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Full text of "Dictionnaire De La Conversation Et De La Lecture Volume 11"

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f 



RÉPERTOIRE 

DES 

CONNAISSANCES 

USUELLES 



LISTE DES AUTEURS QUI ONT CONTRIBUÉ A LA RÉDACTION 
DU I I e VOLUME DE CETTE ÉDITION. 

MM. 
Allont ille (cozte Armand d'). 
Artaud, htsp. goen. de lïnstructi«m pub. 
Attberl de ilr. 
9dlffret 
Bandellle H'abbé ). 
Bardin ( le gnrl). 
Barhlemy (l'abb J. 
Beaufori  . 
Bêchera {Charles}. 
Belfield-Lefëvre. 
Berille (bl.-tIbin), proesident h la cour 
impériale de Paris. 
Billot. 
oislel. 
Bonvallol. 
Bordas- Deoulln. 
Bureau 
Bory de Salul-Vincenl. de l'Adémie 
Bultêe (A.. 
Bordon (If Isid. j, de t'cd, de 
Bradi çomtesse deJ. 
Brelo d la Gazette des triunlt.. 
BriCheteau (D'). 
Brune (D'). 
Cahen 
Cavdonne {Gamil:e). 
Cahvol (. de). 
Champagnac. 
Charhonuler 
de France. 
Cha»aguoi { J. ç.). 
Chaudes-Aigues. 
Coiombal« de Pi»ère 
Coq (P.h avocaL 
COaC (çomlc Jules 
Dene-Baro. 
De$clozeax (Ernct}  anocn secrétaire 
gnéral du Ministère de la justice. 
Dcsprelz (C.], de l'cadmie des sciences 
Diderot. 
Du Bois {Loto»), ancien s.-préfet. 
Ducbesne {aihC, conservateur de la Bi- 
I,liotquc impériale. 

MM. 
Duckett (W.-,.). 
Dtzfey (de l'Yonne). 
Dupin (baron Charles), de l'Académie des 
Du MèKe (Ch¢ dlexandrel. 
Dulessls (l'abbé J.). 
Dupou (Charl). 
Du fiozoig 
Ëtienne. 
Fauclte (liippolte}, 
Favrog (C.). 
Faot t Frdéric). 
Feillet (.}. 
Ferry, ancien examinateur  l'École poly- 
technique. 
Fo-ati 
Fournier {Edouardp 
Frauçais de Nantes (com) 
Gallois (Napolon). 
Garcin de Tasy, de l'Institut. 
Gauhert 
Gaultier de Claflbry. 
Golhr (P. de), a»cien procureur nrat. 
Grangez 
Gfly d'Agde. 
Hereau [Edme). 
Hêricourt (A. d'). 
Hflsson {Auguste). 
Sanin 
aucourt (Ch  
Juiia-Fonteneiie. 
Kkratry. 
Lafae (Benjamin). 
Lamarline, de l'Académie franse. 
La Mennai çF. de}. 
Lanrent {D, L.}, anc. chigurgien en chef 
de la arine. 
Lemonoicr Charlcs). 
Lmontey, de 1'3cadémte française 
Leuoir {Ch  Mexandre). 
Level 
L'HOte (Ncstor). 
Louvet (L.). 
Mac-Carthy (Oscar). 
Maiu guet 'AI frcd). 

MaDno ,Baron Joseph), de I'Acadmie de 
sciel)ces de "furin. 
Mautz (Paul). 
Marinier (Xaie[). 
Marmottel. 
Martin (P. 
Malter. 
Maussion 
Merlicug {E.). 
Millin (A. L.), de l'Institut. 
Monglaç (Eug. G. de» 
Mo,te.qnlen. 
Nisard tCllarles). 
Nodieg (Charles), de l'Acad6mie française. 
Ortolan {.J.L.E.), professeur à I'Êcole de 
droit de Paris. 
Ourry. 
Parle :C.-M.), professeur de philosophie. 
Page (I h.), capitaine de vaisseau. 
Parlset (D'), secrétaire perpétuel de l'Aca- 
démie de mdecine. 
Pa,eallct (E.). 
Pautet (Jules). 
pellissier. 
Peiouze pere_ 
Ports, de l'|]éraulL 
Pradei (Eugne de). 
Reyhaud (Louis), de l'Institut. 
Beiffenberg (baron de). 
Sadlk-PacDa (b[ichcl Czaykoxsld). 
Salnt-Prosper. 
Saint-Ge,Ms (H. deL 
Saucerotte 
Sandhreuli tLouis), avocat. 
Saagner 
Say (J. B.), de l'Institut. 
Sleard. 
Te} ssêdre. 
Thibad (Hippol)le. 
Tihy (Paul). 
Tissot, de l'Académie française. 
Tollard aln. 
'aodoocoort le général G. de). 
Tiemmet, de l'Acad._:mie française. 
Viol|et-l.educ 
$ire" " 

|'.l, . -- T_t '-' .,|.hl," h" [ ,r4tltll Udut [rëc:, GIs et Cie ru 



DICTIONNAIRE 

DE LA 

CON-VERSATION 

ET DE 

LA 

LECTURE 

INVENTAIRE RAISONNÉ DES NOTIONS GÉNÉPLES LES PLUS INDISPENSABLES A TOUS 
PAR UNE SOCIÉTÉ DE SA'ANTS ET DE GENS DE LETTRES 
SOUS LA DIRECTION DE M. W. DUCKETT 

Seconde édition 

EITIÈREIET REFOI)UE 
CORfIGËE f"[ ALGIETEE DE iLU|EL'BS ,'dfLL|EB$ D'ABTfCLES TO['F D"ACTUALITÉ 

Celui ,ici toit tout abrege |oui 
M¢ITESQU[EU. 

TOME ¢NZIEME 

PARIS 
LIBRAIRIE DE F.IBIIIN DIDOT FRÈRES, FILS ET 
I.MPBIMEI. BS DE L'INSTITUT» BUE |ACOB 
M DCCC LXVII! 



Les lecteurs sont prévenus que tous les mots espacés dans le texte courant ( par 
exemple : Transsubstantiation, Immortalité, César) sout l'objet d'articles 
spéciaux dans le Dictionnaire, et constituent dès lors autant de renvois à consulter. 



ONNAIRE 

DE 

LA 

CONVERSATION 

ET DE LA LECTURE. 

HEMXXS (FÉLIClE-Dogo'ruÉE ]ROW.N, mistress), née 
le 25 septembre 1794, à Liverpool, où son père, Irlandais 
de naissance, faisait le commerce, a laissé un.nom dans la 
littérature anglaise contemporaine, par des poésies pleines 
de grâce et de sentiment. Ce fut dans une romantique con- 
trée dn nord du pa)'s de Galles, à Grevich, oi sa famille 
avait dt se retirer, par suite de revers commercianx, que 
la jeJme fille, frappée du spectacle qu'elle avait sous les 3,eux, 
seatit son cœur s'ouvrir à la poésie; disposition favorisée 
encore par le souvenir et le regret de l'aisance dans laquelle 
elle avait vécu naguère. Les exploits de l'armée anglaise 
dans la Péninsule développèrent encore davantage ses ten- 
dances au romantisme. Elle s'éprit si virement de l'Cut mi- 
litaire, que, très-jeune encore, elle épousa le capitaine [te- 
mans ; union qui cependant fut prosaiquement romp,e 
après qu'elle fut devenue mère de cinq enfants. Dès 1812 
elle publia ses Domestic Affections, collection de ses poé- 
sies lyriques. Son grand poëme The lestoratioa of the 
Works of Art:in Italy (1816) et sa Modern Greece furent 
l|autement Ioués par Byron. Ses Tales and Historç, scenes 
in verses (1819), contiennent de dëlicieuses ballades. Ses 
deux poêmes Wallace et Dartmoor, composés/ la suite 
d'un concours ouvert en 1821 parla tiovul Society of Lire- 
rature, remportèrent le prix. Dans son Forest Sanctuar v 
(1825), elle glorifie les mart3,rs du protestantisme. 
A la suite de visites rendues en 1829 à Walter Scott, et 
en 1830 au vieux W. Word«worth, ses poésies religieuses 
prirent une teinte plus sublime dans ses Son9 s of the Affec- 
tions (1830), Scenesand Hymns of Life and other poens 
(1834), Hynn on the Wors of A'ature (1833)et Hlmns 
[or Childhood (1834). I)ans ses Records of Women (1828), 
elle a décrit le caractère de la femme depuis les plus hautes 
positions sociales jusqu'aux plus infimes, entremêlant ses 
récits de beau'oup d'aventures qui lui lutent personnelles. 
Elle mourut, le 16 mai 1835, ì Ridesdale, près Dublin. 
HÉM-LITHE ou HEMANTHE (de «Iii«, sang, et 
&v0o;, fleur). Ce genre de plantes appartient à la famille des 
amaryllidées de Brown, à l'hexandrie monogynie de Linné. 
Les caraclères des bémanthes sont. : Corolle monopétale, 
colorée, à tube court, offrant un limbe à six divisions égaies; 
six étamines; ovaire inlère, surmonté d'un style et d'un 
tigmate simples. Les lruits sont des baies à trois loges, 
et chaque loge renferme une semence. Les fleurs, disposC 
en ombelles terminales, présentent un involucre, dont les 
six divisions pétaloïdes, ordinairement parCs des couleurs 
les plus vives, sont quelquefois d'un rouge-ponceau magni- 
fique. Les feuilles naissent de la racine, qui est bulbeuse. 
mc. n t co,ve,s. -- z. 

Les hémanthes sont toutes exotiques et originaires du cap 
de Bonne-Espérance : on ne les cultive guère que dans les 
jardinsbotaniques, et aucune d'elles n'est usitée dans la mé- 
decine ou dans l'industrie. Les espèces qui se font surtout 
remarquer par leurs belles couleurs sont : l'hémanthe à 
tige rouge ( h«manthus sanguineus , Jacq. ), dont la hampe 
mëme est couleur de sang, et l'Mnanthe carlate ( hoe- 
manthus coccineus, Linn. ), dont l'involucre, rouge-écarlate, 
assez analogue, quant à la forme, à une tulipe, a mérité à 
cette espèce le nom de tulipe du Cap. 
Bercn-Lrw. 
IIÉM.kTÉMÈsE ( de OEla, sang, et pz:, vomisse- 
ment ), vomissement de sang. C'es une hém orrhagie de 
la membrane muqueuse de l'estomac. Outre les causes géné- 
raies des hëmorrhagies, les impressions irritantes portees 
sur l'estomac, les coups, les cbutes sur la région épigas- 
trique, les substances vénéneuses, l'immersion brusque des 
pieds ou des mains dans l'eau froide, la suppression d'une 
hémorrhagie habituelle ou de la transpiration, peuvent 
amener une bématémèse. Aux s)mptmes généraux qui 
précèdent ou accompagnent les hémorrhagies se joignent, 
dans l'hématémèse, une douleur prol'onde, un sentiment 
d'oppression dans la réon de l'estomac, avec chaleur et 
sensibilité à la pression, goret de sang à la bouche, quelque- 
fois des sïncopes, des éblouissements, des vertigr, des 
tin/ements d'oreilles et la décoloration de la lace. /3ientOl 
après, le sang est verni seul ou mlé à des substances ali- 
mentaires plus ou moins digérées, tantôt liquide, tantôt 
coagulé, mais d'une couleur généralement foncée. Le plus. 
souvenl il arrive qu'une certaine quantilé de sang, plus 
ou moins aitCC passe dans le canal intestinal et finit par 
tre expulsée avec les selles, dans lesquelles il est plus ou 
moins reconnaissable. Du reste, il est rare que cette mala- 
die, dont la durée est variable, prenne des formes très- 
graves. 
Le traitement de l'hématémèse consiste dans l'emploi des 
saignées, tant générales que locales, des boissons retapé- 
tantes, acidulées, fraiches et même glacées, de quelques 
astringents administrés avec prudence, et de révulsifs plus 
ou moins énergiques placés aux extrémités. Si l'bématémse 
dépend de iïngestion de substances vénéneuses ou de 
corps susceptibles de blesser le parvis de l'estomac, on se 
conduira comme dans l'empoisonnement ou dan. la 
gastr, ire chronique. 
HEMATITE (de OEils, sang). L'hématite, connue 
dans les arts sous les noms de s a n 9 u i n e, pierre à bru- 
ir, est une variété de fer oligiste. On la nomme souvent 
1 



 HÉMATITE 
hématite roue, pour la distinguer de l'hématite brune 
ou lirnonite fibreuse, sous-variété de fer hydroxidé. Cette 
dernière se rencontre mamelonnée ou en stalactites, à sur- 
face brune ou no/re, recouverte d'un enduit luisant et irisé. 
Elle a la propri,té, de dotmer de l'acier de forge, comme le 
fer spatbique, qu'elle accompagne ord/nairement. On l'ex- 
ploite à P, ancié, dans rAriëge, dans les Pyrénées et dans 
le Da!pbind. 
HEMATOGÈLE (du grec «I.-,, sang, et z,).,, tumeur), 
fumeur du scrotuta cansée par du sang extravasé. 
IIÉMATOSI (de «I,.OE, OE¢.ttoE¢og, sang), nom que l'on 
donne a l'acte de la sanguiflcation, c'est-à-dire  la con- 
version en sang artériel ,lu chyle, de la l)mphe et du sang 
veineux, qui se sont n,éhngés dans la veine sous-clavière 
gauche, puis ont intimement pénêtré, avant d'arriver aux 
poumons, dans la veine cave SUlrieure, le cœur droit et 
l'artère pulmomire. Quant " l'acte de la shuguification lui- 
ratine, c'est dans le parendlsme pulmonaire qu'il s'opère, 
et c'est l'oxygène contenu dans l'air qui eu est ragent essen- 
tiel. Quels sont les phénnnnes qui se passent alors? L'oxy- 
gène s'unit  une certaine portion du carbone contenu dans 
le sang xeineux, et forme avec lui «lu gaz acide earbonique, 
dont on constate la présenee dans l'air expiré; quant à 
l.'azole, il parait ne jouer qu'un réle n,gatif et tempérer seu- 
lement l'action t,'op vive de l'oxygène sur l'organisme. La 
quantité d'oxygène employée à vivifier le sang veineux 
serait, selon les calculs les plus approximatifs, de deux à 
trois centièmes seulement. C'est à cette combinaison que le 
sang veineux doit la coulent rutilante qu'il prend dans son 
passage a travers les poumons ; c'est aussi de ce phénomène 
que dépend i'elévafion de température que l'on constate 
dans ce fluide hématos.. Qttant à la vapeur d'eau q,ti sort 
des poumons en quantité considérable pendant l'expiration, 
elle provient du sang veineux, peut-ètre aussi de la combi- 
naison d'une certaine quanlite d'oxygène avec l'hydrogène 
qui se trouve dans le sang veineux. 
Le phénomène de l'hmatose a lieu aussi bien chez les 
animaux qui vivent dans l'eau, que chez ceux qui visent 
dans l'air ; aussi les premiers sont bient6t asphyxiés dans 
l'eau privée d'air par la distillation; de mdme que les espèces 
à respiration-aérienne succombent promptement dans le 
vide ou dans tout autre milieu que l'air atmosphérique. 
r S AUCEPO'£TE. 
HÉMATOZOAIRES (de tttu, sang, et ov, animal ). 
On appelle souvent ainsi certains e n t o z o ai r e s, qui, au 
lieu de vivre dans les intestins d'autres animaux, se déve- 
loppent dans leur sang. On en a trouvé dans le sang du 
chienz mais pas encore dans celui de rhomme. 
HEMATU]E ( de .I1", sang, et eeto, uriner ), hé- 
mon hagie des voie urinaires. Elle peut résulter d'une icsion 
mécanique, et c'es t alors une h é m o r r h ag i e traumatique. 
biais l'hématnrie par exhalation, la seule dont nous ayons 
à nous occuper ici, succède à l'abus des diuréliques trop ac- 
tifs, des cantharide% de la tërébenthine, des purgatifs acres, 
à la suppression de qelque autre flux sanguin naturel et 
accidentel. Elle est plus commune chez les hommes que 
chez les femmes, dans rage adulte et dans la vieillesse 
qu'aux autres époques de la vie. Suivant le point où le 
malade éprouve une douleur plus ou moins intense, on 
reeotmait si le sang expulé provient des teins, de la vessie 
on du canal de l'urètre. Dans les deux premiers cas, le 
traitement doit ètre actif, à cause de Pinconvénient qu'il 
y aurait à laisser séjourner dans la vessie un liquide sus- 
ceptible de former des caillots qui pourraient devenir le 
noyau de calculs urinaires. Du reste, il est toujours 
avantageux de recourir avec promptitude aux saignées 
locales et générales, aux bains et aux applications réfrigé. 
vantes. 
HÉMÉRA LOPE, HI.IÊRALOPIE (de t, jour, et 
nxoV,,t, voir). L'béméraiopie est une affection des yeux, 
cousistant en ce que les hémdralopes, e'est-à-dire ceux 
qui en ont affectés, ne distinguent plus les objets vers le 

soir, quoiqu'ils les ,,perçoivent bien en plein iour  t'oye'- 
AMkUIIOSE, CTAnACTF: ). 
IIÉMÉROCALLE (de 4,lp',, jour, et xdD,o;, beaute), 
genre de plantes de rhexandrie monogynie, suivant Linné, 
de la famille des liliacées-asthodéiées selon Jussieu. Elles 
méritent la dénomination qui les distingue, par la beauté de 
leurs fleurs, et parce qu'elles s'épanouissent durant le jour; 
mais d'autres plantes, particulièrement la b e i I e d e j o u r 
ont reçu le même nom, et on pourrait l'appliquer à un 
bien plus grand nombre. 
Les héméroealles servent à décorer nos jardins, et on en 
compte diverses espèces : la jaune ( hemerocallis ava, 
appelée par les jardiniers Ils asphodéle ou lis jonquille, 
est originaire du PiCont, et on la multiplie aisément en 
séparant les racines; la fauve(hemerocallisfulva, L.) ou 
lis orange, croit spontanément en Provence; la blanche 
( hemerocallis japonica, Thunb.) est originaire du Japon 
et de la Chine: ses nombreuses fleurs, d'un blanc pur, ré- 
pandent la plus suave odeur; la bleue (heraerocallis cce- 
rulea, Andr. ) provient des mèmes pays que la précédeute, 
et on la cultive en pleine terre. Toutes offrent les carac- 
tères suivants : Périanthe très-développé et coloré, marres- 
cent, à six parties CaiAes, soudées inférieurement en un 
tube correct, à l'orifice duquel sont postCs six étamines à 
filaments grèles et aseendants; ovaire libre, triloculaire; 
stigmate trilobé. 
Le genre hemerocallis a été démembré par Sprengel, qui 
en a retiré cinq ou six espèces, entre autres les deux der- 
nières que nous avons eitées, pour en former le genre 
funkia. 
IIÉMICRANIE ( du ec -7,,.:u;, moitié, et 
crfine ). l'oqe, bI6nMNE. 
IIÉMIC¥CLE (de tt#,, demi, et zéx).oç, cercle). 
Cette expression, qui peut s'appliquer à tout ce qui est en 
forme de demi-cercle, est surtout employée en architecture 
pour dësigner une salle demi-circulaire. Tel est l'hémicycle 
de l'École des Beaux-Arts  Paris. 
Les anciens nommaient hmicycle, ces chaires dont le 
dos formait un demi-cercle, lls donnaient le mme nom à 
une machine de thé.tre destinée à représenter les lointains, 
mais sur laquelle nous n'avons que quelques ao,,ues reu- 
seignçment de Pollux. 
llEMIONE (de -l.tvrvg, demi, et og, Une) ou DZIG- 
GETAI, espèce du genre cheval, qui justifie son nom 
par la ressemblance qu'elle offre à la fois avec le cheval 
proprement dit par les parties antérieures du tronc, avec 
Fane par les postërieures. La tte prësente le mme mélange 
par sa grosseur elle rappelle celle de PAne, et par sa forme 
celle du cllevai. Enfin les oreilles, un peu moins longues que 
celles de i'lne, sont plantCs comme celles du cheval. Mais 
un trait particulier de rhémione (equus hëmionus, Pallas 
c'est la forme de ses narines, dont les ouvertures simulent 
deux croissants ayant la convexité tournée en dehors. 
« Le pelage de l'hémione, dit M. de Quatrefages, est 
formé d'un poil ras et lustré. La couleur en est presque 
uniforméme,tt blanche pour les parties tufAfleures et in- 
ternes, isabelle pour les portions externes et supérieures, 
Ces deux couleurs se fondent insen, iblement l'une dans 
l'autre. A la face externe des membres, on observe de lon- 
gues barres transversales d'une teinte isabelle ple. La 
crinière, qui commence un peu en avant des oreilles, s'étend 
jusqu'au garrot en diminuant insensiblement de longueur; 
les poils qui la composent sont noiratres. Elle semble se 
continuer en une bande de mme coulent qui règne tout le 
long de la ligue dorsale, s'élargit d'arrière en avant, se ré- 
trécit assez brusquement après avoir dépassé les hanches, 
et vient se terminer en pointe sur le haut de la queue. Celle- 
ci, dans sa plus grande étendue, est couverte de poils aussi ras 
que le reste du corps, et l'ou trouve seulement b._l'extrémit6 
un bouquet de crins noir;Rres. » 
Les hémiones se trouvent en grand nombre dans le pays 
de Cutch, au nord de Guzzarate. On ne peut les ;)rendre 



a,,,,E -- HÉMITR!TE 
qu'avec des piéges, leur course étant plus rapide que celle 
des meilleurs chevaux arabes. On les apptavoi.e avec assez 
de facilité, et dans i'Himloustan on les emploie aux tra- 
vaux agricoles. Depuis phL«ieurs années M. L Geoffroy- 
Saint-Hilaire a teuté l'acclimatation et la domestication de 
rbCi.une, résultats qu'il ne désespère pas d'atteindre. 
HEMIOPSIE (du grec to:, demi, et 6.]opt, voir), 
nom que l'on donne à r a m a u r o s e lorsque rindividu qui 
en est atteint ne voit que la moitié de chaque objet qu'il re- 
garde. 
HÉMIPLÉGIE ou HË3IIPLEXIE ( de !t'J, moitié, 
et I, je frappe ), p ara i y sie qui n'affecte qu'une des 
moitiés latérales du corps. 
HÉMIPTÈBES (du ec !:, demi, et ngpov, aile). 
Comme dans le plus grand nomhre des inse {:te s, le corps 
chez les hémiptères est séparé par deux étranements en 
trois parties distinctes : la tte, le tronc, l'abdomen. La t6te 
snpporte un bec de conformation curieuse, et sur laquelle 
il nous faut insister, parce qu'elle fournit presque tous les 
caractères distiuctifs de l'ordre. Exclusivement destiné à 
entamer le réseau vasculaire des plantes ou des animaux, 
ce bec n'offre ni mandibules, ni màchoires, mais bien une 
pièce tubulaire, articulée, cylindrique ou conique, et forée 
par un canal qui renferme trois soins écaillenses, très-aigues, 
et recouvertes . leur hase par une languette : ces soies 
constituent un véritable suçoir semblable a un aiguillon ç et 
engainé dans l'appareil tubulaire que nous avons dcrit. A 
ces caractères distinctifs de la tte des hémiptères, il faut 
ajouter deux antennes, de forme, de position et de dimen- 
sion variables dans les diffcrentes espèces ; deux antennes 
stacées ou filiformes, ou subulees, ou articulees ; et deux 
yeux à réseau situés à la partie supérîeure de la téte. Le 
tronc donne attache à deux paires d'ailes : assez souvent 
les ailes supérieures, crustaceeg dans leur portion adhérente, 
sont membraneuses à leur extrè:nité libre; quelquefois aussi 
les quatre ailes sont membranruses et transparentes ; par- 
fois encore elles sont furfitracëes et semi-laiteuses ; quelques 
hémiptères enfin sont aptères. Leurs pattes ne les difieren- 
cient pas des autres hrxapodes, si ce n'est que dans de 
nombreux genres les torses antérieurs, composés d'une 
seue pièce, sont fléchis sur la jambe, en faisant avec celle. 
ci une espèce de genou. L'abdomen n'offre pas non plus 
de caractères particuliers; seulement, chez les c i g a i e s, il 
présente une petite tarière cachée dans les ecailles, et qui 
sert à déposer des œufs. 
Les bémiptères ne subissent pas de véritab'.es métamor- 
phoses : ce sont bien plutét des roues, dans lesquelles l'in- 
secte demeure torpide pendant quelques heures; car dans 
leurs trois états prétendus distincts, de larve, de nymphe 
et d'insecte parfait, ils offrent mëmes larmes et mèmes ha- 
bitudes : leurs ailes s'allongent et leur corps se dé,eloppe ; 
ils ne subissent pas d'autres changements. Quelques bemi- 
ptères hahitent l'eau (hydrocorises), et souvent on les ad- 
mire dardant à sa surface avecune merveilleuse rapidite : 
d'autres s'attachent uniquement aux plante qui leur serent 
de nourriture (phytadelges ou plantisugues); d'autres en- 
core se fixent exclusivement sur des animaux (zoadelges 
ou sançutsu9ues ). 
Dans la classification propoe par 5I. Duméril les hémi. 
plères forment le cinquième ordre de la classe des insectes, 
il» forment le troisième ordre de la classe des insectes et de 
la division des suceurs dans la métkode de Lamarck; enfin, 
dans la distribution de Latreille, ils constituent le septième 
ordre de cette mme classe : du reste, les htJmipléres des 
naturalistes correspondent exactement aux rh)ngotes de 
Fabricius. ]ELFIELD-LEFÈ .'BE. 
tlEMISPtiÈRE (du grec !:.','.'p:o, formc de 
demi, et a-ta, sphère ). Le sens de ce mot est conforme 
à son étymologie : dans le discours ordinaire comme dans 
les sciences, il signifie demi-sphère. En astronomie et en 
géographie, son emploi n'est pas sans quelque inexactitude. 
Puisque la terre est un spbéroide aplati vers les péles, 

moitié, quelle que soit la direction du plan de section pas- 
saut par le centre, est un hdrnisphdrotde. Quant aux es- 
puces célestes, on ne peut leur appliquer la notion de sphère, 
ni rien de ce qui en dérive; car on ne peut y concevoir ni 
limites ni forme. 
En geographie, l'ëquateur sépare les deux hémisphères 
borëal et austral. Pour chaque lieu le méridien partage 
le globe en deux hémisphères, oriental et occidental, et 
le grand cercle pacallèle  l'horizon établit une autre division 
entre rhémisphère du lieu dont il s'agit et celui de ses an- 
tipodes. C'est dans ce sens que le mot hémisphère est le 
plus fréquemment d'usage en littérature, et surtout en poL sie : ainsi, par exemple, pour exprimer combien on vau- 
! droit ètre éloigné d'nne personne que l'on huit, on peut dire 
que l'on regrette d'habiter le intime hemi.çphere. 
En astronomie, le plan de l'orbite terrestre partage l'es- 
pace en deux hémisphères, l'un arctique et l'autre ntrc- 
tique. On ne pouvait employer l'cquateur pour cette divi- 
sion, parce que la position de son plan n'et pas fixe dans 
les espaces clrçts. Fuv. 
HEMISPIIERES DE MXGDEBOUI'{G. On dési- 
gne sous ce nom un appareil imaginé par Otto G u e r i c k e, 
bourgmestre de Mag,lebourg, pour démoutrer la puissance 
de la pression de l'air. En elfet, il construisit en cuivre et 
en laiton deux hémisphères d'une assez vaste capacite et 
s'emboltant fort exactement l'un sur l'antre. L'un de ces hé- 
mispbères trait garni d'un tuyau et d'une soupape, afin de 
pouvoir en retirer l'air au moyen de la machine p n e u m a t i- 
l u e, quand on les aurait superposés l'un  l'autre. A tous 
deux étaient attachés des anneaux pour y pasr des cordes 
auxquelles on pot attacher des chevaux. Une fois le vide 
opére ì l'lutArieur des deux hémisphères exactement super- 
pusC, il fallut la force reunie de plus de trente chevaux pour 
les di:gi«,ind re. 
llEMiSPIIÈRES DU CERVEAU. l'oye: Cevru. 
HÉMISTICIIE mot d'origine grecque, forme de 
ç:v.o, l:gne, vers, avec 9,,tzio,, semi, moitie, c'est-à-dire 
moitié de vers, demi-vers, repos au milieu du vers. Cerepos 
à la moitié du vers n'est proprement indispensable quedans 
nos vers héroiques ou a I e x a n d r i n s, c'est-à-dire dans 
coex qui se composent de douze svllabes. Boileau a dit 
Que toujours dans vos vers le sens, coupant les mots, 
Suspende Phemistiche, en marqqc le repos. 
Ces deux vers contiennent le precepte et l'exemple. L'hémis- 
riche doit couper le vers en deux parties eles. Mais, pour 
éviter la monotonie que la loi de rhémistiche semble en- 
trainer avec elle, tout en observant fid/lrment le repos 
qu'elle prescrit, il importe de le cacher avec beaucoup d'art. 
C'est ce principe de bon goùt qui a dicté à Voltaire les ver 
suivants = 
Observez l'hemistiche, et redoutez l'cnnul 
Qu'un repos uniforme attache auprès de lui ; 
Que votre phrasz, heureuse et clairement rendue, 
Soit tant6t terrmnee et tant6t suspendue ; 
C'est le «ccrct de l'art. 
'. Il ne fau pas confondre rhémistiche avec la cdsure. 
i Dans les xers de cinq pieds ou dedix syllabes, il n'.v a point 
, d'hémistiche, mais seulement des céures. La consonnance 
d'un hímistiche avec l'hémistiche du vers suivant est un 
défaut ; cette sorte de consonnance se rencontre rarement 
dans les vers de r, acine et de Boilean. Les Grecs et les La- 
tins n'avaient point d'hemistiches dans leurs vers hexamè- 
tres. Les vers allemands ont un hémi»tiche; mais, chez les 
Italien% les Egpagnols, les Portugais et les Anglais, la poésie 
est affranchie de celte gue. CUAUASC. 
HÉMITRITÉE (Fièvre), de -7,,to:, demi, et 
trois. On a donné le nom de fièvre hrnilrite .'t une va- 
riété de fièvre intermittente caracteri»ée par deux 
sortes d'accès, les uns revenant chaque jour, et les auixes 
tous les deux jours. Cette distinction n'est plus en usage 
aujourd'hui. 



4 HIMITRITÉE -- 
Galien nomme fièvre hmffrite la gastro-enté- 
rite. 
HE.MLING, peintre flamand. Voye'- 
HEMOMANCIE (du grec cléa, sang, et ttv., di- 
vination), espèce de divination par l'inspection du sang. 
Il y avait la grande et la petite hémomancie : la premiëre 
qui était la plus puissante, s'effectuait au moyen d'une pa- 
lette de ce liquide, obtenue par une saignée pratiquée au 
bras droit, et jamais, sous aucun prétexte, au bras gauche, 
qui était toujours réputé de mauvais augure. La petite hémo- 
mancie se pratiquait sur le produit d'une effusion naturelle 
de ce liquide par le nez, les hémorroïdesou les menstrues : 
il ne pouvait en résulter que des pronostics d'un ordre 
inférieur etd'une certitude contestable. Dans l'un etl'autre 
cas, la divination se basait, ou sur la couleur du san, ou 
sur son plus ou moins d'abondance, ou sur son plus un 
moins de limpidité : un sang noir annonçait du tnalheur ; 
un sang ro ou rouge, une bonne chance ; un sang abon- 
dant, des tribulations; un sang rare, des esp6rances; un sang 
épais, la mort ; vn sang limpide, une longue existence. Les 
Perses et les Assyriens ajoutaient une grande foi / l'hëmo- 
nancie. 
HÉMOPTYSIE (du aîa, sang, et 'e;., cracher). 
C'est le nom qu'on donne à |'hémor r hagiedes poumons 
connue encore sons la dénomination vulgaire de crachcmen t 
de san 9. Cette hémorrhagie consiste dans une expectoration 
sanguine, écumeuse, variable d'ailleurs par sa quantité, 
sa couleur, sa consistance, etc. Il y a deux espèces princi- 
pales d'hémopt)'.ie : l'une qu'on pourrait appeler essen- 
tielie, par exhalation et par fluxion; l'autre sgmptomatigue, 
ddpendant d'une lesion organique des poumons (le pl.s sou- 
vent tuberculeuse)ou de quelque altération profonde du 
cœur et des gros aisseaux sanguins. Sous le point de vue 
pratique, ces deux gantes pourraient, comme les hémor- 
rhagies considérées en général, se subdiviser en hémoply- 
sie conslilulionnelle, ou idenlifiée à la constitution; h- 
noptysie accdenlelle, déterminée par une circonstance 
fortuite; hgmoptysie sttccddane, ou supplementaire de 
quelq.e autre fluxion sang.inc, no,'maie ou habituelle ; hé- 
noptysie critique, on annonçant la solution heureuse d'une 
maladie aiguë quelconque. 
L'hmoptysie est une maladie très-fi'équente, h raison 
de l'action permanente de l'organe qui en est le siége ; elle 
se développe sous l'infl.ence d'un grand nombre de causes 
prédisposantes et délerminanles : telles sont, pour les pre- 
mières, une constitution plétl,orique, menacée de phthisie 
une grande susceptibilité nerveuse, certaines professions, 
comme celles de tailleur, de tisserand, de rémouleur, de 
crieur public, de Joueur d'instruments / vent, etc. On ad- 
met au nombre des causes dcterminantes du crachement 
de sang la suppression de certains éeoulements sanguins 
habituais, d'anciennes éruptions cutanées, les métastases 
goutteuses, rbumatismales, les coups, les chutes sur la poi- 
trine, les chagrins profonds, et presque toutes les autres 
émotions de l'tme, etc. 
Les malades menacés d'une attaque d'l,émoptysie ont de 
la tension, de la pesanteur dans l'intérieur de la poitrine ; 
leurs pouls est plein et dur, leurs veines distendues, leurs 
pommettes rouges; il y a souvent des tintements d'oreilles, 
des vertiges, un refroidissement des extrémités, des lassi- 
rudes générales, et quelquefois un goret de sang dans la 
bouche. Ces symptémes précurseurs sont faibles ou n'exis. 
tant pas quand l'hémoptysie est ancienne et passive ; alors, 
la lace est quelquefois pale et le pouls déprimé. Au moment 
où le sang fait irruption, le malade paiR, éprouve des hor- 
ripilations, un refroidissement des extrémité.s, un sentiment 
de picotement et de bouillonnement dans le trajet de la 
trachée-artère et des bronches, une sensation de chaleur qui 
prée&le la toux et l'expulsion d'un sang en général très-rouge, 
et plus ou moins mêlé de mueosités, etc. Uaeeès d'hémop- 
t)sie affecte souvent une sorte de périodicité plus ou moins 
régulire ; sa durée est variable et relative à une multitude 

de us aoeidentelles : la forme 'il affecte et sa avité 
diffërent, selon qu'il-apparient  l'une des vari dont nous 
avons parlé plus haut. 
Le dignostic do l'hmoptysie n'est pas touiours tle 
on la eonfond souvent avec le vomiement de sg et di- 
vers autres hmorrhaes de la bouche ou de la çorge, 
surent quand elle est abondante et subi. Le pronostic de 
cette madie doit être grave quand elle reoen»ait pot cae 
une affection tuberculeuse des poumons, ou e hperlr 
phie du oeuf. L'affection dont il s'agit est, au contrite, 
presque toujours bnigne lorsqu'elle t essentielle ou le pro- 
duit de la spension de quelque fluxian sanguine, normale, 
habituelle, susceptible de se réblir, ou de nses ai- 
dentell passagéres. Les archives de l'ad renlerment 
preuves multipliées qu'un grand nombre d'homm vrs 
aux sciences et aux a sont parvenus à un e avan 
avec des hémoptysi perioaiques et prque habituelle. 
Grétry, q,i a parcouru une asoez longe oerrière, avait 
une h«;mopt)-sie toutes les fois qu'il oempoit un opéra. Il 
guérissait par le repos de corps et d'esprit. 
Le traitement de l'hémoptysie doit généralement dtre b 
sur le caractère fondamental de la maladie ; il varie né- 
srement selon que l'expectoration sanguine peut tre rap- 
portée h l'une des variétés dont nous avons parlé, et selon 
qu'elle est active, passive, symptomatique, etc. Le crache- 
ment de sang est-il reoent, modéré, accidentel, d b9s- 
sons mucilagineuses, dblayantes, ou légèrement aciduls, 
telles que l'eau d'orge, de groseilles, le pet-lait nitré, 
émulsions, le repos absolu, la position borizonie, suffisent 
pour le faire disparaltre. Si l'hémorrhagie pulmonaire t 
plus intense, on aura recours h la saignée du bras,  l'ap- 
plication de sangsues h l'an ou h la lve { s'il y avait 
quelque «nppression hémorrhoïdale ou memelle a com- 
battre ). Il ne faut p rpéter les saignes ns nésité 
oeq selon la remarq,e de Grt, ell affaiblirent les vais- 
seaux et préparent à de nouvelles hémorrhaes. Il y a moins 
d'incon'enient h user des défivatifs sur la pu des extrémi- 
tés, oemme les siuapigmes, les vésitoir Çolan, les 
piluves irritants; l'u froide, les boissons glacée, con- 
viennent égalenent quand la chaleor morbide et l'irritation 
hëmorrhique sont calmées. On doit recourir aussi aux as- 
tngents, aux styptiques, quand le crachement de sang 
résis aux moyens déjà i«diqués, et menace la vie du sujet; 
ils conviennent également quand la maladie est passive et 
ancienne, aussi bien que 1 toniques, 1 ex minerale» 
ferrugiuses. 
L'hémoptysie i t un sympl6me de la p h thi si e pul- 
monaire réclame un traitement sciat, dont il sera question 
en traient de celle maladie. D" Bmcnarao 
HÉMORRllA61E ou HÉMORRAGIE {de ala, sang, 
et çut, rompre). On appelle bémohagie toute effusion 
noble de ng, soit qu'elle t lieu par la blessure ou la 
rupture de quelques vaisseaux, soit qu'elle s'effectue par 
exhalation. Les pees de sg i sont du rso de la 
chirurgie sont connues sous le nom d'hrrha9ies trat- 
maligues. Celles qui sont du domaine de la médecine se di- 
x'isent en activ et en passiv; les un et les autr pe,- 
vent ëtre su bdi en conslittlionnelles» cidentell, 
suppl#menlair,criligu et symplomatigt. Leg hémor- 
rhaes actives coïncident ornairement av un état 
thorique, et dpendent souvent d'un excès de force; elles 
s'observent par oensqueut aux épues de la e ou 
deux éls prédominent, la ieunesse et l'ge adulte; I 
e faibles, d'une grande sensibilité, amis de la nne chère 
disposés à la colère,  sont pareillement trh-expo. Les 
uses aecidentdl d hémorrllaes aaives sont -mul. 
tipliées : telles sont la suppression de eers éoeulements 
naturels, l'ab d alimen iin, d cooliqu, l'o- 
mission d'une saignée habituelle, I exercioes violents, 
ression d différentes parties du rps, la chaleur 
exoessive, la raréfaction de t'air, etc. Elleç sont ordre. 
ment prdées de chatouillement, de pan, de chalem 



nr,a,AGIE  HÉMORRHO[DES 
de battements dans la partie oit le sang afflue, et de refroi- 
dissement des extrémités, etc. ; le pouls est plein, irrégulier, 
sautillant, dicrote, la face rouge, la peau chaude, etc. Les 
sympt0mes varient d'ailleurs en raison de la partie qui est 
le sige du raal et de l'intensité de la maladie. 
Les héraorrbagies passives surviennent chez les individus 
rsdicalement faibles ou exténués par une longue raaladie 
un régirae débilitant, des veilles prolonges, des évacua- 
tions excessives, etc. Les causes directes qui peaent les 
produire sont des héraorrhagies actives précdent,, le scor- 
bot et autres affections organiques qui jettent les vaisseaux 
capillaires dans un état d'atonie. Ces fluxious sanguines ne 
sont prgcédées d'aucune excitation, d'aucun signe de con- 
gestion locale : elles sont accorapagnées de pgleuvde la face, 
de faiblesse du pouls, de Iipotbymies, etc. Elles affectent 
plus particulièreraent le système muqueux ; l'estomac, les 
poumons et surtout la vessie, en sont Iréquerament at- 
teints. 
Quand les hémorrhagies ont lieu par exhalation, elles 
laissent généraleraent peu de traces de teur passage dans 
les organes qui en sont atteints, corarae les raerabranes mu- 
queuses, séreuses, synoviales ; on y rencontre quelqudois 
de la rougeur, un peu d'cpaississeraent et d'engorgeraent 
dans les vaisseaux »oisins. Si, au contraire, l'effusion san- 
guine est due à la section ou à la rupture d'un vaisseau 
veineux et artériel, en cherchant avec soin, on peut remon- 
ter à la source d'ou jaillir le sang et en assigner la cause 
physique, soit pendant la vie, soit après la raort. 
Le sang qui est le produit d'une hémorrhagie par exhala- 
tion est ordinairement rouge et artériel ; celui, au contraire, 
qui provient de la rupture des vaisseaux sanguins est idus 
communéraent veineux et d'une couleur noire; il est bon 
«le taire observer, toutefois, que le sang artériel épanché 
qui a séjourné dans les organes creux, corarae l'estomac, 
l'intestin, prend une teinte noire, susceptible d'en iraposer 
sur son origine. La quantité, de sang que i'horarae peut 
perdre dans une héraorrhagie est singulièreraent variable : 
au rapport des auteurs, cette quantité est quelquefois 
dnorme et au-dessus de toute probabilité. Tisser cite le cas 
d'une ferame qtd affirmait par serraent avoir perdu dans une 
seule année 20o kilograrames de sang. Haller raentionne dans 
son grand ouvrage sur la physiologie tan homme qui dans 
cinq attaques rapproches d'hé fa até raì se rendit 7, 13, 
15, 12 et 9 kilograraraes de sang. Sans garantir des faits si 
traordinaires, qui n'ont peut-être pas été constatés d'une ma- 
nière assez rigoureuse, on est autorisé h dire que le sang, 
se reproduisant avec une grande proraptitude, peut, par 
suite de cette condition, fo,lrnir un aliment à de nombreuses 
et fortes llêmorrhagies. Chaque gge a pour ainsi dire ses 
l,éraorrhagies : dans l'enfance et la jeunesse, ce sont des 
heraorrhagies nasales; dans l'adolescence, le sang se porte 
en abondance et fait irruption dans la poitrine, d'où des h é 
moptys,.'es fréquentes chez ceux qui avaient eu précé- 
demment des ,:p i s t a x i s. Chez les adultes, les congestions 
sanguines s'effectuent «lu coté du ventre, et ont particuliè- 
rement leur sit;ge dans les vaisseaux bémorrholdaux. Cette 
période de la vie est aussi exposée aux vomisseraents de 
sang, aux I., é m a t u r i e s, etc. Enfin, dans la vieillesse 
c'est le cerveau qu est le plus exposé at,x fluxions san- 
guines, et r a p o p I e x i e,/ laq,elle lea vieillards sont si 
exposés, et une véritable l«.raorrhagie. 
Tant qu'une béraorrhagie active est raodérée, on peut 
l'abandonner à elle-me; e!le remédie souvent  I plë- 
thore et débarrasse de eongestions incommodes; mais quand 
elle est trop fotle, trop fréquente, il faut lui opposer des 
saignées révulsives, des irdtants d«'ivatifs, la diëte, le repos, 
des boissons froides, acidules, etc. La connaissance des 
causes petit aussi indiqtwr des raoens spécianx, comme le 
rétablissement d'un exutoire, d'une éruption ancienne, etc. 
Quant aux hémorrhagies passives, elles réclaraent surtout 
l'emplzi des toniques, des styp[iques, des analeptiques, des 
boissons et applications froides : la I i g a t u r e et la cern. 

pression sont les principaux moyens applicables à la cure 
des hémorrhagies trauraatiques ou chirurgicales. 
D r BBICUETEAU. 
tlÉMORRllAGIE NASALE. VoUlez 
ltÊMoRIIIAGIE UTÉRINE. Cette sorte d'hé- 
fa  r r h a g i e est ainsi qua]ifiée prce que l'écouleraent du 
sang s'effectue par l'utëras : c'est celle qu'on nomme vul- 
gaireraent perte de snç, ou simplement perte. Quelques 
auteurs la divisent en mdorrhayie (de t'v, les rè- 
gles, et "t, je romps), et en mdtrorrhagie (de 
matrice ) : le premier nota s'applique quand l'hémorrhagie 
se raanifeste aux époques raenstruelles par un écouieraent 
dont la mesure excède la quantitë normale ; le second, dans 
toute autre circonstance. Nëanraoins les sympt0raes et le 
traitera, nt n'offrent pas de différence sensible. 
Les causes de l'hraorrhagie utérine sont nombreuses ; on 
peut regarder corarae telles toutes celles qui agissent d'une 
manière plus ou raoin directe sur l'appareil genital, l'abus 
des stiraulants, l'emploi des emménago,me, les excës ré- 
uCiens, etc.-Cette hémorflmgie, qui a la plus grande ten- 
dance à se renouveler et a se perpétuer sous forme pério- 
dique, devient une cause d'épuisement si on n'y porte un 
prompt remède. Il faut d'abord reconnaltre si elle n'est pas 
symptoraatique de quelque affeclion de la raatrice, et, dans 
le cas affirmatif, conoentrer sur cette dernière tous les efforts 
de la thérapeutique. En est-il autrement, une saignée au bras, 
des boissons froides acidulées, une diète sévère, une atmos- 
phère fratche, sotfisent ordinaireraent pour eviter de nou- 
velles apparitions de l'coulement sanguin anormal. 
Il faut cependant etablir une distinction pour l'hérnor- 
rbagie utérine à laquelle sont sujettes les nouveles accou- 
chCs. Elle provient de ce qu'après le dccollement partiel 
ou complet du placenta, l'ubçrus, ne revenant pas sur lui- 
raCe, laisse béants les orifices vasculaircs qui communi- 
quaient avec les cotyldons placentaires. La vie s'échap- 
perait avec le sang si l'on ne s'empressait de solliciter leg 
contractions utérines, après avoir débarrassé l'utérus de 
corps étrangers qui pourraient empêcher son retour sur lui- 
rame, et de comprimer l'aorte ventrale sur la saillie sacro- 
vertébrale pour arrgter l'afflux du sang vers le bassin. On 
doit d'autant pbs se pré.munir contre la possibilité de cette 
héraorrhagie, qu'elle peut avoir lieu dans la cavité mëme 
de l'utérus, son orifice se trouvant fermé et rien ne's'é- 
coulant au dehors. Dans ce caç de perte interne, on devra 
ar conlme nous venons de l'indiquer pour les pertes ex- 
ternes. 
ItÉ.MORRIlOïDES (de «1, sang, et o, je coule 
Ce raot signifie écoulement de sang; aussi a-t-il té long- 
temps synonyme d'h oe md r rb agi e; aujourd'hui !'usage a 
prévalu sur l'étymoloe, et sous le nom d'heraorrhoïdes 
on ne désigne qu'un coulement de sang par les vaisseaux 
du rectum, ou mème des turaeurs situées vers i'extréraité 
de cet intestin, et sans aucune héraorrhagie. 
Cette maladie est une des plus [réquentes, et souvent 
une des plus incommodes, quoique ordinaireraent sans dan- 
ger. Elle consiste essentiellement dans l'afflux d'une trop 
grande quantité de sang vers le rectura ; et les syrapt6mes 
variés qu'elle présente ne sont que la suite et la conséquence 
de cette fluxion. Deux causes principales peuvent donc pro- 
duire les hét,.orrhoides : la pléthore sanguine, et tout ce qui 
tend à attirer le sang vers le bassin. Cette affection est quel- 
quefois h6réditaire, mais bien rareraent elle se montre dans 
la jeunesse et avant l'époque otl le corps a pris tout son 
accroisseraent; iusque là, le superflu des raatériaux nutri- 
tifs, s'il en existe, trouve son emploi, et la nature n'a pas 
hÇsoin de chercher nn raoyen de s'en débarraser. Par une 
cause analogue, les femmes, pemlant tout le temps de la 
mcnstruation, sont peu sujettes aux héraorrhoides; elles 
n'en sont atteintes ordinaireraent qu'à leur ge critique. Il 
n'est pas rare pourtant de voir les bémorrhuïdes survenir 
pendant la ossesse, ou à la suite d'tin accouchement labo- 
rieux. Les braorrl,cï,lcs, corarae la goutte, sont une raa- 



6 
ladie des gens riches et bien nourris; ceux qui ne mangent 
que pour vivre en sont rarement atteints. Enfin, les lavements 
irritants, la constipation opiniAtre ou toute autre cause qui 
tend h attirer ou retenir le sang vers le rectum, peuvent 
déterminer les hémorrhoïdes chez ceux qui sont disposés à 
cette maladie. L'usage habituel des siéges perces à leur centre 
et aussi une cause détcrminante de cette allection. 
Le premier symptéme des hémorrhoïdes est un sentiment 
de pesanteur douloureuse vers l'anus, quelquefois accom- 
paé de frisson et de lièvre. Si la fluxion est légère, elle 
cesse bientét d'elle-mëme, ou elle se termine par un écou- 
lement de sang par l'anus; cette bémorrhagie est plu ou 
moins ahoŒEdante, avec ou sans douleur; parfois le malade 
ne perd que quelques gouttes de sang, quelquefois il en perd 
plusieurs livres ; tantét ces crises se renouvellent tous les 
quinze jours, tantét seement au bout de plusieurs moi% 
ou mèrae de plusieurs années. 
L'afflux habituel du sang vers le re°tutu produit d'autres 
elfet : les eines de cette partie se gonflent, se distendent, 
et îorment des rumeurs, soit h l'interieur de l'i»te.qin, soit 
à l'extérieur et au pourtour de l'anus. On a donné aussi  
ces rumeurs le nom d'hdmorrhoïdes. Que la maladie soit 
caractérisée par ces tumeurs seules on par une hémorrhae, 
si elle est récente et accidentelle, on peut tenter de la guérir. 
5lais si la fluxion sanguine est devenue habituelle, surtout 
s'il s'est établi un coulement périodique de san, il faut 
pr.que toujours le respecter; c'est un effort salutaire de la 
nature, qui tendà rétablir l'equilibre de l'Cnnemie. Il en est 
de mème si l'apparition des hmorrhoïdes coincide avec la 
suppression d'un maladie ave : on doit bien se garder de 
troubler cet échange favorable. Pour le traitement des h- 
myrrboides, la principale indication est d'eloier la cause 
de cette maladie = ainsi, un régime frugal, peu nourrissant, 
un exercice modéré, sont les moyens g,:nèraux à employer; 
quant aux moyens propres h combattre les symptémes, 
les bains frais, les lavements tièdes, sont les plus coneua- 
bles. Mais il peut survenir des accidents qui nécessitent m 
traitement plus énergique. Il est rari que l'hémorrhagie de- 
vienne assez abondante pour compromettre la vie du ma- 
lade; mais dans ce cas il faut avoir recours à tous les 
moyens cunvenables puer l'arrêter, tels que les topiq,es, 
les boissons froides, ou mme la saignée. Si l'hémorrhagie 
dépend de l'érosion d'une ou de ph,sieurs tumeurs l,êmor- 
rhéidales, il faut les enlever, soit aec linstrument tran- 
chant, soit par la ligature. On pratique la mème opération 
pour débarra»«er les malade» de rumeurs gênantes par leur 
volume ou ieur position. 
Un accident p!as commun, «:'est l'inflammation des hé- 
morrhoides : la première indication dans ce cas est de faire 
rentrer leg rumeurs intern qui font saillie au dehors, sur- 
tout si elles sont étranglées par le sphincter de l'anus. On 
combat enite l'inflammation au moyen du repos, des bais 
de siége et des bains entiers, des iavements froids, de la sai- 
gnée; les sangsnes peuvent aussi être employ;s, mais il ne 
faut pas les appliquer sur tes tumeurs mèmes. Qelquefois 
les hémorrhoides sont le siege de douleurs extrëmement 
vives, sans inflammation : on les combat alors par 17appli- 
cation de substances froides ou eaimantes, comme la glace, 
ou les sucs de laitue, de jusquiame, de morelle, elc. C 
divers accidents doivent être comhattus dans le cas mëlne 
oh on juge nécessaire de ne pas gnérir les hémorrhoïdes, et 
seulement pour les ramener ì leur état de simplicité; de 
mdme, les personnes atteintes dgzemorrhoïdes constitution- 
nelles doivent éviter toutes les causes qui pourraient aggra- 
ver leur maladie et doner lieu ì ces accidents. S'il est né- 
cessaire de rappeler les bémoxhoïdes supprimées mal ì 
lropos, on le fait au moyen de lavements irritanL% de va- 
peurs irritantes dirigées s'ers l'anus, de pédiluves, et de 
angsues posíesen petit nombre àla fois, et à plusieurs re- 
pries ì l'extrémité du rectun 
HÊMORIIHOÏDES (Herbe aux). Vvye: Êcun. 
HÉ31OSTATIQUE (de «ifz«, sang, et .:-':ct, s'ar- 

ItÉMORRHOÏDES - 
rêler), se dit des remèdes propres à arrêter les bémor- 
rbagies. 
HE.MS ou HOMS. Voyez És-sc. 
HEMSTERHUS (Tma,s), célèbre philologue hql- 
landais, né en 1685 à Groningue, d'un père médecin dis- 
tingué, fut nommé en 170 professeur de mathématiques 
et de philosophie à Amsterdam. Appelé en 1717 h la chaire 
de langue grecque de l'université de Francker, il ne sint 
l'occuper qu'en 1720. En 170 il fut nommé professeur de 
languegrecqneet d'histoire h Leyde, et mourut en oette ville, 
le 7 avril 1760. On le considëre à bon droit comme le mo- 
dèle le plus achevé du véritable humaniste. Il fit luire de 
notables procès à l'étude de la langue grecque, en lui don- 
riant le premier une base scientifique et en fondant une école 
particuliere, dont Ruhncken et Valckenaër furent les élèves 
les plus distingués. Ses principaux travaux furent ses édi- 
tions de l'Onomasticon de Pollux (Amsterdam, 1706), des 
Dialogues choisis de Lucien (1708) et du Plutus d'Aris- 
tophaue (tT-l). Ruhuckeu, dans son Eloyium Hemster- 
husii (Leyde 1768), a résumé avec autant de vérité que de 
talent la vie de cet estimable savant et les importants services 
rendus par lui ì la litterature ancienne. On a aussi de Geel 
des Anecdota Hemsterhusiana (Leipzig, 1825), tirés de» 
œuvres manus¢rites de Hemsterhuys qu'on conserve dans 
la bibliothèque de Leyde. 
| HEMSTERHUYS (Fn_'çots), fil du précédent, né / 
Groningue, en 1720, remplissait h La Haye les fonctions de 
premier commis de la chancellerie d'Eat de la république des 
Proviuces-uuies des Pays-Bas Iorsqu'il mourut, dans cette 
ville, e 1790. Il est le plus éminent, et h peu près le seul 
connu des écrivains hollandais qui se sont occupés de la 
[rhilosophie morale. Il est le seul de son pays qui ait pris 
rang dans cette grande école de Tais philosophes remon- 
tant à Sucrate et h Platou, et inspirant dans les deux 
derniers siècles Fénelon, J.-J. Bonssean et Bernardin de 
Saint-tierce. A l'exemple de ces grands hommes, ltems- 
terhuys, par ses qualités et ses vertus, se mourra 
l'homme de ses livres. Sa philosophie fut pratique, ainsi 
que l'est toujours plus ou moins celle qui part de l'me. 
Toutes ses doctrines prenaient leur sooece, comme les eu- 
seigements de Platou, dans le sentiment de la Divinité et 
dans l'amour de ses semblables. Ses théories sur les arts, 
dont il avait le goal, sont toujours éclairCs par ses prin- 
cipes philosophiques. Voici les écrits par |esqnels Hems- 
terbuys a revélé la tendance et le but de ses m«ditatinns -. 
1 ° Lettresur la sculpture (1766); 2 ° Lettre sur les dsirs; 
3 ° Lettre sur l'homme et ses rapports (I773); o et 5 ° 
Sophyclus, ou la philosophie; ArisNe, ou de la Divinité, 
dialogues (1778 et 1779); 6 ° Alexis, ou de l'69e d'or, 
( I',iga, 1787 ); 7 ° Simon, ou des facultés de l'ame, im- 
primé après sa mort. L'auteur, dans ces quatre dialogues, 
a adopté la méthode d'exposition de Sucrate et imite la ma- 
nière de Platon. La Lettre de Dioclès à Dtime sur ra- 
théiéme ne parut aussi qu'après sa mort. L'originalité, une 
raison aussi déliée que profonde, la noblesse et la chaleur 
de l'ame caractérisent la philosophie et le talent de fau- 
teur. Il a fait à notre langue l'honneur de la choisir pour 
interprète de ses pensée.s. Il fut IlWpar l'amitié au philo- 
sophe allemand Jacohi. Jansen donna en 1792 une édition 
complète des œuvres de Hemsterhuys; les vignetles qui or- 
nent cette édition sont pour la plupart de Hemsterhuys lui 
même. 5I. Sylvain Van de Weyer a réimprim6 une édition 
de ses œuvres philosophiques ( volî ; Louvain, 1825-1827). 
IIÉMUS ou HOEMUS. Voye: BxKa. 
IIÉ'AULT (Cnn.r.s.Jr.A_. Frços ), né à Paris, 
en tû5. mort en t'770, était fils d'un fermier général. 
Entré dans Io. congrégation de l'Oratoire, il y perfectiunna 
ses études litféralres, et fut encouragé par Massillon. Il s'a- 
douna spécialement h la poésie légère, et, rentré dans le 
monde, cncournt pour I prix de poésie. Sonoenvre L'Homme 
intlilc fut couronne par l'Académie Flnçaise, en 1707. 



utAULT 
fut moins par ambition que pour se faire une position so- 
ciale qu'il acheta une charge de président de la premoEre 
chambre des enquêtes au parlementde Paris. Il n'avait pas 
fait d'étude siense des lois ; mais, doué d'nne rare a- 
cité, il suppléait à la science qui lui manquait, par larectitnde 
de son jugement et par une consciencieuse appréciation des 
hommes et des choses. Il parait qu'il tenait plus au titre 
qu'aux attributions actives de sa place; car il n'était que prési- 
dent honoraire quand l'Académie française l'adroit eu rem- 
placement du cardinal Dubois, en 17'2_3. Il fut depuis reçu à 
l'Académie des Inscriptions. Jouissant d'une lortune assez 
considérable, un rang distingué dans la première cour sou- 
veraine de France et le double fauteuil académique lui as- 
suraient une honorable indépendance. Il joiit i ces titres 
celui de surintendant de la maison de la reine. 
Poëte courtisan, galant et spirituel, il s'était fait une vie 
toute de joie et de plaisir. « A ne consulter que ses produ.c- 
tions Iëres, dit Paiissot. le 9résident Hénault n'etait pas 
précisément un homme de lettres: c'était plutOt un homme 
de bonne compagnie, un amateur éclairé qui se plaisait 
avec Jes gens de lettres, aimail à leur Atre utile, qui les 
secondait quelquefois, et que sa fortune avait mis à portéo 
d'obtenir d'eux et des gens du monde une grande considé- 
ration : il la méritait par son esprit, par ses mœurs douces, 
par l'araCit6 de son caractère.  Il était un des ornements 
de la co,r que tenait à Sceaux la duchesse du Maine. C'est 
là quïl se lia avec VolUte, dont les flatteries lui créèreut 
une renommée au-dessus de son mcrite. Lb aussi il connut 
5I m" d u D e I f a n d, dont il fut d'abord l'amant, et dont il resta 
ensuite l'ami. Voltaire le peint dans ces vers : 
Les femmes l'ont pris fort souvent 
Pour nn ignorant agrëahle ; 
Les gens en as pour un s3x ant, 
Et le dieujouflu deta table 
Pour un connaisseur fin gourmand. 
Si le présideut ttenault seconda quelques gens de lettres 
dans leurs œuvres, il s'en aida souvent lui-méme pont les 
siennes. Sa réputation liftCaire ne lui aurait pas survécu 
s'il n'etR fait que des madrigaux, des chansons, et quelques 
pièces de théâtre, aujourd'hui oubliées : son Abr9 chro- 
nologique de l'histoire de France a fait passer son nom à 
la postérité. Cet onvrage toutefois ne peut plus soutenir l'é- 
preuve d'une critique sérieuse et impartiale. Le succès en 
lut d'abord prodigieux : il obtint rapidement de nombreuses 
éditions, et fut h'aduit dans presque toutes les langues de 
l'Europe; mais le plan, qui a depuis servi de modèle ì tons 
les abréviateurs d'histoire, n'est pas de son invention : avant 
lui, i'abbé Boudot avait composé une histoire de France ì 
l'usage de Louis XV, dans le mme cadre et avec les 
mdmes divisions. Ou croit mme que cet abbé fut le colla- 
borateur du président Hénault. 
Les travaux historiques exigent des études continuelles 
et sérieuses : la dissipation habituelle de tténault ne s'ac- 
cordait gnëre asec les exigences de ce genre de travail. On 
lui doit encore François I , grand drame historique en 
prose, dans lequel on est étonné de trouver des personna- 
gesinutiles, insignifiants, tandisqu'il émet ceux qui ont brillé 
en premiëre ligne dans ces graves événements. On a im- 
pri.mé ì la suite une petite comédie, intitulée Le Rdveil 
d'Epiménide. La première ne pouvait tre reprë.entée, la 
secoude ne l'a jamais été. Les poésies fugitives du président 
Hénault n'ont été imprimées qu'en partie. A l'ge de cin- 
quante ans, il déelara qu'il allait tre studieux et dévot. Il 
fit alors une confessiou générale. Il disait/ ce sujet : « On 
n'est jamais si riche que quand on déménage. ,, On a anssi 
attribué au président Hénault une tragédie de Fuselier, in- 
titulée : Cornélie vestale, et une autre de Caux, littérateur 
moins connu, intitulée Maris. L'Abrfié chronologique 
s'arrête au règne de Louis XIV. !1 a été co.qtinué par des 
écivains plus intéressés qu'in.traits, qui y ont ajouté des 
dates et des faits, sans songer  rectifier les nombreuses 
rreurs orinelles. Le prsidenl IIénault avait laissé des 

-- HEIGIST 7 
mémoires, qui sont restés longtemps enfouis dans des pa- 
piers de iamilie. Ces Mémoires, dont l'authenticité n'est pas 
douteuse, ont été publié en 18, par son arrière-neveu 
M. le baron de Vigan. Dz (de i'Yonne). 
HENDÉCAGONE ou ENDÉCAGO.NE (de [.î,¢xa, onze, 
et ,m.oE, angle), figure de onze angles ou de onze c6tés. 
L'hendécagone pol ygone peut tre régulier ou irr:gulier. 
Dans le premier cas, ses angles et ses c6tés sont égaux. Sa 
surface s'obtient alors en multipliant par tf celle d'un des 
trian#es réguliers isocèles, que l'on obtient au moyen des 
raons conduits du centre  chacun des angles. La surface de 
l'endécagone irrégulier résulte de la somme de celles de cha- 
cun des triangles dans lesquels ce polygone se partage au 
moyen de diagonales conduites d'un sommet aux autres. La 
somme de tous les angles de ce polygone, régulier ou irré- 
gulier, est comme celle de toutes les figures de mme genre 
d'autant de fois 2 droits, qu'elles ont de c6tés moins 2, c'est- 
/-dire ici de 9 fois 2 angles d=oits. BLor. 
HEDÉCASYLL..BE. C'est un vers de onze sl- 
lahes, comme l'indique la composition grecque du mot ï..- 
«.oE, onze, et D., syllabe. Ce rhythme n'exisle point 
en français. D'origine hellène, et accepté par les muses la- 
tines et italiennes, il est banni de la poésie française. Chez 
les poëtes latin% le vers s a p h i q ne, le vers p h a l e u q u e, 
dont Sapho et Phaleucus sont les inventeurs, sont des hen- 
dcasyllabes, Exemples tirés d'Horace : 
Ludit lesbosu pec,s omoe campé. 
Jam te premit nv fahulque maries. 
Le premier de ces vers est salhique : il convient aux 
l':rges ou graves accords de la lyre; le second est phaleu- 
9ne : il se marie admirablement aux plaintes «le l'élégie ; la 
mort du aoineau de Lesbie est pleurée par le poëte sur ce 
rb:ythme. Catulle manie heureusement ce vers. L'épigramme 
comme l'entendaient les ancien% c'est-à-dire le plus son- 
vent inscri]tion ou #pita]he, adopta aussi ce rbythme. 
HEXGIST et IIOISA. Ainsi s'appelaient deux frères 
auxquels on attribue la fondation de la domination anglo- 
saxonne dans la Grande-gretague. Selon la tradition anglo- 
saxonne, l'au 446 ou 449 de notre ère, Vort/gern, roi des 
Bretons, sollicRa les secours des Angles et des Saxons 
contre les Pictes et les Scots. En cons«quence, Henst et 
Horsa, qui descendaient d'Odin, s'embarquèrent avec trois 
vaisseaux, débarquèrent près d'Yrwins-Fleet, dans le comte 
de Kent, et triomphèrent des ennemis qui s'etaient déjà 
avancés jnsqu'/ Stamford, dans le Lincolnsliire. Ils envoè- 
rent alors ì leurs compatriotes ,les renseignements sur la 
fertilité du pays, sur la faiblesse des habitants : et ces ré- 
cits ddterminèrent bien x-ire une troupe nombreuse ì venir 
les rejoindre, montée sur seize navires. Les nouveaux venus 
obtinrent des terres, les Jures dans le pays de Kent, les 
Saxons dans celui d'Esex et de Wessex, les Angles au nord. 
Six ou sept ans après, Gortimer et Catigern, frs de Vor- 
figera, conduisirent avec Ambrosius Aurelianns une grande 
armée contre les étrangers. L'an 455, à la bataille 
gelestborp ( aujourd'hui Asbford, non loin de Canterbury, 
dans le comté de Kent), Horsa tua Cafigern, tomba lui- 
mmi sous les coups de Gortimer, et Hengist fut contraint 
à la fuite. Mais l'année suivante, Henst et son fils zEsc 
battirent ì Crayford dans le comté de Kent les Bretons, et 
prirent / partir de ce moment le titre de rois de Kent. 
Dans deux autres batailles, livrées en 465 et 473, ils furent 
encore vainqueurs. Hengist mourut en 88, et son fils après 
lui régna vingt-quatre ans. 
Selon la tradition bretonne, Hengit reçut en don l'lle 
de Buithina, située ì l'embouchmre de la Tamise, appelée 
Thanet par les Anglo-Saxons; comme Didon avait fait ì 
Carthage, il la mesura avec une peau de bœuf, puis il 
alla chercher des renforts dans sa patrie. Le roi chrétien 
Vortigern s'cnllamma d'amour pour sa sœur, la belle et 
païenne Rovenna, et pour la po_séder il donna le comt 



8 
de Kent aux Saxons. Le peuple, mécontent, le déposa; son 
fils Vortimer vainquit les Saxons dans une bataille où Horsa 
perdit la vie, et à la suite de laquelle Henst s'enfuit de la 
Bretagne. Il tut rappelé par Vortigern, redevenu roi après 
que Roçenna eut empot.onné son fils. Comme on lui re- 
fusait ses terres, trois cents Saxons et autant de Bretons 
furent chargés d'arranger l'affaire à l'amiable ; mais lors- 
qu'ils se trouvërent en présence, les premiers,/ l'appel 
de liengist, « nirne de zre Seaxes », tirèrent les longs cou- 
teaux qu'ils tenaient cachés et égorgèrent les Breton ; on 
ajoute que pour racheter sa liberté Vortimer dut en outre 
céder aux envahisseurs Sussex, Essex et liddlessex. 
Cette tradition bretonne est tout à fait insoutenable; 
mais il y a tout lieu de croire aussi que le récit angloesaxon 
est mythique dan» tous ses détails, et l'existence mëme de 
liengist et de Hor.a reste soumise à des doutes légitimes. 
HENNEQUIN ( A'rol.e-Lows-Mle ), avocat à la 
cour royale de Paris, naquit à Monceaux, le 22 avril 1786. 
Son père avait exercé le notariat en Lorraine. Antoine lten- 
nequin débuta au barreau en 1813, après avoir porté un 
moment les armes sous l'empire. Ses premiers plaidoyers 
l'Cevèrent au-dessus du comm,n des gens de sa pro- 
fession ; bient6t une cause qu'il e.t à plaider à l'audience 
solennelle de la cour royale le porta tout d'un coup a- 
premier rang. 11 s'agissait de savoir si l'enfant nature, 
mème non reconnu, qui rapportait la preuve de la mater- 
nité, pouvait non-seulement réclamer de aliments, mais 
encore exercer des droits successifs. Hennequin obtint un 
arrët qui décida la question en faveur de l'enfant et qui fixa 
la jurisprudence, jusque alors opposée à cet acte de judi- 
cieuse charité. De ce moment les causes difficiles ou appe. 
Iées à avoir du retentissement, notamment celles qui avaient 
trait à des questions d'État, furent souriCs à son talent. 
Ainsi, il plaida avec éclat dans quelques affaires nées des 
lois nouvelles relatives aux émigrés qui modifiaient les lois 
révolutionnaires et qui froissaient divers intérëts. II défen- 
dit ensuite, en 1818, F i é v é e, traduit en police correctionnelle 
pour quelques pas_ages de sa Correspondance politique 
et administrative, et développa à cette occasion les doc- 
trines les plus salues en matière de liberlé de la presse. 
Son plaido.'er en faveur des victimes de la routine Lafare 
et l',titouflet indique sa parfaite intelligence des grandes 
opératios financières, comme elle est une satire spirituelle 
et vive des prétendus sentiments philanthropiques des cra- 
teurs de cette laineuse caisse d'pane. 
Il fut l'avocat deM. Arnault fil% dans son procès con- 
tre l'énergumène royaliste Martainvillc, et celui du com- 
mandant Bérard, impliqué dans la conspiration du Ea- 
car jî'ançais, dont il fit prononcer l'acquittement par la 
cour des pairs, en 187|. C'est à son talent que la ville de 
Liége doit la possession du cœur de GrStry, que disputait 
aux magistrats de cette ville, le neveu de l'illustre compo. 
siteur. On ione son succès dans l'affaire des mineurs Du- 
voisin, qu'il déicndit en 1825 contre une réclamation d'État 
qui menaçait les principes snccessifs des familles; mais n 
lui reproche dan le procès de .|lle Bebou, institutrice, con- 
tre 5I. Douglas-Loveday, Anglais, d'avoir conlribué fi as- 
surer le triom[de de Iïntolérance religieu sur l'aulorilé 
paternelle. Il échoua dan l'affaire Boumage ; et si la so- 
ciété a droit de plaindre celui qui ne sut pas décliner la 
défense d'une cause pareille, sous prétexte que les d.lica- 
tesses de conscience ,le l'honnête homme doivent céder 
devant les devoirs despotiques, mais encore mal définis de [ 
l'avocat, elle a lien de se leliciter que les fripons qui spé- 
culaient sur un si beau talent pour demeurer impunis 
aient été déçus dans leurs calculs et chatiés comme ils le 
méritaient. 
E |$17 et |821 Hennequin fut Cu membre de la cham- 
- bre de discipline de l'or«lre des avocat.% et il obtint la déco- 
ration de la Légion ,]'Honneur en 1825. Il faisait à celte 
epoque, avec éclat, un cours de droit civil, ainsi que son 
cofr&'e Belr)er.  la Soci¢/.d des Bonnes-Etud«s. espèce 

de cabinet de lecture-club, que la congrégation avai! 
ginWde monter dans le quartier latin, /l l'effet de garantir 
la jeunesse des écoles d, venin si contagieux des idées li- 
bérales. En 1830 il défendit le ministre Peyronnet devant 
la cour des pairs, et il asista de ses conseils la duchesse de 
Berry, lorsqu'elle fut arrêtC, lJ fut nommé en 183 député 
par un collége électoral du département du Nord, où. grâce 
au sens aristocratique, dominait l'opinion Iégitimiste, qui 
le regardait à bon droit comme l'un de ses plus habiles dé- 
fenseurs. Cependant, il nefit pas grande figure à la chambre 
il n'Cait pas là sur son terrain. On l'a appelé l'ëmule de 
M. Berryer, c'était lui rendre justice sous un point de vue, 
et lui faire honneur sous un autre. Savant dans la jurispru- 
dence et le droit logicien un peu subtil, doué d'une merveil- 
leuse facilité d'élocution, élégant, vif et railleu r, il e0t fait par- 
tout et en tout temps un avocat de premier ordre, mais ja- 
mais il n'eut, comme M. Berryer, donné l'idé accomplie du 
véritable orateur politique. Il n'eut de commun avec ce 
dernier que la persévérance de sa foi au principe de la mo- 
narchie legitime et l'appui qu'il prta jusqu'à sa mort à la 
cause royaliste. Il mourut en 18-I0. On a de lui des Më- 
noires, une Dssertation sir le rdgirne des hypothèclues , 
et un choix de ses plaidoyers. 
[II a laisse deux fils, Victor et Amddde IJa..'Qcr'. 
Ce dernier, né à Paris, le 3 aoùt 1817, avocat à la covr 
impériale, s'est fait connaltre par quelques brochures re- 
latives aux questions de charité. Il a en outre publié un 
livre qui a été remarqqé, Le Communisme etla jeanne 
Allemagne en Siisse (Paris, 1850, in-12 ). Fidèle aux tra- 
ditions paternelles, il n'a jamais cessé d'tire attaché au 
parti légitimiste. 
Son frère ainé, né/ Parisle 2 juin 1816, avocat, repré- 
sentant du peuple, après avoir té dans sa jeunesse congréga- 
niste fervent, s'ente, la dans la secle phalanstèrienne, et 
d,'vint l'nn des rédacteursde La Phalange et de La 19erno- 
cratie Pacifique. Ses loisirs de journaliste lui permirent 
d'écrire quelques bochures, dans le but de wdgariser les 
idées et la doctrine de Charles Fourier En 6849 il fit 
paraitre un livre intitulé Les Arnoirs au Phaastère, 
dans lequel il s'efforçait de remettre en lumière les concep- 
tions les plus extravagantes et les plus immorales du maltre. 
En 1850 fl devint représentant du département de Sa6ne-et- 
Loire à l'Aemblée légilative. Le 2 decembre 1851 il fut ar- 
rêtC et remis en liberte le 16. L'honorabilité deVictor Hen- 
nequin témoigna tolqours de  parfaite bonne foi; et ne 
la prouva-t-il pa de reste lorsque après la ruine irrépa- 
rable de la Ddmocratie Pacifique, il acheva de se détraquer 
la cervelle en .e fanatisant pour la folie du moment, les 
tables tou rna nte s et le commerce des espri ts p II pu- 
blia alors un livre à l'effet de révéler ses entretiens avec 
l'drue de la terre. Mais la Papillonne avait sans doute 
$garé l'ëcrivain ; car après quelques pages dïntroduction, où 
il donnait la recette pour évoquer cet universel esprit, 
jurait en passant ses erreurs révolutionnaires et trouvait le 
moyen de flatter le gouvernement nouveau, il entra.t dans 
une longue et diffuse e.plication de tout le système du Phao 
lanstère. Victor Hennequin avait pompeuement annoncé ì 
l'avance que tous les libraires de Paris se disputeraient son 
manuscrit, qu'il intitulait : Sauvons le 9cure humain! 
mëme il avait dsigné l'intelligent éditeur qui devait aqué- 
rir ce livre, phs précieux queles livres sibyllins; et il avait 
spécifié la somme qui lui serait payée, 30,000 francs, ni 
plus ni moins, ilCas .' tout cela ne fut qu'un brillant mi- 
rage, une mystification que s'était permise l'drue de la terre, 
et le libraire ne vnt pas. L'auteur dut imprimer à ses frais; 
il n'en fit pas nne plus mauvaise affaire, pour cela. Il 
y aura toujours des croyants. Quelque temps après le bru.;t 
courut que la raison de M  llennequin, sa femme, s'ètait 
abtméeen poursuivant ces rëves trop pofonds. ;ictor Hen- 
nequin mourut en décemhre 155-. W.-A. Dccr.] 
llENNIN. On nommait ainsi ces hauts bonnets que por- 
taient les !emnesau qualorzième siècle, lsabcau de Ravière 



nrNlIN 
en avait encouragé, sinon introduit, la mode en France. Les 
henin affectaient diverses formes; le plus souvent ils 
taient cylindriques, et ressemblaient à de hauts pains de 
sucre; parfois, cependant, ils se partageaient en deux 
cornes, arrondies en croissaut, ì la façon des mitres hé- 
braïques. Ces coiffures, qu'on faisait d'étoffes précieuses, de 
tissus d'or ou d'argent, devaient encadrer la figure, et, 
bouffant largement aux oreilles, ne pas laisser voir les che- 
veux. « Les dames et demoiselles, dit Juvenal des Ursins, 
.enaient grands et excessifs etats, et cornes merveilleuses, 
hautes et larges, et avaient de chacun coté, au lieu de 
bourlie, deux oreilles si larges, que quand elles voulaient 
passer par l'huis d'une chanbre, il fallait qu'elles se tour- 
asent de coté et se baissassent, ou elte n'auraient pu pas- 
ser. » Du sommet des hennins, soit qu'ils fussent de forme 
Iroite, ou partagés en deux cornes, s'échappaient de longs 
voiles ftngés d'or, qu'on appelait cornettes. 
La mode des hennins dura longtemps : sou Charles VIf 
et Louis XI les dames s'en paraient encore. Le curieux Il, re 
d'Olivier de La Marche, Le Purement des dames, qui fut 
écrit vers ce temps-là, nous parle encore 
Des hauhs bonnels, queuvre-chiefs à banniëres 
Des haultes cornes pour dames triompher. 
Mais bientOt pourtant la mode s'en perdit ; les cornettes dis- 
parurent les premières : on les enroula a la base du hennin, 
et cites y formèrent t,n énorme bourrelet, qui remplaça les 
larges oreilles qu'on y voyait auparavant. La haute forme 
de cette coiffure fut aussi abaissée et amoindrie d'aunée en 
année. L'énorme édilice qui depuis si longtemps surchar- 
geait la téte des femmes cessa d'exister vers le rëgue de 
Louis XII. Le haut bonnet des Cauchoises est le seul sou- 
venir qui nous soit resté de la mode d,.s hennins. 
ldouard 
IIEXNISSEMEXT. Voye-. Cnw,t., tome V, p. 417. 
itEXNUYEI (Jr LE), év/que de Lisieux. L'acte de 
tolérance et d'humanité qu'on lui attribue à l'egard des 
protestants proscrits n'est nullement fondé. Ce prélat, ne/ 
Sainl-Quenlin, vers 1497, mourut évéque de Lisieux, le 
12 mars 1578. Lors de la Saiut-Barthélemy, il était deve- 
nu, de directeur ,le çonçcicnee «le Diane «le Poitiers, direc- 
teur de celle de Calherinede Medieis et auménier de France, 
fonclions qu'il conserva aprës les massacres et qu'il aurail 
certainement perdues s'il s'y 10t opposé. En remontant à 
la source de cette erreur, on trouve que l'hiMorien de la 
ville de Saint.Quenlin, Héméré, en la consacrant le pre- 
mier comme un fait authentique, acommis une bévue, sinon 
une fraude pieuse. Il a conlondu la test»tance de Le Hen- 
nuyer en 1562 aux ordres de la cour relalivement aux 
protestants, qu'elle toiCait, avec une pretendue résistance 
,en 1572,époqueà laquelle Charles IX les dévoua à l'as- 
sassinat. Aucun historien normand, aucun ehroniqueur du 
seizième siècle ne cite i'évéque de Lisieux comme sauveur 
des protestants, et ils ont raison. En effet, il s'opposa vio- 
lemment à l'exeeulion de i'ëdil de tolérance de janvier 1562 ; 
son épitaphe dans la cathédrale de Lisieux elle cet aele 
d'intolérance, et n'a garde de parler du prétendu acte 
d'humanité de 1572. 11 résulte, au surplus, des regislres mu- 
nicipaux de la ville dont il était évéque que sa place d'au- 
monter le retenait souvent à la cour, et qu'il ne la quitta pas 
en 1572, parce que durant toute cette année son collègue 
Amyot tut retenu à Auxerre, dont il faisait reconstruire ou 
réparer la cathédrale. Il est laux que le gouverneur de 
Lisieux en 157 s'appelàt Livarot : son nom, que l'on doit 
répéter avec respect, était Dulongchamp de Fumichon. Il 
ne demanda pas le sang des protestants, il les sauva géné- 
reusemenl, de concert avec les a,lminislrateurs de la ville, 
qui, pour les soustraire à la rage du fanatisme, les firent 
prudemment enfermer dans les prisons, jusqu'à cê que le 
zèle barbare de la cour et des catholiques se f0t refroidi. 
Louis Dt Bots. 
IIÉOCH. Voye5 ILxocn. 
mer. n « cosvcs. -- r. x. 

 HENRI 9 
HÉ.OTICO ou tlËXOTIQUE. On donne ce nom à 
l'edit publié l'an 482 par l'empereur grec Léon l'Isaurien, 
pour mettre fin aux querelles des monophysitessur la ques- 
tion de savoir si le Christ n'a qu'une nature ou s'il en a deux. 
Comme dans cet édit le point en discussion était entière- 
ment laissé de coté, il ne pouvait satisfaire a,acun des deux 
partis; aussi le pape Félix II, invoquant comme seules 
valables les décisions du concile de Chalcëdoine tenu en 
451, condamna i'Hénoticon, qui fut defmitivement supprimé 
en 519, par l'empereur Justinien I . 
llEXRI. Sept rois ou empereurs d'Aliemagne ont porté 
ce nonl. 
HENRI I er , surnommé l'Oiseleur, le premier roi d'Allemn- 
gne de la maison de Saxe (919-936), né en 876, fils d'Othon 
l'Illustre, duc de Saxe, se trouvait  la chase aux oiseaux dans 
une bruyère aux environs de Quedlinbourg, Iorsqueles députés 
des étais de l'empire vinrent, en 919, lui annoncer la mort 
de son beau-frère Conrad, roi «le Germanie, et son élection 
à la royaute par les princes, évtSques et seigneurs allemands, 
approuvée par les acclamations des députés des villes. C'est, 
dit-on, cette circonstance qui valut au nouveau monarque 
le surnom d'Oiseleur. Un surnom plu» glorieux que lui 
donnent aussi les chroniquenrs contemporains, c'est celui de 
Bdtsseur de villes. Des victoires sur les Vandales, qu'il 
poursuivit j'usque dans Brandebourg, enlevé d'assaut au 
cœur de l'hiver, et qu'il lailla en pièces sur les cotes «le la 
Baltique; ur les Danois, qui continuaient leurs déprédations 
sur les rix es de l'Elbe; sur Arnull le Mauvais, duc de Baxière, 
qu'il réduisit ; sur les Dalmates, les Eclavons et les Bo- 
hèmes, qu'il subjugua; la conquète de la Lorraine, deux 
fois enlexée i Charles le Simple et soumise /t Ffiommage ; 
enfin, ses trtomphes sur les Hongois, barbares encore, dont 
il massacra 80,000 à Mersebourg (90), et dont douze ans 
plus tard il exlermina, sous les murs de la mgme xille, les 
hordes devastalriees, lui valurent l'admiration de l'Eml,ire. 
A sa mort, arrivée en 936, les •illes qu'il avait forlifiees et 
dans lesquelles il avait créé une milice populaire ; les nobles, 
rëunis par de sages lois, exaltés par l'institution des tour- 
nois, proclamërent avec reconnaissance son lils Olhon, 
élu du vivant mème de son père (936). Les historiens du 
temps déplorërent sa perte comme celle du plus habile 
politique et du plus 9rand roi de l'Europe. 
HENRI II, dit le Saint ou le Botteux, empereur d'Mie- 
magne (1002-104), le dernier empereur de la maison de 
Saxe, né en 972, clair fils de Henri de Bavière et arrière- 
petit-fils de l'empereur Henri I «. A la mort de son père, 
arrivée en 995, il héritadu duché «le Bavière, et en 1001 
il accompagna l'empereur Olhon III à Rome, oit par ,.:on 
intrépidité il eonjura une insurrection des Romains. Olhon 
étant venu à mourir en Italie, Henri s'empara des insi- 
gnes de l'empire; mais ce fut seulement gr/tee a l'influence du 
comte Lolhaire de Bernbourg et de i'archevèque Willigis de 
Mayenee, qu'il parvint à triompher de ses competileurs à la 
dignitë de roi d'Allemagne, le margrave Eckard de blisnie 
et le due Hermann de Souade. Le 2 juin de l'an 1002 il fut 
solennellement couronné à Mayenee. En 1005o profilat des 
troubles de l'ltalie, partagee entre le marquis d'Ivrée, Har- 
duin, et l'archiduc de Milan Arnold, qui appelait les Alle- 
mands, fl passe les Alpes, se Ihit placer la couronne de fer 
sur la léte par l'archeèque dans la cathédrale de Pavie, fait 
paisiblemenl son entrée dans Milan, et s'en retourne en- 
suite en Ailemagne. Le roi de Pologne Boleslas 1 - s'ëlait 
emparé de la Bohème et menaçait l'Empire: Heurt cou- 
tonte dans Prague le duc Jaromir, rejetle Boleslas, Irois 
fois battu derrière l'Oder, et le force, par le trait6 «te Baut- 
zen (1018), à se reconnallre tributaire pour in Pologne et 
la Moravie, Pannée mème où l'indolent Rodolphe, roi de la 
Bourgogne transjurane, cëdait à l'empereur tous ses droits 
sur son roaume d'Arles. E Italie, ilarduin avait ressaisi 
le pouvoir : Henri le met en déroute sur les fronlières du 
pays de Vérone, et se fait couronner, le 94 janvier lOI.i, 
dans Saint-Pierre de Rome, empereur d'Occident par 1 
2 



10 
pape Benolt VIII. C'est à cette occasion que pour la pre- 
mière fois un souverain pontife fit don à l'empereur du globe 
d'or dit globe impdrial, comme emblème de la souveraineté 
de l'empereur sur tout l'univers. En 1022, Henri II entreprit 
une troisième expedition en Italie, où le pape Benolt Fap- 
pela à son secours contre les Grecs de la basse Itafie, qui 
ofierohaieut sans cesse à fortifier leur puissance dans ces 
oontrées. L'empereur fut heureux dans cette campagne; il 
réunit les troupes des I%rmands à son armêe, et, en sa qua- 
lité de délenseur du saint-siCe, leur assura des établisse- 
ments fixes dans la basse Italie. 
Henri II eut en outre à soutenir de nombreuses luttes en 
Allemagne. Un frère de sa femme, Adalbero, s'établit de son 
autorité privée archevoeque de Tr/ves. Il marcha contre lui, 
le tint assiégé pendant trois mois dans Tréves; puis, Adal- 
bero ayant trouvé un refuge chez son ffère le duo Henri de 
Bavière, il se vit entrainWà guerroyer aussi contre lui; et 
cette lutte eut pour résultat la dépoition du dao de Bavière. 
Le comte de Flandre et le margrave de lIisnie se rcvoitèrent ; 
mais Henri Il parvint également à les SOalnettre. Relative- 
ment à la Bourgogne, il signa avec le duc RoduIphe III, qui 
n'avait point d'enlants, une convention aux termes de la- 
quelle ce pays, sur lequel les rois d'Allemagne avaient d,;jà 
precédcmment exerc les droits de suzeraineté, ferait re- 
tour à l'Epire après la mort de P, oduIphe III. De mëme il 
rétablit dans son autorité le pape Benoit VIII, qui, en 1314, 
avait etWforcé par l'antipape Grégoire de se refuser en Aile- 
magne. Pour remercier l'empereur, Benott "-Ill, en t320, 
vint en Ailemagne consacrer lui-mème l'crection de l'évché 
de Bamberg, Iondalion de ce prince, qui lui avait donné tout 
son patrimoine. Dévot, ami du clergé et grand partisan 
dela puissance ecclesiastique, Henri Il mourut le 13 juillet 
1024, à Grona, prës de Goettingue, fut enterré h Bamberg, et 
canonisé par le pape Eugëne III. Sa femme Cunegonde, qui 
dans sa vie conjugale avec hfi n'enlreignit jamais, dit-on, le 
VœU de chasteté qu'elle avait fait, fonda divers monatères, 
et mouruten 1038, à Kanfungcn, monastère fondé par elle 
dans le pays. Plus tard elle filt également canonisée. 
HENRI Ill, su,'nommé le Noir, le second empereur 
d'Allemagne de la maison de Franconie, fils de l'empereur 
Conlad Il et de Gisële, né en 1017 à Osterbeck, dans la 
Gueldre, fut elu roi des Allemands ds l'an 1026, devint duo 
de Bavière en 1027,duo de Souabe et de Bourgogne en t08, 
et sureCa à son përe dans la dignité d'empereur en 1039. 
Secondé par les plus heureuses dispositions naturelles et par 
une excellente education, rumpu de bonne heure au metier 
des armes, d'un caractère hautain et sévère, il tint d'une 
main rigoureuse les rnes de l'£tat et de l'Église, et fut un 
des plus puissants souverains qu'ait eus l'Ailemae. Afin 
d'éviter les périls qui résultaient pour la couronne impériale 
«le l'existence de dues trop puissants, il oonserva ponr hi- 
marne et sa famille les duchés tomhés en déshérence, ou 
bien les attribua, comme la Bavière et la Carinthie, à des 
princes n'ayant que de petits Êtats. Le duc de Saxe put seul lui 
tenir tte ; mais il eut l'adresse de lui susciter les plus dan- 
gereux rivaux dans la personne du landgrave de Thuringe, 
Louis le Barbu, et dans celle de l'archevéque de Brëme, 
Adalbert, duquel relevaient douze évohés. 
Lonflemps il guerroya en Hongrie, or, entré ì Stuidweis 2 
seIabourg, il se fit proclamer souverain par les états, rotait 
la couronne sur ha téte de Pierre, auquel ses sujets crevè- 
rent les yeux, et fiait par donner sa fille à l'usurpateur André. 
Ses regards se tournèrent alors vers Ruine. Là, tour à tour 
les factions rivales des comtes de Tusculum et de Ptoié- 
mée laisaient et défaisaient les papes : on vit trois papeg à 
la fois dans la sille sainte, BenottIX/t Saint-Pierre, Far- 
chiprtre Jean ì Sainte-lIarie Majeure, Sylvestre III au pa- 
lais de Latran. Un quatriéme vint, Grégoire VI, qui leur 
acheta ì chacun leur tiers de papauté. Las d'un tel scaudale, 
Henri III, an concile de Sutri, fait dëposer cette tourbe 
impure, et met à leur place son chancelier, l'évéque de 
Bamberg, Suitberg, qui prit le hum de Clment II, et 

HENRI 
qui le couronna, Io j«:»r de Noël 1016. Après lui L éon IX, 
Vie t o r I I, envoyèrent humblement demander à l'empereur 
leur confirmation, et, d'accord avec eux, il entreprit la ré- 
tortue des nombreux abus qui existaient dans l'Eglise et 
celle des mœurs du clergé. Ce qn'il avait surtout en vue, 
c'était d'affranchir l'autorité séculière du pouvoir spirituel ; 
mais Hildebrand, qui remplissait alors les onctions de car- 
dinal-diacre, et qui devint plus tard pape, sous le nom de 
Grégoire Vit, tout en paraissant favorable à la réalisa- 
tion des projets de l'empereur, eut l'habileté et la finesse 
de les contrarier en dessous-mains et d'annuler peu à peu 
son influence sur l'élection des papes. Aussi, quand 
Henri ltl vint à mouri% en t3-:,6, tout Cait-il préparé à Pa- 
rance pour que la puissance pontificale se trouvàt compléte- 
ment soustraite à l'influence des empereurs. 
Avant de mourir, au ch/ltean de Boffeld, dans le Harz, 
assez vraisemblablement des suRes du poison, Henri III 
avait fait reconnaitre, dès l'an I t54, en qualité de roi des 
Humains, Henri, le fils qu'il avait eu de sa seconde femme, 
Agnès de Poitiers, et qui lui sureCa, sous le nom de 
Henri IV. 
Itenri III mourut trop t6t, non pas seulement pour avoir 
le temps de fonder une véritable puissance monarchique 
impériale et de constituer l'unité politique de l'Allemagne, 
mais aussi pour les sciences et les ail.s, qu'il aimait et pro. 
tégeait. Il fonda un grand nombre d'écoles,,h- monastère-« o 
et y coufia l'enseignement à des moines qu'il fit venir de Bre- 
tae; il construisit les catbédrales de Worms, de llaeuce 
et de Spire (c'est dans cette dernière qu'il fut enferré), et 
favorisa surtout les historions:et les musiciens. 
HENP,1 IV, empereur d'Allemagne (de 1056 à 1706), fils 
du précedent, né en 1050, n'avait encore que cinq ans lors- 
quïl perdit son père. Sa mère, Agnés, dut donc se clmrger 
tout à la fois de l'administration de l'empire et de son édu- 
cation. Quoique douée de grandes qualités et secondée dans 
la direction des affaires, d'abord par le pape Viotor Il et plus 
tard par l'évque Henri d'Augsbourg, l'impératrice n'était 
nullement à la hauteur de la position difficile où elle se 
trouvait, forcée qu'elle était de lutter contre les preten- 
tions bautaines des princes de l'Empire et contre les em- 
piëtements de la puissance pontificale. Dans l'espoir de ré- 
concilier avec la maison impériale les princes allemands, 
que l'extréme sévérité de Henri III avait indisposes, elle 
rendit au duc Godefroid la Lorraine, dont son époux l'avait 
dépouillé. Le comte Bodoiphe de Bheinfelden, qui avait en- 
levé sa fille Mathilde, reçut en dot le duché de Souabe, en 
mme temps qu'elle dédommageait le comte Berthold de 
Zoehringen, qui, de l'aveu méme de son mari, avait de justes 
prétentions sur ce duché, en lui accordant le duchê de Ca- 
rinthie, et qu'elle octroyait au puissant et audacieux comte 
saxon Othon de Nordheim le duché de Bavière, devenu va- 
cant. Mais tandis que l'impératrice faisait ces concessions ì 
certains princes ou bien leur laissait prendre de l'influence 
sur la direction des allalres, d'autres, notamment l'arche- 
vdque Hannon de Cologne, se voyaiont tonus à l'écart, s'en 
offensaient, et prenaient la résolution de s'emparer de la 
personne da jeune roi et par suite de l'administration de 
l'Epire. L'enlèvement de Henri eut lieu en 1062; ce prince 
fut conduit à Coiogne, et Hannnn se trouva ainsi le régu- 
lateur suprême de l'Empire, qui dès lors tut en proie ì une 
confusion extrëmeet où on ne reconnut bienf6t plus d'autres 
lois que la force et la iolence. 
Hannon excita bient6t des haines et des jaiousies parmi 
les grands feudataires de l'Epire, et se vit forcé de partager 
avec l'archevêque Adalbert de Br#me la direction des af- 
faires de PEmpire et de Pducation de Henri; mais il n'en ré- 
sutta aucun avantage pour ce prince, dont le caractère ne 
sonifrit pas moins des sévérités de Haunon que de l'indul- 
gence extrême d'Adalbert. Henri ne tarda point h concevoir 
un vif attachement pour AdaIbert, qui en profita pour incnb 
quer au ]eune roi se. propres idees sur l'autorité ah.olue et 
illimitée du tr6ne, en m.mc temps que ses haines particu- 



HENRI 
ères contre les princes de la maison de Saxe, et aussi 
pour s'emparer de la haute direction des atfaires. A cet effet, 
il fit, en 1065, dclarer Henri IV, é alors de quatorze ans 
seulement, majeur, dans une assemblée solennelle de priuces 
tenue " Worms, au retour de sa première campagne, qu'il 
était ailWfaire contre les Hongrois et pendant laquelle il l'a- 
vait accompagné. Ilais fatigués du dcspotisme d'Adalbert, 
les princes de l'Empire ne lardèrent point à,convoquer  Tri- 
bw- une autre assemblée, dans laquelle il [u forc de se sepa- 
ter d'Adalbert, et de confier l'admiuistratien de l'Epire 
Hannon. Pendant ce temps-I Henri oe livrat à des excès 
de tous genres, qui compromirent sa vie. Pour le ramener 
h plus de rgularité de mœUrS, Hannon le décide à épouser 
Berthe, fille du margrave de Suse, avec laquelle il était de- 
puis longtemps fiancé. Ce mariage n'eut pas plus t6t été 
conclu, que Henri songea à se débarrasser de sa femme, qu'il 
n'aimait point. Mais l'intervention du pape, auquel se joi- 
gnirent contre toute attente les princes de l'Empire, réunis 
en diète ì Worm», mit obstacle ì la rèalisation du projet de 
divorce qu'il avait conçu ; et pour é¢iter de grands périls, 
lui fallut se résigner  son sort. Pendant longtemps il cessa 
de voir la reine; mais plus lard une réconciliation eut lieu 
entre les deux époux, et une foL que Berthe lui eut donné 
un fil, en 1071, il la traita avec amour. 
Accusé d'une tentative d'assassinat contre la personne de 
Henri IV, le duc Othon de P, avière avait été cité ì compa- 
raitre devant une diète tenue ì 31ayence, et où il avait été 
¢ondamné à prouver son innocence par le jugement de Dieu. 
Othon, redoutant que ce défi en champ clos ne cacht quel- 
que trahison, au lieu de l'accepter, prit les armes, et fut aus- 
sitôt mis an ban de l'Empire, tandis que ses Eats étaient 
adiugés à son perfide etambitieux gendre, Guelfe. Les dévas- 
tations auxquelles ses domaines étaient en proie ne ces- 
sreat que lorsque, d'accord avec le duc 3Iagnus de Saxe, il 
e-al Ihit sa soumission au roi, qui enleva au duc Berthold 
de Zoehringen son duché de Carinthie, sous prétextequ'il avait 
l'intention de se révolter. Henri, pour maintenir la Saxe 
dans le devoir, , fit construire un grand nombre de chteaux 
forts, et, d'après les conseils d'A.dalbert, retint le duc Magnns 
prisonnier dans le Harz. Il en résulta pour lui une guerre 
dangereuse qu'il eut à soutenir contre la noblesse saxonne, 
et dans laquelle il courut les plus grands dangers. Elle se 
termina par l'humiliant traité conclu en 1074, ì Goslar, en 
verlu duquel il dut démolir tous les chateaux dont il avait 
hrissé les points les plus importants de la Saxe. Les excès 
« ommis par les hommes d'armes des eigneurs saxons con- 
féddrés, qui pillèrent les églises et profanèrent mème les 
tombes de ses ancêtres, déterminèrent Henri ì s'adresser au 
pape pour la punition de ces sacriléges; et le pape saisit 
avecempressement cette occasion d'intervenir aussi dans cette 
querelle. Il envo,a des Iégats en Saxe pour la juger, et en 
uême temps il fit notifier ì l'empereur la défense de conti- 
nuer davantage à pourvoir aux charges et bénéfices ecclésias- 
tiques qui venaient à vaquer. Mais avant méme que les 
Iégats eussent eu le temps d'arriver en Allemagne porteurs 
des injonctions pontificales, Henri avait repris les arr,es 
contre les seigneurs saxons, et te 15 juin 1075 il avait rem- 
porté sur eux, à la bataille de Hobenbourg, sur l'Unstrut, 
victoire qui le rendit de nouveau maitre de la Saxe. Ptn- 
dant ce temps-là, ses conseillers continuaient ì trafiquer des 
bénéfices e¢eiésiastiques. Henri n'ayant mis aucun obstacle 
à ce désordre, et n'ayant point éloigné de son entourage 
le» évëques qui avaient acheté la possession de leur siCe, 
puis, au lieu de déférer ì la sommation que lui adressa le 
pape d'avoir à venir ì Ruine se défendre des accusations 
dont il était l'objet, a,ant répondu par la dposition du sou- 
verain pontife, qu'il fit proclamer dans une assemblée de pré. 
latset d'abbés tenue àWorms, le 2 juin 1076, GrégoircVII 
lança contre lui les fondces del'excommnnication, le déclara 
déc u du droit de gouverner l'Empire, et délia ses sujets de 
leur serment de fidélité. 
Hqri IVse railla d'abord de ces menaces; mais ¢luand il 

11 
vit les princes du sud de l'Allemagne se dtacheg les un 
après les autres de sa cause et s'allier avec les Saxons mé- 
contents: quani une diète tenue à Tribur, en 1076, lui eut 
enlevé l'administration de l'Epire et l'eut sommé d'avoir, 
dans le délai d'une année, à se faire relever de l'anathème 
dont il avait été frappé, s'il ne voulait pasttre déclaré déchu 
du tr6ne, il s'empressa, malgré un hiver des plus rigoureux, 
de passer les Alpes au milieu de dangers et de fatigues sans 
nombre, eccompagn: seulement de sa femme et de son fils, 
et d'aller t,- ver le pape en Italie, au ch$teau de Canossa, 
cbez la marquiso M a t b i I d e, par l'intervention 0c laquelle 
il fut admis ì faire pénitence. Avant d'Cre relevé ne l'excom- 
munication, il dut se soumettre, en dépit d'un froid excessif, 
ì marcher pendant trois jours pieds nus dans le château 
deCanossa et à y taire pénitence te corps couvert d'un cilice 
de criu. 
La conduite altière du pape ì l'êgard de l'empereur pl'o- 
duisit un etfet tout autre que celui qu'il s'en etait promis. 
Les seigneurs italiens, depuis longtemps mécontents de 
Grégoire, offrirent leur secours  Henri IV. Mais les princes 
allemands, à la nouvelle des humiliations que leur roi avait 
acceptées de la part da pape, avaient Alu  sa place Iodolphe 
de Souabe, dan. une assemblée tenueen 1077  Forchheim et 
avec le concours des légats pontificaux. Henri s'en retourna 
donc en toute hàte en Mlemagne, où, seconde particu- 
lièrement par les villes, il réunit une nombreuse armee. 
Les batailles de Melrichstadt (1078) et de l=ladenheim (1080) 
ayant paru potier les derniers coups à sa fortune, Grégoire 
lança de nouveau contre lui les foudres de l'ecommu- 
nication, et déclara qu'il avait perdu la couronne. Par re- 
présailles, Henri réunit à Brixen une assemblée d'érCues 
que Grégoire VII avait virement irrités en leur imposant la 
règle du célibat, et dans laquelle on déposa ce pape en 
mème temps qu'on Cevait à sa place l'archevêque Guibert 
de lavenne, qui prit le nom de Clément III. Ilenri l'al 
encore défait/ la bataille livrée sur les rives de l'Elster, 
non loin de Mersebourg ( 1,5 octobre 1080 ); mais son rival 
Rodolphe .- perdit la vie. Alors, confiant l'administration de 
l'Empire à son gendre, Frédéric de Hohen.taufen, Henri se 
lta de franchir les Alpes, en t08t, à la téte d'une armée, 
parcourut en vainqueur toute la haute Italie, et arriva sous 
les murs de Ruine le lonr de la Pentecôte. Ce ne fut toute- 
lois que trois ans plu tard, en mars 1084, qu'il parvint ì 
s'emparer de cette ville, où il se fit solenneilevaent couronner 
avec sa femme par Clèmentltl, le jour de Pàqu«s, tandis qui 
Grégoire VII se réfuait dans le château de Saint-Ange. 
Il fallut encore que Henri IV repartir pour i'Allemagne, 
où pen,lant son absence on avait Cu roi, le 9 aodt t0Sl, 
le comte Hermann de Luxembour; de sorte que la ,erre 
civile y recommença de nouveau. Hermann, quoiqu'il ett 
vaincu Henri sous les murs de Wurtzbourg ( I t août 1085 ), 
abdiqua volontairevaent en 1087, fatigué qu'il était de la 
dépendance dans laquelle prctendaient le retenir ie princes 
qui l'avaient proclamé roi, et mourut à queiqge temps de 
là. En 1089, la mort délivra également Henri d'un autre 
anti-roi, Eckbel, margrave de 31isuie, rival bien plus dan- 
gereux, qui s'était tait roi lui-méme et qui de-jà l'avait battu 
dans diverses rencontres. Pendant ce temps la, Gregoire VII, 
lui aussi, était mort, le 5 mai 1085, à Sa|crue ; et son parti 
avait successivemeut Cu ì sa place Victor III, puis Ur- 
bain II. Pour protéger Clément III et en méme temps 
maintenir sa prépondrance en Halle, Henri IV franchit une 
troisième fois les Alpes, en 1090. Dëjà il s'était empare de 
3Iantoue et avait remporté diverses victoires sur Guelfe, 
époux de la comtesse Mathilde, lorsqu'il reçnt la nouvelle 
qge son lils Courad avait passé à l'ennemi et s'etait fait cou- 
ronner roi à 3Ionza; enfin, que le roi des Lombaxds venait 
de se liguer contre lui avec Guelfe. 
A cemoment Henri IVdésespéra de sa forttme. en/ermé 
dans un château fort, il demeura longtemps inactif : mais 
en 1096 le courage lui revint, et il reprit la route de l'Aile- 
magne, où par des concessions il rattacha de nouveau à  
2. 



cause plusieurs princes puissants, entre autres le duc Guelfe 
lui-méne. Partout alors on l'accueillir avec des alCons- 
traitons de satisfaction. A sa demande, la diète réunie à 
,layence déc]ara son fils alné, Conrad, déchu du titre de roi, 
et désigna son fils cadet pour lui succéder. Vers le mme 
temps, le pape Urbain étant venu à mourir (I099), de mme 
que l'année suivante le pape Clément II (Il00), puis après 
le parjure Conrad en Italie (I 101), la paix et la tranquillité 
semblèrent vouloir se rétablir dans l'Empire. lais presque 
auit6t après son intronisation le pape Pascal III tança à 
son tour les foudres du Vatican contre Henri, qui persistait 
à disposer des siées épiscopaux quand ils venaient à 
vaquer, en méme temps que plusieurs seigneurs excitaient 
le roi Henri à usurper la couronne impériale de sou frère. 
L'ambitieux jeune homme leva en effet l'étendard de la 
révolte contre son père, le lorça à prendre la fuite; puis, 
voyant que les ville» mettaient une armée à la disposition 
de l'empereur, il réussit à le tromper par des paroles de 
paix, le lit prisonnier, et le força à abdiquer. L'empereur 
s'écippa, il et vrai, de sa prison, et put se rél'ugier à Liége, 
od de toutes parts les villes lui envoyèrent des secours; 
mais il mourut dans cette ville, le 7 ao0t 1106. L'év]ue 
de LiJe lui fit de magnifiques funérailles; mais ses ennemis 
parvinrent à laite dterrer son cadavre, qu'on expia à 
Spire, oU il resta longtemps sans sépulture, dans une cha- 
pelle latérale non consacrée » en attendant qu'il e0t été re- 
terWde la peine de l'excommunication, formalité qui se fit 
encore attendre pendant cinq années. 
Il n'y a pas d'empereur d'Allemane qui ait eu une vie 
aussi merveilleusement mlée de traverses que Henri IV, 
etdont le règne ait été aussi agité. Les défauts de ce prince 
taient une trop ande irritbilité, une extrême légèreté et 
beaucoup d'ambition ; il le rachetait par de brillantes qua- 
lités du cœur et de l'esprit. Eidèle en amitié, il se munira 
toujours reconnaissant envers ceux qd le defendirent sin- 
cèrement; il prenait en pitié les souffrances des pauvres et 
des malades et était d'aussi bon conseil qu'habile à se 
tirer du daner. Doué d'une grande bravoure, il prit cousu 
tamment contre l'aristocratie la défense des intérts de la 
bourgeoisie, qui commençait alors à se con.tituer comme 
corps, et du peuple en genëral..Mis Henri IV manquait 
de lucidité d'esprit, d'instruction et de lermeté de caractère; 
aussi îchooa-t-il dans ses efforts pour défendre la puissance 
impériale contre les insolentes usurpations des grands feu- 
dataires et contre les empiétements toujours croissants du 
pouvoir sacerdotal. 
HENRI V, empereur d'AIlemagne {de 1106 à !15), fils 
du précédent, ne en 10si, lut déclaré roi dAllemagne en 
1098, aprè» la revolte de son frère aihWConrad contre son 
père, et couronné en cette qualité à Mayence, en 1106, du 
vivant mme de son père, à l'incitation du pape Pascal lI. 
Dès l'année 110- il avait cherché fi usurper la couronne 
impériale de son père, tantôt employant dans ce but les 
moyen les plus perfides et les démonstrations les plus hy- 
pocrites, tantôt recourant ouvertement à la force des armes. 
Une fois qu'il eut atteint son but, il chtia cruellement 
ceux qui, comme le duc Henri de Lorraine et la ville de 
Cologn¢, etaient demeurés fidèles à son père. Pour rehausser 
la puissance royale, singulièrement abaissée dans l'esprit des 
peuples, il sehta d'entreprendre des explitions guerrières 
ayant pour but à l'lutCieur de châtier les seigneurs insou- 
mis, et ì l'extérieur de subjuguer les princes de Pologneet 
de Bohne. Pascal II, qui dans le concile de Guastalla 
{l lu6) renouvela les protestations expresses du saint- 
siée contre le droit d'investiture que s'arrogeaient les 
pereurs, fut ensuite invité par lui à assister fi la diëte de 
l'Empire convoquée à Augsbourg, afin de terminer à l'a- 
miable ce différend survenu entre les deux puissances ; et 
en mème temps il accordait sous main l'investiture episco- 
pale aux évoques de Verdon et d'Halberstadt par l'envoi de 
l'ormeau et de la crosse. Puis quand Henri V crt son po- 
çoir conolid, il essaya bien encore dhm arrangement 

amiable avec Pascal; nais ses négociations a]'ant échoué, il 
franchit les Alpes, en 1110, à la tète de 30,000 hommes. 
Il se fit alors rendre hommage dans les plaines de Ion- 
cali par le illes de la haute Italie, s'avança iusqu'ì Sutri, 
s'empara de Rome par oie de négociations; et le pape 
refusant toujours de le couronner tant qu'il n'aurait pas 
Iormellement renoncé au droit d'investiture, il le fit prison- 
nier avec le plus grand nombre des cardinaux. Ce ne lut 
qu'au bout de deux mois, et en s'engageant à s'abstenir 
de toute vengeance comme aussi d'user de i'excommuni- 
cation et de lui contester le droit d'investiture, que Pascal 
obtint d'tre remis en liberté; et alors il couronna l'em- 
pereur, le 9 avril I 1 ! 1. Mais Henri V ne fut pas plus t6t re- 
tourné en Allemague, que Pascal, agissant non pas direc- 
tement mais par l'intermédiaire de l'archevue Guido de 
Vienne dans un synode des évoques bourguignons, lança 
l'interdit contre l'empereur, qui s'en soucia alors d'autant 
moins qu'à ce moment il était engagé dans une guerre 
cuntre ses grands vassaux allemands. La victoire remportée 
sur les rebelles à Varenstoedt par son gnéral, le comte 
de Mansfeld, sembla avoir terminé la lutte; mais les princes 
des bords du Rhin et de la Westphalie la recommencêrent; 
et la fortune des armes se prononça alors contre Pempe- 
teur à la bataille de ,Velfesholze sur la Wipper (ttt3). Les 
archevques de Cologue et de Mayence, ses ennemis, pro- 
fitèrent de sa sitoation critiqse pour le frapper de nou- 
veau d'excommunication. Cette circon.tance et la mort de 
la n arquise Mathilde, arrivée en I 115, des États et des 
doma.'es de laquelle il avait hle d'aller prendre posse 
sion, le déterminèrent à conlier la défense de PAllemae 
aux princes de la Souabe demeurés fidèles et h partir de non 
veau, en 1116, pour l'ltalie, o, après avoir pris possessioa 
de l'héritage de Mathilde, il chassa Pascal II de Rome; et 
après la mort de ce pape, i fit étire pour lui succéder sur 
la chaire de saint Pierre Grégoire VIII, à qui toutefois le 
parti sacerdotal ne tarda point à opposer un rival dans la 
personne de Gélase ll. Celui-ci lança de nouveau l'ana- 
thème contre l'empereur, puis se réfua en France. 
Pendant ce temps-la, la guerre civile avait continué en 
Allemagne avec des alternatives diverses, et dëjà les princes 
menaçaient l'empereur de le dépoer. En outre, à la mort 
de Gélase II, arrivée en ! 119, le terrible archevëque de 
Vienne ayant été Cu pape sous le nom de Calixte II, Henri 
aecourut en Mlemag,ae; et dans la diète tenue à Tribut il 
termina ses différends avec les princes en proclamant une 
amnistie et une paix générales, de mme qu'en promettant 
de restituer à chacun ce qui lui avait été enlevé, promesses 
qu'it rennuvela encore à la diète de Vurtzbourg en 1121. 
De mme, il se réconcilia, à la diète de Worms (1122 ), avec 
Calixte ri, qui l'avait excommunié dans un concile tem à 
Ieims, au moyeu d'un compromis par lequel il fut stipulé 
que l'élection des évtques aurait lieu par les chapitres de 
chaque siége vacant,que leur confirmation dépendrait do pape, 
et que l'empereur leur accorderait ensuite l'investiture sé- 
culière pour leurs biens et leurs droits temporels. Quelques 
guerres privées occupèrent ensuite l'empereur dans l'lutCieur 
de l'Allemagne. Il mourut à Utrecbt, le 23 mai 1125, et 
fut enterré à Spire. En lui s'ëteigit la maison impériale de 
Franconie. Il eut pour succe.eur Lothaire le Saxon. 
HENRI VI, empereur d'Allemagne(de 1191 . tl97), 
le troisième empereur de la maison des Hobenstanl'en, fiI 
de Frédéric I er etde Béatrice de Bourgone, né en 1t65, 
fut dès l'année 1169 couronné en qualité de roi d'Allemagne, 
vcui d'abord en Italie, puis à partir de 1188, o0 son 
père se croisa pour la Palestine, en Mlemagne o comme vi- 
caire de l'Empire. Il lui fallut, en cette qualité, engager la 
lutte contre Henri le Lion ; mais il ne tarda point à se 
trouver contraint d'entrer en accommodement avec lui, 
parce que la mort du roi Gudlaume II, arrivée en llgt, 
rendit vacant le tr6ne de Sicile, sur leqel il avait droit de 
succéder, du che| de son épou Constance. A la nouvelle 
que les élat de $icile avaient proclamé roi TancxèAe de 



HEN RI 
l.c, fils naturel du frère de Constance, Henri ¥I aecou- 
rut en Italie. Par sa politique prudente, il gagna les villes 
lombardes à ses iutérts, de mme qu'en leur livrant trat- 
treusement la ville «le Tusculnm, dont ils abhorraient la po- 
pulation, il décida les Romains à se prononcer en sa faveur; 
puis il se fit couronner empereur aux ftes de P'Aques de 
l'année ! 191, par le pape Clément III. Il conquit ensuite la 
Pouille et le royaume de ffaples. La ville de Naples seule 
lui résista ; et au bout de trois mois de sie la peste, qui se 
déclara dans son camp, le força à s'éloigner. Revenu en Al- 
lemagne, Henri recueillir le riche héritage qui lui était écbu 
par suite de la mort du duc Guel[e IV, transmit à son [rère 
Conrad le duché de Souabe, devenu sacant par la mort du 
duc Frédéric, et recommença la lutte coutre Henri le Lion, 
jusqu'/ ce que celui-ci se saurait. Pendant ce temps-là, en 
ltalie, Tancrède état'l mort, en 119, et son fils Guil- 
laume III, pendant la minorité duquel sa mère, Sibylle, 
devait exercer la r6gence, avait été proclamé roi. Ecouragé 
par cette situation des choses, et disposant de la somme 
immense ( 150,000 mures d'argent) qu'il avait obtenue/ titr ; 
de rançon du roi d'Angleterre, R i c h a r d Cœur de Lion, fait  
prisonnier en Autriche à son retour d'Orient, et que le duc 
Léopold lui avait livré, Henri partit encore une fois pour 
l'ltalie, à l'effet d'y réaliser son grand projet de réunir dé- 
sormais la couronne de Sicile à celle d'Allemagne. Cettefois 
la ville de iaples lui ouvrit ses portes ; Salerne fut prise 
d'assaut, et la Sicile elle-mëme se saurait, de sorte que le 30 
novembre 1194 l'empereur put faire son entrée solennelle 
dans la ville de Palerme. Sibylle et Guillaume abdiquèrent 
alors la couronne de Si¢ile, moyennant la pruine»se qui 
leur ful faite qu'ils conserveraient le com t de Lecca et de Tu- 
rente. Mais bient6t, sous le prétexte d'une conspiration, 
Henri fit arrèter la reine Sibylle et sa fille, qui Jurent conduites 
au monastère deHohenbourg, en .Msace, et mutiler Guillaume, 
/ qui on creva en outre les yeux. Le cadavre m{me de 
Tancrède fut dëterr et livré à d'indignes outrages, en mme 
temps que tous les partisans de la maison des rois nor- 
mands étaient arrtés et mis  mort sans forme de procès. 
Ces craeiles violences repandirent il est vrai la plus vive 
désaffection dans toute la Sicile, et le pape lança les fou- 
dres de l'excommunication contre l'empereur; mais la ter- 
reur qu'inspirait la cruauté de Henri VI et les riches récom- 
penses qu'il prodiguait à ses créatures consolidèrent si bien 
sa puissance, qu'il put sans aucune inquiétude songer à s'en 
retourner en Allemagne. Henri eut à mettre un terme aux 
dilférentes guerres prieCs qui  avaient surgi pendant son 
absence. Ensuite il s'occupa, dans les diètes tenues à Worms 
et à Wurtzbourg, de réaliser la pensée qui avait constam- 
ment fait le fond de sa politique : celle de rendre pour 
toujonrs la couronne impériale béréditaire dans sa maison. 
Mais n'ayant réussi, par suite de l'opposition des princes ec- 
clésiastiques et du pape, qu'à faire élire roi des Allemands 
son fils Frédéric, alors gé de deux ans, il détermina un 
grand nombre de princes allemands à le suivre à une pré- 
tendue croisade. Avec leur aide il comprima de nouveaux 
troubles qui venaient d'éclater en Sicile, puis il lit raser les 
murs de Capoue et de iaples, mettre à mort un certain 
nombre de seigneurs du pays, et par se menaces contrai- 
gnit l'empereur grec Alexis, qui avait usurpé le trône de 
son [r&e lsaac, à lui payer un tribut considérable. Le vri- 
table projet de Henri était de conquérir la Grèce, sur laquelle 
il prétendait avoir des droit», du chef d'Irène, fille d'Isaac 
et épouse de son [rère Philippe. Mais il mourut/ Messine, 
le 28 septembre 1197, des suites d'une boisson trop fraiche 
qu'il avait bue ou peut-ttre bien du poison, et tut enterré ì 
Palerme. Les deux anti-empereurs, PIdlippe de Souabe et 
Otbo IV, lui succédèrent. 
HENRI VIl, emperenr «'Allemagne de 1308 à 1313, fils du 
comte Itenri de Luxembourg, né en 1262, |ut Cu empereur 
le 29 novembre 1308, apr(.s la mort d'AIbert I  et un in- 
terrègne de sept mois. Il dut son élection, aprts le renom 
de ses ver|us cbevalcresques, à la faible importance pohllque 

13 
de sa maison, et surtout à l'influence de i'archevéque de 
lfayence, Pierre Aiscfipalter. Ds le début de son règne, il 
se vit obligé de confisquer au duc de Carintbie la Bolff:me, 
que ce prince gouvernait de la manière la plus tyrannique ; 
et lorsde la diète tenue ì Spire en 1309, obéissant en cela 
au VœU des populations elles-mmes, il contera ce ro)aume, 
comme fief de l'Empire devenu vacant, à son fils Jean, qui 
s'y maria avec la princesse bohème Elisabeth. Mettant ha- 
bilement ì profit les circonstances, il obtint pour cela le 
consentement des seigneurs autrichien qui pouvaient faire 
valoir de justes droits s»r ce pays. Esuite il mit au ban de 
l'Empire les assassins du roi AIbert l « ainsi que le ,[Cace 
comte Éberhard de Wurtemberg, puis il passa avec une 
armée en Italie, pays que décbiraient le luttes des guelfes 
et des gibclins, et s'efforça d'y retablir la tranquillité. 
biais comme il ne se prononçait pour aucun parti et qu'il 
lui fallut bient6t exiger des impôts pour pouvoir acquitter 
la solde de ses troupes, les villes lo,nbardes se [atiguèrent 
e lui, et se confi:derërent pour urganL-cr une insurrection 
générale, qu'il eut beaucoup de peine h réprimer et qu'il 
.hfitia séverement. Pendant que l'Allemagne était dévatée 
par l'horrible guerre privée que Naldemar de Brandebourg 
avait/ sonteuir contre Frédéric le Mordu et contre Eber- 
barri de Wurtemberg, tIenri Vil accourait à Rame, et le 
9 juin 131 il s'y fit solennellement couronner comme 
empereur, après s'ètre d,.jà fait mettre l'année précédente 
à Milan la couronne de fer sur la tte. Toutefois, il n'avait 
pu s'emparer que d'une partie seulement de la ville de Rame, 
attendu que le roi Robert de Naples, jaloux de l'extension 
que la puissance impériale prenait en Italie, occupait l'autre 
avec une armée supérieure en forces à la sienne. Plusieurs 
villes puissantes lui a)'ant envoyé des troupes et le roi de 
Sicile ayant conclu un traité d'allianoe avec lui, l'empereur, 
en dépit des représentation et des menaces du pape, mit 
le roi Robert au ban de l'Empire; et il se préparait  aller 
assioger iaples par terre et par mer, quand une mort ra- 
pide Ienleva, le 2. aoùt 1313, / Buonconvento. On l'attri- 
bue à un empoisonnement commis par un moine domi- 
nicain, au moyen d'une hostie. Outre son fils Jean, il laissait 
deux filles, dont l'une, Béatrice, avait épousé le roi Charles 
Robert de Hongrie, et l'autre le roi de France C h a r I e s I 
Il eut pour successeurs Louis IV le Bavarois et l'anti-roi le 
duc d'A,ttriche. 
IIENIRI. uatre rois de Franceont porté ce nom. 
HENRI I rr, roi de France, était petit-fils de Hugues 
Capet. Son père Robert avait associé au trône, en 1017, 
Hugues, son fils aîné ; mais ce jeune prince mourut huit ans 
après, et Robert appela près de lui et fit sacrer à Reims, en 
107, Henri, son second fils, alors duc de Bourgogne. 
pendant, après la mort de ce monarque, la reine Constance, 
fille du comte d'Arles, princesse ambitieuse, voulut placer 
sur le tr6ne Robert, frère puiné de Henri. Eudes, comte de 
Champagne et Baudouin IV, comte de Flandre, prirent 
les armes pour le jeune Robert, ou plut6t pour Constance. 
Mais le duc de ormandie fournit des troupes à Henri, et 
ce prince, vainqueur dans trois combats, ne se vengea qu'en 
accordant la paix à son Irëre et à la reine Constance. Il fit 
plus : il donna à Robert le duché de Bourgogne. Une nou- 
velle ligue s'étant formëe contre Henri, à l'instigation de la 
reine, il défit, en 1037, Etienne et Thibaud, fils du comte de 
Champagne, auxquels Constance avait livré la ille de 
Sens. Plus tard, il assista contre des rebelles Guillaume le 
Conquérant. Uni avec ce prince, il liera bataille près de 
Caco, dans le lieu nomm le Val.des-Dunes : combattant à 
la tète des premiers escadrons, il lut renversé de son cée- 
val par la lance t'un gentilhomme dl, Cotentiu. Il se releva 
sans blessure, pressa les ennemis, et remporta sur eux une 
victoire complëte. Vers ce temps, le roi eut uue entrevue 
avec l'empereur, et renouvela l'alliance qui existait entre 
les deux cantonnes. Le pape Léon IX vint à cette époque 
en lr»ace, et lint un concile à Reims. 
Cependant, la Normandie renfermait de nombreux élé- 



14 
nents (le discorde, et Henri voulut en profiter. Il entra 
dans cette province à la [etc d'une armée; mais, en 1058, 
il fut vaincu, sur la chaussée de Wareville, entre les vlles 
de Caen et deLisieux. Pe, de tempsaprè.% il raxsembla près 
de lui les prélats et les grands du royaume, et leur fit recon- 
narre pour son successeur Philippe, son fils aihC àgé de 
l, uit ans. Ce jeune prince tut sacré et ¢onronné dans la 
basilique de Saint-Dents, le 22 mai 100. Henri ne snrvécut 
guère à cette cérémonie. Il avait régné environ quatre an- 
nées avec son père, et seul un peu moins de trente ans. 11 
avait épousé Anna, fille de Joradislas, roi des Moseovites. 
II en eut trois fils : P h i I i p p e, premier du nom, qui lui suc- 
céda, Robert, mort encore entant, et Hagues, qui épousa 
la fil/e et heritière d'Herhert, comte de Vermandois. Il 
laissa ses fils sous la tutèle de Bandonin, comte de Flandre, 
qui avait epous6 sa sœur, et il lui confia la régence du 
ros'atme. 
HENRI II, fils de Francois I er et de Claude de France, 
naquit à Saint-Germain-en'-Laye, le 31 mars 1518. II porta 
d'abord le titre de duc d'Orléan, puis celui de dauphin, 
après la mort de son frère araC En 1537, n'étant encore 
géque de dix-neuf ans, il fut mis à la téte d'une armée qui 
forca le Pas-de-Suze, prit Yeillane, Rivoli, Montcallier et 
quëlques autres villes, et barrit plusieurs fois l'armée tro- 
pCaie, conduite par le marquis du Guast. Moins heureux 
cinq ans aprés, il assiégea, sans pouvoir s'en rendre maltre, 
la capiLale du comté de Roussillon. En 1512 il soumit le 
ch/teau d'Emerick et la ville de M,mbenge. En I7, la 
mort de François I er lui donna la couronne de France. 
• Lorsque ce grand roi monta sur le tréne, il s'y trouva 
o t heureux, dit Brant6me, car son royaume e.toit franc 
de toute guerre avec l'empereur ; quant a roi d'Anterre, 
il ne s'en donnoit trop de peine, pour estre futile ennemy 
au prix de l'empereur. Il trouva force finances dans le trë- 
sur du Louvre, qu'on estimoit à trois ou quatre millions, 
ans le revenu de l'année, qu'il voyoit venir devant lui et 
hors de roules dettes.,, En 154 il déclara la guerre à l'An- 
gleterre; ses armes furent heureuses, et Boulogne, qu'il de- 
mandait, lui fut rendue. Octave Farnèse, duc de l'arme, 
a)ant réclamé la protection de la France contre Charles- 
Q u i n t, la guerre se ralluma entre celui-ci et Henri II. L'ile 
«le Corse et la ville de Sienne se placèrent aussi sous lëgide 
du roi. « Les Allemands lui en firent de mesme, qui, mal 
menez sous le joug de l'empereur, crièrent h l'aide de oe 
grand roi, et pour ce, dressa cette grande armée, et en- 
treprit ce beau voyage d'Allemagne, qu'on nommoit ainsi, 
ou il prit, en allant, Metz, "foui et Yerdun fort heureuse- 
ment, et force antres villes impériales ; il ne vou!ut pourtant 
retenir pour lui que les trois premiéres, et donna jusqu'/ 
Strazbourg, faisant boire lb tous les chevaux de son artnée 
dans la rivière du Rhin, à leur aise, en sie de triomphe : 
mais ce fut tout, n'ayant trousW]usque là que tout courtois 
et honncste passager sans aucune résistance; et là, h Stras- 
hourg, voulant passer par-dela, sceut que les Allemands s'es- 
toient accordez avec l'empereur, qui, fin et cault apprében- 
riant la lutte d'un jeune et vaillant roi venir à lui avec une 
si grande armée délibérée, entendit plutost à un accord qu'à 
un ha.rd de guerre. » Les.dlemands appelèrent alors Henri II 
le protecteur de l'Empire et le restaurateur de la li- 
berté germanique. Ce tut alors aussi que Charles-Quint vint 
attaquer Metz aec cent mil!e hommes; mais le duc Fran- 
çois de C, u i se 6tait là avec l'élite de la noblesse française, 
et le t « ianvier 1553 l'ennemi dut lever honteusement le 
siAge, ltesdin et Térouanne furent prises, il est vrai, par 
les Itopériaux ; mais des conquètes plus importantes et ldUS 
glorieases dédommagèrent amplement de ces pertes. La 
bataille de Renti, g -agnée par Henri et par le duc de Guise 
(13 aoat 15), ajouta de nouveaux trophées  ceux que 
ce prince avait recueillis, il cherchait  rencontrer Charles- 
Qnint dans la mel : il voulait oembattre corps "h corps 
avec lui, mais il le chercha en vain 
Les snccës obtenus par la France porŒErent Charles-Quint 

HENRI 
à conclure nn ac¢ommouemeut : les deux puissances, Apai- 
sAes d'argent et d'hommes, firent, en 155fi, une trge pou.r 
cinq années, que rompit bienlôt Philippe IL Après 
contracté une étroite alliance avec l',g!eterre, il entra 
dans la Picardie à la tgte d'une armée de quarante mille 
hommes. La bataille de S ai ni- Qu enfin lut perdue. Plus 
tard, le duc de Guise rappela, par sa valeur, la fortune et 
la victoire. Calais fut enlevé  l'Anglelerre, qui possédait 
cette place depuis plus de deux siècles. Guisnes, Thionville 
et quelques autres forteresses furent aussi soumLes par ce 
hdros. 3lais une bataille perdue à G r a v e I i n e s fit signer le 
traité de Cteau-Cambrésis. 
Quelque temps après, le roi passade vie à trépas. C'était le 
29 juin 1559 : un superbe tournoi avait lieu dans la grande 
rue Saint-Antoine, vis-à-vis les Tournelles et la Bastille. OEoute 
la cour était présente. « La mule fortune fait que sr le soir, 
le tournoy quasi fini, le roi voulut encore rompre une lance, 
et pour ce manda au comte de Montgomery quïl com- 
parut et se mlt en lice. Il le refusa tout à plat, et ' trouva 
toutes les excuses qu'il ' put; mais le roi, fasché de ses 
responses, lui manda expressément qu'il le vouloir : la royne 
Iny manda et pria par deux fois qu'il ne courut plus our 
l'amour d'elle, et que c'estoit assez ; rien pour cela, mais 
lui manda qu'il ne cottroit que ceste lance pour l'amour 
d'elle... Et pour ce, l'autre avant comparu en lice, le roi 
courust, ou fust que le renifleur gén,.ral le voulust ainsi, 
ou son destin I'y poussant, il fut atleint du contre-coup par 
la reste dans l'oeil, où lui demeura un grand éclat de la lance, 
dont aussitost il chancela sur la lice : aussitost fut relevé 
de ses escuyers qui estoient là, et 5I. de Montmorency 
vint à lui, qui le tronva fort Llessé. Toutelois, il ne perdit 
cœur et ne s'estonna point, et soudain pardonna audit 
comte de blontgomery. » Il mourut onze jours après sa 
hlessre. 
Henri etait né doux, humain, généreux; ses favoris, sa 
maltresse et surtout les discordes relienses portèrent quel- 
quefois atleinte à son caractere. On lut reproche d avorr 
rendu des édits rigoureux contre les huguenots au début de 
son règne, h'étant, encore que duc d'Origans, il avait épousé 
Catherine de 3féd luis. Cette union fut heureuse, mal- 
gré le caractère léger de Henri et son amour excessif pour 
D i a n e d e P o i t i e rs, duches-e de Valentinois. La cour de 
Henri II se distingua surtout par sa politesse et par la protection 
noblement accordée aux savants et aux poéles. Tm'nèhe 
Danrat et Muret, Ronsard, Du Bellay, Baif et Pas- 
serat, Desportes, Garnier, Jodelle, et beaucoup 
d'autres, jelèrent alors un grand éclat. Germain Pilon, 
Jean Gon j o n, Bn ll ant, Phillbert de Lu rm e et le and 
Bach e I i e r, couvrirent la France de chefs-d'oeuvre. 
Alexandre n Mfr. 
HENRI III, roi de France et de Pologae, fut le troisième 
fils de Henri IL Il naquit à Fontainebleau, le 19 décembre 
1551. Nommé d'abord Édouard-Ale«andre par le roi d'An- 
gleterre et par celui de 3"avarre, la reine Catherine de 
dicis, sa mère, dont il était le favori, lui fit prendre dans la 
suite le nom de Henri. Actif et brave, il signala les pre- 
mit.res années de sa jeunesse par des exploits qui lui vain- 
rent l'admiration de l'Europe. Nommé lieutenant général 
du royaume en 1567, il gagna, deux ans après, les ba- 
tailles de Jarnac et de Moncontour. A la Saint-Bar- 
thelem', on l'accuse d'avoir, comme son frère Charles LV, 
fait feu sur les protestants ; mais cela n'est point prouvé. 
Il était en train d'assiéger La Rochelle, lorsqu'il reçut la 
nouvelle de son élection au tréne de Pologne, à laquelle 
sa mère avait travaillé avec ardeur ; aussitt ayant lte d'en 
finie avec la ville huguenote, il donna plusieurs a.çsauts coup 
sur coup, perdit énormément de monde, conclut enfin un 
accommodement qui ne fut pas à son avantage, et partit 
pour Cracovie. 
Cependant en sucsCant à Sigismond-Auste, il eut soin 
de demander au parlement des lettres de naturalité, par 
lesqelles il conservait ses droits au tr6ne. ommé roi Iar 



HEN 
le sénat le '9 mai 1573, il fut couronné  Cracovie le 15 fé- 
trier 1574. ltais il ne tarda pas à ètre désenchanté de cette 
couronne, qu'il avait été si impatient de saisir. L'humeur 
indépendante des nobles polonais se scandalisait fort de ses 
manières etféminéeset des caresses qu'il faisait publiquement 
ì ses favoris, à ceux qu'on appelait ses mignons; pour lui, 
fl se trouvait dépaysé comme dans un camp de barbares. 
Le 30 mai de la mëme année, Charles IX mourut. Henri, 
que les droits de sa naissance appelaient ì la succession de 
sou frère, voulut aller la recueillir, llais il craignit que son 
départ n'éprouvgt des obstacles, et ce fut pendant la nuit, 
et comme un coupable qui s'évade d'une prison, que Henri 
sortit de sa capitale. Il laissait la Pologne à la veille d'une 
guerre avec le Turc; mais que lui importait ? Il passa sur 
les terres d'Autriche et à Yenise, où il s'artère trois mois 
dans les plaisirs du carnaval, malgré les instances de sa 
mère. Enfin, il arriva en France. L'anniversaire de son cou- 
ronnement comme roi de Pologne fut célébré à Rrims 
par son sacre et son couronnememt comme roi de France. 
Bientôt la guerre se renouvela contre les r(.formés, et Henri 
gagna sur eux la bataille de Dormans. Après la prise de La 
Fère, il conclut, en 1580, à Nérac, une paix avantageuse 
surtout pour ses sujets rebelles. Ceux-ci en témoignërent 
une grando joie. Les catholiques, alarmés, purent craindre 
pour leurs croyances et pour leurs libertés. 
Toulouse vit alors se former dans ses murs la Sainte 
Union, ou la L i 9 ne, qui bientGt opposa une vive résis{ance 
aux projets des huguenots, et dont la politique des princes 
lorrains se sertit avec une grande habileté. IIenri III ne 
comprit pas d'abord l'importance de cette association. M- 
lent aux exercices d'une dévotion excessive et mal entendue 
un vif amour pour les.plaisirs, il s'imaginait pouvoir con- 
ciller les pratique extérieures du culte avec la plus hon- 
teuse dépravation ; mais les processions où il se montrait en 
public, revêtu du costume de pénitent, ne lui faisaient pas 
pardonner par la foule les orgies du Loutre. 
Trois partis divisaient alors la France. Celui du roi était 
de beaucoup le noins nombreux, et ne se composait que 
d'hommes sans énergie et n'obéissant à aucune impulsiou 
commune. Le parti protestant, plus redoutable par sa com- 
position que par le nombre, car il n'était formé que de 
gens de guerre, vaillanls soldats éprouvGs par vingt ans 
combats, reconnaissait pour chef Henri de Bourbon, roi de 
'avarre. Enfin, la troisième faelion, la plus nombreuse, la 
plus puissante, la plus populaire, avait à sa tête un homme 
d'un génie élevé, une grande renommée millIaire, le due de 
Guise. Il y avait aussi dans le parti catholique une trac- 
tion modérée qu'on appelait les Ioliti9EEues, et qui penchaient 
dès lors vers le roi de Navarre. 
Les états généraux de 1576, obéissant  l'influence toute- 
puissante de la Ligue et s'étant montrés mal disposés pour 
l'autorité royale, Henri crut faire un coup de mettre en 
œe déclarant lui-méme chef de la Ligue. Mais cette démar- 
che ne lui conquit pas un cœur. On était trop indigné de la 
dissolution de ses m ig n o n s, Quélus, Maugiron, Saint. 
liégrin, Joyeuse, aux noces duquel le roi dépensait des 
sommes énormes. Sa politique d'ailleurs n'avait rien 
précédemment il avait encore rapproché les Guise du tr6ne 
en épousant Louise de Vaudemont, leur cousine. La popu- 
larité du chef dela maison" de Lorraine eroissait toujours ; 
en vain Henri armait contre les protestants, il en était réduit 
ì craindre leur ruine, qui eut laissé sans contre-poids l'autre 
parti, plus redoutable encore pnur lui. En même temps 
laissait échapper toutes les occasions qui s'offraient de re- 
donner quelque éclat à son nom. Par peut de l'Espagne, il 
n'osait accepter les Pays-Bas, qui s'offraient h hli ; i'expé- 
dition de son frère le duc d'Anj ou, qu'il soutint sons main, 
avorte. 
tependant, son frère étant mort, le roi de Navarre était 
devenn l'héritier de la couronne. La Ligue redouhlait ses 
efforts; mais Joyeuse fut vaincu à Coutra.. Ou s'en prit 
an toi de ses revers; les pamphlct les plus injnrieux circu- 

RI lS 
latent contre lui, et on faisait en public des prédications furi- 
boudes contre sa personne. Les Parisiens, tournant en déri- 
sion ses momeries monastiques, effacèrent les mots : Mener 
ultime coelo, placés autour de sa devise, formée de trois 
couronnes, pour  substituer ceux-ci : Marier ultime 
claustro. Ils rappelèrefit dans la capitale le due de Guise, 
et celui-ci revint malgré les ordres du roi. Henri eraignit 
pour son autorité; il fit entrer des troupes. Le peuple se 
souleva (t5 mai 1588), se retrancha dans les rues, chassa 
les soldats, dAsarma les Suisses, dëfit les gardes, et pousse 
ses barricades jusqu'à cinquante pas du Loutre. Prêt 
à être assiégé dans son palais, Henri lli s'enfuit à Chartres. 
Le duc de Guise l'aurait arrt, s'il l'avait voulu, et le pe- 
tit-fils de François I « aurait été renfermé dans un cloitre, 
comme ces princes de la première race qui ne devaient plus 
remonter sur le trGne. La sœur du Balafrd, la duchesse 
de ltlontpensier, montrait dëjà les ciseaux d'or.qui en de- 
vaient faire un moine. Guise ne le fit pas, et, quoi qu'on 
en ait dit, il ne parait pas que les projets de ce grand capi- 
taine fussent de s'emparer alors par la violence de l'autorité 
souveraine. Echappé au plus grand péril, Henri III sentit 
toute sa faiblesse, et ne songea plus qu'à se débarrasser 
de l'homme qui n'avait pas encore voulu lui ravir la cou- 
ronne. Il l'attira dans un piCe infgme. Un traité d'union 
et d'oubli fut conclu, en même temps que d'lpernon con- 
seillait au roi de faire assassiner le duc, et que d'Ornano 
offrait d'apporter aux pieds de son marre la tëte d-e ce grand 
homme. Henri appelle Guise près de lui, à BIois, où les 
états généraux du royaume étaient assemblés. Une réconci. 
liation solennelle a lieu. Tous deux vont s'incliner devant 
le même autel, tous deux ? communient ensemble. Le roi 
assure Guise de son affection..., et il le fait massacrer à la porte 
de son cabinet. Le cardinal de Guise, son frère, est de 
u:ême egorgé... Ces meurtres perdirent Henri III. Rome 
lança contre lui les foudres de l'excommunication. Soixante- 
dix docteurs réunis en Sorbonne le ddclarèrent déchu du 
trGne, et déliërcnt ses sujets du serment «le fidélité. L6 
plus grand nombre des catholiques ne put plus voir en lu! 
qu'un tyran sanguinaire, et le sang des Lorrains, l$chement 
répandu, fortilia la Ligue. Le duc de Ma)enne, troisième 
frère des princes assassinC, prit le commandement; toutes 
les grandes villes le reconnurent comme lieutenant çdndral 
dz« royaume, et une partie du pal-lement commem;a lïns- 
truction d'un procès contre Henri de Valois, ci-devant 
roi de France et de Pologne. 
Frappé d'aveuglement, ce monarque n'avait pas mëme une 
armee alors qu'il se rendit coupable de l'attentat de BIoiso 
Quelques jours aprë, il envoya Sancy négocier en Suisse 
pour obtenir des soldats ; il écrivait au duc de Mayenne 
pour le prier d'oublier le meurtre de ses frères ; le car- 
dinal de Joyeuse présentait au pape un mtmoire pour jus. 
tifier cet horrible coup d'État. Repoussé de toutes parts, 
il a recours aux protestants. Il s'unit au roi de Navarre. 
Tous deux s'acheminent vers Paris ; ils assiGgent cette 
grande ville; mais Henri III ne devait plus rentrer dans 
le somptueux palet« du Loutre. Un vil assassinat lui en 
avait fermé les portes, un autre assassinat devait terminer 
sa vie. Il est frapp6 par Jacques Clément, et il meurt à 
Saint-Cioud, le 2 août 1589. En lui finit la branche des 
Valois. 
HERI IV, roi de France et de Navarre, fils d'Antoine 
de Bourbon, duc «le VendAme, et de Jeanne d'Albret, na- 
quit à Pau, le 13 janvier 1583. Le vieux roi de avarre, Henr 
d'AIbret, assistait aux couches de sa fille, et.il vit, comme 
il le disait, sa brebis enfanter un lion. Il prit le nouveau- 
né, lui frotte les lèvres avec une gousse d'ail, et lui fit boire 
dans sa coupe d'or quelque gouttes de vin de Jurançon. 
Placé dans une ëcaille «le tortue, le jeune ttenri fut porté 
h l'église pour être baptis; puis son grand-père le mit en- 
tre les mains d'une simple paysanne, choisie pour lut 
servir de nourrice, et qui l'cmporta dans sa maison,  
Bilhères. !1 tut élcvé ensuite au chàteau de Coaraze, suu» 



16 
les yeux de la baronne de Miossens, sa gouvernante, avec 
toute la rudesse et toute la liberté des autres enfants des 
montagnes. Henri fut instruit dans les principes de la réforme, 
mais il n'imita point.le fanatisme ardentdesa mère. En 1"361 
elle le conduisit à Paris, où elle le lit entrer au collége de 
Iavarre pour y estre institu eœee bonnes lettres, comme 
on disait alors. Il avait povr précepteur le sire de La Gau- 
cherie, z,'lé calviniste, homme savant et «le mœurs austères. 
N'étant encore qu'au berceau, Henri fut nomme prince 
de Iïane; on lui donna peu de temps aprés le titre de duc 
de Beaumont, plus tard celui de prince de A'avarre. Après 
la mort de son père, en 1562, ses sujets et ses vassaux ne 
l'appelèrent plus, en langue du pays, que nouste Henric 
(notre Henri) et le rcyot (le petit roi), termes allectueux, 
par lesquels le peuple des Landes le designe encore aujour- 
d'hui. Les traditions locales ont conseré la mcmore de 
quelques-unes des avenlures dont il fut le beros. Qui n'a pas 
entendu raconter l'histoire de F 1 c u r e t t e, la douce et nal e 
fille du jardinier du cfiateau, sa l,a.siun pour itenri et sa 
fin déplorable? Combien d'autres nous rappellent dans les 
Landes les amours legères de ilenri! Tantot c'est la dame 
d'Allons, tantfit la gentille boulangére de la Halle de N,.rac, 
puis c'est la femme du ciarbunnier de la forèt de Durance. 
D'Ayelles, jeune Grecque, «'cfiappee aux desaslres de sa 
pairie et x enue à la cour de Navarre, a la suite de Cathcrine, 
parait presqu'au mème rang avec la belle Lerebours, et 
Fosseuse, qui n'aima le héros bearnais que pour lui-mème, 
et qui par son carnetCe se lit pardonner par Marguerite 
elle-mème l'amour que lui portait son epon. A cette longue 
série le paysan landais joint encore et la jeune Tignunille, 
et surtout cette Corisande d'Andouiu roye= GAO.), qui 
levait des corps «le troupes pour le service de Henri, et que 
celui-ci chérissait/ ce point qu'une fois il quitta son armee, 
cantonnéedans les environs de Pari% pour xeuir la oir, a 
Hagetmau, en Ga«cogne, s'cx[«»sant ,au danger d'ètre pris 
par les ligueurs, lb.' ces passions vives, mais peu dmables, 
il est de nombreuçe trace« dans le« pelit, s pt-ovinces ou ce 
prince regna d'abord, et le sang de ilcnri de Bourbon a 
formé, cotqme celui ,le son aieul malcrnel, plu',ieurs famille% 
presque toules 6teintes auj,ord'hui. 
La mort d'-turc»inc de Bourbon avait donné à llenri le 
titi'e de roi de 'avar»'e; mais ce nYt.tit / l»et près qu'un 
titre. Ce prince ne possédail qu'une partie du Labourd, le 
pays de Soule, la souveraineté de Bearn, et les comtes de 
Bigorre, d'Armagnac et de Foix. C'clair sans douteun sei- 
gneur puissant ; mais ce n'etait pas encore ce que nous 
sommes habitues à nommer un roi. D'ailleurs, dans ses 
domaines, deux cro)ances opposées partageaient la popu- 
lation en deux factions ennemies, et celle d,»nt la co,muunion 
était la sienne combattait l'nuire et par les armes et par 
l'autorité deposée en ses mains, A peine adolescent, il quitta 
la délicieuse résidence de N,rac, pour avoir l'avanlage de se 
former a !'art de la guerre sous les yeux de l'amiral C o l i g n y. 
Il fit ses premières armes à Arnai-le-Duc. Dès ses premi/:res 
campagnes Henri mont«a son génie pour la guerre. Il remar- 
qua les fautes que firent les généraux à la grande escarmou- 
che de Loudon et aux batailles de Jarnac et de Moncontour. 
En 1572 Jeanne et son fils vinrent à Paris. Le mariage de 
IIenri avec Marguerite de Yalois, .ceur «le Cfiarles IX, avait 
fitWproposé. La mort de Jeanne, arrivte le l0 iuin, ne tetarda 
que de quelque temps cette union. Ele tut celebrée avec 
pompe, et ne précéda que «le six mois l'épouvantable cat0s- 
trophe de la S a i n t-B a r ! h é l e m y. Henri, enfermé dans 
le Louvre, entendait les cris des siens, qu'on égorgeait dans 
tovte la ville ; on délibérait pendant ce temps dans les ap- 
partements du roi son beau-frère si on le livrerait également 
aux assassins. Au matin Charles IX le lit amener devant 
lui avec le prince de Condé, sou cousin : « La mort ou la 
messe! « leur crin-t-il avec filreur. Ils cl,oisirent Ic dernier 
parti. Retenu prisonnier et soumis ì une surveillance sévère, 
sa bonne Immeur adoucir sa position. Il se lia étroitement 
ave¢ tous les ]eunes princes «le la cour, surtout avec les 

HEUR 
Guise, » au point, dit d'Aubigné, qu'ils couchaient, buvaient 
et mangeaient ensemble; faisait de méme leurs mascarades, 
bal]ets et carrousels ,,. Il ne sut pas résister aux piéges ga- 
lants que lui tendait la politique de Catberine de Médicis, et 
s'abandonna tout entier aux voluptés de cette cour corrom- 
pue. Après avoir été forcé de suivre le duc d'Anjou au siCe 
de La Rochelle, il parvint trois ans plus tard/t recouvrer sa 
liberté. Il profita d'une partie de cfiasse pour s'évader avec 
d'Aubigne et quelques autres gentilshommes mécontents 
de la cour. Presque aussit0t il rétracta son abjuration, et 
rentra dans l'Église protestante, qu'il n'avait abandonnée, 
disait-il, « que par terreur de la mort ,,. 
Le roi de Navarre revint alors à Nérac, où il tint sa cour. 
Il avait précédemment résidé à Agen ; mais la licence de ses 
ftes lui a, ait fait perdre cette ville. Peu de temps après, 
on reprit les armes. L'Agenais et la Gascogne furent le théA- 
tre d'une guerre acharnée, dans laquelle llenri ne lut pas 
toujours heureux. Plus tard, le voage de la reine mère 
dans la Guienne ne suspudit pas enti/:rement les hostilités. 
Elle ramena Marguerile au roi de Navarre, son mari, et ce 
Iht alors qu'eut lieu  Nerac une de ces fètes dont le sei- 
ziclne iëcle seul fotrnit des exemples. Cependant les deux 
reines nouaient mille intrigues autour de lui. Catherine lui 
debauchait ses meilleurs capitaines au moyen de ses fem- 
mea et de ses filles d'honneur. Une nuit, au milieu d'un bal, 
le Béarnais al»prit qu'il a ait ainsi perdu une place. Aussi- 
ttt il quitte la partie, moule en selle, et s'en va prendre 
une autre  ille en compensation. La valeur, les talents mi- 
litaires de Henri jetèrent surtout un graud cclat à Cahors. 
Des actions plus ou moins importantes remplirent l'inter- 
valle cuire la prise de cette x il le et la bataille de C o u t r a s, 
ou llcnri de Bourbon se comTil de gloire, et qui aurait eu 
les suites les plus avanlageuses si ce prince avait su proliter 
«le cette victoire. Mais l'a-mée allemande qui accourait au 
secours des protestants fut detruite par le due de G u ise. 
La journée des barri eades, la fuite de Henri III à Ohar- 
tres, l'assassinat des princes lorrains, la décbéance du rt.i 
prononcée par la Ligu e, vinrent coup sur coup grandir 
l'importance du roi de Navarre. Sa genérosité, qui pouvait 
d'aillem's en cette occasion se concilier avec la plus saine 
politique, lui fit prendre le parti le plus digne de lui, celui 
d'olfrir son bras et son armée au roi de France. D u p I e s s i s- 
.M o ma y termina cette négociation. Le traité de Plessis- 
lès-Tours fut signé par les deux rois, et ils se rencontrèrent 
près du pont de La Motte. ,, Courage, Monseigneur'. dit 
Henri de Bourbon, en embrassant Henri III '. courage! deux 
llenr[ valent mieux qu'un Carolus ! » Par ce dernier mot, 
le roi de Navarre désignait Charles de Mayenne, troisiéme 
[rè'e du duc de Guise, alors chef de la Ligue, et nommé 
par elle lieutenant général du royaume. L'alliance des deux 
princes ramena bienttt la Ibrtune, et leur armée vint as- 
siéger Paris. Cetle grande ville n'aurait pu résister lonemps; 
niais la mort de Henri III (3 aoùt 158), en assurant la 
couronne à son légitime successeur, amena cependant des 
ditficultés qui sanvërent la capitale. 
Les droits de Henri IV à la couronne étaient évidents : 
il descendait en ligne directe de Louis IX, père de Robert, 
comte de Clermont. On ne les contestait pas ; mais ils étaient 
annulés, dans l'espritdes catholiques zélés, et par l'excom- 
munication qu'avait fulminée contre lui le saint-siCe et 
par l'attachement de ce prince au calvinisme. La Ligue re- 
conuut pour roi, sous le nom de Charles X, le cardinal de 
Bou rbon, oncle de Henri IV. La justice fut rendue en son 
nom et les monnaies portèrent son effigie. 
Des divisions avaient éclaté dans l'armée royale ; la plu- 
part des catholiques se relusaient à reconnaitrê un prince 
bérétique. Henri pour les apaiser promit de se faire instruire 
dans la religion catholique; mais cette promesse eut aussitôt 
pour effet de lui retirerle cwur de beaucoup de ses vieux com- 
pagnons d'armes, lh'nri leva le .iégede Paris, et entra dans 
la ormandie, o6 il fortifia Dieppe comme un lieu de ré- 
sistance et de rraile. Ala tét¢ de plus de trente mille hot- 



HENRI 
mes, Moyenne vint l'attaquer à A r q u e s, o1 le roi n'avait leur monarque létime. Brissae, gouverneur de Paris, lui 
Ira en réunir que trois mille. Cependant, ce prince fut vain- en livra les portes. L'occupation se fit la nuit sans bruit; les 
queur. Avec un corps auxiliaire anglais qui ,enait de dé- habitants n'apprirent l'événement que le lendemain, en s'é- 
barquer, il osa reprendre l'offensive et marcher sur Paris; veillant. On laissa sortir la garnison espagnole : « Allez, mes- 
maisil ne put occuper queles faubourgs, e.t le manque d'argent sieurs, leur dit Henri, qui était ailWà la Porte Saiat-Denis 
le contraignit bientfit de se retirer. C'était la faiblesse de ses I voir défiler; allez, mais n'y revenez plus! ,, Le soir il foi- 
ressources qui empgchait toujours ses olrations; son armée, sait au Louvre sa partie de cartes avec la duchesse de llont- 
qu'il ne payait presque pas, lui fondait à chaque instant en- pensier. Dans la suite, Moyenne lui-mgme fit la paix et de 
tre les mains. En s'éloignant de Paris, il reprit le chemin de la bonne foi. Des gouverneurs de province exigèrent et reçu- 
l%rmandie, et s'occupe de la réduire. Quarante places élaient rent le prix de leur soumission. Les grandes villes rentrërent 
dejà en son pouvoir; et il assiégeait Dreux, quaud 51ayenne successivement dans l'obéissance. Le roi n'eut bientfit plus 
lui offrit la bataille, à I v y. On connait le résultat de cette d'autres ennemis que les Espagnols, déj/ vaincus par lui à 
journée. Paris fut encore assiégé. Une horrible famine ne Fontaine-Fran çaise. L'espace nous manque pour racon- 
put obliger les habitants à se reudre. Ce lut alors que cet ter tous ces siéges, ces combats où Henri se montra fou- 
excellent prince tempérant par sa boute la rigueur des or- jours grand capitaine, et toujours, encore, aussi courageux 
rires donnés pour le blocus, permit souvent à ses officiers que ces aventuriers de 9uerre dont parlent nos ieux au- 
de faire entrer des provisions dans la ville : « J'aimerais teurs français. 
quasi mieux, disait-il, n'avoir point de Paris que de l'avoir Le traité de Ver v i n s (2 mai 1598) rendit la paix au 
tout ruiné par la mort de tant de personnes. ,, Ayant rêncon- royaume, et bientfit Henri put s'occuper, avec cette persé- 
tré deux paysans qu'on allait pendre pour avoir essayé de vérance qui étit l'un des attributs de son caractère, et avec 
faire entrer du pain dans la ville, il leur pardonne, leur donna cet amour constant pour le bien de ses peuples qu'il pui- 
tout l'argent qu'il avait sur lui, et lesrenvoya en leur disant : sait dans son cœur, des réformes intérieures, de la répres- 
« Allez en paix, mes enfants; le Béarnais est pauvre : s'il,en sion des abus, de tout ce qui pouvait agrandir et honorer la 
avait davantage, il vous le donnerait. ,, Le duc de Parme, France. Son avrnement à la couronne ajoutait à nos pro- 
Alexandre Farnèse, l'un des plus grand» généraux de cette rinces le Béarn et la basse avarre, qui formaient des sou- 
époque, s'étant approché de Paris, Henri en leva le siége, verainetés inàépendantes; le duché à'AIbret, les comtés 
marcha vers l'armée de ce prince, dans le dessein de lui d'Astorac, d'Armagnac, de Lille, de Bigorre et de Foix, 
livrer bataille ; mais celui-ci, content d'avoir jeté des troupes ainsi que quelques autres domaines considérables. 
et des vivr dans la capitale et d'avoir pris Lagny et Cor- Bient6t S u il y, nommé surintendant des finances, entre- 
beil sous les )'eux moemes du roi, revint dans les Pays-Bas, prit uneréformegénéraledes abus.Lebaildescinqgrandesfer- 
d'où il était parti, nes fut élevé et I sous.fermes supprimées; les ailCations que 
La guerre continua, sans amener aucun événement décisif, le roi avait consenties de ses revenus furent rachetées aven- 
Henri était dcouragé ; les divisions éclataient derechef au- tageusement ; le fonds des tailles fut diminué par le retrait 
tmr de lui le prestige que lui avaient acquis ses victoires d'un grand nombre d'exetaptions illégales; les créances et 
se dissipait; la ligne se ranimait. Dans ces circonstances cri- les pensions furent vérifiées, l'introet de plusieurs sortes de 
tiques, il fit un nouvel appel aux souverains protestants de rentes réduit. L'agriculture reçut de grands encuragements; 
l'Europe. Il obtint des renforts, et vint investir Bouen. Ce de tous cots on s'occupe de défricher les terres incultes. En 
siCe fut remarquable, par la belle défense des hahitants et peu de temps l'abondance devint telle que l'on permit l'ex- 
de la garnison. Le duc de Patine parut de nouveau, et tlenri, portation des biC. GrAce à cette prospérité, le taux de l'intérêt 
qui voulait combattre, quitta sou camp. Mais l'habile tomba du denier dix au denier seize. En mme temps le 
général espaguol ayant dílivré cette ville, allait s'en re- geint particulier du roi favorisait l'industrie. Des manufac- 
tourner encore en Flandre, sans avoir accepté la bataille, tures de soieries étaient fondAes à Lyon et à Paris, des tapis- 
lorsque le roi, voulant reconnaltre l'armée étrangère, la sui- siers flamands s'installaient aux Go belins. Henri, qui avait 
vitAtant pen accompagné. Il la vit défiler près d'Aumale, et le got des grandes constructions, embellissait Paris. Le 
put compter le nombre de ses bataillons et de ses escadrons. Le u v re était continuC et la galerie qui le joint aux Tui- 
EntrainWpar sa fougue naturelle, Henri chargea cette armée leries commencée; le Pont-Neuf se terminait rapidement, en 
n'ayant avec lui qu'une centaine d'hommes. Mais il fut chargé mme temps que se bfitissaient la place et la rue Dauphine, 
à son tour, et avec tant d'impétuosité qu'il dut se retirer à ainsi que l'h(pitai Saint-Louis. Le canal de Briare, qui joint 
la IrAte. Il reçut mme une blessure, et peu s'en fallut que la Seine à la Luire, date encore de ce règne. 
par sa mort ou sa captivité la France ue devint la proie de L'Cit de Nantes avait pacifié le royaume; mais une 
peu après que Duplessis-ltornay féodalité nouvelle avait surgi en France pendant la guerre 
l'ëtranger. 
Ce 
fut 
de 
jours 
lui écdvit, avec autant de justesse que d'd-propos : « Sire, civile. Calvinistes et ligueurs avaient reçu, qui pour les ser- 
vous avez assoE fait l'Alexandre, il est temps que vous soyez vices rendus, qui pour prix d'une tardive soumission, gou- 
Auguste. C'est à nous à mourir pour vous, et cest là notre vernenents et places fortes. Guise tenait la Provence 
gloire; àvous,sire, de vivrepour la France,etj'ose vous Joyeuse etDanville se partageaient le Languedoc; Biron 
dire que ce vous est un devoir. » Henri reconnut qu*il avait avait pour sa part la Bourgogne ; d']pernon PAngoumois, 
trop donné en cette occasion à un courage irréfléchi, et laSaintonge, le Limousin, les Trois]vchés,Lesdiguières en 
n'appela plus cette affaire que l'erreur d'Aumale. Il faut DauphinC Caumont la Force en Barn; les Ruban en Bre- 
laisser à l'histoire le soin de dcrire les savoures manœuvres tagne, les La Trémoille en Poitou étaient presque indípeno 
des deux chefs d'armée autour de ]ouen et de Caudebe dents. Henri lutte de toutes ses forces contre ces grands 
et la maniëre dont le duc de Patine, quel'on croyait prèsd'étre seigneurs turl»dents ; il leur oppose sa volonté, énergique à 
forcé dans son camp, rendit raines toutes les e.pérances de la fois et prudente. La mort de B i r o n les frappe d'Ceu- 
Henri IV. Cependant les dissensions intestines des ligueurs vente. 
avançaient plus les affaires do roi que plusieurs victoires. Une rapide campagne contre le duc de Savoie valut à la 
5Iayenne venait de briser la faction des Seize. Les catio- Francela Bresse et le Bugey. Peu de temps après, le roi épousa 
liqJes modérés inclinaient de plus en plus vers Henri, mais 11 a rie à e 5I é d éc i s. Il avait depuis longtemps répudié sa 
ils demandaient sa conversion. Ce fut Sully lui-mème qui première femme, Mer gueri te à e Valois; et il avait un 
engagea son maltre à désarmer la Ligue en rentrant dans le moment songé à épouser la belle Gabrielle d'Estrées, sa 
sein de l'Eglise. L'abjuratiou solennelle que ce prince fit à maItresse, ainsi qu'Henriette d'Entragues, marquise de Ver- 
Saint-Den.;s(15 juillet 1593) remplit la France d'allégresse. Le neuil, qfi lui succëda. 
peuple, les ligueurs, qui ne méconnaissaient son pouvoir La conjuration du comte d'kuvergne et de d'Entragues 
qu'a cause de la religion qu'il professait, virent alors en lu réveille les ressentiments de Henri IV contre l'Espagne 
DICT. DE LA CO,NvERS. -- T. Xl. 



las avait sou{enus. Il se raplela Iean C , $ t e I et totes les 
tentatives d'assassinat diri.ees contre lui. Sully d'ailleurs 
le poussait à la guerre, et lui amassait l'argent nécessaire 
pour la faire avec igueur. Henri IV voulait réduire Pld- 
tippe III  la monarchie d'Eslsagne et des Indes. Il avait 
conçu on vaste et singulier plan. Il voulait constituer l'Eu- 
rope en république chretienne et lui assurer une paix per- 
pétuelle. Les Turcs devaient ttre rejetés en Asie, ainsi que 
le czar de lussie s'il refusait d'entrer dans la fédération. 
Quoi qu'il en soit, Henri IV continuait avec un redouble- 
ment d'activité ses préparatifs contre l'Espagne. E 1608 il 
conclut avec la répobliqne des Pays-Bas un traité d'alliance 
offensive et déîensive. Venise, le pape, plusieurs princes 
d'Allemagne étaient disposés à soutenir ses projets. Cent 
mille hommes étaient prêts à combattre; cinquante millions 
étaient en réserve; d'immenses approvisiounements avaient 
été faits. Le roi devait se mettre en personne à la tte de 
l'armée destinée à agir contre les Pays-Bas espagnols; Les- 
di,mières devait commander l'armée d'Italie ; la succession 
de Clèves et de Juliers devait servir de prétexte pour com- 
mencer la guerre. Le poignard de lavaillac arrta 
Henri IV au moment oh il allait mettre à exécution ces vastes 
projets. 
Les j é s u i t e s, quïl avait chasses, il avait été obligé de les 
rappeler pour ne pas donner d'ombrage aux catholiques ; et 
il leur avait fait btir le collége de La Flèche. Il était agité 
de sinistres pressentiments, parce qu'on l'accusait de ne Jaire 
la guerre que pour secourir les protestants d'Allemagne. Il 
avait une extrême impatience de quitter Paris; mais la reine 
voulut absolument ttre sacrée avant son départ. Le jeudi 
13 mai la reine fut en effet sacrée et couronnée/ Saint-Dents, 
par le cardinal de Joyeuse. Le lendemain, vendredi, 14 mai 
1610, en sortant du Louvre pour aller visiter Sully, qui 
était indisposé, il mourait, frappé de plusieurs coups de 
cotttean dans la rue de la Ferronnerie. 
L'histoire bl',imera toujours les moeurs trop légères de ce 
prince. Aux noms de ses maltresses avouees dont nous avons 
parlé, il [aut ajouter ceux de l'ahbesse de Vernon, de la com- 
tesse de_loret, de Charlotte des Essar fs, de la Bonrdoisière, de 
madame de BoinviLle, femme d'un conseiller au parlement, de 
madeumi.«elle Claire, et même de femmes galantes et de  iles 
prostituées, comme laGlandéeet beaucoupd'autres. Du reste, 
il n'ëtait pas grand abatteur de bois, à ce que prétend Tal- 
lemant des léaux. Il aimait les lettres, et il les protégea tou- 
jours; on lui attribue mëme deux compositions pleines de 
gr$ce : une Citre en vers, adressée à Gabrielle ; une chanson 
et des couplets à la marquise de Verueuil. 
Chàteaubriand a tracé d'Henri IV le portrait suivant : « Le 
Barnais était inrat et gascon, oubliant beaucoup, tenant 
peu... 51ais sa bravoure, son esprit, ses mots heureux, son 
talent oratoire, ses malheurs, ses avenhtres le feront éternel- 
lement 'ivre. Sa lin tragique n'a pas pe« contribué à sa re- 
nommée; disparaitre . propos de la vie et une condition 
de la gloire.  
HE,XI:[|. L'Angleterre a eu huit rois de ce nom. 
HENP, I I «, dit Beau-Clerc, parce qu'il protégeait les scien- 
ces et les lettres, roi d'Angleterre (1100-1135), était le troi- 
sième fil de,uillaume le Conquérant. Il naquit 
ch 1068, et lors de la mort de son frère ainé, Guillaume le 
F, oux, tué par accident  la chasse (1100), il profita de 
labsence de son frère Robert, qui était alors à la croisade 
et |e prcédait dans l'ordre de naissance, pour s'emparer du 
tr(me, et sen mainlint en posoession, gr,îce à la politique 
habile par laquelle il sut ganer le clergé, de même qu'il 
se concilia les sympathies populaires en abolissant la ty- 
rannique loi du couvrefeu et en épousant Matldlde, prin- 
cesse qui avait du vieux sang saxon dans les reines. Robert, à 
on retour de la croisade, essaya inutilement de revendiquer 
sa couronne ; mais il signa une transaction aux termes de 
laquelle il garda pour lui le duché de [ormandie. Prince 
incapable, il vit bienl¢t la nohlese de cetle province se 
évolter contre lui. llem I er inlervint alors ; la victoire 

de Tiuchcbray (7 seplembre t 106) lui livra la .'ormant]ie, 
et sous sa puissante administration nul baron mutin, nul 
fier tenancier n'osa plus lever la tdte. Pourtant, la clëbre 
charge octroyée par lui à son avénement n'était que la 
consécration de l'indépendance légale de la féodalité; mai, 
Dieu et le peuple aidant, elle devint la base des libertés na- 
tiouales de l'Angleterre. Henri mourut en ormandie, à 
Saint-Dents-le Forment, tranquille et respecté de tous, le *" 
décembre 1135, dans la soixante-septième année de son ge. 
HENBIII, roid'Angleterre (115-I189), fils de Geoffroy 
Plantagen et, comte d'Anjou, et de .Mathilde, fille de 
Henri I er, naquit le 11 mars 1133, en Normandie, et fut élevé 
par le savant Bobert de Gloucester. D'après le testamenl de 
son grand-prc, lui et sa mère étaient appeles à monter sur 
le tr6ne d'Angleterre; mais son cousin Ëtienne de Blois s'en 
empara, et sut s'en maintenir en possession malé tous les 
efforts de Mathible. En 1151 Henri hérita de son père de 
l'Anjou et du .',laine, et par le mariage qu'il ¢ontracta avec 
Ëléonore de Poitou, épouse divorcée de notre roi Louis Vil, 
il se trou va en I 15 le seigneur allodial du tiers de la France. 
Devenn de la sorte une redoutable puissance, il n'hésita plus 
à guerroyer contre Ètienne de Blois, qu'il contraignil à le 
déclarer héritier de la couronne d'Angleterre. C'est en vertu 
de ce compromis que Henri monta sur le trône d'_Anctêrre, 
le 19 décembre ltSi. 
.Après dix-neuf années de guerre et de révoltes eunti- 
nueles, le pays était tombé dans un état de profon,i dépe- 
rissement. Henri prta serment, il est vrai, à la charte ac- 
cordée parson and-père; mais il se ferait en posse«sion de 
tous les domaines de la couronne qui en avaient (.té in«h- 
ment aliénés, et parvint à museler une noblesse insolente 
et usurpatrice, en mëme temps qu'il adoucisseur le sort des 
paysans, qu'il donnait aux villes les éléments d'une or3a- 
nisation municipale, et qu'il y encourageait les progrès 
du commerce et de l'industrie. Pour affranchir complé- 
tement la couronne de la dëpendance sous laquelle les 
seigneurs l'avaient tenue jusque alors, il transforma l'obli- 
tion du service militaire personnel en une redevance en 
argent, dite sc«ta9i«m. En méme temps il chassa du pays 
les bandes de mercenaires flamands qu'on y entretenait, et 
leva un corps de troupes en Ang]eterre mime. 
Après avoir terminé, en 1161, une guerre contre la France, 
il soumit les Gallois révoltés, et contraignit leurs princes à 
se reconnaltre feudataires de la couronne d'Angleterre. Il 
chercha ensuite à poser des limites aux usurpations des 
papes et aux envabissements de l'autorité ecclésiastique. A 
l'assemblée des états tenue en 116 à Clarendon, les prelats 
durent signer une constitution ecclésiastique, qui en matières 
temporelles subordonnait l'autorité du pape à celle de la 
couronne. Thomas B e c k e t, créé par le roi en 116 chan- 
celier et primat d'Angleterre, déchalna plus tard contre lui 
le clergé, et mit tout le royaume en combu_tion. En t 170, 
une parole de colère qui échappa à Henri contre ce prêtre 
factieux alCermina quelques gentilshommes à aller l'Cor- 
ger sur les marches .mme de l'autel ; et le roi fut accusé 
bien àtort sans doute, de ce meurtre, qui ne fit cp'irriter da- 
vantage le fanatisme et provoquer toutes les passions, sur- 
tout quand le clergé eut rangé la victime au nombre des 
saints et attesté que ses reliques opéraient des miracles. 
Pour éviter d'être frappé des foudres de l'excommunication, 
Henri Il dut se résigner à aller faire amende honorable et 
pénitence sur letombeau du nouveau saint, et jurer qu'il avait 
été étranger à cet assassinat. Il dut aussi révoquer la constitu- 
tion ecclésiastique. En récompense de sa soumission, le pape 
donna à Henri la permission d'entreprendre la conquete de 
I' I r I a n d e, en proie aux guerres civiles les plus acharnées, 
et qn'effectivement il réduisit sous son autorité, de l'an I17t 
à l'an I17. Sa méchante femme Êléonore, jalouse de la 
belle Rosamonde Clifford, lui suscita aussi beaucoup 
d'embarras. Elle dlermina le prince Henri, héritier pré- 
somptif, que dès t 171 son père avait associé au gouverne- 
menl, / oe révolter; et le prince, d'accord avec ses frères 



eç le roi de France, aih ravager les domaines de son père 
gilué.q eU France. En même temps le roi Guillaume d'Écosse 
rompait la trêve et le comte Leicester levait en A,,gleterre 
l'étendard de la révolte. Henri triompha complétement de 
l'un et de l'autre àe ces ennemis, et passa alors en France, 
où, après avoir battu les t¢oupes dont disposaient ses lils, il 
consentir encore à leur pardonner. Ces troubles une lois 
apaisés, il put entreprendre de grandes reformes dans ses 
États. Yers l'an 1176, Henri I1 abolit l'usage des duels judi- 
ciaires, donna au pays les divisions administratives et po- 
litiques qu'il a encore de nos jours, introduisit les assises, 
et rondCu la rigueur des lois sur la chasse de méme que 
du droit de bris et de naufrage. C'est de lui aussi que pro- 
vient la législation qui régit encore aujourd'hui les rapports 
du débiteur et du créancier. En Ifs0 il eut la douleur de 
voir éclater entrelui et ses fils des démèlés dans lesquels le roi 
de France intervint ; et cette guerre contre ses ambitieux 
enfants n'eut pas été plut6t terrainC, que Richard, surnommé 
CœUr de lion, prit de nouveau, en llBS, les armes contre 
son père et soulea ses domaines de F,-ance. Quand au 
nombre des rebelles il vit aussi firer son fils bien ai/nA, 
Jean, il tomba malade de chagrin, et mourut  que/- 
que.temps de là, le fi juillet 1189, à Chinon, après avoir dtt 
subir l'humiliation d'un traité avec le rebelle Richard. Le 
seul défaut qu'on ait pu eprocl,er  ce grand et magnanime 
.onverain, c'est d'avoir «té toujours enclin à accorder trop 
facilement sa conliance. Consultez Lyttleton, History of thé 
L.fe of Henr II (3 vol., Lo:des, 1767). 
HENNI 11I, roi d'Ang.eterre (116-127), né en t0fi, 
était lils de Jean sans Terre et polit-fils de Henri 1I. Il 
avait à peine dix ans, lorsque la mort de son père l'appela  
ceindre la csronne, sous la tutelle du comte de Pembrocke, 
homme sage, qui mourpt trop tét pour le jeune roi et pour 
la tnalheureuse Angleterre, car le règne de Henri fut un des 
plu» longs et un des plus désastreux que meutionne son his- 
toire. Il est des princes qui ne peuvent q,e sersir de date h la 
clmte de leur pouvoir. Tel htt ce faible Henri III : au dehors, 
vaincu partout, par Louis VIII ( 1219 ), par saint Louis ,x 
la glorieuse bataille de T a i 11 e b o u r g ( t 212 ), dans sa hon- 
teuse expédition de Sicile ; au dedans, despote imbécile, 
l/gué avec Ruine cor, tre son peuple, jusqu'au moment ou 
l'Angleterre, conjurée avec le laineux Simon de Leicester, 
lui impose les expddients d'Oxford (128), anéantit son 
pouvoir, le fait prisonnier avec son frère et son fils Richm-d, 
à la dèsastreuse bataille de Lewes (IRI36), et se donne à 
elle-même le premier essai ,les communes. En vain une 
nouvdle factiouéta le pouvoir au comte de Leicester, vaincu 
et tuè à la bataille d'Evesl,a,n (6 aoùt 103} ; envaiu Hen,-i 
remonta sur le tr6ne pour y mourir tranquillement, au mi- 
lieu de ses favoris (1272), la nation connaissait maintenant 
ses droits, et désormais le parlement fitt une puissance qui 
sut tenir l'autorité royale en bride. Henri III, marié, en 
1236, h Eéonore de Provence, eut pour successeur son fils 
Edouard I er. 
HENRI IV, roi d'Angleterre (1399-1tt3), riC 1367, 
fils de Jean de Gand, duc de Lancastre, et petit-fils du roi 
Édouard 111, porta d'abord le titre de comte de Derby et 
de duc de Lanoastre. Dans sa jeunesse il prit une part active 
aux troubles lutCieurs qui agitaient l'Angleterre, et en 1392 
l commanda une croisade contre le» Lilhuaniens, alors en- 
core paieas ; expédition qui lui valut un grand renom mi- 
litaire. Le laible R i c h a r d II, redoutant en lui l'llomme de 
parti, le nnit en 139S pour toujours d'Anglelerre, par suite 
d'un démèlé avec le duc de zXorfolk. Le bon accueil qu'on fit en 
France à It«ari accrut encore la haine du roi. P, ussi, en 
1399, à la mort de Jean de Gand, dite de Lancastre ci père 
de Henri, Richard il contisqua-t-il les domaines de la 
maison de Lancastre. Dès le  juillet de la même année, 
IIeuri débarqnait dans le comté d'York avec d'apt,'cs mé- 
contents, et bientét il voyait sa bannière réunir un grand 
nombre d'hommes décidés à défendre sa capse. En peu de 
temps son armée ne se composa pas de moins de 30,000 

19 
soldats. Richard, qui à ce moquent se trouvait pour son 
malheur en lrlande, fit marcher contre lui le comte de Sa 
lisbury, dont le corps d'armée, fort seulement de 60,000 hom- 
mes, tut lacilement mis en déroute. Le roi ne réussit as 
mieux quand il vint lui-même présider aux op#rations de la 
guerre. Henri, par un stratagème, et tout en l'assurant de 
son dévouement, parvint à s'en,parer de sa personne: Imis, 
après l'avoir enfermé à la Tour, il le contraignit à signer, 
29 septembre 1399, un acte de cession formelle, qu'il remit 
au parlement. Aussitôt, cetle assemblée déclara que le 
faible Richard était indigne de porter la couronne; et le 
30 septembre, R proclamait Henri roi d'Angleterre. -. ,'uel- 
ques jours de là, Richard mourait de mort violente. 
Comme le comte de la Marche, Edmond Mortimer, enfant 
gé de sept ans et issu de la maison d'York, par les femmes 
seulement, il est vrai, avait plus de droits à la couronne que 
la ma/son de Lancastre, Henri le fit jeter dans un cachot. 
Ces actes de violenc% avec quelque rapidité et quelque 
succès qu'ils eussent été accomplis, ne laissèrent pas que 
de susciter à l'usurpateur de nombreux ennemis. Le comte 
de Salisbury conspira encore avec d'autres seigneurs en 
laveur de Richard; mais il paya cette tentative de sa téte, 
enjanxier 100. En m6me temps le roi Robert d'Êcosse en- 
vahit le sol anglais ; et, dans le pays de Galles, Owen Glen- 
dower, descendant des anciens princes du pays, déploya 
l'étendard de la révolte, llenri Perc, comte de .Xorthum- 
berland, qui avait puissamment contribué à l'élfivalion de 
llenri IV au tréne, mais qui croyait avoir maintenant à s'en 
plaintive, lit cause coin,hune avec Owen Glendower en fa- 
veur d'Edmnnd Mortimer. Son fils aihC Hémi Percy, sur- 
nommé à cause de son intrépiditë ttolslur, c'est-à-dire 
éperon brtlant, se mit à la télé de l'armée confcddrée, et 
fut vaincu parle roi, le2t juillet 1603, h la fameuse 
taille de Shrew»bury, où il perdit la vie. Le vieux Pcrcy fit 
bien alors sa paix avec Henri ; mais en t05 il se ligua en- 
core avec l'archevëque Richard Scrope, pour dctr6ner ce 
prince. Lérot ç en emplo ant la trahison, parvint à s'emparer 
des révoltes, et les fit décapiter. Dès lors le règne ,le Henri IV 
fut paisible, et ce souverain fit preuve de beaucoup de sa- 
gesse, de prpdence et de modération. Le parlement, a qui 
il fit bon nombre de concessions au détriment de la nobles.,e, 
lui proposa à diverses reprises de confisquer les biens eccié- 
siastiques; mais il repoussa toujours cette mesure. Tout au 
contraire, en persécutant les adl,éreuts de Wicl off, il cher- 
clla à se concilier les sympathies du clergé. Ses guerres 
contre l'Rousse furent heureuses; et s'il continua  t.nir 
tre,jours le jeune fils du roi Robert en capti it6, il répara 
du moins ce toet en lui faisant donner une excellente édu- 
cation. Dans la situation où il se trouvait, il lui était im- 
possible de songer à reconquérir ses possessions françaises. 
Redoutant toujours de perdre la couronne dont il s'était 
emparé, et poursuivi de remords, il fut atteint daus les 
dernières années de sa vie d'une affection mentale; et il 
mourat, le 20 mars 13.13, au moment oh il méditait une 
expédition en Palestine. Il eut pour successeur sou fils 
H e n r i V, qu'il soupçonnait de vouloir le détr6ner. 
ItENRI V, roi d'Angleterre (I,13-1622) et régent de 
France, fils du précédent, naquit en 1388. Doue d'une 
grande vivacité d'esprit et condamné à l'inaction par les 
déliaaces jalouses de son père, il se livra comme prince 
royal h la société de jeunes voluplueux, et par cette con- 
duite s'attira les mépris de l'opinion, qui doutait qu'il pos- 
séd«lt la capacité néeessaire pour gouverner. Cependant, en 
maintes circonstances il fit preuve de générosité et de gran- 
deur d'ame, et à la bataille de Shrewsbory il se comporta 
avec autant de vaillance que d'llabileté. Dès qu'il lut monte 
sur le tr6ne, il éloigna de lui les indignes amis dans 
compagnie desquds il avait jusque alors vécu, s'entoara 
des conseillers «le son père, dont il avait eu souvent ì snp- 
porter les an/res censures, et montra autaut de qtalites 
comme rot que d'amahilité comme homme. C'est ainsi qu'il 
accueillir avec distinction le graud-juge Gascoyne, qui na- 
3. 



guère l'avait fait arr/ter pour des faits indignes de son rang. 
En ,ccordant une amnistie générale, Hv.nri V s'efforça de 
fair«oublier les sévérités de son père et surtout de se ré- 
concilier avec la mai»on de Percy. En revanche, il sacrifia 
ì ,m clergé fanatique les lollhards, on partisans de Wicleff. 
Pour occuper à l'extérieur la force d'action de la nation et re- 
conquérir les provinces de France qui avaient jadis dépendu 
de l'Angleterre, il declara la guerre h la France, que déchiraient 
alors des factions pendant la démence du roi Charles V I. 
Après avoir comprimé une conspiration du comte Richard 
de Cambridge, souche de la maison d'York (vogez 
c.eT), Henri débarqua, en aoùt 1-15, en Normandie à la 
téte de 30,000 hommes, et s'empara d'Harfleur; OEais bientOt 
la famine et les maladies réduisirent son armée h la situa- 
tion la plus critique. Henri demanda la paix aux Français, 
qui étaient venus au-devant de lui avec des forces quatre 
fois plus considérables que les siennes, et offrit de rendre 
la place quïl occupait moyennant qu'il lui fùt libre de s'en 
retourner par Calais. L Français exigèrent qu'il se rendit 
à nerci, 'ci le 150ctobre 115 ils attaquërent, dans la contrée 
boisée qui avoisine le village d'Azi n c o u r t, son armée, ex- 
ténuëe. Les talents militaires du roi, la froide intrépidité des 
Anglais et la nature du terrain, qui ne permettait point à la 
cavalerie française de se dcployer librement, telles furent 
les causes de la deroule presque incroyable que les Français 
essuyèrent ce jour-là. Henri ¥ s'en retourna alors en ,tulle- 
terre, tt conclut bientOt avec le duc Jean de Bourgogne une 
alliance dont le but était la conquête complëte de la France. 
Toutefois, ce ne fut qu'un mois d'aoît de l'année 1417 qu'on le 
vit reparaitre en Normandie a ec une atroce de 25,000 hom- 
mes, et en deux années il eut presque entièrement conquis 
cette province.. Le duc de Bourgogne se serait volontiers sé- 
pare drs An;lais pour faire cause comrtune avec le dau- 
phin, devenu plus tard le roi Cbarles ¥II; mais ce 
prince redoutait le duc autant qu'il le haïssait, et le 10 sep- 
tembre 1419 il le fit m,ne assassiner. Le nouveau duc de 
Bourgogne, Pl,ilippe le Bon, pour venger la mort de son 
p:re, se ligua alors de la loanière la plus etroite avec le 
roi d'Angleterre. Cette alliance amena enlin, le 1 mai 
la conclusion du traité de Tro)es entre Henri V et la cour 
de France. Aux termes de la convention qui interviot alors, 
le roi d'Angleterre épousa Calhe,-ioe, fille du roi Charles 
et fut cbargé de la r«gence en l-'rance, ì la condition qu'a la 
mort du roi, frappe de d_mer.ce, la co«ronne de France re- 
viendrait/ lui ou  oes héritiers issus de ce mariage. Quoi- 
quedans cette transaction les droits et les libertês des deux 
peuples eussent été garantis, cette réunion des deux cou- 
ronnes sur sa téte fut mal vue, méme en Anglelerre, d'au- 
tant plus que le dauphin, renforcé par un corps d'auxiliaires 
écossais, put se maintenir dans une partie de la France. A la 
nou«elle de la déroute que le duc de Clarence avait essu,ee, 
le 2 mars 1421, à Beaugé en Anjou, Henri V accourut de 
nouveau en France  la tète d'unearmée de 25,000 hommes; 
mais tous ses efforts pour determiner le dauphin à livrer 
une bataille décisive furent inutiles. Il mourut dans le cours 
de cette campagne, à Vincennes, au moment où il venait 
d'atteindre l'apogée de sa gloire et de ses prospérités, le 
3t aoùt 122; et quelques mois plus tard son infortuné 
beau-père le suivit dans la tombe. 
Henri ¥, dont le caractère a été parfaitement tracé dans 
les poésies de Shakspeare, fut aimé et admiré par les An- 
glais, et mme estimé des Français comme homme et 
comme capitaine. Ce qui distingua son règne, ce fut la stricte 
observation des lois et le respect de la ustice. En outre, 
abolit la milice féodale et arma la bourgeoisie, Le parle- 
ment ne le soutint que médiocrement dans ses entreprises 
politiques. Les revenus publics de l'Angleterre s'Cevaient 
sous son rge à 55,700 livres sterling, et les dépenses or- 
dinaires à 52,200 ; mais pendant toule la durée de son rè- 
gne les subsid¢s accordés par le parlement ne s'Alevèrent 
qu'à 203,000 liv. sterling. Aussi leroi fui-il plus d'une fois ré- 
duit à mettre en gage ses joyaux, et mme jllsqn' sa CA)U- 

HENR. 
tonne; et malgré oet Cai de gne, jamais il ne se rendit cou- 
pable d'exaetions. Son fils Henri VI ( voyez Éovsra 
gé de neuf mois seulement, né le  décembre 1421, lui 
sueeda sur le trane d'Angleterre, et fut aussi couronné 
Paris en qualité de roi de France. Peu de temps après la 
mort de son épou x, Catl;eri ne se remaria avec 0* en T u d o r 
gentilhomme gallois, dont les descendants montCent plus 
tard sur le trbne d'Angleterre. Consultez Goodwin, His- 
tory of the Rei9n of Henri V ( Londres, tT0- ). 
HENRI VI, roi d'Angleterre ( 1422-1-71 ), fils du précé- 
dent, était encore au berceau lorsque la mort de son père 
l'appela au tréne sous la tutelle de son oncle le duc de Bed- 
ford, qui le fit également couronner et sacrer cotonne roi de 
France  Notre-Dame de Paris (décembre 1430 ). Les hé- 
roïques efforts de Jeanne d'Arc et le pieux enthousiasme 
qu'ils inspirèrent aux populations |rançaises sauvërent 
tout  coup la France au moment mme oi la puissance 
anglaise y semblait à jamais consolidée. Charles YlI put 
reconquerir successivemënt les diverses provinces de son 
royaume, et au bout de quelques années la ville de Calais 
était le seul point du territoire français qui obéit  Henri VI. 
Devenu majeur, ce prince, dont les facultés intelleCtnelles 
étaient des plus médiocres, épousa Marguerite d'Anjou  fille 
de René, roi nominal de Sicile ( t4-0 ). La faiblesse d'e,,prit 
de Henri VI devint bientôt un état de somnolence et de 
stupeur voisin de l'imbécillité, et Iixra PAnleterre en proie 
au premier ambitieux qui saurit profiter de ces circonstan- 
ces éminemment favorables  une usurpation. Cet ambi- 
tieux se rencontra dans la personne de Richard, duc d'York, 
issu, lui aussi, de la maison de Tudor et appartenant mme 
 une branche plus rapprochée de la souche commune que 
la branche alors régnante. Une insurrection excit(e par lni- 
mSme lui fournit un prétexte pour se faire déclarer prolec- 
teur du rogaurne ( t:5 ) et investir  ce titre de pouvoirs 
qui réduisaient  rirn l'autorilé du roi. Henri VI, dans un 
intervalle lucide, et obéissant à l'influence qu'exerce sur 
son esprit alfaibli sa femme, l'intrépide Marguerite d'An- 
jou, compren.t que le véritable souverain de l'Angleterre, 
c'est celui qu'on lui a donné pour aller ego; il chasse alors 
de son conseil le duc d'York, qui aussitôt lève ouvertement 
l'ttendar de la révolte. Marguerite d'Anjou arme de son 
c0té, au nom du roi son Coux; et la guerre civile semble 
terminée par la" bata;Ale de Saint-Albans (31 mai 
qui fait tomber la personne mme du fantôme de roi au 
pouvoir du duc d'York. Mais Marguerite d'Anjou ne perd 
pas pour cela courage; elle lève de nouvelles troupes, et 
parxient ì faire enlever son mari de Londres, oh le/rotec- 
teur le retient prisonnier. L'imbécile monarque assiste alors 
 la bataille de Northampton, oh il tombe encore une fois 
au pouvoir du duc d'York. L'intrépide Marguerite réunit 
une troisième armée, et la bataille de akefietd, où son ad- 
versaire est tuC semble décider la lutte en sa faveur. Mais 
le duc d'York, en mourant, a laissé lin fils, Édouard, qui 
devient tout anssitt le chef nominal d'un parti, dont War- 
wick, demeuré  la tte de quelques troupes, et martre de 
la personne du monarque, qu'il tralnait à sa suite, était l'ne. 
Marguerite rencontre XVarwick sons les murs de Saint- 
AIbans ; et à six années de distance les plaines qui furent 
témoin de sa défaite deviennent le thétre d'une victoire qui 
lui rend son Coux et replace l'autorité royale en ses main 
sous le nom de Henri "CI. Mais Warwick, resté maltre de la 
ville de Londres, y fait proclamer le jeune duc d'York sous 
le nom d'Êdouard IV. La lutte recommence, plus achar- 
née; 5Iarguerite est successivement vaincue à Towton et à 
Hexbam, où son époux retombe au puvoir de Warwick» 
qui le fait enfermer ì la Tour de Londres. Il n'y a plus dès 
lors d'autre roi d'Angletere qu'Édouard IV, qui à ce mo- 
ment se croit assez fort pour couer le ioug de plomb que 
lui impose Warwick. Mais celui-ci fait bient{)t repentir 
son protégé de ses velléités d'indépendance. En I-70 
tire lui-mme l'imbécile Henri YI de sa prison, et replace 
ce mannequin royal sur le trône, dont Édonard IY est 



tI.ENR I 2 l 
nellement déclaré déchu. La fortune se montre infidè!e h  tant de la personne du jeune comte de Warwick, seul reje. 
Warwick, surnommé par le peuple King-Mater { le Faiseur ; ton maie de la Rose rouge. Ce ne fut qu'après avoir été cou- 
de Rois); ldouard IV, apr¢s quelques mois d'absence, se ronné le zo octohr et confirmé comme roi par le parlement 

trouve en mesure de recommencer la lutte. La ville de 
Londres se déclare en sa faveur, et Henri VI tombe encore 
une fois du tr¢ne pour rentrer en prison. Sa femme, pen- 
dant ce temps-là, persévérait à revendiquer ses droits. 
Elle parvient à réunir une nouvelle armée ; mais les deux 
batailles qu'elle livre et perd successivement à Barnet et 
 Tewksbury { 14 avril et 4 mai 1471 ) ont pour résultat de 
ruiner sa cause déflnitivement et sans ressources ; car cette 
fois la courageuse reine et son fils tombent entre les mains 
d'Édouard. Dfs lors l'existence de Henri PI était inutile. 
On résolut donc de s'en débarrasser sans plus de délai ; et, 
après avoir été pendant quinze ans promené du palais à 
la Tour, ce prince mourait enfin, à l'age de cinquante ans, 
quelques jours seulement après le dernier désastre essuyé 
par sa malheureuse femme; l'opinion accusa générale- 
ment le duc de Glocester, devenu enguite roi sous le nom 
de  i c h a rd l I I, de l'avoir poignardé de sa main dans sa 
prison. Quant h Marguerite d'Anjou, Louis XI fit cesser sa 
cptivité moyennant une rançon de 50,000 couronnes, et 
l'hëroïque veuve put mourir en paix en France, en 1«82. 
HENRI YII, roi d'Angleterre ( 185-1509 ), né en 156, 
tait /ils de .larguerite de Beaufort, héritière de la maison 
de Lancastre (VO!le'. l».'xxcE,'Ex ), et d'Edmond Tudor, 
comte de Richmond, dont il porta également le titre. 
Quand ldouard IV, de la maison d'York, eut expulsé la 
maison de Lancastre du trfne d'Angleterre, le jeune Rich- 
round fut conduit en Bretague par son oncle, le comte de 
Pembrocke ; et ce fut bien inutilement qu'Edouard IV somma 
le duc de Bretagne, François Il, de lui livrer l'héritier de l'aq- 
tre branche de sa maison. Plus tard, quand Richard III 
eut usurpé le trfne d'Anglcterre, Richmond devint l'es- 
poir non pas seulement de tous les partisans de la maison 
de Lancastre, ;nais encore de tous ceux qui haïssaient et 
redoutaient l'usurpateur. Le duc de Buckingha», qui son- 
geait àrenverser le tyran, réussit même à fiancer Richmond 
avec Elisabeth, fille alnée d'Ëdouard IV ; union qui con- 
fo=salait josqu' un certain point les intérêts des deux maisons 
ennemies d'York et de Lancastre, et qui prêtait plus «le force 
aux droits héréditaires de llicbond, biais Bckingllam 
paya de sa tête ses machinations dans l'intérêt d'une res- 
tauration ; et ce fut le roi Richard III lui-méme qui épousa 
la princesse. Richmond se décida alors h prendre un parti 
décisif, llenacé d'ailleurs d'Cre livré à ]lichard par le fa- 
vori du duc de Bretagme, Pierre Landais, il s'échappa, et vint 
se rélugier à la cour du roi de France, Charles VII1, oh il 
trouva aide et appui. Après avoir organisé une expédition 
composée de 2,000 Anglais, il mit à la voile de Harfleur, 
le 6 aoùt 1485, et alla débarquer à Milford-Haven, au sud 
du pays de Galles, o/J tout aussit¢t il lui arriva des renforts 
considérables. Le 22 du même mois Richmond se rencon- 
tra enfin à Bosward avec Richard, dont i'armée était forte 
d'environ 12,000 combattanta, tandis que la sienne ne reÇ- 
tait guère qu'à la moitié de ce nombre. 5Iais an commen- 
cement de l'action survint à la tête de 7,000 hommes lord 
Stanley, qui jtque alors ne s'était prononcé pour aucun des 
deux partis, et qui à ce moment se mit avec son monde 
du crutWde Richmond. Ce puissant et inattendu renfolt dé¢ida 
la victoire en sa œeeaveur, et Richard III p$rit lui-même dans 
la mélée. Les vainqueurs trouvèrent sa couronne sur le 
champ de bataille; on la mit aussit¢t sur la tête de Rich- 
mond, qui fut proclamé roi d'Angleterre sous le nom de 
Henri ¥1I. 
Le peuple et les seigneurs, également fatigués de la guerre 
civile et de la tyran,de, accueillirent le nouveau roi avec 
enthousiasme. Henri pouvait établir son droit à la couronne 
sur la conquête, sur son mariage avec Élisabetb, enfin sur 
sa descendance de la maison de Lancastre : c'est pour cette 
qualité qu'il se décida, et en même temps il recornmença 
le syslême de perséo,tion contre la maison d'York en .«assu- 

le 7 novembre, qu'il épousa Élisabeth, à laquelle il fit égale- 
ment sentir les effets de sa haine pour la ,naison d'York. La 
nation avait cru à la réconciliation de ces vieilles et déplo- 
rables inimitiés de famille; aussi ces nouvelles persécutions 
provoquèrent-elles partout un vif reContentement. Un prêtre 
rusé et adroit d'Oxlord, appelé Simon, determina alors un 
certain Lambert Simnel, fils d'un boulanger, à se faire pas- 
ser pour Richard d'York, fils d'Edouard IV, et bientét après 
pour le comte de Warwick. L'imposteur joua si parfaitement 
son réle, que les seigneurs irlandais le couronnèrent sous 
le nom d'Edouard PI. Cette révolte prit des proportions 
dangereuses, quand la duchesse douairière de Bourgogne, 
sœur d'Édouard VI, eut envoyéen Irlande un corps de 
troupes auxiliaires commandées par I comte de Lincoln, 
qui, après avoir reçu d'importants renforts dans ce vays, en- 
vahit l'Angleterre. Henri Vil Iattit les rvo|tés en juin 1t87, 
à Stoke, dans le comté de I%tti,,gham. Lambert Simnel fut 
fait prisonnier; et la seule vengeance que rira de lui 
Henri VII fut de le condamner à remplir désormais l'em- 
ploi de marmiton dans ses cui.ines. Quant à ses complices, 
ils furent punis par de fortes amendes. Bien que la polilique 
de tlenri VII ne ft nullement militante, ce prince ne s'en 
trouva pas moins mêlé à la querelle du «!uc de Bretagne 
avec le roi de France. Il arma dans le dessein apparent de 
profiter de cette circonstance pour essayer de reconquérir 
les provinces de France qui avaient autrelois fait partie des 
domaines des rois d'Angleterre; et en octobre I492 
débarqua ì Boulogne, à la tte d'une armée considérable ; 
mais dès le mois suivant il se laissait acheter la paix ( traié 
d'Étaple% signé le 30 novembre 1492) par le roi Char- 
les VIII moyennant une forte somme d'argent. 
Cependant, la duchesse de louo.ne avait réussi ì sus- 
citer tt Henri VIl, l'ennemi de sa maison, nn dangereux ri- 
val dans la personne d'un autre prélendant, d'orine juive 
et appelé Perkin Warbeck. A l'epoque où la France était 
en guerre avec l'Angleterre, cet aventurier avait éte reçu avec 
tous les honneurs royaux à la cour de Charles VIII ; la 
paix une fois rétablie entre les deux puissances, il passa 
en ]cosse, où le roi Jacques IV l'accueillit comme le fils 
gitime d'Édouard IV et lui fit épouser une de ses parentes, 
lady Gordon. E 1495 Jacques IX, r envahit même le sol 
glais à la tête d'une acreC, dans l'intérèt de Perkin War- 
beck, qui se faisait appeler licbard IV. Ce fut seulement 
en 97 que Jacques lit sa paix avec Henri VII et aban- 
donna la cause de Perkin Warbeck, à qui dans Iïnteralle 
un grand nombre de seigneurs anglais étaient venus rendre 
hommage et préter serment de fidélité. Perkin Warbeck 
se réfugia dans le pays de Cornouailles, oO la population, 
mécontente des impéts excessifs que le roi prélevait sur 
elle, semblait devoir lui venir en aide; et avec des forces 
minimes il entreprit alors le siCe d'Eeter, où il tomba 
aux mains de Henri VII, qui le fit d'abord enfermer à 
la Tour, et, à'la suite de diverses tentatives d'évasion, 
finit par l'envoyer au gibet. Henri VII mit à profit le 
rëtablisement de la paix et de la tranquillité pour faite 
cesser les désordres lutCieurs, consolider le trône et ac- 
croltre autant que possible l'autorité royale. Dans celte 
œuvre il déploya une activité, une fermeté et une habilete 
qui lui valurent la réputation du plus grand politique de 
son siècle. Il affaiblit la puissance de la noble«se en au- 
torisant le parlage de ses immenses propriétés foncières, 
et en alfranchissant légalement les payons de toutes 
charges féodales. En même temps il favorisait la bourgeoisie, 
en améliorant la législation civile et commerciale ainsi que 
l'organisation judiciaire. Les progrès du commerce et de 
in navigation, bases essentielles de la puissance anglaise, 
furent l'objet constant et particulier de toute son attention ; 
et il n'épargna à cet effet ni soins ni sacrifices. C'est sous 
son règne que fut construit le premier navire de guerre 



aurais. Un accident seul l'empècha d envo-er Christophe [ de son frère, il prétendit que les diseuses, accordées, par 
Colomb découvrir le Nouveau Monde; mais il seconda les [ lepapeétaientinsuflisantespourletranquilhser, parcequ elles 
efforts de Sébastien Cabot, qui en 1-97 découvrit le con- avaient été données h l'époque de sa minorité. Mais son vé- 

tinent américain. Le caractère de Henri Vrl offrait beau- 
coup de similitude avec ce[tri de G uill au me te Conqué- 
tant. Il était sévère, intéressé et encore plus avide d'argent 
qu'ambifieux, et ne laissait échapper aucune occasion d'ac- 
croltre son trésor par des voies licites ou illicites. Henri Vil 
mourut le 29 avrit 1509 ; peu de temps avant sa mort, il 
avait rendu une anmistie générale et ordonné qu'on répa- 
rat les exactious qu'il avait pu commettre. Consultez lar- 
sollier, Histoire de Henri l-Il ( Paris» 1700). 
HE.NII VIII, roi d'Angleterre et d'Irlande (1509-1547 ), 
fils du précédent, né le 28 juin 1491, était heureusement 
doué, sous le rapport intellectuel, comme sous le rapport 
plqsique, et reçut une éducation savante, voire théo- 
logique. La nation anglaise, qui avait tant eu à souffrir 
des penchants rapaces de son père, salua avec joie son 
avénement au trén, et se laissa éblouir par les premiers 
débuts de son rège. Après avoir épousé, eu 1509, Ca- 
therine d'Aragon, veuve de son frère Arthur et sœur uté- 
rine de l'empereur Charles-Quint, uniquement dans le but 
de maintenir ainsi les rapports d'alliance de l'Angleterre avec 
l'Espame contre la France, les mmes motifs le portèrent 
à intervenir dans les affaires politiques du continent. En 
1512, il s'allia avec 3Iaximilien 1 e contre Louis XII. Quoi- 
qu'ayant remporté avec l'empereur, en 1513,  Guinegate, la 
bataille dite des Iperons, cette guerre ruineuse ne lui 
rapporta aucun avanlage particulier, lévolté en outre de 
l'egoïsme de ses alliés, il ne conclut pas seulement la paix, 
en aodt 15l-, avec le roi de France Louis XII, à qui il fit 
épouser sa sœur Marie; mais encore il signa plus tard 
avec François ! « un traité formel contre Charles-Quint. Le 
roi d'Écosse Jacques IX', qui avait perdu, le 9 septembre 
1513, la bataille de F]odden, obtint également de lui une 
paix équitable. A l'avénement de François 1 « au tréne, 
l'alliance entre l'Agleterre et la France paraissait d'autant 
plus solide, que les rois de ces deux pays avaient Cale- 
ment échoué dans leurs efforts pour disputer la curonne 
impériale à Cllades-Qlinl. Mais celui-ci, en faisant entre- 
voir la tiare au ministre favori de ltenri VIH, réus«it h 
le gagner h ses intérèts et à détacher ce prince de l'alliance 
de la France. Au mois de nnvembre 1521 intervint donc 
entre lempereur et le roi d'Angleterre un traité secret, 
aux termes duquel Henri VIII commença une guerre très- 
impolitique contre la France. 11 se conduisit tout aussi ca- 
pricieusement en ce qui concernait l'administration intt- 
fleure des ses Etats. Après avoir disipé le trésor amassé 
parson père, il eut recours ax exactions, et, en 1523, il con- 
traignit, sous peine de mort, le parlement à lui accorder 
des subsides consid,¥ables; puis, irrité de la résistance qu'il 
rencontrait dans ce corps, il tut sept années sans le convo- 
quer. Cependant Wolsey avait vu déjà maintes fois échouer 
sa candidature à la papauté ; et le dépit qu'il en conçut le 
porta à tout faire pour brouiller l'empereur et le roi d'.Ln- 
gleterre. On s'abstint, il est vrai, de rappeler l'armée an- 
glaise qui occupait une partie du territoire français; mais 
quand, eu 1025, François 1  devint, à la bataille de Pa te, le 
prisonnier de Charles-Quint, Henri VIII n'bésita point à 
conclure avec la cour de France un traité d'alliance. La 
lutte continentale qui semblait alors imminente fournit au 
roi un prétexte pour pressurer plus q,.te jamais ses sujets, 
«le sorte que des révoltes éclatèrent ouvertemett sur diflë- 
rents points de l'Angleterre. Toutefois, ce ne fut qu'en 
1528 que commencèrent les hostilités de l'Angleterre contre 
l'empereur; et la paix de Cambray (5 août 1529) y mit fin 
dès l'année suivante. 
Depuis longtemps Henri VIII avait conçu le projet de 
divrcer d'avec sa femme, tante de l'empereur ; maintenant 
que l'alliance desdeux princes n'existait plus, il n'hésila point 
h le rëaliser. Prétextant des doutes de conscience au sujet 
d'un mariage conclu contrairement aux canons avec la veuve 

rilable motif pour divorcer, c'est qu'il n'aimait point sa 
femme, princesse dépourvue de gr'aces et d'attraits, dont 
il n'avait qu'une fille, et qu'il voulait épouser Arme de 
B o u I e n. Redoutant le juste courroux de l'empereur, le pape 
Clément VII chercha à faire trainer cette affaire aussi long* 
temps que possle, puis finit par envoler  Londres le 
cardinal Campeggio, chargé d'instruire la cause du divorce 
d'accord avec Wolsey. Mais avant que la décision suprême 
etlt pu tre rendue, Clément V'II rappela, en 1529, son léga 
et cita le roi à comparaitre devan son propre tribnnal, 
Borne. Wolsey snpporta !e premier les effets du courroux 
de Henri VIII, qui lechassa de sa cour. D'aprC les conset3 
de C ranm er, devenu bientét par là primat d'Angleterre, 
on déféra l'affaire du mariage h l'appréciation des universitës, 
tant nationales qu'étraugêres, et mme des doctenrs de la 
synagogue. Les plus clêbres théologiens, à l'exception de 
Luther et de Mélanchlhon, déciarërent le mariage nul en 
droit et en fait. Le clergé aurais fit n»turellemeut du mme 
avis, quoique les universités d'Oxford et de Cambridge, 
par crainte de la réformation, se montrassent défavorahles 
à un divorce ainsieffectué. Jusque alors Henri¥III avait tou- 
jours passé pour un zlé catholique. Il n'avait pas seulement 
poursuivi par le fer et le feu les partisans de Wickleff, mais en- 
core ceux de la rformalion del'Église entreprise par Luther; 
et en récompense des écrits qu'il avait fait paraitre contre les 
doctrines deLuther, le pape Lêou X lui avait décerné le titre 
de Dfenseur de la foi. Or, maintenant que le pape se 
refusait à toute transaction sur la question du divorce, 
Henri VIII résolut d'affranchir graduellement son royaume 
de l'autorité spirituelle du saint-siCe. Le désir de s'ap- 
proprier les biens de l'Église et d'accroitre la puissance royale 
ne contribua pas moins que la situation particulière où il se 
trouvait à déterminer le roi d'Aueterre à prendre un tel 
parti. Au mois de janvier 1531, il exigeadu clergé le paye. 
ment de sommes considérables et en mme temps il le con- 
traiguit à signer une déclaratiou par laquelle, ax termes 
d'un antique statut, il reconnaissait le roi comme protecteu 
et chef unique de l'lglise d'Aueterre; l'année suivante, un 
acte du parlement supprima les a n u al e s. 
Après avoir renouvelé son traitë d'alliance et d'amitié 
avec François I , Henri VIII éponsa, le 1 novembre 
Arme de Boulen. Ce ne fut pourtant qu'au mois de ntai 
de l'année suivante qu'il fit prononcer par un tribunal 
clésiaque son divorce d'avec Catherine d'.L"agon. En 
mme temps, le parlement rendit une loi qui déclarait seols 
aptes h hriter de la couronne les enfants qui nalU'aient de 
ce second mariage, et qui imposait à tous les sujets anglais, 
sous peine d'tre considërés comme coupables du crh3ae de 
haute trahison, l'obligation de prêter serment d'obéissance à 
la nouvelle loi de succession. Il ne se rencontra que deux 
hommes assez courageux pour protester contre cet abus du 
droit de la force, Thomas 31orus et Fïsher, év_iue de 
chester; et tous deux epiaient leur témérité, en 1535, en 
périssant sur l'échafaud, de la main du bourreau. Le parle- 
ment convoqué en 153 abolit complétement la juridiction 
spirituelle du saint-si en Angleterre, eu mme temps qu'il 
adjugea an roi les biens de l'Ëglise et qu'il le chargea du droit 
de juridiction et de réformation, ainsi que du soin de pour- 
suivre et punir les hérétiques, etc. Dës 1536 Henri VIII 
fit usage de ses nouveaux pouvoirs, en supprimant une fouie 
de petits monastëres et en faisant traduire la Bible en lane 
vulgaire, d'après les conseils de Cranmer. Le procès et le 
supplice d'Arme de Boulen (19 mai t5:6) et le mariage q:e 
Itenri célébra le lendemain mme avec Jeanne Seymuur 
firent un moment diversion aux troubles et aux bouleverse. 
ments religieux. Le parlement dut rendre en effet une nou- 
velle loi qui excluait de la succession au tr6ne la prinese 
llisabeth, née du mariage de Henri VIII avec Anne de 
Boulen, et qui, au cas oiJ le roi viendrait  mourir sans 



HENRI 
laisser d'héritier, conférait à ce corps le droit de disposer 
de la couronne comme iil'entendrait: des pénalits eft'rayates 
servaient de sanction à ces deux lois. 
Pour fixer les principes de l'Église en matières de foi, 
Henri Vtll convoqua, en juin 1536, une assemblée du clergé 
à laquelle il soumit sa confession de foi, mélange dedoctrines 
catholiques et protestantes, qui à la suite de longues dis- 
crissions finit par ètre adoptée, puis, après avoir été encore 
modifiée de la main mme du roi, fut déclarée constituer 
désormais la règle de la foi. Dès le mois d'octobre de cette 
mime année, ces procédés despotiques en matiëres de cons- 
cience provoquërent dans plusieurs provinces de dangereuses 
révoltes populaires, dirigées par des fanatiques, et qu'on eut 
beaucoup de peine à comprimer. La répression de ces mon- 
vements iusurrecfionnels, la naissance du prince Édouard 
(t2 octobre 1537), que suivit cependoet bient6t la mort de 
la reine, consolidèrent tellement la puissance de Henri, 
qu'en 1538 il n'hésita plus à s'emparer des biens apparte- 
nant aux grandes et riches abbayes. E dissipant ls tré- 
sors immenses que ce système de confiscation accumula suc- 
cessivement entre ses mains, Henri ¥111 ne laissa pas du 
moins que de favoriser les développements du commerce et 
de l'industrie. 
Le clergé obtint enfin du pape Paul III, en 1538, qu'il pu- 
blit la bulle d'excommnnication qui depuis plusieurs an- 
nées déjà avait été lancée contre le roi d'Angleterre; mais 
cette mesure extrême ne produisit aucun effet. Pour ex- 
tirper toute divergence d'opinions en matières religieuses, 
Henri VIII soumit au parlement, en 1539, six articles de foi, 
qui furent également adoptés et proclamés comme dogmes 
de l'Élise d'Angleterre: ces six articles sont laineux dans l'his- 
toire sous lenom de Statut de Sang (Bloody Bill). La con- 
séquence immëdiate de cette mesure fut une persécution 
sanglante des protestants, qu'elle violentait plus que tous 
autres dans leur conscience. Le parlement ne fit pas moins 
bon marché au roi des antiques libertés de la nation en re- 
connaissant furce de loi aux édits royaux soumis au conseil 
d'État. 
Après avoir hésité en, re diff,:rents projets de mariage, 
Henri VIII, qui attachait un certain prix à se faire bien voir 
des princes allemands, et en outre trompé par un portrait 
beaucoup trop flatté, œUVre de H o I b e i n, épousa, le 6janvier 
15-t0, la princesse Arme de CIèves. Mais ne l'ayant point 
trouvée à son gré, il divorça d'avec elle dès le mois de juillet 
suivant, en même temps qu'il faisait intenter un procès de 
hante lrahison à son chancelier Thomas C r o m w e I I, cou- 
pable uniquement de lui avoir conseillé ce mariage, et à qui 
il fit trancher la tte, le 28 juillel. 
L'influence de Catherine Howard, que Henri ¥1II épousa 
le S aoùt 150, mit leduc de Norîolk et Gardiner à la tête 
des affaires; et alors commença une violente persécution des 
protestants. Une foule d'hommes de mérite, qui se refusèrent 
à tenir pour articles de foi les six arlicles, furent br01és 
on pendus. Pendant ce temps-là Henri apprenait avec terreur 
que sa nouvelle pouse avait prieCurement mené une con- 
duite plus qu'équivoque et ne se respectait pas davantage 
maintenant. Il en pleurs de dépil ; mais le 12 février 152, 
sans que la culpabilité de Catherine Howard eut été juri- 
diqnement prouvée, il l'envoya à l'Chaland avec ses pr6- 
tendus complices et amants. C'est à cette occasion que le par- 
lement rendit une loi qui déclarait coupable du crime de haute 
trahison, par cons6quent condamnait à la peine de mort: I ° qui- 
conque, connaissant les déportements de la reine, ne lesrévé- 
ferait pas aussit6t au roi; 2 ° toutejenne fille qui, ayant perdu sa 
virginité, oserait épouser le roi ; 3 ° toute reine d'Angleterre 
qui se laisserai/ sduire ; o tout individu qui lui ferait la 
cour et lui adresserait, de bouche o par écrit, ou encore 
par un entremetteur, une déclaration d'amour ; 5 ° enfin, qui- 
conqe lui servirait de confident ou de témoin dans «le 
coupables intrigues. 
Henri X']FI ayant vainement essayë de déterminer son ne- 
xcu le roi d'Ecosse, Jacques V, à ol».,rer les mO.mes réformes 

que lui dans l'Église de ce pays, finit par lui déclarer la 
guerre. Le 12 février t542 l'armée anglaise, profilant de la 
discorde qui régnait dans les rangs des Écossais, les vain- 
quit sur les rives du Solway ; et la douleur que cette dé- 
faite causa au roi Jacques le conduisit au tombeau. Henri 
conçut alors le projet de réunir les couronnes d'Angleterre 
et d'Écosse, et, avec l'assistance de la famille H a m i I t o n, il 
chercha h fiancer son fils avec Marie, fille et héritière de Jac- 
ques V ; mais le parti catholique écossais vint ì la traverse 
de ce plan. Le 12 juillet 1543 Henri VIII epousa la veuve de 
lord Latimer, Catherine Part, qui lut assez adroite pour gou- 
verner pendant quelque temps ce tyran en flattant sa manie 
poor les controverses religieuses, dans lesquelles, dit-on, 
elle excellait. Mais si elle fut assez heureuse pour échapper 
au soupçon d'hérésie, peu s'en fallut que son époux, jaloux 
des succès remportés par elle, devant tmoius, en maintes 
discussions théologiques, ne lui fit payer cher ces défaites 
infiiges h sa vanité. Il et bien été capable de lui faire 
éprouver le sort traoque de ses devancières, le t)ran qui 
faisait punir de la dégradation et du fouet les prolesseurs et 
les étudiants de l'université d'Oxford assez osés pour pro- 
noncer le grec autrement que lui: 
E février 153, Henri s'allia de nouveau à l'empereur 
contre François I , qui à diverses reprises s'était raillé de 
lui et qui l'avait particulièrement irrité par le vole qu'il 
avait joué dans les affaires d'Écosse. Après avoir rendu 
leurs droits de succession au tr6ne/ ses filles Marie et Eli- 
sabeth, il commença, en 15, la guerre contre la France, 
qu'il envahit par Calais, tandis que l'empereur pénetrait 
en Champagne. L'opiuiàtrete de Henri h ne pas vouloir ar 
d'accord avec son allié ni combiner ses opérations aec les 
siennc déermina l'empereur à signer, le 1 septembre 
15-, ' Cre.py, la paix avec le toi de France, qatre jours 
après que le roi d'Angleterre se fut emparé de Boulogne. 
Ce ne fut qu'au mois de juin 15t6 qu'il consentir h cesser 
une lutte demeurée à peu près sans réultats, et qui n'avait 
pas cofité à l'AnOeterro moins de t,300,000 liv. sterl. Vers 
la fin de oette mème année, Henri VIii fut pris d'une fièvre 
lente, qui l'i.quiéta d'autant pins que son fils n'etait encore 
gé q:e de neuf ans. Il redoutait surtout le puissant duc de 
orfolk et son fils, le comte de Surrey, jeune homme 
plein de mérite, qui avait refusé de contracter un mariage 
qu'il lui imposait. Henri fit trancher la tëte au fils, sous 
un prétexte plus on moins spécieux ; et le père n'échappa 
au mmesort que parceque le roi mourut, le 28 janvier t5t7. 
D'une voix déjà à moitié éteinte, le tyran avait ordonné que 
l'exécution aurait lieu le lendemain. 
L'Angleterre n'eut aucune obligation directe à ce despote 
sanguinaire, dissipateur, mais neroque; et à la honte de 
l'humanité, il f«ut ajouter avec Hurae que non-seulement 
cet autre :Néroa se fit respecter de ses sujets, mais qu'il 
n'en fut jamais ha]. Sous son règne, pourtant, les édits d« 
religion et le édits relatifs à la succession au tr0ne donu¢- 
rent tant d'extension et de définitious diverses au crime do 
haute trahison, que quiconque en était accusé devait néces- 
sairement encourir une condamnation capitale. La noblesse 
anglaise se vengea tout aussitôt de la t) rannieque Henri YIII 
avait pendant si longtemps fait peser sur elle, en annulant 
toutes les mesures prises par lui en vue de la minorité d'E 
douard Vi, et en éfisant le duc de S o m erset pour pro- 
tecteur. Consultez Turner, Hitory of Henry 1"111 (2 vol. 
Londres, 1826); Thomson, Memoirs of the cour of 
Hory VIH (2 vol., t828) ; Tytter, Lc qf K9 Henry VIII 
(1836); Audin, Histoire de Henri l'lll et du Schisme 
d't9leterre (2 voL, Paris, 1847); Empis, Les Six Fenmes 
de Hem'[ VIII, scènes historiques ( Paris, 18.4). 
HEN'RI dit le Lo, duc de Saxe, de 1139 à 1195, le 
plus remarquable des princes allemands du douzième siëcle, 
ne en 1129, était fils de Louis le Superbe, duc de Saxe, 
. par sa mëre petit-fils de l'empereur d'AIlemagne Lothaire. 
Son père étant mort empoisonne dès l'an 1139, sa mère 
] Gertrude et son aïeule Fdchenza dirigèrent pendant sa ml- 



norit l'administration du duché de Saxe. Henri, devenu 
ma.leur en 1146, réclama i, la diète de Francfort, en tt7, 
de l'empereur Conrad, le duché de Bavière, qui avait élé 
enlevé à son pre, mais qui ne loi tut restitué qu'après la 
mort de Conrad, par l'empereur Frédéric I er. Ses domaines 
s'étendirent dès lors de la mer du lordet de la Baltique à 
rAdriatique; et en 1154 les vassaux des domaines héré- 
ditaires des Guelfes en !talle durent loi prêter le serment 
féodal. Il cgnfia le gouvernement de la Bavière au comte 
palatin Othon de Wiflelsbach, pour consacrer tous ses soins 
au duché de Saxe. En forrant les évues des pays conquis 
à recevoir de lui l'investiture par la crosse et l'anneau, il sou- 
leva leur haine. A partir de 1164, ses ennemis, à la tte 
desquels était l'archevêque de Brdme, Hartàg. s'unirent 
successivement contre lui, et conclurent en 1 I66, à Merse- 
bourg, nue ligue h laquelle accédèrent bient6t les évoques 
de Magdebourg, d'Halberstadt et d'Hildesheim, et les mur- 
graves de OEhuringe et de Brandebourg. Mais, par la rapidité 
de ses mesures défensives et otfensives, il eut hient6t dé- 
joué leur mauvais vouloir, en mme temps qu'il s'emparait 
de la ville de Brme et du pays d'OIdenbourg. Vers ce temps, 
il divorça d'avec sa première femme, et ëpoua Malhilde, 
fille de Henri lI, roi d'Angleterre. Bienl6t après, il entreprit 
une expédition en Palestine. Pendant son absence, l'em- 
pereur Frédéric 1 « profita du bruit de sa mort pour faire 
rentrer en son pouvoir les places fortes de la Saxe. Au 
tour de la croisade, Henri suivit bien encore, en 1174, l'em- 
pereur dans sa cinquième campagne en traite; mais il se 
sèpara de loi à Alexandrie, et sa défection contraignit 
Frdéric I « à traiter à des conditions &.favorables avec 
ses ennemis, en 1176. Fréderic se vengea en réveillant les 
vieilles haines qui existaient parmi les princes allemands 
contre Henri; après l'avoir inutilement cilWh comparalh-e 
devant 1ois diètes successivement tenues à Batibonne, 
à Magdebourg et à Goslar, il le mit formellement au ban 
de l'Empire, par un décret rendu lors de la diëte tenue à 
XVurtzbourg en ttH0. Cette mesure lui enlevait tous droits 
de souvcraiueIë sur les £taIs qu'il avait lusqui alors posséd6, 
et ses divers fiefs furent curieCés à d'autres. Ainsi, OIhon 
de Wittelsbach obtint le duchê de Bavière, Bernard d'As- 
canie la Saxe, et l'archevque de Colore l'Angrie et la Wet- 
pbalie, qu'on érigea en duel,C lier, ri prit les armes, ballit 
à Hellerfeld les bandes de l'archevêque de Cologne, et lit pri- 
sonniei UIric, évque d'Halbersladt. Justement alarmé, 
l'empereur marcha sur la Saxe à la tte de forces considé- 
rables et en se faisant préctler d'une déclaration qui mena- 
rait tous ceux qui prèteraient aide et appui au rebelle des 
mmes peines que lui. Henri, abandonn6 de tous ses vas- 
saux, se vit alors réduit à aller se réhgier en Augleterre 
auprès de son beau-père, le roi Henri 11 : la ville de Bruus- 
içk seule lui resta fid6le, et fol inutiiemcnt assiég6e par 
l'archevêque de Cologne. A bout de ressources, Henri vint se 
prosterner devant l'empereur à Erfurt, en 118, et implorer 
sa grâce ; mais tout cequ'il put obtenir, ce fut la conserva- 
tion de ses domaines héréditaires, Bruns-ick et Lunebourg, et 
encore sous l'obligation de s'absenter de l'Allemagne pendant 
trois années, qu'il alla passer en Angleterre. l',appelWparPhi- 
lippe, archevèque de Cologne, qui avait abandonné le parti 
de l'empereur, fl vécut, à partir de 1154, tout à fait tran- 
quille à Brnnswick. L'empereur, qui se défiait toujours de 
lui  s'étant décidé à partir pour la Palestine, il exigea qu'il 
l'y accompagner ou qu'il allàt de noo*eau résider pendant 
trois ans en Augleterre. C'est ce dernier parti que prit Henri 
(1188}; mais dès l'année suivante il revenait guerroyer sur 
les bords de l'Elbe contre les princes et les seigneurs qui te- 
naient pour l'empereur. Ces luttes donnèrent lieu aux plus 
terribles dévastations, et sur les ruines qu'il laissait après 
lui le duc de Saxe faisait inscrire ces mots : Vestigia leonis. 
Il n'y eut de réconciliation opér6e entre lui et l'empereur 
que Iorsqu'il eut marié Henri, son fils aihC avec Agnès 
fille et h6ritière de Coarad, comte palatin du Rhin, irère 
de Fr6ric. 

HE.NP 
Henri le Lion mourut à Brunswick, en 1195, et fut en- 
terré dans la cathédrale de cette sille, où on voit encore 
aujourd'hui son tombeau. Si l'histoire a COlcrv le souv- 
nir de son nom, c'est bien moins à cause de ses 
que parce qu'un milieu de ses luttes si ardeutes contre 
puissance impériale, il ne laissa pas que de donner tons ses 
soins à assurer le bientre de ses sujets, à favoriser les dé. 
vloppements du commerce et de l'industrie, à encourager 
les savants. Il eut pour successeur son fils Henri le Beau. 
HEX'II. Il y eut quatre rois de Castille de ce nom : 
HENPd I er, dit le on,fils d'A]phonse IX, n'avit que neuf 
ans Iorsqu'il monta sur le tr6ne, en 1214. Sa mère, Bérau- 
gère, et le comte de Lara le retenaient prisonnier. Cette cap. 
tivité devint le signal d'une guerre civile. Les antres sei- 
gneurs castillaus se liguèrent contre la puissante famille de 
Lara. Henri ne porta pas Ionemps le titre de roi. 11 mou- 
rut en 117. On attribua cette mort prématurée  la chute 
d'une tulle, qui l'aurait grièvment blessé. 
HENRI 1I roi de Castille, dit de la Merced, fils naturel 
d'AIfunse Xt et d'Etéonore de Guman, né en 13, s'étai: 
rendu fameux sous le nom de Henri de TransParente, 
dans les guerres contre Pierre le Cruel, auquel il dis- 
putait le tr6ne de Castille. Il avait à venger la mort de sa 
mère et de son frère, que son compétiteur avait fait massa- 
crer. Il oe ligua d'abord avecplusieurs seigneurs, mais snc- 
comba dans cette première attaque. Il se retira alors en 
France, dont leroi était justement irrité contre Pierre, qui 
avait fait mourir Blanche deBourbon, et repassa les 
Pyrénées avec une armée trançaise, commandée par Du- 
guesclin et le cimtede la Marche. Après une luttelon- 
gue et meurtrière, Pierre fut battu près du cb;lteau de 
Montiel, où il se réfogia, et Henri poursuivit sa victoire. 
Pierre avait offert à Dogoesclin les plus brillantes récom- 
penes s'il voulait abandonner la cause de Henri. Il ne put 
réussir. N'ayant plus ni armée ni trésor, et toute la Castiile 
s'étant soulevée contre lui, il demanda une entrevue à Henri ; 
et il fut convenu qu'elle amait lieu dans la tente de Dogues- 
clin. Pierre, qui n'avait plus le choix des tnoens, s'aban- 
donna à sa destinée : maté les avis de quelques nobles 
ca.qillans qui lui étaient testés fidèles, il monta à cheval et 
sortit du chàteaa : à peine avait-il franchi la dernière en- 
ceinte qu'il se trouva face à face avec Henri, qui s'écria : « Où 
est ce juif, qui se fait appeler roi de Castille? «  « Tu es 
un traitre, loi répondit son rival ; je suis Pierre, roi de 
Castille, fils Iétime d'Alfonse ,. Et il se précipita sur Henri, 
qu'il renversa. Il allait le percer de son épée, quand Dn- 
guesclin, par un mouvement rapide, le jeta de c6té. Henri 
eut le tempsde se relever, et enfonça son long poignard dans 
le coeur de Pierre, qui mourut sur le coup. Henri fut im- 
médiatement proclamé roi de Castille 13fi9}. 11 eut long- 
temps à combattre de nouvelles ligues de seigneurs, dont il 
triompha; mais le roi de Grenade, craignant qu'il ne tour- 
nM ses armes coutre lui, le fit empoisonner, le 13 mai 1379. 
Sa vie aventureuse n'avait filé qu'une suite de guerres et 
d'attaques. Il ne laissa que deux enfants légitimes, Jeanl «, 
qui lui succéda, et lléonore de Cueillie, qui fut depuis 
reine de .avarre, et six enfants naturels. 
HENRI III, fds de Jean 1 succéda à son père en 1390 
fl n'avait que onze ans. Il fut surnommé l'Infirme ou le 
l'aldtudinaire à cause de la faiblesse de sa santé. Plu- 
sieurs factieux se disputèrent le pouvoir pendant sa mino- 
ritC la Castille fut continuellement agitée par l'ambition 
des grands, et leur rivalité se manifesta par de sanglantes 
collisions. Devenu majeur, Henri III comprima les factions 
sans pouvoir les détruire. Attaqué par le rois de Portugal 
et de Grenade, il les coml,attit avec succès. Il avait envoé 
une grande armée contre les Maures, lorsqu'il mourut em- 
poisonné par un médecin juif, à Tolède, le 25 décembre 
140ç, à Fge de vin-sépt ans. Son fils Jean ll lui suceéda. 
HENRI IV, roi de Caslille et de Léon, dit l'Impuissant 
était n le 25 janvier 15, de Jean II, et monta sur le 
tronc le 20 juillet 115,. Turquet raconte dans son 



HEMqI 
taire à'Espagne que Henri IV, dëterminé ì se justifier à tout 
prix de ce reproche d'impuissance, s'clair fait remplacer 
dans le lit conjugal par Alphonse d'Albuquerque, son favori, 
et que la reine eut beaucoup de peine à se résigner à cette 
substitution. Telle fut, disent encore d'antres historiens, 
l'origine de Jeanne de Castille, qui depuis épousa son oncle 
Alphonso V, roi de PortugaL Henri-l'lmpuissant avait répudié 
sa première femme, Blanche d'Aragon, sous prétexte de 
sortitCe. Il fut déposé en 14{35, par les Castillans, qui 
déférèrent la couronne de Ca#.ille à son frère l'infant don 
A]phonse, et mourut en 1476. DCFEI' (de l'Yoane) 
IIENRI DE BOUBGOGNE, comte de Portugal, petit-fils 
de Bobertler, duc de Bourgogne, doit tre considéré comme 
le fondateur du royaume «le Portugal; il est en effet le 
chef de la première famille qui régna sur cette monarchie. 
A la tète d'une petite armée de Bourguignons et de Béar- 
nais, il franchit les Pyrénées, à la fin du onziO,ne siècle, 
et se rendit marre du Portugal, qu'il gouverna avec sagesse, 
sous le titre de comte souverain. Il y fit fleurir la religion, 
alla guerroyer dans la Palestine en ltO, et combattit de 
nouveau les Maures d'Espagne à son retour. Il avait epousé 
Thérëse, fille naturelle d'Alphonse VI, roi de Castille. Les 
Béarnais, qui composaient la plus grande partie de son 
armée d'aventmqers, s'etablirent dans les domaines qu'ils 
avaient conquis, et y introduisirent leurs usages et leur 
langue, qui est devenue celle du pays. De la l'analogie 
presque identique entre les deux idiomes du Portugal et 
du Béam, tandis que la langue espagnole, qui les sépare, 
n'a avec l'un et l'autre que «les rapports fort secondaires. 
De savants critiques se sont donné beaucoup de peine pour 
expliquer cette analogie, et se sont livrés à de laborieuses 
investigations pour résoudre ce probleme de linguistique. 
11 leur aurait suffi, pour mettre fin à toute incertitude, de 
lire les premières pages de l'histoire de Portugal. H, nri de 
Bourgogne, mort en 1t12 au siCe d'Astorga, eut pour 
successeur sou fils A 1 p h o n s e I er, surnommé l/enriquès, 
qui le premier prit le titre de roi de Portugal. 
DUFEY ( Je l'Yonne ). 
HENRI, cardinal, roi de Portugal, etalt le troisième fils 
du roi Emmanuel : il naquit à Lisbonne, le 31 janvier 1512. 
Ayant embrassé de bonne heure l'etat ecclésiastique, il 
devint archesque de Braga et d'Evora, et ce fut lui qld 
établit l'inquisition en Portugal. Régent pendant la mino- 
rité de son neveu Sébastiên, il lui succéda en 1578. Sur 
le tr6ne, il se mourra lhible, irrésolu, opiniatre, sdicallf, 
et mourut le 31 jansier 1580, ì l'Age de soixante-huit ans, 
sans s'tre choisi un successeur. Philippe II, roi d'Es- 
pagne, s'empara alors du Portugal. 
HENI:! DE C.LSTILLE, fils de F er d i n a n d I I I, se 
rendit fameux par son ambitioh et par ses malheurs. Il prit 
d'abord les armes contre son frère Alphonse, roi de Cas- 
fille et de Léon. Cette guerre lu/ fut funeste, et pour ré- 
parer ses revers il implora le secour de Louis IX, roi 
de France, et de Cbarles Ier, roi de Sic/le. Ce "dernier 
le combla de bienfaits et d'honneurs. Henri de Castllle lut 
plus qu'ingrat enver ce prince : il entreprit de détrOner 
son bienfaiteur, et souleva contre lui le jeune C o n r a d i n. 
Tous denx furent vaincus et faits prisonniers. Conradin eut 
la tète tranchée, et Henri de Castille fut enfermë dans une 
cage de fer, dargé de chaînes, et promené en oet état dans 
foules les villes du royaume de Naples et de S/c/le. 
Dt;I-'E¥ ( de l'l"onne ). 
HENRI DE MISNIE. VovezFnvr..o. 
liENRI DE TRANSTAMAR E. Voyez H£t| I I de Castille. 
HENRI LENAVIGATEUB,inlantde Portugal, quatrième 
fils du roi Jean I e, né en t39, avait commencé par se cou- 
vrir de gloire à la prise de Centa (1415). Le Portugal jouis- 
sait alors d'une heureuse tranquillité ; 1 nation était active 
et entreprenante, et dans toutes les classes de la société do- 
nfinait l'esprit de conqnles et de découvertes. Plus que 
I ersonne l'infant partageait ces idées. Le sciences, et sur- 
h,ut leg m.ttbématiques, l'astronomie, la ua igation, avaient 
mcr. n£ L, t:o,v£its. -- T. XL 

5 
ì ses .eux encore plus d'attraits que la gloire des armes. 
A la mort de son père, il choisit pour séjour la ville de 
Sacres, dans l'Algarve, non loin du cap Saint-Vincent, et con- 
tinua vigoureu»ement la guerre contre les Maures. 11 inquié- 
tait continuellement leurs c6tes, et par suite de ces expé- 
ditions ses marins s'aventurèrent dans des parages de 
l'Océan que les navigateurs de ce temps-là avaient pendant 
longtemps regardés comme impénétrables. Ce qu'il avait 
surtout en vue, c'clair de découvrir des pas encore in- 
connus. Yers6 dans la connaissance de la géographie, il ne 
négligea pen,laot ses diverses campagnes en Afrique aucune 
occasion de tirer des Maures le plus de renseiements 
possible sr les eo»lrées limitropbes de l'Ég. pte, et de s'in- 
former s'il y avait possibilité, en faisant le tour de la c6te 
occidentale de l'AIrique, de trouver un chemin conduisant 
aux trésors de l'Inde« 11 construisit à Saes un observa- 
luire, auquel il adjoignit un établissement dans lequel on 
initiait de jeunes gentilshommes a toutes les connaissances 
nécessaires pour faire un bon navigateur ; et plus tard il 
envoya les lèves sortis de cette école faire des voyages de 
découvertes sur les cotes des Berbères et sur celles de la 
Guinée. Toutefois, ces diverses expeditions restërent sans 
résultats bien importants, jusqu'a ce que Juan Gonzalez 
Jarco et Tdstan raz, battus par des tempèt% découvrirent 
l'lin de Puerto-Santo et, en 1-i18, Madère. Dës lors les 
cotes de la Guinée, si riches en poudre d'or, fixèrent toute 
son attention; mais il ne fallut pas moins que son com'age et 
sa constance à toute épreuve pour triompher des difficultës 
d'une telle entreprise. Sans se soucier desxrailleries et des 
critiques dont ses plans si itardis traient l'objet de la part 
des Ilommes à vue courte, il lit partir, en 1-33, Gilianez, 
l'un de ses marins, avec mission d'aller doubler le Cap 
Noun, regardé alors comme l'extrémité du monde ; celui-ci 
doubla sans encombre le cap Bojador et prit possession 
de ce pa-s au nom du Portugal. Un navire plus grand, 
expédié l'annéi suivante par Henri, poussa encore 20 
mriamètres plus loin que le cap Bojador ; et le sucs qui 
avait couronné ces deux entreprises imposa silence à toutes 
les critiques. Le frère de Henri, PeAro, qui gouvernait pen- 
dant la ufinorité d'Alphonse V, non-seulement lui confirma 
la donation des lies Puerto-Santo et Madère, mais encore 
lui accorda l'assistance la plus active. Le pape Martin V 
confirma également la donation des deux lies, et concéda en 
outre en toute propriété aux Portugais les terres qu'ils 
découvriraient le long de la cote d'Afrique jusqu'aux Indês. 
En 1440, Antonio Gonzalez et Nufio Tritan etant parvenus 
jusqu'a la hauteur du cap Blanc, de jeunes et hardis asen- 
turiers accoururent de toutes parts pour participer à ces 
entreprises et a ces découvrtes. Jusque alors l'inlant Henri 
enavait seul fait tous les frais; mais à ce moment il se forma 
des associations qui, sous sa direction, se lisrërent aux 
mëmes entreprises ; et la pensée qui pendant longtemps 
n'avait préoccupé que ce prince, devint bienl6t l'affaire 
de la nation tout entiëre. Henri n'en déploya que plus 
dardeur encore pour la réalisation de ses plans. En 1666, 
Nuo Tristau doubla le cap Vert, et en lOtt8 Gonzalez Vallo 
découvrit trois des tins A ço r es. L'infant Henri de Portugal 
mourut en 1-13, après avoir encore eu la satisfaction d'ap- 
prendre la dëcouverte de la c6te de Sierra-Leone. 
IIEXRI, prince de Prusse, troisième fils de FfCCie- 
Guillaume V , roi de Prusse, naquit à Berlin, te 18 ianvier 
176, et fut toujours le favori de son pè.re, soit ì cause de 
l'amabilité de son caractère, soit parce que la haine que 
ressentent ordinairement les rois contre leurs successeurs 
augmente leur amour pour leurs autres enfants. Il fit ses 
premiëres armes à seize ans, et assista, comme colonel, à la 
bataille de Czaslau (17 mai 17t2). A Hohen-Friedberg 
(3 juin 175) il était aide de camp général du roi, qui 
pour récompenser sa bonne conduite le nomma général- 
major. La conquète de la Siiësie et l'alliance de Frdénc 
avec l'Angleterre amenèrent, en 1756, la guerre généralement 
COllm»e sous le nom de 9uerre de sept. ans. Le prince 



Henri ¥ prit pari,/t la téte de sa briade. A Rossbach (5 no- 
verobre 1757 ), ce furent les six bataillons du prince Henri 
qui, prenant la colonne française en flanc, ionrnirent au 
général Seidlitz un appui qui fit réussir sa charge. Un peu 
de jalousie a porté Frédéric Il à taire cette circonstance dans 
ses Mémoire. Le prince Henri fut blessé à cette affaire, et 
ne put revenirà l'armêe qu'au mois de lévrier t751L II fut 
alors chargé du commandement d'un oerps d'environ 18,000 
hommes, destiné à appuyer les opérations du prince Ferdi- 
nanti de Brnnçwick en Hanovre et en Westphalie. Pendant 
la campagne de 1759, il fut encore chargé des opérations 
défensives en Saxe. Dans la campagne de 1760, il eut le 
commandement d'm corps de 35,0OO hommes, opposé aux 
Russes, et qui fut chargé d'observer tout le cours de FOder, 
depuis Glogan jusqu'a la mer. Dans ces diverses campagnes, 
le prince Henf, par toutes ses nnonvres, sut conserver la 
haule opinion qu'on avait de sa capacité. Cependant,  la 
fin d== mois d'ao0t, soit ressenliment de la jalousie que lui 
témoignait son frère, soit dissentiment d'opinion sur les opë- 
rations, il quitta l'armée, et refusa toute espèce de com- 
mandement. 
En t76t le prince Henri fut chargé, de défendre la Saxe 
et d'observer l'armée autrichienne de Daun, qui s'etait pla- 
cée devant Dresde. Les grandes opérations de celte cam- 
pagne curent lieu en Silésie, de sorte qu'il n'¥ eut en Saxe 
qu'une guerre deleusive de manoeuvre% où lïnd,'cision de 
Daun (acilila singulièrement le rfle du prince Henri. En 
t'}6 il fut encore chargé du commandement de l'armée de 
Saxe et de la défense de ce pays contre l'armée autrichienne 
et |'arraée des Cercles. La premi:-re partie de cette campagne 
fi=t signal«e par la defaite de I armée des Cercles, qui fut 
obligée d'evacuer |a partie de la Saxe où elle avait péttêtré. 
Le gain de la bataille de Fre.herg (29 octobre), qui lut la 
dernière opération importante de cette guerre, oeuronna la 
loire militaire du prince Henri. 
Immedialement après la paix de Habert,bourg { 15 février 
1763), le prince Henri se retira à son château de Bheinsbe, 
poury jouir du repos, loin du tumulte des ailaires, et se li- 
vrer sans distraction à ses occupations favoriles. Son genre 
de vie était simple et r, gulier. Sa table elait le modële de la 
s,»brieté ; chacune de ses occupations axait ses heures fixes. 
Il aimait et cultivait de preférence la langue et la liftCature 
t anc, aises. Or, amëme delui quelques pieces de pers dansnotrc 
langue, e! un essai I.aique sur la tragedie d'Al--ire, dont il 
voulait faire un opéa. L'amour a'a trouve place dans au- 
cune de ses poés,es; mai. l'amitie y est peinte avec enthou- 
sia-me. Coutre l'habitude tl généraux, et surtot de ceux 
qui ont acquis une reputation utilitaire, la guerre n'etait ja- 
mais le suiet de ses enlretiens; il n'était [,as mème permis 
de paraitre chez lui en uniforme. Il n'clair cependant pas 
inaccessible h la gloire qu'on peut acquérir comme ddlen- 
seur de la patrie : le momment elevé par ses ordres h 
Rheingberg, à la memoire des militaires prussitns qui se 
sont le [»lus distingues, e:t la preuve du contraire. Il n'ai- 
mait pas beaucoup son frère, et ne le comptait pas au nom- 
bre de ceux qui ont fait le bonheur de l'humanilé. Peut-ëtre 
ct éloignement tut-il produit ou augmenté par la circons- 
tance queFrédéric le Grand s'opposa h la demandeque firent 
le Pol-nais du prince llcnri pour regner sur eux, apr la 
mort de Frèderic-Auguste. 
Le prince llenri ne fut point ennemi de la révolution fran. 
çaise; il était p|ut6t, et cela par une conséquence naturelle 
de l'esprit d'ordre, d'humanité et de justice qui dominait 
dans n caractère, parti.an des conAihttions et de la |iberté 
qu'elles assurent aux peuples. !1 ne craignit même pas de 
s'exprimor tuautement a ce sujet, sans égard pour les cla- 
bauderies qui amenèrent la guerre que la Prusse nous fit en 
t79, ni pour les opinions du roi son neveu. Une ¢ircons-- 
tance remarqkable de la ie du prince Henri est la corres- 
lmndance litterairequi eut |leu entre lui le et général 31oreau, 
au suiet des campagnes de ce dernier. Le prince professait 
la plus haute estime pour le général Bonaparte, et admirait 

ses campagnes d'llalie et d .'gypte; mais, par une stalle ou 
sstëme de prudence quïl avait adoptë pour rëgle de ses 
opérations miliires, il blàmnit le monvet  
qui amena pount la poex de CamçFoio. 
 pre Henri rot un snt distrait de s oeeupatiom 
philophiqu et lirair par la rte .«re d 
ds laquelle il oeanda l'armée à laquelle 1 Sax 
inspirent, et qui entra en Bohdme par Toeplilz. Cette gu«re, 
qui n'avait fi de bien rieux  elle-ratine, finit ns e 
pagne. Nous ne parlerons pas d vag que oe pdnoe 
fit, soit Rugie, it eu France (en 1786), et dont lebet 
rl est resoE  nombre des coe d'une litique q 
plu d'objet aujourd'hui. Le poe Hri mourut à Rhe 
rg, le 3 ao0t 180. G " G. n 
H ENBI !", roi d'Hoefi._ Voy 
HENBICIENS  héliques du douziëme sigle, t 
pour chef Hen PEtite, de Toulse, oes¢iple de e 
de B r uy s. urs rs éit à peu p II d P 
busiens. Ils ne bapfiient que I adulte, niaient la 
senoe réelle, délieat I mples et I oex. Ils tr- 
vèrent da int Bnard un veaire ouble. 
On a aossi appel6 Henriciens I partisans des 
d'Allemae Hen IV et Henri V oentre la puissanoe 
tifieale. 
'. HEXRIETTE DE FRAXCE (Mxm), reine d'Al 
rre, fille de Henri IV et de Matie de Mcis, qt 
Paris, en 16o9. A oEe a elle époua Charles Stua, pri 
de Galles, ui, devin roi d*Alerre viatoe 
plus far4, devait e victime de la fureur d factio et 
porter  1te ser l'échafaud. Cette incse, é1 
la foi oetholique, ne ron int à Teli pour 
brser ceUe de son 6ponx. Elle continua, au contraire,  pn- 
tiqu ouveement son culte. Dans un pays fO t le 
protesutisme, cette nduite ne pouvait manr de lui 
susciter des ennemis. rsq les err ciles ci religi 
qui de»olèrent le re de Charles 1 « commenrent à 
en Anglelerre et en s, on l'accu d'aigr son poux 
contre les protestes et de travailler au renversnt de 
reUgion dominante. A la fin, la rellion, pnant le 
le plus sérieux, Benriel{e et son éx oe aceèrent 
faire tf à l'ore. Elle alla demander sur le confinent 
secours d'arm et d'arent, e{ profila, ur y r, du 
maria.e rëoent de  fille alnfe as- le pn royal de 
Hollande. Ce voyage lui donna occasion  dploy« 
grauàe intrl.dité ; car une violente temçète s'étant doeh- 
nee oentre le visseau qui la posait, on la vit mont« 
le nt, et r le calme et le san-froid de s 
rendre le courage aux marins. 
Pe nouveaux dangers l'aendaient à n rets. A 
débarque, une x/ve canonnade I'slUt ds la mson 
elle éit entr pr prendre elque repos. Elle put 
dant arriver ine et uve dans les b de son oux. Au 
mieu des disoerdes crueUes i oennuaient d'açr I'- 
gleterre, elle  distingua en toute ion par son e, 
sa clémence et sa randeur d'Ame. L toeps devt de 
plas en plu diçcil, il lui fallut  parer de n éx. 
Elle ne devait plus le revoir. Béfugi à Exil, et r 
a duemt  lus lu, elle y accoucha, le t 
t, de Henriette, oennue depuis sous le nom de Heu- 
t let t e d'  n  I et er r e.  ennemis vinrent enoere  
cher dans cette retrait, et dix-sept jours s'éent à 
écoul depnis son accchement qu'elle fuyait vers les 
de Franc% ponrsni par  on gls et ples 
d'une mpëte futile. 
Elle onva  pae en proie aux tations c. L 
guerr de la Fronde latèrent bientOt, et eUe en suit 
avec calme et réiguation tout I ul vicissitude. 
Sou ent mme elle se t ui à nquer  chocs 
plus néir : le oern de   trouva un ios dans 
la chambre de sa file, « tent compagnie, ainsi qu'eUe ls 
lui dit ellmme, à oet panvre en,rit, qui n'avait 
lever faute de feu ». Mais ces uffranc n'ient ri 



tIEN t tETTE 
encore en comparaison du coup affreu qle lui porta la 
mort de Charles 1 r, son époux, décapité à Lomlres, le 9 fe- 
vrier t649. Après tant etde si cuisants chagrins, la religion 
seule pouvait lui offrir quelque consolation. Elle courut 
donc s'ensevdir da le couvent de la Visition, qu'Ann 
d'Autch avt fondé à Chaillot.  dl¢ s'occupa dëlever 
pieusement s enfants, et donna à sa communauté l'exemple 
de tours 1 venus. Cependant, des jours plus prospèr 
devaient luire ur ee: le pteur Cromweli ayant 
cdevivre, Char les II remonta sur le trône de son père, 
et en 160 IIenriette eut la joie de renier en triomphe ns 
cette mme Agl¢ffe où douze ans auparavant elle s'était 
vue en butin aux oeups oeants de s ennemis. Malé les 
marqu de dévouent qui lui furent prodi, elle ne 
put supposer le séjour d'une teffe arroe du sang de 
son époux, et revint dans i'ile de paix qu'elle s'6t as- 
suré en France. Apr quatre années d'une vie passoe dans 
un oe¢ qu'elle avait si rarement goùt6 durant son ora- 
geuse ¢xistenoe, elle ¢xpira presque subitement, le 10 sep- 
tembre 1669, à Colom, où elle passait l'CC A quarantejou es 
de là le grand Bossu¢t, prononçi, dans i'fis¢ de Sainte- 
larie  Clmillot, son oraison funèbre, résumait en rmes 
magnifiques la triste destinée de oette infounée prinoesse. 
Paul Tmv. 
IIENBIET WAGLETERE (A), duchse 
d'Orléans, fille de i'infortuné C h a r i e s I  et de H e n r i e t t e 
de Franoe, fille de Henri IV, naquit à Exeter, le 16 juin 
au milieu des erres civiles. Lady 51ofion, sa gouver- 
nante, après l'avoir dérobée pendant deux anné aux re- 
chercs des rebelles, parvint à la conduire en France à la 
reine, sa mère, qui y aait cherché un ile. La jee prin- 
cse donnaitdéjà la mesure de la fieé que, malgré ses aima- 
bl qualités, elle devait conserv toute sa vie; fierté qui, au 
direde Daniei de Cosuac, lui faisait envisager un devoir 
cme une bassesse. Déguisée en petit pa)'san, on ne 
pouvait i'empcber de rp6ter pendant sa fuite : Je ne suis 
p n çaysan, mais ne çrincse. Pour réduire son 
orteil par i'humilité chrétienne, sa mre, retirée au couvent 
de SaintMarie de Chailiot, i'oblig plusieurs fois à servir 
ks relieuseset les pauvre. Lorsque Chafl  sou 
fut rébli s le trône d'Angleterre, la jeune prinoesse ht 
avec sa mère un voyage  Angleterre, d'o elle reint 
bienit pour épouser Philippe d'Orlns, rière de Louis XIV. 
Une tempète qui la força de rentrer au port, et une rougeole 
ç qui survint, retardèrent son arv en France. Enfin, debar- 
que au Hvre, elle y trouva blousent, acoeuru au-devant 
« d'elle avec un empresoement auquel, dit 5me d La Fayette, 
il ne mquait que de l'amour. La duchesse d'Orléan% ra- 
vissante de oe et de jeunesse, atteinle du désir de plaire, 
 environnée de toutes les dcfions, ne sut pas se garantir 
¢ assez de si nombrx p6riis. La galterie en vogue à oette 
 époque, i idées romanqu qu'elle avait puise dans la 
I¢ liérature du temps, lui firent nouer avec le jeune comte 
• de Guiche une intgue plus innoc dans le fond que 
 dans la forme. La malignité s'en empara pour faire paraltre 
un écot intitulé : Amours de Madame et du comte de 
'¢ Guiehe. Danici de Cosnac, évque de alence, premier 
' aumônier de Monsieur, tout dévoné à la pncesse, lui rendit 
. l'Aminent seroe de luire dispaaltre Uédifion entière de ce 
 facheux iioEile, qui repat après la mort de dame, im- 
primé pari les œuvres de Bussy-Rabufin. 
 Louis XIV, qui avait dédainWHenette d'Anglerre dans 
 son adolesnce, revenu de s imprions premières, 
t s'était épris pour elle d'un f sentiment. ultipliant pour 
lui plaire I splendenrs et les {, afin de donner le change 
 à la curiosioE des courtisan% il fit dètre amoureux de 
s ele de L a V a I i i è r e, fille d'honneur de Madame; heu- 
 reusoeent que la feinte, cédant la plaoe à la réalit, ér 
- do la pncesæ le danger qu'elle courait. Mame ne con- 
 tua p moins, par ses charmes et u prit, à jouir aupr 
' da roi de Ious I avantages de la faveur, iusqu'u jour 
f eUe tomba dans une sorte de disgrâce, h laquelle on peut 

-- HENRION 27 
assigner deux principaux motifs : d'abord nne s.rie d'in- 
trigues de cour lit connattre à" Louis XIV, de l'aveu mème 
de la princesse ,la part indirecte qu'elle avaiten¢ à la fameuse 
lethe supposée d,. roid'Epagne à la reine pour t'avertir de 
la paion naissante du roi pour bi e'« de La Vallière ; en se= 
cond lieu, Madame, de concert avec i'évèque de Valence, s'ef- 
forçait de faireasortir le duc d'Orléans de sa nullité en lui 
inspirant le désir des belles actions, et cette continuelle 
préoccupation contrariait les vues politiques du mo- 
narque, qui voyait dans l'abaissement de son Irère un gage 
de sa propre grandeur. Madame, si bien faite pour plaire, 
et qui plaisait à tous, n'avait jamais éprouvé qpc les froi- 
deurs et les dédains du duc d'Oriéans ; une indigne passion 
de ce prince pour le chevalier de Lorraine ;inc mettre le 
comble à ses chagrins domestiques. La princesse crut trouver 
un remède dans l'intervention de Louis XIV pour éloigner 
le chevalier; i'évgque de Valence s'unit à elle, avec la ii- 
berté de langage qui lui était familière. Par une amère dé- 
ception, le roi resta non-seulement sourd a des plaintes si 
justes, mais, saisissant avec empressement l'occasion de 
détmire auprès de son frère des influences qu'il redou- 
tait, il ratifia, au grand désespoir de bladalne, la demande 
d'exil de l'érCue de Valence que blonsieur lui avait adressée. 
Les personnes les plus chères  Madame furent éioignées de 
son service, la marquise de $aint-Cfiaumout, gouvernante 
de ses enfants et son amie dévouee, exilee et remplacée par 
la marécbale de Clairembault, qui Cevait les jeunes prin- 
cesses ses filles à hamr leur propre mère. Tant de chagrins 
parurent devoir trouver leur terme le iour o0 Louis XIV 
eut besoin de sa belle-soeur pour détacher Charles Il de 
l'alliance de la ltollande. Le chevalier de Lorraiue fut 
éloigné; la princesse traversa le detroil et revint rapportant 
le traite obtenu de son frère. Hclas! le triomphe fut comt 
et trop tSt suivi de ces mots funèhres : Madame se »meurt, 
Madameest morte! Saisie à Saint-Cioud de douleurs vio- 
lentes, après avoir bu nu verre d'eau de chicoree, elle 
expira en quelques heures, le t3 juiu t670, à peine .ge de 
vingt-six ans. L'abhé Feuillet, avec une rudesse salutaire 
peut-ètre, mais qui nous parait violente, Bossu et, avec 
des parole« de consolation plus douces, i'assistël'ent à ses 
derniers moments. Les medecins assurèrent qu'elle était 
morte dt cholera-morb«s; mais on a lieu de croire que 
leur opinion filt dictée par Louis XIV, dont la politique etait 
de m,.nager sa nouvelle alliance avec l'Anglcterre. Les pro- 
habilites, appuyées sur la plupart des temoignags contem- 
porains, sont pour une mooE violente, occ.asiolmée par un 
poison subtil que le chevalier de Lorraine aurait envoyé 
d'ltalie, où il était alors exilé. Toutefois, aucune prelve 
positive n'en a été fournie. Outre un fils et une fille morts 
en bas ge, Henriette laissa deux filles, t'une mariée à 
Cilarles Il, roi d'Epague, l'autre à Victor-Amcdee, duc de 
Savoie, 
L'histoire d'Heuriette d'Anglelerre a été écrite h son point 
de vue romanesque par g de La Fayette. On trouve aussi 
des renseignements sur elle dans les mémoires du temps et 
dans les lettres de blme de Sévigué. llais pour considérer 
sa vie sous son aspect certainement plus reei, à la fois 
sérieux et malheureux, on peut lire les Moemoires de Daniel 
de Cosnac, que nous avons publiés en 1852. 
C t« Jules nE Cos.Ac. 
HENBION DE PANSEY (PIEmtE-PACL-lCOLS), 
vaut magistrat français, naquit en 1792, h Tréveray { blense). 
Il étudia le droit à Pont-à-Moussou. Son droit acheve, fi 
vint à Paris en 1762, et y exerça dans une obscurité a peu 
près complète la profession d'avocat jusqu'en t73. La na- 
ture l'ayant doué d'une volonté aussi énergique que pa- 
tiente, il approfondit la science que tant d'autres ne font 
qu'effieurer, et il suppla parle travail au défaut de 
pidité dans la conception. Il publia plusieurs lraités dignes 
d'estime, qui n'aboutirent pas encore à le faire sortir de la 
foule; mais enfinon Traite des Fefs attira sur lui les reard 
des jurisconsulte et des praticiens, et décida de sa répu- 
4. 



28 
ration. Bientét il fut surchargé d'affaires, et les pins épi- 
neuses ne manquaient jamais de lui ttre proposCs. Seule- 
ment, c'est à titre d'avocat consultant qu'il les acceptait, 
laissant le reste de la besogne aux jeunes stagiaires ou aux 
avucats plus riches de langue que de fonds. Il Cr;vit une 
grande partie des meilleurs articles du Rd2ertoire uni- 
versel de Jurisprudence de Guyot, et ajouta une sorte de 
supplement à son Train des Fiefs, sous le titre de Disser- 
tation f#odale. Sur ces entrefaites, la révolution éclata. 
L'ancienne législation française, renversée de fond en 
comble par la Constituante, détruisit en mme temps tout 
lïntrt qui s'attachait aux recherches d'Heur;on de Pansey 
sur les droits féodaux. Alors il qui{ta Paris, et vint s'éta- 
blir / Joinville. C'ëtait d'ailleurs un homme d'étude, à qui 
il fallait absolument le calme et .le repos. De Joinville il 
alla ensuite à Cbaumont. Nommé administrateur du dé- 
partement de la Marne, il s'y lit remarquer par sa modé- 
ration, sa vigilance et son impartial;tC On ne sait pourquoi 
il quitta ses Ionctions ; mais celles qu'il remplit ensuite ì 
l'école centrale de Chaumont, où il professa la législation, 
semblent indiquer lïncompatihilitë de ses gn0ts avec la poli- 
tique. Nanmoins, il n'exerça pas longtemps le professorat; 
il devint membre de la cour de cassation dès que le gou- 
vernement consulaire s'établit; et ce fut en grande partie ì 
la considération méme que lui témoignèrent ses collëgues 
qu'il dut presqueau.sitét l'honneur de les présider. L'empe- 
reur fit plus : il i'appêla au conseil d'Elal, où c'est trop peu 
dire que d'affirmer que Napoléon avait du plaisir ì l'Couler. 
En 1814 Heur;on de Pansey fut chargé, par le gouver- 
nement provisoire, du département de la justice. Il accepta 
ces graves fonctions, sans cesser pour cela d'appartenir ì 
la cour de cassation, et il les remplit jusqu'au 20 mars 
lsls. Il crut alors, ainsi que la plupart de ses collègues, 
ne devoir pas suspeedre les séances de la cour, regardant 
cette résolution comme essentielle pour le maintien de 
I ordre. Il traversa les cent jours, detaché de toute préoc- 
cupation politique dans l'exercice de la justice, et fut nommé 
chef du conseil privé de M. le duc d'Orléans dès que ce 
prince fi,t rentré en France. Enfin, en 1828, il fut appelé 
au sige de premier président de la cour de cassation, en 
remplacement de M. Desèze. Par cet acte de jtLqice, 
Charles X couronna dignement cette Ione vie passée dans 
la pratique des plus hautes vertus et honora la magistrature 
nouvelle dans la personne du plus respectable de ses repré- 
sentant». Heur;on de Panse, ne ]nuit pas Ionemps de 
cet honneur ; il mourut en 1829, .Agé de prës de quatre-vin- 
dix ans. Etre autres ouvrages, il avait publié l'Êloge de 
Dumouln, l'Eloge de Mathieu Mole; Des Pairs de 
France de Fancicnne constitution française; De FAu- 
toritd judiciaire dans les gouvernements monarchi9ucs , 
livre savant, bien écrit, plein de recl,erches historiques et 
dont l'objet est de détertrfiner la compétence judiciaire et 
dYtablir la Iëgalité du conseil d'Êtat; Du Pouvoir muni- 
cipal et de la Police intérieure des Communes; De la 
Compdtence des Juges de Paix; Des AssembNes natio. 
hales en France deluis l'dtablissement de la monar- 
chie, etc., etc. Charles sn. 
IIEXRIOT (Fsxçoas), naquit à Ianterre, en 1761, 
dh,ne famille de cultivateurs, qui, malgré sa pauvreté, put 
lui faire donner un commencement d'instruction ; car il 
s'exprimait avec facilité et écrivait assez bleu. Sa première 
condition fut pauvre et pénible : qu'il ait servi comme enfant 
de ci,oeuf, domestique, ou clerc d'huissier, nous ne voyons 
là rien q,,i l'accuse. Lorsque le mouvement de 1789 com- 
mença, il était, à l'age de trente ans, parvenu à obtenir une 
place de commis dans l'octroi de la capitale. Le peuple 
a)ant mis le feu aux barrières, dans la nuit du 12 juillet, 
il quitta son poste, et le laissa faire. Sa sagacité comprit que 
de nouveaux temps étaient venl,s, et I pins forts étant 
res amis, il passa de leur cété. Depuis il disparut dans les 
grO,lpe; 9 l'emploa à presser l'action révolutionnaire 
par son énergie. ltais dans les premiers temps il ne fut 

HENRION- l:oENRIQurt,-tturt, • 
pas aperçu, et vécut, comme tant d'autres, des subvntions 
des partis. La nuit d.. 9 au 10 aoOt signala son audace : 
il fut remarqué. Il s'attacha bientôt de fait à la garde de 
Bobespierre : celui-ci, le recommandant à sa clientelle, le 
fit nommer chef de la force armée de la section des Sans- 
Culottes. Il fut chargé, le 3o mai 1793, par le «onseil général 
de la Commune, du commandement provisoire de toutes 
celles de Paris; et ce fut surtout à son énergie que le parti 
popolaire dut, au 31 mai et au 3 juin, la victoire qu'il rem- 
porta sur la Gironde. lans cette derniëre journée, la 
Convention, dominée un instant par les girondins, délibé. 
rait, entourée par près de 80,000 hommes des sections, 
commandês par Hcnriot, avec 163 bouches à feu, quand 
Barrère proposa à ses collègues d'aller tenir séance au 
milieu du peuple. Cette motion ayant été accueillie avec 
enthousiasme par la major;tA, l'assemblée entière se rendit, 
son président Hérault de Séchelle en tgte, dans la 
cour des Tuileries. Les sentinelles la laissèrent d'abord 
passer, mais quand elle arriva en face des canonniers et 
de Henriot, et que Hérault ordonna à celui-ci de faire place 
aux représentants du peuple : « Le peuple ne s'est pas levé, 
répondit Henriot, froid et impassible, pour entendre des 
phrases; c'est l'arrestation des traltres qu'il exige. » Saisissez 
ce rebelle, s'Crie Hérault en s'adressant aux soldats. 
Canonniers, à vos piëces, reprend Henriot d'une voix ton- 
nante; soldats, à vos armes, et vous autres, dispersez-vous: 
La Convention renlra dans le local deses séance.s, et la 
ruine de la Gironde fut consommée. 
Ce coup de main, ce service rendu au parti démocra- 
tique, le fit élever dëfinifivement au poste de commandant 
de la garde nationale de Paris; il lui valut à l'élection la 
majorité des suffrages : il eut 9,081 voix, et son concurrent, 
Raffet (de la Butte-des-Moulins), n'en réunit que 6,095. 
Au 9 lhermidor, les mesures militaires qu'il prit furent 
ronfles et insuffintes : il perdit tout parce qu'il se crut 
suffisamment fort. Cinq gendarmes suffirent pour l'arrèter 
et le conduire garrotté au comité de sOreté générale. Mais 
i Cofinhal vint à son secours, conpa ses cordes, et Henriot 
s'élança de nouveau sur son cheval. Rencontrant aussitét 
nne compagnie de canonniers, il lui ordonna de marcher 
à la Convention, et de diriger sur elle ses canons; les 
soldats obéirent d'abord, mais, apprenant que l'assemblée 
venait de le mettre hors la loi, ils l'abandonnèrent. Alors 
il perdit la tte, et fit faute sur faute. La Commune insuée 
comptait sur lui, et il n'agit point; les embarras vinrent de 
sec propres soldats, qui l'arrgtèrent et le livrèrent aux com- 
missaires de la Convention. Il fut conduit  rh6tel de 
ville. Cofinhal, indigné, le saisit avec vigueur, et le lança 
par la feuCre surun tasde fumier, dans une cour obture, 
près d'un égoOt, en lui criant: « Va, misérable! » Il fut ra- 
massé mutilé, brisé, sans comtaissance. Mis hors la loi, 
Fouquier-Tainville constata le lendemain son identité, et 
l'envoya à l'échafaud. Frédéric 
HENRI QUEL-DUPONT ( Locs-PIF_.P.I E', né à Paris, 
en 1797, est en possession d'un des premiers rangs parmi 
les gravenrs de nos jours. Son véritable nom est llenriquel, 
celui de Dupont aant été pris par son père pour complaire 
à une tante qui l'avait élevé. M. Henriquel consacra 
premières études à la peinture historique, et passa trois an- 
nées dans l'atelier de Pierre G n é r in. Cest l/t qu'il apprit 
ette correction élégante, cestyle élevé, cette pureté de 
essin, cette sobriété pleine fie goOt, dont il ne s'est jamais 
départi. Ses progrès furent rapides; mais ne se sentant 
pas la hardiesse nécessaire pour aborder la peinture l,isto- 
rique au moment où les David, les Gros, les Guérin, les 
Gérard, les Girodet, captivaient l'admiration par de nom- 
breux et immortels chefs-d'oeuvre, le jeune Henriquel pré- 
Ira embrasser ,ne carrière moins brillante, mais plus sure. 
!1 choisit la g,'av«re, et passa de l'atelier de Guérin dans 
celui de Bervic, t,n des plus I,abiles maltres en ce genre. 
A l'/,ge de vingt-et-,m ans, en 1818, ;J sortit de l'atelier du 
maitre pour entrer daus le siee. 



M. Henriquel débuta par quelques planches pour la 
branœe ou pour des recueils de gravures, les unes destinées 
 orner les belles éditions de nos grands écrivains, les au» 
tres, un peu plus tard, devant faire partie de la collection 
de gravures du ,Muée royal. Un de es premiers ouvrages 
et de ses meilleurs fut un portrait de femme d'après Van 
Dyck, où toutes les admirables qualités du mal{re se trou- 
,vent rendues avec cette fidëlitc intelligente qui fait de la copie 
le pendant de l'original. Ce fut son début au salon : il attira 
l'attention. M. Henriquel fit alors un choix judicieux parmi 
les peintres de nos jours. Le portrait de M. Pastoret et le 
Strafford, d'après Delaroche; le Gustave Wasa, d'après 
ttersent; le porlrait du roi, d'après Gérard; celui de Bertin, 
d'aprës In,es; Le Christ consolateur, d'après Scheffer, 
sont ses principaux ouvrages. Dans tous le dessin occnpe 
la premiëre place. 
Comme tous les hommes distingués dans leur art, M. Hen- 
riquel en a cherché des applications nouvelles ; il a essayé 
quelques gravnres ì l'aqua-tinta, et le Cromwell, d'après 
Delaroche, a constaté le succ6s de ce procédé nouveau. On 
doit encore au burin de 51. Henriquel la reproduction de la 
fresque exécutée par M. Delaroche pour l'hémicycle de 
l'École des Beaux-Arts, travail qui lui valut la grande médaille 
d'honnem au salon de 1853. En 1849 cet artiste conscien- 
cieux a été appelé à succéder à lichomme dans la section 
de gravure de i'Académie des Beaux-Arts. 
HEXPY (Phi-rocK), un des fondateurs de l'indépen- 
dancedes Ètats-Unis, né le 29 mai 1736, dans le comté de Ha- 
novre en Virginie, fut mis en apprentissage chez un mar- 
chand à l'àge de quinze ans. Dix ans plus tard il se voua 
à l'Cude du droit, et, après une courte préparation, s'éta- 
Llit avocat. Il logeait chez son beau-père, qui tenait un ca- 
baret, et eut à lutter pendant plusieurs années contre le 
besoin. En 1765 il fut Cu membre de la chambre des 
dputés, dans le but exprës de provoquer une opposition 
a l:acte du timbre imposé par l'Angleterre. Après avoir 
va!nement attendu une proposition contre cet acte, formulé« 
par quelque membre plus ancien et plus expérimenté, et lors- 
qu'il ne restait plus que trois séance.s, il soumit, au mois de 
mai, à l'assemblée ses célèbres conclusions contre la loi du 
timbre. En motivant sa proposition, il s'écria au plus fort de 
la diussion:, C¢r a eu son Brulus, Charles 1 « son Crom- 
well, et Georges II1 ...... Haute trahison! » s'Crin à son 
tour le président de l'assemblee ; et de tos c0ts on répCu 
cette exclamation. Henry, sans perdre contenance, ajouta 
avec énergie : • devrait profiter de leur exemple. Si c'est 
la de la haute trahison, faites-en ce que vous voudrez!  A 
partir de ce jour, Henry, considéré comme l'un des cham- 
pions des libert¢s coloniales, fut le favori du peuple. Il resta 
membre de la chambre des députés jusqu'à la fin de la ré- 
volution, lit partie de toutes les commissions importantes, 
et fut député au premier congrs général, qui se réunit à 
Philadelplde, le  septembre t77. Il prit part à toutes les 
mesures qui amenèrent le renversement du pg.uvoir royal, 
et fut nommé en 75 commandant de toutes les forces mi- 
litaires organisé.es pour la défensede la colonie de Virginie; 
pourtant, il se détail de ces fonctions, convaincu qu'il était 
qu'il servirait mieux sa patrie dans les conseils de la na- 
tion que sur les c.hamps de bataille. Bient(t après, le pre- 
mier il fut Cu gouverneur de l'Ètat de Virginie. En 1786 
les suffrages de ses concitoyens l'appelèrent à faire partie de 
l'assemblée réunie à Philadelphie, pour modifier la constitu- 
tion des Ets-Unis; mais il n'accepta point ce mandat, afin 
de pouvoir se livrer librement à l'exercice de sa profession 
d'avocat. Élu membre de Passemblée qui devait prononcer 
sur le sort du projet de constitution fédërale, il reconnut 
bientôt les avantages dn système fédératif, et tout ,en 
combattant avec succès diverses dispositions du projet 
dnt les tendances lui semblaient dangereuses pour la 
liberlé, il devint un loyal fédéraliste. Il mourut le 6 
ju.:n 1797, laissant quinze enfants, auxquels il transmit 
ne grande fortune, acquise par suite d'achats de terres 

,. UPONT -- HÉPATITE 29 
faits avec intellence dans les dernières années de sa vie. 
HÉPATIQUE (en grec «tx6, de :, foie), qui 
appartient au foie. Cette épitbëte, lue certaines nomencla- 
tures ont appliquée à des artères et à des reines, ne s em- 
ploie plus. guëre que pour dsigner un conduit partiel du 
foie. Elle sert sussi à spécifier certaines maladie du foie, 
par ex.e.mple les co li q ue s hdpat iq ues. 
|IEPATIQUE (Botanique), genre de la famille des 
renonculacées ëtahfi par Dillen et ainsi nommé parce qu'on 
leur a attribué des vertus dans les maladies du foie ( 
II ne renferme qu'une seule espèce, l'h#patique trilobœee 
( hepatica trilobata ), vulgairenent trinitaire et herbe de 
la Trinitd, qne Linné rangeait parmi les an é mo n e s. C'est 
une plante vivace, basse, à racines fibreuses, à feuilles tri- 
lobées, d'un vert luisant, tavelées de blanchâtre, rougeàtres 
quand elles vieillissent. En fevrier ou mars apparaissent de 
nombreuses fleurs blanches, roses ou bleues, simples ou dou- 
bles, suivant la variété. Aussi la précocité et la beauté de 
ces Ileurs font-elles cultiver dan s tous les jardins l'hépatique, 
qui ne croit naturellement que dans les réons botCies de 
l'Ero.pe et de l'AraCique. 
HEPATIQUES (¢rgptogames), ordre de vég,taux 
cryptogames intermédiaires entre les licbens et les 
mo usses. Par leur port, les hepatique» ressemblent anx 
lichens foliacís; aux mousses, par les organes de la fruc- 
/ifi«ation. Elles croissent dans les lieux humides. On les di- 
vise en cinq tribus ainsi dénommées : J«ngermanniees, 
rnarcha«tides, rnonocléées, anlhocérotes ci riccies." 
HÈPATIS.kTIO. (de r.:é, foie). Voye: Cxmr- 
CATION. 
IlÉIATITE (de ,ap, .a«, foie), inflammation du 
foie, maladie fréquente dans les climats chauds, aux Indes 
et en AIgérie, surtout dans la province d'Otan : on l'observe 
durant l'CWdans nos climats tempérés, et elle attaque le 
plus ordinairement les intempérants, les hommes à vives 
passions, mais surtout ceux qui s'adonnent aux liqueurs 
fortes, aux excès de table. Quand l'hepatite est aiguë, on 
saigne, on baigne, on fomente, on impose une diète se- 
vère ; on prescrit des breuvages tempérants, des boissons 
acidules, mais surtout des iaxatifs, en particulier le calo- 
mel, et mme jusqu'à salivation. L'hépatite chronique peut 
donner lieu à un grand nombre d'affections chroniques et 
peu curables, à des abcès dangereux et des adhérences, des 
altérations de substance et de volume, ì des ossifications, 
mme à des calculs ; affections diverses que l'on désignait 
autrefois sous le nom vague et collectif d'obstructons ; et 
nous devons reconnaitre que ce mol convient assez à de 
pareils maux, puisque l'i c t è r e, qui se montre fréquemment 
dans tous, semble attester que le cours de la bile est entravé 
et ses canaux obstrues. Outre la douleur vers le c6té droit 
et les dérangements de la digestion, outre les nausées, la 
teinte souvent citronníe de la peau et de la sclérotique de 
l'oeil ; outre la fièvre, la constipation, la nuance safranée des 
urines, souvent l'hépatite se décèle par une douleur vers 
l'épaule droite; quelquefois aussi elle suscite sympathique- 
ment une toux sëche. La douleur de l'Cunie ne saurait 
Cre attribuée qu'un nerf diaphragmatique, dont le foie 
reçoit quelques minces filera, ce ner[ ayant son origine an cou. 
Les inllammations du foie sont ordinairement accompa- 
gnées de fièvre, et les sympt6mes en diffërent selon Iœe siCe 
qu'elles affectent. Eles peuvent également simuler soit la 
péritonite, soit la pleuréie. Souvent les douleurs qu'ellg« 
occasionnent induint le tronc à se fléchir. Enfin, les 
suites tacites de ces graves affections ont plus d'une fois lait 
ilhsion avec la pltbisie pulmonaire, erreurs dont l'issue du 
mai ne dissuadait pas. 
L'inllammation n'a pas de signe plus pathognomçnique 
que la formationdu pus; et il n'est pas très-rare que des abcès 
signalent l'hépatite aiguë ou chronique. Ces abcès sont plus 
fréquemment superficiels que profonds ; et la matière dont 
ils sont formés est presquc toujours déposée entre la mem- 
brane dile «le Glisson et le feuillet superpç»é du péritoine? 



30 HÉPAT1TE 
Plus raressont les abcès profonds siégeant dans la substance 
mème du foie, et l'on a souvent pris pour tels des tuber- 
cules ramollis ou mme des amas de sang, le pus du foie 
ayant la mme couleur vineuse. Les abcès du foie restent 
ffêqnemment ignorés jusqu'a fuueste événement, malgré 
la douleur et la fièvre dont ils sont précédés, et malgré 
les frissons qui en signalent la formation- Cependant une 
fluctuation locale et l'oedeme, quand ils sont contigus aux 
parois du ventre, en ont quelquefois fait reconnaltre l'exis- 
tence. I:-L. Petit en cite un exemple;némorable, et des mé- 
decins modernes en ont ajouté d'autres. Ces abcès, souvent 
volumineux, sont presque toujours mortels, soit en raison 
du trouble qu'ils suscitent dans les fonctions de la vie, soit 
parce qu'ils s'ouvrent brusquement dan le pritoine, dans 
la plèvre droite ou dan« la veine-porte. Cependant, il n'est pas 
sans exemple que de pareils dép5ts se soient heureusement 
fait jour dans l'estomac, dans le colon transverse ou l'ascen- 
dant, et quelques fois méme dans la vésicule biliaire, la- 
quelle versait le pus dans le duodénum par le conduit 
cholé.ioque. D'autres fois on les a sa»s s'ouvrir soit dans les 
bronches, et peu h peu, après avoir traversé le diaphragme, la 
plèvredouble et le tissu du poumon droit, soit à l'extérieur, 
à travers les muse!es abdominaux et la peau; conjonctures 
dans lesquelles la guérison n'est pat absolument impo- 
-ible, en conséquence des adh6rences ttélaires que la nature 
ménage entre ces abcès et les organes dans lesquels ils vont 
s'ouvl']r. 
biais ces adhérenoe.s morbides du foie aveu les organes 
«:[Iii lui sont contigus ne sont pas toutes saintaires, alors 
mme que ces organes en ont pris l'iuitiatlve. 
Dans ces inl]ammtions chroniques du foieet leurs suites 
,iiveroes, on a recours à des saignées locales, aux laxatif«, 
aux rejetions mercurielles, auxappositions de ventouseset de 
moxas vers l'hypochondre douloureux, au • eaux bicarbona- 
tées et acidules, jointes aux infusions de quinquina. Frcquem- 
ment les cures sont assez lentes pour que les malades in- 
terviennent avec compétence dans le choi des remCes. 
D" Isidore Bouaeo,. 
IIÉPATOSCOPIIà ( ,lu grec r,, foie, et çzo, je 
rgarde ), di, ination par le foie. La partie principale que 
les anciens observaient, après les sacrifices, dans les eu- 
trail/es ds victimes, etait le foie. S'il était corrompu, ils 
croyaient le rete du corps affecte de cette souillure, et ils 
cessaient l'examen. S'il etait naturellement rouge, s'il était 
sain et san3 tache, si la tte de t'animal était grosse, s'il 
avaitdeux ttes on deux foies, si les poches étaient tournées 
en dedans, c'étaiênt autant de signes de succès et de pros- 
périté. D'autre pari, on devait s'attendre à des dangers, ì 
ds désappintements, ì des revers, s'il y avait trop de 
cheresse ou un nœud entre les deux parties du foie, s'il 
était sans lobe, ou sïi manquait tout ì fait. Y aperce- 
vait-on quelque ulcère, était-il rétréci, mince, dur, deeuloré, 
rempli d'humeurs viciées ou corrompnes, Cait-il depla¢6, 
ne se détachait-il pas d'une manière visible des entrailles, 
quand on les faisait bouillir, ou enfin s'amollissait-il soumis 
h cette épreuve, on en tirait un mauvais augure. Un lute 
resserré on enveloppé annuncait un prochain malheur. 
Il ÉPlIESTIOX. 
HEPTACORDE(de .=-i, sept, et Xoë, corde), lyre 
ou cithare/ sept cordes, longtemps la plus célèbre et la 
plus usitée de toutes. Quoique cet instrument reproduisit les 
sept .voix de la mus/que ,.l'octave y manquait encore. Simo- 
nide l'y mit,  ce que nous apprend Pline, par l'addition 
d'une huitiëme corde, c'est-h-dire en laissant un ton entier 
d'intervalle, entre les deux t é t r a c o r d e s. 
Les Grues nommaient encore ainsi un système 
form de sept ton. 
IlEPTAGONE ( de -, sept,:et "f','.'a, angle), figure 
composée de sept c61 et de sept angles. On appelle hep- 
tagone réfulier celui dont tous les anges sont égaux. La 
surface de l'heptagone régulier estCale au produit du carré 
d i'uu de ses c{tes par 3,ï339... 

HEP 
I En termes de fortification, on appelle hepta9one une 
place fortifiée par sept bastions. 
! En arithmétique, on entendpar ombres heptagoes des 
nombres polygones oi la différence des termes de la 
i progression arithmétique correspondante est 5. Entre plu- 
sieurs propriétés, le nombre heptagone en a une assez re- 
marquable : c'est que si on le multiplie par 40 et qu'on 
. ajoute 9 an produit, la somme sera un nombre carré. 
; Ainsi I X 40÷9-- 49 ---7  
i 7 × 40÷9 ---- 2 17 • 
! 18 X t0 -[-9  39.9 -- 27  
I 
, 3i X 40 -I- 9 ---1369  37 a 
55 X 40 -I- 9  2209  47 a, etc. 
Ici il est évident que la série des carrés formés est 7 
27', 37 , 47 a, etc., dont la différence commune des racines 
est to, qui est le double de la diflerence eummuue de la série 
arilhmétiqne d'.ù le heptagones sont formés. 
HEP'I'A31ERON (du grec r«d, sept, et ,[:, jour, 
journ6e), ouvrage composé de parties distribuées en sept 
journées, tel que l'lteptarnron rustigue et lHeptam«ron 
de la reine de..Vavarre, M a r g u e r i te, sœur de François I er, 
recueil de soixante-onze contes, la plupart graveleux, quoi- 
que émanant d'une princesse de mœurs sévères ( 
CONTE » 
I HEPTANDRIE (de -:oE, sept, et -,,p, homme, pri ici 
t pour dtamine ), septiëme classe du système de Linné (vo9e:, 
I I?rA.Kw) comprenantles plantes, peu nombreuses, qui on 
; sept etamines. 
HEPTARCHIE. C'est ainxi que l'on désigne les sept 
royaumes fonds parles Anglo-S axons dans la Grande 
Iretagne. La domination romaine, ou plut6t les dis- 
cords sanglants des snccesurs de C o n s t anti n, et le des- 
purisme de la soldatesque avaient eu dans cette fie les 
mes résultats .que dans les antres parties de ce vaste empire. 
Les peuples, amollis, abrutis, dépouilles d'énerve et de na- 
tionalit(, n'ctaient pins que des esclaves, toujours prêts 
changer de martre. Le patriotisme et le courage des insu- 
laires s'étaient réfugiés dans la CalCoute, avec les Écossais 
et les Pictes; et dès que l'empire, épuisé, croula de toutes 
parh sur lui-m,.me, ces deux nations belliquenses franchirent 
le mur de Sévère, et portèrent la mort et le ravage chez les 
Bretons, ahandonnés a leur propre faibles. Ceux-ci implo- 
rèrent le secours d'A6tius; mais le gnral était trop oc- 
cupé à contenir le débordement d'Attila dans les Gaules 
pour ttre en état de leur porter secours. Les Bretons n'en- 
' rent de refuge que darls leurs fordts; et, pour comble de 
manx, naquit au milieu d'eux une guerre de relion, avec 
le fameux Morgan, qui prit en Grèce le nom de Pélage, et 
dont les sectateurs ont été connus, perséeuté et damnés, 
sous le nom de pdlagiens. Le Iche Vortigen, que les Bre- 
tons s'etaient donné pour roi, ne trouva pas de meilleur 
moyen de faire face à un étranger que d'en appeler un autre. 
Les Saxons quiltërent, sur son invitation, les contrées du 
Hoistein, du Schleswig et de la Batavie, sous la eunduil 
d'Hengist et de Horsa. Ces deux frëres partirent des 
bouches de la Mense avec trois vaisseaux, abordèrent, en 649, 
dans File de Thanet, repoussèrent les Pictes et les Ëcossais 
dans leurs montagnes, et, charmés de la beauté du pays 
qu'ils 6talent venus délivrer, ils appelèrent cinq mille de 
leurs compagnons pour les aider à le conquerir.  Bretons 
ne lardèrent pas à reconnattre la faute qu'ils avaient faite; 
iis virent bient6t après leurs dangereux sauveurs faire 
alliance avec leurs ennemis; et le jeune rai Vortimer, qu'ils 
prirent à la place de son indigne père, leur rendit assez dë- 
nergie pour honorer du moins leur défaite. Le Saxon Horsa 
lut tué dans une bataille près d'Ailsford ; mais il fut cruel- 
lement vertsWpar son frêre Hengist, qui massacra les fem- 
mes, les enfants, les vieillaxds et les prètres. Quelques Bre- 
tons, éCllappés à ce carnage, vinrent chercher un asile dan 
l'Armoriqlle, à laquelle ils donnèrent le nom de reta9ne" 
Iêngist fonda sur leur ruine le rosaume de Kent, dansle pays 
ce nom, dans les comtés d'Es'sex, de bl/dlessex, et dans 



.,,.ilE -- HERACLIDES 
une partie du Surrey. Les Angles, voisins des Saxons en 
Germanie, entendirent parler de ces conquêtes, et se mlè- 
rent dès lors à tontes leurs migrations. Ella conduisit une 
colonie nouvelle dans le mi«ti de l'lle, et fonda, en ,77, le 
royaume de Sussex, ou des Saxonsdu sud, dans le comté 
actuel de ce nom, et dans le reste du Surrey. Cordick, autre 
conquérant, le suivit de près; mais il rencontra devant lui 
le fameux Arthur et ses cl,evaliers de la Table-Ronde, qui 
sont peut-Cre aussi vrais que les hévos d'Homère et du Tasse. 
Quoi qu'il en soit, héros d'histoire ou de roman, Arthur, d'a- 
près les traditions adoptées, remporta douze victoires sur 
Cordick et ses altiés. Mais il périt dans la treizième, et avec 
lui la dernière espérance des Bretons. Cordick et son fils 
Kernick s'établirent sur les terres du Hauts, du Dorset, de 
WilL% de Bercks et de t'fie de Wight, qui formèrent le royau- 
me de Wessex, ou des Saxons occidentaux. D'autres voleurs 
privilégiés arrivèrent successivement de la Germanie pour 
fonder le royaume d'Essex sur le territoire de Londres et de 
Colchester, celui d'Estangtie, dont le nom désigne assez les 
véritables créatears, dans les provinces de Cambridge, de 
Suffolck et de No;-folck; celui de Mercie, qui comprit les 
provinces du centre, et eut Hereford pour capitale; plus tard 
enfin, en 547, celui de Northumberiand, qui sëtndit jus- 
qu'en Écosse, quoi qu'en ait dit le patriotisme de ses chro- 
niqueurs. Il ne resta en deh,rs de Fheptarchie que les neuf 
dixicmes de cette Écosse, le pays de Galles et celui de Cor- 
nouailles, où la vieille race des Bretons et la religion chré- 
tienne se réfuërent. Partout ailk.urs s'établit le sceptre de 
fer des Saxons et des Angles sur des monceaux de cadavres. 
Il serait aussi long que fastidieux de donner ici, et pendant 
près de quatre siècles, la nomenclature des rois qui ont suc- 
cessivement porté les sept couronnes. Egbert, dernier reje- 
ton de toutes ces familles royales, régna seul sur les sept 
royaumes, h l'ensemble desquels une assemblée nationale, 
urique des parlements, donna le w,m d'A n 91 e t e r r e. 
L'heptarchie finitainsi, l'an 830, après une durCale 381 ans. 
Et le grand Egbert, comme l'appellent les Anglais, se munira 
digne de sa fortune, en rejetant dans la mer les Danois, q,,i 
venaient déjà lui disputer la po.sesion de son royaume. 
VI£.iIiET, de |'Académie Ffancaise. 
HÉRACLÊE nom commun h un grand nombre de 
villes anciennes ainsi appelees en l'honueor d'Hercnle, et 
parmi lesquelles on distinguait les s»ivanles : 
HEACLÉE en Bithyuie, ou Eribolum, sur les bords du 
Pont ou de la mer Noire, d'où son surnom de Pontica, 
aujourd'hui lreMi, colonie milésienne très-IIorissante, qui 
elle-même |onda pIasieurs autres colonies; on montrait près 
de là l'entrée des enfers ; on y réoellait aussi l'aconit, né, 
dit-on, de la bave de Cerbère, lorsque Hercule le rira des 
enfers. Après avoir longtemps exi»té ì l'Cat de république 
ar.ocratique, elle passa sous la domination d'un seul, le 
tyran CICrque et ses descendants. Par la suile, elle dépendit 
des souverains de la Syrie, et finit par ëtre incorporée avec 
toute la Bithynie à ['empie romain. 
IIEACLÈE en Thrace, qu'on appelait aussi Printhe, et 
qui se nomme aujourd'hui ÉreMi, sur la Propontide, près de 
Byzance, séjour d'Alcibiade dans son second exil, fameuse 
par un long siíge qu'elle soutint contre Pldlippe de bIacé. 
doine, et à la suite duquel elle fut prise, l'an 3 1 avant J.-C. 
HÉRACLÉE en Lucanie { basse ltalie ) aujourd'hui Pol- 
coro, sur le golfe de Tarente, entre cette ville, dont elle 
était une cotonie, et Métaponte ì l'embouchure de l'Aciris ; 
elle fut très-commeçante et très-riche, et suivit l'alliance 
d= Rome du temps de l'invasion de Pyrrhus, qui, l'an 280 
avant J.-C., remporta une victoire importante sous ses 
murs. Les Romains la soumirent en mme temps que Ta- 
rente. 
ItEACLÉE en Sicile, près d'Agrigente, colonie erCoise, 
comme l'indiquait son nom d'Heraclea Minoa; elle fut 
très-considérahle et très-riche jusqu'au moment où elle .rut 
ruinée par les Carthaginois. 
HÉRACLÊIà dans la Gaule narbonnaise, située, au rap- 

31 
port de Pline, ì l'embouchure du Rh6ne, et la m.me vrai- 
semblablement que celle qui est surnommée Caccabwria ou 
Fanum Sancti Eutropii, auiourd'hui Saint- Trope. 
HERACLÈE dans la Gaule iennoise, sur la rive droite 
de la grande embouchure du Rh0ne, et première résidence 
du re! goth A t.a n I f. 
HEPACLEES, fttes qu'on célébrait tous les cinq ans 
sur le mont OEta, dans ['fie de Bhodes, ì Ces, ì Lindus, à Sicyone, ì Athènes et dans plusieurs autres localités de la 
Grèce, en l'honneur d'Hercule. 
On appelait aussi Héracles des recueila de chants et de 
traditions sur Hcrcule. 
HÉPtACLIDE  philosophe et historien grec d'Héra- 
clée, dans le Pont, d'ou il a ëté surnommé le Ponique, et 
ironiquement par les anciens Pompcus ( de Hoz, pompe, 
faste ), vécut vers l'an 328 avant J.-C. D'abord disciple de 
Platon, il embrassa le pythagorisme, passa sous Speusippe, et 
finit par devenir aristotélicien. Au titre de pldlosophe, Héra- 
clide de Pont réunissaitcelui d'orateur, etco,nposa, sans uge- 
ment indépendant, plusieurs ouvres historiques, dont les 
fragment ont été èdités par Rohler (Ha|le, t804), par 
Koray, dans son Prodromus biblWthecoe groecoe ( Paris, 
t805) et, en dernier lies,, par lqiller, dans les Hisoricorv 
Groecorum Fragmenta ( Paris, 18g ! ). On l'a pris aussi pour 
l'auteur de deux écrits que d'autres attrihuent à un certain 
Heaxc,xr., qui sont intitulés : Allegorioe homericoe, pu- 
bliées par Schow (Goettingue, 1782), et de Incredilibus, et 
quiont êté soumis à la critique par Westermann, dans les 31y- 
thographi (Brunswick, 1843). On a prétendu qu'Héra- 
clide delivra sa patrie et tua lui-mme le tyran qui l'oppri- 
mait; mais dans une famine, durant laquelle on l'evoa 
consulter l'oracle, il séduisit la pr/:tresse, qui répondit que 
le flan cesserait quand on lui aurait décerné une couronne 
d'or. Il la reçut effectivement en plein thétre, mais tomba 
Irapp. d'apoplexie au milieu de son triomphe. 
liEIACLIDE. Ce nom a appartenu  plusieurs raé- 
dccins grcs. 
IILR,,CLIDE de Cos, de la fanfille des Asclétiades, 
est particulièrement célèbre comme père d'Bilopocrate. 
Il dot:an h son fils /es premières notions de l'art me- 
di¢al. 
HEBACLIDE de Tarente vivaitvers l'an 20 avant J.-C., 
et fut le médecin le plus distingué de ['école empirique, 
eu ce sens quïl rendit des services à la tlerapeutique en 
repoussant une foule de moyens inutiles, en examinant l'ac- 
tion de ceux qu'il fallait conserver, et en rédigeant un grand 
nombre de prescriptions convenables. Il lut le premier qui 
se servir des moyens appelés cosmetiques. Il fit egale- 
raent faire des progrès ì la chirurgie et a l'art de guérir les 
maladies des yeux. 
HERACLIDE d'Érythrde, qui vivait au commencement 
du deuxième siècle avant J.-C., lut un des successeurs d' H é- 
rophile. Il travailla sur les ouvrages d'Hippocrate, et lut 
célèbre parmi les anciens pour sa théorie du po u ls. 
ltERACLIDES. C'est le nom q:e l'on donne ì la pos- 
tCité d' Herc uie. Ce héros devait régner sur Tirynthe, 
Mycëne et les peuples d'alentour, mais il fut obligé d'oheir 
à Eu r y s t h é e. Ses prétentions sur le Péloponaèse passèrent 
ì ses descendants, et c'est par cette fable que les D oriens 
justifiaient leur conquète ; car la tradition de Sparte les fai- 
sait descendre des premiers don«nateurs de llycène. Lex. 
pédition des Héraclides et la conquète du Péloponnèse par 
les Doriens ï, ont donc .troitement ilCs dans l'histoire; mais 
il serait difficile d'indiquer les autorites sur lesquelles se 
fonde ce rccit, et il parait être tout aussi traditionnel que 
celui de la guerre de Troie, à cette difference prës que nous 
n'avons, pour nous éclairer ni épopee ni scoliastes. Héro- 
dole, cependant, connaissait des poetes qui parlaient du re- 
tour des llérachdes et de l'arri¢ée des Doriens en Laconie. 
Ce poqvait lre des a,,teurs Ciques, de ceux qui, comme 
Cynelhon de Laconie, établissaient les mythes généalogi- 
qnement : ils ont dfi parler des descendants d'Hercule; ou 



32 flÉRACLIDES 
bien c'étaient des poëtes historiques, dans le genre du Co- 
rinthien Eumèle. Hérodote trouva sur les l.léraclides une 
version toute différente de celle qui lui était connue. Nous 
n'en avons guère que deux fragments, l'un d'Hécatée, l'autre 
de Pbérécyde ; encore se rattachent-ils immédiatement à la 
mort d'Hercule. Les tragiques ont été plus fertiles : Es- 
chyle avait composé des lt«raclides, Euripide aussi. So- 
phocle avait écrit un $olaos; Euripide s'initia encore da- 
vantage  l'histoire des Doriens dans ses Tmenide,, dans 
son Archlaiis, dans son Cre*phonte; et sans doute Apol- 
lodore, qui était Athénien, avait principalement puisé à ces 
sources le récit qu'il nous a laissé. 
Les Héraclles, après la mort de leur père, se trouvaient 
à Trachis, chez leur héle fidèle, Cé];x, qui fut obligé de les 
renvo)er,  cause des menaces d'Eurysthée. D'autres, qui 
pensent qu'Hercule mom',,t sur le tréne de Mycène, les 
font bannir par ce tyran aprC sa mort. Dans tous les cas, ils 
viennent à Athênes, oi ils son, t protegés par Thesée ou Démo- 
phon : ils combattent, aidés par les Athniens, que comman- 
dent H)lins et Solaos. Macaria, SœUr des Héraclides, se dé- 
voue à la mort, et ils remportent la victoire. AIcmène tue l« 
roi aréen. Solaos meurt bientét après. Les traditions varient 
beaucoup sur tout cela; il en est qui placent le champ de 
bataille dans le voisinage de Tfiëbes. La conquète du Pé- 
loponnèse aurait été le resultat de ce succès, qui fut suivi 
d'une domination paisible pendant une année, ou durant une 
certaine période. Une peste vint ensuite, qui contraignit 
les Hëraclldes à retourner dans l'Attique. Les m. thograplies 
envoient l'un d'eux, Tlépolemos,  lhodes; et Phérécyde, 
suivant une tout autre version, sans s'inqniéter de la con- 
quSte du Peloponnèse, les fait ,ente à Thbes, o0 ils au- 
raient foudé une colonie, pendant que les P é I o p i d e s, de 
la race de PersC, gouvernaient le Péloponnèse en usurpa- 
teurs. Déormais, les expeditions des Heraclides sont diri- 
gées contre ceux-ci. Dans la troisiëme année, Hyllus s'a- 
vauce vers le Peloponnèoe ; il trouve sur l'isthme les Ar- 
cadiens, les loniens et les Acfiéens, et livre un combat sin- 
gulier à Échémos, filsd'Éropos, prince de Tégée : H)llus 
meurt, et on l'enterre i Mëgare. Les Héraclldes promettent 
de ne pas renouveler leur tentative de cent an% ou de cin- 
quante ans : on n'est pas d'accord I/-dessus. Les traditions 
varient beaucoup encore sur la part des Doriens à ces entre- 
prises ; ils viennent tantét d'Hestieotis, tant6t du Parnasse, 
et l'on n'est pas moins patagé sur les epoques. 
Le fils d'H)-llus est appelé Cl.odoeos, le petit-fils Aristo- 
maque. C'est d'après la genalogie, sans doute, qu'on a fixé 
a quatre-vingts aus après Troie la nouvelle expédition des 
Héraclldes. L'oracle leur dit qu'il fallait entreprendre 
par le detroit la conquète à la troisième récolte. Cet ora- 
cle, mal compris, avait ét la cause de l'erreur WH)lins. 
Désormais Apollon s'expliquera plus clairement : au 
lieu de l'isthme de Corinthe, ce sera le détroit de Rhion 
qu'il faudra suivre, et la troisième récolte voudra dire la 
troisiéme génération. Les ttéraclides mettent h la voile, et 
abordent sur ce point ; et de tait les conte,es voisines de 
l'isthme lutent les demières conquises par les I)oriens. Le 
devin Karnos est tué pendant la traversée, et les Héraclides 
instituent des sacrifices expiatoires i Apollon Karnéos. 
Aristodème, leur chef, étant mort et une épidemie s'étant 
déclarée, l'oracle d'Apollon, consulté de nouveau, conseille 
de prendre pour diriger i'expé.dition l'homme  trois )'eux : 
ils rencontrent Ox)los : soit que borgne il fùt sur un cfie- 
val qui avait ses deux )'enx, soit que les ayant lui-mème il 
fat sur une mule borgne, on le dé¢iara t,"iophthalmos, et 
on le prit. Oxylos était Etolien, originaire de Calydon. Il y 
eut une grande bataille entre les forces du Peloponn6se, com- 
mandces par Tisamène, descendant d'Agamermon, et les 
fils d'Aristomaque, et le pays se soumit  eux. Ici encore 
la tradition parle, tantét d'un combat naval et d'un débar- 
quement, tantét d'une bataille qui aurait eu lieu quand on 
eut dèjì travers i'Arcadie, car Ox}los ne voulait pas leur 
faire connaitre l']îlide. On rapporte que Cresphonte éponsa 

la fille dulroi d'Arcadie, Cypsélos. Le Péloponnèse est ensuite 
partagé etre les trois frères "l;éménos, Cresphoute et Aris- 
todème; mais il fallut encore bien du temps aux Doriens 
pour en achever la conquête. Lorsqu'on crifia  Jupiter, 
que l'on qualifiait d'aieul, il se trouva sut les autels pour 
Argos un crapaud, pour Sparte un serpent, pour la Messénie 
un renard. Cette fable a sans doute été imaginée par les 
Athéniens pour caractériser ironiquement ces peuples. Le 
partage des États demeura tel que l'avaient établi les Héra- 
clides : ainsi, Téménos eut Argos, .M)cènes et Sichon ; Cres- 
phonte, la MessCie; Proclès et Eurysthènes, fils d'Aristo- 
dème, la Laconie. Isocrate dit qu'à leur arrivée, ils se saisirent 
de la meilleure partie des terres, ne laissant aux anciens ha- 
bitants que les plus mauvaises. 
Tel est, d'apr O. Muller, tout ce qu'on peut dire des 
Héraclldes. Taiter ce sujet chronologiquenlent serait folie. 
Le père Petau ne reconnalt que deux tentatives des Hera- 
cfides pour rentrer dans leurs anciennes possessions ; d'au- 
tres, avec Scaliger, en distinguent trois ;" on en admet quel- 
quefois un plus grand nombre. La premiëre expédition, com- 
mandée par Hyllus, fils d'Hercule et de Déjanire, aurait eu 
lieu quarante-un ans avant la guerre de Troie, 1322 avant 
J.-C. Ce fut trois ans plus tard qu'il périt dans un comhat 
singulier, pour tre venu sur une fausse interprëtation de 
l'oracle d'Apollon. Il est une troisième expédition, qui aurait 
eu lieu trente-un ans après la guerre de Troie, et dans la- 
quelle le fils d'Hyllus aurait été repousse par Oreste, qui 
avait succéd à son père Agamemnon ; enfin, la dernière 
est celle que nous venons d'analyser, et qu'on fixe quatre- 
vingts ans après la guerre deTroie. Les Achéens de Mycènes 
et d'Argos, contraints d'abandonner leur pays, s'emparèreat 
de celui des Ioniens : ceux-ci, après s'.tre réfugiés  
AihCes, ,inrent, au bout de quelques années, occuper la 
céte de l'Asie Mineure, qui prit d'eux le nom d'fonte. Le re- 
tour des Héraclldes a changé la face de la Grève : il marque 
la transition des siècles m)thologiques aux temps bisto- 
riqneq.. P. nE Gov. 
I|E[{ACLITE d'Êphèse, philosophe grec, florissait 
vers la 69  olympiade. On ne sait presque rien des évne- 
ments de sa vie: il parait seulement qu'il appartenait à une 
famille distinguée, qu'il exerça quelque temps la ma#stra- 
turc suprtme dans sa patrie, et qu'il se alCit de sa place 
en faveur deson frère. Il avait beancoup de goret pour la 
retraite, pour l'étude, et fort peu pour les hommes en gé- 
néral, pour les Épfiésiens en particulier, dont il méprimit 
l'inatitude et la turbulence démocratique. Il acheva de les 
trouver odieux / la nouvelle de l'ostracisme de son ami 
Hermodore, et se retiradans les montagnes, oi il vécut dans 
la solitude, se nourrisnt d'herbes et de racines. Ce re- 
gime, qui l'avait rendu hydro#que, l'ayant forcé de rentrer 
à l.phèse, il se borna à demander aux médecins, dont il 
ddaignait la science, s'ils savaient transformer l'humidité 
en sécheresse, et se traita à sa façon. Pour provoquer en 
lui une transpiration abondante, dans laquelle il voyait son 
salut, il se fit couvrir de sabe selon les uns, de fumier 
suivant d'autres: ce moyen lui aurait réussi, a-t-on dit d'une 
part; il aurait, d'après une autre opinion, précipité sa mort, 
qui arriva le lendemain. La lëgende va mme jusqu'à le re- 
présenter dévoré par une meute de chiens. 
Ordinairement rang parmi les philosopbes de l'école i o- 
n i e n n e, à cause du lieu de sa naissance et du point de vue 
od il dutse placer audébut de ses recherches, il s'en dis- 
tingue beaucoup par i'originalité et la portée deses travaux. 
Comme les Ioniens, il tenta d'expliquer la nature par elle- 
mème. Le principe matériel lémentaire de toutes choses loi 
parait tre un feu éthéré, dont notre feu visible n'est qu'une 
condensation; celui-ci en se condensant devient air, lequel 
par une nouvelle conden«ation devient eau, laquelle par 
un dernier degré de condensation devient terre. Récipro-- 
quement, la terre en se dilatant devient eau; l'eau se di- 
latedavantage, et devient air; l'air par une plus grande di- 
latation devient feu visible; et le feu visible desient leu 



HÉRACL1TE -- 
thré par une dilatation plus grande encore. Le monde est 
donc comme un organisme vivant, dans lequel toutes choses 
se transforment incessamment, suivant deux échelles, l'une 
ascendante, l'autre descendante, et conformément à des 
lois fixes et immuahlea. Une chose n'a pas plus tt une 
forme, qu'elle tend à en prendre une autre, qui détruit |a 
p¢emière; aucune chose n'est; toutes ont en train d'turc, 
deviennent. Telle est la doctrine fondamentale d'Héraclite; 
elle prépara le dualisme platonieien du changeant et de 
l'immuable, du r| et de l'téCl, du relatif et de l'absolu. 
Héraclite en fit une applicatiou étrange aux objets méta- 
physiques, moraux et politiques. L'me Immaine en se alA- 
gageant des formes terrestres approche de plus en plus de 
la forme la plRs parfaite, celle du feu éthéré : aussi diait-il 
que l'me sèche est la meilleure. Le feu n'est pas seulement 
le substrat«m de tnntes choses, mais aussi l'agent univer- 
sel, le principe vivificateur du monde ; c'est aussi la raison 
générale, la source de toutes les vérités, aveclesquelles nous 
communiquons pendant la veille au moyen de la respira- 
tion, les sens ne nous montrant que le variable et l'indivi- 
duel. 
Du reste, il s'en faut bien que nous connaissions à fond 
toute sa philosophie. Il l'av»it déposée dans un ouvrage, cité 
sous divers titres, et souvent commenté, mais si difficile à 
comprendre que son auteur fut dès la plus haute antiquité 
surnommé l'Obscr : encore ne reste-t-il plus de ce livre 
que des franents très-courts, qui sont aujourd'hui pour la 
plupart autant d'énigmes. Héraclite dédaignait de mettre 
ses doctrines à la portée de la multitude. Les histeriens le 
peignent en général comme un misanthrope, d'une humeur 
hautaine et mélancolique.L'antiquité, si laconique sur sa vie, 
l'est beaucoup moins relativement à cette humeur : sur ce 
• iet les anecdoles abondent, et l'on pourrait dire que son 
caractère nous est parfailement connu, s'il n'était pas éri- 
«lent que la tradition en a fait un type, et qu'xce titre on doit 
plutôt le considérer comme un produit de l'art que comme 
une donnée de l'histoire. Ce travail poCique, dont les vies 
de saints offrent des exemples, et qui se montre sans de- 
guisement dans le contraste établi par Lucien entre Hera- 
dite, qui ne cesse de pleurer, et Dêmocri te, qul rit sans 
cesse, est surtout sensible dans les traits dont l'antiquité 
s'est plu à composer la physionomie du philosophe d'lpbèse. 
Mais, en tenant compte de cette élaboration légendaire, il 
n'en etpas moins certain que son mépris pour les poëtes, 
qu'il accusait de corrompre la jeunesoe, et qu'il voulait ban- 
nir des lieux publics; celui qu'il afficl,ait peur les pbiloso- 
phes, qui ne songent, disait-il, qu'à Oeaz«coup savoir, sans 
s'inquiéter de savoir bien ; son éloignement peur les 
hommes, sa haine pourla démocratie, son dédain da pou- 
voir, qui lui faisait dire qu'il vazt mieux joz«er avec les 
enfants que de s'occuper des ai/aires publiques ; son re- 
fus de donner des lois ì ses concitoyens, trop corrompus 
suivant lui pour qu'm pbilosephe se donnt cette peine ; 
ses rudes réponses à Darius et aux Atlzéniens, sa retraite 
dans la solitude, tous ces details et beaucoup d'autres, faux 
ou vrais, ou exagér% n'en témoignent pas moins de l'im- 
pression q;'avait laissêe dans la mémoire des hommes son 
caractère sombre et superbe. 
Aristote et Démélrius de Phalère ont atlribué l'obscurité 
de ses écr;ts . la nature informe de la prose primitive dent 
il fut un des premiers à se servir. L'auteur avait, dit-en, dé- 
pes son livre dans le temple de Diane, à Éphèse, d'oh il az:- 
rait etWrouirWpar Cratès selon les uns, par Euripide sui- 
vant d'astres, et mis en ver par Scytl,inus. Les fragments 
quinous en rtent ont eté recueillis et savamment coin- 
meules par Schleiermacher, dans son Musée de la Science 
des Anciens. 
On a donné pour maitre à Itraclite, tant6t le ptbagori- 
cien Hippasus, tanlt Xénopl,ane, le fondateur de l'Cole 
d'ÉIC. La seule chose cerlaine, c'est qu'il avait étufié à 
fond le;rs doclrines. D'ailleurs, ceux qui citent ces deux 
nom« sont les premiers à reconna!tre que, ne marchant 
DICT. nE LA CONVERS. l T" Xl" 

HÉRACLIUS 
sur les traces de personne, il ne dut qu'à lui-mme ses idée 
et sa doctrine. 
IIÉP, ACLIUS empereur d'Orient, né en 575, monta 
sRr le trône en 610, et mourut en 641. Il avait trente-cinqans 
lorsque Constantinople, opprimée par le tyran Phocas, im- 
plora la protection de l'exarque d'Ah ique, nommé, comme son 
fils, Héraclius. Le vieux général envoie avec une flotte, 
raclius le jeune. Phocas est renversé. « Malheureux, n'a- 
vais-tu usurpé l'empire que pour faire tant de maux au 
peuple? » lui dit le vainqueur. --« Gouverne-le mieux, » lui 
dit Phocas. Ce furent ses derniers mots. Héraclius le fils prit 
alors la pourpre teinte du sang de son prédecesseur. 
Trois périodes partagent le règne du nouvel empereur : 
honte et désastres de 610 à 622 ; gloire de 622 à 629; en- 
core une fois honte et désastresde 629 à 6t. 
L'empire, envahi en Europe par les Avares, dans l'Asie 
Mineure et en Égypte par les Perses, était réduit aux murs 
de Constantinople. Il paraissait en 622 plus bas encore 
qu'il ne devait I'tre en 152, h l'avénement de ce Maho- 
met 11 par qui fut renversé le vieux trône de Byzance. Dans 
cette détresse, Héraclius songea un instant à porter le siCe 
du gouvernement à Carthage : il en fut détourné par le pa- 
triarche Sergius, dont le patriotisme chrétien voyait la ruine 
de la religion dans l'abandon de la cité de Coustantin. Le 
clergé livre à Héraclius les richesses de l'Eglise pour la dé- 
fense de l'État. Alors commence contre la Perse une guerre 
à la fois nationale et religieuse. Renouvelant un exemple 
bien rare parmi les successeurs de Censtantin, Héraclius se 
met lui-mème à la tète de son armée, laisse les Perses der- 
rière lui, et transporte par mer son armée dans la Cilicie. 
Vainqueur près d'Issus, dans cette première expédition, il 
revient à Constantinople pour surveiller les Avares, dont il 
a acheté la neutralité. La seconde campagne d'Héraclius rend 
à la Perse tous les maux que ses guerriers ont laits à l'em- 
pire. Le massacre des mages dans Ormia, patrie de Zoroas- 
tre, venge les prêtres cbrétiens égorgés et Jérusalem devas- 
tée. Alors fut éteint dans Tauris le feu perpétuel qu'entre- 
tenaient les pontifes du soleil. 
Héraclius a pris position entre le Phase et l'Araxe. Pendant 
qu'il négocie une ligue avec les Turcs de l'Oxus et les Turcs 
Khozares du Volga, Salharas, gouverneur, pour les Perses, 
de Chalcédoine, ville d'Asie, qui n'est séparée de Constan- 
tinople que par un étroit bras de mer, suscite contre ses 
murs les Avares et Iès Slaves. Mais, bien qu'Héraclius soit 
absent, son génie veille sur elle. Les habitants se montrent 
dignes de lelr empereur, et le patrice Bonose repousse 
cette n,lée d'ennemis. Dans une troisième expédition, qui a 
lieu en 627, Héraclius, renforcé par 40,000 Turcs Khozares, 
reprend les villes de l'Arménie, de la Syrie et de l'Osrhoène. 
Il passe leTigre à Mossoul. Là, beau comme Achille, couvert 
d'une armure toute d'or, il culbute de sa lance, en vue des 
deux armées, un Perse d'nne taille gigantesque qui defend 
le passage. Dans une bataille sur les ruines de .Ninive, il dé- 
fait de nouveau les Perses, poursuit Chosroès de ville en 
villejusqu' Séleucie, s'apprncl,e de Ctésiphon ; mais, n'o- 
sant dépasser la limite où s'est arrètée la marche xictorieuse 
de Trajan, il se replie sur Tauris. Là il apprend que Chos- 
roès, trald par son lieutenant Sarbar, qu'il a offensé, vient 
d'ètre précipité du tr6ne par son fils Siroès. Le parricide, 
pour affermir son usurpation, offre la paix aux Romains. 
Héraclius ne veut aucune conquète nouvelle; seulement, les 
anciennes limites des deux empires sont rétablies. Siroès 
rend les aigles romaines, les prisonniers et le bois de la 
vraie croix, que les Perses ont enlevé lors de la prise de 
Jerusalem. Héraclius fait dans Constantinople son entrée 
avec toute la pompe d'un triomphateur de la vieille Rome. 
11 se rend ensuite à Jérusalem, oU, déployant avec le mme 
faste toute Uhumilité chrëtienne, il vient pieds nus, en pro- 
cession, reporter la croix au Saint-Sépulcre. 
Tout cet éclat dura peu : sous son règne, ce triomphe. 
par I'péc, du christianisme sur le magisme fait place au 
triomphe de l'islamisme sur les deux religions et sur les 
5. 



,4 HÉRACLIUS 
deux nations persane et romaine, que cette dernière 
lutte a épuisées. Un peuple jusque alors obscur, le Koran 
d'une main, le sabre de l'antre, va s'élancer des déserts 
de l'Arable et accabler à la fois les deux empires. Hé- 
raclitts, énervé par la prospérité, se plonge dans la mol- 
lesse. Devenu controversiste, il publie en laveur des 
7nonotllites ce fameux édit appelé Eclhèse, qui en vou- 
lant tout concilier introduit le schisme dans l'Église chré- 
tienne. Cependant, les lieutenants du khalife Aboubekr, 
vainqueurs à Aiznadin, dispersent devant eux les chrétiens 
de la S)rie. Héraclius, art lieu de ceindre l'épée, courbe son 
front, devant les autels, et fltit de ville en ville. En appre- 
nant la prise de Damas, en 637, il avait dit : « Adiett la 
Syrie! ,, Lorsque Jérnsalem se fut rendue, en 637, an khafife 
Omar, le faible empereur, prterné dans la cathédrale d'An- 
floche, pleure ses péchés et ceux de son peuple, etdéclare 
au monde qu'il est inutile de combattre contre la volonté de 
Dieu. Alep est pris; Antioche se sauve par un tribut de 30,000 
pièces d'or ; et Héraclius, s'embarquant pour Constanti- 
nople, déliede leur serment de fidélité ce qui Ini reste de su- 
jets en Strie. La Méopotamie, la Syrie, la Palestine per- 
dues, l'Egypte envahie, tels furent les résultats de la dernière 
période de son règne. Après lui, ses deux fils, Héraclius- 
Conslanlin et fldracldous, ne devaient régner que quelques 
mois. Charles Du Rozom. 
IIÉBALDIQUE (du latin barbare heraldus, béraut), 
sciençe ou art dn b I ason: , 
IIÉBAT, l'un des royaumesdes Afghans, sur le versant 
nord-est du plateau d'Iran, et formant un isthme fertile 
entre les roches désertes du Hazareh (le Paropami.sus des 
anciens), à l'est, les grandes solitudes remplies desalines de 
l'Iran central au sud, la province persane du K h o ras.a n 
à l'ouest, et les steppes des Turcomans au nord, consisté 
dans la partie sud-est de l'ancien Khorassan dans l'aCctl,tion 
la plus étendue de ce nom, et est placé dans les. mmes condi- 
tions physiques que cette partie du plaie.au d'Iran. On évalue 
on étendue à environ 2,200 myr. carrés et le nombre de ses 
habitants à un million et demi. La très-ande majorité 
de ceux-ci se compose de Tadjiks soumis, et la minorité 
seulement d'Afghans, les maitres actuels du pays, puis de 
Turcomans et de Juifs. 
La capitale et la senle ville importante de cet Éiat est 
HéeAX, ville mal Iortiliëe, située dans une fer[ile vallée, à 
environ 1,800 mètres au-doesus du niveau de l'Océan, et 
ayant, suivant les uns, I00,000, et suivant d'autres seule- 
ment 5,000 babitants. Par sa position, qui en,fait la clef de 
la seule route conduisant de la Perse dans l'Inde par i'Afgba- 
nistan, position aussi importante sous le rapport commer- 
cial que sous le rapport stratégique, cette ville est le centre 
du commerce par caravanes et l'Cpe naturelle entre l'Inde 
l'Afghanistan et PAsie occidentale ; aussi a-t.elle été de tout 
temps une base d'opération indispensable pour tous les con- 
quéauts qui voulaient de l'Asie occidentale se porter sur 
l'lnde. Elle est protégée par un rempart en terre, que sur- 
montent de nombreuses tours, et par une très-forte citadelle. 
Un aqueduc  amène l'eau de l'Héri-Ud, rivière qui coule à 
4 kilomëtres de là. Elle renferme qnelques mosquées remar- 
quables et des manufactures assez considérables de laine, 
de soie, de coton, de cuir et d'armes; on vante particu- 
lièrement les sabres du Kborassan, qu'on y Ihbrique. La tra- 
dition musulmane lui donne Alexandre le Grand pour fon- 
dateur; mais son nom se trouve déja mentionné dans les pins 
anciens monuments de la religion persane. C'est dans ses 
murs que naquit le célèbre Idstorien persan Kbondémir, qui 
 la fin de son grand ouvrage donne l'histoire complète de 
cette ville. 
ltérat fut soumise lors de la conquëte de la Perse par les [ 
khalifes, au milieu du septième siècle, avec font le Kborassan, 
auquel elle appartenait, et elle partagea les destinées de ce 
pays jusqu'à l'avénement des sultans de Gour, au milieu du [ 
douzième siècle, qui y fixèrent leur résidence. Toutefois, dès I 
la fin du mëme siècle, elle tomba au pouvoii des chahs kbo- 
I 

-- HERAULT 
waresmiens, et en 1220 entre les mains de Dinguis-Khan, 
qui la détruisit de fond en comble. A la fin du quatorzième 
siècle, elle tomba avec tous le Kborassan au pouvoir de Timour. 
Un de ses successeurs y établit le siége de sa dynastie, et 
le sultan Hussin fit d'Hérat, vers la fin du quinzième siecle, 
l'asile des sciences. Au commencement du seizième siècle, 
Hérat fut conquise par les Turcomans; mais dès t$10 
IsmaëI-Sophi la réunit à la Perse, et au milieu du dix-l,uitième 
siècle elle fut soumise par les Afghans. Après les vicissi- 
tudes nombreuses que subit la dynastie afgbane des Dnranis 
0,o/e-- Aycn«ms¢), elle fut la résidence du dernier Durant, 
de Kamran-Chab. Sous son règne, Herat acquit une impor- 
tance toute particulière en raison de la rivalité qui s'établi| 
alors dans le nord de I'tnde Plre b's ltnsges et h, An"lais. 
Les premiers poussèrent la Perse, en 1833, à faire la guerre 
au royaume de Hérat, que les Anglais s'empressèrent de 
défendre contre cette agression. En 1835 le royaume de Hérat 
fut une seconde fois attaque par les Persans, qui vinrent 
assiéger la ville, et celte fois avec des forces plus considé- 
tables. Mais, grlce anx secours des Anglais, elle se défendit 
avec succès, et les Persans se virent forcés de battre en re- 
traite. IIais ce qne la Perse, ou plut¢t la politique russe, 
n'avait pu obtenir, sembla devoir leur réussir par suite de 
la mort du souverain de Herat, Kamran-Chah, en mars 
A la mort de ce prince, le tout-puissant vizir, Jar-Mo- 
bammed s'y fit proclamer chah, et expulsa les fils de 
Kamran. Pour assurer sa souveraineté contre toute tenta- 
tive de la part de ceux-ci, il se soumit au chah de Perse. 
En I51, Jar-Mohammed étant mort, Shere-blohammed- 
Khan, musulman fanatique, fut nommé vice-roi du Herat 
à sa place. 
IIP, AULT (Département de P). Il tire son nom de la 
rivière qui le traverse du nord au sud, depuis sa sortiedu 
département du Gard, od elle prend sa source, jusqu'h son 
embouchure dans le golle de Lyon. Borné au nord par 
l'Aveyron et le Tarn, au couchant par le Tarn et l'Aude, au 
midi par l'Anale et la Méditerranée, au levant par le Gard, 
ce département est une ancienne dépendance de la province 
duLanguedoc. 
[ Sa population est de 389,286 habitants. Il est divisé eu 
4 arrondissements communaux, 6 cantons, 330 commu- 
nes : il envoie trois députés au corps législatif. Il est com- 
pris dans la dixième division militaire, le diocèse de 31ontpel- 
lier et le ressort de la cour d'appel de la même ville. Il fait 
partie de l'académie de son chef-lieu ; on y compte I lycée, 
6 colléges, 2 institutions, 18 pensions, 570 écoles primaires 
de garçons, 444 de filles. 
Sa superficieest d'environ 630,955 hectares, dont 2t-,040 
en landes, pltis.et bruyères; 156,566 en terres labourables ; 
103, 682 en vignes; 77,6-i4 en bois; 27,273 en cultures di- 
verses; 12,268 en étangs, canaux ; 8,537 en prés; 1,415 en 
vergers, jardins; 1,338 en propriétes bàties; 166 en oseraies, 
aunaies, saussaies; I 1,443 en ri vières; 9,714 en routes, rues; 
06 en cimetières, b'timents publies, etc. Il paye 2,335,274 Ir. 
d'imp6t foncier. ] 
Adosséaux Cévennes et au Bouergue, le département 
de l'Hérault présente, dans sa partie occidentale et septen- 
trionale, un ampbithéAtre de montagnes de granit et de 
calcaire qui en feraient un pays fort panvre s'il n'était am- 
plement dédommagé par une richezone de culture qui s'éten 
à largeurs inégales entre le littoral de la Méditerranée et ces 
montagnes arides. Elles renferment cependant d'assez gran- 
des richesses minoerales et quelques établissements ther- 
maux, dont les plus fréquent sont les bains d'Avesne et 
de Lamalou, et de Balaruc. La médecine fait encore 
usage des eaux purgatives de Pérols et de ¥illeneuve-lès- 
blaguelonne, et du pétrole anthelmintique de Gabian. C'est 
aussi sur lelittoral que se voient les traces de plusieurs volcans 
éleints. Trois rivières principales, grossies par de nombreux 
affluents, arront ce département. Le Vidourle forme sa 
limite du cté du Gard, et va se perdre dans l'étang de 
llauguio. L'Hërault et l'Orbe vont directement à la mer. 



tlÉRAULT 
La première de ces deux rizières n'est navigable que sur une 
étendue de 12 kilomètres, depuis le pont de Bessan jusqu'/ 
l'entrée du port d'Agde; elle est flottable dans un es- 
pace de 56 kilomètres. Ce département n'a de navi- 
gation intérieure que celle du canal des deux mers et 
celle des étangs. Le canal entre dans l'arrondissement de 
Béziers, où l'aqueduc de Frenicoupe traverse, après un 
cours de 24 kilomètres, la montagne percée de Malpas; 
 kilomètres plus loin, il descend, par neuf écluses, dans la 
vallée de l'Orbe, franchit cette rivière, avec laquelle il con- 
fond un moment ses eaux, et, après un nouveau cours de 
 myriamètres, il aboutit au port d'Agde. Là commence 
le canal des étangs, qui, se succédant sons les noms de 
Thau, d'Engril, de ¥ic, de Maguelonne, de Lattes et de 
Mauguio, forme une navigation continue de 60 kilomè- 
tres, à laquelle viennent s'embrancher les petits canaux de 
Lunel, du Let, de Vic et de Cette, et qui va communiquer 
au Rh0ne par le canal de Beancaire. Le port de C e t t e est 
au centre de ces ëtaugs, et par là s'écoulent vers toutes les 
parties du globe les producfions de la courtC. 
Vers les montagnes, surtout vers la chaine granitique qui 
unit les Pyrénées aux Cévennes, et qui forme au nord la 
li,nite des départements de l'Hérault et de l'Aveyron, sont 
exploités de riches et de nombreux filons de houille; 
vers la limite des dpartements du Tarn et de l'Aude, et 
dans les montagnes tutCleures deNéfiés et de loujan, il en 
existe quelques autres gisements, moins importants. Des 
mines de fer, des carrières de marbre, enrichissent encore ces 
montagues. On y trouve aussi du plomb argentilère, prs 
du hameau de Cazilhac. 
Les principales cultnres du département sont celles des 
céréales, de l'olivier, du ratifier et de la vigne ; mais cette 
dernière envahit progressivement toutes les autres. Les 
gros vins de Béziers ne sont pas lesseulsdu pays; il fournit 
aux gourmets les vins rouges de Saint-Georges, de Sussar- 
gueset de Saint-Christol ; tes muscats de Lunel, de F r o n- 
t i g n a n, de Maraussan et autres terroirs de l'arron,lissemen t 
de Béziers. La culture de l'olivier a considdrablement di- 
minué. Ilen est de mème des céréales. Le marier, aban- 
donné quelque temps, a heureusement repris faveur ; et 
dans le fait le climat de ce pays est plus propre à la propa- 
gation des vers à soie que la plupart des contr,!es qui sem- 
blent vouloir lui disputer cette production. Dans ce climat, 
ordinairement si doux pendant l'hiver, le thermomètre s'é- 
lève à 35 ° centigrades pendant l'etC et la récolte de la soie y 
est aussi assurée que celle du vin. Celle-ci ne craint que 
l'extrème sécheresse, dans un pays où il n'est point rare 
de voir passer six mois sans pluie, à moins que des orages 
n'y viennent arroser la terre au risque de la dévaster. Le 
défrichement des bois explique ce phénomène, et l'on pré- 
tend que le duc de Montmorency, gouverneur de la province, 
en donna l'exemple en faisant abattre une vaste forèt de 
pins, sous prétexte qu'elle servait de refuge aux pirates; mais 
il sera difficile de convaincre les habitants de la nécessité 
d'en replanter. Aussi les prairies se trouvent-elles dans une 
étonnante disproportion avec les autres terres cultivées. 
Ellesn'en font pas la trentième partie, ce qui rend le pays 
peu propre à élever des chevaux et des bêtes à corne. Les 
boeufs et les mules qui tralnent ses charrues lui viennent 
des autres provinces. On rencontre cependant dans les con- 
tres marécageuses, prs des étangs ou sur les bords des 
rivières, des troupes de chevaux maigres et presque sanva- 
ées, qu'on appelle aigues dans le patois du pays. Mais 
ces animaux ne rendent d'antre service quede battre les blés 
en les foulant aux pieds. Les hères  laine y sont plus mul- 
tipllées :il n'est pas de grand propriétaire qui n'ait un 
ffoupeaudans sa métairie, et ils s'efforcent d'en améliorer 
la race. 
Les laines sont toutes mises en œuvre dans le pays 
méme. Le département possède depuis longtemps des ma- 
nufactures de draps quiont enrichi les villes de Lodève, de 
Cle.rmont, de Bédarrieux  de Saint.Chiaian t de Saint- 

Pons. Les produits deses fabriques s'écoulent dans le Le- 
vant et servent en France à l'habillement des troupes. D'an- 
tres manufactures, établies h Montp.ellier, convertissent les 
lainesen couvertures; et leurs produits, qui vont actuelle- 
ment à cent mille pièces, sont expédiés en partie pour la 
Louisiane, en partie pour la Suisse et l'Allemague. Les lai- 
nes du. département sont loin d'y suffire. On en tire de 
l'Espagne, del'ltalie, de la Barbar';e et du reste de la France. 
Les fabriques de soie de Ganges ont une vieille réputalion 
qu'elles soutiennent, et qui les soutient malgré la concur- 
rence de I[lmes. La iabrication de la hougie, du vert-de-gri% 
emploie encore un assez grand nombre de bras. Sur les 
c6tes, les salines du Bagnas et autres produisent une im- 
mense quantité de sel. Les habitants des ports, des anses 
et des moindres criques se livrent à la pèche, et alhnen- 
lent les villes de poissons de toutes epèces. Cilons encore le 
fabriques de toiles de coton et les distilleries de liqueurs et 
d'essetces. Mais l'industrie la plus active, la plus considéra- 
I le, celle qui embrasse toute l'Cndue de la z»ne «les gran- 
des cultures, est celle des esprits appelés trois-six. On en 
exporte annuellement IS0,000 bectolitres, et dans les mur- 
chés hebdomadaires de Béziers et de Péznas, où il s'en vend 
dix fois plus que le pays n'en produit, ces liquides sont de- 
venus un objet d'agiotage, comme les fonds publics / la 
bourse de Paris. 
[Sept routes impériales, 17 routes départementales, 
chemins vicinaux sillonnent le département, dont le chef-lieu 
est Md  tpe I li er. Les villes et endroits principaux sont 
en outre : Bd'.i ets; Lodève; SaintPons, chel-lieu d'ar- 
rondissement, sur la rive droite du Jaur, avec 7,t8 habi- 
tants, un tribunal de première instance, un petit s&ninaire, 
une industrie importante : c'Cait jadis le siCe d'un évé- 
cilC suffragant de arbunne; l'ancienne eathédrale et une 
grande partie des maisons sont brilles en marbre; on y 
voit une source curieuse jaillissant dans la ville au pied 
d'un rocher; Cette; Pd'.dnas; Agde , chef-lieu de 
canton, sur la rive gauche de l'Hérault, avec 8,683 
bitants, un tribunal de commerce, une école impériale d'hy- 
drographie, un bureau de douane, un port de pèche et de 
commerce pour des bàtiments de 200 tonneaux,  l'em- 
buu¢hure de la branche inférieure du canal du 3lidi dans 
l'Hérault, un cabotage actif, un cummeree considérable 
d'importation et d'exportation, et des communicalions ré- 
gulières avec Marseille par bateaux à vapeur : cette ville est 
très-ancienne : elle doit sa fondation à une colonie de Pho- 
céens; c'est FAgatha des Romains; elle est entièrement bti- 
rie des laves que jetait autrefois la montagne de Saint-Lnup; 
Bddarieux, chef-lieu de canton, sur l'Orbe, avec g,012 
habitants, uit collége, une industrie florissante: des troubles 
grares y éclatèrent après le 2 décembre 151; Cler- 
no  t; Ganges, chef-lieu de canton, avec une église con- 
sistodale calviniste  une chambre consultative des arts et 
manufactures, une industrie et un commerce importants ; 
on y compte .1,600 habitants; F r o n t i 9 n a n ; Z u n e l, etc. ] 
Les bourgs de  à 3,0o0 habitants.sont communs dans 
le pays, et les populations de ces bourgs, comme celles de 
presque tous les villages, sont aggloméré.es et encloses de 
murs depuis la triste et sanglante guerre des Albigeois. Le 
peuple en gfinéral parle le patois languedocien, dégénéra- 
tion de l'ancienne langue des troubadours, dont ce pays a 
vu naltre un grand nombre. L'habitant des campagnes en- 
tend cependant le français ; mais il a de la peine à le parler. 
Enfin, on trouve dans le département d'assez nombreuses 
ruines romaines; les vestiges de la voie Domitienne 
montrent encore sur toute la longueur du territoire. Partout 
des inscriptions, des tombeaux, des franents, des ruines 
de cités, d'amphithdltres, excitent la cutiosité des amateurs 
et les investigations des savants. Près de 2astelnau sont 
les restes d'une ville appelée Substantion. D'autres ruines, 
sans nom détern5n, existent près de Fabrëgnes. A un quart 
de lieue de Clermont était le 'orum Neronis, du nom-dh 
pre de "libère. Pr da Saint-Thibery le Cessero d l'trio 
5. 



$6 IIÉRAULT 
éraire d'Anlonin, un camp permanent était assis sur un 
énorme rocher de basalle. Vr, de l'Acad. Française. 
HÉItAULT DE SÉCHELLES (ll[e-Jx), naquit 
à Paris, en 1760; sa famille, ancienne et noble, était origio 
haire de Normandie. Ses succès dans la magistrature furent 
précoces. Une éducation remarqvable, un esprit vif et pi- 
quant, a parole facile et spirituelle, une taille élevée, une 
figure charmante, les dons de la fortune et du jeune ge, 
lui aplanirent les voies. A sine! ans il était avocat, et ses 
premières plaidoiries furent plus que des essais. La reine 
désira voir le jeune orateur, et M e de Polignac, sa parente, 
le présenta à la cour. Sa personne et son esprit y plurent 
beaucoup. La haute prolection qu'il y trouva lui fit taire 
rapidement son chemin. La première place d'avocat gné- 
rai au Cbtelet venant à vaquer, Marie-Antoinette le fit 
nommer à cet olfice..u commencement de la révolution, 
il passa de cette place à celle de commissaire du roi près 
de la cur de cassation ; mais il ne s'y fil pas remarquer : ce 
ne fui pour lui qu'un échelon pour arriver à l'Assemblée 
gislalive, où il fil nommé par les électeurs de Paris. 
La lillérature l'avait souvent occupé depuis dix ans ; il 
s'était IlA avec les premiers hommes de son époque, avec 
les derniers repren tants du grand e philosophique, Buffon 
Rulhiìr«s, Chamfort et Mirabeau. Il suivit les lices acadé- 
miques, et nous avons de lui un lloge de Suger (t779), 
qui n'estinférieur en rien à celui de La llarpe, ou de Garni ; 
nais son écrit le plus remarquable est sa ïsite à Montbar, 
chez Buffon, en t78b. On a encore de luiun précieux frag- 
ment sur les hommes de la fin du dix-huitième siècle, que 
leur esprit, leurs manières et leur c('lébrité signalaient dans 
le monde. Le Magasin enctclopddique de Millin contient, 
enfin, des notes Itisloriq,esde Hérault de Séchelles sur la dd- 
clamation de Thomas et sur la Iïe d'Athanase Auget = ces 
ëcrits sont de 1791. Dëjà il avait publië, l'année précëdente, 
nn petit ouvrage intitulé .- l)étails sur la socétd à'Olten, 
et une Théorie de l'Ambition. 
Etré dans le mouvement politique, Hérault en suisit le 
coups, leur d'abord, rapide et violent ensuite ; il se lia au 
chefs de parti, mla ses vues aux leurs, les aida généreu- 
semeur de sa bourse, ¢.alcula et discuta les événements 
possibles avec eux. II lit paie des jeunes Immmes de talent 
et d'audace qui jurèrent que la France ne recevrait pas 
la loi de l'étranger. Il combattit dans l'Assemblée tous les 
ministres royalistes, signala les prètres et les émigrés hos- 
tiles, demanda la guerreà chaque outrage, fit attribuer la 
police de sreté aux municipalités, le pouvoir de juger les 
personnes  des corps qui ue jugeaient avant que les cho- 
ses, et donna la main à l'attaque du t0 ao0t par son in- 
fluence dans l'Assembée. Puis i! rédama le jugement des 
vaincus par le tribunal spécial qui fut instilué le 17 aoît, 
et fut envoyé à la Convention par le peuple de Paris. De- 
signA par les jacobins les pus ardents pour la place de 
maire, il relusa ce périlleux honneur. Il était en mission 
dans le lIont-Blanc, avec ses collègues Jagot et Simond, 
lors du procès de Louis XVI, et vota la mort dans une 
lettre/ l'Assemblëe, signëe également par ces convention- 
leis. A.son retour, il se plaça sur la "Montagne, prës de 
I)anton. li présidait laConvention au 31 mai. La constitution 
de 9:, votée après les événements de mai et «lu commence- 
ment de juin, fut principalement son ouvrage : quelques 
matinées et trois nuits lui suflirent pour ) meltre la dernière 
main; mais il ne rarda jamais cette constitution comme 
applicable. On satisfaisait seulement le peuple avec une 
inpossibilitd gouvernementale, dont l'exCurion fut ren. 
voyëe à la paix. H.rault prësidait la Convention, le 18 aoàt 
1793, lorsque oetle constitution fut acceptée par les en- 
voyés des assembiées pdmaires. 
Dans les premiers temps de sa p'ésence au comité de salut 
lmblic, il s'Cait chargé de retracer à laConvention la mar- 
che des afinC, des événe,ents lutCieurs, des levées 
d'hommes, etc. C'est lui qui proimsa le désarmement des 
• uspects et lit donner au comité de salut public la faculté 

DE SECHELLIb -- tlmtt»-ut 
de les arrêter. Au mois de epiembre, il quit de nouvu 
la Convention, pour aller remplir une mission en AI 
Héranlt  organisa rapidement, sans demi-mereç avec 
bumanit6 purtant, une dœefene, qui ne devint pas n- 
sai[. Vers la finale novembre, il fut dénon mme reoe- 
vaut chez lui des nobl du ys. 11 lui fut facile, à son re- 
tour, en doembre, de se justifier, et il offrit sa démission 
membre du comité de lut public ; mais la Convention la 
refusa  l'unanit. A partir de là il parut changer : 
otis de oete accusation l'avent affecte. oujours 
aux snc du mi, il s'y montrer tris, déoeur: 
on nergie n'était plus à rmisson de celiede ses oellu; 
les av mme ne le ramenaient point; il faisait d 
objections qui étonnaient. Robespiee s'inqui de son si- 
Ioe, et te dit. Presque aussit Hérault se trouva isol, 
abandonné. L choses ttainèrent encore quelqu mai- 
ries, qud tout à covp rarrestion d'une migr ch 
5imond, député du Mont-Blanc, ayant/ait prononoer 
nom, il ut abandoun par le coté de salut pubHc au 
cotaitCe sOreté générale, qvi le fit arrr le 9 mars 179. 
Il íit rign; il ne fit ni observation  résisnoe. 
puis quelque temps, il allait tous I lours, au bou 
Tuileries, voir passer quelques chaeées de condamné. 
Quelqu'un lui aant dit : ,,mment, Hérault[ tu 
ici, toi qui les juges -- J'y viens, répondit-il, voir 
de notre rfpublique; j' vieu apprendre ì mourir ». 
Dès qu'il fut sous les verroux, l'homme impsible s- 
at; l'homme charmt et doux se retrouva, avec  p 
sion de l'Cude. Danton éit revenu  Paris: rresh- 
tion d'Hérault et celle de Fabre le blessërent ; son oppo- 
sition s'en irrita; il perdit toute mesure, et se mit au  
de la tribune pour Ironder. Enbarr d'abord, ïmus, 
puis frémist de rage, les dictateurs se dïcidërent 
porter leurs derniers coups jusqv'a cet au,cieux contemp- 
lent. Dauton fut arrêtWaçec Camille Desmuulins et 
d'autr repréentants qui ïtaient ê[ra ou lasde 
Le proc mmença trois )ours après ; Hërault  fut 
compris, ainsi que F a h r e d'Eg ! a n t i n e. Il it dit 
l'acte d'accusatiun qu'Hér?ult avait nnivé longmps 
avec Dumouriez, Philippe Egalité et ses enIan ; et il avait 
trempë, y lisaitn, dans le vol des d i a m a n t s . Fouiet 
Tinville lut arrêté nrt par l'accusé, qui lui lit 
que  acoutions étentœelrangr, émigrées, et qu'dl 
avaient éoE foreCs et publiëes en Psse. E Hërat 
haussait h'oidement les épaul. Fouquier, gn6 et bl 
n auditoire, passait outre. L'accu fut ndamnë h 
ainsi que  amis, aprës les débats agités de trois . 
Il aarcha au supplice sans murmurer une plainte. Sa fige 
prit un air de réni cf[este, et oensea cette douoeut 
bieuveillan et modle qui était sou oeractre patienter; 
ses amis brillait du mme oeure. 
Au pi de l'écbafaud, de oss larmes brillaient à 
l'oeil enflammé de Danton : fl voulut se rapprocher de 
Hérault, calme et réfléchi comme les stoiqu, mds le 
bourreau ! spara rudement : « Plus d'embrmen, 
leur t-ii, c't fini. -- MisCable  lui cria Danton, bi 
donc plus cruel que la mortl Ya, dans nn momen., tu 
n'empêchas pas nos tëtes de se baiser dan le panier 
Cet nergique apostrophe, qui 6mur ivement HétauIt, 
le lira de son impassibilité; i remercia Danton par un trEIe 
et dernier sourire, et monoE fermement sur 
salua le peuple et la stue de la lité, et tendit  bote 
tte au bouffon. Ainsi périt, ì trenteuatre ans, un 
hommes 1 plus aimabl du siècle dernier un des plus 
purs, un des plus généreux de la révolution. 
Frédc Fvor. 
IIÉR&UT da vieux germoE ber, hr, seigneur, ou 
he', arm, ou ehr, honneur, et wld enclin, fidële, 
vooé, ou o/d, nlt, vieux. Ce terme a plusievrs 
Ch les anciens, c'étaitun officier public, dont la [onctmn 
éit dedoeclarer la guerre. Sa personne éit sacrfe, en vertu du 
droit d gens. Tous les peupl poH entent  



HÉRAUT -- HERBE 
ous diverses dénominations. Les Hëbreux ne pouvaient at- 
taquer une ville sans lui avoir préalablement fait offrir la 
paix par des délégués spécialement chargés de cet office. 
Les Grees leur donnèrent le nom de conservateurs de la 
paix, {pvloç),«;. Les Romains, celui de feciales. 
Plus tard, le nom de liéraut fut donné/ celui qui avait 
pour fonction, dan. les jeux athlétiques, de proclamer les 
statuts de la lutte et les noms des combattants vainqueurs. 
lis étaient consacrés à Mercure, et faisaient leurs proclama- 
tions et vers dans les jeux publics de la Grè¢e.- 
Au mo},en fige, les hérauts d'armes étaient des officiers 
de guerre et de cérémonie. On a prétendu faire remonter 
cette institution jusqu'à Charlemagne. Il est au moins prouvé 
qu'il y avait des hérauts sous saint Louis et mëme aupara- 
vant. On les divisait en rois d'armes, hrauts et poursui- 
vants. Le roi d'armes était le plus ancien des héraut ; les 
poursuivants étaient de simples candidats au grade ; les 
hérauts étaient au nombre de trente sous les derniers Valois. 
Ils avaient tous des noms paculiers. Le roi d'armes s'ap- 
pelait Mont-Joie Saint-Danois, cri de guerre des rois de 
France; les autres avaient des noms de province, 'or- 
znandie, Guilenne, yBourgogne, etc., disent Froissart et 
lIonstrelet. Leur principal emploi était de veiller ì la con- 
servation de tout ce qui avait rapport ì l'art héraldique, en 
dressant des généalogies et en s'opposant aux usurpations 
de titres ou armoiries; ils publiaient la célebration des fëtes 
et combats des ordres de chevalerie, signifiaient les cartels, 
marquaient la lice, appelaient Passailiant et le tenant, par- 
tageaient également l'ombre et le soleil aux combaltants  
outrance ; ils assistaient aux mariages des rois et à leurs 
obsèques, enfermant dans le tombeau les marques d'hon- 
neur du prince mort. A rextërieur, ils déclaraient la guerre 
et annonçaient la paix :en cela leurs fonctions et leurs 
privilêges étaient les mèmes que citez les hérauts de l'antiquité. 
Ce ne fut que peu/ peu que les privilées et les charges des 
hérauts d'armes s'accrnrent et parvinrent/ ce degré d'impor- 
tance; ì l'origine ils n'étaient guëre regardés que comme de 
simples messagers. Ils finirent, à la longue, par ne se com- 
poser que de nobles personnages. Leur costume de céré- 
monie était la coite d'armes de velours violet cramoisi, des- 
cendant à peine au genou et chargée, devant et derrière, 
de trois fleurs de Ils d'or Aux pompes funèbres, ils étaient 
en robe trainante, et tenaient à la main un ton noueux 
endurd. Sous Napoléon I  , la France a revu des herauls 
d'armes, vtus de cottes de velours bleu, chargecs d'abeilles 
:roc. Ils reparurent sous la restauration : seulement, les 
fleurs de Ils avaient remplacé les abeiiles. 
En Angleterre, les fonctions des hérauts étaient  peu près 
les racines. Leur collége dépendait du grand-murChai du 
royaume. Amée ne BEauFOrt. 
IERBACÉ. l'ogez Hane. 
HERBAGE. Ce mot, qu'il faut bien se garder de con- 
fondre avec herbe, désigne, dans le jardinage, toutes les 
espèoeç d'lierbes cultivées dans un potager : il n'est guère 
usité dans ce sens que lorsque l'on dit : vivre d'herbaes. 
En agriculture, il a une extension beaucoup plus grande, 
et désigne les prés que l'on ne fauche jamais, et qui sont 
destinés/ la dépaissance des boeufs et des vaches : les her- 
bages de Normandie sont surtout renommes pour l'engrais 
des bestiaux ; herbage désigne encore l'herbe de ces prés. 
LES herbages ont une heureuse influence sur la quai,té du 
lait des vaches, des chèvres, des brebis, etc. (VOile'- Fo,s, 
HEBART ,' JKat-Fln-t,c), un des penseurs les plus 
orinaux des temps modernes, naquit le 4 mai 1776, à 
Oldenbourg. A dix huit-ans il alla suivre lescours de l'uni- 
versité d'lena, et s'y livra surtout à l'étude de la philoso- 
phie. Après avoir accepté une place de précepteur dans 
une lamille de Berne, il revint en Allemagne, et s'établit h 
Goettingue, en octobre 1802. C'est là que parurent ses pre- 
miers esais psychologiques et métaplffsiques. En 1809 il 
fut appelé/ occuper ì Koenisgberg une chaire de philoso- 

AUX OEARPENTIERS . s 
phie, et son activité s'y partagea entre la continuation de ses 
recherches philosophiques et les devoirs de son enseigne- 
meut académique. En 1833 il accepta la chaire de philo- 
sophie de l'université de Goettingue, et mourut dans cette 
ville, en 18tl. L'énumération de ses divers ouvrages oecu- 
parait à elle seule plus d'une colonne de notre livre; et non 
moins longue serit celle des livres qui ont été écrite à roc- 
casion de ses ouvrages, soit pour les défendre, soit pour les 
combattre, ou encore pour les commenter. 
HERBE. Rien ne saurait ëtre plus vague que cette dé- 
signation : presque toutes les plantes annuelles qui, per- 
dant leurs tiges et leur leuillage en hiver, n'acquièrent jamais 
une consistance ligneuse ont été confondues sous cetle alA- 
nomination commune. Toutefois, ce sont le plus souvent 
des graminées ou des végtaux de peu d'apparence 
dans la langue vulgait on appelle herbes; dans la langue 
botanique, les mots herbe, herbac, n'indiquent que des 
caractères propres/ l'organisation des plantes : une plante 
est herbacée dès qu'elle n'est pas ligneuse; c'est une herbe 
Iorsqu'elle n'est ni un" arbuste ni un arbre. Du reste, à 
moins d'avoir parcouru les catalogues, on se ferait difficile- 
ment une idée de la multitude de plantes, diverses d'aspect 
et de caractères, qui ont Ce confondues sous le nom géné- 
rique d'herbes, et qui ensuile ont Ce sp¢cifiées par la 
désignation des usages attxquels elles étaient destinées. 
Les herbes ont été nommées avec justesse les nourrices du 
genre humain. Le blé, la vigne, I,e maïs, etc., sont en etfet 
des herbes. De mme le lin, le chanvre, le coton. L'ali- 
mentation de nos bestiaux est due aux vastes prairies, 
dont les herbes forment la base, qu'ils les y consomment en 
vert ou qu'elles soient transformées en foin par la dsic- 
cation. BELrlELI>-LerÈvRE. 
HERBE À JAUNIR. Voile-- Gcne et 
ilLRBE ; L.X MXXXE. l'o!/e'- F[rcQcE. 
lIERRE A LI|IROXDELLE HEBE AUX HIRON- 
DELLES. i'oçe - 
lIERRE  PAUVRE IIOMME. l'oile-. GRtoLE. 
HERBE À ROBERT. l'oye-. GExtv. 
IIEIBE AU COQ, espèce de tanaisie. Voyc-- Co 
llERBE AU DIABLE. Voge-'. DTVn. 
HERBEAU VENT ou HERBE DU VENT. 
ANÉMONE. 
llERBE AUX CANCERS nom vulgaire du 
ba9o europxa. C'et la seule espèce indigène du genre plu»t- 
ba9o, type.de la lamille des plumbaginées. Elle croit dans 
les champs acides et sur les bords des chemins des contrées 
méridionales. On la reconnalt aux caractères suivants : Ru- 
cine épaisse, pivotante et blanchâtre; tige glabre, anguleuse 
et striee; feuilles alternes, embrasntes, lancéolee s, d'un 
vert.un peu grisètre, entières ou légèrement denti¢ulées 
fleurs agrégées, terminale ; calice tubuleux, persistant, à cinq 
divisions, hérissé de poil» glanduleux ; cinq pétales réunis 
en tube à leurs onglets; cinq étamines, dont les filaments sont 
élargis à leur base en écailles qui entourent l'ovaire; style 
surmonté de cinq stigmates glanduleux ; fruit consistant en 
une capsule petite, s'ouvrant au sommet en cinq vulves, et 
occupée par une semence suspendue/ un placenta filiforme, 
qui nuit de la base, s'élève verticalement, se recourbe au 
sommet, et s'insère à l'extrémité supérieure de la semence. 
L'herbe aux cancers, qui Ileurit vers la fin de l'CA, a été 
désignte sous ce nom parce qu'on a prétendu que l'huile 
dans laquelle on a fait infuser cette plante a été très-elfi- 
cace contre d'anciens ulcères et a mème gueri de véritables 
cancers. Il parait qu'on en a aussi quelquefois employé la ra- 
cine comme masticatoire pour soulager le mal de dents, d'on 
la plante a encore été appele dentelaire. Enfin, le nom de 
;ualhe;'be lui vient sans doute de ses propriétés étaCques 
et de sa grande causticité, qui est telle, que son applications 
sur la peau ? excite une violente irritation. 
llERBE AUX CHARPENTIERS ou HERBE AUX 
COUPURES. I'oilez ACUlLLaa. 



38 
HERBE AUX CIIATb. Voyez CATAII.E et GEBMAN- 
HERBE AUX CUILLERS. Voyez COC[ILEAR. 
HERBE AUX CUBE-DENTS, HERBE AUX GEN- 
CIVES. Voyez VISc. 
HERBE AUX ÉCROUELLES. Vo#ez 
RBE AUX GUEUX. Voyç CLÉMATITE. 
HERBE AUX HÉMOHOIDES. Voyez 
HERBE AçX çiFS. Voyez 
HERBE AUX PERLES. Voçez 
HERBE AUX FOUX. Voçez P» 
EB AUX $O1E$. Voyez Doa. 
HERBE AUX TEIGNEçX. Voçez 
HERBE AUX VERRUES. ç«z 
ltERBE BÉNITE. ez 
HERBE DE CHINE. L Anglais donnent ce nom 
(Gna çrss) à nue sor de fil qu'on obtient dans 
ans la Chine de veres orties. Cette matière xlile pro- 
vient de trois eçde l'ancien genre uvWa ou da genre, 
çlus récent, bohemera, savoir la mv«a, la «ncissma 
la el«pçlla : on en efire auss,  oe u'il 
«or«ovus sida et du «ovchor olior, çais da sda 
tRtoeola et du sida autdon : elle se prSte 
dans les numéros I pins fins; elle rei les oeuleurs les 
çlus viv et çeut se meler  la la,ne pour formrr u drap 
solide et conomique. Les plantes qu produisent cette 
sabsnc« filamenteuse sont vvacs, très-haut, résisntrs 
£at vraisemblablemenlen cultiver en A;gée ns le colo- 
ies, e m$e dans le midi de la Fvaoe. Des gain seraCs au 
luséu dltisoireaturrlle de Paris ont procu une ex- 
oellentr filasse. L'urti«a nivea est déjà cnltiv en 
lgérie. Les toiles fabdques a, ec le Ghna çrs 
par les Yranis balle  Canton e par les Angles 
dol, arrivent main{enanl en Euroçe en oez grandes 
quantités, sous fore de moucho de poche. Elles sont 
d'un beau blanc, d'un biBant arble e d'une 
toute particulière. L. 
HERBE DE LA TRINITÉ. ;%gez 
{Botanique). 
HERBE DE SAINTE CUNÉGONDE. ;.'ouez 
PATOIE. 
HERBE DE SAINT JEAN. Voez 
liERRE DU PARAGUAY. Voyez Hovx. 
HERBELOT ( BxXUL D'), orienliste franis, 
néà Paris, le4 doembre 162b, mourra des sa tendoe jeu- 
nse de rares sposifions pour les langues orienl, et, 
après avoir terrainWes Cudes claiqu, s«joua long- 
temps en Ilie, particulièoement  Rome et à Florence. 
De retour  Paris, il fat admis cb le surintendant Fou- 
quel, qui lui assura une pension de 1,00 ran, oe qui 
n'empcha pas Louis XIV de le nommer son secreire-in- 
terprële pour les langues oenles. L'liie le revit en t666, 
et Yerdinan,l 1I, g,and-duc de Toscane, l'honora d'une protec- 
tion spéciale. Ce pnoe et votda le &ssuader de e rendre 
 l'in ition du ministre Colbert, qui l'aplait à Paris, où il 
mout, le S drcembre 169, profeurde syriaue au Col- 
iége de Franoe. D'Hertot a fait faire, aec Galland, 
grands progr à l'rtude d langues orienl. Sa $iblio. 
thèque orientale, publiée par Gafland (Paris, 1697,  vol. 
in-lb{), est une mine à plus riches pour ceux qui ot be- 
soin de connaitre I mœurs et I sciences de l'Orient. Èlle 
consiste, en grande partie, en traducons de l'arabe Hadji 
Khalfa La connaissance des lwr et d sciences dvoi- 
lée, et a éoE refondt;e par de Hammer dans sa eote en- 
c¢clop«d«que des Scietces de l'Orwnt (2 volume, ipzig, 
10). 11 avait compo, de plus, une Anthologie, et un 
Dictionnaire arabe, persan, tm'c et latin, q»i aurait 
formé 3 volumes in4olio. C deux ouvrag n'ont jamais 
vu le joor. 
HERBERT oem de Vermandoi. 

HERBE AU 
lord), né en lSl, ails, eu 1609, av les troup auxilialr 
anglaises dans I PayeRas, oh fl montra une bravoure voi- 
sine de la témérité. De retour en gletre, il bla à 
cour par son caractère çhevalerque, qui, du reste, l'im- 
pliqua dans plusieurs querell fcheu. En 1616, il fut 
envoyé comme mbassadeur en Franc, oO il rpliqua si 
énerquement h quelques paroles mséant du 
de Lunes, que la oeuf de Franoe demanda et obtint 
rappel; mais il sut si bien se juslifier aupr de Jau 
qu'aprs la mort du conn.ble il fut enoere une fo envoé 
à Paris. C't là que,en 1624, il plia son livre De Verita 
prout dstingutur a revclatione, où il cherche  exposer et 
 prouver que la relion nalurelle est suffinte, généle, 
complè, et que la révélation est iutile. Cet ouwage 
/ait signaler quelquefois oemme le précurseur d 
et d rationalistes. 
A son reur de Franc, il vécut, à pair de 1625, 
doE affair pubfiqu. Lorsque éclatërent 1 troubl du 
règne de Charl l , il se déclara d'abord pour le parl 
ment, mais qufl plus rd ce parti, et perdit par 1 u 
grande partie de  fortune. Il mourut en t6$. Ouke l'ou. 
vrage dont ous avons parlé, il publia : De eligione 9en- 
tilmm eomque apud eos caus ; De eligne la,i, 
et De EzpeditWne inRea insulam. Apr  mort on fit 
paraitre son ouvrage sur La Vie et le règne de Henri Flll 
(en anglais), qui t plutôt un panégydque qu'une védk 
biographie. S poésies, publie en t660 par son f, 
oetiennent quelques boat moux. Lord Oxford fit im- 
primer sec M(moires en 176. 
IlEBIEB. Quelqu auteurs ot nommé herb 
ouvrages scialement oensactés à la dription et h 
délineation des pìces végeoEles qui habitent un pals d- 
terrainW: tel est, parexemple, leHerbarium Amboineme 
Bumph; nais cette acception n't plus Mmise, et l'on 
désigne aujourd'hui sous le om d'rbier une oellecfion de 
plantes recueillies avec soin, préparé et oenseí e 
des feuill de papier. Cette seule de,tion indique - 
smment l différen pots su lquds il nous poge 
d'insister dans t aicle. 
1  Du choix des hanlillons.  plant herba, 
annue ou vivat, doivent, aunt que possible, 
dessché entières afin de oenserver h 1'6chantillon Pas- 
pect genéral et le port de la plante vivante ; les feui ra- 
dioel, dans I espèc vivaces, doivent sout $toe 
s¢rvé intacte. L plan ligneuse, pour la plupa trop 
gndes pour être conseées entiëres, nécsitenl un choix : 
ce sont I branch munies de lous leurs o, 
tig charge de feuilles, de fleurs et de fruit, qu'$ 
suout conseïver. Quelquefois, pour poer  diflér 
orn dans toute leur perfection, il sera neire 
faire plusieurs prëparations de la me plante  diver 
époqu de son développement : ¢'t un so qu'$ ne faat 
pas négliger. 
2  De Inclination des chantfflons. Le mode usi 
dans la preparation d plant doit nêcsairemt vafie 
avec la natureet les racoEr d plantes ell-mSmes. 
dsiccation s'applique h la majorioE des lȏ; il suit 
de I 6ier sur d feuill de papier aluné en conserv[, 
autant que possible, la sition norme et les rap 
de leurs org; puis on I comprime lenment. Ce pro- 
cédo s'applique h la grande majorioE des plant dicot[lo- 
nées; il n' a guëre que 1 fleurs d orchidée, d 
sacé, d amomé, et un  grd nombre de phnt 
monocotylédonë qui s'y retient. Mais I plant crypto- 
gam et les h  d rophtes egent plus de so= 
quelquchampigo, il faudra 1 exposer au soleil, et 
tremper dans une inture alcoolique de qusia ara, 
avant de proder à leur dicoetion complè. C't 
que M. A. Brongniart a pr6paré sa belle oellection de dav- 
r, de t»ezizcs, de phalhls etde bole. Pour 1 fucac, 
su[fira de I laver à l'ou douce et de 1 s6cher à l'oto- 



HERBIER -- HERCULANO 9 
3 ° De la conservation des chantillons. Les échantil- tons-nous que les cryptogames, qui ne fructifient guère 
lons, convenablement choisis, parfaitementdesséchés, coin- qu'en hiver, ne doivent pas tire étudiés dans la belle sai- 
primes, et appliqués sur des feuilles de papier au moyen son ? que les lichens, qui adhèrent intimement  la surface 
d'une solution de gomme, ne sont pas encore à l'abri de des rochers, ne peuvent s'en détacher facilement que lors- 
tout accident : la plupart des ombellifères, des crucilères, qu'une atmosphère humide a ramolli leur tissu coriace ? que 
des composées et des euphorbes, deviendraient presque les plantes prmtanières ou estivales s'étudient difficilement 
inévitabiœement la proie des larves, des teignes, des ptinus sous les neiges de l'hiver ? que les plantes des montagnes 
et de quelques autres insect phytophages, si l'on n'avait ne croissent pas d'habitude dans le plaines, ni les fleurs de 
recours, pour emicher de semblables ravages, à lin procédé la prairie sur les cimes ardues et les aig,dlles des rochers ? Ou 
chimique : ce procédé consiste h imprégner les échantillons bien encore,comme un savant écrivain I'a fait, apprendrons- 
convenablement préparés d'une solution alcoolique concen- nous an voyageur aventureux comment, en main«es occur- 
trée de sublimé corrosif, qui, tout en conservant in«actes les rences, on peut se tirer adroitement d'une pase périlleuse ? 
couleurs des plantes, les met complétement ì l'abri des at- comment, par exemple, on peut traverser un pr.cipice taillé 
laques des insectes : c'est ainsi que nous a té conservée  pic, en se suspendant par les mains ì un long b'ton de 
l'inestimable collection de Linné. cratoegzs oxacantha, placé en travers de l'effrayant 
Enfin, chaque échantillon doit porter une étiquette sur ablme? ou comment on peut se scarifier la paume des 
laquelle seront inscrits le nom de l'espèce, celuide l'auteur mains et la plante des pieds de telle façon que le sang qui 
qui le premier l'a décrite figurée, la patrie originelle de la en jaillit détermine une adhérence avec la surface lisse des 
plante, son habitat, l'époque de sa florain et de sa fruc- rochers, et vous emptche de glisser trop vite, etc. ? Décri- 
tification, la couleur naturelle de ses fleurs, ses feuilles et rons-nous minutieusement le vastmlum dillenianum, et 
ses fruits. Ainsi composé, un herbier devient une collec- le canif pointu, et la loupe à plusieurs lentilles, et les baro- 
tion complète de documents officiels, au moyen desquels le mètre% et les sécateurs, et les coquettes à papier gris, dont 
botaniste peut tracer l'histoire botanique d'un lieu ; docu- il faut, dit-on, se munir ? Rien de tout cela ; nous diron 
ments auxquels tous les historiographes à venir en peuvent simplement aux élèves : Étudiez la botanique dans les jardins, 
appeler pour corriger les erreurs dans lesquelles leurs prf- dans les herbiers, dansleslivresquisontfaits pour cela;puis - 
décesseurs seraient involontairement tombés : ainsi en est-il quand vous saurez votre botanique à fond, allez, cherchez. 
de l'herbier de Ga.pard Bauhin, conservé à Bàle; ainsi étudiez, rapportez; jusques alor., gardez-vous-en bien : votre 
en est-il des herbi.rs de Tournefort, de Vaillant et de 51i- temps serait perdu pour vous et pour le autres. 
cbaud, qui font la richesse du 51usíe de Paris; ainsi en est-il BerteD-Ler/VaE. 
de la collection de Ray et de Kœempfer au Musée britan- ltERBORISTE celui ou celle qui vend des plantes 
nique; ainsi en est-ilenlin de la magnifique collection de mdicinales. Dans lesgrandesville.%ilsdoiventjutifier d'un 
Linné, conservée par les soins du savant botaniste Smilh. diplbme garantissant leur capacité et conféré aprèsexamen. 
Brn-Lvvr,. Ils sont de plus placés sous la surveillance d'une com- 
HEItBIVOPES. On appelle ain.i les espèces animales mission composée de médecins et de pharmaciens. La loileur 
qui se nourrisseur exclusivement ,le végétaux. On emploie interdit la vente de« préparations pharmaceutiques. 
danslemèmesensl'expression dephylophage, nsiteprin- Il suffit donc à l'herboriste de savoir reconnaitre les dt. 
cipalement en parlant des insectes. I e nom d'herbivores verses plantes de son commerce, soit desséchées, soit/ l'é- 
s'applique plus particulièrement aux animaux qui paissent rat frais, et de posséder les moyens de conservation des 
l'herbe des prairies, comme le cheval, le bœuf, etc. Les unes et des autres. 
herbivores ne sauraient former dan»le règne animal une dt- llEPCOTECTONIQUE (du grec [pzoç, mur, rem- 
vision naturelle et systématique, puiçquïl existe dans tous part, et xzxovtz-, art de bàtir), art de construire les 
les ordres de ce règne des espèces animales qui se nourris- lur ri fi cations. Voyez G[.a (Art militaire). 
sent exclusivement de plantes. Toutefois, les espèces lier- |!EItCULANO DE CARVALHO ( AexAnr, o), un des 
bivores offrent quelques caractères qui les distingment des écrivains portugais contemporains les plus distingucs, ha- 
espèces carnassières voisines : ainsi, leur systëme dentaire qui« en 1796, à Guimaraens. Sa famille l'envoya très-jeune 
offre des diffrences notables; leur canal alimentaire offre  Paris, pour y faire son éducation. De retour dans sa pa- 
une surface absorbante plus étendue ; leur foie est plus trie, il se jeta aveeenthonsiasme dans le parti libéral, et se 
fréquemment dépourvu de Çésicule biliaire, etc. fit connaltre comme collaborateur de gazetts chartistes, 
Bvn-Lr/v. puis comme rédacteur du Panorama. Chargé dans ce der- 
ltERBORISA.TION. Linné dans sa Philosophie bu- nier journal de la partie litléraire, il y publia des poéies 
taniqzte, a soumis à des règles mélhodiques ces excursions qui furent bien accueillies, et le succès l'engageant à pour- 
vagabonde auxquelles selivrent les botanistes, soit dans le suivre cette carrière, il mit au jour son ïoëme A Voz de 
but d'étudier la nature végétale dans son allure franche, Propheta (la Voix'du Prophète ), o0 il peint en visions 
hardie, sauvage, soit dans le but de coiliger pour les j a r- et en songes t'avenir de sa patrie sous de sombres cou- 
dins botaniques et les h erb i ers des espèces végé- leurs. Cette œuvre, à la lois religieuse et politique, produisit 
rates nouvel«es; le grand Igislateur du règne végétal a rglé une sensation extraordinaire, en sorte que l'auteur v'hésita 
dans ce travail, avec une minutie que pourrait en-k.r le pas à la faire suivre, sous le titre de A Harpa du Crente 
ri.unal des rites et cérémonies du Céleste Empire, le eus- ( La Harpe du Croyant), d'un recueil de ses essais poCi 
fume, les instruments, les livres, les heures de travail, les ques, dont quelques-unsremontaient  sa première jeunesse. 
heures de repos, auxquels se devait astreindre le bu«artiste Ces poésies, divises en quatre chan«s, sont tout à fait 
herborisant. Mai% hélas! instabilité de toutes les i nstitu- dans le goOt romantique, alors de mode en France; seule- 
tions immaines! les ordonnances du grand Linné, qui toute ment, au milieu de son désespoir affecté, le poëte est resté 
sa vie avaitberborisé, qui toute sa vieavait professé la ho«a- fidèle à la religion de son enfance. Le roman d'Erich, 
nique sont tombées en une complète désuetude et chacun prdtre des Goths qu'il 
publia 
ensuite, 
ne 
pe,lt 
assurément 
a pris dans ses herborisations l'allure qui lui convenait le pas prétendre au titre de ci,eGd'oeuvre; mais il n'en est 
mieux. En face de oette éclatant exemple, à quoi rions ser- pas moins une production remarquable de la iittérature 
irait-il à nous, chétif, qui n'avons jamais herborisé qu'au portugaise. Depuis qu'il est arrivé à i"ge mr, Herculano 
Bois de Bologne, à Meudon et  Fontainebleau,  quoi de Carvalho s'est presque exclusivement appliqué à l'Cude 
nous servirait-il d'établir des règles gén'ales, et de poser de l'histoire nationale, et a achevé de publier rcemment 
des préceptes .dogmatiques ? Apprendrons-nous aux bota. à Lisbonne une Histori de Porçal en six x'olumes. Cet 
nistes qu'il faut aller chercher les Idanles dans les saisons ourae, dont l'auteur a profondément médité le plan, et 
et dans les lieux de. leur plus parfait développement? Di- qui abonde en documents nouveaux, se distingue en outre 



40 HERCULANO 
par un esprit de critique que l'on rencontre rarement chez 
les écrivains du midi de l'Europe, par une connaissance 
remarquable de l'histoire des nations étrangères, ainsi que 
par la beaulé et la pureté classique du style. 11 publie aussi 
des Tableatx tirœes de l'Histoire du Portugal, série de 
romans qui rappellent le taire de Walter Scott, et parmi 
lesquels ou remarque O £obo (le fou de la reine). 
llEBCULANUM ou plut0t Herculaneum, dans l'an- 
tiquité la ville de la Campanie la plus importante après 
l'lapl et Capoue, située entre Naples et Pompéi, non loin de 
la cote, fut fondée par les Osques, mais plus tard sa popu- 
lation se composa pour la plus grande partie de Grecs émi- 
grés. Après avoir déjà beaucoup souffert d'un tremblement 
de terre, arrivé en l'an 63 de notre ere, la terrible érup- 
tion du Vésuve qui eut lieu en l'an 79, et qui coOta 
la vie à Pline l'ancien, l'ensevelit sous des'mon«eaux de lave 
et de cendre, avec I villes de P o m p é i et de S t a b i e s, si- 
tuées à peu de distance. 
Les siècles, e.n se succédant, effacèrent le souvenir de l'é- 
pouvantable catastrophe; la barbar:'e survint ; de nouvelles 
générations parurent, et le sol calciné qui recouvrait Hercu- 
lanum vit un jour s'elever à sa surface deux petites cités 
nouvelles, Portici et Besina, sans que leurs habitants se 
doutassent qu'à une profondeur de 26 mètres au-dessous de 
leurs demeures gisait le cadavre d'une ville antique, autre- 
fois l'asile dn luxe, des beaux-arts, de lettres et des plai- 
sirs. lien n'est moins prouvé que l'assertion de Du Theil, 
qui prétend que la destruction complte d'Herculauum n'eut 
lieu qu'en 671. 
Des fouilles pratiquées précédemment, par exemple en 
1689, étaient tout à fait oubliées, Iorsqu'en creu«ant un 
puits que le prince d'Elbeuf faisait construire en 1720 dans 
une prol,rele qu'il avait acquise à Portici, les ouvriers mirenl 
cn'.lumière trois statnes de femmes vëtues, qui ornentaujour- 
d'hui le musée de Dresde. Mais le gouvernement napolitain 
fit défendre au prince de pousserses fouilles plu» avant, et la 
chose en resta là jusqu'au moment où Charles III d'Es- 
pagne, devenu roi des Deux-Siciles sous le nom de Charles 
¥1I (1736), ayant acbelë l'emplacement pour y construire 
le beau palais que l'on admire aujourd'hui à l'ortici, les 
.excavafions révélèrent l'exislence de la  iile souterraine, et 
l'on commença des fouilles pour interroger les monuments 
de cette ville rouelle. Ces fonilles, praliquées au mëme en- 
droit où avaient eu lieu précdemment cellesdu prince d'EI- 
beuf, firent découvrir un temple de Jupiter orné de sla- 
tu, et un thétre partaitêment conservé. Mais par suite 
de l'inexpérieuce des ouvriers employés d'abord à ces ira. 
vaux, on brisa beaucoup de precieux dubris. En 1750 on 
entreprit des fouilles à la rchercbe de Stabioe et de Pom- 
péi, et on découvrit sur l'emplacement de celle dernière 
ville les restes d'un amphillu.tre, qui, de l'ais de Winc- 
kelmann, devait pouvoir contenirjn.qu'à 30,000 spectateurs. 
Sous le règne de Joseph Bonaparte (1806-t808)les fouill 
se firent avec plus d'activité : il en fut de mme sous le règne 
de Joachim Mural (1808-1515) ; puis les événements poli- 
tiques forcèrent de les interrompre complétement jusqu'en 
1828. Repris alors avec une nouvelle ardeur, les travaux ont 
eu des résultats fort précienxpour l'archéoloe. 
Les deblayements opérés ont permis de reconnaitre que 
les rues d'Herculanum sont tirëes au cordeau, parCs de 
laves du Yésuve, bordes de troltoirs, quelques-unes méme 
de colonnades. Parmi les édilices alCouverts, on remarque : 
t ° trois temples, dont deux sont nrné« intérieurement de 
¢olonnes, de peintures à fresque, d'inscriptions en bronze ; 
o un , rnou»vet funéraire, environné de piédestaux ; 
2° un théMre, situé sous Resina, revêtu de marbres de 
diverses couleurs et décoré de statues d'hommes et de 
chevaux en bronze; 4 ° un forum, de forme rectangulaire, 
entouré de portiques soutenus par des ¢olonnes, pavé en 
marbre et décoré .:l'un grand nombre de statues, dont deux 
équestres en marbre et deux en bronze de éron et Germa- 
nicus; 5 ° plusieurs riches habitations partioulières, parCs 

 HERCULE 
de mosaïques et de marbres de différentes couleurs, et dont 
les murs étaient peints à fresque. 
C'est dans le sein de cette ville que l'on a trouvé la plus 
grande maison particulière des anciens Romains qui soit 
encore connue :elle se compose d'un grande quantite de 
chambres, avec une cour au milieu; d'un nécéed'un 
grand jardin, entouré d'arcades et de colonnes, et enfin 
de grandes salles ayant servi probablement aux réunions de 
famille. A coté de ces demeures de l'opulence s'Cèvent, 
comme dans nos villes modernes, de modestes réduits : 
[ ic c'est la boutique d'un barbier avec ses ustensiles, le 
. bancs où s'asseyaient les citoyens pour attendre leur tour, 
, l'etuve, et jusqu'aux épingles employées à la coiffure des 
femmes; là, la maison d'un chirurgien, avec divers instru- 
ments de son art. Quoique dix-huit cents ans se soient écouls 
I depuis l'engloutissement de la cité, il semble qu'elle ait été 
abandonnée de la vieille, tant les objets retrouvés sont 
pour la plupartdans un parfait état de conservation. Il n'est 
I)asjusqu'aux choses les plus vulgaires qui ne viennent con- 
firmer cette impression : l'une des maisons a offert aux re- 
gards de la farine  l'Cat de pte, un torchon pliA, des vases 
de terre cuite remplis de graines, de biA, de lenfilles, de 
gruau; une carafe contenant de l'huile dséchée, un pot 
d'onguent et un vase de verre renfermant encore le rouge 
que les dames d'Herculanum employaient à leur toilette. 
Bien qu'à chaque instant il semble que l'on doive voir ap- 
paraltre quelqu'uu de hOtes antiques de cette malheureuse 
cilA, on n'y a encore trouvé que quelques squelett : cette 
circonstance donne lieu de penser que la masse des habi- 
tants, qui, d'après quelques indices, était réunie au théàtre 
lors de l'eruption, sera parvenue à échapper au fléau. 
Comme nne ville nouvelle a été construite au-dessus de 
la ville ancienne, on ne peut procéder aux fuuilles qu'avec 
da précautions extrmes. Les dëbris de monuments d'ar- 
chitecture qu'on a pu découvrir jusqu'à ce jour n'ont pas, 
à beaucoup près, l'importance de ceux qu'on a trouvés à 
Pompci. Cependant les peintures murales qu'on y a décou- 
vertes ne sont pas moins remarquables sous le rapportdu 
dessin que sous celui de la composition ; dans le nombre 
on distingue surtout les grandes pages représentant Thésée, 
le Minotaure, Telephus et Hercule, le Ceutaure Chiron fai- 
sant l'éducation d'Acbille, Andromède et PersC, Diane et 
Endymion, l'Education de Bacchus, le tableau si célèbre sous 
le nom de L'Entremetle«se d'ltcrculanum, ainsi que deux 
arabesques de style égyptien. Détachées des édifices où elles 
se trouvaient avec la partie des murailles sur lesquelles 
elles étaient exAculCs, ces peintures ont été transporlées 
et placées sous verre au Musée de Portici, où elles occupent 
seize salles. Parmi les 150 statues de métal qu'on y a aussi 
trou es, les plus remarquables sont un Mercure, un Silìne 
ou un Faune, une 'ictoire, une "¢énus et une Diane. La 
littérature, elle aussi, s'est enrichie du résultat des fouilles. 
En 1753 ou découvrit dans une villa, qui a été détruite 
depuis, 1696 rouleaux de papyrus; et jusqu'en 1828 le nombre 
des manuscrits trouvés s'elevait à 7,756, dont plus de 00 
(grace aux procédés ingfinieux indiqués par Antonio Plaggio 
et par le célèbre chimiste anglais, Humph ry D a v y} ont pu 
ëtre déroul. Toutefois, on n'est parvenu  en lire que $8 
contenant des fragments des œuvres d'Épicure, de Philo- 
dème, de Démétrius, de Polystratos, de Colotè, de Phëdre, 
de Pbanias, de Carnéade de Chrysippe et de Cicéron. Con- 
sultez à ce sujet Herculanensia Volumina qu supersunt, 
publiés par Bosini (5 vol., ffaples, 1"93-1827). 
Epérons que les recherches qui continuent donneront 
un jour au monde savant la joie de posséder les textes 
complets de quelques-uns des ouvrages que le génie de l'an- 
tiquité nous a Iégués, et peut-ètreaussi quelque autre livre 
inconnu digne de prendre place à cté d œuvres immor- 
telles des Tacite, des Cicéron, des Démosthène, des ¥ir- 
gile. 
liEPtCULE. Ce nom, dont le bruit a rempli l'Erope, 
l'Afrique et l'Asie, et qui fut commun à plusieurs triom. 



ERCULE 
phateurs, fondateurs de villes, destrncteurs de ruonstres et 
de fléaux, et navigateurs dans l'antiquité, tient plus émi- 
nemment à l'histoire héroïque qu'aux ruythes grecs. L'aitC 
ration eut lieu lorsque la vanité des Hellènes rasserubla 
sur un seul horurue, né sous leur ciel, toutes les hautes 
actions disséruinées de ces héros tyriens, indiens, cretois, 
thébains. Cicéron, dans son œuvre De lV«tura Deoruru, 
compte jusqu'à six Hercule. Selon lui, le plus ancien se.e- 
rait battu contre Apollon, parce que, la prêtresse du dieu 
ayant refusé de lui répondre, il aurait, de colère, fuis en 
pièces le trépied sacré : celui-là ètalt fils de Lysité et du 
plus ancien de nus les Jnpiter. Le deuxième était 
tien, cru fils du Nil. Le troisième était un des dactyles d'Ida. 
Le quatriëme, fils de Jupiter et d'As/érie, sœur de Latone, 
était honoré par les Tyricns, qui prétendaient que Carthage 
était sa lille. Le cinquièrue, nomrué Bel, était adoré dans 
les Indes. Le sixièrue Cait le notre, fils d'Alcruène et de 
Jupiter. Ajoutons-y notre Hercule gaulois, et nous en au- 
tons sept. Varron n'en énumère pas moins de quarante-trois 
mlant à ces personnages héroiques des marchand% des 
navigateurs, des aventuriers célèbres. 
Le plus fameux, le plus connu des Hcrcule, celui auquel 
se rapportent les statues, les ruonuments, les poëmes de 
l'antiquité, naquit, vers l'an 138 avant J.-C., à Thê- 
bes en Béotie, de Jupiter et d'Alc mène, épouse d'A 
p h i t r y on. Son nom signifie en grec la gloire de Junou 
(Hpa ).o) : il en devint plutèt la honte, et fut mieux 
appelédu noru de sa mère, Alcide (la Force). Deux ser- 
pents, suscités par la jalouse Junon, et qu'il étouffa dans 
ses bras, furent les jeux de son berceau. La reine des dieux, 
touchée de ce prodige, le ravit un instant dans l'Olyrupe 
elle en fit un imruortel en lui donnant son sein, dont 
quelques blanches gouttes de lait tombées forruèrent la 
voie I a c tée. La vigoureuse adolescence, l'éducation de ce 
fils de Jupiter, furent souriCs au plus illustres couteru- 
porains : P, hadamante lui fuit l'arc erCois à la main, et 
Castor le ceste au poing; Chirou lui enseigua, avec 
l'astronoruie, l'art de guërir les hommes, et Liuus les élé- 
ruents de la musique, soins que le fils d'Apollon paya de 
son temps et de sa vie : le jeune et brutal disciple, dont 
l'oreille fausse et les nerfs de ter étaient rebelles  tnnte 
mélodie, brisa d'impatiencesa lyre sur la tëte de son rualtre 
divin, et l'envoya charmer les ombres dans l'Élyse, où 
Virgile l'a vu dans ses rêves poCiques. 
Ayant atteint sa dix-huitiêrue année, doué d'une force 
surnaturelle, Alcide se présente  la cour d'Eu r y st h é e, 
roi de Mycènes, auquel, par le sort de sa naissance, il doit 
soumission. Celui-ci lui commande successiveruent douze 
des plus périlleuses expéditions dont ait jamais triomphé 
un mortel : c'est ce qu'on appela les douce travaux d'ller- 
cule. Sa première victoire fut, non loin d'Argos, dans la 
fort de cmée, une lutte avec un lion monstrueox, qu'il 
terrassa, et dont la peau lui servit, dans la suite, de vte- 
ment à la cour des princes, de casque et de bouclier dans 
les corubats. Près de là, d'un coup de sa massue, il abattit, 
dans les ruarais de Lerue, les sept tëtes renaissantes d'une 
hydre, au plus subtil venin. En Arcadie, il saisit vivant 
un sanglier furieux sur le nmnt lr)'manthe, et l'cmporta 
sur son épaule. Dans cette mëme soufrée, à travers la fort 
de pins du mont Ménale, il atteignit à la course une Liche, 
aux pieds d'airain et aux cornes d'çr, et In prit. Non loin 
de là, il perça de ses flêches, sur le lac Stymphale, des 
oiseaux fêtides, qu'on nommait harpies. En Crête, il 
dorupla un taureau lancé par le courroux de Neptuue sur 
les terres de Minos. En Thrace, il tua Dioruède, roi 
barbare, qui donnait  ses cavales pour pture de la chair 
huruaine : il les lui enleva avec la vie. Sur les plages du 
Pont-Euxin, il exterruina les A ru a z o n e s, et enchaina leur 
reine Hippolyte, qu'il donna à Thésée. En Ëlide, il net-" 
toya les Cbles d'Augias, fils du Soleil, qu'il tua; ces 
étables contenaient 3,000 boeuls. Aux bords du Btis, il 
it mordre la poudre aux trois corps de Gér}'on, dont il 

41 
emmena les génisses à travers les ruonts de Pyrènc s fille 
de roi, qu'il séduisit cheruin faisant et abandonna. En 
Afrique, au pied de l'Atlas, il ravit les pommes d'or aux 
Il espér ides, laissant abattu et sans vie sur le sable leur 
Icrrible gardien, un dragon à cent tëtes. Enfin, il descendit, 
cnchalnant C e r b è r e, dans les sombres royaumes de Plu- 
ton, et en retira Thésée captif. Ce dernier labeur du héros 
eut l'Épirc, dont Proserpine était la reine, pour thëàtre. 
Ces douze grands travaux seraient des contes absnrdes, 
quoique brillants, s'ils n'étaient l'erublerue, selon l'opinion 
des anciens eux-mêmes, du gcnie solaire, parcourant les 
douze sir, ries du zodiaque. 
Des actions prodigieuses, quoique secondaires, leur ser- 
 eutde brillant appendice; ce sont l'extermination des C e n- 
t a u r e s ; Pylos, la ville de Nélée, réduite en cendres; A n t ée 
arraché à sa ruère, la Terre, qui renouvelait les Iorces de 
ce geant, qu'il ètouffa dans ses bras; le tyran égyptien 
Busiris immolê; le brigand Cacus écrasé dans sou antre, 
sous le ruont Aventin; Éryx de Sicile, athlcte et roi, et le 
parjure Laoruédon, fuis à mort, ainsi qu'llippocoon, Eurytus, 
Périclymène et Lycus. Depuis, il enlève Alceste a Proserpine, 
et tralne, rualgré elle, Cerbère écumant jusqu'aux portes du 
jour ; il arrache au fleuve acarnanien Achélos une corne, que 
les nyruphes remplissent de fruits et de fleurs, et qu'elles 
nomment la corne d'abondance; il charge sur ses épaules le 
ruonde, sous le poids duquel va succomber Atl a s; il perce 
de ses flèches le vantour de Proruéthée, dont il fait tomber 
les chalues sur le flanc du Caucase; il délivre Hesioue, fille 
de Laoruédon, d'un monstre marin, suscité par .Xeptuue, 
demandant à Troie son salaire, et enlin, coupe par le milieu 
une ruonlague vers l'Occident, et en fait deux, dont l'une, 
en Europe, s'appelle Calp, et l'autre en AIrique, Abyla, 
qu'il nonme de son nom colonnes d'Herculc. De plus, il cu- 
mule, dans les trois parties du monde alors connues, epouse% 
ruaitresses et cnncnbines. Un jeune etbel enfant de M)sie, 
Hylas, est rume l'objet de ses plus tendres alfections; les 
Haruadryades le lui ravissent en Bith)nle, lorsque le vais- 
seau des Argonautes, dont ce héros fait partie, relAche en 
cette contrée de l'Asie Minoure. Les plus connues de ses 
frurues sont Mégare, fille de Créon, roi de Thèbes, Asty- 
damie, Déjanire, d'Étoile, et Hébé, la dernière, son 
épouse celeste. Parmi ses ruaitresses, on compte O m p Il a I e 
et I o I e, la jalousie de Déjanlre, puis, auparavant, Épicaste, 
Parthénope, Augé, Astyoche, et les cinquante filles de 
Thestius, qu'il rend toutes mères en une rurue nuit. 
Cependant, la gloire et les jours du héros touchent à 
leur terme : la jalouse Déjanire a déa envoyé par Lycas, 
son esclave, la fatale cheruise teinte du sang de Nessus au 
malheureux Hercule. A peine la tunique empoisonnée a- 
t-elle touché ses ruerubr, qu'un feu d6vorant le pénètre 
jusqu'à la ruoëlle des os. Sur le mont OEta, il dresse lui- 
ruëme son brocher, y étend sa peau de lion, se couche des- 
sus, met sous sa tële sa ruasue, et, d'une voix calrue, 
ordonne h son ami, à son corupagnon de gloire, h Philoc. 
tête, d'y mettre le feu, lui laisant le soin de recueillir ses 
cendres. Bient6t la flamme, secondèe par la foudre, monte 
vers la voûte éthérèe et I'me du héros avec elle. Des noces 
éternelles et sereines à jaruais l'attendaient dans l'Olympe : 
il s'y assit au banquet des dieux, à c6te d'Hcbb, la Jeunesse, 
son épouse divine. 
Hcrcule avait institué les jeux o I y va p i q u e s, et laissé 
sou noru à des deseendants qui furent des rois, les Hra- 
clides, et, dans l'Erope et le long de l'Asie, à des villes à 
jamais lameuses (voye'. H«CL:e). Des autels, des temples 
nombreux lui filreat élevés en Grèce, eu Asie, en ltalie, 
en Espagne, dans les Gaules. Le peuplier blanc lui était 
consacré parce qu'il l'apporta de l'Epire clez les Hellèues. 
Eripide et Sénèque n'out eu garde d'oublier Hercule dans 
les plus beaux chants de leurs ruuses tragique.c. 
llEitCULE (Atrooruie), astérisrue qui fait partie de 
23 conciliations boréalcs des anciens, est la I • d.nsles 
6 



4 ttERCULE 
tables. Les deux ttes d'Hereule et d'Ophiucus ou Serpen- 
taire sont très-près l'unede l'autredans le ciel; ce sont deux 
étoiles de deuxiéme grandeur. Entreelles sur les cartes pa.sse 
la ligne menée depuis la constellation Antarès jusqu'à la Lyre. 
On remarque dans Hercule une nébuleuse, petite tache 
blanchâtre, d'une pleur lumineuse et informe. Hercute est 
le plus souvent appelé dans les mythes astronomiques Astro- 
chyton (Tnnique d'étoiles } et Genuflexus (Genou-en-terre) 
parce que ç'est dans cette attitude qu'il est reprèsenté sur 
les globes cdestes, sous l'aspect d'un combattant, et se faisant 
une sorte de bouclier de la peau du lion de émée. 
HERCULE (Bains d'}. Voyez MEuuiA. 
HECULE { Colnnnes d'). On appelait ainsi, dans l'an- 
tiquité, les deux promontoires qui forment le détroit de Gi- 
hraltar, Calpd et Abyla ( aujourd'hui Gibraltar et Ceuta); 
qu'on regardait alors comme les limites du monde, et qu'on 
croyait avoir été placées.là par H e r eu le dans ses voyages. 
Il ERC ULE FA RX EE, statue colossale en marbre, co- 
pie d'un ouvrage dr Ly-ippe, exécutée parGlycon. Elle nous 
montre le béros fatigué du travail. Il se repose un instan: 
et s'appuie sur sa massue. Les musrles et les reines sont 
encore enllés. Le vinage incline à terre et a quelque chose 
de triste dans l'expression. L'unWdes mains d'Hercule est 
posée sur son dos et tient une pomme des Hesperides. Ce 
morceau a été reproduit à l'infini et dans toutes les gran- 
deurs. 
ltEBCY.XIE,X.X'E ( Forèt ), en latin Hercynia sylva, 
dénomination formée,lu mot tudesque hart, signifiant mon- 
tagne couverte de forèts ; clic designe vaguement tant6t une 
montagne, tant6t une autre dans l'interieur non exploré de 
la Germanie. Aristote déja parle de la fort hercnienne et 
5' place les sources de l'lster (Dannbe). Cesar, qui lui donne 
tarte largeur approximative de neuf journées de marche, et 
une longueur de soixante journées, comprend sous ce nom 
toutes les chaînes de montagnes de la Germanie situées au 
nord du Danube, et ses contemporains en racontent beau- 
coup de fables. Strabon, qui ne pouvait pas encore se dé- 
gager entiërement des idées de Car, la plaçait egalement 
dans la région o6 est aujourd'hui le Boehmerwald, ce qoe 
fait aussi Velleius Paterculus en termes plus précis. FIorus, 
Tacite et Pline, de leur cte, y comprennent aussi la for.t 
de Thuringe. A mesure que les géoaphes anciens connu- 
rent mieux la Germanie, et apprirent les noms particu- 
liers de ses montagnes, il leur fallut reporter toujours plus 
avant cette dénomination, de sorte que Ptolémée ne dési- 
gne pins par la que les montagnes qui unissent les Sudètes 
aux Carpatbes, montagnes pour lesquelles il ne connais.it 
pas ns doule le nom spécial. Les géographes moderne» 
ne sont point d'accord sur la dct.ermination précise de la 
contrée de l'Mlemagne actuelle rtpondant à la Iorët Hercy- 
ienne des anciens. 
HERDEP ( JF-A.;-GoI'rrED ), né à Morungen, petite 
ville de la Prusse orientale, en 174.t, est à la fois l'un des 
écrivains les plus distingués de l'Allemagne et l'un des plus 
féconds pol.graphes qui soient connus dans l'histoire des 
lettres. Fils d'un instituteur de jeunes filles, Herder n'avait 
reçu dans la maison paternelle que des leçons mèdiocres. 
Un chirurgien en chef d'un régiment de Prusse, qu'un de 
ces hasards qu'on doit appeler providentiels avait produit 
dans cette famille, mit le jeune Herder sur la voie des 
bonnes études. Bient6t, mieux dirigé, le futur historien de 
l'humanité fit de tels progrès, tout en gagnant sa vie, qu'à 
l'gge de vingt-et-un ans il fut nommé predicate,;r et directeur 
d'un école de paroisse à Riga. L'estime générale l'entourait 
dans cette ville, Iorsqu'au bout de quelque temps, brillant 
du désir de voir le monde et d'étendre ses connaissances, 
il quitta sa position pour venir à Paris, où il se lia avec 
quelques hommes distingués, et rechercha la société de 
tout ce qu'il y avait d'éminent dans les lettres et les scien- 
ces. De retour dans sa patrie, il se chargea de Péducation 
du prince d'Eutin; mais au moment où il amenail ce prince 
à Paris le comte de Schaumbourg-Lippe, élève de notre phi- 

 HEI 
losophie du dernier siècle, le nomma prédicateur de sa pe. 
tire cour, et surintendant des pasteurs de sa principauté 
comptant, d'après les ouvrages de Herder qu'il avait lus, 
s'attacher un homme de lettres plut6t qu'un ministre de la 
religion. Herder, dont l'imagination était exaltée et la piCL fervente, se trouva mal à l'aise dans cette charge, et il sol- 
licitait, par l'entremise de ses amis de Goettingue, une chaire 
de théologie dans cette célëhre université, lorsque., par les 
bons olfiees de Goethe, dont il avait fait la connaissance à 
Strasbourg, le duc de Weimar lui offrit la place de pre- 
mier prédicateur et de surintendant général de son duché 
(1776). Weimar était à cette époque la petite Athènes de 
l'Allemagne : elle possédait Wieland et Goethe ; elle atti- 
rait sans cesse tout ce qu'il y avait d'hommes de foot et 
de génie en Allemagne. Herder se trouva au comble de ses 
VœUX sous ce rapport ; mais les exeës de travail auxquels 
il se livra minèrent bient6t sa santé, et lui donnèrent une 
æusceptibilite d'autant plus fàcheuse que ses relations 
étaient plus étendues et plus délicates. Porté à la prési- 
dence du consistoire par le duc son souverain, anobli par 
l'Cecteur de Bavière, Ioenoré de l'Allemagne, sans dtre in- 
connu à l'Canger, Herder mourut en t 803, peu gé et moins 
heureux que ne le permettait sa position. 
Théologien, orateur sacré, poëte original et traducteur, 
philologue, archlogue, historien, philosophe et critique, 
Herder, doué d'une brillante imagination, écrivant avec 
plus de chaleur et plus d'eclat que de profondeur, fut con- 
sidéré pendant quelque temps comme un savant universel 
et nu homme éminent. L'universalité à laquelle il eut la 
faiblesse d'aspirer ou de se laisser aller l'empêcha seule 
d'arriver au premier rang et de transmettre à la postérité 
un monument die de son génie. Cette dangereoe faci- 
litA, qui ëgare tant d'hommes de talent, lui fit étudier 
toutes les langues, embrasser tous les genres de littérature, 
poursuivre sans cesse les lauriers académiques de Berlin et 
de Munich, et s'attaquer enfin au géant de la philosophie al- 
lemande, à K an t, dont le langage est si difficilement com- 
pris et dont le génie était si diflerent du sien. 
Les ouvrages de Herder, jadis trop célébrés, trop 
laisss maintenant, car l'Allemagne, qui est facdement en- 
thousiaste, cesse géneralement d'estimer ds qu'elle cesse 
d'admirer, ont eté recueillis et publiés par Heyne, Jean et 
Georges Muller d'aprës un choix peu sevère. Ces éditeurs 
les ont classés en trois séries. 
rous placerous ici l'éuumération des œuvres complètes 
de Herder. 
I. Belion et°theologie : 1 ° De l'esprit de la poésie 
hébraique. Cette composition, dont le pieux auteur avait 
conçu le plan dau sa ieunesse, n'est pas achevée; mais il 
n'existe pas dans la littírature moderne de livre qui peigne 
mieux que celui-I/a le vieil Orient des patriarches. 2 ° Le plus 
ancien Document du genre humain. C'est un traité sur 
la cosmogonie de Moïse. On 5' trouve sur la symbolique et 
les hiéroglyphes de l'ancienne Êgpte quelques considéra- 
tions ingenieuses, mais aussi un grand nombre d'hypo- 
thèses temeraires. 3 ° Serinons. to lnterproetation du 
veau Teslamenl : dclaircissemenls liroes d'une source 
cemment découverte ( cette source est le Zenda-l'esta 
d'Anquetil ); Études sur l'Apocalypse. 5 ° Lettres sur l'é- 
tude de la lhdolo9ie. 6 ° lffëditat.ons religieuses" Cette 
premiëre série se compose de dix huit-volumes in-12. 
I1. Philosophie et histoire : 1" Le .llonde primilf. Let- 
tres et dissertations sur les antiquités persépolitaines. C'est 
la meme hardiesse dans les vues et la meme incertitude 
dans les détails que nous avons déjà signales au sujet des 
antiquit de l'Égypte. 2 o Sur l'Origine du langage. 3 ° Prd- 
lude sur l'histoire de l'humanitd. * Idde.s sur l'histoir 
de rhumanitoe. C'est le chef-d'oeuvre de Herder, et M. Qui- 
net a eu raison de le traduire en français : c'était pour 
l'époque à laquelle il parut, c'est./-dire il y a quarante ans, 
une des productions les pins remarquahles du dernier 
siècle. 5 ° Post-scène de l'histoire de l'humanit : c'est 



HERDER 
pendant du Prélude. 6 e Sur le Système de Spinosa, traité 
accompagné de plusieurs autres dissertations de philosophie 
et depsycholngie. 7 ° Discourspédagogiques. 8 ° Adrastea, 
esquisses d'événements et de caractères du dix-septième 
siècle. On remarque dans le nombre le morceau sur les 
académies de France. 9 o Btographies et critiques litl- 
raires. 10 ° Métacritique de la Critique de la raison pure, 
polémique sans puissance et sans exactitude, dirigée contre 
le système philosophique de Kant, que Herder avait mal 
saisi, et qu'il a faiblement combattu, on doit le dire, tout 
en rendant justice aux vues religieuses qui guidaient sa plu- 
me. 11 ° Lettres sur le progrès de l'humanité. 12 ° Calli- 
gone, Traité du beau et de ce qui plaft. Cette deuxième 
rie forme 22 volumes : elle embrasse, entre autres, les 
souvenirs que la veuve de Herder a publiés sur la vie de 
son mari. 
II1. Littérature et arts : t ° Pragments sur la littéra-. 
turc allemande. 2" Poésies. Les unes sont originales, 
les antres iraitCs de toutes les lanes modernes, et en- 
tremèlées de dissertations sur le génie poétique de presque 
tous les peuples d'Occident et d'Orient. Ce qu'on remarque 
dans le nombre est le poëme Le Gid, traduit exactement 
de l'espagnol. 3" Forts critiques. Ce sont des considéra- 
tions sur la science ou l'art du beau d'après les aqteurs 
classiques. 4 ° Sur les causes de la décadence du godt. 
° Sur l'd9e d'or de Louis XIV et de la reine Arme. 
6 ° Archoloyie et plastique. Ge sont des mélanges de 
poésie et de critique. Cette troisième srie forme 20 
hunes in-12. 
Les Allemands ont souvent appelé W te l an d le Voltaire 
de la Germanie. Wieland n'a pourtant embrassé qu'un pe- 
tit nombre de sujets. Sous le rapport d'une intarissable fé- 
condité et d'nne sorte d'universalité, c'est plutOt Herder 
qu'il faudrait assimiler au plus inépuisable de nos écrivains. 
Mais sous le rapport des principes et des tendances ou ne 
remarquerait entre eux qu'une différence tranchée, car 
H,.rder combattait l'Cale de Voltaire, après l'avoir étu- 
diee dans ses principales opinions. Si les éditeurs de ses 
œuvres eussent été ses amis plut6t que ses admirateurs, 
et qu'ils eusent voulu les réduire à une vingtaine de vo. 
lumes, ils auraient rendu un Cai service à la littérature et 
à sa mémoire. En donnant une foule d'ébauches informes 
et d'articles médiocres, échappés à une plume trop facile, 
ils ont [ait autant de tort à la réputation de Herder qu'à la 
pureté de leur go0t. Quant à Herder, ce qui doit sauver 
son nom de l'oubli, dont le temps en accable tant d'autres, 
ce sont ses qualités morales. Elles ont fait la gloire de sa 
vie. Ce sont elles qui non-seulement l'ont distingué d'une 
foule d'écrivaius du second ordre, mais qui l'ont mis au- 
dessus de Wieland et de Goethe, c'est-à-dire au-dessus des 
deux hommes qui ont été avec Schiller, leur ami, la gloire 
de la littérature allemande. Ce sont ces mèmes qualités, 
cultivées avec une attention religieuse, qui l'ont fait sur- 
nommer le Fénelon de l'Allemagne, surnom beaucoup 
trop glorieux pour des temps si voisins de sa vie, mais 
urnom que la postérité lai rendra peut-ètre quand mème 
elle ne lira plus ses ouvrages 
Un fils de Herder, Sigismond.Wol.fang, né en 177ff, 
morten t838,à Dresde, appartint pendant de longues années 
 l'administration des mines du royaume de Saxe, et les 
services qu'il rendit à la minéralogie avaient été récom- 
pen.s dès 1812 par ietitre de baron. Mxrr. 
HERE. Voyez Car. " 
HÉRÉDITÉ. On appelle ainsi l'universalité d droits 
actifs e t passifs qu'une personne laisse après sa mort ( voyez 
Success,o). 
L'action par laquelle nnepersonneqni se prtend héritière 
larme sa demande devant les tribunaux se nomme péti- 
t i o n d'h ér ë di t . L'adition d'héredil$ est l'acte par le- 
quel une personne fait connaitre qu'elle accepte une suc- 
cession qui bd est dévolne. 
L'hérédité des fonctions et des emploisacréé les castes 

HÉRÉDITÉ 43 
de Igypte et de l'Inde; nous la voyons établie de mème à 
l'origine de toutes les républiques et de tous les États de 
l'antiquité. Fille de la conquèt et de l'invasion, elle finit 
par disparaitre en tous lieux, devant l'émancipation du 
peuple asservi. 
En France, sous la seconde race, les bénéfices et les 
ri efs devinrent héréditaires après avoir été temporaires et 
viagers, et de cette tendance u niverselle sortit la lé o d a I i t é. 
Cependant l'hérédité des bénéfices se rencontra en concur- 
rence avec les concessious tmporaires et viagère.s longtemps 
auparavant. Une des formules de Marculfe nous montre que 
c'était déjà une pratique usitëe à la fin du septieme siècle. 
Les exemples en abondent dans les diplmes de Louis le 
Débonnaire et de Charles le Chauve. Enfin ce dernier 
reconnait formellement, en 877, l'hérédité des bénéfices, et 
à la fin du neuvième siècle c'est là leur condition commune 
et dominante. 
Des charges et des offices pu.-ement civils devinrent égaie- 
ment héréditaires par la suite, biais les progrès de l'prit 
humain firent successivement tomber ces priviléges et ces 
entraves. L'héréditë de la pal r le, œuvre de la Restaura- 
tion, périt avec elle. La seule hérédité du tr¢ne, quoique 
abattue par diflérentes révolutions, surnage encore parmi 
nous. 
IIÉBi' DITÉ (Mdecine, Physioloyie). L'hérédité seca. 
ractérise parce qui t inhérent ou adhérent des ancêtres ou 
parents, aux descendants, non pas seulement pour l pro- 
priétés physiques et autres obiets extérieurs, mais pour les 
qualités murales ou internes, qui s'attachent et se trans- 
mettent dans les races ou quelques individus. Ainsi, des 
vices et des maladies se cramponnent, non moins que des 
vertus ou de brillants avantages corporels s'infiltrent dans les 
générations, jusqu'à ce que l'état naturel ou normal ramène 
l'organisme à son type primitif, ou que d'autres modifica- 
tions y soientapportées et implantées à leur tour. L'art, le 
choix des nourritures, les exercices, le régme de vie, iusti* 
tuent nos belles faces de bestiaux, engraissent énormément 
les uns, procurent à d'autres des toisons longues et soyeuses, 
développent les iustincts sagaces du chien pour la chasse, 
la vigueur et la souplesse du cheval pour la course; à la 
suit de longs soins, ces animaux obtiennent des formes, 
des propriétés qui sont transmissibles dans leurs descen- 
dante» si l'on choisit également les individus et lea faces 
avec lesquels on les allie. On sait aussi, par des croisements 
habilemen! ménag, ajouter à telle variété les quaiité pro- 
presà la perfectionner, dans le sens qu'on désire lui attri- 
buer. Ces quabtes brillantes, maintenues à la longue, pas- 
sent dans les Iormes, la structure mème de l'animal, et 
le mérinos, le bouc thibétain, le cheval arabe ou andalou, 
le chien de chasse, le lévrier, etc., telle race de poules • de 
pigeons, se propagent sous l'influence permanente des cau- 
ses qui les ont produites. 
On comprend que si ces perfectionnements factices se 
perpétuent, les vices, les défauts et maladies organiques, 
résultant de progrès contraires, tendent égaiement à s'en- 
raciner, à se détériorer même encore dans la suite des gé- 
nérations, si rien ne s'y opposait. Ainsi, les constitutions 
chétives, épuisées, ne peuvent engendrer que des individns 
encore pins délabrés et impuissants, à mo/ns de nourritu- 
res fortes ou d'un régime restaurant. Tel cheval poussif 
et morveux, tel chien étique, à moins de s'allier  une 
femelle saine, robuste, propagera sa triste race; mais en 
mariant, par exemple, un individu débile de poitrine ou de 
teins avec l'individu bien développé par ces organes, on 
restituera la race dans sa vigueur primordiale. C'est surtout 
au moyen de ces croisement de faces, O- par des alliances 
de défauts contraires, comme par un régime différent, que 
l'on corrigera les vices hrditaires, et qu'on éteindra les 
maladies transmissibles. Or, chez l'homme, les systèmes or- 
ganiques nombreux qui constituent son corps varient dans 
leurs équilibres harmeniqus. Certes, un individu musclé» 
athlétique, bien nourri, habitué à des travaux corporels  



44 HÉBIIDITE 
comme sont les manouvriers, forts de halle, etc., transmettra 
(SI rien n'y est contraire) cette vigueur musculaire à ses entants, 
tandis que le savant, délicat, énervé par ses travaux intel- 
lectuels dans son cabinet, n'aura g,Jère pour progéniture 
que des tres infirmes et sensibles. C'est sans doute pour 
cela que le génie devient rarement héréditaire, comme le 
prouve l'exemple des enfants de la plupart de nos grands 
hommes, Racine, Buffon, etc.; un esprit qui s'épuise reste 
incapable de transmettre son éneie. Au contraire, un 
guerrier, un héros ardent de courage, peut très-bien engen- 
drer des fils qui lui ressemblent pu physique comme au 
moral : Fortes creantur forlibus et bonis. [ous compre- 
nons donc la possibililé de ce genre de noblesse hrddi- 
taire, si le sang ne forligne point dans la race de la pru- 
doterie. Jadis, les Francs, descendanls des gserriers 
cambres, ne s'alliant qu'enlre eux, conservant, avec la di- 
guité de leurs titres, le« babiludes belliqueuses, l'exercice 
perpeluel des armes, de la chasse, la fierté do caractère 
aec la suprematie sur leurs serfs ou roturiers, regorgeant 
chaque jour de chair, ou vivant somptueusement, élaient 
lbysiquement aussi de hauts et puissants seiyneurs. 
On le voit par les peintures et sculplures qui les repré- 
senlent auprès de leurs chélifs mainsmortables, taillables à 
merci et misëricor,le, réduits au pain noir et aux légumes 
dans le moyen ge. 
Les conslitutions et les tempéraments deviennent hérédi- 
taires, surtout dans leurs qualils physiques. De mème, on 
peut croire que si bon chien chasse de race, le fils d:un 
homme civilisé aura dès son enfance le cerveau plus large 
que cebfi d'un barbare. Les propensions du jeune sauvage se 
manifeslent dejà en effet pour la vie errante des fordts, 
comme chez le jeune oiseau, qui dëveloppe spontanémenl 
ses instincts natifs. 11 y a Cerlaines familles chez lesquelles 
l'epril natsrel ce monlre héréditaire plus qu'en d'autres, de 
mème que la diposilion apoplecl[que ou pbtbisique se ma- 
nifeste avec une sorle defalalilé au mme ge qu'elle avait 
apparudans les pères et mères. Personne n'ignore combien 
la folie, la nsélancolie et d'aulres névroses de l'eneéplsale, 
non moins que l'hyslérie, Iëpilepsie, peuvent se Iranspor- 
ter dans le» enfanl par un malheureux hérilage. Cpendanl, 
ce sont moins des lesion purement malCie!les du syslëme 
nerveux que des mouvements vicieux et habituels de cet 
appareil. 11 en est de même des mœurs, qui s'ancrenl et se 
corporifienl, poser ainsi dire, à la longue, par les exercices, 
le rcgime de vie dans les métiers: les casles des Hindons, 
maiuteuues pendant tant de s:èctes, ont pu étabtir des 
faces faciles à dislinguer par la conqiluIion corporelle, 
ci Iransmissil,les de père en fils. 
Ce ne sont poinl les maladies aiguës, mais seulement les 
chroniques, et surlout les organiques, qui deviennent bé- 
réditaires. 11 en est ainsi des conformalions, telles que les 
sexdigilaires, les macroeéphales, les goitreux, cte. Ainsi, 
les virus teuaces, le cancéreux, le serofideux, passent sou- 
vent aux enfants, comrae les affections organiques d« cœur 
et des gros vaisseaux, la disposition anévrismale, la squir- 
rbeuse, cie. Les fil des goulleux, des graveleux, sont expo- 
sés  voir éclore leurs genres d'affeclion, non pas que de 
telles prbdispositions de iennenl néeessairement efficientes : 
les soins, un régime contraire, peuvent emp/cher leur ma- 
nifestation. Cependant, les enlants qui ressemblent le plus 
a leurs parenls emportent presque toujours les germes in. 
vincibles de la phllsisie, de la folie, etc., qui apparaltront 
plu tard, et aux époqes où la constitution paternelle 
et malernelle ont vu se dployer ces funestes prédestina- 
tions. 
On a tenlé d'expliq,er ces phénomènes d'hérédité, soit 
normale, saine, soit morbide. On a dil que le Iluide repro- 
ducleor, émanant de toules les parlies du corps des parent, 
apportait dans la conslilution du nouvel embryon Ios les 
élémenls, en minialure, des organes des père ci mère avec 
!eurs Ision% leur structure intime, leur lempérament natu- 
rel on acquis, leurs diposilions de santé ou de maladie. E 

]tEIESIAIQUE 
quoique les parents,  l'époque de la génération, n'bleui 
encore éprouvé ni la goutte, ni la pierre, ni la manie, n 
l'épilepsie, etc., cependant les germes de ces affections non 
dèveloppes n'en existent pas moins i ils ont fourni un con- 
tingent capable de se développer plus tard dans les descen- 
dants. Lors mme que la femelle serait ule dépositaire de 
l'oeuf ou de l'embryon, la fécondation du m/tic n'en influe 
pas moins slr toute la conlormation du Ioetus, comme le 
prouvent les exemples des métis. On boit dire toutelois que 
ni les bossus, ni les manchots, les boiteux, les aveugles, ne 
transmetteur d'ordinaire leurs infirmités  leurs enfants. 
Quand l'hérédité n'est pas constante du père au fils, on 
dit qu'elle saute une génération pour passer au petit-fils. 
Mais ce phénomène, s'il a lieu pour certaines affeclions, peut 
devoir son interruption  un eroisement avec un individu 
sain, et sa rsurrection ultérieure  des circonstances de 
régime ou de constitution qui ramènent la mdme maladie. 
Du reste, ces observations, la plupart vagues, dans les fa- 
milles, sont plus souvent des excuses ou des accusations que 
des vritSs bien établies. J.-J. Vav. 
ilEBEFOBD un des comtés occidentaux de PAn- 
glelerre, d'une superficie de 7 myriamèlres carré.s, avec 
une population de 99,112 habitants. Coopé de collines, 
de railCs et de plaines, le pays offre un apect charmant. 
Les collines sont couvertes de bois ou de champs cultivés 
jusqu'à leur sommet. La Wye, le plus considérable de ses 
cours d'eau, car il n'a pas moins de 18 myriamèlres de par- 
cours, après avoir reçu le Munnow ou Monnow, à droite, et 
le Lugg avec l',rruw et la Fromie, à gauche, va porter 
le tribut de ses eaux  la Seern. Celle rivière tortueuse, 
rapide, abondante en saumons, est célèbre par ses rives 
romantiques, et assez profonde, dans les hautes eaux, pour 
porter des barques de 300  400 quintaux jusqu'à Hay, 
c'est-h-dire à une distance de 4 myriamètres au-dessus de 
Hereford. Le Lugg est aussi navigable, pour des barques 
de moindre tonnage, jusqu'a quelques myriamètres de Leo- 
rajuster. Le canal de Leominster déhoucbe à l'occident 
près de Kinon, sur l'Arrow, et au nord-est dans la Severn. 
oh doit aboulir aussi le canal de GIouceter et Hereford, 
qui n'est terrainWque jusqu'à Ledbury. Le sol est en gé- 
riCai si ferlile, qu'un douzième seulement du comté se 
refuse à la culture. On récolte plus de froment et d'orëe 
qu'il n'en faut pour la nourrilnre des habitants, et la col- 
Inre des arbres esf l'objet de tant de soins que Hereford a 
etWsurnommé le verger de l'Angleterre. Le cidre et le poiré 
s'exportent en grande quantité, non-seulement à Londres 
et  Brislol, mais jusqu'en AraCique et aux Indes oeciden- 
raies. On cnllive aussi beaucoap de houblon, qui s'expêdie 
en partie dans le Kent et le Sussex. L'ëdueation des bes- 
liaux n'est point non plus négligée. Les montons de Here- 
lord, qui provienneut de la race des Collings on Rylands, 
sont fort estimés, à cause de la finesse de leur toison et de 
l'excellence de leur chair. Les fordts fournissent beaucoup 
de bois de chCe, mais le règne minéral n'offre que des 
mines de fer, qui ne sont pas exploitCs. A l'exception de 
quelques fabriques de gants à Hereford et à Lcominster, de 
cordes et de càbles  Ledbury., et de grossi/res toffes de 
laine, ce comté n'a point de manufactures. Les fabriques 
de drap de Ledbury, autrefois florissantes, n'ont pu se 
soutenir. 
HEREFORD, chef-lieu du comté, dans une contrée fer- 
tile, sur la We et le canal de Gloueester, est le siCe d'un 
év/ché et possède quelques monuments auciens, entre anlres 
une calhédrale du douzième siècle. Au nombre des édifiees 
plus modernes, on cite l'ëvché, le palais de justice, la pri- 
son du comté, le théâtre, l'hbpital et l'hospice des aliéns. 
La population, quis'élève  12,000 limes, fabrique des gants, 
de la flanelle, des chapeaux, et fait un commerce de cidre, 
de houblon et de tan. 
HËRÉSIAPtQUE (du grec ,, patç, opinion séparée, et 
àéTfi;, chef), premier auteur d'une hérésie, eu chef d'une 
secle hrétique. 



IIÉBËSIE (du grec =,'.p--af;, opinion sparée, form de 
=Ipw, je choisis). Ce mot, qui, d'après son étymologie, si- 
gnifie simplement un chuter, une adhdsion à un parti quel- 
conque dans l'hypotbèse de deux opinions opposées, n'est 
plus employé que pour désigner une erreur volontaire, opi- 
nid, tre, contre un dogmeeatholique : de I/ le nom d'hdrd- 
siarque, par lequel on désigne l'auteur d'une erreur 
pareille, ou le chef d'une secte qui l'embrasse, et celui d'h 
r é t i q u e, donné tant aux partisans de cette erreur qu'à l'n- 
I, triton erronée qu'ils adoptent. 
Dès l'origine du christianisme, des hérsies surgissent an- 
dacieuses, et se propagent non-seulement parmi les fidëles, 
mais au milieu mème des nouveaux convertis, qui se lais- 
sent entralner, lesuns par faiblesse, les autres par ignorance. 
11 était important que l'Evangile ne s'établlt pas sans con- 
tradiction et comme dans les tnèbres. Si les apOtres eus- 
sent eu toujours des auditeurs dociles, prèts h les croire sur 
parole, on n'cor pas manqué d'invoquer plus tard contre 
leur doctrine cette aveugle soumission, et d'arguer de faux 
les faits cités par eux et admis par des diseiple trop pré- 
venusen teur faveur pour les examiner. Si donc au premier 
siëcle de l'ère chrétienne les novateurs attaquèrent les 
dogmes sans jamais démentir les faits miraculeux racoufés 
dans l'Èvangile; si, malgré l'avantage et la facilité qu'ils 
auraient eus à en démontrer l'imposture, ils n'curent jamais 
la pensée de le faire, c'est 1/ une des preuves les plus fortes 
de la véracité des hommes apostoliques. 
Les prétentions peu déguisées des Juifs, qui voulaientin- 
troduire dans les rites chrtiens une partiede leurs eérémo. 
nies, celles des païens don t- la conversion manquait de 
sineCitA, et qui tentateur d'allier aux domines eatholiques 
les prétendues vérités de leur philosophie, tels furent jus- 
qu'/ 1I a nès les principes des diverses erreurs répandues 
parmi les chrétiens. 
On conçoit aisémeut en effet combien dut paraltre sin- 
.,_,ulière aux discoureurs des écoles philosophiques une doc- 
rine qui renferme des dogmes auxquels il faut se soumettre 
sans discuter, des mystëres qu'il faut croire sans les expli- 
quer, des vérités qu'il faut admettre sans les comprendre : 
l'orgueil humain se revolta contre de telles exigences; il refusa 
de potier le joug qu'on voulait lui imposer; et comme on 
exigeait tout ensemble la soumission de l'esprit à la foi et 
celle du cœur/ la morale nouvelle comme on voulait mal- 
friser et l'indépendance de l'un et les affections de l'autre, 
il preféra se créer, suivant ses goOts, des lois moins difficiles 
à observer. Telle a été depuis dix-huit siëcles l'orine 
«les hérésies qui ont tour/ tour étonné le monde, les unes 
par la bizarrerie de leurs princi_pes, les autres par le fana- 
tisme de leurs partisans, et qui toutes ont montré/ quel 
danger on s'expose, dans quelles déplorables aberrations on 
se précipite, quand on renonce à la seule garantie offerte a 
l'homme contre l'erreur, le lien de l'unitC 
il faut, pour se rendre compte de ces scandales, se rap- 
peler que si les suppliees des martyrs ont été nécessaires 
pour montrer l'héroïsme nWde la foi, les hérésies ne le sont 
pas moins autant pour distinguer les esprits dociles de ceux 
que la légèreté porte vers les nouveaulés, que pour témoi- 
gner de l'admirable constitution de l'Église et pour tenir 
en garde les dpositaires de la saine doctrine. D'ailleurs, la 
forme seule varie d'une secte h une autre : le fond de l'er- 
reur change peu ; et comme dans une mème communion 
les membres sont souvent divisés entre eux, que ses diffé- 
rentes sectes n'ont de commun que leur loignement de 
l'Église, calfiolique, la Providence semble avoir plaeé sans 
cesse une sauve-garde à eOté des précipices, en donnant 
tout homme de bonne foi le moyen de distinguer, mème 
sans une grande instruction, la vérité du mensonge. 
L'abbé J. 
Tant que le christianisme ne fut pas religion de l'État, les 
ttérésiarques ne furent frappés que d' e x c o m m u n i c a t i o n 
mais depuis Constantin l'aulorité temporelle prit fait et 
cause pour l'Église, et, outre l'excommuaieation dépendant 

des évgques, ils encoururent le bannisemeut, la perte de 
leurs droits civils, et leurs livres furent condamnés aux 
flammes. La peine de mort leur fut appliquée pour la pre- 
miëre fois par le synode de Trèves, dan la personne de 
P r i s c i I I i e n, en 385 ; toutefois, les condamnations sera- 
blables prononcées par les évgques avant l'établissement 
de l'i n q u isition ne pouvaient gtre exécutées qu'avec le 
concours du pouvoir séculier. fais dès les premières années 
du treizième siècle s'établirent dans presque tous les pays 
de la chrëtienté de formidables et tyranniques inquisiteurs. 
La croisade contre les A I b i g e ni s ne fut véritablementen- 
treprise que pour exterminer l'hérésie en exterminant les 
hérétiques. Du quinzième au seizième siècle la France, 
PEspagne et l'Italie furent désolées par les persécutions reli- 
gieuses, que vint renouveler, au dix-septiëme, le fanatisme 
iutolérant des eunfesseurs de Louis XIV. Les inquiiteurs sé- 
firent avec non moins de fureur en Allemagne. 
L'Église protestante a eu aussi ses hérésies et ses hé_ré- 
tiques ; ainsi, au seizième siècle, S e r v et fut brtl comme 
tel à Genève ; et l'Èglise anglicane, si elle ne hrtla pas les 
siens, les dépouille au moins de leurs droits politiques, si ce 
n'est de leurs droits civils. 
HÉRÉTIQUE. On appelle ainsi l'homme qui, sans 
cesser de faire protession du christianisme, soutient volon- 
tairement et avec opiniatreté une erreur opposée à la foi. Il 
laut dune pour devenir hérétlque qu'on soit chrétien; que 
l'erreur dans laquelle on tombe ait pour objet un article de 
fui ; qu'on n'ignore point qu'elle est opposée h la doctrine 
de l'Égllse catholique : on ne peut nier en effet qu'il soit 
possible d'errer de bonne foi. Un enfant né de parents hé- 
rétiques, élevé par eux dans les principes de leur secte, jeté 
plu tard dans une position o0 rien ne iendra lui révéler 
le vice de sa croyance, peut, à la rigueur, pasçer sa vie en- 
fière sans concevoir un doute sur l'orthodoxie de ses prin- 
cipe«. La iustic.e divine est lrop miséricordieuse pour punir 
le péché quand il n'existe pas : or, sans volonté, il n'y a 
pas d'hérésie ; l'ignorance invincible a toujours été d'ailleurs 
uue excuse suffisante. lais donner ses opinions comme 
des dogmeset chercher à leur créêr de prosélytes; mépriser 
et les jugements et la censure de l'Ée, lise; se mettre soit à 
la tète', soit à la suite d'un parti qu'on sait èlre en dehors 
de son giron ; se croire plus in_-truit que le corps entier des 
pasteurs, à qui l'assistance du Saint-Eprit a élé promise; 
ne tenir compte ni de l'autorité des siècles ni de la parole de 
Dieu, c'est une témérité que le plus simple bon sens est en 
mesure d'apprécier, ind,«pendamment des règles de la foi. 
On peut le dire, aujourd'hui que les controverses suscitées 
pour la propagation de l'erreur ont porté presque partout 
aussi la connaissance de la vérité, il et bien difficile de 
trouver un hértique de bonne foi. Une illufion passagère 
peut enlralner, mais 10t ot tard le doute nuit dans l'esprit, 
et dès que le doute apparalt la bonne foi cesse. 
Il faut distinguer cependant avec soin rerreur de ses par- 
tisans : le chrétien fidèle ne ménagera jamais l'hérésie, il 
ne pactisera point avec le mensonge et le poursuiTa dans ses 
plus secrets retranchements. Le dépét de la foi n'est pas seule- 
ment confié au corps enseiguaut ; chaque membre est appelé 
à contribuer, selon ses forces, à le conserver intact; mais 
l'homme isolé, malgré son égarement, doit ètre IraitWavec 
bienveillance, si rien dans sa doctrine ne porte atteinle à 
l'ordre public et aux bonnes mœurs. Telle a toujours été, 
quoi qu'en disent les sectateurs des diverses hérësies qui 
ont déchiréson sein, la conduite de l'l'glise romaine : si elle 
frappe de peines sévères ceux de ses enfants qui se sont 
séparés d'elle, c'est quand le scandale I'y oblige; ses cha- 
timents sont d'ailleurs d'un ordre tout spirituel, et la con- 
version du coupable est bientôt suivie de son entière récon- 
ciliation avec elle. 
llosheim a donc calomnié l'Église Iorsqu'il a soutenu 
dans son lfisloire Eccldsiastique qu'au quatrième siècle elle 
adopte gétëralement la maxime que toute erreur en matière 
de religion, dans laquelle on persistait après avoir été dé- 



46 HÉRETIQUE 
înen-t avedi i-était punissable et méritait les peines civiles, 
mëme des tourments corporels ; jamais, au contraire, elle n'a 
regardé comme punissables que les erreurs qui intéressent 
l'ordre public. Les premiers auteurs d'une hérésie qui en- 
treprennent de la répandre, de lui gagner des prosélytes, de 
faire un parti, doivent tre considérés comme des perturba- 
teurs du repos public. Une expérience de dix-huit siècles a 
convaincu tous les peuples qu'en géueral une secte nouvelle 
ne s'est établie qu'en causant du tumulte, desséditions, des 
révoltes contme les lois, des violences, et souvent mme en 
amenant une elfusion de sang plus ou moins considérable. 
On aura beau dire que suivant ce principe les Juifs et les 
paiens ont bien fait de mettre à mort les Ap6tres et les pre- 
miers cbrétiens : il u'en est rien. Les Ap6tres ont prouvé 
qu'ils avaient une mission di'ine, jamais un hérésiarque 
prouvé la sienne ; les Ap6tres ont prché constamment la 
paix, la patience, la smmmission aux puissances séculières, 
les bérésiarques ont toujours fait le contraire. 
Les peines portC contre les hérctiques sont : I' ex c o m- 
m u n i c a t i o n, la privation de la juridiction ecclësiastique, 
et l'irrgmlarité ; on conçoit aisément la justice de ces me- 
sures. L'Égise, retranchant de son troupeau et privant de 
ses faveurs ceux qui renoncent/ elle, leur laisse toujours 
la facultéde rentrer dans sou sein ; maihêureu.ement tes- 
prit d'erreur, essentiellement opiniâtre, sait trop rarement 
l]cclir et rcntrer dans la voie de la vérité. 
L'abbé J. DvLms. 
HÉRICAIT DE TIiURY (L.-E.-F.), né vers 
OEhury (arrondissement de Senlis), lut chargé de la surveil- 
lance des c ata c o m bu s de Paris, sous le gouvernement 
impërial, qui lui donna les fonctions d'inspecteur général 
des carrières du département de la Seine. C'est au vicomte 
«le Tllury que l'on doit les immenses travaux qui, tout en 
rendant ces vate souterrains praticables, ont affermi le sol 
,le plusieurs quartiers de Paris. On lit avec intérêt les des- 
criptions publies en 1815, sous le titre de Description 
des Catacombes de Paris, par Héricart de Thury lui-mme. 
Successivement nommé membre de l'Académie des Scien- 
ces, olficier de la Légion d'Honner, gentilhomme de la 
chambre du roi Charles X, deputé pour les départements 
,le l'Oise et de la Seine, inspecteur génëral des mines, etc., 
Héricart de TIlury s'était retiré à Ruine, lorsqu'il y mou- 
rut, c.n janvier 185-1. 
HEISSON genre de mammilëres de l'ordre des car. 
nassiers, famille des insectivores. Les hérissons sont remar- 
quables par les piquants roidês et acérés dont leur dos est 
couvert. Cespiquants ne sont qu'une modification des poils, 
qui, au lieu de rester flexibles et soyeux comme citez les 
autres mammiferes, gros,issent et prennent la dureté de la 
corne. Ces animaux, dont la longueur totale est d'environ 
trente centimìtres, sont en général d'une couleur grise ti- 
rant sur le brun. Ils vivent dans les hales et les fourrés, 
et se nourrisseur de jeunes crapauds, de vers, d'escargots, 
,le crabes, de fruits et d'oiseaux. Ils se cachent dans leurs 
terriers pendant le jour, et en sortent la nuit pour aller 
chercher leur ncurriture. Ils construisent leur nid avec de 
la mousse et mettent bas de quatre à cinq petits par portée. 
Le hérisson, que la nature n'a doué ni d'assez de force pour la 
latte ni d'assez d'agilité pour la fuite, et qui n'a pasnon plus 
t'instinct de e créer une retraite inaccessible ì ses ennemis, 
est doué en revanche de la faculté de se ramasser en fl6chis- 
sant la tgte et les pattes sous le ventre, et de ne plus alors 
présenter h l'ennemi qu'une boule toute hérissge de pi- 
quants s'entre-croisant dans tous les sens, et que les plus 
hardis hésitent à attaquer. Plus le danger auquel est exposé 
le hérisson est grand, et plus il a la faculté de se contracter 
de la sorte et de s'envelopper de sa peau comme d'une inex- 
pugnable cuirasse. Quand il a une fois pris cette position, 
on ne peut le décider à revenir à sa forme naturelle qu'en 
l'aspergeant d'eau froide, ou bien en le jetant dans l'eau. 
Pendant in saison d'hiver, i ree ainsi tout ratatiné dans son 
nid de mousse, opposant au [roid sa seule armure; et ce 

n'est plus qu'au printemps qu'il se décide à quitter sa re- 
traite pour reprendre ses courses nocturnes. Il est d'ailleurs 
parfaitement inoffensif. On dit que dans quelqoes contrées 
il est susceptible de domestication, et que les Kalmoucks 
l'emploient  débarrasser leurs demeures de divers insectes. 
Le hérisson, qui possède une odeur offrant beaucoup d'a- 
nalogie avec celle du musc, est souvent chassé par les chiens. 
Cependant ceux-ci n'ailnent pas en général à se frotter contre 
un pareil adversaire, dont les piquants et l'aspect lieu en- 
gageant leur inspirent de la terreur, tant qu'ils n'ont pas 
été dressés à cette espèce de chasse. Mais ils ne lardent pas 
It s'aguerrir; et une fois que les petites blessures que leur 
caosent les piquants de t'animal les ont irrités, ils font bien- 
t6t de leurs dents nn usage tel, que force est au malheureux 
hrisson de e rendre. Plus prudent, le renard, embusqué 
patiemment, attend pour se jeter sur lui le moment oh la 
fatigue le force à se dérouler et à présenter ainsi le défaut 
de son armure. 
On ne connalt encore que deux espèces de ce genre : le 
hdrisson commun, ou hdrisson d'Europe (eriiaceus Euro* 
poeus, Linné), et le hdrisson tf longues oreilles {erinaceus 
aurit, Pallas) qui habite les environs d'Astrakan, les 
bords de la mer d'Aral et mgme l'Égypte. 
HÉRISSON (Botanique). Vo!le= Cnxtç,,,iim. 
HÉi/ISSON (Ichth/ologie), nom vulgaire de quelques 
poissons des genres baliste et diodon. 
IIÉRISSO (/lalacologie), nom vulgaire de plusieurs 
coquilles du genre murex { VOile'- Rocun) : le hdrisson a 
9rosses pointes courtes, ou hrisson pourpre, est le rnurex 
ricinus ; le hdrisson à longues pointes, ou hdrisson om- 
bihgué , estle murex histrix; le hérisson à mille pointes 
est le murex lodus. 
HÉRISSON (Fortification), poutre portée par le milieu 
sur un pivot, et armée de quantité de longues pointes de 
fer, qui sert, aux portes des villes, pour ouvrir it fermer 
le passage, selon qu'il est nécessaire, et qu'on fait rouler sur 
la rampe, ou les débris de la brèche, pour empcher l'en- 
nemi d'v monter. 
HIiSSON (Tactigue). V.o/ez Gaé (Art militaire ). 
HEBISSON CUIP, ASSE. On donne vIgairement ce 
nom . plusieurs tatous. 
HEB.ISSON DE MALACCA  HÉRISSO D'A3I£- 
BIQUE, noms vulgaires de deux espèces du genre porc- 
dpic; 
HEBISSON DE lIER. Vo¢e-. Ot'tsrx. 
HÉBISTALL aujourd'hui HERSTALL, petite ville 
de7,563 habitants, sur la rive gauche de la Mense, ì environ 
3 kilomètres de Lige. L'exploitation de la houille et la pro- 
duction du fer sout tes priucipales industries de la popula- 
tion. La seigneurie d'Héristall appartint à partir de 1444 à 
la maisou de assau, sous la souveraineté de l'évêque de 
Liíge. En 1702, à la mort de Guillaume III, roi d'Angle- 
terre, des diseusions s'élevèrent au sujet de cet héritage, 
qui finitpar gtre adjugé, en 1714, àlaPrusse; et vers 1740 
cette puissance le rendit à l'évgché de Liíge. 
Le château qui le dominait jadis, et dont il reste h peine 
quelques vestiges, est le célèbre manoir héréditaire du 
maire du palais d'Austrasie, Pepin le Jeune ou le Gros, 
appelé de là Pepin d'ltristall. Par la suite, comme do- 
maine de la famille des Carlovinens, il fut souvent la 
résidence de Charlemagne. 
Un chlteau du mgme nom existait aussi autrefois sur les 
bords du Weser, aux environs de Minden, dans la province 
prussienne de Westphalie. Il lut complétement détruit pen- 
dant la guerre de trente ans, et le village qui s'était formé 
au pied de ses remparts porte aujourd'hui le nom d'Hers- 
tell. 
HÉRITAGE ce qui vient par voie de s u c c e s s i o n  
et pat extension, les immeubles réels, comme terres, mai- 
sons, .etc. 
IIEITIEI:L C'est celui qui succède, soit en vertu de 
la loi, soit en vertu d'un testament, h tous les droits actif= 



HERITIER -- 
et passifs d'un défunt (vez Svccr..ssio,). Ce mot vient du 
latin heres, fait de herus, m-,tltre. L'héritier ab intestat 
ou hritier Idgitime est celui qui suceède en vertu des 
dispositions de la loi ; I'hdritier institué, celui qui est nommé 
par la volonlé d'un dfunt ; l'héritier présomptifest le pa- 
rent le plus proche et que l'on présume devoir hériter ; 
l'hdritier pur et simple est celui qui a accepté une succes- 
star purement et simplement; l'lritier bënëflciaire celui 
nui ne ru acceptée que sous bnéfice d'inventaire; 
hdritier réservataire celui en faveur duquel la loi a établi 
llne réserve. 
IIEB_IA.N (JAcQuu), né à BMe, en 1678, mort dans la 
méme ville en 1733, professa les mathématiques, d'abord à 
Padoue, ensuite à Saint-Pétersboug, où leczar Pierre I'" l'avait 
appelé, en 1724, pour y fonder une académie des sciences. 
Ami de Leibnitz et initié par cet illustre savant aux prin- 
cipes du calcul différen Ciel, Herman en prit la défense 
contre Nieuwentyt, dans un livre qu'il fit paraltre en 1700. 
On a de lui d'autres opvrages, qui lui assignent une place 
distinguée parmi les géomètres de son époque. 
liERMAXARIC ou EMANRICH, roi goth issu de 
l'illustre famille des A m a I e s, naquit vers l'an 290 de notre 
ere, et suceéda tout jeune encore à Geberic. Sous son long 
règne, la puis»once des G oth s devint considérable. A son 
avénement au tronc, elle ne s'étendait guère que de l'em- 
bouchure du Danube aux monts Karpathes. Hermanaric 
l'Cendit jusqu'au Don, à la Theiss, au Danube supérieur et 
à l'peCn germanique ou mer Baltique, et selon Jornandès 
toutes les peuplades germaniques et se)Chiques reconnais- 
salent ses lois. Les Hérules, les Wendes, les Esthiens et les 
loxolans avaient dt successivement lui rendre hommage. 
Mais comme il leur laissa leurs rois particuliers, il est pro- 
bable que ses conqugtes n'curent d'autres résultats que de 
errer des liens de suzeraineté et de vassalité entre lui et 
une foule de tribus alors errances dans cette partie de l'Eu- 
rope. D'ailleurs, il ne se trouva jamais en contact direct 
avec la puissance romaine. L'arrivée en Erope des hardes 
de Huns commandées par Balamir mit un terme à la puis- 
sance d'Hermanaric. Reconnaissant l'impossibilité de dé- 
fendre son vaste empire contre ces nouveaux arrivants, qui 
déjà avaient triomphé des Alains, et ne voulant pas survivre 
à sa gloireet à sa puissance, il seprécipita sur son épée et 
mourut volontairement, pair éviter la boute d'une défaite 
certaine ( an 376 de J.-C. ). 
IIERMAXDAD, mot espagnol qui signifie confrérie 
(germanitas). C'était une association des villes de Castille 
et d'Aragon pour le maintien de la paix publique contre les 
usurpations et les brigandages de la noblesse. Elle fut, dans 
ce but, soutenue par les roi, qui  voyaient un moyen d'a- 
battre la noblesse féodale. La première fédération de cette 
nalure se forma en Aragon, vers le milieu du treizième siècle, 
dans la Castille, en 1282. Les villes de Castille et de Léon 
conclurent, en 125, uneligue fraternelle, menaçant de ddas- 
ter les possessions de tout noble {lUi aurait volWou vexé un 
membre de l'association, et qui rehtserait de lui rendre sa- 
tisfaction, ou de donner des garanties pour l'observation de 
la loi. L'hermandad fut dès 1686 complétement organisée 
et munie de priviléges importants en Castille: elle forma 
une ligue de toutes les villes pour le maintien de la paix pu- 
blique. Les commnnes espaoles, à l'exemple de la H a n se 
allemande, soldèrent une armée et nommèrent des juges. 
Les perturbateurs de la paix publique étaient recberchés par 
la force armée, conduits devant le juge et punis.._Ni le rang 
ni la position ne protégeaient contre l'hermandad, qui alors 
prit la dénomination de sainle, et contre laquelle le droit 
d'asile des églises Cait lui-mme sans errer. La noblesse se 
souleva, il est vrai, contre l'hermandad, mais en vain, 
parce que le roi protégeait cette institution. Ele fut aussi 
formellement organisée en Aragon, en 1488. Vers le milieu 
du seiziëme siècler lasainte hermandad ne fut plus qu'une 
gendarmerie, qui, répartie dans plu.ieurs cantons des royau- 
mes de Castille et de Léon» eillait à la sOreté des routest 

HERMANN 
hors des villes, mais ne pouvait agir qu'en cas de flamant 
délit. C'est à tort qu'on i'a confondue avec I'i n q n i s i t i o n, 
ou regardée au moins comme une de sesdépendances. Elle 
a té remplacée dans ces derniers temps par la garde ci- 
vile, véritahle gendarmerie espagnole, organisée sur le mo- 
dële de la notre. 
HEBMANN et mieux HEMAN, nom très-répandu 
aujourd'hui en Allemagne, mais qui ne devint possible 
partir du sixième siècle de l'ère cbrétienne, et que dès lors 
on n'a pu que par ignorance de l'histoire et des origines de 
la langue allemande attribuer au prince des C h é r u s q u e s, 
Armine, que les écrivaits latins s'accordent unanimement 
à nommer Arminius, et les grecs Armenios. 
eNWl'an 16 avant J.-C, il était fils de Sigimer, prittce ché- 
rnsque. Sa ieunesse s'écoula dans un temps de troubles et 
d'agitations, où l'indépendance de la Germanie fut grave- 
ment compromise. En effet, pour protéger d'une manière 
suffisante les frontières de l'empire contre les insultes des 
barbares, les Romains avaient dé envahir les terres méme 
de ceux-ci et y établir un grand nombre de postes avances. 
C'est de la sorte que non-seulement la plus grande partie de 
la population oelte, depuis les Alpes jusqu'au Danube, avait 
élé successivement subjaguée, mais encore que, de l'an 
9 avant J.-C. à l'an , de notre ère, Drusos et Tibère p_ne- 
trèrent dans le nord-ouest de la Germanie jusqa'aux rives 
de l'Elbe, en construisant sur le sol germanique un grand 
nombre de routes wilitaires et de places fortes et en rédui- 
sant les diverses populations de ces centrales à une telle dé- 
pendante de Rame, qu'on pouvait les eonsidérer en fait 
comme déormais subjuguées et soumises. Tibère, non 
moins habile comme gènéral que entame politique, avait 
a avec tant d'adresse et de prudence, que les Germains 
sentaient à peine le joug qui leur avait été imposé, qlt'ils 
étaient dè« lors dans les meilleurs termes avec les Romains 
jusqu'à prendre déjà goret à leurs mœurs et à leurs usages; 
et beaucoup se faisaient mème admettre dans les rangs des 
Iégions romaines. C'est ainsi qu'Armine tait entré avec son 
frère Flavius au service de l'empire, et qu'à la t,:te d'an corps 
auxiliaire de Chérusques, employé dans les pays riverains 
du Danube, il avait non-seulement obtenu les droits de ci- 
toyen romain et la dignite de chevalier, mais encore qu'il 
avait pu se rendre la langue latine familière et acquérir une 
connaissance parfaite de la tactique et de la politique des 
Romains. Revenu au bout de quelques années dans ses foyers, 
tandis que son frère Flavius était demeuré à Rame, il re- 
connut que la situation des choses avait beaucoup empiré. 
Le gouverneur Sentius Saturninus, Iomme prudent, expé- 
rimenté et actif, qui par sa modération, sa bonté et sa ma- 
nière large d'exercer l'hospitalité ava:t gagné l'attacl;ement 
et la confiance des Germains, avait ét rappelé et remplaeé 
par Ouintilius Yarns. Celui-ci, gàté par une longue rési- 
dence en Syrie. pas riche et fort peu belliqueux, crut la 
soumission des populations germaines déjà assez eonsolidée, 
pour pouvoir brusquement procéder à la complète romani- 
sation du pays et y agir en souverain absoht. Dans sa folle 
confiance, il blessa profondément le sentiment national des 
Germains en exigeant d'eux qu'ils acquittassent des impfits 
et des redevanees en nature, et que dans son camp ils se 
soumissent au droit romain et tissent plaider leurs eanses 
devant des juges romains par des avocats romains. C'est 
alors qu'Armine conçut le projet de délivrer son pays d'une 
telle oppression et de conjurer les périls dont l'indépendance 
de sa nation lui semblait menacée. Pour cela il ne fallait 
pas seulement vaincre, mais encore exterminer l'armée ro- 
maine; or c'Cait I un résultat qu'il ne pouvait pas espérer 
d'une simple levée de boucliers contre une armée d'environ 
50,000 hommes d'élite et parfaitement aguerris, ayant pour 
base d'opération la lignedu/rhin et s'apt, uyant en outre sur 
un Ioq système de routes stratégiques et ne points fortifiés. 
Armine eutdone recours aux moyens qu'il avait vu les Re- 
mains emploler eux-mgmes. Toutes les peuplades et tous 
les chef» jusqu'à l'Ebe furent secrètement enr¢lés par luis 



48 
n morne {emps que, redoublant d'elforts pour augmenter la 
tsrité de Varus, il parvenait à lui faire disséminer une 
partie de son armée sur di.rférents points et à le décider à 
abandonner la route ordinaire avec le reste de ses forces, à 
la tte desquelles il se disposait à évacuer le territoire des 
Chérusques pour regagner les bot:ds du Rhin. C'est ainsi 
que ,'arus se trouva attiré dans les contrées de la forét de 
Teutobur9 ( rèpondant au pays de Lippe actuel .ou à la 
partiedu territoire prussien qui l'avoisine ), et y fut exter- 
minéaec son armée tout entière ( an 9 de J.-C. ), dans une 
bataille qui dura trois jours, par une incessante ploie d'au- 
tomne. La nouvelle de ce désastre produisit à lome une 
profonde consternation. Mais les Germains ne songërent 
pas à tirer autrement parti de leur victoire; tout ce qu'ils 
avaient en vue, c'était de secouer le joug des Romains, et 
la politique de Tibère, qui d'ailleurs reconnaissait parfaite- 
ment rimpossibilité et rinutilité d'une conquête permanente 
de la Germanie, se borna les années suitantes à assurer les 
rives du Rhin conlre toute insulte et à relever en mème 
temps le moral de es troupes en occupant le plus long- 
temps possible le territoire ennemi silué de l'autre c6tè du 
Rhin. 
Germanicus, à qui Auguste, peu de temps avant de 
mourir, confia, en l'au I de notre ère, le commandement 
des contrées du Rhin inférieur, pensa autrement. Plut5t 
général d'armée que politique, il se laissa séduire par le dé- 
sir et la gloire de venger l'orgueil national des Romain% q,e 
le désastre de Varus avait si vivement blessé; peut-être bien 
ausi, en sa quatité d'héritier présonqttif du trîme, par la 
pensée de s'assurer ainsi l'affection de l'armée et du peuple, 
il entreprit de grandes expédilions qui mirent les forces et 
l'inlclligence d'Armioe aux plus rudes épreuves. Dans l'au- 
tomne de l'an I, il partit à la tète de 28,000 hommes pour 
aller tenter un audacieux coup de main contre les Morses ; 
toutefois, ce ne fut pas sans peine qu'il put rentrer dans 
ses cantounements. La campagne de Pannée suivante fut en- 
treprise avec des resso,,rces et des forces antrement consi- 
dérables; elle eut pour résultats l'invasion du territoire des 
Cartes, exécutée avec succès sur deux points différents  la 
fois, et la dèlivrance de Segest, assiége par Armine. Depuis 
longtemps en effet la discorde régnait parmi les princes ché- 
ru.ques, dont quelques-uns luisaient cause commune avec les 
Romains, Segest, entre autres, qui djà avait essa', mais 
en vain, de mettre Varus en garde conlre les projets d'Ar- 
mine. Celui-ci, aprè avoir plus tard inutlement demandé 
en mariage Thusnelda, fille de Segest, l'enleva; fait prison- 
nier par Segest, Armine avait ëté délivré de sa captivité par 
les siens, et à sou tour il s'était rendu marre de la personue 
de Segest, qui, lui aussi, avait pu non-seulement s', cllapper, 
mais encoe emmenait avec ui OEhusneda, s fille, qu'il 
avait mise en s0rete dans son cl,tu fort. Segest, ayant 
invoqué à ce moment la protection des P, omains, fut conduit 
sur la rive gauche du Rhin avec Sigismond, son fils, et sa 
fille TI,usnelda, qui était enceinte; et deux ans plus tard 
il subissait à Ruine la douloureuse humiliatiun de voir son 
fils, sa fille et Thumélicus, le petit-fils que lui avait donné 
Tbusnelda, orner le triomphe de Germanicu-. La perte de la 
femme qu'il aimait porta l'irritation d'Armine jusqu' la 
fureur, et il appela de nouveau aux armes les Chérusques et 
les peuples voisins. Germanicus marcl,a contre lui a la tëte 
de plus de to,0 hommes, qd péuétrèrent sur le territoire 
ennemi, une partie par la voie de terre, et rautre partie à 
bord d'une flotte, qui, après avoir Iongè les c6tes de la mer, 
remonta I'£ms. Quand les deux divisions de son armèe eurent 
opéré leur jonction, il visita le champ de bataille où avaient 
péri Varus et ses iégions, dont les ussemenls blanchis cou- 
vraient encore au loin le sol, et leur fit rendre les honneurs 
de la sépulture. Reculant devant des lorces évidemment 
périeures, Armine s'enfonça dans des contrées boisCs et ma- 
récageus jusqu'au moment où une occasion favorable se 
présenta à lui d'attaquer les Romains avec tant de v,gueur, 
que les iégions de GermaniclS, après la déroute complète 

de sa cavalerie, curent beaucoup de peine à tenir pied et 
furent foreCs de battre en retraite. Une partie de l'armée 
romaine revint par la voie de mer dans ses cantonnements 
mais eut beaucoup à souffrir de la fureur deséiéments. Qua- 
tre légions que Coecina ramenait le long des rives du Rhin 
n'échappèrent ì une complète extermination, que parce que 
le plan, parfaitement conçu par Armine, fut déjoué par 
rindiscipline et l'aveugle témérité de son oncle lngniomar. 
Tibère n'osa point encore rappeler positivement Germa- 
nicus, qui fit des préparatifs encore plus considérables pour 
la campagne de l'an 16 après .L-C. Au printemw, une ar- 
mée romaine forte de lOO,OOO hommes et formant deux di- 
visinns, suivant chacune une voie differente, entreprit donc 
une nouvelle expédition. Cette fois encore t,ooo btiments 
remontèrent l'Ems avec l'une de ces divisions et les appro- 
visionnements de l'armée, l'autre prit la voie de terre;et 
quand elles curent atteint le point fixé pour teur jonction, 
elles marchèrent de conserve jusqu'au Weser, un peu an- 
dessus de la Porta lVest/alica, où Armine les attendait 
avec ses Germains. C'est là, dans la Prairie des Femmes 
(Idisiawizo), vraisemblablement entre Hameln et Rinteln, 
que les Romains livrèrent la phs grande bataille donl les an- 
nales germaniques fassent mention. Les Germaias, à la vé- 
rité, furent encore une fois vaincus, parce que le manque de 
tactique et de discipline de leur part rendit encore nue fois 
inutiles les sages plans de leur chel; mais la perte du tiers 
de leur armée abattit si peu leur courage, qu'après a¢oir 
reçu quelques renlorts ils ne craignirent pas de livrer aux 
Romaius une seconde et non moins sanglante bataille, à peu de 
distance des lieux qui venaient d'ète temoins de leur défaite, 
peut-ëtre un peu au-dessous de la Porta Westfalica, sur 
la rive gauche du Weser, et dans un espace tellement resserrë 
entre des marais et des montagne% que l'on s'y battit corps à 
corps ; et les Iomains, qui payèrent cher leur victoire, n'en 
furent redevables qu'a le,r armement, de beanconp supé,ieur 
à celui de leurs ennemis. La disision de leur armée qui 
s'en revint par mer essuya de pertes encore plus grandes, 
par suite des lemples conlre lesquelles la flotle eut cons- 
tamment ì lutter. Germanicus, à la grande terreur des Ger- 
mains, n'en entreprit pas moins encore à l'automne deux 
formidables exp6ditious contre les Cartes et les Morses. 
En présence de tels efforts et d'un si vaste déploement 
de forces, les Germains commen.caient à héiter et mme a 
flécldr ; aussi Germanicus pouvait-il espérer avoir complé- 
tcment terniné cette guerre t'année suivante. _Mais libère, 
ì qui les avantage; obtenus au prix de si grands sacrifices 
paraissaient tort minimes, et aux }'eux de qui, en revanche, 
la gloire de son neveu commenit ì devenir beaucoup trop 
grande, ne lui accorda point l'autorisation qu'il sollicitait 
de continuer les bostilites, et le rappela au contraire de la 
manièrela plus impèrative, ce qui ne l'empcha pas, en l'an 17, 
de lui accorder un magnifique triomphe en mème temps 
qu'il le comblait d'éloges. 
Depuis lors jamais armée romaine u'osa quitter les bords 
du Rhin pour pénètrer dans l'lutCieur de la Germanie; et 
c'est à Armine qu'il faut attribuer en grande partie le mérite 
de ce résultat si important pour les ultérieures destinèe de 
ce pays. Toutefois l'étranger n'eut pas plus t6t été expulsé du 
sol germanique, que les luttes et les guerres intestines écla- 
tèrent avec plus de force que jamais parmi les populations 
indigènes. Le Marcoman Marbo d, prëparé à un tel ri)le 
par un long séjour à Ruine, qui lui avait permis de se ren- 
dre élement [amilières les pratiques de la tactique milRairc 
et celles de la politique, avait fondé en Bohème un puissant 
royaume, qui s'étendait jusque par delà le Danube. Ce chel 
avait bien moins à Cœur l'indèpendance de sa nation que sa 
propre puissance. AUSsi dës l'an 7 après J.-C., quand l'oc- 
casion s'était offerte à lui d'éloigner à jamais les Romain 
des trontières de la Germanie, en faisant cause commune 
avec les Gètes et les Pannoniens soulevé.s, avait-il mieux 
aimé conclure avec Ruine une paix avantageuse pour lui- 
mme. Il rendit aux Romains la tte de Yarus qu'.X_rmlne 



IzlEMAN -- 
lui avait envoyée, et ne prit aucunement part à la luire 
des Chérusques et autres peuplades germaines contre Ger- 
manicus. Maintenant qu'Armine était devenu le défenseur et 
le représentant de la nationalité germaine, les Semnons et les 
Lombards, qui jusque alors avaient reconnu la suzeraineté 
du royaume des Marcomans, »'en détael,èrent pour se placer 
sous l'autorité et la protection d'Armini, tandis que le pro- 
pre oncle de celui-ci, lnguiomar, ne pouvant supporter d'o- 
hCf à son neveu, méme en temps de paix, passait à Marbod 
avec tout son monde. Il en résulta une guerre acharnée, 
et les armes d'Armine et de Marbod se rencontrèrent dans 
la contrée appelée aujourd'hui royaume de Saxe, toutes 
deux à peu près égaies en forces et habituees l'une et l'au- 
tre au métier des armes et à la tactique militaire par les lon- 
gues luttes qu'elles avaient déjà soutenues sous des chefs 
expérimentés. La bataille qu'elles se livrèrent resta, il est 
,vrai, indécise, parce que cbaome d'elles eut son aile droite 
mise en alAroute; mais Marbod fut contraint de battre en 
retraite, et bientét, abandonné par une bonne partie des 
siens, attaqué méme en pleine Bohème par Catualda, qu'il 
avait autrefois banni, et qui arrivait à ce moment de chez 
les Goths, force lui fut d'implorer la protection des Romains, 
qui lui assignèrent pour résidence la ville de Ravenne, où 
il vécut encore dix-huit années, dans une obseurilé pro- 
fonde. 
Armine ne survécut pas d'ailliurs longtemps à la ruine de 
Marbod. 11 parait qu'ayant voulu continuer à exercer pen- 
dant la paix l'autorité suprgme et absolue dont il avait été 
investi pour la guerre, il périt.. à l'ge de trente-sept ans, 
dans la do,zième année de son commandement, par la tra- 
Ifison «l'un de ses parents, dans nne des guerres civiles 
produites par ses prétentions  la souve,'aineté. Il ne revit ja- 
mais depuis sa femme et ses enfants, et l'histoire ne nous 
apprend rien sur leur sort. Tout ce que nous gavons, c'est 
qu'en l'an 47 de notre ère il ne restait plus de toute la race 
des princes chérusques que ltalwus, fils de Flavius, le frère 
dArmin, que la nation chérusqne pria les Romains de 
lui rendre, et qu'elle obtint aussi d'eux. Tacite nous semble 
avoir parfaitement apprécié le réle joué par Arminœe, dans 
cette réflexion qui lermine son récit : « Il f,t incontestable- 
ment le libérateur de la Germanie, et, à la différence d'autres 
rois et d'autres chefs d'armée, ce n'est pas à l'origine de 
sa puissance, mais bien quand déjà elle était parvenue 
à son apogée, qu'il osa attaquer le peuple romain. Si dans 
les batailles il ne remporta pas toujours la victoire, les 
guerres le laissèrent invaincu. Il vit encore aujourd'hui 
dans les chant- des barbares, inconnu aux annales des 
Grecs, qui ne prisent que ce qui les touche, tandis que les 
Roma:ns ne lui rendent par assez complétement justice, 
parce que chez nous les événements modernes lent tout 
leur prix aux choses du passé. » 
IIERMANN surnommé Contractus ou l'Impotent, 
m des écrivains du onzième siècle qui ont rendu le plus 
de services à l'histoire d'^llemagne, naquit le 19 juillet 1013. 
11 descendait des comtes souabes de Vehringeu, et fut 
élevé dans le couvent de Reicl,enau, où il prononça plus 
tard ses vœux. Il mourut le 24 septembre 1054, dans le do- 
n,aine de ses pères, à Aleshnseu, près de Biberach. Sa Cro. 
reçue, important ouvrage qui s'étend jusqu'à l'année de sa 
nmrt, a été cnlinuée jusqu'en t0fifi par le prètre Berthold 
ou Bernold. Rédig¢.x, ur le plan de la Chronique de Bèze, 
eUe est supérieure à cette dernière par l'exactitude chrono- 
logique. Ussermann Pa publiée avec la suite de Bertbold 
( 1700-96 æ 2 vol. ), et Pertz I'a réimprimée dans le 1"-" vol. 
des Monuraenta 6erraania historica (1826). Sans parler 
de plusieurs autres ouvrages, Hermann Contractus a laissé 
des poésies spirituelles; on lui attribue, entre autres, le 
Salve re9ina, l'Alma lledemptoris, et le Veni 8ancte 
.Spirilus. 
HËP, MANN I JÆAr-Gonrso-Jcpves), le prince de 
la critique et de la pl,iloloe allemandes, membre entres- 
pondant de l'Académie des Inscriptions il Billes-Lettres de 
DIG'T. DE LA CONVERS. -- To X|o 

HERMAISTADT 49 
t'Institut de France et de la plupart des socicts savantes 
de l'Europe» naquit, le 28 novembre 1772, à Leipzig, et 
montra de bonne heure les plus brillantes dispositions pour 
l'etude de la liftCature classique. Son père, président du 
conseil des échevins de Leipzig, lui lit étudier le droit à léna, 
où il publia une thèse remarquable Defundamentojuris 
puniendi (1793). Mais peu après son retour dans sa ville 
natale il se décida a abandonner la carrière de la juris- 
prudence pour embrasser celle des lettres et de l'instrui- 
tion publique. Admis dès 1796 comme répétiteur académi- 
que, à la suited'une thèse brillante qu'il dcveloppa Depoe- 
sens 9eneribus, il lut reçu en 1708 professeur agrégé de 
philosophie à l'université de Leipzig. En 1803, après avoir 
refusé une chaire à Kiel, il fut nom,ne titulaire de la chaire 
d'éloquence, à laquelle on adjoignit en 1800 celle de poésie. 
Il mourut le 31 décembre 184s, doyen de l'universitA de 
Leipzig. 
Le fondement de sa réputation fut son beau travail sur la 
métrique et la grammaire grecques, qu'il publia d'abord 
sousce titre : De Metris Poetarum Groec. et Bore. ( Leipzig, 
179ç}, et plus tard sous celui de Manuel de IVdlrique. Il 
donna ensuite les Yudes d'Aristophane, le Trinummus de 
Piaule, l'ltdcube d'Euripide, et l'Art poétique d'Aristote, 
(fS02). A ces travaux succédèrent des éditions du traité de 
Vigier, De proecipuis Grzecze Dictionis ldiotismis (2"édit., 
1802), des Orphtca (1805), des Hgmnes homërtq ues (1806), 
des Suppliantes d'Euripide (I 811). des Baccltantes (1823), 
de la Mddde ( t823 ), de l'Alceste d'Euripide (ts25). 
Ce n'est qu'après sa mort (en t849), qu'a pu paraltre son 
édition de B/on et Moschus. Le nombre de ses dissertations 
académiques est considërable; et il y élucide toujouts des 
questions philologiques d'un haut intcrèt. Les poésies ialines 
qu'il a composées à l'occasion de diverses solennités uni- 
versitairis respirent le parfum de la plus exquise latinité, 
et ont été réunies sous le titre de Opuscuta (4 vol., Leipzig, 
1834). 
Son programme Mgtholugm Grxcorum antiquissima 
(t807) provoqua entre lui et Creuzer nue correspondance 
qui a été imprimée. Un compte-rendu qu'il fit des Inscmp- 
tiones de Boekh amena aussi entre lui et l'auteur de cet 
ouvrage une polémique uivie de part t d'autre avec beau- 
coup d'animation. 
ItERMANSTADT (en latin Cibinium, en honois 
3"a99-S:eben), capitale du pays saxon en T r a n s y I v a n i e et 
aujourd'b ui aussi de toute cette Grande-Principauté, est située 
dans une belleplaine, sur la Zibin, qui s'y jette dans l'Alouta; 
ellese divise en ville haute et ville basse, avec trois faubourgs, 
habités surtout par des Valaques, et on y compte plus de 
22,000 habitants, dont environ 1i,000 protestants. La ville 
haute est bMie sur une éminence, entourée, à l'ancienne 
manière, d'un double tirer et de fossés profonds ; on y voit 
un beau marché et des rues régulières. Parmi les édifices 
publics, on distingue la grande cathédrale gothique des 
Ëvangélistes, l'église paroissiale catlmlique, l'hotel du gou- 
vernement, l'h6tel de ville, l'arsenal et le musée Bruncken- 
tbal, où l'on trouve en outre une bibliothèque considérabh, 
et une collection de médailles et d'objets d'antiquités na- 
tionales, ainsi qu'un cabinet minéralogique. 
Hermanstadt est la résidence du gouverneur tropCiat 
et de la plupart des fonctionnaires supérieurs de l'adminis- 
tration de la Transylvanie. C'est aussi le cbef-lieu du douzième 
corps d'armée, du commandement militaire de Hermanstadt 
et de Fogarasch, la résidence des comtes saxons, le lieu de 
réunion de l'universitg on diète de la nation saxonne, le 
siége du consistoire supérieur de la confession d'Augsbourg 
et d'un évgque grec non uni. Elle possëde en outre une école 
de droit, un gymnase supérieur protestant, un gymnase 
catholique, une école normale suprieuie, une école de 
gymnastique, deux écoles de filles, deux maisons d'orphe- 
lins, une école militaire, quatre I,os#ces pour les malades 
et les infirmes, un b6pital militaire, un dépot de mendicité 
une maison de correction et de travail. Ses habitants sont 



• 50 HEIMAISTADT -- 
très-industrieux et livrent annueilement à la consommation 
environ 40,000 pièces de toile et ptus d'un million de pei- 
gnes de corne ; il y a aussi dans cette ville beaucoup de 
tanneries, de blanchisseries de cire, une papeterie et un 
moulinì poudre, une laminerie de cuivre, cinq imprimeries 
et deux librairies. Le commerce y est imporlant, surtout 
avec la Turquie. Les environs de la ville sont beaux. Le 
village de Hettau, qui en est voisin, est célèbre par la haute 
stature de ses habitants et par ses nombreuses lubrique» de 
lainages. 
Hermanstadt n'était ì l'origine qu'un illage, et dans les 
anciennes chartes elle est désignée sous le nom de Villa 
llermanni, du nom d'un bourgeois de lXuremberg appelé 
Hermann, qui y amena, dit-on, au douzième siècle, sous le 
roi Geysa il, une colonie d'A|lemands. Ds Il60 on y 
comptait un grand nombre de maisons considérables ; et 
en t223 le roi André Il lui accorda des priviléges im- 
porlants. 
HERMAX'SUL ou HERMANNSAULE. Voyez, 
UL. 
HERMANUS. Voge-- Amtcs. 
HEBMAPHIODISME IIEIMAPItRODITE (dé- 
rivé de "Epl'Apo'). En suivant les progrès de la 
composition organique, depuis les plus simples animaux et 
végétaux jusqu'aux plus composés, ou plus parfaits, le pre- 
mier terme est l'agamie , ou l'absence complète de sexua- 
litWchez eux ; ils sont considérés comme neutres, tels que 
les algues, moisissures, lichens, champignons, et la plupart 
«les animalcules infusoires, les zoophytes (protozoa). A un 
degré un peu supérieur apparaissent les Cthoeogames, dé- 
,'eloppant des ovules apparents : telles suint les mousses, les 
fougères, et parmi les animaux, les radiaires, les échino- 
dermes, cie. Ensuite on voit sedéplo)'er l'hermaphrodisme 
dans la grande masse des vegétaus phanérogames, ou dont 
les fleurs visibles ont leurs sexes réunis. Les diverses com- 
binaisons de l'andro99nisme monmque, ou sur un seul in- 
dividu, se manilestent parmi les mollusques acéphales, bi- 
'al,es et mnlli,alves; la plupart des univalves céphalés 
non operculés, rampant sur le ventre, comme les mollns- 
ques nus, sont également hermaphrodites monoïques; 
pendant, quelques autres offrent dejà des exemples de sexes 
entièrement séparés, ou dioiqnes, sur des individus dis- 
tincts, biais le déoublement complet des androgynes et des 
hermaphrodites, ou la polarisation sexuelle en deu in- 
dividus opposés, l'un fort, ou positif, offrant des organes 
saillants ou exertiles, l'autre faible, négatif, recdlant au 
dans ses parties génita|es, n'appartieut qu'attx animaux de 
formes symétriques. Ainsi, depuis les insectes, les crus- 
tacC, en remontant aux vertebrés (poissons, reptiles, oi- 
seaux, mammifëres), la dioecie, ou la complète séparation 
des sexes sur des individus mle et femelle, devient une loi 
génerale. Celle-ci acquiert mëme d'autant plus de constance 
qu'on s'v|èe plus haut dans l'échelle progressive des orga- 
nisatinns les plus perfectionnées, jusqu'à l'homme. Les ex- 
¢eptinns à cette règle ne sont que des monstruosités. 
En génëral, les Sites organisés de forme circulaire ou 
rayonnante appartiennent à l'hermaphrodisme; presque 
toutes les plantes y sont assujetlies ; car les dioïques méme 
ne sont souvent telles que par l'avortement des o»ganes du 
sexe m/tic ou de la femelle dans leurs fleurs; et cela est si 
vrai que certains végétaux, tels que le juniperus virgi. 
mana, etc., sont tant6t mules, tanlt femelles, selon que 
les circonstances atmosphériques font avorter ou les éta- 
mines on les pistils. De mSme, la plupart des animau.'. 
mon6iques ou hermaphrodites prennent des formes circu- 
laires; du moins leurs organes ne sont pas exactement sy- 
métdques, comme on l'observe parmi les molhtsques tur- 
binC, univalves, et jusque chez les bivalves, les ascidies, 
les limaces, etc., etc. Au conlraire, ies furmes parfaitement 
Smétriques, depuis les inscctes iusqa'/ l'homme, excluent 
l'loermaphrodisme, ou ne peuvent pas admettre la réunion 
des deux sexes sur !e mème individu, d'une manière coin- 

HEIMAPH1AODlSME 
piète et capable de fécondation. Il s'ensuit que la consti 
tution hermaphrodite, ou androgyne, monoïque, est surtout 
un attribut végétal ; car les animaux qui présentent cette 
réunion des deux sexes tiennent beaucoup de la nature vé- 
gétale, comme les zoophytes, les radiaires et écldnoder- 
mes, -etc. En effet, une huitre, un ver, un limaçon, n'ont 
qu'une vie végétative, imparlaite ou insensible. Au con- 
traire, l'existence dioïque, ou la parfaite séparation des sexes, 
est un attribut animal, et se montre dans la grande masse 
des animaux, les plus complets surtout. 
Le. causes de ces différencs correspondent au degré de 
sensibilité et de mobilité des tres. Une plante, un animal 
fixes, comme la plupart des zoopfiytes, les hultres et autres 
espèces peu capables d'action, restant exposés ì tous les 
chocs, ne pouvant se garanfir de la destruction par la fuite, 
seraient bient6t anéantis dans la nature. Or, celle-ci le a 
construits de telle sorte que s'il en échappe un seul, l'espèce 
entière est sauvée. En effet, le véritable hermaphrodite on- 
tenant en lui les deux sexes (comme la plante, le zoo- 
phyte, etc. ), représente donc son espèce absolue, puisqu'il 
se suffit ì lui seul pour se reproduire; il possëde en lui- 
mdme tous les principes de Iïmmortalité, précisément parce 
qu'il est plus sujet , la mort. Une huitre, un vil gramen, 
sont donc à cet égard beaucoup plus parfaits que l'homme, 
chez lequel deux ètres de diflérents sexes deviennent indis- 
pensables pour la reproduction de l'espèce. D'ailleurs, la 
plante immobile, manquant de sensibilité et de la faculté 
de coonaitre, n'aurait pu chercher, trouver celle d'un anh'e 
sexe; il n'y a fécondation dans la dioecie qu'au moyen de 
la dissémination du pollen fécondateur, et pat" le huard 
olficieux des zéphyrs, messagers de ces amours près des 
femelles. L'huitre, fixée sur son rocher, ne peut pas cher- 
cher une autre hultre, ni la deviner, ni s'y joi_ndre, au mi- 
lieu de sa coquille, sans )eux, sans bras, sans organes ex- 
térieurs. Si vous voyez un animal incapable de changer de 
place, prononcez qu'il doit Sire hermaphrodite. 
Cependant, il y a deux sortes d'hermaphrodismes, celui 
qui se suffit enlièrement, et un autre, qui a besoin du con- 
cours mutuel de deux individu androgynes. L'hermaphro- 
disme complet existe citez les plantes et dans les mollusques 
acéphale% testacés, et ceux à peau nue (ascidiens), comme 
dans les radiaires (échinodermes, méduses, actinies, zoan- 
thes), les physalies, les polypes à pol)piers solides, les toe- 
nias, etc. : tous se reproduisent seuls par des ovules ou des 
gemmules. Seuls, m',lle et femelle en mme temps, ils ont 
des moments de frai ou de floraison et fructification sport- 
tanC. L'hermaphrodisme a:yant besoin du concours d'un 
autre individu, également ì double sexe, afin d'opérer une 
fëcondation réciproque, est plus spé¢iatement qualifié par 
nous du titre d'aadrogynisme (voye-. Aaaocv-). En effet, 
la plupart des mollusques céphalés, coquillages univalves, 
turbinC, colimaçons, bulimes, toupies et sabots, nérites, 
volute, patelles, et beaucoup d'autres céphalés nus, Il- 
ronces, doris, tritonies, théthys, aply.ies, phyffidies, etc., 
portent bien leurs deux sexes réunis dans le mme individu. 
Toutefois, la disposition de ces organes e telle qu'ils ne 
peuvent se Iéconder qu'à, l'aide d'un individu semblable. 
Alors chacun donnant et recevant mutuellement, est fë- 
coudant et Iécondé. Il y a d'autres univalves à sexes sépars 
sur chaque individu, comme les buccins et murex, les 
cnes et porcelaines, ou vénus et cyproea, qui ne peuvent 
pas cependant se féconder d'eux-mmes. Enfin, les cepha- 
Iopodes, ou les poulpes et sèches, ont des sexe» séparés sur 
deux individus différents : toutefois, ils frayent sans accou- 
plement, à la manière des poissons, par l'effusion de la se- 
mence du ntle sur les grappes d'œufs de la femelle. 
Ceci confirme ce que nous exposons sur les causes de 
l'hermaphrodi:me; car à mesure que les sens des animaux 
deviennent plus parfaits, que ces dites peuvent clmnger de 
place avec facilité, que leur sensibilité 'aiguise ,avantage, le 
mode «le leur génOration devient idus compliqué, il ëprouve 
plus d'obstacles pour son accomplissement. "£andis qu, 



HERMAPHttODISME -- HERMES 
che les plantes, chezles polypes, la reproduction n'est qu'une 
luture ou qu'une production spontanée du méme individu, 
les faces androgynes exigent dé] la combinaison volontaire 
de deux ètres qui se cherchent mutuellement. Mais chez les 
races les plus sensibles d'animaux à formes symétriques, les 
mles et femelles vivent touiours pards. 11 fallait donc que 
cette séparation e0t lieu  mesure que la sensibilité était 
plus vive, pour empècber les excès. Qui e0t opposé une 
barrière  la stimulation perpétuelle naissant de la proxi- 
mité des sexes, surtout sous les plus ardents climats de la 
terre. à des erres aussi inflammables que le sont les animaux 
 sang chaud, comme le singe et le moineau lascils ? qui les 
et préservés de s'énerver, de se ter par leurs voluptés, 
puisque beaucoup d'animaux sont déjà presque épuisés après 
un seul acte de copulation, et que les insectes mles suc- 
combent après cet effort, comme sïls léguaient leur vie tout 
entière  leurs desceudants: 
Quoique l'état normal des animaux parfaits ou symé- 
triques { composés de deux moitiés accolées latéralement, 
et  station I,orizontale) ne comporte point l'bermaphro- 
disme, on a cité toutefois la présence, contre nature, des 
deux sexes en quelques individus, dont nne moitié latérale 
dtait mle, l'autre femelle. Ce phdnomène se prononce eu 
plusieurs inscctes lépidoptères, et parait également constaté 
chez divers poissons. Ceux-ci portent d'un c6té de la laite, 
et riel'autre desoeufs ; toutefois, il n'est point prouvdqu'ils'o- 
père en eux une fécondation spontanée; car leurs ovaires sont 
distincts. Dans les classes supérieures  sang chaud, les oi- 
seaux à un seul oviducte, et les mammifères, l'hermaphro- 
diwae véritable n'a jamais été possible ; car la coexistence 
des ovaires et des test[cules (les uns étant les représeutants 
des autres) implique contradiction, ou ne aurait tre si- 
multanée. On rapporte, à la vérité, beaucoup d'exemples 
de femelles ayant les attributs màles, ou du m,les impar- 
faits conservant encore plusieurs des caractêres extërieurs 
des femelles. Mais les femmes hommasses (viragi»w.) peu- 
vent présenter un développement extraordinaire de certain 
parties, qui leur donnent des habitudes vigiles, une voix 
rauque, une sortede barbe et des traits masculins; de mme, 
certains jeunes garçons de texture débile, n'ayant pas de 
scrotum ni les test[cules desoendus hors de [,anneau ingui- 
nal, simulent, par leurs traits efféminés, par leurs mœurs 
timide% les caractères des filles ; ils manquent de barbe, et 
leur gorge devient potelée ; cependant, ils manquent d'un 
véritable utérus, quoique la verge soit  peine saillante; 
leurs désirs sont nuis on faibles. Ce ne sont donc point de 
véri[ables hermaphrodites; aucun n'est réel. 
L'hermaphrodisme, se su[fisaut à lui seul, étahlit ainsi 
Pégoisme, laneutralité, l'indifférence, l'in.ociabilitë. Il n'ap- 
partient donc qu'à des ètres froids, inanimé, et d'autant 
plus que la facilité de satisfaire les jouissances les réduit à 
l'insipidité. J.-J. VoEv. 
HEILMAPIiltODITE fut, selon la Fable, le fils 
d'Hermès ou ltercure, et d' A p h r o d i t e » ou Véuns. Élevé 
par les naïades, dans les antres du mont lda, il possédait 
les attributs de sa mère uuis aux qualités vit[les de son père. 
A l'ge de puberté, il voyagea dans l'Orient. Se baignant 
dans les eaux limpides des fontaines, la nymphe Salmacis fut 
éprise de se charmes; mais n'ayant pu le rendre sensible, 
ellc pria les dieux d'unir à lui son propre corps, de manière 
que les deux sexes ne fussent jamais sparés. Les eaux de 
ces [ontaines dévdoppaieut le mme hermaphrodime chez 
fous ceuxqui s'y baignaient. 
On a des statues antiques d'Hermaphrodite, coucbées et 
effminées, comme l'observe V/inckelmann, ou combinant 
les beautés de l'homme et de la femme. J.-J. Vmv. 
HEtMAS {Saint), que quelques-uns conjecturent, sans 
trop de certitude, ètre celui dont il est question dans le 
Nouveau Testament, mais qui, suivant d'autres, fut l'un des 
soixante.douze disciple% passe pour l'auteur d'un livre inti- 
tulé Le Pasteur, qui jouissait, dans l'antique Église, d'une 
¢onsidération telle, qu'on le comprenait au nombre des livres 

$1 
canon[ques. Mms comme celui qui existe encore sous ce titre 
en forme de traduction latine ne répond nullement par 
son contenu aux idées qui dominaient  cette époque, on 
est autorisé  croire qu'il appartient  une date postérieure 
 l'époque où vècut saint Hermas, qu'on oet avoir habité 
Borne au premier siècle de l'ère chrétienne, et avoir été 
élevé aux premiers rangs de l'lglLë, sous le pontificat de 
saint Clément. Quoi qu'il en soit, Le Pasteur contient des 
inexaclitudes palpables sur le dogme, et semble n'admettre 
ni la Trinité ni l'Incarnation, favorisant en cela l'erreur qui fut 
depuis celle d'Apollinaire et celle desnestorieus, desarieus, 
en mettant Jésus-Cbrist au nombre des créatures. Le pre- 
mier auteurqui en ait pariWest saint IfCée. 11 en est question 
ensuite dans saint Clément d'Alexandrie, Or[gène, saint Atha- 
hase, Eusèbe et Tertullien. L'ouvrage est divisé en trois 
livres, dont le premier contient des vis[uns ou apologues; ic 
second, des préoeptes ; le troisième, des similitudes, ou em- 
blèmes. Dans ce dernier, le plus important de tous, u 
ange exhorte l'auteur au mépris du monde, au désir du ciel, 
à la prière, aux bonnes œUVres, surtout à l'aum0ne, ag 
jene, h la pureté du corps et  la pénitence. La versio 
latine de l'original grec perdu aété tradulie en français par 
l'abbé Legras, de l'Oratoire, et insérée, parmi les apocryphes, 
dans la Bible, in-fol., de Sacy. On peut consulter aussi la 
dissertation deJachmann Sur le Pasteur de saint Herma 
 Koenigsberg, 1835). 
HE[tMÉENUTIQUE (du grec [ptL«tv, traduire, 
interpréter). Les Allemandsdonnent ce nom à la science qui 
expose les principes et les moyens d'interpréter un discours 
ou un écrit dans le sens que l'orateur ou l'auteur a entendu 
donner  ses express[uns. Dan. une signification pins res- 
tre[rite, l'herméneutique est la science de l'interpréta- 
tion de l'Écriture sainte. 
HEtMÈS. Voile'- 
ilEltMÈS (Archéologie). C'est ainsi qu'on appelle des 
statues de Mercure sans bras et sans pieds, faites de mar- 
bre pour l'ordinaire, quelquefois de bronze, et que les Grecs 
et les Romains plaçaient dans les carrefours et les grands 
cbemins, parce que bi ercure présidait aux routes, ce qui 
le faisait appeler Trivius, du mot trivium. Selon Servin», 
savant commentateur de l'Ênide, des bergers auraient un 
jour rencontré le dieu endormi sur une montagne, et lui au- 
raient coupé les mains : de là viendrait l'usage d'appeler 
hermès certaines statues sans bras. Cependant, d'après 
Su[da% ces statues sans bras, carrées et cubiques, auraient 
eu cette forme parce qu'on tenait Mercure pour dieu de la 
vérité et de la parole : elles ignifiaient que de mme que 
les choses qui ont la terme carrée et cubique sont toujours 
dru[tes, sur quelque coté qu'elles tombent, de mme la vérité 
est toujours semblable à elle-intime. Alcibiade fut accusé 
d'avoir mutilé ou fait mutiler dans une nuit tous les Her- 
més des rues d'Athènes. Les T e r m es des Berna[us ressem- 
blaient beaucoup  ces Hermès des Grecs. Les antiquaires 
en connaissent une multitude, apportes de la Grèce et repré- 
sentant les tètes de ptusicurs hommes célèbres de l'antiquité. 
Mais le véritable Hermès est représenté avec des ailes à la 
tète. 
HEBMES (Gots), fondateur en Allemagne d'une 
école philosophique et dogmatique dans le sein de l'Église 
catholique, naquit le 22 avril 1775, fi Dreyerwalde, dans le 
pays de Munster, et se livraavec zèle, à partir de 1792, 
l'Cude de la philusoplde de Kant. Devenu en 1798 maitre- 
au gymnase de Saint-Paul, à Munster, il s'efforça dc rebatir 
un système nouveau sur les débris laissés par la critique 
de Kant ; mais ce ne fut qu' partir de 1807 qu'il trouva oc- 
casion, comme profeeur de dogmatique  l'université de 
Munster, de rëpandre dans un cercle plus étendu les 
sultats de ses recherches philosophiques. Dans cette posi- 
tion, il s'attira, par uni consultation sur une question de 
droit ecclésiasliqne, lïnimitié de D r o s t e d c Vi s c h e ri n 
qui fut depuis archevèque de Colore; et cette circonstance 
contribna pout-étre aux mesures prises plus tard contre 
7. 



HERMES -- 
l'Cule d'Hermes. En tSt9 il fut appelé, en qualité de profes- 
seur,/ l'université qui venait d'ëtre établie à Bonn, et I, 
comme précédemmellt à .lunster, il attira autour de lui, 
par la nature de ses leçons non moins que par son élo- 
quence, de nombreux auditeurs. Il mourut le 20 mai t$3t. 
La méthode philosophico-dogmatique d'Hermes, qui par 
la suite trouva tant de répnlsion/ Rose, consiste, selon 
son Introduction à la théologie chroetienne catholiçue 
(blunster, 2 • édition, 183t), en ce que la raison doit d'abord 
prouver la réalité de la rvélation chrétienne et .pécialement 
du système catholique et ensuite se soumettre / la révé- 
lation. Il ne peCend pas prouver à lriori chacun des 
dogme.s, mais seulement fonder sur les bases de la raison 
le droit de l'Église à les enseigner et provoquer ensuite la 
foi/ ses do,qnes. Un bref du pape, en date du 20 sep- 
tembre 1835, cozM«naa solennellement cette doctrine, qui 
avait déj/ été énergiquement combattue par Perrone, et 
dont les adhérets furent l'objet de persécutions toutes par- 
ticulières de la part du haut clergé orthodoxe. 
HEP, MESIA,NIAX  poëte élegiaque grec, qui florissait 
vers l'an 330 avant J.-C., ami et disciple du poëte Philoelas, 
composa sur de sujets Cot;ques, et sous le titre de Lon- 
tion, empruxxtéau nom de la fameuse Léontium, courtisane 
dans la foule des amanL de laquelle il fiura, trois livres 
d'élégies. Athénée nous a conservé un fragmeut assez impor- 
tant du troisième, dont G. Hermann (dans ses Opiscula, 
tome IV),et Schneidewin (dans le Delectus Poeseos Groecoe,  
Goettingue, t838) se sont spé(ialement occupes. I 
HERMÉSIANISME  nom qne l'on a donné  la doc- 
trine de G,ores Hermes. 
HEP, MES- TRISMÉGISTE (xp-yo--, e'esl-à- 
dire trois fois le plus an,I ). C'est dans la langue, des Hel- 
Iìnes le om d'un ¢tre mylltologique des anciens E-ptiens, 
représenté tant¢t come étant plus qu'un dieu, et tanlt 
seulement comme plus qu'un personnage hislorique. Ce 
qu'il + a de plus clair dans les données qui nous sont par- 
rennes à son +gard, c'est que Hermès-Trismégiste est dans 
son essence identique avec J h a u t ou ïho, dont il repré- 
ente le chiWidéal. 
Semblahle . l'Herm.s des Grecs, l'Hermës-Trismégiste 
des É¢yptiens«tait une espèce de médialeur cuire les dieux 
et les hommes ; et c'est surlout cet altribut que les philo- 
sophes et les Ihéosophes gréco-égyptiens ont personnifié 
dans Het+mès. A cet égard on peut dire qu'iL n'est que La 
persounificalfon, le s.mbole du sacerdoce égyptien, lequel 
etail un vérilable médiateur enlre la Divinité et les hommes. 
Aussi lui attriLuait-«,n la législation et La civilisation du pais 
ainsi quel'invelion de tous les arts ci de toutes les sciences, 
propriété exclusive du sacerdoce egyptien, nulamment la for- 
mati,,n de la langue, l'invention des signes d'Celiure, sur- 
Iout des h i é rog I y p hes, des malhématiques, de la reCe- 
sine, de La musique, de la danse, du tric-trac, des exercices 
g+nmastiques, L'introduction des cérémonies du culle, de 
l'agricnllure, etc. IL nous présente par conséquent la per- 
sonnification de loule la sagesse et de toute la science sa- 
cerdotales, qu'il avait, dil-on, graves en hiéroglyphes sur 
des coLonnes. C'est par ce motif qu'on lui altribuait aussi 
les caractères de l'écrilure sacrée des Égyptiens, appelée h 
cause de cela par les Grecs dcriture herm+tigue. On peut 
jusqu'à un cerlain point considérer cette écrilnre comme 
une révélation, non-settement de la religion, mais encore de 
toute la dogmatique et de tonle l'histore mythologiq«e, de 
la liturgie «lu système entier de la législation civile et reli- 
gieuse de l'l:g?ple; comme renlermant le cercle complet de 
la ience é,.ptieune, toutes les règles de La morale appLi- 
sables à la vie. Les caracLères hermétiquos n'étaient acces- 
ibles qu'.'--ux pr+lroe» qui ne les montraient au peuple que 
«le loin, dans les processioas par lesquelles on céLebrait les 
grandes solennités. 
C caractères et leur invenlenr prélendu jouèrent de 
nouveau un grand r61e ì l'époque de l'Acule néoplatonicicnue. 
Alorsqu'en Orient la magie, la théosolheet l'alchi- 

HERMINE 
m le devinrent des sciences secr/.tes, et fleurirent comme 
toutes les rèveries m}stiquns, l'Hermès égyptien reçut le 
surnom de Trizm#giste, et fut considéré comme la source 
première de toutes les rveries et de toutes les doctrinea 
occulte. 11 serait difficile de décider si les véritables ouo 
vrages hectoCiques furent effectivement traduits alors 
Alexandrie, ainsi qu'on le peCend, de l'égyptien en groe; ce 
qu'il y a de certain, c'est qu'on leur attribuait a cette époque 
ce que l'Acule néoplatonicienne d'Alexandrie enseignait sur 
les sciences occultes. Elle imagina dans ce but la fiction 
de la chaîne hermti9e, c'est-/-dire toute une série de 
sages dans laquelle se serait transmise successivement la 
tradition de la sagessed'Hermès. C'est de là aussi que pro- 
viennent les ouvrages connus sous le nom d'hermétiques, 
dont les suivants existent encore : Poeraander, sire de 
testate ac sapientia dirina (Paris, 1551 ), .Esculapii De- 
ftniliones ( Londres, 168); latromalhematica ( Nurem- 
berg, 1532) et Horoscopca (1559), réuuis dans la 1%va de 
ztniversis Philosophia, de Patricius (Venise, 1593 ), mais 
qui appartiendraient en partie à un certain Hermès qui vi- 
vait au deuxième siècle de I're chrétienne. Dans les temps 
modernes, Hermès et ses prétendus ouvrages ont de nouveau 
joui d'une grande considération dans l'esprit d'une foule 
«le réveurs et de fanatiques de tous pentes, qu'on a en con- 
séquence surnommés hermdtiques. C'est encore ainsi que 
Paracelse inventa la médecine hermdtique, que naquit la 
.'ranc-raaçonnerie hermtigue , et qu'on appliqua les mots 
/ ermetique, hermétiquement, à des choses tellement 
ferreCs et scellées, que l'air n'y peut pas pénétrer. E effet, 
on attribuait encore à Hermès l'art de sceller des trésors et des 
vases au moyen de sceaux maques, de manière h les rendre 
imp, nelrables. Consultez Baumgarten-Crusius : De librorum 
hermeti«rum origine alque indole (Iëna, t827, in-I «). 
|IEIMÉTIQUE se dit, en termes d'alchimie, de 
tout ce qui est relatif / la science du grand œuvre. La 
.cience hermétique expliquait tous les effets naturels par 
trois principes actifs : le sel, le soufre et le mercure; la 
physique hectoCigue constituait un système de médecine 
qui rapportait toutes les causes à ces trois principes, et les 
expliquait toutes par I/ ; la philosophie hermëligue admet- 
tait en outre deux principes acti[s, qui étaient le phlegme 
et la terre. On entendait par sceau hermétique celui qui 
fermait un vase contenant des préparations, de manière à 
ce que rien e pot s'en exhaler. Pour sceller hermétique- 
ment un vase, on en fondait le col, et on le scellait de sa 
propre matière en le tortillant avec des pinces ad hoc. Par 
extension, on a appliqué l'adverbe hermdliquement h tout 
ce qui et bien fermé. 
iIERMINE animal du genre putois, et dont le nom 
vient, suivant Du Cange, du grec &é,/vtg, Arménien, parce 
qu'en effet ce sont les Arméniens qui les premiers l'ont 
répandue. C'est la mustela herminea de Linné. Ce petit 
mammifère digitiade est connu sous deux couleurs et 
sous deux noms dilférents. Sa robe, qui fournit, comme 
on le sait, une fourrure très-précieuse, affecte en etA la cou- 
leur fauve : alors on lui donne le nom de roselet ; en hi- 
ver, au contraire, elle devient d'un banc éclatant, h l'ex- 
ception du bout de la queue, qui dexient invariablement 
noir, et dans celle saison elle retient la dénomination pro- 
pre d'hermine. Ces fourrures sont incomparablement plus 
belles et d'un blanc plus mat que celles du lapin blanc; 
mais elles jaunissent en vieillisant, et mëme citez les her- 
mines de nos climats elles sont toujours nuancées d'une lé- 
gère teinte de jaune. Parmi les putois de nos conteCs, 
l'hermine vient en seconrl ordre après le furet pour la 
grandeur ; elle porte 2 centimèt,.es, de l'extrémité du mu- 
seau / l'origine de la queue, qui en a 10. L'hermine est, a 
tout prendre, un loli pelit animal :son oeil est vif, sa 
physionomie fine et gracieuse; elle est douëe d'une agilité 
et d'une promptitude de mouvements qui fatio-,uent le regard; 
il serait assez facile de la confondre avec la belette, si elle 
n'avait conslamrrent le bout de la queue d'un noir foncé, 



HERMINE -- 
le bord des oreilles et l'extrémité des pattes blancs. Cet 
animal est très-commun dans les règions septentrionales de 
l'ancien et du nouveau continent, surtout en Russie, en 
orve et en Laponie, où il se nourrit de petits-gris et 
d'une espèce de rats qui pullule considérablement dans ces 
pays. Il est assez rare dans les climats tempérés, et man- 
que absolument aux climats chauds. Rien que l'hermine ne 
soit pas chez nous à beaucoup près aussi commune que 
la belette, on en trouve cependant encore un certain nom- 
bre ; elle se plalt dans les terrains rocailleux, dans les 
anciennes forSts ou dans les champs qui les environnent, 
et fuit avec soin le voisinage des lieux habités. 
L'hermine exhale une fort mauvaise odeur; elle e:t en 
outre d'un naturel extrèmement sauvage, ce qui rend son 
education des plus difficiles. Cependant, il n'est pas im- 
possible de l'apprivoiser. On en a vu qui poussaient la fa- 
,ni]tarirWet la sagacité envers leurs maltres plus loin que 
des chiens ; pour arriver à ce résultat, il faut bien des soins 
et bien des précautions. Mais sur quelque pied d'intimit 
qu'on soit avec elles, il faut bien se donner de garde de 
les inquiéter, et mème de les toucher pendant leur repas. 
On les noarrit habituellement avec de la viande et des œufs : 
elles ont peu de goret po,,r le miel. De meme que les chats, 
ces animaux épient et prennent les souris, tuent les pois- 
sons qui se trouvent à leur portée, et emportent, quand 
ils le peuvent, la proie dont ils se sont emparès; mais ris 
évitent sagement de s'attaquer aux gros poulets, dont ils 
respectent la force et les coups de bec. 
HERMINE CONTRE-HERMINE { Blason ). Voulez 
ÈI X UX. 
IIERMINOXS. Ainsi s'appelait, d'après Irmin, l'un 
des trois fils de Mannns, une des trois tribus dont se coin- 
posait à l'origine la nation germaine. Plir, e range parmi les 
Herminons les Suèves ( nom sous lequel il faut probable- 
ment entendre les Quades et les Marcomans ), les H e r- 
mundures, les Cartes etles Chérusques. 
itERMIONE. Voyez 
HERMIONE fille d'Hélène et de Méndlas, avait 
d'abord oeté promise à Ores t e par son aïeul Tyndare. Mais 
le sort en ordonna autrement : elle fut envo)ée par Ménelas 
a P yr r hus, fils d'Achille, qui l'épousa. Hermione, n'ayant 
point d'enfants, devint jalouse d'Andromaque, veuve 
d'Heetor, qui dtait échue a Pyrrhus dans le partage des p- 
lires. Elle allait, en l'absence de son mari, mettre à exécu- 
tion le projet qu'elle avait conçu de se défaire de celte odieuse 
rivale, lorqu'elle eu fut empéchée, suivant les uns, par le 
peuple, selon d'autres, par Péle, aïeul de Pyrrtms. Redou- 
tant le courroux de ce dernier, Hermione se préparait / la 
mort lorsqe Oreste arriva. Elle se lit enlever par lui, et il 
la conduisit à Sparte. Pyrrhus ayant ét quelque temps après 
egnrgé dans le temple de Delphes, au moment où il offrait 
un sacrifice, les soupçons planèrent sur Oreste et sur son 
adultère maitresse. Tellecst, du moins, l'opinion d'Hygin, 
de Virgilee! de Paterculus. Oide rapporte qu'elle épousa 
Oreste après la mort de son premier mari, et qu'elle lui 
apporta en dot le royaume de Sparte. Suivant Euripide, elle 
aurait alm Pyrrhus / la fureur, et porté jusqu'à la rage sa 
jalousie contre la veuve d'Hector. Racine, dans sa tragédie 
d'Andromaclue, a suivi d'assez prës la version d'Euripide. 
CPAcAc. 
tlEiIITAGE, HERMITE. Voyez E.rrce. 
IIERMITAGE (Yins de !'). Voye» Er.m,c« (Vins 
de I'). 
liERMITE (Bsn r), nom sous lequel on désigne 
en histoire naturelle toutes les espèces du genre pag u r e, et 
plus particulièrement le paguruj bernardus. 
HEILMOD c'est-i-dire le Belliqueux, l'un des fils d' O- 
d i n, le père «les dieux scandinaves, qui lui fit don d'un 
casque et d'une cnirasse, et qui l'employait surtout pour 
ses messages. C'est ainsi qu'il lut envoy6 auprès de H 
dans le monde inférieur, pour en ramener Balder, dieu 
qui avait été tué par Lok i. Il avait aussi pour mission, 

HERNIAIRE 53 
avec B r a gé, le skalde d'O d i n, de recevoir les guerrier 
 leur arrivée dans la W a I h a I I a. 
HEI|OGÈNE de Tarse, en Cililie, l'un des meil- 
leqrs rbCeurs grees, qui florissait vers l'an 160 après J.-C., 
était à peine gé de quinze ans iorsqu'ii fut présent à l'em- 
pereur Marc-Aurèle, qui lui fit l'accueil le plus bienveillant ; 
il composa sur la tthlorigue un ouvrage en cinq livres, qui 
servir longtemps de guide dans l'enseignement; aussi d'au- 
tres auteurs en firent-ils de bonne heure des commentaires 
et des abrégés. La meilleure ddition de l'ouvrage onnal 
avec les anciens commentaires a été donnée par Welz dans 
ses l¢hetores 9roeei. Les Pro9çmnastica, qui en forment le 
cinquiëme livre, et qui jusqu'à la fin du dix-huitième siè- 
cle n'avaient été connus que par la trduction latine de 
Pr i sci e n, ont té publiés par Veesenmeyer ( iremberg, 
tst2). 
HEIrtMUNDURES, tribu germaine, sépare à rouest 
des Cartes par la Werra ; au nord, des Chrusques par le 
Hartz ; à l'est, des Semnones par l'Elhe ; au sml, des Va- 
risques et des Marcomans par la fort de Thuringe et par 
l'Erzgebirge. Comprise dans le principe sous la dnomina- 
tion gnérale de S u èv es, elle est mentionn«e sous ce nom 
d'Hermundures dèsl'an 19de J.-C., poque où, commandée 
par Vibilius, elle mit lin à la domination que le Goth Ca- 
tualda était parvenu à exercer sur les Marcomans, après 
avoir vaincu et expulsé Marbod. Autant en advint, en 
l'an 50, du petit royaume suève que le Quade Vannius 
avait fond, sous la suzeraineté des Romains, entre la Mar- 
che et Gran. En 59 les Hermundures firent la guerre aux 
Cartes pour la possession de quelques saline.s. Au temps de 
Tacite, ils entretenaient des relations de commerce avec 
les Romalns. Il est pour la dernière fois [ait mentio d'eux 
dans l'ennmèration des peuples qui prirent part ì la grande 
guerre des Marcomans contre Marc-Aurèle. 
ilEINIAIRE (Eotanigue) , genre deplantes de la 
familledes caryoph)ilées. L'herniaire 9labre, L. ( herniaria 
91abra), vulgairement turq,ette herniole, est très-com- 
mune dans les terrains sablonneux : ses tiges sont grêles, 
fameuses et diffuses; ses feuil/es sont petites, ovales et 
dpaisse; ses fleurs sont axillaires et verdàtres, et elles 
s'épanouissent durant tout l'etC L'herniaire velue (her- 
iaria hirsuta, L. ) ne parait tre qu'une variété de la 
prcddente. D'anciens auteurs ont attribud ì ces herbes la 
propriété de guérir les hernes, et c'est de cette prétendue 
qualité que vient leur dnomination. Aucune cependant 
n'est moins justiciable. On a également vantd ces plantes 
comme propres a dissoudre la pierre dans la vessie ; et ce 
n'est ni avec plus de raison ni avec plus de vdrit. Les tut- 
quelles, pour ne plus leur douner un nom immrité, con- 
courent pour une faible part ì parer la terre; c'est à quoi 
se réduit leur valeur, autrement elles sont inutiles. 
D r CHARBON.IEn. 
HEPXIAIRE (Bandage) ou BRAYER, appareil des- 
tin à maintenir les hernies réduites. 11 est form d'une 
lame d'acier recourbée pour s'adapter à la forme du bassin, 
et terminée à l'une de ses extrmités par un écusson triangu. 
luire à angles arrondis : cet appareil et garni à sa surface 
interne de bourre et de crin; une peau de chamois enveloppe 
le tout. La surface interne de l'écusson est appliquée sur 
l'ouverture de la hernie, et la bande d'acier, contournant le 
bassin, enserre le corps et le comprime entre ses deux 
extrèmités ; une double courroie maintient en place l'appa- 
reil. Tel est le brayer ordinaire. Lorsque la hernie est ir- 
réductihle et fait saillie, l'écusson est rendu plus un moins 
concave pour s'adapter à cette tumeur proéminente. Le 
brayer est alors dit à euillre. Souvent aussi on remplace 
l'écusson plein par un disque d'acier recouvert d'nne peau 
de chamois disposée de manière à former une bourse : c'est 
le brayer à rayuelles. Ce sont les formes les plus nsitées : 
on emploie encore, mais plus rarement, le bandaye double, 
le bandaye demi-corps et le bandaye omniforme. Chacun 
de ces appareils a ses avantages particuliers ; tous aussi 



54 HERNIAIRE 
eut des inconvénients spéciaux : c'est au médecin à opter. 
HERNIAIRE (Chirurgien), chirurgien qui se livre par- 
ticulièrement au traitement des hernies. On donne aussi 
le nom de bandaç|stes hernia|res aux constructeurs d'ap- 
pareils detins à contenir les heruies, aux fabricants de 
bandages herniaires. 
HERNIAIRE (Sac). Voye. Hral. 
HERNIE. Ce nom distingue une tumeur formée par le 
déplacement d'une partie molle, d'une partie du cerveau, par 
exemple, ou des poumons, qui peuvent sortir hors des ca- 
vités qui les contiennent ì la suite de blessures; mais cette 
dénomination est principalement usitée pour spécifier les tu- 
meurs externescausées par la sortie des intestins et de leurs 
annexes hors du ventre. Le vulgaire nomme aussi cette tu- 
meur descenle, rupture et e/fort. Quand le dernier des in- 
testins ou une antre partie contenue dans l'abdomen change 
de situation et apparaR au dehors sans tre recouvert par la 
peau, cet accident est distingué des herJfies par le mot chute 
eu renversement. La descente du rectum est un exemple 
commun de ce mode de déplacement. 
Les intestins peuve,t s'$chapper du ventre par la plus 
grande partie des parois de cette cavité ; on les a méme vus 
pénétrer dans la puitrine à travers une cloison musculeuse; 
mais c'est ordinalrement sur le bassin qu'ils trouvent des 
issues par des ouvertures invisibtes, qui sont destinées 
livrer passage à des nerfs et "à des vaisseaux ; ouvertures 
peu considérables, mais susceptibles de se dilater au point 
de donner accès h des portions du tube intestinal, ainsi 
que d'une membrane qui les recouvre, et qu'on nomme 
ritoine. C'est cte tnnique membraneuse et vaste qui forme 
une poche contenant telle ou telle partie des intestins, plus 
on moins longue, et que l'on nomme sac herniaire. Ce alC 
placement est quelquefois si volumineux qu'i forme riez 
meurs ou hernies énormes. 
L'affection qui nous occupe est extrémement commune, 
surtout chez les hommes, qui y sont plus diposés que les 
femmes, en raison de leur organisation particulière; elle 
occa<onne Iríquemment des accidenLg si graves que la mm t 
en est souvent le terme. La cau de ces suites fime«tes 
est facile à comprendre : les parties alAplatées, étant com- 
primées par les ouvertures ,troites qu'elles ont franchies, se 
gonflent, s'étranglent et s'enflamment; alors on voit des 
sympt6mes sinistres se succéder : la tuméfaction du ventre, 
des nausécs, des vomissements d'aliments, de bile et mème 
de matières fécales ; un malaise et une anxiété extrëme ; 
une soif d'autant plus pénible qu'elle augmente le besoin 
de vomir. La tumeur est en outre le siCe d'une douleur 
vive. Si la rëduction n'est pas olrée, l'inflammation se 
termine par la granène : en ce cas, la cessation subite de 
la douleur annonce que la partie déplacée est privée de vie 
et abandonnée à une destruction putride. C'et surtout chez 
les individus robnstes, et par conséqnent prédisposés àdes 
inflammations violentes, qu'on rencontre cette série d'acci- 
dents. Quand une tumeur herniaire est à l'Cat de gangr/me, 
la mort du patient est imminente. Cette fin est inésitable 
dans la plupart des cas; néanmoins, on a vu des portions du 
tube intestinal, ayant mme une longueur qui déconcerte 
l'imagination, se détruire ainsi, se séquestrer, et les malades 
survivre à de semblables pertes. Les recueits de méde- 
cine contiennent plusieurs exemples de ces guérisons spon- 
tanCs et inespérées, qui sont suivies à la vérité d'un anus 
contre nature, heureusement curable aujourd'hui. 
Les hernies n'ont pas toujours des conséquences aussi 
malheure«ses : des milliers d'individus les portent impuné- 
ment, et les porions herniées rentrent chez eux dans la ca- 
vité ventrale aussi facilement qu'elles en sortent ; mais il ne 
fat qu'une circonstance imprSvue ou imprévo},able pour 
dterminer lYtranglement : aussi, tout homme qui est af- 
ilig de cette affection ne peut jamais demeurer dans une 
sécurité compl¢Xte; i! ne peut sans risque renoncer aux pré- 
cautions et aux moyens contentits dont l'expérience a dé- 

-- ri iKt tl 
montré la nécessité. Les hernies sont donc des affections re- 
doutables, et il importe grandement au bonheur de l'homme 
de les prévenir. Chez les enfants mles, les bernies sont fré- 
quemment produites par les efforts qu'ils font pour crier, 
et c'est surtout quand leur ventre est comprimé par un 
maillot. Les accAs de toux dans la coqueluche exigent aussi 
des efforts qui causent des hernies ì cet go, et surtout 
encore quand l'abdomen est serré par des langes. Les efforts 
pour soulever ou porter des fardeaux considérable» engen- 
drent communément ces rumeurs. Au nombre des mèmes 
causes, on doit comprendre les inspiratinus trop longues et 
trop soutenues dont les enfants font quelquefois un jeu ; les 
élans, les uts qui exigent de grands efforts muscnlair¢s, 
efforts nécessités chez les personnes constipées pour i'ezo. 
nération des matières lécales. Les hernies sont encore un des 
inconvénients cemmuns de l'Cut de grossesse. On peut aussi 
considérer comme propres à les favoriser le jeu des instru- 
ments à vent, les géuuflexions habituelles et longues et l'é- 
quitatinn : l'action de cette dernière cause est remarquable 
dans les régiments de cavalerie. 
Lorsque cette affection n'a pu tre prévenue,  faut. ten- 
ter de la guérir : on y parvient assez aisément chez les en- 
fants qui en sont aflectés par des causes indiquées ci-dessus, 
et qui mme naissent avec cette tumeur. Quand son exis- 
tence est reconnue, il faut la rxluire; c'est--dire qu'en 
replace les parties dans leur situation naturelle. Après avoir 
rempli celte première indication, on appliquera un h a n d a g e 
compressif sur le lieu que la tumeur avait occupë, et il con- 
vient d'y maintenir aussi un topique tonique : la folle farine 
de tan, délayée dans du vin rouge, est excellente en ce cas. On 
tiendra en mme temps les enfants ceuchéa, et on préviendra 
autant que possible les cris et la toux. Avec ces soins, on 
guérit radicalement les hemies dans la première et la sec, onde 
enfance. Cette affection est-elle curable plus tard ? Plusieurs 
médecins le nient, ou du moins ils en bornent la possibilité 
à des cas extrêmement rares. Avant de renoncer à tout es- 
poir, on a,irait da, il nous semble, faire des tentatives 
plus nombreuses, et surtout s'y adonner avec plus de 
tance. Il est des moyens ratinnnels qu'on devrait éprouver. 
Tel est ce procédé fondê sur l'opinion que les tissus qui 
ont livré passage aux portions d'intestins peuvent revenir 
sur eux-m,nes au peler de former une barrière soude quand 
on éloigne les causes qui les dilatent par une action méca- 
nique. En conséquence, la situation du corps est la premiëre 
condition du traitement : après la rduction de la hernie, 
les sujets doivent se coucher sur le dos, le bassin plus 
élevé que le reste du tronc et le c6té de la hernie plus levé 
que l'autre : le but, enfin, est d'empëcher que les intestins 
n'exercent aucune pression sur les ouvertures du bassin, sur 
lesquelles on applique en outre des substances astringentes, 
la folle farine de tan principalement. Ce moyen est facile; 
mais il est fatigant, et il exige du temps ainsi que de la 
patience, car il faut rester couché durant deux on trois 
mois sans trop varier ses positions ; mais sil réussit, on sera 
trop heureux de le posséder, et on serait grandement dé- 
dommagé d'une gêne momentanée par la délisTance d'une 
infirmité très-grande. 
Aussit6t qu'une hernie se manifeste, soit graduellement, 
soit subitement, il faut invoquer les secours de la chirur- 
gie, et le plus t6t est le mieux : en attendant, on placerale 
sujet affecté sur un lit et dans la position que nous venons 
d'indiquer : elle suffit quelquefois pour que les parties her- 
niaires rentrent spontanément. Quoi qu'il en soit, on attend 
les secours avec moins de danger d'ëtranglement. Quand 
la hernie est réduite, il faut prévenir son retour par l'appli- 
cation d'un bandage contentif, et il faut s'astreindre à le 
porter hors du lit et mime constamment, si on est sujet à 
de forts accès de toux durant la nuit. igous ne saurions trop 
insister sur cette précaution, quelque gènante qu'elle soit, 
la vie en dépend souvent. Si la hernie ne peut tre réduite, 
il faut recourir h une opération cruelle et difficile pour re- 
placer dans l'abdomen les parties qui s'en sont é,:happée» 



HERNIE -- 
mais toute pénible qu'elle soit, il faut y recourir, et le plus 
tt possible, ainsi qu'aux moyens accessoires. 
D r CHARBONNIER. 
HERNIE GUTTURALE. Voyez Gol'ae. 
HERNIOLE. Foutez HEsmg;ua (Botanique). 
HERNUTES ou HEBNHUTES. Voyez HEsr,nl'. 
MÉRO, jeune et belle prêtresse qui desservait le temple 
de Vénus à Sestos, sur la rive européenne, où elle recevait 
de nuit Léandre, son amant, qui habitait Abydos, sur la 
c6te d'Asie. Celui-ci traversait à la ;;age I'H e I le s p o n t, qui 
les séparait, et un flambeau allumé sur une tour par Héro 
lui servait de phare; mais pendant une nuit d'orage, lole 
ayant soulevé les flots et éteint le phare, Léandre périt dans 
le trajet. Au lever du soleil, Héro, ayant trouvé le corps de 
son amant sur le rivage, céda à son désespoir, et se préci- 
pita du haut de la tour dans la mer. On avait souvent nié 
la véritë de ces faits en s'appuyant sur la difficulté de tra- 
verser le détroit, qui n'a pas là moins de 875 pas. Lord 
Byron, suivi d'une barque, partit du cbàteau d'Abydos, et, 
bien que la pensée de rejoindre un objet adoré ne soutlnt 
pas ses forces, nages jusqu'à la rive opposée, mais entrah;é 
par le courant à trois milles au-delà du lieu qu'il voulait at- 
teindre. Léandre, familiarisé avec les accidents que présente 
l'Hellespont, savait sans doute abréger le trajet, qui valut 
au poëte cinq jours de fièvre. Strabon, 5arlial, Lucain, Si- 
iius Italicus, Stace, Pomponius Ilela, Servius, Autipater de 
Macédoine et blusée le Grammairien ont consacré, dans 
leurs ouvrages, cette double mort. Viennent ensuite chez 
nous Gentil Bernard, Lefranc de Pompignan {dans une tra- 
gédie lyrique en cinq actes), la Porte du Theil, Gail, l'abbé 
de Cournand et notre collaborateur D e n n e- B a r o n, dont 
le poëme se reco6mande par l'élégance du style et l'interSt 
des notes. Des médailles et des camées ont conservé aussi 
cotte histoire touchante. Plusieurs montrent Léandre sous 
les traits d'un beau jeune homme, dont les flots mouillent 
la,longue chevelure. Celles de Caracalla et d'Alexandre Sé- 
vère le représenteut précédé d'un Amour qui porte un flam- 
be.u. Cssc IE BADI.* 
HÉRODE. Plusieurs rois o,I gouverneurs de Judée ont 
porté ce nom. Les principaux furent: 
ItÉRODE, dit LE GRAND, fils de Cypros et d'Antipater, 
gouverneur de l'ldumée, aquit  Ascalon, l'an 62 avaot 
J.-C., et futnomméen l'an 8 gouverneur de la Galilée, qu'il 
purges des brigauds qui l'infestaient. S'étant distingué dans 
l'exercice de ces fonctions, Sextus César, gouverneur ro- 
main de la Syrie, lui confia en outre l'administration de 
Samarie et de la Coelé-Syrie; et il fut investi du commande- 
ment supérieur des forces de terre et de mer dans ces pro- 
rinces. Vainqueur d'Antigone, neveu du gouverneur de Ju- 
alC, Hir¢an Il, il épo;sa la fille de ce dernier, blariamne; 
et le triumvir Marc-Antoine le promut alors aux fonctions 
de tétrarque. En l'an 37, il eut, il est vrai, le dessous lors 
des hostilitës que renouvela Antigone et fut mème obligé de 
prendre la fuite; mais il se rendit à Borne, où il parvint à se 
l'aire également bien venir d'Antoine et d'Octavo. Bient6t le 
sénat romain lui adjuges le royaume de Judee et déclara 
Antigone ennemi de la république. Hérode revint alors en 
Judée, et secondé par les troupes romaines de Sosius, il re- 
pr't Jérnsalem sur Anfigone,  qui il fit trancher la téte. 
Une politique habile, de la bravoure personnelle, l'amour 
des arts et un goOt délicat, telles furent les qualités qui le 
distinguèrent des autres rois de Judée; par contre, il se montra 
défiant, enclin à écouter la délation et cruel. Sa sœur Sa- 
Iomé exerça sur lui une pernicieuse influence. Il fit périr 
dans les supplices Mariamne, son épouse, Aristobule son 
ieau-fi'ère et sa mère Alexandra, le vieux prince Hircan et 
trois de ses propres fils. Malgré la haine dont il était l'objet 
de la part des Juifs et les dangers auxquels, l'exposèrent 
les guerres civiles des Romains, il se maintint sur le trône, 
gr/ce à l'babileté avec laquelle il sut toujours se déclarer 
à temps en faveur du parti vainqueur. Quoiqu'il eOt d'abord 
embrassé les intérêts de Marc-Antoine, Auguste non-sou- 

HERODE . 
lement lui cunserva le trOne de Judee, mais encore ajouta à 
ses Etats Trachonitis  Auranitis, Batan.a et le territoire de 
Zenodor. 
L'événement le plus remarquable du règne d'Hérode le 
Grand fut la naissance de Jésus-Christ. Ce prince re- 
construisit le temple de Jérusalem avec plus de magnificence 
que jamais, et embellit la capitale d'un grand nombre d'é- 
dilices; il fonda plusieurs villes, barrit les Arahes et leur chef 
Aretas, et vainquit les bandes de brigands syriens et arabes 
qui infestaient la contrée. Dans les derniers temps de sa 
vie, son fils Antipater ayant conspiré contre lui, i! le lit étran- 
gler cinq jours avant de descendre lui-m{me au tombeau, 
l'an 2 de notre ère. 
HÉRODE AICHÉLAUS, fils du précéAent, lui succéda 
comme ethnarque de Judée, et commit tant de cruautés 
que dès l'an ri de notre ère Auguste se voyait obligé de 
l'exiler à Vienne, dans les Gaules. 
HÊRODE ANTIPAS, second fils d'Hérode le Grand, de- 
vint tétrarque de Galilée, fut exilé à Lyon, en l'an 62 de 
notre ère, par Caligula, et mourut en Espagne. Il enleva 
Hérodias, femme de son beau-frère Hérode, et fit décapiter 
saint Jean-Bu ptiste. Tout en dressant des embOcbes à 
Jésus-Christ, il Pacquitta comme juge. C'est d'après cet 
Hérode qu'on a donné le nom d'Hrodiens à une secte 
juive, plut61 politique que religieuse. Plusieurs Pères de la 
primitive Eglise, tels que Tertullien, Epiphane, saint Jean 
Chrysostome, etc., en parlent comme d'une socle qui tenait 
Hérode pour le véritable Messie. Comme partisans d'Hé- 
rode, ils étaient, avec les Pharisiens, de ceux qui sur- 
vei'Jaient les actes de Jésus de Nazareth, et qui, pour se bien 
faire venir des lomains, soutenaient qu'il fallait toujours 
payer le tribut da à l'empereur. 
HÊRODE PHILIPPE, troisième fils d'Hérode le Grand, 
fut tétrarque de Tracbonitis, d'Aurauitis et de Batanœea. 
HÊRODE AGR[PPA I ", petit-fils d'Hérode le Grand. par 
l'un des fils de celui-ci, Aristobnie, qu'il.avait fait décapiter, 
et frère d'Hérodias. Josèpfie nous dit que son grand-përe 
l'envoya à Ruine pour faire sa cour à Tibëre, et qu'Hérode 
Agrippa devint le compagnon d'enfance de Drusus, fils de 
Tibère. Forcé de quitter Ruine, par suite des dettes immenses 
qu'il  avait contractees, il se refugia en Idumée. Plus tard, 
il revint à Ruine, et lut jeté en prison par ordre de Tibëre. 
Mais par la suite la faveur de Caligula et de Claude lui 
fit obtenir avec le titre de roi l'administration de toute la Ju- 
«lée érige en ro)aume indépendant. 11 mourut l'an 44 «le 
notre ère; et à sa mort la Judée presque tout entière fut de 
nouveau déclarée province de l'empire romain. Le règne 
d'Hérode fut en général digne d'élogs ; cependant on a à 
lui reprocher d'avoir fait mourir l'ap6tre saint Jacques 
et emprisonner saint P i e r r e. Par son crlit auprès de l'em- 
pereur, il avait fait obtenir la principauté de Cfialcis à sou 
frère aihC Hao»ï. Celui-ci devint grand-prétre/ la mort 
de son frère. Il avait épousé sa nièce B é rén ice. 
HÊRODE AGII PPA Il, fils d'Hérode Agrippa I er, suceéds 
à Hérode Philippe dans sa tétrarcbie, et fut le dernier ro 
des Juifs ainsi que le dernier membre de sa race. il aida 
les lomains à s'emparer de Jérusalen, obtint alors la dignite 
de pr#.teur romain, et mourut vers l'an 95 de notre ère. 
HERODE (Tnams-Cuws), surnommé ATriCUS, 
né à [Iarathon, au commencement du second siècle dr notre 
ère, descendait d'une famille distinguée par son ancien- 
neté et ses richesses, et se consacra de bonne heure et avec 
les plus grands succès à la pratique de l'éloquence. Pu/s, 
sous Lucius Verus et Marcus Antoninns, qui avaient suivi ses 
leçons, il remplit diverses fonctions publiques, notamment, 
en l'an 143, le consulat  dbènes. Plus tard, devenn sus 
pect à cause de ses opinious, il se vous à la retraite, et se 
s'occupa plus que.de science jusqu'à sa mort, arrivée vers 
l'an 180. 11 consacra presque exclusivement ses immenses 
richesses à des choses utiles, et plus particulièrement  la coins.. 
tructlon d'édifices grandioses, dont il orna la Grèce, i'Aie 
et l'ltalie. On citait surtout dans le nombre l'Od6on d'Athe- 



56 flÉRODE 
nns, dédié à son épouse legiila, le plus grand et le plus beau 
qu'on connfit, ainsi que les vastes et magnifiques jardins 
nés de temples élégants et du tombeau de sa iamille, qu'il 
avait créésau voisinage de Rome, sur la voie Appienne, et qui 
reçurent le nom de Triopium, d'après le Triopas, afin de 
les mieux garantir contre toute profanation. Sur cet emplace- 
ment on a découvert deux grandes inscriptions de 39 et de 
.59 ers hexamètres, vraisemblablement l'oeuvre du poëte 
Harcellus Sidétès, dont les originaux sont au musée du 
Lo,Jvre. Ces inscriptions, dites lriopiques, ont été expli- 
quëes par Visconti, Eichsloedt, etc. Du la.lent oratoire de 
ilCde Atticus, qui entre autres surnoms flatteurs lui avait 
,tain celui de roi de l'éloquence, il ne nous reste qu'un 
d-chantillon, qui ne justifie guère l'appréciation qu'en fai- 
sait un ancien critique en disant ,, que le fleuve de ses dis- 
,, cours se déroulait en flots d'argent sur un I,t d'or ,,. C'est 
un discours ou plutét une déclamation d'école sur l'Etat; 
d'ailleurs, rien n'en démontre l'authenticité. 3. Bekker I'a 
comp.s dans  Oratores Altici (tome V, Berlin, 1824 
HEIODIEN historien probablement d'origine grec- 
que, qui fleurit de 170 à 240 de notre ère et passa la plus 
grande partie de sa vie  Borne, est auteur d'une Histoire 
de FEmpire romain, en huit livres, embrassant la période 
écoulée de Commode ì Gordien fil. Ma]gre quelques erreurs 
de cbronoloe, cette histoire, ecrite en grec, se distingue 
avantageusemeut par une pureté assez grande de 
comme aussi par la clarte, la fidelite et Findgpendance avec 
lesquelles Herodien raconte les faits. La première édition de 
cet ouvrage est celle qui a Ce donnee par Aide à Yenise, en 
103. Parmi les meilleures réimpressions, on cite celle d'Ir- 
misch (Leipzig, 1759-105, 5 vol. ), de Wolf (Halle, 
1792 ), de Bekker (Berlin, 186 ). Politien en a donne une 
traduction latine (Bologne, 1493, souvent réimprimee de- 
puis ). 
llÉP, OD1EX (Eues), célèbre grammairien grec d'A- 
lexandrie, vécut du deuxième au troisième sicli de notre 
ère. Il était fils d'Apollonius Dsscolos, et jouit d'une haute 
considération h Rome, sous le règne de Marc-Aurle. Il 
composa un grand nombre d'ouvrages de grammaire et de 
prosodie, dont nous possedons encore des extraits et de longs 
fragments publies dans les Anecdota Groeca de Bekkêr, 
Cramer, Bacbmann et Villoison ; dans Fedition de Moeris 
par Kock ; dans celle de Phrynichus, par Lobeck; dans les 
Gram.rnatici Groec de Dindorf, elc. 
HEP, ODIENS. l'oye-. H¢.son. A_XTIPAS. 
HÉRODOTE. On s'accorde h penser que ce Pêre de 
l'histoire naquit a Halicarnasse en Carie, la 4 ¢ année de 
la 7Z* ol)mpiade ( ,is-i ans a ant J.-C ). Il était le neceu du 
poête épique Panyasis, que plusieurs critiques de l'antiquite 
placent à ctë d'flomère, et qui tomba victime de Lygda- 
mis, tyran de Carie. Le jeune Hérodote, appelé par son génie 
à écrire les annales de sa natiou, résolut de connaltre les 
lieux qui avaient été témoins des grmldes choses qu'il vou- 
lait transmettre h la postérité. Son séjour à T)r est attesté 
par Ini-mëme. Il isita également l'Eg.pte, les cbtes de la 
Palestine, Bab.vlone, l'Assyrie, la Colchide, le pays des 
Scythes, les colonies grecques du Pont-Euxin. De là il 
passa chez le Gères, dans la Thrace, en Macédoine; enfin, 
il descend,t, par l'Êpire, dans la Grèce, qui était à la fois le 
terme et le but de ses longs vo)ages. De retour dans sa pa- 
trie, il trouva le pouvoir suprgme usurpé par Lygdamis. La 
crainte de mourir, comme Panyasis, victime de son despo- 
tisme, le décida à chercher dans Samos un asile où il pot 
xire en paix. C'est là que, suivant toute apparence, il mit 
en ordre les nombreux matériaux qu'il avait rassemblés ; 
c'est là aussi qu'il résolut de délivrer son pays. On prétend 
qu'il réussit dat«s ce noble et périlleux projet, mai qu'un 
gonverttement oligarchique ayant sureCWau despoti.noe 
d'un seul, il fut contraint de sMIoigner, pour la seconde fois, 
d'une ville ingrate, qui reprochait ses nouvelles infortur, es 
a son libérateur, et d'abandonner sa patrie pour n'y plus re-- 
 enJr. 

A la suite de cet exil, il parut aux &eux olsmpiqu«, où il 
eut soin de lire les morceaux de son ouvrage les plus 
pables d'exciter l'euthousiasme des auditeurs. La Grëce ap- 
plaudit avec transport l'historien qui se présentait à elle 
sous les auspices des Mns. Thucydide, priseur à cette 
scène, pleura d'aàmiration. Témoin de ces nobles larmes 
d'un enlant de quinze ans, Hérodote prédit au père la gloire 
qui attendait son fils. Encouragé par d'aussi honorable« 
suffrages, il employa douze autres années à perfectionner 
son histoire, et se mit à parcourir de nouveau certaines par- 
ties de l'Hellénie, qu'il ne croyait pas a, oir assez profondé- 
ment étudié.es. La fgte des Panathénées, célébrée l'an 
avant notre ère, vit un second triomphe d'Hérodote, qui, 
ayant lu son ouvrage tout entier devant le peuple d'Athènes, 
en recul comme récompense civique une somme de IO talents 
(environ 5,000 francs de notre monnaie). La sensation 
produite par cette lecture fut telle, qu'Ensèbe a cru devoir 
en consacrer le souvenir dans sa Chronique. Malgré le 
bon accueil d'Athènes, qui semblait l'avoir adopté, il fixa 
sa demeure à Thurium, où, au rapport de Suidas, il mourut, 
dans un gge avancé. Cependant, parmi les monuments de 
la famille de Cimon, on voyait, ì l'une des portes d'Athènes, 
un tombeau d'Hérodote; mais ce tombeau, élevé par la e 
connaissance d'un peuple enthousiaste en l'honneur du 
Pdre de l'histoire, n'était probablement qu'un cénotaphe. 
Ce culte pieux pour le génie a surtout rendu immortelle la 
ville de blinerve. 
L'héritier d'Hérodote fut un Thessalieu nommé Plésirhofis, 
poêle l)rique, qu'il aimait beaucoup. Il avait fait le proème, 
ou exposition du travail de son marre. L'ouvrage du grand 
historien est peut-être le monument le plus précieux que 
nous ait légué l'antiquité grecque. 11 se divise en neuf livres, 
 chacun desquels est attachéle nom de l'une des neuf Muses 
aucun peut-Cre n'a ruantWautant de faits avec une aisance 
aussi remarquable ; aucun n'a eu une marche plus terme, 
n'a su mieux lier les petits évén¢ments aux andes causes, 
et n'a conservé mieux l'unitWd son plan. La lutte sanglante 
des Perses contre la Grèce revit tout entière sous les pin- 
ceaux fidèles du prosateur poête. Lon#n l'appelait le plus 
homërique des écrivains de la Grèce, et Denys d'Ball- 
ramasse I'a placéau-dessns de Thucydide. 
Qui le croirait cependant ? l'homme qui avait tant travaillé 
pour savoir, qui s'etait servi d'un si beau génie pour racon- 
ter ce qu'il avaiI appris en interrogeant les annales des peu- 
pies, fut, après sa mort, poursuivi par la calomnie? On 
lui refusa la science qu'il avait acquise par tant de vo.ag 
et d'Cudes; on l'aceusa de plagiat. Un Casstérins, un Polion, 
un Momus, et mëme Snidas et Dion Chrysostome essa}è- 
reut de flétrir la mémoire du Père de l'htstoire. Plutarque 
lui-ratine attaque sans raison l'écrivain consciencieux qui a 
pris les Grees eux-mmes fi témoin de la fidélité de ses 
cits, et que la science actuelle, appuyée des récits des 
geurs modernes, a dífinitivemeut rangé au nombre des bis- 
torieus les plus víridiques. Parmi les anciens, Denys d'Ha- 
licarnasse; parmi les modernes, l'abbé Geinoz, Larcher, 
Scalig¢r, l'illustre Boerhaave, ont rendu le plus éclatant 
hommage à Hérodote. On aattribné à ce grand écrivain nm 
Vie d'Homère, malheureux pastiche, qui bien certaine- 
ment n'est pas de lui; mais il parait positif qu'il avait 
gcrit aussi une Histoire d'Assyrie, qui n'est point venue 
jusqu'à no.u.s. P.-F. TI$SOT, de l'Académie Franche. 
HEIOIDE : petit poême qui a génétalement la forme 
del'pitre et le ton de i'lgie. Les anciens lui ont 
donaé ce nom parce que dans ce genre c'est presque t0u- 
jours nn héros, ou une híruine, ou quelque personnage connu, 
qui raconte les évínemeuts de sa vie ; mais ce n'est point 
absolument nécessaire. Les qualités de l'héroide sont le na- 
torel, la variété des mouvements, le pathétique et l'intérgt. 
Il fautque le poëte s'efface absolument pour ne laisser voit 
que son personnage, sans quoi l'invraisemblance refroidi- 
rait à chaque instant le lecteur. 0 v i d e a Laissé des hrofdes, 
que l'on peut comparer aux plus belles élé#es de Properce 



ItE[4OIDE 
et deTibulle, lly est plein de chaleur et de sensibilité lors- 
qu'il soupire au nom de Pénélope, de Phèdre, on de 
seis  ndis u'il est de glaoe losqu'il se p[aint lui-meme 
d ieus de son exil. Le ul dfaut que l'on puis se 
¢poche aux hérides d'Ovide 
iou  le su]ei : ce at tou]oas des amant malhea- 
rem et dhiées; mais, comme le dit La arpe, on ne 
uait employe plus d'art à vafie un fond uniforme. Dans 
le aiëde dernier, oà chacun se piuaitd'uae exquise seasi- 
hi]i[é, l'hroade devint fort à la mode.  en fut alors de 
oe gee comme plus rd d mddtations 
d dlodes, des hmoni» e., etc., de l'cole 
mantique. Une belle hoeroide, que l'on cite souvent dans 
notre lane, t oelle d'Hélooe  AbCard, imitée de Pope 
par Colardu. 
CHMPAGNAC. 
HOQUE (Age). Voye Haos et Aç (L quatre). 
HEOISME. Ve» Hos et 
HÉOLD ( Luvs-Josea-FavNX» ), l'une de nos 
gloir musioel, naquit  Paris, le 28 janer 1791. Son 
re, profeeur disti»gu de piano, l'initia Ini-mtme à la 
connnce de la scienoe dans laquelle il devait un jour 
briller au premier rang. Il mourut de bonne henre, et le 
jne Hérold entra au Conrva{oire. Il aait a peine seize 
ans lorsqu'il y concourut pour le premier px de piano, 
q» rempo d'emble. Élève de Louis Adam, il concou- 
rut en jouant une sonate de sa composition; fait unique 
dans les annales du Conservatoire, «r le prix qu'il rem- 
por fut un double triomphe accordé à l'exécunt et au 
oemposiur. Après avoir étudié pendant quatre ans l'har- 
monie et la composition sous Méhul et sous Ca{el, il rem- 
por, en 1812, le premier grand prix decomposition par une 
oenate dont le sujet it ff¢ La Vllre. Ce grand prix 
exempit Hrold de la consc6ption, faveur bien rare et 
bn recherchée us l'empire. Il parfit alors pour Borne ; 
ma il y sjourna peu de temps, appelé qu'il fit à Naples 
pour donner d leçons de piano aux princess filles 
de Murat.  jenne professeur voulut dbuter au thétre 
de Napl; il y donna La Giovt di Enrico V, opéra 
en deux actes, qui lut accueilli avec un grand sucoEs. 
 vénements politiques ne rdèrent pas à le foroer 
de s'éloier de ce ciel enchanteur; et oe ne fut pas sans 
courir une foule de dgersqu'il parvint à rentrer h Paris, 
ns les premiers jours de la restauration. Inutile de dire, 
ns doute, que le fléatre éit le but de tont ses pen- 
s; mais alors, comme aujourd'hui,l abords en étaient 
èrement gard et interditsaux debutants par les four- 
nisseurs officiels et pfivilés. Cependant,  l'ocoesion 
des ft par lesquelles on lébra, en 81ç, le mariage du 
duc de rry, ieldieu, à qui on s'Cait adressé pour 
musique d'un opéra de circonstance, compos par Tbéau- 
lon, Charl de France, et qui n'aimait point à impr 
vioer et à travailler sous Pobligation d'Cre prët à jour fixe, 
s'adjoiit pour la comsifion de ce{te partition officielle 
le jeune Hérohl, en qui il avait reconnu bien vite {o les 
ge d'un grand lent. Le suoeès de Charl de France 
courag Tfiulon, le grand fournisseur de l'OpCa-Co- 
mique, à confier au collaborateur de Gieldieu, au jeune 
homme dont le nom venait d'avoir l'honneur de figurer 
r l'affiche à c6t de celui d'un maltre, nn onvraEe plus 
impor{ant. En moins de trois mois, Les osières furent 
composé» mis à l'{ude et représentées. La musique en 
çut jus{ement applaudie. Son second ouvrage fut La Clo- 
chette, dont le suoe fut plus dédé, quoique l'enœemhle 
de la partition ne présen{e s un reCte aus soutenu 
que Les osères. Aprës « Clhelte, vint un opéra en 
trois ac{es, Le Premier Venu, comédie fort gale, repré- 
sentée par Vial, à l'Odon, av nn and suc et que 
l'auteur avait arrangée 
éit sensible ; les mélodi en {aient plus Irancbcs, mieux 
arrlé que cellde La ClocheHe. Le polit acte des Tro- 
qu (Iô19) n'vblint qu'un succ m,llocre, et mrilait 

 HERON 57 
assurément mieux; car il y a dans cette petite parlition 
de ravissantes ci,oses. 
Le découragement qu'Hérold en éprouva le porta à ac- 
cepter la place d'accompagnateur au ThéAtre-Italien, po- 
sition qui eut du moins pour lui cet avantage qu'elle lui 
fournit l'occasion et l'obligation de se livrer  l'Cude des 
cl, efs-d'oeuvre de cette scène, qui ne devait pas tarder  
rétentir des mélodieux ouvrages de Bossini. Hérold ne 
bouda pas bien longtemps l'opéra-Comique : il y fit jouer 
successivement Lasthnie, L'Auteur mort et vivant, Le 
Lapin blanc, mais sans grand succès. Le dernier de ces 
ouvrages n'eut mème les honneurs que d'une seule audi- 
tion. Il fut plus heureux dans Le Muletier, encore bien 
que le public, passablement collet-montA, de cette époque 
trouvat par trop leste la pièce de M. Panl de Kock. Elle 
eut à vaincre une redoutable opposition ; mais plus de cent 
fructueuses représentations dédommagèrent la direction des 
embarr&« de tous genres dont il lui avait fallu triompher 
pour faire admirer et applaudir ce petit chef-d'oeuvre. 
Marie (1826), qui fut reprësentëe aprës Le Muletier, eut 
un succès retentissant : c'était pour la premiëre fois que 
Hérold travaillait en collaboration avec M. Planard. Le 
poëme réunissait la grâce à l'esprit et à la gaieté : il porta 
bonheur au compositeur, qui fut virement applaudi. Pen- 
dant ce temps-la, Hérold avait qnitté sa place d'aecompa 
gnateur au ThéAtre-Italien pour entrer en qualité de chef de 
chant à l'OpCa. Les devoirs ardus de ces nouvelles fonc- 
tions l'eloignèrent pendant quelque temps de l'Opéra-Comi- 
que, où il fit cependant représenter, en 1829, un petit 
acte, L'Illusion, qui n'obtint guère qu'un succès d'estime. 
En revanche, il s'était créé à l'Opéra une spécialié où il est 
resté sans rivaux : la musique de ballets. Il nous suffira de 
rappeler la musique d'Astolphe et Joconde, de La Belle 
au bois dormant et de La Somnambule villageoise. 
En 1831 Hérold fit représenter Emmelme, puis Zampa 
(1831), qu'on peut considérer conme son chef-d'oeuvre. 
L'année suivante l'OpCa-Comique jouait Le Pr aux Clercs, 
qui lut bien le chant du cygne, car Hérnld assita mou- 
ant à la première représentation. Il avait alors près de 
quarante-quatre ans, et ,léj/ il subissait les atteintes de la 
terrible maladie h laquelle son père avait suecombé, pré- 
cisément au mème age, et qui l'enleva, le 13 janvier 1833. 
II laissait un fils, qui est aujourd'hui avocat à la cour de 
cassation. 
Aux onvrages de ce compositeur que nous avons Cumé- 
rfis ci-dessu», il convient encore d'ajouter Le Roi Ben, opéra 
«le circonstance, composé ì l'occasion du sacre de Charles X; 
Vend6me en Espagne, grand opéra en deux actes, en so- 
ciété avec Auber; L'Auberge d'Auray, petit opéra en un aele, 
en société avec Carafa, quelques morceaux et le finale tout 
enfler de La Marquise deBrinvilliers ; enfin de nombreuses 
fantaisies pour piano. 
IIÉROS. La plupart des ornitholo[stes ont réuni en 
un genre distinct, le genre hron, les oiseaux à bec al- 
longé, rohusle, conique, acéré; aux mandibules à bord 
tranchant ; aux naines symétriquement di»posées à la hase 
du bec, et en partie recouvertes d'une membrane; aux 
jambes longues, écussonnées, alCarnies de plumes; aux 
pieds longs, greles, armés d'ongles allongés, peu arqués, 
aigus : et Cuvier a rangé ce genre dans la deuxième tribu 
de ses échassiers cullrirosD'es. Mais il y a dissidence parmi 
les naturalistes qaant aux sous-divisions, quant au nombre 
d'espèces dLstinctes qu'il laut admettre dans le genre lui- 
mème. Ainsi, Buffou a divisé son genre hron en quatre 
sections distinctes : la première renfermant les h(rons pro. 
prement dits et les a igrettes, la seconde les butors, 
la troisième les b i h o re a u x, la quatrième les c r a b i e rs. 
Vieillot n'a élabli que deux scellons : dans la première, il 
a classé comme espèces distinctes les hérons, les crabiers, 
et les blongios; dans la seconde, les biboreaux et les bu- 
tors. Tenuninck, dans son Manuel d'Ornithologie, a aussi 
dislribuë les diflërcntes espèces du genre lKon en deux sec 



8 
liens; mais il n'admet dans la première que les bérons p- 
peinent dits et les aigrettes, tandis qu'il réunit dans la se- 
conde les bihoreaux, les butors, les crabiers et les blonos. 
Enfin, Cuvier (Règne animal, t. 1 ) tablit dans le genre 
héron six espèces distinctes, qu'il ne classse pas en seetions 
le IlAton proprement dit, la grande aigrette, la petite ai- 
grette, le bihoreau, le butor, le blougio : chacune de ces 
espèces renferme de nombreuses variétés. Les diflérentes 
espèces du genre ëron i»résentent entre elles les plus 
grandes analogies de moeurs, d'habitudes, deJ'acies; elles ne 
se,,t guère diflcrenciéesl'une et l'autre que par quelques 
délails peu importants, dans la disposition et les couleurs 
de leur plumage : aussi nous bornerons-nous à tracer ra- 
pidement ici l'histoire naturelle du béton proprement dit. 
Le Iléron vit solitaire. 11 séjourne d'lmbitude sur le bord 
des lacs et dans les plaines marécageuses que sillonnent de 
vombreux co»rs d'eau. Là, le orps immobile et équilibré 
sur sa jambe grèle et roide, posé d'un seul pied sur quel- 
que caillou anguleux, le col replié en S sur la poitrine, la 
lëte enfoncée dans ses épaules exhaussées, l'oeil immobile et 
fixé sur l'eau qui s'écoule à ses pieds, il guette, pendant des 
hetu'es entières, avec une inébranlable impassibilité, la proie 
qu'il doit frapper à mort par le rapide développement de 
ce col, replie comme nu serpent, et armé d'un bec effilé et 
quelquefois barbé comme une flèche. Ou bien encore, on 
le voit marchant solennellement, comptant chacun de ses 
pas, et fouillant la vase, chaque-fois qu'il y pose sou pied 
aux doigts longs et noueux, pour en faire sortir des anné- 
iides, qu'il transperce d'outre en oqtre. Il y a dans l'impas- 
sibilitë solitaire et mélancolique de cet oiseau, il y a dans 
tout son aspect, dans tous ses gestes, quelque chose de 
cbement faroucbe, quelque chose de froidement égoïste, 
que tous les observateurs ont remarqué. 
Le vol du béron est élevë plut6t que rapide. II s'élève en 
tournoyant dans les airs, la tëte appu)ée sur son dos, et les 
ambes étendues en arrière comme un gouvernail. Les oi- 
seaux rapaces, les éperviers et le faucons bd ïont une guerre 
à outrance; et dans la bataille, ce n'est jamais en fuyant à 
tire d'ailes qu'il tìcbe de se soustraire au davger : toute sa 
stratée consiste à dominer constamment ses antagonistes 
par sa position plus ëleve dans les plaines de l'air. Bëlon 
ptétend que lorsque l'oiseau dt proie a gagné le desus, et 
que le hbron le voit s'apprèter à fondre sur lui, il passe, 
comme dernière défense, sa t[e sous son aile, et prcsente 
son bec effile au ra isseur, qui, s'élan.cant aec une vélocité 
que rien nl Feut plus modi/ier, s'y transperce lui-mèrne. 
Les bérons perchent leurs nids, tantJt sur les sommets des 
arbres, tant6t dans les broussailles des tout,cages. Ces nids 
sont formés de bùchettes entrelacées de joues, et arnies de 
duwt et de mousse; ils y dëposeut de quatre "3 six u.uis, de 
couleur verte, bleue ou blancl1,ttre, suivant les especes. Ils 
font leur nourriture habituelle de poisson; mais le poisson 
faisant d,faut, ils se contentent de rcptiles, d'aunélides, de 
tnollusques, et spécialement de grenou':e_, de ers et de li- 
maces. Dansles temps de grande disette, ils livrent la guerre 
aux petits quadrupèdes, les musaraignes et les campagnols, 
on bien ils se repaissent de charades. 
Pourvus d'appareils Iocomoteurs qui leur permettent 
de traverser sans fatigue de grandes Arendues aériennes ; 
sobres  l'ext,ème, et pouvant supporter également de lbn- 
gues abstinences et de andes modifications de tempéra- 
ture, les hérons sont largement repandus sur la surface du 
globe : ce sont des oiseaux erratiques bien plus que des 
oiseaux de passage. BEL'F£LD'-L£FÈvnE. 
HÉRON (Fontaine de). l'/ez I:O.,,TtSC Ve Hi:no. 
HÉRON. Les annales de l'antiquitë nous font connaitre 
trois savants de ce nom, tous trois célëbres dans les matbé- 
mal;ques. 
tlERON l'ancien, le premier et le plus illustre des tt'ois, 
naquit à Alexandrie, environ 120 ans avant J.-C. Il eut pour 
malt,'e C t é s i b i u s, de barbier devenu mathématicien, con- 
temporaind'Arcbimoee. Ddvou6 au,: applicalions, au moins 

fI'ÊT, ON  
autant qu'aux théories de la science, Héron est auteur de 
douvert,.fort ingénieuses sans doute, mais qui parais- 
sent avoir ét plus curieuses qu'utiles. U connut, calcula, 
employa la puis.ance de deux grands agents de la nature, 
l'air et l'eau, .sans en pénétrer le secret. C'est le Vaucanson 
de l'antiquité : des horloges hydranliques ou c I e p s y d re , 
une machine appelée de son nom.fo n t a i n e de lt é r on, 
des automates, des machines à vent, tels sont les prodiges, 
fruits de son imagination savante, qui mervei]lërent son 
siècle, et qui lorment, avec le peu d'ouvrages qu'il a laissés, 
ses titres au souvenir de la postérité. On n'a que des extraitç 
de son beau traité de lffœecanigue et de sa Dioptriçue. 
Mais nous posaCons textuellement un fragment de ses Au- 
tomates, son traité sur les Macizines à vent, et celui sur 
les armes projectiles. Son ouvrage sur le levier nous a 
aussi été conservé dans la collection Théveneau. .. 
HEROI le Jeune, on mieux /e Second, exista versle 
:milieu du cinqume siècle après J.-C. Il enseigna les ma- 
thématiques au célbre philosophe né-platonicien Pioclu% 
. et quelques-uns veulent que ce soit là son seul titre de gloire, 
et qu'il n'ait laiss aucun écrit. Mais Letronne lui attribue 
les/ragments d'un traité sur les Mesures, insérgs dans/a 
collection des Bénédictins. 
HÉRON le Troisième, appelé aussi souvent ltdron le 
Jeune, par ceux surtout qui veulent que le second n'ait 
rien écrit, appartient au commencement du septième siècle 
de notre ère. Il est auteur de plusieurs ouvrages, l'un sur 
la Dëfense des Places, un autre sur les Machines de Guerre, 
un troisiëme sur les Termes de çornetrie, d'Eléments 
de Géométrie, et d'un traité de Géodésie, dont le titre est 
trompeter. Ces ouvrages oit n'ont pas été publiés tuus, ou 
ne l'ont été qu'en partie, ou bien il n'en a été imprimé que 
la tradnc!ion latine. Bo,s'rL. 
HÉROP|tlLE le plus grand anatomiste de i'antiquité, 
né ì ChaisCaine, vécut sous Aiexandre le Grand et sons 
les soccesseurs de ce prince. Il eut pour marre dans la mé- 
decine proprement dite Protag,,oras de Ces, et il exerça 
]ouemps à Alexandrie comme médecin et comme profes- 
seur. Après Erasistrate, il fut le premier qui eut occasion 
d°étudier l'anatomie sur le corps humain, et il s'y livra 
avec tant de zèle, qu'il fit beaucoup avancer cette science. 
II découvrit le premier les nerfs proprement dits, et donna 
à quelques parties du corps de nouveau noms, qui sont 
restés presque tous. C'est lui, par exemple, qui imposa les 
noms de rtine et d'arachnoide à deux tuniques dePoeii, etc. 
Ses doctrines ont été transmises à la postérité par des 
éerivains postCeurs, notamment par Galien. 11 avait com- 
po un manuel d'anatomie qui ser'it de guide dans les 
siècles suivants ; mais, à l'exception d'un commentaire sur 
les ahorismes d'Hippocrate, qui n'a point encore ëtí im- 
primé, il ne nous reste de ses nombreux ouvrages que 
des fragments. 11 est, d'ailleurs, encore remarquable en ce 
que le premier il formula une théorie du pouls; eu ce 
qu'il donnait une grande valenrà l'expérience, luttant ainsi 
contre le dogmatisme de son temps, biais on ne peut nul- 
lement le meure à la tète de l'école e m p i r i q u e en méde- 
cine, qui ne fut fondée que plus tard par quelques-uns de 
ses d!ciples. 
lIER.OS. Comme un grand nombre de mots de notre 
langue, celui-ci prend des acceptions diverses. Il en est une 
cependant qu'il conserve le plus habituellement, et à laquella 
s'attache une idée de grandeur. Dans ce sens, héros ne s'ap- 
plique qu'aux grands gue'riers, aux bommes qui ont accompli 
de grandes choses mai« toujours dans l'ordre physique. 
Ainsi, l'antiquité grecque a célébré comme un héros Hot- 
cule, qui accomplit ses douze travaux, et Tbésée, qui 
purgea son pas des brigands qui l'infestaient. Homère a- 
pelle des héros A c h i I I e et A j a x parm i les Grec.s, H e c for 
parmi les Trayons : c'étaient les plus forts et les plus vmJ- 
lants. Hésiode, dans son poëme des Œuvres et des Jours, 
nous apprend qu'anx -.tges d'or et d'argent uccéda i'Age 
d'airain et qu'ensuite, la terre lut I,abitée pr une autre 



HEROS -- 
race plus juste, plus çMll,'mte, celle des hdros, demi- 
dieux qui ont .précédé dans la ¢arriëre de la vie la race 
actuelle, cinquième ge du monde, siècle de let. De ces 
héros, les uns prirent sous les murs de Thèbes, les autres 
sur cenx de Truie; mais tous ne descendirent pas citez les morts, 
dit Hésiode : quelques-uns furent transportes, au delà de l'O- 
céan, dans des lies où ils jouissaient d'un bonheur sans mil- 
lange. D'autres lutent meme admis aux honneurs de l'O- 
l)mpe, parmi les immortels. L'gge héroique s'étend depuis 
Inachus j nsqu'au retour des H é r a c I i d e s, c'est-à-di re de 
l'an la00 à l'an 119o avant J.-C. 
Dans la suite, le héros fut plus que fort et courageux, il 
fut intelligent : il se personnifie dans Épaminondas et 
A 1 e x a n d r e. Alexandre est le ty pe du héros chez les Grecs : 
jeune, vaillant, conrageux, plein d'ambition, soumettant 
,les provinces inconnues, detruisant une des plus puissantes 
et des plus vieilles dynasties du moude. Les Romains pour- 
raient compter grand nombre de héros; mais si nous conser- 
vons à ce mot l'acception qui lui convient désormais, nous 
dirons que leur héros est Cé s a r. Céar, dans des circuns- 
tances beaucoup moins favorables qu'Alexandre, ayant des 
obstacles plus grands à surmonter, fit d'aussi grandes choses 
et montra une plus grande intelligence. Depuis CI,arlemagne 
jusqu'à nos jours, les temps modernes ont fonrni grand 
nombre de héros, méritant justement ce titre, mais nous ne 
les citerons pas. D'après leur vie, on jugera les hommes. 
Celui qui dans les temps modernes a réalisé le vrai type 
«lu I,éros, l'homme qui a réuni la pins haute expression de 
l'intelligence humaine à la ioroe de volonté la plus éner- 
gique, c'est l a p olé o n. ;oussommes encore trop prës de ce 
géant pont le saisir dans son ensemble et le juger comme il 
le mérite. 
Le mot hdros s'applique encore à une ame noble et géné- 
reuse, souffrant sans murmurer, et dévorant ses secrëtes 
duleurs, pour ne point démentir son caractère. L'l,omme 
vertueux qui supporte les angoisses de la misère plut0t que 
de renoncer à ses convictions, que rien ne peut abattre, 
qui sait dompter la mauvaise fortune par sa grandeur d'ame 
inébranlable, celui-là est un héros, méritant bien mieux ce 
titrcque celui qui va promenant son épée victorieuse dans 
quelque partie de la terre. C'est assez géndralement dans ce 
sens de résistance morale du héros que se prend le mot 
roisrae. 
L'héroïsme est bien aussi une qualité de l'àme, supposant 
toujours un fait éclatant, mémorable, appelé trait d'héroïsme; 
[nais c'et sqrtout l'action de l'homme accomplissant un fait 
moral par lequel il devient héros. II y a héroisme à résister 
aux offres brillantes et séductrices du pouvoir, lorsqu'on 
sonffre, et cette résistance constitue le béms moral. Dans 
les œuvres thtrales et littéraires, on appelle hdros le sujet 
principal de l'action, et hdroine la femme qui remplit le 
premier r61e dans une pièce, ou une œuvre liftCaire. 
HEROSTRATE. Voyez EaOSTnAT. 
HERPES. Voyez DATn. 
HERPËTOLOGIE. Voyez 
HERRENHAUSEN, château de plaisance du fui de 
Hanovre, situé à environ deux kilomètres de la capitale, et 
où on arrive parune avenue magnifique, était autrelois une 
propriété particulière de la famille de Walmoden. Le parc 
 la française qui en dépend renferme un des plus beaux 
jets d'eau qu'on puisse voir en Europe. La gerbe qui s'en 
échappe n'a pas moins de trente-lrois centimètres de dia- 
mètre, et s'éléve jusqu'à quarante mètres. 
HERRERA ( Ersvo ou H¢a,'.'o I) ), poêle espa- 
gnol, né à Sévil'.e, au commencement du seiziëme siècle, ne 
se voua que tard à l'ëtat ecclésiastique et mourut vers 1598. 
Formé par l'étude des Grecs, des Romains et des Italiens, il 
possédait une vaste érudition. Comme poëte, il eut uni 
telle réputation parmi ses contemporains, qu'ils lui décer- 
nèrent le surnom de divin, à une (.poque où h poésie brillait 
d'un grand éclat en Espegne. Plusieurs de ses poëmes 
raissent avoir été perdus, et parmi ceux qui existeat il se 

HERRERA 59 
trouve beaucoup de potsies trotiques, qui charment pat 
l'expression de sentimeuts tendres et délicats; tandis qu'il 
règne souvent dans ses odes un enthousiasme sublime. Ses 
Obras en verso ont été publiées par Pacheco (Stville, t 
et plus tard sous le titre de Versos (1619) ; puis rimptimées 
dans la Coleccion deRamon Fernandez (1786 ; nuv. édit., 
1808. On a aussi de lui, en prose, une Relacion de la 
Guerra de Chippre (1572), et une Vida y Muertede To- 
mts Moro (I 592). 
llERRERA. (Asxo,m), l'un des bistoriens espagnols 
les plus celëbres, né à Cuellar, en 15-9, s'appelait rée.le- 
ment Tordesillas, comme son père; mais il prit le nom de 
de sa mëre. ll alla en ltalie dans sa jeunesse, y gagaa les 
bonnes grâces de Vespasiano Gonzaga, frère du duc de 
lIantuue, revint avec lui en Espagne Iorsqu'il fut nommé 
vice-roi de avarre et de Valence, et obtint dans la suite 
de Philippe I1 la charge de premier historiographe des 
deux ludes et de Castille. Il mourut à Madtid, le 29 mars 
1625, peu de temps après avoir étt! élevé aux fonctions de 
secrétaire d'Êtat. Son meilleur ouvrage est son tIistorta 
9eneral de lus hechos de lus Castellanos en las islas y 
tierra firme del Mat Oceano, 1492-155 (4 vol., Madrid, 
1601-1615 avec figures), publiée ensuite de nouveau avec 
les continuatious de Gonalès de Barcia ( 4 volumes, 1728- 
1730 ) ; sa Descripcion de las lndas occidentales ( 1601 
et 1615) en est comme l'introduction. Il iaut mentionner 
aussi son Historia del Munao, ed el Reynado del rey 
D. Philippe II, 155- 1598 (3 volumes, 1601-16 t 2); ses Com- 
tentarios de lus hechos de lus Espagnoles, Francescos y 
Venecianos en ltalia, 1281-1559 (1fOrt), et son Historia 
de Portugal y conquista de las islas de lus Açores, 
1582 y 1583 (1591, tf voltmaes). 
HERRERA (Fn-,'cwsco), dit el lïejo, c'est-à-dire le 
Vieux, l'un des plus grands peintres espagnols de l'Acule 
de Séville, naquit en cette ville, vers 1576. II est le pre- 
mier qui renonça à cette timidité de pinceau que l'on re- 
marque dans les œuvres des anciens peintres andaloux; il 
dessinait avec feu et vigueur, et peut par conséquent gtre 
considéré comme le fondateur d'une nouvelle école plus 
nationale. Son Jugement dernier, tableau qu'il peignit 
pour l'église de Saint-Bernard de Séville, est un cbef-d'oeu- 
vre de dessin et de coloris; on n'estime pas moins sa Sainte- 
Famille et sa Venue du Saiat-Esprit, dans l'église de 
Sainte-lnès, de la mème ville. La coupole de l'eglise de 
Saint-Bonaventure témoigne de son habileté dans la pein. 
ture à fresque. Il travailla aussi le bronze ; ce qui peut-Atre 
donna lieu à l'accusation élevée contre lui de s'ètre mis en 
rapport avecde faux monnayeurs..II avait un caractère dé- 
testable, au point que personne ne pouvait vivre avec lui. 
Après avoir, en t647, terraiué ses tableaux pour le palais 
archiépiscopal de Séville, il se rendit à Madrid, où il mou- 
rut, en 1656. Ses tableaux de chevalet, parmi lesquels se 
trouvent aussi quelques sujets de la vie ordinaire, se vendent 
à des prix très-élevés, ainsi que ses dessins à la plume. Le 
musée du Louvre contient quelques-uns de ses meilleurs 
ouvrages, par exempte Les lsradlites dans le ddsert et re: 
cueillant des cailles, tableau d'une grande finesse de co- 
loris, mais dans la composition duquel il règne un peu de 
coulusion. Il se mèla aussi de sculpture et d'architecture : 
la façade d'un couvent de Séville, notamment, et de lui. 
Le plus jeune de ses fils, Francesco HuaoEA, surnommé 
el Mo:o, c'est-à-dire le Jeune, peintre de geure en fres- 
que et architecte, né à Séville, en 1629, fut l'Cève de son 
père ; maisne pouvant pas supporter plus longtemps son ai- 
freux caractère, il se rendit à Ruine, où il se distingua telle- 
ment par ses tableaux représenlant des poissons, qu'on le 
surnommai/Spagnuolodeglipesci. Ala mort de son père, il 
revint à Séville, et travailla alors pour les églises. Lors de 
la fondation de l'Académie de Séville, en 1660, il en ht 
vice-directeur; toutefois, il se démit de cette place, et 
alla à Madrid, où il orna la coupole de la chapelle de Saint- 
Philippe de fres.ques qui plurent tant au roi Philippe IV, 



4:0 ItERRERA -- 
qu'il le chargea de la décoration de la chapelle de l%tre- 
Dame-d'Atocha ; et comme il toucha de main dt marre le 
suiet qu'il avait ì traiter, l'Assomption de la l'ierge, le 
roi le nomma peintre de sa cour. Plus tard, Philippe IV lui 
donna l'intendance des bttiments de la couronne ; da ns ces 
fonctions, il se lit détester par son excessif orgueil, et mou- 
rut l'an 1685. Ses tableaux de fleurs ne sont pas moins 
estimés que ses tableaux de poissons. On trouve de ses 
toiles h Seville, à Madrid et/ l'Escurial ; on dit qu'il grava 
aussi à l'eau Iorte. 
HE«lnA, surnommé el liubio, c'est-à-dire le P, ou9 e, 
frère du précédent, également peintre de genre, mourut 
très-jeune. 
Parmi les artistes du mme nom, il faut encore citer .tl- 
fonso de HnEnA, né à Ségovie, en 1579, auteur de six ta- 
bleaux exécutés pour l'église de Villa-Castin, qui ont été 
ggtés en 173f, par la main d'un restaurateur inilabiie ; et 
Sebastiano HEnnEn^, surnOmmé Barnuevo, nWì Mad;-id, 
en 1619, mort inspecteur de i'Escurial, en 1671, élève de 
son père, Antonio HErm, également distingué comme 
statuaire, comme architecte et comme peintre, et imitateur 
heureux d'Alfonso Cano. 
IlERREOS (Don IIs.rEL BRETON nE LUS). Voyez 
BIE'i'O nE LOS HERIW_ROS. 
|IERRIES (Jons-CusntEs), ministre anglais, né en 
1778, mort en 18:,, fils du colonel tterries, desceudait d'une 
anç:ennc famille écossaise, dont une branche s'était établie 
à Londres et y avait Iond6 line Io.'te maison de banque. 
.xprès asoir terrainA ses Cudes à Leipzig, il fut nommé, en 
807, secrétaire privé de lord Perceval, alors chancelier de 
|'échiquier, et plus tard premier ministre. Son patron ayant 
et tué en 1812, il obtint la place lucrative de commissaire 
de la liste civile, et il la remplit pendant quelques années. 
Sa vie publique ne cotnmence qu'en 1823, oit il fut nomm 
secrétaire de la trésorerie et envoyé al, parlement par le 
bourg de ilarwich. Sans Atre doué de talents supérieurs, 
sans posséder les qualités de l'homme d'Ëtat, Herries se 
mourra un homme d'affaires habile. En politique, il s'atta- 
cha à la fraction du parti tory qui suivait Wellinon et 
Peel plut6t qu'à la Iraction libérale qui reconnaissait Can- 
ning pour cheL L'étounement fut donc genéral Iorsqn'on vit 
lord Goderich, l'ami et le successeur de Canning, lui con- 
fier le peste de chancelier de l'échiquier. Le désaccord que 
l'on prévoyait ne tarda pas à se manifester entre Herries 
et ses collègues, plus libéraux. Son opposition aux vues de 
Huskisson, qui réclamait une modification du s)steme 
protecteur, lit éclater un conflit et amena la dissolulion du 
minislëre. Heurtes entra dans le cabinet form6 par 
lington, où il n'oblint que le poste subordonn de di 
recteur de la monnaie. En 1830 il fut appelé ì la prdsi- 
dense du Bureau d, commerce ; mais dès le mois de novem- 
bre il dut se retirer avec ses collègues devant un ministère 
libéral. Dès lors il combattit au premier rang parmi les conser. 
valeurs, jusqu'en 183f, ; alors un nul,veau cabinet Iory lui 
confia le portefeuille de secrétaire d'Ëtat de la guerre. Dës 
l'année suivante, les libéraux revinrent aux affaires, et Her- 
ries finit par perdre mgme son siCe au parlement, en 1861. 
Ii ne prit donc aucune part personnelle à la lutte contre 
le libre échange, que la défection inattendue de Peel ter- 
mina en faveur des libres échanstes. L'influence du mar- 
quis d'Exerce l'aant fait réélire député, en 18f,7, par le 
bourg de Stamford, sa Ioogue expéfience lui vaiut dans le 
parti protectioniste, assez pauvre en capacités, un rang émi- 
rient, sinon le premier, qu'il dut céder à D' I s r a ë I i, qui lui 
est infiniment supérieur comme orateur. Lorsque ce parti 
reprit, en 1852, les rgnes du gouvernement, il rentra dans 
"le ministëre comme président dl, Bureau des Indes. Ce fut, 
comme on le sait, pour bien peu de temps. 
IIERRHUT bol,rg d'environ 1,100 ",mes, dans la 
Haute-Lusace saxonne, est le principal établissement des 
[rères toraves ou frères lohmes, dits aussi Hcrrnh«tes. 
C,e bourg tire son nom du Hutsberg, montagne sur le ver- 

HERSCHEL 
saut méridional de laquelle il est construit ; et il fut lundi 
par les frères moraves, en 17, sur ies dépendances de la 
terre de Berthelsdorf, alors propriété du comte de Zinzen- 
dorf. Les maisons, surtout l'ëtablissement des h'ëres et des 
soeurs moraves, sont remarquables par la régularité de leur 
construction, oit la simplicité n'exclut pas le bon go0t. Les 
membres de la communauté se distinguent par leur vie la- 
l»orieuse et exemplaire, par leur mépris pour le luxe, et par 
la pureté de leurs mœurs, qui leur a mérité l'estime gé- 
raie et les a fait accueillir avec empressement partout 
ils ont voulu fonder de nouvelles colonies. Les beaux et 
solides ouvrages en tous genres qui sortent des ateliers de 
leurs artisans, fabricants et artistes, notamment les tissus, 
les objets en laque, en cuir, les papiers marbrés et glaces, les 
bougies, trouvent partout d'avantageux debouci,és. 
IIERPHUTES ou HERNUTES. l'o9ez itEniL'tiOl'. 
HERSCHEL (Fnéntntc-GuAc), l'une des gloires 
de l'astronomie, naquit à Hanovre, le 15 novembre 1738. 
Son père, qui était musicien, l'avait destinë la mgme pro- 
fession ; aussi entra-t-il dans le corps de musique d'un régi- 
ment dès l'tige de quatorze ans. E 1757, s'6tant rendu  Lon- 
dres pot, r se perfectionner dans son art, le comte de Dat- 
linon l,i fit obtenir la place de maitre de musique d'un 
corps qu'il avait organisé dans le comté de Durbam. Plus 
tard, Herscilel s'établit conme maltre de musique à Leeds, 
et il lut ensuite nommé organiste à Halifax, emploi qu'il 
Changea en 1766 contre celui de directeur de musique a 
Ball,. Depuis le commencement de son séjour en Angleterrê, 
il aait utilis tous ses instants de loisir pour étudier les 
nlathématiques. La lecture desouvrages de Fergussonava;.t 
décidé de son goOt pour l'astronomie. N'ayant pas assez d'af. 
gent pour acheter tin télescope, il lui vint à l'idée d'en con,- 
truite un. Il réussit si bien dans ce travail, qu'en 1774il 
put, à I"aidi d'un réflecteur de I mètre 66 centimètres qh.'l 
avait fabriqué lui-m(me, découvrir l'an n eau d e S a t t, rue 
et les satellites de J u pi t e r. Depuis, il conslruisit des té ! 
copes d'une grandelr encore inouïï; et à l'aide de tels 
inlruments il lui devint lacile de faire déconverte sur de- 
couverte. En 1780 il donna le calcul de la hauteur de 
montagnes de la lune. Ce fut le 13 mars 1781 qu'il décou- 
vrit la planète appelée généralement aujourd'hui Uratus, 
mais que beaucoup d'astronomes persistent à désignei sons 
celui qui eut la gloire de la découvrir. Herschel l'avait 
nommee, en l'honneur du roi Georges Iii, Georgiura $idus 
Ce prince lui en témoigna sa gratitude en le mettant daa 
une position telle qu'il put se livrer exclusivement à la 
culture des sciences. Il se retira alors / SIough, près de 
Windsor, oit il s'occupa surtout de l'observation des 
buleuses et des constellations; il démontra qe 
ph,siel,rs de ces constellations se composent de 50,00o 
étoiles. En 1787 il découvrit deux satellites d'Uranus, d 
quatre autres encore en 1790 et 179f,. Un télescope de 13 
mètres 33 de longueur et de 1 m. 50 de diamtri, qu'il 
avait construit en 1755, ne contribua pas peu à lui faire 
faire ces dëcouvertes, et lui servir en outre à découvrir 
deux des satellites de S a t u r n e, les plus rapprochés de cette 
planète. Herschel acquit autant de ceiébrité par la perles- 
tion qu'il apporta dans la construction des instruments 
d'optique (travaux dans lesquels il fut grandement aide 
par son frère, habile mécanicien), que par ses découvertes 
astronumiques. Avec son gigantesque télescope, il troo;a 
le temps que Saturne met ì effectuer sa révolution, que 
Laplace avait déjà déduit de la loi de gravité au moyen de 
l'analyse mathématique, et découvrit que cette planète, si 
di{Iérente des autres, se ment sur un axe perpendiculaire 
son orbite. Il conclut de ses observations que la lumiére 
solaire ne provient pas du solei I mgme, mais des 
fortement pbospborescentes qui se forment dans l'atmosphère 
solaire. Parmi les plus importantes découvertes dont on 
lui est encore redevable, il faut aussi citer celle des é t o i le s 
doubles ou système d'ëtoiles fixes, dont l'observation l'oc- 
cupa pendant tin grand nombre d'années/ partir de 17"S, 



HERSCHEL 
avant qu'il lui ft possible d'avancer qu'il existe des toile 
fixes se mouvant autour l'une de l'autre dans des orbites ré- 
guliers. 
Herschel mourut ì Slough, le 25 août 1822, et fut enterré 
à Upton, dans le Berksbire. Les Transactions philosophi- 
ques de la Société royale de Londres contiennent l'exposé 
de la plupart de ses travaux scientifiques. Il en est cependant 
restë beaucoup d'inédits. 
La sœur de Herschel, Caroline HSCnEL, née ì Hanovre, 
le 1{; mars 1750, aida beaucoup ce grand astronome dans 
ses observations et ses calculs. Elle découvrit elle-mme 
plusieurs comètes, et, ind«.pendamment de diverses disserta- 
tions imprimées dans les Transactions philosophiques, elle 
publia, en 1798, un catalogue d'étoiles. A la mort de son Irère, 
elle revint ì Hanovre, off elle est morte, I'e 9 janvier 1898, à 
Page de quatre.vin-dix-huit ans. 
HERSCHEL (Sir JOn-Fun,cK-W;LLt«, bafouer), fils 
unique du précédent, naquit en 1792, dans le domaine de 
son père, à SIough, près de Windsor, et fit ses Cudes à i'u- 
niversité de Cambridge. Ses premières recherches mathé- 
matiques sont consignées dans sa refonte du Calcul df- 
frentiel de Lacroix, entreprise avec Peacock. Soit seul, soit 
en société avec James South, il consacra, à partir de 1816, 
«me grande partie de son temps à l'observation des  t o i I e s 
d o u b I e s. Comme premier résultat, il put, en 1823, pré- 
enter à la Société royale de Londresun catalogue de trois 
cent quatre-vins nouvelles étoiles doubles, dans ses Obser- 
vations of the apparent distances and positions of three 
hundred and eight ç double and triple stars (Londres, 
 825 , contenant le résuméde dix miileobservation«. En 1827 
il donna un second catalogue de deux cent quatre-vingt- 
quinze, et en 1828 un troisième de trois cent x'ingt-quatre 
etoiles de ce genre. En 1830 il publia d'importantes ob- 
servations sur douze cent trente-six étoiles, faites avec un 
réflecteur de 6 mètres 66 centimètre.s. Il donna la mme 
année, dans le tome v des Transactions de la Société As- 
tronomique, un travail contenant l'observation exactede trois 
cent soixante-quatre étoiles, et tous les résultats sensibles du 
mouvement des étoiles doubles. En mme temps il s'occupait 
de rechercl,es de physique, dont il consigna les lruits soit dans 
,les journaux scientillques, soit dans des ouvrages spéciaux ; 
ì cet ordre appartiennent : Treate on Sound, dans l'En- 
¢gclp«rdia metropolitana ( 1830 ) ; On the Theorç of" 
Light; A pi'eliminar 9 Discourse on the Study of natu- 
rai Philosophy, faisant partie de la Cyclopxdia de Lard- 
ner, et A Treatise on Astronomç, dans le mème recueil. 
La plus grande entreprise de Herschel est son séjour de 
quatre ans au cap de Bonne-'Espérance, du mois de fe fier 
1834 au mois de mai 1838, off il examina de la manière la 
l,lus exacte et dans les circonstances les plus favorables 
tout l'hémisphère céleste méridional. Du cap de Bonne- 
Espérance, il suggéra, et non sans succès, l'idée de luire, à 
des jours déterminés et simultanément en divers lieux de 
la terre, des observations météoroioques. Il supports seul 
tous les frais de cette expédition scientifique, et relusa l'in- 
denmité que le gouvernement lui offrit à cette occasion. Le 
• if intérêt que le monde savant prit ì cette savante entre- 
prise se manifesta au retour de Herscbel en Erope par les 
honneurs dont il fut l'objet. La reine Victoria, à l'époque de 
soncouronnement en 1838, le créa bafouer. 
Sir .;abri Herschcl a consigné les rësultats de son expédi- 
tion au Cap dans l'ouvrage intitulé lesults ofastronomical 
Observations ruade al the cape of Good ttope (Londres 
18t7). On a aussi de lui, en société avec divers autres sa- 
vants, un Manuelofscientific Eruluir  ì l'usage des officiers 
de marine ( Londres, 189 ) ; et sous le titre de Outlines of 
Astronoml (18t9) il a réimprimé avec d'importante addi- 
tions le traité qu'il avait dbj/ publié dix-sept ans aupara- 
vant. En 1850 il a été appelé aux importantes tonctions 
de directeur de la Monnaie de Londres. 
HERSE (Agriculture), du latin herpe.z (mme signi- 
fication), ou d'hericius, hérisson. La herse est un cadre 

-- HERSENT 6t 
rectangulaire, disposé en forme de treillis, et orné d'un cÇté 
de plusieurs rangs de dents très-fortes. On attelle un cheval 
à la herse, et on le fait passer sur les terres labourCs ou 
nouvellement ensemencées : les dents de cet instrmnent 
labour brisent alors les maltes de terre que la charrue a sou- 
levées, ou recouvrent et enfosissent les graines que l'on 
vient de semer ; il est certains terrains et nombre de contríes 
où ce dernier office est rempli par la charrue. Le verbe 
herser et le mot hersage représentent l'action de passer la 
herse dans un champ. 
Le mot herse se dit encore de ces chandeliers de forme 
triangulaire sur les pointes desquels on fait brùler plusieurs 
vierges. 
llERSE ( Fortification ), sorte d'arrière-porte, ou de 
double porte qui, au lieu d'ètre à gonds, jouait en glissant 
dans des rainures verticales, pratlquëes dans le solide dh,ne 
voùte. Cet usage est finnémorial en Grève et en Orient. 
Celles des Grecs et des Bomains s'appelaient cataractes. 
La forme des herses orientales, empruntCs par nos pères, 
avait produit la dénomination de sarrasines ; le moyen Sge 
les a aussi appelées harpes. Il y a eu des herses en bois 
plein ; mais on les a surtout préférées en grilles, ou bar- 
reaux, soit en bois lerré, soit en fer. A travers leurs ouver- 
tures, les assiégés repoussaient l'insulte, tandis que, pr 
uu judas percé dans la centre de la voùte, un énorme pilon, 
arme de iame de fer, travaiilait les assiëgeants, au milieu 
d'un déluge de pierres et de tions. Les berses dont les bar- 
res, au lieu d'ètre assemblees par des entre-taSses, tare- 
halent chacune sans faire un tout, s'appelaient orgues de 
mort. Depuis le système de la fortification récenle, toute 
espèce de herse a disparu. G l B,n,,. 
HERSENT (Loçis), peintre d'histoire et membre de 
l'Académie des Beaux-Arts, est né à Pa,-is, le t0 mars 1777. 
II entra fort jeune dans l'atelier de J.-B. Begnault, et 
obtint en 1797 le second prix de peinture. Les oel;vres de 
M. Herscnt n'ont pas été nombreuses; parmi celles qui ont 
commencé à rendre son nom illustre, il faut cite," : Achille 
livrant Brisais aux herauts d'Agamem,on ( t804 ); Ata[a 
s'empoisonnant dans les bras de Chactas (10) ; Feue- 
lori rasenant ne vache Iz des pagsans et le Passage du 
pont de Lan,'lshut (1St0) : ce dernier tableau est mainte- 
riant au musée de Versailles. M. Hersent exposa encore 
Las Gaa soigne par des sauva¢es ( 18t4 ), la Mort de 
chat, Daphnis et Chlo, et Louis XVI dtribuant de 
secours aux pauvres ( 1817 ). Ainsi, l'artiste passait de la 
peinture historique à la peinture de genre, et se faisait une 
réputation. M. Delessert possède le Louis XVI dstribuant 
des secours ; c'est la pensée première du tableau de plus 
grande dimension que l'artiste peignit plus tard pour les ga- 
leries de Versaiiles. L'Abdication de Guitare Waa, qui 
tut achetée par le duc d'Orléans, produisit une sensation 
profonde au salon de 1819. Puthet Bouc ( 122); les 
ligieux d ont Saint-Gothard (182 ); le Portrait de 
l'vue de Beauvais ( 1827 ), et ceux du roi, de la reine, 
du duc de Montpensier ( 1831 ), ont été les derniers ouvrages 
sérieux de M. Hersent. L'un de ses meilleurs portraits est 
à notre gré celui de M u« D. Guy, qui a été plusieurs fois 
gravé. La peinture de M. Hersent est soignée, finie, mais 
sans largeur aucune et sans accent. Son dessin est d'une 
élëgance un peu lade ; sa forme est d'une correction vul- 
gaire; son coloris est terne et froid. Les portes de l'Institut 
se sont ouvertes pour lui en 1522. La plupart de ses ou- 
vrages ont été gravés par des artistes habiles, et on les trouve 
presque tous reproduits au trait dans les Annale du Musee 
de Landau. 
M. Hersent a épons M tIc Louise Mauduit, fille du geo- 
mètre de ce nom, qui elle-mme a fait quelques tableaux dans 
le genre anecdotique. On se rappell{ avoir vu de sa main 
La Mèreabandonne (I 8fit) ; ltenriette de ranoe 11819) ; 
Sullt et Marie de Médicis { 1822) ; et enfin Lotus .YIV be- 
hissant son arrière-petit-fils i.182- ), scène bnale, qu'on 
a jugée digne des honneurs_du 



HERSIAU ou ERSEAU. Voyez EltSE (]tlarine). 
HERSTALL. Voyez, HÉRIST,L. 
HERTFORD ou HERTS, l'un des comtés du centre 
de l'Angleterre, entre les comtés de Cambridge, d'Esex, de 
Iliddlesex, de Buckingham et de Bedford, n'est Iraversé 
que dans sa partie septentrionale par une suile de monta- 
gues atteignant une altitude de 250 à 300 mètres, et présente 
partout ailleurs une surface à peu près plane, interrompue 
seulement par les vallées de la Le.a, du Colne, du Maran, 
du lib, du New-River, du Stort et du Gade, et offrant al- 
ternativement des torts, des champs de blé et des prairies, 
ainsi qu'une foule de maisons de campagne, de fermes et 
de villages, qui lui donnent l'aspect le plus riche et le plus 
agréable. Sur une superficie de 20 myriamètres cureC, dont 
19 sont cultivés, ce comté contient une population de 
174,000 habitants dont la culture du sol constitue avec 
l'élève du betail, la principale industrie. 
HEaXrOXD OU HAOaV sur la Leu, son chef-lieu, est 
une petite ville de 6,000 hab. ; un monument y a été elevé 
à la mémoire de Baron de Verulam, dans l'église de Saint- 
blicbel. Son chàtean, maintenant en ruines, servit de prison 
au roi de France Jean et au roi d'Ëcosse Daid Il. 
A peu de dt»tance de Hertford est situé le college d'Hai- 
leylmr/, où la Compagnie des Indes oricntales lait elever 
les jeunes gens qu'elle destine à lui servir un jour d'em- 
ployés dans ses possessions des Indes, après qu'ils y ont 
uivi, pendant deux années, des cours spc.'iaux consacres 
à l'enseignement des langues orienales et de l'organisation 
politique et judiciaire de ces contrées, ains que de leur 
histoire, et comprenant en mme temps quelques notion_ 
générales de mathématiques et d'histoire naturelle. La cons- 
truction de cet cdifice, qui date de ! a0, coûts à la Com- 
pagnie I00,000 liv. st. Les professeurs y sont au nombre 
<le douze, et on y compte d'ordinaire de quatre-vin-dix 
a cent élëves, tlont la moitic sont des Ecossais. 
Le comt de Hertford comprend encore la petite ville de 
Saint-Albans sur Ver, appelée jadis Verulamum. On y voit 
les ruines de la muraille dont les Romains avaient entouré 
cette ville, ainsi qu'une abbaye fondee en 79, dans la cha- 
pelle de laquelle se trouve le tombeau de Ff. Baron. Il 
s'y ratlache aussi d'intèressants souvenirs historiques des 
guerres de la Rose rouge et de la Rose blanche. 
HERTHA. Voyez NTCS. 
- HERTOGEXBOSCII. Voyez Bos-Lr.-Dc. 
HE[tULES, peuple geruanique, remarquable au moyen 
Sge par son agilite et son impetuosité h la guerre, par son 
naturel indompté et son long attachement au paganisme. 
Il est probable que les Hérules habitèrent d'abord les bords 
de la mer Baltique, sous le nom de Suardos; mais plus 
tard on les voit paraitre dans des contrees trës-éloiguées. 
On les trouve sur les rivages de la mer oire, prenant 
part, dans le troisième siëcle, aux expéditions maritimes 
des G o t h s; puis ils sont soumis, dans le quatrième, par le 
roi goth Ermanrich; plus tard ils suivent A t tila, et après 
la mort de ce couquétant ils se joignent aux Gépides 
pour détruire la domination des H u ris. On rencontre aussi 
des Hérules parmi les peuples qui, à la fin du troisième 
siècle, battirent l'empereur blaximien dans les Gaules. Au 
commencement du cinquième, ils sont mentionnés comme 
les compagnons des pirates saxons qui ravagërent à cette 
époque les cbtes de la Gaule; et dans le courant du même 
siècle, sept navires montés par 00 Hérules parurent sur 
les rivages de la Galice et de la Cantabrie. On trouve aussi 
des Hérules parmi les bordes qui. sous la conduite d'O- 
doacre, renversèrent l'empire d'Occident. Les lierules nous 
sont signalC,/ la fin du cinquième siècIe, comme dominant 
sur le moyen Danube et établis sur les bords de la Theiss su- 
périeure. Dans leur orgueil, ils contraignirent, dit-on, leur 
roi Bodulf à attaquer les Lombards, qui leur étaient soumis ; 
mais ils furent vaincus, et une partie d'entre eux fut établie 
par l'empereur Anastase, en 512, sur la rive méridionale 
do Danube, tandis que l'antre prit la résolution hasardeuse 

HERSIAU  HEIVAGAULT 
de gagner la $candinavie. Un grand nombre de ce't]x qui 
s'étaient établis dans l'Epire se joignirent aux Gépides, 
les autres rendirent à Justinien d'excellents services dans 
ses guerres contre les Perses, les Vandaies et les Ostro- 
goths. Le nom des Hérules disputait de l'histoire aprës la 
soumission de l'ltalie par Narsès. 
HERVAGAULT (Je--M). Le 2S pluvibse an x, 
au temps du Consulat, comparut devant le tribuna| correc- 
tionnel de Vitry-sur-Marne un jeune homme, gé tout au 
plus de dix-neuf ans. Il avait les traits agréables, le 
blanc, une chevelure blonde qui bouclait naturellement, 
un {,,rand air de candeur et de dignité : il était vètu avec 
beaucoup de recherche et s'exprimait d'un ton plein d'ai- 
sance. La salle del'audience s'était remplie, de bonne heure, 
d'une foule inacceutumée, au milieu de laquelle on pouvait 
remarquer des ecclésiastiques, des femmes elégantes, des 
citoyens riches, tous connus, dans le département de la 
blarne ou les alCarlements voisins, pour leur attachement. 
mal déisé,  l'ordre de choses que la révolution avait dé- 
truit. L'intérèt le plus vif paraissait s'attacher à l'accusé, 
qui, à peine assis, parcourut lentement des yeux cet au. 
ditoire frémissant de curiosité ou de sympatlUe, et salna 
d'un sourire empreint d'une noble familiarité tous ceux qui 
lui envoyaient des regards respectueux et amis. Cependant, 
ce jeune homme était I sous le poids d'nn delit qui n'a pas 
coutume de provoqner un bien vif intérët. L'accusation, 
qui avait eu le bon esprit de ne pas le prendre au mot, lui 
reprochait tout simplement • d'avoir abusé de la crédulité 
de plusieurs personnes à l'aide «le faux noms et de fausses 
qualités, et de leur avoir escroqué partie de leur fortune, • 
C'Clent ses propres termes; mais ils ne provoquèrent dans la 
plupart des assistants qu'un sentiment d'incrédulité mo- 
queuse ou dïndignafion mal contenne. Et, chose remarqua- 
ble, ceux dont le commissaire tin gouvernement se faisait 
le défenseur officieux (il n'y avait pas de plaignant)étaient 
précisément les plus incrédules on les plus indignes. C'esl 
qu'ils étaient tous profondément convaincus que celui qu'on 
allait juger comme un ignoble escroc n'était autre que le 
légitime héritier de la couronne de France, le jeune et in- 
fortuné Lo u i s XV I I, que quelques serviteurs fidèlesavaienl 
su enlever dit Temple, caché dans une voiture de linge, 
après y avoir introduit, de la mbme manière, l'enfant ma- 
lade qui mourut bientbt après, et fut enterré sous le nom 
du dauphin. 
Cette conviction avait jeté de si profondes racines dans 
leur esprit, qu'elle ne put 6tre ébranlée par les charges qu'une 
longue et minutiense instruction avait accumulées conh'e 
i'accusé. Elle établissait d'abord qu'il s'appelait tout sim- 
plemeut Jean-Marie Hav«ccgT, et n'était que le fils 
d'un pauvre tailleur de Saint-Lb ; puis elle lui reprochail 
d'avoir dès l'àge de douze ans déserté la maison patex- 
nelle, parcouru successivement les départements de la Man. 
che, de l'Orne, du Calvados, de Seine-et-Marne, de la [lar- 
ne, tant6t sous un nom, tantbt sons un autre, et d'avoir 
partout, à l'aide de lansses qualités, extorqué des sommes 
considérables ; de s'btre fait arrèter comme vagabond, une 
première fois à Hottot, une seconde fois à Cherbourg; de 
n'avoir échappé dès lors à une juste punition qu' la faveur 
de sa grande jeunesse et des instances de son përe, 
l'avait rclamé; enfin d'avoir été condamné / Chiions, le 
13 floréal an vu, à un mois de détention; à Vire, le23 ther- 
midor suivant, à deux années de la mème peine, et toujours 
pour les mbmes faits. Ces charges ne démontrèrent qu'une 
chose aux yeux de partisans obstinés du faux dauphin, c'est 
la fëcondité de son imagination pour dépister les poursuites 
de la police; et quant au tailleur de Saint-Lb, ils ne voyaient 
en lui que le père de l'enfant substitué au dauphin, lors de 
son évasion du Temple. Le tribunal de Vitry, «lui ne parta- 
ge.ait pas cette opinion, condamna le ieune tlervagault 
quatre années de détention. Cette condamnation, bieatbt 
confirm par le tribunal criminel de Chiions, ne nit pas fin 
tout d'un coup à l'intrët qu'Hervagault avait su exciter. Il 



HEIVAGAULT 
fallut que le ministre de la police le fit transporter loin du 
thétre de ses aventures, pour luire enfin cesser les hum- 
mages et les attentions dont il continuait à tre l'objet, mme 
après l'arrèt du tribunal criminel de ChMons. Il mourut à 
Bictre, en t812. Hippolyte Tmnvn. 
HERVEY (lies). Voye Coos (Archipel de). 
HERWEGH (GEosçES), l'un des poêtes lyriques al- 
lemands les plus distingués de la jeune génération, est né  
Stuttgard, le 31 mai 1817 ; il étudia d'abord la théologie, 
ne tarda point à connaltre le doute, et abandonna alors cette 
direction pour se livrer  la politique et à la culture des lettrcs. 
Après avoir pris part à la rédaction de diverses feuilles Imbli- 
ques, il fit paraltre, en t841, ses Podsies d'un vi,ant (Zurich 
et Vinterthur), dont sept éditions se succédèrent rapide- 
ment. Après un courtséjourà Paris, Herwegh fit, en t 82, sa 
rentrée en AIlemagne, qui fut pour lui un véritable triomphe. 
Le roi de Prusse, Frédéric-Guillaume IV, l'engagea lui-m¢me 
 venir le voir à Berlin. Mais à ces avances du pouvoir 
Herwegh, poêterépublieainet socialiste, répondit par un refus 
conçu dans des termes mal séants, et auquel les frères et 
amis nemanquèrent psdedonner bien vite la pluslarge publi- 
cité. Un ordre d'expulsion du territoire prussien fut pour 
Herwegh le résultat dece coup de téte ; et dès lors son talent 
rencontra presque autant de détracteurs qu'il avait ru au- 
paravant d'admirateurs. Ayant annoncé à Zurich, où il était 
venu se fixer, l'intention de faire paraltre un journal dans 
le sens libéral le plus avancé, le parti qui dominait alors dans 
cette ville l'en fit aussitôt expulser. Il se lit recevoir bour- 
geoisdu canton de Bie-Campagne, et à la suite d'un voyage 
dans le midi de la France et en Italie il se fixa ì Paris, où 
il fit parattre un second volume des Posies d'un vivant. 
t,lais le succès de ce nouveau recueil de vers fut bien loin d'é- 
galet celui du premier. A Paris, Herwegh se lia avec les 
principaux meneurs du parti socialiste, et au mois d'avril 
1848, suivi de sa femme, fille d'un riche ngociant de Berlin, 
il envahit le territoire badois ì la tte d'une colonne de tra- 
vailleurs allemands et français, dans laquelle figurait aussi 
le fameux Bornstedt. Cette bande ayant étè battue et dis- 
persée par les troupes wurtembergeoises, Herwegh se re- 
fugia en Suisse, puis au midi de la France, ou depuis lors il 
vit dans une profonde obscurité. 
HERZ (Lr), l'un de nos pianistes contemporains 
les plus ustement célèbres, est né à Vienne ( Autriche ), en 
1806. Sou përe, pianiste habile, lui enseigna dès I'/ge de 
quatre ans l'art dans lequel il ne tarda pas à faire de ru--. 
pides progrbs, malgré une laiblesse dans la main gauche, 
qui l'empcha pendant bien longtemps de laire courir en- 
semble ses deux mains sur le clavier. Il triompha de cette 
faiblesse constitutive en exerçant sa main gauche, non sur 
le piano, mais sur le violon. Après avoir pendant quelque 
temps pris des leçons d'harmonie du célëbre Hunten, Henri 
Herz vint  Paris, en 1817, entra au Conservatoire et y 
remporta bientôt le grand prix. La mme année il se fit en- 
tendre dans un concert donné au ThíAtre-Italien par 51 m« Ca- 
talani, et y oblint un grand et beau succès. Depuis lors il 
n'a cessé d'Cire placé au premier" rang entre les grands ta- 
lents qui se partagent la faveur publique, et toutes les capi- 
tales de l'Europe ainsi que les principales villes de l'Amérique 
ont tour  tour confirmé par leurs suffrages le jugement en 
premier et dernier ressort prononcé par le public parisien. 
Il y a une vingtaine d'années déjà que t,l. Herz s'est d,»cidé 
à faire servir ì la fabrication des pianos les lumières toutes 
• péciale puisées dans sa longue pratique, et il eut bientGt 
réussi à se placer sur la ligue des Erard, de Pape et des 
Pleyel. 
llERZBERG (EWALD-FIIÉltlC, comte de), clèbre di- 
plomate prussien, né en 1725, à Lutrin, près de Neustettin, 
obtint peu de temps après sa sortie de l'université un emploi 
au ministère des affaires étrangères à Berlin, et fut ensuite 
nommé secrélaire de légation. Il composa en huit jours, 
d'après les dépches secrètes des cours d'Autriche et de 
Saxe tenueCs par FfCCic le Grand à Dresde. le fameux 

 HESCHAM 
31moire raLçonn, qui avait pour but de justifier l'invasion 
de la Saxe par une armée prussienne, et ne tarda- pas à ttre 
nommé ministre des affaires Strangères. Le traité conclu 
en 1762 avec la Russie et la Suède fut son ouvrage, comme 
aussi la paix d'Hubertsbourg. Lors du prêmierpar- 
rage de la Pointe, effectué en 1772, il exécuta avec une 
grande habileté les proiets de FfCCie le Grand ì I'$gard 
de la Pt'usse occidentale. Le successeur de Frédéric le Grand 
réleva  la dignité de comte. Ses efforts pour la pacification 
des troubles de Hollande furent couronnés d'un plein suc- 
cès. Il s'attacha en outre h maintenir l'équilibre politique 
conformément aux principes qui avaient amené la cr6alion 
du Fïtrstenbund. Cependant, par suite de la condescendance 
dont le roi de Prsse fit preuve  l'égard de la Hollande et 
de rAngleterre, la convention de Beichenbach fut conclue 
en 1790 sur de tout autres bases que celles qu'il aurait 
voulu voir prévaloir. Il n'en rédigea pas moins la célëbre 
déclaration adressée à l'Autriche, ou l'on indiquait à l'empe- 
reur Lëopol,l les conditions auxquelles la Prusse et le. pui 
sauces maritimes consentiraient à ce qu'il conclut la paix 
avec la Porte. L'avortement de son plan et la nomination 
de deux ouveaux ministres contraimirent Herzberg, en 
179t, à donner  démission. 
Le second partage de la Pologne, effectué en 1793, etla 
siluation politique dans laquelle la Prusse se trouva placée 
par suite de son accession à la coalition contre la France. 
l'amenërent  offrir de nouveau le concours de ses services 
au roi de Prusse dans trois lettres datée. de 179, et où l'on 
trouve l'expression du plus noble patriotisme; mais ses 
offres ne lutent pas aceptc. Le profond chagrin qu'il 
en ressentir lœe fit tomber malade, et il eu mourut, le 9.7 
mai 795. 
Herzberg était l'homme du monde le plus simple et le 
plus accessible. Son abord avaitquelque chose de patriarcal ; 
doué d'une grande droiture de cœur, sa franchise était ex- 
freine ; aussi lui reprochait-on de manques de la qualité es- 
senlielle pour l'emploi qu'il occupa pendant si longtemps : 
la discrétion. En effet, il ne croyait pas ì la puissance du 
mystëre et du silence en politique, et pensait que la pu- 
blicité donne bien autrement de force à. un gouvernement. 
C'est dans cet esprit que, lors de l'avénement au trone de 
Frédéric-Guillaume Il, il prononça à l'Académie des Sciences 
de Berlin, dont il était membre depuis longues années, 
ces paroles remarquables : « Tout Etat qui base ses actes 
sur la sagesse, la force et la justice, gagne toujours  la pu- 
blicité, qui ne peut offrir de dangers qu'aux gouvernement 
engagé dans des voies tortuenses et dcloyales. » 
itERZÉGO],VINE c'est-à-dire pays du duc, appelée 
aussi par les Vénitiens duch de Samt-Saba, du nom d'un 
saint qu'on prétend y tre enseveli. Cette province de la 
Turquie d'Europe, qui luisait jadis partie du ro)aume 
de Croatie, et ì laquelle on donne en¢o quelquefois 
le nom de comtd de Chulm, confine au nord à la Croatie; 
 l'est, à la Bosnie; au sud, / Monténégro et au golfe 
de Cattaro;  l'ouest, / la Dalmatie. Réunie à la Bosnie 
en 13'26, l'empereur Frédéric Iii l'erigea plus tard en 
duché indépendant, et la donna en fief à la [amille «le 
Cossac ou de Hrani¢h. Conquise par le sultan Mahomet II, 
en 1466, mais par la suite souvent disputee aux Turcs, 
l'Herzégowine leur fit formellement cédée aux termes de 
la paix de Carlowitz, en t699, à l'exception de la ville de 
Castelnuovo et d'un pet/t territoire, dont les Vénitiens 
talent mis en possession en 1682, et qui fait maintenant 
partie du ro)aume autrichien de Dalmatie. 
L'Herzégowine turque compose le san,l]hak de HerseA-, 
qui forme la partie sud-ouest de l'ëjalet de Bus nie, avec 
lequel elle a toutes les alfinités possibles au point de vue de 
l'l,istoire et de la 8éographie, comme sous les rapports po- 
litiques et etimograpbiques La capitale de I'/ferzgowine, 
Mostar, sur la Narenta, principale rivière du pays, a des 
fabriques reuommëes d'armes blanches, et 9,000 habitants, 
ilESCHAM, khalifes de Cordoue. Voyez 



64 
IIÉSIODE, un des pl,s anciens poêtes grecs dont les 
orages nous soient parvenus, était né  Cyme, en Élide, 
province de l'Aile Mineure; mais il quitta très-jeune son 
papys, et passa la plus grande partie de sa vie  Asera, bourg 
de Béotie, au pied du mont Héficon. lous savons trës- 
peu de chose decertain sur sa personne. On est mdme dans 
le doute sur le siècle où il vícut. Aulu-Gelle, Senèque et 
Pansanias nous apprennent que de leur temps on discu- 
tait pour savoir s'il avait été contemporain d'Homère, ou 
lequel des deux avait précédé l'autre. Hérodote, qi les fait 
contemporains, s'exprime ainsi  leur gard : « Je ne crois 
pas qu'Hésiode et Homère aient existé plus de quatre cents 
ans avant i'ge où je vis. » Ce qui marquetait l'époqne des 
deux poêtes au neuvième siècle avant J.-C. Quant à une 
lutte poétique dans laquelle Hésiode aurait remporté le prix 
sur Homère, quoique Dion Chrysostome, sur l'autorité de 
Varron, rapporte une inscription relative à cette tradition, 
il est bien reconnu que le petit écrit dans lequel elle est ra- 
contée est l'ouvrage de quelque rhéteur de l'Cule d'Aiexan- 
drie, et n'a aucune valeur historique. D'un autre estC les 
marbres de Parus font Hésiode plus ancien qu'Homère. 
Enfin, l'opinion la plus généralement adoptée, et la plus 
probable, est qu'Hésiode est venu après Homère. 
Tzetzès cite les titres de seize ouvrages qui ont été attri- 
bués à Hésiode. Sur ce nombre, trois seulement nous sont 
parvenus, savoir : les Travaux et les Jours, la Thogonie, 
et le ]ouclier d'Hcrcule. Pausanias n'admet comme ou- 
vrage authentique de ce poête que les Travaux et les Jours. 
Ce poême est un recueil de maximes de morale, de pré- 
ceptes sur l'agriculture, la naxigation, la doctrine des jours 
heureux et malheureux. Les anciens le faisaient apprendre 
par cœur à leurs enfants, selon Denys d'Halicarnasse. On 
ne peut nier qu'il n'olfre dans son plan un certain nombre 
de répítitions, d'incohérence», de transitions mal ménagées. 
C'est ce qui a induit d'habiles c'itiques à penser que les 
divers morceaux dont il se compose, n'appartenaient pas pri- 
mitivement à un mëme ouvrage, et que leur fusion dans un 
senl tout estdue  un travail postérieur. Les deux morceaux 
les plus remarqnables sont la fable de Prométhée et de 
Pandore, puis la description des diff«!rents ges par lesquels 
a passé le {genre humain. Hesiode adresse ce poême à son 
frère Persès. ,'oici à quelle occasion :lls vivaient tous deux 
avec leur père/t Ascra, s'occupant d'agriculture et du soin 
d'lever des troupeaux. Après la mort du vieillard, ses biens 
furent partagés entre les deux enfants; mais les juges, ini- 
que% firent tort au poêle d'une partie de ce qui lui revenait, 
et favorisèrent son frère, aussi aide que prodigue. Hésiode 
administra avec économie ce qui lui restait, et fit si bien 
prospérer son petit domaine, quïl sembla n'avoir rien perdra 
Persès, au contraire, laissa ses biens se détériorer par la 
paresse et la négligence, et s'engagea dans des procës qui 
achevèrent sa ruine. Hésiode tire de ce double exemple de 
salutaires leçons qu'il adresse à son frère. Aujourd'hui cet 
ouvrage rions offre surtout un intërt historique, comme 
monument de l'état des mœurs et de la société à l'époque 
d'Hésiode. C'est un tableau de la civilisation encore dans 
son enfance. On y voit le passage de la vie guerrière à la 
vie laborieuse, de la sociét héroique  une société nou- 
velle, Iondée sur le travail et la propriété. 
Le second ouvrage qui porte le nom d'Hésiode est une 
Théogonie. Pausauias doutait qu'il fOt réellement l'auteur 
de ce poême. C'est une collection de mythes antiques sur 
la généalogie des dieux et sur leurs combats. Ce poême est 
le plus ancien monument que nous aons de la mytho|ogie 
grecque : aussi reCite-t-il sous ce rapport nne sérieuse at- 
tention. Plusieurs critiques, il est vrai, entre autres Her- 
mann, n'y voient qu'un assemblage confus de fragments 
étrangers l'un à l'autre, de débris des chants nombreux 
que possédait l'antiquilé sur l'origine des dieux et du monde, 
cousus ensemble et remaniés, sans que le compila{eur ait 
toujours eu l'intelligence du sens véritable de ces documents 
anci¢as. Il est certain c[u'on est frappé en lisaut la Tho 

HESIODE -- HES ..... 
9onie de la diff,reuce des mythes, tant6t inlormes et peu 
développes, tantôt per[ectionnés jusqu'au raffinement : le 
récif en et tant6t sec et sans ornement, tant6t abondant 
et riche de poie. éanmoins, quelles que soient les alté- 
rations que l'ouvrage a subies par l'action du temps, quel- 
les que soient les contradictions fréquentes qui résultent des 
versions différentes d'un mme mythe, quelles que soient 
les interpolations de morceaux plus modernes au milieu de 
fragments antiques, nous croyons qu'il est poible de re- 
connaitre dans ce poême une certaine unité d'intention et 
de sujet. Il uous semble que sous cette forme incohérente 
et mutilée, dans laquelle les siècles nous l'ont transmis, 
règne une pensée première et fondamentale, qui domine 
l'ensemble et forme le lien des diverses parties. Ce fut long. 
temps une espèce de lie sacré dans toute la Grèce et 
comme le catëchisme potique des croyances nationales. Ce 
fut en effet la première tentative considérable faite pour 
systématiser les traditions religieuses des Grecs, pour les 
résumer en corps de doctrine, et donner ì ce peuple une 
théoloe. L'auteur  recueille les mythes populaires sur les 
dieux ; il les coordonne, il les interprète, non avec l'appareil 
dogmatique, mais sous la forme poétique de l'épopée. Il  
raconte l'histoire des dynasties célestes qui ont tour à tour 
gouverné l'univers, la succession des {générations divines, 
représentant symboliquement les grandes phases de la créa- 
tion du monde. Telle est la donnée fondamentale de la T/o- 
9unie. La guerre des Titans contre les dieux ol$'mpieus en 
et l'action principale et en forme le nœud ; le dénouement, 
c'est la victoire de Jupiter sur les Titans, c'est-à-dire du 
principe de l'ordre sur les agents du désordre, et par suite 
l'organisation du monde dans son état actuel. 
il nous reste  dire quelques mots du Bouclier d'Hereule, 
fragment d'une Hrogonie , ou filiation et histoire des 
demi-dieux : le» 56 premiers vers sont extraits du Catalo- 
gue des Femmes, ouvrage d'Hésiode perdn. Un rhapsode 
inconnu y a rattaché un morceau sur le combat d'Hercule 
et de Cycnos, renfermant la description du bouclier du hé- 
ros. L'antheuticité de ce morceau a déjà été contetëe par 
les anciens, entreautres par Lonn et plusieurs scoliastes. 
Le caractère de cette poésie est purement descriptif, et n'a 
aucun rapport ni avec la poésie d'Hésiode ni avec celle 
d'Homère. 
Hésiodc succède à Homère comme la science  la poé- 
sie, comme la réflexion à l'inspiration. Sa poésie est es- 
sentiellement didactique; elle a presque partout un ca- 
ractère d'utilité. On voit que le poête s'est donné la mission 
d'enseigner les hommes. Il se plalt aux sentence.s, aux 
proverbes, son poême en abonde. Aussi Isocrate lui assi- 
gne-t-il une place parmi les poêtes gnomiques. Son style, 
vanté pour sa grâce et sa douceur, n'a pas l'élévation ëpi- 
que de celui d'Homère, mais Quintilion lui donne la pal- 
me dans le genre tempéré. Arcn. 
IIÉSIONE fille du roi de Truie Laomédon et de 
Leucippe, devait ëtre, en vertu d'un oracle, et parce que 
son père avait relusé la récompense promise à xNeptune 
pour la reconstruction des murs de Truie, exposée à un 
monstre marin, et elle venait dans ce but d'ètre enchatne 
à un rocher lorsque Hercule, au retour de on expédition 
contre les Amazones, vint à Troieo et la délivra. Hercule fit 
ensuite la guerre à Laomédon, pour le punir d'un parjure, et 
Hésione Cirer au vainqueur, qui la donna pour épou.e a 
son compagnon, Télamon, duquel elle eut un fils, Tencer. 
Selon d'autres, Hsione, mécontente de sou mari, l'aban- 
donna, et.se maria aec Arion, roi de MileL 
HESPÈRIDES fillesde la Nuit, et suivant d'autres de 
Phorcys et de Léto, ou d'Atlas, d'Hespérus, ou encore 
de ,Inpiter et de Thémis. Suivant Apollodore, elles ëtaient au 
nombre de quatre : Égld, Erythëa, Heslia et Ardthuse; de 
trois, suivant Apollonius  Hespdrie, Erythéis et Égld; et 
de sept, suivant Diodore. On les appelle aussi Atlantides, 
suivant qu'on leur donne Atlas ponr père. Elles étaient pré- 
pusC avec Ladon, dragon à cent ttes, à la orde dans 



leurs Jardins des pommes d'or que, lors de son mariage a ec 
Zeus (Jupiter), lldre (Junon) reçut en cadeau de noces de 
Gœea (la Terre). Les Jardins des Hespérides étaient, sui- 
vant Apollodore, situés sur le mont A t I a s, dans le pays des 
Hyperboréens, et suivant la tradition la plus ancienne, 
tapportee par Hésiode, tout à l'extrémité occidentale du 
nonde. Hercule rapporta les pommes d'or à E u r y s t h é e, 
qui lui en fit préent. Mais, au lieu de les garder, Hercule 
les donua à ,linerve, qui les rapporta aux lieux go elles se 
trouvaient auparavant. Ce fut aussi avec une de ces pom- 
mes d'or que la Discorde brouilla les trois grandes divinités, 
qui décidèrent entre elles des'en rapporter au jugement de 
Ptds. On peut voir dans les Mémoires de l'Académie des 
Inscriptions une longue dissertation de rabb Massieu, 
qui nous apprend que les Hespérides avaient pour voisines 
les Gorgones, et qui discute savamment la question de 
savoir si les fameuses pommes d'or étaient des citrons, des 
oran-es ou bien des coings. 
HESPÉRIE (Hesperia, l'occideutale), nom donné d'a- 
bord par les Grecs à l'ltalie ( vo!le-- Hr.svr.nvs), puis plus 
tard ì l'Hipanie, quand ils curent poué leurs expéditions 
plus ì l'ouest. 
HESPERUS  HESPER ou VESPER en ( grec 
Petoile du soir, de ¢rép,,, le soir). C'etait, suivant 
Hésiode, l'un des fils d'Astrée et de l'Aurore. D'après une 
autre tradition, c'était le père des H esp é ride s, le fils d'A- 
tlas et un astronome distingué. Étant monté au haut de l'A- 
tlas pour y obser'er le cours des astres, une tempdte l'en pr- 
cipita dans un abime, et on ne le revit plus jamais. On lecrut 
métamorphosé en ètoile ; et ce fut pour honorer sa mémoire 
qu'on donna son nom à la plus belle d'entre les etoiles. 
H}'ginus rapporte qu'il était fils de l'Aurore et de Céphale, 
et si beau, quïl put disputer le prix de la beauté à Vénus 
elle-mème ; de là le nom de Vdnu.s donné aussi ì cette étoile. 
D'après une autre version, Aths aurait chassé de ses États 
son fils Hespens, qui se réfugia alors en Italie, contrée qu'en 
cousequence on nomme aussi quelquefois Hespdrie. 
Cette étoile, qui n'est autre que la planète Vdn u s, pa- 
rait tautSt le soir, tantét le matin. Comme étoile du matin, 
elle avait reçu des anciens le nom de Lucifer. Dans nos 
campagnes on l'appelle encore l'croule du Eerger. 
HESS (CflAIEï-EnEsT-CnIISTovnE), graveur célèbre, 
né eu 17.55, à Darmstadt, eut à lutter coutre bien des 
stacles, dont sa misère n'était pas le moindre, avant de pou- 
voir se livrer à l'Cude des arts, vers laquelle il se sentait 
irrésistiblement entralné. C'est à Manheim qu'il apprit les 
premiers éléments de la gravure ; et une $cëne de Chasse 
qu'il exécuta pour l'clecteur de Bavière lui valut la protec- 
tion de ce prince. En 1776 il alla se perlectionner à Augs- 
bourg; et l'année suivante il accepta l'invitation qui lui fut 
thite de se rendre/ Dusseldorî pour y travailler à la grande 
gaIerie de Krabe. La première planche de ce recueil, qu'il 
exécuta d'après Bembrandt, obtint un tel succEs qu'il fut 
Cu membre de l'Académie; et en 1782 l'électeur lui donna 
le titre de graveur de sa cour. En t787 il entreprit le 
voyage d'Italie, et se lia à Borne avec Hirt, Herder, Goethe 
et Schlegel. Quand, en 1782, PAnglaisGreen résolut de con- 
tinuer la galerie de Dusseldorf, Hess et B a r tolo z z i furent 
appelés à y travailler. Hess, pour sa part, exécuta l'As- 
cension de la Vierge 1larie, d'après le Guide, Le Charlatan, 
d'après Gërard Dow, l'un des chefs-d'oeuvre de la gravure, le 
Portrait de luben», et celui de la femme de Bubens, re- 
gardé comme la meilleure gavure au pointillé q'on pos- 
sède. ous citeronsencore de cet artiste une Sainte Familli, 
d'après Bapbael, et la scène célèbre du Jugement dernier, 
d'après Bubens. Quand la galerie et l'Acadm.e de Dussel- 
dorf furent transtrées, en t$06, à Munich, Hes y obtint 
egalement une ï, osilion honorable; et parmi les planches 
qu'il grava «]ans celte rapitale, nous mentionnerous plus par- 
licu]iërement le Sa;..n Jdrdme, d'aprEs Palms, l'Adoration 
dtt dit'in Ag,eat, d'aprèsYan E)-ck, «'uvre de sa vieil- 
le»'o, et enlin.son dernier ouvrage, le putlrmt en ped 
l)IcL ne LA convers.  . 

roi Maximilien, d apr Stieler. Cet artiste rnourl à Mu- 
nicb, le 25 juillet IS28, lais-aut trois fils, qui se sont tait 
aussi un nom distingue dans les arts. l'airC Pierre tlr.s, 
né en 1792, à Dusseldorf, comme peintre de genre et de ba- 
tailles ( l'empereur icolas le fit venir en 1839 en lussie, où 
il peignit toute une suite de scènes grandioses relatives aux 
événements de la ande guerre nationale de 1812) ; le 
cond, Henri Hs, né en 1798, ì Dusseldorf, peintre d'his- 
toire et bon portraitiste, depuis 1826 professe,r de peinture 
ì l'École des Beaux-Arts de Munich; le hoisième, Ch¢zrics 
Hess, peintre distingué de genre et d'animaux, né à Dus- 
seldorf, en 1801. 
HESS ( Hasm, baron ne), feld-zeugmeistre autrichien, 
commanlant en chef de la troisième et de la quatrième armée 
dont les quartiers géneraux sont à Bude et Lembcrg, e»t né 
à Vienne, en 178. En 1805 il entra comme enseigne dans 
le régiment d'in[anterie du con»te Gyulay, et tant que gura 
la paix il fut employé soit à l'état-major général, soit à des 
opérations trigonométriques. Il fit la campagne de 1809 aec 
le grade de premier lieutenant, et se signala ì la bataille de 
Wagram. A la conclusion de la paix, il retourna à ses tra- 
vaux scientiliques; mais lorsque la guerre de 1813 éclala, 
il rentra en aclivité comme capitaine d'ètat-major. Après la 
campagne de 814, où il e ditingua et lut décoré d'ordres 
autrichiens, prussiens, russes, il fut élevé au grade de major 
et attaché au bureau de la guerre. Depuis 1817 il fut charge 
du commandement de divers réments. En 1829 il passa 
colonel, et l'année suivante il fut mis à la tète de la divi- 
sion de Fetat-major général auprès du corps mobile dans 
la Lombardie. Il rendit dans ce poste d'éminents services, 
par les soins quil apporta ì l'instruction des troupe% en 
sorte que dès lors il passait pour un des meilleurs officier» 
de l'armée a«trichienne. En 182 il tut promu au grade de 
îed-maréchal-lieatenant. C'est surtout dans la guerre de 
1548 qu'il a trouvé l'occsslon de déployer ses talents..Nommé, 
au mois de mai de cette année, quartier-maRre général auprès 
de l'armée d'ltalie, il dirigea les opérations qui préparèrent 
le triomphe des armes de l'Autriche. Badetzky lui-mème, 
dont il était le principal conseiller, se plut à le reconnallre 
en maintes occasions. C'est lui, par exemple, qui conçnt et 
prépara les plans des opérations déciives des mois de juin 
et de juillet ; la marche sur Vicence, la prise de cette ville, 
/es mouvements offeusifs qui amenèrent la victoire de Cus- 
tozza; c'est lui encore qui, après la d6faite des Piémontaig, 
signa l'armistice avec le général en chef ennemi. En récom- 
pense de ses services, Hess fut décoré par son souverain de 
l'ordre de Marie-Therìse, et par l'empereur de Bussie de 
celui de Saint-Georges. La guerre s'ctant rallumée, Hess 
conçut le plan de cette glorieuse campagne de cinq jours, 
et l'exécuta avec une 'apidité merveilleuse. Le vieux 
dctzky lui-mème avoua modestement que c'était h son 
quartier-maitre gencral que la gloire en revenait presque 
tout entière. A la suite de la campagne de lf9, l|e5s fut 
créé baron et élevé au grade de chef de l'Cat-major génc- 
rai de l'armée autrichienne. En t5-1 il fut appelé au com- 
mandement supérieur des deux corps d'armée reuni en 
Gallicie, Hongrie et Tranylvanie, et destinés à surveiller les 
mouvements de la gmrre d'Orient, entre les alli et 
Russes. 
lIESSE (en allemand Hessen), contrée de l'Allemagne 
habitée a»trefois par les Kattes, et formant auourd'lufi 
les trois États de tlesse-Cassel, llesse-Darmstadt et 
Hesse-Hombourg. Dès l'an 1 aprEs J.-C. on soit les 
Kattes aux prises avec les Bomains comm«ndés par G er- 
m a ni c u s, qui détruisit leur chef-lieu, appelé par les his- 
torieus romains Martium. Pendant les siëcles suivants il 
se confondire||t dans la lie ,les Francs ; plus tard l'émi- 
gration des Francs en Belgique et dans les Gaules eut I,Om" 
résultat ,le laisser la liesse pre.que enliérement déserte, 
jusqu'à ch qu'ils y eussent etWremplacés par les 
lesqael la disis.rent en gaus nombreux, qui à l'époque 
«les rois Francs obissaienl tous h ds comtes particulier», 
9 



6 HESSE -- HES .... 
tlgnt les plus puissants furent les Conrad. Lors de la-chute "té acquis pour le musée du Luxembourg, M. Hessetronva 
es Cadovingiens, cette race parvint ì la iité de duc des critiqu moins compla qu'en 1833. Ce n't p 
des Fes, en la pernue de Conrad I , et bientèt après à qe Pant foi inférieur aux Funaille du TitWn; ma 
la oeuronue impérie. La mort de Conrad et de son frère, qua anns s'éient écoui, et ndant ce m 
arfivée sans qu'ils lssassent de postérité, n'eut p príci- l'Cule avait fait dans le oeloris et le cir-obscur d procès 
sment pour résult de tire le ducbé des ran ; is rapid; le public, de son oE, avait  u étudié 1 
la puissanoe d du cessa dès tors de s'tendre sur h liesse, maitr et it devenu plus difficile. Le tie giofieu  
où s'Cevèrent dive d)nti de souverains et de œem, dnier Voenitien, que les jourualis avaient aé à 
dont 1 plus punh furent 1 comtes de'Gudenberg. Par bl. Hesse, ns dou paroe que ses btx ient sig 
son mariage avec la fille unique et héritière du dernier de et datés de Venise, lui tut cet fois contesté. C'éit  
effet un étrave éloge pour un peintre q ignore fl oe point 
I transrenoes des demi-teintes et semble se complahe 
aux ombr lourdes et noir. Dans 1 Funraill du 
Titien comme dans te Triphe de Pisani, i1  a  

ces comtes, Geiso IV, le landgrave de Thuringe Louis I 
hérita du comté de Gudenberg ; et tous les seigueur de la 
Hcse le reconnurent alors pour leur souverain. La race de 
celui-ci s'éteignit en tt7, en la personne de H«m'i de Iaspe, 
et sa nièce, Sopbie, fille du landgrave Louis le Pieux et 
épouse du duc Henri de Brabant, Ceva des prétentions 
l'hérilagc du la Thuringe et de la Hesse. A la suite de 
ïutte longues et sanglantes, soutenues contre son rival, 
le margrave Henri l'Illustre de Misnie, fils d'une sœur de 
IIenri Bape, un compromis conclu en 1263 lui adjugea la 
Hesse. Le fils de cette Sophie, Henri I *', dit l'E»fan, souche 
de la maison de Hesse qui subsiste encore de nos jours, s'é- 
tablit  Cassel, où avait résidé jadis la dynastiedes Conrad 
conserva le titre de landgrare, qu'il tenait du cllefde sa mère, 
et bt reconnu en cette qualité comme prince de l'Empire. 
Ses descendants accrurent peu à peu leurs possessions, par 
des acquisitions hors de la llesse et mème sur les bords 
du Rhin ; mais tous les efrort qu*ils tentèrent pour reven- 
diquer lents droits à l'heritae du Brabant demeurèrent 
infructueux. 
A la mort de Henri I ', ca 1309, un partage de ses Êtats 
eut déj lieu entre ses deux fils, Othon et Jean. Les deux 
li'aes collatérales qu'ils fondèrent et leurs divers rameaux 
se trouvbrent de nouveau confondus, en i'année 1500, en 
la personne de Guillaume 11, lequel mourut en 1509, laissnt 
a son fils unique, ;gé alors de cinq ans seulement, Phi- 
lippe I «-" le Magnani»e , la souveraineté de tout le lmys de 
Hesse. Pendant la minorité de ce prince, ses États furent 
toux ernes par une regence, composée de gentilshommes, puis 
par sa mére, d'accord ascc la diète du pays. Mais les troubles 
auxqvels l'Allemagne était en proie determinèrent dès 
1508 l'eapereur .Maximilien ì déclarer le jeune landgrave 
majeur. Il prit une part actis'e à la guerre ditedes Pay san s, 
a l'oeuvre réformatrice de Lutber et atLx luttes de la ligue 
,]-« Schmalkade. 11 consacra à fonder l'université de 
.',Iarbourg les biens confisqués des couvents, et mourut en 
1567. Par son testament, daté de 1562, il avait precedcm- 
ment partage ses Eats e«tre ses quatre fils : Guillaume, 
Louis, Philippe et Georges. Philippe étant mort en 1583 
et Louis en 1603, tous deux sans laisser de postérité, il ne 
resta plus alors que les deux lignes principales de Hesse- 
Cassel et de Hesse-Darmstadt, encore aujourd'hui ré- 
gantes. 
HESSE (ALeXaKDnE), peintre d'histoire et de genre, 
et le lil de J.-He»ri Hr.sse, qui sous l'Empire sest fait 
connaitre par un grand nombre de portraits eu miniature 
et à l'aquarelle. 3I. Aiexandre Hesse, entré chez Gros en 1821, 
puisa dans la fréquentatiou de ce maltre célèbre un vit 
amour poar la couleur. Il donna un intéressant spécimen 
de son talent daus un tableau exposé en 1833, les ltonneurs 
funèbres rend,ç au Titien, dont le succès ne fut pas con- 
testé. Cette composition, qui fait partie de la collection de 
M. Delessert, poa d'err, blíe M. Hesse comme un coloriste 
de la meilleure école. Mais le [épulations acquises en un jour 
se conservent malaisCent. Dans le Léonard de Vinci (1836), 
dans les Pécheurs catalans et la Jeune Arlsienne 
on ne vit rien qui répondit aux promesses du début. Les 
portrait» de femme que M. H'se exposa ì divirses reprises 
furent, d'un commun accord, jus durs, secs et ns vic. 
Prboccnpé par le souvenir «le ou premier succès, l'artiste 
voulut donner dans le Triomphe de Pisani (l-æT) nn pen- 
dant aux Funérillcs du Titien. B,en que ce tableau ait 

complète de mouvement. Si agitC que paraissent les f- 
res, elles ne vivent pas, elles sont de bois sous leurs splea. 
dides étoffes, et l'auteur les a plutôt juxtaposées que 'ou- 
pes. Le pinceau de 1I. Hesse est extrtmement soigneux. 
Il sait trouver des tous Juteuses et brillants, mais sa tou- 
che est d'une dureté sans égale : au,si les vtemenJ.s dont ses 
personnages sont couve'ts n'ont-ils pas plus de réalité que 
de souplesse. Doué d'une patience infinie, M. Hesse a le 
travail très-lent, et de tous les peintres actuels c'est celui 
qui a le moins produit. La dernière œuvre qu'on ait vue 
de lui est la figure symbolique de la République : un cer- 
tain talent d'exécution recommandait cette étude, oil le luxe 
du costume tenait lieu de pensée et de stle. Semblable 
l'artisle grec dont l'histoire a conservé |e souvenir, 51. Hesse, 
ne pouvant faire sa lélmbligue belle, avait pris le parti de 
la faire riche. 
HESE-CASSEL (ÉJectorat de) ou HESSE-ÉLECTO- 
BALE. Il se compose dun territoire formant un tout com- 
pact et de diverses enclaves, et confine à la province prus- 
siennedeV'estphalie,  la principautéde Waldeck, au grand. 
duché de Hesse-Darmstadt, au duché deassau, ira ville libre 
de Francfort, au cercle bavarois de la Basse-Franconie, au 
grand-duche de Snxe-Weimar, à la Saxe prussienne et au 
Hanovre. Ses enclaves, qui se trouvent séparées du groupe 
principal et disséminées au milieu de divers Etats voisins, sont 
le grand comté de Schaumbou rg, la seigneurie de Scbmalkaide, 
une portion de l'ancien comté de Henneber, etc., presea- 
tant ensemble une superficie de 41 myriamètres carrés. 
La superficie de i'electorat tout entierestde 145 myriamë- 
tres carrís, et lorme quatre provinces = la Basse-Hse, la 
Hesse-Superieure, la province de Fulda et de Schmalkalde, 
la province de Hanau. La plus grande partie du sol hessois 
occupe le centre du plateau de l'Allemague. Elle forme nne 
plaine ondulense, entrecoupée pat un grand nombre de 
crètes moulauses, dont la hauteur varie entre 4 et 700 
mètre. Les cours d'eau les plus importants qui l'arrosent 
sont la Werra, qui ne parcourt qu'un petit nombre de pat- 
celles ; la Fulda, qui dans tout son parcours appartieal 
pre.que eclusivement h Pclectorat, et qui a pour atlhnt 
l'Edder et la Scbwalm ; le Weser, provenant de la jonc- 
tion de la Werra et de la Fulda, qui tantOt sert de fronflée 
au pays et tantOt traverse une petite partie du territoire; le 
31an, qui sert de limites/la province de Hauau du cotede 
Hess-Da,'Tustadt, avec ses atfluents la Kinzig et la Niddal 
enliu, la Lahn, avec ses aflluents l'OInn et la Wohras. 
Le sol est presque partout fertile, et produit une graa& 
quantité de ccreales de toutes espèces, jusq'h de l'épeaa- 
tre et du maïs, de plantes légumineuses, notamment des 
fées, beaucoup de tabac (en bon 20,000 quintaux ), 
lin et des fruits excellents. Des t'orèts en couvrent un boa 
tiers. L'éducation du bétail, notammtnt des moutons et du 
porc, y donne de produits importants. En fait de produc- 
tions du règne minéral, ï, v trouve du cuivre, du plomb, du 
cubait, du vitriol, de I alun, de l'arête et surtout de 
bouille ainsi que du sel gemme. Eu fait de sources 
nérales, il faut citer Schwalbeim, Wilhelmsbad, Rod- 
hcrg ci Nenndorf. Aprè. la cdture du sol et l'Alève du bétail, 
le. principales industries sont, dans La Haute et I Ilass 



HESSE-I 
Hesse, ainsi que dans la province de Fulda, la culture et le 
tissage da lin ; dansla province de Schmalkade, la fabrica- 
tion des armes et des articles d'acier, de fer et detéle; à Cassel 
et à Hanau, l'orfévrerie et la joaillerie. On y fabrique aussi 
de la faïence, des creusets, du verre, du drap et du papier. 
Le enmmerce d'importation et d'exportation, qui ne laisse 
pas cependant d'avoir une certaine importance, est de beau- 
coup inférieur au commerce d'expédition, que favorisent, 
indépendamment de la navigabilité de la Fulda, de la Werra 
et du Weser, d'excellentes routes et un réseau de chemins 
de fer récemment achevés, qui mettent l'électorat en com- 
munication avec les pays voisins dans la direction de l'est, 
du nord et du sud. Les principaux centres du commerce 
d'expédition sont Wafied, Karlslf«n et Eschweçe ; 
et pour le commerce intérieur, Cassel et H a n a u, où des 
foiret importantes se tiennent chaque année ; Spanenberç 
et Scnmal/zlde. 
Le chiffre de la population s'élevait à la fin de f852 à 
755,228 habitants, tous d'origine entièrement germanique, 
sauf environ 8,500 juifs. Dans les Ëtats liéréditaires, la 
poptdation appartient an enfle protestant, et dans les 
acquisitions nouvelles au culte catholique, sauf environ 300 
mennonites. Les consistoires de Cassel, de Marbourg et de 
Fulda dirigent les affaires des églises protestantes; les 
catholiques sont placés sous la juridiction spiritt»elle de l'é- 
vèque de Fulda, et les juifs sous celle d'un graud-rabbin. 
En laitd'etablissement d'instruction publique, il existe une 
université à Marbourg.. une école de peinture, de sculpture 
et d'architecture à Cassel, une école de dessin  Hanau, une 
école supérieure d'industrie à Cassel, dix-neuf écoles de mé- 
tiers, une école forestière  Fulda, deux écoles normales pri- 
maires protestantes  Case[ et  Marbourg, une catholique 
et une juive à Fulda, un séminaire catholique, huit lycee, 
colléges et gymnases, une école militaire et quatre-vingt- 
quinze écoles de ville. Les revenus publics etaient évalués 
dans le budget.de l'exercice 1854 à 4,158,480 tlialers, et les 
dépenses à 4,63,430 thalers, non compris 209,830 tli. de 
dépenses extraordinaires. En tSl la dette publique s'Cevait 
à 12,706,850 thalers, dont la moitié provenant de l'emprunt 
contracté en 1845 pour la constrt,ction des chemins de let. 
D'après les bases constitutives données à Parmèe, soit 
2 pour 100 du chi ffre total de la pop»lation, elle se compose de 
12f16 hommes d'infanterie, 1,509 hommes de cavalerie, 
1,0t I hommes d'artillerie et 150 pionniers. 
 diffërents territoires dont se compose l'électorat de 
Hesse forment un tout indivisible. La forJe du gouver- 
nement est monarchique, avec une constitution ]'états. Le 
souverain, qui prend le titre d'électeur de Hesse, grand- 
duc de Fnlda, prince de llersfeld, Hanau, Fritz]ar et Isen- 
burg, comte de Katzenelnbogen, Dietz, Ziegenhain, idda 
et Schaumbourg et reçoit la qualification d'Altesse Rogale , 
réunit en sa personne tous les droits de la souveraineté. Le 
tréne est heréditaire, mais uniquement dans la ligne màle 
provenant de mariages contractés entre princes et princes. 
ses (at«s ebenburtiger Ehe), d'après l'ordre direct de pri- 
mogéniture. L'électe»«r actuel est Frédefic-Guillaume fer, et 
l'héritier présomptif du tréne le fils du landgrave Gudlaume- 
Frédéric, né le 26novembre 1520. Les lignes collatérales de 
la maison éleetorale sontHesse-Philippsthal, Hesse- 
Philippsthal-Borchfeld et la ligne de He, se-lheii[els- 
l?ottenbur9, dëjk éteinte dans sa repréentation mille. 
Si la maison régnante venait à s'Cindre, la succession 
pasar.aità ces lignes collatérales, puis,  defaut de celles- 
ci,  la maison de HesseoDarmstadt, et enfin à celle de 
Hesse-IJombourg. Le siCe du gousernement ne peut tre 
transferé l,ors du pays. De conventions de reversibilité 
héréditaire existent aussi avec la Saxe depuis 1373, et avec 
la Prusse depuis 1457. Ces dernières furent renouvelées 
en 1614. 
Après le renversement de la constitution de t83!, une 
nouvelle constilution a été publiée, le 13 avril t 852, d'accord 
avec la confédération germanique, constitution que le gou- 

ASSEL 
vernement actuel considère comme octroyée, par consé- 
quent comme révocable. Aux termes de cette constitution 
la représentation du pays se compose de deux chambres, 
tandis que la constitution de 183! maintenait le sys{ème 
d'une chambre unique. La première chambre se compose des 
princes cadets de la maison électorale, quand ils ont atteint 
leur majorité; des chefs des ancieunes familles immédiate. 
de l'Empire, nommé  titre héréditaire par le souverain ; de 
grands propriétaires fonciers dont les biens sont constitués en 
fidéi-commis, plus de députés Cus par la noblesse de la vieille 
liesse, du Schaumbourg, etc., du maréchal héréditaire issu de 
la maison de Riedese, du vice-chancelier de l'université, de 
l'évque catholique et des surintendants prooEtants. La 
conde chambre se compose de seize grands propriétaire 
fonciers, de seize députés des villes et de sei députés des 
paysans. La corporation des électeurs urbains est composée 
des bourgmestre», des membres des conseils municipa»x, 
des chefs de corps d'éta, de manufacturiers et de négo- 
ciants. Cette corporation choisit les députés dans son sein. 
Les corporations électora]es des campagnes ont les mmes 
bases et une organisation analogue. Les fonctionnaires 
biles ne sauraient tre Cus sans Pautorisatio du gouver- 
nement. 
La période électorale compreud trois années. Le souverain 
ordonne la convocation de états; mais il doit le faire au 
moins tous les trois ans. Les sessions des états ne peuvent 
pas durer plus de trois mois, à moins que le souverain n'en 
autorise la prolongation. Les affaires lutAfleures nt exl,res- 
sément le bt»t de la convocation des états. En outre, aux 
termes de cette constibttion, les fonctionnaires publics ne 
sont responsables de leurs actes administratifs qu'autant 
qu'ils ont agi de leur propre mouvement et sans axoir obéi 
aux ordres qui leur sont hièrarchiquement transmis. Les 
dëlibérations des ëtats doivent, dans la règle, ètre p»bli- 
ques. Les chefs d'administration qui se sont rendus v'ulon- 
tairement coupables d'une violation de la constitution peu- 
vent etre mis en état d'accusation, sur une décision ren,h,e 
d'accord par les deux chambres; mais s'il y a doule sur 
Uinterprétalion à donner an texte de la constitution, c'est 
la dièle germanique qui décide. Le pouvoir judiciaire est 
séparé du pouvoir administratif, et nul ne peut tre distrait 
de ses juges naturels, en mème temps que l'inéCeu,lance 
du pouvoir judiciaire est protégée. Tous les cures recon- 
n»s par t'Ëtat jouissent au mme titre de sa protection, et 
l'Etat exerce à leur égard l'inaP._.ble et imprerildible 
droit de surveillance et de protection dans  plus large 
extension. Les impéts deslinés à faire face aux beoin. ,le 
l'État sont ordinairement vots pour un espace de trois 
nées. Les impéts existants ne peuvent Otre augment,s ; et il 
ne saurait en ëtre établi de nouveaux sans l'assenliment 
préalable des états. La nécessité ou l'utilité d'une dépense 
et le besoin d'une taxe nouselle pour la couvrir doivent 
leur h'e démontrées. D'ailleurs, l'impét nouveau o, bien 
l'augmenlation d'impét contiuuent à ttre perçus jusqu'à 
ce que le gouvernement les supprime, d'accord avec l'as- 
semblée des états. Pour apporter des modifications à la cons- 
titution, une majorité des trois quarts des voix est nécessaire 
dans es deux chambres. En ce qui touche le régime de la 
presse et la librairie, on exécute les lois et les ordonnances 
rulatrices décretées par la confédération germanique. 
Dans le petit conseil de la Confédération, l'électorat oc- 
cupe la huitième place; et il a trois voix dans les assemblées 
plénières. En 18t9 il contribua pour une somme de .50,000 
thalers aux dépenses communes de la Confédëratien. Son 
contingent fédéral, à raison de 2 pour 100 de la population 
totale, e.q ,le 9,.39 hommes d'infanterie, de !,140 homm es de 
cavalerie, de 71S hommes d:artiller/e avec 22 piëces de canon 
et t 14 pionnior, ln,lpendamment «le la médaille du mé- 
rite militaire, déieinée à ceus qui prirent part aux canpa- 
gnes de 18t3 a 1815, et de la croia de mérite, qui depuis 
!S35 se donne / cenx qui ont un cerlain nombre d'anntes 
de service mditaire, il existe dans la Ilesse-Ëlectorale ttoi» 



I;8 
ordres de chevalerie,  savoir : t ° l'ordre du Lion d'Or, créé 
en 1770, divisé en quatre classes ; 2 ° l'ordre dst Itérite mili- 
taire, fondé en t719 ; 3 ° l'ordre du Casque de Fer, fondé en 
1814, en commémoration de la guerre de l'indépendance, et 
par{agé en trois classes. 
La maison de Hesse-Cassel est la branche alnée de la 
maison de H esse, fondée par le fils aihWde Philippe le 5la- 
gnanime, le landgrave Guillaume IV, dit le Saqe , qui établit 
sa résidence  Cassel et régna de 1567 à 1592. Il eut pour suc- 
cesseur son fils Maurice, qui embrassa le protestantisme, abdi- 
qua en 1627 en faveur de sou fils Guillaume V, et mour,t en 
1832. Guillaume V inlroduisit la loi de primogéniture dans 
sa famille, prit part à la guerre de trente ans, s'allia avec les 
Suédois, et mourut en 1637, après avoir élé mis au ban de 
l'Epire. Son frère puiné, Hermann, fonda la branche col- 
latérale .de Hesse-Rotenbourg, aujourd'hui éteinte. Guil- 
laulne VI, fils et successeur de Guillaume V, mourut en 
1663» laissant pour héritiers Gllillaame VII, mort en 1670, 
avant d'avoir alleint sa majorité, et Charles, qui succtda t son 
frère, sous la tutèle de sa mère. Un troisième fils de Guil- 
laume VI, Philippe, fonda la branche de Hesse-Phi- 
lippsthal. Charles, devenu majeur en 1675, pril alors 
les rénes du gouvernement. Depuis la guerre de trente ans, 
on avait constamment vu des troupes hessoises à la solde 
des grandes puissances continentales. Ce système avait amé- 
lioré les finances, et permis à la maison de Hesse-Cassel 
de tenir une cour brillante en mème temps que de conclure 
des mariages avantageux à Iélranger. Le fils aihWde Charles- 
FfCCie épousa UIrique-Eléonore, SœUr cadette du roi 
de Suède Charles Xll, qui lui succeda sur le trtne, et devint 
ainsi rbi de S»ède. A la mort de son père, arrivée en 1730, 
Frédéric prit aussi les rnes du gouvernement dans son land- 
gravial de liesse, mais en s'y faisant représenter par son frère 
Guillaume, qui. lui »ceeCa sous le nom de Guilla«me VIII, 
le 28 mars 175t, parce qu'il mourut sans laisser de descen- 
dance. Guillaume VIII prit part, comme allié de IAngle - 
terre, à la guerre de sept ans, laquelle valut beaucoup de 
gloire aux armes hessoises, mais eniraina une foule de ca- 
lalnités poar le pays, et mouruten 1760. Il eut pour succes- 
seur Frédtl'ie 11, qui avait embrassé le catbolicisme. Ce 
prince eut une COllr brillante, augmenta eonsidérablement 
son armée, et de 1776 à 1781 lint constamment un corps de 
2,000 hommes à la disposition de l'Angleterre, qui s'en 
servir pour combattre les insurgés de l'AraCique du ord. 
L'Anglelerre reconnut ce hon service en lui payant une 
somme de 21,276778 Ittalers (79,754,167 ff. 50 e). Avec 
cela il lui fut possible de faire beaucoup pour les sciences 
et pour les arts. 11 mourut en 1785, et eut pour successeur 
sou fils Guillaume IX. Après avoir pris part, dans le con- 
tingent de l'Empire, aux premiëres guerres contre la révolu- 
tion française, Guillaume IX areCa à la paix de Bàle, con- 
clue en 1795. En 1803 il fllt élevé à la diité d'Cecteur, et 
prit alors entame electeur de Hesse-Ca,.sel le nom de Guil- 
laume I . Le rtle équivoque joué par ce prince en 1806 
dëtermina 1apoléon, après la bataille de Iéua, à faire oc- 
cuper la ville de Cassel par des troupes françaises; et le 
traité de Tilsitt raya l'Cecteur de Hesse-Cassel de la liste des 
souverains, en mëme temps que ses Êtals ítaieut icorporés 
au nouveau royaume de Westphalie. 
Après sept années d'absence, l'Cecteur Guillaume let 
rentra dans ses États, à la fin de 1813 et relusa de reeon- 
naitre aucun caractère de légalité aux actes Iégislatifs, po- 
litiques ou administratifs du gouvernement westphalien. De 
là dans les rapports privés des simples citoyens une foule 
de procès, suscités surtout dans des questions de ventes 
domaniales, et dont un grand nombre ne sont pas encore 
lerminés à l'heure qu'il est. Dans sa manie pour l'ancien 
¢égime, l'Cecteur alla Jusqu'à rendre à son armíel'uniforme 
qu'elle portait avant les guerres de la révolution française, 
sans lui faire gré, ce du tricorne, de la poudre dans les che- 
veux et de la queue, avec le rétablissement de la baston- 
nade pour apprendre au soldat / bien astiquer son four- 

HESSE-CASSEL 
niment. En remontant sur le tr6ne de ses pères, l'Cecteur 
avait promis à ses snjets, dans une proclamation solennelle, 
de leur rendre leur assemblée d'états telle qu'elle existait 
avant 1806, mais avec abolition de toutes les immunités et 
priviléges COllsacrés par l'ancien ordre de choses. Cette as- 
semblée se réunit effectivement du 1 er mars au 2 juillet 1815 
et du 15 fevrier au t0 mai 1816. Le vent était alors aux 
constitutiOllS octroyées. L'électeur voulut donner la sienne 
et chargea en conséquence une commission de hauts fonction- 
naires de lui en rediger une. Le projet était définitivement 
arrèté, lorsque l'tlecteur, changeant d'avis, par sltite des 
velléités d'indépendance qu'avait témoignées l'assemblée des 
états en matière de vote de finances, déelara qu'il ne se. 
rait lmint donné de constitution à ses sujets. Au lieu de 
cela, il publia, le  mars 1817, un statut organique pour la 
maison souveraine et pour l'Êtat, contenant quelques-unes 
des dispositions du projet de constitution précédemment 
écarté; mais il cessa dès lors de convoquer l'assemblée 
des .tats, prélevant l'imptt et rendant des lois en vertu 
seulement de sa toute-puissance comme souverain légitime. 
La mort de ce prince, arrivée en 1821, ne modifia pas sen- 
siblement la situation. En augmentant le nombre des fonc- 
tionnaires, et par suite les dépenses publiques, son fils et 
successeur Guillaume II se créa, au contraire, de plus grands 
embarras. Le scandale de la liaison adultère qu'entretenait 
l'Cecteur avec la comtesse de Reichenbach irrita toujours 
davantage l'opinion, et en septembre 1830, au moment 
l'Cecteur et la comtesse se disposaient à revenir habiter 
Cassel, d'où ilsCaient depuis lonemps absents, une Cente 
éclata dans cette capitale. Elle prit tout de suite des propor- 
tions telles, que les autorités se virent dans la nécessité de 
laisser la bou rgeoisie se conslituer en garde nationale pour ré- 
tablir l'ordre dans la rue et dans les esprits. Des désordres 
semblables éclatèrent presque simnltanément sur divers 
points de l'électorat, notamment à Fulda et à lqanau. Il 
avait là une quasi-révolution. On fit comprendre à l'electeur 
que l'un;que moyen de conjurer le danger était d'accorder 
une constitution. Il s'exCutu à cet égard d'autant plus ai- 
sément que la constitution  laquelle on lui fit donner sou 
consentement était aussi monarcbique que possible, biais 
il n'en garda pas moins rancune h ses sujets d'avoir ainsi 
violentWsa volonté, et pour les punir il rsolut de s'abstenir 
à l'avenir d'habiter sa.bonne ville de Cassel, dont la popu- 
lation continuait d'ailleurs à se montrer fort hostile à la 
favorite, la comtesse de Reichenbach. Les habitants de Cassd 
se souciaient en réalité médiocrement de la présence on de 
l'absence de leur bien aimé souverain; mais l'expédition 
de toutes les affaires administratives souffrait beaucoup de 
ce que le chef de l'État ne résidait pas dans la mème ville 
que toutes les autorités centrales et supérieures. L'électeur 
lut donc invité à revenir habiter sa capitale; or, comme 
il n'entendait pas le faire sans Etre accompagné de sa con- 
cabine, la comtesse de Reichenbach, devenue l'objet toet 
particulier de la haine et du mépris public, et dont tout ré- 
cemment un court séjour à Wilhelmshoehe, chteaude 
plaisance voisin de Cassel, avait suffi pour provoquer les 
démonstrations populaires les plus injurieuses, l'Cecteur 
se décida à déclarer son fils co-régent et à partager avec lui 
l'exercice de l'autorité souveraine jusqu'à ce que sa santé 
lui permit de venir habiter sa capitale. Le manifeste conte- 
»ant ces dispositions était daté du 30 septembre 18311 ; et 
7 octobre suivant le prince ru-régent faisait son entrée 
lennelle à Cassel. On aurait pu croire que sous l'influence des 
nouvelles institutions l'action et la marche du gouverne- 
ment allaient Etre désormais aussi faciles que régulières; 
mais il fut loin d'en Etre ainsi. Le pouvoir, en faisant des 
concessions, en consentant à tracer des limites à l'exercice 
de ses prérogatives, ì rendre compte au pays de ses actes 
après aveir commencé par lui en justifier soit la nAsit, 
soit la légalité, n'avait jamais été de bonne foi. La cons- 
titution, ce n Cart a ses velx q»'un chiffon d papier sa.n 
leur, dont il [=i appartênait en toa« cas dïute:-lu.(h, r le tete 



tlESSE-CASSEL 
et de fixer l'esprit. Le papys, au contraire, avad pris au sé- 
rieux cette constitution octroyée, si insuffisante qu'elle lot 
d'ailleurs. De là tout aussitét des conflits entrele gouvernement 
et les états, expression plus fidèle et surtout plus indépen- 
dante qu'il ne s'y attendait des besoins physiques et moraux 
des populations. Le mariage morganatique que le prince élec- 
toral vo-r Cent ne tarda point à contracter avec la femme d'un 
lieutenant prussien, appelé Lehmann, après avoir acheté 
le consentement du mari à ,m divorce amiablement pro- 
noncé, et qu'il créa comtesse de Schaumbourg, indisposa 
siu-mlièrement contre lui l'opinion, et ne contribua pas peu 
à rendre de plus en plus aigres les rapporls du gouverne- 
ment avec les étdts, dans le sein desquels il se forma bien- 
t6t une opposition des plus nettement tranchées et ayant 
lour principaux organes les députés Jordan, Pfeiffer, Scbom- 
bourg et Wiederhold. La fixation du budget, la discussion 
des dépenses publiques, leur réduction, furent, comme dans 
tous les pays constilutionnels, le ter,-ain où s'etablit tout 
aussit6t la lutte entre le pouvoir exécutif et le pouvoir lé- 
gislatif. Le ministre Hasoenpilug fut formellement mis en 
accusation, en 1833, pour avoir retarde! la convocation de 
la troisiëme diële; et devant cet acte de vigueur i pouvoir 
n'hésita point ì dissoudre l'assemblée. C'était pour la 
deuxième fois déjà depuis l'établissement de la cons{itulion, 
qu'il recourait ì ce moi, en extreme. La diète suivante mit 
également le ministre prévaricateur en accusation ; mais le 
tribunal supérieur chargé de le luger rendit une sen{ence 
d'absolution. De 1834 ì 1847 l'histoire de Hesse-Cassel 
n'est que la monotone répétition des mmes événements. 
D'une part, c'est lepouvoir faisant riel'arbitraire en toute occa. 
sion, ne se gnant pas, au besoin, pour violer la constitu- 
tion, s'obstinant à maintenir ì la direction des affaires des mi- 
nistres sous erainement detestés, et dépensant le plus d'argent 
qu'il lui est possible; de l'autre, c'est l'assemblée des états 
luttant par i'or'ane d'une imposante minorité, et pariois d'u ne 
majorité décidée, contre les illégalités, les abus de pouvoir 
et les folles dépenses du gouvernement; et les populations 
qui assistent ì ces incessants tiraillements, qu'on accable 
d'imp6ts et qu'on s'efforce de condamner au mutisme, de 
prendre un intérèt de plus en plus vif à ce jeu des insti- 
tutions représentatives, où elles s'indignent de voir le pou- 
voir toujours tricber de la manière la plus audacieuse. 
Le 20 novembre 1847, l'Cecteur Guillaume II mourut à 
Francfort, où il s'était retiré depuis plusieurs années. Veuf 
en 1841, il avait tout aussitét épousé morganaliquement sa 
concubine, la comtesse de Reichenbach ; puis celle-ci étant 
venue ì mourir deux ans après, il avait épousé ( toujours 
morganatiquement) une certaine demoiselle Caroline de 
llerlepsch. Le prince électoral, jusques là simple co-régenl, 
devint alors électeur régnant sous le nom de Fredéric-Guil- 
iaume ler. 
La question d'argeut était toujours celle sur laquelle les 
ministres de  prince ne pouvaient point s'entendre avec les 
Cats, qui avaient refusé de voter la grosse lite civile de- 
mandée par le nouveau souverain. Une ordonnance de dis- 
solution, rendue le 22 lévrier 1848, futla réponse du gon- 
veruement ì cet acte d'indépendance, qualifié hautement 
de,rébellion, llais ì quelques jours de là, à la suite de notre 
révolution, l'Ailemagne était en feu, et i'éleclorat de Hesse- 
Cassel subissait des premiers le contre-coup des événements 
dont Paris avait élé le Ibéìtre dans la journée du 24 février. 
La crainte de voir partout proclamer la république rendit 
alors les petit; despotes allemands aussi souples et malléa- 
bles qu'ils s'étaient montrés auparavant rogues et iusolents. 
Les concessions ne leur co0taient que la peine de les signer ; 
et c'était merveille de oir comment la lumiëre démocratiqne 
illuminait tout / coup leur intdligence. Frédéric-Guil- 
laume ! er abolissait donc dès le 6 mars la censure sur les 
journaux et écrits périodiques; cinq jours aprb il accep- 
tait un ministère libéral. La diète, dissoute le 22 février, re- 
prenait ses travaux dès le t3 mars. Son personnel s'était 
accru des divers dép=tés / l'admission desquels le pouvoir 

69 
s'était précédemment oppos; et les soutiens de l'ordre 
de choses qui venait de s'écrouler s'étaient fait lutice 
en s'abstenant d'y para|tre. Cette assemblée vota tout 
aussitôt une série de lois organiques répondant aux exi- 
gences de la situation. Cette fois ce n'était plus avec l'as- 
semblée des états, mais avec l'Cecteur lui-mme que le 
ministère avait à lutter ; car, revenu de sa première frayeur, 
ce prince s'avisait maintenant de marchander ses conces- 
sions. L'année 1s48 et la suivante s'écoulèrent d'ailleurs 
aussi paisiblement que cela était possible au milieu" de la sur- 
excitation générale causée dans les esprits par les progrès de 
la révolution en Allemagne et par les efforts qu'elle tentait 
mur reconstituer l'uni{é nationale sous un pouvoir cenlral. 
L'année tss0, on se le rappelle, donna partout le sigual ì 
une réaction provoquée par les iautes et les excès des hom- 
mes qui s'étaient faits les représenlants par excellence de 
la liberlé et du progrès. Aussi le 27 février l'Cecteur ne 
craignait pas de renvoi, er le ministère libéral qu'il n'avait 
svpporté jusque alors qu'avec impatience, et de composer un 
nouveau cabinet, presidé par Hassenpflug, une des mes 
damnées de la rëaction. 
Hassenpflug s'efforça d'abord de donner le change ì la 
diète au moi, en d'un programme des plus modéré ; mais 
l'assemblce ne se laissa pas prendre ì ces beaux semblants, 
et y répondit à l'unanimité par un vole de dèfiance, suivi Iout 
aussit0t d'une ordonnance de prorogation. Quand elle fut 
appelée ì reprendre ses travaux, la lutte recommença de 
plus belle entre elle et le ministère réactionnaire, el tout 
naturellement sur les questions d'argent. La diète pe,'sistaut 
dans ses refus de voter les erCits demandés, le ministère 
Hasenpflug eut recours ì une dissolutiou. Mais cette me- 
sure n'eut d'autre résullat que d'amener (22 ao0t 1850) 
dans la nouvelle assemblee une majorilé démocratique et 
bien autrement hostile que la dernière diète. A son tour, 
cetle nouvelle assemblée Cait dissoute dès le 7 septembre 
suivant. Le ministëre déclara cinq iours plus lard le pa,s tout 
enlier en êtat de siCe, en investissant le chef suprê,ne de 
l'afinC, le général Ba0er, de l'autorilé la plus illimitee. 
On voulait évidemment faire de la répression, au besoin 
de la répression sanglante; et en dépit de ces provoca- 
tions les populalions restèrent calmes et paisibles. 5Iais il 
suifisait de la moindre étincelle pour produire un emlrase- 
ment général, tant la situation était tendue. Dans ces cir- 
coustauces, le comité permanent de la diète lança un 
acte d'accusation de haute trahison contre les ministres 
pour avoir violWla constitution. Le 13 septembre la ville 
de Cassel apprit, à sa grande surprie, que dans la nuit l'C 
lecteur et son conseiller Hassenpflug avaient pris la ri]ire 
pour aller se réfugier à Hanovre. De sa retraite, l'Cecteur 
et son ministre favori continuèrent à vouloir imposer leur 
volonté au pays; le général de Ha y nau, depui longtemps 
ì la retraite, fut remis en activité et chargé, en remplacement 
du général Ba0er, qui avait donné sa démission, d'exècuter 
les mesures de rigueur ì l'aide desquelles ils comptaient 
rétablir l'ancien ordre de choses, biais Haynau renconlra la 
mme résistance passive et léale que son prédécesseur. Le 
comité permanent des états décida que le général serait tra- 
duit devant les tribunaux sous l'accusation de haule tra. 
hison. En vain celui-ci essa,a d'exciter le corps des officiers 
ì lui prèter main-forte; liés par leur serment ì la constitu 
tion, les officiers en masse donnèrent leur démission. Toot 
annonçait un conflit imminent. 
ÉI de fait, i'intervenlion étrangère Cait dès lors chose ré- 
solue etl'électorat de Hesse-Cassei était le pa,s où devait se 
décider la question allemande. Les appels adl'eSSéS par Ha- 
senpflug ì laConfédération germanique, reconstituée comme 
ci-devant, avaient été entendus. Le t « novembre t8 50 uq 
corps austro-bavarois, commandé par le prince de la Tour 
et Taxis franchit la frontière de l'llectorat, et occupa 
Hanau, en mème temps qu'un corps prussien pénétrait 
par le nord et occupait Cassel et Fulda. L'armée hessoise 
fit alors licenciée et désarmée en méme temps que la 



70 HESSE-CASSEL  
|berté de la psse était abolie dans l'Ëlectorat et qne le 
recouvrement des imp6ts non consentis par la léslature 
était exigé de 'ive Irce des contribuables. Quand la garde 
civique eut étë egaiement dearmée et l'administration 
pnrgëe à tous ses degrés des fonctionnaires qui avaient cru 
leur conscience lice par le serment prêté à la constitution, 
Pélecteur fit sa rentree à Cassel, le 27 dcembre. En face de 
ces violences, qui excitèrent une émotion générale en Mie- 
magne et furent virement désapprouvées par la presse an- 
glaise, rattitode de la population demenra ce quelle avait 
toujours Ce, celle du satine et de la muderatiun. Cette con- 
dure si digne ne lui valut que de nouvelles persécutions. Des 
tribunaux militaires, composés d'ufticiers Crangera, furent 
sur tous les poinL du pays suhstitués  la magistrature 
hessoise. Bien que la constitution prit désormais Atre considé- 
rue comme n'existant plus, la rtsistance légale n'en con- 
tinua pas moins ; et le gouvernement, ayant laissé s'écouler 
e delai voulu par la cuu.,3litutivn sans convoquer la diète, 
le comitë permanent ,]es états mit de nouveau le ministre 
Hassenptig en accusation (3 ma.-s 1851 ), et quatre jours 
aprês tous ses membres etaicn! aTëtés. Une ordonnance 
du 29 juin suivant decldra nniles et non aenues toutes 
les luis qui conferaient à la diète le droit d'inlervenir dans 
la composition «les cours de justice. A la réaction puiilique 
'associa bientbt aussi la r6action religieuse, répresentce 
parVilmar et confiee aux pietistes, qui curent desormais la 
haute main en tout ce qui concerne le culte et l'instruction 
publique. Il n'y a dès lors rien d'tonnant h ce que jamais le 
mouvement d'émigration n'ait ëte plus prononcé qu'a ce mo- 
ment dans l'Eectocat, oit la misère avait pris une extension 
extraordinaire parsuite des charges imposées par l'ocoepa- 
tion étrangère. Les procès politiques devinrent de plus en 
plus nomhreux ; mais celui de tous qui excita le plusprofon- 
dément les s]mpathies publiques lut le procès qu'on intenta 
aux quatre membres du comite permanent des états, Schwar- 
aeaberg, ltenckel, Keliner et Groef. Le cinquième avait pu 
s'expatrier  temps. Tous forentcondamnés a une longue de- 
tention. Si le pouvoir consentir alors à convoquer les etats, 
sur les hases .de la constitution de 1831, il faut lui savoir 
peu gre de cet acte de condescendance ; car il lui fut arra- 
che par la necessité de faire de l'aent et d'obtenir le vote 
de l'imp6t. 1[ xa sans dire d'ailleurs que toutes les mesures 
avaient ctd prises pour que ce semblant de reprësenta- 
tion du pays fut une assembiëe de muets ( 30 juin, 1852). 
Le 27 mars 1852, une résoluti«u de la diëte germanique 
abolit complétenent la constitution de 1831 ainsi que les 
amendements et additions qu'on y avait ajoutés en 18ff8 
et 18/9, et invita l'electeur a oclroer à ses sujets une nou- 
velle loi d'Etat, qui fut effectivement publiée le 13 avril 
suivant: nous l'avons analsée plus haut. 
HESSE-DARMSTADT ( Grand-duché de ). Il se 
compo,e de deux parties principales et presque 6gales, que 
.pareut le comté de Hanau, appartenant à la l-lesse-Elec- 
rurale, et le territoire de la ville lbre de Francfort, et qui 
occupent une superticie d'environ 106 mriamëtres carres. 
La partie seltentriunale, ou Hesse-Suoérieure. q,ticunfine à 
la llesse-Èectorale, au duché de Nassau et  la Prusse, est 
montagneuse, parcourue par les nombreuses ramifications 
du Vogelsberg, qui au Taufstein et à l'Oberwald atteint une 
élévation de 750 a 760 mëtres, par quelques embranclwment o 
du mont Taunus et du Westerwald. et est arroe par la 
Lahn, la Nidda, la Wetter, l'Eder et la Fulda. Son climat 
est celui du nord de l'Allemagne, et, sauf la ferlile Wetté- 
ravie, le sol en est pierreux. La partie méridionale, ou pro- 
rinces du Starkenburg or de la Hes.ge-Rhénane, confinant 
au duché-de Nassan, à la Hesse-Electorale, a la Bavière, 
au grand-ducbé de Bade et h la Prusse. n'est montagneuse 
qu'à rest, oit viennent se prolonger les deruiëres ramifica- 
lions de l'Odenwald, qui h Melibocus alteint onu élévation 
«le 550 mètxes. Le long «le la fi'untiëre occidentale s','tend, 
dans la direction ,lu sud au nord. la magnifi,lae Bergstrase" 
Celle partie mëridionale da rav.d-duchë c,st an'osée par 

HESSI-,,,,,, , -, • 
le Bbin et le Main, la Nahe et le Neckar, qui y touchent plus 
ou moins. Le climat en est doux, et la vgtion Mog.e 
celle du sud  rMlemagne. 
us le rapport politique, le pays e divisd en tis pro- 
vin : Srkenburg, la Hse-Supfiee, et la Hesse-ghé- 
nane. A latin de 1852, la ulatlon totale s'dlevait à 51,311 
habin do 217,798 catholique% 4,199 vaudois et nen- 
nonites, viron 9,000 jfifs, et le çe appartenait au cuite 
luthêden ou  la religion formde, con6mdue, depu 
182, dans la HsBhénane, sous le nom d'Eglise protes- 
tante unie. Trois surintendants surveillent le cul ps- 
nt: les populations catholiques relëveat de l'autori 
ituelle de l'évque de Mayence, et les jnifs ont six grands- 
rabhins. Les principales productions d, grand-duché sont 
les réales, I fruits, les amandes, les chignes et sur- 
tout les vi. s crO de Nierstein, de Laubenheim, de 
Benheim, d'lngelheim (vin rouge) aux environs de 
Mayence, de Scharlachbeg ps de Bingen, de Liebfran- 
milch près de Worms, sont 1 plus en renom. On rl:e 
en outre du lin, du chèvre, du bac, des pavo et 
des semonces forestières. Le règne minéral ne fournit guëre 
que du cuivre, du ier et de la bouffie. L'ricuItm etP6iève 
du betail sont dans l'etat le plus florisnl, et l'activioE in- 
dustrielle y a pris de larg développemen.  Hesse-Su- 
fleure suout  distingue r s nombreuses maua 
lur de lainges, de cotonnades, de toiles et de b. U exis 
beaucoup de tannefies ns l'Odenwalde, et dans la 
ghénane d'impont huilefi et usines à inonder l'oge. Eu 
182 la rol des vins s'Ceva à 3 llions de litres, 
pntant une valeur de ,800,000 florins. De honnesrous 
et la nagahilioE des rivières favorisent le commerce. En outre, 
la partie mdridione du pays est traversee par le chem 
de fer du Main or du eckar; sa pavie septentrionale par 
le chemin de fer du Main et du Wer ; et la Hesoe-Bhé- 
nane ne Mera pas non plus à avoir son embranchement 
sur le chemin de 51ayence à Ludwigshen, en ce moment 
en voie de consuction. La ville la plus dustrieuse d! 
grand-duché estOffenbach, ou de,x foir annuelles ont 
été stitus en 18g. Masmoe t le nd oene du 
commerce de transit et d'expédition. En ce qui rardelïns- 
truction publique,  exis une univeité à Gin, un 
séminaire protesnt  Friberg, deux ecol normales pri- 
mair pour I cathoquet ! protestants, une école ior- 
ti6oe, sept lyses et collég, six 61 industriell et t,o0o 
dcol élémenires, aii que d'autres étahlissemen. 
revenus publioe pour l'exerdoe iennal de 1851  1853 
éient évalués h 8,06,873 flofins, et les dépen pour la 
mme période de temps fi 8,159,000 florins. A la fin de 
180 la dure pnbliques'élevait à 18,868,000 flofins. L'effecf 
dol'afinC, non compfisla rhee, est de t I ,9t hommes d'in- 
fanterie, de 1,416 hommes de cavalerie, et de 1,016 homm 
d'aillefie, avec  pièc de canon et 127 pione. 
La loi fondame du 7 décembre 182 a rglé la nsfi- 
ution politique du pays. Le and-duc, aujourd'hui f.ouis III, 
t le chef suprême de l'Ét, et la uveraineté est héri- 
ire dans la ison gudule svant l'ore de primo- 
géniture et dans la ligne directe provenant de mariages con- 
tc entre prin et pnc (nus ebenbfirtiger Ehe) 
à déçaut à'héfitiers mles dans h lie directe, elle pas 
la lie fémine. La lis civile da grand-duc est fixée à 
581,000 flos. Il prend le tre de grand-duc de Itesoe et 
du Rhin et reçoit la qualifition d'Altesse roa/e, qui d 
puis 18 se donne aussi an and-duc héritier, tandis que 
I pfinc puînés et 1 pfinc ne reçoivent que cee 
d'Altesse grand-ducale, hdépendamment  quelles mé- 
daill d'honneur, le nd-duc dispo de deux ordres de 
chevalerie : Fordoe de Louh, cé en 1807 et pagé en 
cinq elass, et l'ord de Phifippo le Magnanime, fond6 
en tac0, et qui comprend qua das. La oepntation 
du pays se mpo de deux chambres, qui sont convus 
tous les trois ans en di6te ordinaire. L r#gl qui p- 
aident à ',a fortion des deux chambres ont té plusieurs 



HESSE-DAIMSTADT 
lois modiflées depuis 15$. Le ministëre d'Etat se compose 
de cinq départements ministériels : alfaires etraugères et 
maison du grand-duc, lutCieur, finances, justice et guerre. 
Le gran.d-duché occupe la neuvltme place dans l'ordre de 
la confédération germanique et exerce trois voix dans Pas- 
sembiée plénière. Son contingent fdéral, à raison de un et 
demi p. 160 du total de la population, est de 10,43o hommes 
dïufanteric, 1,275 hommes de cavalerie, et 86 hommes 
d'artillerie, avec 2 pièces de canon et t27 pionniers; il fait 
partie du neuvième corps d'armee de la Confdération. 
La maison de Hesse-Darmstdt est la branche principale 
de la ligne cadette de la maison de Ho sse, et fut fondée en 
1567 par Georges I er, dit le Pieux, le plus jeune des fils 
de Philippe le Magnanime. Georges 1 er, mort en 1596, eut 
pour successeur l'aihWde ses fils, Louis V, lequel mourut 
en 1626, laissant pour héritier son fils Georges II, mort 
eu 1661. Louis VI, fils et successeur de ce dernier, mourut 
en 1678 ; et son fils, Louis Vil, ne régua qu'une couple de 
mois. 11 mourut à Gotba, le 30 ao0t t678, le jour mëme 
fixé pour con mariage avec la fille du duc Maurice de Saxe- 
Zeitz. A celui-ci succéda son frère consanguin, Ernest-Louis, 
mo«'t en 1";39, léguant la souveraineté ì son fils Louis VIII, 
qui régna jusqu'en 1768. Le landgrave Louis IX, qui lui 
succéda, perdit, aux termes de la paix de Lunéville, toutes 
• es possessions situées sur la rive gauche du Rhin, et en 
fut indemnisé par divers territoires sur la rive droite de ce 
fleuve eten Westphalie. Après avoir accédé, en 1806, à la 
Confedération du Rhin, il prit, sous le nom de Louis 1 er, 
le titre de grand-duc de ttesse-Darrnstadt, demeuré de- 
puis dans sa maison. Il se mourra fidële ì l'alliance de la 
France taat que la fortune sembla protéger Napoléon; mais 
après les revers que celui-ci éprouva en 1813 le grand-duc 
s'empressa d'accéder ì la coalition; et le congrès de Vienne 
reconstitua ses États à peu près tels qu'ils étaient composés 
au debut des guerres de la révolution française. 
En mai 180, pour remplir les promesses faites en 1813, 
le grand-duc accorda à ses sujets une constitution repré- 
sentative : mais l'assemblée des états convoquee pour la dis- 
cuter la repoussa, et Louis I er en dut octroyer une autre, 
qui fut miv en activité le 17 décembre suivant. C'est justice 
de reconnait:'e que ce prince, homme éclairé et dont le gou- 
vernement mourra dès lors constamment les tendances les 
plus libérale% prit cet acte au sérieux. Aussi, pendant tout 
son rme, le grand-ducbé de Hesse-Darmstadt offrit-il 
l'Allemagne le pectacle d'un gouvernement constitutionnel, 
en miniature sans doute, mais fonctionnant avec une grande 
siucérit. La presse resta soumise à la censure préalable, 
parce qmJ'ainsi le voulaient les prescriptious générales de 
l'acte fédéral rattachant le pays à la Confédération germa- 
niqun; mais la censure fut du moins exercée avec tant de lais- 
ser-aller, que relativement au reste de l'Mlemagne le grand- 
duche parut en complète possession de la liberté de la presse. 
Les dictes furent toujours régulièrement convoquées aux 
époques fixées par la constilutiun. La quatrième conmema 
ses travaux en novembre 1829. Sa session n'était pas encore 
terminëe, lorsque le grand-duc Louis 1 « mouru{, le 6 avril 
1830, laissant pour successeur son fils Louis II. Le nouveau 
gran'i-duc était peu populaire, parce qu'on le croyait hostile 
aux institutions nouvelles ; et la diète lui donna immédia- 
tement un temoiguage irrécusable des défiances et des mau- 
vaises dis,p, ositions da pas à son égard, en refusant de mettre 
ì la charge de l'État deux milbons de florins de dettes per- 
sonnelles de ce prince, de méme qu'en réduisant le chiffre 
de la liste civile de 591,60 florins à 576,000. Les troubles 
qui éclatèrent dans le pays de Hesse-Cassel, la fermentation 
générale produite en AIlemagne par la révolution de Juillet 
et ensuite par les Courantes péripéties de la lutte soutenue 
contre le tsar par les Polonais, curent nécessairement leur 
contre-coup dans le grand-duché de Hesse-Darmstadt, dont 
le nouveau gonvernement ne dissimulait point ses tendances 
ractionnaires. Des associations qui se formèrent à l'effet de 
venir en aide  la Polouecombattant pourson indépendance 

7t 
furent interditcs par le pouvoir, qui bientôt s'empres.a de 
publier et de mettre à exécution les résolutions de la dic 
germanique ayant pour but de prorire les rcunion po- 
pulaires, les demonrations politiques et les socictés se- 
crètes. Le gouvernement grand-ducal, bravant la réproba- 
tion de l'opinion, entreprit alors, sans le coucours des états, 
la rorganisation administrative et judiciaire du pays. La 
cinquième diète, dont les t[avaux commencërent le 5 dé- 
cembre 1832, n'hésita point à blamer énerquement la 
conduite du pouvoir. Les états formulèrent même des propo- 
sitions relatives à la position que le gouvernement prétendait 
faire au pays dans ses rapports avec la Conlédération germa- 
nique, et, ì l'instar des états de Bade et de Wurtember.,_,, 
réclamèrent hautement i'abolilion de la censure. L'assem- 
blée fut dissoute le 2 novenbre 1833; et dans uu edit 
publié pour justifier cette mesure le gouvernement parla 
d'un pamoEi qui avait pris une attitude d'hostilite systé- 
matique ì légard da pouvoir, et qui faussait l'esprit «les 
in.titotions en prétendant étendre les attributions de la dite 
ami delà des limites que leur tixait la constitution. Divers 
fonctionnaires publics qui avaient fait partie de l'opposition 
dans l'assemblée des états, Gagera entre autres, se sé- 
parèrent alors avec éclat du gouvernement en donnant leur 
démission. 
Depuis lors, la hltte fut constante entre un pouvoir réac- 
teur et hostile aux libertés publiques et le pays, dont la 
drsaffection, de plus en plus grande, trouvait un organe de 
plus en plus puissant dans l'oppo.ition, toujours nombreuse, 
de la seconde chambre des états. Gagera devint l'un des che[» 
de cette opposition constitutionnelle, que le pouvoir traitait 
de factieux, mais dont tous ses efforts lutent impuissant à 
empcher la réélection aux différentes diètes qui se succé- 
dèrent dès lors. Quand les questions financières ou adminis- 
tratives ne fournissaient pas aux passions en présence un 
terrain assez vaste, elles se dédommageaient en se rejetant 
sur les questions de détail. Le vote des differentes lois re- 
latives h la création de voies ferrées, notamment, donna lieu 
à mettre de plus en plus en évidence le desaccord complet du 
gouvernement et du pays. L'historique de ces tiraillement, 
intérieurs n'a qu'un inlrêt tout local ; nous nous dispen- 
serons, par conséquent, de presenter ici, mème par voie 
de simple analyse, le détail des travaux législatifs ci des 
luttes parlementaires qui occupèrent chacune des différentes 
diètes réunies jusqu'en 187. Si cette session est de noire 
part l'objet d'une exception, c'est qu:à ce moment l'Europe 
tout entière avait comme le pressentiment des grands éé- 
nements qui devaient bient6t s'accoplir. Toutes les intelli- 
gences se préoccupaient de questions politiques avec une 
ardeur jusque alors inouie; et les hommes d'6lite qui quelques 
années auparavant avaient cédé au découragement et dit 
adieu à la politiqoe )- revenaient maintenant avec empres- 
sement. C'est ainsi que Gagern, qui depois louer.reps s'oc- 
cupait uniquement de travaux aicoles, se laissa élire 
membre de la diète, et vint reprendre sa place dans cette as- 
semblee, en fvrier 1847; et l'opposition le reconnot tout 
aussit6t pour chef. Des élections génrales curent lieu, à la 
fin de cette même année, pour la diète nouvelle qui devait 
se réunir ì cette époque; et, en dépit de tous les efforts faits 
par legouvernement pour en fausser l'esprit, elles donnèrent 
encore plus de force ì l'opposition. Dès l'ouverture de I« 
session, en septembre t87, les débats de l'adresse prou- 
vèrent les progrès immenses qu'avait faits l'idée de la 
rësistance au pouvoir. Après une courte prorogation, l'as. 
semblée reprit ses travaux le 28 f6vrier 184t;. La mention 
de cette simple date indique tout de suite au lecteur ce quc la 
position avait de tendu. Ce même jour les députés Gagern, 
Wernber et Frank proposaient à l'a.semblée de voter 
l'établissem«nt d'one repré»entation nationale commune à 
tourte l'Allemagne, et de remettr la direction supërieure des 
affaire% tant interiem'es qu'extérieures «le l'Allemagne  à une 
,cule pa;ssance, de»ignant franchement la Prusse pom- jouer 
ce iSh. Cepenlant la rVohltion maichair a pas de ,_.'eat:! ; e 



le ministère du grand-duc s'efforça vainement de l'arrèter 
par des promesses : liberté de la presse, organisation de la 
garde nationale, publicité des débats judiciaires et introduc- 
tion du jury, tout cela devait ttre accordé sous quelques 
jours. A ce moment le grand-duc comprit qu'il n'était plus 
l'homme de la situation; et le 5 mars il se donna son fils 
pour eu-régent, en mtme temps qu'il renvoyait ses anciens 
ministres et que, aux acc3amations universelles du pays, il 
appelait .à la direction des affaires un nouveau cabinet pré- 
sidé par Henri de Gagera. C'est ce cabinet qui se chargea 
• de réaliser les belles et beaucoup trop tardives promesses 
de la précédente administration. Mais bientOt on vil éclater 
parmi les populations des campagnes de l'Odenwa-tde et du 
nord du grand-duché une agitation semblable d celle qui, 
en ! 525, avait donné lieu  la guerre des p a y s a n s. Il y eut là 
soulèvement en masse conlre les propriétaires fonciers ; et 
dans ces désordres il ni fut pas difficile de recomaitre l'ac- 
tion du parti démocratique et socialiste, aux yeux de qui 
l'ancienne opposition constitutionnelle se composait d'en- 
nemis de la liberté non moins dangereux que les partisans 
avoués du despotisme de l'ancien réme. Ce parti, quoique 
ne conqituant qu'une extr6me minorité sans racines dans 
le pa.s, auquel il inspirait en général la plus viveantipathie, 
n'en parvint I,as moins, en raison des circomtances excep- 
tionnelles où l'on se trouvait,  l'agiter violemment à la 
_urface. Le mini-tère Gagern no tarda donc pas h ètre si- 
gnalé comme réactionnaire, et son cite[ ayant été é:u député 
h l'as»emblée nationale convoquée  Francfort, d'autres 
hommes se trouvèrent naturellement appelés à prendre la 
direction des affaire dans le grand-duché. 
La mort du grand-duc Louis II, arrivée sur ces enlrelaites 
( 16 juin 1848), ne changea rien t la situation; et son lils, 
que depuis trois moi il avait associé d l'exercice de la sou- 
x-eraineté, lui succéda sans conteste sous le nom de Louis Iii. 
Le nouveau cabinet commué  la suite de la retraite de Henri 
de Gagern deme,tra fidèle au programme politique de cet 
homme d'État, mais eut comme lui à lutter contre le parti 
républicain, qui chaque jour aifichait davantage ses préten- 
tions. Ce quïl exigeait en ce moment, c'était la democra- 
tisation de la loi eleclorale et la convocation d'une assemblée 
nouvelle en remplacement de celle que lesévénements de mars 
avaient trouvée en ionctions, et qui continuait à reprcsenter 
le pays. Ces idées acquérant toujours plus de force au sein 
mème de cette assemblee, le ministère prit le parti de la pro- 
roger indéfiniment; mesure qui fit aussitOt jeter les hauts 
cris à l'opposition republicaine. Le gouvernement n'en con- 
tinua pas moins à user largement de son droit d'initiative 
pour opérer seul dans l'administration et la legi»lation les 
reformes depuis longtemps reclamées par l'esprit du temps. 
Mais ces reformes, en détruisant une partie des sources du 
retenu public, ne laissèrent pas que d'accroitre les dilficul- 
tés finaneiëres du moment; et un iml, èt extraordinaire etabli 
sur les revenus ne produisit oas les résultats qu'on s'en etait 
Les cbambres prorogëes se réunirent de nouveau, en no- 
vembre t88; et le gouvernement leur présenta alors un 
proiet de loi électorale ayant pour base le suffrage univer- 
sel. La discussion de cette loi se prolongea jusqu'au milieu 
de l'année suivante; et la dissolution de l'ancienne diète ne 
put en conséquence avoir lieu que le 6 mai lS. La toi 
électorale publiée le 1 ¢ septembre 186 déclarait tous les 
citoyens Iggs de vingt-cinq ans en possession d'élire les 
membres de la seconde chambre, compose de cinquante 
députés. Tout citoyen honorable ggé de trente ans était eli- 
gible à l'une et à l'autre chambre. La première chambre, 
composée de vin-cinq membres, était élue par ies mille 
citoyens les pln; imposés de chacun des dix dpartements 
dans lesquels le territoire du grand-duché avait été divisé 
en 1818. on et pu croire la marche régulière des affaires 
désormais as»urée; mais par ses exigences et ses pretentions 
le parti extreme rendit bient6t nuis les resultats des refor- 
mes qui venaient d'ètre opérées. 'a'ant plus de prétexte 

HESSE-DARMSTADT  H 
i /t l'inCCieur, ce fut en esploitant les questions extérieurea 
que l'agitation démocratique continua/t se produire. L'a- 
doption de laconstitution de l'Empire, votée par le parlement 
national de Francfort comme prelimiuaire et base de la 
grande unité allemande, provoqua des démonstrations dites 
patriotigues , i la suite desquelles surgirent des conflits re- 
grettables; et bient0t le mouvement franchement révoln- 
tionnaire, qui avait son centre d'action dans le grand-duché 
de Bade, se propagea aussi dans le grand-duché de Hesse. 
Darmstadt, tout en y rencontrant plus d'obstacles et de 
sistance que dans le reste des petits Etats de i'Allemagne 
centrale. C'est ainsi que dês le 26 mai 1869 les assembles 
populaires ca plein air furent prohibees par le gous-erne- 
ment, qui n'hesita point  mettre une partie du pa.s en 
etat de siege. Puis, la réaction contre les excès de la dema. 
gogie gagnant chaque jour plus de terrain, un ministère 
o,tsertement contre-révolutionnaire se coustitua, et les 
troupes de ltesse-Darmstadt aidërent les troupes prussiennes 
à rétablir l'ordre dans le grand-duchè de Bade. 
Les cloutions faites aux termes de la nouvelle loi électo. 
raie donneront au larti denmcratique la majorité dans la 
diète qui se reunit a la fin de décembre lS.i, et cette as- 
semblee fut en conséquence dissoute le 30 janvier tS»0. 
L'assemblee nouvelle qui se réunit en septembre suivant, 
provenant d'cloutions faites en vertu de la mgme loi élec- 
torale, devait nécessairement présenter les mgmes éléments 
dans sa composition. Le parti démocratique continua donc 
 y avoir la majorité. L'hostilité de cette dicte/ l'égard du 
gouvernement se traduisit bient,t par un refus absolu du 
vote de I'.:mpOt; mais le pouvoir, se sentant maintenant as- 
sez fort, ont non-seulement recours  une dissolution, mais 
encore abolit la loi électorale de 1819, et de son autorité 
privee en octroya une, d'après laquelle l'exercice da droit 
electoral etait soumis  la condition du pasement d'une cote 
de contribution persotmelle. Les élections faites d'aprè 
ces bases ne donnèrent de tnajorité décidée  aucun des 
partis en provenue; et dans la diëte qui s'ouvrir à la fin de 
janvier 1851 le parti 'démocratique continua  compter 
d'assez nombreux représentants pour conserver une intpor- 
tance politique réelle. Des discussions relatives aux rapports 
douaniers du pays avec les États limitrophes, ainsi qu'avec le 
Zolls erein, occupèrent In plus grande partie des sessions de 
1851 et de 1852. Cette derniëre date indique déj que nous 
sommes arrives au moment où le triomphe de la réaction 
est complet, et où dans le pa)s de Hesse-Darmstadt, comme 
ailleurs, I « revolution de 1868 a vécu. 
HESSE-ÉLECTORALE. l-o9e-. Hr.ss-CSL. 
HESSE-IlOMBOURG  landgraviat qui .se compose 
de la seigneurie de Ho mbourg-ès-Monts et de la sei- 
gneurie de Meisenheim ; la première, limitée par la Hesse- 
Darmstadt, la Hesse Électorale et le duché de .Xassan ; la 
seconde, situé au decà du Rhin, par la Prusse et la Ba- 
r/ère; offrant ensemble une superficie de 55 kilomètres 
carres, dont 15 kilomètres pour Hombourg et 40 pour Mei- 
senheim. Hombourg est une jolie contrée, bien lertile, tandis 
que Meisenheim, traversé par le H u n d s r u c k, est un pays 
montagneux, mais en revanche riche en fer et en houille. La 
population totale s'ël/ve à 2,91 habitants, dont lt,13 
pour Hombourg et 13,755 pour Meisenheim; sur ce nmnbre 
on compte 3,000 catholiques, environ 150 juifs, et le reste 
protestants des deux communions. 
La force armée se compose de  compognies de chas- 
seurs, fortes, Ch y comprenant la réserve, de 488 hommes. 
Les revenus publics etaient évalués pour l'année 185 à 
33,3,381 ff., les dëpenses 336,608 ff., et la dette publique 
s'elevait h t 52,70 ff. Le contingent fédéral est de 350 bommes, 
compris dans te onzième corps d'armée. 
Les landgraves de Hesse- Hombourg sont une branche colla- 
' térale dela maison de ltesse-Darmstadt datant de 1596. L'acte 
constitutif de la Confèderation du Rhin les plaça sous la sou- 
i verameté de la branche ainée; mais le ¢ongrës de Vienne 
les reMaura dans la jouissance de leurs droits. Le landgrave 



HE55E-HOMBOURG -- HÉTAIRIE 
actuellement réaant, Ferdinand-IIenri-Frdértc, ancien 
général au service d'Autriche, né en 1783, et qui succéda 
en septembre t868 à son frère Gustave-Adolphe-Frédéri% 
n'ayant point d'enfants, le petit pays de Hesse-Hombourg 
fera à sa mort retour au grand-ducbé de Hesse-I)arm- 
stadt. 
HESSE-PH|LIPPSTHAL  ligne cadette et collatérale 
de la maisou électorale de H esse- Casse I, sans souverai- 
neté. Elle descend de Philippe, né en 1655, troisième fils 
du landgrave Guillaume VI et d'Hedwige-Sophie, sœur du 
grand-électeur de Brandebourg, et se subdivise elle-mème en 
deux branches : ltesse-Philippsthal et Hesse-Philippsthal- 
yBat'c.h.feld. 
HESYClllASTES les calmes, les silencieux (du 
grec tnoZ;a , tranquillité, repos). Ainsi se nommaient autre- 
fois les moines contemplateurs du monastère du mont Mhos. 
Leur doctrine, que l'Église vit sur{r dans le onzième siècle, 
fut approuvée par un concile de Constantinople, l'an 1341, 
puis condamnée par un autre, tenu anssi dans cette capi- 
tale, en t351. Un des actes essentiels de cette doctriue con- 
sistait à se tenir immobile, les yeux baisés et les regards 
attachés à son nombril, en attendant que, ravi en extase, on 
en aperçut sortir les flammes impalpables de la lumiëre in- 
¢réëe, ce qui valut  ces visionnaires le singulier surnom 
d'ombilicaires (du mot latin ombilicus, nombril ). Ils pre- 
naient cette partie-milien de leur corps pour un autre Thabor, 
sur la cime duquel ils espéraient voir s'épandre la divine et 
;umineuse essence, qui s'offrit aux Ap6tres drant la t r a n s- 
f i g u r a t i o n. 
IIÉSYCHIUS grammairien grec d'Alexandrie, qui vé. 
cul vers la fin du quatrième siècle après J.-C., selon d'autres 
dans le sixiërae siècle, et qui a composé un lexique grec, 
dont il empunta en partie les matériaux à des ouvrages ana- 
logues plus anciens. Il ne nous en reste qu'un abrégé, 
plein de moh nouveaux et d'exemples tiré des portes, des 
orateurs, des historiens et des médecins (voe . Dc'ro.- 
xmE, tome Vll, p. 558). La premiëro édition de ce dic- 
tionnaire est due à Muserus (Venis«, 15t4, in-folio); elle 
laisse beaucoup à désirer. La meilleure est celle que donnë- 
rent Alherti et Bulmken (2 volumes, Leyde, 1746-1766, in- 
tblio);. Schaw y ajoota des complémenL; (Leipzig, 1792). 
IIESYCHIUS de llilet, historien h qui Fou donne le 
surnom d'Illustre, vivat! au sixième siècle de notre ère. 
Il avait écrit une chronique depuis les temps les plus an- 
ciens jusqu' la mort d'Anastase, dont il nous reste des frag- 
ments, et une table alpllabétiqqe des principaux savants 
grées, notamment des pbilosophes, tirée en majeure partie 
de l'ouvrage de Dtogène «le Laerte. Ces deux ouvrages ont 
etWpubli par Meursius (Leyde, 1613), et par Orelli 
ç Leiz..ig, 189.0 ). 
||ETAIRES ( d'gx«'.'0, amie, maitresse). Chez les Grecs 
on appelait ainsi les c o n r t is a n e s, sans y attacher toutefois 
une acception dédonorante, grâce au sentiment «lu beau 
qui animait la nation grecque. Des les temps les plus an- 
ciens, nous trouvons de ces hdtaires se rattachant au cidre 
religieux, à C o r i n t b e, et partictdièrement à Athènes, depuis 
. t'époque de Solon. En tolérant des filles et des femmes pu- 
bliques pour les étrangers et les célibataires, il avait cherché 
ci garantir l'inviolabilité de la foi conjugale. C'étaient lta- 
bituellement des esdaves, ou mme des femmes libres, qui 
aux degrés les plus divers, et sous l'enseigne d'un art agréa. 
blé, qu'elles exerçaient en effet comme danseuses et joueuses 
de cithare ou de flte, venaient étaler leurs charmes dans 
les banquets et les f.tes. A partir de Périrlès, l'ëtat ne se 
fit pa.g scrupule de lever un imp6t sur cette industrie. Quel- 
ques hétaires, distingqées par leur esprit et par l'élégance 
de leur conversation, surent mme réunir autour d'elles les 
hommes d'tat les plus brillants, les orateurs, les pbiioso- 
phes, les poëtes, Périclès, A]cibiade, Hypéride, Platon, 
Socrat.e; d'autres obtinrent même une importance politique, 
et des statues furent ërigées en leur honneqr : telles furent 
Aspasle; T h a ï s, maitresse d'Alexandre et,'plus tard, épou se 
. r. LX cosvra:s.  . x. 

73 
de Ptolémée Lagus; Myrrhina, qui exerça un empire absolu 
sur le roi Démétrius ; Thargélie, Lamie, Léoena, etc. D'autres 
encore étaient connues par leur talent pour la sduction, 
comme La ïs de Sicile, Théodote, et, par-dessus toutes, 
P h r y n é de Thespies, qui servir à Praxitèle de modèle pour 
ses statues de Vénus. Aussi ont-elles été pour les anciens un 
sujet particulier d'observation, dans des écrits spéciaux, tels 
que les Dialogues des H¢taires, par Lucien, et les Lettres 
des Hétaires, par Alcipbron, et forment-elles le nœud de ce 
qu'on appelle la nouvelle comédie grecque. Dans les temps 
modernes, le tableau le plus exact de leur manière de vivre 
nous a été donné par Wieland, dans son Mnandre et G19- 
cdrion, ainsi que dans son Aristippe; F. Jacobs en fait une 
peinture aussi agréable qu'instructive, dans ses deux excel- 
lentes dissertations intitulées : Des Femmes 9re«/ues, et Des 
Hétaires, inséré.es dans ses Œuvres mélées ( Leipzig, t830). 
Consultez aussi Chanssard, Fêtes el Courtisanes de la Grëce. 
Au masculin, les hdtares (a{p{) ou amis, étaient 
une espèce de gardes du corps, connus surtout dans l'histoire 
d'Alexaudre le Graud. 
HÉTAIRIE nom d'ne société secrëte dont l'origine 
est restée énigmatique, mais qui n'a pas laissé que d'exercer 
une influence directe sur le sort de la Grèce. Il parait qu'elle 
fut fondée par le Thessalien Constantin R h i sa s, qui vivait 
à la fin du siècle dernier, à l'effet de donner de l'unit et 
de la force au sentimeut de la nationalité qui  cette époque 
se réveillait, aprës un long somr,eil, patati les diverses 
populations grecques de la Turquie. Ce lut parmi les 
p h t e s grées que Blfigas crut devoir chercher les preraiers 
éléments de cette patriotique association; et c'est pour euï 
qu'il composa ses chanLs nationaux et guerriers, calqués en 
partie sqr les cbants patriotiques de la révolution française, 
et devenus tout aussitOt popalaires en Grèce. Telle qu'il l'a- 
vait conçue, l'association ne devait obéir qu'à une mme 
penser directrice. La religion lui en avait sembié l'expres 
sion la plus heureuse et la plus contpbte; et ou recomman- 
dait aux initiés de coufoudre dans leur esprit l'amour de la 
religion et celui de la patrie, la haine implacable pour les 
Turcs et l'aspiration incessante à l'mdépendance et a la li- 
berté. La société était d'ailleurs disisée en classes, çù les 
initiés étaient admis en raison de l'étendue pire ou moins 
grande de leur intelligence et de leurs connaissances. La 
mort violente de Rhigas (mai 1798 ) l'empcha de mettre 
exécution les grands projets qu'il avait conçus ; mais i'i,e- 
tairie, fondée par lui, n'en eut pas moins d'importants r,.- 
suitats pour la Grèce. Les aspirations à l'indépendance qu'elle 
avait suscitées parmi les populations grecques survëcurent 
 Rhigas; ou du moins, quand o» s'occupa pires tard de re- 
constituer une hétairie, on en trouva tous les éléments deja 
preparés et réunis. On ne sait pas au uste si ce fut en lfSt ou 
1815, ou encore en 1 S 17, que cette idée se produisit; ce qu'il y 
a de certain, c'est que cette fois ce fat en Russie que l'hé- 
tairie eut son principal ceutre d'action. De même que dans 
l'hétairie fondre par Bhigas, l'indëpendance de la Grèce fut 
le but que se proposa la nouvelle association. Mais comme 
la première hétairie n'avait eu en vue que de préparer les voies 
à la révolution, o.n s'occupa avant tout dans la seconde 
de l'éducation et de l'instruction des masses. Les Grecs seuls 
étaient admis h en faire partie ; et un bétairiste ne pouvait 
point appartenir h une autre société secrète. Les formalités 
à suivre pour y ètre admis étaient des plus simples, chaque 
membre ayant le droit de présenter tout individu «lui lui 
semblait réun'.'r les conditions requiss. Le nouve initië 
ne connaissait que celui qui l'avait reçu : mais avant son 
admission ses préeédents, son état de t'o-tune avaient et6 
sévèrement scrutég; et at moment o/ il était admis, il devait 
pt-èter un serment garant de ses sentiments de piété et 
de son amour pour la liberté de son pays. Des eontributions 
volontaires étaient acquittées par chacun des membres, et 
centralisées à la caisse nationale, sirotée en Rtzssie. La société 
. était dirigée par un conseil supërie,w ou orchie 
disposant des fonds déposés à la cai.»e nalionae. II Caic.'t[ 



74 HÉTAIRIE 
eml,loyés à ensoyer sur les principaux points du territoire 
tre,c, notamment à Constantinople, et même dans un grand 
nombre de s illes des pays voisins, des émissaires chargés 
de recruter de nouveaux membres à l'association. Ces émis- 
saires, qualitiés d'oeplores, snrveillaient les actes du gouver- 
nement turc et de ses fonctionnaires, en rendaient compte 
a leurs mandats, et faisaient passer à la caisse cenh'a]e les 
sommes provenant des dons et conlributions volontaires 
des hetairistes de leurs circonscriptions respectives. Vers 
lb18 cette organisation Cit complète et en pleine aetivité. 
Les Turea commençaient à avoir des soupçons; sur bien des 
points on avait eté trop loin pour qu'il fùt possible de s'ar- 
rêter et de reculer ; aussi la direction suprême de l'hetairie 
semblait-elle appeler de ses VœUX le moment où éclaterait 
la revolution. D'une part, pour echapper à la responsabilité 
qui i,eait sur elle, et de l'antre pour prévenir les trahisons 
possible», on se Ita donc de chercher un chut pour ]'entre- 
prise; et surle refus du comte Capo d'Istria, alorsmi- 
nistre de l'empereur de Russie, d'accepter un tel rle, on 
jeta les yeux sur Aiexandre Ypsilanti, fils de l'ancien 
hospodar de Valachie, qui consentit a ce qu'on lui deman- 
dait, trompe qu'il fut, a ce quïl parait, par les chefs de l'hé- 
taire, qui loi alfirmaient que tout se faisait du consentement 
de l'empereur de Russie, dans l'armée duquel il avait servi 
en 1813. Diverses circonstances firent éc]ater prématurément 
en 121 lïnsurrection, tant en Moldavie qu'en Valachie et 
en Grëce. L'insurrection a.ant une lois commencé, l'hé- 
tairie se trouva naturellement dissoate. Mais plus tard, 
quaud l'indépendance de la Grëce eut Ce proclamée, elle 
lut remplacee par le parti des hetairistes, dont m paiotisme 
I,ur et desinteressé ainsi que l'amour de la patrie ne furent 
pa toujours les uniques mobiles. 
Independamment de Pbctairie politique, il s'était aussi 
formé, au commencement de ce siècle, en Russie, en Vala- 
chie et en Grène, des associations du même nom, mais 
poursuivant uniquement un hut scientifique et litteraire. 
L"et ainsi que dès 1813 il s'était constitue à Athênes, sous 
la présidence de l'archevèque de cette ville, une hétairie 
qui s'occupait de reunir les fonds necessaires pour créer 
une bibliothèque publique et un muée, pour faire impri- 
mer et publier des éditions et des traductions des auteurs 
de l'antiquite classique. Une hétairie du même genre, dite 
leta rie philomuse ( ç0,to tp«) se forma également 
/ Vienue à l'époque du congrès, à l'effet de propager en 
Grène les moyens d'instruction, d'y fonder de écoles et 
d'aider de jeunes Grues à aller se former aux universités 
ctrangères. La cotisation de chaque membre etait fixée à 
deux piatres fortes par an. On as.re que celle société fut 
,nde en lsIŒE ou 1815 par le oemte Capo d'Istria lui-mme, 
,levenu plus tard président de la Grène. Entravée dans son 
action par la révolution de 21, l'hetairie philouse se 
rêconstitua en 1824; et ses efforts n'ont pas peu contribué 
h relever les etude. en Grène. 
H ÉTA IRISTES. Foge 
HÉTÉROBR.NCHES (,le ëzpoç, différent, 
I-rancbies I. Ce nom, qui signilie branchies variables, a 
été donné par Blainville à l'ordr quatrième de la cla 
des mollusques acéphales. La cracteristique de cet ordre 
ct la suivante : llranchies de forme açsez variable, mais 
toujours contenues dans le tube, ¢pti de la partie postérieure 
du corps conduit  la bouche; corps de forme anormale, 
ordinairement cy[indrode, enveloppé dans un manteau 
terme de toutes parts, percé de deux orifices, et ne con- 
tenant aucune uae de coquille ou de partie calcaire intee 
ou externe; bouche profondément cachee, sans appendices 
labiaux ; anus egalement antérieur. L. 
Geolho3 Saint-Hilaire a donné le nom d'hetoerobranches 
à un genre de po i ssonsde la familledes malacoptér)-eus, 
adopte depuis par Cuvier et par 31. Yalenciennes. 
HÉTËIODO." (du grec z--éo;, aulre, et 6[oE, opi- 
nion). Ce mot, qui dit moins que hëroetiq ue, dêsigne 
dis partisans d'une opinion contraire -/t celle de l'Eglise ru- 

roaine. On ne peut pas être hérligue sans être hoetérodoxe; 
mais un peut fort bien être htoerodoxe sans être heroetque. 
L'h é r é s i e cm porte une scission, soit violente et ouverte, 
soit secrëte et cachée; l'hoetoerodoxie ne repose que sur une 
discordance ayant pour objet un point moins important. Un 
sentiment, pour être hérétique, doit être opposé à une ré- 
gie de fo/; une opinion est hetérodoxe quand elle est con- 
traire ì une règle de discipline. L'hérésie détruit l'union, 
l'bétírodoxie n'anéantit que la conformité de pensées sur un 
point qui n'intéresse pas la foi. Ainsi, Fbérésie rattache à 
un parti, soit comme chef, soit comme membre; Fhétero- 
doxie laisse isolé, avec ses vues propres et ses sentiments 
particuliers. Ort h o d oxe est l'opposé de htrodoxe. 
IIÉTÉItOGÉNIE (de ¢é;, autre, diffërent, 
genre, espëce, nature. Ce nom a été proposé par Burdach 
pour le faire contraster avec honogenie. Voici comment il 
formule lui-mne sa pensée dans son Trait de Ph9siolo9ie , 
« On appelle lt#rognie toute production d'être vivant qui, ne 
se rattachant ni pour la substance, ni pour l'occasion, à de 
individus de la mème espèce, a pour point de départ des 
corps d'nne autre espèce, et dépend d'un concours d'autres 
circonstances; c'est la manitestation d'un tre nouveau 
dénué de parents, par conséquent une génération primor- 
diale ou une création. ous le reconnaissons partout ounous 
 o}'ons paraitre un corps organisé, sans apercevoir un autre 
corps de même espèce dont il puisse procéder, ou dçcourir 
dans celui-ci aucnne partie apte à opérer la propagation. 
Dugs emploie comme s.,non}me d'ltêrogoeie le terme 
spontpar, itoe ( ru.ge= G.taAo SO.A,E ). 
IlY.TEROMEBES. 1-oge: COLOTS. 
HÉTÉttO31OIPHES (Animaux), de Çéo., autre, et 
.., fo.fine. Vo9e=, Epoo. 
HETEBONO311E (de é, autre, diffèrent, et 
Ioi. C'est le contraire d'autoomie. Les Grues em- 
ployaient cette expression pour dësiner le gouvernement 
des peuples ou des villes soumis  l'empire romain, qui 
avaient perdu leurs lois et leurs institutions i,articulieres 
pour .obéi.r  celles du vainqueur. 
HETEBOSCIENS (de [:«éo, autre, diiférent, et -z:-, 
ombre , terme de ,éoaphie par lequel on désigne ceux 
des habitants de la terre dont l'ombre ne oe projette que 
d'un seul cét. Les peuples qui habitent, par exemple, entre 
les tropiques et les cercles polaires, et dont on voit l'ombre, 
par les latitudes septt.ntrionales, toujours tournée vers 
nord, ou bien par les latitudes méridionales, vers le sud, . 
sont dits h#tërosciens, par opposition au a tp h is c i en, 
qui habitent la zone torride, et qui ont leur ombre 
du cété du no¢d et tant6t du cété du midi. 
HÉTÊBOusIENS  du grec exéés:., autre, différent, et 
ooE, substance), hérêtiq,es qui soutenaient que le Fils de 
Dieu est d'une autre substance que lui, à la différence de 
quelques a r i e n s, qu'uu nommait h o st o i o us i e n s parce 
qu'ils enseignaient que le Fils est d'une substance semblable 
à celle du Pêre. 
HÉTÉBOZOAIRES (de îpç, autre, et ,3v, animal]. 
Voyez Evoo. 
H ET31AN. l'oyc: 
ItËTIE ou FAYARD ( Fogu sylt'atica, Lin. ), arbre 
de haule iutaie de la monoecie polyandric «le Linné, de la 
famille des cupu[ifères, dont il forme i lui seul un genre. 
Il est grand, gros, branchu, et sëlève jusq«'à une hauteur 
de trente mètres. Son bois est blanc et dur, son écorce unie. 
de couleur cendrée ou grisà.tre, et médiocrement grosse; 
ses rameaux sont divisés, peu pendants ; ses feuill, ovale, 
alternes, sont soutenues par de courts pétioles : elles ont 
peu près la grandeur de celles du charme, sont d'un ert 
glacé, accompagnées de stipu4es, et denterC à leurs bords. 
Les fleurs du hètre sont unisexuelles : le même arbre en 
porte demàlesct de femelles; le renies ont un calice en cloche 
dentelée, de huit ì douze Camines, et des anthère droites 
et aiguês; les iemelle. ont composée de trois pistils, place» 
dans un calice monoph311e, velu, «!i:<é en «'-aahc 



HETRE N HEURISTIQUE 
roites et aiguës. L'ovaire est supérieur : après  fécon- 
dation, il se change en capsule ovale, coriaoe, hérissée de 
pointes ronfles, à une seule loge, et s'ouvrant en quatre 
valves. Cette capsule contient le fruit du hêtre, nommé 
/'a î n e. La croissance du hêtre est rapide; mais la durée de 
cet arbre ne dépasse pas un siècle. Les feuille« de la varia'tL du hêtre nommée hœtre pourpre sont d'un rouge cerise au 
mois demai, d'un brun pourpre quand elles ont pris une 
certaine croissance, et presque noires quand elles ont toute 
leur consi-:tance; l'Corne en est nnie et d'un rouge brun. 
On peut semer le hêtre en pépinière ou en plant; mais 
cette dernière manière est préférable, car il snpporte diffici- 
lement la transplantation. Ou a conseillé de tremper sa graine 
dans les eaux du fumier : le goOt desagrable qu'elle en con- 
tracte empêche les animaux etles iusectes qui en sont friands 
.de la détruire dans sa jeunesse. Le hêtre aime l'ombrage, 
et redoute le voisinage de« mauva«es herbes, dont il laut 
le préserver. Parvenu ì une certaine croissance, il forme un 
grand et bel arbre, d'un aspect très-agréable et régulier. 
Le hêtre croit naturellement dans les forêts de l'Europe 
et de l'Amérique septentrionale : assez commun dans les 
pa)s de plaine, où le climat eS tempéré, il affectionne da- 
vantage le penchant méridional.des montagnes. Dans certaines 
conteCs, on l'emploie ì la formation de hales majestueuses, 
qui croissent vite, et parviennent à une asoez grande hau- 
teur. Le bois du hêtre sert à faire un assez grand nombre 
d'ouvrages de menuiserie, d'ébéniterie, et une infinit de 
petites choses : ce bois est sec: il petille |net au leu, et quoi- 
0in'il dure peu, il est le plus agréable à br01er et le pins 
, timé. 
IIEURE (en grec é a,en latin hora), vingt-quatrième 
partie du j o u r astronomique, se subdivisant en O0 minutes, 
chaque minute renfermant à son tour 60 secondes, etc. Aux 
trois sortes de rem p s que distinguent les astronomes cor- 
respondent nécessairemeut trois sortes d'heures : l'heure 
siderale, que les vieux auteurs nomment heure du pre- 
mier mobde, est la vin-quatrième partie du jour strierai; 
l'heure solaire moyenne, plus grandede près de !0", est la 
vingt-quatrième partie du jour moyen ; l'heure solaire vraie 
est la durée variable que met la terre pour accomplir 15 ° 
,le son mouvement diurne. On passe de l'heure vraie à 
l'heure moyenne, et vice versa, à l'aide de I' é q u a t i o n d u 
temps. Dans les usages civils orme se sert que du temps 
raoyen; mais la manière de compter des heures en temps 
• moyen civil diffëre un peu de celle qu'on emploie en temps 
moyen ash'onomique; le commencement du jour est dans 
le premier cas/ minuit, dans le second /t midi; de plus, la 
livision du jour en deux parties n'et pas usitée par les 
tronomes : ces derniers comptent d'un midi ì l'autre, de- 
puis 0 heure jusqu'à 2g heures; par exemple, astronomi- 
quement, 15juillet 21 heures équivaut à 16juillet 9 heures 
du soir. 
La mesure du temps était loin d'avoir atteint chez les an- 
ciens la perlction à laquelle elle est arrivée de nos jours. 
Le mot heure se trouve donc employé par eux pour désigner 
,les durées de temps bien differentes. Ainsi les Juifs, ainsi 
les Romains, jusqu'à la premirre guerre punique, donnaient 
le nom d'heure à la deuxième partie du jour artificiel, comme 
l'attestent encore ces vieux mots prime, tierce, sexte et 
noue, conservés par la liturgie catholique. Ces heures, dont 
In longueur variait chaque jour plus ou moins suivant le 
c I i m a t, çont quelquefois nommées heures antiques, heures 
]ttdo«ques, ou encore heures plan#taires, parce que. l'as- 
trologie avait placé chacune d'elles sous l'influence d'sine 
planète. E. 
On donne le nom d'heures ì un instrument de gnomo- 
nique, espèce de cadran propre ì indiquer les heures du 
jour et la hauteur du soleil. 
L'Ê;I,.'se a aussi adopté cette dénomination pour certaines 
p,'ii, rcs qui se font dan. des temps réglés ; ces heures sont 
,tite heures canoniales. Enfin, certains livres de 
p:ère. ans re«;u par extension le nom d'heures, le» heures 

75 
chrdtiennes,.les heures royales, etc. Quelques-uns de ces 
livres, chefs-d'oeuvre de calligraphie, richement ornés, 
ayant appartenu ì de hauts personnages, ont aujourd'hui 
un grand prix. 
Chercher midi à quatorze heures, c'est chercher une 
chose oh elle n'est pas. La bonne heure est le moment 
vorable pour laire quelque chose. A la bonne heure ! si- 
gnifiehé bien ! soit ! ou heureusement. Toucher ìsa dermëre 
heure, c'est mourir. 
HEURES (M!/thologie), "t-éa en grec, Horoe en 
latin. Les anciens avaient placé les Heures dans POI)-mpe, 
avec le titre de déesses. Les Grecs donnaient le nom d'heures 
aux saisons de l'année; ils n'en admirent d'abord que trois, 
Dicé (la Justice), Irène ( la Paix) et Eunomie (la Loi ), qui 
figuraient le Printemps, l'ÉtWet l'Hiver. L'Automne y ayant 
été ajout plus tard, deux nouvelles Heures furent chargée« 
de veiller aux fruits et aux flesws : on les nomma Carpo et 
Thalatie. Oide nous montre les Heures dans le palai. du 
SoleiI-Apollon, tantôt séparées par d'égaies distances, 
......... Posirtv spatiis trqualibus Hortr ; 
tantôt attelant et dételant les courçiers du char du dieu, 
Jungere equos Titan elocibus imperat Itor, «, 
Ju*sa de« celeres peraouat. 
Avant le poëte latin, Itomère avait appelé les Heures les 
ministres du Soleil, les porfiëres du ciel. Selon Hésiode et 
Apollodore, elles étaient filles de Jupiter et de Thémis, et 
avaient vu le jour au prin temps. Théocrite dit qu'elles étaient 
les plus lentes des divinités, mais qu'elles apportaient tou- 
jours qnelque chose de nouveau. Quand le jour eut été di- 
visé en dix parties égales, on compta bient0t un pareil nom- 
bre d'Heures, qu'on appela les di sœurs, et qui se nom- 
ruaient Au9 é ou A.fghi, l'aube ; Aatold, le lever du çoleil ; 
Musia, l'heure des Muses, ou de l'étude ; Glmnasio, l'heure 
du g?mnase et des exercices; N!/mpha, l'heure des Naiades, 
ou du bain ; Mesembria, le milieu du jour; Spondd, l'heure 
des libations; Elétd, l'heure de la prière; Adté, on Cgpris, 
l'heure du repos et des plaisirs; Dgsis, l'heure du coucher 
du soleil. Elles étaient toutes au service de Jupiter. On les 
voyait, dit Pausanias, sur la tte d'une statue de ce dieu, 
avec les Parques, pour exprimer que les Heures, les sai- 
sons et le temps lui obéissent. Les Heures avaient un temple 
à Athènes : on y célébrait en leur honneur les Hordes, 
06w, au renouvellement des saisons, avec des offrandes de 
fleurs et de fruits. Les peintres et les sculpteurs les raptC 
sentent tenant des horloges et des cadrans. Dans la Bible 
des Septante, comme dans les anciens poête grecs, elle 
indiquent les saisons. Cuxle nx c. 
HEURES (Prières des Quarante). l'o9e: QtAr.x.x 
HEUIES. 
HEURES CAXONI.LES. C'est le nom donné dans 
l'Ëglise catholique /l certains olfices ou certaines priëres 
diurnes ou nocturnes, dont les anciens canon», vrai- 
semblablement en conformité avec le verset t61 du 
psaume cxx, Septies in die laudem dixi tibi (Sept 
fois le jour, Seigneur,'j'ai chanté vos louanges), ont réglé 
et prescrit la célébration à certaines heures fixes. En effet, 
on en compte sept : matin es et landes, prime, tierce, 
sexte, noue, vépres, compiles. Jadis office de nuit, 
les matines sont encore distribuées en trois nocturnes, ré- 
pondant aux trois premières veilles, et compos6es le neuf 
psaumes, avec trois ou neuf antiennes, selon la solennité plus 
ou moins grande. Les landes se disent immédiatement après 
les matines, et font la deuxième partie de l'office ordinaire 
du bréviaire. Prime, tierce, sexte et noue sot appelée 
petites heures, parce qu'elles doivent être récifC h cer- 
taines heures, en l'honneur «les mystères qui ont été accom- 
plis ì ces heures-là, et aussi pour les distinguer des ma- 
tines, des landes, des vêpres et des cotnplies qui contiennent 
plus de priëres. 
HEURISTIQUE (du grec .vp, je trouve). Les 
manda appellent ainsi l'art d'inventer, ou la maniëre de faire 
lU. 



iV, HEURISTIQUE 
«les inventions par nne vole méthodique. $'it ne s'agit point 
d'inventions, mais seulement de ddcoucertds, par consé- 
quent d'une connaissance empirique de ce qui existe bien, mais 
n'est pas encore connu, ce qui arrive, par exemple, dans 
l'histoire naturelle, dans la géographie, dans l'histoire, on 
ne donne point/t l'ensemble des règles d'après lesquelles les 
observations doivent Cre faites, réunies et contrflées, le 
nom d'heuristique. On ne s'en sert que Iorsqu'il s'agit de 
trouver des connaisnces non empirique$. 
IIÉi-ÉL|US (JE.), dont le véritable nom était HmwL, 
ou, comme le croient quelques-uns, HEWELKE, astronome 
pratique distingué, né à Dantzig, en 1611, étudia à Leyde, 
et fit, de 1630 à 163-, un voyage en Hollande, en Angle- 
terre, en France et en Allemagne. De retour dans sa ille 
natale, il se consacra à la mécanique et au dessin, dans le 
but de se construire des instruments plus parfaits ; il éta- 
blit aussi dans sa maison une imprimerie, qui lui apparte- 
uait et d'où sortirent la plupart de ses ouvrages. En t6at 
fl fut Cu échevin, et en 1651 membre du sénat de Dant- 
zig. Pour faciliter ses observations astronomiques, il ¢ons- 
truisit, en 16-1, dans sa maison un observatoire, qu'il 
nomma Slelloetmrçum, et qu'il garnir d'une telle quantité 
d'instruments construits par lui«nème, que sous le rapport 
de la richesse du matétiel il n'était surpassé que par I'U- 
ranienbourg de son devancier T)-cho-13rabe. Il s'occupa 
avec beaucoup de soin des montres à roue, dont i'uge 
s'introduisit alors, sans pourtant arriver à un résultat satis- 
faisant. Lui-mème mesurait habituellement le temps au 
raoyen de ands cadrans solaires horizontaux, divisés de 
h-oi. en trois ntinules; et ses horloges h pendule, qu'il cller- 
citait souvent à régler par des observations de la hauteur 
des etoiles, lui donnaient les subdivisions de ces trois mi- 
nutes. Beaucottp de ses manuscrits, sa bibliothbque et son 
observatoire, devinrent la proie d'un incendie, le 9.6 sep- 
tembre 1t;79. Un si grand désastre ne l'abattit point; il 
chercha à rétablir son observatoire, et continua ses obser- 
vations jusqu'a sa mort, arrivée le 28 janvier 1688. 
Parmises ouvrages, il en est un qui a maintenant encore 
une grande valeur; il est intitulé: Selenographia, 
decriavtio Lunoe ( Dantzig, 16t7, in-fol.). Hévelins y donne 
une description détaillée de la surface de la lune. Il entre- 
prit une description de tout le ciel astronomique dans son 
Prodromus Astronomioe, et dans son Firmamentum 
sobiescianu;gt, sire uranograph[a; ces deux onvrages ne 
parurent qu'aprës sa mort (Dantzig, 1690, in-fol.). _Nous 
de, nus encore citer son livre De n«tura Saturni (Dantzig, 
1656, in-fol.}, sa Cometographia (Dantzig, 1668, in-fol.), 
qui contient des détails e| des observations sur des co- 
rnites qu'il avait vues, et la Machina coelestis 12 vol., Dan- 
tzig, 1673-79, in-loi.), dont le second volume est une des 
plus grandes raretés bibliographiques qui existent, parce 
qu'à l'excepti du petit nombre d'exemplaires qu'il avait 
envoyés/t ses amis, l'édition presque tout entière fut br0- 
leu. Hévélius fut un mauvais théoricien, mais un prati- 
cien distingué, qui par son zèle infatigable, par sa rare 
patience, et l'emplui de toutes ses facultés, a rendu des 
services essentiels à la science. Il était en corresLondanee 
suivie avec la plupart des savants illustres et beaucoup de 
princes de son temps, ainsi que le prouvent ses lettres, re- 
cueillies et publiées par Ochof(Dantzig, 1683). Rois et 
princes se trouvaient honorés de s'enlretenir avec lui eu 
que prouvent les visites qu'ils lui rendirent. Halley.fit le 
voyage ite Loudres à Dantzig, dans l'unique but de faire sa 
eonamissance, et Louis XIV lui accorda d'abord une gra- 
tification et plus tard une pension. 
HE,rËS eomitat de Hongrie, dans le cercle de la Theiss, 
au nord de Neograd et de Goemoer,  l'est dé Borsod et 
Szaboles, au sud de Békès et de Csongrad,  l'ouest de Pesth, 
présente une superficie de 86 myriamétres ca, ré», avec une 
population de 67,28 habiants » répartis en I 16 tgouss.ten, 
19-6 villages, 10 bourg$ (dont un, Gycengyoes, ne compte 
pas moins de 16,200 habitants), et une ville, Erlau, cbef-liett 

du comitat. Sauf environ 3,000 Slaves, Allemands ou Grecs, 
toute cette population appartient  la race magyare. Le co- 
l mitat d'Hévès, généralement plat, à l'exception de son extré- 
mité septentrionale o0 se trouve la chalne des monts Matra, 
qui produisent entre autres d'excellents vins, est l'un des'plus 
riches de la Hongrie. Le tabac de Debroe et celui de Verpelet 
I sont an nombre des produits naturets les plus recherchés de 
ce royaume. Le bourg de Tilsafureà (,000 habitants),'sur h 
Theiss, a une grande importance stratégique en raison de sa 
situation; el pendant la guerre de rlndépendance (t 8 S-189) 
il fut/ diverses reprises le thé'alre et le but d'engagements 
sanglants entre l'armée hongroise et l'armée autrichienne. 
ItEXAEDRE (de , six, et g, siCe, face), volume.ou 
solide à six laces. Quand l'hexaèdre est réguler, les six 
faces sont des carres tous égaux entre eux, et alors le solide 
prend le nom de cube. Un dé à jouer ordinaire offre la 
forme d'un exaèdre de cette espce. Le cté de rhexaèdre 
régulier est au diamètre de la sphère circonscrite comme 
I est à la racine carrée de 3. TEYSSÈDIIE. 
IIEXAGOXE (de , six, et "t, tovoE, angle), figure ou 
polygone de six angles et de six cotés. L'hexagone rdgu- 
lier jouit de cette propriëté que chacun de ses cotés est 
exactement égal au rayon d u cercle circonscrit, propriéte qui 
fournit un moyen bien simple de diviser le cercle en six 
parties égales et de tracer en méme temps le polygone. 
Pour cela, il suffit de porter le rayon sur la circonférence; 
on déterminera de cette manière six divisions de cette cir- 
conference, lesquelles jointes par des codes donneront la 
figure de l'hexagone régulier. 
La somme de trois des angles de ce polygone valant qua- 
tre angles droits, on donne très-souvent la figure d'nn hexa- 
gone régulier aux carreaux de brque dont on pave les diverses 
pièces d'une maison ordinaire, il est digne de remarque que de 
toutes les figures qu'on peut tracer ns laisser de rides entre 
elles, sur une surface donnée, celle de l'hexagone régulier 
est la plus satisfaisante, quand on veut que ces figures, toutes 
égales entre dles, renferment le plus &espace aec un contour 
donné. Voilà pourquoi les abeilles donnent six paris aux 
airCes qu'elles destinent à recevoir le miel. _Les géomètres 
ont démonlré que de toutes les formes qu'elles pouvaient 
choisir, c'est la plus avantageuse. Tss/mre. 
HEXAGYXIIE (de , six, et "t, uv, femme, pris ici 
pour 19istl) s'applique, dans le système de Linné, aux 
ordres de plantes comprenant celles qui.ont si pistils (vover, 
ItEXXMETIE  vers grec ou latin rh)thmé par six 
pieds, ou mesures. On en attribue l'invention/ Olenus, on- 
tCieur / Orphée, et l'introduction dans la poésie latine 
 Ennius. Son nom, composé des mots grues, ç, six, et 
V./xpov, mesure, l'explique tout d'abord. Ces pieds sont ou 
dactyles, ou apo ndées. Le goOt, le caprice, l'oreille 
du poële, les emploient, les enlremëlent, les placent indiffe- 
ruminent dans les quatre premiers pieds, mais le pied pé- 
nullième doit ëtre un ductile, et ledernier un spondée, ou 
un trochée..Nous citerons, pour exemple, en grec, ce 
vers si imitatif d'Homère : 
dont le sens est : 
Et l'arc d'ar[ent du dicu rendit un son terrible. 
Et en latin, ce vers plein de magnificence : 
Parutitur interea doraus oranipotenti Ol'mpi. 
Du tout-puissam Olympe alors les portes s'ouvrent. 
Le dactyle, rapide, vif et léger, se multiplie dans le ver 
bexamëtre quand il faut peindre la célérité et la joie méme. 
Exemple tiré de Virgile : 
O.uad«pedante putrem sonitu quatit ungula campurn. 
Sous les pieds des chevaux les cl,amps poudreux rèsoauer.t. 
Au contraire, le poëte fait succéder l'un h l'autre les spon- 
alCs, quand il s'agit d'un rbylhme lent, grave et tri»te 



nr.xMETBE 
comme ime cérmonie funëbre. Exemple encore emprunté de 
Yirgile : 
xtir, ctum n.)fmphw crudeli funere Daphnim 
Fl¢bant. 
...................... les nymphe, dolíes, 
Pleuraient Daphois éteint par un trép cruel. 
Le rhythme du vers fiexamètre t le plus pompeux, le plus 
sonore, le plus reCu&eux que connaisse Poreille humaine, 
et oependant, il date de plus de trois mille ans. Acette époque 
il cadenit djà les sub pensées d'Orphée et d'Homëre. 
Ce vers est empreint d'une si belle musique, que les uns en 
rapportent l'origine à Phémon, première prêtresse de 
Delphes, d'autres aux dieux mmes. Vainement J ode 11 e 
voulut-il, en 1553, rsusciter l'hexamëtre data la poésie 
fi'anise par ce distique détestable : 
Phoebus, Amour. Cypris veut sauver, nourrir et orner 
Ton vers et ton chef, d'ombre, de flamme» de fleurs. 
Vainement ce rhythme s oedence trouva-t-fl des enthou- 
siastes, i'hexamétre irançais n'eut pas de durée. ez les 
Grecset les Humains, il se pliait à l'épop, ì l'idylle, à l'Citre, 
ì la satire. Dans l'légie, il s'accouplait av le penmètre 
( vers de cinq pieds), diminuant ainsi  pompe etson éclat, 
qui auraient effarouché I amours ou troublé la douleur 
et la paix des tomux. Outre le grec et le latin, l'hexa- 
mètre s't naturaH dans la poésie lemde et us 
celle d peupl slaves et gttons. La Messiade de KIop- 
stk et la traduction russe de l'lliade d'Homëre par Gné- 
ditch nt en vers hexamëtr. On appelle encore ce vers 
hroïque. Il t absurde de le comparer à notre alexa n- 
drin, dont l'emploi est à la vérité le mme, mais dont 
la prosodie diflëre absolvent. D-B. 
HEXA-MILI. t%ye» 
HEXDRE (de , six, et &p, liomme, pris ici 
puur tamine ), siëme dse du sysme de Linné 
BoÆç ), renferme les plantes qui ont six ímin 
libre% comme la Oupa d asparinées et buoeup de 
liac. Cette classe se divi en hexandrie nogynie 
(ris, tulipe); hexandrte digynie (z); hexandrie trigynie 
( colchique ); etc. 
Lié emploie aussi le mot hexandrie pour désirer un 
ordre de la gynandrie : la 9ynande hexandrie, oe- 
ractérisée par six m portésur le pisril. 
LES ou Sextupl, ouvrage célèbre d'Ori - 
. gè n e, du mot grec [«6ot, qui a oet signification. Ce 
œuvre sur l'Ancien Ttament t malheureusement rdue, 
moins qudques fen sur les psae% sauves par saint 
J Clst6me, par Ploponus dans son Hexamron, 
et chez les mernes, pat Druus et le père Montfaucon, qui 
en ont recueii quelques débris. Cette œuvre d'un pri- 
gieu labeur éit une espèce de Bible polyotte écrite sur 
six colonnes paraèles : le texte hébreu, le mme en oerac- 
tres e, la version d'Aquila, cefle de Ssmmaque, celle 
des Sepn, cee de Théorion. 
Deux autres traducons en ayt éoE trouvé, l'une à 
Jicho, en 217, l'autre à Nicopolis, en 228, Ogène les 
joiit ì son and ouvrage. Alors les Hexapl devinrent 
l Octuple, qui, réduits par l'auteur à quatre Hvres 
devinrent les Ttrapl (de zçoE, quatre). C'éient 
les quatre versions greues d'Aquila de Symmaque, d 
Sepnte et de dofion. Orige y avait marqué de  
main, par des asoErismes et obles (petites brhes), I 
passes altérés ou omis par ces translateu : c'était au,rit 
de lumières qu'il poit aux yeux d juifs, des chrtiens 
et des siden d'alo, comme si ce saint docteur de l'É- 
glise naisste n'efit ps voulu qu'il prit ètre dit de Dieu : 
Tradidit bibliam suam dputationi eorum , il a livrë son 
livre à leu sputes. D«s-Bsos. 
HEYDEN (Jss V ), peintre hollandais, nWà 
Gorkum, en 1640, monta d sa plus tendre jeunesse un 
gofit didé pour la peinture, reçut d'un pein6sur veffe 
les premières lens de oet ad, et se rfoetionna ens 

-- HEYNE 7 
par son propre génie. Il habita plus tard Amsterdam, oi il 
mourut, en 1712. Il réussissait surtout à peindre des villes, 
des villages, des clrteaux, des palais et des maisons, qu'il 
reproduisait avec un soin indicible et avec un naturel ex- 
traordinaire. En examinant de près ses tableaux, parmi 
lesquels on vante principalement l'h6tel de ville et la bourse 
d'Amsterdam, l'Iglise et la bourse de Londres, on ne peut 
assez admirer les conuaissauces qui s'y rlèvent, l'harmonie 
des couleurs, la perspective et le fini. On estime beaucoup 
aussi ses dessins au lavis et au crayon rouge, ainsi que ses 
excellentes eaux-fortes. Heden mérita bien de la ville 
d'Amsterdam, par la meilleure organisation qu'il donna à son 
systëme d'éclairage public, et en perfectionnant l'adminis- 
tration des secours contre l'incendie ; aussi fut-il nommé di- 
recteur de cette partie de l'administration municipale. Il a 
publié un ouvrage spécial sur la manière d'arrèter les incen- 
dies au moyen de pompes de son invention (Amsterdam» 
1690, in-fol, avec figures). 
HEYN (PETE-Presr,), célèbre marin hollandais, né 
en 1577, ì Delflshaven, près de Rotterdam, débula par ëtre 
mousse, et à force de bravoure s'Ceva jusqu'aux plus hauts 
grades. Comme vice-amiral de la flotte de la Compagnie des 
Indes occidentales, il battit, en 1626, les Espagnols dans la baie 
de Tous les Saints, leur enleva quarante-cinq batiments, et 
rapporta en Hollande un immense butin. Nommé alors amiral 
au service de la Compagnie, il s'impara presque sans coup 
férir, en 1626, de la grande flotte espagnole des gallons, con- 
tenant 12 millions de florins d'argent en barris, sans comvter 
d'énormes quantités de machaudi°-es précieuses. En réçom- 
pense de cet exploit, il lut cré, en 1629, audral de Hollande, 
et à peu de temps de lb il trouvait la mort dans un com- 
bat contre deux navires sortis de Dunkerque. Un monu- 
ment en marbre a été éleve à sa mémoire dans l'ancienne 
église de Delf. 
HEYNE (CnT»GOrLon) naquit en t729, ì Chem- 
nitz, en Saxe, où son pére, pauvre tisserand, s'était réfugié 
pour échapper à des persécutions religieuses qu'il avait 
éprouvées à Gravenschutz, en Silésie. De 17/1  1718, il 
fréquenta le lycée de Cbemnitz ; mais sa famille étant dans 
la plus profonde misëre, il fallut pour le soutenir dans ses 
éludes le concours de quelques citoyens aisés. Plus tard il 
alla se perfectionner à Leipzig, oh le professeur de philoso- 
phie Crusius l'employa d'abord ì traduire en latin les dis- 
cours qu'il était obligé de prononcer ou de publier dans 
cette langue. Alors brillait ì cette université le célèbre Er- 
nesti : Heyne réussit / lui inspirer un vif intérèt, partagé 
par Back et par Christ. Leur protection le rait bientÇt en 
état de se créer quelques ressources, en communiquant sa 
science an serrure pecus des étudiants, dont il se fit le 
répétiteur. Ses tudes terrainCs, il obtint du comte de Bruhl, 
qui gouvernait alors la Saxe et son souveraiu, une place 
d'employé au catalogue de sa bibliothèque particulière, avec 
environ 400 f. d'appointements. De la bbliothèque du mi- 
nistre il passa parmi les conservateurs de celle de Dresde, 
sans qu'il en résultat une amélioration bien sensible dans 
sa position pécuniaire. Mais étudier était son unique passion, 
son seul besoin. Il profita donc de son séjour dans la capi- 
tale de la Saxe pour connaitre les beaux monuments d'art 
antique qu'elle renferme. A la mme époque, Winkelmann 
aussi vivait à Dresde, studieux, pauvre, inconnu comme 
Heyne, et la conformité de penchants, de fortune, d'esp6- 
rance, les eut bien vite liís. ignorés du monde et ne pouvant 
avoir qu'un sentiment confus de leurs forces, ils étaient 
sans doute loin de soupçonner la noble et brillante destinée 
qui les atten4ait. Bient0t ils se séparèrent pour ne plus se 
revoir : Winkelmann alla continuer ses éludes en ltalie, 
Heyni resta in Allimagni; il lorsque après un grand nom- 
bre d'années de séparation une celébrité tardive fit retentir 
dans l'Eope les noms de Hesne et de Winkelmann, chacun 
d'eux dut reconnaltre avec plaisir dans l'autre, et non peut- 
ètre sans quelque étonnement, son jeune compagnon d'cru- 
des à la bibliothèque de Dresde. 



78 
Cependant, tleyne ne tarda pas à sel'aire connattre. En 1755 
il donna sa première édition de lïlmlle, qui ne fut pas esti- 
mée sans doute autant qu'elle aurait df |'ètre, cur tout  raison 
des trésors d'ërudition comparée qu'elle renfermait ; mais 
cette publication lui attira l'attention de Hemsterhuys et 
«le l'Cule dont ce savant Hollandais était le chef. L'année 
suivante il prouva par r, on édition d'Epictète qu'il n'était 
pas moins familiarisé avec les lettres grecques qu'avee la 
litterature romaine. La phi|osoplde des stoïciens ne lui fut 
pas inutile : elle le prépara à subir avec constance les mal- 
heurs qui accompagnèrent la guerre de sept ans. Cette guerre 
ravagea Dre«de, priva Heyne de saplace, desontrailement et 
tarir à la fois toutes ses ressources. Aussi dut-il s'estimer heu- 
roux d'obtenir alors l'emploi de mentor d'un jeune homme 
qu'on envoyait suivre les cours de l'universitéde Wittenberg. 
Ce moment difficile une lois passé, Heyne avait pu venir 
reprendre ses occupations ordinaires à Dresde, quand la 
guerre l'obliges une seconde fois à fuir; mais il ne rentra h 
Dresde que pour y tout perdre dans le bombardement et 
l'incendie de cette ville. C'est l'instant qu'il choisit pour 
se marier ; heureusement pour le jeune ménage, un riche 
seigneur de la Lusaee prit alors pour ré.sseur Heyne, qui 
passa chez lui sept années à s'occuper de l'administration 
de ses domaines, bien plus que de travaux httéraires. Mais 
le guerre et ses calamités vinrent encore le Ctlasser de cet 
asile et le laisser à peu près sans ressource. Heyne revint 
 Dresde, et, sur l'invitation de Lippert, qui publiait alors 
sa Dactyliothèque, il se chargea d'écrire le tex.te latin du 
troisième  o|ume. Le eélèbre Gessner, qui avait longtemps 
occupé la chaire d'éloquence et de poésie à l'université de 
Gœettingue, mourut. Le gouvernement llanovrien lui cherchait 
un uoeesseur làuhnkeniu% auquel on s'était adressé, re- 
[usa de quitter la Hollande, et témoigna un vif étonnement 
de ce qu'un allat si loin chercher un successeur à Gessner, 
quan,l on avait près de soi le savant éditeur de Tibulle et 
d'Épictète. Ce ne fut pas sans peine qu'on parvint à découvrir 
la modeste retraite de Heyne, qui prit possession de la chaire 
en juin 1763. Il ne tarda pas/ tre nommé bibliothécaire 
et conseiller. Ses opuscules académiques prouvent avec 
quelle ardeur, avec quelle supériorite il se livrait à l'enseigne- 
ment. Les leçons de Heyne etincelaient d'éelair de gonio, 
et sa prolonde érudition attirait de nombreux étudiants à 
l'université. 11 ne eessa pas un seul instanl de prendre part 
aux travaux de la Société des Sciences de Goettingue, dont 
il était membre, et contribua pour la plus forte part au 
succès des Annales savantes de Goettingue. Ses princi- 
panx ouvrages sont les éditions de Tibulle, de lïrgile , de 
Pindare, d'Apollodore. Il consacra dix-huit ans à la publica- 
tion d'Homère. 1ui n'a tiré plus de parti de la mythologie, nul 
ne I'a mieux associée à l'histoire. C'est sous son administra- 
tion que l'uniersité de Goettingue parvint au plus haut de- 
gré de splendeur : il laissa la bibliothèque riche de plus de 
'2_00,000 volumes; et lorsque l'armée française s'empara du 
Hanovre, une simple réclamation de Heyne fit en quelque 
sorte excepter Goettingue de la conquëte. La fin de sa car- 
rière ne fut pas exempte de chagrine littéraires : les Lettres 
mythologiques de Voss sont des modèles d'amertume et 
d'outrage, et l'édition de i'lliade attira sur le patriarche de 
la philologie les censures les plus irrespectuenses. Il mourut 
d'apoplexie, le lt juillet 1512. P. n GoLn#_B. 
HEt'TESBUB r (WmLxt A'COURT, baron), diplo- 
mate anglais, né en 1779, est le fils desir William PmCE Asnc 
A'CooBr, qui en sa qualitë de propriétairedu bourg pourri 
de Heytesbury, s'était envoyé lui-reCe siéger /l la ebambre 
ds communes, qui fut créé bafouer en 1795, et mourut 
en 17. A partir de 1814 il prit part, sous le nom de sir 
William A'Court, à diverses négociations importantes. 
Après avoir ét(.' pendant quelque temps ministre à ffaples, 
il fut envoyé en Espague, où, après la révolution de 1820, il 
représenta PAugleterre pendant toute la durée du gouverne- 
ment des eortës; et ses efforts pour déterminer les chefs du 
parti dominant à consenth"  quelque I,eU modifier la cons- 

HEYNE  h 
titution furent inutiles. En 152, il fut nommé ambassadeur 
à Lishonne, à l'effet d'y combattre l'influence, alors prépon- 
dérante, de la Frauce, et à laquelle, secondWpar le ministre 
Palme|la, il réussit bient6t  substituer complétement dans 
le conseil l'influence anglaise. C'est d'après ses avis que les 
ministres décidèrent le vieux roi malade  établir une ré- 
gence. Quand l'infante Isabelle eut pris les rênes de la ré- 
gence et que dura Pedro eut accordWune constitution au 
Portugal, l'ambassadeur d'Angleterre joua un r61e fort im- 
portant dans les luttes des différents partis; et il témoiga. 
si manifestement ses sympathies pour les doctrines absolu- 
listes, que sa conduite fut aussi sévèrement qualifiée par les 
whigs en :kngleterre que par les partisans de la constitution 
en Portugal. C'est ainsi qu'il s'elforça de faire nommer au 
commandement en chef de toute i'armée portugaise le marë- 
chai lord Beresford, tory pur sang; et cette intrigue n'éehoua 
que par suite de l'opposition qu'elle rencontra de la part du 
ministre de la guerre, Saldanha, et aussi de la haine toule 
particulière que te peuple avait vouée il Beresford. Quand, 
au mois de décembre 1826, le gouvernement anglais se dé- 
cida à envoyer une armée auxiliaire en Portugal, à l'effet de 
protéger la régence contre les parlisans de dom Miguel, 
commandés par Abrantès et Chavès, une mésintelligence 
patente éclata entre le général Clinton, commandant cecorp% 
et l'envoyé d'Angleterre, à qui on reprocba d'avoir activement 
secondé les effort. faits par le parti absolutiste pour porter 
la régente, femme d'un esprit faible et mediocre, à ce mëfiet 
des desseins des libéraux, et d'avoir surtout travailié contre 
Saldanha, dont le renvoi du ministère eut effectivement lieu 
en 1827. A la suite de la violente agitation que cette mesure 
provoqua à Lisbonne, l'hOtel habité par sir William A'Court 
fut l'objet de menaçantes démonstrationspopulaires. Quand, 
à la mort de Canning, le parti tory eut repris la boute main 
danç les affaires, A'Conrt semble avoir poussé enente plus 
loin que jamais ses intrigues secrètes en faveur des adter- 
suites «le la conçtitution. Toutefois, il fut nommé ambassa- 
deur en Russie, en t$2s, avant que la question du retour 
de dura Miguel eut Ci décidée ; et à cette occasion il reçut 
le titre de lord Heytesbury. Le conflit survenu entre la 
Russie et la Porte donnait alors une importance toute parti- 
culière au poste de Saint-Pétersbourg ; et s'il ne put rénssir 
à empèeher les hostilités d'éclater entre les deux puissan. 
ces, du moins il sut gagner l'amitié personnelle de l'em- 
pereur Nicolas. Aussi, malgré tontes les récriminations du 
parti vhig, conserva-t-ii son ambassade sous le ministère 
Gr'ey, jusqu'en t$, époque de son rappel. Nommé en 
gouverneur g6néral des Indus, la courte duree du cabinet 
de sir Robert Peel fut cause qu'il u'alla point remplir 
fonctions. Plus tard, il obtint la sinécure de gouverneur de 
Vile de Wight; et en t84 il fut envoyé avec le titre de vice- 
roi ea Irlande, qu'il admiui-tra pendant deux années art milieu 
des dangers et des difficultés «le tous genres créés par une 
horrible famine. La retraite de Peel, en t$6, amena aussi la 
sienne ; et depuis lors il a complétement ceé d'ètre 
tion de lui dans le monde politique. 
HIAIBAS. Voyez Ixrs. 
HIATUS  mot latin qui a passé dans notre langue, et 
qui signitie ouverture, solution de continuité, lacune. 
Ainsi, dans les anciens auteurs, il exprime un passage que le 
temps n'a point respecté. Mais il n'et guère employé que 
comme terme de grammaire et de prosodie. 11 dësigne le 
concours de deux voyelles, d'où résulte un bàillement dé- 
saéable, antipathique à l'harmonie. Les Grecs l'évitaient 
avec soin : témoin Démosthène et Théophraste; Cieérou 
i'évitait aussi. Il est [ort rare dans Massiilon. Mais Thucydide 
et Platon ne se sont pas montrés si scrupuleux. C'était donc 
une question indécise chez les anciens. Dans notre langue, 
on évite autant que possible, mëme en prose, Ïhiatus d'un 
mot à nu autre, et il n'est jamais toiCWen poésie. Auss/ 
Boileau a-t-il dit : 
Garde-.. qu'une voyelle, il courir trop hfitëe, 
.Xc suit d'une voyelle en son chemin hcurtëe. 



tla/u -- tilÉRATIQUE 
L'hialus d'une voyelle avec eile-mme est surtout désagréa- 
ble, et ces phrases. Je vais à Athènes, je vais à Aryos, cho- 
queront toujours l'oreille. C'est encore pis quand l'hiatus est 
redoublé, comme dans il alla à Atleènes. 
Avaut Boilean, les poëtes n'évitaient point l'hiatus, biarot 
a dit : 
Ci-gist qui assez mal preschoit. 
biais on peut se dispenser de cette règle quand on la viole 
avec grince, comme l'a fait quelquefois La Fontaine, ou 
.quand on cite quelque proverbe, comme dans ces vers de 
Ménage : 
Ci-dessous gist monsieur l'abbé, 
Qui ne savait ni 4 ni B. 
Le concours des voydles n'est point vicieux encore lorsque 
le second mot commence par un/z aspiré; ainsi Boileau a 
pu dire impunément : 
Un clerc pour quinze sous, sans craindre le holà 
Peut aller au parterre attaquer AItila. 
L'hiatus dans les mots est quelquefois doux, comme dans 
Lazs, Danad, llia, elc., quelquefois rude, comme dans 
Chanrtan, Raab, etc. Charles Du Rozom. 
-HIBERNATION. Voyez Hlvv,«ïrs (Animaux). 
HIBERNIE (Hibernia). C'est le nom que les Romains 
donnèrent "h la contrée qu'un appelle aujourd'hui 1' I r I a n d e, 
et dont il est pour la première fois mention dans Aristote, 
sous le nom d'lern, comme étant l'une des lles Britanniques. 
Les Romains ne la eOnlmrent que par les récits de César 
et d'Aicola; mais jamais ils n'y portèrent leurs armes. 
Tout ce que Tacite savait au sujet de ses habitants, c'est qu'ils 
ressemblaient aux Bretons. Ptolémée, qui donne des détails 
exacts sur la grandeur et la configuration de l'ile, mentionne 
quelques-une» des peuplades de l'Hibernie, entre autres les 
lrernes, qui habitaient, au sud-ouest, et dont on dotma le 
nom au pays tout entier. 
IIIBOU. On donne ce nom h plusieurs oiseau du genre 
chouelte. Ils se distinguent de leurs Cotlgenères par le 
grand disqqe complet de plumes eflilëes qui entoure leurs 
.velx, et qui lui-mSme est e»tolwë par une collerette de 
phunes écailleuses. Ils portent sur le Iront deux aigrette» de 
plumes qu'ils relëvent à volonté. La conque de leur oreille, 
qlfi s'étend en demi-cci-éle depuis la racine du hec jusque 
versle sommet de la t6te, est garnie eu avant d'un oper- 
cule mcmbranelx. Leurs pieds sont garnis «le pllmes jus- 
qu'aux ongles. Les varietés les plus remarquable» sont : le 
hibou commun ( strix otus, Linné ), type dl; genre otus de 
Cuvier, au ph,mage fauve, avec des taclles longitudiuales 
hrunes; le 9rand hibou à huppe courte, fauve comme le 
prëcédent, mais strié transversalement sous le ventre i le 
,r«md hibou d'AraCique. 
Il est curieux de remarquer que la Grèee païenne ait fait 
du hibou l'oiseau de Minerve, tandis que l'art calholique l'a 
employé comme symbole des du|reines écleetique et pro- 
testante, « parce que, dit la légende, il protesterait au 
besoin contre l'ëvideuce du soleil; il ne veut s'éclairer que 
par la lumière qui sort de ses propres yeux ,, ( Lisez saint 
Ambroise et Aldrovande ). Bzt.rlïn-Lr/,.vn. 
It lDALGOmot espagnol, composé des deux mots hiju, 
fils, descendant, et alyo , biens, fortune; en portugais,fidalyo. 
C'est en Espagne le titre d'uneclasse de la petite noblesse, cous- 
tituant la hiàalyuia. Les hidalyos se divisent en h-iàalyos 
de naturale'a, tenant leurs privib«ges de leurs ancêtres, 
et hidalyos de privileyio , ayant aehetë leur noblesse, ou 
l'ayant obtenue par faveur ; maisils jouissent tous des mdmes 
privildges, et sont à cet égard sur la rme ligne que les 
autres membres de la basse noblesse ( cavalleros, chevaliers, 
et escuderos, écnyers ). A l'exception de quelques anciennes 
familles et des membres des ordres de chevalerie, les hi- 
dal»os n'ont presque aucun avantage sur la classe des bour- 
geois, qui les regarde comme des intrus ou des reuégats. 
Le mot hidalyo, préeédé de senor, est un titre des pages 
du roi, dela reine, des princes elprineesses. En Portugal, la 
Jidal9ia , beaueonp plus élendue, embrasse tou le» n.hles 

79 
sans e.xception, sous la dénomination commune defldalyos. 
HIEBLE. Voyez Stmr.u. 
HIERAPOLIS (c'est-à-dire Ville Sacrëe), aujourd'hm 
Bambuk-Kalessi, ville de la Grande-Phrygie, située sur la 
rive septentrionale du bléandre, sur une éminence, et con- 
sacrée  Cybële, était célèbre daus l'antiquité par ses sour- 
ces thermales et par l'antre Plutonium, qui exhalait des 
vapeurs mortelles et oi les prdtres de Cybèle pouvaient 
seuls enlrer sans dauger de perdre la vie. 
HIÉRARClllE. Ce mot vient du grec t¢paé«, prêtre, 
et y.,, je commande, et signifie pouvoir du prëtre; car 
A l'origine des sociétës tout pouvo:,r était confie aux mains 
des prétres. Dans la classe mme des prètres, il y avait diffé- 
rents degrés de puissance et de pouvoir, au sommet des- 
quels était placé le souverain pontile. Chez les cheCiens, on 
employa d'abord ce mot pour exprimer la domination des 
saints ou du sacerdoce, ainsi que celle de i'Elise sur son 
intérieur et sur i'Elat. La constilution de i'Ëglise n'en 
était pas moins démocratique; cependant, peu  peu, 
elle se rapproclm de l'aristocratie. Le gouvernement des 
communautés se concentra dans les mains des chefs; les 
é v ë q u e s se plaeërent au-dessus «les anciens; les m é t r o- 
po lirai us s'etablirent surveillant» de leurs collëgues; les 
p a t r i a r c h e s les dominérent encore ; le pape catin, l'erg- 
que de Ruine, devint le chef détente» les églises chretiennes 
de l'Occident. 
Puis le mot hidrarchie s'appliqua aux rapporls de I'É,- 
»lise avec l'État. L'Eglise prétendit non-seulement ètre in- 
dépeudante de l'État, mais lui tre supérieure. C'est le sys- 
tème hirarchiŒEue ; le système territorial, au contraire, 
établit des rapports opposés; et le système collcyial 
considère l'Église et l'Eat comme iadëpendants l'un de 
l'autre. 
Le mot hidrarchie n'a pas conservé dans notre langue 
sa signification primitive; il ne veut pas dire pouvoir du 
peCre, mais ordre du pouvoir. Ainsi, il y a hiérarchie 
dans tuutes les classes de la société : hiérarchie dans l'ordre 
civil, hiérarchie dans l'ordre ecclésiastique, hiérarchie dans 
l'ordre militaire. La hiérarchie est une échelle, dont le pre- 
mier degré domine les autres : sans hiérarcbie, point de 
société. La hiërarchie des pouvoirs a donuë lieu  des théo- 
ries plus ou moins heureuses : il faut convenir toutefois que 
c'est la base de toute societé, et qu'elle mérite bien de 
fixer l'attention des théoriciens. En Russie, le tchinn établit 
une gradation dequatorze dêgrés, d,mt la hiérarchie militaire 
est la base, mais pour lesquels il y a dans le civil des équi- 
valeurs spéciaux. Cette hiérarchie de service établit seule 
le rang des sujets vis-à-vis du gouvernement. Chez nous, 
les de, és qui sont relalifs seulement aux fonction», et ne 
dolmeqt I,uitlt de Lilt-es qui lent" 3lll 't:LII|, ,',UI; utflllbrellx et 
cariés dans le civil et le militaire. La succession des g 1-a d e s, 
depuis le soldat jusqu'au chef suprdlne de l'avinée, 
les divers dru|nous de la hiérarchie militaire. L'obeissanceest 
due au grade supérieur par tous les grades nulCieurs. Les 
rapports et réclamations, la connaissance d'un fait intél'eS- 
saut le service, se transmetteur toujours hiérarchiqllement 
de grade en grade jusqu'à celui qui donne le droit d'en 
eonnaitre, de juger et de prononcer ; il en est de méme de 
la transmis»non des ordres du supérieur h sou infi[rieur dans la 
hiérarchie. Ainsi, le ministre de la guerre ne eurrespond avec 
les officiers que par la voie lfiérarchique ; et ceux-ci ne peu- 
vent s'adresser à lui que par l'intermédiaire suceessit des 
chefs suivant leur rang ; la hiérarchie, base de la subordina- 
tion militaire, prévient la eonlusion, maintient la d i s c i p I i n e 
et assure l'exécution des ordres. Eu». G. ne 
HIÉRATIQUE (Ëcriture) du grec [.pg't'tZ6.;, sacer- 
dotal. Voyez HIÉ'P.OGLYPIIES. 
HIERATIQUE (St)-Ie). C'est, dans l'histoire de l'art 
grec, l'imitation de l'ancien style de sculpture grecque qui 
jusqu'à l'époque romaine- fut en usage pour certains objets 
et certains sujets. Ce sont surtout des offrandes pour les 
le:nples, que l'on façonnait dans ce si?le compassé et exa- 



0 
gré. Ot{fried Muiler se sert indifléremment des termes 
archaïstique et h¢ralique. D'autres, Welcker notamment, 
ne se servent dans ce sens que du premier de ces termes, 
et entendent par sculptures hiratigues celles qui sont véri- 
tablement d'une, antiquité très-reculC. 
ilIÉIOCLES. On fait monter jusqu'à plus de quinze 
le nombre des personnages de ce nom, la plupart d'une 
très-quivoque renommée : nous citerons seulement les plus 
célèbres. 
HIÉROCLÈS de Bithynie, juge d'abord à icomédie, vi- 
vait sous Dioclétien; sophiste dechalné contre leschrétiens, 
au besoin il et été leur bourreau. Il opposait aux miracles 
de Jésns-Christ ceux d'A p o I I o n i u s de Tyane, et écrivit 
h ce sujet un livre intitulé Philaletç, ou l'ami de la vritd. 
Eube et Lactance, dans son traité des Institutions divi- 
es, ruinèrent avec les armes de la foi et de la logique les 
arguments du Bithynien. 
HIÉROCLÉS, célèbre philosophe é c I ect iq us du com- 
mencement du cinquième siècle de notre ère, était chef d'Cale 
a Athènes sous lhéodose le jeune. L'éloquence de Sucrate 
Stait sur ses lèvres, l"ame ferme du mal»re battait dans son 
sein ; il croyait ì la préexistence des àmes. Deses nombreux 
ouvrages Sur la Providence, le Destin et Le libre Arbitre, 
de ses Ëconomtgues, de ses Maximes des Philosophes, etc., 
il ne reste que de camus fi'agments ; son Commentaire seul 
sur les vers dors de Pythagore nous est parvenu en 
entier. 
Des autres personnages de ce nom, nous citerons ici les 
moins obscurs : H».aoc/:s l'orateur, né à Alabande, en 
Carie ; Hocs auteur du livre Hstoroe, etc., ou Les 
Amateurs de tables ; Haoc£s philosophe stoïcien, né à 
llyllarium, en Carie, H£nocgis jurisconsulte, Htf:aoct'.s 
gramraairien du huitiëme siècle, enfin, un Hffmocs auteur 
d:» iivro Faceti,r. DEE-BAv, OI. 
iilÉIAODI_TLE (en grec tcp4;o,.o, de [¢p6, sacré, et 
¢o.oç, esclave), esclave attaché au service des temples. 
Dans l'antiqnité, on d,.signait par cette expression générique 
lous les individus attach,.s à un titre quelconque au service 
«lu temple consacré à une divinité, et dans un sens plus res- 
lreint ceux-là seuls qui y remplissaient certaines fonctions 
tufCleures, et qui avec leurs dccendants etaient à tou- 
jours consacrés à ce temple. Le nombre des hiérodules 
dans les temples de la Syrie, de la Phénicie et de i'Asie 
Mineure ne laissait pas que d'ètre considérable. Dans la 
Comana de Cappadoce Strabon en rencontxa 6,000, et 
3,000 ì Morimène. C'étaient pour la plupart des esclaves 
dt» sexe féminin, qui pour un faible présent, s'étaient liw'ées 
au dieu qu'elles servaient; et cest à elles surtout q»'on 
appliquait cette qualificatiou de hi6rodules. Citez les Grecs 
l'organisatio» «les hiérodule avait quelq»e chose de plus 
.!i;ue et de plus moral, sauf certaines exceptions, comme 
a Corinthe et à Samos. Les biérodules de Vénus Ercine 
ch Sicile etaicnt surlout célèbres. L'art représente les hié- 
rdules du sexe feminin dansant sm" la pointe des pieds, 
les bras levés en l'air, vtues d'une robe très-courte et trans- 
parente, avec une couronne bizarrement tressée sur la tte, 
,'.out les cheveux sont enroulés et ne formeut q»'un seul 
IllÉIOGLYPlIES (du grec .p,, sacr6 et y)., gra- 
vure). On appelle ainsi les caractères de l'ëcriture figurée 
,les Egyptiens, dont la signification, autrefois d'»me obs- 
curit proxerbiale, n'est devenue peu a peu intelligible que 
depuis iesdécouvertes de Champollion. Par dcriture hiéro- 
919phique on n'entend désigner, suivant l'étymologie grecque 
du mot, que l'écriture sac»'ée incrustes sur les monuments ; 
et en ffet, c'etait surtout, pour ne pas dire exclusiveraent, 
une écriture monumentale différant de l'écriture cm'sire 
et» usage po»r les livres. 
Les Ég.ptiens employaient quatre écritures difl'érentes, 
an{6t toutes ì la fois, et tant6» l'»»ne apr.s Va»tre, à voir : 
|'tcriture hroglgphique ou sacrée, l'écriture historique, 
l¥criture dpistolographique , enchorique ou demotiue» 

i'écriture capte. Les trois premières étaient ¢es critures 
indigènes. Herodote et Diodore n'en comptent que deux : 
i'écriture sacrée ( t,ç& *tçtltlt«« ), et l'écriture populaire 
(rts.otxct ou it6 y,.V.ts-«« ); l'inscription de Rosette et 
celle de Turin ne font alement mention que de deux espëces 
d'écritures : l'ecriture sacrée et l'écriture vulgaire ( 
yçoElloE«). Saint Clëmentd'Mexandrie est le premier qui dis- 
tine trois espèces d'écritures; il nomme l'une l'criture 
sacrde sur pierre (ytlla« tepoytx), l'autre l'dcriture 
sacerdotale (l,.wt'tx,'J) et la troisième #.criture pistolaire . 
1, [nt«'ro).oyp«txoE). Comme dans l'usage actuel on a em- 
prunlé à saint Clément les dénominations de la première 
et de la seconde de ces écritures, il sot été plus juste de 
nommer aussi avec lui la troisiême ëcriture ëpistologra. 
phi9ue, pour laquelle on a adopté à peu près généralement 
aujourd'hui, d'après Hérodote, la dénomination d'#.criture 
dmolique, quoique dans la division de cet auteur, içëcri. 
turc intermédiaire hiératique, si elle n'était pas compléte- 
ment omise, devait d» moins tre comprise dans l'écriture 
démotiq»e. 
L'criture hMroglyphi9ue, appelée dans les inscriptions 
hiéroglyphiques elles-tnèmes dcriture des paroles divines, 
était laplus ancienne ; et vraisemblablement c'était à i'ori- 
ginela seule écriture des hiéroglyphes. Les signes, oucarae- 
tères, sont plus ou moins des images fidèles d'objets visibles, 
de roules espèoes. Ces caractères sont ou incrnstés dans les 
monuments, ou gravés en relief sur leur surface; mais le plus 
souvent on les trouve eombinés dans les grandes sculptures 
murales, pares que, somme les figures des représentatious 
elles-mmes, ils ont été excutés en reliefs»en creux. L'u- 
sage était en outre, quand il s'agissait d'une plus richeor- 
nementation, d'exécuter tous les caratères en couleur sur des 
murailles polies, lls sont tracés tant0» de plusieurs couleurs, 
tant6t d'une seule, ou encore simplement esquissé.s. L'écri- 
ture saerée était fr#quemment employée aussi pour les rou- 
leaux de papyrus, mais »niquement pour les textes sac#.s 
notamment pour le Livre des morts ou quelques-uns de 
ses chapitres, qu'on avait coutume de placer h coté àu 
mort dans son tombeau. Les hiéroglyphes y nt générale- 
ment de la lorrae la plus simple, des esquisses, comrae il 
convenait au style des textes. Le goOt tout particulier des 
Ê'ptiens pour la partie caracb.ristique du dessin s'y pro- 
duit encore d'une maniére plus frappante que dans les images 
exCutCs. 
L'oecriture hidratique ou sacerdotale fut sans doute 
appelée ainsi pour la distinguer de l'Cri»m, épistologra- 
phique ou profane, pares qu'à une époque posterieure elle 
fut employée de prëference par les prëtres seulement et 
pour la liftCature sacerdotale. Préeédemment, surtout avant 
que s'introduislt l'usage de l'écriture épistolographique, elle 
etait aussi la seule écriture employée pour tous les actes 
écriLs de la vie civile; et dës lors elle devait servir non- 
seulement pour le dialecte sacré, mais encore pour le dia- 
lette populaire. C'est surtout une écriture de livres ; et ce 
n'est que par exception qu'on la trouve empIoyée sur les 
monuments. D'après les formes de ses signes ou caractères, 
c'est essentiellement une abrévialion tachyaphique de 
i'écriture hiéroglyphique; d'ou il est résulté qu'on a perdu 
en grande partie la connaissance de la siification des 
images primitives, quoique la connexion soit évidente, 
pour peu qu'on compare les divers signes repondant aux 
hiéroglphes. Les premiers essais de cette écriture hiéra- 
tique cursive se trouvent dans les plus anciens monuments 
de l'antique Égypte qui soient parvenus jusquh nous, à savoir 
sur les blocs des Pyramides de Gizeh et dans les tombeaux 
qui les avoisinent. 
L¥crilure ¢pistolographi9ue ou démoti9ue , provenue 
directement de l'ê«riture hiératiq»e, est une abréviation en- 
core plus g'aqde de ces caractères, qui le plus gënérale- 
ment y ont Fri  une forme louis conventionnelle, et Ira- 
hissant  peine son origiue. On n'en peut suivre l'usage que 
jusqu'à l'èpoque des Psammëtiqnes, la 26" dnastie manC 



.,.,ROGLYPHES 
flmnienne, au septième siècle avant J.-ç. Les grands chan- 
gements politiques survenus h cette époque semblent avoir 
tait eprouver le besoin de rendre autrement susceptible 
dëtre écrite la langue de la vie commune, qui s'était de 
plus en plus éloignée de l'ancienne langue écrite du dialecte 
sacré ; et comme l'écriture biératique était exclusivement 
xéservée à l'usage des prétres et des savants, pour la liftCa- 
ture sacrée et l'antique dialecte dans lequel elle était écrite, 
on s'habitua à employer celle écriture, très-simple dans ses 
signes de même que limitée  un très-petit nombre de signes 
usuels, pour tous les actes de procédures, contrats, lettres 
et autres documents écrits. On ne la rencontre guère que 
sur les rouleaux de papyrus; toutefois, le texte intermé- 
dJaire de l'inscription de Bosette, 00 on la trouve aussi gra- 
ve sur pierre, est une des exceptions les plus connues. 
Ces trois écritures demeurërent toutes en usage jusque 
dans les premiers siècles de l'ère chrétie»ne. Mais lorsque 
le christianisme se répandit toujours davantage en 
amenant à sa suite la littérature ecclésiastique grecque, 
on commença aussi à se servir de l'alphabet grec pour les 
ouvrages cbretiens écrits en langue égyptienne, en y ajou- 
tant, pour les sons particuliers à i'égyptien, six caractères 
e|uprnntés h i'éeriture biératique. Cette écriture, employ.e 
par les Col»tes , est appelée criture copte. 
Le décbiffrement de l'écriture indigène, et notamment de 
l'écriture bi6roglypbique, a été h-bon droit proclam par 
N i e b n b r l'une des plus grandes découvertes de notre siè- 
cle. Elle a donné naissance à une science vaste et nouvelle, 
et elle a exercé la plus décisive influence sur les autres 
branches de l'archéologie, attendu qu'elle nous a mis en état 
Pacquérir successivement la connaissance de la plus an- 
tique civilisation du monde et de celle qui ait duré le plos 
longtemps. Le domaine de l'bisloire scientifique a pu être 
reporté à plus de 2,000 ans en arrière de l'ëpoque où il 
s'arrêtait précédemment; et désormais l'histoire d'Ëgypte 
lbrmera le cadre obligé de toutes les autres histoires de 
l'antiquité. La découverte de l'inscription de Rosette, à l'é- 
poque de l'expvdition de Bonaparte en Egpte (1799), est le 
.premier fait qui ait pu inspirer l'espoir fondé de parvenir un 
jour à dcbilfrer les biéroglyplies. Elle contenait un triple 
texte en caractëres biéroglypbiques, démotiques et grecs. 
Du dernier de ces textes, il résultait qu'elle contenait un 
eul et même decret en facur de l'tolëmée Ëpipbane, 
digé par les prêtres ég}ptiens dans la t, * année du rëgne 
de ce prince, l'an t96 av. J.-C., et que les prêlres ordon- 
riaient d'exposer dans tous les temples de Ptolémée. Cette 
pierre, dont on comprit tout aussitft l'importance, 
'abord déposée à l'Institut du Caire, puis transportée à 
Loudres avec tous les autres monuments de l'expédition 
cientifique d'igpte, que le sort des armes fit tomber aux 
raains des Anglais ; et elle fait aujourd'hui partie de la col- 
lection du lb'itish Museum. On s'empressa d'en multiplier 
Is copies, et le texte en fut pour la première fois publié 
ch 1803, par les soins de la Société des Antiquaires de Lon- 
rires. Mai on ne parvint pas h déchiffrer les biéroglypbes 
aussi vite qu'aurait pu le faire espérer l'existence en trois 
ecritures de cette inscription. La difficulté était double. 
D'abord letexte hiroglypbiqne n'était pas complet. Toute la 
i»a tiesupérieure en avait été hrisée ; et il a été prouvé depuis 
q»e, outre les premières des quatorze lignes biéroglypbi- 
ques, dont pas une seule n'était complète, il en manquait 
complétement tout autant. En second lieu, ce qui rendait 
toute comparaison très-difficile, c'est que les divers ca- 
raclères ou signes n'avaient point, ou du moins n'avaient 
las toujours de valeur alphabétique, maisexprimaient souvent 
des mots tout entiers, de sorte qu'il y avait impossibilité 
d« faire marcher de front le travail de comparaison. Le 
texte en écriture démotique se trouvait en bien meilleur 
état de conservation ; il n'y manquait q»'un coin.: aussi 
avant s:en occupèrent-ils plut6t que du texte hiérogl.- 
vt,qe. 
|,e i»remier qu! tenta cetfe opération fut S /i res t r e d 

81 
Sacy, qui communiqua dans sa Lettre au citoyen Chap- 
»al (alors ministre de l'tutCieur ), publiée dès 1802, les r& 
sultats de la comparaison qu'il avait faite des textes grec 
et encborique. Il estimait que l'écriture biéroglypbique etait 
entièretnett idéographique ou écriture de mots; que l'ecri- 
ture biératique, qu'il avait bien reconnue dans d'autres ins- 
criptions, constituait une écriture syllabique ou alphabéti- 
que ; enfin,' que i'criture encborique était compltetnent 
alpbabétique, sans que d'ailleurs il lui ftt possible d'en 
lire les divers caractères. Mais il tons»ara que les trois écri- 
tures devaient se lire de droite à gauche, "et il sépara par- 
faitement du texte courant un certain nombre de groupes 
contenant les noms de Ptolemée, César, Arsinoé, Alexan- 
dre, etc. 
Le diplomate suédois Akerblad, dans sa Lettre au ci- 
toyen Svlveslre de Sacy, sur l'inscription gyptienne 
de losette, fit faire un second el plus important progrès 
à l'art de décbiflrer les bieroglypl»es. II ne s'en tin» pas à 
séparer les groupes entiers, mais il les réalisa et determina 
la valeur phonétiquedes divers signes dans les noms de Pto- 
Iémée, Arsinoé, Alexandre, Bér¢nice et six autres encore. 
L'alphabet qu'il en constitna était an total exact. Il avait en 
outre positivement reconnu dans le texte Idéroglypbique 
divers noms de nombre. En réalité, c'est donc lui qui le 
premie parvint à décbiffrer les caractères égyptiens. Mais 
l'oeuvre en resta là. 
L'Analyse de l'inscription de losette, publiee en 180 
par le comte Panin, manqua complëtetnent le but que l'au- 
teur avait eu en ue, parce qu'il partit de cette fausse sup- 
position que l'inscription biéroglypldque s'était conservée en 
entier, et parce qu'en conséquence il cotnpara la prmiere li- 
gne du texte grec avec la premiëre ligne encore subsistante 
du texte biéroglypbique. Il l'interprétait donc de telle façon, 
qu'au lieu "du non» de Ptolémée, par exemple, il lisait ces 
mots : AIin qu'ilsoit connu. Les tentalives faites par Sickler, 
Bailey, Spohn, etc., ne furent guère plus heureuses. L'es- 
sai publié seulement en 1808 par Qnatremère de Qnincy 
sousle titre de Becherches critiques et historiques sur la 
langue et la littdrature de l'£gyptc, où il prouvait que 
la langue copte est tout à tait la mème que l'ancienne langue 
égyptienne, fut un travail autrement important. De 1809 à 
1813 avait paru la vaste Description de l'Egypte, ce glo- 
rieux fruit de l'expédition de Bonaparte; mais elle demema 
un portrait sans lumière, sans ombre et sans perspective, 
parce que les innombrables inscriptions qui lui servaient 
de commentaire et pouvaient expliquer le tout dans son 
ordre historique demeuraient encore inintelligibles. 
C'est en 1819 que l'attention fl»t pour la première fois 
attirée de nouveau sur ces importantes recherches par n» 
article du clèbre physicien Young, qui parut dans un sup- 
piCent à la première partie du 4 e volume de i'Encvcloloe- 
dia Britannica. Dans cet important article lgypte, la dé- 
couverte d'Akerblad était appliquée du texte dëmotique au 
texte biératique. On y prouvait de la manière la plus in- 
géuieuse, au moyen de l'écriture hiératique placee entre 
les cieux, que les divers signes dans les figures hiéro- 
glyphiques de noms répondaient aux signes déjà connus 
des g_oupes de noms en écriture démotiqne. Le D  Yo»ng 
obtint ainsi un petit alphabet biéroglypbique, à l'aide du- 
quel il essaya d'expliquer une suite de figures bifroglypbi- 
qms de rois toutes différentes. Cette tentative lui reussit en 
g(,néral ; mais elle fut si dfectneuse dans les applications 
particulières, qu'il lisait plusieurs figures d'une manière tout 
, fait erronée, par exemple Arsinoe au lieu d'Autocrator, 
Évergète au lieu de César, etc. 
Cbam polit on, qui dès 1807 avait fait une étude toute 
particulibre de l'Egypte, connaissait sans aucun doute 'ar- 
ticle du D' Young ; et il semble que ce soit ce travail 
qui l'ait porté à faire de nouvelles tentatives pour arriver 
l décbiffrer les biéroglypbes. En 1821 il fit paraitre une 
brochure d'une rareté extrême, parce q»'il la mit à quelque 
temps de là presqJe tout entière au pilon. Elle éla't inlitu- 



ië« : De l'dcrituro hidrattqe des anciens Êgyptiens, et 
il y prouvait que si l'écriture biéroglypbique, comme cela 
avait été généralement admis jusque alors, méme par Young, 
à t'exception des noms propres, n'ëtait qu'une écriture 
idéograpbique de mots, il fallait en dire autant «le l'Acri- 
ture biératique, puisque les papyrus de morts qu'il avait 
examinés correspondaient signe pour signe dans les deux 
écritures, tandis qu'auparavant il semblait plus vraisemblable 
aux savants que cette dernière écriture pouvait Cre syl- 
labique. Mais les progrès les pins décisifs dans le àécbif- 
fremeut des hiéroglyphes n'eut lieu que l'année suivante, 
en 1822, à la suite de la publication de sa fameuse Let- 
tre à M. Dacier, dans laquelle, au moyen de l'analyse 
d'une suite de noms de rois, il dressait un alphabet hié- 
roglypbiqne presque parfait, quoique encore un peu res- 
treint, s'appliquant de la mauiëre la plus Cider.te partout 
où revenaient les reCes signes. Quoique ce brillant ré- 
sultat ne partR à certains égards qu'une rectification et 
une exteusion de la découverte si ingénieuse du D  Young, 
qui d'jà avait en partie attribué aux signes isolés la 
même signification, il en differait cependant essentielle- 
rueur, parce que Champollion y suivait une voie tout au- 
Ire, aussi simple et directe, par conséquent aussi sfire et 
aussi féconde que celle de son prédécesseur était difficile 
et ingénieuse, mais par cela méme peu sfire et n'attei- 
tuant que partiellemeof son but. Champollion fut secondt  
daus cette occasion par une circoustance particulièrement 
favorable. En 1815 Banks avait déterré dans l'fie de Philœe 
un obelisque qu'eu 1821 il fit transporter avec sou pitdes- 
lai eu Angleterre, et qu'il fit dresser dans son domaine de 
Hingslon-Hall, comté àe Dorset. La méme »nnée il publia 
les inscriptions Ifiéroglypbiques de cet obélisque et l'tus. 
ctiption grecque de la base qui en dependait. Cette dernière 
contenait une lettre du prétre d'Isis de Philoe / Ptolëmée 
Evergète II, à Cléoptre sa soeur, et ì Cléopttre son épouse. 
II était donc naturel de supposer l'exisfeuce des mmes 
noms dans les inscriptions hiérogb pbiques. Or, quoiqu'on 
suppostt à tort qu'il existait un rapport entre l'inscription 
grecque et l'inscription Ifiéroglyphique, ayant trait toutes 
deux, il est vrai, an méme roi, mais appartenant à des 
années différentes de son règne, il ex-istait cependant en 
r«.aiité s»r l'obélisque, outre le nom de Ptolémée, déjà lu 
dans l'inscription de Rosette, la figure de Cléopàtre; et 
Banks inscrivit déjà lui-reCe ces noms à coté de la figure 
exacte sur l'exemplaire qu'il envoya à Champollion. Celui- 
ci basa alors sur la méme présomption son analyse com- 
parative des deux noms. Il se rencontra par hasard et fort 
heureusement que les deux noms PTOLEmmos et kLE- 
PATrA coutenaient cinq lettres pareilles, et qu'en outre I'a 
se répetait dans le deuxième nom. La démonstration était 
si simple, qu'il ne pouvait pas rester le plus léger doute 
sur l'exaetilude de la leçon lue, bien qu'il rester encore à 
triompher de quelques objections. Ces deux noms four]ris- 
saieut donc un alphabet de onze signes phonétiques, qui 
s'aumcntèrent bienf0t considérablemeut par «les applica- 
tion nltérieures de ce méme alphabet aux noms d'Alexan- 
drc, de Uéréniee et de beaucoup d'autres. Ainsi se trouva 
fixée et bientOt reconnue par les érudits les plus ëminents, 
tels que S)'lvesfrede Sacy, Niebuhr, G. de Humboldt, la 
bae de toutes les découvertes qui devaient se succéder rapi- 
doement sur ce terrain. 
biais mme dans sa Lettre à M. Dacier Champollion 
avait si peu reconnu le véritable organisme de tout le sys- 
tème des hiéroglypbes, qu'il partageait toujours avec Young 
et mtres l'opinion erronnée que la signification phonéfique 
des hiéroglypbes isolés se bornait uniquement aux noms 
propres, et que le reste du tex-te courant se composait de 
signes imremêut idéographiques. II n'abandonna cette idée 
que dans son ouvrage suivant, son Pr¢cis du système 
ro91yphique (Paris, 181, oi il alCunira que l'alphabet 
trouvé an moi'en des noms pouvait s'appliquer à tous 
autres grouoes où se trouvaient les mmes signes. _Mais 

IIIEROGLYPI ., -- 
c'est dans sa Grammaire l9yptienne, publide seulement 
en 183, après sa mort, que se trouvent les derniers et le» 
plus complets résultats de ses recherches philoloqnes. 
Dans cet ouvrage il entreprit d'exposer tout le système de 
l'éeriture biéroglyphique et les traits principaux de la langue 
qm y est déposée, en donnant pour preuves des exemples 
nombreux tirés des inscriptions les plus diverses de toute» 
les époques. 
Dans sa Lettre It M. Bosellini sur l'alphabet hidrogly- 
lhique, insérée au tome 1X  des Annales de l'lnstilut 
archdologique (Rome, 1837 ), Lepsius lit faire uu progrès 
de plus à l'intelligence exacte et métbodique du système 
d'écriture égptienue, en divisant en diverses classes ral- 
phabet plmnétique qui dans la Grammaire de Champollion 
se compose de 3 signes, et en ne reconnaissant qu'un 
nombre de 3t hiéroglyphes pour constituer la partie pu- 
rement et exclusivement phonétiqne. La première partie 
de l'ouvrage de Bunsen intitulé : La place qu'occupe 
l'Égyple dans l'histoire du nonde (Hambourg, 1845) 
contient encore un aperçu plus général de la matiëre 
coordomée suivant les principes acquis. La partie lexico- 
logique de la connaissance des biéroglypbes a aussi été 
notablement enrichie par les ouvrages de Rose]lini, de Sal- 
volini, de Leemans, de Hincks, et tout récemment par les 
traductions de textes plus éteudus qu'ont données Birch et 
de Rougé. 
Les recherches sur l'écriture hiératique se rattachent 
pour la plupart à l'écriture hiéroglyphique, biais depuis 
Silvesfre de Sacy et Akerblad les déchiffrements démofiques 
out été avancés surtout par Young, qui a donué une large 
base pour toutes les recherches ultérieures sur ce terrain de 
l'hiérogl phique, plus éloigné par le temps, le dialecte et 
sources. Il faut surtout citer à cet égard sa traduction 
interliuéaire de l'inseriptiou de Rosette et de plusieurs pa. 
pyrus démotiques dans la Hiéfollythics collecter by the 
E9yptian Societ# (Londres, 1823 ) et does ses Budiments 
of an E9yptian Diction ary, publiés d'abord comme auuexe 
à la grammaire copte de Tatfam (1830), puis separément 
( 1831 ). Après les diverses dissertatious de Champollion, 
de Salvolini, de Lepsius, de De Saulcy, il faut encore men- 
tiouner l'hup, ortante publication faite par Leemans, dans les 
Monuments,'yytiens de Leyde (Leyde, 1839), d'uu grand 
papyrus démotique contenant une foule de devises grec- 
ques. Dans ces derniers temps ces différents travaux ont trouvé 
uu habile exploitateur dans Btugscb, qui a déjà publié sur 
ce sujet plusieurs ouvrages, parmi lesquds on doit plus 
spécialemeut citer les dissertations inlitulées Scriptura 
.oe9yptiorum demotica (Berlin, 1848), lVumerorum dœemo- 
ticorum Doctrina (1849), et Cllection de Documents 
àemotiques (t. I , ls50). N'oublions pas non plus de dire 
que la science lfiéroglypbique fondée par Champollion a de 
tout temps rencontré des adversaires, et parfois de trs- 
violeuts coutradicteurs, parmi lesquels il faut nommer sur- 
tout Klaprofh, Palin, Janelli, ,'illiams, Goulianof, Secchi, 
Seyffarth et Ubleman, dont les modes de díehiffrement 
ont aussi peu de rapports entre eux qu'avec le sstème de 
Champollion, sauf celui du dernier de ces auteurs, qui adopte 
compléfement le sstème de Seyff.artb. 
Toute écriture a pour point de départ une écriture d'images 
ou d'idées, et, dans les dettes uitCieurs «le son dt.veloppe- 
ment, se rapproche loujours davantage de Fécriture pboné- 
tique purement alphabétique. La langue mexicaine d'ima- 
ges pouvant à peine Cre qualifiée d'écriture, dans le sens 
rigoureux de ce mot, l'écriture chinoise d'uneparf, et les écri- 
lutes européennes «le l'autre, nous représentent de la maniè 
la plus complète les deux points extrëmes de loul le déve- 
luppement de l'écritnre. Les écritures syllabiques en forment 
le d%,,ré intermédiaire le plus important. L'beriture égyp- 
tienne se distingue de toutes les autres par celle eircons- 
tauce que dans son remarquable organisme elle conli«a 
tous le» degrés à la fois dans des rapports  peu pr égaux. 
Son point de départ lut ,me écriture idéographique de mot% 



nlÉROGLYPHES 
et successivement elle se developpa jusqu'aux signes pure- 
ment phonétiques dans lesquels le consonnes et les voyelles 
paraissent séparées sans pour cela renier jamai son ori- 
gine idéograpbique ou subordonner seulement les élétnents 
idéographiques aux éléments acquis postérieurement. 
La premifre classe des biéroglypbes, celle des signes léC- 
graphiques ou représentant des idées, se subdivise : t ° en 
signes se rapprochant plus ou moins directement des nbjets 
qu'il s'agit de désiger; 2 ° en signes désignant symbolique- 
ment ou par voie d'ailusion des idées abstraites nu bien des 
objets difficiles à reprësenter. A ces deux divisions se rattache 
3 ° la série des signes déterminatifs, qui ne se prononcent 
point et ne servent qu'à mieux désigner un mot prêcédent 
ou bien la clame de mots à laquelle fl appartient, par exemple 
le cercle, que doit représenter et signifier le disque du 
soleil ; à la seconde, le vautour comme symbole de la mère 
ou bien le plan d'une ville pour signilier ville; h la troi- 
sième série, le lion, répété derriëre son nom roui, ou bien 
|a tige «l'une fleur derrière le nom de la plante. 
La seconde classe des hiéroglyphes est celle «les signes 
phonétiqu¢$. Ceux-ci furent choisis dans la grande masse 
des hiéroglyphes idéoaphiqnes, de telle sorte que le son 
qu'il s'agissait de désigner fat le son initial du nom de 
l'objet représenté. Ainsi le idbou, en égyptien moulag. 
représente l'm; l'aigle, en égïptien achom, l'n. Le nombre 
des biéroglyphes choisis pour les quinze sonde la langue, 
dont on pouvait faire usage dans tous les cas o/l il ne s'a- 
gissait que d'écrire des sons isolés, fut limité à trente envi- 
ron. On se permettait en outre certaines substitutions de 
signes complétement homophones, afin de pouvoir plus 
commodément classer" les groupes pour l'oeil. Plus tard, 
notamment du temps des Bomains, cet alphabet fut encore 
attgmenté de quelques signes. 
Enfin, la troisième classe des hiroglyphes tient le milieu 
entre les deux premières, .es signes participant des deux 
natures, tant idéographique que phonétique. Sou,ent en 
ellet on se servait des hiéroglyphes sités pour certains mots 
non-seulement dans leur signilication phonétique primitive, 
mais encore pour les lettres initiales des mmes mots, et on y 
ajoutait les au, res sons de mots tirés de l'alphabet phonetiqne 
général. Ainsi la croix ane, par exemple, servait à 
signer le mot anch, vie, mais elle ne saurait ëtre 
ployée que comme a, parce qu'on y ajottait pour I'n et le 
ch les sons phonétiques tirés de l'alphabet général. Elle ne 
devient pas de la sorte signe pbonétique général, parce qu'elle 
ne saurait tre employëe partout où il laut désigner le son 
a, mais seulement au commencement du mot anch, qu'à 
Porine elle a seul désigné. Mais quelquefois aussi certains 
signes perdent tellement leur signification originairement 
idéographique pour des complexes pbonétiques d'une ami de 
plusmeurs syllabos, que l'on peut s'en servir aussi pour d'au- 
tres mots ou pour telles de leurs parties qui répètent pour 
l'oreille le mme complexe phonétique. Les équivoques pos- 
sibles sont alors évités à l'aide de divers moyens, notam- 
ment par l'addition de déterminatifs. Mais dans tous les cas 
o se présentaient a/ément des difficultés de désignation 
idéographique, comme pour les noms étrangers, les flexions 
grammaticales, etc., on avait coulumede se servir de pré.. 
férence d'hiéroglyphes parement phonétiques. 
L'fcriture hiératique et l'écriture démotique contiennent 
en général les mmes éléments que l'écriture Idéroglyphi- 
que; mais ici, dans l'écriture dímotique surtout, la partie 
idíographiqne de signes resta toujours de plus en plus en 
arrière «le la partie plumétique. 
HIÉBOMANCIE (du grec tr6,;, sacré, {zvvoE, diri- 
nation), divination par la voie des sacrifie.es. Elle était ba- 
sC, d'abord sur les conjectures tirCs de l'extérieur de la 
victime et de ses divers mouvements, puis sur l'observation 
des entrailles, le plus nu moins de promptitude avec laquelle 
la flamme les dévorait, l'aspect des gteaux, de la farine, 
du vin, de l'eau, de tous les objets employés dans la céré- 
monie ; sur la manière entin de trappex la victime et de la 

-- HIERON 83 
dépecer. Opposait-elle quelque résistance à l'approche de 
l'autel, fuyait-elle, se dérobait-elle au coup fatal, expi- 
rait-elle dans une longue agonie, ou tombait-elle frappée 
de mort subite avant l'atteinte du couteau sacré, c'étaient 
là autant de fàcheux présages. Marchait-elle, au contraire, 
d'elle-mme à l'autel, y recevait-elle la mort avec resi- 
gnation, expirait-elle sans pousser un gémissement, on 
ne pouvait 'y méprendre : les ddeux étaient favooehls. 
On allait jusqu'à lui verser de l'eau dans l'oreille pour en ar- 
racher un mouvement de tte exprimant sa satisfaction. La 
dépeçant avec un couteau dans tonte sa longueur, on tirait 
des pronostics des ondulations de la queue. On en tirait d'au- 
tres de cette mme queue jetée sur le bra«ier : la chaleur la 
faisait-elle recourber, c'était mauvais signe; pendait-elle, 
ou s'Cendait-elle horizontalement, c'était un présage «le 
chute; s'élevait-elle en ligne droite, c'était un si:.e de 
victoire. 
Après avoir ouvert les flancs, on passait à l'observati«m 
des entrailles, qu'on jetait toujours aux flammes, atten,h! 
qu'à la mort de la sibylle de Delphes, ses esprits animaux 
avaient passé dans les plantes servant de nourriture aux 
bestiaux, et avaient ainsi transmis aux ictimes le don de 
prophétie. On attribu ait de mème aux parcelles de la siblle 
répandues dans l'air le don des présages par le son. Les 
entrailles entières, salues, bien proportionnées, d'une belle 
couleur, étaient un signe favorable ; dans le cas contraire et 
si elles étaient pat#tante», elles n'annonçaient rien que de fa- 
cheux. La partie principale à observer était le foie (vo9c= 
Hvoscovm.) 
Après l'examen du foie, le sacrificateur passait à cehfi du 
cœur. Peu volumineux, maigre, avec des palpitations fré- 
quentes, il était d'un fachenx augure. Son absence totale an: 
nonçait quelque fun¢ste événement. Il manquait a dettx 
victimes le our où César fut assa.,siaé. Après le cœur, le fiel, 
la rate, les poumons, les membranes enveloppant les en- 
trailles! Un fiel volumineux, facile à déborder, la rencontre 
de deux finis, présageaient de violents débats, des combats 
sanglants, dont l'issue toutefois devait Cre heureuse. La 
rate trouvíe à sa place ordinaire, pure, saine, ayant sa 
couleur naturelle, était un signe de succès. Les entrailles 
glissaient-elles des mains du sacrificateur, s'oifraient-elles 
taninCs de sang ou livides, souillées de pustules, dechir««e% 
dessêchées, en putréfaction, attaquíes par les vers, c'niaient 
autant de malheurs. Des poumons fondlts conseillaient «le 
suspendre toute entreprise commencée ; sains et infants, ils 
invitaient à se laisser aller au cours de la fortune. Totttes les 
parties de la victime présentaient ainsi des présages he:treux 
ou funestes au croyant qui les consultait avec foi. Les temps 
se modifient, l'homme ne change pas. 
HIÉBOMNÉ|ON (d'".zé6, sacré, tvV.., contrf- 
leur, gardien, c'est-à-dire préident des sacrifices ). l'oye-. 
APUlL"T¥ONS. 
HIIBON. Il y a eu deux princes syracusains de ce nom. 
HIÉRON I e. G é ! u n avait, pendant un règne de dix-sept 
ans, fondé et affermi la grandeur de S y r a c u s e et de sa pro- 
pre famille. Il eut pour successeur son frère Hieron I er, 
qui régna onze ails (de '/7 à 467). Selon Diodore de Sicile, 
ce fut un tyran avare, fourbe et cruel. Élien et Pindare le 
représentent comme un prince /ncomparable. Xenophon a 
vautWdans un de ses dialogues sa sagesse et sa vertu. Eh 
bien, les uns et les autres n'ont pas tort. Au commence- 
ment de son rgne, en effet, on voit en lui un tyran inquiet 
et soupçonneux, qui se forme une garde de mercenaires 
ítrangers, et tend des embûches à son ff'ère Polyzèle, dont 
la popularit lui porte ombrage. Celui-ci va chercher tin asile 
à la cour de "l'héron, tyran d'Agrigente, qui a été l'ami de 
Gélon et le compagnon de ses victoires contre les Cartha- 
ginois. La guerre êe/ate entre Syraeuse et Agrigente; mais 
bientbt les deux frères se réconcilient, et Hiíron recherche 
l'amitié de Théron. Dès ce moment l'histoire nous montre 
le tyran de Syracuse sous un tout antre aspect. A la suite 
d'une maladie grve, il chercke tes délassemeats dans la 
11. 



84 
société des savants, et prend tant de pla,ir à leur entretien, 
que ce caprice d'on convalescent devient une louable et 
utile habitude. Dès lors sa cour est le rendez-vous des 
hommes illustres de l'époque. Les poëtes Ba cch y I id e et 
E p i ch a r m e partagent son intimité. Sa générosité attire 
près de lui S i m o n i d e et P i n d a r e, qui payent ses bien- 
faits par des éloges immortels. C'est auprès d'Hiéron qu'Es- 
chy I e, vaincu par Sophocle, son jeune émule, vient ca- 
cher son dépit et sa honte. En montant sur le tr6ne, ce 
prince avait réuni à Syracuse Géla et quatre villcs de sa dé- 
peudance. Il soutint plusieurs guerres heureuses et justi- 
tiées par une généreuse politique; il déKvra les Agrigentins 
du tyran Trasydée et leur rendit la liberté; il prot«gea l'in- 
dépendance de Cumes, ville de Campanie, menacée par les 
Tyrrhéniens. Suivant une pratique dont l'antiquité offre de 
fréquents exemples, il transplanta les habitants de.Naxos et 
de Catane de leur ville natale dans celle de Léontimn ; 
puis il repeupla Naxos et Catane par une colonie de 5,000 
Syracusalns et de Grecs qu'il avait appelés du Péloponnèse. 
Il mourut en 467, à Catane, qu'il avait fondée : les habitants 
lui décernèrent les honneurs héroiques, espèce d'apothéose 
semblable à celle que les Romains accordèrent, dans la 
suite, , leurs empereurs. Hiérou I er avait vu proclamer son 
nom parmi les vainqueurs aux jeux olympiques. Thémis- 
tocle, plus sévère, aurait voulu lui interdire l'entrée de 
Pise. « Il n'est pas juste, disait-il, que celui qui n'a rien fait 
pour la Grèce pendantl la guerre medique participe à ces 
jeux. » 
HIEON II. Pendant la tyrannie d'Agathocle, les Syracu- 
saius, qui viennent d'ttre huroiliés par Pyrrhus, roi d'Epire, 
se jettent dans les bras d'Hiéron Il, rejeton de l'ancienne 
famille royale. Proclamé d'abord général, il ïut élevé, en 
569,  la fo)anté, à la suite d'une victoire sur les Marner- 
fini (brigands italiens, qui s'étaient emparés de Messine, 
et qui l'occupèrent assez longtemps ). Son règne, qui dura 
cin,iuanle-quatre ans, ne tut trouhlé que par la défaite qu'il 
éprouva en 2O en combattant les lomains, au commen- 
cement de la première guerre punique. Il demanda ensuite 
la pai, ïut reçu dans l'alliance du peuple romain, et la lidé- 
litWavec laquelle il observa le traité fut une des causes les 
plus ellicaces du succès des Romains dans cette pretoière 
lutte conlre çarthage. L'an 241, à la fin de cette guerre, il 
vit la moitié de la Sicile passer de la domination carthagi- 
noise sous celle de lome. Pendant son long rëgne, il assura 
i« ses sujets une prospérité sans exemple. 
Charles De Rozot. 
IIIÉBOXYM E  dernier tyran de S y r a c u s e, petit- 
fils «le !! i éron Il, lui succéda en 215 avant J.-C. Ses débau- 
ches et sa cruauté soulevèrent les Syracusains : au bout 
d'un an de règne, il fut assassiné. Aors le parti carthagi- 
unis triompha dans Syracuse. Il n'en fallut pas davantage 
pour attirer sur cette république les armes des Ilomaius : 
après trois ans de siCe, Syracuse succomba en 212. Deux 
ans après, toute la Sicile était reduite en province ro- 
maine. Charles Dr Rozom. 
HIÉRONYMITES  cbanoines réguliers, appelés aussi 
Jéronymite ou Ermites de Saint-Jér6me, parce qu'ds se 
rouaient à imiter saint Jér6me daus sa retraite de Bethléem. 
Leur ordre date de 1373. Leurs statuts étaient puisés dang 
les écrits deleur patron, et ils suivaient la règle de Saint-Au- 
gustin. Au quatorzième siècle, ils étaient déjà nombreux en 
Espague et en Italie. On en comptait de cinq espèces : les 
hiéronymites d'Espagne, ceux des Pays-Bas, qui s'occupaient 
de l'instruction de la jeunesse, ceux de l'observance ou de 
Lombardie, ceux dela Congrégation de Pierre de Pise, et ceux 
de la congrégation de Fiesoli. Ce fut Thomas de Sienne qui 
fonda ceux d'Espague. Après sa mort, ses disciples passè- 
rent en ltalie; les autres se fixèrent à Valence, en Castille, 
en Portugal. Les Hiéronymites de Castille jouirent de quel- 
que célébrité : leurs monastères servirent de retraite aux Es- 
pagnols qui fuyaient la haine de Pierre leCruel. Au quinzième 
-iO:le, leur abbaye de Lupano était la Dlus considérable de 

HIERON -- HIGHWAYMEN 
l'ordre; là se tenaient leurs assemblées générales. Le pape 
Benolt XII1 l'exempta de la juridiction des évques. A 
tre-Dame de Guadeloupe, les Hiéronymites fa'aient de gran- 
des distributions de blé, formaient de jeunes clercs, et don- 
uaient l'hospitalité aux pèlerins. Ce fut dans leur abbaye de 
Saint-Just que C h a r l e s-Q u i nt se retira après son abdica- 
tion. Il ne reste plus guère de leurs communautés que celle 
de Saint-Laurent, attenante à la demeure royale de l'Escu- 
ri al, crée par Philippe Il, et richement dotée, afin de dire 
desmesses pour son ame, bourrelée de remords. Le vetement 
de ces religieux consistait en une tunique de drap blanc, un 
petit capuce et un manteau de mme couleur, avec un scapu- 
laire noir. Ceux de l'Orient avaient seuls une robe brune. 
La congregation de l'Observance, ou de Lombardie, fut fon- 
dée par Loup d'Olmédo, dans les montagnes de Casalla, 
près de Séville. Pendant quelque temps plusieurs de leurs 
instituts prohibèrent l'étude des sciences, comme conduisant 
à l'orgueil. Leur principal monastère en Italie était Saint. 
Pierre de l'Ospitaletto, aux environs de Lodi. Le prieur se 
qualifiait de comte de l'Ospitaletto, et avait une partie des 
pouvoirs épiscopaux. Pierre de Pise cra, vers la lin du 
quatorzième siècle, à Montebello, dans l'Ombrie, la cong-ré- 
gation qui porle son nom. Elle avait des ermitages dans les 
provinces d'Aucune et de Tréviœe, dans le Tyrol et en ga- 
vière. Charles de Montegranelli, de la famille des comtesde 
ce nom, se retira dans la solitude aux environs de Veroue, 
et ïonda, sur la fin du quatorzième siècle, la congrégation de 
Fieoli : elle fut supprimée en 1668. Les Hiéronymites comp- 
taient beaucoup de monastères riches et puissants; la plu- 
part de leurs ordres avaient des armes distinctives. Il .v 
avait au.ssides religieu.es hiéronymites. 
HIEROXYMITIQUE (Alphabet). Voye-. CT,]LLm 
(Alphabet). 
HIEROPII.LXTE ( du grec l¢po.=oEw'o;, de t¢ç6;, saint, 
sacré, et .=;vw, je déclare, je manileste). C'est ainsi qu'on 
appelait la grand-prE¢re qui présidait aux re)stères d'Ê- 
I e u si s, et que toujours on choisissait dans la famille des 
Eumolpides, dont l'aieul E umolpe passait pour avoir Ce 
le fondateur de ces mystères en mme temps qu'il avait ë!é 
le premier hiérophante. Pour remplir ces fonctions, fl fallait 
ne plus Atre de la première jeunesse et Etre sinon beau, du 
moins dépourvu de tout défaut choquant de conformation, 
posséder en outre un organe extrmement agréable, et sous 
le rapport de la moralité tre c, omplétement irreprnchable. 
Le mariage n'était pas permis aux hiérophantes; mais il 
n'est pas invraisemblable qu'on choisissait pour ces fonc- 
tions des individus déjà mariC, à qui dès lors il demeurait 
interdit de contracter un nouveau mariage. Dans la o, lébra- 
tion des mystères, l'hiérophante représentait le demi ourgos 
ou créateur du monde. C'est à lui seul qu'ítait confiée la mis- 
sion de conserver les lois non écrites et de les interpréter, 
comme aussi d'introduire les néophytes dans le temple d'É- 
leusis et de les initier peu à peu aux petits et aux grands 
mystères. Aussi l'appelait-on encore parfois mystagogue 
et prophète; et il était absolument interdit de prononcer 
son nom en présence d'un profane. Dans les remouies 
publiques, c'est lui qui portait la statue richementorne de 
la déesse. 
HIÉBOPHANTIDES ou PROPHANTIDES, prç- 
tresses des mystères d'Eleusis. 
HIGHLADEBS habitants des Highlands ou 
hautes terres d'Ecosse. 
HIGHL.NDS c'et-à-dire Hautes-Terres. On appelle 
ainsi la partiedu royaume d'Écosse séparée du pas plat 
par les monts Grampiaus. Celte délimitation naturelle fut 
une des causes principales pour lesquelles les highlanders 
ou habitants des Hautes-Terres ont toujours formé et for- 
ment encore une race tout à fait distincte des habitants de 
la plaine. 
HIGH],VAYMEN. On appellait ainsi, en Anglet¢rre, 
les brigands qui autrefois infestaient plus particulièrement 
les enviltm de Londres, gens souvent de fort bonne famille 



HIGHWAYMEN 
et montant des chevaux de prit. L'audace et la courtoisie 
aec ie«quelles ils exécutaient leurs brigandages leur don- 
naient une certaine couleur romanque, et les ballades où 
on célébrait les exploits d'un Claude Duval ou de tel antre 
highwu!iman fameux, faisaient au commencement du dix- 
huitieme siècle partie des lectures favorites du peuple an- 
gl-ais. Aussi, depuis De Foc et Field ing jusqu'à Bulwer et 
Ainsworth, les romanciers n'ont-ils pas manqué d'exploiter 
cette mine féconde. Celui qui arrètait un highwovm«n rece- 
 ait de la justice une recompense de quarante livres sterling. 
Le progrès des mœurs et une meilleure police ont mis de- 
puis longtemps un terme à ces désordres. 
HILAI RE(Saint), pape, originaire de l'ile de Sardaigne, 
qui remplaça, saint Léon sur le tr6ne pontifical, en 4(;1, 
aait eté archidiacre de l'Ëglise romaine sous son prédeces- 
sent, qui l'avait employé dans les affaires les plus importan- 
tes et l'avait nommé son légat au second concile d'Éphèse. Le 
pontificat d'Hilaire n'a offert rien de bien remarquable. Il dé- 
plo)a un grand zèle pour la foi et pour la conservation de 
la discipline ecclésiastique, et mourut, le 21 tévrier 568, lais- 
sant onze épitres et quelques décrets. 
IIIL:t_IRE (Saint), de Poitiers, naquit dans cette ville, 
vers le commencement du quatriëme siècle, de parents no- 
bles. Elevé dans le paganisme, il fit de brillantes études, et- 
voulut: lire tous les auteurs paiens, juifs et chrétiens. La 
lecture de ces derniers le rapprocha des hommes qui pro- 
fessaient la foi évangélique. Il la partagea bientOt lui-même, 
et se distingua par tant d'érudition relieuse, de piété et 
de vertus, que ses concitoyen% bien qu'il fi)t marié, l'Ce- 
vèrent a l'épiscopat, en 350 ou 355. Il se munira un des#us 
ardents défenseurs du christianisme au concile de Milan, 
en 355, et à celui de BoEiers, en 356. Il y deploya tant de 
logique etd'éloquence, que les ariens, qu'il combattait, le 
fireut exiler en Phrygie. Appelé au concile de Séleucie, 
en 35% il y défendit avec beaucoup de chaleur et de talent 
la consubstantialité du Verbe, conke les demi-ariens et les 
anoméens. Ses adversaires le firent alors renvoyer dans les 
Gaules, où il fut reçu à bras ouverts par les fideles de son 
diucèse, il s'occupa sans retard d'obtenir la rétractation de la 
plupart des évques de la contree, qui avaient souscrit le for- 
mulaire de Rimini, et de fermer toutes les plates que son ab- 
sence avait faites à son eglise. Rappelé en Italie par Valen- 
tinien, il n'y demeura tiui peu de temps, et vint mourir 
saiatement dans son diocèse, ver» 367 ou 368. L'église ho- 
nore sa mémoire le 13 janvier. Ses œuvres se composent de 
1 ° douze Livres sur la Trinil#; 2 ° on Trait# des Snodea 
° un Commettaire sur saint Matthieu et sur les Psaumes ; 
° trois Écrit, à Constance, dans lesquels il censure sa par- 
tialité pour les arieus. Son st?le, vébément, impëtueux, quel- 
quefois obscur et enflé, l'a fait appeler par saint Jérôme le 
lh6ne de l'dloquence latine. On lui a attribué sans fonde- 
ment le Gloria in excel$i,, le Te Dem et le Pange lin- 
1tl LAIE ( Saint ), d'Arles, n6 en -0 t, de parents 
bles et ricbes, fut élevé par le saint abbé de Lérins, 
Honorat, son parent. Appelé au siCe épiscopal d'Af- 
les, Honorat emmena avec lui Hilaire, qui fut le coopé- 
rateur de ses travaux et son successeur. Hilaire assembla 
plusieurs conciles, entre autres celui d'Orange, par lequel il 
fit dëposer un évêque gaulois nommé Ch(lidoine. Celui-ci 
en appela au pape saint Léon, qui cassa la décision du con- 
cite d'Orange, et retrancha mme l'évque d'Arles de la 
communion dusaint-sige; mais ayant reconnu, paris suite, 
combien les préventions qu'on lui avait inspirées étaient 
injustes, le pontife revint sur cette détermination, et le saint 
prélat mourut dans son diocèse, le 5 mai -V9, epuisé par 
ses travaux apostoliques. Saint Hilaire avait écrit à saint 
Augustin en -27, avec saint Prosper, pour lui exposer les 
erreurs des semi-pélagiens. Saint Augustin lui adressa pour 
réponse ses iixris de la Pr#destination des saints et du 
don de la Perséeeranee. Plusieurs des ouvrages de saint 
tlilaire ne sont point parvenus jusqu'à nous. L'éloge de 

-- HILDEBEIT 85 
saint Honorat, qui est au nombre de ceux qui nous sont 
testC, fait ivement regretter cette perte. L'Église célèbre 
sa fdte le 5 mai. 
ItlLAII&NT (Gaz). Voyez AzoT. 
|llLAIIO,NI { Saint), fondateur de la vie monastique 
dans la Palestine, naquit vers 290, h Tabathe, aux envi- 
rons de Gaza, de parent paiens, qui l'envoyèrent étudier 
ì Alexandrie. Ayant embrassé le christianisme, il alla re- 
joindre saint An toine dans la Thébaïde. Après quelqlm 
temps de séjour auprès du cnobite, il revint dans sa patrie, 
avec quelques moines, partages sa fortune entre ses frères 
et les pauvres, puis se retira dans nne affreuse solitude, oit 
créa un grand nombre de monastères. Quand il ne s'aban- 
donnait pas ì la méditation, il se livrait au travail des inains. 
Le bruit de ses vertus attirant auprès de lui une multitude 
d'admirateurs, il dut s'arracher à sa cellule, parcourut les 
déserts de l'Égpte, et passa en Sicile, en Dalmatie, dans l'tic 
de Chypre, oi il mourut, en 371. Il refusait tous les dons 
que lui offraient ceux qui croyaient devoir leur guerison 
l'intercession de ses prières, et leur conseillait d'en réserver 
le produit pour les pauvres. 
|IILAI:tODE HIL.qODIE, HILM:tO-TIAGÉDIE. 
L'hilarode êtait un poete grec, chantant des vers plaisants 
moins libres toutefois que les pièces toniques, lls furent plu 
tard appelés Sfmodes : on les introduisit dans les choeurs 
de la tragédie et dans les intermèdes du lbCire. 
L'hil«rodie était la pièce de vers faite ou chantée par l'hi- 
larode. Ce fut dans le principe une chanson badine, qui 
se développa ensuite, et devint une espëce de drame, tenaa*. 
le milieu entre la comédie et la tragédie. Quelques auteurs y 
oient l'origine de la parodie. 
L'hilaro-tragdie était, au contraire, une espéce de 
comédie, dont la catastrophe était heureuse et faisait passer 
le héros du comble de Iïnfortune au comble du bonheur. 
Suidas en attribue l'invention à P, hinton, poëte comique de 
Tarente, d'où lui serait venu le nom de Bhintoiee fa- 
buloe. 
HILDBOUI:tGItXUSEX ancienne capitale dn duché 
de Saxe-Hildbourghausen, et depuis 1826 dépendance du du- 
ché de Saxe-Meiningen, appelée dans les vieilles charles 
ltilperthusi« ou Villa Hilperti, et situëe sur tes rives de 
la Werra, se compose de la vieille ville et de la nouvelle ville 
et de deux faubourgs, et compte environ f,500 habitants. 
Ele est encore aujourd'hui le siCe de diverses autorités ad- 
ministratives, et elle possède un gymnase, un séminaire pe- 
dagoque, auquel est adjoint depuis lS3 une école desourds 
muets, une école d'arts et mrtiers, une maison de fous, un 
hospice d'orphelins et une maison de correction. Le château 
ducal est entouré d'un beau parc. La tradition attribue la 
fondation de la ville de Hildhourghausen àPun des rois francs, 
Childebert, fils de Clovis. La ville neuve" fut fondëe par des 
réfugiés français attiré par le duc Frédêric-Eruest I ', à la 
suite de la révoction de l'Cit de Nantes. 
lllLDEBEB.T DE TOURS, scolastique et hymnogra- 
plie latin, né en 1057, à Lavardin, étudia sous Gregoire de 
Tours, à l'abbaye de Cluny, devint ensuite professeur à l'C 
cale du chapitre du Mans, puis évque de cette ville, en t097. 
L'hérétique Henri, qui niait la présence réelle dans l'eu- 
charistie et rejetait le baptëme des petits enfants, les prières 
pour tes morts, t'adoration de la croix, le culte des reliques 
et la croyance au purgatoire, ayant rempli le diocèse de se» 
prdications fanatiques, Hildebert l'en chas.,a avec ses sec- 
lattes, et réussit à maintenir dans son troupeau l'unitA de la 
foi. Nommé archevSque de Tours, suivant les uns en 1 
selon d'autres en 1129, il mourut en 113-. C'est un des 
hommes qui ont le plts lionord le douzième siècle, et ses 
ouvrages témoignent d'une instruction aussi variée que pro- 
lande. Il fut le premier en Occident qui essa},a de ramener 
la dogmatique à un système unique, devant servir de base 
A tous les systèmes subséquente. Saint Augustin fut le guide 
qu'il prit pour ce travail. C'est dans ses ouvrages que le mot 
tronssubstanti«tion se trouve emplo},é pour la première 



86 
fois. Comme philosople, l:lildebert, qualifi tantôt de saint, 
tantôt seulement de rnœerable, unissait l'originalité de la 
pensée à un'coup d'oeil clair et rapide, à un jugement re- 
marquablement sain. Il n'y a rien dans les prodnctio,s de 
son siècle à comparer à ses poésies latines, la phspart rimees 
suivant le goret de l'époque. Ses oeuvres, qui se composent 
du ces poésies, de lettres et de serinons, ont été publiees 
par Beaugendre (in-folio, Paris, 1708 )._ Le latin d'Hilde- 
bert est laconique mais clair, et ne manque pas d'une cer- 
taine élénce. 
HILDEBRAD. Vo,e: Gecom 'II. 
HILDEBI?kNDT (Fr.av;,n-Tnonoe), mn des 
artistes les plus célèbres de l'Cule de Dusseldorf, né le 2 joi|- 
let 1804, à Stettin, se consacra à l'art depuis 1810, ì Berlin, 
sous la direction de W. Scbadow, qu'il suivit à Dusseldorf 
en 1826. Dans la suite, il devint lui-reCe professeur à l'a- 
cadëmie de Dusseldorf, où il a formé un assez grand nombre 
d'elèves. Ses ouvrages les plus importants, qui ont contribué 
 donner à l'é«ole de Dusseldorf le type qui lui est propre, 
sont Faust (1825), et nn Roi Lear pleurant la mort de Cor- 
dlia (t826), dont la figure principale, pénétrée de la plus 
profonde douleur, est le portrait de l'acteur Ludwig Devrient; 
Le Guerrier et son fils enfant (1832) ; Les Enfants d'E- 
douard, toile dont la popularité est devenue tout aussit)t si 
grande en Allemagne, et dont la gravure a multiplié la re- 
production; Otloello racontant ses aventz«res au srnateur 
et iz Desdenwne (188). En 1850 il a fait une copie admirable 
de la Mortde saint François par Rubens. Sa dernière grande 
toile est Le/oi Leur, dans la 7 e scène du IT  acte, oo il re- 
oeuvre la raison à la vue de Cordélia. La manière de cet ar- 
tiste se rapproche jusqu'à un certain point de celle de Rem- 
brandt et de ses élves; seulement il ne cherche point des 
contrastes si tranches. Son coloris brille par la chaleur, la 
fineççr et la fraicheur. 
HILDEGAlDE. Ce nom a élé porté par nue tropCu- 
trice et par une sainte. L'une, fille du comte de Souabe Hil- 
debrand, epousa, en 772, C harl emagn e, qui venait de 
repndier Désiderate, fille de Didier, le dernier roi des Lom- 
bards. Ce mariage fut lonemps considéré comme ilii- 
lime : il scandalisa tant Adelard, petit-fils de Charles Martel 
et couin de Cliariemagne, qu'il abandonna la cour et alla 
se faire moine à Corbie. Hildegarde, qui mourut à Thion- 
viii% en 785, le 30 avril, laissa, entre autres enfant.% Charles, 
qui fut roi d'Austrasie; Pepin, qui fut roi d'Italie; Louis 
le Debonnaire, qui succéda a son père comme empereur; 
Bothrude, Bertl,e et Hildarde. 
Sainte Hildegarde, abbesse du monastère de Saintdupert, 
prés de Bingen, sur les rives du Rhin, née vers l'an 1100, 
morte en 1178, a laissé quelques ouvrages mstiques, dont 
la vogue fut très-grand% e t qui ont été imprimé à Cologne 
Ch 1566. 
HILDESHEIM  principanté qui appartenait autrefois 
au cercle de la base Saxe, et qui fut jusqu'en 1802 un évê- 
ché. relevant immídiatement de l'Empire. Elle confine aux 
territoires de Calenberg, de Lunebonrg, de Bruuswick et de 
Halberstadt, comprend à peu prës 200 kilomètrescarrís, avec 
envirou 153,000 I,abitants, et forme nne partie du cercle pro- 
v/ncial du royanmo de H an ovre auquel elle donne son nom, 
et dont drpendent encore les principautés de Goettingue et 
de Grubenhagen, ainsi que le com de Hohenste/n; de sorte 
quc ce cercle a en totalité une superficie de 560 kilomètres 
carr% avec 360,000 I,abitants. La principauté de Hildesheim 
est la province la plus fertile du Hanovre, et se d/stingue 
particulioeement des autres parties de ce royaume par l'uni- 
forme bonté de son sol. La Le/ne, l'Innerste, la Fuse et 
l'Ol, er, la parcourent en tous sens; on ne trouve de monta- 
gnes que dans sa partie méridionale, nommément des rami- 
lications du Harlz et de la Deister, avec ses appendices. La 
majorité des I,abitants est catholique; mais l'Elise évangé- 
lique domine dans les villes; beauoeup de juifs liabitent aussi 
cette principauté. Outre l'extraction de la pierre et de in 
ci,aux et le travail des mines, l'agriculture et l'Cève des 

HILDEBEIT -- HILL 
bestiaux, les satines, la culture du tabac, le commerce du 
bois et de la houille sont les principaux moyens d'existence 
de la popuhtion; Hildesheim et Goslar sont les plus gran- 
des villes du pays. L'évhé d'Hildesheim doit son origine à 
Charlemagne, qui le fonda en 796, ì l'effet de contribuer à 
la conversion des Saxons, et qui lui assigna pour diocèse 
I douze cantons méridionaux des Ostfaliens. Aux termes 
de la paix de Lnnévflle et du récez de l'Empire en date du 
25 fevrier 1803, qui en fut la conséquence, la principautéet 
l'évéché de Hildesheim furent adjug ì la Prusse. En 
un décret impérial, rendu conformément aux conventiçn 
de la paix de Tiisitt, les comprit dans le nouveau royaume 
de Westphalie. Les forces ailiées en prirent possession en 
novembre t813, au nom du Hanovre, a qui le congrès de 
Vienne les adjugea dífinitivement. 
HILDESHELM, ville fort ancienne, baffe surl'Innerste, dont 
les rues sont presque toutes irrégnlières et étroites, se divise 
en ieille ville et en ville neuve. Elle est le siége d'un évtehé, 
qui a été complétement réorganisé en 1828, et des autoritês 
superieures du cercle provincial. On y compte 14,734 ha- 
bitants dont 5,309 catholiques et 397 juiîs, qui depuis 1849 
ont une synagogne. De ses nombreuses ílises, qnelre sont 
affectées aux protestants, et six aux catholiques. Parmi cel- 
les-ci on doit citer surtout la vénérable cathédrale, recons- 
truite en 1046, peu de temps après un grand incendie; on re- 
marque sa coupole dorée, ses portes de bronze, ornes de 
reliefs magnifiques, ses beaux vitraux, la prëtendue statue 
d'Irmen (voye . IZI.SVL), placée en avant du chœur, et le 
rosier, àgé de plus de mille ans, qui setrouve en dehorsde 
l'apside du choeu r. Cette ville possède en outre un chhtean, un 
gymnase protestanl, avec une bibliothêque assez importante, 
un gymnase catholique avec un séminaire, une école de sourds- 
muets, une prison, une maison de correction, quinze h/pi- 
taux, deux maisons d'orphelins, un couvent des sœurs de la 
Misericorde et un musC. Il s'y fait nn commerce fort actif 
en blís, fils, toiles, etc. 
HILE (du latin hilwrn), l'oye . C;crmctn. 
HILL (RowL_,-m, lord et vicomte), général aurais, qui 
acquit de la celébrité dans les guerres contre Napoléon, ne 
en 1772, dans le Sbropshire, entra au service comme ensei- 
gne, et était drjà capitaine en 1793. Au siége de Toulon, il 
remplissait les fonctions d'aide de camp de lord 
Il était colonel lorsqu'il fut blessé en Epte, en 1801 ; en 
1808 il passa en Espagne avec le grade de géneral major, et 
s'y distingua plus particulièrement lors de la retraite sur la 
Corogne et aux affaires de Talavera et de Busaco. Forcë en 
tS10, par l'état de sa santé, d'aller passer quelque temps 
Angleterre, il revint en Espagne dès l'année suivante, et en 
qualité de lieutenant général reçut le commandement d'un 
corps d'armée particulier, à la tëte duquel il battit, le 28 octo- 
bre 1811, le genírai Gérard à Arroyo de Mol/nos et prit 
d'assaut, le 16 mai 1812, la forteresse d'Almaraz. A la bataille 
de Vittoria, c'est lui qui commandait l'aile droite, et il se di»- 
tingna d'une manière particulière aux affaires de Nivelle, 
d'Orthez et de Toulouse. Dès 1812 il avait été nomme e- 
valier de l'ordre du Bain et élu membre du parlement par la 
ville de Shwresbury. En 1814 il fut créé pair sous le titoede 
baron d'Almaraz et d'Hau'kstone, et reçut du parlement, 
titre de rëcompense nationale, nue pension de 2,000 liv. st. 
En t815, avant l'arrivée de Wellington, il commandait le 
deuxième corps de l'armee britannique en Belgique; et 
loendant la bataille de Waterloo il fut ehargé de garder 
la position de Bal pour couvrir les communications de rar- 
mëe anglaise avec ons et Bruxelles. En toe5 il fut 
général, en 1827 gouverneur de Pl.vmouth, et l'ann, 
suivante, quand Well/ngton devint premier m/nistre, il f,.*t 
appelé au commaadement supérieur de l'armée, poste qu'il 
couserva sons les divers administratious qui se suoEé- 
dèrent jusqu'en 182. L'affaiblissement de  nté le. con- 
traignit alors à prendre sa retraite, et eu récompense de 
ses longs et bons services, il fut créé vicomt. Il mouru.peu 
de temps après, à son cl,teau de lqardwick-Gran, 



BILL -- 
Shwresbury. Son neveu, str rtoevan ltill, né en too, re- 
cueillir sa pairie. Il remplit aujourd'hui les fonctions de lord 
lieutenant du Shropshire. 
A la méme famille appartient Rowzn FhLL, le réforma- 
teur de l'administration des postes d'Aneterre, où après 
plusieurs années d'efforts il parvint, en 181, à faire adopter 
le principe d'une taxe légère pour le transport des lettres au 
lieu des droits exagérés qu'on exigeait precédemment, et  
faire adopter le prix uniforme d'un penny pour poirit de d- 
part de la taxe à percevoir pour le port de chaque lettre pe- 
sant un certain poids. En récompense de l'amêlioration qui 
résuita de cette réforme aàmiaistrative dans toutes les trans- 
a,'tions privées, on ouvrir une souscription particulière 
dont le produit, s'élevant h to,ooo liv. st., lui fut offert 
comme temoignage de la gratitude nationale. Parmi le grand 
nombre de brocbures et de mémoires que Bowland Hill a 
publies bi'appui de son innovation, on doit citer Store and 
prospects of penng postage (Londres, 1814). Aprè. avoir 
essuyé maintes persécutions de la part de l'administration 
générale des postes et perdu l'emploi qoïl y occupait, il a été 
nommé superintendant of thé Money-qfflce en 1847. 
HILLEL  savant rabbin juif, COlltemporain de Jésus- 
Christ, était originaire de la Bab.lonie, et contribua puis- 
somment ì la prospérité ultérieure des hautes écoles juives 
de lïbériade, de Lydda, de Cesaree, etc., en faisant le premier, 
dans ses leçons à Jérusalem, des observation» critiques, 
exégétiques et paléographiques sut- l'Ancien Testament, qui 
se Irausmirent verbalement et furent successivement ras- 
semblées sous le titre de Jlas ora. Du reste, il apparte- 
nait h la secte des pharisiens, et comme tel était  la tte 
d'une école particuliëre opposée ì celle de Schammai. 
L'histoire de la liftCature hébraïque mentionne encore 
deux savants de ce nom, qui brillèrent en Italie aux douzième 
et quinzième siècles. 
HIMALAY?,_ c'est-à-dire, en souscrit, pays de la neige. 
On appelle ainsi la grande thaine de moutagnes de l'Asie 
centrale, qui s'étend, sur une longueur d'environ 9.5 myria- 
mètres et sur une largeur moyenne de près de 30 mgr., 
depuis I' H i u d o u-k o u h ou les frontières de l'Afghanistan 
jusqu'h celles de la Chine : elle forme le contrefort méri- 
dional «lu grand plateau central de l'Asie, et sépare PHindotan 
du Thibet. L'lJimala)a se compose de trois chatnes prin- 
cipales, qui des plaines de l'Hindustan s'élëvent les unes au- 
dessus des autres comme autant de degrés. La premiëre de 
ces chaines n'atteint qu'une hauteur de 1066 mètres au- 
dessus du niveau de la mer, et est principalement formée 
de grès. Une suite de longues vallées, appelëes duns, sé- 
pare en général cette chaine de grès de la seconde, compo- 
 surtout de diverses sortes de schistes, rarement entre- 
mëlés de granit; sa hauteur vade de 1,066  9.,800 mètres, 
et ses points les plus élevés se trouvent sur les versanls du 
nord-ouest et du sud-est. La troisiëme chaîne centrale est 
l'Himalaya proprement dit. Sa base est de gneiss entreraAlL de granit, qui forme les sommes les plus élevés. La crête 
centrale de cette chaine, la plus élevée de l'Himalaya, com- 
porte dan- toute sa longueur 4,933 mëtres. Au-dessus s'C 
lèvent de nombreux pics, dont beaucoup ont plus de 6,00 
mêtres de boutent, et tous couverts de glaciers et de neiges 
éternelles. 
Parmi ces pic on distingue surtout trois groupes : 1 ° celui 
de la contrée où sont situées les sources du Gouge, le 
Djoumna et le Sutledge, dont le point culminant, le 'Vanda 
Dew, a 8,053 mètres d'élévatiou ; 2 ° celui des sources de 
Ghandak, auquel appartient le Dhawalagiri, c'est-à- 
dire, en sanscrit, la montabme Blanche» regardé comme le 
i»,itt le plus élevé de la terre, et qui a selon Blake 8,780, 
et seloq Webb 8,7fi0 mètres au-dessus du niveau de la mer:; 
3 ° celui dont le point cuhninant est le Tschamalari, qui a, 
dit-ou, une élévation de 8,755 mèlres. 
De l'autre cgté de cette chalne .principale de l'tIimalaya, 
au nord-est, s'étend, entrecoupé de nombreuses émi»ences, 
railCs e! pentes, le plateau du Tb i bé t, dont l'élévation 

BIMALAYA 87 
moyenne est de 3,300 mëtres. Innombrables sont les val- 
h.es qui sillonnent l'Himala3,a. Presque tous les fleuves 
auxquels il donne naissance jaillissent derrière la chaine 
centrale, coulent d'abord daus des railC droites, puis les 
rompent en les traversant h une hauteur molenne de 2,800 
mètres. La nature déploie dans ces hautes régor, s de l'Hi- 
maiaya les phénomènes des montagnes des Alpes avec une 
najesté qui ne se rencontre nulle part ailleurs sur la terre. 
La limite des neiges éternelles» sur le versant méridional de 
l'Himalaya, est h 3,900 mètres; sur le versant septentrional, 
elle est en moyenne de 1,300 ruètres plus éle ée, c'est-h-dire 
à 5,120, 5,3D0, et même en certains endroils à 6,9.56 métres 
au-dessus du niveau de la mer. La raison de ce phénomène se 
trouve dans la nature brùlante et ra-onnante des plateaux 
du versant septentrional de l'Himalaya, si secs et par con- 
séquent si chauds en été. 
Par rapport au climat et ì la végétation, on peut diviser 
l'Himalaa en cinq régions. La première e.t formëe d'une 
large zéne ou djongle , couverte de rose.aux et de broussail- 
les, s'éteudant tout le long de la base de ces montagnes, 
allant toujours en se rétrécissant vers l'ouest, et beaucouf. 
moins sensible au delà du Djoumna. La majeure partie en 
est basse, inondée pendant la saison des pluies, et par 
conséquent, par son humidité et sa chaleur, lavorable aux 
plantes tropicales. Dans la parité occidentale, où le pied de 
l'Himalaya est situé plus bout et plus au nord, et par consé- 
quent plus fi-oid, les plantes analogues h celles des tropiques 
et qui ont frappé le vo)ageur, disparaissent pour faire place 
 celles de l'Europe. Après cette première z6ne s'ciève la 
seconde, qui atteint une hauteur de 13 ì 1»600 mèlres, et 
s'étend aussi loin que vont les plantes tropicales. Elle em- 
brasse toute la première chalue de grès et les parti [»lus 
bassesde la cbainede schiste. Le climat des  allees, dans ces 
montagnes, est alternativement tempéré et tropical ; et la 
neige n'y tombe que fort rarement sur les points le» plus 
élevés. Par conséquent, ì cté des plantes tropicales crois- 
sent aussi déjà les céréales; pourlant la culture du riz con- 
tinue à Cre dominante. La troisième région s'élève jusqu'a 
2,D6 mètres, et comprend principalement la seconde cbalne 
ou celle du schiste. La neige dlsparait encore ici avnt la 
saison des pluies, et ce n'est que sous l'influence de la cha- 
leur et de l'humidité de cette saison qu'y croissent aussi 
des plantes tropicales, ruais seulement des herbacées. Le 
genre d'arbres est déjà tout à lait celui de la zone tempérée, 
et une foule d'arbres fruitiers d'Europe :y viennen! ì l'Cat 
sauvage. Comme dans cette réon les pluies tropicales sont 
encore sensibles, on voit cultivr tout h la fois sur les pla- 
teaux le froment, le mais et le millet, et dans les xallées le 
riz. La quatrième région, ou région supêrieure, comprend 
la cbaine centrale de l'ftimaiaya A partir de ',86 mètres jus- 
qu'à la limite des neiges éternelles. Elle répond aux régions 
froides de la terre et aux courtCs alpestres; la neige n'y fond 
qu'en mai ou en juin ; pourtant la chaleur croit ensuite rapi- 
dement. La végéiation est h/titre en proportion, et le c-cle 
en est aussi court qu'au p61e. Dans les parties basses crois- 
sent encore quelques arbres [ruitiers ; mais sur les hauteurs 
on ne voit que les essences fructiferes. Sur le versant mé- 
ridional l'agricultnre se maintient jusqu'h 3,133 mètres, et 
sur le célé septentrional jusqu' 3,700; l'on renconirê 
mème encorel'orge à une élévation deS,000 mètres. Au delh 
se trouve enfin la cinquième région, celles des glaces et de 
neiges éternelles dont sont cou, erts les pics les plus élevés 
de ces montagnes, et qui présente absolument le mëme 
caractère que les points culminants des Alpes. 
Innombrables sont lt pays compris dans l'Himala)a, et 
qui lutinent tant6t de grands, tanlét de petits États ; ici des 
monarchies, là des républiques. En pintant de l'est, nous 
rencontrons d'abord le Bhoan, puis l'important État de e- 
paul ; viennent ensuite le Kumaon, le Gurbwal, le Sirmour 
et le Bissahir, qui apFartiennent plus ou moins h l'empire 
indu-britannique, ainsi qu'une foule «le petits Ètats situés 
dans les montagnes, la plupart dan» la dépen,lance lmre'.nen! 



$8 HIMALAYA 
nominale ou royaume des Sikhs, et se terminant à l'ouest 
à la vallée dtl K a s ch lt i r. Tous ces territoires sont situés 
sur le versant méridional de la chaine des neiges, et ne dépas- 
sent le versant septentrional que sur quelques points, comme 
le Bi.çsah.ir, dans la vallée du Sufledge. 
HIMEIE, ville de la c6te septentrionale de la Sicile, à 
l'est de Panormus (Palerme), fut fondée vers l'an 64'9 avant 
J.-C. par des Grecs inniens (Chalcidiens) de Zancle, passa 
vers l'an 560 sous la domination du cruel tyran d'Agrigente 
Phalaris, à qui les Himériens se soumirent sans écouter les 
avis de leur concitoyen le poëte Stésichore, qui chercha 
vainement à les en dissuader en leur racontant la fable de 
la soumission volontaire du cheval sous la puissance de 
l'homme. Plus tard, elle dépendit de Théron d'Agrigente, 
i'allié de Gélon de Syracuse, quand celui-ci remporta sous 
ces murs, l'an 4'80, une victoire importante sur les Cartha- 
_2,inois commandés par Amilcar. En 472 Hiéron la deli ru de 
|a tyrannie de Thrasid«.e; mais vers l'an 409 le Carthanois 
Annibal, petit-fils d'Amilcar, la détroisit compiétement. 
Les Carthaginois fondèrent plus tard, à quelque distance de 
la, la ville de Thermoe. 
IIIMERIUS sophiste grec du quatrième siècle, né à 
Prusias en Bith)'nie, enseigna avec succès l'art de l'éloquence 
à Alhènes, où il avait reçu son éducation. L'empereur Ju- 
lien, qui l'avait en estime particulière, l'appela a Antioche; 
mais après la mort de ce prince il revint a Athènes, en 363, 
et y mourut, vers l'an 386, dans un fige fort avancé. De ses 
nombreuses harangues de circonstance et d'apparat, que dé- 
t, araient tu,te l'enflure et l'affectation particolières à cette 
epoqoe, il s'en est conservé vin-quatre, dont Werusdorf 
a donné une édition (Goettingoe, 1790 ). 
HIMILCOX. Trois Carthaginois célèbr ont porté ce 
nom. L'on, général illustre, après avoir soumis la majeure 
partie de la Sicile, échoua dans la tentative qu'il dirigea 
,.outre Syracuse, vaillamment défendue par Denys le T.ran, 
et se tua de dt, espoir, Fan 398 avant J.-C. L'autre, naviga- 
teur illustre et qu'on suppose avoir éte conaemporain 
d'H a n n o n, s'aventora le premier au nord de l'Océan, et 
,lecouvrit lesCassitérides ( lies Sorlingues) et la Bretagne. Le 
troisième, général de la cavalerie carthaginoise, appartenant 
a la faction Barcine, trahir, ì la suite d'une conférence se- 
crëte avec Scipion, ses concitoyens, qu'il avait d'abord vail- 
lamment défendus, et, passant à l'ennemi avec ,000 che- 
vaux, ne contribua pas peu à la perte de Carthage, 
l'an 1:s7 avant J.-C. 
|IIXCMAR archerCue de Reims, un des prélats et 
des hommes d'Etat les plus actifs et les plus édairés de son 
temps, né en 800, fut redevable au savant Hilduin, abbé de 
Saint-Denis, d'une excellente éducation, et suivit volontai- 
ruinent en exil son martre bien aimé que des querelles poli- 
tiques avaient lait, en 830, reléguer en Saxe par Louis le 
Debonnaire. Hincmar parvint cependant à faire rentrer en 
grince son protecteur et à le ramener dans son abbaye. Lors- 
que Charles" le Chauve monta sur le tréne, Hincmar devint 
pour le fils ce qu'il avait été pour le père, un conseiller fa- 
vori, passa à la cour les quatre premières années de son 
règne, et fat le principal moteur des grandes affaires du 
temps. Enfin, l'an 85, à l'/kge de trente-neuf ans, il fut 
élevé au siége archiépiseopal de Reims. En cette qualité et 
comme primat du clergé de la France occidentale, il fit beau- 
coup pour la discipline et l'ordre de l'Ëglise, pour le main. 
tien des droits des coneiles et des év&ines du royaume contre 
les prétentions des papes; il sot aussi défendre l'autorité 
spirituelle contre le pouvoir temporel, et exerça une in- 
fluence décisive sur les relations politiques de l'époque. 
C'est ainsi qu'il opposa la rsistance la #us opiniâtre aux 
décrétales du faux lsidore, ce levier principal de la 
puissance des palms , tandis que le fils de sa soeur, le séditieux 
evèqoe de Laon, nomméHincmar cemme lui, déposë en 871 
ci privé de la vue par ordre du roi, se posait en défenseur 
de ces dëcrétales. Ce fut lui aussi qui força le roi Lothaire II 
 reprendre heutberge, sa femme, qu'il avait répudiée. 11 

ne déplo)a pas moins d'activité pour dtouffer les erreurs dan- ' 
gereuses «le quelques hérétiques, tels que Gottschalk, qu'il 
traita fort durement. Durant les trente-sept annees de son 
épiscopat, on trouve sa siCature au bas des actes de 39 
conciles. Lorsque, en 882, les Normands firent irruption dans 
la France occidentale, il s'enfuit dans les forts de Poutre o5té 
de la Marne, et termina bientdt à Épernay une vie si pleine 
de travaux. Ses ouvrages, qui se composent de son livre 
contre Gottschalk, De prvedestinatione Dei, d'un traité De 
regis persona et reyio rninisterio, d'un autre De cavendis 
vitiis et exercendts irtutibus, d'une Vie de saint Remy, 
de curieux mandements, et de 3 lettres adres.es à des rois, 
dcs palms, des archev&lues, des princes, des abbés, se trou- 
vent dans l'édition la plus complëte, oeuTe du jésuite Jac- 
ques Sirmond ( 2 volumes, in.folio, Paris, !64'5 ); leur valeur 
théologique est bien au-dessous de lïmportance qu'ils ont 
comme documents précieux pour l'histoire de la période 
Carlovin#ennc. 
HIND (Jon.x-RcssLL), célèbre astronome anglais, t né 
le 12 mai 1823, à Nottingham ; son père, fabricant de den- 
telles, avait un goret tout particulier pour la mécanique, et 
rendit un important service aux manufactures de son pa.s 
ch y introduisant le mëtier à la Jacquart. Eu ce qui est de 
l'astronomie, le jeune lllnd n'eut point d'autre maitre que 
lui-reCe, et dès l'ge de six ans a plus ande recréation 
était la lectur,, des ouvrages relatifs à cette science. En 1840 
il vint à Londres, et y entra dans le hureau d'un ingenieur 
civil ; mais c'était là une occupation qui n'avait pour lui 
aucune espèce d'attraits, et bient/t, grace  la protection 
du professeur XVheatstone, il rénssit à obtenir nne place d'aide 
dans la division de l'Observaloire de Greenwieh placée sotu 
la direction du professeur .Mry. 11 la garda depuis novembre 
184'0 jusqu'à juin lS-, mettant largement à profit la pré- 
eiense bibliothêque de l'Observatoire pour aceroitre  cen- 
naissances astronomiques. Après avoir pris part aux travaux 
de la eommiion envo5ée par le gouvernement à Kings- 
town. près Dublin, pour mesurer la lontude de Valentia, il 
fut, sur la recommandation d'Airy., attaehé cemme obser- 
vateur à l'Observatoire particulier de Bishop, dans Begent's 
Parck. C'est là qu'il mmença, pour la recherche de nou- 
veaux corps planCaites, une série d'observations qui furent 
eouronnées des plus brillanls succès. Le 13 aott 18-1,7 il 
découvrait Iris; le 18 octobre de la mme année, Flore; le 
13 septembre lSb0, Victoria ; le 19 mai 1851, lrène, et le 
22 aott 185, Fortuna. Depuis il en a encere trouvé plu- 
sieurs autres; et en 1854' il en était déjà à sa neuviëme pla- 
n è te. En outre, le 29 juillet 186 il deconvrait une comtte 
observée deux heures plus tét à Ruine par de 3,ïeo ; le 
octobre de la mtme année, une seconde comète, que l'Cut 
brumeux de l'atmosphère ne lui permit plus de revoir, et le 
6 février 184,7, une troisième, devenue visible en plein jour 
le 13 mars suivant. Enfin, il découvrit seize nouvelles étoiles 
mobiles, et trois nèbolenses éehappées aux observateurs pré- 
cédents. Dans cesdix deruières années, il a calculé les orbiles 
de plus de soixante-àix planètes et comètes; et les resuitats 
de ses travau, ont été pobliés, soit dans les .'uvelles astro. 
nomiques d'Altona, soit dans les Comptes-rendus de l'.,- 
cadémie des Sciences de Paris, ou encore dans les Trans- 
actions de la Soeiété ru}aie Astronomique de Londres. Le 
services rendus par Hind à la science ont été unanimement 
appréciés. Dès le mois de décembre 184,4, la SoeiéoE royale 
Astronomique de Londres l'admettait dans sonsein; en 1846 
il ëtait nommë secretaire étranger et en 184,7 membre cor- 
respondant de la Société Phiiomatique de Paris ; enfin, eu 
181 il succédait à Schumaeber cemme cerrespondant de 
l'Institut de France. En t852 le gouvernement anglais li 
accorda un traitement de 00 iiv. st. La plupart de ses 
vres se trouvent épars dan« les Mémoires des diverses 
sociétés savantes que nous venons de nommer, ii est 
auteur d'une dissertation intitule : On the e.rpected returr. 
of the reat cornet of 1264, and 1556, et d'un petit ouvragt 
sur l'astronomie planetaire : The sola.r Syslem. A la lin 



uto -- HIPPARQUE 
de 1$. n, il aeneore fait paraltre une disoertation : On comets, 
ett, n Dict:onnaire d'Astronomie. 
ltlNDOST_.' ou HINDOUST. Voye [» et 
!I 
HIXDOUOUH {dt-à-dire Mont Indien). C't le 
m de la continuation de l'Himala?a depuis l'Indus jus- 
qu'au meridien de Balkh, c'est-he du M  au 36  de latitude 
nord et du 59 ° au 7 ° de long. est; oenlrée alptre, traveant 
de l't h l'oust la vaBée de çabod { appel Kouhist6n dans 
 partie septe»trnale) et formant plus h l'est le pays 
uni, fertile et ternirWde Peswer, q s'dève  s 
en formant quatre ehalnes, dont la plus élev, eompooee de 
r primitives, se rd dans I nu avec ses pi cou- 
ve de neige; et qui h l'oust, entre Bamihn et Balkb, où la 
mone prend le nom Hindououh, préoente le pie de 
Cound, haut de 6,666 métr. D defilés extrmemeut dif- 
ficiles et s'etendant jqu'h la région d neig érnelles, 
entre autr le grand filé de Bami6n, situé h 4,000 métr 
de hauteur, onduioent sur le versant septentfioi du Ka- 
boul h l'ou (O). 
Le çernt méridional, où la limite d neig eommenoe 
h environ g,666 mère, jadis thëhtre des exploid'Aiexandre 
le Grand, s'appdle de n jours I« Kafert6n. Le versant 
oeplentrional, qui s'abaisoe en lerrass alstr sussies 
jusqu'a la vallee de l'Amou, enkoeoupe de la manière la 
plus aceident par I a[fluen de oe fleuve, forme le pays 
appelé Tokharisldn. 
L'Hindoukoub, situé dans la z6ne des pluies et d cli- 
mats tropioe, offre ois ema diflerents. Le riz, le mais, 
le bac, la oenne h sucoe, le coton, qui croisent dans 
I pfond vallé du versant mérional, sont remplacés 
dans les petit vaB et sur leu eontoe-fo par la 
le mer et 1 frui les pl exquis. Ausus de la r- 
gion boi d hau cbn, où abondent ! chn, les 
arbres h feul acieulair et I fougère, est située la re- 
gion des phturages alpestre, où palpent de nomboeux trou- 
pux t qu'ornent les fleurs aux coen I plus fonds, 
entre autr l'sa foetida. Le ersant septentrionM pré- 
nte sans doute I mës oeracr de egétion, mais 
av d formes plus europnnes. On a donné le nom de 
Cauc«e indien à ut oe système de mon. 
HIN DOUKOUSH. %yez Hwova. 
HIXDOUS. On apfle ainsi, en génér, I habints 
de la pr'lle de l'lnde, quoiqu'an point de vue eto- 
graphique i poentent ! plus grandes diffren. 
mot Hindou n'est donc pas, en général, un nom de peuple, 
mais une dénomination comprenant tons 1 uples qui 
habitent le toire préci. Toutefo, 1 Persan d'abor 
puis ! autr populations de l'Orient mnsdman, et dans ces 
derniers temps I Euroens, ont dié plus paiculi- 
rement ain la ande nation d'orine arique qui habite 
principalement le pays a par le Gange, et q de  re- 
pandit  relion,  imfitutiom et  civilition dans toute 
la pru'lle. A oe double emploi du mot hindou eorr 
pond oelui du mot Hindoldn (c'est-h-e pays des Hin- 
d), dérivé du pean, qui digne ainsi bien toute la pé- 
ninsule en de du Gge, que, ds  oens plus rtreint, 
 pavie ptent6onale. D'Hindousn on a it hindotani 
ur désigner la langue gínéralement adop dans la pé- 
sule pour le oemmeroe et les rílatio cial; langue 
provenue d rap d Musuans et d Hindous, sur- 
tout à pair de la domination mongole, et qui est fortement 
melangée de pern et d'arabe. Il ne faut pas la eontondoe 
avec l'hindou ( lane d Hindous), langue du moyen hge 
dien provenue du pkrit, ni avec l'hindi (mot dérive 
du persan Hind, qui siilie lnde), qui n't autre que 
l'hindouï modernisé par I Hindous eux-mm 
Ins et ln [ Langu ). 
lliXDOUSTAX  HLSDOUSTSI. Voyez Hçs et 
HIPPARQUE 4 fils de P  s i s t r a t e, sua, l'an 
avt J.., avec H ippias son frère, h la uveraineté 
DICI. i)E L& uN El.  . 

8 
d'A t h è n es, que leur père avait nsurpe. Leur aénernent 
fut salué par les aeclanlations du peuple. Hipparque, qui 
était l'alné, protégea les lettres, introduisit dans sa patrie 
les oenvres d'Homère, y fit venir A ha créo n, qu'il envoya 
chercher sur un vaisseau à cinquante rames, et y retint S i- 
ra o n i d e par des présentç. Peut-être, en suivant Celte ligne 
de conduite, la dynastie des Pisistratides se ftt-dle main- 
tenue dans la ville de Minerve, si Hipparque n'e0t conspiré 
contre sa famille et contre lui-reCe en concevant pour le 
jeune Harmodius une de ces bontenses passions qui pul- 
lulent dans l'histoire de la Grèce. Malheureusement pour 
lui, l'adolescent repeussa ses bref:mages, non par vertu, wai 
parce qu'il recevait déjà cenx d'Aristogiton, llipparque s'en 
vengea en chassant des cboeurs d'une féte religieuse une 
canéphore, sœur d'Harmodius. Celui-ci, indigné de cet af- 
front, résolut, avec Aristogiton et quelques Atbéuiens, de 
tuer les deux princes. Hippias écbappa aux conjurés; mai» 
Hipparque tomba sous leurs coups, l'an 5t4 a ant J.-C. 
HIPPAIQUE, le plus and astronome de l'antiquite.. 
naquit à Nicée, et se fit connaltre, sous Ptolémée Epiphane, 
à Alexandrie. Pline n'en parle qu'avee admiration, et le cite 
souvent. 11 dit qu'il avait entrepris une chose difficile, mème 
à un dieu, en ce qu'il s'était imposé la thche de compter 
toutes les étoiles et de les nommer, et loue son exactitude. 
Strabon se plaint de son penchant à la critique. Examinon 
les principaux points dont il s'est occupé, et les service 
qu'il a rendus à la science. 11 n'y avait guère dans l'anti- 
quité d'idées justes ou arrêtCs sur ladurée de l'annee ; Hip- 
parque, en estimant celle de l'a n né e tropique à 365 jour» 
5 heures .55 minutes 12 secondes, en dèpassa la mesure 
de 6 heures et 2 minutes. Il s'occupa aussi du mois s)no- 
dique, qu'il fixa à 29 jours t heures 4-i minutes 3 se- 
condes 1/3. Pour parvenir à ce résultat, il avait compare 
ses observations sur les éclipses à celles des Chaldeens. Il 
dressa des tables du soleil et de la lune pour 600 ans : 
mois, heures, jours, situations re.pectivesdes lieux, aspect» 
du ciel selon le diverses nations, tout y était compris, tou 
a été védfié par le temps. On croirait, dit Pline, l'atrononm 
admis au conseil de la nature. Dans oes exeellenles Annales 
des Lagides, Cbampollion ajoule qu'il observa l'éclipse de 
lune qui arriva le 22 seplembre de l'an 200 avant l'Ce vul- 
gaire, celle du 19 mars suivant ( l'an 199), qui appartiennent 
l'une et l'autre à la Se année du rëgne d'Eiphane ; enlin, 
celle du 1 septembre de la mme 199e année, qui arriva 
au milieu de la sixième année du règne de ce l,rince, et 
avant le traité de paix conclu avec Antiochus l'année sui- 
vante, la 7 « de ce règne. 
Hipparque est manifestement le premier auteur de tables 
a.tronomiqnes, quoiqu'une observation de Fréret tende / 
en faire remonter le merite aux Cbaldéens. Ce fut lui qui 
découvrit la préeession des équinoxes, en rapprochant se» 
observations avec celles de Timocharis et Aristyllus, plus 
anciennes de 160 ans. Ptolémée le désigne formellemen. 
comme l'auteur de cette dëcouverte, l'une des plus impor- 
tantes de l'astronomie. Pour ses observations, il se servait 
de l'anneeg)ptienne, année de 1 mois à 30 jours et de 5 
complémentaires. Il avait recours aussi ì la përiode de 
soixante-seize ans, imanëe par Ca lippe (voyez CXCL), 
et la rectifia, reprenant tous les calculs de 3Ié t on et Eucte- 
mon ; tbéorie qui, sans atteindre la perfection, puisqu'il fit 
encore l'année trop longue, etait lumineusement développée 
dans un traité Sur les mois et les jours intercalaires. 
Pline nous dit qu'Hipparque comptait les jours de minuit  
minuit. Il comptait aussi selon une ère qui partait de la 
mort d'Alexandre, et que l'on nomma l'ère de Philippe, 
e'est-à-dire de Philippe-Aridée; elle commence -i annee3 
égyptieunes plus tard que celle de Nabonassar, le ¢ du 
mois de tbot, ou le 12 novembre del'année 32 proleptiq.: 
avant J.-C. Hipparque joignit un almanach à son ct-..-. 
Petau a traduit en latin ce qui nous reste d ce pèe de , 
science astronomique ( Uranologie; Paris, ISS0). 
P. nF. 

i2 



90 HIPPIAS 
It I pPI X S, frère d' H i p p a r q u e, rna seul sur Athè- 
ries, après Pasr, assinat de ce t.vran. Depuis ce momeut, il ne 
ne voulut plus devoir sa sreté qu'à une police impitoyable. 
Poursuiis par les délations et les snpplices, beaucoup de 
ciloyens quitlèrent leur ville natale, et se rébgdèrent à Lacé- 
dmone ou à Delphes. La Pythie parla en fateur «les pros- 
crits, et les Lacédomoniens s'armèrent pour eux. Les enfants 
d'Hippias étant tombés en leur pouvoir, celui-ci, pour les ra- 
cheter, comentit à abdiquer sa puissance et à quitter l'At- 
tique dans l'espace de cinq jours. Ceci se passait l'an 
ayant ,l.-C. La réintallatipn du tyran, proposoe par les Spar- 
tiates, a'ant été rejetée avec indignation par le conseil ana-. 
phictyonique, Hippias se retira à la cour «lu satrape Aa- 
pherne, qu'il décida à s'armer contre sa patrie, oe qui ne 
fit que la consolider. Il fut tuC l'an 490 avant J.--., à la 
bataille de Marathon, au milieu des Perse« qtiil aait 
ameuté* contre ses concitoyens. 
IIIPPIAS sophiste, n à Êlis, qui vivait en¢iron 
-100 ans avant J.-C., contemporain de Protagoras et de So- 
crate, se rendit surtout fameux par son extrème vanité et sa 
• antardise. C'est ainsi qu'il pretendait tout savoir, qu'il se 
<lisait prt à répondre à toutes les questions, et qu'il se 
antait d'avoir confectionné lui-mme toutes les parties de 
son vëtement, comme manteau, souliers, etc. PlaLon, 
deu de ses dialogues, auxquels il a donné son nom, mai 
dnt l'un est considéré comme apocryphe, le critique svë- 
rement, à e.aue de l'obscuritë de son langage. 
IIIPPIATIIQUE ( de L-mo,, cheval, et ttt-.pv.'tt, gaéri- 
son ). On désigne par ce mot l'art de guérir les maladies des 
chevaux, partie essentielle de l'art v é té r i n a i r e. 
H[PPO appelée d'abord Hippo lie9iu$ pour la dis- 
tinguer de plusieurs places du mème nom, ancienne capi- 
tale et résidence des rois de .Numidie, située sur la Medi- 
terranée, fut cclèbre phm tard comme si(ge d'un évëcbé 
qui compta saint August in au nombre «le ses titulaires. 
Les Arabes la détruisirent au septième siècle. Pourtant les 
habitants ne tardêrent pas à se rétablir près de ses ruines, 
et bfi donnèrent alors le nom d'Hippone, d'ou l'on a fait 
par la .uite Boue. 
HIPPOCEXTAURE (de L-=,.«;, cheval, et 
centaure). Vo,je5 
HIPPOCP, XTE. Ce grand homme naq»it dans la i 
tire ile de Cos, la première année de la 80 * olympiatle, c't- 
à-dire 660 ans avant J.-C. Il etait de la lamille des A scle- 
piades, et le dix-l,uitiême descendant d'Esculape. A 
cette poque l'ècole de Cos possédait depuis très-longtemps 
sur toutes les Lranches de l'art medical une prodigieuse 
quantité de materianx donnes par l'expédence, et pour ainsi 
dire epurés les uns par les autres. Cette masse énorme de 
faits renfermait en elle-mgme et les lois des maladies et les 
lois de la médecine : il ne fallait plus pour les dcouvrir 
que rapprocher ces faits, les comparer entre eux, en saisir, 
en exprimer les rapl,orts. Ce travail immense, un seul 
homme a eu le courage de l'entreprendre et le bonheur de 
"achever: Hippocrate, conduit, inspiré par ,m des plus 
eanx génies qui aient honoré le monde. Quiconque lira sans 
Fréoccupation les chefs-d'oeuvre sortis des mains de ce grand 
homme sera frappé de traites les qualit6s de ce rare esprit : 
justesse, prolondeur, sacité, élendue, élevation, sublimité. 
Il n'est pas une parole de ses écrits ld9itimes (j'entends 
œux qui sont x'raiment de bd) qui n'mvre à vos yeux un 
horizou inlini, qui ne vous jette dans le silence et le recueil- 
lement de la mcditation : car (et j'empruW.e ici ce que 
m'en disait lïllustre Cabanis) tel est lecaractëre dHippo- 
¢tate, d'exciter l'entendement et de faire penmr plus qu'au- 
cun autre écrivain, quel qu'il soit. 
Pour élct'er à la m édeci ne ce solide et magnifique mo- 
nmnent, Hippocrate ne voulut point se borner aux seules 
ricl,esses qu'avaient réunies ses aieux. Après la mort de 
»on për¢ lléraclide, qui avait été son premier maltre, et 
dëja profondëment initi dans la doctrine de sa famille, il 
tcnl;t qu'il det'ait étendre ses connaissances par des vo}a- 

ges. Une secrète inquiétude l'avertissait qu'un complément 
lui éit nécessaire. On oempit ho des mpl d m- 
din$ lëbr et d de leur lébfioE. Hérodieu de 
lbfie faisait à t'aide de la mnfique des cur mer- 
vlle. Le voir, le oennaitre,  fMre son élëve ur 
n imiur, devenait un devoir pour pp. 
Oemone, de même que C appelait d min é 
 pour le- æioe de - mn, et I tfis jeux 
guee appnnent oe q oe saut appren la clique 
tmquille d'une le. Voy la oe éoE de lio 
e dt Ho en ant  ball ! Au thtoe 
a voir, au ènes à étudier, autr ma a fir. Il 
penit, d'un autre té, que I climat, I lienx, I mi- 
sons, I alit de l'air et  ux, muent de I 
oertèr I oenMitufio et I maladi ; et OE« vu d 
mn prit, il voulut I mr par d 
recto, pour I prunier dans lenrsvébl liste, 
du moins ds leu vaé pnl. 
n de oe former an lent de l'expon, il  dos le- 
ns de rgi, le pl fameux rhgteur de la GOe ; et 
apres un jour de quelqu ann d l'fie de Tltams, 
paumt I pfindpal vill de la tlie, de la Mat6 
doine, de la Thce et du nord de l'ie Min, inte 
gnt paout et nobnt a¢ soin 1  iuflueu 
qu'exeroent sur le physique et  le mol de }'hmme 
tom I agenL naturels : et it 'il ait p la mur 
viter l'Afrique, et particulièoement pte qM avait 
tout invente, it que de fidèl renseiem lui aii 
été tnsmis de e ie du mon, oe qu'o ne t nier 
c't qu'à la fin de son MOE du Pronostic, ur ants 
Mu  doctne sur oe poi OEpi, il te I fai 
IMn obmrve ds la Tboe, à Dfiloset d la b'e, - 
à-dire sur un pace de r qni oempoend de 12 à 15 
dés de lafide.  Thoe  la ibye  nt I exi 
m, Dèlos en ooEnpe le milieu. 
 n't p ut. Depuis de siècl I fi ét 
n ve l'étude de la ture. Plusiu plfilosephm 
avaient ét sur la mine. Ms en ennt dans la m 
dne, la philosophie généle n'y pomit que d-id 
ut spulafivoe, lquell devaient uver leur 
mation dans la pfique ;  le so  verrier h théorie 
les fai ne ponvt ée pris e p un . Hip 
vout donc à son ur pencher d la philosophie 
rale,  il ent  glo de l'asmci et tout ele d 
subordonner à  ience favo. Au Galien se plt41i 
réper qn'Hippra ét non-lent un meden 
mirable, msoeoe un pophe du  oms. QIo 
est la  de  pol?Ou le Phe de Plan 
vo y lirez 'Hippoete s't de la n, de 
oemposition et d prope d oe. Pour mahoe 
sOre ds d reeherch si deoet, il voult 
I oes à leu élemen I pl simpl, et 
pour chaom d'eu ce q, ns son oen av ns 
autre, fl peutfmre et sJfir. Cg oe le, etm 
g da  affinités de  e mee. Jus'où 
phsicioes de  ps et lui-mème avent po 
invafio, on l'ignore; m c'ét  MlWf loin 
que d'avoir pétr6 j.là. Du , m  
mande riveront aux msd'ier tou I ienm 
natuoe,  physique, la meorolo#e, l'anoe. 
avait l-mfi u oeaioe x de la 
tion de la feue, de s p61 et de  nes ; d mifi- 
fio que le m et I oen impdment h l'a 
phère; de l'aion de l'r sur l'otim de l'hom 
et d anau L'air pour lui t l'alent de la e 
,a oeufion : parole dons on nt aujonrd'h la pfon- 
deur et l'éndue. En pc savait oe qu'on ne 
p il y a  de-siècle, c't que I isso- n vivent q 
paroe qu rioe l'air  en I mol 
de l'caB. 
Qua x an par la philosophe m6rM 
t une qu'Hipa a s hon, c't la 



HIPPOCRÀTE -- iIIPPODAMIE 

Jamais coe.nf d'homme n'a mieux connu la sainteté de ses 
devoirs, et ne l'a fait sentir aux autres homme« par des traits 
pins touchants. Jetez les yeux sur son Serment, sur sa Loi, 
sur ses Préceptes, sur son petit traité De la dignitd du 
tedecin. Quelle pureté de mœurs I quelle chasteté ! quelle 
discrétion I quelle gratitude et quel dcsintéressement ! Pour 
lui la morale est aussi nécessaire que l'air lui-mgme. Aussi, 
faut-il rejeter comme une odieuse calomnie ce bruit devenu 
presque populaire, qu'aprës avoir puisé dans les archives 
des temples tout le fonds de ces admirables livres qui l'ont 
immortalisé, Hippocrate en cache pour jamais la source, 
en la faisant disparaRre par un incendie. Ce mëlange d'hor- 
reur et d'extravagance peut-il se concilier avec tant de 
nie et de vertu?Est-il un seul écrivain de l'antiquité qui 
ait osé noircir le moins du monde un si noble caractère? 
C'est seulement dans nos temps modernes qu'une malignité 
fanatique l'a accusé d'athéisme : imputation de laquelle ont 
pris soin de le laver des hommes d'une raison supérieure 
et d'une érudition consomm,,e. 
Les véritablea ouvrages d'Hippocrate sont en assez petit 
nombre : s'il était nécessaire de les classer selon l'ordre de 
leur importance, nous placerions au premier rang : 1" quel- 
ques traits descriptifs, en particulier celui des Af/celions 
;«t«9"iet«res, etc.; 2 ° le 1 "r et le 3* livre des Epid«mie«, 
dont nous ne voulons point parer ses belles vues sur les 
Constitations (voir le Trail¢ des Progntics), où respire 
ce sensexq,tis dont on est saisi presque à chaque parole, et 
qui est le caractère essenliel du génie; ° le Traité du regime 
dan les maladies auës ; 5" enfin, ce livre des Aphorismes 
qui, sauf quelques répfititions, quelques transpositions, et 
peut-être aussi quelques interpolations, suffirait seul  l'é- 
ternelle.gloire de son auteur : la troisiëme section est sur- 
Iout un modéle de statistique médicale ; ç° enfin, le livre si 
connu Des airs, des eaux et des lieux, dont Aristote et 
blontesquieu ont si bien développé les conséquences. Ses 
livre sur la chirure ne sont point assez lus. Ils renferment 
touchant les fractures, des choses toutes nouvelles, mëme 
pour nous. Seulement il ne permet pas à ses disciples de 
tenter l'opCation de la taille. C'est que de son temps la taille 
était le patrimoinede quelques opérateurs, comme on le volait 
en E,trope il y a quelques siècles, comme on le voit encore 
a,j,mrd'lufi dans une partie de l'Orient. On sonnait, du 
reste, toutes les qualité de son style, nerveux, concis, ra- 
pide, plus rempli de choses que de mots, et luisant briller 
e, courant des v6rités inattendues. 
On a mëlê aux événements de la vie d'Hippocrate quelques 
faits apocryphes et contestés. On dit qu'h la cour de Perdis- 
cas, roi de btacédoine, il fitce que plus tard Érasistrate fit 
à la cour du roi de 8)rie, S61eucus. La similitndede ces deux 
aventures a fait croire qu'elles Catent tabuleuses : raisonne- 
ment peu exact. Une grave élfidémie ravageait les Êtats 
du grana roi ; ce prince envoya une députation solennelle à 
Hippocrate, et l'engagea par de magnifiques promesses à 
venir au secours de ses sujets. Itiippecrate refusa les donset 
les secours. Le i,retnier refus honore Hippocrate ; il suivail 
dans le second les idées que les Grecs s'liaient failes sur 
les devoirs du citoyen ; mais dans les idëes, plus élev6es, 
que nous avons touchant les devoirs «le l'humanité, ce re- 
fus serait-il excusable? Fénelon l'ett hlàmé, lui, aux yeux 
de qui toutes les guerres sont des guerres civiles. Les détails 
de cette affaiee servent de texte  des lettres dont on a grossi 
les oetvres d'Hippocrate, et que l'on croit supposées, ainsi 
qneoelle ot l'on parle du voyage d'Hippocrate à Abdere 
pour voir Démocrite et le traiter d'une prétendue toile. 
Est-il vrai, du rte, qu'Hippoerate se soit êgalement refusL aux sollicitations des 111yriens et de quelques rois barbares 
dont les llats souffraient de la peste, ou plut6t du t}phus 
contagieux, car la vraie peste n'existait point alors? Est.il 
vrai que dansla peste d'Athénes, décrite par Thucydide, il ait 
rendu aux Athcniens ces services signalts qui lui méritërent 
une cooronne d'or et une pension dans le Prytan6e ? Ces 
histoires sont des flattons de quelques écrivaius plus 

dernes. On ne trouve rien qui les autorise, ni dans Thucy 
dide ni dans Hippocrate lui-rat:me. 
çe grand médecin, ce grand écrivain, ce grand philo - 
sophe, ne jouit réellement de toute sa gloire que lorsque, 
rendu à ses loyers, il déploa dans l'Cole de Cos ces 
rares et sublimes connaissances qu'il devait / ses etudes, 
à ses observations, à ses méditatious, a ses voyages, à ses 
communications avec les premiers hommes de son temps. 
Ce fut alors que l'école de Cos prit sur toutes les autres 
cette suprematie qui dure encore, et que les siècles ne 
lui 6leront jamais. Cependant, il quitta son école pour se 
rendre/ Larisse» ville de Thessalie, oi il mourut, dans un 
lge avancé. Quel était precisément cet .lge ? On a arié sur 
ce point entre les deux extrèmes de quatte-ingt-quatre et 
de ce«t neuf ans. Une sépulture lui fut donnee entre G.vr- 
toue et Larisse. L'humble monument dont elle etait ornée 
rappelait au souvenir des hommes un nom qui s'est identifie 
asec le nom méme de la médecine, et j'ajoute avec l'idëe de 
la vertu. PABISET, 
secrétaire perpëtucl de l'Acadëmie de Mëdecine. 
HIPPOCRATIQUE (Faci6s). C'est le nom que don- 
nent les médecins à un ensemhle de caractères que prescrite la 
face chez les mourants, d'apr Hippocrate, qui en a le pre- 
mier décrit le tableau. Voici les caractères de ce.lac i ès : 
peau du front tendue, sèche ou couverte d'une sueur h-oide; 
yeux entr'ouveris pendant le sommeil et enfoncés dans leur 
orbile ; nez effilë; retapes creuses; pommettes saillantes ; 
oreilles froidês, sêches et retirëes ; lèvres livides et pendan- 
te. . 11 est bon de sasoir tou!efois que quel,lug-,ms de ces 
signes peuvent se montrer soit seuls, soit mëme rcunis, us 
annoncer une rnl-1 procl,aine. D r SAECEllO'fTF. 
Il I PPOCREXE, c'est-à-dire la F6taiat  du Cheral ( du 
grec ...¢;, dwval, et v.?,-«, fonlaine), source pela»gique de 
Bdotie, consacrée aux Muses, sur l'llélicon. Près «le 
cette source, B e I 16 r o p h o n se serait isi de Pegase, qui 
y était senu boire. Telle est la tradition de Strabon. 
tres versions rapportent que c'est au moment off le cheval 
ail s'Aleu.rait de la terre vers les régions du ciel, que, d'un 
coup de pied, il fit jaillir sur l'H,:licon l'tiippoctëne. 
tonius Liberalis «lit qu'elle naquit lors de la lutte des P i d- 
rides et des _Huses : charmée de leurs concerts, la mon- 
tagne grandissait à vue d'cil, q«and Pégase, envo)é par 
Neptune, comprime d'une ruade, qui fit jaillir l'Hippocrène, 
cet essor ambilieux. Les pieds délicats des 3Iuses, dit Hë- 
siode, s'agitent autour de cetle fontaine, dont la fraicheur 
augmente celle de leur teint. Il sullit aux poëtes de s'y dé- 
saltérer pour faire de beaux vers. Paunias parle d'une 
autre source, que fit également jaillir un coup de pied de 
Pegase, I'A g a n i p p e, à sa gauche, quand on cuire dans le 
bois sacré; mais il ne dit rien de l'Hippocrëne. Pline l'an- 
cien cite l'Hippocrène avec l'Aganippe, l'Aréthuse, la Dircé : 
mais il n'a point vu, il a compilé. Si l'on songe maintenant 
que ces deux merxeillenses fontaines ont mëme ori.ginc, 
mêmes propriétés, presque mème nom, on fera comu:e 
plusieurs poëtes anciens, qui les ont confondues. 
IllPPODAMIE (qui dompte les ci,creux ) ou DÉIDA- 
3IIE (la Victorieuse), une des plus célëhres héroines de 
Grèce, était fille d'Adraste, roi d'Argos. Elle el,OUSa p i r i- 
t h ofts ; ses noces furent ensanglantées par le fameux com- 
hat de« Ce nta u re« et des Lapithes. 
IlIPPODAMIE princesse d'Élide et la plus belle de 
ces héroïnes qui devaient gtre le prix de l'heureux 
dent vainqueur d'oEn o m art s, son père, roi de Pisa, h la 
course «les chars. Treize princes avaient dëjà élt; h,és par 
ce tyran, la mort étant une condition de leur dëfaite. Un 
rusé vainqueur se trouve : ce fut Pélops, qui gagna son 
ecuyer et Cnsa sa conqugte; hmeste hymen, d'où naqui- 
rent, entre autres fils, A t r é e et T h y e s t e, si connus sur 
la scène grecque, que Yirçle s'Acriait, il y a près de deux. 
mille ans : 
Qui ne connalt Pélops et sa ftale amante? 
D ,. -B_xo.. 

12. 



2 HIPPODAMIE 
illPPODAMIE, fille de ]rlsè$. Voyez BnlSËIS. 
IlIPPODPtOME (du grec t'r..o, cheval, et 6o, 
course), place né l'on court, lieu destiné aux courses de che- 
vaux ou de chars. De tout temps les Grecs montrèrent le 
:got'tt le plus vif pour les courses de c bevau x et de chars, 
,2t les hippodrome« remontent  l'époque héroique; on peut 
ç'en convaincre en lisant le 23 e lire de l'lliade. Cependant 
i'antiquité nous a laissé bien peu de documents -ur ces 
arénes, leur étendue et l'espace qu'on y parcourait. Le 
seul Pausanias a décrit l'hippodrome d'Olympie, et encore 
cette description est-elle très-confuse en plusieurs endroits. 
Une enceinte, longue de 120 mètres et affectant /i peu 
près la forme d'un éperon de navire, précédait l'hippo- 
drome et servait à remiser les chevaux et les chars pen- 
dant les pr.:paratifs de la lutte. La lice qu'ils avaient à par- 
courir 6lait un carré long; à son extrémité se trouvait un 
terre-plain, surmouté d'une borne, autour de laquelle il 
fallait tourner. L'espace en cet endroit était si resserré, 
qu'il n'y pouvait passer qu'un seul char à la fois; c'était 
l'écueil où venaient échouer la plupart des concurrents. 
Pour sortir de ce pas dangereux, il s'agissait surtout de 
moderer ì propos les chevaux qu'animaient des fanfares 
;clatantes et le choc bruyant àes cymbales; et I'aurige s[ l 
perstitieux adressait tout bas des vœux au génie Taraxippus 
(qui effarouche les chevaux), dont l'autel décorait l'entree 
mème de l'arène. Lorsqu'un char se brisait contre la borne, 
ceux qui suivaient descendaient sur la pente d'une trancbée 
douce qui régnait autour du terre-plein, pour remonter 
ensuite sur le terre-plein et accomplir l'évolution prescrite 
autour de la borne. Les juges qui déceruai, nf le» prix aux 
"vainqueurs étaient assis à l'une des extremit de l'hippo. 
,!tome, prës de l'endroit où se terminait la course, et les 
,pectateurs s'etageaient le I,ng de la barriëre ou du mur h 
hauteur d'appui qui formait la lice. 
On croit genéralement que les hippodromes des anciens 
• avaient quatre stades de longueur et un stade de largeur. Les 
Romains empruntèrent aux Grecs leurs courses de.chevaux 
,-I de chars; mais ils appelèrent cirque l'édifice où se 
,]onnaien! ces jeux, et qui servait d'ailleurs en même temps 
aux combats de hëtes et de gladiateurs. L'tige d'or de 
l'hippodrome, ce lut le Bas-Empire. Il aimait il la fureur 
ce» sortes de spectacles, ce peuple hybride qui avait hé- 
rité des Grecs et des lomains ; il y déployait tout le luxe 
fabuleux de l'Orient, jusqu'h sabler de poudre d'azur et de 
vermillon l'arëae ou luttaient les faction s rivales des en- 
chers, ces bleu s et ces verts qui se partageaient la mul- 
titude passionnée. Il y eut deux hippodromes h Constan- 
t i n op I e, l'un bti par Théodose et qu'Irène d'molit: il était 
.tué entre le palais d'Elentberius et celui d'Amastrianus; 
l'autre commencé par Septime Séère et fini par Constantin 
le Grand. C'est sur son emplacement qu'est auourd'bui 
:ituée la place de l'Atmeida, et le vocable turc a la même 
ignification que le mot grec auquel il a Ce substitué. En 
Asie Mineure, en I!alie, en France, il existe encore quelques 
ruines d'bil«podromes, mais beaucoup moins que de cirques 
et d'amphithé/ttres, constructions massives qui ont mieux 
rdsisté au temps destructeur. 
A Pari, on a donné le nom d'hippodrome à un nouveau 
irque, construit en t85, en deho:s de la barrière de l'É- 
toile, près de l'Arc de triomphe, sur une partie de l'ancien 
.promenoir «le Chai[lot. Il est entièrcment bàti en bois et 
affecte une forme ovale. L'enceinte destinée aux exere;ces 
figure un parterre gazonné, ct,upé par quatre ailC sablées 
lui aboutissent ì un petit ronà-point, oi l'on a coustruit 
en 1.5-i un thétre pour jouer des piëces militaires. La lon- 
gueur totale d,;s constructions est de 130 mëtres ; celle du 
turf de 10 métres, sur une largeur de 108 métres. On y 
pénCre par une porte dans le goOt moresque; des tentures 
]3ariolées, de larges handerolles flottantes de conleurs va- 
riées donnent a ce col)sée de bois et de carton un aspect 
tolet oriental ; il peut contenir quiuze mille persounes. 
Le n:ème nom d'hippodrome a été donné ì un vaste 

-- HIPPOLYTE 
terrain de 130 hectares, pris dans la plaine de Longehamp 
pour tre annexé au bois de Boulogne, et affecté à des 
courses publiques de chevaux. W.-A. Dccsrr. 
HIPPOGBIFFE (mot formé des deux termes grec« 
gz,o;, cheval, et 'p,-p, griffon, mais que les Grecs ne con- 
naissaient pas). C'est un animal cbimérique, de l'inven tion des 
poëtes, dont l'Arioste a lait un usage fréquent dans son 
poême de loland furieux; l'invention toutefois ne lui en 
appartient pas, c'est  Bojard o qu'elle revient tout entière. 
L'hippogrille est le coursier de l'épopée chevaleresque, la 
digne monture des héros fabuleux, qui échangent de si 
grands coups de lance sur la terre et àans les airs. Moitié 
cheval, moitié griffon, comme son nom l'indique, il est 
pourvu de vigoureuses ailes. Le cheval céleste, qui est ailC 
et qu'Euripide nomme Ménalippe, fut affecté au signe du 
Sagittaire. Quelques auteurs en font la monture de Ju- 
#ter ; d'autres, celle de Bellerophon, ou d'Hippono0s, qui 
l'enfourcha pour combattre la Chimère, vomissant du leu et 
ravageant la Libye. Jupiter réunit Crotus, fameux chasseur, 
à son cheval, qu'il avait beaucoup affectionné pendant sa 
vie. De nos jours, Wieland, au d,.but de son Ob¢ron, 
somme la Mue de lui seller l'hippogriffe pour entreprendre 
une excursion dans le vieux pa.s romantique. Pour lui, 
l'hippoiffe et le Pégase du moyen-age. 
IlIPPOLYTE, fils de Thésée, et de l'Amazone An- 
t i o p e, reine de Thémicyre, sur le Pont-Euxin. Son nom 
composé des deux mots hellènes, .o, cheval et )..to, je dé- 
lie. Célèbre par son noble cœur autant que par sa chasserC 
tojour» l'arc en main dans les bois, sur les monts, suivi 
d'une meute docile, il avait voué sa vie à Diane. Sa réidence 
état Trézène, ville maritime de l'Attique, où son éducation 
avait été confiée à son bisaïeul Pithée. Hippolyte nourrissait 
sa jeune ame de la pure morale d'Orphée -- Euripide lui 
donne m.me une lyre, comme à ce philosophe-poêle. 
Cependant, P b è d r e de Crète, fdle de l'incestueuse Pa- 
siphaé, et femme de ThéC, avait vu le favori de Diane, 
le fils de son époux, dans le temple de Cérës, à Athèncs, 
pendant la céléhration des mystères. Le voir et brûler d'un 
feu criminel [nt pour la fille de Minos l'instant d'un éclair. 
Éhontee, ou plutôt poursuivie par la colëre de Vénus elle 
ose déclarer h son beau-fils son incestueuse passion, qe 
l'enfant de l'Amazone, les yeux baisses, repousse par son 
silence, sa chate contenance, et rompt par une fuite pré- 
cipitée. L'infidèlc "fhësée tait alors ailWen qute d'aventures 
dans les en!ers, c'est-à-dire en Épire, contrée basse et bru- 
meuse, par rapport à la Gré,e. Au bruit du retour d'un 
époux outragé, dont elle redoute la colère et la sévère jus- 
lice, Phèdre, en proie alx furies d'un amour non sali»fait 
et dedaigné, se pend  une solive de son palais. Thée ar- 
rive au moment ou elle vient d'expirer ; en vain fait-il 
éclater son désespoir. Toutefoi», en serrant encore cette 
main chérie, il v trouve une lettre accusatrice contre son 
propre fils, bien qu'on assure que l'art d'ecrire n'Clair point 
inventé à cette époque. La perfide OEnone, sa nourrice, avait 
donné à Phèdre cet infcrnal conseil. Un incestueux attentat 
à la couche paternelle était vivement et douloureusement 
tracé dans l'pitre. Le père, qui croit à l'ouUage, couvre 
d'imprèeations la tëte de son fils. « O Neptune ! des trois 
vœux que tu m'as promis d'accueillir, s'Crie-t-il, exauce 
d'abord celui-la : j'abandonne l'infàme/i ton courroux. ,, Ni 
sa vertu ni la candeur de sa défense ne peuvent justifier 
lïnfortuné : foudroyé par les regards de son père, banni 
par lui, il regagne tristement sur son char le chemin de 
Tr(oE,ne, Iorsqu'un taureau marin,  la croupe recourbée, 
toute couverte d'écailles, s'elance, en fureur, du sein des flots 
émus. ltippolyte saisit un javelot, le lance au monstre, qui, 
blessé bondit sous le poitrail des chevaux; ceux-ci, ef- 
frayt précipitent en fuyant Iiippo!yte et son char à tra- 
vers les rochers, où il se brise. San#ant, décbiré, mourant, 
le fils de Thée est rapporté à son pre, auquel Diane elle- 
mème a révélé la tardive et fatale vérité. Le doux et mal. 
heureux llippolyte n'accuse point de sa mort tin pre dé- 



HIPPOL_'I£ -- 
sespré; lesdernières paroles qu'illui adresse sont des conso- 
lations pleines d'amour et de respect, jusque à ce qu'il lui 
{lise -. « O mon père I voilez -moi promptement la tte ! » 
E il expire. Il avait peur que le visage d'un mort ne souill$t 
et son père et son roi, qu'il avait si tendremeut aimé et 
respecté durant son i=nocente vie. 
Tel est le sujet du drame d'Euripide intitulé : Hippolyte. 
Dans Sénèque le tragique, la belle et heureuse scène de l'c#e 
du jeune prince, restée, comme preuve de conviction, a,tx 
;nains de Phèdre, est un triomphe, mais le seul, du poëte 
latin sur le poête grec. La Bible avait laissé un modèle «le 
cette scène dans le mauteau de Joseph, abandonné par le 
chaste fils de Jacob sur la couche même de l'adultëre épouse 
de Putiphar. Racine, dans sa Phèdre, a imité Sénèque et la 
Bible. Une vie pure, si t6t moissonnée, une mort si triste et 
si sanglante, valurent à Hippol)te des autels et des temples 
dans la Grèce. Diomède lui en Ceva un : il y consacra un 
prètre particulier et des fètes annuelles. Avant de se marier, 
les jeunes filles lui faisaient l'offrande de leur chevelure, 
ans doute pour avoir la force de garder la foi conjugale. Ce 
lils d'Amazone eut aussi sa idace dans les cieux : il avait 
donné son nom ì la constellation du Co c h er. Sous le règne 
de Nmna, les prëtres barbares de Diane, dans la m)'sté- 
rieuse forèt d'Aricie, près de Borne, curent l'artifice de res- 
susciter Hippol]de sous le nom de Yirbius, ou deux fois 
homme. Esculape, disaient-ils, lui avait rendu la vie, ì la 
prière de Diane, et le jeune prince, toujours modeste, tou- 
jours amant de la solitude, alors diinité champêtre, se se- 
rait tenu cacbé jusqu'au règne de uma, dans le bois de 
Diane, sous la forme d'tin homme d"ge m0r. 
DE,xE-BAtO. 
IIIPPOLYTE (Sai,.t), évêque, martyr et docteur de 
l'Eglise. On ne sait point quelle église il gouvernait, ni en quel 
temps il répandit son sang pour l'Évangile. Quelques sa- 
vants prétendent cependant qu'il était évëque, non de Bome, 
mais/i Borne, pour soulager le pape dans ses fonctions; 
peut-ëtre erait-ce alors le confondre à tort avec un autre 
Hippolyte dont parle Prudence. Une autre opinion fait de 
saint Hippolyte un évëque d'Aden en Arable, qu'on appelait 
anciennement le Port Romain. En tout cas, on pensequ'il 
vivait vers l'an 230, sous Alexandre Sévère. Des nombreux 
ouvrages qu'il avait compuss la plupart sont perdus. Parmi 
ses œuvres, on remarque son Canon Paschalis, table qui 
servait à déterminer le jour de Pàques par le moyen d'un 
cycle de seize ans; (cette table est anterieure à celle d'Eusèbe, 
et Joseph Scaliger la publia le premier, en 1583) ; son travail 
sur l'Ante-Chrst ; celui sur Susanne et Danel; une 
monstration contre les Juifs; un livre De Deo trino et nno, et 
de znysteris lncarnatonis , contrà hoeresim IVoeli ; et 
des fragments d'un Commentaire sur la Genèse. Fabri- 
cius a recueilli et publié les œuvres de saint Hippol) te {Haro- 
bore'g, 1716-1718, 2 vol. in-fol.). On découvrit en 1551, 
dans des fouilles faites près de Tivoli, la statue en marbre 
d'mi évèque assis, qu'on jugea être celui dont nous par- 
lons, le Canon Paschals étant reproduit aux deux ctés 
de la chaise. Ce monument est conservé dans une salle du 
Vatican. 
Dans ses recherches au couvent du mont Atbos, M. My- 
noide Mynas découvrit un manuscrit du quatorzième siècle, 
sur papier de coton ,de médiocre apparence, mutilé, sans 
nom d'auteur, intitulé Rfatation de toutes les hrsies, 
omrage que M. Muller attribue à Origène et que M. Bun- 
sert restitue à saint Hippolte. L'idée de ce livre est que 
toutes les bérésies sont simplement d'anciennes pbiloso- 
phies, faisant invasion dans le christianisme et le denatu- 
tant pour se l'approprier. Valentin, selon l'auteur, veut plier 
i'Eangile aux idées de P)thagore et de Platon ; Basilide est 
nn disciple d'Aristote; Marcion renouvelle Empédocle, et 
Cérinthe n'est qu'un initié des mystères égyptiens. L'écrivain 
expose franchement les tbéories de ses adversaires, et ne dé- 
daigne pas de raisonner avec eux. Viennent ensuite comme 
des .mdmoires secrets sur l'lutCieur de l'Église romaine, 

HIPPOPOTAME 93 
une accusation terrible portée contre le pape Calixte et des 
détails nouveaux sur la protection que Marcia, concubin 
de Co mmod e, accordait aux chréliens proscrits. 
IilPPONACTIQUE {Vers). Voyez Cuot.tm. 
HIPPONAX d'Ephèse, po/.te ïambique, célèbre par 
son caractère satirique, vécut ver l'an 530 avant J.-C. La 
crainte que leur inspirait sa mordante ironie détermina les 
tyrans de sa ville natale à le chasser. 11 se rendit ì Clazo- 
mène, o{l, pour se venger du mépris que lui attirait sa dif- 
formité physique, il flageila du fouet de la satire tous ceux 
qui lui déplaisaient, et principalement les femmes. Il inventa 
pour ses poë,nes satiriques une forme particulière d'iambe, 
le choliamhe, qui de son nom fut appelé vers hppo- 
nactique; il écrivit également en vers hexambtres et dans 
le style épique des parodies dont il nous a étWconservé un 
fragment, qui concerne un glouton. Les fragments d'Hip- 
ponax ont été publiés de la manière la plus complète par 
de Bergk, dans ses Poetec 19rici grzeci ( Leipzig, 183). 
HIPPOXE Voge: Hwvo. 
IIIPPOXlCE (de o¢, cheval, et o, pied), genre 
de mollnsques gastéropodes, de l'ordre des pectinibranches, 
famiUe des capuloïdes, et qui se distinguent des cabocbons, 
dont ils sont voisins, au support calcaire sur lequel ils re- 
posent, et qui parait transsuder «lu pied de l'animal. On n'en 
connait qu'une .e.spëce vivante et plusieurs espèces fossiles. 
ilIPPOXOUS. Vove:, BELLÉROPttON. 
HIPPOPIIGES c'est-à-dire mangeurs de chevaux 
(de r.o,, citerai, et ¢$-to, je mange). C'était, selon les re- 
lations d'anciens géographes, le nom d'une peuplade sc)tfii- 
que, qui habitait au nord-est de la mer Caspienne, o{l de 
nos jours encore les I,ordes de Kalmouks conservent fo,des 
les habitudes des anciens Sc3 thes, sont comme eux nomades 
et friands de la chair des chevaux. Dans des pays civilisés, 
on a aussi te,dWà plusieurs reprises, par des motifs d'éco- 
nomie politique, de faire de la chair du cheval un aliment 
ordinaire; et If cet cilet il s'est constitue des societes bippo- 
phages, par exemple en 152 dans le Wurtemherg. biais ce 
qui vraisemblablement s'opposera to,;jours à la vulgarisation 
de ces idées dans nos pays d'Europe, c'est : 1 ° q;;'il répugne 
à l'homme de se nourrir de la chair d'un animal domes- 
tique qui lui est si utile et que distinguent tant denoblesqua- 
lités; 2  que la ci;air de cheval a quelque chose de doux et 
de sucré qui répt;gne au goùt ; 3 ° enfin, c'est que presque 
partout le cheval est un animal d'un trop grand prix pour 
qu'il puisse  avoir avantage à employer sa chair comme 
moyen d'alimentation. 
HIPPOPOTAM E. Ce mot, qui, d'après son étymologie 
grecque, signifie cheval de rère (de Bxo;, cheval, et 
xoE,6, rivière), est le nom d'un quadrupède qui dispute au 
rhinocéros le premier rang après l'élépliant, et occupe le 
second sans aucune contestation. Quelques-uns de ces ani- 
maux pèsent plus de deu mille kilogrammes, et atteignent la 
longueur de cinqmèt;'es depuis le bout dt; museau jusqu'a l'ori- 
gine de la queue. Une tète énorme, une gueule rendue pres- 
que jusqu'aux épaules, des yeux à peine visibles dans cette 
tête si massive, un corps arrondi, porté sur des jambes ex- 
trèmement courtes, un veqtre dont l'ampleur surcharge en- 
core cette lourde masse, tout cet ensemble n'est pas propre 
ì donner une bonne opinion des facultés de ce prétendu 
cheval, et l'on est porté d'abord à demander comment on 
peut justifier le nom.qu'il porte. Ses oreilles courtes, poin- 
tues et roides, n'ajoutent rien à sa physionomie, et la cou- 
leur noiràtre de sa peau, non moins dégarnie de poils que 
celle de l'éléphant, ne contribue pas ì l'embellir. On n'a 
donc pas ì regretter que ce colosse, d'une forme aussi dé- 
plaisante, soit confiné dans les réions chaudes de l'ancien 
continent. Comme on ne l'a jamais 'u que près des grandes 
rivières ou plongé dans leurs eaux, on est fondé à croire 
qu'il n'est pas plus ampl;ibie que le castor ou fa loutre; ses 
pieds ne sont pas m:me pourvus de membranes entre les 
doigts pour l'aider à nager, en sorte qu'il ne semble destiné 
q;t'/l mat cher sur la terre. Comme les végétaux font une par- 



94 HIPPOPOTAME 
tie de sa nourriture, il vient paltre sur le bord des fleuves, 
et c'est la que les chasseurs l'attendent. 
L'épaisseur et la dureté de sa peau repoussent les balles 
sur une grande partie de son corps; il n'est vulnérable qu'au 
ventre et entre les cuisses. Outr.e ces armes défensives, cette 
cuirasse, sous laquelle son dos et sa croupe sont en sOrete 
contre les projectiles ordinaires et les ongles du lion et du 
tigre, sa redoutable gueule oppose à ses ennemis de lon- 
ues et fortes dents canines, les plus dures que l'on connaisse. 
Rien ne peut réister aux puissantes mchoires de cet ani- 
mal : les canots sont chavirés ou dchirés, de fortes barres 
de ter pliCs, etc. Il est rare quc le fort abuse des avantages 
que sa force peut lai donner aux depens du faible : on a 
pourtant à faire ce reproche h l'hippopotame, et dans des 
circonstances où la gravité qui semble convenir si bien à sa 
masse et h sa forme fut trës-n,'gligée. Uu individu de celte 
epèce avait choisi pour station habituelle l'embouchure d'un 
fleuve d'Afrique ; des colons établis sur les deux rives com- 
muniquaient fréquemment entre eux; le nalin quadrupède 
eut la fantaisie de chavirer leurs canots chaque lois qu'il les 
rencontrait, sans autre but apparent que de voir les par- 
sagers "fi la nage. Cette mauvaise plaisanterie fut tolerée 
pendant quelque temps ; mais il fallut y mettre un terme, 
et une cllas.e bien organisée délivra ces parages d'un habi- 
tant devenu très-incommode. 3lais on ne cite que ce fait o6 
l'llippopotame n'ait pas évité l'approche des hommes. C.:t 
animal n'est pas plus offensifqu'aucun des herbivores, et ne 
fait la guerre qu'anx pot»sons, sur lesquels il fonde une pa:'- 
rie de sa subsistance. En le con.idéraat par rapport/ l'usage 
que l'on peut en faire, on vante l'exclleqce de sa chair 
l'abondance, la bonté, la salubrité de son lard, moins allé- 
rable et moins indigeste que celui du cochvn, la blanclleur 
et la dureté de s dents canines (défenses), qualités qui 
font préférer cette matière/ toutes les autres pour faire des 
denls artificklles. Les Africains font avec la peau du dos et 
des reius des boucliers. On dit aussi que le lait des femelles 
n'est pas moins savoureux que le meilleur lait de vac.be. 
A l'epoque de la splendeur de l'empire romain, des ani- 
:natx de ce genre ajoutaient l'tutCéf de la curiositë à la ma- 
,ni.,'icence et à la variét_ dsjeux dil cirque. On savait d«mc 
I,» prendre vivant% les tran.porter h Rome et les , nourrir. 
On a cru reconnaitre l'hippopotame dans le Edhemolh 
l'hi<loire de Job ; mais on ne peut appliquer/ aucun ,'mi- 
mal existant une description aus.i poëtique. Si elle n'éait 
qu'un tableau dont tous les trait fuent arandis, on pou. - 
rait esp,:rer de voir un iour, dans les prairies de.; pays chauds, 
le gigantezque hippopotame paitre tranquillement près de» 
Croupeaux domestiques, et mëme se mler / leurs jeux, 
Qu,»i qa'il en soit, il parait certain, d'après cette histoire, 
que Ihippopotame habita jadis des pays qu'il a quittés, que 
des marais et des rlis_eaux lui offraient des retraites et des 
lieux «le repos, où il se plaisait / se livrer au sommeil. On 
ne le trouve plus aujourd'llUi sur les rivières peu profoude.% 
»h il ne pourrait échapper h ses ennemis en plongeant sous 
les eaux ; les grands Iieuves de l'Inde et de l'Afrique le con- 
servent encore, mais on n'en voit point sur la céte orien- 
tale de l'Asie. Le temps approche où il aura totalement 
évcué l'EgTpte, quoique le Nil Iùt autrefois l'une de se 
stations favorites. Fr-. 
Depuis les exhibitions du Cirque/ Rome l'Europe n'aval! 
peut-erre pas vu d'hippopotame vivant, Iorsqu'en 1859 tin 
ieune individu de cette espèce, pris dans Pile Obaisch du .Nil 
Blanc fut amené en Aiigleterre. Nourri d'abord de lait de vache 
et de mats moulu, il en est arrive à consommer par jour en- 
viron 50 kilogrammes de foin, de paille, de biC de racine.; 
et d'llerbes. En 1856 un Ilippopotame femelle fut encore 
amené ì Londres. Au mois de mai 1853, un hippopotame 
arriva à Paris. Il avait alors onze mois, et il consommait 
30 litres de lait par jour; petit/ petit on le serra, et on coin- 
posa sa nourriture de pain bis, de carotte% de pommes de 
terre et de fruits. En dix-Irait mois il doubla de grosseur, 
et ì la lin «le 185 il avait t',20 de hautettr, q',70 de Ioa- 

 HIRONDELLE 
gueur, 3m de circonférence. Cet animal a l'aspect d'un 
masse degraisse suant l'huile par une infinité de pores, et 
semble plut6t fait pour rouler que pour marcher. Il se tient 
habituellement dans un bassin «le 2m, creuse' dans le sol de 
la Rotonde du Muséum. Jamais il ne reste plu» d'une demi- 
heure au fond de l'eau sans venir respirer l'air/ la surface 
par ses larges naseaux. L'hiver on fait chauffer l'eau de son 
baa«in, que l'on maintient/ une température de ÷ 12 ° cen- 
tirades. Chose singulière,/ la moindre exultation de son 
gardien, cette lourde masse execute une foule de cabrioles 
dans l'eau, puis, comme pour réclamer le prix de ses gen- 
tillesses, l'animal ouvre sa monstrueuse bouche déj/ garnie 
de quelques m/lcbelières et où les morceaux de pain dispa- 
raissent comme dans un gouffre. Un autre hippopotame 
femelle de onze mois est arrivé à Paris en mai 1855. Tous 
viennent ,t'Egypte. L. LovLr. 
HIRAM ou KHIR.-L,I, roi de Tyr et fils d'Ahibal, qui 
régna de l'an 1095 à l'an 985 avant J.-C., fournit à Salo- 
mon, avec qui il aait contracté alliance, des matériaux 
et des ouvriers pour son fameux temple. La Bible lait encore 
mention d'un orfèvre, ou ciseleur, du mgme nom, 
ment de T.r, contemporain aussi de Salomon, qui confec- 
tionna la plus grande partie des vases prCcieux servant ì 
l'ornementation du mème temple. Untroisiéme Hiram, ori- 
nai re encore de T. r, fut recommande/ Salomon pour diriger 
comme architecte les travux de construction du temple, 
et périt assassiné par une p.,rtie des onvriers placés sous ses 
ordres. Ce meurtre joue un and rée dans la mythogra- 
phie des francs-maçons et da compagnonage. 
IIIRCAX. l'o?/e: Hvr.c_x. 
IIIRE L). l'osez Lx Hwm. 
IIIROXDE (Queue d'). l-o?/e: Qtgg 
IIIOXDELLÈ  genre de la famille des fissirostres et 
de l'ordre des passereaux, ayant pour caractères : Be court, 
triangulaire, large, aplati horizonlalement, profondément 
iendu ; mandibule supérienre faiblement recourbée vers sa 
pointe; pieds courts,/ quatre doigts grgles, trois antérieurs 
un posterieur ; queue forlnee de douze rectrices ; ailes «llon- 
gées, la première rémige la plus longue. 
Les hirondelles apparaissent en France vers l'équinoxe 
«lu printemps, pour disparaitre de nouveau vers l'équinoxe 
d'automne : oiseaux cosmopolites, leur domaine s'ëtend par- 
tout oh le soleil acquiert assez de puissance pont réchauf- 
ter la terre glacée, partout o/ l'air nourrir assez dïnsectes 
pour leur fournir une abondante proie. Mais si l'hirondelle 
n'a pas de patrie, elle a une famille, une demeure, un che» 
l elle, et dans ces longs vo,ages qu'e!le execute deux fois 
l'an, des terres équatoriales aux lignes polaire% et des cer- 
cles arctiques à l'équateur, elle se choisit toujours deux 
[points de entre lesquels elle partage sa vie : presque 
epos 
toujours I hirondelle, qui rions quitte en septembre, revient 
I vers la rai-avril au nid qu'elle s'est bati, et, ce qui est plus 
étrange encore, les jeunes hirondelles établissent presque 
toujours leur demeuredans le voisinage du nid qui les a vues 
narre (Spallanzani). Ce fait de l'ëmigration des hirondelles 
vers l'approche de la saison rigourense, l'une des traditions 
les plus populaires de l'histoire naturelle, a souvent été ré- 
voqué en doute; et deux opinions émises par les anciens 
écrivains pour expliquer ces disparitions périodiques trou- 
vent encore des partisans parmi les naturalistes modernes : 
Olaiis Malus pensa avoir constaté, par l'obse, ration directe, 
que les hirondelles passaient l'lliver dans un état d'asphyxie 
au fond de l'eau des marais. Klein, dans sa dissertation De 
hibernaculis hirondinum, et Linné ont donnë l'autorité 
de leur nom à l'hypothèse du savant évéque d'Upsal; et 
Cuvier lui-mgme (l¢ëgne animal, 1817, vol. t, p. 376) dit. 
en parlant de l'hirondelle de rivage : • 11 parait certain qu'elle 
s'engourdit en hiver, et méme qu'elle passe cet état au iond 
,le l'eau des marais.  D'autres naturalistes ont prêferë ad- 
mettre que les Ilirondel!e% comme les animanx hivernants, 
passhient la Iroide saison engourdies dans les creux de 
cllcrs ; ma!s .Maudut, Spallanzani, attères (cité par Tem- 



HIRONDELLE 
minck, Manuel d'Ornithologie) ont tenté une multitude 
d'expériences, dans le but de démontrer combien cette hy- 
pothse était peu fond.ée. L'h)'pothèse, si inexplicable qu'elle 
«oit, de l'Cigration, est encore celle qui, en histoire natu- 
relle, compte le plus de partisans. 
Suivant Spallanzani, les hirondelles sont monogames : 
elles dèfendent en commun leurs foyers envahis par l'ennemi; 
elles reconstruisent en commun leurs demeures renversfies 
ou détruites (Linnfi, Dupont de Nemours). Essentiellement 
inctivores, elles font leur nourriture ordinaire de cousins, 
de mouches, de charançons, de tipules surtout, dont elles 
sont très-friandes (Tessier). Et c'est parce qu'elles poursui- 
vent ces insectes dans les plaines les plus ievées de l'air, 
q'aand le ciel est pur, et qu'elles les chassent encore en ra- 
nt le sol quand le ciel est chargé de nuages, que le vol 
de l'hirondelle est devenu un baromètre/ l'aide duquel le 
peuple predit les changements de temps. 
Le genre hirondelle (hirundo, Linné) renferme de nom- 
breuses espëces, parmi lesquelles il faut distinguer surtout : 
l'hirondelle domestique, l'hirondelle des fenétr, l'hi- 
rondelle des riva9 et l'hirondelle salangane : c'est 
cette dernière espce, qui habite l'archipel des Indes, qui 
construit ces ni,is gélatineux que les Chinoi. apprêlent 
comme, des champignons, et dont ils Iont si grand cas. Le 
mystëre qui s'attache à l'origine de ces nids n'est pa encore 
compiétement clairci : quant à sa forme, ce nid ressemble 
à l'une des vulves de la coq«ille nommce par Linné mytilus 
hiundo, par Lamarck aronde oise«m : la salangane le 
con,truit selon les uns avec du frai de poisson, selon d'au- 
tres avec des fucus d« genre 9elidhtm. Ces nids, demi- 
transparents, à cassure vitreuse, d'une consistance ferme 
et tenace, adhërent fortement aux rochers : on les r.:colte 
trois fois l'an. BELFtEL1)oLEFÈYRE. 
On assure qu'un essai «le poste au hirondelles, fait 
en août 1854, a étécouronn6 d'un succès qui dfipasse toutes 
les espërances. Six hirondelles, prises dans leurs nids à 
Paris, ont été transporlées ;t Vienne (Autriche) par le chemin 
de let; là on leur a placé sous le ventre un petit pli conte. 
riant une sfirie «le nouvelles de !,510 mo£ ; puis à sept heures 
un q«art du matin on a mis en liberté les six captives. Sur 
ce nomb«'e, deux sont arrivées  Paris un peu avant une 
heure de l'après-midi, une ì deux heures vingt minutes, une 
 quatre ieures; les deux autre se sont per!lues en route. 
ItlRONDELLE À QUEUE CARREE. l'ojcz 
4OULEVENT- 
HIRONDELLE DE MER. Voyez D.,c'rYLOPTÈit-I. 
HIRTIUS (Actes), lo«ain «le naissance plébéienne, 
partisan et confident de Césa r, dont il fut liet'.teuant dans 
les guerres des Gaules, et auquel il dot la préture l'an 66 
avant J.-C. et le consulat pour l'an 63 avant notre ère. 
Apr/ le meurtre de César, il se brouilla avec A n t o i n e, 
et, ayant pris possession du consulat, il se mit en campagne 
contre lui avec n collègue C. ¥ibius Pansa et avec Octave. 
Antoine, d'abord défait par lui à Bologne, fut encore nne 
fois battu et mis en firte, le 27 avril de l'an 43 avant J.-C., 
dans la bataille dficisive livrée près de lIodne, d'où cette 
guerre a été appelée 9uerre de Modène. IIais Hirtius iui- 
mme périt dans cette dernière action; Pansa mourut le 
jour suivant des blessures qu'il avait reçues ì Bologue. On 
ne saurait dècider si Hirlius est ríellement l'auteur de 
l'histoire de la guerre d'Aiexandrie et de la guerre d'Afri- 
que ; mais il parait certain que la continuation ( le 8  livre) 
des Commentaires de César sur la guerre des.Gaules, est 
de lui. 
HIRUDINÉES, familled'annides, dont les s a n gs u es 
forment le principal genre. 
HISKIAS. Voe: Ézécmxs. 
HISPE (de hispidus, couvert d'épines), genre de 
coloptères subpentamères, ainsi nommé parce qu'il ren- 
ferme plusieurs epèces dont le desss et les cries du 
corps sont c.uverts d'pines branchues, ainsi que le an- 
tennes. Toiles sout l'hisFa testacea, qui se trouve sur le 

 HISTOIRE 
ciste dans toute l'Europe australe, et l'hispa atra ou 
taigne noire, a.sez commune aux environs de Paris. Cette 
dernière s'attache aux tiges et aux racines des plantes qui 
croissent dans le sable. 
HISTIOPHORE. Voyez Isopnoe. 
HISTOGÉXIE HISTOLOGIE, HISTOTO.HE (de 
l, tissu, y.tto, j'engendre, ).yo, discours, -rto, je 
coupe). Les anatomistes allemands ont d'abord proposé le 
mot hitologie pour désigner la branche de i'a n a t o m i e 
qui traile des diver. systèmes de tissus entrant dans la 
composition des organes des animaux et «les végetaux. Pour 
eux, l'anatomie proprement dite des tius reçoit le non« 
d'hotomie, qui signifie dissection de c,es tissus; mais ior- 
que, recherchant dans les embryans la formation de to»te 
les parties qui s'y développent, ils ont voulu s'attacher a 
l'observation plus spéciale de la formation primordiale de 
tous les éléments tissuiaires, depuis le solide vivant le plus 
homogène, qui est le blastème ou le tissu blasteux de tous 
les organes, jusqu'aux diverses sortes de tissus fibreux, ca- 
verneu et parenchymateux, ils ont en quelque sorte ins- 
tilué une nouvelle science sons le nom, très-convenable et 
très-caractéristique, d'htog,nie , qui signifie gnération ou 
formation embryonnaire des tissus vivants. L. 
HISTOIRE. Ce mot, qui vient du grec t-rop[oE, signifie 
recherche des choses curieuses, envie de savoir, exposi- 
tion des./ait dont nous avons ët, les spectateurs; car 
le verbe toxopZ vent dire précisément connaffre, soror 
une chose coznme l'a.lant vue. Les philosophes, qui dis- 
tinguent dans l'entendement humain trois faculles princi- 
pales : la reCoire, la raison, l'imagination, ont fait 
river de ces trois facuiles une distribution génrale des cou- 
naissances bmaines, en histoire, en philosopide, en poe- 
ste. De la memoire dérive l'histoire, comme la philosophie 
dérive de la raison, et la poésie reconnait l'imagination 
pour .ca mi.re. On n'a pas besoin d'ajouter que ces d«limi- 
tati«ns tbéoriques sont nécesairement franchies dans l'ap- 
plication : car que serait l'histoire sans la philosophie pour 
coordonner les fails? De mme, que serait la philosophie 
sans un certain ordre de faits ? 
L'histoire considérée dans sa matière .e compose de 
faits : les faits sont ou de Die«, ou de Phomme. ou de 
la nature; les faits qui sont de Dieu appartiennent à l'his- 
toire sacr#.e; les faits qui sont de l'homme appaiennent 
ì l'histoire cwile ou politique, et les faits qui sont de la 
nature se rapportent à l'histoire naturelle. 
L'histoire sacrée expose à la fois les mystëres et les 
cérémouies de la relioon, les miracles et les choses sur- 
naturelles dont Dieu seul est le principe, la discipline et 
les fastes de l'Église. Les prophties, dans lesquelle le 
récit a précédé l'événement, sont une branche de l'histoire 
sacrée. L'histoire civile se compose des faits qui viennent 
de l'homme : dpoitaire fidèle des traditions des ancêtres, 
«les révolutions des temps pass, de l'origine des institu- 
tions politiques, de la gloire et de la ciebrité des hommes, 
i la science historique se distribue suivant ces objets en his- 
toire politique proprement dite et en histoire liftCaire ; 
car c'est avec raison que le chancelier Bacon a dit que 
] l'hi.toire du monde sans l'histoire des savaut% c'est la sta- 
tue de Polyphème à qui on a arraché l'oeil. L'histoire 
civile se sous-divise en histoire 9nrale, en histoire Fer- 
sonnelle ou biographie , en histoire singdière ou 
particulière, dcrivant une action particulière, un sié, 
une bataille, une conspiration, une ambassade, une intri- 
gue, un voyage, etc. Sil est vrai que l'histoire soit la 
peinture des temps passés, les antiquites (et par là j'en- 
tends les monnments, les inscriptions, les médailles) sont 
des dessins presque toujours endommagés ; les biographies 
sont des portraits ou mifiatures plus ou moins tortC, et 
l'histoire generale, nu tableau dont les za,moires sont des 
Cudes. Oaa encore dit que la chronologie-etlago- 
graphie sont les deux eux de l'histoire. Qui doit leur 
tenir le flambeau? la. critique. C'est elle qui vivifie ces 



6 
deux rejetons de la science, et qui en fait ses appuis indis- 
pensables. Par la critique, la chronologie place les hommes 
dans le temps, tandis que h géoaphie les distribue sur 
notre globe. Toutes deux tirent un grand secours de l'his- 
toire de la terre et de celle des cieux, c'est-à-dire des faits 
historiques et des observations célestes; en nn mot, la 
science des temps et celle des lieux sont lilles de l'astro- 
nomie et de l'histoire. 
Bappelons encore les distinctions que nos devanciers du 
dix-septième siècle admettaient, non pas sur la matière de 
l'histoire, mais sur la forme dans laquelle on l'ëcrivait. Par 
rapport à la forme, disaient-ils, elle est simple, figtroee 
ou raélde. Simple, elle est sans artirce, sans aucun orne- 
ment; ce n'est qu'un récit nu et fidèle des choses passées 
et de la manière dont elles ont eu lieu: tels sont les a n n a le 
des Grecs par olympiades, les fastes consolaires des Bo- 
mains, puis les c h r o n i q u e s du Bas-Empire et du moyen 
• age, enlin les j o u r n a u x, depuis celui de L'Estoile jus- 
qu'aux Ga'.ettes officielles, etc. Figuree, l'histoire admet 
les ornements que lu/ prête le savo/r-faire de l'écrivain, 
comme les histoires politiques des Grecs et des Bomains, 
depuis Hérod o te jusqu'à Tac i te, et la plnpart des histoi- 
res modernes, depuis Comine s et Davi la, jusqu'b Da- 
ni el et Mézerai, depuis Voltai re et Bayna I jusqu' 
Lacretelle, Thiers ouSismondi : « C'est, dit un 
vieux critique, nne histoire rai:onnee, qui, sans s'arrCter a 
l'écorce et  l'apparence des choses, va jusque dans la pen- 
sée des personnes qui out a# de concert, et lait soir sur 
l'evenement des cboses qu'ils ont entreprises la sagesse de 
leur conduite ou le défaut de leur jugement. » Enfin, l'h/s- 
foire mélée est celle qui, outre les ornements de l'histoire 
jiguree , a des preuves qui sont tirCs de l'histoire simple 
et qu'elte donne souvent pour appu er ce qu'elle expose avec 
plus d'artifice et d'appareil. 
Ces définitions trës-simples, et mme un peu écolières, 
devaient bientôt tre oubliees pour faire place à d'autres 
plus pompeuses et moins justes. Le tempsn'était pas éloigné 
ou l'on allait voir au delit de la forme des productious his- 
toriques; et l'histoire figuree devait faire place  l'histoire 
lhilosophique, titre pompeux et vide, qui annonçait moins 
une histoire raisonnée qu'une production ou les faits histo- 
riques seraient sacrifiés aux préoccnpatious du jour. Tout 
étaitphilosophi9ue alors, comme on est pittoresque an- 
jourd'hui. Quoi qu'il en soit, on dira toujours : histoire 
chronologique, histoire gnéalogique, histoire tolitique, 
histoire secrète, histoire littéraire, histoire eccldsiasti- 
que, enfiahistoire9énrale. Ces termes simples et clairs sont 
au-dessus de la mode, de la vogue du jour ; ils se compren- 
nent d'eux-mèmes. Ajoutons que l'histoire chronolo#que 
peut ëtre substantielle et attaehante à lire quand on sait 
l'écrire comme l'ont fait les auteurs de l'Art de véri.lier les 
dates, le président Hénault et ¥oltaire dans ses Annales 
de l'empire. L'histoire généaloque jettera du jour sur 
l'histoire moderne quand on saura la traiter avec une éru- 
dition impartiale et désintéressée, comme I'a fait Schoell, 
dans son Histoire des Ètats europèens. L'histoire pofi- 
tique et morale est la plus féconde en réflexions :Thucydide, 
Tacite, Bossuet,Montesquieu, Ancillon,Guizot, 
Heeren, etc., voilà les modèles de cette grave et utile 
manière. L'histoire secrète n'Cait autrefois que celle des 
cours; anjourd'hui elle offrirait des partictdarit curieuses 
sur les hommes de révolution : ce genre a toujours offert 
beaucoup d'attraits à la malignité humaine ; mais l'histoire 
ainsi écriteest souvent suspecte de dénigrement, iorsqu'elle ne 
l'est pas de flatterie. L'ifistoire iittéraire, nligée par tous 
les anciens, si l'on en excepte Yeileius Paterculus, a, de- 
puis l'exemple donné par Voltaire, pris place dans l'histoire 
générale. On peut en dire autant de l'histoire ecclésiastique; 
elle est pour pi,as de la moitié, et avec raison, dans l'Essai 
stzr les Maeur.. leste aux imitateurs à suivre sur ce point 
Voltaire, en s'écartant du mauvais et faux esprit qui a guidé 
sa plume. Iïé¢ sou la pluoee de laynal, l'histoire parle- 

HISTOIRE 
metaire a fleuri depuis parmi nous. Quant à l'histoire 
genérale, elle doit, dans une juste mesure, embrasser toutes 
les autres. 
Ce qui. il mon as i% dépasse la haute podée de l'homme. 
ce qui prouve que cette créature, passagère ici-bas, a été 
formée pour une d..stinée éternelle comme le temps, c'est 
l'effort constant que fait l'esprit humain pour fixer le passé, 
pour y trouver les leçons du présent et les espérances de 
l'avenir. Sous ce point de vue, l'ifistoire n'est pas seulement 
une occupation grave : c'est une religion avec ses re)stères, 
ses dogmes, ses devoirs et sa fin : que dis-je ? ce culte a 
mrme sa prédestination. Là reposent les convictions de 
colefataliste, école sombre, austère, et dont les oracles 
terribles, menaçants, rappellent les sons mystérieux du 
chëue de Dodone ou les rauques accents du druide pré- 
di.qant sur les plages de l'Armorique les derniers jours du 
cu'.te de Teutatès. L'oecole morale historique est anssi une reli- 
gion : so sanctuaire est la conscience. Quant h IMcole pit- 
toresqte, s'appuyant sur des détails extérieurs, sur des 
textes aus, cette école, qui a aujourd'hui pour elle le capr/oe 
de la vogue, notLs semble, sinon mériter moins d'estime, 
du moins avoir une direction moins sérieuse, un but moins 
gravement utile. 
L'histoire doit aussi asoir sa foi, et par ce mot je n'ex- 
clus pas la critique, j entends la tendance morate de l'his- 
torien. Loin de moi celui qui veut matérialiser l'histoire, 
qui dans les actio,s bonnes ou mauvaises des hommes 
ne voit que les reflets de tel ou tel ieil Age, et qui, trop 
conséquent avec ce sstème avilissant pour l'humanité, 
fait taire sa couscicnse pour écrire l'histoire! Il faut sou- 
mettre cette science h de hautes idées morales et philoso- 
phiques, il faut tou:,ours et partout flétrir le fanatisme, 
lïmpiété sacrilege, qui est bien aussi un fanathme ; il faut 
faire la guerre au despostisme, à l'iniquité, à la sédition, 
l'indifférence pour la chose publique. Avec de tels prin- 
cipes, l'historien n'écrira plus seulement pour ou contre les 
rois, les grands et les pontifes; il deviendra le peintre 
pathique des peuples, i'aprtre de l'humanité, le fanal des 
masses. Il évitera ce ton morose qui fait emprunter i l'his- 
toire le ton d'unfaclum ou d'un acte d'accusation. Com- 
bien, dans leurs histoires, qui ont d'ailleurs fait faire un pas 
immenxe à la science, MM. T h i e r r y et Sismondi n'auraient- 
ils pas rendu plus sensibles et plus saillantes leurs excel- 
lentes pensées de réintégration des peuples et des faces, 
s'ils avaient mis une justice plus inddgente dans Fesquisse 
des portraits ro.aux, princiers et ministeriels! Que me 
sert que vous ne soyez plus le Daniel des rois, si vous Ates 
celui des peuples? Point de flatterie dans l'histoire, mah 
moins encore de dénigrement. Elle doit ëtre écrite de telle 
sorte qu'elle nous apprenne à n'estimer ou mépriser les 
souverains et les grands que par le bien ou le mai qu'ils 
ont fait, et non d'après les preoccupations bienveillantes 
ou hostiles de l'historien. Autrement, le but de i'lfistoire 
serait manqué. S'il est xrai qu'elle soit le juge souverain des 
rois, il faut que ces hommes, assez malheureux pour que 
tout conspire à leur cacher la vérité, la trouvent au moins 
dans l'histoire ; il faut qu'elle soit pour eux un juge intëgre, 
impartial, mais non pas menaçant, dtïiamatoire, humoriste, 
exagéré. Il faut qu'i son tribunal ils puissent se juger d'a- 
vance, en y reconnaissant par le témoignage, sage, modéré, 
irrefragable, que l'histoire rend à leurs prédécesseurs, l'i- 
mage fidèle de ce que la postérité dira d'eux. 
biais en France, en Europe, dans le siècle où nous vivon:-, 
est-ce aux rois exclusivement que s'adressent les jugements 
et les instructions de l'histoire ? .N'est-elle pas d'un intérêt 
aussi positif pour les individus ? En effet, parmi les bon, mes 
susceptibles dïnstruction, quelle classe assez médiocre ne 
peut pas tre appelée à mettre la main, de près ou de loin 
au gouvernail politique? Tout le monde aujourd'hui est 
intéressé à se pénétrer des graves ieç..ous du temps passé : 
le pewple n'a-t-il pas partout ses Cus qui sont appel( à 
concourir à l'administration d'une localitê, à la confec- 



HISTOIRE 
tion des lois, à la marche gnérale du gouvernemcqt? 
• L'histoire est un miroir où les rois voient l'image de leurs 
ddfaols, • a dit je ne sais quel bel esprit du siècle de 
Louis XIV. Et BossueS, si gigantesque dans l'expression 
des idées les plus communes, n'a-t-il pas ajouté : « C'est 
dans l'histoire que les rois, dégradés par les mains de la 
mort, Tiennent, sans cour et sans suile, subir le jugement 
de tous les siécles. » On a rëpété cent fois depuis cet axiome ; 
et dans un temps oi] l'on croyait faire parade de philoso- 
phie en alAci--ruant sans cesse contre les pouvoirs établis, on 
se donnait le facile avantage d'opposer aux flatteurs des 
cours les pages accusatrices d'un Tacite ou d'un Mézerai. 
Mais depms que les rom n'ont plus etWles seuls oppres- 
seurs, depuis que les peuples ont eu aussi la prétention de 
devenir des souverains absolus, et que, grâce a la contagion 
d'une autorité sans contr61e, ris se sont montres les des- 
poses les plus aveugles et les plus cruels, et que, par une 
conséquence trop nécessaire, la multitude aussi n'a pas 
manqué de flatteurs, l'utilité pratique de l'histoire s'est 
étendue à toutes les classes de la société. Ses leçons s'a- 
dlessent donc à tous; et il devient indispensable de s'en pé- 
nétrer, ne fùt-ce que pour haler le moment où les peupleg 
désabusés d'illusions séduisantes et corruptrices, demeu- 
reront convaincus qu'aprés tout la nation la plus heu- 
reuse est celle dont les institutions, à l'abri d'un pouvoir 
puissant et protecteur, présentent le plus de garanties pour 
le repos des citoyens et pour la paisible et douce culture 
,le l'industrie, des arts et des lettres. 
Mais, quelle que soit la portée que vous vouliez donner 
aux graves instructions de l'histoire, la morale qu'on peut 
en tirer est toujours la mme. Toujours elle se fonde sur 
le respect dà à l'autorité Iégaie, qu'elle soit exercée par 
les rois, dans sine monarchie, ou dans une république, au 
nom du peupleo par des magistrats électifs. En tous temps, 
en tous lieux, l'histoire condamne les guerres injustes, sans 
distiner si elles ont été décrétées par la cupidité d'une 
multitude avide ou dictée par l'ambition d'un orgueilleux 
monarque : elle flétrit les oppresseurs et les t.rans, et ne 
les rencontre pas moins souvent à la tribune, et sur la place 
publique oi] se prononce l'ostracisme, que sous le dais im- 
përial ou dans les conseils d'un sombre despote. 
La morale de l'histoire se réduit, au rcste,à un petit 
nombre de principes fondamentaux ; car toute science vé- 
ritable est simple dans ses eléments... Attachemeut à la re- 
ligion, au sol et aux institutions de son pas, respect pour 
les traditions de ses ancêtres, déférence pour la vieillesse, 
lidélité aux traités, humanité dans la guerre, amour de l'or- 
dre dans la paix; voilà, si je ne me trompe, le codeà peu 
près complet de cette morale. Malheur aux ètres corrompus 
«lui, dans leur mépris pour l'humonité, n'étudieraient l'his- 
toire qu'afin d'apprendre l'abus de la force et l'art de trom- 
per habilement les hommes! Je ne plaindrais pas moins 
ceux qui, en remarquant de si notables différences dans la 
religion, les mœurs et les opinions des peuples, seraient 
assez mal inspirés pour  puiser cette coupable impartia. 
litë qui se montre indifférente au bien comme au mal. Com- 
bien cette triste impartialit6 nous désole! C'e.q Suétone 
racontant froidement les turpitudes du lit impérial ! Il est 
trop vrai, on peut abuser de l'imparlialilé, qui est la pre- 
mière vertu de l'historien, comme on abuse de tout ce qui eq 
bon. L'impartiaiité poussée ì l'extrême, quand il s'agit de la 
religion, devient scepticisme; quand il s'agit de la patrie, 
indifférence, égoïsme ; quand il faut peindre la vertu, froi- 
deur coupable. Inflexible dans sejugements sur les hommes 
pervers, l'historien pont s'abandomer  quelque complai- 
sance quand il trouve ì célëbrer ce qu'il )' a de noble et 
de sublime dans les actions des hommes; alors seulement 
il a le droit de laisser apercevoir ses sentiments, ses alfec- 
tions, son enthousiasme. Hors de là, l'impartialilé la plus 
rigoureuse doit présider ì ses réciLs; autrement l'histoire, 
déchue de sa dignité, ne serait sous sa plume qu'un texte 
mobile pour des déclamations de circonslance. 
meT. I I.. COVIX'. -- T. x,. 

9'/ 
Quelles sont les sources de l'histoire, à commencer par 
l'histoire ancienne ? L'école de Voltaire répond : Nous possé- 
dons trois monuments incontestables : le premier est le 
recueil des observations astronomiques faites pendant dix- 
nerf cents ans de suite à Babylone, envoées par Alexandre 
en Grèce, et emploiCs dans l'Almageste de Ptolémée; le 
second est l'éclipse centrale dit soleil, calculée à la Chine 
2,255 ans avant notre ère vulgaire, et reconnue véritable 
par tous les astronomes; le troisième monument, fort infé- 
rieur aux deux autres, subsiste dans les marbres d'A ru n- 
del: la chronique d'Athénes  est gravée 263 ans avant 
notre ère, mais elle ne remonte que jusqu'à Cécrops, 
1,3t9 ans au-delà du temps où elle fut grasC. Dans ce 
siécle d'impartialité, sans laquelle il n'est point de véritable 
critique, les savants avouent qu'on possède bien d'autres 
sources, qu'affectaient de mépriser Voltaire et son école, 
je veux parler des livres religieux des différentes nations de 
l'Orient. Le temps n'est plus où l'on isolait l'histoire an- 
cienne de ces somo's sacrées, sans lesquelles elle n'aurait 
ni autorité, ni sanction, ni mme de commencement. La 
Genëse est le premier livre que doit consulter l'historien ; 
et plus il l'étudie, plus il reconnaR combien, humainement 
parlant, les traditions recueillies par Moise méritent de 
confiance et de respect. « flous igaorons, dit Miiller dans 
son llistoire universelle, combien de fois le soleil s'est 
levé depuis que, dans les plaines fortunées du royaume de 
Kaschemir ou sur les hauteurs salubres du Thibet, le Créa- 
teur anima d'une étincelle de son feu céleste le limon dont 
il forma le premier homme; mais, quelle que soit notre in- 
certitude à cet égard, il est prouvé que l'ère de toutes les 
nations commence à peu près à la mème date. Les longues 
séries de siècles dont parlent les Chinois, les Indiens et les 
Égyptiens, ne sont que des calculs astronomiques, et n'ap. 
particnnent point à l'histoire. Les récits du plus ancien livre 
des Chinois, du Tschou-Kin9, deviennent historiques seu- 
lement • ers l'époque de la guerre de Trois; son auteur est 
postérieur / Homère et à llésiode. Les Indiens ne font pas 
remonter leurs temps historiques au delà de 5,000 ans. 
Conformément aux époques des livres sacrés des Hébreux, 
calculAes d'après le s.vstëme qui me parait le plus vraisem- 
blable, je crois que l'on peut compter 7,506 ans depuis la 
création de l'homme, racontée dans l'Écriture Sainte, 
jusqu'en 178. • 
Consultez encore les écrits et les calculs des C u v i e r, des 
Biot et d'autres savants illustres, qui depuis Mller ont 
agrandi le domaine de la science cbronologique, et vous 
verrez leur génie, non point seulement s'abaisser devant les 
textes sacrés, mais :y trouver des faits tout h fait d'accord 
avec l'exactitude de leurs calculs. Devenue donc source 
historique, la Genëse ouvre la carrière. Vient ensuite 
rodote d'Halicarnasse (car je ne parle pas de Sancho- 
n i a to n, ce Moïse de l'idolAtrle, à qui l'impudente érudi- 
tion d'un nouvel Annius de Viterbe a voulu rendre une exis- 
tence fantastique), cet Hérodote que la critique légère et 
subversive du dix-huitiè,ne siAoie a tant de fois accasé de 
mensonge ; mais depuis qu'on s'est mis à étudier l'lgypte 
et. l'Orient, la gloire du père de l'histoire profane s'en e.t 
accr,e; et l'on a reconnu avec quefle presomptueuse igno- 
rance de téméraires critiques avaient rejeté chez lui une 
foule de détails sur les mœurs et sur la géographie, par la 
seule rai.on quïls n'as'aient rien vu de pareil dans nos 
contrées modernes. Il faut néanmoins le reconnattre, maigre 
la foi acquise à la Genèse, malgré les antiques traditions 
sur l'Êgypte, la Perse et la Syrie, qu'Hérodote a pu re- 
cueillir, il ne nous reste du monde Irimitif que quelques 
fragments de poésies bien obscurs, ou des canons de rois 
dont l'authenticité n'est pas prouvée. 
Quelque importance que l'on puisse attacher ì des dé- 
couvertes récentes, et quel que soit le mérile de ceux qui 
le» ont failes, que de ténèbres couvrent encore le berceau 
de la monarchie égïptienne ! On a bien pu déchirer le voilo 
mystérieux de quelques hiéroglyphes, et nrracher 



8 
l'oubli le nom de telle dynastie, de te) prince juche alors 
demeuré inconnu; on ne parviendra jamais  jeter un in- 
tert bien positif sur des époques contemporaines de la nais- 
sance des sociétés, et dont les souvenirs sont ensevelis 
dans la mëme tombe qui renferme les générations qu'elles 
ont vues nul!re? De méme de l'AssTr/e. Par combien de 
questions insolubles se trouvera circonscrit, artCC l'his 
torien qui prétendrait en rétablir les annales. La Peroe et 
l'Inde, que la linguistique a commencë d'explorer, vont en- 
core agrandir pour lui le cerclede foules ces difficultés. Les 
origines syriennes et pliénicieanes, les commencements de 
la société pour l'Asie occidentale, pour la Grèce, pour l'Ilalie, 
pour l'Iberie, pour les rivages septentrionaux de l'Afrique, 
offrent aussi bien des problbmes  la critique; et pour 
les résoudre, si l'on trouve quelque secours dans Hérodote, 
dans Tbuc)dide, dans Diodore, dans Pausanias, dans le 
vieil Homère, qui est bien aussi une source historique, 
aucun de ces auteurs n'a runi assez de faits, assezde do- 
cumenls, pour qu'il soit possible à l'historien de bttir un 
s.slëre satis'aisaat. 
Je sol)pose qu'à force de perCeCance, d'érudition et de 
sagaci{é, l'historien ait clairci les époques fondamentales 
de la chronoloe; qu'il ait en quelque sorte passé les déserts 
de l'histoire, et qu'il soit arriv aux temps véritablement 
historiques, alors d'autres diïficoltés, d'aufres devoirs ge 
présenleront pour lu/, les modèles ne lui manqueront pas: 
ce sut Yelleius, Bossuer, Jean de .I iz I I e r, le modeste ci 
sage abbé Gérard, dont l'Histoire ncienne inacbevée est 
trop peu connue; enfin, jusque dans les petites écoles, 16 
bon abbé Gaultier, qui eut le génie de l'enseignement 
maire. Mais je le suppose entiërement arrivé aux temps his- 
toriques, alors son œuvre ne se bornera plus à fixer des 
dates, à relever des anachronismes, à dé«enchanter des 
fablcs gracie,ses, pour y trouver un fond de véritë; 
il lui faudra !taller des points pins véritablement impor- 
tants, parce qu'ils luiCessent l'intelligence et la moralité 
humaines ; il lui faudra rectifier des Jugements répétés 
depuis des siècles et sur les hommes et sur les choses. Les 
institutions des peuples, les renommées de leurs chels, 
voJl ce quïl doit apprécier  sa juste valeur. Il demandera 
compte à tel homme de sa gloire usurpee, il réparera pour 
tel a«are Iïnjusle oubli des biqoriens. Il se gardera bien 
surlout de préconiser ,'omme des verlus politiques des sen- 
timents et des actes reprouvés par la saine morale, séduc. 
tion à laquello n'ont pas toujours résisté des sages tels que 
Bossuet, Rollin et .Montesquieu. 
On a dit souvent que les peuples avaient, comme les 
iadiidus de l'espèce humaine, leur enfance, leur jeunesse, 
leur virilité, leur décrépitude. Rien n'est plus jusfe que ce 
rapprochement que l'historien Florès a le premier dé¢eloppé 
avec toute la pompe d'un rbCeur, mais qu'il n'a pas conçu 
en philosophe. L'enfance des nations présente peu de faits 
à i'lfitorien ; car le berceau de la plupart est entouré de si 
épaes ténëbres, q«Je tous les efforts de la crilique ne par- 
viendront jamais  lg dissiper. La jeunesse des peuples, qui 
s'annonce par quelques inventions simples dans les arts 
utiles, ainsi que par d'héroïques prouesses, se ressemble 
dans tous les climats et dans tou les siècles. Leurs annales, 
fondëes sur des tradilions incertaines, ne laissent entrevoir 
que quelques faits isolés ci eonnailre que des homntes 
encore rapprochés de l'Atut «le nature, dont les vices sont 
aussi francs que leurs vertus sont nu/res. Aussi, à la cou- 
leur locale près, je vois dans les chants des bardes cale- 
donieus se reproduire les mbmes .ouvenirs, ies reAmes pas- 
sions, et presque tes reCes faits que dans les chants «lu 
vieil Homère. Il n'en est pas ainsi de !a virilité des peuples : 
c'est alors que clhaque nation déploie le caractère qui lui est 
propre : le cachet de lacivilisation marque déormais de 
mille empreintes diverses les hommes qui chaque jour s'é- 
ioignent «le la simplicit pr/'milixe des premiers siëcles. Les. 
inventions d'une industrie qui s'appliquait aux nécessik' 
de la vie sont remplac6es par les premiêres recherches du 

luxe. Les héros, les consuls, ne quittent plu le comman- 
dement des afinC pour aller conduire la cliarrue ; le roi 
ne portent plus des manteux filé par la main de lem 
femm ou de leurs files; ils ne ont plus vendre, ponr vi- 
vre, les herbes de leur jardins. Les prestiges de 
les plaisirs de l'esprit, commencent/ charmer des existen- 
ces dont le bien-ëtre matériel est dsormais assuré. Aux 
passions indomptées, aux sentiments extrémes qui faisaien! 
agir uni sociétë à demi civilisée, ont suéeCA les vertus 
soutenues, les desseins savamment combinés; mais aussi 
les vie, es et les mouvements pervers de l'àme, en se dessi- 
nant, en prenant les allures de la sagesse et de la vertu, 
exercent des ravages cent lois plus cruels que la foue pas- 
sagëre qui distingue les personnages des temps héroiques. 
C'est alors que la politique, armée de ses froids calculs, 
devient un art profond, qui trop souvent fausse les com- 
ciences, confond les idées d'honneur et de chorale, et dé- 
savoue le crime pour le commettre. Alors aussi les combi- 
naisons de la guerre érigée en science peuvent se passer 
pour ainsi dire de la force physique du guerrier et de sa 
valeur morale : le soldat n'est plus la que pour faire 
et obéir; et le général peut souvent, sans nulle fatigue du 
corps, sans mme aucun danger personnel, gagner des 
batailles et mois.onner les lauriers de la gloire. 
A ce degré de leur existence, l'histoire des peuples offre 
nn véritable intérét et devient fécunde en sujets de 
lion. C'est la Grèce au temps de Themistocle et de Périclès. 
C'est Ruine brillante de la uire de Fabius Cnnclator, des 
deux Seipion, de Flamininus, de Paul-Émile. Les monu- 
ments ne manquenf plus désormais à celui qui veut él«dier 
l'histoire. Les peuples, jeunes encore, ont la plupart les or- 
ganes éminemment di.posés pour les inspira!tons de la 
poésie. Ils prod uisent alors des rhapsodcs, des bardes ou des 
troubadours, qui conservent les traditions nationales en 
leur donnant le merveilleux de la lubie, et qui ne sont exa¢ts 
que dans la peinture des mœurs. Ce sont là les seuls h/s/o- 
tiens populaire des temps héroïques. Cï n'est que rhez les 
peuples djà avancés dans la carriëre des destinées polili- 
ques qu'on voit narre de graves écrivains, qui cherchent 
froidement la vrité des /aiLs pour la transmeltre à la pus- 
térité. 
Le mme degré d'/ntérèt s'altache/ l'histoire des nations 
dans leur "¢ieillesse ; car s'il est curieux d'apprendre com- 
ment les sociêtés se forment, il ne l'est pas re»iris d'étudier 
comment elles se décomposent. Une civilisation tut!e, et 
j'ose dire jeune elle-mème, fait les temps de gloire d'une 
grande nation, qu'une ciçili.ation avancée prolongera dans 
l'abaissement et dans l'anarchie. Alors un peuple mécontent 
de tout gouvernement ne saura que fronder làcllement on 
s'ater sans but; alors il pourra trouver lebonheur dans une 
paix honteuse, et qui compromettra pour jamais sa dignité na- 
tionale ; alors il faudra faire des institutions avec de grands 
mots sur lesquels personne n'et d'accord; chez lui l'excèsdu 
luxe enfantera l'égoisme dans toutes les classes de la sociél, 
et il van!cru les progrès de son commerce, parce que citez lui 
tout est devenu vénal ; il ne croira plus à sa religion, pas 
mème aux systèmes de ses,philosophes; mais l'hypocrisie 
ou l'iudifférence se partageront les consciences, et les lem- 
pies seront remplis d'hommes qui, en lêvant les enx au 
ciel, ne songeront qu'aux intérëls de la terre. C'est / de 
f,areils traits sans doute que l'historien pourrait signaler 
les derniers jours de Carthage, de Corinthe, des monarchies 
de l'AsieMincure et de l'Ëgyptesous les Lagides, si l'orgueil 
des historiens romains avait daigné nous informer de l'Cut 
intérieur des peuples "¢aincus par les armes de leurs conci- 
toyens. Toulefois, i leur defauto nous trouvous assez de 
traits caracteristiques sur ces peuples imbns de toute la cor- 
ruption païenne, dans Lucien, dans Themistius, dans les 
Pères de l'Êglise, dans les scoliastes et dans quelques his- 
In,eus du moien ge. Ce sont des matériaux 6pars; la 
I'che de l'llistorieu doit consisler à les rapprocher et  :es 
mcllre en œuvre pour en former un corps de doctrine. 



HISTO1T, E 
.tu démembrement de l'Empire Romain en Occident, com- 
mence un nouvel ordre de choses, et c'est ce qu'on appelle 
l'histoire du moyen dge; « histoire barbare, dit Voltaire, 
de peuples barbares, qui devenus chrétiens n'en de- 
vim'ent pas meilleurs ». Cette sentence est-elle donc sans 
apll? Le moyen ge, qu'on est convenu d'étendre jusqu'à 
la prise de Constantinople par Mahomet 11, est-il 
une époque si constamment dgradante pour l'humanité? 
Veut-on tre convaincu que pendant cette période l'intel- 
ligence humaine n'a pas sommeillé, et que quelque chose a 
été fait pour le bonheur des hommes, il suffit de rappeler le 
règne de T h é o d o r i c en Italie, de J u s t i n i e n à B}zance, 
l'éclat du royaume franc sous D a g o b e r t, les conquètes et 
la soudaine civilisation des A ra b es, sectateurs de Maho- 
met. les capitulaires de Charlemagne, les heureux ef- 
forts d'Alfred le Grand, la puissance et la gloire du pre- 
mier empire de Russie, l'importance de la double couronne 
impériale et royale sous la maison de Souabe, la richesse 
et l'activité des républiques d'Italie et du Io,d, les temps 
de Louis le Gros et de Philippe-Auguste, les c r o i s a d e s, 
avec leur héroïsme et leurs immenses résnltats, les con- 
c i I e s avec leurs canons d'un si haut intért moral et po- 
litique, les assises deJérusalem, la renaissance du 
droit romain, la formation des communes, les éta- 
blissements de saint Louis, les ordonnances de nos 
rois, etc.; sans parler des chefs-d'oeuvre de l'architecture 
religieuse, et de tant d'inventions utiles depuis celle da 
papier de chiffon et de la poudre de guerre, jusqu'h 
I' i m p r i m e ri e ; enfin, par-dessus tout, l'établissement 
si savamment combiné de l'Église de lome. Citerai-je en- 
core le rué!ange, la conserxatiou et l'oblitération des faces 
qui ont chacune contribué pour leur part au renversement 
de l'Empire Romain, ci dont les traits plus ou moins pro- 
noncés, se retrouvent méme aujourd'hui au sein des po- 
pulations modernes, semblables aux flots du Rh6ne, qui tra- 
versent les eaux du lac Léman sans se confondre avec elles. 
• La grande utilité de l'histoire moderne, dit Voltaire, et 
l'avantage qu'elle a sur l'ancienne, est d'apprendre  tous 
les potentats que depuis le quinzième siècle on s'est tou- 
jours réuni contre une p,issance trop prépondérante. Ce 
système d:équillbre a toujours été inconnu des anciens ; et 
c'est la raison du succès du peuple romain, qui, ayant formé 
une milice supérieure à celle des autres peuples, les sub- 
jugua l'un après l'autre, du Tibre jnslu'à l'Euphrate. ,, Je 
m'étonne d'entendre le judicieux Heeren dire, au début de 
son Manuel historique, que rhistoire moderne ne se sé- 
pare de l'histoire du monter dge par aucun de ces faits 
extraordinaires qui conslituent des époqses gënérales. N'est- 
ce donc pas un événement assez notable que la clmte du 
vieil empire de Constantinople? que la naissance de ce sys- 
tëme d'éq u i lib re eutre les divets Ëtats de l'Europe? que 
les changements opCés vers cette époque dans les mœurs, 
dans les opinions, dans les intérëts, dans la politique, 
par suite de la découverte de l'Amérique et du passage 
aux Indes orientales? Un demi-siècle après vierdra la 
ré for matie n, qui aura pour résultat de renverser en partie 
le vieux système de Grégoi re VII, sans arrêter les pro- 
grès de la civilition, prenne exclusivement dus penda»t le 
moyen ge  l'influence du sacerdoce catisollque. Les grands 
Eats, formés par la réunion successive des fiefs, tendent  
engloutir les petits ]tats, soit par la conquéte, soit par les 
mariages. Cette tendance  l'unitWabsolue est arrëtée par 
le systëme d'équilibre qui se déx'eloppe et se régularise au 
milieu des guerres d'Italie : lutte inutile et funeste pour la 
France comme puisnce politique, mais qui doit contribuer 
à répandre chez elle le go0t des arts et des lettres. Les dé- 
ouvertes marifimes procurèrent à l'Erope la conqub.te dr 
reste du monde; l'intérè.t religieux, qui au mo)-en ,e domi- 
nait toute la politique, ne sera vraiment puissant que durant 
le feu des $nerres de la réforme; une fois la paix religieuse 
rétablie en Europe, l'intért commercial abrbera tout. 
,près Louis XIV, Louis XV et Lou« XVl, la rvolution 

99 
d'Angleterre, les guerres de succession, le partage de la Po. 
logne, viendront la révolution, l'empire, la restauration eten- 
cote des nouvelles révolutions. 
biais qu'un historien compare ce qu'était l'Europe en 1774, 
 l'avénement de Louis X¥I, à ce qu'elle est aujourd'hui, 
ne sera-t-il pas tenté de reconnaltre qu'une aveugle fatalitë 
préside aux destinées humaines? Pour ne parler que des 
événements qui se sont passsdepuis un demi-siècle, qu'on 
me dise quel roi fut plus populaire que Louis XVI au mo- 
ment de la guerre d'AraCique et Iorsqu'en 1789, ave 
son frère Louis X¥III, il se prnnonça pour la double re- 
présentation du tiers état ? Et, cependant, trois ans aprês...! 
Est-ce à la fatalité, est-ce àla Providence que l'histoire at- 
tribuera la toute-puissance de lobespierre, tribun sans ta- 
lent, sans extérieur et sans courage, despote sans trésor 
et sans afinCst' Et toute l'histoire de lapoléon ne sem- 
ble-t-elle pas soumise h l'empire de la fatalité! La fatalité 
depuis soixante-dix ans ne poursuit-elle pas sur tous ses 
troncs l'auguste maison de Bourbon, comme, chez les 
Greos, elle poursuivait la race de l'éiops et celle de Laïus; 
comme chez nos voisins elle a poursuivi les Stuarts i' Huit 
jours h peine séparent le Te Deum d'AIger de la tourmente 
de juillet 1830 ! Oui, ne nous étonnons pas qu'Hérodote, si 
profondément pénétré des traditions religieuses de sa pa- 
trie, ait empreint son histoire de cette sombre doctrine, qui 
imprime un pathétique si profond aux drames des tragiques 
grees. Ce dogme de la fatalité se trouve dans toutes les an- 
ciennes religions ; cette doctrine se révèle aussi dans la Ge- 
nëse et dans nos livres saints, où elle se nomme prœedesti- 
nation. 
_u reste, M'envisager philosophiquement, ce dogme est 
le mème que celui de la nécessité, qui exclut la liberte 
de l'homme et tout ce qui est arbitraire ; qui assujettit l'u- 
nivers à des lois invariables, sans lesquelles il ne sacrait sub- 
sister. Malheureusement, on peut abuser de cette doctrine 
au détriment de la morale. Aussi, aux historiens de l'école 
fataliste est imposée cette gravité austère qui rait d'une con- 
viction profonde, et qui jamais ne s'exprime légèrement 
sur les grandes vérités qui formert la base de l'ordre social. 
C'est cette crainte qui a porté plusieurs philosopbes à pros- 
crire cette école : ainsi fait Chateaubriand dans son élo- 
quente introduction  ses Études historiques; mais, quel- 
ques pages plus bas, ne retombe-t-il pas lui-mme dans le 
système qu'il combat, en ne trouvant pour expliquer la 
terreur de 1793 d'autre moyen que de la comparer à ce 
fléau contaeux qui réveilla toujours si puissamment les 
idées de fatalisme parmi le populations. « La terreur, dit- 
il, ne fut point une invention de quelques g,ant, ce fut 
tout simplement une maladie morale, une peste. ,, Je trouve 
plus puissant cet argument de M. de Bonald contre la fa- 
talité : « Le destin, dit-il, et en politique ce que le hasard 
est en physique; et comme le hasard n'est, suivant Leibnitz, 
que l'iorance des causes naturelles, le destin et la fatalité 
ne sont quel'ignorance descauses politiques.  Mais le moyen 
pour l'historien, mme contemporain, d'éviter cette igno- 
rance ? J'en prends à temoin les trois écrivains qui, dans des 
systèmes si opposés, ont écrit l'histoire de notre révolution = 
La cretell e, M..Mi gnet et .M. Thiers. 
A l'école philosophique et rationnelle appartiennent Dau- 
heu, Sismondi, Ancillon, IIM. Thierry, Guizot. L'école pit- 
tor¢que ou descriptive a pour chefl'bistorien des dues de 
Bourgogne , tl. de Barante. Ce n'est pas cette école qu'on 
accusera de demander aux siècles précédents des arguments 
pour fortifier telle ou tellevue politique et transformer i'his. 
tette en un sophisme docile : elle a ramené la science à sa 
simplicité primitive. A la manière d'Hêrodoteet de Froissart, 
elle donne les faits tels que les ont transmis les sources ori- 
ginales, les oui-dire du temps ; elle fait revivre au naturel 
les personnages du pass, et les montre avec leurs opinions 
et leurs préjuges, sans se permettre de rien conclure ni pour 
ni contre, laissant au lecteur la faculté de porter tel juge- 
ment qu'il luiplaira. Au surplus, les deux écoles que jevens 



de signaler ont leurs écueils comme leurs avantages. Acété 
de l'inconvénient de ne pas du tout iuger les faits se trouve 
le danger de les juger mal ; et il n'est pas de plus mauvais 
guide en histoire que certains philosophes à systèmes, et qui 
cherchent non pas à voir les choses comme eiles sont, mais 
comme elles s'accordent avec leur s}stème. Pour ceux-là, 
je m'Crierai, avec J.-J. Bousseau -. « Les faits ! les faits ! » 
Cet abus du raisonnement et de la sagacité, qu'on a mme 
reproché à Tacite, peut s'adresser à presque tous les histo- 
riens du dix-septième et du dix.huitième siècles, à Saint- 
Bëal, à llillot, à Raynai, à Mably : ,Montesquieu seul ait 
abaisser devant les faits sa profonde sagacité. Quant à Vol- 
taire, s'il se montre exempt de ce défaut, il pèche dans un 
sens opposé, en rejetant trop légèrement tout ce qui est con- 
jectural. 
L'Allemagne a aussi ses écoles : l'une, purement historique, 
s'en tient aux fails et rejette toute lormule philosophique; 
elle reconnalt toutefois un enchainensent providentiel dans 
S'ordre des événements. Telle a été la marche de I i e b u h r 
dans ses recherches sur les origines de Borne; telle est celle 
de S avigny dans son Hisloire du droit romain. L'école 
philosopldque historique, qui a pour chef H e gel, soumet 
le fait à l'idée ; selon elle, l'esprit humain crée le fait. L'ë- 
cole purement historique, au contraire, dit que le fait met 
en nsouvement l'esprit humain. 11 y a en outre deux écoles 
théologiques, dont l'une lait sortir le christianisme de la 
raison pure, l'autredela révélation. H e r d e r, dans ses Idées 
sur la philosophie de l'histoire, individualise l'humanité 
et la représente comme un vo}'ageur qui, poussé sur cette 
terre par une main invisible, a successivement parcouru 
toutes les contrées, toujours se modifiant, toujours en lutte 
contre lui-mëme et contre le monde matériel. Ce noble 
sstme, qui sympathise si bien avec les idées chrétienues, 
n'est pas nouveau : il y a plus d'un siécleet densi, Vico 
l'avait deviné. Vico était oublié : M. 1! ichelet a exhumé 
et propagé la Sciïnce nouvelle : tel est le titre du livre de 
Vico. 11 a fait mieux, il a publié divers ouvrages dans les- 
quels vit, par l'application, ce système dont la théorie peut 
paraitre obscure. Plus mystérieux encore que Vico, non 
moins religieux, et souvent éloquent, l'auteur de la Pe. 
lingdnsie, B a I lanche, vrai druide de l'histeire, s'efforce 
de Périgcr en une théosophie chrétienne. Ces écoles médita- 
tives, nées sons le ciel germanique, et qui ont déjà influë 
sur la légèreté du génie français, me rappellent invoiontai- 
rement ce livre où i'Allemagne revit tout entière sous la 
plunse d'une femme, dont le génie indépendant effaroucha 
le despotisme militaire. Pouvais-je parmi cette galerie his- 
torique onsettre M me de Staël, qui dans ses Considérations 
sur les principau.z évdnements de la révolution française 
a montré, dit Chteauhriand, «, ce qu'elle aurait pu faire si 
elle c0t appliqué son génie à l'histoire, • 
La patrie de Viro est aujourd'hui riche en historiens, 
dont q,elques-uns appartiennent  son école : après Botta, 
dont l'Histoire des Etats-Unis rappelle plut6t l'Cule philo- 
sophiqne; après llicali de FIorence, dont le génie sagace 
et patient a fait revivre les vieilles nations de l'Êtrurie, je 
citerai Cibrario, Cantu, etc. La Grande-Bretague avait dans 
la science historique précédé l'Europe ; elle citait avec or. 
gueil, dssrant le siècle dernier, Bobertson, Hume, 
Smollet, Gibbon,etc.; elle peut ajouter Lingard, tlal- 
lam, etc. 
L'histoire iittéraire ne pouvait manquer d'ëtre cultivée 
parmi nous à une époque où toute la littératare s'est r.fu- 
giée dans l'tsistoire. Jamais, d'ailleurs, elle n'avait étë 
n.gligée; et avant que Voltaire l'cor unie à i'lsistoire gén- 
raie, Bas-le avait déjà fait d'excellente histoire iittéraire ; 
Gaillard, dans son Histoire de François I er, avait en cela 
uivi Voltaire; enfin, un auteur presque inconnu, a puhlié 
vers 178-i un petit volume, qui est un def-d'oeuvre, inti- 
tuié: De l'amour de Henri 1 V pour les lettres. Depuis nous 
avons eu l'Histoire de la Litlrature italienne par G i n- 
I u e n é. On doit  Clsn.;er un Tableau d la Littrature au 

HISTOil 
dix.huitième icle Dans ses cours,  la fois si brillants et 
si solidement iustructifs, lL Villemain a embrass les lit. 
tératures de presque toutes les époques modernes. Si l'on 
parcourt les ieçons e! les écrits philosophiques de ,I. o u- 
s in, on y trouvera non-seulement des chapitres tout faits 
pour l'histoire de la philosophie, mais encore de isaute ct 
grandes vues sur la science historique. La biographie, que 
Bayle avait élevée si Isaut, a encore de nos jours acquis 
une nouvelle importance. 
J'ai à peine indiqué les sources de l'histolre ancienne et ro- 
maine ; et cependant que de points essentiels me sont chap. 
pés: outre Hérodote, T bu cyd ide,Xéno phon, Tite- 
Lire, Florus, Diodore, j'aurais voulu rappeler 
P.o I y b e, A p p i e n d'Alexandrin, J o s è p h e. Dans l'histoire 
dite Auguste , six historiens ontécrit les règnes des empe- 
reurs, depuis Adrien jusqu'à Carus: cesauteurs, auxquels il 
faut ajouter le judicieux Amnsien Marcellin, isomme dËtst et 
homme de guerre, ont un mérite précieux = dans leur st)le 
inculte, et qui se ressent de la décadence romaine, ils disent 
beaucoup de choses en peu de mots et, plus souvenl que 
les grands historiens de l'antiquité, il nous transmetteot des 
actes authentiques et des discours tels qu'ils ont été tenta. 
J'aurais cité Dion Cassius de icée : j'aurais aussi fait voir 
comhien les poëte depuis Juvénal jusqu'à Claudien, de- 
puis Perse jusqu'à Ausone, peuvent offrir de documents 
précieux sur l'ldstoire des mœurs et mme sur des faits 
politiques. J'aurais énunsér toutes les richesses qu'offrent 
en ce genre les Pères de l'Eglise; j'aurais signalé l'histoire de 
Paul Otase, dont le plan a peut-être servi de modële  
Bossuet dans son Discours sur l'histoire universelle. 
Arrivé au moyen àge, je n'aurais éprouv que l'embarras 
du choix parmi le. trésors historiques que nous offrent ces 
siêcles de barbarie, où l'on écrivait beaucoup plus qu'on 
ne le pense communément : témoins l'histoiri du Goth J o r- 
u and è s, les vies des sain.% ieschroniques des couvents, les 
fastes de la vie des princes, les correspondances des hommes 
d'Êtat (Boèce, Cassiodore), des papes, des évéques, de 
simples prëtres, etc., qui forment dans nos vieilles b[io- 
th/ques tant d'in-folio lus seulement jadis par les religieux 
qui les publiaient, et qu'explorent aujourd'hui avec la,t 
d'ardeur les jeunes adeptes de la science. Enfin, l'histoire 
sacrée de Sulpice Sérëre, l'histoire ecclésiastique de Gré- 
go ire de Tours, la vie de Charlemagne par Êgi nhard, 
nous auraient, au milieu de la barbarie générale, frap 
par un certain mrite de composition et de stie; et, vap. 
pelant un mot célëbre «le Pyrrhus, roi d'Êpire, nous aurions 
pu nous écrier : « Cette ordonnance ne nous parait pas si 
barhare ! • Les codes des peuples germaniques auraient 
aussi attiré nos regards. Je n'aurais point passé sous silence 
Joinville, Villehardoin, Christine dePisan, dont 
les écrits sont les premiers monuments de notre langue na- 
tionale. 
llais je me hte d'arriver aux temps modernes. Ici l'his- 
toire, rabaissée au niveau de simples chroniques par 
presque tous ceux qui l'ont écrite au moyen àge, reprend 
sa majesté : chaque peuple a ses historiens : en France, 
Froissart, Monstrelet, Comines et leurs contensporains, ne 
laissent en oubli aucune particularité de notre histoire. 
Il en est de mme partout, mais l'ancknne indigence  
tourne en superflu. !1 n'est point de ville qui ne veuille 
avoir son histoire particulière ; point d'homme d'Ëtat qui 
n'écrire ses mémoires; on est accablé sons le nombre des 
autorités. Là n'est pas le seul mal. L'isistoire moderne est 
loin d'avoir gagné en certitude comme en étendue : autant 
d'historiens sur le mème fait, autant de versions différentes. 
LeÆ monuments, les médailles, ne sont quelquefois pas 
plus véridiqnes. Si cette colonne rostrale dont on pt voir 
encore le piédestal au musée Pio-Ciémentin, et qui fut 
érigëe dans Rame par les contemporains de Duillius en 
mémoire de sa victoire navale, est nne preuve hi.torique 
dont on ne peut clouter, la statue de l'augure Ioevius, 
élevée, non sans le caillou qu'il avait coupé avec un rasoir, 



ISTOIRE 
p'ouvait-elle qu'il avait opéré ce prodige? Il en a sans 
doute été de cela comme de la sainte ampoule, et de 
maintes autres prétendues reliques destinées à attester des 
miracles supposés. On peut en dire autant des fausses d é- 
c rétales. Il est enfin certaines médailles qui ont été frap- 
pées pour des victoires très-indécises ou pour des entre- 
prises manquées. Ainsi, pendant la guerre de tTg0, entre 
l'Angleterre et l'Espagne, ne frappait-on pas une médaille 
attestant la prise de Carthagéne par l'amiral Vernon, tandis 
qu'il levait le siCe? Autre source d'ignorance et d'erreurs; 
au milieu d'un déluge de livres : nos temps modernes ont 
été très-téconds en libelles satiriques, qui tendaient à dé- 
naturer l'histoire : ces libelles s'imprimaient surtout en 
Hollande et en Belgique. Parmi tous ces obstacles et tous 
ces'doutes, qui s'opposent à ce qu'on puisse espérer de 
bien savoir dar ses détails l'histoire des temps modernes, 
l'homme de sens qui veut s'instruire est obligé de s'en 
tenir au fil des grands événements et d'écarter tous les 
petits faits particuliers : il saisit dans la multitude des ré- 
volutions l'esprit des temps et les mœurs des peuples. 
Ai-je parlé de la manière d'écrire l'histoire, dont, depuis 
Lucien jusqu'à Mably, depuis D'Alembert et Voltaire jus- 
qu'à Bonahl, tant d'auteurs ont donné les préceptes ! Long 
ns doute serait ce sujet à traiter ; mais j'aime mieux dire 
à chaque auteur, avec Chateaubriand : « S'il est bon d'a- 
voir quelques principes arrètés en prenant la plume, c'est 
une question oiseuse de demander comment l'histoire doit 
ètre écrite, chaque historien liécrit d'après son propre 
nie... Toute manière]est bonne, pourvu qu'elle soit vraie. 
Cicéron n'avait-il pas dit dëjà : Hiitoria quoquo modo 
scripta placet. Au surplus, l'auleur des ltudes joint l'exem- 
ple au précepte : au gré de son esprit, aussi mobile que 
vaste, il est tour à tour sentencieux et pathetique, raison- 
neur et pittoresque, philosophe et fataliste; quelquefois 
mème il se trouve n'tre pas historien du tout, mais il 
est toujours grand écrivain. 
Ai-je parlé de ces romans historiques qui, »ous la plume 
d'un Walter Scott, d'un Cooper, d'un Marchangy, éclairent 
le temps passé presque aussi bien que l'histoire? Ai-je enlin 
traité de l'importante question des abrégés? Très-com- 
modes pour la lecture et pour Sire consultés superficielle- 
ment, les abrégés peuvent-.ils donner une instruction vé- 
ritable? Avec B o n a i d, je ne le pense pas. « Ils ont trop de 
détails ou n'en out pas assez ; et ils n'offrent ni assez de 
prise à la mémoire ni assez d'exercice à la pensée. » Avec 
tous ses détaiis, l'histoire convient aux jeunes gens; « car 
cet .ge ne retient que les longues histoires; et les retranche- 
ments qu'exige i'abrégé portent principalement sur les faits, 
qui sont la partie que les jeunes mémoires reçoivent avec le 
plus de facilité et conservent le plus fidèlement. » Le telnp« 
n'est plus o0 cette science n'entrait que comme un hors- 
d'œuvre dans l'éducation publique. Ce n'est pas sans peine 
cependant q n'en t 818 cet enseignement fut intruduit dans nos 
colléges. Il a fallu, pour :y réussir, toute la volont6 de 
Royer-Gellard, alors président du conseil royal de l'instruc- 
tion publique; et dans cette circonstance il fut heureux de 
trouver l'appui et l'influence universitaire de MM. Cuvier, 
Guizot, et de quelques autres personnages  grandes vues, 
alors en crédit dans le monde polilique. En 1820 on con- 
damnait au silence certaines chaires historiques de la Fa- 
culté des lettres; on ne voulait plus absolument d'histoire 
dans les eolb:ges. Alors, j'aime à le rappeler, i'abbé Nicollc 
s'est jeté généreusement entre l'enseignement historique des 
coiléges et les barbares qui voulaient le proscrire ; il fut 
assez heureux pour sauver cette institution. Enfin, l'expé- 
rience désarma les préventions : elle prouva que l'histoire 
convenablement professée, n'est pas plus l'adversaire des 
humanités classiques que des saintes vérits et des gloires 
humaines du catllolicisme; mais qu'elle en est le grave et 
puissant auxiliaire. On voit ainsi que la Restauration, malgré 
quelques veliéités contraires, n'a pa. été défavorable à la 
science historique. Après 1830, l'histoire, encouragée, et 

101 
cependanl demeurée libre, régna presque oens partage dans 
la littérature, au thAtre, et dans les académies ; elle fit 
naltre, dans les départements comme dans la capitale un 
chalne d'associations vouées au culte des temps passes. L'ar- 
chitecture, la statuaire, la peinture, l'art de travailler le 
bos, ne lutent occupées dans les vieilles rsidences royales 
qu'à rappeler les souvenirs, les traditions et les habitudes 
locales des temps passés. Ge ne tut plus dans les livres, ce 
fut dans Versa[lies mème, que l'on put lire désormais le» 
pages ios plus vraies du règne de Louis XIV. De mme à 
Fontainebleau, pour François 1«: à Pau, pour Henri IV. 
Sous les auspices d'un homme d'État historien, les archives 
des chefs-lieux et des villes commencèrent à sortir do la 
poussière: elles obtinrent des locaux convenahles ci des 
conservateurs instruits. Sous les gouvernements suivants, 
l'impulsion ne pouvait se ralentir. De grands ouvrages his- 
toriques parurent encore, et si l'histoire n'a pas conserv6 
toute sa liberté peut-être, elle n'en a pas moins gardë toute 
son importance. Charles Dr IOZOIR. 
tlistoire s'emploie encore dans différentes acceptions. Il 
se dit des romans, des narrations fabuleuses, mais vrai,cm. 
blables, [riventCs par un auteur, ou dans lesquelles il a in- 
troduit un mélange de vérité et de lictions. Ainsi, en parlant 
de romans bien connus ,on dit : l'histoire de Cgrus, l'his- 
toire de La princesse de Clèves, l'histoire de Gil-Elas, 
l'histoire de Cleveland, l'histoire de Tom Jones, etc. Ce 
n'est que de nos jours qu'on a inventé cette expression, qui 
répond à tout : roman historique. Le mot histoire s'appli,- 
que aux récits particuliers qu'on fait de quelques événements 
singuliers, terribles ou notables: des histoires galantes, 
tragiques, prodigieuses, naïves, pieuses, etc.; des histoi- 
res de revenant.% de voleurs, de pirates, elc. C'est en ce 
sens que Bussy-Babutin avait intilule son libelle, Histoire 
amoureuse des Gaules, et que Boileau a dit : 
Ces Itistoires de morts lamentables, traglques, 
Dont Paris tous les ans peut grossir ses chroniques. 
Histoire se dit d'une aventure qui a quelque chose de 
plaisant ou d'extraordinaire : il nous a conté une histoire 
curieuse qui lui est arrivée. Quand on dit d'une femme : 
11 lui est est arrivé bien des histoires, on lait entendre 
par là qu'elle a eu nombre d'aventures galantes. L'histoire 
de ses amours est une expression consacrée. Histoire 
se dit aussi d'un propos Ieng, ennuyeux, frivole : 11 nous 
conte des histoires à n'en pas finir; ce sont là de belles 
histoires, de vraies fariboles. Histoire, dans certaine 
acception, est synonyme de conte, de mensonge : Ce Gas- 
con a toujours des histoires à faire. E ce sens, l'auteur du 
Mondain a dit : 
Monsieur l'abbë vous entame une histoire, 
Qu'il ne croit point, mais qu'il veut [aire croh'e. 
Dans le style familier, histoire est synonyme d'affaire : 
Voilà bien line attire histoire. On dit encore proverbiale- 
ment : Il veut épouser cette femme, avoir cetle métairie, 
oblenir cet emploi : voilà bien des histoires. Vous faites 
bien des hiztoires est parfois, dans la conversation, syno- 
nyme de : Vous faites bien desfaçons. 
IIISTOIIE ( Peinture dï. S'il nous fallait donner une 
définition dt la peinture d'histoire, elle ne devrait pas tant 
s'appliquer au nombre des sujets qu'il est possible d'y com- 
prendre qu'à la manière de les traiter. Des sujets religieux, 
m.vtbologiques ou empruntés à la légende ne sont "pas par 
eux-mèmes des tahleaux d'histoire. La véritable peinture 
d'histoire élève la figure humaine à un degré plus haut en lui 
donnant l'expression sensible d'une pensée sublime, et en 
ratlachant son existence à quelque moment important et dé- 
cisit de la vie. Chez les Grecs, parmi lesquels la peinture se 
déveioppa comme art indépendant, nous la voyons oceupéa 
à retracer l'histoire des héros et de celle des batailles les 
plus rcemment iivrées ; et ce sont là les sujets qu'elle 
choisit toujours puur la plupart de ses travaux. Quand vint 



102 
l'époque chrétienne, la peinture, depuis son enfance j,s- 
qu'à son complet développement, fut p.resque exclusive- 
ment consacrée à la représentation de l'histoire religieuse 
et à l'expression des pensées pieuse.s. Par conséquent dans 
l'un et l'autre cas la peinture servait à la reproduction de 
la figure humaine, mais seulement à un point de vue très- 
élev, c'est-à-dire dans ses rapports avec l'expression de 
ce qu'il y a de divin et de moral dans l'homme. Or cette ex- 
pression du sublime ne peut ètre atteinte que par la con- 
ception de la beauté de la forme et l'exposition de ce qu'il 
y a de plus noble dans la pensée et dans le caractère, en 
d'autres termes, qu'en retraçant aux sens ce qu'il y a de plus 
noble dans le phénomène intellectuel et visible de la nature 
humaine. I.l ne sufat pas pour cela d'une représentation belle, 
naturelle et caractéristique des formes, il faut encore que 
les mouvements en soient coordonnés de manière à oflrir une 
image de leur action et à satisfaire en méme temps l'oeil par 
le gracieux et l'harmonieux des lignes. 
Il ne saurait exister de tableau d'hioire là où l'artiste n'a 
pas su grouper avec art; aussi est-ce la forme humaine qui 
doit tenir le plan principal et occuper exclusivement les yeux 
et l'esprit du spectateur. Cette exigence d'une belle expnsi- 
tion est ce que l'on entend par sigle, l'une des qualités in- 
dispensables de la peinture d'histoire. Il ne saurait y avoir 
de tableau historique proprement dit sans style; aussi dans 
ces derniers temps les termes de peinture de sigle ont-il 
généraiement été employés au lieu de ceux de peinture 
d'hLstoire. Chez les anciens, au contraire, il ne pouvait 
pas y avoir d'art sans style. La rigueur de cette condition 
apparalt chez les Égyptiens dans la sevérité de toute leur 
architecture. De mème, nous voyons la sculpture des Grecs, 
ainsi que ce qui s'est conservé jusqu'à nos jours de la 
peinture des Romains, complétement soumis aux lois du 
st:,.le. Dans la peinture chrétienne elle-mme, l'idée du 
style fut, depu4s les débuts les moins satisfaisants de l'art, 
considérée toujours comme la loi supréme de toutes repré- 
sentations; et dans les sujets pieux, les seuls qui fussent 
alors traités, elle arriva peu  peu h une perfection con- 
forme à la nature humaine. Jusqu'h lap hael, il n'y eut 
donc pas d'autre peinture que celle d'histoire ; et cetle dé- 
signation méme ne int en usage que lorsqu'on commen.ca 
à prendre pour sujets particuliers des objets qui jusque alors 
n'avaient été qu'accessoires, comme les paysages, etc. A 
partir du dix-septième siècle surtout, la peinture de g e n re, 
dans laquelle, au lieu du beau et du sublime, dominent 
la vérité et la nature, devint l'opposition la plus complète 
et la plus importante de la peinture d'histoire. 
Cette séparation des genres commença ì s'effectuer dès 
le seizième siècle, alors que l'art s'affranchit du service 
exclusif de l'Église, et qu'à cté d'une peinture historique 
profane naquirent lepa,sage, le genre et la nature 
wh orte. Mais dans ces genres mme continua de subsister 
la puissante influence de la peinture d'liistoire. C'est ainsi 
que naquit iepagsage historique, on, comme Goethe préfë- 
rait l'appeler, le paysage héroique, lequel, comme repré- 
sentation d'une action humaine importante, d'une grande 
civilisation primordiale, participe aux lois élevée» du style 
historique et exige que les masses y soient groupées avec 
non moins d'art, etc. La peinture d'animaux eile-mme, 
quand elle s'occupe d'une représentation grandiose de la na- 
hre, par exemple dans les toiles d'un Bubens, mérite 
quelquefois la qualification d'héroïque, par opposition à la 
vérité naturelle et ordinaire d'un tableau de chasse de lidin. 
ger, par exemple. C'est en ce qui touche les figures que 
les limites de la peinture d'histoire sont le plus diificiles à 
déterminer. Elle comprend en effet la représentation de 
tontes les figures idéales, comme celles des dieux ou des 
saints, et aussi les figures allégoriques et symboliques, at- 
tendu que la forme humaine y est élucidée d'après les lois 
! plus élevées de l'art. Vient ensuite un genre intermédiaire, 
celui qnon appelle le portrait historùlue , et où un person- 
nage historiquément important est, par la manière dont le 

HISTOIRE  HISTOIRE • 
traite le style historique, élev au-dessns d'un caractère 
purement individuel, pour constituer l'expression d'une 
poque caractéristique et d'un symbole. 
En ce qui touche le tableau de genre, la distinction, sur- 
tont dans la peinture moderne, est très-difficile à établir. 
Ainsi, il est certain que dans Les Moisonnears ou Les 
cheurs de Léopold B o b e ri, on trouve réunie toute la di- 
gnité des tableaux d'histoire, en raison du style noble de 
leur conception et de leur exécution, tandis que les deux tier 
des prétendus tableaux d'histoire qu'on voit aux expositions 
ordinaires ne s'ëlèvent pas au-dessus du tableau de genre ou 
du portrait. Ceci tient à deux causes : l'absence du style 
historique dans l'exposition, et l'absence du moment drama. 
t/que. Ce qui fait la puissance de la peinture historique pro. 
prement dite, c'est qu'elle reproduit un événement  son 
instant décisif, au moment méme où il s'accomplit. Il ne 
lui est donné sans doute que de reproduire un seul instant; 
mais par l'habileté avec laquelle elle exprime les caractères, 
par la manière vive et saisissante dont elle les groupe et les 
fait agir, elle reproduit l'événement complet, non-seulement 
par la représentation de ce qui se passe au moment qu'elle 
a choisi pour sujet, mais aussi eu faisant pressentir ce qui 
a dO précéder et ce qui devra suivre. Comme tenteconcep- 
tion de ces instants décisifs de la vie humaine est uu acte 
d'activité poétique, on voit tant6t l'CCent épique, tant6t 
l'élément lyrique dominer dans ces sortes de créations. Mais 
le vérilable but de la peinture d'histoire est le drame, qui 
exige la plus grande unité d'action avec la lia'Lson exacte de 
tous les motifs. C'est en ce point, de mme que pour la 
chaleur et la ivacité de sentiment avec laquelle il excelle 
à reproduire ce qu'il y a de noblesse de i'àme dans la beaulé 
du corps, que Baphael domine tous les artistes modernes. 
On trouve réunie en lui la force dramatique avec la concep. 
tion la plus noble des moindres détaiis. L'élévation particu. 
lière que cet artiste imprime à ses conceptions provient de 
la maniëre noble et grande dont il comprend les caractères, 
rultat que des générations tout entières out vainement 
cherché ì obtenir, par exemple l'école de David, qui ne 
represente jamais que le c6té vain et théâtral de l'art, au 
lieu de la noble simplicité et du naturel qui en est l'essence. 
Comme toute conception de figures est une concentration, 
le peintre d'histoire devra s'attacher ì élucider son sujet par 
les motifs les plus clairs, à mettre en saillie les figures prin. 
pales, à laisser sur le second plan les earactres secondaires, 
et a savoir distinguer dans son tableau les scènes princi- 
pales des scènes accessoires, les ívíuements principaux des 
simples ípisodes. C'est par la réunion de ces motifs intel- 
lectuels et sensuels sur un même point et ì un moment 
tmique, que l'impression que produit un tableau acquiert de 
la force ; et elle dédommage jusqu'à un certain point de 
l'impossibilité qu'il y a pour la peinture de reproduire, 
comme la poCte, une grande pèriode de temps et tout ce 
qu'elle a embrassé. 
HISTOIIE AUGUSTE. Voye: AvCçST (titre). 
HISTOIRE NATURELLE  science dont l'objet est 
la connaissance des corps, soit bruts, soit organisés, qui 
composent Penmble de notre globe. Restreinte dans ses 
plus étroites limites, elle est encore l'une des plus vastes dont 
l'homme, qui faitpartie de son empire, se puisse occuper. 
La variété des objets de son domaine est infinie. Il n'est pas 
besoin d'en peindre emphatiquement les beauté pour la 
rendre aimable; et prétendre en prouver l'importance à qui 
ne la sent pas est nne puérilité; essayer surtout de le faire 
enarguant des causes finales n'appartient plus à notre siècle. 
L'bistoire naturelle n'est point la nature, c'est sa connais- 
sance : confondre ces deux choses, comme l'ont fait jus- 
qu'ici presque tous ceux qui en écrivirent, ce serait, ai-je 
dit autrefois, confondre Borne et ses Césars avec les annales 
de Taote. Si la nature pourvoit à nos besoins, son ldstoire 
n'a pourtant que de» rapports indirects avec ces besoins 
mmes : on peut ne pas avoir la moindre notion en histoire 
naturelle et pow. tant faire de très-bon pain, élever des poules 



HISTOIRE 
ou des vers à soie, atteler le bœuf à la charrue, tanner le 
cuir, etc. 
L'utilité de l'histoire naturelle est dans l'appui que prte 
son étude à la raison humaine pour détruire les honteuses 
absurdités qui l'obscorcirent Iontemps, et dans la recherche 
des idées ju.tes qui doivent nécessairement résulter de sa 
connaissance. L'erreur ne lui saurait résister : elle est la 
plus importante des sources de vérité. Son avancement a 
depuis environ cinquante ans détruit peut-Cire plus de pré- 
jugés que n'en avaient osé attaquer tous les philosophes : 
en persévérant, pour l'approfondir, dans les voies où les 
naturalistes dignes de ce nom dirigent maintenant leurs in- 
vestigations, le dix-neuvième siècle ne sera pas révolu que 
les sciences physiques auront fourni les meilleurs moyens 
de renverser en Europe les deruières barrières que la su- 
perstition s'efforce d'opposer encore au développement de la 
véritable sagesse. Un tel résultat sera la plus victorieuse des 
réponses qu'on ait pu faire à la question du oui bono. Je 
doute que tous les raisonaemenls renouvelés de monsieur 
le] prieur de l'abbé Pluche, dans sou Spectacle de la 
lute, en présentent d'aussi satisfaisantes. 
L'histoire naturelle n'est devenue réellement une science 
que dans ces derniers temps; mais on n'eu a pas moins 
imaginé de la faire remonter à la plus haute antiquité. Sans 
examiner si, d'après le texte mme des Saintes Écritures, 
Adam en fut effectivement le premier et le meilleur nomen- 
clateur, j'avouerai qu'il ne me parait guère plus démontr 
qu'Orphée, Linus, ou le centaure Chiron, Démocrite, Épi- 
cure, Héraclite, Tbaiès, Platon ou autres sages de l'anti- 
quité, aient été des naturalistes, encore que l'on mit sou- 
vent leurs figures au frontispice de certains in-folio de bo- 
tanique et de zoologie imprimés durant l'avant-dernier 
siècle. Dans les temps reculC, Aristote seul mérita le 
titre de naturaliste; i! embrassa l'ensemble des connaissances 
humaines, à la vérité moins étendues de son temps qu'elles 
le sont du notre, et l'étude de la nature fut pour lui simple- 
ment une des branches de ces connaissances. Les autres 
philosophes grees ne s'occupèrent guère quede quelques-uns 
de ses rameanx : Dioscoride et Théopbraste jetèrent seule- 
ment les fondements de la botanique. On ne peut regarder 
comme des zoologistes Ëlien ni Oppien, auteurs de traites 
spéciaux de pche et de chasse; et quant au grand roi Sa- 
lomon, qui connaissait toutes les plantes, depuis l'hysope 
]usqtl'aU cdre du Liban, on doit préumer qu'il n'eut pas 
beaucoup de disciples parmi ses Juifs, dont pas un, depuis 
le règne de ce prince, ne s'est occupé d'histoire naturelle, 
si ce n'est de nos jours l'ichthyoloste BIoch. P I i n e pourrait 
à la rigueur tre considéré comme le second des naiuralistes 
des temps anciens; mais, bien inférieur à l'illustre précep- 
teur d'Mexandre, il n'observa jamais par lui-mme les 
choses dont il nous entretient : adoptant sans critique les 
contes populaires les plus niais, compilateur crédnle, nar- 
rateur prolixe, déclamateur emphatique, ses écrits sont 
plutOt l'histoire des erreurs que l'état des connaissances plff- 
siques de son temps. 
Longtemps après Pline on ne rencontre gnëre que des 
médecins arahes qui, commentant les crits de l'antiquité, 
effleurent plus ou moins l'histoire naturelle. 5lais bient0t 
l'Europe accorde une attention toute particuliêre à cette 
science : on l'Cutile d'abord dans les vieux livres, on m- 
dite enfin d'après la nature mme; des observateurs saillcnt 
de toutes parts et lui dcouvrent de nouvelles beautés. Les 
fruits de leurs recherches sont recueillis et coordonnés dans 
plusieurs traités généraux ou particuliers. L i n n é apparait, 
compare ce qui s'était fret, ose embrasser l'immensité de 
cette création, dont il s'étonne, en devine les lois, imagine 
pour en enregistrer les détails un langage nouveau ; son 
Sys[ema ]'aturoe en présente l'ensemble, et dans ce vaste 
essai tous les tres connus, asservis sous trois règnes, sont 
dlsposés méthodiquement, de façon à ce qu'on les y puisse 
reconnaitre. Cependant, la route pllilosophique ouverte par 
le Iégslateur suédois fut d'abord mconnue de ses propres 

NATURELLE 1OS 
admirateurs, qui crurent que le savoir de leur marre con- 
sistait simplement dans sa nomenclature, quand il n'avait 
prétendu en faire pour les savants de tous les pays qu'un 
simple mais rigoureux moyen de s'entendre. Substituant 
leur obscurité à sa concision, ils imaginaient avoir contribué 
à compléter le tableau des productions de l'univers, quand 
ils n'avaient qu'indiqué dans une simple phrase gnérique 
ou spécifique, et d'après des caractères souvent arbitraires 
ou superficieilement établis, l'existence.de quelque animal 
ou d'une plante. Ceux-là n'avaient pas mieux compris les 
préceptes du grand homme que les faiseurs de phrases re- 
tentissantes n'ont compris le sublime de Buffon ; et ce Linné, 
que l'aridit de ses imitateurs fit accu«er d'avoir mêtamor- 
phosé en une science de mots striles l'étude de la ri.coude 
nature, fut cependant le vritable créateur de l'histoire na- 
turelle. Linné établit sa classilication sur des bases si solides, 
que les coupes heureuses s'en reproduisent nécessairement 
dans les ouvrages mme de ses plus ardents détrateurs. 
B u fro u, qui, s'essayant ì peindre la nature avant d'avoir 
la moindre teinture des sciences naturelles telles qu'elles 
venaieut de se constituer, et qui, dans la marche incertaine 
de son pompeux debut, prit pour troites et mesquines des 
idOes d'ailleurs aussi larges que raisonnables, se déclara de 
prime abord l'antagoniste de toute nomenclature systéma- 
tique ; plus tard, et lorsquïl fut devenu aussi grand natu- 
raliste qu'il tait n grand écrivain, il n'en foudroya plus 
que l'abus ; mais il devint aussi, et certainement à son insu, 
le chef d'une école où le verbiage ampoulé d'incapables imi- 
tateurs fut substitué  Peloquence du modèle. C'est au géuie 
linnéen, lécoudé à la vérité par certaines grandes vues buf- 
foniennes, que l'histoire naturelle dut sa genéralisation, où 
les J ussieu et les Lamarck furent ceux qui brilleront le 
plus alors. Le premier publia un Genera dont les premiers 
ecrivains de [tome, au temps de sa glolre, n'eussent pas 
désavou l'éloquente latinité, et dont Linné admirait l'im- 
mensit des recherches. Le second, qui lut aussi uu grand 
hotaniste, débrouilla ensuite le chaos des inverlébres, dont 
la plupart, si lonemps dédaignés des naturalistes, jouent 
pourtant un rOle si éminent dates la structure du globe. C u- 
nier, enfin, après le Hollandais Camper, évoquant du 
-ein de la terre les races perdues, qui eu peuplërent autre- 
fois la surface, éclairant la géoloe et la zooloe l'une par 
l'autre, rétablissant pour ainsi dire les charles où furent 
déposés les titres cbrcnologiques du monde primitif, dispo- 
sant dans un ordre naturel toutes les créatures vivantes, 
assiguant ì chacune d'elles son véritable nom, Cuvier, enfin, 
ruuisnt en lui et Linné et Buffon, deviut le modèle à 
.,mtao dans la manière d'ecrire l'histoire naturelle, sous le 
double rapport du stle et de la méth)de. C'est su r les traces 
de oesavant qu'il laut désormais marcher dans la recherche 
des ëtres physiques. 
Mais la science étant devenue si vas[e que nul ne saurat 
l'embrasser tout entière, on a d0 la diviser d'abord en trois 
grandes branches, savoir : la n i n é r a l o 9 i e, la -. o o 1 o 9 i e, 
et la bota nique. Depuis, chaque partie s'étant encore 
prodiçeusement accrue, la g é o I o g i e et la c r i s t a I 1 o g r a- 
p hi e tendent  se détacher de la première division ; outre 
que la physiologie et ranatonie sont réultéesdes 
deux autres, la scieuce se divise ì prsent en presque au- 
tant de brancheq distinctes qu'on y comptait de classes. 
Ainsi, la mamma loqie est la connaissance des mam- 
m i OEres, l'or n il ho I o 9 ie celle desoisea u x, l'erp- 
toloqie celle des reptiles, l'ichthçolo9 le celle des 
p of s s o n s, la m a.l a c o lo 9 i e ( nom qu'on doit substituer 
 celui de conch yliolo 9 ie) celle des m ol lusq ues, 
l'entomoloqie celle des insectes et gnéralement des 
aculés. On peut en aire auant pour la botanique, où 
Paqrostoqraphie est déjà la counaissance des graminées, 
la  ç co l o 9 ie celle des champignons, l'hçdroph9toloqie 
celle des cryptogames et affames des eaux. Il ne andrait ce- 
pendant point abuser de lçétablissement de tels dmembre- 
[ ments et prtendr créer dans l'arbre des sciences natu. 



I04 
reJles autant de noms qu'il s'y peut développer de ramemx. 
Bon'/" DE SAINT-VINCENT» de I'Acadëmie des Sciences. 
fliSTOLOGIE. Vo/e: 
HISTORiE MORALISATE. Voyez Gr.st, BOS- 
DORUM. 
IllSTORIOGRAPllE. Ce mot, dérivë du grec 
histoire, et ,iw, j'Cris, désignait anciennement tous ceux 
qui s'appliquaient à écrire l'histoire, o I1 est historiographe 
diligent, » dit biontaigne en parlant de Guichardin; et ici 
ce mot est synonyme d'historien, biais depuis longtemps 
on ne le dit plus que de ceux qui ont une commission, un 
brevet du prince pour écrire Phistoire de son règne. L'his- 
toriographe de France était un homme de lettres pensionné, 
et, comme on disait alors, appointé pour écrire l'histoire. 
{3cite charge parait avoir existé de temps immémorial dans 
les monarcbies de l'Orient : on en voit la preuve dans I'Ê- 
criture Sainte. Alain Chartier lut l'bistoriographe de 
Charles Vil. Lorsque en 1536, l'empereur Charles-Quint 
rvait la conquête de la France comme chose facile et sure, 
il dit à Paul Jove, son historioaphe, de se munir 
plumes et d'encre pour retracer tous ses exploits. A Venise, 
c'était un noble du sénat qui avait le titre d'historiographe 
de la république de Saint-Marc. L'bistoriographe de Franco 
obtenait le brevet de conseiller d'État en recevant les provi- 
sions de sa charge : il était commensal de la maison du roi. 
biézerai, Pélisson, Bacine, Boileauo Yalincourt, 
furent historiographes de France sous Louis XIV. Quel- 
ques traits de sincerité que Mëzerai se permit contre la taille 
et la gahelle lui firent retrancher d'abord une partie de 
pension, et ensuite sa pension tout entiëre. L'historio- 
graphe disgracié mit à part, dans une cassette, les derniers 
appointements qu'il avait reçus, et y joignit ce billet : « Voici 
le dernier argent que j'ai reçu du roi ; il a cessé de me payer, 
et moi de parler de lui, tant en bien qu'en mal. » Poelissou 
suivit une conduite toute différente : dans ce qu'd a écrit ,le 
l'histoire de Louis XI¥, il exalte le monarque ju»qu'au dé- 
goût. « Cette histoire, disait Desprêaux, est un pane- 
rique perpetuel; il loue le roi sur un buisson, sur un arbre, 
sur un rien ; et quand on lui fait quelque remontrance à 
ce sujet, il répond qu'il veut louer le roi. » On a dit qu'un 
fiistoriên devait ëtre sans passion ; il tact ajouter, sans 
pension. Il est bien difficile que l'historioar»phe du prince 
ne soit pas un menteur; celui d'une république ( comme 
l'était l'historiographe de Venise) flatte moins, mais il ne 
,lit pas toutes les vërités. Ainsi pour lui n'est point fait cet 
adage de Cicéron : 'e quid veri tacere non audeat (qu'il 
tut oser ne taire aucune vérité). Ce que Racine et Des- 
préaux firent de mieux, quoique fort bien payés, ou plutOt 
parce qu'ils l'Calent, fut de ne point donner au public une 
histoire qui n'aurait été qu'un monument d'adulation, peu 
utile à la gloire du roi, et encore moins honorable  celle 
des deux poëtes. Au surplus, un incendie, en détruisant la 
bibliothèque de Valincourt, leur successeur, fit périr tous 
les mannscrits que Racine et Boileau avaient laissés comme 
Idstorioraphes. Quelques notes recueiilies par de scrupu- 
leux éditeurs dans les œuvres de Racine font peu regretter 
cette perte. 
Sous Louis XV, la place d'historioaphe de France ne 
lut pas pour Duclos un titre oiseux : il écrivit l'histoire 
,lu monarque qui le pensionnait, et son ouvrage ht, après 
sa mort, recueilli dans les dépts du ministère, o Je me 
somiens, dit La Harpe dans son Cou»'s de Littdralure, 
d'avoir entendu quelques morceaux de la préface, qui annon- 
çaient le courage de la vérité. » Un contemporain de Duclos, 
l'académicien bioncrif, lecteur de la reine, fit une Histoire 
«les Chats, plaisanterie fort insipide. Les plaisants lui don- 
nèrent le titre d'historiogriffe. Après Duclos, bl a r m o ri- 
t e ! et Moreau, auteur de vin et un volumes de Discours sur 
l'histoire de France, curent simultanément le titre d'Iris- 
toriographe : ils le portèrent jusqu'au moment où la rd- 
• "olution vint niveler tant de positions et abaisser tant 
d'exi»tences. Que Fou consulte l'Almanach royal de t79, 

HISTOIRE NATURELLE- HISTOIIQUES 

et l'on y verra que les ordres du roi, la maison de Bourbon, 
l'Académie d'Architecture, l'ordre de Saint-Lazare, la ville 
de Paris, etc., avaient aussi leurs bistoriographes : Blin 
de Sainmore, Desormeaux, I.eroy, Gantier de Sibert, 
Ameilhon, tous académiciens, jouissaient de ce titre, qui 
avait entiërement disparu, lorsque l'avénement du second 
empire le fit un instant revivre en faveur de M. Gn, ancien 
rédacteur en chef du Moniteur, aujourd'hui archiviste de 
la couronne. Charlls Du Bozom. 
HISTOIAIQUES (Sociétés). Les académies et sociétés 
historiques et arehéoiogiques doivent leur origine  l'ardeur 
avec laquelle on s'est livré de plus en plus dans tous les 
pays à l'étude de l'histoire de la contrée, des manuscriL«, 
documents, chartes, monuments, médailles qui peuvent 
l'éclairer. La première académie de ce genre qu'ait possêdée 
la France est l'Académie des Inscriptions, fondée par 
Colhert, en 1663, sous la protection de Louis XIV. 
En 1805 une société de savants et d'hommes zélís penr 
l'archéologie se forma à Paris, sous le titre d'Académie 
Celtique, à l'effet àe se livrer  la recherche età l'explica- 
tion des antiquités gauloises. En 1813 elle prit le titre de $o- 
ciétd des Antiquaires de France. La Socidté de l'Histoire 
de France date de 1833 ; elle a été instituée pour la publi- 
cation des documenls ori#naux de notre histoire. L'Institut 
Historique fut fondé  Paris la mme année. Les départe- 
ments comptent une foule de sociétés historiques. Le c o- 
mité de la langue, de l'histoire et des arts, institué près 
du ministère de l'instruction publique, peut aussi tre 
regardé comme une société historique. Il est en correspon- 
dance avec des commissions et des archíologues des départe- 
ments. Enfin, l'histoire tient son rang dans les réunions d'é- 
rudits qu'on nomme con 9rès scien t ifiqu es. 
Au nombre des académies et sociétés historiques ítran- 
gëres, nous devons citer en premièt'e ligne l'Acadernie 
roçale d'Histoire portz«qaise de Lisbonne, créée en 1720, 
par le roi dom Jean V, et l'Académie rOlale d'Histoire de 
Madrid, confirmée en 1738 par Philippe V ; l'Académie 
d'Histoire de Souabe, à Tubingue ; I'.lcadoemie A rcholoqi- 
que de Cortone, rn traite, instituée en 1727 pour l'étude des 
antiquités étrnsques ; celle d'Upsal (Suède), fondée en 1710 
pour l'rtude des langues du Nord et des monuments scan- 
dinaves; les deux Instituts Hstoriq,aes de la mSme ville et 
de Stockholm : la Socitd Historique et Archoloqiqz«e de 
Moscott, fondée en 1836; deux académies du mêmegenre 
établies à P, ome par Paul Il et Léon X; l'Acaddmied'lter- 
culanum, pour la recherche et l'explication des monuments, 
d'llerculannm et de Pompéi, fondée en 1775, à Naples, par 
le ministre Tanucci ; PAcadëmie d'Histoire et d'Antiquités, 
dans la mème ville, créée en 1807 par Napoléon ; l'Académie 
fondée, la mè.me année, à FIorence pour l'exploration des 
antiquités toscaues; la Socidtd des Archdoloues de Londres 
qui date de 1751 ; celle des Antiquaires de la mme ville, et 
la Sociétd Historique aqlaise, qui y a été fondée en 1836 
pour l'Cude et la publication d documents relatifs  Fhis- 
foire de la Graude-Bretagnejusqu'au règne de Henri VIll; celle 
de Borne, de 1725; celle de Batavia, de 1778 ; celle de Cal- 
cutta, de 178g ; celle de Vermont, de Boston et de Philadel- 
phie, de 1769 ; enfin, la plus nouvelle de robres, l'Institut 
Historiqtte et C,4oqraphique du Br#sil, fondé en 1837,  
Bio-de-Janeiro, e.t qui a dëjà pnblié d'importants travaux 
sur les peuplades indigènes de l'AraCique du Sud. 
En Allemagne, dans ces derniers temps, une nouvelle 
impulsion a été donnée à ces ítudes par la Société de l'His- 
toire ancienne de l'Allernaqne , qu'a fondée, le 20 janvier 
1819, ì Francfort-sur.le-Main, le ministre prussien de Stein, 
laquelle s'est imposé pour tcfie une édition générale, cri- 
tique, des sources de l'histoire d'Allemagne au moyen ge. 
Les Momtmenta Gerrnanioe historica de Pertz ont été le 
principal témonage de son activité. L'exemple a oeté suivi, 
les sociétés historiques se sont multipliées dans toutes les 
provinces, et l'on en a compté plus de quarante dans les 
;tats Germaniques. Quelques-unes ne e sont pas bornées à 



HISTORIQU ES 
l'histoire et à l'arckulogie; elles ont embrassé dans leurs 
recherches la langue, la liftCature, les arts, etc. Panl Wi- 
gand a cbercbé à leur donner un centre commun, par la pu- 
blication des Amales des Socidtoes historiques el archdolo- 
9iques (Lemgo, 1831-1832). On compte en Prusse quinze 
sociétés historiques, qui tiennent leurs séances à Berlin, 
Boan, Breslau, Goedilz, Halle, Koenigsberg, Minden 
Manster, Paderborn, Saarbr0ck, Saltawedel, Stetliu, Trè- 
res, Wetzlar. Toutes ont publié et publient d'utls travaux 
relatifs à Içbistoire générale ou particulière du pays. Il en 
est de mme en Bavière, où elles sont spécialement encoura- 
gées par le roi; et, à l'exception de la Société de uremberg, 
elles sont en rapport avec l'Académie royale des Sciences. 
Elles ont leur siége à Anspach, Augsbourg, Baireuth, Bain- 
berg, Munich, uremberg, Passau, Ratisbonne, Spire et 
Wurtzbourg. 
Le rnyanme de Saxe compte deux sociétés historiques, 
l'une "/l Dresde, l'aulre à Leipzig. La première a été fondée 
en 18.1, et a successisement ëtendu le cercle de ses opéra- 
tions dans les années suivantes. La seconde est la Socidld 
allemande tour l'aude de la langue el des anti¢uilds 
nationales, fondée à Leipzig, en 1697, sous le titre de Cob 
ldge Portique, renouvelée en 177 par G o t t s c li e d, sous 
le titre de $ociae des Progrë de la Langue Allemande; 
elle s'est étendue, en 1827, par l'aocessiou de plusienrs 
membres de sociélés archéologiques de Saxe et de Tliuringe. 
En 183 la Sociéte itistorique de la Basse-Saxe a été fon- 
dée à Hanovre. Dans le Wnrtemberg, outre la Socidté de 
l'Histoire nalionale, créée par le roi, en 18, comme éta- 
blissement public, on compte celles de Rottweil, fondée en 
1822, et d'UIm, qui a publié son premier comple-rendu en 
18f3, et celle de Stuttgard, établie en 18. Cette dernière 
a publié des travaux importants. La Hesse-Électorale avait 
eu dès 1777, à Cassel, une Sociéloe Archeolo9ique; il 
constitua une nonvelle association du mme genre, en 1 
Le grand-duritWde Hesse-Dannstadt a deux lnstituts 
loriques, à Darmstadt mme età Ma.vence. Il y en a égale- 
ment deux dans le grand-duché de Bade, à Baden-Baden et 
à Sinsheim. Le Mecklembourg, le Schleswig, Nassau, Saxe- 
AIlenbourg, Saxe-Meiningen, la principaute de Reuss, Franc- 
fort-sur-le-Mein, Labeck, Hambourg, ne sont pas restés en 
arriëre dans cette voie de progrès. L'Autriche n'a point de 
sociétés historiques dans le sens convenu de ce mot, b[en que 
dans ce pays on ait fondé des musées provinciaux. La Suisse 
a plusieurs institutions de ce genre, à BMe, Fribourg, Ge- 
nëve, da le pays des Grisons et dan« les cantons de Yaud, 
Znricli, Lucerne, Uri, Schwytz, Uatewalden et Zug; enfin, 
la pins importante de toutes, celle de Berne, qui tient tous 
les deux ans un congrès historique. Les provinces rnsses de 
la mer Baltique ont les Sociétés Estliienne, de Dorpat, Cour- 
landaise, de Riga. Le Danemark est fier de sa Société des Anti- 
qnaires du ord, qui a publié entre autres les Antiquitates 
Americanx. Copenbague a depuis 180, son Dstitul His- 
torique; enfin, il existe pour la Fionie une société spéciale. 
IIISTOTOMIE. Voyez 
HISTIION. En l'année 391 de la fondation de Ruine, 
une horrible peste venait de désoler cette ville. Les politiques 
du temps pensèrent que pour dissiper les Inguhres impres- 
sions qu'elle avait laissées dans les esprits il fallait procurer 
au peuple un spectacle plus gai que les exercices du Cir- 
que, seul amusement jusque là de la grande cité. Dans 
l'l:'trurie se trouvait une troupe de baladius et de danseurs, 
qu'on engages pour venir donner des représentationsà Borne. 
• En langage étrusque, un bouffon se nommait hister; dans 
la langue latine, on en fit histro. Bientôt ces mmes gro- 
tesques devinrent des acteurs parlants. Ils commencèrent 
par débiter quelques mauvais vers improvisés au milieu de 
leurs danses; ils finirent par jouer de petites pièces assez 
informes, intitules Satires, et pour lesquelles on compo- 
sait une musique exécute par des finies. Tel fut le tbétre 
romain jusqu'en l'an 51, où Livius Andronicus fit, le 
prunier représenter des pièces plus régalièr, pour les- 
mc'r. ; a curerons.  '. aL 

-- HITTORFF t0 
quelles on abandonna les histrions. Le nom ne fut plu. 
alors qn'un terme de mépris, et c'est dans cette acception 
qu'il est devenu un mot de notre langue. Longtemps des 
esprits moroses, de trop sévères moratistes, l'appliquèrent 
avec injustice à la classe badine des comédiens ; l'épuration 
du thégtre, les progrès de la raison pnblique, ont réduit ce 
terme  ce qu'ildevait Stre: une flétrissure individaelle et ex- 
ceptionnelle. O. 
HITTOIF (J-Jcus), architecte, est né à 
Cologne, en 1792. Il viut très-jeune à Paris, od il eut pont 
marres Percier et Bellanger. Esprit studienx et préoccupé 
de honne heure de l'histoire de l'art antique, M. Hittorff 
appartient à cette famille d'arcldtectes qni se sont rendus 
cëlèbres pinter par les livres qn'ils ont pnbliés que par le 
nombre et la beauté des édifices qu'il ont constrnits. On 
sait pourtant qu'il a suivi sous Bellanger les travaux de 
l'abattoirde la me Roe'hecbouart et l'exécution de la coupole 
en fer de la Halle aux BIC. Associé plus tard à Joseph Le- 
cointe, il a biti avec Ini le thé$tre de l'Ambigu-Comique 
et a restauré la salle Favart. Parmi les desçius quïl a mis 
au jonr, celui d'un monument à élever au dnc de Berry et 
les projets de restanration de l'église de Saint-Bemy, à 
Reims, furent les plus remarqués. C'est aussi de concert 
avec Lecointe que M. Hittorff organisa les grandes cérémor 
nies funëbres qu'on célébra en l'honneur du prince de Condé, 
du duc de Berry et de Louis XVIll. Les fëtes brillantes aux- " 
quelles donnèrent lieu le baptSme du duc de Bo;deaux et 
le sacre de Charles X furent également dirigées par ces 
deux architectes. On trouvera dans l'ouvrage qu'ils pnbliè- 
rent ensemble (in-folio, 12 planches), le souvenir des 
solennités du baptême. Un des dessins de ce recueil a figuré 
ail salon de 1822. Nommé chevalier de la Léon d'Honnenr 
dès 1825, M. Hittorfl obtint successivement plusieurs mé- 
dailles aux expositions du Louvre, où l'on a vu de sa 
main divers projets de constructions nouvelles ou de res- 
taurations d'anciens monnments ( 1831 ), le plan de l'êglise 
de Saint-Vincent-de-Paul (1833), et cinq dessins d'après 
la rotonde du panorama élevé aux Champs-Élysées ( 184! ). 
Sur ces entrefaites, M. Ilittorff avait été adjoint à M. Le- 
père, / la famille duquel il s'était allié par un mariage; 
et dès lors il conduisit avec lui les travaux de Saint-¥incent- 
de-Puni. Cette église, commencée en 182, n'a été ter- 
minée qu'en 1894, après des lenteurs de toutes sortes et 
des difficullés administratives qui presqne au début de 
l'entreprise interrompirent les travaux pendant huit ans. 
Nous n'avons pas à décrire ici cette basilique, œuvre 
étrange, dont le plan primitif appartient à l'initiative de 
M. Lepère, édifice b$tard, oh tons les style« sont con- 
fondus, triste et remarquable exemple de l'inquiëlude mo- 
derne et du déplorable éclectisme de nos artistes. Les deux 
campanilles qui slwmontent le portail paraltront toujonrs 
sans liaison aucnne avec le reste de la construction; et 
d'ailleurs, qnelle pauvreté de forme et quelle absence 
de caractère! Si l'on excepte les deux escaliers qni condui- 
sent au porclie, Saint-Vincent-de-Paul n'a rien de grand, 
rien de religicux. La décoration intérieure n'est pas moins 
mesquine et moins dépourvue de gravité. Et cependant 
M. Hittorff est tin architecte érudit, un homme de guOt et 
de science. Il doit à ses ouvrages historiques une bonne 
partie de sa célébrité et son titre de membre de l'Institut. 
Sans rappeler ici les nombreux mémoires qu'il a publiés 
dans les journaux sur des questions spéciales, son curieux 
travail sur les Arabesques, imprimé dans l'Artiste du mois 
de mai 18-4, et les articles Archilecture et Histoire de 
l'Architecture qu'il a publiés dans l'un de nos recneils 
encyclopédiques, on doit/t M. Hittorff les livres suivants : 
Architecture antique de la Sicile, 3 vol. in-fol., avec 
180 planches; Architecture.moderne de la Sicile , in4olio, 
7f plancb. ; les Anluités inddites de l'Attique, in-folio, 
avec 60 planches (1832). Ce dernier recueil est une traduc- 
tion de l'anglais. Enfin, bi. Hittorff a depuis longtemps 
entrepris la publication d'nn grand ouvrage sur l'Architec- 



! 06 BITTOB FF 
ture polychrome che, les Grues, savant trava'd, d'une 
exécution aussi soignée que remarquable, et qui doit jeter 
de vives lumières sur une des questions les plus négligées 
et les plus curieuses que puisse soulever l'histoire de l'art 
monumental dans l'antiquité. P. Mxrz. 
G'est encore à bi. Hittorffque l'on doit la décoration de 
la placede la Concorde et des Ghamps-Êlsées, ainsi que le 
Diorama, le Cirque, et les autres monuments municipaux qui 
s'y trouvent. On peut leur reprocher une certaine appa- 
rence de co[ioEhet, une surcharge d'ornements et de couleurs 
peu en rapport avec la matière mise à la disposition de Far- 
chitecte. 
HIVEI. Voge: S.sos. Pour l'CumAration des hivers 
rigoureux, t'oge'. 
HIVEB (Quartier d'). Voye'- 
IIIVEIL3AGE HIVERNER. Les régions íquinoxiales 
n'ont pas des saisons aussi tranchées que les nStres : la durée 
des jours y varie peu, les frimats y sont inconnus ; cepen- 
dant, le ciel n'y a pas le mème caractëre à toutes les épo- 
ques de l'année : pendant quelques mois il se coux re 
d'épais nuages, de fréquentes tempdtes bouleversent l'at- 
mosphère, ordinairement si pure, et à chaque instant il 
tombe des torrents de pluie. C'est la saison pluvieuse qu'on 
a nommée hivernage; c'est aussi la saison des maladies: 
le climat alors devient meurtrier pour les Européens. Bien 
que l'hivernage n'arrive pas en mme temps dans tous les 
pays voisins de l'équateur, il ne varie guère qu'entre les 
mois de mai et d'octobre, précisément pendant le printemps 
et l'CWde l'Europe. Le marin craint de se risquer à la mer 
en temps d'hivernage ; le se»jour méme des rades ne le ras- 
sure pas : mille souvenirs sinistres lui en font un épouvan- 
rail. Combien de na ires ont disparu au milieu des torna- 
dos du Sénégal, des ouragans des Antilles, des pamperos 
du Brésil ! Si le bth«cnt est pris entre les tropi, lues pen- 
dant cette saison, il se ré[ugie au port, enlève ses voiles, 
déparse ses mts, se couvre d'une tente, laisse passer les 
tourhillons, et atend pour reparaitre le retour des fral- 
ches brises de la mer : voilà ce que l'on nomme hiverner. 
La vie devient pénible à bord, au sein de cet air cbaud et 
humide; les poumons travaillent à ide, et l'on se sent 
vieillir avec rapidité : aussi les puissances maritimes de 
l'Europe évitent-elles de laisser hiverner leurs escadres sous 
les tropiques, car les maladies déciment promptement les 
équipages..Nos gouvernements ont astreint le commerce à 
de sévres règlements pour les garantir des dangers de Ihi- 
xernage : on fixe l'époque où il commence, et à partir de 
ce moment tous les navires marchands doivent abandon- 
ner les colonies. Ainsi, à la blartinique le 21 juin est dé- 
signé comme le premier iour de l'hivernage; le commandant 
de la station française tire le coup de canon de partance, 
et nul hàtiment de commerce ne peut rester plus longtemps 
sur la rade de Saint-Pierre ou sur tout autre point de File. 
Ce jour-là porte avec lui un caractère de tristesse : le mou- 
vement des affaires cesse tout à coup d'animer Vile, les 
nëgociants se retirent à la campagne, les bords de la mer 
deviennent déserts ; chacun se précautionne contre la mau- 
vaise saison, qui déjà s'annonce menaçante, car de sombres 
nuages œuvrent souvent une partie de Vile. 
Théogène Pa, capilalne de vaisseau. 
ll|VEINANTS (Animaux). Les naturalistes désignent 
Çous ce nom quelques espèces animales qui vers la fin de 
t'automne tombent dans un état de lethargie plus ou moins 
complète, état qui persiste pendant toute la durée de l'hiver, 
et qui se dissipe peu à peu aux premières chaleurs du prin- 
temps. L'hibernaton s'observe également chez des ani- 
manx à sang chaud, chez des animaux à sang froid et chez 
des animaux dépourvus de toute circulation sanguine. 
Parmi les animaux/ sang chaud, l'hibernation a été cons- 
atée plus spécialement chez leloir, le lérot, le mus- 
cardin, la chauve-souris, le hérisson, la mar- 
motte, le hamster et le dipus canadensis, quelques 
espèces d' o u r s, queloues b I a i r e a t/x, le [enrec, espèce 

HI,  
de hérisson de 51adagascar, et quelques autres mammifère 
offrent, dit-on, ce mmê phénomène; mais le fait n'a pas 
été assez bien établi pour que nous soyons fondë à les 
classer parmi les aimaux hivernants. 
A l'approche des froids, les animaux laivernants re:her- 
chent quelques trous obscurs pratiqués dans les troncs des 
arbres, dans les broussailles, dans la terre elle-mme; il 
les tapissent soignensement de feuilles mortes, de mousses, 
de paille quelquefois et de plumes, et s'y blottissent pour 
n'en plus sortir que vers l'équinoxe du printemps: la chanve- 
souris se suspend par les ongles de ses pattes de derrière 
aux vot'tes mmes de l'asile qu'elle s'est choisi ; les autres 
mammifères se contractent et se pelotonnent de manière à 
exposer au contact de Fait la plus petite surface possible, 
et au bout de quelques jours on les trouve roulés en boule, 
les yeux ferreC, froids, roides, immobiles, et tellement 
insensibles qu'il devient dilficile de leur arracher quelques 
signes de vie; leur respiration mme est devenue lente, 
irrégulière, et quelquefois complétement imperceptible. 
Cette Iéthargie des animaux hivernants parait tre exclusi- 
vement déterminée par l'abaissement de température sur- 
venu dans le milieu ambiant : elle ne se lie en aucune fa- 
çon à une nécessité périodique de leur organisation. On re- 
marque en effet que les mammilëres hivernants ne sont 
pas, autant que les autres mammiferes, indépendants de 
la température du milieu dans lequel ils vivent : desexpé- 
riences thermométriques ont démontré que chez eux la tem- 
pérature du sang suivait avec une certaine exactitude la 
température de l'air, bien qu'elle se maintint toujours plus 
élevée de quelques degrés ; l'observation a démontré en outre 
que leur énergie vitale était toujours en rapport direct avec 
la température de leur sang. Aussi, en modifiant artificiel- 
lement la température du milieu dans lequel on les place, 
on peut développer chez eux à toutes les époques de l'an. 
née tous les degrés de vitafité, depuis l'exaltation la pins 
énergique jusqu'à l'engourdissement le plus complet. Les 
expériences qui ont établi ces réultats ont en outre établi 
que chez quelques mammifères hivernants on pouvait abaisser 
la température du sang jusqu'à ÷ 3 ° centigrades sans en- 
tralner la mort de l'animal ; mais nous ne pensons pas que 
l'on ait encore déterminé quelle pouvait tre l'extrême durée 
de cet état de torpeur. 
Toutefois, quelque complète que soit la léthargie des ani- 
maux hivernants, elle ne saurait entralner la destruction, 
ni mme la suspension des fonctions plffsiologiques essen- 
tielles à l'existence de tout Stre animé ; la vie n'est pas 
éteinte tant que dure la léthargie, elle est dissimul#e seu- 
lement. Ainsi, il y a toujours élimination des éléments excré. 
mentitiels du sang par la surface tégumentaire et par les 
membranes muqueuses, pulmonaire et intestinale ; et, par 
conséquent aussi, il y a pour l'animal nécessité absolue 
de pourvoir à l'alimentation du sang. Une disposition orga- 
nique fort simple répond à cette necessité : les nombreux 
épiploons des animaux hivernants se surchargent pendant 
leur 'e active d'une quantité considérable de tissu adipeux, 
et ce tissu, lentement absorbé pendant l'hibernation, fournit 
au sang des éléments incrímentitiels suffisants à la déperdi- 
tion de cette vie passive. 
Quant aux animaux à sang froid, un grand nombre derep- 
tiles, de» opbidiens surtout, peuvent ëtre classés parmi les 
animaux hivernants : toutefois, leur engourdissement parait 
tre en général moins profond-que celui des mammifères. 
Il faut ajouter que quelques reptiles deviennent torpides da 
les rd9ions équatoriales, ainsi que I'a observé M. Alexan- 
dru de Humboldt chez les reptiles de l'Amérique méridio- 
nale, qui restent ensevelis pendant une partie de l'année, et 
qui ne sortent de terre que dans la saison des pluies. 
Les froids de l'hiver produisent encore ch un très- 
grand nombre d'insectes, dépourvus de circulation sanguine, 
des phénomènes identiques à ceux qui constituent l'hiber 
nation chez les o-téozoaires ; M. Léon Dufour a en ou'e 
constatt que les hémiptères engourdis par le froid se nour- 



HIVERNANTS -- HOBBES 
rlssaient, commeles mammifères, aux dépens du tissu adipeux 
répandu entre les circonvolutious de leur canal alimentaire. 
Nous ne savons pas si l'hibernation proprement dite a 
jamais été positivement coustatée chez des oiseaux, des 
poissons, des mollnsques ou des annélides. 
BELFIELO-LEFÈVPd. 
HJEI:tTA (LxRs-Jx), éditeur de la feuille suédoise 
qui a pour titre Aftonbladet, est né en t$0t ì Uspsal, où 
son père était trésorier de l'université. Il fit ses Cudes dan 
cette ville, et dcx'int notaire  Stockholm. Pendant la diète 
de 1828-1830, il fonda avec C r u s en s't o I pe la 
de la Dile, qui devint l'organe presque exclusii de l'oppo 
sition. Lorsque.cette diète eut fini sa session, il sesCara de 
Crnsenstolpe; et tandis que celui-ci se chargeait de la r- 
daction de la ieuiile ultra-royalistele Foederneslandet, Hjerta 
publia, à partir de décembre 1830, la feuille radicale 
lonbladet. Une lutte très-vive se soutint entre les deux écri- 
vains jusqu'en 1833, moment où Cruseustoipe fut obligé de 
cesser de faire paraltre son iournal, qui ne trouvait aucnne 
sympathie. Par son talent, son habileté ì donner une tour- 
nure piquante aux nouvelles du jour, Hjerta fit tomber tous 
les autres journaux, et mtme cehli de l'opposition, l'Argus, 
de sorte que son Aflonbladet est arrivé à compter plus de 
5,000 abonnés, nombre ennsidérahle pour un pays tel que 
la Suède, et quoiqu'elle et cessé d'appartenir  l'opposi- 
tion. Les différents ouvrages de cet écrivain n'ont d'ailleurs 
d'intértt que pour la Suède. 
Depuis l'avénement du roi Oscar, Hjerta s'est tout à fait 
réconcilié avec Crusenstolpe. Il est en mme temps libraire, 
et possède une fabrique de bougies stéariques, la première 
qu'on ait créée en Suède. C'est un homme fort actif, et qui 
se mtle volontiers de toutes les entreprises publiques. 
HOANG-HO, c'est-à-dire en chinois fleuve Jaune. Ce 
fleuve prend sa source dans l'intérieur de l'Asie, dans les 
montagnes de Kulkun, parcourt, en formant de grandes 
courbesde l'ouest à l'est, les provinces chinoises de Kan-Sou, 
la partie méridionale de la Mongolie, le Schen-Si, le Schan- 
Si, le Ho-Nan, le Schan-Toung et le Kiang-Sou, puis, aprè 
avoir deux fois traversé dans son cours la grande tuuraille, 
se jette enfin dans la mer Jaune. Ses affluents le. plus con- 
sidérables sont : sur sa rive droite, le Whai-Ho et le Hoai- 
Ho; sur sa rive gauche, le Fuen-Ho. Bien qste des travaux 
bydrauliques importants aient ét exécutés çur ses bords 
pour régler son cours, ses iaondations causent encore de 
grands ravages, surtout  cause des terres qu'il entralne con- 
tinuellement et qui exhaussent son lit; de sorte qu'en bean- 
coup d'endroits son niveau est au -dessus de celui des terres 
environnantes, qui ne sont protégées que par des digues. 
Son cours a un développement d'environ 400 myriamtres, 
et son bassin est d'ì peu près 22,000 myriamètres carrés. 
ItOAX mot anglais, qui se reproduit ì chaque instant 
dans les journaux et les comédies satiriques de nos voisins, 
et sur le sens précis duquel on cousulterait vainement le 
lexiques. Il est très-proche parent de notre mot b I ag u e. 
« Le Houx, nous apprend M. Philarète Chasles, le Blarney 
et le ltumbu9 sont trois incarnations du mensonge, trois 
formes de la chadatanerie magniloquente. Le Blarney est 
spécialement irlandais, nous n'osons pas dire ga.won. Le 
Houx, c'est la mystification savante dont tout le monde est 
dupe, excepté son auteur. Le Humbug, plus sérieux, plus 
vaste, offre la dernière expression du factice, du simulacre. 
du faux sur une large échelle. Quiconque posséde le don 
inné de cette magie triple et souveraine fera passer aisé- 
ment et doucement, sans le voler janais, l'argent d'autrui 
dans sa poche. Le Blarney lui prépare les voies; le Houx 
dispose ses ressorts, et le Humbu 9 couronne son œuvre. 
Comment se plaindrait-on de lui? 11 hérite naturellement 
de vos cus.; et vous restez là, bouche béante, bourse vide, 
Ch face du séducteur qui vous a charmé, tons deuxégalement 
content. l'un de l'autre. Personne n'est dupe; on se dupe 
soi-même : voila le secret! » 
IIOBAITTOVN ci,er-lieu de l'tic,et de la colonie' 

anglaise de la Terre de V a n D le m en, en Australie, siége 
du gouverneur et des autorités supérieures de la colonie, 
est situé sur la c6te sud-est, au pied de la montagne de la 
Table ou Mont Wellington, à l'embouchure du Derwent, 
qei  forme un vaste et excellent port, appelé Derwentha- 
feu. Cette ville, dont la fondation ne date que de 1804, 
contient déjà une population de 20,000 rimes. Ses rues, 
larges de 0 mètres, sont généralement très-longues. Il s'y 
tronve nu grand nombre d'édifices considérables, une ma- 
nufacture de draps, des brasseries, des distilleries; elle 
est le centre d'un commerce actif avec l'Angleterre et les 
Indes, et entretient des communications régulières  vapeur 
avec Sidne% dans la Nonvelle-Hollande. Elle possède plu- 
sieurs banques, dont la première fut fondée en ts, et 
plusieurs typoaphies, où il s'imprime une douzaine de 
journaux et de revues. 
HOBBÉMA (Mem»T), le meilleur peintre de paysa- 
ges peut-être des Pays-Bas, après J. Buysd ael, naquit 
dans le dix-huitième siècle, vraisemblablement à Coeverden; 
du reste, on ne sait rien de sa vie. La plupart des figures 
qu'on voit dans ses paysages sont de Berghem, Van de 
Velde, Lingelbach et J. Vanloo; on peut donc rapporter 
de 1660 h 16[0 son plus beau temps. 11 a surtout repré- 
senté des vues de fortts, des ruines, des villages, etc. Il 
excelle ì peindre les détails, surtout le feuillage, avec une 
netteté de composition, une vigueur et une beauté de coloris, 
avec une si dlicate dégradation de tons, que sous ce rap- 
port il surpasse de beaucoup les plus grands paysagistes. 
Ses tableaix sont dispersés daus beaucoup de galeries. On 
croit qu'il fut élève de Buysdael, auquel beaucoup l'égaient, 
ì cela près que son exécution est moins délicate. 
[ll  a dix ans notre Musée du LouTe n'avait pas un 
seul Hobbéma, et pourtant on pouvait en admirer chez sir 
B. Peel, chez MM. de Bothschild, Paul Périer et Kalkbren- 
ner. Depuis, cette lacune a été comblée. La collection du 
baron de blecklembourg possédait aussi un Hobbéma clair, 
en pleine lumière, tandis qu'ordinairement les paysage 
de ce martre représentent des bords de fortt sombre et 
mélancolique avec quelque mare où se reflète les arbres. 
Ce paysage a été vendu 7,000 ff., en décembre 
L. LOUVET. ] 
HOBBES (Tnoa«s), né à Malmesbury, en 158.8, fit d'a- 
bord, dans sa ville natale, de bonnes Cudes classiques, et 
consacra ensuite à l'Cude de la philosophie d'Aristote ciq 
années passées à l'université d'Oxiord. Chargé de l'édncation 
du jeune lord Cavendish, fils du comte de Devonshire, qu'il 
conduisit en France et en Italie, il ne put reprendre ses 
travaux qu'à son retour en Angleterre, et il s'F appliqua 
de nouveau, surtout à l'histoire de la philosophie, qui le 
détacha beaucoup de la dialectique et de la métapbysique 
d'Aristote, que jusque-là les écoles d'Angleterre enseignaient 
presque exclusivement. Ses liaisons avec Bacon le ratta- 
chèrent au système de ce philosophe, système qu'il devait 
pousser jusqu'au matérialisme, et que suivant ses adver- 
saires il aurait pouss jusqu'à l'aihCame. A cette époque 
néanmoins il se préoccupa de politique. Attaché, par posi- 
tion, aux doctrines monarchiques, il choisit celui.des histo- 
rions de l'antiquité qui lui paraissait le plus propre à com- 
battre le mouvement démocratique du temps, et fl traduisit 
Thucydide d'une manière conforme à son de, sein ( Londres, 
1628). Peu après il retourna en I'rance et en ]talle avec le 
jeune Cliflon, dont il était devenu le précepteur. 
Les mathématiques, le» Cudes positives, commençaient 
alors à intéresser les pl,ilosophes. C'était l'époque des B a- 
con, des Galilée, des Mersenne, des Gassendi. 
Hobbes, lié avec le premier de ces savants, fit, dans un 
troisième voyage en France et en ltafie, la connaissance de. 
tros derniers. C'était en qualité de précepteur d'on second 
fils du comte de Devonshire qu'il se trouvait sur le conti- 
nent. Il , revint bient6t nne quatrième fois, pour se dérober 
aux agitations politiques qui avaient commencë dans sa pa- 
trie ( ! 610 ). Présente à Descartes par Mersenne, il discuta 



108 
ave lui sur les Mdditatios que préparait le rformatenr de 
notre philosophie; mais ces discussions ne furent pas conti- 
nuCs; llobbes y mettait un esprit qui convenait peu à son 
célèbre interlocuteur. Le philusophe anglais tut d'ailleurs 
accueilli avec distinction, et prolongea son séjour en France. 
Le prince de Galles, petit-fils de Henri IV, se trouvait à 
Paris : Hubbes lui donna des leçons de pbilusophie et de 
mathématiques. En mme temps, il composait son ouvrage 
De Cire, dont il fit imprimer, en 1642, un petit nombre 
d'exemplaires pour ses amis. Les suffrages qu'il obtint de 
Mersenne et de Gasseudi décidëreut Sorbière  faire impri- 
mer ce livre pour le public, pendant un voyage qu'il fit en 
Hollande en 1647, et a le faire parallre en français l'année 
suivante. 
Après ce traité politique, Hobbes composa encore en 
France son livre De la iature humaine, ou lments 
fondamentaux de politique ( Londres, 1651 ), f, on LdviŒE- 
t,an, qui parut également à Londres la mme annee, et un 
volume de philosophie morale, les Quoestioes de Libertate, 
de z'ccesstate et de Casu, qui ne forent imprimées toute- 
fois qu'en 1656, après le retour de l'auteur dans sa patrie. 
En effet, ltobbes, champion prononcé de l'absolutisme mo- 
narchique, après s'ètre retiré en France longtemps avant 
les funestes évenements de 169, sur lesquels il ne trouva 
pas une parole comenable, retourna en Angleterre sous le 
gouvernement de Cromweli (1653), et y publia quelques 
ouvrages qui, tout en défendant les principes fondamentaux 
,le la monarchie, affligèrent singulièrement les royalistes. 
Ce furent les Ëlments de Philosozvhie; premiêre partie, 
Du Corps (1655) ; seconde partie, De l'ltomme ( I fiSS) ; et 
les Elcmets de la Loi zvolilique. D'après ces publicalion% 
la cour «le Charles il, rcfugiée en Hollande, le soupçonna 
de vouloir faire sa paix avec le parti national. Cependant, 
a la restauration de 16{30, le roi l'aoeueillit avec bienveil- 
lance et lui fit une pension de cent lives sterling; mais il 
se garda de i'esnployer, et Hobbes ne tarda pas à se retirer 
a la campagne, dans la famille de Devonshire. 
Ayant réuni se» ouvrages isoiés et traduit en latin ceux 
qn'il avait d'abord composés en anglais, il ne put pas mème 
obtenir la permission de les faire imprimer à Londres, et 
cette é,litio» parut à Amsterdam ( 16fi8, tf vol. in-4°). Cela 
se passait au moment des plus fortes et des plus aveugles 
réacti,ms, et Charles il. qui abusait des principes d'absolu- 
tisme que contenaient ces ouvrages, ne voulait pas qu'on 
tirat avantage de quelques opinions iibérales que l'auteur , 
a-ait glissèes, notamment dans le Ldviathan, quoique d'ail- 
leurs on désignàt le parti populaire par le nom de cette 
bëte monstrueuse. Le jugement personnel de Charles II sur 
les opinions de son précepteur était partagé par la cour, 
et de son coté la nation ne pouvait elle-mgme que repous- 
ser un écrivain qui hfi disputait tous ses droits. 
Hohbes était jugé à l'etranger comme en Anglcterre. Ses 
ouvrages étaient traduils, commentés et admirés par les par- 
tisans de l'absolutisme; ils étaient repoussés et combattus 
par tous les écrivains qui avaient foi à la noblesse et à la di- 
gnité de la nature humaine. Hobbes, qui avait des préten- 
tions de divers genres, et qui écrivait en mgme temps sur 
la religion, la morale, la politique, la métaphysique, les 
mathématiques et la liftCature, ne justifiait pas l'opinion 
qu'il avait et qu'il donnait de iui-mgme. Il fut matbémati. 
cien plus que médiocre, quoiquïi se vantat d'avoir décou. 
vert enfin la vraie méthode mathématiqne. Sa philosophie, 
ma -Lré la rigueur de ses démoustrations, partait d'une base 
fausse et aboutissait à d'absurdes consèqueuces. Dans sa 
jeunesse, il s'était attaché exclmivement à la dialectique et 
 la métaphysique la plus subtile ; dans i'ge mùr, il pro- 
fessa un empirisme grossier. La philosophie était pour lui 
la connaissance raisonnée des causes par les effets et celle 
des effets par les causes; mais il ne songea pas un instant 
 demander comment on arrive aux notions d'effet et de 
cause, ni àeaminer de quel droit on conclut de la liaison 
ubjective de la cane et de l'effet , leur liaison objective. 

HOBBES 
Tout objet est pour lui un corps : l'homme est .n corps 
naturel ; l'État un corps artificiel ; la logique, la plffsiquu et 
la métaph},sique sont la science des corps naturels ; la po- 
iitique et la morale, simple branche de la politique, forment 
la science des corps artificiels. Tout ce qne Hobbes dit sur 
la première de ces deux sciences lui est inspiré par ses 
opinions sur la seconde, et tout cela offre aujourd'hnl 
peu de valeur. 
ltobbes n'est original qu'en sa qualité d'écrivain poli- 
tique et moralisle; mais sa doctrine, tout en constituant 
l'unique titre qu'il ait encore pour occuper la postérité, ne 
lui assure plus qu'une renommée douteuse. En effet, les 
principes que l'illustre FIorentin professa à l'usage des Mé- 
dicis, Hobbes les professa à l'usage desStuarts : l'un et l'au- 
tre, partant dn mgme matérialisme, aboutissent au mgmedes- 
polisme; mais ce n'est pas ,Machiavel, sortant de la barbarie 
du moyen g/ge, qui mérite le plus nos colères. Toute so- 
cieté, dit Hobbes, repose sur i'intérgt des sujets, et toute 
la légitimité des rois est dans leur utilité. Ils ne sont et n'ont 
droit d'être que parce q«t'ils sont nécessaires; mais puisqu'ils 
sont nécessaires, ils ont toute puissance. L'essence de la 
royauté estle pouvoir. Erre roi, c'est gtre le maltre. Pour 
gtre le maltre, il faut avoir la force; régner, gouverner et 
administrer, Cest déployer la force. A la verité, le salut 
du peuple est la loi suprgme de l'État, et par conséquent 
le premier devoir «lu prince est de procurer ce salut; mais 
il en est de ce devoir comme de tous les autres : on est libre 
de les accomplir on de les négliger; le roi peut remplir le 
sien on y manquer, c'est son affaire; ce n'est pas celle du 
public : il est irresponsable, et libre de vouloir ce qui lui plalt. 
Personne n'a le droit de s'opposer à sa volonté, car teutle 
monde s'est iivréà son arbitre sanscondition. Ii }, a eu contrat 
entre les rois et les peuples; mais les peuples, las des maux 
de i'etat sauvage, s'ëtant livrés aux rois sans restrictions, 
les rois les traitent comme ils les ont reçns, à discrétion. 
Telle est la condition du pouvoir : constitué par ncessité, 
il n'est réei qu'antant qu'il est absolu. Il est , tel point 
absolu quetoute liberté nationale est une infraction au droit 
du maitre, une violation dn pacte social. Tonte liberté est 
mauvaise sans exception, car le pouvoir s'étend sur tout, 
sur la religion comme sur la police de la cité. On le voit, 
Hohbes, qui se vantait de la conséquence de ses raisonnemenl& 
mettait ce mérite au-dessus de la vérité et, pour y gtre fidele, 
allait hardiment à l'absurde. C'était certes une absurdioE 
que de donner au mailre un pouvoir absolu jusqu'en ma- 
tiëre de religion, car cela impliquait pour le peuple i'obIi- 
gation d'embrasser tour à tour, au ë du maitre, toutes ie 
doctrines qu'il lui plairait de trouver bonnes. Or, cda im- 
pliquait évidemment l'abolition de la conscience et de la 
raison, qne Hobbes faisait mine de respecter. Son syslème 
était donc absurde. Ce système convenait, à la vérité, aux 
Henri YIlI, anx Marie Tudor, aux isabeth et surtout 
Stuarts ; il convenait aussi à Hobbes, dont le scepticisme 
trouvait bon qu'une autorité matérielle fixt la foi publique; 
mais il rêpugnait à la nation anglaise, il répugnait à l'hu- 
manité : et la politique de Hobbos fut repoussée en Ane- 
terre par Glanvii et Clarendon; en Hollande, par Gilbetl 
Cocquius; en Allemagne, par Cocceius, Aibert, Rachei et 
Osiander; en France, et sous le règne mgme du plus absolu 
de nos rois, le hobbésianisme fut frappé de réprobation. 
En définitive, cette fameuse apoloe du despotisme eut 
pour résultat de le faire proscrire en le montrant dans toute 
sa nudité. Ce que M. de ChMeaubriand dit des Stuarts: 
« Ils fixèrent la liberté en iacombattanl, » on peut le dire 
plus lotie raison du précepteur de Charles II. Les écoles 
les plus monarchiqnes répudièrent sa doctrine : celle de 
Cambridge chasa un élndiant qui avait osé la mettre dans 
une thèse; celle d'Oxford, qui vota, en 1683, le principe 
de l'obéissance absolue, supprima dans ses annales quel- 
quea louanges qu'on prétendait donner à Hobbes. Dans 
vieux jom, cet écrivain, qui avait commencé par traduire 
Thuc)'dide en latin, traduisit Homère en vers anglais, coin- 



HOBBES 
posa un traité sur la liberté, quelques ouvrages surles sciences 
exactes et une histoire des guerres civiles, qu'il n'obtint 
pas la permission d'imprimer en Angleterre, que des amis 
firent imprimer en Hollande et dont la publication le rem- 
plissait encore d'inquiètude quand la mort vint le surprendre, 
à l'tge de quatre-vingt-douze ans (le 4 décembre |679), à 
Hardwick, domaine du comte de Devonshire. Il n'avait ja- 
mais été marié. 
Dans la vie privée, Hobbes avait toutes les qualités mn- 
rates; comme écrivain, il déploya une haute capacité; mais, 
animé d'nu orgueil intolérable, n'écoutant personne, lisant 
peu et mal, professant pour les autres, meme les anciens, 
un mépris qu'il ne déguisait pas, tranchant les questions 
avec audace, blessant sans cesse le bou sens et la raison, 
il ne lira de ses talents qu'un parti médiocre ou méme dé- 
plorable. Comme écrivain, il manque aussi de sincérité : s'il 
étonne quelquefois par la force de la pensée, jamais il ne se 
fait admirer ou chérir par la beauté de ses sentiments; c'est 
un talent égaré. Hobbes, à l'$ge de quatre-vingt-deux ans, 
avait écrit sa vie en vers latins. Après sa mort John Aubrey 
publia sa biographie en anglais; Blackburn mit cet ouvrage 
en latin, Th. Hobbesii Vita (1681, in-12). Il parut à Londres, 
en 1750, une édition complète de ses Moral and political 
Works. Molesworh a donné une édition de ses English 
Works (Londres, 11 vol., 1842-185) etde ses Opera latina 
(5 vol., 184-1845). 
C'est dans sa relraite chez lecomte de Devonshire, après 
la restauration des Stuarts, que Hobbes écrivit en assez 
mauvais vers élégiaques sou autobiographie sous le titre de 
Histori Ecclesiastice car'mine elegiaco Concinnata, qui 
ne parut qu'après sa mort(1688), ainsique son Eehemoth, 
or a history of the civil wars from 1640 tu le0. A l'6c- 
casion d'un bill présenté à la chambre des communes po»r 
le faire punir commeathée, il se défendit dans un ingénieux 
ecrit intitulé Historical Varration corcernin 9 heresy and 
the punishment thereof. 
HOBE[tEAU oiseau du genre./a u co n : c'est le falco 
subbuteo de Latham. Ses mœurs diffèrent peu de celles de 
l'émérillon. Quand il cherche sa proie, son allure rap- 
pelle celle de la c r e s s e re I I e. Poursuit-il une alouette qui 
s'élève perpendiculairement, il monte après elle, lad«.passe, 
et la saisit en descendant. Cependant comme le vol du hobe- 
reau est assez bas, si l'alouette a pu s'élever dans les airs 
audelà de la porée de la vue, elle commence à chanter, 
sdre d'Cre hors de danger. 
Le hobereau est gros comme une grive. La cire et les 
cercles périophthalmiques sunt jaunes chez bd comme chez 
la cresserelle. Son cri est aigre et strident. Cet oiseau est 
répandu dans le nord de i'Asie, de l'Afrique et de l'Arné- 
tique et mtme dans toutes les parties de l'Europe ; mais 
il ne s'élève pas dans le nord pins haut que la Suède. Il 
quitte l'Europe en hiver; pourtant il passe cette saison sur 
1 fontières d'Espagne. 
Quelques espèces indiennes de faucons sont connues sous 
le nom générique de hobereaux. 
HOBE[tEAU  que l'on écrivait autrefois hobreau, si- 
gnifie aussi un gentilltre. Henri Estienne, dans son Traité 
de la Précellence du Langage Français, parlant des mots 
empruntés à la fauconnerie, s'exprime ainsi : ..... Volon. 
tiers on dit : C'est un hobreau de celui qui, ayant peu de 
moyens, fait toutefois quelque montre d'en avoir beaucoup. 
Belleau a usWde cette translatiou (métaphore) en ce passage 
d'une sienne comédie : 
L'amoureux est dessus les erres 
De pouvoir tirer hors des serres 
Et des pince de ce Izobreau 
Le. plumes de ce jeune oiseeu. 
il n'est pas aisé d'expliquer l'origine de ce terme dans ces 
deux acceptions, et les étymologistes peuvent se donner car- 
fière. Ménage, le roi de i'étymoloe, le parangon des subtils 
interprètes, croyait que hobereau venait d'umberellus, di- 
mi«utif d'umber, auquel les Latins, ainsi qu'on le voit dans 

-- IIOCCO  09 
Varrou, donnaient la signification de bdtard. S'il uousest 
permis de hasarder une conjecture, nous tirerons ce mot, 
comme désiguation d'un ptit gentilhomme, de hoba, em- 
ployé dans la basse Infinité pour signifier une propriété ru- 
rale peu considérable, d'où hobarii, ceux qui possaient 
un tel bien et tenaient par conséquent un rang subalterne. 
Peut-être, par aualoe, aura-t-on donné ce nom à un oiseau 
peu estimé, et alors ,-contre l'opinion de Henri Estienne, 
ce serait la fanconnerie qui aurait emprunté, au lieu de pr- 
ter. D EIFYENnEBC. 
IIOBHOUSE (Jous CAM), lord BBOUGHTON, 
homme d'État anglais, né en 1786, est le fils de sir Ben- 
jamin Hobhouse, riche brasseur de Londres. Quand il eut 
achevé ses Cudes à Cambridge, oi il eut pour condisciple 
lord B y r o n, il voyagea, en 1809, en Orient, et  son retour 
publia un livre intitulé : Journey into Albania and other 
provinces of the Turlish Empire ( Londres, 18 ! 2). Byron 
lui a dédié le quatrième chant de son Childe.Harold, auquel 
Ilobhouse a ajouté des notes intéressanles. Pendant les cent 
jours, Hobhouse se trouvait en France, et après la bataille 
de Waterloo il publia ses Lettres écrites par n Anglais 
durant le dernier règne de Yapol#on (1815), qui lui 
firent beaucoup d'ennemis, parce qu'il y prenait ouvertemcut 
le parti de l'empereur. Aussi fut-il enfermé jusqu'a la fin 
de la session de 1819 à Newgate, sur l'ordre de la chambre 
des communes, qui vit dans une de ces brochures une at- 
teinte à ses priviléges ; mais cette condamnation mme lui 
valut la popularité qui s'attache infailliblemcnt h la persécu- 
tion, et le fit nommer l'année suivante dépulé à la chambre 
basse par les électeur de x, Vestminster. Il y prit place parmi 
les radicaux les plus violents, et lutla souvent avec avan- 
tage contre la politique tout aristocralique de Cavning. Doué 
de connaissances littérires fort étendues, il conlribua, avec 
d'autres chefs iufluents du parti radical, à la fondation de 
la liewe de Westminster. 
Plus tard, s'étant rapproché davantage des opinions mo- 
défies, il entra en 1831, comme secrélaire d'Ëtat au dé- 
partement de la guerre, dans le minislère Grey, et fut nommé, 
en mars t833, secrètaire d'Etat pour l'lrlande. En dac- 
cord avecla chambre des communes au sujet de la suppres- 
sion de l'imp6t sur les portes et fenëtres, qu'il combattait 
maintenant après l'avoir autrefois appuyèe, il donna sa de- 
mission et se représenta devant les électeurs, qui cette fois 
lui refusèrent leur mandat. En 183 lord Melbourne lui fit 
accepter une place dans le cabinet avec le titre de com- 
missaire en chef des domaines; puis il représenta Nottingham 
 la chambre basse. En 1839 il devint membre du bureau 
central des Indes orientales, et conserva cet emploi jusqu'eu 
18-11, époque od le cabinet ltelbourne fit place à une ad- 
ministration nouvelle. Quand les whigs revinrent au affaires 
en 186, Hobhouse fut nommé président de l'East-lndia 
Board, d'où pour lui la nécessité de se soumettre à une 
nouvelle réélection. Mais l'ardent radical sYtait, comme tant 
d'autres, complétement converti; aussi eut-il la mortification 
d'ètre repoussé par les électeurs de iottingham, et pour 
renlrer à la chambre des communes il lui tallut accepter le 
mandat du bourg de Harwich, fameux entre tous par la vë- 
nalité de ses électeurs. Sou administration fut l'objet des 
critiques les plus reCitCs; aussi quand, à la dissolution du 
cabinet de lord John lusell, en 1851, il fut créé pair, sous 
le titre de baron Broughton de Gv.ford, le tint-on généra- 
lement pour un homme politique à jamais enterré; et en 
effet, sauf un éphémère retour aux affaires dans un nou- 
veau ministère reconstitué par lord J. lussell, suivi bientôt 
de sa démission, on n'a plus entendu reparler de lui. 
HOC (A»). Voyez Av noc. 
llOCCA. Voye - B«sCOL et 
IIOCCO  genre d'oiseaux de l'ordre des gal]inacés, ap- 
partenant à la famille des undipèdes de Vieillot, des longi- 
caudes de Ilainville, des tétradactyles de Latreille. Ces oi- 
seaux sont propres aux régions équatoriales de i'Amérique 
depuis le blexique jusqu'au Paraguay inclusivement, où ils 



t. 10 
représentent en quelque sorte les d Indons. Temminck, 
qui a décrit leur caractère, insiste sur un carac.tère anato- 
mique d'où rsulte prohahleme*t ce bourdennement sourd 
et concentré, cette sorte de ventriloquie que fait entendre le 
hocco  ce caraetère consiste dans la solidité des anneaux de 
la trachée et dans le repli qu'dle fait sur elle-rnme avant 
d'entrer dans la poitrine. 
Les hoccos sont d'une nature très-douce. Ils se runissent 
en troupes nombreuses, dans de vases'forts, où ils se nour- 
rissent de fruits et de jeunes bourgeons. Ils sont polygames. 
Chaque femelle pond, suivant Sonnini, quatre ou cinq œufs 
blancs. La chair du hocco peut tre compare à celle de la 
pinlade. Il serait facile d'élever ces oiseaux en domesticité. 
Le hocco oir (crax alector, Linné) est suivant Tem- 
minck le mitu-poranga de ]larkgraf, le pos ou co 7 d'A- 
mdrique de Frisch, le hocco de la Guiae de Brisson, le 
Iabos de Monte des Espagnols du Mexique, etc. Sa taille 
et  peu près «elle du dindon. Sa huppe est d'un beau noir 
xelouté, ainsi que les plumes de la tte et du cou. Toutes les 
parties supérienres sont d'un noir irisé à reflets verdtres. 
L'abdomen et les rectriceç caudales inférieures sont d'un 
blanc pur. Le hec et les pieds sont d'un noir terne. L'oeil 
est entouré d'une membrane nue d'un jaune noirâtre, s'éten- 
dant jusqu'au bec, où elle forme une cire d'un beau jaune. 
L'iris est noir. Les femelles adultes dilfèrent des mles par 
une huppe plus petite, d'un noir moins brillant, et parune 
queue plus courte. Ce hocco se trouve au Mexique. Sa alC 
marche est lente et grave, son vol bruyant et lourd; il fait 
entendre un cri aigu, et produit aussi quand fl marche sans 
inquiétude ce bourdonnement signalé par Temminck. 
Le hocco roux ( crax ruIrfa, Temminck), hocco du Pérou 
de Bnffon, appartient au Mexique, comme la pr.lente 
pëce, dont il ne diffère guère que par la livrée. Le mme 
genre renlerme deux autres espèces, moins importantes. 
HOCHBEP, G ( Margraves de), ligne collatérale de la 
maison de Bade fondeeen 1190 et éteinte en 1543, qui tirait 
son nom du veux château fort de Hochberg, situé  envron 
un myriamètre au nord de Fribourg en Brisgau. 
Lorsque le margrave de Bade Charles-Frédéric épousa 
en mariage morganatique Louise-Caroline Geyer de Geyers- 
berg, il lui fit donner par l'empereur le titre de comtesse 
de Hochbery. Les fils qu'il eut d'elle furent déclars, en 
1817, margraves de Bade et héritiers de la couronne grand- 
ducale. L'alné de ces princes, Lopold, mort en 1825, avait 
succlé en 1830  son frère cousanin, Louis-Guillaume- 
Açuste, mort sans postérité, comme grand-duc de Bade. 
flOCHE (Lz) naquit le 25 juin 1768 à l1ontreuil, 
faubourg de Versailles. Ses parents étaient pauvres, et son 
père, palefrenier dans les écuries royales, l'y fit entrer, à 
l'ge de quatorze ans, en qualité d'aide surnuméraire, llais 
une vocation plus brillante attendait le jeune Lazare, et à 
dix-sept ans il s'engagea dans les gardes françaises. Là il 
débota par s'imposer les plus dures privations, et, se livrant 
à toutes sorles de travaux, il parvint ainsi  acheter une 
petite bibliothèque, dont il dévorait chaque jour les vo- 
lumes. C'est ainsi qu'il se donna lui*mime une éducation 
que ses parents n'avaient pu lui procurer. La révolution le 
trouva ce que la monarchie l'eut toujours laissé, sergent. 
Adjudant d'undesquatre régimentsde lagarde nationale pari- 
sienne soldée, après le licencieme,t des gardes françaises; 
lieutenant au régiment de Rouergnc en 1792, Hoche se 
distingua au siCe de Thionviile. Le comité de salut public, 
à qui il se présenta après la trahison de Dumouriez, le 
nomma adjudant général : il fut chargé, en cette qualité, de 
la défense de Dunkerque lors de la descente de l'armée du 
duc d'York, et la bravoure intelligente dont fl donna des 
preuves dans ce poste difficile lui vaiut un avancement si 
rapide que peu de temps après, à peine gé de vingt-cinq 
ans, il commandait en chef l'armée de la Moselle. L'ennemi 
était alors en Alsace et bloquait Landau : le jeune général 
en chef voulut, pour débuter d'une manière digne de lui, 
délivrer tte place et le territoire national de la présence des 

HOCCO  HOCHE 
Prnssiens et des Autrichiens ; ses premières tentatives furen! 
malheureuses, et il fut repoussé par les Prussieus, retranches 
à Kaiserslautern. Changeant soudain de plan d'attaque, il se 
porte avec rapidité, à travers des chemius imprafivahles, sur 
l'arme autricldenne de Wurmser, la bat complétement 
sons les lignes de Wissembourg, qu'elle occupe, et oktient 
ainsi les résultats qu'il a espérés. Continuant ses sueur, 
fl prend Germesheim, Spire et Worms. 
Là lut interrompue pour lui une carrière commencée sous 
de si brillants auspices : P ich e g r u avait partagé la gloire 
de Hoche ; mais celui-ci en fut humilié : il prit Pichegru 
en haine, et écrivit coutre lui au comité de salut public : 
ce comité, soit qu'il partagMt la bienveillance de Saint-Just 
pour Pichegru, soit que le jeune commandant de l'armée de 
la ]loselle lui parut retoutable, à cause d'une ambition que" 
de grands talents faisaient ressortir davantage, le manda 
à Paris et le fit incarcérer comme suspect. La détention de 
Hoche opéra en lui nn grand changement : il devint plus 
grave, dompta sa fougue impétueuse, et m$la quelque r- 
serve à sa franchise brusque et imprudente. Le 9 thermi- 
dor lui ouvrir les portes de sa prison, et la rpublique l'ap- 
pela bientôt après au commandement d'une des armé 
destinées à opérer contre la VendC, celle des ctes de Brest 
et de Cherbourg. Il devina d'un coup d'oeil les noyens de 
pacifier cette malheureuse contrée : la discipline la plus ri- 
goureuse fut établie dans son armée ; le système des camps 
retrancb remplaça celui des cantonncments, et des colonnes 
mobiles se mirent/ poursuivre dans tous les sens les co- 
lonnes vendéennes. Le succès de ces mesures amena une 
première pacification ; mais le jeune général la jugeait au 
moins prématurée, et penchait pour la continuation de la 
guerre. La nouvelle levée de boucliers de la ,'endée, l'expé- 
dition de Q u iberon le trouvèrent donc sur ses gardes, 
et il anéantit d'un seul coup les troupes runies à grands 
frais par l'Angleterre pour entretenir la guerre civile. Mais 
si la conduite de Hoche excitait l'enthousia-me de la France 
répuhllcainc, elle aiguisait le poignard de s ennemis, et 
plusieurs tentatives d'assassinat et d'empoisonnement furent 
infructueusement dirigées contre lui. 
A la fin de brumaire an iv, se trouvant  la tëte destrois 
arm_ées rnnies des c6tes de Cherbourg, de Brest et de l'ouest, 
il lit échouer  l'lle-Dien une seconde explitiun dirigée 
par l'Angleterre. Persuadé que désormais les plus saag]anls 
combats seraient sans effet pour écraser un ennemi insai- 
sissable, il conçut et exécuta un plan où la rigueur s'alliait 
à la modération, la force  l'adresse : par ses ordres, des 
colonnes mobiles, parcourant le pays dans tous les sens. 
enlevèrent aux paysans leurs liaux et leurs gras, 
fichant partout cette adresse simple et énergique : • La re- 
publique vous enlève vos grains et vos boeufs pour vous 
punirde votre perfidie; reniez-nous vos armes, et vous au- 
rez vos boeufs, • Hoche avança ainsi une pacification ra- 
pide, qu'accíléra l'arrestation de C h a r e t t e; son adminis- 
tration douce et modérée i'acheva. Le Directoire fit décréter 
que le jeune général et son armée avaient bien mérité de la 
patrie. 
Homme de résolution et d'activité, il ne pouvait rester 
inactif à la tëte d'une armée de 100,000 hommes, le long des 
• cOtes de l'Océan : il mlita donc d'aller attaquer l'Angle- 
terre dans ses intérêts les plus chers, en transplantant les 
idées démocratiques dans une contre prète h lui échapper. 
On sait par quel concours de faoEités l'explition d'l r I a nd e 
écboua sans avoir seulement débarqué. Hoche ne parvint 
rentrer en France, sur la frégate qui le portait, qu'après 
avoir couru des dangers inouis. Pour re¢onnaltre ses services 
pas, le Directoire lui confia alors le commandement de 
l'armée de Sambre et Meuse; mais il le laissa dans la plus 
déplorable inaction, pendant que Bonaparte poursuivait en 
Italie le cours de ses brillantes victoires. Ce ne fut que le 
9 germinal an v que Hoche obtint enfin l'autorisation de 
marcher en avant. Il ouvre la campagne par le '.glorieux 
passagç du Rhia sous le feu de l'ennemi, gagne trois 



HOCHE 
tailles et deux combats b euwlel, Ukerath, Mtenkirchen, 
Diedorf et Heddersdorf: il avait fait faire à son armée 
plus de t0 kilomètres en quatre jours; aucun obstacle ne 
s'opposait plus à sa marche victorleuse, qnand la nouvelle 
des préliminaires de paix de Léoben le força à s'arrèter à 
Wetzlar. 
Sincèrement dêvoué à la république, Hoche vit avec in- 
dignation les menées des députés royalistes dans les conseils. 
Convaincu que la patrie ne pourrait tre sauvée que par 
un conp d'État, il offrit ses services au Directoire, et lui 
envoya mme la plus grande partie de la dot de sa femme 
pour faire face aux dépeuses nécessaires auxque|les il n'et 
pu subvenir, tant sa détresse était grande : le Directoire 
accepta ses services. Déjà des troupes de son armée avaient 
franchi le cercle constitutionnel, quand tout à coup, ef- 
frayé des pouvoirs qu'il avait placís entre ses mains, le 
gouvernement hésita et l'abandonna Ichement. Hoche, 
abreuvé de dégoOts, attaqué ì la tribune par les royalistes 
des conseils et ì peine défendu par ceux q»i l'avaient fait 
agir, se retira ì son quartier général. Ce fut Au g er e a u 
qui coopéra au coup d'État du 18 frtctidor. Il se trouvait 
à la tte des armêes réunies de Sambre et Meuse et du Rhin 
quand la mort vint le frapper le 15 septembre 1797. A peine 
cet evénement fut-il connu dans l'armée que des bruits d:em- 
poisonnement s'y répandirent et se propagèrent dans toute 
la France, mais sans preuves suffisantes. Le Directoire lui 
fit faire à Paris de magnifiques obsèques. Une statue en bronze, 
due ì M. Lemaire, lui a été élevée ì Verilles en 1832. 
Napoléon 
HOCHE-QUEUE. Ce nom désie certains oiseaux 
de la famille des becs-ri ns, qui ont l'habitnde de mou- 
voir continuellement leur queue de haut en bas. Mais les 
oitholostes ne sont pas d'accord sur les espèces aux- 
quelles on doit l'appliquer. Cuvier donne le nom de hoche- 
qee à un groupe qu'il divise en hoche-queue propre- 
ment dits ou luvandiëres et en berger on nettes. Vieil- 
let et Temminck ne voient là qu'un seu| genre. Le »cul 
caractère distinctif établi par Cuvier consistait dans l'ongle 
du pouce plus long et plus droit chez les bergeronnettes 
que che les hoche-queue. 
tiOCiiI[IEIM petite ville du duché de ffassau, avec 
,200 habitants, située sur une haute colline, ì  kilomètres 
de Mayence, sur la route de Francfort, ì peu de distance 
du Mein, dont la rive droite est longée par le chemin de 
fer du Taunns; elle appartenait autrefois au chapitre de 
Mayence. 
Le vin des cteaux de Hochheim est célèbre pour sa force 
et son bouquet; c'est un des vins «lui se conservent le 
mieux, et il en existe dans les caves d'amateurs des échan- 
tillon« qui se vendent d'autant plus cher qu'ils sont pins vieux. 
llOCHKIRCH ou HOCHKIRCHEN, village de la haute 
Lusace saxonne, sur la route de Bautzen à Lobau et à 
(,gale distance de ces deux villes, est remarquable par la 
vic[oire que Daun y remporta, le t octobre 1758, sur Fré- 
défie le Grand, qui perdit 9000 hommes tués ou blessês et 
t01 pièces de canon. Toutefois la perte des Autrichiens ne 
s'était pas non plus élevée à moins de $,000 hommes. 
C'était là un beau triomphe pour Daun ; mais il ne sut pas 
profiter des avantages que cette victoire aurait pu lui donner. 
En 1813, le t2 mai, Hochkirch fut aussi le thtre d'un 
engagement entre les Français et les alliés, dont la position 
était des plus impontes. Nos troupes rëuss'rent à tourner 
l'aile droite des alliés, de sorte que l'aile gauche de ceux- 
ct, appnyée sur Hochkirch, ne put pas résister aux atta- 
ques combinêes de Marmont et de Macdonald. 
HOCHST.DTç ville du cercle bavarois de Souabe, 
sur le Danobe, avec une population d'envirnn 2,500 habitants, 
est célèbre dans l'histoire de la guerre de la 
d'Epagne par un combat qui se livra sous ses murs le 
20 septembre 1703 et par une bataille qui y eut lieu le t3 
aofit 170, bataille à laquelle les Anglais donnent le nom de 
bataille de Blenheim. 

HOEFER I I l 
Les puissance be|ligérantes étaient d'une part la lranoe 
et la Bavière, de l'autre la Hollande, l'Angleterre, l'Autriche, 
la Savoie, le Portugal et l'Empire, à l'exception de l'eleç- 
teur de Bavière, que les coalisés redoutaient d'autant plus 
que la situation géographique des États de ce prince lui 
offrait de nombreux avantages pour lutter contre l'Autriche 
et qu'il avait les go0ts les plus belliqueux. Déjà l'électeur 
avait battu, le 20 septembre 1703, à Hochstoe.dt, le général 
de l'armée impériale Styram, et s'etait emparé de Passau. 
Le mécontentement que provoqua en lui les manières hau- 
laines de Villars l'empcha seul de recueillir tous les 
fruits q,ae  avantage aurait pu lui valoir. Maintenant il s'a- 
gis.ait pour les coalisés de livrer une bataille décisive, dont 
Mariborough avait djì conçu le plan et oh l'armée 
française et bavaroise se laissa entrainer dans les circons- 
tances les pins alCavorables, le 13 aoOt 170. Elle présentait 
un effectif'de 56,000 combattants aux ordres de Tallard, de 
Marsin et de l'Alecteur; l'armée des coalisës, forte de 
52,000 hommes, était commandée par Eugèn e et M a r I bo- 
roug h. Par un inconcevable aveuglement, les géneraux fran- 
çais se croyaient inattaquables dans la position qu'il» aaient 
prise, de sorte que le 13 ao0t, quand i'armée des coalisés 
se mit en mouvement vers deux heures du matin, ils crurent 
que c'était pour battre en retraite. A sept heures, quand les 
ttes des huit colonnes avec lesquelles s'avan.caient Eugène 
et Marlborough étaient déjà visibles, Tallard était encore 
convaincu que ce mouvement n'avait d'autre but que de 
masquer une retraite. A la vérité, dès qu'il eut reconnu son 
erreur, il eut bient6t fait de mettre en ordre de bataille sort 
armée, qui combattit avec une bravoure sans égale. Mais sur 
les cinq heures de l'après-midi Marlborongh perçu la ligne 
de bataille, qui n'avait pas moins de 7 kilomètres de déve- 
loppement. Marlborongh, au lieu de poursuivre l'ennemi 
dans sa fuite, lui coupa la retraite et le força ì mettre bas 
les armes. Environ 11,000 Français etaient restes sur le 
champ de bataille, et au nombre des prisonniers se trouvait 
le maréchal de Tallard lui-mme. Cette bataille eerça une 
influence décisive sur tout le reste de la campagne la Ba- 
vière tomba au pouvoir de l'Autriche, et l'Coile de Louis XIV 
s'éctipa comletement. 
HODOMETRE ou COMPTE-PAS. Vove, Onoxnz. 
HOEFER (Frms,n), médecin litté.rateur, est né le 
21 avril 1811, à Doeschnitz, petit village de la fort de 
Thurine. Il reçut du pasteur du lieu les premiers élément. 
d'instruction classique. A treize ans il fut placé au gymnase 
ou collëge de Rudolstadt. Il munira dès l'enfance une grande 
aptitude pour les langues. Ce n'était pas assez pour lui 
d'apprendre régulièrement au gmnase le latin, le grec et 
l'hébreu; peu épris des plaisirs, il consacrait ses heures de 
récréation d l'étude passionnée du français, de l'anglais, de 
l'italien, de l'espagnol et mème du russe, différents idiomes 
dont plusieurs lui sont restes familiers. Sorti du gymnase, 
le jeune Hoefer fit ses apprts pour un voyage d'instruc- 
tion, dans lequel il essayerait d'appliquer en les perfection- 
nant selon les contrées ses études de linguistique. Après avoir 
visité Hambourg, il s'embarqua à Brème. Le navire où il 
était passager fut jeté sur les ctes de |'O»t-Frieslande. Au 
lieu d'aborder en Angleterre, comme il l'avait espéré, il eut 
à traverser pniblement la Hollande et la Belgique; et il 
était en France quelques jours après la révolution de juil- 
let 1830. 
Etièrement dénné de ressources, mais toujours épris des 
voyages, il s'engagea volontairement à Lille dans la légion 
étrangère, et fut désigné pour l'ex-régiment de Hohenlohe, 
alors à Marseille. Bient6t il partit pour la Grèce. Désen- 
chante de cette terre classique comme du service militaire, 
il profita du licenciement de son régiment pour revenir en 
France. A Lon il rencontra un professeur allemand qui lui fut 
secourable. Ce bienveillant compatriote le plaça au collége 
de Iantoa, et plus tard à Saint-Ëtienne, où il enseigna les 
langues classiques et l'allemand; en mme temps il donnait 
des ltçom de piano et il composait des valses allemandes. 



! l  ttOEFEII 
M. iloefe¢ eut l'heureuse occasion d'Cre présent au sa- 
• aat inspecteur de l'université Burnou! pêre, qui le fit 
¢onnaltre et le recommanda i M. V. Consin. De Saict- 
Êtienne, M. ltoefer vint  Roanne, oh avait ét6 appelé le 
priucipal du collége de Nantua. Là notre pbloiogue tradui- 
sit pour M. Cousin la CritilUe de la Iatson pure de Kant; 
plus lard il l'aida dans la traduction du ZII  volume des 
œuvres de Piston, notamment pour le Time. 11 le seconda 
éga]emeut pour la conlroutation des deux manuscrits du 
Sic et non d'Abeilard, bl. l:loefer fut ainsi le secrétaire de 
M. Cousin, situation peu fructueuse, mais honorable, 
qu'il ne conserva pas Ionemps. Voici a quelle occa»ion 
M. Hoefer cessa ses lelations habituellcs avec M. Cousin : 
il s'était vu installë par lui dans un pelit cabinet de k 
bibliothèque de ]'Institut, afin de vérifier plus commo- 
dément les passages des Pères de l'Eglise qu'Abeilard cite 
dans son Sic et non, mais vaguement et sans indiquer ni 
le livre ni le chapitre d'ou il tire chaque emprunt. Un jour 
M. Cousin tomba sur le fameux passage du prologue : Du- 
bitando ad ceritatem pervenimus (le doute conduit t 
la vérité). Comme Abeilard r,'invoque/t ce propos aucune 
autorite, 51. Cousin n'hsila point a lui faire I,onneoe de 
cette proposition, si analogue a la ¢élebre iltcorie de Des- 
cartes sur le doute. Vite, sur curie visée d'opinions iden- 
tiques, bi. Cousin compnsa pour l'Acadëmie des Sciences 
morales et politiques un mémoire dans lequel Abeilard 
était considrë comme le précurseur de Descarles. Sa lec- 
ture laite et parfaitement accueillie, 51. Cousin int in|ormex 
on secrétaire de l'assentiment flatteur de son auditoire 
académique. « Mais, lui dit tranquillement M. Hoefer, le 
passage dont vous parlez n'est pas d'Abeilard ; il et de 
Cicíron, et mème du traité le plus connu de l'orateur ro- 
main, du De O.'iciis.  Malheureux ! s'écria 5t. Cousin, 
transporté de colère0 ne m'avoir pas garanti de cette me- 
prise !... Que vont penser de moi, en Allemagne, M. Schel- 
ling, M. Neauder? Je suis un homme litterairement déshw 
note! » L'emportement pliilosopbique prit ce jour-la un tel 
diapason et M. Cousin btriettx prodigua tellement les 
épithète, que M. Hoefer se resigna au sage parti de rompre 
anssitOt aec son illustre patron. Toutefois ce divorce në- 
cessaire n'a jamais interrompu completement de l'un à 
l'autre les relations affectueoses et bieuveillantes. 
Après culte separation, bi. Hoefer lut heureux de retrou- 
ver son ancien protecteur Burnnuf, qui lui fit obtenir des 
leçons fructueuses dans plusieurs maisons d'éducation. En 
méme temps il se faisait inscrire parmi les etudiants en 
,tédeciqe de la l=aculte de Paris, et en 180 il était reçu 
docteur. Depuis il a publié bou nombre d'ouvrages. Les 
Elennts de Chimie minérale, ouvrage dans lequel les corps 
soat classés par familles comme en botanique, parurent eu 
18 1. L'Histoire de la Chimie depuis le tenps le plu re- 
cul ju¢u'à notre epogue, contenant une analyse db.laillee 
des manuscrits alchimiques des bibliotl,èques de Paris (2 vol. 
in-8°; Paris, 18t2-18-3)» mourra les vastes connaissan- 
ces de l'auteur, et M. Chevreul tusC, a l'occazion de cet 
ouvrage, quatorze articles dans le Journal des Sacants. 
En 183 M. Hoefer donna la première traduction fraaçaise 
de l'Economicuc d'Axistote, avec quelques autres Iraités 
du même. On li,idoiten outre la Bibliothèque historique 
de Diodore de Sici/e, traduite du grec en français, avec 
notes (  vol in-t2, 1846.); un Dictionnaire de Physique 
et de Chimie (in-18,186) ; un Dictionnaire de Mdecine 
pratulue (1847- 1851  ; un Dictionnaire de otaigue 
Osso ; deux mémoires sur la non-authenticitë de ruineJ 
de It'inive (en »pposition avec M. de Sanicy , lSM. 
M. Hoefer a publié beaucoup de travaux de geoaphie 
sur PAsie et l'Afrique, dans l'Univers pittore¢ue de 
M3[. Firmin Didot. 11 a adressé au ministre de l'instruction 
publique plusieurs rapports sur l'enseiement universitaire 
en Allemagne, et il a en grande partie traduit en français la 
Ghimi¢ de Berzelius. Chargé de la direction de la iogra. 
phiegnérale de MM. Firnin Didot, on trouve de lui dans 

 I-lOFER 
ce recueil un grand nombre d'articles. Il a de plus tra- 
duit en français la derniére édition allemande des Tableaux 
de la zYature de M. A. de Humboldt, et donné une édition 
anote du discours de Cuvier sur les Révolutions 
globe. En 1855 il a soumis/t l'Académie des Sciences une 
nouvelle th6orie des tremblemeuts de terre et des volcans, 
qu'il attribue/ de vírilables orages souterraius. Décoré eu 
1846, le docteur Hoefer a été naturalisd français en 1848. 
D" Isidore Bovm0. 
HOEIS  Faction des) ou HA3fATL Voye'- 
HOELTY (Lou,s-Hs,-Cnws'roPnc), un des meilleurs 
tu»êtes lyriques de l'Allemagne, né à Mariensée, près de 
novre, le 2! décembre 17118, et mort en 1776 a Hanovre, 
était le fils d'un pasteur protestant. En 1760 il alla étudier 
la th6oloe/t Goettingue; mais ses travaux excessifsruint- 
rent bient6t sa santé, déj/t minée par un amour maiheu- 
rotx. Dans le pressentiment d'une mort prochaine, il com- 
po encore plusieurs élégies pleines de mélancolie, et il 
s'occupait de la publication de ses poésies lorsque la mort 
vint le frapper. Un amour profond et secret, les inspirations 
de l'amitié, une satislaction douce et mélancolique causée 
par la conternplation de la nature et du monde, telles sont 
les données fondameatales de ses idylles et de ses éiégies. Ses 
OEuvrespoCtiçues ont été publiées parVosset Stolberg{17. 
HOEMUS on H.E.MUS. Voye'=. 
HOENE VVBONSKI. Voye'. Wo.ss;. 
HOFEB (A_xv), chef de l'insurrection du Tyrol, en 
1809, pendant la guerre entre l'Autriche et la Franoe, était 
né le 22 novembre 1767 à Saint-Léonard, vallée de Paseyr, 
oh son père teuait une auberge. Il en hérita à sa mort, et 
à cette industrie il ajoutait encore un commerce de vins et 
de cl,evanx avec l'ltalie. En 1796 il avait déj/t marché conh-e 
le; Français sur le lac Garda, à la téte d'une compa,,,qlie d'ar- 
quebusiers tyroliens ; et lors de la création d'une nKlice 
nationale en Tyroi, à l'époque de la paix de Lnnélle, 
avait fait preuve d'un grand zèle pour la défense du pas. 
En lsOS, quand tout annonçait la reprise prochaiae des 
hosl]lités entre l'Autriche et la France et lorsque djà la 
dé.'-,affection des populations tyroliennes pour le gouverne- 
ment bavarois en était renne a son comble, il arriva se- 
crètement ì Vienne des députés du .Tyrol, parmi lesquels 
se trouvait AndréHofer et qui étaient chargés de faire con- 
naltre à l'archiduc Jean les souffrances, les VœUX et les 
espérances du pays. Par ordre de l'archiduc on dressa alors 
le plan d'une insurrection en Tyrol; et Hofer et ses amis 
rent mission d'y préparer la contrée. Les mesures adoptes 
réussirent complétement. En trois jours,du 1 ! au 13 avril, 
le pays tout entier fut gagné à la cause de l'insurrection; 
et huit mille hommes de troupes francaises et bavaroises 
furent surpris et désarmés à Inspruck, ì Hall et dans la 
lande de Ster2ing, où commandait Hofer. Le nord du Tyrol 
une fois libre, Hofer marcha vers le sud. et en chassa éga- 
lement les Français, après leur avoir fait essuyer des pertes 
cousidérables. )lais pendantce temps-là, les Françai«, vain- 
queurs à Eckmfihl et a Ratisbonne, ayant marchë sur Vieane, 
les Bavarois,/t leur tour, envaldreut !eTyrol, o ils portërent 
en tous lieux le fer et le feu. Le jour néme de la prise de 
Vienne, le génëral autrichien Chasteler essuya une déroute 
¢onlplte à Woerlg, et dut se replier sur la portion ces- 
Inhale du Breuner, d'ou il parvint ensmteà se frayer unpas- 
sage les armes à la main, en laissant un petit corps aux 
ordres du général Buol pour défendre leTyroL Quand le g- 
néral Ruska avait chassé du Tyrol le comte de Linanges, 
lort aimé dans ce pays, Hofet, à la tte de sa compagnie 
franche, avait déja contribué à combattre l'ennemi. Il pa- 
rut alors surin Brenner, et dans les journées du 2 et du 
mai 1809 iilivra aux Bavarois deux combats, à la suite des- 
quels ceux-ci se virent contraints d'évacuer de nnuvean le 
Tyrol. A peu de temps de là le comte de Linanges, assi3é 
dans la ville de Trente, était délivrë pat les troupes autrichien- 
nus et par les bandes de Tyroliens aux ordres de Hofe. 
Déjà celui-ci était au moment de rejoindre avec son corps 



HOFER -- 
de Tyroliens le gros de l'armée autrichienne chargée de 
livrer Klagenfnrt et de rétablir de la sorte les communi- 
cations du Tyrol, cerné de tontes part et souffrant de 
toutes les calamités de la guerre, avec le cœur de la mo- 
narchie, lorsque l'armistice de Znaim, signé à la snile de la 
bataille de W a g r a m ( 12 juillet 1809 ), stipula l'évacua- 
tion du Tyrol et du Vorarlberg par les Autrichiens et livra 
ces courras à l'ennemi. L'agitation la plus violente éclataalors 
parmi les populations qu'on abandonnait ainsi à leur sort. 
On parlait déjà d'arrOSer les commandants autrichiens Buol et 
Hormayr, d'enlever aux troupes sous leurs ordms leur ar- 
tillerie avec ses mtmitioas,dedéarmer ceux de leurs soldats 
qui retuseraient de passer dans les rangs des iusur,qés et 
nme d'égorger les prisonniers de g:erre .... Heureusement 
ce« excès ne furent point commis, et les troupes autri- 
chiennes purent évacuer le Tyrol sans encombre. 
Cependant le maréchal L e fè v r e envahit le Tyrol/ la téte 
de 30 à 40,000 Français, Saxons et Bavarois, et lanca aussit0t 
ses colonnes dans la montagne par divers points . la fois. 
Hofer s'était d'abord caché dans une caverne de la vallée 
de Passeyr; mais ayant appris que son ancien lieutenant 
Speckbacher, le capucin Joachim Haspinger et Pierre Maycr, 
/ la tte des populations insurgées, avaient entrepris de dé- 
fendre le Tyrol contre l'ennemi et l'avaient mSme battu à 
deux reprises, dans les journées du 3 et du 9 ao0t, André 
Hofer se rsolut à quitter sa retraite, et fut tout aussit6t re- 
connu comme chef des Tyroliens insurgés pour leur ancien 
souverain et la défense de ses antiques droits. Une bataille, 
livrée le 13 ao0t snr le mont Isel, eut pour résultat de con- 
traindre le maréchal Lefëvre à évacuer le Tyrol, où André 
Hofer dirigea alors toute l'administration civile et mili- 
taire, au milieu des plus bizarres anomalies, jusqu'à la paix 
de Yienne (  octobre). L'archiduc Jean, dans une procla- 
mation adressée aux Tyroliens, leur ayant alors ordonné lui- 
mime dose sonmettre, et les montagnes du Tyrol se trou vaut 
de tontes parts envahies par des forces ennemies, André 
fer adressa, en novembre, sa soumission au vice-roi Èugène 
et au généralen chef bavarois. 5lais trompé parties bruits de 
victoires et d'entrée de l°archiduc Jean dans le pays, il re- 
commença les hostilités; et les bandes qu'il commandait, mal 
soutenues par les populations déconragées et latiguees, du- 
rent, ma]gré quelques heureux engagements, finir par céder 
à la snpériorité du nombre. On avait à cœur de sauver la 
vie d'André Holer; mais tel était son amour pour le sol natal, 
qu'il refusa de se réfugier mSme en Autriche. Pendant deux 
mois il se tint caché au milieu des neiges et de» glaces, 
dans une cabane du Passeyr; et les promesses comme les 
menaces des généraux français furent également impuis- 
sautes à provoquer dans ces montagnes un seul traltre qui 
vint rvéler la retraite dn proscrit, dont la tte avait éle mise 
à prix. Enfin, un prStre appelé Donay, jadis l'ami intime de 
Holer et qui croyait maintenant avoir à se-plaiadre de lui, 
vint révéler au général Baragney d'Hilliers le nom d ce.lui 
qui fournissait des vivres à Hofer dans sa retraite. Moitié 
menaces, moitié promesses, on parvint alors à obtenir de cet 
homme des révélations par suite desquelles André Hofer 
lut pris, le 20 janvier 1810, avec toute sa famille. Il fut con- 
duit sous une imposante escorte à Mantone et traduit de- 
vant un consolide guerre prsidé par le colonel Bisson. Les 
voix se partagèrent, et la majorité des juges repoussa la 
condamnation à la peine de mort. Mais une délche télé- 
graphique expédiée de Milan ordonna que Hofer serait fu- 
sillé dans les vingt-quatre heures, de manière à rendre inuti- 
les les intercessio[L en favenr du condamné auxquelles on 
s'attendait de la part de l'Auchiche; intercessions qui eussent 
eu d'antanl plus de chances de réussir, qu'à ce moment 
poléon étalt à la veille d'épouser Marie-Louise. 
André Hofer fut fusille à Mantoue, le 20 février 1810. 
]I mourut avec la plus froide intrépidité, refusa de se lais- 
ser bander les yeux et commanda lui-mme le feu. En 1819 
sa ramifie fut indemnisée par l'empereur des pertes qu'elle 
avait essuyées, en mme temps qu'elle recevait l'expédition 
IL-l '. DE L/k OVIIS.  'o 

HOFFMANN i I  
des lettres de nblesse déjà accordées à son auteur en fS09. 
En t$2t une stat«e en marbre a été érigée/ la mémoire 
du héros de lïndépendance tyrolienne, a Insprdck, dans 
l'église des Fanciscains, près du tombeau où repose l'empe- 
reur Maximilien I «. 
HOFFMANN (Fno-/.ac), le plus célèbre médecin de 
son siècle après Bon rllaav e, né le 19 février 1660, à Halle, 
oi son përe était médecin du duc de Saxe, y fit ses pre- 
mières études, et fut de bonne heure initié par son p/:re aux 
connaissances nécessaires dans la carrière qu'il devait suivre. 
E 1681 il fut reçu docteur à lna, oi il s'établit; pls tard 
il se fixa à Minden (1685), en Weslphalie, puis/ Halberstadt 
(tçee). Lors de la fondation de l'univerité de Halle, l'êlec- 
te«r Frédéric III de Brandebourg l'y nomma, en 1693, " une 
chaire de médecine. Dès 1703 le roi de Prusse Fréderic I e 
lui avait iuutilement offert la place de son premier mé,Jcin ; 
tontelois, ce prince étant tombé gravement mala,Je en 1708, 
il ne put se défendre d'accepter ce titre, et, tout en conser- 
vant sa chaire, il se rendit à Berlin. Fatigué de la vie de 
cnurtisau et de l'iaimiti de l'ancien n du roi, Gun- 
delheimer, il revint en t72 à llalle, qu'il contin,la d'ha- 
biter jusqu'à sa mort, arrivée le 12 novembre 1742. 
Hoffman a rendu de grands services à la mcdecine llra- 
tique; il eut recours à une foule de moyens thérapentiqnes 
nouveaux, et en expliqua l'emploi. Grâce au regard pené- 
trant qu'il jetait sur la nature, il sut obtenir de ands succès 
par les moyens les plus simples et notamment par la diëte. 
Ses recherches sur beaucoup d'eaux minéra]es généralisèrent 
l'emploi de ces agents naturels, et quelques preparatious 
médicales, notamment l'Eli.irium vicerale ou lume 
de vie d'Hoffmann, et le Liquor anodynus mineralis 
ou Liqueur d'Hof.fmann et aussi Gouttes d'Hoffmann 
(voye-- ETun), dont il enseigna la composition et qui portent 
son nom, sont maintenant encore d'un usage général. On 
reconnalt moins de valeur au ssteme suivant lequel il attri- 
buait au corps des iacultes propres et une vie indépendante 
mise en mouvement par une substance éthérce excoriée- 
ment subtile, qui serait l'àme sensible (anima sensitiva). 
Cette substance s détachcrait en partie du corps lui-mme 
et serait en partie tire par lui de l'atmosphère, mais serait a 
son tour soumise, "dans ses mouvements, à une me supé- 
rieure, inconnue. Les causes de maladie agiraient sur la 
partie solide par pression et par tension ; l'altération des 
humeurs serait un pllénomène qui ne se développerait que 
dans le cours de la maladie; les ma]adies elles-mmes con- 
sisteraient en un mouvement trop fort ou trop faible, et il 
faudrait les distinguer d'aprës ce principe. C'est ainsi que 
Holfmann voulait établir que l'essence de la vie est déter- 
minée par masse, nombre et poids. Il appartient par consé- 
quent a l'école des iat rotant hœema ticiens; circons- 
tance qui s'accorde parfaitement avec a prédilection pour 
les matlé.matiqnes cicuce vers laquelle il s'niait senti en- 
tralné dès sa plus tendre jeunesse. Son systëme, bien que 
en premier lieu il repose sur une hypotbèse tout à fait in- 
soutenable, et qu'il soit en outre extTmement incoberent 
dans une foule de déta]Is, compta unmoins beaucoup de 
partisans, par opposition au système de son riçal St ah l, 
parce qu'il sut l'exposer d'une maniëre claire et saisissable. 
HOFFMANN ( EaSET-Tnr.oOn:-Arr.É:, OU plut6t 
V'LneLU ), l'un des conteurs allemands les plus originaux, 
naquit à Koenigsberg, le 2-I janvier 1776. De bonne heure il 
montra un goOt prononcé pour les aventures singuliëres, 
et une très-forte inclination pour les choses d'art. Quand il 
avait passé une partie de sa journée à écouter chanter sa 
mère, oit sa belle tante Sophie jouer du clavecin, il s'amusait 
à effrayer ses amis par mille tours d'espiéglerie. Souvent 
encore '-I barbouillait des figures sataniques sur la Bible de 
son aïeule, et jouissait de la peur qu'il lui avait ainsi causée. 
La sévérité de son oncle, quelque grande qu'elle foi, ne put 
réussir à changer le .tonal de ce jeune caractère, qui, malgre 
les prévisions fcheue de  mère, devait tre plus tard si 
simple et si bon. 15 



Au collége, Itoffmann se fit remarquer de ses maitres 
par son aptitude aux Cudes srienses et par sa grande ap- 
plication. Quand il fut question pour lui de faire choix d'une 
carrière, il  dcida pour la magistrature, et apporta aux 
cours universitaires, qu'il tir obligé de suivre alors, la 
mtme assiduité qui l'avait fait déjà distinguer au collé.ge. 
Ses éludes ne l'absorbaient pas entièrement cependant ; il 
trouvait encore chaque jour quelques heures  consacrer à 
la musique. Un incident, fort grave h son ;lge, vint mëme 
ajouler une entrave de plus h ses occupations : il devint 
amoureux d'une dame à laquelle il donnait des leçons de 
chant, et il composa vers ce temps, pour plaire à sa mai- 
tresse sans doute, deux essais de romans qui ne furent pas 
imprimés. Les titres seuls (Cornaro et Le MysNrieua: 
nous en sont testC. 
Le 22 juillet 1795, après avoir passé un examen brillant 
il se rendit à Giogan, chez un de ses oncles, conseiller de 
cetle ville. L'ennui etant venu l'y saisir, il se remit au tra- 
vail avec nne espëce d'acharnement, et ne larda pas h subir 
un second examen, plus brillant encore que le premier, après 
lequel il fut nommé rél'érendaie, L'oncle auprès de qui se 
trouvait Hoffmann ayant été nommé, dans l'AtWde 1798, 
conseiller intime au tribunal de Berlin, il s'y rendit avec son 
neveu. Ce fut dans cette ,ille qu'Hoffmann passa son troi- 
sième et dernier examen, qui le fit nommer assesseur de la 
régence de Posen avec voix consultative. Un de ses anciens 
camarades decollége vint le voir à cette epoque, et les deux 
jeunes gens entreprirent ensemble un voyage, pendant lequel 
ils méditèrent de visiter plustard toute l'Italie. Pour le mo- 
ment, Hoffmann se rendit à Posen, lieu de sa desti[aIi,n. 
Hoffmann a.vant eu le malheur de blesser, par des carica- 
tures, le gnéral Zastrow et d'autres personnages puissantg 
de cette sille, lut envoyé comme en exil à PIozk, oh il se 
rendit en 10% accompagné d'une jeune Polonaise, qu'il avait 
rrcemment épousée. Le séjour de Plozk étant fort tri.te, il 
se ferait au travail de nouveau, et Cendit mëme le cercle 
de ses occupations. Il menait de front son emploi, la mu- 
sique et la peinture, lorsqu'au commencement de IS03 il 
fut envoyé ì Varsovie : l'cuitée des'Français dans cette 
sille, en 1806, mit fin h ses fonctions adminitratives. 
A Varsovie il avait continué de s'occuper de peinture, et 
surtout de musiqoe, 11 avait entrepris la direction d'un con- 
cert périodique organisé dans le palais Minszk..Maintenant 
sans emploi, et sentant la misère approcher, il résolut, après 
une assez grave maladie, de se rendre h Berlin pour y cher- 
cher fortune. I quitta donc Yarsovie en 1807, aprts avoir 
renvoyé sa femme dans sa famille. 
La misère, qu'il avait prévue, vint le saisir en effet à Ber- 
lin. Au moment oh ses souffrances etaient le plus grandes o 
pour comble de malheur, il apprend que sa fille vient de 
mourir, et que sa femme est également en un danger 
vrme. Obligé, au milieu de ces nouvelles douloureuses, de 
songer h sa propre destinée, il finit par obtenir une place de 
directeur d'orchestre au théàtre de Bamberg. Il y court. 
Mais la situation de cethé,tre étant mauvaise, Hoffmann se 
trouve bient6t sans emploi et aussi miȎrable que la veille. 
Ne sachant que devenir, il imagine alors de retourner à ses 
anciens goùts littéraires, et il devient collaborateur de la 
Ga'.ette musicale de Leipzig, dan laquelle il publie d'abord 
la Biographie de Kreisler. Gràce h cette industrie nouvelle, 
sa position devient plus supportable. Un de ses oncles meurt 
en 1811, et lui laisse quelque argent avec lequel il paye ses 
dettes. Deux ans après, obligé d'avoir recours pour vivre 
d'autres expédienh, il prend la route de Dresde, oh on lui 
offre la place de chef d'orchestre. Cette fois encore le démon 
de la guerre semble atlaché à sa poursuite, et il est témoin 
de la bataille gagnée par Napoléon aux portes de Dresde, le 
27 aofit 1813. 
Le 9 drc¢mhre de la mëme annre, Hoffmann se rend 
Leipzig avec sa troupe, Il ,/tombe malade en 15|6, et y l?u- 
bile pendant sa convalescence ses Fantaisies à la rnanière 
de Cailot. La misère le force bientôt de ,iuittor la direction 

HOFFMANN 
de son orchestre. Heureusement, fl ohtienL à force de solfi- 
citations, de rentrer en qualité de surnuméraire dans les bu- 
reaux de Bedin, et commence, apr tant d'années malheu- 
reuses, à goûter un peu de bonheur et de repos. 
La fortune, honteuse de s'acharner si longtemps contre un 
homme, lui aourit enfin. En Janvier 1816 il est nommé con- 
seifier au kammergericht, et son opéra d' 17ndine e.st joué 
à Bedin avec le plus grand suc¢,ës. Tout à coup, et comme 
par l'effet d'un enchantement, le nom d'Hoffmanu devient 
populaire. !1 est fdté et recherché partout. Les libraires lui 
offrent des sommes énormes, et se disputent ce qui échappe 
à sa plume. 11 se trouve riche du jour au lendemain. Hoffmann, 
ceci est facile à concevoir, ne passa pas froidement d'un 
trtme à l'autre, et chercha dans les plaisirs présents l'oubli 
de sa misère passée. Il y eut chez lui une réaction violeute. 
L'ardeur de son sang, contenue pendant les ann6es bouil- 
iantes de la jennesse, se mourra d'autant plus impetueuse; et 
il s'adonna à la débauche et au vin. Nous devons dire, ce- 
pendant, que ces excès, quelque déplorables qu'ils pussent 
être, furent beaucoup moins longs et beaucoup moins ex- 
trtmes que bien des gens ¢at feint de le croire. Ce qui a 
poussé h prêter q,clque fui aux contes rid.icules débites sur 
Hoflmann, c'est sans conlredit la lecture de ses œuvres. On 
s'est plu  faire un m;:me homme de cllacUU de ses hëros et 
de lui. Si ce n'etait là qu'une erreur sans cuuséquence, il se- 
rait inutile de la relever; uais comme elle attaque le carac- 
tère etla vie privée d'Hoffmann, ou ne peut se dispenser de 
protester et d'invoquer l'authenticité des faits. 
En 1.g19, fatigné par les seilles et le travail, Hoffmann 
tomba malade, et composa, dans le délire de la fièvre, la 
nouvelle si bouffonne du Petit Zacharie. De 1819 à 1, 
il publia encore Les Frères Sérapion, Le Chat Murr et La 
' princesse Bra»ibilla; aprës quoi, ses souffrances nouvelles 
ne lui permettant plus d'écrire lui-lnême, il prit le parti de 
dicter ce qu'il composait. La mort le surprit dans cette occu- 
pation, le 25 juin 1822. Ctnr.s-Acr 
! IOFFI.kX N (Faarço[s-Broir-Htmn) né à Nancy, en 
tT;0, d'une fandIle originaire de l'Allemagne, vint à iarh 
en 1785, et s'y fit distinguer de la foule des versificateurs d 
ce temps par un recueil de vers qui aunonçait un véritable 
talent Ooétique. Ce fut seulement quatre ans après qu'il fit 
sou drbut dramatique par la tragédie lyrique de Phëdre, 
suivie de celle de Yevht, qui au bout de trois ans obtint 
également du succès. Euvhrosyne et surtout Stratonice, 
ath,mentèrent hea,,coup sa renommée, et en confiant ces 
opéras à un musicien pauvre et ignoré, il eut l'honneur de 
deviner Me hul et de le donner a la France. Ce fut prin- 
cipalement pour le théàtre de l'Opéra-Comique que travailla 
Hoffmann depuis ce moment, et il y donna près de quarante 
ouvrages, qui presque tous curent des réussites plus ou 
moins eclatantes, Ariodant , lontenero , Le Secret, 
Rende-.-vous boarçeois, etc., prouvèrent qu'il savait pas- 
ser sans efforts du drame sombre h la comédie, ou mè, neà 
la gaieté la plus folle. Son opëra d'Adrien, qu'il ne parvint 
à faire jouer qu'aprës de nombreuses difficultés, et que 
jury des prix décennaux jugea digne de la premiëre mention 
honorable après La Vestale et celui de La Mort Abel, 
furent pour lui de nouveaux triomphes sur notre première 
scène lyrique. 
Hoffmann n'a donné au Thritre-Français que deux bluettes., 
L'Oriçinal et Le Roman d'une heure, dialoguées toutes deux 
avec beaucoup de grâce et de finesse. 11 ne devait pas 
moins briller dans une autre carrière, que lui ouvrir sou 
ami Étienne, en le faisant eutrer, ch 1805, au Journa/ 
de Dbats, nommé alors Journal de l'Empire. Déjà il 
avait fait ses preuves dans la polémique littéraire par la d6 
lense de son Adrien contre Geoffroy, qui avait trnuvë 
en lui an rude joutent. Il apportait dans les fonctions de 
journaliste critique des qualités qui y nt assez rares : une 
instruction profonde et étendue, qui ne te laissait étranger 
h aucune scicnce; une scrupuleuse exactitude h lire et me- 
diter les ouvrages dont il renda;t .umpte ; antre une haine 



HOFFMANN -- 
des coteries, une volonté d'impartialité et d'indépendance, 
qui le décidèrent à se retirer à Passy et à n'y recevoir au- 
cune visite, pour se soustraire à toute influence. On sait 
quelle fouie d'articles pleins de raison, de sens et d'une 
spirituelle malice il fouruit au Journal des Ddbats; on se 
rappelle urtout ceux où il fait |ustice des jongieries du 
mesmérisme et du somnambulisme ; ses lumineuses et pi- 
quantes appréciations des œuvres de Chateaubriand, de 
Pradt, de M =e de Genlis, etc., etc. Ennemi de tous les 
chaflatanismes, il stigmatisa surtout celui des |Cuites, que 
la Restauration nous avait rendus, avec une logique et une 
vigueur que Pascal n'efit point désavoubs. Attaqué depuis 
longtemps d'assez graves infirmités, Hoffmann mourut subi- 
tement, le 25 avril 188, à l°ge de soixante-huit ans. Deux 
éditions de ses Œuvres complëtes ( Io vol. in-8°), publiées 
dans les trois aunées qui ont suivi son décès, attestent 
assez la réputation qu'avait acquise parmi nous cet habile 
critique, cet élégant écrivain. OvPa. 
HOFW YLç vaste domaine, situé à 9 kilomètres au nord 
de Berne, et célèbre par les importantes créations de Fe !- 
lenberg. 
HOGABTH ( WmuA ), célèbre dessinateur, peintre 
et graveur, naquit à Londres, en 1698. Son père, correcteur 
dans une imprimerie, le plaça chez un orfèvre qui gravait 
la vaisselle plate. Lorsqu'il sortit d'apprentissage, fl d'avait 
qu'une faible idée du dessin, et cependant il se mit à graver 
des armoiries et des adresses. Ces premiers essais lui don- 
nèrent alors à peine de quoi vivre. Hewensement son 
génie pour la caricature se développa de bonne heure; son 
premier essai en ce genre fut la caricature d'un buveur qui, 
dans une rixe, reçoit sur la tgte un violent coup porté par 
son adversaire avec un pot de bière. Notre artiste rendit 
de la manière la plus comique et la plus vraie l'horrible 
grimace du blessé,dont le visage était tout couvert de sang. 
Une autre fois, il fit la caricature de son b6tesse, qui le 
tourmentait pour le payement de 20 shellings; mais ces pré- 
ludes le laissèrent encore dans l'obscurité, et plusieurs fois 
il fut obligé pour vivre de peindre des enseignes. Depuis 
il eut l'idée de les reproduire dans quelques-unes de ses gra- 
vures. Enfin, il eut occasion de travailler pour des libraires ; 
et l'un d'eux lui donna à faire des vignettes destinées à une 
édition du poême d'Huaibras, publiée en 1726. Ses ingé- 
nieuses compositions furent remarquées, et ont été repro- 
duites dans l'édition de 174tf et dans la traduction française 
publiée en 1757. Il s'essaya ensuite dans le portrait, et son 
talent  attraper les ressemblances, à bien grouper les ta- 
bleaux de famille, lui procura bient6t de nombreux travaux. 
En 1730, il épousa la fille du peintre d'histoire Thornhill; 
mais ce tut sans le consentement du père, qui pourtant se 
réconcilia avec les jeunes époux lorsqu'il vit son gendre 
acquérir de la réputation et de la fortune. C'est vers cette 
époque en effet que se développa son talent extraordi- 
naire pour représenter les folies et les ices de son siècle. 
Dans la suite de six grav u res intitul The harlot's progress, 
pour laquelle il réunit jusqu'à 2000 souscripteur% et dont les 
tableaux originaux furent détruits par un incendie en 1755, 
il représenta la vie d'une prostituée, et dans une autre 
série, compose de Irait gravures, la vie d'un débauché, 
"Phe rake'sprogression. Après ces planches, les plus clèbres 
,le celles qu'il publia de 1733 à 1738 sont La Foire de South- 
wark, Une Conversation moderne à minuit, Le Poête 
malheureux et Les Comédiens dans la 9range..Peu satisfait 
«le la hauteur à laquelle il était parvenu en ce genre, il 
oulut aussi prendre rang parmi les pa'mtres d'histoire; 
mais le delaut de justesse du dessin et le manque de grilce 
et de dignité lui étaient devenus tellement babituels, qu'il 
ne dépendait plus de lui de changer la nature de son talent. 
Dans ses compositions les plus sérieuses, il se laissait sans 
le vouloir aller  la caricature, ainsi qu'en témoignent ses 
toiles L'Êtan 9 de Bethelsda, Le bon Samaritam, etc. 
Aprës avoir repris la direction qui convenatt à son ta- 
lent, il donna en 1740 The enraged Musician; en 1745» 

HOGENDOI[P 
The Marrlage à la mode en six feuilles, dont les origi- 
naux furent acbetés pour la Galerie Nationale; en 174, 
The Effects of lndutr9 and ldleness; en 178, T 
Match to Finchle9; en 179, Te Gare of Calais; et en 
1751, Tte Stagesof Cruelt 9 (! planches). 
En 1753, il publia son Anal9se de la Beauté, où il re- 
présente la ligne sinueuse comme la forme la plus agréable 
pour l'oeil et prétend déterminer les lignes qui constituent 
la forme de la beauté. Mais cet ouvrage, loin d'ajouter 
sa réputation, le couvrir de ridicule aux yeux de ses con- 
temporaius. 
11 fit ensuite paraltre en 1755 Four Prints of an Election, 
et etl t72 The /mes, mordante satire contre Pitt. Une 
toile ridicule, Sigtsmonda (1757), que l'artiste, visible- 
ment dégénéré, prétendait Atre le peudant d'un des chefs- 
d'œuvre du Corrége, lui valnt d'amères diatribes, dont il se 
sentit vivement blessé. Sa santé s'altéra, et il mourut en 1764, 
à Leicesterfields. Eterré à Chiswick, on éleva une pyra- 
mide sur son tombeau, et sur l'une des faces on grava son 
épitaphe, composée par l'illustre Garrick, son ami. 
Force est de convenir que le dessin de Hogarth est dé- 
fectueux. Sans doute, sa manière est ingénieuse ; mais il se 
borne toujours à de simples esquisses, sa couleur est mau- 
vaise, et ses tableaux manquent d'effet. Dans ses gravures 
l'exCurion est souvent superficielle et médiocre. Son grand 
mérite, c'est la pensée, c'est l'invention, c'est la peinture des 
mœurs de son siècle et de son pays; et voilà pourquoi il 
est parvenu à une célébrité telle qu'en ont seulement les plus 
grands génies ; on I'a laite non à l'artiste, mais au créateur 
d'une suile de caractères sans pareils. Ses gravure, mème 
les plus insignifiantes, se payent aujourd'hui des prix fous. 
Aprës la mort de sa femme, arrivée en 1789, les planches 
et furent vendues par sa nièce, miss Lewis, à Poydell. Ni- 
chols a [ait paraltre une belle édition de ses œuvres d'après 
les planches originales retouchées par Heath (3 vol., Londres, 
1820-1822). 
HOGENDOP, P ( GtJssrax-Cu«P,x.r, comte nf), l'un 
des hommes d'État les plus distingués des Pas-Bas» né 
Rotterdam, en 1762, entra d'abord au service de Prusse, 
et fit la guerre de succession de Bavière. A la paix, il revint 
danssa patrie, où il fut placé, en 1782, dans la garde 
du stathouder; plus tard, tout en conservant son grade, il 
étudia le droit à Lede. Par suite de son attachement à la 
maison d'Orange, il quitta le service lorsque le parli des pa- 
triotes eut pris le dessus. Au rétablissement du stathou- 
dérat, il tut nommé grand-pensionnaire de Bottcrdam, et 
donna sa démission lorsque, en 1795, les Français firent la 
conqugte de la Hollande. Il avait formé, en 1802, le plan 
de fonder au cap de Bonne-Espérance une colonie pour 
les partisans de la maison d'Orange; mais ce projet échoua, 
et lui coOta la plus grande partie de sa tortune. Lorsque, en 
1813, les armées des alliés s'avancèrent victorieuses, il 
réunit à La Haye les partisans du prince d'Orange, et con- 
tribua efficacement à soustraire la Hollande au joug des 
Français. Bient6t après il fut nommé président de la com- 
mission chargée de la rédactiondu nouveau projet de cons- 
titution; et en raison de l'influence qu'il exerca sur ses col- 
lègues, on peut à bon droit le considérer comme l'auteur de 
la constitution des Pays-Bas. Il eut ensuite le département 
des affaires étrangères, fut élevé à la dignité device-président 
du conseil d'État et cr comte en 1815; mais dès 1816 
le mauvais état de sa saute le détermina à se retirer des 
affaires. Comme membre de la seconde chambre des etats 
généraux, où il fut Alu en 1815, il appartint au parti de 
l'opposition qui se torma pour défendre les droits du peuple 
et la constitution contre les mesures du ministre vau blaa- 
rien. Il renonqa alors  siéger dans la première chambre, ou 
il s'était fait remarquer cemme ami du peuple et comme 
éloquent défenseur de la liberté du commerce, parce que les 
discussions n'en étaient pas publiques; ce qui, dans son 
opinion, était contraire au caractèt'e essentiel du s}stème 
représentatif. 11 mourut à La Haye, en 



   HOGEN I)OIP 
HOGEDORP (Dn n ), frère aihWdu précëdent, né en 
! 7t • d'abord ambassadeur de Hollande à Saint Pétcrsbour, 
puis gouverueur dune petite colonie dans les Grandes In- 
des, fut ministre de la guerre sous Louis Bonaparte, en 
I0; et lapoléon, auquel il était sincèrement dévoué 
omma, en 15tl, général de division, puis en I1 son 
aide de camp. Successivement gouverneur de Koenigsberg 
de A-ilna et de Hambourg, il se lit partout dëtester des po- 
polations h cause de sa dureté et de la brutalité de ses pro- 
cédé». Après la chute de Napoléon, il retou ma dans sa patrie; 
mais à peine l'empereur fut-il revenu de r|le d'Elbe, que 
Hogcndorp int le rejoindre h Paris..Napoléon étant tombé 
une seconde fois, Hogendorp passa, en 1816, au Brésil, où 
il vécut isolé, et mourut daus un domaine voisin de ]io- 
Janeiro. 
IIOGG (JASES), dit le Berger d'Ellric;, né en t772, 
au village d'Ettrick (Écosse méridionale), était fils 
éleveur de bestiaux ruiné; à Pàge de sept ans, il aai! a 
peine reçu, à l'école, quelques uotions élémentaires, lors- 
qu'il lui fallut aller dans les montagnes garder des vaches 
et plus tard des moulons. Les traditions et les cbants po- 
pulaires, courant en Écosse de bouche en bouche, nourri- 
rent son imagination aisément inflammable. Sans savoir en- 
coreni lire ni écrire, il co,nposait déjh des poésies ; et quand 
il eut, non sans peine appris l'un et l'autre et commencé a 
consigner ses poëmes par écrit, il fut rencontré par Walter 
Scott, occupé alors à rassembler des ballades et des cban- 
sons pour son Minslrels!/ of the Scottish Border. En- 
couragé par cet bomme illustre, il apporta ses manuscrits 
à Êdi,nbourg, en y conduisant des moutons au marcfié, et 
llt imprimer à ses frais un certain nombrede ballades(flor- 
derer Ballads; Édimbourg, 1805); mais il y perdit son 
argent. Walter Scott le consola, et le poême qu'il donna en- 
suite : The Mo'urdan Bard, ainsi qu'un Esa!/on Sheep, 
lui rapportërent un bénéfice de 00 liv. st. Pourtant «les en- 
gagements inconsidéres lui enlevèrent son avoir, et co,mne 
personne ne voulait plus lui donner de moutons à garder, il 
se rendit, en fcvrier tSt0, à ]51imbourg, o0 il entreprit 
une publication hebdomadaire, The Sp/, qui ne se soutint 
que peu de temps. En 1813 il fit paraitre : The Queen's 
Wae ; en tsar, Tle ]oe/ic Mirror ; en 1815, The 
grn oF the Sun; et en 1816, .ladone of the Moor. Le 
premier de ces poëmes, qui contient une série de bal- 
lades pleines de richesses potiques, est de tous ses ou- 
vrages celui qui eut le plus de succès. Il écrivit ensuite 
en prose des légendes merveilleuses et des tableaux du 
caractère national écossais, qui obtinreutun rapide écoule- 
ment, notamment The Brownie oJ Bodsbeel (tStS); 
Winter evenin9 Tales (t89); The three Perils of llan 
(182); The three Perils of IVoman (18a}; Jacobile 
Relies (2 vol., 1819-.1 ), et d'antres encore, q,i, tirés du 
BlacAwood's llaga:ine et rëunis sous le titre de The She- 
lherd's Calender, parurent ì Londres (2 vol. 1829). Il n'a- 
cheva que plus tard un poeme qu'il avait conunencé sous 
le tilre de Queen ttynde. Jusqu'à ce moment il avait eu 
san» cesse à lutter contre une cruelle pauvreté; le duc de 
Buccleugb lui ayant alors alfermé, presque sans redevance, 
un domaine situé  Allrive-Lake, sur l'Yarron, il se trouva 
désormais ì l'abri de tout souci pour sa vie materielle, et 
composa dans cette retraite A queer llook, poëme conlre 
l'émancipation catholique et le bill de la réforme (Ëdimbourg, 
1832). A Poecasion d'une visitequ'il fit à Londres, on donna 
des banquets en son honneur : c'en était troppour sa vanité; 
il s'engages alors dans une grande exploitation rurale, et se 
créa par là de nouveaux embarras. D'ailleurs, la faillite 
de son êditeur ne lui permit de retirer qu'un médiocre bé- 
néfice de la collection de ses œuvres, pnbliées sous le titre 
de Altrive Tales, et précédées de son aulobiograpl,ie, qfi 
fut sa dernière production. 11 mourut ì AItrive-Lake, le 
novembre 1835. On a quelq,efois comparé James Ilogg à 
B u r n s; mais il lui est de beaucoup tutCeur sous le rapport 
de la force et de la profondeur du senliment. 

iiOGLAND, Ile du golfe de Fiulande, et dépendance 
gouvernement de Courlande, longue d'environ un initia. 
mètre, avec quatre cents habitants à peu pr, et deux 
phares, est célëbre par le combat naval du 17 juillet 1788, 
où les Russes, commandés par l'amiral Grey, battirent 
les Suédois, placés sous les ordres du duc Cbarles de 
dermanie. 
HOGUE (Combat de La). A l'angle oriental de la 
langue de terre où la ormandie s'arrtte dans La blanche, 
un cap peu élevé domine une rade étroite et longue, bordée, 
du cotë du continent, par une plage de sable qui plonge 
so,s l'eau, et abritée des flots et des vents du large par nne 
pelite Ile mince et recourb6e : c'est le cap de La Hogoe, 
ainsi nommé du mot scandinave hou9, promontoire, pointe 
de terre. Parfois, quand la tempoete a bouleversé la blanche 
et remué le sable de se rivages, la mer, en se retirant, 
laisse à découvert des canons, des tronçons de mts, des 
carcasses de navires, et la vague qui déferle roule ptle- 
mle vers la c3te des algues, des ossements et des boulet 
rongés par la rouille : Souvenir désastreux pour la France! 
I,à, en 1692, la marine militaire de Louis XIV se brisa et 
disparut. Les rois de la terre sont frères ; celui de France 
s'était ému des infortunes de celui d'Angleterre, chassé de 
son royaume par ses propres sujets : il rassembla en Nor- 
mandie 8,000 soldats français et 15 bataillons irlandais pour 
les lancer sur la rive opposée ; une flotte de 60 vaisseaux de 
ligr, e, commandde par Tou rville, devait accourir de 
tous ses port. pour bala)er la Manche et préparer un pas- 
sage libre au convoi des troupes. Les Anglais, de leur o6té, 
veillaieut sur leur liberté et sur leurs cOtes ; 63 vaisseaux, 
sous les ordres de l'amiral Russell, croisaient près de leurs 
ports; 36 autres  préparaient en Hollande pour la défense 
de l'An._"leterre. Le succès de la France dépendait de sa 
promptit«de; il fallait déharquer sur le territoire ennemi 
avant que leg flottes alliëes eussent opéré leur jonction. Si 
la fortune avait également favorisé les deux partis, la lutte 
e6t «.té longue et sanglante, mais les vents contraires emp6- 
citèrent l'escadre de Toulon de rallier Tourville, et iui- 
mème fut un mois avant de pouvoir pénétrerdans la 31anche; 
il y enha enfin, mais avec 4-1 vaisseaux seu!emeut, le 
lendemain du jour ou la rézmion des ¢scadres combinées 
avait donné 99 vaisseaux à l'amiral anglais. Le 29 mai 
quand la vigie du matin annonça 100 vaisseaux de ligne en 
vue, il y eut étounement chez les marins français : tous les 
officiers dans le conseil de guerre furent d'avis d'éviter un 
engage,nent trop inégal ; mais Tourville leur lut la lettre du 
roi, et tout le monde se prepara en silence : l'ordre était 
pr6cis : ,, Vous attaquerez les Anglais, forts ou faibles, • La 
possibilité de la jonction des forces aflié u'avait pasmme 
etWprévne! 
Qzmrante-quatre vaisseaux français, poussés par un vent fa- 
vorable, allèrent élonger, ì portée de pistolet, toute la flotte 
de l'Angleterre, rangée en ligue de bataille et en panne par le 
travers du Havre. Dès le commencement de l'action, l'amiral 
Bussell voulut profiter de sa supériorité nnmérique pour 
nous envelopper ; il detacl,a des vaisseaux d'avant-garde 
qui devaient doubler la téte des Français; mais les vent« 
se turent quand le combat fut engagé : les detonations de 
tant de milliers de bouches a feu troublèrent Patmosphère 
et hfi imposèrent un calmeeffrayant. Et pourtant ces com- 
bats, que l'l,istoire nous peint si terribles, n'étaient guère 
meurtriers ; car le feu régnait sur toute la ligne depuis une 
heure et demie que les Français n'avaient encore perdu, ni 
mts ni chalo,pes. Le vent, q,i d'abord soufflait du sud- 
ouest, sauts au nord-ouest, et permit à l'ennemi de doubler 
notre ligne; puis ,n épais brouillard enve]oppa les combat- 
tants ; la canonnade générale cessa. Français, Anglais, Hol- 
landais, coururent en désordre vers l'ouest, et dans les 
éclaircies les vaisseaux qui se reconnaissaient comme en- 
nends échangeaient quelques bordëes. La nuit vint, et avec 
elle la marée et la brume, qui s'épaissit encore : les deux 
flottes jetërent l'ancre ; les vaisseaux anglais qui avaient 



HOGUE 
doublé notre lise la traversrent au milieu d'une grle de 
boulels pour aller rejoindre leur corps de bataille : ce fut 
une faute ; ils nous tenaient en échec entre deux feux. 
Le lendemain, au point du jour, la brise s'éleva à l'est : 
les Français firent roule à l'ouet; les Anglais les suivirent. 
Nous fuyios; déjà les deux armées épares taient arrivées 
par le travers de Cherbourg, quand le retour de la marée 
les furça à jeler l'ancre de nouveau. A onze heures du soir, 
Tourville appareilla : son projet était de faire passer son 
armée par le Ras-Blanchard, canal étroit, qui spare les tles 
d'Aurigny et de Guernesey de la presqu'lle de Normandie, 
pour aller à Brest cbcrcher un refuge. Il voulut, dans sa 
fuile, conserver un ordre trop difficile; il perdit du temps : 
vingt-deux de ses vaisseaux seulement doublèrent le Ras ; 
do«ze autres, retardés par la marche trop lente de ceux qui 
avaient le plus souffert dans le combat, ne purent l'at- 
teindre avant la marée, et furent conlraints de se sauver 
vers La Hogne : c'étaient les plus beaux vaisseaux de notre 
marine ; on en comptait cinq à trois ponts. Leurs ancres ne 
purent tenir ; le vent et la mer les poussèrent sur le sable. 
La flotte anglaise les suivai!; elle expédia Ioutes ses embar- 
cations afinCs pour les incendier. Il y eut là un spectacle 
imposant : la flamme dévorait nos vaisseaux et jetait au 
loin d'ef[royables lueurs; mille canons éclataient dans son 
foyer; des navires entiers sautaient en l'air comme des vol- 
cans sous-marins, et au milieu de cette atmosphère brU- 
lante les chaloupes anglaises et françaises se battaient avec 
acharnemeT, la Iorche à la main. La fortune de l'Anglelerre 
l'empora : le roi Jacques, du haut de nos cirages, cou- 
templait cette effrayante lulle, qui décidait de ses destinées ; 
et alors que sa couronne lui échappait sans espoir, Anglais 
encore malgré son expulsion, la gloire dont se couvrait la 
marine anglaise le forçait d'applaudir aux exploits de ses 
anciens sujets. Deux vaisseaux s'ëlaient réfugiés à Cher- 
bourg = ils furenl brOlés. La marine Irançaise ne se releva 
plus. 
Bussell ne sut pas tirer parti de son immense supériorité : 
il eut pu anéantir notre flotle, et elle faillit lui échapper 
tout entière; les Eléments seuls la lui livrèrent. La gloire 
de Tuurville fut obscurcie; sa bravoure mdme ne l'a pas 
sauvé aux yeux de la postéritél Le seul reproche qu'on 
puisse cependant lui adresser, c'est d'avoir hésité à fuir : 
aussi l'artisle qui a sculpté sa statue lui a-t-il mis entre les 
mains l'ordre ftneste d'attaq«er, comme pour demander 
grâce aux générations futures du désastre de La Hogue. 
OEhéogne PACE, capitaine de vaisseau. 
[IOllENFRIEDBERG petit bourg du cercle de 
Liegnitz, en Silésie, avec 400 habitants, est célèbre dans 
lqdstoire de la guerre de sept ans par la bataille que Fré- 
d éri c le Grand y gagna, le 4 juin 17ttg, sur les Autrichiens 
et les Saxons commandés par le duc Charles de Lorraine 
et le duc Jean-Adolphe de Saxe-Weissenfels, et qu'on ap- 
pelle aussi quelquefois bataille de Striegau. 
Avant cette bataille, la situation de Frédéric II était des 
plus critiques. La déroute essuyée par les Bavarois à Pfaf- 
fenbo{en avait eu pour résultat de rcociliœer le eme lec- 
teur de Bavière, lIaximilien *Joseph, avec l'impératrice 
Marie-Thérëse par la paix signée à Fussen. Cetle princesse 
s'clair tout récemment alliée avec l'Angleterre, la ltollande 
et la Saxe, et avait tait parallre un manifeste dans lequel 
elle déclarait que la Silésie constituait une partie intégrante 
de l'Autriche, attendu que le roi de Prusse avait violWla 
paix de Breslau. Les Autrichiens avaient envahi la Silésie. 
Bucco s'était emparé par trahison de la place lutte de 
Kosel, et te prince de Lorraine ainsi que le duc de Saxe- 
Weissenfels, après avoir opéré leur |onction à Koenigsgroetz, 
s'étaient avancés jusqu'à Bolkenhain avec une armée pré- 
sentant un effectif de 70 à 80,000 hommes. En mme temps 
FfCéfie, à la tèle de 70,000 hommes, avait quitté son 
camp de Frankenslein el était venu à la renconlre de l'en- 
nemi jusqu'à Jauernick, où son avanl-garde, aux ordres du 
général Dumoulin, avait pris position. Le prince Charles de 

-- HOHENLINDEN 
Lorraine, qui ëtait de beaucoup supérieur en forces à celui- 
ci, desndit de la montagne pour l'attaquer, et prit positiou 
rès de l'étang de Striegau. Mais par nne marche rapide, 
exécutée dans la nuit du 3 au 4 juin, Frédéric arriva jusqu'à 
Striegau. Le 4 juin, à quatre heures du matin, la bataille 
s'engagea par une vive atlaque faite de l'aile droite des Au- 
trichiens par les Saxons sur Striegau. Mais ils furent re- 
poussés, et le duc de Saxe-Weissenfels parvint à les ral- 
lier sur les haulenrs situées derrière Pilgramshain. Atta- 
qués alors par Dumoulin avec l'aile droile prussienne, ils I- 
chutent pied avec l'aile gauche aulrirbienne, tandis que la 
cavalerie prussienne, après six charges successives, réus- 
sissait à rejeter l'aile droite autrichienne su r Hohenfriedberg ; 
ce qui conlraignit l'iuanterie de l'aile droile à se replier 
également à la suite d'une attaque de l'infanterie prussienne, 
commandëe par le prince de Pl'usse. Ce mouvement de 
recul des deux ailes sépara le cenlre de l'armée autri- 
chienne, où bienlt la déroute devint générale. A di heures 
du matin la bataille était déjà gagnée; elle coUta aux coa- 
lisés 4 généraux, 200 officiers et 4,000 hommes tués ou 
blessés, environ 7,000 prisonniers, 60 pices de canon et 
83 drapeaux. Du cté des Prussiens la perte ne fut que de 
3,000 hommes 
ltOI|ENLINDEN (Bataille de). L'armistice qui suivit 
la bataille de M are n go n'avait pas arrdt les opérations 
de l'armée française du Danube. Ce ne fut que le 15 juil- 
let 1800 que 51 oreau, ayant alteint une position qm liait 
les opérations de son armée avec celles de l'arm d'ltalie, 
consentit à une suspension d'armes, qui h,t signée à Pars- 
dorf et prorogée encore le 0 septembre par une nven- 
tion signée à Hohenllnden, dans l'espoir de voir l'Autriche 
se résoudre à la paix. Les iulrigues de l'Angleterre ne le 
permirent pas, et la reprise des hostilités fut définitive- 
menl fixée au 28 novembre. A cele ép¢que, des douze divi- 
sions de l'armée du Danube, les tr«.ts de dro;e, sous les 
ordres de Lecourbe, couvraient les d,bonchés du T)rol ; 
Grenier, avec les trois du cenlre, était à oeroite de llohen- 
linden ; les trois de la réserve autnr doEbersberg; Sainte- 
Suzaune, avec les trois de gauche, au delà du Data,Se, 
entre ce fleuve et l'AItmild. Le gros de l'armée aulrichienne, 
fort d'environ 80,000 hommes, occupail la rive droile de 
l'lnn, entre Rosenheim et Braunau, n'ayant à la rive 
gauche qu'une faible ligne d'avant-postes; mais cette armée 
ëtait maitresse des Ietcs de pont de Rosenheim, Wasser- 
burg, Kraiburg, OEttingen et Braunau. A la droite, Klenau, 
avec 25,000 Sommes, couvrait Batisboune et le palalinat 
de Bavière; à la gauche, Ililter, avec 35,000 hOmlues, 
occupait le Tyrol. 
Le 2 novembre l'armée française se mit en mouve- 
ment. Les divisions Montrichard et Gudin, sous les ordres 
de Lecourbe, rincent e placer devant Rosenbeim. Celles 
de la réserve (Decaen, Richepance et Granjean) s'avan- 
cèrent, les deux premiëres vers Roth et Wasserhurg, et la 
troisième sur la chaussée de Muhldorf. Grenier, avec 
centre (Ne},, Legrand et Hardy , marcha sur Haag, cou- 
vert sur la gauche par un petit corps de flanqueurs. Saiute- 
Suzanne, laissant la divi!,m Souham sur l'Alt-blihl, se rap- 
procha du Danube, avec les divisions Colaud et Laborde, 
pour passer le fleuve et se diriger sur Freysing. Le 30 
le centre de l'armée française était arrivé sur les hauteurs 
d'Ampfing, la réserve échelonnée en arrière jusque vers 
Haag. L'arroSe aulrichienne n'avait pas fait d'autres mon- 
vements que de pousser une avant-garde au delà de Mihl- 
dort. La position que prenait ]loreau en marchant vers 
l'lnn était mauvaise selon foules les règles de la guerre. 
Ses six divisions du centre, eu colonne en arriè;e d'Amp- 
ring, pritaient le flanc à l'Inn, pendant un espace de 
2 kilomètres, cuire Ampfing et'Vasserburg; deux aulres 
étaient à plus de 22 kilomètres en arrière, à Roseuhcim; 
deux, enfin, bien plus loin à gauche, vs Ingolstadt. L'n- 
nemi se concenlrait, sans qu'on sot précisément vers 
lequel des poinls de passage dont il avail les tëles de 



118 
il prtait ses plus grandes forces. 11 était possible que ce 
ftt vers Wasserburg, où la division Richepance avait été 
repoussée le 29; et alors, l'attaque princir, ale étant dirigée 
de Wasserlmrg sur Haag, le défilé de la fort de Hohen- 
linden pouvait treperdu, et l'armée française rejetée sur 
Freysing et séparée de la droite de Lecorhe. leme en 
admettant, ce qui arriva, que l'archiduc Jean, voulant 
utiliser lecorps de Klenau, fit attaquer la tète de Ja co- 
lonne, la direction de son mouvement lui permettait de 
déborder la fort ce Hohenlinden et la gauche de l'armée 
française dans la direction d'Erding et de ParsdorL 
Le t er décembre l'archiduc Jean se mit en mouve- 
ment. Le gros de son armée était sur la Roth, ayant fait 
occuper à droite, Landshut par la division Kienmayer; la 
gauche passa l'Inn à Mohldorf et à Kraiburg, se dirigeant 
sur Ampfing; le corps de Kleuau s'avançait é,alement par 
la gauche de l'Isar sur Landshut. La téte de l'armée fran- 
çaise, virement assaillie de front et sur sou flanc droit, 
menacée sur sa gauche par le mouvement d'une partie du 
centre ennemi dans la vallée de l'Iser, ne pouvait tenir 
dans cette positiou aventurée : Moreau la fit replier sur 
Haag. Cette retraite se fit en bon ordre, presque sans 
perte. Les divisions Bichepance et Decaen se replièrent sur 
Ébersberg et Zornoldingen ; Lecourbe reçut l'ordre d'C 
tendre sa gauche vers Pframering. Ces mouvements cu- 
rent lieu le 2, en mime temps que Grenier, avec le cen- 
ire, rentrait dans ses premières positions à Hohenlindeu. 
Le mouvement de Moreau en avant avait donc été en 
pure perte : dans tout le terrain qu'il avait parcouru il n'y 
avait point de position où il pot recevoir l'attaque de l'en- 
nemi, à laquelle il devait cependant s'atteudre. Celle de Ho- 
henlinden fut choisie pour l'arrtter en le forçant à combattre. 
Mais il parait, par la position où il plaça sa réserve, que 
Moreau croyait que, l'archiduc continuant son mouvement 
par la gauche de la foret de Hohenlindeu, l'attaque aurait 
lieu daus la directiou d'Erding et de Dorlen. 
L'archiduc Jeau commit la faute grave de ne pas pour- 
suivre son mouvement le 2. S'il avait coutinué de pousser 
le centre de l'armée française, il e0t pu ce jour-là mne 
occuper Alhaching et Saint.Christophe ; et l'armée Iran- 
çaise se fut trouvée dans une position crique, boreau 
profita de la juurnéedu 2 pour faire prendre position à ses 
troupes; mais il parait qu'il s'aperçut alors que la droite 
était trop retirée, et voulut rectifier cette erreur, qui per- 
mettait à l'ennemi de dépasser la droite de la division 
Granjean sans éprouver de résistance. Les divisions 
cbepance et Decaen reçurent l'ordre de se porter de nou- 
veau en avanl, pendant la nuit du 2 au 3 : la première 
devait occuper Matenpot, à l'entrée du bois de Hohen- 
linden; la seconde, Saint-Christophe, en laissant quelques 
troupes à Ébersberg, ou Lecourbe devait porter la division 
Montrichard. Sans les retards que firent éprouver à la divi- 
sion Bichepance le redoublement du mauvais temps et les 
erreurs des guides pendant cette nuit, n'aant à 
courir que 12 kilométres, elle serait arrivée  Matenpot à 
peu près eu mime temps que la tte de la colonne ennemie. 
Son mouvement et celui de Decaen n'avaient d'autre objet 
que de flanquer l'armée, et de menacer la gauche de l'en- 
nemi, qu'on ne croyait pas dépasser la ligne de la gcande 
route. 
Cependant l'archiduc Jean, dont le projet primitif avait 
été de tourner toute la position de Hohenlinden, afin d'ar- 
river à l'Isar avant l'armée française, avait changé de 
dessein ; il était décidé à lui livrer bataille. La supposant 
en pleine retraite, il crut qu'il ne la rencoutrerait qu'à 
Parsdorf, et qu'il ne trouverait tout au plus qu'une arrière- 
garde à Hohenlinden : il fit ses dispositions en conséquence. 
Il détacha d'abord 17 bataillons et 12 escadrons sur la 
gauche, avec l'ordre de déboucber de Wasserhurg et de 
¢rrer le corps de Lecourhe. Il fit marcher le restant de 
son arméeentrois colonnes. A gauche, I0,000 hommes, sous 
les ordre de Kiesch, se portèrent, par Albacldng, sur la 

HOHENLINDEN 
droite de Hohenlinden. A uroite, Baillet-Latour, avec 
5,ooo hommes, remontant l'lsar, prit la direction de Blet- 
grain, afin d'arriver par la gauche. Au centre, où se trou- 
vait l'archiduc en personne, Kollowratb, avec 40,000 hora- 
mes, se jeta dans la grande route de MOhldorf à lunich : 
les parcs et le« bagages suivaient cette colonne. A l'ex- 
trme droite, le corps de Kienmayer, qui niavait pas pu 
encore gagner Erding, se rabattit par Dorlen sur Schwabeu, 
où il était en mesure de se porter sur Hobenlinden ou 
Parsdorf. Le corps de Klenau devait se joindre à ce dernier; 
mais, inquiété par la marche du corps de Sainte-Suzanne, 
il ne fit aucun mouvement. Les colonnes ennemies avaient 
marché pendant la nuit, sous une neige abondante; ce/Je 
du centre, favorisée par la chaussée, arriva la première. 
A sept heures du matin, l'avant-garde attaqua la gauche de 
Groochy, que formait la division Graujean, et y causa 
quelque surprise, parce qu'on croyait que Bichepance 
avait pu arriver à Matenpot et couvrir le défilé; mais nos 
troupes arretèrent l'ennemi, qui fit en vain des efforts 
pour les prendre en flanc, et finit par re rejeté à l'entrée 
le la fortt. Alors Moreau ordonna à la division Ney de se 
joindre à la division Grouchy, et de refouler de concert 
la colonne autrichienne dans le défilé. La division Riche- 
l,anc* ne pouvait tarder à arriver sur Matenpot, et coin- 
piCr ainsi le succès. 
Aprts avoir longtemps erré dans des chemins de tra- 
verse, qu'on re{rouvait à peine sons la neige, elle dépassait 
en effet Saint-Christophe à sept heures du matin. La 1 « 
brigade, avec une batterie, était au delà de la croisée du 
chemin d'Albaching ; la 2" y arrivait lorsque la ttte de la 
colonne ennemie, commandée par Biesch, débouchait sur 
la droite et s'engageait avec la 1  légère. Bichepance ne 
pouvait pas juger de la force du corps qui l'attaquait : la 
neige qui tombait ne permettait pas de distinguer les objet 
à dix pas. D'un autre c6té, on eutendait le canon à Hohen- 
linden, ce qui indiquait que l'ennemi était engagé dans le 
bois. Une attaque sur Matenpot, quel qu'en f0t le résultat, 
devait produire une diversion dcisive en faveur de l'armée 
française. Richepance ne balança pas : donnant l'ordre à 
Drouet de s'arrêter avec sa brigade et de coutenir l'ennemi 
jusqu'à l'arrivée de la division Decaen, il continua son mou- 
vement avec les troupes qui avaient passé. A Matenpo|, il 
reucontra une brigade de chevau-légers havarois; le 1 " de 
chasseurs, qui la chargea, fut repoussé sur l'infanterie. Il 
n'i avait pas de temps  perdre; Richepance enjoignit  
Walther de coutenir avec le I er de chasseurs la cavalerie 
enuemie, et, Iormant ses deux régiments d'inlanterie en 
colonne, il entra dans le bois par la grande route. Bient)t 
il rencontra la queuede la colonne du parc et des bagages; 
le feu s'engegea, et deux rgimeuts autrichiens qui cou- 
vraient le parc s'avancèrent pour repousser nos troupes. 
lls furent culbutés par le 8 , et le désordre le plus affreux 
se mit dans la longue file de voitures qui encombrait la route. 
Troupes, conducteurs, chevaux, tout se dispersait dans la 
iortt, ou se jetait en confusion sur le corps d'armée qui coin. 
battait à Hobenlinden. 87 boucbes à leu et 3oo voitures 
restèrent en notre pouvoir. 
Cependant iey et Grouchy, qui poursuivaient leurs 
succès, s'aperçurent hient6t que l'ennemi, qu'ils poussaient 
devant eux, tourhillonnait, arr/té par l'embarras des voi- 
tures et épouvanté par les fuyards refouiés de Matenpot. Ils 
firent nn suprtme effort, et le centre de l'armée autrichienne, 
«bandonné par l'archiduc, qui s'enfuit, un des premiers, vers 
110hldoff, se dispersa en déroute dans les bois qui bordent 
le chemin. La communication rouverte avec Richepance, 
, e dernier retourna sur ses pas à Mateupot, pour empcher 
l'enuemi de se rallier et dégager la 9" brigade, blai De- 
caeu, arrivé à Saint-Christopbe avec la lte de sa dî-wson, 
avait déjà battu Riesch et le poursuivait; la brigade Dehili, 
restée à Ébersberg, avait également repoussé l'attaque des 
troupes sorties de Wasserburg avant l'arrivée de Leconrbe. 
A notre gauche le combat se soutint plus longtemps. Enfin, 



HUtlI LI,IJEN  
Ca division Le,rand, du corp de Grenier, parvint à rer 
Kiemaer da le défilé de Lorf; la colonne de Latour, 
atqu de front par la «Uvision Bastoul et prioe en flanc 
çar la brigue Joba, fut ement baltue et for de oe 
retirer sur loen. s de cos eemis raèrent rfen 
fort maltraioEs : I 1,0 pronniers, dont 2 généraux, et 100 
pi de non fuoent les tropb de la ctoire du t  au 3. 
La pee de l'armée auUichienne s'Ceva à 5,000 homm; 
nous en rdlm 10,0oe. La dérouet la disrsion de l'en- 
nemi était complèt : en le ursvant av vieur et 
+ivité, u de débs auraient p l'Inn; mais Mordu, 
qui savt vaincre, ne sut jais profiter de la victoire : il 
perdit la jouée du , et ne oe remit en mouvement que le 5. 
G "t G. »E VAUDONCOUBT. 
HOHENLOHEç d'a com et plus tard pncipauté 
du cercle de Franoenie, e I'te de la nféraon du Rhin 
médiati en 1806 et pla ur la plus e partie us 
la domination du Wuemberg et le r sons oelle de la 
Eavière, et comprenant une sucie d'envin 22 ma- 
mètr . 
La iamille de Hohenlohe fait remon[er son ofine jus- 
qu'au douème siècle; ms ce n't qu'à partir du comte 
Gotied, eu»rident de l'emreur Hen VI, que la lumière 
commen à  iaire dans son histoire. L fils de Gott- 
fçied iondèrent I branch de Hon- Braunec, 
étein d la atme génétion, et de Hohlohe-Hol- 
loch. Cette deière s'est ubdivisíe en de nombreux ra- 
meaux, dout I seuls aujourd'hui exisn sont Honlohe- 
uenstein et Hohenlo-Waldenbrç. Le premier, qui 
appartient à la reUgion prottante, a fo I lies de 
Hohenlohe- enstein- OEl«riyen, et Hohlohe- 
Yetein-ngenrg. La premiè de  lies, dont 
I posssions ooeupent une surface de 3 mNriamëtres 
, est représent aujou'hui par le prin Et, nL le 7 m 17, génél major au sece de Wuemberg; la 
secoude, dont I ssios cupent une superficie de 
 mamëtres rr, est repren par le pfiuce Auste, 
nWle 27 novembre 178, lieutenant général rtember- 
geois, qui ssède en out un majorat considérable en Si- 
Iésie. Le second rameau, celui d'Hohenlohe-Waldenbrg, 
profe la relion tholique, et ditbue encore à  
membr un ordre du Phénix, fondé en 175. 11 a égale- 
ent formé deux li: Hohenlo-Waldenbourg-Bar- 
tetein, représent aujourd'hui par le prin Charles, 
n le 2 juillet 1837; et Hohlohe-Waldenbrg-Schil- 
lingsfrst, repren aujourd'hui par le prinoe Frédic, 
éneral au rvioe de Russie. L sssions de la iie 
de Hohenlohe-Banstein upent une surficie de 
5 mriè rrés, avec 24,oe0 habin; et oell de Hw 
henlohe-Schilgsçst che superficie de 3'/ mriamètres 
carr. 
C't à la brauche de Hohenlohe-Waldenbourg-Bar- 
tenstein qu'apenait le pce u-Alos n Hon- 
, qui, après s'être distingué à l'arm de Condé, fut 
nommé mard de Franoe sous la Bura{ion, à la sui 
de l'exdifion d'Espue, en 1823, ndant laquel il 
avait commaé un corps, et qui munit en t9. 
Le prin de HONLOnS le thathurge, Alezandre- 
Lopold-François-Emmerh, appaenait à la branche de 
Hoheohe-Waldeubourg-ScbillingsçUrst. U était nWen 179, 
et le dix-huitième enfant issu du marie du prince Charl- 
Albert avec la fille d'un maat honois. 11 çut l'ore 
de la prètse en 1815, alla l'année suivan[e à Borne, oh  
s'afOlia à la Socié{é de Jns, et oevint en 1817 en vière, 
ou bient6t il eut la réputaon de guérir I mali I plus 
incubles par la simple in{ervention de s prières. Quoi- 
que de nomhreu guéoens miculeuses atteint le don 
d mact dont le ciel l'avait doué, le saint-sie se garda 
bien de vouloir prononcer sur leur authenticité, et  borna 
 Ier dire et faire. Le pnce de Hohenlohe, devenu évë- 
que de Grosswardein en Honnie, mourut en 1850. On a 
de lui de nomboeux ouvrag ascètiqu et une disoeation 

HOHENSTAUFEN t 19 
politico-religieuse : Quel et l'esprif de notre /emps 
(Bambe, 1821 ), di aux empereurs d'Auiche et'de 
Buie, où il établit qu'il ne peut y avoir de suje fides 
que parmi les bons tholiqu. 
HOHENSTAUFENç famillle de dastes aUemands 
qui parvint à la couroe impe, la gar de I t8 
12, et s'éiit  Ine mle d la peoe de Con- 
radin  1268. Le premier de s tr bien then- 
fiqu fut Frédic de Buren, ainsi appelé du village de 
Buren, situé entre Gmund et Goeppungen, pr de Hohen- 
suf, dans le royaume de Wurtemrg. !1 vait vers le 
milieu du onzième iède; et, abaudonnant la vall étroite 
où il avt jusque alo habit, il alla s'établir sur une hau- 
teur voisine, appelée Staufen, d'où il pt le nom de 
henstaufen. De Hildae, ue d'une fille de Fran- 
conie et d'Alsaoe, il eut un fi, appel le chalier Frédi¢ 
de uren, ieur de Hohenstaufen, qui défendit l'empe- 
reur Hen 1V da tours  adversis, et déploya noire- 
ment une lle bravoure h la lle de Mersebourg (IQgÇ, 
contre Bolphe de Sou, que  pnoe, apr lui avoir 
octroyé le duché de Soua, lui fit éuoer sa fille A et 
mme lui confia, en 1081, l'aiubtrafion de I'leme 
quand il franchit I Alpes pour s'en aller combattre le 
pape. Ces dtinctions furent ss dou  baoe  an- 
deurs de la maison de Hohensufen ; m eH devrent 
en mme temps la souroe d longes et fun e 
que I Hohensufen eurent à souter contre l'antie fa- 
mille d Guelf, au préjuce de laquelle ell avaient été 
accordé. 
Behold, fils de l'anti-roi odolpbe de Soua, et Ber- 
thold de Zœehgen dputërent au nouvu duc la posssion 
de son duché; et  ne t qu'apr de Ion guerre, 
mèl de succ direz, qu'il put lui Ue de nouvu 
lennellement octroyé, en 1097, mais noblement dinué. 
A mo le duc FfCCie sa deux fils, Fréc et 
Conr. Le nouvel empereur, Hen V, pour s'surer le 
dévoueme»t et l'app de la fae de Hohensufen, qui 
lui éit alée par I liens du ng, oenfirma aussit6t 
l'alné de oes deux fils, Frédéc 1I, dit le orçne, la pos- 
ssion du duché de Soua; et en llt2 il octroa aui à 
Conrad, fre de l&i, le duché de Froenie. L deux 
frère, Fréric II notamment, lui en téièrent leur 
connaissanoe par le fidèle atchent dont ils lui don- 
nèrent d'éclatau preuves dans la querelle d invtires 
et dans s lutt cone le duc Lothaire de Saxe. 
quand il voutut violer la oenstition de PEmpire, ils lui 
résistèrent ouveement et avec la plus inébnlable r 
lution, d'acco en oela avec les autres pnc. 
A la mo de Henri V, de,er roi d'lemae de la 
mn de Franconie, I Hohcnsen hritrent de s 
domain; et Frdéric, en ison d remarquabl qualis 
dont il éit doué ainsi que de sa proche paren avec l'em- 
pereur délunt et de  pusanoe de sa maison, Cevait à la 
couronne impérie des prétentions q& semhlait d'autant 
plus lgitim e l'opinion générale se pronont en 
faveur. Toutefois la crain qu'inspit sa puisnoe, 
]ointe à la haine que vers pn transflrent de l'hé- 
rifier d Fran-Saliens à la maigri de Hohenstaufen, et 
perfid intrigues de l'archevque Adalbe, de Mayence, 
furent use que I élecurs choirent pour empereur 
L o t h a i r e le Son, le ns achaé de to les ennemis 
de Fréric. 
Cette élecUon, la prétention e le nouvel empereur Ceva 
ait6t de faire rtituer par I Hohenslaufen I divers 
possessions qui leur avaient été accoé us le re pré- 
dent alluèrt alors e ee olente entoe la famille 
de Hohenstaufen  l'empereur. Fort de son allianoe avec 
pns de la maison de OEhngen et aveç Henri le Superbe 
de Bavière, à qui il avait marié sa fille en lui donnant le 
duché de Saxe ur dot, Lotire aflaqua I Hohensufen 
dans le dsein d'en finir d' seul coup avec la puisoe de 
tte maison. Pendant lonmps Fédéric dut se dèfendre 



tout seul contre ses puissanls adversaires, parce que son 
frère se trouvait en ce moment absent, par suite d'un pèleri- 
nage qu'il était ailWfaire en Terre Sainte. A son retour la 
lutte parut devenir plus favorable aux deux frëres ; et 
Conrad, à la suite d'une audacieuse expédition entreprise 
par-delà les Alpes', se fit couronner roi d'Italie à r, lonza 
(Il28). 1frais Conrad n'ayant pas pu se maintenir en Italie 
conlre les Guelfes et contre le pape, et les forces de leurs 
adversaires s'accroissant chaque jour en Italie, les dessx frères 
se virent enfin contraints, en t135, d'implorer le pardon de 
l'empereur. Il leur fut elfectivement accordé, et à la diète 
tenue en 1135à Mulhausen Conrad renonca au titre de roi 
d'/[al/e; mais il obtint la prééminence parmi les dues, et 
son frère recourra toutes ses possessions. En suite de quoi 
les deux frères accompagnèrent Lothaire dans son expedi- 
t/on en Italie. riais à la mort de Lothaire Conrad de Fran- 
conie fut Cu empereur d'Mlemagne, le 22 février t 138, sous 
le nom de Conrad III. Cette élection au trfne impérial 
ouvrir l'ère bri[/ante des Hohenstanfen, dost alors, pendant 
près d'un siècle, la puissance ne fit que prendre des déve- 
loppements toujonrs plus grands. Mais la haine des Guelfes 
pour les Hoheus[aufen (voyez, GmELssS), haine dont /es 
premiers germes se trouvent dans l'alliance conclue entre le 
duc guelfe de Saxe et de Bavière Henri le Superbe avec 
l'empereur Lotbaire, ne fit que s'accroltre par suite de cetle 
accession des Hohenstaufen à la couronne impériale. 
La lutte commença lorsque, conformément aux lois de 
l'Empire, le Gibelin Coarad exigea du duc Henri, à la diëte 
de Batisbonne, que des deux duchés de Saxe et de Bavière, 
dont il se trouvait en possession, il renonçt au second, et 
lorsque, sur le refus de Henri d'obtempérer à cette somma- 
tion, il l'eut mis au ban de l'Empire» Henri mourut inopi- 
riCent en 1139. Son fils, Guelfe VI, continua la lutte; mais 
les victoires de Weinsberg (1140) et de Flochberg (1150), 
remportées par ses adversaires, accrurent considérable. 
ment la puissance des Hobenstaufen aux dépens surtout des 
princes de la maison de OEtlriugen. alliée des Guel{e% et 
la lutte ne fit dès lors qlle la consolider davantage. Bien que 
l'empereur Conrad n'e0t point réussi dans son projet d'as- 
surer par une loi de l'Empire l'hérédité de la couronne im- 
périale dans sa maison, la confiance que dans tout l'Empire on 
aait dans les Hohenstaufen fut cause qu'à ca mort, arrivée 
en 1152» le choix des électeurs se fixa snr son neveu, F6- 
déric [I[, fils de FfCCie I[, dit le Borgne, qui, cumule em- 
pereur, est connu dans l'histoire sous le nom de Frf.dé- 
ri c I •, Barbe-llousse. Ce qui ne contribua pas peu a l'a:ler- 
missement de sa maison, c'est qu'en triomphant de H e n ri 
le Lion, à qui il enleva son duché et qu'il réduisit à la pos- 
session du Brunswick, il anéantit complétement la puissance 
des Guelfes en Allemagne. Mais par le succès qui avait cou- 
ronné ses armes en Italie il avait excité la jalousiedu pape; 
et ce fut làce qui fit échouer son fils et successeuc, l'em- 
pereur Heni V [, dans ses efforts pour rendre la coone 
d'Allemagne héréditaire dans sa famille malgré le consen- 
tenent écrit de plus de cinquante nembres de l'Empire ; 
aussi eut-il beaucoup de peine, en 1196, à assurer la nomi- 
nation de son fils, alors gé de deux ans seulement, pour 
lui succbder sur le trfne. Le mauvais vouloir des papes à 
l'endroit des liohenstanfen fut cause que pendant la m/no- 
rité du jeune FfCCic II l'on opposa le duc de Zahringen, 
comme anti-roi, à son oncle Philippe de Souabe, nommé 
administrateur de l'Empire jusqu'à sa majorité. Convaincu 
que dans de telles circonstances il lui serait impossible de 
conserver la couronne à son neveu, Philippe la reven- 
diqua pour lui-intime. Il acheta, moyennant II,000 mures 
d'argent, la renondation de Berthold de Zehringen à ses pré- 
tentions personnelles ; et il e0t vraisemblablement fini par 
l'emporter dans sa lutte contre Othon IV de Brunswick, que 
le pape lui suscita pour compétiteur, s'il n'était mort prématu- 
rément, en 1208, sous le poignard d'sn assassin. Le meurtre 
de Philippe rendit, il e.»t vrai, Otbon IV seul maltre de 
l'Empire pendant quelque cmp»i mais lorsqu'il essaTa de 

HOHENSTAUFE, 
faire prévaloir son autorité impériale en Italie, il s'attira 
ainsi l'inimitié du pape Innocent !!I à un degré tel que 
celui-ci épousa la cause du jeune Frédédc, qui avait été 
précédemment reconnu comme empereur (à ce moment 
il était roi de Sicile), et qu'après avoir excommunié l'em- 
pereur Othon il excita mème contre lui un retoutable parti 
dans l'Empire. Frédéric repassa alors les Alpes en toute 
hate, et se fit couronner b Aix-la-Chapelle sous le nom de 
F ré déric I I ; puis, après la déroute qu'Othon IV essuya à 
Bouvines, en 121, il régna seul en Allemagne. 
Au début de son règne tout sembla se réunir pour favoriser 
l'agrandissement de sa maison. Quand la lamille de Zoeh- 
ringen vint à s'éteindre, en 12ès, il IlCira de ses possegions. 
!1 récupéra de mme les domaines hérlitaires de sa race 
que son oncle Philippe avait ailCés ; ses guerres en Italie 
furent conronnes de succès, et en 1220 il obtint sans dif- 
ficulté que son fils Henri f0t Cu pour lui succéder comme 
empereur d'Allemagne. 5Iais quand la cour de lome se prit 
à soupçonner le plan grandiose qu'avait conou l'empereur 
de constit,er un empire romain-allemand ayant pour base 
principale l'Italie transformée en monarchie, elle lui opposa 
la résistance la plus vive, en soulevant contre lui le parti guel[e, 
qui dominait plus particulièrement dans les villes de la 
liante Italie, oit suscitant de nombreux anti-rois en Alle- 
mane, en y provoquant des révoltes et jusq«'à des cern- 
plots contre la vie de l'empereur, enfin en lançant de nou- 
veau contre lui les foudres de l'excommmlication. Par la 
terreur de son nom et par la grandeur de son génie 
défie il maintint encore, il est vrai, l'Aoint et la puissance 
de la maison de Hohenstaufen ; mais une fois qu'il fut des- 
cendu au tombeau la décadence de sa race fat rapide. 
Fréderic avait déà de sou vivant fait élire, en 1237, à 
Spire, son second fils, Conrad, en qualité de roi des Ru- 
mains, après que l'aihC Frédéric, eut été privé de cette dignitb 
par son père pour s'ètre révolté contre lui. Conrad IV lut 
effectivement reconnu en qualité de roi par le plus grand 
nombre des États de l'Empire à la mort de son père, arrivée 
en 1250; mais les anti-rois et les ennemis que le pape lui 
suscita, de méme que l'excommunication dont il le frappa, 
paralyrent tellement les forces de ce prince en Allemagne 
qu'il prit le parti de passer en Italie pour toltt au moins 
s'affermir dans la possession de ses Etats héréditaires, 
la Pouille et la Sicile, entreprise dans laquelle il fut grande- 
ment secondé par son frère consanguin, M a n f r e d. Toute- 
fois il ne tarda point à y rencontrer la mort, et périt em- 
poisonné, suivant toute apparence 0254). Son fils nnique 
Conrad, plus généralemnt appelé C o n r a d i n, était le seul 
représentant Iégitimede cette branche des Hohenstaufen. Tan- 
dis qu'il grandissait en Allemagne sous la tutelle de son oncle, 
le duc Louis de Bavière, Manfred s'efforçait de lui enlever 
son héritage en Italie. Quand plus tard, en 1258, contraint 
par les Étatsde l'Empire, il fut monté sur le trfne de Sicile, 
le pape, fidèle à sa haine potr la maison de Hofienstaufen, 
lui suscita un rival dans la personne de Cllarles d'Anjou. Le 
généreux banfred, trahi par sou entourage de seigneurs et 
abandonné par une grande partie de son armée, perdit la vie 
dans la bataille qu'il livra à l'envaldsseur sous les murs de 
Bínévent, le 26 février t 266. riais la cruauté de Charles d'An- 
jou suscita bient6t contre lui un redoutable parti, qui appela 
Conradin à venir reprendre possession du tr6ue de ses pères. 
Battu à la bataille de Tagliacozzo, qu'il livra eu 1268 à on 
rival Cllarles d'Anjou, Conradin de Hoheustaufeu lut fait 
prisonnier, et irit à Naples de la main du bourreau. 
Des autres descendants des Hohenstaufen, E nzio, roi 
de Sardaigne, fdsde Frédéric Il, mourut en 1272, prisonnier 
à Bologne; les fils de Maufred, Frédéric, Henri et Anselme, 
périrent également après avoir passé de longues anné 
dans des cachots. De méme, la tille de l'empereur Frédë- 
tic II, Marguerite, épousa AIbert le Grossier, qui la rendit 
très-malheureuse; et la fille de Manfred, Constance, devint 
la femme de Pierre III d'Aragon, qui, quatorze ans pi ' 
tard, oenquit la Stilc et venea ainsi la mort de Conradin. 



ttOttEISTAUFEN 
Les domaites de la maisot de Hohenstaufen éclmrent 
après la mort de Conradin, à la Bavière, au souverain de 
Bade et au Wurtemberg. La dignit de duc de Souabe et 
de Fratmonie s'teignit, et il n'y eut que le titre de duc de 
Franconie qui demeura nominalement attacbé au siége 
épiscopal de Wurtzbourg. Consul4ez Raum¢r, Histoire des 
ltohenstaoEen et de leur temps (6 vol., 2e Adit., t 84 t, Leip- 
z). 
HOHENTHAL (Famille de). Quoique d'origine assez 
récente, les comtea de Hohenthal sont aujourd'hui consi- 
dérés comme l'une des premières familles de la Saxe. Ils 
descendentde Pierre Hou,, né eu t6ç3, de parents pau- 
vres,  Koennern, dans le cercle de la Saal. Doué de beau- 
coup d'aptitude pour le commerce, il entra en apprentis- 
sage chez un marofiand de Leipzig, et finit paz fonder dans 
cette ,ille une maison de commerce n.ui, grAce  a pru- 
dence,/ son activité et  sa loyauté en affaires, parvint 
bient6t à un crédit e.t à une considération tels, qu'en 1717 
l'empereur Charles IV l'anoblit en lui conférant le titre de 
banneret et de chevalier de Hohenthal. A sa mort, arrivée 
en 1732, il constitua un riche majorat destiné à soulenirl'é- 
clat de son nom Il laissait six fils, qui fondèrent autantde 
lignes collatérales, élevées en 1733 au titre de barons, puis 
en 1790 à celui de comtes. Il n'en subsiste plus aujourd'hui 
que deux : celle de ltohenthal-Kcenigbrizck et celle de 
lfohenthal-Dcelllfau. 
HOHENZOLLEP, N  aucienne famille princière alle- 
mande,/ laquelle appartient la maison régnante actuelle de 
Prusse, et qui tire son nom du vieux manoir de Zoflern ou 
Hoheuzollern, situé dans la Souabe. On mentionne comme 
le plus ancien deses anottres le comte Thassilo, qui vivait 
ters Pari $00. Vers l'an 980, le comte Frdéric I « reconstruiit 
l'antique castel de sa race, et l'agrandit. Le comte Fré- 
déric III, qui vivait vers l'an t 111 » laissa deux fils, dont 
l'alné, Frídéric IV, est la souche de la famille de Hoben- 
zollern, encore aujoud'bui existante; et le cadet, Conrad 
fonda la ligne royale de Prusse actuelle. En l'an 1200, il 
devint premier burgrave de .Xuremberg. Son arrière-petit- 
fils Frédéric III, obtint, en 1273, le titre de prince de l'Em- 
pire et le burgraviat de Iuremberg à titre de fief hérbli- 
taire. En l'an 1415 l'empereur Sigismond octroya à 
dëric V1 le margraviat de Brandenburg (voye'- Pavss). 
Le frère aihWde Conrad, Frédéric IV, en sa qualite de 
possesseur du fief paternel, continua la branche alnée des 
Hohenzollern ; famille qui n'acquit quelque importance qu'au 
seiziëme siècle, lorsque l'empereur Maximilien 1  eut ac- 
cordWau comte Frédéric IV, en 1515, le titre héréditaire de 
chambellan de l'Empire. Son petit-fils, Charles Y', à qoi 
l'empereur Charles-Quint prenait tant d'intérét qu'il le lit 
élever en Espace, obtintcu 159, quand la famille de War- 
denberg vint à s'éteindre, les comtés de Sigmaringen et de 
Voehringen ; plus tard il fut créé président du conseil au- 
lique de l'Empire, et en 1575 il établit dans sa maison un 
statut de succession aux termes duquel ses fils portèrent 
tous lesarmes et les titres des comtës de liohenzollem, Sig- 
maringen ctVoehringen, ainsi que des seigneuries de Haiger- 
loch et de Woehrstein, mais qui décidait que la charge de 
chambellan héréditaire de l'Empire appartiendrait toujours 
à l'aihA de la maison, h moins que celui-ci ny renoncer. Ses 
fils, Eitel FfCerte Vi et Charles Il se partagèrent l'héritage 
paternel; le premier eut Holtenzollern, le second Sigmaringen 
et Voehringen. Eitel Frdéric VI construisit le château de 
ltechigen, et adopta pour sa ligne la dénomination de- 
lfohen'-ollern-ltcchingen, tandis que Charles donnait h la 
,terme le nom de ltohenollern-$igmaringen. Le fils de 
Frédéri¢ VI, le comte Jean-Georges »v. ltotm.zoen,- 
ltmscm, fut erC eu 163, prince de l'Empire par l'em- 
pereur Ferdinand I! ; le chef de la branchede Sigmaringen 
obtint la mme distinction en 1632; et en 1692 l'empereur 
Lépold i r accorda le titre de prince aux fils pulnés de celle 
maison, sau f ceux de la famille de ltohenzollern-Haigerloch, 
branche collatérale de la maison de Sigmaringen. Le pays de 

HOHE[NZOLLERN-SIGMAIIXG EN 12t 
Hohenzollern fut alors érigé en eomté-princier, avec tous droitç 
de souveraineté, complétement indépendant, ne relevant ni 
de l'empereur ni de l'Empire; il n'y eut plus que la juridic- 
tion criminelle que ces princes tlnrent de l'empereur  titre 
de fief. En 1695 et t707 des conventions d'hérédité mu- 
tuelle furent conelues avec l'électorat de Brandenburg et les 
margraves de Baireuth et d'Anspach, et, de mme que le 
statut de succession de 1575, elles servireut de base au nou- 
veau statut de famille intervenu en 182!, et qsm confirma le 
roi de Prusse, en sa qualité de chef de toute la maison de 
Hohenzollern. En vertu de ce nouveau statut, le droit de pri- 
mogëniture reste eu igueur ; et si une ligne mille venait k 
s'Ceindre, ses possessions devraient taire retour . la ligne 
féminine encore survivante, et à défaut de l'une et de l'autre, 
à la maison royale de Prusse. Mais la souveraineté des divers 
territoires appartenant aux différeutes branches de la fa- 
mille de Hohenzollern a déjà fait retour à la Prusse, eu 1849, 
par suite de la renonciation volontaire des princes de Ho- 
henzollern à leur titre de prince souverain. 
Les principauts de Hobenzollern forment un territoire 
long et étroit, situé au sud de l'Allemagne, sur le plateau 
de la Souabe supl.rieure, entouré sur trois de ses ctés 
par le Vurtemberg, et sur l'autre par le grand-duché de 
Bade. il s'étend, dans la direction du nord-est au sud-est, de- 
puis la valléedu [eekar jusqu'aux environs du lac de Cons- 
tance, et contient une superficie d'environ l myriamëtres 
carrés, avec une population de 6,000 mes. Cette contrée 
est traversée en partie par une chalne d'pres montagne.% et 
arrosée par le Danube et ses afiluents, le Schmiech, le Lau- 
cbart et l'Ablach, et par le Neckar et ses affluent% I'Eyacb, 
le Glatt et le Starzel. On trouve une source alcaline à Im- 
nau, et à Glatt des eaux sulfureuses et aluminenses. On cld- 
tire les céréales dans les railC% parmi lesquelles la plus 
fertile est le Killcrthal. Cependant les principales ressources 
des habitants consistent dans l'elève du bétail et dans le 
commerce des bois, produit dont le païs abonde ainsi que 
dans la filature du coton et du lin, dans la fabrication d'ar- 
ticles en fer et l'exploitation de quelques mines de ferdans 
les montagnes. 
A l'exception d'une centaine de familles luives, la popu- 
lation des deux principautés, comme ses ci-devant souve- 
rains, appartient h la religion catholique romaine. 
HOHENZOLLEBN-HECHINGEN ( Principauté 
de). Sur un territoire de près de  myriamètrescarrés, elle 
contient environ 2t,000 habitants. Elle est située au nord 
de Sigmaringen, sur le ersant occidental de la montsgne 
qui traverse tout le pays de Hohenzollern. La paix de 
Lunéville lui enleva des droits féodaux dans le pays de Lige, 
et le recez de l'Empire de 1803 lui accorda, comme indem- 
nité, la «eigneurie de Hirsehblatt et le couvent de Maria- 
gnadentbal, au village de Sletten. Le prince Herman Fré- 
déric par son accession h la Confédération du Rhin, devint 
prince muverain en 1806. La capitale de la principaoté est 
Hecbingen. A  kilomètres de cette ville s'élève sur le 
Kegelberg, haut de 87t mètres au.dessus du niveau de 
l'Océan, le chateau de Hohenzollern, berceau «le la famille, 
qui a été tout récemment restauré, et dont il est mme ques- 
tion depuis Ionemps de faire une place forte. 
Deptfis 1796 la principauté possédait une constitution 
d'états qui fut révise en 1835. Aujourd'hui, de méme que la 
principauté de Sigmaringen, elle fait partie intégrante de la 
monarchie pru.sienne. 
llOIlENZOLLEPN-SI GMAIMN GEN (Principauté 
de). Sur près de tt msriamètres carrés de superficie, elle 
compte 4t#O0 habitants. La paix de Lunéville lui enleva 
certainsdroits féodanx sur des seigneuries situées dans les 
Pas-Bas et des domaines eu Belque; mais elle en lut dé- 
dommagée par la cession de la seigneurie de Glatt et de do- 
maines appartenant à divers couvents. Le prince Aloys- 
Mainrad, par son aoEession  la Confédération du Rhin, 
en t806, devint alors souverain, et recul en Change de 
divers domaines et droits feotlaux dont sa famille était etl 
16 



122 
possession dans les Pas-Bas différentes eigneuries voisines 
de sa principauté. 
La partie septentrionale de la principauté, dite Oberland 
de Sigmaringen, et qui appartient au bassin du Dannbe, se 
compose d'un sol pierreux et montagneux, qui ne produit 
pas la quantité de céréales nécessaire à la population, mais 
en revanche très-boisC La partie méridionale, pays génra- 
lement plat et fertile, arrosé par le eckar et son affluent 
l'Eyach, produit assez de blé pour pouvoir en exporter. La 
capitale est la petite ville de S i g m a r i n g e n. 
A la suite des événements de fs48, qui eurent également 
leur contre-coup dans ces petits pays, les deux princes de 
Hohenzollern-Hechingen et Hohenzollern-Sigmaringen 
noncèrent, le 7 décembre 18/rg, à leursdroitsde souveraineté ; 
leurs Élats ont cessé dès lors d'ëtre indépendants, et, en vertu 
de conventions d'hérédité antérieures, ils furent réunis à la 
Prusse, oin ils forment aujourd'hui un cercle de régence, de 
mhne qu'ils sont représentés dans les chambres prlJssiennes. 
Les deux princes, tout en rentrant alors dans la vie privée, 
ont conservé le titre d'Altesse et le rang de priuces de la 
branche cadette de la maison royale. 
HOIR  vieux mot employé encore dans la jurisprudence 
pour signifier h Sri I i e r. 11 s'applique ordinairement aux 
enfants et Petits-enfants t de préférence aux autres héritiers. 
il s'emploie plus volontiers au pluriel qu'au singulier. 
HOlltlE vieux mot synonyme d'hœeritage, succession. 
On ,lit encore aujourd'hui : faire un don en avancemett 
d'hoirie, c'est-à dire faire à l'un de ses hér i tiers unedo- 
nation en avance sur la succession qui doit lui échoii. 
Comme les qualités de donataire et d'héritier sont incom- 
patibles, si l'on accepte plus tard la succession, on doit rai»- 
porter dans sa masse tout ce que l'on a reçu en donatiol,. 
Si l'on y renonce, au contraire, on peut retenir le don entre 
vifs j«squ'à concurrence de la portion disponible. 11 n'y a ait 
autrefois que les donations en avancement d'hoirie oh l'on 
suivlt ces règlea; elles ont été Cendues par le Code Nap. 
aux donations pures et simples. La clause d'avancement 
d'l»ifie devenait donc inutile ; on continua uéanmoins de 
l'irisCer dans les actes; et les horaires ont conservé cette 
forme de st)le, par suite de l'habitude louable oU ils sont de 
faire remarquer aux parties les effets des contrats qu'elles 
souscris ent. 
HOLBACH f PAvI.-HI.::lu-TmEnlV, baron n' ), naquit 
à Heideisheim, dans l'ancien Palatinat, au commence- 
ment de i'année 1723. A en croire IRousseau, son père était 
un parvenu ; mais le Genevois ne pardonnait pas au baron 
ce qu'il appelle ses grossièretés à son égard. Tout ce qu'on 
sait, c'est que d'Hoibach vint à Paris dans son enfance, et 
que son père lui laissa une brillante fortune. Dès lors sa 
maison devint le rendez-vous de tous les étrangers de marque» 
de tout ce que Paris renfermait de distingué dans les scien- 
ces, les lettres et les arts : Buffon, D'Aiembert, Diderot, 
FIelvétius, Baynal, beaucoup d'autres, y formaient une sorte 
d'aréopage phiiosopllique. Deux ou trois fois la semaine, 
d'Holbach donnait à ses intimes de splendides dlners; mais 
Buffon ue tarda pas à se retirer de cette société. L'ahhé 
G a i i a n i, un des convives les plus exacts, appelait son am- 
phitryon le 7naftre d'h6tel de la philosophie. aigeon, 
moins ingrat ou plus épicurien, publiait dans le Journal de 
Paris qu'il offrait la pratique constante de toutes les 
ertus qui font le plus d'honneur à la nature humaine, 
et qu'il avait reculd les bornes des sciences politiques, 
philosophiques et morales. C'est pourtant d'Hoibach qui a 
écrit ces deux hlasphemes : « Un Dieu immatériel, infini, 
immense, est une chimère composée par la théologie.  
L'athéisme est le seul systême qui puisse conduire l'homme 
à la liherté, au bonheur, à la vertu, • 
Des nombreux ouvrages qui ont paru sons son nom ou 
sous des pseudonymes, aucun n'atteste cette justesse d'es- 
prit et de jugement que ses amis ont vantée ; rien dans les 
habitudes de sa vie ne justifie non plus ce queaigeon, entre 
autres, a dit de la simplicité antique et patriarcale de ses 

HOHENZOLLEBN-SIGMARINtit -- nuva,, 

mœurs, si ce n'est la crédulité avec laquelle il accueillait les 
nouvelles des gazettes etles éloges qu'on luidonnait. Du reste, 
ce bon patriarche se plaisait singulièreraent dansla compagnie 
des femmes li¢encieuses; oe philosophe austèreCait un Lu. 
¢uilus au petit pied, plein de faste et de morgue. Quant aux 
traits de bienfaisance que les aneotistes lui attribuent, voici 
ce qu'il dit lui.mme des motifs qui les lui ont inspirés : 
« Je me contente du r6le sec de bienfaiteur : un peu de re- 
connaissance me fait plaisir. » Certainement ce est pas un 
crime que de désirer un peu de reconnaissance, maîs le 
bienfait perd beaucoup de son prix iorsqu'on l'accorde sè- 
chement, et qu'on ne l'accompagne pas de paroles conso- 
lantes. D'Hoibach était un grand seigneur philosophe, data 
le Cœur duquel les sentiments tendres étaient émoussé. Sa 
nature germanique, te faste et la bonne chère, alourdissaient 
son esprit. Aussi la plupart de ses bons mots ressemblent- 
ils à celui qu'il adressa à Turgut, se retirant du ministère : 
« Vous meniez fort bien votre charrette ; mais vous aviez 
oublié la petite botte de saindoux pour graisser les essieux. 
OEétait dans la socité qu'il recevait que ce formait l'o- 
pinion du jour. Le club Holbachique, comme disait Bous- 
seau, avait ses protégés et créait ou ruinait les réputations. 
Les prenfiers jugements sur tous les genres de mérite en 
sortaient puissants et exclusifs. Les emplois brlants et lu- 
crati[s étaient mme accordés à ceux que la socié[é pous- 
sait à la cour : elle disposait des journaux et des voix de la 
renommée. D'Hoibach fut le prête-nom de la ligue philoso- 
phique dont Roussean a dit : i L'intérêt commun iestient 
étroitement unis, parce qu'une haine ardente et cachée est 
la grande passion de tou.% et que, par une rencontre bien 
nahlrelle, cette haine commune est tombée sur les mmes 
objets. Ils étendent ainsi leur cruelle influence dans tous 
les rangs, sans en excepter les plus élevés. Pour s'attacher 
inviolablement leurs cn)atures, les chefs ont commencé par 
les employer à mal faire, comme Catilina fit boire à ses com- 
plices le sang d'uu homme, sùrs que par ce mal où ils les 
avaient fait tcuwet, ilsles tenaient iiés pour le reste de 
leur vie, etc. » 
Le crédit du baron d'Hoibach diminua avec sa fortune 
que restreiguit considérablement l'établissement de ses fils, 
dont Lagrange fut le précepteur; mais jusqu'à sa mort, 
arrivée le 21 janvier 1789, il conserva une influence qu$l 
devait moins à ses talents qu'au souvenir des services qu'il 
avait rendus aux philosophes. S'il faut s'en rapporter à 
J.-J. Bousseau, il se faisait attribuer tontes les producti0es 
monstrueuses de ses associés, que ceux-ci craignaient d'a- 
vouer. Barbier prCtend avoir entendu dire à laigeon que 
les personnes m6me qui fréquentaient sa maison ignoraient 
qu'il f0t l'auteur des ouvrages phiiosophiques qui sortaient 
des presses de Hollaude. Il confiait ses manuscritsà aigeon, 
qui les faisait passer par une voie s0re à Michel Be$ :cdni- 
ci envoyait ensuite en France les ouvrages imprimés; et sou 
vent d'Holbach en entendait parler à sa table avant d'avoir 
pu s'en procurer un seul exemplaire. Voici quelques-uns 
des principaux : Chimie rntallurgique, traduite de l'alle- 
mand de Gellert (in-t2) ; Mindralogie, traduite de l'allemand 
de Vallerius (2 volumes in-t2) ; l'Antiquitd dévoilée 
volumes in-12); le Christianisme dévoil, ou examen des 
principes et des effets de la religion ehrdtienne ; Examen 
critique de la vie et des ouvrages de saint Paul; la 
Contagion sacrée, ou histoire aturelle de la supersti- 
tion; l.'Esprit du Clergd, ou le christianisme prirniti! 
vengd des entreprises et des excès de nos prdtres 
dernes : ces deux ouvrages sont fruités de l'anglais de Jean 
Trenchard et de Thomas Gordon; De l'Imposture sacerdo- 
tale, ou recueil de pièces sur le clergd , traduit de l'anglais; 
David, ou l'histoire de l'homme selon le cœur de Dieu; 
L'esprit du Judaïsme; Dernier chapitre du militqirephi. 
losophe, ou difficultés sur la religion proposdes au ère 
Malebranche$ Lettres à Eugénie, ou Frservatifs contre 
les prdjuggs (2 volumes in-t2). On a faussement attribué 
 Frérot ces lettres, qui parurent en 1768. On compte encore 



HOLBACH 
vingt-trois cuvages du baron d'Holbach,inspîrés par sa haine 
pour la religion : parmi ceux-ci figurent en premiëre ligne 
mn Histoire critique de Jdsus-Chrisl et son fameux SlS- 
tème de la Nature. Il a en ou|re traduit phtsieurs œuvres 
scientifiques, tdles que PArt de la Verrerie de l'drie, 3fer- 
ret et Nanclel ; un Essai d'histoire nurelle des couches 
de la terre; l'Art des Mines; un Recueil ci'histoire de la 
chimie et d'histoire naturelle, d'après les travaux des 
acaddmies d'Upsal et de Stockholm, etc., etc. Ces livres, 
vraiment utiles, font regretter qu'un homme doué de ta- 
lents réels les ait fait servir à nn but anti-social. 
Victor Bonr,v. 
HOLBEllI (HA.ss), 'afd, peintre de l'Acule de Souabe, 
né vers 1450, vécnt principalement à Augsbourg. C'ëst vers 
l'an 15OO qu'il arriva à l'apogée de son talent et de sa ré- 
putation ; et I,ient0t, avecses fils Ambrosius, Brunoet ltans, 
qui cultivaient aussi l'art, il se retira à Bàle, où il mourut 
en 1520. L'œuvre de Holbein l'aihWporte l'empreinte d'une 
::fanée vérité de caractère et de nature, qui n'atteint pas, il 
 vrai, la beanté et la dignité idéales, mais ne laisse p;rs 
i'gtre pleine de charmes et de grgce, et que rehaussent 
• honte la délicatesse et la îralcheur du coloris. En général, 
lans ses toiles, les personnages qui représentent le g:nie du 
mal, et parmi lesquels revient souvent un homme pgle en 
-'ostume de chasse vert, avec une plume de coq surmon- 
• ant sa coiffure, Sont outrés. Parmi les tableaux de cet ar- 
'!ste qu'a conservés la galerie d'Augsbourg, le plus important 
,t celui qui représente les principaux évenements de la vie 
.le l'ap0tre saint Paul, et q,e l'artiste composa pour l'église 
Saint-Paul de cette ville. On voit aussi de ses productions 
dans les galeries de Francfort, de Municb et de uremberg. 
l,a dernière n'en possède pas moins de vingt, dont dix-pt 
ïeprésenlent des scènes de la vie de Jésus-Cllrist, et out etL lithographiées par Gysin (Bgle, 15t8 ). Prague a de lui aussi 
.leux magnifiques toiles pelures en grisaille ; Ble enfin, quatre 
grands tableaux relatiîs à la Passion de Jésus-Cl,rist, avec des 
:ignres quelque peu maniérées, mais cependant pleines de vie. 
HOLBEIN (l:lxr), le jeune, l'un des premiers martres 
,le l'art allemand, naquit en 197t à Grunstadt, comme 
nous l'apprend son portrait exécuté par lui-reAme, et dont 
!a découverte est toute récente, et fut I'.lève de son père. 
:)ës 1512 ses productions commencèrent à faire sensation. 
Datas les années suivantes il décora diverses maisons et 
:glises de la ville de l?le de portraits, de fresques et de 
tableaux d'autel. Beaucoup de mots plaisauts, que la tradi- 
tion a conservés, le représenteut comme un joyeux compbre, 
o't sa vie est aussi riche en anecdetes que celle de pas un 
,les plus grands peintres italiens. Ainsi on raconte que 
cbargé un jour de peindre à fresque unedanse de paysans 
dans la maison de danse de Bgle, notre artiste, au lieu de 
presser sa besogne, faisait de longues et fréqueutes stations 
dans un cabaret voisin, situé sur le marcbé aux poissons. 
L'individu qui I avait commandé ce travail temoignant 
tin vif mécontentement de ce qu'il n'allait pas plus vite, 
Holbein imagina de peindre sur la muraille, tout au-dessous 
«le son écbafaudage, deux jambes pendantes et d'une res- 
semblance si parfaite, que lorsque le propriétaire de la mai- 
son mettait le nez à la porte de la salle pour surveiller son 
peintre, il croyait tojours le voir profondément occupé et 
se retirait bien discrètement, pour ne pas le déranger. 
Holbein vivait mal avec sa femme; et lrasme, avec qui 
il était fort lid, fit de valus efforts pour l'arracher au dé- 
sordre. On raconte qu'esprant ainsi le ramener  une meil- 
leure conduite, il lui adressa un exemplaire de son Élooe de 
la Folie; et que Holbein, encltanlé des portraits qu'Ërasme 
avait tracés des différents Heures de folie, entreprit de les re- 
présenter à !'aide de dessins qu'il traça sur let marges mgmes 
de cet exemplaire qu'il ferait à Érasme, et que celui-ci le 
lui renvoya après avoir écrit le nom de Holbein au-dessous 
d'un sujet dans lequel notre artiste avait représenté un 
gros Hollandais caressant d'une main sa bouteille et de 
l'autre sa maltresse. 

-- I]0LBE]N 
Quand Holbein s'ennnya de la ville de Baie et de la ste 
qu'il y menait, Ërasme lui donna des lettres de recomman- 
dation po,tf le célèbre chancelier Thomas blorus; et il se 
rendit alors en Angleterre, en passant par Leyde; du moins 
la tradition raconte une Ioule d'anecdotes sur sa rencontre 
avec Lueas de Leyde. Thomas Motos le logea dans sa maison, 
le fit travailler pendant environ trois années, et invita alors 
le roi à venir visiter les peintures exCulAes par Holbein. 
Srprs et ravi à leur aspect, Henri VIIi s'Crin : « L'artiste 
vit-il encore et pe,t-on l'avoir pour de l'argent? » Aussit6t 
Tbomas Morus de présenter son protégé au monarque, qui 
prit Holbeinà son service et le récompensa magnifiquement. 
Celle rponse, que fit nn jour Henri VIII à un lord qui se 
plaignait à loi d'avoir été insulté par son peintre : « Sachez 
q.e je puis faire sept Iords avec sept paysans, mais qu'il me 
serait impossible de faire un seul Holbein avec sept lords, » 
prouve combien il appréciait notre artiste. Holbein recul 
clés lors constamment en Angleterre, objet de l'estime et de 
la considération générales; il y fit, entre autres, le beau por- 
trait en pied de Henri VIII, qu'il a copié plusieurs fois, ceux 
du prince Ëdouard, des princesses Marie et Ëlisabelh, ce- 
lui d'Arme de CIèves, q«i fait aojord'hui l'ornement du 
lusée de Paris; etc., etc.; et il mourut en ce pays, de la 
peste, en 1554. 
Sans doute Holbe|n fut surtout et dans maintes périodes 
de sa vie presque exclusivement peintre de portraits; mais 
sous ce rapport déjà il égale les plus grands peintres italiens» 
en mme temps qu'il l'emporte sur tous les Allemands con- 
temporains. Il n'y a rien dïdéal dans ses portraiLs; seu!e- 
ment la nature s' trouve représentée dans ce qu'elle a de 
plnq vif et de plus ingénieux. Quant à l'exécution, rien de 
plus riche, de plus,parfait sous le rapport du coloris, du des- 
sin, de la disposilion des figures et des accessoires. Ce ne 
sont point des personnalités béroiquemment guindées; ce 
sont des personnages bien réels, représentés avc autant de 
chaleur que de vérité : c'est la vie prise sur le lait. ous 
citerons pour exemples les portraits de sa femme et de ses 
enfants qui se trouvent à Ble, ainsi que ceux de Froben, 
d'Érasme et d'Amerbach. C'est aussi à cette première période 
de sa carrière qu'appartient La Sainte Cène, qui -,e trouve 
 BÆle, de mme que sa célèbre Danse des Mors, o" 
il a représenté tontes ]es conditions de la vie ; les dessins 
si comiques qu'il composa pour l'encadrement des marges 
de l'loçe de la Folie d'Erasme • et les deux magnifiques 
toiles reprégentant des filles de joie. Autant on en peut dire 
d'un tableau votif que possëde la galerie de Dresde et re- 
présentant un bourgmestre de Bgle agenouillé devant la 
sainte Vierge avec toute sa famille; des nombreux cartons et 
esquisses qu'il composa pour des peintres sur verre; de ses 
fresques, dont la plupart n'existent ma!heureusement plus ; 
enfin d'une Adoration des bergers et des rois ornant la ca- 
tbédra]e de Fribourg en Brisgau, et vraisemblablement aussi 
de la célèbre Psion, en sept compartiments, qui se trouve 
à Ble. Dans ses tableaux historiques Holbein se dégage des 
entraves de la tradition de son école. Dans son coloris, dans 
son exposition, il est complétement vrai et indépendant. Il 
a cbercbé et trouvé la poésie à sa manière, non point en se 
lançant dans l'idéal comme les Italiens, mais par la concep. 
tion pure et nuire de la vie. Le coloris des deux Filles de 
Joie, l'ordonnancemen t et les caractère., de La Sainte Cène de 
BMe, proche parente de celle qui orne la galerie du Louvre, 
prouvent cependant que Holbein connaissait et avait étudié 
les œuvres de Léonard de Vinci. 
Dans sa seconde période, le travail devient un pu plus 
superficiel, et son coloris n'est point tout à tait exempt de 
la manière des peintres flamands qui se sont formés en 
Italie, et dont il se peut qu'il ait vu les œuvres pendant 
sonvoyage pour se rendre en Angle/erre. De magnifiq,es et 
ingénieux portraits, appartenant à cette seconde përiode, or» 
rient la galerie du L¢uvre, le mnsée de Berlin et surtout les 
galeries du cbàleau de Longford, près de Salisbury, et du 
château de Windsor. Il existe de lui, dessinés à la main, 
16. 



14 
quatre-ingt-sept portraits de personnages de la cour de 
!Icn,i V I Il ; la plus grande partie en fut retrouvée dans le 
tenu de Kensington et a été gra ée par Bar tolozzi. Dans le 
/e1-'s h'a'l  Londres, on voit un beau tableau de cérémonie 
qui réprésenle Henri VIII dont)ont de nouveaux statuts 
corporation des chirurgiens et barbiers, dont les chefs sont 
agenouillés devant lui. iotre musée du [,ouvre poss6xie aussi 
un des plus beau. Lableaux de Holbein, rprésenfant Jus 
descendu de la cro/.z : au bas est une frise figurant la Cène, 
dont la composition, les gestes et l'exproEsion des figures ont 
beaucoup d'analogie avec le magnifique tableau de Léonard 
de Vinci qui est à Milan. 
Pendant longtemps Holbein a aussi pas pour un des 
plus grands graveurs sur bois. Sa Dalse des Morts, des 
gures pour l'Aucien Testament, trois alphabets d'luit|nies et 
d'autres travaux encore lui assignera|eut ce rang s'il les avait 
non seulemet)t compos, mais encore gravés lui.même. Mais 
cette opinion a été combattue, et nou sans une grande ap- 
parence de raison. On croit donc que Holbcin n'a que peu 
grarë ou mme pas du tout; que sa Dot, se des Morts fut 
grave par Hans Lutzelburger, dont le monogramme se 
retrouve egalement sur le portrait de la Duchesse. Toute- 
t-oto c'est là une question encore controver»ée, et qi a donné 
lieu à une polémiqe assez animée de la part de quelques 
critiques allemand, comme I',umohr, Sotzemaun, etc. 
HOLBEIG (Lovt, baron er.), le créateur de la littéroe 
turc danoise moderne, në le 3 novembre t35,  Bergen, 
.Nrvège, tudia d'abord la théologie/ Copenl,ague et fut 
nsuite précepteur pa ticulier. Son p.re, qui de imple sol- 
dat était devenu colonel, mourut ainsi que sa mère pen- 
dant qu'il était encore sur les banes de l'univers|tC et ce 
double malheur le rëduisit à une gêne cruelle. En donnan 
des leçons particutires, il fit cependant des économies suf- 
fisantes pour pouvoir isiter la Hollande, fAllemagne, la 
France et l'Angleterre. De retour à Copenbague, flolberg y 
vécut encore quelques anaCs en enseignant les langues 
trangères, puisil fut nommé professeur agrgé d°abord, et plus 
tard professeur en titre à l'université. C'est alors quïl com- 
rnença  s'exercer dans la satire. Il crivit ensuite en 
bes Ic poeme héroi-couique de l'eder Paars (1719-1720 
qui lui eut bient6t fait une grande répt,ti«n. Cet ouvrage 
fut suivi de/]ans M»-lleLsens fire $emedi9te ( 172, et 
et plus tard de Hns MiMelscs Metamorphosis eller For- 
vandli:çer (t726). Le hasard lameua à travailler pour le 
thctre, où son talent tro»va enlin le véritable terrain qui 
ui convenait. Il composa, à des intervallestrès-rapprocbes, 
un gra,d nombre de comédies, publiées sous le titre de 
liards Mddelse:s Comedter (7 vol., I23-17-i), qui ne lar- 
dèrent pas à ètre traduites eu allemand et mè, ne en français: 
toutes curent un grand succès. Il fut, ix proprement parler, le 
fÇndateur du théàtrecodque des Danois. La vivre|tWde 
ere, la finesse de sa plaisanterie, l'original|tWde ses ca- 
ractè'es lui assurent une des places les plus honorables parmi 
les auteurs comiques modernes. Bien que Iaucoup de 
trait. ne se rapportent qu'a son temps et au degré de civi- 
lisation où se trouvait alors sa nation, on les voit et on les 
it totjours avec plaisir. Tout récemment son Potier d'dlan 
a eu les honneurs d'une double traduction en français. 
Son Foyçe outerrain de .A'els Klim, roman satirique 
_n latin, qui dès son apparition fut traduit en plusieurs lan- 
gues, ajouta encore àsa réputation. On a aussi de lui une/s- 
toire de Da:enmrl, une H isloire çdndrale de l'Éçlise, une 
IIistore des Jifi, et des EWgraphies comportes ci« 
os et. d'lloeroï:es clèbre.s, à la maire de Plutarque, des 
Ëpitres et des Fables; mais on voit tout de suite en les 
|int qu'il n'était point né fabuliste. Il tut créé baron du 
royaume, en t77. Anglai par le caractère, Françai par le 
go0t et la politesse, il véozt célibataire, et mourut le 17 jan- 
vier t5, Itguat la majeure partie de sa fortune au colléf, e 
noble de.Soroe. 
I|OLETIES (de ).o, tout, et ,-.«., ventre). 
Aacut«b, t. |» p. 729. 

HOLBEIN  HOLLA'DAISES 
HOLLAX-D (H£.-rlwasnt) VASSALL, lord ), né en 
t773, était fils unique d'Ëtienne Fox, deuxième lord Hol- 
land et neveu du célèbre F o x. Après avoir termin4 ses 
Cudes ì Eton et Oxford, il voyagea sur le continent, et connut 
en ltalie ]liabeth Vantail, femme de sir Godfrey Webster, 
qu'il épousa à la suite d'un divorce scandaleux. A son re- 
tour, il prit place, en 1798, ì la chambre haute. Dès sou 
début, soutenu par une éloquence simple, mais noble, il se 
munira défenseur et avocat résolu d'une politique libérale. 
Avec beaucoup d'autres, il jugea tout de suite qtm la réforme 
des abus monstrueux dans l'administration ne pouvait s'. 
pérer que par une réforme du parlement. Il se prononej 
également contre l'union de l'Irlande avec l'Angleterre, que 
le ministère ne put emporter que par les moyens de la cor- 
ruption la plus CoutC. En 1802, à la paix d'Amieus, Hol- 
land alfa voyager pendant trois années en Espagne et en 
Portu,al, et il utilisa son séjour dans la péninsule pour se 
livrer/ une étude approfondie de la langue et de la littéra- 
turc espagnoles; étude dont témoignent ses excellentes bio- 
grapbies de Guillen de Castro et de Lope de Vega (Lot)dre, 
1805; 2 « édition, 1817). A son retour, il reparut dans les 
rangs de l'opposition, et en oS06, à la mort de PlOt, il entra 
comme secrêtaire d'Etat dans le ministère dit des Talents. 
I Mais la toort de Fox (13 septembre t$06) ayant rompu les 
négociations entamées avec la France, il sortit du cabinet; 
et/ partir de ce moment il dirigea pendant vin-qualre 
ans et sans relàchc, dans la chambre haute, la lutte de l'op- 
position contre la politique doE tories. Dans toutes les ques- 
tions importantes de cette époque, il défendit les vrais prin- 
cipes de la liberté et de l'humanité. Si alors il ne put em- 
porter contre les tories, affermis par la victoire, la révo- 
cation des lois d'exception, il se rendit tout au moins re- 
doutable  ses adversaires par le retentiement de ses mor- 
dants sarcasmes et par une infatigable opposition. Lorsqu'eu 
mars 1818, MM. Moutholon et Santim dënoncèrent au par- 
lement la eruauté avec laquelle on traitait Napoléon à Sainte. 
Helène, Holland insita pour q«e les ministres donassent 
communication des pièces relatives à toute cette allaite; 
mais il vit la majorité rejeter at,ssi cette proposition. " 
Lady Holland c..ercha  adoucir le sort de l'illustre captif 
en lui envoyant des litres, des journattx, et en I,d falot 
passer divers autres objets que le gouvernement anglais ne 
lui accordait qu'avec une extrême parcimonie. L'empereur, 
reconnaissant, fit prëent à Lady Holland, dans son testa- 
ment, d'un camée antique qui lui avait été offert jadis 
Pie ,'I, lors de la signature de l'armistice de Tolentino. 
Enfin, en 1830, lorsque le ministère de la reforme, d/riVe 
par Grey, arriva aux affaires, Ilolland rentra ausidar 
l'administration. Toutefois, sa santé l'empêcl,a d'accepter 
un portefeuille ; mais on le nomma chancelier du dnch de 
Lancastre, sinëcure qui lui donnait le droit de fMre partie du 
cabinet avec voix délibérative. Il siégea également en cette 
qualité dans le ministëre M e l b o u r n e. ,'ers la fin de sa vie, 
Holland prit rarement la parole au sein du parlement. Voue 
aux arts et  la science aussi bleu qu' la politique, sa mai- 
son était le rendez-vous des artistes et des savants. 11 mou- 
rut  Londres, le 22 octobre IS40. On a de lui une bioalkie 
de son oncle Fox, qu'il a pubtiëe avec l'ou rage de celui-ci : 
ltitory of the early part of the reien of Kmg James il 
(Londt-es, 1505). II est aussi |'ïàiteur des Memoir$ o.f Wal- 
deçrave (1522). 
Ses enfanLs ne portent plus le nom de Vo.sall, qu'il avait 
pris de sa femme ; mais ils ont repris le nom de Fox, qui 
est celui de leur famille. Son fils, Henri.Edouard Fox, 
lord HOLL'U), né en 1802, ex-emoyë à Florence, a publie 
en 1850 les piquants Souvenirs de Voyage (Fore/en 
niscences) de son père, qui produisirent une vive sensation 
dans les cercles aristrocratiques. 
IIOLLAXDAISE (lcole). Voye'. ÊcoLr.s nf. 
tome VIII, page 
HOLL.kNDAISES (Latgue, Lit,érature et Sciences). 
La langue parlée en flollande est un dialecte du tt]desquc; 



HOLLANDAISES 
on s'y sert aussi du frison, dans lequel a crit Gysbert Ja- 
cobs, né en 1603, à Bolsward, et qui a été l'objet des re- 
chercbes du professeur Everwyn-Wassenberg. Les llollan- 
dais sont fort attachés à leur idiome, qui en effet est riche, 
flexible, et aussi propre à l'expression des pensée« qu'à celle 
de la naiveté et de la grâce. C'est une des langues les mieux 
faites, différant de l'allemand sous le rapport de la gram- 
maire et sous celui des inversions, riche en synonymes et 
en nuances délicates. Par son ampleur et son énergie la lan- 
gue hollandaise semble plutft convenir à l'histoire, à l'épo- 
pée, à l'ode et à la tragédie, qu'à la poésie Igère et à la 
comédie. D'ailleurs, la poésie est populaire en Hollande, et 
cette nation, qu'on se figure volontiers comme flegmatique 
et exclusivement occupée du soin de s'enricltir, est, jus- 
qtm dans les classes les moins élevées, sensible/l tout ce 
qui peut émouvoir l'imagination et remuer le cœur. 
Au treiziëme siécle, blelis Stoke écrivit une chronique ri- 
mée, contenant en l0 livres i'histoiredes comtesde Hollande, 
depltis Dijrk ou Didier 1 er jusqu'à Guillaume 11][. A la mme 
époque nous trouvons encore des fabulistes et des roman- 
¢iers. Le quatorziëme siècle nous présente Guillaume van 
Hildegaertsberch et, de mme que l'Age précédent, des 
pèces de trouvëres, appelés orateurs ou sprelzers, qui par- 
couraient les cours et les chteaux, où ils débitaient des 
maximes morales en prose et en vers, arrangé% soit par 
eux-mmes, soit par d'autres, et auxquelles on donnait alors 
le nom général de proverbes ou spreulen. Pendant ces épo- 
ques, et jusqu'à la fin du seiz/ème siécle, la supériorité fit- 
téraire semble appartenir à la B e I g i q u e; mais la Hollande, 
ayant conquis son indépendance, l'emporta bient6t sur sa 
rivale, qtd, placée trop longtemps dans des circonstances 
moins favorables, n'eut rien à opposer aux Vend el, aux 
Kats, aux Hooft, aux Van Haren, aux Helmers, etc. 
L'imitation française, une imitation servile et malentendue, 
faillit tout perdre, lorsque les écrivains qui illustrèrent le 
règne de Louis XIV eurent ébloui le reste de l'Europe 
de leur renommée, biais enfin, on abandonna cette route 
prilleuse. 
Uu des auteurs qui contribuèrent le plus puismmrcent à 
ramener la littérature balaye à son génie fut B i Id erd y k, 
que ses compatriotes placent sans hésiter  coté de Goelbe 
et de Byron. De nos jours, se sont distingués comme poëtes : 
Feith, Bellamy, Van AIphen, lieuwland, Êlisabeth 
Wolf, Agathe D e k e n, Tollens, etc. ; comme prosateurs, 
Loosjes, Van Hall, Berger, Van der Paire, etc. 
La Hollande est toujours la terre classique de l'érudition, 
la terre qui donna le jourà Dousa, à Juste Li pse, à Sca- 
liger, à Grotius,ì Vossius, àHeinsius,  Gre- 
ner, à Haverkamp, et continue cette école philologique fon- 
dée par les Hemsterbuy% les tt uhnkeJtiu.s et les Wttenbach ; 
école sage et laborieuse, mais qui peut-être s'attache plus 
à la forme qu'à l'idée. La Hollande est le seul pays de l'Eu- 
rope o6 l'on se pique encore d'écrire en latin avec élégance 
et pureté. Ses universités, surtout celle de Leyde, récom- 
pense d'un grand dévouement patriotique, soutiennent leur 
ancienne réputation ; et ses écoles moyennes et élêmeutaires, 
multipliPes jusque dans les plus humblos villages, et où l'on 
suit d'excellentes méthodes, portent jusque parmi les moins 
fortunés une instruction substantielle, prudemment propor- 
tionnée au rfle que chacun est appelé il jouer dans le monde. 
L'association dite Pour l'unit publique (Tel n ut van t'al- 
9emeen) rend sons ce rapport, contme sous bien d'autres, 
d'éminenLs services, qui ne coOtent rien à l'État. 
Les Hollandais cultivent les scieucesavec succès; il nous 
suf6ra sans doute de rappeler ici pour la mddecineles noms 
de Van Helmont, de Boerhaave de Vesale, de 
Swammerdam, de Rusch, de Camper, de Huy- 
ghens, de S'Gravesande, de van Calkoen, de Leeu- 
wenhoek,deM uschenbroek, deSpinosa, d'lrasme, 
d'Ailzena, etc. Leurs peinlres, si nombreux, si estimés, mais- 
que Louis XIV n'aimait pas, lui qui u'ttait frappé que °|'une 
grandeur de convenlion, sont des colorisles incotnparable% 

-- HOLLANDE 1 
moins habiles, toutefois, à rendre les grandes scènes de 
l'histoire qu'à reproduire avec une vérité minutieuse la na- 
ture morte et les détails subalternes ou grotesques de la vi 
dome.stique. Ils ont déjà été appréciés dans ce livre à l'ar- 
ticle ECOL DE PEI.NTUBE ; nous nous bornerons donc à y ren- 
voyer le lecteur. L'architecture, excepté l'architecture 
draolique, ne brille pas citez les Hollandais d'un grand éclat; 
leurs édifices modernes manquent en général de dignité et 
de grace. Quant à la musique, on cite parmi eux peu de 
compnsiteurs dignes d'attention ; et c'est à peine si à l'é- 
tranger on en pourrait nommer un seul. 
DE 1 E, FF'BEnC. 
HOLLANDE. C'est, dans son acception la plus large, 
le nom qu'on donne souvent à la ci-devant république des 
sept Provinces-Unies et au royaume actuel des P a y s-B a s; 
mais, dans un sens plus restreint, on entend par là les deux 
provinces nord-ouest de ce royaume confinant/l l'ouest et 
au nord à la mer d'Allemagne, à l'est au Zodersée et aux 
provinces d'Utrecht et de Gueldres, au su,l à la province du 
Brahant septentrional et à la Zélande, et répondant à peu 
prës à l'ancien comté de Hollande. Depuis 1816 ces deux 
provinces n'en formèrent pies qu'une seule, divisée cepen- 
dant, sous le rapport administratif, en deux gouvernements : 
celui de la Hollande septentrionale et celui de la Hol- 
lande mdridionale; mais quand, en 1830, la Belgique 
se sépara des Pays-Bas, on en constitua deux provinces 
du royaume, complétement distinctes l'une de l'autre. 
Elles comptent ensemble, sur une superficie de 66 myria- 
mètres carrés, une population de 1,068,638 habitants, et 
forment la partie la plus peuplée, la plus riche, la plus 
rissante du royaume, de mme qu'autrefois la Hollande 
constituait le centre et le point d'appui de la république 
des provinces uniesdes Pas-Bas. Placée quelquefois au-des- 
sous du niveau de l'neCn, elle offre partout un sol plat, que 
dominent seulement des dunes qui, avec un coOteux sys- 
tème de digues, le protègent contre les envabissements de la 
mer; couvert d'ailleurs de lacs en pa, tie desséchés comme- 
la mer de Harlem), de marais et de tourbières, d'immen- 
ses lturages, de terres à bi» et de jardins ; et traversé 
par d'innombrables canaux de desséchement et de na- 
vigation, par exemple le and Canal de Hollande, entre 
Amsterdam et le Helder, par de petits cours d'eau, et par 
plusieurs bras du Rhin et de la Meuse à leur embouchure. 
Le climat est humide, variable et froid, sans tre malsain 
pour les habitants. Le sol, cultivé avec le plus grand soin, 
produit surtout du seigle. On cultive aussi le chanvre et la 
garance; on récolte beaucoup de h'uits et de légumes. Les 
graines de jardin, notamment les oignons de jacinthes et 
de tulipes, donnent mme lieu à un commerce d'exportation. 
Mais l'éducation du bétail, qui a pour annexes la fabrica- 
tion du beurre et du fromage, constitue, en raison de l'ex-- 
cellence des pturages, une industrie autrement importante. 
L'éducation des abeilles et des volailles ne laisse pas non 
plus que d'tre très-productive. Les principales industries 
consistent dans la fabrication et la blanchisserie des toiles, 
la filature du coton et du lin, la fabrication des toiles à 
relies, des rubans, du sucre, du sel, des sirops, du tabac, 
des articles en cire, en caoutchouc et en argile, des couleurs, 
de la céruse et des produits chimiques, la distillerie des 
eaux-de-vie de grains, la taille des diamants, la fonte du 
fer et la construction des machines, surtout des vaisseaux. 
Il faut  ajouter des pcheries importantes, un vaste ca- 
botage et un commerce aussi actif que productif. C'est en 
ltollande q«e sont situés les villes les plus grandes, et les 
plus-riches, les ports les plus stlrs et les pins fréquentés, les 
ítablissements, les collections et les sociétés scientifiques les 
pins considérables qu'il y ait dans le royaume des Pays-Bas. 
La Hollande septentrionale, désignée aussi autrefois sous 
le nom de Frise occidentale, présente avec les lies qui en 
dépendent (Terschelling, ¥1ieland et Texel dans la mer du 
Nord, Marken, Wieringen dans le Zudetxée, etc.) une 
superficie tolale de 29 myriamélres carrés, avec une popula. 



tion de 479.566 babitants, et est divisée en arrondissements 
porta,,t les noms des villes qui en sont les chef-lieux 
Amsterdam, Harlem, lloornet Alkmar. 
La Hollande méridionale, en y comprenant les lies d'¥s- 
selmonde, de Voorue, de Beljerland et d'Overflakke, situées 
entre les embouchures de la Meuse, présente une superficie 
de 37 mriamètres carrés, avec une population de 568,872 
habitants, et forme les af rondissents de La H a y e, L e y d e, 
R o t t e r d a m, D o r d r e c h t, Gorkum et Brielle. 
Dans les temps les plus anciens, la HolLande était habitée 
au sud par les B al au es et au nord par les F r isons. Les 
premiers furent soumis par les Francs dès le cinquième, les 
seconds seulement au huitième siècle, et encore conservè- 
rent-ils toujours une certaineindépendance. Le pays, qui à l'o- 
rigine dependait de la Lorraine, etait go uverné par des comtes, 
parmi lesquels ceux de Wlaardingeu acquirent toujours plus 
d'importance, de mme qu'ils agrandirent contim,ellement 
leurs possessions, surtout dans la Hollande septentrionale, ha- 
bitée par des Frisons, et finirent par se rendre souverains 
béréditaires de toute la Hollande et par tre reconnus comme 
princes immédiats de l'Empire. Dijrk I ', mort en 903 
dit-on, le premier qui obtint de Charles i« Simple la Hoi- 
lalde à titre de fie[ héréditaire. Toutefois, les cl,artes ne meu. 
tionnent pour la première fois le nom du comté de Hollande 
que sous Dijrk V. Avec le temps ces comtes acquirent 
aussi la Zlande et une partie de la Frise orientale. Leur race 
s'éteignit en 1299. Le pays échut alors en héritage à Jean Il 
d'Avesnes, comte de Hainaut. Au milieu, du quatorzième 
siècle de grands troubles intérieurs surgirent, provoqués par 
la querelle survenue entre Marguerite, épouse de l'empereur 
Louis de Bavière (à qui le pays Cait échu en i,éritage, par 
suite de la mort de son rière, le comte Guillaume IV), etson 
fils Guillaume V. Il se forma alors deux factions, celle des 
Hoeks et celle des Cabillau ds, dont les luttes ne cessè- 
,eut que lorsque le pays Chut, en 1430, à Philippe le Bon 
de Bourgogne, après ie.dëtr0nement de la dernière héri- 
tière et souveraine, la comtesse Jacobée. Dès lors la Hol- 
lande partagea les destinées de la Bourgoe (voile'- 
coe et PYs- B). En ce qui touche l'organisation politique 
du pays, la constitution de la Hollande était celle des Etats 
voisins. Aux douzième et treizième siècles, les villes devin- 
rent puissantes et florissantes; le commerce y était des plus 
actifs; et elles comptaient deja d'importantes manufactures de 
draps. Les comtes de Hollande avaient une flotte conside- 
rable ; les habitants des cotes étaient tem,s d'y servir pen- 
dant un certain temps. 
IlOLLANDE (Fromage de). Voye'- 
HOLLANDE (Nouvelle). Voyez [OUVELL£-HoLLnE. 
HOLLAP (We,CSLS), spirituel graveur sur cuivre, 
n en 1607, à Prague, fut Féleve de Matthien Mérian de 
Francfurt. Dès 1625 il donna ses deux premières planches, 
une tïerge fi l'enfant et un Ecce Homo; puis il parcourut 
l'Allcmagne, et grava des vues de ses principales illes, 
telles que Strasbourg, Francîort, Cologne, blayeuce, etc., 
qui excitèrent l'admiration générale. A Cologne, il ren- 
contra, en 1636, lord Arundei, envoyé par l'Angleterre en 
qulit d'ambassadeur à Vienne. Lord Arundel, qui aimait 
les arts, le prit à son service. A Londres, Hollar grava 
d'abord quelques planches d'après des tableaux de la galerie 
d'Arundel ; en 1638, à i'àccasion de la visite de 51arie de 
Mdicis en Angleterre, differents portraits de la iamille royale 
et celui du comte d'Arundel à cheval ; en 1639, les vin- 
Irait planches si admirées de l'Ornatus znuliebris angli. 
canu, q,,'il fit suivre, de 1642 à 1644, des costumes de 
|emmes citez les différents peuples de l'Europe. La guerre 
civile vint interrompre ses travaux ; mis en prison, en 1645, 
comme royaliste, il suivit, après sa mise en liberté, le comte 
d'Arundel, qui s'était sauvé à Anvers avec sa.collection. Il 
resta plusieurs années dans ce|te ville, et y grava d'abord 
quelqt,es morceaux de la gale,'ie du comte; mais la santé 
«le celui-ci l'ayant forcé d'aller en Italie, Hoilar fut obligé 
pour gagner sa vie de recourir à des travaux commandés 

HOLLANDE -- HOLOTHURIDE$ 
par des marchands d'objets d'a,t. En 168, il retourna, 
est vrai, eu Angleterre; mais il ne réussit pas à s'y faire 
une position meilleure, et malgré son infatigable ardeur an 
travail, il tomba dans la plus profonde misëre. Les der- 
nières années de sa vie s'écoulèrent de la maniëre la plus 
triste, et l'on raconte que peu de temps avant sa mort ses 
créanciers roulureS, pour se payer, faire vendre la seule 
chose qu'il possédat encore, son lit. Il mourut le 8 mas 
1677. Ses gravures sur cuivre» soit d'après des martres 
anciens ou contemporains, comme Hoibein et Van 
soit d'après ses propres dessins, montrent de l'esprit, de la 
finesse et une vérité de natnre obtenue avec peu de moyens. 
Un catalogue de ses ouvrages a paru ì Londres en 
HOLM. En Dauemark et en Suëde, 'est le nom qu'on 
donne en général aux petites lies : mais ì Copenhague et 
à Stocklaolm on désigne généralement par ce mot des flots 
sur lesquels sont établis des chantiers de construction. 
HOLMAN (J«s), le ièbre voyageur aveuglo, fut d'a- 
bord iietatenant dans la marine britannique, et exéeuta dé 
pendant les guerres contre la France de grands voyages par 
mer, surtout dans les mers d'Amérique. Devenu avenue, 
il n'en continua pas moins ses pérégrinations et tout seul. 
C'est ainsi que, de 1819 à 181, il parcournt la France, 
i'Italie, la Suisse et la Hollande ; et il rendit compte de ses. 
exeursions dans son Varrative of a Journeil, etc. (Londres, 
18--). Peu de temps après il se remit en route pour la 
Iussie; mais, par suite des obstacles que lui suscita le 
gouveriement russe, il n'alla pas plus loin que les provinces 
méridionaies, et dut revenir sur ses pa. Alors il s'en alla 
fairo le tour de i'Afrique, et se rendit, en passant par l'lle 
Maurice, dans l'Inde, parcourut plusieurs parties de la 
ninsule, pénétra en Chiue aussi loin qu'on le lui permit, 
visita au retour Ceylan, Madagascar, puis l'Anstralie, et, 
dans l'CWde 1831, le continent américain; il ne revint dans 
sa patrie qu'en 1832, après une absence de cinq ans, et 
puhlia alors de l'ouvelles Observations faites dans ses 
roulages. En 183 il visita encore la Daimatie, Montenegro, 
la Bosnie et la Servie, et se rendit en 1844 par la Moldavie 
dans la Tran«ylvanie. 
HOLOCAUSTE (du grec 6ov, formé de 
tout, et z,,m, je brille), sorte de sacrifice dans lequel la victime 
était entièrement consumée par le fen. Chez les Juifs deux 
agneaux étaient tmas les jours offerts en holocauste sur l'autel 
d'airain : un le matin, avant les autres sacrifices, et l'au- 
tre le soir, aprèstous ceux de la journée. On offrait en onlxe 
des holocanstes dans différentes cérémonies publiques on par- 
ticialières- Dans les sacrifices que les Grecs avaient coutume 
de faire aux Dieux infernaux, on n'offrait que des holo- 
canstes. L'hostie était réduite en cendres sur l'autel, parce 
qu'il était défendu de manger rien de ce qui avait été ira- 
molWpour les morts. Dans un sens plus étendu, holocauste 
s'entend de toute espèce de sacrifice. 
HOLOPHEILNE. Voyez JVmTH. 
HOLOTHUIIDES. Blainvifle désigne sons ce nom 
son ordre premier de sa première classe des animaux rayon- 
nés ou actinozoaires ou des échinodermaires. Cet ordre est 
divisé par lui en cinq sections, auxquelles il n'asslgue ni le 
rang des familles ni celui des genres. Voici les caractères 
de l'ordre des bolothuridcs et des cinq sections qu'il ren- 
Ierme : Corps plus ou moins allongé, quelquefois verrai- 
|orme, mou ou flexible dans tous ses points, pourvu de 
suçoirs tentaeuli|ormes, souvent nombreux, très-extensi: 
bles, complétement rétractiles, et percés d'un grand orifice 
à chaque extrémité ; bouche antérieure au fond d'une sorte 
d'entonnoir ou de caviteprébuccale, soutenue dans sa circon: 
férence par un cercle de pièces fibro-calcaires et pourv 
d'un cercle d'appendices arbnseulaires plus ou moins ra- 
mifiés; anus se terntinant dans une sorte de cloaque, s'ou- 
vrant à l'extérieur par un grand orifice terminal ; organe 
de la génération se terminant par un orifice unique, médian, 
à peudedistance de l'extrèmté antérieure et presque mar- 
ginal. 



HOLOTHUBIDES 
Les bolothrides sont des animaux marins qu'on trouve 
eans toutes les mers, dont ils habitent en général le fond. 
On les tr«nve cependant quelquefois sur les rivages, parmi 
les fucus. On connatt très-peu leurs mœurs, surtout ce qui 
ed relatif à leur génération. On sait qn'ils se nonrrissent en 
général du détritus des substances végétales et animales m- 
lies au sable plus ou moins vaseux qu'ils avalent et qu'on 
trouve en abondance dans leurs intestins. 
ka premiëre section des holothurides renferme les espèces 
dont le corp est aplati avec soçoirs en dessous, qui forment 
le genrë cuvieria de Pérnn. La deuxième ne comprend que 
les espèces du genre h o I o t h u r i e, c'est-/-dire celles dont 
le corps subprismatique est pourvu de suçoirs inférieurs. 
- Un troisièmegroupe d'espëces à corps fusiforme et à suçoirs 
pars constitue le genre thione, qui forme la troisième sec- 
tion. La quatrième ou le genre flstularia ne contient que 
les espèces  corps vermiforme, h tentacules pinnés. Eniin, 
la cinquième section ou le genre cucumaria esf le groupe 
des espèces à corps subpentagonal à soçoirs ambulacri- 
formes. L. 
HDLOTHUIE (de ),o, entier, et Optov, petit trou), 
genre d'animaux raonnés, de l'ordre des h o I o t I, u r i d es, 
dont il constitue la deuxième section. La caractéristique de 
ce genre, institué par Linné, est, en outre de la forme sub- 
prismatique de son corps et de ses suçolrs épars situés sur 
le veutoe seulement, la position subinfère de la bouche, ce 
qui le distingue du genre cuvieria, dont les deux orifices 
(bouche et anus) sont plus ou moins supérieurs; en outre, ce 
genre offre des appendices buccaux peu ramifiés, en quoi 
diffère des autres genres thone, fistulaires et cucumaria ou 
concombres de mer. Il renferme un assez grand nombre 
d'espèces, dont six ont été observées et décrites par M. Delle 
Chiaje comme habitant le golfe de Naples. L. Lxvwr. 
Parmi les espècesde ce genre, citons l'holohrie rpan 9 
(hololuria edlis), dont la substance, quoique assez co- 
riace, est rechercbée comme aliment dans que]ques localités. 
« Célèbre depuis longtemps dans le commerce de l'Iode 
sons le nom. de trépang, que lui out consacré les Malais, ou 
depriape marin, que lui donnent les Européens, cette ho- 
lothurie, dit M. Lesson, est l'objet d'un immense commerce 
de toutes les lies indiennes de la Malaisie avec la Chine, le 
Camboge et la Cochinchine. Des milliers de jonques malai- 
ses sont armées chaque année pour la pche de ce zoophyte, 
et des navires anglais ou américains se livrent eux-mmes 
la vente de cette denrée, généralement estimée chez tous 
les peuples poigames, qui lui accordent les propriétés 
aphrodisiaques les plus énergiques et les plus efficaces. 
Au dire de M. Delle Chiaje, les pauvres habitants des c6tes 
de Naples manent aussi des holothuries. 
HOLSTEIN ducbé du nord de l'Mlemagne, borné 
au nord par le duché de Schleswig, dont le séparent U "Eider 
et le canal de Scbleswig-Holstein, et par la Baltique; à l'est, 
par la Baltique, le territoire de Lubeck et le duché de Lauen. 
bourg; au sud-ouest, par le territoire de Hambourg et par le 
royaume de Hanovre, dont le sépare l'Elbe; à l'ouest, par 
la mer du Nord. Il renferme en grande partie la principauté 
de Lubeck qui y forme une enclave appartenant au grand* 
duc d'Oldenbourg, et, non compris ce dernier territoire, 
comprend une surface d 109 myriamètres carrés, avec 
une population de 80,000 habitants de souroe germanique. 
En raison de la nature diverse de son sol, on le divise en 
larschland (Pays de Marches) et Getland (Pays de lan- 
des). Sous la première de ces dénominations on comprend 
l'Cendue de territoire, formée par alluvion, que des diues 
pro{ègent contre les empiétemenls de la mer du Nord et de 
l'Elbe; pays qui commence un peu au-dessous de Hum- 
bourg, se prolonge tout le long de la frontière occidentale 
du duché jusqu'au Schleswig, et prcsente à son point 
extrême de large«r une profondeur de 15 kilomètres envi- 
ron. La seconde est employée pour désigner la partie du 
pays la plus élevée, qui forme une plaine onduleuse, inter. 
ompue par de petites cones, traversée à son ntre, dans 

-- HOLSTEIN 127 
la direction du nord au sud, par un petit plateau sablon. 
neux et couvert de bruyères, puis s'abaissant à partir de ce 
plateau dans la direction de l'est à l'ouest. Le sol, sauf 
un petit nombre de bruyères et de parties sabtonneuses, 
est fertile, à l'ouest surtout, et d'une luxuriante fécondité 
dans les Marches. Il est arrosé par divers cottrs d'eau et 
par de charmants lacs, notamment à l'est. Nous citerons 
parmi les premiers l'Eider et l'Elbe, qui lui servent tous 
deux de ligues de démarcation, l'Alster, la Stoer, la Bruine, 
qui se jettent dans l'Elbe, et la Trave, qui a son embouchure 
dans la Baltique. Les lacs les plus remarquables sont ceux 
de Ploen, de Salent, d'Enfin et de Vfesten. Sur la Irontiëre 
nord, le canal de Schleswig-Holstein met la Baltique en 
communication avec l'Eider, qui se jette dan la mer 
Nord. Le climat et les conditions physiques du pays, tant 
dans le Marschland que dans le Gecstland, sont les mëmes 
que dans les autr, contres du nord de l'A|lemagne si- 
tuées sous la mime latitude. Le duché fournit du sel et de 
la chaux, mais pas d'autres minéraux. On trouve de l'am- 
bre sur les bords de la Baltique, et beaucoup de tourbe dans 
l'intérieur. Il produit en aboodance des céréales de toutes 
espèces ; il s'I/ trouve aussi de belles forSts notamment 
à l'est, et le htre en est l'essence dominante. Il y a de 
mme abondance de chevaux et de btes a cornes; et les 
cours d'eau et lacs sont très-poissonneux. L'industrie manu- 
facturière est peu itnportante: en revanche, l'agriculture 
et l'Cève du bétail y sont parvenues à un haut degré de 
perfection, et leurs prodtits constituent les articles les plus 
importants d'un grand mouvement d'exportation. Le com- 
merce qui en résulte a pvi. un assez large développemeat, 
de mSme que dans les ports le cabotage. Les travaux en- 
trepris dans ces trente dcctdërcs années pour l'amélioration 
des voies de communication n'eut pas peu contribué/ l'ac- 
croissement des relations commerciales, qu'a encore favo- 
risWla construction du cltentin de fer qui s'étend auiour- 
d'hot d'Alloua jusqu'à F I e n s b o u r g, en Schleswig, avec 
embranchement» sur Gluckstadt et sur Kiel. 
Il y a plusieurs ièe]es déjà que le Holstein forme ae le 
Schleswig une unité administrative et politique ; mais quoi- 
que réuni politiquement, et mdme sous certains rapports ad- 
ministrativement, au Danemark par la commuuantc de sou- 
verains, il ne constitua jamais, h bien dire, un méme Etat 
avec ce royaume, puisque l'ouverture d'un droit de succes- 
sion à la couronne autre qu'en Danemark pouvait Peu sé- 
parer° En outre, le Holstein lait partie avec le duché de 
Laueubourg de la Confédération germanique. Le gouver- 
nement du pays est monarchique, et limité seulement par 
une assemblée consultative d'etats provinciaux. Cette as- 
semblée se compose d'une voix virile appartenant au ma- 
jorat constitué par la famille de Hesse, de deux appartenant 
au clergé, d'une appartenant à |'université du pas, et de 
quatre exercées par des membres de l'ordre équestre  la 
nomination du roi, plus çle neuf députes de l'ordre équestre, 
de seize députés des villes et de seize députés de l'ordre des 
paysans, qui se réunissent tous les deux ans à Itzehoë, et 
ont le droit de proposition, de supplique et de rpartitioa 
des imp6ts. Toutes les lois générales, ayant pour but d'ap- 
porter des modifications aux droits des personnes et aux 
droits de propriété, ou relatives aux imp6ts et aux caisses 
publiques, doivent tre soumis à leurs délibératious. Leurs 
séances ne sont pas publiques, mais la presse les porte 
à la connaissance générale. L'au*.orité supérieure du pays 
tait autrelois la chancellerie de Schleswig-Holstein-Lauen- 
bourg, qui siégaJt à Copenhague. Aujourd'hui il n'y a plus 
pour le Holstein et le Lauenbourg qu'un ministre d'Etat, 
responsable envers le roi seul et membre du ministére da- 
nois, sous Pautoité duquel est provisoirement placé le 
gouverneur, qui rëside  Kiel. En ce qui estde l'adminis* 
tration de la justice, la haute cour d'appel forme le degr6 
supréme de juridiction pour le Holsteia et pour le Lauen- 
bourg. Sous le rapport administratif, le pays, qui au. moyen 
àge avait été dirasWen Holstein proprenent dit { compris 



entre l'Eider, la Gieselau, la Stoer et la Schwentine), en Wa- 
grie à l'est, en Slormarn an sud, et en D i t kma r sch en à 
l'ouest (cette dernière partie est la seule q.i ait aujour- 
d'hui quelque importance, en raison de ses priviléges), est 
partagé en 2t bailliages dont ne font cependant pas partie lg 
villes ainsi que les diMricts nobles composds de 147 prop riétés 
questres. Au point de vue ecclésiastique, le duché est divisé 
• n huit prév6tés, dans chacune desquelles existe un con- 
sistoire compos$ de plusieurs pasteurs » sous la présidence 
du prév6t. Au-dessus de ces consistoires est placé un con- 
istoire central, siégeant à Gluckstadt. Il y a ì Itzehoë, à 
Preez et à Uetersen des cloltres nobles, institutions hospita- 
lières pour les filles nobles qui ne se marient point. Les 
revenus publics s'Cèvent à environ 1,200,000 thalers. Le 
duché <le Holstein occupe la dixième place dans la petite 
assemblée de la diëte, et jouit de trois voix dans l'assem- 
blée plénière. Avant 18f8, il fouruissait à l'armée fédérale 
un contingent de 3,696 hommes, qui faisait partie du 
deuxième corps. 
A l'époque la plus reculée le Holstein tir complélelnent 
peuplé par des habitants allemanch, de race saxonne. Plu» 
tard des Slaves s'établirent en Wagrie, contrée formant 
]'exlrémité orientale du Holstein depuis le golfe de Kiel 
jusqu'à la Trave. Les Saxons du Holstein participèrent à la 
ddfailg complète que Charlemagne lit essuyer/ leur nation, 
qu'il subjugua ; et le Stormarn ainsi que le Dithmarschen 
(le Holstein propremenl dit ), qu'ils habitaient, consti ruèrent 
la principale partie de la lVordalbingie , qui fit d'abord partie 
comme Marche particulière du duché de Saxe, mais q,i dès 
l'an 1106 fut érigée par l'empereur Lothaire en fiefde l'Empire 
en faveur du comte Adolphe de Schaumbourg, à l'exception 
du Dithmarschen. Dès le dixième siècle les Slaves de la 
Wagrie avaient été subjugués ; et ils furent germanisés de 
bonne heure par des coloris flamands et saxons. Au douzième 
siècle, le comte Adolphe II aTant conquis leur territoire, le 
réunit au Holstein et au Stormarn. 
Les comtes de Holsteia curent de nombreuses guerres fi 
• outenir contre les Danois et les Slaves ; mais de ces deux 
peuples les Danois étaient l'ennemi dont ils avaient le plus 
à redouter. Dans les premières années du lrezième siècle, com- 
mandés par leur roi Waldemar, ceux-ci s'étaient dbjà em- 
arés de tout le Holslein ; mais la bataille de Bornhoeved, 22 
juillet 1227, eut pour resultat de l'affranchir d'une manière 
durable de la dominalion danoise ; et mëme le H0)lstein 
à partir de ce moment exerça toujours plus d'influence 
sur le Danemark. Le comteGerhard 1V, lils de Henri de Fer, 
se fit octroyer, en 1385, par la reine/ttrguerite de Dane- 
mark à titre de fief le duché de Schlesig, qui depuis lors 
t toujours considéré comm un pays à part, complétement 
par du Danemark, et qui effectivement demeura tel, malgré 
les longues et sanglantes guerres qui en résultèrent. 
La lamille de Schaumbourg s'éteignit en 1459'en la 
personne du comte Adolphe VIII. Les états du pays élurent 
alors pour duc, en t60 le fils de la sœur du défim[, le 
comte Christian d'OIdenbourg, qui, en lf8, avait déjà été 
lu roi de Danemark. Celui-ci reconnut le droit de libre 
élection des états de Scldevig-Hoistein; droit que ceux-ci 
continuèrent effectivement d'exercerj usqu'à la fin du seizième 
siècle. En outre, les droits et prNiléges des duchés furent 
solennellemenl garanli dans une capitulation bien expresse 
et bien précise, précéàemment Christian avait déj, promis 
que le Schleswig ne pourrait jamais tre réuni au Danemark. 
De mme il fut bien stipulé que le Holstein et le Schleswig 
resteraient à toujours unis et indivisibles ( v,o?/e "- Scur.swa- 
En i7 l'empereur Frédéric III érigea le Holstein et le 
Stormarn en duché, et y réunit le Dithmarschen, q,i d'ail- 
leurs ne put Cre soumis que boauconp plus tard. En 1481 
le roi de Danemark, Jean I', octroya le Schleswig et le 
Holstein à son frère FfCCie 1 , qui lui sucia sur le 
xéne de Danemark, en 1523. Le s}stème des parages con- 
tinua dgalement sous ce prince. Ses fils, le roi Christian.llI 

ltOLSTEIN 
de Danemark (mort en t559), et le duc Adolphe(mort 
en 1586), devinrent les fondateurs des deux principales 
ligues de la maison de Holstein : la ligne roale, arec ses 
branches collatérales de ltolstein-Sonderburg-Augus- 
t e n b u r 9 et Holstein.Sonderburg-Beck (depuis 18t6 cette 
dernière est dite lf otstein-Sonderbour g-¢ lu c t; s b o t r g) ;et 
la ligne ducale ou ligne de Ho ls t e t n - G o t t o rp • souche 
commune de la maison impériale actuelle de Russie et de 
la maison ducale d'OIdenbourg (VoUlez Oeno¢). Une 
foule de discordes furent le résultat de ces partages ; elles 
ne cessèrent qu'en 1773 lorsque le grand-duc Paul de 
lussie, devenu plus tard empereur sous le nom de Paul 
eut cédé sa part du Holstein à la maison royale de Dane- 
mark en échange des comtés d'Oldenhourg et de Delmen- 
I,orst, érigés alorsen duché d'Oldenburg, et que Paul aban« 
donna à la brancbe cadette de la maison de Holstein-Gotlorp. 
La ligne de Holstein-Sonderburg-Augu»tenburg est aujour- 
d'hui représentée par le duc C h ri s t i a n-Charles-Frédéric- 
Au ,g9ste , né en 1798 ; et la ligue de Holstein-Sonderburg- 
Bock, par le duc Charles, né le 30 septembre 1813. 
La partie rnyale du Holstein, et à partir de 1773 le duché 
tout entier, à l'exception de la principauté de Lubeck, par- 
ragèrent compl6ement les destinées du Danemark; il nous 
faut seulement faire remarquerque le servage y fut aboli en 
180. Q,and la création de la Confédération du lhin mit 
ri. à l'Empire d'Aile.magne, le roi de Danemark, par une 
ordonnance en date du 6 septembre 1806, réuni/le Holstein 
au Danemark ; et à cette occasion il supprima arbitraire- 
ment l'antique constitution d'états dout louissait ce duché. 
Dans la grande guerre de 183, le Danemark 
resté jusqu'au dernier moment fidèle à IIapoléon, le Hol- 
slein fut occupé par les troupes des coulisC, jusqu'à ce 
que la paix conclue à Kiel, le 1 janvier 181, mit fin aux 
hostilités. L'acte du congrès de Vienne déclara ensuite 
que le Holstein faisait avec le Lauenbo,rg partie de la 
Confédération germanique. Dés cette époque, par suite de 
préjudices nombreux qui résultaient pour le llolstein de 
son union avec le Danemark, particulièrement en ce qui 
concernait l'administration de la justice et les finances, il se 
manifesta dans le duché une tendance bien prononcée à s'af- 
franchir d'une union devenue une lourde charge ; tendance 
qui explique les événements politiques dont ce pays a ët 
le thétre dans ces dernières années. Cette tendance se ma- 
nifesta d'abord par les efforts faits par l'ordre équestre pour 
remettre en vigueur l'antique constitution, illégalement sup- 
primée en 1806, après avoir été maintes fois confirmée et so- 
lennellement garantie. Ces efforts, il est vrai, demeurèrent 
inutiles, parce que la diète germanique, dont l'ordreCues- 
tre invoqua l'appui pour la défense «le ses droits contestës 
et mis à néant par l Danemark, déclara ses rédama- 
tions mal fondCs, attendu que leazu:ie.aue constitution u'exis. 
tait plus en réahté; mais la crise de 18:0 eut pour résultat 
de donner encore plus de force aux tendances que nous 
nous de simuler. La conséquence de l'agitation queces évé- 
nements prod,isirent en llolstein, comme dans le reste de 
États du roi de Danemark, fut la loi du 15 mai 183, q,i 
accorda au pas une constitution détats provinciaux. Dans 
toutes les assembies qui curent lie, depuis lors, la lutte 
eut pour but de défendre les droits du Holstein contre le» 
usurpations du gouvernement danois; et i'indépendance 
à rendre à leur pays devint la pensée dominaute des po- 
pulations. Les institutions semi-représentative octroées 
au Danemark curent aussi pour résultat d'y provoquer et d' 
sur-exciter le scntiment de la nationalité ; mais, par contre, 
la nationalité germanique se réveilla avec un redouble- 
ment d'énergie parmi les populations du Holstein et du 
Schleswig à l'effet de repousser les projets d'absorption du 
Danemark et de défendre leur indépendance. 
La mort du roi FrédéricVI  1839), l'avénement au 
tr6ne de Christian VIII, qui n'avait qu'un fils resté sans 
enfants ( le roi aujourd'hui régnant FfCA r i c Vil }, donné 
rent pour la première fois ì cet antagonisme sa véritablesi- 



HOLb'J.']£1.N  
gnificalion. A ce moment on entrevi! la possibilité d'une sé- 
parution amiable d'avec le Dauemark, attendu vue la ligne 
mille directe de la maison royale venant à s'éteindre, éven- 
tualité plus ou moins prochaine et probable, la couronne 
de Danemark passerait à la ligne féminine de la maison 
royale, tandis que les'duchés devraient appartenir à la fa- 
mille d'Augustenburg. En Holstein, comme en Dune- 
mark, l'opinion prit la question d'autant plus à cœur, que 
ces éventualités acquéraient toujours pblS de vraisemblance. 
Tandis que surgissait tout a coup parmi les Danois, et sans 
détours, la pensée de ne plus faire des deux pays qu'un 
seul ci m(me Etat, l'opinion publique, en Holstcin, se roi- 
dissait avec toute la forcedu senlirnenl ::ational cuire de tels 
projets, et trouvait le plus important de ses organes dans 
la diète des états provinciaux. Lors de la diète danoise tenue 
en 1844 à Roeskilde, le député Algreen-Uessing, bourg- 
rnestre de Copeubague, ayant préseotë une motion pour l'u- 
nitWet l'indivisibilitc futures de l'Etat complexedanois, la po- 
pulation du Holstein fut unanime pour repousser cette idée; 
et, dans une énergique declaration, les états réuuis à Itzchoë 
proclamèrent que les habitants du.duché voulaient demeurer 
independants et conserver leur antique droit de succession. 
Tandis qu'à l'lutCieur du duché le sentiment patriotique 
s'exallait toujours davantage, et que dans le reste de l'Aile- 
magne l'intért et l'importance attachés à la solution de 
cette question devenaient de plus eu plus vifs, les Danois ne 
restaient pas non plus inactifs. Si la motion faite à Roeskilde 
eu 18-4 en était restee I., deux ans plus tard ce fut la 
couronne elle-même qui essaya de trancher le nœud. Le 
8 juillet 1846 parut la fameuse lettre patente de Cbris- 
tian 'IIl qui déclarait qie le Schleswig tout entier et une 
partie du Holstein seuletoent constituaient un tout indivisible 
avec la monarchie danoise. L'assemblée des états du IIo 
stein rédiga une incontestable exposition des droits du pays, 
et le roi de Danemark ayant refusé de la recevoir, elle in- 
voqua l'appui et la garantie de la diëte germanique. La po- 
pulation tout entière manifesta dés lors l'attachement le plus 
vil pour la cause nationale ; et dans tout le reste de l'Alle- 
magne se déclara une sympathique agitatior), qui se traduisit 
en adresses et en protestations en faveur du bon droit du 
Schleswig et du Holstein. La diète germanique elle-mme ren- 
dit (le 17 septembre) une décision qui tout au moins n'était 
point d«favorable aux droits de Holstein. Que si cette at- 
taque directe des Danois coutre les droits des duchés n'avait 
pas cette fois encore réussi, puisque dans une seconde let- 
tre palenle Chrislian ¥111 s'efforça d'atténuer reflet produit 
par la première, le parti danois n'en poursuivit pas avec 
moins d'ardeur la réalisation de la pensée de l'incorporation 
des duehés an Danemark. C'est ainsi qu'en I$17 on ima- 
gina de réunir toutes les parties de la monarchie au moyen 
d'une constilttion libérale commu ne, d;,os l'espoir de reus»ir 
par rapp-t de la liberté la ou avait échoué i'abiutisme. 
La mort de Christian VIII et ravénement au tr6ne de son 
filsFrédéric Vil (0 janvier 1848) Iournirent a celle 
combinaison l'occasion de se développer rapidement. Dês le 
28 janvier le nouveau roi annonçait un projet de constitution 
commune pour rEtat complexe, constitution sur laquelle 
seraient appelés a dëlibérer des hommes éelairés et expéri- 
menI,'s du Danemark et des duebés. Pendant ce temps-la 
l'administration danoise continuait toujours d'agir, et se 
montrait préoocupée avant tout de la pensée de daniser 
le Ho'.stein, et plus particulièrement encore le Sehleswig ; 
si dune la population se décida à procéder aux électioos pour 
une assemblée des notables, ce ne fut qu'en exprimant la 
defianee la plus manifeste contre la politique danoise et 
qu'en faiçant les réserves le» plus expresses pour le main- 
tien des antiques doits des ducbés de Scbleswig-Hoistein. 
Efin s'accomplirent les événements de mars 188. A 
Copenhague la revolution imposa au roi un ministère qui 
adopta pour devise cette iormule politique « le Danemark 
lusqu'h i'Eider ,,. Cet événement eut pour suites la réunion 
des états du Holstcin et du Sehleswig, dëlibérant en commun 

HOLYROOD '. 9 
(18 mars), l'envoi d'une députation à COl)enhagt«e, chargée 
d'y protester en faveur du maintien des droits et de l'union 
séculaires du Holstein et du Schleswig, et, après l'insuccès 
de cette démarche, le rapide et victorieux soulèvement 
des duchés ainsi que i'établissement I t mars) d'un gou- 
vernement provisoire pour ces deux provinces ailemaudes. 
A l'article Scnesw«ç-Horat. nous traiterons la que»lion 
de droit politique qui se trouvait alors iitispen,lante, de mème 
que, pour éviter d'inutiles répélitions, on y trouvera le rëeit 
des événemenIs nitérieurement arrivés en Holslein, dont les 
destinées sort ins,.parables de celles du Sehlewi. 
I1OLSTEI-OOTOB, P (Maison de). Elle descend 
du due Adolphe de Itoistein, frère alné du roi de Dans- 
mark Christian 11I, lequel partagea avec son cadet 
les duchés de S c h I e s w i g et de H o i s t e i n, dont il herita 
h la mort de son père, le roi de Danemark Frédéric 1 , 
tandis qu'en Danemark, où la loi de primogéaiture était de- 
puis ionemps en vigueur, il n'y eut pas de partage. La fa- 
mille de Holtein-Gottorp, qui occupe aujomd'hui le tr6ne de 
Russie, et h laquelle appartenait la famille royale de Sui.de 
que les evenements «le 1809 exilèrent de ce pays, tire ce 
nom d'un vieux manoir féodal, appelé Gottorp et silué 
près de la ville de Schleswig, oti les sueces«eurs du due Adoi- 
phe 1' (mort en 1586) résidèrent pendant tout le dix-seplième 
siècle et une grande partie du dix-h,itième. Les lutles inter:sau- 
tes de la maison «le Goltorp contre les rois de Danemark oe- 
cupeul une grande place dans l'histoire du nord de l'Europe. 
liOLTEi ( Cnx:es nï), poêle dramatique et lyrique, 
n6 a Breslau, en 1797, abandonna la arriere universitaire 
pour débuler en 1819, sous le nom de Mortimer, au thetre 
«le Breslau. Après avoir subi de rudes épreuves à Dresde, 
il renonça à monter désormais sur les planches, tout eu 
cons,rvant la place de seerétaire et de poeIe du thétre ,le 
Breslau. Des tracasseries le décidèrent à se rendre à Ber- 
lin, où il composa ses premiers vadevillcs : Les Viennois 
à Berlin, et Les Berlinois t Vienne ; il y publia aussi des 
Poésies (1826). D,' lors il fit représenter successivement 
sur le théàtre de la Koenigstadt un grand nombre de pièces ; 
et on peut dire que c'est lui qui a naturalisé le vaudeville 
en Ailemagne. Après avoir pendant quelque temps dirigé le 
théàtÆe de Riga, puis celui de Breslau, il s'oecupa de la pu- 
blication de ses mémoires et de ses souvenirs, consignés 
dans ses Lellres crites de Grafenort el ad»esses art 
méme lieu, mais principalement dans son ourage intitul 
Quoranle ans. 11 re»uit aussi ses travaux dramaliques en 
un volume, sous le titre de Thd61re {18-5). Les earaclères 
parttculiers à son talent sont une grande mobilité poetique 
d'esprit, une disposition à la sensibilile dégenrant souvent 
en fausse sentimentalité, et une certaine vanité, qui néan- 
moins ne se met point personnellement en jeu. Beaucoup 
de ses chansons, dont il a publié un recueil sous le titre 
de Chansons allemandes» sont à juste titre populaires. 
IIOLYROOD {dest-a-dire Sainte.Croix), l'antique 
palais des rois d'Écosse, h É,limbourg, et le monastère de 
Holyrooà-House qtd loi faisait face, lutent construits vers 
le milieu du douzii.me siêcle, par le roi David 1 , puis coin- 
piCement brtiés, en 1544, par les Anglais, sauf la nef de 
l'église. Le palais fut reconstruit sous le règne du roi Jac- 
ques V, et servir alors de résidence ordinaire à la reine 
Marie Sluart et à son fils, Jacques VI, jusqu'au moment 
où celui-ci eeigoit, en lç03, la couronne d'AngleIerreo 
sous le nom de Jacques 1'% Encore une fois détruit par les 
troupes de Cromwell, le palais resta en ruines jusqu'a ce 
que, en 1673, sous le règne de Charles II, commença la 
cnstruclion du palais actuel, dans lequel on conserva sa 
forme primitive à la partie nord-ouest du vieux palais bàti par 
Jacques V. Le nouveau palais fut édifié en pierre, sur les 
dessins de l'architecte W. Bruce, en forme de carré, dont 
chaque e0té présente un développement de près de 8O mè- 
tre», et dont les façades sont flanquées à chaque angle de 
fortes lours. Dans la galerie du c6té du nord, longue de 
tO mètres sur 8 de large, et haute de 6 mètres, se trous'eut 
17 



1 0 • HOLYPOOD -- 
les portraits de 11 rois d'Écosse, t.our la plupart fabu- 
leux, peints par le Hollandais de Witt. Dans la partie 
ancienne du chateau on a conservé la chambre de la reine 
bi a r i e S 1 u a r t, tout à [ait en l'Cat oh elle se trouvait lors- 
que cette princesse l'habitait, avec les différents meubles 
et ustensiles dont elle se servait et avec quelques broderies 
de sa main. On y voit aussi le cabinet oi, en présence 
de lk reine, mn favori lizzio tut assassiné par le con- 
juré Darnley, lequel était parvenu jusqu'h eux par une 
trappe donnant sur le corridor voisin. La chambre de la 
reine fut babitée pendant quelque temps, en 17-15, par le 
prétendant C h a r I e s-É d o u a r d, et peu après la bataille de 
C u i i o d e n, par le duc de Cumberland. Plus tard le palais 
d'Holyrood servir, à deux reprise«, de 1795 à 1799 et de 
1830 à 1832, d'asile aux Bourbons chassés de France. Sauf la 
partie dont nous venons de parler, à laquelle se rattachent 
d'intéressants souvenirs historiques et que les descriptions 
de Walter Scott out surtout contribué à populariser, le 
cbatean de Holyrood a été presque entièrement converti 
en casernes et en magasins d'armes et de munitions. On 
y conserve aussi, dans la chambre dite de la couronne, 
la couronne et les insignes des rois d'Écosse, retrouvés 
en 1818. Depuis que la reine Victoria, dans les tourm.es 
d'automne qu'elle fait habituellement en Ëcosse, vient se 
loger h Holyrood, les appartements d'honneur du ch;teau 
ont été décorés et meubiés à neuf. 
I|OII.tJLD  espèce de crustacé ddcapode macroure, 
de la famille des aslaciens, qui a jusqu'h 0%65 de longueur, 
et dont la chair est très-estimêe quoique dfficile à digérer. 
C'est rastacus narinus de Fabricius, et le cancer 9am- 
aru de Linné. Ses caractères sent : Carapace unie, ter- 
rniuée autérieurement par un rustre tridentWde chaque c6té, 
avec une double dent à sa base supérieure ; pinces très- 
grosses, inégales, l'une ovale, avec des dents Iortes et mous. 
ses, l'autre plus petite, allongée, avec de pehtes dents nom- 
breuses; bords des segmcnts de Pabdomen obttts ; couleur 
brune verdatre, fdets des antennes rougeàtres. Cette espèce 
habite les lieux remplis de rochers et peu profonds, sur les 
cétes de i'Ocean, de la Manche et de la Mediterrane. Elle 
pond ses œufs au milieu de rété. L. Lxcnx 
La pche du homard, dans la mer du .Nord, est uuc indus- 
trie des plus productives pour les habitants de File de H e i- 
go la n d, qui trouvent h Hambc, urg un placement-des plus 
avantageux pour cet article. Les .Norvégiens, qui pêchent 
attssi beaucoup de homards sur leurs cétes, les vendent pour 
la plus grande partie aux Anglais et aux Hollandais, qui se 
chargent ensuite de les conduire dans divers ports de mer, 
enfermés tout vivants dans des bateaux h double fond cous- 
traits pour cet usage. Dans la plupartdes ports ail ils ont- 
vent, on les cuit ou on les marine pour les en-voyer dans 
lïntërieur du pas, à moins qu'on n'ait h sa disposition la 
facile et rapide voie de tran.gport des chemins de fer. On a 
calculé que dans le nord de l'Europe seulement il ne se con- 
somme pas moins de cinq millions de homard par an. 
IIOMBEIG (GntLL.VSle), chimiste célèbre, dont le 
nom resta jusqu'h la création de notre nomenclature at- 
taché à plusieurs substances qui furent l'objet de ses sa- 
vantes recherches, entre autres l'acide b oti que (sel sdda- 
tiJ de Homber9 ) et le ch lor u re de calcium (phosphore 
de Homberg). é  Bataia, le 8 janvier 1652, d'un em- 
ployé de la Compagnie des Indes, il revint à Amsterdam 
aec sa famille, et ce fut dans cette ville qu'il commeaça 
les éludes qu'il devait continuer pendant une partie de sa 
vie, tant6t aux universités de lena et de Le:pzig où il 
cultiva le droit, tant6t à .Magdebourg, ail Otto de Gue- 
ricl, e l'initia aux oecrets de la physique; plus tard, h Pa- 
doue, ail il s'adonna à la médecine, à l'anatomie et à la 
botanique ; h Boiognc, oit il s'occupa d'alchimie; h Rame, où 
il _ iivra à rnptique; plus tard encore en France, en Angle- 
terre, en Hongrie, en Bohëme, en Suède, cherchant partout 
h agrandir le cercle de ses connaissances encyclopt:diques. 
Appelé à Paris, en 1691, par l'abbé B;gnon, IIonlberg fut 

agrdgé  l'Académie des Sciences, dans le lecueil de la- 
quelle il fit paraltre environ cinquante mémoires d'un grand 
intérêt, aant pour principaux objets la chimie, la phy- 
slalome végétale et l'optique- Le duc d'Oriéans le choisit, 
en 1702, pour lui enseigner la plffsique. Cette flatteuse 
dist;.nction redoubla l'amour de Homberg pour l'Cude. Ce 
savant, dont Fontenelle nous peint le caracoEre sous les 
plus riantos couleurs, mourut le 2 septembre 1715. 
HOMBOUPG capitale du iandgraviat de Hesse- 
Ho m b o u r g, et résidence du landgrave, est une ville assez 
pittoresque, et dont la population s'élève à 5,000 mes en- 
viron. Elle est située h 1-1 kilomètres de Francfort-sur-l¢. 
Mein, à l'extrémité orientale de la chaine de montagnes que 
de nos jours on nomme Taunu$, el qu'on désigait autreiois 
par le nom de lloehe (mont), encore en usage chez le bas 
peuple, d'où est venue l'épitbète s-mont (var der Hvehe), 
attachée au nom de Hombourg, pour distingner cette ville 
de plusieurs locatités portant le mëme nom. Hombourg est 
b,iti sur une coi.fine, h 2oo mëtres au-des, sus de la mer. 
château du landgave en occupe la partie la plus élevée. Au 
nord de la colline se trouve la vieille ville, avec ses rues 
Craites, ses maisons basses et disgracieuses, formant con. 
traste avec les deux antre tiers de la ville, dont les rues 
larges, les jolies maisons peintes, h un seul étage, déno- 
tent l'origine r,:cente. Les fermiers actuels des sources miné- 
raies et des jeux de Honbourg ont changé à grands riais, 
depuis une quinzaine d'années, la face de cette bourgade, 
qui n'a ni hldustrie, ni sol productif, ni commerce. 
Les sources de ltombourg sourdent au pied de la colline 
sur laquelle est btie la • file. Le réservoir de ces sources 
réside dans un terrain argileux, h une profondeur mo[enne 
d'environ 4 mètres. La decouverte de ces sources remonte 
fort haut. Elles ne servirent longtemps qu'h l'extraction da 
sel de cni»ine {cldorure de sodium), qu'elles fournissaient 
en abondance, et l'exploration n'en lut abandonnée defing 
tiçement qu'en 17-10. Ce sont des espëces d'eaux-raère des 
salines, très-salées comme ettes, et dont l'usage médiinal 
ne remonte qu'h 111, époque ail les armees françaises oe. 
ccpaient la contrée. Au temps dont nous parlons, u 
maison voisine de la source dite des Bains fut trans/ormée 
en hépitai militaire, et le chirur{en du rément des chasseurs 
de la gde, cantonné h Hombourg, imagina de falrepreadre 
h se: malades des bains avec l'eau salée qu'il trouvait à 
proximité_ Q uoiq ne ce fait eClt passé inaperçu, cependant c'es 
de lui qu'on s'est ensuite autorisé pour fonder à Hombourg 
en 12-1 un étabtissenent de bains dirigé par des Français, 
qui s'y ruinèrent. Un 31..Ifi!!er, pharmacien, releva l'éabl 
sement en 1833, et peu de temps après le douteur Trapp ré- 
glementa l'emploi des eaux, sur lesquelles il publia une pre- 
mière notice dans l'Annuaire balnéologiclue de Gr'Me et 
de Kalisch (1836). Ce premier exemple une fois donne, dt. 
• ersécrits furent publiés sur ces eaux, encore peu coaanes.I,e 
renom d eaux de Hombonrg fit des progrès à proportion des 
publicaUons qu'elles avaient inspirées. Elles n'avaient réaai 
que 155 amateurs en 183f,; elles en comptèrent 800 en 1839, 
2,700 en 1813, et plus de 3,000 les années suivantes. Il est vrai 
que _',! I. Blanc, de Paris, avaient passé bail avec le landgrave 
d 18-11, et déjh découvet trois sources nouvelles, sain 
compter l'importation bien autrement attrayante et prodac- 
tire du Trente et quarante et de la oulette, qu'une loi 
française bannissait dès lors de Frascati et du Palais-Rolai. 
Les sources minérales de Hombourg sont au nombre de 
cinq : 1 ° La source Elisabeth (Elisabethenbrunnen on 
Curbrunnen ), désignée ainsi en Phonneur de la prin- 
cesse Élisabeth, épouse du landgrave Joseph, était an 
nombre des sources salées qu'on exploitait anh'efois. C'est 
par elle q.m furent commencées les expériences thérapea- 
tiques du docteur Trapp, et elle est la pins fréquentée 
comme buvette. 2 ° La source de l'empereur ( Kaiserbrtm- 
rien ou Strudel), qu'on découvrt en 182, par un son- 
dage qui atteignit  15,5 mètres de pro[ondeur. Son surnom 
allemand de Sprudel lui est venu de l'eslce de bouùlon- 



HOMBOURG 
nement que prodait dans ses eaux l'acide carbonique qui 
s'en dégage en abondance. Ce dégagement est quelquefois 
si grand que la source en devient intermittente; c'est la 
source la plus chargée de principes (23 grammes par 
litre), la plus puissante et la plus purgative; c'est aussi 
la moins froide des cinq, à raison de son gisement, plus 
profond, a ° La source des bains (Badequellen), dont la 
saveur est trop désagréable pour qu'il en soit fait usage à 
l'lutCieur : c'est la seule source qui serve aux bains ; les 
quatre autres sources sont employées comme bure,tes. 
4 ° La source nouvelle ou ferrugineuse; c'est le fermier 
actuel qui I'a découverte, à une profondeur de 7 mètres. 
5 ° La source acidule de Lois (Ldwigsbinnen ou 
Sa,«erbrunnen), qui est la plus gazeuse des cinq. Ces dif- 
férentes sources sont plus chargées de principes fixes que 
les plus salines des eaux françaises (Balaruc), mais plus 
de moitié moins que l'eau de mer, dont chaque litre con- 
tient 4t granunes de sels. M. Liebig, célèbre chimiste de 
Giessen, les a anaIFsées, et il a constaté qu'elles contenaient 
par litre : chlorure de sodium, de 10 à 15 grammes, sui- 
vant les sources; des cblorures de pota.sium, de calcium, 
de magnesium, en quantités plus restreintes (2 ì 3 grammes 
des trois sels réunis); de la chaux sulfatée et carbo- 
natée, de la magnésie ou du fer carbonaté, de la silice et 
de l'alumine, des traces de bromure et quelquefois d'iode, 
enfin 2 à 3 grammes par litre d'acide carbonique libre, 
et dans la source ferrugineuse, les acides erCique et apo- 
erCique, des traces de chlorure Il,bique et d'ammoniaque, 
du manganëse et une matiëre organique. Ainsi on F trouve 
jusqu'à cinq éléments alcalins, servant de bases à des sels : 
soude, potasse, chaux, magnésie, ammoniaque; quatre acides 
libres ou combinés; et deux rué,aux, le fer et le manganèse. 
On ne dit pas si M. Liebig y a trouvé l'arsenic, depuis qu'on 
a rencont'ré cette substance, en France et en Allemagne, 
dans des eaux déjà si nombreuses. 
Toutes lessources de Hombonrg sont froides à peu prè au 
même desA : elles marquent en effet de 10 ° à 10 ° /8 ; une 
seule, celle de l'empereur, atteint 11 degrts centigr. Ces 
résultats ne s'accordent point avec les protondeurs assignées 
aux sources, et il doit y avoir quelque erreur, soit sur la 
mensuration des degres tbermométri,lues , soit pour l'assiette 
et la profondeur des #servoirs soc,terrains. En tout cas, il 
y a telle de ces sources qui fournit près de loo,0o0 li- 
tres d'eau dans les vingt-quatre heures, et qui conséquem- 
ment permettrait la distribution de 2 à 300 bains par jour. 
Ces eaux sont très-excitantes. Elles purgent, poussent aux 
urines, et quelquefois les bains chauds qu'elles compo- 
sent suscitent des éruptions proessives assez ressem- 
blantes h ce u'on nomme la ioussoee, dans les piscines 
de Loèche. Etles ne conviennent ni dans les affections 
aiguës, ni durant la grossesse, ni quand il existe quelque 
altération oanique {squirrhe, cancer, tubercules, épan- 
chement apoplectiqae, myélite, etc.). Les sujets lympha. 
tiques, bonflïs et indolents, s'en trouvent mieux que les in- 
dividus sanguins et maigres. Ces eaux aggravent toujours 
la phthisie pumonaite de mme que la syphilis. On les 
conseille dans des affections nombreuses, trop nombreuses 
sans doute. Mais il en est rellement plusieurs dans le 
cours desquelles leur emploi peut avoir de très-réels avan- 
tages, nous : 1 o les alfeetions ca- 
De 
ce 
nombre 
citerons 
tarrhales chroniques, qu'elles commencent toujours par 
augnnenter avant de les modérer ou de les tarir; 2 ° l'en- 
gorgement des viscères du ventre ; 3 ° la suppression des 
flux sanemfins, nécessaires par nature, ou devenus tels par 
l'habitude, par exemple les hémorrhoïdes ; 4 ° la gravelle 
et l'affection calculeuse, non-seulement parce qu'elles aug- 
mentent la sécrétion des urines, mais par une action vrai- 
semblablement directe et chimique, en empécliant des 
concrétions nouvelles; 5 ° on les a encore employées avec 
que,que succës contre la paralysie non cérébrale, alors 
sur'cul que la maladie a eu pour cause des rhamatismes, 
de»/rafche,rs ou des excès énervants ; 6 ° elles convien- 

-- FIOMBPE 
ent surtout, et à la manière des eaux de mer, dans les 
affections nerveuses et scrotuleuses, et principalement dans 
ce dernier cas, quand l'iode ou l'iodure de potassium n'ont 
pu tre supportés ou n'ont pas réussi; 7 ° elles peuvent 
aussi réussir dans quelques engorgements ds ovaires et 
de l'utérus, et plus d'une fois elles ont servi de vermifuge. 
Dans la plupart des cas, on en tire plus d'avantage en 
boisson qu'en bains. 
Pour ce qui est des bains, on les prescrit frais et de 
peu de durée aux gens nerveux, mais plus chaads et plus 
prolongés aux individus scrofuleux. On prend aussi à 
ttombourg, comme à Iganheim, h Prmont et ì Crouthal, 
des bains de gaz acide carbonique, bains secs, dans les- 
quels les malades se plongent tout habillés. On ne bae.e 
quelquefois ainsi qu'une partie du corps, un bras, etc. Ces 
bains gazeux ne font tant suêr que parce qu'ils entravnt 
l'exhalation cutanée du gaz acide carbonique qui se forme 
naturellement dans le corps humain, ce qui double la 
tàche chimique des poumons, comme aussi la chaleur 
vitale et la vapeur aqueuse, toujours proportionnees à la 
comme des combinaisons pulmonaires. 
II ne faudrait pas juger de la puissance de« eaux de Hom- 
bourg d'après les sels qu'elles conliennent en si grande 
quantité. La forte dose d'un remëde nuit quelquefois à son 
action, en l'empècbant de pénétrer dans les organes et tes 
humeurs. C'est donc sans motifs sérieux que deux chi- 
m4stes de Paris ont proposé à l'Academie de M6decine 
d'imiter les eaux de Homhourg en combinant l'eau de 
Bourbonne, par exempte, avec de l'eau de mer, etc. On 
serait bient6t conduit à penser, si l'on croyait ces chi- 
mis,es, que des eaux afleman,les qa'on n'imiie qu'en com- 
binant trois eaux françaises ont par ce fait trois fois plus 
de vert, s que chacune des eaux nélangées; et pourtant ce 
serait une erreur, erreur que rend evidente la simple com- 
paraison des SuCisons opérées aux eaux françaises et aux 
eaux allemandes. 
Hombourg possède des édilices remarquables et des sites 
attra}ants. Le Kursaal, ou maison de conversation, est 
comme un petit palais où tr6nent depuis midi jusq:e fort 
avant dans la nuit les croupiers aux gages des frères Blanc. 
Le chateau est un editice imposant, dont les beaux jardins 
sont accessibles aux étrangers. Les trois sources l,lincipales 
sont bien captées, bien aménagees, et de frais ombrages les 
environnent. La roche d'Elisabeth, le village d'Allechaus, 
le ch,'tteau de chasse et le chne de Luther (qui fut plant6 
à la grande commémoration protestante de 117), sont au- 
tant de buts de promenades et ce ne sont. pas les seuls. La 
ville possède des églises ou des temples pour tous les rites 
et toutes les communions chrétiennes. On dine, on se loge 
et on se baigne à bon znarché à Hombourg. Mais logement, 
bains et diner ne sont là que des dépenses accessoires. Il 
est certain que le landave, avec sa liste civile de 3)0,0o0 
francs, doit trouver providentiel le subside qu'il prélève sur 
le fermage actuel des eaux, sans parler de l'aisance que 
r6pandent dans la ville et tout le pays tant d'étraners qui 
se laissent attirer par les séductions du Kursa««l et des 
prospcctas. D  Isidore Bouaoo.x. 
HOMBIE (Jeu de 1") ou de l'homme, car telle est la 
signification du mot hombre chez les Espagnols, qui nous 
ont transmis ce jeu de cartes, jadis fort en vogue, et que 
l'on devrait peut-être aujourd'hui remettre ì la mode pour 
guérir certaines personnes de la passion du I a n s q u e ne t 
et des autres jeux de hasard. ïl s'agit en effet d'un homme 
qui lutte seul contre deux joueurs et quelquefois contre un 
seul. La bte ombrde, qui en est le diminutif, se joue entre 
deux, trois, qaatre ou cinq personnes. Dans l'hombre,  
trois, on n'emploie que quarante cartes en retirant les dix, 
les neuf et les huit ; à deux, on 6te une des deux couleurs 
rouges, cœur ou carreau. L'ordre dans lequel les cartes 
sont supérieures l'une à l'autre varie selon les couleurs ; 
mais l'as de trèfle et l'as de pique sont toujours triomïh,% 
et l'emportent mème sur les aotres matad,rs. L'as de 



trëfle s'appelle bcte, c'est-à.<lire simplement trèfle; car 
dans les cartes espagnoles cette couleur est ligur,e par des 
bàtons ou bctes; de là le nom de club, que les Anglais 
donnent au trèfle. L'as de pique s'appelle spadille ; c'est 
aussi à ce mot que les Anglais ont emprunté celui de spore 
qu'ils donnent au pique. Le deux de pique et le deux de 
trèfle s'appellent manille. Les triomphes rouges sont do- 
reinCs par le spadille; le sept de CœUr ou de carreau, qu'on 
appelle aussi nan ille, sont la seconde triomphe; viennent en- 
suite le baste ou as de trèfle, Pas de cœur et l'as de car- 
reau, qu'on nomme pontes. Les rois, dames, volets, deux, 
trois, quatre, cinq et six viennent dans cet ordre aux con- 
leurs rouges; tandis que dans les couleurs noires après spa- 
dille, nanillc et baste, on range le roi, la dame, le valet, 
le sept, le six, le cinq, le quatre et le trois. L'hombre est 
le premier joueur désigné par le sort, ou à tour de réle ; ì 
moins qu'il ne soit renrioe, il indique la couleur dont il 
veut fairela lriompbe. Sur les neuf cartes qu'il a reçues, il 
en écarte autant qu'il veut, et les remplace par d'autres 
prises au lalon ; les deux autres en font autour. Chacun est 
obligé de fournir de la carte jouée, s'il en a, sous peine de 
faire la bte; mais on n'est pas tenu de forcer ni de couper 
avec un atout. C'est du nombre de levées que dépend le 
gain de la poule; rhombre doit en faire cinq ou quatre au 
moins; si l'hombre ne gagne pas la poule, il fait une bète 
égale à la somme qu'il aurait tirée du panier. 
Pope, dans le troisième chant de son poëme de La Boucle 
de cheveux enleœde ( Bape qf Ihe Lock), a fait une peinture 
aussi exacte qu'animée du jeu de rhombre. On peut juger 
par le peu que noug venons de dire de la complication de ce 
passe-temps favori dans les lertulias ou cercles espagnols ; 
mais il y a ensuite des coups particuliers, qu'on appelle le 
9ano, le codille et la t'ole. On compte onze hasards ou 
chances purement fortuites. Un de ces hasards s'appelle le 
bon air : c'est la réunion «le quatre matadors sans prendre ; 
si l'on gagne, on obtient une fiche de chacun de es adver- 
saires, et on leur paye à chacun une fiche en cas de perte. 
La réunion des deux as rouges dans la mème re.aih s'ap- 
pelle les yeux de ma stand'mère; les quatre dsmcz s'al:- 
pellent le charivari ; les qulre rois, la discorde ; les quatre 
valets, la.fanatique; quatre faux matadors se nomment la 
chicorde ; trois rois et une dame font la partie carrée. Le 
parfait contentement consiste à jouér sans prendre, quoi- 
que l'on eOt dans la main cinq matadors. C'est un jeu sot, 
pour leouel chaque joueur est tenu de payer une fiche h 
l'hombre. 
HOMÉLIE (u grec 6IzO.i,,), discours, ou plutét con- 
ference, dans le but d'expliquer au peuple l'Évangile et les 
dogmes de l'Église. Le nom grec d'homélie, dit Fleury, 
daus son Histoire Ecclésiastique, signifie un discours fa- 
milier, comme le lnot latin sermo. On nommait ainsi ceux 
qui se faisaient dans l'église, pour montrer que ce n'Calent 
point des harangues, ni des discours d'apparat comme ceux 
des orateurs profanes, mais des entretiens comme ceux d'un 
maltre avec ses disciples, d'un père avec ses enfants. Re- 
marquons, toutefois, que ce n'est que par la suite qu'on 
donna cette acception au mot homdlie, qui désigna dans 
l'origine une assemblde, et non les exhortations pateraelles 
faites à une assemblée de fidèles. L'homélie ne doit pas 
tre confondue avec le serra on, et nous adoptons avec tous 
les théologiens la distinction établie par Photius : c'est que 
Fhomélie se faisait familièrement, et nous ne saurions 
mieux Passimiler qu'à une c o n f é r e n c e ; car les pasteurs 
 interrogeaient le peuple, et en étaient interrogés ; le ser- 
mon, au cnntraire, se fait solennellement., et celui qui le 
prononce monte en chaire, à la manière des orateurs an- 
ciens. Il nous reste un assez grand nombre d'homélies des 
Pères grées et latins; toutes ont été faite par des évb.ques, 
parce que dans les premiers siècles l'épiscopat seul donnait 
le droit de prëcher : c'est pour cette rai.on que nous navons 
aucune homélie de saint Clément d'Alexandrie ni de Ter- 
tullien; oe ne tut que vers le cinquimesiècle que la faculté 

I-IOMBRE -- HOux, tr 
de prêcher fut étendue aux prêtres. Cependant, saint ,Iean 
Cbrysostome et saint Augustin font exception à cette règle; 
et leurs homélies doivent tre platCs en première ligne de 
toutes celles qui sont parvenues jusqu'à nous. 
HOMÈRE le plus clbre des poëtes de l'antiquioE 
classique. Sa personne et ses ouvrages ont donné lieu ì un 
grand nombre de questions, dout la solution est encore in- 
certaine. Ce que nous savons de sa vie se réduit à fort peu 
de chose. Les biographies d'FIomère attribuée» à Hérodote 
et à Plutarque sont un tissu de fables, quelqu.efois ingé- 
nieuses, le plus souvent absurdes. On lui a donhé pour 
ctres les dieux et les muses ; on a entouré son berceau de 
miracles et répandu d merveilleux sur roule sa vie; son 
nom a donné lieu  une foule d'elymologies puCies; les 
circonstances de sa vie, l'époque à laquelle il a vécu, tout, 
ju.qu'à son existence mëme, est enveloppé d'obscur/tés et 
d'incertitudes. Homèrc n'est devenu clebre que dans un 
lemps où il était impossil.le de recueillir sur lui des docu- 
ments dignes de foi. A d0.faut de ces documents, on a dO 
refaire son histoire sur des probabilités, sur des traditions : 
de I cet amas de tables ineohérentes, d'anecdotes, de par, 
ticularilés evid,.mment forgées après coup. D'après les moins 
alCaisonnables de ces traditions, Homère serait né sur les 
bords du fleuve M.-lè% prs de Smyrne ; il aurait eu pour përe 
Méon et pour mère Crithéis : de là vient qu'on l'appela leo. 
aides, du nom de son père, et Mdldsigène, du lieu de sa nais- 
sance. D'autres lui donnent pour pcre Mentor, ro de Pylos, 
et Clymène, ou Themisto» de Chypre, pour mère. Ce qui 
reste de tous ces récits, c'est qu'il 0ne époque très-reculée 
il exista un poëte cclèbre, qui fit une révolution dans la poCic 
contemporaine, et qu'on est convenu de l'appeler Homère. 
Son existence une fois admise, il s agit de déterminer 
deux points importants, sa patrie et l'époque où il a vécu. 
On sait qu'un grand nombre de villes se disputèrent l'hon- 
neur de lui avoir donné le jour. Il en est sept surtout dont 
les prétentions h cet égard ont ét célebrees par la poésie : 
Smyrne, Colopbon, Chio, Argos, Athènes » ll.hodes et 
lamine ; d'autres disent Cyme et 1)ylos, au lieu des deax 
demières. En cherchant les indications qu'offrent ses poê- 
mes sur le pays oi il est ue, on est amené à conclure qu'il 
dut vivre dans l'Asie Mie:cure, en fonte, ou dans unedes 
lies voisines. Malgré des autorité, nombreuses en laveur de 
Smyrne, si l'on s'en rapporte à l'hymne à Apollon, cité 
par Tlmcydide, Cbio serait la patrie d'Homère. Strabon dit 
qu'elle conservait encore sous la domination romaine le sou. 
venir des titres sur lesquels elle fondait ses prétentions. 
L'auteur anonyme du Combat d'Bomère et d'Besiode té- 
moigne qu'Homère était fi Chio l'objet d'un culte poétique, 
sinon religieux, de la part d'une association, d'une caste, 
ou d'une famille, qui faisait remonter son origine à ce poêle. 
Chio demeura longtemps le centre de ce culte, puisque les 
peuples du Peloponnêse et de l'Attique y envoyaient des dëp- 
ta|ionsannuelles. Une inscription récemment commeaée  
5I. B oe c k h offre l'exemple de l ultes rhapsodiques à Cbio; 
autre inscription parle d'ur. gymnase boreCien dansoette ile. 
Sur l'époque ì laquelle Homère a vécu, nous rencontrons 
la mëme incertitude ; car on est indécis entre le dixième, 
le neuvième et le hultiëme siècle avant J.-C. Si mme on 
prend les opinions extrmes, on trouvera jusqu'à cinq siècles 
de différence. Il y a une opinion qui fait Homère contem- 
porain de Lycurgue. Ëratusthène, Aristarque et 1)hilodoras 
le placent 120, I0, ou tS0 ans après la prise de Troie- 
L'auteur d'une bioaphie absnrde d'Homère, attribuée à 
Hérodote, dit qu'il naquit 622 ans avant l'expéaition 
Xerxès en Europe, qui répondrait à l'an 1102 avant J.-C.; et 
le calcul qu'il établit semble indiquer qu'il travaillait en cet 
endroit sur quelque document ancien. Hérodote, au deuxièn 
livre de son histoire, c. 53, dit qu'Homère vivait 00 ans 
avant lui, c'est-k-dire, 850 ou 880 avant J.-C. Selon les 
marbres de Paros, il florissait 907 ans avant J.-C., 302 
la prise de Troie, sous l'archontat de Dmgénète, un peu 
avant les olympiades. Entre toute ces données, les indien- 



HOMERE 
tions mo)-ennes sont les plus vraisemblables. Homère répète 
que par lui-mêrae il ne sait rien de ce qu'il raconte, et que 
la renommée seule en est parveune jusqu' lui (lliad., I. II, 
v. 487). S'il était né, comme quelques-uns le veulent, 60 ou 
80 ans après la guerre de Troie, si lui-mème et ses audi- 
teurs avaient connu «les vieillards qui en eus.ent été témoin$, 
aurait-il pu dire que les bëros de ces temps-là lançaient 
etsCent des pierres que trois hommes du sieu pouvaient 
à peine soulever (lliad., XIV, v. 446)  D'un autre c6té, dans 
rlliade, on trouve sur la disposition matérielle des erreCs, 
sur fa topographie du camp des Grecs, tels dtails qui snp- 
posent une tradition bien fralche et des souvenirs-bien 
rëcents. 
L'opinion la plus commune jusqu'à la fin du siècle der- 
nier faisait donc d'Homère un Grec asialique d'Ionie, 
florissait vers le milieu du dixiëme siècle avant notre ère, 
posterierement b la fondation des colonies grecques de 
rAsie Mineure. lode (Coraraetatio de Orpheo; Gteltingue, 
tsar,) a combattu cette opinion : il suppose Homère né dans 
le Ploponnèse, an temps mme de la gnerre de Troie ; il se 
fonde sur ce que ni dans l'lliade ni dans l'Odgssde il n'est 
fait alllsion b la grande invasion d,u Péloponnèse par les 
Doriens, vers tf00, un peu moins d un siècle après la prise 
de Troie. Thiersch suppose aussi qu'Homère a vécu dans le 
Péloponnèse, antërieu rement b l'expulsion des H  r a c I i d e s, 
à une époque très-voisine du siCe de Troie, peu de temps 
après le retour des Grees vainqueurs. 
Avec un telle incertitude sur la famille, le siècle et la pa- 
trie du poëte, il n'et pas surprenant qu'on sache peu de 
chose de sa destinée. Homëre doit avoir beaucoup voyagé : 
sans doute il parcomut, à plusienrs reprises, la Grèce, la 
Ph,nicie, l'lgypte, etc., si l'on en j uge par les connaissances. 
géograpbiq,es et maritimes qu'attestent ses ouvrages..Nul 
poëte n'est plus exact à décrire tous les lie.x, plus fidele 
dans ses peintures, plus attentif à rapporter les traditibns 
nationales. Il a toujours passé pour excellent géograpbe, 
et Strabon s'appuie souvent sur son antorité. Enfin, tIom/:re 
est l'historien de son époque. Plies d'une lois son témoignage 
a été invoqué àans les contestations des villes entre elle : 
Strabon, rappelant le démêlé d'Athènes et de Mégare sur la 
possession de l'tic de Salamiue, rapporte que les Athéniens 
alléguaient pour établir leurs droits le vers 558 du deuxième 
livre de l'lliade, qui a d'ailleurs été contesté : quelques au- 
teurs supposent qu'il fut ajoaté par Solon. Le Mégarien% de 
leur c6te, ripostaient par un autre vers d'Homère. Ce lait 
prouve que du temps de Solon on s'en rapportait / l'au- 
torité d'Homère comme à celle de l'historien le plus grave, 
le plus irrécusable. 
En admettant qu'Homère ait été réellement aveugle, 
comme le raconte Pausanias, il n'était certes pas avengle de 
naissance ; car il u'aurait jamais été capable de faire des 
peintures des objets visibles telles que ses poëmes en con- 
tiennent. On a fait de lui tant6t un mettre d'école aveugle, 
tant6t un mendiant réduit  gagner son pain en chantant 
de porte en porte : ce qui est contredit par tout ce que 
nous savons des anciens aoede$, ou chauteurs, chez les 
Grecs, et de leur condition. S'ils n'étaient pas liches 
et puissants, ils étaient du moins très-considérés, rpec- 
t»-t mème; ils avaient leur place marquée dans les sa- 
crifices et les ftes ; ils étaient également bien accueil- 
Ils dans les réunions des citoyens et dan» les palais des 
princes. Homère Cait, selon toutevraisemblance, un deces 
chanteurs ambulants, un de ces poëtes improvisateurs, 
qu'il a représentés dans Phémius et Démodocus, et non un 
mendiant ou un maltre d'école. 
Quoi qu'il en soitde toutes ces conjectures, on ne parvien- 
dra  dëterminer le degré de foi qu'elles méritent que par 
un examen critique et historique de l'lliade et de l'Ods(e; 
car les questions relatives à la personne d'Homère se rat- 
achent nécessairement aux questions relatives  ces poëmes. 
lou sommes élevés dans l'admiration du gënie d'Homère 
et de la belle unité qui règne dans ses ouvrages : les lin- 

133 
bitudes de notre éducation, les traditions classiques de 
notre littérature, nous ont accoutumés Une voir dans 
l'lliade et l'Odgssde que deux poêmes réguliers, deux vas- 
tescompositions, exécutees aec un art accompli et selon 
toutes les rgles de h poéthlue. Si donc on ,lent nous dire 
qu'il  a de fortes raisons de douter qu'il ait jamais existé 
un Homère, que ces poêmes, si réguliers en apparence, et 
qui ont servi «le type aux règles de l'épopée tracees par Arts- 
rote, n'existaient pas pdmitivement sous la forme où nous 
les avons aujourd'hui ; que cette prétendue unité que nou» 
admirons tant est le résultat d'une élaboration de plnsieurs 
siècles ; que, loin d'avoir été conçus sur un plan unique et 
fondus d'un seul let, ces poêmes n'étaient d'abord que des 
chants épars, isolés, recueillis par lasuiteet rapproches par 
l'industrie de quelques arrangeurs, alors nous nous récdons 
contre un paradoxe révoltant, insoutenable; notre esprit, 
préoccapé de nos idées d'unitë et des habitudes actuelles 
de composition, a peine à admettre que l'lliadeetJ'Odyssde 
n'aient pas élé exCutCs sur un plan conçu d'avance et 
profon,lément médité par rautenr. Cependant, examinons 
les motifs de cloute allégués par ces hardis critiques. 
Ils prétendent non-seulement que l'lliade et l'Odyssde ne 
sont pas l'oeuvre du mme poëte, mais que ni l'une ni l'au- 
tre n'est due à un seul et méme anteur; que ces poëmes 
sont deux recueils de fragments poetiques composés séparé- 
ment. qui sont rcst6s Iongtemp détachés les uns desautres, 
et dont on s'est enfin avisëde forn,er un tout. Selon e,zx, 
cetteépoque, intermédiaire entre la barbarie et laciviliation 
à laquelle vécut Homère ne comporte pas une composi- 
tion vaste et compliquée commele plan d'un poëzae épique 
régulier ." des ouvrages de si longue haleine ne se conçoi- 
vent pas dans la vie de ces cliante«rs nomades, qui ne les 
récitaient jamais en entier, mais seulement par fragments. 
Tout est spontané, naïf, dans la poésie homériqzze; tout y 
exdnt l'idée du travail et du calcul ; c'est le produit de 
l'inspiration, et non d'un plan habilement combiné. D'ail- 
leurs, une œuvre sz étend,e n'aurait pu s'acliever sans le 
secours de l'écriture : or, tont atteste que du temps d'Ho. 
mèrel'écriture n'était pas connue en. Grèce. Une preuve 
dPcisive est que dans ces dellX poëmes il n'est fait aucune 
mention de l'art d'écrire, malgré les fréquentes occasions 
que le poëte avait d'en parler, s'il e0t été connu. Hésiode, 
ainsi qu'Homère, ne parle en aucun endi'oit de l'écriture, 
nid'inscriptions, ni d'aucune monnaie. Le passage de l'l- 
liade relatif Be]l,rophon (cli. VI, v. tCS), souent invo. 
qué en faveur de l'opinion contraire, ne prouve réellement 
dans le poëte que Uignorance de cet art,  moins qu'on ne 
veuille entendre par ecriturel'usage de quelques signes non 
encore réduits en alphabet. Il en est de mëme du passage 
où les h6ros grecs tirent au sort pour savoir qui combattra 
Hector. 
Wolt, dans ses fameux Prol(çomènes, a fortement établi 
cette opinion. Selon lui, en admettant que l'écriture ltît 
connue Ch Grèce du temps d'Homère, et qu'elle pot tre 
employée pour des inscriptions, on ne s'en servait pas 
encore, l'usage n'en était pas encore général dans qa vie 
commune avant le temps des O I y m p iades. Il ne suflïsait 
pas d'avoir réussi à graver quelques lettres sut la pierre; le 
défaut de matCeux sur lesquels on pot tracer des ouvra- 
ges volumineux, tels que les poëmes homériques, était un 
obstacle que les siècles seuls pouvaient vaincre. A !'époque 
de Solon, plus de quatre sides après Homère, lécriture 
avait fait si peu de progrès, que pour publier ses lois le 
législateur d'Athènes les fit graver sur la pierre, dans la 
forme dira b o u  t top h d d o n, qui tient  l'enfance de l'art. 
Le témoignage de Joscphe à I éard des poésies d Homère 
est positif; voici comment il s exprime (contre Apion)°: 
« La Grèce ne rebut les lettres que ort tard et avec peine. 
Les connaissait-on au stêgê de Troie ? C'est un problème 
où toutes les probabilites sont pour la négative. Il n'est 
fait mention d'autre écrit avant les poëmes d'Homère ; 
on croit mme que ces poêmes ne furent pas écdts ; ils 



134 
nous ont été transmis par les rhapsodes, qui les chantaient, 
et c'est pour cela qu'on y remarque une si grande va- 
riété de leçons. » Objectera-t-on que le temoignage de Jo- 
sèphe est bien moderne pour un fait d'une si haute anti- 
quité ? Mais il faut observer qu'il ne l'avance pas comme 
une opinion particulière à lui ; il en parle comme d'un fait 
généralemeut admis et ieconnu. Plutarque, il est vrai, dit, 
dans la vie de Lycurgue, que ce législateur, voyageant dans 
l'Asie Mineure, y découvrit l'Iliade et l'Odysse, et que, 
plein d'admiration, il s'empressa de les transcrire, pour 
les rapporter à Lacédémone. Ce qu'il peut y avoir de réel 
dans le fait rapporté par Plutarque se réduit à ce que 
Lyenrgue aurait fait connaitre en Grèce loe poésies d'Ho- 
mère. Quant à l'expression transcrire, il ne faut y voir 
que la préoccupation d'un auteur qui transporte dans les 
siècles passés les usages et les idées de son temps. Héra- 
clide de Pont, historien qui vivait au troisiëme siècle avant 
Jesus-Christ, dit seulement que «, Lycurgue, ayant reçu les 
poésies d'Homère des héritiers de Créophyle, les apporta le 
premier dans le Peloponnèse. ,, On voit qu'ici il n'est pas 
question d'écriture. emploi de l'écriture pour des usages 
particuliers peut, à la rigueur, dater du huitième siècle a uni 
notre ère ; mais à cette époque il dut ètre très-borné, vu 
l'insuffisance des matières, telles que la toile cirée, les 
feuilles d'arbres, les feuilles de métal et les peaux. Il est 
probable qu'on ne eommença t écrire des morceaux d'une 
certaine élendue que vers le milieu du sixième siècle, 
après qu'on eut reçu dÉg)ple le papyrus; car les dipthè- 
res, peaux de chèvre ou de mouton grossièrement préparées, 
étaient insuffisantes à cet usage; et elles Caient abandon- 
nées dès le temps d'Hérodote(I. V, ch. 58). Il n'est guère 
possible non plus de suppor qu'ou eut gravé deux poëmes 
de l'ctendue de ceux d'llomère sur des lames de plomb : 
pour que celle gravure efit etWsolide, il aurait fallu qu'elle 
fùt prolonde, ce qui aurait exigé des lames fort épaisses et 
iort pesantes. 
Les poëmes d'Homère ne furent donc pas écrits, mais 
chantC. La mémoire conservait alors les œuvres du génie, 
comme la tradition, la renomraee ule, transraetlait le 
souenir des événements. De là ces fréquentes invocations 
aux Muses, filles de .lemoire, seille» dépositaires du passé. 
Longtemps encore après Homère, tout se conservait par 
les chants et la poésie : les lois mèraes se chantaient, 
corame l'atteste le mot nomos (A1i»tote, prohl. x, 
(:es chant» historiques et nationaux durent commencer 
immédiatemeut après le retour de la guerre de Troie. 
Dans les poëmes d'Homère, on trouve les aoedes, ou chan- 
teurs, sorte de corporation dépositaire des connaissances 
historiques et mythiques de leur siècle, lls jouent un r61e 
important dans la socièté héroïque; ils ont leur place 
marquée dans les Iëtes, dan» les funérailles, dans les céré- 
monies religienses et au banquet des rois. lls étaient le con- 
servatenr des audes actions, le dép6t vivant des tradi- 
tion nationales. Ils voyageaient de ville en ville, comme nos 
troubadours ; ils parcouraient la Grèce et l'Iouie. Pendant 
que la Grèce européenne était tourmenlee par les révolu- 
tions, l'loniejouissait d'une paix profonde. Il s'y formait 
une école de poëtes pour composer les chants qui accom- 
pagnaient les solennités politiques ou religienses. Les Co- 
ges qu'Homère donne partout à ces poëtes, qu'il appelle 
divius, chéris des dieux et des hommes (Od., VIII, 
la confiance que leur témoignent les rois, les honneurs 
qu'on leu rend, tout donne à penser qu'Homère était un 
d'eux. On a donc pu supposer, avec quelque vraisemblance, 
qu'il s'était peint lui-mème sous les noms de Phémius et 
de Démodoeas -- de là cette image du vieil Homère allant 
de ville en ville, chantant les hèrus et les dieux, aveugle, 
car les 5luses avaient empoisonné leurs faveurs en le pri- 
vant de la vue(Oà., VLil, 64). Ces chauteurs passaient pour 
inspirés des dieux (Od., V, 3a7); ils ne composaient pas 
h loisir, ils improvisaient. On conçoit que l'usage de réci- 
ter ces chants dans les lieux publics, en présence du peuple 

/OMÈRE 
assemblé, ne çomportait pas des compositions de longue 
haleine, lls ont donc existé d'abord sous la forme de frag- 
ments épars, isolés ; ils n'da.lent pas éerits, l'écriture n'ëtait 
pas alors connue en Grèce, ou l'usage n'en était pas assez 
répandn et assez facile pour transe;ire des ouvragesCendus: 
ils se conservaient dans la mémoire desbommes et se trans- 
mettaient de bouche en bouche. Le témoignage d'Élien 
( Var. hist., liv. XIII, ch. lt) est clair et positif sur ce point. 
Il est donc bien constant que ces poésies furent d'abord 
chantCs par fragments. Aprës les poètes primitifs, il , eut 
des rhapsodes, qui apprenaient par cœur les vers des poëtes 
et faisaient métier de les redire »ur les places publiques et 
dans les fètes solennelles. Ils savaient ainsi un certain nom 
bre de fragments, ou rbapsodies, Iormant de petits poëmes 
détachés. Les poésies homériques, comme les autres, furent 
chantes par des rhapsodes qui parcouraient le pays et ré. 
citaient dans les lieux où ils étaient certains morceaux ou 
épisodes formant un ensemble complet, et connus sons des 
titres particulkrs, tels que ceux que meutionne Élien. Ces 
rhalosodes, qm sueeèdent aux chanteurs {aoedes), mar- 
quent un second ge dans l'histoire des poésies boreCi- 
ques. Ils n'inventent plus, ils s bornent à réciter les ehants 
d'autrui. Itérodote (I. x,-, ch. 7), qui vivait trente ans après 
Pindare, est le plus ancien auteur o/ se trouve le nom de 
rhalgsodes. Pindare n'emploie que le mot boreCdes : « De 
mème que les homërides, chanteurs de vers cousus, ils com- 
[ mentent dès le principe chanter Jupiter (Nem., II, t-2). 
par 
Voilà le r61e des homéddes bien clairement déterminé 
mais qu'étaient ces boreCdes, et d'où leur venait ce nom 
Le scoliaste de Pindare dit : « On appelait autrefois homd- 
rides ceux de la famille d'Homère qui chantaient ses  
sies par transmission ( par héritage). Après eux, vinrent les 
rhalgsodes, qui ne faisaient pas remonter leur origine à 
Homère. » On lit dans Strabon, 1. XL : , Les habitants de 
Chio rclament Homère, et pour preuve il citent œux 
qu'on nomme homerides, qui sont issus de ce poëte. » Ti- 
mée le Sophiste, auleur d'tin lexique sur Platon, dit sim- 
plement que le» hom6rides étaient ceux qui récitaient eu 
expliquaient les vers d'Homère (voye-. l'lon, la Rélgubliflue, 
liv. X, et le Phddre). Harpocration, auteur d'un lexique sur 
les dix orateurs atbeniens, dit, à l'occasion de ce nom em- 
ployé par Isocrate, à la fin de l'éloge d'Hélène, que les 
homrides étaient une famille orinaire de Chio, et qui 
tirait son nom du poète Homère. Il ajoute que Séleucas 
donnait à ce nom une autre ètymoloe, et le dérivait 
l.téoç, otage. Suidas n'a fait que copier Timée et Harpocralion. 
Dugas-Montbel, dans son Hstoire des posies home.tiques, 
dérive ce mot du verbe 6l.tr,.--[. , composé de 6W, en:m- 
ble, et de ié--'t, je dis, sur l'autorité d'Hésychius, qui l'ex- 
plique ainsi, 6lo ŒEpl.t60m xoEi Ul.t.=o3«tv. Homérides signi- 
fierait alors les rassembleursi ceux qui chantent ensemble, 
ceux qui s'accordent pour chanter. Dansla Th9onie , v. 39, 
le participe du mème vrbe est employé dans le mme sens 
et appliqué aux Muses. Dans la suite des temps, par le pen- 
chant des Grecs à tout personnifier, les boreCides auraient 
donné lieu à supposer un Homère. Quelque ingénieuse que 
soit cette conjecture, il nous parait difficile d'abolir enliè- 
rement la personnalité d'Homère, et de conclure que son 
nom ne représente qu'un tre purement fictif et controuré. 
D'après les témoignages les plus vraisemblables, les ho- 
reCdes paraissent avoir été une famille ou une é¢ole de 
rhapsodes qui chantaient les poésies d'Homère et celles des 
anciens poëtes cycliques. Des éeoles du mme genre ont 
existé chez d'autres nations : telles furent les éeoles de 
p top h ë tes chez les Juifs ; chez les peuples du ,Nord, les 
bardes, lesdruides, lessealdes, apprenaientparcoeur 
des posies et les chantaient; ils iormaient la tradition vi- 
vnte et eonservaieut le seuvir des événements. C'est 
dans l'ile de Chio que cette éeole des boreCides parait avoir 
fixé son siCe; de là ils se répandirent dans la Grèce. Le 
plus célèbre d'entre eux fut Cynéthus, contemporain d'Es- 
chyle. Les Homérides n'étaient pas de simples chanteurs, 



HOMÈRE 
ils ajoutaient, ils aitAraient. Pindare, dans le passée cité 
plus haut, montre les Homérides faisant toujours précé- 
der d'un hsmue religieux chacun de leurs cbants Apiques 
(voyez aussi Isthmiq., 1. IIl, od. tv, v. 55). Les homgrides 
se distinguent donc des rhapsoàes par une existence sociale 
et par l'invention poétique. Les floreCides ne chantaient 
que les poêmes d'Ilomère, ou leurs propres compositions; 
les chapsodes chantaient indistinctement tous leq genres de 
poésies. Cette institution des rhapsodes suhshta longtemps. 
On voit des combats de rhapsodes établis par |es ri|les 
d' ,rgos, Athènes, Sicyone, Orchomëne, etc .... Hérodote 
(l. "C, ch. 671 raconte qu'on Clistbène, tyran de Sicyone, 
élant en guerre avec les .rens, défendit les combats de 
chant entre rhaprodes, parce qu'ils y récitaient les vers 
d'llomère, où se trouvaient les louanges d'Argos. Isocrate, 
data le Panégyrique, loue les anciens Athéuiens d'avoir 
établi des combats de musique dans lesquels on récitait les 
vers d'Homère. 
Avant l'usage de l'écriture, les monuments historiques 
devaient gtre des chants ; les seus moyens de transmission 
étaient dans la mémoire des hommes. Les rhapsodes lurent 
donc néceaires tat:t que ces poèmes ne furent pas écrits. 
!ais on ne saurait douter qu'un pareil mode de transmis- 
sion ne lut sujet à bien des altérations : en passant par iant 
de bouches, ces poèmes n'ont pu rester intacts; bien des 
passades ont d6 se corrompre, des fragments étrangers sy 
introd,fire; plus d'un vers y fut intercalé pour flatter l'orgueil 
de telle ou telle ville. Aussi dès que l'usage de l'écriture 
se répandit dut-on sempresser de l'emplos-er/ recueillir 
ces chants précieux, seules annales des temps béroïques. 
Ce travail une fois accomp|i, les rhapsodes n'ont plus 
de r61e à remplir : du moment qu'on a des copies écrites 
de ces poêmes, les rhapsodes, si longtemps en I,onneur, 
perdent leur importance et finissent par tomber dans le 
mépris. Platon les livre au ridicule dans l'/on, et Xéaophon 
les appelle une race de niais, qui ne comprennent rien au 
véritable sens despoëtes (3lem. Soer., I., IX', c. 2, § 10. 
Banquet III, 51. An commencement du quatrième siècle, 
ils n'étaient plus que de raisCables histrions. 
A quelle époque faut-il rapporter cette révolution produite 
par la transcription des poésies homériques? On sait, d'une 
part, qu'il y a en Grècebsence coml,lete de monuments 
écrits jusqu'au temps de Solon; d'un autre cété, on ne peut 
douter que l'Iliade et l'Odyssde ne fussent rassemblés et 
ne portassent le nom d'Homère au siècle de Socrate et de 
Xénopbon, puisque, dans les Entreliens mdmorables de 
Socrate, Euthydème dit qu'il possède les œUVes d'Hor2ère 
et que, dans le Banquet de Xenophon, icératns se vante 
de pouvoir réciter de mémoire l'Iliade et FOdyssée. Des 
témoignages divers et nombreux saccordent pour rapporicr 
à Pisistrate l'epoque à laquelle les poésies d'ttomère furent 
recueillies et rassemblées en corps d'ouvrage. Le plus ancien 
de ces témoignages est celui de Cicéron, qui dit que « Pi- 
sistrate, le premier, mit les ouvrages d'Homère, iusge 
alors épars et confus, dans l'ordre où nous les avons aujour- 
d'hui (De Oral., 111, 3t). » Platon dit seulement que ce lut 
llipparque, l'un des lils de Pisistrate, qui fit conuaitre Ho- 
mère à Athènes, et qui eut soin que ses poèmes fussent chan- 
tés à la féte des Panathénées, par des rhapsodes alternant 
entre eux, de manière que le morceau «le l'un fit suite à 
celui de l'autre. Déj/ antérienrement, Solon  au rapport de 
Diogène Laerte (I, 57 )» • avait réglé que ceux qui réci- 
taient les vers d'Homïre eu public le feraient alternative- 
ment, en sorte que l'edroit où l'un aurait cessé serait celui 
par lequel Pautre commencerait. » C'est-à-dire que Solon 
ordonna, lorsque plusieurs rhapsodes chanteraient en pu- 
blic, d'observer l'ordre des temp et de ne pas intervertir 
la suite des événements. Cette" première mesure était une 
peCarution au travail ordonné par Pisistrate : là est déjà en 
germe l'idée de recomposer l'ensemble des deux poëmes. 
Élien, après le pas,sage que nous avons cité plus haut» 
ajoute ; « Ensuite Pisistrate ayant réuni ces posies, pu- 

135 
blia i'llinde et l'Odysse. » Pausanias, discutant sur un 
nom de ville cité dans le Glalogue des vaisseaux, ajoute : 
• Lorsque Pisistrate rassemblé les t ers d'ttomère, aupara- 
vant dispersés, et conservés dans la mémoire des rhap- 
rodes... (Vil, 26). » Deux sco|ies sur Denys de Thrace 
racontent cette réunion des poésies homériques sons Pisis- 
trate : la premiëre est ainsi conçue : « On rapporte que les 
podsies d'Homère ataient été perdues; car alors elles se 
transmettaient non par l'écriture, mais par le seul ensei- 
gnement (la didasculie), de maniere qu'ils n'taient con- 
servés que dans la mémoire. Pisitrate voulut que les poé- 
sies d'ltomère fussent conservees par l'écriture. Il établit un 
concours public, qu'il fit proclamer par des hérauts donnant 
permission/ qui saurait des vers d'Homère de les lui indi- 
quer. Ayant fixé le prix d'une obole pour chaque vers, il 
i par, int/ réunir les poésies dans leur entier, et les trans- 
mit aux hommes. » La seconde scolie est une amplification 
de la première, et se termine par un anacl,ronisme, qui fait 
Iigurer Aristarque et Zénodote parmi les contemporains de 
Pisistrate. Enfin, selon un fragment d'une vie d'Itomère, 
citée Iar Léo Allatius (De Putria Ilomeri), « les vérita- 
bles poèmes d'Homère, d'abord cl,antés par morceaux 
tacbés, furent réunis par Pisistrate, comme le t,:moigne 
l'inscription gravée sur sa statue à Athënes. ,, Le travail 
commun,lWpar Pisistrate sur les poesies d'Homère est donc 
un fait bien constaté, atteste par des autorités nombreuses 
et suffi«antes. 
Pisistrate réa sur Atl,ènes à trois reprises, de l'an 561 
à l'an 528 avant notre ère. C'est donc dang cet intervle 
qu'il faut placer la première transcription et la coordina- 
tion des poésies boreAtiques. Ce trasail, quelque soin qu'on 
y apporta/, dut gtre bien imparlait; il ne put se faire sans 
des suppressions, des additions pour lier les différentes par- 
ties; l'ignorance ou la fraude durent y introduire bien des 
fragments étrangers, des vers inutiles, des répétitions, des 
histoires fabriquées dans quelque intérgt local ou de famille. 
11 n'est pas douteux que ce texte ne subit des altérations 
nombreuses. Plus tard, la critique naissante essaya de cor- 
riger les fautes les plus grossiëres, d'effacer les disparates 
les plus choquants, de restituer les leçons les plus authen- 
tiques, de combler les lacunes, etc., opérations dont l'en- 
semble est exprimé par le mot grec a:to,.»'o.,, arranger. 
L'emploi fr,.quent du mot àiaskevastva dans les scolies 
du manuscrit de Venise, publiée par Villoison, insinue qu'il 
s'assait d'une classe d'érudits tout / fait différents des 
rhapsodes, et d'une epèce de travail que les poëmes d'Ho- 
mère ont subi avant celui des grammairiens d'A|exandrie, 
qui en firent des recensions et des í,litiuns. Le travail des 
diaslévastes fut donc de deux espïce» : 1  de réunir le di- 
verses parties de ces poèmes, charités jusque lors par mor- 
ceaux detachés, et de former un grand ensemble de ¢¢s frag- 
ments épars, qui composett aujourd'l,ui l'lliade et l'Oàyssde ; 
2 ° de remanier le texte en maint endroit, pour tablir la 
liaison des diverses rbapsodies ; et en effet parmi les in- 
terpolations qui se rencontrent fréquemment dans les poésies 
homériques, on peut encore distinguer souvent les sutures 
qui sont l'ouvrage des diaskévastes. 
Mais ce furent les grammairiens d'Alex qui mient la 
dernière main aux poëmes homíriques, et qui leur donnèrent 
leur forme d,finitive. La division de l'lliade et de l'Odyssce 
en vins-quatre chants, désignés par chacune des lettres de 
l'alphabet, est attribuée au cél;:bre critique Aristar que, 
qui florissait à Alexandtie ers le milieu du troisième siècle 
avant J.-C. Antérienrement au travail d'Aristarque, d'o6 
sont sortis oes poêmes, à peu près dans la forme qu'ils ont 
conservée depuis, il en existait déià un grand nombre de co- 
pies, ou d'ditions, dont les plus célèbres étaient celles de 
Chio, d'Argos, de Crète, de Sinope, de Cypre, de Marseille, 
et celle qu'Aristote fit pour A le x a n d r e le Grand; on la ci- 
tait sous le nom d'édition de la cassette. La critique des 
Alexandrins, Zénodote, Aristopbane de Byzance, A.ristar- 
que, etc., s'exerça principalement sur les interpolations et les 



136 flOMEP, E 
vers ajoutés par les diaskévastes. Ils retranchèrent impi- 
toyablement tout ce qui leur semblait ne pas appartenir au 
peëte. Voila pourquoi on lit dans les auteurs anciens tant 
de vers attribués/ l/omère que nous ne retrouvons plus 
dans nos éditions, faites d'après la censure des Alexandrins. 
On conçoit m, aintenant commeut Aristarque, malgré le culte 
presque superstitieux que l'on rendait a Homere, supprima 
de vers de l'lli«de ou de l'Od/ssée : c'est qu'il les considé- 
rait non comme des vers d'Homëre, mais comme des in- 
terpolations dues aux rhapsodes ou aux diaskévastes. 
51aintenant que cette longue élaboration et ce remanie- 
ment continuel des poëmes homériques jusqu'/ l'ccoie d'A- 
lexandrie est nn fait bots de doute, que penser de cette 
belle nnité de plan et de composition qu'on a si souvent 
admirée dans l'lliade et l'Odyssée ? _e ommes-nous pas 
tenté d'en rapporter tout le mérite à ceux qui, sous 
Pisistrate, réunirent les diverses parties de ces poëmes 
Mais les critiques qui examinent de près cette pretendne 
unité n'y voient qu'une unité artificielle et nou prinfitive, 
un arrangement, une coordination, plus ou moins habile, 
mais non une œuvre nnique, fondue d'nn seul jet. Ils re- 
marquent de frappantes disparates entre les differentes par- 
ties et mème plus d'une contradiction. Far exemple, l'lé- 
mënes, chef des Paphlagoniens, est tué au huitième chant 
de l'lliade, v. 578, et au treizi, me chant, v. 658, on le voit 
accompagner le corp de sou filg. Bien des morceaux d'une 
grande étendue forment des hors-d'oeuvre qui suspendent 
l'action : par exemple, le dénombrement des vaisseaux, les 
jeux aux funérailles «te Patrocle, etc. Tontes ces observa- 
tions réunies portent  conclure que ni l'Iliade ni l'Odçssde 
ne sont d'un eul auteur, ni d'une seule époque. Quant à 
la différence de ton et de couleur entre l'lliade et l'Odilssœee, 
elle avait d,Sja clé remarquée par les anciens. Longi, com- 
parait l'auteur de I' Iliade au soleil levant, et Fauteur de 
l'Od/sse au soleil couchant. Ceux des grammairiens d'A- 
lexandrie qui furent désignes par le nom de chori:outes 
attribuaient les deu,t poêmes à des auteurs differents. Il est 
cert«ia que l'Odgssœee prcsente un autre langage, d'autos 
idées, une autre msthologie et une civilisation plus avancée 
que l'llmde. Cette thëse a été fort bien dcvloppée par Ben- 
jamin C o n s t a n ! dans le troisième volume de son ouvrage 
sur les religions. Mais c'est dans les fameux Prolœegomène.s 
de Wolt que toutes les questions relatives  l'authenticité 
des poésies boreCiques ont été trait,.es de la manière la plus 
complote. 
3-ous ne parlerons pas ici des hymnes attribués à Homère. 
La plupart ne sont que des fragments d'anciens poëmes 
ccliques, ou des préambules de rhapsodes. La critique a 
prouvé qu'ils appartiennent à un siècle pins receat que les 
deux grands epopées. 
Homêre a été souvent traduit en français. Mais la traduc- 
tion de -M  Dacier était restée la plus fidèle, celle qui don- 
nait le mieux Iïdée de l'original, jusqu'à la publication du 
beau trava// de Dugas-3lontbel. Il faut le lire daus la 
seconde édition, accompagnée du texte et de notes excellen- 
tes, publiée par Firmin Didot. Dngas-Montbel $ a joint une 
histoire des poésies homíriques, o/ il a fort bien résumé les 
opinions de Wolf et des autres savants sur cette contro- 
verse. Anl"tn. 
HOMÉiIDES. Voiler, 
llOMICIDÈ(du latin homo, homme, coedere, tuer). 
C'est l'action de tuer un homme. La loi française di»tingue 
plusieurs epèces d'homicide. L'homicide volontaire et avec 
préméditation s'appelle a s s z s s i n a t; l'homicide volontaire 
sans préméditation prend le nom de m eut tre; enfin, l'ho- 
micide par imprudence est puni d'un emprisonnement de 
trois mois à deux ans et d'une amende de cinquante à six 
cents francs, et donne lieu à des dommages-interêts. 
Le mot homicide s'emploie aussi pour dsigner ceint qui 
¢ommet l'action de tuer. Efin, il s'emploie comme adjectif. 
On dit un.fer, homicide, des vapeurs homicides. 
IIOM ! LETi Q UE. Les Allemands donnent ce nom, dé- 

 HO.u.r I 
rivé du grec 60o, eonverr,  l'art d'exlser et d'ensei. 
gner les bases de la foi cliretienne au moyen d'homé 
I i es ou de serinons. L'homiletique comprend par eonsé 
quent les règles qui doivent présider au choix des textes 
de sermon,  l'art de les disposer et de les traiter, comme 
aussi celles qui sont relatives  la déclamation et au geste. 
Les professeurs de nos facltés de lhéologie qui sont char. 
gs des chantes d'éloquence sacrée embrassent en parti 
dans leur enseiement ce que nos voisins appellent plu 
particulièrement homilœetiiue. L'ouvrage de saint Au gus- 
tin de Doctrina Christiana est,  bien dire, le premier 
traité d'homil«lique qu'on ait songé  réàiger. Mais plus 
tard cette science reçut de plus grands développements, 
la suite des travaux d'Er asme et à'Hypérius. L'Eccle- 
siate du premier (Ble, 1535) est demeuré classique en 
ce genre. L'ouvrage d'Hypérius a pour titre : De orman- 
dis Concionibus souris (31arbourg, 1553); L'Essai ur 
l'llo9uence de la Chatrc, du cardinal Maury, est plut6t 
un recueil d'analyses et d'observations qu'une théorie sys- 
tématique. Les .Allemands  cet égard ont montrë plus 
d'actisité que nos théoloens; et leur littérature theolo- 
giqae ahonde en ousrages speciaux sur cette matiCe. 
liOMIXEM (An). loyer, An nomx. - 
llO.'$1MAGE  HO313L,GE LIGE (Droit flodal). 
Vo¢e:e Foc  HoaaAce, et FÉon_L,TÉ, tome IX, page 343. 
HOMME (en latin homo). Il est ainsi défini : Animal 
à deu,r »nains et à deux pieds, marchant debout, doué 
de raison, d'un langage articule, et susceptible de cirili. 
sation. Il est l'unique b imaae et bipède. Ëtant, parmi 
tous les animaux, le seul creé pour l'exercice de la pem-è 
et de l'industrie, afin de rogner sur les autres êtres, il dal 
teurs'oir une station droite. C'était le mo)en de lui attribuer 
un cerveau volumineux et la liberté des mains. Aimi, la 
nature fit à l'homme trois dons eminent% qui lui assurent 
l'empire, savoir : Pinte lliçence pour inwnter, le lan- 
ç a9 e pour s'associer, et les m a i n s pour exécuter..Ces 
caractères n'appartiennent dans leur totalité  aucune autre 
e-«pèce. Par sa conformation physique, il est de la 
classe des animaux verte hrés à sang chaud : la lemme 
tant vivpare et allaitant ses enfants, elle se range, comme 
I'i)omme, dans l'ordre des m a m m i fër es, selon les alo- 
ralistes, • 
Placés à la ttedn rëgne animal et revtus d'une stprme 
autorité sur to,t ce qui respire, c'est  nous qu'il appartient 
de sonder les prolondeurs de notre propre nature. 11 a  
réservé  l'homme seul de mesurer ses droits sur ce glol; 
car tout ce qui vit s'ignore soi-même, excepté noire 
espèce. Aussi les ètres organisés, végrtaux et attimaux, 
comme les matiëres brutes, relèvent tous de l'homme, tan 
que ce roi de la terre ne relève que de la Divinite. par le 
corps, nous sommes classés au rang des animaux; par la 
raison et I',me, nous émanons de l'intelligence sulrne- 
L'humanité constitue donc la création la plus dorée et domi- 
natrice sur la terre, et devient le plus and suet 
nient de toute la création. Telle est la suprématie qui nom 
fut attribuée : puisque l'homme tire de l'intelligence t0ut 
sa grandeur et mme son moàe d'existence sur la terrecar 
il n'agit pas de pur i nsti net,  la manière des Ites, mais 
en s'associant et en perfectionnant sa nature), on doit le 
consid Cer comme un animal éminemment philosophe, l'bon0 
sapiens de Linní. Tout en lui manifeste sa destination 
exister principalement par le cerveau, tandis que les Ixale s 
vivent davantage par le corps. Le sstême nerveux, pins 
actif et pus developpé chez notre espèce, devient la sour 
des grands biens comme des grands maux qui la àistieat 
entre tous les ètres. 
En nous donnant l'existence, le grand arbre de la viea 
fleuri, s'est élevé au tare de sa croissance; il a produitennc- 
ses fruits les plus élaborés, si l'on veut considérer toute la 
sërie hiërarchique des Cires oanisés. Ainsi au delà d 
simples matëriaux terrestres et hruts se sont developptez 
les immenses tribus végêtales, depuis l'humble mousse l" 



tt03f),IE 
qu'a,, palmier fécond et jusqu'au cèdre superbe. Sur le règne 
végdtal est apparue ensuite l'animalité qui s'en substante, et 
au-dessus de ces faces inférieures se sont déployées des 
pèces plus uobles, plus puissantes, ou plus audaeieuses, 
telles que des earnisores et les ordres supérieurs des erté- 
brés, les oiseaux, les mammifères. Parmi ceux-ci s'observe 
une gradalion manifeste dans le perfectionnement de l'orga- 
nisation. Depuis les brutes grossières, ou pachydermes et 
ruminants, on remonte par les tribus d'animaux ongaficulés, 
les rondeurs, aux car nassiers, et de ceux-ci aux tgrimates, tels 
que les singes ou quadrumanes, aux orangs-outangs; enfin, 
de ces genres à celui de l'homme, la gradation se marque 
encore par des transitious delmis le l-Iottentot et le st,|pide 
Papou, lusqu'h la suprême perfection corporelle et intel- 
lectuelle de l'homme blanc, civilisé par l'instruction et les 
arts, dans notre Europe moderne. Eevés ainsi au sommet 
de l'éebelle des règnes organisés, c'est à nous que viennent 
aboutir tous les mouvements qui s'opèrent parmi eux. 
L'homme est comme la tte, la partie pensante de ces erC- 
turcs ; elle en repréenle la fleur la plus délicate et la plus 
sensible, tandis que les autres espèces en composent le corps 
ou la masse brute. De même que le cerveau est tortuWpour 
goueerner l'économie vivante de chaque individu, le cerxeau 
des tres organisës, qui est la race Immaine, est établi par 
la nature comme un modérateur suprême pour fdire rner 
entre eux l'équilibre et la subordinalion. C'est une sorte de 
grand balancier destiné à peser tour à tour sur tout ce qui 
s'dève au delh des limites naturelles : 
Sanelius his animal, menosqne capacius altoe, 
Deerat adhue et quod dorainari in coetera p«»sset; 
Natus homo est. (OVltL, .ltam., !.) 
De même que le règne animal est institué pour réprtmer 
l'excessive abondance du rëgne végetal par les déprédations 
qu'il exerce, les espèce» carnivores ot été erCes aussi pour 
retrancher rexeès des espèces qui vivent des végétaux. La 
race humaine a été superposée sur toutes les autres, afin 
de faire rëgner l'harmonie entre elles, en chàtiant également 
les unes et les autres pour le» contedr entre leurs limites 
re.peetives. Cette Ionetion est prouvee par la faculté accordée 
 l'homme de pouvir subsister dans tous les climnats du 
globe et de se nourrir également de végétaux et d'animaux. 
Lorsque l'espèce humaine, à son tour, surabonde, et que 
sa puissance despotique devient ruineuse pour les corps 
organisés, alors naissent les disettes, les lamines desiruc- 
rives, ou ces épidémies meurtrières, qui ne sévissent jamais 
plus que dans les immenses réunions d'hommes, par la 
corruption et les eontagious qui s'y propagent. D'ailleurs, 
la nature humaine est exposée à de soudaines catastrophes 
politiqes, à des discordes civiles,  des guerres d'autant 
plus ravageuses que la population est plus eondeusée ou 
plus nombreuse. Ces dissensions entre les peuples sont 
comme autant de eautères ou de saignées qui diminuenf, 
pour ainsi parler, la pléthore des nations, et rétablissent 
une plus iuste hiérarchie entre les créatures vivantes. Les 
têmps de malheur pour le genre humain desiennent alors 
des époques de développement et de croissance pour les étres 
de la nature, parce que nous ne nous multiplions que par 
leur ruine, et nous ne nous enriclfissons que de leur dépré- 
dation. 
Si l'homme n'est qu'un instrument nécessaire dans le sso 
tème de vie, tout ce qui existe n'est donc pas formé pour 
otre feficité. De même que les souverains sont établis pour 
faire le bonheur des peuples, l'homme a été comme le cbef 
élevé sur tous les étres pour maintenir leur bien général. La 
mouel,e qui l'insulte, le ver qui ronge ses entrailles, le vil 
ciron dont il est la proie, sont-ils nés pour le servir? Les 
astres, les saisons, obéissent-ils aux volontés de ce dieu de 
la terre, aliment d'un Iv@le sermisseau Les maladies, les 
infortunes et les douleurs, les tourments que nous nous 
erCns nous-mëmes par nos passions, proasent que la Pro- 
• idenee s'est montrée équitable, et que, pour tire exlmussés 
CT. uE L« cuawF, s. -- T. 

au premier rang, nous ne sommes pas au-des«us de  ois. 
Ce n'est donc point l'homme qui règne sur la terre, ce sont 
les lois de la Divinité, dont il n'est que l'interprète et le dë- 
positaire. Soumis  ces décrets irrévocabtes de la natur il 
en devient le premier esclave. Animaliafecit Deus lropter 
hominem, hommem propler seipsum. Si ergo animalibus 
rninislrat tgrolter hominem, quomodo hominibus non 
minislrabit tgropler seipsum? fS. Chrysoslomus, in 
lattl.) L'homme tient ainsi à tout : il est la ehalne de com- 
munication entre tout ce qui existe, l'intermédiaire de la 
Diviaite et des ereatmes inlérieures. L'animal, la plante, 
demeurent eirconscrits dans leur sphère ; la notre embrasse 
l'unieers par les différentes nations «lu globe et par cette 
communication universelle qui s'enlretient parmi elles 
l'aide {les langues, des besoins mutuels, des transaclions du 
commerce, de l'industrie, et la propagation {les l,mi)res : 
nous sommes ainsi devenus l'drue du monde thysique. Quels 
animaux peuvent disputer à l'hum.me sa suprematie? Un 
animal de cinq pieds donne la loi aux puissantes baleines 
et fait ageaouiller l'eh.plhant devant lui ! Sa superioriIé est 
telle sur les brutes qu'il leur est plus avantageux de s'en faire 
oublier, comme les insectes, que de lui résister comme le 
lion. 
Si nous étudions sans préjugé la conformation interne et 
les formes exterieures de l'homme, il ne nous apparaltra 
que peu favorisé. Il n'est en effet poursu d'aucune des 
armes dclensives et offensives que la nature a distribuées 
d'autres êtres. Sa peau nue est exposée à l'drdeur brù/ante 
du soleil comme à la froidure rigoureuse des hisers, tandis 
que la nature a protegé d'une écorce les arbres eux-mèmes. 
La longue fdihlesse de notre enfance, notre assujettiseamt 
à une foule de maladies dans le cours des figes, Finsuffisanee 
individuelle de l'homme, l'intemperance de ses appétits et 
de ses passions le trouble de sa raison et son ignorance 
originelle, le rendent peut-/tre la plus misérable deg er.éa- 
turcs. Le sauvage traine en languissant sur la terre une 
longue carrière de douleurs et de tristesse. Victime des Cé- 
ments, il ne jouit d'aucun avantage sans l'acheter au prix de 
ses travaux, et demeure en proie à tous les hasards de la 
fortune. Quelle est sa force devant celle du lion, la rapt- 
{lité de sa course auprès de celle de l'dan ou du chamois? 
A-t-il le sol élevé de l'oiseau, la nage du poisson, l'odorat du 
chien, l'unie du lièvre, l'«.il perçant de l'aigle? S'eno- 
gaeillira-t-il de sa taille auprès de rélépbant, de sa dex- 
tërite en présenee du singe, de sa légèreté près de la gazelle? 
A-t-il la magnilicence du paon, la soix rëlodicuse du r.h3utre 
{les bois? Chaque ëtre fut doué de son instinct., et la sage 
Providence à pourvu aux besoins de tous; elle a donné des 
serres eroelmes, un bec acéré, des ailes sigoureuses à l'oi- 
seau de proie; elle arma le quadrupède de denB, de cornes 
menaçantes; elle protëgea la lente tortue d'un épais bou- 
clier ; elle enseigna à tous les ètres leurs merveilleux instincts 
de conservation. L'homme seul ne sait rien, ne peut rien 
sans l'éducation ; il lui faut péniblement enseigner à 
à parler,  bien penser; il lui faut de longs labeors pour 
surmonter tous ses besoins; la nature ne nous iustruisit qu'à 
souffrir la misère et nos premières voix sont des pleurs. Le 
voil& gisant à terre, tout nu, pieds et poings garrottés par 
des landes, cet animal superbe, në pour commander  tous 
les autres ! il gémit, on l'emmaillotte, on renehalne; on 
commence sa sic par des supplices, pour le seul crime d'dire 
né. Les animaux n'entrent point dans le monde sous de si 
euels auspices; aucun d'eux n'avait reçu une existence aussi 
fragile que l'homme; aucun ne conserve un orgueil aussi 
démesuré dans l'abiectiou ; aucun n'a la superstition, l'ava- 
rice, l'ambition, la folie et toutes les fureurs en partage. 
c'est par ces rigoureux sacrifices que nous avons acheté la 
raison et l'empire du monde, présents souvent funestes à 
notre bonheur et à notre repos ; et l'on ne saurait dire si 
la nature s'est montrée envers nous ou plus généreuxe 
mère par ses dons, ou marâtre plus inexorable par le prix 
qu'elle en exige. 
18 



138 
L'homme est destiné à marcher debout,tandis que la brute, 
pench sur le sol, ramène ses regards avec ses désirs vers 
cette fange dont elle est sortie, et qui doit un jour l'engloutir 
tout entière : 
O eurvæ in terras animœe et coelestim jaunes ! 
Cette station horizontale ne permet pas aux animaux d'avoir 
une tète fort volumineuse, un large cerveau, ni par con- 
séquent une intelligence très-étendue. La nature a donc 
suspendu leur cr'ne au moyen d'un ligannnent cervical 
(occilto-verNbral) pour empécher la téte de retomber 
sans cesse : ce ligament n'appartient pas à l'homme. La m- 
choire supérieure des animaux à museau prolongé porte à 
son milieu un os intermaxillaire qui n'existe point chez 
l'homme. otre tête demeure ainsi placée en équilibre sur 
la colonne vertébrale droite. Pour prévenir l'aux trop ra- 
pide du sang au.cer eau des quadrupèdes, la nature a divisé 
leurs artères carotides internes en plusieurs artérioles for- 
ruant ce lacis admirable artérie.[ d«:crit par Galien com- 
me appartenant à l'homme ; mais comme il n'en était nul 
besoin dans notre station droite, il n'existe pas en notre 
espèce (ni dans l'élépbant }. Au contraire, le sang poussé 
plein canal dans nos carotides et vertébrales, s'il nous dis- 
pose à de dangereuses congestions cérébrales, nourrit en 
effet bien davantage, aandit et développe l'instrument de 
notre intelligence. Aussi, l'homme seul, à sa naissance, 
porte une ouverture au cr'ne, à cet endroit des sotures 
réunies du coronal avec les par/¢tax, an sinciput, dite la fon- 
tanelle. C'est sans doute afin que le cerveau puisse se com- 
primer Iégèrement dans l'accouchement. De mme, le muscle 
bulbeux ou suspenseur de l'oeil était imltile à l'homme. 
Le trou occipital, chez l'homme blanc surtout, est directe- 
ment placé sous le cr'ne, en sorte que celui-ci se tient en 
équilibre sur la vertèbre atlas, position unique et néces- 
saire de la station verticale. En effet, ce trou occipital n'est 
déjà plug directement central chez les singes, mais il se re- 
cule à l'opposite des m/tchoires dans les quadrupèdes d'au- 
tant plus que ceux-ci ont le museau prolongé. 
On a prétendu neanmoins que les hommes sauvages mar- 
chaient d'abord à quatre pattes, et que notre espèce était 
primitivement quadrupède, comme les enfants se tralnant 
h terre..lais dans cette hpothèse, se,terme par Moscati, 
le visage serait placé vis-h-vis le sol, la tête retomberait 
bienl6t sans soutien, le sang s'accumuierait au cerveau..Nos 
bras ne sont ni d'une longueur ni d'une force proportionnées 
à celles des jambes. otre poitrine large, la position des 
omoplates ne soutiendraient pas bien le haut du corps 
sur les bras, et le muscle grand-dentelé, qui chez les qua- 
drupèdes sert d'une sorte de sangle pour suspendre la poi- 
trine, n'est pas assez robuste chez l'homme. De plus, notre 
pied, conformé pour se poser à plat sur le sol, serait forcé 
de relever le talon, et les cuisses, trop longues, relève- 
raient le train de derriëre plus que celui de devant. Enfin, 
chez les qoadrupèdes le cœur est situé de manière que sa 
pointe repose près du sternum ; chez l'homme, au contraire, 
le péricade est attaché au médiastin, et la pointe du cœur 
descend obliquement vers le diaphragme du coté gauche; sa 
base regardant le haut de la poitrine, notre aorte présente 
une courbure différente de celle des quaprupèdes. Il suit de 
ces diverses dispositions que l'homme ne peut devenir qua- 
drupède, mais, de plus, qu'il est privé de l'avantage de na- 
ger naturellement comme le font les petits naissants des 
. chiens et des chat% etc. 
Les mains de l'homme sont évidemment organisées pour 
la prebension, et non pour soutenir le corps dans la marche. 
De longs doigts, divisés et flexibles, un pouce opposé à ces 
doigts, rendent la main humaine l'instrument par excellence 
et celui qui a créé tous les autres. Quoique très-propre à 
saisir, la main des singes est bien moins parfaite que la 
tre; leur pouce est trop petit et presque nul; les autres 
doigts n'ont ancan mouçement séparé ou indépendant l'un 
de l'autre, parce que leurs tendons moteurs sont unis et 

HOMME 
jouent toujours ensemble, ce qui n'a lieu chez nous que 
pour les doigts annulaire et auriculaire. Aussi, jamais les 
singes ne pourraient, comme l'homme, écrire ou faire des 
mouvements libres et variés des doigts. De'plus, chez 
nous le radius s'articule avec l'humCus de telle sorte que 
nous pouvons beaucoup plus tourner le bras en pronaton et 
en supination que les singes. Quelle que soit leur agilité, 
ils ne s'escrimeraient pas avec autant de diversité de mon- 
vements que le font nos bras. Mais ce qui nous confère un 
immense avantage, mme sur l'orang-outang, c'est que ce- 
lui-ci ne peut constamment marcher debout sans s.e soute- 
nir par les mains. Les muscles servant à l'aponévrose ti- 
biale s'insérant plus bas que les condyles du tibia chez les 
singes, ils ne peuvent étendre parfaitement la jambe. De 
plus, l'étroitesse de leurs muscles fessiers rend leur station 
chancelante, et leur bassin n'offre pas une base de susten- 
tation assez large pour la station droite comme chez l'hom- 
me. Le pouce de leur pied est séparé et opposé comme/ la 
main, ce qui les rend pdirnanes ou plut¢R quadr«mane; 
ce pouce a un long extenseur propre et un long abdu«teur, 
ce qui, avec un muscle plantaire très-charnu, donne à ces 
doigts des pieds de grands moyens de préheasion. Ces pieds 
dans l'orang sont pl:,cés obliquement; leur calcanéum est 
si court et leur talon relevé de telle sorte, qu'ils tomberaient 
en arriëre s'ils l'appuyaient sur le sol. Toute cette structure 
montre que les singes sont organisés pour grimper sur les 
arbres; ils ont des bras plus longs que les jambes. L'homme, 
au contraire, a le pied solide et aplati, avec un talon sa/liant 
et des c,isses fortes pour la marche. Notre basin est élargi; 
l'articulation du fémur avec l'ilCn est adaptée au moyen 
d'un condyle placé obliquement pour élargir encore la base 
de sustentation du tronc. Des muscles fessiers vigoureux et 
épais meuvent fortement les cuisses. De plus, l'homme seul 
a des mollets, muscles gastro-cnémieus robnstes, aih de 
maintenir les jambes droites ou en extension parfaite sur 1« 
terrain ; car ils sont attachés moins haut sur le fémur que 
ceux des singes. Mais, pouvant mieux marcher qu'eux, nous 
ne rimpons pas aussi facilement. 
Dans le quadrupède à station horizontale, les facultés sont 
à peu près équilibrées uniformément. Le canal médullaire 
vertébral partage avec le cerveau l'énergie motrice et sen- 
sitive. Chez l'homme, au contraire, les facultés vitales 
s'exercent principalement an cerveau, masse prédominante, 
et aux extrémités sentantes, ffotre vie de relation est bien 
plus étendue que celle des brutes, et nous sommes émi- 
nemment nerveux parmi les animaux. A mesure que nous 
voyons leurs espèces s'élever dans l'échelle progressive de 
l'oanisation, leur système nerveux devient plus volumi- 
neux, leur cerveau plus vaste et plus compliqué. L'intelli- 
gence des animaux ( non leurs instincts ) s'accrolt en généval 
dans la mème proportion. Nous voyons en mme temps les 
animaux se relever à proportion vers la station droite, de 
manière que l'attitude la plus redressée coïacide avec le 
cerveau le plus complétement d6veloppé. 
La proportion de la repasse cérébrale au volume da corps 
est en effet plus considérable chez l'homme que dans la 
plupart des mammifères. En général, les animaux de petite 
taille, les enfants, présentent, à proportion, plus de cer- 
velle que les adultes et les grands individus. Chez l'enfant, le 
cervelet est plu s volumineux, et la substance grise plus abon- 
dante que dans l'ge parfait. Dans l'homme, terme moyen, le 
cerveau fait la trente huitième partie de son corps. Les h- 
misphères cérébraux, y compris leur base, sont au cervelet 
comme six ou sept est à un, d'après Soemmering, on, selon 
Cuvier, comme neuf est à un. L'homme adulte, maigre, du 
poids de 55 kilogrammes, peut avoir un cerveau pesant tre 
kilogramme çt demi, ce qui fait environ le 35 de tout le 
corps : cette proportion surpasse celle de la plus grande 
partie des mammifères, fféanmoius, dans le singe saïmiri et 
le saï, dans le dapphin, l'encéphale.a ét trouvé plus volu- 
mineux, en proportion, que chez l'homme lui-mme. Cette 
proportion supérieure est surtout manifeste parmi les petits 



HO 
oiseaux, le moineau, le serin, etc. Toutefois, les parties qui 
diminuent le plus chez le nègre d'abord, ensuite dans les 
singes et autl mammifères, ce sont les Iobes sutCieurs, 
ainsi que les pro|ongements des corps canaetés (corpora 
striata), qui constituent en se reployant la large VOlUte 
des hémisphères cérébraux._Nous avons constaté qu'ils étaient 
deià moindres dans la race nègre que dans l'homme blanc. 
C, elui-i présente le plus grand nombre de circonvolutions, 
et plus profondes que chez les autres animaux, ce qui en 
rend les surfaces considérables; et ce rapport de leur éten- 
due semble correspondre au plus grand développement de 
l'intelligence. D'après OEiedemann, le cereau de l'orang- 
outang est distingué de celui de l'homme par sa petitesse 
proportionnelle'; car, plus court et moins haut, ses lobes 
pnsterieurs ne recouvrent déjà plus entièrement le cervelet. 
Celui-ci apparatt relativement alors plus considérable, puis- 
que les hémi.phères diminuent, tandis que la moelle épi- 
niëre, les corps pyramidaux, les tubercules quadrijumeaux, 
les couches optiques et les corps striés, conservent leurs 
proportions. Il y a moins de circonvolutions et d'anfrac- 
tuosités aussi à ces hémi»phères. Enfin, relativement à la 
moelle épinière et h la masse générale de soe nerfs, le cer- 
veau de rorang-outang est moins considérable que .dans 
l'homme; cette disproportion entre les masses nervenses et 
le centre érébral au,ente h mesure qu'on deseend l'é- 
chetle animale. De là suit cette considération, que l'homme 
rassemble pour la pensée, dans son cerveau, presque toute 
la puissance sensitive (méd,dle nerveuse), tandis que les 
brutes la disséminent dans les autres organes du corps. Ainsi, 
l'homme est destia6 à vivre beaucoup par la tte les hèles 
Far les membres et la circonférence. Donc l'homme est l'a- 
nimal intellectuel par excellence, et les suites esle¢es sont 
des tres detinés  une existence sensuelle ou toute phy- 
sique. 
Privilégié pour l'esprit, l'homme l'est moins que la plu- 
part des animaux pour les sensations : 
Nos aper auditu proecellit, aranea tactu, 
Yultur odoratu, lynx visu, simia buste. 
Enfin, il possède d'autant moins d'instinct naturel qu'il lui 
fut d6parti plus de raison. En effet, diverses espèces of- 
frent un ou plusieurs sens beaucoup plus exaltés que l'hom- 
me, mais non pas  en génêral, aussi délicats, aussi bien 
équilibrés entre eux que le sont les n6tres. Ce puissant 
odorat du chien ou du porc, ce« gotts ardenfs des carni- 
vores, ne servent qu'à solliciter leurs appétits, allumer 
des désirs brutaux ; l'ouïe du lièvre le tient en frayeur ; la 
vue presh)'te ou perçante de l'aigle ne lui sert qu'à décou- 
vrir sa proie de loin. Les autres sens des animaux, ou re- 
lativement faibles, ou inégaux cuire eux, ne donnent point 
à leurs impressions ces comparaisons harmoaiques, 
fournissent, au contraire, à notre intelligenee des idées 
plus justes ou mieux proportionnées que n'en peuvent rece- 
voir les animaux. De l'a vient que nous pouvons mettre une 
sage mesure entre nos facultés, fions apprenons l'oeil et l'o- 
reille •  discerner la beauté de la laideur, l'harmonie de la 
dissonnance..Nom instruisons l'odorat, le goret, et surtout le 
toucher, à des impressions pins fines, plus variées, plus 
délicafes que n'en ressentent les brutes, lotre intelligence 
tient les rénes pour l'ordinaire, tandis que des sens impé- 
rieux tyrannisent les animaux ; nous pensons plus, parce 
que nous sentons moins intensivement. 
C'est surtout par rapport au t o u ch er, ce sens positif et 
philosophe, que l'homme surpasse en délicatesse toos les 
animaux ; il a la peau nue, éminemment impressionnable; 
il n'est, pas aussi velu que les singes. La main de l'homme, 
privée de poils, offre de i puissants avantages pour la per- 
fection du tact et l'exactitude des formes des objets (m6me 
pour les aveugles) que le philosophe Anaxagore et ensuite 
ltelvétins n'ont pas balancé à lui rapporter le bienfait de 
notre suçrématie .ur tous les animaux. ons voyons véri- 
tablement les personnes à peau fine plus adroites et plus 

IIIE ! 
spirituelles, en général, que les individus épais (pachyder- 
mes), encrottés d'un cuir calleux ou très-velu. Nous de- 
vons  cette exquise délicasoe une plus grande débté, 
it paroe que nous éprouvons des caress de volupte pire 
viv ou nous subigons d douleurs plus cut que 
les autres animaux. L'homme ci litsC amolli dans les déoes, 
est suout moins endurci aux maux du corp qoe les b- 
t et que le uve, expos6 à toutes les rigueu d climat. 
C'et pournt de oette infefiorioE relative que nous tirom 
tonte notre sup6riorité et notre perffibilité. Si nous étions 
forts dès nos jeunes ans, nous n'aurions nul intcrt à nous 
asuplir, nous e prendrions nul soin d'ch lier; nous re 
semblerions au qoadrupe, qui d ses premiers jours 
s'éloigne data les campagnes, devient bient6t pubère, pu 
engendre, et meu dans un court paoe de ie, sa 
laisser de traoes de son existence sur la terre. C'est donc la 
loneur de notre aiblse enfarine qui nous rend docfles 
et pliabl à tou[e strucfion, qui reculant la puberté pro- 
longe nos a6es, et roemble en nous les trérs d'une 
dtrieuse 6duoetion. 
Ce qui prouve encore mieux que nous sommes destinés 
à la ie çiale, c'est que la nature en nous attribuant la 
parole l'a refusée aux autres mammifères, jusque 1 qu'elle 
en 6te mème la possibilité à l'orang-outang par une stru 
ture particulière de son laq-nx. Sans dou 1 animaux 
pourvus de poumons, ayant d voix et des cris vers, 
peuvent mifcster leurs affections d'amour ou de ¢oloe, 
de terreur ci de joie, eto; cependant oe langue, trèIimité, 
n'exprime guère que des actions toutes physiques. On ne 
saurait dire que 1 mots aiculés qu'apprennent à 
noncer les perroque ou d'autr oiseaux ent pour eux 
la moindre signifioetion morale; aussi, n'y comprenant rien, 
ils ne les trsmettent point à leurs petits. L'homme est 
donc seul investi de l'immense prérogative d'attacher un 
sie à chaque id, de la conserver, la commuquer à son 
semblable, la tr»mettre h sa pontCite. 'oilà le nouvu 
lien resserrant les membres de la famille, et bient6t de la 
nation. L'homme alors sait imaginer d dseins, com- 
biner d entrepris bien autrement élen,lttes et variées 
que cees des associations des fourrais, des cto; espes 
aant sans doute quelque langage de sites ou de gestes 
pour s'enlendre data les inr communs de leurs 
coudes destinées. 
Ainsi, la nature a développé en nous, par la parole et 
la communioetion des idées, e plus complète estence. 
Elle nous confia le libre arbitre de l'independance intellec- 
tuelle, tandis que la brute est esclave de son stinct. Soe 
illustre apage éit le rsult néoessaire de la supériorite 
de raison, et cette prééminenoe dépend de notre domina- 
tion sur toutes les créatures. Cell-ei, manquant de 
telligenoe, avaient bein d'un guide intérie qui leur 
diett tout ce qui est indispensable ì leur subsisnoe, à 
leur propagation sur la rre. Plus les tres sont faibles et 
d'une cue existence, comme les Justes, plus fl leur 
flait un instinct développé et merveilleux, une soe d'ins- 
piration ou de lumière de la Divinité pour 1 diriger dans 
la vie. Au contraire, l'homme ayt reçu un rayon d'es- 
prit, a é le seul émcip6, comme l'aé de toutes les 
.ertures. Donc, plus il cultive le champ fertile de  rai- 
son; pire il seconde les desseins de la nature ; elle lui ins- 
pira la curiosité, le d6sir de s'instruire, et lui ouvrir les 
port de s sanctuaire. 
Par la conformation de soe viscs et de ses organes de 
mastioetion, l'homme semble tenir le milieu entre loe i- 
maux herbivores (ou fruvor) et les carnivores. Ses 
dents et la forme de n estomac sont alogues à ceux de 
la famille des singes.  bouche moins grande, les muscles 
crotaphites et masseters moins robustes, les mchoires 
moins allonges, leur articulation moins seée que chea 
les oernassiers, montrent que nous ne devons pas vivro 
uniquement de chair. Aussi, nos den canin nt moins 
longues, nos molaires téfieur moins tuberculens que 
18. 



dans les carnivores..Nos molaires plates et qt,atre inci- 
aires, comme chez les singes, forment la partie frugivore 
de notre dentition, et l'on établit qt,e dans le nombre de 
nos tren4e-deux dents, la proportion carnivore est comme 
ht,it, et l'herbivore comme douze. 1otre estomac est sim- 
ple : il porte, outre son appendice vermiforme, tln coecum 
phls grand que celui des carnassiers, mais moins déve- 
loppc que ceh,i des rongez, fs. Les intestins des carnivores sont 
courts et Cruits, ceux des herbivores très-longs et larges; 
cetzx de l'homme tiennent également le milieu entre les uns 
et les autres. Toute cette confo[wation intermediaLre ma- 
nifeste que, dans la rigueur, nous ne sommes pas capa- 
btes de nous sustenter uniquement soit de végtaux, soit 
de matières animales, ainsi que l'ont affirmé des philoso- 
pi,es. Il s'ensuit donc que nous devons vivre de ces deux 
clames d'aliments. Nous préférons dans les ardeurs de 
l'etC et sous les cieux des tropiques, le régime vég,.tal ra- 
fraichissant à la c!,air, trop nourrissante et putrescible; 
mais celle-ci convient mieux en hiver et dans le« contrées 
glaciales, Iorsqu'un froid vif excite l'appétit et exige une 
forte restauration vitale. Sans doute, quand on dit que 
l'homme est omnivore, on ne prétend pas qu'il puisse se 
nourrir de terre glaise, comme Gumilla, 3I. de I:lumboldt 
et d'autres voyageurs l'affirment pour divers sauvages : 
c'est souvent par faute de ivres, pour lester l'estomac, 
comme ont aussi par besoin les loups de nos contrées en 
hiver..',lais depuis l'Esquimau et le Kamtschadale, vivant 
de chair de phoque, ou de lard rance de baleine, avec des 
poissons gelés ou pourris, jusqu'au délicat Hindo,, sub- 
sistant de bananes, de dattes Sllcrées, de ëgetaux aro- 
matiques, et se désaltérant avec des SOl'bets parhlmés, 
combien de nuances dans les nourritures et les boissons 
chez toutes les faces humaines! L'homme, ci,ci de tous 
les ëtres, de, ait avoir droit sur tous; il goùte en quelque 
manière toute la nature. Composé de tout, cependant il 
préfère les substances les [Aas elaborées des deux règnes 
végétal et animal, comme si le corps du premier des êtres 
ne devait se con, poser que des mateflaux les plus delicats 
ou les mieux perfectionnés de la création. Il apprend ainsi 
à connaitre tout, puisque son alimentation devient encore 
un sujet d'etude pour lui, tandis qu'un instinclt brute 
guide l'animal vers son unique ptu,e. 
Le réme tout pythagoricien, ou herbivore, si vanlé 
par des pl,ilosophes comme primitif dans notre espèce, ne 
pourrait pas bien soutenir la vie, suioEout parmi nos con- 
tfCs froides, ainsi q,le l'ont montré les pl,ysiologistes. 
Le reme tout animal deient évidemment malsain, meur- 
trier et i,utride sous de. cieux bralants, et l'instinct nous 
uide admirableme,t à cet egard. Les enfants aiment 
plut0t les fruits que la chair, et dans nos maladies, qui 
sont un letonr ers la tature, nous appetons les suhstances 
végqtales ; il est certain que nous sommes plus li'ugivores 
que carnassiers, et la  te trop animalisce, si elle rend ro- 
buste, actif, cruel ou belliqueux, est plus maladive : le 
corps devient plétl,orique, les humeurs sont putrescibles. 
Le régime vegetal tempère davantage le caaetëre, mais 
rend timide et faible, comme on l'obselve en comparant 
le delicat Hindou, le Brahme, s'abstenant de tout ce qui a 
eu ie, avec l'Anglais, son dorainateur, gorgé de roastbec| 
et de in de Porto. L'ichtbyophagie, chez les peuples ma- 
,itimes, nourrir moins que la créophagie; aussi les pois- 
sons passent pour du nzaigre dans toutes les religions et 
dans les carèmes; leur usage, outre quïl abonde en sucs 
muqueux dilficiles à digérer, parait disposer aux maladies 
cutanées. 
otre espèce ayant aussi les viscères digestifs plus dé- 
licats que les autres animaux, fait cuire et prépare ses 
aliments; par là elle s'est encore adoucie et civilisée. 
Quand Homëre peint un homme féroce, il l'appelle cru- 
divore» parce que la ci, air crue annonce «les viscères ro- 
bustes, les appétits sanguinaires d'uu ours ou d'un lion. 
Au contraire, un estomac dcbile, qui a besoin d'aliments 

HOMME -- ItOMME DE BIEN 
Iégers, cuits et assaisonné», indique un ëtre délicat, s- 
sihle, et par 1 mème intelligent. 
Précisément à cause de sa nudité ori0nelle et de la dé- 
licate sensibilité de sa peau, l'homme devait se vgtir; 
mais en apprenant " se garantir contre l'inclémence de 
l'atmosphère, il sut bient6t franchir les limites de tous les cli- 
mats, et il devint le possesseur du globe. Sans doute cette 
nudité primitive établit notre berceau sous les chaudes 
régions tropicales, avec les singes, nos anciens compa. 
triotes, et à cause de la communauté de leurs haltamde 
hugiçores. 5lais notre constitution est bien plus flexible, 
puisqu'elle se plie à tous les genres d'alimentation, et 
qu'elle a reçu l'usage du feu pour réchauffer nos membres 
et cuire nos nourritures. D'ailleurs, l'homme se prépare, 
mieux que d'autres animaux, des habitations : soit qu'il 
descende avec le Sibérien, pendant la saison hiberna!e, 
dans ses iollrtes enroules sous terre; soit qu aec les Ga- 
libis de la Glu, are, les Papons de la ffouvelle-Guinée, il 
suspende sa demeure à des branches d'arbre, ou balance 
son hamac sous le feuillage des pins de la Yirnie, pour 
éviter l'humidité et l'approche des serpents ; soit qu'il se 
contente, comme le nègre, d'un ajoupa de roseaux ou de 
feuilles de palmier; l'homme de la nature trouve encore 
grottes dans les rochers ; le Groenlandais s'abrite sous les 
immenses carcasses des baleines après en avoir d6vor6 la 
chair. L'enfant d'Ismael, le bedouin, tran,porte sa lente 
sur ses chameaux dans ses solitudes, et les 31ongols errent 
dans les steppes de la Tatarie avec leurs "kibitkas, ou cba- 
flots, comme les anciens Scythes hamaxobites et hippo- 
molgues; car les jeunes Kalmoulks se suspendent à la ma- 
melle de leurs cavales. 
Il y a loin encore des palais de cartou peint des Jap0- 
nais aux monuments des cités civilisées. Les ltiments 
fixes, ou en pierre, les plus remarquables dans l'Inde, 
l'Orient, l'Egpte et l'Europe, semblent n'appartenir qu'a la 
race lutte ou cancasique, avec les tcmples et les pyrat'0k]es 
gautesques qui bravent les siècles. Ce n'est aussi que 
cette grande famille et les nations mongoles méridionales 
d'Asie qui ont b,iti des villes populeuses et constitué de vas- 
tes empires sur la terre. Aidé de ces moyens de s'abriteret 
de se couvrir, l'homme s'est avancé jusque sous les glaces 
polaires; caron y trouve des faces à cheveux noirs et àpeau 
brune, comme l'iris de leurs )'eux. Il a trainA en esclavage 
le chien, son docile auxiliaire, par tout le globe, et avec 
lui il a dompté les plus fiers animaux. Par ses vgtements, 
il a su conserver la délicatesse de sa peau et la sensibilité 
du tact, plus que le nêgre nu ou que l'Américain endurci. 
La civilisation, la vie cita,tine, aidee de toutes les comrao- 
dités du luxe, ont institué, mème dans les villes du .ord, 
un climat factice parmi de chaudes Imbitalious à tel point 
que les Russes opulents d'Archangel ou de Tobolsk devien- 
nent aussi promptement pubères et presque aussi délicats 
que des Italiens. 
Les travaux les plus récents des anatomistes et'des pbysio- 
logistes ont presque complétement établi l'unitA de l'eSl 
humaine. Mais cette unité une fois admise, il est incoate- 
table qu'il faut reconnaitre dans l'espèce ho»troc plusieurs 
r a c es bien distinctes, dont nous au rons à décrire les carac- 
teres particuliers dans nn article spécial. J.-J. 
HO$13,1E (Droit .feodal). loye= Fut  Ho¢£ et 
FÉODALITÉ. 
ltOMME D'AFFAIRES. Sous l'ancien r6me, tout 
indi-idu employé dans les affaires de finance, attaché anx 
fermesdu roi, aux gabelles, à la perception des contributions, 
était appelé homme d'affaires. De nos jours ce nom est de- 
ven u synonl me d' a g e n t d' a f fa i r e s, 
HOMME ])AILIES se disait anciennement d'un 
valier arme de toutes pièces ( voye: CvAeam, tome 
pages 72-723 ). 
IIOMI, IE DE BIE'. Roubaud définit l'homme de bien 
celui qui passe sa vie dans la pratique du bien ou l'exercice 
des bonues œuvres. Ce nom.. "llli répond si exactement à cetle 



HOMME DE BIEN -- 
expression latine homofru9i, indique un homme estimable 
de tout pot.ne, de bonnes mœurs, de bonnes ,riel,nations, 
juste, probe, attaché à sa parole. « On dispute trop, a dit un 
moraliste, quel est l'homme de bien au fie,, de le devenir. ,, 
Si vous lisez dans ['ëpitaphe 
De Fabric% qu'il fut Ioujours homme de bien, 
C'est une faute d'orthographe ; 
Passant, lisez : hmrne de rien. 
Ho»me de bien, pris ironiquement, est la plus sanglante 
injure qui puisse ètre adressée/ quelqu'un, t;'est ainsi que 
dans TartzoEe Orgon exl,ale tout son mépris pour l'hypocrite 
détnasqué. 
iiOMME DE COULEUR. Vo/e--,3IuLA'rRE. 
iiOMME DE LETTRES. Voulez LETrltes. 
ilObiME DE LOi. Celui qui fait profession d'inter- 
prëter les lois, jurisconsulte. 11 s'emploie aussi quelquefois, 
surtout au pluriel, pour désigner les gens de justice, les 
ofiiciers ministeriels près des tribuqaux. Sous la lqemière 
republique française, c'était le nom qt'on donnait aux 
hommes qui occupaient près des tribunaux pour des clients. 
Ils remplaçaient les avocats et les avoues, dont les pri- 
 ilAées avaient 6t6 abolis. Ce ter, ne ne s'emploie plus guère 
aujourd'hui ; mais le peuple le donne encore a tous ceux qui 
s'ooe,pent d',flaires judiciaires, qu'ils,lent ou qu'ils n'aient 
pas quai,te. 
HOMME DS BOIS. ;bt/e'- 
HOMME D ÉTAT. Voge-- É,t. 
HOMME bItO,/NEUR. Diderot définit lhomme 
d'honneur celui qui suit rigou,eusement les lois et les usages 
de la société. Roubaud le dëlinit avec plus de raison celui qui 
se tait remarquer par la hauteur, la rem,etc et la dëlicate»se 
des sentiments incompatibles avec toute idée de bassesse. 
Homme d'honneur se dit principalement d'un homme ar- 
t, chC sa parole, fidele à ses promesses, incapable de la,re 
une action avilissante. Avouons que souvent l'orgueil, le 
respect humain, les préjugés ont beaucoup de part aux qua- 
lités de l'homme d'honneur. 
IIOMME BU MONDE. t'oge: l',Iotn. 
HOMMEGRAND., GKAND HOMME Vogez Gax,u. 
HOMME HONXETE, HO.NNE't'E HOMME. Voyez 
Horie. 
HO3LME HOXO[tABLE. Voyez HO.0aAL. 
HOSLMES MAItLXS ètres fabule,ex crees par l'ima- 
nation des anciens, qui les dësignaient encore sous le nom 
de t r i t o n s, comme ils designaient des espèces de femmes 
marines sous le nom de si renes. Cette fable, que dans son 
Telliamed De Maillet chercitait encore a accrediter h la fin 
da dix-sept,crue siècle, tirait sans doute son o,iine du la- 
mantin et du dugong, mam,nifëres amphihies, aux- 
quels des nageoires en forme de mains, des ma,nelles pecto- 
raies, des pieds à l'aide desquels ils portent leurs petits, un 
mulle entoure de poils plus ou moins semblables a une che- 
velure, donnent une ressemblance plus ou moins éloignée 
avec l'hume. 
HOMOCENTRIQUE (du grec 6téç, semblable, et 
vov, centre), c'est-a-dire qui a le mème centre. Ce tnot 
est s)'nonyme de c o n ce n t r i  u e, qui est pins genérale- 
ment en usage. 
HOMOEOPATItlE ( du grec 6gotov, semblable, et 
eo;, souf[rance). C'est e nom donné à la nouvelle t,etl.ode 
n, edicale dont H a h n e m a n n est l'auteur. La medecine a pos- 
sédé et possède encore bien des sstèmes; mais tandis que 
ceux-ci reposent sur une hypothèse plus ou moins ingénieuse 
ou vraisemblable, la méthode d'Hahnemann al, prëtention 
d'ètre fondée uniquiment sur l'expérience; la vérité est 
qu'un tait expérimental en a Até l'origine, que l'expérimen- 
talion préside à tous ses procédés, et que, sans l'expérience 
constamment invoquée par ses partisans, le raisonnement a 
Friori tendrait à la faire rejeter comme absu,-de. D'un atre 
c0té, pourtant, comme nous le montrerons plus loin, l'ho- 
moeopatlqe présente plus d'un Irait de ressemblance avec la 
wcll,ode d'Hippocrate. 

HOMOEOPATHIE t 4 ! 
Quoique l'homoEopathie compte déjà plusde soixant ans 
d'existence, elle n'est connue en France que depuis l'ëpi- 
alCie cholérique de 1832 ; mais, il faut l'avouer, elle a fait 
dans notre pays, comme dans toutes les rëgions civili»ée de 
l'Europe et de l'Amérique, de rapides progrès ; et elle a su se 
concilier l'opinion d'une minorité importante, malgré l'oppo- 
sition que n'ont cessé de lui faire les corps savants, gardiens 
naturels des sa,ries traditions de la science. Témoin impartial 
de l'intérët qui s'attache depois quelques années/ la quel- 
tion de l'homoeopathie, et désireux d'exposer sans inexacti- 
tude nne doctrine à laquelle nous sommes resté (',ranger, 
nous avons d0 emprunter quelques documents essentiels à 
nn confrère instruit, disciple zéle et fort convaincu d'Hahne- 
mann, au D' Escalher, dëj/ connu par plusieurs travaux 
judicieux de medecine homoeopathique. 
C'est en traduisant l'article tïumqmna data la Matière 
mddicale de Cuilen qu'Halmemann, peu satisfait des expli- 
cations diverses sur l'action thérapeutique de cette substance, 
voulut en essa)er sur lui les effets; grande f, at sa sur- 
prise quand il se sentit pris de froid, puis de chaleur, puis 
d'une sueur ahondante, en un mot d'une suite d'effets 
analogues à un accès de tievre intermi trente. Cette exp,_'- 
rience fut pour lui un trait de lumière : il peusa que puis- 
que le quin,luina, remède spéciliquedela lièvre intermittente, 
était susceptible de produire un accès analogue à cette lièvre, 
tout medicament capable d'engendrer un certain ordre de 
phénomènes morbides dan l'economie serait peut ëtre des- 
tiné à guérir la maladie presentant un ensemble de sympt6- 
mes aalogues. Cette  ue, qui n'ëtait encore qu'une h) Ix, thèse, 
lui persuada d'entreprendre une suite detudes / la fois 
phsiologiques et cliniques sur un certain nombre de me_Mi- 
rament% et ce ne fut qu'aprës plu-ieurs années de ces expcri- 
mentatons diveriliees sur des individus de tout àgeet de 
toute condition, qu'Hahnemann se crut le droitde présenter 
la theorie des»emblabtescumme l'unique loi de la thérapeu- 
tique. Cette loi peut se Iormuer ainsi : Tout vrai rentëde 
doit susciter dans un homme jouissant de sa saute 
une maladie analogue à celle ue le remëde doit 9uerir, 
et reciprouement. 
Du reste, des recherches multipliées, que sa vaste étudition 
facilitait, lui permirent de corroborer es expériences person- 
nelles par des faits innombrables empruntes/flapratique des 
auteurs ses devanciers et souvent mème/ la thérapeutique la 
plus routinière : en voici quelques exemples : la rhubarbe, 
q,,i / haute dose détermine la diarrhée, a petite dose l'ar- 
rète. Boulduc l'aait obseré. Le séue engendre ou guérit 
descoliques, selon les conjonctures et selon la dose, remar- 
que Detharding. Peu de tabac fait éternuer, beaucoup de 
tabac arrète l'ëternuement. L'eau-de-ie et les épices, qui 
réchaufl'ent momentanement Ch corps refroidi, arrètent 
pourtant la sueur chez un homme echauffe. A haute dose, 
la pomme épineuse et la jusquiame produisent le délire, et 
cependant les mèmes substances ont plus d'une fois guet, la 
manie : consultez Stoerck et Fotherll ! Le mercure, ce spe- 
cifique de la syphilis, a plus d'une lois fait renaitre ou aggravé 
cette maladie en ceux à qui on l'avait administré à comr- 
temps. L'euphraise et la rose produisent la rougeur des yeux, 
s'ils n'y remédient : Lober et 31urray l'attestent. Leseauxsul- 
fureuses calment ou guérissent certaines maladies de la peau, 
et pourtant les hommes saius qui s' plongent leur doivent 
souvent une eruption comparable à la gale des ouvriers e 
laine ( la lOtssde ). Les eaux ,ridules gazeuses «étern,inent 
fréquemment de vives douleurs  ets la vessie et vers leste'us, 
souffrances analogues à celles de la gravelle; et pourtant 
ces mèmes eaux sont conseiliées dans la gravelle et la pierre. 
Ce sont i des fdits dont nous alfirmous l'exactitude. Quoi- 
que la foudre ait souvent orWle mouvement et la parole à 
ceux qu'elle avait fi'appés, néanmoins l'é'ectricite a plus 
d'une lois remédié à la paralysie et aux rhumatismes. La 
clematite a guéri des ulcères, bien que les g,eux de Telëde 
etde Seville se servent «lu suc de cette plante pour exco- 
rier la peau et simuler des p!aies. Efin l'opium constipe, 



et pourtant il remédie  la colique des peintres, laquelle 
con,iste surtout dans une extrême constipation .... Et mille 
autres raiL« de même nature, dont la liste serait lastidleu. 
De tous ces laits, entre eux si contrastants, Hahnemann 
aurait pu inférer que la prescription des médicaments 
clame une extrême circonspection et de longues études; il 
aima mieux y voir la preuve de l'excellence de sa doctrine. 
Toutefois, i'adoption de ses idées rencontra de grands obsta- 
¢les. Au milieu de voyages et de tourments, Hahnemann n'en 
poursuivit pas moins ses travaux. Aidé d'un petit nombre 
d'élèves dont le noyau se grossit peu à peu, il fit mat- 
citer de front l'édification de la matière reCis-aie, c'est-à- 
dire i'expérimentation physiologique, la pratique de la mé- 
decine, l'enseignement tlienriqe et clinique, comme aussi la 
rédaction d'ouvrages et de mémoires cousidérables. Ses élèves 
ont tortuCes disciples ì leur tour, mais sous la hautedirec- 
tion d'Hahnemann lui-même, tant qu'il a vécu. L'Allemagne 
s'est bientt)t trouvée comme inondée d'homoeopatlies : de la le 
flot s'est répandu en Suisse, en Russie, en ltalie, en France, en 
Angleterre, en Espagne, aux États-Unis, au Brésil, au Mexique. 
A Vienne, ì Augsbourg,  Londres, des lg'»pitaux ont été et 
sont exclusivement consacrés an traitement homoeopathique. 
Une chaire d'homoeopathiea été creée à la Faculté de Vienne 
par ordre de l'empereur ; le roi de Prusse et l'empereur 
du Brésil ne se sont pas montrés moins favorahles ì cetle 
doctrine. En France même, où la tolérance n'a été escortée 
d'aucun encouragement, l'homoeopathie n6anmoins grandit 
chaque jour dans l'opinion. 
L'exposition qui suit donnera une idée suffinte de la doc- 
trine homoeopathique. Êtant posé ce principe expérimental : 
Il faut combattre une maladie avec la substance qui est sus- 
ceptible de produire chez une personne en bonne sant les 
phénomènes les plus analogues aux symptOmes de cette 
maladie, il en découle pour le médecin l'obligation conscien- 
ciense d'entreprendre les opérations suivantes : t ° expéri- 
tnenter sur des personnes jouissant de la santé les diverses sb 
stances de la matière médicale; 2 ° lorsque se prescrite un 
malade, noter avec soin les divërs symptOmes de son affec- 
tion, et chercher dan la inatière médicale quelle et la sub- 
stance dont les effets physiologiques représentent le plus exac- 
tement les symptOmes notés ; 3* préparer et adminirer le 
médicament qui a été choisi de la manière la plus convenable 
pour le complet développementde son action thérapentique. 
La substance médicamenteuse doit tre choisie dans son état 
de pureté et d'intégrité le plus parlait : en poudre, si la sub- 
stance est insoluble ;" en teinture mère, si la suhslance est 
soluble. Cette teinture est le résultat d'un mélange ì parties 
égaies d'alcool avec le corps méAicamenteux : ici se rangent 
tous les sucs végétaux, qui doivent autant que possible tre 
extritsde la plante fralche et sur place. Jamais ces médica- 
ments ne sont mélangés; ils peuvent ëtre pris quelquefois 
d'une manière alternative. Il est rare quela suhstance mère 
soit ainsi administrée ; presque toujours les homoeopathes 
lui font subir avant de l'employer la préparation décrite 
par nn de nos collaborateurs ì l'article Gonv, s'il s'agit 
d'une poudre. S'il s'agit d'un sue ou d'une teinture, on dé- 
laye une goutte successivement dans plusieurs fois cent 
gouttes d'eau distillée; et tous les mélanges successifs, nom- 
més dlztions, amoindrissent la dose du remëde : au bout 
de trois opérations, la différence est d'un million de par- 
celles. Dans ce cas, l'agitation de la liqueur dans son fla- 
con remplit le même effet que la trituration de la poudre; 
et m6me Hahnemann recommande de ne pas trop remuer 
la dilution, dans la crainte que les billionièmes ou les 
cillionièmes de grain du remède ne deviennent, dit-il, trop 
actits I Quant à l'administration des remèdes homoeopathi- 
qu¢, elle a lieu sous la forme de poudre, de mixture 
aqueuse ou de gl0»bules ayant la ténuité des graines de pavot. 
Cette partie de la doctrine d'Hahnemann on de sa pharma- 
cologie, les doses dites infinitsimales, ont attiré sur la 
méthode elle-mëme le plus d'attaques sérieuoes et aussi de 
quolibets, Quevoulez-vous, disent leshommes les plus sensC, 

HOMOEOPAItr 
habitués à prescrire  médicament à grandes doses roussi. 
res, et qui ont reconnu das ces doses nne activité proportion- 
nelle à leur élévation, que voulez-vou. que produisent de 
quantités inappréciables de suhstance médicamenteuse ' Et 
mëme ces prétendues dilutions renferment-elles en réalité 
qoelqu parties de la substance ? On trouve dans l'Organon 
les réponses faites d'avance par Hahnemann aux ohjectious 
qui peuvent lui être adressée.s; d'ailleurs i'expérience clini- 
que est là qui, si elle est bien établie, prévaut contre tous les 
raisonnements. D'un autre c6té, des Cudes physiques et phy- 
sioloques sont venues apporter .des secours à la pharma. 
cologie homoeopatique. Maerhofer a trouvé au microscope 
des molécules de platine dans la dixième dilution, d'or dans 
la onzième, d'argent lans la douziëme, de mercure dans 
la nenvième, de fer dans la huitième, d'étain dans la 
quatorzième; aant démontré que les parcelles de métal 
se divisent de plus en plus, il en a indiqué la proportion 
par des chiffres. Spallanzani, en appliquant avec la pointe 
d'une aiguille une goutte de cinquantieme de ligne d'un 
mélange de 1 onoes d'eau et de 3 grains de sperme surdes 
.oeuls de grenouille, a féconde ces œUfS aussi promptemeat 
qu'avec du sperme pur. Arnold, renouvelant ces experiences, 
a pu produire la fecondation avec une troisième dilution, c'est- 
ì-direavec une liqueur renferment un millionième de 
sperme; il aéalement produit deuxpusttdes vainale bien 
caractrisées par i'inoculation d'un mélange d'une partie de 
vaccin avec cent parties d'eau. 5I. Bouchardat n'a-t-il pasdit 
ì l'Académie des Sciences : « Les préparations arsénicales, à la 
dilution d'un millième, empoisonnent les égétaux; les pois- 
sons éprouvent de même l'action toxique de ces snbstances .... 
Un milligramme d'iodure de mercure, dissous dans 20 litres 
d'eau, a suffi pour tuer en quelques secondes les poissons 
que l'on a piongés dans cette dissolution ; cette proportion 
e tellement faible, un rnllionime, qu'elle échappe aux 
réactifs chimiques les plus sensibles. Les poissons sont 
comme loudroyés dans de l'eau contenant un milliètne 
d'essence de moutarde ..... ? • Les médecins homoeopalles 
peuvent donc dire avec quelque raison que si les doses 
infinitésimales ont produit des effets toxiques, elles peuvent 
aussi bien produire des effets médicamenteux. J'ajouterai 
ici que l'on comprend a priori la necessite d'une dose plus 
faible pour une medication qui agit dans le sens mëme de la 
mal adie ; en poussant en quelque sorle la maladie dans ieseas 
où elle marche, le médecin doit craindre deFaggraver. 
Quelques mots sur le réme homoeopathique, ì proposda- 
quel il est bon de dire que les disciples se sont un peu rel,- 
chés de la sévérité du martre. Comme les médicaments ho- 
moeopathiques sont toujours administrés à doses trës-fai- 
bles, Hahnemann prive ses malades de toutes les substances 
pouvant exercer sur eux une influence medicinale plus puis- 
sante que celle du remêde administré. En conséquence il 
leur défend le thé, le café, la biêre, les aromates, le punch, 
le chocolat, les parfums, les bouguets defleurs les prepa- 
rations dentifrices, les sachets odorants, les patisseries, les 
glaces sapides et lesépices, les légumes herbaoes, les viandes 
faisandées, le fromage fait, les aliments ai, les viandes 
de porc, d'oie, de canard, et le veau trop jeune. Le sucre 
et le sel sont aussi prohibés, de même que les v,ementsd 
flanelle, le grand feu, et toutes les voluptés ainsi que les 
passions, • Car, dit Hahnemann, les doux sons de la fifre 
qui, de loin et dans le silence de la nuit, disposent un cr 
tendreà l'enthousiasme, en vain frappent l'airquand ils 
sont accompagnés de cris et de bruits discordante. » 
Pour être complet, j'ajouterai qu'Halmemann, aband- 
nant le terrain de Pxpérieuce pour rentrer dans celui de 
Phypothèse, qu'il reproclie fi ses devanciers, met la sétie 
des maladies chronigues sous la dépendance de Irois virus : 
la syphilis; la sycose, ou principe des umeurs v6gétantes 
ou des ries; et la psore, principe de la gale; la région des 
deux premiers virus étant [ort ¢irctmscrite, o voit qudle 
part considérhle d'influence a été donuée à la psove lmr le 
père de l'homoeoIatliie. Mais cette théorie» oui est en dehOrS 



• nuur.ur_« £HIE 
de la méthode, n'est pas admise par la phvpart des ho- 
moeopathes, même purs, et il n'en est resté pour eux que ce 
fait expérimental de la kéquente analogie des maladies 
chroniques de toute espèce avec les affections cutanées. 
Revenons en terminant sur les ressemblances qui nous 
paraissent exister entre la méthode d' Hi p p o c r a t e et celle 
d'Hahnemann. Hippocrate, il est vrai, donne le précepte 
de guérir par les contrair($ (eontraria contraries curan- 
tur ); mais cet illustre médecin affirme ailleurs que le vo- 
missement se 
curatur ), Comme tous leshommes de génie qui ont beau- 
coup écrit, PJppo¢rate semble quelquO'ois se contredire. 
Mais ce qui prouve que son opirdon diff'ere peu de celle 
d'Hahnemann, ce sont les lignes suivantes, que renlerme 
un de ses onvr'ageî : « Il y a des maladies dont la cause et 
le remède sont de mme nature ou homogènes. » Or, voyez 
combien ce mot homogène est proche parent du mot ho- 
oeopathique ! Mais reprenons les choses de plus haut; 
sans pr/qendre qu'Hippocrate ait nettement pressenti la doc- 
trine d'FIahnemann, établissons du moins que ce dernier, 
,ui que Port considère comme méconnaissaet les principe 
de l'art, n'a, au contraire, rien avancé qui ne puisse par- 
faitement s'adapter aux fondements éternels de la médecine 
hippocratiqne. Comme Ilippocrate, Hahnemann admet un 
principe vital (enormon), lequel, selon lui, préside avec 
intelfigenee, et dans un but de conservation, à la marche de 
tonte maladie : c'est là l'équivalent dece qu'Hippocrate ap- 
pelle nature (ç.). Hahnemann, encore comme Hip- 
pocrate, s'attache beaucoup plus à étudier les symptSme, 
a marche, l'issue ordinaire des maladies, qu'à en rechercher 
spéculativement les causes prochaines ou l'essence mème. il 
sait, ainsi qu'Hippurate, qu'il existe dans toute affection trois 
différentes voies de traitement : 1 ° s'en remettre au hasard ; 
2 ° entraver ou contrarier la nahre; ou 3* l'aider en l'imi- 
tant. C'est ce dernier parti qu'Hahnemann pvétère touiours, 
et, en aidant la nature, il suit manisfetement les traces 
d'Hippocrate. En effet, opposant à une maladie le remëde 
qui de lui-mme la produirait, Hahnemann augmenle ainsi 
cette maladie; il en active la marche, il en favorise les cri- 
ses et l'issue. Il aide donc la nature, loin de la contredire 
ou de l'entraver. Les doses sont infiniment petites, et cela 
devait Ore, puisque les médicaments qu'il emploie ont 
pour effet d'annenter la maladie, et puisque l'objet d'Hah- 
nemann est d'aider la nature, sans pourtant la solliciter vi- 
rement. Enfin, comme Hippocrate, Hahnemann emploie les 
médicaments non composés, et de prfférence des végetanx, 
des simples. Seulement Flippocrate employait des plantes 
plu salutaires que celles dont peut user Flahnenann, le ciel 
de Dresde et de Leipzig n'a.vant ni la chaleur ni la pureté 
du ciel de la Grène. La diète d'Hahnemann et encore plus 
sévère que la diète d'l=lippoerate, et la méthode homoeopa- 
thique n'et-eUe pour avantage que de motiver des priva- 
tions, aurait encore des résultats incalculable. Si Hahnemann 
ne respecte pas les habitudes des malades aussi scrupuleuse- 
ment qu'Flippoerate, c'et queles habitudesde notre hge 
moins patdarcales et plus dangereuse que celles des con- 
temporains d'FIippocrate. Pour dernier terme de comparai- 
son, Hahnemann avait voyagé comme Hippocrate; il avait, 
comme Hippocrate, professé son art dans de petites localités, 
là où le recueillement est plus praticable et la méditation 
pins fructueuse. Comme le père de la médecine, il connais- 
sait mieux la sémëiologie que l'anomie, et mieux la ma- 
tière médicale que la physiologie et la haute physique. En- 
fin, en récompense de ses travaux et de sa sagesse, il avait, 
comme hïppoerate, acquis le droit de s'autoriser de sa 
longue expérience. FIahnemann est mort à quatre-vinS-huit 
ans. D 
IIOMOEOPTOTON. Voye: 
HOMOIOTELEUTONou HOMOEOTELEUTON 
I, semblable, et xD.o, je termine ), nom d"une figure 
de rhétorique qne Ci¢éron appelle similiter desinens, et qui 
consiste  rapprocher des ruolz dont les désinences sont les 

 HOMPESCH  43 
mèmes. CeRe phrase de Jean-Jacques nous en fournit un 
exemple : « Quel courage d'homme eut le premier qui en- 
gloutit dans son estomac des membres qui dans le mo- 
ment d'auparavant bilaient, mugissaient, marchaient et 
voyaient. » Comme toutes les figures de rhetorique dont la 
répélition forme le fond, l'homoioteleuton ne doit être em- 
ployé qu'avec précaution. Les anciens rhéteurs ne la sépa- 
raient pas d'une autre figure qu'ils appelaient homoeoptoton 
(6ttot5r«o¢ov, sim[liter cadens), et qui résulte de la simi- 
litude de cas. 
HOMOIOUSIEXS. Voye'- Am.xs. 
HOMOLOGATIO (du grec 6tooy, j'approuve). 
C'est l'approbation, la sanction qu'aeeorde l'autorit6 judi- 
ciaire  certains actes qui ne peuvent erre exéeutés sans 
cotte approbatinn. Ainsi, les délibéralions des conseils 
de famille qui prononcent l'exclusion d'un tuteur; 
celles qui l'autofi.ent à aliéner, à hypothcquer les biens de 
son pupille, à transiger en son nom, celles qui ont pour 
objet les conventions de mariage d'un i n t e r d i t, les pro- 
cès-verbaux des partages fait en justice, doivent être homo- 
logués par le tribunal de première instance; les concordat 
pagsés cuire Le débiteur failli et le créancier doivent avoir 
l'homologalion du tribunal de commerce. La loi n'a pas dé- 
terminé de formes partienlières aux homologation» ; les tri- 
hunaux qui les donnent rendent ì cet er[et un jugexat 
dans la forme ordinaire. 
IIO31OLOGUE (de 6t6;, semblable, et ).6yo, raison, 
rapport, proportion). Les géonëlres désignent par cette 
expression les lignes ou cftés qui dans les figures ou les 
volumes semblables sont adjacents à des angles égaux 
chacun à chacun et dont les longueurs sont proportion- 
nelles entre elles. De là il ré»ulle que dans deux triangles 
semblables les c6tés homologues sont ceux qui sont opposes 
aux angleg égaux. Vr,,ye: SImLrCD (Gomtrie). 
IIOMOLOGUMEX'-ES. Au v3alrième siècle on donna 
ce nom aux livres du ouveau-Testament dont l'authen- 
ticib. était bien prouvée et reconnue d» tous,  la différence 
des livres antilogumèes, dont l'mthenticité était revo- 
quée en doute par qu¢qques-uns (voye-- CANONIQUES [Livres]). 
IIO31OXYME (du grec 61;, pareil, et 6ott:, nom), 
mot dont la prononciation est identique avec celle d'un autre 
mot dans une mème langue, à la différence des s ynon y- 
mes, qui sont liés entre eux par une ressemblance de si- 
gnification : ceux ci consistent dans le rapport du sens ; 
tes autres, dans celui du son. Ainsi, les substantffs mer 
(mare), Mers, nom de ville, mère (genilrix), et maire (prœe- 
sui urhis), sont homonymes. Il en est de même quant aux 
noms la mort, le mort, les Maures de Numidie, un mors 
d'acier. Il parut en 1775 en Dictionnaire des ltomo- 
nymes, assembDge de nots sans choix et de citations sans 
got'rt, «lit Philippon de la Madelaine, dans la préface du sien 
(Paris, in-8o, an x ). Depuis oR paru les Homonymes de 
lu Lançue Française, pat' De ¥ignans ( BIois, in-8o ), où 
chaque groupe d'homonymes est accompagné d'exercices 
propres à donner aux élèves l'intelligence et l'orthographe 
de ces mots. Les homonymes ne sont pas le moindre ob- 
stacle que renconh ent les,)reilles étrangères à la promple in- 
telligence des langues. Le mérite des cal cm bours est d'a- 
buser de ces ressewHanees de sons avec plus ou moins de 
succès. 
On donne encore le nom qualificatif d'omon»w à de» 
personnes ou des lieux qui portent un m(me nom. Démetrius 
Magnus a fait un traité, ex profeso, des crvain et de 
poële omonyme. Vossins et Josius ont abordé le même 
sujet. 
IIOMOPBOXIE (de (6;, semblable, et T.w, son), 
concert de plusieur voix qui chantent à l'unisson. 
HOMOUSIENS. l'oye: Ame.s. 
itOMPESCH ( Fgsm.xs.x», baron ».), le dernier 
grand-maRre de l'ordre de Saint-Jean, et le premier Alle- 
mand qui ait été revêtu de cette dignité, appartenait à une 
ancienne famille noEe du ducbe de Juliers. Në le 9 no- 



.144 
.vembre l-i, à Dusseldorl, il vint à Malte à l'age de douze 
ans. D'abord page du grand-maltre, il s'niera suecessie- 
ment à la dignité de grand'croix, remplit Ionglemps les 
fonctiols d'envoé de la cour de Vieune auprës de son 
O.dre, et ïut Cu granà«naître en 1797, par l'iM]uence 
préponderante de |'Autriche. Lorsque Bonaparte parut de- 
'ant Malte, le 10 juin 1798, Hompesch lui relusa l'entrée 
du port et lit mettre ses troupes eu bataille. Il disposait de 
quatre cents chevaliers, d'un roegilnent d'iManterie de cinq 
cents l,ommes, et de la milice. Quelques détachements fran- 
çais qui furent mis à terre rejetcrent bientot les troupes de 
l'Ordre, au delà du poli. Pourtant la capitale et le fort La- 
valette auraient pu se maintenir plus longtemps, si la 
tral,ison n'avait amené entre Bonaparte et quelques cheva- 
liers une capitulatiou qui, no)ennant la reddition du Iort» 
garantissait a l'Ordre ses proprietés, sa religion et ses 
priilcges. Mais à peine les Français furent-ils eu posses- 
.,ion de File entière, qu'oubliant la capitulation, ils contrai- 
gnirent Hompesch, sous la promesse d'une pension de 
200,000 francs, h quitter l'lin avec ses chevaliers. Le grand- 
maitre s'embarqua pour Trieste, où il protesta solennelle- 
ment contre la capitulation, et quelques mois après il deposa 
sa d ignite entre les mains de P a u I t , empereur de Russie, 
qui lui accorda une pension. Apres la mort de Paul, la 
lussie a}ant cesse de lui pater sa peu»ton, Hompescb 
tomba dans de grands embarras d'argent. 11 se rendit en 
/rrance pour reclamer une partie des arrerages de la pension 
qui lui avait etc prolnise au nom «le la France, et montant 
alors à près de ,500,000 Iranes; on fi=it par lui pa)er 
un a-compte de t,000 tv., et il mourut aMoull,ellier dans 
les prelnier mois de lb05. 
|lO.[IS. loyez F.i:s£. 
IIODLI[OILïËI% nom d'une famille celbre de pein- 
tres hollaudais. 
.Elidtus llo.nltOXrm, ne/x Utrecht, en 15s3, se dis- 
tiligua paliruliercment comme peintre de passades. Ses 
tableaux en ce genre appartiennent encore a l'aucieuae ma- 
niere Ituta-tique, telle qu'on la troue un peu lnode=ee 
dans Roland 5aver) et D,ttid Vinclebooms. 1 habita plus 
tard Amsterdam, ou il mourut. 
Son Cris, Gqsbert ou Gdles H,.,,ltOTr2,, né à Ams- 
terdam ou a Ltrecht, en t6t3, fut egalcment un peintre 
eelebre, et mourut a Utrecht, oU il s'trait retire, parce 
qu'une jeune fille qu'd ai=unit tendrement lui plfera son 
pëe. Dans sa maniere il continua la tradition de son 
p»'e. 
Le fils de Gijsbcrt, Melchior Horso, né h Utreeht, 
en t66, apprit la peinture d'abord chez son père, puis 
ensuite chez son oncle, Jean-13ajglisle VeExI, et lut le 
plus celebre de sa famille. Il mourut le 3 avril 1693. Il 
peignait aee un talent admirable les animaux, su,'tout les 
oisea«x, dont il imiit à s'y meprendrê le plumage, notam- 
ment les poules, les dindons, les canards, les oies les 
puons. Ses fonds de tableaux sont en general des paysages 
bien distribues. Son pinceau et moelleux et plein; son 
dessiu, ferme et large, ilnite a ec une illusion parfaite le jet 
des plumes. Bien que sous le rapport du ton et de l'har- 
monie, son oncle Veeuix lui ft)t superieur, une basse-cour 
de ltondekoeter se pale toujours mieux qu'un groupe de i 
volatites morts de son oncle. 
IIO,DSCItOOTE ville de France, chef-lieu de ean- 
I 
ton, dans le departemant du li o r d, a 15 kilomètres de Dun- I 
kerque, avec a,S00 habitauts, des blannhisseries de toiles, 
des tanneries, des pépinieres. 11 ne parait pas qu'elle exis- I 
tac avant le dixième siècle. Longtemps oile lut renommée 
pas ses manufactures de serge et de toiles. Incendiée en 
1383, lorsque Charles V I chassa les Anglais de ce canton, elle 
fut encore devastée en 1558 par les Français, puis saccagée , 
et brt'dée par les Hollandais, en 1708. Mais cite est surtout  
lèbre par la victoire que les Français 1, remportèrent sur 
les Autrichiens, le 8 septembre 1793. 
Le duc d'York assiégeait Dunkerque avec 33,000 hommes, 

HOMPESCH  HC 
tandis que le maréchal Freytag, avec 16,000 Autrmhienz. 
se tenait en avant des marais de Dunkerque, de maniere 
intercepter les oecours qui pouvaient venir de l'inCCieur de 
la France; enfin, les Hollandais, au nombre de 1,000, sous 
i les ordres du prince d'Orange, étaient postés à .Menin, plutôt 
comttae une menace que cotnme une trottpe auxiliaire, puis- 
qu'ils étaient à trois journées de la position de Freytag. Au 
] lieu de masser ses 60,000 hommes, et de se porter, en mat- 
' citant rapidement entre les Hollandais et Fre} tag, sur les 
derrières du duc d'York, de manœuvrer ainsi entre les trois 
corps ennemis, et d'accabler successivement Freytag. le due 
d'York et le prince d'Orange, le général français Houchard 
songea tout simplement à marcher contre Freytag,  se re- 
jeter sur les derrières du duc d'York et /l tacher ensuite 
d'inquiéter le siége. Pendant qu'il butait ses préparatifs, Dun. 
kerqne faisait une vigoureuse résistance. On était arrivé aux 
derniers jours d'aofit. Houchard commença par une démons- 
tration sur Menin, qui n'aboutit qu'à nn combat sanglant et 
inutile. Après avoir donné cette alarme preliminaire, il 
chargea Hédouville de marcher sur Rousbrugghe, seulement 
pour inquiéter la retraite de Freytag sur Fumes, et il alla 
lui-même donner de front sur Freytag avec toute son armée. 
Freytag aait dispose son corps sur une ligne assez Cen- 
due, et n'en avait qu'une partie autour de lui, lorsqu'il reç.ut 
ce premier choc. Il se  it donc oblige de reculer; ses ailes 
furent gravement contpromises, etsa retraite fut menacée vers 
Rousbrugghe par Hedouville. Voulant alors se reporter dans 
la mème journée en avant et reprendre le village de Rex- 
poede, qu'il avait évacué dans son mouvement de retraite, 
Frettag rallia unn de ses di'isions, marclm sur Rexpoede, 
et y arriva au moment o/a les Français y entraient. Un vil 
combat s'engage; le general autrichien est blessé et fait 
prisonnier. Cependant, on touche/lla fin du jour. Houchard, 
craignant une attaque de nuit, se retire hors du ri/lugent 
n'y laisse que trois bataillons. Le nouveau chef de la dki- 
sion compromise, Valmoden, arrive sur ces entrefaites, et 
se decide à se faire jour au travers de Rexpoede. Un combat 
sanglant a lieu dans la nuit ; le passage est lrchi, et Freltag 
delivré. L'ennemi se retire en masse sur la villeàe laond- 
schoote. Houchard l'y poursuit. 
Tout cela se passait le 6 septembre. La journée du 7 est 
employee à observer les positions de l'ennemi, defendues 
par une artillerie très-lorte; le 8 l'attaque décisive est ré- 
solue. Dès le matin l'atroce française se potin sur toute 
la ligne, pour l'attaquer de front. La droite, sous les ordres 
d'Hédouville, s'étend entre Killem et BerCert ; le coalxe, 
commandé par Jourdan, marche directement de Killem sur 
Hondscltoote ; la gauche s'ebranle entre Killem et le canal 
de Fumes. L'action s'engage entre les taillis qui œuvrent 
le centre. De part et d'autre, les plus andes forces sont 
dirigées sur ce point. Les Francais reviennent plusieurs 
à l'attaque des positions : enfin, ils s'en rendent maitres. 
Pendant qu'ils triomphent au centre, les retranchemeuts de 
droite sont emportés, et l'ennemi est contraint/l se replier 
sur Fumes. Cependant, la garnison de Dunkerque fait, 
la conduite de H och e, une sortie vigoureuse, et force les 
assiëgeants, qui se voient menaces sur leurs derrières, 
lever le siCe et à se retirer également sur Fumes. 
Les journées des 6, 7 et S septembre curent pour résullat 
de rejeter le corps d'ohsert ation ennemi sur les derrières 
du corps de siCo. Le dernier combat donna son nom  la 
bataille entière, qui fut considérée comme ayant rompu la 
longue chainn de nos revers dans le nord, fait essuIet un 
échec cruel aux Anglais, trompé le plus cher deleurs 
la possession de Dunkerque, sauvé la république du m- 
heur qui lui eut C le plus sensible, et donné tre grand e- 
cou.ragement aux armes de la France: Charles 
ltO.XDURAS l'une des républiques de l'Amé.riqne 
c e n t r a I e, bornée au nord par l'extrémité occidentale de la 
mer des Antilles, c'est-à-dire par la baie de Honduras, oi] de 
nombreux banes de sable et récifs et de fréquentes tem# 
rendent la na igation extrëmement périlleuse; à l'ouest, ! 



i'Etat de Guatemala ; au sud, par l'État de San-Salvador et 
l'Ét de icaragua ; à l'est, par la c6 des Mosquito, 
tribu iuddpeadaate. e pays comprend une superficie den - 
viro OE,600 mriamètres rrOs, avec une population de 
près de 00,000 m ce qui donne de 70 à 75 habilan 
par myriamètre crO. E général, l'Ét de Honduras 
forme un plateau offrant une sussion de draines et de 
goupes de montagnes, et s'abaisser en terrasses vers la 
mer des Antilles. Bien que du cO de la mer le sol se trans- 
forme insensiblelnent en luxuriantes savann s'avannt 
jusqu'à l'endroit où la cote est le plus pla, quelques mon- 
lnes aez considOrabl ne laisoent p que de se trouver 
mme tout près de oe riva hérissé de récifs et d'flots 
par exemple le mont Om (2,180 m.) le pic Cunbe- 
boy ( 2,33 m.), le o-Guimareto ( 1,600 m. ). La 
cote préseute aussi plusieurs promotoir extrOmement sail- 
lants, tel que le cap Tres-Puntas ou Manabique à l'ouest, 
et le cap Hondur ou Punla-Clilla h l'est. Le pays est 
parfaitement aosé, par un grand nombre de cours d'eau, 
dont aucun n'a un dévdoppement eonsidërable, mais qui 
tous sont plus ou moins navigables. A l'époque des pluies 
les dvières soent de leur lit et inondent les contres basses. 
Le oeufs d'eau le plus imposant se trouve à à l'ouest : 
on l'appelle le RW Grande ou Molagua; ila pour alfluent 
le Hiqueras. A l'est, e't le angues, à l'interieur, le 
Sirano, qui coule au sud h travers la plaine de Comayagua. 
Le. climat est d'une chaleur et d'une humidité exIremes, 
surtout au voisinage de la céte. Il est plus lempré dans 
les montagnes de l'tutArieur, quoique, en raison des nom- 
breuses et épaisses forais qui y couvrent le sol, l'air y soit 
loours étouffant.  nature, d'une luxuriante riche, y 
donne en immenses quantités tous les pruits Columer- 
eiaux parIicufiers h l'Amérique centrale; il faut mentionner 
notamment la eochenille, l'indigo, le labae, les bois d'acajou 
et autoes sen priees provenant des inépuisables fo- 
rëts de l'intéreur, ainsi que des min d'or, d'argent et de 
plomb. 
L'Ét de Honduras t divisé en sept déportements : Co- 
ayagua, Sanla-Barbara, Gracs, Yoro ou Lldro, 
Choluleca, TegucigalFa et Jutpalpa. Il a pour chef-lieu 
Coxrx¢vx ou la Auvelle Valladolid, ville appelée au,- 
fois 6stra-Sehora de Concepcion, bMie ds une plaine 
fertile, sur les bords du Sirano, siCe des autorit supé- 
rieuoe et d'un 6vcllé» avec une catllédrale, un eollé et 
18,000 babints. Parmi I ports, les plus imponts sont 
Omoa M'ouest, et Truxillo à l't; oe dernier est très-fou liftC 
Honduras, ainsi appel6 h oeuse des nombreux bas-fo ad s 
(cri espagnol, hondura ) de sa mer faisait autrefois partie 
du royaume indien de Quicha, et formait le centoe de  ci- 
çilisation, qui florissait vraisemblablement avant l'arrivée 
des Azlèquesau Mexique. Honduras fut découert par 
Christophe Colomb, en 1502 ; mais ce ne fut qu'en 153 que 
les Epagnols en pfioent possession. Colonisé peu ì peu, au 
milieu d'aIques fréquentes d diens, ce territoire fut 
rigë en audiencia rdevant de la oepiinede géoCaie de 
Gualemala; en 17, on le lransforma en simple intendance, 
et il en fut ainsi jusqu'en 182, époque où il se eonstitua en 
république. Après des rétlnio alternativeme«t condues et 
dissoul avec ! autoes ÉE de l'Amérique centrale ( le 
25 juillet 18bi, il se réunissait encore à icaragua et à San- 
Salvador, pour oenstituer nn Ét fédératit), ce pays forme 
aujourd'hui e république indépendant. Aux rmes de 
plus eente constitution, le pouvoir exécutif y t aux 
mains d'un président ( en 185, c'était le génér Trinidad 
Caba, dont l'éleelioa remonUit à 185 , luel est Cu 
par les deux ehambr, h savoir : la chambre tislative, 
composée de quatorze dépuoEs, et le sénM, qui compte 
lement quatorze membres. Le prident t st6 d'un 
conseil d'£lat composé des ministr et de sept aulres 
mbres. La cour suprdme de justice, résidant à Comaya- 
a, se compose de trois jug. L'évèque de Comayagua ad- 
ministre le pa's sous le rapport spirituel. 

-- HONFLEUR 145 
HONDUBAS, ou Dis[riel forestier de Honduras, co- 
lonie anglaise, appelée aussi quelquefois Balise ou Belize, du 
nom de son chef-lieu, située dans la partie sud-est du Yu- 
ctan, sur la cote occidentale de la baie de Hondura% bornée 
au nord par le Rio Grande ou Rio Hondo, et au sud par le 
Rio Sarstun, qui la sépare de Guatemala, comprend une 
perficie de 2,1 myriamètres carrés, et comptait en 188 
une population de 11,0 habitant. Derrière la cote, qui 
est lort basse et garnie d'une foule d'|lots, de récifs et de 
bancs de sable, le sol s'élève à une hauteur aez consi- 
dérable avec les mout Coxcomb, Chalna, etc. Après leu 
deux fleuves qui lui serent de frontières, ses cours d'eau 
les plus importants sont le New-Ricer au nord, et le 
au centre, lequel se jette dans la mer par le gevenge. Situé 
en deçà du cercle d Cancer, ce pays participe au climat et 
à la végétation de la zone torride. Mais la vritable richesse 
de la colonie et ce qui constitue sa principale valeur, ce 
sont les immenses fort% dans lesquelles, phlsienrs milliers 
de travailleurs, nèes pour la plupart, abattent d'énormes 
quantitës de bois ,Paeajou et de hois campche, qui s'expé- 
client en Angleterre. Dans la population de cette colonie se 
trouvent des blancs d'origine anglaise, des nègres et des in- 
diens indigènes, avec lesquels les coloris ont plus de rela- 
tions et de points de contact que partout ailleurs. 
Le gouvernelnent de la colonie a pour base une autorité 
législative et un pouvoir exécutif désiés sous le nom de 
magistrats de Honduras. Le gouverneur porte le titre de 
direcleur. Un régiment des Indes occidentales y lient gar- 
nison, et la milice locale est toujours prële h prendre les 
armes. La colonie possède aussi une llottille h elle. Dbs 
1070 les Ai, glais obtinrent de l'Espagne l'autolisation de 
faire du bois sur les bords du Balize, et fondèrent des éta- 
blissements sur ce fleuve. Après des attaques ntainles fois 
répétées, puis suivies de traités nouxeaux, ils finirent, en 
1786, par obtenir formellement la cession du territoire 
situé entre le Balize et le Hondo, ou sur la cote de la baie 
de Hanovre. 
Tout récemment les Anglais ont étendu les limites de leur 
district forestier, au sud, jusqu'aux Sarstun. 
Le citer-lieu est le port de Bali:e, à l'embouchure du 
fleuve dtt mme nom. On exporte de la salsepareille, du 
bois de campfide, et surtout du bois d'acajou. En 18tt9 la 
valeur déclaree des importations venant d'Angleterre s'Ceva 
au chiffre de 206,4- liv. st. L'exportation dépase de beau- 
coup les importations; et le mouvement général du com- 
merce présente un total d'enxiron 11 millions de francs. 
Les lies de la cte : Turne.ffe ou Terranot', avec des llabi- 
tarifs indiens; George's-Cay, avec un fort, résidence d'été 
des Anglais ; Ambergrs-Cay ou Ubero, etc., dépendent 
également du gouvernement de Balize, de méme que les 
lies d'Utilla, de Ruatan, de Bonacca, etc., situées sur la 
cote septentrionale de l'Ètat d'Honduras et formant la station 
intermédiaire avant d'atleindre la cote des Mosquitos. 
HON FLEUR ville de F rance, che[-lieu de canton, dans 
le département du Calvados, à 11 kilomètres du Havre, 
avec 9,361 habitants, un tribunal de commerce, un port 
très-fréquenté par des navires anglais, suédois, danois et 
norvéens, un entrep0t réel et lictif, un entrep0t de sri, 
une école impériale d'hydrographie. On y arme pour la pehe 
de la morue au banc de Terre-Neuve, etfl s'y fait un com- 
merce de bois du Nord, de houille d'Angleterre, de rets, 
vins et eaux-de-vie. Cette ville possède des ralfineries de 
sucre, des brasseries renommées, un établissement de bains 
de mer, des fabriques de produits chimiques, d'huile «le 
graines et de savon ; on y construit des navires et on y fait 
un comu:eree important d'œufs et de îruits avec l'Angleterre. 
Le port se compose d'un avant-por[, d'un petit lrt d'6- 
thuage, de trois basitts a flot et d'une petite retenue qui 
serl a tcpeusser les ormei ban¢l de vase que la mer y apporte: 
les I ues Sorti ê[rol[es et toi tueu»es, boroee oe v lel[leà Illd.lSUU." 
en bois; on y voit cependant quelques édifieesgothiques di- 
Kues d'intért. En ttA0 ltonfleur fut enlex'ée par Dutais 
9 



1 46 HO_FLEUR 
roi à'Angleterre. C fut la dernière ville de No,'mandie qui 
se soumit à Henri IV. 
HONG ou HONGS (en anglais Hong-merchants), c'est- 
à-dire marchands de sOreté on de confiance. C'est par ce 
nom qu'on désigne aujourd'hui ì Canton, en Chine, tous 
les Chinois que font des affaires avec de négociants 
étranrs. Autrefois, et jusqu'au moment où fut signé avec 
l'Angteterre le traité Pottinger (IS2>, les mardands 
hongs formaient une corporation privilliée par le gouver- 
nementchinois (Cu-Hu9), dont les membres pouvaient seuls 
counereer avec les Crangera, et qui Calon! responsables 
non-seulement du recouvrement des divers imp0ts prlevés 
sur les navires et leurs cargaisons, mais encore de la con- 
daitn des étraners. En retour de ce monopole, il leur 
fallait se soumettre aux énormes exactions des antorites, 
exactions qui se traduiaient en surcro|ts de dits imposés 
aux étrangers, et amenaient souvent des faillites colossales. 
Les longs étaient, il est vrai, solidaires les uns des autres, 
de sorte que la corporation tout entière payait les dettes de 
celui de ses membres qui venait à manquer; mais dans 
les derriiers temps cette obligation avait fini par devenir 
purement nominale. Quand il y avait suspension de paye- 
ment, les recouvrements étaient d'une difficulté extrème, 
et la plus grande partie des créances était perdue. Autrefois 
les ltongs , en raison de la responsabilité pernnelle qui 
leur incombait pour les faits et gestes des marchands ëtran- 
gers, étaient continuellement eu butte aux exactions des 
mandarir, s, de sorte qu'il n'y avait rien de moins s0r que 
leur prupriêté. Le traité conclu en 1842 avec l'Angleterre 
mit fin à l'e.,àstence de cette corporation ; et depuis lors il 
est permis à chacun de commercer avec qui bon lui semble, 
dans les cinq illes ouvertes au commerce étranger,  sa- 
voir : Canton, Amoy, Fou-tabou-Fou, ,Xing-po et Shang-haï. 
|IONGIOXG ile de la c61e méridionale de la Chine, 
dans la Boeca-Tigris , ou golfe formé par l'embouchure du 
Ileuve de Canton, situ6e à environ 6 m)riamëtres à 
l'est de Macao, et longue de 14 kilomëtres sur 7 de large. 
Elle dexint à partir d'aoOt 1839, quand les Anglais durent 
evacuer Macao, le point de réunion de leurs forces actives 
et le point «le départ de leurs expédifions cotre Canton e! 
l'est de la Chine. Aux termes des traitës des 20 jnier et 
7 mai 18-1, cette ile fut ccdce par les Chinoisaux A»glais; 
cessiun devenue d,-finitive seulement en vertu de la paix 
signee le 22 ao0t 182. Depuk lors on y a rapt lement 
construit une place forte, appelee Iïcliria-Town, et dim- 
menses entrepris pour l'opium et le riz. Dës 185, la valeur 
dclarée des produits anglais importés à Hongkong et dans 
les autres établissements anglais des ctes de la Chine s'C 
levait à ,394,827 liv. st. ; en 18-9 les importations pour la 
seule place de Hongkong avaient etWde 651,969 liv. st. En 
1850, la. population etait déjà montre à 33,143 habitants. 
liONGRE (Cheval). l'oje. CnEVXL, tome V, p. 417. 
llONGBIE(en magyare, 3lag#ar Orsjag; en turc, 
31a99nris¢n , c'est-h.dire Pajs des ll,9tare ; en slave, 
Vcn9'ia; en latin, Hun9oria), le phs vaste de EaLs hé- 
r0:ditaires de la munarchie autrichienne, comprenait au- 
trefois, so»s le nom de rojaume de ton9rie, non-roulement 
laCroatieetl,Esclavonie, la Dal matie, laTran 
sylvnie e[ les Frontières militaires, mais encore 
la woïvodie de Servie et le bahut ,le Terne.% les comitat 
du lyen-Szolnok, de Kras.na  de Zarand avec le district 
de K6var; mais tous ces pays en' ayant été disjointa de- 

Depuis que la Croatie avec le Littoral et Film en a é 
détachée, la Hongrie est un pays complétement míditerra- 
néon ; entourée de montagnes an nord, à l'est et ì i:ouest, 
elle forme la pins grande partie du vaste bassin du moyen 
Danube. Les Carpathes, la plus haute des chalnes de 
montagnes qui la sillonnent, commencent.ì Theben, sur le 
Danube, non loin de l'endroit où le Iarch vient s'y jeter, 
et sont renommés par l'abondance de leurs mines de reC 
taux de tontes espèces et de sel gemme, par la richesse e 
leurs forts, par la beauté et la fertilité de leurs railC et 
de leurs coteaux, qui produisent surtout d'excellents vins. 
Ils forment, Ch ]écrivant un arc immense, comme le rempart 
naturel de la Hongrie du coté de la 3oravie, de la Silésie, 
de la Gallicie ; ils pénètrent ensuite en Transylvanie, d'oU 
ils renvoient encore un grand nombre de rameaux dan la 
partie de la Hongrie située à i'et de la Theiss. La contrée 
onduleuse, mais beaucoup plus basse, formée à l'ouest de la 
Hongrie par les prolonements des Alpes _Noriques et Car- 
niques s'ëtend jusqu'au Danube par les pittoresques mon- 
tagnes de Leitha et par le monts rértes, prolongement 
du mont Bakony. Au sud, au del du lac Platten, après 
avoir traversé un pays bien boise; couvert de vignobles, 
de riches cultures, de nombreux chteaux et villages, oh le 
grou pe de F t n fk i r c h e n atteint encore une élévation de 400 
mbtres, elle se rapproche de la 3Iur et de la Drave, et sYtend 
à l'est juu'à la Sfirviz, l'un des auents du Danube, et 
jusqu'au canal de la Sfirviz. 
Nulle autre partie de la monarchie autrichienne ne 
présenle des plaines aussi vastes que la Hongrie. La 
Petite-Plaie ou plaine de la Haute-Hongrie, qui s'étend 
sur les deux rives du Oanube entre Presbour et Komorn, 
sur une étendue d'environ 140 myriamètres carrés et/ 133 
mètres au-dessus du niveau de la mer, est entourée de 
tous cttés de montagnes, et n'et évi,lemment que le basin 
d'un lac desséché, dont le lac de Nensiedl (Fert), à l'ouest 
de cette coutrée, avec ses environs marécageux, rappelle 
encore aujourd'hui l'existence. Cette plaine, par sa ferti- 
lité. a mérité le sunom de Jardin d'Or de la Ho%,rie. Au 
norl et au sud, le sol, tant0t uni, tant6t montueux, ne 
présente ì la vue que champs et jardins parfaitement cul- 
tiv, bois, veers, vignobles, qui pénètrent dans les vallées 
des Carpathes et dez Alpes et dans la for de Bakony. La 
Grande-Plaine ou plaine de la Bozse-Hongrie offre 
a.çpect bien Jifférent; située à l'orient, entre le Danube et la 
Theiss, elle s'ëtend sans interruption, au sudouet, depuis 
Ung. hvdr, Munldcs et Szathmdr jnsqu' Growardein, 
Pesth et Stuhlweisenburg, et au sud elle se prolonge 
jusqu' la Woïvodina, au Bahut, à l'Esdavonie et aux 
Frontires militaires, comprenant ain un espace de I100 
m.riamètres carrés, dont 700 font partie de la Hongrie. 
Cette plaine, sans aucun doute, a été autrdoi.; le ba.in d'un 
lac; nulle part, entre le Danube et la Theis% on ne remarque 
d'arête qui sépare les deux cours d'eau; c'est u pals 
parfaitement plat, élevé de 33 mètres au-dessus du niveau 
du Danube ou de 133 an-dessus de la mer. De vastes 
récages, convert d'aunes ou de roeanx, des tourbières, au 
milieu desquels coeeufe lentement le Danube, aux ffes i- 
numbrables, et serpente la Theiss; entre les deux.rivières, 
sur le plateau de Telecska, àont la partie septentrionale, 
appelëe la Lande de Kecskemet, a vu jadis les renies 
d'AItila et des Kmtmans, corame aussi à l'orient de la 
Tbeiss, sur la lande de Debrec-zin ; des plaines de sable 

puis (s40, elle n'embrasse plus aujourd'hui que la centrée perte de vue, coupées çà est là de petites collines sablon- 
située entre 45 ° 3o', et 46 ° 35' de lalitude septentrionale, neu.es; des landes immenses, dépourvues d'eau d'-breset 
d'ombrage, interromnnes 
et entre 33 ° 40', et 4 o o' de longitude orientale. Elle est ........ :- v 
bornée au nord par la Mora¢e et la Silésie autrichienne, à '  roue mere ae nomnreux troupeaux, ou par des champs 
l'est par la Gallicie, la Bukovine, la Tran.ylvanie ; au ud [ d'une fertilité admirable, qui sans engrais récomenseul 
par la Voïvodina et le Bahut, l'Eclavoie et la Croatie, | les soins du laboureur; de distance en distance îluelqee 
à l'oues par la Styrie, la basse-Atvieloe.et la Moraie. Sa / ferme isolée ou quelque btiment rural «r Ië Poussten, 
circonférence est «le 262 myriamëtres, dont 60 e,viron  îaebîeeus:ë:emnèScetèêe-oeîïd. s et très-eplés, tel 
longent la frontiïre d'AIlemagne; sa superficie est de 2, / parer au ste  e as" "" e,. que ! on pourrait c0n- 
myriamètres carréé. »,, auque ou a a sarane américaine. 



HONGIIE 
La Hougrie est arrosée par plus de 600 rivière» ou rut»- 
seaux, qui tous, à l'exception du Poprad et du Dunajec, af- 
fluents de la Vitule, appartiennent au bassin du Danabe. 
Ce grand fleuve entre en Hongde.à Thaben, au-dessus de 
Presbourg, traverse la gorge qui sépare le Vértes,du 
grad, près de Waitzeu, en «e dirigeant vers le sud, et pé- 
nètre dans l'Eclavonie. 11 reçoit à droite la Leitha, le Raah, 
le Siirviz, et sur la rive méridionale la Drave avec la Mur; 
à gauche, le Match, le 'Waag, la Neutra, le Gran, l'Eipel, 
et la Theiss, son plus grand affltmnt,,avee le Bodrogh, 
l'Hernad, le Saj6, le Szamos, laKrassno, le Ké¢és et le Ma- 
res. On trouve dans les Karpathes de petits lacs,.qu'on ap- 
pelle meerauçen; mais c'est dans Ja plaine qu'on rencontre 
les plus .grands, comme le Neusiedel et le Balaton ou 
Platten, qui l'emportent en étendue sur tons ceux de l'Eu- 
rope. Les marais sont aste et nombreux sur les .bords 
du lgeusiedel,.du Danube, de la Theiss,delaKrassna et du 
S:lrviz; cependant dans ces dernière» annees on en a desséché 
plusieurs, ou du moins on les, a considerablement diminues. 
Le plus grand, après le .Hansfig, est celui d'Eesed, dans 
¢omitut de Szathmlir; il a 91ntomètres de long sur 7 il 10 
de large. Les lacs de soude «ont particulièrement remar- 
quable»; oeux de la.lande .de Debreczin occupent une sur- 
face de plusieurs myriamëtres et ont de 1 à 2 mètres de 
profondeur. On en tire chaqae année t0,000 quintaux de 
natron. Jusqu'à ,présent la Bonie ne pogsède aucun ca- 
nal navigable; ceux du Siirviz et d'Albrecht-Karasicza ne 
servent qu'à l'écoulement des eaux. Le premier, de 34 myria- 
mètres de long, sert de alCharge au marecage situé entre 
Stuhlweissenburg et Szeliszsd, le .second au grand .marais 
du comitat de Baranya. 
La position géographique de la lIongrie et surtout sa 
configuration annoncent dejà un pays tempéré. A l'exception 
de la vallée de Poprad, qui s'ouvre vers le septentrion, elle 
est protégée contre les vents du nord par de hautes monta- 
gnes, tandis qu'elle est exposee ì ceux du sud, dont de 
fréquents orages tempërent les ardeur». Sauf les régions 
montagneuses, les changements de température y sont 
fréquent»; à des journées brùlanles succèdent des nuits trèv 
fralches dans Les plaines de sable et les landes ; les fièvre» 
intermittente» séissent fréquemment dans les district» 
marécageux, et l'itTégularité du genre de s:ie des habitants 
les expose à d'autres maladies. Néanmoins le climat n'est 
pas malsain, géuéralcment parlant, et il n'est pas rare de 
rencontrer des Hongrois parvenus à un "age très-avané. Sa 
position climatologique, jointe à l'etsme fer tilile du sol, font 
de la Hongrle un pays qui produit en abondance tout ce 
qui est nécessaire aux besoins et mème aux commod/tés 
de la  le. Sa flore offre les plantes du nord et du midi de 
l'Asie et celles de l'ouest de l'Europe. Quoique l'Cat de son 
agriculture laisse encore beaucoup ì désirer, c'est une des 
contrées de la terre où l'on récolte le plus de céréales; aussi 
s'en fait-il une exportation considérable. On y cultive du 
froment, du seigle, du maïs, de l'os'ge, beaucoup d'awine, 
du sas:fa»in, du millet, des légumes, etc., des'pommes de 
terre en grande quantité, beaucoup de clmoux, légume fa- 
vori des ltongtis, des citrouilles, des raves et .des bette- 
raes dont on fabrique du sucre, d'excellents melon», des 
eoncombres, etc. Les prairies sont assez négligées, excepté 
dans les cantons peuplés d'Allemands et dans quelques do- 
maines appartenant à des particuliers; par contre, on 
donne de grands .soins.à la culture des fruits sur certains 
points, notamment dans le comitat d'oEdenburg, tandis 
.que dans .d'autres on ne s'en occupe presque pas. On trouve 
.des forèts entière» de chàtaigniers dans l'ouest et de pruniers 
dans le midi; le»prunes quc l'on y récolte servent à fabriquer 
dillem'ontes espèces de liqueur» spiritueuses, de l'eau-de-vie 
.de prnne, de la slibowitza ou rakie. Les noyer» abondent 
dans tout.le pays; les figuier» et les amandmrs reussissent 
lnème dans les padies auéridionales. Depuis quelques an- 
née. on.a aussi inh'oddit en IIongrie la culture du mùrier. 
Lst i$3 tle e,. «le pkmlation de Iht ont russi au delà 

147 
de rouie attente. Parmi les plantes emplo,ées dans les ma- 
nufautures ou demaudées dans le commerce, on cultive le 
lin, le chanvre, un carthama de bonne qualite, le pastcX. 
la gaude, I&garance et d'tmtres plantes tinctoriale», le tabac, 
en .plus.grande quantité que dans aucun autre pays de l'Eu- 
rope (environ 40,000 .quintaux, et ,60,000, y compris 
la Woïvodina, l'Esclavonie et la Croatie), le colza, la na- 
vette et d'autres plantes uléagineuses, le cumin, le fenouil, 
le senevé, l'anis, le poivre rouge de Turquie ou paprika, 
la réglisse et mème la rlmbarbe. Les grandes forC» qui 
couvrent les montagne» fournissent non-seulement du bois 
en quantité considerable, mais des gland» pour engraisse» 
les pourceaux, des oix de galle, de l'écorce, de la résine, 
du charbon, de la potasse, etc. Dans les parties de .la 
plaine qui manquent de bois, on bràle des jonc», des re- 
seaux, de la paille ,.de la bouse 
Dans ses limites actuelles, la Iongric présente une sur- 
face productive d'environ 1:90 myriamtres carré, qui se 
divisent ainsi : ebamps.laboaré, 695; vignes 0; jardins 21 ; 
prairie», 16; pacages, 346; forC-% riS0; le terrain impro- 
ductif est évalueà 30 myriamètrescarrés. L'éducation des 
bestiaux est très-importante. En 180, c'est-à-dire après une 
guerre qui en a fort diminué le normmbre, on comptait encore 
en Hongrie 1, t0,000 chevaux, d'une race déjà très-perfec- 
tionnée. Le véritable cheval honois est petit, mais plein de 
feu, et il supporte bien la fatigme. Il y a de grands haras 
militaires à Bàboina et à Mez01mees dans le comitat de Csa- 
n',tri, et un très-grand nombre de haras particuliers. Les 
bëtes à cornes sont gcncralement de petite tadle, mais les 
courtCs arrosées par La Theiss en nOLu'rissent une race 
ecellente. Les troupeaux de mouton», en partie de race 
perfectionnée, de coclmns, de clsèvres, sont nombreux; 
on élève beaucoup de volailles, surtout des nies, et l'duca- 
tion des abeille» donne aussi des résultats assez importants. 
Le ch&seur trouve encore des lièvre», des bétes fauves et 
des bè, tes noires en assez grande quas«tité pour exercer son 
adresse. Dans les Karpathes habitent «les renard», des lynx, 
des loups, des ours, ainsi que quelques chamois, des mar- 
mottes, «les ca»tors et des loutres. Les montagnes et les 
contrms marécageuses sont peuplées d'oiseaux sauvages. 
Les eaux et les lleuves abondent en poissons. La Theiss, 
la rivière peut-ètre la plus poiesouneu,e de l'Europe, 
nourrir le tik ; le Daaube, le grand esturgeon ; le Poprad, 
le Waag et la Drave, la truite saumonee; le lac Phtten, 
le fogas, ou poisson à dents. La Hongrie a en outre 
des écrevisses renommees, beaucoup de tortue», de gros 
limaçon» savoureux, et fournit au commerce d'ënormes 
quantités de sangsue». 
Peu de courtCs de l'Europe sont plus riches que la 
Hongrie en mines. En 1817, y compris le Banal, la Croatie 
,et l'Esclavonie pour une quantité relativement minime, les 
.mines de Kremstitz, Schemnitz, Neusohl, Scbméhdtz, Itésing, 
Hen'engrund, Budfalu, _Xagyblinya, etc., produisirent 3,594 
marc» d'nr et 77,568 marc» d'argent. Dans la mème année, 
on eu retira 801 quintaux de raercure, principalement des 
mines d'Allia»ser sur la Zips, et l'on évalue le produit des 
antres mines de la Hongrie à 48,556 quintaux .de cuivre, 
6,281 de plomb, 11,235 de .ki|hazge, 60b,|5 de fer, 4114 
• d'autimoine, 2,813 de oohalt, 418 de soufre, san, comptes. 
de moindres quantités de zinc, d'étain, dont on a découvert 
récemment une mine près de Gran, de manganèse, do 
vert de I:longrie, etc. On trouve également est Hongrie une 
grande variéte de pierres-et de terres prd-cienses : de superbes 
opale» à Czervenicza dans le comitat de SAros, des opale» 
liquiformes et communes, des jaspes opales,.des calcédoines 
d'une singulière beauté, des grenat», des hyacinthes, des 
anethystes, des oemalino-s, des agate», du cs-igal de roche, 
entre autres le diamant de Marmaros ou dragomite, des 
tourualine», dg hyalites, du quartz et du sable quartzeux, 
de la lave, de la pierre cornée, dst marbre de toutes cou- 
leurs, entre attires du marbre noir près de FUnfkirchen, «lu 
gnciss, dis porphyre, du basMte, «lu grès, de la.pierre ì 
19. 



1 
chaux, de la craie, du talc, de la serpentine, de l'ardoise, 
du schiste à aiguiser, de bonne glaise  potier, de l'asbeste, 
de h terre à foulon et de la terre de porcelaine. Le pays est 
très-riclle en excellent sel gemme : les mines de lhonaszesk 
en livrent annuellement a00,000 quintaux, celles de Szali- 
tina et de Sugalagh chacune 200,O00. E 1850 il en a été 
extrait en tout 1,237,562 q«intaux. Il ne l'est pas moins 
en sel de soude. Dans la narine année la saline de So6wtr, 
dans le comitat de Stros, en a produit ttg,t59 quintanx, 
et en 1847 elle avait fourni 138,358 quintanx de sel 
gemmes. C'est aussi de la Hongrie que se tire plus de la 
moitié de l'alun que produit l'empire d'Autriche (en 1847, 
15,371 quintaux). On recueille de la soude et du salpètre 
naturels dans les s-.ts (mates desséchées), et sur les bords 
des lacs de soude en quantités bien plus considcrables que 
ne Pexige la consommation. Les environs de Grosswardein 
donnent annueilement 1,200 quintaux d'asphalte. Les Kar- 
pathes ne sont pas riches en houille ; cependant la Hongrie 
en possède des mines très-importantes, qui sont à peine 
expioitées ; les principales sont celles d'oEdenburg, de Gran et 
de Y0nflirclen. 
On compte en tIongrie 355 sources minérales, c'est-à-dire 
plus que dans tout autre pays de l'Europe, et sur ce nombre 
il y en a qui sont très-fréquentées, comme les sources su- 
fureu«es chaudes d'Ofen, de Tceplitz, près de Trentschin; 
«le Hai'» prbs de Grosswardein ; de 1'6stény ou Pischtyan, 
s:,r le Waag; de Boing, près de Preshou; d'Aim et 
de Toits, de Grossh6flein dans l'oEdenhurg; de Sz6hrancz, 
dans l'Ungbvtr ; de Siklos, dans le laranya; de Toicza et 
de Kezthely, dans le Szalad ; de Szerencs, dans le Zemplin ; 
les bains de Vichaya et rie Glash0tten, dans le Bacs; les 
sources aluminenses et sulfureuses de Parad, dans le Hévès; 
une quantité de sources acidules, teUes que celles de 
Schmeck% ou bain des Carpatl,es, J Grosschlagendorf, sur 
la Zips ; de Mohr, près de Stuhlweissenburg; de Tatzmanns- 
dorf, dans i'Eisenburg; la source de Suligu, dans le Mar- 
maros ; la source de Herltn, à Rank, dans i'Abaoujtorna; 
celle de Szalatnya, dans le Honth ; les sources ferrugineuses 
de Barffeld dans le Stros, qui attirent beaucoup d'étrangers ; 
les eaux tbermale ferrugineuses de Lucska, dans le comi- 
tat de Liptau ; enfin, les sources salines d'Uugarisch-lschl, 
dan le district de So6vtr. 
La population de la Hongrie offre un mélange d'un grand 
nombre de nations différant de race, de langage, de re- 
iion, de mœurs, de culture, et offrant quelquefois dans leurs 
caractères les contrastes les plus tranchés. D'après le re- 
censement de 1851, elle s'élève fi 8,011,837 hahitants, y 
con@ris 352,686 étrangers, dont 349,952 ori--inaires d'au- 
tres parties de la monarchie autrichienne, et 147,575 indi- 
gïnes absents. Elle est répartiedans 95 villes, 595 bourgs, 
8,385 villages, 1,2i4,229 habitations, sans compter les ha- 
meaux et les fermes des Poussten. Trois villes seulement, 
Pesth, Szegedin et O feu, comptent plus de 50,000 Ames, 
sans la garnison. Viennent ensuite P re s b o u r g, D e b r e c- 
z i n, Grosswardein, AIt-Arad, E r I a u, OEdenburg, Raab, 
FOu fk i rchen, etc. Le village le plus populeux, Oroshtja, 
a 10,915 habitants. Les plus beaux 'illages sont ceux des 
Allemands ; les plus malproprea ceux des Valaques et des 
Ruthènes, qui sont beaucoup moins bien iogés que les Slo- 
vaques et les Magyares. Les derniers, si à l'etroit dans leurs 
vètements, aiment les spacieuses habitations. En 1846, la 
population, évaluée approximativement à 8,626,749 Am, 
e divisait ainsi : 4,69,700 Magyares ou Hongois propre« 
ment dits, , compris quelques Szeklers, qui appartiennent 
 la mme famille ethnographique; 2,672,799 Slave, voir: 
1,80,7t0 Slovaques; .71,190 Ruthènes; 78,179 Croates; 
69,170 Serbes; 69,600 Slovènes ou Wendes; 836,710"Al- 
lemands; 566,750 Valaques ou Dacoromans ; 249,760 Juifs; 
21,000 Bohémiens; 6,980 Grecset Zinzares; 3,000 Arméniens. 
Le nombre des .Maares, peuple d'origine finno-ouralienne, 
et des Szeklers s'élevait à la mme époque à 5,418,773, 
en T comprenant les 232,730 établis dans la Woïvodina et 

HONGRIE 
le Banat, les 667,150 qui habitaient la Transylvanie : 
5,80 de la Croatie et de l'Esclavonie, les 5,411 de la 
kovine, les 5,t7 des Frontières mililaires, et les 32,502 
qui étaient sous les drapeanx. Les rcceusements officiels 
faits de laS0 à 1851 donnent, au contraire, le chiffres sui- 
vants : 3,79,66! Magyarea; 1,656,311 Slovaques; 834,350 
Allemands; 538,373 Valaqes; 347,734 Ruthènes; 82,003 
Croales; t9,116 Siovënes ou Wendes ; 20,994 Serbes; 6,928 
Illyriens; 323,56 Ju[fs; 47,609 Bohémiens. 
La langue la plus répandue est le magyare, qui se parle 
dans l'lutArieur du pas, c'est-à-dire dans la majeure partie 
de la gran,]e et de la petite plaine honoise; dans le reste, 
on parle allemand, slave ou valaque. Les _agyares habitent 
.0 comitats sur .5; dans 23, ils forment la population do- 
minante ; dans t, ils sont en minorité ; excepté sous le 
rapport des dialectes, ils ne présentent aucune différence 
essentielle, bien qu'on les divise ethnographiquement 
• Mayares du Danube et de la Theiss, en Vaioczes et Szeklers. 
Les Slovaques habitent les montagnes du nord-ouest (la 
SIovaquie) ; les Ruthènes au nord-est; les Slovènes domi- 
nent dans l'ouest; les Croates dans le sud-ouest; les Serbes 
au sud (et sont rëpandus aussi dans l'lutArieur) ; les Va- 
laques au sud-eso Les Allemançls occupent, au sud daDanube, 
le long de la frontière de la basse Anriche et de la Styrie, 
un assez va.te territoire, coup çà et lb par des cantons 
peuples de Slaves. Dans l'in,rieur du pays, on en trouve 
aussi un nombre considérable formant des agglomérations 
au milieu des autres habitants : par exemple entre le Kapos, 
le Sfirviz, le Danube et la Karasicza, dans les comitats de 
Tolna et de Baranya, puis dans ceux de Pesth, de Stuh]- 
weissenburg, de Gran, de Vessprim, autour de KremnioE 
et dans le comitat de Zips, sur le territoire des Slovaques. 
Les habitants issus d'autres rares, comme les Juifs, sont 
repandus parlout. Sous le rapport de la relion, on comp- 
tait au commencement de 1851 parmi les 7,659»151 in- 
digènes, 4,t22,738 eatholiqnes romaius; 676,395 grecs unis; 
396,931 grecs, 724,38 iuthériens {presque tous Allemands 
ou Slaves); t,15,192 réformés (en majorité 3Iagyares)et 
323,564 juifs. 
I Le Magyare a beaucoup plus de gnOt pour l'agriculture 
que pour l'industrie on le commerce; aussi préfêre-t-ii la 
]iv ie des champs à celle des villes. Cependant l'agriculture 
n'a fait jusque ici que peu de proès : l'abondance des ré- 
cuites n'est due qu'à l'extrême fertilité du sol. Quant a l'é- 
dueation des bestiaux, on en est encore à la coutume sau- 
vage de laisser toute i'année les troupeaux en plein air. Lié , 
lève des montons seule s'est beaucoup amëliore. Dans ces 
derniers temps, l'agriculture s'est, en général, perfectionn& 
en ses diflerentes branches dans les grands domaines et 
les cantons cultivés par des Allemands. Après les Allemands, 
ce sont /es Slovaques qui se distinguent le plus par leur 
activité laborieuse. Au reste, on ne doit pas oublier que 
jusqu'à présent la Honnie a manqué de bras pour la cul- 
ture de son sol, et que l'oppression dans laquelle on tenait 
les paysans, qui n'ont obtenu qu'en 1836 la libre disposi- 
tion de leurs biens et n'ont été affranchis que tout recem- 
ment d'autres entraves, a toujours opposé de grands obstacles 
au développement de l'agriculture. Ce sont les AIiemand 
et les Slovaques qui s'occupent principalement de l'exploita- 
tion des mines. 
L'industrie et le commerce étaient déjA en progrès avant 
la révolution do t88. La navigalion à vapeur se dével0p- 
pait de plus en plus sur le Danube et sur la Theiss; le 
chemin de fer central facilitait les relations; une banque 
nationale s'était placée à la tëte du crédit public, et de 
nombreuses caisses d'épargne utilisateur les petits capitaux. 
Dans l'exposition publique de l'industrie qui eut lieu 
Pesllu en t812, le g-nie industriel parait avec honneur 
devant le lribunai de l'opinion. L'nnion protectrice, fondée 
en t84, sur la base de l'exclusion absolue de tous les 
produits trangers, ne put se soutenir, et fit place à une 
autre union, qui se distinguait par urii lendance plus pra- 



HOAGRIE 
tique. Un grand nombre de soeiétés industrielles contri- 
buaient selon leurs forces à la prospérité des labriques, et 
malgré quelques revers la Société commerciale hongroise 
se soutenait. Des socictés s'organisaient mème pour fonder 
une banque de prèts, pour venir en aide aux ouvriers 
pauvres, pour créer une caisse lffpothécaire en faveur 
des propriétaires, etc. ; mais les événements de 1848 et de 
1849 portèrent à toutes ces institutions de crédit un coup si 
fatal, que, malgré l'abondauce des matières premières, 
malgré lasuppression de beaucoup d'entraves administratives 
qui nuisaient au developpement de l'industrie, des années 
s'écouleront avant que tes dernières traces de ces troubles 
politiques aient disparu. 
En général, l'actiité industrielle de la Hongrie se borne 
aux objets les plus necessaires à la vie ; les fabriques n'y font 
que de natt,e. Le paysan hongrois est lui-mëme son arclii- 
tecte, son charpentier, son charron ; sa femme tisse la toile 
et le drap, prépare le savon, la chandelle, etc. du ménage. 
Parmi les ouvriers se distinguent les faiseurs de tschismes 
( bottes de cordouan ), les rubaniers, les fourreurs, les ¢ein- 
turonniers, les corro'eurs; ceux qui travaillent le bois, la 
paille et le jonc sont nombreux. La societé des bateaux à va- 
peur du Danube a .son prit,cipal chantier à Alt-Ofen ; mais 
on construit aussi des navires à Szegedin et dans d'aut,es 
endroits. Les fabriques de toile prospèrent surtout dans le 
Zips, quoique l'on lile et que t'on tisse le lin dans plusieurs 
comitats du nord; les environs d'Eeriés livrent au com- 
merce des toiles imprimées; une foule de lisserands, ré- 
pandus partout, confectionnent de grossières.étoffes de laine ; 
quelques grandes manufactures produisent des draps lins; 
on fabrique en quantité de gros tapis, des couvertures, 
des marteaux, des dentelles de fil grossières, des cordes, 
des cribles, etc. Depuis quelques annees les sa,onneries 
ont fait des progrès. La fabrication du cordouan, du maro- 
ttuiu et du cuir de russie est très-importante, et les tour- 
rieurs en corne sont nombreux. Plus de soixante-dix papete- 
ries, établies surtout dans le nord, livrent du papier génerale- 
ment grossier. Les reCaux sont mis en œuvre dans un 
grand nombre de forges, d'aciéries, de fonderies, de [abri- 
ques de fer-blanc, de Iii de let, d'armes, etc., etc. Les 
blismments les plus considérables de ce genre sont les 
laminoirs de Pesth, les fonderies d'O[en et de Dern6 ; mais 
c'est de Dios Gyér, dans le comitat de Borsod, qu'on tire 
le meilleur acier. En 1852 on comptait dans le royaume 80 
n,achlnes à vapeur, dont 66 dans la Hongrie proprement dite, 
et 60,000 individus, non compris les mineurs, y vivaient de 
l'industrie des fers. La chaudronnerie et l'or[ëvrerie occupent 
aussi un certain nombre de bras. La fabrication des poteries 
et des faïences a pris une grande extension. Debreczin livre 
à la consommation plusieurs millions de têtesde pipe en terre, 
et llerend, dans le comitat de Vessprim, possède une celëbre 
fabrique de porcelaine. Une cinquantaine de verreries pro- 
dt,isent du verre, mais de médiocre qualité. On trouve anss 
en Honnie quelques raffineries de sucre, et le nombre des 
fabriques de sucre .de betterave s'y accrolt chaque année. 
Les fabriques de savon sont importantes, surtout celles de 
Debreczin et de Szegedin, comme aussi les fabriques de 
bougies, de soude, de salpètre, de potasse, les raflineries 
d'lmile, les distilledes d'eau-de-vie, de rosoglio, de liqueurs, 
et les brasseries. La fabrication du tabac, autrefois aban- 
donnéeà l'industrie ptivée, est aujourd'lmi devenue un 
monopole du gouvernement. Les comitats de Liptau, d'Arva, 
de Gémér et de Sol,l exportent de grandes quantités de 
fromages; c'est dans ce dernier comitat, à Briés, que l'on 
fabrique l'excellent fromage de ce nom. 
Le commerce, tant intërieur qu'extérienr, est assez ac- 
tif, et rapporte i la Hongrie des profits considérables. 
Les principaux articles d'e.xportation sont le froment, l'a- 
voine, les boeufs, les porcs, la laine, les peaux, les cuirs, 
le vin, les noix de galle, le tabac, le miel, la cire, les 
plumes, la corne, le cuivre, l'alun, la potasse, la soude, le 
boi.% !'eau-de-vie. Les places de commerce les plus impor- 

149 
tantes sont, après Pesth, un des premiers entrepéts du 
commerce européen, Ofen, Presbourg, OEdenburg, Debrec- 
zin, Kaschau, Baab ; les marchés les plus considérables : 
Pestli, OEdenburg et Keeskemét (ces deux derniers pour les 
bestiaux), p,tis Felegyhfiza, dans la Koumanie; Szerdahely, 
dans le comitat de Preshourg; Gross-Tapolcsan et Freistadt, 
dans celui de bleutra. Le transport par eau se fait sur le 
Danube, la Theiss et la Dra,e au moyen de bateaux  
vapeur; sur le Waag, le Baab, le blaros, le Szamos, le 
Poprad, etc., par des bateaux ordiuaires. 
En l'absence de bounes routes dans une grande partie de 
la Hongrie, la creatiou récente des chemins de fer a etWun 
fait d'une grande intportance. Le premier qui ait été cons- 
truit, etsur lequel les convois sont tralués par des che*aux, 
s'étend de Presbourg à Tyrnau et Szerad, sur un parcours de 
6 m)'riamètres. Le chemitt de fer central ou du sud-est, cons- 
truit plus tard, part de ¥ienne, entre en Hongrie à Mar- 
chegg, traverse Presbourg, Neuhaeuse), Waitzen, blonor, 
Czegléd,arrive à Szolnok,après avoir franchi unedistance de 
30 myriamètres, et se prolongera vers Debreczin. A cette voie 
se rattache le chemin de fer ouvert le 4 mars 1854, qui 
conduit de Czegled par Félegyh,a à Szegedin (10 myria- 
mètres). Un autrechemi, en construction, celui d'oEden- 
burg à Katzelsdort', sereliera au chemin viennois «lu sud 
(3 myriamètres), et l'on a le projet d'en etablir deux autres 
de Puspék-LadAn à Grosswardein et de MohAcs aux mines 
de hot,ille de Funfkircl,en. Au milieu de t'année 1854 
la Hongrie possédait donc déjà environ 50 myria,nètres de 
chemins de [er. çes rapides voies de communication met- 
tent les vastes et fertiles contrées qu'elles traversent, leurs 
villes de plus en plus florissantes, la riche vallée de la 
Theiss et les principMes cités de la vallée du Danube, en rela- 
tions suivies non-seulement entre elles, mais avec Vienne, et 
offrent un grand débouché à la surabondance de leurs pro- 
duits. Le resultat de ce dëveloppement des moyens de 
transport ne tardera pas à se faire sentir de la maniere la 
plus favorable pour la culture du sol, lïndnstrie, le com- 
merce et la civilisation générale du pays. En outre, la suppres- 
sion des lignes de douane, en 1850, a fait entrer la Hongrie 
dans le systëme économique de l'Autriche et, par suite, de 
tout le centre et de tout l'ouest de l'Europe. Le commerce et 
l'indnstriesontsoutenusau]ourd'imi par lesbanqoes d'Ofeu 
et de Kaschau, qui sont des succursales de la banque natio- 
nale d'Autriche. 
Sous le rapport de la culture intellectuelle, la Hongrie 
est fort au-dessous des États héréditaires de l'Autriche, bien 
que les statistiques officielles dressées en 1851 donnent des 
résultats plus favorables qu'on n'aurait dù s'y attendre. Le 
nombre des écoles élémentaires s'Alève à 7,t;9 ; elles sont 
fréquentCes par 61 enfants sur 100. Cinq ecoles normales 
sont établies à Pesth, Szegedin, Xeuhaeusel, bliskolcz et 
Grosskanizsa. La Hongrie ëst mieux pourvue d'écoles supé- 
rieures : elle possède une université, une école de chirurgie 
et une école supérieure d'artset metiers, ainsi qu'une école 
de médecine vëtérinaire à Pesth, trois écoles de droit à 
Pesth, KaschauetGrosswardein, une école des mines et fo- 
restière à Scbemnitz, 8 gymnases catholiques et 39 protes- 
tants  dans 61 le hongrois était la langue de l'enseignement, 
lorsqu'une ordonnance impériale vint prescrire l'enseigne- 
ment exclusif en allemand dans tous les colléges de l'Etat, 
à partir de ianier 18 ), dont 3 sont des écoles supérieures 
avec huit classes, 20 avec six classes, et 32 où l'enseigne- 
ment est incomplet ; deux écoles d'artset métiers à Pesth, une 
à Ofen, Presbourg, Stuhlweissenburg, Szegedin; des écoles 
des mines d'un rang lutCieur à Schemnltz et à Schmélnitz; 
plusieurs écoles militaires, des instituts de sourds-muets à 
Presbourg et à Waitzen; des instituts pour tes aveugles à O[en 
et à Preshourg; une école de commerce à Pesth "- nne école in- 
dustrielle, une société industrielle et une sociéte imperiai,, 
d'agriculture à Pesth, avec de nombreuses succursales ; une 
académie des sciences, une société gëologique et un musée 
national à Pesth ; plusieurs bibliothèques importantes, des 



150 
collections et des ocités savantes-daa les grandes  illes. 
En fait d'in.tituts agricoles, depuis la fermeture du Georgi- 
kon fondé à Keszthely, par le comte Festetics, il n'en existe 
plus qu'un ouvert tout récemment à Ungarisch-Altenburg. 
Après Vienne, Pesth est de toutes les villes de l'empire 
celle qui fait le plus grand commerce de livres, et la typo- 
graphie y a acquis un haut desWde perfection. Depuis 
quelques années la langue et la littérature hongroises ont pris 
un développement extraordinaire ; la Hongrie compte au- 
jourd'hui des poëtes et des écrivains du premier rang. 
Dans ses anciennes limites, la Hongrie etait divisée en 
quatre cercles : en deça et au delà du Dan ube (basse tlongrie), 
en deO et au delà de la Theiss (haute Hongrie), compre- 
nant en tout 46 comitats et les districts particuliers des 
Haïdouc ks, des Iazyge s, dela grande etde la petite Km=- 
manie. On regard«it aussi comme en faisant partie les 
royaumes de la Croatie et de rEsclavonie, avec leurs six 
comitats. Depuis ! 8,9, ces deux derniers royaumes, avec 
le Littoral croate, Fiume, les lies de la ?,Iur et de la I)rave 
dans le comitat de Szalad, en ont été détachés comme pays 
de la couronne ; des comitats de Bbes-Bodrogh, ToronlAI, 
Ternes et Krass6 on a formé la vawodie de la Serbie et le 
bahut de Ternes, tandis que les comitats de Krassna, Moyen- 
Szolnok et Zarbnd, avec les districts de K6vr et la ville de 
Zilah ( qui d'ailleurs ne faisaient point partie des 4 6 ce- 
mitais) ont été de nouveau réunis à la Transivanie, dont 
ils avaient élé d,:tachés en 1835. Ainsi réduit au sud et à 
l'et, le royaume béréd.taire de Hongrie forme aujourd'imi 
an gouvernement particulier, divisé en cinq grands cercles 
et ubdivisé en 43 comitats et 243 districts. Sur ces 43 co- 
milats, 14 seulement ont conservé leurs anciennes limites; les 
autres ont été plus ou moin. réduits, quelq,»es-uns partais, 
un plus grand nombre réunis. Ces cinq cercles sont ceux 
de : ! ° Presbor 9 (48 myriamètres carrés, et 1,G!2,203 
habitants, en 1851 ), avec les onze comitats de Presbou, 
haut et bas .Neutra, Trentschin, Arva-Liptan, Tlmr6cz, 
Hontb, Sohl, Bars, Neograd et Komorn ; 2 o K as ch a  (500 
myriamètres carrés, et !,410,463 habitants ), avec les huit 
tw)mitats d'Abaoujtorna, G6m6r, Zips, S,ros, Zemplin, Ungh- 
var, Beregh-Ugocsa et Marmaros; 3 ° G r o s s 
myriamètres carrés et 1,459, ! 19 habilauts), avec les six comi- 
tats de Nordbihar, Sudbihar, Arad, Bekes-Csanbd, Szathm:r 
et Szabolcs, y compris le distrk{ des Haidnuks; 
Ofe n (49 m.vriamètres carrís et ! ,599,819 habitants), avec 
les neuf comitats de Pesth-Pilis, Pesth-Solt, Stuhlweissen- 
burg, Gran, IIeves, Szolnok, Borsod, Csongrdd, Iazy£ie avec 
les Konmanies; 5 ° OEden b«r 9 (4«»9 myriamètres carrés 
et !, 78,658 habitants), avec les neuf comitats d'oEden- 
hurg, "Yieseiburg, Raab, Eisenburg, Ves«prim, Szalad, So- 
nogy ou Simegh, Tolna et Barauya. Sous le rapport ecclesias- 
tique, la Hongrie est divisée en trois archevchís callmliques 
romains, Gran, Erla et Kaloc=a ou Coloc:a. De l'archevê- 
que de Gran, qui est en mme temps prince primat de Hon- 
grie, relèvent sur les évchés de Stein sur l'.,nger, Yesprim, 
Stuhlweissenburg, Baab, Neutra er Neusohl ; de celui d'Er- 
lau, les évchés de Zips, Kaschau et Szathmbr; de celui de 
Kalocsa, les évéchés de Csan.d, Diakov(r (en Esclavonie), 
Zengg ( dans les Frontières militaires) et Kalburg en 
Tranylvanie. Depuis t853, l'évcbé d'Agram en Croatie a 
été détaché de ce diocèse et élevé au rang d'archevêché 
indépendant. Les évchés grecs d'Ofen et d'Arad sont 
soumis à l'archevêque de Carlovicz. Les Grees unis ont des 
évoques à Épériés, Ungbvdr et Grosswadein. 
Les bases de la constitution hongroise étaient avant 1848 : 
t ° la bulle d'or du roi André Il, datant de 1222 ; 2 ° l'ar- 
ticle x de la première partie du riparlitum de Ver- 
Iczy, déterminant les droits de la noblesse; go les traités 
de paix de Linz et de Vienne, conclus en 1606 et en 1645, 
ainsi que l'article xxw des décisions de 1791, qui fixait 
les droils des diverses communions; 4 o la pragmaliqne 
sanction, les lois réglant la succession au tr6ne et les réso- 
lution des diète; 5 ° les dt 116mes par lesquels les princes à 

HONGIIE 
cur avénement à la couronne de,aient couru'mer toute les 
liberlés.et immunités du royaume. Le cops leslatff se divi- 
sait en denx chambres ou tables : celle des magnats et celle 
des états. Elles étaient l'une et l'autre camposCs d'éléments 
divers, et n'avaient le caractère ni d'une chambre haute 
hér&litaire, ni d'une chambre purement élective. La table 
des magnats comprenait les onze barons du royaume, 
ennvoqués directement par le prince, de mme que les huts 
dignitaires de l'État, les archevlues, les évques et quel- 
ques prélats catholiques, grec unis ou grees, tons les pa- 
latins des cornitats et un député de la Croatie, choisi 
voie d'élection ;- enfin, les princes indigènes ou natura- 
IlsC, les comtes et les barons. Le fantenil de la présidence 
était occupé par le palatin du royaume, et en son absence 
par lejudex curioe. La table des états était formée par les 
dëputes des comitat hongrois, du royaume de Croatie, des 
villes libres et des chapitres, ainsi que par les membres des 
tables royales que leurs emplois y appelaient, par les ahbés 
etles prév6ts catholiques, envertu delenrs dignités, s°iis pos- 
eCatent un bénéfice réel, par les chargés de pouvoirs des ma- 
gnat absents et de leurs veuves. Le président était nommé 
par le prince, ou, en cas d'obstacle, par le àce-palatin. La 
période législative était Iégalement de trois ans ; ce te¢me 
passé, lïmp6t militaire ce.dt d'ttre d. L'initiative n'ap- 
partenait pas seulement au prince, mais aussi aux états. 
La tble des magnats ne pouvait que discuter les pro- 
positions des états et les rejeter en tout ou en partie; ce qui 
amenait une nouvelle délibération des états ; de là, faute d'un 
lien organique entre les deux chambres, de fréquents tirsik 
lemenL% des obstacles, des délais pour les réformes les plus 
importantes. Les deux tables tenaient des proc-verbaux 
de leurs séances; procès-verbaux rédigés, dans les derniers 
temps, en mage'are par les protonotaires de la table regain 
et livrés à Fimpression. Le mandat impératif des députés, 
l'absence de tout règlement sur le vote et la marche des 
d_libéralions, l'incertitude qui régnait sur les condilioas de 
l'éligibilité, les brigues dont les életions étaeut l'objet dans 
quelques comitats, la disproportion existant entre les èé- 
putés des villes et ceux des comitats, enfin rexclusien du 
peuple proprement dit de toute participation légale aux 
affaires, tels étaient les vices de cette constitution. Dans les 
dernières années, les sesious de districts o/ onte question 
grave etait discutée et préparée par de legs de.bats avant 
d'arriver à la diète, avaient pris une grande importance. 
Les attributions de la diète comprenaient, entre le vote des 
lois, la naturalisation des étrangers, le droit d'élever les villes 
ou bourgs au rang de villes libres, la fixation du prix du sel, 
le vote du chiffre des recrues et leur levée, le vote des dons 
volontaires de la part de h noblesse, le droit important de 
voter l'impOt. A la tte de Padministration politique du 
pays Cait la chancellerie aulique hongroise, signant 
Vienne, laquelle jugeait aussi en dernier ressort certains 
procès et exerçait par ses maudements une inl]nence 
table sur la marche de la justice. Dans le pays méme, le 
gouverneur de la Hongrie administrait les affaires poli- 
tiques, levait les impOts directs et exerçait dans certai 
cas la justice, notamment dans les procès entre les sei- 
nenrs et leurs serfs. Sous sa direction les palatins bérédi- 
taires et les palatins nommés par le prince étaient chaés de 
l'administration politique et judiciaire des enmitats. Outre 
ces hauts fonctionnaires, le personnel administratif se com- 
posait d'officiers municipaux choisis parmi la noblesse, et 
dont les fonctions duraient trois ans ; leur adraJnistrai 
était contrlée d'une manière toute particulière par les 
semblées de la noblesse prqpriétaire ou sans propriétés. 
L'omnipolncœe que s'arrogeaient ces assemblées de co- 
mitats, qui d'ailleurs étaient ennsidérées comme les plus 
solides appuis des institutions du royaume, n'était pas an 
médiocre obstacle à la marche réuliere du gouverne- 
ment. 
Cette constitution fut abolie lorsque la révolution de 
eut été vaincue  et elle a été remplaoee par le décret ira- 



ttONGBOE 
riai du 15octobre 1849, basé sur la constilution de Ue[npire 
en dat du 4 [nars, lequel organisa provisoirement la Hongrie 
coin[ne pays de la couronne. C'est seule[nent le tO janvier t 853 
que fut publiée l'organition définitive, mise ì exécution 
le t « mai suivant. Le pre[nier fonctionnaire est le gou- 
verneur, qui exerce ì la fois le pouvoi civil et [nili- 
taire et réside ì Ofen. Il exécute les ordres de l'e[nperenr 
ou de son ministère, e«t le chef suprème de la po|inc, pro- 
mulgue les lois, propose les sujets pour les grades nobi- 
liaires, les ordres, les privilége% soumet h l'approbation du 
gouverne[nent l'établissement des fidéico[nmis, traite les 
affaires ecclésiastiques qui concernent les rapports de 
glise et de l'Ëtat, les relations des diverses confessions entre 
elles, la nomination aua évtchés et autres diguités de 
l'Église. Chacun des cinq rands cercles a à sa tte au vice- 
président et un conseil auliquc. Ces vice-présidents sont 
nom[nés par le ministre de l'tutCieur, sur la présentation 
du gouverneur. L'ad[ninistration des comitats, à la tte de 
laquelle est un conseil nommé par l'empereur, dirige 
toutes les affaires po|itiqucs et administratives de la pro- 
vince, et sert d'intermédiaire entre le gouverneur et les 
employés inferieurs pour tout ce qui touche à la police et 
à l'administration. Elle a sous elle les présidents de juri- 
diction et les fonctionnaires politiques qui ne sont soumis à 
aucun de ces préddents, ainsi que les inspecteurs des con- 
trihutinns et les employés des btiments, qui sont no[nmés, 
ceux-là par le nduistre des finances, ceux-ci par le minis- 
tre de commerce. La patente impériale du 16 février 1853 
a plac à la tte de Forganisation judicLaire les cinq siéges pré- 
sidiaux de Pesth, Presbourg, CEdenburg, Épériés et Gross- 
wardein, desquels révèlent des tribunaux infrieurs. En règle 
g«nérale, chaque comitat a son tribunal. Dans les cinq villes 
principales, les tribunaux portent le no[n de rdsidieoE 
imlériaux; dans les autres chefs-lieux de comitats, celui. 
de tribunaux impéria dccomitat. Certaines causes, 
terminées par les lois et rêgle[nents, sont reservées aux 
présidianx ;  cea près, la juridiction des deux espëces 
de tribunaux est la [nme. A chaque prsidial est at- 
taché un procureur général. II n'y a qu'un seul tribunal 
de commerce séant à Pesth ; dans les autres comitats, les 
contestations relatives à des transactions commerciales 
sont jugées par les tribunaux ordinaires, qui s'adjoignent 
des assesseurs choisis dans le corps des ngociants. Tout 
ce qui concerne l'exploitation des mines dans le cercle de 
Pesth-Ofen est de la compétence du présidial d'Oien; dans 
le cercle d'oEdenbnrg, de celle du présidial d'CEdenburg ; 
dans le cercle de Kaschau, de celle du tribunal de Kas- 
chau; dans le cercle de Presburg,de celle du tribunal de 
eusohi et dans le cerde de Grosswardein, de celle du 
tribunal de Szathmr; mais darLs ce cas ces tribunaux 
doivent s'adjoindre des experts. L'administration politique 
rentre génëralement dans les attributions légales des pre- 
sidents de Jridiction ; cependant, dans les lieux ou siègent 
le présidiaux et les tribunaux de comitat, ainsi que dans 
les districts qui en dépendent, ces cours de justice exercent 
la juridiction civile et criminelle conjointement avec les 
tribunanz de distplct'institués par les villes; aussi les feue- 
tions des présidents de juridiction dans de semblables 
distTicts sont-elles d'une nature purement politique. Dans le 
anciennes villes libres, là où résident les fonctionnaires des 
co[nitats et des cercles, les affaires politiques rentrent dans 
les attributions de. [nagistrats mnnicipaux. 
En mme temps que I premier de présidianx était ins- 
talé à Presbom, le 28 septembre 1854, le gouvernement 
pro[nulguait les lois suivantes : le règlement de procédure 
crimineilë du 29 juillet 1863 ; le rèlementpouv les tribunaux 
cri[ninels du I 8 juin 185; le règlement concernant les juri- 
dictions du 18 lévrier 1853; le règlement pour les tribu- 
nan civilsdtt' 3 mai 1853 ; le règlement pour les syndicats 
d'Ct du3 aoOt 1854 ; le rëgle[nent sur Iprocédure exh'a- 
judiciaire du 9 a«ft 185A. Le droit houois compoend, ou- 
tre ces rle[nent, la patente impériale du 27 mai 

151 
ou code cri[nlnei; la patente impériale du 29 novemvre 1825, 
ou code civil ; la pante impériale du 3 mai 1854, ou loi 
énérale sur l'exp!oitation des mines. L'administration de 
toutes les contributions directes et indirectes est confiee à 
la direction générale des finances, divisée en cinq sous-di- 
rections, qui siègent dans les chefs-heux des cercles. Le gou- 
verneur civil et militaire est le président de toute cette ad- 
ministration; à la tte de chaque sous-direction est un vice- 
président, assisté d'un conseil aulique, soumis directement 
au gouverner, r, qui exerce une surveillance générale. Cer- 
tains cas qui intéressent tout le royaume sont réservés ì la 
sous-direction d'OfeL Les sous-directions finsnciëres éten- 
dent leur juridiction sur tous les employés des finances, 
chacune dans son ressort. La Hongrie était autrefois soumise 
à un imp6t te uerce, que les états rotaient tous les trois 
ans pour l'entretien de i'armée, et qui éraillerWsur les co- 
mitats, les villes libres et les districts au prorata de leur 
population respective. Le clergé et ce qu'on appelait les ho- 
noratores en étaient exempts. Cet imp6t s'devait darLs 
les derniëres annves à ,395,ooo florins. Un autre imp6t, 
que la noblesse valait dans ses asse[nblées, et qui était des- 
tinWaux besoins des co[nitats, pesait égaltuent sur le 
peuple seul, et souvent il dépassait [n[ne la contribution 
de guerre. Aujourd'hui les imp6ts directs consistent en une 
taxe foncière de 16 pour Io0 sur le reenu net, étahlie 
depuis le t  novembre 1852 d'après un cadastre proviso.;re; 
en un imp6t sur les maisons, à Pesth, Ofen, Presbourg, 
Kachan et OEdenburg, s'devant à 12 pour I00 du rcveau, 
déduction faite de 30 pour I00, et remplacé partot ailleurs 
par un imp6t sur les btiment« établi par catégries; en 
un impdt sur le revenu et en un i[np6t sur les ac lutts pe'- 
sonnels. Les imp0ts indirects comprennent : les donanes 
(en tout cinq bureaux seule[nent), l'imp6t de consomma- 
tion surin viande, le vin, les liqueurs spiritueuses, la bire, 
le sucre de betterave, etc., les produits du monopole du sel 
et du tabac, de la poste, du timbre et des taxes judiciaires, 
ainsi que ceu de la loterie. Sous le rapport militaire, la 
tlongrie compose aujourd'hui un gouvernement à la fois 
[nilitaire et civil. Elle est co[nprise avec la Transylvanie dans 
la 3  division militaire, dont le siége est à Pesth, et qui com- 
prend les 10 , 11, e 12 e (pour la Transylvanie)et 9 e corp.% 
al»afinC, dontles Cats-majors résident à Presbourg, Gross- 
wardein et Pesth. Il y a en outre un commandant [nilitaire 
dans chaque chef-lieu de cercle. Consultez Fenyes, Diction- 
naire gographique de la Hon9rie ( Pesth, 185, 4 vol.); 
Paluai, Descrpto historigue, 9dographique et statisti- 
que du roym«me de Hongrte (Pesth, 1852; et années suiv.). 
Histoire. 
La situation gograpbique de la Hongrie au sud-est de 
l'Europe, la fertilité de son sol, la richesse de ses produc- 
tions naturelles y attirèrent dès les temps les plus reculës 
une foule de peuples de l'Erope et de l'Asie occidentale, 
comme les Daces, les Bastarnes, les Gèles, les Illyrien% 
les Pannouiens, les Sarmates, les Iazyges, les Van- 
d a les ,lesBul ga res, les AI aih s, lesAv are s, lesHu us, 
lesSnèves, lesQuades, les Marco[nans, les Gé- 
pides, les Lo[nbards, les Goths, etc. Tout ces peu- 
ples s'y sont snccédé les uns aux autres, le dernier arrivant 
expulsant en totalité ou en partie la peuplade qui l'avait pré- 
cédé. C'est qu'il existait encore dans le pays des Bulgares, des 
Slaves de diverses tribus, des Chazares, des Valaques, des 
celons allemands et italiens, lorsque les Magyares, appelés 
UTri, [79ri, Ungri et Wengri par les Slaves, sy établi- 
rent', l'an 89 de notre ère, sons la conduite de leur chef 
Almns (Aimes) et de son-fils Arpd. Dès l'an900, toute la 
contréeeur était soumise. Les chefs de tribus se partagè- 
rent d'abord leur conquête ; mais bientOt le droit fut accordé 
au duc de récompenser les exploit des guerriers, sans dis- 
tinction de personnes, par l'investiture d'tre fiel Partagée 
entre sept tritms et en 10S ramilles, la Hongrie était un 
État militaire. Les hauts faits des Hngrois et le succès de 



152 
leurs entreprises attirèrent sous leurs étendards un grand 
nombre de guerriers étrangers, «lUi s'établifent dans le pays 
et décidèrent beaucoup de peuplades dont ils envahirent le 
territoire à se joindre à eux; on vit mme des princes et des 
nations, prës de succomber sous les efforts d'ennemis trop 
puissanls, implorer leur secours. 
Les Honois poussèrent leurs incursions jusqu'à la mer 
Baltique, dans le midi de la France, en Italie et sur les 
bords de la mer Noire; mais les défaites que dës le règnede 
leur roi Henri I er, qui fut battu en 933 à Kenschberg, leur 
firent successivement essuyer les Allemands, les Saxons, les 
Francs, les Bavarois et enfin l'empereur Othon I er, qui 
remporta sur eux une grande victoire à Lech{eld, en 935, 
répritnèrent leur ardeur guerrière. On commença à fixer 
les limites du royaume et à les fortifier. On accueillit avec 
empressement les colons étrangers et leurs industries : on 
employa les prisonniers de guerre allemands et slaves à 
la culture des terres et aux arts de la paix. Le grand nombre 
d'esclaves chrétiens, les relations avec la cour de Byzance et 
surtout les eflbrts du duc Geysa ( 972-997 ) et de son épouse, 
Sarolta (Caroline), qui pro|essait la religion chrétienne, 
préparèrent l'introduction du christianisme, dont le fils de 
Gejsa, Etieune (997-1038), assura le triomphe avec le se- 
cours de prêtres romains et de chevaliers allemands. Ce 
prince rendit la liberté à tous les esclaves chretiens, et 
persécuta les blagyares qui refusaient le baptéme. Il em- 
ploya la force des armes pour soumettre les grands qui s'op- 
posaient ì l'établissement du christianisme. Il fonda des 
ecoles dans sa propre résidence, appela comme instituteurs 
des moines instruits de l'étranger, précha, enseigna lui-mme, 
btit un grand nombre d'églises et de chapelles, créa dix 
évèches richemeut dotés, introdnisit la dlme et fit du clergé 
le premier ordre de l'Etat. Pour le récompenser de si grands 
services, le pape Sylvestre II lui envoya une couronne qui 
forme depuis ce temps la partie supérieure de la sainte 
couronne du ro!laume de Hongrie, tandis que la partie in- 
Iérieure est form«'e par celle dont l'empereur Manuel Ducas 
fit présent au roi Geysa 1  ;  ce don le pape joignit une croix 
de patriarche et le titre de roi «postolique. (Cette couronne, 
h laquelle les MagTares attachent une importance super- 
stitieuse, et qui fiat enlevée de Vienne par Soliman, puis 
rendue par lui à Zapolya, et parla veuve de celui-cil'empe- 
reur Ferdinand, s'etait per,lue lors du départ du gouvernement 
inurrectionnel hongrois pourla Turquie. Elle a été retrouvée, 
en 153, avec le manteau de saint Étienne et les autres insi- 
gnes du couronnement dans une caisse enfouie près d'Orso- 
xva; transportfe à Vienne, elle fait de nouveau partie des 
joyaux de la couronne. ) Étienne Ceva la Hongriean rang de 
royaume, dont le clergé et la noblesse devaient étre les prin- 
cipaux soutiens. Il divisa ses É.tatsen 72 comitats ou palali- 
nats, gouserns par des fonctionnaires qui ne relevaient que 
du roi et qui exerçaient lepouvoir civflet militaire. Ces pala- 
tins fotauaient, avec les hauts dignitaires de la co et les 
prélats, le sénat du royaume, qui seconda le prince dans 
la reorganisation de son royaume, devenu chretien. 
Cependant bien des années s'écoulèrent encore après la 
mort d'Etienne avant que les obstacles qui s'opposaient 
a la prospérité, de la Hongrie et au développement de sa 
puissance fussent entiërement levés. Parmi ces obstacles, 
un des plus considérables était l'absence de toute loi po- 
s/t/ve sur la succession au trfne; car l'incertitude qui régnait 
d cet égard engendra non-seulement des guerres intestines, 
mais fournit aux princes voisins, et principalementà la cour 
de ome, l'occasion de s'immiscer dans les affaires du 
royaume. A cette cause de troubles se oignirent les pré- 
tentions illégitimes du clergé et de la noblesse, la réaction 
des indigënes contre les étraners que le successeur d'É- 
tienne, Pierre (1038-10/6), comblait de faveurs, enfin la 
lutte sourde, mais incessante, du paganisme contre le chris- 
tianisme. Une violente explosion de toutes ces causes de 
discordes eut lieu à l'avénement au tr3ne d'Andre 1, ( 106- 
1060) ; elle se renouvela sous Béla I«, (t 060- t 063  à lacélèbre 

HONGRIE 
diète de t062, mats pour la derniëre fois. Béla I« eut pour 
successeurs ses neveu' Salomon et Geysa I (t07--t077). Au 
milieu des ténèbres de ce siècle brille d'un vifeclat la figure 
de Ladislas let (t077-t095), fils de Geysa, et celle de KIoman 
(t09-ttl). L'un et l'autre étendirent les frontières du 
royaume, le premier par la conquête de la Croatie et de 
i'F-.sclavonie(t089), le second par celle de la Dalatie 
( ! 102). L'un et l'autre défendirent avec fermeté i'bonneur 
de leur couronne et l'indépendance de la nation contre les 
étrangers; l'un et l'autre r«tablirent l'ordre à l'intérieur 
par d'excellentes lois. Après eux montèrent sur le trône 
Ëtienne I[ (mort en ! 131 )et Béla Il (mort en 11-1 ), deux 
princes d'une nullité coin hte. L'ëtablissement, ous le rëe 
de C, eysa Il ( 1 I/d-116 ), de colons venus de la Flandre, de 
l'AIsace et d'autres contréesde l'Allemagne, dans lesenvirons 
de Zips et en Transjlvanie, et les relations plus étroites qui 
s'établirent, sous Bela III (1173-120), avec Bjzance, 
ce prince avait étéélevé, ne restèrent pas sans influence sur 
la civilisation de la Hongrie. Les Maares s'habituèrent 
de plus en plus à la vie sociale et aux institutions civiles. 
Plusieurs emplois firent crdés à la cour et une chancellerie 
du rojaume établie sur le modèle de la cour grecque. D'un 
aulre ct., le second mariage de Béla 111 avec Marguerite, 
sœur du roi de France Philippe et veuve du jeune Henri 
d'Angleterre, mit la Hongrie en rapport avec ces États. 
L'élegance française s'iutroduisit à la cour. De jeuues Hon- 
grois furent envoyés à Bologne c! jusqu'à Paris pour y 
achever leur éducation. On fonda mëme à Vessprim une 
académie sur le modèle de l'universit de Paris. biais la 
noblesse et le clergé abusèrent de la faiblesse d»André II 
( t205-t235 ) pour augmenler leur puissance. La noblesse se 
fit accorder par la bulle d'or, en 1222, l'extension de ses 
priviléges, et le clergé arracha au roi, en t3, un con- 
cordat avantageux. Les réformes salutaires de Béla IV (1235- 
170) furent interrompues, en 12-1, par une invasion des 
Mongols; et, après la perte de la bataille du Schajo, le 
royaume, ravagé jusqu' la mer Adriatique, fut reduit au 
plus triste état. Après la retraite des bordes tatares. Béla 
rassembla ce qui restait d'habitants, appela des Allemand. 
et des Italiens pour repeupler le pays, rtablit l'odre et la 
slreté, favoria la bourgeoisie, au.meMa le nombre des 
villes libres, introduisit la culture de la vie à Tokay, et 
employa tous les moyens pour ramener le bien-étre dans 
ses Ëtats. Mais ses plans de conquoet en Autriche, eu Styrie 
et en Carinthie, et l'association de son fils Êtienne à sa 
couronne occasionnèrent des différends qui ébranlèrent le 
respect de la royauté et préparèrent la decadenc¢ de la 
Hongrie. Avec André Iii, qui mourut le 13 janvier 1301, 
s'éteignit la ligne masculine de la race d'Arpad. 
Après de longues querell, le duc Charles-lobert d'An- 
jou l'emporta sur ses compítitenrs, et fut Cu roi de Bon- 
grie, en 1307. Sous les princes de cette famille, la Bongrie 
s'Ceva au faite de sa puissance. Charles-Robert ameliora 
te système monétaire, établit un nouveau système d'impôts, 
et substitut à ce qu'on appelait le jugement de Dieu laction 
de tribunaux réguliers, comme en France et en Italie. II 
profita de ses iiaisons avec le pape Clément V pour r- 
glementer l'ëlat du clergé hongrois. Louis I et (1342- 
1382) dtendit son royaume aux dépens de la Pologne, 
de la Russie Rouge, de la Moldavie et de la Servie. Ses 
voyages et ses expéditios firent connaitre à ses sujets la 
civilisation étrangère. Il fonda, en 1367, une école sul- 
rieure à FOnoEirchen, delivra de ses entraves le commerce, 
qui était trës-actif avec l'Orient, favorisa l'industrie des 
villes ; mais il expulsa les ]uifs et chargea les paysans de 
nouveaux impôts. En 1370 il réunit sur sa tète les 
couronnes àe Honnie et de Pologne. S i g i s m o n d, empe- 
reur d'Allemagne, monta après lui sur le trône comme son 
gendre. Tout son règne fut rempli par ses querelles avec 
les grands du royaume, par une invasion des Turcs en 1391, 
et par la guerre des h u s s i t e s.- Quoique fort occupé, en sa 
qualité d'empereur des affaires de l'Allemane et àe l'Fiise 



HON6RIE 
alholique, il ne ndgligea pas la I-Iongrie, oin il établit l'u- 
niformitë des poids et mesure et promulgua le premier 
rë$1ement militaire. En t405, il Aleva les villes Iii,res au 
rang d'états «lu royaume et assura aux paysans l'exemption 
du droit de alCraction. Après sa mort, la couronne de Hon- 
érie passa pour la première fois dans la maison de Hahs- 
bourg, par suite du mariage de sa fille Élisaheth avec le 
duc Albert V d'Aulriche (Albert II, comme roi des Romains}. 
Ce prince mourut en tt39, laissant enceinte sa femme, 
qui, se sentant trop faible pour gouverner dans ces temps 
difficiles la Hongrie, la Bohème et l'Autriche, consenlit à 
épouser le roi de Pologne Ladislas I11, que les magnats 
durent roi de ltongrie. Mais ce mariage n'eut pas lieu, la 
princesse élanl accouchée, en lttl0, d'un fils, qui fut plus 
tard le roi Ladislas, et qu'une partie de la ltongrie reeonnut 
pour roi : ce qui donna lieu à des guerres inteslines. La- 
dislas III de Pologne ayant été tué à la bataille de Varna, 
en 16t, Ladislas le Posthume monta sur le tr6ne de llongriê 
en lttttS, et Jean Hunyad fut élu régent du royaume. Ce 
grand capilaine sut garantir la Ilongrie des invasions des 
Turcs; mais son plan pour les chasser de l'Europe Ci,onu, 
par la tiédeur des princes chrdtiens et la jalousie de ses en- 
nemis. Après la morl de Ladislas, le fils de Hunyad, Ma- 
thias Corv i n, fut Cu roi, en 1458, et il tint d'une main 
ferme les rnes d a gon  ernemenl. A la fois diplomate et guer- 
rier, il humilia ou dompla tous les ennemis intérieurs et 
extédeurs du royaume. Une bonne organisation des comi- 
lais assura la lranquillilé publique, lropsouvent tronblée, et 
Con'in, malgré la sévérité de son administration, mbrila 
ainsi l'amour et la eonhance de la nation. Un proverbe 
s'est conservé parmi le peuple : « Le roi llathias est morl ; 
dame Justice est mufle avec lui. » Ce prince montra son 
goal pour les lellres et les sciences en créant l't,niversitë 
de Presbourg, en t:tfiT, où il apl,,'la comme protesseurs des 
savants élrangers, surtout des llaliens, et en réunissant 
une précieuse bibliothèque dans le ddtleau d'Ofen, bibliu- 
lhèque qui malheureusement fut dispersée après sa mort. 
Le roi de Bohgme Ladislas II fut appelé au tréne après 
lui. Sous son règne (1690-1516) et solOS celui de son fils 
Louis II ( 1516-t56 ), !'ambition et l'avarice des grands, 
à la tète desquels se mirent Élienne Zapolya et son fils 
Jean, plongèrent le pays dans les plus grands désordres, 
«.t provoquèrent un soulèvement des paysans, qui ne fut 
conprimé (tSltt) qu'à l'aide des plus atroces cruautés. Une 
smte de ces troubles fut la bataille de Moh,4.es (1526), Où 
le roi Louis Il perdit la vie, et qui plaça une grande partie de 
la tlongrie sous la domination des Turcs pendant cent 
soixante ans. Ferdinand d'Aulriche et Jean Zapolya se dis- 
putèrent le reste du royaume, jusqu'à ce que les protestauL% 
qui redoutaient le zèle persCulent de ce dernier, curent 
assuré le triomphe de son compétiteur en faisant cause 
commune avec lui, Zapolya dut se contenter dela Transl- 
tante et de quelques comitats de la haute Hongrie. Depuis 
lors la Hongrie est reshe sous le sceptre de l'Autriche. La 
transaction intervenue avec Zapolya contenait le germe de 
nombreuses querelles entre l'Autriche et les princes de Tran- 
s.lvanie ses successeurs. La discorde, enlrelenue par les 
Turc.g et les Français, favorisée par les persécutions des pro- 
testants, augmentée par l'introduction des jésuites, en 15131, 
ëclala enfin en guerre civile. Le traité de Vienne (11306) 
conclu avec Étieune Boe»kai, celui de b;ikolsburg { t6) si- 
gné avec Bethlen Gabor, et celui de Linlz (lfiib) conclu avec 
George Rakoczy, ne rétablirent pas la tranquillilé. Enfin les 
généraux de Léopold 1 r s'emparèrent d'Olen, en IfSfi. 
Le gdnéral Caraffa fit juger par le tribunal criminel d'Épé- 
riC, en 1687, tous ceux qui datent soupçonnés d'intelligence 
avec l'ennemi, et la diète de Presbourg, en 1688, proclama 
l'hérédité de la couronne de Hongrie. En mème temps, par 
le traité de Carlovicz  lfiO), la Porte rendit à l'Autriche la 
Transylvanie et la portion de la Hongrie qu'elle occupait, à 
l'exceplion da dislrict de Temesvar. 
Cependant cette paix et l'élablissement de la Commissio 
olCr. o£ t.a co.rl«S.  . 

153 
neoacquistica, devant laquelle devaient étre portCs toul 
les questions relatives aux terres affranehies de la domina- 
tion turque, excitèrent de nouveaux mo,tvemenls, que l'em- 
pereur Joseph I tf parvint enfin  calmer, en 1711, par la 
paix de Szatl,mfir. 121,arles VI (Otaries il, comme roi 
de Hongrie )a«sura, par la pragmatique sanction de 1713, la 
couronne de Hongrie méme aux femmes de la maL;on de 
ltabsbourg, et améliora l'administration en rétormant la 
chancellerie anlique et les autres branches du gouvernement. 
Il élabfit aussi une armée permanente pour la Hongrie, et 
ordonna la levëe d'une contribution de guerre pour son en- 
tretien. Le congrès de Passarowilz, en 1718, rendit à la 
Hongrie le district de Temesvar, et la paix de Belgrade, en 
1739, fixa les limites d,t royamne du c6té de la Turquie. 
L'impératrice Marie-TI, érès e lit beaucoup pour le pays 
en régularisant, en 17fi5, les rapports des assaux, au moyen 
ce qu'on appelle l'urborium, en supp,imant l'ordre des 
Jésuites, en t773, et en réfo,'mant l'instruction publique. 
J o s e p h I I  oulut aussi, et dans les meilleures intentions 
du monde, apporter d'importantes modifications à la cons- 
tit,tion bovgroie; mais son zèle le lit aller trop vite, et il 
renco,tra dan la nation plus d'opposition q,,e d'appui. Dans 
le but d'elever la Hongrie  un plu, l,aut degré de civilisa- 
tion, il chercha à conserver, autant q«e possible, sa liberté 
d'aclion, et à cet effet il ne se lit pas couronner roi de Hon- 
érie, parce qu'il aurait dù jurer le rc-pect de la constitution et 
se serait ainsi IlWle» mains; il ne cons'oqua méme auune 
diète, parce qu'il aurait etWentravé d.,ns l'exécution de ses 
projets par la longueur des delihérations de l'assemblée. 
biais les paysans et les bourgeois ne pouvaient pas encore 
et la noblesse et le clergé ne voulaient pas al,l»écie, les 
sultats salutaires des télormes de Joseph. E delfit du ser- 
vage et des udieuses obligations i,uposëes par le tatuts des 
corps de métiers, les premiers trouvaient leur sort tolerable, 
ci, grace à leurs prisiléges, h leur exemption de toules les 
charges de l'État, les nobles et les prfitres ètaient ort con- 
teurs. Lors dune que Joseph abolit le servage et modilia 
dans un sens plus liberal les staluts des corps de méliers, 
lorsqu'il supprima les droits féodaux, somnit les nobles aux 
charges publiques, abolit les ëtals, et introduisil un eo.L 
national, lorsqu'il ré,luisit le nombre des couleurs, rendit 
l'Cit de tolerance et garantit la Iiberte de la presse, paysans, 
bourgeois, nobles et prèlrs se soulevèrent contre cs inno- 
vations. Cependant, ce qui mit le comble / l'irritation, ce 
fut la loi par laquelle il rendit obligatoire pour tous l'ensei 
guement de lalangue allemande. Cet altenlat contre la nalio- 
nalité hongroise provoq,ta un si violent mécontentement qu'il 
fut facile au clergë et h la noblesse de soulever le peuple 
contre l'empereur, qui se vit forcé, le 8 janvier 1790, de réta- 
blir beaucoup de choses sur l'ancien pied. Lé opol d 1 I, qui 
suc@da à son frère Joseph, s'appliqua h reconcilier la Hongrie 
avce l'Autriche ; son premier soin fut de convoquer la dtCe, 
qui ne l'avait pas Ce depuis vin-cinq ans, et qui lut oette 
fois très-orageuse. Léopold se mourra très-dispos6 à abolir 
les innovations de son frère, mais refusa avec énergie de 
prdter le serment du sacre qui aurait réduit en Hongrie 
son pouvoir à une ombre, et il reassit à taire adopler l'édit 
de tolérance par la diëte, après de longs dëbats. Son fils 
François I , qui lui suéeAda en 1792, marcha sur ses 
traces. Sous son rëgne, la cis ilisation, l'industrie, la com- 
merce, firent de grands progrès en Honnie, et la nationalité 
hongroise prit un puissant essor. Le peuple s'attacba de 
plus en plus à la maison de Habsbourg. Il en donna la 
preuve lorsque .Napoléon convoqua inutilement en 1809, une 
assemblée nationale hongroise, qui n'aurait rencontré au- 
cun obstacle si elle avait voulu proclamer la séparation 
de la llongrie d'avec l'Aulriche. 
Cependant le gouvernement de l'empereur François reA- 
connut l'Cat vérilable du pays. Les mesures de l'empereur 
Joseph avaient développé un esprit de rivalité nationale et 
d'independance que le système dominant ne sut pas satis- 
faire. Le gouvernement s'aitCa nne parlie du clergé et 



lanohlesse. Une opposition, qui complnit dans sc. rangs des 
hommes pleins d'activité et de talents, se forma, Iortiliée 
d'un c616 r s mesur du système goueementM, 
encouree de l'autoe poe la faibl du pMin, l'archiduc 
Jogeph, qui avait été elevé  cette dignité  1796. Pen- 
dant  temps, on s'imita à Viee quMn ferait facP 
lement triompher l'absolutie en Hongrie. On ne convoqua 
aucu dicte, on ya de lever les impO et I recrues; 
mah on éprouva une ristance q& obi à [cunir la dièle 
en t825. Cette fois encore on parvint  s'entendre; n6a 
moins, i'oppoeifion pohtique  natiale,  la tte de 
quelle se placèrent d hommes ennaidérables, comme 
comte Eienne S zéch ényi, ne csa de ger du regain. 
Elle trouva  la diète de 1830 l'ocoesion d'sayer s foroes 
dans les questions portantes du roetemenl, de l'em- 
ploi d'officiers indigèn et de l'usage de la langue masure, 
ci elle le fit av un succès évident. BieniOt apr la 
turc de la die, le pays fut horriblement vagé par le 
choléra. Le peuple, dans son ignonce superslitiee, se 
peuada que les fontaines avaient étc empoisonnées, et se 
liera, surlout dns le nord, aux pl d}orabi excès. 
Au mois de décembre t832 se réunit une nouvelle dite, 
à laquelle le gouvernement soumit la rélorme de l'urba- 
rium. Cce question tcres plus que toute autre les 
rappos des seigneurs mec les paysans, et la manière dont 
elle fut réolue d6notait m procès essentiel. Cendaut, 
la marche des &scussions dans la diète, le vœu de plus en 
plus prononcé de rfo politiques, la Iorce de l'gita- 
on dans les asemblée de comita{s, tout prouvait que le 
goueement ne parxndrait pins  tisfalre les exigenc 
de la nationalioE marc p de simpi réfo maté- 
eles. Ct alors que pat K o s su t h, qui, malté l'oppo- 
sition du gouveement et de la police, sut s bien profiter 
d ressorc de la imbHcité, que les da de la 
excitërent un interèt gencral. C't au milieu de ce mou- 
vemet de plus en plus rpide q.e Pempereur François 
mout, en 1835. 
Sous F e r d i n a n d le ( Ferdinand V en Hongse) le gon- 
vernement comprit les p..ùls de la suation. Il essaya au 
moyen de tit,-s concessions d'en prévenir de plus gnd, 
ma ne rëussit par là qu'à donner plus de force à Iprit 
public. La question de l'urbarium fut dëfinitivement réglée 
dans l'automne de 1-35. Les rapports des paysans avec 
leurs oeieurs fnoent mieux régl, l'exemption absolue 
d'im0ts dont jouissait la noblesse fut limitêe, et ces réfo 
ne contribuèrent pas peu aux près  Pesprit public. 
I,,rs I ieux moyens du s)-stème de Metternicb ne pou- 
valet ,tu'attiser le feu au lieu de Feinde. On sa)-a de 
rereindre la lié de M iribune dans des Iimis pMs 
6oites, en intentant des procès aux pins gnds orateurs 
de l'opposition, Wessel6nyi, Kossuth, Déak, Klau- 
zal, etc.; ma le rësuit fut diamétlement opposë à oelui 
qu'on tte»«l. L'élément masure de la population, 
et bien organisé, se montra paont opposé aux tendances 
du gouvernement, et les intrigues auxqueli le pouvo eut 
reeosws pour exchwe de la dëte les individus qui lui d««plai. 
saient bouèrent hontenseme. La diète de 1839 ne oc- 
cupa ère que de plalnt élevées contre les mesur du 
gouvernement, qui, au milieu d iolents déba soulev 
par ses faute% parvint à peine à faire meure ses proposi- 
tio aux voix. La die, qui f close au mois de mai 
ne se sépara pas sans avoir rempli un des VœUX les plus 
chers de l'opposition. Elle vota la lo de la langue, qui 
sanctonna la suprématie de la nationalité masure, et une 
nistie en faveur de tous ceux qui laient pour»uivis ou 
aient été condanmés pour abus de la libeé de la 
foie. En général la vie publique avait fait de très-an 
progr depuis les dernièrcs nns du rèe de Fnçoi. 
La condition d paysans s'tait améliorée, les priviiéges 
de la noblesse avaient élé rIreints, les lendanc into- 
16rant du clergé enmbaltne 'cc suc, et beaucoup 
d'61iotions matédeles étaient proieCs. L'opposion 

BONGIM,, 
"mag-yare-trouva dns le Pesti ?fir[ap, publié depuis t84t 
par Kossuth, un organe ettrmemeut influent. La loi de 
la langue lui donna le moyens de magyariaer de plus 
n plus le pays, et elle y travaJila avec une aclivJté 
'infatignble, san respect quelquefois pour les autres atio- 
nalités. C'était dans les comitats qu'on discutait avec 
feu. souvent avc violence, ces questions qui devaientttre 
portCs devant la diète. A la diëte de t83-186. la ques- 
tion de l'imposition de la noblesse lut agitce de nouveau, 
mais elle t:e fut pas déflnitivement résolue; cepenlaut les 
Tottriers furent déclarés aptes à présider et à remplir tonte 
espèce d'emploi, et une nouvelle loi sur Pusage de la 
langue magyare confirma la prëpondérance de la nafionalit6 
magyare. D'autres questions importantes, comme celles de 
la réforme des états, du code pénal, de lïntroduction de la 
publicité et de la procédnre orale, etc., tendant toutes à 
transformer la Hongrie en un Eat représentati[, furent 
agitCs, sans ttre résolues. Le gouvernement navalt aucun 
moyen de s'opposer énergiqnement à tout ce mouvement 
de propagande. Lot:qu'il voulut essayer de comprimer par 
des mesures administratives l'action des comitats, 71 es- 
strya de nouveaux échecs. L'archiduc palatin, h la falblesm 
duquel les magnats, partisans de l'ancien ordre de choses» 
attribuaient les succès de l'opposition, £ant mort le 13 jan- 
vier 1847, son fils, rarchiduc Étienne, qui était né et avait 
61é élevë en Hongrie, fut nommé gouverneur et Cu palatin 
à la diëte de 1867, que le roi ouvrir en personne par un 
discours en magy. are. Le got-erncment proposa toute une 
.,érie de mesures concernant le commerce, les échanges, la 
po.ition des villes libres, les ro bote s, etc. L'oppoxifion 
• rbdama la liberté de la presse, la rêponsabilité des 
uistres, l'union de la Transylvanie à la Hongrie, la publicité 
de tous les actes du gonverr.ement, l'égalité en mafiëre d'ira- 
pot, l'égalité devant la loi, la rforme de l'urbariurn, etc. 
L'influence de Kossnth se fit déjà sentir d'une manière tout-à 
fait prépondérante dans cette diëte, et la machine gouverne- 
mentale, paralysée en Honnie comme dans tout l'empire, 
se mourra ans, i impnîssante pour accorder que pour 
fuser. La lutte était ardente sur toutes ces questions, lorsque 
éclata la révolution de tS-8, bieutJt suivie d'un mouve- 
ment inrrectionnel en tlongrie. 
Une députation, chargee des vœux du peuple, arriva 
"Vienne au moment o/l le s)'stème de Metternich s'écroulait. 
L'opposition liberale obtint promptement satisfaction. Un 
de es chefs, le comte Louis B a t t h y à n y i, fut chargé de com- 
poser un ministère particulier pour la Hongrie, dans lequd 
enirèrent Szemera, Kossuth, Deak, Messàros. Le roboleJ 
furent supprimé«s, la dlme abolie du consentement du 
clergé, i'impOt rendu g,.nírai, une garde nationale insti- 
tuée, et les liens qui unisaient la Hongrie à i'Autriche 
tellement rehlchés, qu'il ne resta qu'une union personnelle 
avec la famille impériale. La diète procéda avec tapidité 
au changements les plus importants, de manière à met 
l'administration d'accord avec les institutions nouvelles. £11e 
adopta une loi iectorale conforme au syëme reprïseutalil, 
vota l'égalité en matière d'impîts, reglementa l'urba- 
rium, introduisit la liberté de la presse et le jury. Graee 
son énergie, la révolution eut bient6t obtenu un triomplm 
complet et assuré à la Hongrie nn gouvernement national. 
Il ne restait plus pour opérer la séparation d'avec lAutriche 
qu'A créer une armée et à établir des rapports directs 
les puissances étrangères. Mais les Ma'ares avaient de t0 
temps respecté trop peu les nationalités et sëtaient mont 
trop intolérants envers les autres races juxtaposées à lalem, 
pour que celles-ci ne profitassent pas de l'occasion de 
venger. Les Allemands de la Transylvanie, en{a'e autre 
portaient impatiemment le joug; les Serbes et les Croate, 
tic leur cOté, ddsiraient une réorganisation nationale. Dès 
mois de mars ces derniers prirent des mesures imporlav 
tes.'lis cltoisirent pour ban J e I I a c h i c h, et adresséren! 
gouvernement une série de'demandes, qui, basées, sm le 
ln'incipe de i'indépendance nation.ale, tuaient directemeg 



avec la constitution autrichienne. A cette proposition, une 
nombreuse députation de in diète honoise répondit, le 
septembre, par la présentation d'un contre-projet, dont 
l'adoption e0t équivain à la reconnaissance de t'indépen- 
dance honoise. Toutes les troupes qui n'étaient pas en 
présence- de l'ennemi auraient été renvoyées en Hongrie, 
et les Croates soumis aux Magyares. L'empereur aurait dù 
I sanctionner tontes les lois qui n'avaient pas encore reçn sa 
sanction et se rendre en Hongrie, après avoir éloigné de sa 
personne tous les ennemis de la liberté. La cour fit une 
réponse évasive, en mème temps que Je|lachich enlrait en 
. Hongrie. La position de l'archidun palatin, qui essayait 
de jouer le réle de médiateur, devenait insoutenable ; il 
donna sa démission, et quitta le royaume. En ministère, 
dissous, fut remplacé par nn comité de défense sous le 
présidence de Kossuth, et les préparatifs de guerre furent 
ti! poussés avec nne.nonvelle ardeur. La lutte s'était déjà 
gaée aoe¢ le ban Jeilachich, iorle l'empereur chargea 
i le baron Vay de composer un nouveau ministère, et envoya 
en Hongrie le comte Lamberg comme ommiire impérial 
Le meurtre de ce commisai.-'e surin pont d:Ofen (28 septem- 
 bre ) ft, le signal de la révolution. Les Hongrois vircut 

I:IONGRIE 
contraires dans leurs tendances au but que poursuivaient 
les Mage]arcs. Tandis que la diète de Pesth che«dait à 
séparer autant que possible la Hongrie du reste de la 
monarchie autrichienne, on s'efforç:dt  Agram d'arriver à 
une séparation complète d'avec la Honnête. Ces divisions 
amnèrent bientôt une guerre ouverte entre les Hongrois 
d'un cSté, les Serbes et les Croates de l'autre. Les deux 
partis essayèrenl, au mois de Juin, de faire valoir leurs 
droits auprès de l'empereur, qui résidait alors à Inprnck, 
et l'emperenr clargea en effet l'archiduc 3en n d'accom- 
moder leurs différends. La conduite des conseillers de l'em- 
pereur dans toute cette affaire n'a pas encore été claire- 
ment expliquée. Lorsque Jellacldch se rendit à Inspruck, 
il fut reçu avec bonté; mais peu de temps après, Iorsqu'il 
s' en retournait, parut un d:cret qui le déposa, bien qu'il 
soit certain que la cour impériale et le gouvernement sym- 
palhisaient plus avec lui qn'avec les Magyares. A l'ouver- 
ture de la nouvelle diëte hongroise, |e $ juillet I8, la 
situation était déjà fort critique. La Transylvanie ne sup- 
portait qu'à contre-coeur son unionavecla Hongrie, lesSerbes 
et les Croate s'armaient, les rapports avec la dynastie im- 
pédale étaient équivoqne; les Magyares eux-mmes étaient 
sous l'iniluence d'une extrême exaltation, et quelqes- 
un se laissaient emporter h des voeux extravagant% qui 
leur préparaient de terrible revers. Cependant Kosçntb 
sut vivifier le nouveau ministère et inspirer son enthou- 
siarne à la diète, qui, à la suite d'un brillant discours de 
l'agira{eut, nota nu impét de 42 millions de florins et une 
levée de 200,000 hommes. On se prépara à la guerre 
avec nne activité extrême; on organisa par{out des batail- 
lon de honvéds, on arma les forteresses, on Cit ,In 
lapier-monnaie; les demandes de concours adressées 
par l'empereur pour la guerre d'Italie farent éluddes, on 
travailla à délacher le« troupes bongroises de la politique 
impériale et à les rattacher directement à leur pairie, on 
chercha à nouer des alliances h l'étranger; en un mot, 
tout faisait prévoir une rupture. Il fallait ou que la mo- 
narchie autrichienne se décomposfit, ou qu'elle egngefit 
une, halte décisive contre la todance du gomernement 
hongrois à se constituer en État séparé. Le conseil de 
Fomperenr adopta ce dernier parti. Dès l'CWde ls4S tout 
se prépara por un sanglant coutil. Déjà la guerre, une 
gerre de races, avait éclaté en Hongde contre les Serbes. 
Les Croates se dkposaienl à y intervenir avec vigueur. 
Le ministère impérial, à sou tour, changea de politique. 
Le li aoOt il relira / l'arobiduc-gouverneur la pleine 
puissance qui faisait de lui le véritable représentant de l'au- 
torité royale. On proposa dans des conférences tenues à 
Vienne, comme moyen d'accommodement, la suppression 
des ministères de la guerre et des finances, incompatibles 

155 
dans les événements de Vienne une diversion tavorabw; 
mais ils ne purent donner aux Viennois le uecours qu'il 
leur avaient promis, après la alCaite'de $chwechat ( 30 oc- 
be ). La prise de Vienne, la formation, en novembre, du 
ministère $chwarzenberg-Stadion, l'abdication de Ferdi- 
hand, i'avénement au tréne de F r a n çoi s-Josepfi 1 « ( dé- 
cembre ta4a) devaient hter la décision du sort de la llon- 
grie. Avant la fin de l'année, l'armée impériale aux ordres 
de Windisehgrætz marcha contre I Hongrois, s'empara 
rapidement de la rive droite du Dannbe, boqua Komorn et 
Leopoldsiadt, et s'approcba d'Of,n, tandis que Sdfiik oc- 
cupait Kaschau. Les troupes hongroises étaient trop peu 
nombreu.es ; c'est à peine si ou avait pu les équiper, et on 
pouvait djà remarquer de dissidence» en!re les chef mili- 
laires et les chefs civils de la révolution. Kossutb semblait 
plus compter sur l'appui de I'«tranger cè sur une interven- 
tion diplomatique, que sur la force des armes. S,»us l'im- 
pression d'un premier mouvement de découraement, la 
diète essaya d'entrer en négociations avec Windischoelz; 
mais le général nuit!chien se berna à ff.pondre à ces ouver- 
tures en exigeant qu'on se souaJ: sans conditions. L'occu- 
pation de Bndapecth (5 janvier tM9) sembla lui douner 
raison. 51ai¢ les affaires changèrent Lienlét de face. Les Im- 
périaux avaient à lutter contre les rigueurs de la saison, et 
la déf«.ction des régimcnts hongrois sur laquelle il comp- 
taient, n'eut pa. lieu. G oe r g e i opSra avec beaucou p d'habil 
la retraite depuis le Danube ju«que dans les montagnes, et 
rédta avec avantage à toutes les attaques du corps de 
Schlik. La dnnlon «lui exisiait déjà entre lui et Kossuth 
éclata lorsque le Polonais D e m bi n  k i fut nommé général 
en chef. La dëfaile de Kapolna ( 7 février) fut le premier 
réulat de cette méçintellignce entre les cltefs, et amena la 
retraite le Dmbin«ld et son remplacement par Vetier. 
De divisions éclatèrent de mme sur le terrain de in petit- 
tique. En préence d,.s démocrales, à la tète desquels était 
Ko¢ulh, et de ceux qui voulaient concerner intacte la non- 
voile organisation de mars, existait un tiers parti, enclin à 
ach.ter la paix par des concessions. Ce. divi.ions affaiblis- 
saient le Magyare% sans que la guerre prit encore pour eux 
une leurre=re défavorable. Les Impdriaux ne surent pas pro- 
filer de leur victoire de Kapolna ; il firent peu de progrès, 
et se laiscèrent chas=er de quelques-unes des posilion« qu'ils 
occupaient, par exemple de Szolnok. Cependant, la lutte 
s'était a=ssi en,_,agéc en Transylvanie, où le Szeklers seuls 
tenaient le parti ,les a_y. arcs, andis que les Roumans et 
les Saxons s'étaient déclarés contre ex. Au mois de janvier 
189, le général polonais Bem y avait ouvert la campagne 
contre P,,chner, et avaitoccupé toute la partie septentrio- 
nale. Il fit, il est vrai, battu à Gru¢schener, le l janvier, 
et à Vizakna, le 4 février ; mais le 9 du mëme mois il defit 
à son tour les Impériaux prës de Piski. i l'entrée des Ru.ses 
dans la Tran¢ylvanie, ni une défaile que lui fit essuyer P=chner 
près de 51ediasch, ne l'empëcbèrent de marcher sur lier- 
mannstadt. Il y barrit les Russes, le¢ reponssa en Valachie 
et occupa Kron»tadt. La Transylvanie Cait donc tombée pres- 
que entiërement au pouvoir des 51agTares. Depuis la prise 
d'Ofen, l'armée autriohienne n'avait fait aucun progrès 
considérable, et la politique impériale n'avait pas été plus 
heureuse. L succès des armes hongroises avaient tiré le 
pays de son apatlde ; IC prëparatifs s'étaient ach«vés, les 
troupes se montraient pleines d'ardeur et d, confiance, 
surtout depuis que G<.rgei avait remplac Vetter dans le 
commandement en chef. Les Magyares purent donc prendre 
l'offensive et enlever à leurs ennemis les avantages de la 
compagne d'hiver. Une armée sous les ordres- de Perczel 
marcha sur la Bacska et le Banat, repeussa les Serbes, qui 
étaient divisés, et soumit presque entièrement ces pays, 
pendant que Bem conquérait la Transylvanie. Serrëe de 
près, la forteresse d'Arad dutcapituler; Karlsburg et Ternes- 
var, les seules places à peu près qui fussent encore au pou- 
voir des Impériaux dans tout le sud-est, furent assiégées. 
Les opérations de Goergei dans le nord në furent pas moins 
20. 



heureuses. A la fin de mars, les Magyares avalent Iranchi la 
Theiss et occupaient les lmpériaun dans les environs d'Er- 
lau, et dans le mme temps un corps de troupes s'avan- 
çant contre Géd0116 y battit les Autrichiens, le 7 aril. 
Un autre corps, commande par Aulicb, s'approcha de 
Pesth, tandis que Goergei courait au secours de Komorn, 
battait l'ennemi le 9 avril, et le Iorçaii à abandonner ses 
posilions. Tel Cail l'Atut des affaires lorsque Windisch- 
groelz fut remplacé par Welden. Les Magyares poursuivi- 
rent leurs succés, batlirent encore les Autrichiens à agy- 
Sarlo, le 19 avril, déhloquèrent Komorn, et un instant on 
put croire qu'ils allaient marcher sur Vienne. Mais ils pré- 
férèrent altaquer d'abord Ofen, qui succomba, après une 
vaillante défense, le 21 mai. La guerre insurrectionnelle 
avait atteint son apogée. 
Cependant le pays se trouvait en proie à une perturbation 
et une confusion de plus eu plus profondes. La majorité du 
peuple et de l'armée croyait sincèrement combattre pour 
le roi Ferdinand v ; du moins on regardait une réconcilia- 
tion asec la maison imp .riale comme le but de la guerre, 
tandis que Kossutb dirigeait les alfaires dans le sens d'une 
solidarit,: rëvolutionnaire. Il rêvait une constitution démo- 
cralique pour sa patrie; il songeait au rdablissement de la 
Pologne, et il trouvait pour ses projets d'ardent soutiens 
dans les nombreux émigrés polonais, qui occupaient dans 
l'armée des grades élevés. De la la mésintelligence qui régnait 
,.ntre lui et Goergei. Ce dernier, appréciant d'une manière 
plus juste les dispositions du peuple, s'opposait aux ten- 
dances révolutionnaires, et voulait arriver h un accommode- 
ment avec l'empereur. Sous ce point de vue politique, ses 
voe,x n'allaient point au del de la constilution de mars. 
En vain les deux rivaux essuyèrent-ils de s'entendre; le 
désaccord entre eux n'en devint que plus tranché. Kossuth 
tenta enfin un acte décisif, pour rëpondre à la constitution 
octroyée le t mars à to,t l'Empire. Il arracha, le 14 avril, 
à la diëte de Debreczin un dcret portant que la Hon- 
grie se déclarait indépen,lanle, excluait du tréne la maison 
de Habsbourg et confiait le» rnes de l'Etat à un président 
et "a des ministres responbles. Èlu lui-mme prési«lent, 
il forma, sous la présidence de Szemère, un ministère qui 
se déclara haulen,ent republicain-democrate et dévoué 
à la souveraineté du peuple dans toutes ses conséquences. 
Gcergei ne laissa rien paraltre de son mécontentement; 
mais il ne fut pas possible de cacher longtemps la désu- 
nion qui régnait cuire les chefs de la révolution, entre le 
gouvernement et l'armée. Goergei travaiilait à isoler Kus- 
suth et à éloigner les Polonais ; Kossuth, à son tour, es- 
saya d¥1oigner Goergei de l'armée, eu le nommant ministre 
de la guerre. 
L'Autri«he, de son cété, avait réclamé l'intervention de la 
Russie, ci l'avait obten,e d'autant plus facilement que la 
Russie devait se considérer comme menacée elle-reCe 
par une insurrection dirigée en partie par des gnéraux 
polonais. Une division russe sous les ordres de Paniutine 
vint se joindre à l'armée du Danube commandée par H ay - 
nau, le nouveau généralissime autrichien ; un autre corps, 
commandé par Liiders, devait soumettre la Transylvanie, et 
l'armée principale, forte d'environ 130,000 hommes, péné- 
trer en Hongrie par la Gallicie, sous les ordres de Paske- 
wilsh. Le 19 juin, le corps de Liiders entra dans la Tran- 
sFIvauie par le défilé de Rothethurm, défit les Magyares 
et occupa llermanustadt, pendant que, au sud, les Au- 
trichiens se rendaient maltres de Kronstadt, en juillet. Se 
portant de la Bukovine dans le nord de la Transylvanie, 
les alliés en chassèrent Bem après divers engagements 
malheureux, et le battirent pres de Scboessburg, le 31 juillet, 
après une inutile tentative de diversion en lIoldavie. Ce- 
pendant Bem réussit à renlrer dans Hermannstadt, le 6 
aoùt ; mais il dut bientét l'évacuer, et la Transylvanie lut 
«le nouveau perdue pour les 5lagyares. Jellachich ne lut 
pas aussi heureux dans la Bacska. 11 remporta d'abord 
des avantages sur les Magyares, hattit Perczel, le 7 juin, et 

ttO_NGRIE 
investit Pe[erwardein ; mais bien[ét après, ,ra«l capitula, 
et, dotait près de Hegyesch, le l-I juillet, il dut abandonner 
la Bacska. Cependant, vu l'iu,:galité des forces, la lutte ne 
devait pas tarder à se décider. Tandis que la grande 
mée russe s'avançait par Epériés et Kaschau çers la grande 
Plaine de la Hougrie, Haynau commença ses opérations 
sur les deux rives du Danube. Goergei était alors en com- 
plet désaccord avec Kossuth. Refusant d'obéir aux ordres 
du gouvernement et de concentrer ses troupes derrière la 
Theiss, il résolut de soutenir la guerre dans les environs 
de Komorn. Frappé de destitution, il s'appu}'a sur la con- 
fiauce de l'afinC, et resta à sa tle, sans atteindre toute- 
fois le résultat qu'il avait en vue. Le 9. et le 11 juillet il 
livra de sanglants cmnbats près de Komorn; mais il ne 
rnssil pas ì rompre les lignes des Autrichiens, et il se vit 
contraint de se replier sur la Theiss et sur Szegedin, oh 
le gouvernement s'était réfugié. Quoiqu'il eut conduit habi- 
lement cette retraite, une catastroplm était inévitable. L'ar- 
mée impbriale avait pris avec succès l'offensive; Raab fui 
emporté, Ofen et Pesth occupés. Goergei lui-méme ne ca- 
chait pas sa conviction qu'il n'y avait plus à espérer qu'une 
capitulation honorable ; et c'est dans ce sens qu'il répondil 
aux propositions des Russes. Cependant Hayna avait quith 
les bords du Danuhe, et s'approchait de Szegedin. Le gou- 
vernement s'enfuit eu toute hhte. Après avoir pris possession 
de la ville, le gnral autrichien défit Dembinski ì Szoereg, 
le 3 août, et remporta, le 9, près de Temesvar, une vic- 
toire complëte sur le général Bem, qui avait Cé rappelé de 
la Trans)lvanie. A la suite de ces défaites, il était presque 
impossible que Goergei, avec ses 20,000 hommes environ, 
prolongeàt la résistace. Tandis que les politiques mettaient 
habilement en avant le plan d'appeler une dynastie russe au 
tr6ne de Hongrie, les débris du gouvernement et de la dièle 
fuyaient ì Arad, où Goergei conduisit ses troupes. Kossuth, 
convaincu enfin de l'impos.ibililé de continuer la lutte 
donna sa démision, et céda la dictature à Goergei, le 11 
aoI. Le conseil de guerre du nouveau dictateur se prononç« 
pour une soumission absolue; et le 13 fut signée la capitu 
lation de ,'ilgos avec le général russe iidiger. Les autres 
corps hongrois furent dispersés ou se refugièrent en Tur- 
quie. Les forteresses se rendirent l'une après l'autre, ex- 
cepté Konmrn, que le brave Klapka défendit jusqu'à l'au- 
tomne et qu'il ne rendit qu'au mois d'otobre, après avoir 
obtenu une capitulation honorable. 
On avait esperé qu'en se soumettant à un général russe, 
ou sec'ait traité avec moins de rigueur; mais cet espoir 
fut déçu. Dans cette circonstance, comme toujours, Goergei 
se laissa conduire par ses senliment personnels pl,dét que 
par un patriotisme CairC Les Impériaux, qui avaient sur- 
tout conlribué à terminer la guerre, durent voir avec 
deplaisir les Russes traités en vainqueurs. Haynau, investi 
de la dictalure, donna libre cours aux vengeanees. Dés 
le commencement d'octobre, Pesth et Arad furent témoins 
du supplice de Louis Batthanyi, Igagy-S.'indor, Aulich 
P61tenberg, Leiningen, Damjanics, Kis, Lazar, Tér6k, sa- 
crifiés aux ressentiments d'un vainqueur impitoyable. La 
loi martiale, à laquelle fut soumise la Hongrie, lut exécutée 
par llauau avec une sévérité sanguinaire, jusqu'à ce que 
le ministère impérial révoqua les pleins pouvoirs de cet 
homme enterWet capricieux (juillet 1850). Les restes de 
l'ancienne constitution hongroise disparurent avec la nou- 
velle. La Hongrie fut complétement assimilée aux aunes 
parties de la monarchie. Le régime de [er qui pesait sur 
elle reçut quelque adoucissement lorsque l'archiduc-AI- 
bert e fut nommé gouverneur (automne de 1851 ); ce- 
pendant, ce lut seulement l'année suivante, à l'occasion du 
voyage de l'empereur, que les conseils de glerre furent sup- 
primés et une anmistie partielle accordée. La situation du 
pays était encore bien sombre. Des bandes de brigands le 
parcouraient en tous sens. L gouvernement n'en poursulvit 
pas moins ses plans d'incorporation du oyaume. A cet et'- 
let il créa tout un nonveeu système Irpothécaire, basé sur 



BONGBIE 
la réformation du cadastre, en mtme temps que l'adminis- 
tration civile et l'organisation ]udiciaires «taient amendées 
d'après les principes adop dans le reste de l'empire, et que 
le code autricUien était mis en vigueur. La force du mag.va- 
risme et du parti dcmocratiqne a été ainsi brisée; mais à 
en juger par certains sympt6mes, l'étincelle couve sous la 
cendre. Les vieux conservateurs, qui avaient combattu 
Kos.uth, sont loin d'ètre satisfaits de la complète fusion de 
la Hongrie avec l'empire d'Autriche. Cependant, tout en 
violant les traditions nationales et politiques, le gouverne- 
ment a opéré des amélior'ations matérielles qui doivent atta- 
cher les bourgeois et les paysans au nouveau système. Con- 
sultez Gebhardi, Histoire de Hon9rie (Leipzig, t778-t782, 
4 vol.; Fessle'r, Histoire dela Hogrie et de ses Habitants 
(Leipzig, 2 e édit., 187-t850, t0 vol.) ; Enge, Histoire du 
royaume'de Hongrie (Vienne, 183, 5 vol.); Mailath, 
Histoire des Magyares (Ratishonne, 1852 et suiv. ). 
Littdrature. 
La littérature hongroise reflète fidèlement le caractère de 
la nation, ainsi que ses destinees; cela seul suffirait pour 
lui mériter l'attention de l'Europe occidentale, lors mme que 
le royaume de Hon3rie et son développement intellectuel 
n'auraient pas acqds une inlluence décisive sur une question 
d'un intcr6t capital pour l'Europe. Deux élémenls, le latin et 
le magyare, auxquels on pourrait adjoindre l'allemand pour 
une part modeste, mais importante, dominent tout le déve- 
ioppement intellectuel de la Hongrie. A peine les Magyares 
se lurent-ils solidement établis dans la Pannonie, et eurent- 
ils constitué une espèce d'État par t'adoption de la forme 
monarchique (an t000), qu'Étienne l  y introduisit l'ciC 
ment latin, par sa conversion au christianisme, et l'ciCent 
allemand en épousant la princesse bavaroise Gisèle. Êtienne 
trouva dans les grands dignitaires de l'Empire d'Allemague et 
dans les missionnaires catholiques d'excellents alliés pour 
neutraliser en partie la résistance que la royauté et le christia- 
nisme rencontraient dans les sentiments oligarchiques et 
païensde la majorité de la nation ; au,si recommanda-t-il à 
ses successeurs de prendre pour guide sa devise : Uril«s 
liguœe uhi«sq«e rnoris regum imbecille et ri'agile est. 
Ils lui ohéirent tidèlement en favorisant le cergé et en atti- 
rant des coloris étrangers, principalement des Allemands. Ce 
qui [avorisa encore le developpement de l'ciCent latin, c'est 
que toute la science était entre les mains du clergé, la no. 
blesse s'occupant presque exclusivement du métier des armes. 
L'élévation du clergé au premier rang parmi les ordres de 
l'État, l'introduction de la langue latine substituée à la lan- 
gue nationale dans tout ce qui regardait le culte, les procé- 
dures devant les tribunaux et la rédaction des documents 
authentiques ou de tous les actes légaux, provoquërent une 
opposition qui se calma insensiblcment grtce à la sage po- 
litique des princes de la maison d'Anjou. Dans les siècles 
suivants, surtout sous Mathias I , l'idiome national rentra 
peu à peu dans ses droits, et on put dvjà remarquer alors 
les premiers symptômes d'une vie littéraire, biais au mo- 
ment où la réformation, se répandant avec rapidité en Hon- 
gie, semblait vouloir compléter la victoire de l'élément 
national, le royaume tomba sous la domination de la maison 
de Habsbourg, qui, dirigée par les mmes principes que les 
premiers rois indigènes, favorisa l'élément latiu aux dépens 
du honois, en mème temps que les rapport« politiques 
avec l'Autriche donnaient à l'éiément allemand un accès tou- 
jours facile dans les classes moyennes. Cette compression 
de l'élément national arrëta d'un c6té le développement de 
la civilisation générale du pays, et de Pautre, en consti- 
tuant la iittérature latine à l'état de privilége exclusif en 
faveur des classes élevces, seules en possession de droits 
politiques, elle en fit le véritable levier intellectuel de l'État. 
L'élément honois se développe donc d'une manière incom- 
vlète, et se tint timidement h l'écart jsque dans la seconde 
moitié du dix-huitiëme siècle, époque oi la domination jus- 
qu'alors exclusive du latin fut d'abord ébranlée, sou» Marie- 

157 
Thérèse, pui. finalement détruite sous Joseph II, par le gou- 
vernement lui-mëme, au pr«/it de l'éément allemand. Mais 
dès lors aussi la langue hongroise commença à reven,liquer 
énerquement ses droits ; elle s'ernpara dc position laissées 
libres dans la vie politique et litre.raire, et se produisit au 
grand jour dans toule la force et la ri'nichent de la jeunesse. 
Qtant à l'instruction supérieure, dès le oitzi«ue siècle il 
s'établit «n Hongrie un grand nombre dëcoles de couvent 
et d'écoles épiscopales; et dès le douzieme qoelques Honois 
se rendaient/ Paris pour sui ,'e les cours de l'univer.ité. Au 
commencement du treizième la première école supérieure, 
studi:m 9eerale, f«t [ondec à Ves»prim ; on y enseignait 
non-seulement les arts libêrau, mais la théologie et la 
risprudence. En t87 cette école tut reorganisee par le roi 
Ladislas IV, qui la dota d'une bibliothèque et de riches 
revenus. En t367 le roi Louis 1  fonda une nouvefle univer- 
site à FUnfkirchen, et en 1388 Sigismond ctablit une nou- 
[ relie acad«.mie, studium 9ewrale, à Ofen. Mathias Cor- 
vin, qui ériea, en 1.167, à Presb,»urg l'acadcmie tropoli- 
laine, fit don h l'école d'Ofcn, quïl agrandit, d'une biblio- 
thèque célëbre. Ds 1473 Andre Hess fundait ì Ofen vne im- 
primerie, des presses de laquelle sortit le Ch roico Budense. 
Dans le seizième siècle les écoles se multiplièrent en IIongrie 
et en Transylvanie d'une man!ère extraordinaire, surtout 
parmi les protestants, qui fréquentaicnt d'ailleurs en grand 
nombre les universitcs de l'Allenagne, ,le la llollande et de la 
Suisse. Dans le dix-septième siècle les jéuites fonderent 
leurs écoles de Tyrnau, Presbourg, Kascha.t et Klauenburg. 
La première, qui devint universite nationale après lasuppres- 
sion de l'ordre de Loola, fut transf,.ree  Ofenen tT0, puis à 
Pesth en t 7S. Très-peu de temps aprcs, cinq academies ïurent 
établies à Pre.bourg, Kaschau, Baab, Grosswardein et Agram, 
consistant chacune en deux F,cultcs ; sans compter un 
fo)al qui lut créé  Klausenburg, nn i.cée archi,.piscopal à 
Erlau, et un lyc«e ëpiscopal à l=unfkirchen. A l'exception de 
la Société Danubienne, Iondce en t97 par Conrad Celtes, 
les sociétés savantes curent beaucoup de peine à sïmplanter 
dans la Hongrie et la Transylvanie. C'est en tS27 seulemet 
que la diète ordonna la fondation d'une sociëte savante, qui 
I depuis son établissement (t7 noxembre t830)a rendu 
d'incalculables services à la littrature nationale. La Hon- 
grie et la Transylvanie ont produit un grand nombre de 
savants, qui écrivirent en latin »ur toutes les branches de la 
science. On a des chroniques, des annales de Hongrie, en 
latin, remonlant aux temps les plus reculC; une foui., de 
ces documents, précieux sans doute, sont encore enfouis daus 
les archives, tandis que beaucoup d'autre» ont péri au 
milieu des guerres civies. Parmi ceux qui ont été impri- 
reC, nous citerons l'ano9mus Belœe re9is .Yotarius, 
Simon Kéza, Calanus, Thomas Spalatensis, Bogerius, Jean 
de Kikell et Laurent de Monacis. A dater de la fin du 
quinzième siècle, parmi le» Idstoriens ou chroniqueurs les 
plus remarquables, on trouve non-seulement des étrangers 
établis en H,mgrie, comme Bonlinius, Galeotus, Banzanus, 
Ursinu, Brutus, Taurinus, Laszky, ,Verner, Lazius, Ilici- 
nu, Sommer, Gabelmann, T'potius et Eus ; mais surtout 
des indigènes, tels que J. Thurotzius, Tubero, Flacius, 
Brodericus, Zermegh, Listhius, Yerantins, Forgacs, .Nadasi, 
Fr61ich, Batkai, Jean et Wolfgang, comtes de Bethlen, Lu- 
cius, Toppeltinus, Haner, l',lart. Szentivany; en ce qui 
touche la médecine et les sciences naturelles, on cite les 
noms de Clusius, Kramer, Perliczy, Mollet, Jessenius, 
Torkos, Molmir, 5Iitterpacher, Piller, Kle.ëri, Wezpremi, 
layger, Parizpapai, Benk6, Poda, Born, Hedwig, Lumnic- 
zer, Kictaibel, Grossinger, J.-B. Horvfitb, Domin, Panki et 
Schraud. 
Daria, Peurbach, Dudith, Bos c or i c h, Szentivdnyi, Be- 
rényi, Segner, Hell, Mak6, J.-B. Horvhth, Pap. Fogarasi, Han- 
derla, Mikovinyi, Rausch et Aug. lloszgon)-i se sont fait con- 
naitre par leurs travaux sur la philosopltie et les mathéma- 
tiques. Parmi les poëtes et les orateurs les plus distingués on 
doit mentionner Janus Pannonius, .ean VitC, Barth. 



,ous. Jaeqnes et l.lienne PJso. Zaikàn. Olahus. François 
ltnnadi, Szentg'y6rg.,i, Bekényi, Schesœeus Lg emer 
Uncius, mbucus, T0, Kasi, Filitzky, Dobner, Baj, 
ak6, Faba, Hanulik, Pafiya, Zimani,Soerdahel)i, 
ic. Revai, Doeffy et Caflvoszky. Tous  ho, dont 
la reputation s't répandue mème à Iëtranger, n'aoent 
pourrit que sur une seule clame, les gens insti et les 
gens d'6glise ; leur mépris de la lane nationale fut ouse 
que la culture intelltuelle de la nation rm fi to arriée, 
que sous Lasl Il ( 1491 ) la plupart des ands diitair 
du royaume ne savaient enoere ni lire nioefire, quoique reru- 
dition 6trangère efit dejà tait de gran procès en Hongrio. 
La litterature nationale ne se d6vdoppa nc que tre 
lentement. Le masure n'6t plus d'usage que dans les 
rations commerciales, les oemps, l réunions de famille, 
les fês publiquoe., et jusqn'a un oein point dans 
assemblees de comitats et dans la diète. Les prêtres et 
mimionmirm Crangera, lomqu'ils parlaient an peuple en 
latin, devaient avoir  c6té d'eux un interprè pour tra- 
duire leurs discours en langue vulgaire; cependt les 
clesitiq«es indignes se servaient de la lan:ue matmelle 
dans racoemplissement de certaines fonctions. Ils s'est 
c«nseé des traces d'anciens cbants de guerre, des tra- 
cteurs.de chats populaire, et des serinons ; il t uestion 
dans les aales dfi C'ant Joeulatorum et Tru]]tom. 
1 a préfaoe du decret de Kolom dans le Gorpus Jur 
Hztngarioe potée expreément qu'il a 6 traduit ,lu hon- 
grois, et on préteud que la bulle d'or d'André I1 iste - 
cote dans l'orinai honois. C'est sous le gouçnement 
d rois de la maison d'jon seult q la langue du 
pays et aee elle la iitterature nationale prirent un eor 
plus bre. Le latin rta toujours la langue ecelcastique 
et officielle ; mais le hongrois fut emplo)é plus fréqu- 
ict qu'aupara+t, fi dexint la lue de la oeur; la 
plupart des dames de la oeur éient même d Honoises. 
Charles-Robert fit elever a sa our la fioee de son fils, 
et le ro Louis ses drux ndres iuturs, afin qu'its se fi- 
liafiasent a ce les mœurs et la lgue du pays. On 
git drj en hongrois d act publics et des lettres ; 
de oette poque que date la formule de seent, écri en 
lgne hongroise, qtU se lit enoere da le Corpus Juris 
ungaroe. On commença mënae h traduire les Sat Ecfi- 
lutes en langue xulg,dre, e le prouve un mmerit do 
l'annee 1382 qu'on oensere  la bibliotbue imp«.fiale da 
Vienne. Plus tard la Bible fut mtes foh traduile, entre 
autres par Ladislas Bathofi,  143% et par Bertalan en 1508. 
Apr de parel tentatives, Jus Paonius pouvait se 
ha»arder à oemposer e ammaire hooise, qui 
cependt perdue. 
Aveo le oe:ziçme siècle eommenoe e 6poq plus ta- 
xorable po la fittérature honoise. L mouvements po- 
tiqtm et surtout religieux qui latèrent soin i r 
de Ferdind I  et  Maximilien H (1627-176) eurt 
les rultats les plus beureux sur la culture tdlectuelle du 
peuple et le déeloppement de sa litterature. La rëioa- 
tion, qui s'introduisit de la BohSme ds  Honnie, 
l'exemple de cet t voin, l'aBiee intime q exisit 
entre les deux pays., irent d'une mièro viifiante sur 
bras i espts. Employée data 1 disl,ut releu 
ns les lis, dans les 6coles, dans les çhants de guee 
et dans I cbants populr, la langue nationale s'enfielfit, 
se polit et at  dré de pffion, engie, qu'elle 
ne dépa plus avant 1780. On travla à imtruire 
peuple data  propre lae ddte de antr. 
OEt m oe but qe it rcdigs les çhronu hon- 
ois de Skely ( 1559), de Temesvfi { 1569 ), de 
(t72), d8 PothO, dont le nom vérimblet Zrinyi (1660), de 
Bba ( li ),. de szny ( 1696 ) et d'auto. LOe 
fions d livr saiu en langue bonoise devoe de plus 
en plm.nomeuParmi les adu¢toas de laBible ondoR 
cicr oe de Komjfi (Craoevie, l 33), Pti (Vien 1 6), 
Erdi ou $ylvtre (Ujszigeth, 1$tl ), Heltai (Klaunb. 

HONGIIIE 
1,6 ),.Sz6kely ( Cracovie, t54s ), Juhz ou Melius 
bre¢zin, 1565), Félegyhazi (Debreczin, 1586 ), Karolyi ( Yi- 
sol}', 1590), Aih. MolnAr (Hanau, 1608 ), Kéldi (Yienne, 
169.5) ; celle qui fut publiée par une société de théologi.ens 
protestants (Grosswardein, 1661 ), celles d'Esipkés Kom'- 
romi (Debreczin, 1685) et de Totfalusi (Amst., 1685), qui 
ont été réimprimées, même  l'étranger. De spiritnels ora 
teurs se produisirent : Gaal vers 1556, Jnbmz ve 1563, 
Davidis en 1569, Kult.r en 1574, Bornemisza en 1575, 
Telegdi en 1577, Detsi en 158., KArolyi en 1584, Pzmfin 
en 160, Ketskemeti en 1615, Zvonarits en 1625, Kopt- 
sanyi en 1630, KAIdi en 1630, Martai en 1632, Alvinlzy 
en 1738, etc. Dans la poêsie sacrée se distinguèrent Székely, 
Bornemisza, Batizi, Pétsi, Ujlalvi, Skaritzai, Fabrieius, 
Fazékas, Aih. Moinar, Gelei, Dajka et Megyesi. Jamais on 
ne eomposa en plus grand nombre quia cotte époque des 
chants populaires destinés à rappeler les exploits des béros 
indigènes,  raconter les ieilles histoires ou de vieux contes. 
Parmi ceux qui se distinèrent surtout dans ce genre 
de littëralnre, nous mentionnerons Tin6di (vers 150), 
Kikonyi (15-19), Tsamidi ( 1577 ), Valkai ( 1572 ), TsAktorny 
(1592), Trényi, Szegedi, Illësfalvi, Sztary, Fazékas 
(1577), Balassa, Illosvai, GosarAri, Veres, Enyedi, 
Szoelltesi (150), etc- La poésie epique prit également un 
puissant essor; nous eiteruns les poemes du comte 3iklas 
Zrin.i (1652), de Ladislas Lissthi (1653), de Christophe 
Pask6 (1663), du comte Ëtienne Kohary (1699), et sur- 
lout les œuvres nombreuses d'Étienne de Gy6ngy6si (t66t- 
173t), un des poëtes les plus remarquables de la Hongrie. 
Dans la poésie I.rique, Rimai, Balassa, Benitzky et d'au- 
tres se sont fait un nom célèbre. Le code honois redigé 
en latin par Eenne Verb6ez., fut traduit en hongrois par 
Biaise Yeres (1561), Gaspard Heltai (1571), Jean d'Oko- 
litsanyi (16t8), etc. En 1653, Jean Tsere (Ap/dzai) pub|la 
meme une Eneyclopedie de toutes les sciences, qu'il fit 
suivre ,l'une loqne en langue hongroise, en 1656. On ne 
négliga pas non plus la grammaire de l'idiome magy.are, 
comme le prouve la publication de nombreuses grammaires, 
de dictionnaires et d'antres omrages de philolo_e, tels que 
la Nomenclatura de Gabriel Pesti (Vienne, 1538 "et 1561 
la Grammaire d'Erdoesi ou Sylvestre (Ujszigelh, 153), le 
Lexicon de Calepin, avec explications en hongrois ( Lyon, 
158 ); les Dictionnaires de Fabriciu ou Kov/ds (Debreeziu, 
1590), de Yerantius (Yen., 1595), d'Mb. Molnar 
remberg, 160t); les Grammaires d'Mb. Molnar { Hanau, 
1610 ), de Gelei Katona ( Kartsburg, 16-5, d'Eipkés Ko- 
m/tromi (Utrecht, 1655 ), de Pereszlén?i (Tyrnau, 168"2 ), 
de Koevesdi ( Leutschan, 1690 ; et Kaschau, 1766), |e 
Origines Hungarioe. d'Otrokotsi Foris- (Franeker, 1693) 
l'Ortographe de T6tfalusi (Klausenb., 1697), enfin le ce- 
lëbre Dictionariura de Parizpipai ( Leutschau, 1708 ; sou- 
vent réimp. ) et les Principes de l'orthographe hongroise 
de Tetsi. 
Mais- cette littérature si pleine de séve, si vigoureuse 
dans ses développement, fut bient6t étouffee, parce qtt'en 
Hongrie, comme en Bohème, la langue nationale etait con- 
sidërée comme la source des heresies et des révoltes; seule- 
ment, en l-longrie on ne proeéda pasconh'e la littéraurena- 
tionale avec autant de barbarie qu'en Bohême. La période 
qui s'écoula de 1702 à 1780 fut donc le siècle d'or des écri- 
vains latins. Dès. 1721 parut en latin la première gazettequi 
se publia regulièrement, et dès 1726 la langue latine fut 
employéedans la rédaction du Schématisme de l'Etat (al- 
manaoll d'adresses). (Yest dans cette période que rivalié- 
rent d'él.wance romaine les écrits de Hidi, Hevenesi, Czwit- 
tinger, Kazy ,. Tarnétzi» Mathias et Charles Bel, Prileszky, 
14uszty, Szegedi, Desericius., Stilting, Bajtai, Timon, Pe- 
terlfi, Kaprinai, Kolldr, Ladisl. Thuroetzy, Sehmitt, 
Bod, SzIsaky, Schier, Severini, Bentzur, Pray, Cornides, 
G.etto, GAn6oEy, ovk., Salgi, Katona, Kerchelich, 
Palma, ,«agne¢, Seiwmwiner, Kovae}fieh, $Veszpremi, 
Horfinvi-tc. Parmi ceux qui ée.a'hirent en bon'ois se dis- 



ItO_N G RIE 
tinguèrent lranç. Faludi, ,braham Bartsai, le baron 
runz Ortzy, Georges Bessenyei, Alexandre Bt¢otzi, le 
comte Ad. OEeleski, le baron Étienne Daniel, Paul hnyos, etc. 
Cet état de choses se prolongea presque jusqu'à la fi du 
règne de Ma¢ie-Thérèse, off- produisirent deux 
ments qui exercèrent une influence décisive sur le déve- 
loppement de la vie intellectuelle en Hongrie, et qui curent 
l'un et l'autre leur oigine dans esréfovmes de Joseph II. 
Le contre-coup de la réiorme de l'instruction publique en 
Autriche se fit sentir en Hongrie et enflamma les esprits 
d'un autre coté, les elforts de Joseph 11 pour abolir la 
constitution honoise, et ses mesores pour gevmaniser le 
pays, mirent tout en feu dans le royaume. Dès lors la 
nationalité et toutes les questions qui s'y ratiachent forent 
à l'ordre du jour, et elles y nt testCs jusqu'/ ce jour. Les 
luttes que ces questions provoquèrent d'abord contre le gou- 
vernement, puis contre les nations qui n'etaient pas d'origine 
magyare, furent ries plus violentes ; elles ne s'apaisèrent 
jusqu'a un certain point que quand la langue m,,yare fut 
devenue la langue du gouvernement et que la littérature 
hongroise eut conquis la première place. 
La nouvelle période de la litterature hongroise commence 
au règne de Joseph Il et h la révolution française : elle est 
politique dans ses éléments comme dans ses tendances. 
Les premiers indices du génie moderne se firent remar- 
quer dans la diète et dans les asmblêes de comitats. Les 
débats de ces dernières assemblées ne pouvaient être im- 
primés; aussi la littérature de cette première époque ne 
¢omiste-t-elle que dans les procès-verbaux des assemblées. 
En 17st, le savant Iathias Rtb parvint à fonder à Presbourg 
la première gazette hongroise. Faible et pille d'abord, la 
rédaction prit plus de vigucur à mesure qu'elle excita da- 
vantage l'lutCêt et que la concurrence augmenta. Bient5t 
naquirent quelques maigres brochures, et cette espèce de 
littérature se sontint mème pendant la guerre. ,près la 
conclusion de la paix, et surtout depuis s20, l'agitation 
redoubla dans les congrégations de comitats et les diètes. 
Diffcrentes lois et divers r/glements furent wotés par la 
diète, lesquels donnèrent une énerque impulsion in la lit- 
t$rature nationale, en mme'temps qu'ils développèrent et 
étendirent l'usage de la langue vulgaire. Il fut ordonnéque 
la langue magyare serait enseiée dans toutes les écoles 
sans exception ; qu'elle serait employée dans tous les actes 
publics, politiques et juridiques, qu'elle serait la lanmae de 
tous les employés du gouvernement. Dans beaucoup d'é- 
coles certains coors commencèrent à se donner en bon- 
grois; un tbétre hongrois s'établit à Ofcn et un auh'e à 
Peth ; l'amour de la lecture, de plus en plusvif, fit naitre 
plusieurs publications périodiques, le Mindenes Gyite- 
rnény, l'Orpheus, le Kassai Mu:eum, l'Urania, etc.; 
des prix forent fondés pour les ouvrages littéraires les plus 
importants. Des hommes de talent ne lardèrent pas à 
paraltre, et leurs efforts réunis imprimèrent ,m grand es- 
sor à la liftArature hongroise. On fonda des revues purement 
littéraires, la 1Vyelvmivel6 Tdrsasd9 munkdi , l'Erddlyi 
3lu-.eum, l'utile Tudomdnyos GyiOterndny. David Szab6, 
Bajinis, Beregsz,4szi, Garnmthi, Aranka, FÇIdi, BenkÇ 
Kassai, Pethe, Szentpdli, B6jthi, Yerseghi, Virg, Réuni, 
Ëtienne de Horv;ith, et Jean M.4rton rendirent d'impor- 
tants services à la ammaire de la langue magyare. Dans 
la poésie se distinguèrent David Szdbo, Joseph Bajinis, 
Gabriel Dajka, Georges Aranka, Charles D6me, Jean Bat- 
snyi, Joseph Tak;its, AndréHorx-,Mh, mort en 1839, au- 
teur du premier poëme épique en langue magyare (Arptid, 
Pesth, 1830)_, le comte Joseph Teleki, le comte Ladislas, 
Teleki, le comte Jean Fekete, Joseph Mitysi, François agy, 
François Verseghi, Joseph Kovdts, Benolt ViVag, Jean Kis, 
hlexandre et Charles K i s [ a ! u d y, de qui date l'ère nom'elle 
du théAtre hongrois ; Gabriel Dfibriintet, Paul Szemere, .',li- 
chel Csokonai, Ladislas T6t, Daniel Berzsen).i et Michel 
Yitkovits. Les prosateurs qui ont rendu le plus de sernces 
sont André Dagonits, François Kazinczy, Benoit 

159 
Jean Bat¢;inTi, François Yerseghi, Esaïe et -François 
dai,-Samuel P,4pai, François T4t, Gabriel Bthori, Georges 
FuiC, Etienne M,4rton, Daniel Etsei, Paul Siv;iri, Joseph 
Takgtts, Jean Endrbdi, Szik.¢zai et son fils Benjamin, 
SAthm,4ri, Jean.-Georges Somosi, fagda, KSvi, lmre, 
Georch (G6rtsell) et Mokri. D'autres écrits orinaux pleins 
d'lutCêt ont été publiés non-seulement par des savants, 
tels que '_Nyiry, Slemenits, Szsz, Kllay, G..-6ry, Ba/za, 
Guzmits, Szemere, Schedel, Kerekes, etc., mais par des 
gen»du monde, comme les comtes Etienne Széchéni, Aurel 
Desev,.ffy, V;esselényi, le baron JSsika, .M. de F,4y, etc. 
Des documents relatifs à Pbistoire littéraire ont été mis au 
jour, en langue hongroise, par Spang,4r (vers 1738), Bod 
(1766}, findor, Budai, P.'ipai, T6t, Janltowics, etc.; en 
latin, par Czwittinger, Rotarides, Bel, Schier, Ylaner, 
Scbmeitzel, Veszprémi, Prag, ,allaszk.v, S|mondricb, Bel- 
nai, Tibold, etc.; en allemand, par Vindisch, Seivert, 
Kovachicb, Engel, "Fesseler, Miller, Schwartner, Schedins, 
Lttbeck, Roesler, etc. 
Cependant la littératore n'exerçait encore son influence 
que sur une petite partie de la nation, sur la classe éclairée; 
car l'aeademie, fondée en 187, n'avait pas porté tous les 
fruits qu'on en esperait. Elle ne commeaça à se répandre, à 
se populariser, qu'à l'apparition du journalisme, qui, sous le 
point de vue politique et mSme littéraire, a joué en Hongrie 
un r61e plus important que dans tout autre pays de l'Eu- 
rope. On peut regarder comme le créateur du journalisme hon- 
g-rois Louis Kossuth, qui le premier traita dans son Pesti 
Hirlap, de 18fl à 1846, les questions les plus aves, les 
plus importantes pour la patrie, dans un style à la lois 
élégant et populaire, clairet attachant, et qui répandit 
ainsi dans toutes les classes de la société un attachement 
de pins en plus profond pour la vie nationale, en même 
temps qu'il ranima et enrichit la langue vulgaire. Le 
dapesti Hirado, et d'autres journaux, tout en combattant 
le esti Hirlap sur le terrain de la politique, marchèrent 
sur ses traces dans le champ de la littevalure. La Hrnoe-, 
le 1Veto:cri [st9, le Jele»kor, et tous les vieux journaux 
qui jusque là s'étaient contentés d'euregistrer les evéncments 
politiques, rivalisèrent avec leurs jeunes concurrent% et 
contribuèrent aussi à hgter le developpement «te llt x-te 
littéraire. A coté de ces journaux se fondèrent des re- 
vues hebdomadaires uniquement consacrées à la littërature, 
et qui accrurent singulièrement les tresors litteraires de la 
nation. Un autre fruit non moins utile «le la presse quoti- 
dienne urent ces almanachs politiques et litteraires qui, 
comme l'Ellenoer, l'Emleny, l'oErangya?, etc., introdui. 
sirent le goret de lecture même parmi les femmes. Mais 
les rapides progrès du journalisme curent des resultats 
très-heureux, ils en curent aussi de funestes, en ce qu'ils 
absorbërent toutes les forces intellectuelles et arrêtèrent 
ainsi le développement d'une littérature d'une valeur plus 
réelle. Les seuls travaux d'un mérite solide que l'on puisse 
citer dans cette période sont les écrits sur l'ëconomie po- 
litique et les voyages de Coetvoes, Széchényi, Szalay, Trefort, 
Szemere, Pulky, etc. ; les ouvrages historiques d'Ëtienne 
et de Michel Horvdth, de Szalay, de Jaszay, etc. ; les tra- 
vaux pbiloloques de Fogarassy et de Bloch, et les écrits 
de statistique de Fénves. La littérature des sciences exactes 
ne présente guere que des traductions de l'allemand, de 
l'anglais et du français, et elle ne se fait ère remarquer 
que par une tendance visible à magyariser toutes les expres- 
sions techniques, tendance évidemment pins propre à dé- 
populariser la science qu'a en taciliter l'intelligence. D'un 
autre cOté, cependant, l'excitation produite par le iournalisme 
sur la jeunesse instruite, et le goOt pour la lecture qu'il fit 
naltre, agirent d'une manière tr-favorable sur les helles- 
lettres, qui en quelques années firent pins de prom'ès qu'elles 
n'en avaient fait en des siècles. Les nouvelles et les romans 
du baron J6sika, qui prit pour modèle Walter Scott, les 
ouvrages de Coetvoes, ce Kemény, etc., qui imitèrent 
plutOt les écrivains de l'Allemagne, les écrits de Kuthy, 



a, Plffy, elc., qui copièrent la maniére d'Eugène Sue, 
n'ont point, il est vrai, une bien grande valeur, et ne se dis- 
tinguent guère par l'originalité cependant ils révèlent un 
progrès important, et ils ont contribué ì Iormer la langue 
• A la repandre. Des travaux plus importants sont les comé- 
dies de sociélé de Coetvoes, Obernyik, etc., les drames de 
Gai, Voeroesmarty, Czak6, Ladislas '£eleki, etc., moins 
popolaires toutefois que les pièces de théàtre du fecond 
Szigligeti, qui depuis longtemps rëgne presque seul sur le 
théatre hongrois. C'est pourtant la poésie proprement dite 
qui forme le plus brillant c6té de la liftCature hongroise 
de nos jours. Il y a dans les œuvres de Czuczor, Yoeroes- 
marty, Bajza, Garay, Yachot, Szfiz, Erdélyi, Kerényi, etc., 
des morceaux dignes de figurer à «3té de ce que la litté- 
rature moderne a produit de plus beau dans les autres 
contrées de l'Europe. La laitue / cet «gard appartient 
au jeune Alex. Peloefi, dont la lyre ne s'est fait entendre que 
de 18-16 à 1849. Le premier il a affranchi la littérature 
bonoise de la servile imitation de l'étranger, pour la ra- 
mener à la nature et lui imprimer le. cachet du véritable 
gt«nie de la nation. Le talent avec lequel il manie sa langue 
en fait d'ailleurs un modèle, que Tompa, Hiador, Lisznyai,'etc., 
et surtout le brillant, Jean Arany, ont essai'Wd'imiteravec 
plus ou moins de sucoEs. C'est à eux que la littérature 
hongroise est redevable de sa poésie lyrique, dont ils sont 
vraiment les p6.res. La publication des anciens chants po- 
pulaires hongrois, entreprise par la société Kisfaludienne 
(qui a été dssoute depuis la rEvolution, apr6.s avoir rendu de 
grands services) et achevée par Jean Eddyi (Pesth, 
187 ; 3 vol), contribua beaucoup aussi à ramener la littCra- 
ture hongroise à la nature, à l'originalite et à la nationalité. 
La rëvolution de 18-18 imprima un puissant élan au 
fournalisme, mais elle auisit en g6néral au développement 
de la liftArature nationale, qui semblait devoir regter ense- 
velie sous les ruines de la patrie, les éerivains les plus émi- 
nents ayant péri dans la I,tte, comme Petoefy, Vasvary, etc., 
ou bien a)-aut cherche un asile sur la terre étrangère, 
comme Szemere, Pulszky, Joika, Gorove, Hors';tth, Szalai, 
Teleki, etc., ou encore ayaot perdu leur liberté, comme 
Czuczor, Sirosy, etc., ou bien brise leur plume de douleur, 
connue Vœroesoearty et Garay, ou mme ayant «:té frappés 
de folie, comme AI. Vachot et Bajza. Mais elle portait en 
elle un principe de vie qui survécut ì cette terrible crise. 
Le temps consola le désespoir, rendit la liberté aux pri- 
sonniers et procura aux exilës les moyens de se mettre en 
communication avec leur patrie. Les plus belles espérances 
ne lardèrent pas ì renaitre. Le journalisme politique, 
qui ctait avant 188 la branche la plus importante de 
la littérature, n'est plus relwésenlé aujourd'hui que par le 
Budapesti hirlap et le Pesti .Yaplo; mais le journalisme 
littéraire s'est enrichi de ses pertes. Differents recueils, 
comme le Phênix de Losonc:, par Yachot (1851-53, 3 soL), 
l'Album de 'aggenged et le Livre de la littrature hon- 
groise, par Szihigyi, les Feuilles lénitic«s de s:iks=6, par 
Csfiszar, etc.., sont égalemeut des tmoins vivants du réveil 
liftCaire, liatalin et les ohEmiens de 'agg-lda (1852), 
par Aran),, I.adisltu le saint, par Garay (Erlau, 1851-52, 
2 vol. ), la suite des Nouvelles et Contes de Tompa (.Xii It, 
1852), les Trois Paroles de Voeroesmarl),, Paul Kini=si, 
épopée populaire, par T6t, l'Écho de Thang, par Pom- 
péry, les Œuvres complètes de Bajza, et d'autres pu- 
blications de ce genre, prouvent que la poésie hongroise ne 
fut pas seulement un produit du mouvement politique et 
qu'elle n'a pas succombé as'ec la révolution. On doit encore 
citer avec eloge le llecueil des Chants populaires hogrois 
publié par Mfitray, et la suite de ces chants par Erdel)i, 
qui a aussi composé, de concert avec Ballagi, nn llecueil 
de Proverbes. Il serait fcbeux qu'à force de rechercher la 
nationalité la poésie hongroise tomber dans la jargon, 
comme cela est déjà arrivé à Lisznyay, dans ses Chants 
des Paloes, et ì Szelestey, dans son Cymbalom de Kemenes. 
1,¢ baron J6sika occupe toujours le premier rang parmi les 

lON61I 
romanciers. Parmi les jeunes poêtes, on remarque surtout 
Mot. Jkay, à cause de sa grande fécondité, de sa bril- 
lante imagination et de la beauté de son style. Dans le 
champ du roman et de la nouvelle, Kuthy, Bércz, Pfilffy, 
Dobsza, etc., ont produit d'excellentes choses. La littérature 
des voyages s'est enrichie d'un Voyage en Orient par 
Jerney, de Lettres crites de la Turquie par Egressy, 
d'un Tout" en Italie par Hovfinyi, d'un Voyage en ltusie 
et en Scandinavie par Podmaniczky, et surtout du Voyage 
dans les Indes du comte Andrssy. Dans le domaine du 
droit public, nous ne voyons ì mentionner que l'Orateur 
et l'Homme d'État hongrois, par Esengery, la continuation 
du Livre des Hommes d'Etat, par Szalay, le Dictionnaire 
de la Conversation des temps actuels, excellent ouvrage 
rëdigé par Pikh, et l'Influence des iddes dominantcs au 
dix-neuvième siècle, par Coetvoes. L'histoire et la statistique 
sont, au contraire, cultivées avec une grande ardeur. L'His- 
toire de la Hongrie, par Szalay, Le Siècle des Hun9ads, par 
Telcld, La Hongrie après la bataille de Mohacs, par JA- 
zay, les Dissertations historiques de Palugyai, Fejer, Toldy, 
Telesky, etc., l'Histoire des anciennes Littdratures clas. 
si9ues, par J. Szvorén)t, les Ant9uitds 9recques, par J. 
Fojtenyi, le Dictionnaire 9dographi9ue d'Alexandre 
Fényes, la Description statistue de la Hongrie, par 
Enn. Palugyai, feraient honneur à quelque iittérature que 
ce ft. Les Esquisses de la vie du peuple en Hongrie, 
par le baron Pr6nay, illustrées par les H,,ngrois Barab.4s, 
Sterio et Weber, offrent de l'intérèt au point «le vue ethno- 
graphique. Cependant l'ouvrage qui mérite le plus d'éloges, 
c'est la Bibl,othèque nationale, publiée par F. Toldy, avec 
le concours des patriotes et deg écrivains les plus distin- 
gués. Cette grande publication se composera de plus de 100 
volumes iu- °, divisés en 15 sections, et reproduira tous 
I les écrits des auteurs hongrois un peu remarquables, de- 
puis le quinziëme siècle jusqu'à nos jours. Ont déjà paru 
les œuvres complètesdes ffAres Kisfaludy, de Jean Kis et de 
Csokonay ; les œuvres du palatin Eterhfizy, du comte Ni- 
I colas Zrinyi, la Chronique de Michel Cserey, et d'autreson- 
vrages remarquables. On comprend qu'une littérature aussi 
jeune dut chercber ì s'approprier par des tra,luctions beau- 
cotp de productions étrangëres; on ne peut mëme que l'en 
louer. La traduction de l'Histoire d'Angleterre de tacau- 
lay, par Esengery, et celle de l'Histoire de la Revolution 
d'Angleterre de Guizot, par Somsich, ne sont guère in- 
fèrieures aux orinaux. Au nombre des meilleures traduc- 
tions des classiques anciens on doit citer celle de l'lliade 
par S. Szab6, celle de Piston par P. Hunfalvi, celle d'Eu- 
i ripide par H. Szab6 : ce sont de vëritables chefs-d'oeuvre. 
On ne peut parler qu'avec éloge aussi de la traduction 
d'Aristote par I. Kis, de celle d'Hippocrate par Tonzlev, de 
celle de Virgile par Gyuric, de celle d'Os ide par Egyed, etc. 
Les sciences exactes ont été cultivées avec zèle dans ces 
derniers temps, la physique par le professeur Jedlick, la 
chimie par le professeur Nendtwicb, la botanique par 
Gœnczi et Brassai, etc. Consultez F. Toldy, Histoire de 
la Littrature hongroise (vol. 1-3,2 • édit.; Pesth, 1853): 
Langue. 
Parmi les langues vivantes de l'Europe qui vieneentde 
l'Asie, la langue magyare est une des plus jennes; la séve 
de la vie physique y abonde, et aucnne ne renferme peut- 
itre dans son organisme moins d'éléments étrangers. llle 
doit à son originalité d'avoir conservé ses formes panicu- 
lières, sa vigueur originelle, au milieu des circonstances les 
plus défavorables. Le magyare appartient à la mëme famille 
que la langue des Uzes ou Koumans, des Polowzes, des 
Chazares, d Petschenègues, peuples qui avaient tous une 
origine commune. Jusqu'à ces derniers temps on a discute 
la question de savoir s'il avait assi de l'affinité avec le 
lapon et le finnois, ainsi que le prétendent Budb6k, Eccard, 
Ihre, llell, Sajnovits, Gatterer, Schl6zer, Bfisehing, Hagen ci 
surtout Gyarmathi; ou bien avec les lanues orientales, 



HO31GP, IE 
comme Otrol, otsi Oertel, KalmAr, Verseghi t surtout 
l;eregsoE«yi ont esyé de le démontrer. Diffémnt complé- 
lement de toutes les langues européennes (excepté le fin- 
uois et, à certains égards, le turc) dans ses formes tant 
inlérieures qn'ettérienres, la langue hongroise a d O exprimer, 
au moyen de l'alphabet latin adopté par la nation depuis 
sa conversion au christianisme, les nuances qui lui sont 
propres et les tïnesses de sa prononciation. Le hongrois dis- 
tiugue les voyelles simples des quiescentes; les premiëres, 
a, e, i, o, , u, i, ont le son aigu, qu'elles soient brèves 
ou longues; les secondes se prononcent en tralnant, elles 
sont toujours surmontées d'un accent (d, oe, i, 6, , zï) et 
diffèrent beaucoup des premières dans la prononciation, 
par exemple, kar (le bras) et kdr (le dommage); kerek 
(rond), keroek (la roue) et lrek (je prie). En outre, la 
langue hongroise n'a pas de diphthongues proprement dites ; 
elle distingue avec un soin extréme les plus fines différences 
de sons, surtout des consonnes. Elle a des sons particuliers, 
çy, ny, ly, ty, où l'y ne sonne nullement comme un i, mais 
comme un) confondu avec la consonne. Jamais une syllabe 
ne commence par plus d'une consonne; dans les mots étran- 
gers qui eommencent par deux, le vrai hongrois fait pré- 
cder d'une voydle la premi6re ou intercale une voyelle 
entre les deux; ainsi il prononce iskola pour schola, et 
Kirdl9 pour Krdl. 
Comme la langue finnoise, la hongroise ne distingue pas 
les genres; elle n'a pas de déclinaisons; les flexions des cas 
consistent en particules qui se joignent au radical et se 
confondent plus ou moins avec lui. La distinction établie 
par les lois de la logique entre les formes ahsolues et les 
formes relatives des mots se produit dans le hongrois h 
travers les décllnaison et les conjugaisous d'une manière si 
précise, si caractéristiqJ=e qu'il en ré»ulte de très-grandes 
di[ficultës pour les ètrangers qui ne sont pas habitués à 
c, tte précision le,que. Les pronoms possessifs et les pré- 
positions s'exprimer, t par des suflixes. Les noms de famille 
sont considérés comme des adjcctifs et précèdent les noms 
de baptême, par exemple, Barber 9 Gobor (Gabriel de Ba- 
rber). La juste proportion des voyelles et des consonnes, 
le soin que l'on apporte  nuancer exactement les sons et à 
articuler les syllabes et la sttccession précise des vo)'elIes 
donnent à la langue hongroise beaucoup de pompe, de force 
-et d'harmonie, en mëme temps qu'elle est redevable d'une 
singulière énergie à la variété «le ses Iormes «le mots et de 
ses constructions. La régularité des flexions et des liaisons 
la rend en outre claire et précise; le caractère tout par- 
ticulier de es radicaux prouve son ori.nadté, enfin sa 
flexibilité lui donne une richesse si ande qu'elle l'emporte, 
 cet egard, sur presque toutes les lanternes de l'oçcident. 
Malgré toutes ses qualités, la langue hongroise est peu 
parlée, ce qui s'explique par la coexistence dans le pays de 
plusieurs autres langues, comme le slave, l'allemand, le 
valaque, l'italien, et sm'tout par cette circonstance que, 
pendant des siëcles, elle a été elue de l'administration 
publique, de l"Eglise, des coles, où i'on ne se servait que 
du latin, et mme pendant longtemps des cern]es tic la bonne 
société, oin l'on préférait le français ou l'allemand. Les cours 
des rois de Hongrie et des =nagnat= et plus particulièrement 
des princes de la Translvanie contribub.rent à la déve- 
lopper et h la répandre, de méme que la constitution libre du 
pays, les disputesthéologiques que fit naitre la Réformation 
et qui se soutinrent gëníralement en hongrois, et plus tard 
la réaction contre l'introduction de l'allemand ccrmme langue 
officielle sous le règne de Joseph II. A partir de la mort de 
cet empereur, le hongrois prit un puissant essor et tendit 
de plus en plus à ce perfectionner. 
La grammaire honoise composée h Debreezin par rote 
société de savants et publiée h Vienne en 1795 fonda la 
critique savante; celle de Gyarmathi, écrite également en 
hongrois (Klausenb==rg, 1795), se distingue par la richesse 
des matériaux; elle est moins complète pourtant que celle 
de Niklas Révai (Pth, 1809; 2 vol.), que la mort de l'au- 

teur ne lui permit pas d'achever. Les meilleure= grume 
maltes élementaires sont celles de Jean Farkas, refondue par 
François Pethe; de Joseph MArron (Vienne,t s20, et souvent 
réimprimée depuis) et de BIoch. De très-bonne heure, Pesti, 
Verantius, Megiserus, Fabricins, Molérar et Prizppai 
blirent des dictionnaires, qui furent suivis de ceul de Mdton 
et Mokry. De nos jours, Fogarasi et BIoch ont fait imprimer 
de bons dictionnaires de poche allemands et hongrois. Pré- 
senter un tableau complet de la langue hongroise sous le 
point de vue de la critique, de l'étymologie, de l'histoire 
et de la grammaire, tel est le but que la Société des savants 
hongrois posuit avec une infatigable persívérat, ce. 
HOGPtlE (Vins de ). La Hongrie est, après la France, 
le pays de l'Europe le plus riche en vignobles sous le rap- 
port de la quantité et de la variété des produits. Les vigno- 
bles occupent une surface de 4t myriamtres carrés dans la 
Hongrie actuelle, de 8 dans la Woivodina et le Banal, de 
8 dans la Croatie et l'Esclavonie, c'est-à-dire de 57 myria- 
mtres carrés dans le royaume de Hongrie, tel qu'il se com- 
posait avant la révolution. On évalue la productio annuelle 
du vin dans la Hongrie proprement dite à 18,58,000 eimers 
d'Autriche (d'une valeur de 66,037,000 florins), dans la 
Woivodina et le Banal/ 4,341,000 eimers ( 13,023,000 |lo- 
fons), dan la Croatie et l'Esclavonie h 3,608,000 eimers 
( t 0 ,S0-t,000 florins), en tou t 26 ,$3 t ,000 et mers {t9,t64,000 
tins), dont 4 millions d'eimers environ sont exportés à l'étran- 
ger. Les vins de Hongrie sont en général d'un go0t agréable, 
doux, un peu amer, aigrelet. Il y en a d'un rouge foncé, d'un 
rouge clair, d'un jaune d'or, d'un jaune pale, de limpides 
comme de l'eau, de verdatres. En général, ils contiennent 
beaucoupd'esprit; aussi les classe-t-on parmi les vins lourds 
ou épais, qui agitent fortement le sang, mais causent rarement 
des maux de tEte et d'estomac. Une des plus nobles sortes est 
le tokag, qui vient dans PHegyalja, comitat de Zemplin. 
D'un jaune brunAtre quand il est jeune, il devient ver- 
d0tre en vieillissant. On en récolte annuellement 900,000 
mers, dont t2,000 eimers, tout au plus, de la première 
goutte, au rapport de Féryas. Pour le préparer, on sépare 
avec soin lesgrains secs, et on en fait quatre sortes de vins de 
qualité supérie=re. La qualité la pins recherchée est appelée 
esence; c'est le suc huileux des grappes de raisi, que leur 
propre poids fait êgoutter à travers des vaisseaux percés de 
trous. Lorsque l'égonttement cesse, on écrase ces grains 
secs avec des grappes iratches, on en fait une pMe que l'on 
arrose de mo0t, et après la fermentation on verse le moùt 
doux dans des vaisseaux; c'est le vin de la première 9outre. 
Un second mélange de mo0t de tokay ordinaire avec ce 
qui reste des grains secs, et dont on exprime le suc avec les 
mains, donne le maschl6sch. La quatri.mo sorte est le 
ordinaire. Le vin de la première goutte et le maschlsch 
se préparent de la méme maniëresurles coteaux de Menesch, 
dans le comitat d'Arad, et le vin de la première goutte à 
Rust, dans le comitat d'oEdenburg, et à Saint-George% dans 
celui de Presbo=»rg. On obtient anuullemeut plus de 
70,000 eim.rs de vins de Menesch en le mélangeant avec 
des qualités inferieures. La Hongrie produit en outre d'ex- 
cellents vins d'entremets, dont les plus estimés sont ceux 
d'Ofen, d'Erlan, de Szeckzard, de Nessmély, de Villin, de 
Schomlau, les vins des lacs (entre autr., celui de Badatschon 
qu'on récolte sur les coteaux du lac Platten, et qui rivalise 
avec le Tokay), ceux de Szeredny, de Miskolcz, de Dio.%y6r 
et de Székelyhid. Le principal entrepôt est à Pesth. Le vin 
de Hongrie supporte le transport en toute saison ; cependant 
les grandes chaleurs et les grands froids lui sont nuisibles. 
Quant aux vins des pays qui faisaient autrefois partie de la 
Hongrie, ou cite comme le meilleur de l'Esdavonie celui de 
Syrmie, connu dans le commerce sous nom de vin de Car- 
lovic .. Les vins de Croatie sont liquoreux; les plus estio 
més sont ceux de Bukovez et de MozlavinA. Le meilleur via 
du Banal, après celui de Sirmie, est le vin de Versecz, et 
des Frontières militaires, le vin rouge de Weisskirclen. Con- 
sultez Schams, la Vigne en Hogrie (Peth, 1t32 ); et 
2t 



ltn, 31anuel de slatistique de l'Empire d'Autriche 
(Vienne, 1853; 2 vol.). 
HONGPOYEUI ouvrier qui façonne spécialement 
le eut r dit.de Hongrie. 
HONNETE. L'honnéte, pris substantivement, est, d'a- 
près Cicérin, tout ce qui est conforme à la raison et à la 
vertu ; pris adjectivement, il a, commelemot bon 
diverses siguifications : une personne honnœele est celle qui 
cannait les bienséances et qui les pratique ; hiniœete, placé 
après le substantif, signifie obligeant, civil, qui sait vivre : 
ainsi une femme honnéte peut tre une femme honnéte 
dans ses manières sans tre pour cela honnét lemme. De 
mme un homme honnête peut bien u'tre pas un honntte 
homme. Appliqué à certaines choses inanimées, honrte se 
lit de ce qui est d'une médiocrité raisonnable. 
Dans les auteurs du siècle de Louis XIV, l'expression hon- 
haute homme s'applique presque exclusivement à F h o m m e 
de bien, qui a pris l'air du mon,le, qui sait vivre, qui 
cannait toutes les bienséances de la société et excelle à les 
pratiquer. Les qualités de l'honnête homme ont plus d'ex- 
térieur, mais sont moins solides et bien moins réelles que 
celles de Phomme de bien. « L'bonnete homme, dit Saint- 
Evremond, ne cherche pas à montersur le théàtredu monde 
mais, si sa naissance et la fortune l'y placent, il joue bie 
parfaitement son r61e. • « On connalt assez, ajoute La Bruëre, 
qu'un homme de bien est honnête homme; mais il est plat. 
saut d'imaginer que tout bonnète homme n'est pas homme 
de bien. L'homme de bien est celui qui n'est ni un saint ni 
un dévot, et qui s'est peiné à n'avoir que de la vertu. » Enfin, 
plus vrai que sévère, Pascal définit l'honnbte homme : • Celui 
qui ne se pique de rien. » Le poëte Faret, qui a fait un 
livre de l'Honndte homme, lui avec qui Saint-Amand, si 
l'on en croit Boilean, 
Charbonnait de ses xers les murs d'un cabarel, 
parlait sans doute de l'honnte homme, c'est-h-dire de 
l'homme du monde par excellence, à peu près aussi savam- 
ment que les romaacers d'aujourd'Imi, pi]ier.s davant-scènes, 
de calés et de coulisses, parlent du beau monde. Donnons. 
pour finir, une définition complète de ce terme par Menage, 
qui ne voyait d u moins que la meilleure societé de son temps : 
« Erre honnèle, c'est n'ëtre puint prévenu, avoir du discer- 
nement, juger bien des choses, avoir l'esprit et le cœur 
droits; c'est louer avec chaleur son concurrent et son en- 
nemi dans les choses où il est louable; c'est le condamner 
sans aieur et san emportement quand il est condamnable; 
c'est enfin ne pas exagérer le mérite de son ami, et ne pas 
soutenir ses soltises. Tout roule là-dessus, la justesse de 
l'esprit et l'équité du oeur. L'une est une vertu en l'esprit 
qui combat les erreurs, et l'autre une vertu au cœur qui em* 
pèche l'excès des pa.ions, soit en bien, soit en mal. 
Le dix-huitième siècle a re]erWl'emploi du mot honnête 
homme, et Pu tendu synonyme d'homme de bien. Dejà 
Boileau l'avait rhabilite dans ces deux traits ecbappés à 
oa indignalion : 
Lucre le premier .............. 
Vengea l'humble vertu de la richesse aRiëre 
Et l'/wnnéte ormn« à pied du faquin en litiëre. 
(rt poetique.) 
L'argent en onnte omrne ér.ige un scélérat. 
('pîlre 
Les philosophes de l'époque ne parlent que de roi 
homme. Louis XIV, a-t-on dit, aété le plus honnœete 
de sou royaume. Qu'a servi ce mème titre décernë à l'infor- 
tnné Louis XVl ? 
La politique a abuse du titre d'honnges gens. Chateau- 
briand, dans les derniers jours de sa vie, eOt été ms doute 
un peu embarrassé d'expliquer, dans le sens de sa popularité, 
oe fameux adage dont il est l'auteur : La Charte et les hon- 
[¢es gens._ 
HONNETETÉ. De quelque manière qu'on l'envisage, 
soit comme quatioe, oit comme vertu, l'honneteté(en latin 

HONGIIE -- HONIEUR 
honestas) n'en a pas moins droit à l'estime des homme*. 
Comme qu,ilC elle usie dans d mani afftueu, 
¢ordies, et que leur franchise plaoe au-de,us de la pal i- 
russe, q t pl froide, plus re.  pooe t 
l'ane de gens bien élev, et trône pque ex¢luve- 
ment dans les and virile, ndis que l'hooE, oette 
habitude de bienveillanoe, de civité instinctive, se lrouve 
aui bien ds la chaumière du pauvre que  I réu- 
nions du dmonde ; PhonnteoE et la polisse sont donc 
bien dt«tinc, et l'on pt fai d impo ì loroe 
d'honnoE. En de plus haut, l'honnteoE ie 
dans  pureté des mœurs, dans l'habitude de l'honneur, 
la probi, de la veu, dont eBe t le premier élént - 
titutif. « L'honneurWqui fait 'un homme est hoë 
homme, a dit Mnage av unp de on, t la jas- 
 de I'pt et l'équit6 du CœUr. » 
HONNEUB. L'haleur nsis à ne faire que de 
nnes actions et h fidr tou I mauva. OE une qua- 
lioE qui nous vient d'un  droit et de la bont6 de l'e, 
mais qui suppose la préexistenoe d ci6t. L idé que 
ce mot suggère ou repren ne peuvent venir h l'espde 
l'homme de la nature. EII n'ont p d'expron dans 
sa lane : il laut des devoirs ébs ou nvus pour qu'il 
y ait de l'honneur h I sui¢re et du dhor à s'en er. 
C't alors dans le strict acoemplissement de  devoi 
d'homme et de ¢ien que I%onneur oen; et c't 
preer p vers la oeuption que d'fimer un homme par 
oela ul qu'il n'enfreint pas 1 obligations mmun ì 
tous. Un oend pas t d'en venir A le louer, à l'honorer, 
oemme s'B faisait plu» qu'il ne doit, et qud on 
eniin an bo de le rmpenser la soliC6 t bien 
lade. L prix bi o n t h y o n nt non-nlement la saure 
plus amère 'un bon et hng homme thi de h nafi 
la plus ¢ilisée du monde; c't en,re le signe le pl 
manites de  dédenoe. 
Si no abandoo tnt  générafi pour ar- 
river à l'applifion, no enUu d le domahe de l'- 
traire, et la déition de l'haleur, appli à l indice, 
vae suivant 1 lois et 1 moeu de son pas.  à 
chrétien d'Causer  mère,  roeulera d'horreur en effet à 
i'inoes ; eh bien  i'fiqui no parle d' peuple de l'ie 
oU cette adion éhit impose au fils oemme un devoir. nseil- 
lez  nosélant du lauu Satrm ou de la C- 
s'An d'aller oe brûler s le rps de leu mas; leu 
frè ou ieu amants traiteront oet ac  sdde, et, 
par hrd le premier jour vous trouvez une veuve s 
lle qui ne se révolte pas, il t probable e le M 
jour dle n'y ver ni haleur ni profit : eh bi! h 20 
25,000 kilomètr de Pas, lle q ne va point  
sur le hocher njugal t une femme dhonor. L l 
de Bablone se prostituaient une foh I' dans un tempe, 
et le pruit de leur prostitution fat pae de leur dol 
Donnez aujourd'hui oe conil  nos doeo, vo  
chs6 de toutes ! maisons honn. L fill de Sp 
diet ut nu sur le mont Taygè; ¢'it  devdr 
pour elle, ndis qu' n'y a p de Fse q ne  ct 
déshonorée  elle en falot au,rit sur 1 hauu de Mont- 
mtre. nsi l'appréciaoa de l'honneur dépend de tee 
lle loi que l homm oe nt fai. M e il  a log- 
temps que le monde dure, quë 1 siét sont ifitu. 
Chacun oenit ou doit oealtre s devoks, et oelui qui 
manque à Phoeur ne peut en apler à son 
Boileau a t dans  oième fire : 
Le seul honneur aode 
C't de preste Ioujours la vèrité pour ide, 
De rerder en tout la raison et la loi. 
D'èe dou pour tout autre et rigoureua pour soi 
D'accomplir tout le bien que le ciel nous inspire 
E d'ëtre jus enfin ; ce seul mot veut tout dire. 
Oui, oe tant dit tout; mais rte toujours à défier lejt« 
et l'injuste. Il  a d'ailleurs plus que de l'honneur à a¢com- 
plk lout le bien que le ciel inspke à  honnête ho ; 



HONNEUR -- 
;I y a de la vertu, et puisque ces deux epressions se ren- 
contrent sous notre plume, nous ne saurions les laisser 
passer sans critiquer le jeu de mots de Montesquieu sur les 
républiques et les monarchies. Dans les unes comme dans 
les autres, la vertu ne gte rien, et l'honneur seul ne suf- 
tirait à aucune. Il n'y a que de l'honneur dans le retour de 
Bégulns à Carhage; car c'est l'accomplissement d'nue obli- 
gation prise, d'une parole donnée. Il y a de la vertu dans la 
résistance de Malesherhes au despotisme de la cour et dans 
celle de Matthieu Molé aux ftrreurs de l'anarchie. Si les ré- 
publiques ont des Coclès, des Camille, des Marceau, 
la monarchie a ses B a y a r d, ses d' A s s a s et ses C a t i n a t. 
Défions-nous des principes absolus en morale comme en po- 
litique. 
Il est des circonstances oh l'honneur consiste à bien se 
battre, à braver la mort sur un champ de bataille, et. 
comme chevalier, François pr aurait pu écrire à sa mère, 
après le désastre de Pavie, que tout était perdu fo l'hon- 
neur; car il s'était défendu en héros après la défection des 
Suisses. Mais comme roi, comme capilaine, il ne pouvait 
le dire; car il n'y a pas d'honneur à affaiblir son armée 
quand l'ennemi renforce la sienne; Il y en a moins encore 
à jeter cette armée entre sa propre arlillerie et la mitraille 
qu'elle bat en br$che. Aussi François 1 er a-t-il bien fait de 
ne pas écrire les mots qu'on lui prdte, parce qu'en sa qua- 
litWde roi il avait autre chose A faire que de se battre, et 
qu'il ne l'avait pas fait. 
L'honneur ne varie pas seulement suivant les lois et les 
mœurs d'un pays ; ses conditions changent avec l'état des 
personnes et pluson est grand, plus on a de devoirs A 
remplir, et par conséquent plus il est difficile de se ain- 
tenir dans les voies de l'honneur, de conserver inlact ce qu'on 
a iustement appelé le bien le plus précieux de l'homme. Oui, 
c'est à son honneur que l'homme doit attacher le plus de 
prix. Ce n'est pas tout d'ëtre bien vttu, bien logé, bien 
nourri, d'avoir des quipages et des salons dotés, il faut 
dtre estim, considér de ses concitoseus, biais ici nous en- 
trons dans un autre ordre d'iddes : ce n'est plus la pratique 
de l'honneur, c'en est la récompense. Au moment de sortir 
pour aller signer le traité d'Amiens, lord Cornwailis, se trou- 
vaut indispos$, fait dire au plénip¢tentiaire trançais qu'il 
signera le lendemain, et qu'on peut regarder sa signature 
comme donnée. La nuit suivante, arrive un courrier de Lon- 
drus qui ordonne de suspendre. « J'ai conclu, » répond le 
ministre anglais à sa cour, et il signe le lendemain malgrë 
la défense, parce qu'il a engagé sa parole. On disait autre- 
fois bonne renommée ; on a trouvé plus commode, plus 
concis de dire l'honneur d'un homme, celui d'une famille, 
celui d'une nation. Celui-ci dépend de la probité des gouver- 
nements, et peut être en contradiction avec l'honneur per- 
sonnel des individus qui la composent. Il n'est point tou- 
jours synonyme de grandeur, de gloire mëme. 
Qu'y avait-il de plus perfide que la conduite des Romains 
à I'gard des rois et des peuples étrangers? L'honneur n'en 
était pas le mobile, et cepco¢hnt c'est là tout le fondemeut 
deleur immense gloire. Le monde entier s'est pris à ce piCe : 
il admire encore Richelieu, Mazariu et Pitt. Les moralistes 
crient, et J.-B. Roussea, a fait là-dessus une ode admirable. 
Ce mot a subi bien d'autres abus. On peut tre un homme 
sans honneur et se faire honneur d'une belle pièce de thétre 
ou d'un beau livre; cela s'est vu. Puis, dës qu'on a été en 
train de se faire honneur de quelque cho, on a fait des- 
cendre ce mot dans les formules de la servilité. On s'est fait 
un honneur de recevoir une lettre, une invitation d'abord 
d'une personne considérée, ensuite de tout le monde; d'ètre 
le trës-humble serviteur du premier veun, de saluer le pre- 
mier faquin qu'on rencontre, et ces expressions sont aujour- 
d'hui communes à la duchesse et à l'écaillère. Vous me faisiez 
l'honneur de me parler, dira un homme de cour à un détail- 
lant de chandelles; il disait antrefois à son Agai : Monsieur 
veut-il me faire l'bonneur de se couper la gorge avec moi? 
De tous les emplois dt: ce mot, le plus étrange est de l'in- 

HONNEURS 
roquer en tant la vie à son semblable (voyez Dn). 
ce préiug ait pris naissance chez un peuple barbare, cela 
se conçoit ; mais qu'il ait prévalu depuis quatorze siècles sur 
toutes les idées de raison, de justice, d'humanité, au point 
de braver les lois et les échafauds, de soumettre mme à ses 
exigences le plus déterminé de ses antagonistes, avec le rué- 
pris public pour auxiliaire, c'est la plus indéfinissable des 
bizarreries de l'esprit humain, flous nous trompons, il en 
est une qui le lui dispute dans cette singulière histoire de 
l'honneur, c'est d'attacher celui d'un mari à la honne con- 
didte de sa femme. La civilisation et la philosophie com- 
meucen heureusement à en faire justice. On n'est plus 
déshonor que Iorsqu'on le sait et qu'on le souffre. Euoere 
ne voudrions-nous pas jurer que, si le temps des Montes- 
pan et des Duharry n'était point pass, les maris de ces 
dames ne vissent affluer dans leurs salles de bal ou de con- 
cert tous les collets-montés de la haute sociét de Paris. 
On dirait d'eux ce qu'on dit de tant d'autres, qu'ils se font 
honneur deleur fortune. Il suffit pour cela de donner à diner 
à des parasites, de faire danser toute une ville, d'avoir un 
grand train de chevaux, des loges aux grands speclacles, de 
jouir enfin de tous les plaisirs de la vie. Que cette fortune 
soit le produit d'une banqueroute ou de la prostih,tion, peu 
importel dès l'instant que vous la dissipez avec gr'ce, que 
vous en jetez les débris à la tte de tout le monde, vous 
ètes honorable et honoré. Il n'T aura mdme d'honoré hient6t 
que la fortune. "VIENNE'r, de t'Académie franc.aise. 
HONNEUR (Affaire d'), débal, dém$1é, querelle où les 
parties croient un homme compromis. Il se dit particuliè- 
rement d'un d u e I, d'un combat singulier. 
ItONNEUP ( Chevalier d'). Voge, Cnwcca. 
HONNEUR ( Dame, Demoiselle et Fille d' ). Voyez 
D«ME et DEMOISELLE. 
HONNEUR (Homme d'). Voye'- Hou n'no,c. 
HONNEUR (Légion d'). Voçez L[«mn n'no..un. 
HONNEI]P, (Parole d'). Voye'.. Paog 
HONNEUR ( Point d'). Voyez POT 
HONNEURS. Les titres, les dignité.s, les hautes fonc- 
tions, les andes charges, qu'on appelait autrefois, qu'on 
appelle encore des honneurs, n'attirent plus autaut de res- 
pect ni de considération. A peine oserions-nous dire au- 
jourd'hui ce qu'étaient jadis les honneurs du Louvre, de la 
cour, du tabouret et ceux que recevaient, à leur entrée dans 
nos villes, les rois, les princes, les amhaseadeurs, les gou- 
verneurs de provinces, les chefs de la magistrature. Qui, 
hors des cérémonies publiques, oserait maintenant se pro- 
mener dans Paris avec les insignes d'une dignité ou d'une 
haute fonction ? Dès que la fte est finie, voyez tous ces 
hommes à honneurs se réfugier dans leurs voitures et con- 
rit vite les déposer pour endosser le frac qui les met de 
niveau avec tout le monde. On a tant dit et redit que les 
honneurs changeaient les moe,rs qu'on a peur d'avoir mme 
la dignité de son état. Ce n'est pas qu'on les fuie, on les re- 
cherche au contraire, mais pour l'aeut qu'ils rapportent, 
et, par une amère drision, nous appelons cet argent des 
h o n o r a i r e s, pour bien constater que les appointements 
d'une place en sont la partie la plus honorable. 
Dans ce siècle d'agiotage et de spéculations, les hon- 
neurs mili laines sont peut-ètre les seuls qui aient con- 
servé leur prestige. C'et encore un ieu sérieusemeut joué 
par ceux qui les rendent et par ceux qui les reçoivent. C'est 
qu'il y a là d'éminents service rendus au pays au prix du 
sang; il y a là un sortCe de périls, de batailles, de vic- 
toires, toutes choses qui ont un grand retentissement, qui 
excitent les admirations populaires. Là on tressaille h Pas 
pect d'un drapeau qui, sur la porte d'une mairie de village, 
n'est que l'assemblage de quelques lambeanx de serge. Les 
honneurs qu'on lui rend émanent d'un sentiment de véné- 
ration qui ne peut faiblir ; car il sulfit d'une campagne pour 
le ranimer. Là on rend les honneurs mime au courage 
malheureux, parce que les vainqueurs sentent ce qu'il eu 
co6te d'ttre battu et ce qu'on fait ponr ne pas l'tre. 



104 
Les nonneursfunibres, dont l'usage est demeuré uni- 
çersel, sont plus propres à résister aux variations humaines. 
C'est d'abord un spectacle pour le peuple, et cela ne blesse 
ni la vanité ni l'intért de ses chefs. L'égoisme et la vanité 
y trouvent méme leur compte. Ce n'est point la satire de 
notre siècle que nous faisons; nous n'avons pas oublié que 
César fit rendreles honneurs lunèbres à Pompée. Nous aimons 
mieux ceux que reçut notre Marceau; ils ont réellement 
honoré nos ennemis. Mais l'esprit de parti s'est aussi em- 
paré des honneurs funèbres pour en fausser le principe, 
pour altérer la pureté de cet Immmage suprême. Dans les 
funérailles «le nos hommes politiques, nous avons moins 
chercfié à honorer les morts qu'à insulter les vivants : c'est 
fcfieux. Ne perdons point cet usage, ne le prodiguons pas 
surtout. Rendons-lui, s'il se peut, sa moraUté. 
VIENNET, de l'Académie frauc.aise. 
IIONNEURSDE LA COUR. Voyez ]TIQUETTE. 
HONNEUPS MILITAIRES. On désigne par ce 
terme les démonstratious extérieures de respect auxquelles 
tout militaire est tenu à l'égard de son supérieur, et qui ont 
pour but de confirmer le principe si important de la subor- 
dination militaire en lui donnant une nouvelle consécration. 
Ils varient suivant le rang du supérieur et aussi suivant la 
losition où se trouve le subordonné au moment voulu. 
Presque partout aujourd'hui le salut, qui consistait à se dé- 
couvrir la tte quand on passait devant un supérieur, a été 
remplacé par l'action de porter simplement la main à la 
tte. Si un soldat est en faction, il portera ou présentera les 
armes suivant le grade de celui qui passera devant lui. Un 
poste ne prend les armes que pour un officier de ronde. 
Dans les parades, les revues, cte., le drapeau s'incline, et 
les olîïciers saluent de leur sabre. Dans les places fortes, 
des honneurs particuliers sont rendus aux princes ou aux 
grands personnages qui viennent les visiter ; et des règle- 
ments spéciaux déterminent le nombre des coups de canon 
qui doivent tre tirés en parelles occasions. En mer, les 
vaisseaux se rendent aussi I«» honneurs militaires, et se 
saluent réciproquemetlY. 11 saluent également, par un cer- 
tain nombre de coups de canon, les forts devant lesquels ils 
passent ou devant lesquels ils jettent l'ancre. 
On appelle 9ardes d'honneur les gardes que l'on donne 
aux princes ou h d'autres hauts personnages. Il est une au- 
tre espce d'honneurs militaires : cesont ceux que la troupe 
ou la garde nationale rendent, après leur décès, aux officiers 
et soldats de leurs corps et aux membres de la Légion 
d'honneur de tous les degrés. 
HONOLOULOU ou HONOROUROU. Voyez 
WlCll (lle). 
HONORALE. L'expression homme honorable indi- 
que un homme que sa position, autant que son caractère 
personnel, rend digne d'tre honoré. Dans un autre sens 
**n lwmme honorable veut dire un fiomme dont la maison 
et les dépenses sont sur un bon pied, un homme qui sait 
bien recevoir et traiter ses amis convenablement. Depuis 
1815, le titre d'honorable est devenu une dénomination 
politique qui s'adresse aux députés : l'honorable membre; 
nous avons empruntWcet usage aux Anglais. Dans l'ancien 
réme» honorable homme était le titre que prenaient !es 
bourgeois, les marchands enrichis, ce qui fait dire aux au- 
teurs du Dictionnaire de Trvoux. « Ce titre est ì préseut 
avili, et est, en quelqqe façou, oppos à la noblesse. » Hono- 
rable et sage homme était encore un titre que, dans de 
vieux actes, on donnait  des hommes de robe, à des duc- 
teurs gradës. Sous l'empire romain, on qualifiait d'honora- 
biles les anciens magistrats, ceux que nous appelons ho- 
HONORABLE (Amende). Voyez A;seoe 
HONORAIRE. On appelle honoraires la rétribution 
due aux services et aux soins des personnes qui exercent 
certaines professions lilrales, par exemple les m édecins 
et les avocats; elle est à peu près lais.ée ì leur discrétion 
quant à la quotitë de la somme. Jadis on employait le mot 

HONNEURS -- HONORIUS 
honoraires pour désigner les traitenents des fonctionnaires 
d'un ordre élevé. 
Honoraire est aussi adjectif; il se dit des personnes qui 
portent un titre honorifique sans en exercer les fonctions. 
Il s'accorde aux magistrats dont la carrière judiciaire est 
terminée et qui ont entièrement cesé de siéger. Les 
savants et généralement la plupart des sociétés particulières 
ont aussi des membres honoraires qui ne sont point astreints 
aux mmes obligations que les membre ordinaires. Enfin, 
on cnnalt les tteurs honoraires. 
HONORES (Au). Voyez Au un.ones. 
HONORIFIQUES (Droits). Voyez Dnos 
llOXORIUS (FSVlVS), empereur d'Occident, second 
fils de T h é o d o s e, était îgé de heu f ans seulement, en 395, 
quand la mort de son père lui donna la moitié de l'empire. 
Son frère A r ca d i u s reçut l'Orient en partage. Tout le rège 
d'Honorius est dans la vie de S t i I i c o n, son ministre; et, 
quand ce fantôme d'empereur eut fait mettre à mort ce 
général, Ruine f«t prise par A I a r i c, et Honorius, rélugié 
Ravenne, ne «lut son salut qu'à la mort du roi des Visignths. 
Les llus belles provinces de l'empire furent perdues sous 
son rëgne, la Grande-Bretagne, la Gaule, l'Espagne. Il 
mourut en 43, à trente-huit ans. 
IIONORIUS. Quatre papes et un antipape ont porté ce 
nom. 
HONORIUS 1 ¢, fils de Pétrone, consul, naquit dans la 
Campanie. Il fut élevé sur la chaire apostolique vers l'an- 
née 626, et mourut après un pontificat d'environ douze ans. 
Il se fit remarquer par les mœurs les plus douces, la piété 
la plus tendre et par sa magnificence, qu'attestent encore 
un grand nombre d'élifices religieux qu'il fit construire ou 
réparer. Sergius, patriarche de Constantinople, répandait 
dans tout l'Orient l'erreur d u monohœelisme, dans l'espoir de 
ramener les Eutychiensà l'Église. L'empereur Héraclius pro. 
tégea cette doctrine, et Sergius écrivit à l'évque de Ruine 
pour tacher de le rendre favorable à ses projets. La répoose 
du pape à Sergius fut conçue dansdes vues de conciliation, 
sans tomber toutefois dans l'hérésie des monothélistes, dont 
la doctrine fut anathématisée au sixiëme concile général tenu 
à Constantinople en 680, sous le pape Agathon. La mémoire 
de tous ceux qui avaient favori.;Wcette erreur fut, en ou- 
[tre, proscrite, et Honorius nommément condamné. Léon II, 
i successeur d'Agathon, dans une lettre adress à Con.,tan- 
tin Pogonat pour confirmer les actes du concile, n'éparse 
pas idus Honorius. 
[HONORIUS (CADALOUS), antipape. En l'an 1061 éclata 
un nouveau schisme qui dura trois ans. A la mort de 
co I a s I I, deux lattions puissantes se disputèrent l'lectinn 
deson successeur. Celle du fameux Hildebrand fit nommer 
A I e • a n d r e 11, avec la pensée secrète d'alfranchir le saint- 
siége de la dépendance où le maintenaient les empereurs 
d'Alleuagne et de le délivrer en mme temps de la tran- 
nie des comtes de Toscanelle et de Segny. Ces seigneurs, 
qui dominaient dans Romedepuis plus d'un siècle, sunirent 
cette fois au représentant de l'empire, à Guiblrt de Parme, 
que l'impératrice Agnès, tutrice du jeune Henri, roi deGer- 
manie, avait cré chancelier d'Italie, pour renverser l'ou- 
vrage d'Hildebrand. Guibert devint l'me de cette lie : il 
s'adressa d'abord aux évéques de Lombardie ; il y joiit 
une multitude de clerc« et les condldsit vers l'impératrice, 
qui saisit avecempressement l'occasion de reprendre les droits 
de l'empire. Une diète fut convoquée  BAIe, où se rendirent 
un grand nombre de clercs et de prélats. Le jeune empe- 
reur y parut le 28 octobre I06l, et Cadalo6s Calavicini, 
évdqne de Parme, fut Cu souverain pontife sous le nom 
d'Honorius II :- c'était le digne représentant de tous les vi- 
ces qui dégradaient le clergé romain, et Pierre Damien se 
rendit l'interprète de la cfirétienté en les lui jetant à la face 
dans une lettre eélèbre. CadaloOs ne s'émut point des cla- 
meurs que soulevait son exaltation : il ]eva de l'argent et 
des troupes, duisit quelques partisans d'Alexandre II, et 
parut aux porte de Ruine le I avril 1062. Lepape se 



HONORIUS 
,te fuir dans la Tnscane, mai le peuple fiat ferme, et le 
duc Godefroi, étant venu à son secours, fit un effrolable 
carnage des troupes de l'antipape. Cadaloiis n'échappa lui- 
mme à la captivitë et peut-être à la mort qu'en séduisant 
à prix d'or quelques officiers du duc de Toscane. biais dans 
ce temps, comme dans beaucoup d'autres, |es vaincus ne 
gardaient point d'amis. L'AIlemagne dirigée par les conseils 
d',nnon, a¢chevb.que de Cologne, et par les écdts de Pierre 
Damien, abandonna le pape du synode de BAie et reconnut 
celui d'Hildebrand. L'impératrice Agnès vint elle-même à 
Borne solliciter le pardon d'Alexandre, et se retira dans un 
couvent pour expiersa faute. Le dancelier Guibert fut dé- 
posé et chaseWde la cour; mais l'antipape ne se tint point 
pour battu. Réfugié dans son église de Panne, il renoua ses 
intrigues, attira dans son parti ce mme Godefroi de Tus- 
carie qui l'avait repoussé des portes de Borne, et séduisit en- 
core quelques ministres ou ufficiers de l'empereur Henri. 
L'archevêque Annnn, changeant de langage, se rendit en 
Italie pour soutenir devant Mexandre le droit qu'avait eu 
l'empereur de nommer un pape; mais il ne tarda point A 
faire voir que la reconnaissance de ce droit par Alexandre 
le louchait plus que le rétablissement de Cadaloos. Un concile 
fut assemblé ì Mantoue; le cal"dinal Pierre Damien )' suivit 
le pontife, qui, s'étant purgé du reproche de simonie, fit 
condamner tout d'une voix son comltiteur comme simo- 
niaque. Cadalois n'en fut pas plus abattu ; il osa mme se 
rendre à Ruine en cachette, séduisit quelques capitaines, 
distribua de l'or aux soldats, et s'empara de l'église de Saint- 
Pierre. Mais le peuple, étonné d'abord de ce trait d'audace, 
mit en lutte les soldats de l'antipape, et sans le prompt 
secours que lui préta Conclus, gouverneur du chAteau Saint- 
• nge, il eut péri dans ce tumulte. Ce secours n'était pas 
désintéressé : Conclus ne recueillir Cadalos dans sa forte- 
rosse que pour le ran«onner, tout en résistant aux troupes 
du pape Mexandre. On prétend que le siCe dura deux an- 
nées : c'est difficile à croire. Quoi qu'il en soit, il est hors 
de doute que l'antipape arriva au mont Bardon au milieu de 
quelques p[:lerins qui avaient protégé sa fuite, et que, réfu- 
gié plus tard dans le bourg de Barette il continua à faire des 
ordinations et des décrets, que reconnaissaient encore plu- 
sieurs églises d'Allemagne; il soutint enfin jusqu' sa mort, 
arrivée en 1066, la légitimité de son élection, et le nom 
d'Honorius I1, que l'histoire ne lui a point conservé. 
VIEtET, de l'Académie Française.] 
HONORIU$ II, pape, élu en t t2, évque d'Ostie, nommé 
précédemmeqt le cardinal L.«n, conlirma Lothaire dans 
la dignité impériale, etcondamna, pour diverses fautes, les 
abbés de Cluui et du montCassin. Il mournt en 1130, lais- 
saut quelques lettres assez curieuse. 
HOOBIUS !I1 (C¢to S,kVELLI}, nWà lome, élu 
en 1216, mort en 1227, reconnut l'ordre des Domiuicairs 
et celui des Carrons, prc, ha vainement une eroisade 
pour conquérir la Terre Sainte, arma Louis ¥111 contre les 
a I b i g e o i s, accorda, le premier, des i n d u I g e n c e s dans 
la cannnisation des airats, et défendit, vers t220, d'enseigner 
le droit civil à Paris. On a de lui : Conjuratio adversus 
principem tenebrarum et angelos eju.s (Borne, 1629, 
in-an). 
HONORIUS IV (J«cQr.s SAVELLI), Romain, Cu pape 
en 12a, mort en t28"/, dé|ivra les États de l'Église des 
brigands qui les infestaient, sontint, en Sicile, le parti [ran- 
çais contre la maison d'Ardgon, et fut le défeaseur des im- 
munités ecclslastiques. 
HONT, comitat de EIoagrie, situé en deçà du cercle du 
Danube, conlinant aux comitats de blograd; de Grn, de 
Pesth, de Bars et de Sobl, comprend nue superficie de 32 
m)'riamètres carrés, est généralement montagneux, et, tant 
par ses beautés naturelles que par la richtsse de ses pro- 
duits i forme l'une des parties de la Hongrie les plus heureu- 
sement doutons. On )' récolte d'excellents vins, on )' cultive 
beaucoup de tabac, et il n' a pas «le comilat dont les pro- 
al, fils minéraux soient aussi abondants. Les mines appartenant 

 HONTE 
à la couronne rapportent annuellement, en moyenne, 708 
marcs d'or, 15,126 mures d'argent et 2,498 quintaux de 
plomb, tandis que les mines appartenant à des particuliers 
fournissent chaque année 856 mures d'or, 18,tt93 mates d'ar- 
deur, et 6,95 quintaux de plomb. L'exploitation des mines, 
pratiquée surtout par des Allemands, occupe au moins u 
dixième de la population. Celle-ci, répartie en 3 villes 
8 bourgs à marché, 176 tillages et 28 poussten, s'élève à 
110,128 habitants. Sous le rapport des nationalités, elle se 
divise en 49,9.23 Hongrois, 52,220 Slaves, et 8,685 Alle- 
mands; sous te rapport des cuites, elle se compose de 
75,8t catho|iqnes, de 27,13 protestants luthCins, de 
7,1t2 calviuistes et 368 juifs, qui n'ont élé admis à résider 
dans ce comitat qu'en 180. Il a pour chef-lieu la ville de 
C h e m u i t z, dont le nom est aussi employé d'ordinaire pour 
désigner les mines du comitat de ttont. 
HONTE. La honte est quelquefois la conscience d'une 
action qui dégrade l'homme dans sa propre estime; elle est 
aussi la crainte d'entendre l'expression d'un blé, me mérité 
in non, et par conséquent elle se soumet au joug des pré- 
jugés dominants comme aux ordres d'une morale judicieuse, 
aux conseils de l'honnteté et des convenance.s. Ce n'est 
pas un guide qui arrête sur la bonne voie, mais seulement 
un obstacle qui ferme quelques-unes de col|es qui n'abou- 
tissent qu'un mal et quelques autres qui seraient indiquée 
par la vertu. La fausse honte est une disposition mëticn- 
leuse et condamnable, qui place la crainte du ridicule an 
niveau ou au-dessus des exigences du devoir. Une 
vaise honte empche trop souvent de réparer les dommages 
cansés par des propos indiscrets, une alCarche impru- 
dente, un abus de pouvoir, une ngligeuce, etc. « Tel homme 
opulent, dit Horace, craignant de passer pour prodigue et 
dissipateur, refuserait de venir au secours d'un ami qui 
souffre de la faim et du fruid, • La honte n'est donc pas un 
frein muta| sur lequel on puisse compter dans tous les cas. 
L'expression énergique, mais Uès-jnste, boire sa honte, 
eut da avertir le législateur et provoquer ses méditations 
sur l'inefficacité de l'ignominie considérée comme moyen 
de répression, et trop prodigu6e dans nos codes criminels. 
Les hideux spectacles mis trop souvent sous les )'eux dt 
public émoussent p|ns les sens moraux qu'ils ne peuvent 
les exciter et les développer à l'avantage de la société. 
Bien de ce qui présente quelque idée de grandeur ne 
passe pour honteux; l'audace ne flétrit jamais, au liet 
qsae tout ce qui lui est opposé-dans la conduite elle carac- 
tère de l'homme peut mëriter la honte. Dans les ,me 
d'une trempe forte, le témoignage d'une bonne conscience 
l'emporte sur tout te reste. Thomas Corneille a dit avec au- 
tant d'énergie que de justesse : 
Le crime fait la honte, et non pas l'Chaland. 
L'iniortuné que le besoin réduit à mendier refuse quel, 
quefois de recourir à cette humillante ressource : c'est un 
pauvre honteuz; le brigand est au-dessus de la honte : il 
semble que cette sorte de censure perd ses droits et s'arrête 
lorsque le crime commence. Un petit mensonge peut {ro 
honteu ; une calomnie atroce ne le sera pas si elle tire 
son origine de fortes passions, et surtout si elle a éé 
neste à sa victime. 
On donne quelquefois le nom de honte à une timidité 
qui gne l'expression de la pensée, parce que les Latins la 
comprenaient parmi les nombreuses acceptions du mot 
puàor. C'est dans ce sens qu'Horace, en parlant des courtes 
réponses qu'il fità Mécène lors de leur première entrevue, 
donne cette raison de l'embarras qu'il éprouvait : 
Infaus ualnque paldor probibat plura profari. 
Il semblerait, d'après cette observation, que notre idiome 
a poussé pins loin l'analyse des sentiments muraux qu'on 
ne l'avait lait à Borne jusqu'au siècle d'Auguste, puisque 
nous avons des mots pour exprimer des nuances que l'on 
n'apercevait pas alors, des distinctions que l'on n'avait pas 
faites. C'est la pudeur qui prescrit de voiler les parties 



166 HONTE 
honteuses du corps humain. La pudeur ne peut tre con- 
fondue avec la honte, quoique le mot impudeur signifie 
le plus souvent lïnsensibilité aux atteintes du blme pu- 
blic, aux réclamatious de la conscience. 
HONTHOB.ST ( G ), peintre distingué de l'C 
cule flamande, né en 1592, t Utrecht, se forma sou Abra- 
haro Bloemœert, et à Ruine et Naples, sous Michel-Ange de Cara- 
rage. Là, il s'appropria ces effets de lumière vigourenx et 
tranchés, surtout ces effets de nuit, qui lui ont lait donner 
par les Italiens le surnom de Gherardo dalle notti. Il fut 
au nombre de artistes de ce siècle qui, évitant le genre 
maniéré et les extravagances d'imanation de plusieurs de 
letJrsconlemporains, s'attachèrent, à l'exemple du Caravage, 
à reproduire exactement la nature. Toutefois, il n'imita 
du Caravage que la carnation, la vie et les grandes masses 
d'ombre et de lumière ; il fut plus exact dans le dessin, 
plus choisi dans les formes, plus gracieux dans les mouve- 
ments. Honthorst travailla quelque temps en Angleterre, pour 
Charles I er, et fut ensuite peintre du prince d'Orange. Il 
habitait La Haye, et fit un grand nombre de peintures pour 
le château de plaisance de la blaison du Bois, près de cette 
capitale, où se trouvent toujours beaucoup de ses plus 
beaux lableanx. Il vivait encore en 1662. Joachim de Sand- 
rart fut le plus celèbre de ses elèves. 
Son frère, Guillaume Hoxuoas, mort en 1666, tra- 
vailla dans le même style, particulièrement pour la cour 
de Brandebourg. 
HONVÉDs c'est-à-dire dfenseur du pal/s. On ap- 
pelait ainsi autrelois en Honnie, sous les rois, les com- 
battants indigènes, et plus tard toute l'arrose. Cette dénomi- 
nation disparnt avec les institutions qui lui servaient dc 
base ; mais on la fit revivre lors de la dernière révo- 
lution. Dans l'Cê de 1898 on ne donna d'abord le nom 
de hon,ds qu'aux volontaires enr61és pour quelques se- 
inaines seulement ou a'gl/oezelmi 9 (jusqu'à la victoire), 
et qu'on envoya dans le sud contre les Raitzeset les Serbes. 
biais quand, plus lard» la lutte s'engagea plus particulière- 
ment contre l'Aulriche, lorsque beaucoup des anciens ré- 
giments de troupes régulières passèrent sous les tendards 
hongrois, et lorsqu'on y illCorpora un grand nombre de ces 
volontaires, ou bien qu'on en forma de nouveaux régiments 
de li;me, le nom de honved fut employé pour désigner 
toute l'armée nationale. Dans le tan,ge babitnel, on en- 
tendait cependant plus particulièrement par ce mot les sol- 
dats d'infanterie. 
HOOD (S«u, célèbreamiral anglais, né en 1724, 
fils d'un pasteur, débula dans la marine royale comme en- 
seigne, et dès le commencement de la guerre de sept ans 
était parvenu au grade de capitaine de la flotte. En 178, 
il obtint le commandement de la frégate La Vestale, sortit de 
Porlsmoulh en croisière, et prit, après un long combat, la 
frale française L Bellone; ensuite il commanda le vais- 
seau de ligne L'Afrique, de 64 canons. Lorsque commença 
la guerre contre les colonies americaines, Hood croisa 
Jans les eaux de ces contr.s. En 1780, elevé au rang de 
baro»el et au gracie d'aroiral, il renconlra et boltit l'ami- 
ral de G r a s s e, près Saint-Christopbo, le 2t février 178i, 
et lui fit essuyer une defaite plus decisive le 14 avril, près 
de la Guadeloupe. Quelques jours aprës il prit encore, dans 
la passe de Mona, deux vaisseaux de ligue français et deux 
vaisseaux espagnols. A la paix de 1783, le roi George III 
le crut pair d'l riande, sous le titrede baron de Gatherington. 
L'annëe suitante, il entra à la chambre basse, où il s'ac- 
quit, par le liberalisme de son opposition, unegrande popu- 
tarirWqu'il perd/t lorsque, en 1766, il se lais.a gagner par le 
ministère, qui le nomma lord de l'amirauté. 
Au coromencement des guerres de la révolution fran- 
çaise il obtint le commandement de la flotte de la Médi- 
terranêe. Le 27 aoflt 1793, de concert avec l'amiral 
gnol Langara, il s'empara, par capitulation, de la ville de 
Toulon, rëvoltée contre la Convention. biais la désunion 
des ro}'alistes et la jalousie de l'Espagne entravèrent ses 

-- HOOFT 
orationsultériures. Grâce  l'énergie du jeune Napolon 
Bonaparte, improvisé général de l'armée de siCe, Hood fut 
contraint d'abandonner la rade de Toulon, le 18 décembre. 
Avant de partir il incendia l'arsenal ave -le matériel qu'il 
contenait, onze vaisseaux de ligne, neuf îrégates et cor- 
vertes ; emmenant avec lui les trois vaisseaux qui restaient, 
six frégatea et six btiments moindres. Une tempète força 
Hood ì jeter l'ancre prèsdes ries d'Hyères, avec sa flolte en- 
combrée de royalistes lugitifs. De là il fit voile pour les mers 
d'ltali,et s'empara de la Corse le 21 mai 179; mais line la 
garda pas longtemps. Ce fut là son dernier exploit.  re- 
tour en Angleterre, il fut créé vicomte de Whitle!l, et en 
1796 gouverneur de Greenwich. Il mourut à Bath, en 
HOOD (Tnos), un des humoristes anglais les plus ori- 
ginaux, naquit en t 798, à Londres, où son père, Écossais d'ori- 
gine, faisait le commerce de la librairie. Destiné ì embrasser 
cette profession, il la prit tellement en dgoOt, que sa santé 
s'altéra. Pour la rétablir, son père l'envoya passer quelque 
tempsauprès d'tin parent, ì Dundee, oit fl donna les premiëres 
preuves de ses dispositions pour la littéralure, en prenant 
part ì la rédaction du Dundee Maga--ine. De retour à Lon- 
dres, on le mit en apprentisage chez un graveur; mais il ne 
demeura dans son atelier que le temps nécesaire pour ac- 
quérir des notions pratiques qui plus tard devaient lui Stre 
utiles pour l'illustration de ses ouvrages {par exemple, pour 
celle du Cornic A nnual). A partir de 1521 il s'adonna exclu- 
sivement  la littérature, et filt chargé de la direction du 
London .llagazine. Par la suite il publia un journal ì lui, 
sous le titre de Hood's Magazine. Son premier recueil de 
vers, intitulé Whints and Oddities, obtifft un grand reten- 
tissement. Ce qui distinguait surtout cet ouvrage, c'est le 
parti que l'auteur y tirait des jeux de mots, genre d'esprit 
devenu sous sa plume une source d'humour vraie et sou- 
vent mSme d' émotions douces. Quelques contes en prose, 
1Vational Tales, qu'il fit para[tre en 1827, curent moins 
de succès; et tin roman, Tglne!l Hall, qui parut ensuite, 
prouva que dans cette directiou son talent faisait fausse 
route. En revanche, ses nouveaux essais poCiques reus- 
sirent encore plus que les premiers; dans le nombre ou 
remarque surtout le poêmeintitulé: Dreamof Eugeneram, 
publié en 1529 dans l'almanach The Gent, et The Plea 
the rnidsummer Fairies, création fantastique pleine de 
charme. Il maintint sa réputation d'humoriste par la pu- 
blication du Gomic Annual et par son Tp the RAine(tSg2), 
satire contre les touristes aurais. Les Whimaicaliliez, 
periodical 9atherin 9 (  vol., 1843 ), avaient déj paru en 
grande partie dans le Yew Monthlg-Magazine. Le der- 
nier de ses poêmes qui mêrite d'$tre mentionné est le $on9 
of the Shirt, qui parut d'abord dans le Punch, et où il 
dépeignait avec tant de vérité la misère des ouvrières de 
Londres employêes ì des travaux de couture, que ce pé- 
nible tableau produisit une profonde sensation et ne contribua 
pas peu aux mesures prises alors pour alléger tant de poi- 
gnantes souflirances. Dans la plupart des productions de 
ïhomas Hood, dans ses quolibets et ses parodies ume, 
on sent l'inspiration d'un amour vrai de l'humanite. 
ont parfois quelque chose de sérieux et de triste dont l'effet 
est encore augmenté par les rapprochements aussi bizarres 
quïnattendus qu'on y trouve. Il rit d'un oeil sur les folies 
des hommes et pleure de l'antre sur leurs faiblesses et 
vices. Thomas Hood mourut le 3 mai X845. Une quatrième 
édition de ses Poêmes a paru en 1851. 
HOOFT (PirTEn}, né  Amsterdam, en 158, fils du 
bourgmestre Cornelis Hooft, l'un des nobles qui, en 1587, 
bravèrent au ril de leur vie la t)rannie de Leicester, 
se forma par l'Cude des classiques anciens et par ses 
voyages en Italie. A son retour, il remplit depuis 1609 
jusqu'à sa mort, arrivée ì La Ha3e le 21 mai 16-17, les 
fonctions de bailli de Muiden, sans prétendre ì de plus 
hautes dignités, comme semblaient l'v convier sa nais- 
sance, ses connaissances et  richees. Tacite, qu'il 
traduisit en hollandais et en style classique, fut son modèle 



1300FT 
comme Ifistorien, et il fit tous s efforts pour l'imiter. 
Comme historien, il publia : Het leven van h'onin9 lien- 
drik IV (Amsterdam, 16-6) et une Histoire de la 
son de ldicis , 1669); mais sa A'ederlansche Historien 
(2 vol., 16tt2) est celui de ses ouvrages q,'on estime le 
p!us; e||e s'étend de 1256 à. tSa7, au moment oh finit le 
gouvernement de Leicester. Comme poëte, llooft natvralisa 
en Hollande la tragëdie aussi bien que le genre érotique. Ses 
Lettres, qu'on regarde également comme des modèles, ont 
été imprimées par Huyde¢ooper (1738), et sa Traduction 
de Tacite par Brandi ( 
HOOGHE (PmeT nv.), un des meilleurs peintres de 
genre flamands, né vers 16tt3, et selon d'autres en 1659, tut, 
dit-on, élève de Bergen. Il peignit avec un rare bonheur des 
scèues d'intérieurs flamands, oh il a su reproduire de la 
manière la plus naturelle et la pins agréable Peet du su|cil 
à travers les fenétres. Presque tous ses tableaux représentent 
des intérieurs d'appartement avec de ces effets de soleil ; et 
les personnages tranquilles, silencieux, qu'il , place, rendent 
de la manière la plus complète le calme qui est le propre 
d'un lour de fte. Son pinceau est moins délicat, mais non 
moins sçirituel que celui de Dow ou de 3IfCis; et comme 
coloriste, il est un des maitres dans son genre. Ses tableaux 
sont assez rares et d'un prix très-íle'é, il mourut en 
1722. 
Il ne faut pas le confondre avec lomain de 
ingénieux graveur flamand sur cuivre, në vers 1638, et qui 
a travaillé jusque vers 1706. 
I|OOGSTIATEN { Jcttev-s ae), grand-juge des héré- 
tiques à Cologne, et l'un des adversaires les plus acharnés 
de B e u c h If n, naquit en 1454, au bourg de Hoogstraten 
en Brabant, fit ses Cudes à. Cologne, entra bientét après 
dans l'ordre des dominicains, et y obtint un prieuré. [gommé 
par la suite professeur de théologie à Cologne, il fut éta- 
bli grand-juge des hérétiques (hereticoe pravitatis inqui- 
sitor) lorsque l'inquisition fut introduite en Allemagne sur 
|es instanee du pape Léon X et de l'empereur Charles- 
Quint. Hoogstraten choisit tout d'abord pour victimes de 
son zèle È rasme de Botterdam et Beuddin, et fit publi- 
quement brt)ler les ouvrages de ce dernier. Reuchlin s'en 
ventes en le livrant aux risées du monde lettré ; Hoogstra- 
ten fut aussi lori maltraité dans les Epistoloe obscuormn 
rirorum, et mourut à Cologne, le 21 janvier 1577. On a 
de lui qelques mauvais pamphlets en latin, coutre Luther 
et la rtormation. 
HOOçSTIATE (Dua v), peinlre flamand, 
en 159, était apprenti orfévre quand il s'appiiqua à la gra- 
vure sur cuivre, et plus tard à la peinture, où il se fit la 
réputation d'un excellent artiste, notamment dans le genre 
historique. Il mourut à Dordrecht, n 
Son fils, Samuel v Hoo6snA'v, surnommé le Balaye, 
né à Dodrecbt, en 1627, fut initié à l'art par son père et 
par Rembraadt. Il peignit beaucoup de portraits, de ta- 
bleaux d'histoire, des fleurs et des fruils ; mais les tran- 
quilles scènes d'intérieur lui réssissaient de préférence. 
De Vienne, où il ails ftwt jeune encore, il se rendit  Borne, 
et plus tard à Londres : il mourut dans sa patriel, en 1678. 
Son Traité de la Peinture, avec des planches gravées 
par lui-mïme, est un des meilleurs ouvrages qui aient été 
publiís dans ce sièc|e sur ce sujet. 
Son frère, Jean w, Hoocsxa;s, qui l'a¢compagna dans 
ses voyages, peiguit également des tableaux d'histoire, et 
tnourut à Vienne, en 
- HOOI (Tu¢-onon e-Ëaoçna), romancier et poëte drama- 
lique anglais, né à Londres, en 1788, st auteur d'une foule 
de pièces de thtre, comme le Retour du Soldat; le Sidge 
de Saint-Quentin; TeMi, '.mélodrame, etc. Présenté au 
prince-régent, il capta si bien sa faveur par ses saillies et sa 
gaieté, q,'en 1812 il fut nommé receveur général et tréso- 
rier à l'lle Maurice, avec un traitement'de 2,000 livr. sterl. 
11 remplit ces fonctions jusqu'en 1818, époque ù un abus 
de confiance., commis par l'un de ses subordonnés, mit àsa 

HOOKE 
charge un déficit considérable reconnu dans sa caisse. 
Quand il revint en Angleterre, on lui intenta un prou.ès, qui 
dura ]usqu'en 189.3, et se termina par un ugement qui 
condamnait A réintégrerdans les caisses du gouvernement 
une »omme de t,000 liv. sterl. Pendant ce temps-I il était 
devenu l'un des rédacteurs du John-Bull, journal dans le- 
quel il défendait les principes du parti tory et combattait 
ses adversaires avec une verve de cansticité voisine souvent 
du cynisme. Au moment du procès talentWa la reine Ca- 
roline, il accabla souvent cette malheureuse princesse des 
plus grossières insultes. Malgré cela, il lui fallut subir la 
détention à laq,melle il avait était condamné; et ce fut dans 
la prison pour dettes qu'il composa ses premiers Contes, 
puhliés sous le titre de Sa!lings and Doin9 s ( Londres, ! 824) 
et dont le succès fi,t tel, qu'ils lui valurent plu de 2,000 livr. 
sterl. Il parut une continuation en 185, et bient6t après la 
détention de Hook cessa. II se consacra dès lors exclusive- 
ment à la nouvelle et au roman. En 188, il publia une 
troisième série de ses Sayings and Doings; en 1830, 
well; La Fille du Curé et Amour, et I'anitœe. En 1836, 
il prit la rMaction en chef du a)'ew-Monthl!-Maga-..inc, 
recueil pour lequel il composa Gilbert Gurne9, puis uuesuite 
assez médiocre " ce roman!, inlitulee : Gurney Marido 
Vinrent en«uite, en 1837 ,' Jack Bruni; en ! 839, lVaissances 
)lorts et Mariages; en IM0, Pères et Fils. On a aussi de 
lui des Memoirs of general sir David Bairà et une Vie de 
Kell 9. Son dernier roman, Peregrtne Bunce, ne parut 
qu'après sa mort (3 vol., 18-12 ), et fitl achevé par une main 
étrangère. Sa connaissance du monde, ses relations avec la 
haule société, son eprit, son lalent pour la narration, lui 
eussent permis de faire beaucoup mieux quil n'a lait, si sa 
vie désordonnée ne l'avait constamment jeté dans des cm- 
barrais d'argent, et si la necessité de soutenir cinq enfants, 
ns d'une union illégitime, n'avait entravé l'essor de son 
génie. Il mourut le 2t août 1841. 
llOOiE (RoaT), géomèlre et astronome anglais, ne 
dans l'lle de Wight, en t638, mort le 3 mars 1703, est cé- 
Ièbre par un grand nombre d'inventions. Mémeen lui con- 
testant celle du ressort spiral des montres (royez B'- 
cn), il lui reste assez d'autres titres de gloire. Mais ce qui 
lui merite surtout une place distingu6e dans la science, c'est 
d'avoir, douze ans avant .N e  t o n, entrevu les lois de 
gravitation universelle. On lit en effet dans un de ses 
ouvrages, publié en 167tt, et intilulé : An attempt tu 
the motion q[ the earth (Londres, in-tt°), le passage re- 
marquable dont voici la traduction : « J'expliquerai un 
système du monde diffëreat " bien des égards de tous les 
autres, et qui est fondë sur les trois propositions suivantes 
1 ° que tous lescorps célestes ont, non-ulement une attrac- 
tion ou une gravitation sur leur propre centre, mais qu'ils 
s'attirent mutuellement les uns les autres dans leur sphère 
d'activilk; 2 que lous les corps qui ont un mouvement 
simple et direct continueraient à se mouvoir en ligne droite 
si quelque force ne les en detournait sans cesse, et ne les 
contraignait à décrire un cercle, une ellipse ou quelque autre 
courbe plus composée; 3 ° que l'attraction est d'autant plus 
puissante, que le corps attirant est plus voisin. ,, Hooke 
fit paraltre plusieurs autres ouvrages, également en anglai 
le principal est sa Micrographie , 1665, in-folio. C'est ser 
ses plans que Londres fut en partie rebMie après le fameux 
incendie de 1666. 
HOOHEI (SoE Wu.q-Jasox) , né à Exeter, en 
1785, manifesta de bonne heure un gotit des plus vi[. pour 
l'Cude de l'histoire naturelle, et en 1809 e, trepdt en Islande 
us voyage scientifique qui lui fournit le.ujet d'un livre intitulé 
A Tour in lceland ( édit, 18 t 3 ), En 18 t 5, il épousa la fille 
de Da-son Turner, savant botaniste et archéologue, et hérila 
de la fortune, assez considérable, de son cousin Wiiliam 
Jackson, de Canterbury ; ce qui ne l'empécha pas d'accepter 
la chairede botanique que lui offrit à ce moment l'université 
de Glasgow et de déployer en méme temps un infatigable 
activité littéraire. C'est ainsi qu'il continua la Bolanical 



I 0S' HOOKER  
Maga'-ine fondé, en 1787, par Curtis, dont il commença 
une troisième série en 1845, après la publication du 70 « vo- 
lume; qu'il fit para|tre, h partir de t834, le London Jour- 
nal oflotong, et qu'il publia en outre Botanical Mucel- 
lany. Nous citerons encore de lui British Junyermanniœe 
(1816) ; bluscoloyia 13ritannica (2 « éd., 1833 ) ; Musci 
exotici ( lB! 8 ) ; Flora Scotica (! 821) ; Exotic Flora (3 vol., 
t 823-t827 ) ; Flora Borealis.Americana (2 vol., t833-18O); 
les parties botaniques des voyages scientifiques de Beecbey 
et autres; TheBritish Flora (5 vol., 1830 ; 5" édit., lB/t2) ; 
fcones Plantarum, or /içures with brief descriptive 
characters and remarits of new and rare plants, selec. 
ted front the author's herbarmm ( 1837 ) ; Species Fili- 
cure (186-1853); A century of orchidaceous plants 
En 1836, tlooker fut créé baronet, en considération 
des services rendus par lui à la science. Quelques années 
llus tard, il fut nommé directeur du Jardin botanique de 
Kew, devenu depuis lors le premier établissement de ce 
genre qu'il y ait au monde. II a rendu compte des améliora- 
tions qui y ont été e[fectuées par lui, dans l'écrit intitulé : 
Kew Gardens, or a l)opular guide fo the royal botanic 
Gardens al Kew (187). Son dernier travail est un ou- 
vrage de grand luxe sur la Victoria reyia ( 1851 ). 
HOOKER (Josn-D,tLro), fils du préeédent, né eu 
816, docteur en médecine, accompagna de 1839 à 1843 
le capitaine Ross dans son expédition au p61e antarctique, 
en qualite de ndecin et de naturaliste ; et il en a publié 
les résultats botaniques dans sa Flora Antarctica ( vol., 
1845-1848} et daas sa Flora ?,bvoe.Zelandize (1852. En 
! 87, muni d'instructions spéciales de 11. de llumboldt, il en- 
treprit un voyage botanique dans l'lnde. Arrivé/ Calcutta en 
janvier 188, il franchit l'Himalaya, et pénítra jtsque dans 
le Thibet, ou il découvrit un grand nombre de plantes nou- 
velle», entre autres 37 espèces de rhododendrous jusqu'alors 
completement inconnues, dont on trouvera la description 
daus le magnilique'ouvrage intitulé : The Rhododendrons oJ 
Ihe .SiMint Himalaya ( 18t9-1851 ). !i était de retour de 
cette expedition ientilique en 1851. 
iIOORX ou tlORN, villeet chef-lieu d'arrondissement 
de la province de Hollande septentrionale (royaume des 
Pays-Bas), située dans une belle contríe, sur une baie du 
Zuderzée, possède un bon port, un college, un bel htel 
de xille, dix églises et compte 8,000 habitants, qui font un 
commerce considerable en beurre et en fromages. Ils font 
aussi la péche et construisent beaucoup de vaisseaux. 
Hoorn Cait jadis l'une des villes les plus riches et les 
plus florissantes de la Hollande, grâce à l'activité de ses në- 
gociants, de ses narins et de ses pcheurs de baleines. C'est 
I que furent inventés les grands fdets employes encore au- 
jourd'hui pour la p,che du hareng, et que naquit entre au- 
tres hommes clëbres, Wilhelm Schouten, qui le premier 
.Ioubla le cap H or n. Cette époque de prospérilé est depuis 
longtemps passée. Comme presque toutes les autres villes 
de la Hollande septentrionale situées sur le Zuyderzée, 
Hoorn décline chaqne jour davantage. Aprës une terrible 
inondalion, causée, en 1557, par la rupture des digues,elle 
eut encore beaucoup à souffrir pendant les guerres contre 
l'Espagne. En 1799 elle fut prise par les Anglais ; mais ils 
l'évacuërent aprës la bataille d'AIkmaar. 
HOPITAL et HOSPICE (mots dírivés du latin hos- 
pes, b6te, et hospitalitas, hospitalité). Un h6pital ou hos- 
pice n'a et6 d'abord, en effel, qu'un lieu où l'on donnait 
l'hospilalitê. Il parait que chez les anciens Grecs et Bomaius 
d n'existait pas d'établissements analogues / nos h6pitaux 
modernes. Pour expliquer ce lait, il faut se rappeler que la 
population était alors formellement divisée en hommeslibres 
et en esclaves : parmi ceux-ci, les malades et les infirmes 
devaient tre soignés par leurs maltres, ou si quelques-uns 
étaient abandonnés, qui s'inquiétait du sort de quelques 
esclaves? Quant aux hommes libres, ceux qui devenment 
pauvres tombaient souvent dans l'esclavage, ou ils trouvaient 

HOPITAL 
secours et appui chez ces patriciens qui avaient des milliers 
de ctienls sous lenr patronage. Le christianisme vint, qui 
changea la face dn monde, en proclamant cette matime 
étrange pour les riches, cette bonne nouvelle pour lespau- 
vres, que les esclaves sont les frères de leurs maltres. C'est 
le christianisme qui a fondé les hbpitaux. 
On croit que les premiers hbpitaux furent fondés à Jé- 
rnsalem, pour recevoir le« pèlerins qui venaient visiter la 
Terre Sainte. Ils se muitipliërent ensuite dans toute l'Europe 
chrétienne; chaque abbaye, chaque monastère, clmque ca- 
thédrale mme eut son hpital. Les fonds nécessaires h leur 
établissement et à leur entretien furent fournis par les sei- 
gneurs et les rois ; le bourgeois eux-reCes contribuèrent 
pour beaocoupà la fundation des h6pitaux. Il n'y avait guère 
d'homme riche qui en mourant ne fit quelque legs  un 
hbpital. Les barons, après avoir pillé les serls pendant 
leur jeunesse, faisaient ensuite pénilence en donnant à un 
hpital le fruit de leurs rapines. Aussi voit-on qu'au moyen 
ge il existait des h6pitaux pour chaque espèce de naladie 
et d'infirmité, des hbpitaux pour chaque genre de métier, 
des hpitaux pour les hommes, pour les veuves, pour les 
filles, pour les voyageurs, etc. Tous ces étabIissements 
étaient sous m direction du clergé, et le service intérieur en 
était fait par les différents ordres religieux. Les malades, 
les infirmes, et longtemps aussi les voyageurs ou pëlerins, 
trouvaient dans ces as[les nourriture et repos ; quant au 
traitement médical, il n'en était souvent pas question. On 
n'offrait aux pauvres que l'hospitalité, mais une hospitalité 
réelle et généreuse : ceux qui étaient reçus dans les h6pi- 
faux, disent les chroniques, se conlessaient et commu- 
niaient ; ils étaient ensuite regardés comme les maltres de 
la maison, et les relieux devenaient leurs serviteurs. 
Quand le pouvoir se concentra dans la main du roi, c'est 
son gouvernement qui dut protection et secours à tous ses 
sujets. L'administration des h6pitaux passa d'abord aux 
parlements ; plus tard, en 154, François 1  chargea le 
prév6t des marchands et les échevins de Paris de veiller 
aux besoins des pauvres. Depuis lors, ces magistrats, sous 
le nom de grand bureau des pauvres, curent l'adminis- 
tration des hpitaux, /t l'exoeption de I'H 6 t e I-D i e u, des 
Petites-Maisons et de La Trinité, régis par des ad- 
ndnistrateurs particuliers. Il en fut à peu près de rnme 
dans les provinces. Comme les dons volontaires ne suffi- 
salent plus, le bureau des pauvres avait le droit de lever 
sur tous les habitants un imp6t nommé taxe d'aum6ne. Ce 
bureau fut remplacé à la révolution par des administra- 
teurs, et plus tard par le conseil gnral des h@itaux 
et hospices. Depuis lëpoque où le gouvernement eut son 
siége definitif à Paris, c'est dans cette capitale que s'élevë- 
rent les établissements de charité les plos importants. 
En 1632, Louis XIII posa lapremière pierre deLa Sal- 
pétriëre, et en 1657 un put y faire entrer les pauvres 
mendiants. On avait, dans le mmetemps, agrandi et disposé 
le ch/teau de Bi c  t r e pour qu'il pot servir d'hpital : ces 
deux établissements reçurent 7 / 8,000 pauvres. Vers la 
méme époque, on parvint à fonder un établissement pour 
les enfants trouvds. Sous Henri IV et Louis XIII furent 
encore fondés deux grands h6pitaux, celui de Saint-Louis 
et La Pitié. Traités d'abord dans les divers hpitaux et sut- 
tout à l'H6teI-Dieu, les vénériens furent ensuite envoés  
Bicètre. Là, ils devaient Atre fustigés avant et après le trai- 
tement, et ce traitement était tel que la plupart mouraient 
dans un horrible état. En 1784 les vénériens furent trans- 
portés dans l'ancien couvent des Capucins, aujourd'hui 
h6pital du Midi, et ils y furent traités d'une manière conve- 
nable. Depuis lunoemps les malades n'étaient plus des 
h6tes eonsidérés comme les maltres de la maison o6 on 
les recevait; les hpitaux étaient devenus de« lieux terribles, 
où les malheureux n'entraient souvent que pour y agoniser 
et nourir. A l'HoteI-Dieu, les malades ont couché jusqu'k 
huit dans un lit à deux étaaes, c'est-à-dire que la moitié 
de ces malheureux couchaien par terre pendant six heure 



HOPITAL 
et faiaient ensuite lever les quatre autres pour prendre 
leur place : cest Louis XVl qui a fait donner un lit à cha- 
que malade. Avant Henri IV, les soldats invalides n'avaient 
d'autre ressource que la charité publique : ce prince leur 
donna un asile dans une maison située rue de l'Arbalète 
(aujourd'bni l'École de pharmacie). Louis Xlil les fit trans- 
fërer à Bicètre, o/ ils restèrent jusqu'à l'époqueoù Louis XIV 
fit construire pour eux le magnifique h6tel des I n v a Il d es. 
Telle était en général la situation des établissements pu- 
blics de charité au moment où éclata la révolutio[:. La Cun- 
vention, ce dictateur si actif, s'empare de l'administration 
des b0pitaux comme de toutes les autres. En 1794, seize 
membres de cette assemblée furent choisis pour surveiller 
les h6pitaux et hospices, et ils commencèrent à donner au 
service l'uniformité qui existe aujourd'hui. Mais cette orga- 
nisation régulière est due surtont au conseil général des h6- 
piteux et hospices fondé en 1801 par le premier consul. De- 
puis lors la direction et la distribution des secours accordés 
aux pauvres et aux malades ont été remises à une même 
volonté, elle service et l'administration des h6pitaux suivent 
partout un plan unilormeet rég,dier. C'est aussi la Convention 
qui a créé les h6pitaux militaires. Jusqu'à l'époque de la ré- 
volution, tous lesasiles publies ouverts aux malades et aux 
infirmes indigentsétaier, t déaignés sous le nom général d'bd- 
pitaux; mais ce nom d'h6pital réveillait chez le peuple 
t'idée d'un lien si repoussant, d'une prie si insultante et si 
cruelle que, devenu le marre, il le proscrivit avec hor- 
reur et lui substitua le nom d'hospice. 
Ces asiles cependant sont de deux espèces bien distinctes. 
Dans les uns, on n'admet que des malades ou des blessës; 
on ne les garde qu'un temps limite, ou jusqu'au moment 
de leur guérison, si on peut l'obtenir, ou, si leur mal est 
incurable, ils doivent céder leur place à d'autres. Dans les 
autres, au contraire, on admet les individus que i'àge ou 
des infirmités incurables mettent ho d'état de pourvoir ì 
leur existence, et on les garde jusqu'à leur mort. Il était 
donc convenable de distinguer ces deux sortes d'asiles par 
des noms dilférents. Le nom d'hospice a été réservé pour 
ceux-ci, et les premiers ont repris le nom d'h@ital, qui 
ne doit plus inspirer aujourd'hui la mëme repugnance. Les 
maisons de sanN sont des h6pitaux privés et payants. Il y 
a aussi des hospices particuliers. Dans les départements les 
h6pitaux ont souvent des salles réservées aux malades qui 
peuvent payer les soins dont ils sont l'objet. 
11 existe, en outre, à Paris trois h6pitaux spécialement con- 
sacrés aux militaires en activité : l'h6pitai du Val-de-Grâce, 
ouvert pendant la révolution, qui contient !,000 lits; 
l'h6pitai du Gros-Caillou, fondé en 1765 par le duc de 
Biron : il contient 260 lits, et sous la Restauration il était 
réservé aux soldats de la'garde robaie ; enfin i'h6pitai du 
faubourg du Roule. 
Avant d'ètre admis dans un h6pital civil, les malades doi- 
vent se présenter  un hure.au central : ils y sont examin6s 
par des médecins et chirurgiens qui leur délivrent un billet 
d'admission pour l'un des h6pitaux, suivant le genre de leurs 
naladies. Cependant en cas d'urgence, les malades ou 
blessés peuvent Cre portés directement à un h6pilal. 
Tous ces établissernents, dirigés par un mëme conseil, 
out servis et administrés de la méme manière; tous sont 
tenus dans un état d'ordre et de propreté vraiment admi- 
rable. Les salles sont en général spacieuses et bien aéré.es : 
celles qui sont cartelCs sont lavées avec soin ; les salles 
parquetC sont oirCs et frottée.s. E hiver, elles sont chauf- 
fées au moyen de poêles ou de calorifères, et maintenues h 
une température de 15 ì 18% A son arrivée, le malade est 
conduit ou porté dans un lit garni de draps blancs et entouré 
de rideaux blancs. Ses vêtements sont mis en paquet et 
gard6s pour lui tre rendus h sa sortie. On lui donne une 
chemise, des chaussettes; une robe de chambre, un bonnet, 
des pantoufles; il trouve près de son lit une table de nuit 
ou tablette sur laquelle sont : un crachoir, un couvert com- 
plet pour manger et trois pots, le tout en Atain. Le linge de 

169 
corps estchané tous |es hit jom's et|es draps tous |es mois. 
Les médicaments sont fournis à tous les bpitaux par 
une pharmacie centra|e. Le pain est fourni aussi par une 
seule boulangerie. Ceux des malades qui peuvent manger 
une portion entière d'aliments reçoivent par jour : pain, 375 
grammes; viande ou Iumes, 140 gr.; vin, lb centilitres. 
Ceux qui sont au régime gras reçoivent en outre 50centilitre 
de bouillon. Les malades mis à la demie ou a, quart de por- 
tion reçoivent des qtmutités proportionnelles d'aliments. 
Les malades ou les bless sont traités par des médecins 
ou chirurgiens. Vingt-cinq blessés, 50 fiévreux, galeux ou 
vénériens sont remis aux soins d'un nédecin ou chirurgien, 
élève interne de l'h6pital, secondé par deux ou trois élèves 
externes. Ces élèves font les pansements et exécuteur les 
prescriptions d'un médecin ou clfirurgien, chef de service, 
qui a sous sa direction 80 à 1o0 malades. A l'H6tel-Dieu et 
dans les h6pitaux militaires, il y a en o,tre un médecin ou 
chirurgien chef général de tout le service de santé. 
Chaque matin, de six h sept leures, le cfief de service fait 
la visitedes malades (roue'. CLINIQUE) ; il est accumpagné des 
élèves, qui lui rendent compte de ce qui s'est passé en son 
absence. Un des élèves et un pharmacien sont munis chacun 
d'un cahier sur lequel ils écrivent les prescripfions du chef. 
Après sa visite, le chirurgien pratique les grandes opérations 
dans un local éloigné des salles des malades. Un chirurgien 
reste jour et nuit de garde pour 300 malades. Clmque h6pi- 
tel a encore un pharmacien en chef qui surveille la prépa- 
ration et la distribution des médicaments magistraux. 
L'administrtion est confiée à un économe ou directeur, 
qui a sous ses ordres tous les employés, excepté les méde- 
cins et chirurgiens. Au dernier degré de l'échelle des employés 
se trouvent les i n fi rmie rs des deax sexes ; leurs lonctious 
sont les plus Immbles, mais non les moins importantes pour 
les malades. Les soins si pénibles des infirmiers sont encore 
partagés dans la plupart des h6pitaux par des sœurs reli- 
gieuses, derniers représentants du clergé et de l'origine 
chrétienne des h6pileux, ff.-P. AiQUETZL 
En 1852, il existait h Paris seize h6pitaux pour le trai- 
tement des maladies et dix hospices ou maisons de refuge 
pour les infirmes incurables et les vieillards indigents. Les 
b6pitaux étaient : l'H6tel-Dieu Sainte-Marguerite, la Pitié,. 
la Cbarité, Saint-Antoine, P;ecker, Cochin, Beaujon, Bon- 
Secours, Saint-Louis, le llidi, Lourcine, les Enfants- 
llalades, la Maison d'accouchement, la Clinique et la Maison 
de santé. Les dix hospices étaient : Bicètre, la Salpètrière, 
les Incurables hommes, les Incurables femmes, les Ména- 
g«, La Rochefoucauld, Salnte-Périne, Boulard, Brezin et 
Devillas. Depuis on a ouvert l'h6pitai La Riboisière, nommé 
d'abord h6pital Louis-Philippe, puis de la République, puis 
du .Nord, situé dans le clos Saint-Lazare. L'h6pital Sainte- 
Marguerite a été exclusivement consacré aux enfants mala- 
des ; un h6pital a éte fondé, dans la rue Picpus, par M. de 
Rotbschild, en faveur des Israélites. En outre, un hospice, 
sous l'invocation de sainte EutCie et consacré aux jeunes 
filles, doit dtre élevé dans le lauhourg Saint-Antoine avec 
l'argent du collier que la ville de Paris voulait offrir ì l'im- 
pératrice Eu gé n i e, lors de son raariage. Enfin, il existe un 
étahlissemen! spécial pour les enfants trouvés et orphelins. 
Pour subvenir aux nombreuses dépenses qu'entralne une 
administration aussi multiple, il faut un budget considéra- 
ble; celui de l'exercice 1852 s'est élevé, en recettes, à 
t2,767,290 ff. 35 e., et en dépenses à 12,238,702 fr. 85 e. 
Voici la division de ces recettes et de ces depeuses : 
lfccettes : Domaine et revenus mobilier% 3,028,135 fr. 
33 c. Revenus éventuels, 464,557 ff. gt ¢. Concessions de 
terrains dans les cimetières, 134,958 ff. 75 c. Droits sur 
les spectacles, 1»085,315 [r. 98 c. Boni du Mont-de-PiCC 
209,325 ff. 27 c. Frais de s6jour des malades étrangers à 
la ville de Paris, 357,00 ff. 78 c.Frais d aliénés étrangers à 
la ville de Paris, t,0oE4,156 ff. 40. Contingent pour le ser- 
vice des enfants trouvés, 1,495,148 ff. 41 c. Rembourse- 
ment de frais divers, 7, 13 fr. 15. Subvenlion municipale  
22 



17O HOPITAL 
4,421,813 ff. Revenus des fondations, 54t, 462 ff. 07 c. 
Tolal 12,767,290 |r. 35. 
Dpenses : Service des rentes et fondations, 75,255 ff. 
03 c. Dépenses du domaine et perception, 292,233 fr. 87 c. 
H6pitaux, 3,801,976 ff. 37 c. Hospices, 3,780,249 ff. 49 c. 
Hospices Iondés, 233,194 ff. 68 c. Enfants placés à la campa- 
gne, 1,930,584 ff. 24 c. Secours à domicile, 2,125,209 fr. 17 c. 
Total égal, 12,238,702 ff. 85 c. 
Au nombre des principales recettes de l'administration 
hospitalière, nous voyons figurer : les loyers des maisons 
pour 347,009 fr. 83 c.; ]es fermages en argent et en nature, 
437,380 ff. 95 c.; les intéréts de la dette de la "fille envers 
les hospices, 554,873 fr. 80 c. ; les rentes sur l'État, 
1,807, 440 fr. 35 c.; enfin, le produit des legs faits pendant 
l'année 1852 aux établissements de bienfaisance de la ca- 
pitale est évalué à 671,388 fr. 
Il a été consommé en 1852, dans les divers établisse- 
ments bospitatiers de Paris : Pain et farine, 5»843,436 kilo- 
grammes; vin, 1,491,893 litres; viande, 1,243,664 kilo- 
grammes; bois, 13,287 stères; charbons, 7,247,745 Lilo- 
grammes; œUfS, 1,36,132; lait, 1,083,551 litres; beurre, 
97,781 kiloammes; sel, 81,08 kiloammes; p,»mmes 
de terre, 473,068 kiloammes. Le co0t de la journëe dans 
les h6pitaux est de I tr. 79 c., et dans les hospices de t ff. 
11 c. La dépense d'un lit pendant une année dans un 
pital est de 654 If. 9 c., et dans un hospice de 406 ff. 66 c. 
Enfin les établissements que nous avons énumérs con- 
tenaient en 1852, 17,170 lits, savoir : H6pitanx, 6,743 ! Hns- 
pices, 9,28 ; Enfants Trouvés, 599. Pendant la mme année 
il a été traité dans les h0pitaux 90,486 individus, 77,776 
sontsortis guéris; 7,201 sont morts. Au total, c'est un chiffre 
de 2,099,881 journées. Dans les hospices, sur 3,73,36 
journées pour un personnel de 12,117 admiitrés, il y a eu 
1,538 décès. Quant aux enfants trouvés on orphelins secou- 
ros par l'administration, leur nombre s'est élevé à 17,880. 
Tuu ces maades n'appartiennent pas à la ville de Paris. 
L'administration a soin, en recevant dans un h6pital un 
individu malade et indigent, de constater sa nationalite, 
afin de réclamer ses frais de séjour au pays ou au départe- 
ment dont il est originaire. Pour 88,219 individus reçus dans 
les établissements hospitaliers de Paris pendant l'année 1852, 
la capitsle proprement dite ne comptait que 72,010 Parisiens. 
La banlieue avait fourni un coutingent de Ii,002 indi- 
xidus, les departements figurent pour 2,162 per»onnes et 
parmi les 38 étrangers qui viennent compléter le total que 
nous avons indiqué figurent I0 Belges, 8 Anglais, 5 Suisses, 
5 Africains, 3 Savoyards, 2 Allemands, 2 Américains, I Turc, 
I Prussien et  Égyptien. L. Lovva. 
HOQUET. On désigne par ce mot, qui est une onoma- 
topC, une sorte d'inspiration brusque, spasmodique et 
accompagnée d'un son vocal rauque et non articulé, qui se 
reproduit ordinairement plusieurs fois de suite, en détermi- 
nant des secousses pénibles dans les organes thoraciques et 
abdominaux. Les phénomènes qui constituent le hoquet et 
les parties qui concourent à sa production ont été et sont 
encore aniourd'hui le sujet d'une foule d'opinions diverses : 
les nns ont fixé son point de départ dans l'estomac; les au- 
tres ]'ont placé dans le diaphragme; ceux-là dans les pou- 
mons et dans l'oesophage ; ce]x-ci ont regardé ce phénomène 
nerveux comme étant le résultat d'une expiration forcée et 
rapide ; enfin Chaussier et presque tous les pliysiologistes 
modernes pensent que le hoquet est la conséquence d'une 
contraction subite et involontaire du diaphragme et d'un 
resserrement de la glolte, qui arréte brusquement l'entrée 
de l'air dans la trachée. Selon nous, cette sorte d'aberration 
nerveuse est le résultat de la contraction spasmodique et du 
relchement brusqne et alternatif du diaphragme, de l'es- 
tomac, de l'oesophage, ainsi que de tous les muscles de la 
respiration. La contraction simultanée de tous ces organes 
détermine un mouvement rapide d'inspiration, qui en don- 
nant lieu à lïntroduction convulsive de l'air dans la glotte 
produit un son vocal inarticulé, qui se trouve slabitemenl 

interrompu par le relâchement de tous les muscles inspira- 
teurs, mais qui se reproduit aussit6t par de nouvelles con- 
tract¤ons. 
Cette affection, le plus uvent essentielle et ne consti- 
tuant pas un état pathologique, a quelquefois pour cause dé- 
terminante la réplétion brusque et immodérée de l'estomac, 
l'usage d'aliments indigestes, pris avec voracité et sans Cre 
humectés de boissons; la déglutition précipitée on trop promp- 
tement arr¢tée, comme il arrive souvent chez les enfants; 
l'ingestion de boissons froides, de liqueurs alcooliques; la 
sensation de froid aux pieds, à la circonférence de la poi- 
trine, surtout à l'épigastre; enfin, les émotions vives de 
l'ame, telles que la colère, la surprise, la joie ou la terreur. 
Quelquefois le hoquet est symptomatique de certaines mala- 
dies, dont il est, ainsi que dans le choléra, un des signes 
prognostiques du plus t3cheux augure. Le hoquet, qui, dans 
quelques cas, persiste longtemps après la guérison des affec- 
tions dont il a été un des sympt6mes, peot, dans certaines 
circonstances, déterminer des effets fàcbeux, non-seulement 
"en troublant, par sa durée et sa violence, la circulation 
pulmonaire et la nutrition, mais encore il ocasionne un 
dépérissement général en provoquant le vomissement des 
aliments introduits dans l'estomac. Ënfin, dans quelques 
cas, à la vérité fort rares, il est si grave et si opinittre qu'il 
constitue ,ne véritable maladie, qui n'a été observée que 
chez les personnes nervenses et très-irritables. Les secousses 
spasmodiques du hoquet peuvent aussi ¢tre entretenues par 
une sorte d'habitude de l'oanisme, qui tend à répéter les 
actes qu'il a exécutés vu certain nombre de fois. Le célèbre 
Boisier de Sauvage, l'illustre Boerhaave prouvent que 
cette affection peut aussi ttre communiquée par imitation, 
et qu'elle accompagne quelquefois l'hysterie et l'hypochon- 
drie. Une circonstance qui tend à ne laisser aucun doute 
sur le caractëre névralgique ou nerveux du hoquet, c'est 
que, parmi ]es causes qui le produisent, on trouve des 
moyens propres à le combattre : ces moyens agissent Ci- 
dominent en produisant une perturbation brusque et imtan- 
tnee de l'action nerveuse : telles sont la surprise, la peur, 
l'ingestion d'un liquide froid, ou l'aspersion brusque avec de 
l'eau à la gace, etc. 
Le traitement du hoquet doit donc varier selon ]es caoses 
q,d sont supposées l'avoir déterminé : culot qui est ]er 
n'en exige aucun, parce qu'il cesse promptement de lui- 
mëme, ou du moins en employant les moyens très-simpl 
que nous venons d'indiquer. Dans les cas où il est plus in- 
tense, lorsquïl revient à des ëpoques plus on moins rap- 
prochées, périodiques eu non, il est souvent difficile de le 
faire cesser : on doit principalement avoir recoursà tons les 
moyens thérapeutiques indiqués dans le traitement des af- 
fections nerveuses. Enfin, le traitement par excellence de 
cette affection sera celui qu'on aura prescrit aprts avoir 
remonté à sa cause, lorsque les secousses singultueuses 
ront déterminées par une digestion pénible. Sans l'existence 
d'une maladie de l'estomac, on emploiera ave avantage des 
infusions de thé rendues un peu plus stimulantes par l'ad- 
dition de qsaelques gouttes de rhum ou d'une autre liqueur 
alcoolique. Si ce phénomène nerveux se présentaR soos la 
forme intermittente, on le combattrait au moyen dnquîn- 
quina ou de toute atltre préparation antipériodique, de mime 
que dans un grand nolnbre de cas il suffit, pour l'arrtter. 
d'une volonté ferme, de quelques distractions et de 
vements capables de modifier l'innervation. 
D r COLOIfB£T ( de i'lëre ). 
HOQUETON mot qui a servi de dënomination à 
genre d'arme défensive, et au guerrier ou à l'archer porteur 
de cette arme qui servait sous le grand prévbt. On est mal 
éclairé sur i'ét}mologie de ce terme, que les uns croieutde 
source flamande, les autres d'origine anglaise. Il est sflr 
qu'au temps du prince Noir ce que lesAng]ais, combattant 
Franoe, appelaient akton n'était autre que le vëtement que 
nous avons plus tard appelé aUClueton ou hoqueto, 
C'était une tunique d'archer, en usage surtout depuis char- 



HOQIIETON 
les v, ou une manière de surent ou de sayon d'étoffe ou 
de cuir, accompagnée de diverses garnitures en métal. Jusqu'à 
l'abolition de la maison militaire de Louis XVI, on voyait 
encore quelques soldats à hoçueton. G t B«mr. 
HOIACE (Qrus HonxTIvs FLACCVS), naquit à Ye- 
nouse, ville frontière de la Lncanie et de la Pouille, le 8 
décembre de l'an de Ruine 688. Sou père était un affranchi : 
en homme intelligent, il avait profité de sa liberté pour faire 
fortune; en père tendre, il se servir de sa fortune pour faire 
lever son fils dans toutes les belles et sévères Arudes de 
l'Cule aflénieune. 11 le conduisait bfi-mème aux écoles. Il 
était à la luis son mentor et son ami. Horace, à vingt-deux 
ans, savait la langue de Lucrèce et celle d'Homère. Ce fut h 
Mhènes qu'il rencontra Brutus, l'énergique assassin de César. 
L'/tme forte de Brutus eut bientôt conquis ce jeune homme; 
Brutus persuada au jeune Horace de  faire soldat et de 
le suivre dans la mh«e des guerres civiles. La première fois 
que le eune Horace vit une bataille, c'était dans les plaines 
de Philippes; il s'enfuit, relictd on benè parrnuld, comme 
il dit lui-mme en se vantant spirituellement de sa frayeur. 
En effet, on peut dire q:e ce fut là une heureuse lched. 
Quel grand poête la ville de Borne pouvait perdre, et 
que c'e0t été dommage si Quintus Horatius Flaccus, de- 
venu chef de bandes, e0t été le mme barbarus toiles qui 
s'en vint usurper la tranquille chaumière du berger de 
¥irgile et fouler aux pieds ses rouissons jannissantesl Ho- 
race eut peur de cette oire, Comme il eut peur de la mort. 
Il sentait déjà confusément qu'il était nn poëte, et il com- 
prenait à merveille que ces foreurs civiles ne pouvaient 
durer; que cette guerre éternelle aurait un terme ; que 
lome, n'ayant plus rien à dévorer, pas mme ses entrailles, 
allait eutrer enfin dans te repos, c'est-à-dire dans les beaux- 
arts, dans la poésie, dans l'éloquence, dans tous les heureux 
et poCiques loisirs de la paix. Il comprenait aussi que le 
temps n'était pas loin où la république romaine deviendrait 
la cour la plus magnifique eL in plus policée du plus Erand 
roi de l'univers. A ces causes, il voulut vivre. Il se dit encore 
tout bas que son génie lui donnerait, t6t ou tard et sans 
violence, quelque retraite heureuse et tranquille sur les co- 
te.aux verdoyants de Tivoli ou de Tibur, et il aurait eu peur 
d'usurper le pauvre domaine de Tityre on de Mélibée. Ho- 
race était déjà un sceptique politique, en attendant qu'il 
jet son heureux scepticisme sur toutes les actions, sur 
toutes les passions, sur tous les transports, sur toute la phi- 
losophie, sur tous les amours de l'homme. Il s'enfuit donc 
des plaines de Philippes. Brutus et Cassius, héros retarda- 
taires de la liberté romaine, morte avec S3,11a, ne purent 
survivre à ce dernier Ifort. Brutus tomba en s'Criant : 
Vertu, tu n'es ru'un rt I Horace n'a jamais calomnié 
ainsi mme le plaisir. 
Cependant Auguste, vainqueur et marre du monde, 
proc|ama l'amnistie qi devait compléter sa toute-puissance 
et sa grandeur. Il oubliait volontiers tout le passé, c'est-à- 
dire tons les efforts de la liberté romaine, à condition que 
la liberté l'oublierait lui aussi sous sa couronne de laurier 
Horace, qui avait été le premier à déposer les armes, ne 
fut pas le dernier à renh'er dans cette chère Italie, son 
amour. Il 3, rentrait ruiné, ses biens confisqués; mais il 
n'était plus soldat. Pourtant il fallait vivre. Il acheta une 
charge de secrétaire du trdsor, et il fit des vers. Déjà 
un souenir lointain de Pindare le tourmentait à son insu. 
Il avait étudié en poëte les merveilleuses ressources du vers 
grec, ses cadences sonores, ses allures si nettes, sa forme 
simple, et, comme un grand artiste qu'il était, il s'appfi- 
quait ì modeler le vers latin sur ces rares et précieux mo- 
dèles, dont il savait à fond toutes les ressources. Ce tra- 
vail eut bientft du retentissement dans cette ville de Borne 
qui se calmait de jour en jour. Yarius et ¥irglle, ces grands 
marres, l'un qui s'est perdu, l'autre qui est un des mal- 
tres de la poésie en ce monde, apprirent bient/)t qu'il 3, avait 
dans les bureaux du trésor une espè de poëte tout athéuiep, 
qui faisait des odes comme Pindare et des satires comme 

 HORACE 11 
Lucilius. Bientôt Horace fut l'ami de ces deux hommes, l'bon. 
neuf de leur siècle. ¥i rgile, si tendre, si dévoué, le prit 
par la main, et le conduisit chez ce dcscendantdes rois d'É- 
trurie qui partage l'immortafité d'Horace, 5|Cène; ami et 
confident d'Auguste, Mécène avait lrouvé dans cette immense 
république qui embrassait le monde, la seule chose qui lui con- 
vint: il avaitabandonué la gloire et la puissance pour la philo- 
sophie et les leltres. !i voulait Atre le plus grand après i'em. 
perenr : il se fit l'ami de Virgile et d'Horace. Il retint dans ses 
mains tout l'esprit de ce siècle, qui allait lutter avec le siëcle 
de Péridès: c'était bien plus que d'en tenir la toute- puissance. 
La première entrevue de Mícène et d'Horace fut pleine de 
réserve d'une part, et de l'autre part pleine de modestie. 
Ils se revirent une seconde fois, neuf mois aprfs, et ce 
ne plus se quitter. II 3' avait déjà trois ans que la 
bataille de Philippes avait mis Auguste plus haut que Car. 
Deux ans plus tard Mícëne, envo3,é par l'empereur à 
Marc-Antoine, emmena son poëte Horace avec lui. Horace 
a raconté ce Voyage à Brindes, vous saez avec quel esprit 
et quel abandon I Qui oe douteralt que le but de écëne, dans 
ce voyage, si amusant et si lentement exCoiC n'était autre 
que d'apaiser la guerre civile et d'en finir avec Antoine? 
Mais Antoine n'en voulait finir qu'à Actium! De retour de 
Brindes, Mécne donna à son pocte cette terre des envi- 
rons de Tibur, si souvent chantée, qui rendit notre Horace 
si heureux et si fier. A Tibur accoururent bientôt tous les 
beaux esprits de cette lome impériale, Agrippa, Pollion, les 
Pisons, Yarius et Tibnlle, serrnonum nostrortm candide 
index ! Alors aussi commença dans le cœur d'Horace sa 
passion et son dévouement pour l'empereur. En elfet, la 
cause d'Auguste était la cause de llome entière. Sextus Pure. 
pée n'était qu'on continuateor maladroit de cet Antoine qui 
s'endormait sur le sein de Cléoptre en attendant l'empire. 
Enfin la bataille d'Actium rendit un instant la paix à l'u- 
nivers, et, qui plus est, aux poëtes. 
Horace n'ëtait plus jeune. I| n'appartenait plus qu'à la 
philosophie et à Mécène. L'empereur voulut en faire son 
secrétaire : il refusa cette place brillante, pour rester Paroi 
de Mécène et de l'empereur. Que de belles odes cette dou- 
ble amitié et ce double enthousiasme nous ont values ! Le 
Poème séculaire, Carrnen seculare, les victoires de Tibère 
et de Drusus, Drsum 9erentem bella sub Alpilms, et 
touteJ; leu réformes des mœurs romaines, entreprises par 
Auguste, cëlébrées par son poëte I Ainsi la vie d'Horace s'é- 
coulait doucement sous les ombrages, aux murmures de 
ses fontaines, dans le culte des Muses, au milieu des hon- 
neurs et de la puissance, dont il n'avait que les roses sans 
les épines. Il raconte quelque part le charmant emploi 
de sa journée, et sans contredit c'est là le récit d'un 
homme heureux, exempt de chagrins, de soucis, d'ambi- 
tion. Son plus grand malheur, c'était de dlner trop sou- 
•ent chez Mécène, d'ètre trop souvent à la campagne de 
Mécëne, de trop appartenir à Mécène. Et il se consolait fa- 
cilement de ce malheur. Du reste, courtisan jusqn'hl'ami- 
fié, jamais jusqu'à la flatterie, noble esprit, qui n'a jamais 
brisé ce qu'il avait adoré, il a célébré dans ses vers Caton 
et Brntus, la vieille et sainte république. Auguste, plus d'une 
fois, s'arrta étonné devant ce rude langage, et il écrivait au 
poête : Je vous en veux de ne as mettre mon nom plus 
souvent dans vos odes. 
Son amitié était ainsi à toute épreuve. Comme il-parle 
de ses amis, et comme il les loue ! Varns, Septimius, Vir- 
gile, Mëcène ! Et ses maitresses, comme elles sont belles, 
Nera, Lsca, Pyrrha et les autres, couvertes d'essences 
et de fleurs, liquidis perfuscoe odoribusl Et le vin, comme 
il l'a chantét et Homère, comme il l'a compris! Et les 
fleurs, les arbres, les troupeaux, les bergères, les nym- 
phes qui dansent au clair de lune et dont les pieds re- 
tombent en cadence, et le berger Pris, et la bulle Hélène, 
et la guerre de Truie I Il est l'homme de la douce morale, 
des épanchements intimes, des fines causeries, des plaisirs 
iégants,simplex mundities. Pas une mauvaise pene dans 



son esprit, pas une hainedans son cœur I Tant6t stoïcien plein 
de courage, tantOt épicufien, mais épicurien avec délices ; au. 
ourd'hui sur les ailesde Pindare, demain sous le bosquet d'A- 
nacréon. Archiloque, Alcée, Sapho, voilà ses maltres, voilh 
ses modèles Qui ne sait par cœur tousles vers de ce poëte, 
qui est le poëte de tous les temps, de tous les figes, de tous les 
lieux, de toulesles positionsde la vie? Sage et fou,amoureux 
et philosophe, enthousiaste ou légërement pris de vin, rail- 
leur de bonne compagnie, redresseur des forts sans colère et 
sans fiel, écrivain élégant, correct, harmonieu x, complet, aussi 
loin de la rage de Juvénal que de l'obscurit de Perse, il en 
veul plus aux ridicules des hommes qu'à leurs vices. Lisez 
ses Épffres, quel plus charmant causeur I Dans ces Épitres, 
il est lui-mme, il se montre à vous dans toute la simplicité 
de sa bonne nature. Son humeur est douce, franche, jo- 
viale; il cause, il rit, il s'indigne; ou dirait la conversation 
de Molière si Moliëre avait été un causeur. Il y a deux 
vers de Perse qui expriment/ merveille le charme de cette 
causerie. 
Omue valet, vitium ridcnti Ftaccus amlcs 
Tait, ci admiss«s circum prcordia ludit. 
11 a réussi dans tous les genres. Il est le plus merveil- 
leux des conteurs : lisez plutôt la fable des Deux Rats. Il 
est le plus grand martre dans l'art d'écrire : lisez plutôt 
son Art podtique. Toutes les rëgles de l'art, tous les st)'les, 
fous les modéles se trouvent «]ans cette admirable Lettre 
az Pisons..Mais pourquoi tant d'cloges'? Que ve,,t dire 
notre admiration superflue.* Notre poête, le poëte de tous 
les honnEtes gens, de toutes les mémoires cultivées, de tous 
les esprits ingénieux, de toutes les philosopl,ies raisonna- 
bles a-t-il donc si grand besoin d'tre Ioué ? 
Horace était petit, délicat ; sa vue était faible, ses cime- 
veux hlancbirent de bonne l,eure. Sur la fin de ses jours, il 
était devenu raionnablement replet, comme tous les hommes 
qui savent diner. II mourut à cinquante sept-ans, et avec 
lui mourut sinon le plus grand poëe d'un siCie qui fut le 
siècle de ¥irle, du moins le poëte le plus ufile et le plus 
populaire de son temps. Bientôt arriva la décadence ro- 
maine, puis la barbarie. Horace, oublié dans ces temptes, 
fut remis en lumière à la renaissance, et il eut bientôt re- 
pris toute sa puissance sur les e»prits les plus distingués de 
l'Europe policée. On ne compte plus le nombre des éditions 
de l'illustre poëte, encore mois le nombre de ses com- 
mentateurs, encore moires celui de ses traducteurs. Les poC 
ste§ d'Horace ont été traduites dans toutes les langues du 
monde moderne, et mme dans la vieille langue de Sapho 
et de Pindare, .indier honneur, que n'avait pas rëvé notre 
poëte, sous le Portique, à l'Académie, au cap Sunium. 
Jules Jxms. 
_Nous remplirions plusieurs colonnes de ce livre rien 
qu'avec l'indication des principales éditions d'Horace qui 
ont été publiées en France seulement. Nous ne pouvons pas 
cependant nous dispenser de signaler aux bibliophiles la 
délicieuse ition damant, avec les notes des meilleurs 
commentateurs, que vient de publier ?,I. Firmin Didot (Paris, 
1855). Ce petit volume elzevirien peut à bon droit tre cité 
parmi les chefs-d'oeuvre de la tpographie française. 
La question de savoir où etait située la mais,n de cam- 
pagne d'Horace a de tout temps et longuement occupé les 
arch(ologues de tous les pays, et tout récemment encore 
elle a fourni Ic sujet d'un savant travail ì M. Noël Desvergers. 
Cette curieuse dissertation se trouve dans le numéro d'avril 
1855 du Blletn archdologique de l'Athénoeum Français. 
HOIACES et CUR1ACES. Au moment od les annales 
de Borne semblent prendre un caractère plus historique, un 
épisode du rëe de Tullus Hostilius rend à leurs antiques 
traditions toute leur couleur poétique. E lisant l'histoire 
des Horaces, on croirait entendre un chant de l'lliade. 
Dents d'Halicarnasse et Tile-Live ont raconté l'histoire 
«les Horaces et des Curiaces, le premier avec plus de détails 
t plus d'assurance que le second. Inutile de remonter aux 

HORACE  

HORACES 
causes de la guerre : des violences avaient été audaci«use. 
ment exercées par les citoyens d'A I b e et de Rome, et, 
par hasard, les ambassades qui demandaient satislaction 
s'taient croisées. Afin de reporter sur les A]bains la respon- 
sabilite d'un injuste refus, le roi de Rome retint leurs dé- 
putés par des festins et des ftes, différant le moment de 
leur introduction au sénat jusqu'au moment où le refus 
dAlbe serait connu, où Rome aurait déclaré la guerre. Quand 
elle commen.ca, après l'expiration des délais et des somma- 
tions en usage, les deux armées se reucontrèrent à lafossa 
Cluilia. Eles étaient en présence, lorsque Suffetius Mé- 
tire (c'était le dictateur albain)vint trouver le roi Tul- 
lus, et lui proposa de faire décider par un combat de trois 
guerriers contre trois quel peuple se soumettrait h t'autre. 
Tite-Live dit qu'il se trouvait par hasard dans cbaque ar- 
mée trois frères à peu près de mme force et de mme 
ge, les Horaces et les Curiaces, mais qu'on ne sait pas 
bien à quelle nation appartenaient les uns et les autres : il 
se range de l'avis de ceux qui donnent le nom d'Horaces 
aux Romaius. Denys est plus précis : Il ï avait à Albe un 
nommé Séquinius, qui avait deux filles : if maria l'une à 
lIorace, de Borne, l'autre à Curiace, d'AIbe; toutes deux 
enceintes en mme temps mirent au jour chacune trois 
lils. Les jeunes gens d'Albe sont choisis ; Suffétius en vient 
pr,venir Tullus, car on avait fait une trève de dix jours ; 
c'est aussi Suffétius qui indique les trois Horaces. Tullus 
les fait venir : ils demandent  consulter leur père, qui les 
embrasse et les félicie de la résolution qu'ils ont prise. 
Les chefs de la cité amenaient d'une part les Curiaces, 
et de l'autre les Horaces, parés comme les victimes qu'on 
mène à la mort. Avant de combattre ils s'embrassërent en 
pleurant, de maniëre à émouvoir tous les assistants. 
Le signal est donné, et, les armes en avant, ces jeun 
guerriers se heurtent comme deux ironts de bataille. 
les uns ni les autres ne songent à leur propre péril : c'est 
leur patrie qui les occupe. Dès qu'on vit briller les épées, 
une horreur profonde saisit tous les spectateurs. Dans l'in- 
certitude du succès, ils retiennent leur voix, leur haleine. 
Bient6t les combattants s'attaquent de plus prés; les bles- 
sures, le sang frappent tous les regards; deux des Ro- 
mains tombent expirants l'un sur l'autre; les trois Alhains 
étaient blessés. A la chute des Horaces, un cri de joie s'C 
leva dans l'armée albaine, et l'espérance abandonna l'ar- 
mée romaine, tremblante pour le guerrier qu'avaient en- 
touré les Curiaces. Il était heureusement sans blessure 
pour le» séparer, il prend la lutte, persuadé quïls le pour- 
suivront de plus ou moins près, selon qu'ils se trouveut 
plus ou moins blessés. Ils le suivent, en effet, à longs 
intervalles. Le premier frétait pas loin : Horace revient 
sur lui d'un élan rapide, tue son ennemi, et marche ì un 
nouveau combat. Le cri qu'arrache aux Romains ce succès 
inespéré l'encourage ; il est vainqueur. Enfin il aborde 
le troisième Curiace, épuisé par ses blessures, et en triom- 
phe sans peine. 
La joie de cette victoire fut troublée par un crime : lors- 
que les Romains ramenaient avec allégres celui qui leur 
avait assuré la suprématie, la sœur d'Horace, fiancée à 
un des Curiaces, vint au-devant de lui, et, voyant sur ses 
epaules la cotte d'armes de son amant, elle pleura, et 
prononça des imprécations. Indigné de ces larmes, Hoace 
la tua en s'Criant : Ainsi périsse toute lonaine qui 
pleurera un ennemi/ Le roi nomma les décemvirs pour 
juger le coupable ; ils le condamnèrent. Horace devait tre 
battu des verges et suspendu à un arbre. Il en appela au 
peuple, devant lequel son vieux père plaida chandernent 
sa cause. Son discours fit un grand ellet; mais le lre, 
pour sauver son fils, fut obligé de pa)'er uneamende, et 
le fit passer sous une espèce de joug. 
Tire-Lire dit qu'on voyait encore les tombeaux de 
cun de ces guerriers à l'endroit où ils étaient tombés : les 
deux Romains ensemble, plus près d'Albe; les trois Albaim 
du coté de Rome. Denys dit que depuis lors on eut un 



HORACES 
lel respect pour les triples naissances, que l'Etat se chargea 
d'élever tous le jumeaux nés au nombre de trois, comme 
les tloraces et les Curiaces. ]qiebubr croit voir en eux les 
trois tribus symbolisées. Po n. GoLBv. 
Plutarque, dans sa Comparaison de quelques histoires 
grecques et romaines, retrouve l'histoire des Horaces et 
des Curiaces dans les Arcadiennes de Démarate. Voici son 
récit (traduction d'Amiot) : « Les habitants des villes de 
Tégée et Phénée avoient eu une longue guerre, les uns 
contre les autres, jusques à ce qu'ils s'accordèrent entre eux 
de vuider leurs différends par le combat de trois frères 
lumeaux ; les Tégéates mirent en avanl les enfants d'un de 
teurs citoïens nommé Beximachus, et les Phénéates ceux 
de Vémonstontas, lesquels étant descendus en champ de 
bataille, il y eut deux des fils de Reximachus qui furent 
tués sur-le-champ, et le troisième, qui s'appeloit Critilais, 
vint à bout des autres trois par une telle ruse : il fit sem- 
blant de luit, et tua l'un après l'autre ceux qui le pour- 
suivoient. A son retour au pays, tous ses citoïena lui firent 
la plus grande chère dont ils se purent aviser, excepté une 
sienne sœur appelée Demodice, d'autant que l'un des frères 
qu'il avoir desfaits Coit son fiancé. Critilas estant fasché 
de ce qu'elle lui faisoit si mauvais accueil la tua sur la place• 
Sa mère le poursuivit d'homicide; mais il en fut absouis à 
pur et à plein, comme escrit Dimaratus, au second hre 
,le ses Arcadiques. » On serait donc fondé à regarder cette 
fable comme renouvelée des Grecs. TEvssènar. 
IIORAIRE  qui a rapport aux heures. L'angle horaire 
d'un astre est l'angle formé au p61e par le cercle de décli- 
naison de l'ash'e et par le reCi,lien du lieu. Il est ainsi 
nommé parce que la determination de l'angle horaire du 
soleil, par exemple, fait connaltre l'heure, du moins en 
temps vrai. 
Considérés en vue de cet usage, les méridiens situés de 
15 en 15 °, à partir du premier, prennent le nom de cercles 
horaires (voyez CAntons SOLAUIF-)o 
Le mouvement horaire d'un astre est la quantité dont 
il varie en une heure, soit en latitude, soit en longitude, etc. 
HORAPOLLO ou HORUS APOLLO, prètre égpticn 
de l'antiquité, passe polir l'auleur d'un ouvrage sur les 
hiéroglyphes, qui ne s'est conservé que dans la traduction 
grecque qu'en a faite un certain Philippe• La meilleure édi- 
tion est celle qu'en a donnée Loemans (Amesterdam, 1835). 
HORATIUS nom d'une antique famille patricienne de 
de Rome, à laquelle appartiennent les trois Horaces, 
que la tradition légendaire de Rome fait combattre contre 
autant de Curiaces, sous le règne de Tullus Hostilius. 
Parmi les descendants de celui des Horaces qui survécut 
aucombat, on compte ll^Bcus HotAlcs PcL LI,I:5, dësigé 
au nombre des consuls Cus la pt cmiëre année après l'expul- 
sion des Turquins, à laquelle il avait coopéré, et qui suc- 
cëda à Spurius Lucrctius, aitr, i que son frère Horatius 
Coclès. On peut encore mentionner parmi ceux qui, dans le 
lroisiìme et le quatrième siècle de la fondalion de Rome, 
remplirent les fonctions de consul ou de tribun consulaire, 
Mncs Hor, ATivs BBATS, qui, après le renversement des 
décemvirs, obtint avec Lucius Valerius Publicola le consulat 
(-i0 av. J.-C. ) {pi'il avait déjà revgtu à deux reprises, et 
«lui, M'accord avec son collègue, fit passer les lois célèbres 
(le9es ltoratioe et Valerioe) qui rendirent obligatoires 
pour Iout le peuple les résolutions prises dans les comices 
de. tribus, interdirent les élections de magistrats faites sans 
provocation préalable, et punirent du banaissemenl ceux qui 
manquaient de respect aux magistrats plebéiens. Le nom 
de cette race patricienne disparalt des fastes à partir de 
l'an 37s aVo J.-C. 
IIORATI US (Psrws), surnommé.Coclès (le Borgne), 
parce qu'il avait perdu un oeil dans un combat. Lorsque Por- 
senna lit le siCe de Rome, les Étrusqnes, aprèss'gtre emparés 
du Janicule, allaient franchir le pont Sublicius ; les Romains 
fuyaient dans une grande confusion• llais Horatius, ayant 
gardé Iout son sang-froid au milieu de cette déroute, coin- 

-- HORIAH t73 
prit qn'd fallait couper le pont pour empgchet l'ennemi de 
pénétrer dans la ville• Ralliant quelques-uns des luards 
par l'ascendant de son courage, il leur ordonna de le rompre 
derrière lui, demeurant sur l'autre rive avec deux autres 
patriciens, T. Herminius et Sp. Lartius, et soutenant tout 
l'effort des assaillants. Bientfit il contraignit ses compagnons 
à rejoindre les autres Romains, et quand le pont fut détruit : 
• Esclavc.L s'Crin-t-il en regardant avec dédain les Ètrusques, 
comment osez- ous attaquer des hommes libres ? » Puis, après 
une belle invocation au dieu du Tibre, il y sauta tout armé, et 
regagna sain t saut l'autre rive, en échappant miraculeuse. 
ment à une grgle de traits. La patrie se mourra reconnais- 
tante : Horatius Coclës et une statue dans le Comitium 
et autant de terre qu'il en put labourer en un jour ; enfin, 
dans une famine, chaque citoyen retrancha quelque chose 
de son nécessaire pour le lui donner. Niebuhr regarde celle 
histoire comme fabuleuse. P. nE Gorna. 
HORDE. C'est la dénomination que les géographes ap- 
pliquent a,x populations errantes et n'aant point de de- 
meures fixes, logeant les unes sous des rentes, les autres 
dans les cbariots mgmes qui leur servent à se transporter, 
eux et leur famille, d'un lieu dans un autre, aussitOt que les 
vivres commencent à leur manquer ainsi que les paturages 
pour leurs bestiaux : telles sont les différentes tribus de Tu- 
tares qui habitent au delà du Volga, devers Astracan. D'ordi- 
naire une horde se compose de cinquante à soixante rentes 
qu'on dresse en cercle, avec un espace qui demeure libre au 
milieu. Tous les individus faisant partie d'une de ces hot'- 
des obéissent à une espèce d'organisation militaire, à la 
tte de laquelle est placé l'ancien de la tribu, qui reçoit les 
ordres «lu chef suprgme ou prince de la nalion.  - 
IIOREB l'un «les sommets du Tor-Sina, ou mont 
Sinai, qui s'élève sur la langue de terre située entre le golfe 
de Suez et Akaba, à i'extrémité nord de la mer Roi»ge, dans 
le désert d'Ëtham. Son nom hébreux, tloreb ou Khoreb, 
signifie sdcheresse, ddsolation. Cependant ce rocher, se- 
lori les voyageurs, voit un ruisseau couler à ses pieds ; de 
plus, on y distingue comme douze bouches qui figurent des 
sources tartes, ce qui justifierait l'action de Moïse, frappant, 
ouvrant le roc et en faisant sortir des eaux jaillissantes, vers 
l'an du monde 2513, lors du douzième campement d'une 
année dans le désert. C'est sur la cime de ce mont que, en 
un buisson de feu, Jéhovah apparut à Morse et lui donna 
les Tables de sa loi. Selon d'autres, ce fut sur le mont Sinai 
que se passa cette scène formidable. Celle confusion est 
toute naturelle, puisque Horeb, beaucoup moins liant que 
le Sinai, est si voisin de cette cime, que, s'élevant à l'oc- 
cident aux premiers rayons de l'aurore, il est presque en- 
tièrement frappé des ombres qu'elle projette, dominante 
qu'elle est à l'Orient. C'est sous les roches obscures et soli- 
taires d'Horeb, que, retiré des rumeurs dela cité de David, 
Élie le prophèle se préparait à disparaltre du ndlieu des 
hommes. Pourl'évaluation de la hauteur du mont Horeb, 
les auteurs varient entre 2,062 et ,676 mètres. 
IIOBÉE Ve5 ItEIES (Mythologie). 
HORIAH, Valaque de Trausylvanie, dont le véritable 
nom elait Niklas Urss. Né à Na-Aranyos, dans le comi- 
tut d'Albe, cet homme ne manquait ni de dispositions natu- 
relles ni d'éducation ; mais, dominé par des passions désor- 
données, il conçut, sous Joseph II, le projet de se faire 
proclamer roi des Valaques. Dans ce but, il travaiila d'abord 
secrètement, ave son compagnon Klos,a, les Yalaques, 
populations grossières et en proie à une cruelle oppression ; 
puis il se rendit à Vienne, où il réussit à obtenir de l'em- 
pereur le droit de marché peur le bourg de Bran, dans le 
comltat de Zarand. A l'aide de l'ordonnance rëdigée à cet 
effet, il pcrsuada, en tTsg, aux Valaques qui ne savaient 
pas lire qu'il avait plein pouvoir pour, à un jour fixé, égor- 
ger tous les nobles. Cependant la conjuration ayant été dé- 
couverte, des ordres furent donnés pour en arrttrr leschefs. 
Alors les conjurés, dans l'iutrtt de leur propre sùreté, 



174 HORIAH  
ert,rent ne pas devoir différer plus longtemps d'agir, et se 
jetèrent avec une férocité sans exemple sur la noblesse et 
le clergé. Plus de mille individus perdirent la vie au milieu 
des plus affreux tonrments, et une foule de chMeaux furent 
détruils avanl que l'on pot réprimer ces terribles désordres. 
Horiah, qui avait pris le titre de roi de Dacie, fit, avec 
ses partisans, la plus vigoureuse ré,istance pendant tout 
l'hiver de 1784; et ce ne lut qu'avec beaucoup de peine 
qu'on parvint à se rendre maltre de sa personne dans le 
cours de l'année suivante : il périt alors du deruier supplice. 
HORIZON. Quel que soit le lieu du monde oh l'on se 
Irouve, si l'on jette les yeux autour de soi, le ciel appa.ralt 
comme une vaste vo0te ou calotte sphérique appuyée sur 
la terre par sa base : une simple lie ondule ou tortueuse 
quand le sol qui vous environne est accidentC car elle 
rase le sommet des cOleaux ou des pics voisins, et redus- 
cend dans les vallées et les gorges des montagnes, mais 
parfaitement régulière et sans ressauts, un cercle enfin, si 
l'on occupe le centre d'une grande plaine, d'un désert, osa 
si l'on est en haute mer. Cette borne de l'univers embrassé 
par l'oeil du speclatenr se nomme burin.on : le mot nous 
vient de la Grèce, du verbe 6pto, je borne ou je termine ; 
Eclide le premier l'employa, ou du moins c'est dans ses 
ouvrages que nous le rencontrons pour la première fois. 
Ainsi, l'horizon divise le ciel en deux parties : l'une est 
visible, l'autre ne l'est pas. Si l'oeil de l'observateur était 
placé à la surface même de la terre, l'horizon serait un 
plan tangent ì cette surface; mais à cause de son léva- 
tion au-dessus du sol, l'horizon est réellement un cne dont 
l'oeil occupe le sommet, c'est Phori.'.on sensible: en pleine 
mer, il va toucher la surface des eaux ì plusde 4,50omëtres 
quand l'oeil du spectateur est à 1=,6o seulement de hau- 
teur. On nomme hori-'-on astronomique le plan tangent au 
lieu of l'on se trou'e. Ces deux horizons font entre eux un 
angle dont la grandeur dépend de la 1fauteur de l'oeil 
au-dessus de la terre: cet anle donne la d dpressi on; 
il est le résultat de la forme sphérique de notre globe, et 
son observation fut le premier pbénomène qui éveifia les 
soup¢ons de l'antiquité sur la rotondité de la terre ; les 
poëtes l'ont nolé : quand un navire abandonne un rivage 
pour la pleine mer, les c6tes disparaissent graduellement à 
sa vue, les sommets les plus Cevis sont ceux qui semblent 
s'enfoncer les derniers sous les eaux. 
Proveh[mur portu, lerroeque «rbesque recedunt. 
Un troisième horizon, appelé rationnel ou 9docentrique, 
passe par le centre de la terre ; il est parallèle ì l'horizon 
astronomique, et divise la sphère en deux parties égales : 
la ncessité où se trouvent les astronomes de rapporter 
toutes leurs observations au centre de notre globe I'a fait 
imaoner. L'horizon joue un grand r61e dans l'astronomie, 
car les astr¢ ne sont visibles quequand ils se trouvent au- 
dessus de lui : lorsque la rotation de la terre les amène 
dans son plan, et qu'ils commencent  poindre, on dit 
qu'ils se lèvent; ils secouchent quand, après a'oir par- 
couru la partie visible du ciel, ils disparaissent sous ce 
mème plan. Ainsi, e plan de l'horizon est le lieu du lever 
et du coucher de tous les astres: de là la distinction d'ho- 
ri-'.on oriental, et d'horLon occidental. Enfin, toutes les 
positions des astres sont díterminées par leur h au t e u r 
au-dessus de l'horizon à un instant quelconque. 
L'horizon n'a pas moins d'importance pour les marins : 
quand on pproche des c6tes après une longue traversée, 
tout le monde regarde à l'horizon pour reconnaitre la lerre ; 
«le là de vagues espoirs et de nombreuses dceptious, car 
presque toujours la brume y dessine des c6tes fantastiques. 
En temps de guerre, un intért plus puissant encore y en- 
chalne tous les regards : c'est I que le corsaire guette sa 
proie, et que le navire marchand tremble de voir apparaitre 
un ennemi. Que d'émotions, que d'illusious alors! D'abord 
on distingue à peine la cime des mats, puis les voiles s'C 
lèvent lentement, puis enfin, on voit tout le corps du ha- 

HOItLOOE ' 
vire : est-il ami ou ennemi? a-t-il de canous.  est-ce 
un vaisseau? est-ce une frégate? et mille avis différents e 
succèdent; car le mirage se joue de toutes les remarques, 
et le marin le plus exercé est inhabile  prononcer. Le soir, 
c'est encore l'horizon que le marin interroge, pour savoh 
si l'on peut se fier aux vents, ou si l'on doit redouter la 
temp¢te; et quand il va chercher ses points de repère dans 
le ciel, c'est sur l'horizon que reposent toutes ses observa- 
tions; les instruments qu'il emploie lui retracent  la lois 
l'image réfléchie des astres et l'image directe de l'horizon. 
Quand le ciel est pur, l'horizon se détache comme une 
ligne d'un bleu foncé sur l'azur tendre de l'air ; seulement, 
quand le soleil s'en approche, il 5 jette une trace de feu 
étincelante, telle qu'une tratnée de rubis et de diamants; 
mais dès que le vent a soulevé les flots, l'horizon devient 
ondulé, il monte et descend avec les vagues. Parfois aussi 
la réfraction le rend incertain, l'oeil distingue plusieurs ho- 
rizons ; et souvent enfin la brume le cache à tous les 5en_x. 
Dans les ports, l'horizon de la mer manque souvent : pour 
Iv supplêer dans la vérification des montres marines, on a 
imaginé l'horizon artificiel : c'est une glace parfaitement 
dressée, appwyée sur trois pieds à vis, et armée d'un niveau, 
à l'aide duquel on s'assure  chaque instant de sa position 
horizontale. Cette glace donne l'image réfléchie de l'astre; on 
mesure l'angle que fait le rason direct et le rayon ainsi ré- 
fléchi, cri'on a le double de la hauteur au-dessus de l'hori- 
zon, car les angles d'incidence et de réflexion sont égaux. 
Cet instrument est incommode pour observer le soleil, 
cause des perpétuelles rectifications qn'ontraine l'action de la 
chaleur sur les vis; aussi lui préfère-t-on généralement aujour- 
d'hui l'hori-.on à mercure ou à huile, qui consiste dans 
une simple cuvette remplie dol'une ou de l'autrede ces sub- 
stances, et sur laquelle se réfléchit l'image du soleil. Afin 
de garantir sa surface des ondulations que la brise  pour- 
rait produire, ou pour en écarter la poussière, on le recou- 
vre d'un châssis ì glaces de talc très-minces, et également 
inclinées. Théogène PAGE, capitaine de va;seau. 
En peinture, on appelle horizon la partiediun tableau 
le ciel sucde à la terre; par extension, ce mot a désiguë 
la hauteur à laquelle le peintre a placé son point de vue. 
Au figuré, le mot horizon a été et est encore chaque jour 
emplo)'é d'une manière devenue presque abusive. 
HORLOGE,HORLOGERIE. Une horlogeest en général 
un mécanisme indiquant les heures et leurs subdivisions. 
Un c a d r a n su i a i re nous rend le mCme service ; mais l'n- 
sage a dcidé qu'on lui laisserait le nom de cadran, et que 
celui d'horloge serait réservé pure les machines qui donnent 
la mesure dutemps. Ainsi, l'art de compooer et de fabriquez 
ces machines, les procédés qui lui sont propres et toutes 
les connaissances qu'il exige composent le savoir de l'hor- 
loger , qu'il ne faut pas confondre avec l'ouvrier en horlo- 
gerie. A la rigueur, l'horloger peut se passer d'instruction 
en gnomonique, puisqu'il ne fait aucune application de cette 
science; mais s'il n'ignore rien de ce qui est réellemont utile 
ì son art, il fera des cadrans solaires sans étude ni appren- 
tissage prlables. Les plus grandes difficultés qu'il eut à 
vaincre n'eussent point été surmontées par le génie des ma- 
chines, s'il n'avait pas eu le secours des sciences perfec- 
tionnées, et, en échange du bien qu'elles avaient fait, les 
sciences, munies de meilleurs instruments, ont marché aveC 
plus d'assurance dans leur vaste carrière. La physique 
rite surtout la reconnaissance de l'horlogerie, qui lui doit 
ses procès les plus r¢cents et la rapproche du terme oi il 
lui sera permis de s'arrêter. En elfet, énonçons le problème 
dont cet art nous donne la solution: comment on a commenc, 
et quelle route on a suivie pour en venir au point de fabri- 
quer assez rapidement, par des procédés sors et sans trop 
de trois, ces chefs-d'oeuvre que les marins nomment 9ardu- 
temps. 
Sans soumettre ici à l'analyse la notion de temps, 
sons immédiatement à sa mesure, et reconnaissons qu'elle 
ne peut ètre que celle de l'espace parcouru par un mobile 



HORLOGE 
anim d'une vitesse un/orme : il s'agit donc de produire 
ce mouvemenl, et de lui conserver une rigoureuse unifor- 
mitC 11 faul donc un mécanisme où toutes les causes de va- 
riation soienl peCues, écartées ou compensées par des équi- 
valeurs en sens contraire. De quelque nature que soit le 
moteur, il y a des précautions à prendre contre le chan- 
gements qu'y produisent le froid et le chaud, la sécheresse 
et l'humidité, etc. Certaines causes relardatrices, telles que 
les frottements, sont soumises à des lois connues, et leur 
influence peut ëtre calculée; mais les machines compliquées 
éprouvent beaucoup d'autres actions, contre lesquelles il 
n'est pas moins indispensable de les prémunir : l'air qui 
les environne, et dans lequel toutes leurs parties sont plon- 
gées, est plus ou moins dense ; des chocs extérieurs et tout 
à.fait imprévus sont ressentis inégalement par chacune de 
ces pièces, etc. Ces faits sont sous les yeux de tout le monde, 
mais leur influence n'est pas appréciée par ceux qui n'ont pas 
l'habitude des mesures de précision. Lavoisier s'applaudis- 
sait de posséder une balance qui trébuchait à une traction 
de mil]ioniëme du poids dont elle était chargée ; on ne doit 
certainement pas moins admirer une horloge qui, dans l'es- 
pace de plusieurs années, ne s'est dérangée que d'une frac- 
tion de minute; car la première n'avait à surmonter qu'une 
sorte d'obstacles, la résistance de.« frottements, au lieu que 
la seconde éprouvait sans cesse des actions perturbatrice-% 
dont on pouvait espérer tout au plus que la somme, après 
un temps assez long, se réduirait àpeu prës à rien. Remar- 
quons même que les longues séries d'observations ont sou- 
vent l'avantage d'opposer des erreurs en plus et d'autres 
erreurs en moins, et que les unes, ainsi que les autres, 
peuvent tre susceptibles d'une assez grande latitude, sans 
que leur somme en soit sensiblement affectée dans l'un ou 
l'antresens. Ainsi, l'art du balancier aurait peut-être obtenu 
relativement à la perlection du travail un prix que l'horlo 
gerie lui disputerait vainement : nous verrons plus loin jus- 
qu'à quel point ces prëtentions seraient fondCs. 
Les frces motrices employées par les l,orlogers ne peu- 
vent ètre que la pesanteur et l'action des ressorts : la pre- 
miëre ne convient qu'aux machines qui ne subissent point 
de dép[acemenl, folles que les borlges des édifices publics, 
les pendules des observatoires astronomiques, et mème 
celles des appartements, qui ordinairemeut séjournent 
long temps à la mèene place ; les ressorts s'accommodent de 
toutes les situations, et donnent aux mécanismes qu'ils 
mettent en mouvement la faculté de pouvoir ttre lranspor- 
t#s ais(,.ment, de supporter sans inconvénient le tumulte des 
voyages sur terre et sur mer. Les plus habiles horlogers des 
temps modernes ne pouvaient méconnaltre l'importance de 
ces instruments pour la marine, pour les observations géo- 
graphiques et d'autres recherches d'une grande utilité; ris 
se sont donc attachés plus particuliërement à la consh'uG- 
tion de cette socle de garde-temps, et ils ont mis en œuvre 
pour ce travail le. belles expériences des physiciens sur la 
dilatation de métaux par le calorique. On savait déjà cor- 
riger la variation de force d'un ressort qui se détend : l'in- 
génieuse invention des fus(,'es rendait uniforme l'action 
de ce moteur sur le mécanisme; mais il fallait que les 
cillations du h alan ci er fussent aussi parfaitement égaies, 
et par conséquent il s'agissait d'appliquer à cette pièce si 
petite et si délicate des artifices de compensation analo- 
gues à ceux qu'on avait employs avec succès pour le 
perfectionnement des pendules. On pense bien que ces opé- 
rations ne peuvent tre confiées qu'à des mains très-adroi- 
tes, dirigées par une intelligence exercée. Des mcanismes 
d'une aussi grande perfection ne peuvent ètre des produits 
de manufacture : ils ne seront donc jamais très-nombreux 
ni à bon marché. 
Dans toute horloge, quel que soit son moteur, on repro- 
duit à chaque instant les circonstances initiales du mouve- 
ment, en sorte qu'il ne peut  avoir ni accélération ni ra- 
lentissement, si la force motrice est constante. Ainsi, le 
monvement de la machine ne l,eut élre qu'une succession 

de marches el de repos d'nne égale durée. Il faut donc in- 
troduire dans le mécanisme une pièce oscillante dont l'ailée 
et la venue permette et empche tour à tour le mouvement 
des antres piëces. De là la nécessité d'un é c h a p p e m e n t, 
disposition qui donne au balancier le moyen de s'engager 
dans chacune des dents d'une roue soumise immédiate- 
ment à l'action du moteur, et de s'en dégager pour passer 
à la dent suivante. Le balancier est donc réellement et 
uniquement le régulateur de la machine : si ses oscillations 
se maintiennent parfaitement ales, rien ne manque à la 
perfection de l'horloge, pourvu que les autres piëces salis- 
fassent d'ailleurs aux con,titions de régularité qui leur sont 
imposée.s. Ces pièces peuvent sortir assez correctes des ate- 
liers d'une grande manufacture, et de Iëgères imperfections 
qui s' trouveraient seraient sans influence sur la bonté 
de l'ensemble : on voit donc que les prorës de l'horlo- 
gerie dépendaient du perfetionneent des balanciers et 
de l'échappement. On ne placera pas ici l'Cumération 
des rouages dont est composée toute machine à mesurer 
le lemps; l'inspection de l'lutCieur d'une montre les lait 
mieux connattre que la description la plus minutieuse. Cett 
inspection suffit aussi pour faire juger de la prodigieuse 
subdivision dont le travail de l'horlogerie est susceptible; 
mais pour en acquérir une notion complète il faut visiter 
le Jura suisse, on les habitants de quelques railC s'adon- 
nent à ces Iravaux qui occupent tous les Sges, tous les 
degrés de force et d'intelligence. Il y a tout lieu de croire 
que des machines exécuteront un jour ces mëmes ouvrages 
avec plus d'exactitude et d'économie ; que cette branche 
dïndu»trie manufactnrière n'a pa. pris encore tout son 
développement, et qu'elle est destinée/ changer de forme 
en s'étendant, aux dépens des populations laborieuses 
qu'elle alimente aujourd'hui. L'horlogerie a plus besoin 
qu'aucnn autre genre de fabrique d'arriver par la voie la 
plus courte à la perfection des travaux partiels, afin d'ë- 
parer ceux de révision et de correction. 
Dans les grandes horloges, dont le moteur est un poids, 
le régulatenr est un p e n d u I e ; on l'applique aussi à toutes 
celles qui doivent rester en place, et dont on veut réduie 
la hauteur, et toutes ces machines ont pris le nom de 
pendules, lors mme qu'elles sont mises en mouvement 
par la détente d'un re.«sort. Comme la ,liesse des oscilla- 
tions d'un pendule dépend de sa longueur, mesurée depuis 
le point de suspension jusqu'au centre d'oscillation, il a 
fallu rendre cette longueur invariable, malgré les dilatations 
et contractions successives du métal d.nt cette piëce est 
formee, et ce problëme partiel a ete résolu avec elégance. 
,Mais quoique les pendules coïnpensateurs fassent un bel 
effet dans ces machines destinCs à la dcoration des ap- 
partements, il est beaucoup plus simple et tout aussi bon 
de faire ces régulateurs avec du bois, matiëre inexteusible 
dans le sens de la longueur des fibres. 11 faut aussi remar- 
quer qu'une pendule, très-bien réglée pour un lieu, peut se 
trouver en défaut si on la transporte à de grandes distan- 
ces vers le nord ou i'équateur, sur de hautes mo.;tagnes ou 
beaucoup au-dessous du niveau de ce lieu pour lequel 
toutes ses parties furent disposC : à la rigueur, celle qui 
marquetait exactement les heures à Genëve avancerait un 
peu à Paris, et plus encore a Stockholm; elle retarderait, 
au contraire, à Chamouni et à Lima. Les montres portees 
jusqu'à la perfection des garde-tempsont l'avantage de n'é- 
prouver aucun changement par l'influence des variations de 
la pesanteur à la surface de la terre; elles sont toujours à la 
disposition de l'observateur, en repos comme en mouvement 
et en quel¢lue lien qu'il se trouve. 
La durée d'une révohltion de la terre autour de son axe 
est pour nous l'unffé naturelle et principale de la mesure 
du temps, et les subdivision qu'on y a faites sont consa- 
crées aujourd'hui par des habitudes qu'on ne changera point. 
Nos horloges représentent donc le mouvement de rotation 
de notre planète, et peuvent indiquer aussi des nombres de 
jours, etc. Les rouages dont elles sont composées suivent 



t 7O HORLOGE 
exacb, ment l'ordrede subdivision riel'unitWprincipale, afin 
que chacune de ces subdivisions soit rendue visible sur le 
cadran, si on a besoin de la connaltre. Quelques-uns dê ces 
mécanismes représentent aussi le mouvement de la lune et 
les plmses de ce alellite. Ces additions imposent à l'horio- 
ger l'obligation de posséder à fond la théorie des nombres, 
les métbodes pour la recherche de leurs facteurs, etc. 
Toutes ces connaissances lui sont n6essaires pour alC 
terminer les dimensions respectives des pièces de la ma- 
¢hine à construire. En général, cet art est un de ceux 
qui exigenl les plus fréquentes applications des sciences 
mathématiques, et pour le cultiver avec un plein succès, 
l'artiste fera bien de se mnnir d'une ample provision de ces 
science et de toute l'iustruction que l'on possède aujour- 
d'hui sur les propriétés des matériaux qu'il emploie. Que 
l'horloger soit géomètre, chimiste et physicien, il pourra 
marcher sur les traces de B r e g u e t, et continuer l'oeuvre 
de ce savant et habile promoteur de l'art. 
On n'a parlé jusque ici que de l'art moderne, sans recher- 
citer ce qu'it tut à sa naissance, saus le suivre dans ses pro- 
grès. Son histoire a été trop comldétement néglige pour 
qu'il soit possible de lui restituer ce qu'elle a perdu. Tout 
ce q11e l'on sait de son origine, c'est que l'on se contcnta 
longtemps de cadrans solaires, et que les premiers eais 
d'horlogerie furent des cleps)'dres, instruments qui ne 
mesuraient que des parties d'heure. Pour obtenir la mesure 
de plus grands espaces de temps, il ne s'agissoit que defixcr 
le niveau du liquide au-dessus de l'orifice d'écoulement, et 
de recevoir l'eau dans une capacite graduée. Cette premiëre 
ebauche fit enfin place à une machine beaucoup plus com- 
mode : l'eau qui s'écoulait avec uue vitesse constante, et 
par un orifice invariable, fut employée comme force motrice 
appliquée à uue roue, dont la vitesse de rotation fut mo- 
difiée par des rouages; on eut nn cadran, et dans les pays 
où l'eau conrve en toute saison sa liquidilé, on put avoir 
des horloges qui n'avaient pas besoin d'être remontœee, biais 
quelques lieux seulement étaient propres à cette sorte de 
construction ; l'eau tombante fut remplacée par un poids 
et une résistance constante qu'il fallait vaincre pour entre- 
lenir le mouvement fut le régulateur de tout le mécanisme. 
Pour les cas où les clepsydres suffisaient, on avait perfec- 
tionné ce petit instrument en le convertissant en sablie r, 
en substituant du sable fin et secà l'eau, dont on avait re- 
connu que l'écoulement dure plus ou moins suivant quel- 
ques circonstancesatmosphériques. Les horloges, parvenues 
 ce degré de perfectionnement, pouvaient déjà suffire aux 
besoins de la vie civile; quelques-unes allaient an delà de 
!eut emploi, surprenaient les curieux par divers artiûces de 
mcanique, indiquit le mouvement de quelques corps 
célestes, etc. ; mais toutes avaient besoin d'être remises assez 
fr6quemment d'accord avec la véritable mesure du temps, 
le mouvement de rotation de la terre; et les écarts aux. 
quels on ne savait point remédier d'une autre manière pro- 
venaient de l'imperfection des régulatenrs. Enfin, les pen- 
dules furent trouvés, et il parait constant que Galilée 
conçut le premier la possibilité d'en faire l'application aux 
horloges, quoiqu'on fasse généralement honnenr de cette 
invention à H n y g h e n s, qui en effet la répandit et l'accr- 
dita. Au reste, cette belle et grande invention peut être ré- 
clamée par plusieurs avec des droits égaux; mais ce qui 
l,eut tonner, c'est qu'elle se soit fait attendre aussi long- 
temps. 
Les découvertes de la science moderne permettent d'espérer 
de nnuveanx progrès dans Part de l'horlogerie. I)éj on a 
reconnu qu' l'aide de courants éleetriques on peut ac- 
corder toutes les souneries des horloges d'une mme ville. 
Ce système, appliqu dans plusieurs endroits, a maintenant 
ponr lui la sanction de l'expérience. Fv. 
HORLOGE D'EAU. Voyez Ccsvn. 
HOItLOGE DE .LA MORT. Dans le silence de la 
nuit et durant les heures d'insomnie, nos oreilles sont 
souvent frappes par un bruitonparableà celui qui résulte 

d'un choc léger, rapide, rpté cinq ou six lois, et que la 
syllabe tac, prononcée en même nombre, reproduit 
fidèlement. C'est principalement dans les maisons dont la 
construction est de vieille date, dans les chambres boisC 
et lambrissíes, qu'on entend le bruit que nous signalons, 
et qui impatiente souvent par sa monotonie. Plusieurs per« 
sonnes l'attribuent aux araignées, mais à tort : selon l'o- 
pinion la plus plausible, il est causé par de petits insectes 
appelés vrillettes, parce qu'ils creusent dan les meubles 
et les boiseries des trous analogues b ceux formés par des 
vrilles, qu'on nomme vulgairement trous de vers, et dont 
s'écbappe une poussiëre blanche, qui est un dtritus du 
bois. Ces insectes font, dit-on, enteudre du bruit afin de 
s'appeler au temps de leurs amours. Cette cause, propre à 
éveiller dans l'imagination des idées riantes, en a cepen- 
dant engendr de bien contraires : on a préfré y voir une 
allusion au travail des vers dont nous sommes destins à 
devenir la pàture dans le sépulcre, et de là povient ce nom 
d'horlope de la mort, qui excite la curiosité. Les uns citent 
ce son comme un avertissement de la fin inévitable qni nous 
attend, et le font servir de texte à des moralité banales; 
d'autres lui accordent une bi_.uiflcation plus fnèbre : il est, 
dit-on, pour celui qui l'entend, le présage d'une mort pro- 
chaine. Dès lors il devient le sujet de ces terreurs dont on 
se plalt à effrayer les enfants, ainsi que les adultes qui leur 
ressemblent par le défaut de raison. C't un de ce contes 
dont il est nécessaire de montrer l'absurdit, parce qu'ils 
ne sont pas sons danger. D r Cnxauo..*rn. 
HOILMAYB ( Josen, baron »" ), historien allemand, 
né à lnsprnck, en 1781, joua un r61e lors de l'insurrection du 
Tyrol sous les ordres d'André Hofer, en 1809; insurrec- 
tion à laquelle ne contribuèrent pas peu ses énergiques pro- 
clamatious, et pendant laquelle la direction des affaires ad- 
ministratives dans les courtCs iusurgées lui fut confiée 
En 1815, l'empereur d'Autriche le nomma historioapbe 
de lLmpire et de la maison impériale, biais en 18i8 il 
passa au service de la Bavière, et de 1832 à 18-6 fut ministre 
rsident de Bavière, d'abord à Hanovre, puis auprês des 
villes anséatiques. Il remplissait depuis t86 les fonctions 
de directeur des archives, à biunich, quand il mourut dans 
cette ville, le 5 nnembre 188. On a de lui des Essais 
critiques et diplomatiques sur l'histoire du Tyrol au 
moyen tige (1802); n»e Histoire du comtœe-princier de 
T9rol (1806); Le Plutarque Autrichien, ou vies et por- 
traits de tous les sourerains qui ont rœegn en Autriche 
(20 vol., 1807-1820); une Histoire de la ville de Vienne 
(1823) ; nne Histoire gœenérale de l'Europe depuis la mort 
de Frœedéric le Grand (3 vol., 1817-1819); des Tableaux 
de la Guerre de l'lndœependance (9 vol., 1823-1825), ou- 
vrage des plus intéressants, mais qui a sulevë de nombe.uses 
eritiques; une ltstoire d'Andrœe Hofer (1817), complëte- 
ment refondne en 2 volumes, sous le titre de Le Tyrol e: 
la 9uerre du T9rol en 1809 ( 18-16 )» etc., etc. 
HOBMISDAS. Voyez Pnsr. 
HOBMOUS ou ORMUZD. Voye-- 
ltOBN, ville de Hollande. I'oye-- 
HOILN (Cap). Quand Magellan ent bien mari son projtt 
de mettre en communication les deux ocëaus qui baignent 
les c6tes del'Amérique, fl descendit vers le sud, en cOtosant 
les plages encore inexplorées de la partie méridionale du 
Nouveau-Monde. Arriv au-delà du 50  degré de latitude, 
les terres de la Patagonie s'onvrirent devant lui ; il pareou- 
rut un long et tortueux détroit, sem d'flots et de rfi[s, 
accidenté de mille promontoires, où la brise se heurte et 
varie sans cesse, souvent balayé par des conps de vent et 
at par les courants que les marées de deux grandes mers 
y apportent. C'est un passage dangereux, et pourtant pen- 
dant prs d'un siècle il servir de grande route au commerce 
de la mer dn Sud et aux pirates de toutes les nations que 
l'or du Prou appelait aux trousses des Espagnols; car on 
croyait que les tpres rochers de la Terre-de-Feu, converts 
de neige, et parfois vomissant des flammes et de la fumée, 



EOBN 
n'taient que le pro|ongement usqu'au ple de la chattm des 
Ande patgoniennes, qu'un tremblement de terre avait seu- 
lement brimes au détroit de Magellan. Dès 1578, à ce qu'on 
croit, le cap Hum avait été aperçu par l'Anglais Francis 
D r a k e; on prétend méme que l'amiral pagnol Gasroia 
3o{re de Loasa l'avait découvert en t 5 ! 5. Mais voici qu'en 
1616 le Hollandais Jacob Le Maire, en s'aventurat plus 
près du pble, s'aperçut que ce prétendu continent n'était 
qu'une grande lle, ou plut6t un archipel, qu'il contourna 
en passant par le détroit qui porte aujourd'hui sn nom. Il 
se trouva au milieu d'une mer ouverte, s'unissant à l'ouest 
avec la mer Pacifique, à l'est avec l'orCn Atlantique, et 
borné au sud par les ténèbres et les glaces du p61e; et dans 
cette mer, que nul navire encore n'avait sillonnée, an 
ein de cette atmosphère brumeuse que nul Européen avant 
lui n'avait respirée, un ressouvenir de la patrie vint le frap- 
per. Un sombre promontoire s'Cevait à l'extrémité de la 
terre par 56 ° de latitude, comme pour marquer la borne 
du monde, escarpé et aigu, tel que le produit d'un volcan : 
on lui donna le nom de la ville de Horn ou H o o r n, où Schou- 
ten, son second, avait reçu le jour. Ainsi fut tracée une 
seconde route autour du globe. 
Plusieurs navigateurs suivirent les traces de Le Maire: 
malheureusementits y furent victimes de temptes violentes, 
et plusieurs naufrages rendirent le cap Hum l'effroi des 
marins. Aujourd'hui mme que les progrës de l'art ont 
écarté presque tous les périls de la navigation, le passage du 
cap Hum inspire encore quelques craintes : c'est que nulle 
part ailleursle ciel n'apparait plus menaçaot, le climat plus 
rigoureux, les vents plus cbangeants et plus irrités, la mer 
plus hérissée de vagues. Soit que, porté par le vent et la 
marée, on traverse le détroit de Le Maire, ou que l'on con- 
tourne la terre des Êtats, il est facile de venir reconnaltre 
le cap Horn, qui s'élève du sein des eaux comme uoe 
pyramide aigue et irrégulière ; mais là le ciel change sou- 
dain d'aspect: d'épais nuages éclipsent le soleil ; on ressent 
les atteintes des régions hyperborées, et le vent, qui souffle 
presque toujours de l'ouest, semble s'obstiner à alCendre 
les approches de la grande mer du Sud. Si la brise reste 
violente et contraire, le marin le plus habile et le plus dé- 
terminé déploie en vain toutes les ressources de sa science 
pour cheminer à travers l'orage; chaque soir, après de 
longues et pénibles heures, il vient reconnaltre la terre, 
espérant que ses efforts l'auront avancé vers le but de sa 
course; et chaque soiril éprouve une douloureuse déceptioo, 
car les rapides courants de l'orCn Pacifique le ramèoent 
au point d'oit il était parti : il retrouve devant lui la mme 
montagne qui la veille lui avait servi de reconnaissance ; 
et les semaines, les mois, se passent ainsi en raines fati- 
gues. Rarement il échappe sans que quelque maladie décime 
les équipages ; ses rodes sont emportées, esvergues balsCs 
par les rafales; la carène elle-mme, ébranlée par de con- 
tinuelles secousses, s'ouvre de toutes parts ; et cependant, 
une dure nécessité lui fait un devoir d'exposer au vent toutes 
ses voiles, il faut qu'il fuiela chie. Parfois, aux premiers 
rayons du jour, il se flatte de mettre à profit nn vent ma- 
niable ; puis soudain fond sur lui un grain terrible, qui 
tombe avec la rapidité de la fondre, poussant des torrents 
de neige et de grle. En vain il essaye de serrer ses voiles, 
que le vent gonfle avec rage ; le froid trop vif paralse les 
bras des matelots; leursdoigts, presque gelés, les soutiennent 
difficilement au sommet des mats; tout devient désordre et 
danger. Et puis, quand la rafale a passé, emportant avec 
elle un dernier débris de voile, un calme plat succède, 
calme effrayant, oit le navire, battu comme un rocher par 
d'énormes vagues ne peut fuir devant la mer qui le bal- 
lotte et menace sa mAture. Tous ces dangers, exagérés par 
les récits des navigateurs, firent abandonner pendant long- 
temps le passage du cap Hum. Jusqu' Cook, on préféra la 
route par le détroit de M a g e I I a n ; car, bien que réellement 
plns périlleuse, elle n'inspirait pas les mëtnes terreurs : c'est 
que l'idée de sombrer sous voiles en pleine mer a quelque 
mc. »v. L cov. -- . 

1"/7 
chose de plus sombre, de plus profondément mélancolique, 
que celle d'un naufrage sur la c6te : l'espoir n'est pas 
mort au fond dit cœur du nautragé, quand le flot le roule, 
sur les pointes roc_ailleuses du rivage. A présent, au con- 
traire, le détroit dë Magellan est presque entièrement aban- 
donné : de trop cruels souvenirs en écartent les navires, 
qtti redoutent moins les rempotes de la haute mer. Seulement, 
pour éviter les courants de la c6te, ils descendent très-bas 
dans le sud, quehluefois jusqu'au 60 • degré de latitude : le 
ciel est plus triste sans doute, la brise plus froide, la mer 
souvent y charrie des glaçons ; mais elle n'y cache point 
d'ëcueits, 
On avait d'abord cru que le cap llorn était un promon- 
toire de la Terre-de-Feu; maisen 162 mae escadre hol- 
landaise, commandée par l'amiral L'Hermite, reconnut 
qu'il formait le sommet d'tre groupe d'lies, qui prirentle 
nom d'fes l'Hermite. Bien que célèbre parmi les naviga- 
teurs, ce cap, qu'on distingue de si loin, parce qu'il s'élève 
verticalement sur l'¢au, n'a qu'une hauteur peu conside- 
rable : elle ne depasse pas 580 mètres, tandis que derrière 
lui, dans la Terre-de-Feu, le mont Sarmiento en a 2,000 
c'est le sommet le plus élevé de toutes les montagnes con- 
nues des mers australes. Toutes ces lies qui environnent 
la Tcrre-de-Feu, et dontle cap Hum fait partie, constituent 
le g¢oupe nommé l'archipel de .tlagellan. Les marins, qui 
ne les avaient vues que de loin, en faisaient des terres 
freuses, couvertes de lave et de neige, et souvent envelop- 
pées de flammes. Le capitaine King les a dernièrement explo- 
rées en détail : elles sont en effet sous un climat froid, 
neigeus¢s pendant l'hiver, mais arrosées de belles rivières, 
avec des forCs et une luxuriante verdure. 
Théogène p^çv., capitaine de caisseau. 
HOI:Ù (PutLlePg nE MONTMOBENCY, comte nE). 
Voile . 
HOILI (Gcs«v., comte e), général suédois à l'épo- 
que de la guerre de trente ans, né en t59 ì Oberbyhuus,. 
dans la province de Upland, entra au service sous le règne- 
de Gustave-Adolphe. En 1625 il s'empara de Dorpat, 
en 1630 de Kolberg; et lorsque Gustave-Adolphe marcha 
sur Francfort-sur-I'Oder, ce prince lui'confia le comman- 
dement de la moitié de l'arntée suédoise. A la bataille de 
Breitenfeld, c'est lui qui commandait l'aile gauche; et il 
figura aussi à l'affaire du Lecb. A la bataille de Lutzen, il 
eut ordre de se jeter à la poursuite de l'aile gauche de l'en- 
nemi, qui avait été mise en déroute, pendant que le roi,  la 
téte de son régiment de Steinbock, s'efforçait de rbtablir 
l'ordre dans son aile droite. Après la mort du roi, le comte 
de Hum seconda les plans de son beau-père, le chancelier 
Oxenstiern et opéra sa jonction en Souahe avec le duc Ber- 
n a r d de Saxe-Weimar, qui, contreson avis, livra, en 1634, 
la bataille de Noerdlingen. Fait prisonnier dans cette affaire, 
il ne fut échangé qu'en 1634. Dix ans plus tard, en 1644, 
il commanda encore une arm6e enScanie, et contraignit les 
Danois à faire la paix. Sous les règnes de C h ris t i n e et de 
C h a r I e s X, il jouit également d'un grand crédit. Gouver- 
neur de la Livonie, puis de la Suante, il mourut en 1659, 
-avec le titre de grand-matChai du royaume. 
HO[[N (Atromr.-JosEn, comte va ), roué. vif en place 
de Grève, ì Paris, le 26 mars tT0, comme coupable d'as- 
asinat commis sur la personne d'un agioteur de la rue 
Quincampoix, dans le but de lui voler une somme de cent 
mille Cris, appartenait ì l'ancienne et illustre famille de 
Hum, enBrabant (voye Hov.xm), alliée, depuis mie longue 
suite de générations, ì la plupart des nobles maisons de 
l'Europe. C'était un grand et beau jeune homme de vin#- 
deux ans, fils cadet de Philippe-Emmanuel,prince de Hum, 
qui avait servi avec distiuction dans les dernières guerres 
de Louis XIV, et qui notamment avait reçu sept coups de 
feu à la bMailledeBamillies. Sa mère Cait une princesse de 
Ligne. Eldré de bonne heure au service autrichien, sa nais- 
sance l'avait fait arriver jnsqt'au grade de ca#laine ; mais 
il n'avait pas tardWà ètre réformé, comme mauvais sujet in- 
23 



178 HORN -- 
corrigible, et il tait devenu depuis longtemps, en raison 
de r,a vie d'obscure et crapuleuse débauche, fort embarras- 
sant pour sa mère, restée veuve, et pour son frère alné, 
maintenant chef de la maison. Depuis deux mois qu'il se 
trouvait/ Paris, il s'y li rait/ tant d'excès de tous genres, 
que sa famille, inqniète, à bon droit, de ce qui en pouvait 
résulter, parce qu'elle le savait capable de tout, envoya 
un agent confidentiel chargé de payer les dettes qu'il pou- 
,ait avoir centractes dans celle capitale, et en mme 
temps de solliciter du rdgeut une lettre de cachet qui i'ex- 
puiser de France. L'age,t n'arriva/ Paris que le samedi de 
la semaine sainte. La veille, jour de la Passion, le comte de 
liorn avait été arrété en flagrant délit d'assassinat commis 
dans les circonstances suivantes : 
C'était alors le moment où le système de Law tournait 
lentes les tgtes, et où la nation française s'imaginait que la 
planche aux actions de la laineuse compa,ade du 5-1ississipi 
était une source de richesses bien autrement inépuisable que 
les mines du llexique ou du Pérou. L'agiotage sur ces 
chiffon de papier était devenu une véritable fureur, et 
les primes les plus tabuleusement exagérées étaient payêes 
pour obtenir les bienheureuses actions dont Law inondait 
la France. La rue Quincampoix, située parallèlement entre 
tes rues Saint-Dents et Saint lartin (et dont avant peu, 
par suite de l'établissement du Boulevard du Centre, il ne 
restera plus de traces), Cait le foyer de ce hizarre com- 
merce ; la foule s'y portait constamment, et toute circula- 
tion s'y trouvait interrompue du matin au soir. Le veu- 
dredi 22 mars 1720, le comte de Horn, sous le prétxte 
de lui acheter cent mille écus d'aclions, donna endez-vons 
à un agioteur dans un cabinet particulier d'un cabaret de 
la petite rue de Yeuise, qui met la rue Quincampoix en 
communication avec la rue Saint-Martin. L'agioteur y 
courut avec son portefeuille et ses aclions ; il y trouva le 
comte de Horu en compagnie de deux individus que celui-ci 
lui présenta comme ses amis. Ces deuxcoupe-jarrets avaient 
nom l'un de PEstang, et l'autre, soi-client capitaine ré- 
formé piémontais, Laurent de Mille. Après les premiers 
complimenls et  un signal convenu, tous trois se jelèreut 
ur le malheureux agioteur; le comte de Horu lui porta 
plusieurs conpsde poignard, et prit le portefeuille. Laureut 
de Mille, vo.ant que l'agioteur n'Cait pas encore mort, lui 
donna le coup de grace. 3lais quelque dextdrite, quelque 
prmnptit,de que ce trois misCables eussent mises à la per- 
pétration de cet assassinat, leur victime, en se alCattra,t, fit 
assez de bruit pour qu'un garçon du cabaret, passant de- 
,ant la porte de ce cabinet, i'entr'ouv,'lt pour savoir ce qui 
s'.v passait. En apercevant un homme baigné dans son sang, 
il donna/ la porte deux tours de clef, etcria a l'assassin. Les 
meurtriers, se voyant decouverts, cherchèrent / s'échapper 
par la fenètre, et y réusireht; mais l'alarme était donnée. 
Le comte de Horn fut arrêté au moment où il se laissait 
ci,oir dans la rue. De Mille parvint à se fanliler dans la 
roule qui encombrait la rue Quincampoix; mais on y put 
cuivre ses trace», et il fut arrêté/ la I,auteur des halleg. 
Plus heureux, de l'Estang réussit/ s'évader. Arrgtés ainsi 
en flagrant délit, les assassins ne purent nier leur crime; ils 
furent conduits/ la Conciergerie, et livrés à la justice. 
On comprend quel bruit dut faire dan» Paris un crune de 
cette nature, commis avec tant d'audace, en plein jour et dans 
de telles circonslances. La haute naissance de l'un des cou- 
pables, ses relations de parente aec toute la grande no- 
blesse de France voire avec le régent, dont il se trouvait 
l'allié par sa mère, pouvaient donner à croire que l'autorité 
s'efforcerait d'étottffer cette affaire. De grands personnages 
s'entremirent en effet auprès du régent pour implorer sa 
pitiê et lui représenter la honte qui allait en rejaillit" sur 
tant de nobles familles. On lui proposa de faire déclarer le 
comtede Hum fuu etde le fai,eenferuzer, pour le restant de 
ses jours, aux Petites-Maisons, en alléguant qzt'un de ses 
oncles  était d:jà. Le duc d'Odéans (c'est une justice que 
l'histoire aime à lui rendre} se montxa inflexible, et voulut 

que prompte et bonne justice Iùt faite des deux misérables 
dont le crime occupait tout Paris. Les solliciteurs lui alant 
fait observer que la maison de Hum avait l'honneur de lui 
appartenir à lui-ratine : Eh bien, messieurs, leur dit-il 
fen partagerai la honte avec vous. On fit bonne garde 
autour des assassins; le comte de Hum fut tout bonnement 
enlermé à la Conciergerie avec les criminels ordinaires, 
et l'instruction du procès se fit avec une rapidité telle que 
dès le mardi suNant, 26 mars, lui et son compficede Mille 
epiraient sur la roue, en place de Grève. 
HORNBLENDE. Voyez AI[PHInOLE. 
HORNEMANN (FaoEc-Coanm), voyageur 
lèbre, né en t77, à Hildesheim, étudia d'abord la théolo. 
gie, et obtint un emploi ecclésiastique en Hanovre; mais 
bientôt, cédant à une vocation décidée, et br01ant du désir 
de pénétrer dans l'interieur de i'Afrique, il se fit re- 
commander, en 1795, à la Société Africaine de Londres, qui 
I'y envoya avec une mission. Le 5 septembre t879 il quitta 
Le Caire, pourvu de passeports signés par Bonapart% et 
partit avec une caravane pour le Fezzàn. Il s'arrëta dans 
la capitale, à Mourzouk, fit de là tme excursion/ Tripoli, et 
gagna ensuite Bournou, d'ou sont datées les detnièxes non. 
relies qu'on ait reçues de lui. Des versions diftereutes cir- 
cu|èfeut en Europe sur le lieu de sa mort; car on 
qu'il pénétra jusqu'a Tombouctou. Un journal qu'il avait 
écrit en langue allemande, et que de Tripoli il avait envoye 
en Angleterre, a été publié, traduit en anglais ( Londres, 
i 802). 
ItOINES ou ltOORN, terre de l'ancien territoire de 
Liege, mais alCendante du duché de Brabant, érigée ea 
comté, en 1 50, par l'empereur Frédêric IV, dit/ oeaciflu, 
en faveur de Jac(]ues sire de ltornes, Aitena, Craenea- 
donck, Monligny et Weert, grand-veneur heréditaire de 
Brabant. Jean ve Hor, NS, issu de cette maison, ayant 
épous Arme d'Eont, veuvede Joseph de Montmorency, 
seneur de Neveele, en Flandre, et n'en alant point eu 
d'hériliers, adopta les enfants du premier lit. C'est ainsi 
que leur aihA, Philippe vv. IIo.'iXO[mNC, devint comte de 
Hornes, et fit battre monnaie d'or et d'argent à son nom et 
 ses armes, comme franc seigneur de Weert, dans le Lira- 
bourg. 11 fut attaché de bonne heure à la personne de l'em- 
pereur Cbarles-Qtdnt, qui lui donna le gouvernement de la 
Gueldre. Il en reçut de plus lecollier de la Tuison-d'Or et la 
charge d'amiral ou de capitaine genéral de la mer. Philippe II 
I'etablit chef des finances des Pays-Bas, et, contre l'or- 
dinaire de ceux qui manieur les deuiers de l'Etat, le comte 
de Humes rendit pour plus de 300,000 écus de son bleu 
afin de subvenir aux besoins du trésor public. Comme capi- 
taine, il s'était signalé aux batailles de Saint-Quentio et 
de Gravelines, dans la defeuse de Luxembourg, et au siége 
de Dourlens. 3lais son éloignement pour les persécutions 
relieuses, ses liaisons de famille et d'amitié avec le comte 
Lainerai d'Egmont, et son opposition au système.du 
gouvernement espagnol, causèrent sa perte : leducd'Albe 
le fit artCr et decapier le méme jour que son illustre pa- 
rent, le 5juin t5o8 ; il eut la tgte tranchée sur la place 
hlique de Bruxelles, à I'ge d'environ cinquante ans. n 
frère, Florent v. Mot-rloaesc, seigneur de blontignl, R- 
tenu prisonnier en Espagne, éprouva le mgme sort, en 
ou, selon quelques-uns, mourut empoisonné. En lui fruit 
la branche des sires de Neveele, de la maison de Montmo- 
rency. 
Le pro¢è des comtes d'Egmont et de Horn a été 
cueilli dans deux volumes servant de supplement à la tra- 
duction de Strada, par du Ryero Quoiqu'iis portent latu- 
briqte d'Amsterdam, ils ont été réellement impdmés 
Bruxelles, che P. Foppens, et sont tirés d'un vieux ma- 
tmïcrit qui appartcttait au conseiller Wlmants. Il est asse 
remarquable qu'il y manque la partie des interro3atoires du 
comte d'Egmont, où il indique le lieu de sa naissance, c'est- 
à-dire le chateau de la Itamaïde, dans le Hainaut. Barbier, 
dans son Dictionnaire des Antonymes, attribue ces deux 



HORNES -- HORS-D'OEUVRE 
volumes à Jean Dubois. Par malheur, le vant bibliographe Un manuscrit curieux de la bibliothèque de rArsenal con- 
ne s'est pa aperçu qu'il prenait pour réditeur d'un ouvrage tient les fioroscopes des Louis rois de France depuis 
publié en t729 le procureur général du conseil des trou- Louis XVI jusqu'à Louis XX. Croyez encore après cela aux 
btesen t56. Les amateurs recherchent aui un li-re rare, horoscopes! 
intitulé L Déduction de l'innocence de messire Philippe On appelle encore horoscope ,,ne figure, ou thème céleste, 
de Montmoren¢g, comte de Humes (sans nom d'auteur, qui covtient les douze vnaisons, c'est--dire les douze signes 
ni de lieu, imprimé a, mois de septembre 1568 ). Cet on- du zodiaque, dans lesquels on marque la disposition du ciel 
vrage existe aussi en hollandais sous la mdme date. et des astres à une heure déterminée, pour en tirer des pré- 
DE IEIfFENB£nC. dictions; et horoscope binaire le point d'oi sort la lune a, 
HORNE TOOEE (Jours), philologue anghis, né à Leu- moment o0 le soleil se trouve au point ascendant de l'orient; 
dres, en t3f, étudia la théologie, et achetaensuite une pré- c'est la partie de fortne en astrologie, blercure et 
bende dans le comté de Kent. Il se lit connaltre po,r la Vénus jouaient autrefois un grand réle dans toutes ces fulies. 
première fois comme écrivain en 177 l, en entrant en lice On a également donné le nom d'horoscope à nu instrument 
avec autant d'énergie que d'esprit contre l'auteur anonyme de mathématiques, de forme planisphériqae, inventé par 
des Lettres de Juniz«s. Ce qui appela ensuite l'attention Jean Paduanus, autclzr d'un traité particulier sur ce ujet. 
sur lui, ce fut l'intérdt qu'il exprima pour les Américains Quant anx horoscopes proprement diîs, on n'en trouve 
dans leurs lutte avec l'Angleterre. La souscription qu'd o,- plus vestige aujourd'hui que dans quelques almanachs. 
vrit pure" les soutenir fut considérée comme un acte de IIORRIPILATION (du latin horriplatio, f,,rmé de 
trahison envers le pays; et les tribunaux le condamnèrent horrere, avoir peur, frissonner ; pils, poil ; et astre, faire, 
h tin an de prison. A l'exl»iïation de sa peine, il se con- agir). Ce mot, fréquemment employé comme suonyme de 
sacra  la cience du droit; mais en sa qualité d'ecclésias- fr i s s o n, spécifie une vive impression produite par l'or- 
tique il ne ut suivre la carrière du barrea:g : il reprit donc ganisme, qui fait tout à la fois trembler et herisser les poils 
la plume e l'écrivain politique, etpublia un grand nombre ainsi qt:e les cheve,x. La terreur fournit des exemples cern- 
de pampl:lets, dont l'un lui valut, en 1794, une nouvelle muns de ce phénomène, causé prim:tivement par l'irritabi- 
accusation de haute tral:ion. Il motlrut en 1812, h "-im- litWdont l'appareil nerveux est la source. Le redressement 
bledon, o/ s'écoulèrent les dernières années de sa vie. Le des poils est secondairement effectué par l'action des cou- 
plus important de ses ouvrages a pour titre : [eŒE poe'«a, ches musculaires étendues Ol|S la peau, ct qui appartiennent 
or the diversionsoPurle (Londres, 1786-1805). aux organes du mouvement. Plusie,rs aninmux sont très- 
HOROLO61US. Voye: Don. richement dotés de ces couches : au,si leurs pils sa hrisent- 
HOROSCOPE (du grec p=. heure, et .o, j'exa- ils aussitét q,'ils éprouvent quelque sensation vive, surtout 
mine, jeconsidère), observation du ciel, position ou conjonc- la colère. Ce privilége est encore pour e,x un moyen de 
tion des atres au :noment de la naissance de quelqu'un ou défense; il leur sert à chasser les insectes ou à présenter à 
«l'une entreprise quelconque, pour y lire les destinées ch, leur ennemis des pointes redo,tables : telles sont surtout les 
nouveau-néon les résultats futurs de l'évënement qui sepré- armes du hérisson. 
pare. De cette consultation du firmament, on induit que Considérée comme le degré le plus intense d, frisson, 
rheure qui c6incide a'ec un tait donné et favorahle ou non l'horripilation offre une importance majeure aux mdecins 
au succès. On a appelé cette opération tirer un horoscope, quand ils la voient se manifester au début d'une fièvre 
comme les figures et les calculs tracés dans ce but ont pris d'accès, ils doivent s'efforcer d'en préçenir le retour ou 
le nom de thèmes de nativitd. C'est le eardoorientalis des d'en diminuer la violence, car dans cet état on a va la mort 
Latins, qui l,fi donnaient, comme on la lui a donnê chez achever de glacer le malade, ou bien succéder une réaction 
nous la désignation d'ascendant. On voit donc quïl y a, brOlante dont l'apoplexie est quelquefois le terme. C'est le 
entre l'horoscope proprement dit et la divination ordi- cas pour eux d',ser des moyens puissants dont ils peuvent 
nuire cette différence, que celle-ci tire ses inductioqs de oir- disposer. D r CU.LrP.O.glER. 
constances plus on moins bizarre, insignifiantes ou fantas- HORS préposition q,d vient du latin lotis, dehors, par 
tiques, tandis que |'horoscope, pfu.q ambitieux dans ses le changement du.fenh, etquiest destinéeàmarquer l'ex- 
vues, plus audacieux dans ses moyen% dedaigne les pro- clusion. On l'applique aux temps, aux lieux et à diverses 
cédés vulgaires, et ne demande ses inspations qu'un ciel. choses qui n'ont rapport ni aux temps ni aux lieux. Dans 
Cette manière d'opérer a, par son semblant de hauteur et l'enhnce de la langue française, a* lieu de hors on disait 
de grandiose, longtemps fasciné les ye,x : les prètres ci,al- /ors, qui rappelait bien mieux l'étymoloe du mot. 
deens et égyptiens, pour la plupart tout aussi astrologues En jurisprudence, mettre hors de cour et de procès, c'est 
,lu'astronomes en tirèrent de bonne heure grand parti ; renvoyer les parties, comme n'y ayant pas sujet de plaider. 
et les Grecs, qui leur empruntèrent cette pratique super- Ce jugement s'appelle un hors-de-cour. En politique, on 
.qitieuse, la transmirent à leur tours aux Bomains. Mais «lit qu'un homme est mis hors la loi, lorsque, dësigné 
déjà sous le paganisme les eslrits éclairés faisaient justice tous par nu jugement comme l'ennemi commun, il n'a droit 
de cette jonglerie ; Vespasien en moquait publiquement, et h aucun des avantages de la loi coramunc 
il ne fallut rien moins que l'ignorance du moyen ge pour IIOILSA. Vo?je-. HF.NGIST. 
remettre les horoseopes en Imnneur. Il y eut un temps où ilOBS-D'OEUVRE. Considér.; sous le point de vue 
la manie de tirer des horoscopes dégénéra eu une fureur gastronomique, le hors-d'oeuvre était regardé jadis, pour 
telle, qu'Albert le Grand, Cardan, et pl,sieurs at,tres po,s- répéter la définition du Dictionnaire de Trévoux, comme 
sèrent l'extravagance jusqu'à dresser celui de Jésus-Christ. « des petits plats ou «les assiettes qui accompagnent les 
Mais, sans aller chercher nos exemples si loin, n'a-t-on pas grands, et remplissent l'espace qui est entre eux. » Cetle 
vu une reine de France, Cath erine de blédicis, et, avant ch.finition ne donnerait de nos jours aucune idée des bots- 
elle, Louis Xi prisonnier de ses propres soupçons à Plessis- d'oeuvre, qui se composent de certains mets, tels que petits- 
Iès-Tours, s'entourer de sorciers, de maçcieng: et demander fours aux viandes blanches, radis, figues fralches, beurre, au- 
tous les Jours aux astres des illusions de bonheur et de vie? cbois, sardines, melon, cornichons, cpres lines, olives, etc., 
Glocester, Marie-Stuart, Élisabeth, lagrandc reine, n'étaient que l'on met s,r la table avant d'y rien servir. Les hors- 
pasau-dessusdecette faiblesse. Au di-septiëme siècle, cette d'œuvre ne sont donc que des accessoires, appelés dans 
croyance conservait encore tant de polvoir, que deux sa- un diner, dans un djeuner surtout, moins à aiguiserrappétit 
vantsillustres, Képler et Oranam, se virentforcés defaire des qu'à flatter l'oeil par la symétrie qu'ils établissent sur une 
horoscopes, l'un pour vivre, l'autre pour ne pas mécon- table. ous nus trompons; il existe un seul hors-d'oeuvre, 
tenter de puissants protecteurs. A la naissancede Louis XIV, qui brille de son propre éclat : c'est le sorbet au rhum. 
l'horoscope du jeune prince fut encore soleaneltementdres. Au temps des soupers, les lmbiles appelaient ce repas un 
3. 



t su HOBS-D'CEUVIE 
rs-d'oeuvre. Plus tard, cette dénomination fut modifiée, 
et le hors-d'oeuvre devitt un dtner gourmand, un dlner 
d'adeptes, arrosé de bon viii. 
En architecture, hors.d'ceuvre se dit de tout ce qui ne 
fait point partie de l'ordonnance générale d'un bAtiment, de 
tout corps de bltisse, de tout objet, de tout travail acces- 
soire et étranger à l'en.¢embte, quel qu'il soit, du corps de 
l'objet, oudu travail principal : il s'applique également aux 
inesures prises de l'lutCieur ou de l'extérieur d'un bAtiment ; 
c'est dans ce sens qu'on dit : ce batiment a tant de mètres 
Iors-d' oeuvre. 
En littérature, on a appelé hors-d'oeuvre tout ce qui sem- 
ble introduit après coup dans un ouvrage, et peut en tre 
retranché sans nuire à l'ensemble. Nombre de ces hors- 
d'œuvre ajoutent quelquefois un grand prix à l'oeuvre dans 
laquelle il se trouvent placé% et parmi cenx-l nous devons 
compter ces é p i s o d e s, pleins de grâce et de fratcheur, dont 
la plupart des grands poëtes de toutes les nations et de 
tontes les époques ont semé lettrs chefs-d'oeqvre, afin de re- 
pour un instant le lecteur, que pourrait fatimr la lecture 
d'un écrit trop suivi. 
HORTENSE (La reine), IIortense de 
naquit à Paris, le I0 avril 1783, et mourut à Viry, chez 
la duchesse de Raguse, le 5 octobre 1837. Que de terribles 
péripéties, que de gloire, que d'inquiétudes, que de joies, que 
de souffrances, entre les deux dates de cette naissance et de 
cette mort! Hortense-Eugénie de Beauharnais, fille du vi- 
comte Alexandre de Beauharnais et de Joséphine Tas- 
cher de la Pagerie, sœur du prince Eu gène, était appelée 
ì de bien hantes destinées ; elle s'en mourra digne. Devenue, 
par le second mariage de sa mère, aec le #n,:ral Bona- 
parte, belle-lille du grand homme, elle fut l'ornement de 
La petite cour consulaire et bientôt de la cour de l'empereur. 
Mariée, le 7 jalvier 1802, à Lu ui s Bonaparte, frère de Na- 
poléon, devenu plus tard roi de llollande, elle regretla la 
France; et l'esprit un peu taciturne de son mari et de ses 
sujets ne contribua pas peu à rendre celle union nalheu- 
reuse, llortense avait be»oin de l'air de Pari por reçpirer 
librement. Musicienne habile, elle composait de jolies ro- 
mances chevaleresque% qtd étaient dans le go0t avenlureux 
de l'époque, et les chantait bien. On cite dans le nombre 
Partant pour la Sgrie , devenu depuis le nouvel empire 
en quelque sorte un air national, lapoléon avait nne leu- 
dresse de père pour sa belle-fille ; et lorsque le premier-nA 
de la reine ltortense mourut, ce douloureux événement Ior- 
tifia dans le cœur de 5apoléon son projet de divorce. 11 
avait concentrt ses affections sur le fils de la reine Hurleuse. 
Celle perspective d'un héritier indirect bris, lSlapoléon 
pensa "fi rompre ses liens avec Joséphine. C'était une Êírie 
qui dirigeait luma : l'empire s'écroula emportant avec soi 
toutes les splendenrs du trône de lSlapoléon et des royautés 
fraternelles improvisées; la reine Hurleuse resta d'abord 
à Paris, où elle prit le titre de duchesse de Saint-Leu, et 
fitt de la part des alliés l'objet des plus délicates attentions ; 
elle e bouda point, sans jamais renier toulefois le culte dit 
passé. Louis XVIll disait d'elle : « Je m'y connais, et je n'ai 
jamais vu de femme qui réunisse à tant de grAce des ma- 
nières si dis'tinguées. » Exilée à la suite des cents-jours, elle 
habita successivement lome et Arenenberg, et ne revint 
en France que tors des tentatives infructuenses de son fils 
Louis, qu'elle voulait suivre en Amérique. Elle n'en eut 
pas la force, et mourut à Viry, sans pouvoir soupçonner 
l'avénement de ce fils chéri, alors si malheureux, au tr6ue 
glorieux ,le son oncle. Jules 
llORTENSIA. Avant les dernières années du dix-hul- 
tiëme siècle, cette belle plante, originaire de l'Asie orienlale, 
n'était guoere connue en Europe que par les riches bro- 
deries et les peintures édatantes de la Chine et du Japon; et 
cependant Petiver, dans son Ga-.o-phttlac|um » l'avait dési- 
gnée sous le nom de sambuco affinisjaponica ; Koempffer 
l'avait décrite dans ses Aménité, exotiques, et C o m mer- 
son ca avait fait passer en Europe quelques écltantillons 

-- HORTE[NSIUS 
desséchés, biais, vers l'année t?90, Cels et Andeb¢rt réusi- 
rent  naturaliser parmi nous tette belle étrangère, et depia 
cette tpoque l'hortensia, ou la rose du Japon, quoique 
dépourvue d'odeur, a été recherchte de tous les horticulo 
teurs, comme l'une des plus belles de nos plantes d'agrément. 
La rose du Japon est un arbrisseau peu élevé, auquel es 
branche rameuses donnent par leurs nombreuses subdivisions 
l'aspect touffu d'un buisson ; ses feuilles sont opposées, p- 
tiolées, larges, glabres ì leurs deux surfaces, ovales, dentier; 
les sommets des rameaox et «les tiges, et souvent aussi les 
aisselles des feuilles supérienres, supportent des coryml 
de fleurs, tantôt d'un rose tendre, tant6t bleutre«, mais 
toujours d'une grande beauté : chacun de ces corymbes 
est formé de quatre à six pédoncules, qui tous partent du 
'mtme point, et qui tous se divisent et se subdivisent en 
nombreux pédicelles, dont les extrémités terminales sont 
toutes couronnées de fleurs. Les fleurs elles-mtmes sont de 
deux espèces : les unes, stériles, sont formées par cinq ou 
six folioles pétaliformes, qui, suivant Decandolle, ne seraient 
que des bractées anormalemeut développé.es, et ì l'lutCieur 
desquelles on remarque les rudiments des organes floraux 
les autres, complëtes, lusCées dans les bifurcations des 
pédon«:nles, sont caclées par les fleurs stCiles qui for- 
ment la périphérie du corymbe. Le frnit de l'hortensia 
ne nous est pas connu. La rose du Japon se perltue 
par marcotte et par boutnre; elle exige nne terre sub- 
stantielle, une terre de bruyère mélangée de" terre fran- 
cite ; elle entre en pleine éve au mois de février, et fleurit 
au mois d'aoît. On dit que l'oxyde de fer mélangé au terreau 
donne ì la fleur de l'hortensia une belle teinte violette, 
Commerson et Lamarck avaient fait de l'horteasia nn genre 
distinct, que Jussieu a rapproché et que Smith a réuni au 
genre h9drangde ( décandrie trignie de Linnë, famille des 
saxifragées de Jussien), sous le nom d'hydrangea Iorten- " 
sia. BELFmLt-L£ïÈVIE. 
llOPTEXSIUS (Qtast:s), célëbre orateur romain, 
naquit Van 40 de Rome, d'une illustre famille plébéienne. 
Dès I'e de dix.neuf ans, il dbuta au barreau ave un 
éclat extraordinaire. Il avait une éloquence pompeuse, 
procédant de l'emphase asiatique, toute pleine de périodes 
et semée de traits à elfet; son débit était irréprochable, 
son geste expressif et pathétique, sa mémoire prodigieuse, 
son improvisation chaude et entrainante. Malgré la glorieuse 
place qu'i| avait conquise tout d'abord, il quitta presque 
aussittt la toge pour endosser la cotte d'armes et, comme 
toute la jeunesse romaine, il se fit soldat. Ele,é au grade 
de tribun militaire, pois lieutenant de Sylla dans la guerr 
contre Mithrilate, il ne tarda pas fi revenir aux |uttes d h 
tribune. Tous les orateurs en renom qui l'occupaient na- 
guère, Crassns, Antoine, Catulus, Julius, Sulpicius, étaient 
morts dans l'intervalle leur jeune et henreux rival n'eut 
pas mme à combattre pour étre salué le prince du bar- 
r ca u romain. Les grandes affaires, les causes lucratives lui 
arrivèrent en Ioule, et l'opulence avecelles. Dès lors il vécut 
dans un faste innui, mme pour cette lome qui ne savait 
comment dépenser les revenus del'univera. C grand avocat 
avait d'ailleurs peu de scrupules quand il s'agissait d'atg- 
meuler sa fortune; il se chargeait volontiers des plus mau- 
vaises causes et défendait sans honte les hommes les plus 
décriés : Ver rs fut son client. On voit qu'il y avait loin 
de l'orateur Hortensius ì. l'or.ateur de Caton, vir probw 
d|cedi peritus, téanmotns fl ¢onserva sa royauté du 
Forum jusqu'au moment ou se produisit Cicéron. 
Tombé du premier rang au second, il se rigna d'abord d'av 
oez mauvaise gce, et ne parut plus à la tribune qu'à de rare 
intertalles. La popularité qu'il s'acquit par sa magnificence 
et ses largesses, lors de son édilité, la préture et le consulat 
qu'il obtint successivement, ne purent le consoler de sa dé- 
cadence; et lorsque Cicéron fut élevé à la première magistra- 
ture de la république, il se remit avec une ardeur nouvello 
aux luttes de la parole. Leur rival, ité, du reste, n'avait 
mais dégénéré en jalousie basse et haineuse; ce, deux 



IIORTENSIUS 
hommes, s'ils n'étaient point amis, avaient au moins res- 
prit de le paraltre. Ils suivaient la méme ligne politique, 
soutenant le plus souvent le sénat contre le peuple et dë- 
rendant l'ordre de choses établi. Un jour mme Hortensius 
faillit etre assassiné par les gladiateurs de CI odiu s : c'est 
encore lui qui fit entrer Cicéron dans le soliCe des augures. 
11 mourut peu de temps après, en l'an de Rome 704. 
Hortensius s'occupait de littërature et de poésie ; mais il 
dédaignait les Cudes plilosophiques, bien que Cicéron, qui 
lui a dédié sot' traité De Philosophia, se vante de l'avoir 
converti. Aucune de ses œuvres, vers, harangues ou plai- 
doyers, ne nous est parvenue. Il se maria deux fois, et son 
second mariage nous offre un trait curieux de. mœurs ro- 
maines : il était devenu amoureux de la femme de Caton 
d'Utique, son ami ; ne pouvant maltriser sa passion, il en fit 
l'aveu h Caton lui-mime. En vrai stoicien, celui-ci, lour 
récompenser sa franchise et l'encourager à la vertu, re- 
nonça à l'épolmse qu'il chérissait, et la lui céda, bien qu'elle 
fut alors enceinte et déjà mère de deux enfants. 
La fille de l'orateur, HOaTEsI, est également célébrée par 
les ancien comme un modèle d'éloquence. W.-A. DccaErr. 
HORTICULTURE (de hortzs, jardin, et cultts, 
culture), culture des j a rd in s. La limite entre les attribu- 
tions de l'horticulture et de l'a gr i c ul tu re est fixée par 
ce qui établit la distinction entre les jardins et les chrnps. 
C'est à l'agriculture qu'il est réservé d'al»peler à son aide 
la puissance des machines et la force des animaux auxi- 
flaires de l'homme; l'horticulteur n'a que ses bras et des 
outils de la plusgrande simplicité. La charrue, la herse, 
les différentes ortes de semoirs, etc., appartiennent à la 
culture cbarnptre; la biche et ses diverses modifica- 
tions, les ciseaux de rélagueur, le sécateur, les instrsments 
pour greffer, sont entre les mains dsm jardinier. Quelques 
opérations sont communes à ces deux divisions de la cul- 
ture, et toutes les connaissances qui peuvent éclairer et gui- 
der l'lorticulteur font partie des sciences aonomiques. 
La passion toujours croissante en France de l'horticul- 
ture a contribué fortement à l'institu[ion de sociètés dont 
le but est d'enricllir les jardins et de perfectionner l'art de 
les cultiver. On leur devra plus et mieux que des écrits; 
elles font des expériences, forment des pépiniëres, se pro- 
curent et naturalisent des plantes exotiques, etc. Si les des- 
tinées du genre humain ne sont pas trop défavorables, ces 
utiles associations se consolideront, et, sOres d'une longue 
existence, elles entreprendront les essais dont la durée 
excède celle de la vie d'un individu. 
L'horticulture a aussi son importance commerciale. Sans 
parler des tulipes et jacinthes de la Hollande, dions que 
les produits annuels de l'horticulture, à Paris seulement, 
excèdent six millions. Grace à la facilité des communica- 
tions, Dijon lutte pour les cerises avec blontmorency, Or- 
léans pour les fraises avec Fonlenay-aux-Ioses, Clatenay, 
et Bagnolet; la Touraine pour ses fruits avec lontreuil, etc. 
Et si nous passons en revue les produits propr_es aux jardin» 
fleuristes, combien nous trouverons de progrès effectués, de 
variétés créées par une hybridation bien conduite parmi les 
camélias, les rosiers, les rlododendrons et les azalées, les 
pélargoniums, les pivoines, les oeillets, les fuchsias, les li- 
liacées, les orclidées, etc. 
I IORTULAIRES. Voge: C«rcw1aes. 
HORUS, en égyptien Or, fils d'Osiris et d'Isis, est la 
personnification du soleil caniculaire, arrivé à la plus grande 
intensité de sa vertu calorifique. Les Gre reconnurent 
eur Apollon dans ce dieu égyptien, qu'on représente sur 
les monuments avec une ttte d'épervier. Typhon essaya 
vainement de contester sa légitimité; il fut déclaré le véri- 
table fils d'Isis et d'Osiris. Il est en effet Horus Chnouphis, 
nouveau soleil qui éclaire la nature depuis l'équiuoxe du 
printemps jusqu'à l'équinoxe d'automne, c'est-à-dire lors- 
que le soleil verse partout les flols de sa lumière, fconde 
la terre et prolonge les jours. De lb vient qu'on le repré- 
sente, comme le dieu Priape, avec tous les caractères de 

-- HOSANNA 
la plus grande énergie. Jablonski trouve dans la langue 
cophte l'étymologie du nom d'Horus, qui voudrait dire roi, 
ou seigneur, ce qui convient à la force et à la puissanc 
du soleil d'été. Il passe pour le dernier roi d'Egypte issu 
de race divine. Il possédait l'art de guérir et celui de pro- 
phétiser. On a remarqué la plus grande ressemblance entre 
Horus et H a r p o c r a t e, d'où l'on a conclu que ces deux 
divinités n'en faisaient qu'une, ci que les Grecs les avaient 
distinguées mal à propos• On représente Isis, mère d'Horus 
ayant sur ses genoux un enfant nouvellement né : elle lui 
présente la mamelle en s,nriant. Les Égyptiens adorateurs 
de cette déesse, célébraient le 25 du mois t/b| (décembre) 
la fé{e du solstice d'liver, ou les couches d'Isis et la nais- 
sance d'Horus. C'est alors que les prêtres tiraient de leur 
sanctuaire la représentation de ce mystëre. Cette fte est 
indiquée ce jour-l dans les anciens calendriers sous le nom 
de natalis solis invicti. C « Alexandre Lo. 
HOP, US { Astronomie ). VOle, Cocn. 
llOVATll (51CngL), llistorien Hongrois, né en 1809, 
à Szentes, comitat de Csonad. fut élevé au séminaire de 
de Waitzen, et entra dans les ordres. Il était attaché à la 
paroisse de Grossk$ta, lorsque des difficultés que lui sus- 
citèrent ses supérieurs ecclésiastiques en raigon de la ten- 
dance trQp libérale de son enseignement religieux, le dé- 
terminèrent à renoncer à la carriëre de la prication, malgré 
le succès qu'il y obtenait, et à accepteren 1851,/ Vienne, 
une place de précepteur dans la makon du comte Erdoe/ly. 
biais il ue tarda pas à la perdre, et obtint alors la chaire 
de langue hongroise au collége de Vienne appelé Theresia- 
hum. Trois ans plus tard il ft appelé aux fonctions de 
prév6t de l'église de Hafvan. Dans ce bo,trg voisin de 
Peth, il eut avec les libéraux honois de nomhreuses 
relations, par suite desquelles il fut nommé, en 1848, év$que 
de Csanad et membrede la chambre haute. L'activité qu'il 
déploya le rendit extr$mement populaire; aussi, après la décla- 
ration d'indépendance, lui conlia-t-on le portefeuille de l'ins- 
truction publique et des cultes (14 avril 18i9). Quand 
la révolution fut étoulfée, il réussit à se réfugier à Paris, 
d'où il se rendit à Zurich avec la veuve du comte Louis 
Batthyanyi comme instituteur de ses enfants• En 1851, une 
des commissions militaires ëtablies en Hongrie par l'Au- 
triche le condamna par coutumace à tre pendu. 
Son début dans la littératre fut un Mémoire qu'il coin- 
posa à l'occasion du prix offert par le cmnte Joseph Tcleky 
à l'auteur du meilleur parallèle entre la civilisation des 
Magyares, au moment où ils vinrent s'établir en Hor, grie, 
et celle des autres peuples de l'Europe. Son blémoire 
fut couronné ; et il remporta également le grand prix pro- 
posé vers la mSme époque par l'Académie pour la 
meilleure histoire du commerce et de lïndustrie de 
la Hongrie sous les rois de la dynastie d'Arpad. Ces de,mx 
ouvrages furent imprimes dans les Annales de l'Aca- 
démie, qui en 1838 le nomma l'un de ses membres corres- 
pondants. L'ouvrage le plus ;mportaut qu'on ait de lui est 
son A ;lagyarok trtdnete, etc. (Histoire des Hongrois, 
4 vol., Papa, 18tt2-1856). Il a aussi emichi les Annales 
de l'Académie hongroise et celles de l'Athenxum honois 
d'un grand nombre de précieuses mouographies listoriques. 
HOSANNA  et mieux Hosana ou Hoschanna ( sans 
s au pluriel ), en hébreu Salivez, je vosprie! formule de 
bénédiction ou d'heureux souhait. On appelait aussi ho- 
sanna, chez les Jqifs, les prières qu'on récitait le septième 
jour de la f$te des Tabernacles, et Hosanna rabba, ou 
grand Hosanna, cette fete elle-mme, parcequ'on y répé- 
tait souvent ce mot pour demander  Dieu le salut du eu- 
ple, le pardon de ses péchés et la bénédiction du ciel pour 
l'année commencée. Comme pendant cette ftte on açta,t 
des branches de feuillage en chantant Hosanna, on leur 
donna également ce nom, qu'on répéta avoe enthousiasme 
autour du Sauveur le jour de son entrée à Jrusalemo Gro- 
tias prétend que les Juifs ne célébraient pas seulement dans 
cette lte la mémoire de leur sortie d'Égypte, mais ansr, i 



Pattene du Messie, et que leurs cris vers le Sauvent 
un témoignage pohllc qu'ils lui rendaient en le reconnaissaut 
pour le Messie promis. ' L'abbé J. Dcvss. 
HOSPICE. Voyez HomvxL. 
HOSPITAL (L'). Voyez L'HosrrxL. 
HOSPITALIERS, nom donné aux religieux 
cialement institués pour exercer l'hospitalité, desservir les 
h6pitaux. La premiëre confrerie d'hospitaliers, nommés 
frères de l'h@ital, date dn neuvième siècle seulement. 
Elle fut instituée par un habitant de Sienne, nommé Soror, 
qui ouvrit sa petite maison aux pèlerins. Sa maison s'a- 
grandit, et finit par devenir le vaste h6pital della Scala. 
Quelques personnes se joignirent à Soror; il donna à ses 
compagnons une règle, qui fut approuvée plus tard par 
l'évque diocésain et par le pape. La réputation de la 
maison de Sienne se répandit. Florence, Bieti, Todi deman- 
dèrent à Soror des frères et des sœurs pour desservir les 
établissements que ces villes fondaient. Les congréga- 
tions d'hospitaliers ne tardèrent pas à se répandre partout. 
L'ordre des chevaliers de Saint-Jean, devenu plus tard ordre 
deMalte, et l'ordre Teutonique étaient aussi des ordres 
.hospitaliers. En1120 tut fondé, par A|ard ou Adalard, 
comte de Flandre, dans le diocèse de Rodez, l'b6pital d'Au- 
brac, sur une montagne escarpée, au milieu d'une contrée 
déserte, destiné à recevoir les voyageurs. Un aulre ordre 
d'hospitaliers, non moins clèbre, fut celui des Pontifices ou 
frères P o n ti les. A la fin du douzième siècle, Gui de Mont. 
pellier fonda en France un h6pital qui servit bient6t de 
modèle à plusieurs autres. La conégafion dont il était le 
snpérieur fut autorisée par Innocent III, en I198; elle ne se 
composait que de laics, mais remplit si religieusement ses 
devoirs, qu'en ! 204 le pape appela Gui à Borne pour lui confier 
la directiun de l'h6pital di Santo-Spirito in Sassia. Leshos- 
pitaliers étaient nombreux en Angleterre. Ceux de Saint- 
Jean-Baptiqe, à Coventry, appartenaient à l'ordre de Saint- 
Benolt; d'autres suivaient la règle de Saint-Augustin. 
L'Espagne eut anssi de bonne heure de magniliqnes h6pi* 
taux servis par des chanoines réguliers. Vers la fin du 
treizième siècle, Gui de Joinville fonda en France l'ordredes 
hospitaliers de la Charité. J ean de Dieu fut le Iondadeur 
de i'hpital de Grenade. il ne donna pas de règle ì son 
ordre; tout ce qu'il en exigea, ce fut qu'il se consacrM au 
soin des malades. En 1572, le pape Pie V le soumit ì la 
règle de Saint-Augustin ; et Sixte-Quint lui donna le titre 
deCongrdgation de Saint-Jean de Dieu. L'Espagnol Ber- 
nardin d'Obrégon fut encore au dix-septième siècle le fon- 
dateur d'une importante congrégation d'hospitaliers soumise 
au fiers ordre de Saint-François. Les hospitaliers nommés 
Bons Frères ou Bons Fils, institués à Armentières en 1615 
par cinq ouvriers, appartenaient au znme ordre. 
Une des plus anciennes congrégations de femmes hospita- 
lières est celle de Saint-Augustin, attachée d'abord à l'bt ci- 
Dieu de Paris. La mère Geneviëve Bouquet les soumit au 
regime claustral. L'ordre de Saint-Jean avait des sœurs 
hospitalières. Celles de l'hbpital Saint-Gervais s'appelaient 
Pi I les- Dieu. Les Handriet tes étaient aussi des Sœurs 
hospitalières. Citons en outre les relieuses de Saint-Thomas 
de Villeneuve, les sœurs de Sainte-Marthe, les sœurs hospi- 
talières de la Charité ou Filles de Saint-François, les sœurs 
Grises, Filles de la C h a r i t é, ou religieuses de Saint-Vincent 
de Paul, les soenrs de Saint-Joseph, la Congrégation du Saint- 
Esprit, etc., etc., qu'on retronve encore actuellement dans 
nos hpitaux. 
HOSPITALITÉ (en latin hospitalitas, d'hospes, 
h6te), vertu très en honneur chez les anciens, et que 
pratiquent encore les peuples parmi lesquels la civilisation 
n'a pas rendu les communications assez fréquentes pont 
que i'hospitalitd, telle qu'on Pexerçait dans l'antiquité, 
soit devenue impossible. Les moenrs bibliques et boméri- 
ques pr6sentent les mmes faits : te voyageur est non-seu- 
lement accueilli, mais on le recherche; il est introduit dans 
la famille, dont tous les membres s'empressent à le servir 

HOSANNA  HOSPODAR 
. on lave ses pieds, on prépare ce que l'on a de moilleur pom 
[son repas; l'enfant de la maison lui cède sa couche, et il 
part chargé de bénédictions. A h r a h a m et Sara, dans les 
champs chaldéens, exercent l'hospitalité à l'égard de troi 
célestes voyageurs. On la retrouve au milieu de l'antiquité 
paienne, dans la fable de Philémon et Rancis. Les na- 
tions ne donnaient pas de moindoes preuves d'hospitalité 
que les individus : quand les Mhéniens abandonnèrent leur 
ville ì l'armée de Xerxès, leurs vieillards, leurs femmes, 
leurs enfants, se retirèrent ì Trézène. Aprës avoir pourvu 
au besoin de tous, les habitants de cette ville nommèrent 
des marres d'école chargés d'instruire les jeunes Alhéniens, 
ci on leur permit de prendre dans les jardins tous les fruits 
' qu'ils désireraient. L'hospitalitoe s'exerce encore parmi 
Arabes et les penples de J'Orient, ainsi que chez les plan- 
teurs de l'Amérique ; on la rencontre aussi dans certain 
coçtrées du nord de l'Europe : avant d'aller aux champs, 
le paysan dalécarlien poe sur une table, au milieu de sa 
cabane (dont la porte n'est fermée extérieurement que par 
une corde nouée ), un pain et un vaoe de lait, afin que le 
 oyageur se rafralchisse en passant. L'hospitalité prend un 
caractère différent dans les pays 06 le commerce, l'indus- 
trie, l'étude des sciences et des arts atent la popuhtioe, 
et la déplacent sans-rel$che ; chez les particuliers, elle ne 
consiste guère qu'en démonstrations bienveillantes; de la 
part des gouvernements, elle résulte snrtout des intérts 
politiques. Un des peuples modernes qui a exercé l'hospita- 
litWavec le plus de magnificence a été le peuple polonais, 
lors de l'Amigration française, qui commença en 1790. Les 
révolutions qui depuis plus de soixante ans ont troublé 
J'Erope et amené tant de proscriptions feront renaltre les 
vertus hospitalières qne l'esprit religieux senl avait con- 
servées. Dans presque tous les convertis on recevait les 
voyageurs et on leur donnait des seconrs pour continuer 
leur route : cela se fait encore en Italie et en Espagne. 
Aujourd'hui que des opinions différentes, prévalaut sue- 
cessivement dans divers Cats, y condamnent ì l'exil lant 
de citoyens, tous les peuples europëens ponrront à leur tour 
exercer l'hospitalité les uns envers les autres; et celui qui 
dans la pratique de cette vertu déploiera le plus de géné- 
rosité et de pervérance sera sans nul doute la première 
nation du monde. C e ne BRAnl. 
HOSPODAR  titre des souverains de la Moldavie et 
de la Valachie. L'étymoloe de ce mot est toutà fait 
slave ; elle est simple ci compliquée. Hospodar, en langae 
slave, "veut dire maître de la maison, maître d'une terre, 
celui qui ret tout, qni est à la tSte de tout. En polonais, on 
le nomme 9ospodar:. Telle est la véritable signification de ce 
mot ; mais la dérivation du nom hospodar donné ì un sou- 
verain est complexe, et se compooe de deux mots : hospod 
et dar. ltospod, en idiome slave, signifie Dieu, le Seigneur, 
le Tout-Puissant; dar veut dire don. Les Valaques de- 
vinrent au quatorzième siëcle tributaires de la Pologne. En 
1443, Ladislas III, roi de Pologne par le choix de la nation, 
et sacré par le primat du pape, donna de sa main, comme 
don de Dieu, Elle, fils d'Aiexandre, pour souverain à la 
Valachie, et lui déféra le titre de hospodar, c'est--dire 
marre donné par Dieu et par l'entremise du roi de Pologne, 
considéré comme un de ses lieutenants sur la terre. 
Telle est l'origine que les Valaque assignent ì ce titre 
dans leurs chroniques. Les Polonais soutiennent que les 
rois de Pologne, regardant la Valachieet la Moldavie comme 
leurs fiefs, nommaient des vice-rois pour gouverner enleur 
nom ces provinces. La sigmificafion stricte du mot hospo- 
dar vient à Vappui de cette assertion. De nos ]ours encore 
le peuple slave, en parlant de l'emperenr de $aint-Péters- 
bourg, le désigne sous le nom de hospodar de toute la 
Russie. S,mK-Pscux (Michel Czx-xows). 
En Moldavie et en Valachie, le peuple désigne ses 
prince% dans a langue maternelle romane, sons le nom de 
dornnu, qui répond au latin dorninus, dont le mot hospodar 
n'est que la traduction slave. 



HOST m HOTEL DE VILLE 
HOST. Dans notrevienx langage, ce mot a eu plusieurs 
acceptions : il a signifié ennemi ; de là le proverbe : « Si 
l'host sçavoit ce que fait l'bost, i'liost deferoit l'host ;  ce qui 
revient à dire que, dans la guerre, il est essentiel de bien 
cacher ses dispositions à l'ennemi. L'host a désigné aussi 
une armée ou une porlion d'armée, une bande, un esca- 
dron, une compagnie d'infanterie ou de cavalerie. C'C 
tait, en générai, une muniCe de se former, qui ne présen- 
tait rien de bien fixe, une ordonnance éventuelle, dont la 
profondeur ne se réglait d'ordinaire qu'au moment de la 
charge. Host se prenait aussi pour maison, li6tel, camp. 
Le,ire d'host était le commandant d'un camp; le mar.chal 
de l'host était le murChai de amp; titre passager, emploi 
révoeable, qui n'était ni une dignité ni un office. 
HOSTIE. Ce aom désigne tout ce qui doit Atre olferl 
en saur i lice. Chez laplupart des anciens peuples, les pri- 
sonniers faits à la guerre étaient dévonés à la mort. Le mot 
hostie, dérivé de hostis, d'où l'on a fait hostia victime nous 
rappelle oette coutume barbare. Les chrétiens ont consacré 
le mot hostie pour digner Jésus-Christ, la victime par 
excellence, celle dont toutes les autres n'étaient que l'ombre 
et le type, et qui est venu reoneilier le ciel avec la terre. 
On a aussi donné le nom d'hostie au pain destiné au 
erifiee euebaristique. Les hostie* proprement dites ne fu- 
rent introduites dans l'lglise qu'au douziéme siècle. On em- 
ployait primitivement an m,me usage du pain ordinaire, au- 
quel on substitua ensuite un pain particulier, fait exprès, de 
forme ronde jusqu'au quatriéme siècle, qu'on partageait, 
aprèsla consécration, entre tous les communiants. Les hosties 
nt de petits morceaux, ronds et minces, de pàte blanche, 
sans levain, portant l'image duSauveur crneifié. Il y en a de 
grandes pour la mese et de petites pour la communion des 
fidèles. Elles étaient autrefois préparées, dans la sacristie, 
par des prttres rev*tus de leurs ornements sacerdotaux. 
Dans i'Eglise réformée, on fait usage de pain ordinaire. 
Au figuré, tousles actes religieux, intërienrs ou extérieurs, 
prennent le nom d'hostie*. C'est ainsi que saint Paul exhorte 
les premiers fidèles à offrir à Dieu une hostie continuelle 
,le louanges..., à exercer la chadté, à pratiquer toutes les 
sertus, car c'est par de semblables hostie* qtt'on se rend le 
"fris-Haut favorable. J.-G. CnxssAcNO.. 
HOTEL mot ayant la mme étymologie latine qu'h6- 
lital, hospice, dérivés de hospes, h6te. C'tait d'abord un 
logis, une maison ; ce fut plus tard une habitation vaste et 
somptueuse de grands seigneurs, de personnes possant de 
hautes charges à la teur, et mme de financiers. Le blutais 
fit d'abord le quartier des beaux hôtels, puis le faubourg 
Saint-Germain, la Chaussée d'Antin, le faubourg Saint- 
Honoré, etc. Auiourd'hui , cçest un peu partout; l'usage a 
mme resserré le mot dans de plus étroites limites; non- 
utement te pdnoe, ie ministres, les directeurs généranx 
ont leurs h6tds, mais mme la Banque, le Crédit foncier ou 
mobilier et les diverses compagnies d'assurances, sans comp- 
ter beaucoup de banquiers, d'agents de change, d'acteurs, 
d'actrices, de chanteurs, de cantatrices, et quelqueslionnes et 
Iorettes, qui remplacent en masse les financiers d'autrefois. 
Une histoire desh6tels de Paris serait infiniment corieuse 
sous le rapport topographique et comme histoire des mœurs 
et des arts. On y verrait figurer l'H6tei-Dieu; l'h6tel 
des dues de Bourgogne de la seconde race, entre la rue 
Chartière, celle des Sept-Voies et le CIos-Bruneau, depuis 
Saint-Jean de Beauvais ; l'h6tei du Petit-Muse, plus tard de 
Bretagne, puis du Petit-Bourbon, acheté par Louis I , 
due de Bourbon, petit-fils de saint Louis, demeure devenue 
ensuite la propriété des rois Qmrles V et Charles ¥I, de la 
duchesse d'Eampes et de Diane de Poitiers, maltxesses de 
François I er et de Henri 1I, etc., etc. 
Jean, du de Berr, frère de Chares "ci, avait cinq h6- 
tels dans Paris, et sept dans les faubourgs; Bictre était la 
plus agréable de ses habitations cbamptres. 
D'impérissables souvenirs historiques se rattachent à l'b6- 
te Saint-Paul, que Charles V, qui le fit construire, appelait 

Vh6te[ solennel des 9rands esbattemens, à celui de, 
Tournelles, à l'h6tel de B amb ou i I let, siége des Prcieuse 
ridtcules, à l'h6tei de Eluny, à l'h6tel Barbette, à l'h6tei 
Earnavalet, habité par ?,t « de Sévigné, à i'h6tel La Tré- 
mouille, et à tant d'autres encore. 11 est à regretter de voir 
sacrifier chaque jour ces belles habitations à des spécula- 
tions rapaces qui privent les arts de vastes emplacements 
lur leurs produits, et la population, de masses d'air, de 
soleiLet de verdure. 
H(TEL DES INVALIDES. Vogez Isvaus. 
HTEL DE VILLE, lieu où s'assemblent les ma- 
gistrats municipaux d'une ville pour tous les actes de leur 
administration. On l'appelait dans quelques localité 
maison de ville, maison de la commune, h6tel commun. 
Sous le régime républicain, on disait la commune. ¥itruve 
donne à eu genre d'édifice le nom de civilis concilii balica 
eut/n. Le mot mairie, employé de nos jours dans le mdme 
sens, est un néologisme : dans son acception originaire et 
vraie, il signifiait la dignité meme du premier magistrat 
municipal. 
Dans les villes où la liberté communale s'est développée 
de bonne heure, ces édifices ont un aspect digne de leur 
ancienne importance. Leur caractère, du re»te, est à peu 
prs partout le mme. Ce qui en formait la partie essentielle, 
c'était la tour du b e ffro i, avec son campanile, souvent orné 
d'un joyeux carillon, qui semblait tre un symbole de franchise 
et d'indépendance. On voit en effet dans les charles les mots 
droit de beffroi ou de cloche employés comme synonymes de 
droit de commune ou d'chevina9e. Aux jours de danger, on 
mettait en branle le beffroi ; à ce signal d'alarme,à eus volées 
lugubres qui tiutaient par les airs, le travail s'attelait dan, 
toute la cité et les habitants descendaient en armes dans les 
rues et les earrefours pour veiller à la défense commune. 
Les h6tels de ville n'avaient ordinairement qu'un rez-de- 
chaussée et un premier étage; les eérémonies publiques se 
faisaient dans les salles du haut, et les magistrats populaires 
y tenaient conseil. Au rez-de-cbaus«ée, nn portique, clou- 
riant sur la grande place, servait de bourse aux marchands. 
En Belgique, sur cette vieille terre des Flandres o6 la 
liberté date du moyeu ge, les b6tels de ville sont de ma- 
jestueux édifices gothiques surmontés d'un beffroi monu- 
mental; tels sont eeuxde Bruxelles, de Gand, la turbulente 
uitWd'autrefois, de Louvain, etc. N'oublions pas, en Hol- 
lande, celui d'Amsterdam, et en Allemagne celui d'Aix-la- 
Chapelle. 
En France, eu genre d'édifiee n'existe que dans les 
villes septentrionales, les seules où le régime communal ait 
eu quelque Iorce et quelque vitalité. Ainsi nous citerons les 
b61els de ville d'Atlas, de Douai, de Saint-Quentin, de Bé- 
lhune, de Noyou, de Compiègne, de Dreux, d'Orléans, etc. 
L'HbTEL VE rlLLl DE P a.PAS ne fut construit qu'au seizième 
siCie. Avant cette époque la Hanse parisienne, compagnie 
de marchands par eau qui a donné naissance an corps mu- 
nicipal de Paris, tenait ses séances dans un bàtiment qu'on 
appelait la Maison de Marchandise, au lieu dit la Vallée 
de Misëre, prs le Grand-Chtelet, puis dans le Parloir 
aux Bourgeois, entre l'enclos de Jacobins et la place 
Saint-Micbel. 
En t3bT, le prévt des marchands, Étienne M a r e ci, fit 
l'acquisition, pour la commune, moyennant deux mille huit 
cent quatre-vingl livres, d'un btiment situé sur la place 
de Grève, et qu'on ppelait la Maison-aux-Piliers ou 1'1t6- 
tel du Dauphin, parce qu'il avait appartenu aux dauphins 
du Viennois. biais après deux siècles, la population de 
Paris sçétant eonsidërablement aecrne, il fallut construire un 
édifice plus vaste et plus digne de la capitale du royaume. 
La premiére pierre du monument que l'on voit aujourd'hui 
fut posée le 15 juillet 1b33, en présence du prév6t des mar- 
chands, Pierre Viole, sieur d'Athis, conseiller au parlement. 
Dominique Boeeador ou Boceardo de Cortone en avait 
dressé le plan ; il fut ehargé de la direction des travaux " 
raioen de 50 livres de gages. Maltre "l'homas çhoqueur, 



184 
tailleur d'images, et Charles, peintre, furent engagés moyen- 
nant quatre livres tournois par pièce de sculpture ou de pein- 
ture. Sous le rned'Henri IV, Androuetdu Cerceau modifia 
le plan de l'architecte italien, et les travaux ne furent ter- 
minés qu'en 1628. Il en résulla une des plus remarquables 
productions du stle de la renaissance, un monument plein 
de grâce et d'élégance, que François Miton trouvait plus 
propre  loger des princes ou des ribaudes que des ma,is- 
trats populalres. La façade était percée de treize fenctres, et 
sur ses combles aigus, couronnés de cheminCs monumen- 
lales, s'Cevaient de hautes lucarnes; elle était surmontée 
par un campanile off l'on plaça, en 178t, l'horloge de la 
ville, ouvrage très-estimé du célèbre horloger Jean André 
Lepaute. 
On s'est toujo»rs étonné que l'on n'ait pas consb uit l'h6tel 
de ville parallèlement  la Seine et que l'on ait tourné sa fa- 
çade principale du cotë de la place de Grève. La petite ran- 
cune d'un prévSt des marchands contre le curé de l'église 
Saint-Jean fut la seule cause de cette anomalie monumentale 
ce magistrat fit élever le btiment municipal sur le c6té où 
se trouvait cette petite 0lise, pour en masquer le portail. 
Du c6té du nord, l'ancienne chapelle du Saint-Eprit et 
ue partie de l'hospice du mme nom se trouvaient ados- 
sees  l'h6tel de ville; du c6té opposé, c'esl--dire vers la 
Seine, un aspire btiment, ser'ant de succursale pour les 
bureaux, était réuni au corps principal par l'ancienne arcade 
Saint-Jean, sous laquelle passait la rue du Martroi, longeant 
l'h6tel de ville et l'glise Saint-Jean, q»i lui faisait suite à l'est. 
Des maisons particulières, traversées par l'étroite et fetide 
rue de la Mortellerie, séparaient toutes ces coustructions du 
quai et de a rivière. Un ancien Flan de Paris est d'ailleurs 
indispensable pour bien comprendre la complète métamor- 
phose subie dans ces derniers temps et par l'édifice mème 
et par le quartier où il est situé, lequel a été entièremen! 
démoli et reconstruit (roi/e» Pss). 
Dès le milieu du siècle dernier, les bAtiments de l'htel 
de ville de Paris furent trouvés insuffisants; et l'on songea à 
le reconstruire sur l'emplacement de l'h6tel ,le Conti ou fut 
bti depuis l'h6tel des Monnaies. Après la révolution, la 
création de l'octroi, des contributions indirectes, des poids 
et mesur, de la caisse de Poissy et la réunion de la pré- 
fecture de la Seine / l'adninislration municipale nécessi- 
tèrent un agrandissement considérable. On coustruisit sur 
/'emplacement des églises Saint-Jean et du Saint-Esprit des 
annexes pour loger les services extérieurs ; plus tard on y 
établit le jardin et la cour du prélat; enfin, en 1823, fut 
bàtie la salle dite du Trocaddro, en façade sur la rue du 
Maroi. En meme temps la rue du Pet-au-Diable prenait 
le nom plus decent de rue du Tourniquet-Salut-Jean, si 
bien décrite par Balzac dans une de ses Scènes de la vie 
ariienre, intitulée: La Femme vertueuse; on élargissait la 
rue de la Tixeranderie aux dépens de la rue des Vieilles 
Garnisons, qui était supprimée; enfin, la rue du Martroi 
elle-mème était améliorée, tout en conservant encore pour 
entrée, du coté de la Grève, la vieille arcade Saint-Jean. 
Mais les abords du palais municipal étaient toujours trés- 
resserré.s; et lorsque les événements politiques des premiè- 
res années du règne de Louis-Philippe eurent démontré la 
nécessité et l'urgence qu'il y avait d'isoler l'h6tel de ville, 
pour en faciliter la défense en cas dïnsurreetiou, on se dé- 
cida h entreprendre l'oeuvre de sa transformation complète. 
Les plans de ,,151. Godde et Lesueur furent adoptés. Les 
travaux commencèrent le 20 aoOt I;37 et l'ensemble des 
coustructions ne fut achevé qu'en 
On enleva h la rue de la Mortellerie son triste nom, qu'elle 
ne justifiait que trop, car le choléra en 1832 avait décimé 
ses habitants; et on l'appela rue de l'Htel-de-VJlle. Les 
rues du Martroi et du Tourniquet Saint-Jean furent démolies, 
et une autre s'ouvrit h leur place, qui prit le nom du maré- 
chal LobatJ. L'arcade Saint-Jean devint la porte d'entrée de 
la cour et l'habitation privées du préfet dela Seine. 
Quelle que fft l'importance de ces travaux» ils laissaient 

HOTEL DE .... 
encore imparfaits les abords du mnument qu'euserrait de 
toutes parts le dédale des petites rues envirounantes. Tombé 
tout de suite au pouvoir de l'insurrection en février t8gS, 
peu s'en fallut qu'autant lui en arriver encore en mai et juin 
suivant. Aussi en 1849, en méme temps que l'on décidait 
la continuation de la rue de Rivoli, entre le Louvre et 
l'hStel de ville, on ordonnait l'isolement du monument et la 
construction de la caserne Napoléon pour le protéger. La 
rue Lobau, la rue du Mouton et la rue de la Tixeranderie 
furent ai »fs supprimées. Enlin, un récent décret du 28 Sel " 
tembre 1854 vient de complèter le dégagement du coté de 
l'église Saint-Gervais et de relier par un large boulevard 
l'entrée du palais municipal  la place du Chtelet, achevant 
ainsi la création d'un magnifique quartier sur l'emplacement 
de la plus hideuse partie du vieux Paris. 
Quant ì l'agrandissement méme de l'h6tel de ville, tout 
l'honneur en revient au gouvernement de Juillet. 
L'ancien corps principal et ses deux pavillons du stle 
de la renaissance ont été conservés  peu près intacts; mais 
on a doublé la longueur de l'édifice en y ajoutant deux 
autres corps de batiment et deux autres papillons d'un style 
plus moderne, qui forment transition avec l'architecture 
lourde et sens caractère des trois autres chiC. On reproche 
encore aux continuateurs du Cortone de n'avoir pas su 
donner  leur œuvre cette solidité qu'on remarque dans 
celle de l'architecte Florentin. Quatre-vin-quatorze niches/ 
frontons ont été réservées dans les entre-colonnements pour 
recevoir les statues des hommes célèbres qui ont illustré la 
ville de Paris. On y voit déjà Étienne Boyleaux, Hugues 
Aubriot, Juvenal des Ursins, Guillaume Budé, François.Miton, 
La Vacquerie, de Hariay, Malthieu MolC Colbert, Voyer 
d'Argenson, La Reynie, Turgot, Bailly, Frochot; Gozlin, 
Saint-Landry, Maurice de Sull?; Saint-Vincent de Paul, 
l'abbé de L'Epée, Montyon; Philibert Delorme, Pierre 
Lescot, Jean Goujon, Le Sueur, Le Brun, Mansard, Perronel, 
Gros ; ]lolière, Boileau Despréaux, Voltaire, D'Alembert, 
Buffon, Rollin, Condorcet; Ambrnise Paré, Papin, Robert 
Etienne, Lavoisier, Monge; Catinat, Lafayette, etc. 
La porte principalede l'h6tel de ville, qui en 1835 encore, 
avant que le sol de la place n'cet ëté exhaussé, se trouvait 
au haut d'un perron, est surmontee d'un grand bas-refiefen 
bronze représentant Henri IV à cheval. Cet otvrage est 
de M. Lemaire, et reproduit exactement celui qui fut détruit 
pendant la révolution et que Pierre Biard avait fait sur le 
modèle de la statue de MarcAurèle au Capitole. Du reste, 
l'entrée du palais municipal est loin de répondre  sesvastes 
proportions; en effet, par la malencontreuse disposition du 
terrain, qui se relève brusquement en montagne, disposition 
que l'architecte du seizième siècle a recherchée évidemment, 
mais qui ne convient plus ì nos idées modernes, il faut 
grasir un escalier de dix-neuf march pour arriver à la prin- 
cipale cour, qui se trouve ainsi plus élevée d'un étage que 
la place et les deux cours modernes de" droite et de gauche. 
Toutes trois ont d'ailleurs la forme d'un trapèze, ¢elle da 
centre en sens inverse des autres; cela a été fait ainsi pour 
donner aux façades nouvelles de l'h6tel de ville agrandi le 
parallélisme qui manquait au vieil édifice. 
Du reste, la cour d'honneur est la seule remarquable : 
elle est bordée d'arcades avec des colonnes engagées d'or- 
dre ionique; on y voit une stable de hrnnze et en pied 
de Louis XIV par Coysevox. Les deux bas-reliefs du piC 
destal, très-médiocres d'ailleurs, représentent PAn9 e de la 
llotaut donnant du pain aueule pendant lagrande 
famine de 1662, et la lteligion et la France foudroyant 
l'Hdrésie, ¢'est--dire la révocation de l'édit de Hantes. 
Cette belle statue, érigée en 1690, fut enlevée et demeura 
cachée pendant tout le temps de la révolution; «lle ne 
reparut que sous l'empire. Elle avait reanplacé une première 
statue du mme monarque, par Jacques Sarrazin; l'artiste 
avait figuré le roi, vtu  la romaine, foulant sous ses pieds 
la Fronde, et la montrant vaincue de sa main droite qui 
tenait un baton de commandement. Un jour de réjouissanoe 



klOTEL DE VILLE 
publique, que Louis XIV vint dlner à l'h6tel de ville, il 
diten entrant dans la cour: « Otez cette figure, elle n'est plus 
de saison. ,, Aussit6t, et dans la mme nuit, le prév6t des 
marchands, de Fourcy, fit [etirer la statue qui avait encouru 
la disgràcede Louis, et la transporta à sa maison de cam- 
pagne de Chessy. Quelque temps après, la maison de Condé 
l'acheta, et la fit euterrer. Enfin à la révolution, Alexandre 
Lenoir la retrouva dans une cave; on I'a vue au Musée de 
la rue des Petits-Augustins jusqu'en 1816. 
Au rez-de-chaussée, du c6té de la place Lobau, se trouve 
la salle Saint-Jean, qui sert à différentes réunions, aux opé- 
rations de Urage au sort et de révision des conscrits, aux 
séances de sociétés savantes. Du mSme c6tt on peut voir le 
vestibule du grand escalier d'honneur et du c6té opposé 
deux escaliers exactement pareils; l'un d'eux n'existait pas 
dans l'ancien édifice et a été copié sur l'autre, dont il repro- 
duit les plafonds d'un style caractéristique. 
L'h6tel de ville se divise en trois parties principales : le 
corps de btiment du nord, qui donne sur la rt;e de Rivoli, 
est entièrement affecté aux bureaux de la préfecture de la 
Seine. L'étage inférieur du pavillon du midi forme les ap- 
partementa particuliers du préfet, à qui sont réservés aussi 
la cour du midi et le jardin demi-circulaire qui avance sur 
le quai de la Grève. 
Les salons de réception embrassent l'Cage principal, à 
peu près sur toute la longueur des trois autres c6tés. 
Nous citerons, entre-autres, la salle du Tr6ne, ornée  ses 
deux extrémités de deux cheminées monumentales, œuvre 
de Biard et de Th. Bodin. Sous la révolution, elles avaient 
été masquées par des tribunes où le peuple et les tricoteuses 
venaient assister aux séances de la commune de Paris. Les 
quatre grands panneaux qui font face aux fenêtres sont oc- 
c;;pés par quatre peintures de MM. Gosse et Séchan, repré- 
sentant la Ville de Paris, personnifiée sous les traits d'une 
femme, au V c, XIIe, XVIleet XIXe siècles. C'est dans la salle 
du Tr6ue que se donnent les banquets officiels. I La 9alerte 
de marbre, décorée de buit paysages d'Hubert Robert, pro- 
venantde l'ancien h6tel Beaumarchais. -- Le salon azz af. 
codes, peint par MM. Picot, Aug. Hesse, Schopin et Vau- 
chelet ; le plafond principal a pour sujet la Ville de Paris 
assise devant le temple de l'immortalité, protégeant et en- 
courageant la paix, l'abondance, la concorde, le commerce, 
l'industrie, les arts, l'agriculture, la bienfaisance et l'eusei- 
gnement. Dans les airs, et comme formant nne auréole au. 
tour de la ville, sont groupés les hommes célèbres qui ont 
contribué à son illustration. C'est dans cette salle que le 
gouvernement provisoire s'installa en février 1848. -- La 
salle à manger, revètne en stuc et décorée de sujets de 
chasse et de pëcbe par Jadin. -- Le salon de l'Enpereur, 
tendu de satin vert semé d'abeilles, où l'on remarque nn 
portrait de apoléon par Gérard et un plafond peint par 
M. Ingres représentant l'Apothéose de 'apolon i er, 
magnifique composition qu'encadrent le figures allégori- 
ques des capitales de l'Europe par le mSme artiste. -- 
La gra»de galerie des fétes, une des plus vastes salles de 
bal qu'il y ait au monde; elle est éclairée sot la place Lobau 
par treize baies en arcades et ornée de trente-deux colonnes 
dégagées d'ordre corintlaen, servant de point d'appui aux 
retombées de la vofite qui porte le plafond. M. Lebmann 
en a décoré les voussures et les pendentifs de cinquante-six 
sujets, formant une véritable épopée de l'histoire de la civi- 
lisation depuis les premiers efforts de l'homme pour vaincre 
les éléments et les bStes féroces, jusqu'à son merveilleux 
développement actuel. -- La salle des caratides, d'une sin- 
gulière originalité de construction, et dont les vo,tes en pen- 
dentifs portent une tribune carrée décorée de cariatides. -- 
Le salon de la paiz, dont le plafond et les huit caissm;s 
qui l'entourent sont de M. Eugène Delacroix. 
Enfin la b i b I i o t I; è q u e est logée à l'Arage le plus élevé 
du bàtimeut, du c6të de la place Lobau; elle doit son 
origineà un legs de M. Moriau, procureur du roi en t759, et 
compte plus de soixante mille volumes. W.-A. DuCltErr. 
DIGT. DE LA CONvEB.S. I T. Xl [ 

-- HOTEL-DIEU i 85 
IITEL-DIE;Ie plus ancien et le plus célèbre h6- 
pital de Paris. Il se compose d'une réunion de btiment 
irrégulièrement disposés, construits en différents temps, les 
uns sitnés dans la Cité, le long de la rive septentrionale du 
petit bras de la Seine, qui en baigne les murs sans les rendre 
cependant plus propres, depuis le Petit-Pont jusqu'au Pont- • 
au-Double, les antres plus modernes, mais presque aussi 
disgracieux, sur la rive gauche, en partie sur le quai Saint- 
Michel, en partie sur les terrains de Saint-Julien le Pauvre. 
Ce n'est que sur la place du parvis qotre-Dame qu'on a 
cherché à donner à cet amas de constructions quelque régu- 
larité. En 180/. l'architecte Clavareau constrnisit un pavillon 
de vingt-cinq mètres de développement, couronné d'une 
frise dorique et d'un fronton, qui forme l'entrée 
cipale de l'b6pital. A chacun de ces ctés on a ménagé deux 
cours ferreCs de grilles. Une passerelle couverte, qui a 
remplacé le pont Saint-Charles, récemment démoli, relie le 
corps principal de b.timent à ceux de la rive gauche et 
ceux-ci communiquent entre eux an moyen d'une autre pa 
serelle qui enjambe la rue de la Bucherie. L'ancienne église 
de Saint-Julien-le-Pauvre sert de chapelle à l'll6tel-Dieu. 
Le nombre «les lits de l'H6tel-Dieu est de 736. On y reçoit 
les maladeset les blessés, à l'exception des enfants, des in- 
curables, des fous et des individus attaqués de maladies 
vénériennes ou chroniques. Il est desservi par les dames re- 
ligieuses de Saint-Augustin. Dix médecins et cinq chirur- 
giens sont attachés à son service. 
On a atlribué la fondation de l'H6tel-Dieu à saint Landri, 
évque de Paris au septième siècle ; mais cette assertion 
n'est appuyée sur aucun monument historique, bien que 
cet établissement charitable remonte peut-être à ces temps 
réculés. On sait en effet qu'alors il existait auprès de 
tontes les maisons épiscopales un lieu destiné à la nour- 
riture des pauvres inscrits sur la matricule de l'église; 
voila l'origine de l'H6tel-Dieu de Paris. Au commencement 
du-neuvième siècle, on construisit pour l'usage des pau- 
vres matricnlaires nne chapelle dédiée à saint Christophe, 
qui donna son nom à l'h6pital. En tf08 le chapitre de 
P/otre-Dame rendit un statut portant que tout chanoine en 
mourant ou en quittant sa prébende serait tenu de donner 
nn lit à l'hpital. 
A cette époque, cette maison n'était pas seulement des- 
tinée aux pauvres malades, mais ansai à ceux qui étaient en 
bonne santé comme dans les lemps primitifs du christia- 
nisme; on l'appelait alors l'anm6nerie de Sainte-Marie de 
Paris. Philippe-Auguste, en 1208, gratifia la Maison de 
Dieu de Paris de tonte la paille qui avait servi à son palais 
( onme strantea de cantera et do»to nosra ). Saint Louis 
lui accorda le droit de prise sur les denrées vendues aux 
balles et marchés ; il l'exempta de toute contribtttion, des 
droits d'entrée et de tout péage par terre et par eau ; il en 
augmenta les bAtiments, les étendit jusqu'au Petit-Pont, et 
lui assigna des rentes considérables. Les successeurs de ce 
prince imitèrent quelquefois son exemple, et il serait trop 
long de rapporter tous les bienfaits que cet h6pital reçut  di- 
versesépoquesde la part des rois etsurtout des particuliers. 
Le chapitre de-Notre-Dame avait depuis les temps an- 
ciens l'administration de l'H6tel-Dieu. Il nommait deux 
chanuines proviseurs de cet h6pital ; des frères et des sœurs 
le desservaient. La rigueur des èglements n'empcba pas 
pendant l'introduction de tous les abus et de tous les dé- 
sordres. Ils furent tels que le parlement en 1505 se vit obligé 
de renvoyer les sœurs, qu'on appelait alors les sœurs noiz es, 
de les remplacer par des sœurs 9rtses, et de nommer huit 
bourgeois de Paris pour adminislrer cet h6pital. Cette or- 
ganisation se maintint jusqu'à la révolution. 
C'était alors l'établissement de charité le plus riche de 
l'Europe, et peut-trele plus mal tenu. Tous les amis de l'hu- 
manité demandaient avec ins{ance sa translation sur un 
rmldacement plus convenable ou sa division en plusieurs 
maisons. Cbamousset, Duhamel, Petit avaient fait à ce 
sujet de vives représenlations, qui demeurèrent inutile 



86 HOTEL-DIEU 
Enfin, en 1786, Bailly fit paraltre son fameux mémoire, 
auquel répondirent les administrateurs de l'H6tel-Dieu. 
Louis X¥1, ému de ces révélations, demanda un rapport 
à l'Académie des Sciences. Ce rapport fut publié, et bieot6t 
chaque pauvre malade put coucher seul dans un lit, tandis 
qu'aoparavant on en mettait jusqu'à huit daus une cou- 
chette a deux élages. 
La construction de quatre hépitaux, que proposait le rap- 
port pour remplacer l'HéteI-Dieu, fut ordonnée par le roi, qui 
invila les bons cito)ens à concourir avec lui par des dons 
et des so,scriptions à cette œuvre de bienfaisance. Une gé- 
néreuse émulation s'établit parni toutes les classes de la 
population de Paris ; mais les événements précurseurs dc 
la rèvolulion et le dèsordre des finances engloutirent use 
somme de quelques millions q,e l'on avait déjà recueillie. 
Cependant la révolution rendit plus Incite la s,ppression 
des èoormes abus de l'ancien régime. On ne construisitpoint 
de nouveaux édilices, mais on distribua les malades, d'après 
la nalure de leur maladie, dans les divers bépitaux déjà 
existants et dans les maisons religieuses évacuées dont 
on pouvait disposer. 
Aujourd'hui cet bépital ne présente plus de traces de 
son ancien et affligeant état. Dans ces derniers temps, cepen- 
dant, en raison morne de sa situation au centre de la ville 
et dans un quartier popule,x, on a beaucoup agité le projet 
de le démolir pour dégager les abords de Notre-Dame et con- 
tinuer la ligne «les quais de la Cité, qu'il interrompt désa- 
gréablement. Plusieurs plans ont été présentés sans qu'on 
se soit eneore délerminé pour aucun. W.-A. 
HTEL GABI. On "dèsigne ordinairemeot sous ce 
nom une maison meublée, tenuepar une personne patentée, 
qui loue chaque chambre, chaque appartement séparément, 
au mois et au jom" : les hélcl garais sont sous la surveil- 
lance immédiate de la police. C'est surtout dans les grandes 
villes que la surveillance est le plus active à cet ègard. 
On conçoit en effet de quelle importance est pour la sU- 
retWd'une ville, pour le repos et la tranquillité de ses ha- 
bitants, la certitude que la police seille sur des maisons qui 
pourraieut devenir des retraites laciles pour des gens sans 
aveu. Aussi la police exige-t-elle une déclaration préalable 
dela part des personnes qui se proposent de tenir des cham- 
bres et des apparlements garuis, alin de pouvoir s'assurer 
de leur moralitè. Les mailres d'h6tels garnis portent à la 
police le passeport des locataires qui logent chez eux, et cela 
dans les vingt-quatre heures, sous peine d'amende; à defaut de 
déclaration faite par le marre dh61el, le portier doit laire 
la sienne. Les mailres d'h61els garnis doivent tenir un re- 
gistre, qu'ils font viser h la police à cerlaiues époques. A 
Paris, il y a des inspecteurs de police qui ont mission d'al- 
ler visiter les h61els garnis, attendu qu'il serait trop em- 
barrassant pour les bureaux de police d'avoir une multi- 
tude de livrets fi examiner journellement. 
A Paris, il y a des maisons meuhlëes qui ne sont pas des 
bétels garais et qui ne sont pas soumises aux rigueurs de la 
police comme les hétels. Dans une maison qui n'est pas to- 
talement meublée, la police exige que l'on fixe h la porte 
d'entrée an petil écriteau jaune, sur lequel sont écrils les 
mots appartements meubN$ ou chambres 9arnies. Les 
personnes qui tiennent ces appartemenls ou ces chambres 
doivent ëgaletoeot avoir un livret de police. 
L'h6tel garni rem place i' a z b e r 9 e, off on logeait à pied et 
à cheval, et l'hétcllerie, qui avait plus de prélenlions, mais 
où on logeait encore à la nuit. Il n'y a guère d'h6tcls, du 
reste, que dans les grandes villes, o6 les voyageurs font 
un sëour un peu prolongé. L'auberge et l'h6tellerie n'exis- 
tent plus guère que dans les villes de passage, et encore les 
chemins de let ne larderont pas h les faire di.paraltre. A 
Paris les hétels ont des aspects différeols, suivant les quar- 
tiers: près des Tuileries vont les riches Anglai.: et autres élran- 
sers; près de la Bourse et des boulevards, les personnes que 
les affaires appellent à Paris; les pelils commerçants de pro- 
vince vont encore pus au centre de la ville ; les étudiauts 

Fit 
demeurent dans les h6tels da quarller Latin. Les hOtels joi- 
gnent sotvent à leur industrie des tables d'hOte. Dans quel- 
ques quartiers pop,deux, des logeurs réunissent desouvriers 
dans des chambres  plusieurs lits; ailleurs des malheureux 
s'entassent sur la paille degrandsdortoires sansséparations. 
Entra, dans ces derniers temps, Paris a vu s'élever,  Pinstar de 
plusieurs villes étrangères, de grands hétels oil une immense 
population pourra se réunir dans le plus doux confortable. 
HOTELLERIE. Voye Amec et Hora. CSaLm. 
HOTTENTOTS. C'est le nom que, à l'origine, les 
Hollandais imposèrent aux habitants aborigìnes de Vextré- 
mité méridionale de l'Afrique, qui s'appellent eux-mmes 
Anacloua ou Qouacloua , et qui tous ensemble forment nne 
race isolée, complètement distincte des autres peuples du 
continent africain par leur langue et par leur constitution 
physique. Cette race se partage en quatre tribus princi- 
pales : les Hottentots dits coloniaux ou, fi proprement 
parler, les Qouaqouas du Cap; les Koranos, appelés aussi 
Koras ou KorwAqouas (c'est-à-dire hommes de Kora); les 
/Vamas ou 2Vamaqouas et les Saas ou Boschimans. 
Leur teint olivàtre-sale, leur front déprimé, la forme de 
leur visage rendue presque carrée par des pommeRes en 
général larges et extrmement saillantes, leurs lèvres épais- 
ses, leur nez Cru,Wplacé entre deus yeux très-petits, enfin 
l'exiguïté de leur taille, font des Hottentots une race fort 
laide. Les traits du visage de la plupart des individus, no- 
tamment des plu» aSC, ont quelque chose de repoussant 
et qui tient mme de la nature du singe, à cause de la forte 
saillie que fait la bouche. Les Koranas seuls diffèrent des 
autres, par une plus haute stature, par la vigueur de leur 
corps, par des yeux vifs, des visages mieux eonformés et 
aussi par plus d'intelligence. Leur langue, qfi manque de 
preue tous les éléments de lbrmation et d'inflexion, pos- 
sède une foule de sons gutturaux fortement aspirés, sortant 
de la cavitë pectorale rapidement et d'une voix enrouée, et 
aussi de sons d'une nature toute particuliëre, tenant du ch- 
quement; aussi l'a-t-on souvent comparée à la langue que 
par!eut les goitreux des Alpes, ou encore avec le cri du 
dindon et autres volatilg de ce genre. Les Hottentots pur 
sang ne se trouvent que dans la contrée dite Orange-River- 
Sovereignty , la partie la plus septentrionale de ces con- 
trées, qui n'a ètè que tout récemment incorporée h la co- 
lonie du Cap. En effet, ce qu'on appelle les Hottentots co- 
loniaux, c'est-à-dire ceux qui habitent en deçà des limites 
«le l'ancienne colouie hollaudaLge du Cap, qu'un acte puhli 
en 1828, par le gouverneur Burk, a lé'alement assimilës 
aux blancs, se sont mélangés avec des Européens, des Ca- 
fres, peut&tre hien encore avec des nègres et d'autres dmi- 
grants ; aussi Ieur langue est-elle devenue une espèce de 
patois composé de mots holtentots, hollandais et carres. 
Q,,oique mal propres et extrêmement adonné« h l'ivrognerie 
et Iégers, comme ce sont au total de bonnes gens, bien com- 
plaisauts et généralemeot honntes, les cultivatenrs et les 
paysans du Cap les prennent volontiers à leur seariceen qua- 
litA de bergers ou de charretiers. Leur nombre s'élève à en- 
viron 5,000. Du mélange des Européens avec les femmes 
hottentotes est provenue une race particuli/re, les Bastards, 
appelés aussi Grigouas , qui l'emporte infiniment sur .les 
Ilottentots proprement dits sous le rapport du développe- 
peinent pbysiqui et qui montre beaucoup de dispositions 
pour les arts de la vie civilisée. Il forment une population 
particulière, qui avec le temps eu est arrivée  présenter 
un total d'environ 20,000 tète.% dont les premiers membres 
avaient été, dans lecours du siècle dernier,s'établir au nord, 
où ils vivent de la vie nomade dans les savonnes situées 
entre lX'ou.Garip et Kay-Garip, ou bien qui ont constituéde 
petits Etats avec quelques points centraux, tds que Philip- 
popolis et Plaatberg, et qui pratiquent l'agriculture. Une 
lroupe compacte de ces Bastards., chréliens pour la plu- 
part, et forte d'environ 6,000 individus, lut établie en t82 
par le gouvernement sur les bords du Katriver, où elle forme 
une petite colonie, qui a parlaitement réusgi, car aujourd'hu'." 



HOTTENTOTS 
elle ne compte pas moins de 17 villages avec 17 écoles 
quentées par 1,200 16ves et dirtgées par des missionnaires 
h ernhutes. Un corps de chasseurs à cheval, qui y tient 
garnison, et qu'on appelle les Cape-Moantain-liifles, ne se 
compose que de Bastards et de Hottentots. 
HOUBLON, genre de la dàoecie penladrie de Linné, de 
la famille des urticées de Jussieu. Ce genre ne renferme qu'une 
seule espèce, le houblon 9rimpant (humulus lutmlus, L.). 
Le houblon est une plante vivace, h tige herbacée ou sous- 
ligneuse, anguleuse, mde au toucher, et volubile de gauche 
à droite anour des branches qui lui prêtent appui ; ses 
feuilles, opposées et paimes, rappelleut un peu la forme 
de la lenille de vigne, et sont accompagngs de larges sri- 
pules membranenses et quelquefois hilides au sommet : ses 
fleurs, toutes mles sur quelques tiges, toutes lemelles sur 
les autres, sont disposCs en grappes paniculées et group6es 
au sommet des rameaux chez les individus mmes, chez les 
individus femelles aux aissefles des feuilles supérienres : la 
fleur m$1e est formée d'un calice profondément divisé en 
cinq Iobes, et de cinq étamines, dont les courts filament.« 
supportent des anthères oblongnes; la lieur femelle rait dans 
un «6ne ovoide, formé d'écailles membraneuses, ovales, 
imbriquées, et contenant nu ovaire chargé de deux styles 
subulé., à stigmates fififormes. Le fruit qui résulte de la fé- 
condation de l'ovaire est un petit akìne arrondi, lenticulaire, 
et enveloppé dans l'Acaille calicinale. On distingue quatre 
variëtés de houblon, qui croissent à l'Cat sauvage dans les 
baies et sur la lisière des bois de t'Europe septentrionale : 
de ces quatre variétés, deux seulement sout cultives en 
grand dan.s les plaines dela France, de l'Allemagne, de l'An- 
gleterre, etc. Du reste, la culture du houblon exige de nom- 
breux soins. F thérapeutique, la fleur du houblon est re- 
gardée comme tonique, sudorifique, antiscorbutique ; on 
l'emploie surtout dans les affections scrofuleuses et dans 
les maladies cutanées; elle possède également des propriétés 
narcotiques, et les anciens thérapeutistes prescrivent souvent 
l'emploi d'un sommier de fleurs de houblon, comme un 
moyen simple et facile de procurer du sommeil aux enfdnts; 
mais la prinduale utilité q.e l'homme retire du houblon 
lui vient de ses fruits, qui jouent un r61e important dans la 
fabrication de la bière, à laquelle ils douuent sa saveur 
Iranchement amère et son odeur caractéristique. 
BELFIELD-LEFÈVE. 
HOUBRACIEN (ARNOLD), peintre flamand plein de 
talent, né à Dordrecbt, en 1660, mort/ Amsterdam, en 1719, 
»'adonna surtout à la peiuture du portrait. On a cependant 
aussi de lui quelques gravures sur cuivre. Il est connu sur- 
• .out par un excellent ouvrage intitulé : Groote Schouburçh 
der nederlandsche Konstscflilderç ch Schildressen, elc. 
( Amsterdam, 1718). 
Son fils, Jacques HOUBP.ACKEX, peintre et graseur dis- 
lingué, né à Dordrecht, en 168, mort à Amslerdam en 
1790., prit pour modèles Edelingk et Drevet, et grava plus 
,le 600 portraits, qui presque tous ont une haute valeur, en 
raison de la remarquable facilité avec laquelle ils sont exé- 
«.utés, etaussi de la force etde Penergie de coloris qu'on y 
remarque. 
HOUCHABD (JF-NICOLS), né ca 1740, à Forbach 
(Muselle), quitta à quinze ans la maison palernelle pour 
Jengager dans le rgiment royal-allemand cavalerie. D'a- 
bord imple soldat dan« ce corps, devenu plus tard capi- 
taine dans celui de Bourbon-dragons, il fit en A]lemagne h 
plus grande partie de la guerre de sept ans, et prit ensuite 
part à la conquête de la Corse. Il éta.t parvenu au grade de 
lieutenantocolone] et avait obtenu la croix de Saint-Louis, 
au moment où éclala la révolution, dont il embrassa les 
principes avec ardeur, à la différence de la grande majorité 
des officiers d'alors, qui passèrent à l'étranger, s'imaginant 
que leur absence laisserait la France ans arrache. Il fut 
nommé en 1792 colonel d'un régimentde chaseur. à cheval 
qui fisait partie de l'armée de Custine, et il se distina, 
• u mois de septembre, par son intrépidilé devaut Spire. Son 

 HOUDETOT 18 
régiment s'illustra dans cette campagne en maintes rencn. 
tres avec les Vieilles bandes de Frédéric, regardC commo 
les meleures troupes de l'époque. En mai 1793, il fut 
nommé général en chef de l'armée du lhin en remplacement 
de Custine, et passa peu de temps apr6s à celle de la 51oselle, 
qu'il ne quitta que pour remplacer le mme généra dans le 
commandement en chef «le l'armée du nord. C u s t i n e avait 
été destitu6 ; on l'accusait d'avoir causé la perte de l'armée 
de Mayence; et Houcbard f,t run de ses principaux accu- 
satenrs. De brillants faits d'armes signalèrent la reprise de 
l'offensive dans les Flandres contre les coalisés, qui furent 
battus devant D,mkerque, dans les célëbres jonrnées des 6 
et 7 septembre t793. Le siCe de Dunkerque lut levé, et le 
lendemain, 8 septembre, les Anglais furent delaits à H o n d- 
se b o o te; cernée de toutes parts, leur armée entière tomba 
an pouvoir des républicains. Fumes, Menin et d'autres pla- 
ces importantes leur furent enlevées; cependant, on reprocha 
au général en /hef de n'avoir pas su tirer tout le parti pos- 
sible de ses succès. Il eut pu, dirait-on, faire prisonnière 
toute l'armée ennemie. 
Par suite des accusatious auxquelles il se vit en butte, 
il fut arrtë à Lille le 26 septembre, conduit à Paris et tra- 
duit devant I tribunal révolutionnaire. Il ëtait alors gé de 
cinquan|e-t rois ans. L'acte d'accusation rappelait l'accusation 
qu'il avait lui-m6me portée contre Custine ; elle bli repro- 
chait d'avoir négligé de secourir Mayence, d'avoir, au mo- 
ment où il pou'ait s'emparer de Sancroi et de Kaise, or- 
donné la retraite, malgré les ordres des représentants, 
d'avoir relusé d'exécuter le plan d'attaque de Menin, d'avoir 
changé celui qui avait été ensoy6 par lecomité de salut 
public lors du sige de Dunkerque, d'avoir fait perdre le 
fruit de la victoire de Hondschoote, où il pouvait faire pri- 
sonnier le duc d'York et roule l'armée anglaise, etc. Il se 
défendit lui-reCe devant le tribunal révolutionnaire.., J'ai pu, 
dit-il, en terminant i'exposé de sa condaite faire des fautes : 
quel est le général qui n'en fait pas? Mais je n'ai jamais été 
uu traitre : les jurés me jugeront dans leur ame et conscience ; 
quant à moi, je puis dire que la raienne est pure et tran- 
quille. » II fut condamné à mort, le 26 brumaire an n (7 
novembre t793), il montra sur l'échafaud le même courage 
que sur le champ de bataille. Dcre (de |'Yonne). 
HOUDETOT ( Famille d' }. Cette famille de bons gen- 
tilshommes français, assez aucienne pour que, moennaut 
m peu de complaisance, on en décousre au moins va 
memhre daus l'annuaire militaire du temps des croisadc% 
doit son nom à une ancienne seigneurie de Normandie, éri- 
gée en marquisat en 172. Elle ne compte plus aujourd'hui 
que deux repré.gentants mles : t  le comte Fréderic-Chris- 
tian D'HOt'DETOT, ex-pair de France de la création de 1819, 
dont toute la biographie se résume dans ce mot; 2 ° le 
comte Frank n'Hocwxor, général de division, ancien aide 
de camp de l'ex-roi Louis-Philippe, que la Bestauration avait 
trouv,." lieutenant-colonel. C'Cait un des serviteurs les plus 
dévoués de son royal maitre, auprès duquel il continua son 
service d'aide de camp dans l'exil avec plus de z6le quïl 
n'en mettait, dit-on, lorsque Loui»-Philippe était aux Tui- 
leries. Dputé sous le dernier règne, M. d'Houdetot faisait 
partie de cette majorité trop aveugle ou trop docile qui a 
précipité la chute du tr6ne. 
Un mot maintenant de M me d'Houdetot, la grand'mbre de 
nos deux honorable contemporains, si célèbre au dernier 
siècle par sa liaison avec Saint-Lambert, et l'objet de 
l'ardent amour de Jean-Jacques. 
Élisabeth-Françoise-Sophie de La Lice de ltellegarde , 
comteçse n'HocneToT, née vers 1730, ëtait fille d'un fermier 
gnéral et be!le-soeur de M me de La Lice d'Êpina'. On la 
maria trb-jeune, et malë elle, en 1748, au comte d'Hou- 
detot, bon militaire, mais joueur, chicaneur, très-peu ai- 
mable, et qu'elle n'aima jamais. Trouvant dans Sa[nt-Lam- 
bert tous les mérites de son mari, avec des qualités plus 
agríables, de l'prit, des vertus, des talents, elle s'attacha 
b lui ; et le temps, qui légitime ou sanctionne tant de cbos¢s 



J $$ HOUDETOT 
fit jusqu'à la fin, regarder comme respectable dans l'opi- 
nion du monde, cet altachement mutuel, dont on vantait 
déj la constance à I'poque où lousseau crivait ses Con- 
fessions. A vrai dire, foule la vie de ,l e d'Houdetot est 
dans cette liaison, laquelle ne fut trouble que par les soins 
qu'elle dut prodiguer  Saint-Lambert, qui, tombé dans une 
sorte d'enfance, ne cessait de se plaindre de cette amie si 
devoJée et heureusement mourut avant elle. La folle 
passion de lousseau pour cette femme charmante alfcra 
peut-être aussi un peu la douceur d'une union si tenace et 
si prolongée; mais en rsumé il parait bien que M me d'Hou- 
detot fut la plus heureuse femme du monde, et la meil- 
leure preuve, c'est qu'elle vícut jusqu'à quatre-vingt-trois 
ans, et mourutl sans agonie, comme sans remords, le 28 
janvier t813. Il faut, d'ailleurs, renoncer à peindre cette 
femme, après le portrait qu'en a fait lousseau. Il y aurait 
Ilus d'une chose à reprendre sans doute dans ce portrait, 
admirable, du reste, de simplicité, de candeur et, jusqu'à un 
certain point, d'onction ; mais il ne faut pas oublier que 
c'est un amant délicat et malheureux qui I'a trac, et que 
cet amant est lousscau. Ce grand écrivain avait trop de 
raisons de mépriser certaines lois sociales qu'il appelait de» 
tr#ju9és, pour ne pas se moutrer indulgent envers une 
femme qui se jouait avec elles en les outrageant, et qu'il ai- 
mait par-dessus le marché, comme jamais, de son propre 
a'eu, il n'avait aimé. l roc d'Houdetot a iaissé quelques 
Pensoees. Charles lS& ID. 
HOUDON (J£-AI'To[,£), né à Versaiiles, en 1741. 
C'est peu d'années après la mort de Nicolas et de Guillaume 
Coustou, lorsque vivait encore Bouchardon, qu'un 
nouveau statuaire venait de naître, et il devait paraitre avec 
d'autant plus d'éclat qu'il se forma presque seul et en pre- 
nant pour modèle les ouvrages de ces grands artistes. Hou- 
don reçut pourtant quelques conseils de Jean-Baptisle Le- 
moine et de Jean-Baptiste Pi ga le. Il n'avait que vingt ans 
iorsqu'il remporta le grand prix de sculpture à l'Academie. 
Arrivé en Italie, il y lu, bientôt éclairé par le flambeau de 
l'antiquité que Winckelmann venait de rallumer. 11 e**t alors 
un bonheur bien rare pour un éludiant el pour un étranger, 
c'est celui de faire pour I'glise des Charlreux] à lome une 
statue colossale de sainl Bruno, leur fondaleur, lien de plus 
simple, de plus vrai que cette statue : c'est l'idéal de I%umi- 
IiiWsous la forme et le costume d'un pieux cénobile; sa vue 
produit la plus vive et la plus durable impression, et, sui- 
vant l'expression du pape Clément XIV, cette statue par- 
lerail çi la r91e de son ordre ne lui prescrivait le si- 
lence. De relour ì Paris, notre staluaire fit une grande figure 
connue sous le nom de l'Écorcldde Houdon, qui esl devenu 
depuis un sujet d'élude dans lous les ateliers. 
Franklin, durant son séjour dans la capitale, dêlermina 
notre artiste à l'accompagner - Philadelphie pour faire le 
buste de Washington, et, d'aprës ce modèle, il fit enuile 
- Paris la statue en marbre de cet illustre gënéral, de ce 
grand cito:yen. Plus tard, Houdon fit pour l'impératrice Ca» 
therine I1 une statue de Diane. Ce n'est pas sans raison 
qu'on lui a reproché d'avoir représenté la chaste déesse de 
forts aussi peu vlue que pourrait I'tre la déesse de 
thère. Il fit ensuite la statue de Voltaire, as»fs et drapé ì 
l'antique : le marbre est mainlenant placé dans le vestibule 
du Thétre-Français, et le modèle se trouve dans la galerie 
d'introduction de la Bibliothèque impëriale,  qui il a ét 
donné par son auteur. On lui doit aussi la slalue de l'amiral 
Tourt'ille, une charmante figure allégorique, si connue sous 
le nom de la Frileuse, puis enfin une slatue de Ciccron pla« 
cée au palais du Luxembourg. Houdon fit aussi un grand 
nombre de busles remarquables par la ressemblance et par 
la finesse des détails : nous citerons ceux de Voltaire et de 
lousseau, Buflon, D'Alembert, Gerbier, Gluck, Sacchini 
Franklin, l'abbé Barlhélemy et Mirabeau. 
Tant de travaux méritèrent à Houdon plusieurs honneurs 
il fut successivement nomnJé membre de l'Académie, pro- 
fesseur de l'École., e membre de la Légion d'Honneur. 

 HOUILLE 
conserva longtemps une santé vigoureuse, et après avoir 
teint sa quatre-vingt-huitième année, il mourut le 16 juil- 
let f88. Dvcn atné. 
HOUE, outil dont on se sert pour labourer les vignes et 
généralement les terres inaccessibles à la charrue. Elle se 
compose d'un manche moins long que celui de la bche, au 
bout duquel s'adapte à angle droit un fer plus on moins 
élargi et recourbé, • Le travail de la houe, dit M. de Gas- 
parin, n'a pas la meme perfection que celui de la h t c be. 
L'instrument enfoncíen terre, l'ouvrier tire la motte à lui et 
l'Caie sous ses pieds. Elle n'est pas retournée, elle n'est que 
déplacée ; on n'expose donc pas sa partie inférieure à l'ac- 
tiou de l'air, commepar le bêchage rgulier, • 
Le savant agronome que nous vendus de citer regarde 
comme des varités de la houe : le p/c, dont la pointe 
est destinée à opérer dans les terrescaillouteuses et dures; 
la pioche, dont le fer plus élargi convient aux terres dur- 
cies, mais non pierreuses; la tourne.e, qui offre la reuuion 
du pic il de la pioche en un seul outil ; l'oecobue, labi. 
n e t te et la ser.fouette. Le houe desjardiniers» plus large 
que celle des laboureurs, leur sert à detruire les mauvaises 
herbes en rclant le terrain. 
llOUI. Voe COL_. 
HOUILLE, combustiLle fossile, charbonneux, compatie, 
d'un noir luisant : ou Iv nomme aussi charbon de terre..Sa 
cassure est lisse, et ses fragments affectent la figure rectan- 
gulaire. On ne peut méconna|tre son origine végétale; car 
on y reucontre Iréquemment des empreintes etdes débri. de 
piaules dont plusieurs appartiennent à des espèces qu'o 
ne trouve plus sur la terre. D'autres combustiles sont mles 
aux bouilles en quantités extrmement variables : ce sont 
des bitumes, des sulfures de fer, du soufre, quelques com- 
binaisons de phosphore. Ou ne les trouve jamais associes 
aux I i  n i t e s et aux t o u r b e s. Les terrains qui les recèlent 
sont de formation dite secondaire : on en chercherait vaine- 
ment dans les granits et autres roches primitives, ou dans 
les couches le plus récemment consolidées; les matièr 
pierreuses qui les enveloppent sont des schistes, des grès, 
des calcaires non marins. Leur. aflleurements viennent jus- 
qu'à la surface du sol et les indiquent aux minedrs; mais 
leurs dép6ts les plus étendus sont quelquefois à une grande 
prolondeur, inaccessibles aux travaux de l'homme : com- 
ment de tels amas de matières végétales ont-ils pu tre ame- 
nés de la surface de la terre jusqu'aux lieux où ils sont ac- 
tuellement? A quelle époque faut-il rapporter ces déplaoe- 
ments? Dans ces questious, on retrouve encore en presen¢e 
les part/sans des eaux et ceux du feu central Il est certain 
que le bois soumis à une forte pression et . une très-haute 
température prend tous les caractères extérieurs de la houille, 
et se montre pourvu de toutes les propriétés de ce fossile ; 
il ne l'est pas moins que les ratines slbstances ligneuses se 
rapprochent aussi de l'etat de la houille à mesure qu'elles 
ont ét eufouies à une plus grande profondeur, et que leur 
sjour daus l'iutérieur de la terre a duré plus longtemps. 
L'examen des différentes sorles de lignites et des lieux d'oi 
ils sout extraits ne permet pas de douter qu'à l'aide du temps 
ces iignites auraient etWtransformés en houille. Cependant, 
comme les amas de ce combustible que nous exploitons au- 
jourd'hui n'ont été formés que par une seule voie, en mme 
temps que l'enveloppe pierreuse dont ils sont revtus, aban- 
donnons ces recherchez, qui ne peuvent nous procurer de 
véritables connaisnces, et voyons quels sont les emplois 
de la houille. 
Suivant la quantité de h i t u m e contenu dans les houille, 
elles sont plus ou moins propres à différents usages. Pour 
l'économie domestique, on recherche celles qui brillent 
avec flamme, et celles-là sont tellement bitumineuses, qu'on 
en extrait celle substance pour remplacer le go u d ton. La 
houille ainsi carbonisée est le coA'e (cook des Anglais), 
matière qui remplace le charbon de bois, mais avec dé- 
savantage, parce qu'elle brtle plus diflicilemen[ et n'est paz 



HOUILLE 
toujours exempte d'odeur sulfureuse. Dans la plupart des 
fo rges de la France, on a substitué le coke au charbon de 
bois pour le traitement du minerai de fer et sa conversion 
en fonte. Les houilles maigres, cest--dire peu bitumi- 
neuses, sont propres aux travaux des forgerons. Mais quel- 
ques-unes ne donnent point du tout de bitume par la distil- 
lation; elles ne s'enflamment que très-difficilement, et for- 
ment une espèce distincte sous le nom d'anthracite. 
Quoique l'on puisse encore en tirer parti, ce n'est que par la 
disette des autres espèces que l'on se décide h user de celle-ci, 
parce que sa combustion doit tre entretenue par des souf- 
flots d'une très-grande force. Aux États.Unis de lAmérique 
du Nord, on applique mal à propos le nom d'anthracite à 
toutes les espèces de charbon de terre, mème aux plus com- 
bustibles, en sorte que les lecteurs pourraient tre induits 
en erreur et croire que les Anglo-Américains ont trouvé l'art 
de brOler les houilles qui chez nous se prètent le moins à 
la combustion. 
A poids égal, les houillcs 9rasses, c'est-à-dire très-char- 
gées de bitume, donnent presque le double de cbaleur qu'au- 
cune sorte de bois, et doivent Cre préférées, surtout pour 
le chauffage des machines à vapeur. On leur reproche avec 
raison leur fumée subtile, qui noircit tout, et contre hquelle 
il est si difficilede maintenir la propreté du linge et des meu- 
bles. Le coke n'a pas ces graves inconvénients; mais il 
chauffe beaucoup moins, et son emploi dans le foyer n'est 
pas aussi commode. Les bonnes ménagères reprocheront 
encore à la houille que ses cendres sont inutiles pour les usa- 
ges domestiques; mais l'agriculture les réclame comme un 
ecellent engrai s, et ses demandes méritent bien aussi 
qu'on ne les re[use point, l:.:e.. 
Les Angla'ts, qu'une expérience qui a depuis longtemps 
]evancé la n6tre en cette partie a mis à mtme de mieux 
uger le.« qualités de la houille, ont reconnu toutes les nuan- 
ces qui en différencient les variétés. Itais, pour se renfermer 
,]ans les limites que prescrivent les travaux pour lesquels 
elles sont employées dans leurs nsines, ils se bornent h un 
classement de tout le charbon minéral en trois sortes prin- 
cipales. Tontes les bouilles qui sont principalement com- 
posées «le bitume appartiennent à la première espèce, qui ne 
produit que peu ou mtme point de coke. Il n'y a guère de 
cette sorte de houille exploitée en France. Le jaillet du gise- 
ment d'Mais, en Languedoc, s'en rapproche sous certains 
rapports. La deuxième espèce donne abondamment un bon 
coke, très.combustible, et qui émet beaucoup de chaleur. 
La troisième espèce produit en abondance un coke terreux, 
friable, d'on mauvais emploi. P£LOUZE père. 
M. de Villenfagne, qui a fait un mémoire sur la decou- 
verte du charbon de terre dans le pays de Libge, la recule 
«le l'année 1 t98 h l'année 1049 environ. Des chroniqueurs 
ont raconté qu'un ange avait montré ì un pauvre ma- 
réchal l'usage du charbon, et des écrivains moins crédules 
se sont imaginé qu'au lieu du mot angelus il fallait lirean- 
9l«s, attendu que d'après eux l'usage du charbon était déj 
connu en Angleterre. Les houillères du Hainaut n'ont ét 
exploitées que plus tard. 
Il semblerait que le charbon de terre n'était pas ignoré 
des anciens, s'il est vrai que Théopompe parlait de celui 
qu'ondécouvriten Thesprotie. Marc-Pol, au treizième siècle, 
prit le charbon de terre pour une pierre noire et inflam. 
tuable, et s'émerveilla de voir qu'elle brOlait plus longtemps 
que le charbon. Cette substance parut tout aussi nouvelle 
dans le quinziëme siècle au célèbre Enéas Sylvius (depuis 
pape sous le nom de Pie II), pendant son séjour en 
Ecosse. Arnot, en son Histoire d'Edimbourg, cite le passage 
où il rapporte que les pauvres recevaient, au lieud'aumOne, 
à la porte des églises, des morceaux de pierre avec les- 
quels ils s'en allaient bien joyeux, et qui, contenant du 
soufre ou quelque autre matière inflammable, servaient de 
bois à br01er dont le pays était dépourvn. Le tëmoignage 
de ces deux écrivains fait voir qu'autrefois dans l'Europe 
méridionale on ne connaissait las du tout ce oembustible. 

189 
Mème en 152o, on consulta la Faculté de Médecine de Pari 
sur l'insalubrité prétendue du leu de charbon de terre. Er 
Belgique, au contraire, et dans la Grande-Bretagne, il ëtait 
d'un usage journalier, du moins au temps d'/EnCs Slvius. 
En 1245, Henri !1I, roi d'Angieterre, fit faire des fouilles 
pour le charbon de mer (de carbone maris ), et fixa le 
salaire des ouvriers qui y étaient employés. En Ecosse, 
l'abbaye de Dumferline obtint, en 1281, la permission de 
faire dans la province de File des fouilles pour le charbon.. 
Les renseignements authentiques de la ville de Newcastle 
concernaut le commerce de ce combustible ne remonten 
pas plus haut, quoiqu'il y ait lieu de croire qu'on en faisait 
l'extraction bien antérieurement. En effet., l'éditeur des 
Voyages mtallurgiues de Jars, de l'Académie des Sciences- 
de Paris, croit qu'on doit fixer en 1066 la date deceteextrac- 
tion, puisque Guillaume le Conquérant disposa cette année 
des mines de charbon de Newcast]e, qui mtme pouvaienî" 
bien ttre connues avant cette époque. D BxF.nç. 
C'est surtout pour rAngleterre que l'exploitation de la 
houille est une question de premier ordre. « On a dit que 
l'Angleterre est une lle de houille et de fer. C'est presque 
vrai à la lettre, écrit M. Chemin-Dupontès. On compte 
dans le Poyaume-Uni, sur une superficie de près de t mil- 
lion 00,000 hectares, environ 3,200 mines de houille, dont 
l'esploitation donne du travail, sur et sous le sol, h prês 
de 300,000 ouvriers, hommes, femmes et enfants, et em- 
ploie un capital qu'on évaluait dès 1849 h 800 millions de 
francs. 
« Vers le commencement de ce siècle, l'Angleterre ne proe 
duisait, dit-on (car sur ce point il n'existe pas de données 
officielles), que 5 h 6 millions de tonnes de houifie. Suivant 
blac-Culloch, l'extraction, prodigieusement activée de t 820 
h 1830 et depuis, par l'application de la houille au travail 
du [er et par la création des railways, s'élevait vers 1840 
à près de 17 millions de tonnes. Enfin, en 1851, d'après 
la récente statistique de Poole, la production atteignait en 
minimum 34 millions de tonnes, et ce chiffre, des personnes 
bien informées, croyons-nous, le portaient à près de 40 mil- 
lions, soit 40 milliards de kilogrammes. C'est qlatre fois 
environ ce que produisent la France et la Belgique rémdes. 
Voici, du reste, un aperçu de la production générale des 
charbons minéraux dans les principaux pays producteurs : 
Angleterre, 3 millions de tonnes; Belgique, 5 millions de 
tonnes; France,  millions et demi de tonnes; Prusse et 
Autriche, 4 millions de tonnes; Etats-Unis 2 millions et den 
de tonnes; total : 50 millions de tonnes. 
« Sur ce total approximatif et à peu près officiel de 34 mil- 
lions de tonnes de houilles anglaises, t environ sont con- 
sommés dans les forges d'Angleterre, 6 dans les autres usine» 
et manufactures et batiments à vapeur, et 12 ì 13 vont au 
chauffage domestique ou à l'éclairage au gaz. Total de la 
consommation anglaise, 30 millions 500,000 tonnes. Le- 
reste, soit 3,500,000 tonnes, est exporté, savoir : 600,000 
tonnes aux possessions anglaises d'outre-mer, et 2 million 
9o0,000 à l'étranger. L-dessus, nous prenions en 1852 
560,000 tonnes, c'est-à-dire qu'il ne vient en France qu 
la soixantième partie environ de la production houillère bri- 
tannique, ou le sixième de Pexportation totale, tandis que 
nous recevons les 89 centièmes des houilles belges expor- 
tées. Il est vrai que ces chiffres subiront sans doute de 
graves modifications, par suite du décret impérial du 22 no- 
vembre 1853 qui a diminué les droits d'importation des 
houilles en mtme temps que ceux des rets. L'Angleterre en- 
voie de ses bouilles aux États-Unis, au Brésil et jusque 
dans les mers de l'lnde. 
« Les charbous de Newcastle, qui de 1835 h 1845 se co- 
taient en moyenne, sur le carreau des mines, tO ff. 50 c. 
par tonne, étaient tombés en 1851 à 9 ff. Les énormes be- 
soins de 1853 ont relevé ce prix moyen h 12 fr. environ. 
Chez nous comme en Belgique les prix sur la fosse ne sont 
guère plus élevés ; mais rendues aux centres de consomma. 
tions ouvent fort distantt de mines no bouilles rvienne»| 



190 HOUILLE -- 
deux, trois et quatre fois plus cher que les charbons an- 
glais. La manufacture britannique a donc sous oe rapport 
un grand avantage sur la notre; mais l'extension de nos 
chemins de fer améliorera notre situation relative. 
« En face de l'immense consommation de houille qui se fait 
chaque année dans le monde, on s'est quelqaetois demandé si 
un moment ne viendrait pas o les gttes houillers, qui donnent 
si libéralement le combustible minéral, se trouveraient enfin 
Cuises. Cette question a dans un temps très-virement in- 
tOressé l'Angleterre en particulier, où la houille forme l'un 
des premiers éléments de la richesse publique. Des recherches 
attentives ont été faites, et il en est résulté que dans les 
seuls comtés de Durham et de Northumberland et dans le 
pays de Galle, où se trouvent, il est vrai, les principaux 
bassins carbonifères, on comptait près de 2,000 milles 
earrés non encore exploites; or, comme chaque mille carré 
est réputé contenir environ 36 millions de tonueaux, cela 
suppose pour ces trois dep0ts seulement un total de 72 mil- 
liards de tonnes, c'est-à-dire de quoi alimenter la consom- 
mation anglaise pendant deux mille quatre cents ans. Si l'on 
ajoute maintenant que toutes les autres mines de houille 
connues jusqu'ici dans le monde peuvent fournir à peu près 
autant, et que de plus l'euveloppe de notre globe en recèle 
probablement beaucoup d'autres d'une incalculable richesse, 
on voit que l'humanité n'est pas près de mourir de froid 
faute de combustible minéral, • 
HOUIOULS. Vo9e: Gorts. 
HOULAGOU. Voye= Dn.çmzumur. 
HOULANS. Voye. HVLs. 
HOUPELANDE ou HOUPPELANDE, sorte de v- 
tement large, qui se met par-dessus l'habit, dit l'Académie. 
Après la revolution de 1789, pour dissimuler la carton- 
gnole de rigueur, et pour se garantir aussi du froid, on 
adopta une large et longue redingote de ce nom, en étoffe 
grossière de laine hrw, e, à longs poils, avec une bordure 
eu peluche de laine, bleue, rouge, ou noire, ì laquelle Ilus 
tard lesmuscadins substituèrent du velours cramoisi ou 
noir. Loemps auparavant on avait donné dans l'armOe 
le nom de hot*pelonde ì un grand manteau,  manches, res- 
semblant fort  nos cubons d'aujourd'hui. 
HOUQUE genre de gramines auquel M. Kunth as- 
signe les caractères suivants : Épillets biflores, ì fleur tu- 
fAfleure hermaphrodite, mutique, à fleur supOrieure munie 
d'une arète, sonnent dëpourvue de pistil; deux glumes et deux 
glumelles membraneuses, presque de mue longueur; trois 
6lamines; ovaire pyriforme, glabre; deux styles termi- 
naux, très-courts; stigmates plumeux, ì poils simples. La 
caractéristique de Linn6 6".ait plus vaste; il admettait dans 
le genre holct des espëces  Ciliers uniflores, dont on a tait 
depuis le genre sor9hum (vo/e: Sonçno). 
[ Le genre holcus ne renferme plus que huit espèces. 
L'une des plus intécessantes est la houque laineuse (holcus 
lanatus, Linné), vulgairemeut nommée blanchard velouN. 
Cette herbe vivace est l'une de celles qui se lrouvent le plus 
abondamment répandues dans beaucoup de prairies natu- 
relles en sol moyen, et surtout dans les prairies qui repo- 
sent sur un sable frais, dont eloE compose souvent les deux 
tiers; elle est tellement hìtive que, cultivée seule, elle forme 
un pré qu'on peut loucher vingt jours avant les prairies or- 
dinaires; sa hauteur est de 45 ì 60 centimètres ; elle est touf- 
fue; on peut en faire deux coupes pour faner en foin et obte- 
nir un boa pturage po.or troisième rcolte. Le blanchard 
velouté est sans contredit l'une des meilleures herbes de 
prairie, soit qu'on le sème seul ou avec d'autres plantes pour 
prairies à faucher ou pour prairies dedépaissance, pources 
derniëres surtout, qui sont deslinées à tre plturées par 
les bOtoe à cornes; cette plante se trouve souvent dans la 
proportion de plus de soixante-quinze parties sur cent dans 
le mélange naturel des herbes qui composent les herbages si 
célëbres du pa.s de Brai, doù le beurre, le meilleur qu'on 
puisse trouver, coe apporté chaque semaine à Paris; c'est 
atmsi à la présence de la houque ou blanchard velouté qu'il 

HOUSSAYE 
faut r@porter la qualité sn#rieure, comparativement h 
beaucoup d'autres fromages de tant de pays diflérent% de 
fromages de ffeufchtel, qui se fabriquent non-seulement 
aux environs de cette ville, mais encore, et tout assi déli- 
cats, aux environs de Gournai en Brai. 
La houque molle (holeus mollis, Linné ) diffère de la 
précédente par sa panicule moins blanche, plus étroite, et 
par ses afCs plus longues. Elle croit dans les prés secs et 
dans lesbois de l'Europe. . ToLxm ainé.] 
HOURA ou HOUBBA, cri de guerre ou de joie parti- 
culier aux nations germaniques, slaves et scandinaves. On 
donne deux étmologies différentes à ce mot : la première 
le dérive du mot ra, qui en langue mongole signifie rivière, 
et parait avoir quelque analogie avec le mot slave reka, 
dont la signification est la mme. //'ou est chez les Mongois, 
comme chez les Slaves, une exclamation de joie. Quand 
les hommes en étaient encore à mener la vie pastorale, ils 
roulaient leurs demeures sur des chariots ou les transpor- 
talent à dos de chameaux. Ils cherchaient pour leurs éta- 
b|issements passagers des endroits où pussent paitre leurt 
nombreux troupe.aux. Or, à des Iturages il fallait de l'eau, 
tant pour les hommes que pour les bestiaux ; il iallait nue 
rivière. Les premiers qui l'apercevaient s'écriaieut donc avec 
joie hourra? ce qi équivalait ì dire voilà la rivière? Plus 
tard, lorsque les hommes commencèrent à s'entr'égorger, 
ils recherchèrent avec autant d'avidité un ennemi à com- 
battre, une caravane à piller, que précédemment une rivière 
et en les trouvant ils poussèrent encore leur exclamation 
de joie accoutumée hourra 1 
Voici la seconde étymologie : ltora en langue slave veut 
dire une montagne ; et chez quelques tribus slaves ce nom 
se prononce houra ou hourrah. En gravissant une mon- 
rogne, les Slaves criaient hourra ! hourra ! pour s'encou* 
rager et afin d'amoindrir l'effort physique par la force mo- 
rale. Ils adopttrent donc le mme cri pour le combat, car 
il faut dans l'attaque un effort vigoureux et de la force 
morale. 
S'il fallait absolument choisir entre ces deux étmologies, 
je crois que je m'en tieudrais encore à la première.. 
D'après les chroniques, les Iégeudes et les chants anciens, 
nous voyons que le cri hourra fut apporté en Europe par 
les Mongols; les cris de guerre des Grecs et des Bomains u'y 
ressemblaient en rien. Ce nest qn'aprës leurs guerres contre 
les Sc},tbes et après les invasions des Huns, peuples du 
mme type que les Mongols, qu'on remarque chez eux quel- 
que chose d'analogue à ce cri dont se servaient aussi les 
Slaves, et que les Germains et les Scandinaves prirent aux 
Slaves. Les premiers le répandirenl en A]lem,,me, et les se- 
couds le portèreut en Angleterre. 
SABIg-PACHA (Michel CZAOWSrd). 
HOUBAS. Voe-- Foua. 
HOUII. Ce nom, qui en arabe veut dire d'ue blan- 
cheur blouissale, est cdui des jeunes filles dont les 
chastes embrassements sont l'une des récompenses résea- 
uCs aux bienheureux dans le Paradis de Mahomet. Selon 
le Koran, les hot,ris sont d'une beauté éblouissante, 
exemptes de toute impureté; jamais homme ni esprit ne 
leur a 6té leur virginité, et leurs regards, d'un doux et 
langoureux 6clat, n'appartiennent qu'à leur bien-aireC Dans 
des jardins toujours verts et arrosésd'eaux abondates, elles 
reposent sous des berceaux, sur des coussins verts et sur 
les plus riches tapis, et la plénitude des plus vifs plaisirs 
attend le bienheureux dans leurs bras, sans qu'elles cessent 
jamais d'ètre vierges. Les femmes auront tin paradis séparé 
de celui des Iœemmes ; toute{ois, l'homme pourra rédam& 
soQ épouse au lieu d'une houri. 
I-IOUPA.. ¥ove= ltoOx. 
HOUSSAYE (AarJ.o,r  I ). Vovez &aao a 
HoussA. 
HOUSS&3/'g (Aasia), dttérateur contemporain, est 
në attx derniers jours de l'empire, le 28 mars 1815, dana 
une petite ville de l'fie-de-France, Bruyères, coin de pays 



dOUSSAYE 
gté par la nature, où il apprit peut-tire  l'aimer. Lorsqu'il 
fallut étudier, il s'en cousola en travaillant peu; il aait une 
manière/ lui de faire l'Cule buissonnière : il courait / la 
bibliothèque lire Ovide. son maltre de philosophie, si tou- 
tefois il a jamais eu un maltre ; car Arsène Houssaye ala 
prétenliou de lent savoir sans avoir rie appris, ou plut6! 
il a la prétention plus prétentieuse de ne rien savoir, et c'est 
pour son usage qu'il a écrit cet aphorisme profond : Ap- 
prendre, c'et perdre. I.I n'a guère étudié qu'en plein vent. 
Le collége lui a toujours paru une vraie tour de Babel. Il 
n'avait pas seize ans, qu'il aurait voulu se faire soldat pour 
délivrer la Belgique ; mais la Belgique ne l'attendit pas, 
et il resoE sous le luit natal. Que faire pourtant avec cet 
espritinqqiet et indisciplinable? Son père le poussait à l'étude 
des lois, mais il aimait mieux suivre les lois de l'eprit que 
l'esprit des lois. Il devint laboureur. Il est vrai qu'il faisait 
plus de vers que de sillons. Tout alla bien pendant quelque 
temps ; mais le père ne tarda pas à s'apercevoir que son 
jeune laboureur avait des mains trop délicates lour conti- 
nuer ce rude métier. « E bien l mon père, vous avez, là, 
tout près de la ferm, un vieux moulin pittoresquement juché 
sur la montagne; c'est une charmante retraite pour un r- 
veur comme moi. Rembranàt a conduit le moulin de son 
përe, Yan D)-ck a dérangé le moulin de sa mat[resse ; laissez- 
moi gouverner le v6[re. » Il aile donc s'enfariner. 
D'on vieux moulin à veut j'avais la dctat,re 
Comme un fier nautonier, que de fois j'ai bravé 
Les orages du cœur, et crus de la nature, 
Qui, dans leurs bras d'air vif, m'ont si haut soulevë ! 
J'aimais le vieux mou/in et sou architecture. 
Comme un pays perdu, comme un pays rvé. 
Un moulin ! dlrez-vous, par quelle fanlaisie ? 
:%cbez donc que j'Cais misanthrope à seize ans. 
Les moulins ont souvent Iogë la poësie ; I 
Bembrandt y reCite; Van Dvck tout un priolcmps 
] 
Y vOat amoureux d'une blanche Aspasie ; 
Couc.v pour sa beauté s'eufarina longtemps. 
Mais on était en 1832; on cro]/ait à une ère nouvelle. Il I 
s'Cevait tous les jours h l'horizon un dieu nouveau. « il 
faut, dit le poCe, quel'aille saluer tous ces dieux en habit 
à la française. » Il partit une nuit sans mot «lire et sans af- ' 
gent. Le futur àirecteur àu Thétre-Français rencnntra une 
troupe de comédiens ambulanls. C'était la seconde édition 
du Rognon Comique. Un des plus huppés de la troupe 
vint boire h la fontaine. « /ous avons bu dans le méme 
verre, dit Arsène tloussaye, soyons amis. Un poëte et un 
comédien peuvent parcourir le méme chemin. Oit allez-vous ? 
 Je ne sais pas, dit le comédien philosophe. -- Puisque 
nous allons au méme endroit, reprit Arsìne ltoussa)e, 
nous pouvons laite la route ensemble. » 
En marchant tout droit devant lui le voilh A Pari.% où il des- 
rend dans un httel de la place de Cambrai, dont le choléra 
avait emporté tous les locataires, moins un poëte excentri- 
que, Paul Van del Hall, qui se réjouit de son arrivée, parce 
qe, disait-il, la mort pourrait faire une nouvelle boucht;e 
dans la maison avant de l'atteindre, biais ce n'clair pas 
assez de braver la mort, il fallait braver la vie. Après huit 
ours passés à rver dans les musées et sur les quais, Ar- 
sène Houssaye n'avait plus un sou. Son compagnon avait 
la mène fortune. Ils vécurent tout un mois à improviser, 
pour les chanteuoes des mes, des chansons h la manière de 
bt. de Béranger. Ileurex, après tout, les poêtes dont les 
cigales chaulent les chansons ! Ils passèrent de la chanson 
au méioàrame, du mélodrame au roman, sans devenir plus 
riches. Ils se perdirent de vue aux émeutes de juin et ne 
se retrouvèrent plus. Arsìne Houssaye s résigna à cludier 
le droit; mais il connut Gérard de ._Nrval, Théophile Gan- 
tier, Boger de Beauvoir, Camille Bogier et Alphonse Esqoi- 
rus, qu'il parvint plus tard à sauver du conseil de guerre. Ils 
se réunirent et vécurent ensemble, comme dans un conte 
dIoffmann. Ils fondèrent ainsi la bohU.me littraire, mais 
la bohm dorée. C'était au milieu àe quelques maisons 

191 
en ruines abritées sous une aile du Louvre. Gautier en • 
racooté les bonnes fortunes dans la llevue d Deux lelon- 
des, Gérard de erval a écrit la Bohème Galante, Hous- 
saye en a dit quelque chose dans l'Histoire du quarante 
et uniëme fauteuil, ce beau livre déjà classique. 
Il y a dans l'Anthologie cette pitaphe d'un poëte : « Ne 
dites pas que Myron est mort ; dites qu'il dort, puisque sa 
po(ie rève parmi nous. » On pourrait appliquer cette épi- 
taphe à la jeunesse de M. Arsène Houaye. biais « le poïte 
de la jeunesse et des roses, » comme M. Sainte-Beuve a sur- 
nommé M. Arsène Houssaye, est de ceux qui seront toujours 
jeunes. 11 a écrit de trïs-éloquentes pages sous ce titre 
Que la jeunesse est la muse de la vie, et que ceux qui 
ont t jeunes l¢ sont toujours. 
M. Arsène Houssaye s'était marié jeune à une fille de ma* 
dame Edmée Brucy, une élève de Prudbon. La fille de ma- 
dame Edmée Brucy semblait dëtacbée de la galerie ideale 
de notre grand peintre néo-grec. La mère mourut jeune, 
la fiile mourut jeune. Madame Ar»ène Houssaye a prouvé 
qu'elle et écrit comme madame de Sévigné, si elle n'avait 
mieux aimé donner toutes ses heures à ses enfants, et sa 
mère a signé des portraits que Prudhon et contre-signés. 
Vint la révolution de Février. Arsène Houssaye était de 
i°fitat-majo de Lamarline pendant le fameux voyage de la 
chambre des députés h l'H6tel de ville. « De la royauté 
la république il y a un ablme, dsait Lamartine. -- La 
France le passera sur vous, » lui répondit son jeune ami. 
Une fois à l'H6tel de ville, pendant que les sauveurs de la 
patrie se disputaient le pari de sa robe, Arsène ttoussa'e 
s'en retourna chez lui. Le lendefnai,, le 3Iomgeur 
apprit que tous ses amis étaient devenus les rois de la répu- 
blique. Pour lui, il redevint poCe comme devant, témoin ces 
strophes CriSes le 25 laurier, o0 il dit qu'on palais du 
roi il ne reste qu'une couronne, celle de Jé.sus-Christ. 
En novembre t89 il fut appelé à la direction de la 
média-Français, élégant consulat, qui, selon M. de Saint- 
Victor, n'a péché que par l'indulgence. On préteml qu'd 
faut se défier comme administrateurs des hommes d'ima- 
¢ination ; celui-ci imagine d'enrichir le répertoire, «te payer 
les dettes àevenues proverbiales d tbetre, et de partager, 
en outre, cent mille francs par an entre les sociétaires. 
Après le coup d'Ëat, pendant que Victor ttugo cherchait un 
refuge à l'étranger, M. Arsène Houssaye, croyant qu'il fallait 
garder malgré eux les poëtes h Paris, soulut jouer 
Delorme, ce qui parut un acte insuriectionnil. M. P, omieu 
avertis le directeur de la Comëdie-Française que ce spectacle, 
affiché pourle lendemain, était consideré comme une bra- 
vade, et que, s'il n'Cait changé, M. Arsène Hous.,a)e pou- 
va;.t se regarder comme de.stité. Cet avertissement ne fut 
pas le seul ; tout le Paris liltéraire et politique s'occupe de 
la representation comme d'un événement. Au foyer des ac- 
teurs il y avait des paris pour et contre la destitution. 
Enfin, le jour mme ou ¥ictor Hugo" qaittait la France, 
Motion Delorme, par Voeo Hço, frappait tous les yeux 
sur la façade du Tbétre-Français. Tout a coup un mes- 
sage de l'Élysée annonce que le chef de l'Êtat assistera 
h la représentation. M. Arsène Houssaye vint recevoirle 
prince dans le salon de la loge présidentielle. Le futur 
empereur garda le directeur près de lui pendant la raptC 
sensation. 11 avait deux ministres h ses ctes, qui écou- 
tèrent le beau drame de Victor Hugo sans applaudir, mais 
sans critiquer. Le chef dal'État tmoigna h plusieurs re- 
prises son admiration pour les vers politiques du quatrième 
acte et dit qu'il fallait souvent donner àe telles pièce.. 
Arsène H,,ussaye a toujours fait vingt choses à la fois, 
en ayaa:t l'air de vivre du temps perdu. Il atraversë toutes 
les fortunes, les bonnes et les mauvaises, tant6t riche, tan- 
tbt pauvre, toujours aventureux et intrépide dans la bataille 
de la vie; il a écrit celle maxime à son usage : « Il y en a 
qui vivent pauvres pour mourir riches; moi je veux vivre 
riche, sauf à mo«3rir pauvre.  Si cela ne s'appelle pas de 
laraison, cela peut bien s'appeler de la philosophie. A Beau- 



jon il a b/ti sept htels, quand personne n'osait s' ha- 
sarder, et il les a tons habités. Il n'y a dans la vie que des 
commencements e! des stations. Les esprits affamés d'idèal 
cherchent oujours le mieux et sont ennemis du bien. 
L oeuvr d'Arsène Houssaye renlermen : Madame de 
La Vallière et Madame de Montêspan ; Le roi Voltaire ; 
Hisloire de l'art français; Voyage à ma fent; Prin- 
cesses de comédie et Dœeesses d'opëra; Hslore du qua- 
rate et unième autil; Les princes de Fe.prit; Les 
Mœetomorphes de l'Amour; Psies complètes; 
qises et Dchesses ; Histoire du temps perdu, 
irs de Jeunesse. M. Arsène Houaye a eu aussi de 
grands succ comme romancier. Témoins M«e 
 V/on de Fraold,  Filles d'Ère,  Vertu 
osie, etc., etc. 
En quittant la direction d» Thétre-Français, M. Arsène 
Houssaye est devenu inspecteur gnéral d beaux-arts. 
L muses e[ les écoles de beaux-rls des dépar[emen doi- 
vt dé aucoup  sou initiative. Enfin, au milieu de 
tout I complications deson existences il n'a pas cesé de 
diriger L'Arlisle, qui sera la vraie histoire de l'art e{ de la 
littérature vu dix-neuvième siècle. Théodooe se BaNVlLLE. 
HOUSTON (S.owL), çénér et sénateur de l'Union 
AraCraine du Nord, t n le  mars 793,  ockbridge- 
Cor, en Virginie. Comme ses arents taient de pauvr 
ouve, fl passa plus de {emps, dans son enfance,  arder 
1 vches qu' l'Cole. A I'e de treize ans, il perdit son 
père; et sa ère aile alors sYtablir avec ses neuf enfants sur 
les bords du Tenne, dans l'État du mme nom. Houton, 
 d'abord en apprentissage chez un mercier, ne rda 
p  se doO[er de ce moefier; déseflant son patron, 
ails se ré{tter dans les bol% au milieu d'une [bu d'Indiens. 
Crks, oU il passa cinq années, ci se familiasa ainsi avec 
vie et I mœurs des sauvage. Revenu A I'ge de dix-huit 
a aopr de sa famille, i {onde sur e limit 
de la civilisation une école à l'uge des enfan des rud 
icbeu de for[s. A l'Qoque de la guerre contre les Anglais 
( tBi3 ), é alors de in ans, il s'enfila dans Uarmëe 
Sd aux ordres du général Jackson, et se distingue particu- 
lièrement à l'affaire de Horse-Shoe, où il fut grièvement 
les. Renonçant ensuite à la cerbère miliaire, il aile étudier 
le droit  Nasbe. Il avait à oe moment vingt-cinq ans. Sa 
Ioyauoe et  perspioeci en affaires lui euren[ bien6t fait 
une nombreuse clientle comme aocat. En t 2 t il fut nommé 
génral-major de la milice du Tennessee. En {823 il siég 
pour la profère fois dan» la chambre de reprenan, à 
«ashington, et n andat Iislaf lu lut enoere renou- 
velé en 1825. En 1827, l'État de Tennesçee I'lut pour son 
gouverneur. Après s'[re démis de oe fnctions, son go0t 
pour la vie active et accidentée le conduisit  passer encore 
trois nns parmi les défcheurs de frë; il dcourit 
ce{ ocoesion les friponneries que commettaieut 1 cvmmi 
ircs et en de l'Uuion chars de taiter a'ec les Indiens, 
et aile en 1832 les dnoncer  Waslsiton. 
Un an plus tard, Houston partit pos]r le Texas, qui venait 
de s'affranchir de la tyrannie du dcur du Mexiqoe, 
Saute -An ne, et fut Cu memb e la convention chargée 
de diger une constitution pour oe nouvel État. Sau-Anna 
ayant eu recours ì la force des aes pour [aire rentrer 
le Texas sous son autorité, Houston se mit à la t de 
l'armée libératrioe et, apr avoir fait essuyer divers 
rout aux Mexiins, les défit complëtemcnt à la sanglante 
ilte de San-Jacinto. Avec 700 hommes il anéantit l'ar- 
mée ennemie, forte de 1,800 hommes, et dont sept individus 
seulement êappèrent au oernae. Parmi les prisonniers se 
trouvait Sanie-Arme lui-mOrne. Hotston fut blessé dans oette 
affaire,et y eut un cheval tu sous lui. Les habin du Texas 
rmpensèren leur libérateur en l'élisant pour présidet 
de leur jeune rpthliue; et ltouton con«era ces tons- 
tions jusqu'au moment de l'annexion du T e x as à l'Union. 
Il l'hangea alors cont un sic dans la chambre du sénat, 
e tout I éltion ultrieure$ lui ont 

HOUSSAYE m H 
En t52 ilouston fiurait sur la lis!e des candida{s 
mocratiques pour la préidence, et dans la convention 
tionale tenue au mois de juin de lambine année à lalfimore, 
il obtint les suffrages des délégu(z de plusieurs Êtats. Ce 
qui le distingue comme homme politique, c'est un coup 
d'oeil rapide et pratique. Comme législateur il unit l'amour 
de la justice au patriotisme et à l'éloquence. Sa manière toute 
joviale d'envisager la vie, qui au!refois lui faisait aimer dé- 
mesurément la bou!eille, l'a rendu d'ailleurs Irês-popnlairo 
dans les masses ; et la foule d'aveutnre% tantOt comiques, 
!an{dt sérieuses, qui ont marqué sa vie fournissent dèjà, de 
son vivan! mme, d'intrissables sujetz de conversation aux 
vei]lé popniaires. 
HOUTIA. Voe - C.os. 
llO UTMAN (COatLJCS), le fondateur du commerce 
hollandais avec les Indesorientales, était né  Gouda, vers le 
milieu du seizième siècle. Pendantun séjour de quelque temps 
qu'il eut occasion de fairv à Lishonne pour ses affaires, 
le commerce avec l'Inde, qui alors enrichissait exclusive- 
ment le Portugal, frappe virement son atlention. Préoccupé 
dèslors de l'idée d'y faire participer sa pairie, il s'attache 
recueilir les renseignements les plus exacts sur la nature 
de r commerce, sur la manière dont il se faisait, ainsi que 
sur la route conduisant aux Indes orientales. Mais ses 
marches ëveièrent les soupçons des auIoritës portugaises 
il fut emprisonné et condamné à une forte amende. Hors 
d'état de la payer, il s'adresse secrètement au commerce d 
sterdam, auquel il promit de ,communiquer tout ce qu'il avait 
appris touchait le commerce des Portugais avec les ludes 
oriental, si on voulait le dégager. La proposition fut accep- 
tèe; et  peine Houtman fut-il revenu dans sa patrie 
que le commerce d'Amsterdam, après avoir constitué une 
compagnie dite des Pays lointains, armait quatre vaisseaux 
pnur les Indes orientaies, le chargeaït de marchandises, 
et nommait Houtmao subrécargue de cette petite escadre. 
L'expèdition mit à la voile le 2 avril 19, et aborde le 
23 juin 1596 à iantam, dans File de Java. Accueillis d'a- 
bord a,ec bienveillance, les Hollandais furent bient6t brouil- 
les par les Portugais avec les indigènes, de rte que la 
flottille dut s'en retourneren Hollande après avoir perdu les 
deux tiers de ses équipages. Malgré l'insuccès de cette pre- 
mière entreprise, on en rësolut immëdiatement une seconde ; 
en mme temps descompagnies semblables  formèrent, à 
l'exemple de celle d'Amsterdam, dansles principales villes 
maritimesdes Province-Unies. Ces diverses compagnies fi- 
nirent par ne plus constituer qu'une seule grande com- 
pagnie des Indes orientale% qui peu à peu réussit à arracher 
aux Portugais le commerce de l'Inde et à les chasr de 
ces contles, et qui se maintint en possession eclusive de 
ce commerce jusque vers la fiu du dix-huitième siëcle. 
Houtman cul le commandement de la seconde expédition, 
qui partit en 1598. Après avoir visi!é Madagascar, les 
Maldives et la Cochinchine, il débarque à S u m a t r a, dont 
le roi le reçut d'abord avec amitié, mais l'enferme ensuite 
dans une forteresse. Les vaisseaux, q»i venaient de charger, 
revinrent sans loi. On croyait que Houtman avait ïlWtué, 
lorsque le 31 décembre 1600 il vint à bord d'uu vaisseau 
hollandais stationnant devant Acheta, déclarer que, bien 
que retenu dans une captivité à laquelle il ne voulait 
pas se sos]straire, il avait encore toujours l'espoir de con- 
clure avec le roi un traité avantageux ì sa patrie. Le 
roi montrait réellement des disposilions favorables ; mais 
il céda plu.tard aux insinuations des Portugais, et reléta 
Houtman dans l'lutCieur dst pays, o/ il mourut. Pendant 
.a captivité ì Sumatra, Houtman s'était occ,pé d'observa- 
tions astronomiques. It envoya dans sa patrie les réultats 
de ses découvertes par le vaisseau hollandais à bord duquel 
il se présente, il avait uotamment découvert plus de trois 
cents nouvelle_ étoiles, qui dans la suite fiJrent 
en lreize nouvdes con»tellations. 
il O U tV A L D ( Ch BSTOVJ e- EP.r.ST, baron » ), écrivain 
dramatique allemand,nWen t77S, à Straupitz, dans la 



v u , LD 
basse Lusaee, entra, après avoir achevé ses études univer- 
sitaires» dans l'administration de sa province; et quand elle 
subit, en 18t5, une complète réorganisation, par suite de la 
cession de la basse Lnsace  la Prusse, il se retira dans 
la solitude de sa terre de Sellendorf, où le sort lui amena 
l'ami de sa ieunesse Contessa. £1u en 1822 syndic de sa 
province par les états de la basse Lusace, il s'établit alors  
lïeul,aus, près Lubben, où il mourut, le 28 janvier 1845. 
Dès sa ieunesseil avait rimé quelques chansons et mème 
abordé la tragëdie. Plus tard, sous le nom d'Ernest de 
Waludo (anagramme de son nom), il publia quelques 
morceaux de poésie dans les journaux et les reeueils litt- 
raires. Mais ce ne fut qu'à partir de 18t5 qu'il se livra 
Iout à fait à la poésie. Après ses ionvelles, intitulées Accords 
romantiques et publiées par Cntessa, parut son Livre pour 
les enfants des classes instruites (3 vol. ; nouv. édit., 1833), 
h,dépcndamment de divers pehts poëmes tragico-drama. 
tiques, tels queLa ltdFublique, Le letour, ildouna, en 1821, 
Le Portrait, Le Fanal, Malddictwn et Benddiction, qui 
fondèrent sa rputation; plus tard encore, la pièce de 
circon-tance intihdée Le Prince et le Citoyen (t27) et les 
tragédies Les Ennemis (1825) et Les Brigands (1830). 
L'élément lyrique domine trop chez ce poëte; les quelques 
passages saisissants qu'on trouve dans ses œuvres drama- 
tiques ne rachètent pas une sentimentalité qui tourne trop 
souvent au larmoyant et à la fadeur. 
HOUX genre d'arbrieaux de la famille des nerpruns, 
ou plut6t des rhamnee%selon la mëthode de Jussieu, et de 
la tétrandrie tetrag)nie de Linné. On en compte plusieurs 
espèces intéressantes à connaitre. L'espèce principale et 
type du genreest le houx commun de nos forgts (ilex 
aquifolium, Linné); il peut s'élever à la hauteur d'arbre, 
cinq ou six mètres, si sa végétation n'est pas contrariée 
On le remarque par sa couleur, d'un vert foncé et luisant, 
qui dure constamment, et qui ressort surtout quand la aeige 
couvre la terre. Comme tons les arbres verts, il est une pa- 
rure d'hiver. L'écorce de la tige est lisse, les feuilles sont 
entières, alternes, pétiolgs, ovales, et leurs bords sont 
garnis d'aiguillons trës-aigus, ce qui lui a valu le nom d'é- 
pine toujours verte. Les fleurs, axillaires, pelotonnées, 
 pédoncules courts, ont un- calice à quatre dents, une co- 
rolle blanchMre en forme de roue, et divisée aussi par quatre 
incisions profondes. Il leur succède des baies d'un rouge 
de corail, et qui contribuent h embellir cet arbre, quand les 
autres sont pour la plupart dépouillés de leurs feuilles. D'au- 
tres espèces se distinguent, soit par des feuilles entièrement 
hérissées d'aiguillons sur leurs bords comme sur leur face, 
soit par un feuillage panaché en blanc ou en jaune; il en 
est dont les formes des feuilles ressemblent à celles du 
chgne, du myrte, du laurier, etc. 
Le lmux est utile sous différents rapports, et sa culture 
mérite d'gtre encouragée. Plusieurs espèces exotiques pour- 
raient aisément s'acclimater chez nous; mais la plus inléres- 
sanie, comme objet d'utilité, est celle qui croit facilement 
sur les flanes des montagnes exposées au nord, et méme 
dans tous les lieux qui ne sont pas humides. On la multiplie 
aisément par les semis. Le bois se recommande par sa du- 
reté et par le poli dont il est susceptible, ainsi que par une 
belle couleur noire qu'on peut lui communiquer, et qui rap- 
pelle l'ébène. Il sert à confectionner les manclles de divers 
outils, desdents de moulin, etc. ; on en a mème fait des 
meubles beaux et solides. On peut employer ces arbrisseaux 
pour former des baies; les espèces panachées, et qu'on peut 
mélanger, permetthient d'avoir des cl6tures dilficiles à flan- 
chir, et qui plairaient à l'oeil l'CWcomme l'hiver, blalhen- 
reusement, on moissonne trop t6t ces arbrisseaux pour fa- 
briquer des manclles de fouet ou des cannes. C'est avec la 
seconde:ëcorce que l'on prépare la meilleure glu. En mé- 
decine, les feuilles de houx furent Ionemps recommand[!es 
dans la goutte et les eutCites chroniques, mais on en fai- 
sait peu usage, principalement en France. Depuis, on a dé- 
couvott que les feuilles sont un excellent supp!éant du quin- 
VloE. DE LA CONVEP, S. -- T. Xl. 

-- HOWITT ga 
quina : administrées en poudre et dans du vin blanc, eii 
suffisent pour prévenir les accès de lièvre intermittente. 
Ious cro}ons que les feuilles du buis possèdent la mème 
propriété. De plus, on a extrait du houx un principe appelé 
i I i c i n e, et auquel on attribue une puissance égale à cetle 
du sulfate de quinine. 
Le houx est principalement cultivé en Écoe : la for 
de Neadwood en contient un grand nombre d'individus re- 
marquables par leur élévation. Les branches servent ì orner 
le bonnet des montagnards dans les jours de fète ; mais on 
le cultive en ce pays d'une manière qu'on devrait adopter 
chez nous : c'est de le planter le long des chemins, oh il 
sert de borne et de guide quand la neige couvre la terre. 
Dans plusieurs localités montagneuses de la France, cct 
usage serait très-utile. Les rameanx du houx servent aussi 
pour conserver les viandes salées et les préserver des rats_ 
Le houx est encore réput dans les classes ignorantes comme 
propre à contre-balancer l'action des sorts ou des malé- 
fices, et comme tel on le trouve suspendn dans beaucoup 
de maisons de paysans. D  Cno,. 
Parmi les espèces exotiques, une des plus célèbres est le 
houx rnat ( ilex mate, kug. Saint-H|laire), vulgairement 
herbe du Paraguay, th du Paraguay. On sait en effet 
aujourd'hui que c'est de cette plante que provient le thé du 
Paraguay, certitude acquise au prix de la captivité du sa- 
vant Bonpland. 
Le houx apalachine (ilex vomitoria, Ait. ), qui croit 
spontanément dans les parties maritimes de la Caroline et 
de la FIoride, doit son nom spécifique latin aux propriétés 
vomilives que possèdent ses fruits et l'infusion de ses feuilles 
prise à haute dose. Cette mgme infu-ion, prise ì dose peu 
elevée, est tonique et diurélique. Aussi cet arbri.seau porte- 
t-il Vl|lgairement le nom de thd des Apalaches. 
HOUX (Petit). Voyez, Fax«o.. 
HOXVAP, D (Famille). Voyez, Nont, ooE. 
HO'tVARD (Catherine), l'une des cinq femmes du roi 
d'Anglelerre H enri V [I I. 
ilO'tVARD (GEORGES, comte VE CAllLlSLE), homme 
d'Etat anglais. Voye-. CLSLL 
IIOXVE (Rtcn.tra), comte), amiral anglai% né en 1722, 
entra au service en 1736, s'embarqua avec Anson pour 
l'océan Pacifique, et fut nommé capitaine en 17-tg. Lors 
de la guerre contre la France, il prit part, sous les ordrea 
desir Édouard Hake, en 1757, a la conquète de l'lle d'Aix, 
et detruisit le port de Cherbourg. En 770 il fut nommé 
contre-amiral et commandant des forces navales anglaises 
dans la Me,literranbe, et la guerre de l'indépendance amé- 
ricaine lui fournit de nombreuses occasions de se distin- 
guer. En 1782, on le chargea de ravitailler Gibraltar. A 
la paix, il fut nommé premier lord de l'amirauté, char 
qu'il déposa en 1788 et qu'il reprit plus tard, Iorsqu'il fut 
créé comte. En 1793 il fut nommé amiral of the whi2e 
flag, et chargé en cette qualit, du commandement de la 
flotte dans le canal. Il bloqua peu lant quelque temps le 
port de Ilrest, barrit les Français le. 1 « juin 179, a Oues- 
saut, et fut nommé en 1795 général des troupes de la ma- 
rine. Quoiqu'il efit d,"ià résigné le commandement de la 
flotte, l'influence tonte particulière qu'il exerçait sur l'esprit 
des matelots, qui l'avaient surnommé Dick le ?;oir en raison 
de son teint, fortement basanë, lui permit d'apaiser une 
grave sédition à bord des flottes de Portsmouth et de Ply- 
mouth. Il mourut le 5 aofit 1799. 
iiOXX'ICI (CnnES GREY, vicomte ). Voye'. Gnrx. 
IIOXVITT (W,x et MAV), couple poétique qui, 
par ses travaux ori[,dnaux et ses traduction de l'allemand 
et d'autres langues étrangères, s'e«t fait un nom hono- 
rable dans la littérature anglai contemporaine. Willlam 
Howilt est né en 1795, à Heanor, dans le Derbyshire. de 
parents quakers, et fut élevé dans les dogmes et les prin- 
cipes de cette secte, En 1822 il épousa Mry Botham, née 
et «'levée dans la mëme foi religieuse que lui, et qui parta- 
geait ses gofits littéraires. Dès t23 les deux jeunes époux 
25 



 94 HOWITT 
puhliaient nn recueil de poêsics sous le titre de The foresl 
31instr«l, qui fut parfaitement accueilli ; bientOt après ils 
entreprirent un voyage à pied en Eeosse, et quand ils l'eu- 
cent te,'miné, le mari, qui possédait des connaissances Cen- 
dues en chimie, en botaniq,Je, en physique, etc., s'établit 
pharmacien à lottingham. Les travaux de sa profession ne 
l'empèchèrent pas de contiuuer à cnltiver les lettres. Il pu- 
blia de nouveau un poëme lyrique composé en société avec 
sa femme, The Desolatinn of Eyam, puis un grand nombre 
d'articles dans les revues et les almanachs, et en 1831 son 
Book ofSeasons, pour lequel il ne trouva pas d'abord d'é- 
diteur et qui depuis a obtenu sept éditions. Son ltistory 
ofPriestcra/! ( 1833 ; 8 e édition, 1852 ) irrita beaucoup les 
partisans de l'Église etablie, mais en revanche lui valut tant 
de popularité qu'il fut Cu au nombre des aldermen de 
?ottingham. Il reuonça alors à la pharmacie, et se retira à 
Esher, dans le comté de Surrey, où il passa trois années uni. 
quement occupé de travaux littéraires. En 1836 parut son 
livre intitule lh«ral Lire in England (2 vol. ), oui il decrit 
les mœurs elles habitudes, les travaux et les divertissements 
du peuple des compagnes en Angleterre; en 1840, les Vislts 
to rernarcable plces, old halls, battle-./ields ond scenes 
ilhtstrative of English history and poetry, ouvrage 
de l.txe, et qui malgré son prix élevé obtint un debit con- 
id«rable. Les deux époux se rendirent alors eu Allemagne 
pour l'édvcation de leurs enfants, et s'rtablirent/ Heidel- 
berg, qu'ils habitèrent jnsqu'eu t844. Ce séjour louruit au 
mari le sujet de divers ouvrages sur les mœurs et les ha- 
bitudes de l'Allemagne, tan,lis que sa femme s'attachait 
faire conuait,e/ l'Angleterre, par des traductions, quelques- 
uns des meilleurs romans publiés en Allemagne, en Dune« 
mark et en Suède. 
Après avoir pris part en 18-6 à la fondation du People's 
Journal, "'lliaa Howitt s'en retira l'année suivante, 
pour créer un journal  lui, Howitt's Jowrnal, qui loin 
de reossir lui eccasionna des embarras d'argent. Son roman 
Madam Dorighton of the den (1851) est une belle pein- 
ture de la vie de la grande dame anglaise de la vieille roche. 
Un ouvrage consacré à l'appréciation des littératures du 
norJ de l'Europe, composé en société par le mari et la 
femme, Literatqre and romance of orthern Europa 
( vol. ), qui parut la méme annee, produisit une vive im- 
pression. Au printemps de 185oE Wi.ltiam Howitt et sa 
femme sont allés s'élablir en Au»tralie. 
IlOYA ancien comte de l'Empire, aujourd'hui depen- 
danee du royaume de H a n o v r e, comprenant une superlicie 
de 38 myriamètres carrés. Cette province est arrosée par le 
XVeser, l'Aller et la Hunte, et se compose en partie de ter- 
rains de marches, et en partie de bruyères et de sables. On 
la divise en comtes supérieur et inférieur. Les bourgs de 
Bassum et d'Heiligenrode appartiennent à l'un; les villes 
de Hoya (1,800 liab.) et de IYienbzr 9 (4,00o hab. ) dé- 
pendent du second. La famille des comtes de Hoya s'étant 
éteinte en 158, le comté fit retour au duché de Brunswick, 
et partagea depuis les destinées diverses de ce pays. 
IïOZIER (Famille D'). l'oye'. 
HttABAN-MAP, ou HRABANÙS-MAURUS, un des 
hommes les plus remar,luables du siècle de Charlemagne, 
et qui contribuèrent à répandre les premiers élëments 
«le la civilisation en Allcmagne, était né à bIaence, et fut 
élevé dans le monastère des Bnédielins de Fulde, d'ou il 
se rendit à Tours pour achever ses études sous Alcuin. 
A son reto»r, en 804, il établit à Fulde une bibliothèq,e con- 
entuelle ainsi que la première école monastique qu'ait eue 
l'Allemagne, et d'où sortirent dans la suite tant de savants 
distingués, tels que Watairied, Strabo, Otfried, etc. 'En 
il fi;t sacré abbé de Fulde, et durant les vingt années qu'il 
remplit ces fonctions il eut la satisfaction de xoir s'aceroitre 
de plus en plus l'influence bienfaisante de sa savante école, 
¢:erçant nn.,. action salutaire sur l'introduction d'une diàei- 
pline véritahlement el,rétienne. Affligé des troubles de son 
.mps  il résigna ses fonctions, en 82, povr terminer ses 

jours en paix dans le prieuré de Saint-Pierre; pourtant, ! 
roi Louis le Germanique le délermina, en 847,  rentrer 
dans la vie active comme ardtevèque de Mayence, et il mou- 
rut revèlu de cette dignité, à WiukeI, das le Rheingau, 
en 856. Si Boniface avait été rapétre, on peut dire que Hra- 
banus Maus fut l'instituteur de la nation allemande ; il re- 
connut d'ailleurs la néeessité de soustraire l'Église d'AIlema- 
gne à l'influeuce du siége de Rome, et chercha  atteindre 
ce but par la propagation des lumières. Pour faciliter l'étude 
de la Bible, il inlroduisit en Allemagne l'étude de la langue 
grecque; il s'oecupa surtout du perfectionnement de la lan- 
gue nationale, et il insista sur la nécessité de prèeher en aile. 
man& On a de lui, entre auh'es ouvrages, ,m Glossaire latin- 
allemand de la Bible, qui a été imprimé dans le Thesatrus 
de Sehiller et dans le Commenlarius de lebus Francioe 
orien alks d'Eckard. 
itUAItTE (Jt, médecin espagnol, né à Saint-Jean- 
Pied-de-Port, s'établit à Madrid, et y exerça l'art de guérir 
dqrant la seconde moitié du seizième siècle. On sait fort 
peu de chose au sujet de sa vie, mais il doit une réputation 
durable à un éerit qu'il mit au jour sous le titre d'Er.amen 
de Ingenios para las Sciencias, h,aprimé à Pampelune, 
en 1578. Ce livre obtint promptement diverses édilious ; il a 
éle traduit en italien, en anglais, en allemand ; deux ou 
lrois érudits l'ont fait passer dans la langue latine i Chap- 
puis, Yion de Dalibray et Savinié d'A]ynié l'ont successive- 
meut mis à la portedu lecteur français. Uue quarantaine d'é- 
ditions en six ou sept langues différentes constatent que 
cet Examen appela l'attention de l'Europe entière. Aujour- 
d'hui il est à peu près oublié, l-Iuarte dédia son Examen 
à Philippe II lui-reAme, et il y put impunément émeltre l'o- 
pinion, bien avancée pour le seizième siècle, que c'est à la 
structure et au jeu des organes qu'il faut demander l'explica- 
tion du travail de la pensée, et que t'est de t'exaltation de ces 
mèmes organes que pro ferment les phénomènes de l'extase, 
des pressentiment% des oracles, phénomènes mis, bien mal 
à propos, sur le compte de la Divinité ou des démons. On 
pourrait le soupçonner de matérialisme; car il n'hësite pas 
à dire que l'àme n'est autre chose qu'un acte et une forme 
substantielle du corps humain. Il est vrai que presque aus- 
silt, peut-ètre pour donner le change au lecteur, il se bàte 
de reeonnattre l'existence des démons incubes et succubes. 
Huarte avait deviné le système du eélèbre docteur Gati ; 
car il avance que l'entendemenl, la mémoire et l'imagina- 
tion sont Iogés dans des ventricules différent« du cerveau. 
Au milieu de beaucoup d'obseurités, de beaucoup de détails 
physiologiques très-eontestables, empruntés à Gatien, y figu- 
rent de judicieuses observations su les rapports des diffe- 
rentes sciences avec les différents genres d'esprit Dans le 
quinzième et dernier chapitre, Huarte expose un sslème 
complet de mégalanthropo9nsie. Il veut enseier aux 
pères les moyens d'engendrer des enfants sages et donés de 
talents, d'avoir des garçons ou des filles. Nous ne saurion le 
:uivre dans ces détaiis scabreux, semés d'ailleurs de pres- 
eriptions assez ridicules. Nous ne savons s'il prenait lui- 
mëme au sérienx les conseils qu'il donnait de faire usage 
d'aliments chauds et humides, tels que le poisson, pour ob- 
tenir des enfants pourvus d'une grande mémoire, et de re- 
courir h une nourriture sèche et chaude, aux épiees, aux 
pigeons, à l'ail, pour avoir des descendauts à l'imanation 
brillante. Ce qui vaut mieux que tout ceci, ce sont les très- 
sages conseils qu'il donne pour l'éducation physique et in- 
tellectuelle de l'enfance. En somme, à tous égards, Huarte 
doit tenir une place fort distinguée dans la tenaille des pen- 
seurs ; on peut dire que ses défauts appartiennent à son 
époque et que ses qualités sout bien à lui. G. Btrx. 
HUBER (Fçoss), natu_'-aliste célèbre, né à Genève, 
le OE Juillet 1750, eut le malheur de devenir aeugle dès sa 
jeunesse, en partie par suite de sa trop grande assiduité  
l'«tude; mais d'autre part il fut assez heuremt pour troue¢ 
en Aimée Lullin une épouse avec laqqelle il vécut qmrante 
ans dans l'union la plus parfaite. Charles Bonnet ayant 



HUBER 
CelitWson atteutiou sur les mystères de l'histoire naturelle 
des abeilles, il eutreprit, malé sa cécité, de les éclaircir, 
et pour y parveuir il enseigua l'art difficile de l'observa- 
tiou  son domestique, Frauçois Burnens. Des r,ches de 
verre ingénicnsemeut disposCs servirent à étudier ces pe- 
tits insectes. Ce fut des observations de son domestique, qui 
se tronvèrent d'accord avec celles d'autres amis prenant 
part à ses Cudes, qu'il alCu|sit les résultats qu'il publia 
pour la prœemiërœe fois dans des lettres à Bonuet, sous le 
titre de Kout, elles Obsert, ations sur les Abeilles (1792). 
Buruens ayant été chargé d'autres soins, la lemme de 
ltuber, puis le fils de Burnens, contiuuèrent les observa- 
tions avec S e n n e bi e r, qu'il consulta dans ses recherches 
sur la respiration des abeille.s. Il fit ensuite sur la germiua- 
tion des semeuces des observations qu'il a consignées dans 
un l¢moire sur Finfluence de/'air et des diverses sub- 
stances ya'.euses dans la 9ermination de différentes 
plantes (oEnëve, 18t)1 ). Ses observatious uitCleures sur 
les abeilles se tron,'ent dans la nouvelle édition de l'ouvrage 
meutionné ci-dessus (2 vol., Paris et C, enève, 
Huber fonda à Genève la Sociéte de Physique et d'Histoire 
naturelle. 11 se servait de la t.'pographie pour la plus graude 
partie de sa correspoudance, et il y fut aidé par l'habileté 
en mécauique d'uu domestlqne, Claude Lechet, qu'il forma 
à ce service. Il passa ses dernières aunées à Lansame, at,près 
de sa fille, dans les bras de laquelle il mourut, le 2! dé- 
cembre 1831. Delille l'a célébré dans son poëme des Trois 
Règnes de la l'ature. 
IIUBER (Lotus Ol Ao-scs), corroi'eut, qui s'est fait 
en nom dans nos troubles civils, est né en 18lUi, à "Vasse- 
Ionue (Bas-Rhin). Combattant de juillet 1830, un roman- 
cier le fait déjà paraltre alors  l'h6tel de ville pour deman- 
der la république à la eommissiou municipale. Membre de la 
Socièté desDroits de l'tlomme, compromis daus l'affaire dite 
du complot de l'euilly, il tut eondamué  cinq ans de pri- 
son, et mis en liberté par l'amnistie du 11 mai 1837. Placé 
néanmoins sous la surveillance de la haute police, il resta 
Iougtemps à Paris, puis partit pour Londres. Le 8 daeembre 
1837 il débarqe à Bougne, et perd sou portefeuille eu 
débarquaut. Un employé des donaues le trouve et le remet 
aux autorités. Il y avait dedaus des piêces eompromettantes, 
uu plan de maclÆiue inferna!e. Huher, arrgté à sou h6tel, est 
traduit devant la cour d'assises de la Seine, aveeM mu« G cou- 
r el I e, Stenble, Leproux, Auat et d'autres ; il se voit 
eoudamnë -à la déportation pour complot coulre la vie du 
roi. Prisonnier récalcitrant, il subit les plus rudes traite- 
ments en prison, et sa sauté s'altéra gravemeut. La révo- 
lution de février I,i rendit sa liberté, et le 1.3 mai il fut 
nommé gouverneur du chateau de Raiucy. Membre du 
comitécentral de la SontCWdes Droits de l'Nomme et 
président du Comité centralisateur qui avait remplaeé le 
Club des clubs, il présida à l'organisalion de la mauifesta- 
tion du 15 mai 18-18. Il rédigea uu manifeste, fixa le jouir, 
l'heure et le lieu de la réunion des clubs et des corl, ora- 
tions ouvrières qui voulaieut porter uue pétit,.'on à l'As- 
semblée naliouale, régla eu nn mot l'ordre et la marche 
de la manifestation eu faveur de la Pologue. A cet effet, il 
fit une convocation publique par la voie de la presse, des 
journaux et des affielles, et par de délations directes, 
y joignant.toujonrs la emadion expresse que cette mani- 
festation aurait lieu pacifiquement et sans armes. B arbès 
lui demanda des ajournements, eu obtint plusieurs; mais 
la dërnière convoeafiou eut lieu malgré ses démarches. Le 
13 mai Huber avait d'ailleurs fait deider que si on était 
attaqué bu se défendrait et qu'on irait chercher ses armes. 
Le 15 mai Htlber partit de la place de la Bastille à la Iéte 
de la manifestation, an milieu des bannières et des delégués 
des clubs. Il se détacha du cocUAge sur la place de la Cou- 
corde, et-'tme demi-heure aant l'ouvertttre de la séance 
de l'Assemblée constituante il péuétra dans la salle; le 
secrétaire général le fit sortir, mais il y reutra bienl61 al,rès , 
quand la r, éatme eommeuçait, lnvilë de nouveau h se reti- 

HUBERT 
ver, il déelara que si on laissait lire la pétitiou, tout se panse- 
rait bien, mais que si on s'y refusait, il y aurait du désordre. 
Après l'euvahissemeut de l'Assemblée, la lecture de la pé- 
tition et le discours de Blauqui, tluber monta à Iii tri- 
bune, et demanda que le peuple pt defiler devant Pas- 
semblée. Ëpuise, il s'évanouit; mais revenu à lu au bout 
d'une demi-heure, il s'Cance à la tribuue, meuaee le pr- 
sideut, et iaprès nue nouvelle lutte deelare l'Assemblée 
dissoute. Le président Bu ch ez, pris au collet, est mis  la 
porte. On proclame aussit6t un gouveruemeut provisoire, 
et on anuouce le départ pour l'hlel de ville. Huber va 
anuoncer la dissolution de l'Assemblée à la garde uatiouale, 
mais il est arcCC la loule le réelame, et il retint-lent 
libre. Arrêté de nouveau vers six heures du soir, et con- 
duit ì la mairie du quatrième arrondissemeut, le maire 
le fait mettre encore en liberté. Alors il rentre chez un 
de ses amis, se fait raser, et disparatt. Il ëtait parmi les ab-- 
seuts lors du jugement des aecusés de mai devant la haute 
cour de Bourges. IA un témoin, ancien secrétaire éuéral 
de la préfeclure de police sous C a u s s i d i è r e, ré Ca qu'il 
avait lrouvé dans les archives de la préfecture nu rapport 
au prefet de police M. Delessert, relaliemeut à l'affaire 
Grouvelle, rapport précéde de deux lettres sit'riAes Huber. 
Huber vit son honueur eugagé ; il quitta Loudres, et vint 
se constituer prisonuier. Malheureu.ement les debat étaieut 
trop avaucés, l'affaire d'lluber resta disjointe, et il ue put 
comparaitre que devant la haute cour de Versailles, le l0 
octobre 1869. Le témoin Monter y répéta son «lire. Devant 
les juges, Huber parut plus occupe de defendre son houneur 
 is-à-vis de ses eoreligionnaires politiques que sa liberté. 
Cepeudaut, il déelara qu'il avait spoutauémeut t,ronoueé la 
dissolution de l'Assemblée pour éviter une lulle violente 
qui eut pu coOter la vie à plusieurs représeutant. M. Bu- 
chez reveudiqua cette idée. Il affirma avoir demandé à 
Huber que par une mesure ,le violeuee, il le fit mettre 
à la 19orle, afiu de sauver l'Assemblée et d'éviter des 
mlheurs. Huber réelama. « Cela n'est pas exact, dit-il à 
l'ex-présideut ; vous voulez me sauver, je vous remercie ; 
mais eu u'est pas cela : vou aviez à garJer votre dignité, 
moi je pouvais me sacrifier pour le salut de toute, et je l'ai 
fait. Je me suis mis entre le marteau et l'enclume. On me 
eoudamuera ici, et Blanqui, qtti s'était opposè au défilé que 
je voulais organiser, a regardé la mesure que j'ai prise 
comme nu grand mallteur pour la cause democratique. 
Moi, je voulais éviter l'effusion dut sang. » Defendu par 
M. Bu,iguier, et reconnu coupable par le Itaut jury, Huber 
fut eoudamné à la déporlatiou, le 1 octobre 1849. Après 
la conslitulion de l'empire, si uous avous bonue mémoire, 
Huber .se déclara vaiucu ; miué par la maladie et les dé- 
boires, il annonça renoncer h la politique, et obtint d'ètre 
remis u liberté. L. Lo'w.r. 
ltUBEBT (Saint), ap6tre des Ardenues, vivait au 
septième siècle. Il apparteuait à l'uue des familles les plus 
puissantes et les plus riches de l'Aquitaiue. La légende le fait 
méme decendre de Clovis. Sa jeuoesse se passa daus la dis- 
sipation, et il oecupa des hauts emplois. La légende raconte 
qu'étaut à la eltase, Hubert aperçut un cerf qui portait 
un crucifix entre ses bois; il regarda cette vision comme nn 
averlisemeut du nid, et il se couves-lit : de I,à les chasseurs 
le prirent pour patron. Pour sa conversion, il alla trouver 
saint Lantbert, évèque de Maê.slrieltt, et lui succèda. Il trans- 
féra ensuite sa résidence épiscopale ì Liége. Hnbert mourut 
près de Bruxelles, en 727. lultumé dans l'église de Saint- 
Pierre de Lié.ge, son tombeau devint eélèbre par d'innom- 
brables miracles. En 825, son corps fut tran»portd au mo- 
nastère d'Andain ou Andaye, qui prit le nom d'abbaye de 
Saint-ltubert en Ardenues. 
La Saint-llubert a été ehant,:e avec bonheur par nos vieux 
poêtes. Autrefois elle était eél,.brée avec pompe par !es 
chasseurs; aujottrd'hui, ils la fèteut encore dans quelques 
eudroits» et se la rappellent toujours pour en faire l'objet 
d'une joyeuse i-cunion. 



[96 
HUBEIT (Ordre de Saint-), le plus distingué de ceux 
de Ba'ière, car il ne compte que douze chevaliers et un 
grand-commandeur parmi les indigènes, et il n'est guère 
conféré ì l'étranger qu'aux souverains et aux personnages 
politiques les plus éminents. Il fut fondé en t444, par le 
duc de Berg et de Juliers, Gérard V, en commémoration 
de la vidoire qu'il remporta le jour de la Saint-Hubert sur 
Arnold d'Egmont, puis h'ansféré en Baviëre par l'Cecteur 
Charles.Théodore. Les insignes de l'ordre se composen t d'une 
croi d'or, à huit pointes pommetées, ornée de perles et de 
diamants, an#ée de rayons d'or, et chargée, au centre, d'une 
image de saint Hnbert. Les titulaires les portent suspendts 
à un large ruban ponceau moiré, liseré de vert et ode de 
ponceau, passé en écbarpe de gauche ì droite. La plaque 
de l'ordre se porte sur le cété gauche. 
HUBERTSBURG ou ItUBERTSBOURG, ancien ch'a- 
[eau et rendez-vous de chasse, situé aux environs du bourg de 
de Wermsdorf, dans l'arrondissement de Leipzig, fut cons- 
truit il grands frais, en 1721, par I¥1ecteur de Saxe, Au- 
guste Iii, devenu p|us tard roi de Pologne. En tç$ ce 
prince l'agrandit et l'embellit encore; mais pendant la guerre 
de sept ans les Prusiens le détruisirent complétcneut, 
sauf la chapelle, en represailles des dé'astations commises 
par les troupes saxo,rfies à Charlotte,buts. Plus tard, on 
le reconstruisit, mais avec moins de magnificence. La fa- 
brique royale de poteries, qui y avait été fondée en 1774, 
a été vendue en 1839, a-ec obligation pour l'acquéreur de 
continuer les travaux de fabrication. Aujourd'hui Hu- 
bertsburg est utilisé comme maison de justice pour les in- 
4iidus condamnes à une longue détention, comme hépital 
{depuis 1839) et comme maison de correction pour les 
femmes. 
Célèbre autrefois par les fètes brillantes qu'on y clbrait 
à l'époque des chasses, ce cfiMeau a acquis en outre t,ne 
notorieté historique, à cau»e du traité connu sous le nom 
depaix d'Hubertsbourg, qui y lut conclu le 15 février 1763 
entre PAutriche, la Prusse et la Saxe, et q«i termina la 
guerre de sept ans, après que la paix eut dt«jà êté signée 
le 10 février 1763 entre la Grande-Bretagne, la France, 
PEspagne et le Portugal. La pai. d'Huberthourg conolida 
la position de la P,-usse paf'mi les grandes puissances «le 
l'Europe. L'impératrice- Marie-T hérèse y renouça ì 
toutes ses prëtentions sur les provinces de Silé.ie et de 
Glatz précédemment céd.es à la Prusse par les traités de 
paix de Breslau et de Bedin, en 1742 ; F r éd é r i c le Grand 
rendit au roi de Pologne son électorat de Saxe; la paix de 
Dresde y fut confirmée, et l'lLmpire d'Allemagne flt compri 
dans le traité. 
HBNER (RODOLVn-JVLs-BsrO), t;n des meilleurs 
peintres d'histoire qu'on conpte aujourd'lmi en Allemagne, 
né en lS06, à OEls en Silésie, commença l'ctude de sou art 
ì Berlin, en 152t, sous la direction de W. Schadow, qu'il 
suivit à Dusseldorf, en 1827, avec Hildebrandt, Lessing et 
Sohn. Dès l'année suivante il donna son tableau des P- 
chet«rs, d'après la ballade de Goethe, qui excita la plus 
vive attention ì Berlin par la grìce des formes et de 
l'expression. Pendant et après un ,codage en |talie, il peignit 
Booz et Rutb, et sa fameuse set.ne de l'Arioste, Boland 
délivrant la princesse Isabelle de la Carerne des Bri- 
9ands, ainsi que le Dpart de _Nomi, 1835. Son Samson 
.branla;;t les colo;mes du Temple, et un magnilique de- 
vant d'autel représentant le Christ et les Evan9rlsles 
(t835), dans l'Cisse de Meseritz, révélèrent un dévelop- 
pement nouveau et plus énergique de son tale,R. Parmi les 
les tableau. qu'il donna plus tard, on remarque Les deux 
Amants du Canlique des Ca;;tiques ; L 'A9e d'Or; Le Christ 
iz la colonne; Les Enfants dormant dans la fort et leur 
Ange gardien, ainsi qu'une suite d'excellents portraits. La 
FoeliciN et le Sommeil, d'après l'Octavien de Tieck, est une 
œUVre de la plus grande délicatesse et de la plus grande 
beauté. En lait de dessins, il laut citer de lui une figure de 
I,'Allemagne, pour l'album dt, roi Louis de Bavière, que la 

HUBEPT -- H 
gravure et la lithographie ont multipliée à l'infini. Depui 
1839, Hiibner habite Dresde, oii il a été nommé prolesseur 
ì l'Académie, en 
HUCIIET petit cor de chasse qui sert à appeler les 
chiens. C'est un des principau x m e u b I e s en blason. 
ItUDDEPSFIELD l'une des villes manufaeturières 
les plus importantes et l'un des grands centres du commerce 
intérieur de l'Angleterre, située dass le tVest-ldiz 9 du 
comte d'York, non loin d'Halifax, dans une contrée mon- 
tagneuse, sur le canal de Manchester à Huddersfield, percé à 
travers les montagnes qui sparent les comtés d'York et de 
Lancaster, et qui de lit, sous le nom de llebVle navigation , 
se jette dans le Calder et compte plusieurs embranche- 
ments. Huddersfield est tin grand marché pour les coton. 
nades et les lainages, notamment pour les mouchoirs et les 
draps léger», qui sont exposés dans la grande halle aux draps 
construite en 1765 ì l'instar de celle de Leeds, et qui at- 
tirent un grand nombre d'acheteurs de Leeds, de Halifax et 
Wakefield aux marchés qui s'y tiennent toutes les semaines. 
La 'ille proprement dite ne compte que 30,000 habitants ; 
mais la population de la paroisse de Huddersfield, qui 
comprend les bameaux d'Almondbury, K!rkburton, Kirk- 
heaton, Morfield, etc. dans une longue et étroite vallée se 
prolongeant jusqu'au village de Marsden, important par ses 
filatures de coton, s'elève à pins de 12-,000 'Urnes. Elle est 
presque uniquement occupée à la fabrication des draps, 
des casimirs, etc. Comme dans toutes les montagnes en 
général, c'est une race d'hommes alertes et courageux, qui 
ioua un grand foie dans les guerres civiles de la Rose 
blanche et de la Fiose rouge. Sus ttenri ¥ItI ou comptait 
dans la montagne de Huddersfield 40,000 :._mmes armes. 
IIUDSO,' , HENDRtK). Quand Colomb eut découvert 
l'Amérique, l'Italien Cabot acreCira en Angleterre l'op:.nion 
qu'il existait un passage au Cathay par le nord-ouest de 
l'Europe : cette idee fermenta dans toutes les tëtes vers 
la fin du seizième et le commencement du dix-septième 
siècle, et l'on rèva une seconde route par le nord-est. 
tludson, simple et rude pilote, mais déjà éprouvé par de 
pénibles campagnes, s'olfi-it pour aller à la reclierche de ces 
voies tant dësirées; quelques marchands de Loudres l'ac- 
ceptèrent, et le 1 "r mai 1607 il partit de Gravesande avec 
un seul navire, monté par dix hommes et un mousse. 1! se 
dirigea vers les cétes septentrionales du ouveau-Monde, 
en rasant les tirages du Groenland. Le 14 juillet il arriva 
l'ouverture dt, detroit qui porte aujourdhui son nom : ses 
matelots croyaient que c'ëtait une haie, car de tous les 
cétés des montagnes lointaines bornaient leur vue; mais 
comme la sonde allait en augmentant, il en conclut que 
c'était un passage qui le conduirait à la grande mer ; il ne 
l'explora pas cependant : les préventions de son équipage le 
forcèrent à remonter plus au nord. Là, les glaces l'arrètè- 
rent au milieu de ses espérances : il rebroua chemin. L'an- 
née suivante, il poursuivit la chimère du passage par le N-E et parx'int jusqu'à la lowaja SemOa 
les glaces encore lui lermèrent l'entrëe du détroit de Waigatz. 
Ces mauvais succès détruisirent son crédit en Angle- 
terre : il quitta Londt'es, et traita avec une compagnie hol- 
landaise pour la recherche du double passage. D'abord il 
remonta jusqu'au F i n ma r k ; refoulé par les glaces du péle, 
il fit voile vers la Virginie, atteignit plus au no,d l'embou- 
chure du grand fleuve qui a conservé son nom, prit terre 
sur ses rives, et de retour à Darmouth céda aux Hollandais 
tous ses droits de découverte sur cette partie de FAmé- 
tique. Cette expédition le réhahilita dans l'esprit des négo- 
ciants anglais : il obtint d'eux un nouveau navire, partit 
de Blackwall en 1610, retraça sa première route, retrouva 
son détroit, le traversa, pénéh'a tort avant dans la mer ou 
baie d'Hudson. Un hiver terrible survint; son navire resta 
p,'isonnier au milieu des glaces. La chasse et la pche sous 
la glace suffirent pendant la saison rigoureuse à la nour- 
riture de son équipage ; mais au printemps, quand la mer 
redevint libre autour de lui, et qu'il voulut retourner dans 



HUDSON 
sa patrie, les vivres lui manquèrent. Il a consigné dans 
quelques lignes de son journal les angoisses de cœur qu'il 
ressentir quand il fut contraint d'employer l'autorité pour 
impair ì ses matelots un sévèra régime : malheureusement 
ceux-ci ne comprirent pas la dure nécessite; ils conspirè- 
rent contre lui, le jetèrent dans une chaloupe avec son fils 
encore enfant, Woodhouse, honn/te amateur de science, 
qui s'était embarqué pour faire des observations astrono- 
miques au pale Nord, le charpentier et cinq matelots restés 
fidèles ; les révoltes leur donnèrent un fusil, quelques sa- 
bres et des provisions pour un seul jour .... LA s'artCe 
l'histoire; l'imagination peut seule dérouler la sombre des- 
tinée d'Hudson. Théogène PAGE, cap;taine de vaisseau. 
ilUDSON (Baie et Détroit d'), grande mer intérieure 
de l'Amé rique septentrionale, d'environ 15,000 my riamtres 
carrés, située entre le Labrador, la Nouvelle-Galles 
et les terres polaires, longue de If,0 myriamètres sur 80 de 
large, avec 140 brasses de profondeur vers son centre, se 
relie à l'est 
qui a 70 myriamètres de longueur, et communique par le 
canal de Fox avec la mer Polaire. Elle contient plusieurs 
grandes baies : au sud la Baie de Jantes, au nord la Baie 
de Button, et à l'ouest la Baie de Chesterfield. Elle est 
remplie de banes de sable, de récifs et d'lies, dont la plus 
considérable est lïle de Southampton, située entre le canal 
de Fox, le détroit de Welcome et celui de Frozen. Quoique 
en dehors du cercle polaire septentrional, cette mer inte- 
rieure diffère peu de la mer polaire. Elle n'est navigable que 
pendant quatre mois de l'année ; pendant les huit aulres, 
elle est couverte de glaces flottantes. Le detroit d'tIudson, 
si non la baie eile-mme, fut découvert dès t517 par 
Sébastien Cabot; mais ce fut Hendrik Hudson qui le 
premier navigua dans l'un et l'autre en 1610, et il leur 
imposa son nom. De nou,elles dècouvertes furent faites dans 
ces parages en 1612, par Thomas Button ; en 1612, par ro- 
bert Bylot et W. Ba[fin, qui pcnétrajusqu'au Canal de 
Fox et à l'lin de Southampton ; en t619, par le Danois Jens 
Munk ; en 1631, par Luke Fox et Thomas James, plus tard 
par Parry et autres. 
[ La nature a été sévère pour toute cette partie du globe : 
le soleil d'Cé n'y a que de rares chalêurs ; le climat en est pre, 
la v6gétation sans force et l'hiver terrible ; pendant six mois 
de i'année, une épaisse crofite de neige enveloppe la terre, 
et la glace couvre la mer. Quand les compagnons d'Hodson 
revinrent dans leur patrie, ils etalerent aux yeux des mar- 
chands d'Angleterre les peanx de castor et autres magni- 
fiques pelleteries dont ils avaient trafiqud, pendant l'hiver- 
nage, avec les Esquimaux et les sauvages du nord du Ca- 
nada. Une compagnie oe forma pour exploiter cette nou- 
velle branche de commerce ; elle établit des factore.ies sur 
les cidres occidentales de la baie. Les colonies françaises du 
Canada en prirent jalousie, et les, attaquèrent ; il y eut des 
guerres continuelles jusqu'a la paix d'Utrecht, «lui assura à 
la Grande-Bretagne la possession de tout le littorai du dé- 
troit et de la baie d'Hudson. Les principaux comptoirs des 
Anglais sont sur la cte ouest et à Pembouchure des ri- 
vières, qui la mettent en cmnmunication avec les sauvages 
de i'intérieur ; les liqueurs fortes sont leurs principales mar- 
chandises d'échange, et tout le monde sait quelle influence 
destructive elles ont exercée sur les peuplades Jncivilisées 
des foréts de l'Amérique. Cette compagnie réalisait depuis 
longtemps des profits immenses, qoand une association 
rivale s'éleva à Montréal, qui pendant quelque temps 
éclipsa celle de la baie d'Hudson : en 1821, ces deux com- 
lagnies se ondirent en une seule, sous le nom de Hudson's 
ayfur Cornpany, et son importance grandit soudAn au 
point que nulle entreprise américaine n'a pu encore appro- 
cher de son degré, de splendeur. Voyez, Hcnsot (Terres de 
la Baie d') Théogène 
HUDSON (Compagnie de la Baie d'). Voyez Hcuso, 
(Terres de la Baie d' ). 
iiUDSO. Terres de la rate d'). Les Anglais nommèrent 

ainsi ì l'origine tt, utes les terres qui entourent la Baie d'Hué. 
son et situées au nord et ì Pouest du Canada, dont la pos- 
session leur fut assurée, en 1713, par le traité d'Utrecht, et 
qu'ils divisèrent en Labrador, ì l'est de la Baie (dont le lit- 
rural reçut ici le nom d'East-Main oudezVouvelle-Bretagne), 
en l'ouvelle-Galles ì l'ouest (et ce territoire fut plus tard 
subdivisé en Nouvelle-Galles du Nord, au nord-ouest,et en 
NOllvelle-Galles du Sud, au sud-ouest), et en Territoires in- 
térieurs de l'Ouest. Dans ces derniers temps, le traité si- 
gné le 25 février 1825, à Saint-Pétersbourg, a fixé le 13 e 
méridien de longitude occidentale pour l'extrème limite des 
possessions anglaises du coté de l'AraCique Russe. Le 
traité conclu le Z0 octobre 1818, à Wasbin#on, avait déjà 
fixé le 49 e cercle paraliète jusqu'aux Montanes-Rocheuses, 
ou Bocy-Mountains, comme la limite méridionale des pus° 
sessions anglaises vers les États-Unis. Le traité de l'OrCon, 
en date du 15 juin 186, les étendit encore jnsqu'au détroit 
de Fuca, en méme temps qu'il prolongeait le territoire de 
la Cornpagme de la Baie d'Hudson par-delà les Montagnes- 
Rocheuses, jusqu'à l'océan Pacifique, et qu'il y ajoutait ainsi 
une portion notable de cette partie de l'ancien Territoire du 
nord-ouest ou Nouvelle-CalCame. Les territoires apparte- 
nant à la Compagnie de la Baie d'Hudson comprennent par 
conséquent les sept huitèmes de toute i'Amérique Anaise 
(104,000 mriamètres carrés ), notamment tout ce qui se 
trouve au delà des provinces colonisé.es (settled provDwes) 
au sud-est (Canada, Nouvelle-lcosse, etc.), sans compter les 
lies de la mer Arctique, dont la grandeur et la position n'ont 
pu encore tre bien déterminées. 3lais cet immense terri- 
toire ne se compose guère que du litloral, couvert de nuages 
et de glaces pendant la plus grande partie de i'année et ail er- 
rent quelques rares tribus nomades, ou bien de vastes dis- 
tricts forestiers encore au pouvoir des aborigènes et sur 
lesquels l'Angleterre n'a acquis de droits qu'en raison du 
commerce qu'elle fait dans la Baie d'Hudson et par l'acquies- 
cement des autres États ì ses pretentions. 
La Baie d'Hudson divise naturellement ce territoire en trois 
parties distinctes : le Labrador, le Territoire de la Baie 
d'Hudson, et le Territoire dtl Nord-Ouest ou Nou elle-Caledo- 
nie. La partie centrale, ou Territoire de la Baie d'Hudson, of- 
ficieilement appelee aussi Bupert's lard, a au total une cons- 
titution géognostique des plus simples. Les montagnes primi- 
rives y dominent à l'est et aq nord. Toutefois, le soi de ce dis- 
trict est généralement plat à l'est, quoique entrecoupé çà et là 
par de nombreuses et vastes crtes de rochers; ce n'est qu'au 
nord, dans la partie voisine de la mer Glaciale, qu'il s'éleve 
jusqu'à former un plateau, appelé le plateau arctique, dont 
la surface est aussi {art inégale. Le district occidental des 
montagnes primitives, où dominent les montagnes de transi- 
tion, est encore plus plat que le district oriental, et secompo.e 
génêralement de prairies. Cetle dilference géognostique entre 
le district oriental et le district occidental determine les con- 
ditions hydrographiques du Territoire de la Baie d'Hudson, 
car sur la ligne de partage de ces deux divisions naturelles .e 
trouve une remarquable suite de cours d'eau d'une hau' 
importance pour les relations du commerce. C'est grAce 
aux nombreuses ratifications de ces eaux intérieures que 
les immenses déserts qu'elles h.aversent, place» en rapports 
réguliers les uns avec les autres au moyen de postes com- 
merciaux, ont pu entrer dans le domaine de la civilisation 
européenne. Dans la plaine immense qui s'abaisse graduel- 
ietnent vers la baie d'Hudson, les systèmes h.vdrograpldques 
les plus importants sont d'abord le grand lac Winipeg, de 
287 myriamètres carrés, qui reçoit les eaux du Sotatswan 
et celles du Bed-Biver et se d6gorge par le Neison; et plus 
loin au nord, le Churchill ou Missinippi. La plaine sep- 
tentrionale qui va en s'abaissant vers la mer Glaciale 
forme en grande partie le bassin du Mackensie, auuel ap- 
partiennent entre autres le lac d'Athabasca (105 myr. earrés), 
le grand lac des Esclaves {388 myr. carrés) et Iç grand lac 
des Ours (260 myr. carrés). Plus loin  l'est oe décbarge 
le Fleuve des Mines de Cuivre, et au nord-est le grand Fleuve 



des Poiasons se jette dans la mer Glaciale. Partout le cli- 
mat présente le caractëres tes plus saillants du climat de 
l'AraCique du ord : des hivers d'une rigueur excessive, des 
pdemps extrèmement froids, avec des Cés relativement 
hauds etde beaux automnes, et dans presque toutes les 
saisons une très-grande inconstance de la température. 
Sous le rapport de la végétation le Territoire offre trois 
réons; celle des prairies, celle des lorêts, et celle des Bar- 
ren-Grouds. La région des prairies, id6pendamment de 
sa nature de steppe, est caractérisée par l'existence de 
nombreux bancs de sel et lacs sales. La région des forèts 
est situëe  lest, dans le district si riche en cours d'eau des 
montagnes primitives. L'arbre te plus commun au nord est 
le sapin blanc, et la plante alimenltaie la plus importante, 
celle qu'on appelle '- sauvaçe mais qui ne croit que dans la 
partie méridionale et dans des terrains marécageux. La ré- 
ginndes Barre-Grouds, c'est-à-dire des territoires déserts 
ou infertiles, est situee au nord de la réoa des forèls, dans 
des contrées géncralement herissées de montagnes. La v6- 
gtation la plus elevée n'y consiste plus qu'en arbrisseaux 
el en arbres nains. Des mousses et des lichens  cou- 
vrent souvent seuls d'immenses etêndues du sol. Sauf la co- 
lonie agricole lablie sur le lied-;liiver, on ne cultive de 
plantes alimentaires qu'aux environs des postes appartenant 
 la Compagnie, et encore en trè-petite quantitê% à cause 
des gelCs nocturnes, blème au sud on ne saurait jamais 
compter sur les récoltes de cerdales. C'est le règ-ae animal qui 
fournit le plus de ressources alimentaires, de méme que 
les mo.en de se vètir et les seuls produits qui soient 
exportables, à ravoir d'excellentes pellcteries et louernres. 
Parmi les animaux h fourrure, le castor est le plus impor- 
• tant; mais cette espèce a singnlièrement diminné de nos 
ours, en raison de la poursuite ardente dont elle aeté Pobjet. 
On trouve ensuite d'immenses quantités de rats musqués. 
Puis viennent les renards, de di erses couleurs, les loups, 
les ours, les I)x du Canada, différentes espëces de martres, 
de loutres, etc. Le renne (cervgs tarandws) et l'elan 
(moose-deer) am6ricains, le hoeuî musque ou rguk-ox, le 
wapiti et autres espèces de cerfs, le lièvre d'Amérique et 
le |ièvre polaire, di,erses espèces de poules de bois et de 
neiges et une fouie d'antres oi.eaux encore, sont les animaux 
qui contribnentle plus  l'alimentation. Toutefois, les incal- 
culables richesses que contiennent en poisons les innombra- 
bles lacs et cors d'eau de ces contrees ont une ressource 
enoore autrement précieuse. Sauf un petit nombre d'Euro- 
péens disséminés dan les forts et les postes de la Compagnie 
et dans la colonie du licd-P, iver, la population se compose 
d'aborigènes. Quoique le nombre en soit trë-restreint, ils 
se divisent en une foule de petites tribus, dont la principale 
est celle des lsqu ima ux, qui habitent tout à l'extremite 
nord, le long de la c6te; ient esuite celle des Indiens, 
dont le nombre total peut s'elever h 50,000 àmes. Toutes ces 
tribus aborigènes sont habituees aux marchandises d'Erope, 
dont elles ne peuvent plus se passer, et vivent sous la com- 
plète dépendance des negociants en pelleteries. 
Le Français Grosseliez, qui, vers le milieu du dix-sep- 
tième siècle, pénétra du Canada jusqu'à la c6te de la Baie 
d'Hudson, proposa à son gouvernement de créer des sta- 
tions commerciales dans les terres de la bae d'14udson, à 
l'effet de donner une plus grande extension au commerce 
des pel]eteries; mais ses proposilions furent reponssees. Il 
s'adressa alors h la coo du roi Charles lI d'Angleterre, et y 
trouva un Protecteur dan la peroenne du prince palatin 
RnperL qui, en 1668, l'envoya à la baie d'Hudson avec le 
capitaine Giliiam. Cette exp6dition hiverna sur la c6te orien- 
tale (Ect-Main), prèsdu fleuve Bupertu% et y construisit le 
premier fort. Le palatin gupert, unissant ses efforts à ceux 
d'autres seigneurs, obtint alors ch faveur de la Cornpanl 
of adventlres of England tradin9 into Hudson's 
une charte, en date du 2 mai 1670, qui assurait aux pa'rti- 
cipants et à leurs descendants le monopole du commerce de 
la Baie et du Detroit d'fldson, et qui leur concodait en 

I:IUDSG 
outre tous droits de som'erah»ete, d'administration et de ju- 
ridiction sur ce territoire ainsi que sur les contrées qui 
l'avoisinent et ne se trouvaient pas déà en la possession 
d'autres princes et États chrétiens. Cette Compagnie de la 
Baie d'Hudson a depuis lors développé extraordinairement 
le commerce des pelleteries dans ces tontrées, et a con- 
servé [u.qu' nos jours ses privilíges primitifs, que la 
reine Victoria lui conlirmait encore pour une période de 
trente-et-une années par un acte en date du 30 mai 1839, qui 
très-certainement sera renouvele au moment ou fl viendra 
à expirer. De toutes les compagnies de commerce anaises 
fondCs avec de grands priviléges dans le cours des sei- 
zième, dix-septième et dix-buitiëme siècles, c'est la seule 
qui ait consersé le monopole ainsi que les droits de souxe- 
raineté dont elle avait été gratifiée sur les contrées qui lui 
étaient assignées, et elle n'eut  soutenir qu'nne concurrence 
passagère contre des entreprises françaises, qui cessèrent 
complètement à partir de t763. Cette Compagnie de la 
Baie d'Hudson trouva pourtant une dangereuse 'ialedans 
la Compagnie du lïord-Ouest que des marchands de pel- 
leteries du Canada, pour la plupart originaires des mon 
tagnes de PÉcosse, fondèrent en t783, à Montreai, et qui joua 
un r61e important dans i'Amérique du _ord pendant plus de 
trente ans. Celle-ci exerçait son ïructueux commerce d,ns les 
contrées de l'ouest non comprises dans la charte deFancienne 
Compagnie. Ses ages pénétrèrent jusqu'aux lIontagnes- 
Rocheuses, et aux fleuves provenan1 du Missonri ; en 1806 
Simon Fraser Iranchit méme cette montagne, à l'ouest de la 
quelle il fonda le premier poste de commerce, le Fort du 
lac Fraser. C'est la contree que depuis I S06 on appelle,''o u- 
velle-Ca, loedon ie. A partir de 18Il les agents de laCom- 
pagnie du ord-Ouest se montrèrent aussi sur les rives du Co- 
lumbia ou Orégom La alonsie commerciale amena d'abor0 
des difiïcuités, puis en 1814 une guerre en règle entre les 
deux Compagnies; de sorte que le gouvernement anglais fut 
forcé d'intervenir comme médiateur; et en 1821 les deux 
Compagnies fusionnèrent, comme on dit auiourd'hui. 
La Compagnie de la Baie d'Hodson (ltudson Bai] fur 
Compan/) se compose en ce fnoment de 239 membre 
(proprietors), représentant un capital de iondation de 
400,000 liv. ster. Les affaires de la Compagnie sont admi- 
nistr6es par des directeurs, qui résident  Londres et qui 
sont élus par l'assembiée générale. Depuis t839 la Com- 
pagnie a constitué une cour régaliëre de instice pour son 
territoire, dans sa colonie du ted-River. Dans File de 
Vancouver ( en face de la c6te occidentale, dont la posses- 
sion a été octro)ëe à la Compagnie en 18-9 par la reine 
• ,ictoria), la jgsÙce est rendue par une cour spéciale. Le 
commerce de pelleteries de la Compagnie est réglë data son 
terriloire par le statut désigné sous le nom de Deed _Poil, 
en date du 6 juillet 183, qui détermine les droits et les 
devoirs de ses divers empio3és et agents. 
Quoique le nombre des animaux à fourrure ait beau- 
coup diminué en Amérique, et qu'ils manquent mme déjà 
completement dans certains districts ; bien que le com- 
merce des pelleteries et fourrures ait de nos ours beau- 
coup perdu de l'importance qu'il avait autrefois, la Com- 
pagnie de la Baie d'ltudson n'en est toujours pas moins 
une corporation riche et puissante. Sous le rapport admi- 
nistratif, elle a dijsé tout son Territoire en quatre depar- 
tements : 1 ° Le département de ,Montréal, avec le Fort- 
a-Chne, dép6t principal ; 2 ° le département du Sud, dépOt 
principal .Sloose-Fort; 3 ° le depatement du Nord, dép6t 
principal et entrep6 t général de tout le Ter itoire le Fort- York, 
où se tient chaque année le grand conseil des facteurs en 
chef; Cest là également que se trouve le principal port des 
vaisseaux appartenant à la Compagnie. La colonie aicole 
du Red-Biver, fondée en 1811 par lord Selkirk, au sud du 
lac Winipeg, est assi d'une importance toute particulière. 
Elle a pour chef-lieu et point central le Fort-Garr9 = c'est 
là que se trouve la leà-Riwy-Ac«demu., florissant établis- 
semeur d'education, oi sont élevCs les fils et les filles des 



n'1.,N -- HUEITA 
agents de la Compagnie; * enfin, le département de Cè-  provisoire. Nommé colonel en t812, 

Imnbia, comprenant l'ancien district de la Nouvelle-CalC 
doute et Pile de Vancouver, avec le fort Victoria. 
IIUDSON (Fleuve). Arrivé, lors de son troisième 
voyage, à l'embouchure du fleuve de l'Amérique du Nord qui 
porte aujourd'hui sou nom, H u d s o n voulut l'explorer ; 
il le remonta l'espace de 200 kilomètres, et fut frappé de 
son caractère imposant, car presque partout il mesurait 
tre mille de largeur ; ses eaux étaient assez profondes pour 
les navires; des bassins naturels s'ouvraient sur ses rivages 
pour les radouber ; une riche végétation animait ses deux 
rives : c'étaient de grands arbres, des sapins et «]es chCns 
por la construction, et d'innombrables poissons le remon- 
taient et le descendaient avec le flux et le reflux de la mer. 
Seulement une immense solitude :y régnait ; à peiue quel- 
ques sauvages abandonnaient leurs huttes et s'exposaient 
près de sou vaisseau pour l'admirer avec curiosité, ou échan- 
ger des pelleteries contre des bagatelles d'Europe. Aujour- 
d'hui l'Hudson est devenu l'une de plus andes artères 
de la civilisation du Nouveau-Monde; il traverse l'Etat de 
New-York et baigne une partie du New-Jersey ; les canaux 
que l'on a coupés sur ses bords lui ont donné une impor- 
tance extraordinaire. Il communique avec la D ela w a re 
par le canal de Morris, qui a t00 milles de longueur ; le 
grand canal de l'ÉriA, dont l','tendue est de plus de 36 
milles, le met en commnnication avec le lac É ri é et tout 
le haut C a n a d a ; le canal C h a m p ! a i n, de 6 milles et 
demi, l'unit au lac Cbamplain; enfin, un autre canal, de 65 
milles,joint encore un point «le ses rives à celles de la Dela- 
ware. D'opulentes et magniliques villes lui doivent leur 
grandeur : A! ban ', où commence le canal de l'ÉriC pos- 
sède de beaux édifices, un riche capitule, une biblio- 
thèque, un tbé'/ttre; son immense commerce de transit la 
rend l'nne des plus importantes cités de l'AraCique ; Trog 
vient de naitre, et dejà elle compte plus de 20,000 habi- 
tants, une fabrique d'armes et de toiles; Hudson, Sandg- 
Hill, et enfin New-Yo rk, la grande capitale des Etats- 
U n i s, et l'un des foyers de la civilisation de l'univers : c'est 
un peu au-desot de cette viii« quïl se jette.dans l'OuCn. 
11 laut avoir vu i'etonnante activité qui règne le long de ce 
fleuve, les innombrables navires qui s'y donneur rendez- 
vous de toutes les partieg du globe, les mille paquebots  
vapeur qui se croisent dans tous les sert; au milieu de ses 
canaux, pour se faire che i,lee des richesses que le com- 
merce  accumule et de la splendeur que l'avenir réserve 
mx belles coutrées qu'il arro. Nulle part ailleurs l'indus- 
trie humaine n'a réali«é de plug gigantesques conceptions. 
Théogène PAE, capitaine de vaisseau. 
- YIUDSON LOUVE (Sir), le geélier de 5apoléon à 
Sainte-Hélène, né en 1770, en lrlande, entra en 1785 
comme volonlaire au 50  régiment d'infanterie de ligne an- 
glais, et lut nommé lieutenant en 1791. Il assista à i'expé- 
dition de Toulon, et, dans la campagne de Corse, prit part 
à l'attaque de la tour de Martello, à l'assaut de la redoute 
de la Convention, et aux siéges de Bastia et de Calvi ; il 
servit ensuite deux ans en Portugal et nn an à lIinorque. Il 
fit, sous Meure, la campagne d'Ë,-y, pie, devint secrétaire de 
la commission de conciliation à lIalte, obtint en 1800 le 
brevet «le major dans le régiment des chasseurs corses, et 
fut mis à la demi-solde en fs02. Appelé au service actif en 
1803, avec le grade de major, il fut envoyé par lord Ho- 
bart, avec des missions secrètes, en Portugal et en Sar- 
daigne; l'année sui ante il compléta le régiment des chas- 
senrs corses, obtint en récompense le rang de lieutenant- 
colonel, et servir ensuite à Naples, sous les ordres de sir 
James Craig. Comman«]ant de Pile de C a p r i depuis 1806, 
il iut'orcé de la rendre aux Français en 1808, après une 
vaillante défense, et, en vertu de la capitulation, il se retira 
en Sicile avec armes et bagages. A l'attaque de Naples, il 
commanlait le premier ordre de bataille; il contrihua à la 
prie d'lschia, assista an siCe de Zante et de Céphalonie, 
et fut dans cette dernière ile membre du gouvernement 

199 
il vint en ISl3 en 
qualité de commissaire anglais au quartier génétal de nlu- 
cher, accompagna celui.-ei en France en 181,, fut dans I 
mme année nommé major général, et en 1815 gouver- 
neur de Sainte-Hélène, lorsque Sapoléon était dit'igb sur cettœee 
fie. A son retour, il obtint, en 1821, lê 95 « réghnent, fut 
nommé gouverneur des lies Bermudes, en 1823 lieutenant 
général, et en 1842 propriétaire du 50  régiment d'infan- 
terie de ligne, il mourut le 10 janvier 184t. Préposé à la 
garde de Napoléon, il outra encore, par sa dureté et par ses 
fbrmes outrageautes, les instructions rigoureuses que son 
gouvernement lui avait données pour rendre impossible l'é- 
vasion de l'illustre captif. Tous les services honorables qu'il 
avait pu rendre précédemment, Hudson Loe les fit oublier 
par la manière barbare dont il traita Napoléon; et la nation 
angaise, qu'il fatt se garder de confondre avec In gouverne- 
ment oligarchique qu'elle avait alors, fut la première à clouer 
au poteau de l'infamie le nom de l'officier général qui s'ctait 
fait Iàchement le ge61ier du grand homme. 
llUE ou HLE-FOU, en Cochincbine, capitale du 
royaume d'Anam, / l'embouchure du fleuve Hue, est la 
place la mieux fortifi0.e de l'Acte. Le fossé qui entoure la 
ville, et qd a 100 pied de large, a 12 kilomètres de tour; 
et ! remparts, hauts de 20 mètre, sont garnis de 
1,00 bouches à feu. Dans la citadelle, qui forme un carr6 
r«uli,.r, se trouvent le palais impérial, un arsenal, d'ad- 
mirables magasins et des casernes. La ville, dont on Calue 
la population de 30,000 à 100,000 habitants, et qui, à la 
manière des villes indiennes, consiste presque entièremeut 
en b»gres maisons de bambou, fut eédée aux Français 
en 17s7; mais ils n'en prirent jamais possession. Elle e.,t • 
traversée par un caual, sur les bor,ls duquel s'Cèvent 
des quais consi,lérables avec un arsenal et des magasins, et 
son port sert de station à une partie de la flotte d'Anam. 
Bien qu'elle soit fort déchue depuis longtemps dej, elle n'en 
est pas moins encore le centre d'un commerce important. 
IlUELVA, province d'E, pagne, formée de la partie oe- 
cideutale du royaume de Séville, en Andalousie, et séparée 
du Portugal par la Chanza et la Guadiana, compte une po- 
l,ulation de 153,000 àmes. Elle est bornée au nord-ouest 
par la Sierra-de-Aroche, eontinuation de la Sierra-Morena, 
et y prescrite une agréable succession de montagnes, de col- 
line et de vallëes; au sud--est, elle se compose de terrains bas 
et «le,cris. Elle et arrosée par la Guadiana, avec ses af fluents, 
la Chanza, le Malagon et l'Albajarilla, ainsi que par la 
Piedra, l'O.liel et le Tinto. Par suite de son climat chaud 
et de la |ertilité de son sol, tous les produits du sud et la 
vigne notamment y abondent. Le vin de Tinto, ou Tinto 
da Rota, vin rouge fort épais, tire son nom du fleuve 
Tinlo (c'est-h-dire le Coloré), dans les eaux jaunttres et 
impregnes de cuivre duquel ne peut vivre aueun animal. 
HUELVA, son chef-lieu, l'Onoba des anciens, au moyen age 
la place Iorle des Arabes appelée Velba ou Vuelba, possède 
un port et etlviron 8,000 habitants. La construction des 
navires constitue, avec la pcbe et le commerce des poissons, 
la principale industrie de la population; et il en est de mme a 
Moguer, petit port de mer, à Palos, autre petit port a l'est de 
la baie où vient se jeter le Tinto, et à Ayamonte, ville située 
à l'emb,u 'hure de la Gua.liana. La ville la plu importante de 
toute la proviu«e est 1Vtelba, l'llipa des ancien% sur le Tinto, 
avec un chtteau fort et 1,000 habitants. I0ès le treizième 
siècle Huelva, 5loguer et Palos étaient en possession de 
produire de courageox et babiles marins. Il en était encore ainsi 
du temps de Christ,phe Colomb, qui partit de Palos, en 
lt92, pour son premier voyage de découvertes, et a son re- 
tour débarqua le 15 mars lt93 à Saltes, en face de Huelva. 
A cette époque, Palos était le port d'expédition de tous les 
vova_-es de découverte» qu'entreprenaient les Espagnols. 
IUEPTA (Vc,xTe G-c ne L), poëte et critique 
espagnol du milieu du dix-huitième siècle, né à Zafra, lai- 
sait ses Cudes à Salamanque, lorsqu'un protecteur haut 
placé l'appela à .",ladrid, où il se fit bient)t un nom par son 



talent politique. Les ennemis que lui avaient attirés ses 
manières arrogantes réussirent/ le faire exiler à Oran, 
l'occasion de sa tragédie de llagzel. Le sentiment de son" 
innocenca et un noble orgueil le soutinrent dans ce malheur. 
]algré la roideur inflexible de son caractère, i| fut rappelé 
à btadrid et nommé premier conservateur de la Biblio- 
thèque royale. Champion de la vieille poésie nationale con- 
tre ceux qui prétendaient introduire en Espagne le classi- 
cisme français, il défendit malheureusement la bonne cause 
avec plus de zèle que de goGt et avec moins de tact que 
de palriolisme ; ce qui ne |'empè¢he pas d'occuper une 
place honorable dans l'histoire liftCaire de son pays. Il 
mourut/t ltadrid, le t2 mars 1787. Outre de petites disser- 
tations criliques, on a de lui la liblioteca militar espaîwla 
0760) ; Obras poeticas (2 vol, 1775-1779) et Teatro espaîol 
(17 vol., 1785-1786), choix d'anciens drames dans le vieux 
go0t national. Comme poëte, il s'est essa)é dans les genres 
lyrique et dramalique; et dans toutes ses poésies il a mon- 
tré un talent remarquable, particulièrement sous le rapport 
de la langue et de la versification. Sa tragédie de llaçuel, 
qui a pour sujet l'amour du roi AIphonse VIII pour la belle 
iuive Radte|, et la tir« tragique de celle-ci, fut, au temps 
de ses premières représentalions (1778), accueillie avec 
enthousiasme, et passe encore pour une des meilleures pro- 
ductions modernes du thétre espagnol. Il arrangea aussi 
pour la scène espagnole l'£1ectre de Sophocle, sous le ti- 
tre d'Agarnemnon vengado, et mème la Zaïre de Voltaire. 
ItUESCA province d'Epagne, formée de la partie nord- 
est du royaume d'Aragon, séparée de la France par les Py- 
rénées et de la province de Lérida par la oguera Biba- 
gorzana, compte une populalion de 247,000 mes. Elle ap- 
pariteur en entier au bassin de l'Èbre; et, quoique parcou- 
rue par les rivières appelees Aragon, Gallego, AIcanadre, 
Cinca et Ioguera, est assez pauvrement arrosée; la plaine 
produit des céréalesde divers geares, du vin, des fruits de 
toutes espèce% du chanvre et du lin; dans la parlie mon- 
rugueuse, qui est richeen min,.raux et en lrorêts, on se livre 
surtout à l'éducation du bétail. 
I-IUESCA, son chef-lieu, btie dans une plaine saine et 
tempérée, surlarive droile dcl'Isuela, siége d'vché, comple 
environ 11,000 habitants, possède une cathédrale, une uni- 
versité, fondée en 1355 par Pedru I¥, le grand collége de 
Santiago, ïond en 1587, divers établissements d'instruction 
publique et quelques manul'actures. 
Huesca est l'Osca des anciens, dans le pays des Yesc- 
tani. En l'an 76 avant J.-C., Sertorius y fonda des écoles 
grecques et latines; et c'est la qu'il périt assassiné, en Pari 72. 
César surnomma cette ville la ïctorieuse. Les Arabes s'en 
emparèrent en l'an 713 de notre ëre, et la nommèrent Wes- 
china ou Wesch«ka. Pedru I , dont le père, Sancho Ia- 
mitez, mourut au siCe de celle ville, le 4 juillet 1094, la reprit 
sur lesinfidèles/ la suite d'une victoire quïl remporta dans 
la plaine d'Mcoraz» qui l'avoisine; il y lixa sa résidence et 
transféra l'évché de Jaca. A la diële qm s'y tint en 1247, 
on  publia le code du roi Jayme 1 . Le 2 mai 1837 les 
carllstes  balfirent Irren Barren et Léon, qi tous deux 
furent tnés dans l'affaire. Les autres villes de cette province 
sont Barbastro, siCe d'évëché, et Jaca, avec une citadelle. 
HUET (PIEInI-DI.I), savant évque d'Avranches, 
naquit à Caen, le 8 lévrier 1630. Il mourra de bonne heure 
une grande ardeur pour l'etude, et s'y livra avec passion. 
Descartes et Bochart, le savant auteur de la Géographe 
croee, furent ses guides. Le premier lui donna le goùt de la 
philosophie, le second lui inspira une vive passion pour la 
véritable science. A cette époque, Christine, reine de 
Suède, attirait auprès d'elle tous les hommes d'esprit et de 
science qui voulaient bien quitter leur pas pour orner sa 
cour. Huer fut du nombre de ceux à qui la curiosité de voir 
cette reine extraordinaire et le désir de se trouver avec 
les savants de toute l'Erope firent entreprendre ce voyage. 
Christine lui lit le meilleur accueil, selon son habitude, et 
le retint quelque temps " sa cour; Huer en profita pour re- 

HUEPTA -- 
cueillir des manucrits anciens, et, de retour dans sa pa- 
trie, il les fit coattre au monde savant. Il pub|la d'abord 
un excellent traité sous ce titre : De optimo 9enere inter- 
pretandi et de claris interlrretibus. Après l'abdication de 
Cristine, il refu«a d'aller se fixer à sa nouvelle cour à 
Borne, et ne voulut pas accepter non plus la che que lui 
offrait le gouvernement de Suède d'élever Chades-Gustave, 
successeur de cette reine. 
En 1668 il fit paraltre sa traduction latine des Commen- 
taires d'Origène, Commentaria in sacrum Scriptzram, 
(Bouen, 2 vol. in-loi.); puis, deux ans aprës, le célèbre 
7rait de l'O'i9ine des Romans, qu'ami de Segrais et 
de ]I me de La Fayette il avait composé pour tre mis en tte 
de Zaïde. Le duc de Moutausier, gouverneur du grand 
dauphin, fils de Louis XIV, fit agréer en qualité de sous- 
précepteur Huer, qui devint ainsi le coopérateur de Bossuer 
dans cette œuvre difficile. Arriyé à la cour en 1670, il ne 
la quitta qu'en 1680, époque où son royal élève se maria. 
Il avait profité de sa position et de la faveur dont il jouis- 
sait pour coopérer activement  la première publication faite 
en France d'une collection des classiqu latins, avec des 
commentaires, ad usure delphmi, travail d'un rare mérite, 
qui compte 65 volumes in-4 °. Ce fut au château de Ver- 
sailles qu'au milieu de la cour la plus bruyante, et durant 
les rudes Ionctions du prolessorat, il écrixit en outre 
son plus celèbre ouvrage, Demonstratio Evangelica , im- 
primé  Paris en 1679, in-folio. 
La haute répntation de Huer était établie depuis assez 
longtemps pour lui dunner des titres à l'Académie Fran- 
çaise : aussi cette illustre compagnie, au milieu de laquelle 
siégeaient alors tant de maitres célèbres, crut-elle de son hon- 
neur de l'admettre dans son sein en 174. Quelques années 
après sa réception,Huet, qui jusque là avait bésit s'il em- 
brasserait o,; non l'etat ecclésiastique, s'engagea définitive- 
ment dans les ordres sacrés. Louis Xl% « voulut récompenser 
son zèle, et lui donna l'abbae d'Aulnay, près de Caen. 
Bient6t il fut nommé évSque de Soissons, puis d'Avranches 
(192). Ce fut alors qu'il compo la plus grande partie de 
ses ouvrages, et qu'il se livra avec le plus d'ardeur à l'C 
rude : ceci fit qu'il négligea les devoirs de sa place, et qu'il 
fut peu accessible à ses ouailles, dont l'uue, à qli l'on 
disait uu jour que l'évèque ne pouvait la voir, parce qu'il 
ét,;diait, s'Crin : « Eh i pourquoi donc le roi ne nous a-t-il 
pas envoy un évb.que qui ait fait toutes ses Cudes? » Huer 
comprit qu'il vaudrait mieux quitter la place que "de faire 
souffrir l'administration de son vché; il se détail de ses 
fonctions, et obtint en échange l'abbaye de Fontenay, près 
de Caen ; puis il se retira quelque temps après dans la matin 
professe des |ésuites à Paris, où il mourut, le 26 janvier 1721. 
Huer a laissé un and nombre d'ouvrages, tant en latin 
qu'en français; mais l'ënumération ne saurait en truuvel 
place ici. Il excellait encore dans la poésie, et l'on a cinq 
éditions de ses vers, dont la dernière est de 1710; elle 
contient des odes, des élígies, des églogues, des pièces 
héro;ques, son voyage en Suède, un poème sur le sel, etc. Il 
Criait aussi, dans les dernières années de sa vie, ses mé- 
moires en latin, qui ont étè traduits pour la première fois 
en français par notre collaborateur bi. Charles Nisard, en 
t85. Comme philosophe, Huer avait d'abord embrassé avec 
ardeur la philosophie de Des¢artes; plus tard non-seule- 
ment il l'abandonna, mais il la combattit mme avec 
assez de violence. S'écartant tout h fait de la route suivie 
alors par le plus grand nombre de philosophes, il posa 
la loi comme critérium de toute certitude : ce système, qui 
a retrouvé de nos jours quelques adeptes, fut combattu 
par les partisans de l'ecole cart.ienne, qui ne lui épargnè- 
rent point les invecti, es. Il fit quelque bruit d'abord, puis 
on l'oublia..',lais ce que l'on n'oubliera jamais, c'est la 
pro|onde science, le goOt de cet écrivain, qui fut un des or- 
nements de son siècle. La liibliothëque de Huer, dont il avait 
[ait cadeau aux jësuites, ses h6tes, a passé en partie, lors 
de leur proscriptiou, dans celle de l'h6tel de ville de Paris, 



LAD 
HUFELAND ( ÇmUSTOPEt£-GUILLUZlE ), lèbre m- 
decin allemand, naquit à Laugensal, dans la Thurine, le 12 
aoOt 1762. u docteur à Oeubgen, en 73, il pratiqua 
d'abord à Weimar, sous les auspi de son père, mdecin 
du lieu.  jeune Hufela fut, à quelque temps de 
nommé professeur à lua; puis il succéda h son père comme 
conseiller-médecin aulique à Weimar, et r dans 
lle jusqu'en 1801, oh le roi de Prusse i'appela à Berlin, 
pour cuper aux mmes titr pr de sa rsonne 
rie distiné qu'il remplisst près du duc souverain de 
Weimar. Bientôt il devint en outre mdecin-recteur de La 
Charité de Berlin, dirccur du collée de chirurgie et con* 
sellier prié. 
Lorsqu'en 1809, la Prusse s'inspira de l'exemple de la 
rance pour instituer une université hiérarchique, Hufcland 
fut pourvu d'un brevet de profoeur ordinaire h la Faculté 
de Uerfiu, et nommé l'oene suivante,conseiller d'État. 
Enfin, ver 1819, le gouvernement le nomma directeur de 
l'Académie de Medecine et de Chirurgie militaires. Il serait 
dfflicile de citer une existenoe de mecin pi ooeupée que 
la sienne; peu de praticiens ont autant écrit, pe d'auteurs 
médecins ont autant pratiqué. Hufeland avait coutume de 
dire, et fl a fini par écrire dans son dernier ouvrage ces 
tristes paroles : « Celui pour qui la médecine ne devient 
point une sorte de rel/on ne trouve en elle quela plus dé- 
olanfe, la plus fatigante, la plus ingra des profions. 
Depuis 1795 jusqu'au terme de sa vie, Hufeland blia 
seul à Berlin un journal mensuel, sous le titre de JournŒl 
tr die praklche Ar:neykunde und Wunda:ney- 
kunst, au nombre quasi incroyable de 88 néros. Il 
fit paraitre ca outre dmque année, h partir de 1801, un 
annuaire de i'h6pilal de La Cbarité de Berlin. On court 
encore de lui quarante et quelques ouvres, dont plu- 
sieurs ont oE traduits en divers lanes. L principaux 
sont: l Art de prolonger la vie (léna, 1796), le plus 
¢élëbre de tous et qui a été le plus universeflement traduit ; 
la France sede en possède deux versions ( 12t et 
L'auteur voulut le rajeunir so le nouveau titre de Macroe 
biotique; c'est dans oe traité qu'il affirme que l'Europe a 
tué pl d'Amérioeins avec sou alcool qu'avee sa poudre 
nou, et qu'il supplie ses lecteurs de laisser tomber chaque 
jour, sans l'eeer, une goutte de cire h cheter dans le 
• ee habiel où ils se verseur de la liqueur, conseil fort 
sage, non-seulement en ce qui concerne e boisson per- 
nicieuse, mais h l'égard de l'habitude qu'il ne veut réprimer 
que goutte h goutle ; 2 ° Sysldme de .llédecine ratue, 
qui n't pas atheé (Leipzig, 1808; rlin, 1818); 
3  Traild des Scrofules : h cette ocoesion fl recommanda 
le muriate de baryte, qui groe h lui obtint une vogue 
universelle; oet ouvrée fut traduit h Paris en 1821, accom- 
paé d' mémoire du baron Larrey ;  Hslore de la 
Sanl¢ (1812); 5 ° Conseils sur l'Educalion hysique 
(1799) ; 6  Principales eaux rein(raies de l'Allemagne 
(1810), petit ouvrage qui n'a pas failli au succès de ses au- 
Hufeland it l'ennemi n6 d systèmes : en cette qua- 
lité il eombattit tour h tour la dicholomie de Brocart, 
l'irritation de B r o u s s a i s, i'homoeopathie d'H a h n e - 
m a n n; mais il mit nt de modération, nt d'égards dans 
 critiqu, que plus d'une fois il se concilia l'estime de 
œux dont Il repoussfit 1 doctrines. C'est h lui, par exemple, 
qu'Hahnemann adrait, pour être insérés dans son jour- 
nal, ses ieRres, s rëflexions, ses iefs mme d'homme 
persécuté et de meein in¢ompr. OEoujours h la recherche 
s faits et ne prisant que la réalité, Hufeland ne donnait 
aoeès dans son recueil qu'à des observations avérées, h des 
remarqu pratiqu. Ses cours publi avaient la mme 
simplicité que s 
Huleland a sumé non p s doclrines, il n'en avait 
point, h proprement parler, mais s idées sentielles, 
opinions dtaebes, dans un de ses derniers ouvrages, 
qu'on a traduit dans toutes les lan, et qui a pour titre 

 HUGEL 
banal : Manuel de Mddecine praliqzte, frltit d'une e.rp 
rence de cinquante ans, avec oette épigraphe : Alura 
sanat, edcus curat rbos. Dans cette oeu vre l'auteur no 
tient pas assez compte d recherches et déeouvert fran- 
cises, auxquelles le diagnostic et le sie des madies sont 
redevies de tant de iumiëres. 
En 1833, Hufeland fèta le cinquantième anniverire de 
son doctorat et de son heuree pratique, et à oette ooeion 
il lui fut adres beaucoup de faveurs et d'hommage. Le 
roi de Prue voulut, entre autres gracieuseté, que la soci 
fondée en 1810 par on premier médecin pot dormais 
le nom d'Hufeland. Ce médecin lèbre mourut h Berlin, 
le 5 ao6t 16. D • lsidore Bouv.no. 
HUGEL (C[LeS-.ttXSVt-ASSLt, baron »t), 
Ièbre vo)eor allemand, n le 25 avril 1798, h Ratisbonne, 
servir d'abord dans l'armée autrichienne, et de lSO h 
fut atlaehé à l'ambassade d'Auiriche à Saples. En 1830 il 
conçut le pland'un grand voyage en Afrique, en Asie et 
dans la Polynésie; entrep6se qu'il mena h bonne fro, 
à une fortune considérable, h beaucoup de vigueur piysique 
et h e encrée toute juvénile. Aoeompaé d'un mecin, 
d'un chirurgien, d'un peintre et d'un naturaliste, muni d'un 
riche arsenal scientifique, il quitta le 2 mai t835, à bor,l 
du vaisseau de erre franis le D'Assas, la rade de Ton- 
lori, et après un court séjour en Grèoe et en C]ète il dé- 
barqua a la fin de juin au vieux pmt d'Alexandrie. La il 
fré un vaisseau marchand anglais, qui le porta dans l'fie 
de Chypre. De Laiakieb, il alla par Antioche, Suedieh et 
Tortose, h Homs dans le dcrt, d'où il fit de nombreuses 
ecursions dans les contrees environante»; il vsi les 
ruines de Baalbek, franchit la plus haute cime du Liban, 
et poursuivit sa roule par la ravissante vallee Bescharrœes, 
où la maladie le sur[,fit ainsi que son domestique. Ce fut 
avec la plus grande peine qu'ils attelèrent Tpoli : le do- 
mestique mourut; Hugel guérit, il est rai, mais non sans 
peine. De Tripoli il gma Ueyrout, et y fre un navire au- 
trichien, avec lequel il fit voile vers Sidon, Tyr et Saint- 
Jean'Acre, où il quitta son vaisseau pour parcourir la 
Palatine. Apr s'ètre rembarqué à Jaffa, il arriva à Alexan- 
ie. Trois de ses comptons restèrent en Épte, deux 
moururent, et ce fut tout seul qu' arriva par Suez et Aden 
dans la rade de Bombay. De lb il entreprit un voyage dans 
l'luiCieur des terres pour étudier la race malaie, son eiat 
de civilisation et ses vanCes provenant de son memnge 
avec I ra mongole et uoesienne. Pendant son 
dans I Ghats du nord, il s'enfonça souvent dans des ri- 
lCs situées h plus de 100 mètr de profondeur, oh la 
chaleur t excessive, et y gagna la fiëvre des bois, comme 
l'appellent les Indiens. Lorsquïl fut retabH, il se di6g vers 
la presqu'lle méridionale, off il espérait trouver une popu- 
lation et une civilisation moins mêlées d'élémenls éirangers, 
par que les musuimans n'ont guère pénetré jusque i. 
Il traversa ainsi la majeure partie du Dekan, Sattara, 
Bejapour, célèbre par ses monument, si andios, d- 
cendit de là vers Goa, retourna de nouveau dans le pais 
haut, pour visiter Darwar, 1 merveilles de Bijnaer, 
Beilari, Bangaiore, Seringapatnam et 5lsore. Aprës avir 
gravi les montagnes Bleu (Sri Gerri) et  avoir passé 
trois semaines, il continua son chemin par Coiatore vers 
la cote de Malabar, visita Cotehin et Travaneore, atteignit 
le oep Comor, et se rendit par mer de Tuttikorin, 
Ièbre par s pëcheri de perles, h Raseram et h Manar. 
Il séjourna plus de cinq mois dans la suisante ile de 
Ceylan, qu'il pareourut dans tons les sens. De lb il revnt 
sur la c6ie de Coromandel, visita Tranquebar, Pondichéry, 
Cartel et Madns, où le oepiine Lambert, commandant 
de la frate L'Alliator, envoé en mission dans l'Archipel 
Indien, h la Nouvelle-tloll,le et dans la Polynie, I'vi 
h l'accomp«gner. Hugei p oet offre avec joie. Après 
avoir vité Sinpour, Sumaa, Born, Java, plusieurs 
des plus importtes i1 de l'Archipel Indien, la Nouvelle- 
Hollande, la tee de Van-Diémen et enfin la Nom eile-, 



02 HUGEL 
lande, il s'embarqua dans celte dernière lle pour Manille. 
Après avoir visité Macao et Canton, il revint à Caicutta, 
pénétra par les monts Himalaya et le Kaschmir jusqu'aux 
frontières du Tibet, suivit le fleuve Tschilum jusqu'à Mo- 
zafferahad, gravit les montagnes qui se prolongent vers 
l'Indus, et revint d'Atock par Lahore et Ludiana à Deihi, 
en traversant des contrées peu visitées par des Européens. 
Il était de retour à Bombay quatre ans juste après y erre 
arrivé pour la première fois; et après un court séjour au 
Cap et à Sainte-Hélène, il débarquait à Portsmouth, environ 
six ans après sou départ de Vienne. 
L'utilité dont le voyage de Hugel a été pour les sciences 
en géneral, et particulièrement pour l'histoire naturelle et 
l'etllnographie, est prouvée par les importantes collections 
qu'il en rapporta, et qui furent toutes aclaetées pour le cabinet 
impérial et la bibliothèque de Vienne: celles qui se rappor- 
tent aux science. naturelles contiennent ì elles seules plus de 
32,000 echantillons. Il n'a paru jusqu'à ce jour de la Relation 
historique de ses voyages que Le Kaschmir et le royaume 
des Sihs (4 vol., Stuttard, t840-42) ; mais Endlicher a 
donné nu catalogue latin des plantes recueiliies par Hugei 
sur les bords du Swan-Biver (Vienne, 1837 } ; et lIeckel a 
décrit d'après lui Les Poissons du Kaschmir ('ieune, 1838). 
Hagei, président de la Société Autricl,ieune d'Horticulture, 
qu'il a fondée, semble aujourd'hui se consacrer entièremeut 
à cette science; cependant il a décrit les plus importantes 
des plantes no»selles introduJtes par lui en Europe, dans 
l'ouvrage intitulé : Archives de Botanique de la Sociétë 
Impériale d'Horticulture d'Aztræhe (Vienne, 1837). 
HUGO (GcsrxvE), l'un des plus célèbresprofesseurs de 
droit romain des temps modernes, né à Loerracb, dans le 
le pa)'s de Bade, le 23 novembre 1764, étudia à Goettingue, 
de 1782 /z 1785, et fut nommé en 1786 précepteur du 
prince héréditaire de Dessau. 11 fonda sa réputation par 
son edition des Frag»lents d'Irlpien ( Goettingue, 1788 ). 
?forumWeu 188 professeu agrégé, et en goE protestent 
titulaire de droit/ Goettingue, il obtint plus tard le titre 
de conseiller intime de justice, et mourut le 1£ septembre 
1846. Hugo fut l'un des premiers à suiîre l'exemple de Leib- 
nitz et de Putter, et à exposer le droit romain actuel non 
d'après la suite des titres, comme c'était encore l'usage 
dans la plupart des universités, mais d'après les époques 
dominantes de l'histoire du droit, et à admettre la philo- 
sophie du droit comme base de l'enseignement gnêral. 
C'est à lui, à Haubold et à Savigny, que la science du droit 
romain est redevable des importants procès qu'elle a 
faits dans ces derniers temps. Son ouvrage principal, qui 
se distingue par la sagacité, l'esprit de recherche et i'éru- 
dition, est son .llanue[ d'un cours de Droit civi[ , com- 
posé de sept volumes, portant tous des titres différents. 
$]UGO (Vcroa-MxmE). 1I. Victor Hugo est venu au 
monde avec le dix-neuvième siècle. ,, Ce sibcle avait deux 
ans ! ,, Comment il fat éleé, il nous l'apprend lui-mme. Il 
tut m en faut pau vre; mais il eut une noble mère, ce qui est la 
plus grande des richesses. M. Hugo a parlé de sa mère dans 
ses vers, et il en a parlé avec le cœur d'un fils et avec la pas- 
sion d'un grand poëte. Du reste, il eut l'enfance de tout le 
monde, c'est-/-dire une belle enfance. Après l'enfance qui 
joue, la première et la meilleure enfance, arrive l'enfance 
qui t-availle : alors le pauvre enfant joyeux se trouve jeté 
dans mille études qu'il comprend à peine. La science du col- 
16ge fit peur au jeune Hugo. Un esprit vulgaire qui se serait 
ainsi abandonné lui-mme, pendant que les jeunes esprits 
ses confrères se livraient ardemment à l'etude, se serait privé 
ainsi de tout espoir et de tout avenir; mais notre poëte 
avait un esprit d'une trempe peu commune. L'oisiveté lui 
profita pour le moins autant que le travail / ses condis- 
ciples; pendan! que sur les bancs où il était assis, écolier 
obscur et ennnyb, on étudiait avec ardeur les belles règles 
de l'art antique, il se faisait déjà à hli-mme son art poë- 
tique, ce code nouveau qu'il a promnlgué le premier; pen- 
dant que toute l'Cule jurait t:lr Aristote et par B«dlem, 

l'enfant Victor ne jurait dà qe par son gén|e, qui fermen- 
tait, bouillonnait et jetait sa fumée, en attendant qu'il jefAt 
tout le feu brOlant qu'il a jeté depuis, ll était donc déj/ un 
poëte, pendant que ses petits camarades n'étaient encore 
que des écoliers; il était donc déjà un novateur, pendant 
que ses frères d'armes revenaient de toutes leurs forces 
aux vieux préceptes du got. Ainsi, l'opposition de M. Hugo 
à la vieille langue et à la vieille poétique de nos pères com- 
mence déjà au collége. 
La première fois que M. Victor Hugo fit entendre sa voix 
à la France, ce fut pour célébrer, dans une ode pleine d'é- 
clat et de douleur, la mort funeste du duc de Berry. La 
mort du duc de Berry, par bi. Hugo, est une des plus 
belles choses qu'il ait écrites. Puis, Iorsqu'on sut que le duc 
de Berry n'était pas mort tout entier, que la souche roym 
n'avait pas été blessée au CœUr, et qu'un rameau vert allait 
refleurir sur ce noble tronc que l'on croyait à jamais des- 
séché, au.;sitt voilà le poêle qui reprend sa lyre, le voilà 
qui rejette bien loin les crêpes fuuèbres qui la couvrent. Il 
chante encore, mais cette fois c'cet un chant d'espérance. 
L'Odesur la naissance du duc de Bordeaux est encore au- 
jourd'hui une des plus belles de ce poéte qui en a tant fait 
depuis. 
M. Victor Hugo fut longtemps fidèle à la croyance poli- 
tique qu'il avait adoptée. Son premier recueil, Odes et Bal- 
indus, est empreint/ chaque page de cette préoccupation 
royaliste qui lui a fait produire ses plus beaux ouvrages; 
quand le roi de la charte fut pot'tê dans les cadeaux de 
Saint-Dent.% le jeune poêle cbanta les funérailles de 
Louis XVIII. Je m'arrête à dessein sur les deux volumes 
d'odes et ballades, d'abord pare, e qu'à tout prendre c'est le 
plus beau recueil poétique de M. Hugo, et ensuite parce 
qu'on y voit dans toute leur limpidité les opinions gínéreuses 
et les croyances du jeune poêle. Et toujours, quoi qu'il fase, 
entllousiasme ou désespoir, chant d'amour ou chant de 
guerre, il écrit toujours sous l'inspiration de cette prophétie 
qu'il s'était faite à lui-mëme en commençant : L'histoire des 
hommes ne présente de 1oése lue jt9ëe du hozt des 
idëes monarchiques et des croyances reli9ieuses. Jamais 
il ne s'est montré plus chrétien et plus royaliste, c'est-à-dire 
plus grand poêle, que dans ses deux volumes d'essais. 
biais ce jeune homme avait deà bien une autre ambition 
que d'gtre tout simplement un grand poëte. Il était venu 
trop tard pour comprendre comment le poëte est fait pour 
vivre seul loin de la foule; il a donc vml]u gtre non-seule- 
ment un poête nouveau, mais encore un poêle revoluiion- 
haire. Les odes ne lui ont pas suffi, il a voulu batir des 
tbéories. !1 a voulu prouver et démontrer sa poésie, comme 
si la poésie véritable se démontrait autrement que par ses 
passions, par ses joies et par ses extases, et par ses dou- 
leurs. D'où il est résulté dans les œuvres de M. Hugo un 
triste pgle-mgle d'enseignement et d'inspiration, de pré- 
ceptes et d'exemples. Être poëte et professeur, c'est trop de 
moitié. M. Hugo a etWtout cela/ la fois. Ainsi, à propos de 
ses Odes et Ballades, vous retrouvez dèjà plusieurs opi- 
nions sehismatiques en littérature, lI. Hugo pose et déve- 
loppe ses principes littéraires; il construit sa thgtorique, ii 
perd déjà de cette naïveté aventureuse qui plaft si fort dans 
les essais de Goethe, de lord Byron, de Schiller, de tous les 
novateurs naïfs et inspires, bi. Hugo est de bonne heure un 
novateur pédant et entêté : il prend soin de commenter lui- 
mgme son propre génie. Il fait secte. Il se nomme de sou 
plein droit le Cah in poétique. Il se sépare s iolemment du di« 
septième siècle, ce grand siècle des grands géuies, se fai- 
sant un homme de lhéories, pendant qu'il n'était dans le 
fond qu'un homme d'imanalion. 
A force de dire dans ses préfaces qu'il venait pour tout 
remplacer dans l'art et pour lout remplacer en littdrature, 
on avait lini par le prendre au mot et par avoir peur de 
cet usurpaleur d'un nouveau genre. Le public» il faut le dire, 
n'avait pas tout à fait tort. Qui de nous n'a été affligé par 
la préface de cette longue tragédie de Cromwell, premio" 



«sai dramatique de M. Victor Hugo ? Dans cet;e préface, 
qui est ì elle seule toute une poétique, bi. Victor Hugo se 
mettait sans façon à la place de Racine et du vieux Cor- 
neille. Ilse nommait, de son plein droit, le chef d'une secte 
qu'il annonçait devoir remplacer tout à fait le dix-sep- 
tiè[ne siècle, la grande époque de la vérité, du talent et 
du genie, bi. Victor Hugo démolissait tout notre passé poé- 
tique en vrai jeune homme, et, qui plus est, il démolissait 
Racine comme un homme qui ne comprend pas Sbaks- 
peare. Quelle Crange idée en elfet d'avoir voulu nous pré- 
senter Sbakspeare comme le type de la tragédie dans le 
monde? idée aussi (trange que celle de Voltaire, qui appe- 
lait Sbakspeare un barbare. Shakspeare n'est pas plus un 
chef d'école pour la France qu'il n'est un barbare pour per- 
sonne. Cette préfaeœe du Comwell fit tant de peur au pu- 
blic de cette époque que le mécontentement genéral rejail- 
lit mème sur plusieurs charmants délaiis de cette vaste 
composition. Pourtant, que de belles scènes ! quê de grands 
passages : Et quelle naïve figure c'était lb, la jeune iille de 
Cromwell restee royaliste et pleurant sur les mains de son 
terrible père ce sang royal qui allait couler l Mais encore 
une fois Comwell a été enterré semis la préface, et ne s'en 
est pas relevé depuis. 
Tel fut le premier essai dramatique de M. X'ictor Hugo. Les 
critiques qui ont grande mémoire, une mémoire de critique, 
c'est tout dire, se souviennent encore de certain 'drame, 
jo,é au tbeàtredei'Odéon, intitulé : Amy Robsart. Cedrame 
avait été composé par 1I. tlugo, en sociêté avec M. 
ce ! o t (I. Aueelot et lI. Hugo, qui l'aurait jamais cru 
Ce drame d'Amy Robsart, composé d'après toutes les 
règles de la prefaee de Cromçeii, fut sifflé dans toutes les 
rëgles usitées depuis l'invention des sifflets à l'Aspar du 
sieur de Fonteneile. L'orage fut violent, et le lendemain de 
cette mésaventure bi. Hugo écrivit une lettre dans les jour- 
naux pour annoncer qu'il était l'auteur d'Amy lobsart. 
Ce fut là la première manifestation de la ferme volonté ou, 
comme disent les autres, de l'entètement litteraire dont 
1I. Hugo a donné tant de preuv res depuis A my lobsart. C'A- 
tait déjà la barre de fer qui ne savait pas plier. L'opposi- 
tion le jetait dans tous les extrèmes, un coup de si[fiet le 
révoltait dans les plus intimes secrets de sa conscience. Il 
sentait bien qu'il avait un immense avenir; mais comment 
dompter le public, comment parvenir à se taire entendre 
de cette foule inattentive et incrëdule, comment prouver 
au public deFranee qu'il était un poëte naif, et non pas la 
contrefaçon de lord Byron, qui venait de mourir? Savez- 
vous ce que fit M. Vietor Hugo? Il se mit à écrire le 
roman comme Waiter Scott, sauf plus tard à attaquer 
Casimir D e I a v i g n e sur le théàtre qu'il s'était fait. Un beau 
jour il sortit de chez lui portant sons son bras une espèce de 
roman historique intitulé 1tan d'lslande. En ce temps-là 
1I. X'ictor Hugo, comme c'est le lot de tout jeune homme qui 
commence, cherchait un libraire sans pouvoir en trouver 
un. Par grand bonheur Han d'lslande trouva un libraire: 
c'etait un féroee et formidable roman, tout rempli de sang 
et de meurtres. Le béros principal mange des hommes tout 
crus et ne boit que de l'eau de la mer; il rugit comme un 
lion, il est absurde. Mais pourtant au milieu de cea dif- 
formités le lecteur attentif pouvait remarquer d'énergiques 
peintures, chaudement accusées et colories, des portraits 
dessinés de main de maltre, une ou deux scènes de ter- 
reur et de désolation. Certainement il  avait un rivain an 
fond de ces bizarreries ; mais il fallait du courage pour aller 
«hercber un écrivain dans cette lange et dans ce sang. 
C'est aussi à peu près dans le mème temps que 1',I. Victor 
l:lugo publia nn autre petit roman B¢tg-Jargal. Bug-Jar. 
gai est un nègre affreux, aussi horrible que Han d'Islande. 
11 a toutes les passions et tous les vices. C'étaient là les 
premières tentatives de M. Victor Hugo por réhabiliter le 
laid en poésie. En elfet, la nouvelle éeole, fatiguée du beau 
antique, jalouse à la fois de la Vénus de biëdicis et de 
pollen du Belvédère, s'était mise à réhabiliter le laid. Oh! 

c'était là une affreuse tentative ! la France eut peur du l.id, 
et véritablement la France eut raison. 
Avançons. a d°lland« n'est qu'un 
n'es qu'un esi enoe deux essais uquels 
ft guëre attentiqn. Il s'agit à poent d'un roman i est 
un grand livre, fl s'at d'une étude psychologique qui 
laisse bien loin lelameux livre de Boeoeria sur les dé et 
les peines. M. Victor Hugo jet en effet dans le monde ce 
livre formidable qu'on ne ut relire deux fo, mais dont 
on se souvient sans fin et n ces une fris qu'on I'a lu : 
Le Dernier Jour d'un Condamné. Vous pouvez peer de 
l'effetdecettehistoi de la inede mort raconte heuw par 
heure, supplice par suplice, battement de cœur par battement 
de cœur, et racont par l'homme qui va mourir. A[[reu dé- 
tails maisquedevéritéscelles maisquelabominable sang- 
froid m queue patiente investigation des droits de l'homme 
consideré comme chair et oemme g comme cir qu'on 
ne peut trancher, comme ng qu'on ne ped répandre 
Dans son livre, 3I. Victor Hugo laisse de c6té le crime, 
pour ne voir que la peine de mod. Il n'attaque p la loi, 
il n'accuse pas la loi, il atque la peine de mort. fi oeleule 
les lentes minut de cette hoible onie, avec quelle pa- 
tience et quel sanff[roid, vons le vez 
Une fois qu'il eut tiré de ses entrailles et de son cœur ces 
terribles pages d'analyse, une fois qu'il eut dompte le par- 
terre juqu'h la boue de l'Chaland, M. Victor Hugo 
pira  un plus grand théâtre. Depuis ionemps il 
dit qu'il serait le mailre d'un parterre. Il s'était fait d 
lecleurs enfin  Asit6t le voilà qi reoemmenoe de 
belle, il reprend son oeurage  deux main% et sur le pa- 
tron, surin ésie, sur la vieille passion, dions plus, sur 
vieu hrosdu grand Corneille, voici que notre jeune poete 
se met h construire une trédie en ve po le Thétre- 
Français, Hernani, passions espagnoles, mœurs espagnole», 
costume espagnol. Tout Paris voulut voir Hernani : e't 
que d'abord tout Paris était excité par cette nouveauté 
rauge, une tragédie de M. Hugo. Toutefoi», le 
nani ne fut pas un succès dcisif; on y retrouver, fl t 
vrai, plusieurs d grandes qualités du poëte lyrique, l'en- 
thousiasme, le oeup d'oeil profond et asi quelquefois el- 
ques douces et ten, ir lueurs d'un amo exalté, naves 
et dramatiques psions d'un jeune cœur. Mais la s'arrê- 
taient foules ! qualités de la troee de M. Hugo. 
bi. Hogo, et ili'a prouv depuis hcinq ou six repris, n'en- 
tend rien h la conlexture du drame. Disposer son action 
dramatique, l'arranger oenvenabletnent, préparer toutes 
os pour que i'ëmotion du spectateur ne soit ni brm- 
quée ni rentie, metlre sez d'art dans toutes I combi- 
naisons de cette œuvre diificile pour que l'a n'y paisse 
pa, voà ce qui tait imssible à M. vitrer Hugo, roh 
aussi h quel piège il s'est laissé prendre. Sa tragédie d'H- 
nani tait ionme, vraisemblable, mal aange; le dé- 
nouement en était impoesible : non, non, par Coee 
malgré cette affection de vérité, ce n'eil 
Et pourtant Hernani t encore le meilleur drame de f. Vi 
ter Hugo! Tout oe qu'il a fait depuis pour le t beurre nous parait 
chose misérable, tout h lait indignede ce noble esprit. Comme 
amaturge, I. Victor Hugo t bien loin, mais bien loin 
de Victor Doenge et de Gfibe de Pixerecou. A 
d'ir Shaskspeare, dont il n'a jamais connu la poe 
potique, M. Victor Hugo no a ut h fait rejetés ds 
l'enfance de i'a. Et puis, dest surtout dans I drames de 
!. Victor ltugo que vous retrouverez cette ndance ab- 
surde h réhabiliter le laid déjh sialée dans Bug-Jargal 
et Itan d'lslande. Aimi, après Heani, Vitrer Hugo 
fit jouer Marion Delorme. Marion lore, dest la ré- 
hahilitation de la courtisée  Elle seule dans tout ce drue 
] elle a de l'esprit, elle a du dévouement, elle a du courage, 
elle a du cœur. Toute cette époque de i'lfistoire de France 
est mirablement sacrifih cette vile fille de joie que lis- 
toioe nous représente non-seulement comme la maitree. 
. maisenoeoe, choseplus hoible  commel'pion du OE'dinai. 



04 
Et, pins tard, savez-tous ce q,e M. H,Jgo a fait de Marie 
'rudor, cette pédante et sanglante Marie d'Angleterre,  qui 
l'histoire peut bien reprocher ses cruautés, mais non pas 
ses faiblesses ? M. Ilugo en a tait une reine bonteusement 
debauchée, qui paye  prix d'or l'amour d'un vit Italien qui 
la trompe pour une aulre femme. Marie Tuàor (ce grand 
nom de Tudor ainsi avili, iuste ciel ! qu'aurait dit Shaks- 
peare de son élève l'l. Hugo ?) Marie Tudor trabie et 
vo|ée par un Italien, assemble sa cour et son conseil, et 
eu présence de tous elle accuse cet Italien, elle le livre  
la justice; bien plus, elle fait appeler le bourreau, et cite 
dit au bourreau : Je redonne cette téte charmante! Et 
tout ce dranle est ainsi fait. Quand l'Italien kle la reine est 
perdu par elle, elle veut le sauver; elle imagine donc un 
certain tour de passe-passe, qui ne réussit pas. On voit 
donc l'Italien marcher au supplice, un voile noir sur la 
tte, et " la main un cierge de cire jaune ! Et voilà ce que 
l'l. Hugo appelle un drame! et voilà comment il s'imagine 
imiler Shakspeare ! 
I. ,'ictor Hugo e s'arrëte pas k Hernani, à Marion 
Delorme, à Marie Tudor. Ce sont It autant de leçons inu- 
tiles ! Plus le parterre résiste au poëte, et plu la difficulté 
l'excite, fit conseils sévères du public, ni prières de l'a- 
mitié, ne peuvent éclairer 5|. Hugo sur les dangers de la 
route nouvelle dans laquelle il est cuirC Il arrive donc 
qu'un jour en plein "héà|re-Français, dans une pièce in- 
titulée £c Itoi 'amuse, M. Hugo, laissant toute pudeur 
historique, s'abandonne follement aux plus tristes, aux 
plus misérables, aux plus ahsuràes inventions. Fimlrez-vous 
que cette fois 51. Hugo prenait la doreuse, non plus de la 
fille de joie, mais des bossus et des fous de cour. Pendant 
qatre actes le public français supporta toutes les hor- 
reurs de ce mélodrame; ce ne fut qu'h la fin que d'hor- 
ritales sifflets éclatèrent tout d'un coup avec un épouan- 
table fracas, lude leçon, que 1. tlugo avait mritée, et 
qu'on fit bien de ne I,d pas épargner, mme en présence 
de sa femme et de sa fille aihC, qui pleurait sans savoir de 
quoi il s'agissait. 
Parlerons-nous des deux mélodrames de M. Hugo, Lu- 
crèce Bor9iŒE et An9elo , tyran de Padoue? Lucrce 
orgiç, mère d'un soldat qui a nom Gennaro, est poignar- 
dée par son fils, comme ferait une des mères de Sophocle. 
Le poison joue un grand foie dans ce drame, et non-seule- 
ment le poison, mais encore le contre-poison. La dernière 
scène se termine par une longue file de cercueils dtinés 
à eceoir sept convives imprudents qui ont été souper 
chez une fille de joie : car la fille de ioie domine partout 
dans les drames de M. Yictor Hugo. "I'ons ces moyens vio- 
lents, tous ces horribles coups de théfltre, ces hommes 
qu'on empoisonne et qu'on sauve, ces coops de poignard, 
ces mystères qui rappellent beaucoup les mystères des ro- 
mans.al'Arme l,ad|iffe, sont-ce la, je vous prie, des 
moyens bien littéraires ? disons mieux, sont-ce là des moyens 
dramatiques dignes d'un esprit de cette trempe et de cette 
élévation? Angelo, tyran de Padoue, est tout à fait un 
mélodrame raillé sur le patron de L«crèce Borgia ; c'est 
toute une histoire très-compliquée de portes secrètes, de 
jalousies fertnées au cadenas, d'appartements dérobés, de 
longs couloirs sombres à travers lesquels les espions cir- 
culent comme font les vieux rats dans une masure aban- 
donnée. Du reste, rien du cœur, rien de l'esprit, tout ce 
drame-là appartient aux sens. Le poete cette fois s'amuse 
à nous tontrer des dangers physiques, des morts violenles, 
des résurrections inattendues. Cette lois encore le poison 
et le contre-poison des Bora jouent un grand rote dans 
ce drame. Cette fois encore nous avons  faire à une cour- 
tisane. 
Ce n'est donc pas dans ce qu'il apporte au thé'2tre qu'il 
faut chercher bi. Victor Hugo dans sa puissance et dans 
sa liberté. Pour le trouver tel qsfil est, lisez ses vers quand 
on in.piration est belle et pure; lisez Le Dernier Jour d'un 
£ondamnœe; lisez surtout son cbel-d'oeuvre, Notre-Dame 

IIUGO 
de Paris, cette entralnanterésurre¢flon du vieux {emp.s, 
des vieilles mo,rs et des vieilles passions de notre histoire. 
Notre.Dame ,te Paris, terrible et puisute lecture, dont 
l'esprit se souvient avec terreur comme d'un horrible cau- 
chemar. C'est à surtout que la verve, le géni¢, l'au- 
daoe, l'inflexible sang-froid et l'incroyable volonté du 
poëte s'étalent dans toute teur puissance. Que de malheurs 
entassés dans ces tristes pages! que de ruines relevées ! 
que de passions terribles ! que d'événements incroables]! 
Toute la fange et toute la croyance du moyen-lge sont pé. 
tries, remuées et mlées ensemble avec une truelle d'or 
et de fer. 
Et pourtant ce livre, brillante page arrachée ì notre his- 
toire, qui jettera son plus grand éclat dans la vie littéraire 
de l'auteur, et qui dans une plus sage tte aurait décidé 
de sa vocation, à savoir le drame et le roman, Ntre-Dame 
de Paris, qu'est-ce autre chose encore cette fois que la 
réhabilitation de la laideur ? Quasimodo est un tre encore 
plus difforme que Triboulet; l'auteur a épuise tout ce qu'il 
avait d'imanation et de verve  tordre cette épine dorsale, 
à noircir ces dents jaunes, fi faire _,rimacer cette bouche 
horrible, à charger ce visage abominable de pustules et 
de verrues. Qasimodo est sans contredit la plus abom 
nable création de la laideur; jamais «apaud n'est sorti plus 
horriblement doue de son écume infecte que Quasimodo, 
le sonneur de cloches sortant du crìne de l,l. Yictor Hugo. 
Quant à sa belle Esmeralda, cette chanson qui danse, ce 
rve aérien qui sort tout éc!ataut de pureté et de blancheur 
de la boue du drame, qu'est-ce autre chose après tout que 
la fille de joie réduile à son plus simple état d'innocence? 
Cetle fois encore éclate dans tout son jour et dans toute sa 
naïvelé la passion poétique de bi. Victor Hugo pour cette 
enfant perdue de nos civilisations pourries qu'on appelle 
la fille de joie. Je vous ai dejà fait remarquer cette prédi- 
lectiou du poêle pour ces bumhles et équivoques créatues 
de la nuit. 
A chaque nouvel ouvrage de M. Victor ttugo, vous 
retrouverez la même tendance, au moins bizarre, à reha- 
biliter ainsi ce pauvre métier de vice et de corruption, l,lème 
cela va si loin que dans un de ses meilleurs recueils, 
£es Feuilles d'Automne, et dans la plus belle pièce de ce 
recueil, La Prière laour tous, et dans ses Chants du Cré- 
laus¢ule, vous relrouverez encore étalée à plusieurs reprises 
cette espèce d'obsession funeste. Avant ces deux poëmes il 
faut placer £es Orentales. Ce que nous avons dit des pre- 
miers vers de M. Hugo se peut dire à bon droit de tous 
les autres. C'est toujours le mème poëte qui s'abandonne 
volontiers  l'inspiration de l'heure présente, amoureux  
ses heures, royaliste quand il n'obéit qu' son cœur, quel- 
quefois emporte par l'ardeur ríxolutionnaire, comme tout te 
monde, jugeant les ívénements et les hommes de très-haut, 
mais quelquefois de si haut qu'il réduit  rien les événe- 
ments les plus importants et les hommes les plus illustres. 
Homme de colère et d'inspiration, de passé et d'axenir, 
bomme de fantaisie a ant tout, d'un cœur mobile, changeant 
à volonté d'amitié et d'amour, comme c'est son droit de 
poête ; puis quand il a bien erré dans les vastes landes ou 
les belles campagnes d'une imagination cbargée d'épines et 
de fleurs, et qui n'a peur de rien, le voilà rentrant tout à 
coup dans l'intimité du foyer domestique, et là célébrant 
doucement toules les passions tendres, se livrant à toute 
les émotions naves, simple et bon père de famille, le moins 
poétiquement qu'il lui est possible. 
Les Orientiles, connue suite aux Odes et BaIlades, ne 
sont, à tout prendre, qu'une contrefaçon de lord B.ron. 
L'Orient ne se devine p&, il faut le toucher des mains or 
du cœur. 5I. Hugo a vu l'Orient dans l'àme, dans |e cœur 
et dans les vers des poëtes ses devanciers. Il a vu l'orient 
dans Cbàteaubriand et Lam artine, à peu près comme 
Fénelon a vu la Grece dans llomère; M. Hugo a rëví le 
reste. Ce fève s'appelle Les Oricntales. 
M. Ilugo, pour chercher à deviner l'Orient, qnïl n'- paz 



HUGO 
a, a besoin de grossir sa voix et de perdre sa poésie dans 
mille efforts extraordinaires, biais le poële des Feuilles 
d'Automne est le poële de la famille, il chante son bon- 
heur domestiqne, il a des vers pour tous ceux qu'il aime. 
Il célèbre les frais paysages qu'il a vus, les petits sentiers 
qu'il a parcourus, les fleurs qu'il a cueillies, les beaux ar- 
bres qui l'ont protégé de leur ombre, le beau soleil qui lui 
a dit : Je suis le Printemps, et la source limpide qui lui 
a chanté en murmurant : Je suis l'Ët, et le verger de l'Au- 
tomne, et la montage chargée de neige qui est venue à 
lui en s'Criant : Voici l'lliverl Voilà le graud charme des 
Fdlles d'Automne. Ce sont des sentiment sentis, des 
douleurs éprouves, des joies réelles, des paysages qui 
existent, des émotions toutes vivantes, des pluies saignantes 
ou cicatrisées. Ce livre, enfant d'une révolutiou, ne se res- 
sent nullement de l'époque à laquelle il a vu le jour. Quel 
que soit le tumulte de la place publique, le poëte reste fi- 
dele à lui-mème, car la poésie n'est pas faite pour reculer 
devant une révolution. 
Quedirons-nousdes C ha n t s du Crdpuscule ? C'est unmé- 
lange de bien et de mal, d'Orient et d'Occident, de politique 
et d'amour; c'est un souvenir en partie double des Ode, et 
des Feuilles tfAutomne. Ces Chants du Crtmscule, 
remplis de souveuirset d'imitations, poésie indécisecomme 
toute poésie sans opinion arrêtée et sans conviction bleu 
résolue, sont eucore, à tout prendre, une belle œuvre, bleu 
que ce soit l'oeuvre d'un poete qui doute après avoir été un 
poëte plein de foi. Jules 
M. Victor Hugo est né à Besançon, le 2Û fevrier 1802. 
Son père, Joseph-Lopold-Sigisbert Hcco, né à Nancy 
en 1774, eugagé volontaire ì quiuze ans, olficier en 1790, fit 
toutes les guerres de la révolution, et passa ensuite au 
service de Joseph Bonaparte, roi de .Naples, qui le nomma 
colonel; il le suivit en Espace, fitt promu au grade de 
général, et barrit en plusieurs rencontres le fameux E mpe- 
cinado ; nommé eu 1812 au commandement de la place de 
Madrid, il eut encore celui de l'arrière-garde peudant toute 
la retraite de i'armée française. L'année suivante il défendit 
Thiouville contre le« alliés, qu'il empécha de nouveau d'y 
entrer durant les cent jours. Il avait été nommé comte par 
l'empereur, fut mis ì la retraite en 18, et mourut en 188. 
Outre le grand poëte dont nous apprécions les Ciels et la 
vie, le général comte Hugo eut deux fils: l'alné, Abel 
Hcco, auteur d'une Histoire populaire de 2Vapolon et de 
La France pittoresque, est mort en 1855; le cadet, 
ène Bnco, « esprit qu'hé]as! Dieu submergea, » aunon- 
çait un beau talent avant d'être Irappé d'aleuatiou mentale. 
Il est mort en 1838. 
La première ënfance de 3I. Victor Hugo se passa tantôt 
en France, tant6t eu Italie, car son père se laisait suivre de 
sa famille dans presque tous .ses changements de garnison. 
De 1809 à 1811 il séjourna ì Paris, et y commença son 
éducation sous les yeux de sa mère, Sophie TnÉnucner, 
qui habitait une maiscn perdue au milieu de vastes jardins 
et située tout au Ioud de l'impasse des Feuillantines. Un 
veux prêtre lui enseigna les premiers éléments du latin et 
du grec, ainsi qn'ì son Irère Eugène, compagnon de ses 
Cudes etde ses jeux. Eu 1812, le jeune Victor alla rejoiudre 
son père en Espagne; il fut admis au nombre des-pages 
dl roi Joseph, et entra en cette qualité au sminaire des 
nobles de Madrid. Les événements politiques abrégèrent 
son séjour dans cette maison ; mais il eut le temps d'ap- 
prendre la langue espagnole, et cette circonstance a dt 
beaucoup influer sur son génie littéraire. 
Cependant de fàc]leux dissentiments avaient troublé 
l'union du général Hugo et «le sa femme; à la chute de 
lapoléon, la politique acileva de les séparer ì peu près 
complétement. Le père, usant de ses droits rigoureux, reprit 
ses fils et les fit entrer dans une pension o/ ils devaient se 
préparer aux examens de l'École Polytechnique. L'un et 
l'autre, du reste, avaieut une singulière facilité pour les 
mathématiques, et leurs noms retentirent aux distributions 

205 
de prix du concours général. Pourtant ils ambitionnaient 
d'autres triomphes; ils étaient poëtes tous deux. Docile à 
l'influence de sa mëre, fille de la VendC, qui lui avait 
inspiré une chevaleresqne sympathie pour les Bourbons, 
Victor avait composé une tragédie classiqne, intitul6e 
Irtamène, oh le retour de Louis XVIII se trouvait nus 
en action sous des noms égyptiens. Il en commençait uue 
autre qui devait s'appeler Athlie, ou les Scandinaves, 
lorsque l'Académie Française ayant mis au concours le sujet 
suivant: Des avantages de l'aude, il entreprit de le 
traiter, et euvoya une pièce de vers très-spirituelle et très- 
brillante, qui obtint uue mention. Elle eùt mme remporté 
le prix, s'il n'avait pas commis l'imprudence de confe«»er 
sou Age au docte aropage ; personne ne voulut admettre 
que l'auteur de ce morceau remarquable fùt un eufant de 
quinze ans, et ou lui fit payer cette préteudue inconvenance 
en reléguant sa pièce au second rang. 
Le père du jeune iaureat lui permit alors de renoncer 
aux matbématiques et de suivre en toute liberté son irré- 
sistible penchant. L'Académie des Jeux Floraux de Tou- 
Iouse le couronna deux lois pour ses odes sur la Statue 
de Henri IV et les l'ierges de l'erdun ; une troisième, 
Moïse sauvé des eaux, lui valut le grade de maltre ès Jeux 
Floraux (1820). Dans cette métne année il fouda avec 
ses frères le Conservateur lttraire, et il y publia des 
articles de critique sous un pseudonyme. C'est encore à 
cette époque que M. de Chàteaubriand lui donna ce nom, 
qui fit fortune, d'enfant sublime. 
En 1823 le roi Louis XVIII lui accorda une pension 
de 2,000 francs. Il épousa alors une belle jeuue fille qu'il 
aimait depuis l'enfance, M u* Foucher, fille d'un employé 
du ministère de la guerre. 
Le 6 février 1830 eut lieu la première représentation 
d'Hernani. On sait que le parterre servir ce soir-là de 
champ clos aux romantiques et aux classiques. On sait 
aussi que pendant cinq soirées consécutives, la salle, en- 
tièremeut occupée par les anis, les lauatiques, et surtout 
par la claque, cette institution inconmle des lerruques 
du grand siècle, et qui doit tant ì M. Hugo, faillit crouler 
sous les bravos ; mais qu' la sixième épreuve le publie 
se montra beaucoup plus froid, et qu'on entendit mëme 
plus d'une protestation formulée en sifllet.. Cela importait 
peu au poëte; il avait fait son 10 aot)t littéraire, et les 
plus f,:roces de ses amis avaient dansé une ronde infernale 
dans le foyer du Tbétre-Français, en criaut : Enfoncé 
Bacine ! 
L'Académie, scandalisée des témérités hnpies du novateur 
que l'ecole romantique avait acclamé son chef, sollicita 
Charles X d'interposer sa volonté souveraiue pour réduire 
au silence les révolutionnaires; mais le vieux roi, qui 
vosait avec plaisir le discrédit de l'école libérale et voltai- 
rienue, repondit finemeut : « En fait d'art, je n'ai d'autre 
droit que ma place au parterre. » 
Déjà l'année précbdente M. Victor Hugo avait donné au 
Théàtre-Frauçais Marion Delorme; mais la censure en 
empêcha la représeutation, ì cause du r61e que le p.oête y 
faisait jouer à Louis XIII. Comme dolommagement, M. de 
Labordonnaye fit porter à 6,000 francs la pension de 
M. Victor Hugo; mais celui-ci crut de son devoir et de son 
honneur de refuser. 
Daus la lettre quïl écrivit en cette occasion au ministre, 
M. Victor Hugo disait : ,, Mon dévouement au roi est sincère 
et profond. Ma famille, noble dès l'au 1531, est une vieille 
servante de l'État... J'ai moi-mcme peut-ètre aussi été 
assez heureux pour rendre quelques obscurs services au 
roi et à la royauté. J'ai fait vendre cinq éditions d'uu livre 
oil le nom de Bourbon se trouve ì chaque page. Bien d'hos- 
tile ne peut venir de moi. Le roi ne doit attendre de 
vïctor Hugo que des preuves de fidélité, de loyauté et de 
dévouement. » 
Cepeudant l'interdiction de Marion Delorme jeta tout ì 
fait le poëte dans le camp du libéralisme, qui depuis long- 



temps lui faisait les plus séduisantes avances et lui montrait 
en perspective une popularilé inouïe. En 1827 déjb, l'Ode 
la Colonne avait offert quelques traces de patrioterie bona- 
partiste. C'était un averfissement au pouvoir, et le pouvoir 
n'avait pas voulu l'entendre! 
tlarion Delorme ne fut jouge qnaprès la révolution de 
Juillet,  la Porte-Saint-?,lartin. M. Victor Hugo avait rompu 
avec son passé. En 1831, au sein du comité dramatique, 
il s'oubliait jusqu'à traiter d'i»oEdme le gouvernement de la 
Restauration» et lI. Theodore Arme lui répondait par ces 
paroles sévères : « Rdirez donc, monsieur, de votre bouton- 
nière ce ruban rouge que vous tenez des Bourbons. » Quel- 
que temps après il écrivit pour l'anniversaire des journées 
de Juillet une cantate, dont H ru i d composa la musique. 
Eu 1831 parut z'fotre-Dame de Paris; le 22 novembre 1832 
le 1toi s'amuse lut représenté au Tbé',Rre-Français, et in- 
terdit presque immédiat, ment ; deux mois plus tard la 
Porte-Saint-Martiu lit jouer Lucrbco Borgia ; Marie Tudor 
suivit bient6t. La Rewte de Paris inserait Claude Gueux 
et une Etude sur Mirabeau, et le public accueillait avec em- 
pressement deux hOUX eaux recueits de poesies : Les Feuilles 
d'aulomne et les Chants du Crépuscule. Le 8 avril 1835, 
Angelo fut joué au "fhéatre-Français par M u Mars et 
.',I ' Dorval; depuis il écrivit pour M a« Louise Bertin, 
fille de M. Bertin l'alné, dans l'intimité duquel il etait de- 
puis longtemps admis, le libretto de la Esmeralda. 
Officier de la Légion d'Honneur en 1837, il publia suc- 
cessivement deux nouveaux volumes de vers, Les S'oipc 
trieures et Les Rayons et les Ombres, qui ne le cèdent à 
aucune de ses plus belles inspiratious lriques. C'est toujours 
la même mélodie du rh?tbme, la même musique de la 
rime, et toutes les richesses de cette imanation prodi- 
gieuse, cette magnificence de desctiptions, ce luxe d'ima- 
ges, de tableaux, cet dclat, cette pompe qui n'appartiennent 
qu'à ce beau et vigoureux génie. 5lais on y retrouve aussi 
tous ses défauts, encore exagérés peut-être, une préoccu- 
pation constante de la partie matérielle de l'art, un reten- 
tissement magnifique, mais ide, le son étouffant presqtra 
partout le sentiment, la couleur et la forme deguisant i'ab. 
ence de la peusée, la passion fausse et tbeatrale faisant tort 
aux accents vrais du cœur humain, sans parler des expres- 
sinus bizarres, affectées, obscures, outrees, des rapproche- 
ments forcés etde mauvais g,»0t, des navetés travaillees et des 
antithéses puCiles, tout ce strass que M. Vie/or Hugo prelère 
an plus pur diamant de son écrin poétique. Ajoutons que 
dans un des plus beaux morceaux de ce dernier recueil, La 
Tristesse à'Oltmpio, le poëte, dans l'incarnation candide 
qu'ila de lui-mgme, se met en seènede la façon la plus ridicule 
du monde; si bien que le surnom d'Ol,mpio lui en est  tout 
jamais demeuré. Ce livre contenait aussi les premiers vers 
amoureux qu'ait faits M. Hugo ; vers charmants, inspirés 
sans doute par d'idéales passions, car la médisance ne 
saurait dire de quelle Juliette il est le Roméo. 
Boy Blas, drame en vers, fut joué le 8 novembre 1838, 
art tltetre de la Renaissance. Le talent de Frederick Le- 
m a I t r e ne ¢onIrua pas peu à relever la pièce, qui fut d'a- 
bord accueillie par une grgle de sifllets. 
En 1860 5I. Victor Hugo brigua les suffrages de i'Aeadé- 
mie Française, mais on lui préféra bi. Fiouren s; le 3 juin 
1Sa I il fut Cu en remplacement de Népomueène L e m e r c i e r. 
La curiosité attira une nombreuse affluence au jour de sa 
réeepfion; on s'attendait a un chant de triomplte du chef des 
romantiques on se demandait comment iltraiterait ses adver- 
saires d'hier, ses confrères d'auiourd'bui; mais la curiosité 
publique fut déjouée, et le discours de M. Hugo fut un dis- 
cours tout politique. Il donnait ainsi le premier exemple 
d'une innovation dont ce corps savant a peut-ëtre abusé de- 
puis. 
/.es Br!Iraves, trilogie en vers, représentée au Thétre- 
rançais en 183, tomba compiétement. Jamais 51. I:lugo 
'avait pouss$ si loin l'audace de ses tbéories dramatiques; 
tl n'avait pas encore produit une composition plus ineohé- 

HUOO 
rente et plus grotesque. On retrouve das cette pièce tontes 
les invraisemblances et toute la fantasmagorie de la poé- 
tique du boulevard du Temple. L'actiony est peu de chose, et 
ce n'est,/a dire vrai, qu'une perpétuelle tirade débitée entre 
trois ou quatre personnages. La citute éclatante des But- 
graves fut le signal d'un revirement dans l'opinion pu- 
blique ; une réaction se fit dans le sens classique, et 
M. Ponsard, l'auteur de Lucrèce, fut acelamé le chef de 
l'Cule du bon sens. 
L'orgueil de 5I. Victor Hugo avait reçu une profonde bles- 
sure; il s'en vengea sur M. Saint-Mare-G i r a r d i n, auquel il 
repondi'., lors de la réeeption de celui-ci à l'Académie Fran- 
çaise, au mois de janvier 1845. Il eut le mauvais goret de 
donner à son discours une couleur de mercuriale presque 
offeusante pour le professeur coupable d'irrévérence envers 
Lucrèce Bor9ia. 
Le Rhin, leltres à un ami { 18),livre sans goflt et sans 
esprit, où il se permet des calembours dignes de M. Grassot, 
n'était guère faiX pour le réhabiliter dans l'opinion, biais 
le poëte avait d'autres soueis; il enxiait les lauriers poli- 
tiques de 5I. de Lamartine, et dans ses rëves fiévreux 
n'ambitionnait plus qu'une chose, les luttes de la tribune; 
son regard d'aigle voulait des horizons infinis. Le gou- 
vernetnent de Juillet eut la bonne volonté de se prêter aux 
désirs du poïte : il fut créé pair de France, par ordonnance 
royale du 16 avril 18t5. 
M. le vicomte "¢ictor Hugo patin beaucoup au Luxera- 
bourg; dans la session de 18117 il prononça de nobles 
paroles en faveur du prince Jéréme, qui demandait en ce 
qui le concernait l'abrogation de lois de proscription contre 
la.famille Bonaparte. Mais, hélas! M. le vicomte Vietot 
Hugo s'clair avisé trop tard d'offrir son concours  la mo- 
narchie constitutionnelle; à quelque temps de là elle tom- 
bait dans l'ablme de Février. 
Aux élections eompiétoentaires de Paris en juin 188, le 
nom de .i. Victor H,go, candidat réactionnaire porté par 
l'Union éleclorale, sortit le septième du scrutin avec un con- 
tingent de 86,9f, voix, aprës le cito3en Canssidière, avant 
le citoyen Lou i s-N a p o 1éo u Bonaparte, car alors tout le 
monde était ciron'en. Il purin toul de suite contre les alo- 
I i e r s n a t i o n a u x, et siégea parmi les membres de la ma- 
jorite jnsqu'aux approches de l'élection présidentielle. A 
cette époque I'Évdnement, journal fondé par lui quelques 
mois auparavant, poa d'abord à mots couverts et puis ou- 
vertement sa candidature à la présidence de la répubfiqne. 
D'après ce journal, le peuple devait nommer un homme de 
génie, un poëte, attendu que le poëte referait le monde à 
l'image de Dieu, « et qu'au-dessus de tous les hommes et de 
toutes les soeiétés, il y a celui que les Grees appelaient 
rotrl;, celui «lui fait; que les Lafins appelaient vates, 
celui qui predit; bras et tgte, coeur et portsC, glaive et 
flambeau; doux et fort; doux parce qu'il est fort, et fort 
parce qu'il est doux ; conquérant et léslateur, roi et pro- 
phète; lyre et ëpée ; ap0tre et messie. ,, 
L'Événement, depuis son premier usqu'à son dernier 
numéro, était écrit dans ce stle olympien. La fine fleur du 
romantisme ormait le personnel de sa rédaction, Charles 
Huao et François-Victor ttcao, les deux fils du poëte, tout 
frais échappés du collé.ge; Auguste Vacquerie, l'auteur des 
Demi-Teintes et de Tragaldabas ; Mery, le fils de lïrgile, 
qui y publia un roman de sa façon intitulé le Transporté ; 
Théophile G aut i e r, Adolpbe Caille, Philoxène Boyer, Paul 
Meurice au profil penseur, et ¥itu, dont le nom est nne 
9luire; le ban et l'arrière-ban de ces flagornenrs qui ont si 
pernicieusement influé sur le talent du marre en lui faisant 
croire, par leurs louanges pyramidales, a sa propre dvinité. 
e lui disaient-ils pas en effet : 
Ici-bas et lb-haut vous èles deux seigneurs, 
Vous faites votre livre et Dieu fit sou p;'iutemps. 
Et hieot6t, lorsque enfiu resplendira le v6tre, 
On pourra comparerun univers à l'antre. 



Quant à sa couleur politique, la feuille de M. Hugo, d'a- 
bord presque rétrograde, passa rapidement, après l'élection 
du 10 décembre, par toutes les nuances de la démocratie, 
et s'arrta enfin sur les limites extrêmes du socialisme, 
ubi defuit orbis. Il n'est pas besoin d'ajouter que son 
patron accomplissait simultanément la mme évolution 
dans l'Assemblée législative, où il avait été réelu. Dans 
la discussion qui précéda la nomination de la commission 
chargée de préparer, conformément ì l'art. 13 de la cons- 
titution, les lois relatives ì la prévoyance et ì l'assis- 
tance publiques, M. Victor Hugo donna des gages à ses nou- 
veaux amis en soutenaut la tl,èse socialiste. Après le 13 
juin il fit diversion au triomphe des vainqueurs eu porta[d à 
la tribune une protestation contre les excès commis par 
des gardes nationaux dans les impdmeries Boulé et Proux. 
Au mois d'aoùt 1849, il présida le Congrès de la Paix, 
« cette jonglerie maltfiienne, » suivant P.-J. Proudhon ; il y 
prououça un discours en plusieurs antithèses. « Un jour 
s tendra, dit-il, où les boulets et les bombes seront remplacés 
par les rotes. Un jour viendra o/ l'on moutrera un canon 
dans les musées, comme on y montre aujourd'l,ui des ins- 
truments de torture en s'étounant que cela ait pu ëtre. ,, Et 
plus loin : « Supposez que les peuples de l'Europe, au lieu de 
se jalouser, de se haïr, se ittssent aireC, les 128 milliards 
donnés depuis trente ans ì la haine eussent été dounés à 
l'amour. » 
L'Ëvénement qui, par nécessité, s'était fait en quelque 
sorte le satellite de La Presse, et se servait de ses 
presses et d'une partie de sa composiliou, poursuivait 
le cours de ses folatreries et de ses inepties. Tant6t il 
déclarait que la saisie de La Presse avait causé à la 
Bourse de Paris une baisse de 2 ff. 50 c. ; tant6t il disait 
son fait, en passant, à bi. de Lamartine, « l'homme de ce 
temps qui aura le plus contribué ì enraciner daus les es- 
prits ce préjugé vulgaire et absurde que le poëte est inha- 
bile et incompétent dans la couduite des allaites humaines ,. 
Ailleurs il publiait, in extenso, le discours prononcé par 
M. Yictor Hugo dans le sein de la commission du conseil 
d'État chargée de préparer la loi sur le thé,ltre, et qui avait 
tait appel aux lumières des hommes spéciaux. L'austèrepen- 
seur se déclarait partisan de la liberté illimilée de tout dire 
sur la scène : « Sans la liberté illimitée le tl,éatre ne saurait 
tre un enseignement pour le peuple, une école ì la fois re- 
ligieuse, politique, historique et morale. » 
Au mois d'avril 1850 M. Yictor Hugo attaqua avec élo- 
quence le projet de loi sur la déportation; pour la première 
fois depuis Février il avait su trouver des accents vérita- 
blemeut inspirés ; il se mourra plus étudié dans la discussion 
du projet de loi relatif à la restriction du suffrage uni- 
versel. 
Dans le cours de l'année 1851, il prononça lui-mëme la 
défense de son fils aihC traduit devant la cour d'assises 
pour la publication d'un article sur la peine de mort. 
Opposé à la réélection du président de la république, 
et l'un des plus violents adversaires de l'Élysée après le 
coup d'État du 2 décembre il fut iuscrit sur la liste de pros- 
cription qui bannit de France un certain nombre de repré- 
sentants. M. Victor Hugo avait d'ailleurs courageusement 
pris part ì la lutte que l'extrdme gauche essaya de soute- 
nir dans les rues de Paris. Après avoir séjourné quelque 
temps en Belgique et ì Londres, il s'est retiré avec sa fa- 
mille dans l'lle de Jersey, où il s'occupe de travaux iittéraires. 
Eu 1852 parut à Bruxelles lVapolon lePetit, pamphlet qui 
prelue partout fut l'objet des poursuites de la police; et 
l'annee suivante il fit encore imprimer un recueil de vers iu- 
titulé Chdtime ts, daus lequel il s'essaye au rOle de Juvénal, 
et qui ne circule que sous le manteau. W.-A. Dccarr. 
HUGTENBUIAGii ou HUCHTENBUI1CH (J wu), 
peintre de batailles distingué, né ì Harlem, ca t6-16, eut pour 
maltres à lome son frère Jacques V_, HC«TE.XUOECU, mort 
prématurément, et ì Paris Van der Meulen; mai ses modèles 
principaux furent les ouv,'ages de Phil. Wouverman. Le 

-- HUGUENOTS 2o 
prince Eugène de Savoie fit peindre par lui tes batailles qu'Il 
avait livrees en 1708 et 1709 avec le duc de Marlborough; 
elles ont été gravées, et forment un volume in-folio (La Hae, 
1725L En t7 t t Hugtenburgh se rendit à la cour de l'Cecteur 
palatin, où il exécuta divers ouvrages et fut en grand honneur. 
Il passa presque toute sa vieillesse à La Hae, et mourut 
à Amsterdam, en 1733. II surpassait van der Menlen, et 
approchait de Wouverman pour la delicatesse du toucher 
et mme pour la perspective aérienne. Son habileté à carac- 
teriser les diverses passions, les individus et les peuples, 
excitait à bon droit l'admiration de ses contemporains. Ses 
eaux-fortes et ses gravures sur cuivre ont aussi beaucoup 
de mérite. 
HUGUENOTS. Ce nom, célèbre dans l'histoire des uer. 
res dç religion, ne fut d'abord qu'un sobriquet populaire 
donné par les catholiques aux protestants, ou rélormés de 
France. Mais d'on vient-il? Suivant les uns, les partisan$ de 
la liberlé à Genève, s'étant fait admettre parmi les confé- 
dérés suisses, en auraient pri» la qualification d'eiçots ou 
huguenots, de l'appellation allemande edgenosse, con- 
fédérés, associës au mme sermeut, ou de Besançon lI- 
9ues, chef d'un parti religieux et politique, négociateur de 
l'allia.ce avec les cantons. Pasquier, dans ses Becherches, 
fait dériver ce mot de Huguet, ttz«9on, ou Chat-tIz«mt, 
lutin qu'on saluait du litre de roi, et qui, dans la croyance 
du peuple, courait les rues de Tours, pendant la nuit, à 
l'heure où les premiers protestants allaient au prt-he. De 
TI,ou le fait venir d'un endroit des environs de cette ille, 
où les religionnaires tenaient leurs réun;.ous, et où l'on as- 
surait que l'ombre de Hugues Capet se montrait dans la 
nuit. Selon Guy Coquille, ils auraient été ainsi appelés 
parce qu'ils soutenaient les droits des descendants de Hu- 
gues Capet contre les Guises, qui se prétendaient issus de 
Charlemagne. Enfin, le père Maimbourg, et, après lui, 
Voltaire, sans citer son autorité, supposent que cette déno- 
minatiou aura ét formée en France, par corruption, du mot 
hollandais huitgenoten , habitants de la mëme maison ou 
membres de la mème famille, parce que les prédicants 
clandestins commençaient leurs prdches par cette apostro- 
phe : M9ne libe tIuitgenoten ! 
On a donné le nom d'huguenote à un petit fourneau de 
terre ou de ionte, auquel s'adapte une marmite, qui se ferme 
herméliquement. Les huguenots s'en servaient pour faire 
cuire de la viande secrètement et sans bruit les jours dé- 
fêndns. De lb ce proverbe œufs à la huguenote, pour dire 
des œufs cuits nou canouiquement les jours maigres. L'es- 
prit de parti ne se cuntenta pasen France du tiheinjurie,x 
de huguenots : ou appelait les protestants parpaillots en 
Lauguedoc,fribours eu Poitou, du nom d'une monnaie de peu 
de valeur et très-décriée; ohristodins, ailleurs, parce qu'ils 
ne parlaient que du Christ. 
Lapremière levée de boucliers des huguenots, eut lieu en 
1562, sous le rne de Charles IX et ouvrir la série des 
guerres dites de religion. Elle fut provoquée par le mas- 
acre de Vassy. A la nouvelle de cet attentat, les humlenots 
coururent partout aux armes, et les hostilités commencè- 
rent au nord et au midi du royaume. Vainqueurs d'abord 
sous Condé et Coligny, tandis que G uise, Montmorenc;y 
et Saint-André marchaient à la tète des catholiques, et s'é- 
tant tout aussit£,t rendus maitres de diverses places impor- 
tantes, comme Grenoble, Lyon, Montaubau, Montpellier, Or- 
Iéans,-Rouen, Tours, etc., ils ne lardèrent pas à perdre suc- 
cessivement ces positions. L'ann6e suivante ils se soumet- 
talent ì l'édit de, pacification dounéì Amboise le 13mars 1563, 
et déposaient les armes. 
La seconde guerre de religion éclata quatre années plus 
tard, à la suite d'une véritable couspiratiou tramée par 
le parti hu,meuot, qui avait esperé surprendre la cour, 
plougée, ì Monceaux en Brie, dans les fëtes et les liesses. 
Le sang-froid, l'ênergie et i'activité de Catberine de 
MWd i ci s la sauvèrent du p6ril extrême qu'elle et ses par- 
tisans coururent à ce moment. Bentot les I,uguenots» ré- 



08 
duits à se retirer en Lorraine, où ils reçurent un renfort de 
troupes allemandes, se virent dans la nécessité de rançonner 
cruellement les populations pour subsister, et soulevèrent 
ainsi contre eux le peuple des campagnes partout où ils 
portërent leurs pas. Après avoir mis le siége devant Cbar- 
tres, ils durent s'estimer heureux d'accepter, le 28 mars t 568, 
à Longjumeau, pour bases d'une nouvelle pacification, ce 
mème édit d'Amboise qu'ils avaient lacéré. Enhardie par le 
succès, Catherine de ]Icdicis songea, dès le mois d'aoUt sui- 
vant,  en finir axec les novateurs et h ne plus tolerer à 
l'avenir dans le pays qu'ule foi, une loi et n roi. Elle 
essaya d'enlever Coligny et CentiC les deux chefs du pro- 
testantisme, et fit rendre, le 28 septembre, un édit par le- 
quel tout autre culte que le culte catholique était désormais 
sévèrement interdit en France. La lutte qui s'en suivit eut 
le caractère le plus odieux. Les deux partis ne firent plus 
de prisonniers, et massacrèrent sans pitié femmes, vieillards, 
enfants. Plus faibles que leurs adversaires, dont le nombre 
eut suffi pour les ecraser, les hugneuots puisaient dans leur 
foi religieuse une énergie opiniâtre, qu;. triplait leurs forces et 
leurs ressources. Ainsi s'explique leur attitude touiotws me- 
nsçante, même après legs funestes journées de J a r n ac et de 
Iloncontour (3 octobre 19), qui portèrent des coups si 
terribles à leur parti ; l'année d'après, ils réparaient leurs 
désastres, grâce à l'actisité et à l'energie de Lanoue et de 
Coligny. Les deux factions se sentaient épuisées : la paix de 
Saint-Germain-en-Laye (8 anUt 1570) mit fin  la troisième 
guerre de religion. 
Les massacres de la S a i n t-B a r t h é I e m y furent le signal 
de la q[,atrième guerre de relion, qui se termina le 6 
juillet 1573, par l'Cit de 13oulogne, lequel réintégrait les 
huguenots dans leurs biens et leurs honneurs, et leur ac- 
cordait la liberté de conscience en même temps qu'elle au- 
torisait l'exercice public de leur culte dans diverses villes 
importantes, notamment/ La Bochelle, .Iontauban, NI- 
mes, etc. Ce ne fut 1 toutefois qu'une trêve passagère, 
et dès le mois d'avril 1574 les hostilités recommençaient 
avec un nouvel acharnement, à la suite d'un vaste compl»t 
trainWpar les protestants à l'effet d'obtenir de plus solides 
garanties. L'insurrection éclata dans diverses provinces à la 
fois, Le duc d'Alençon, l'un des frëre du roi, vint lui prêter 
le prestige moral de son nom, tandis que l'union des po li- 
tiques aiouta h ses forces et h ses ressources ; et malgré 
la victoire remportée h Fismes par le duc de G u i s e, la cour 
dut céder et signer la paix dite de Monsieur, qui, négociée 
prs de Chteau-Landon, termina la cinquième guerre de 
religion. 
La sixième guerre de religion éclata h la suite de la 
tenue des états généraux de Biois; elle se termina, après 
des succès et des revers partagés, par la paix de Ber- 
gerac (17 septembre 157). La sep[ime est connue sous 
le nom de 9uerres des amooreux, sobriquet par lequel 
on désignait les jeunes seigneurs frivoles et debauchés qui 
formaient à 'érac la cour de Henri de Navarre. Ce furent 
leurs conseils qui déterainèrent ce prince à recommencer 
les hostilités contre la cour et les catholiques. Après s'ëtre 
d'abord emparé de diverses places, il fut vaincu à .Mont- 
Crabel par Birnn, tandis que Matignon reprenait La Fère, dont 
Coudé s'était rendu maitre. Cette guerre, qui ne fut qu'une 
série de brigandages et où de part et d'autre on sisait sur- 
tout  piller les églises et les chteaux, commença en mai 
1580, et se termina le 1 novembre de la même année par 
la paix de Fleix. 
La huitième le,cée de boucliers des huguenots, appelée 
aussi la 9uerre des trois Henri, parce que Henri de Na- 
varre, Henri de Guise et Henri III y commandèrent tous 
trois des afinCs, commença en 1583 et ce se termina 
qu'en t59g, par l'abjuration de H en ri 1" et son entrée 
à Paris comme roi de France. Les principaux événe- 
ments qui la signalèrent furent la bain'clic de Courras et 
la sanglante défaite que Guise fit es.uyer, près de Vemory et 
d'Aune,au, aux reitres et aux auxiliaires allemands accouru» 

HUGUE( 
en France pour aller grossir l'armée du roi de lavarre. 
On sait que les ligueurs finirent par se prononce contre 
Henri II! lui-même, lequel se vit réduit  se jeter dans 
les bras du parti protestant, et à implorer les secours du 
roi de lavarre. C'est au moment où les deux rois étaient 
'¢enus mettre le siCe devant Paris insurgé, que Henri III 
tomba sous le poignard de Jacques Clément (1589}. Cet 
événement impréu cbangea complétement la nature de la 
guerre. Les ligueurs, plut6t que de reconnaltre le roi de 
Navarre comme hë trier de la couronne, proclamërent i'a- 
vénement au tr6ne du vieux cardinal de Bourbon, sous 
le nom de Charles X ; et la lutte se prolongea encore 
pendant cinq ans. 
L'édit de'antes (t595) avait pour but de cicatriser les 
dernitres plates de cette longue et sanglante série de dissen- 
sions civiles et d'en clore à jamais le cours. En essayant 
d'en violer les dispositions, en rétablisant violemment dans 
le 13éarn le culte catholique, qui n'y existait plus depuis le 
règne de Jeanne d'Albret, Louis XIII provoqua la neuvième 
guerre de religion. On accusa les huguenots, non sans 
quelque rendement, d'avoir eu l'idée de se soustraire à l'an- 
torité royale pour fonder dans les provinces où ils domi- 
naient une république fedérative, à l'instar de celle des Pro- 
vinces-Unies. Des revers et des défeetiong les contraignirent 
à demander la paix, qui tut signée en 1623, à Montpeilier. 
Le traité, tout en maintenant les stipulations de l'Cit de 
hantes relatives au libre exercice de leur culte, restreignit 
aux villes de Montauban et de La Rochelle les places de 
suretWaccordees aux protestants. 
Deux ans plus tard, au commencement de 1625, eut 
lieu la dixième guerre de religion, provoquée, cette fois en- 
core, par la mauvaise foi de la cour, qui cberchait à éluder 
les stipulations du traité de .Iontpellier. _Iai dès le mois de 
fevrier Richelieu, inquiet de la situation genérale de l'Eu- 
rope, se htait d.'y mettre fin en renouvelant un traité qui 
lui laissait la libre disposition de toutes ses ressources pour 
peser dans la balance des destinées du monde. L'Angle- 
terre et |'Espagne comprenaient trop combien une aussi 
puissante diversion pouvait favoriser leurs projets pour ne 
pas exciter le parti huguenot à prendre les armes, et alors 
eclata la on:iëme et dernière guerre de relion 
chelieu, résoln d'en liuir, aila mettre le siége devant La R o- 
c hel I e, qui, après une résistance de quatorze mois, prolnn- 
gée par le secours de i'Angleterre, dut ouvrir ses portes 
l'armée royale. En vain Rohan avait essayé, avec les sub- 
sides de l'Espagne, de prolonger encore quelque temps la 
lutte dans le midi de la France. La prise de ce boulevard 
de la réforme avait été un coup mortel porté aux huguenots, 
comme parti politique, ainsi qu'aux velléités d'indépen- 
dance d'une certaine partie de la noblesse. Pamiers, Privas, 
Montauban furent successivement pris par l'armée royale ; 
et la paix de Xlmes (129), tout en maintenant les hugue- 
nots en possession de la liberté de leur cuite, leur enleva 
leurs places de suretC leurs forteresses, leurs assemblées 
ainsi que leur oganisatinn républicaine et fedérative par 
églises, créée huit années auparavant. 
11 est assez curieux de remarquer que durant les guerres 
religieuses de France, les trois plus grands adversaires de 
la réforme avaient épousé des femmes huguenotes, savoir : 
le duc de Guise, la princese Arme d'Este ; le duc de .Mont- 
pensier, Jacquette de Longwi; et le marechal de Saint-An- 
drC llarguerite de Lustrac. En ces temps de désordre, un 
baron de Pardaillan, zélé huguenot, était abbé de Clteaux. 
Dans lesactes officiels, sous Louis XII[ et sous Louis XIV, 
le mot huguenot est presque touiours remplacé par cette 
désignation : ceux de la religion lrtendue réformée. 
Louis XIV révoqua l'édit de 3antes, et fit poursuivre les 
huguenots; les d rago nnadesen firent convertir quelques- 
uns; d'autres furent envoyés aux galère; Ie plus grand 
nombre quitta la France, et porta nos arts en Allemagne 
et en Angleterre. 
Sous le rèe de Louis XV, on prit de nouveau des me- 



ures contre les huguenots, mais elles furent moins sévèrc.% 
et en 17t6 ils osërent se montrer publiquement dans le 
Languedoc et le Dauphin& Peu à peu de nombreuses voix 
s'Cevèrent pour réclamer la tolérance religieuse. 51ontes- 
quieu donna le signal ; néanmoins, ce qui produisit le plus 
d'effet, ce fut, en 1762, la publication d'un écrit sur la to- 
ICance, écrit sorti de la plume de Voltaire, dont l'indignation 
avait èté soulevée par le sort de C a I a s. Malesberbes aussi écri- 
vit en faveur des huguenots. Ils ne firent plus inquiétés de- 
puis. Louis XVI, par sa declaration du 29janvier t788, leur 
rendit mème l'usage des droits civils, lls ne pouvaient cepen- 
dant occuper encore d'emplois publics. La révolntion de 
1789 les fit jouir de la plénitude de leurs droits de citoyel|s. 
L'empire constitua leurs églises. Au retour des Bourbons, en 
1815, ils se vivent de nouveau menac-As : à Nlmes et dans 
plusieurs localités du midi. ils fiwent en butte à de san- 
glantes agressions, auxquelles les passions politiques n'é- 
taient pas etrangères. Cependant, la charte de Lonis XVIII 
leur avait accordWle libre exercice de leur culte, en sala- 
riant mème leurs pasteurs, mais en proclamant le culte 
catholique religion de l'Etat. Il lallait la dmrte de 1830, 
confirmée sur ce point par la conslitutioa imp2riale, pour 
consacrer l'égalité des cuites en France. 
HUGUES, coiate de Provence et roi d'traite, fils de 
Tbibaut, comle d'Arles et de Provence, et de Berthe, tille 
de Lotbaire lI, roi de Lorraine. Ce prince, qui descendait 
de Charlemagne par sa mère, fut proclame roi d'traite, en 
926, "/t la place de Raoul de Bo«rgogne, que ses sujets ve- 
naient de chasser. Cinq ans plus tard, il s'asocia son fils 
Lotbaire; mais ses cruautës rendirent sa domination 
odieuse. Déjà il avait fait crever les jeux / son propre 
frère Lambert, duc de Toseane ; il réservait le mème sort 
à son neveu Bérenger, marquis d'Ivrée ; mais celui-ci le 
prévint, et levant contre lui l'étendard de la révolte, le con- 
traignit ì se réfugier en Provence, où il mourut, en 947. 11 
avait épousé en secondes noes Berthe, veuve de Raoul de 
ourgogne. 
llUGUES le Grand, dit aussi le :Blanc on l'Abbé, à 
cause des abbajes qu'il possédait, fils de R o b e r t, comte 
de Paris, et neveu d'E a d e s, qui furent tous deux rois, et 
père de Hugues Capet. Hugues le Grand dédaigna de 
ceindre la couronne, se contentant d'ëtre beauco, p plus 
puissant quesoa suzerain, hfi faisant la guerre et disposant 
par trois fois du tronc de France, tanl6t au profit de sa 
propre famille, tant6t en faveur des derniers ca rlovin- 
giin. 11 mourut en 95. 
HUGUES CAPET, roi de France, chef des CapC 
tiens, dest-à-dire de la troisième dynastie. Il était dé]à 
comte de Paris et due de France, Iorsqu'en 987, après la 
mort de Louis V, le dernier des Carlovingiens, il se fit 
proclamer roi, dans une assemblée des grands vassaux 
tenue à Noon, et sacrer à Reims. Il fit de Paris sa capi- 
tale, associa l'année suivante son fils Robert à la couronne, 
triompba par trahison de Charles de Lorraine, oncle du 
feu roi, qui avait été reconnu roi ì Laon, et mourut en 996» 
lais«ant la couronne à son fils R obert. 
HUIG (Ju»). Voyez DtCTIONqAInE, tome Vil, p. 558. 
HUILE (en groe g.).w.). On donne ce nom/ diverses 
substances assez mal définies, résultant de la combinaison, 
eu proportions variables, de plusieurs principes gras. Les 
halles diflèrentdesgrais s es en ce qu'elles restent liquides 
à une température de I0 à 15 ° centigrades. Elles sont ou 
vé9dlales ou animales. Parmi ces derniëres figurent I' huile 
de poisson, l'huile de foie de morue et quelques 
autres, telles que celle que la simple pression permet d'ex- 
traire du jaune des œufs d'oiseaux, ou encore l'huile pro- 
datte par la distillation des malières organiques azurCs 
(sang, os, muscles, etc. ). Cette derniëre, que l'on appelle 
huile animale empyreumatique ou huile animale py- 
ro9énëe, est brune, épaisse, d'une odeur fétide; soumise 
à plusieurs distillations successives, elle perd ces diverses 
propriétés, et devient l'huffe animale recliflde de Di1919el, 
tc. »  co,ves. -- r. xh 

09 
ainsi nommée da chimiste qui la fit connaltre, et employé 
aulrefois dans le traitement ,les fièvres intermittentes et dg 
quelques maladies du système nerveux. 
Les huiles vë9(lales se divisent en huiles fi:es ou 9rasses, 
et halles volatiles ou essentielles. Les premiéres sont 
presque complétement inodores, et ne laissent percevoir 
la langue qu'une sensation d'onctuosité; les secondes of- 
frent des caractères tout opposés, une odeur plus ou moins 
intense, une saveur plus ou moins cre et irritante. Peu- 
dant que celles-ci se volalilisent, mais sans se dpeom- 
poser, a unetempérateurede 150 à 160 ° , celles-lb restent li- 
quides jusqu'à ?00 et mëme 00 °, pour se transformer alors 
en huile volatile, en acide acétique, en gaz oxyde de car- 
bone et en hdrogëae carboné. 
Les bulles grasses renferment toutes au moins deux prin- 
cipes gras, l'un solide ( la m a rga ri n e), l'autre liquide ( 1' n- 
ICnc); la st«arine ne se trore qae dans les halles et 
les graisses d'origine animale. Elles sont saponifiables par les 
alcalis ". dans cette action, l'alcali se suhslilue à la gl ycé- 
fine, en se combinant avec l'acide gras naturellement 
conlenu dans l'huile employée. On subdiviseles bulles fines 
en huiles siccatives et huiles non siccalives, les unes 
durcissant à l'air, les autres y rancissant. Toutes les bulles 
fixes peuvent s'obtenir, soit par la pression (proeéde le plus 
généralement usité), soit par l'èbullition dans l'eau des corps 
qui les contiennent. On se procure par expression ou pres- 
sion des substances huileuses celles qni en gnéral sont 
le plus utiles dans les ar. Quant aux halles obtenues par 
ébullition, ce sont principalement celles dont la consistance 
est butyreuse ou s/.bacée, comme le beurrede caca o, de 
c o c o, 1' h u i I e d e p a l m e, l'huile de baies de laurier, et 
beaucoup d'aulres. Le procédé pour les huiles de cette ca. 
tégorie consiste à broyer les matibres, à les faire bouillir 
dans l'eau l'huile vient nager  la surface da liquide, 
elle est recueillie dans un ét d'impureté plus ou moins 
grand, et soumise ensuite à la rectification, au mo.en d'une 
nouvelle tusion sur un feu doux, suivie quelquefois de filtra- 
tions ì chaud, et autres procëdés de purification appropriés 
suivant l'espèce et les circonstances. 
Quand on presseau moulin les graines à l'huile, celle qu'on 
retire la première, et par la simple expression, e.t la meilleure 
et la plus douce : oalattomme huile vierge. On donnele nom 
d'ëchaudée à Pa seconde huile, qu'on extrait des tourleaux 
le la première, avec efort, et au moyen de plaques chaudes, 
otl h l'aide de l'eau bouillante liquide, ou, encore mieux, de 
la vapeur d'eau. On appelle t ourteau le mare qu'ott re- 
tire de la presse, bons lourteaux ceux qui contiennent en- 
core un peu d'huile, et tourteaux secs ceux qui en sors 
CuisC. 
L'huile grasse existe toute formée dans les graines, 
les amandes des traits, et dans la pulpe de ceux qui 
la recèlent; mais pour qu'elle y soit sensible, et pour 
qu'on puisse la retirer, il faut qne ces subslances aient 
acquis de la maturité, et qu'une partie du liquide aqueux 
surabondant s'en soit évaporée ; sans quoi, à la presse, on 
n'obtiendrait qu'une liqueur laileuse ou émulsive. Dans le 
pressurage de la plupart des fi'oits, il se mle toujours ì 
l'huile grasse une certaine quantilé d'huile volatile. En per- 
dant de son mucilage, l'huile grasse devient raacescible, et 
elle acquiert quelques-unes des propriélés de l'huile volatile; 
elle devient alors, comme celle-et l'est éminemment, en 
partie soluble dans l'alcool. Les cieux halles existent con- 
curremment dans la plupart des graines, et dans ce 
c'est dans l'aman,le ou périsperme que s« tient l'huile 
grasse, et dans la pellicule l'huile volatile. 
Le« principales huile non siccalives sont celles d'olive, 
de colza, de navette, d'amande douce, de laine, de ben, 
de ricin, etc. 
L'huile d'olive, extraite de la pulpe des Iruils de I' o- 
Il v i e r, est la plus estimee. Maisil faut choisir avec soin le 
moment propice à la recuite des olives qui doivent servir 
h sa labricalion. L'olixe trop more donne une huile p/dense • 
."1 



tO 
encore verte, elle fournit une Imile amère, qui a reçu des 
anciens le nom d'hz«Ite omphacine (de 6.,., raisin vert, 
verjus). L'huile d'olive vierge est verd'tre. L'dchaudée est 
ja,ane ; mèlée  l'huile vierge, elle donne l'huile d'olive or- 
dinaire employée comme aliment Cette huile est souvent 
falsifiée avec de l'huile d'œillette. On reconnalt cette fraude 
à l'aide de l'acide hypo-azotique, qui solidifie la première et 
laisse la seconde à l'Cot liquide. 
L'huile de co l ".a provient des grainesdu brassiee cnm- 
pestris olcifera. Cette huile, d'une couleir jaune, d'une 
légère odeur piquante de crucifère, sert comme aliment, et 
aussi pour l'éclairae, pour la fabrication du savon xert, 
le foulage des étoffes, la préparation des cuirs, etc. 
L'huile de navette, qui oflre à peu près les mEmes pro- 
ptiéts que la précédente et qt6 s'emploie aux mec'mes usa. 
ges, s'extrait des graines d'une autre varitté de chou, le 
br««ssict tpus oleoEera. 
L'huile de capeline est préférable pour l'éclairage 
aux huttes de colz et de navette, parce qu'elle donne moins 
de fumée en brù]ant. 
L'httile de fafn e a une saveur douce, agréable ; sa «'on- 
lelr t janno, son odeur, très-l,gère. C'est incontestable- 
ment la meilleure, comme huile aliœenlaire, après celle 
d'olive. 
L'brille d'amandes douces, douée d'une saveur agréa- 
ble, et incolore «,n faiblement jaurtre. On la retire des 
fruits de plusieurs amandier. On l'emploie en plarmacie 
polr la préparation dn liniment volatil et du savon mé- 
dicinal. 
L'htile de ben est recherchée par la parfumerie, à cause 
de la propriélé dont elle jouit de ne rancir que très-diflici- 
lement. Elle provient du moringa oie(fera. 
L'huile de tic i n, ou htile àe palma-Christi, est lrès- 
emploée en tl,érapeu tique. C'est, avec l'huile de c r o t o n 
et l'huile dpurge , une des plus purgatives des bulles gras- 
ses. L'huile de ricin, ailée avec son vulume d'alcool rec- 
tilié, se dissout en totalité; elle laisse tre rësidu, si elle a 
été falsifiée avec une autre imile. 
L'huile de s ds a m e est propre à l'alimentation et à la fa- 
b,'ication des savons dnrs. 
Dans la cat,,gorie des I,,iles siccatives, il faut ranger 
les hui'.e de lin, de noix, de chènevis, d'«-illelte, etc. 
L'htile de I i n est ton}ours plus ou moins colorëe; elle a 
une odeur piquante et une saveur désagréable. Elle entre 
dans la composition des couleurs h l'huile, des vernis 
gras et de I'e ncre d'imprimerie. On augmente sa propriété 
siccative en la faisant bouillir avec de la lilfia,-ge, ou d'au- 
tres sels ou oxydes métalliques. Ainsi p,'éparée, elle sert à 
la fabrication des taffetas gommés, des toiles cirées, etc. 
Lhuile de noi x est jaune. Son odeur est légère. Pré- 
parée à froid, elle a nne saveu," douce, et est employée 
comme aliment. Obtenue à chaud, elle est plus ou moins 
cre, et sert po,if l'éclairage pour la peint,tr, et pour la 
préparation des vernis et du savon vert. Elle est plus blan- 
cl,e que les I,uiles de lin et de chanvre, mais moins siccative. 
L'hzile de choenevis ou hule de cha vre est ira,ne 
et d'une saveur désaéable. Elle est employée pour la 
l.,e[uture, l'éclairage et la fabricatmn du savon vert. 
L'huile d'œillette, ou huile de p a vo t, est jaunre. 
Elle na ni odetr ni saveur bien sensibIe, ce qui permet de 
s'en servir pour sophistiquer l'huile d'olive. On l'emploie 
aussi comme aliment, et pour la peinture et l'éclairage. 
lIais elle est fort mauvaise ì brffier. 
Les huiles volatiles, huffes essentielles, ou encore e s- 
seces, outre les caractères que nous leuravons assi- 
gnés plus haut, sont généralement peu solubles dans 
i'eat ; distillées avec ce liquide, elles hi communiquent letr 
odeur. Elles prennent feu ì l'approche d',tu corps en com- 
bustion, et broient avec une longue flamme, en répandant 
beaucoup de fumée, causée par la ande quantité de car- 
boue et d'hydrogène que ces htliles renferment. Ces ëlé- 
ments se trouvent en assez grand excès pour ne pouvoir 

HUILE 
braler entirement lorsqu'oa enflamme l'essence ; c'est de 
cette combustion imparfaite que provient la fumée. La com- 
position des bulles essentielles ne ressemble à celle des 
bulles fines qu'en ce qu'elle résaite de la combinaison de 
deux corps immédiats, l'un eolide ( la stéarotène), l'aulre 
liquide (l'oléoptène). Le plus ordinairement le sige de 
huiles est dans la racine, l'Corse de la tige, les feuilles, le ca- 
lice des fleurs, les enveloppes des fruits et des semences. 
Elles sont en général iacilement solubles dans i'acool et 
dans l'éther, difficilement combinables avec les alcali 
Chaque plante fournit l'huile esentielle qui lui est propre, 
quelquefois par simple expression : ce sont celles dans les 
airCies desquelles l'bulle repose en gouttes disfincte¢, 
telles que dans l'êcorce de l'orange, du citron, etc. D'aulres 
ois on emploie la distillation. Enfin  des procédé.¢ partic. 
liers sont nécessaires pour recueillir certaines esences, 
telles qe celles de ils, de tubéreuse, de jasmin, de jacin- 
the, de violette, etc., qui,n'étant point conservées par la 
plante dans des réservoirs particuliers, se volatilisent aus- 
sit6t q«'elles sont produites. 
En général, la couleur des huiles essentielles est blanche, 
tirant sur le doré; presque toutes jouisseut au plus haut d- 
gré de l'odeur et de la saveur de la plante d'off i'lmile a 
extraile. Beaucoup d'enlreeiles perdent en veillissant leur 
odeur propre et en partie leur fluidité. Elles dissolvent,avec 
une cxtrOne facilité le camphre, le soufre, le phosphore, 
les baumes, les rësines, les savons, les hufles grasses, les té- 
cules coloranles, et mgme quelques oxdes mtalliques. 
Les principales bulles volailles extraites par distiilation, et 
dont on fait le plusd'usage, sont celles de cannelle, de 9iroe, 
de cddfat, de bergamote, de citro, de lavande, de 9e- 
nièvre, d'oigan, de t d r é b e n t h i n e. L'hd rop, ène et le car- 
bone, l'hydrogène surtout, sont les éléments prédominants 
dans la composition des hniles. ¢oilà pourquoi, à la distil- 
lation destructive, elles fournissent en plus grande quantité 
qu'aucune autre substance connue, un gaz d'éclairage fort 
ahon,lant, très-caïhuré, et dont par conséquent la proprieté 
ifluminante est trè-considérable. 
Les bulles essentielles ont de nombreux emplois dans les 
arts. La facilité avec laquelle elles dissolvent les huile« fixes 
et les graisses les rend propres ì enlever les taches pro- 
&rites par les corps gras. Dans la fabrication des vernis, 
elles servent à dissoudre les résines. Elles sont encore re- 
chercbées par la parfumerie et la thérapeutiqne. Enfin quel- 
ques-unes forment un des principaux éléments de certaines 
liquetrs dç table.An«si l'appàt d'un gain illicite est-il sou* 
vent cause de la falsification des essences, falsification qui 
s'opère soit par leur mlange entre elles, très-difficile ì 
connaitre sans une grande habitude des odeurs particulières 
à chaclme, soit par leur mélange avec de l'bulle fixe ou de 
l'alcool. Une essence mélangée d'alcool blanchit l'eau que 
l'on ate avec elle. Quant aux essences dans lesquelles on a 
introduit «le l'lmile fixe, si on en verse une goutte sur un 
papier et que l'on approche celui-ci du feu, l'essence sera 
volatilisée et il restera une iache gTasse accnsah'ice de la 
fraude. 
|U1LE. Les distillateurs donnent ce nom à certaines 
l i q u e u r s d'une apparence huileuse à la vue et au gofit, 
comme l'huile de rose; apparence due à la haute dose de 
top de sucre qu'elles renferment. 
HUILE(Parfumerie). Les parfumeurs donnent le nom 
d'huile à divers produits de leurs officines, ayant tous pour 
baoes des bnil es fixes ou essentielles. 
Huiles dit antiques. On emploie pourlerr préparation 
les huiles d'amande douce, de ben, d'avelines, d'olive très- 
pure, etc. Ou les obtient en faisant infuser les fleurs dans ces 
huiles, ou en les aromatisant par des bulles essentielles. 
Celles qui se font par infusion sont d'oranger, de rose, de 
cassis, de jasmin, de seringat, de jonqnille, de tubérese, 
de xiolettes, de clématite, d'aubépine, etc., et de toutes les 
fleurs fugaces : elles sont d'autant pins odorantes qu'on .a 
t epté phs souvent les in|usions. 



HUILE -- HUILE DE FOIE DE MORUE 
Huile de lavane, lIuilu, 59 grammes ; e..enee de la- 
van,le ou de marjolaine, 8 grammes : on prépare de mme 
¢des à la menthe, a thym, au serpolet, etc. 
lluile du phenix, pour fortifier la chevelure : Meelle de 
boeuf dépurée, 125 grammes ; huile épaisse de muscade, 125 
grammes; axunge, 60 grammes; liuile de girofle, de la- 
vande ,de menthe, de romarin, de sauge, de thym, de cha- 
cune 2 grammes ; baume de Tolu, 15 grammes ; camphre, 
4 grammes; alcoo! à 36 ° , 30 grammes. 
tlule des Cdlèbe$. Huile d'olive superfine, 1 litre; clous 
de girofle n ° 8 ; cannelle concassée, 15 grammes : faites 
bouillir pendant une heure, et ajoutez, après avoir remplacé 
i'lmile perdue : cannelle, bois de santal, de chacun 15 ., 
clarifiez et ajoutez : essence de Portugai, 15 grammes. 
Huile de Macassar. Huile de ben, 8 litres ; de noisette, 
4 litres; esprit de vin, I litre; essence de bergamote, 90 
grammes ; esprit de musc, 90 grammes; esprit de Portngal, 
60 grammes; esseuce de rose, 8 grammes. 
Huile de Vnus , voye: CaVL JULI-FoNTEN'ELLE. 
HUILE (Peinture à I' ). Les auteurs qu'on consulte le 
plus habituellement sur l'histoire des arts, Vasari, Carie Van 
Mander, Félibien, Descamps et les compilateurs qui les ont 
copiés, s'accordent à attribuer à Jean Van Ey ck l'honneur 
d'avoir découvert la peinture à l'huile. Les plus hardis vont 
mme jusqu'à préciser une date, et affirment que c'est en 
1410 que cet habile artiste s'avisa pour la première fois de 
dissoudre ses couleurs dans de rhuile de noix ou de lin. 
Beaucoup ont admis sans difficulté un fait qui paraissait 
,appuyé sur des b.moiguaes si considérables ; et cette asser- 
tion a acquis aujourd'hui l'auloril que le temps donne 
quelquefois à l'erreur elle-mme. Remplaçons désormais la 
légende par l'histoire. Dès le milieu du dix-huitième siècle des 
textes lbrmels avaient ëté cités qui prouvaient péremp- 
tuirement que l'usage de la peinture à l'huile était bien anté- 
rieur à Van Eyck. ous ne nous arréterons pas au memoire 
dans lequel le comte de Calus s'est efforcé d'établir que ce 
procédé était connu des anciens. Bien qu'il soit constant que 
les Romains se servaient de la peinture à l'huile pour de 
gros.iers ouvrages de alCotations, la conjecture,  notre 
avis, tient ici une trop grande place; et les textes all6goés 
sont si obscurs, que la question est restée douteuse. Ce qui 
demeure beaucoup plus sérieux, ce sont les asserlions de 
Lessing, qui et venu affirmer, en 1774, que la peinture t 
l'huile était praliqnée longtemps avant Van Eyck. L'auto- 
rité sur laquelle il s'appuyait était en réalioE lort grave ; 
c'éiait un manuscrit du moyen ge, resté jusqu'alors inédit, 
et que la mort seule l'empecha de publier. Ce manuscrit, 
ovrage du moine Théophile, rouva un prenfier C/teur 
dans Ch. Leiste ( 1781 ) ; et la meme année un savant anglais, 
Raspe, mit au jour une aulre édition du liv[e de Théophile, 
édition incomplète, il est vrai, mais qui reproduisait le texte 
du manuscrit de la bibliothèque de Cambridge. Baspe s'cm- 
para de récrit de Tbéophile comme d'une pièce justifica- 
tive pour l'ou rage qu'il a publié sous le titre de A critcal 
£ssay on Oilpanling proving , that the artofpaintn 9 n 
oi/was Ànown belote the prelended discovery qf John 
and Hubef Van Eyck ( Londres, 1781 ). Enfin, un troisième 
manuscrit, conservé à la Biblioflèque tropCinie, a servi de 
guide à ?,I. de Lescaiopier dans l'excellente édition qu'il a 
donnée de la Diversatm Artim Schedula de Théophile 
( Paris, 183, in-4 ° ). Ce livre, monument précieux d'une 
époque où l'on n'écrivait gère sur les arts, est une sorte de 
manuel, où l'auteur explique avec détails tous les prouCes 
emploés de son temps par les peintres verriers, les enlu- 
mineurs, les or[evres, etc. biais à quelle date écrivait Théo- 
plfile ? La question n'est pas encore résolue. Raspe, Ranzi, 
lmeric-David ci M. de Montabertle font vivre vers le dixième 
ou le onzième siècle. M.J.-M. Guicbard, dans la savante no- 
tice qui accompagne rdition de lI. de Lescalopier, établit 
assez bien que le livre de Théopbile est ptus moderne ; d'a- 
près les considérations qu'il développe, nous serions disposs 
à le dater du treizième- siècle seulement, et nous nous en 

tiendrons à cetle conjecture, iusqu'à ce qu'on chiffre anthel- 
tique soit venu éclaircir nos doutes. 
Théophile parle de la peinture à l'huile en divers endroit 
de son manuel. Trois passages surtout paraissent concluants ; 
et nous ne savons vraiment pas ce que les defenseurs de 
Van Eyck pourraient répondre à celui-ci : « On peut bro}-er 
dit Théophile, les couleurs de toute espèce avec la mme 
sorte d'lmile (l'huile de lin ) et les poser sur un travail de 
bois; mais seulement pour les objets qui peuvent tre sécbés 
au soleil; car chaque fois que vous avez applique une couleurr 
] vous ne pouvez en superposer une autre si la première n'est 
séchée ; ce qui, dans les images et les antres peintures, est 
long et trop ennuyeux (quod in imaginib et aliis pic- 
turcs dhturnum et toediosum nimis est ). » C'est bien 
là, si nous ne nous trompons, la peinture à l'huile, et l'in- 
convénient qu'on lui reconnaissait alors est mme nette- 
ment indique. L'bulle était lente à sécher : c'est là sans 
doute une des raisons qui empèchèrent cette manière de 
peindre de se répandre beaucoup au moyen age. Ainsi, l'em- 
ploi des couleurs disutes dans l'huile etait sin,m frequent, 
du moins connu au treizième siècle : il parait mme qu'il en 
est éga4ement fait mention dans l'ouvrage, plus ancien, d'E- 
raclius, De Coloribus et Artibus Romanorum , que Baspe a 
publié eu partie à la suite de son Essay on Olpaintn 9, 
et dont notre bibliothèque possède une copie qu'on croit 
complète. Un iaitgrave vient corroborer l'autorite des vaonn- 
ments écrits : on a retrouvé plusieurs peintures à l'huile an- 
térieures à la pretendue inention de Van Eyck. M. de 
lIontabert cite une peinture allemande excutée par Mutina 
eB 1297; mais il ajoute, avec beaucoup de raison, que dans 
quelques-uns des tableaux o les chimistes ont constaté la 
présence de l'bulle cette substance peut aoir été ajoutée 
après coup, soit pure, soit mèlée à des gommes ou à des 
ernis, et avoir fait corps avec l'enduit primitif. Des docu- 
ments récemment p:lbliés permettent d'affirmer que ce se- 
cret était connu en France; et, sans multiplier les exemples, 
nous rappellerons que dès 1355 Jean Coste peignit à l'lmile. 
Ainsi, Van Eyck n'a point invent ce procédé. Quelle lut 
donc la porlee de sa decouverte? Nous l'avons indiqué déjà: 
la couleur employée avec les huiles ordinaires était très. 
lente a scher; van Eyck eut ridée de les faire cuire et 
mdlne d'y ajouter une substance resineuse qui les rendit plus 
siccatives. Sans doute divers passages de Thophile, étudiés 
de tles-près, seraient de nature à faire supposer que l'usage 
des siccatils n'était pas complétement inconnu de son 
temps: ou ne peut cependant nier que Van Eyck n'ait com- 
pose un melange nouveau, et il est certain que ses tableaux 
ont conservé un. émail et une solidité inaiterables. Ce fut 
là sa gloire. Vasari, dont la relation a jusques ici eté mal in- 
terprétée, parle bien plus, comme le remarque 5I. Gui- 
chard, de l'invention d'un siccatif que de la dissolution des 
couleurs dans l'huile, idée vulgaire et insignifiante, qe les 
Italiens avaient enpruntee à l'antiquité, et qui n'appartient 
à aucune epoqne, h acme école, h aucun homme. 
La découerte de "¢n Eyck eut un tel retentissement, 
qu'au rapport de Vasari, Antonello de Messine lit le voyage 
de Flandre, alla visiter Van Eyck, et usa de Ioutes sortes 
de ruses pour surprendre son secret, qu'il rapporta triom- 
phant dans sa patrie. Dès lors, remploi de ce procêde de- 
vint géneral et la face de l'art fut renouvelée. Toutes les 
antres mtllOdes furent en quelque sorte abandonnées, ou 
do moins.ne conservèrent plus qu'un intérët d'erudition et 
de curiosité. 
Raconter rhistoire de la peinture à rhuile depuis le quin- 
ziëme siëcle jusqu'à nos jours, ce serait faire l'histoire de 
l'art, et ce n'est pas notre t'cbe. C'est assez pour nous d'a- 
voir indiquê quelques dates et d'avoir répondu par des 
textes explicites fi un préjugé qui a eu cours trop Ionemps 
parmi Ici savants et les artistes. PaUL l|Abi'l'Z. 
ilUILE DE CADE. Vo!te-. Cn. 
ilUILE DE CASIOMILLE. l'oye-. C.eLe. 
ilUILEDEFOIEDEMORUE. 



IIUILE DE GABIAX HUILE DE PËTROLE. l'oye 
HUILE DE PALME  produit du cocotier du Brésil. 
Pour l'extraire, on écrase grnssièremeni l'amant, ou on 
la moud au moulin. On fait ensuite marrer dans l'eau 
chaude jusqu'à ce que toute l'huile s'en soit séparée et soit 
xenue à la surfaoe de l'eau, oh elle se rasæmble et se con- 
crête par le refroidissement ; plus rd, on la purifie par 
le lavage à l'eau chaude. L'huile de pahne t d'une odeur 
agréable, qui se rapproche beaucoup de oeUe de la violelte 
ou de l'iris de FIoence. Sa saçeur est douce, lèrement 
sucrée. Sa consistanoe à la température ordinaire dans nos 
climals est celle du ue, et eUe est de oeuleur cilrine; 
elle rancit bucoup en vieillissant, perd son odeur able, 
et sa oeuleur jaune se change en blanc sale. Ou la trouve 
fréquemment sophistiquée avec du saindoux oeloré par le 
curcuma, et ama{isée avec la racine d'iris de FIorence. 
Po re. 
D'autres atldbuent la production de l'bulle de palme à 
l'el ;«' i s 9ueenss. Peut-être le nom s'applique-t. à deux 
subslanc extraites de vègéux différents. 
L'h«e de palme entre ans la composition du baume 
ne-al. Jadis elle fanait la hase de l'emplâtre de diapalme ; 
mais on lui a substitué Uaxonge. 
llUILE DE POISSOX. l'oye= Poisson. 
llUILE DE VITBIOL.:Voye« ScrcaQue (Acide 
llUILEGASSE snon)'me d' bu i l e fe. 
Les pei{res appliquent particièremt le nom d'huile 
9rosse h celle quils mlet h leurs couleurs pour les luire 
secher. On l'obtient en faint bouillir ensemble une hue 
sictive, celle de noix ou de lin, et de la litharge; cequi 
surnage après avoir laissé reposer la liqueur est l'linge asse 
des pein{res. 
HUILE OMPllACINE, Voyez 
IIUILE VIEBGE, Iye: Hu, 
HUILES tSaint). Chez les Hebreu, o. considérait 
comme un symle de conécration et oemme un signe de 
guérison pirituelle, de la graoe oevine et de ses opérations 
dans nos m, l'action de épan,lre sur quelqu'un, ou sur 
quelque chose, une huile odori[ranle : ainsi, on lit dan la 
Genèse : « Jacob ..... prit la pieffe qn' avait mi»e sous sa 
tele, et l'írigea comme un monument, répandant de l'huile 
dessus. » Moïse, d'arès l'ordre de Dieu, avsit composé, pour 
consacrer les vases et les instrumen liturgiques des Juifs, une 
bulle d'onction, où entraient, en pai iuegale% de la m)'r- 
rbe, da cinnamome, de la nne aromatique, de la nnelle 
et de l'hle d'olive. « Vous ferez de tout cela, dit Dieu 
3[oïse ( Eode, ch. XX), une huile sainte, pour set vit aux 
onctions du tabeacle du témoiage, de l'arche du test- 
ment, de la table avec s vas, d u chandelier et de ses acces. 
soires, de l'autel des parfums, de oelui des holocautes, du 
bassin avec sa base de tout oe qui t, enfin, nécire au 
culte. Vous sanctifi« aii toutes  choses; elles devien- 
dront sacres; et quiconque y touchera, ra nifi. » Cette 
huile d'onction fut perdue dans la dtruclion du premier 
' temple bti par Salomon. 
L'lise calholique a cru devoir coerver l'usage d'oin- 
dre d'hle les rsonn, pour leur donner un oeractère sa- 
erC Aux éx'èques uls appartient le droit de nsacrer, le 
teudi saint, celle qu'elle emploie pour le saint c b r me et 
l'extrême-onction. Le int chrme se à plusieurs 
sacrements, au Baptm e, à la Co n ri rma tion, h l'Oral i- 
nation, ou aux sacres. Celui dont on oint lapoitrine et 
les éules sur les on baplismaux s'appelle huile des 
caNchumèae. Celui de l'extrme-onclion prend le nom 
d'hu[l des males. Tous ensemble sont connus dans 1' 
gUse tholique sous la dénonfination de saintes huile. 
Dans l'l[se greue les but/es saintes désignent notre 
crement de l'extrême-onction. 
llUIS CLOS exprsion qui sifie pte [mée. On 
dit qu'une affaire est jugée à hu clos lorsqu elle l'est en 
l'absenoe du public. Autrefuis en Franoe les cours pv6- 

HUILE DE GABIAI" 
tales, les chambres ardntes, et généralement tons les procès 
au criminel s'instruisaient et se irisaient à huis clos : cet 
usage se maie,tient encore aujourd'hui en Mlemagne, en Ita- 
lie, et dans d'autres pays de l'Europe. Le grand principe 
de nos instilntions judiciaires est la publicité des débats 
en malière cisile et criminelle; néanmoins les tribnnaux 
peuvent ordonner le huis clos lorsque les débats doivent 
entralner du scandale ou de graves inconvénients pour l'or- 
dre et les bonnes mœurs. Il ne s'tend qu'aux dbats et 
au plaidoiries et non pas au jugementj qui doit toujours 
6tre prononcé publiquement. 
IIUISSIER. Ce mot vient du sierx français huis. On 
appelle ainsi les officiers subalternes dmrgés d'onvfw et de 
fermer les portes dans la résidence du souverain. Ceux qui 
oe tiennent dans l'antichambre des ministres, des hauts fonc- 
tionnaires, etc., pour annoncer les personnes qu'ils reçoivent, 
et ceux qui sont dmrgés du service des séances de certains 
corps, de certaines aggemblées délibérantes, comme l'Institut, 
le sénat, le corps Iëgislatif, etc. 
On appelait autrefois huissiers à verge les sergents royarx 
reçus au Chlelet, et huissierà chevalceux qui exploitaient 
dan» tout le royaume. Dans la langue du droit, ce mot est 
quelque peu délourné de son sens primltif. Les huissiers 
sonl des Ionctionnaires publics établis dans chaque arron. 
dissement pour faire toutes citations, notifications et 
s i g n i fic a t i o n s requises pour l'instruction des procès, tous 
actes et exploits nécessaires à l'exécuon des ordon- 
hantes de justice, jugements et arrèts, et le service per- 
sonnel près les cours et tribunaux. 
Les huiiers pour le service des cours impériales et de 
tous les tribunaux sont nommés par l'emperenrj sur la pro- 
posilion de ses procureurs et des présidents des cours et tri- 
bunaux, et sur la présentatiuu qu'ont le droit d'en faire les 
huissiers démissionnaires et les hritiers ou a-ants cause 
des huissiers dc/edés. Pour Cre huissier, il faut avoir au 
moins vingt-cinq ans, avoir travaillé pendant deux ans dans 
une élude d'avoué ou de notaire, on bien chez un huissier 
ou pendant trois ans au greffe d'une cour ou d'un tribunal 
de prenière in,tance, et rapporter de la chambre de disci- 
pline un certificat de moralité. 
Par exception, les huissiers près la cour de cassation sont 
nommés par elle. Les huissiers, dans le mois de leur nomi- 
nation, doivent pr6ter le serment de fidélité à l'empereur et, 
d'obéissance à la constitution, aux lois et règlements con- 
cernant leur ministère, et jurer de remplir leurs fonctions ave 
eactitnde et probité. Ils ne peuvent faire aucun acte avant 
d'avoir prèté ce sermenL Ils sont ob|igès de fournir un cau- 
tionnement, dont la qmmlité est fixée pardes règlements spé- 
ciaux et qui est affecté par pfivilégeàlagarantie des conclura- 
nations qu'ils peuvent encourir à raison de leurs fonctions. 
Parmi les huissiers, chaque cour ou tribunal dësigne chaque 
année pour son service intérieur ceux qui sont jugés le plus 
dignes de cetle faveur ; ils prennent le titre d'huissier au- 
àienciers. Tous les membres en exercice sont réélibles : 
ceux qui ne sont pas réélns rentrent dans la classe des huis- 
siers ordinaires. 
Les lluissiers audienciers assistent aux audiences pour 
maintenirl'ordre, y faire l'appel des causes et exécuter les 
ordres du président. Les huissiers audiencier seuls peuvent 
faire les significations d'avoé à avoué, le service personnel 
aux enqa[tes, interrogatoires et autres commissions ainsi 
qu'au parquet. Tous autres actes peuvent ëtre faits concur- 
remment par les huissiers tant audienciers qu'ordinaires, 
chacun dans le ressort du tribunal de première instance de 
sa r6sidence. Les uns et les autres doivent garder la rési- 
dence qui leur a été assignée. 
Les fonctions d'b»issier sont incompatibles avec toutes 
autres fonctions publiques salariées, ainsi qn'aec la pro- 
fession d'avocat. 
Les huissiers doivent exercer leur ministère tontes les 
fois qu'ils en sont requis sans acception de personnes. 
,e peuvent, .sous peine de nullité, instrumenter pour leurs 



n u x$SIER 
parenls on alliés, m pour ceux de leurs femmes, en ligne 
directe, à quelque degré qu'ils soient, en ligne collatérale, 
iusqu'au desWde cousin issu de germain inclusivement. 
La loi règle tout ce qui est relatif à leurs fonctions, à leurs 
obligations personnelles, à leur costume  à la forme de 
rédaction de leurs actes, au salaire qui leur est attribué ; elle 
met à leur charge les a¢les nuis et fruslraloires qu'ils peuvent 
faire, ci ceux qui donnent lien à une condamnation d'a- 
mende; ils sont passibles des dommages et intérts de la 
partie suivant l'exigence des cas; ils peuvent mème tire sus- 
pendus de leurs foutions, lls sont respunsables du prix des ven- 
tes qui leurs sont contiées. Il leur est dcfendu, sous les peines 
portC par les lois, de se rendre adjudieataires, directement 
ni indireclement, des objets qu'ils sont chargés de vendre, 
et de devenir cessionnaires des procès, actions et droils 
litieux qui sont de la compétence des trilmnaux dans le 
ressort desquels ils exercent. Ils sont eontraignables par 
corps pour la restitution de titres et deniers à eux confiës. Ils 
sont déchargés des pièces, après deux ans, depuis l'exAeu- 
tion de la commission. 
Ce sont les huissiers qui exëcutent les prises de corps, ex- 
eepté à Paris. Dans les villes où il n'y a point de comlnis- 
saires priseurs, les huissiers ont droit de procéder, ¢oncurrcu.. 
menl avec les greffiers et les horaires, aux prises et renies 
publiques de meubles et effets mobiliers. 
La communauté des h«issiers de chaque arrondissement 
a une chambre de discipline établie et organisée d'après le 
décret du 14 juin 1513. Par ses relations avec le corps entier, 
cette chambre est à portée de découvrir les petites contra- 
veulious qui échapperaient à la sqrveillance du ministère pu. 
blic; elle maintient le bon ordre parmi le huissi,.rs, veille à 
ce qu'il ne se commelte aucune actioq conlraire à Fhonneur 
et aux intéréts de la communauté. Chaque huissier contre- 
venant y est jugé par ses égaux, sauf l'intervenlion des tri- 
bunaux dans les cas graves. Les buissiers de chaque arron- 
dissement s'obligent, en nuire, à nne rétribution annuelle 
proportionnée aux émolumenls de chacun d'eux, rélribulion 
qu'ils versent dans une bourse commune, et qui sert à sub- 
enir aux besoinsdes huissiers retirés pour cause d'furie- 
milC, ou à leurs veuves et orphelins. L'adminislralion de 
celle bourse commune apparlien t à leur chambre de discipline. 
tlUISSIER À L:XCII.XîXE. l'oye'. 
HUISSIER-PRISEUI. Voyez Co:amssm-Pmsva. 
HUÎTRE, genre de mollusques bivalves, acéphales, 
conchifres, monomyaires. Tel qu'il avait été caractërisé 
par Linné, il renfermait, outre les huîtres proprement diles, 
les genres spondyle , p e i ç n e, perne , avicule , hotletle, 
9ryphde, plicatule, marteau, loue, etc., qui en ont 
Cé retirés par les travaux de Bruière et de Lamarck. 
Ainsi réduit, le genre huître tnferme encore plus de deux 
cents e«pèces, dont il est vrai que les trois quarts ne se 
trouvent qu'à l'Cat fossile. Nous ne nous occuperons ici 
que de l'huitre comeslible (oslroea edulis, Linné), dont 
l'imporlance est incontestable. 
C'est dans toutes les mers, ordinairement sur les chies, 
souvent aux embouchures des fleuves, et gén{ralement  
peu de profondeur que l'on rencontre les buitres, attacl;ées 
aux rochers Oll  d'autres corps sous-marins, ou encore 
lixées les unes aux autres de manière à constituer ces im- 
menses bancs d'huilres sans cesse renouvelës, malgré l'ex- 
ploitation dont ils sont l'objet. C'est que la fecondité de 
l'huitre est telle, quechacun de ces mollusques pond annuel- 
lement 50 à 60,000 œufs, poule qui se trouve doublée en 
vertu de I'b er ma p h r od i s m e complet qui caractérise 
toute la classe des acéphale. C'est au commencement du 
printemps que s'Coule ce frai qui ressemble assez à une 
goutte de suif, Il faut le secours d'un fort grossissenent pour 
 distinguer celle mullitude d'œufs, dont la coque trans- 
parente laisse apercevoir une petite coquille bivalve. Cette 
coque rompue, l'embryon pour'u de cils vibratiles nage 
en tournant, jusqu'à ce qu'il tombe sur quelque corps solide 
aU'.luel il s'attacb, l,lais son développement n'est pal pour 

-- HU1TRE  t 
cela assuré ; tu mer reckle nn grand nombre d'animaux 
font leur. parure de ces lmilres à peine nées. 
Est-il besoin de dficrire la coquille de l'lmllre? ui ne con. 
nuit ses vulves inégales, à stru«t«re lamelleuse? Et quant 
aux variations de forme qu'olfre l'une d'elles, celle que l'on 
nomme in.fgrieure, cette singularité s'explique par la m¢l- 
lesse de ce test, qui au moment où l'hultre se fixe sur un 
corps sous-marin lui en laisse une empreinte ineffaçable. 
L'animal est moins connu que la coquille  et au premier 
abord on ne sedoule pas de la d«licatesse de sou organisation. 
1Mais si l'on renverse le manteau, on découvre une bouche 
munie de deux lèvres minceset memhraneuses, se continuant 
de chaque c6té du corps en une paire de palpes labiaux 
étroits, lancéolés, lisses en dehors, chargés de lames obli- 
q«es sur leur face interne ; cette bouche que l'animal peut 
contracter à l'aide d'un petit muscle subcircnlaire, aboutit 
h un oesopl;age très-cou, t, se dilalaut en une poche stoma- 
cale, ovni:le, dans l'lutCieur de laquelle plusieurs ouver- 
tures apportent la bile. Le pylore cm:duit à un intestin grle 
c?lindriql,e, qui, après de nombreuses circonvolulions, se 
termine en un anus placé enlre les lobes du manteau. Le foie, 
que l'on reconnalt à sa couleur verd/ttre, est très.gros. Les 
organes de la gènération sont très-simples. Ceux de la res- 
piration et de la circulation consistent dans des brnncbies 
et dans ml système veineux considerables. 
Les huilres verles, peCerCs par les glronomes, ne 
forment pas une espèce distincte. On attribue leur colora- 
lion à differentes causes; la plus admissible est celle qui y 
voit un état maladif de ces mollusques, oceasionné par la 
présence d'animacules inlroduils dans sa substance. Du reste 
l'usage habituel que l'on fait deshuilres verles prouve qu'elles 
sont sans inconvénient pour l'homme. On a encore fait une 
epëee d'bultre sous le nom vulgaire de pied t[e cheval; 
mais c'est toujours i'hultre comestible arrivée à des di- 
mensions s,apérieures à celles auxquelles on la livre le plus 
ordinairement à la consommation. 
On sait que les hullres ne sont pas envoyées au rnarcbé 
sit6t après leur pèche. En France on sépare les huitres dites 
vmrchandes de celles qui ne le sont pas. L'buitre non mar- 
chande est celle qui, n'ayant pas encore atteinl lout s6n 
veloppement, est rapportée eu mer sur des bancs huitrier, 
o/ elle croît et se reproduit et d'où, en temps opporlun, 
elle sera de nouveau relirée pour les besoins des consom- 
rumeurs. Les huitres marchandes sont celles qui, ayant les 
dimensions réglementaires ( f, à lu centimètres de la char- 
nièce  la barbe, sont exportees, s'il s'agit, par exemple, 
de la pèche de Granville, dans les parcs de Dieppe, de Cour- 
seulles et de Saint-Waast-la-Hougue, d'où, aprës un sejour 
plus ou moins long, elles arrivenl sur le marche de Paris. 
Ce parcs  hulres sont des bassins Cendus, creuses sur le 
bord de la mer, et dans lesquels peuvent pënetrer les eaux 
des grandes murCs. Les huitres sont jetees dans ces bassins, 
où elles s'accroissent en repos. Dans les mers de l'aples, 
on les parque d'une manière spéciale. Comme on a remar- 
quë leur tendance à s'atlacher  des corps offrant peu de 
surface, on plante des piquets dans les lieux qu'elles pré- 
Ferent ; quand elles y adhèrent en assez grand nombre, leur 
pèche consiste ì relirer ces piquets et  les en dëtacher. 
Il est notoire oue la culture des huitres est une industrie 
pnssible, q,e ml.me les anciens Romains s'en étaient occu- 
pés, et qu'actuellement encore les bords du lac Fuaro sont 
couverts de bancs d'lmities cr6és de main d'homme et arti- 
ficiellement entretenus. Celle culture emploie les plus sim- 
ples procédés : elle se borne à entourer des bancs artiliciel_ 
de pieux et de lagots destiés à arrêter les embryons au 
passage et/a leur présenter de¢ surlaces auxquelles ils s'at- 
tachent. Au bout de deux ans, on retire les pieux et les ra- 
gots dont on enlève successivement toutes les hultres par- 
enues à rnaturité, puis on remet l'appareil en place pour 
atlendre qu'une nouvelle génération amène une seconde ré- 
coite. 
Paris consomme h hfi seul pour plus de 1,50eO0 francs 



 14 HUITIE 
d Imitres par an, ce qui reprsenle h valeur de 70,000,000 de 
ces mollusques. Sur ce dernier chiffre, le port de Granville 
doit tre compris comme en fournissant les cinq septièmes, 
car ce sont les icheurs granviilais qui depuis fort longtemps 
dèjà sont en possession d'approvisionner les marchands 
éleveurs de Saint-Waast-la-Hougue, de Couçseulle et de 
Dieppe, qui préfèrent Phuitre de la baie de Granille à celle 
pchée dans la baie voisine de Cancale ; ce qui n'empéche 
pas ce peti port de jouir de la réputation d'6tre le oeul point 
où se lchent les belles hultres qui se mangent à Paris. 
Nous manquons de renseignemenls statistiques sur tire- 
portance économique de rhuitre dans les pays étrangers. 
Cependant nous pouvons d,re qu'elle est encore pus grande 
en Angleterre et aux États-Unis qu'en France. Ainsi, à New- 
York la vente annuelle des huitres dépasse 5,000,000 de 
dollars ( plus de 26,000,000 ff. ), et ce commerce occupe 
50,000 personnes. Les deux tiers des hultres qui se con- 
somment / ew-York viennent de la Virginie. La partie la 
plus importante de ce commerce est topCation qui consiste 
.t transplanter les huitres de leur banc natrel dans un lit 
artificiel 
[Les nations les plus dis«emblables par leurs mœurs, 
pour peu qu'elles fussent policées, ont payé le m,me tribut 
d'hommage et d'amour à la saveur bienfaisante de l'ho,tre. 
Les Grecs et les Romains la servaient au commencement 
de leur repas du soir : c'êtait le prélude obligé de leurs frs- 
tins. Ils appelaient service d'airnables causer,es celui o/ 
I hultres se trouvaient et provoquaient leur appétit el leur 
gallé. Il y en eut qui, dans leur enthousiasme pour ce pro- 
.luit des mers, le consacrèrent par nn nom bien doux, ce- 
bfi d'oreilles de l'ënus. C'est ainsi que les Étui,eus nom- 
matent les huitres. Plusieurs grands hommes de l'antiquité, 
semblables, en cela du moins, aux gourmets de nos jours, 
ont eu pour elles un faible décidé, Cicéron entre aulres. 
Cependant, ce grand orateur leur fit une fois une im- 
pardonnable infiddité, et alla jusqu'h leur préférer, pas- 
gèrement il est vrai, un plat de betteraves accommodées 
.mx champignons et à d'autres légumes, plat délicien que 
rendaient plus aéable encore l'bob, letWdu cusinier et le 
plat»if piquant de se moquer de la loi Licinia, qui n',-ait eu la sotte velli{é de s'attaquer à la luxure romaine. 
Il ne parait pas que nos pères aient fait un usage gé- 
néral des hultres / leurs repas. Les lois somptuaires qui 
t.»,sonnent sur ce sujet dans les capitula,res et dans les or- 
«!onnances de nos rois ne font point mention du molluue 
,,d nous occupe. Les preraiers renseignements que nous 
 couvons à cet Co rd cousirent dans une ordonnance probi- 
!..;lire de 1779. Il y a donc lieu de croire que les Françis 
n'avaient pas po les hoitres avant le dix-huilième siècle 
te go0t déclaré qu'Rs ont montré depuis. Ds l'époque oi le 
vgom'eux, mais incorrect auteur du Tablea¢ de _Paris, 
, omposait son bizarre ouvrage, il se faisait dans la capitale 
,;ne consommation prodigieuge de ces habitants des ruches 
hmrines. Cette consommation n'a ps diminné depuis. 
L'ho'tre n'est pas moins utile aux malades q,,'elle n'est 
agréable aux gens en santé. C'est un des mets que le mé- 
decin prudent prescrit le plu« volontiers àson patient. Pre- 
mière alimentation de la convalescence, elle ¢t de bon 
augure sur i'assielte d'nn malade ; elle pruine!/ son palais, 
que la diète a paralysé, des plaisirs plus succulent» et plus 
solides. Quant aux buîtres colles, l'hygiène n'appronve pas 
coite préparation. L'hullre devient alors indigeste, de stoma- 
chique qu'elle était. D  Bocc. J 
IIUITP, E ÉPINEUSE nom vulgaire et ancien des 
spon «l.yles. 
liUITBE FEUILLETÉE nom vulgaire de la camo. 
HU[TIE I;E{LIÈPE nom vulgaire d'une espèce du 
genre nvicule { o/e-. Ao.x et PL ). 
IIUtTI4E PLISSÉE, espèce d'huitre dont la co- 
quille est vulgairement connue sous le nom de corne d'a- 
I/ondance, dU sans doute/t son crochet très-long et creusé 
d'une profonde caviié. 

HULANS, HOUL NS, OULA.'S, ou UHL_L'IS, cava- 
lerie légère, qui, venue d'Asie, s'introduisit dans le nord de 
l'Europe avec les premiëres colonies tarares qui s'établirent 
eu Puiogne et eu Lithuauie. Leur nom parait dériver de 
celu d'an de leurs premiers chefs. Les souverains des deux 
ro.aumes où ils se réfugière crurent devoir, pow se les 
attacher, leur accorder de grands priviléges. Leurs polks, ou 
régiments, étaient montés sur des chevaux tatars, lég¢rs, 
élégants, inlatigables. Les cavaliers faisaient le mme ser- 
vice et combattaient à peu près de la nme manière qneles 
h u s s a rd s; mais, outre le sabre et les pislol¢ts, ils avaient 
une lance, de 1 mètre 6.5 à 2 mètres, surmontée d'une 
petite flamme en taffetas vers,coloré, destinée à effrayer les 
chevaux ennemis. Cette arme., comme celle de nos lan- 
c i ets actuels, était assujettie au moyen d'une bandoulière. 
L'uuilorme des premiers huions conçgstait en une culotte à 
la turque, montant au-dessus des hanches, et descendant 
jnsqu'/t la cl,eville; eu une veste courte, recouverte d'une 
simarre à l'ottomane, à petits paremeuts, tombant jusqu'au 
gras de la jambe ; enfin, en un vieux bonnet polonais, connu 
sous le nom de l'urtla. La couleur de l'uniforme et des 
flammes était rouge, verte, jaune chamois, ou bien de ciel, 
selon les polks. 
Les Atrtrichieus et les Prussiens furent les premiers à 
emprunter cette cavalerie aux Polonais. Seulement ils sub- 
stituërent le c -- a p s k a on chapsta, avec aigrette en crin, 
an kara, et la flamme aux couleurs nationales fi la flamme 
de fantaisie. En 1736 le marídml de Saxe essaya dïntro- 
du,re cette arme en France, et eu forma un polk de 1,000 
homme% auquel il mèla une moitié de dragons. Ce corps ne 
survécut pas  son créateur. Les huions fran.cais portaient 
la simarreet la culotte verte, les bottes à la honoise et un 
casque sans visiëre, garni d'un turban, d'où s'échappait une 
queue en crins de couleur. Ils étaient armés d'un sabre, 
d'nu seul pistolet, et d'une lance de près de 3 mëtres. 
Anjourd'hui la Russie, la Prusse et L'Atrtriche sont les 
seules puissances du Nord qui aient encore des halons. La 
Bussie recrute les siens dans la Voll,yuie, la Lithname et 
la Poiogne; l'Autriche, dans la Gailicie; la Prusse, un peu 
parto,,t. 
IIULL ou KI_GSTO_ UPO. HULL, ville maritime de 
l'Eas-Ridin 9 du ruralWd'York,/ l'embouchure de la riviëre 
de Hull dans l'Flamber, qui forme ici nn bras de la mer du 
Nord, large de près de 5 kilomètres. Elle possède un port 
[orlifié, muni de deux pi,arcs ; et après Londres, Liver- 
puni et Bristol, c'est la ville de commerce la plus impor- 
tante quïl v ait en Xngletcrre. C'et au,si son principal 
port sur sa c61e nord-est,le an 1 centre du commerce q,,e 
l'Anglelerre fait avec le nord riel'Europe, acec Ha,nbourg, 
Brème, le Danemark, la _orège et la Suë,le, la Prusse, la 
Bussie, la Hollande et la Beigiq,,e pour l'exportation tout 
des produits des fabriques de la ville m6me que de ceux des 
raan«fctures de comtés d'Yorl, de Lancaster, de Xot- 
tingl,am, etc. On " fait au, si des affaires cousidérables avec 
le mi,Il de l'Europe et avec i'Amériq,,e. Des canaux, des 
cbemins de t,.r, des rivière facililent les relations du com- 
merce ext,'rienr avec les villes d'York, de Leeds, de Shef- 
field, de 31anchester, de Liverpool, de Nottingham, de Lin- 
cola, de Londres el de Bristol. Son commerce maritime n'est 
pas canins favorisWpar son heureuse situation sur PHumber, 
près duq,el on a construit trois docks immenses, avecdt 
berges en pierre el des magasins pour les marchand,ses, et 
comprenant avec leur bassin un espace de 20 acres. 
Le mouvement de la navigation y est ,tes plus actifs, et 
la Hull-Steam-Pacet Companj n'y contribue pas peu 
avec ses nombreux paquebots à vapeur. Eu 18 il entra 
dans le port et les docks de Hull 1,S09 btimeuts an- 
glais, jaugeant ensemble 313,893 tonneanx, et 1,248 navires 
étrangers, jaugeant 136,675 tonneaux; tu{al Cai, 2,557 na- 
vires, jaugeant 50,568 tonneaux. 
Les princilkaUX articles d'e.spor{ation sont les cotonnades, 
les la,nages, les objets en fer et en acier, les grains, et le» 



-- HUMANITÉS 
.ratines pour les différents points de lacte. L'expédition des 
llouilles pour Londres, qui coniluait autrefois un article 
de premier ordre, a beaucoup diminué dans ces derniers 
temps ; il en est de mëme de la phe de la baleine, par 
suite de l'ex ten sion tonj ou fs pi us grande que la pêche du cltien 
de mer prend dans la mer du Sud. Cependant Hull est en- 
cure de tons les ports de l'Angleterre celui où cette in- 
dtmtrie a conservé les proportions la plus grandioses. 
L'importation consiste en bois de menuiserie et planches, 
tan, laine, lin, chanvre, suil, os, toiles à voiles, chevaux, 
grains, et autres produits du Nord. La ville possède au delà 
de 500 navires en propre, et la construction des vaisseaux y 
occupe un grand nombre de bras. L'industrie déploie une 
activité extr[me dans la fabrication des bougies de sper- 
macaeti et de blanc de baleine, des toiles if voiles, des cor- 
dages, et des articles en fer; elle possède de nombreuses 
usines pour l'extraction des bulles de baleine et pour la fa- 
brication des savons, ainsi que de nombreusesscieries reCa- 
niques. On y compte aujourd'hui 25,2,6 habitants. 
Dans la vieille ville, hAtie le long de l'Hull, avec des rues 
laides et étroites, se trouvent les magasins et les comptoirs 
dn commerce de gros. La ville neuve, au contraire, offre un 
grand nombre de larges rues, bordCs de constructions ma- 
gnifiques; tout y annonce le luxe : les qnais sur l'tlumber, 
la statue équestre de Guillaume III, la statue en pied du 
célèbre Wil berforce, né à Hull, frappent tout de suite 
l'attention du voyageur, qui, en fait d'éditices publics, devra 
visiter les deux églises gothiqves de _Notre-Dame et de La 
Trinité (cette dernière, construite en 1312, est un remar- 
quable monument de l'architecture du moyen age ), la Mai- 
son de La Trinité, la Douane, le Musée, le Théatre. Hull 
possède aussi plusieurs h«)pitaux, parfaitement organisés, et 
d'autres établissements de bienfaisance, un grand nombre 
d'écoles, un jardin botanique, une Sociétë litt6raire et une 
Société des Sciences. 
Hull fut fondée et fortifiée par Édouard I er, sous le 
nom de Kin9stown, et Henri ¥I lui accorda les droits de 
ville. 
Au bourg de Goole, situé à quelques milles plus avant dans 
les terres, non ]oin de l'embouchure de l'Ouse dans l'Hum- 
ber, de riches capitalistes et fabricants, dont la ville de Hull 
avait refusé les offres avantageuses au bien public et au de- 
veloppement du commerce, ont fondé récemment, par des 
établissements nombreux, une nouvelle place de commerce 
qui est en voie de rapide prospérité, et fait dejà à Hull une 
rude concurrence. Si Goole, il y a quelques années simple 
bourg de 1,60( habitants, est aujourd'hui une ille où l'on 
compte dès if présent t4,000 Ornes, elle en est redevable 
à la puissante Société de l'Aire et du Calder. En creusant les 
canaux de Leeds et de -akefield cette compagnie s'est 
assure la navigation sur l'Aire et le Calder, et a donué à Goole 
une communication avec la mer sans passer par Hull. Goole 
possède déjà deux docks maguifiques ; celui qu'on y a etabli 
en 1851 et une des plus belles contructions de ce genre 
qu'il 7 ait en Angleterre. 
I|ULLI. (Pmmu-Ac;csrE, comte), naquit à Genève, en 
1758. Apprenti horloger, il exerçait son état à Paris, lorsque, 
frappé de sa haute taille et de sa belle figure, le marquis 
de Confions le prit à son service comme chasseur. Sa belle 
conduite an 14 juillet 1789 lui valut, soldat aux gardes 
françaises, le titre de vainqueur de la Bastille, avec la mé- 
daille décernée par la municipalité de Paris. Autant il avait 
fait preuve de courage à l'attaque de la forteresse, o il 
entra des premiers, autant il mourra ensuite d'humanité, 
défendant à outrance le malheureux gotwerneur Delaunay 
contre l'aveu#e féroce de la multitude; mais tous ses ef- 
forts ne purent lui auver la ie. En 1796 .Hullin avait con- 
quis le grade d'adjudant genéral dans les guerres d'Italie, 
et s'y 6tait distingué par divers actes de bravoure. "Fa 1799 
il eontribua puissamment à la défense de Gnes. Au 18 
brumaire, il se trouvait à Paris, près du général en chef Bo- 
naparte, dont ri servir a,tivement les projets. Il fit la nou- 

relie campagne d'Italie en 1800, fut nommé en 1803 général 
de division et commandant des grenadiers de la garde con- 
sulaire, et en t 80 il eut le malheur de présider le conseil de 
guerre qui condamna à mort le duc d'Enghien. Pendant 
les campa.mes de l'empire, il fut successivement gouverneur 
de Vienne et de Berlin. Il commandait à Paris la 1 " division 
nititaire en 18t, lorsque Clora la conspiration du g:néral 
Malet, qu'il fit échouer au péril desa vie. Malet lui rira, 
presque if bout portant, un coup de pistolet, qui lui fracassa 
la machoire inférieure. Le Parisien, habitué à rire de tout, 
donna à Hullin, à ce propos, le surnom de BooEfe la 
Balle. Il conserva n commandement jusqu'en mars 1814, 
où, aprës avoir accompgné Marie-Louise à BIois, il envoya 
son adhésion à Louis XYlII, qui ne l'emplo3"a pas. Au re- 
tour de l'empereur, le gouvernement de la 1 *e division lui 
fut rendu, et il le garda jusqu'à la seconde restauration. 
Compris dans l'ordonnance du l juin 1815, il fut arrêtC 
détenu en Corse, et proscrit par l'ordonnance du 17 janvier 
-1816. Il passa en Belg;que et en Allemagne ses annees 
d'eil, publia à son retour une apologie as«ez embarrassée 
de a conluite dans l'affaire du duc d'Enghien, et mourut 
en 18-1t. Depuis longues années, il était affligé d'nne cëcite 
conarlcte. 
Ht3MAXITAIIES. l'ove: COtMrN-ISME. 
Itl.711AXITÉ. Ce mot a pris dans notre langue plu- 
sieurs sens, fixés par les poêtes plut6t que par les prosa- 
teurs. L'auteur de la Metromanie fait d.re à l'un de se; 
peromlages : 
... A l'humanité, si parfait que l'on f,:tt. 
Toujours par quelque faible on paya le tribut. 
Il s'agit des imper[ections de la nature humaile, aux- 
qu hes on sait que cet auteur paya largement sa part dr 
contribution. Mais Lorsque la Fonlaine dit : 
Un loup rempli d'humanite 
($ïl en est de tels daof le monde), 
il attribue à ce loup un sen:iment de pitie pour les victimes 
de sa faim, une bienveillance pour tons les êtres sensibles, 
qui esl aussi de l'humanité. Dans l'homme, cetle qualité est 
toujours dime d'estime et d'affection ; lorsqu'elle reud capable 
d'uu généreux dévouement et de nobles efforts, elle devi,_.nt 
nue vertu. Il ne faut po» la confondre avec la p h i la n t h r o- 
pi e. L'une est un sentiment; l'autre, une croyance morale, 
dont l'origine est toute dans l'intelligence. On peut être phi- 
lanthrope sans humanitë, humain, quelque misanthrope. 
La philanthropieentreprend de compléter l'oeuvre de la civi- 
lisation. Son but est de joindre quelques réalités aux charmes 
des belles formes d'une société cirlisée. Sa marche est grave 
et mesm'ée, comme ee!!edu raisonnement; elle a soin de 
vérifier à chaque pas la directiou de sa route, la solidité et 
les diflieultés du terrain. L'humanile n'use point de ces 
précautions; elle n'examine pas, elle at Iorsqu'eile aperçoit 
un bien à faire, nne souffrance à soulager. 
Dans la conversation et même dans les éerits, le mot 
humanitd siguifie quelquefois le 9cure humain : c'est dans 
ce sens qu'on pa.rle des a»is de l'humanité. 
HUM;kXlTES. Comme dénomination speciale ce mot 
a longtemps servi à déiguer particulièrement la classe de 
secondes, autrement appelée secondoe rhetorices; mais 
comme terme générique il embrassait au moyen àge et 
embrasse encore anjourd'lmi, d'aprës la définition acadé- 
mique, l'étude des lanes grecque et latine, celle de la 
grammaire, de l'histoire, de la poée, de la rhétorique. Lor 
de la création de l'univer.ité imperiale une nouvelle déli- 
mitation fut prescrite, et après deux classes élémentaires et 
deux années de grammaire, il y eutdeux années d'humanit(s 
(troisième et seconde). Ainsi platCs, les humanités avaient 
pour objet de perfectionner dans le mécauisme des lanes 
les jeunes gens que les deux années de grammaire 5 avaient 
mùrement inifiés, puis deteur révéler le g6nie de ces mmes 
langues dans toute sa force native, toute la richesse, toute 
la variélé, toute la hardiesse de ses nombreuses et savante- 



 i 6 HUMA3"ITÉS 
combinaious. Yeuaient après, comme clef de vote, la 
rhétorique et la philosophie. Grammairiens, rhéteurs, his- 
toriens, philesophes méme, sont tous aujourd'hui" plus ou 
moins humanites; tous formulent leur pensée avec plus 
ou moins de grace ou d'élégance, plus ou moins de tact, 
de finesse, de délicatesse ; tous enfin impriment à leur elo- 
turion quelque chose de cette urbanité exqube, sans laquelle, 
h vrai dire, il n'est point d'humanits. MO.XDELOT. 
« Il s'est rencontré chez les nations civilisées, a dit 
M. l'abbé Dupardoup, dans son discours de réception h FAca- 
demie Française, une belle et grande expression : descendue 
par l'usage dans la langue commune, elle conserve, sous sa 
vulgarité appareute, une profonde dignité; il en est peu qui 
offrent un sens plus noble et plus élevé. Pour nommer et 
définir les études, qui sont le mo)-en le plus puissaut, la forme 
la plus heureuse de la i,aute éducation intellectuelle de 
l'homme, on a dit le humantoes. C'est un de ce mots 
siml,les et l,mineux dont on ne saurait trop étudier le sens 
et rechercher la lumière. Les Latins disaient artes liberaes. 
bonee, optimoe, menuze artes. Cicéron, cisercliant  rap- 
procher Iïdée des etudes auxquelles on applique l'enfance, 
de Fidee primitive du mot hmnnit, disait : Artes qmbus 
«tas puerili ad humanitatem fingitur. Il disait encore : 
Studia humanitatls, humaniores litteroe. Les Grecs di- 
saient vulgairement ;=.a:ç«;,,, ils disaient aussi t-, i'har- 
monie; ce mot exprimait tout à la fois chez eux l'art ora- 
toire, la poCic, l'éducation. Platou emploie presque cons- 
tamment ce mot, qui va si bien / la nature de son génie 
et qui tend h faire entendre que l'ëducatiou n'est autre ci,ose 
que le développement pur et i,armonieux des facultes huma- 
nines. Nous, avec moins de grâce peut-Cre que les Grecs, 
mais avec plus de précision et de force, nous avons dit 
simplement, comme les lomaius, et méme plus énergi- 
quement qu'eux, les humanits. La langue humaine ne 
pouvait mieux dire. En effet, c'était dire tout; c'clair nom- 
mer, avec une vérité frappante, ces Cudes qui font l'l,omme, 
qui, dans l'ordre naturel, Cèvent en lui l'hmanité / sa plus 
haute expression, déeloppent et fortifient le plus puissam- 
ment ses facultés iutellectuelles et morales, les forment et 
les perfectionnent à l'image de Dieu mème. » 
HUM.N,'.Y (Jr_'- Gcaçm), ministre des finances en 
France, de 1832 à 1836, et de 18i0 à 18/2, né.  Strasborg, 
le 6 aot 1781, était négociant dans cette ville, et membre 
,le la chambre de commerce depuis 181"/, Iorsqu'en 1820 
le département du Bas-gbin l'Cut pour son représentant 
à la chambre des députés, où dans plusieurs questions de 
finances il se prononça contre le gouvernement, et où 
en t823 il vota avec les doctrinaires contre les alloca- 
tions relative h l'expédition d" Esp agne. Mallgré tous les 
eiforts du ministère, il fut réélu en t821. Dans la nouvelle 
chambre, dite des tros cents en raison d, chiffre de la 
majorité que le ministère était parvenn h luire voter dans 
ses intérèts comme un seul homme, il fit parlic dcla roura- 
geuse minorité liberale qui en toute occasmt« dctendit la 
charte et les iibertés qu'elle consacrait, contre les attaques 
de la contre-révolution. C'est ainsi qu'il se déclara contre 
la réduction des rentes proposée par le ministre V i I I èl e, 
jugeant la mesure dangereuse, non pas en elle-mme, mais 
/ cause du mode adopté pour la mettre / exécution ci 
de l'extension qu'on pretendait lui donner. Dans les sessions 
de 1825 à t827, il prit la parole sur to,tes les questions 
de finances, et s'Ceva conlre la renonciation de la France 
à ses droits de souveraineté sur Haïti, contre i'indemnité 
des émigrés et contre les lois restrictives de la liberté de 
la presse. Atx élecfions de 1827 il écboa dans son dépar- 
tement; mais en mai t828 le département de i'Aveyron le 
renvoya h la chambre desdeputés. Dans la session de 1829 
il fut nommé rapporteur du projet de budget pour 1830. La 
profondeur de vues financiëres qu'il révela en cette circous- 
tance et l'éloquence simple, et iacile avec laquelle il defendit 
les intrèts du pa)s contre/es exigences d'argent de la coter 
lui valurent l'estime gnérale ainsi qu'une grande popularite, 

et le désignèrent dès lors pour les fonctions éminentes qu'Il 
ne devait pas tarder ì remplir dans l'Etat. L'année suivante, 
il fut l'un des deux cent vinS-un deputes qui rotèrent 
fameuse adresse dirigée contre le ministëre Polignac. 
,ussitOt aprës la révolution de .luillet, il rentra à la 
cliambre en qualité de député du Bas-l=lbin, et fut appeld 
à faire partie de la commission chargee de modifier de charte. 
Lorsque Laffitte prit les rénes de i'administratiou, il 
[rit/ Humann le ministère des finances, que celui-ci refusa 
par respect pour ses engagements eners M. Guizot. Il n 
voulut pas non plus entrerdaus le ministère Périer. Ce 
ne fut qu'en octobre 183, lorsque le maréchal Soult 
fut mis/ la tête de l'administration avec les doctrinaires, 
que tlumann accepta le ministère des finances. Ala suite do 
cette détermination, il iiquida ses vastes opérations commer- 
ciales, pour désormais se consacrer tout entier aux aflaires 
de I'£tat. il eut peu de part à la réactitm politique que les 
doctrinaires commencèrent alors dans la législation; mais 
il prit l'initiative de la réforme de i'économie politique pra- 
tiquée, et rendit par lb de véritables services à la France. 
Il r«'alisa des économies, réularia i'imp0t et surtout le ca- 
dastre, accrut le mouvement du commerce extérier et in- 
térieur, et, par diverses mesures heureuses, réussit à im- 
primer un puissant clan/ l'industrie privée. En avril 1833» 
il etablit le premier budget régulier. Ses dissentiments pro- 
fonds avec le marcclial Soult, qui, sous l'influence des 
somenirs de l'époque impériale, dépensait des sommes 
Snormes pour la rétrar, isation de l'afinC, amenèrent la dé- 
mission donnée par ce dernier en juillet 1834. Abstraction 
faite de l'intervalle d'octobre 183-1, lors de la retraite du ma- 
réchsl Gérard, ttumann dirigea l'administration des finances 
jusqt'en 836. 
Plus il pnëtrait dans l'état fiuancicr du pays, plus il res- 
tait convaincu que i'ëquilibre entre les recettes et les dépen- 
ses ne pou ait être retabli que par la réduction des r e n t e s 
sur l'État, mesure que Villële avait voulue précédemment. 
Il l'avoua hautement h la chambre, le Ii janvier t836, en 
dpo«ant le projet de budget pour t837. Cette déo]aration, 
que navait precédée aucune resolution prise en conseil, ex- 
cita le mécontentement de ses collègues, mais surtout ce- 
lui de Louis-Philippe, qui craignait de s'aliener les classes 
moyennes par la r«duction des rentes. Humann donna alors sa 
délaission comme membre du cabinet, mais conserva son siége 
dans la chambre, qui partageait son opinion. 11 appuya de 
tout le poids de son autorité persormelle la proposition faite 
par M. Goulu pour la reduction de la rente, et eut bient6t 
la satisfaction de voir le cabinet, battu sur cette question, 
forcé de se retirer. Le 3 octobre 1836 il fut nommé membre 
de la chambre des pairs, où il cotiuua  s'occuper spécia- 
lement de questions finaneiëres. Lorsqu'en mars 1839, après 
le renversement du ministère 51o1é, le maréchal Souit essaya 
de former un ministère centre gauche, Humann fut appelé 
h faire partii du nouveau cabinet..Mais les concessions 
pugnaient h ses priucipes ; et son inflexibilité amena la ruine 
de la combinaison. Ce ne lut qu'après la retraite de 
M. OEhiers, en octobre 1840, qu'il reprit l'administration des 
finances dans le ministère Guizot. II cherchait à rétablir par 
un système de sévère économie l'ordre dans les finances de 
l'État, qu'asaient ébranlees les immenses préparatifs de 
guerre laits si étourdiment par l'administration prnte, 
iorsquela mort le surprit dans ses fonctions, le 25 avril 1812. 
HUMAXTI. genre de poissons chondroptérygiens 
établi par Cuvier, avant qui ces poissons étaient réunis 
aux sq u a les. Ils se distinguent de ceux-ci par la position 
de leur seconde dorsale et par la brièveté de leur queue. 
Une forte épine sur chaque dorsale, une pe.an trè, s-rnde; des 
luiCientes tranthant, et sur une et deux rangées; les 
supérieures grèles, pointues, et sur plusieurs rangs; tels 
sont les principaux caractères du genre humantin, dont 
l'espèce la plus répandue sur nos cotes est le s9ualus cen- 
"rina de Linné. 
HUMBERT, sites de Beaujeu. l'ogez 



HUMBOLDT 
' IIUMBOLDT (CnAILEs-C*;ILLAEg, baron oz), ancien 
ministre d'Etat prussien, né à Potsdam, le 22 juin 1767, 
étudia d'abord à Gcettingue, et, après avoir passé ensuite 
plusieurs années à léna, oi il recul dans l'intimité de 
S cin i Il er, débuta dans la carrière diplomatique en qualité 
de résident de Prusse à la cour pontificale. En 1808, il 
fut nommé conseiller d'Etat et chef ,le la section des cuites, 
«le lïnstruction publique et «les établissements med:caux, 
au ministère de l'intrie,r «le Prusse. En 1810, il se rendit, 
avec le rang de ministre d'État et en qualité d'ambassadeur 
de sa cour, à ,'ienne, puis au congrès de Prague comme 
plénipotentiaire. Il prit part, en 18t4, au congrès de CI,a- 
tillon et/i la paix de Paris, dont il fut l'un des signataires 
avec le cbancefier d'État Hardenberg; il fig,wa aussi au 
congrès de ¥ienne et y signa, en 1815, la paix entre la Prusse 
et la Saxe. 
En juillet 1816, il se rendit à Francfort comme ministre 
pieu ipotentiaire de Prusse pour régler les allhires territoriales 
de l'Allemagne. Bientdt après, son souverain le nomma 
membre de son conseil d'Ètat et lui fit présent de lit,sieurs 
terres. Puis il alla en qualité d'ambassadeur extraoldinai, e 
à Londres, et de 1/% en octobre 1818, à Aix-la-Chapelle. En 
1819, il fut appelé ì faire partie du cabinet avec voix deli- 
bérative, et y fut chargé «le plusieurs branches d,n service 
qui jusqu'alors avaient etWdans les attributions du ministre de 
l'interieur, telles, par exemple, que les Mfaires relatives aux 
états ploviuciaux ; mais il ne tarda pas à se trouver cmdraint 
de donner sa demission par suite de sa profonde dissidence 
d'opinions avec H a r d en b e rg, criampion de l'absolutisme, 
tandis que lui il recommandait instamment au roi de Prusse 
l'adoption d'une politique plu liberale et se rattachant davan- 
tage aux idées constitutionnelles. Ce ne hd qu'/ partir de 
1830 qnïl prit de nouveau l art aux séances du conseil 
d'Etat, après avoir ëté appele l'anuee précedenle ì la pré- 
sidence du consei des bAtiments et des musées. Dès 1825, 
rAcademie des Inst:riptions et Belles-Lettres de France 
l'avait élu l'un de ses membres étrangers. 
Depuis sa retraite du minislère, il vécut principalement 
dans sa terre de Tegel, près de Berlin, o/ il mourut le 8 
avril 1835. 
Guillaume de Humboldt a réuni sous le litre d'Essais 
esthetiques (tare. l, Brunswick, 1799) ses premiers tra- 
vaux littéraires, par exemple : ses reflexions critiques sur le 
Tour de promenade, de Scldller, sur l'Hermann et l)o- 
,Çthde, de Goetrie, sut" le Beinecke Fachs, etc. Sa traduc- 
tion de l'Aqamemuon d'Eschyle (Leipzig, 1816)fut le 
fruit de ses studieuses recherches sur la langue et la prosodie 
des Grecs. Ses Corrections et additions au Mithridate 
d'Adelun 9 sur la lanque canlabre ou basque (Berlin, 
t817), et son Essai sur tes habitants pri»nitifs de t'Idis- 
partie, au moyen de la lanque basque (Berlin, 1821), té- 
moignent de travaux aussi profonds que consciencieux. 
Parmi les nombreuses disserlations pl,ilologiques lues par 
lui à |'Acadêmie des Sciences de Be,-lm et livrées enuite à 
l'impression, nous devons mentionner surtout son Mëmoive 
sur l'Eçsode du Mahabharata couru sous le nom de 
Bha9avad-Gita (1826); son memoire sur le Duel (1828) ; 
et sa savante dissertdtion sur l'Affinitd des adverbes de 
lieu avec tes pronoms dans quelques lanques (1830). Le 
principal ouvrage composé par Guillaume de Humboldt 
dans cette direction d'idées est son Essai sur la lanque 
lt'awi, dans l'ile de Java (3 vol. Berlin, 183f,-1840), pu- 
blië après sa mort par Édouard Busclmnaan, jeune érudit 
qui depuis 1839 l'avait secondé dans ses recherches et ses 
travaux. L'introluction à ce beau |ivre, qui a été aussi 
publiée à part sous le titre de Essai sur la Diversitd de 
construction des lanques humaines, et sur l'Influence 
qu'elle a exercée sur le ddveloppement intellectuel de 
l'human itd (Berlin» 1836), a fait époque dans l'histoire de la 
philologie. Buschmann a égaletnent publié son Vocabulaire 
inddit de la lanque taïtienne et son Aper« de la lanque 
des iles Marqui, es et de la lanque taæienne; ce savant 

les a fait parattre en 13. En mourant, llumboldt Iégua sa 
collection de matériaux relatits à la linguistique et la partie 
de sa bibliothëque concernant la litterature étrangère à la 
Bibliothèque Boyale de Berlin. 
Grâce a la publication posthume de la Correspondance 
inœedite de Guillaume de Humboldt ou Lettres adressœees à 
une amie ( vol. 187 ; 5* édition, 1853), lepublic a pu se 
convaincre que Guillaume de ltuutboldt à toutes les qualités 
de rhomme d'Ëtat et du savant ajoutait encore oelles qui 
font rami sfir, dévou6 et deliot. Ces lettres sont adressées 
h une dame, marie h Cassel aprës avoir prouvé bien 
des vicissitudes de raclure; il avait fait sa connaianoe en 
1788, h l'rmont, avait pu tre assez heureux pour lui 
rendre d'imposants services en 1814, et jusqu'a sa mort 
n'a ait pas cesM d'entretenir avec elle une coreespondance 
intime. Ce recueil, sous le rapport moral oemme sous le ra 
port lilt,raire, est un des joyaux de la littérature allemande. 
[ tlUMBOLDT ( FnEEmc-ItEm-ALEe, baron E), 
ri'ère du précedent et le plus grand naturaliste de notre ép 
que, në le l't septembre 1769 a Berlin, n'avait pas encore 
dix an quand il perdit son pre, qui, dans la guerre  sept 
ans, avait rempli les fimctious d'aide de camp «lu prince 
Ferdinand de Urunswick et qui plus lard était devenu 
chamllan du roi de Prusse. 
Alexandre de Hnmbohlt reçnt une tdncatiun extrmement 
soigne, qu'il partagea avec son ri'ère aine, Guillaume. Après 
avoir svi dans l'automne et l'hiter tir rannée 1787-17S8 
les cours de i'université de Francfortu -I'Oder, il paa 
l'CWet l'hiver suivants h Berlin, ou il se liera à I',.tude de 
la teclmolugie, de mbme qt' cele ,le la langue grecque. A 
cette epoque, il se lin d'ne amitie des Idus etroites avec le 
cclëbre botaniste Wil.len«»w. Au printemps de 1789 il alla 
suivre pendant une annçe, et en commun avec son frère, les 
com's de I'versi de Goettiue, nomment œux d u celèbre 
Il ey n e, et compusa Mors un Mëmoire sur la manière dont 
les Grecs tissaient leurs etoffes ; Memoire qui n'a pas Cv im- 
primé, mMs qui fut son début does la carrière des leHres. 
Pendant son séjoor à Goettingue, la frequentation des cours 
de Blumenbach, de Beckmann, de Gurelin, de Link, elc., 
ainsi que de nombreus excursions dans le Harz e sur les 
bordsdu Rhin, deeloppërent son goOt pour l'étude d 
sciences naturelle. Le fruit de c travaux fut son premier 
ouvrage imprimé, qui pat sous ce litre : Sur les basaltes 
du Bhin, avec des Rechemhes sur la sVenite et la basa- 
nte des anciens (en allemand; Berlin, 1790). Au prin- 
temps de 1790, Alexaudre de Humbohlt entreprit avec Geor- 
ges Forster un rapide, mais instructif voyage en Belgique, 
en Hollande, en Angleterre et en France; cette excursion 
scientifique et l'accueil encouragent que lui fit sir Joseph 
Banks firent naitre tout à coup en lui le plus vif désir de 
visiter les régions tropicales, et exercèrent une influence déci- 
sive sttr sa vie. Revenu d'Angleterre à la fin de cette mème 
année 1790, et toujours destiné à suivre la carrière de l'ad- 
ministration, il se rendit à Hambourg à l'effet de s'y per- 
fectionner dans les langues étran#r à rinstilut de Busch 
et d'Eling. Après avoir passé cinq mois dans cette ville, 
il revint auprès de sa mère, et ohtint enfin dMlle la permis- 
sion de se rendre à Freyberg, pour suivre 1 brillantes le- 
çons du grand minéraloste Wer ner ; et, dans l'espaoe de 
quelques mois, sous les yeux de cet excellent maitre, il 
recueillir et coordonna les riaux de  Flore ,enter- 
raire de Freçberq, et  ainsi les premiers jalo d'une 
science dont l'existenoe it à peine saumonC. 
A cette epoque, il n'y avait p encore ì Feberg de 
dmke spéciale de chimie, et les élèves se trouvaient dans 
la nécg«sité de combler par des études paiculières la la- 
cune qui exisit dans l'enseignement public. Les travaux, 
alors à peine connus en Allemagne, des chimist franig, 
de Berlhollet surtout et de Lavoisier, fixërent Pattention 
d'Alexandre de Humldt : il fut conduit ì dé,elopper dans 
plusieu articles insërés dans le Journal des MDtcurs ces 
nouvell h'pothèses si fécondes cil resultats pratiques; et 



18 
cette étude simultanée de la ci,truie théorique et de la mi- 
riCalote pratique lui permit de donner une nouvelle pré- 
cision à ses grandes conceptions sur la strncture géognosti- 
que et oryctognostiqne di globe ; conceptions qu'il devait 
plus tard vérifier dans les deux hémisphères, et livrer comme 
irrécnsables à la mditation des gëologues. La Flora st«b- 
terranea Friebergensis et aphorismi ex physiologia che- 
mica plantarum (Berlin, 1794), dont nous avons parlé plus 
haul, fiJ! le fruit de ce séjo«r de huit mois dans l'Ezgebirge. 
A peine Alexandre de Humboldt eut-il quitté l'académie 
de Freyberg qu'il lut nommé assesseur au conseil des mines 
de Berlin; et quelques mois plus tard (aoùt 179-), sur nn 
rapport très-detaille, qu'il rédigea sur la situation des ri- 
chesses sonterraines d'Anspach et de Ba)reuth, il fit pré- 
posé à la direction g'nérale des mines de cette principauté, 
qui venait d'ètre adjointe au territoire de la Prusse. 
Jusqu'ili l'activité intellectuelle de M. de llumbohlt avait 
été dirige presque exclusivement vers un seul but, l'explo- 
ration approfondie de la structure de l'écorce du globe dans 
quelqzes points limités de l'Allemagne ; mais, en 1796, cette 
actisití reçut une tout autre direction : si. de Humboldt 
quitta ses Cudes oryctognotiques pour suivre le prince de 
Hardenberg dans une mis»ion diplomatique sur les bords 
«lu Ihin et dans les Pays-Bas; et l'année suisante il entra au 
Conseil supérieur de l'industrie et du commerce. Ce fut à 
cette 6poque que les sciences des corps orgauisés, les 
sciences phsiologiques surtout, altirèrent toute son atten- 
tion ; et ses belles recherches ur le galvanisme, et son 
Traité sur l'rritation des erfs et de la .libre enuscu- 
laire, publies en 179, datent de cette année (1795), dont 
la dernière moitié fut cnsacrée presque tout entière à des 
voyages géologiqes dans le Trul, dans la Lumbardie et 
dans une portion de la Suisse, et qui valut encore à la 
science qoelques nouveaux aperçus, quelques indications 
générales sur les phénomènes si complexes de la végétation 
des plantes. 
Le printemp. de 1797 fut pasé à léna, où Mexandre de 
l]umboldt, qui suivait assidùment les leçons de Loder, se 
préparait par de pénibles Cudes d'anatomie pratique à 
l'exécution d'un grand voyage scientifique qu'il avait dès 
logtemps projeté. Ce fut ì Iéna qu'il termina son travail 
sur l'irritation de la fibre musculaire, et ce fut lb aussi qu'il 
vit sa tborie chimique sur les modifications de la [orce vi- 
tale devenir entre les mains de quelques-uns de ses con- 
disciples le germe d'une multitude d'expériences qui sem- 
blaient devoir un jour servir à formuler la grande loi des 
phénomènes de la vie chez les tres organisés. 
Ainsi l'activté intellectuelle d'Alexandre Humboldt avit 
successivment e.xploré toutes les grandes catègories de la 
science humaine : sciences historiques, ience des corps 
bruts, science des corps organisés, il avait éludié, et partout 
il avit crée, partout il avait ajouté quelques laits nouveaux 
aux faits acquis, quelque nouvel aperçu aux aperçus dejà 
deveioppés. Et cependant, à ses propres eux, son oeuvre 
jusqu'ici n'avit été que préparatoire : il avait profondé- 
ment creusé les livres des hommes, mais c'était pour ap- 
preudr« ì déchiffrer le livre du monde ; il avait fouillé le 
sol de l'Allemagne, et médité sur le institutions sociales 
du peuple qui couvre ce sol, mais c'était puer apprendre 
à fouiller le sol de la terre, et à découvrir dans les tradi- 
lb)us des peuples l'histoire du développement social de 
l'humanité. En 1797, sa co|iecte scientifique était faite, 
les provisions intellectuelles que nécessilait son voyage 
étaient péniblemeut rassemblées, et il vint ì Paris avec Iïn- 
tention de diriger ses premières courses vers l'Asie centrale. 
Il espéra d'abord que l'expediton du capitaine Bauhin lui 
fournirait l'occasion d'accomplir son projet; mais le renou- 
ve|lement des hostilités entre la France et l'Autriche ne lui 
permitpas de s'embarquer : il voulut ensuite s'adjoindre ì 
l'expddition d'Égpte, espérant pénetrer par l'Mrique dans 
l'Arable, et de l'Arabie, par le golfe Persique, dans les pos- 
r,sions glaises aux Indes ; mais des circonstances 

FIUMBOL 
prévues le retinrent à Marseille, et encore une fois  fut 
contraint de renoncer  son projet. Alo il se rendit à Ma- 
drid, et, ayant obtenu du gonvernement la permissiom 
d'explorer danstonte leur étendue les possessions espagnoles 
dans le nouveau continent, il modifia ses premiers projets, 
et, s'embarquant avec sou ami Bonplaud à la Corogne, 
il fit voile pour l'Amérique méridionale, et débarqua à Cu- 
mana au mois de juillet 1799. Celle année fut emp]oyée 
isiter les provinces de la Nonvelle-Andak)usie et de la 
Guiane espagnole; puis, revenu« à Cnmana par les Missinns 
Cara-d)es, les voyageurs se rendirent  Cuba, oh ils déter- 
minèrent rigoureusement, suivant les trois coordonnt%s de 
l'espace, la position géoaphique, juque alov mal connue, 
de la Havane. Au mois de septembre ! 801, les voyageurs 
commencèrent leur célèbre exploration de la gigantesque 
chaine des Cordilières : ils séjonrnèrent quelques mois 
Quito; ils visittreut le redoutable Toungonraga, le Tésuve 
de l'Amérique méridonale; ils traverreut les ruines encore 
frémissantes de lio-Bamba, qu'nn tremblement de terre 
venait d'eparpiller sur le sol, et  parvinrent enfiu, après 
des efforts inouis, LSqu'au .Nevad riel Chimborazo, sur le 
revers orienlal de ce .,éant des montagnes du ouveau-Monde. 
La leurs efforts redoublèrent :ni la difficul de respirer à 
cette hauteur prodieu, où l'air raréfié suffisail à peine 
à oxygéner le sang dans leurs poumons; ni le froid glacial, 
ni l'aspect de ces neiges éternelles, étal#s comme un lin- 
ceul immense sur cette ossatuoe du globle ; ni ces ablmes 
béants qui fascinent le regard et qui semblent atter 
eux avec nne invncible puissance, rien ne put les arrêter 
dans leur marche : déjà ils tendaient leurs bras vers le Chin'- 
Irazo lui-mme ; dejà ils louchaient de la main ce roi du 
.Nouveau-Monde, ce fier dominateur d'un peuple de monta- 
gne% Iorru'une effroyante creva«se, raillée à pic, et qui leur 
semblait l'onvertnre beante d'nn gonlfre sans fond, rompit 
la continuité de leur route, et leur ferma la voie. Au bord de 
ce précipice, s'Cevait un dme de porph.vre, qui se projetait 
en noir sur cette mer infranchissable de neiges ; et sur ce 
dme de porphyre, à une hauteur absolue de 7,000 mètres 
au-dessus du niveau de lainer, ils établireut leurs instrument% 
et recueillirent une série d'observtions de la plus hante im- 
portance en géographie physique. Ils avaient touché la limite 
extrême de la vie ; mais ils n'avaient pas atteint le point 
culminant de la terre. Du Chimborazo, ils dirigëreut leur 
route vers Lima, et à Callao ils observèrent et notèrent 
l'immersion de Mercure sur le dt:que du soleil. En tS0 et 
1803 ils visitèreut le Mexique, la ouvellEspae, la Phi- 
ladelphie, les Etats-Unis, et enfin ils s'embarquèrent pour la 
France, après avir pendant six années consécutives sillonné 
dans tous les sens le nouveau continent. Alexandre de Ehm- 
boldt arriv en France dans I derniers jours de 180, plus 
riche qu'aucun voyageur ne l'avait été avant lui ce faits 
nouveaux ou nouvellement vérifiés, en observations impor- 
tantes, en deins précieux, eu mannscrits plus précieux en- 
core : et les années qui sui,¢ieent son retour furent con- 
crées à la coordination et ì l'impression de ces innombrables 
documents. E I809 parut le premier volume de son Voilage 
aux roegios dquiuoxiales du uo«veau continent, ouvrage 
qui ne tut terminé qu'en t 825 (3 vol., avec atlas; Paris, 1809- 
1825). biais, au milieu de ces travaux, le rve de sa premiëre 
jeunesse revenait ns cesse  sa pensée : il avait riaitWle 
nouveau continent parce que l'ancien confinent lui était 
fermé, et maintenant que le monde savait son nom, et que 
toutes les barrières s'abaissaient devant lui, que tontes les 
voies lui étaient ouvertes» il revnait  sa première ambition, 
son premier but, l'exploration de l'Asiecentrale. En t $28 donc, 
Alexaudre de l]umboldt entreprit, avc MM. Ehrenbe et 
Gustave lose, un voyage de 4,500 lieues, aux mines de 
l'Oural et de l'Altai, aux frontières de la Sougarie chinoise, 
aux rives de la mer Caspienne. Les voageui's s'embarquë- 
rent à .isclmi-_;owgorod, et descendirent le 'ol jusqu'aux 
ruines tatares de Bolgari : de là ilç se rendirent, par Perm, 
ì Eatherinebonrg sur la pente asiatique de l'Oural, cette 



HUMBOLDT 
vaste cnaine à rangCs paral]è]es' dont les sommités cul- 
miuantes atteignent/x peine 1,400 b 1,500 mètres d'élévation 
=b«olue, mais qui, comme la Cordilière des Andes, suit la 
direction d'un méridien, depuis les formations terliaires du 
la Aral jusqu'aux roclms de grunstein, qui bordent la Mer 
de glace. I& ils explorèrent les riches alluvions de platine 
et d'or, et les gisements de béryls et de topazes, les mines 
de malachite; puis, dirigeant leur course à travers la steppe 
de Barbaca, ì travers les myciades incalculables d'insectes 
qui PinfestenL ils pénêtrèrent jusqn'aux bords du lac Koli- o 
• an, jusqu'aux mines d'argent placées sur la pente sud- 
ouest de la chalue de l'Altaï, dont le plus haut sommet, la 
blontagne de Dieu, ne dépasse pas la hauteur du pic de Té- 
n,':riffe. Enfin, ils arrivèrent ì la frontière de la Sougarie 
chinoise, et, longeant la steppe de la horde mo)enne des 
Kirghises et la ligne des Cosaques de l'Iscbim, ils gagnèreut 
l'Oural méridional ; puis, suiaut cette chaine jusqu'aux car- 
rières de jaspe vert off la rive du Jaïk brise sa continuité 
de l'est à l'ouest, ils se dirigèrent par Orenbourg : ils attei- 
gnirent la fameuse mine de sel gemme, située dans la steppe 
de la petite horde des Kirghises; ils ,isitèrent le grand 
lac suiWd'Elten, dans la steppe des Kaimoucks, et ils tec- 
minèrent leur pèlerlnage dans l'etablissement des frères mn- 
raves, près d'Astracan. 
Cet immense voyage a jeté un and jour sur la distri- 
bution géogcaphique de l'Asie ceutrale; et les renseignemeuts 
,lirectememt recudliis par Alexandre de ltumboidt, et qui 
sv lient ì ceux que MM. Ahei--Remusat et Klaprotb out 
puisés dans les travaux stati»tiques des Chinois et des 
Mandchoux, ont permis de redresser d'innombrables er- 
reurs que des donuées incomplètes avaient introduites dans 
la géographie de l'Asi.e.M, de Humboldt lui-mème a ce- 
cueilli dans ce voyage les materiaux de ses nombreux Mé- 
moires sur les systèmes de montagnes de UAsie centrale, 
sut" les volcans qui y out été actifs depuis les temps histo- 
riques, sur la grande depcession de l'Asie occidentale, dépres- 
sion dont les surfaces de la mer Caspienne et du lac Aral 
lutinent la partie la pins déclive, et qui semblent former 
sur notre monde sublunaire un pays crut.tre tel que sont 
sur la surface de la lune les taches desigtes sous les toms 
de Hipparque et Arcbimède. Enfin, Alexandce de Humholdt 
a pu dresser une carte qui indique la direction des quatre 
grands systèmes de montagnes qui di iseut l'Asie contrale 
et le terrain volcanique qui s'etend depuis la pente m.ri- 
dionale des monts Celest 'es jusqu'au lac Darlaï. (Cette carte 
est la première sot" laquelle se trouveur indiqués les vol- 
cans de l'intérieur des terres et les hauteurs absolues des 
principaux points au-dessus du niveau des mers.) Les 
résultats de ce grand voyage n'out ëte complétement publies 
qu'en IS48, sous le titre de/Lsie australe, Becherches sur 
les chaines de nontayne*, et la climatoloyie compare 
(3 vol. ; Paris, 1843-1848). 
Les ag:,tations de 1830 donnèrent aux travaux d'Alexan- 
dre de Ilumboldt une direction plus politique, sans apporter 
d'interruption ì ses recherches scientifiques. Après avoir, 
en mai de cette année 1830, accompagné le prince royal 
de Prusse ì Varsovie pour assister a l'ouverture de la der- 
nière diète de Poiogne, puis le roi de Prusse fi Teplitz, 
déric-Guillaume III l'envoya ì Paris porteur de la recon- 
naissance de Louis-Philippe en qualité de roi des Français, 
mission à laquelle le rendaient plus propre que tout autre 
les nombreuses relations qu'il avait déja eues avec ce prince 
alors qu il n'était encore que simple prince du sang. En 
1832, en 183 et en 1835 il servit aussi d'intermédiaire 
aux relations diplomatiques particulières suivies entre les 
cabinets de Bedin et de Paris. De 1835 ì 187, il fit encore 
douze voyages ì Paris, où d'ordinaire il passa chaque année 
pès de six mois consécutiïs. Mais depuis janvier 
Mexandr¢ de Humboldt a cessé ses visites à la grande ville, 
retenu probablement par son grand ge au foc'er domes- 
tique. Cependant il continue de se livrer ì ses travaux scien- 
tifiques avec autant d'ardeur que dans sa jeunesse, et son 

-- BUME 
dernier grand ouvrage, Cosmos, témoigne de ce qu il y a 
encore de verdeur dans son esprit. 
iIous voudrions et nous devrions, pour rendce cette note 
biographique quelque peu complète, donner ici l'indication 
et l'analyse des principaux travaux publiés par M. de Hum- 
boldt ; mais un catalogue purement biblioaphique de ses 
travaux dépasserait de beaucoup l'espace que nous avons 
dëjà concrë à cette notice, et nous sommes lorcé, mal- 
gré nous, de nous borner  un résumé sommaire des prin- 
cipaux résultats qu'il a acquis/ la science. Par ses obser- 
vations sur les distances lunaires, sur les éclipses des sa- 
tellites de Jupiter, sur l'immersion de Mercure, il a rendu 
des services essentiels aux sciene astronomiques; par 
ses recherches sur la distribution des plantes suivant les 
les iatitudes et suivant les hauteurs absolues du sol, il a 
presque cré. la géographie botanique; par ses recherches 
sur la distribution des ligues isothermes, dont il a le pre- 
mier constate l'existence, et sur la position de i'ëquateur 
magnétique, qu'il a étudié l'un des premiers; par l'etude 
approfondie qu'il a faite de la constitution gëologique des 
pays qu'il a parcourus; par les savantes coupe qu'il a 
dressées; par les innombrables mesures bdrometriques et 
trigonométriques qu'il a exécutées, il a changé la face d  la 
géographie physique, et, en reculant les bornes, en élacgJs- 
saut le cercle de nos connaissances, il a emis des consi- 
dérations generales qd peuvent servir de lien aux materiaux 
qu'il a cotligés, créant une science la  ù il n'existait que 
des faits épars: par la multitude d'espèces exotiques, 
animales et v«.gétales qu'il a rapportCs en Eucope, il a 
enrichi nos cabinets de minéralogie, de botauique et de 
zoologie plus que jamais vo)ageur ne l'avait fait avant lui. 
Enfin, par les nombreux renseignements qu'il a publiés sur 
les monuments du Mexique et du Perou, par les nom- 
breuses traditions qu'il a recueillies sur les civilisations 
primities du Noueau-3Ioude et sur les théogonies so- 
ciales des Aztèques, des Toitèques, des Péruviens, etc., il 
a singuliërement contribué  l'avancement des sciences so- 
ciales et hi»toriques. 
Alexandre de Humboldt fait pactie de presque toutes les 
académies : ses travau ajoutent aux richesses de presque 
tous les recueils scientifiques ; seul peut tre de tous les 
vants de natte époque, il peut 6tre nommé pour la presque 
universalite de ses connaissances apcès Aristote et Hal 
let, après les prodigieux enc]rclopedistes du moyen fige. 
BELFIELnLEFI:.Vi.E. ] 
HU31BUG. l'ove'- HoAx. 
IIU31E (D.sm), ingénieux sceptique et historien 
classique a»glais, né/ Edimbourg le 6 avril 1711, êtait 
le liG cadet d'un lord d'Ecosse de la famille des comtes de 
Home. Il perdit son père dans un age fort tendre ; mais sa 
mère se devoua entièremeut a l'éducation de ses enfants. 
De bonne heure le jeune David Hume se sentit entrainé 
sers l'Cude de la philosophie et de belles-lettres. Mais sa 
famille etait pauvre, et la faible part qui lui revenait dans 
l'hritage paternel le focça d'accepter la propo.-ition qu'on 
lui fit d'entrer dans une maison de commerce de Bristol. Il 
avait alors vingt-trois ans, et ne tarda point à éprouver une in. 
vineible répuance pour sa nouvelle profession. Il y renonça 
donc bientot pour s'eu revenir/ Edimbourg terminer ses 
Cudes universitaires, qt,e sa mauvaise santë l'avait un ins- 
tant contrain dïnterrompre. 11 résolut alors de se soumet- 
tre/ toutes les privations pour pouvoir suivre ses penchants 
et conserver son indépendance. Il vint en France, pensant 
avec raison qu'il y pourrait vivre avec plus d'économie 
que dans son pa?s natal. Ce fut sot,s le beau ciel de l'An- 
jou qu'il écrivit son relise upon human nature. 11 re- 
vint à Lond,'es après tros ans d'absence, pour faire im- 
primer cet ouvrage, qhi n'eut aucun succès, mais où l'on 
retrouve tout le scepticisme et le g6nie w.rticulier de Hume. 
La philosophie du dix-huitième siècle était alors dans son 
premier éclat, et commençait à jeter les fondements de ce 
' sstème d'investigation hardie qui cherche la cau de tout, 
25. 



220 
et qui nie tout ce qu'elle ne peut expliquer ou comprend,-e. 
Hume était un des adeptes de cette philosophie, dont il fut 
bientôt un ,le.aptres les plus audacieux, l'eu d'années après, 
il fit paraltre  Édimbourg la première partie de ses Essa!/s 
moral, poltical and literary ( t 742). Ce second ouvrage 
tu t mien x accueilli que le premier, et il publia successivement 
la suite de ces Essays, où il ëtonna les hommes les plus dis- 
lingués de l'Erope par la profondeur et la nouveauté de 
s aperçus. On admira la raison forte, calme et subtile à 
la fois, de ce gënie élevé; cette supériorité d'intelligence 
que rien n'étonnait et à laquelle rien ne paraissait étranger. 
L,.gislation, économie sociale, politique, morale, philoso- 
phie spéculative, metapliysique, sciences, beaux-arts, com- 
mercç, industrie, tout était du don,aine d« cet esprit fé- 
cond et OEoué de connaissances universelles. Dan» ses Re- 
cherches sur l'antiquité, il fit briller cette sagacité de critique 
que Voltaire depuis porta dans l'histoire, et qui a mis en 
doute des points jusqu'alors incontestés. 
Ce q,i faisait le principal mérite des ouvra.es de Hume 
fut prcisement ce q«i les empcha «le jouir de la répt,ta- 
tion dont ils ëtaient dignes. 11 traitait des s«jets avec les- 
q«els le public nYtait point encore familiarisé; et comme 
il ne s'adressait qu'aux esprits ClairC, il n'eut aucune po- 
pularite. Au«si, malgré tout son mérite, il dut sacrifier au 
besoin d'exister cette indépendance qu'il chérissait tant. 
En t745, il accepta la place de mentor près du fils du mar- 
quis d'Ar, nandale, jeune homme dont l'esprit était affaihli ; 
puis il-devint le secrétaire du g0:nral Saint-Clair dans son 
expédîtion contre les ctes de France. Une chaire de phi- 
losophie morale étant venue  vaquer  Édimbourg, Hume 
se mit sur les rangs pour l'obtenir. Mais ses écrits l'avaient 
rendu odieux au clergé, et on lui prétéra un de ses concur- 
rents. Il se determina alors h accompagner le général Saint- 
Clair dans son ambassade à ¥ienne et h Turin. De retour 
dans sa patrie, il fit paraitre h peu d'intervalle son Enquir 9 
concernin 9 human understandin 9 (Londres, 174s), où il 
développait son systéme de scepticisme universel d'unema- 
nière bien autrement complète. Re enu en Êcosse en 1752, 
il y publia son Enquiry concernin 9 the princoeles qf mo- 
rals, ouvrage dans lequel il recherche avec plus d'exac- 
titude qu'on ne l'avait encore tait la base du sens mo- 
ral. Le sentiment moral est à ses yeux le motif de toutes 
les actions morales ; et il fait consister le caractère de la 
vertu dans la possession des qualites intellectuelles qui nous 
rendent utiles ou agréables aux autres. Ces efforts redou- 
blés fixèrent enfin l'attention du public; la r«putation de 
Hume s'Cendit en Angleterre et sur le continent. 
En 1752, ayant été nommé bibliothécaire de l'ordre des 
avocats d'Édimbourg, il fut amenë h s'occuper de recherches 
historiques, et conçut alors l'idée d'écrire l'histoire de son 
pays. De 175-t à 1756 il fit paraitre l'Histoire d'Angleterre, 
depuis l'avdnement a tréne de la famille des tuarts ; 
travail suivi, en 1759, de l'Histoire de la maison de T«dor, 
et complété, en 1761, par le récit des faits des périodes anté- 
fleures. L'ouvrage fut ensuite reimprimé sous le titre général 
de llistory of England frorn the invasion of Juliu.ç 
Cesar fo the revolu!ion of 1655. En déldt de l'en,ie et des 
critiques, cette histoire d'Angleterre acquit bientôt une 
célébrité méritée, et devint classique, mëme du vivant de 
l'auteur; sa fortune et son ind@en,]ance furent assurées, 
et il obtint une pension du roi. L'envie se tut ; l'Angleterre 
honora dans IIume son plus illustre historien. Un témoi- 
gnage d'estime plus flatteur peut.tre que les hommages 
tardifs q«'il recevait dans sa patrie, l'attendait en France. 
En 1763, il consentit à acco,npagner, en quantité de secré- 
taire d'ambassade, le lord Hertf«rd dans sou ambassade à 
la cour de Versailles. Il y reçut l'accueil le plus flatteur et 
le plus distingué. On lit dans la correspondance de Grimm 
(tom. V, p. 124) des détails i,iquants sur sa personne et 
ur la réception qui lui ht thite. ,, Paris et la cour se sont 
disputé l'honneur de se surpasser... Ce qu'il y a de plaisant, 
¢'est que toutes les jolies femmes se le sont arr:,clié, et que 

tlUME 
le gres philosophe écossais se plalt dans leur société. C'est un 
excellent homme que David Hume. Il entend finement, ri 
dit quelquefois avec sel, qnoiqu'il parle peu; mais il est 
lourd, et n'a ni chaleur, ni grlce, ni agrément dans l'esprit, 
ni rien qui soit propre h s'allier au ramage de ces char- 
mantes petites machines qu'on appelle jolies iemmes, • 
En France, Hume se lin étroitement avec J.-J. Rousse.au. 
Il l'emmena avec lui en Angleterre, en 1766; mais l'humeur 
morose et misanthropique du philosophe génevois, ses 
soupçons inquiets et plus que tout peut-Cre cette affec- 
lion hypochondriaque qui causa le tourment de dernières 
années de sa vie amenèrent une rupture éclatante, à la 
suite de laquelle Hume, pour se justifier des injustes re- 
proches de J.-J., eut le tort de trahir le secret de sa cor- 
repondance privée avec lui, et de faire ainsi connaltre les 
services qu'il lui avait rendus. 
E t767 Hume fut nommé sons-secrètaire d'État; mais 
il ne conserva ces fonctions que pendant deux années, et en 
1769 il se retira h Édhnbourg, oi, après quelques années 
d'une exist._-nce Ieureuse, il fut attaqué d'un dyssenterie 
qu'il jugea lui-mëme incurable. 11 vit approcher sa fin avec 
calme, et mourut pai¢iblement le 2 aott 177. 
Outre les ouvrages de Hume dont nous avons parlé., on 
a encore de lui des Dialogues sur la religion, et des Essais 
sur le Suicide et sr l'Immortal[té de l'dne, qui n'ont 
paru qu'aprës sa mort. 
Hume fit sans contredit un des esprits les plus éminent 
du dix-huitième siècle, de ce siècle si fécond en hommes su- 
périeurs. Les critiques anglais citent son style comme un mo- 
dle de diction facile, claire, élégante et pure. Ses doctrines 
philO»Olddques sont souvent dangereuses; on est effrayë de 
ce scepticisme froid et métholique qui s'efforce d'ëbranler, 
toujours Ch déguisant la passion, les fondements de toutes les 
croyances. On ne lit guère pl,m aujourd'hui la plupart de ses 
œuvres politiques ou philosophiques. L'école du scepticisme 
a fait son temps. Toutes les questions qui ont si fortement 
occupé le siècle dernier ont été t'objet de controverses les 
plus animëes h la tribune, dans les feuilles publiques, dans 
les recueils p,:riodiq«es. On a emprunté aux unes, pour les 
faire passer dans le droit public ou dans la législation, des 
idées fecondes et d'utilité pratique; on a abandonné les au- 
tres comme oiseuses et insolubles..Iais ce qui assure à 
jamais la gloire de Hume, ce qui fera vivre son nom, c'est 
son Histoire d'A91eterre. Il a eu le rare mérite de porter 
le premier de la clarté dans les annales de sa patrie; il , a 
consacré plus de dix années de sa vie. ¥oici comment il 
s'est lui-mme jugé : « J'étais, je le savais, le seul historien 
« de mon pays qui ett écrit sans rien sacrifier à l'ascendant 
« du pouvoir dominant, à l'autorité présente,  lïntérët 
« du moment, aux préjugés populaires. » Ses contemporains 
et la postérité ont ratifié l'eloge, et cet éloge suffit  sa 
mémoire. Camille Cnnos. 
HUME (Jo»nn), homme d'État anglais, né en 1777 à 
lIontrose en Écosse, perdit de bonne heure son père, ca- 
pitaine d'un petit bàtiment raboteur ; et sa mère dut de- 
mander h ur petit commerce de détail les moyens de nourrir 
et élever sa nombreuse famille. Après avoir appris un peu de 
latin au collége de sa ville natale, puis passé quelque temps 
en apprentissage chez un chirurgien, J. Hume alfa étudier 
la médecine h Ëdimbourg, où en 1796 il subit son examen 
devant le College of $urgeon$. A quelque temps de là il fit 
attaché en qualité de chirurgien au service de la Compatie 
des Indes, qui l'envo)a au Bengale. Il s'y appliqua avec 
tant d'ardeur à l'ëtude de la langue locale qu'en 1803, 
lorsque éclata la g:erre contre les .Iahrattes, il put tre 
attaché en qualité d'interprëte h la division du général Po- 
'ell envoée dans le Bun, lellund, tout en conser'ant ses 
fonctions de cliiruien, avec lesquelles il cumula bient¢t, 
gràce  une infatigable activitd, celles de payeur et de di- 
recteur des postes de l'armée. La manière dont il s'aequitta 
de ses nombreux devoirs lui valut des remerciements pu- 
blies de la part de lord Lai, e, commandant eu chef de 



ttUM E -- 
l'armée de i'Inde. Les émoluments considérables qui ) 
avaient été attacbés et aussi d'heureuses spéculatious le mi- 
rent à mëme de s'en revenir en Europe, en t808, avec une 
fortune assez ronde. 11 parcouut alors pour son instruc- 
tion les diffcrentes parties de l'Angleterre et de i'Idande, 
puis l'Espagne, le Portugal, la Turquie, la Grëce, l'Égypte, 
les lies loniennes, la Sicile, Malte et la Sardaigne. En 1817 
il lut Cu membre de la chambre des communes par le 
bourg de Weymouth ; mais le parlement aant etWdissous à 
quelque temps de lb, il ne lut pas réélu. II partagea alors 
son temps entre les devoirs de sa place de directeur de la 
Compagnie des Indes, qu'il avait obtenue en 1813, et les 
soins qu'il donnait à la propagation de la méthode d'cusei- 
gnement elémentaire dite de Lancaster. Ce fut seulement 
en 1818 qu'il rentra comme représentant de sa ville natale, 
Montrose, h la chambre des communes, oit peu à peu il s'i- 
• nitia au r61e politique important qu'il lui a été donné depuis 
lors de jouer. Par le sévère contr61e qu'il exerça sur toutes 
les dépenses de l'État, par ses critiques mordantes contre 
celles qui ne lui paraissaient pas strictement nëcessaires, il 
devint le cauchemar des tories, alors h latête des affaires, et 
qui usèrent, mais en vain, de tous les moyenspossibles pour 
sedebarrasser dece censeur incommode. Elu en 1830 membre 
du parlement par lecomtë de Middlessex, il figura au pre- 
mier rang parmi les défeuseurs du bill de la réforme parle- 
mentaire; et cette importante mesure une fois obtenue, il 
devint dans la chambre nouvelle le chef du parti radical, et 
ne contribua pas peu  déjouer, en 1835, la plan qu'avait 
conçu la faction orangiste d'exclure de la succession au 
rSne la princesse ¥ictoria, dont l'education avait été euta- 
chée de libéralisme, pour appeler le duc de Cumberland  la 
couronne. Devenu l'ohjet tout particulier des rancunes du 
parti tory, il échoua aux électious de Middlessex de 1837 ; 
mais, gr'hce h la protection d'O'Connell, il n'en continua pas 
moins de siéger au parlement comme représentant de Kil- 
kenn)'. Aux élections générales de 184!, il ne fut pas Cu; 
mais l'année suivante la ville de Montrose le choisit de nou- 
veau pour représentant; élection renouvelée, depuis, en 1817 
et en 1852. Il mourut au mois de terrier 1855. Joseph Hume 
fit toute sa vie un des plus intrépides adversaires du mo- 
nopole et du privilége, un des plus fermes champions des 
liber/és politiques et religieuses. Comme réformateur finan- 
cier, il n'eut pas d'Cai dans le parlement ; et à cet égard 
son infatigable constance était passée en proverbe. C'est à 
ses efforts que l'Angleterreest redevable du meilleur ordre qui 
a été introduit dans sa comptabilité financière et de la sup- 
pression de l'amortissement. On estime à plusieurs millions 
de livres sterling les économies annuelles qu'il est parvenu à 
opérer dan.s le budget de l'État. 
IIIIERAL (du latin humerus), ce qui a rapport à 
I" h u mérus ou à l'épaule. C'est aussi le nom du dos ou 
de la partie postérieure de la eu ir asse. 
IIUMERUS. Les anatomistes nomment ainsi l'os du 
br a s proprement dit. Son extrémité supérieure est en gé- 
néral arrondie ; elle présente trois éminences : la plus grosse 
porte le nom de téte de l'humCus, et les deux autres celui 
de tubdrositds; l'interçalle qui sépare la téte du corps de 
l'os est le col de l'humdrus ; les deux tubérosités sont sé- 
parAes par une rainure qu'on appelle coulisse biccpitale. 
L'extrémité inférieure de l'humArus est aplatie et recourbée 
d'arrière en avant ; elle pré»ente de chaque estWune saillie, 
le condyle interne et le condyle externe ; l'espace qui 
sépare ces deux cond yles forme la poule articulaire 
de l'humérus, et une éminence arrondie qu'on remarque 
 sa partie externe prend le nom de petite téte de l'hume- 
rus. L'humdrus s'articule en haut avec i" o m o p I a t e pour 
former l'épaule, et en bas avec les os de l'avant-bras ; 
cette dernière articulation produit le coude. 
La dlirurgie a souvent h s'occuper des ff a et u re s et des 
iuxations de l'humArus. 
llUMEUIL Lecorps humain est composé de parties so- 
lidesou matcriaux fixes, et de parties fluides ou matériaux me- 

HUMEUR t 
biles. Ces derniers, que l'on appelle humeurs, sont en quantité 
majeure et sont même la source des premiers. Le sang est 
l'origine commune des matériaux fixes et mobiles. Des vais- 
seaux capillaires absorbent dans le sang arteriel les maté- 
riaux humides qui lubréfient les surfaces membraneuses, 
la peau, les articulations mobiles, le tissu cellulaire. Ces 
fluides, étant reportés dans le torrent de la circulation, sont 
appelés humeurs rdcrdmenttielles par opposition à d'au- 
tres qui, étant absorbées pour tre exl,Ulsées , sont appelées 
h umeztrs excrmen litielles : telles sont la t r a n s pi r a t io n 
insensible q.i emane de la peau, la s 1 e u r, la pers#ration 
pulmonaire, les résidus de la digestion. Des g I a n d e s très- 
nombreuses sépareut aussi du sang des produits divers qui 
sont au nombre des Ilumcurs : ces organes, appelés sdcrd- 
teurs, forment les larmes, la s al i ve, le suc panerAa- 
tique, la bile, l'urine, le lait, cie. 
Les humeurs ainsi composées ont dans iYtat normal des 
propriétés physiques et chitniques qui les differeucient entre 
elles, mais qui toujours sont modifiées par la force motrice 
et inconnue qui est l'ciCent primilil de la vie : si eetle 
puissance ëprouve quelque ailCation, on peut concevoir que 
les fluides sont proportionnellemen/ viciés, et cet efli:t 
peut ètre rapide : qu'une nourrice, par exemlde, se mette 
dans une iolente colère, son lait se déprave au détriment 
de l'enfant qu'elle nourrit. Les humeurs présentent donc un 
élat de santé et un état morbide, et les solides doivent s'ai- 
tCer dans ce dernier cas, parce que la source ou ils se ré- 
parent n'est pas saine. La raison snggëre instinetivement 
celte nolion; elle parait même si simple qu'on croit d'abord 
qu'il est facile de la démontrer aux sens : il n'en est cepen- 
dant point ainsi, malgré les immenses progm'ës «le la phi'si- 
que et de la Cllimie, malgré la facilile avec laquelle cer- 
taines personnes étrangèm-es h la medecine expliquenl par 
la viciation des humeurs la cause d'un grand nombre de 
maladies. D'aillears beaucoup de médecins, donl les doc- 
trines diverses ont été confondues sous le nom d'humo- 
risme, ont fonde exclusivement des lhéories sur rallralion 
des fluides, comme d'aulres sur celles des solides. Les 
hommes ludicieux qui pratiquent l'art de guérir rejettent 
les unes et les autres comme peu seusées, parce que toutes 
les parlies du corps Ilumain sont tellemeut lices cuire elles 
que les unes ne peuvent s'altérer sans que les alltres s'en 
ressenlent. Mais pour le vulgaire les théories tondées sur 
lhumorisme ont un allrait irrésislihle. On se laisse aller 
à a,lmeltre aee les humoristes, dont Moliëre nous a trans- 
mis le lype, que la cause de loute maladie est dans une hu- 
meur peccante (c'est le terme consacré), laquelle olfre d'abord 
une période de crudité pendant laquelle elle est intraitable. 
Puis vient la coction ou cuisson des humeurs par la fiè- 
we, moment favorable pour d,.barrasser l'économie du le- 
vain morbifique qui causait tant de mal (voyez Cms ). 
tleureusement qu'aujourd'hui, s'il reste encore quelques Ar- 
gants, nous n'avons plus guère de Purgons. 
Le mot humeur est souvent employé pour qualifier lea 
dispositions d'esprit ou les caractères : il a d/ eu tre ainsi 
&après l'influence que le physique exerce sur le moral. 
Aussi, le tempérament sangnin imprimant au caractère de 
la vivaeité, de la fougue, de l'emportement, on dit d'un 
homme qui présente celle manière d'ètre : il a l'humeur 
sanguine; la prédominance de la I y m p h e et du mucus 
étant aecompagnée de lenteur et d'indécision dans les ac- 
tions, les I'mphaliques ont, dit-on, l'humeur phle9mali- 
que; la bile étant réputée pour engendrer la tristesse, les 
personnes bilieuses ont l'humeur atrabilaire. 
Appliqué au moral de l'homme, le mot humeur a 
encore un grand nombre d'acceptions ; il comporte l'idée 
de tristesse, de mécontentement, de fantaisie, de caprice, 
de bizam-rerie, d'irdtabilité ; il désigne si bien la disposition 
d°esprit qu'on dit Cre en humeur de danser pour exprimer 
que l'on est disposé à s'amuser, comme on dit aussi qu'on 
n'est pas d'humeurà se laisser ouverner ou mener quand 
on veut conserver son libre arbitre. Une opposition trano 



229 
chée dans le moral est appelée i n c o m p a t i b i l i t e d'hu- 
meur et de caractère ; une disposition habituelle à l'en- 
jouement, à la gaieté,  une joie douce et calme se nomme 
bonne humeur. D r Cnxtmo..-tr.a. 
HUMEURS FROIDES. Voile'-SCROFULES. 
HU.ilLITÉ. La vertu représentée par ce mot n'est 
pas aussi ancienne que lui. Humilite vient du mot latin bu- 
mus, terre. Dans ce sens de chose peu élevée, les Romains 
appelaient humbles les ignes et les arbrisseaux. Virgile 
donne cette épithète h l'ltalie : 
Cure procul obscuros colles humilemque vidimm 
Italhm...., 
soit que, du cété oh naviguait alors son heros, il ne pot 
apercevoir aucune des hautes montagnes de l'ltalie, soit 
que la distance les amoindrit aux yeux des navigateurs. Co- 
rydon désire ivre tranquille dans son humble chaumière, 
Atque I-,umi[es habitare casas... 
Cette expression, tranport«e de la terre et «les plantes à 
l'homme, n'a point d'abord changé de condition. La signi- 
fication d'homme humble, pour les Latin% étail la même 
que celle d'homme  il et meprisahle s'il s'agissait de la 
position personnelle de quelqu'un, et d'homme sans portée 
d'eprit, sans genérosité s'il s'agissait de la trempe de son 
caractère. Pour rel,ausser l'importance du consul P. Len- 
tulus, auquel il doit son retour dans la patrie, et ra- 
 aler les cousuls Pison et Gabinins, auteurs de son exil, 
Cioeron traite ces derniers d'hommes d'un eprit étroit et 
humble. L'humilité emportait donc pour les Latins une 
idée d'opprohre ou de mepris. Elle était aussi quelquefois 
pour eux l'equivalent de ce qu'on appelle chez nous humi- 
liation. 
Il faut donc interpréter par bassesse de condition le mot 
humilité, employé dans le beau cantique de la Vierge, qui 
declare le tressaillement de son cœur devant Dieu dès 
quïl daigne la regarder avec bénignité ( humilitatem an- 
cdloe suit ). Ctte humilité n'est autre chose que la fai- 
blesse d'une créature en face du Créateur, faiblesse couve. 
nablement mise en paraliële, dans ce cantique, avec la 
loire promise à la mëre de Dieu dans tous les ges. 
Les Latins n'avaient pas de mot qui s'approcl,M dvan- 
rage de celui d'humilte, comme nous l'entendon% que celui 
,le modeMe. Il y a pourLnt cuire ces deux termes une 
grande ditférence = alors comme aujourd'hui, le mot 
destie, qui a sa racine dans modus, règle, mesure, ordre, 
indiquait cette modération de desirs, d'affections et d'ac- 
tions par laquelle l'homme, prenant de chaque chose moins 
encore que ce qui lui serait permi.% se contient dans les 
limites les plus étroites de ses facultés, subjngue toutes 
cupidités, et amortit le emportements de son ambition na- 
turelle. L'humilité, au contraire, dénote une soumission 
spontanée, un sentiment de soi-mëme, réglé non-seulement 
sur la connaissance sincère qu'on a de la petilesse de 
l'homme considérée en elle-mème, mais aussi sur celle de 
la grandeur de Dieu. Voila la véritable humilité, inconnue 
h la vertu orgueilleuse des anciens, et qui a éoE proclamée 
pour la premiere fois par le Sa**veur du monde, prononçant 
ces mots ublimes : Celui qui s'humilie sera exalte. 
L'humilite est donc un mot chrétien, théologique, que la 
religion a sanctifié, et qui n'emportait chez les anciens 
aucune signification de vertu. 
Baron Joseph M_t,so, de l'Acadëmie de Tre'in. 
IlUXIMEL (JE,kN-NEiOMuCÈsE }, l'un des pianistes et 
des compositeurs les plus dixtingués des temps modernes, 
né h Presbourg le 14 novembre 1778, apprit les premiers 
éléments de la musique de son père, Joseph Hummel. Ce- 
lui-ci ayant été appelé en 785 à Vienne par Schikaneder en 
qualité de maitre de chapelle, le talent précoce de l'entant 
excita tellement l'intérêt de Mozart qu'il le prit chez lui et 
se chargea ne le diriger. Ds 1788 Hummel entreprit avec 
sou père des tournées artiMique en Aile.magne. en Angie- 
terre et en Hollande. -En 1795 il revint h Vienne, oh sous 

HUMEUR -- HUMOUR 
la direction particuliee d'A I 1 r e c fi t s b e r g e r et par des 
relations de chaque jour avec Salieri, il fit de l'art de Ia 
composition une etude speciale, dont les fruits furent divers 
rondeaux, trios et sonates, que ses ouvrages postericurs 
ont fait oublier. Entré au service du prince Esterhazy en 
qualite de maitre de chapelle, il eut occasion de s'y essa)er 
dans la musique religieuse et dans la musique dramatique. 
Après aoir renoncé  cette position, en 181 I, il se consacra, 
sans jouer en public,  l'enseignement et à la composition. 
Ce ne fut qu'à Stuttgard, oh il fut appelé, en 18115, comme 
mattre de clsapelle, qu'il se fit de nosieau entendre sur le 
piano en public; la perfection de son jeu excita l'admiration 
universelle, et tous les contemporains sont d'accord pour 
proclamer qste jamais peut-être on ne porta plus loin que lui 
la laculté d'improviser. En 1820 Hummel alla rempli le 
même emploi à Weimar, oh, sauf quelques grands voyages 
en Russie et en Angleterre, il continua de séjourner jusqu'à 
sa mort, arrivée le 17 octobr 1837. Il a déposé dans un 
grand ouvrage intitulé Ecole de forte-piano, et ,tans divers 
morceaux d'etudes, les principes qu'il s'était faits et le¢ ré- 
sultats de son expérience. Ses compositions consistent en 
concertos, trios, sonates, un grand nombre de petits mor- 
ceaux pour piano, divers morceaux de musique d'cglise 
et de musique thehtraie. Dans ce dernier genre, l'artiste 
ne roussit que mcdiocrement ; et son opéra Mathilde de 
: Go/se n'eut aucun succës; en revanche, deux grandes messes 
: de lui, une sonate, deux concertos, quelques trios vivront 
éternellement. 
IIUMOPdSME  HUMORISTES. Voyez, Hceca, 
CI:ISE  etc. 
IlUMOUR. Ce mot, qui a penétré dans la langue critique 
et htt«raire, signifie simplement humeur, bizarerie natur, Ile 
de caractère, penchant auquel on cède, habitude d'esprit dans 
laquelle on se complait : on est donc de bonne humeur, 
de mauvaise humeur ; on a l'humeur sombre, noize, riante. 
Les Français ont conservé cette acception du mot, mais il 
n' a que les nations septentrionales qui aient pensé h taire 
de l'humorime un mërite et une forme litteraire dis- 
tincte : trausportaut les caprices et les  ariétes de leur hu- 
meur dans les œuvres intellectuelle% ils en ont lait un nou- 
veau mobile d'intert que les anciens n'avaient pas connu, 
et qu'ils avaient même repoussé avec d,.go0t. Souvent les 
fils des Teutons ont essayé de laire valoir comme chef- 
d'oeuvre cette farouche indépendance, tantét gaie, taut0t 
lugubre, et qui leur semb!ait à la fois si precieuse et si di- 
gne de l'homme. A force de livrer rimagination et le capric, e 
à toutes leurs fantaisies, ils découvrirent que le mode spé- 
cial qui exprimait le mieux l'essor singulier de cette indé- 
pendance intellectuelle, c'était la rêverie tour h tour mé- 
lancolique et folle, donnant essor à des saillies joyeases qui 
trahissent un Iond d'amertume tuur h tour riant au milieu 
des larmes, et lançant une etincelle ardente, un trait de gaiete 
imp, tueuse au milieu de la trislesse la plus amère ; il n'y 
avait lb rien qui ne fùt d'accord avec les habitudes de 
l'humanité, mais c'etait sa maniëre d'ètre la plus libre, 
la plus sans façon et la moins reée. 
Notre civilisation française, depuis les Romain% n'a ja- 
mai abandonné la règle, qui tour à tour a pris les noms 
de discipline militaire, d'organisation ecclésiastique, de po- 
litesse dans les mœurs etde formules administratives ; aussi 
l'humeur telle que nous l'avons décrite plus haut fut-elle 
bannie des mœurs françaises. On trouve bien une gaieté bril- 
lante chez R abela is, une h'istesse pleureuse chez Ar- 
nau lé, une mclancolie douce chez B a ci ne et plusieurs 
autres ; mais rien n'y est plus rare, rien n'est moins en har- 
monie avec le génie national que cette fusion de gaieté et 
de tristesse, de la philosoplrie et de la déraison, qui font le 
mérite de Sterne, deRichter, deLamb, etquise 
retrouvent dans Shakspeare et Byron. Hamlet, qui 
tourne le monde eu plaisanteries amres; yorick, dont le 
cràne retrouvé sert de texte h des théories si mélancoliques; 
le pauvre Jacques, qui voit périr un cerf et qui morali 



HUMOUR -- HU.NE 
pendant une heure avec tant de charme et de puérilité à la ] soixante-dix ans. Pepiu, qui avait fait a,sassiuer Waitre 
fois sur sa mort, offrent des exemples humoristiques très- étant venu à mourir, Hunald abandonna le froc, et, leur 

frappants : le livre entier de Sterne, comprenant l'histoire 
d'un homme, et qui au sixième volume n'a pas encore fait 
quitter la jaquette à sou héros, compte parmi les pins 
délicieux produits de l'imagination anglaise. Presque tous 
les ans paraissent des ouvages du mme ordre, plus ou 
moins médiocres. Les heureux, ceux qui touchent le but 
acquièrent une estime considérable, et se placent au rang 
des premiers é¢rivains. 
Les Allemands nous semblent avoir exagéré un peu cette 
manière, et nous ne pardonnons pas ail spirituel et im- 
mense Jean-Paul Iorstlu'il fait jouer à la balle les planètes 
Mars et Vénus, et qu'il montre le Soleil moulant eu chaire 
pour haranguer ses satellites; mais les narrations naives et 
touchantes, les inventions ingéuieues et extraordinaires 
sont empreintes sur toutes les pages de cet humoriste. 
lleine, dont la malice est plus piquante, nous semble au- 
jourd'hui le plus remarquable des humoristes allemands, 
dont l'ecole est nombreuse. Les Anglais, en perdant Lamb, 
ont perdu le dernier lleuron de cette couronne humoristi- 
que. Qtmnd lord Byron, s'adressant à l'homme en général, 
et voulant comprendre sous une re&ne indication la bizar- 
rerie de ses joies et de ses douleurs, I'a comparé h un pen- 
dule qui oscille entre le sourire et les larmes : 
Mao, thon, pendulum between a stalle and a tear, 
il a donné Io définitiou la plus complète et la pins précise 
d'une tournm'e d'esprit singuliëre qui caractérise surtout 
les hommes de sou pays. Philarète CnSLES. 
HUIIUS. On nomme ainsi cette couche superficielle, 
composée pour la plus grande partie de matiëres organiques, 
qui, se formant continuellement/ la surface de la terre, se 
mdle avec les molécules miuérales qui constituent le sol, et 
est la cause principale de la fécoudité. Là où la culture n'a 
pas encore péuétré, par exemple dans les forét vierges du 
ouveau-Monde, l'humus se trouve souvent accumulé en 
couches d'une énorme épaisseur. Ailleurs la superficie de la 
terre s'en enrichit continuellement par alluvious ou par les 
débris organiques contenus dans les eaux stgnantes. Les 
rives du Nil en Égypte, les parties basses du Danuhe et de 
la Theiss en Hongrie, les botteras des rives du Mississipi, 
de l'Ohio et du Missouri, la ceinture formée par le Marafion, 
l'OrCuque, et la Plata » o0 se montre la végétation la plus 
gigantesque, eu général les pays de marais ou de marches 
qui avoisinent les cStes de la mer et le lit des fleuves sont 
des lieux où l'on rencontre accumulées de grandes masses 
d'bumus, de mme que les tourbières et les matCages qui 
remplacent aujourd'hui en Europe et dans d'autres régions 
d'anciens lacs, «.tangs et marais. Plus une terre est fé- 
conde et riche, et plus elle contient d'humus : ce qui im- 
plique toujours l'existence d'une rivale et luxuriante végé- 
talion. C'est par ce motif que le cultivateur, eu charriant 
du futaie r sur son champ, y renouvelle constamment la 
somme d'bumus en même temps que la puissance de pro- 
duction. Dans ces derniers temps quelques chimistes ont 
prétendu contester l'importance du rSle joué par l'humus 
dans la nutrition des plantes; mais leurs objections ont été 
d'autant moins accueillies qu'elles étaient en opposition di- 
recte avec les faits positffs résultant d'expériences de plu- 
sieurs siècles. 
]IUNALD ou HIDIOLD, duc d'Aquitaine, issu de la 
famille des Mérovingens, sucsCa à son père Eudes en l'an 
735, et ne tarda pas à essayer de secouer le joug du vasse- 
lage que Charles Martel et ses fi|s lui avaient imposé. Il 
contracta à cet effet alliance avec Odilon, duc de Bavière; 
mais, trahi dans cette lutte par son frère, il lui fit crever 
les yeux. Puis, se voyant sur le point de tomber au pouvoir 
de Pepin et de Carloman, il abdiqua en faveur de son fils 
Waifre, auquel le vainqueur n'avait point de reprnches  
faire, et alla s'ensevelir dans un monastère de l'tic de RC 
d'où il ne sortit que vingt-trois ans après, gé alors de 

venger la mort de son fils, appela ses aueiens sujets à l'in- 
su rrection. C h a r I e m a g n e réussit à comprimer ce mou- 
vement, qni prit un instant des proportions menaçautes; et 
il força Huuald h s'enfuir d'Aquitaine pour aller demander 
asile d'abord h Loup, duc de Gascogne, qui le trahit et le 
livra à sou eunemi. Mais il parvint h s'échapper et se rétogia 
eu Italie, auprès du pape, qui le recueillit en lui faisant 
promettre de ne jamais s'éloigner du tombeau des ApOtres. 
llunald, aprës avoir prëté ce serment solenuel, ne oe sentit 
pas la force de résister à l'appel de Didier, roi des Lom- 
bards, leqnel, daus sa lutte contre Charlemagne, crut tirer 
bon parti de l'expérience du vieux proscrit. Tout àeux ne 
tardèrent pas h ètre assiégés dans Pavie (en 7-t) ; et Hunald 
périt l'année suivante dans cette cite ou écrasé par la chute 
fortuite d'une tour, ou lapidé par les habitants; car les termes 
de la chronique latine se prêtent h cette dou ble interprétation. 
IIUïDRE mot anglo-saxon employé pour dsigner 
une circonscription politique et admini»trative correspou- 
dant au gau des Germains. Les comtes (shires) étaient di- 
visés en plusieurs hunàreds. Dans les anciennes cbartes 
le mot hundred (hundrctum ou Hundreta) sert aussi à 
désigner l'assemblée des hommes libres residant dans cette 
circon«criptioE: 
HUNDSRUCK moutogne de schiste calcaire, située 
dans les arrondissements de Coblvntz et de Trèves de la 
province rhénane de Prusse, qu'entourent les quatre railCs 
du Bhin, de la Muselle, de la Saar et de la _Xahe, railCs 
fertiles, très-peuplées et o0 on cultive la vigne. Haute d'en- 
viron 500 mètre% et en majeure partie couverte d'épaisses 
forèt% elle consiste en deux groupes dsliucts, dont celui 
du nord-est forme le Hudsriick proprement dit, entre 
Kirn et Bacharacb ; et celui du sud-ouest, le Hohenwald 
ou Hochwald, dont une partie a nom ldarwald. Cette 
derniëre partie, avec le Walderbsenhopf et l'ldarlzopf, 
points cuhninants de toute la chalne, s'étend en formant 
divers rameaux le long de la Muselle et de la _abe, rétrécit 
beaucoup le lit de ces rivières et est la cause des nombreux 
detours qu'elles décrivent. Les habitaut du ltundsr0ck, 
comme tous les mo.taguards, sont fiers de leur rude pa)s, 
et reviennent toujours avec bonheur de l'étranger dans 
leurs foyers. Quelques auteurs écrivent le nom de cette 
montagne Hunsruck, et le font dëriver d'une colonie de 
IIun% que l'empereur Gratien aurait, dit-on, établie dans 
ces courtCs, ou encore de Huus qui seraient venus y cher- 
citer un refuge après la defaite d'Attila. Ils appuient leur 
opinion sur ce que dans cette contrée différents noms de 
lieux, tels que Itunoldstein, Hunenborn, Hunthein, etc., 
semblent rappeler le souvenir des lions; mais ce 'est 
lb qu'une h)pothèse plus bizarre que fondée. 
ItUXE HU.IÉR. Les anciens navires de la _Méditer- 
ranée portaient, au sommet de leurs lnts, une espëce de 
cage, ou 9abie, servant de guérite, de vigie et de bastion 
au matelot. De lb le nom de 9abier donné h l'homme qui 
y montait la garde, nom qui s'est conservé jusqu'h nos jours. 
Cette guérite bastionnée suffisait aux bàtiments qui navi- 
guaient presque toujours à la rame et ne portaient pas de 
relies élevées. Mais les peuples maritimes de l'Océan, dont 
les navires de haut bord demandaient au vent une force plus 
grande, curent besoin d'un appareil nouveau pour appuyer 
solidement les mts supérieurs impla.ntés sur les bas mts : 
ils élargirentla gabie des marins de la Mé,literran6e,  en 
firent une plate-forme assez large et assez lutte l,uur servir 
de point d'appui et d'arc-boutant aux h au ha n s des màts 
les plus hauts ; ils appelërent hune cette plate-forme; et ce 
mot, venu des peuplades du ord, est resté dans la langue 
de la marine française. Les hunes, pendant le combat sont 
garnies de pierriers et d'espingoles; les gabiers, armës de 
fusils, font pleuvoir sur les ponts de l'ennemi une grle «le 
balles et de grenades. Ces feux plongeants produisent d'et. 
froyables ravages quand on combat de près ou qu'on ma- 



24 
noeuvre pour en venir à l'abordage. La hune est donc une 
plate-forme à peu près rectangulaire, percée d'un trou carré, 
nommé trou du cl«tt; la ttte du bas mfit la traverse et la 
domine de quelques décimètres; le second mt élevé au- 
dessus est le mdt de hune; elle est maintenue contre le bas 
mfit h l'aide de fortes piëces de bois, solidement chevillées. 
Sur ses bords sou[ pratiquées des ouvertures qui donnent 
passage aux haubans du mfit de hune. L'esemble de tous 
ces haubanes du m't de bnne et de la Lune forme une pra- 
roide quadranHlaire , dont la hune est la base et le mt de 
hune l'axe. 
Le mt de hune porte une voile carrée, dont les deux 
extrémits inferieures, ou points, vont s'attacher aux deux 
bouts de la basse vergue, immëdiatement au-dessous : cette 
oile est le hunier; la vergue ou pièce de bois à laquelle 
on la fixe est la ergue de hune. Elle peut s'elever ou s'a- 
baisser à volonté au moyen de cordes, car elle tient au 
rt par un collier qui glisse ïacilement sur toute sa hau- 
teur; ce collier est ic tarage. Le hunier est une voile de 
grande dimension. Quand le vent souffle avec force, l'ac- 
tion qu'il exerce sur la toile tendue pourrait dépasser la 
puissance de rCsistance des cordes, ou la limite de stabilité 
du navire. On a imainé un moyen de soustraire, à volonté, 
une partie plus ou moins grande de cette voile au souffle 
du vent : on l'a partagée en plusieurs bande horizontales, 
qu'on replie sur la vergue avec des cordes ou 9arcettes, 
qui passent à travers de petits oeillets pràtiqués dans la toile : 
ces bandes se nomment ris. Thtogène PAGE. 
HUNEBOURG (Comte b'). Voyez CL:ee. " 
HUNIADE ou HU.NIADES. Voye=, 
ilUNLXGUE  cbeï-lieu de canton dans le departement 
du Haut-R h i n, sur la rive gauche du Rhin, avec 2,120 ha- 
bitants et un bureau de douanes. Cette ille avait été for- 
tifiee par Yauban. Demante|ée en partie à la paix de Rswick, 
priv de son pont sur le Rhin en 1752, elle fut considéra- 
blement réduite en l'an V, après qu'une grande partie de 
l'armée y eut opéré son passage, lors de la belle et célèbre 
retraite de Moreau. 5Iais elle a èté surtout illustrée par |'hé- 
roïq)e d.feuse du général Barbanègre, en 1815. Ses 
foriificatiors furent delruites en 1816, en vertu du traité de 
Paris et sur les «-ollidtations de la ville de Ile auprès des 
puissances coali»ées. Eles n'ont pas été relevées depuis. 
Le telit Hunmgue, situé de l'autre c6té du Rhin, est un 
bourg qui appartient h la Suisse. 
HUNOLD. Voye= 
ItUXS. Peuple d'Asie, qui, aprés avoir vaincu les 
Alaius, fi-anchit avec eux le Don (le Tanais) en l'an :75, 
détruisit l'empire golh d'Ermanrich ( voye - GoTllS ), et se 
trouva de la sorte mlé à l'histoire de l'Occident. Partagés 
en hordes nombreuses placées sous l'autorite de clefs in- 
dependants les uns des antres, et entre lesquels Balamir est 
le premier dont il soit fait mentiol par l'histoire, les Huns 
habitèrent ensuite les vastes plaines qoi s'çtcndent du Volga 
au Danube, o0 désormais leur nom remplaça cehii des Scy- 
tiges. 'Ious les auteurs sont d'accord pour nous les lepré- 
senter comme fortement ba.anés et d'une laideur repous- 
sante. Leurs mœurs étaient celles des autre peuples nomades 
de la haute Asie : ils paraissent cependant avoir ctë les pins 
féroces de tous. "l'oujours errants daus les montagnes et les 
lofais, ils tralnaient ì leur suite leur» troupeaux et leurs 
familles dans des chariots atelês de boeufs, qoi leur servaient 
en route d'habitations. Leurs vëtements, qu'ils laissaient 
pourrir sur eux, ¢taient ch peaux d'animaux ; ils portaient 
des braies ou esp/ces de pantalons en peaux de chèvre, et une 
chaussure infrme qui ne leur permettait pas de marcher 
commodément; leur coiffure etait une sorte de casque ou 
de bonnet recourbé. Ils ne marchaient et ne combatlaient 
qu'à cheval, se nourrissaient de racines crues et de clair 
mortifiée sous la selle de leurs chevaux. Leurs armes etaient 
des javelots arm6s d'un os pointu, un cimeterre et un lilet, 
dont ils se servaient pour embarrasser leurs ennemis. Ils 
cumbattaient presque toujours dëbandés et sans ordre, al- 

HUNE -- H 
taquant et fuyant tour à tour. La rapidité de leurs m ,-- 
ments, les hurlements dont ils accompagnaient leurs charges 
et leur 6gure horrible étaient leurs principaux élément" de 
victoire. Une lubricité éhontée, une cruauté et nne avidité 
sans bornes les rendaient l'effroi des peuples contre les- 
quels ils dirigaient leurs dévastatrice expéditions, qui, en 
Asie, s'étendirent depuis le Cucase jusqu'eu S)rie, et en 
Europe par delà le Danube jusqu'en Thrace, oh, sous le 
règne d'Arcadius, Uldin, un de leurs princes, s'avança mme 
jusque sur les murs de Con»taatinople. Leurs troupeau.x 
constituaien t leur pincipale richesse, et ils n'a aient pour 
habitations que des rentes et des huttes. Sur la rive gaucle 
du Danube, i|s s'emparèrent des plaines qui s'étendent us- 
qu'à la Theiss, et oU campa plus tard Attila; sur la rive 
droite, les empereurs d'Orient leur dèrent tout le territoire 
I situé entre la Drave et la Save, comptant de la sorte, et 
aussi en leur donnant de l'argent, se mettre à l'abri de leurs 
irruptions. A partir de l'an 434, les deux frères Attila et 
Bleda soumirent ì leur autorité les diverses hordes de Huns 
qui erraient depuis le Danube central jusqu'à la mer Cas- 
pienne; et, quand il eut azsassiné son frère, Attila se trouva, 
leur unique souverain. En l'an 447, après qu'Attila eut 
horriblement dévasté la Thrace, la Macédoiue et l'lllrie, 
Honoria, fille de Placidia et sœur de l'ompereur Valenti- 
nien III, en s'offrant ì lui pour épouse, lui Iournit un pré- 
texte pour briser les rapports de bonne amitié qui, ce aux 
efforts du célcbre Aétius, avaient jusqu'alors existé entre 
l'empire d'Occident et les ltuns. Aussi bien, depuis l'an 450, 
régnait en Orient Marcien, prince autrement energique qoe 
son predéceseur "l'héodose II, et les Yaudales d'Attique pro- 
metlaieut  Attila de se joindre à lui pour une expédition 
contre les ¥isigoths. C'est ce qui explique comment en 
l'an 451 on le vit franchir le P, hin ì la tête d'une immense 
armée composée de hordes de Huns et de tribus germai- 
ries qu'il avait sul.juguées, notamment d'O-trogoths, de 
Gépides, de Rugiens, de Skyres et de Quades, et envahir la 
Gau|e. Mais vi,urcumeat reçu par les armées combinée 
des Romains et des Yisigoths, qui lui firent essuyer une 
droute complte dans les champs Catalauniques» force lui 
fut de rebrousser chemin. 
Après la mort d'Attila (453), la guerre civile allumée par 
ses nombreux enfants offrit aux peuples vaincus l'octaiou 
«le secouer le joug. L'exemple fut donné par les Gpides : 
Elak, celui de ses fils qu'Attila avait alCigné p,ur rêgner 
sur eux, périt dans une grande bataille qu'il leur livra Les 
lluns furent cbassé alors des contées qu'arrose le Danube, 
et se retirërent par d«dh le Pruth et |e Dniester, où ils con- 
tinubrent d'obéir à différents princes ou chels. L'un d'enx, 
fils d'Attila, Dagenzik, périt vers l'an 4S dans une guerre 
entreprise contre les Ostrogotbs, et dès lors il n'est plus 
question dan l'histoire d'un empire des Hune. On trouve 
cependant encore des bandes de Huus mentionnées comme 
mercenaires faisant partie de l'armée que Narsès comman- 
dait contre les Ostrogoths. Quant à la nation même, elle 
reparait alors sous le nom de Kutugures ou Kutrigure$ 
 l'ouest, et sous celui d'Uturgures ou Utriure. à l'est 
du Don ; et dans le courant du sixième siècle le« premiers 
se rendirent surtout redoutables à l'empire d'Orient par 
leurs fréquentes invasions. 
D'après le portrait que nous ont laissé d'eux les anciens 
historiens, oo les considère avec raison comme des Mongoles 
auxquels étaient rennes se joindre des hordes tatares, quand 
ils avaient débouché de l'est de l'Asie. C'est très-certaine- 
ment h tort qu'on fait descendre d'eux les Honois ( Ma- 
gyarcs); et plus tard on a voulu avec tout aussi peu de 
fondcment donner le nom de Huns aux émigrants fin- 
nois qui vinrent s'établir en Pannonie que précédemment 
on avait prétendu faire descendre d'etx les Avares. Il n'y 
a rien de bien prouvé dans l'opinion qui veut que les ttuns 
soient le même peuple que le Hiong-nou ( lesquels, suivant 
les hi.toriens chinois, habitaient au deuxiéme siëcle de notre 
ère la 5longo|ie, o0 ils b.taient la terreur des Cltinois)» et 



BUS -- BUNTINGDON 
qui ajoute que quelques-'ones de ieur hardes finirent par 
tomber sous la domination chinoise, tandis que les autres 
allaient s'étabfir dans les courtCs qu'arrose le Gihon et au 
sud de la Sibérie vers l'ltk ( mont Oural ), d'où, chassées 
plus tard par d'autres émigrants, elles auraient franchi le 
Don, l'an 375 av. J.-C., et adopté désormais le nom de Huns. 
Dans un Mémoire couronné par l'Institut, en 18f7, M. Neu- 
mann soutient que les Hiong-nou saut précisément le intime 
peuple que les Huns occidentaux, et trace la route qu'ils 
suivirent pour arriver du fond de l'Asie centrale sur les 
bords du Volga. 
HUNT (Hemv), radical anglais, homme d'un caractère 
énergique et d'un extérieur rude et bizarre, naquit en 1773 
 Willington, dans le Wiltshire. Fils d'un réfugié américain 
et d'une SœUr du peintre BeD]amin West, il se livra d'a- 
bord à la culture des terres, s'établit ensuite brasseur à 
Bristol, oU il devint capitaine de la yeomanry. A partir de 
1816, il figura comme orateur populaire dans tous les mee- 
tings tenus pour aviser aux moyens de faire triompber la 
réforme radicale, et ce fut hii qui, en 1819, convoqua lagrande 
assemblée populaire tenue à llanchester, que la enmanr 
dispersa par la force desarmes. Traduit en justice pour sesdis- 
cours, qui provoquaient  la révolte, il fut coudamué à trois 
ans de prisou. Dès 1825, il reparut dans les assemblées 
qui demandaient la suppression de l'imp6t des portes et 
tenétres, et en 182 il s'ocuupa surtout de l'abrogation des 
lois sur les céréales. Élu, en 1830 et eu 1831, par les élec- 
teurs de Westminster, membre de la chambre basse, il 
gfe:.erça que peu d'influence dans le parlement à cause de 
son radicalisme exaëéré. Il mourut, en 1834, à Alvesford. 
HUNT (J,r.z-llty LEIGH-), célèbre écrivain anglais, 
frère du précédent, est né à Londres en 178t. Aprës avoir 
loDgtempstravaillé chez un avoué, il obtint des fonctions 
publiques assez lucratives, auxquelles il renonça cependaDt 
pour se consacrer à la critique théMrale. On a recueilli 
en volumes, sous le titre de Critical essoys on the per/or- 
mances of the Landau theatres (1807), les excellents 
articles publiéspar lui sur le tliétre et l'art dramatique. Ne 
gardant nul ménagcment dès qu'il s'agissait des hommes et 
des choses de la politique ou de l'Ése établie, il fut alors 
l'écrivain qui introduisit avec le plus de verve le radicalisme 
et ses doctrinesdans le journalisme de Londres, particulière- 
ment dans l'Ezomier, recueil radical hebdomadaire fondé 
par lui, en commun avec frère John, en 1808. Devenu bien- 
t6t l'objet de provocatioDs passiounées et mme d'accusa- 
tions juridiques, il fut condamné à deux ans de prison 
pour un libelle contre le prince régent, depuis G eu rg e s IV. 
Plus tard, il se voua à des travaux purement poCques, et 
fonda sa réputation en ce genre par son beau poëme The 
.çtory of Rmini (1816). Tous ses autres poêmes, tels que 
The descent of liberty, a Mosk (1815), Feast of the poet$ 
attd other pieces (tSt4), Folio/je or poems original and 
translated (t818), Poetical works (1833), le poëme carat. 
que Capitaine sword and peu ( 1818), sont de beaucoup 
inferieurs à ce poëme, purement romantique. Dans sa satire 
g'ltra-Crepidarius (1823), il chercha à venger son ami 
Keats du jugement rigoureux porté sur lui par le trop sé- 
vère critique W. Gifford, éditeur du Quaterly-lteview. 
Sa feuille trimestrielle The R«flec¢or et une autre, The 
Liberal, n'curent pas de succès; en revanche, un recueil 
d'épisodes intéressants de la vie dt ByrÇn, qu'il publia 
sous le titre de lrd Byron anà saine of his cotempo- 
re.ries, with recolleclions of the authors life and his visit 
tu llaly (1828}, excita virement l'attention publique tout 
en le faisant accuser d'ingratitude envers un grand poëte  
qui il avait de nombreuses obligations personnelles. Après 
avoir traduit l'Arainta du Tasse, et donné en 1834 un choix 
de ses écrits en prose dispersés dans les journaux, les Ma- 
gazines et les Revues, il publia, en I40, le drame intitulé 
A Legend of Florence, et en 1842 Palfre9, poëme dans 
lequel il fait preuve d'une extrgme richesse d'imagination 
comme dune facilité peu commune à monter sa langue. 
DICT. DE L& COffVERS,  T. gl. 

• 
Parmi les nombreux ouvrages qu'il a fait parallre depuis, 
nous citerons The Forster-Brother, roman en 3 vol. 
lma9inalion and fancy (1845); $torie /rare the 
lion poets (186); Men, Women and Books (187); A 
jar of honey from mourir lt9bla (IM7); Readings for 
Railwas (185o). Ces deux derniers ouvrages ne sont que 
des extraits d'anciens poëtes et romanciers que Hunt tire 
d'un oubli immérité et qu'il accompagne d'intéressantes 
observations critiques. En 187 le gouvernement lui a accordé 
une pension de 200 liv. st. 
HUNTEB (Wtccg), cclèbre analomisle, médecin et 
accoucheur, Daquit le 23 mai 1718 à Long-Calderwood, dans 
le comté de Lanark en Ecnsse, et ails d'abord étudier 
la théologie ì l'uuiversité de Glasgow. La liaison qu'il 
contracta avec Cullen eut pour résultat de le décider 
se livrer ì l'Cude de la médecine ì partir de 1737. Plus tard, 
en 1740, il se rendit ì ÉdJmbourg, et eu 17fl ì Londres, 
pour se perfectionner; il y fut d'abord médecin en second 
de ili6pital Saint-Georges, où il fil, en 1746, un cours de mé-- 
decine. En 1747, il parcourut la Hollande et la France, et 
s'établit ensuite à Londres, m3, renonçant bientbt à la pra- 
tique chirurgicale, il s'occupa exclusivement d'obstétrique 
et d'anatomie. Après l'heureux accouchement de la reine 
il fut nommé, eu 176., soD chirurgien extraordinaire; et en 
1768, lors de i'établissement de l'Académie des beaux-arts, 
ou lui confia la chaire d'aDatomie attachée ì cette institu- 
tion. Il consaera une partie de sa grande fortune ì faire 
construire un bel édifice, où il établit un amphitbeMre d'a- 
natomie pour ses leçons et sa riche collection de prépara- 
tions anatumiques, de livres, de minéraux et de médailles. 
Après sa mort, arrivée le 30 mars 1783, l'un et l'autre de- 
vinrent d'abord la propriëté de son neveu, puis celle de l'u- 
niversilé de Glasgow. Une description de ses l'ummorum- 
veterum populorum et urbium a été donnée par Combe. 
L'ouvrage capital de Hnter est son Anotomy of lhe hu- 
mon9ravid uterus (Londres, 1775). il a écrit, eu outre, 
beaucoup de Mémoires dans les Philosophical transactions, 
dans les Recueils de la Société médicale de Londres et dans 
ses Medicol comntentories ( Londres, 1762). 
ttUTER (Jom), frère cadet du précédent, non moins cé- 
lèbre comme anatomiste et chirurgien, né le g juillet 1725 
ì Long-Calderwood, reçut une éducation tellement négligée 
qu'à I'ge de vin ans c'est à peine s'il savait encore lire 
et écrire. Il avait appris le métier de charpentier, lorsque 
la fortune que son frère avait faite ì Londres le décida a 
ì venir le re]oindre. Accueilli avec empressement par son 
aihC il ne tordu pas ì taire preuve, lui aussi, des plus re- 
marquables dispositions potgr les travaux anatomiques, et 
s'appliqua en outre avec ardeur à la chirure. Plus tard, 
il ails étudier à Oxford, et devint, en 1756, l'un des chirur- 
giens de l'h6pital Saint-Georges. En 1760, il prit du service 
dans i'armée, et assista à l'expédition contre BelIe-lsle et 
à la campagne des Anglais en Portugal. A son retour 
Londres, il se consacra à la pratique chirurcale ainsi qu'b 
l'étude de l'anatomie et de la phsinlogie comparées. 
Dans ce but, il se fit batir dans le voisinage de Londres une 
maison dans laquelle il entretenait une petite ménagerie 
pour observer les animaux. Il fut nommé chirurgien eu chef 
à l'h@ital Saint-Geoes en 1768, chirurgien extraordi- 
naire du roi en 1776, premier cliiruren g_néral de 
l'armée et iuspecteur général des h6pitaux militaires en 
1792. Sa grande collection de préparations anatomique 
fut achetée par le gouvernement après sa mort, arrivée. 
le 16 octobre 1796. Ses ouvrages principaux sent : Natu- 
ral Histor of the human teeth ( vol., 1771-78); Orv 
the venereal diseuse (1786); Observations on the diseu- 
ses of the arm in Jamaica and on the best means of 
preservin 9 the health of European$ (1788) ; et On tire 
nature of the blood inflammation, and 9unshot wound 
(2 vol., 179-I). 
HUNTINGDON, l'un des coms d'Angleterre situé 
à l'est et le plus petit de tous après le comté de Rutland, 
9 



borne par les eomtés ne {orthampton, de Cambridge et 
de Bedford, se compose dans sa partie sud et dans sa 
partie ouest d'une belle plaine onduleuoe et fertile. Sa partie 
nord-est, au contraire, appartient à la grande dépression du 
soi qu'on al»Pelle Jens ou marais; elle contient plusieurs 
lacs, tels que le Whittle-Sea et le Ramsey-Mere ; mais au 
moyen du drainage on est parvenu à en transformer la 
plus grande partie en prairie». L'Ouse, rivière navigable, 
le traverse au sud-est, et le Nene forme sa limite au nord- 
ouest. Sur une superficie totale de t2 myriamtres carrés, 
on en utilise 10 en champs h ble, en prairie» et pacages. Les 
habitants, dont le nombre s'élève à 60,320, s'occupent 
presque exclusivement d'agriculture, et prnduisent surtout 
heaucoup de beurre et de fromage. Le plus cher et le plus 
fin des ftomages d'Anelerre, leStilton, provient, il est vrai, 
de la paroisse de ce nom dans le comté de Huntingdon ; mais 
il s'en lhbrique de bien plus grandes quantit dans celui de Let- 
ce»ter, d'où cette industrie est originaire. Cette dénomination 
lui vient de ce que sa réputation eut .pour berceau vnc au- 
bere de cette paroisse, situ¢,e sur la grande route du nord. 
Le comté de Hunlingdon est divisé en 4, hundreds 
et 103 paroi»ses, et envoie quatre membres an parlement. 
Sou chef-lieu, Huntmgdon, situé sur la rive gauche de 
l'Ouçe, sur laquelle est jeté un pont ma-nilique conduisant 
à Godmanchester, n'est qu'une petite ville de g,000 /tmes, 
de l'aspect le plus antique et où se trouvent deux 
La population lait le commerce des grains, des farines et 
de la drécbe, et a en outre pour principale industrie la 
fabrication de la deutelle. Cette ville etait jadis beaucoup 
plus considérable qu'aujourd'llUi ; il fut un temps ou l'on 
y comptait jusquït 15églises et plusieurs couvent», et oit 
il y existait un chMeau. C'est lh que naquit Cromwel. 
La petite xilic de Saint-lves sur l'Ouse contient 3,000 
bilant», possëde diverses fabriques de drèche, [ait un com- 
merce assez actif, et est en outre l'un des marché» a bes- 
tiaux, les pins frequentës qu'il y ait eu Angletere. Il ne 
reste plus que d'insignifiantes ruines de son prieure, dont la 
construction remontait à l'année 1201. La petite ville de 
Ea»tsev eerce les mSmes industries. On y voit les ruines 
,l'une abbaye construite en 969 et parmi lesquelles se trouve 
le tombeau d'Ailwine, considérë comme le plus ancien 
morceau de scuIp[ure que possède de l'Angleterre. 
IIUXYAD le plus considérable des comitats de la 
Transylanie, situé dans le pays des Hongrois, borné au 
nord par Zarud, à l'est par la Valachie, h l'ouest par la 
Hong le, occupe une superficie des 5g myriamètres carrés, 
et compte 5 bourg» à marché, avec 336 villages. Générale- 
ment montagneux, surtout du c6té de la Valachie, off se 
trouve, entre autres, le mont Retycsat, haut de 2,660 métres, 
et parcouru dans des directions diverses par le Muta»ch, le 
Strcll et la Cserna, le climat en est froid sans doute, mais 
sain, et ne nuit point à l'agriculture. La vigne eile-mème 
croit sur les ondulenx coteaux du Marosch  dans les bonnes 
années il s'? produit as¢z de vins pour qu'on puis en ex- 
porter, et leur qualité ne le cède guère a celle des vins de 
Hongrie. Les mont Muta»ch fournis»eut de riche produits en 
or, argent et fer, et on trouve ì Htzeg d'exce:lente terre à 
porcelaine. Le comitat d'Hun?ad possède en outre de grandes 
richesses en farde sources d'eaux minérale» et autres. La 
population, forte de 120,000 àmes, appartient compiêtement, 
sauf une minime fraction magyare, à la nationalité valaque 
et à la relion grecque. Le naturel indolent de cette nation 
est la cause principale qui empècbe le comitat d'Hunyad 
de ]ouir de tous les avantages que lui a alCartis la nature 
et qui fait qu'on n'y aperçoit point la moindre trace de com- 
merce et d'industrie. Le cbel-lieu du comitat est le bourg 
à marché du même nom, situé au confluent de la Cserna 
et du Zalasà, et que la tradition peCend avoir été fondé pat 
ie Huns- 
[IUXYAD (Jr.), célèbre ilCus hongrois, était, dit-on, 
Je fils naturel de Sigi«mond, empereur d'Allemagne et roi 
de Honnie, et de la boyare valaoue Eiisabelh blorssinay. 

• HUNTINGDON  HUPPE 

Il naquit vers l'an t,95. Sigismo.nd le nomma ban de 
Yalacliie occidentale, fonctions qui lui fournirent l'occa- 
sion de se distinguer dansles guerres contre les Turcs. Plus 
tard l'empereur Albert 1! lui confia la v6ïvodie de Transl- 
vanie. Après avoir contraint les Turcs, à la suite de diverses 
victoires, h omclure en 1¥t0 une tr6ve de dix ans avec la 
Hongrie, il remporta encore sur ena les plus brillants suc- 
cès, en 12, quand ils vinrent à rompre la trêve. A la 
mort de la reine Elisabeth (13), il se prouonça en faveur 
du roi Ladislas ; et sonexemple fut si puissant sr les grands 
du royaume que ce prince ne tarda point à tre maltre de 
la plus grande partie de la Houille. Comme général des 
afinCs de Ladilas, Hunyad força de nouveau les Turcs 
à souscrire, le 13 juin 14 et à des con&tions fort avan- 
tageuse pour la Hongrie, une tr$ve de dix ans. Ce fut La- 
dilas qui la viola; le t0 novembre lg-, il fut tué à la 
bataille de Varna. En consé.quence, Hunyad administra la 
lIongrie pendant la minorité de Ladislas Il, fils cadet d'É- 
lisabeth, et repoussa victorieusement diverses tentatives 
d'invasion des Turcs. Au mois d'octobre 1g$8 il fut, il est 
 rai, entiërement dcfait et mème fait prisomier en Servie ; 
mais quand l'intercession des tats lui eut fait obtenir sa li- 
bertc, il fit tout aussit6t ressentir les effets de sa vengeance 
aux despotes de Servie, jusqu'à ce que la paix eùt et. con- 
clue en 15! par les états. Ladislas II, devenu majeur en 
! 453, ayant pris iui-mSme les rêne» da gouvernement, Hun.vad 
eut à soutenir une lutte des plus +iolentes contre lun de ses 
ennemis personnels, le comte Ciiley. Toutefois il maintint 
son ancien renom contre les Turcs par son héroïque défense 
de Belgrade et par une audacieuse attaque tentée contre le 
camp turc, par suite de laquelle le sultan Mahomet fut 
contraint à la retreite. 
Htmyad mournt t Semlin le t t août t56. Ii aait conçu 
le projet de chasser complétement les Turcs de l'Earope; 
mais lïndifference des puissances enrnpéennes et les mens 
jalouses de ses ennemis ne lui permirent pas de l'exC 
curer. Son fils ainé, Ladislas Hun)-ad, eut la téte tranchée 
h Oïeu le 16 mars 17 pour avoir, dans une querelle ave 
le comte Cilley, l'ennemi acharné de son përe, tue un des 
domestiques de ce oeigneur. Son fils cadet, Mathias Hu- 
n:yad, monta sur le trOne de Hongrie en 158, et régna sous 
le nom de Matbias 
H U PPE, genre d'oiseaux de l'ordre des poesereanx, dont 
on ne cannait que deux espèces, la hpe d'Afriqtte 
(upula crist«tella, Vieill.), qui habite depuis Malimbe 
jusqu'au cap de Bonne-Espérance, et la h uppe-puput 
epops, Linné), riant nous nous occuperons plus particu- 
liërement parce qu'on la rencontre en Erope pendant le 
printemps et Fëté. La huppe-papal est un oiseau de la 
grandeur d'un merle ou d'une grande grive : il a sur la 
tëte une ailette ou huppe composée de deux rang» ,le 
plumes égaux et paralleles entre eux. Cette aigrette com- 
mence an-dessus du bec et s'étend au-des»us de la tète en 
forme d'arc très-faiblement incliné. Chaque plume est ter- 
mMée par une tache noire, excepté les dernières, et plu- 
sieurs en ont une blancheau-dessous de celle-ci. Toutes sont 
rousses, celles de la puits-inc, du entre et du cou d'un noi- 
sette clair; ses ailes sont transversalement rayées de brun, 
de blanc et de noir; son bec est noir et long de 5 milli- 
mètres; ses jambes sont fort courtes, et ses ailes, loin de 
se terminer eu pointe comme celles des autres oiseaux, 
vont en s'arrondissant. Les couleurs sont un peu plus vives 
chez le mme que chez la femelle. Leur diversité fait de la " 
huppe un oiseau remarquable; mais, comme elle ne chante 
pas, elle estpeu recherchée. Cet oL:-eau ne fait effectivement 
que pousser pli»leurs cris peu harmonieux, que rendent tant 
bien que mal les syllabes ci, zi, houp, houp. La huppe se 
platt dans les lieux bas et humide», et dépose toujours son 
nid  une très-petite élévation, tant6t dans les lentes des 
rochers, tant0t dans les crevasses d'un mur, quelquefois datî 
tes trous naturels des arbres (d'oii lui ieut le nom vulgair 
de bec«se d'arbre). On a peCendu, B¢lon entre antres, 



HUPPE -- HUSKISSON 
«ne ces oiseaux avaient pour habitude d'enduire et mme 
de composer leur nid avec des exeréments humains et d'au- 
tres matières aussi inlectes, ce qui leur a valu dans quelques 
contrëes le nom de coq puant et m/me celui de coq er- 
deux. Cette erreur vient sans doute de ce que les pelits de 
la Imppe contractent dans leur nid une puanteur iusuppor- 
table  dont il faut cbercher la cause dans la profondeur de 
leur nid, qui les empche de jeter leur fiente au dehors. Cet 
oiseau pond de quatre à sept œufs, un peu plus gros que 
ceux «lu merle et assez soeblables à ceux de la perdrix. Il 
se'nourrir d'insectes, de vers, de baies et de substances vé- 
gétales. En Égpte, il est domestique et aussi familier que 
le ont chez nous les moine.aux : cette sociabilité avec 
l'bomme semble ètre dans son earact/re; car jeune ou 
vieux il s'apprivoise très-aisément. Sa vie et assez courte ; 
on en borne la durée  trois ans. La huppe habite i'Afrique 
pendant l'hiver, et ce n'est qu'an printemps qu'elle émigre 
vers les contrées les idus oeptentriona|es de t'Europe. Elle 
est sédcntaire en Égypte. 
On a appelé huppe l'aigrette on touffe de plumes qui sur- 
monte la të.te de quelques oiseaux. De là on a fait l'epithi:te 
huppd, que popuiairement et figurément on applique aux 
personnes du haut parage. 
|IUBE, nom que.l'on donne à la tète du sanglier quand 
on l'a dtachée du corl,s. On dit aussi, par e.xtention, hure 
dë brochet, hure de saumon. 
HUREPOIX. Voyez I u F_c et 
liUBLER se dit du cri prolongé des chiens et 
loups, et par extemion des cris ais et prolongés que l'on 
pousse dans la douleur, dans la colère. Par exae, ération, ce 
mot signifie parler avec emportement, avec le ton de la fu- 
reur. Un proverbe ditqu'/faut hurler arec les lmtps, 
c'est-à-dire s'accommoder aux triCs, aux manières, 
moeurs, aux opinions de ceux avec qui l'on vit, quoiqu'ol 
ne les approuve pas. Enfin, le mot ht{rler a une acception 
spéciale dans la compagn onage. 
II UILEUB genre de singes de la tribu des cé b i en s, 
ainsi nommé parce qe, chez ses di-erses espèces, Vh¢Jtde 
est di.posé de manière  leur donner une voix rauque, dé- 
sagréable et très-forte, que d'Azara compare au craque- 
ment ]'une grande quantité de charrettes non gralssée. 
M. l. GeoffroyoSaint-Hilaire:ea imposé à ce genre le nom 
scientifique de stentor. 
La-tte des hurleurs est pyramidale, le museau allongé, 
le visage oblique; l'angle facial est seulement de 30 °. La 
m$choire inférieure est très-développée. Le système dentaire 
des burleus montre qu'ils doivent ètre placés ì la tête des 
singes amérieains. Ces animaux habitent, en effet, presque 
tonte l'AraCique méridionale : on en rencontre an Paraguay, 
zu ]résil, ì la Gn)'ane, etc.; mais c'est principalement sur le 
bords de l'OrCuque qu'on les trouve le idus communément. 
Quelques voyageurs ont beaucoup vanté l'instinct des 
burleurs. Niais, en présence de récits contradictoires, on ne 
peut que-dire que leurs mœurs ne sont pas bien connues. 
Ils sont donés d'une agilité remarqnahle, et ils en profitent 
pour se tenir presque constamment sur les plus hautes bran- 
ches des arbres. Leur chasse est donc assez difficile. Du 
reste elle n'offre las d'avantage; car ce n'est guère qu'au 
Brésil qu'on utise la peau de ces singes pour recouvrir les 
œelles des mnlets. 
IlUtON { Lac). C'est le nom que l'on adonné à l'un de 
ces immenses bassins dont les eaux alimentent le colossal 
fleuve Saint-Laureut. Sa superficie, d'environ 8..000 kilomè- 
tres carrés, est égale à celle de plusieurs de nos déparie- 
ments. Il appartient aux Eats-Unis et au Canada, qu'il 
sépare. Situé ì 20 mètres au-dessous du lac Supérieur, élevé 
de t9 mètres au-dessus du lac ÉriC il communique avec 
l'un par la rivière Sainte-Marie et avec l'autre par la rivière 
Saint-Clair, et mèle eu outre ses eaux  celles du lichigan. 
Au nord, une contrée rocheuse et aride l'environne de toutes 
parts; ses c6tes sont découpées ì l'infini; des lies sans 
nÇnbre s'élèvent¢au-dessus de la sur[ace de »es eaux. 

IIUIO.S, peuplade indienne de l'.$,mériqne septentrio- 
nale qui appartient d la fraction occidentale de Iroqnoi 
septentrionaux et comme eux  la grande famille des Algon- 
quins-Lénapes. Elle habitait au nord du lac IÉrié et plus 
particulièrement la contrée à laquelle on donne aujour- 
d'hui le nom de Canada Supérieur. Les Cinq-Nations, qui 
les appelaient Qzatoghi, les exterminèrent on les dipersë- 
rent vers le milieu du di.-septième sitcle, de mme que 
leurs voisins, les Attionandaro;zs ou nation neutre. Le 
véritable nom de ce peuple est W!lu;zdots : lturons n'est 
I qu'un sobriquet que lui donnèrent les Franeais, avec les- 
quels ils curent de bonne heure des relations. Les 
sionuaires français trouvèrent aussi plus de facilités pont 
propager chez ex |es lumières de l'Évangile que parmi toutes 
les autrestribus sauvages; et ie dehri de cette peuplade 
out cou.cerné, mme de nns jours, bien plus de traces des 
efforts faits par les missiounaire pour les civiliser que les 
antres nafionsde i'AmétSque sepfeatrionale. Les Hnron sont 
au nombre des pins civitisés parmi les Indiens demeorés indéo 
pcndauts. I Is habitent des maisons construites en cbarpent% 
pratiquent l'agriculture et l'élève du bétail, et font le com- 
merce des ains. Il n'y a pas longtemps qu'eniron un 
ndllier de H«rons vivaient mèlés avec leurs vainqueurs sur 
le territoire des Ètats-Unis qui borde la baie de Sandusky 
et aux environsdu Détroit ; mais on les a récemment trans- 
plantés dan l'Ouest. 
HUS[ilSSO (Wn.gs), célèbre homme d'État an'_,lais, 
né à Birch-Moreton, dans le comte, de V'orcester, le 
mai 1770, fut envoé, en 1783, auprès de son oncle, le sa- 
vant medeciu Gem,  Paris, où, six aunées plus tard, il 
lui fit donné de prendre part à la prse de la Bouillie ; il se 
fit au.si remarquer, commue membre du club de t7s9 ,. par 
plusieurs excellents discours qu'il y prononça sur des sujels 
d'économie politique. En 179, nommé secrétaire particu- 
lier de I'avabasadeur d'Ang|eterre, lord Gower, i[ revint 
avec lui h Londres, o/, en 1793, il obtint un emploi dans 
le bureau des émigrés. C'est là qu'il fit la connaissance de 
Canning et de Pitt. En 1795, le ministre de tu tucrre 
Dundas le choi.it pour premier secrétaire, et, sur la recom- 
mandation de Pitt, le bourg pourri de l',Iorpeth l'oint men- 
bre du parlement. Pilt le fit ensuite soas-secrétaire d'État, 
receveur genéral des imp)tsdu duché de Lancastreet com- 
missaire du bureau du conuner¢ê. II résigna toutes oes 
fonctions ì la retraite de son protecteur, en 801. Après la 
dissolution du parlement, en 1802, il perdit aussi son siCe 
dans la chambre hasse. Pitt étant revenu à la tëte des af- 
faires, en 1804, Huskisson fut rëélu au parlement par le 
bourg de Liskeard, et nommé par Pitt secrétaire de la 
trésorerie. Ala mort de Pitt et sous le ministère de Fox, il 
perdit de n{iveau ce poste, eu 1806 ; mais il loi fut rendu, 
en 1807, par Pcrcival. Depuis lors il siégea sans interrup- 
tion à la chambre des communes, et en dernier lieu, ì par- 
tir de 1823, comme représentant de la ville de Liverpool. 
Lorsqu'en 1809 Canning oe retira du mini»tère, Huski»son 
quitta aussi la trésorerie; etce ne fut qu'en 181, , 
Canning fut nommé ambassadeur en Portugal, quïl se 
cida à accepter les fonctiol de directeur général des forCs 
et de membre du conseil privé. A la mort de Castlereagh • 
en 1822, il fut appelé ì la présidencedu bureau de la ma- 
rine et du commerce; après la mort de Canning, en 1827 
il fut ommé secrétaire d'État pour lescoionies, et dans l'ad- 
ministration de Wellington il eut le portefeuille des affaires 
étraugères, qu'il conserva jusqu'en mai 1828, époque où il 
donna sa démission. 
C'est Huskisson ì qui revient la gloire d'avoir fondé la 
nouvelle politique commerciale de l'Angleterre ; c'est lui 
qui, en sa qualité de ministre du commerce r fit accorder 
toutes lesnationsindistinctement le droit de commercer avec 
les colonies anglaises, dont jusqu'alors les relations avaient 
étéexclusivement restreiates ì la métropole. On lui est re- 
devable aus»i de la suppression de plusieurs droits d'entrée 
et de notables modi{ication apportées ax dispositions 
zg. 



Pacte de navigatlon. Lors de l'inaugurationdu chemin de fer 
de Liverpool  Manchester (15 septembre 183o ), Huskisson 
eut le malheur de tomber sous les roues du wagon que la 
locomotive commençait à entratner juste à ce moment, 
t ne sur*écut que quelques heures à ce cruel accident. 
HUSO ou HAUSEN. Voyez EsTunGEON. 
HUSS (JEAN), né en 1373 à Hnssinecz, près de Pracha- 
sitz, «ans la Boheme méridionale, fut le précurseur de Lu- 
ther dans les voies de la réforme religieuse : moins heureux 
que lui, il expia sur le b0cber l'éclat prématuré de ses té- 
néraires prédications. Fils d'un paysan comme Lulher, i! 
avait pris son rang parmi les docteurs de l'université de 
Prague avant de troubler l'Église par ses doctrines. Son 
talent pour la prédication lui procura, en 1403, la cure de 
l'église de Bethléem, dans la meme vil!e, et le titre de 
onfesseur de Sophie de Bavière, seconde femme de Wen- 
£eslas, roi de BobCe. Il précha avec autant de hardiesse 
que d'éloquence contre les désordres des grands et contre 
les vices des moines et du clergé. Il trouva data Wences- 
las un protecteur contre les courtisans, qui se plaignaient 
de ces attaques d'un prètre. Ce fut alors qu'un ancien dis- 
£iple de Jean Huss, Jér6me de Prague, revint d'An- 
gleterre et apporta à son maltre les ouvrages dans lesquels 
Jean W icl e f, prétre et docteur d'Oxford, attaquait non- 
-seulement les abus de la cour de lome, mais la hiérarchie 
de l'Église. I,iu, qui ne connaissait cet Anglais que par a 
réputationd'hérétique, refusa d'abord de tire ses livres; 
mais bienlt il y prit goût, et se prononça dans ses serinons 
pour quelques-unes des opinions hardies de Wiclef. Pres- 
que toute la Bohème accueillit avec enthousiasme ses prédi- 
cations. En vain en t410, conformément à un bref du pape 
Alexandre V, Sbinko, archerCue de Prague, fait condamner 
45 propositions de Wiclef par les professeurs allemanJs de 
t'université de Prague, cbarmés de cette occasion d'humi- 
lier Jean Hnss, dont la supériorité les écrase. l-luss, fort de 
la réputation qu'il s'est faite par la pureté de ses mœurs 
et confiant dans la protection de la reine, laisse passer l'o- 
rage sans avoir l'air de s'apercevoir que celle condamnation 
-contre Wicle! s'adressait indirectement à lui. Mais il ne 
tarda pas à s'écarter de cette ligne de circonspection. Un 
nouveau livre du docteur anglais transforma subitement le 
aominaliste Jean I,iuss en un fetwent éaliste. Était-ce 
parce que les professeurs allemands étaient nominalistes? Il 
recommença alors à précher la doctrine de Wiclef, à diriger 
• es altaques contre les mœurs corrompues du clergé, sans 
ménager meme le pape. Toute l'université se partagea en 
deux factions : celle des Allemands ou nominalistes, celle 
des Bohémes ou réalistes. On se combattit dans des exer- 
cices publics, « et quand l'arsenal des arguments était 
épuisé, dit un historien, les professeurs se disaient des in- 
jures, les étudiants se donnaient des coups d'épée.  
Bient0t une affaire particulière augmenta le nombre des 
haines et des ressentiments dont Jean Huss était l'objet. 
L'université de Prague était divisée en quatre nations, 
lolonaie, bavaroise, saxonne et bohëme; chacune avait 
sf voix dans les délibérations génerales. Les étrangers, 
sous le nom d'Allemands, faisaient cause commune, et dans 
outes les circonstances réuvissaient leurs trois voix contre 
les Bohémes. Jean Huss entreprit de changer cet ordre de 
choses ; il obtint de Wencelas un dipl6me du 13 octobre 
1409, qui donna trois voix à la Bohéme, en réduisant à 
ne seule les voix des autres nations réunies. Anssit6t 5,000 
tudiants et docteurs polonais, saxons et bavaris quit- 
tèrent Prague et se rendirent à Leipzig, oh l'Cecteur de 
Saxe venait d'ériger une université. Huss, Cu recteur par le 
nffrage aes docteurs bohemes, imprime à ses prédications 
une direction plus hardie : il attaque la légitimité des pos- 
sessions du clergéet la primauté du pape. Le pontife Alexan- 
rire V ordonne à l'archerCue Sbinko de réprimer ces doc- 
trines dangereuses. Le prélat interdit la prédication à Jean 
Hnss, qui, bravant cette défense, en appelle du pape mal 
informé au pape mienx informé, et çonlinue à préchet. 

HUSKISSON  ,,, 
L'an 141 l, le pape Jean XXIII, successeur l'Alexandfe V, 
le cite à comparaltre à jour fie devant son tribunal ; 
mais à la priëre de la reine Sophie, de la noblesse de Bo- 
héme, de la ville et de l'université de Prague, le roi Wen- 
ceslas obtint du pontife que le procës s'instruirait par des 
légats envoyés en Bohème, et que Jean Hnss, de son cOté, 
comparattrait par des fondés de pouvoir. Son procès, en effet 
s'instruit par le cardinal Colonne, qui le déclare publique. 
ment excommunié. Huss en appelle au pape; d'autres juges 
lui sont donn6« ; ils confirment la sentence, et "ses fondés 
de pouvoirs sont maltraités et emprisonnés. Hnss en ap- 
pelle au futur concile. 
Le schisme d'Occident durait encore : trois papes, Se.an 
XXIll, Grégoire XII et Benolt XIII, se disputaient la tiare. 
Chacun d'eux avait sa chancellerie, sa cour, ses cardinaux; 
chacun d'eux excommuniait ses adversaires, et anathé- 
matisail les rois et les nations qui méconnaissaient son ohC 
cliente. Pour comble de scandale, Jean XXIII préchait une 
croisade contre Ladislas, roi de Naples, qui soutenait Gré- 
golfe XII. Heureux Jean Huss, retiré alors dans son vil. 
lage, s'il e0t su se tenir étranger aux querelles des papes 
et des rois! mais il rompit le silence pour démontrer l'ab- 
surdité des indulgences que Jean XXIII promettait à c, eux 
qui s'armeraient contre Ladis!as. « Le pape, disait-il, ne 
peut faire la guerre pour des intéréts purement temporels : 
Jésu-Christ n'a pas permis à saint Pierre de s'armer pour 
lui sauver la vie.  Ces observations produisirent le plus 
grand effet: le pape l'éprouva. Sa bul!e contre laples fut 
comme non avenue; son tr0ne déjà chancelant semblait 
tout à fait ébranlé! Jean Hnss, animé par le succès, pu- 
blie, l'an t4t3, son Traitd de l'Égli*e, le plus important 
de ses ouvrages et qu'on pourrait appeler la préface des 
éerits de Lutber et méme de Calvin. Il y présentait déjà 
avec une clarté con'aincante toute la doctrine de Lutber. 
« L'Église, disait-il, est un corps mysrienx : Jésus Cbrist 
en est le chef; les justes et les prdestinés en sont les mem- 
bres : ceux-ci ne peuvent en ttre séparés par une injuste 
excommunication; leur conscience doit les rassurer contre 
l'injustice... Le souverain pontife, les cardinaux, les év- 
ques appartiennent au corps de l'Église, et le souverain 
pontife n'en est point le chef. Quand il n'y aurait ni pape 
ni cardinaux, l'Église n'en subsisterait pas moins. Le pape, 
les cardinaux, les évéques cessent d'Cre membres de 
l'Église 'ils sont en état de péché mortel .... Le pape et les 
évques ne lient ni ne délient rien par eux-mêmes, mais 
seulement par Jésus-Christ. Sans doute les évéques ont 
droit à l'obéissance des fidèles» mais l'Ecriture n'ordonne 
qu'une obéissance raisonnable. Les chrétiens ont pour les 
conduire un guide plus s0r que la parole des hommes; 
c'est la parole divine. Or, cette parole est tout entière dans 
les livres saint.  Cette doctrine, qui renversait dans sa 
base non-seulement la puissance pontificale, mais les dogmes 
les plus respectés du catholicisme, attira sur la téte de 
Jean Hnss un tonnerre d'accusations, en multipliant à l'in- 
fini ses partisans. Ne se croyant plus en sOreté à Prague, 
il se relira dans son pays natal, où il prêcha avec plus d'é- 
nergie que jamais la foi en l'Ëvangile, seul guide du chrétien. 
Citë à comparattre devant le concile général réuni à C o n s- 
tance, il s'y rendit en novembre 11, avec une escorte 
et un sauf-conduit de Sigismond, duc d'Autriche. Par une 
fatalité singulière, l'adversaire du recteur de Prague, le 
pape Jean XXIII, devait comparaitre aussi comme accns 
devant ce concile; mais le duc d'Autriche fit évader à temps 
le pontife, son ami. Quant à Jean l-luss, ce faible prince 
crut pouvoir se parjurer envers un hérétique, et il l'aban- 
donna à la fureur de ses ennemis. 
Arrivé à Constance le 3 novembre, Jean l-luss fut arrété 
et jeté en prison dè. le 28, en dépit des protestations des 
gentilshommes polonais et hohémes qui l'avaient accom- 
pagnê au concile. Dans le grand interrogatoire qu'on lui fit 
shir le 6 juillet 1415, d lui fut donné lecture de 39 propo- 
sitions tirC de ses oovrages et déclarées entachées d'hë- 



.HUSS -- 
résie au plus haut degré. Jean Huss persistaà les maintenir 
pour vraies jusqu'à ce qu'on lui en e0t démontré la tausseté 
par des textes de l'Évangile. Pat" suite de cette déclaration 
faite avec calme et sans jactance, le concile condamna Jean 
Huss à tre blé vif; et cette terrible sentence fut excutée 
le jour mme; les cendres de l'inlortuné docteur fuoent jettes 
dans le lhin. Le secrétaire du concile, Aneas Sylvius, de- 
puis pape sous le nom de Pie II, atteste lui-mme, dans 
ses écrits, qn'aucun sage de l'antiquité, aucun martyr des 
premiers siècles de l'Église, ne souffrit la mort avec plus 
d'héroïsme. Consultez Historia et Monumenta Johannts 
Bussi arque Hieronymi Pragensts (2 vol., ;uremberg, 
1665); Bonnechose, les ldformateur avant la Rforme 
(2 vol.; Paris, t84). Charles Dr BozomR. 
HUSSARD ou HOUSARD, sorte de cavalerie légère, 
d'origine hongroise, connue aussi sous le nom de Croates 
depuis la guerre de trente ans. Ce fut sous le règne de 
Louis XIII, en t37, que l'on vit pour la premiére fois 
en France des compagnies de hussards étrangers, servant 
dans nos arroges comme troupes auxiliaires. On ne les con- 
naissait alors que sous le nom de cavalerie hongroise. Ious 
avons fait coenaltre l'origine du mot hussard à l'article 
C«v,Lïï (lome IV, p. 723). En t691, quelques déserteurs 
hnnois s'otlrirent à prendre du service dans les régiments 
de cavalerie étrangère au service de Louis XIV; quelques- 
uns s'attachèrent à des officiers de marque, qui, en raison 
de la nouveauté de leur costume, les prirent pour ajouter 
une bigarrure de plus à leurs équipages. Cependant, le nombre 
de déserteurs hongrois augmentant chaque jour, on dut son- 
ger  utiliser des hommes braves et entreprenants. L'un 
d'eux, plus hardi que les autres, se présente, au nom de 
tous, au marécltal de Luxembourg, lui déclare que ses cama- 
rades n'ont abandonné leurs drapea,lx que dans l'espoir qu'on 
les emploiera en France, et ne dissimule pas les dangers 
qu'il y aurait à entretenir plus longtemps le mécontentement 
qui se manifeste déjà parmi les siens. Il offre, comme pre- 
mière preuve de fidelité, de se mettre à la tte de 2o hommes, 
et d'aller, en partisan, inquiéter les derrières et les convois 
de l'ennemi. La proposition fut acceptée, et la petite troupe 
ne tarda pas à faire preuve d'une granàe bravoure et de 
quelque expérience dans ce genre de guerre. Lonis XIV, in- 
formé de la cond uite de ces braves, ordonna quïl fat formé au- 
tant de compagnies de hussards que le nombre des réfuiés 
hongrois pourrait le permettre. La nouvelle de la création de 
ces compagnies s'étant répandue parmi les troupes ennemies, le 
nombre des dëserteurs augmenta à tel point, que l'année sui- 
• vante (1692), on fut obligé d'en créer un régiment. Ces corps 
s'augmentèrent successivement: ils étaient au nombre de six 
en t759, de douze quatorze sous la République, le Con- 
ulat et l'Empire, et de six sous la Restauration. En t840, 
ce nombre fut porté à neuf. 
Les hussards combattaient sans aucune espèce d'ordre ni de 
tactique. Ils se groupaient confusément, et cltargeeient ainsi 
leurs adversaires, les enveloppaient et les effrayaient par leurs 
cris et leurs mouvements. En cas d'échec, ils se ralliaient avec 
promptitude, et revenaient ensuite  la charge. On les 
employait plus particulièrewent pour aller à la découverte, à 
l'avant.garde,  l'arrière-garde, harceler les convois, atta- 
quer les fourrage,tors, flanquer dans les marches les ailes de 
l'armée. Ce ne fut qu'avec beattcoup de peine que l'on par- 
vint à les habituer au jongde la discipline. Les anciens huso 
eards étaient trs-adroits à manier leurs chevaux : ils avaient 
des étriers fort courts, de manière que, les Cetons se trou- 
vant très-près des flanes de l'animal, ils le forçaieut  courir 
avec beaucoup plus de vitesse que la grosse cavalerie. 
Ds le commencement du règne de Louis XV cette arme 
fut adoptée par toutes les puissances du nord de l'Europe. Le 
PiCont et les Élats méridionaux, excepté i'Espagne, suivi- 
rent aussi cet exemple, et il est peu de princes souveraius 
qui n'aient aujourd'hui un ou plusieurs régiments de hus- 
l, es hussards se sont distingu dans plusieurs de nos 

HUSSITES 
grandes guerres. La France se rappelle avec orgueil les 
noms de Bercltini, Lauznn, Chamboran, Laaile, Cari- 
gnan, et de beaucoup d'autres, sous le commandement des- 
quels les hussards se couvrirent de gloire. L'habillement 
de cette troupe est élégant et léger. Ses chevaux sont de 
petite taille; ses armes consistent en un sabre, une cara- 
bine, une paire de pistolets. 
De tous les corps de l'armée Irançaise, c'est celui auquel 
on eut le plus de peine  faire adopter la coiffure à la 
Titus. Sous PEmpire, les hussards conservèrent encore les 
nattes, les cadenettes et la queue. 
HUSSITES. C'est le nom que prirent les partisans de 
Jean H u s s, qui l'honnrèrent, lui et J é r 6 m e d e Pr a g u e, 
h l'Cai des martyrs, et qui, méprisant les décrets et les ana- 
thèmes des conciles, êxercèrent de terribles représailles con- 
tre les pr6tres et les moines. Ils adoptèrent pour emblème le 
calice, que, suivant la recommandation de Jacob de Nisa, 
approuvé par Jean Huss, ils présentaient aussi aux laics à 
qui ils administraient la communion sous les deux espèces ; 
et le roi Wenceslas IV leurconcéda en 1417 diverses église». 
A la mort de Wenceslas, arrivée le t3ao0t tdg, la plqpart 
des seigneurs et des villes de la Boh6me refusèrent le ser- 
ment d'obéissance et de fidélité à son d61oyal frère, l'empe- 
reur Sigismond; et le cardinal légat, Jean Dominico, en se 
conformant aux instructions du pape qui lu/ ordonnaient 
d'employer la force pour en finir avec l'hérésie, provoqua 
une insurrection géné»raie, que suivit ce qu'on appelle la 
9uerre des hussites. On égorgea les prètres et les moines; 
on réduisit en cendres les églises et les couvents. Les hus- 
sites se divisèrent eu deux partis : celui des Ca li xii ris, 
plus modéré, et celui des Taborites, plus rigoureux. Ce 
dernier tirait son nom de la forteresse de Tabor, dont il 
avait lait sa placed'armes ; et il reconnaissait pour chel l'a- 
vengle Jean Z i s k a, dont le lieutenant, Iicolas de Hassinecz, 
repoussa en t 420 l'attaque tent,.e contre Tabor par l'armée im- 
périale aux ordres du rénégat UIrich de Bosenberg. Les ca- 
lixtins, qui appelaient de le,trs voenx le rtablissement de la 
paix dans l'Empire, offrirent la couronne de Bohème d'a- 
bord au roi Ladislas de Pologne, puis au grand-prince de 
Lithuanie, Vithold, et enfin à son neveu Koribot. Ziska refusa 
de donner son consentement ì cet arrangement, et dès lors 
iii eut scission complète entre les deux partis. En 12o 
et t2t chacun d'eux puhlia de son cté une prolession de 
foi distincte, résumée en articles particuliers. Les taborites 
rejetaient absolument tous les dogmes de I'glise qui ne 
sauraient ëtre prouvés à la lettre par un texte de l'Écriture. 
Cependant, en face de l'ennemi commun, les deux partis 
se prètaient un mutuel appui. En t422 Ziska battit les 
Impériaux  Deutschbrot, puis dans une succession non in- 
terrompue de petits engagements; et en t2t la ville de 
Plague n'échappa  une dévastation complète qu'en sous- 
crivant la plus dure des capitulations. A la mort de Ziska, 
arrivée la mème année, les hussites se donnèrent pour chef 
le grand P r oc o p e, tandis que le commandement de leur 
armée était déféré au petit Procope. En t427, lorsque 
Koribut fut forcé de renoncer  la couronne de Bohtme, 
et de mœeme, en 1431, Procope remporta des victoires si- 
gnalCs sur les crotsés mercenaires de l'Emp!re d'Allemagne ; 
et jusqu'à la fin de l'année t432 il demeura la terreur des 
contrées voisines, oh il entreprenait continuellement de dé- 
vastatrices expditions. Le concile de B I e étant entré en 
négociations, en t133, par l'intermédiaire de Sigismond avec 
les révoltés, une transaction, connue sons le nom de Com- 
pactata de Prague, fut conclqe avec les calixtins. Les tabo- 
rites et les orphelins (comme se nommaient ceux qui re- 
gardaient Ziska comme irremplaçable) se refusèrent à ac- 
céder  cette transaction; mais ils furent complétement 
battus à la bataille de Boehmischbrot, le 30 mai 143, par 
les catholiques unis aux calixtins. Par le traité conclu e,t 
t436 à Iglau Pempereur Sigismond cnnfirma les Compac- 
rata, et garantit aux habitants dela Bohème la jouissance de 
la libert politique et religieuse. Toutefois, la guerre civile 



ao HUSSITES -- 
oontinua toujours, et ne cessa complétement qu'en 1485, 
époque o, dans la diète de Kuttenberg, le roi Ladislas ac- 
corda une paix de religion qui assurait aux calixlins et aux 
eaholiques la paisible jouissance de leurs droits respectifs. 
Plus tard les taborites se confondirent avec la secte des 
frères Bd hère e s, sortie de leur sein. Consultez Schubert, 
Histoire de la 9zlerre des hz,ssite« (eustadt, 1825). 
IIUSTINGS. La cour «les htstittfls était jadis la plus 
haute et la plus anciennement établie des juridictions de la 
cité de Londres; et c'est encore aujourd'lmi à cette cour, 
présidée par le }oral*maire et les alderlnen, qu'on en ap- 
pelle des jugement rendus par la cour des sheriffs. D'autres 
villes et cités, telles que York, Lincoln, etc., possèdent nne 
semblable juridiction. 
On appelle aussi huatimds les espèces de tribunes en 
plein *eut, décor6es de bannières à leurs couleurs, où les 
candidats à la d#putation viennent faire leur profession de 
foi devant les électeurs dont ils recherchent les suffrages. 
Chacun sait avec quelle liberté, pour ne pas dire quelle 
licence, le peuple anglais use de son droit électoral. Il ne 
se borne pas toujours à accabler de ses sifllets les candidats 
dont il ne partage pas les principes politiques ; il a le plus 
souvent recours à des démonstrations plus hmuiliantes en- 
core. Les projectiles les plus immondes sont emplo)'és pour 
forcer l'orateur à battre en retraite et à abandonner les 
hustin9 s, trop heureux lorsque la violence directe n'est 
pas employée à cet effet. C'est sans doute parce qu'à 
l'origine le clmix des bowgeois appelés à représenter la 
cité de Londres au parleïtent devait se faire devant la 
cour des husIin9 s, qu'on aura appelé hust*ngs d'abord 
le lieu où se faisait une élection parlementaire, puis l'é- 
chafaudage mème sera'art aux candidats pour haranguer la 
foule. 
HUTCIIESON (Futures), naquit en 1694, dans l'If- 
lande septentrionale, et fit ses premiëres Cudes à une épo- 
que po les doctrines religienses et pldlosophiqoes subis- 
saient le contre-coup des deux grandes crises que venaient 
de subir, en 1649 et en 1688, les institutions politiques 
d'Angleterre. C'était, dans les sciences et dans les lettres, 
l'époque des iewton, des Locke, des Shaftesbury. Doué 
d'un beau génie, le jeune tIutcheson, qu'on destinait à 
l'Elise, s'appliqua, à l'université de Glasgow, avec une ar- 
deur égale, aux langues anciennes, à la philosophie et à la 
théologie. Après avoir terminé ses Cudes, il entra comme 
professeur dans une institution particulière de Dublin. 
Hutcheson y eut des succès, qu'il releva par une publica- 
tion importante sur la philosophie. Une grande question 
de plfilosophie pratique s'agitait alors dans les écoles d'An- 
gleterre; c'était celle d« principe mëme de la morale. 
Shaftesbur$' fondait toute sa doctrine morale sur les af- 
fections surveillantes du cœur humain et sur les directions 
qu'elles impriment à l'amour-propre ou à l'intérêt per- 
sonnel. Cette doctrine plut à Hutcheson. il la dëveloppa 
dans un volume intitulé Becherches sur l'orig[e de nos 
ide. de beauté et de vert u (Leurres, 1720). L'auteur avait 
alors vingt-six ans, et son ouvrage n'était pas remarquable 
sous le rapport de la science. Il exposait, au contraire, 
une sor[e de sensualisme moral très-vulnérable; et un 
frère du célèbre Samuel Clarke, John Clarke, le réfuta 
avec beaucoup de vivacité et de raison, dans un ouvrage 
publié à York, sous ce titre: Fondemeit de la morale en 
thoeorie et en pratique. Cependant cette réfutation, loin 
de nuire à itutcheson, contribta au succès de son livre. 
Hutcheson plut par sa prétçntion d'apporter à la science 
des sentiments la précision et la rigueur.de la démonstration 
mathématique. Il fut recherché et encouragé. 
Huit ans après, il publia son ouvrage sur les passions, 
Essay on the nature and conduct of pas.çons and a.f.fec- 
tion*, with illustrations on the moral sense (Lon,lres, 
1728). C'est celui de ses ouvrages où il professe avec le plus 
d'entrainementles sentiments tes plus nobles, et qui le mit le 
mieux à sa place : il le fit nomm'-ç à la chaire de morale 

HU 
de l'univerté de Giasgow (1729). Professeur, Hiitchesoa 
se disfingua par un enseignement simple, plus riche d'in- 
génieux dëtails que de vues profondes, ennemi de toute pré- 
terrien et de tonte tradition scolastique. Peut-Cre fut-il celui 
des philosophes de son paysqui contribua le plusà développer 
cet esprit d'analyse détaillée, ingénieuse et facile, qui distiugtm 
l'école d'Écosse. Plein de #été et de moralité la plus pure, 
Hutcheson fit, outre ses leçons ordinaires, un cours de re- 
ligion, chrétienne qui fut encore plus suivi qu'elles, et q u'il 
adressait le dimanche au soir à un auditoire plus populaire 
que celui des étudiants. Il composa pour ces derniers 
quelques manuels écrits dans une élégante latinité, mais 
qui n'curent que la vie lactice des écoles. Son principal 
ouvrage, achevé en 174, q uand la mort int l'enlever, ne 
fut publié par son fils que dix ans après. Il parut sous le 
titre, un peu ambitieux, de Système de Phi losophie morale:. 
La vie d'Hutcheson a,ait été si belle qu'Adam Sndth fut 
glorieux d'Atre le successeur d'un tel homme et de perfoe. 
tionner sa doctrine. Cette doctrine avait besoin de luire des 
progrès. Observateur ingénieux, Hutcheson, avec le sens 
pratique et cette philanthrnpie théoriquequi distinguent ses 
compatriotes, l'avait fondée sur un fait moral qui lui parut 
d't,ne grande fécondité, sur le plaisir q,e nous éprouvons 
i faire le bien, et spécialemeut celui que nous éprouvons à 
contribuer au bonheur de nos semblables. Cette bienveil- 
lance pour les autres, ce désir de leur boni,eut, non-seule- 
ment s'accorde suiant lui avec le désir de notre propre 
boni,eut, mais nous conduit précisément aux actio qui le 
fondent. S'il pouvait y avoir conflit, Ge serait le sens ïtoral 
qui déciderait. Le sens moral, qui a joué un si grand t61e 
dans les écoles d'Écosse, et dont Hutcheson a le premier 
développé la lbCrie, est une faculté qui nous fait approuver 
naturellement, instinctivement, ce q,fi est juste et raison- 
nable. IIutcl,eson endCive tous les droits et tous les devoirs 
de l'homme ; il y rattache :mme toutes ses doctrines re- 
ligieuses et eslhtiqtes. Mais on voit aisément tout ce 
qu'il y a d'aventureux dans eeite lbCrie. 
Si ce sont les sens qui introduisent les idées dans l'in- 
telligence, et que le rOle de la raison se réduise " la com- 
paraison et aux déductions, il est évident que les idées 
murales ont le sort de toutes les autres. Fournies par les 
sens internes ou externes, les notions de bien et de mal ne 
sauraient avoir plus de valeur que les autres notions de 
ce genre. Bientôt le sceptique Hume vint prouver qu'il 
en est de la beauté et de la laideur, de la vertu et du vice, 
comme du got)t et des couleurs, que les unes sont comme 
les autres des qualités sensibles. La raison, ajoutait Hume, 
nous donne la connaissance du vrai et du faux, le gofit 
nous donne le sentiment de ce qui est beau et de ce 
qui et difforme, de la vertu et du vice. De là suivait que 
la noralité était une affaire de gofit; et l'on voit ainsi 
combien la théorie d] sens moral est malencontreuse. Elle 
est fausse..Nous l'avons dit, l'idée du ute et de l'injuste. 
qui est la source de la morale, appartient à la raison, et non 
aux sens. Ce ne sont pas les sens qui Iïntroduisent dans 
l'intelligence. Sans doute nos jugements moraux sont ac- 
compagnés d'un sentiment, d'une émotion ; mais c'est le 
jugement d'a bien ou du mal qui est la cause de cette Cd- 
tion, de ce sentiment ; ce sentiment, cette émotion n'ont 
rien de primitif. C'est avec le primitif, ce n'est pas avec 
le dérivé qulon a un principe, qu'on a un système, ou du 
moins une méthode. Autant le pieux Hutcheson se propo- 
sait de combatlre le scepticisme, autant fl le favorisa. Il a 
cela de commun avec L o c Il e. Pour tire les ouvrages d'Hut- 
cheson avec utilité, il y faut faire deux parts, celles des 
principes qui sont faux, celle des détails qui sont riche» et 
ing#nieux. MTrn. 
IIUTCHIISON (Jom.Hzv), général anglais, né le 15 
mai 1757, était le fils cadet de John Hely Hutchinson, 
secrétaire d'ltat pour d'Irlande, et de Christiane, baronne de 
Dononhmore. Entré au service en 1774 comme cornette, 
dans un régiment de dragons, il était parvenu au grade de 



#aéral-major en 1796, et en 1799 il fit a-ec distinction la 
campagne de ]lollande. En 180l, il s'embarqua pour I'Ê- 
gypte; et quand le général Abercromby eut été mor- 
tellement blessé à la bataille d'Alexandrie (21 mars), ce fut 
lui qui prit le commandement en chef; il s'empara alors de 
Damiette et de Iamauieh, bloqua le Caire, et contraiit le 
général Belliard à signer nne capitulation. Il marcha 
suite sur Alexandrie, repoussa toutes les sorties de M e n o u, 
I 
et le contraignit enfin à se rendre avec toute son armée. 
10, 000 Français durent mettre bas les armes, et trois cents 
bouches à feu tombèrent au pouvoir des Anglais. En récom- 
pense de ces bra'llants succès, le général ]lutchinson fut créé, 
le 10 décembre 1801, lord Hutchnson de KinocMofty. 
Promu lieutenant général en 1803, ambassadeur en Russie 
en 1806 il snccda  son Irère aihWRichard,en 125, comme 
comte Donoughmore et membre de la chambre liante, et 
mourut le 6 juillet 1832. 
]IUTCHISON (Jon. lier,), troisième comte de Do- 
aoughmore, neveu du précédent, n en 1787, était capi- 
taine dans l'armée en 1815, lorsqu'il se rendit célèbre en favo- 
risant, de concert avec sir Robert Wilson et le capitaine 
Bruce, l'évasion du comte de L a v a I e t t e, comdamné  mort 
par la cour prévotale de la Seine. Il est mort le 12 sep- 
tembre 1851,  Palmerston-House, dans le comté de Dublin, 
et remplissait  ce moment les fonctions de lord lieutenant 
dans le comté de Tipperary. Son fils atné, Richard-John- 
]lely ]lutcldnson, vicomte Snirdale, né en mars 1823, lui a 
succéde comme quatrième comte de Donoughmore. 
HUTTEN (ULmcn ne), né en 148, dans lecastel, main- 
tenant en ruines, de sa famille, à Steckelberg (]lesse-Elec- 
torale), fut, à l'àge de dix ans, placé au monastêre de FIde; 
ais il se sentait si peu de goret pour l'état monastique, 
qu'en 1594 il s'enfuit AErfurt, où il se lia avec bon nombre 
de savants et de poëtes. L'année suivante il se rendit à 
Cologne, et de là, en 1506,  Francfort-sur-l'Oder, dont la 
xouvelle université fut inaugurée cette mëme année. C'est 
aussi à cette époque qu'il lot atteint d'une maladie cruelle, 
présent funeste que le Nouveau-Monde venait de faire à 
l'ancien, ui elle exerçait alors les plus affreux ravages, sans 
entrainer encore pour les patients la honte qui y est mainte- 
riant attacbée. Quoique tortnré par les douleurs qu'elle lui 
causait, il alla voyager dans l'Allemagne du nord, où par- 
tout on lui fit un bienveillant accueil en sa qualité de 
poête. En I11, il vint aussi a V(ittenberg, où il poblia un 
ouvrage sur la versification ; de là il se rendit à Pavie, pour 
y étudier le droit, et rentrer ainsi dans les bonnes graces de 
son père, qui ne lui pardonnait pas de s'tre éloign# de 
Fulde. Dépouillé de tout ce qu'il possédait  la suite de la 
prise de cette ville par les Suisses au service de Maximilien, 
il se vit contraint, en 1513, à prendre du service dans l'armée 
impériale ; mais il n'y resta qu'un an. D6jà célèbre en AI- 
temagne par ses incessantes attaques contre Ulricfi, duc de 
V(urtemberg, qui avait assassiné nn cousin de Hutten, il le 
devint encore plus en prenant parti pour Benchlin dans ses 
querelles avec Hoogstra ten, l'ardent dominicain de Co- 
logne ( voye F2sot2E OBSCOCS vmou). Pour com- 
plaire à son père, Hutten se rendit encore une fois en Itafie, 
en 115, afin de s'y faire recevoir docteur en droit. Après 
avoir visité Borne, puis Bologne, il revint, en 1517, par 
Veuise dans sa patrie ; là, à Augsbourg, il fut conronné poête 
lauréat, et l'empereur Maximilien l'arma chevalier. En Italie, 
il avait appris à connaître dans toute sa corruption la vie 
des moines et à mépriser profondément le clergé romain. 
Après avoir publié l'ouvrage de Laurent Valla, découvert 
dans nn couvent, De falso credta et ementita donatione 
qnstantnf, qu'il dédia, par défi»ton sans doute, au pape 
Léon X, il entra, en 1515, au service d'un prince éclairé, 
Albert, archevëque de Mayence. Cette même année, il ac- 
¢ompagna son archevêque  la diète d'Augsbourg, où Luther 
eut sa fameuse entrevue avec Caj:tan, et où Hutten, dans 
un discours à la façon de Dmosthène, engngea les princes 
allemands ì faire la guerre aux Turcs. Cependant, fatigué 

 HUTTON 23-t 
de la vie des cours, il se retira bient6t dans son manoir de 
Steckelberg, oh il établit une imprimerie, et publia de nom- 
breux écrits ayant pour but de signaler la perversité du 
cicr# romain. Il perdit ainsi la laveur et la protection de 
l'archevèque Albert de Mayence, et h ce moment se mit en 
communication directe avec Luther, pour qui, en sa qualité 
de moine, il avait eu jusque alors fort peu d'estime. C'est 
aussi à partir de cette époque qu'il écrivit tous ses ou-rages 
en allemand, au lieu dese serir de la langue latine, comme 
précédemment. Comme il ne se trouvait plus nulle part eu 
streté contre ses ennemis, il jugea prudent de se retirer en 
Suisse; mais Érasme, dont il avait pourtant été autrefois 
t'ami, ne le laissa en repos nnlle part ; de sorte qu'il fut 
obligé d'errer d'un endroit  l'autre jusqu'h ce qu enlin, 
accablé par une réapparition de son ancienne maladie, il 
mourut, le 3 ! aott 1523, dans Plie d'Ufenau, au milieu du lac 
de Zuricb. 
Hutten fut l'nn des esprits les plus indépendants, le. plus 
hardis de son temps, un des précurseurs et des ap6tres 
de la réforme, un modële et en même temps un auxiliaire 
pour Luther. L'injustice, la fraude, t'hypocrisie, la tyrannie 
le révoltaient; aussi les démasquait-il avec togte i'énergie 
de sa plume, instrument dont il se servait avec un talent 
peu commun, particulièrement en latin. Son caractëre droit 
et courageux le rendait inaccessle/t la crainte alors même 
que tous ses amis tremblaient pour lui. ous possédons de 
lui quarante-cinq ou rages, sans compter plusieurs autres 
qu'on lui attribue, sans qu'il soit possible d'affirmer qu'ils 
soient de lui. Une coller.tion en a été donnée par Miiacfi (6 vol., 
Berlin, 1821-t87). 
IIUTTIEIS. C'est le nom qu'on donne aux baLitants 
des désert marecageux de la Ve n «1 ée, et qu'il ne faut pas 
confondre aec les Colliberts, autre race particulière 
à la mme courtC. 
HUTTON (ffAar:s), célèbre géologue anglais, né le 3juin 
1726,  Ëdimbourg, fit ses premiëres Cudes dans sa ville na- 
tale, où son père était commerçant. L'attrait que lui offrit 
la chimie le fit renoncer à la carrière de clerc au sceau du 
roi, que -oulait lui taire embrasser sa famille. Il alla passer 
deux ans h Paris, et en 179 il prenait  Leyde le grade 
de docteur en médecine. De retour en Écosse, il fonda d'a- 
bord une fabri,Iue de sel ammoniac, puis l'activité de son 
esprit se tourna vers l'agriculture. Mais c'est à des travaux 
d'nne autre natnre qu'il dut sa célébrité. Hutton avait dej/ 
fait paraitre quelques ouvrages sur la minéralogie, la physique 
et aussi sur la philosopfiie, Iorqu'il donna, en 1795, sa 
Theor/qf the Earth (Édimbourg, 2 vol. in-8°), résume 
de trente années d'etudes géolo#ques. Dans ce livre, Hutton 
pose le calorique comme agent principal des grandes opé- 
rations de la nature (voile= CnxLF.Va oEneST), sans ce- 
pendant admettre la fluidité primitive de notre globe. 
Membre de la Societé royale d'Edimbourg, Hutton écriit 
dans les Transactions plusieurs mémoires remarquables. Il 
mourut en 1797. 
IIUTTON (CnLm), célèbre mathématicien anglais, 
né en 1737, à Newcastle, fils d'un inspecteur des mines, reçut 
une éducation très-incomplète, et ne dut qu'h lui-même les 
connaissances multiplies qu'il posséda plus tard. La démoli- 
tion d'un vieux pont à Newcastle lui fournit l'occasi«m 
d'écrire sur la construction des ponts un petit ouvrage qui 
le fit tout anssitOt cannaltre. A peu de temps de là, il de- 
venai membre de la Société royale de Londres, qui le choisit 
pour secrétaire chargé de la correspondance trangìre. Il fut 
eusuite nnmm professeur de mathématiques à l'Académie 
royale de Wooiwich; fonctions qu'il continua d'exercer 
jusqu'en 1807, époque de a mise  la retraite. 11 mourut  
Londres, en 1823. 
]lutton prit part à presque tousles perfectionnements intro- 
duits de son temps par les An#als dans l'artillerie et le génie. 
Parmi ses nombreux ouvrages, il faut suriout mentionner 
ses Tables of the products and pou'ers of numbers, with 
an Introduction (Londte.% î781); Mathematical Table, 



3 HUTTON -- 
contalning the «ommon hyperbolic and logistic lo- 
9arithms (1785; nouv. édit. 1811); Elements of Conic 
Sections  1787) ; 3lathematical Dictionary (dern. édit. 
1815) ; Course of mathematics (3 vol., 1801). 
HUYGHENS ou HUYGENS. Trois auteurs ont porté ce 
nom, mais un seul l'a illustré : l'un lut poëte, ou plutôt ver- 
sificateur; l'autre théologien, et le troisième, celui dont nous 
allons parler, occupera toujours une place honorable dans 
l'histoire des mathématiques, de la physique et des arts. 
La mémoire deChritian Htrcnr.Ns de Zv-acnr.M prolongera 
celle de son père'Constantin, très-mal soutenue par un grand 
nombre de volumes remplis de vers latins, qu'il faisait, di- 
sait-il, pour se délasser, raotif dont les lecteurs tiennent peu 
de compte. Constanfin vivait ì la cour du prince d'Orange, 
dont.il était secrétaire : son fils Christian naquit ì La 
Haye, le 14 avril 1629, et manifesta dès son enfance ce qu'il 
devait tre un jour. A l'fige de neuf ans, ses éludes de col- 
Iége étaient finies, et ì treize ans il surmontait seul les 
difficuités des hautes mathématiques. Son père essaya de 
l'appliquer ì l'Cude oe la jurisprudeuce ; mais à l'univer- 
sité de Leyde, où il fut envoyé, d'autres cours absorbèrent 
son attention; et le jeune Huyghens fit définitivement une 
conquète des sciences mathémathiques et physiques, sans 
que la volonté paternelle mit aucun obstacle à cette vo- 
cation. Dès lors il prit part ì presque toutes les décou- 
ertes, fut bient6t en correspondance avec les géomètres 
les plus illustres de cette époque:la Société royale de 
Londres et l'Académie des Sciences de Paris le mirent au 
nombre de teurs membres. La France, qui avait enlevé 
Cassi n i ì l'ltafie, voulut aussi s'approprier Huyghens, et 
Colhert en vint à bout. Le savant Hollandais, fixé ì Paris 
par les hieniaits de Louis XIV, redoubla d'activité, et ne 
fut pas moins utile aux applications des sciences qu'anx 
théories qui faisaient alors de si grands progrès. 
Les h o r i o g e s et les t é I e s c o p e s furent particulièrement 
l'objet de ses soins, le but de ses travaux : les premières 
manquaient de bons régulateurs, et pour les instrument 
d'optique à l'usage des astronomes, on n'osait pas encore 
employer des lentilles de long foyer et d'un grand diamètre, 
parce qu'on ne savait pas les construire avec assez de 
perfection. Le géomètre mit lui-mme la main ì l'oeuvre, 
et fit un télesoepe avec lequel il dccouvrit l'anneau de 
Saturne, le mouvement de ce corps singulier, ses appa- 
rences successives, dont il soupçonna bient6t la cause : il 
aperut aussi l'un des satellites de cette planëte. Mais on 
ëtait encore bien loin de la puissance de vision donnée ì 
l'homme par le télescope d'Herschel. Les instruments qui 
reculent ainsi pour nous les bornes de l'univers accessibles 
à nos observations ne sont pas seulement des conceptions 
du génie; il faut pour lesexécuter un ensemble d'arts que 
le temps seul peut réunir. Les services rendus par Huyghens 
ì l'horlogerie furent beaucoup plus importants que ce qu'il fit 
pourl'optique; mais on lui conlesta sa principale découverte, 
celle des propriétés du peu d u l e. On ne peut au moins lui 
refuser le mérite d'en avoir fait la première application, d'avoir 
mis entre les mains des horlogers tout ce qu'il fallait pour 
amener ce régulateur ì un parfait isochronisme. Séduit par les 
belles propriétés de la cy c ! o ï d e, il continua longtemps 
d'infructueux essais pour surmonter les obstacles que la 
nature des ¢o"ps opposait ì la précision des résultats de 
la thíorie ; enfin, les pendules cyclo'/daux disparurent tout 
à fait; le fil auquel on suspendait la lentille fit place ì une 
verge inflexible et l'on ne s'attacha plus qu'à régler la 
longueur du pendule et l'Atendue de ces oscillations. L'ou- 
vrage de Huyghens intitulé Horologium oscillatorum est 
un traité complet sur cette matière. L'auteur y travailla 
depuis sa première découverte, en 1657, jusqu'en 1673 
époque de la publication de son livre. 
Tant de recherches d'une utilité immédiate n'empchèrent 
pas Huyghens de selivrer ì la théorie pure. Ainsi, un demi 
siècle açt que Jacques Be r n o u I ! i ícrivlt son Ars conjec. 
tandi, Huyghens résolvait plusieurs questions importante 

HYACINTHE 
du calcul des probabilités. A la mème époqe il donnal 
des méthodes pour la rectification de la parabole cubique, 
la quadrature de la cissoïde, etc.; plus tard, ses travaux sur 
le pendule l'amenèrent à s'occuper de Iorcas c e n t r a ! e s.' 
Quand Leibnitz fit connaitreles principes du calcul d i fié r e ri- 
t i e I, Huyghensles aecueillit}d'abord avec une certaine répu- 
gnance. Cependant, à la suite d'une assez longue correspon- 
dance avec Leibnitz et L'H6pital, il revint sur cette première 
impression.lAjoutons que H uyghens fut un des premiers à éta- 
blir en optique le système des ondes, aujourd'hui démontré 
par Fresnel. 
On a vu comment la France s'empressa d'adopter l'illus- 
tre savant; il est pénible d'avoir à dire qu'elle ne le conserva 
point. Huyghens était protestant; la révocation de l'Édit de 
Nantes le força de choisir entre sa religion et sa patrie 
adoptive : il revint en Hollande, où il mourut, ì I'ge de 
soixante-six ans, le8 juillet 1695. Le recueil de ses écrits 
est beaucoup moins volumineux qu'on ne le penserait, après 
une vie dont près d'un demi-siècle fut entièrement consacré 
aux sciences, et en raison de la variété des ohjets dont il s'oc- 
cupa : quatre volumes in-4 ° renferment jusqu'à ses œuvres 
posthumes. Mais il possédait, comme écrivain, le secret 
d'tre à la fois concis et très-clair; ces volumes sont plus 
pleins de choses que leur apparence ne le promet. Fav. 
IIUYSUM (J v), le peintre de fleurs et de fruits 
le plus distingué qu'ait produit le dix-huitième siècle, na- 
quit à Amsterdam, en 1682. Destiné par son père, Juslus 
v Hwsvs, marchand de tableaux et peintre fort médiocre. 
à devenir avant tout un peintre de paysages, il snivit en 
ce geme la manière de Nic. Piemont, qui était fort estimé 
en Hollande. Ce ne fut que dans son ge m0r qu'il com- 
mença à peindre des tableaux de fleurs et de fruits. Dans 
ses fleurs, que, contrairement à la manière suivie jusque alors, 
il représeuta le premier sur un rond clair, et qui sont encore 
plus belles et plus vraies que ses fruits, il surpassa tous ses 
devanciers pour le moelleux et la fralcheur, pour la délica- 
fesse et la vivacité des couleurs, pour la finesse du pinceau 
dans l'expression des teintes douces, pour la dégradation 
la plus frappante de la lumière ; et dans les gouttes de rosée 
et les insectes qu'il ajoutait ì ses tableaux, il sut reproduire 
la nature au plus haut degré de vérité et de vie. Mais en gé- 
néral ses derniers ouvrages sont plus superficiels que les 
premiers; il mettait le plus grand soin ì préparer ses cou- 
leurs et son huile, et faisait nn mystère de ses procédés. 
Il ne permettait à personnede le regarder peindre, de peur 
que l'on ne surprlt son secret. Des circonstances malheu- 
reuses, particulièrement la coquetterie et la prodigalité de sa 
femme, et la mauvaise conduite de son fils, attristèrent ses 
dernières années. Il mourut à Amsterdam, en 1749, sans 
laisser de fortune, bien qu'il fit payer le moindre de ses 
tableaux de 1,000 à 1,400 florins. On voit de ses chefs- 
d'œuvre dans les galeries de Vienne, Munich, Dresde, et 
surtout à saint-Pétersbourg. 
Il avait trois frères, également peintres : JuMus 
Hvs, peintre de batailles, mort dès l'fige de vin-deux 
ans; 1Vicolas v Hvvsv, artiste de premier ordre, mais 
sur la vie du quel on n'a aucun renseignement; et Jac9es 
v. Hw'svM, qui s'établit en 172t à Londres, où il mourut, 
en 1740. Il copiait les tableaux de remuer de fruits de son 
frère Jan avec tant d'exactitude qu'on s'y trompait, et que 
ces copies se payaient un très-haut prix. 
HUEEN ou HWEEN, petite Ile du S u n d, dépendant 
de la province de G oth I an d, est célèbre pour avoir été le 
séjour de Tycho-Brahe, à qui le roi de Danemark Fré- 
déric il l'avait donnée en riel. Le ch'tealt d'Uraienbourg, 
dont il avait fait un observatoire, et qu'il fiabita jusqu'en 
1597, est maintenant ch ruines. En 1558, l'tic de Hveen 
fut cédée par le Danemark ì la Soède. 
HYACINTHE jeune prince, Jils d'oEhalus, était_ nar 
ses grâces et sa beauté, l'ornement d'Amiclës, ville de'lï- 
conte, où il était né. L'étymologie de son nom fait allusion 
à sa malheureuse fin : il est formé en grec de a.'. ! hélas ! 



et de 0o, fleur. Bore, roi des Hyperboréens, selon 
uus, Zephre, «uivaut d'autr,  kpolion se disputëreut 
amié. Le dieu Pemporta. Un jour que sar lesriv de I'Ea- 
rol Apollon et Hacinthe s'excrètent à loer le disque, 
le premier aant fait décrire au sien un Io cercle dans les 
airs, le second, emporlé par l'ardeur du jeu, courut pour le 
ramasser; il arriva trop t6t: le diue, en tomber, le fmppa 
d'un contre-coup au visage. ,, Alors, dit Ovide,, commeon 
voit l pavot, les Ils et les violettes, qui ont été trancbés 
par le pioe, incliner leur lte, ainsi Hacintbe, ple et lan- 
guint, laissa tomber la sienne sur n épaule. » En vain 
Apollon expfima-t-il sur la blsure de n favori le suc 
de toutes les plant dont la verlu était connue à  vas 
sdenoe; Hyacinthe expirt. Le oeeu de la lumiëre aoeu, 
dans son désespoir, Bo, ou plut6t Zéph?re, d'avoir de- 
iourné, r son souffle jfloux, le pet de sa ute. A l'as- 
pect de ce sang épandu, il voulut qu'H?acinthe deint 
fleur, et que oette fleur conserçt h ve couleur de ce 
sg précieux. Il  tra deux fois les lettres plaintiv 
OEi OEi, en grec ( hélas, hélas  ). Dioscoride pense que la fleur 
que décrit Ovide n't autre que le vaciet, ou oignon u- 
ve, auqud Virgile, si savant en aicultuoe, donne l'épi- 
thète de noir. En effet, les poêt comparent toujours la 
chevelure de leurs brunes maffress à la flr de l'hyacin- 
the. La nature, en outre, a ira imparfaitemt sur oette 
fleur les lettr ai. A j axeut aussi la faveur d'tre changé en 
cette bulbifère, et d'y laisser la première s$11abe de son nom. 
$parte, qui revendiquait la gloire d'avoir donné le jour à 
Hyacinthe, lui Ceva un tombu; elle y lébraii, en l'hon- 
neur d'Apollon, vers le mos de juin, pendant tis jou, d 
1 appel Hgacinthies. Les deux premiers jours éhient 
destin aux lamenhtions et aux libations; 
à la joie et aux banqueh. Il  a bucoup d'analogie entre 
I f funèbres d'Hacinthe et oelles d'Adonis. Ceux qui 
y sishient portaient des couronn de lierre, auquel les 
anciens attribuaient la veu de prérver de l'ivresse. _ 
D-Bo. 
HYACINTltE (Botanique). Voe 
HYACINTHE (Minéralogie), piene précieuse 
peu estimée : elle t ordinairement d'un jaune orangé, ti- 
rant sur le brun ou sur le rouge fon. L'hyacinthe est 
composée d'alumine, de sce, de oerbonate de chaux et de 
fer. Sa dure est à peu pr fle à ceedu crishl de che. 
On attribuait autrefois un and nombre de ve méci- 
hales à oette pierre précieuse, et elle avait méme donné son 
nom à une sooEe d'électuaire phaaceutie appelé con- 
fection d'hçacinthe, dans quelle elle n'entre mme plus 
aujourd'hui. On prétend qu'une similitude de oeuleur de 
qudqu-un de ces pierres avec lafleur de la plante appelée 
inthe leur a fait donner le nom qu'elles portent. 
HYACINTHIES. Voçez Hxc. 
HYADES nom que l'on donne à une oenstellation 
formée de sept étoil, en forme d'Y, qui bllent sur le 
front du tauru. Les pt q 1 ont chanté ne sont 
pas d'accord sur leurs vérihbl noms. On les regarde 
toutefois assez géralemen comme fies d'Afl et d'Ethra, 
comme sept soeurs, nommées Eudoxe, Ambros, Pric 
Corons, Phileto, Poliso et Thioné. Voici oe qu'on raoente 
d'elles : Leur frère Hyas ayant été déchiré par une lionne, 
lles pleurèrent si amèrement sa mort, que I dieux, tou- 
chés de comssion, les transportèrent au cid sur le front du 
uru, où ell pleurent encore. Suivant Bahand-Snt- 
£tienne, elles annonieut la pluie ; on les appelait les ph- 
euses, 6oEô en gr ; on les iait vernt d pleurs, 
comme l'Aurore. On ajoute qu'elles servaient particulière- 
ment à rler les leçons qu'on donnait en ple aux dis- 
ciples des prètres, au mo)-en d'un Atlas, c'est-fiire d'un 
Horus portant une sphère céleste. Les poëtes, ayant per- 
«onnifié Atlas, en lirent nalurellement, le père des Ilyades. 
Leur imagination alla jusqu'à Orion, qui oe lève immia- 
tement après elles : ils en firent un liftin, qui ne c de 
les poursuivre. On dit encore qu'elles furent les nourrices 

-- HYBRIDE 233 
de Bacchus, et que Jupite, pour les soustraire à la fureur 
de Junon, les transporta au ciel et les plaça parmi les 
astres. Un passage de Manilius, sur les violences qu'Orion 
exerça contre les Hyades, ses voisines, nous apprend que 
dans les peintures astronomiques on les parait richement, 
et qu'on leur peignait les joues en rouge. 
C e Alexandre LEom. 
It.YALITHE (du grec «).ooE, verre), variété d'o pale, 
Concrétionnée en gouttelettes, elle offre la transparence, du 
verre. 
HYALURCIE (du grec ïoEooE, verre, et [po, ouvrage). 
On appelle ainsi la branche de la chimie technoloque qui 
a trait à la fabrication ou à la manipulation du verr e. 
HYBRIDE, HYBRIDITÉ ( de rtt{ bMard, metis ). 
Le nom d'hlbride désigne tout individu, animal on végétal, 
issu de l'alliance de deux espèces diffërentes, quoique voi- 
sines, comme les mulets, les plantes tenant du mélange 
d'une autre. Mais le caractère lffbride consiste surtout à 
porter les athibuts méhngés des deux espèces, à présenter 
des habitudes intermédiaires et par là complexes, le plus 
souvent incertaines. Les races hybrides, pour la plupart, ne 
se reproduisent pas pures d'elles-mèmes, ou ne se propa- 
gent guère entre ell sans qu'il y ait de Pimpossibililé; mais 
il y a préférence pour les rac originelles. Ainsi, elles ten- 
dentà rentrer dans la tige maternelle ou paternelle. Quoique 
lesmultres et d'autres métis puissent former entre eux 
lignée ; quoiqu'on ait vu des mules devenir fécondes dans 
les climats chauds ( puisque la stérilité n'existe ps absolu- 
ment parmi les mulets), cependant, ces tres mi-partis re- 
cherchent naturellement une de leurs espèces prédominantes 
originelles : ainsi, lespetits-blancs aspirent à la race blanche, 
comme la plus noble ou supérieure. 
Il est probable que nos races multiples de chiens, de 
poules, de pigeons, et autres animaux domesliques, n'of- 
frent tant de variétés que par des unions hybrides. C'est à 
l'aide de ces mélanges ou croisements avec des rases plus 
belles qu'on a su ennoblir les chevaux, les mourons méri- 
nos, les chèvres à duvet de cachemire, etc. On présume 
aussi que le loup, le renard, le chacal, ont pu entrer dans 
les mélanges des faces canines si diverses, et que des es- 
pèses sauvages du genre colontbin ont contribué aux nom- 
brenses modifications de nos pigeons. 
Il y a des hybrides connus jusque parmi les poissons, 
d'autant mieux que la fécondation de leurs œufs a lieu hors 
de la femelle par l'aspersion de la laite des mles daus les 
eaux. Cependaut, ces mélanges ne s'effectuent pas entre des 
espèces trop disparates, la nature ayant probablement limité 
l'absorption de la liqueur fécondante a la structure des mem- 
branes de l'oeu f des espèces le plus congénères ou analogues 
entre dles. L'hybridité féconde est aujourd'hui bien averëe 
parmi les oiseaux et chez les reptiles. De mme, il est re- 
connu que des accouplements se sont opérés entre des in- 
sectes d'espèces différentes, parmi des coléoptères, des 
diptëres, des lépidoptères, cités par les observateurs; ils ne 
peuvent avoir lieu qu'entre des voisins, toutefois, du mme 
genre ou de méme famille. La nature en effet a couformé 
les organes gnitaux de telle sorte qu'il y a entre des espèces 
éloigné¢s des empchements ou des disproportions incom- 
patibles. De là résulte que toute sorte d'hybridité n'est pas 
possible; dailleurs, la durée ou le mode de gestatioit peu- 
vent beaucoup différer, en sorte que l'union de l'homme 
avec une femelle d'orang-outang, par exemple, serait pro- 
bablement sans résultat. Buffon a nié avec raison que l'ac- 
couplement du taureau avec la jument produiit de prrten- 
dus jumarts. Ces animaux sont de genies trop différents. 
De mdme, la dissimilitude des sèves empche les g r e fie s 
de réussir entre des arbres de genres forts éloignés. 
Toutefois, on ne sonnait pas exaclement les limites des 
mélliances pour la production des hybrides, parce qu'on 
n'a pu encore élablir exactement les caractères infi-and,is,- 
sables enh'e les rases, les variél et les espèce. chez une 
multitude d'animaux ci de '¢gétaux. Ceux-ci sont C='aie- 
30 



234 
.ment sujelsà l'h_bridité, par le mélange du pollen fécon- 
dateur d'une espèce sur une autre, soit naturellement, soit 
artificiellement. Koehlrenteret d'autres observateurs se sont 
appliqués à cette recherche. On enlève les Camines d'une 
lieur avant la fécondation, et on apporte sur le pistil le pol- 
len d'une autre espèce. G'est ainsi qu'on améliore ( nu que 
se détériorent par le voisinage seul et le transport «le l'air ) 
les belles variétés de raclons ou d'autres fruits. Les hybrides 
végétaux sont plus faciles à produire parmi les espèces mo- 
no,ques ou cliniques que dans les hermaphrodites, à cause 
que les sexes .sont loojours asciés chez ceux-ci. L'hy- 
bride végétal, quoique fécond, retourne d'ordinaire sponta. 
nment à sa tige maternelle, parce qu'elle est prédominante. 
I|ais si, loin de l'abandouner à cette tendance ,, ou 
visme ( retour aux aieux et à l'Cat sauvage, remarqué dans 
le fraisiers), 'l'on redouble dans .les générations subsé- 
quenles une.nouvelle aspersion du pollen palernel, on fait 
alors prédominer la forme.du-type male. 
Sonnent les bolanistes rencontrent dans leurs herborisa- 
tions des produits sponlanés de ces alliages, ou des rases 
hybrides; mais il a/vive aussi que, ne les connaissant pas 
toutes, ils peuvent les ériger en espèces, ou les croire du- 
rables. Lorsqu'ils signalent une espèce portant les caractères 
interm«.diaires de plusieurs de ses congénères, ils la quali- 
fient d'hybride, sans avoir néanmoins la certitude de sa 
b'tardise : par exemple, delphnurn hybridu, vero- 
c hjbrMa, etc. Les légminenses, aant leurs organes 
de fruclificatiott enclos dans la carène de leur fleur, sont 
moins exposé.  l'hybridité que d'aulres plantes. 
J.-J. 
En ammire on nomme hybrides les mois qui sont for- 
més de racines de langues différentes. 
HYDATIDE (de Goi , Gavç, eau), nom commun à 
un grand nombre de parasiles des animaux supérieurs, af- 
feclant la forme vésiculaire et remplis d'un liquide aqueux. 
Ces parates, que les auteurs ont désiés sous les'noms «le 
vers cys?iq«es, v$siculaire$, hydetques , etc., dëpourvus 
d'organes reprodcteurs, sonl bien inléieurs aux fenias et 
aux bothriocépbales. On les divise en plusieurs gcnres, dont 
nous nommerons les principaux. 
Le genre cystWerquerenferme une espèce qui vit dans le 
péritoine des lapins, et une autre que l'on dit commune à 
l'homme et au cochon. C'est celte dernière qui donne lieu 
à la la drerie. Deux aulres espèces sont propres Puneaux 
muscles et au tissu cellulaire, l'autre au cerveau de l'homme. 
C'est encore nne espèce de cysticerque qui vit dans la cavité. 
crnierme des.moulons, et détermine la maladie de ces ani- 
maux connue sous le nom de tournis. 
Le» inliidus du genre coEmre offrent |'apparene d'nne 
agrégation de vers hydatiques.dont les vésicules sont réunies 
en une seule poche et les ttes distinctes. Le genre chi- 
nocoqe semle pouvoir lui tire rénni. Le genr ac$- 
p h er l o cys t e a été l'objel d'nu article particulier. 
Le docleur Hnnler atlribuait le ca ncer à une hyciatide 
qu'il nommait hydetide canct'euse. 
HYDE. Voye 
HYDE DE NEUVLLE (J-GIt«V'E, baron), 
ancien député, ancien ministre sous la Restauration, est né 
à La Charité-sur-Loire, d'un père d'origine anglaise, fabricant 
de boulons dans cetle petileville. La légitimilé n'eut pas de 
plus fougleux, de plus- infatigable champion. Dès 1797, ' 
affili au club royaliste de |a rus de C I i c h y, il mit au ser- 
ice de la maison, de Bourbon une aclivilí exlraordinaire, 
tant6t excitant le zèle des.partisans qu'elle avait à Paris, 
lanlt fomenlant la erre civile dans louest, sollicitant à 
cet effet des subsides de PAngleterre, où il alla très-souvent 
de sa personne, secondant enfin par ses intrigues les inlri- 
gues patentes ou occulles des d'Andigné, des Gestes C a- 
dondal et des Bourmont, ses amis. Le 18 fructidor 
vint-enfin metlreun ferme à ces mauoeuvres, et M. Hyde 
de 'euville, qui était signalé à la police française comme 
nn des agents les plus résolus de la conspiration bourbon- 

HYBRIDE  HYDE 
,nienue, fut quelque temps sans remettre le pied sur I« 
continent. 11 demeura "à Londres, 06, alant bienlfit éta re- 
joint par son beau-frère Delarue, il présenta de nouveaux 
plans de contre-révolution atrgouvernement anghis. Celui- 
ci, bien qu'il commençait à se lasser d'Atre, sans profit, 
le eaissier des conspiratenrs royalistes français, ne laissa 
pas que de s'exAenter derechef et de fournir encore des 
subsides pour rallumer la guerre civile chez nous. Le 15 
brumaire arriva. La révolution, alors personnifiée dans Bo- 
naparte, parut à M. Hyde de leuville devoir Atre altaquée 
plus sàrement et renversée méme d'un seul coup. A cet 
effel, il établit à Paris une contre-police, chargée d'épier 
toutes les démarches du premier consul, et il mit à la tèle 
de cette audacieuse entreprise uu certain Duperrom Soit 
• maladresse, soit trahison, cet agent se laissa surprendre, et 
M. Hyde de Ieuville n'cul que le temps de fuir en Avgle- 
glelerre, sans pouvoir emporter ses papiers. Aussi, quand 
la police.fit me descenle chez lui, trouva.l-elle non-seule- 
.ment le plan organisé contre la personne du premier consul 
par M. Hyde de Neuville, mais encore des preuves  peu 
près irrécusables de sa participation au complot de la ma- 
chine infernale. Fouché le désignait du moins dans tous ses 
rapports comme l'uu des auteurs de l'attentat du 3 niv6se. 
C'est en vain qu'il s'en est défendu dans les termes de la 
plus vive iudignation ; il n'est pas encore disculpé. A la suile 
«le cet allentat, il se retira dans les environs de Lyon, et y 
vécut dans la plus complïte obscurité jusqu'en 1805. lors, 
grâce  l'intervention deJoséphine, il obtint un sauf-conduit, 
an moyen duquel il arrangea ses affaires, partit pour l'Es- 
pagne, et passa de là en Amérique. 
On dit que, le spectacle imposant de la prospérité des 
ltals-Unis et le peu de sympathie qu'il y rencontra pour ses 
propres opinions refroidirent son fanatisme royaliste, et lui 
tireur apprécier plus sainement la situation de son parti en 
France. Mais cette conjecture est démentie par l'insistance 
qu'il mil / ddterminer Moreau à revenir en Europe 
pour re I,remlre le armes contre sa patrie. Arrivé à Paris en 
juillet 181-, SI. Hyde de lenville n'eut pas besoin de de- 
mander des emplois : ils lui furent offerts à l'instant méme, 
et il n'eut qu'à choisir. Cependant, le retour imprévu de 
l'empereur, sa marche triomphante de l'tic d'Elbe à Paris, 
lui en donnèrentà peine le temps. Il suivit Louis XVIII à 
Gand, puis revint avec lui. Nommé député par la Nièvre, 
il siCes à l'exlrgme droite, et fut un des orateurs les plus 
violents de ce c6té. Le premier, il préconisa le s'slème des 
épurations, se recuira l'adversaire passionné de l'indépen- 
dance des juges, et coulribua de tout son pouvoir à grossir 
les listes de proscription. Le lit re de baron, le grand, cordon 
de la Légion d'Honneur, et bient6t après sa nomination au 
poste de ministre de France aux Ètals-Unis furent la ré- 
compense de son zèle ullra-monarchique. Il resta à Wa- 
shinglon jusqu'en 1822. Ensuite, il revint en France, oi la 
Nièvre l'envoya, pour la secoude fois, à la chambre. Il s'y 
prononça avec force pour l'expulsion de M anu ci, s'ap- 
puyant sur les argnmenlsempruutés aux usages d'AraCique 
et d'Augleterre. En 1825, dans la discussion relative h l'in- 
demnité des émigrés, il proposa que les rentiers de l'État 
' ruinés par la révolution fussent admis à y prendre part. Cetle 
proposition n'eut pas de succès ; mais l'auteur n'en recuillit 
pas-moins une certaine popularité. C'est à celte époque 
qu'il rompit avecVil lèl e. 
Il revenait de son ambassade de Portugal, où il avait étL envoyé un an auparavanl. Les marchés O u v r a r d excitaient 
un grand scandale ; 51. Hyde de Neuville ayant fait à ce sujet 
quelques révélations, jugées inopportunes, et dangereuses, 
on lui retira la pension qu'il louchait depuis 1815, comme 
ancien servileur des Bourbons. Outré de cet aele d'ingra- 
141ude, il se crnt dégagé envers le minislre qui l'avait exé- 
cuff_,, et pendant qu'on disculait la loi sur le jury, la ques- 
lion de la prérogalive royale ayant été engagée incidemment, 
il défendit les principes par lesquels la Charte avait limile cetle 
prerogative, encourut par là plus que Jamais le grave soup 



HYI)E DE NEUVILLE -- HYDRA 
çon de libéralisme, et indisposa virement le ministère contre 
lui. Il n'en continua pas moins à le harceler. Ainsi, ì l'occasion 
«le la fameuse proposition Laboiière, il prit hpartie Villèle, 
auquel il reprocha Iïndécence de ses procédés parlemen- 
taires; et plus tard, Villèle ayant paru décliner toute res- 
ponsabilité dans le licenciement de la ga r d e n a t i o n a I e, 
14. Hyde de Neuville releva cette inconstitutionnalité avec 
aigreur, et acheva ainsi de précipiter la chute de celui 
qui l'avait offensé le premier. Il dut à la part considérable 
qu'il prit à cet événement de faire partie en 1828 du minis- 
tère qui succéda à celui de Vlèle. On le chargea alors du 
portefeuille de la marine. Renversé à son tour par le ,ninis- 
tère Polignac, il prévit que cette révolution miuisterie|le ne 
s'arrëterait pas au changement du cabinet dont il faisait 
partie, et la catastrophe de juillet 1830 confirma ses crain- 
tes. Il disparut depuis complétemen" des affaires, et vécul 
dans la retraite jusqn'en 1839. Alors, soit de son gré, soit 
à son insu, il fut porté comme candidat aux elections géné- 
raies par le club royaliste de la rue D,phot. Il eut quel- 
ques milliers de voix. Cela ne méritait pas la peine qu'on le 
tir.t de son obscurité. Au mois d'octobre 1851, on le vit 
encore se mêler, aux défenseurs de l'ordre troublé à San- 
cerre. 
l',l. Hyde de 1euville a publié : I ° Reponse de Jean Guil- 
laume Hyde de 2Veuville, habitant de Paris, iz toutes les 
calomnies dirigees contre lui, il l'atroce et absurde ac- 
cusation d'avoir 19rUs part à l'attentat du 3 niv6se, avec 
l'expos  de sa conduite politlue ( 1801, in-S a ); ° Éloge 
historique du 9eneral Moreau (tew-York, 181/, in-8°; 
3 ); Les amis de la liberl6 de lapresse: des inenns(quenees 
ninisl-rielles (Paris, 1827, in-°). Charles 
HYDERABAD ou plus exactement HAIDERABAD, 
c'est-à-dire ville de lion. Deux villes de i'Inde orientale 
s'appellent ainsi. L'une donne son nom à un Ëtat vassal de 
la Compagnie anglaise des Ind orientales, et ronnn sous 
16 nom d'État du Nizam d'tlyderabad. Le lerritoire du Nizam 
est situé au centre du plateau de Dekan, et est arro par 
le Kestnah et le Goàavery. Èn raison des démembrements 
que les Anglais lui ont fait subir autrefois, il ne comprend 
pins aujourd'hui qu'une superficie de ,125 myriamètres 
carrés, avec environ onze millions d'habitanls. Il se com- 
pose des provinces d'tlyderabad, Bidet, et de quelques 
parties d'Aurengabad et de Bidschapour, et est gouverné 
par le ni'-am ou subahdar, e'est-à-dire gouverneur, sous 
la suzeraineté britannique. Les  illes les plus importantes 
du pa)-s sont Hyderabad, la czpitale, mai fortifiée et rési- 
dence du nizam, snr le _Mussyo tvce 90,000 habitants, quel- 
ques palais considérables, des moq,ées et des ateliers pour 
le polissage des diamants ; G o lcon de, dans le voisinage 
d'Hyderabad, autrefois capitale du royaume de ce nom ; 
Eider, également capitale d'un ancien royaume et remar- 
quable par de magnifiques mausolêes, des mosquées et des 
palais; Au rengabad , Datlatabad et E llora. 
Dans l'antiqité et le moyen ge, l'histoire de cet État 
se confond tout à tait avec celle du royaume de Dekan, 
auquel appartenaient ses différentes parties. Èn dernier lieu 
elles faisaient partie du royaume de Dekan oui régnait la 
dynastie des Bahmanydy ; plusieurs parties s'en détachèrent 
pour former des Ëtats particuliers, entre autres Golconde. 
Cet État se maintint avec sa dynastie particulière juqu'en 
1704, époque ou le grand-mogoi Aureng-Zeyb i'ineorpora 
à son empire et le comprit dans la ice-royauté des cinq 
États mëridionaux, administrée par un subahdar, ou gou- 
verneur. Vers 1717, ce gouverneur, qui portait le titre de 
lVi'.am-el-.hdl»se rendit indépendant, tout en eon_ervant 
ce titre, et choisit Aurengabad pour résidence. Son sueees. 
seur, Nasir-Ali, régna de 1761 h 1803, transféra sa rési- 
dense à Bdgnag/tr, qui, d'un de ses titres (Hyder-.,llah, 
lion de Dieu), reçut le nom d'Hyderabaà, e! perdit beaucoup 
de pays dans diverses guerres contre H.der-Ali, les llah- 
tartes et les Anglais. A sa mort, il eut pour successeur son 
fils Mirza-;kander-Cimh. Celui-ci mourut en t29, léguant 

235 
le trbne à son plus jeune fils, Nasir-ed-Daulah, qui, 
se maintenir au poutoir contre son frère aihC se somnit à 
la suzeraineté de la Compagnie anglaise des Indes orien- 
tales. 
Les revenus du izam s'Cèvent à près de 16 millions de 
francs, dont plus des trois quarts sont versé à titre de tri- 
but dans les caisses de la Compas-mie des Indes. Celle-ci 
ne contrôle pas seulement les finances du pas, mais tient 
la main à ce que le izam entretienne une armée de 1 à 
15,000 hommes équipés  i'curopéenne, outre un contingent 
de trois régiments d'infanterie et d'un régiment de cavalerie 
fourni a i'armée anglaise, soit disant pour protéger, le Xizam, 
mais dont la solde et l'entretien sont, bien entendu, à la 
charge du protégé. Il est exptes.'sément interdit aussi au_Nizam 
d'enr6let des officiers étrangers à son service ; et dès que 
i'Angleterre est en guerre, il doit laisser occuper ses places 
rodes par des troupes britanniques. Dans c, es derniers temps 
le Nizam s'était montré assez peu exact à solder son tribut, 
et avait laissé s'accumuler une arriéré de 80 lack de roupies; 
de i'h de nombreux dëmëlés entre le vassal et le suzerain, 
qui en 1851 menaçasou protegéde eonlisquer une partie de 
son territoire. Après de nombreuses négociations avec le ge- 
neral Fraser, le débiteur aequitta la moitié de sa dette, et 
conserva ainsi provisoit ment l'intégralité de ses États; 
mais on peut s'attendre à voir l'Angleterre les lui enlever 
au premier jour, sons un prétexte ou un âulre. 
L'autre Hyderabad est lâ capitale de la principauté 
du Sind, conquise en 1818 par les Anglat% et incorporée 
alors à i'lnde britannique. Elle est située sur l'In.lus, à 
l'entrée du delta formë par ce fleuve et dans l'une de ses 
lies ; elle est fortifiée, compte environ 20,000 habitants, fait 
un grand commerce, et possédait autrefois des fabriques 
d'armes importantes. 
HYDEIA-ALI sou verain de 11 y s o r e, dans les Indes 
orieutales, et l'un des princes les plus remarquables quait 
eus l'Asie, né en 1728, ruait fils d'un gouverneur maho- 
reCan de la ïortere.-se de Bangalore, situëe dans iés mon- 
tagnes de Mysore. Initié à Fart de la gJerre par ie Fran- 
.cals, il s'Ceva au rang de géneral de l'armée de M)sore, 
y introduisit les manœuvres ci la discipline européennes, 
et détr6na, en 1759, le radjah de Mysore, auquel il laissa 
son titre foui en le retenant en captivité. Il s'empara en- 
suite de Calicut, Bednor, Onor, Cânanor, et autres États 
voisins, de sorte qu'en 176 ses possessions comprenaient 
une superficie de près de 3,000 nt)riamètrescarrés. Le rad- 
jah étant mort cette même année, il s'emparâ de la sou- 
veraineté loul entière. Il fit deux fois, et avec des succès 
variés, laguerre à la Compagnie anglaise des Indes, et dans 
sa seconde guerre fut très-activement appuyé par les Fran- 
çais. Il se distinguait des autres princes d'Asie par une 
douceur extraordinaire, qui lui concilia l'affectiou générale. 
Le plus grand ordre regnait dans son gouvernement ; il 
enrouragea i'aieulture, les arts et le commerce, ét protégea 
sans distinction toutes les sertes religieuses, du moment 
qu'elles se eonlormaientaux lois. T i p po u-S a i b, son fils, 
fut son successeur. 
IIYDNE, genre de champignons, type de la sous- 
tribu des hydnées. Son principal caractère consiste dans 
les aiguillons libres ou sondés à la base qni hérient sa 
membrane Iructifère ; ces aiguillons portent à leur extré- 
mité les capsules qui renferment les sporules. 
lous ne citerons qu'une espèce, i'hydnum imbr, ieatu»t 
de Linné, connu des Allemands sous le nom de hirsch- 
schwamm. Il est très-commun dans les forêts de pins et de 
sapins de la Thuringe, où on le mange apprêté avec du  i- 
naigre. Il est facile à reconnaitre ì son chapeau couleur 
d'ombre, floconneux, à ses aiguillons d'un gris cendré, et 
ì son pédiselle court et épais. 
Le genre hydne renlerme plusieurs autres espèces éga- 
lement comestibles. 
IIYI)IA HYDRIOTES. En face des rivages de 
l'Arëolide s'élève du sein des eaux, tel qu'une botrv»u- 
0. 



36 
fl,ar volcanique, nn pre et stérile ocber, qui s'étend du 
nord-est au sud-ouest, sur une longueur de 12 kilomètres 
et 4 à peine de largeur; un simple canal de 8 kilomètres 
le sépare du continent : c'est Hydra, la principale tle du 
groupe connu dans l'archipel grec sous le nom de 
rudes occidentales. L'ancienne Grèce la nommait Hydrera, 
mais elle était sans gloire alors : nul dieu de l'Olympe ne 
l'avait choisie pour sa résidence favorite, car elle n'avait 
ni rivière ni ruisseau pour alimenter des bosquels sa- 
crés, ni fontaine ni source qui pal offrir son onde pour 
les purifications des prêtres et des autels. Aucun poëte n'y 
eveilla les Muses; son roc nu repo,,ssait le brillant génie 
de la Grèce païenne. Seulement quelques pEcheurs allaient 
chercl,er un abri contre la tempEte dans les enfoncements 
«le ses c6tes ; ils suspendaient à ses pointes rocheuses leurs 
lilets pour les sécher ou les réparer; et souvent aussi des 
pirates y trouvaient un repaire. Des bannis seuls pouvaient 
en faire leur séjour, et ce furent en effet des exilés qui, vers 
le milieu du quinzième siècle, vinrent y chercher un refuge : 
les Skypetars chrétiens de I' AI b a ni e fuyaient devant l'é- 
tendard de Mahomet, et abandonnaient leurs colonies du 
Péloponnëse; le sol d'Hydra ne leur promettait qu'une 
pier='e pour reposer leurs tttes, et la liberté : ils l'accep- 
tèrent pour patrie. Ils demandèrent  la mer la nourriture 
que la terre leur relusait. D'abord misCables pcheurs, 
ils n'curent que de petites barques ; puis corsaires, puis 
marchands, ils construisirent de grands navires. Stam- 
boul emprunta à Tchzzmlidjah (ainsi la nommaient les 
Turcs) des marins pour la manœuvre de ses flottes; 
la Russie p='évit de bonne heure qu'un jour cet flot ignoré 
serait le premier poste avancé d'où elle battrait en brëche 
l'empire des Osmanfis. Catherine II soudoya la marine 
l,ydriote, et lui donna les premiers canons qui armèrent 
ses vaisseaux. Hyd='a bient0t devint célèbre dans to,te la 
MEditerrance; elle tirait de l'Égypte le blé que son sol ne 
produisait pas; les forts du Parnasse lui envoi'aient les 
pins de ses mlures ; les sapins d'Ol]mpie garnirent les 
flancs de ses vaisseaux ; le coton de l'Argofide forma ses 
blanches voiles ; les vins de l'Aide et de la Messénie égayë- 
.-ent ses banquets et ses ftes. Hydra renouvela les pro- 
diges de l'ancienne Tyr : dans les conflils de la France et 
de la Turquie, quand les marchands de Marseille lutent 
exclus des ports du Levant, Hydra bErita de leur com- 
merce. Les Hydriotes servirent de courtiers entre toutes les 
villes de la Méditerranée : on les rencontrait jusqu'au fond 
de la mer Noire, où ils réalisaient des profits considé- 
rables. L'industrie accumula dans leurs mains d'immenses 
riche«ses ; mais, toujours fidèles à la patrie malgré leurs 
succès, ils revenaient, après des courses vagabondes, ap- 
porter sur leur rocher les trésors ramassés aux terres étran- 
gëres. Cette patrie se glorifia de ses nobles enfants; elle 
it s'élever au bord de son rivage la plus belle des cités 
«le l'Orient. 
La ville d'Hydra, dont la population peut aller de 12 
15,000 mes, est btie en amphitfiétre; ses maisons, blan- 
of,es, étincellent aux rayons du soleil et l'annoncent de loin 
aux marins ; ses rues sont propres et toutes pavées ; elle a 
des quais soigneusement entretenus, des églises oi l'or et 
le marbre témoignent de la ferveur religieuse des habitants, 
de édifices pnblics consacrés au commerce; ses maisons, 
construiles en pierre, sont belles, quelques-unes même méri- 
teraient le titre de palais ; elles sont dëcorées avec luxe 
et réunissent toutes les jouissances des Orientaux, de f-alcl,es 
galeries de marbre avec des murs et des plafonds peints à 
fresque, des bains d'étuve, de magnifiques salles dallées en 
marbre, et des terrasses où les femmes se réunissent le soir. 
Le noyau de Pile perdit un peu de son preté native; il 
se couvrit d'une légère couche de terre végétale, et en quel- 
q,es endroits se para d'une gracieuse verdure. Le climat 
d'Hydra serait délicieux si la terre était plus léconde ; son 
ciel et son soleil sont admirables: c'et le ciel, c'est le 
leil de la Grèce dans toute leur splendeur. Les maladies y 

HYDRA -- HYDRACHNES 
sont rares; l'air y est pur, les brises de la mer le rafrai- 
chissent pendant les chaudes journées de l'AtC l'lgiver y a 
quelques jours de pluie, mais jamais de frimats. Aussi le 
riche sang de l'Albanie n'a point dégénéré à Hydra : les 
driotes sont beaux parmi les plus beaux hommes de la 
Grèce, ils portent encore un caractère de fierté sauvage qui 
rappelle leur origine; leurs ¢ichesses ne les ont point eflé- 
minés; la jeunesse, exerc aux rudes fatigues de la mer, 
devient svelte et vigoureuse ; la sobriété est en honneur 
parmi eux, et les voluptes qui énervent sont flétries : ils 
se marient de bonne heure. Une ardente jalousie veille sur 
la sainteté des mariages, la morale publique la soutient, la 
lemme adultère ne serait accueillie nulle part; une impla- 
cable vengeance poursuivrait l'insulte faite  l'honneur du 
mari. Du reste, au milieu de ces hommes énergiques, la 
femme n'occupe qu'un degré assez bas de lëchelle sociale : 
ainsi que dans tout l'Orient, elle vit cach et récluse; un 
voile impénétrable la dérobe aux yeux étrangers : peu de 
voyageurs ont eu l'occasion de voir des femmes Hydriotes. 
Dans la Grèce avilie par l'esclavage, Hydra avait con- 
serré sa liberté, et développait les généreuses qualités de 
ses enfants. Aussi, quand éclata la guerre de l'indépendance, 
apparurent-ils dans tous les combats comme une race hé- 
roïque ; la marine militaire des Turcs succomba sous les 
coups de ses hardis marins, dont quelques-uns renouvelè- 
rent les exploits des flibustiers : montés sur de Iégers br0- 
lots, ils s'attachaient à la suite d'escadres entières, les ral- 
liaient audacieusement pendant la nuit, accrochaient le 
premier navire arrivé, fat-il un vaisseau de ligne, l'embra- 
saient, et le laissaient se consumer et disparaltre sous les 
eaux : aussi leur nom seul était la terreur des Turcs. Des 
institutions renouvelëes de la république de Sparte entrete- 
naient leur génie guerrier; nulle constitution écrite ne 
traçait les devoirs, mais la mémoire des anciens et des 
sages du peuple maintenait sacrées les antiques tradilions. 
La musique et la poésie curent aussi leur génie parmi eux ; 
à la mer, pendant les magnifiques nuits de l'Archipel, tous 
les matelots, réunis sur le pont, chantaient en cboeur la patrie 
et la gloire; l'amour ne leur inspirait que rarement des 
chants, et quand la brise cessait d'enfler les voiles, penchés 
sur leurs avirons, et répétant une cadence simple et vive, 
ils levaient et laissaient tomber leurs rames avec les accords. 
Ainsi grandit rapidement celte république, et pendant 
quelq=,e temps sa population s'éleva à 40,000 mes. La 
protection de la Russie la défendait contre les crainle. trop 
fondées du sullan ; elle encourageait les entreprises mari- 
rimes de ses conseils et de son or, car elle comptait sur les 
raatelots h)'driotes comme sur les auxiliaire de sa future 
conquête. Toute la science du peuple avait trait à la marine; 
la moitié de la génération ava:t couru sur mer, et grand 
nombre d'entre les Hydriotes étaient habiles dans la construc- 
tion navale. Leurs vaisseaux étaient les plus rapides qui par 
courussent la Méditerranée; même aujourd'bui les écoles 
publiques de commerce et de navigation sont celles que 
fi'éq«,ente la jeunesse d'Hydra. Ilais les sociétés passent 
comme les individus, la splendeur d'Hydra s'efface; nos 
yeux ont vu son opulence etl'apogée de sa puissance, ils sont 
Iémoins aujourd'hui de son déclin. L'ile ne compte plus guëre 
aujourd'hui que 20,000 habitants. La régénération de la 
Grèce s'est opérée sous les auspices d'Bydra, etla Grèce rége- 
nérée ne lui a pas pardonnéle tort de n'offrir à la base de ses 
rochers aucun port pour abriter les vaisseaux; une autre 
tic a pris sa place : là est maintenant le foyer du o»mmerce 
des spéculatlons maritimes de la baute industrie de tout 
le Levant ; là affluent les étrangers, les marchands, les ri- 
clesses. Cette nouvelle tic qui domine tant' d'intérêts, c'est 
Syra. On a d'Antonios lliaulis, fils d'André Miauiis, l'un 
des béros de la guerre de l'indépendance et Hydriote, 
Mémoire en grec.moderne sur l'tic d'ltydra (Municb, 1832). 
Théogëne P^c, capitaine de vaisseau. 
HYDP.CllNF_,S (de top, eau, et Zwq, fil), genre 
d'araclmides tracbéennes, famille des hydrachnclles, établ,- 



HYDRACHNES -- HYDRE 
par l1uller, qui y faisait entrer toutes les acarides de La- 
treille. Ce sont de petites arachnides qui vivent dans les 
eaux tranquiiles, où elles abondent au printemps. Les plus 
grandes ont six miilimètres de long; leur corps est en gé- 
riCai ovale et globuleux. Leur lkte et leur corselet sont con- 
fondus avec le ventre. Les hydrachnes se rapprochent des 
araignées par le nombre des pattes, et des tiques par le 
nombre des yeux et par les antennes. Elles sont carnassières, 
et se nourrissent d'animaux peu visibles h l'oeil. Le corps 
des nies, qui sont plus petits, se retrécit en arrière sous 
forme de queue,  l'extrémité de laquelle sont les organes 
sexueis, tandis que la femeUe les a sous le ventre. Les hy- 
drachnes n'ont d'abord que six pattes; dans leur état par- 
fait, elles en ont huit, avec lesquelles elles nagent rapide- 
ment et se meuvent continuellement. Leurs métamorphoses 
et leurs amours ont été observées avec soin par lIuller et 
-par Dugis. L. LAcnET. 
HYDRACIDE. Voyez AcmE. 
IIYDRALGUES. Voyez HImoenvTEs. 
HY DRABG Y RE (de wp, eau, et p,tto, argent) était 
autrefois le nom scientifique du vif argent, métal auquel la 
science actuelle a imposé la dénomination de m e r c u r e. 
HYDRARGYBO-PNEUMATIQUE (Cuve). Voye'- 
HYDRARGYBOSE, terme scientifique, dérivé d:hy- 
dr argy re, dont se sont servis quelques praticiens pour 
dsigner les frictions mercurielles en usage dans le traite- 
ment de« maladies syphilitiques. 
HYDBABTHBE (de ïwt, eau, et pOpov, articula- 
tion). Voyez H'unoplslE. 
HYDRATE ( de i, eau), combinaison chimique, in- 
time et permanente de l'e a u avec uneautre substance. Proust 
est le premier qui ait appelé l'attention des chimistes sur cet 
ordre de fait.. Jusque alors, on n'avait considéré l'eau dans 
les divers corps qui en contiennent que comme substance 
madéficianle ou imbibante. Il s'en faut cependant de beau- 
coup que le r61e de l'eau soit aussi borné. On sait aujour- 
d'hui qu'elle fait partie inlégrante d'un grand nombre de 
composés, dont quelques-uns mme ne pourraient exister 
sans sa présence, et qui jamais ne deviennent absolument 
anhydres qu'en éprouvant une décomposition indépendante 
de l'expulsion du fluide aqueux, quoiqu'elle en soit la con- 
séquence immédiate. Cette nouvelle vue a rendu facilement 
eplicables une multitude de phénomènes restés jusque alors 
tort obscurs, et dont on ne pouvait se rendre compte. 
Le nombre des hydrates est très-considérable, et principa- 
lement parmi les oxydes métalliques : lorsqu'on en chasse 
l'eau» on aperçoit dans ces corps des propriétés toutes nou- 
velles. Par exemple, on connaissait de temps immémorial 
une rouille de ter d'un jaune très-riche, et  l'analyse chi- 
mique, on ne pouvait assigner des proportions respectives 
d'oxygëne et de fer qui dusent faire admettre un degré 
d'oxydation du métal différent de celui du peroxyde rouge. 
Dans le fait, ce n'est que ce mme oxyde rouge à l'état hy- 
draté. Cette substance abandonne son eau de composition 
à une assez basse température. D'autres oxydes la retien- 
nent avec beaucoup plus d'opiniatreté : I' a I u m i n e (oxyde 
d'aluminium), par exemple, qui ne perd les dernières 
portions de l'eau de combinaison qu'à une température 
excédant 27 ° du pyromètre de Wedgwood. 
Pouz père. 
HYDP, AULIQUE, partie pratique de l'h y d r o d y n a- 
inique, ayant pour objet la construction des machines 
propres à cond uire, à élever les eaux, telles que p o m p e s, 
turbines, siphons, etc., et aussi de toutes celles où 
l'eau est employée comme force motrice, les moulins à 
eau, les presses h ydra u liques, etc. Ce mot est dérivédu 
grec 5p, et «)..:, flle, tuyau. « La raison de cette ét)'- 
nologie, dit D'Alembert, est que l'hydraulique citez les 
anciens n'était autre chose que la science qui enseignait  
construire des jeux d'orgue, et que dans la première ori- 
gine des orgues, où l'on n'avait pas encore l'invention 

d'appliquer des soufflets, o se servait d'une chute d'eau 
pour y faire entrer le vent et les faire sonner. » 
Quelques auteurs donnent le nom d'hydraulique à toute 
la partie de la mécanique qui traite des fluides. Ainsi com- 
prise, l'hyd raulique se d ivise en h y d r o s t a t i q u e et h y d r o- 
d y n a m iq u e. Cette de nière branche de la science devient 
ainsi une subdivision de l'hydraulique, dont elle n'Cait, 
d'après notre première alCnition, qu'une application. 
Le mot hydraulique s'emploie aussi adjectivement. Par 
exemple, on donne le nom d'architecture hydraulique à 
cette partie de l'architecture qui s'occupe spécialement des 
constructions destinées à la conduite des eaux, des aque- 
ducs, etc. Les machines hydraufiues sont celles où l'eau 
joue le r61e de moteur. 
HYDIAULIQUE (Bélier). Voyez BÉLII BDnAu - 
LIQE. 
HYDRAULIQUE (Presse). Voyez PnssE nnWU- 
LIQCE. 
HYDRE ( Histoire aturelle), genre de polypes san 
polypiers, dont on n'a encore bien oenstaté l'existence que 
dans les eaux douces. L'organisation des hydres est des plus 
simples, et c'est un des premiers d%-rés par le»quels l'uni- 
maille s'élève au-dessus des plantes : le tissu de leur corps 
est homogëne, gélatineux et contractile; il renferme une 
cavité qu'on considère comme un organe de digestion; un 
seul orifice y donne accès, et cette ouverture ou bouche est 
munie de bras ou tentacules detinés à saisir des substance 
nutritives, principaliment des haïs, petite espèce de ver». 
Le volume de ces animaux égale à peine celui d'un grain de 
biW: aussi une loupe est-elle nécessaire pour en acquérir 
une image précise. Dans quelques espèces, les bras ont 
cependant une longueur de plusieurs centimètres. Avec un 
organisme I,omogène, et où il est difficile, sinin impossible, 
de démontrer un système neweux, les hydres sont cepen- 
dant douées d'une sensibilité qu'on reconnalt en les voyant 
se diiigir vers une lumière vive et saisir la proie dont elles 
se nourrisseur; le tact est leur seul sens, et il leur suffit. 
Elles montrent en mSme temps que les membrane» mu- 
qucuses qui revStent intérieurement les animaux les plus 
parfaits ne different pas essentiellement de leur envelolpe 
extérieure, la peau. Qu'on retourne une hydre comme un 
doigt de gant, ainsi que Trembley l'a remarqué, elle n'ru 
digère pas moins, quoique son estomac ait éb: r,mversé. L 
reproduction des hydres est encore le sujet d'une observa- 
tion curieuse : on ne distingue en elles aucun organe sexuel : 
elles se propagent par bouture, comme les plantes. Coupez 
un de ieur bourgeons, il ne lardera pas  crotre et à de- 
venir parfait. On pense aussi qu'elles se reproduisent par 
des œUfS, sorte de graine. 
Ainsi donc voii un animal qui nous montre que les 
fonctions ne sont pas absolument dévolues/ des organe« 
spéciaux, comme Carus en a fait la remarqueen Aliemague. 
La respiration peut s'effectuer sans poumons ; la nutrition, 
l'accroissement et la crétion sans circulation de fluide», 
la génération sans distinction de sexe, la sensibilité sans 
nerfs proprement dits, le mouvement sans muscles. Cette 
grande et belle vue nous est pourtant offerte par un ére à 
peine perceptible à nos yeux. Pour le trouver, il iaut Il 
cbhrcheh dans lhs ruisseanx, les étangs et les mural», no- 
tamment sur la face intérieure des lentilles d'eau. En met- 
tant une pincée de ces plantes dan un vase de verre rempli 
d'eau, et éclairé virement sur un de ses points, soit par le 
soleil, soit par une bouge, on verra les hydres quitter leur 
point d'appui pour se diriger vers le point lumineux. 
D r CHARBONNIER. 
HYDRE (Astronomie), constellation australe, s'étendant 
au-dessus de celles du Lion, dela Vierge et de la Ba- 
l a n c e. Elle offre une étoile remarquable parmi les 2 qui la 
compont. : c'est le cœur de l'hgdre. Les anciens, qui 
voyaient en elle l'hydre de Lerne, la dignaient sou 
les noms de serpens aquaticus , asina coluber, echida ; 
on la nomme aussi vipère, et souvent hgdrefemdle, pour 



238 
la distinguer d'une des nouvelles constellations anstrales 
de Bayer, i'hydre mdle. Cette dernière, située entre la 
Dorade et le Toucan, est trop voisine du pole austral pour 
parallre jamais au-dessus de notre horizon. 
HYDBE DE LEBNE. Cet animal fabuleux, né de Ty- 
phon et d'Echidné, habilait le marais de Lerne, dans le Pé. 
Ioponnèse, et dévastait toute la contrée voisine. Suivant Dio- 
dote, il avait cent ttes; Simonide ne lui en doune que cin- 
quante, d'autres mme seulement sept, dont celle du milieu 
était immortelle. Uneantre tradition lui prète aussi des ailes. 
Quand Hercule reçut d'Eu risthée la mission de tuer 
ce monstre, ils'associa dans ce but avec lolaos; et, à l'aide de 
ses flèches, il contraignit i'hydre à sortir de sa taniêre. Aus- 
sit6t le héros, élreignant le monstre de ses bras, se mit en de- 
voir de lui trancher ses ttes. Mais, ì sa grande surprise, il 
n'en avait pas plus t6t coupé une qu'il en •osait repousser 
une autre. En outre, Junon envoya au secours de l'hsdre 
une énorme écrevisse, qui blesssa Hercule au talon. Mais 
Hercule réussit à tuer i'revisse, et ordonna alors ì Iolaos 
d'incendier une forèt qui se trouvait près de là. Quand ils 
avaient COUl une des ttes de i'hydre, ils promenaient aus- 
sit6t sur la place saignante des tisons enflammés, qui empë- 
choient la tte de renaitre. Hercule parvint de la sorte à cou- 
l,er toutes les ttes du monstre l'une aprës l'autre, mdme 
celle qui était immortelle, qu'il ensevelit dans la terre en la 
recouvrant d'un immense rocher. En mme temps il eut 
soin de tremper ses flches dans le sang vénimeux de 
rhydre. 
HYDRIATRIE (de top, eau, et ioEpeoE, guérison), 
art d'employer médicalement l'eau froide à l'lutCieur, et 
les effusions 'd'eau froide ì rextdrieur. Ce mot notveau ne 
parait avoir été inventé que par ceux qui désiraient se sous- 
traire au patronage et à l'ignorant empirisme de Vincent 
P r i e s s n i t z, chef de i'ecole hydroth¢rapiquc de G r oe- 
fenberg (vocez HnoTux¢). D  Isidore BOUION. 
HYDRIOTES. Vote: HynltA. 
HYDROCANTHARE (de 6op, eau, et xv0«po, sea- 
rabe), genre d'insectes coléoptères pentamères, dans lequel 
Latreille rangeait tous ses c a r n a s s i e rs aquatiques. Ce 
genre, réduit depuis par plusieurs entomologistes, est très- 
• oisin du genre d t t i 9 u e. Les hydrocanthares se tiennent 
de préférence dans les eaux stagnantes, à la surface des- 
quelles on les voit remonter de temps ì autre pour respirer. 
Leurs larves ne le cèdent en rien fi celles des dytiques pour 
la voracité. L'insecte parfait possède sous ses élylres des 
ailes bien développées, dont il se sert pour se transporter 
d'un étang à un autre ; son vol est lourd et bourdonuant 
comme celui du hanneton. 
HYDROCÈLE. Ce mot, dérivé du grec ( ïôop, eau, et 
),, tumeur), devrait désigner toute tumeur aqueuse, et ëtre 
synonyme d'h y d r o p i s i e; mais il ne s'applique qu'à une 
sorte d'hydropisie, celle du scrotum. 
On distingue plusieurs variétés d'hydrocèle : sous le rap- 
port de leur cause, on distingue i'hydrocèle par infiltration 
«le i'bydrocèle par épanchement; sous le rapport de leur 
siCe, celle du cordon de celle de la tunique vaginale. La 
plus commune de ces maladies est rhydrocèle par épanche- 
ment dans la tunique vaginale. Elle consiste en un amas de 
sérosité qui se produit et s'accumule dans l'enveloppe des 
testicules. Les causes de cette malaàie sont à peu près in- 
connues : in contusion des bourses peut, il est vrai, donner 
lieu ì i'hydrocèle, mais c'est là une de ses causes les plus 
rares. On reconnatt l'hydrocèle aux sympt6mes suivants : 
un des c6tés du scrotum (rarement les deux à la fois) grossit 
peu ì peu de bas en haut, et forme bient6t une tumeur 
pydforme, indolente, sans changement de couleur à la peau. 
En examinant cette tumeur, on y distingue la fluctuation 
d'un fiquide, et en la plaçant entre l'oeil et la lumière d'une 
ioue on voit qu'elle est transparente. Ce dernier sigue 
est cara¢téristique de rhydrocèle, et sert à la distinguer 
dautres maladies qui lui ressemblent au premier aspect, 
comme la s a rcocèle et plusieurs espëces de hcrnies. L'lff- 

HYDRE -- HYDROCÉPHALE 
drocèle est une maladie peu grave, et en géaéral facile 
guérir. Quelquefois elle se termine d'etle-mme ou  l'aide 
de quelques fopiques résohlih ; dans ce cas, la sérosité est 
enlevée par les vaisseaux absorbants, et les parties atta- 
ques reprennent leur volume naturel. Mais plus souvent 
la tumeur, abandounée à eile-mme, anmente peu à peu 
de volume, et devient quelquefois énorme. Le malade alors 
vout en ëtre débarrassé. Deux sortes de traitements peu- 
vent tro employés : le palliatif, qui consiste à faire dispa- 
raitre i'épanchement de sérosité, mais sans l'empcher de 
se reproduire, et le traitement radical, qui guérit enmpiéle- 
ment la maladie. Dans le traitement pailiatil, on se borne 
 vider I tumeur au moyen d'incisions ou de la ponction. 
Pour la cure radicale, on a proposé et emplo)é différents 
moyens : l'incision, i'excision, la eautérisation, le séton, etc. 
Le procédd employé presque exclusivement aujourd'hui 
consiste à ider d'abord la tumeur au moyen d'une ponc- 
tion ; on y injecte ensuite, à l'aide d'une seringue, un liquide 
irritant, tel que du vin chaud, que l'on fait ressortir presque 
aussitSt. Cette injection détermine l'inflammation adhésive 
J de la tunique vaginale; sa cavité se trouve oblitérée, et tout 
nouvel épauchement devient impossPole. On a quelquefois 
obtenu la guerison radicale sans opération; soit au moyen 
i de repiques fi-oids et résolulifs, comme la glace, l'eau vgelo- 
minérale; soit'a l'aidede flictions mercurielles, ou mdme par 
i appheatton d un-véswatolre sur la tumeur. Mas, pour obtenir 
ce résultat, il faut que la maladie soit récente et la tumeur 
peu volumineuse. "II.-P. 
HYDROCÉPIIALE, dérivé du grec ï¢op, eau, et 
xçoE),, tète ; mot à mot, eau dans la téte, c'est-ì-dire hy- 
dropisie de la tte. Cette maladie a son siege dans i'inté- 
rieur du crìne et dans la cavité de la membrane séreuse 
appelée a r a c h n o ï d e. On divise i'hydrocéphale en interze 
et externe : la première espèce se snbdivise en aiguê et en 
chronique. L'hydrocéphale aiguë ou ri 
de l'enlance a le plus ordinairement une marche très-rapide, 
d:,ns laquelle néanmoins on admet trois periodes. Les symp- 
t6mes principaux de cette grave maladie des enfants sont 
1  période : de la céphalale, des vomissements, des alterna- 
tives de rougeur et de ptdeur de la face, de la tristesse, de la 
somnolence, une fièvre vive, etc.; 2epériode : une l¢nteu,-re- 
marquable du pouls, des plainte, des cris d'un caractère 
particulier, une dilatation ou une oscillation des pupilles; des 
monvemeuts convulsifs des seux, de la face, du délire, 
et des exacerbations fréquentes; 3  période : del'assoupisse- 
ment, de la paralysie, des convulsions, une abolition pins 
ou moins complète des sens, i'insensibilité et la mort. Cette 
maladie, que l'on parvient rarement à guérir, enlève sou- 
vent les enfants en quelques jours ; elle peut néanmoins 
passer h l'Cat chronique, et n'entralner la mort que dans 
l'espace de plusieurs semaines. Il y a en outre une seconde 
espèce d'hydrocéphale chronique (la seconde espèce dont 
nous avons parlé ), qui commence dans les premiers mois 
de la vie, et souvent avec la naissance : celle-ci, iente dans 
son developpement, opère peu à peu au moyen de l'accu- 
mulation de la sérosité épanchée, la distension des cavités 
cérébrales, i'amincissement de la substance du cerveau, la 
disjonction des sutures du crtne, ainsi que l'augmentation 
de volume de cette boite osseuse, d'où une atteinte pro- 
fonde portée ì l'exercice des sens, des facultés intellectuel- 
les, des mouvements, et mdme des fonctions assimilatrices; 
désordres qui sont pour l'ordinaire irrémédiables, et snivis 
d'une mort plus ou moins éloignée. 
Quant ì rhSdrocéphale qu'on appele externe, ce n'est 
autre chose qu'une infiltration du tissu cellulaire sous-eu- 
tané du cràne et de la face. 
Les hydrocéphales sont classées parmi les h y d r o p i s i e s 
des membranes séreuses ; néanmoins, celle qu'on appelle 
interne, vulgairement connue sous le nom de fièvre cr. 
brale', a été considérée par divers auteurs comme une ir.- 
flammation très-aiguë de l'aracbnoïde ou du corvean, qui se 
termine par un épanchement de sérosité dans les entricules 



AA • ,.,,,-,,'"-P HALE 
cérébraux. Après la mort des individus atteint ,]'hydrocé- 
phale, on trouve des quantités diverses de sérosité ípan- 
chées dans les ventricules corCeaux, le quatrième ventricule, 
et même le canal rachidien, différents degrís d'inflammation 
dans le cerveau et sa membrane séreuse, quelquefois mme 
des tubercules. Dans certains cas, avant la naissance, le foe- 
tus affecté d'une bydrocíphale congéniale présente un cer- 
veau transformé en une poche membraneuse, qu'on est obligé 
de percer avec un instrument, piquant pour faciliter l'ac- 
couchement. L'hdrocéphale est une maladie propre ì l'en- 
fance, qui se développe teC-rarement chez les adolescents 
et les adultes : il est impossible dans certaines circonstan- 
ces de la peCenir, mais non de la guérir, une fois qu'elle- 
est formée. 
Les indications curatives qu'elle réclame sont de deux 
sortes : l'une propre ì attaquer la cause du mal, l'autre 
destinée à provoquer ou bien à aider l'absorption de la sé- 
rosité épanchée dans le crâne. A la première se rattache 
• l'action des remèdes antiphloistiques, réfrigérants, díri- 
vatifs, purgatffs, Cétiques, etc.; à la seconde, les mïdi- 
caments capables de produire une activer¢'sorption, comme 
les diurétiques, les hydragogues, les stimulants, modifica- 
teurs du système lymphatique, et en particulier les prépa- 
rations mercurielles connues sous les noms d'onguent 
»zcrcuriel (en frictions), et de calornel ou protochlorure de 
mercure {à Iïnh:rienr). D r 
HYDROCÉRAME (du grec 5top, eau, et xoE«, terre 
à potier). Voye: ALCARAZA$. 
• HYDROCHLORArrE. Voge:, 
H'YDROCHLORE. Vo?le: 
HY1TROCHLOIIQUE (Acide). Voile: CnLomnm- 
çÇF./Acide). 
IIYlï)ROEYANIQUE (AcideS). Voile'- 
(Acide). 
HYDBODYNAMIQUE (de 5çtop, eau, et 
force', puissance), partie de la d y n a mi q u e qui traite d u 
mouvement des fluides. Son cadre est donc plus vaste que 
ne le lerait supposer Pétymolngie que nous venons de don- 
ner. Les lois de i'éco u lement des I i q uide s, la théorie 
desajutages, le mouvement de l'eau dans les canaux et 
dans les rivières, une foule d'autres questions importantes, 
sont du domaine de l'hydrodnamique proprement dite; car 
on a proposé avec juste raison de distinguer sous le nom 
d'arorntrie la partie relative aux fluides aírifonaes. La 
compressi bilité dont jouissent ì un si fiaut deé ces 
derniers établit pour eux des lois particulières, qui ne s'ap- 
pliquent pas aux liquide. 
HYDROFUGE (Enduits), du ec 5p, eau, et 
ce qui chas.e, .fait fifir. Voye: E_»u. 
HYDP, OGENE { de 6,top, eau, et -i'«to, j'engendre ), 
corps simple, qui, comme son nom le rappelle, entre dans 
la composition de l'eau. Les anciens chimistes lui don* 
riaient le noln d'air nflornrnable, qui avait i'inconvénient de 
pouvoir le faire confondre avec d'autres gaz combustibles. 
L'hdrogène est le pins léger des gaz que l'on connaisse 
actuellement; sous le même volume, il lse prés de qua- 
torze lois et doe!e moins que t'air atmospbérique : c'est sur 
cette propriété qu'est fondée la construction des ballons. 
It est invisible, sans odeur quand il est pur; mais Iorsqn'on 
le prépare en grand, par exemple pour remplir des aros- 
rats, il contient mie substance étrangère qui lui donne 
une odeur extrêmement désagréable, dont on pourrait le 
priver en le faisant passer dans de l'alcool et de la potasse; 
mais ce n'est jamais que pour des expériences de labora- 
toire que l'on a besoin de l'obtenir ì rétat de pureté parfaite. 
Quand on approche un corps enflammé de l'orifice d'un 
vase contenant de l'hydrogène, celui-ci brie avec une 
flamme bleue légère, et qui éclaire très-peu. L'appareil ì 
l'aide duquel on fait habituellement cette expériencea reçu 
le nom de larnpephi[osophiçue. 11 se ternfine par un tube 
effilé, parce que si ou laissait quelques instaat_ l'orifice du 
• ae ouvert, et qu'il fut tourné vers le haut. i'aouroche du 

-- HYDROGENE 
corps enflammé donnerait lieu à une détonation assez xio- 
lente,  cause du mélange d'air qui se serait opcré ; et : i 
on laissait un peu trop longtemps le vase ouvert dans cette 
position, tout le gaz se disperserait, à cause de sa iégè- 
reté. On peut faire même, en raison de cette propœiëté, une 
expérience curieuse avec ce gaz. Si on en remplit uneeprou- 
vette, et que, la tenant l'ouverture en bas, on en approche 
une bougie allumée, il se produira une Ière flamme à l'o- 
rifice du vase; mais en plongeant la bougie dans l'tutCeur 
du gaz, elle s'Ceindra, pour se rallumer en passant à l'o- 
rifice. Cet effet est dU ì la propriété qu'a l'hydrogène de 
brûler parle contact de l'air atmosphérique, avec lequel il 
se mêle facilement à l'orifice du vase qui le contient, tandis 
que les corps en combustion ne peuvent brtler dans ce gaz. 
Si on mélange de l'hdrogèneavec la moitié de son va- 
iume d'ox ygèn e, l'approche d'une bougie produit une dé- 
tonation violente et dangereuœe, si on l'opère sans les pré- 
cautious convenahles. Quand on emploie de très-petites 
quantités du mélange, on peut tenir dans la main le vase ou il 
est renfermé sansavoir rien àcraindre ; mais si on voulait se 
servir d'un quart de litre seulement, il faudrait envelopper 
avec un linge en plusieurs doubles le vase contenant le 
mélange, et n'approcher la bougie de l'orifice qu'en la pla- 
çant dans une direction opposée ì celle où l'on se trouve ; 
très-fréquemment le vase est brisé en un grand nombre e 
fragments, qui seraient lancés violemment/ de grande 
distances s'ils n'étaient retenus par le linge. Si on souffle 
«]ans de l'eau de savon renfermée dans un vase en métal 
une certaine quantité de ce mëlange, et qu'on en approche 
une bougie ou une«llumette, il se fait une detonation extrê- 
mement forte, mais qui est sans aucun danger. Un ballon 
rempli du même mélange lancé dans l'air, et enflammé par 
une mèche produit un effet très-curieux et qui n'offre non 
plus aucun danger. Si on portait dans le n:$me mélange un 
fragment de mousse de platine, qu'on le lit passer dans m 
tube rouge, traverser par une étincelle électrique, ou qu'on 
le comprimer fortement dans un briquet pneumatique, le 
mhne effet serait produit. Le pistolet deVolta et le cnon 
lectrgue , que l'on voit employer quelquefois dans les ca- 
binets de physique, ne sont autre choe que des reservoirs 
enmétal dans lesquels on fait détoner un mélange d'hxdro- 
gène et d'oxygëne par le moyen d'une étincelle électrique 
( roge E_c-raclxr ). En opérant dans des appareils cn- 
venables, où l'hydrogène se trouve [.rùlé sans jamais oe 
mler ì l'oxygène, on recueille de l'eau, que ces raz for- 
-ment en s'uuisant, et c'est ainsique Lavoisiir a prouve 
la composition de l'eau. 
Quand on dirige dans l'air un jet de gaz hydrogène sur 
nn morceau de platine en mousse ou en éponge, le platine 
rougit, et le jet «le gaz ne tarde pas à s'enflammer : réponge 
de platine condense le ga hydrogène et facilite sa combi- 
naison avec l'oxygène de l'air. On a cherché ì mettre à 
profit cette propriété pour la construction d'un bruiner qui 
pot procurer immédiatement de la lumière; pour cela on 
faiit tomber sur un fraaent de platine en mous,se un 
courant d'hydrogène produit par l'action du zinc sur l'acide 
sulfurique. 5lais i'éponge de platine qui est réstée quelque 
temps exposée à l'air perd, en absorlant de l'humidité, la 
propriété de produire l'inflammation de l'hydrogène, et ne 
la reprend qu'aprs avoir été chauffée au rouge. Cet incoa- 
vénient a lait abandonner l'usage de cet instrument. 1] en 
existe un autre, que son prix élevé peut seul empêcher 
d'employer plus fréquemment,et dont l'action est aussi 
fondée sur i'inflammabilité de l'hydrogène (voile: Bal- 
: ). 
Dans les laboratoires on prépare l'hydrogène en faisant 
réagir de l'acide sulfurique sur des hmes de zinc platées 
dans de l'eau; le zinc s'empare de roxygène de l'eau; il se 
forme de l'oxyde de zinc, qui.se combine avec l'acide sulfu- 
rique; rhydrogène se dégae et est recueilli dans une éprou- 
vette. Ce gaz s'obtient encoreen faisant passer dela vapeur 
d'eau à travers un tube de porcelaine chauffë zu r«,uge et 



240 HYDI0GÈNE 
renfermant plusieurs faisceaux de fil de [er; le métal s'unit 
à l'oxygène, et l'hydrogène est mis en liberté. 
GAVLT»£P, nE CLAVnI¥. 
L'hydrogène peut s'unir avec tous les métalloides excepté 
le bore, et avec plusieur reCaux. Passons en revue les 
principales des nombreuses combinaisons binaires dans les- 
quelles il entre. 
L'h/drogène forme avec l'ox?gèuedeuxcomposé$: le pro- 
toxyde d'hydrogène, ou eau, et le bioxyde d'hydrogène 
ou eau oxyg#n#e. Ce dernier corps est un liquide peu stable, 
découvert en 1818 par M. Thnard. Incolore, inodore, il 
blanchit la langue en y produisant des picotements très- 
vil, sans cependant détruire l'épiderme. Il décolore le 
curcuma, et détruit en général, à la longue, les teintares 
végétales. Il coule dans l'eau comme du sirop, et s'y dissout 
aisément. 
L'hydrogène forme avec le soufre, le fit»or, le chlore, le 
brme, l'iode, lesélénium, le tellure, les hydracides auxquels 
les chimistes ont donné les nom. d'acides s u l [ h y d r  ri « e, 
Jl«orh9dr[qtte, c h t o r h 9 d r i 9 u e, bromh9dri9tte, iodh 
drique, slenh9drtgw, telhrh9àri9ue. Le cyan ogè n e, 
quoque n'étant pas un corps simple, se comportant comme 
un métallolde, on peut ajouter à cette liste l'cde 
hydrige ou prussi q ne. 
Le urètres composés binaires de l'hydrogène sont des corps 
neutres. Ce sont un sulfure, un soeloeniure, un a-.ott«re 
(voyer A.,dOLtQV£, deux phosphures, un grand nombre 
de crbures, etc. 
Le perlhosphttre d'hydrogène ou hydrogène phosphoré 
est un gaz incolore et d'une odeur alliacée. Au contact de 
l'air, il s'enflamme spontanément. C'est h son dégagement 
que l'on attribue les flammes connues sous les noms de 
fCx fÙllets. 
Mais c'est surtout la classe des carbures d'hydrogène qui 
mérite l'attention du chimiste. Les produits de la distilla- 
tion des matières animales en renferment toujours, et ils 
sont en proportions tellement variées que l'huile de colza 
en a donné neuf diffét'ent  M. 1%raday. Plusieurs de ces 
composés, comme le ça'- h!làrogène trotocarbonë, le 
pétrole, le caoutchouc, la tr#benthine, etc., se 
produisent dans la nature. Le g: hydrogène protocarbon 
ou g--- des marais e.t ainsi nommé parce qu'il existe dans 
la vase des marais ; pourle recueillir, il sulfit de renverser 
atl-dessus d'eaux stagnantes «les flacons remplis d'eau : 
si on agite la vase, le gaz se rend dans ces flacons en bulles 
nombreuses. Il est incolore, insipide, inodore. Mêlé à l'air 
atmophérique, ildonnenaissance au melange e.xplosif connu 
des mineurs sous le nom de gris o. Le 9al hydrogène 
b[carboné est beaucoup plus rare dans la nature. On le pré- 
pare dans les laboratoires en chauï[ant une partie d'alcool 
avec quatre parties d'acide sulfurique. Ce gaz inodore, sans 
saveur, doué d'une légère odeur empyreumatique, brille 
avec une belle flamme iaune tirant sur le blanc. On l'appelle 
encore ça'. oléant, parce que soumis à l'action du chlore 
1 donne naissance ì un liquide huileux conm sous le nom 
de ligueur des llollo_ndis, etqui est ln chlorure d'hdro. 
gène hicarboné. Mlé avec d'autres carbures d'hydrogène, 
le gaz hsdrogène bicarboné forme le gaz de l'éclairage; 
combiné avec l'eau, il donne lieu à l'alcool; il forme la 
base des divers ét h e fs; etc. 
Beaucoup de earbares d'hydrogène sont isomères : ainsi, 
parmi les bulles essentielles, qui sont de vrais carbures 
d'hydrogène, on peut citer l'hile de rose, Pessence de 
térébenthine, l'essence de citron et celle de valériane, 
qui ont toute ]our formule C H . 
HYD[tOGRAHIlà (de p, eau, et ,poE, je d- 
cris), partie théorique de l'art de naviguer. L'hydrographie 
se compose de l'ensemble de toutes les connaissances néces- 
saires  la ha v i g a t i o n hauturière, connaissances dont 
les principes sont du domaine de l'astronomie, des mathé- 
matiques et de la physique. Prenant à chacune de ces 
ciences ce qui lui est nécessaire pour ses applications 

HYD1 
spéciales, elle/'orme de cs divers élémen un tout con- 
courant  un méme but. Étant donné un btiment en 
mer, déterminer d'une manière oertaine sa position sur 
globe; diriger un btiment dans la route { royez Loxo- 
nno) qu'il doit suivre pour se rendre d'un point à un 
autre; telles sont les deux faces de l'important pt-ohlème 
que doit se poser et résoudre à chaque instant le marin isold 
sur un océan aus bornes et sans poiut de repère. En lais- 
sant de cté tout ce qui ne touche qu'à la manoeu re » à la 
partie matéielle, la solution de ce problème peut tre con- 
sidérée comme le principal objet de l'hydrographie. 
ons avons ndiqué ailleurs la méthode die e s 
 l'aide de laquelle on peut effeoEuer quelques courtes tra- 
versées dans des parages n'olfrant pas de dangers sérieux. 
l',lais à combien d'erreurs s'exposerait le marin qui se fierait 
à ces grossiers procédés! Ces erreurs ont leurs sources dans 
le manque de fixité du bateau de loch, dans le relèvement 
imparfait du rumb de vent, dans l'existence de courants 
dont la vitesse et la direction sont mal connues, dans mille 
causes encore, qui chaque jour peuvent ajouter à l'incer- 
titude de la position du htimcnt. L'estime, avec ses res- 
seurces bol'nées, est donc insuffisante. Il faut la suppléer, 
et c'est ce que fait I'hydrographie en ne tirant ses consë- 
quences que des lois constantes qui régissent la marche 
des corps célestes. 
Il faut que le marin puisse connaitre à chaque instant la 
latitude et la longitude du point qu'occupeson na- 
vire. Si l'on pouvait construire un chronomètre d'une pré- 
cision absolue, il est évident qu'un tel instrument donnant 
exactement l'heure d'un méridien connu, on n'aurait plus 
qu'h déterminer par des observations astronomiques l'heure 
du bord pour conclure de la diiférence de ces heures la 
longitude du lieu. Mais à quelque degré de perfection que 
soient parvenues nos montres marines, la prudence exige 
que le marin se mette par de fréquentes vérifications à 
l'abri des crrellrS auxquelles pourrait entralner une 
aveugle confiance dans un si ffAle instrument. Il s'assurera 
de l'exactitude des inoications qu'il lui fournit, par des cal- 
culs basés, par exemple, sur l'observation de la distance 
angulaire de la lune à une planète ou à une-étoile remar- 
qoable. La marche de la lune est assez rapide pour que sa 
distance à un astre quelconque varie d'une manière appré- 
ciable dans un temps très-court. Ces distances sont calcu- 
lCs ..i l'avance dans la Connaissance des Temps et dans les 
diverses Ëpb#mdrides nautiques pour des époques très-rap- 
prochées, et des métbodes d'interpolation font con- 
naitre les époques intermédiaires avec une approximation 
suftisante. L'observateur pourra donc trouver en quelque 
point qu'il se trouve l'heure du premier méridien, et en 
conclure la longitude de ci point. 
Une construction gdométrique nous fait voir qu'une ad- 
dition on une soustraction suffit dans tous les cas pour 
déduire la latitude de la hauteur méridienne du soleil, 
corrigée de ses causes d'erreur (erreur instrumentale d é- 
p ress ton de l'horizon, r é racti on, pa fa Il axe), et de 
la déclinaison de cet astre. Cette dernière donnée est 
encore une de celles qui se trouvent dans la Connaissance 
des Temps. Il ne reste donc qu'à diriger convenablement un 
sextant pour lire sur le limbe de cet instrument la bau- 
teur méridienne apparente du soleil, et le problëme est ré- 
solu. Mais le soleil n'est pas toujours visible au moment de 
son passage au méridien, et d'ailleurs on peut avoir besoin 
de déterminer la latitude à un autre instant. L'hydrogra- 
phie fournit alors d'autres méthodes; elle détermine la la- 
titude par deux hauteurs du soleil et par l'intervalle de 
temps compris entre leurs observations; si le soleil n'est 
pas sur l'horizon, elle recourt aux hauteurs de la polaire ou 
d'un autre corps céleste ; enfin, qu'il s'agisse d'un problëme 
de latitude ou de longitude, elle met à cOntl-ibvtion tous les 
pllénomènes astronomiques pour qu'il soit toujours possible 
au navigateur de retrouver sa route. 
Dans les voyages au long cours, il est d'une importance 



ajeure que le commandement du bfiment  trouve entr 
es mains,d'un hoe ver dans la oennaissanoe d pro- 
dés,de Photographie  le lut de tous en épend. Aussi 
n'aecorde4n le brevet de capiine au long cours qu'aux 
marins qui, ayan suffisamment vigué pour offr de 
iees garantes de leur srucfion praque, iustifient en 
outoe e leurs étud hdrographqu en subant 
ns ur la scienoe qui nnusooeupe et s annex. Pour 
préparer à cette rrièoe, la Franoe poe trente quatre 
éoeles d'bydrogrape, dont les principai sont oefl de 
Bordu, Maroeille, Saint-o, Le Havre, Nantes, Brut, 
Lorient, Toulon, Bocbefort, Cberhourg, etc. Le grade de 
profse à c écol (où l'eeignement est gratuit ) n'est 
lui-mme conféré qu'après un oenoeu et d examens dont 
le proamme embrasse tou les oennaissan utiles 
l'hydrogrape. C t là que se forment la plupa de nos 
pies au long cours et de nos maltres au grand oeboe. 
La crUon de c écoles, si utiles à notre arine mar- 
chande, est due à Colhe ( ordonnanoe de 1681 ). Quant à 
la marine de l'Ëtat, n ét-major t fourni par l'École 
navale, à luelle nous devons de posséder l& marine 
liire la plus éclair du monde civilisé. 
Le mot hçdrographie sert asi à dsier cette partie 
de la géograpbie qui traite de la strihution desux 
à la surface de la terre (vçe« Bsm ). E. Mux. 
HYDBOMACIE ( du grec p, u, et 
divination ), aliénation au moyen de l'eau. On la pratiquait 
de bien d manières. Elle recevait le nom d'hydotoscopie 
d elle résulit de l'inspection de la pluie, et celui de 
pçntie d eUe se raidit avec de l'u.de routine. En 
géneral, elle consisit à tirer des présages des diverses 
ipressions, des changements, flux et reflux, couleurs, 
imes que l'u présentait. Voulait-on connaltre l'ét 
t de la santé d'un malade, on plongit un moirdans 
une fonne, et l'on s'en servait pour ! prédictions, ou hien 
la personne qui cousulit Paven tenait suspendu dans 
l'térieur d'un ve rempli d'u un annu attaclié par 
 fil à !' de s doigt. Elle faisait nne courte prière 
aux dieux ; et si la chose qu'elle oenjecturait devait sa réa- 
fioer, l'anneau frappait de iui-mme un certain nombre de 
fois les hords du race. On recourut encore assez commu- 
nément à un auoee genre d'Creuves : On jetait trois petites 
çierres ns I'u : si elles se mouvaient en rond dans leur 
chute, c'éit un signe de houheur. Au eu d'u, on se r- 
rait aussi quelquefo d'huile, ou de vin, et l'on remplait 
encore les pierres par de petits coins d'or ou d'argent. L'in- 
vention de i'bydromande est attbuée par les uns a uma 
Pompilius, par d'autres à Joseph. Ceux.ci oe fondent sur 
ce passage de l'Ecriture : « La coupe e vo avez dérobée 
estcelle-là mme dont mon male se e pour les augures. » 
Saint Augustin fait mention de l'hydromancie. 
HYDOMEL (de p, eau, et O,, miel). On donne 
ce nom ì deux préparations distindes, qu'il faut se garder 
de confondre. L'hydmel simple e prépare en raient 
dioudoe dans seize paries d'u tiède une pavie de miel 
dépuré : il en résulte e basson assez fade, dont les pro- 
pétés apétives ont lait un agent thérapeutique utile dans 
les laoe des enfant. L'hydromel vineux, le 
des Greoe, le merum d« tins, possède de bien plus pré- 
cieuses qualités : on le prépare en faisant ssoudre à chaud 
une partie demiel dans trois parties d'u, et en prolongent 
Pébullition jusqu'à oe que la diolution it sez épaisse 
pour faire flotter nn œuf (c'est ainsi que s'expment les 
formaires). La solution, refroidie et filtre h travers une 
mine, est abandonnée, ds un v ouve, à la fermen- 
iation, qui s'établit au ut de,elles jour% et i se pro- 
longe pendant deux ou rois mois : la fermentation deter- 
mine la séparation d'une quantité considërable de fè, 
qui  précipitent, et produit e cene quantité d'alcool 
qm te en solution : il en résulte un liqde transparent, 
plus ou moins coloré, qui possède plusies d qualités 
des vins d'pae. 
. vt L oeaS. -- x. XL 

-- HYDROPHOBIE 24t 
S'il faut ajouter foi à Fautorité de Pline, c'est à Aristée, 
roi des Arcadiens et fils du Soleil, que l'humanité doit la 
découverte d'une liqueur dont Pusage parait avoir été très- 
généralement répandu parmi les peuples de l'antiquité. Les 
Celtihères ( Diodore de Sicile ), les Taulantiens, peuples de 
l'lllyrie (Aristote), la Grèce, l'antique Égypte (Diodore, 
Pline, Galien ), buvaient largement le divin aélicraton, et le 
douzième livre de Columelle l'agrononome est en grande 
partie concré  l'exposition des procédés dont les Bomaius 
faisaient usage dans la préparationde cette boisson favorite. 
Aujourd'hui encore l'usage de Phydromel est géuéralement 
répandu en Pologne et en Russie, et les Abyssiniens en font 
une grande consommation. BELFIELD-LErÈ,E. 
HYDI:tOMETE, HYDBOMÊTBIE ( de ï.p, eau, 
et I[qov, mesure ). Le mot hydromdtrie a été créé vers la 
fin du dix-septième siècle, pour désigner l'art de mesurer le 
poids, la densité, la vitesse, enfin les diverses proprietés 
des liquides, et particulièrement des grandes masses d'eau ; 
ainsi, en 169. l'université de Bologne fondait une chaire 
d'hydromtrie en faveur de Guglielmini. ]lais ce mot n'est 
plus guère usité ; du reste, l'ohjet auquel il s'applique est 
mal défini, et les éléments de l'hydrometrie rentrent pour 
la plupart dans le domaine de l'h,drostatique et de 
i'hydrodynamique. 
Cependant, le nom d'hydromètre, donn d'abord aux 
instruments dont se servait l'h,drométrie, a été conservé 
pour désigner ceux de ces instruments specialcment destinés 
à mesurer la vitesse des cou rants d'eau. Les uns sont de 
simples flotteurs dont on ohserve la marche avec soin. 
D'autres offrent des applications plus ou moins ingénieuses 
des principes relatifs au mouvement des liquides : tels saut 
le volant à aubes, le pendule hydromdtrque , le tube de 
Fitot, les balances hydrornétriques, le tachomètre, le 
moulinet hydromtrique de Waltmann, etc. 
HYDROPARATATES ( de 6F, eau, et «,-xr,.t, 
j'offre, je présente ). Voye: EtCITITES. 
HYI)POPATHIE ( de p, eau, et oE0o;, douleur). 
C'est le nom donné d'abord à l'hydrothrapie ou 
thode curative au moyen de l'eau froide, dont P r i e s s n i t z 
fut le généralisateur. Les médecins qui emploieut cette mé- 
tbode sont sonvent nommés hydropathes ou h!/droth- 
rapeutes. 
ilYDIOPÉBICAI:tDE, hydropisie du péricarde. 
VOle'- H'DB.OPlSL 
llYDI:tOPHOBIE (de 6mp, eau, et o, crainte), 
aversion, horreur de l'eau ou des liquides. Comme l'horreur 
de l'eau et en général des liquide» est un des sympt6mes les 
plus caractéristiques de la rage, on donne très-souvent à 
cette maladie le nom d'hydrophobie, dénomination qui, du 
reste, est plus technique, quoique moins exacte. L'aversion 
pour l'eau se manifeste néanmoins dans d'autres maladies 
que la rage : telles sont certaines affections nerveuses, quel- 
ques fièvres de mauvais caractère, et mme des plilegmasies; 
mais elle ne constitue jamais, ainsi que l'ont avancé des 
auteurs peu exact.s, une sorte de rage spontanée, à laquelle 
l'homme succomherait eu peu de jours, comme il arrive ì 
celui qui a été mordu par un chien enragé. E lisant avec 
attention les observations d"nydrophohie spontanée essen- 
tielle rapportCs dans les anciens recueils de faits, on voit 
que l'horreur de [eau est toujours accompagnée d'autres ac- 
cidents, indices d'une maladie primitive. Par conséquent, 
l'hydropbohie est ici un s,mpt6me et non nne maladie es- 
sentielle qu'on peut faire entrer dans un cadre nosologique. 
Parlons maintenant du sujet principal de cet article, de 
l'hydrophobie rabienne on rabique, vulgairement appeiëe 
rage , l'une des maladies les plusterrihles dont l'espèce lin- 
mairie puisse tre attaquée. La cause prochaine aussi bien 
que la nature intime de cette affection sont inconnues : on 
sait seulement qu'elle est produite par la morsure des 
maux enragés, et particulièrement du chien, le plus expoeé 
de tous à l'hydrophobie spontanée. On a fait intervenir un 
virus déposé dans la plaie faile par les dents de l'anima!, et 
3 



94 
auquel la iive ek es mucouites de la bollche serçent de vé- 
hicule; mais ce virus n'est qu'une entité, dot l'existence n'est 
nullement démontrée. La cireur n'ivflne pas, comme on 
pourrait le croire, " sur te déveoppemen' de Phydrophobie 
spontanée: cm l'observe dans toutes les saisons ; des recher- 
• hes exactes t prouvé que les mois de mars, d'avril, de mai 
et de ptenbre foraaissaieat le plus d'exemples d'hydro- 
phobie slrtanev. Aucnn chien n'en est absolumeut exempt, 
on la rencontre sous toutes les laiitudes; il y a pourtant 
certaines cotrdes, comme l'Egy, pie, Cla.vpre, la S)rie, qui 
en sont iwcsque entièrement préservdes. Les loups, les chiens, 
les rcnards et les chats sont les a_-_imaux les plus exposé à 
la rage spontanée, et ceux qui la commmliqueut à l'homme ; 
les berbivores, comme le cheval, le bœuf, ¢teviennent rare- 
ment hydrophobes, et ne peuvent comm,mquer cette terri- 
ble maladie; elle ne parait pas susceptible de se transmet- 
tre de l'homme  son semblable : seulement la terre,tf ins- 
pirée par certains hydrophobes a quelquefois produit une 
aversion passagère pour l'eau {h.drophobie s)mptomatique). 
La rage se reconnait, chez les diverses espèces d enre 
canis, aux phénomènessuivant: l'animal est triste, recherche 
la solitude, refuse les aliments et les boissons; il s'agite, 
abandonne la maison, la tte bas et la queue tralnante, 
laP4_'ue pendante, et la b«uche p|eine d'ecume ; sa marche 
vagabon, le annonce qu'il n'a plus de repos : la soif le devore, 
et «'epedant il s'eloigne e frcmissant de tonte espèce de 
liquide. La lurezr qui l'aite par moment te porte à 
jter sur tout ce qu'il rencontre ; la resistance ne fait que 
l'irriter. L'aboiement du chieu enragé est remplacé par un 
affren,c murmure rauque, qui effraye mêmeson.espèce. Après 
avoir erré pendant quatre on cinq jour.% en proie aux con- 
vulsions, l'animal meurt après quelques redoublement.« rap- 
prochés de son mal. Chez les autres mammitères, l'hydro»- 
phobie presente / peu près les mèmes caractères, 
quelques particnlarités, dues h l'organisation des espèces. 
L'incubation de la rage communiquée est longue; elle ne se 
développe d'ordinaire chez l'homme et les oeimaux que cinq 
ou sixsemaines aprèsla orsure. Toutefois, sans parier d'ex- 
replions peu nombreuses cilCs par les auteurs, diverses cau- 
ses peu vent hter le développement de l'hydrophobie, comme 
une chaleur ecessixe, des a[lections murales, la terreur cau- 
s.e par la mort d'un hydrophobe, un excës de réme, etc. 
Chez l'homme, la rage communiquée s'annonce par des 
douleurs dans la parlie mordue, une pesanteur de tète, 
de l'insomnie, des rèves effrayants, une exaltation momen- 
tanée ou un affaissement notable des facultés mentales; l'in- 
,tufCude s'empare du malade, ses yeux deviennent brillatls, 
.vitent la lumière, etc. Bient6t arrive le terrible frison 
,lrophobique, caus par la vue d'un liquide, de corps brillants, 
et même la simple agitation de l'air. Approche-t-on de la 
bouche du malade un vase rempli de liquide, il frissonne, 
repousse le vase avec effroi ; la gorge et la peittine éprou- 
vert t un serrement douloureux et spasmodique; les yeux s'ani- 
ment, le corps est agité de sanglots, de suffocations et de 
mouçements convu[sifs. Cette horreur des liquides n'est pas 
,ontinuelle : elle cesse, et permet au malade de boire, pour 
evenir bient6t après; nne soif inextinguible, une ardeur 
br01ante, tourmenteur le malheureux hydrophobe, 
invincible horreur éloigne des boissons ; une bave Aruineuse 
mouille la Iuche dans les moments d'agitation. L'homme 
atteint d'bdrophobie éprouve rarement le désir de mordre, 
et il n'y a aucnn danger à l'approcher; il est mme plus 
sensible et pins affectueux que dans l'Cut de santé. L'exal- 
tatiou cerébrale ne fait qu'augmeuter. L'insomnie favorise 
des hallucinations ¢ontinuelles. La vue et l'audition devien- 
nent d'une susceptibilité extrtme, le malade recherche l'obs- 
curité. Vers la lin de la maladie, sa voix devient rauque, le 
délire s'empare de lui ; la mort arrive ordinairement le cin- 
quième, le sixième ou le huitième joui de lïnv asion, an milieu 
des spas,nes de la poitrine et des mouvements convulsiïs. 
L'intensi de l'b)-dropbobie n'est point du tout en raison 
de l'Cendue des morsures ni tic leur nombre, ni de la forc 

HYDROPHO 
des animaux qui l'inoculent à l'homme; on sait seulement 
que les blessures faites / travers les vêtements sont moins 
dangereuses que celles qui sont faites sur la peau nue, et 
qu'elles ne causent souvent aucun accident. Les faits anthen. 
tiques observés jnsqu' ce jour provent que l'hydrophobie 
rabienne est incurable. Le besoin d'expliquer la contagion 
et la marche rapide d'une si terrible maladie a fait supposer 
un principe déltère, uo virus susceptible de la propager. 
Si l'exislence de ce virus n'est pas pruuvee, il est encore bien 
moins certain qu'une imagination effra]ée par le sort luneste 
des animaux cnragés puisse produire l'hydrophobie chez 
ceux qui ont été mordus; des enfants morts/ la suited'ac- 
cidents iJareils ont sccombé à fa rage sans avoir eu la moin- 
dre crainte du sort qui les menaçait. 
La propriêté contagieuse du virus l3drophobique cesse 
avec la vie de l'animal, et l'on peut dire, morte la béte, mort 
le enin. On a ouvert impunément un grand nombre d'hy- 
dropbobes sans que jamais l'opérateur ait eu à redouter 
Iïne¢ulation du virus. On s'accorde généralement à placer 
le siége de ce virus, quel qu'il soit, dans la salive de l'ai- 
mal malade, ainsi que dans le mucus guttural et broucbi- 
que qui s'y troue mèlí : effectivement, es fluides deposé.ç 
dans les mors;rres produisent constamment l'hydrophobie, 
tandis que les mmes morsures sont inoffensives quand le 
vètements absorbent l'Cuine salivaire de l'animal. 11 est 
donc bien entendu qu'il faut que la peall soit entamée pour 
que Iïnoculatiun ait lieu; l'application de la salive de 
drophobe sur le derme intact n'est snivie d'ancun accident. 
Aprës la mort des bydrophobes, on trouve fort souvent 
des traces d'inflammation sur la membrane muqueuse des 
voies aériennes, du pbarynx et de l'oesophage : cette 
brune est recouverte d'une mucosité écumeuse; les pou- 
mons sont tantôt emphysématenx, tantOt rouges et injectés; 
les autres altérations notées par les auteurs dans l'encéphale 
sont moins constantes que cel|e dot il ient d'ètre question; 
ni les unes ni les autres ne sont d'un grand secours pour 
déterminer la nature de la maladie, car elles peuvent ètre 
le résultat de l'ëtat spasmodique et couvnl.ifdes organes de 
la déglutition et de la respiration. Quant aux lésious encé- 
phaliques, que l'on ne peut pas expliquer de la même ma- 
nière, elles ont paru stfasantes a oertain» médecins pour 
placer le sidge de l'h)drophobie dans le cerveau. 
On emploie contre l'hydrophobie deux sortes de traite- 
ments, l'un préservatif, Fantre curatif: le premier est le 
seul ellicace, on ne gurit point la rage Iorsqu'elle est con- 
fifreC. Le principal, pour ne pas dire l'unique agent de la 
prophylactique, dans la maladie qui nous occupe, est la catw 
térisation des plates; on peut la pratiquer par le feu ou par 
les médicaments appelés caustiues; les anciens préféraient 
généralement le feu, auquel ils supposaient une force d'actiun 
spéciale sur le virus hydrophobique; mais de nos jours on 
péfëre le caustique liquide et diffnsible. Au reste, quel que 
soit le moyen qu'on emploie, il faut agit" profondément et 
scarifier ou charbonner sans distinction toutes les parties. 
dans lesquelles ont peuCfWles dents de l'animal malade : 
pour cela, il est souvent besoin d'y revenir à plusieurs re- 
prises, d'inciser les paxties qui out été cautérisées les pre- 
ties, etc. l,es circonstances dans lesquelles se trouve le 
médecin l'obligent souvent  se servir du premier caustique 
qui lui tombe sous la main ; mais quand il peut choisir, il 
emploie le plus ordinairement le chlo liydrate d'antimoine li. 
quide, appele vulgairement beurre d'antitnoine. On doit 
faire suppurer longtemps les plaies résultant de la cautéri- 
sation, et en général jusqu'au delà du quarantième jour. 
L'ablation des parties mordues, quand elle peut avoir lieu, 
est aussi nn moyen très-efficace pour préserver de l'hydro- 
phobie. La cautérisatioo peut tre pratiquée avec suc¢ës 
aux diverses époques qui précèdent l'invasion du mal; mais 
il convient d' recourir te pins i6t possible. On a eu recours 
à un grand nombre de moyens enratifs contre l'hydrophobie 
conlirmée; on a rapporté des exemples de guérison, mais 
['authenticitê de ces cures n'a jamais été parfaitement 



I'DROPHOBIE 
tatée; dans beaucoup de cas, on a eu affaire à de Amples 
hydrophobie» symptomatiques provenant d'affections mu- 
rales profondes; dans d'autres, on a commis des erreurs de 
diagnoic plus graves encore, attribuant à des affections 
érébrales une oriine hydr.ophobique. D r Bmcnvr,v. 
HYDPOPHYLLACEES  famille de plantes instituée 
par Rob. Brown, et composée des genees hydrophylltm, 
lhacelia, memophila, etc., dont les fruits sont capsulai- 
res, earactërisée par un albumen caflHaçneux considérable 
et par des feuilles ¢omposées et profondément lobées. Le 
genre hydrophyll«m, qui est le type de cette famille, se 
compose d'espèces de 1lantes américaiues très-rustiques 
croissant dans tons les terrains, particulièrement dans les 
lieux frais et ombragés, e/ elles produisent de belles ronfles 
très-remarquable» au premierprintemps. On en connalt deux 
espèee. L. 
HYDROPHYTES (de rp, eau, et çr6v, plante). 
Nous avons, dans divers endroits de nos ouvrages, pro- 
posé de consacrer ce nom pour désigner les plantes agames 
u cr.ptogames qui se développent ou croissent dans les 
eaux, et qui forment une vaste classe dans le règne végé- 
rai. Elles y ocenpent les limites de Fanimalité par leurs rap- 
ports naturels avec les polypiers flexibles et autres sortes 
de zoophytes ou de lithophytes. Lamonroux proposa pour 
les dësigner le nom de thalassiophytes, c'est-à-dire plantes 
de mer : beaucoup ne vivent que dans l'eau douce; d'au- 
tres savants les ont apl,el6es des hydralçues (algues d'eau ) ; 
mais, quoi qu'en puissent dire encore certains botanistes 
routiuiers, ce ne sont pas des algues. Les hydrophytes, que 
le vulgaire nomme varechs ou varecs, et 9ornons ou 9ua- 
mon», étaient compris par Linné dans sa 24* classe, et ré- 
partis en quatre enres, fucus, ulva, conferva et bys 
sus. On en comptait alors moins de deux cents espèces; 
nous en positions maintenant au moins mille dans nos 
cofleetions, formant un grand nombre de tertres. Ces végé- 
taux, bien peCarés, et quand ou est parvenu à les 
pouiller de leur tendance hgrométrique, sont, parl'élégance 
de leurs formes, la manière dont plusieurs s'appliquent au 
papier, et la variété de leurs nuances, souvent fort brillan- 
tes, l'ornement des Iærbiers, où naère on daignait à peine 
les admettre. Leur étude offre le plus grand intérêt, car 
en eux fut l'origine de toute végëtation, et le patron en 
quelque sorte sur lequel la nature s'essaya à l'eufantement 
des plantes terrestres ou aéroph)oEes, qui devaient parer les 
campagnes après qu'dles seraient sorties dn sein des mers. 
En effet, répétons-le souvent, car la vérit6 doit tre sou- 
vent répétée pour triompher de l'erreur, il y eut des époques, 
et probablement diverses durées de temps, oti notre globe 
était environné d'eaux, comme il l'est maintenant par Pat- 
mosphère. Ces eaux purent arier detempérature, ëtre bouil- 
lante», chaudes, tiède», peut-être glaciale», selon les causes 
qui en avaient determiné la préeipitation. Elles furent peut- 
être mm¢ pénétrées, dans leurs diverses apparitions, de 
principes qui ne sont plus da les n6tres, et par le moyen 
desquels les së4iments antérieurs des diverses créations pré- 
rédentes firent broyés, bouilli», dissous, comhinés et pré- 
«ipil de nouveau pour former ces couches terrestres où 
des esprits s)atemalique, théogonistes d'nne nouvelle école, 
veulent compter les années de ce monde, dans l'existence 
duquel les années, les siècles, les millénaiÆes même, ne 
sot pas ce qu'une seconde est dans la durbe d'une monta- 
fine. Des oulèvements, qe, dans un chapitre de notre 
l-oage en quatre iles des mers d'Afri9ue , nous avons 
soutenu avoir été la cause productrice des ries et des conti- 
nents, s'opéraient par l'ellet d'un travail intérieur; et la 
nature se préparait ainsi, an sein d'un océan sans bornes, à 
revoir la terre de sa verdoyante Farure, en formant rudi- 
mentairement toutes les parties dont se devaient composer 
les végétaux plus parfa:ts, ou du moins plus compli,lnéS , de 
oette terre à venir. Ainsi, les fdament. trach«!iformes, les 
t'abc» ekfisonnés, les celhdes, le xaseules, l'Corse et les 
aouehes du bois, les di.positions foliacées, les teintes suave» 

HYDROPHYTES 243 
et la consiçtance des pétales de fleurs, les urnes des nous- 
ses, les capsules fructil-eres, toutes ces choses étaient 
sayées et reconnue» bonnes dans les h?droph)tes quand les 
aérophytes parurent, et c'est une merveilleuse occupation 
que de les rechercher avec le secours du microsoepe, quand 
le commun des betanistes ne soupçonne pas que l'h/dro- 
phytologie démontre l'existence de tous les organes 
taux dans leur état préparatoire. 
Cependant, par une singularité digne de remarque, 
la distribution géographique, ou plut6t hydroapbique, des 
plantes de l'humide élément est soumise à des lois as»et 
dilfrentes de celles qui président à la géographie botanique 
de la partie exondée du globe. Ainsi, les reCes b)dro- 
plfftes se retrouvent à peu près sur tout le pourtour de l'u- 
nivers, dans les nmes zone» climatologiques; ils different 
moins d'un p6e à l'autre que les plantes de la terre, soit 
à cause de la moins grande différence qui règne dans la 
température moyenne des eaux, soit que les causes de dis- 
sémination ou de créations analogues y soient plus actives. 
On doit annoter encore que tandis qu'on voit le règne vé- 
gétal s'amoindrir en nombre d'espèces et en proportions de 
grandeur, de l'équateur aux regions glaciale», les hydroph)- 
tes, au contraire, moins varié» et plus petits sous la ligne 
et les tropiques, se multiplient et acquièrent leur plus 
grande taille spécifique à mesure qu'on s'élève vers le Nord 
ou qu'on s'abaisse.vers le Sud. 
Les h?drophytes croissent au fond des eaux, comme les 
herbes et les arbres à la surface de la terre ; ils y forment 
des espèces de prairies, des bocage», ou lutine des forêts 
capables de résister an choc violent des vagues déchaines, 
comme les arbres puissants résistent aux fougueux aquilons. 
Les ruches les plus battues des flots en sont ordinairement 
les plus fournies. Les Cendue» sablonneuse» o aseuses 
de la mer y sont, au contraire, comme nos dunes ou nos 
landes arides, les moins productives, et souvent elles en 
restent totalement dépouillées. Sur quelques rives, le flot re- 
jette au rivage une si grande quantité d'hsdroph.xtes arra- 
chés des ablmes qu'on a imaginé de les utiliser, soit pour 
les engrais de»champs, soit pour l'incinération et la produc- 
tion de la sou de. Il est des espêces dont les riverains se 
uourrissent, et qui fournissent une gelée d'un usage fort 
agréable et sain. C'est avec une de ces espèces comestible» 
que l'hirondelle salanue compose son nid, si recherché 
des Chinois amateurs de houne chère. 
Les principales lamilles d'hydrophytes sont les fueacées, 
les dietyotées, les spongodiées, les floridées, les gélidées, 
les ulvacées, les céramiaires, les conIervées, les arthrodiées, 
les chaodinées, etc. ous en recommandons l'ctude et la 
recherche aux voyageurs, d'autant mieux que rien n'est 
plus facile que de les bien conserver et d'en rapporter de 
maifiques collections sans beaucoup de peine. Il suffit 
d'anaeher ces plantes à marée basse des lieux où elles 
croissent, ayant soin, autant que possible, qu'elles conser- 
vent leurs racines, leurs tiges et tous leurs rame, aux, afin de 
les avoir bien complètes. Quand elles crois»eut trop pro- 
fondément pour que l'abaissement des eaux permette de 
les atteindre, on se sert de crochets ou de dragues pour les 
obtenir, et Iorsqu'on y est réduit on ramasse au rivage les 
écbantillons les moins maltraités qu'y jette la haute marée. 
On lave la récolte dans l'eau douce, à deux ou trois re- 
prises, pour la dépouiller de la mucosité saline qui s'oppo- 
serait à sa conservation, et on la fait ensuite sécher sur un 
plancher, ou mne au soleil, s'il n'est pas trop ardent, 
comme on ferait d'une reolte de foin Ayant ensuite le 
soin d'attacher h chaque espèce un petit papier ou l'on in- 
dique quelle était sa couleur à l'état frais et son habitat 
positil, on fait du tout un ou plusieurs paquets environnés 
de papier gris. Ains5 rcoltés, en quelque partie du globe 
que ce soit, les hydroph?tes, remouillés avec précaution par 
un hotaniste expérimenté, reprennent l'apparence de la vie 
on peut alors les étudier, les déerire, les figurer, le.« Cen- 
dre a loisir pour en orner l'herbier. L'habitude enseigne plus 



44 HYbROPHYTE$ -- 
tard à disposer élégamment sur des carrés de beau papier 
blanc collé, mis dans une cuvette pleine d'eau douce, les 
nsp,ces capillaires ou dé|lentes qu'on laisse flotter et re- 
prendre leur port naturel ; après quoi, retirant avec pré- 
caution le papier du fond du vase, ou ridant celui-ci avec 
une seringue, on a la plante gracieusement collée et ne per- 
dant pas ses vives couleurs ; on les conserve ainsi, pour peu 
iu'on apporte quelque soin dans la manière de les mettre 
en presse et d'opérer leur dessiccation. 
Depuis un demi-siècle environ, l'Cude des hydrophytes 
obtient une certaine vogue; on en a puhlié un assez grand 
nombre d'ouvrages à planches, dont quelques-uns sont 
dignes d'entrer dans les bibliothëques de luxe. Gmelin et 
Esper, en Allemagne; les auteurs de la Flore Danoise, sur- 
tout l'exact, modeste et savant Lynhie à Copenhague; Tut- 
ner, Stakhouse et Gréville, dans la Grande-Bretagne; enfin 
l'auteur de cet article, qui peignit de sa propre main, dans 
le xoyage de La Coguille, un grand nombre d'hdophtes, 
sont ceux qui en ont le plus fignr, et dont les ourages 
sont devenus indispensables ,à quiconque veut s'occuper 
d'hydrophytologie. 5tertens,à Brème, Lamouroux et Chauvin 
en Normandie, Bertoloni en Italie, Clemente et Cabrera en 
Espagne, Aard en Suëde, Hornemann et Hoffmann-Bang 
en Danenark, sont les auteurs qui contribuèrent le plus 
répandre et à éclairer la connaissance des hydropl0"tes, 
qui cependant est encore loin d'être portée au point d'a- 
aucement où s'est élevée la phanérogamie. 
BORV DE SAINr-¥,NCENT, de l'Académie des Sciences. 
IIYDBOPIIYTOLOGIE C'est la description des 
b),drophytes. 
IIYDROPISIE. Les fonctions opposces de l'ab s o r p- 
i i o n et de t' e x h a I a t i o n ne peuvent cesser d'ètre dans un 
équilibre parfait sans qu'il en résulte des inconvënients 
plus ou moins graves. Si, par exemple, l'absorption est 
exagérée, beaucoup de matériaux destinés  être expulsés, 
étant retenus, altrreront plus ou moins les autres fluides 
et ensuite les solides. Si, au contraire, l'exhalation est ou- 
tfC, beaucoup de materiaux propres " la réparation jour- 
nalière du corps seront entrainés au dehors; s'ils sont éva- 
cués par la peau et par les surfaces muqueuss, la perte 
s'effectue manifestement par des sueurs, par des selles 
plus ou moins abondantes, " l'exception cependant de quel- 
ques cavits, comme les sinus maxillaires. Si l'équilibre est 
rompu sur des membranes séreuses qui forment des sacs 
sans ouverture, le ilnide, exhalé en quantité anormale, 
panche dans ces cavitës, et lorme des collections de séro- 
sit$ qui, n'aant pas d'issue, s'ae¢roicnt graduellement. 
Ces collections ont été appelëes hydropisie, parce que 
la rosité a t'apparence de l'eau { ¢op, eau, .p, aspect, 
apparence ). 
Les membranes sreuses tant nombreuses, les siéges 
des hydropisies sont multipliës, et portent des noms divers. 
Ainsi, le cerveau a?ant dans sesannexes un tissu de ce genre, 
il s'. forme des épanchements sreux, qu'on nomme h//d r o- 
c # p h a l e s ou hgdropisies de tdte. Dans la poitrine ou ri 
fax, des sacs sëreux sont la source del'h9àrothorax ou de 
l'h9dropéricarde. La membrane tant très-vaste dans le 
ventre, elle est le siCe d'une collection appelée asci te, 
et qui et quelqu!ois norme. L'hydropisie des surfaces ar- 
ticulaires se nomme h9drarthre. Des cavitës quipeuvent îe 
former accidentellement dans toute partie de l'organisme, 
et qu'on nomme kystes, sont encore les siéges de col- 
lections de fluides qu'on désigne par le nom d'h9dropisies 
enk9stées. On en distingue plusieurs autres. Quand la séro- 
sité s'epanche dans le tissu cellulaire, l'affection porte plut(t 
le nom d'in fil tra tion que d'hydropisie. On la nomme 
aussi oe d è ;n e , a n a s a r q u e , ou leucophlegmasie. 
L'hdropisie peut survenir promptement après un refroi- 
dissement prolong de la peau, ou par toute autre cause qui 
iupprime la transpiration cutanée. Dans ces cas, l'exhala- 
tion n'étant plus opérée dans une juste proportion, il en ré- 
lte un ¢paachement entr les feuillet» d» membranes s 

reuses. Cette cause n'est pas très-commune, mais on en 
possède assez d'exemples pour que ce soit un motif d'éviter 
autant que possible des refroidissements qui ont d'ailleurs des 
suites funestes. Une potation trop abondante peut produiro" 
ces épanchements, comme on en a vu des exemples chez des 
malades qui croyaient n pouvoir trop boire de tisanesou 
d'eau pure: l'absorption dans ces cas oulrepasse l'exbala- 
tion. Les personnes débiles, comme les convalescents, ou celles 
qui sont affaiblies par une nourriture, soit insuffisante, soit 
insalubre, ou qui vivent dans un lieu humide, ont souvent 
tissu cellulaire des jambes infiltré. Bien de plus commun que 
celle appelëe cedè?ne; mais elle se dissipe facilement quand on 
a obtenu la guérison delamaladiequiapréc6d6. L'inflamma- 
tion, d6truisant l'gquilibre dont nous avons annoncé la néces- 
sitë, est une cause commune de l'Cane|lement sreux qui 
nous occupe, quand elle est  un certain degré. L'application 
d'un vési cat o i re, une brOlure modérée, en fournissent 
des exemples communs : on voit une vessie, une cloque 
remplie de sSrositë succéder à ce mode de phlegmasie. 
L'inflammation des vaisseaux, artères, reines, etc., comme 
toute cause qui apporte obstacle au cours du sang, une af- 
fection du coe,,r, un anévrisme, etc., produisent souvent cet 
effet. Les pertes de sang sont dans la mSme catégorie ainsi 
que l'Cat de grossesse. 
Le nombre de ces causes est donc très-varié, et leur mode 
d'agir est loin d'être le même : par conséquent le traitement 
ne peut pas Cre uniforme. Telle n'est cependant pas l'o- 
pinion du vulgaire, qui considère les h.vdropisies comme 
des effets constants de la débilité, et les combat trop ex- 
clusivement par des toniques. Si on réussit chez celui qui 
est devenu I;)dropique parsuite d'une alimentation insuffi- 
sante, on échoue chez celui qui l'est par suite d'une ph]eg- 
music chronique. C'est cette dernière affection qu'il faut en- 
lever : l'l;ydropisie cëdera ensuite d'elle-mëme. Le traitement 
de ces maladies est difficile mène pour le médecin, et 
subordonné' mille circonstances variées. Les moyens les plus 
rationnels et réputés pour être les plus actifs sont souvent im- 
puissants. La port cri o n, qui procure une évacuation subite, 
n'est qu'une ressource palliative, parce qu'elle donne issue 
au liquide épanch sans tarir la source; et cette opération 
d'ailleurs n'est pas exempted'inconvënients. Il est cependant 
très-important de ne pas laisser persister cette affection 
lonemps; car les tissus s'altèrent et se dénaturent pen- 
dant sa durée, et en tous cas plus elle est ancienne, plus 
il est dilficile de la u«.rir. D 
HYDROP,X'EMATIQUE(Cuve). Voge= Cv. 
HYDPOPOTE (du grec wp, eau, et ç, buveur), 
buveur d'eau, et surtout celui qui ne boit que de l'eau 
et s'abstient de t.outç liqueur fermentée. 
HYDRO-SELENIQUE (Acide). Vogez 
Qc (Acide). 
I|YDPOST..TIQUE (de Gtp, eau, et ioalt , se te- 
nir, ëtre en repos ). Ce mot de, rait donc rigoureusement 
signifier la tatiq ze de l'eau, la science de l'équilibre 
des eaux ; mais, malgr la rigueur de l'étymologie, la va- 
leur du mot hgdrostalique n'est pas restreinte à ce qui 
concerne l'eau, comme pourrait le faire supposer la compo- 
sition du mot. Cette expression s'étend en général 
q  i I i b r e d e tous les Jhlides ; et rela est fort raisonnable, 
car les lois de cet ëquilib,'elenr sont communes. 
Les fluides sont soumis à des lois de pression et d'équi- 
libre qui diffèrent en plusieurs points de celles qui régisse 
les mêmes propriétés dans les corps solides. Ces propriétés 
se réument pour les fluides en une série de propositionsque 
les bornes de cet article ne nous permettent pas de dvelop- 
per en les accompagnant de toutes les Procures dont elles 
sont susceptibles, mais que d'après l'aurontWde dëmonstra- 
tions qui abondent dans les traites spéciaux sur la matière, 
on peut considérer comme absolument pronvées. Voilà quel- 
les sont ces propositions fondamentales : 
les solides sont composés, abstraction faite des quantités de 
calorique dont ils sont respectivement plétré», de mol- 



HYDROSTATIQUE -- 
crues uie mtme nature, et conséquemment le molécules 
des fluides sont douées de pesanteur, à l'instar des molA- 
cules des corps solides ; 2 ° les fluides pèsent de bas en haut 
tout comme de haut en bas; 3 ° les fluiàes exercent une 
pression latérale; ° la pression exercée sur les molécules in- 
férieures d'un fluide par la pesanteur de la colonne supérieure 
du fluide, est égale dans tous les sens; 5 « chaque molécule 
d'un fluide est également pressée de toutes parts par les mo- 
lCules environnantes, d'où résulte la conlition de repos ab- 
solu; 6 u de l'égalité de cette pression, il résulte encore que 
la surfaced'un fluide abandonné à lui-mme doit constamment 
affecter la forme plane, et que ce[te surface sera toujours 
parallèle à l'horizon ; 7 ° la pression exercée par un fini& 
contre une surface quelconque sera perpendiculaire à chacun 
des éléments de cette surface ; 8 ° quelles que soient leur quan- 
litWet la figure des vases dans lesquels ils sont contenus, les 
fluides doivent presser en raison exacte de leur hauteur; 
9 ° dans les tubes, soit égaux, soit inégaux, soit droits, soit 
obliques, pourvu qu'il y ait communication entre eux, un 
fluide doi[ monter à la mme hauleur : ce qui résulle né- 
cessairemeut de ce qu'il ne peut être en repos qu'autant 
que toutes les surfaces supérieures seront dans un mëme 
plan parallèle à l'horizin ; 10o les pressions exercées sur 
une base donnée par deux /]uides de diflérente densité ne 
peuvent tre Cains entre elles qu'autant que leurs hau- 
teurs et leurs densités seront en raison réciproque. » 
A l'égard de la I er proposition, nous disons que si la 
pesanteur des molécules d'un fluide n'est pas sensible 
dans le fluide m.me, cela tient à ce que les molécules in- 
Jirienres soutiennent les molécules supérieures, qui ne peu- 
vent donc descendre : au lieu que dans les solides, toutes 
ces molécules sont étroilement orties entre elles, et for- 
ment un seul et mme tout, dont l'effort se concentre poioE 
ainsi dire en un seul point, les molécules des fluides, au 
conlraire, sont indépendantes les unes des autres. Le peu 
d'adhérence qu'il y a entre elles est cause qu'elles doivent 
céder au moindre effort qu'on fait pour les séparer ; elles 
doivent donc exercer une pression, indépendamment les 
unes des autres. Pour preuve de la 2 e proposition, il y a 
une expérience bien simple a faite. Plongez dansl'eau un tube 
de verre (non capillaire), ouvert par les deux extrémités; 
bouchez l'une d'elles avec le pouce. Le tube étant rempli 
d'air, l'eau n'y montera qu'à une très-petite hauteur, llais 
en levant le pouces, afin de la/sser échapper Pair comprimé, 
vous verrez monter beaucoup l'eau dans le tube ; elle at- 
teindra mtme à un niveau supérieur à celui de la surface 
de l'eau dans le vase. L'eau contenue dans le tube est donc 
mue dans un sens opposé à l'effet ordina/re de la pesanteur. 
Donc, il en faut conclure que les fluides pèsent de bas en 
haut. Si l'on veut s'assurer de la vérité de la 3  proposition, 
que l'on prenne un tube recourbé, ouvert par les deux 
bouts, et dont les branches, d'inégale longueur, fassent entre 
elles un angle quelconque. Si vous bouchez avec le pouce 
l'orifice de la longue branche, et si vous plongez la courte 
branche, lorsque vous Oterez le doigt, l'eau montera sen- 
siblement dans la plus longue. CeIte ascension ne peut Cre 
causée que par une impulsion latérale que reçoivent des 
molécules voisines, celles qui se trouvent à l'orifice du tube. 
Aussi voit-on un tonneau plein de liquide se vider quand 
l'on y pratique un trou sur le oSté. La 4e proposition n'est 
pas plus dilficile à prouver par expérience. Le repos absolu 
de chaque molécule d'un fluide, que nous avons conclu de 
ce qu'elle est également pressée de toutes parts, est une 
vrité qui n'a pas besoin de démonstration. C'est l'objet de 
notre 5  proposition. Nous en pouvons dire autant de la 
 proposition; car de ce que réquilihre s'établit et que le 
fluide est en repos, il s'ensuit que sa surface devient plane 
et parallèle à l'horizon. Est-il nécessaire d'ajouter que l'on 
n'entend parler ici que d'une surface de peu d'étendue et 
non d'une vaste snrîace comme celle des mers, dont nul 
c'ignore la courbure'/A l'égard de la 7" proposition, on doit 
cousidéret que pour que au lieu d'tre perpendiculaire à 

HYbROSUbOPATHIE 24 5 
chacun des éléments d'une surhce quelconque, la pression 
for oblique, il [audrait la décomposer en deux, dont l'uno 
erait perpendiculaire à la surface, conséquemment effec- 
rive, tandis que J'autre, qui aurait une direction parallèle 
à cette surface, serait de nul effet ; ce qui serait contrairo 
au principe de la pression en tous sens. La démonstration 
des propositions 8, 9 et 10 exigerait des développements 
dont nous sommes forcé de nous abstenir, et qui nous en- 
tralneraient dans des redites inutiles. 
Dans la théorie de rhydrostatique, on considère encore 
I'qzdlibre des corps flottants et des corps llon96s. Un 
solide plongé dans un fluide est pressé de toutes parts par 
le fluide, et cette pression croit en raison de la hauteur 
du fluide au-dessus da solide. Un solide plongé dans un 
fluide perd une partie de son poids égale au poids du 
volume du fluide déplacé : c'est la généralisation du cé- 
Iêbre principe d' A r c h i m è d e sur lequel se basent la cons- 
truction de la balancehydrostatique et desarëo- 
mètres. Un solide plongé dans un fluide spécifiquement 
plus léger que lui doit s'enfoncer jusqu'à ce qu'il arrive au 
fond. Cela est évident ; car il est poussé de h.aut en bas par 
sou propre poids, et il n'est poussé de bas en haut que par 
une force égale au poids du volume du fluide deplacé : or, 
cette dernière force est moindre que le poids du solide qui 
est supposé avoir plus de poids spécifique que le fluide: 
donc le solide doit descendre avec une force, c'est-à-dire 
une vitesse égale à la différence entre son poids et celui 
d'un pareil volume de ce fluide. Un solide plongé dans un 
fluide spécifique plus pesant que lui doit monter jusqu'à ce 
que le poids spécifique du solide soit au poids spécifique 
du fluide comme le volume du fluide déplacé est au volume 
du solide qui y plonge. Le corollaire de celle dernière pro- 
position est qu'on solide plongé dans un Iluide spécifique- 
ment plus pesant que lui doit flotter à sa surface. 
La matière que nous n'avons pu qu'efl]eurer n'est suscep- 
tible de démonstrations mathématiques qu'à l'a/de d'une 
analyse algébrique extrèmement élevée. Ces sortes de quel- 
tions ont exercé les facultés des plus grands géomètres d 
l'Europe ; et il n'appartient qu'à peu de personnes de con- 
tinuer leurs travaux. Mais de ces travaux savants et pro- 
fonds il est résulté la certitude des propositions que nous 
venons d'établir. Porz père. 
HY DROSTATIQUE ( Balance ). l'o9e-- B.LC 
HY/{OSTAT/QUE. 
tiYDROSUDOP;kTHIE (du grec ,p, eau, du latin 
sdor, sueur, et du grec ;,o:, douleur). Ce mot hybride 
exprime plus complétement qo e celui d' h U d r o t h é r a p i e 
les bases essentielles de la méthode de P r i e s s n i t z, laquelle 
consiste ì employer l'eau froide à l'lutCieur et à l'extérieur, 
alors que les malades sont en sueur. Il est assurément fort 
original d'avoir transformé en un traitement célèbre et ré- 
gulier une des causes les plus redoulées d'un grand nombre 
d'affections morbides. Guérir des maladies en usant de la 
chose mme qui fréquemment les engendre, voilà une nou- 
veauté qui méritait bien d'appeler les regards sur l'homme 
à qui elle est due. 
Nous pourrions renvoyer au mot Ha)eora/.a tout ce 
que nous avons à dire de l'ltdrosdopatltie; cependant 
nous énoncerons dès à présent quelques-uns des principes 
positiîs dont cette nouvelle méthode a droit de s'autoriser, 
quoique ces principes, fort postCieurs à sa création, soient 
restés igunrs de sou fondateur. 
Déjà depuis quelque temps il était prouvé que les ani- 
maux à sang froid, les serpents, les crocodiles', les gre- 
nouilles, ne sont pas exposés aux inflammations, et n'ont 
jamais rien de fébrile, premier fait qui induit à conjecturer 
l'influence antiphlegmasique ou anti-phlogistique du [roi,l. 
On a cru découvrir plus récemment que l'application ,lu 
froid au corps de l'homme a pour effet de condenser les 
tissus, de restreindre la eavilé «le« vaissaux capillaires et d'y 
ralentir le cours du sang ; constatation explicative des effets 
directs de l'hydro[hérapie. Un mde¢in P, ydropa[he di 



4 HYDI0SUDOPATHIE 
qu'aant plongé l'un de ses pieds, qui avant l'immersion 
marquait 26 degrés oentigrades de ch,deur, dans de l'eau de 
puits, à 9 degrés ceutigrades ( température la plus basse 
qu'on obienne naturellement l'AtWà Paris), ce pied, après 
quinze minutes d'immexsiou, était devenu rès-rouge et ne 
marquait plus que 13 degrés, et 19degrés à peine dixmi- 
nutes après avoir été retiré de l'eau et couvert de tissus 
chauds et protecteurs. 
Il est prouvé qu'on supporte d'autant mieux le froid 
qu'on est dou naturellement d'une chaleur vitale plus éle- 
xée. 11 n'y a jamais plus de deux degrés de différence dans 
la température d'une mne personne, qui, par suite de 
l'exercice corporel, ou par l'effet de lourdes couvertures, 
passe de l'etat tiède et calme h l'Cut de sueur; or, celui dont 
le corps en sueur comporte et signale ainsi deux degrés de 
chaleurau delà du degré normal, et jamais davantage, cette 
personne supporte beaucoup mieux Pimmersion dans un 
bain froid qu'une autre qui n'aurait que sa température or- 
dinaire et de repos, cette température fUt-elle très-elevíe. 
Voilà des faits qui out élé parfaitement demontres et dont 
la certitude expérimentale nous est acquise. On demandera 
peut-ëtre à quoi sert une évaluation si précise de la cha- 
leur humaine et des limites assignbs h ses accroissements. 
ious repondons que de pareils faits fondent des motifs se- 
rieux à cette médication bizarre, qui consiste à faire suer 
des individus générale.ment peu malades, avant de les plonger 
dans l'eau la plus fi'oide qu'on puisse rencontrer. C'est la mé- 
thode encore nouvelle que le paysan PriessuiLz a pratiquée 
longtemps en Allemagne, et qu'on a promptement irportée 
au nordet àl'ouest de Paris, d'abord aux prés de Salat-Ger- 
vais, puis aux Thernes, à Auteuil, à Bellevue, et enlia a Paris 
mme. C'est là ce qu'on nomme Phtdrothërape et l'htdro- 
zudopathie, mots composés, qui semblent avoir etc faits 
exprës pour les pauvres immergés, qui ne les prononcent 
qu'en frissonnant, et non sans reprendre haleine, pendant 
les trois à cinq minutes au-delà desquelles un tel bain ne 
peut ètre prolongé sans imminence d'asphyxie, sans flagrant 
peril pour la vie. Il faut les voir courir avec leurs mante.aux, 
 la sortie de ce bain glacial ! 
Cette étrange méthode de traitement est loin d'tre tou- 
jours efficace, mais elle est nouvelle, et c'est un grand 
te. Ce qu'elle offre de plus surprenant, c'est que l'e.xtrème 
révolution qu'elle oc£asionne en des organes chauds et seu- 
siffles soit si rarement suivie d'accidents. On ne la loue si 
démesurément que parce qu'elle ne proàuit pas tout le mal 
qu'on avait lieu d'eu appréloender. Nous ajouterons cependant 
qu'elle a paru favorable dans de certaines affections chro- 
niques. W Isidore 
HYDROTHÉRAPIE (de ïwp, eau, et 0é,w , je 
guéris), art de guerir au moyen de l'eau. L']ldrothrapie, 
ou l'art de traiter les maladies au moyeu de l'eau pure et 
froide, a été singulièrement circonscrite dans ces dernier» 
temps, parce qu'on ne s'est occupé que des effets produits 
par l'ean froide (au-dessous de 18 ° cenL ) Si autrefois cette 
mdication par l'eau froide n'était gutre en usage, excepte 
pour la chirurgie, l'eau pure n'en a pas moins etA de tout 
temps recommanòée comme moyen diététique pour bains et 
pour boisson. 11 est vrai qu'en général on la négligeait beau 
coup trop, attendu que les quelques voix isolées qui s'Ce- 
vaient pour la recommander étaient étouffées ou par des 
prejugés profondément enracinés qui lui attribuaient des ré- 
aultats nuisible, ou par l'indifférence qu'inspire naturelle- 
ment au mëdecin tout moyen trop vulgaire pour laisser 
quelque illusion - celui qui l'emploie ou servir les intérëts 
de celui qui l'ordonne. Quelques cas dans lesquels on essaya 
«le l'eau froide, après avoir inutilement usé d'autres moyens, 
provoquèrent bien de temps à autre quelques imitations ; 
mais ces traifements d'exception ne réussirent pas à faire 
sortir l'eau froide de la categorie des ressources cxtrèmes et 
désespérées, pou= la c.lasser au nombre des agents thra- 
peutiques d'un emploi journalier. Aussi, et malgroe les effort, , 
d'un assez grand nombre de praticiens qui, surlout depuis 

   1JkiUIHE[{APIE 
le commencement du dix-imitième siècle, essayèrent da 
rendre plus general le traitement par l'eau froide, cette lhéra- 
pentique inspireraibelle encore la défiance, si les attestations 
d'oErtel et de Priessnitz, qui la vantaient comme une 
panacée infaillible, et si les heureux résultats qu'on en obte- 
nait fréquemment dans la pratiqne, n'avaient tout à coup 
transformé en enthousiasme le préjugé' que les gens du 
monde asaieut naguère contre l'eau froide, et éveillé chez 
un grand nombre de praticiens le regret d'avoir jusque alors 
trop négligé cet expédient. 
Il s'en taul cependant encore que la puissance curalive de 
l'eau froide ait été suffisarament démontrèe. Pe qu'il y a de 
g_néralement gvéré, c'est que l'emploi intérieur de ce moyen 
calme la surexcitation des neris, facilite les scrètions et 
améliore/es rapports s'nergiques des solides et des liquides; 
que son emploi externe calme également la chaleur fébrile 
des vaisseaux et leur donne du ton lorsqu'ils sont affaiès, 
qu'il fortifie les filtres de muscles, et qu'il excite la peau, 
dont il modifie les éruptions chroniques. Voici, d'après les 
plus croants, les maladies dans lesquelles on a obtenu 
les meilleurs résultats de l'emploi de l'eau froide : affections 
aigiies : le typhus, la fiëvre scarlatine et autres maladies 
de la peau ; l'angine couenneuse, et diverses inflammations; 
mais surtout, quant aux douches froides et ainsi que l'a 
prouvé le docteur Fleury, les fièvres iutermittentes sur les- 
quelles le quinquina u'a eu aucun pouvoir. Affections chro- 
niques : la splèli», la goutte atonique, le rhumatisme, di- 
verses espèces de paralysies, /es maladies nerveuses et les 
maladies des organes I,ypogastriqnes. 11 es'l cependant ué- 
cessaire de tenir compte de diverses circonstances, comme 
par exemple de l'individualité du malade et de la maladie, de 
l'abaissement ou de rélëvation de la températnre de Peau, 
des phéuomènes qui se manifestent pendant la durée du 
traitement et la durée de /'application méthodique du re- 
mëde, de la manière dont on l'emploie, etc. L'attention 
dont Feau froide a été Pobjet dans ces derniers temps a 
fait perdre de vue l'eau chaude qu'on emploie extérieure- 
ment aussi souvent qu'autrefois, mais qui prise intériea- 
remeut offrirait, entre les mains d'un médecin rationnel, 
un moyen curatif qu'on a tort de trop négliger aujourd'hui. 
La méthode indiquee et employée par Cadet de Vaux, la- 
quelle consiste à traiter les malades effectés de la goutte ou 
de rhumatismes en leur faisant boire de grandes quantites 
d'eau chaude, a produit des cres fort remarquables, mais 
n'a jusqu'h ce jour trouvé qu'un petit nombre de parti- 
sans. On n'a fit non plus qu'un très-petit nombre de re- 
cherches et d'observations satisfaisantes sur les vertus ge- 
riCaies de l'eaa chaude et la manière de l'appliquer. Bref, 
la doctrine de l'hydrothérapie offre de graves inconvénients 
déjà connus, et il serait à désirer, dans l'intérèt de l'bu- 
manifC qu'elle fùt l'obiet dun travail impartial, complet 
et scientifique, qui préciserait les cas off cette méthode de 
guérir peut Cre employ6e avec avantage, ainsi que la me/l- 
leure manière de l'appliquer, et ferait justice des préjnges 
comme des exagérations. 
On a partiellement employé cette méthode h!ldriatri¢ue, 
mais en la modifiant, dans cette effrayante période du cho- 
Iéra qui a reçu le nom de période al9ide. Alors qu'aprës 
la durée plus ou moins longae des vomissements, d'une 
diavrhée séreuse, floconneuse et blanchâtre comme de l'eau 
de sason, le refroidissement de la lace et des membres fait 
des progrès; alors que l'haleine et la langue deviennent 
glaciales comme la périphérie du corps; que la physionomie 
s'altère profondément et se consterne comme par vingt 
nées d'àge tout à coup surajoutées à l'ge réel; que le nez 
est froid cimme celui d'un chien, effilé comme celui d'an 
moribond ; qne la peau des extrémités devient bleue, froide 
etgluante comme celle d'un reptile; qu'elle se ride et se 
fronce aux doigts comme s'ils venaient d'ëtre macérés dans 
nn bain chaud trop prolongé, ou dans de la lessive; que 
le pouls se déprime jusqu'à devenir incertain ou nul; que 
la vo.x se brise, s'ëclipse ou s'éteint, que l'nrine diminue 



HYDROTHERAPIE  HYENE 4 
iusqu'à tarir, et qu'h ce cortége de s.vmpt6mes sinistres il " nonsavons pariCnt dispersées en divers endroitsde la ville. 

.se joint une soif que rien n'étanche, des crampes de téta- 
nique, et cette vive persuasion d'une mort prochaine qui 
ghtce et tta'rifie les assistants, alors, dans ce daner su- 
prême, on a quelquefois recours h la methode de Priess- 
nitz, naah; en la modifiant, je le répète. On lrempe un 
drap de toile dans de l'eau iroide, et ce drap imbibe sert à 
envelopper de toutes parts le corps entiërement nn du ma- 
lade. Quelques médecins donnent la préïerence h de l'eau 
chaude et faiblement salue pour cette methode, à laquelle 
un d'eux a donné le nom de mlhode d'enveloppement. 
La tte seule reste hors du drap. Par-dessus cette enve- 
loppe mouillée, on place des couvertures de laine, et qael- 
quelois mme on y joet un édredoa ou sac de plume, at- 
tirail de luxe pour lequel quelques Parisiennes montrent 
tant de predile¢tion. Voici maintenant ce qui arrive, au 
moins quelquelois, comme après les immersions froides des 
h.dotherapeutes. La peau da malade, d'abord refroidie et 
cyannsée (bleue), reprend de la souplesse, et devient le 
siége d'une réaction qui ramène la coloratiun vitale et la 
chaleur. Les vaisseaux absorbants reboivent d'ailleurs cette 
eau partiellement vaporisée dont le drap est humecte, ce 
qui rend à la masse du sang une partie du serum dont elle 
est privée du fait de la maladie. C'est dans ce but qu'on 
renouvelle de temps en temps l'humidité extérieure que 
l'air, l'absorption vitale et la chaleur ont dissipée. Pins d'une 
gnérison de choléra a été obtenue de la sorte, par cette mé- 
thode d'enveloppement qui est principalement eonseillée 
par un habile praticien de blelz et par un des radecins de 
l'bhteJ-Dieu de Paris, après l'avoir été à Smyrne, en ;847, 
par les do¢teurs Ba.rgigli et Burguiëres. IY IsidoreEo¢os. 
HYDROTHEBAPIQUES (Etablissements). C'est 
ainsi qu'on appelle les etablisments oi l'eau froide est 
méthodiquement employée pour la cure des maladies. Les 
diverses açplications de l'eau Iroide exigent diffêrents appa- 
reils, très-simples assurément en eux-mèmes, mais qui, au 
total, ne se trouvent que rarement ou méme jamais coin- 
piCement réunis dans les habitations particuiières avec les 
ustensiles requis. 1 faut notamment des baignoires e dfffê. 
rentes espèces, les appareils nécessaires pour adminislrer 
des douches et des bains de pluie, des appareils propres 
provoquer la suette, indépendamment des couver turcs de laine 
et de coton. La grande réputation que se fit Priessni tz 
par ces applications de l'eau froide le détermina  fonder à 
Grœe[enberg, lien oh il résidait, le premier établissement 
hydrothérapique; et I' h y d r o t h é r a p i e fit bient6t en Aile- 
magne nn si grand nombre de partisans, qu'en 1842 on 
comptait pas moins de quarante étab4issements h)dro- 
thérapiques, et qe depuis lors ce nombre s'est encore sin- 
gtdièremeut augmenté, lons citerons plus particulièrement 
ceux d'llmeuau et d'Elrsbonrg, dans la forét de "fhnringe, 
deKreisha et de Schwectzermùhle, dans la Suisse saxonne, de 
Hohenstein, danslErzgebirg¢, et de Lanterberg, dans le Harz. 
La plupart sont pla¢és sous la direction scientifulue de mé- 
decins en qui les malades ont la conliance la plus absolue. 
Après les dispositions nécessaires pour pouvoir ¢onvena- 
blement loger et traiter les baignenrs, wue condition essen- 
tielle pour un établissemt de ce genre, c'est de pouvoir 
disposer d'une bonne eau de source, qui ne soit pas trop ex- 
posée/t l'influence de la température extérieure; viennent 
ensuite les conditions d'un air per et d'environs agréables, 
ainsi que les requiert tout autre établissement de bains, La 
plupart des établissements hydrothérapiques sont situés 
dans des pays de montagnes. Gomme il arrive souvent que 
quelques espèces particolihres de bu/us sont plus faciles à 
établir dans certains endroits isolés que dans les établisse- 
ments mSmes, il n'est pas rare que les appareils pour les 
bains de douches, delames, etc., se trouveï, t placésìquelque 
distance de là. A IImenau, parexemple, il n y a pas d'établis-- 
sement proprement dit. Les baigneurs logent dans des mai- 
sons particnlières oi l'on trouve les divers appareils néc- 
suites au traitement hydrothérapique, et les dist,sitions dont 

Le traitement hydrothérapiqe absorbe chaque jour bien 
plus de temps que l'usage des bains d'eaux minrales ordi- 
naires : par eemple, voici quel etait, autrefois du moins, 
Groefenberg l'emploi de la journee d'un malade. A quatre heu- 
res du matin on le plaçait dans une couverture sudorifère, où 
il restait jusqu'à huit heures, pour bient6t entrer dans 
bain froid. Après ce bain, qui durait quelques minutes, le 
malade faisait un petit tour de promenade précipitée; puis il 
avalait de l'eau froide et ensuite déjetnait. Après le deje0uer, 
nouvelle promenade pour aller prendre des douches. Cette 
iormalité une fois remplie, le patient s'agitait encore au 
gran,l a/r, afin de se préparer convenablement pour le diner, 
qui avait lieu  une heure. Deux heures environ après le di- 
ner, le malade faisait encore un petit tour de promenade avant 
de se replacer dans la couverture sudorifère. Trois heures 
après, un nouveau bain ; pub promenade en attendant le 
souper, que suivait encore nn tour de promenade; et la journce 
se terminait par un bain de siëge. 
La diversité des affections morbides modifiait naturel- 
lement ce régime ; et il a encore été modifié davantage a 
mesure que les médecins se sont familiarisés avec l'applica- 
tion de l'eau froide. Le traitement est cependant resté le 
mème dans les details essentiels; et avec une diète nourri- 
saute, ruais très-simple, comme on peut facilement l'ob- 
server dans des établissements de ce genre, il a eu d'heureux 
résultats. A Paris on près de Paris, nous avons des établis- 
sements semblables, ou peu s'en laut, h ceux de Groefen- 
ber.-. D  Isidore Bono.. 
HYDROTHEBMOLOGIE, etude et science des 
eaux thermales ou des thermes. 
HYDIOTHOBAX ou h?dropisie de poitrine. 
H YUROPlSI I. 
HYÈNE genre de carnassiers digitrade. La hyèna 
était connue des anciens naturalistes, et Aristote la decrit 
avec une rare exactitude; mais la Iche féroité de cst uni. 
mal sauvage, qui en faisait pour les uns un objet d'eftroi, 
et l'étrangete de certains caractères anatomiques, qui en fai- 
sait pour les antres nn être anormal, ont donné lieu h des 
Iégendes tellement nombreuses et tellement exagerees, que 
l'histoire naturelle de la hyène n'est parvenue jusqu'à nous 
qu'escortée d'une innombrable série d'erreurs traditionnelles, 
dont Pline, Elien, Aldrovande, etc., se sont faits les échos. 
La hyëne est nn animal nocturne, vorace, vivant surtout 
de chatoies, et r6daut sans cesse autour des tombeanx 
pour chercher quelque cadavre, qu'elle deterre et qu'ello 
devore : dans quelques conteAes tropicales, elle péuètre la 
nuit dans l'enceinte des villes pour dévorer les immondices 
et les corps morts qu'on abandonne dans les rues. Ses quatre 
doigts sont armés d'ongles très-puissants, mais qui, n'etant 
ni acérés ni tranchants, forment un instrument .fouisseur 
plut6t qu'une arme offensive; la largeur de sa tëte, ter- 
minée par un museau obtus, l'Corme développement de sa 
cr4e sagittale, l'écartement considérable des arcades zygo- 
rustiques, indiquent une énorme puissance d'action dans les 
muscles du col et dans les màchoires, et expliquent le récit 
des voyageurs qui racontent avoir vu la hyène emporter 
dans sa gueule des proies énormes sns leur laisser toucher 
le sol. A la mcboire supérieure, elles ont trois fausses mo- 
laires, à la mchoire inférieure quatre : toutes sont coniques, 
mousses et singulièrement grosses ; leur dent carnassiër. 
supérieure porte un petit tubercule, mais la carnassihre in- 
tcrieure ne présente que deoz fortes pointes tranehantes, 
en général, la puissance de leur appareil masticateur leur 
permet de briser les os les plus durs. Leurs oreilles sont 
grandes et presque nues, leurs yeux ont un aspect étrange; 
car leur pupille s'offre sous la [orme d'une pyramide dont 
la base, au lieu d'ètre ptaue, rait fort arrondie; leurs nu- 
fines sont plaees à l'extrémité da museau et enroueCs d'un 
mufle ; leur train de derrière n'e_t pas plus bas que le train 
de devant, comme on l'a cru longlemps ; mais leurs 
bres plqerienrs sont toujours fléchis, ce qi leur donne une 



48 HYENE -- 
al,ure bizarre qu'augmente leur alCarche oblique, et qui les 
fait paraltre boiteuses; leur queue est courte et pendante; 
enfin, elles oflrent un appareil glandulaire particulier, dont 
ieconduit excréteur s'ouvre prés de l'anus, et sécrète une ma- 
tiëre épaisse et visqueuse d'une odeur extrèmement fétide. 
C'est/ l'existence de cette poche qu'il faut rapporter les fa- 
blesdes anciens sur le prétendu hermaphroditisme de la hyène. 
On distingue plusieurs espèces d'hyènes, dont quatre 
se rencontrent encore à l'Cat vivant. Ce sont : la hyène 
raçde (hl/oena vulgaris , Geoff. St.-HI. ), qui parait avoir 
«té l'espèce connue des anciens, et qui habite la Perse, 
l'Êgypte, l'Abyssinie : elle fut montrée aux Bomains pour 
la première fois sous l'empire de Gordien ; la h9ène brune 
(h9oenafusca , Geoff. St.-Hil. ), dont la patrie est inconnue; 
la hllène lacheNe (h?loena capensis, Desm. ), qui habite la 
partie méridionale de l'Mrique, et que les habitants, dit-on, 
emploient  la chasse; c'est sans doute à cette espèce qu'ap- 
partiennent ces hyënes apprivoisées dont on trouve plus 
d'un exemple en Algrrie, où, dit-on, on en voit quelquefois 
rendre  leurs marres les mmes services qu'un chien ; la 
h/ène peinte (hI/oena picla, Temm. }, décrite et figurée 
pour la première lois par Temminck, Pornithologiste hol- 
landais: c'est le chien hI/dnoïde de Cuvier. De plus on trouve 
fréquemment dans les c a v e r n e s à ossements de nombreux 
débris de differentes espèces d'hyènes fossiles. 
BELF,ELD-LEFÈVP, E. 
HYÈRES (Iles d'). En face du rivage le plus méri- 
dional de la Provence sont tro[s petites lies, nommées au- 
trelois lies.al'Or, et appelées aujourd'hui Porquerolles, 
.ort-Cros, et l'lle-du-Lerant ; elles embrassent dans leur 
contour la vaste rade d'Hères; leur sol est une roche 
calcaire, abrupte sur ses bords, et recouverte, dans I%té- 
rieur, d'une mince couche de terre végétale ; le vent du 
nord-ouest, si fréquent sur les plages de la Provence, les 
balaye presque continuellement; des sapins rabonnis et 
q,elques arbousiers leur donnent un peu de verdure. Porque- 
l.olles, la plus importante, parce qu'elle domine la rade, 
compte plusieurs forts et batteries de crte dont les gardiens 
reçoivent du continent tous lesobjets nécessaires à la vie; car 
l'eau y est rare, et ils ne peuvent, dans la plaine cultivable, 
récolter assez de légumes pour leur consommation journa- 
liëre. L'industrie a profité de son heureuse position maritime 
pour y établir une labrique de soude, biais si la terre est 
aride, le ciel y déploie tous ses trésors ; chaque jour le so- 
leil s'y lève et s'y couche radieux; dans la journée, il dë- 
'erse des terreurs de lumière, et les nuits sont bien douces 
sous le plus beau ciel de la Provence. 
La ville d'Hb'ères est plus heureuse que ses lies : située 
sur le revers d'une colline, elle est abritée contre les vents 
du nord par une enceinte de hauteurs qui lui ménagent 
une agréable température; l'hiver y a rarement des frimats; 
pendant l'CA, les brises de la mer rafralchissent ses jour- 
nées les plus chaudes, et le mistral souffle dans les airs sans 
tourmenter les feuilles de ses arbres; ses jardins, remplis 
d'orangers, descendent en pente douce vers la mer; une 
rivière et plusieurs rnisseaux .arrosent ses alentours, et sur 
la plage unie et sablonneuse qui horde sa rade on trouve 
de magnifiques salines. La réputation de son climat y attirait 
nagnères une foule d'étrangers: les phthisiques de toutes les 
courtAes de l'Europe venaient y chercher un reste de vie; 
le rendez-vous des malades est aujourd'hui ì  i c e, qui offre 
infiniment plus de ressources et possède un ciel encore plus 
doux et des ites plus agréables. 
Outre ses salines, ttyères fait un grand commerce d'oranges, 
assez médiocres, de citrons, de grenades, d'huile d'olive, 
de bons vins rouges d'ordinaire. )u y compte 9,37 habi- 
tants. La colline est couronnée par les ruine d'un château 
gothique. Au moyen ge elle possédait alors un po,t, où 
s'embarquaient les pierins de Palestine. Saint Louis y 
aborda, à son retour d'Égyt ,te- Théogène Pçe. 
HYGIE (en grec'l'q««), considérée par les Grecs comme 
la déesse de la santé, était selon quelques auteurs fine d'Es- 

enlapo et d'Épione; d'autres la lui donnent pour femme, e 
il en aurait eu suivant eux plusieurs enfants. A $icone, 
dans le temple d'Esentape, elle avait nne statue h demi 
couverte d'on voile, " laquelle les femmes de cette ville of- 
fraient leurs chevelures. Un gros serpent enveloppe le corps 
de la déesse, et faisant plusieurs contours autour d'elle, 
passe sur son bras pour boire dans la coupe qu'elle tient à 
sa main. Alexandre Lr.'on. 
HYGIE p,anëte découverte par M. de Gasparis, à laple, 
le 16 avril 1849. Sa distance au soleil est à celle de la terre 
au mme astre comme 3,15 est à 1. Son excentricité est 
0,12; son inclinaison, 3%7'". Sa révolution sidérale s'ef- 
fectue en 075 jours. La longitude de son périhélie est de 
234  25' 5.4"; celle de sonnoeud ascendant, de 87 ° 15' 8". 
HYGIENE (de ¢q,t«, santé}. Ce mot designe une 
partie de la médeci ne enseignant les moyens de conserver 
la vie des hommes dans l'Cat sain. Ce but fait tout de suite 
sentir l'importance du sujet qui va nous occuper ; mais il est 
très-vaste, car il comprend la connaissance de l'organisation du 
corps humain, celle du jeu des organes et celle des condi- 
tions qui sont favorables ou nuisibles à l'entretien de la vie: 
il exige, enfin, la connaissance de l'ensemble des sciences 
naturelles, puisque nous sommes en relation avec tous les 
corps de la nature, et influencés par eux. 
Parmi les appareils d'organes dont le corps humain se 
compose, il en est qui ont une importance majeure compa- 
rativement aux autres. En première ligne, on remarque 
l'appareil nerveux : c'est par lui quel'organisation commence, 
et c'est sous sa présidence qu'elle s'achève. C'est en lui que 
réside le principe de l'intelligence; il est le dispensateur de 
cette propriété inhérente à nos tissus qui les rend aptes à 
tre excités,/ recevoir des impressions, à ètre sensibles; il 
établit des rapports entre toutes les parties et est l'organe 
des smpathies : en lui se trone probablement aussi la 
source de la chaleur propre an corps antreC. On dirait 
que cet appareil est l'animal proprement dit, que tout le 
reste de l'organisme Ct accessoire et destiné à le servi. 
Comme organe d'excitation, d'action et de réaction, le sys- 
tème nerveux est pour nous une voie d'impressions aussi 
nombreuses que variées. 
Les corps célestes ont une action sur nous, mal on po'ml 
connue, mais appréciable par des effets. Sans leur accorder 
l'empire que les astrologues leur attribuaient jadis, on .ne 
peut nier, d'après l'observation, l'influence de plusieurs 
causes sidérales. Le soleil, source de la chaleur répandue 
dans la nature, et avec laquelle notre température propre 
tend à s'équilibrer, est l'origine de plusieurs modifications. Si 
son action modérée est nécessaire pour l'entretien de la 
vie, elle est nuisible quand elle est en excès. Cet astre 
échantïe-t-it trop fortement le milieu dans lequel nous vi- 
vons, ne pouvant nous débarrasser d'tre excès de calorique 
qui nous surcharge, nous éprouvons une excitation acca- 
blante, qui affaiblit nos facultés intellectuelles et use préma- 
furCent les instruments de la vie : une trop vive insolation 
engendre des accidents graves et instantanés. Nous trouvons- 
heu_% au contraire, placks dans tre milieu froid, nous avons 
d'autres inconvénients/ redouter ; mais ils sont moins dan- 
gereux, et il est plus facile de s'y soustraire; nos maisons, 
nos foyers, nos vêtements, nous offrent de grandes ressources 
sous ce rapport : aussi la vie se prolonge-t-elle plus long- 
temps sous les latitudes froides que sous celles qui leur sont 
opposées, l%us devons donc nous soustraire autant que 
possible aux degrés extrmes de la température. Par la 
mème raison, nous devons, pour la conservation de la santé, 
nous abstenir des b a i n s trop chauds comme des bains trop 
froids : adoptons pour règle en les prenant l'état où on se 
trouve au sortir de l'eau : qu'il soit le bien-tre, et ne nous 
plongeons pas dans ce milieu s'il laisse après qu'on s'en 
est retiré une chaleur fébrile on un sentiment de froid. 
La lumière, autre émanation du soleil, considérée indépen. 
damment des organes de la vision, exerce anssiune action in. 
contestable sur nous : son dfaut commeson excès sont nul- 



sibles. La lune doit avoir quelque influence sur nos corps; 
mais ot ra sans doute exagérée, et elle est mal connue : 
si elle était constante et démontrée, ses effets se reprodui- 
raient régulièrement à toutes ses phases, qui se répètent 
toujours de méme. L'électricité, agent impondérable rpandu 
dans la nature, modifie aussi notre existence, et la plupart 
du temps sans que nous puissons diriger son action. 
Les organes des sens servant principalement à mettre 
l'homme en rapport avec le monde extérieur sont des voies 
très-actives d'excitation; leur exercice réclame de la modéra- 
tion étales temps de repos; on ne peut en user immodérément 
sans léser leur tissu et sans troubler la fonction du cerveau, 
par conséquent sans impressionner tout l'ensemble de l'indi- 
vidu. Des miaines dont ont cherche inutilement la cause 
proviennent souvent de la surexcitation des yeux, ainsi que 
plusieurs autres accidents. Les bruits intenses et inattendus 
sont funestes en plusieurs cas, surtout pour les femmes en- 
ceintes. Les odeurs ont des inconvénients très-graves et 
auxquels on ne lait pas assez d'attention, etc. 
Comme organe des facultés intellectuelles, l'appareil ner- 
veux est la source de nombreuses moditlcations, et c'est 
sous ce rapport qu'un exercice modéré est encore nécessaire. 
C'est au détriment de notre santé que nous nous adonnons 
aux méditations profondes et soutenues que l'étude exige. 
L:homme éprouve cet elfet dès sa jeunesse, qu'il passe dans 
les écoles. Cependant l'exercice des fonctions mentales n'est 
nuisible que s'il est exagéré : il est nécessaire  l'homme, et 
surtout quand on s'en est lait une habitude : en ce cas, on 
n'y renonce pas sans tomber dans une vieillesse anticipée. 
Les passions, qui ont aussi leur origine dans le systeme 
nerveux, soit par raction des organes des sens externes, 
soit par les impressions instinctives parties des viscères, 
combien de maux n'engendrent-elles pas? Une joie exces- 
sive peut tuer comme une vive affliction ; la tristesse, le 
chagrin détruisent  la longue nos entrailles, comme des 
poisons corrosils ; la colre est une cause fréquente d'apo- 
plexies foudroyantes, etc. Il faudrait éviter ces affections 
extrmes; mais l'homme ne peut pas toujours se sou.-traire 
aux conséquences de sa propre organisation, ainsi qu' cel- 
les de mille circonstances où il est placé. Il est un bien que 
la nature nous a donné pour laisser des périodes de relU, che 
et de repos à un appareil d'organes chargé de tant de télés 
importants, c'est le s o m m e i I, qu'on a mme appelé la 
meilleure partie de la vie, tant l'Cat de veille est souvent 
pénible. Il est un besoin impérieux auquel il importe beau- 
coq, de satislaire pour conserver la santé. Les personnes 
qui consacrent une très-grande partie des nuits au travail 
ou aux plaisirs sont ordinairement maladives, et rinsonmie 
trop prolongée compromet la vie ou la raison. 
Le système nerveux, que nous venons d'examiner  la 
hàte, sert d'intermédiaire entre les organes des sens, par 
conséquent des perceptions, et ceux qui exercent divers 
mouvements nécessaires h la satisfaction de nos besoins. 
Ces derniers actes sont accomplis par un appareil comçosé 
d'os et de muscles, dont l'exercice est en grande partie 
soumis ì l'empire du cerveau, etqui est nne source de santé 
comme de maladie. 11 faut d'abord que l'appareil locomo- 
teur puisse se développer librement et suffisamment : c'est 
une nécessité qu'on néglige trop souvent de satisfaire en re- 
tenant les enfants captils dans des langes. Plus tard, on 
les astreint dans les écoles  une vie trop sédentaire pour 
leur ge. Communément encore les écoliers accomplissent 
leur tcbe sans étre assis commodément, et ils prennent 
l'habitude d'une position vicieuse,  laquelle ils s'abandon- 
nent d'autantplns que lent attention est entièrement absor- 
bée par la composition des devoirs. Cette cause, ì laquelle 
on n'accorde point assez d'attention, produit communément 
les déviations de la taille et nuit plus ou moins au dévelop- 
peinent du corps, flous devons reconnaitre toutefds que 
les différents jeux gymnasfiques adoptés dans la plupart des 
pensions augmentent maintenant les bienfaits des heures 
consacrées  la récréation. 
mc.  .a «o.v..  T. x. 

249  
L'exercice musculasre est une condition de la santé, mai, 
c'est surtout quand il est combiné avec celui des organe» 
e l'in|elliger.ce. C'est ainsi que le jeu de billard, qui exige 
cette combinaison, est un moyen de distraction trës-salu- 
taire. Les excursions en plein air qui ont un but intellec- 
tuel sont encore préférables : telles sont celles qui ont pour 
objetretude de la botanique, «le rentomologie, de la géo- 
logie, etc. Dans la vieillesse mème, des courses pareille 
ont toujours de grands avantages. E générai, donnons un 
but d'utilité ou d'amusement h nos promenades ; autrement 
elles nous ïatigueront promptement, et nous n'en retireron 
aucun fruit. La chasse est un exercice moins noble que ce- 
lui mquel on s'adonne pour étudier l'histoire naturelle, quoi- 
qu'on l'ait appelé le délassement des heros ; mais il u't.n est 
pas moins salubre, si toutefois, comme tout autre, il n't 
pas excessif. En genéral, l'action musculaire contribue  en- 
tretenir le corps dans un état vigoureux : en favorisant la 
circulation du sang, en reparlissant, par consequent, les ma- 
tériaux nutritifs, elle empêche certaines parties d'acquérir 
plus de développement que d'autres, cequi est un effet de 
l'oisiveté et de la vie trop sédentaire. L'activité des organes 
Iocomoteurs doit toutefois ètre contenue dans le bornes de 
la modération ; autrement elle cause va état ïébrile : on doit 
la proportionner aux Iorces et aux po»liions sociales. La 
promenade  pied est plus convenable pour les uns; pour 
d'autres, c'est l'équitation, etc. S'il faut user des ïacultés io- 
comotrices dans rintérét de la conservation de lasanté, il 
faut aussi savoir accorder des temps de repos aux mu.cle 
soumis à notre volont : la ïatiguc nous instruit de cette 
nécessité, et ce n'est pas impunément qu'on negligerait cet 
avertissement. Il n'y a dans rorganisme qu'un certain nom- 
bre d'instruments destines ì une action non interrompue et 
indépendante de notre vooloir. Tels sont les instruments de 
la circulation, de I. respiration. Cet ordre est dans notre 
intérêt et la marque d'une prévoyance que nous ne saurion» 
trop admirer : s'il eu eut été autrement, que nous eussions 
pu» par exemple, respirer à volonté, combien la somme de 
nos maux n'aurait-elle pas augmente? 
Après les besoins rësultant de la sensibilité et «le la mo- 
bilité, viennent ceux qui sont engendrés par le jeu des o-- 
ganes destinés ì renouveler constamment les materiaux do 
l'organisme se compo_e, comme aussi ì expulser ceux 
doivent être éliminës, n'etant pas assimilables ì la matière. 
animale. Deux vastes surfaces servent ì l'accomplissement 
de ces ïonctions importantes, et concourent avec les organe 
des sens a établir des rapports entre rhomme et le monde: 
où il est placé : l'une est lormée par la membrane muqueuse 
qui revêt les caités du corps ; l'autre est l'enveloppe ap- 
pelée peau. Le premier acte de ces fonctions d'entretien est 
la d i ge s t i o n, la source du sang, avec lequel coulent par. 
tout les matériaux notritits. Si cette fonction est une des pre 
mères conditions de l'entretien de la vie, elle est aussi la 
cause de non,breux abus nuisibles  la sante. C'est surtost 
cette partie des connaissances hygiéniques qui est immenoe 
et dont rsous ne pouvons présenter qu'une faible ébauche. 
L'appétit et la soif sont les moniteurs qu'on devrait con- 
sulter pour prendre des aliments et des boissons. Ce n'est 
pas sans raison qu'un adage médical proportionne la liste 
de plusieurs maladies  celle des progrès de l'art du cuisi- 
nier. En nous laissant aller aux plaisirs du palais, nous man- 
geons ordinairement trop : ce n'est pas une satioté pénible 
qoi devraitdéterminer la fin de nos repas ; ce devrait Cre un 
sentiment de bien-ètre au moral comme au physiine_ Il faut 
aussi proportionner la quantité des aliments, indépendam 
ment de leur nature, à l'àge et ì l'exercice. 
Les inconvénients qui dérivent d'une quantité d'aliment 
insuffisante se conçoivent facilement, et, sous ce rappor| 
l'estomac est l'ennemi du pauvre. Les substances alimentaires 
ont une influence variée sur la santé en raison de leur qua- 
litW: il nous est impossible de les passer en revue ; conten- 
tons-nous de dire que beaucoup d'erreurs et de préjugés 
existent à ce sujet. Il serait très-difficile de donner des rè- 

.':2 



.;o HYGIÈNE -- 
gles de diétéliquc d'une application générale; car ce qui 
est pniblement digré par les uns l'est aisément par d'au- 
tres. Chacun doit chercher à acquérir par sa propre expé- 
rience la connaissance des aliments qui conviennent le 
mieux à sa nourriture. Les b o i s s o n s sont un besoin impé- 
rieux pour l'homme : ce sont elles qui réparent en grande 
partie la perte des fluides dépenss par les voies de sécré- 
lion et d'excrétion ; la quantité nécessaire pour l'entretien 
de la sauté est indiquée par la sensation de la soif, mais 
l'homme est loin d'ëcouter cette suggestion : sous ce rap- 
port, il se distingue à son désavantage des animaux, comme 
sous celui de faire l'amour en tout temps, ainsi que l'a ju- 
dicieusement remarqué Figaro : laqualité des boissons nuit 
encore plus intensivement et plus communément. Les diffë- 
rents liquides qui nom« servent de boLssons étant absorbés 
dans l'estomac sans Cre soumis aux lois de la digestion, on 
peut juger combien ils modifient promptement le sang, et sur- 
tout sa propriété présumée d'tre l'ecitateur des nerls. Lors- 
que l'acte de la digestion est accompli, il faut que sou pro- 
duit, qui est le premier état du sang, soit perfectionné dans 
un non,cet appareil, où il subit une action très-remarquable. 
Si l'existence de l'homme dépend de la terre sous le rap- 
port des comestibles et des boissons, elle dépend aussi riguu- 
reusement de l'atmospl,ère; la respiration est un besoin iné- 
vitable, qui exige pour condition principale un air pur : il y 
a dans cette fonction, comme dans celle de la digestion, 
un choix de matëriaux propres à entretenir l'organisme et 
un rejet de matériaux impropres à ce but. C'est dans l'un et 
l'autre appareil une opération indispe,,sable pour la santé. 
D'autres organes agissent anssi comme dépu,'ateurs, et leur 
action est alement nécessaire : telle est surtout celle des 
organes urinaires; la se trouvent diverses causes de maladies. 
Les fonctions de la peau qui revèt le corps sont multiples 
et importantes pour la conservation ,le la santé. Comme or- 
gane du tact, cette surlace contient beaucoup d'expansioqs 
nerveuses dans son tissu, et a une s)mpathie très-etroite 
avec le reste de l'organisme : elle est comme le régulateur 
de la chaleuranimale ; elle est tout a la fois une voie d'absorp- 
tion et une d'excrétion. On comprend combien il importe 
que ces fonctions diverses ne soient pas entravées. D'autres 
fonctions, destinées i entretenir la vie humaine et i la re- 
produire, sont eucorc des sources de besoins qui doivent 
être satisfaits dans de justes mesures pour que la santé se 
consetwe. Il faudrait passer en revue la physiologie pour 
montrer les données hygiéniques qui en decoulent ; mais, 
dans les proportions qui nous sont prescrites dans ce tra- 
vail, nous pouvons seulement en faire comprendre l'impor- 
tance par.un simple aperçu. D r CnARnONIBg. 
HYGIENE (Conseil d' ). Voye'- COrsE. n'avct/-E 
nLIQUe .T US SALUBiITÉ. 
HYGIENE PUBLIQUE. Voçe-. 
HYGIN ou HYGINUS (Ccs-Jc,us), savant grammai- 
rien romain du siècle d'Angusle, qui l'estimait beaucoup 
et le nomma directeur de la Bibliothèque Palatine. Jadis 
ou le regardait généralement comme l'auteur du Fabzlarzm 
Liber, collection de 224 fables, tirCs du cycle des traditions 
grecques et romaines, et des quatre livres Poeticon astro. 
nomic6n, oo il est parlé du monde, de la sphère céleste et 
des signes du zodiaque au point de vue mythologique. 
Pourtant, à cause du style corrompu et de l'exposition sans 
gent qui règnent dans ces deux ouvrages, la critique a dé- 
cide depuis longtemps ou qu'ils ont Ce interpolés plus tard, 
ou qu'ils appaoEiennent  un tout autre Hnns, qui vis'ait 
sons les Antonins, et peut-être mme sous Théodose. L'é- 
dition la plus complète s'en trouve dans les Mytho9raphi 
latin, de Mnncker (2 volumes, Amsterdam, 1681), etde van 
Staveren ( 2 volumes, Leyde et Amsterdam, t73, in-4 ° ). 
A. Mai a le premier fait connaRre, d'après les manuscrits du 
Vatican, dans le tome III des Clcssici auctores e Vatiean. 
codd. edit. ( Borne, t851 ), une nouvelle collection de fa- 
bles qui pore bgalement le nom d'H.vginus. 
HyGRoMTBE, HYGHOMÉTH tE (de¥po:, humide, 

HYG 
et p.az@v, mesure). L'air qui nous environne, quelque set 
qu'il nous paraisse, tient toujours en suspension une cer- 
taine quantité d'eau, suivant le des'Wde sa température, 
les saisons, les directions des vents, etc. De[mis lonemps. 
les phys/ciens ont imaginédivers instruments pour se rendre 
compte de la quantité de vapeurs aqueuses qui peuvent*tre 
mélangées avec un gaz : e.es intruments ont reçu le nom 
d'h9a)mètres. Les principes sur lesquels repose leur cons- 
truction, l'interprétation de leurs indications, relativemen à 
notre atmosphère constituent l'hgromtrie, partie im- 
portante de la météorologie. 
L'état hç9romtrque de l'air ne dépend pas uniquement 
de la quantité absolue de vapeur d'eau qu'il renferme. 
Une mme quantité de vapeur, dissémin6e dans un air 
chaud on dans un air froid, lui communique des propriétés 
hygrométriques notablement différentes, • "gel air, dit 
M. Foucault, qui, t la température de 4 ou 5 degrés, pr6, 
sentera tous les caractëres de l'humidité extrême, favori- 
sant la déliquescencedes sels, la dilatation des matiëres or- 
ganiques, la détorsion des cordages, reprendra, par une 
simple élévation de température, toutes les apparences d'un 
air s; sans perdre sa proportion de vapeur, il deviendra 
propre à sëcher le linge, à et'fleurer les Is et à contracter 
les matières organiques La proportion de vapeur restant 
la mme, l'élément metéorologique qui constitue l'Cut hy- 
grometrique aura cependant changé, et si l'on veut arriver 
a le déterminer expérimentalement, il faut d'abord le 
finir d'une manière précise et qui permette de l'exprimer 
numériquement. Assurément, si l'air sur lequel on opère 
avait toujours la mme température, le degré hygrométrique 
ne serait pas difficile ì definir ; on commencerait par cons- 
tater qu'il y a une proportion maximum que la vapeur 
d'eau ne peut pas dépasser en se mélaneant à cet air, et 
toutes les fois que cette propre'tion serait reconnue exis- 
tante, on enqdoierait pour la noter le chiffre le plus élevé 
de l'échelle hygrométrique, le chiffre indiquant que l'air est 
complétement saturé. Au contraire, iorsqte cette propor- 
tion ne oerait pas atteinte, on tàcherait de déterminer par 
une méthode quelconque combien il s'en manque, et la 
fraction de salutation ainsi reconnue donnerait par son 
numérateur le degré hygrométrique reprentant une idée 
nette à i'eprit. Trouve-t-on que cette fraction s'Cève an, 
10, aux 20, anx 25 eenti/mes de la quantité maximum, on 
exprime par 10, 20, 25 degn'és l'état bygromëtrique de l'air 
éprouvé. Or, rien n'emphe de determiner une fois pour 
toutes le maximum de salutation de l'air à toutes les tem- 
pératures, et cette besogne une fois faite le desWbyo- 
métrique conserve sa signification dans toute Fetendue de 
l'Cbelle tbermométrique; car, à quelque température qu'on 
opère, ce degré exprime la valeur de la fraction de satura- 
tion correspondante. En définitive, prendre le degré hygro- 
métrique d'un certain air, c'est rechercher la proportion de va- 
peur d'eau contenue dans cet air et la comparer à la quan- 
tirWmaximum qu'il peut contenir  la méme température. 
Diverses méthodes sont employíes pour les observations 
hygrométriques. M. Begnault, à qui l'hyomítrie doit une 
grande partie des procès qu'elle a faits dans ces derniëres 
ann6es, les distingue en m.thode chimiq«e, raethode des 
absorbants organiques, mëthode de l'hygromètre tz con- 
densation et mthode du psvchroraè2re. 
La première de ces méthodes consiste à faire absorber par 
un corps avide d'eau la vapeur contenue dans un volume 
déterminé d'air. Ce corps étant pesé avant et après l'exp6- 
rien,e, on conclut de son aumentation de poids la pro- 
portion de vapeur que renfermait l'air. Cette méthode est 
rigoureuse ; mais elle exige les soins les plus minutieux de 
la part de l'exp6rimentatenr. 
Entre lesappareils qu'empluie la méthode cldmique et ceux 
qtti appartiennent à la méthode des absorbants organiques, 
on pourrait eu placer un dont la constrnction est de« [,lus 
simples. Cet hygromëtre consiste en nn fléau de balance, 
une des extrémités duquel est suspendue une éponge pari;tire- 



HYGROMÈTRE -- ItYMEN 
ment nettoyée,'ou tout autre corps s'imbibant aisement à 
l'humidité atmosphérique. Un contre-poids est suspendu à 
l'autre extrémitë du fléau : au terme moyen d'humidité, il fait 
cquilibre  l'éponge, ce qu'indique la direction alors verticale 
d'une aiguille perpendiculaire au milieu du tleau. Cette aiguille 
se meut sur un are de cercle graduésuiant des divisions cor- 
respondant aux divers degrés d'humidité de l'atmosphère. 
Les instruments formes par des stibstances qn'allonge 
l'humidité rentrent dans la mfithode dite des absorbanls 
organiques. L'h)gromètre le pins parfait de ce genre est 
l'hygromètre it cheveu, ou hygromètre de Saussure, 
du nom de son illustre inventeur. Quand on se propose de 
construire cet instrument, on choisit un certain nombre de 
cheveux d'une grosseur égale et d'une contexture aussi 
unilorme que possible ; puis on les degraisse en les lessi- 
vant dans une dissolution alcaline I!gèrement tiëde; on les 
laisse sécher pour les trier de nouveau. Cela lait, on prend 
un de ces cheveux, on le fixe par un bout au moyen d'une 
pince, que porte une petite potence. Plus bas, se trouve 
une poulie : elle a deux gorges, dans l'une desquelles on 
fixe l'autre bout du cheveu ; dans l'autre gorge de la poulie 
est enroulé un fil de soie, auquel est suspendu un petit poids; 
le tout est disposé de façon que le poids fait constamment 
tendre le cheveu. Enfin, l'axe de la poulie porte une petite 
aiguille dont la pointe parcourt les divisions d'un arc de 
cercle. 'oici maintenant quel est le jeu de l'instrument : 
quand le temps devient humide, le cbeven, s'imbibant de 
vapeur d'eau, s'allonge, le contre-poids descend, et fait 
tourner l'aiguille vers la division du cadran qui indique 
l'humidité extrëme. L'air devient-il plus sec, le cheveu lui 
abandonne son hunfidité, se raccourcit, lait tourner la 
poulie en sens contraire, et l'aiiile s'avance vers le point 
du cadran qui indique l'extrême secheresse. Lorsque tout 
l'appareil est confectionné, et que le cheveu est en place, 
on place l'instrument sous la cloche de la machine pneuma- 
tique, dans laquelle on a mis de l'acide sulfurique concentré; 
on fait le vide : l'acide absorde le peu de vapeurs qui res- 
tent dans la cloche, du moins à très-peu de chose près. 
Au bout de quelques jours, l'aiguille cesse de marcher vers 
le sec; on note ce point sur le cadran : c'est le point fixe 
de la sécheresse extréme. On le matxlUe en écrivant 0. 
Cela lait, on porte l'instrument sous une cloche dont on a 
mouillé les parois intérieurs avec de l'eau distillee : les 
bords de la cloche plongent aussi dans quelques millimètres 
d'eau : l'aiguille parcourt le cadran en sens contraire, et on 
note le point oh elle s'arrète définitivement en écrivant fil : 
c'est le point fixe de Uhumidild extréme. Enfin, on divise 
l'arccompris entre les points fixes en t00 parties égaies, et 
l'instrument est terrainC 
L'fiygromètre h cheveu est fort simple, trè-ingénieux ; 
mais il est bien loin d'indiquer exactement les divers degrés 
d'humidité que subissent les gaz. M. Regaault a, en effet, 
démontré que cet instrument n'a ai la sensibilité ai la ré- 
gularité de marche qu'on lui a attribuée. A plus forte raison 
ces remarques s'appliquent-elles à ces grossiers hygromè- 
tres ot le cheveu est remplacé par une corde-h boyau; celle- 
ci faisant mouvoir, an lieu d'une aiguille, soit le capuchon 
«'un moine, soit tout autre indicateur. 
La mëthode de l'hygromètre à condensation repose sur 
un fait qui se produit tous les jours sous nos yeux. Sup- 
posons une carafe pleine d'eau exposée dans un lieu lermé : 
au bout d'un certain temps, il est évident que la tempéra- 
ture de la carafe et celle de l'eau qu'elle contient seront 
égaies à celle de l'air ambiant. Supposons cette température 
de o ° : si l'on jette des glaçons dans la carafe, l'eau se 
refroidira ainsi que la carafe, et il arrivera un instant ot 
,a carafe se couvrira  l'extérienr d'une coucloe d'humidité : 
c'est ce qu'on appelle le point de rose. 11 est facile d'ex- 
pliqu¢r pourquoi il se depose de l'eau sur la carafe : en et- 
let, les g!açons qu'on a jetés dans le vase ayant fait baisser 
tu température au-dessous de zéro, les vapeurs d'eau con- 
tenues dans l'air qui se trouvent en contact avec sa surface 

51 
extérieure se refroidissent à leur tour, et passent à l'Atut 
liquide. On observe, au reste, un phénomëne semblable, 
surtout en été : il suffit de verser de l'eau hla glace dans une 
carafe exposfie dans un lie,l chaud pour la voir en peu de 
temps se couvir de gouffelcttes d'eau. 
Si, au lieu d'une carafe, on emploie une surface métalli- 
que polie, le phënomène acquerra une netteté dont on pourra 
tirer de précienses indications. L'abaissement de la tempéra- 
ture, qui correspond dans un certain air au point de rosce, 
donne bien simplement son fitat llygrométrique ou sa frac- 
tion de saturation ; car cette temperature est preciscmeut 
celle à laquelle il sulfirait d'abaisser cet air pour qu'il 
parvint / sataration avec la quantité d'eau qu'il contient. 
M. Regnauit a lui-même construit expérimentalement la table 
des sathrations de l'air à toutes les températures ; la deter- 
mination du point de rosée, rapprochee de la température 
ambiante, donne dans la table les nombres dont le rapport 
exprime la fraction de saturation. 
Quant h la méthode dt] psychrmnètre, due h Gay-Lussac, 
elle est basée sur l'observation simultance de deux thermo- 
mètres, l'un sec et l'autre mouillé. L'ëvaporation est d'au- 
tant plus rapide que le milieu ambiant contient moin d'eau ; 
le thermomètre mouillé accuse l'abaissement de température 
qtd accompagne cette évaporation. On comprend facilement 
que le degré de saturation de l'air sur lequel on opère soit 
une fonction de la temperature des deux.instruments et de 
la pression barométrique ; mais la formule qui relie ces 
divers ciCents renferme un coefficient qui varie pour cha- 
que localite, et, du reste, elle n'est raie que dans une frac- 
tion de I«echelle hygrometrique. 
It'LAS, fils de Teiodamas, remarquable par sa beauté, 
fut le favori d'Hercule, qu'il accompagna dans l'expédition 
des A rgo haut es. Les Xaïades, séduites par ses cllarmes, 
l'attirèrent dans le» flots, tandis qu'il était venu  terre, aux 
environs de Troie, puiser de l'eau au fleuve Ascanius. Her- 
cule chercha partout son favori en l'appelant d'une voix plain. 
tire; pendant ce temps-là, le navire Argo continuait sa route 
sans l'attendre. Par la suite, ou célëbra dans cette contrée, 
en mémoire de cet évenement, une fète qui durait trois 
jours, et dans laquelle le prètre appelait trois fois Hylas. 
HYLLUS fils d' Fle r c u I e et de D é j a n i r e, épousa 
lole à la mort de son père, et devint alors le chefdes H er a- 
c I i d e s. Mais expulse du Péoponèse par E u r y st h é e, il.se 
rélugia  Athènes, où il éleva  la Pitié un temple, devenu 
plus tard un refuge assuré pour les criminels. H)-ilns fut tué 
en combat singulier par Échemus, roi des Tégeates. 
H'LOBIEXS. Voye'- GsmsosoFntsxEs. 
HYLOZOïSME. On appelle ainsi l'opinion suivant la- 
quelle les éléments primitifs des choses ( la matière, selon 
l'expression des philosoplles grecs, Fltylee) étaient ori- 
nairement animés d'une force vitale dont Faction se révlait 
dansles phénomènes de la vie. En tant qu'il parait superflu, 
pour l'explication de la vie qui ne se manifeste effective- 
ment que dans un petit nombre des corps ph)siques, de re- 
monter h une intelligence crcatrice et régulatrice comme 
cause première, on ì souvent désigné l'hylozoïsme comme 
une varierWde l'athéisme, et on l'a distingue des antres sortes 
d'athéi sme. (l'oye-- CCSXLtÉ. ) 
H'MATIOX. Voyez Cn. 
ilYIEX, HYMÉNEE { en grec Gv, pellicule, voile 
léger qui couvre le sanctuaire des amours ; anatomique- 
ment, c'est une membrane qui ferme l'entree du vagin ehoz 
les vierges. En botanique, l'hymen est une peau déliée 
qui enveloppe le bogton de la fleur, et ne se rompt que 
lorsqu'elle s'épanouit. 
Dans la fable, llymen est le dieu qui préside aux ma- 
riages. lymd#e, en poésie, signifie chanson nuptiale, ou 
mieux, acclamation consacrée h la solennite des noces. L'é- 
pitllalame, h sa naissance, n'était que ce chant, cette 
acclamation repétëe en refrain : « Hymen.!  hymoene ! » 
On en trouve l'origine dans Fhistoire que Sereins nous a 
transmise d'un adolescent d'Atllenes ou d'Argos : ll?men 
2. 



552 
»u Hyméu dalt un jeune homme d'un exlrme beauté, 
mais fort pauTe et d'une obscure origine. Il tait dans 
cet ge où un gar.con peut aisémeut passer pour une fdle, 
lorsqu'il devi,t amoureux d'une jeune Athènienne ; mais, 
comme elle était d'une naissance bien au-dessus de la 
sienne, il n'osait lui déclarer sa passion et se contentait 
de la suivre partout. Un jour que les dames d'Athènes de- 
"¢ak'nt célèhrer, sur les bords de la mer, la fète de Cérès, 
sa maltresse devait ètre, il se travestir, et, quoique inconnu, 
son air aimable le fit recevoir dans la troupe dévote. Ce- 
pendant quelques corsaires, ayant fait une descente subite 
à l'endroit où l'on était assemblé, enlevèrent toute la pro- 
cession, et la transportèrent sur un rivage éloigné, où, après 
avoir débarqué leur pri»e, ils s'endormirent de lassitude. 
Hyménée propose à ses compagnes de tuer leurs ravis- 
seurs, et se met à leur tète pour exccuter ce projet. 11 se 
rend ensuite à Athènes, afin de travailler au retour des 
Athéniennes, déclare dans une assemblée du peuple ce 
qu'il est et ce q,d lui est arrivé, et promet, si on veut lui 
donner en mariage celle des filles calerCs qu'il aime, de 
ramener toutes les autres. Sa proposition est acceptçe : il 
épouse sa maitresse, et, en faveur d'un mariage si heureux, 
les Athèniens l'invoquèrent toujours depvis dans leurs 
unions sous le nom d'Hymen, et célehrêrent des fétes en 
son honneur, appelées h/mdnées. Dans la suite, les poëtes 
ïormèrent une généaloe à ce dieu, les uns le faisant naitre 
d'Uranie et établissant ainsi l'origine celeste du mariage; 
d'autres, d'Apollon et de Callioppe, divi,dtés s}.mholiques de 
l'harmonie, ou de Bacchus et de VèllUS. On le représentait 
toujours sous la figure d'un jeune homme couronn de fleur., 
surtout de marjolaine, tenant de la main droite un flambeau, 
et de la gauche un voile de couleur jaune. Dans ce dernier 
cas, il serait frère de I'A m o u r. Bovxl.OX. 
ltYMÉNIUM couche membraneuse et superficielle sur 
laquelle reposent immédiatement les organes de la fructifica- 
tion des cbampi.gnons. 
IIYMÉNOPTEES ( de Wq',, membrane, et .,, 
aile). Dans la métbode de Latreille ( 
les b)mènoptères, ainsi nommès par Linné ì cau«e de leurs 
ailes eutièrement memhraneuses, foment le neuviirae or- 
dre de la classe des in sectes : nous allons indiquer snm- 
mairement leurs principaux caraclères. Outre leurs yeux 
¢ompoès et a facettes, la plupart des Iqmenoptère por- 
tent au sommet du front trois yeux lisses, disposés en 
triangle, et uommés slemmates : leurs antennes, liliformes 
ou sétacées dans la plupart des sentes, varient considéra- 
blement pour la forme, la disposition, le mode d'insertion 
non-seulemenl d'espèce à espèce, mais encore chez des in- 
dividus de mme espèce, mais de sexe diïferent : leur 
|ouche présente un appareil très-comldexe, dans lequel en- 
trent comme éléments une lèvre supérieure, deux man- 
dibules distinctes, deux mìchoires extrmement allongées, 
ci une lèvre inférieure tubulaire qui s'allonge en terme de 
hompe, propre ì conduire des substances liquides. Le cor- 
selet des hyménoptères est formé de trois pièces distinctes, 
que Kirby a désignées sous les noms de collier, de thorax 
et de mdtathorax. Le collier supporte la première paire 
de pattes, et s'étend, dans quelques genres seulement, jus- 
qu'/ la partie supéieure du corselet; le thorax donne at- 
tache aux pattes moyennes et pestèrieures et ì deux paires 
d'ailes, transparentes ou byalines, nues, membrane:tses, 
veiues Iongitudinalemcnt, et croisées horizontalement sur 
le corps ; les ailes supérieures, constamment plus grandes 
que les tufCleures, portent à leur origine une petite écaille 
arrondie et convexe : le métathorax .'e con[end souvent 
avec le thorax ; lorsqu'il demeure dist!nct, il se présente 
|eus la forme d'un écusson plus ou moins étendu. L'abdo- 
men est, en général, séparé du tronc par un étrangement 
très-marqué, et parait comme appendu, au moyen d'un pé- 
dicule, à l'extrémité inférieure du corselet ; il est for,nWde 
segments dont le nombre arie de  à 9, et son extrémité 
terminale, chez les femelles, est top jours munie d'une tarière 

HYMEN -- HYMNE 
qui leur sert à creuser un abri pour y déposer leurs œufs, 
ou armée d'un aiguillon extrSmement aigu, et percée d'un 
canal par lequel l'insecte "¢erse dans la plaie qu'il a faite un 
liquide sécréte par des glandes spéciales, et doué de pro» 
priétés vénneuses. Les hymnopres sont donc des insec-. 
tes h mandibules et  mchoires, à quatre ailes nues, mem- 
brancuses, reinCs longitudinalemeut ; à abdomen armé, 
chez les femelles, de tarière ou d'aiguillon. 
Les hménoptères subissent une métamorphose complète; 
leurs larves sont de deux ordres : les unes soqt dépour- 
vues de pattes et ressemblent à des vers (les insectes par- 
faits qui proviennent de ces larves ont tous l'abdomen pé- 
diculé, ou uni au corselet par quelques anneaux grêles et 
étroits) ; les autres sont portC sur six pattes  crochet, 
et souvent aussi elles offrent douze à seize pattes simple- 
ment membraneuses. Les larves apodes se nourrisseur de 
cadavres d'insectes, de larves, de nymphes, et mme 
d'œufs; comme elles sont dans i'imposibilité de se mouvoir 
pour aller chercher elles-mèmes leur nourriture, la mère 
les approvisionne d'avance, tant6t en portant leurs ali- 
ments dans les nids qu'elle leur a construits, tantèt en 
plaçant ses œufs dans le corps mème des insectes dont ses 
larves doivent se nourrir; tant0t enfin ses larves sont 
élevées en commun par des insectes de sexe neutre, réunis 
en sociétés et exclusivement charges des travaux. 
Les hyménoptère% parven,]s à leur état parfait, vivent 
presque tous de fleurs, et sont en général pl,ts ahondaqts 
dans les pays méridionaux ; la durée de leur vie, depuis leur 
naissance jusqu'à leur dernière metamorphose, est bornée 
au cercle d'une année. Latreille les divise en deux sections : 
les tërbrants, dont l'abodmen est muni d'une tarière; les 
porte-aiguillons, dont l'abdomen est armé d'un dard. La 
première section renferme les genres c 9 n ps, ichn e u- 
non, etc. ; à la seconde appartiennent les abei|les, les 
fo u r m i s, les g u  p e s, etc. BILWELn-LErÈE. 
IIYMETTE (Mont). Hrrodote l'al»pelle 
C'est une moutae de la Grèce, dans I'A t t iq u e, près de 
ville d'Athènes, an midi oriental, sur la c6te du golfe 
Saronique. Elle est fort célèbre chez les poëtes à cause de 
l'excellent miel que l'on y recueillait. Le mont Hymette est 
appelé encore aujourd'l,ui par quelques Francs monte Mette; 
mais on le nomme généralement Lampravouni. Il est à 12 
kilomètres d'Athènes, au delà de l'Ilissus, et son élévation 
est de 9OO mètres. Sport, qui l'a visité, dit qu'il n'a guère 
moins de 30 à 35 kilonètres de tour. Le sommet ou pla- 
teau n'est ni babilWni cultivé. Il y a cependant au nord sm 
couvent de Grecs, que les Turcs nomment Cosbachi. On 
y fait quantité de niel, qui est fort estimé, parce qu'il est 
moins cre que les autres miels de la montagne, qu'il est 
d'une bonne consistance, d'une belle couleur d'or, et qu'il 
porte plus d'eau qu'aucun autre quand on en veut faire du 
sorbet ou de Phydroluel. Si l'on en croit Strabon, le meil- 
leur miel de l'Hymelte était celui qu'on recueillait près de 
ses mines d'argent, qui sont depuis longtemps perdues; 
mais cette qs»alité tenait particulièrement à la fabrication. 
Le mont Hymette 6tait encore célèbre par le marbre ma- 
gnifique qu'il recélait dans son sein : blanc comme l'alb/Rre, 
mlé quelquefois d'autres couleurs, il était surtout remar- 
quable par sa finesse et le poli qu'il prenait sous le ciseau 
de l'artiste. Il a fourni, en grande partie, les materiaux 
des temples et des monuments de la cité de Périclès. Borne 
aussi en fit souvent usage. 
IIYMXE  substanti! masculin, mais féminin lorsqu'il 
s'agit des l,mnes de l'Êlise. Ce mot, tout grec, vient de 
¢3p.,«, louange. L'l,ymne ne fut d'abord qu'une sainte et 
douce exclamation de la voix de l'homme en contemplation 
devant les merveilles du Créateur. Longtemps après il se re- 
vètit du luxe de la pensée, et ne s'éleva plus vers le ciel que sur 
les ailes vibrantes du rbythme et de la mélodie. Ce fut dans 
l'Orient, cette contrée des parfums et de l'encens, que ces 
alleluiah, composés pa des légistateurs, des grands prètres 
et des rois, reteatireut pour la premier« fois sous le riche tu- 



bernacle de Jébovah. Ces cantiques racontaient et célébraient 
la grandeur de Dieu, sa puissance, sa justice, son immen- 
sité." sa sagesse infinie. Plus tard, le Nord eut aussi ses 
bymnes; mais des bardes cruels, qu'irritaient un sol de g|a- 
ces, un ciel. d'airain, les chantaient dans des forèts profon- 
des et t«nébreuses, aux seuls dieux du sang, " Mars, à 
Thor, à Teutatès, à Odin. Les plus antiques hymnes connus 
ont ceux deMoïse et de Débora, la Prophétesse. Le plus 
grand nombre des c a n t i q u e s hébreux ont été recueillis 
dans la Bible par Esdras, sous le nom de Sepher thehillim 
(livre des louanges). Tout ce que nous pouvons savoir de 
la poétique de ces saintes inspirations, c'est qu'un sens et 
une pensée presque complète sont enfermés dans le paral- 
lélisme de deux phrases, ou vers, identiques en nombre de 
syllabes ; le plus court n'a pas moins de six ou sept sylla- 
bes, et le plus long est à peu près du double. On sent aussi 
que le poëte sacré affecte souvent les rimes ou consonnan- 
ces; mais elles ne semblent point y gtre de rigueur. Toute 
autre prosodie, si elle existe, est restée voilée à la.sagacité 
de nos plus célèbres hébraisants. Ces hymnes se chantaient 
aux sons des cithares et des tltes par cieux cboeurs alter- 
natifs : le premier chantait l'hymne ; l'autre,  des intervalles 
déterminés, répétait un distique intercalaire, ou refrain. La 
grave et mélancolique Mizralm (Egypte) ne paralt pas avoir 
honoré ses tristes et emblémafiques divinit avec cette 
pompe musicale de voix et d'instruments ; le sistre senl, ou 
la fl0te, se faisait à peine entendre dans ses mystérieux 
bypogées. 
Les Grées, qui avaient une |oule de dieux " honorer, 
s'emparèrent de ph)rmne hébralque, lls la soundrent à leurs 
rhythmes poétiques et à leur m.lodie. Ce chant fut chez eux 
de plusieurs espèces : il était invocatf, I«udaif, admi- 
ratif, volif, théoçoniue, philosophue, selon les cir- 
circonstances. Les prétendus hymnes d'Orphée sont de la 
première espèce. Ceux d'Homere exaltent les passions et 
les désordres de ses dieux charnels. L'hymne grec et riant, 
mondain. Cependant le stoïcien Cleanthe a fait un hymne 
en l'honneur de Jupiter, ou plut6t de lah, le dieu créateur : 
dans ce poëme éclate une certaine majesté de pensée chré- 
tiennes. Les hymnes de Cailimaque, dont la plupart étaient 
populaires, c'est-à-dire chantés dans les temples des dieux, 
sont d'une sévérité et d'une réserve qui conviennent à la 
Divinité, sous quelques formes, quelques attributs que l'ho- 
norent les hommes. Les Dioscures de Théocrite sont aussi 
ce qu'il y a de plus parfait en ce genre de poésie sous le 
double rapport du style, des images et de la morale. Ana- 
erCn, Sapho, Simonide, Bacchylide, T$,tée, Pindare, qui 
les chantait lui-racine dans le temple de Delphes, compo- 
sèrent des hymnes. Numa lut l'auteur du Saliare, chanté 
par les prêtres saliens. Les choeu fs, dansla tragédie grec- 
que, sont la plupart du temps des bymnes ou invocations. 
Les bymnes en l'honneur d'Apollon et mèn,e des grands 
dieux se nommaient poeans, ceux de Bacchus dithy- 
rare be s. Des princes, égarés par la flatterie et leur Iélicité 
d'ici-bas, ont osé usurper sur celui qui c,'éa le ciel et la terre 
son sacré privilége. A|exandre, Démétrius Poliorcète, des 
Césars mme sont de ce nombre : on les invoquait comme 
des dieux. 
Enfin, quand le christianisme eut dressé ses autels au 
seul Dieu vivant, des hymnes cbastes et plus pures de pensée 
que de style peignirent, aidées d'une mélodie solennelle, 
ou les joies du ciel et de ses saints, ou les tribulations et le 
martyre du chrétien snr la terre. Au sixième siècle, Fortu- 
nat, évgque de Poitiers et poëte célèbre alors, écrivit ces 
bymnes que l'Église a, en partie, adoptées pour ses offices, 
entres lesquelles se fait remarquer le Vexilla Regis. On 
doit ì Claudien Mamert, frère de l'archevêque de Vienne 
de ce nom, en l'an 463, le Pange lingua. Profondément 
versé dans la liturgie, ce simple religieux régla l'ordre des 
ftes, celui des offices, le chant des psaumes, et composa, 
entre autres, l'office des Rogations, tel qu'il se chante encore. 
Ces hymnes é{aient d'une prosodie peu chtiée, ouvent 

HYMNE  HYMNES FARCIES 
leines de fautes ; mais la naiveté ou l'exaltation des sen- 
timents mystiques et le doux ascétisme qui y dominent les 
feront vivre autant que l'Église. La prose méme nsurpa 
sur l'hymne sa m).o,;.e. Le célèbre Pergolès adapta une 
musique immortel!e et lugubre comme le sépulcre à ces sim- 
ples paroles : 
Stabat mater dolorosa 
Juxta crucem lacrymosa. 
On doit reconnaitre dans ces deux lignes de prose l'imita- 
tion dtl parallélisme et de la rime des cantiques bébreux. Il 
était donné au grand siècle de Louis XIV d'offrir des illus- 
trations en tout genre. Santeuil changea la lyre d'Horace en 
une harpe angélique. Sur les rhythmes nombreux du poete 
d'Auguste, elle fit retentir le temp!e saint du fameux Stu- 
Çete 9entes, de l'Opus peregisti et de l'Hgmnis dum re- 
sonat. Une mélodie religieuse et simple, plut6t qu'une har- 
monie savante, fait encore ressortir les belles pensées du 
célèbre hymnographe. Le salularis à 3 Voix de Gosses 
est, parmi les modernes compositicns musicales d'église, 
un chef-d'oeuvre de chant religieux. 
En 1793, quand les portes du temple saint furent con- 
damnées et que les hymnes du Dieu d« chrétiens se turent 
sur toute la face de la France, des bymnnes au dieu des 
batailles ( la Marseillaise ), h la Nation ( le ldveil du 
peuple), à la Liberté, à la Victoire, qui elle-mëme ou- 
vrait la barrière des combats à nos armées, à l'Eternel enfin 
firent entendre, non sous des cintres de pierres, mais 
sous la route céleste, leurs terrains entrainants, leur ter- 
rihle et magnifique harmonie, qui soulevaient des flots 
de peuple, ou gagnaient des batailles. Les Chénier, les 
Rouget de l'lsle, les Méhul attachèrent leur nom à ces 
compositions impérissables, alors expression francbe et 
forte de toute une grande nation, llais enfin les temples 
sacres se rouvrirent, et les saintes hymnes, chants de paix 
et de consolation, réveillees dans le sanctuaire sur la harpe 
des Iévites, montèrent au pied du Dieu vivant et versèrent 
sur bien des plaie.q le baume de leurs pensées reliflenses et 
paisibles, montrant ainsi che= le plus noble peuple de la 
terre l'amour de Dieu et l'amour de la patrie àjamais unis 
ensemble. Dt,xe-Bo. 
HtINE ANGÉLIQUE. Voyez GLORIA IN EXCELSlS. 
HYMXES FABCIES, chants d'église mlés de fran- 
çais et de latin, dont l'origine remonte au douzième siècle. 
Suivant l'abbé Lebeuï, on en faisait sage pour désennuyer 
les fidèles à certaines fëtes, et leur faire retenir en fran.cais, 
au mo.en du chant, l'histoire du martyre des saints ou de 
pieuses pensées. C'était alors la coutume dans les églises des 
Gaules de faire lire en latin, à la messe, les actes des saints, 
usage qui s'est maintenu jusqu'au neuviëme siëcle, cette 
lane étant peut-étre encore suffisamment entendue par 
les anciennes familles gauloises. Dom Edmond Martène a 
tiré d'un missel manuscrit de Saint-Gatien, de Tours, da- 
tant de six à sept cents ans, la formule des complaintes que 
l'on y chantait le jour de Sainl-Ëtienne. On peut voir dans 
le Glossaire de Ducange, au motfarcia, les preuves que 
c'était un usage universel dans toutes les provinces de France. 
Au commencement du dix-huitième siècle, à Dijon, on 
chantait encore l'Citre de Saint-Ëtienne en langage alter- 
nativement latin et Irançais; h Aix, en Provence, on la 
chante mme, dit-on, encore ainsi. On appelait ces chants 
Plants de Saint-Estève, c'est-à-dire les Plaints Saint- 
Etienne.. Les Ordinaires de Narbonne et de Chglons font 
aussi mention de ces sortes d'épitres doubles, qu'on appe- 
lait des Epistres farcies. Après ces explications, on n'est 
plus embarrassé pour comprendre le passage de l'ordonnance 
d'Eudes de Sully, évgque de Paris, de l'an 1198, sur les ré- 
jouissances des fgtes de Noël, oh il est lait mention de 
épltres. « La messe, y est-il dit, sera célébrée de la mëm 
« manière par qnelqu'un des susdits, sauf qu'on y ajoutera 
« une épftre Jarcie, chantre par deux cleoes en sapes de 
,, soie. » Il importe de ne pas ouhl!er que, les jom ou il y 



24 
avait paraphrase ou commentaire de l'ép|tre de la messe, 
ou était au moins deux pour l'exécution de cette pièce, 
l'ul chantant le fi'anç.ai% l'autre le latin, ou bien le sous- 
diacre se réservant le texte sacré, et deux enfants de chteur 
chaulan! l'explication, monts au jubé, ou à la tribune, 
pour lre mieux enlendus. 
, Le gofit lur cette espècede chant devint si fo qu'on ne 
se contenta pas de i'al,piiquer aux pièces les plus +érées 
et les plus populaires de la liturgie catholique, mais qu'on 
s'en servir, enoere pour parodier ces mmes pièc, et sur- 
tout pour en composer des chansons à boire, de sorte que 
les œuvres entrdacc les hyes fcies revinrent au peuple, 
d'où ees rient. C'est ainsi que le cantique toucitant 
l'enite adorerons fut trsformé en Inite potem»s, irai- 
talion baclfie. ( l%e: ENTRELMtD.) Charl 
HYMNODES (de o, louange, et , chant), 
¢i;ante d'h y m n e s dans l'antiqui{é. Tant6t c'etaient des 
choeurs de jeun vierges, ainsi le vouhit  ère Pallas; 
tan{Ot, comme à Délos, une jeunesse fleurie, choiMe entre 
les deux sexes; tant6t poëtes, mnsiens, femmes, fils, 
filles de prêtres et prëtrcs, ciantant les louanges de la di- 
riaitWaux accords de la cithare- Ma, si c'étt le mat, les 
prtr uls, aux sons doux et lmes de la fiole, ié- 
braient le re du dieu de la lumière. De-BAo. 
HYMNOGRAPHE  celui qui écrit ou compose des 
bymnes (du grec ., louange sacvée, et p;v:, écri- 
vain). L%ntiquité ne compte point de pot oelèbres qui 
n'ent pruit des fi? m n es. Aux grands iyriqu que nous 
avons dià cis il hut ajouter A,thès, Olen de Lcie, 
Olym de Mysie, Archi loque, AieC Si ce n'est quel- 
ques minoes t?agments, toutes leurs œuvres ont pri. Les 
chais sacrés de Pindare lui valaient, dit-on, d'Apollou Del- 
phique et de la Pythie, une portion de» prémi que la 
piCWet l'admifion d peuples déposaient aux pieds du 
dieu. La Groe religieuse institua des ptx en faveur des 
hymnor«pls le mieu inspir. On ne it pourquoi 
Orphée et Musée, son disciple, n'ont s sous aux juges 
un nl de leurs I;ymnes. Ras d'eux.mes, oe oyaient- 
ils hors de ligne ? ou pensaient-ils que leur mélodies appar- 
naient exclivent à i'Olympe ? Chez I Romaius, H o- 
r a c e d le trop voluptueux C a t u I i e nous ont laissé acun 
un bu chant culaire. Auguste récompensait large ment 
les lëbr hymnograph, ceux i associaient son sigle 
et oioe à la louange des immortels. Sous Domi{ien, mai- 
gré 1 prix qu'il lui offrait, l'hymnographie ne retrouva plus 
ses rbltfim éthérés et él?siens : elle était passe sor les 
Iëvres chrétienn des rois néophytes, des saintes rees, d 
Pères de.['Eioe  de pauvres solitaires. De-Bo. 
HYOE (Os). Les anatomistes appellent ainsi un 
situé à la rine de la langue, dont il t comme la baoe et 
le ufi. Cen,»m lui a été donn paroe qu'il a la figuoe de 
i' des Grees (d'6, u, et eto;, foe). L'os hylde, chez 
adultes, est d'rdinaie compo de cinq tt os; celui du 
lieu, qui est le piu gros, est al,pelé la base, et les quatre 
aukes le corn. II rot mU ar cinq paires de muscles. 
HYO]DIEN (Appareil). Voyez Cou. 
HYPALLAGE ( du grec «).)., changement, sub- 
veion). C'est, comme i' e n a i I a g e et i' h y p e r b a t e, une 
figure de rhétorique basée s l'idée de changement. Ici 
elle n'est trsouvent qn'apparente et affecte h peine qnci- 
qu paies  la phrase; elle présente, par exemple, 
l'esprit un adjectif transformé en un substantif principal, 
auprès duquel le véritable «ubstantif ne devient plus que le 
génitif de la pfire; ar exemple, In,qu'on dit : la beaut 
 c arbres, au lieu de dire ces bea{x arbre. 
ilYPATIE (en gr Y«0m ), l'une des gloires lin plus 
puces de la fameuse école d' A i e x a n d r i e, naquit dans 
ville vers l'an 370de l'ère cfirétienne, et éit fille de ThOn, 
astno  mathémalicien ceièbre. Après avoir appris de 
son pre la gométrie et l'astronomie, elle puisa data la c- 
vertion et dans les cole des philo«ophes ièhr qm 
florisient alors h Alexandrie les principes fondamentaux 

HYMNES FARCIES -- HYPERBATE 
des autres sciences. A la suite d'un voyage à Athènes en- 
trepris dans le but de perfectionner ses Cudes et d'aug- 
mentor ses connaisance auprès des savants de cette cite, 
alors encore brillant foyer de la science et de la ciilisation 
grecques, elle revint dans sa ville natale enriclfie de tant 
de notions scientifiques diverses que, frappés de la supé- 
riorité de son genie et de ses Imnières, les professeurs des 
diverses écoles et les magistrats d'Aiexandrie l'engagèrent 
à faire des cours pnblàes, et i'appelërent tout d'une voix 
monter dans la chaire de philosophie illustrée par tant 
d'hommes célèbres et en dernier lieu par Plotin. 
Hypatie était mariée au philosophe Isidore ; h une science 
profonde, à une éloquence enchanteresse, à la vertu la plus 
pure elle unissait la beauté la plus touchante. Quoiqu'elle 
for païenne, l'ëvque de Cyrène, Sinecius, eonserva toujours 
avec elle les relations d'une tendre et respectueuse amitié. 
Au nombre des fiommes distingués qui formaient  société 
habituelle et qui avaient conçu pour elle une amitie fondée 
sur i'estilue et l'admiration, se trouvait Oreste, préfet ou 
gouverneur d'Alexandrie, qui, bien que chrétien, faisait 
preuve de tolérance et d'cquité à i'égard des paiens et des 
juifs, nliuorite dissidente qu'il savait protéger, fidèle en cela 
peut-être aux conseils d'Hypatie, contre les outrages et les 
I,e,'scutions des clretiens qui composaient la grande ma- 
jol-i[é de la population. De là une lutte, d'abord sourde, puis 
déclarëe, entre lui ¢t de patriarche d'Alexandrie, Cy r i I le, 
qui méditait l'expulsion des Jlfifs. Aussi un maitre d'ecole 
appele Hiérax, partisan fana|ique du patriarche et ennemi 
personnel d'Hypatie, ayant te tué, un certain Pierre, lec- 
teur dans feglise d'Alexandrie, répand partout le brui 
q,e ce meurtre avait été commis à l'instigation d'Oreste 
et d'Hypatie; et, ameuant ensuite contre laphilosol)he un 
certain nombre de fanatiques, il se porte h leur t¢z[e vers sa 
demeure- Elle était sortie_ Les assassins l'attendent / sa 
porte, se prëcipitent sur elle au moment ui elle se disposait 
h rentrer, la saisissent et i'e,,trainent dans une égtise ap- 
pelée Csarde, où ils la massacrent sans pitié à coups de 
tuiles et de pots casses. Puis ces forcenés dëcoupent son 
cadavre en morceaux et transportent ses membres mutilés 
sur la place dite inaron, oi il les réduisent en cendres. 
Ce meurtre odieux, qui fit le déslmnueur de i'eglàse d'A- 
lexandrie et de Cyrille, fut commis pendant le carème de 
l'an 15 de notre ère, sous le règne de Théodose le 3curie : 
l'impunité dont il fut suivi s'explique par le relàchement fatal 
de tous les liens de fordre social à cette époque, mais ne 
laisse pas non plng de doute sur la complicité du patriarche. 
En mourant, H)patie laissait un and nombre Cou- 
vrages; ils perirent avec tant d'autres lors du fameux in- 
cendie de la Bibliothbque d'A[exandrie. Il y avait dans le 
nombre un C'aon astronomique, un Commentaire sur 
Diophanle et nn Commentaire sur les seclions coniques 
d'Apollonits. 
HYPEPB.,TE (du ,rec u=p, au delà, et Ç:t;.vto, 
passe), figtre de grammaire ainsi nommée parce qu'elle 
consiste dans le alClacement des mots qui composent un 
dseours ou une pfirase, dans le transport de ces mots de 
l'endroit que leur assignait la construction simple à une 
autre place qui semblait ne pas leur appartenir. Ctte figure 
était Irequemment usitée cfiez les Latins : on la retrouve 
dans le plus grand nombre de leurs phrases. 11 est très- 
facile de la confondre avec I' n v e r s i o n, qui consiste aussi 
en un véritable renversement d'ordre dans les mots. Les 
grammairiens distinguent plusieurs espëeesd'hyperbates, 
entre autrs i'anastrophe, qui était regardée comme figure 
dans la langue latine, parce qu'elle autorisait le déplace- 
ment de la proposition, qui ordinairement doit marcher avant 
son eomplétnent : ainsi l'on disait par anastrophe lla- 
liara conlra po,r contra ltaliam, qutî de re pour de 
re. La synchyse et la parenlhèse sont deux autres sortes 
d'hyperbate. La première consiste à introduire quelques 
mots entre deux eorrélatifs,eomme dansoe vers de Virgile : 
Arct agcr, vitio me»rions sit aeris hcrba, 



HYPERBATE -- 
où les deux mots ritio et aeris, {lui sont corrélatifs, sont 
séparés par deux autres mots qui n'ont aucun trait à cette 
corrélation. La seconde est le résultat de l'insertion d'un 
petit sens détaché entre les parties d'un sens principal. En 
général, il faut user de l'hyperbate avec infiniment de su- 
hriété et de got, sons peine de s'exposer à jeter de la con- 
sion dans le discours. 
HYPERBOLE (Rhétorique), du grec upol, à 
excès, dérivé de p, au delà, et [lto, je jette. L'hyper- 
bole agrandit ou diminue les objets contre toute vraisem- 
blance, laissant à l'esprit le soin de s'en former à son gré 
nne idée plus exacte : quand on effet est d'amoindrir les 
choses au delà de la vérité, elle prend plut¢t le nom de dia- 
sçrme. C'est par hyperbole que les poëtes disent que les 
flots de la mer s'élèveutjusqu'ax cex, qu'ils comparent 
le vol de l'aigle à la rapiditd de la foudre, les pleurs à 
un torrent, etc. Les tours h/perboliques sont plu« natu- 
rels qu'on ne le croirait peut-fifre. On les emploie très-sou- 
vent dans la simple conversation. Ne dit-on pas d'un danseur 
¢pfil est léger cmme ztne plume, d'un cheval qu'il va 
plus vite que le vent? La plupart des métaphores sont 
des hyperboles; car, Iorsqu'on dit d'un homme qu'il est 
bouillant de désir, brlant de colère, 9lacd de crainte, etc., 
il est évident qu'il y a dans ces figures de l'exagération. 
Cette sorte de figure s'emploie ordinairement dans les situa- 
tions fortes et violentes; elle entre dans le langage véhément 
et exalté. Ainsi on lit dans Chateaubriand : « Quelquefois je 
rougiais subitement, et je sentais couler dans mon cœur 
comme des ruisseaux d'une lave ardente. » Et dans 
ranger : 
Près de la borne o6 chaque état commence 
Aucun épi n'est pur de sang" humain. 
Il y a sans doule de l'exagération dans ces exemples; 
mais cette exagération évidente fait qu'on ne prend point à 
la lettre l'expression hlperbolique; l'esprit sait la réduire ì 
sa juste valeur : aussi l'on peut dire que les hyperboles 
rnentent sans tro»per. 
Cette figure est très-piquante dans la poésie, et mme en 
prose il n'y a guère de descriptions d'orages, de combats, 
d'incendies, de ftes, etc., où l'on ne trouve des hyper- 
boles. Il y a aussi des hype.rboles qui sont de pures plai- 
«anteries; telles sont celles quon attribue aux spirituels 
habitants des bords de la Garonne. Tels sont aussi quelques I 
traits satiriques comme celui-ci : 
Le plus SOl animal, . mon avis, n'est l'homme. I 
L'hperbole suivante de ¥oiture est une véritable plaisan- 
terie : « On vit sortir d'un and bois qui était à trois cents 
pas de la maison un tel nombre de feux d'artifice qu'il 
semblait que toutes les branches et tous les troncs se con- 
vertissent en fusCs, que toutes les étoiles du ciel tombassent 
et que la sphère du leu voulùt prendre la place de la 
moyenne région de l'air. Ce sont là, monsieur, trois hyper- 
boles, lesquelles, appréciëes et réduites à la juste valeur des 
choses, valent trois douzaines de fusCs. » 
Cette figure, poussée trop loin, mène à l'affectation, au 
faux et à l'enflure. Les Orientaux font un emploi fréquent 
de l'hyperbole. Un poëte qui soupirait de voir Louis Xlr 
à l'étroit dans le Louvre disait : « Une si grande maiesté a 
trop peu de toute la terre. » Quelle puérilité! L'exagération 
supposant toujours une certaine exaltation, rien n'est si 
choquant qu'nne hyperbole froide et déplacée. Aussi l'ac- 
compagne-t-on souvent de correetifs, comme : pour ainsi 
dire, en quelçue sorte, si l'on leut parler ainsi, etc. 
Auguste HCON. 
HYPERBOLE (du grec -, excès; voge: t. 
p. 279), c o u r b e du second desC qui, comme l'elli p s 
peut tre définie de différentes maniëres. L'équation géné- 
rale des sections coniques donne une hyperbole lorsqu'on 
a B • -- 4 AC > 0. Eu construisant cette courbe d'aprës les 
methodes ordinaires, on reconnait qu'elle se compose de 

HYPERBORÉENS 255 
deux branches, s'étendant chacune à l'infini dans deux sens, 
et pourvues d'asym ploies communes. Comme l'ellipse 
encore, l'hyperbole est douée d'un con tr e, de deux a x es, 
de deux dt r ect ri ce s et de deux foy e rs. Relativement à 
ces derniers, ce n'est plus, il est vrai, la somme des r ay o n s 
vecteurs qui est constante, mais leur différence. L'hyperbole 
iouit donc d'un ensemble de propriétés dont les unes sont 
identiques et d'autres seulement analogues à celles de l'el- 
lipse : par exemple, la surface du paralléloamme cons- 
truit sur deux diamètres conjugués est constante dans l'une 
et l'autre espèce de courbe; mais, dans l'ellipse, c'est la 
somme des carrés des diamètres conjugues qui est inva. 
fiable, tandis que dans l'hpcrbole c'est leur différence, etc. 
Si l'on prend pour axes des c o o r d o n n é e s les asymptotes 
à l'byberbole, l'eqnation de cette courbe se réduit à Xl:m 
cette quantité  est quelquefois nommée puissance de 
l'hyberbole. L hyperbole dite équilatère peut tre définie 
par une de ses propriéts géométriques, soit par l'égalité de 
ses axes, soit par la perpendicularité de ses asymptotes. 
L'hyperbole équilatère tient parmi les hyperboles la mme 
place que le cercle parmi les ellipses. 
L'hyperbole étant une courbe infinie, on ne peut se pro- 
poser de déterminer sa surface; mais, si l'on prend ses 
asymptotes pour coordonnées, on pourra évaluer l'aire com- 
prise entre un arc de la courbe, les ordonnëes de ses 
extrémités et son asymptote : on trouvera alors que ces aires 
hyperboliques sont les I o ça ri t h m es des abscisses corres- 
pondantes. Le système dans lequel on devra prendre ces 
lorithmes sera le système népérien, si l'hyperbole est 
équilatère. Dans tous les autres cas, ce sera celui qui aura 
pour module m z sin OE, en conservant à m  la signification 
précédente, et en représentant par OE l'angle des asymptotes. 
E. "IraLt cx. 
IIYPERBOLIQ..UES (Logarithmes). Vot. Locxnrrmws. 
HYPERBOLO IDE (de upo)., hyperbole, et 
forme), surface courbe du second de,ré, douée, comme 
l'ellipsoïde, d'un centre et de trois axes rectangu- 
lattes, mais dont l'équation, rapportëe à ces axes, est 
+-=_+,. 
a o c 
En prenant ÷t pour second membre de l'équation, on 
voit que la surface est rencontrée par les axes des x et des 
/, mais pas par celui des =. Les sentions de cette surface 
paralleles au plan des xj sont des ellipses ; les sentions 
parallèles aux deux autres plans coordonnés sont.des h y- 
p e r b ol e s. Cette surface, dont on se fait dès lors facilement 
une idée, est dite hgperboloiàe à zne nappe. Un de ses 
cas particuliers est l'hgaverbolo[àe de roerolution à zne 
nappe, qu'engendre une hyperbole tom'nant autour de son 
axe transverse. 
Si le second membre de l'équation est --1, le seul axe 
des z rencontre la surface. Les sentions parallèles au plan 
des x// sont ou imaginaires ou ellipliques ; les deux autres 
sertes de sentions considéres précédemment sont encore 
des blperboles. Cette surface est l'hgperboloïde à deux 
nappes; elle est, en effet, composée de deux parties disjoin- 
tes, s'étendant l'une et l'autre à l'infini. Une hyperbole 
tournant autour de son axe non transverse engendre I'h 9- 
I3erboloide de rvolution dt deux nappes. 
Quelle que soit l'espèce d'un hyperboloide de révolution, 
il est évident que les sections perpendiculaires à l'axe de 
révolution deviennent des cercles. E. MEnLtEUX. 
HYPERBORÉENS (c'est-à-dire habitant au delà de 
Borée ou dn vent du nord ). Les anciens comprenaient sous 
cette dcnomination tous les peuples inconnus du nord et de 
l'ouest, qu'ils supposaient rtre placés sou l'influence d'un 
beau ciel. D'après les indieationspassablemeut obscures que 
nous fournissent les auteurs de l'antiquité grecque, on enten- 
dait surtout désigner par ce nom tous les peuples habitant 
au delà de la chainede montagnes qui forme les limites «le 
la Grène au nord ; Hérodote les place au nord-ouest 
Grène, tout h fait dans Iïntrieur de cette conteC, au 



256 HYPERBOREENS 
inage des Scribes; Strabon, au nord de la mer Noire. Les 
écrivains modernes nous les représentent comme habi- 
tant tant0t le nord du Pont-Euxin ou de la mer Adriatique, 
taut0t les Indes (Schubart), tant0t l'Italie (Niebuhr), tant0« 
la Scaudinavie ou encore la partie sud-est de la Germanie. 
Les traditions des anciens peuples et les récits de leurs écri- 
valus s'accordent d'ailleurs  dire que les Hyperboréens ha- 
bitaient une contrée où régnait un printemps perpëtuel, 
une espèce de paradis, qu'ils vivaient pendant mille ans 
dans un état constant «le ieunesse et de parfaite santé, et 
que, en qnalité de favoris d'Apollon, qu'ils honoraient dans 
lem fertiles plaines par des sacrifices et d'harmonieux con- 
certs, ils étaient protégés par ce dieu contre le vent du nord, 
et menaient nne vie toute de ftes et de liesses. 
HYPERDULIE. l'oe-- CçLxE, tome Vil, page 27. 
IIYPÉR|DE» célèbre orateur rec, rival de Démos- 
thène et comme lui un des plus redoutables adversaires 
contre lesquels ait eu à lutter la politique envaldssante et 
usu rpatrice de P h il i p p e de Macédoine. On i-nore la date 
précise de sa naissance, mais on sait qu'il fut disciple de 
Platon et d'Isocrate. ]I avait d'abord servi avec dis- 
tinction, et faisait partie de l'expédition que ses concitoyens 
envoèrent, sous le commandement «le P h o ci o n, au se- 
cours de Byzance, menacée par le roi de Macédoine. Plus 
tard, il se cousacra à la défense des intérèts privés avant 
d'aborder, à la tribune aux harangues, la discussion des 
grands intérts de la patrie. Si, à la nouvelle de la perte de 
la bataille de C h é r o n é e, Isocrate, son mai«re, alors -g 
de plus quatre-vin-dix ans, mourut de douleur, Hypoeride 
trouva dans son courage le calme nécessaie pour prendre 
les mesures propres à sauver encore son pays. Il fit rendre 
un décret d'amnistie pour les exilés et d'affranchissement 
pour les esclaves, mettre les dieux, les femmes et-les en- 
fants en s'reté dans le PieC, et prendre les armes à la 
population en masse pour la dlense du territoire national. 
Après le désa.tre de Cranon, qui mit fin à la guerre La- 
miaque, dont il avait été avec Démosth/ne le principal ins- 
tigateur et qui livra Athènes à Antipater, il se ref, tgia à 
Ëgine dans le temple de eptune. Archias, l'un des satellites 
d'Antipater, loin de respecter cet asile, l'arracha de la statue 
de ce dieu, qu'il tenait embraseC, et |e conduisit à Coriu- 
the, où se trouvait son mal«re. Antipater le fit périr dan. 
les tortures les plus cruelles, et priva son cadavre des hon- 
neurs dela sépulture. Plus heu/eux, Démoçtbène put échap- 
per par une mort volontaire à la vengeance féroce du tyran. 
Pour apprëcier le genre d'éloquence particulier  Hypé- 
ride, il ne nous reste guère d'autres documents que les ju- 
gements qu'en ont portés Denys d'Halicarnse, Longin et 
Cicéron. Le premier dit qu'elle se distinguait par l'intelligence 
dans la dispo.<ition des preuves, par la race'.et la netteté 
des narrations. Cicéron, qui semble assigner  Hypéride la 
trois!ème place parmi les grands orateurs de la Gréce, le 
compare à Démosthène lui-mme pour l'art de la discussion. 
Lonn dit que son éloquence avait toutes les graces et tous 
les charmes de celle de Lysias, et qu'il martial« avec un art 
sans pareil l'arme de l'ironie. Des soixante-douze discours 
qu'on lui attribuait dans ce temps et qui ont servi de base 
aux appréciations que nous venons de reproduire, il ne s'est 
conservé juscu'à nous, et encore grâce " Stobée, qui le cite 
avec raison comme un morceau plein d'éclat, qu'un frag- 
ment d'un éloge funèbre prononcé en l'honneur des citoyens 
morts pour la patrie dans la guerre Lamiaque. Dans ces 
derniers tmps, quelques fragments d'un discours contre 
Démostbène ot été retrouvés par MM. Harris et Arden 
sur des papyrus d'Égypte. Lucien nous parle de lui comme 
d'un ami peu sot; d'autres écrivains de l'antiqité lui repro- 
chent l'élégance dissolue de ses mœurs, tout en reconnaissant 
que son intégrité lui donnait le droit de se porter l'accu- 
sateur  Démosthène, lorsqç'il lui reprochait de s'«tre 
laissé corrompre par Harpale, ce seigneur macédonien à qui 
Alexandre, pendant son expédition dans rInde, avait confié 
la garde de ses trésors, et qui, après avoir abusé de ce 

dép0t, s'était enfui à Athènes. Quand Alexandre arriva 
$ardes, il ? trouva les réponses de Démosthène ì Darius 
qui lui prodiguait son or, et le bordereau des sommes que 
ce prince lui avait fait passer pour l'engager ì susciter des 
embarras  Philippe, marché dans l'accomplissement duque. 
IMmosthène se mourra si consciencieux. Mais on ne put 
mettre la main sur aucun document de ce genre relatif 
Hypéride. Finissons par une anecdote souvent citée : Chargé 
devant le tribunal des H é I i a s tes de la défense de Phryné, 
accusée d'impi(.té, il osa suppléer à l'insuffisance de sa cause 
en arrachant le voile qui couvrait la gorge de sa cliente, 
demandant aux juges s'ils auraient le courage de condamner 
la prêtresse favorite de Vénus. C'était là évidemment un 
argument ad homincm, si jamais il en fut : ce moyen 
extra-oratoire lui réussit, et Phryné fut renvoyée absoute. 
HYPEBMNESTBE. Voe-. D_t0ES. 
IIYPERSTIIÉNISANTS (du grec {,p, au delà, 
et 0o«, force ). Voge-. COSrt-STICLSE. 
HYPERTROPIllE (de unp, au delà, et xço«, nour- 
riture), augmentation mm'bide du volume d'un organe, pro- 
venant d'une nutrition trop active. Comme l'a tropbie, 
,]ont elle est l'opposé, l'hypertrophie peut erre partielle. 
Les organes pour lesqtlels on doit le plus redouter cette 
affectiou sont le cœur, le foie et le cerveau. 
L'hypertrophie du cœur est plus souvent partielle que 
générale. Le cœur h?pertropbié est plus ou moins déformé ; 
son volume peut tre doublé et mme triplé ; son poid 
peut atteindre deux kilogrammes et demi. Les effets de 
l'hypertrophie varient suivant la partie du cee n r qui en 
est le siége; ainsi l'hypertrophie du ventricule gauche ac- 
tive la circulation, tandis que celle du ventricule droit y 
porte obstacle. Une hypertrophie simple peut tre arrtée 
par les saugsues et l'emploi convenable de la d i g i t a I e. Mais, 
.i on laisse empirer cette affection, il est rare que l'on 
puisse lui apporter autre chose que des palliatifs. 
L'hypertrophie du foie atteint quelquefois des proportions 
bien autrement considérables. On cite des cas où le foie 
pesait jusqu'h 15 kilogrammes (Power). Le diaphragme ne 
peut descendre, la poitrine est retrécie, le poumon comprimé, 
la respiration difficultueuse; le sang conséquemment re- 
gorge de toutes parts, les poumons ne lui donnant plus h; 
mëme accès : beaucoup d'oppressions et d'asphyxies n'ont 
pas d'autre cause. Alors la mort peut tre subite, et quel- 
quefois c'est par l'apoplexie que e termine l'existence. 
Quel que soit l'organe h?pêrtrophié, on devra, dans le 
traitement, recourir ì tous les moyens qui tendent à affai- 
blir |'action assimilative. Les saignées, une diète sévère, 
l'usage des purgatifs, des sudorifiques, les préparations 
iodurées et mercurielles rempliront cette indication. Quand 
elle sera possible, la compression de l'artère qui se rend 
à l'organe hypertrophií pourra donner de bons résultats, 
en diminuant la dose du sang reçu par cet organe. 
HYPNOTIQUE (en grec, ,--«xo, qui fait dormir 
dérivé de ,-o:, sommeil). Vovc . CcsTs et Ncorjo.r.s. 
HYPOCONDRE ou HYPOCHONDRE {de o, sous, 
et Xopo:, cartilage). On donne le nom d'hgpocondres aux 
parties supérieures et latérales du bas-ventre, sous les 
fausses-c0tes, parce que ces cotes sont presque toutes carti- 
lagir, euses, lfvpocondre se dit aussi pour hVpocondriaque, 
de celui qui est atteint d'hypocondrie. 
HYPOCONDRIE ou HYPOCHONDRIE. Une ma- 
ladie peu rare en tout pays, et affectant l'un et l'autre sexe, 
fut ainsi nommée par les anciens, qui croyaient qu'elle avait 
son siCe dans les régions du ventre appelées lei hgpo. 
condres. Les malades h!tpocondrio/iues atteints de 
cette affection (ou hvpocondres) se font remarquer par une 
sollicitude minutieuse, constante, puérile pour l'entretien de 
leur santé. Le choix de |eurs aliments est très-grave- 
ment raisonné; ils consultent le baromètre et le thermo- 
mètre pour sortir, de leur chambre, et ils mesurent soi- 
gneusement leur exercice : le moindre vent coulis est pour 
eux une tempète formidab|e, et ils font tout pour 



garantir. Ils ont toujours une apparence de malaise, d'in- 
qniétude; ils se plaignent de défaut d'appétit, d'avoir des 
digestions pénibles, d'éprouver des douleurs dans le ventre, 
d'avoir des vents, d'ëtre tourmentés par des bourdonne- 
ments d'oreille ou d'autres hallueinations. Ils se eomplaisent 
dans la lecture des livres de médecine, s'appliquant tous 
les symptfimes de maladies dont ils trouvent les deserip- 
tions, et ils eouçoivent des alarmes à ce suiet, entame ils se 
rassurent en comptant les nombreux et. puissants moyens 
de guérison que l'art se vante de posséder. Leur état 
pb.siqt:e s'accorde souvent avec leur état moral ; ils sont 
ordinaitement pàles,jannes, émaciés et constipés : quelques- 
uns, toutefois, conservent l'apparence de la saute. En ce 
dernier cas, on considère assez généralement l'hypocondrie 
comme une maladie imaginaire: au lieu de plaindre les 
patients, on rit souvent à leurs dépens; on croit voir en 
eux nne répétition de M. Argant, ce personnage eréé par 
blolière et si vrai sous plusieurs rapports. Il n'est cepen- 
dant pas d'hypocondrie proprement dite sans une altération 
reelle, soit organique, soit vitale. Comme on n'observe sou- 
vent après la mort des sujet aucune lésion organique, 
l'affection est reputée nerveuse; c'est dire, en d'autres termes, 
qu'elle est une altération de la vitalité. Quoi qu'il en soit, 
elle est une maladie réelle, mème dans sa plus faible 
nuance, appelée vapeurs, accompagnée de b/lillements réi- 
térés et fàigants. 
L'hypocondrie est le résultat de causes différentes qu'il 
faut connaitre afin de les éviter ou de les combattre. L'ap- 
pareil nerveux, et principalement le cerveau, est la source 
des rapports qui existent entre toutes les parties de l'orga- 
nisation. Des chagrins vifs et soutenus, dont la source est 
dans le cerveau, produisent à la longue sur l'épigastre un 
sentiment pénible que chacun a pu apprécier dans sa riel 
h la longue, cette sensation amène un changement dans la 
vitalité de l'estomac et des intestins; de la des troubles 
dans la fonction digestive et réaction sur le cerveau : le 
tissu mème des organes digestifs peut s'altérer et offrir 
toutes les nuances de la gastr ite; dès lors, on peut voir 
se manifester les sympt6mes variés de l'hypocondrie. Toutes 
les passions qui engendrent les chagrîns en sont aussi des 
causes communes. Il en est de mème de l'exagération ou 
du dfaut de l'exercice des fonctions intellectuelle» ou de 
l'oisiveté. Les affections qui ont dbuté sur le canal digestif 
par l'action des stimulants qui y sont portés directement 
peuvent encore agir sur le cerveau et produire la mëme 
maladie; aussi les excès de table sont-ils une source com- 
mune de l'hypocondrie. Les médicaments adminitrés à 
Iïntérieur, surtout les purgatifs, agissent également, et en- 
core plus défavorablement. Le docteur Lallcmand a re- 
connu que la lésion de la glande prostate et de se; an- 
nexes est une cause assez fréquente de Phypoeondrie, et 
rume une de celles qu'on considère très-sottvent à tort 
comme une maladie imaginaire. 
L'hypocon,lrie n'alflige pas ou du moins afflige rare- 
ment l'homnae dans sa première jeunesse : à cet age, les 
excès de table et les passions n'ont point exercë leur in- 
Iluence nuisible, ou du moins n'ont eu qu'une action de 
peu de durée et suivie d'accidents plutt inflammatoires 
que nerveux. Dans I"ge mr et quand toutes les illusions 
décevantes qui ont soutenu notre courage an milieu des 
vicissitudes de la vie viennent à s'évanouir, c'est alors 
qu'on devient aisément hypoeondriaque. Outre les causes 
du ressort de l'Cat social qui iavorisent la production de 
cette maladie, il en est d'autres qui sont inhérentes à l'or- 
ganisation et au tempérament de chaque individu. Ainsi 
l'observatiou a appris que les personnes chez lesquelles les 
fonctions du foie sont très-actives, celles qui sont pusilla- 
nimes, ëgoïstes, qui ont une estime exagérée d'elle.-mèmes 
deviennent hypocondriaques pins que tout autre. D'après 
les fonctions que le cerveau remplit dans le jeu des organes, 
on s'explique aisément un tel fait, et entament la phréno- 
logie, qui a aussi l'observation pour base, doit éclairer 
I)ICT. I)E LA CONVERS. -- T. XI 

-- HYPOCRISIE ..7 
l'étude de l'hypocondrie. Sachant aussi combien le cœur esl 
enflammé par les centres nerveux et par les viscères» on ne 
doit point être snrpris de voir la maladie qui nous occupe 
ètre ordinairement accompagnée de palpitations de cœur. 
L'aperçu que nous avons tracé des sympt0mes de l'hypo- 
condrie suffit pour montrer le malheur de cet état de santé, 
que le temps aggrave ordinairement de plus en plus si on n'y 
remedie pas. Les fonctions des organes sensoriaux se dé- 
»rayent au point que les malades ont des perceptions 
bizarres, comme celles des fous : ils ne goùtent plus le repos 
du sommeil; ils deviennent méfiants, insuplortables aux 
autres comme à eux-mèmes. Leur situation enfin est fré- 
quemment si intolërable qu'ils cherchent un secours dans 
le suicide. Un tel état réclame donc des soins médicaux, 
employés avec discernement. Au mg.decin appartient un tel 
traitement, parce que lui seuil peut découvrir l'origine des 
troubles survenus dans l'état normal. C'est  lui d',:valuer 
les vitalités respectives du cerveau et des viscères d'après 
lesaberrations du mouvement et du sentiment, afin «le dé- 
couvrir quel est le rouage primitivement les& Cette décou- 
verte est la partie la plus importante «lu traitement» et le 
succès en dépend. Mais les moyens que Fart possède ont-ils 
une puissance qui puisse rassurer ? Dans plusieurs cas, on 
peutrépondre affirmativement. S'il est possible d'éloigner 
les causes, les effets cesseront aisément : ainsi, en faisant 
renoncer aux travaux intellectuels profon,ls et soutenus 
trop lonemps, comme en mettant un terme h l'oisiveté, 
et en remplaçant ces habitudes par des exercices muscu- 
laires, surtout par la culture des arts d'agrément, on peut 
espérer de guërir l'hypocondrie; d'autre fois, il faut rem- 
placer l'intempérance par la sobriëté et recourir au traite- 
ment des irritations gastro-intestinales. Mai:, quand la ma- 
ladie est le résultat de chagrins qu'il est impossible d'ecarte.r, 
le médecin ne pent donner que des consolations banaes 
qui ne rem,dient pa au mal. D  Co.t. 
ilYPOCRAS breuvage célebreau moyen -age. Son nom, 
qui ne dérive pas, comme Menage veut le laite croire, de 
celui d'Hippocrate, inventeur preten,lu de cette boisson 
agréahle et salutaire, doit bien pluttt venir, selon nous, 
des deux mots grecs :b et x#vvut, qtd signifient mé= 
langer. L'bypoeras, en elfet, était un mélange de vin et d'in- 
grédients doux et rechercbés; on en lugera par la recette 
que Taillereut, le maitre-queux de Charles Vil, nous en a 
laissée : « Pour une pinte, dit-il, prenez trois treseaux (trois 
gros ) de cinnamome fine et pure, un treseau de mesche, ou 
deux qui veult, demi-treseau de girofle, et de sucre fin six 
onces, et mettez en pouldre; et la fault tout mettre eu ung 
coulouoir avec le vin et le pot dessoulez, et le passer tant 
quïl soit coulé, et tan t plus est passé et mieu vault, mais qu'il 
ne soit esventë. » Pour parvenir à cette clarification parfaite 
du mélange, on employait on filtre préparé i cet effet, et 
qu'on appdait chausse d'hypocras. Plus tard, afin de 
rendre cette préparation moins longue, on eut des essenees 
à l'aide desqoelles, selon le Dictionnaire de Trdvouac, on 
faisait soudainement de l'hypocras. Le vin rouge ou blanc 
n'était pas toujours la base de cette liqueur ; on la faisait 
aussi avec de la biëre, du cidre et mème de l'eau. Mais 
c'était là l'hypocras du peuple, et, suivant le docteur Pegge, 
la cannetle, le laoixre et le miel cladfié en étaient les seuls 
ingrédients. Citez les grands, on s'en tint toujours h l'hypo- 
cras au vin, rehaussé d'un goût de framboise ou d'ambre. 
Du temps de Louis XIV, ce breuvage était encore en laveur: 
on le servait dans tous les grands repas et à toutes les eol- 
lations. Laville de Parisdevait même, chaque année, en don- 
ner un certain nombre de bouteilles pour la table royale. 
Édouard Fouirm. 
II'POCRISIE, llYPOCRITE. Tou. les vices humains 
ont une lelle ressemblance cuire eux, mème dans leurs 
nuances les plus variées, ils se lient si int.;mement les uns 
aux autres que ce n'est, le pins souvent, qq'à l'aide de la 
comparaison qu'on peut en donner une juste idée. Ainsi 
l'hypocrisie n'est qu'une vari6té de la d i ss i m u I a t i o n ; ce 
33 



$8 HYPOCRISIE -- 
n'est mme qnela dissimulation au dernier degré, la dissimula. 
tion aux paroles doucereuses, la dissimulation accompagnant 
la perfidie la plus noire : la dissimulation, tout odieuse qu'elle 
est, l'est cent fois, mille lois moins que l'hypocrisie. Le man- 
que de franchise est le caractère de la dissimulation : là 
se borne son r61e; l'hypocrisie, au contraire, a toujours pour 
mobile des espérances de lucre ou de vengeance. L'homme 
dissimulé cache ce qu'il a sur le cœur; mais, si sa houche 
retient son secret, son maintien, son visage sont toujours 
préts à le trahir malgr lui; car cette situatio[] de l'àme est 
tout "à fait accide[]telle et ne saurait durer. L'hypocrite, hé, 
n'a dans sa voix, dans ses regards, dans ses ma[]ières rien 
qui laisse devi[]er ses sentiments. Il a cicrWla dissimulation 
à un tel desWque désormais il est maitre de toutes ses ira- 
pressions de joie et de déplaisir : il co[]tinue son r61e jus- 
«lu'au bout, et ne se dépouille de ses dehors caressants que 
Iorsqu'il en parvenu à son but, que Iorsqu'il peut jeter le 
masque sans danger. La dissimulation a quelquefois la né- 
cessitd pour excuse; mais jamais ce motif, quelque impérieux 
qu'il puisse tre, n'absoudra l'hypocrisie.La pire de toutes 
}es hypocrisies est l'hypocrisie dêvote, celle do[]t Jesus-Christ 
appelait les adeptes des sepulcres blanchis ; celle que Vol- 
taire nomme : 
La tendre hypocrisie, h l'air plein de douceur ; 
Le ciel est dans ses yeux, l'enfer est dans son cœur 
celle enfin qui a inspiré à Molière sa sublime création de 
Tartufe. 
« Qui ne sait dissimuler ne sait réer, » disait Machiavel 
dans ses préceptes à l'usage des gouvernements ; et, en effet, 
toute révoltante qae semble cette maxime, elle soulève 
moi[]s l'bumauité que ne l'aurait [ait celle-ci : « Qui ne 
sait Cre hypocrite ne sait rogner. » Et cependant cette ha- 
bitude j.le dissimulation que recommande l'auteur du Prince 
n'est autre chose que de ihpocrisie, ta[]t on sait bien dé- 
guiser avec les mts tout ce que les choses ont de hideux ! 
HYPOGXSTRE ( de o, sous, et ,oE«:,p. ventre). Les 
anatomistes appelle[]t ai[]si la padie inferieure du bas-ve[]tre 
commençant h l'ombilic et s'Cendant jusqu'à l'os pubis. Par 
rd9on hypogastrique on entend l'ensemble des arteres, des 
muselos, des v.aisaux, etc., qui se rattachent/t l'hypogastce. 
HX'POGEE (du grec5x6-f¢o;, souterrain, fi»rmé de 
sous, et -f, terre). On désigne principalement par ce nom 
des excavations et eonstructions souterraines dans lesquelles 
les anciens déposaient leurs morts. On se sert aussi dans 
le mème sens du mot c'.atacombes; mais le nom d'hy- 
po#es est plus spécialement affecté aux exea ations for- 
mant les nécropoles de l'Êgypte. 
[On rencontre deshypoges sur tout le littora| du .il, 
depuis Aiexandrie jusqu'à S)ène et aux cataractes, dans le 
voisinage des anciennes villes. Les curieux visitent plus 
parlieulièrement celles d'Alexandrie, de Saccarah et de 
Ghizeb, celles de S3-outh, Beni-Hassan, Hermopolis, Ele- 
thsa et Kournaeb,/t Thèbes : ces dernières sont les plus re- 
marqttables, tant par leur haute antiquité que par leur grand 
nombre et leur beauté. On distingue entre autres la Nécropole 
de cette ancienne capitale, la Syringe, immense labyrinthe 
composé de couloirs, de chambres et de puits conduisant les 
uns aux autres et destinés jadis k contenir des milliers de 
momi es. Mais les tombeaux des rois thébains sont en ce 
genre les ouvrages les plus curieux, moins encore par leur 
prodigieuse dtendue que par les ulptures et les peintures 
hiéroglypbiques durit ils etaient alCorC. Ces tombeaux sont 
situés à l'occident de T h èbe s, dans une vallée qt,i porte le 
nom de Biba¢-al-Molouk (les portes des rois). Les Pharaons 
consacraient toute leur vie à se faire creuser t« [] tombeau, et 
l'on pouffait en quelque sorte appréeier par l'Cendue et le 
travail de ces ex,avarions la duree du règne et l'opulence de 
chacun d'eux. Il parait que les travaux sarrdtaient à la mort 
du roi, et qu'après que la momie avait été dépos dans le 
tombe.an on le fermait soigneusement pour en dérober 
i'eatrée aux profanations de la cupidité. Ces exeavations of- 

frent des cavernes sépulcrales très-profondes, compoëet 
de galeries souterraiues et de chambres qui ex,nduisent à 
nne salle principale, où était le sarcophage renlermant la 
momie du roi. Ces tombeaux, violés pour la plupart à l'é- 
poque de l'invasion des Perses sous Cambyse, etalent déjà 
visités, du temps des Grees et des Romains, par les curieux, 
qui y inscrivaient leurs noms. Strabon en compte 40, et Dio- 
dore de Sicile 47. Du temps d'Auguste, il n'en restait que 
17, dont plusieurs étaient déjà fort endommagé.s. On en 
compte aujourd'hui dans la Vallée des Rois 24 ou 25, dont 
le mieux conservé est celui du roi Ousirei, l'aïeul de Sé- 
sostris, découvert par Belzoni : ce voyageur n'y trouva plus 
que les débris de l'ancie[]ne spoliation que le monument 
avait éprouvée du temps des Perses. Le tombeau de Mem- 
non et celui d'un atttre roi beaucoup plus ancien se trouve[]t 
da[]s une vallée située à l'ouest de la première. 
Les catacombes d'Alexandrie, dites les Bains de Ct4o- 
pdtre, ont été creusées ì une époque beaucoup moins re- 
culC, et qui ne doit guère remonter au delà de la fondation 
de cette ville par Alexandre le Grand. Ces grattes consistent, 
comme celles de Sidon en Phénicie et comme les catacom- 
bes grecques et romaines, en galeries plus ou moins étendues, 
et ayant de chaque crutWde leurs parois une ou plusieurs 
rangées de niches ereusées les unes auprès des autres et 
assez profondes pour co[]tenir un cercueil. 
Sestor L'HtTE. ] 
ilYPOGYXE (de uro, sous, et ç, femme), se dit de la 
c o roi le et dautres organes floraux, quand ils naissent 
sous l'oaire. 
HYPONO.IEUTE (de ":£olxo-, qui ronge par-des- 
sous), genre dïnsectes de l'ordre des lépidoptères, famille 
des nocturnes, principalement caracterisés par leur abdomen 
grèle et cylindrique et par leurs ailes Iégèreme[]t courbées 
en faux. Ces insectes provien[]ent de chrysalides réunies 
en troupe« nombreuses sous une laite commune, mais ayant 
chacune leur coque distincte. Avant d'arriver à cet état, les 
hyponomeutes, trop connues alors de cultivateurs, e pré- 
sentent sous la forme de chenilles glabres, eflilees ì leurs 
deux extrémits, et parsemées de points et de quelques poils 
rares sur un fond livide. Ces che6illes sont le fléau des arbres 
fruitiers, dont elles detruisent les feuilles. Les plus redouta- 
bles sont celles de l'hyponomeuta cognatella et de l'hypo- 
nomeuta padella : la première s'attache aux pommier ; 
en 1s38 elle çommit des d«g,ts do[]t la Normandie a rdé 
le souvenir ; elle causa la mort d'une grande quantité d'ar- 
bres en plein rapport. La chenille de la seconde espèce, que 
[]ous venons de citer, n'est pas moins à craindre pour les 
cerisiers. Qcand ces chenilles apparaissent, il n'y a guère 
de remèdes ; car elles se propagent aee une rapidite que ne 
peut prévenir l'echenillage le plus actif. 
Les chenilles d'byponomeutes produisent beaucoup de 
soie ; on a essayé de tirer partie de leur industrie, en les 
obligeant à construire leurs toiles sur un moule convenable- 
ment choisi ; on a obtenu ai[]si des tissus très-fins et très-lé- 
ger» propres/ divers usages. Ces essais, laits en AIlemagne, 
ont cependant été abandounés. 
IlYPOSPADIAS (de o, au-dessous, et roE:o, es- 
pace vide), vice de conlormation du membre viril, consis- 
ta[]t en ce que l'urètre, au lieu de s'ouvrir ì l'extrémité du 
penis, s'ouvre au-dessous, à une distance plus ou moins 
eloigne du gland. On peut le considérer comme le résultat 
d'un arrët survenu dans le développement de cet organe chez 
le ïtetus. Lorsque cette ouverture anormale est ituée pr 
de la racine de la verge, le scrotum se trouve souvent di- 
visé en deux replis, simulant les grandes lèvres chez la 
femme', ce qui a parlais pu faire regarder comme h erma- 
p h r o d i t e s des individus atteints d'hypospadias. Ce vico 
de conformation est sans remède. D r SAUCERO'I-rE. 
HYPOSTIlÉX'iSAXTS (de o, sous, et 0vo;, 
force). Voye:. CO.Xam-STIVLiSaE. 
IIYPOTEXUSE ( de ïo, sons, et xtvw, je tends). 
cSté opposé à l'angle droit d'un triangle rectangle. Il jouit 



HYPOTEqUSE -- HYPOTHËQUE 
d'une propriété remarqttaLle, dont la alCou,erre est attri- 
bué à Pytbagor e, et que l'on enollCe ainsi : Le rré de 
lonuse est  ì la somme des rrés des cotés de 
i'gle droit.  thëorème, fécond en coroaires et en appli- 
cations, petlt-tre rattaché lui-mme à la théofie des a- 
gl semblables. On en a donné d'aillenrs une foule de 
monstrafions indQmndantes de oette tbëofie; l plus sim- 
# se ouve èas to les Elents de #otoCrie. 
Si, du sommet de l'angle droit, on abaisoe une peendi- 
cul,re sur l'hypoténuse, cee diculaire est moyenne 
propoionnelle entre ! deux sen de l'bonu. 
De plus, chaque cèté de l'angle dit t moen propoion- 
riel entre l'hyponu et le sent adjacent. 
HYPOTilECAIBE (Canoe, Créancier). IMve 
CBÉXNCE, CBÉACIER et HYPOTHÈQUE. 
HYPOTHECXIBE (In.Otion). Voe» 
Il YPOTIIÇCAIE (Réme): Vove: 
HYPOTHEQUE. Dfinie Iégalement, l'hçpothèque 
e un droit rl sur les immeubles affectés à l'acquiSe- 
ment d'une obligation. Garantir l'eificacité des transactions 
et proter également le citoyen qui veut du crédit et le 
toyen qui peut en faire, tel est le but d bypothbques. En 
effet, le premier soin de deux peræonn traitant ensemble 
est d'assurer l'exution de leurs engagement. Le contrat 
suppooe I'tenfion et contient la promise de l'exécuter ; 
mais la promue nMst pas toujours sincère et les moyens 
uvent e pas répondre à l'intention. Or, si les paries 
connaisient leur situation rpective, l'une n'ohtiendrait 
que oelon ce quMIle reCite, l'autre n'accordeit que ce 
qu'elle peut accorder sans risque, et il n'5 aurait alors 
rêe dplac ni surprise fAcheuse. Si donc on trouve 
moyen d'éclMrer chaque citoyen sur la position véritable de 
de oelui avec lequel il traite, on aura tout oe que peuvent de- 
sirer les gens de bonne foi ; et si la mauvaioe foi s'en aimée, 
eu sera une gartie de plus en faveur de la mesure. 
L'bpothèque aflec un meuble à l'exCnfin d'un en- 
gagement. Si le contractant n'éit pas propfitMre, ou si cet 
immeuble était déja abrbé par des affeations pré'- 
dentes, l'b}otbque serait illusoireet les conventions n'au- 
raient aucu sacrifie. Il n'est pasde Iêgislateur qui, frappë 
de cet inoenvent, n'ait cherché h 5 porler remëde. Chez 
les Grecs, un poteau placé sur l'meuble annonçait qtfil 
n'était pa Hbre, et que ce bien formait le gage de quelque 
créance. Un pareil usage parait avoir été ct,nnu et ptiqué 
à ome i il y aMt de çexcès dans oette precaution ; 
car, s'il t n que les paries traient avec une connai 
sance respoefive deleur état, il n'est point néoessaire de le 
proclamer par affich et de I'noneer à tous I instants, 
mme aux peres ns intét de le connMtre. Cet usage 
disparut, et depuis il a suffi pour bypothéquer un immeu- 
ble d'en faire la stipulation ; et mme l'bypothëqtm a 
attach de plein droit à toute obligation authentique. C'êtait 
réparer un mM par un mal plus gnd ; car l'hypothèque 
donnée par des acs oult ne laissait aucune gantie 
contre la mauvaioe foi.  là des discussions multipliées et 
ineuses, dont le rsult le plus sur it de devorer le 
gage des crnciers, dépouill comme le débiteur lui-mme. 
Le TM système devMt donc consister en  juste milieu, 
entre I'ge du oes si extefieurs apposés sur les 
rages a[fec et plaçant ì tous l insnts sous tous 
yeux la situation Mgnte d'un citoyen et cette oburi 
fable qui Hvrmt s défense la bonne foi  l'intfie et ì 
la pervsité. Ce sstème, ! que ous le pubCons, peut 
se résumer en  mo : les as prodnt hythèque 
seront inscrits dans un ristre, et les rsonnes intéres- 
sé pomont véfifier si le gage qu'on leur propooe est libre 
ou jusqu'à quel point il peut ttre affûtC 
Mi que nous l'avons dit, l'origine de l'hypothèque est 
de la plus haute antiqui, eL s'il en faut croire de gav 
aturs, Solon s'applaust d'avoir pgë les proprietés 
théniencs  leurs hypolbèques. Mais, comme toute ins- 

titution htemaine, Iëtablissement d'un bon régime hypothé- 
caire a Ce lent, diificile à réaliser ; et, nous bornant à ce 
qui concerne la France, il a fallu lutter longtemps contre 
les prëiugés, les mauvais vouloirs et l'intërêt pernnel. 
Un édit du mois mars 1673, dU à Colbert. avait ëtabli la 
publicité des hypothèques au moyen de re#stres; le meme 
6lit instituait des greffiers tenant un registre coté, paraphé 
et vis#. chaque mois par le juge, et sur lequel devaient erre 
inscrites les oppositions aux hypothèques. Cet édit fut rap- 
portë au mois d'avril 1674. Un édit du mois de juin 1771 
créa des oifices de conservateurs des h.vpothèques, et donna 
une sorte d'existence au système. Une loi du 4 fevriel 
1791 intervint ensuite, mais purement réglementaire. La 
loi du 9 messidor an m fut rendue peu après : son but 
étant de mobilLser toutes les propriétes foneières, elle créa 
tout un nouveau système bypothécaire. Mais l'effet de 
cette loi fut suspendu par les lois des 21 nivèse an v et 27 
veudémiaire an v, qui établirent un système moins com- 
pliqué. Enfin, la loi du 1 l brumaire an w cr définiti- 
vement ce regime de la publicité des IO'pothèques qu'avait 
lentWd'introduire l'Cit de 1673, et que la loi de l'an iii 
avait trop étendu. La loi du net ventèse an vu détermina 
les fonctions des conservateurs et fixa leurs salaires, et le 
Code civil, en modifiant sur quelques points la publicite 
hypothécaire, imposa de nouvelles obligations aux conser- 
vateurs et précisa leur respon«abilité. 
Sans avoir la prétention de tracer ici un résumé complet 
des lois sur les hypothèques, nous croyons devoir donner 
un aperçu rapide de l'ensemble du regime h. pothécaire. 
Quiconque s'est obligé personnellement est tenu de rem- 
plir son engagement sur tous ses biens présents et à 
venir. Ses biens sont le gage commun de ses creanciers. 
La loi a fixe certains priviléges en faveur de créaneiers 
déterminés : ces priviléges s'exercent sur les menbles, puis 
sur les immeubles. L'hypothèque est un droit réel : elle est 
de sa nature indivisible, et suit les immeubles dans quel- 
ques mains qu'ils passent. L'hypothèque n'a lieu que dans 
les cas et suivant les formes déterminées. L'hypothèque est 
lg«le, c'est-à-dire résultant de la loi en faveur de femmes, 
des mineurs, des communes et établissements publics; elle 
est fl«diciaire, c'est-à-dire résultant de jugements en faveur 
de celui qui les a obtenus; enfin, elle est conventionnelle, 
c'est-à-dire ayant pour cause des conventions redigees 
sous la forme de certains actes. 
Le mode de purger les proprietés des priviléges et hypo- 
thèques a été tracé aux tiers détenteurs au moyeu de la 
trans cri p t ion, à la conservation ou bureau des bypo- 
thècines, des contrats translatifs de proprit-tê. La loi a 
presoit en mëme temps les formes / suivre à cet cil'et, 
ainsi que celles relatives au mode de purger les h.vDO- 
thèques Iëgales qnand il n'existe pas d'inscriptiou sur les 
biens des maris et des tuteurs. Les registres des conserva- 
tions des hypothèques sont publics, et les conservateurs 
sont tenus de délivrer à tous ceux qui le requièrent copie 
des actes transcrits sur lenrs re#stres et des inscriptions 
existantes, ou un certificat qu'il n'en existe aucune. La 
loi a impose une grave regponsabilité aux conservateurs 
dans le cas d'inexactitude des renseignements ou d'irrégn- 
laritë dans l'accomplissement des formalites; elle a égale- 
ment tracé la forme des registres et les précautions à prendre 
pcur en assurer la tenue régulière. 
Par la loi du 21 ventèse an vu, la conservaon des 
hypothèques a étë confiée à l'administration de Penre,tre- 
ment et des domaines; les fonctions de conservateurs 
sont remplies par des employés de cette importante parue 
des services publics : ils exercent sous la double surveil- 
lance de l'administration et des tribunaux. Des consetwa- 
tions sont établies dans chaque arrondissement communal et 
dans la ville oi siCe le tribunal de première instance; 
l'Cendue de la conservation est la mème que le ressort du 
tribunal. Une exception existe pour le département de la 
Seine, ou, quoiquïl n'y ait qu'un tribunal de première ins- 
33. 



60 
tance, dont le sige est fi Paris, il a clé néanmoins établi 
trois conservations : ì Paris, b, Sceaux et "/t Saint-Denis. 
Henri nE SMIT-GEIlS» érlfieateur des domaines. 
Les biens susceptibles d'hypothèque sont les immeubles 
et l'usuluit des reCes biens pendant le temps de sa dtrée. 
Quelques droits réels immobiliers, comme le droit de pa- 
cage, peuvent être l'objet d'une hypothèque, parce que, bien 
qu'incorporels, ils ne sauraientêtre détachës des immeubles 
dont ils forment une propriété distincte. Mais il y a d'au- 
tres droits que la loi décla'e immeubles par destination, les 
actions en revendication d'immeubles, par exemple, qui ne 
sont pas susceptibles d'hypothèques. Les servitudes actives 
ne peuvent ètre bypothéquées qu'avec in fonds lui-même, 
attendu qu'elles cesseraient d'exister si on les en séparait, 
non plus que les droits d'usage etd'habitation, parce qu'ils 
snt incessibles. L'e m p h y t h é o s e peut être hypothéquée; 
mais l'u sufr uit d'un immeuble ne peut pas l'être. 
Les droits et créances auxquels l'hypothèque légale est at- 
tribuée sont ceux des femmes mariCs sur les biens de leur 
mari, ceux des mineurs et interdits sur les biens de leuls 
tuteurs; ceux de l'État, des communes et des établisse- 
ments publics, sur les biens des rcceveurs et administra- 
teurs comptables. 
La femme a h)potbèque légale sur les biens de son mari 
pour tous ses droits et créances, quels qu'ils soient, pour ses 
erCunes paraphernales comme pour ses autres reprises. Tous 
les biens présents et ì venir da mari sont somnis ì l'hypo- 
thèque légale de.la femme. Quant h celle de la femme d'un 
commerçant, elle éprouse quelques modifications relative- 
ment ì son etendue, en cas de lail|ite de ce dernier. 
L'enfant mineur n'a point d'h)pothëque Iégale pour s0- 
reté de ses biens personnels dont le p6re a l'administrabon 
pendant le mariage. 
Le trésor public a une hypotlièque légale, ì la charge de 
l'inscription, sur les immeubles appadenant aux compta- 
bles anb.rienrement ì leur nomination et sur ceux acquis 
postérieurement par eu, autrement qu'h titre unt.reux. 
L'h)-potbèque judiciaire résulte des jugements contradic- 
toires ou par defaut, définitifs ou prosisoires; elle peut 
s'exercer sut" les immeubles actuels du debiteur et sur ceux 
qu'il pourra acqnerir. Tout jugement confëre hypothèque 
lorsqu'il contient une con,Intonation quelconque, soit qu'elle 
cousiste dans le pa)ement d'une sonnne ou dans l'obligation 
de faire ou de ne pas faire. Les dérisions des tribunaux ad- 
ministratifs en matière contentieuse sont, comme celles de 
l'autorité judiciaire, susceptibles de conférer l'liypotlièque. 
Les décisions arbitrales n'emportent hjpotbèque qu'autant 
qu'ellessontrevêtues de l'ordonnance judiciaire d'exécution. 
Quant ì l'hypothbque conventionnelle, comme la facullé 
d'hypolltéquer est absolument la conséquence de la faculté 
d'aliéner, celui que la loi prive de la faculté d'aliéner est 
alement pdvé de celle d'bypothéquer. L'incapacité légale 
d'aliéner, et par conséquent d'hypolh6quer, tombe sur la 
femme mariC, sur les mineurs, sur les interdits et snr les 
individus pourvus d'un conseil judiciaire,/ moins qu'ils n'en 
aient le consentegient. Cette incapacité atteint le mineur, 
mme émancipé, ì moins qu'il ne soit commerçant. Il y a 
encore exception en faveur des marchaudes publiques, qui, 
pouvant s'obliger pour ce qui concerne leur négoce, ont la 
faculté d'hypothéquer leurs biens immeubles. Toutelbis leurs 
bens dolaux, lorsqu'elles sont marié« sous le régime dotal, 
ne peuvent dtre bypothéqtés que pour les causes et dans 
les formes étahl.:es par la loi. Il en est de mme des biens 
des mineurs, des interdits et de ceux des absents, tant que 
la possession n'en est déférée que provisoirement. Un ac- 
quéreur peut h)pothéquer une chose acquiseavant d'en avoir 
pa3'é |e prix; mais, comme on ne peut donner p|us de droits 
qu'on n'en a soi-intime, l'hypothèque consentie pourra ètre 
privée d'effet si l'acquéreur ne paye pas le prix convenu. 
L'hypoflque conventionnelle ne peut dire consentie que 
par acte passé en forme authentique devant deux notaires. 
Il n' a. d'liypotbeque convenfionnell, valaIfle une celle 

qui, soit dans le titre attthentique constitutif da la créance, 
soit dans un acte authentbique postérieur, déclare spéciale- 
ment la nature et la situation de chacun des immeubles ap- 
partenant actuellement au débiteur sur lesquels il consent 
l'hypothèque de la créance. 
La spécialité est nn des principes fondamentaux de l'hy- 
pothèque conventionnelle; on conçoit alors que cette espèce 
d'hypothèque ne peut grever que les biens présents, puis- 
qu'il serait impossible de spécialiser des biens ì venir. Ce- 
pendant, comme le but de la loi est de favoriser le crédit 
du déhiteur, elle lui permet, si ses biens présents et libres 
sont insuffisants pour la s0reté de sa creance, de consentir 
que chacun des biens qu'il acquerra par la suite j demeure 
affecté ì mesure des acquisitions. 
L'bypothèque conventionnelle n'est valable qu'aotant que 
la somtne pour laquelle elle est consentie est certaine et 
determinée dans l'acte. Si la créance résultant de l'obliga- 
tion est conditionnelle pour son existence, ou indeterminée 
dans sa valeur, le créancier ne peut requérir l'inscription 
que jusqu'à concurrence d'une valeur estimative par lui dé- 
clarée expressement, et que le débiteur a droit de faire ré- 
duire, s'il y a lieu. 
Le rang des hypothèques est fixé, non par la date des 
titres, mais par celle de leur i n s c r i p t i o n sur les restres 
du conservateur. L'bypotbèqu¢ sans l'inscril,tion est, sis- 
ì-vis des tiers, comme si elle n'existait pas; car c'est l'ins- 
cription qU lui donne la publicite et qui doit fixer le rang 
entre les divers creanciers. Ce principe et applicable con- 
lement ì l'liypothèque légale, ì l'hypothèque judiciaire et 
ì l'hspothèque conventionnelle. Mais il est modifie, comme 
il a etc dit plus haut, par deux exceptions en faveur de 
l'hspothèque légale des femmes et des mineurs et interdits. 
Elle existe alors, independamment de toute inscription, du 
jour. de l'acceptation de la tutelle ou de celui du mariage. 
Pour les s»mmes dotales provenant de successior, s échues 
ou de donations faites ì la femme pendant le mariage, l'hypo- 
thèque n'existe qu'/ dater du jour de l'ouverture des suc,- 
cessions ou de celui où les donations ont eu leur effet. Pour 
l'indemnité «les dettes qu'elle a contractées avec son mari et 
pour le remploi de ses propres ailCC, l'liypothèque n'existe 
qu'/ dater du jour de l'obligation ou de la vente. 
Certaines précautions, néanmoins, qui assurent la publi- 
cite de ces h}potbèques et sausegardent les interêts des 
tiers, ont été prises par le Iëgislateur. Ainsi les maris et tu- 
teurs sont obliges «le rendre publiques les hypothèques dont 
leurs biens sont greves, et à cet effet de requerir eu\- 
mëmes, sans aucun delai, Pins¢ription sur les immeubles 
ì eux appartenant et sur ceux qui pourraient leur appartenir 
par la suite,/ peine d'.tre réputës stelLionataires. Les su- 
brogés tuteurs, le procureur impérial, les parents et amis 
du mari, de la femme, ou ceux du mineur, la femme ou les 
mineurs eux-mêmes ont la faculté de requérir les inscrip- 
tions de l'hypothèque légale. Elle peut cependant être 
restreinte en ce sens qu'elle ne nuise pas au crédit des 
teurs et epoux et ì la transmission des immeubles. Les 
parties majeures peusent, dans le contrat de mariage, con- 
venir qu'il ne sera pris inscription que sur certains immeu- 
bles du mari ; il en est de mme pour celle des mineurs lors- 
que les parents, en conseil de famille, y ont consenti. Les 
jugements sur les demandes en réduction d'hypothèque des 
matis et tuteurs ne peuvent tre rendus qu'après avoir en- 
tendu le procureur impérial. Un principe d'ordre public a 
fait interdire ì la femme la faculté de renoncer ì l'hypothè- 
que par son contrat de mariage; cette garantie, en effet, n'a 
pas lieu seulement dans l'intërët de la femme, mais aussi 
dans celui des enfants. 
Les créanciers ayant une hypotfièque inscrite sur un im- 
meuble ont le droit de le suivre, en quelques mains qu'il 
passe, pour ètre colloqués et payés de ce qui leur est 
suivant l'ordre de leurs créances ou inscriptions. Les créan. 
clefs chirographaires, étant appelés à partager par co n t r i- 
bution ce qui reste du prix de l'imtneu!e après l'acquit- 



HYPOTilEQUE 
lement des dettes hypothcaires, peuvent intervenir dans la 
procedure d' o r d r e pour veiller à leurs intértts; mais ils 
ne peu,eut élever les mêmes contestations que les créan- 
oers bypothécaires et proposer, par exemple, la nullité de 
l'inscription. 
Lorsque le nouveau propriétaire d'un immeuble n'a pas 
rempli, dates le délai prescrit, les formaiités requises pour 
purger les hypothèques, il demeure, par l'effet seul des ins- 
criptions, obligé comme détenteur à toutes les deltes hypo- 
thécaires, et jouit des termes et délais accordés au débiteur 
originaire. Dans ce cas, le droit de suite conféré au,z créan- 
ciers par leur hypothèque subsiste dans toute sa force, et 
le tiers detenteur et tenu ou de pa)'er tous les intéréts et 
capitaux exigibles, ou de délaisser lï[nmeuble hypothéqué 
sans aucune réserve (voye-. DLAtSSEaX). S'il n'a pas 
purgé la propriété, et s'il se refuse à pa)-er les dettes bypothé- 
caires ou à délaisser l'im[neuble, chaque créancier a droit de 
poursuivre l'expropriation et de faire vendre l'immeuble bypo- 
théqué trente jours après commandement fait au débiteur 
orinaire et sommation faite au tiers detenteur de payer la 
dette exigible ou de delaisser l'heritage. Mais le tiers deten- 
teur peut s'opposer, au moins temporairement, à la vente 
en opposant le b én é fice de dt se u ssi o n, exceplion qui 
ne saurait être opposée au créancier priiléé ou ayant une 
hypothèque spéciale sur l'immeuble. Si la discussion n'est 
pas demandée, ou si elle ne suffit pas pour désiutéresser le 
créancier, la eute est poursui, ie suivant les formes de 
l'expropriation. 
Les hypollèques s'éteignent par l'extinclion de l'obliga- 
tion principale, la renoncialion du créancier, la purge, la 
prescription. Si l'obligation principale ient/t re, ivre, l'hypo- 
thèque revit également; mais si la radiation a eu lieu, elle 
ne prend rang qu'à dater du jour de la nouvelle inscription. 
La reaonciation à Phypothèque est l'acte par lequel le 
¢réancier abandonne ses droits ser la chose, en se réservant 
seule[nent son action personnelle conlre le débiteur. La 
prescriplion est acquise au debiteur, quant aux biens qui 
sont dans ses main, par le temps fixé pour la prescription 
des aclions qui donneur l'hpolhëque. Quant aux biens qui 
sont dans les mains d'un tiers detenleur, elle hd est acquise 
par le temps régle pour la prescription de la propriéte à son 
profit. Lorsque les droits des créanciers sont ouverts et 
exigibles, ils opèrent l'interruption de la prescription par 
voie de sommation, de saisie ou de co[nmamlement ; mais 
si leur créanee n'est pas exigible, ils n'ont d'autre mo)-en 
que de former contre le tiers detenteur l'action en déclara- 
tion d'hypolhèque, action qui a pour but de faire déclarer 
l'immeuble déte[n afleclé h l'hypolhëque. 
« La malière des hypolhèques, disait Réal, est sans con- 
tredit la plus importante de toutes ; elle intéresse la Iortune 
mobilière ou immobilière de tous les citoyens. Elle est celle 
à laquelle loutes les transaclions sociales se rattachent. » 
Cette grande i[nportanee de l'hypolhèque lit de tout lemps 
élever des plaintes amères sur la complicalion des rouages 
qui mettent en action loul le sstème h)pothécaire et sur 
la néeessite d'y apporter de grandes améliorations. Cepen- 
dant tous les vices du régime hypothécaire n'étaient pas 
également remédiables; quelques uns tiennent à la nature 
mème dela proprieté et aux intérèls co[npliqués et divers 
qu'il faut prendre en considéralion. Une reforme qui devait 
précéder toutes les autres et.qui a.été enfin effectuée 
par la loi du 3 mars 1855, l'établissement d'une Iormalité 
intrinsèque, la t r a n s e r i p t i o n, pour les transmissions 
entre-vifs de la proprieté, c'est-à-dire le relour à la loi de 
brumaire an ,, a donné satisfaction sur ce pone à l'opi- 
nion générale. Les acquereurs etles préteurs sont alCot- 
mais à l'abri de ce dédale d'e[nbt'ches où les jetait l'absence 
d'une tradition publique de la chose aliénée. Quant à la re- 
vision totale du régne hypothécaire entreprise par PAssem- 
blée législative, elle n'a point survécu au nau[rage de ce grand 
corps politique; mais l'organisatton du crédit foncer 
doit preparer la voie des perfectionne[nent« ,i venir. 

-- HYPOTHÈSE 2or 
HYPOT|IÈSE conception idéale qu'on pose et sur 
laquelle on s'appuie pour arriver à des conséquences ou à 
des explications. Ce mot semble être le synonyme parfait de 
celui de supposition, qui signifie aussi ce qu'on met dessous, 
ce qu'on avance pour servir de base à un raisonnement, 
avec cette différence pourlant que l'un vient du grec (fi6, 
sous, et O«t.;, action de placer ou de poser), l'autre du la- 
tin, (sub, sous; posilio, action de placer ou de poser). Mais à 
cette première différence s'en rattachent d'autres beaucoup 
plus importantes : d'abord, hypothèse doit êlre plutt un 
terme scientilique, et supposition un ter[ne du langage or- 
dinaire : on sait que, de tout temps, les savants ont affecté 
d'e[nployer des mots dérivés du grec, tandis que notre lan- 
gue usuelle, presque entière, p,end ses racines dans le latin. 
Cette dilférence, d'ailleurs, est constamment observée par 
l'usage : hypothèse est un mot que l'on rencontre sans cesse 
dans les matlématiques, en astronomie, eu loque, etc., 
et, au contraire, on se sert toujours de supposition dans 
le discours commun ou mème familier. On lit dans le Dic- 
tionnaire de l'Academie qu'hypothèse est un terme de philo- 
sophie : c'est un terme de science ou de spéculation. 
Hypolh'èse étant un terme scienlifique, et les sciences 
s'occupant souvent de choses idéales, imaginaires, ns au- 
cun rapport avec la réalité, l'hypothbse n'a pas pour essence de 
présenler la chose comme possible, au lieu que la supposi- 
tion la donne toujours coin[ne telle, ou [nême comme réelle. 
Un astronome suppose la lune babilee s'il se borne à dé- 
duire les cons:quen¢es qui d,_'rivent de sa conceplion, il fait 
une hypolhëse; il n'y a rien à lui dire. Mais s'il prétend 
qu'etfective[nent la lune et habitce, et qu'il fasse des indue- 
tions en conséquence, c'est une supposition; et sa supposi- 
tion peut ètre gratuite, vraie ou faus«e. L'hypothèse est un 
fait de l'imagination, de la conception : on ne l'attaque 
point en elle-mme, mais dans ses conséquences, ou cortune 
insuffisante pour rendre raison des ci,oses; la supposition 
est du domaine du jugement ou de la croyance : elle affirme 
la réalitë ou tout au moins la possibilit,.; ce qu'on attaque 
en elle, c'est le supposd iui-mème. Enlre l'hypoth'èse et la 
supposition sous ce point de, ue la diffcrence est la mème 
qu'enlre la delinition et la proposition ordinaire : la I,re- 
miëre est libre et inattaquable ; c'est tout le contraire pour 
la seconde. Ce qui prouve bien encore que l'hypothèse est 
tl,eori,lue, idéale, didactique, relative seule[nent à l'in- 
telligence ou à l'explication des choses, et la supposilion 
relative à la pratique, à la vérité, ou à la rëalite, c'est que 
le [not supposition seul se prend dans un sens moral, pour 
signifier allégation, production fausse, chose feinte ou con- 
trouvé, pour nuire : s tpp o s i t i o n de piëces, d'un testa- 
ment, de nom, de personne, etc. 
11 rsulte des detinilions donnëes par l'Académie des deux 
[nots hypothèse et supposition que de l'hypothèse on tire 
desconséquences, etdelasuppositon desinductions. 
Les points de départ, et, pour ainsi dire, les appuis de nos 
raisonnements sont de deux sortes, ou de prc[nisses, c'est- 
à-dire des principes, des lois génerales, des concepts de 
l'esprit,.d'ou nous déduisous des conséquences ; ou bien des 
faits, des observations, à l'aide desquels nous nous Alevons 
à des inductions. Or, il est évidenl par cequi précède que 
l'hypothëse nous fournit plulét des données de la première 
espèce, et que la prétention de la supposition est toujours 
de nous en fournir de la seconde. Lorsque l'hypothèse, au 
lieu d'ètre une conoeption simple, est un ensemble de con- 
eeplions ou de lhéories IlCs entre elles, ce mot devient 
synonyme de système, si l'on en croit l'Academie. Ious 
ne sommes pas de cet avis. Une difference les distingue pro- 
fonde[nent : l'hypothèse est toujours le frein du génie de 
l'homme, et, l'homme ne pouvant deviner la nature des cho- 
ses, il arrive rarement qu'il y ait coïncidence entre ses con- 
ceptions et les desseins du Créateur; de 1/ vient que le mot 
hypothese entralne toujours dans sa signilication quelque 
chose d'imaginaire et de fantastique. Mais, le systëme pou- 
vant être le résultat d'observations exaetes ou de supposi- 



62 HYPOTHÈSE 
tions ralisées et vérifit:es, ce mot se prend presque ton- 
|ours en bonne part. On dira donc bien les hypolhèse ou 
les système de PtolCmëe, de Tycho-Brahe; mais on dira 
le système, et non pas l'hypothèse de Copernic. 
Hypothlique est un adlectifentièrement didactique, qui 
se dit seulement des raisonnements et des propositions qui 
impliquent une bypothèse. Benjamin Lav.,-. 
HYPOTYPOSE (en grec, ,o--, représentation 
figurée, de OE, sous, et,-vor.&o, imprimer, calquer, décrire), 
ligure de rhétorique q,i réunit, à elle seule, les orne- 
ments, l'éclat et le coloris de toutes les autres. Elle n'est 
qu'une description vve et animée dont on se sert 
Iorsqu'on a des raisons pour ne pas exposer implement un 
fait, et qu'on veut le peindre avec force. Chez les anciens, 
Homère et Virgile ecellent dans ce grand art, et leurs 
poemes olfrent une suite de tableaux du plus grand talent 
et de la plus grande vérité. Parmi nos écrivains, on en 
trouve aussi de bien beaux modèles en tous genres. Sou- 
ent cette figure est exprinéc en peu de mots ; c'est alors 
surtout qu'elle frappe. Mais ordinairement l'hypotypose a 
plus détendue : alors elle copie l'obje.t par differents traits 
rassemblés, et ainsi elle s'enrichit encore par t'acc«mula- 
tion, qui ramasse avec force et sivacitè, pour les rcunir en 
un seul point, toutes les circonstances. Entre autres exem- 
ples, on peut citer la mort de Didon, dans Yirgile; la des- 
cription que fait Cicéron de Verrès couché avec une femme 
sur le rivage de la mer, ulwrculd ni:vus, etc. Toutefois 
on doit remarquer que cette figure est plus particuliere à 
la poAsic, qui doit peindre avec plus d'entliousiasme et avec 
des traits plus hardis que la prose. Nos anciens rhéteurs 
rardaient l'hypotpose comme une des parties de la des- 
crittion; dans nos eus rages modernes, c'est, au contraire, 
sous le nom gén6ral d'hypotypose que se trouvent compri- 
ses : t ° l'e.ffiction ou trosopoyr«phie, qui represente les 
traits extérieurs; 2 ° la totoyr«phie, qui décrit les lieux; 
3 ° la chronoyrothie, qui caracterise le temps d'un événe- 
ments par le détail des circonstances; 4 ° enfin iYtotëe, qui 
décrit les mœurs et le caractère. 
HYPOXYLÉES (de ;o, sous, et ç)o., bois), famille 
«le champignons, ainsi nommée parce qu'un certain 
nombre de ses espèces vivent sur les plantes vivantes, dont 
elles rompent répiderme..Mais la plupart croissent sur le 
bois mort, d'autres sur la terre même. Les hypoxylées sont 
de petits champignons généralement corlaces, brnnfitres, 
souvent connes par leur base ; leurs autres caractères par- 
ticulicrs consistent dans leurs spoudies, enveloppees de 
mucus ou enferreAes dans des cellules allongees. Les genres 
hysterium, cytispora, sphrie sont les principaux de cette 
famille. 
HYPSIL/LXTI. l'o9e: YPSlLA1VI'I, 
HYPSIST.kBIEXS ou HYPSISTA.NIES, secte du 
quatrième siècle, qui avait son. siége en Cappadoce, et qui, 
mécontente des nombreuses altérations que le christianisme 
avait déjà subies au sein de l'Eglise, adopta la croyance en 
un Dieu universel. Les hpsistaries adoraient Dieu sous 
son nom le plus ancien et le plu; simple, Hypsistos, c'est- 
i-dire le Très-Haut (de ,oç, hauteur, cime, le ciel), et en- 
touraient leur culte de pratiques et de symboles empruntés 
syncrétiquement à diverses religions. Aussi saint Grégoire 
de Nazianze ietr attribue-t-il en mme temps le culte du 
feu et l'observation du .sabbat judaïque, avec quelques lois 
relatives aux aliments. Les sertes des euphémites, ou mes- 
saliens, en Pliénicie et en Palestine, celles surtout des abé- 
lites etdes célicoles en Afdque, semblent asoir eu riel'af- 
finitWavde la secte des hypistariens. On a diversement 
expliqué l'urique et le caractère-de celle-ci. 
HYRCA- nom de deux grands prétres et princes des 
Juit, de la maison des Asmonns. 
ItYBCAN I « (Je), fils de Simon, qui régna de l'an 
136 à l'an 106 avant J.-C., subit d'abord leioug des Syrieus; 
mais, devenu independant, il suumit les Samaritains, et 
«onhaiguit les Idumécn à embrasser le judaïsme. Il tir 

alliance avec les Romains, construisit le: château fort de 
Baris, sur l'angle nord-est de la montagne du Temple, et 
recnla son territoire presque jusqu'aux anciennes limites du 
royaume de Dasid. Il semble aussi asoir jeté les bases du 
sanliéd r i n. Pharisien dans l'origine, il se rallia plus tard 
la secte des Sadducéens. A sa mort, il laissa cinq fils, dont 
deux, Aristobule et Alexandre, régnèrent avec le titre du roi. 
HYBCAN II, petit-fils d'Hyrcan 1*" et fils d'Alexandre, 
fut proclamé mi de Jérusalem l'an 96 avant J.-C.; mais, 
vaincu par son frère Aristobule, il rentra bientét dans la 
vie privée. Provoqué par l'ldumécn Antipater, il chercha 
ensuite à remonter sur le tréne avec l'aide d'Arétas ; mais 
ce fit sans succès. En l'an 63 avant J.4:L, Pompée le 
nomma grand prêtre et ethnarque. A partir de cette époque, 
Hyrcan s'occupe dutemple, et Antipater du gouvernement. 
L'an 47 avant J.-C., César lui confirma la dignité hérédi- 
taire de grand prëtre, et nomma Antipater procurateur. 
Lorsque Antigone, fils d'Aristobule, fut devenu grand 
prètre et roi par le secours des Parthes, il fit couper les 
oreilles à Hyrcan, pour le rendre indigne d'exercer le sou- 
verain sacerdoce. Les Parthes l'emmenèrent avec eux 
Sele,cie, l'an 40 avant J.-C. 
IIYRCAXIE, nom anden d'une province de Flràn, 
qui comprenait la centrée située entre le mont EIbrouz et la 
mer Caspienne, par conséquent le pays situé le long de la 
céte méridionale de cette mer, appelé auiourd'lmi Masan- 
dérdn, et qui se trouvait entre l'ancienne ?,Iédie au sud-ouest 
et la Parlhie à l'est. Sauf la partie basse riveraine de la mer 
Caspienne, c'èlait ,m pays sauvage, mais bien arrosé par 
les nombreux petits cours d'eau qui ont leur source dans les 
nontaes voisines et vont se déverser dans la mer Cas- 
pienne, dès lors d'une fertilité extrême, dans ses vallées et 
ses parties basses, en grains, fruits et vins. Ses habitants 
appartenaient, suivant toute apparence, à la race des Par- 
thes, et Catent fameux dans l'antiquite à cauede leur 
ruelle. L'H rcanie fut de bonne heure subjuguée par les Mèdes 
et les Perses ; et comnoe province de la Perse partagea à 
toutes les époques les destinées de cet empire, sauf la pé- 
riode peudant laquelle la Perse se trouva placée sous la do- 
mination des Parthes, époque où l'Hyrcanie se maintint in- 
dépendanle, et fit mëme souvent trembler les rois parthes. 
IIYBC.XIE.XXE (Mer). Voyc-- C.,,smmr.. (Mer). 
HYSOPE. Ce genre appartient à la didynamie gymnos- 
permie de Linné, à la famille des labiées de Jussieu. Parmi 
les cinq espèces qu'il renferme, une seule offre quelque 
intérèt : c'est l'hysope officinale ( hyssopus qfficmalis, 
Lin. ). L'b}sope officinale est un petit arbrisseau rameux, 
à branches dressëes et pqlvérulentes, à feuilles opposées, 
sessiles, lancéolées et poudreuses comme les branches, et 
parsemèes, à leur face inférieure surtout, d'une multitude de 
petites glandes. Les fleurs de l'hsope, bleues, roses ou blan- 
ches, sont disposées en Cis dans les aisselles des feuilles supé- 
rieures, et toutes sont dirigées d n mëme c6té ; leur calice est tu- 
buleux, cylindrique, à cinq dents aiguês ; leur corolle est bi- 
lahiée; quatre Camines, droites et écartées, se proiettent 
au dehors de la corolle; et l'ovaire, supère et quadrilobé, 
porte un style filiforme, couronné par un stigmate bifide. 
L'hysope croit, à l'état sauvage, sur les collines arides, et 
dans les murs delabrés de la France méridionale ; elle fleu- 
rit aux mois de juin et de juillet. D'une odeur pénëtrante, 
comme la plupart des labiées, d'une saveur aromatique et 
et un peu acre, l'hsope a dO nécessairement trouver place 
parmi les plantes médicinales : aussi l'infusion de sec som- 
mités fleuries a-t-elle été souvent conseillée, avec s,ccès 
peut-ëtre, dans la plupart des affections catarrhales, eX 
surtout dans les inflammations chroniques de la muq,euse 
pulmonaire. 
L'hysope est fréquemment mentionnée dans les saintes 
Écritures : il paraitrait mme que les Juifs s'en servaient 
dans leurs purifications. « Salomon a connu fo,les les plan- 
tes, depuis le cèdre du Liban j.squ'à l'h)-sope qui crut! dans 
les murailles, ,, dit le livre des Rois. Hasselquist s'est au- 



torisé ,le ce passage pour avancer que l'e:ob des Hébreux 
n'était pas, malgré l'autorité des Septante, P(mawoc des 
Grecs, mais bien une petite mousse, fort commune dans les 
murs de Jérusalem ; mais la critique d'Hasselquist n'a pas 
étA adoptée, etlaversion des Septante a prévalu : touteiois 
nous n'en sommes guère plus avancés quant à la détermina- 
tion botanique de la plante que les Hébreux ont appelée e--.ob : 
car, en admettant, ce qui est douteux, que l'e'.ob des Juifs 
soit bien rellement l'éaawo; des Gret, il faudrait encore 
prouver que l'aawo; des Grees était bien réellemcnt 
l'hyssopus de Linné, ce qui est plus douteux encore; 
Dioscoride, qui mentionne cieux espèces d'atoo:, ne les 
caractérise ni l'une ni l'autre, et la plupart des botanistes 
penctient à croire que la plante ainsi denommée par lui et 
qui paralt avoir été très-génëralement connue de son temps 
appartenait à quelque espèce vëgdtale complétement dis- 
tincte de I'«,f.ficinalis. .B£LFIELn-LEFÈvBE. 
[]¥ST&PE  père de D a r i u s I er, était issu de la fa- 
mille des Actiémenides et tait gouxerueur de la Perse pro- 
prement dite quand son fils, apcès avoir tué le mage Smer- 
dis, s'empara de la couronne de Perse. C'est à peu prés tout 
ce qu'on sait de lui. Il ne fut pas longtemps témoin des 
splendeurs et des prospérités de son fils, et mour,tt, dit 
etésias, des suites d'une chute qu'il fit en allant visiter le 
tombeau magnifique que Darius se faisait construire entre 
deux mont9es. 
[]YSTERIE(de (;,--poE, utérus), maladie à laquelle la 
femme est disposée par son organisation particulière : ce 
mot spécifie en grec l'affection d'un iscère chargé de rem- 
plir principalement la pénible ionction de la maternité. L'es- 
q,tissedes principaux symptémes de cette maladie en don- 
nera facilement une idée. Les femmes I,ysteriques ou dis- 
pusCs à le devenir se font remarquer par une sensibilild 
et une mobilité très-vives; leurs gestes, leurs regards, sont 
caressants; elles se complaisent à embrasser leurs compa- 
res et les enfants; leur caractère est très-variable; on les 
voit passer facilement ,l'une gaieté folle à une tristesse ino- 
pinée et non motivée. L'efftrsion des larmes est pour elles 
un besoin fréquent, qui met fin momentanément à un 
sentiment d'oppression et de sulfocation. Divers accidents 
signalent l'affection : des b;lillements réitérés surieunent; 
la respiration devient pénible ; un mouvement s'opère dans 
l'abdomen, et il est accompagné d'une sorte de contraction 
des parois de cette cavité'; il s'en élève comme une bu,de, 
qui semble remonter vers la gorge, et suffoque la malade : 
la peau palit, se refroidit, rougit et s'échauffe alternative- 
ment ; la circulation est troublée; le cœur palpite ; les ar- 
tères de la tète battent avec violence; souvent les màchoires 
se resserrent, les membres s'agitent convulsiement, et 
la syncope met fin à cet état. Lorsque la malade se ranime, 
,m flux abondant de larmes ou d'urines s'opère comme une 
sorte de crise salutaire. Cette perturbation violente, appelêe 
vulgairement attaque de nerfs, ne laisse après elle qu'une 
fatie de peu de durC, et la santé babituelle se rétablit. 
Mais, plus tard, ces accidents se renouvellent à des retours 
périodiques, qu'on nomme accès, et dont la répétition est 
plus ou moins Iréquente. Si l'hystérie n'est point combattue 
efficacement, elle peut acquérir une gravité alarmante. Les 
accidents d,.butent subitement et avec force; les mouve- 
ments convulsifs sont violents, ou bien le corps est dans 
une roideur tétanique; les malades poussent des soupirs ou 
des cris étouflés, quelquefois analogues aux aboiements 
d'un chien ; tantét elles grincent des dents, tanlét s'arra- 
chent les cheveux; elles s'abandonnent enfin à des actes in- 
sensC. La violence de cet état convulsif est quelquefois com- 
parable à l'épilepsie. La syncope peut se prolonger au 
point d'ètre léthargique. Enfin, dans ces cas extrëmes, l'hys- 
téde est vraiment une scène effrayante; aprés les accës, 
iii reste une sensibilité morbide très-grande, et divers acci- 

STÊROTOMIE ABDOMINALE 263 
dents, méme mortels, peuvcfit survenir. Une douleur lo- 
cale, fréquemment perçue sur la tgte, est au nombre des 
sympt6mes de cette maladie; cette douleur, en raison de sa 
fixité, a été appelée clou gslérique. 
Le sige de l'hstérie se découvre par le peint de départ 
des premiers symptômes, et par la remarque que ceite ma- 
ladie n'affecte les femmes que durant la période de leur vie 
où elles sont aptes à devenir mères. Mais, independamment 
de l'organe abdominal, on doit aussi considérer que le cer- 
veau concourt puissamment à sa production ; car on la voit 
survenir communément aprè.« «les entretiens ou des lectures 
érotiques. L'observation montre infime qu'une partie dira 
cerveau y prend une part spéciale : c'est la partie corres- 
pondante au cervelet, celle o/ les pbrnolo#stes ont placé 
la phi[ogéniture'; les femmes hstériques ont ordinairemeut 
cette region du cervelet trës-développée, et une sensation 
pénible sur cette partie a souvent ete perçue chez quelques- 
unes avant et pendant les accès. L'auteur de cet article en a 
vu une qui, dans un délire Itysterique, tenait constamment 
une de ses mains sur la partie que nous indiquons. Les 
fiommes mème qui ont le cer-eau amplement développe 
ont des maieres caressantes comme les femmes prédispo- 
ses à l'hystérie, et les angoisses paternelles que ces indi- 
vidus éprouvent sont accompagnees d'une sorte de stran- 
gulation. Shakspeare l'avait remarqué, car il lait dire au 
roi Lear, accable de douleur par la conduite de ses filles : 
« Le mal des mères inc suffoque. » biais ce concours du 
cerveau dans la production de l'hystéde, que l'observation 
empirique révële, ne peut surprendre un plysiologiste; et 
celui qui sait que les iscëres sont solidaires les uns des 
autres comprendra aussi que l'lvypocondrie a du rap- 
port aec I'[ystérie, et peut la compliquer. Aussitôt que 
les symptômes precurseurs de la maladie se manifestent, 
on éprouve des bàillements rëit,.rés, de l'étouffement, le 
besoin de pleurer, une sensation contractive dans le 
ventre, etc. On doit essayer de prevenir l'accès en faisant 
sentir à la malade une plume brùlee ou tout autre corps qui 
degage au feu une émanation analogue, mais s'abstenir des 
odeurs trop penétrantes, comme Falcali et l'éther, qui irri- 
tent le cerveau par leur activité. On pourrait aussi exercer 
sur le derrière de la tëte des lotions avec de l'eau froide, 
tandis qu'on entourerait les jambes de serviettes chaudes, 
ou qu'on a,lministrerait un pediluve chaud. Si les accidents 
n'ont pu tre prévenus, il faut enlever le corset et les jarre- 
tiéres, ne laisser enfin aucune ligature; placer la malade 
sur un matelas ; éloigner d'elle tous les objets qui pour- 
raient la blesser dans ses mouvement irraisonnés; la con- 
tenir dotmement; exercer «les blutions sur ses membres 
avec les mains nues ou aec des Ilanelles ; dégager autour 
d'elle des odeurs fétides, et attendre ainsi le retour du calme ; 
puis faire entendre h celle qui sort ,l'un état aussi violent 
des paroles affectueuses. Ces soins doivent être donnés, 
autant que possible, par des personnes àgées ou peu exci- 
tables, car l'ti}-stérie se propage aisement par imitation i la 
prudence veut qu'on ne rende auome jeune personne, 
femme ou fille, temoin d'un accès hystérique. L'expérience 
a demontré l'importance de cette recommandation, sur la- 
quelle nous ne pouvons trop insister. 
Les moyens de prévenir l'hysterie sont assez bornés. On 
recourt, suivant les cas, aux purgatifs, aux ferruneux, aux 
antispasmodiques. La nourriture doit ëtre Iégëre, l'exercice 
modcré. Quand il n'y a pas de contre-indication, on peut 
espérer de bons effets des bains froids. Mais on devra sur- 
tout faire tous ses efforts pour empgcher l'esprit du malade 
de s'appesantir sur l'alfection dont il est atteint. 
D r CH A UBO,%,IEi 
|IYSTÉROTOMIE ABDOMINALE du grec 
:spoE, matrice, et ztvw , je coupe), l'oye-- C[Saltm, (Opé- 
ration ). 



I 

| neuvième letlre de noire alphabet, qui occupe la troi- 
sièJne place parmi nos voyelles. Cette lettre, chez le an- 
ciens Latins, avait deux valeurs difï«rcntes : elle était ou 
voyelle ou consonne, suivant les exigences de la prosodie. 
On met un point au-dessus de ce caractère, afin qu'on ne 
le contonde pas avec le jambage de quelque Irrite voisine. 
Rien, on le sait, n'est si ordinaire que l'omission involon- 
taire de ce point : aussi l'attention h le mettre est-elle re- 
gardée comme le signe d'une exactitu,le ponctuelle ; on dit 
o'un hommé exact dans les moindres cimses qu'il met les 
points sur les i. 
On appelle  trn celui sur lequel on met deux poinls 
disposés hodzontalement; on donne aussi à ces deux points 
le nom de dirèse. Le teCa sur ['t indique que cette 
lettre ne forme point dipbthongue avec la voyelle qui la 
précède, et doit ëtre prononcée séparément, comme dans 
les noms Las, Morse, qui se prononcent différemment que 
les mots lait, nois malgré la similitude apparente du tél« 
qu'y rempli.sent les voyelles ai, o. 
Suivant Court de Gébelin, dansl'aipfiabet primitif, dans le 
lange i|iéroglyphique, la letlre idésigne la main de l'homme, 
instrument dont il se sert pour toutes ses opérations, siCe 
de sa puissance et de sa force. C'est le yod des Sémites. 
On a longtemps fait de i'i une seule et mme lettre avec 
le j. Dans tous les vieux Dictionnaires, dans la grande 
cyclopoedie, on réunit ces deux lettres, l]eauzée seul, dans 
cette derniëre œuvre, proteste contre cet usage. 
Empioye comme lettre num,rale, l'i en grec signifie 10, 
de mme qu'en ficbreu. L'I romain vaut un. Placé devant 
V ou X, il diminue d'une unité le nombre exprimé par 
ces deux lettres : ainsi, V, qui vaut cinq, ne vaut plus que 
quatre si on le fail préceder de la ieltre en question (IV). 
Cependant, en latin, tiC exprime 00, IIIM 3,000, elc. 
Comme abreviation I signifie lmpcrator, In, lqiffi, In- 
rictus, ldoea. Souvent i'I est combiné avec différentes lettres : 
l. Ctus signitie Jure consultus; l.Q, Jure Quiritium ; 
I. G, Jure genlium ; I.V, Jastus vir; V.I, vir illuMris. En 
France, la lettre I était naguère la marque caractéristique de 
la blonnaie de Limoges. 
Dans les formules chimiques, I représente un équivalent 
d'iode, If un équivant d'iri, lium. 
IABLONOVSI!  tamille princière de Pologne, qui 
a produit plusieurs personnages distingués. 
Stanisla I.eosowsl, né en 1631, après avoir pris 
part aux guerres contre les Cosaques, les Tartares et les 
Suédois et avoir assisté, aux cétés du roi Jean Sobieski, à 
la glorieuse bataille de Choczim (1673), fifl élevé à la di- 
gnitédegrand hetmau de la couronne, en i652. Sa retraite de 
la Bukowine, d'où il ramena, en 1685, i'armée polonaise, 
en résistant avec avantage aux forces bien supérieures des 
Turcs et des Tatares, lui lit le plus grand honneur. Il 
mourut en 17o2. 
Joseph-Alexandre IAULO.'OWS, né le 4 février 171l, 
devint voïwode de Nowogorod et fut créé, en 17.3, prince 
de l'Empire d'Ailemagne. En 1768, Il quitta sa patrie, lors 
des troubles qui y éclatèrent, et, au retour de nombreux 
voyages en France eten Italie ,il fixa sa résidence à Leipzig, 
oil I1 mourut le I er mars 1777. Ami et pro[ecteur des scien- 

ces, il reunit dans ses domaines, notamment à Iablonof, de 
riches collections de livres, de medailles, etc.; il composa 
aussi iui-mme plusieurs ouvrages polonais, latins et .fran- 
çais. Dans i'année 1765, il proposa trois prix pour la solu- 
tion de trois questions relatives h l'histoire de la Poiogne, 
h i'économie politique, "h la physique et -aux matfiémati- 
ques; prix que la Sociëté des laturalistes de Dantzig ëtait 
appelee à décerner en 1766. Mais celle-ci ayant accordé le 
prix à une dissertation de Schlozer, qui reléguait dans le 
domaine de la lubie l'existence de Lech, le prince Iablo- 
no'ki regarda cette assertion comme une hë'sie fiistori- 
que contre laquelle il puhlia ses l'cndicze Lechi et C:echi 
(Leipzig, 1770), et refusa de delirer le prix proposé, eu 
soutenant que les condilions du concours n'avaient point été 
remplies. En 1768, il fonda à Leipzig la société scientifique 
qui porte encore son nom, mais qui ne fut définitiment 
organisëe qu'en 1774. labnowski la dota d'un capital dont 
les revenus sont appliqués à faire fiapper trois médailles en 
or, de la valeur de a ducats chacune, h l'effigie du fonda- 
teur, pour les meilleures réponses à trois questions relatives 
au sciences peCitCs. 
La famille labionowski fleurit encore en Russie et en Au- 
Iriche. Ele a aujourd'hui pour chef le prince Antoine 
I.tOtOWSK, né en 1793 ; son petit-neveu, le prince Fli 
Ixntoows, né en 180S, entré dan» l'armée autrichienne, 
y a ohlenu en 1:551 le grade de feld-maréchai-lieutenanl. 
IABLU,ILIk petite ville faisant partie des domaines de 
l'archiduc Charles (mort en 187) dans la Siiésie autri- 
chienne, située dans un «les dish-icls montagneux des Car- 
pathes, au confluent de i'oEIse et de la Lomna, avec 2,500 
habitants dont l'industrie linière est la principale ressource. 
Ele est assez mai bàtie et d'une chëtive apparence, mais 
fort importante par sa position sur la routeprincipale condui- 
sant de ce point en Hongrie, et qu'on appelle le defiié de 
lablunl«a. Le retranchement remarquable que l'on h'ouve 
à 10 kilomètres de cette ville, au sud, fut elevé en 151, lors- 
que la Siiésie fut menacée par les Turcs qui avaient inondé 
presque toute la ltongrie. Dans la guerre de trente ans, en 
1625, ce retranchement fut pris par le corps d'armée de Mans- 
feld, qui y séjourna pendant près dune année. En 165 le 
général suédois Koenigsmark s'en empara. Autant en fit Fré- 
déricll h l't.poque de la première guerre de Siiésie ; et depuis 
il resta dans un état de delabrement complet. Ce n'est que 
dans ces derniers temps que l'on compJit de nouveau la va- 
leur de ce 
« , point stratégique et qu'on l'a remis en bon état 
de léfense. 
IACCIlOS. Voye.: Bxccuvs. 
IACOB! (Fnmc-H-l),ingénieux philosophe, né à 
Dusseidorfen 1743, futdestiné par son père, riche négociant, 
au commerce. Un séjour de trois années qu'il fit à Genève, 
en lui permettant de se rendre familières les principales 
productions de la littérature française, lui inspira le gofit le 
plus vif pour l'étude des sciences et des beiles-letlres. Après 
avoir exercé le commerce avec distiuction pendant plusieurs 
annecs, tout en se iivranl à la culture des lettres et à la phi- 
losopfiic , il fut nomm meffinbrc du conseil aulique des fi- 
nances, position qui lui permit de renoncer desormais tout 
h fait a la catïiè commerciale, et qu'il ne quitta qu'en 1779 



IACOBI -- IAMBE 
pour se rendre à Munich avec le titre de conseiller privé. 
A la suite de l'atation toujours croi.sante que la révolution 
française provoquait en Allemagne, il se rendit dans le Hol- 
stein, en t 79,, et habita alors tantôt XVandsbeck et Hamhourg, 
tant6t Eutin, jusqu'en 1803, époque où il fut rappele à Mu- 
nich pour y organiser la nouvelle Académie des Sciences. Il 
fut nommé prësident de cette académie en t$07 mais il se 
alAmit de ces fonctions en 1813, tout en conservant le traite- 
xnent qui y était attacbé, et que la perte de la plus grande 
partie de sa forttine, jadis considëmble, lui rendait néces- 
salve pour vivre, et mourut le t0 mars 1819. 
Ses ouvragesles plus remarquables sont : Woldemar (2 
vo1.,1799 ) ; Collection de Lettres d'Éd. Alwill ( i 751 ), sur 
l'#tude de Spuosa ; Lettres à Mendelsohn (1785); à David 
1lame, sur la foi,ou Iddalismeçt Bdalitd(1786 ) ; et Lettre 
à Fichte (1799). Comme poëtc, lacobi se distingue par 
une peinture fidèle et énergique de la nature et du cœur 
lmmain, une expression vive, spirituelle et raie; comme 
plfilosophe, par la chaleur de ses sentiments religieux. Et 
cependant, il est peu d'écrivains et de penseurs au sujet des- 
quels on ait émis des jugements plus dt%ets, plus contra- 
dictoires. Suivant lui, la foi, ou, pour nous servir du terme 
qu'il employa ldus tard, la raison nous recèle les choses 
divines tout comme les sens nous recèlent le monde exté- 
rieur. Cette'révélation constitue une notion immédiate: 
toutes les notions (de l'esprit) ne sont que secondaires. Il 
était naturel qu'avec une telle manière de voir, laeobi ne 
rot le disciple d'aucun autre philosoplJe, et que son vole se 
born'M à ètre le critique des philosophes de son siècle, tels 
que Mendelsolm, Kant, Fluide et Schelling. La controverse 
qu'il engagea aec ce dernier, dans son écrit intitulé : Des 
choses divines et de leur rëvelat$on , fut suivie de part et 
d'autre avec une grande aigreur. 
Son frère, Jean-Georges lcon|, né en 1740, mort en 
1514, professeur de théologie à luniversité de Halle, a laissé 
un nom comme VJëte, et fut rimitateur, parfois heureux, 
denotre C haulieu et de notre La Fare. 
I&COBI (.Mxtce-Hml-x-), né h P,]tsdam, en lSté, 
conseiller d'État russe, membre de rAcademie imperiale des 
Sciences de Saint-Pétersbourg depuis 1847, s'elt fait un 
nom dans le monde savant par sa découverte de la gai- 
v a n o p I a s t i e et de l'application de l'électro-magnétisme au 
mouvement des machines, ainsi que par ses expériences en 
grand, faites à Saint-Pétersbourg, en i8:,0, en société avec 
Augerand, pour l'éclairage électriqlm. On lui doit aussi la 
première application des bouées explosives pour faire sauter 
les vaisseaux en mer. Indépendamment de quelques anciens 
mémoires, tels que son Mémoire sltr la GaivanoplaMe 
(Saint-Pétersbourg, 180), et un autre Mcmoire sur l'Ap. 
191ication de rlectro-mapnétisme au |ouvement des 
¢enachiues (Potsdam, 1835), on a de lui, dans le Recueil de 
rAcadéufie de Saint-Pétersbourg, un grand nombre de dis- 
sertation s. 
I.'ERTA (Hxss), ancien ministre d'État suédoE% fils du 
lieutenant général baron de Hjerta, naquit le 11 fevrier 1774. 
Il avait vingt-six ans lorsquïl débuta à la diète générale 
de 1800, tenue à liorkjoeping. Dans cette assemblée, il ap- 
porta Fexpression chaleureuse des idées au nom desquelles 
s'était faite la révolution française, et renonça solennelle- 
ment à son titre de gentilhomme. Son exemple fut imité 
par qnelques-nns de ses amis, qui déclarèrent comme lui ne 
plus vouloir faire partie d'un ordre dont le maintien était 
incompatible avec le bien-gtre et la prospérité de la pa- 
trie. A partir .onc de ce moment, il renonça à son nom 
noble de Hjerta, qu'il n'écrivit plus désormais que loerta, 
ces deux nom.» se prononçant en suédois de la mgme façon. 
Quand ëclata la rëvolution de 1809, il remplissait un em- 
ploi dans les bureaux d'une compagnie d'assurances à 
$tocl, ltolm; il fut désigné alors pour secrétaire du comité 
chargé d'élaborer la nouvelle constitution suedoise. Peu de 
temps aprës, il fut nommé ministre des finances et du com- 
merce, et en 1812 gouverneur de la Dalecarlie emploi 
D.t,i. DE LA CO2tÉ;$o  "£. Xl. 

65 
dont il se démit en t82. A quelque temps de !, il vint se 
fixer  Upsal, od il vécut désormais tout entier à des tra- 
vaux historiques et dans le commerce intime dcs savants 
professevxsde cette université. C'était en politique la contre- 
partie exactc de Geijer : si celui-ci avait desert les r, ng 
des couservoteurs pour p&ser dans ceux des amis de la li- 
bedé, loerta, après a,'oir professé les principe» les plus 
exaltés de la democratie, avait, sur la fin de sa vie, fait 
volte-face, et s'était rallié aux ultra-conservateurs. « Il 
191us royaliste que moi.néme, » aait coutume de dire de 
lui le vieux roi Bernad ot te. 
En 1838, l'Académie d'llistoire et d'Arcbéologie décerna 
un prix à son Histoire de la Jurisprudence en Suède au 
dix-septième siècle ; livre qui témoigne de recherches aussi 
profondes que savantes. Dans les dernières années de sa vie, 
il avait élé nommê chef des archives «lu royaume, tout en 
continuant d'habiter Upsal. Il est mort en 1847. 
I&KOUTSK pro ince de la Sih,;rie orientale, qui Dt'est 
comprise dans aucun des quatre gouvernements de la Si- 
bérie. Elle est diisée en cinq arron,lissements : iakoutsk, 
Olekminsh, Wiljuisk ou Olensk, Werchojausl et Sredne- 
Kolymsk,, et sur une superficie de ab0 myriamètres carrés 
ne compte guère qu'une population de 170,000 "àmes. Les 
Kotjoekes, les lakoutes, les lul, agires et les OEongouses sont 
les seuls habitants de ces àpres contrées, presque compb.te- 
ment inhoçpitalières, et qui, à l'exception de lakoutk, le 
cbet-lieu, d'Olekminsk et de XXiljuik, ne présentent en- 
core que peu d'habitations fies, parcourues qu'elles ne sont 
d'ordinaire que par des peuples nomades adonnés à la 
cltasse et à la pècl,e. Cette pro lace est remarquable par la 
grande ab,,ndance de ses eaux. En effet, indep:.ndamment 
du gantesque torrent «le la L,'n., avec son rand nombre 
d'allluents, tels que l'Olekma, l'Mdan et le XVilui, elle pos- 
sëde encore le grand fleuve d'Anabara, ceux de Olenek, de 
Jana, d'lndirka, de Kolyma et ,rOmodon, qui tous se 
jettent dons la mer Glaciale du Sord. 
Le chef-lieu, lakoutsk, sur la Léna, à peine habité par 
4,000 Ames, fait un c .minette a:.if, d'un c6te lusqn'au: 
deux dislrict maritim's d'Odtozk et du Kamschaika, et de 
l'autre jusqu'h hkoutsk et à Tobolk. C'e,-t un des princi- 
paux points de réunion pour les cara'anes de la Sibérie 
orientale, de mëme que le grand enlrep6t du commerce des 
pelleteries pour les districts maritimes. Cette  ille est aussi 
un des lieux d'exil où l'on ,h'porte ordinai.'ement les cri- 
minels politiques de quelque imp,.,rtance. B!en que ce ne 
soit pas la ville située le plus au nord de la terre, elle en est 
très-certainement la plus Iroide. Le sol y est constamment 
gelA à plus de 130 mèh'es de proondeur, et il uy a qu'une 
couche extérieure d'un mètre qui deg:le en ét., lorsque le 
thermomètre marque 5 ° à l'ombre. 
I.kLTA.  ville de la Tauride, dans une situation ravi»- 
sanie, près de la cbaine méridi«nale des rochers de la 
Crimée, au pied du colossal Tsch :tyr-Dagh, à 85 kilomé. 
tres de Simphéropol, avec un port s.,rvant au cabotage. Bàtie 
en amphitltéttre sur les bords de ! t Iner Noire, elle était le 
siCe d'un commerce florissant, sou • le gouvet-nemcnt rtlse, 
avant la guerre actuelle. La paix lui rendra sans doute son 
importance. 
Une autre ille du mgme nom, située p:-ës de la m :r d'Azof, 
entre Petroskaja et Marioupol, dans le gnuvert|e|uent de 
lé.k.atérinolaw, est aus-i une place de commerce importaute. 
IAMBE  IAMBIQUE. Une sllabe brève mise avant 
une longue s'appelle un tombe, dit Horace. Ailleurs, il ob- 
serve qu'Archiloque, couseillé par la rage, inventa rtan|be. 
Ici le mot reçoit un nouveau sens, et signifie un vers de six 
pieds, composé de syllabes successivement brêves et longues. 
Le nom substantif ïambe est employé aussi comme un ad- 
joctif: « Les ers ïambes, remarquele Dictionnaire de 
l'Acaddmie, sont propres à exprimer les pasious., Mais 
est plus rarement elnploé aujourd'hui à cet usage qtle 
l'adjectif dérivé iambiue. C'est un pied rapide, aioute tin- 
race. Aussi a-t-on donné le nom de trimètre art vers iam- 



bique, parce qu'on le scande, ou comple, en réunissant deux 
pi¢îls dans nne seule mesure, exemple : 
'ers ïambique : B-tus il-le qni-procul-neoefi : 
" ritre mbique : Beaus il-le  pro¢ul-ncgo.ti. 
A son tour, l'adjectif ambie t employé Ini-mme r 
ellipse, à la manièred'nn snbstantiL 
Dans le pncipe, l'iambe pouvait composer à lui seul 
tons les pie du vers ïambe : tel est l'ïambique pur. Mais, 
dans la suite il fit société avec le spondée, et pagea son 
domaine avec lui, sans néanmoins poner la complaisance 
jusqu'à lui céder la seconde ni la quatrième place du vers : 
oe fut rambique mId. « Le brodequin et le cothurne, dit 
Horaoe, ont adopté ce mètre, d pour l'action et propre 
a dialogue. » Eu effet, suivant Astote, Cicérou et Quin- 
tilien, le vers ïambique était si narel, qu' venait se pré- 
nter de lui-même sous la plume de l'histocien, ou sur les 
lèvres de l'orateur, et les éivains se tenaient en garde 
contre bd, s'ris ne voulaient paraltre affecter le rhythme 
ptique dans la prose. Il fut adopté au théàtre avec de an- 
d libertés. La tragédie introdubit dans les mures ira- 
paires le spondée, le dacyle, l'anapeste et le tribraque : le 
troisième pied doit commencer par nne césnre ; mais on 
trouve rarement l'anapeste, qu'on voit plus sonnent an cin- 
qème pi. Le second admet voloners nn tribraque. Enfin, 
la comée vt converser en vers ïambiqnes de huit pieds ; 
eUe enemla, sans distinion, les spouds, les dactyl, 
] anates, les tribraques et les trhées, sans conserver 
d'autoe joug que l%bligation d'un iambe an dernier pied, 
oemme nn souvenir de son ortie. Mais le vers dut à cette 
oenoe une variéte, nne aisance, un naturel, qui rent avec 
plus de ridaitWle laisser-aller de la conversation. 
Le grand vers ïambe, lyque ou tragique, est de six 
 le tit de quatre; le troisième vers d'une strophe al- 
ie est mime un ïaique de quatre pieds et demi. 
Dans la composition lyrique, tantOt chaque espèce de vers 
ïbique est employée seule, tant6t le grand vers ïambi- 
que est accouplé avec le petit, qui marche de pair avec lui ; 
tant6t le vers hexamètre se marie avec le graud iambiqne, 
et ui-ci accompae celni-lh comme le peutamètre dans 
les dys. 
Le terme iambe, suivant ceai philologues, so de la 
racine ;, venin, ou du verbe agtv, médire. e serait-ce 
s, an oentraire, ce dernier mot qui serait dcrivé du pre- 
? Eu effet, les Grecs donnaient le nom d'[a[a à leurs 
psies satifiqu ; et c'est avec oe alerter sens que M. Au- 
s Barbier a imprimé le mot ïambes au frontispice de 
son recue. A l'imitation d'André ChCier, dont les œuvres 
ptiques sont reinCs par des ïambes sur la t3"rauie 
révolutionnaire, fl emploie alteativement le vers alexan- 
drin et le vers de huit syllabes, rhythme dont Phaonie ré- 
pond à la marche d'Horaoe dans son e sur les dissen- 
sions civiles de sa patte : 
tera j territ bel civbus oe ; 
 et ip Koma viribus ruit. 
Hippolyte 
IIBLICUS. te 
IANINA. Voye= JA. 
IAAS on HIABBA5, roi de Gétulie,querÉndenous 
fait oennaitre à propos de n ,mr pur Dt'don. Irrité 
du refus que ce oeine avt fait de l'épouser, il décla 
effe aux Cathagiuois. Mab Didon, us le prétexte d'a- 
per I mes de Sichée, son premier poux, fit préparer 
 grand sace, se piarda et se je dans un b0cher 
'ee avait ait allu. Virgile a suppos qu'larbas avait 
ét vaincu par Én ée, son rival ; mais qu'ap  victoire 
lehéros troy avt abandonné Didon, et que ce fut par dé- 
po mno que la Re de Cadhage se donna la mort. 
 (de rYoe). 
IABOSLAF ou OSLAWL, autrelois nde prin- 
ciuléet an jonC'but gonvcement dndant de b Grand 
ussie, sitn ente les gouveements du Wologda au nord 

JAMBE -- IATRAI_ . . 
de Kostroma à l'et, de W]adimir au sud-est et au sud, de 
Tweràl'onest, et deNovogorod àl'onest, compte t,0t0,000 ha- 
bitants, snr une surface de450 myriamètres carrés, divisée 
en dix cercles. Le I en est généralement plat, d'une mé- 
diocre fertilité, et arrosé par le Wolga, la Mologa, la 
$cheksna, etc. Cette province reulerme de nombreux ma- 
rais et quelques lacs, notamment celui de Naro, près de 
Rostof, produit peu de cSréales mais en revanche beaucoup 
de lémes, et possède d'assez importantes filatures de lin ; 
on y élève aussi beaucoup de bétail. 
IAROSLAV, chef-lieu du gouvernemen russe du. 
mime nom, ì l'embouchure du Kotorosl dans le Volga, 
compte 36,000 habitants et nn grand nombre de mannfac- 
turcs, et tait un commerce important. Elle et le siége d'un 
archevêque et du gouverneur militaire; on y trouve qua- 
rante-qnatre églises, trois couvents, et»uu séminaire, un 
lycée fondé par un Demidofet auquel est adjoint nne biblio- 
thëque considérable. Toutefois, la ville de commerce la plus 
importante de ce gotrvernemeut et aussi de toute la Russie 
centrale est R ybinsk. 
IAROSLAF ou IAROSLAU, chef-lieu d'une capitai- 
nerie du royaume de Galli«ie (Autricbe), ltie dans nne 
helle contrée, sur les bords de la $an, l'un de afl]uents de la 
Vistule, compte une population de 8,000 mes, On y trouve 
des blanchisseries de cire, des manufactures de draps à l'u- 
sage de rarmée, des fabriques de bougies, de toiles, de ro- 
soglio, etc. ; il s'y fait aussi nn commerce considérable favo- 
risWpar la navigation de la SAn, qui a pris de très-grands 
développement«. 
IASIKOFF {N;OLï M;cnAïLOVrrCn), poëte lyrique 
russe, naquit en 1805, h Simbirsk, et entra h l'Age de dix- 
sept ans dans le génie, biais s'occupant plus de liftCature 
que de son métier, il lisait et étudiait les œuvres des poëtes 
Lomonosoff et Derjawine, dont il est facile de reconnaitre 
l'influence sur la direction de son talent. Un journal, le 
Sorewnowatelj, reçut ses premiers essais potiques. A 
partir de 1823, il passa plusieurs années ì Dorpat, où il se 
lia avec Schukowski et Poushkin. En 1831 il obtint un em- 
ploi dans l'adxninistration ; mais le mauvais état de sa santé 
le contraignit à  renoncer au bout de deux ans, Il s'en re- 
vint alors à $imbirsk, dans l'espoir de s'y rétablir, et 
mourut, en 18t6, à Moscou. Dans l'intervalle, il avait été 
passer cinq années à Hanan, en Italie • et sur les bords du 
lac de C6me. Son poême Sur le lhm est le meilleur de 
ceux que lui inspira ce voyage ì l'étranger. 
Quoique la courte existence de lasikoff n'ait été marquée 
par aucun incident bien important, chacun de ses poëme 
se rattache à quelque événement de sa vie. L'homme et le 
poëte sont étroitement nnis chez lui. Comme forme, tout 
ce qu'il a écrit est un modèle ; et ses vers sont d'une ravis- 
sanie harmonie. On est étonné qu'il ait pu assouplir à ce 
point la langue russe. Pou.hkiu et Dellwig s'accordent 
dire que l'art de la versificatiou a atteint les dernières li- 
mites de la perfection dans les vers de ce poëte. Dans sa 
jeunesse, Iasikoff ne chantait que le vin et l'amour, et avait 
ainsi mérité le surnom d'Anacroeon russe. Plus tard, ses 
souffrances physiques donnèrent à ses pensées nne direction 
plus grave. 
IASMUND, partie septentrionale de l'ile de ln gen. 
IASSY. l'ole JASSY. 
I.TRALEPTIQUE (de toEpz, médecine, et 
frotter), méthode thérapeutique, qui consiste à administrer 
les médicaments ou à traiter les maladies par la voie de 
l'absorption cutanée.Ainsi, les frictious, les onctions 
et toute espèce d'application topique, rentrent dans cette 
médication, qu'il ne faut pas confondre avec la metbode 
e n d er m i q n e, dans laquelle la snbstance médicamenteuse 
est mise en contact immédiat avec le derme, déponillé. 
préalablement de son épiderme par l'action d'un corps vési- 
saut. Cette dernière, d'une application malheureusement 
plus restreinte, jouit d'une énergie bien supSrieure à rantre. 
Ge n'est pas une raison, cependant, pour abandonner la. 



IATKALEPTIQUE  IBIS 
-mthode ialraleptique, qui possède une efficacité incontes- 
table, nonobstant l'obstacle qui riait de I'épidexme. 
D r S,CCEnOTrE. 
| ATBO"CHIMISTES  partions de la c h ira in t r i e. 
IATIgJ-MATHE.kTICIENS. On a donné ce nom 
aux membres d'une secte medicale qui prétendaient expli- 
quer tous les phéunmenes de l'économie animale, soit dans 
l'état de santé, soit dans l'état de maladie, par les principes de 
l'hydraulique et de la mécanique, et qui formulaient les lois 
d'aprës lesquelles ces phénomènes se produisent sous forme 
de calculs mathématiques. Cette secte, qui prit naissance 
en ltalie, vers le milieu du dix.septième siècle, eut 0out 
fondateur B o tel i i. La philosophie cartésienne, les travaux 
de Galilée, la découverted'Harvey, les recherches de Sanctoe 
ius, etc., avaient mis en grande faveur les recherches de phy- 
sique expérimentale, et Borelli crut qu'il pouvait faire aussi 
facilement l'application des principes de la mécanique A la 
pathologie qu'il l'avait fait précédemment aux mouvements 
des animaux. Bellini, son disciple, développa la partie sys- 
tématique de cette doctrine; le cours du sang, le mécanisme 
des sëcretions furent ramenés aux lois de la statique et de 
i'h)draulique. La précision math,.matique que cette theorie 
semblait introduire dans les phnomènes si obscurs de la vie 
séduisit beaqoup de médecins, et les doctrines mecaniques 
e disputèrent avec les doctrines humorales la faveur du 
public. SaUvages en France, Hotfmann en Allemagne, 
I o ë r h a a v e en Hollande, en adoptèrent quelques parties, 
qu'ils rattachèrent, les premiers à i'aninisme, qu'ils profes- 
saient, d'après S t a h I ( voyez, A.xmsF.s), le dernier a l'h - 
morsme. 
En AnOeterre, les grandes découvertes de Newton sem- 
bhient avoir donné une nouvelle vie aux doctrines iatro- 
.atbématiques, dans lesquelles ou faisait jouer un r61e im- 
portant à l'attraction. Cheyne, Picarn, Keille, Beruoulli en 
Italie, renchérirent encori sur leurs prédecesseurs, en ap- 
pliquant à la physiolooe le calcul de Iogarithmes, le calcul 
diff«rentiel et int'gral, etc. ; maison aait dep6s longtemps 
depassé le but; et le praticiens, got'tant peu les subtilités 
des mécaniciens, finirent par ne plus doun d'attention à 
des recherches qui, contenues dans de justes limites, eus- 
sent pu avoir une heureuse influence sur les procès de la 
science. C'est ce qu'ont compris quelques physioloostes de 
nos jours, et à leur tte Magendie, qui a pronvé qu'on 
pouvait tirer un parti très-heureux de l'application discrète 
des sciences phsiques, surtout depuis leurs récents progrès, 
 la science de i'hoaune sain ou malade. D r SAUCEIOI'TE. 
IAXAITES aujourd'hui Sihon , ,Sir ou Sir-Dara , 
fleui'e du Turkesta n, qui prend sa source sur le versant 
eccidental de i'Asie centrale, traverse dans la direction du 
nord-ouest la contrée montagneuse de Ferghana, dans le 
khanat de Khokand, et va se jeter dans le lac d'Aral. On 
estime sa longueur directe fi 136 myriamètres, son par- 
cours total à 200, et son bassin à 3,900 myriamètres OETéS. 
Les Grecs l'appelaient tantOt Orxantes et tantôt T(maïs; 
les 51assag è tes, qui habitaient ses rives, lui donnaient le 
nom de ,$ilis; et on te regardait comme formant l'extrème 
line frontière de l'ancienne Perse au nord-est, c'est-à-dire 
de la Sogliane, oi Cyrus avait construit la forteresse de 
Cyropolis ou Cyreschata, qui est peut-être bien le Khod- 
jand actuel; de même qu'Alexandre le Grand y construisit, 
plus  l'est, une autre forteresse appelée Alexandrin, et 
qui est peut-être bien le Khokand actuel. 
IAZYGES (en hongrois làs'.ok ), nom d'une des sept 
races principales dont se compose la nation hongroise. A 
l'époque d'Herodote, ils habitaient avec d'autres tribus de 
mme origine la contrée appelée aujourd'hui Russie méri- 
dionale. Peu de temps aprës la naissance de Jésus-Christ, 
leur nom parvint jusqu'à lqome, où on les redoutait comme 
excellant à manier l'arc. A cette époque en effet ils tra- 
versèrent la Moldavie et pénétrèrent en Honnie jusqu'à 
la Theiss. Lors de la grande invasion de l'occident par les 
lI a g y a r e s, le nom des lay£,es se con['ondit avec celui de la 

nation principale. Mais au trcizibme siècle, quand le flot du 
l'invasion magare se fut arrêtC ou les retrouve au lieux 
qu'ils habitaient précédemment, c'est-h-dire ur les rives de 
la Theiss, où de nos jours encore ils forment la population 
des di»tricts de la la:ygie, de la grande et de la petite 
Kournanie, silnés au centre de la Hongrie, au voi.inage du 
Danube et de la Theiss, occupant ensemble uue surface 
de 60 mvriamètres carrés, et comptant une population 
de 00,000 tmes, d'origine complétement ma-,yare, et ré- 
partie dans dix-sept bourgs forains, cinq villages e cin- 
quante-cinq looussten. Sur ce nombre on compte 84.956 ré- 
formés, 390 luthCiens, 8 grecs et le reçte catholiques. 
Après avoir maintes fois rachelé de l'ordre Teutonique 
leurs district% que lui avaient engagé les anciens rois de 
Honrie, les Iazyges et le Koumans furent confirmés 
en 17-15 dans leurs antiques priviléges par i'impératrice 
llarie-Th,.rèse. Jusqu'en 1Sf9 ils étaient tous considérés 
comme gentilshommes et placés immdiatement sous les 
ordres du Palatin. Les trois districis qu'ils occupent sont 
très-plats, et produisent beaucoup de fionen, car la popu- 
lation en est presque exclusivement agricole. Le chef-lieu 
des trois districL« réuni est las=ber.¢ny,  file de 19,000 Smes. 
IBAiRA (JO«Cl,), né à Saragosse, en 176, mort le 23 
novembre 1785 à lIadrid, où il était imprimeur du roi, eut 
le mérite d'élever en Espagne la typographie à un degré 
de perleclion dont on ne s'eait pas fait d'idée jusqu'à lui. 
De ses presses sortirent des ditions de luxe de la Bible, 
du Missel Mo:(tr(tbique, de l'Histoire d'Esp(tg"ne par 51a- 
rianà, de Don Quixote, et de la traduction epagnole de 
Solluste, qui avait pour auteur linfant don Gabril. Connue 
il nYtait lainais sorti de sa patrie, il lut réellement l'inven- 
teur de toutes les améliorations qu'il introduisit dans l'impri- 
merie. 
IBÈiES. l'ove'. 
IBÊRIDE genre de plantes de la famille des crucifères, 
dont les principales epèces sont connues sous les noms vul- 
gaires de thlaspi et de corbeille d'argent. 
IBÉIIE. Les anciens avaient donné ce nom à une fer- 
tile plaiue de l'isthme caucasique, presque entièrement en- 
tourée de monta-,nes, traversée dans toute sa longueur par 
le fleuve Cyrus (aujourd'hui appelé le Kour), produi- 
sant en abondance du biC de l'huile et du vin, séparée au 
nord du pays des Sarmales par le Caucase, et bornée au cou- 
chant par la Colchide, au mi«li par la Grande-Armènie, et 
au levant par l'Albanie. Cette contrëe forme aujourd'hui la 
Géorgie ruse ou Grusie. Les bal}fronts, les Ibères, se li- 
vraient surlout à la pratique de l'agriculture, et formaient 
quatre ca_Ores distinctes; les nobles, les pr,'.tre% les guerriers 
et les ariculteurs ou esclaves. L'expédition que Pompée 
entreprit dans ce pays, en l'au 65 avant Jésus-Chri»t, le fit 
comlaître. Il resta .-uns la domination des P, omains depuis 
le règne de Trajan jusqu'à la mort de Julien, époque où il 
fut conquis par le roi de Perse Sapor II. 
Le nom d'lbrie avait également ét donné par les anciens 
à l'Espagne, c'est-à-dire au pays arrosé par l'Iberus 
(l'Ëb) et habité par les lbères, peuple primitif du sud- 
ouest de l'Europe, n'ayant aucun rapport avec les Ibères 
d'Asie, et qui était divisé en nne f,»ule de petites peuplades 
disséminées non-seulement dan» toute l'Espagne, mais encore 
au nord des Pyrénées, en Aquitaine, et vraisemblablement 
autrefois plus avant encore dans la Gaule, de mme qu'aux 
brds de la Mé,titerranée jusqu'au Rh6ne. Dans ses lecher- 
ches sur les habitals oborigènes de l'Esp(«9e , au oyen 
de "la langue basçtue ( Berlin, 1821), Guillaume de H u m- 
boldt a demontre que les Basques actuels sont les decen- 
danls de ces lbères. Du mélange des lbères avec quelques 
peuplades celles émigrées provinî la nation des C e I t i b 
  e n s, qui habitait le plateau de l'Epagne centrale. 
IBIS genre d'oiseaux de la famille des échassiers ion- 
girostres. Ils se distinguent des c o u r I i s par leur système de 
coloralion, et aassi par leur pouce, qui, au lieu de ries'appuyer 



68 IBIS  
b. terre, comme chez les courlis, que par i'extrémité de la 
deruitxe phalange, y repose, au contraire, dans presque 
taule son elendue. Ces oiseaux vient en petites troupes de 
six à dix individus. Ils sont monogames et de mœurs douces 
et Daisibles. Leur nourriture consiste en vers, en insectes 
aqualiques, en petits coquillages fluviatiles, ce qui les at- 
tire dan, les lieux humides et marécageux. Ils recherchent 
aussi les herbes len,lres et quelques plantes boueuses. 
L'i/ris ronfle (ibis rubra, Wagler), qui habite l'Amé- 
r.ique méridionale et la Guiane, est d'un beau rouge ver- 
meil, à l'exception de l'extrémité des n»miges, qui est 
noire. L'ibis vert ou noir (tbts fitlcinelhts, W.), que 
Bulfon décrit_ sous le nom de Courlis d'ltalie, a son plu- 
mage noir, mais aee des reflets verls et violcts en dessus ; 
on le rencontre en Europe, dans l'Iode et aux Itats-Uuis. 
L'i/ris sacré (ibis reliyiosa, Cmier), propre à la Nuhie, à 
l'Ê.g,pte et au Cap, est blanc, à l'exception de l'extremite 
des grandes rémiges, qui est d'un noir cendré, et de celle 
des rémiges moyennes qui est noire avec des reflets verts 
ci violets. 
C'est cette dernière espèce qui est la plus célèbre. Elle 
porte ce non, dïbts sacrd, parce que les Eg.ptiensen avaient 
tait un oiseau sacré. L'ibis vert reeeait aussi chez eux 
les honneurs diins ; mais tout porte h croire qu'il occupait 
un rang inférieur. Ce culte, fondé, comme tant d'autres, 
sur l'erreur, avait pour cause la persuasion où etaient les 
£gypliens que l'ibis détruisait les serpents ailes et véni- 
meux qui, disail-on, pariaient lous les ans de l'Arabie pour 
pénétrer en £gypte. La fable une fois etablie, le peuple 
vit dans l'ibis uneincarnation de Thoth. Les prëlr% ardents 
propagateurs de toutes ces absurdités, déclarèrent que la 
chair de cet oiseau ne se corrompait pas. 11 est vrai qu'on 
les embaumait aprës leur mort. On a retrouv dans la 
nécropole de Memphis un nombre très-eonsideralde de 
ntomies d'i bis en fermés dans des pots de forme con ique, a an t 
de 33 à 5 centimetres de bauleur. 11 reste encore d'autres 
nonuments de la veuéralion dont cet oiseau fit l'objet : 
l.si s est quelquefois représentée avec une lète d'ibis. 
On a prétendu que les hommes devaient à l'ibis Iïnven- 
tion des lavements, parce que cet oiseau se seringue à 
l'aide de son bec, Iorsqu'il a besoin de ce remède. 
IBX. l'oye Ea. 
113X-BATOUTAII célèbre voyageur arabe, parcourut 
de 139.5 à 1354 les cétes Barbaresques, l'Ègyple, la Syrie, 
l'Arable, la Perse, l'Asie Mineure, Constantinople, la 
Russie méridionale, la Tartarie, l'Afghauislan, l'Iode, la 
Chine, les lies Mldives, Ce)lan, le Zang,ebar, le Soudan, 
Tombouctou, Grenade, elc., sans avoir d'autre mobile dans 
ses incessantes péregrinations que le désir de ve»if et de 
courir le monde, que cette inquièle curiosité et cette passion 
pour les voyages qui sont un des traits saillants du caraclère 
arabe. Ibn-Batoutah a écrit le récit de ses voyages, mais 
son ouvrage n'était guère rcpandu jusqu'h ce jour qu'en AI- 
gérie et dans le 3laroc. Une ëdition en a été récemment pu- 
bliéeà Paris par les soins de la Sociéte Asiatique, avec une 
Iraduction française en regard. C'est un livre très-curieux, 
et qui jette une ,riv luiuière sur les mœurs, les usages, les 
preiugés et I¢z opinions du monde arabe au moi, en àge. 
On , voit lbn-BaIoutal, vo.nageant pendant prês de Irente 
années sans crédit ni fortune, parce que partoul où il porte 
ses pas, de Tanger/ la Malaisie, il rencontre sa langue, 
ses moeurs et sa religion ci se trouve dans son pays, c'est- 
à-diredans ce monde de l'islamisme, o0 il y a absence de 
n .: onalités, où les hommes ne connaissent d'aulre lien so- 
cial que le li,.n religieux. Sunnite dévot el sévre, mais cri- 
lique indulgent quand il s'agit d'apprécier les miracles de 
sa secte, il est au ca,traire d'une itnpitoyahle penétration 
pour trouver en défaul les miracles des ehyites. Chemin 
faisant, il nous dcrit un nombre incroyable de prodiges per- 
manenL% et visile les docIeurs les plus cél/thres du laroc, 
du Caire, de la Mecque, de Samarkand, rencontrant par- 
lout l'hospitalité la plus empressée; hopilalit6 d'a,flant plus 

IBR, -- 
facile à pratiquer que dans les lointaines contrées où l'- 
méne son bumetir vagabonde elle ne risque voint d'tre 
exploilèe. Aussi bien le voyageur arabe, presque toujours 
jurisconsulte ou médecin, exerce sa profession tout en voya- 
geant; et partout oia il s'artère, rien ne s'oppose/t ce qu'il 
devienne bientét un personnage considérable. Sous ce rap- 
pari, rien de -arié ci d'étonnanl comme la vie d'lbn-Baloa- 
tab, que le lecteur voit tanl6t vivant dan la société des 
princes et des puissants, lantét tant celle des ermiles, ou 
bien encore recueilli dans les fondations pieuses, vérilables 
hélelleries gratuiles, créées par les croyants dévots pour faci- 
liter aux pèlerins pauvres le voyage ì la Mecque, cette vi- 
site à la Kaaba dont la loi de Mahomet fait un devoir de 
conscience à tout fidèle musulman. Ibn-Batoutah exerce 
d'aille,rs successivement lous les métiers; nous le o,ons 
Idmdi à Delh)', ambassadeur en Chine, juge aux fles Mal. 
dives, parlant fort honoré, a)aut le soin aussi de se marier 
partout où il se fixe pour quelque lemps, et la précaution 
de divorcer quand il se remet en rouie, afin de pouvoir 
à la plus prochaine station conlraclcr on nouveau ma- 
riage. 
IBX-IllALDOUN { VALv-EnIIN-ABOt;I-ZEvn-ABn- 
AtJXn.'), écrivain arabe, né h Tortis, l'an 133 de Jsus- 
Chri.t, mort au Cake, en 1a06, gé d'environ soixante- 
quinze ans, eludia, auprès de son pre et des hommes les 
plus habiles de son pays, le Coran, les tradilions de Ma- 
humer, la grammaire, la poésie et la jurisprudence, fil un 
voyage en Espagne, séjourna quelques années à Gre- 
nade, remplit «le haules fonctions à Tunis, à Fez et en 
Egypte, et laissa, entre autres ouvages, une tlistoire des 
Arabes et des Perbères, regardée par les Orientaux comme 
la tactile,re Cule de pu;itique. Deux préeienx manuscrits 
de ce livre ,rit été récemment découverts à Constantinople 
et à Conslantine. 11 a Ce publié en arabe et en français, 
avec des notes, par M3I. de Slane et Noël Desveers 
(184|-183) 
IBRAIIIM. sultan ottoman, naquit en I17, el sucoEda, 
en It4o, à son frère Amurat IV. L'avénement de ce prince 
offre un trait caractéristique des mœurs orientales. Lorsque 
les grands dignitaires se rendirent au sérail off il vivait re- 
légue, pour lui faire ceindre le sabre d'Osman, il refusa 
d'ouvrir et se barricada, croyant loucher à sa dernière 
heure; on parvint enfin j.squ'h lui en brisant les portes, 
mais on ne put cahner sa frayeur; et comme il redoutait un 
piCe de son lrère, il protesta longlemps contre les hon- 
neurs qu'on lui rendait, assuranl qu'il préférait à la socièle 
des hommes celle des petits oiseaux qu'il avait élevés. Enfin, 
la sultane Valide lit apporter le cadavre d'Anmrat ; aussit6t 
Ibrahim, changeant de lac.gage : « Dieu soit !ouC dit-il, 
l'empire est délivre de son bourreau ! » . 
D'un exterieur chétif et d'une santé chancelanle, le nou- 
veau sultan se munira rarement au peuple et/t l'armée; il ne 
quitta guëre le barem, et abandonna le gouvernement à sa 
nièce et au grand, izir. Dïmportants événements se pas- 
sèrent cependant sous son règne. Deux expéditions succes- 
sives contre les Cosaques amenèrent la reddition d'Azof, et 
Candie, la seule ile de l'Archipel qui n'était pas encore 
soumise au croissant, succomha eu 1645, à !'exception de la 
capitale, qui ne se rendit qu'en 1669. 
Une intrigue du serail avait été la cause première de 
cette longue guerre. Ibrahim s'Cait atlaché à uee ieune es- 
clave qui était la nourrice de son propre fils Mahomet; 
celle-ci, redoutant le courroux de la sultane, oblint la per. 
mission de quilter le sérail avec son enfant, sous le prëtexte 
d'un pëlerinage h La Mecque. Le vaisseau qu'elle montait 
fl, t pris par de galëres de Malle qui relAchèrent à la Canne. 
La èorte aussit6t proclama que la répuhlique de ,'enise 
avait violWla neutralité, et lui dëclara la guerre. Quant aux 
chevaliers, ils curent d'abord que l'héritier présomplif du 
tr6ne des O:mdulis etait tombé en leur pouvoir. Plus lard 
ils reconnurent leur erreur, ci l'enfant fut élevé dans la reli- 
gion Cbrctiemte. Ce personnage en!ra par la suite dans .les 



D 
urdres monastiques, et sous le nom de Padre Ottomono 
lassa dans toute l'Europe pour le fils du sultan. 
Une revolte des janissaires, auxquels se juignioent le mufti 
et les ouiCas, mit fin au règne d'lbrahim, qui fut étranglé 
dix jours après sa dëposition, le 16 ao0t t;8. Son fils Ma- 
humer, g seulement de sept ans, lui succéda. 
i BiAHIM-PA.CHA., lil. adoptif du vice-roi d'Êgypte, 
Méhémet-Ali, naquit en 1789. Ce fut contre les Waha- 
bites qu'il donna, pour la première fois, des preuves écla- 
tantes de sa valeur et de ses talents comme général. 11 défit 
complétement ces rebelles en 1819, puis il sub]ugua le Sen- 
naar et le Darfour. Eu t82b il envahit la Murée,  la tète 
d'une armée égyptienne, pour soumettre la Grèce à son père; 
mais par suite de l'accord de l'Angleterre» de la France et 
de la Russie, il sevit force, en t828,derenoneer à ses projets. 
Après la paix d'Andrinople (1829), Mél,emet-Aii songea 
à faire de la Syrie le boulevard d'un nouvel empire égptien- 
erCois. Abdallah, pacha de Saint-Jean-d'Acre, n'etant pas 
entré dans ses vues, lbrahim fut cbargé par son père de tran- 
cher la question avec l'épée. En conséquence, Ibrahim,  
la tte de l'armée de terre, Iranchit, le 9 octobre 1831, les 
fronlières égyptiennes, occupa en peu de temps la Palestine, 
prit d'assaut Saint-Jean d'A cre, le 25 mai |.32, s'empara 
ensuite rapidement de toute la Syrie, batlit les T,,rcs le 
9 juillet 1832, à Homs, puis à Beilan, et le 20 décembre, à 
lonieh, dans l'Asie Mineure, josqu'5, ce qu'entin i'arrivée 
des Russes dans le Bosphore mit un terme à sa marci,e vic- 
torieuse. Cette.campagne se termina par l'intervention des 
grandes puissances européennes; non-seulement, le 4 mai 
1833, la Porte consentit à abandonner la Syrie à 3léhémet- 
Ail, mais encore elle céda le cercle d'Adana, à titre de fer- 
mage, à Ibrahim personnellement. Ibrahim commença aus- 
sitOt l'organisation des provinces nouvellement acquises, et 
rendit de grands services aux populations, en retablissant 
parmi elles, bleu qu'à la manière orientale, l'ordre et la sé- 
curité des personnes etdes proprietés; maiscomme il intro- 
duisit dans l'administration, à la place de la mansuétude 
dont tous les actes de l'ancien gouvernement étaient em- 
preints, un système de rigueur calqué sur celui que 31éhémet- 
.Mi avait ëtabli en Egpte, un soulèvement éclata dès 183, 
de sorte q,,e son père dut accourir à son secours. La tran- 
quillité fut bien rétablie en apparence ; mais il dut faire au 
peuple d'importantes concessions. Independamment des 
troubles incessants dont la Syrie était le thétre, et qui 
avaient principalement pour ca,se la conscriptiou qu'lbral,im 
y avait introduite, une guerre de protocoles se continua entre 
Mel,émet-Ali et le sultan 3Ial,moud Il, jusqu'en 1839, mo- 
ment où de part et d'autre on résolut d'en appeler de nou- 
veau à la force des armes. La guerre se trouva déclarée de 
fait entre les deux puissances par le passage de l'Euphrate 
qt,'effectua, en avril 1839, près de Bri, par conséquent sur 
le territoire égyptien-syrien, l'armée tt, rque, aux ordres du 
seraskier Hafiz-Pacha. lbrahim battit toujours en retraite de- 
vant l'ennemi, jnsqu'au 24 juin, jour où les deux adver- 
saires se livrèrent, prës de isib, une bataille dans laquelle 
l'armée turque fut complétement anéantie. 
A ce moment Ibrafiim fut encore une fois arrêté dans sa 
marche victorieuse par la France, qui l'engagea à suspendre 
toutes hostilités, pour que les grandes puissances pussent 
arranger le différend. Les négociations dipiomatiques ouver- 
tes à cet effet n'ayant point abouti, une flotle austro-anglaise 
parut dans l'CWde t840 sur les c6tes de S)'rie; elle bore- 
barda et prit les villes de Beirout, de Jaffa et de Saint-Jean 
d'Acre, provoqua un soulèvement genéral parmi le popu. 
|ations du Liban, et chassa les Égyptiens de tut,tes les 
positions qu'ils occupaient sur les c6tes. Dès lors la position 
d'lbrabim, qui s'etait retiré sur Damas avec son armée, ne 
fut plus tenable en prcsence d'une insurrection gagnant de 
plus en plus du terrain autour de lui. Aussi se vit-il forcé 
d'abandonner ses conquëtes en Syrie et de battre en retraite 
sur l'Ëgypte en lraversant le desert sur trois coionnes, au 
milieu de lifficults de tous genres. 

-- ICARIE 
on sait que la France eut un instant la velléité de prendre 
en main la défense de Mëhémet-Mi, comme le lui comman- 
dait la politique la plus é[émentaire ; mais au moment dé- 
cisif, au moment bU la flotte française de la Mediterranée 
pouvait anéantir les flottes an:41aise et autrichienne, le cœur 
manqua h nos gouvernant d'alors; et notre amiral reçt 
l'ordre de ramener nos vaisseaux à Toulon. Mélwmet-Ali ne 
pot,ant nger ì lutter contre l'Europe tout entière, dut ac- 
cepter les conditions des vainqueurs, et se résigner à se 
reconnaitre de nouveau et de la maniëre la plus lormeile 
vassal de la Porle, sous la réserve expresse toutefois de l'hé- 
rédité du grand fie[ d'Êgypte dans sa famille. 
Depuis cotte époque lbrahim, qui, par suite des conven- 
tions arretées entre son père et la Porte, ¢:tait dési,,né pour 
lui succéder, se retira des affaires publiques, du raoins en 
apparence, et s'occupa seulement d'encourager l'agriculture 
dans ses domaines. Ce ne fut que potérieurement, et lors- 
que le grand ge de Mhémet-..li dut faire pressentir sa 
prochaine, qu'ibrabim-Pacha reparut sur la scène comme 
fiéritier présomptil du pachalik. ",lais djà il ressentait les 
premières atteintes du mal auquel il devait succomber. Les 
médecins lui conseillèrent d'ail,.r passer l'hiver de 1816 dans 
le midi de la France; et les soins que lui donna le célèbre 
docteur Lallemand, de M,mtpellier, réussirent assez pour hd 
permettre d'entreprendre au printemps suivant le voyage de 
Pa,'is, à l'effet de venir salne le roi Louis-Philippe. Le fils 
et héritier présomptif de Mel,_,net-Ali obtint dans notre ca- 
pitale une réception toute princière; le gouvernement le 
logea à l'Élysée.Bourbon et lui lit tous les honneurs de Paris, 
comme s'il se fat agi d'une tte couronn,e et encore de la 
plus hnppée. Après un mois de séjour passé à Paris en lies- 
ses, en fêstins, en bals et en revues, Ibrahi,n-Pacba s'en re- 
to»,-na en Égypte, oit il mourul, en IS8, quelques mois avant 
Mébémet-Ali. Sa descendance lut écatte de la succession, 
qui passa..au petit-fils favori de Méhémct-Ali, Abbas-Pacba. 
IBRAIL ou IBRA1L... Voyez Ba.ïlOW. 
IBYCUS, poëte Iriqt,e g,ec et contemporain d'Ana- 
créon, né -,i P, heum, dans l'ltalie inférieure, int vers le 
milieu du sixième siècle avant J.-C. à la cour, alors trës-b,'il- 
iante, de Polycrate, tyran de Samos. Plus tard, après avoir 
entrepris plusieurs voyages, il retourna dans sa ville natale, 
où il mourut. Suivant ,ne tradition répandue djh dans l'an- 
tiquité, il tut attaq,é et assassiné par des brigands. Les an. 
viens mentionnent d'lbycus sept livres de poésies epiques, 
en dialecte dorique-éolien, qui traitaient «le sujets héroï-ro- 
tiques, et se dislinguaient par le feu de l'imagination et de 
la pas.ion, comme le prouvent les fragments qui en subsis. 
tent encore, et qt, i ont étWrecueillis par Schneidewin dans 
le Delectz«s poesLç Groecorum Ele9iicoe, etc. (Gottingue, 
1839 ), et en dernier lieu par Bergk, dans ses Poêtoe Lyriei 
Grzec[ ( Leipzig, 1,43 ). 
ICABE. Voye'- 
ICAP, IE, terre promise à la nation des communistes, 
située dans la cervelle du citoyen Cabet, sous une la- 
titude où les matières les plus dures, le diamant lui-mème, 
entrent en liquéfaction, tant la chaleur s'y maintient à un de- 
gré dont le feu de l'enfer même ne saurait donner une idée! 
Icara en est la capitale. Elle est remarq,able par ses rues 
en chemins de fer, ses trottoirs abrités, ses tunnels, ses 
fontaines, etc., et réalise sous le rapport de la propreté, de 
la commodité et de l't;h;gance, les rèves dt, plus difficile dus 
arcbitectes-vc:)-ers. Telle est du moins le témoignage, qu'en 
porte, dans son Histoire du Commtmisme, M. AIfi-ed Su. 
rire, qui a eu la singuliëre fantaisiede xo-ager dans ce pays- 
là, et qui nou en a rapporté d'Afranges nouvelles. A Icnra, 
nul acci,lent à craindre pour les pietons « du c6té des voi- 
tures, des chevaux, ou des aulres animaux, ni d'auc,m 
autre c6té quelconque » ; car l'entrée de la ville est iuterdite 
aux conrsiers fringants; les conducteurs de diligences et 
d'omnibus doivent aller au pas, et tout le monde enfin 
hères et gens, prendre to,tjors la droite. « Les chiens, bri- 
?.6s et IP-I]selés, Ou conduils en laisse, ne peuvent jamais ni 



prendre la rage, ni mordre, ni effrayer, ni surtout causer 
un scandale qui, dans les villes du vieux monde, détruit 
en un instant toutes les prévoyances d'une éducation de plu- 
sieurs aunées. » Jamais cheminée, jamais pot de fleurs ni 
de chambre, jamais aucun corps quelconque ne peut tre, 
ni lancé par l'orage, ni jeté par les croisées, tant les lieux, 
les volontés et les mouvements de chacun sont habilement 
disposC, calculés et prévus! On ne voit à Icoro ni guin- 
guettes, ni estaminets, ni bourses, ni cafés, ni receptacles 
pour de honteux et coupables plaisirs, ni corps-de-garde, 
ni gendarmes', ni monchards, ni filous, ni ivrognes, ni 
mendiants, ni filles de joie; en revanche, on y voit partout 
des indispensables, aussi élégants, aussi engageants que 
propres, les uns pour les femmes, les antres pour les hom- 
mes, où la pudeur peut entrer un moment, aus rien 
craindre ni pour elle-mme, ni pour la décence publique. 
Les regards n'y sont jamais offensés de tous ces croyon- 
nages, de tous ces desins, de toutes ces ecritures, qui salis- 
sent les murs des autres villes en mëme temps qu'ils-font 
baisser les .veux. 
Autour d'lcara  groupent cent villes provinciales, dont 
chacune est entourée de dix villes communales, plusCs au 
centre de territoires égaux. Elles sont naturellement cons- 
truites à l'instar d'lcara. Des établissements agricoles, non 
rooins parfaits dans leur genre, ornent et féconde,,t les cam- 
pagnes. Dans ces magnifiques demeures les Icariens vivent 
en communauté de biens et de travaux, de droits et de de- 
voirs, de bénéfices et de charges. « Ils ne connaissent ni 
propriété, ni monnaie, ni ventes, ni achats; ils so,t éga,x 
en tout, à moins d'une impossibilitd absolue. ,, Tous tra- 
vaillent galement pour la rép«bliqoe ou la communauté. 
C'est elle qui recueille les produits de la terre et de l'indus- 
trie, et qui les partage également entre les cironeus; c'est 
elle qui les nourrir, les habille, les loge, les instruit et 
leur fournit tout ce dont ils ont besoin, d'abord le néces- 
saire, ensuite l'utile, et enfin l'agreable, si cela est possible. 
Pour rendre facile au gouvernement cette t3cl,e gigantesque, 
des statistiques gnérales et pafliculières sont dress«es cha- 
que année, suivant lesquelles, étant constaté le droit de 
l'un / un pantalon, de l'a,tre à une livre de chandelle, 
d'un troisième à un ressemelage de bottes, d'un quatriëme 
à un blanchissage de chemin, le gouvernement est tenu de 
s'exécter dans le plus bref délai. 
Le travail n'a rien de répugnant en lcarie : des marri- 
res prodigieusement multipliées y dispensent l'lomme de 
tout effort pénible. Les règlements, discutés par l'Assem- 
blée nationale, y ont force de loi et sont communs/ tous 
les ateliers. Toutes les professions y sont également esti- 
reCs. Chacnn choisit la sienne, suivant son go0t, et s'il 
$ a concurrence pour quelques-unes, l'admission a lieu au 
concours. Les rèmunérations en nature sont interdites, le 
guie étant un accident tortuit, un pur don de Dieu, qui 
doit tre assez récompens, par la satisfaction qu'il trouve en 
lui-mbme. Cependant, l'lcarien qui tait llus que son de- 
voir obtient une estime particuliëro et des distinctions pu- 
bliques. 
Le mariage y est admis et respecté, grosse inconséquence 
dans nn état où la communauté, en tout et pour tous, est un 
principe fondamental, llais comme la promiscuité des sexes 
est uneidée qui présente l'apparence de la débauche et de l'im- 
moralité, et contre laquelle s'élève le respectable et redou- 
table hourra des défenseurs de la mora|e et de la pudeur, 
on la repousse quant à présent, saufà la reprendre quand 
les eprits seront plus éclairés. Comme on ne connait I ni 
dots ni successions, et que la plus entiëre liberté est laissée 
au choix des jeunes gens, |es conxenances personnelles 
président seules aux unions. Il va sans dire que le célibat 
est flétri. 
Après cet expo de l'organisation économique et sociale 
de l'TIcarie, passons  sa constitution pol,tique. Une assem- 
blée unique, de deux mille membres élus par le suffrage uni- 
• ersel, et divisée en quinze comites, subdivisés eux-mèmes 

ICçRII 
en un grand nombre de commissions spéciales, est investie ce 
l'autorité législative pour tout ge qui concerne l'intérêt g- 
riCai. Chaq«e province a aussi son assemblée particulière, qui 
disette ses intérts particuliers. Enfiu, dans chaq]e cornu 
tourie, des assemblées primaires traitent les questions d'in- 
térët local, qui sont reuvo}ées à l'examen du peuple par 
l'assemblée générale. Les lois faites par celle-ci regardent 
aussi bien la politique que l'ameublement, le logement, la 
ilette et la cuisine des habitants de l'lcarie. Le pouvoir 
exécutif y est confié à un excutoire national, composé 
de quinze ministres et d'un presideut de conseil. Ils sont 
nommes tous par le peuple, sur une triple listede candidats 
que lui présente l'Assemblée natinnale, fl y a aussi des eé- 
cutoires provinciaux et commun«ux. Les fonctionnaires 
publics sont nommés, les uns par l'Assemblée nationale, les 
autres par l'eëcutoire 9dnral. Toutefois, depuis le der- 
nier jusqu'au plus élevé, ils n'ont ni garde, ni liste civile, ni 
traitement. Les cito)ens, qui doivent leur obéir sans résis- 
tnce, ont aussi le droit de les traduire/ la barre du peuple; 
mais l'ordre ne sera jamais troublé en lcarie, attendu que, 
par un hereux privflége de la communauté, il n'y a là ni 
partis politiques, ni di=-ordes civiles, ni conspirations, ni 
cmeutes, ni jalousies, ni baines, ni larcins, ni violentes, ni 
meurtres. 
Et pourtant dans cette communauté carienne c'est en 
vain que le citogen Cabet s'efforce d'établir une alliance 
contradictoire entre le communisme et une liberté politique 
illimitée; le despolisme et la contrainte ne lardent pas/ 
reparattre sous la forme de la défiance la pins raffinee, la 
plus injurieuse, pour des ëtres qu'il supposesi par'faits d'ail- 
leurs, la proscription de la liberté de la presse : Tout ce qu'il 
accorde à cet égard est un journal national, des journau pro- 
xinciaux et communaux, lesquels ne contiennent que des 
procès-xerbaux et des statistiques, toute discussion, d'une 
nature quelconque, leur étant interdite. La Iiberte de la 
presse proprement dite est remplac»e en lcarie par le droit 
de propositmn dans les assemblées poplaires. Pour tous 
autres ouvrages imprimés, la censure! _N'y a-t-il pa. d'ail- 
lents des écrivains nationaux, des savants nationaux, des 
poëtes, des artistes nationaux? Eh bien, oeux-ci ne tra- 
railleront que sur le commandement de la république, et 
feront des chels-d'ceuvre par ordre. Il n'.va aussi d',utre 
histoire çe Uldstoire officielle, écrite par des bi,toriens 
nationaux:. Un tribunal juge la mémoire des personnages 
historiqu,s, et décerne, sans appel, la gloire ou l'infamie. Une 
langue destinee à être universelle est creée en Icarie. On 
traduit dans celte langue les ouvrages jugés utiles; les au- 
tres sont supprimés. 
Pendant que le citoyen Cabet était en train de faire une 
langue, il ne |uS en coulait pas beaucoup plus de faire une 
religion? Donc, suivant le catéchisme icarien, Dieu existe, 
mais ses attrihuts sont itw.onnus. Jésus-Christ n'est qu'un 
homme, mais le premier des hommes pour avoir proclamé 
les principes de l'égalité, de la fi'aternité, de la commu- 
nauté. Existe-t-il on paradis pour les justesP On ri.licite 
ceux qui  croient. Un enfer? Comme il n'y a en Icare ni 
tyrans, ni criminels, ni méebants, on n'y croit pas/ un 
enfer, qui serait parfaitement inutile. Cependant, il e.iste 
des temples et des prêtres : ceux-ci sont de simples pré- 
dicateurs de morale. Ils doivent êtres mariC. Il y a aussi 
des prêtresses. Les tomples sont beaux et commodes, mais 
dépourvus de tout emblème. On s'y réunit pour entendre 
des prédications de morale, et adorer en commun le m:sté- 
rieux auteur des choses. Du reste, toutes les religions sont 
tolérées en Icarie. Seulement, il est de règle absolue que 
jusqu'à l'.ge de seize à dix-sept ans les enfants n'entendent 
point parler de relieur. Laloi défend mbJneaux parents deles 
entretenir de Dieu. C'est seulement quand leur raison est 
formée, qu'un prolesseur de philosophie, et non un prdtre, 
leur expose tous les systèmes religieux, pour qu'iis¢hi- 
sissent en connaissance de cause. 
Telles sont les institutions sociales, politiques et xeligieur 



de l'Iode. Nous en aç,ns emprunté les détails à l'ouvrage 
dt M. Sudre ainsi qu'aux livres mème du citoyen Cabet. 
Il nous reste ì dire par quelle transition la communauté de 
l'Icarie a passé du régime affreux de la propriét$ us le- 
quel ce pays 9émissait depuis longtemps, au réome actuel. 
Après un tableau effrayant des abus de l'ancien ordre de 
choses en lcarie, des cimes de la monarchie repréenta- 
tire, de la corruption des mœurs parlementaires, de la garde 
nationale, des prttres, des ignoranties et des jésuites, la 
révolution de 17S9 Cate enfin en lcarie. On dresse des 
barricades dans les rues ; on se bat avec acharnement ; la 
reine Cloramide est détr6née, le perfide ministre Lindox 
et ses complices sont livrés  la justice nationale. Jean, le 
chef de l'opposition démocratiqne, le héros de l'insurrec- 
tion, ancien charretier, puis prètre, puis renégat, puis ca- 
lomniateur de Jésus-Christ, est nommé dictateur. Criblé de 
,lettes apparemment, et n'ayant pas le courage, pour réparer 
ses affaires, de voler le bien d'autrui h force ouverte, il 
imagine de le rendre commun  tout le monde : il invente 
et fonde le communisme. A peine investi du pouvoir, il 
s'entoure d'un conseil de dictature et publie adresses sur 
adresses, decrets sur décrcts, lesquels, cbose étrange, 
semblent ttre le modèle de ceux que le gouvernement pro- 
isoire de la dernière république française • lancés avec 
une si fondroyante rapidité. Commissaires, garde mobile, 
armement de tous les citoyens, destitution en masse de 
tous les anciens fonctionnaire% etc., rien n'est oublié. Une 
assemblée nationale, de deux mille membres, élus par le 
suffrage universel, est convoqnée; après quoi, une commi 
sion de publication est chargée de rédiger un journal officiel, 
qui doit étre distribué gratis et qui r«ppelle encore nos fa- 
meux bulletins de 1848. Jean proposeensuite son projet de ré- 
publique dmocratque, dont il veut bien ajonrner l'établis- 
semeur définilifì cinquante ans. Voici en quoi elle consiste : 
Les fortunes actuelles seront respectC; mais pour les ac- 
quisitions futures le système de lïnégalité alCroissante et 
de l'égalité progressive servira de transition entre l'ancien 
système d'inégalité illimitée et le système lutur d'égalité 
parfaite et de communauté. Le budget pourra n'tre pas 
réduit; mais l'assiette et l'emploi en seront différents. Les 
objets de première nécessité et le travail seront affranchis 
de tout fmpa)t. La richesse et le superflu seront imposés 
progressivement. Le salaire de l'ouvrier sera réglé, et le prix 
des objets de première nécessitétaxé. 500 millions au moins 
seront consacrés chaque année h fournir du travail aux ou- 
vriers et des logements aux pauvres. Le domaine populaire 
sera transformé en villes, villages ou fermes, et livré aux 
paysans. éO0 millions seront consacrés annuellement h l'é- 
ducation et à l'instruction des générations nouvelles. N'o- 
mettons pas de dire que, pour subvenir h ces largesses, les 
ministres et les prévaricatenrs du réme déclin ont été 
condamnés à un milliard d'indemnité envers le peuple .... Et 
dire pourtant que de pareilles monstruosités ont trouvé du 
crédit parmi certains hommes, et que quelques centaines 
d'imbéciles sont allés au del/ des mers tenter l'applica- 
tion de cette ineptiel Il est vrai que ces essais malheureux 
sont venus finir en police correctionnelle. Charles lgsxnn. 
ICARIENS. loyer, 
ICAP, IENS (Jeux). Voe'. B,tta,çomr. 
ICI|ABOE Ile située sur la c6te occidentale d'Afrique, 
célèbre par le g u a n o dont ses rochers étaient recouverts 
mais depuis 1851 ce dép6t parait épuisé. 
ICHNEUMON genre d'iusectes appartenant b la fa- 
mille des Pupivores et / l'ordre des hyménoptères téré- 
brants ( Latreiile ). Les ichneumous ont un tégument externe 
lisse, brdlant, diversement coloré, mais assez souvent d'un 
noir éclatant, parsemé de taches jaunes et blanches; leur 
forme étroite est allongée/ l'extr6me; leur tète, arrondie 
et plus large que leur corselet, est munie de trois stem- 
mates, et porte de longues antennes soyeuses, articulées, 
dirigées ¢az avant, quelquelois rouiC sur elles-ratines, et 
presque constamment en vibration. L'abdomén, de lon- 

ICHNEUMON 2 7 
gnenr variable, mais toujours pédiculé est armé, chez 
femelles d'une tarrière à trois filets ; leurs pattes, allongée 
et épinenses, sont très-robustes; leurs ailes sont inégales. 
En général, on peut déhntr ainsi l'idmenmon : h)-méno- 
ptère à abdomen pétiolé, arrondi inférieurement, à Ivre in- 
férieure courte, à antennes soyeuses, non brisées, de vingt 
 trente articles,  ailes supérieures simples, non dou- 
biC. 
Les entomoiostes portent  trois cents environ le nom- 
bre des esp6ces distinctes que renferme le genre ich- 
neuraon, espèces différenciées entre elles par des diversités 
de formes et de mœurs assez remarquables. Nous ne par- 
lerons ici que d'une seule espèce. La larve des ichneumons 
e--t une larve apode, incapable par conséquent de quitter 
d'elle-mme le lieu où sa mère I'a déposée à l'êtat d'œuf ou 
de germe, incapable de se déplacer dans l'espace pour 
pourvoir elle-mème  sa subsistance : de la ré.ulte pour 
l'insecte parfait la ncessité de déposer ses œufs dans un 
lieu d'élection, où la larve,  peine éclose, puisse trouver 
une nourriture suifisante : ce lieu d'élection est constam- 
ment le corps d'un insecte vivant, dans l'un de ses quatre 
états d'œuf, de larve, de nympbeou d'insecte parlait. Il est 
à remarquer que la m6me espèce d'ichnenmon choisit en 
général, pour y déposer sa progéniture, la mème espèce 
d'insectes, et toujours elle la choisit dans la mème phase de 
son développement : nous prendrons pour exemple l'ichnen- 
mon qui dépose ses œUfS dans la chenille du chou. Ausi- 
t6t que l'ichne,mon femelle est devenue mère, elle cizerche 
avec un instinct vraiment merveilleux la malheureuse che- 
nille qu'elle chargera de fournir à la subsistance de sa pro- 
géniture; dès qu'elle l'a entrevue, elle darde sur elle du haut 
des airs comme un oiseau de proie ; elle se cramponne ì 
ses poils, et vin, trente, cinquante fois, elle lui perfore la 
peau avec son aiguillon l;rzdenté, puis elle l'abandonne, et 
la chenille, remise de cette chaude alerte, reprend ses pai- 
sibles habitudes, et voit ses nomhreuses blessures se cica- 
triser peu  peu. Mais  clzaque piqtre, l'ichneumon a 
déposé dans le tissu sous-cutané de la chenille un germe 
qui bient6t doit éclore ; et en effet de ce germe sait un 
petit ser blanc, apode, qui s'approprie et desore la matière 
graisseuse que la chenille avait amassée dans son tissu adi- 
peux, pour fournir aux nécessités de sa vie de chrysalide. 
Il est  remarquer que dans cette elfrayante devastation la 
larve n'attaque jamais les organes essentiels de la vie avant 
qu'elle soit elle-mme parvenue au teze de son entier 
veloppement. Parasite intelligent, elle laisse l'existence ì 
linstrument qu'elle exploite, jusqu'h ce que cette existence 
lui devienne inutile : alors, et alors seulement, elle la brise. 
Lorsque les larves ont atteint leur entier développement, ce 
qui a lieu pour toutes ì la mème époque, elles perforent 
leur tour le tégument de la chenille, qui meurtdaus des an- 
goisses ineffables, au milieu de ces insectes qu'elle a nour- 
ris aux dépens de sa substance la plus intime, et auxquels 
elle semble donner naissance. A peine sortis, tous ces vers, 
sans s'éloigner les uns des autres, sans s'ecarter non plus 
du cadavre de la chenille, se mettent à filer en commun 
une espèce de coron : ils jettent avec la filière qu'ils por- 
tent ì leur lèvre inférieure quelques fils soleux, et bieut6t 
il résulte de leur travail combiné une masse floconneuse 
dans laquelle chaque vers se construit plus tard une petite 
coque particulière. Renfermée en sa coque, et abritée contre 
lïntemprie de l'air, la laÆve subit tranquillement sesdiverses 
mélamorphoses, et au printemps prochain il sort de cba- 
que coque une petite mouche aux pattes jaunes ou rouges. 
Ces monches s'accouplent, et quelques jours après on voit 
les femelles fécondées rechercher, comme l'avait fait leur 
mère, la dzenille du cbon, dans laquelle elles doivent, elles 
aussi, déposer leur progéniture. 
Aux détails dans lesquels nous venons d'entrer, nous 
ajouterons seulement que dans un grand nombre d'esp- 
ces le germe déposé subit toutes ses métamorphoses dans 
le corps mtme de l'insecte qui lui a servi de pépinière, et 



t.9 , ICHNEU,ION 
qu'il n'en sort qu'à l'Cat d'insecte parfait ; que le nombre 
d'œufs déposés par la femelle dan cl,aque ci,enfile est assez 
généralement en rapport avec les dimensions relatives que 
la larve doit atteindre avant d'abandonner son asile vivant. 
Les anciens naturalistes ont donné le nom d'whneumon 
à une petit mammifère : c'est la znangouste d'É99pte 
de naturalistes modernes. BELrEr-Lr/Vn. 
ICllXOGRAPlllE (dez.vo¢,trac¢ ' et ,éoE;o, e décris). 
Ce mot, qui signifie au propre la trace que forme sur un 
plan la be d'un corps qui y e«t appuye, oert h dësigner, en 
perspective, la section d'un obje{ quelconque faite ì sa imse 
par un pl horizonl. En architecture et en termes de [orti- 
fication, oe ot conserve un sens analogue : il est alors 
synonyme de plan 9eomèlral. 
ICHO (du grec Z6p, humeur), sérosi{é acre, pus 
reux, fetide et corrosif, qui dccoule des ulcères. C'est aussi 
le nom que dome Homère au sang qui coe dans les ein 
des dieux. 
ICIITHYOCOLLE (du grec te06;, poisson, et 
colle), loye: Cotte  Poisson. 
ICIITYOGÉXIE(de Z0g, poisson, et yv., j'en- 
gendre), nom donné quelquefois h la piscicuHure. 
ICHTIIXOLOGIE(de ZO;, poisson, et ).éyo, dis- 
cours), partie de la zooloe qui traite des p o i s s o n s. Cette 
branche de l'histoire naturelle ne remonte pas au dela d'A- 
r ist o te, dont les descriptions imparlaites sont cependant 
les ules qui servirent de base a l'ichtholoie jusqu'au 
seoEième siècle de notre re : oer on ne peut compter dans 
l'histoire de ceUe science le c»ml,ilateurs qui, h l'exemple 
de Ple, d'Ëlien, cte., parlrent des poissous sans en don- 
ner une description methodique, sans fixer leurs oeractères, 
laah simplement sous le rapport de leurs mœurs et de leurs 
uges. Belon, le premier, essaya, au seizième siecle, une 
classifioetiun ichthyologique, assez remarquable pour le 
temps où elle paroi. A peu de dt»tance de là, Rondelet 
imprimait une vive impulsion h l'icbth)ologie par des ob- 
servations neuves, appuiCs ser une sne critique. Lïtahen 
Saiviani marchait dans la mëme voie vers la mème epoque, 
et avec un succés non oins grand. Conrad Gesner, de 
Zuricb, auquel la botanique dut de si beaux travaux, en- 
richissait aussi l'icldhologie de ses rechercltes. Nonobstant 
ses erreurs, Ahlrovande contribua cependant pour sa part 
 populariser oette scienoe. Mais malgre tous oes travaux, 
la veritable métbode icbthyologique n'était pas fondde. 
C'est h J. Ray, inspire lui-mgme par Willughiff, qu'ctait 
rserv6 cet honneur; c'est h Artedi, leur succesœeur, et 
dont L i n në adoptala classification dans la premiè'e édition 
du Systema Aturoe, qu'appartient la gloire d'avoir fund6 
définitivement lïchthologie sur des baoes stableset tout 
lait scientifiques. Aussi quelque-unes de ses idées et sa 
nomenclature ont-elles surv6cu aux progrès de la science. 
Antoine Gouan modifia aec succès le système de Lié. 
Iais le plus bu monmnent éleve h l'ichlbyologie dans le 
dix-huitième siècle, c'est ns contredit le grand ouvrage 
de B 1 oc b, commencé en 1785. Ce na{uraliste decrivit et 
iigura plus de 600 espèces, et constitua un sez grand 
nombre de genres nouveaux. En ce qui concerne la classi- 
lition, c'est celle de Linuí qu'il adopte. C'est aussi une 
méthode arfilicielle que choisit L a c é p è d e, dont l'ouvrage 
contribua beaucoup a réndre, au oemmencement de oe 
siëcle, le go6t des recherch ichth5oogiques. Mais de tous 
les ouwages publiés jusqu'h présent sur oette partie de 
zoologie, nul ne peut ètre comparé ous le rapport de Fim- 
portance, de l'Cendue et des cbosos neuves qu'il renferme 
h la magnifique Htoire des Poissons, commencee par 
Goerges C u v te r et acbevée pa M. Yalenciennes; ouvrage 
dans lequel on trouve la description de 6,00o e«pèc en- 
virofl. D r 
ICIITHYOMAXCIE (du grec IZ';, poison, et 
OE,«tOE, divination), art de pdire l'avenir par les 
[raill des ions. On I examinait comme cell des 
tr victimes. On croyait aussi trouver d prsag dans 

la nature, la tortue, le mouvement, la nourriture, des poissons 
decertaines fontaines consacrées à quelque divinité. Athénce 
en cite une de la L?cie, dédiée à Apollon. On yoffrait aux 
poissons, qui y venaient de la mer, les prémices desvictimes, 
avec des broches de bois, et un prêtre assis les obser;ait 
attentivement. Le mme auteur mentionne aussi la fon- 
laine Phellus. Pline rapporte qu' Myra, en Lycie, on jouait 
de la flOte à trois reprises pour taire approcher ceux de la 
fontaine d'Appollon, lesquels, ne ntanq«ant pas de venir, 
tantét dévoraient la viande qu'on leur jetait, ce qui était 
d'un heureux augure, tat)t la repoussaient avec leur queue, 
ce qui «tait d'un présage funeste. 
ICltTttYOPIIAGE { du mot grecq.5, poisson, 
et .ToE'e;.v, manger). C'est une quafification qu'on a donnée 
h toutes les peuplades xoisines des bords de la mer ou des 
lacs, et qui se nonrrissent principalement de poisson, soit 
frais, soit corrompu. Le nombre d'ichthyopfiages est très- 
grand, principa'.ement en AraAtique et vers les "ferres Po- 
laires. Les anciens donnaient ce nom d'ichthyophages a 
deux peuples différents; l'un habitant la Gedrosie (aujour- 
d'hui le Beloudjistan ), sur les bords du golfe Persique, 
l'autre en Etl,iopie, sur les bords de la mer rouge. La nour- 
riture des icfith)ophages, étant peu alimentaire, ne conient 
qu'h des hommes mous et dépourvu d'energie : elle en- 
tralae plusieurs maladies, telles que la lèpre, la gale, les 
dartres, etc. Du reste, on a remarqué que les ichtl,)opl,ages 
vivaient longuement, et c'est une consequence de la légèreté 
de cette alimentait,m, qui durcit moins les organes qu'une 
nom'riture animale plus substantielle. 
ICHTIIYOSA.UBE (de iï.O.J;, poisson et aoEéo;, 
ldzard), nom douné par Georges Cuvier a un genre de reptiles 
fossiles qui otlrent des caracteres interme, liaires entre les 
vertebrcs de cette classe et les poissons, ou plutét encore 
a ec les cétacés. Les restes de ces animaux antédiluviens se 
trouvent particulierement dans les couches des terrains se- 
condaires que l'on dcsigne sous le nom de calcaire jurassi- 
que, en Angleterre, en Allemagne, en France. Les échantil- 
Ions recueillis dans un grand nombre de iocalites ont fourni 
le moyen de reconstruire en entier le squelette de l'animal, 
et m,_'.me d'y distinguer plusieurs espèces, notamment : 
Iï¢hthyosaurts communes, l'ichthyosaurus termirotris, 
l'ichthyosaurus luncvillensis, troux'6 dans r:otre muscbd- 
kalk, etc. Rien de plus monstrueusement bizarre que la 
structure de cet animal. C'était un reptile de 6 à 7 metres 
de longueur, portant , i'extrémitê d'une tte de lézard une 
n,'choire de dal,pi,in avec des dents de crocodile, et une 
colonne vertebrale de poisson, avec des nageoi-es de cétac6 
disposCs eidemment pour tu vie aquatique, quoiqu'on ne 
puisse dire si I'ichtt,yosaure ivait dans les eaux douces ou 
dans la mer. I) r .SA.tCEROT'I'E. 
ICILIUS nom d'une famille plebéienne dt Rome, à la- 
quelle appartenaient plusieurs delenseurs de la cause popu- 
laire contre les patriciens, notamment SPL-P, IUS IclLn_$, tribun 
l'an 670 avant J.-C., lequel punit par une loi sévère qui- 
conq«e trooblerait un trlbun tandis qu'il serait occupé asec 
le peuple ; et Ltctçs ICaLtCS, tribun en l'an/,56, qui fit de- 
cider que le mont Aentin serait attribué au peuple et accor- 
der aux tribuus le droit de convoquer le sénat. Fiancé avec 
la célèbre Yirginie, L. lcilius fut l'un de ceux qui contri- 
buèrent le plus au renversement du pousoir des díccmvirs. 
ICi LIUS (Qtl.X't'cs). Vol/e:. Gt:ISClLA'I'. 
ICOGLAXS ou mieux itch oglans , c'est-h-dire pages 
de la chambre. C'est le nom que po,'tent tes jeunes gens 
.cl,a,gés du service personnel au près du sultan. On les no,rime 
encore itch agasin. Ce sont pour la plupart des Asiatiques 
de condition inferieure. Ils vivent renlermés dans le sé- 
rail, comme tous les autres officiers attacbés au palais 
du sultan. 
ICOLMKILLç petite ile du groupe des H é b r i d e s, ap- 
pelée aussi lona par les écrivains du ntoycn ge, et séparée 
par un étroit canal de Pile de Mull, s'appelait originairment 
h9 ou f, c'est-à-di,c le. Elle reçut ce nom d'lcolmkoE d'aprè 



ILL 
le moine irlandais Colomban, qm s'y établit au sixième 
siecle. C'est pourquoi on l'appela alors 1 Columb.ltïll, c'est- 
l-dire l'ile, cellule de Columban. On montre encore les 
ruines du couvent fondé par Colomban. Dans l'église, cons- 
truite plus tard, vraisemblablement vers ] fin du onzième 
siècle, se trouvent les tombeaux de quarante-huit rois d'E- 
cosse, de quatre rois d'Irlande, et de huit rois de 'orvège. 
Au moyen age il y avait dans cette tle une école cëlèbre, fré- 
quentée par la première noblesse d'Écosse. 
ICOXIUM  capitale de la Lycaonie, en Asie Mineure, 
dej/ célèbre dans l'antiquité, mais plus célèbre encore au 
moyen fige, «lu onzième au treizième siècle, comme si#ge d'un 
sultanat des Seljoucides. De nos jours, c'est une ville assez 
imlmrtante qu'on appelle Konieh, et où l'on conserve plu- 
sieurs monuments intëressants d'art et d'architecture des 
temps anciens. 11 s'y tint, en l'an 235 de notre ére, un concile 
qui s'occupa surtout de la validité du baptème des hérétiqnes. 
Dans ces derniers temps, cette ville a pris de nouveau place 
dans l'histoire par la bataille livrée sous ses murs, le -0 dë- 
cembre 1832, et dans laquelle lbrahim-Paeha barrit 
complétement l'armde turque. 
ICOXOCLASTES, c'est-à-dire brLseurs d'images (du 
grec .zGv, image, et z).ito, je brise). On donna ce nom, 
au huitième siècle, ì une secte d'héretiques qui, se déclarant 
contre le culte des images, non-seulement les exilèrent de 
leurs temples, mais, se portant aux plus horribles profa- 
ndtions pour les détruire, troublèrent par leurs violences 
paix de l'Église. Ils trouvèrent d'abord tin puissant appui 
dans l'empereur Léon I 1 I, surnommé Plsaurien, qu'ex- 
citait en secret Constantin, évèque schismatique. Les 
l, hMifes les favorisêrent ensuite, et bient6t Constantin Co- 
pronyme .et Léon, fils et petit-fils de Léon l'lsaurien, con- 
tribuèrent -A la propagation de cette nouvelle doctrine, que 
le premier de ces princes fit adopter par un concile tenu, 
en 726, à Constantinople, auquel assistèrent plus de trois 
centsévèques.Qttand toutes les voies de persuasion fitrent Cui- 
sCs, quand les efforts réunis du pape Grégoi re Il, de 
saint Germain, patriarche de Constantinople, de saint J ca n 
de Damas, etde plusie,rs autres saints personnages, curent 
échoue contre les prètentions de ces fanatiques, le second con- 
cile deN i c é e (st pliëme oecuménique) les condamna, en 787, 
sous l'empire d'lrène et de son fils Constantin Porphyro- 
génète. Le concile de Constantinople, tenu sous le règne de 
Theodore, en 84:Z, confirma cette condamnation. Plus tard, 
sous- les empereurs grecs Léon l'Arménien, Michel le Bègue 
et Théophile, le pouvoir civil s'étant de nouveau déclaré 
leur protecteur, on les vit se porter envers les catholiques 
à des cruautés qui dégénérèrent en guerre civile. Ce ne fut 
que peu a peu qu'ils disparurent, pour renaltre ensuite dans 
tes vau dois, les albigeois, les hussites, les wic- 
ciCiles, les calvi nistes et les I uthé ri ens, dont quel- 
ques-uns renouvelèrent les excès des anciens iconoclastes, 
et qni tous adoptèrent, en partie du moins, leurs principes. 
11 est essentiel de remarquer, cependant, que les luthëdens 
conservent dans leurs temples les peintures historiques et 
mème l'image du Christ. 
Depuis le moment où s'Ceva contre les pratiques reli- 
gieuses des fidèles une accusation d'idolttrie, le cuite 
rendu aux s a i n t s, la vénération dont on entoure les images 
qui rappellent quelque trait de leur vie et les objets qui leur 
ont appartenu ont été si souvent défendus contre les atta- 
ques renouvelées des hérétiques, qu'il semble aujourd'hui 
superflu de revenir sur une question résolue dès longtemps. 
Il ne s'agit en effet, pour détruire les arguments des icono- 
clastes anciens et modernes, que d'établir une distinction 
bien simple et bien naturelle, à la port de toutes les intel- 
ligences : il faut définir bien positivement ce qu'on doit en- 
tendre par adorer. Or, catholiques et dissidents convenant 
que l'adoration consiste à reconnaître le souverain domaine 
d'ml Cre sur tout ce qui existe, les objections contre le culte 
des imagess'évanouissent par I mëme. Car, si l'on examine 
avant tout le c u I t e rendu  Dieu, et cehd qui a les saints 
D]CT- DE LA. CON'EnS. 

ICOSAEDRE 273 
pour objet, on verra que, persuadés de la présence réelle 
de Jésus-Christ, homme-Dieu, dans I' eu ch a ri st ie, les 
calhofiques l'adorent dans le pain consacré, et lui deman- 
dent directement les grâces qu'il désirenten obtenir, tandis 
que, convaincus, d'un autre coté, du pouvoir des saint 
auprès de Dieu, ils les invoquent, mais seulement comme 
des intermédiaires dont le Tout-Puissant accueille favora- 
blement la médiation. Cette différence ressort évidemment 
de la formule mème d'invocation mise par l'Église dans la 
bouche de ses enfants quand ils récitent les litanies. On y lit 
en effet : Avec pitid de nous, quand on s'adresse à l'un 
des troispersonnes de la sainte Trinité, et Prie'. pour nous, 
quand c'est la sainte X'ierge ou un saint qu'on invoque. Cel¢ 
posé, il devient incontestable que les catholiques sont bien 
éloigaés de rendre à la figure un hommage qu'ils refusent à 
la réalité, et que jamais ils n'ont adoré ni les images ni les 
reliques : ils les conservent, ils les vnèrent, parce qu'elles 
leur rappellent le souvenir de sublimes vertus ; ils rapportent 
à celui qu'elles représentent, ou auquel elles ont appar- 
tenues, un hommage respectueux : là se borne tout leur 
culte. 
Il est encore, dans les usages de l'Église, nne expression 
dont on a singulièrement abusé : c'e,t c»lle d'adoration de 
"oE croix; mais, tout en reconnaissant que vdrer la croac 
st plus convenable et plus orthodoxe qu'adorer la croi, 
disons cependant que nos hommages adressés à la figure du 
Sauveur-sut la croix, ou à une parcelle du bois sur lequel 
il tut attaché, ne sont point uniquement destinés à l'image 
ou ì la relique vénérée; qu'ils s'adressent au Dieu dont le 
supplice nous est ainsi rappelé ; que nous ne demandons ja- 
mais rien à la croix, mais que c'est par la croix, et en in- 
voquant un souvenir tout-puissant sur le cœur de celui qui 
s'est d.voué pour nous, que nous esp,:rons obtenir l'effet de 
nos prière. L'abbé J. Duçr_ssv. 
ICOXOGBAPHIE ou ICOXOLOGIE, c'est-à-dire 
science des images ou des portraits. On appelait ainsi autre- 
fois, comme lïndique l'étymologie mme de ces deux mots, 
:a démonstration, la description et l'histoire des images de 
personnages célèbres de l'antiquite représentés par des statues, 
des bustes, des médailles, des pierres gravées, peintures, etc. 
Michel-Ange et Fulvius Ursinus furent, au seizième 
siècle, les restaurateurs de cette science, que perfectionnè- 
rent d'abord Giovanni-Angelo Canini, dans son lconografia 
(Rame, 16.  9), mais surtout E.oA. Yisconti. Dans res der 
ers temp., on a avec toute raison étendu la significahon du 
mot 1conographie à la connaissance des figures idéales, 
dieux, saints ou çho«es abstraites. 
ICONOLÂTRIE (du grec dv, image, et XoEzp--[a, 
adoration). L'iconoldtrie est leculte des images, statues, ou 
tableaux, poussé jusqu'à l'adoration, comme chez les 
païens. Les paiens étaient des iconoldtrcs, adorateurs d'i- 
mages. Ce terme injurieux fut plus tard adres.é par les 
i ca n o c I a s t e s aux chrétiens. Il n'est plus employe aujuur- 
d'hui que par les protestants à l'égard des catholiques. 
Certes, l'Église et les catholiques instruits n'ont jamais adoré 
«les images ; mais les gens peu éclairC, comme on en trouve 
en ltalie, en Espagne, et mème dans quelques-unes de 
nos provinces de France, comprennent-ils bien In diffèrence 
qui eiste entre le culte supréme, absolu, le culte de latrie, 
qui n'est di qu'à Dieu, et les marques de respect, de piCC 
adressées aux symboles qui le représentent, aux images, 
statues et tableaux «le la Vierge et des saints, avec l'inten- 
tion de rapporter ces hommages du cœur aux objets qu'ils 
représentent ? 
ICOXOMAQUE (du grec d.Gv, image, et ttï.**ztt, 
combattre, qui combat !e culte des images), mot synonyme 
d'iconoclaste, qui a été à peu près exclusivement appli- 
qué, comme surnom, à Léon l'lsaurien, quand il eut fait pn- 
biler son édit pour ordonner la destruction de toutes les 
images et de toutes les figures de saints peintes ou sculp- 
t«es. 
ICOSXÈDBE (de dx«, vingt, et ï, sige, base), 
-:5 



74 
polyèdre terrainWpar vin faces régulières ou irrégulières. 
L'icosaèdre régulier a pour faces vingt triangles équilaté- 
Faux-" 
ICOSANDBIE ( de ¢xo«, vingt, et OEvp, homme ), 
douzième classe du système de Liné (voyez 
ICOSIUM. Voyez 
ICTÈRE, ICTÉRICIE. Ces noms désignent une teinte 
jatme, qui se répand sur la pea à la suite de diverses af- 
fections : ils tireur leur origine, selon les étymoloistes, 
d'une belette, ayant les yeux jaunes, appelée ;.x» ch grec, 
ou du loriot, x¢po, oiseau dont le plumage offre en ande 
partie la même couleur. Le vulgaire, ainsi que plusieurs 
médecins, nomme cette coloration anormalejaumsse, alC 
nomination plausible, tandis que l'autre est d'autant plus 
ridicule qu'on l'applique aussi à des colorations verdtres 
ou noires. La jannisse est populairement considérée comme 
une maladie : c'est à tort ; elle n'est que i'efet d'un état 
morbide. Le point de l'organisme d'oh provient un tel 
changement dans le coloris naturel de la peau est le foie, 
viscère qui exerce sur i'hématose, ainsi que sur la diges- 
tion des actions importanles, et si essentiel qg'on le trouve 
dans les premiers de,és de l'mfimalité. 
-Pour indiquer toutes les causes de la jaunisse, il fau- 
drait mentionner toutes celles qui troublent les fonctions 
complexes du foie. Nous ne pouvons que les rappeler som- 
raairement. Les unes agissent mécaniqucment et directement 
sur l'hypochonOre droit : telles sor, t les chutes et les 
blessures. D'autre dépravent la vitalite «lu foie par une re- 
lation plus ou moins proche, comme la surexcitation du 
centre épigastrique et de la plupart des viscères ahdomi- 
naux. Il en est qui agissent par l'entremise du cerveau 
telles sont ie ilaie de tète, les travaux intellectuels, pro- 
tonals et assidus, les émotions murales très-vives, etc. 
Les températures chaudes et humi,les, comnoe celles de 
certains climats et des saisons intermédiaires, exercent 
aussi sur le foie une influence dont la jaunisse est l'expres- 
sion. Des concrétions pierreuses qui se forment dans le ré- 
rvoir et les conduits biliaires peuvent encore produire et 
entretenir la jaunisse. C'est principalement dans i'ge où 
'homme est soumis à l'action des causes physiques et 
murales indiquces ci-dessus qu'on voit la peau se teindre 
en jaune. Ce changement est commun aussi das les pre- 
miers jours qui suivent la naissance, parce qu'alors l'ch- 
Iant faisant lui-mème son sang, le r61e da ff;le éprouve un 
changement notable. Ordinairement, la teinte apparait d'a- 
bord sur le blanc des yeux, vers les angles htternes de 
ces organes, et se prononce en.uite sur toute cette sur- 
face. On a, dit-on, recueilli quelques laits indiquant que 
les personnes affectées de la jaunisse voient les objets colo- 
riés en jaune. L'imprégnation des tissus de l'oeil parait même 
devoir produire cet effet; mais d'autres faits contraires ont 
etWpubliés : de sorte qu'il convient de se retrancher dans 
le doute à ce sujet. Après les yeux, ce sont les tempes, 
les pourtours du nez et de la bouche, qui se colorent. Fi- 
nalement toute la peau prend une couleur jaune, assez 
souvent verdAtre; elle devient sèche, roide et quelquefois 
prurigineuse. Tandis que ces changements extérieurs a'o. 
pètent, les urines prennent la couleur du salran, rougis- 
sent, s'épaissisent, se troublent et déposent considérable- 
ment. Les matières excrétées par les selles se décolorent. 
Enfin, divers troubles généraux éclatent en même temps. 
La teinte disparatt comme elle apparalt : elle a commencé 
par la région du cop% c'est par là qu'elle s'efface d'abord. 
Les oeuses de la jaunisse étant celles de I' hépati te, 
les moyens propres à y remédier sont à peu près ceux qui 
conviennent pour traiter cette maladie, qui dans la plu- 
part des cas. ne doit pas tre con.idérée comme alar- 
13uaute. D r 
IDA haute montagne, qui de la Phrygie s'étend à tra- 
vers la Mysie, et par conséquent aussi à travers la caniche 
qu'on appelle la Troade. C'est au pied de cette momagne 
ou'était htie la ville de T roi e ; et, en s'inclinaut douce- 

ICOSAÈDIE - 
ment vers la mer, elle forme une vaste plaine qui servit do 
théàtre aux exploits du siége de Truie et à un granà nom- 
bre de mythes grecs. Sa partie méridionale s'appelait lu 
agarus , dont le pic le plus élevé, le Kotyllu$, offrait un 
templede Cybèle, surnommée à cause de cela la mère I,léenno 
( ldoea nater ). C'est là que Pris décida la dispute sur- 
venue entre Vènus, Junon et Minerve, en adjugeant à la 
première de ces déesses la pomme d'or, objet du débat, et 
aussi qu'eut lieu l'enlèvement de Gany mèd e. 
Il existait dans file de Crète un autre mont Ida ; on l'ap- 
pelle aujourd'hui le Psiloriti. Cette montagne la traverse 
de l'ouest à l'est. D'abondantes sources jaillissent de ses 
tartes et iertilisent ce sol rocheux. Parmi les plantes qui y 
réussissent plus particuliërement, il faut mentionner la tra- 
9acanthe, dont on retire la gomme aàragante, objet impor- 
tant d'exportation, lon-seulement la légende racontait que 
Jupiter avait été élevé dans les gorges de cette montagne, 
mais on y plaçait encore les dactyles den$, ainsi nommés 
parce qu'ils habitaient le point extréme de la montagae, et 
qui apparaissent dans la fable grecque comme d'antique 
démons primitifs, toujours en rapports avec Cyl!e, mais 
sur le rSie desquels la tradition ne fournit rien de bien pe- 
sitif. Ils vinrent, dit-on, de Phrygie si fixer sur cette mon- 
tagne, inventërent l'usage du feu et l'art de fondre les reC 
taux; circonstance qui prouve que l'art d'exploiter les 
mines et de travailler les m.taux remonte à la plus haute anti- 
quité. 
IDALIE, IDALIUM et IDALIA, ville antique et fameuse 
de Pile de Cypre (aujourd'hui Chypre), située dans l'tutC 
rieur d terres, avec des bois, in altos Idalioe lucos, dit 
Virgile, et une montagne du rnme nom. Vénns, qui passait 
l'ur tre née et sortie de Ia mer sur une nacre éblouisante, 
dans les parages de cette lle, y avait choisi, disent les 
poetes, trois villes, Amathonte, Paphos et Idalie, pour y 
remiser ses colomhes et son char. Cette dernière fut ainsi 
nommée par les Phéniciens, nation voisine, adorateurs de 
la Vénus Astarté, ldalah, dans leur idiome, signifiant 
lieu de la desse, si l'on n'aime mieux cette étymoloe 
grecque, ioE),to;, humide, à cause des sources de ses bois, 
où la mère de Cupidon cacha le jeune Ascae, auquel elle 
avait substitué son fils, sans carquois et sans ailes, sur :es 
genoux de Didon, à Carthage. C'est dans les bois idaliens 
qu'Adonis fut tué par un sanglier. Idalie ne subsistait déà 
plus du temps de Pline. Strabon ni Pomponius Mela n'en 
parlent, et au iècle d'Auguste les poêtes seuls en évoqueut 
le souvenir. Il existe néanmoins aujourd'hui dans Fintë- 
rieur de l'ile de Chypre une villedu nom de Dalin : en site 
riant et enchanteur fait croire que c'est l'antique Idalie, 
qui, relevée par les modernes insulaires, n'a pu quitter ni 
sa douce appellation, ni son exposition, propice à la volupté 
et aux amours. D.x.»EEBx,,o. 
IDÊAL. Dans le sens le plus étendu, ce mot est opposé 
à rdel, et désigne ce qui n'est que conçu par la pensée, ce 
que l'on se figure dans l'esprit, en opposition ì la rdalité, 
qui existe en dehors et indépendamment de la pensée. 
Dans un sens plus restreint, on entend par iddal un objet 
réellement conçu par la pensée, qui répond complétement 
à une idée, ì un type, à un modèle. Les notions où la 
pensée du modèle, du parfait, de l'achevé, ont une signi- 
fication propre, ne sont pas moins variées que les [Iccep- 
tions mëmes du mot iddal. Il y a donc en général l'idéal 
moral et esthétique; puis, dans les détaiis, Pidéal de la 
science, l'idéal de la sagesse, de la vertu, de l'État, de la 
famille, etc. Kant parle mgme d'un idéal théorique de la 
raison pure, c'est-à-<]ire de l'idéal d'un tire qui repondrait 
-h l'idée intellectuelle d'un absolu liant tout ce qui est con- 
tingent. On pourrait également se faire un idéal de la lai- 
deur, de la m6chanceté, etc. En tant que l'on peut et que 
l'on doit essayer, dans le domaine de la matière, de déter- 
miner le rdel par rapport à Pidëal, on se sert aussi du 
mot iddal là où une réalité semble à un haat degré répondra 
à une idée. Il en est ainsi notamment dans le domaine des. 



arts : PApollon du Belvédère, les Madoaes de Ba- 
phaei, le Jupiter de Phidias, sont l'idéal de l'art, c'est-à- 
dire une représentation qui répond complétement ou du 
moins h un haut degré d'approximation aux iddes qui 
servent de base à ces images de divinioEs. Lorsque des 
idées ne peuvent pas erre exposées de manière h frapper 
les sens comme dans les arts, et lorsque, ainsi qu'il arrit e 
dans les sciences, il s'agit de les préciser par des peuxCs, 
le mot idée est souvent employé dans le meme sens que le 
lnot idëal. 
Idaliser, c'est traiter un sujet réel d'après une des rè- 
gles de la perfection; cçest ainsi, par exemple, que l'artiste 
idœealise la nature. Dans le langage de la vie ordinaire, on 
désigne aussi quelquefois par la l'illusion qui croit trouver 
dans la réalité plqs de perfection qu'elle n'en a véritable- 
ment. Pris sous le rapport psychologique, ridal de Pl,omme 
se règle en général sur l'élévation de sa culture intellectuelle ; 
dacun se fait un idéal de ce q,fi lui offre, en quelque genre 
que ce soit, une mesure de perfection, de sorte qu'en ce 
sens l'idéal est esthétique, matériel, politique, ou bien re- 
ligieux, et varie h rinfmi, non-seulement suivant les indi- 
¥.idus, .n,ais encore suivant les siècles et les peuples. 
IDEALISME, IDÉALISTES. En opposition au réa- 
lis me on désigne par le nom d'idalisrne le système phi- 
losophique qui ne voit pas de réalité dans les objets exté- 
rieors, mais uniquement dans le sujet topeAsentant, ou 
encore dans ce que l'on regarde comme réeilement existant. 
Les formes diverses sous lesquelles i'idéalisme s'est pro- 
duit sont complétement le rdsultat «le la philosophie mo- 
derne depuis Descartes; dans l'antiquité, les systèmes les plus 
savants même étaient réalistes. On se trompe en effet quand 
en qualilie d'idéaliste le système de Platon, et de rcaliste 
celui d'Aristote. Que si Platon déclare que les idées seules 
existent, il ne les considérait point cependant comme de 
simples produits d'un être représentant, mais comme quel- 
que chose d'existant indëpendamment de toute intelligence. 
Dans la pl,ilosophie moderne les doctrinesidcalistes ont pour 
point de départ soit la question de savoir comment on se 
représentera l'influence du monde corporel sur l'àme, in- 
fluence par suite de laquelle les d,oses prod,isent les idées, 
soit cette réflexion subtile, qu'admettr« les objets extérieurs 
n'est pas autre chose que la représentation du sujet topeC 
sentant. Toutefois, les opinions diverses qui se manifes- 
tèrent sur cette première question ne conduisirent point 
un idéallsme bien positif. Descartes, Malebranche et Leibnitz 
se contentèrent de nier l'existence d'une influence ph)sique 
du corps sur les choses intellectuefles, et la remplacèrent 
par les systëmes de l'assistance, des causes occasionnelles 
et de l'harmonie prétablie;mais ils ne uiaient point la 
réalité du monde pl,ysique, encore bien que Malebranche 
soutint qu'il est difficile de prouver qu'il existe des choses 
en de!,ors de nous. L'empirisme mmi d'un Hobbes etd'un 
Lod, e avait admis que les qualités sensibles des objets ne 
sont pas leur véritable être, mais de simples phénomènes; 
d comme toute cette supposition des objets extérieurs ne 
repose empiriquement que sur la perception de ce qu'ils 
sont pour la sensation, ou comprend pourquoi ce fut en 
gleterre, où dominait l'empirisme, que Collier et B e r k e 
essuyèrent pour la première fois de traiter d'illusion l'existence 
objective du monde physique et de n'attribuer de réalioE 
qu'aux substances intellectudles. Or, cet idéalisme de Ber- 
keley ne considëre point resprit humain, mais bien l'esprit 
divin commele créateur desreprésentations d'un monde ob- 
jectif apparent; ce qui ne rempoche point de soutenir le 
principe de la non existence de ce monde objectif; aussi 
qualilia-t-on plus tard son sstème d'idalisrne de, ma- 
gique. 
L'idalisrae critique ou transcendantal de Kant diffëre 
de l'idealisme dogmatique de Berkeley. 11 repose sur ce 
principe que la matière de Pexpërience est à la vérité fournie 
ar la sensation, et qu'il lui faut peCupposer les ci,oses 
comme des causes premières, mais que les formes de l'ex- 

-- IDÉE 275 
périence (l'espace, le temps et les calCortes ) péxistent en 
nous a priori, c'est-à-direindépendamment de l'expérience 
comme condition de toute expérience possible, et que dès 
lors nous ne connaissons les choses que telles qu'elles pa- 
raissent, et non point telles qu'elles sont en réalioE. En dé- 
veloppant les conséquences du cdticisme de Kant, quel- 
ques penseurs, F i c h te entre autres, s'imaginèrent que la 
supposition de l'existence des choses serait inutile si l'on 
pouvait démontrer par quelleaction nécessaire le moi, seule- 
meut actif et productif de tout notre cercle d'idées, en ar- 
rive à imaner iui-mSme l'apparence d'un monde objectif 
et h mieux déterminer cette production qui lui est propre. 
Cet idéalisme a par conséquent pour base ce principe que 
le moi,. le sujet qui se représente, lui-mme ainsi que le 
monde, n'est pas seulement le soutien, mais encore la orale- 
tion d'un monde des phénomènes donnés comme nbiectifs. 
Aussi l'a-t-on plus tard appelé idëalisme subjeeti.f. Il ne 
comprenait que dans le moi l'identité de la pensée et de 
rètre du subjectif et de l'objectif. Mais plus tard la philoso- 
phie de l'identité de Schelling ne se fit pas scrupule de 
placer cette identité de la pensée et de rètre même iode- 
pendante du moi h la tte de ce système de philosophie; et 
comme on attribuait une productivité absolue aux notions 
et aux idées, tarot dans ledomaine de Iïnt:.lligence que dans 
celui desobjets physiques, en vertu de la contemplation in- 
tellectuelle, on désigna cet idéalisme plus avancé sous le 
nom d'idealisme object:t, dont i'idcalisme absolu dans le 
système philosopbique «le H e g e I peut-être regard6 comme 
la derniëre émanation. Tandis que Fichte disait : Le moi, 
l'tre pensant est, Hdgel repliquait : La pen»ee, la notion, 
lïdée, ou plutét le procëdt;, rimmincnce fgtme de la pensée, 
est seule vraie et réelle. Plus roules ces formules diverses 
de ridt.alisme s'éloignent des opinions gcn..ralement ad- 
mises, plus il importe de faire remarquer que ri,t,:alisme de 
Fichte marque un point nécessaire de transition de la 
pensée spéculative, et que le réalisme de l'opinion générale 
est I,ors d'Cat de ré|uter iesobjection de Iïdéalisme. 
IDËE. L'idde est la représentatio, dans nolre esprit, 
d'un objet quelconque, ou, si l'on xeut, le fait intellectuel 
qui répond, dans notre esprit, aux objets dont il a pris con- 
naissance. Mais, pour mieux faire comprendre ce que nous 
entenduns parce mot, il faut distinguer l'idde des faits in- 
tellectuels qui ont avec elle le plus d'analogie. Le fait avec. 
lequel elle semble se confondre le plu% c'st la n o t i o n. 
La notion se prend pour la connaissance d'un objet à qnel- 
que état qu'elle soit. On entend plus v,,lontiers par idde la 
représentation claire et dislincte d'un objet dans notre es- 
prit. Je sais qu'on dit une idge co»j'«se, obscure; mais 
dans ce cas le ri,et idde est détourné de sa véritablesigaifi- 
cation philosophique. De plus, le mot notion s'emploie 
comme snonyme de c o n n a i s s a n ce, et le mot idde, 
dans son acceptiou scientilique et rigoureuse, n'en est point 
tout  fait synonyme, puisque nos connaissances se com- 
posent de j u 9e t e n t s, et que i'idée doit être considérée 
comme un éliment des jugements. L'idée n'est pas non plus 
la perception. On donne le nom de perceltion  la 
notion, au moment où elleest acquise, où elle fait pour ainsi 
dire son entrée dans notre esprit, tandis qu'on entend 
plut6t par idde le fait de la notion quand elle a pris place 
dausresprit,quand elle y est domicilice et  persiste malgr6 
l'absence de l'obiet dont elle est la représentation. 
On ne peut pas non plus attrilmer le nom d'iddgç à ces 
assemblages de notions qui constituent ce qu'on appelle 
connaissances et que la philosophie scolastique a désignés d u 
nom de juçements. Les mots juement, idëe, nt bien des 
teffnes corrélatifs, mais c'est précisément pour cette raison 
que l'on ne doit pas les confondre. Une connaissance pro- 
prement dite, un jugement, c'est par exemple: la terre est 
ronde. Or, dans ce jugement nous distingons trois idées, 
celle de terre, celle de rondeur et celle du rapport que 
notre esprit conçoit entre la qualité de rondeur et la terre, 
Les idees considcrées en elles-mêmes et isolément ne tons. 

35. 



Tg IDEE 
tiluent donc point des connaissances, elles en sont seulement I sans un tre intelligent. Cependant, l'esprit eoneoit l'oderr, 
les éléments et comme les matériaux. On dit à ce sujet I la saveur, la couleur, la pensée, etc., indépendmment des 
qu'il n'existe point dans notre esprit d'idées proprement Cires donés de ces qualités. Quand l'objet de notre pensée 

dites, puisque nous ne pouvons penser sans former des 
jugements, qu'il est impossibleque l'esprit procède ainsi par 
faits intellectuels isolés et abstrails; que par conséquent les 
idéesne doivent point ètre considérées comme un phénomène 
particulier et sui 9eneris. ous convenons bien que l'intel- 
ligence ne peut avoir d'idées isolées et qu'elle ne procède 
que par jugements. Il n'en est pas moins vrai que chaque 
jugement peut se décomposer, par l'analyse, en éléments 
distincts, et l'on ne saurait s'empècher de donner à ces élé- 
ments un nom, celui d'id,.es. Assurément ces éléments ne 
sont isolés que par l'anal.se, ou, si l'on veut, l'abstraction, 
mais aux yeux de l'abstraction ils n'en existent pas moins, 
ils ne doivent pas moins ètre distingués du jugement lui- 
mme, de mème que dans un solide nous pourrons dis- 
tinguer les surfaces, les angles les lignes, quoique ces sur- 
faces, ces angles, ces lignes n'existent pas inàépendamment 
du solide. Cette comparaison doit servir à mieux faire 
compren,lre la relation de l'idée au jugement, et le rle 
qu'elle remplit à son égard. L'idée est eerlainement un 
phénomène abstrait, mais on ne peut mer l'exislence d'une 
ab»haction, pas plus que celle d'un phénomène complet. 
L'idee esl un fait si distin et si remarqvable qu'on a 
pu l'étudier sous ses differentes faces, ce qfi a permis de 
distinguer dilférenles espèces d'idées selon les poinls de 
vues divers sous lesquels on I'a envisagée. On a d'abord 
considéré les idées par rapport à leurs objets, et c'est ce 
qui a donné lieu aux catgories, ou grandes classes, 
où l'on a fait rentrer toutes les idées de l'esprit humain. Les 
catégories d'Aristote son célèbres; elles ont longlemps oc- 
cupé l'école, qui pour en aider le souvenir les a ren[ermt.es 
dans ce dislique barbare si connu : 
Arbre Tres Servos Ardore Befricrat Ustos; 
luri Crus Stab% sed Tunicatus etc. 
Arbor représente la substance, tres le nombre, sercos 
l'idée de rapport, ardore la qualité, refi'igeral l'aclion, tstvs 
la passion, ruri le lieu, crus le temps, slabo la posilion, 
tunicaltts la possession. Les modernes n'ont point etc si 
prodigues, et ont rëduit ces dix cat«gories à trot% savoir : 
la substance, la qualild, et le rapport. Eu effet, il est 
impossible à la pensée de concevoir aulre cbooe que des 
ëtres, des qualités par lesquelles ces ètres se manifestent, 
et des rapporls entre ces êtres, et il est facile de voir que 
la passion, par exemple, ou la possession ne sont que des 
manières d'ètre, des Cais; que l'idée de nombreest une 
idée de rapport; que l'idée de temps etde lieu sont éga- 
lement des idees de rapport, si on les cousidère relative- 
ment aux ètres qui y sont plaeës, ou bien des idées de 
qualil, si on considère le temps et l'espace en eux-mëmes, 
c'est-à-dire comme des allributs del'ètre nécessaire, éternel 
et infini. On a encore admis une autre division des idëes, 
touiours en les considérant sous le point de sue de leurs 
o|/.lets. Les objets de nos idëes sont de .deux natures : on 
bien ils tombent sous les sens, ou bien ils leur échappent 
et ne peuvent être atteints que par t'intelligence: de lb 
deux sortes d'idées, les idées sensibles et les idées intellec- 
rutiles. 
Si nous cessons de considérer les idées selon leurs objets 
ou la nature de leurs objets, et que nous les envisagions 
selon lesdifférentes formes qu'eIle font prendre pour ainsi 
dire à leurs objets en nous tes reprësentant, nous aurons 
encore de nouvelles esp:ces d'idées. En ellet, les objets de 
notre pensée sont loin d'exister toujours au dehors de nous 
comme ils existent dans notre esprit : tant6t la pensée les 
scinde, les analyse; tant6t elle les groupe, les réunit, pour 
opérer sur eux avec plus de facilité. Ainsi, il n'existe dans 
la nature rien de simple, c'est-à-dire rien qui ne puisse se 
décomposer par la pensée. Il n'existe pas d'odeur sans un 
¢,orps odorant, de aveur sans un corps sapide, de pensée 

est ainsi indéeomposable, l'idée qui / correspond est dite 
simple; mais si un objef quelconque peut se résoudre par 
la pensée en plusieurs éléments, quel qu'en soit le nombre, 
l'idée est dite composde. Ainsi l'idée d'odeur, de couleur, do 
son, l'idée d'une affection de plaisir ou de peine, d'un acte, 
d'une perception, l'idee d'ètre, de temps, d'espace, sont des 
idées simples. L'idée d'une plante, d'un insecte, l'idée d'une 
faculté complexe, comme l'imagination, sont des idées eom- 
posées. Une des propriet-és les plus remarquables des idées 
simples et composées, c'est que les idées simplesne peuvent 
se communiquer par aucun moyen à celui qui ne les aurait 
pas acquises par sa propre expérience. Les mots qui dési 
gnent les couleurs seraient des sons dénués de sens pour 
un aveugle-nC Les idées composées, au contraire, peuvent 
se communiquer, au moyen des signes, à ceux qui ne les 
auraient point aequises par eux-mèmes, pourvu toutefois 
qu'ils aient acquis les idées simples qui entrent comme lé- 
ments dans la tormation des idées composées qu'on leur 
transmet. 
ous avons remarqué que la pensée a le pouvoir de sé- 
parer ce qui n'est point séparé et ne peut Pètre dans la 
nalure. Ainsi, il n'existe point de qualité sans un ètre, pas 
plus qu'il n'existe de substance sans modification, ni de 
rapport sans termes. Mais nous pouvons cependant nous 
occuper des qualités d'un ètre sans nous occuper de l'èlre 
qui les contient, et les etudier isolément ; nous pouvons 
parler des rapports qui existent cuire des objets, et négli- 
ger leurs termes. Si on considère les idées sous ce nou- 
veau point de vue, on les divise en abslraites et concrètes; 
abslraites, quand leur objet est une abstraction, con- 
crètes, quand la pensée a laissé intact leur objet, et qu'il 
est reprt.senté à l'esprit avec les parties qui le constituent. 
Toutes les idees simples sont abstraites, puisqu'il n'existe 
rien à l'etat simple dans la nalure, et q'il taut que la 
pensée ait détachë cet Cl.ment du tout auquel il appartient. 
lais toutes les idées abstrailes ne sont pas simples. Ainsi, 
l'idée d'un triangle est abstraite, puisqu'il n'existe pas en 
dehors de notre peusee une figure composee uniquement de 
trois droites qui se coupent, c'est-à-dire de trois lignes qui 
n'aient ni largeur ni profondeur; mais lqdee de trian,ie 
n'est pas simple, puisque son objet peut lui-mëme ètre d:- 
compo.¢é en lignes, et en rapports de ces lignes entre elles. 
La plupart des idées renfermées dans les ouvrages qui 
ont puur but le developpement d'une science sont des idees 
abstraites. On peut dire que ce sont ces idée» qui font toute 
la pui.sance de l'intelligence humaine, puisqu'elles lui per- 
mettent de considérer les divers peints de vue d'un objet 
séparément de cet objet mème, qui, s'il nous apparaissait 
toujours/ l'etat concret ne ferait qu'embarrasser t'esprit et 
s'opposerait à Panalyse, la mère des sciences, biais puis- 
que les idées abstraites deviennent ainsi les matériaux des 
sciences, pour que la raison puisse opérer sur elles, afin 
de s'élever aux éritbs scientiliques, il faut que ces idées 
subissent pour ainsi dire un nouvel élat, passent / l'Cat 
d'idées 9nerales. Cette considération nous amène à dis- 
linguer cette nouvelle sorte d'idées, aussi remarquable qu'im- 
portante à étudier. En etfet, nous ne nous bornons pas à 
abstraire, par exemple, de l'idee d'un homme l'idée de 
corps organisé, l'idée de sensibilité, d'activité, d'intelli- 
gence raisonnable ; quand nous avons remarqué ces dillé- 
rents modes d'existence dans quelques individus, nous les 
étendon à un nombre indéfini d'individus, et nous nous 
élevons ainsi à l'idée genrale d'fiomme, c'est-h-dire l'idée 
d'une classe d'ètres auxquels ces qualités sont communes. 
On voit donc que l'idée géné.rale se forme au moyen des 
idées abstraites, puisque c'est aprës avoir abstrait d'un 
petit nombre d'indi'idus les qualités principales qui les 
constituent que nous concevons ces qualiles comme pou- 
vant appartenir à de. mriades tl'ëtres, dont nous formon 



IDEE zTr 
lar la pensée une collection innombrable, qui n'a d'autre ] font partie inhérente de sa pensée avant tout développe 
liendans notre esprit que les abstractions qui leur sont coin- I ment intellectuel. En un mot, ces idées, selon Platon, sont 
rennes. Aussi envisaget-on les idées générales sous deux I inn#es. C'est cette opinion, beaucoup moins fondée que la 

point de vue: 1 ° par rapport aux inffividus réunis dans 
notre pensée par des qualités semblables; 2 ° par rapport 
aux qualités elles-mmes, qui servent à les réunir : c'est ce 
qu'on appelle dans l'Cule l'extension et la compréhension : 
l'extension, c'est le nombre des individus que l'idée géné- 
rale peut enserrer ; la compréhension, ce sont les qualités 
communes aux individus qui forment nne classe. Ainsi, 
l'extension de i'idee générale d'homme, ce sont tous les 
lres auxquels nous attribuons ce nom; sa compréhen- 
sion, ce sont les qualités qld constituent esnliellement 
l'espèce lmmaine, comme d'étre organisé d'uue certaine 
façon, et d'ëtre doué d'une ",1me sensible, clive et raison- 
nable. 
Les idées peuvent être plus ou moins générales. Ainsi, 
celle d'homme est plus générale que celle d'ignorants et 
de savants, et l'est moins que celle d'animal. Celle-ci l'est 
moins que l'idée d'#tre. L'idëe d'ëlre est la plus vaste de 
toutes, celle qui contient toutes les autres : on l'al»pelait 
pour cette raison supremum çenus. On donne le nom de 
9ente aux classes qui en contiennent d'autres, et le nom 
d'espèces aux classes tufCleures contenues dans ce genre. 
Si l'on se demande ce qui donne lieu h diviser et sub- 
diviser ainsi les idées généraleso on peut remarquer que 
c'est l'augmentation ou la restriction apportée au nombre 
des qualitésqui constituent les individus des diverses clas- 
ses. Ainsi, on voit que plus nous exigeons de qualités feu- 
nies: pins nous diminuons le nombre d'indisidus auxquels 
ces qualités sont communes; de sorte que l'extension est 
toujours en raison inverse de la comprébension, c'est.ì- 
dire que plus l'idée est générale, moins sont nombreuses 
les qualités qui servent h la lormer, et que plus le nombre 
de ces qualités augment, plus nous voyons diminuer le 
nombre des individus auxquels elles conviennent. 
.Mais il est une qualité propre constitutive de chaque es- 
pèce, qui distingue à nos enx cette espèce et du genre 
on elle est contenue, et des autres espèces qui y sont con- 
tenues avec elle. Sans ce caractère distinctif, en effet, il 
n'y aurait pas lieu pour nous à séparer cette classe des 
autres. On a appelé dif.lérence spécifique cette qualité, 
parce qu'elle differencie telle classe de toutes les autres, 
et qu'elle donne lieu h une espèce particulière, speciflca. 
Ainsi, le corps et l'esprit sorti deux espëces du genre sub- 
stance. Qu'y a-l-il donc dans l'idée de corps qui la disline 
de l'idée de subslance et de l'idée d'esprit. Il y a l'idee d'd- 
tendue. L'étendue est le caractère distinctif et, comme 
parle l'Cule, la diffërence specifique de l'idée de corps. 
Ces qualités constitutives des espèces avaient de bonne 
heure attiré l'attention des philosopbes :Platon les re- 
marqua surtout, et s'Ceva sur-le-champ à cette grande 
pensée, que c'est sur le type de ces qualités que Dieu a 
fut ,é tous les individus contenus dans les espèces qui 
composont l'univers. Quoique cette opinion ait été assez 
mal accueillie, je ne vois en elle rien que de simple et de 
rationnel. En effet, il est certain, comme il le dit, que 
Dieu a da avoir de toute éternité dans sa pensée l'idée des 
qualités qui constituent les espèces auxquelles il de, ait 
donner une réalité en dehors de lui-méme, et que c'est sur 
ce modèle, sur ce type, qu'ont été formés par lui les indi- 
vidus de ces espèces, puisque les qualités communes aux 
individus d'une mëme espèce sont comme l'unitA qui ras- 
semble ces différents dites dans la pensée et lui permet 
d'en faire une seule famille. Or, comment veut-on que 
Dieu n'ait pas eu le secret de cette unité, n'ail point conçu 
son œuvre d'une manière générale, si l'homme, avec sa 
faible intelligence, peut s'élever h ce« généralités? llais 
Platon ne s'est point arrété là. on-seulement, selon lui, 
Dieu a de toute éternité l'idée de ces qualitës essentielles, 
mais ces types de toutes les espèces sont par lui revélés à 
l'homme avant qu'il ait ouvert les ieux à la iumiëre, et 

première, que nous allons examiner, en considérant les 
dées ous le point de vue de leur origine. 
Pour simplifier cette question immee, sur laquelle on 
a éerit des volumes, et avant de discuter Arislote ou Platon, 
Dearles et Condillac, nous commencerons par exposer 
le plus brièvement possible notre propre croyance, qui ai 
dera, nous l'espérons du moins, l'intelligence et la critique 
des systèmes dont nous avons à parler. 
La question de l'origine des idées n'est autre que la ques 
tion méme des facu i té s de l'entendement, car il e,t ési- 
dent que si l'entendement possède des idées, il en est rede- 
vable aux facultés en vertu desquelles il les possède. 
Demander quelle est l'origine de telle idée, c'est demander 
par quelle voie elle nous sient, c'est demander quelle est la 
faculle qui nous la donne. Donc, étudier les facultés de 
l'entendement, pour savoir s'il ) en a une seule à laquelle 
on puisse ramener les aulres, ou s'il y en a reellemenI plu- 
sieurs bien dislincles l'une de l'autre, c'est remonter à la 
source des idées, discuter sur leur ori4ne. Si nous pouvons 
trouver entre toutes lesidéesde l'esprit humain une connexité 
telle que nous les jugions de la méme nature ou pouvant 
s'engendrer les unes les autres, si en un mot nous ne alC 
couvrons qu'une seule famille d'idées, nous les rapporterons 
toutes h une méme source. Si, au contraire, elles nous ap- 
paraissent comme partagees en classes bien distinctes, bien 
Iranchées et irrédctibles l'une à l'autre, nous serons obli- 
gés d'admettre autant de sources dil|erentes quïl y a d'es- 
pèees distinctes d'idees. 
Or, si nous envisageons des idées sous le rapport de leurs 
objets, c'est-h-dire des faits qu'elles sont charg,:es de nous 
représenter, nous remarquons d'abord deux classes d'idëes 
bien dislincles : les idées qui nous representent les pbéno- 
mënes du monde extérieur, et celles qui nous représentent 
les pbénomènes du monde interne : ainsi, la perception de 
la couleur, de la forme d'un objet, n'a rien de commun avec 
la pereeplion d'un acte de notre vol.nté ou d'un sentiment 
de plaisir eprouvé par I'-me. Et quoique ce deux percep- 
tions puissent exister ensemble, et l'une  l'occasion de 
l'autre, cependant elles se rapportent chacune à des faits 
d'une nature si dilferente que nous ne pouvons les attribuer 
h la méme faculté; nous supposons dune deux pouvoirs 
dilirents, l'un d'aëquërir les idées du monde extérieur, 
l'autre de nous donner la notion des phenomènes de Fàme. 
'ous sommes conduits à cette distinction par une autre 
voie. Ainsi, nous remarquons que les circonstances dans !es- 
quelles nous acquérons ces deux sortes d'idées sont toutes 
différentes..Nous avons besoin pour acquérir les premières 
d'ëtre en communication par nos organes avec leurs ob- 
jets. g;ous n'avon besoin, au contraire, d'aucune relation 
asec l'extériorité.pour que les secondes nous soient données. 
II est aussi une autre espèce d'objets pour la pensée que 
nous sommes fore.és de distinguer, soit des faits de Pexté- 
riorité, soit des fai[s internes : ce sont les rapports. 3lai 
il est une autre idée encore que nous ne pouvons en aucuu. 
manière faire sortirde celles que nous venon de remarquer : 
c'est l'idée d'infini. Cette idée, que l'expérience ne peut nous 
donner, existe-t-elle en nous avnt tout dévloppement in- 
tellectuel, autrement dit, est-elle innée Car» puisque le 
|ini ne peut la donner et que l'expérience ne nous révèl_  
que le fini, qui nous la donne donc? La raison, direz-vous. 
Mais la raison, en vrtu de laquelle nous la possédons, nous 
la fait-elle acquérir comme nous acquérons les autres, en 
présence de leur objet? On ne peut dire que nous nous trou- 
rions en présence de l'infini plurent à un moment qu'h un autre; 
et quoique l'idée nous en apparaisse à l'occasion d'une clmse 
finie, i'inlini n'est pas plus sous nos regards après qu'av«nt la 
perception du fini. Assurément avnt d'avoir ouvrt les yeux 
à la lumière nous n'avons aucune idée, si l'on entend par ce 
mot la notion claire et distincte d'un obiet. 3lais d'un autre 



Ts IDÉE -- 
coté, comme l'idée d'infini n'es contenue dans aucune de 
celles qdi nous sont données par l'expérience, qu'elle ve 
fait qu'apparaltre à leur occasion, et que son oblet n'est pas 
Ilus sous les regards de l'intelligence quand l'idée de fini se 
présente qu'elle ne l'Cait avant, il est naturel de supposer 
qu'elle existe dans l'rime, non comme idée distincte, mais 
comme notion latente, qui n'a besoin pour se réveiller et 
se manifester clairement que de l'apparition de son con- 
raire. En effet, l'infini n'est autre chose que Dieu même, 
au sein duquel nous vivons toujours. Or, comment l'intelli- 
gence pourrait-elle exister, méme à l'ctat de puissance, sans 
avoir in notion du principe d'oi elle émane, de cet inlini au 
sein duquel elle vit et elle est pionsC, -h quelque de4ré 
qu'elle soit de son développement? 
Après cette concession au système des iddes inndcs, nous 
aurions mauvaise grfice à accuser, comme on l'a fait, de 
folie les doctrines de Ptaton. Cependant, si nous admet- 
tons une idée innée, nous sommes loin de vouloir comme 
lui meubler Iïntelligence avant que i'expérience lui ait fourni 
ses richesses. Platon soutient en effet que nous avons primi- 
finement dans l'esprit toutes les idees gén,.rales et toutes 
les vérités générales sur le type desquelles Dieu a créé l'u- 
nivers, et qu'il a conununiquécs ì l'homme en lui donnant 
la vie. Ainsi, avant d'avoir vu un arbre, un animal, l'homme 
a i'idée générale d'arbre, d'animal ; et la vue d'un imlividu 
de ces e.«pèces suffit pour lui rappeler l'idée génerale qui 
existe déja comme type de l'espèce dans sa pensée. Ce 
tèmc était une hypothèse, ì laquelle le défaut d'analy.-e py- 
chologiqm a seul prté longtemps de l'appui. ¥oici, selon 
nous, d'ou provenait l'erreur de Platon : il ne pouvait ex- 
pliquer comment t'esprit, ì l'aide de quelques faits, de 
quelques rapports, s'élève ì les généralise», c'est-à-dire 
les ëtendre ainsi dans l'espace et dans le temps h un nombre 
illimité:. e pouvant concevoir comment du particulier il 
pomait conclure au général, il supposa le g,'néral connu 
par me révélation antérieure, et alors il dota l'homme ì 
sa naissance e toutes les idées ; car quelle est l'idée qui n'est 
point génerale ? 
Il ne sera pas difficile, après ce qui a été dit sm" l'origine 
des idées, de juger les diff.rents s) stèmes des iddes acquises. 
Le plus ancien est celui d'Aristote, dont la doctrine 
ce sujet a etWformulée dans cet aphorisme : .'¢ihil est in 
intellect« quod non peins fuert n setsu. Je demande 
comment les sens pourraient nous donner les idées de temps 
et d'espace, de nccessaire, les idées de l'rime et de ses phé- 
nomènes. Les sensualistes furent très-habiles à renverser la 
théorie de Platon, mais nllement à prouver que les sens 
étaient leu seules sources de nos connaissances. La question, 
fut longtemps renfermée dans ce faux dilemme : Si les iddes 
ne sont point tanCs, elles nous sont acquises par les sens; 
et si toutes les idées ne nous sont point données pa les 
sens, elles sont innées. Locke sortit de ce dilemme en 
admettant une deuxiëme source dïddes, la réflexion, c'est- 
h-dire la conscience. Mais il demeura fidèle au systëme de 
l'expérience, c'est-A-dire qu'il n'adroit que des idées ac- 
quises; aussi s'est-il assez mal tiré de l'explication des 
rités premières. Enfin, Laromiguière a admis quatre 
sources de connaisances, qu'il appelle des noms tant soit 
peu bizarres desenlment-sensaton, sentiment des facul- 
tds de l'drue, sentiment-rapport, sentimet moral. Je ne 
ferai ì l'égard de ce système si connu que quelques ob- 
servations. D'abord, Laromiguière conlond le sentiment 
avec la notion, et par là place l'intelligence tout entière 
dans le domaine de la sensibilité; mais je pense qu'il y a 
ici confusion dans les mois plut6t qu'erreur véritable. En- 
suite il ne nomme pas la raison : aussi n'a-t-il pu expliquer 
d'une manière satisfaisante l'acquisition des idées et des vé- 
rités générales ; enfin, les idées morales n'ont pas besoin 
d'une origine particulière ; car l'idée de b i e n et de mal 
s'explique facilemet.a l'aide de celles que fournit la cons- 
cience et la raison. Mas ce .que nous devons dire ì la gloire 
de Laromigière, c'estqu'il est te premier qui ait distingué 

ID1 
nettement la notion (qu'il appelle sentiment) de l'idée pro. 
prement dite, et qui ait montré comment l'homme arrive 
ì transformer les premiers développements obscurs et confus 
de sa pensée en idées claires et distinctes au moyen de I' a t- 
te n ri o n. C.-M. PAFF£. 
IDÉE FIXE. Voyez Fx (Idée). 
IDÉES ( Association des ). Voyez Assocarmr ngs In,F.s. 
IDENTITÉ. Le Dictionnaire de l'AcnéCie définit 
ainsi l'identité : « Ce qui fait qu'une chose est la même 
qu'une autre, que deux ou plusieurs choses ne sont qu'une 
ou sont comprises sous une m6me idée. » En philosophie, 
on appelle identté la conscience qu'a une personne d'elle- 
mème, qu'elle est to.ujours elle, n'a point cessé d'être elle, 
que le moi n'a pas changé dans elle. 
Dans le langage de la jurisprudence, on entend par iden- 
tité la reconnaissance qui est faite en justice de Pexistence 
d'une personne prétendue bomicidée, ou d'un condamné 
qui est repris après s'tre évadé. Les articles 444 et 518 
à .520 du Code d'Instruction criminelle déterminent les 
formes/ suivre en ces cas. Les arrts d'identité peuvent 
ïtre attaqnés en cassation. 
En algèbre, on donne le nom d'identité ì une égalité 
dont le second membre est la répétition du premier ou n'en 
diffère que par la maniëre dont il est écrit (voye= 
L'ideutité est donc, en quelque sorte, une tautologie. Ce- 
pendant les identités sont souvent utiles pour opérer des 
transformations dans les calculs ou pour vérifier leurs réo 
sultats. 
On a donné plus particuliërement le nom de hlosophe 
de l'identit au sstëme de Schelling aussi qu'à celui 
de Hegei, parce qu'ils ont pour base essentielle ce principe 
que la.pensée et l'existence sont tout un ou identiques. 
IDELOGIE IDELOGUES. On appelle idëologie 
cette partie de la philosophie qui traite des id ées, de leurs 
differentes espèces, de leur formation, de leur génération 
et de leurs rapports avec l'expression de la pensée, ou les 
langues, ltlais enstdte on a donné une extension plus 
grande à ce mot, et t'on s'en est servi pour dsigner la 
science qui s'occupe d'analyser les faits de l'esprit humain; 
il est devenu alors le synonyme du mot vieilli de m dta. 
p h y s i q u e; et l'idéologie a été regardée comme la science 
opposée aux sciences physiques, qui traitent de la matière, 
tandis que celle-ci s'occupe des idées. Dans ce cas, on en- 
tend par 1ddes les faits psycholoques, lesquels ne tombent 
pas sous l'observation sensible. Mais ce mot idéologie a 
vieilli lui-même, pour faire place au mot p s y c h o l o 9 i e, 
plus large, et mieux fait. C'est dans ce dernier sens que 
l'entendait h'apoléon, qui s'était déclaré l'ennemi des ideo- 
iogues, et qui désignait sous ce nom, auquel il attachait 
une idée de réprobation, tons les hommes qui s'occupaient 
de philosophie, c'est-g-dire des idées sur lesquelles reposent 
les droits des individus et des nations. Il avait oublié sans 
doute qu'il devait à l'idéologie d'avoir succédé à la vieille 
monarchie; et il ne pensait pas non plus qu'un jour elle se- 
rait plus forte que lui, et qu'elle enerrait ses Iégions pour 
le précipiter de son tr6ne. C.-bL P.FFE. 
1DE terme du calendrier romain. Les Ides étaient 
ainsi nommées du mot iduare, diviser, parce qu'elles divi- 
saie_nt le mois en deux parties presque egales. 
I!)IO$1E (du grec to.oE, langage particulier ). Ce mot 
en français est substantif, et signifie langue propre à un 
pays, à une nation ; ainsi, l'on dit : « L'idiome que pariaient 
les Grecs était plus élégant que celui qui était en usage 
Borne. » Il n'y a jamais eu de peuple un peu nombreux qui 
ait parlé absolument et sans reCange'le même idiome : les 
Grees en comptaient quatre principaux, sans y comprendre 
le d ialecte macédonien. Du temps des Romains on par- 
lait grec dans le midi de l'ltalie, latin ,vers le milieu, et bar- 
bare au pied des Mpes. L'Italie moderne parle dix espèces 
d'italien denuis Nalesiuqu'à Veniæœe et Turin. En France, 
outre la 'lan:,'ï,e nationalWet. class,que proprement d,te, nous 
avons cinq idiomes principaux : au nord, le flamand 



l'allemand grossier qu'on purin en Lorraine et en Alsace; 
à l'ouest, le ba-breton; dans le midi, depuis Grenoblejus- 
q'à Bordeaux, un latin corrompu, vieux débris de la 
lane romane dos troubadours, connu ns I noms de 
patois ærovençal, lançuedocien, çcon, bdaais; et 
dans I Príné Uscara, ou esara, que nops appe- 
lons improprement b a s q u e. 
IOPATHIQUE (du ec o, pwe, et o, 
madie). On donne ce nom aux sympt0mes de maladie 
qui prodt immédiatement d oeuses du al, par op- 
posion aux symptém sçmpalhques. Lorsque par suite 
d'un tat maladif de l'estomac, d maux de tête et des 
étodissements oe mafestent, tandis que dans les blessures 
de la tête et des autres actions nuisibles r cet oane, 
d congtions sangues au cervu oe compliquent son- 
vent av le degoOt, le malaise et les omisoeneu, dans 
le preer oes, I symptômes de rtomac sont 
lhiques et ceux du ceu sçplhiques, et vice versa 
dans le second cas. Dans beaucoup de cas, il t facile au 
médecin d'apprécier les sptmes de oe genre oelon leur 
ordre cbronoloque et leurs relations originell; dans 
d'autres, au contraire, il lui est difficile d'arriver à une 
solution satisfaisante. 
IDIOSYNCBASIE (du ec o, propre, v avec, et 
é«, tempérament). On appelle ainsi une disposition 
pmiculière de l'organisme qui lui inspire un goOt anormal 
ou une répuce de mme nature pour ceain choses. 
Cette disposition ne consiste pas seulement dans la répu- 
gnanoe invincible de ceains homm pour oeains mets, 
oertain bosons, cerins bruits, ceains sons, etc., 
mais encore dans I résulta de sou action, lorsqu'elle a 
B à Pinsu de l'inoevidu, et mëme quand la première sen- 
tiou qu'elle produit est agable ; par exemple, lorsqu'une 
eructation a lieu quand on a mangé des frs. Il faut eu 
dire autant de ces aberrations de l'appétit, qui font aimer 
par quelques individus come des fdandises des choses 
Qui rpuent généralement aux autre. LSuscrasie 
peut aus t nafive, par exemple and les chos 
i ploent généralement à tous sont indiffcrentes pour 
quelques-s. Les idiosyncsies sont ou constantes ou 
borné slement à un ceain espace de temps, notam- 
ment si elles  manifestent pendant une maladie ou à  suite, 
ou bien lou'il s'opère un changement oble dans le 
corps; par exemple, da les odes de croissance, dans 
la ussoe, etc. EII sont d'une grande impornce pour 
le mec, parce qu'ell exigent de scrupuleuses precau- 
tion« dans le diaosfic et le traitement des maladi. 
IDIOT mot dévé du , qui siie proprement 
un homme qui passe sa vie loin d tions politique, 
qui ne se mle point du gouveement. Il a été ps ensuite 
pour un homme sple, ignorant, ne sachant que sa lane 
natmlle, et est devenu enfin synonyme d'ibcile et de 
lupide, ps il a servi plus paoEculièrement  di 
personnes aUeintes d' d i o  i «. On appelait diots autrefois 
les frre lais ou c o n v e r s qui ne savaient p li. 
IDIOTIE maladie ou im[rlection de l'homme, dans 
laquelle I facultés de l'esprit ne se sont jmnais manifoE 
ou n'ont pu oe dévelopr que d'nne anière hs-impar- 
faite. Jnsqne ici on a générement employé dans le mème 
sens le mot idiolisme; mais on doit reluer oe dier mot 
 son s primitif,  ne s'en seoir que pour exwimer une 
locution pacière au génie d'une langue. Esirol, Geor- 
et et aues en ont donné l'exemp. On a confondu ri- 
diole av la d  m e n c e. Cendant les hi q cacté- 
risent l'une et l'antre de oes deux éta moux de l'homme 
sont ifférents et faciles h saisir. L'idioe t une 
ladie que Foevidu appose en naissant; elle se mafte 
au moment où I facult affecUv, mol  iellectuelles 
deient coincer à se faire connaltre. Elle t toujrs 
accompa dune imrlecon plus ou moins grade ns 
le développement du ceu, ou d'une altéraon dans n 
oanisation time. L iàioB parf«its sont oenséuem- 

IDIOTISME 2T9 
ment incurables, et rien ne peut leur donner de l'aptitudi 
à raisonner ou à saisir/es rapports exi.tants entre les objets 
qui les entourent. ,Aussi, autant il est facile aux personnes 
de l'art de reconnaitre cette espëce de dérangement céré- 
brai, autant il leur est difficile de le faire disparaitre. Les 
fonctions de la vie végétative ClloE les idiots se font orài- 
autrement bien ; toutefois, il est rare qu'un idiot complet 
vive au-delà de vingt-cinq ans. 
Sïl est vrai, comme on ne peut plus en douter, que l'in- 
tégrité et la perfection du ce r v en u sont nécessaires pour 
la manifestation des facultés de l'esprit, qu'en resuitera-t-il 
quand un enfant naitra avec un très-petit cerveau ou bien un 
cerveau malade, comprimé par la présence de plus ou moins 
de sérosité dans son intérieur ? Une incapacité  remplir toute 
espèce de fonction cérébrale, un manque abçolu de faculté 
morales et intellectuelles. Et bien, c'est là l'idlotie. Les ob- 
servations de Gall et de tant d'antres nous ont prouve 
le cerveau ne peut pas remplir ses fonctions quand Ic crâne, 
dans l'àge adulte, n'a que treize à dix-sept po,ces de cir- 
conf,'renci, mesure prise sur la partie la plus Lombee de 
l'occiput, en passant par les temps et par la partie la plus 
élevée du front. J'ai observé en I.s24, dans l'hospicedes alid- 
nés de Crémone, en Italie, une femme d'en iron trente ans, 
compléteuent idiote de naissance, qui n'avait que la mollie 
du volume de la tëte d'une femrae ordinaire. Un cr'ne de 
ma collection, qui appartient h un enfant mort à I'ge de 
dix ans dans un etat d'idiotie si complet, qu'il ne savait pas 
mème prendre les.aliments qu'on lui presentait, prescrite le 
tiers du volume de celui d'un enfant ordinaire du mëme 
àge; et encore ce crâne contenait-il h-ois ou q«atre onces de 
sérosité, qui comprimait le petit cereau. Dans la collec- 
tion de Gall, il y a deux crànes très-pefits, l'un d'un enfant 
de sept ans, l'autre d'une fille de ingt, qui étaient égale- 
ment idiots. Yillis a decrit le cerveau d'un jeune homme 
idiot de naissance : son volume comporte à peine la cin- 
quième partie de celui d'un cerveau humain ordinaire. A 
mesure qu'il y a plus de développement dans le cerveau, 
l'idiotie est moins générale, et couséquenunent lïncapficite 
de pareils individus devient moins ensible, jusqu'a ce qu'il 
se contonde avec cette masse de mcdiocrites et de demi° 
imbécillités dont est couerte la surface de la terre. 
L'idiotie des c ré t i n s du Yalais ne dépend pas genérale- 
ment du défaut de déeloppement de la masse cérebrale; 
elle provient, dans la plupart des cas, d'une sorle d'infil- 
tration séreuse dans le cerveau, qui l'engourdit et rend ses 
fibres molles et incapables de remplir leurs fonctions. Plu- 
sieurs individus sont idiots ou presque idiots à la mauiere 
des crétins : sur eux, la cranio»copie peut se tl'omer en dé- 
faut, et on reucontre des hommes qui ont l'air dYtre bien 
organisés, et qui efltivement sont des idiots vedtables. 
D r 1705$ATIo 
IDIOTISME mot formé d'id i o t, quand il designe une 
sorte d'alirnafion mentale, quc l'on nmme plutôt id t n t 
maintenant, et d'  d i nm e quand il s'emploie en grammaire. 
Dans ce cas, il signifie une construction, une locution, con- 
traires aux règles communes et generales, mais propres et 
particulières à une I a n g u e. Chaque langue a des idiotismes 
qui lui appartiennent, des locutions qui lui sont propres, 
et qu'il est ir0possible ou du moins fort difficile de a'aduire 
exactement dans une autre langue. Les idiotismes grecs se 
nomment hellnismes; les idiotismeslatins, latinis. 
t e s ; les trançais, ç a l l i c i s m e s ; les allemands, ç e r m a- 
nismes ; les anglais, anglic,mes. Il y a même des idio- 
tismes provinci«ux dans une mêmelangue; et nous avons cité 
ailleurs les çasconismes. Sous le titre d'ldioticon, les 
Allemands possèdent des vocabulaires pour les constructions 
propres à chacune des fraetions de ce peuple. Un latiniste, 
mème médiocre  comprendra très-bien le sens de ce pre- 
mier vers du second livre de l'Enéide : 
Conticuere omnes intentiçue ora tenebant ; 
mais aucun traducteur ne parviendra à le rndre sans aitC 



$80 
ration. Horace a dit quelque part, en parlant du plaisir que 
le  ulgaire prend à entendre le recit des infortunes d'un ty- 
ran : bibit ore vulgus. Dire que la foule boit ces roecits 
de la bouche serait mal traduire; on ne peut y arriver que 
par un équivalent et toujours imparfaitement. Les idiotis- 
• nes, en quelle lane que ce soit, sont généralement con- 
traires au bon sens, c'est-à-dire que la signification des mots 
y est toujours plus ou moins faussée, comme dans ces ex- 
pressions : battre le pave, la campagne, croquer le mar- 
mot, dormir un somme, passer une nuit blanche, tuer 
le temps. Ce sont de toutes les difficultés les plus gr,lndes 
que rencontrent les traducteurs; néanmoins, malgré leurs 
constructions vicieuses et contraires aux plus simples règles 
de la logique, les idiotismes contribuent souvent beau- 
coup à l'originalité et mème à la beauté d'une langue. 
TEYssÈoIE. 
IDOCRASE (de .o, forme, et :,.poE», melanée ). 
Les minéralogistes donnent ce nom à plusieurs silicates alu- 
ruineux isomorphe, dont la composition chimique est 
identique à celles des grenats ayant les mmes bases. 
Ce sont des minéraux à cassure vilreuse, fusibles en verre 
jaunâtre, a«sez durs pour rayer le quartz. Leur poids 
spécifique est 3,. Les couleurs des diverses espces d'i- 
docrase sont le brun, le rouge violet, le vert obscur, le 
vert jauntltre et le bleu. Ou les rencontre dans les terrains 
de cristallisation. Quand elles sont transparentes, on les 
taille et on les monte en bagues. Les idocrases ainsi taillces 
qui se vendent à Naples sous le nom de 9emmes du Vsuve, 
sont à base de chaux, et colorées en brun par de l'oxyde 
de fer et un peu de manganèse; elles apparlienuent à l'es- 
pëce minéralogique dite idocrase du lësut, e, vulgairement 
rsurienne, que l'on trouve en abondance daas les blocs 
de la Somma. 
IDOLÂTRIE, IDOLES (dn grec ito).o., image, et 
)oEp..'«, culte). Iàole, dans sa si=nification la plus litlérale 
et la plus étendue, signifie image , .[igure , repr«sentation ; 
mais l'idée particulière que nous avons attachée  ce mot 
est celle d'une statue ou image reprégentant nn diinité, 
l'idoldtrie est le culte rendu a cette fi,uro, et, par exten- 
sion, le culte rendu à font simulacre, à tout objet sensible, 
natur,.I ou factice, dans lequel l'imagination place quelque 
faux dieu. L'orine ,le l'idc, l'trie se perd daus la nnit des 
temps : nous n'oserions rép, ter, avec t'abbé Bergier, qu'elle 
n'a commencé que quelque temps après le dluge et la con- 
fusion des langues; car nous pourrions, d'après la Bible, la 
faire remonter jusqu'à Coin. Quoi qu'il en soit, les peuples 
qui l'adoptèrent les premiers, les Orientaux, avaient placé 
le siCe de la puissance divine dans les astres, auxquels 
présidaient, d'après eux, des dieu x ou des intelligences 
toutes-puissantes. Après avoir ainsi peuplé le ciel de divi- 
nites, les hommes furent entrainés à en peupler la terre, et 
tout phénomène qui les épouvantait ou qui surpassait la 
porhe de leur esprit Cait à. leurs yeux la preuve, le gage, 
de la présence d'un dieu. 
lous n'avons pointà nous occuper ici des différents modes 
d'idolâtrie qui se sont soueCe ou confondus sur la surface 
duglobe ;lesabéisme,le féti chisme,lepoly théism e, 
la religion des d r u i d e s, le p a r s i s m e en sont les princi- 
pales formes. Bornons-nous à constater que jusqu'à la 
venue du Christ tous les peuples de l'ancien continent ont 
été idolàtres, hormis les Juils. La relion chrctienne détrui- 
sit lentement parmi nous ce culte trop souvent sanguinaire 
des idoles; quelques contrées de l'Orient, comme l'Iode, 
la Chine, le Japon, la plupart des peuplades de l'lotCieur 
de PAfrique. de l'Amerique, de la Polynésie, y demeurent 
cependant encore attachées, et, malgré les efforts tentés 
jusqu'à ce jour par d'bonorables missionnaires, on n'en 
saurait pré;lire, avec certitude l'extinction prochaine. 
IDOME.EE  fils de Deucalion et petit-fils de M i n o s, 
rë.'_'n:it sur plu,teurs villes de la Crëte lorsque, accompagné 
,!,. son neveu Mérion, il vint, dans un àge avancé, se join- 
-ire, avec 80 vaisseaux aux Grecs qui faisaient le siCe de 

IDIOTISME . 
Troie, ce qui l'a fait ranger par les mythographes au nombre 
des prétendants à la main d'Hélène. Homère parle sou- 
ent aec éloge de son courage et de l'amitié qui l'unissait 
à Agamemnon. Il eut, à l'occasion des jeux funëbres clé- 
brés en l'honneur de. Pafrocle, une violente querelle avec 
Ajax Odce. Suivant l'lliade, Idoménée aurait ramené heu- 
reusement dans l'fie de Crète tous ceux de ses compagnons 
d'armes que la guerre avait épargnés. Diodore de Sicile ra- 
conte qu'on lui Ceva, ainsi qu'd Mérion, un magnifique 
tombeau, et qu'on leur accorda méme des honneurs divins. 
D'après quelques auteurs romains, ajoutant trop de foi aux 
traditions douteuses d'Alexandrie, ldoménée, ì son retour 
de Troie, fut forcé de quitter la Crëte  la suite d'un vi»u 
indiscret : surpris par une violente tempète et en danger de 
péir avec son compagnon, il fit vœu à -eptune de sacri- 
fier le premier homme «lui s'offrirait à lui en touchant la 
terre natale, s'il pouvait y aborder. Or, ce fut son propre 
fils, ou plut6t Leucus, son fils adoptif, son gendre futur, 
auquel il avait laissé le gouvernement de ses Etats, qui se 
presenta et lut immolé. A ce sacrifice succeda une peste 
affreuse, qui determina les sujets d'fdomënée ì le chasser 
du po)s, comme autetw du fléau. Sui ont une autre version, 
Leucus s'opposaau debarquement du roi, sous prétexte quïl 
apporlait lYpidémie, et le força,:le se rembarquer. Expulsé de 
ses Etats, il chercl,a un asile à Colophon, d'après les uns, 
dans la Calabre, où il aurait fondé Salente, selon d'autres. 
L'avenlure d'ldoménée a fourni  Crébillon le sujet de sa 
premiêre tragédie, et à Fénelon celui d'un des plus inté- 
ressaots épisodes de son Toeloenm/tue. 
IDB.IAo ille de la capilainerie de Wippach, duché de 
Carniole, célbre par ses riches mines de mercure, dont la 
découverte date de 1197, et siCe d'une direction des mi- 
nes, est située daus une profonde vallëe, en forme d'en- 
tonnoir, qu'arrose l'Idri-.:a, et compte environ ,00 hahi. 
tortis, dont prës de 600 appartiennent au fersonnel de l'ex- 
ploitation des mines. Le reste a pour industries le tissage 
du lin et des soies et la fabrication des eau.x-de-vie de ge- • 
nièvre. On y trouve une 6cole des mines, un collége alle- 
mand et un theàtre. Parmi les ëdifices, on distingue le châ- 
teau de Gewerkenegg, bàti par le corps des métiers, en 15.9.27, 
alors qu'Idria appartenait  la république de Venise, et 
est aujourd'hui la direction des mines. C'est ifi qu'est 
situé l'orifice de la fosse principale par laquelle on descend 
ordinairement dans la mine. 
La mine demercure d'ldria est, à came de son organi- 
tion, une des plus curieuses de l'empire d'Autriche. Son 
produit annuel s'elève actuellement à environ 3,000 quin- 
taux, et la fabrique de cinabre en livre annueilement de 
6 à 700 qninlaux/ la consommation. Le plus remarquable 
des mineraux que l'on y trouve est l'idrialithe ou idria. 
line dans lequel on a découvert un nouvel hydrogène 
carburé. 
IDSTEDT, village du Schlesig, situé à 2 myriam- 
tres au nordde la capitale de ce duché, est devenu célèbre 
de nos jours par la bataille qui s'y livra, le 2- et le 25 juillet 
1850, entre les troupes du gouvernement national du S c h le s- 
wig-ltolstein, commandées par le génrat Willisen, 
et l'atroce danoise aux ordres du général Krogh. 
IDUMÉE Voye-. 
IDU.'$1ËE.S ou ÉDOMITES, descendants d' É s a ri, ha- 
bitaient l'ldunuee, petite contrée montagneuse, entrecoupée 
de roches caverneuses, et située sur la frontière sud-est de 
la Palestine, d'où ils avaient expulsé les Horite, c'est-à-dire 
les habitants des cavernes. Sous H y r c a n, leur pays fut 
corporéau royaume de Judée, auquel ils donnèrent plus tard 
dans la famille d'Héroàe une dynastie de souverains. 
/près la dernière erre de Judée, le nom de lenr pays se 
confondit avec celui de l'Arable. 
IDIîk (c'est-à-dire qui aime le travail, ) nom d'une 
vinite de la mythologie du ord, qu'on ppelle quelquefois 
aussi, mais/ tort Idîna ou Idunna. Sage fille du nain 
Svald, et initiée à la connaissance de l'avenir, elle fut ad- 



IDU[N -- 
mise au nombre des A s e s et donnée pour épouse à B r ag i. 
C'est elle qui possédait cette pomme délicieuse qui donnait 
aux dieux une jeunesse éternelle. Le géant Tbiassi, assisté 
par Loki, la lui ayant enleée, les dieux ordonnèrent à 
Loki de la lui rapporter ; et celui-ci, se metamorphosant en 
faucon en rame temps qu'il changeait Idùn en noix, lui 
rapporta ce fruit, dont la perte était pour elle un sujet de 
vive affliction. 
IDî'XA ou IDUNNA. Voye-. lvuv. 
IDYLLE (du grec d5),),to,, diminutif d'doç, figure, re- 
présentation), petit poëme du genre pastora 1, et qui diffère 
de |' é g| o g u e en ce qu'il n'e pas dialogué, mais en forme 
de description et de m.ditation. T h é o c ri t e est le créateur 
du mot, qui n'avait pas d'abord ce sens précis, puisque la 
moitié à peine des tre=te petits poëmes que contient son 
recueil ont pour sujet la vie des champs, le calme, l'inno- 
cence et le bonheur qu'on y trouve. On peut en dire autant 
de B i o n, de Moschus et de V i r g i I e, réduit, d'ailleurs, à co- 
pier des tableaux d'nne nature qu'il n'avait pas wm. L'idylle 
ne reparut qu'à la reuaissance des lettres; car on ne peut pas 
donner ce nom aux pastourelles provençales du moyen àge. 
Vauqnelin de La Fresnaye fit paraitre un recueil de 
poésies sous le nom de Foresteries et d'Idillies. Beaucoup 
d'autres auteurs s'exercèrent dans le genre pastoral; mais 
il faut arriver à Gessner pour retrouver de w!ritables 
idyiles, admirables pour la pureté des sentiments, pour la 
moralité de la passion. Il n'a peint pourtant que des por- 
traits de fantaisie, et ses actions imaginaires n'appartienuent 
ni  la campagne ni à la ville. Andre ChCier a peut-ètre 
mieux compris encore l'idylle anlique, non pas elevée jus- 
qu'à la hauteur héroïque on lyrique que Théocrite lui a 
donnée quelquefois, mais pleine des graces naives qtd respi- 
rent dans q!elques-unes de ses riantes compositions. 
IÉHATERINBURG KATIIABINE,NBURG, ou C-- 
THEBINE.NBOURG, chef-lieu de district, dans le gouverne. 
ment de Perm, qui faisait autrefois partie du royaume de 
Kasan, mais qui, dans la division politique actuelle de la 
lussie, forme un gouvernement particulier, dont Perm est 
le chef-lieu en mbme temps que le siCe de ses autorités 
slipCleures. Ce territoire est considéré comme appartenant 
encore à l'Europe. 
La ille d'léaterinburp, btie sur les bords de l'lsset et 
du lac du rume nom, .ur la lisière orientale de l'Oural cen- 
tral, contrée riche en mines, doit à sa position au centre 
du district où le minerai est le plus abondant, d'ètre la 
plus ioenplée de toutes les villes de ce gouvernement, et 
compte attjourd'hui au delà de o,0o0 habitants. C'est 
te siCe d'un tribunal supédeur pour toutes les mines 
de l'O,tral ; on y trouve en outre une école des mines, 
une fabrique de monnaies de 9uivre, des usines im- 
portantes pour la labrication du let et du fil de fer, et une 
fonderie de canons, ainsi que d'importants lavages d'or 
Cai,Ils sur l'Isset, rivière aurifëre, qui se rattache au sys- 
tème de l'Oh. 
IÊH&TÉIINODAR capitale Tschernomores ou Ko- 
saks des Tschernomoriques, c'est-à-dire babitant les bords de 
mer 5luire, dont le territoire ( 504 myriamètres carrés, avec 
15,0o0 hab. ) est compris, d'après la plus récente division 
politique de la Russie, dans la province cJscaucasienne. C'est 
le sitge de Va t a m a n et des diverses autorités militaires. La 
ville, dont la populationestd'environY,000 mes, est située 
dan. la marécageuse vallée du Kouban, dans u n site malsain et 
humide. Elle est protégée par uneassez bonno citadelle où, 
indépendamment de la cathédrale, se trouve aussi un ma- 
gnifique h5pital militaire, de construction récente et à l'u- 
sage.,le l'armée tchernomorique. 
lElàATÉll.XOSLAFF,gouvernement de la louveile- 
Russie, ou Russie méridionale, entre Charkoff et Pultawa, 
au nord, Cherson à l'ouest, la Tauride-au sud, la mer 
d'Azur et le pays des Kosaks du Don ( dans lequel est situé 
Taga nro g) à l'est, compte sur une superficie d'environ 
o0 myriamètres carrés, une population de 8o0,ooo àmes, 
DICT. DE LA CO¥EIiS. -- T. XI. 

IÉNA 
non compris Iê gouvernement de la ville de Taganrog 
( 56 myriamètres carrés et 80,000 babitmlts) et le pays (les 
Kosaks de la mer d'Azof (4 myriamètres carrés et 60,000 
habitants). Ce gouvernement est une plaine immense, du 
genre des steppes et riche en herbages, dont la nature 
ne se modifie qu'/i l'ouest de Dniepr et le long de ce fleuve, 
où les douze cataractes connues sous le nom de Porop tom- 
bent successivement avec fracas dans une contrée monta- 
gneuse et presque romantique, en y interrompant la navi- 
gation. En raison de sa situation méridionale, ce gouver- 
nement produit une foule de fi'uits qu'on ne lrouve nulle 
part ailleurs en Russie, "tels que abricots, poires, cerises, 
mùres. On y cultive l'amandier, le figuier, la vigne, l'arbou- 
sier et le melon, qui y réussit en pleine terre. Un des arbres 
fruitiers qu'on rencontre le plus ordinairement dans les 
vallees, pour la plupart cou erres de beaux et riches  illages 
est le prunellier, dont les baies servent à préparer une epèce 
de vin appe|ée terwf.fha. Il y a grande disette de buis, et 
en beaucoup d'endroits on est réduit aux joues, à la pailk: 
et il la bouse de vache pour tout combustib|e. Les ploine 
abondent en outardes, perdrix, coqs de brqyère, bccasses 
et cailles, de mme qu'en loups, renards, lièvres et lapins ; 
on troue méme sur certains poiMs des buffles. Le pelican, 
oiseau si rare dans le reste de l'Europe, y abonde. Dans ces 
derniers temps la sériciculture et le perlectionnement «le la 
race ovine, au moyen du croisemcnt avec de» bëliers mdri- 
nos, ont Ce l'objet de la sollicitude tut,te particuliëre du gou- 
vernement, qui n'a rien nég|igd pour accroitre le bien-tre 
des peuplades, généralement nomades et da¢quisition nou- 
velle, «lui I,abitent cette province. C'et ain¢i que dans ce 
gouvernement, autrefois  peu près imp,.netrable, ont été 
fondAes plusieurs centaines de colonies de nationalités les 
plus diverses. On y trouve des l'rnssiens et des Saxons, des 
Persans et des T«tares, des Grands-Russes et des Kosaks, 
des Grecs et des Arméniens, des Magyares et des Ratzes, 
des Moldaxes et des Valaques, des Albanais, des Bulgares et 
des Arnautes, vivant confondus de la n,arrière la plus pai- 
sible. 
Le ci,et-lieu de toutes les colonies Arméniennes est Chorti: 
ou Chort:,ja, avec 12,00o I,abitants ; 3"«chtschevan, sur 
le Don, avec le mëme cl,iffre de population, est le centre de 
toutes les colonies allemandes. 
Cette contrée, qu'à partir de 175 on commença à colo 
niser h l'aide de colons étrangers, recul d'abord le nom de 
;foucelle-Servie; en 176, on lui donna celui de .Yoilvelle- 
l«sse ; son organisation et sa dénominatiun actuelles da- 
tent de 1783. 
IÉKATEBINOSLAFF, sur la rive droite dt Dniepr, au- 
dessous des cataractes, ci,et-lieu du goqvetnement, 
fondée en 178-, par Potelukin. Cette ville, siëge d'un arcl,e- 
vèché et des principales atttorités administraties et inili- 
faites, a des rues larges, 15,000 habitants, un séminaire, 
un collége, une école de chirurgie, p|usieurs ht,pitaux, de 
nombreuses fabriques. On y a élevé un monument à la mé- 
moire de limpératrice Catberine ll. Il faut encore citer, 
outre Pawlograd, Bacbmut, A|eandrowsk et Werchne- 
Dnjeprowsk, les deux autres illes cbeEs-lieux de cercle, 
l'ovomoshowk, sur la Samara, jadis capitale des Kosaks- 
Zaporogues, a'ec 12 à 15,oo0 habitants; et S/awano- 
erbsb, sur le Donetz, cenre d'un commerce et d'une na- 
vigation assez importante; enfin, le port de mer Ma'ioupoL 
sur le Ka|mius, et au voisinage de la mer d'Azof, Tepanrop, 
Achitschevdn et les forts d'A=of et de lostqff, ou 
Dimilria. 
IÊx- dans legrand-duché de Saxe-Weimar-Eisenach, 
capitale de l'ancien duché de S«xeoldna, fondé en 1672 par 
Bernard, fils du duc Guillaume de Saxe-Wiemar, et qui s'é- 
teignit dès l'an 1590, à la mort de son fils Jean-Guillaume. 
Après avoir passé alors à la maison de Saxe-Eisenach, il fit 
retour, à l'extinction de cette ligne, en t')$l, à la maison de 
Saxe-Weimar. La ville est située dans une romantique  allée, 
au confluent de la Leutra et de la Saale» qu'on )' traverse sur 



282 
un ponten pierre. Charles-Quint, qui avait vu tant de villes, 
frappé de la situation délicieuse d'Iéna, avouait qu'après 
llorence c'Cait la ville dont il avait conservé l'impression 
la plus agréable et la plus durable. Iéna, où l'on voit un 
château antique, compte environ 6,000 habitants; la dëmo- 
lition de ses remparts et de ses bastions lui a fait perdre 
peu à peu sonair de vétusté, et unepartie de ses fossés, après 
avoir été comblés, ont été transformés en un beau pare. 
Iéna est célbbre dans l'histoire par la mémorable bataille 
livrée sons ses murs en 18o6 (,oye . l'article ci-après) et par 
son uuiversité. Elle est le siCe 'une cour d'appel commune 
au Grand-Duché et au duché de Saxe, ainsi qu'à la prin- 
cipauté de Reuss;on ytrouve une Société de llinéralogie et 
une SortCWde la Littérature latine. La Tour du lenard 
(Fuchsthurm), qui s'élève sur le Hausberg, situé prës de 
la ville, est un débris du vieux manoir de Kirchberg. 
L'université fut fondée en 155Œ, par l'Cecteur de Saxe 
Jean-Frédéric le Magnanime, qui en conçoit le projet dès 
1547, lorsque, prisonnier de Charles-Quint, après la bataille 
de Muhlberg, il flt conduit à lena pour y avoir une entre- 
vue avec ses trois fils. Par cette creation, il voulait rempla- 
cer l'université de "ittenberg, qui lui avait été enlevee par 
le sort desarmes ; et son but était de faire de cette nouvelle 
université le doepft fidèle de la pure doctrine evangélique 
et le foyer des sciences et des lettres. Il assigna à son entre- 
tien les biens de Irois couents supprimés par la réforma- 
tion; et l'ouverture solennelle en eut lieu le ŒEE terrier 1858, 
après que l'empereur Ferdiuand 1 r eut à cet effet donné son 
consentement, longtemps refié. Les revenus de l'universite 
s'elevaient à près de 4o,000 thalers. Son époque la plus 
brillante fut le rgne du duc Charles-Auguste (177 à 1.06 ), 
protecteur éclairé des seienoes et des lettres. Parmi les pro- 
lesseurs q,i l'out illustrêe, on cite Schelling, Hegei, 
Voss,Fries, Oken, H u tel and, Feuer b acb, Thibaut, 
Etc hhorn. Le nmnbre de ses étudiants, qui en 1815 et 
années suivantes s'était élevé  800, n'est plus aulourd'hui 
que d'environ 500. E 1851 on  comptait 24 professeurs 
en titre, 10 professeurs ordinaires et 2- professeurs agregés. 
Sa bibliolhè«ple se compose de l,lus de 200,000 volnmes. 
On y a ,ljoint un cabinet de m,.dailles et un musëe d'anti- 
ques., des cabinets de minéralogie, d'anatomie comparé,.., etc. 
IENA (Bataille de). Le 3 octobre 1806, apolé,m avait 
dit : ,, Le 8 je serai devant l'eunemi, le 10 je le battrai à 
Saalfeld, le 1 ou le I je battrai toute son armée, et 
avant la fin du mois mes aigles entreront dans Berlin. ,, 
Le 13 au soir il répetait à Larmes, en lui donnant ses ins- 
tructions : OE L'armce prussienne est coupée comme celle 
de Mark l'clair à Ulm l'ann¢.e dernière; elle ne va plus 
manœuvrer que pont se faire jor ; le corps qui se laisse- 
rait percer se desfionorerait. ,, Les troupes se mirent en 
ma'che ds l'aurore du 14, par le plus épais brouillard. 
La dii.-ion Suchet attaqua le bois de CIoswitz, defimdu 
par Tauenzien, et à dix heures elle en avait délogé les Prus- 
siens. Soull man-.uvrait sur la droite. La cavalerie prus- 
sienne essaya vainement d'arrëter sa marche; elle [nt reje- 
tée dans les défilés de Rodchen, et toute l'infanterie d'Holt- 
zendorf se rep]ia en doesordre sr les bauteors de Stobra. 
Iey entendait le canon, mais, resserré entre des cbemins 
étroits, il ne pouvait amener ses masses : il prit donc avec 
lui un corps d'élite de 4,000 grenadiers et voltigeurs, passa 
entre Reille et Suchet, et se porta sur le village de Vierzben- 
Heiligen. Augereau grait, à la tète de la division Desjar- 
dins, les vignes escarpées de Flohberg; et tout le corps 
d'Hofienlohe se tronva bient6t dëposté des hauteurs et 
refoulé dans la plaine par les ttes de colonne des quah'e 
corps français qui l'avaient attaqué. 
Le prince s'attenoait si peu à livrer bataille, qu'il signait 
l'ordre de ne pas latiguer les tropes au moment où ses 
avant-gardes braient culbutées. La brigade saxonne de 
Cerrini était déjà détrite. Mais il avait réussi à rallier 
ses principales Iorces à ¥ierzehn-lleilingen, et les décbarges 
de son artillerie avaient accueilli le corps d'ëlite. La cava- 

|crie de Co]bert fondit sur cette arti]|erie et lui en|eva reiz8 
pièces; mais elle fut presque au,lift ramenée par tes esca- 
rirons prusdens, bley protégea son retour avec les carrés de 
son infanterie; et le corps de Larmes, accourant à son aide, 
emporta le village à la baïonnette. Ce fut là le centre des 
efforts des deux armées. Saxons et Prussiens y firent des 
prodiges de valeur; mais Larmes déborda leur extréme 
gauche, tandis que Iey pénétrait, avec son avant-garde, 
entre le village disputé et celui d'Issexstoedt, lqapoléon, 
rejoint alors par Augereau et la division Desjardins, la dirige 
snr ce dernier village, et la fait soutenir par la brigade 
Wedel de la division Suchet. La division Heudelet re- 
pousse en mme temps nn corps saxon au débouché de la 
Sclmecke, et blurat arrive avec ses masses de cavalerie. Le 
corps d'Holtzendorf, défait dans les environs de Stobra, 
livre l'aile gauche d'Hoheniobe aux attaqnes de Soult; Heu- 
delet avance à grands pas sur son aile droite, et cet effort 
simultan6 de toute la ligne française porte ses tëtes de co- 
lonne en avant des villages que l'ennemi lui a disputés. 
Tout se disperse devant elles ; des régiments entiers sont 
foudroyés et alCruits. Hobenlobe rallie un moment ses débris, 
et veut faire un changement de front. La brigade saxonne 
de D)fiern, qui forme son point d'appui, est assaillie par 
les troupes de V-edel et de Desjardins. Son artillerie est 
prise, ses quatre régiments sont mis en déroute. D'autres 
corps ennemis, rallies entre les villages de Gross et Klein- 
Iompstadt, sont culbutés, malé les efforts que fait leur 
cavalerie pour les soutenir. 
lucbel arrive enfin au secours de Hohenlobe, à la tëte 
de vingt-six bataillons et de vin escadrons ; il rallie quel- 
ques Inigades fugitives, et porte ses colonnes sur Franken- 
dort avec une grande résolution ; mais il est trop tard : tes 
divisions françaises n'ont pins d'autres ennemis à vaincre. 
Soult attaq**e son flanc gauche, et le fait prendre en écharpe 
par son artillerie; Wedel l'aborde de front, Desjardins se 
jette sur son flanc droit. La cavalerie de Mural est seule 
arrètée un moment; mais celle des Prussiens, fusillée à 
bout portant par la division Saint-Hilaire, est refoulée ì 
son tour sur l'infanterie, il s'ensuit une m]íe ì la baïon- 
nette ; et au bout d'une heure tout le corps de lluchel est 
poussé en désordre au delà de Cappellendorf, sur la chaus- 
sée de Weimar, où les dbris de Hohenlohe ne lardent pas 
ì le suivre, sous la protection d'un carré qui ex,ente sa 
retraite en bon ordre. La division saxonne.de iezemen- 
che], cependant, est restée sur le champ de bataille, entre 
Isserstoedt et le ravin de Schwabbaiiser. Les ordres de Ho- 
benlohe ne lui sont point parvenus; elle ne s'aperçoit de 
son isolement qu'en se voyant cernée et attaquée de tous 
ctés par les divisions françaises. Sa résistance est longue 
et glorieuse; mais, après un combat terrible, où elle est 
ralliée plusieurs fois par Zechevitz, et touiours rompue par 
de nouvelles attaques, elle ne peut sauver quelques fuyards 
qu'en se jetant pêJe-mèle dans le défilé de Denstdt. Tonte 
cette afin,Ce et enfin reloulée sur Weimar, et des 55,000 
hommes de Hohenlobe, des 5,000 que luchel a amenés à 
son secours, il en resle ì pirte.oE0,000 qu'on puisse mettre 
en ligne. 
Cette victoire, quelque brillante qu'elle ftt, l'Atait 
moins cependant que ne le croyait .Napoléon ; car il ,était 
convaincu d'avoir .lutté contre la principale armée prus- 
sienne. Ce fut seulement peudant la mdt qu'il connut son 
erreur, et la victoire, plus étonnante encore, de D a vou st. 
L'empereur lui avait écrit le 13 qu'il tenait l'armée prus- 
sienne réunie entre ]éna et V(eimar ; il lui ordonnait de 
marcher sur Apolda, et de tomber sur les derrières de l'en- 
nemi, en combinant ses manœuvres avec celles de Berna- 
dotte, arrivé à Dornburg. Mais celui-ci interpréta mal cet 
ordre, et ne prit part à aucune des deux batailles. Da- 
voust crut donc n'avoir affaire qu'à un gros détachement 
de l'armée prussienne, ndis que ses principales forces 
marchaient sur lui sous la conduite dn roi et de Brunswick. 
Arrivéedans les environs d'Apolda, le 13 au matin, 



IÉNA -- IINISEISK 
armée s'arrta au bruit du canon d'lna : c'Cait l'attaque 
du plateau de Landgrafenberg par Larmes. Mais les cour- 
tiers de Hobelflohe n'y avaient vu qu'un engagement sans 
importauce, et le roi de Prusse avait porté le soir son quar- 
tier gét6ral à AuerstxlL Davoust, qui de sou coté avait 
fait occuper le défil de Koësen, pase la Saule à six heures 
du matin le 14, atoe ses trois divisions. Les deux armées 
marcheur l'une sur t'attire à travers le brouillard épais qui 
couvre la courtC, croyant ne pousser qu'une reconnais- 
sance, quand la brigade GauUtier heurte tout à coup des 
masses dont elle ne peut juger la force. C'est une avant- 
garde de xingt-cinq escadrons, d'un bataillon «le grena- 
diers et d'une batterie d'artillerie iegère, conduite par Bhi- 
cher, et qui a dejh dpassé le t iilage de Hassen-Elausen. 
Averti par le colonel Burke, qui a le premier reconnu 
l'ennemi., le 25 e forme ses carrés à droite du village, tan- 
dis que le 85 e les forme à gauclte, et que l'artillerie de la 
brigade se place sur la cltaussee. Blucher, repoussé dans 
une première charge, perd ses canons, et se replie sur le 
corps de Scltmettan, qtm Brunswick ient de mettre en 
ligne. La brigade Petit joint en mème temps la brigade 
Gauthier, et toute la divisiou Gudiu se trouve ainsi en- 
g«tgée sur ce point. Bli)cher reparalt à la chute du brouil- 
lard, déterminé à se venger d'un premier échec. Mais reçu à 
bout portant, avec une h-oide intrepidité, par les carres de 
la dit ision française, foudroyé dans plusieurs attaques in- 
h uctuenses, il s'eufuit dans le plus grand desordre tets Spii- 
berg, et est poassé à son tour par la cvaierii de Vialaunes 
à t kilomètres du champ de bataille. 
Cependant, les masses prussiennes entraient en ligne; et 
'arstenleben, retardé par le passage de l'Ems, debouchait 
à huit heures du matin du village de Garnstoedt sur le liane 
droit de Gudin. La disision Friant court à la rencontre de 
ces nouvelles troupes; Dasoust fait enlever une de leurs 
batteries par le 108 e, et russit à déborder leur aile gauche. 
Mais, de l'autre c6té de ltassen.ltausen, le 8  a seul sou- 
tenu le cltoc de deux brigades prussieunes, et Brunswick, 
ayantreeonau sur ce point iahiblesse de son ennemi, forme 
le projet de l'accabler, de se placer entre la Saale et la 
cilaussée, et de couper ainsi à Davoust la retraite sur Koe- 
sert. Lïntanterie du prince d'Orange vient renforcer le corps 
de Schmettau, que t0udroient les ba!teries de Gudin; et 
J'aile droite de ce corps, l'infanterie de Warstenleben, les 
éserves de Kuahdm et d'Amim, et la cavalerie de BltiCller, 
se jettent en masse sur le s illage de ttassen-Elauseu, où Petit 
s'est établi à la tte de sa brigade. Davoust lui ordonne de s'y 
maintenir avec le 2t e, et d'envoyer le t2 e au secours du 85 e. 
Ces deux derniers se postent sur les escarpements des che. 
tains creux qui sillonnent cette c6te, et opposent lonemps 
une résistance Iléroïque. Mais, accablés par le noulbre, ils 
sont coutraints de se replier dans l'iutërieur et en aniëre 
du village, oi ils se font une position inexpugnablè. Bruns- 
vick, indigné de cette résistance opiniâtre de trois régi- 
ments, ordounait un assaut genérai, quand une balle vient 
le frapper d'un coup mortel ; une autre renverse Schmet- 
tau, et Warstenleben a son cheval tué sous lui. Au reste, 
ces accidents ne jettent qu'une bésitation momentanée dans 
les coionnes prussiennes; elles se raniment à la voix de 
Frédéric-Guiilaume et de Biticher : la division Gudin va ëtre 
forcée dans ses positions, quand Davoust fait avarger la 
division Morand, sa derniëre réserve. La cavalerie du prince 
Guillaume de Prusse veut en vain lui barrer le passage. Les 
carrés de Morand font un feu terrible sur les esoadrons 
lrussiens, et Davoust, qui se trouve partout, les fait mi- 
trailler par son artillerie. Le prince Guillaume est mis, à son 
tour, IlOrs de combat, et sa cavalerie s'enfuit en désordre à 
travers les champs d'Auerstœedt. 
Pendaut_cette glorieuse resistauce des divisions Gudin 
et Morand, la division Friant contiune à tourner la gauche 
de la ligne prussienne, et culbute dans le vallon de Itehau- 
sert la brigade du prince Henri. C'est là que viennent bient6t 
r,e rallier toul les raasses que Daxoust a enfin repoussees 

283 
de Hassen-Hausen; mais les colonues de Morand les y 
poursuivent l'épe dans les reins. Le roi de Prusse accourt 
en personue, à la t6te d'une forte réserve. Par bonlteur, Mu- 
rand a imprimé à ses soldats un lau irrésistible. Il clmsse I 
Prnssiens du plateau de Sor, neudort, et, prenant en flanc la 
colonue du roi, porte la mort et le désordre dans ses rangs. 
La division Gudin chasse en mëme temps les débris de 
Schmettan et de Warstenleben. La division Friant, arrètee 
un momeut par les troupes dn priuce d'Orange, qui a couru 
soutenir le prince Heurt, s'ouvre enfin un passage/ travers 
leurs bataillons enfonoes. Cependant, les Prussiens comptent 
encore quelques issources, et Davoust a engagë toutes ses 
troupes. Kalkreuth, qui est restë en réserve avec deux divi- 
sions à la hauteur «le Juba, s'approche pour sauver le corps 
d'armée. Bhicher, a,ant en méme temps rallie sa cavalerie, 
demande à reprendre l'offensive. Pendanl qu'on délibère, 
les divisions Irançaises attaquent, debordent, écrasent ce 
nouveau corps prussien, le refoulent sur Gernstoedt et lui en- 
lèvent encore cette belle position. Bliicher, étourdi du coup, 
ne peut méme trouver un refuge au iilage d'Auerstœedt, 
qu'incendient les boulets français. A cinq Itettres du soir, les 
Prussiets, écrases de toutes parts, abotdoutetat le champ de 
bataille, jonché de 10,000 morts, laissant en nos mains un 
nombre incalculable de blessés et de prisonniers, e0 rira- 
peaux, 300 pièces de e.auon et 30 géneraux. Bruuswick et 
deux autres meurent de leurs bless,res, et B-in reçoit la 
loi d,t vainquet, k'VIEzNET, de i'Académie Franqaise. 
IÉNIHALE  ville de la Ctimée, sur le détroit de Kertch 
ou detroit de lenikale, qui )oint la mer .Nulle / la mer 
d'Azur, par 4523 ' de latitude septentrionale et 3-1°e ' de 
longitude orientale. Les Turcs batirent cette  iile en 1703, 
pour defendre l'entrée de lainer -,»ire aux Busses; mais 
cettx-ci la prirent en 1771. Au mois de mai 18:,, les troupes 
auglaises, ïranaiseset turques s'étant emparees de K e r t « h, 
les lttss evacuèrent Ieuikale en faisant sauter leurs maga- 
sins et leurg batteries etittcendiant leurs vaisseaux/ apeur. 
IÉNISÉi ou IENISSEI, le plus long des iieuves gigau- 
t«ques de la Siberie tributaires de la nier Glaciale du .Nord, 
traverse la prnvincede tWn i se isk, et prosient de la rëun:.on 
du grand et du petit Kun, dont l'un preud s» s6u.ee dans la 
contrëe où se rejoignent les monts SayAn et Ba:2,ai, et l'au- 
tre dans i'Ektagh, l'une des ramifications de l'Altai. Le Ie- 
uisei traverse, en formant de notqbreuses cataractes, la 
chatne des Sayaets, atteint la region des plaines au-dessous 
de Krasnojarsk, et y reçoit les eaux d'un grand nombre d'af- 
fluents, notamment, h sa droite : le Tungouska supétieur ou 
Angara, qui provient du inc Bakdi, le Tungouska moyen et 
le Tungonska inferieur. Son parcours,  compris ses nom- 
breux detours, est de gg0 my riamëtres; et son bassin em- 
brasse une surface d'environ 35,000 myriamëh-es carrés, 
dans laquelle se trouve aussi comprise le gigantesqtm-bassin 
du lac de Baikal. La iile la plus meridionale, brille sur le 
lénisei, et par  l  de iatit, septentrionale, est Mitousinsk; la 
plus septentrionale, batie à son embouchure par 72 ° de la- 
titude septentrionale, est liantash. Entre ces deux points 
extrëmes on ne rencontre que trois ilLes, la'rasnojarsÀ, 
leiesk et TourouchansA', quelques chétifs villages de 
relais et de misCables huttes ; desorte que ceux qui, pour 
la chasse, la pëclte et la récolte des os et des dents de 
mammouth, longent ses rivages, sont souvent obliges de 
voyager toute une journée avant, de trouver un asile hos- 
pitai!er. 
1 "ENISEISI, un des deux grands gouvernements qui 
composent la Sibérie orientale, se subdivise en cinq al¢on- 
dissemeuts : Krasnojars , l niseiM G Atsehinsi , lfanslg 
et Mïtousinsk. Sur sou immense superficie, qui égale celle 
de l'A]lemague, de la France et de i'Angleterre réunies, on 
ne compte guerre que 230,000 habitants, consistant prin- 
cipalement, au nord, eaz Samoyedes, et au midi en Ton- 
gouses. Ce pays n'est pour la plus grande partie qu'une 
vaste plaine déserte, s'étendant jusqu'à la Léna dont le soi, 
qld participe de la nature de celui des steppes,.est.rebeile.. 
36. 



toue culture en raison du grand nombre de marais qu'on y 
rencontre et du froid glacial qui règne en tout tenlps. 
C'est seulement dans sa partie la plus méridionale, sur les 
frontières de la CI,inc, qu'on y peut cultiver des légumes et 
quelques arbres fruiliers ; le gros concombre de la CI,inc 
notamment y réussit très bien et y est d'un goùt délicieux. 
Ia pcl,e, dans les grands fleuves le Tu:, le lnisdi, le 
t;atança et l'Anabara, ainsi que dans beaucoup de lacs, 
par exemple le Pjasino, et la chasse, sont les principales 
occupations des I,abitants. Le commerce des pelleteries 
y constitue l'industrie la plus importante. Les centres 
commerciaux sont 1(rasnojarsk , leniseisk , et Tourou- 
chansk : Iéniseisk surtout est pendant quelques semaines, 
à cause de la grande f»ire qui s'y tient au mois d'aoft, le 
rendez-vous de presque tous les habitants de la grande con- 
trde des sfeppes. 
La -ille principale de ce pays est Krasnojarsk, sur le 
léniséi, avec 8,o00 habitants; les autres en comptent à 
peine 1,000 ì 2..000. C'est à l'extrénlitë nord de ce gouver- 
nement, dans la presqu'lle des Samoyèdes, que se trouve le 
cap le plus septentrional du continent asialique, appelé 
cap ord-Est ou cap Sjewerowostoi[noi, par 78  latitude 
nord. 
IElll.kl TIMOTEJEIV, turbulent chef de Kosaks, 
fut, pour cause de séditiou, obligé de fuir avec beaucoup 
de ses adhérents, devant le czar lwan Wa,iljewitst.I, ; et 
Ssemen St roganoff le décida ensuile à enlreprendre une 
expédition en Sibérie. Après plusieurs campagnes faites avec 
ses Kosacks contre les Talares, alors marres de cette con- 
trée, il réussit, en 1581, ì battre dans trois rencontres suc- 
cessives leur I, ltan, houlscl,joum, et le 26 octobre, à la 
suite d'un assaut livré au camp établi par ces hordes sur l'Ir- 
tisch, il s'empara de Ssibir, capitale de la Sibèrie, lait d'armes 
qui soumit ce pays ì la Russie. 11 entreprit plus tard encore, 
pour l'agrandissement de sa conqte, d'autres expéditions, 
dans l'une desquelles il trouva la nlort, en 1584. On lui a 
érigé un nonument a Tobolsk. 
IE/31OLOF { AleXs-I'cxuowxscn), général et diplo- 
mate russe, né vers 1778, descentl d'une des plus nobles 
tanlilles de la Russie. Entré de bonne l,eure au service, il 
prit part aux campagnes de 1805 et 107, comme aussi ì 
celles de 1512 et 1813a et commandait en avril 1815 le 
deuxième corps de l'armure russe qui, sous les ordres «le Bar- 
clay 0e Tolly, vint de la Pologne sur le Rhin. En 1817 
il fut nonuné gouverneur général des provinces lranscauca- 
siennes et général en chef de l'armée du Caucase, puis en- 
voyé en ambassade extraordinaire à la cour de Perse avec 
une suite qui réunissait la fleur de la noblesse russe. Cette 
mission avait pour but de combattre l'influence anglaise et 
de la détruire s'il était possible : elle réussit completenlent. 
De retour dans son gouvernement, le général lermoloïs'ap- 
pliqua ì y encourager les entreprises du commerce russe, 
ì y fonder des colonies allemande% et à y tavoriser l'intro- 
duction de la civilisation européenne. En 1826, avecson ar- 
nle, dont depuis 1820 ilavait porté l'effectif jusqu'à 100,000 
hommes, il repoussa les attaques des Persans, qui, sous 
Abbas llirza, avaient rompu la paix ; cb'tia, après plusieurs 
années de conlbats, les montagnards maraudeurs des Tsbets- 
chenz, et mit en fuite le traitre Amoulad-Beg; ce qui ne 
l'empécha pas, en 1827, d'encourir, au milieu de ses succès, 
la disgrace de l'empereur; et le général Paskéwitscb le 
remplaça au commandement.en chef de l'armée contre les Per- 
sans. Depuis cette époque, Iermolof vit retiré ì Moscou, 
consacrant ses loisirs ì la culture des lettres. Quoique par- 
venu à un ge déjà avancé, il jouit d'une verte vieillesse, et 
ne se gêne pas pour exprimer très-crOment son opinion 
sur les hommes et les choses, habitude de franchise qui lui 
a fait un grand nombre d'ennemis. Après la mort de l'em- 
pereur ticolas, son successeur avait appelé le général ler- 
molof au commandement de la milicede bloscou ; nais il ne le 
conserva pas longtemps. Il s'est aussi fait connaltre dans 
Un cercle assez restreint conlnle écrivain ; et on y connait 

IÉNISEISK  IF 
de I,ai, cuire aulres, la relalion de son voyage en Perse, 
celle de la campagne de 1812 et quelques livres sur l'art 
militaire ; mais aucun de ces ouvrages n'a Cé publié. Un 
des traits particuliers du caractère du général lermolof, 
c'est qu'il relie lui-reCe ses outrages avec autant d'art que 
pourraient le faireles Siroter, les Koeller, etc. Samine impo- 
sante, sa familiarilé avec le soldat, son talent supérieur pour 
l'exécution en grand des plans slralégiques, ont conservé 
sa mémoire dans le Caucase; il y passe encore pour le 
plus habile gouverneur général que ce pays ait eu jusqu'à 
préenl. 
IF genre de la tribu des taxinées, famille des confrères 
de Jussieu, de la dioecie monadelphie de Linné. Ce genre 
renferme de nombreuses espèces, pour la plupart origi- 
nattes de la Chine et du Japon : l'une d'elles, l'if commun 
(taxus baccata, L.), aujourd'hui très-répandu dans toute 
l'Europe septentrionale, est la seule qui doive nous occuper 
ici. 
L'il dommun est un arbre dont la tige, cylindrique et 
droite, atteint une hauleur de 12 mètres eniron : cette 
tige se partage iatëralement en branches extrëmement nom- 
breuses, presque verticillées, dont les ramifieations der- 
nières sont couronnées de feuilles éparses, sombres de cou- 
leur, lineaires, très-courtement pétiolées, dirigées des célés 
de la branche, et qui tendent à s'étaler dans le mënle sens; 
les fleurs sont axillaires, sessiles et dioques; la fleur maie 
forme un petit chaton globdeux, porté sur un pédon- 
cule creux et chargé d'Cailles imbriquées; la fleur fe- 
melle est appliquée sur un petit disque orbiculaire et peu 
saillant, qui se dèveloppe plus tard pour former au truit 
une enveloppe parencb)mateuse; ì cette fleur féconde 
succède une baie grosse comme une merise, don! la partie 
charnue et d'un rouge écarlate est d'une saveur douceàtre, 
tandis que le véritahle huit, rentermé dans cette cupule 
parenchymateuse, est une petite noix ovoide, d'une saeur 
amère et térébintbacée. Le bois de l'if est d'un rouge 
brun, phlS ou moins veiné : c'est le plus compact et le 
plus pesant de tous les bois d'Europe, le buis seul excepté. 
L'if croit lentement, et acquiert parfois des dimensions 
énormes ; on cite des troncs qui comptent 5,7,16 mètres de 
circonference ; sa longévité n'esl pas moins extraordinaire 
que ses dimensions, car sur des troncs de 1',10 de cir- 
eonlërence on a compté jusqu'à cent cinquante couches an- 
nuelles; on en a complA deux cent quatre-viugts sur un 
tronc de 1' 60; ce qui assignerait à quelques ifs connus 
deux/ trois mille ans d'existence. 
La tradition a attribué à l'if les propriétés les plus mal- 
faisantes : ses feuilles tuent les chevaux qui les nlangent, 
mais épargneul les herbivores ruminants (Théophraste); 
leur suc servait aux Gaulois pour empoisot, ner leurs flèches 
(Strabon)a etCat i.v o i q ue, roides lburons, en but pour se 
donner la mort (César, de Bello Gallico, liv. S'l). Les éma- 
nations de cet arbre en fleurs sont fatales aux abeilles ¥ir- 
gile, Géorç., liv. 1¥ ; Lucrèce, Plutarque)  et ses fruits 
donnent des diarrhées colliquatives morteiles (Dioscoride). 
Pline, exagérant encore les dires de ses prédéeesseurs, fait 
de l'if le symbole des plantes vénéneuses, et prétend que le 
mot grec xçt-o (poison) descend en ligne directe du nom 
latin de l'if, ta«us. Quelques auteurs modernes ont adopté 
ces assertions des anciens naturalistes : 5latlhioli, J. Bau- 
bin, Scolt et Ray, ont tous Ionguenwnt insisté sur les dan- 
gereuses propriëtes de cet arbre; et toute la lormandie 
répète encore la légende de ces deux curés qui moururent 
subitenlent pour avoir couché une nuit dans une chambre 
lambrissée eu bois dïf. 
Des expériences out démontré que ces assertions tradi- 
tionnelles, quoiqu'un peu exagérées, n'étaient pas com- 
pletement dépourvues de tondement : l'extrait aqueux et la 
poudre des feuilles et de l'écorce de l'if, adminislrés à des 
doses assez faibles, ont déterminé des vertiges, des vonlis- 
sements, etc., et méme la mort dans quelques c.as; il parait 
constant aussi que dans quelques circontances encore 



tf  tG'ACE 
r«al déterminées, l'arbre lui-mme émet des exhalaisons 
narcotiques, qui occasionneut tous les phénomènes de l'i- 
vresse t de la Iéthargie. Toutefois, le fruit de l'if parait 
tre  inee, et san pricarpe charnu ne devient laxatif 
que lorsque Pun en mang des qnantités eonsidérables. Il 
e faut pas perdre fie vue, néanmoMs, que toutes es expé- 
fientes sur lesquee c assenions e fondent ont 
fait aee l'il qui croit dans la France septentrionale; et 
il se pourrait fo bien que toutes c propriétés augmen- 
taient singulièrement d'intemité soin l'iuence d'un 
at plus doux et d'un sol moins rebelle. 
B»-Lvw. 
IFFLAXD (AçUS-GuLLU), lèbre dans l'histoire 
du théMre allemand comme acteur, oemme poete dramatique 
et comme dramatue, naquit le t9 avril I759, à Hanovre, 
et fut d'abord destin à l'étude de la tbéologie. Son aersion 
pour cetM scienoe et un goOt né pour l'art thetrM le d&i- 
dèrent, à I'e de dix-huit ans, à s'enfuir à Gotha, où il s'en- 
gea dans la troupe d'EckhoL Il mout en t81i, à rlin, 
oU  éit directeur des thétres tuyaux. Comme acteur, 
lfflan,I n'excellait pas moins dans la charge et le ut oemique 
que dans I r01es pathétiques. Comme auteur dramatique, 
il dlle s la peinture des mœurs. Ses pièces, toutes d'une 
facture large, d'une tendance esoentietlement morale, plein 
de sentiment et lié de la maniere la plus intime à la ie 
de famille, témoignent d'une entente parfaiM de 1 scène et 
d'une rare connaissance du cœur humain. Attrayantes par 
la vérioE d caractèr et le naturel, elles sont enoere au- 
jouM'hui la meilleure pierre de touche pour apprécier 
véritabl vocations thëAtrales, bien que par leur oenti- 
menlme de famille ell aient été plus nuisibles qu'utiles 
aux pro de la littémture dramatique. ll qui se sont 
anlenues au petoire sont : Les Chseurs, L'Obli9a- 
tio»l du service, Les Avocat, La Pi[le et Le Cdlibtre. 
IGNXCE Saint), évque d'tihe, vers l'an 69 de 
notre ère, pas pour avoir été le disciple des Apôtres 
int Jean ou saint Pierre. Il reçut le surnom de Thophore. 
Sucoesseur de saint Evode, qui avMt rempla saint Pierre 
ì Antioche, il gou erna paternellement son Église, et soutint 
aec consnce la divMite de Jesns-Christ et la suprématie 
des évèques s 1 prêtres et I diacre. Quand les cé- 
tiens oe virent en butte ì uue troisième persecution, sous 
Trajan, Ignace fut conduit d'Antioche à Borne pour ëtre 
livr aux hèles ; il vit arriver son heure suprêtne en bénis- 
sant le Seieur, et expira oeurageusement, le 10 decem- 
bre 107 ou 116. Ce pére a laissé sept ëpitr adressé ì 
saint Polycae, aux Ephesens, aux MagnesJeos, aux Tral- 
liens, aux Smyrnëens, aux Philadelphiens et aux Boma : 
dans cette deière, fite qud  éit con,luit à Borne, il 
'oppose aux efforts qu'on pourra tenter pour l'arracher ì 
la mort : « Flaz plutôt I b, dit-il, afin qu'elles de- 
viennent mon tombeau, qu'ell ne laissent rien de mon 
corps, de peur qu'aprés ma mo, je ne sois  charge ì 
quelqu'un... Je les flatterai Roi-même, pour qu'elles me de- 
notent plus vite, de peur qu'elles ne craignent de me u- 
cher', comme cela est arrivé ì d'autt ; et si elles ne veulent 
pa, jo les y forcerai. Excuz-moi : je sais cequi m't utile. 
IGXACE (Saint), fils de l'empffeur Michel Curolate, 
patriarche de nsntinople, élu en 86, fut proscrit en 857 
pour s'être coureusement élevé contre les débordements 
de gardas, frère de l'impératdce Théodora. Bemplacé par 
le célëbre P h o t tu s, qui lui fit subir I plus atroces trai- 
tement% sans pouvoir réussir ì le faire renoncer à son titre, 
saint Ignaoe fut rbli sur n si6ge en 67, r l'empereur 
Ba»ile. et nmurut à quatre-ngts ans, en 877. 
IGNACE DE LOYOLA. En 191, la damedu chtu 
de Loyola, en Biscaye, senUnt, pour la onfiëme fois, 
douleurs de l'enhntement, se fit der dans une table, en 
mémoire de l'accouchement de la Vierge, et la e mit au 
moe un fils, qu'on appela Inigo (Ignace). D'abord page de 
Fd V, ensuite nid/taire, le jeune Loyola défendait, 
en 1521, Pampelune, assiégée par 1 Français, lorsqu'un 

DE LOYOLA 285 
éclat de pierre le frappa à la jambe gauche, et qu'un brin- 
let de canon en mme temps lui cassa la jambe droite. Il 
se fit transporter au cbAteau de son père. Les chirurgiens 
déclarèrent que l'opération avait été mal faite, qu'il y avait 
des os hors de leur place, et que, pour les remettre en leur 
position naturelle, il fallait de nouveau casser la jambe droite: 
Inigo la leur abandonna sur-le-champ. Cette jambe, mal 
soignée la première lois, ne le fut pas mieux la seconde. 
Un osavançait toujours au-dessous du genou, et empchait 
le patient de porter la botte bien tirée. _M par un senti- 
ment de vanité, il eut le courage de se le faire couper jus- 
qu'au vit, sans jeter le moindre cri, sans mëme changer de 
visage. Ce ne fut pas le seul tourment qu'il endura pour n'a- 
voir rien de difforme : sa cuisse droite s'etant raccourcie 
depuis sa blessure, il consentit  se [aire tirer violemment 
la jambe avec une machine de fer ; mais quelques efforts 
qu'on fit, on ne put jamais l'etendre autant que l'autre, et 
Ignace resta boiteux. 
Pendant sa convalescence, il sentit le besoin de s'occu- 
per, et demamla des romans de chevalerie, dont il faisait ses 
delices; mais de tels lires n'existaient pas dans la biblio- 
thèque du chteau : on lui apporta La Fleur des Saints. 
Ces merveilleuses histoires frappèrent tellement son imag4- 
nation, quïl forma le dessein de se consacrer ì Dieu et à 
sa sainte mère. Plein de cette idée, il passa, selon les lois de 
l'ancienne chevalerie, une nuit entière sous les armes de- 
vant l'autel de Marie, et suspendit son épée et son poignard 
à un pilier voisin. Un Maure qui avait osé soutenir en sa 
présence qu'elle avait cessé d'ètre vierge en devenant mère 
faillit expirer sous les coups du nouveau converti. Il se mit 
en route pour Manrèze, petite ville ohscure alors, mais qu'il 
a rendue célèbre par sa pénitence. 11 alla s'y loger à l'hO- 
pifal, et commença ses mortilications par jeOner tous les 
jours au pain et ì l'eau, excepté le dimanche, ni il mangeait 
un peu d'herbes cuites, dans lesquelles il mêlait de la cen- 
dre ; il portait sous sa robe de toile un apte cilice, se donnait 
trois fois par jour la discipline, couchait sur la terre et 
veillait presque toute la nuit. On le voy«it mendier son pain 
de porte en porte, poursuivi par les huées et les pierre¢ ]es 
enfants. Cependant, son nom, sa naissance, asant été 
connus des habitants, il prit la fuite, et chercha une re- 
traite au pied d'une montagne,  un quart de lieue de la ville, 
dans une caverne entourée de broussailles, et qui ne rece- 
vait qu'un peu de lumière par une fente de rocher. Là, qua- 
tre ou cinq fois par jour, il se mart)-risait avec une chaine 
de fer, et, ì l'exemlde de saint JerOme, il se frappait 
ment la poitrine avec un caiIMu. Quelques personues le 
trouvëtent évanoui à l'entrée de sa grotte, et le ramenèrent 
malwé lui i l'h6pital. Il y tomba dans une profonde mélan- 
colle. Alors ce ne furent plus, assurent les historiens de sa vie, 
qu'extases et que visions. Dieu lui expliqua ses principaux 
mystëres, et lui révéla mme, dit-on, dans un ravissement 
qui dura huit jours, le plan et les progrès futurs de la com- 
pagnie qu'il devait fonder. Enfin, ce fut pendant ce ex- 
tases qu'il composa son livre des Exercices stiritueLs, qtfi 
devait lui attirer depuis tant de persécutions. 
En t52-, ilfit un voyage b la Terre Sainte. De retour en 
Europe, à l'Age de trente-trois ans, il commença ses études 
sous Jér6me Ardebale, professeur de grammaire à Barce- 
lune. Au bout de deux ans, il résolut d'aller faire un cours 
de philosopbie et de théologie ì l'université d'Alcala. Quel- 
ques disciples qu'il avait formés ì Barcelone voulurent le 
suivre; mais il n'osa pas tous les emmener, de peur que 
l'inquisition de Tolède n'en conçOt quelque ombrage : il 
n'en prit d'abord que trois, Caliste, Artiaga et Cazevès ; 
l'h6pital d'AIcala lui en fournit un quatrième : c'était un 
jeune Français nommé Jean, qui, ayant été blessé dans une 
querelle particulière, en passant par cette ville, à la suite 
du vice-roi de Navarre, dont il était page, avait été porté 
à l'hpital pour y tre guéta de ses blessures. Le maitre et 
les disciples étaient vètns d'une longue jaquette de serge 
grise, avec un bonnet de mëme couleur ; ils se faisaient 



loger pst charité et vivaient d'aum6nes. Un iour, avec ses 
quatre disciples, il se mit A catéchiser les enfants, à faire 
des exhorlatinns aux écollers débauchés et à enseigner la 
doctrine chrétienne au bas peuple. Cette entreprise excita 
de.grands murmures; il fut mis en prison, puis re|'àché; 
enfin, une sentence publique, rendue en juin 1527, lui en- 
joignit, ainsi qu'à ses comparons, de prendre l'habit ordi- 
naire des écoliers et de s'abstenir d'expliquer les dograes de 
la religion, jusqu'/l ce qu'il eut étudié quatre ans en théo- 
In#e, et cela sous peine d'excommunication et de bannis- 
semeur. ]gnace, réduit à la simple condition d'écolier, se 
retira à Salamanque, et y recommença ses prédications. 
Arrlé de nouveau, avec ses disciples, il resta vin-deux 
jours en prison, à la suite desquels, ne les trouvant cou- 
pablesd'an¢un déréglement de mœurs ni d'arienne hêrésie, 
on leur permit de faire le catéchisme, avec défense toute- 
fois d'y toucher le point délicat de la distinction des pécbés 
mortels et véniels, jusqu'à cequ'ils eussant étudié quatre ans 
en théolo#e. 
Fatië de tant de contradictions, Ignace résolut de quitter 
son ingrate patrie et ,le passer en France : ses compagnons 
refusèrent de le suivre. Parti seul, à pied, chassant devant 
lui un ne chargé- de ses livres et de ses écrits, il arriva 
à Paris, en février 1528, recommença ses humanités au 
collége de Montaigu, fit sa philosophie à celui de Sain{e- 
Barbe et sa théologie chez les Jacobins. Là il parvint 
à s'attacher six nouveaux disciples : Pierre Lefëvre, pau- 
vre prêtre savoyard; F r a n ç o i s-X a v i e r, gentilhomme na- 
varrais, qui professait la philosophie au colle.ge de Beauvais ; 
lePortugais Simon Rodriguezd'.evedo, et trois tspanols : 
Jacques Lainez, Alphonse Salmeron et Nicolas AItouse, sur- 
nommé Bohadilla, du lieu de sa naissance. De peur que leur 
zèlene vint àse refroidir, il les mena dans l'église de Mont- 
martre, le jour de l'Assomption (153). Pierre Lefevreleur dit 
la messe et les fitcommunier dausune chapelle souterraine; 
ensuite, ils firenttons vœu d'entreprenMe, dans untemp« pres- 
crit le voyage de Jersalem,afin de travailler à la conversion 
desinfidèles, et, dans le cas où ils ne pourraient y demeurer, 
d'aller àRome se jeter aux pieds du souverain pontife, pour 
le supplier de disposer de leurs personnes. Plus tard, trois 
autres disciples : Claude Le Gay, Savoyard, Jean Codure 
et Pasquier Brouet, Français, se joignirent aux premiers, et 
firent à ontmartre le même vœu le jour où leurs frères 
le renouvelaient. Ces dix hommes, fondateurs d'une so- 
¢iété devenue si celèhre, se rendirent à Rome vers la Phques 
de 1538. Ils tinrent uneassemblée dans laquelle ils jetèrent 
les premiers fondement de leur édifice mystique. Ignace 
prononça un discours avant pour but de prouver qu'ils ne 
feraieut jamais rien de and si leur troupe ne devenait un 
ordre capable de se multiplier en tous lieux et de subsis- 
ter jusqu'à la findes siecles, et que, combattant sous la ban- 
nière de Jé'us-Christ, ils n'avaient pas de meilleur nom à 
prendre que celui de ce divin R«dempteur. 
Après quelques difficultés, l'ordre fondé par Ignace fut 
approuvé sousle nom de Compagr, io de Jsus. Ignaceré-- 
digea la règledeson inditut, et en 1541 fui proclamé général 
des Jésttites. Il vit son ordre s'étendre rapidement, et 
ì sa mort, arrivée ì Rome, le 31 juillet 1556, il était déjà 
répaudn dans tout l'univers. Son corps fut exposé : on en- 
tendit répéter dans toute la ville : Le saint est norl. Le 
peuple courut en fouie pour le voir; les uns lui baisaient les 
mains et les pieds, les autres y appliquaient leurs chapelets 
et leurs.rosaires; on voulait emporter des lambeaux de ses 
vtements, mais ses disciples s'y opposèrent. Il fut ense- 
veli avec de grands honneurs, dans l'église dela maison pro- 
fesse, Béatifié en 1609 par Paul V, il fut canonisé par 
GroireXV, en 162. Eug. G. v Mo,¢w. 
IGIE genre de plantes de la famille des dioscoréa-- 
O.es, renfermant une cinquantaine d'espbees, ayant pour 
caradèrea'communs': Fleurs dioiques; calice corolloide, à 
six divisions, épine; etamines insérées ì la base du ca 
lice;troi, styles simples; capsules triloculaires, à graice 

IGNACE DE LOYOLA • . ......... 
aplaties, ailCs. La plupart des iames sont des plantes ri 
vaces, h tige volubile, erinaires des contrées intertropi- 
cales. " 
Quelqne especes de ce genre ont une trs-granOe impor- 
tance, à cause de leurs volumineux rhizomes, fournissant 
une matière alimentaire comparable jusqu'à un certain 
point à lapomme deterre. Sousce rapport il faut placer au 
premierrang l'igname aile (dloscorca fiat.a, L.), cultivée 
dans l'lnde et enAfrique. Son rhizome,.ordinairement du 
volume de nos betteraves, noiratre à l'extérieur, blanc ou 
rougeâtre à l'lutCieur, constitue un aliment sain, d'une sa- 
veur assez douce lorsque son acreté primitive a ét enlevée 
par la cuisson. 
Q«elqnes agronomes s'occupent activement de propager 
en Francela culture de l'ignamedu Japon ( dioscorea da- 
ltonien, Thuub.), plante dont la rnsticité s'accommode/i notre 
climat. Sa racine est volumineuse, riche en matiëre nutri- 
tive, déjà mangeable crue, d'une cuisson facile, soit dans 
l'eut b soit sous la cendre, et sans autre saveur que celle de 
la fécule. Elle pourrait peut-être suppléer la pomme de 
terre. 
IGXITIOX ( du latin igni$, feu), état d'un corps com- 
bustible saturé de calorique, an point de produire de la 
lumi.re et d'tre visible dans l'obscurité. Un mëme corps 
est susceptible d'éprouver divers degrés d'ignition : le let, 
par exemple, qu'on expose h un feu de forge est d'abord 
d'un rouge brun ; il prend ensuite la couleur dite rouge-ce- 
rise ; enlin, il passe au rouçe-blanc, qu'il conserve inva- 
riablement, quelque grande que soit la violence du feu. Il 
est très-probable, s'il n'est pa_ mme certain, que la tem- 
pérature qui produit un certain degré d'i'tion est cons- 
tante et invariahle. 
IGN|VOIE( de içnis, feu, et vorare, dévorer). Cette 
expression manque de justesse, car il n'est personne qui 
puisse dévorer du feu : toutefois, on désigne par ces mots 
des baladins, des charlatans, qui, pour amuser le puhlic et 
lever un imp6t sur sa credul[té, introdui.»ent réeilement des 
matières enflammées dans leur bouche sans en éprouver 
aucune incommodité : la réussite de ces tours de force dépend 
de l'adresse de celui qui les excute, de la constitution de sa 
bouche, et bien souvent aussi des exercices qu'il a faits pour 
diminuer la sensibilité de sa langue, de son palais, etc. 
On voit assez souvent sur les places publiques des hommes 
qui introduisant un tampon d'etoupes dans leur bouche, en 
retirent des filaments tout enflammés : il n'y a rien la de 
merveilleux : les filaments embrasés ont été placés adroi- 
tement dans l'intérieur du tampon, de sorte qu'ils ne pour- 
raient en aucune façon se mettre en contact avec « parois 
de la bouche. Il se rencontre des personnes qm introdui- 
sent la flamme d'une chandelle dans leur bouche, et l'en 
retirent tout allumée. Il n'y a là rien d'étonnant, pourvu 
que la bouche de ces personnes soit recouverte <le beaucoup 
de salive, et qu'elles aient soin de retirer la chandelleavant 
que l'intérieur de la bouche soit devenu sec. 
On lit dans le Journal des Savants de l'année 1677 
qu'un certain Richardon, Anglais, dit nangcur de feu, 
mettait des charbons ardents dans sa bouche, et qu'on les 
y voyait dans un état complet d'ignition pendant assez long- 
temps. Richardson faisait cuire un morceau de chair dans 
un charbon allumé placé sur sa langue; il avalait du verre 
fondu. Dodatt, de l'Académie des Sciences, donna dans le 
mëme journal une assez bonne explication des tours de Ri- 
chardson. D'abord, il n'est pas très-rare de voir des "per- 
sonnes qui avalent des oublies toutes brOlantes, il ya aussi 
des gens qui, grace ì l'abondance de leur salivë, peuvent 
introduire un charbon allumé dans leur bouche et le 
mcher sans se brùler, attendu que la salive ételnt promp- 
lement le charbon, du moins à l'extérieur, de sorte 
qu'il n'est brOlant que vers son centre. On peu[ ajouter 
à ces raisons qu'un charbon ardent éteint est un mauvais 
conducteur du calorique : chacun a pu voir qu'on peut 
saisir et teuirpar un bout un charbon dont le bout oppos6 



est iucaudescent. Quant au morceau de chair cuit «er la 
langue du .baladin anglais, rien que de très-simple : la chair 
enveloppait le charbon qui était destinéà la cuire. Il n'est 
pas aussi facile de rendre raison du tour de force de la 
dégustation du verre fondu : Dodart suppose qu'en accu- 
mulant dans la bouche une grande quantité de salive le 
tour est possible; il serait bien plus simple, à notre avis, 
d'y introduire de l'eau, et de l'y retenir par un moyen quel- 
conque. 
On a également vu des hommes qui avalaient du plomb 
fondu, de l'huile bouillante ; mais il est probable qu'ils 
avalent des substances qui ressemblent beaucoup à celles-ci, 
et entrent en fusion et en ébullition à une température 
moindre qu'elles ; l'habitude de la chaleur permet à de soi- 
disant i n c o m b u s t i b I e s de su pporter uue chaleur souvent 
supérieure à celle de 100 et 120 degrés. TExssiuae. 
1G.KOMIIE  synonyme d'infamie et de déshon- 
neur. L'origine de ce mot remonte à la constitution même 
des Romains; ils appelaient ignominie la note infàme dont 
ils fletrissnient les citoyens. Diderot définissait l'ignominie 
« degradation du caractère public dun homme; » mais notre 
législation en établissant des peines in.faon an tes n'a pas 
ratifié cette dislinction. L'ignominie ne s'entend plus guère 
dans notre langue que d'une dégradation morale. 
IGNOBACE. Ce mot, quant au sens, appartient à 
tous les idiomes, et il n'est pas de ceux qui se perdront : ce 
qu'il exprime est trop inhérent à la nature humaine. Toute- 
fois, si l'ignorance où l'homme est plongé, et qui le prsse 
de toutes parts comme une atmosphère téw-breuse, ne 
cesse de le ramener au sentiment de sa faiblesse et de sa 
misëre, il , trouve aussi un indice certain de sa supériorité 
sur les ètres qui l'environnent : car, trs-differente de celle 
de la brute, son ignorance n'et pas une simple privation, 
un état purement néatif; il sait qu'il ignore, et il ue peut 
le savoir que par une rte de vue obscure de la véri[e qui 
se dérobe a lui. Infiuies dans leur source, finies dans leur 
développement et leur exercice possible, ses ïa c u I t é s ren- 
contrent partout des bornes qu'elles ne sauraient franchir. 
ltlais ces bornes mêmes l'instruisent de ce qu'il est, de ce 
que rot ou tard il doit être, puisqu'il les sent et aspire au 
delà. Perpétuellement actif, son esprit se meut dans nn 
milieu vague entre la science complète et le n,.ant de la 
ciance, milieu que ses efforts tendent sans cesse à élargir. 
Il ne sonnait rien parlaitement, il n'ignore rien entiè- 
fument. Etonnant de andeur, effra,ant de pull|esse, 
selon l'apect sous lequel on le considère, il ressemble à 
un monde naissant, qui, peu à peu se dilatant au sein de 
l'espace, reçoit des mondes voisins un nombre toujours 
croissent de raons directs ou réfléchis, restant néanmoins 
comme englouti dans l'immensité de l'univers dont il fait 
partie, et ou il disparait tel qu'un atome imperceptible. 
Si loin que s'étende notre pensée, toujours elle découvre 
un horizon nouveau, et de plus elle ne pénètre au fond de 
rien : glissant sur les surfaces, l'intime et secrète nature 
des choses et toutes les essences lui échappent. llême ce 
qu'elle voit, elle ne le voit pas tel qu'il est en soi. mais 
suivant le relations qui subsistent entre elle et les objets 
de son aperception. Ils lui offrent mélangé avec ce qui 
vient d'eux une espèce de reflet d'elle-même, et toute con- 
naissance a deux éléments primitifs et inséparables, l'être 
connu et l'ëtre connaissant, et par conséquent elle ne re- 
présente rigoureusement que leur rapport. Cependant, ì 
raison du lien nécessaire qui l'unit à l'Ètre des ètres, à la 
cause éternelle et universelle, l'homme a une tendance in- 
vincible à tout comprendre, à tout expliquer, parce que 
toute explication, toute compréhension, est en eflet renfer- 
mée dans cette cause suprëme dont la lumière indéfectible 
l'Claire intérieurement et lui révèle, dans les limites que 
sa nature comporte, l'immuable région des idées. Il cherche 
donc» il cherche forcément, opiniRrement, et cette ardente 
recherche n'est qu'nne aspiration perpétuelle vers Dieu, son 
terme véritable et le lieu de son repos. Et comme fl ne 

Ifi[ORANCE -.87 
aurait, durant con existence pr6senle, parvenir à ce lerme 
deson Cre, ala vision parfaite du vrai, dont les rayons 
n'arrivent  lui qu'à travers le voile des choses sensibles et 
sous les conditions de son propre organisme, ouvent il se 
rebute, perd courage, etavec une angoisse profonde déses- 
père momentanément de ce qui neanmoins au fond de sa 
nature est l'objet à jamais vivant d'une impérissable espé- 
rance. 12'est alors, c'est en ces heures de fatigue pante 
et stCte, qu'on entend ces plaintes lamentables : « Je me 
suis proposé en mon me de rechercher et d'examiner 
avec sagesse leur ce qui se passe sous le soleil. C'est la 
pire des occupations que Dieu ait données aux enfanls des 
hommes pour s'y exercer. J'ai vu tout ce qui ce fait sous le 
soleil, et tout est vanité et affliction d'eçprit. J'ai dit en mon 
ctenr : Voilà que je suis devenu grand, et j'ai surpassé en 
sagesse tous ceux qui ont été avant moi, et mon esprit a 
contemplé beaucoup de choses attenlivemenl, et j'ai 
beaucoup appris. Je me suis appliqué à connailre la pru- 
dence et la dnctrine, les erreurs et la relie, et j'ai reconnu 
qu'en cela encore il n'y avait que travail, a[fliction d'esprit, 
et qu'accroitre la science, c'est accroitre le labeur. ,, (Eccles., 
1, 13 et suiv.) 
[ous apercevons des-effets et l'enchainement de ces 
effets; les causes nous sont à jamais cashCs. Que de 
sstèmes, inventés pour satisfaire une oricsité également 
insatiable et vaine,après avoir séduit la raison quelques 
courts instants, ont ensuite disparu sans retour! Chaque 
siècle en voit naitre et mourir plusieurs. Un impénétrable 
msstère enveloppe toutes les origines, celle d'nne mousse 
comme celle d'une planète, et c'eut pourquoi Montaigne 
disait si sensCent : « Oh le mol et doux chevet et sain, 
que l'ignorance et l'incuriosit,, à reposer une tète bien 
faite. » Ainsi donc, considérée sous des points de vue di- 
vers, notre inorance, toujours relalive, toujours accom- 
pagnée de l'in;tinclif besoin de reconnaitre, révèle une 
puissance indéfinie de progrès dans la connaissance; et 
notre science, toujours limit,«e, toujours inséparable du 
sentiment de sa propre imperfection, n'est, en vertu même 
de ce qu'elle a de reel, qu'une manifeqation plus vive de 
l'Cendue de notre ignorance. Ce dernier fait surtout avait 
frappé Pascal, plus enclin à abaisser l'homme qu'à le relever, 
et dont le génie amer se plaisait aux contemplations dou- 
loureuses. « Les sciences ont, dit-il, deux extrémitd qui 
se touchent : la première est la pure ignorance naturelle, 
oh se trouvent tous le- hommes en naissant. L'autre extré- 
mité est celle où arrixent les grandes grues, qui, ayant 
parcouru tout ce que le hommes peuvent voir, trouvent 
qu'ils ne savent ien et se rencontrent dans cette méme 
ignorance d'où ils étaient partis. Mais c'est une ignorance 
savante, qui se sonnait. Ceux qui sont sortis ,le l'ignorance 
naturelle et n'ont pu arriver à l'aulre ont quelque te"nture 
de celle science suffisante, et font les entendus. Ceux-là 
troublent le monde, et jugent plus mal de tout que les autres. 
Le peuple et les habiles composent pour l'ordinaire le 
train du monde. Les autres le méprisent et en sont 
prisC. ,, 
On ne doit pas oendure de cette remarque, quelque 
incontestable qu'elle soit d'ailleurs, la nullité de la science, 
mais sa disproportion avec le vrai, qui est son terme, ou 
avec 1"objet absolu et universel de la connaissance; et 
cette disproportion plus complétement sentie, plus claire- 
ment aperçue, est cetle i9norance savante, 9u se con- 
unit, suivant l'heureuse expression de Pascal. !1 l'oppose, 
avec grande raison, à la pure ignorance naturelle, oiz se 
trouvent tous les homntes en naissant. Celle-ci résulte 
directement de la loi générale et sans exception qui règle le 
développement des tres créés. Chacun d'eux a en soi, 
dès le premier moment de son existence, le germe de di- 
verses facultés, dont l'ensemble forme, sous certaines con- 
ditions organiques, sa nat».re particuliëre, facullds Intentes 
à l'origine, et qui se manifestent successivement à mesure 
que se doeveloppent les organe» dont elles dt'pendent, non 



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dans leur essence, mais quant à leur exercice. Il y a seu- 
lement cette différence entre l'homme et les btres inférieurs 
ì lui, que pour ceux-ci le progrès, purement individuel et 
renfermé en des bornes fixes, ne s'étend pas jusqu'à l'es- 
pèce, immuablement stationnaire, tandis que le genre hu- 
main se perfectionne comme l'individu par un dévelop- 
pement continu sans aucune limite assiguable : sublime 
privilège! qui ouwe ì l'homme une carrière aussi vaste 
que le temps mme, et lui présente ncore au-delà le but 
dernier qu'il doit atteindre. 
E puisque l'humanité, quoi qu'il en soit de ses fractions 
appelées faces, nations, peuples, est, dans on unité totale, 
évidemment regie par une loi de progrès, il s'ensuit que 
ses commeuccments ont da ressembler à ceux de l'bomue 
méme; qu'efie a dU passer par l'enfance, l'adolescence, la 
jeunesse, avant d'arriver à i'/ge viril, si pour elle i",lge 
viril est vee.u. Transposez cet ordre de croissance, imaginez 
des alternatives de décadence et d'avancement, ou, mieux 
encore, placez la plus haute perfection dans l'antiquité la 
plus reculée, toutes les lois naturelles étant interverties, 
l'esprit ne sait plus à quoi se prendre au sein du chaos 
qu'engendre une semblable hypothèse. Vi re, c'est obser- 
ver ; ieillir, c'est apprendre. Nous ne croyons donc point 
à une science primitive perdue, aux incomprébensibles 
vertes d'une philosophie selon laquelle, à des époqnes an- 
térieures h Phistoire, c'est-à-dire ignorées de quiconque ne 
possède que les moyens ordinaires d'investigation, l'homme, 
incomparablemcnt superieur à ce qu'il fut depuis, aurait, par 
son union plus intime avec l'univers, pénétré les m)stères de 
la vie ,connu les choses et teurs esseuces, à l'aide d'une claire 
intuition, et disposé en dominateur des torces génrales de la 
nature soumises à sa puissante volonté. Ces idees et d'autres 
analogues ont eu cours smtout en Allemagne, o/ des écri- 
vains d'un rare mettre, mais d'une imagination peu réglée, 
renouvelant les opinions les plus hizarres de quelques scctes 
orientales, et les exagerant mème sur plusieurs points, 
semblent avoir pris à tache d'etonner la raison au lieu de 
l'Cairet. Aucun fait certain, aucun monument, aucune 
preuve de quelque valeur n'appuie de pareilles conjectures. 
Iireste à la véritédans l'In, le, en Perse, en ClJahlée, en 
Ëgypte, de splendides vestiges d'une civilisation dont 
rigine se perd dans la nit des ges; mais, de quelque 
c6té qu'on l'envisage, elle est loin de justifier les spécula- 
tions qu'un moderne m)sticisme y a rattaches. Les im- 
menses travaux exécutés à ces époques iointaines, et d'au- 
tant plus grossiers quïls sont plus anciens, attestent moins 
une science profun, le qu'un grand depIoiement de forces 
physiques, que le despotisme seul, un de»potisme gigan- 
tesque, a pu faire concourir à un but determiné, soit de 
caprice individuel, sot d'utilité gen:.rale. On y reconnait 
les vigoureux, mais informes essais de l'mi qu'un génie 
plus cultivé perfectionne depuis. Il en est ainsi de la poésie 
et de la philosophie toute poétique, qui, près du berceau 
du genre humain, se confondait avec la reli#on. On ne 
nous donnera pas apparemment les doctdnes chinoises, in- 
diennes, égyptiennes, non plus que les vastes épopées pos- 
tédeures aux Vedas, quelque admirables d'ailleurs qu'elles 
puissent être à certains égards, comme le prototype de 
toute vérité et de toute beauté. Le privilége des habitants 
primitifs de la terre fut d'ouvrir à leurs descendants les 
voiesoù ceux-ci ont marché. Tel est l'ordre invariable du 
monde. Toutes les inventions nécessaires ont dU appartenir 
aux premiers temps et se produire en quelqne manière 
l'une et l'autre, selon les besoins progtessifs de la vie im- 
maine; car tout besoin senti détermine l'effort destiné à le 
satisfaire, et c'est ainsi q,e l'humanité avance perpétuelle- 
ment vers sa fin. La plus importante des sciences, la 
science sociale, celle des droits et des devoirs de l'homme, 
avait-elle atteint dès l'origine son plus haut degré da per- 
feclionnement? E ne la voyons-nous pas au contraire se 
développer de siècle en sièclè par une sorte de travail na- 
turel et ¢ontinu, plus que jamais sensible de .o leurs? 

IGNORANCI 
Aussi les phiiosophes que nous combattons montrent-ils 
en général un dédain superbe pour les faits bien établis, 
pour les faits qui ne comptent que trois ou quatre mille ans 
d'antiquité : l'histoire les gne. Si parmi ces faits il en est 
quelques-uns qui les frappent, ce sont précisément ceux 
qui, au jugement des ara'res hommes, indiquent la faiblesse 
de l'enfance et son ignorance native, mère des croyances 
qui n'ont de rendement que dans l'imagination. Ainsi, on 
a cru  la magie, aux secrètes communications avec des 
esprits bons et mauvais, doués d'une puissance au-dessus 
de la n6tre, à i'efficacité de certaines paroles, de certaines 
form«les, à la vertn évocatrice de certaines plantes, de cer- 
tains mtaux, à tout uu ordre fantastique d'enchantements 
et de merveilles : à leurs yeux, ce sont là autant de preuves 
d'une science supérieure aujourd'hui perdue, des traces 
presque effacées du magnifique pouvoir conféré à l'homme 
originairement, et dont l'abus provoque le deluge, époque 
d'abaissement pour l'humanité, qui, déchue de cet état de 
grandeur, n'en a gardé qu'un souvenir vague, une tradition 
mystérieuse. lalheureusement pour ces philosophes, on ne 
sait rien du monde antédiluvien. Lïdée qu'ils s'en forment 
repose uniquement sur des conjectures arbitraires destinées 
à étayer une tbéorie qui ne l'est pas moins. Il est vrai 
cependant que dës la plus haute antiquité connue de nous, 
on retrouve çà et là de clairs indices d'une admiration 
traditionnelle pour les hommes et les temps anterienrs. 
Quelque chose s'était passé dans le secret des premières 
origines qui avait virement frappé la race humaine nais- 
sanie, et encore aujourd'hui nous concevons que des 
esprits siuulièrement distingues s'étonnent d'un certain 
caractère de grandeur attaché aux œuvres primitives. En 
tout, ce sont les commencements qui, avec raison, sur- 
prennent davantage. Or, les plus importantes inventions, 
celles qui, mères de toutes les autres, séparèrent en quel- 
qne façon la vie humaine de la vie de la brute, appartien- 
nent ax plus anciens /ges. Métiers, arts, écriture, calcul, 
tontes ces tuereiileuses productions du génie de l'homme 
remouteot à des temps qui précèdent les époques histori- 
ques, et se distinguent, dans leur ensemble et leurs relations 
réciproques, par je ne sais quoi de spontané et par une 
epèce de profonde synthèse, remarquable surtout dans la 
structure des langues primordiales. 
lais ces faits s'expliquent aisément sans qu'il soit besoin 
de recourir ",i des hypothëses opposées aux lois générales 
ëtres : ils out leur raison dans notre nature mme. Comme 
l'animal apporte en naissant les instincts spéciaux indispen- 
sables à sa conservation, l'flemme aussi unit avec les tacul- 
tés constitutives de son espèce et l'organisation nécessaire à 
leur exercice et à leur développement : et puisqu'il e-t un, 
ces facultés, IlCs entre elles par de mutueis rapports, se 
supposant, s'aidant, se modifiant l'une l'autre, sont elles- 
mmes ramenées à l'unitC et concourent, suivant un ordre 
de subordination r¢'gdier, à l'accomplissement des fon- 
tions naturelles et spëciales de l'Atre humain. DonCs d'une 
puissance native de spontanéité, elles ne peuvent pas ne 
point agir, ne point reconnaitre leurs relations avec le 
monde externe, ne point appliquer cette connaissance 
à l'entretien, à i'amelioration de la vie in&vidueile et de 
la vie sociale, et avant que l'analyse, qui vient plus tard, 
parce qu'elle suit Pexpérience et la flexion, ne ]oigne a 
l'intuition instinctive et directe un procédé nouveau, la 
liaison qui subsiste entre elles imprime nécessairement une 
forme s)nthétique à leur action. A mesure que l'univers 
révélait à eux par le pouvoir intime qu'ils possédaient de 
pénétrer en lui et de réagir sur lui, à mesure que les ri- 
chesses cachées de leur ètre propre se manifestaient par 
l'accroissement de la connaissance, le développement de la 
pensée et l'application de leurs forces internes aux choses 
extérieures; à mesure, en un mot, que leur magnifique 
nature se dévoilait à leurs regards, les premiers Immmes 
durent contempler avec une vive admiration cet ensemble 
de merveilles, et transmettre à leurs descendants cette ad- 



iGNORANCE 
miration originaire ; et c'est le mSme sentiment qui, chez 
tous les peuples peu avancés dans la culture intellectuelle, 
i fait diviniser les premiers inventeurs, les premiers artistes, 
les premiers poëtes. Mais rien en cela qui contrarie la loi 
univirselli du procès, et si la science primitive apparalt 
dans le lointain des ges sous de colossales proportions, 
on ne doit pas, trompé par cette illusion d'optique, lui 
attribuer sur la science plus vaste, plus exacte, plus variée, 
des siècles postériiurs, une supériorité qu'elle n'a jamais 
eue ni pu avoir. Major e lon9inquo reverentia. Les 
anciens agrandissaient tout parce qu'en tout ils voyaient, 
ils sentaient la cause suprême, Reconnaissant dans l'homme 
une puissance indéfinie, mystérieuse, ils élevaient un autel 
à l'entrée de chaque route nouvelle que ini ouvrait son 
génie, comme ils plaçaient un dieu à la source de chaque 
fleuve. 
En résumé, la supposition qu'il a jadis existé une science 
supérieure à celle que l'homme a depuis péniblement re- 
construite est une hypothèse arbitraire et directement op- 
posée à ce que l'on counalt des lois générales du monde. 
Elle contrarie les faits constatés pour toutes les époques 
dont il reste des monuments, et, en tant qu'elle se fie à la 
croyance de communications possibles avec des esprits 
bons et mauvais, à l'aide desquels on peut opérer ce qui 
ne pourrait l'ètre naturellement, elle favorise une supersti- 
tion également vaine et dangereuse. La magie, la sorcelle- 
rie, les arts divinatoires et toutes les aberrations sembla- 
bles de Pesprit humain ont avec elle une étroite connexité. 
ous n'avons ni ne pouvons avoir aucune notion précise 
de ce qu'a été l'homme à son apparition dans l'univers. 
P{ous savons seulement qu'aussi haut qu'on puisse remo.n- 
ter, on voit, non dans chaque peuple particulier, mais 
dans l'universalité du genre humain, un travail inter- 
rompu pour reculer les bornes de la connaissance, toujours 
progressive ; de sorte qu'à partir de premiers temps dont 
le souvenir se soit conservé, on arrive, par une série de 
degrés appréciables, à la science moderne, plus certaine, 
plus étendue, plus féconde en résultats applicables, que ne 
l'riait la science précédente. 
Le développement de la science se mesure en effet, comme 
sa réalité se vérifie, par ses résultats ; et comme elle se 
compose de deux branches principales, elle engendre deux 
ordres de consquences pratiques, souverainement intéres- 
sautes à suivre dans l'Idstoire de l'humanité. Ainsi, le pro- 
grës de l'homme dans la science de la nature est prouvé 
par le pouvoir qu'il a successiviment acquis sur la nature 
mème qu'il maltrise, soumettant à sa volonté ses forces 
les [,lus énergiques et en disposant pour accomplir certaines 
tins d'utilité. Il sait, puisqu'il fait. Vo?ez ce que la terre, 
h'ansformée dans une immense portion de sa snrfaoe, est 
devenue sous sa main. Il l'a peu à peu assujettie à sa do- 
,dnation : il dompte les fleuves, parcourt les mers, et sa 
puissante pensée, que nulle distance n'arrête, ramëne 
encore sous son empire, pour les faire servir à ses besoins, 
les astres mêmes, qui fuient en vain dans les déserts de 
l'espace. 
On doit cependant remarquer deux choses à l'égard de 
cette branche de la science. Si la nature mieux observée 
est aussi mieux connue, cette connaissance ne s'étend pas 
au-delà d'une certaine série de faites secoue[aires, liés par 
des lois également secondaires. Les bases d'une genèse uni- 
verselle manquent complé{ement. On n'a pas fait un pas dans 
la connaissance «les lois premières, et toutes les origines 
sont reslées nn mystère impénétrable. Er, ph)sique, en 
chimie, en physiologie, on sait que tels phénomènes se 
manilestent hffailliblement dans des circonstances dëter- 
minces, qu'il existe entre eux une dépendance qui permet 
d'en prévoir le retour, et mëme de le produire à volonté 
inrue les conditions de leur existence ne sont pas en 
l,ors de notre phère d'action. Mais si loin qu'on suive cette 
rhaine ci'effets, on en trouve un dernier devant lequel 
lcsprit s'arrête, impuissant à remonter jusqu'au premier 
tc, n  couver.s. -- . 

terme de la série, et par conséquent à i'énergie primitive et 
spéciale qui l'engendre. Ici la conception faillit avec In 
science. On touche à la région de l'incompréhensible, car 
l'homme ne comprend que le fini, et dès lors mtme il ne 
le comprend que d'une manière imparfaite, sa cause, sa 
raison, qui est au delà, restant toujours insaisissable. Le 
nuage qui recouvre les essences ressemble au voile d'Isi», 
qu'aucune main mortelle ne souleva jamais. 
Dans l'ordre même des connaissances accessibles pour 
nous, ce que l'on sait est bien peu de chose comparé ì ce 
qu'on ignore. La science est un trésor qui s'accroit lente- 
ment, et outre la science réelle il en existe une autre, 
simplement apparente, qui, née de la vanité de se faire un 
nom tel quel, ne sert guère qu'à retarder l'avancement de 
la vraie science et ì ? porter le désordre. Expliquons-nous : 
le gnie de la synthèse, un des plus beaux et des plus rares 
attributs de l'intelligence, forme, des faits épars qu'il 
enchaine et généralise, comme une sorte d'organisme, un 
tout vivant, où chaque partie, ¢onsidérée sous la double 
relation de cause et d'effet, a sa place assignée et sa fonc- 
tion propre, dépendante des lois de l'unitWtotale. Quelque 
nombreux que puissent Cre les phénomènes connus, jus- 
qu'à ce qu'ils aient été ainsi coordonnés, ils ne constituent 
point la science, ils en sont seulement des matériaux. Mais 
il n'est donné qu'à bien peu d'hommes d'opérer cette espèce 
de création, d'animer, si on peut le dire, d'une vie com- 
mune ces ciCents inertes. Cette gloire, la plus grande 
que la science puisse offrir, venant à tenter des espril 
médiocres avides de renommée, ils se mettent fi l'oeuvre, 
et de là tant de thbories htivement construites et plus 
vite encore renversées, de sstèmes incohérents, ridicules, 
absurdes, qui, semblables aux ombres de Virgile, se pres- 
sent incessamment aux porIes de l'oubli. Or, une de» 
conséquences de ces impuissants efforts est d'obliger à dé- 
naturer plus ou moins les faits eux-mêmes, pour les ac- 
commoder aux principes qu'on veut établir, à les présenter 
sous un faux jour, ì substituer la conjecture à l'observa- 
tion, à obscurcir dès lors la connaissance réelle, et ì mul- 
tiplier les préjugés qui en retardent le progrès. 
D'une autre part, le soin de se reconnaitre au milieu 
des faits innombrables dont se compose la science de ! 
nature a rendu nécessaire de les ranger dans un certain 
ordre, de les diviser en plusieurs groupes, selon leurs ana- 
ioges et leurs différences respectives, de les classer, de 
les dénommersystrmatiquement : travail épineux, qniexige 
avec la connaissance la plus étendue des faits mêmes, une 
analyse aussi sure qu'exacte, aussi déliée que profonde. 
Aristote en offre le premier modèle, et il a eu chez les mo- 
dernes des imitateursdignes de lui. 5lais d'aulres sont venu» 
ensuite, qui, pour mettre en relie[ quelque petite décou- 
verte imperceptible, leur unique titre ì l'attention publique, 
ont, sur ce seul motif, changé, bouleversé en tout ou en • 
partie les classifications admises; espèce de manoeuvre% 
qui se croient architectes parce qu'ils remuent au hasard 
les pierres de i'èdifice ; fabricateurs infatigables de noms 
prétendus savants, dont le moindre delaut est de n'ëtre 
d'aucne langue. Leur st_rile labeur n'aboutit qu'à jeter 
dans les sciences auxquelle ils l'appliquent une confu- 
sion inextricable, à en rendre l'accès ditficile et rude, et 
souvnt à cacher dans l'obscurité d'un langage inintelligible 
une ignorance qui serait trop apparente sans cela. 
La seconde Iwanche principale de ia science comprend le 
droit et le devoir, c'est-h-dire tous les développements quo 
les iunnuables principes de justice et d'amour, qui sont 
le fondement de la vie sociale, ont successivement reçus 
ì mesure que la raison elle-mëme s'esi développée. San» 
doute ils ont en Dieu leur origine incontestable, ils déri- 
vent de lui. Néce.sair ì tous les hommes, nul homme 
ne le ignore entièrement. Ils sont celle loi ecrite dans 
les cœurs,  laluelle la conscience »'end tmoignage 
(Rom., n, 15), cumme parle saint Paul. Mais la notion e 
peut lre plus ou moin éiendue, plus ou moins neite; te se- 
37 



290 IGNé)RANCE 
riment plus ou moins vil et délicat. Comparez, sous ce rap- 
port, les nations modernes aux anciennes nations, les 
peuples chrtiens aux peuples que n'a point éclairés la lu. 
mièrede l'Évangile: la différence est-elle assez marquée, assez 
frappante ! Et chez les peuples chrétiens eux-mèmes, com- 
ment méconnaitre de siècle en siècle le progrès social? 
L'esclavage et le servage ensuite presque universellement 
abolis, la distinction des races et des castes rejetée par 
l'opinion, ainsi que les priviles odieux qu'elle entraine; 
les gouvernements forcés de rendre hommage, au moins 
extérieurement, à des lois reconnues supéricures à leur vo- 
lonté; les lois mèmes devenues plus équitables, plus douces; 
h faiblesse mieux garantie contre l'abus de la force; l'éga- 
lité, la liberté, la fraternité humaine proclamées lautement : 
tels sont quelques-uns des fruits de l'accoissement et de la 
diffusion des lumières dans la sphère de l'ordre moral. Beau- 
coup de temps néanmoins sera nécessaire pour qu'elles 
achèvent de pénétrer au fond de tous les esprits., sans 
parler mme du développement jusqne ici inconnu qu'elles 
peuvent recevoir dans l'avenir. Il est triste de le dire, de 
grandes masses d'hommes sont encore plongíes dans les 
ténèbres du passé, dominées par des habitudes, des pré- 
jugés qui ont disparu devant une raison plus avancée. 
biais leur jour viendra ; elles ont déj le 'sentiment, l'ins- 
tinct impérissable de ce qu'elles connaitront plus tard 
clairement. Jamais le soleil intellectuel, qui illumine out 
horn»e venant en ce noade, ne descend sous l'horizon : 
des nuages peuvent le voiler, mais il se remontre bient5t. 
Une génération succède à une autre, et dans l'héritage 
qu'elle recueille, elle n'accepte que ce qui a vie. De I/ le 
progrès continu, quoique lent quelquefois, de la société; 
et ce progrès, qui se compose des conquëtes de l'homme 
dans ce que nous avons appelé les deux branches princi- 
pales de la science, n'est en réalité que la succession des 
victoires remportes sur l'ignorance, une des sources 
nérales du mal. 
Les penples donc s'élèvent d'autant plus dans l'échelle 
de l'humanité que la connaissance du droit et du devoir 
est parmi eux plus parfaite et plus rcpanduc; de mëme 
que leur prospérité matérielle ou la richesseeommune erot 
avec la connaissance de la nature et de ses lois, et la facilité 
que tous ont de s'instruire de ce qu'elle offre d'applicable 
aux défférents genres dïndustrie : car l'emploi de la force, 
ou le travail, est productif proportionnellement à la me- 
sure de science et d'intelligence qni le dirige. La supério- 
rité des nations chrétiennes sur le reste du genre humain a 
pour unique cause ce double progrès, en vertu duquel, 
jouissant, d'une part, de plus de liberté et de sécurité par 
le développement du sens moral, et par l'influence de ce 
développement sur les mœurs publiques, sur le gouverne- 
ment et la législation, elles exercent, d'une autre part, 
une puissance plus grande sur la création inférieure: et 
telle est l'harmonie des lois divines, que ces deux ordres 
de perfectionnement se supposent, s'aident, se provoquent 
l'un et l'autre, et sont de fait inséparables. Pourquoi de- 
vons-nous ajouter que cela mème est ce qui les rend moins 
rapides? Il n'est que trop vrai pourtant. L'introduction 
pratique, dans les institutions sociales, des éternelles 
maximes de justice et d'amour combat tous les intérêts 
égoïstes, qui, vivant d'arbiraitre, de priviléges, de mono- 
poles, divisent le peuple comme en deux portions, l'une 
exploitante, l'autre exploitée. Ces intérèts privés, forcé- 
ment ennemis de la liberté et de l'égalité, qui constituent 
le droit, et de la fraternité, d'où naît le devoir al pour 
tous, sont menacés directement par les progrès de l'intel- 
ligence, et doivent dès lors tendre à l'arrêter. De là cet 
effroi des lumières, qui forme un des caractères de la 
politique de certains États; de là ces interminables décla- 
mations sur le danger de répandre l'instruction parm le 
peuple. On ne saurait longtemps le priver de ses drcts 
qu'en l'empèchant de les connaître. Pour l'abaisser socia- 
lement, il est nécesairede l'abas.e ntellectuellement : il 

faut l'abrutir pour le traiter et le gouverner comme la 
brute. Si donc la force commence l'oppression, l'ignorance 
la prolonge. Aussi voit-on tous les despotismes s'appliquer 
soigneusement ì la maintenir; et pour eux rien de pins 
sage, car elle est une indispensable condition de leur 
durée. C'est, parmi tant d'autres, une des choses qui rend 
le d e s p o t i s m e détestable. En opposition absolue avec la 
nature humaine, destinée à se perfectionner indéfiniment, 
il doit, pour subsister, repousser la lumière, épaissir les 
ténèbres, lutter incessamment contre le vrai, contre le 
bien, contre Dieu. 
Pour conclure, l'homme individuel ignore tout en nais- 
riant, et son dëveloppement propre consiste à participer, 
autant que le permet l'avancement spécial de la société dont 
il est membre, aux connaissances successivement acquises 
par le genre humain. Le genre humain lui-mme a 
suivre, sous ce rapport, une marche semblable à celle de 
l'individu. Né aussi dans une ignorance, si ce n'est com- 
plète, au moins relative, il a, par ses efforts spontanés 
et continus, élargi peu à peu le cercle de sa science, qui 
n'a de bornes que l'infini, au sein duquel se cachent toutes 
les causes premières, toutes les essences, toutes les ori- 
gines : de sorte que la loi primordiale de l'humanité est 
de connaitre toujours plus, pour aimer toujours plus, et 
concourir aec une puissance toujours plus grande à la 
réalisation progressive du plan divin. 
C'est là certes une haute destinée. Que l'homme donc, 
pour user de cette expression de Pascal, s'estime son 
juste prix. Deux extrmes pour lui sont alement à évi- 
ter : l'orgueil et le decouragement. S'il tend trop à se com- 
plaire, à s'admirer dans ce qu'il sait, je l'effraie de son 
ignorance, si vaste qu'il ne saurait mme en connaitre 
toute l'Cendue. Si le mépris de son savoir, quel qu'il soit, 
le regret douloureux de ce qui lui manque, l'incline às'en- 
dormir dans une lthargique apathie, à négliger les sn- 
blimes fonctions que lui assigna le Créateur, je lui montre 
la route lumineuse qu'il s'est frayée, à travers la création 
mme, jusqu'à celui qui est, dans sa mystérieuse unité 
la source éternelle de l'ëtre, le principe à jamais vivant du 
vrai, du bien, du beau infini. F. 
IGNORANTINS (Frères). Voye-- Fa/:a ns Ecos 
cmTs. 
IGNOBANTIS.IE. Voye'- OuscvaTms. 
IGUA-'E genre de reptiles de la famille des igu. 
niens et de l'ordre des saurieus. Les iguanes, assez sea- 
blables aux Iézards dans leurs formes générales, ont le 
corps et la queue couverts de petites écailles imbriquées 
une rangèe d'écailles comprimées et pointues se dressent 
comme des épines sur toute la longueur de leur dos ; sous 
leur gorge pend un goitre, comprimé et pectiné ; leur tte 
est couverte de plaques, et leurs cuisses présentent une 
rangée de tubercules poreux ; des dents comprimées, trian- 
gulaires, à tranchant dentelé, arment chaque mchoire, 
et deux petites rangCs de dents hérissent aussi le bord 
postérieur du palais. Les erpétologistes reconnaissent en 
général dans ce genre cinq espèces distinctes, parmi 
lesquelles l'i9ae ordinaire d'Amërique (i9uana tuber- 
culata, Laurenti) est la plus commune. L'iguane ordi- 
naire a le dos bleu ; mais lorsque l'on irrite l'animal 
cette couleur peut successivement revêtir toutes les nuan- 
ces intermédiaires entre le vert et le violet; le ventre est 
d'une couleur plus pàle. Ce reptile, qui mesure de 
1' 60, est assez commun dans toute l'Amérique méri- 
dionale, où il habite les bois sur les lisières des fleuves et 
des eaux vives ; il fait sa nourriture principale de feuilles 
de fruits et de graines, et se tient d'habitude dans les ar- 
bres : sa morsure, sans tre venimeuse, occasionne de 
vives douleurs. La femelle, plus petite que le mle, a des 
couleurs beauco,,p plus éclatantes : elle dépose dans le sa- 
ble des oeufs de la grosseur d'un œuf de pigeon, mais un 
peu plus allougés; ceulg qui sont fort esthn6s, dit-on, des 
épicunens de Surmam, et qui, par une exception assea 



IGUA_NE -- ILES FLOTTATES 
sinlière, renferment à peine quelques vestiges de blanc. 
La chair de l'iguane est elle-mme très-recherchée; aussi 
fait-on à ces reptiles une guerre acharnée; mais, comme 
la plupart des animaux à sang Iroid, ils ont la vie extr¢- 
mement dure, et le plomb du fusil glisse sur leur peau, 
flexible et couverte d'une armure d'écailles imbriqnes 
c'est au lacet qu'on les attrape ; et c'est en enfonçant une 
flèche dans leurs narines qu'on les fait mourir. Les iguanes 
sont extrmement agites, gracieux mme, dit-on : irrités, 
ils dardent leur langue comme des serpente; ils gonflent 
leur gorge et les écailles épineuses de leur longue crête, et 
font briller leurs yeux comme des cbarbous ardente. Ils 
font la guerre aux insecles, aux larves, aux oiseaux mème, 
qu'ils saisissent dans les branchages des arbres où ils ont éta- 
bli leur domicile. On prétend qu'ils se laissent apprivoi- 
ser, et que les colous de la Guyane et des Antilles les nour- 
rissent dans leurs jardins pour les besoins de leurs tables. 
Ious citerons encore, d'après Cuvier, l'iuane ardoioe ; 
l'içuane à col nu, qui, suivant L.urenti, habite les Indes, 
l'iguane cornu de Saint-Domingue, et l'iguane ¢ bandes, 
qu'on trouve à Java et probablement dans les autres lies 
de la Sonde. ]]LFZELD-LErÈIE. 
ILE. On appelle ainsi de petites superficies de sol entière- 
ment entourées d'eau ; mais les c o n t i n e n t s, eux aussi, sont 
ento»rés d'eau. C'est donc là une dénomination particulière 
que ne justifient pas suffisamment les différences de super- 
fide relative. Le Groe n land, la N ou vclle-Guinée, Bor- 
néo, Sumatra, Madagascar sont des lies, tout comme 
la petite Sui nte-H é I ène ou l'imperceptible H e I g o fanal. 
C'est donc plut6t dans les condition physiques du sol que 
nous devons chercher ce qui différencie le« iles des conti- 
nents. On donne aux contrées entourées d'eau le rtom d'iles 
quand elles ne portent pas un caractère fortement accusé 
d'originalité, tant sous le rapport ctimatoloique que sous 
les rapports orographique, hydroaphiqle, géoloique, 
ethnoaphique et botanique, qui en lasse un tout distinct 
et independant des continents voisins. C'est ainsi qu'on 
donnera le nom d'île à 5adagascar, située en face du plate.u 
africain qui la domine, et qu'on appellera connen la 
ouvelle-Hollande, située au milieu et en lace des iles de la 
mer du Sud et de la mer des Indus. Nous n'aons p.s de 
termes particuliers pour alCigner les lies formées par den, 
bras d'un fleuve ou d'une rivière; les Allemands leur donnent 
le nm de werder ou coerth. On appelle çroupe dïl«s 
ou encore a r c h i p e I un certain nombre d'lles situées l'une 
près ,le l'autre, et chafn d'îes un certain nombre d'lies 
placées à la suite les unes des atre en ligne droite. Une 
contrée entourée par la mer, mais rattachée d'un c6té à un 
continent, reçoit le nom de presqu'fle ou de 
En ce qui touche l'origine des iles, la géologie moderne 
les divise, depuis Léopold de Buch, en deux catégories. Les 
unes, qui paraisseut longues et étroites et se terminent presque 
toujours en pointes à leurs extrémités, peuvent, en raison 
de leur constitution géologique, de la division de leurs mon- 
tagnes et du para[ttdisme de leur direction, tre regardCs 
comme ayant fait a"refois partie de continents; onleur donne 
en conséquence ladComination d'fles coninealales. L'autre 
epèce d'lies, dites plaçiques ou ocoeaniennes, qui dans 
leur type principal se rapprochent plus de la forme ronde ou 
elliptique, comprend des formations complétement ind- 
pendantes, des individualité.  part, devant leur origine 
soit à des effets ou à des influences volcaniques ou à l'in- 
fatigable activité que déploient au fond des mers les animaux 
désignés sous le nom de coraux. A cette catégorie appar- 
tiennent les nombreuses iles de corail qui chaque année 
"surgissent dans la mer du Sud ou dans la mer des Indus, 
mais qui, faute d'une empreinte bien individuelle différen- 
ciant leur nature de celle des continents voisins, n'apparais- 
sent que comme des existences particulières. Les unes et les 
autrespréententdes formes essentiellement différentes. Dans 
la premièrecatégurie, lesiles s'élèvent abrupfementau-(]essus 
des flots en affectant une forme plus ou moins conique, et 

91 
présentent pour la plupart des volcans encore en activité. 
Les lies de la seconde catégorie offrent des surfaces planes et 
basses, dont le centre est toujours plus bas que le rempart 
de corail dont elles sont entourées. Consultez Darwin, Coral 
ree./s (Londres, t82) et les Voyages scientifiques du mme. 
On évalue la surface totale detoutes les lies connues de la 
terre à environ 70, 00o myriamètres carrés. Les plus grandes 
sont Bornéo et le Groenland ; viennent ensuite la Nouvelle- 
Guinée, Madagascar, Sumatra et la G r a n d e-B r e t a g n e. Le 
plus grand nombre d'lles se trouvent dans le giga[tesque 
bassin de l'océan Pacifique, o0 elles forment la partie de la 
terre qu'on appelle A ustralie ou encore Polynésie. 
ILE DE FEP,. Voile: F (lle de). 
ILE DE FBANCE. Vo/e: M.UalC. 
ILE-DE-FBANçE  ancienne province de France, 
dont la capitale était Paris, et qui se composait de dillé- 
rentes parties : l'lle-de-France proprement dite, la B r i e fran - 
çaise, le G/ t i n a i s français, le V e x i n français,le Hurepoi, 
dont le chef-lien était Dourdan, le Mantois, le Valois, le 
B a u v a i s i s, le Laonnais, le Noyonnais, le Soissonnais 
le Drouais, ou pays de D re u x, et le Thimerais, dont Chtesu- 
neuf était la ville principale. Quelques-uns de ces petits 
pays lui furent réunis à différentes époques. Son territoire 
forme aujourd'hui les alCarfumeurs de la Seine et de Seine- 
et- Oise, les quatre cinquièmes de celui (le I'O ise, plus 
de la moitié de ceux de I'A i s n e et de S e i n e - e t- M a r n e, et 
le cinquième de celui d'E u re-et- L o i r. L'histoire de l'lle- 
de-France se confond d'abord avec celle du duché de 
France, puis avec celle du royaume lui-mëme. 
ILE.-JOUBDAIN (L'). Vo/e-- Gis (Département du). 
ILEON le troisième et le plus long des intestins 
grl«. Ce mot, en grec et),e., vient du verbe et).., en- 
torti"er, tourner, parce que l'ilCn fait un grand nombre 
de circonvolutions. 
ILES (Os des). V/e-'. B.. ( Anatntie ). 
ILES DE LA SOCIÉTE. Voyez Sooér. (Iles de la). 
ILES DE AMIS. Voe. 
ILES DU "trEXT. Voile'- ATILLeS. 
ILES FLOTTANTES. Peut-on dire qu'il y ait réel- 
lementeu des tles flottantes erCes par la nature, et voçuant 
au caprice de l'onde? Cette question ferait sourire de pitié 
le mondre de nos savants, et porant, l'imagination des 
anciens, si amoureuse du merveilleux, a adopté cette fiction 
des Grecs, comme elle en avait adopté tant d'autres. Selon 
eux, Délos, sortie du fond de la mer, aurait flotté au 
des ondes, jusql]'à ce qu'une main divine l'eut enclJalnée 
et fixée à la place qu'elle n'a pas quittée depuis. Les Cala- 
mines, Thérasie (aujourd'hui Santorin), auraient aussi 
d.ns le principe été le jouet des flots ; Pline parle de l'fie 
flottante du lac de Cutilie; Sénëque, de celles de l'Italie; 
Pomponins Méla et Théopbraste, de celles de la Lydie. Le 
peuple d'Otaïti croit que le graud Eatou, après avoir trainé 
plusieurs jours cette lle au travers des déserts de i'Océan, 
la clÇua, un beau soir, là oi'i nous la voyons aujourd'hui. Les 
lies flottantes sont donc une de ces cbimëres des temps 
antiques et modernes, q]i se retrouvent aussi dans nos 
contes de fées, et que les poëtes ont vu fuir à regret. Ce- 
pendant, si l'on peut appliquer ce nom à quelques mottes, 
semées d'herbes et de racines verdoyantes, que l'eau porte 
et promène dans son cours, qui se réonissent, s'agglomë- 
rent, se condensent, et finissent par former une couche de 
terre de quelques mètres d'étendue et de quelques décimè- 
tres d'épaisseur, alors nous serons forcé de dire qu'il existe 
réellement des lies flottantes. En France, on peut en ob- 
server dans un lac situé auprès de Saint-Orner, et un géo- 
graphe moderne, Letellier, avait vu en elles un phénomène 
digne d'tire placé.au nomhre des merveilles de la nature. 
On en voit en Italie dns le petit laço dî aqua soif a, de 
Tivoli ; en Amérique, sur la riviére de Guayaquil, et principa- 
lement dans les lacs qui environnent Mexico. M. de Hum- 
bol,lt, dans son voyage à la ouvelle-Espagne, donne de 
très-cur!eux détails sur ces petits flots, appelé 
.'7. 



292 LES FLOTTANTES -- ILEUS 
dans le pays. Ils sont de deux sortes : les uns mobiles ; i complétement exemptes de droits de douanes et d'impélz. 
en les toue et pousse à l'aide de longues perches pour les Elles possèdent une constitution propre, assez analogue  
faire passer d'une rive à l'autre; les autres fixés au ri- I celle de l'Anglcterre, une cour de |ustice, une assemblée 
vase; ils y ont adl,éré à mesure que le lac al:eau douce s'est d'états, composée des juges -et des curés (les uns et les 

çioigné de celui d'eau salée i ces derniers, qui sont en lrès- 
grand nombre, sont devenus de vrais jardins potagers; on 
y cultive des lèves, des petits pois, du piment, des pom- 
mes de terre, des articl,auts, des choux- fleurs, etc. D'a- 
près M. de Humboldt, la nécessité aurait forcé, vers la 
lin du quatorzième siècle, les habitants des environs des lac.q 
de llexico à se réfugier sur ces quelques flots flottants, et 
ème à en construire d'artificiel% espèces de radeaux, faits 
«le roseanx, de joncs, de racines, de broussailles, recou- 
xcrts de mortes, qui ne lardèrent pas à faire corps avec leur 
base; c'est I' quïls .se seraient mis à l'abri de leurs enne- 
wis. Aujourd'hui, ces flots ont une destination toute d'a- 
griment; chacun est un véritable jardin, entouré qaelque- 
Ibis d'une haie de rosiers, qui renferme jusqu'à la cabane 
de l'Indien préposé à sa garde. Les suaves parfums qu'ex- 
halent au loin les milliers de fleurs qui y sont eu|tinC, 
l'eau qui caresse mollement les flancs de ces lies furtives, 
la brise qui les pousse et les promène au gré de ses capri- 
«:es, tout se réunit pour préler un charme inexprimable à 
ces petites oasis. L'air frais qu'on y respire le soir les fait 
rechercl,er avec délices par l'habitant de ces climats brt- 
lants ; des flotlilles de pirogues promènent tout le peuple 
«,exicain à l'entour; des concerts se font entendre de toutes 
I,arts sur ce sol mouvant, et l'Européen qui a habité quelque 
te.reps la vieille Anal,nue se rappellera to,,jours avec émo- 
tion les heures qu'il a passées au milieu des chinampas 
Ileurieç. Eug. G. ne bIoNGLAVE. 
ILES FOP, TUXÉES. Voge: CxàmEs. 
ILES iXOP, MANDES appelées par les Anglais Chan- 
el 1.slands (lies du Canal), groupe d'lies appartenant à 
l'Angleterre et situées dans la blanche, golle dont les rivages 
de la Normandie et de la Bretagne forment les limites. C'est 
le dernier dcbris des possessions que les rois d'Angleterre 
possédaient autrclois sur les cétes de France, en leur qua- 
litWde dues de ."ormandie. Ce groupe se compose de deux 
lies principales, JERSEY et GUEINESEV, des lies d'ALoEn.E¥, 
de Souk et de quelques ilots tels que H -EP, M, IÉTnO:,;, etc., 
et de réscifs nombreux, q,,i, joints/ la violence des brisants, 
en rendent l'accès difficile. La superficie totale en est éva- 
luée ài myriamètres, et en 1811 on y comptait 90,800 ha- 
bitant.g. Italgré leur sol, de formation granitique, et par 
suite du climat océanien extrëmement tempèré et eu méme 
tcml.s sain qui y règne, elles sont très-fertiles en céréales, 
légumes et surtout en fruits, qui avec le cidreet le poiré ior- 
meat un article important d'exportation. L'élève du btail 
constitue aussi une brancl,e essentielle de l'industrie locale ; 
'est une espèce bovine de race particulière, très-petite et ce- 
pendant donnant beaucoup de lait. La péche, celle des Iwl- 
tres surtoul, iournit aussi, avec le commerce et la navigation, 
de précieuses ressources à la population, qui possède une 
marine assez nombreuse. Devenues de nos jours l'asile d'un 
.grand nombre de proscrits et de réfugiès politiques, les 
lies Iormandes, à l'époque de la première révolution et du 
système continental de ffapolêon, étaient le grand en- 
crepét de la contrebande avec la France; et le gouverne- 
ment anglais y avait aussi établi de grands magasins pour 
ses flottes. La navigation à vapeur les a depuis singuliè- 
rcment rapprocl,ées de l'Angletene, et leur a donné au 
point ce vue cowmercial encore plus d'importance qu'elles 
n'en avaient autrefois. Les habitants, qui se servent ordi- 
nairement d'un espèce de patois normand, mais qui parlent 
aussi anglais et français, pro[essent la religion reformée. 
Quoique ces lies soient sous la souveraineté de la couronne 
d'Angleterre, elles ne font pourtant pas partiedu royaume 
(Pealm) proprement dit, et ne sont pas réc. par la cons- 
titution anglaise. "En revanche, elles jouissent de tous les 
pri«iléges assurés aux sujets britanniques, outre un grand ] 
nombre de priviléges particuliers : c'est ainsi qu'elles sont 

autres en sont membres h vie), et de conndtables, ou dé- 
putés Cus pour trois ans. A la téte de l'administration est 
placé un gouverneur. Les deux lies principales sont à bien 
dire des portraits en miniature de l'Angletcrre elle-mëme, 
et leurs routes sont.magnifiques. 
Jnsv, la plus grande et la plus méridionale, d'environ 
2 myriamètres carrés, a été fortifiée par Part et par la na- 
ture. Son sol, à base granitique, est d'une iertilité extréme. 
On dirait un mmense lardin. Avec les dots qui en dépen- 
dent, elle compte une population de 57,155 habitants. Sans 
compter les btiments employés au service des cotes et au 
pctil cabolage, elle compte 346 [navires ì voiles, jaugeant 
ensemble 32,»77 tonneaux, et fait un commerce important 
avec les dilférentes possessions anglaises de méme qu'ave 
l'ëtranger. ,Saint-H¢lier, son chef-lieu et en méme temps 
son port principal et résidence du gouverneu.r, est situé 
sur la céte méridionale, dans la baie de Saint-Aubin, et 
compte 20,000 habitants. On y trouve de vastes docks, et 
un port de streté, dont le gouvernement anglais a fait 
commencer à ses frais la construction en 1821. La petite 
ville de Saint-Aubin, située à peu de distance et dans la 
baie du mème nom, possède aussi un beau port. 
Gt,nsv, au nord-ouest de Jersey, d'environ 2 m)ria- 
mètres carrés, complétement entourée de rochers escarpés, 
et protégé en outre contre toute attaque par de formi- 
dables ouvrages de defense, présente à l'tutCieur une agréa- 
ble succession de collines et de plaines, de prairies pre.que 
toujours vertes et de jardins soigneusemc.nt entretenus. 
Aec les ilots qui l'avoisinent, elle compte 33,615 I,ab.:- 
tants. En 1851 on y comptait I1 btiments h voiles, jau- 
geant ensemble 16,9£ tonneaux. La seule ville qu'on y trouve 
est Saint-Pierre ou Peter's-Port, avec près de 18,000 
I,abitants, ainsi qu'un port fermé par deux digues en granit 
et protégé par un petit fort appelé Cornet-Castle. 
Avnv, en lrançais Aurign?/, la plus septentrionale 
de ces lies, entourée également de rochers et d'écueils, 
et dont le sol est tout joncfié de masses granitiques, n'en 
pourvoit pas moins elle-mème aux besoins de ses ,000 
habitants. La petite ville du mème nom, avec son port 
protégé par un petit lort, renlerme la plus grande partie 
de cette populalion. 
ILES SOUS LE VEXT. l'oye-- .XTILLES. 
ILÉUS o, PASSION ILIAQUE, affection que l'on sup. 
posait avoir son siCe dans l'intestin ilœeon, et qui a reçu 
aussi la dénomination de volvulus, parce que l'on pensait 
que les intestins étaient comme roulés (volvere) ou entor- 
tillés par suite de cette maladie. Le peuple lui donnait le 
nom de miserere, ayez pitié, voulant peindre par lb la vio- 
lence des douleurs au.xquelles est en proie le malheureux 
atteinl le ce redoutable mal. 
L'ilé«s est caractérisé par des coliques d'une atroce violence, 
accompaguées dune constipation opiniâtre et de vomisse. 
ments. A ces symptémes se joignent une profonde anxiété, la 
petitesse du pouls, des sueurs froides, des défaillances, 
la contraction des parois abdominales. Si l'affection doit avoir 
une issue fatale, les vomissements, de glaireux ou bilieux 
qu'ils étaient d'abord, deviennent ensuite stercoraux. Rien 
ne peut les artAter ni surmonte la constipation, et le ma- 
lade peut succomber en quelques heures en pleine connais- 
sance, avec le sentiment complet de sa douloureuse situa- 
tion. Heureusement que les choses ne se passent pas tou- 
jours ainsi. Souveut on voit les douleurs se cahner par 
l'effet de soins bien entendus, les vomissements s'arrèter, et 
les selles reprendre leur cours ; et une affection qui p,m- 
rait emporter le malade si rapidement ne laisse pour l'or- 
dinaire aucune trace de son existence les jours suivants. 
On pourra,t confondre l'ilus avec les symptémes qui 
annoncent l'étranglement d'une h e r n i e ; mais l'existence 



ILÉUS -- ILLE-ET-VILAINE 
atérieure de cette infirmité dissipera les doutes qu'il se- 
rait possible d'avoir à cet égard. Le choléra, qui a quelques 
tzits de ressemblance avec la passion iliaque, en diffère 
par les déjections alvines qui l'accompagnent. L'absence de 
fièvre et le développement soudain de la maladie ne per- 
mettent pas de l'attribuer à une inflammation du tube di- 
gestif. Il serait plus facile de tomber dans une méprise à 
l'occasion de cerlains empoisonnements par des sub- 
stances narcotico-cres, etc. ; mais ici encore il y a d'autres 
circonstances qui peuvent mettre le praticien sui la voie. 
On a attribué l'dus à une invagination de quelques 
anses d'intestins; toutefois» dans beaucoup de cas il est 
impossible de rien préciser à cet égard. Ainsi, on le voit 
survenir à la suite de circonstances fort opposées : un re- 
froidissement des pieds» l'ingestion d'une boisson glacée 
lorsqu'on est en sueur, un acchs de colère ou toute antre 
motinn vive; quelquefois sans cause appréciable. 
Le traitement consiste dans l'application de cataplasmes 
émollients et fortement laudanisés sur le ventre; dans l'ad- 
ministration réitérée de lavements l,uileux, d'une potion 
l,uileuse avec addition d'extrait de belladone, d'une infu- 
sion de camomille pour boisson. Un bain tiède est parfois 
aussi d'un utile sel:ours. D r SAucEnoTE. 
ILIADE. Voile« Hou[nE. 
ILIAQUE  terme d'anatomie, qui s'emploie pour spéci- 
fier les muscles, a r t è r e s, etc., en rapport avecles os du b a s- 
sin qui oot reçu le nom d'os des iles, etque l'on appelle 
aussi os iliaques. La crconvolution iliaque est une portion 
du colon. 
En mddecine, passion iliaçlue est snonyme d' i l s. 
ILIAQUE (Table). C'est un bas-relicf en stuc assez 
impodant, découvert au dix-septième siècle dans les ruines 
d'un temple ancien, sur la voie Appieune, et auquel on a 
donné ce nom, parce qu'on y voit représentés les prin- 
cipaux sujets de la guerre deTroie. Le tout est divisé, con- 
formément aux chants de l'lliade, en un certain nombre de 
cornpartiments ou de chants, et de plus partagé en trois 
parties principales par deux colonnes, sur lesquelles sont 
g¢avds en petits caractëres les passages des poëtes d'où 
les sujets ont Cê tirés, avec u.ne courte explication de 
ceux-ci. Il est assez vraisemblable que ce monument servait 
aux grammairiens dans les leçons qu'ils donnaient à la 
jeunesse des écoles, pour lui faire mieux comprendre les 
évënements racontés dans les poêmes d'Homère, dont ils 
avaient Fbabitude de leur [aire la lecture. 
ILICINE. Cette matière, d'une composition inconnue, 
est ainsi nommée parce qu'on l'extrait du h o u x (en latin 
ilex) ; pour cela il suffit de précipiter pue dêcoction de 
feuilles de houx par l'acétate de plomb basique, et de dis- 
soudre le résidu par l'alcool bouillant. L'ilicine prend alors 
une forme cristalline et une couleur jaune brunâtre. Sa sa- 
veur est très-amère. C'est à l'ilicine que l'on attribue les 
proprétés fébrifuges du houx. 
ILION (llium), ancien nom de la capitale de la Troade, 
de cette T r o i e devenue plus tard si célèbre. La tradition 
veut qu'il lui ait été donné à cause d'llus, l'un des fils de 
l'ros, et qu'elle ait été construite sur une colline entre le 
Simoïs et le Scarnandre. Après sa destruction, les Pbrygiens 
et les Mysiens bàlirent sur son emplacement un second 
llinm; et avant le siècle d'Alexandre un troisième s'Ceva 
encore, à l'ouest de celui-ci, plus près de in côte, appelé 
d'ordinaire IYove! Il[on, qui florissait encore à l'époque 
de la domination romaine, et qui forme aujourd'hui le bo»]rg 
de Troja ou Trojahi. 
ILITHYE (en grec E[te0t). Voçe-- LcrE. 
I LIUM on ILIOS. VOile'- BAss. (Anatomie). 
ILLE-ET-VILAINE (Département d'), un de. ciuq 
formds de la Bretag ne, appartient à la partie ouest de la 
France, et est borné au nord par la mer et le département 
de la Manche, à l'est par celui de la Mayenne, au sud par 
celui de la Loire-Inférieure, et à l'ouest par ceux du Mor- 
bil,an et des COtes-du-Nord. 

293 
Diviséun6 arrondissements, dont les chefs4ieux sont Ren- 
nes, Fougères, Montfort-snr-Meu, Redon, Saint.Malo, Vitré; 
/3 cantons, 349 communes, il compte 57/«,0S habitants, 
et envoie quatre députes au Corps LégislatiL II est compris 
dans la seizième division militaire, l'académie et le diocèse 
de Rennes et le ressort dela cour impdriale de la mme ville. 
Il possède un. lycde, quatre colldges, une école normale pri- 
"maire, trois institutions, deux pensions, 636 écoles primaires. 
Sa superficie est de 672,8/ hectares, dont/ll,379enter- 
res labourables; 129,635 en landes, ptis, bruyères ; 5/,516 
en pré; I0,539 en bois; 5,532 en vergers, pépinières, jar- 
dins; 3,301 en propriétés bat[es; 1,/95 en étangs, abreuvoirs, 
mares, canaux ; 23,823 en routes, chemius, places publi- 
ques, rues; 1,318 en rivières, lacs, ruisseaqx; 315 en 
forts, domaines non productifs ; 235 en cimetières, dglises, 
presbytères, btiments publics. Il paye 1,951,716 francs 
d'impOt foncier. 
Le sol est formé de granit et de schiste recouverts d'une 
coucl,e plus ou moins épaisse de terre vdgétale, parfois ar- 
gilo-calcaire. Il est ondulé de coteaux et de vallons très- 
ho[sés, et offre en productions minéraloques du fer, du 
plomb, de l'amllite ou pierre-noire, de l'ardoise, de l'ar- 
gile à potier, de la tourbe. La pierre à b'tir est le granit, Icgrès, 
le schiste. Quelques calcaires donnent une chaux propre aux 
constructions et à la fertilisatio,u des terres arables, pour 
lesquelles les engrais animaux manquent genéralement. Le 
gibier est excellent, surtout le lièvre, le lapin, les perdrix. 
Les autres animaux sont d'espèce in férieure. Les essences d'ar- 
bres les plus comm,mes sont le chne rouvre, le châtaignier 
et le htre. Le poirier et le pommier suppléent à la vigne, que 
l'on ne cultive quesur un point de l'arrondissement de Re- 
don : le pommier donne un cidre agréable, léger, plus déli- 
cat que spiritueux. Les ch'taignes sont abondantes et bon- 
nes. Parmi les ceréales cul[ivCs, on doit signaler le froment, 
le rnéteil et le sarrazin, plus particulièrement consacrés à la 
nourriture de l'homme, et l'avoine, surtout celle d'l,iver, 
dont on extrait un excellent gruau. Le produit des vaches 
est borné "A un beurre reC[ocre, propre toutefois aux [ri- 
tures, et dont on exporte de grandes quantités : le beurre 
rnëme ditde la Prévalaie (du nom d'un château situé à i ki- 
lomètres de Rennes, sur la Vilaine) est beaucoup trop vante 
et inferieur à ceux de Gournai, d'l.igni et de Livarot. Le 
miel est noir et de mauvaise qualité : on tue encore les 
abeilles pour leur avacher leur butin. Le tabac est cultivé 
dans quelques communes de l'arrondissement de Saint-Ma[o. 
On convertit entoiles le chanvre et le lin du pays. A cette 
industrie, il faut ajouter qpelques papeteries, des verreries, 
des forges, la pche maritime, l'envoi des hultres de Can- 
cale, et des expédilions pour la morue et la baleine. 
Traversé par trois rivières navigables, par deux canaux, 
cehfi d'llle-et-Rance (8 kilomètres), celui de Nantes /rest 
(-:, kilomètres), par vingt-trois routes, tant impériales que 
ddpartementales, et notamment par celle de Paris  /rest; 
par t, t 85 chemius vicinaux, ouvert à l'exportation comme à 
l'importatiun par deux ports de mer, ce départeme,t n'a 
veritablement  dësirer et à réclamer qu'une active indus- 
trie, qui mette en valeur ses produits agricoles et emploie 
uttlement dans les fabriques les bras de ses nombre,,x et 
pauvres habitants. 
Parmi les villes et Ioe.alité.s remarquables nous citerons 
Rennes, chef-lieu du département; Saint-lalo, 
V i t r ; Fougères, chef-lieu d'arrondissement sur le I'an- 
çon, près du confluent de cette rivière et du Couesnon, 
avec 9,083 habitants, un tribunal de première instance, des 
fabriques de toile à vo[les, de toile de chanvre et d'embal- 
lage; Motfort-sur-Meu, chef-lieu d'arrondissement, sur un 
c6teau agréable, entrele bleu et le Garun, avec un tribunal de 
première instance et 2,072 habitants; 1 e d o n, S a i n t-A u- 
bi ri.du-Cormier, C ancale, Coin bo u r 9 , Saint.Ser- 
van, jolie ville maritime, à l'embouchure de la Rance, dans 
i'Océan, à 2 kilomètres de Saint-Malo, avec un collége et 
,96 habitants : on -5' arme pour la pche de la morue et 



294 
le cabotage; on y construit des navires, et on y fabrique de 
bons cbles; Do£; le cbO, teau des Bocbers, longtemps habité 
par M e de Sévi gn é; le château d'Épinai, dans la commune 
de Champeaux ; la galerie cellique d'Essé, connue sous le 
nom de la lloche-aux.Fœees; plusieurs dolmeus et peul- 
ILLÉGALITÉ. L'iHé9«lif¢ est le caractère de ce 
qui est contraire à la loi. Il s'emploie plus spécialement 
pour désigner les inlractions faites aux lois par ceux qui 
sont Cllargés de veiller à leur exécution, c'est-à-dire par 
fous ceux qui participent  l'action gouvernementale. Ainsi 
l'on dira d'un corps constitué qu'il a agi illégalemenl, 
mieux qn'on ne le dirait d'un ou de plusieurs citoyens qui 
auraient violWla I é g a I i t é. Un ministre agira illégalement 
quand il sortira du cercle des devoirs et des attributions 
qui lui ont été fixés par la loi. Les remèdes que nos lois 
offrent contre les iliígalités, de quelque part qu'elles vien- 
nent, sont bien faibles. La France est encore dt' nombre 
de ces pays où la poursuite des illégalités commises par des 
fonctionnaires dans i'exercice de leurs fonctions est 
environnée de tant d'entraves, qu'elle devient la plupart du 
temps d.écourageante.et mme impossible. 
ILLEGITIMITE. C'est l'état de toute chose qui n'est 
point ! égi ri me. On appelle en droit un enfant ilNgitime 
celui qui est né hors mariagç et qui n'a point été légitimé. 
Le mot ill¢gitine s'applique aussi aux choses : ainsi, l'on 
dit d'un titre, qu'il n'et point lœegitime , pour signifier qu'il 
manque des qualités légales. Quelqnelois, |e mot iil»ji- 
tme signifie aussi injurie. 
ILLIOIS l'un des États-Unis de l'AraCique du Nord, 
entre le Mississipi, l'Obio et le Wabasb, borné par le 
Kentucky, l'Indiana, le lac de Micbigan, le Wisconsin, le 
Jowa et le Missouri, comprend une partie de l'ancien terri- 
toire de l'Ohio ou, à partir des premiëres années du dix-hui- 
tième siècle, vinrent s'ëtablir un aud nombre d'émigres 
français du Canada, et tes terres achetées par ceux-ci de 1803 
à 1816 aux Indiens. Il fut ainsi nommé à cause de la grande 
riviìri du mme nom, qui le traverse. Êrigé en 1809 en 
territoire, il tir admis en 1818 comme Etat dans l'Union 
américaine. La population s'y e. rapidement accrue. 
En est0, sur une snperlicie de 1800 myriamëtres carrés, 
elle ne se composait encore que de I,28 habitants. Dès 
1850 elle était delà de 851,370 habitanls, tous, à l'exception 
d'environ 5,000 mnltres libres, plat, teurs de race blanche, 
qui se livrent à l'agriculture et à l'éducation du bétail, et 
possèdent aussi quelques usines, notamment des manufac- 
tures d'étoffes de laine et des bants fourneaux. Dans ces 
derniers temps, un grand nombre d'Allemands sont venus 
getablir dans cet État, où ils forment maintenant près du 
tier» de la population totale. Le sol est géneralement un, 
cependant montagneux an nord, oU sa ferlilité est extrème. 
Au sud, l'lllinois est couvert de. riches foréts ; au nord on 
trouve des prairies tant6t sèches et tant6t humides, et des 
terres grasses et marecageuses. Au total, c'est un pays 
extrémement fertile, o/ réussissent particulièrement le fro- 
,ent et le maïs, de méme que les lumes, le tabac, le 
chanvre, le lin, produisant en outre beancop de foin et de 
suc d'érable; et quoique le climat en soit un peu froid, la 
vigne ne laisse pas que d'y roussir. Il n'y a guère encore 
que la septième partie du sol (environ 255 myriamètres car- 
tés), en général le long des cours d'eau, qui ait été mise 
en culture. D'immenses troupeaux de bètes à cornes, de 
porcs, de moutons, couvrent les prairies, et la production 
de la laine, du beurre et du fromage y est importante. En 
outre, de riches mines de plomb ont été découvertes, il n'y 
a pas longtemps, to,t à l'extrémité septentrionale de l'État. 
De méme que l'Indiana, le Jo,a et le Kentucky, il fait 
partie du grand bassin houillier de l'Illinois, qui, à partir du 
Kentncy et en se. dirigeant an nord-ouest jusqu'au llissb- 
sipii embrasse une surface de ,400 myriamètres cars. 
Le commerce y est favoris6 par la ligne de natigation 
établie sur l'Ohio» le Mississipii le Wabash, l'lllinois, et 

1LLE-ET-VILAIIE  ILLUMIIES 
autres cours d'eaux, de mme que par le lac Michigan, qu'il 
c6toye sur une partie de ses frontières. Au I « mars 1852 
on n'y comptait encore que 28 myr. de chemin de fer en 
activité, mais il y en avait 21 en consh'uction. A la méme 
époque, l'lllinois envoyait au congrè neuf représentants. 
Le gouverneur, qui reçoit un traitement de 1500 dollars 
et les sénateurs, au nombre de 25, sont Alus pour quatre 
ans; l'élection des 72 représentants a lieu tous les deux 
ans. Tout citoyen blanc établi depuis six mois dans lçlta! 
a droit de voter. En 18ge, la dette fondée de cet Ètat 
levait/ 16,627,509 dollars. Le cheF-lieu, et en méme temps 
le siége du gouvernement, est Springfiegd , petite ville de 
6,000 mes. La ville la plus importante est Chicago, qui 
en peu de temps a pris un rapide essor, sans exemple jus- 
qu'alors, mëme aux États-Unis. 11 faut ensuite citer la ville 
de Vandalia, fondée par des Mecklembourgeois, anoen chef- 
lieu de l'État, avec 1,600 habitants, Allemands pour la plu- 
part; Shawneetown, avecde riches salines appartenantà l'U- 
nion ; Galena, i l'extremité nord-ouest, dans une vaste région 
plombifère, fondée en 1836, avec une population de 6,000 ;3mes; Jaclsonville (4,000 bab. ), où se trouve le collíge 
Illinois, indépendamment duquel l'État possède encore 
les trois collëges d'Upper-Aiton, de Lebanon et de Gales- 
bury, ainsi qu'une école de médecine à Cbicago; l'auvoo, 
sur le blississipi, autrefois le chef-lieu des Mutinons, 
qui en furent cbassés de vive force. Le magnifique temple 
qu'ils y avaient construit, et qui fut ensuite détruit, fut 
plus tard acheté par des Icariens français, dont l'essai 
de colonie socialiste et communiste a eu la plus triste fin. 
ILLUMINÉS. Il y a en quatre sectes différentes de 
ce nom : à la fin du seizième siècle, la société des Alora- 
brados en Espagne; vers l'an 1634, celle des Guërinots, 
en France, imbéciles fanatiques et visionnaires; à la molli6 
du dix-huitième siècle, une association de mystiques en 
en Belgique; et à partir du 1 « mai 1776, l'ordre des lllu- 
nmës, qui d'Ingolstadt se propagea surlout dans l'Allemagne 
catholique. C'est ce dernier qu'on comprend le plus ordi- 
nairement sous cette dénomination, bien qu'à l'origine son 
fondateur lui eut donné le nom d'ordre des Perfectbilistes. 
Adam Weisshaup t, prolesseur de droit canon à In- 
golstadt, forte tëte et profond penseur, br|ant de l'amour 
de l'humanité, mais connaissant peu les hommes, conçue, 
dans sa haine pour le jésuitisme, la peusee de former 
dans une nombreuse association d'hommes une ligue des 
plus nobles esprits, une léon inte d'invincibles cham- 
pions de la sagesse et de la vertu. Le but de cette so- 
cieté était de donner l'empire du monde à la raison, de 
favoriser la propagation des lumi/:res et de la véritable idee 
religiense, en ebranlant dans leurs bases le culte et tu toi 
domagtique de l'Église, en propageant le díisme ou religion 
naturelle et en crëant un corps de doctrines républicaines. 
Wordre des llluminœes recruta tant d'adhérents, surtout 
lorsque Knigge y eut consacré son activité et que la franc- 
maçonnerie / eut étë intér¢ssée, qu'à t'epoqne oU il jeta. 
le plus vif éclat il comptait parmi ses membres plus de 
%000 des hommes les plus instruits de l'Allemagne. Quel- 
que noble et désinteressê que fut Weisslmupt, il oe laissa 
séduire, en étudiant la constitution d'ordre des Jésuites et 
leur système d'ëducation, par la pensée d'employer au bien 
le moyen dont les jésuites se sont servis pour faire tant de 
mal. Sans doute il ne s'assait pas de fonder des écoles 
d'éducation à l'usage des membres de t'ordre, à l'instar de 
celles qu'entretiennent les jésuites; mais les llluminds de- 
vaient se surveiller, s'espionner les uns les autres, aller rê- 
gulièrement à confesse; bref, accomplir une foule d'actes, se 
soumettre à une multitude d'entraves et de restrictions qui 
révoltent le cœur et la conscience d'un homme libre. 
espérait de la sorte parvenir à rëunir dans la méme main 
tous les fils à l'a/de desquels la légion sainte serait conduite 
an bonheur de l'humanité. Que si dans le choix de parei!s 
moyens, la mort de l'ordre se trouvait déjà en germe, la 
dësunion qui survint bientÇt entr, les deux chels, Weiss- 



haupt et Knigge, ne fit que Paccéldrer. L'opinion publique 
e prononça contre ces nouveaux réformateurs ; et une or- 
donnance de l'Cecteur de Bavière, en date du 22 juin 1786, 
et renouvelée le - mars tTSS, prononça la dissolution de 
tordre de lllumin. Weisshaupt fut interdit comme pr|re, 
et banni; des peines sévères furent prononcées contre d'au- 
tres membres, sans qu'on ait pu justifier les formes insolites 
de la procédure suivie pour la condamnation de l'ordre. 
ILLUSION (de illudere, se jouer, tromper). Au mi- 
lieu des reaiités, souvent trop posifives, de la sphère dans 
laquelle l'homme s'agite, de riantes rtveries, de flatteuses 
espérances, se glissent parfois dans son Ame, et viennent 
le consoler des maux qui l'accablent chaque jour. Ces 
couleur de rose de l'homme éveillé, ces espérances, dont 
la réalisation lui semble si prochaine, ou, pour nous servir 
d'une expression devenue familière, ces chdteaux en 
2agne, constituent ce qu'on appelle l'illusion, et un poëte a 
dit avec beaucoup de vérité : 
L'illusion c'est le bonheur! 
L'enfance et la jeunesse compnscnt ce qu'on appelle à 
bon droit l'dge des itttsions. Sans les illusions de l'amour, 
qui songerait au mariage? Sans les illusions de la gloire, 
qui enflammerait le savant, le poëte, l'artiste, le guerrier ? 
Somme toute, l'homme s'acharne avec plus de constance 
ì la poursuite de ses illusions qu'à celle de son bonheur 
réel. De mme qu'il est d'aimables illusions, il en est aussi 
de bien noires, produites par une imagination mélancoli- 
que et romanesque; il en est enfin auxquelles ne se rattache 
aucune idée heureuse ou malbeurense. 
Les erre u r s qui nous viennent de la vue portent le 
nom d'illusion d'optique. Sans l'illusion, il n'y a 
plus en peinture ni relief ni perspective. Et que devient 
la seine sans illusion ? 
ILLUSION DOPTIQUE. De tous les sens il n'y en a 
pas de plus trompeur que ceint de la vue; les objets dont il 
nous transmet l'image nous semblent, s'ils sont un peu 
éloiés, plus pe;ts, con[ormés, colores autrement qu'ils 
ne le sont en realité; quelquefois nous les plaçons dans des 
lieux o0 ils ne sont pas, et souvent nous cro)ous mobiles 
•eux qui sont en repos, et réciproquement. Un objet nous 
parait plus petit en raison de la distance 0 il est du lieu o0 
nous sommes, par la raison que les rayons visuels qui par- 
tent de ses bords, vont former dans notre oeil un angle d'au- 
tant plus petit que l'obiet est plus éloigné. C'est ainsi que les 
denx files de maisons qui bornent une longue rue paraissent 
s'abaisser à mesure qu'elles s'éloignent, quoique reellement 
elles aient la mtme hauteur. A l'aide d'une figure de géométrie 
facile à concevoir, on démontre que l'ane sous lequel on 
voit un objet, et par suite sa grandeor apparente, doivent 
/re presque en raison inverse de l'éloignement de l'oeil du 
spectateur, du moins quand l'angle sous lequel on voit 
l'objet n'excède pas certaines limites. Cependant cela n'a pas 
toujours lieu ì beaucoup près; car un homme que nous 
jugeons avoir 5 pieds, vu à 2 mètres de distance ne nons 
semble pas avoir d/minué sensiblement de grandeur quand 
il s'est éloigné à 10, 12 mètres : il n'est pas aisé à beaucoup 
près de se rendre aison de cette fllnsion d'optique, dont 
la sindarité contrarie le système de la structure de l'oeil 
et les principes de la géométrie. 
Une boule vue de loin nous parait un disque tout plat : 
telle st l'image du soleii, de la lune, etc. L'éloignement 
et les milieux que traversent les rayons visuels alterent et 
décompos?nt les couleurs des objets ; le soleil, par exeanple, 
que nous voyons d'un blanc éclatant par un temps sans 
nuages, nous parait de couleur pourpre quand le ciel est 
voilé par un brouillard d'une densité convenable ; cela tient 
à la composition de la couleur blanche, que l'on sait ëtre 
t«rmée des couleurs éldmentaires du spectr e, lesquelles 
ont la propriété de traverser les milieux, tels que les eaux, 
le verre, l'air atmospbérique, etc., avec plus vu moins de 
force. Le rayon de couleur rouge est, s'il est permis de 

ILLUSTRATIONS 95 
parler ainsi, le plus vigoureux de tons. Cette couleur doit 
donc dominer dans l'image du soleil par un temps de brouil- 
lard, parce que les rayons bleus, indigg, vert, etc.,'sont 
restés en chemin, en tout on en partie. C'est encore par 
cette raison qu'un objet de couleur rouge se voit de plus 
loin que s'il était bleu, jaune, blanc, etc. 
Les couleurs influent sensiblement sur la grandeur appa- 
rente des corps : le disque du soleil nous parait plus grand 
que si cet ase n'était Clair6 que par une faible lumiëre; 
un habit blanc fait paraitre un homme plus gros que s'il 
tait habillé de noir. Les peintures ne sont, absolument 
parlant, que des illusions d'optique. 
Le mouvement est souvent la cause d'erreurs de cett 
espèce : si l'on considère la roue d'une voiture qui cour 
avec une grande vélocité, on est tente de croire que cette 
roue est pleine, ou qu'il n'existe pas de jours entre ses rais 
{rayons). Lorsqu'on fait tourner un charbon allumé, à la 
manière d'une fronde, l'oeil aperçoit un cercle continu de 
leu. La cause de ces illusions consiste dans la facolté qu'a 
l'oeil de conserver un instant l'image de l'objet colore qu'il 
contemple : d'où vient que si l'objet change rapidement de 
place, la sensation de l'image qui le faisait voir en un point 
n'est pas effacée quand il est arrivé au point qui suit im- 
médiatement, et d'oi il transmet à l'oeil la sensation d'une 
image semblable, etc.; de sorte que si la balle d'un mous- 
quet était incandesoente, on croirait voir une trainee de lu- 
m/ère quand elle sortirait du canon. 
Si le spectateur se trouve dans un lieu qui soit en repos, 
tous les objets qu'il verra se déplacer seront effectivement 
en mouvement; le contraire doit arriver quand le lieu qu'il 
occupe est en mouvement : les objets en repos lui semble- 
ront change de place ; c'est ce qu'on observe lorsqu'on se 
trouve dans un bateau, une voilure... Les arbres, les 
maisons, semblent fuir ou s'approcher, suivant que le ha- 
tenu, que l'on croit immobile, s'éloigne ou s'approche d'eux. 
C'est encore de cette manière qu'on explique le mouve- 
ments apparents des astres, qui pour la plupart sont lixes, 
mais qui semblent se mouvoir une fois en • ingt-quatre 
heures, parce que la terre, tournant sur elle-mme pen- 
dant le m6me temps, nous les présente successivement 
vers tons les pointsde la vote céleste. 
Il arrive quelquefois que les objets que nous regardons 
nous paraissent doubles : on en donne pour raison le d.- 
placement accidentel ou volontaire de l'un des organes de 
la vue, ce qui fait que la sensation de l'image de l'objet, qui 
se forme ordinairement dans chacun des yeux, ne pouvant 
plus se coniondre en une seule, nous croyons percevoir 
deux images. Les personnes ivres voient les objets doubles 
et mobiles, parce qu'elles ne peuvent fixer leurs regards. 
TE'ISsÈnl. 
ILLUSOIRE se dit de tout ce qui tend à tromper sous 
une fausse apparence, de tout ce qui est sans effet ; c'est 
dans ce sens qu'en dit : une promesse illusoire. 
ILLUSTPATIONS. C'est le nom qu'on donne aujour- 
d'hui aux gravures sur bois qu'on intercale dans un texte 
impr/mé, soit afin de l'élucider, soit pour reproduire aux 
yeux, la scène, les lieux, l'objet dont il y est q,estiou. Ces 
impressions typographiques ornées d'images obtiennent de 
nos jours tant de succès, qu'elles forment une fraction 
particulière et iort importante de la littérature moderne. On 
a orné de vignettes et encadré d'arabesques des livres à 
l'usage de renhnce ou du peuple, des poëmes et des ro- 
mans, des livres de prières et de dévotion, des traductions 
de la Bible et re#me des classiques de l'antiquité. Cette 
mode a non-seulement fait revivre d'une vie toute nouvelle 
la gravure sur bois, replacée au nombre des arts qui se rat- 
tachent à l'imprimerie, mais encore fait perdre à la gravure 
sur planches métalliques une partie de son importance. 
Les gravures sur bois ont remplace le« gravures sur acier et 
sur cuivre, et comme autrefois, alors q#e la gravure sur 
bois et la typographie étaient étroitement nnies, elles sont 
devenues un accessoire indigpen.able pour une foule d'ou 



296 
vrages, qui grâce à leur concours obtiennent un débit con- 
sidérable. La mode des illustrations s'est répandue d'Angle- 
terre en France, et de là en Allemagne; et partout elle a pro- 
voqué une telle lureur pour les livres à figures, que notre 
epoque semble en vérité vouloir revenir au culte des images, 
à l'instar du moyen ge. Jamais on n'illustra plus d'ouvrages 
qu'aujourd'hui. Cbez nous l'illustration a servi de prétexte 
tant6t pour publier à des prix fort élevés des éditions nou- 
velles d'ouvrages que chacun avait délà dans sa bibliothè- 
que, tantôt pour faire acheter des livres dont personne ne 
se soucierait sans cela. D'abord timide et modeste dans ses 
all.Jres, la gravure sut bois n'était que l'humble servante 
du texte ; mais plus tard, c'est le texte qui est devenu son 
très-soumis serviteur. En effet, les 6al[teurs lui ont h t'envi 
fait subir les plus inconcevables mutilations, toutes les fois 
que cela a convenu aux besoins de leurs spéculations ; et 
plus d'un intrépide liseur de romans, qui a entassé sur les 
rayons de sa bibliothèque les œuvres de nos principaux 
conteurs contemporains illustrées à quatre sous la livrai- 
son, est bien étonné quand il s'aperçoit qu'il n'a que la moi- 
i é de telle ou telle œuvre originale qu'il avait cru acquérir, 
l'éditeur en ayant sans façons supprimé ce qu'il appelle 
les lolgueur ou les digressions iutiles. C'était l'unique 
et facile moyen de taire entrer ses co0teoses grasures 
dans un texte dont la reproduction entière et fidèle e0t 
compiétement changé la nature de sa spéculation, laquelle 
consistait à paraltre offrir au public les œuvres illustres 
de Walter Scott, par exemple, ì tout aussi bon marché, à 
meilleur marché méme que les éditions déjà existantes, fort 
complètes sans doute, mais auxquelles manque l'attrait de 
ces vignettes explicativessur bois, de ces illustritions dont 
on commence un peu trop à abuser. « Illustration, que 
me veux-tu ? » s'écrierait sans doute aujourd'hui Fontenelle, 
et avec tout autant de raison qu'à propos de la simpiter- 
nelle nate. 
ILLUSTE éclatant, célèbre par le mérite, par la 
noblesse, par quelque chose de louable, d'extraordinaire. 
( vo!lez, CL/Braré ). Plutarque a ecrit la vie des hommes il- 
lustres, grecs et romains. 
• Il y avait ì la décadence de l'empire romain trois titres 
d'honneur différents, qu'on accordait anx personnes qui se 
distinguaient des autres par leur naissance ou par leurs 
charges. Le premier était celui d'illustris, le second celui 
de clarissimus, le troisiéme celui de spectabilis; mais 
illustris marquait une prééminence toute particulière : on 
le donnait aux cousuls, aux patriciens, aux préfets, aux com- 
mandants genéraux, aux sept ministres du palais. Au cin- 
qniéme siècle les empereurs eux-mémeset les rois tributaires 
de l'empire le prenaient. Plus tard fl fut exclusivement 
réservé aux comtes et aux patriciens. 
La suscription des rois mérovingiens, toujours placée en 
téte de leurs dipl6mes, se composait d'une ligne : N. tex 
Fracorum, vit inluster. Ce titre n'apparait chez les 
Francs qu'après que CIovis eut reçu d'Anastase la dignité de 
consul, ì laquelle il était attaché. Chilpéric, Pepin et Char- 
lemagne s'en parèrent successivement ; mais ce dernier varia 
la forme de suscription de ses diplômes, en raison des 
divers états qui tombèrent sous sa dépendance : ainsi, 
quand il eut été couronné empereur d'Occident, il rem- 
plaça le vir iiuster par la formule impériale des Césars. 
Les ma[res du palais, ayant peu ì peu usurpé l'autorité 
souveraine, s'arrogèrent ce titre, qui passa plus tard aux 
comtes et aux grands seigneurs du royaume dans les lettres 
que les monarques leur adressaient. On en décorait aussi les 
évèques et les abb de haute considération. Enfin, il cessa 
d'ëtre d'un usage aussi général, et se changea en un simple 
superlatii, sans grande impor|anoe, à la cour de Reine, qui 
donne encore le titre de seigeurie illustrissime aux non- 
ces, aux archevques, aux érCues, aux prélats. Celui 
d'illustre magnificence était conféré par les rois goths à 
leurs principaux officiers. 
les lllutrati étaient les membres d'une académie, ou 

ILLUSTRATIONS- 
société littéraire, établie  Cas,al, en Italie, ayant pour 
embléme le soleil et la lnne, avec cette inscription : 
indeficiens. 
|LLYRIE royaume faisant partie de la monarchie au- 
trichienne, mais non compris dans la Confédération germa- 
nique, et qui avec la Dalmatie forme la base de la puis- 
sance maritime de l'Autriche, borné au nord par le pays de 
Salzbourg et la Styrie, à l'est par la Croatie, les Frontières 
Militaires et la mer Adriatique, au sud par cette méme mer, 
h l'ouest par le royaume Lombardo-Vénitienet par le Tyrol, 
comprend, sur une superficie de 360 myriantètres carrés, 
1,295,200 habitants, pour la plupart catholiques. Depuis 
1849, il est divisé en trois territoires de la couronne : le 
duché de C a ri n t b i e, le duché de C a r n i o ! e, et le Lit- 
toral, c'est-à-dire les comtés princiers de G oritz et de 
G r a d i s k a, avec le margraviat d' I s t r i e et le territoire 
de la ville de T r i e ste. Les trois chefs-lieux et siéges des 
gouverneurs sont Klagefurt, La!lbach et Trieste. Cette 
contrée est arrosée par la Save, la Drau et l'Isonzo ; et on y 
compte plusieurs lacs, notamment celui de Czirknitz. 
Sur les ctes, le pays est plat et sablonneux ; mais à l'in- 
ter[eut il est parcouru par les Alpes Carniques, Ner[ques 
et Juliennes. Aussi, le climat y est-il fort pre, tandis que 
dans les vallees du sud tous les fruits parviennent à matu- 
rité. Les produits les plus importants, surtout en Carinthie 
et en Caruiole, sont les articles en fer et en acier, dout 
la fabrication dépasse chaque année deux millions de flo- 
ril. La grande majorité de la population est de race 
slave. 
Les anciens lllyriens étaient de la méme race que le 
"[hraces, mélangé» de bonne heure avec des Phéniciens, des 
Grecs, des Italiens et des Celtes.lls habitaient au quatrième siè- 
cle av. J.-C. tout le littoral de l'est de l'Adriatique, les iles 
qui en dépendent et l'ouest de la Macédoine jusqu'à l'Ëpire. 
Mais le roi Philippe de Macédoine leur euleva tonte celle 
partie de la Macédoine j,lsqu'au fleuve appelé Dr[lori ( au- 
jourd'hui Drio ); et l'lllgricum ou lllgrica, comme on 
appelait alors i'lllyrie, fut ensuite divisé en lll!lrica Groeca 
et lll!lrica Barbara. La première, qui [orme aujourd'hui 
l'A! ha ni e, fut incorporée à la Macédoine. C'est là qu'é- 
talent situées Dyrrachium (aujourd'hui Dura«:o) et 
Apollonia. L'lll!lrica Barbara s'étendait depuis le cours 
d'eau appelé Arsia (aujourd'hui Arsa), en Istrie, jusqu'au 
Dr[lori, etCait divisée en Jap!ldia, Liburia et Dalmatia; 
elle donna le jour à divers empereuts romains. 
La piraterie était la principale industt-ie des Illyriens, 
dont les rois eurent en conséquence de bonne heure des 
démélés avec les Romains, qui l'an 288 avant J.-C., sous 
le règne de leur reine Teuta, finirent par subjuguer complé- 
tement cette nation. De temps à autre, il est vrai, elle es- 
saya de briser ses fers; mais vaincue par César, puis entié- 
rement affaiblie par Auguste, Germanicus et Tibère, elle 
finit par voir son territoire converti en province romaine, 
tout en conservant à ce titre un rang important dans 
le grand Empire. Le nom d'lllyricum, auquel dans le 
quatrième siècle on ajouta l'épithète de magnum, com- 
prit alors toutes les provinces de l'Empire Romain situées 
h l'ouest. Lors du partage de l'empire, l'lllyrie fut adjugée 
à l'Empire d'Occident, à la chute duquel, en l'an 476, 
elle dchut à l'Empire d'Orient. Une fois sa nationslite 
effacée et anéantie par la longue souveraiaeté de Rome et 
par l'occupation passagère des Goths, l'lllrie lut renou- 
velée, au sixième siècle, par les Croates et les Serbes, peu- 
plades d'origine slave, qui vinrent s'? fixer; et elle russit 
bientôt ì se rendre indépendante du faible gouvernement 
de Byzance. Alors, il est vrai, ses provinces occidentale.s, 
la Carniole et l'Istrie, furent à toujours incorporées à l'Em. 
pire de l'Mlemagne depuis l'époque des Carlovinens, tan- 
dis que ses provinces orientales retombaient, mais pour 
peu de temps seulement, sous la domination des empereurs 
de Coustantinopie. A partir de l'an t090, les Vénitiens et 
les Hongrois s'emparèrent de diverses parties de ce terri- 



t,,zuIE -- 
1dire ; eten ! 17o ony wt surgir un ro)'aume bon,dis-slave 
de Bascie, duquel naquirent plus tard la Bosnie et la 
S er v i e. La Dalmatie passa d'abord sous les lois de Venise; 
mais en 1270 elle devint en grande partie la proiedes Hon- 
.grois; toutefois, ceux-ci demème que les Véuitiens se virent 
enlever par les Turcs presque tout ce qu'ils possédaient. 
Venise ne conserva plus qu'une petite partie de la Dalmatie, 
et la Hongrie que l'Edavonie et une partie de la Croatie. 
La paîx de Campo-Formio, en 1797, plaça la Dal- 
matie-Vénitienne jusqu'au Cattaro sous la domination au- 
trichienne. Douze années plus tard eut lien une résurrec- 
tion de l'antique lllyrie. Un décret de apoléon, en date du 
13 octobre 1809, portait : « Le cercle de Villach, de Carin- 
laie, la ci.devant Istrie autrichienne, Fiume et Trieste, les 
«ontrées désignées sous le nom de Littorai, et tout ce qui 
nous a été cédé sur la rive droite de la Sure, la Dalmatie et 
!es iles qui en dépendent, prendront désormais le nom de 
Provinces lllyriennes. ,, Après avoir acquis un accroisse- 
ment de territoire de près de 22 myriamètres carrés par la 
ression du Tyrol italien, consentie par la Bavière, les Pro- 
rinces illyriennesreçurent une organisation définitive, tant 
sous Ic rapport militaire que sous le rapport financier, en 
vertu d'un décretimpérialen date du 15 avril 1811. L'll- 
lyrie resta alors sous la domination fran.eaise jusqu" la 
chute de Iapoléou ; puis, en I$16, elle fut replacée sous 
!a domination autrichienne comme royaume. Depi6s, le 
Littoral hongrois et la Croatie en furent séparés en 1822 et 
réunis à la Hongrie, tandis qu'en 1525 on incorporait 
toute la Carinthie au royaume d'lllyrie, qui fut alors divisé 
en deux gouvernements, Laybach et Trieste, le premier 
comprenant la Carinthie et la Carniole, le second le reste 
du territoire situé au sud, le Frioul autrichien, les comtés 
de Goritz et de Gradiska, le territoire d'Aquilée et la pres- 
qu'ile d'Istrie. Laybach devint la capitale de tout ce royaume. 
La constitution nouvelle, don née à l'empire eu I $49, lu i laissa 
ses liraites; mais ses diverses parties reçurent une orga- 
nisation intérieure toute nouvelle. 
ILLYRIENNES (Langue et LiftCature). Il n'y a point 
de langue illyrienne proprement dite : la langue que le peuple 
parle en lllyrie est un dialecte du slave, divis lui-mème 
en autant de dialectes différents que l'lllyrie compte de pro- 
vioces naturelles. Partout ou il y a une langue, il y a une 
poésie et une liftCature. Dans les langues perfectionnées, 
cette littérature devient classique, et finit par appartenir à 
tous les peuples. Dans les langues naïves, qu'on a peu cul- 
tivces bots de leur domaine autochthone, elle reste locale, et 
ne se conserve guère que par la tradition ; tels sont les poëmes 
illriques, ou plus proprement morlaques, dont je me 
propose de parler. Qu'on se représente d'abord le chantre 
morlaque, avec son turban cylindrique, sa ceinture de soie 
tissue à mailles, son poignard enfermé dans une gaine de 
laiton garnie de verroteries, sa longue pipe à tube de cerisier 
ou de jasmin, et son brodequin tricotC chantant le pismé 
ou la chanson héroique, en s'accompagnant de la 9z«la, qui 
est unclyre à une seule corde, composée de ceins entortillës. 
C'est ordinairement.après les première» heures du soir que 
le Morlaque se promène sur la montagne, en racontant dans 
son chant monotone, mais solennel, les exploits des anciens 
chefs. Il ne voit pas les ombres de ses pères dans les nuages, 
mais elles vivent partout-autour de lai. Celle de l'homme 
hospitalier et fidèle, qui n'a point été désavoué par ses amis 
dans l'assemblée du peuple, et qui a été brave à la guerre, 
descend souvent à travers lerameaux des yeuses dans un 
rayon de la lune; elle tremble sur le gazon de sa tombe, la 
care.se d'une lumière douce, et remonte. Celle du méchant 
s'égare dans les lieux abandonnés; elle fréquente les spul- 
turcs, déterre les morts, ou, plus téméraire, va boire dans 
un berceau négligé de la nourrice le sang des enfants nonveau- 
nes. Souvent un p/re épouvanté a rencontré le vampire 
tout p!e, les cheveux hérissés, les lèvres dégoOtantes, et. 
le corps à demi enveloppé des restes de son linceul, penché 
• .,n" la petite famille endormie, parmi laquelle, d'un regard 
t»lcr. DE L CONYERS. -- T. XI. 

ILLYBIENNES 

97 
fixe et affreux, il choisit une victime. Heureux s'il parvient à 
trancher alors d'un coup de son hangar les jarrets du ca- 
davre, car désormais celui-ci ne sortira plus de on cercueil. 
Au mSme instant, les magiciennes préparent Icur. sorti- 
léges; elles dansent trois à trois, comme les sorores de 
Macbeth, en proférant d'effroyables conjurations : ce sont 
elles qui appellent l'orage, la grèle et les temptes. Quand 
un vaisseau vient se briser dans les dunes, on les a vues 
souvent bondir de vague en vague, en frappant de leur pied 
la cime écumeuse des flots. 
C'est au milieu de ces prestiges que marche mon pote, 
car il est poëte aussi, et ne se borne pas à répéter des chants 
connus. La douceur de sa langue harmonieuse, la liberté 
de son rhythme, qui n'admet ni la symëtrie fatigua.e d'une 
césure obligée, ni le monotone agrément de la rime, lui 
permettent d'obëir à toutes ses inspirations, et d'embellir de 
ses pensées la vieille ballade que la tradition lui a transmise. 
Il arrive mme souvent que d'une montagne à l'autre un 
chantre inspiré fait succéder à la strophe qu'il achève une 
strophe nouvelle. Tous deux s'arrStent et luttent d'invention 
poétique à la manière des bergers de Yirle. Ils ont encore 
ce rapport avec les interlocuteurs des bucoliques anciennes, 
qu'ils finissent ordinairement par laite l'Coge de leur chant, 
et cette dernière partie du poëme illyrien se modifie suivant 
l'homme qui le récite, ce qui est tout à fait conforme a la 
nature. 
Le poëte illyrien le plus célèbre par ses chansons aura 
l'honneur de présider à la danse rustique. C'est autour de 
lui que le Aolo se forme en rond; c'est lui qui l'anime du son 
de sa cornemuse ou du bruit desa oix; il redouble, il presse, 
il précipite la mesure ; la gaieté devient de l'enthousia.--me, 
du délire ; le délire fait place à l'accablement, et les danseurs 
tombent Cuises autour du poêle. Il est remarquable que 
le goùt du chant, de la poésie et des arts mimique so!t 
d'autant plus xii que ces arts sont moins perfectionnés et 
plus voisins de leur berceau. Jamais les lecteurs du plus 
prouWde nos poëtes de salons, les concerts du plus habile 
de nos virtuoses, le ballets symeriques du plus élegant 
de nos cboréaphes, nont produit l'ivresse qu'iuspirent les 
accents sauvages d'un improvisateur des dëserts. Pour se 
faire une idée du chant morlaque, il faut l'axoir entendu. 
Fortis essa)'e de le décrire, mais il oublie une chose qui 
parait essentielle à dire, c'est qu'il ressemble très-peu/ 1« 
voix humaine. C'est une espèce dïnstrument à deux parties 
qui oppose avec une rapidité surprenante les deux timbres 
les plus éloignés ; et comme cette pensée ne peut guère 
s'exprimer par une seule définition, je croirais n'y avoir pas 
réussi autant que cela est possible, si le ne cberchai à faire 
comprendre à mon lecteur le contraste qui doit résulter d'un 
Imrlement rauque, toujours suivi d'une cadence trè:-aig:ë, 
et la suivant toujours avec une célérité de mouvement et 
une justesse d'accord qui étonnent l'oreille. Les chantsfour- 
lans et tyroliens se rapprochent beaucoup de cette mélodie 
sauvage, mais ils annoncent plus de culture et de gofit. 
Le mèlre le plus ordinaire du/Lsrn illyrien a beaucoup 
de rapport avec ceini de notre vers de dix syllabes. Quoique 
la césure soit généraiement peu marquée dans la poésie 
slave, il est rare que l'enjambement de la mesure ou le 
capricedu chant la rejette au delà du douzième pied. La bal- 
lade n'est pas divisée en couplete, ruais la pensée est ordi- 
nairement circonscrite dans les vers, forme très-antique, qui 
donne de la monotonie mais de la solennité à l'expression, 
surtout quand le chant s'y approprie heureusement, ce qui 
arrive presque toujours, à cause de la simplicité des motifs. 
Le poëte illyrien ne s'est pas soumis à l'esclavage de la 
rime ; mais presque tous ses mots, terminés par des vocales 
sonores, prêtent infiniment à l'harmonie. Il a d'ailleurs deux 
procédés qui favorisent singulièrement la nombre, et qui 
consistent dans l'opposition ou le balancement de la phrase 
poétique, et dans la répétition contrastée de l'exp-esion, ce 
qui est, par parenthèse, une forme très-naturelle aux jeunes 
langues et un artifice fort insipide dans les langnë'en 



98 
cadence. Le plus grand défau d'un poete qui a perdu de 
vue la nature, c'est la prétention de lui ressembler. 
Je ne sais si la langue slave aura jamais une liltérature 
classique; je l'en crois très-die sous tous les rapports, 
et il est du moins certain qu'elle a dejà son llade ou sa 
J¢rusalem : c'est l'Osmanide, poëme épique de Gondola, 
aussi célëbre chez les Dalmates qu'il est inconnu à Paris. 
Toutefois, ce poëme assez récent n'existe Iqi-mme que dans 
la boucbe des rapsodes et dans quelques manuuucrits très- 
rares; encore le temps en a-t-il fait perdre deux chants, 
que bi. le comte de $orgo a retablis avec un talent très-dis- 
tingué, mais qui sont bien loin d'atteindre, au gré des con- 
naisseurs délicaLs,  la naïve sublimité du modële. En at- 
tendant que le poete esclavon prenne son rang parmi les 
maitres de l'épopée, ce qui peut arriver un jour, son exis- 
tence, à peine coustatée, n'occupe pas la renommée à vingt 
lieues du pa)s qui conserve ses cendres, et je n'ai jamais 
enlendu nommer un de ses Cules dans tout le reste de 
l'Europe. Cependant ces bardes obscurs, dont le nom sera 
tout à fait ignore de l'avenir, font le charme d'une nation 
xive, spirituelle, sensible, qui confine d'un coté à la patrie 
de Virgile, de l'autre à celle d'Homère, et qui ne le cède 
ni à l'llalie ni à la Grèce antique dans la beaute du. territoire, 
dans la variéte des sites, dans l'origina]ité des mœurs et des 
in,pirations. Cette singularité dans la destinée liltéraire 
des nations vaudrait la peine d'ètre approfondie. 
J'ai dit que l'opposition de la phrase poétiq,c et la rëpê- 
tition contrastée de l'expression ou de la figure étaient un 
des artilices les plus commuus du poëte illyrien, et l'on 
peut en conclure, comme je l'ai déjà insinue, qu'il nN a rien 
qui ressemble mieux à l'enfance d'un art que sa cducité. 
Je ne vois que cette différence entre le poëte primitif et 
ceh,i des littératures très-raf6nées, que lun obeit a lïmpul- 
sion d'une senibilite naturelle, et pour ainsi dire eufimtine, 
qui s'amuse du choc des idëes et des images, et que l'an- 
tre, fatigué de l'éternelle beautedes senthnents simples, les 
tourmente pour les renouveler. Il serait peut,tre hardi, 
mais il serait vrai de dire que le bon sens est l'àge adulte 
des arts. 
La littrature illyrienne dont ie parle ici, c'e.t la littëra- 
turc originale et spontanée de la langue nave. Ce n'est pas 
la littérature acquise, la littérature d'importation, que l'll- 
lyrie possède comme tous les autres pays de l'Europe, pour 
ne pas dire mieux qu'aucun antre. Il n'y en a point en effet 
oi les langues classiques des anciens et desmodernes soient 
cultivées avec plus d'ëclat; et il suffit de rappeler aux sa- 
vants, pour le prouver, les noms des Boscovich, des 
Stay, des Zamagna, des Sorgo, des Appendini, des Albi- 
noni, si chers aux muses gecques et latines. 
Le culte de la muse slave a dU tre beaucoup plus dé- 
daigné dans la civilisation scolastique et universitaire des 
ages modernes; mais je ne doute pas qu'il ne se rétablisse 
un jour. Le patriotisme des nations ClairCs reveillera 
tot ou tard la poésie des vieilles langues, et ne saurait 
mieux faire, car fl n'y a plus, helas, de poésie que là. Par 
rapport a l'lllyrie, j'ai déjà d,t qu'elle avait au moins son 
lasse dans le Gondola. Le vieux Wragnin ou Waragnin, 
que les Italiens appellent Ra9nino, ne le cède pas de 
beaucoup à Horace, et Giorgi a des pièces charmantes  
qui auraient rendu jaloux Anacréon et Théocrite. On n'a 
pas le droit d'abdiquer une langue qui a produit de telles 
merveilles. Charles Nou, de l'Académie Franc.aise. 
I LLYBIE[NES (Provinces). Vo/e xar. 
I LMEX (Lac d'), dans le gouvernement russe de la Grande 
Novogorod, long de quatre myriamëtres sur trois de large, 
très-profond et très-dangerenx. C'est sur sa rive septentrio- 
nale, à deux myriamètres de Novogorod, à l'endroit où il 
reçoit les eaux du Wolchow, que s'élève le magnifique con- 
vent de Saint-Jurli, qui se distingue.de la plupart des autres 
monastères de la Bussie, non-seulement par le st)le simple 
et noble de son architecture, par son antiquité et ses t- 
sors, mais encore par d'imoortantes collections de vérita- 

ILLYRIENNES  _ ..... , 
bles richesses artistiques. Le lac d'llmen, aliment par plu- 
sieurs riviëres considérables, est très-productif pour la p- 
che. La Msta, formée de la réunion de la Zna et de la 
Schlina, le Lowat, avec ses bras qui forment un della, ses 
nombreux affluents et la $chelona, sont les cours d'eau 
les plus considêrables qui y aboutissent, tandis que le Wol- 
choir lui sert de cana[ de déctmrge et porte  eaux au lac 
Ladoga. 
Le lac d'llmen et ses canaux forment aujourdthui une 
des plus importantes voies intérieures de communication de 
la Bussie, le canal qui, sur le bord septentrional du lac,. 
joint la Msta au Wolchow, reliant Saint-Pétersbourg à 
Astrakan, et le canal de Welikiluki mettant en communica- 
tion Biga et Saint-Pétersbourg au moyen de la Duna et du 
Lowat. De trois c6tés, au nord, au sug et à l'ouest, ce lac est 
entouré de colonies militaires; et Staraja-Rusa, au sud, la 
capitale de ces colonies, est remarquable par des salines 
d'une richesse extraordinaire. 
ILOTES ou HILOTES, et encore HÉLOTES, popula- 
tion de la ville d'Helos, dans le Péloponnèse, au fond du 
golfe de Laconie, indignement reduite en esclavage par 
l'impitoyable Agis 1 , roi de Lacédémone, qui l'eflaça, 
elle et ses murailles, de l'ancien royaume de Ménelas, dont 
elle faisait partie. Son antiquite, son amour de la liberté, sa 
aillance, chantee par Homère, meritaient ì cette ville nn 
meilleur sort. I'oe victiM blalhenr aux vaincus : dirent les 
Vomains; honte aux vaincus.' disait Sparte, cent fois plus 
cruelle que Borne. Ce que le fer et la flamme avaient oublié 
de ses habitants, elle le toEma captif, bommes, femmes et 
enfants. Leur esclavage, plus honteu x encore pour leurs tyrans 
que pour eux, fut si avilissant, que le nom dï/ote et d'i/o- 
tsme fut dans la suite la seule expression qui put peindre 
l'abjection morale et physique de l'homme. Soumis aux 
plus dégoOtants olfices, il leur était defendu de coucher dans 
la ville de Sparte, cette fiëre rëpublicaine, dont la]oie était 
de faire des esclaves de ses propres frères. Les travaux ms- 
tiques, les delices de l'homme simple et Iii)re, étaient pour 
ces malheureux un supplice, une hnmiliation sans fin ; le 
fouet etait incessamment levê sur eux. A des epoques fixes, 
dans l'annèe, on les fustigeait impiloyablement, et sans 
motifs, seulement pour qu'ils se remi.sent en mémoire qu'ils 
etaient moins libres que des bëtes de somme. On écrasait 
sur la pierre leurs nouveau-nus quand leur accroissement 
donnait des craintes à cette barbare rêpublique. Le gouver- 
nement les louait ou les prêtait aux citoyens, qui étaient 
tenus de les lui rendre, à sa première réquisition. 
Tous les esclaves h S p a rte, de quelques nations qu'ils 
lussent, étaient géneralisés sous le nom des anciens habi- 
tants dela malheureuse ville d'Helos. Certains jours de fte, 
on Iorçait ces miserables à s'enivrer : alors, en cet Ct, 
trébuchant, tombant à terre, on les offrait ple-me à la 
risée et aux insultes des enfants, pour salir leurs regards 
plutbt que pour leur laite horreur de la débauche, pins 
hideuse encore sur ces corps avilis par la servitude. Infor- 
tunés prolétaires, donnaient-ils de l'ombrage à la rëpn- 
blique par leur accroissement, on en égorgerait un certain 
nombre; 2,000 furent ainsi massacrés en une seule nuit. 
Quels bonrreanx étaient cbargés de ces executions? Qui le 
croirait ? Les plus braves, les plus forl, la fleur de la jeu- 
nec, se spartiate! Vaiaement ces martvrs de la Grèoe, l'a 
469, se soulevërent-ils dans Sparte, qu'un horrible trem- 
blement de terre avait à demi renversée. Eux et les Mes- 
sénieus, qui s'étaient joints à leur cause, firent réduits de 
nouveau. Dès lors la fureur de leurs tyrans ne leur laissa 
nulle relâche. Cependant, en de pressants périls, on les em- 
ployait dans les combats; et sïls donnaient d'éclatante. 
preuves de bravoure et de dévouement, alors, éclairée d'un 
rayon de justice et d'humanité tombé des cruelles lois de 
L)curge, Sparte affranchissait ces ilotes, et les admettait 
atl nombre de ses citoyens. Les généraux Lacédémonien 
Lysandre, Callicratidas, Gylippe, furent des i|otes affran- 
chi». On aurait peine à croire à t'ilotisme, si nous n'aions- 



ILOTES 
eu sous nos yeux, en deux vastes parties du monde, l'es- 
clavage des noirs, dont la postérité vengea si crneUement 
les os de ses pères sur les mornes en leu du Cap, eucore 
rougi du sang des blancs. 
ILÇA, ancien nom de Pile d'Eibe. 
ILVAïTE ou LIÉVRITE, noms d'une des espèces 
minéralogiques du genre [er, que les classilïcateurs mo- 
dernes appellent fer silicatd (ydnite ou fer calcardo- 
siliceux d'Haiiy). C'est une suhstance d'un noir brmnhtre, 
poussière noire, composée de silicate, de peroxyde de fer et de 
silicate d'ox)dule de fer et de chaux, cristallisant en primes 
droits rhomboidaux, termines par des sommets 
quatre faces, qui se font souvent remarquer par un chatoie- 
menl particulier. L'ilvamte, que l'on observe aussi en masses 
ba¢illaires, fibreuses et compactes, se trouve h File d'Elbe 
(en latin llva, &off le nom d'ilvaïte). 
IMAD-EDDAULAfl. Voye'. Boums. 
IMAGE du latin imago, derivë d'imilari, imiler. En 
effet, une image est l'imitation d'une chose naturelle qui 
vient à frapper nos yeux ou notre esprit. Dans le premier 
cas, elle porte également le nom d'image, qu'elle soit le 
produit instantané et fugitif de la réflexion d'un objet sur 
une surface unie (voyez l'article ci-après), ou bien qu'elle 
provienne du travail d'un artiste. Dans le second cas, elle 
est le résultat du talent d'un poëte, qui, dans son ouvrage, 
a su retracer avec intérét une scène gaie, terrible ou atten- 
drissante. 
Quoique le mot image s'emploie comme terme d'optique 
ou de rhétorique, il est d'un usage bien plus fréquent et 
bien plus général encore dans les beaux-arts. Cependant, 
on ne doit pas s'en servir indifféremment pour toute repré- 
sentation, pour toute imitation. La poésie seule emploie le 
mot imaçe en parlant de la figure d'un personnage que nous 
voyons ou que nous aurions pu oir : autrement on dit 
plut6t le portrait, la statue, la 9ure. Ima9e est surlout 
réervé pour des personnages respectes, ou bien pour des 
ëtres que nous n'avons jamais vus : ainsi, on dit une ima9e 
de la Vierge ou de saint Jean, l'image de Dieu, etc..Nous 
devons cependant ajouter que si, chez les Grecs, le mot 
d.xdv, que nous traduisons par image, servait à désigner de 
belles productions des arts, un artiste maintenant serait peu 
flatté d'entendre dire qu'il a fait une image de saint Étienne, 
ou de sainte Julietle ; il regarderait mème cette expression 
comme une critique. E effet, on n'emploie plus le mot image 
que pour des ohjets de commerce, ordinairement sans 
mérite sous le rapport «le l'art. 
Les anciens peuples ont eu beaucoup de vénération pour 
les images ; les Juifs cependant ne s'en permettaient aucune, 
ni dans leurs temples ni dans leurs maisons. Les maho- 
métans ont adopté ce système dans leur religion. Les Ru- 
mains au contraire avaient un immense re«pect pour les 
images de leurs ancëtres : ils les conservaient soigneusement, 
et les plaçaient ordinairement dans l'atrium de leur mai- 
son. Des esclaves étaient chargés de les netto)'er, de les 
parer dan» les jours de fète, de les porter dans les jours de 
triomphe, ou de funérailles. Cet honneur n'était rendu qu'à 
ceux qui avaient exercé de grandes magistratures, telles 
que l'édilité, la préture et le consulat. Polybe rapporte que 
dans les jours de solennité on mettait des toges i toutes les 
images des ancétres, et que ces toges étaient prdtextes, 
c'est-à-dire bordées de pourpre, pour les images des consuis, 
des préteurs ; celles des censeurs étaient ornées différemment. 
Des toges brodées en or étaient données aux images des 
triomphateurs. Lorsqu'au contraire un ancètre ne méritait 
aucune estime, son image ne paraissait, pas dans les céré- 
montes; si méme il avait encouru le blhne ou le mépris, 
on brisait son image, on la trainait dans la boue, on la jetait 
dans un fleuve, mme dans un cloaque..Ne trouvons-nous 
pas dans ces usages l'exemple de porter dans nos pro- 
oessiom religieuses les images de la Vierge, celles des saints 
patrons de la ville ou de la paroisse ? .N'y voyons-nous pas 
surtout l'origine de cette habitude si IrCquente d'avoir pour 

-- IMAGE 299 
un grand nombre d'images des robes plus ou moins amples, 
plus ou moins belles, plus ou moins riches, suivant que 
la féte est simple ou solennelle? Et les filles de la Vierge, 
les membres des courtAries, ne sont-iis pas les successeurs 
de ces esclaves chargés du soin des images des ancêtres? 
Les Romains plaçaient à la poupe de leurs navires l'image 
d'une divinité, qui devenait tutélaire pour le vaisseau ; 
de lb vient l'habitude de sculpter une ou plusieurs figures 
sur les bttiments de mer. Cet usage est remplacé dans la 
navigation flusiale parle nom écrit de la Vierge ou du saint, 
patron du bateau. 
Les premiers chrétiens curent aussi des images, et leur 
s éneration devint telle que dans le huitième siècle quelques- 
uns, regardant ce culte comme de l'idolttrie, cberdmërent 
 le détruire, et firent, h cause de cela, nommés icono- 
c la s t e.s. Metrophane-Critopule rapporte que lorsque l'on 
fait la/ère d'un saiut, on place son image au mi/leu de l'é- 
glise, et que ceux qui sont présents siennent la baiser; 
mais cet hommage se rend dilféremment suivant le person- 
nage. Si c'est l'image de Jésus-Christ, on lui baise les pieds 
si c'est celle de la Vierge, on lui baise les mains; si c'est 
celle d'un saint, le baiser se donne sur le visage. Les ima- 
ges Atant universeilement vénérées, celles de la Vierge sur- 
tout se sont muitipliées à l'infini; beaucoup sont encore 
maintenant l'objet d'unehaute venéralion. Parmi ces images, 
les unes sont scuiptées, soit en basalte, soit en bois ; souvent 
elles sont couvertes de vëtements en étoffe riche, brodëe en 
or, en argent, ou ornée de pierres précienses ; d'autres sont 
peintes : quelques-unes de celles-ci sont attribu,:es  saint 
Luc; c'est une erreur. Sans savoir quel aurait pu ètre le 
talent de i'evangéliste saint Luc dans les beaux-art% on est 
assuré maintenant que ces anciennes peintures ont été l'ou- 
vrage d'un peintre nommé Luca, et qui vivait en ltalie dans 
le quatrième siècle. Il serait difficile de donner une liste 
complète des nombreuses images de la Vierge; mais il pa- 
raitra curieux sans doute de rappeler ici les plus celèbres. 
Parmi les madones scuiptées, on doit citer celles de Lu- 
lette, de Capocroce, de Foursiëre, de Liesse, de Charlre_s 
et du Pu)-en-Velay, d'Einsilden en Suisse, d*Atocha, de 
Valence et du mont Sera. Parmi les images peinte% nos 
appellerons l'attention plus particulièrement sur celles de 
Sainte-Marie-Majeure, de Saint-.Nicolas de Tolentin à Ruine, 
du mont Brio h Vicenoe, du mont de la Garde " Castclla- 
mare, de Messine, de Passau, etc., et nous nous arrèlerons 
sans pdrlcr des célebres vierges de 11 a p h a e I, car ce serait 
aussi une espèce de prolanalion de les citer dans une liste 
d'images. 
Ainsi que nous l'avons dejà fait entendre au commence- 
ment de cet .article, le nom d'image ne sert plus maintenant 
qu'h désigner ces petites figures gravées et ordinairement 
enlmuinées, que l'on accorde pour récompense aux enfant% 
lorsqu'iis ont bien lu ou bien récité leurs leçons ou leur cate- 
chisme. Autrefois image a été synonyme d'estampe, et on 
donnait le nom d'imagiers  ceux qui les fabriquaient ou 
les vendaient. Les libraires, ainsi que les autres marchands, 
avaient aussi des enseignes sur lesquelles ils faisaient pein- 
drequelque image, et les livres du dix-seplième siècle portent 
souvent leur adresse aveccette mention : A l'image 
Christophe, A l'image Saint-Jacques, A l'image otre- 
Dame; quelquefois aussi on disait simplement : A la Belle 
Image : c'était celle de la Vierge. On dit tamnilièrement 
un livre plein d'images , un livre d'images. Si un enfant 
resle bien tranquille, souvent on dit : Il est sage comme unu 
mage. Lorsqu'une femme est belle, mais qu'elle ne sait 
pas causer, et que son esprit ne répond pas i sa grlce, on 
dit : C'est une belle inta9e. Dvcnsr aine. 
IMAGE (Optique). On donne ce nom à l'apparence pro- 
dmte par les rayons lumineux émanés d'un objel et r6fl..cbis 
par un miroir. Quoique généralement les images ne soient 
qu'uneapparence, on doit cependant leg distinguer en 
virl:«cllcs et images reelles. Les miroirs plans nous don- 
nen! un exemple des prenfières; s'il.g nous font voir un objet 



00 
symrtrique à celui qu'on leur présente, ce n'est lb qu'une 
illusion de l'oeil ; l'image n'existe pas réellement, car les 
rayons lumineux ne traversent pas le miroir, llais suppo- 
sons un miroir concave, et plaçons un corps éclairé au delà 
de son foyer; si l'on suit la marche des rayons lumineux, 
en se conformant aux lois de la r Ci ex ion, on reconnaitra 
qu'après avoir été réfléchis, ils viennent former en avant 
du miroir une image relle, dont on constatera l'existence, 
soit en la recevant sur un écran, soit en plaçant simplement 
l'oeil dans la direction des rayons rëfléchis ; cette image, 
placée entre le centre de courbure et le foyer principal du 
miroir sera p!us petite que l'objet et renversée ; si l'on 
transporte l'objet à cette place, son image viendra le rem- 
placer; elle sera alors amplifiée et toujours renversée. Enfin 
si l'objet est placé entre le miroir et son centre, lïmage de- 
vient droite et virtuelle commedans les miroirs plans, mais 
elle est amplifiée. Quant aux miroirs convexes, ils donnent 
toujours des images virtuelles, droites et plus petites que 
l'objet. 
Comme les miroirs, les I e n t i I i e s donnent lieu à la for- 
motion d'images, les unes réelles, les autres virtuelles. Pour 
en reconna|tre thcoriquement la nature, il suffit de suivre 
la marche des ra)'ons lumineux, en a)ant égard cette fois 
aux lois dela réfraction. 
C'est sur ces consid0rations que repose la construction de 
la plupart des instruments d'optique. E. lr.raaEcx. 
IMAGE (Litlérature). Longin dffmissait lesimages des 
pensées propres à fournir des expressions et ì présenter des 
tableaux  l'esprit. « Ce sont, ajoutait-il, des discours que 
nous prononçons, lorsque, cëdant à l'enthousiame ou à une 
vive emotion de l'lme, nous croyons voir les choses dont 
nous parlons, et nous chercbons à les peindre aux yeux des 
autres. ,, C'est donc, comme on l'a dit, une sorte de ma- 
trialisation de l'idee, ou plutrt le voile matëriei d'une idée, 
selon l'expression de Marmontel. « En poésie, dit ce savant 
a¢adémieien, le but de l'image est i'etonnement, la surprise. 
Dans la prose, au contraire, son objet est de bien peindre 
les choses et de les faire voir clairement. Dans l'un cri'autre 
genre, du reste, elle tend également à emouvoir. Ces pein- 
tures contribuent beaucoup à donner du poids, de la ma- 
gnificence, de la force, au discours. Eles l'Chauffent, elles 
l'animent ; ménagées avec art, elles domptent et soumettent 
le lecteur et surtout l'auditeur. On appelle généralement 
images, tant en éloquence qu'en poésie, toute descrip- 
tion, courte et vive, présentant les objets aux )-eux au- 
tant qu'à l'esprit. D'après Longin, on a compris sous le 
nom d'image tout ce qu'en poésie on appelle descr il- 
t i on et tableau. Mais en parlant du coloris du style, on 
attache à ce mot une idée beaucoup plus précise ; et par 
ima9 e on entend celte espècede métaphore qui, pour donner 
dela couleur à la pensée et rendre un objetsensible, s'il ne 
l'est pas, ou plus sensible s'il ne l'est pas assez, le peint 
sous des traits qui ne sont pas les siens, mais ceux d'un objet 
analogue... Toute image est une m é t a p h o r e, mais toute 
métaphore n'est pas une image... L'image suppose une res- 
semblance, renferme une comparaison; et de la justesse 
de la comparaison dépend la clarté, la transparence de 
Iïmage. ,» 
Les peuples orientaux, comme les peuples barbares, font 
un grand emploi des images dans leur langage. Chez les der- 
niers, c'est un besoin ; chez les premiers, c'est un effet du 
climal, qui exalte leur imagination. Les langues plus avan- 
cées sedépouillent davantage de cet ornement. La iittérature 
française est mème aceusée d'en ëtre trop sobre par ses 
oeurs d'Europe, qui en abusent peut-ètre encore, et qui ne 
comprennent pas une poésie sans un style virement imagé. 
Une école a pourtant voulu chez nous aussi s'envelopper 
de cette vapeur, quelquefois brillante, trop souvent nébu- 
leuse, et à force de rechercher lïmage, elle produirait une 
çorte de matérialisation de la langue. L. LotrvEr. 
IiAOES (Culte des). Voyez, Ico_OL«tat. 
IM&GIER ou IIIAGER. On a donné ce nom aux mat- 

IMAGE -- IMAGINAIRE 
i chauds et fabricants d'images imprimées, et notamment 
d'images communes, imprimées sur bois. Leur art, qui se lie 
ì l'histoire de lagravure sur bois, a conduit aux premiers 
essais de l'imprimerie typographique. 11 a commencé, à 
ce qu'on croit, par l'impression des c a r t e s à j o u er. C o s- 
ter de Harlem était un de ces anciens imagiers. Dans les 
i quarante premières années du quinzième siècle, en effet, on 
imprimait, en plusieurs endroits, sur des planches en bois. 
gravées, des figures avec un texte à eté, au bas où sortant 
de la bouche des personnages. On possède plusieurs livres 
de ce genre, comme la Bble des Pauvres. Les plus ancien 
ont été imprim d'un scul cété du papier, avec une encre 
grise en détrempe. Les figures sont au trait, d«us le gofit 
gothique. Les fcuiilets sont souvent coliés dos à dos; des 
lettres de l'alphabet indiquent l'ordre de leur arranment. 
On les imprimait sans doute par le frottement : plusieurs en 
portent la preuve. Bientét ou imprima seulement du texte 
sur des planches en bois (voye XLOç«Vm) ; puis on voit 
apparaltre la presse à imprimer : la pression est substituée au 
frottement. Vers le mème temps naissait l'imprimerie en ca- 
ractères mobiles; mais les imagiers continuaient leurs ira- 
pressions; puis les deux arts s'unirent, la gravure se mèla 
aux caractères mobiles, la gravure sur bois se perfectionna; 
et pendant que les artistes font aujourd'hui à grands frais des 
illustrations pour les amateurs, des dessins pour elu- 
cider les ouvrages seentifiques, des artisans plus modestes 
labriquent des images pour le peuple et les enfants, et le 
dix-neuvième siècle a encore ses imagiers. L. LotsoEr. 
IMAGINAiItE  ce qui n'est que dans l'imagination 
et n'a rien de réel. Les espaces imaginaires, créés par l'i- 
magination, en dehors du monde réei, sont peuplés ,:'idées 
chim6riques, et servent de refuge aux esprits exaltés, rCveur» 
ou confiants. Les trompeurs créent aussi des c h i më r es, 
qui leur servent à leurrer. Le malade imaginaire est celui 
qui, atteint d'h y pocond ri e, se croit malade sans l'ètre. 
IMAGINAIILE (Mathématiques). On donne ce nom 
aux racines d'indice pair des quantités négatives. L'extrac- 
tion de ces racines ne peut ètre eflectuee d'aucune ma- 
nière : supposons que l'on euiile obtenir la racine carree 
de -- 5, par exemple; cette racine n'est ni q-- 5, ni -- 5, 
car le carré de toute quantité, positive ou négative, est es- 
sentiellement positif; on ne peut donc que se borner à- 
indiquer une opération impossible, en écrisant V'----". 
L'expression OE q--  V'-- , où : et  sont des quantitês 
réelles, rationneiles ou irrationnelles, positives ou négatives. 
a recu le nom de type imaginaire. En appliquant aux 
exprëssions compliquées d'imaginaires les rëgles du calcul 
ordinaire, les analystes ont démontré qu'elles pouvaient 
en effet Cre toutes ramenées à ce t-pe unique. Quoique 
elles ne représentent rien de réel, leur emploi est des plus 
avantageux, et elles conduisent à des résultats que sans 
elles il serait difficile d'atteindre : nous ne citerons que la 
célèbre formule de bloivre. Qui ne -oit, dureste, la géné- 
ralité qu'entraine la considération du t3"pe OE q--   
Ne représente-t-il pas non-seulement toutes les expressiong 
imaginaires, mais encore toutes les quantités réelles? Pour 
avoir ces dernières, il suffit de faire  : o. 
Les racines des é q u a t i o n s sont ou réelles ou imagi- 
noires. C'est en admettant ces deruières que l'on établit que 
le nombre des racines d'une équation est Cai à son degre. 
On démontre aussi que si OE q-- V'--'T satisfait à une 
équation, il en est de mème de OE--  
En géométrie, on conçoit aussi des points, des lignes, 
des surfaces, des 'olumes imaginaires. Soient une droite et 
nn cercle situés dans nn mème plan; rapportons-les à deux 
axes fixes, et cherchons les c o or d o n n é e s des points d'in- 
terseetion. Tant que la distance de la droite au centre du 
cercle fie sera pas supërienre au rayon, nous trouverons 
pour les coordonnées des valeurs réelles; mais sit6t cetto 
limite dépassée, les imanaires apparaissent, et les points 
qu'elles représentent »out eux-mèmes dits irnaginaire. 



IMAGIIAIBE -- 
• Il y a une différence essentielle entre l'idée que l'on 
doit se faire de ces points et celle que nous attachons par 
exemple aux points de rencontre des courbes et de leurs 
a s y m p t o t e s. Ces derniers sont situés à I' i n fin i, c'est-à- 
dire à une distance qui l'emporte sur toute grandeur as- 
signable ; si l'infini ne peut tre comparé à une quantilé 
finie, ce n'est que par l'exclusion de l'idée de limite, idée 
qu'emporte toujours avec elle une graudeur déterminée. Ce- 
pendant on peut dire que l'infini est plus grand que le fini ; 
on ne peut établir aucune relation du mme ordre entre les 
expressions imaginaires et les expressions réelles. 
E. 
IMAGINATION. C'est peut-être celle des faculté s 
de l'intelligence que les orateurs et les poïtes ont le plus 
chantée; mais c'est aussi peut-Cre celle que les philoso- 
phes ont le moins étudiée et le plus mal alCnie. 11 est des 
métaphysiciens qui n'en disent pas un mot. Ce que Locke 
lui consacre de mieux, se réduit il ceci : « C'est l'affaire de 
la mémoire de fournir à l'esprit ce idées dormantes dont 
elle est la dépositaire, dans le temps qu'il en a besoin, et 
c'est à les avoir toutes prêtes dans l'occasion que consiste 
ce que nous appelons invention, magination et vit,cit 
d'esprit. ,, Condillac coufond l'imagination avec la réllexion 
et avec la mémoire : « Lorsque, par la réflexion, dit-il, on 
a remarqué les qualilés par oii les objets diffèren{, on peuL 
par la mdme réflexion, rassembler dans un seul les qualites 
qui sont séparées dans plusieurs : c'est ainsi qu'un poëte 
se fait, par exemple, l'idee d'un liéros qui n'a iamais existé. 
.Alors les id¢es qu'on se crée, sont des images qui n'ont de 
réalité que dans l'esprit ; et la réflexion, qui fait ces image», 
prend le nom d'imagination. ,, Il serait difficile de réunir 
en moins de lignes plus d'inexactitudes et plus d'er- 
teurs. 
L'imagination est la faculté que nous avons d'imager , 
qu'on nous permette ce terme, plus exact que celui d'ma- 
9iner, qui n'exprime qu'une moitié de cette faculté. Imager , 
c'est concevoir des images. Ilos images sont de deux sortes. 
Celles de la première sont des représentationsd'objets réels 
et sensibles, et celles-là introduisent dans notre intérieur 
une espèce de copie ou de portrait inteIleclue! des choses 
qui ont en dehors de nous. Dans cette magnifique opéra- 
tion, qui établit dans notre intelligence un immense ma- 
gasin d'idées et de matériaux de construction, l'imagina- 
tion est la compagne inséparable de la perception, 
qui n'est elle-mme que le sens intérieur mis en contact 
aec le dehors par les sens extérieurs. Le sens intérieur est 
préciément la faculté d'avoir des sensations et des intui- 
tions purement intérieure. A cette puissance d'inhoduire 
au dedans les images des choses du dehors, se rattaclie le 
privilége de les }' maintenir, de les }, rappeler, eu de les }' 
reproduire. 
Dans cette seconde opération, non moins magnifique que 
la première, puisqu'elle nous permet de disposer, à tout ins- 
tant, de nos ricltesses intellectuelles, sans jamais les épuiser, 
l'imagination est la compagne intime ou une sorte de forme 
nouvelle de la m é m o i r e. Comme la mémoire est passive 
ou aetive, l'imagination est passive ou active, c'est-/t-dire 
qu'elle rappelle et reproduit un objet involontairement ou 
volontairement. Ainsi que la mémoire, l'imagination suit, 
dans ces deux cas, les lois naturelles de l'association 
des idées. C'est à s'y tromper entre ces deux facultés, 
c'est h les confondre l'une avec l'autre. Et-ce la mémoire, 
est-oe l'imagination, qui met devant nous l'ami absent, la 
contrée éloignëe? Séparer, dans l'analyse, la mémoire et 
l'imagination est possible, mais faire nettement la part de 
chacune est difficile ; elles accomplissent ensemble l'oeuwe 
commune. Elles y font pourtant chacune leur office et se 
distinguent par des nuances. Dans ce« reprodnctions si 
merveilleuses, n'est-ce pas l'imagination qui dessine le 
plus nettement et le plus complètement les objets ? West- 
ce pas elle qui pousse le plus :oin les illusions? 1Vest-ce pas 
elle qui nous fait oublier tout le présent pour l'absent ? 

IMAGINATION 0! 
I qui nous précipite de fantaisies en fantaisies, et finit par 
' nous jeter dans les hallucinations? 
L'imagination est surtout puissante dans le domaine de 
la seconde sorte de nos images, dans celles qui ne lui vien- 
nent pas du dehors, qu'èlle compose librement avec les 
images de la première sorte. A c6lé de la puissance d'in- 
troduire dans l'entendement des copies de choses extérieures, 
elle a la puissance de combiner les images qu'elle y a 
introduiles de façon à en composer d'autres, qui ne sont 
des copies de rien, auxquelles ne répond rien au monde. 
Ces produits, on les appelle les combinaisons, les crations, 
ou ieschimères de l'imagination. On les appelle des combi- 
naisons lorsqu'ils se bornent à rassembler, d'une manière 
simple et ordinaire, des traits épars, dont l'ensemble n'offre 
rien de brillant, rien d'élevé. Réunir en un seul dessin ce 
qu'on a vu de plus beau dans plusieurs édifices, et tracer 
avec ces détails, ces emprunts, le plan d'un nouvel édifice, 
c'est combiner. Assembler, au contraire, en un seul chei- 
d'oeuvre, plein de gre, de majesté et de vie, les traits 
les plus beaux et les plus sublimes, et convertir avec un 
fer un bloc de marbre en un Apollon, c'est créer. C'e:t 
créer aussi que de planer, comme Homère, au-dessus d,: 
la terre et des mers pour écouter, dans les asemblées des 
dieux, le secret des combats et des luttes, des destinées 
présentes et fut»res de deux peuples. C'est créer que de 
peindre, comme le chantre d'Achille, de manière il inté- 
resser tous les àges, les mœurs et les croyances d'un seul 
-age. C'est, au contraire, se livrer il des chimëres que de bàlir 
des chteaux en Espagne avec l'argent qu'on va gagner à la 
loterie, ou d'accumuler en idée toutes les jouissances du luxe 
sur ur, e existence qui doit s'épuiser en travaux et en priva- 
tions. Dans ces cas, l'ima#nation est dite créatrice, et en 
apparence, elle ne copie pas. Cependant, au fond, elle ne 
crée pas : elle combine, elle compose, ou elle dëlire. A bien 
examiner les choses, en effet, ¢liacun voit que l'architecte 
qui dessine l'église de la Madeleine, aprës avoir comparé la 
Maison-Carrée, le temple de Poe.dum et le Parthénon, 
copie, mais ne cree rien ; que le peintre qui fait un Apol- 
lori comme Apelles faisait sa Vënus, copie, mais ne cr'e 
rien ; que le poëte qui ohante la colère d'Achille et les aen- 
turcs d'UI},sse, commeles chante le ieillard de Mëonie, 
copie, mais ne crée rien. L'imagination la plus crëatrice 
agit de mémoire. Elle a sur les autres la superiorite d'ue 
intussusception plus vive, d'une conservation plus fralclie, 
d'une reproduction plus éclatante, d'une combinaison plus 
merveilleuse; elle n'a pas d'autres avantages, elle n'est 
créatrice qu'en ce sens, qu'elle conçoit son modèle, son 
type, son idéal, qu'elle façonne un personnage comme il 
lui convient, le fait agir comme il lui plalt, le met dans les 
circonstances et dans les lieux de son clmix, biais tout 
cela, elle ne le produit qu'avec les moyens que lui fournit 
la nmoire; et si vous détaillez son idéal, vous en trouvez 
aisémenl toute la friperie dans la ralité. 
• Cependant, ses combinaisons ne sont pas des mosaiques 
fi'appees de mort : ce qu'elle fait respire, a %, a pensée 
et Iassion ; ses créations sont des puissances animées. Dans 
son audace, elle ouvre le ciel à la terre et met l'homme 
en commerce avec les dieux, évoque les grands hommes 
du passé et les peint avec des actions qui les élèvent au- 
dessus de l'fiumanité, représente les passions, les douleurs 
et les catastroplles de leur vie, ou expose leurs vices, leurs 
ridicules et leurs folies, de manière il vous commander suc. 
cessivement tous les sentiments qu'il lui plait, la pitié, l'ad- 
miration, la terreur, la compassion, le sourire. Elle crée 
la poésie lyrique, l'épopée, la comédie, la tragédie. Ele 
crée tous les genres de littérature, car elle fait une satire 
aussi facilement qu'un idéal ; elle dicte une fable, un conte, 
un roman, comme elle it:spire une ode, ou un drame ; elle 
sait aussi bien le secret des fées et des bètes que celui des 
amants et des béros. D'autres fois, elle dédaigne de s'a- 
dresser par la parole/ l'intelligence; elle cre alors le 
arts du dessin pour parler ì la vue, la musique pour parler 



302 
à l'oreille. Tons les arts sont ses enfants. Elle les occupe, 
]es varie, les enrichit, les excite sans cesse. Sans cesse, 
elle leur inspire de nouvelles créations. Ainsi que les lettres, 
elle les fait servir à tous les genres d'émotions et de pas- 
sions Magicienne, faisant de toutes choses ce qu'elle veut, 
elle les grossit ou les rapetisse, les déade ou les ennoblit, 
au mo)-en des sons et des couleurs, comme au moycn de 
la parole et des caractères. Dans les arts, comme dans les 
lettres, tozzt est de son domaine, tout est à son usage, l'al- 
tégorie, le symbole, le mytlze, la caricature. 
On a parfois prétendu que, semblable à la somnambule, 
elle marchait avec d'autant plus d'andace et de force, qu'elle 
s'ignorait davantage, qu'il fallait se garder de la réveiller, 
de l'atleindre, de mettre la raison sur ses pas, de crainte 
de la paralyser. La raison et l'imagination, a-t-on dil, sont 
ennemies; l'une tue l'autre. Rien n'est plus faux. Il est 
trës-vrai qu'en analysant une opération quelconqpe de l'in- 
telligence, on l'arrête ; on la met sons le verre de l'obser- 
vation; mais une opération arrêtée n'est pas une faculté 
anéantie ; l'observation faite, l'opCation reprend son cours 
avec d'autant plus d'assurance qu'elle a mieux mesuré 
ses forces. Comme toutes les autres facultés, l'imaginalion 
gagne à se connailre ; mieux elle se sait, mieux elle dis- 
pose de ses moyens. Supposer que chez elle tout est, ou 
enclzanlêment, ou caprice, que rien ne suit de rëgle, et 
+lu'au moment où la wm de l'intelligence y touche, tout 
s'évanouit, c'est faire l'hypothèse la phs gratuite. Son jeu 
est aussi naturel, aussi réel, aussi observable que celui 
de toute autre facullé de l"ame, que celui de la raison elle- 
mëme, dont elle est loin d'ètre l'ennemie, avec laquelle elle 
eulrelient, au contraire, les rapports les plus intimes. En 
ellet, l'imaginalion n'est qu'une des facullés secondaires de 
liutelligence, une des nuances de ce and pouvoir. Elle 
en est tout à lait inseparable. Elle est, sans cesse, soumise 
à la raison, qui la surveille, la jge, la dirige, excepté l'état 
de r+ve ou de fièvre, état où toutes les facultés sont à l'a- 
bandon, état où l'imagination l'e+t plus particulièrement. Il 
est vrai que, dans l'Cat de veille et de raison, nous nous 
laissons aller quelquefois au gré de celle de nos tacultés qui 
veut bien uous conduire, et que, dans cette situation, c'est 
le plus souvent l'imagination qui nous mène ; mais alors, 
c'est en vertu d'un parti pris, d'une résolution formellement 
ou tacitement arrtee. 
D'ailleurs, la raison peut, quand elle veut, reprendre son 
empire : d'ordinaire elle ne distribue à l'imagination que 
trois degrés de liberté. Le premier et le moindre de ses de- 
gres, c'est celui od elle enjoint à cette facult«; de tracer 
des images, des figures données et précises, a Mscrire, par 
exemple, un hexagone dans un cercle. Au second degré, 
elle lui laisse une demi-liberté. C'est Iorsqu'elle lui donne 
commandement d'aller à un but déterminé, sauf le choix 
de la route ; par exemple dans le conte moral, où Iïmagina- 
tion est maltresse des personnages, des d,:tails, de la bro- 
derie, mais où elle est, sans cesse, obligée de calcoler chaque 
trait conl0rmément au dessein qui lui est prescrit. Au troi- 
sième degré, la raison lui donne une liberté encore plus 
complète : Elle lui permet d'aller comme elle l'enterM, soit 
pour son amusement, soit pour celui des autres, à la seule 
condition de se posséder elle-mme, et de se distinguer de 
ce qu'elle est dans le rve, ou dans la fièvre. Mais celle situa- 
tion, complétement stérile et peu digne de l'intelligence, 
est rarement accordée à l'imagination, et son activité est 
presque touiours dirigée par la raison. 
Selon l'opinion vulgaire, c'est dans les crémions de la 
poésie ou de l'ar{ qu'elle at le plus librement. Il n'en est 
rien. C'est précisëment dans ces crémions qu'elle est le plus 
soundse aux lois du geint, qui sont les lois de la raison, 
du bon sens et de la morale. Le beau, l'honnête, le bon, 
Futile, le sublime, ne s'aplu'écien{ , en dernière analyse, que 
par la raison ; ce sont les plus pures idées, les plus hautes 
conceptions de celle faculte. Dës que, dans ces erCllons, 
I'maination franchit les lois de la raison, elle n'enfante 

IMAGINATION 
plus que des monstres, et n'excite plus que le mpris ou 
le dégot. La raison se constitue quelquefois complice de 
ces monstruosits ; mais c'est la raison des peuples encore 
dans l'enfance. {3'est ainsi que le symbolisme de l'Inde 
offre des monuments qui repoussent : la raison y permet 
ì l'imagination d'amasser sur le mme personnage une foule 
de têtes, une foule de bras, une foule d'emblèmes, qui se 
pressent, se gnent, s'excluent, et tuent à la lois la heauté 
morale et la beauté pby»ique. Dans les monuments de la 
Grèce, c'est au contraire la raison qui domine l'imagina- 
tion, qui la tempère, la fortifie, l'élève et la fait briller. 
C'est là ce qui fait de ces monuments les chefs-d'oeuvre 
et les types de l'humanité. Là, dans ce juste tempérament 
de l'imagination par la raison, est la gloire, est la puis- 
sance créatrice de l'imagination ",i son. plus haut degré. 
Aussi le génie des peuples produit-il d'autres chefs-d'oeuvre 
et s'approche-t-il ou s'éloigne-t-il de ces types, à mesure 
qu'il avance ou qu'il recule. Abandonner les rênes de l'i- 
magination à elle-mme, c'est les abandonner à un cheval 
fougueux, qui s'emporte et emporte son cavalier. Alors elle 
est la.folle dz« logis; alors elle crée toutes les monstruosi- 
tés intellectuelles et morales ; alors elle devient une puis- 
sance effrénée et effroyable dans les petites choses comme 
dans les grandes. Ou elle nous berce des plus pitoyables illu- 
sions d'amour-propre, de vanité, d'ambition et de folie, 
ou elle nous jette dans les tortures de la terreur, de la su- 
perstition, de la misère, de lïgnominie. Rien n'est si haut 
ni si saint qu'elle le respecte, ni la science, ni la religion, 
ni le droit, ni la raison, ni la vie. Tous les genres d'enthou- 
siasme, ou plut¢t-de fanatisme, fanatisme moral, religieux 
et politique, sont ses enfants. Que de fous jette-t-elle dans 
nos h¢pitaux, que d'aliénéspousse-t-elle au suicide ! Combien 
en précipite-t-elle dans les entreprises les plus extravagantes 
et les plus coupables! Elle a pouvoir sur les plus sages 
car chacun a son 9rai de folie. Mais bien réglée par la 
raison, elle grandit tous ceux qu'elle inspire ; elle les élève 
au-dessus des peines de la vie, des entraves du corps, de 
l'enceinte de ce monde; elle nïnspire pas seulement les 
Homère et les Apelles, les Phidias et les Millon, les Atteste 
et les Cervantes, elle guide les Platon et les Descartes, les 
Galilée et les biewton, les Démosthène et les Bossuer. Les hy- 
pothèses les plus ilgénieuses et les découvertes les plus 
admirables sont ses œuvres. C'est un syllome, aidé de l'i- 
magination de Cbristophe Colomb, qui nous a révélé I'A- 
mërique. Empirique ou transcendantale, l'imagination mérite 
nos etudes comme notre admiration. 
i%us possédons sur cette faculté des monographies de 
Muratori {Sur l'Imagination, édition de Richerz, 185 ), 
de Meister (Lettres sur l'Imagination, 1794), de Maass 
(Essai szr l'Imagination, 1792), et un poëme de De- 
I i I l.e. Mx'rrm. 
IMAM mot arabe qui signifie celui qui prdside, celti 
qui enseigne , dont nous avons fait iman, et qui est surtout 
employé pour désigner les plus célèbres dogmatistes du 
mahométisme, notamment les quatre fondateurs des sectes 
orthodoxes. Dans l'usage ordinaire, on appelle imans les 
oulémas qui sont chargés du service des mosquées. Ils 
récitent les prières, lisent à hante voix le Coran, font des 
serinons, assistent les malades, bénissent les mariages et 
sont ì bien dire les prêtres musulmans. Leur costume est 
le mme que celui des laïcs, auf le turban qu'ils portent 
un peu plus elevé. Ils reçoivent leurs traitement» des mosquées 
qu'ils desservent, et sont généralement en grande véné- 
ration parmi le peuple. Le sultan lui-reCe prend le nom 
dhman, comme chef snpreme de la religion. Pour les cbiites, 
l'iman est un ëlre doué de vertus surnaturelles en qui ré- 
side l'autorité spirituelle et temporelle, et qui seul représente 
la divinité sur la terre. Ait, Hassan, Houssein et ses des- 
cendant sont pour eux des imanides. 
En arable, on donne le nom d'imons à certains chefs ré- 
unissant le pouvoir politique et religieux, comme le prince 
«le I'Y é m e n et ce:ui de M a s c a t e. 



IMATRA  
IMATIL't ( Saut d' ), l'une des plus magnifiques chutes 
«l'eau de la Finlande, située à environ six myriamètres au 
delà de Wiborg. L'impétueuse Wuoxa, large de près de 67 
mètres, se precipite écumante de rocher en rocher, sur une 
étendue de plus de 5OO mètres, et d'une hauteur de plus de 
40 mètres, formant dans sa direction une chute d'eau oblique 
telle que n'en présente aucune autre cataracte du globe, 
excepté peut-être celle du blia g a ra. Des rochers surna- 
gent pele-mêle au milieu de cet ellrayant abtme, et, en bri- 
sant les flots qui se rompent contre eux, ajoutent à l'elfet 
de ce spectacle imposant. Sur les rives du fleuve, dans le 
voisinage de la cataracte, on trouve une multitude de cail- 
loux arrondis d'une manière toute particulière par l'action 
des vagues et connue sous le nom depierres d'Imatra. 
|MBÉCILLITÉ. C'est à peu près la mme chose que 
l'i d i o t i e; cependant, l'on peut 3' remarquer quelque diffé- 
rence. C'est l'inaptitude à la manifestation d'une ou de tou- 
tes les facu Ités intellectuelles proprement dites, et ce 
n'est que par extension qo'on l'applique au manque de 
quelques-unes des facultés affectives. Quand une partie seule 
du cerveau se trouvera défectueuse ou altérée dans son or- 
ganisation intérieure, qu'est-ce qu'il en résultera ? évidem- 
ment une impossibilité à l'exercice des fonctions cérébrales 
qui se rapportent à la partie viciée ou défectueuse; car il en 
est du cerveau comme de tous autres.organes, blous pouvons 
ainsi nous rendre compte de ces individus privés d'intelli- 
gence, véritables imbécilles, qui sont en même temps do- 
ndnés par des penchants très-violents, tels que ceux dela 
génération, de la destruction, du vol, etc. Nous pourrions 
citer mille exemples de cette espèoe d'imbécillité, accom- 
pagnée de quelqne penchant ou de quelque disposition 
instinctive particulière; mais on en rencontre partout, 
et il suffit seulement de fixer sur ces exemples une atten- 
tion soutenue. Allons plus loin. Un individu peut avoir 
une incapacité, un manque d'aptitude pour une seule 
faculté, et avoir en même temps une intelligence par- 
faite sous tous les autres rapports. Comment expliquer 
cela? q'est-il pas vrai que l'on peut avoir son cer, eau 
très-bien développé dans tontes ses parties, excepté une 
seule, très-petite, celle qui serait destinée à l'exercice d'un 
seul penchant, d'une seule faculté déterminée? C'est 
comme cela qu'à l'aide de nos principes et des obervatinns 
crànioscopiques, nous expliquons les anomalies de certains 
«dividus qui ont une inaptitude parlielle, une imbécillité 
partielle, sil m'est permis de la nommer ainsi. 
Les diverses imbécillites, soit qu'elles affectent toutes les 
facultés intellectueiles, soit qu'elhs soient partielles, sont 
presque iucurables, comme l'idiotie de naissance. Certai- 
nement, à force d'exercer ces embryons de facultés, fou 
parient à produire quelque faible manifestation de leur 
puissance, mais le résultat de tant d'efforts est toujours 
imperceptible. Dès lors, çn comprendra facilement pour- 
quoi sont si souvent inutileg les soins de l'éducation, quand 
ils ont pour but de cultiver une faculté ou un talent pour 
lequel on n'est pas né. D  FOSS,TL 
IMBERT (BXnL), poëte français, né en 177, à 
Nmes, oit il fit ses éludes, vint à Paris et se fit homme de 
lettres. Il écrivit des vers gracieux et spirituels, mais trop 
faciles. A vingt ans il publia son poeme le Jupement de 
Pdrs, qui fit sensation. Ce succès le gàta : produint pres- 
que sans travail, il s'essaya dans tous les genres, s'Ceva de 
l'epltre badine à la comédie de caractère, et de la mème 
plume qu'il aiguisait des épigrammes, il rima des tragé- 
dies. Il mourut dans un état voisin de la misère, le 23 
aodt 1790. On lui doitdes Fables nuvelles, des Historiettes 
ou lVouvelles en vers, Les Ëparement$ de l'Amour, ou 
Lettres de Faneli et de Miifort ; les Lectures du matin 
et du$oir; les Lectures varices, ou Biparrures littraires, 
un Choix de fabliau. mis en vers; les Jaloux; sans amour, 
comédie en 5 actes et en vers libres; le Jaloux malproe 
lut, comédie en 3 actes et en vers; larie de Brabant, 
tragédie; Gab,'lle de Possy, parodie; le Lord anplais ; 

IMIRÉTIE 303 
le Gdteau des Rois, les Deux ylphes, etc. Imbert a pen- 
dant qudques, années fait les comptes rendus des ouvrages 
nonveaux dans le Mercure. 
IMBIBITION (du latin imbibere, imbiber). Ce mot se 
dit dans le travail de l'argent, du mëlange des minerais 
de ce métal avec le plomb pour l'en séparer ensuite par la 
eoupellation. 
IMBROGLIO. Ce mot n'est pas le moins expressif de 
tons ceux que notre langue a empruntés à celle des Italiens. 
Il ? a dans lui un onomatop qui fait déjà deviner la con- 
fusion, le désordre, l'embrouillement qu'il est destiné à 
peindre. Ainsi, l'on dit d'une pièce de thétre, d'un roman, 
dont l'intrigue est eomplétement désordonnee : C'est un vé- 
ritable imbroplio. On a aussi donné ce nom, dans le lan- 
gage dramatique, à des pièces dans lesquelles ce désor- 
dre et cette confusion sont jetés à dessein : les imbroplios 
espagnols et les imbroplios italiens sont quelquelbis fort 
divertissants, et rentrent assez dans ce que nous appelons 
le genre amphigourique. Héraclius est un imbroglio tra- 
que, et le Mariape de Fiparo un spirituel imbroglio. Ce 
genre, en présentant au publie une sorte d'énigme, ne doit 
pas la lui olfrir tellement obscure, qu'il lui soit impossible 
ou même trop prnible de la deviner. L'imbroplio , qu'on 
ne peut débrouiller, ne mérite plus ce nom : il doit prendre 
celui de 9.a l i m a t h i a s. 
IMIRETIE  IMERETH ou IMÉRITHIE, province de 
la Russie asiatique, bornée au nord par le Caucase, qui 
la sépare de la Circassie; à l'est, par la Géorgie, dont 
elle est séparëe par la chaine de l'Oloumba; au sud par le 
paehalik lute d'AkhaI-Tsikhe; au sud-ouest par la Gourie; 
à l'ouest par la Mingrélie : elle a environ 7 myriamèlres 
de long du nord au sud, 16 m?riamèlres dans sa plus grande 
largeur, et environ 210 myriamètres carrés de surface. 
Cette province, tout entière comprise dans le bassin du 
Rioni, le Phase des anciens, et entourée de montagnes 
presque toujours couverles de neiges, en conlient elle- 
même un grand nombre dont les llancs sont couverts de 
superbes fortts; ses vallees offrent de riches prairies. E 
général, le sol en est d'une grande ferlilité ; les "arbres à 
Iruils, tels que chàtaigniers, noisetiers, y croissent et s'y 
multiplient sans culture; la igne grimpe sponlanement le 
long des arbres. Les habitants, qui apparliennent h la race 
eaueasieune, la plus belle du genre humain, comme on sait, 
mais dont la paresse est extrême, récoltent un peu de fro- 
ment et d'orge, du maie, du tabac, du chanvre, de la ga- 
rance; les boeufs, les chevaux y sont peu nombreux et de 
médiocre stature. On importe dans le pays du sel, de la 
tile, des étoffes de laine, de «oie, des ustensiles de cui re, 
des armes, de la quincaillerie, de la monnaie, des cuirs, de 
l'orfévrerie et des denrées coloniales. Les exportations con- 
sistent en vin, blé, soie, étoffes de coton, taffetas, miel, 
cire, peaux, laine et fruits, l',lais de tous les articles d'ex- 
portation il n'en est pas de plus avantageux que la vente des 
jeunes filles : tous les ans il en part un certain nombre 
pour alimenter les harems de la Porse et de la Turquie : 
les Russes ont inutilement tenté jusquïci de mettre un terme 
à cet odieux tralie ; la contrebande sejoue de toutes les 
précautions de la prohibition et de loutës les sanctions pé- 
hales de la répression. Le gonvernement turc, sur les ins- 
tances de ses alliés, et notamment de l'Angleterre, a dê- 
feedu ce commerce ; sera-t-il plus heureux? du moins les 
agents anglais doivent-ils veiller partout à l'exéeution de 
l'ordre impérial. Le commerce du payoEe-t entre les mains 
des Juifs, de Grecs et des Arméniens; la relion dominante 
est celle des Grees sehismatiques. 
Au quatorzième siècie, l'IraitCic faisait partie de la Géor- 
gie; au eommencemeut du quinzième siècle, le roi Alexan- 
dre 1 « la donna à son fils ainé; dès lors elle forma un étt in- 
dépendant; dans la suite les Turcs la subjuguèrent et lui 
laissèrent une ombre d'indépendanee -moyennant un tribut 
annuel de quarante jeunes filles et d'autant «le jeunes gar- 
çons. En 1804, Salomon, le prince régnant, se sotunit o- 



3O4 IMIRIT1E -- IMITATION D _ 
lentairement ì la Russie moyennant une pension que cette  nature. Ce sont des soldats qui coup sur coup se pendent ì la 
puissance continue à payer à ses descendants et successeurs. . mme guérite, des iemmes qui à peu près dans le méme temps 

IMITATION. L'imitation a été le premier mobile de tous 
les arts. La faiblessehumainese serait arrêtC, aprës tre par. 
venue  un certain degr de vérité matérielle, qu'il ne lui est 
pas permis de dépasser, si le génie créateur, dédaignant cette 
barrière, ne l'avait franchie, en arrivant jusqu'à la beauté 
d.ale dont la reproduction seule constitue l'art. L'obser- 
vation des choses réelles conduit les esprits élevés à la re- 
cherche de leurs principes et de leurs conséquences : c'est 
celte étude des objets apprciables à l'oeil ou h l'oreille, dans 
leurs rapports entre eux, d'ordre, de grandeur et d'barmo- 
xiie, qui forme l'imagination poétique, pittoresqueet musicale. 
Lï n v e n t i o n poétique, dans toutes ses acceptions, résul- 
tant de l'observation des objets matériels, n'est donc, en 
dfinitive, qu'une imittxtion embellie. Mai% dans un siècle 
aussi vieux que le n6tre, oh la nature a eté observée et dé- 
crite sous tous ses aspects, où les sentiments et les pas- 
siens de l'homme ont t.té explorés et exprim6s de toutes les 
manières, il est, indépendamment de l'imitation des choses 
r6elles et naturelles, une a«tre imitatio», inévitable aujour- 
«rhui, celle des ouvrages anh.rieurement produits par les 
gnies de l'antiquité et des temps modernes. 
Deux routes se présentent. Les Grecs ont voulu plaire 
par le moyen d beau ; et cette inspiration de leur ciel 
hrillant et doux, de l'éducation du gym hase, de leur lan- 
gue harmonieuse, leur a fait créer, dans tous les sentes, des 
ouvrages qui ont obtenu l'admiration de leurs contempo- 
tains et de la postérité, parce que ces ouvrages, bien que 
dilférents pat" leur forme, sont tous composés d'aprës le 
mme principe: ils spiritualisaient. Les uations modernes, 
«lui ont consacré une littérature propre h elles, comme les 
.s, nglais, moins iavorisés par le cie, sous |'influence d'une 
religion sévère et soumise h des besoins impérieux; peu 
sensibles, d'ailleurs, à la beauté, voilée ì leurs regards, sous 
un climat froid et uebuleux, mais susceptibles de toutes les 
impressions morales et physiques de la douleur, ont exhale 
leurs plaintes et exprimé l'amertume de leur cœur. Dési- 
rant, par un sentiment bien naturel, intesser h leurs maux, 
rendre sensibles h leurs regrets et a leurs plaintes, elles ont 
atérialis. 
Cette assertion peut paraltre paradoxale h une cole qui 
a la prctention de n'abandonner les formes anciennes que 
i,a amour pour la spirtualite, qui ne dédaigne la beauté 
,les corps que pour preconiser la sublimité de l'me et la 
divinité de la pt'nsée. On ne peut donc trouver hors de 
popos des développements qui, peut-ëtre, ne sont pas in- 
dispensables. Les Grecs, par i'étudedes formes, avaient été 
conduits h la connaissance de l'me : Socrate avait été sculp- 
teur, et Piston est postCieur à Phidias. Ils ont dnc spi- 
ritualisé, puisqu'ils ont été du corps " l'esprit. Les nations 
modernes, ClairC par la morale du Christ, n'ont adopt 
des formes que orcés, pour ainsi dire, par l'obligation de 
transmettre ce dogme aux yeux et h l'entendement. Elles 
ont été de l"me à la matiëre; elles ont donc matérialisé. 
Chez ces dernières enfin ies impressions de l"me ont été 
interprétées par les formes de la matière, tandis que les 
Grecs, par la perfection sublime à laquelle ils ont porté les 
arts d'mtation, ont donné l'idée d'une beauté tellement 
.upérieure à celle qui tombe habituellement sous les sens, 
q«'elle ne peut provenir que d'une imitation d'un principe 
divin. Ce n'est pas une raison pour que nous prëtendions 
qu'il faille imiter servilement les ouvrages de l'antiquité : 
sous voulons dire seulement que, dans la composition de nos 
ouvrages, nous devons nous conformer aux principes qui 
dirigeaient les Grecs dans leurs compositions. 
YOLLr-L-Dvc. 
L'homme porte en tout et partout la manie de l'imita- 
tion : Aristote prétend méme qu'il ne diffère des autres ani- 
maux qfen ce qu'il est imitateur à un plus haut degré. On a 
rcmarqué qu'h certaines époques, il y a comme nne épi- 
dmie de svicides, d'infanticides, de crimes «le la méme 

empoisonnent leurs maris, des mères qui tuent leurs nou- 
.[ veau-nés de la méme façon, etc. Dans la politique, on voit 
chaque changement de forme de gouvernement ramener des 
modes surannées et sans raison d'Atre dans les emps nou- 
veaux. Dans l'industrie, l'imitation donne souvent des bénP- 
fices illicites. L'or, l'argent, les pierres précienses, l'écaille, 
l'ivoire, les bois, et uneinfinité d'autres matiëres, sont imités i 
tromper l'oeil. On imite aussi les anciens manuscrits, les 
vieilles mdailles, les objets d'art. Toutes ces infitations font 
souvent des heureux, trop souvent des dupes. 
L. Love. 
IMITATION { Musi9ue ). C'est la reproduction, dans 
un méme morceau, d'un motif déjà entendu, que cette re- 
production soit une simple répétition, une transposition 
ou tout autre arrangement du premier motif. Le got du 
compositeur régie l'emploi de l'imitation. Cependant elle est 
obligée et méthodique dans certaines compositions, telles 
que le c a n o n, où elle est continue, et la lu g u e, où elle est 
périodique. 
IMITAT|ON DE JÉSUS-CHIIST. Peu de livres, 
parmi les anonymes, ont soulevé plus de discussions que 
celui-ci. On a peut-être encore plus disserté sur l'Imitation de 
Jdsus-Christ quesurl'lliade. Des ordresreligieux ont apporté 
leurs disputes jusque devant le parlement de Paris; et, tandis 
que cette cour souveraine défendait d'imprimer l'Imita- 
tion sous un autre nom que celui de Thomas à Kempis, h 
Borne on se prononçait exclusivement pour le henédictin 
Gersen. Cette contradiction s'explique parfaitement lorsqu'on 
examine les raisons presentées par les uns et les autres contre 
leurs adversaires : les Kempistes en effet, prouvaient facile- 
ment que Gersen n'avait jamais existé ; les Gersénistes prou- 
vai,.nt facilement que Kempis n'était qu'un copiste ; et dans 
ce dehat négatiï, la vérité ne pouvait se montrer. Le véri- 
table auteur semblait en dehors de la discussion. 
L'Imitation de Jdsus-Chrit est divisée en quatre livres. 
Le premier contient des Avis tiles 1our la vie spiri- 
tuelle. 11 engage à imiter Jësus-Cbrist et h mOpriser les va- 
nités du monde ; il parle de l'humble sentiment qu'on doit 
avoir de soi-mème, du bonheur qu'on doit eprouver dans 
i'obéissance et la soumission à un supérieur, des asantages 
de l'adversité ; il arrive h la vie religieuse, parle de l'amour 
de la retraite et du silence, de la componction du cœur, du 
jugement et des peines des pécbeurs. Le second livre con- 
tient des Arts tropres à conduire à la vie interieure. Ce 
sont des avis pour une sorte de conversation intérieure, 
une familiarité intime avec Jésus-Cbrist. Le livre troisième 
est intitulé : De la Consolation intérieure. C'est une sorte 
d'entretien entre Jsus-Christ et P'me fidèle. Jsus-Chri.t 
exhorte le fidéle à renoncer à soi-mme, h mépriser le monde, 
h ne chercher de vraie consolation qu'en Dieu. Le quatrième 
livre traite du Sacrement de l'Eucharistie. Ce sont des 
exhortations à s'approcher de la communion sans en scruter 
curieusement le mystère, et à s'unir intimement avec Jésus- 
Christ. Tout l'ouvrage est basé sur une profonde humilité qui 
porte h substituer la volonté de Dieu, des supérieurs et 
mme du prochain à la sienne, à mépriser les vanités du 
monde, h supporter avec patience les misëres de cette vie 
comme Jésus a porté sa croix, et à n'espérer de bonheur, 
de repos et de paix que dans la vie éternelle. 
Ce livre, qu'on a appelé aussi le Livre de la Consolatioh 
se répandit promptement, au quinziëme siëcle, par les copies 
qui se multipliëtent dans les monastëres et par l'imprimerie. 
Il a étë traduit dans toutes les langues. On en connaR qua- 
i Ire-vingts versions frangaises. Corneille entre autres le mit en 
vers. L'auteur est inspiré de la Bible et des Pères, et en prend 
souvent «les phrases qu'il développe par une pensée prati- 
i que. Il joignait à son érudition une grande connaissance 
du momie et des passions humaines : il avait souffert ; il 
avait comm les andeurs de la terre; il avait vu le malheur 
sur le tr6ne et sous la tiare. Aussi, dit Villenave - « Par- 



IMITATION DE JÉSUS-CHMST -- IMMANENT 

iout on voulait avoir ce livre et le méditer, comme offrant le guide 
le plus sOr dans le chemin si difficile de la vie, les consolations 
le» plus vives et les plus efficaces dans toutes les afflictions, 
et la perspectivedn bonheur du juste, quand, après son pèleri- 
nage sur la terre, il entre calme et confiant dans l'éternité. 
biais quel est l'auteur de ce livre ? Nous avons déjà cité 
un bénédictin de Yerceil, du nom de Gersen ; d'antres l'at- 
tribuent au chanoine régulier Thomas à K cm p i s; d'autres 
le réclament avec plus d'apparence de raison pour Gerson, 
chancelier de l'université de Paris. Nous ne nous occuperons 
pas de quelques autres réclamations. 
Les chanoines régnliers de Saint-Augustin, les Jésnites 
flamands et les B o I I a n d i s t e s, partisans de Thomas à Kempis, 
s'appuient sur un manuscrit de 1441, écrit de la main de ce 
frère et se termiaant par ces mots : Finitus et completus per 
ams fralri Thomæ à Kempis. biais 1"homas à Kempis 
était un habile calligraphe, passant sa vie à copier des ma- 
nuscrits : sa formule n'implique pas autre chose que le tra- 
vail de l'écrivain. L'auteur de l'Imitation demande à n'Cre 
point connu : il ne pouvait donc pas signer son livre comme 
auteur sans se mettre en contradiction avec lui-mëme. Et puis 
il n'y a qu'à lire quelque opuscule d0 an pieux chanoine 
pour s'apercevoir qu'il n'était pas capable d'écrire l'ouvrage 
qu'on veut lui attribuer. 
Les ltafiens, avec les Jésuites piContais et les Bënédic- 
tins, qui revendiquent l'Imitation de Jdsus-Christ pour un 
certain abhé Gersen, s'appuient sur différents mannscrits 
oh le nom de l'auteur est ainsi écrit; ils disent que le livre 
doit tre d'un moine, d'un bénédictin mème ; ils ont re- 
trouvé un historien italien qui cite un ahhé du monastère de 
Saint-Étienne, à Verceil, du nom de Gersen Grégory alCour re 
un manuscrit qui aurait appartenu à des Aogadri, famille 
dont on retrouve anssit6t un journal qui cite an treizième 
siècle le preceux manuscrit; le mime auteur rencontre ì 
Cavaglia des Garzoni, qui se rappellent l'abbé du treiziëme 
siëcle, et un manuscrit de la Bibliothèq,e impériale porte 
justement le nom de Jean de Canabaco. Enlin, l'Imitation 
fourmille d'italianimcs. D'abord on oublie que plusieurs des 
rnannscrits qui portent le nom de Gerscn portent en mème 
emps la qualification de chancelier de Paris; ce qui peut 
bien faire penser que c'est une erreur de copiste, d'autant 
plus que la substitution de l'e à I'o est fréquente dans le 
Nord. Ensuite, les manuscrits anciens où il n'y aqne Gersen 
ne l'appellent jamais abbé de Verceil : les manuscrits avec 
cette qualification n'offrent pas assez de certitude. L'ouvrage 
n'est pas n(essairement d'un moine, an contraire. Il est écrit 
pour les religieux, assurément, mais les gens du monde 
ne sont pas oubliés. C'est bien pint6t l'oeuvre d'un séculier; 
l'auteur a certainement vécu dans le monde, il en a connu 
les grandeurs et la vanité ; il a cherché un relnge dans la 
solitude des cloitres, mais il ne tient exclusivement à aucun. 
11 parle aux relieux avec lesquels il vit; mais il n'oublie 
pas les hommes avec qui il a vécu, et s'adresse à tous. 
Sans cela son livre n'cet pas eu le succès qu'il a ohtenn. 
Ses instructions ne sont pas plus celles d'un bénédictin que 
celles d' un autre religieux. C'est un théoloen qui abandonne 
la science et la discussion pour parler aux simples de cœur et 
d'esprit. L'existence d'une abbé de Verceil du nom de Gersen 
est loin d'Cre prouvée par la simple assertion d'un historien 
trop postérieur, n'appuyant son dire sur aucun acte authen- 
tique. Quant aux Avogadri, personne n'y croit. Leur journal 
,»ffre des lacunes regrettables. Le manuscrit portant Jean de 
Canabaco ne l'appelle pas Gersen, et ne le cite pas comme 
abbé de Verceil.; il est d'ailleurs difficile de faire Cavaglia 
de Canabaco. Le tnme volume contient des pièces d'un pro- 
fe..-eur de Prague portant le nom de Joannes de Tambaco 
ou Cambaco; Canabaco ne serait-il pas ce mme nom es- 
tropié ? Si l'Imitation est du treizième siècle, comment ne 
Ironve-t-on pas de mannscrits certains de cette époque, ni 
dit quatorzièn|e? Pourquoi n'y en a-t-il pas de trace dans les 
auteurs du temps? Enfir,, les ilalianimcs prélenus son| 
aussi bien des gallicismes. 
»ICT. DE L& CONVERS.  T. 

305 
Rappelons seulement pour mémoire qu'un chanome de 
latishonne, lf. Weigl, a, vers fS;0,/maginé de revendiquer 
l'Imitation pour un Jean de Cauabac ou de Rorhac, lequel 
aurait été moine sous le nom de Ghersem, et aurait vcn à 
Vihlingen, au treizième siècle. Citons encore une opi[tion qui 
attribue l'Imitation ì saint Be rnard. 
Les déîensenrs de Gerson, parmi lesquels il faut citer le 
docte Genee, s'appuient sur ce que les plus anciens et les 
meilleurs mannscrits de l'Imitation de J#.sus-Christ por- 
tent le nom du chancelier de Paris, sur ce que les pre- 
mières &litions imprimées portent la mme attribution. Ils 
citeut surtout un manuscrit de la seconde moitié du quin- 
zième siècle, ayant appartenu au neveu de Gerson, et portant 
le nom, la miniature du chancelier. Ils disent qu'un livre 
de cette valeur n'a pu tire écrit que par n homme 
savant t éprouvé, comme il I'a été. Ils pensent que Ger- 
son écrivit ce livre à l'abbaye de Moelck en Antriche, oU 
il s'était réfugié après le concile de Constance, vers 1458, 
Iorsqu'il était poursuivi par les sicaires du duc de Bour- 
gogne, qu'il avait osé attaquer en chaire, et où on a tronv 
vingt-deux manuscrits de l'Imitation, dont le plus ancien 
connu portant la date de 1421. Là, au milieu des moines, 
dans le silence de la retraite, le chancelier de l'université 
de Paris, qui plus tard devait catéchiser les enfants dans 
la cathéàrale de Lyon, le grand théoloen qui écrivait à son 
propre frère, prieur des Cclestins de cette ville, des 
lettres pleines d'onction, pouvait bien écrire un traité sur 
la vanite du monde. Gence a donné des parallëles, tirés de 
œuvres de Gerson, o/] l'on retrouve le mème latin, les mimes 
tournures de phrases, Ic mèrne fonds de pensées, de sen- 
timents, d'images, les mmes gallicismes, les mmes mos 
forés que dans ['imtaton. Les quelqlmes idiotismes étran- 
gers s'expliquent suffisamment par le séjour du chancelier en 
Allemaffae, en Flandre et en Itaiie, s'ils ne sont pas dus aux 
divers copistes. Son frère, répond-on, a fait le catalogue de 
ses œuvres, et il ne cite pas l'Imitation ; mais l'auteur de 
ce livre ne veut pas tre connu, son Irère a bien pu res- 
pecter ce VœU. éanmoins, à peine Gerson est-il mort, que 
son neveu, Thomas de Gerson, chanoine de la Sainte-Cha- 
pelle, fait copier l'Imitation avec le nom de son oncle, a la 
suite d'un sermon de la Passion, incontetablenent de Gtr- 
son. Et puis, si sa modestie n'y e0t pas été luiCessée, com- 
ment Gerson e0t-il oublié de citer l'Imitation parmi les livres 
qu'il recommande. Ce livre est tout italien, dit un critique, 
mais d'o/] vient que c'est en France qu'il a eu le plus d'ditioml» 
et de tra,luctions, qu'on trouve le plus de manuscrite? 
Pourquoi jusqu'au seizième siëcle l'ltalie imprime-t-elle 
l'Imitation sous le nom de Gerson, chancelier de Paris ? 
pourquoi y trouve-t-on des manuscrits avec la mëme attri- 
bution. Supposera-t-on avec Grégory que les copistes italien% 
connaissant mieux Gerson de Paris que leur compatriote de 
Verceil, changeaient Gersen en Gerson ? Ce serait pousser 
un peu loin la complaisance. Enfin, en lisant attentivement 
ce livre célèbre, on reste convaincu que c'est le chancelier 
de Paris qui parie ; tous les faits s'appliquent  Ilmi, ainsi 
Gence I'a prouvé dans vingt endroits, notamment dans s, 
1Vouvelles Considérations sur l'auteur ci le livre de l'Im,.- 
talion de Jésus-Christ. L. LouT. 
15OECULÉE CONCEPTION. Voyez 
nE La "VIFBGE. 
IMMANENT. C'est en termes d'ecole, par opposition 
à ce qui est t r a n s c e n d a n t, tout ce qui reste en dedans 
d'une chose ou d'une idée, et n'en sort jamais. Le langa.e 
philosophique emploie ce mot dans plusieurs acceptions : 
il distingue les causes extérieures transcedantes des causes 
intérieures immanentes : celles, par exemple, qui existent 
dans des choses susceptibles par elles-mmesde modifications, 
comme la volonté. Ainsi Spinosa appelait Dieu la cause 
innanente du monde, pour faire comprendre par là que. 
par son essence, il ne diffère point du monde; forme de 
definilion que les systèmes panthéistes postCieurs se son! 
aussi appropriée. Kant parle d'un emploi immanent de la 
39 



306 IMIANENT -- 
raison, et par là il entend nn emploi de la raison qui ne dé- 
pasoe pas les limites du monde visible donné, par opposi- 
tion a un emploi transcozdant de cette mëme raison, 
passant ces limites. On dit de mtme thode immanente 
pour désigner celle qu'on peut déterminer par l'objet mme 
de la recherche. On dit aussi le ddveloppetaent immanent 
d'une science, et un savoir immanent, c'est-ì-dire qui 
n'et point extérieur, qui est appronfoodi dans le sujet mëme. 
Le mystique qui contemple face à lace i'esseuce divine, 
parle de l'intmanence de son propre moi en Dieu. 
I.IMATRICULA.TIO  du mot latin natric.ula, 
qui designait le registre servant à contenir les noms de sol- 
dats. L'immatriculation est l'action d'inscrire sur nu re- 
gistre pub.lit ( voyez MTmCtL ). 
IMMEIATS {États). On donnait autrefois en Aile- 
magne ce nom aux seigneurs et aux princes investis du 
privilége de n'etre justiciables que de la juridiction directe 
de Pempereur, sans Stre soumis à un pouvoir territorial in- 
termédiaire, soit ecclésiastique, soit temporel. Lors de la 
dissolution de l'Empire d'Allemagne, en 1806, la plupart «le 
ces Ëtats immédiats furent zn.dats.s, c'est-à-dire qu'ils 
furent soumis à l'autorité directe des princes souverains dans 
les Eats desquels leurs possessions et domaines se trouvaient 
enclavés, et les actes de la Confederation germanique ne leur 
coulrèrent plus que certains privileges d'un ordre secon- 
daire. 
I$IIENSITÉ grandeur iafmie, étendue sans bornes. 
Au sens propre, ce mot ne peut s'appliquer qu'à Dieu. Par 
analogie, nous l'employons pour indiquer des ctendues dont 
les limites échappent à nos sens, comme lorsque nous par- 
lons de i'immensite des cieux. Par extension, On s'en sert 
encore pour caractériser des Cendues très-vastes, l'immen- 
sité de l'Océan ; et fréquemment pour marquer des choses 
considérables dans leur genre : c'est ainsi qu'on dit qu'une 
personne est immensément riche. L. LoveT. 
IMMERSION (eu latin m»zersio, fait de in, dans, 
et znerso, je plonge), action par laquelle une chose est plon- 
gce dans de l'eau ou tout autre liquide. 
On dit mmersion, en astronomie, quand une étoile ou 
une planète est si près du soleil, relativement à nos obser- 
vations, que nous ne pouvons pas la voir, se trouvant comme 
enveloppee et cachée dans les rayons de cet astre. Ce mot 
dsigne aussi les premiers instants d'une éclipse de lune, au 
moment où la lune conunence à devenir sombre et à en. 
trer dans l'ombre de la terre; le méme terme est aussi ap- 
pliqué, mais moins fréquemment, à une éclipse de soleil 
lorsque le disque de la lune commence à le couvrir. Ce 
mot est donc i'opposé d'd n e es  o n. Il est fréquemment ap- 
pliqué aux satellites de Jupiter, et spécialement au pre- 
mier satellite, dont l'observation est si utile pour décou- 
x-rie la longitude. Par immersion de ce tellite on entend 
le moment où il semble entrer dans le disque de Jupiter, 
et son Onerston est le moment où il en parait sortir. Les 
immersions sont obser,ées depuis le moment de la con- 
ionction de Jupiter avec le Soleil, jusqu'au moment de son 
opposition. 
LI$1EUBLES (du lain tmmobils, immobile). Par 
ce mot on entend, dans le langage du droit, les b i e n s fonds, 
ou ceux qui sont réputés en avoir la nature. Les fonds de 
terre et les btiments sont immeubles par nature, ainsi que 
les récoltes pendantes par leurs racines etles frnits des arbres 
non encore recueillis; les moulins fixés snr piliers et faisant 
partie du bgtiment; les tuyaux servant à la conduite 
des eaux dans les maisons et autres héritage, s, etc. Les objets 
que le propriétaire a placés snr son fouds pour le service 
et l'exploitation sont immenbles par destination : ainsi, les 
animaux attachés à la culture, les ustensiles aratoives, les 
semenees données aux fermiers ou coloris partiaires, les pi- 
geons des colombiers, les lapins des garennes, le ruches à 
miel, les poissons des étangs, les pressoirs, cbaudières, cuves 
et tonnes, le» ustensiles nécessaires à l'exploitation d'une 
forge, d'une usine, les pailles les entais. Sont encore immeu- 

IMMO 
bles tous les effets mobiliers que le propriétaire a attachés ao 
fond ì perpétuelle demeure; tels sont ceux qui y sont sceilés 
en plàtre ou à chaux ou ì ciment, ou ne pom ant ttre deta- 
chës sans qu'il yait fracture ou détérioration, tes glaces d'un 
appartement, lorsque le parquet sur lequel elles sont atta- 
chCs fait corps avec la boiserie ; les statues placées dans 
des nicioes. Sont immeubles par l'objet auquel ils s'appliquent, 
rnsufruit des choses inunobilières, les servitudes ou ser- 
vices fonciers, et les actions tendaut à la revendicatioa d'un 
immeuble. Enfin sont immeubles par la détermination de la 
loi à la voiouté des propriétaires, les actionsde la Banque de 
Frauce, de la compagnie des Quatre-Canaux, etc., les 
rentes sur l'État immobilisé.es, pour la formation des ma- 
jorats. 
IMMOBALITË absence complète de morale, 
qui est contraire aux principes de la morale : i'liomme im- 
moral sera donc uu homme dépouillé de tons les principe 
moraux que commande, nous ne dirons pas la vertu, mais 
une certaine pudeur, qui porte i'humanite  couvrir d'un 
voile complaisant ses vices et ses faiblesses. Ce peu de mots 
fait assez voir combien est grand le cercle de vices dont la 
nudité constitue à nos yeux ce qui est immoral. Nous di- 
rons seulement que ce sout toujours les plus bas, les plus- 
honteux, les plus reponssants, qui entachent un homme 
de la triste réputation d'immoralte. Mais i'immoralité privée 
n'est point la seule : il y a une immoralite politique, qui, 
pour ètre conventionnelle, n'en est pas moins odieuse : aux 
yeux des partis, quels qu'ils soient d'ailleurs, toute défection 
due plutOt à une influence corruptrioe qu'à de sincères chan- 
gements opérés dans la conviction de celui qui abandonne le 
camp des uns pour passer dans celui des autres, eutraine 
avec elle une idée d'immoralilé; tout moyen de succès ré- 
prouvé par une morale svere est i»z»zoral. Que de fois 
n'a-t-on pas vu ceux qui, n'etant encore rien, appliquaient 
cette épithète à des mesures dirigées contre eux, employer, 
quand ils étaient arrivés au pouvoir, les mmes moyens 
contre leurs ennemis, se fàchant tout rouge quand on leur 
jetait au visage le reproche d'immoraiite! 
IMMORT.akLITE. Quaud un journaliste dit ì un poête 
de ses amis: « Je t'immortaliserai, » il dit une sottise. 
Quand il se moque de celui qui s'Crie : « Je suis immor- 
tel, » il en fait une. Rien n'est plus facile que d'arriver ì 
i'immortalité. Voyez les 80 volumes de la 1iogralhie 
chaud, celle des vivants, celle des Contemporains, et tant 
d'autres : vous avouerez qu'il n'y a pas de quoi se anter. 
On va par mille chemins divers au temple de mémoire, 
qui n'est autre cliose que ce que nous appelons prosaïque- 
ment l'immortalilé. Achiile et Thersite, Sucrate et Tri- 
boulet, Homère et Zoile, Corndie et la Dubarry, Marc- 
Aurèle et Érostrate, César et Catilina, Penéiope et Lgi 
Sully et Narcisse, Aiexan6re et blaudrin, Taima et Bo- 
bèche, sont également immortels; et si nous persistion 
dans la manie des exhumations iittéraires qui secouent 
aujourd'hui la poussière de nos bibliethêques, nous ressus- 
citerions tant de noms propres, que la mémoirede dix Cuvier 
ne suffirait pas à les contenir. Ainsi, l'on s'immortalise par 
ses vertus et par ses vices, par sa sagesse et par ses folies, 
par ses talents et par ses ridienles, par ses actions d'eclat 
et par ses cruautés. On y parvient mtme par uue grande 
spéculation. Le fameux H u n t, le 9rand agitateur d'une 
autre époque, aurait dfi peut-ètre à son cirage rimmortalRé 
qu'il a gagnée dans les émeutes d'Angleterre. Nous ne dé- 
ciderons point si les victoires de Lucuilus l'ont plus aidé 
vivre dans la mémoire des hommes que sa goinfrerie et 
l'honneur d'avoir apporté le premier cerisier en Italie, quoi-- 
qu'il soit impossible ì tout l'Institut de dire l'espèce de 
cotise dont il enridfit son pays. L'histoire est pleine mime 
de gens qui sont immortels sans l'açoir souhaité : voyez le 
bonhomme Urie et le sire de Cluteaubriand, par exemple. 
David et François 1  sout amoureux de leurs femmes, et 
l'immortalité les atteint comme un accident. Il n'y a rtelle- 
ment ni mérite ni, avantage à i'$tre. C'était bon pour les au- 



LMMORTALITÉ -- IMMORTALITÉ DE L'AME 

¢iens. Les historiens n'enre#straient alors que de grands 
noms, des rois, des ministres, de grands capitaine», ou de 
grands sclérats. Les satiriques sauvaient bien aussi quel- 
ques misírables de l'oubli ; mais ces satiriques n'ëtaient pas 
ux-mêmes certains de se survivre. 
Si le moyen Age ett duré deux siècles de plus, tous ces 
témoignages de l'antiquité eussent été transformés peut-ëtre 
en misseAs et en antiphonaires. Cette fouie de belles actions 
qu'on nous offre pour exemples, ces grands hommes qu'on 
nous présente pour modèles, se seraient engloutis dans le 
poudreux ablme des cloltres, qui aurait ainsi intercepté 
leur immortalite. C'est par hasard si l'éloquent Cicéron 
et le sublime H omèro ont échappéau naufrage dans lequel 
ont péri tant de poêtes, d'orateurs et de philosophes. Au con- 
traire, depuis la découverte de l'imprimerie, et surtout 
dans ces derniers temps, ce sera grand hasard si tous nos 
Moevius ne vont pas à la postérité la plus reculée. Il n'y a 
point au monde, disait La Bruyëre, de si pénible métier qne 
de se faire un grand nom; la vie s'achève qu'on a h peine 
ébauché son ouvrage, llous allons plus vite aujonrd'hui : il 
n'y a pas longtemps encore qu'il suffisait d'un discours de 
tribune, saisi au bond par un parti bruyant et vaincu, d'une 
chanson bien séditieuse, recommandée aux chanteurs de 
taverne par une coterie puissante, des rëvasseries mystiques, 
prnées par un bureau d'esprit, pour immortaliser un 
Immme. Depuis soixante-dix ans environ la France a mis 
plus de noms propres dans les livres que les huit premiers 
siècles de iome. 
Pour faire un immortel de nos jours, nous ne parions point 
de ceux que fait l'Académie (cela se borne  deux, bon an, 
mal an), mais de ceux qui surssent tous les matins par la 
grAce de la camaraderie politique ou littéraire, il faut une 
plume de bonne volonté; il n'est pas besoin qu'elle ait un 
nom, il suffit que sa prose louangeuse et eutbousiaste soit 
imprimée dans les colonnes d'un journal ; et les fabriques 
d'immortels ont un agent accrédité auprès de tous les feuil- 
letons de la capitale. Dix mle ahomtés, cent mille lecteurs 
sont avertis qu'un gr_and homme vient de narre. Le fat 
en est convaincu lui-même. 11 se hMe de produire, de 
grossir son bagage; les biographes s'en emparent, et le 
voilà lancé dans la postérité, qui en fera ce qu'elle voudra. 
lous sommes grands épicuriens; mais nous faisons peu de 
cas du précepte d'Épicure qui nous engage  cacher notre 
t'le. Il est vrai, suivant la remarque de Montaigne, qu'il 
le démentit lui-même au lit de mort en souhaitant qu'on se 
souvint de ses discours et de son pa.age sur la terre. Le 
mepris de la gloire, tant prêché par Diogène, ne fut jamais 
une vertu commune, et le même Montaigne a eu raison de 
dire que de tontes les rêveries du monde la plus reçue et 
la plus universelle est le soin de la réputation. L'essen- 
tiel est de la bien soigner : ce n'est pas tout d'ètre immortel, 
il faut l'ëtre  bon titre, et ne pas tralner dans l'avenir nn 
nom que pendant sa vie on n'oserait écrire sur son front. 
Ce principe n'est pas celui de tout le monde. Le fracas et 
le pêle-mêle des réputations qui ont surgi dans les derniers 
bouleversements de PEurope ont si bien arrangé Popiuion et 
le siècle, que les noms de F i e s c h i, de L a c e n a i r e et autres 
de la même famille [ont fermenter des ambitions comme 
ceu x de ff a p o 1 é o n et de Malesherbes. 
Il y aurait, un gros livre à écrire sur le turt que fait  
la morale publique la nécessité de remplir tous les jours 
les douze colonnes d'un journal ; mais il faudrait y réserver un 
nssez long chapitre sur les appétits désordunnés de la cn- 
riosité publique. A Dieu ne #aise que nous roulions renou- 
veler la sottise des Éphésien% qui, après l'incendie de leur 
temple, donnèrel, t un brevet d'immortalité à Érostrate 
par le décret qui défendit de prononcer le nom de cet in- 
cendiaire. Mais ce serait une noble et grande nation que 
celle dout le silence et l'oubli anéantiraient par le seul 
effet d'un sentitnent puhlic le nom d'tri grand criminel. 
:Nous n'en sommes point là malheureusement. Le plus 
ni;saur assassin ne peut échapper aujourd'hui à la publicité, 

0; 
et court la cbance d'être immortel, tout aussi bien «tue 
l'auteur d'un drame à la mode. La société est réellement h 
bi merci du reChant ou du sot, que tourmente l'envie de se 
faire un nom. Ce n'est pas précisément  la gloire qu'on 
vise, c'est seulement à faire du bruit dans le monde, ou 
plutOt  une immortalité qu'on puisse escompter en beaux 
écus. Nous ne savons pas nn de ces admirateurs de notre 
vieux Corneille qui voulut de sa gloire si on le condamnait 
à faire raccommoder ses souliers et ses bas par le savetier 
du coin. On ne désire plus arriver au temple de mémoire 
qu'en éqnipage. C'est très-bien quand on le peut, la gloiro 
n'exclut point la fortune ; mais qu'ils y entrent à pied ou 
en voiture, la postérité rira bien de certains immortels que 
nous lui fabriquons.. "'E,T, ,:c l'Académie Fran, aise. 
IMMOP, TALITE DE LAMÈ- Le fil de l'induction 
Il la main, puisque les sens eux-mêmes, principaux organes 
de notre entendement, semblent nous refuser leur témoi- 
gnage, examinons ce qui nous apprucbe, ce qui vegëte, ce 
qui respire, ce qui agit h nos cotés, soit spontanément, soit 
par impulsion ; et voyons si le placement du plus sociable 
des tres sur la terre a eu un but par rapport k lui-même, 
si quelque autre y a etWintéressé, si la création a été le 
résultat d'un caprice improvisé, ou si elle tient/ un sys- 
tème dont le premier jet se montre ici-bas, et dont l'en- 
semble justement préconçu doive se réaliser ailleurs, dans 
un temps prescrit, mais enveloppé de ténèbres nécessaires 
à son exécution ? 
Dieu n'est pas l'abstraction d'une pensée inerte; l'activité 
et la perfection du mouvement font partie de son essence. 
Cette activité Pa poussé à donner de l'exercice/ sa force, 
parce que les conséquences devaient en être bonnes. ŒEetait 
lui demander la c r é a t i o n. Une main libérale a semé par- 
tout les élincellesde la -le; quoique plus éoonome de celles 
dn sentiment, elle a versO sur des myriades d'êtres le bon- 
henr que comportent leurs organes; mais, avant l'appel de 
l'homme, elle n'avait pas encore allumé le flambeau de 
l'intelligence appliquée aux sublimes notions de l'ordre; 
celles du devoir étaient 6salement h naitre; il ne s'accom- 
plissait sur la terre que par une sorte d'impulsion automa- 
tique. Cependant Dieu voulait se faire des relations ; car 
l'ouvrier en aura toujours avec son œuvre, dès qu'il ) aura 
déposé une grande pen»ée; il ne la perdra pas de vue, il 
se gardera bien de la briser, surtout quand l'oeuvre, par 
le pins grand des miracles, aura été douée de la faculte 
de s'élever ju:-qu'/t l'onvrier et de lui rendre grAces de 
l'existence dont elle jouit par son bienfait. Non, le statuaire 
ne frappera pag de son marteau la Galatée qu'il a forcée de 
sortir du marbre pour recevoir avec la vie l'impression 
de ses propres sentiments! 
Ainsi, sur notre globe sublunaire, la solitude du Tout- 
Puissant devait cesser. Comment et où chercher le mot de 
cette grande éuigme? L'adjonction de l'e, prit  la matière, 
et, par lui, de la pensée à un organisme, pouvait seule le 
donner. L'péce bumaine y a trouvé son berceau. Que se- 
raient en effet des /mes sans organes (à supposer leur 
e.vdstence possible), si ce n'est de pures et simples extensions 
de l'essence divine? .Nées du concept d'un Dieu, elles n'en 
pourraient avoir que les perfectious. Dans leur natnre homo. 
gène, elles seraient en similitude exacte entre elles ; aucune 
ne jouirait d'un caractére qui lui ft propre, et l'individualité 
ne serait nulle part. Celle-ci en réalité ne saurait surgir que 
d'un rapportà un centre commun, de perceptions, dïdées, 
de besoins à satisfaire, d'actes résolus par la volonté et en- 
chatnés l'un à l'autre par la mémoire. La créature mxte, 
sous ces conditions, s'est trouvée constituée. Jetez un coup 
d'oeil rapide sur cette échelle des êtres animés, dont l'homme 
est le point cnlminant : en partant de sa base, oi la ma- 
tière commence  recevoir un principe d'action, qu'. x '3n- 
nous? Des lé#ons d'animaux didgés par un seul et même 
instinct, soit dans les mers, soit sur le sol qui leur sert de 
pàture. Il n'y a riett là qui mérite d'être différencie, rien de 
caracléristique pour chacun. En montant de quehlues de- 



08 
grés dans cel{e échelle, on voit l'instinct, de simple exis- 
tence presque végétatiee, arriver à l'instinct de conserva- 
tion ; allant plus haut, on apercevra un éclair de rëflexion, 
mais encore rien de réellement dislinct, rien qui de l'cilet 
puisse remonter à la cause, de la créature au Créateur! et 
c'était là le vrai but, probablement Ic seul bat de la grande 
intention primitive. S'il n'avait été atleint, autant eflt alu 
laisser les mondes dormir dans le néant. 
lious avons rencontré l'ètre qui seul est en possession 
de discerner le juste et l'injuste, le beau et le difforme dans 
les mœurs, de se livrer au crime en cédant a ses passions 
déréglées, de leur résistcr par une vertu souvent pénible, 
de respecter les lois ou de les enfreindre, de concourir en* 
fin à l'ordre voulu par la Providence ou de le fouler aux 
pieds . Ce n'est pas tout : la portée de cet tre va plus loin; 
essuyons de la suivre. 
Peu occupé du moment présent, qui a été l'oblct de ses 
longues attentes, il s'élance résolOment vers un avenir il- 
limité. Il s'en empare comme d'un poste élevé, d'où il 
puisse régner sur tout ce qui l'enloure. Faible d'organes, 
borné dans ses forces, qui ne résisteraient pas à une simple 
céphalalgie, il a dans le cœur les désirs d'un souverain et 
dans la bouche les paroles des immorlels. Passionné pour 
le beau, le rvant sous toutes les formes, ne le rencontrant 
jamais tel qu'il l'a imaginé, de déception en déception, il 
porte ses VœUX dans un monde inconnu, sur lequel il prend 
et donne hypothéque. Après avoir à peine ébauché ses 
amours dans cette vie, il les renxoie à une autre, oi il se 
propose de les parachever, liche en projets, pauvre dans ses 
moyens d'exécution, par les livres, par les monuments, par 
la pierre des tombeaux, par les testaments, il veut les con- 
tinuer, lui qui ne sera bient6t quepoussière ! Le temps frappe 
incessamment à ses cotés ; le temps lui enlëve chaque jour 
quelques débris de son existence; c'est ce qui le décide : à 
tout prix, il faudra qu'il se survive ; car il en sent intérieu- 
rement le besoin et la possibilité. Por y parvenir, il fera 
un appel à sa mémoire et  ses prévisions. Et-ce qu'il n'a 
pas le don de rétrograder dans sa carrière terrestre, par 
des souvenirs, comme le jeune guerrier de X'irgile, qui en 
mourant se rappelle sa douce Argos? Ses VœUX sans cesse 
renaissants ne tendent-ils pas à prolonger sa carrière, m,me 
par delà la tombe? Pourquoi ces réminiscences et ces dé- 
sirsprojetés aussi loin, si t'inanité nous en étit démontrée? 
Leur raison, la voici : c'est que la conscience de chacun 
lui montre dans l'espace parcouru un sstëme et une suite 
d'arguments qi doivent conclure à quelque chose. Consé- 
quent à lui-mëme, l'homme, avec une audace dont il n'a 
pas le simple soupçon, jette deux arches d'ne vie à l'autre ; 
l'une s'appuie aux jours laissés derrière lui, l'autre s'accule 
sur l'éternel avenir. 
Tout est dit pour l'animal dont les facultés sont les plus 
élevées entre ceux qui foulent avec nous ce globe terrestre. 
Au delà de la perpétuité de son espèce, rien ne lié dans son 
sensoru» le passé au futur. 11 n'a pas d'historiens pour se 
rappeler l'un, de philosophes pour prévoir l'autre, et on 
cour plus vaste que l'uniiirs pour s'y trouver à l'étroit. Un 
rapport de son tre tel qu'il est constitué, avec les divers 
événements de ce bas monde, serait tout à tait superu. Il 
meurt, et avec lui l'étincelle de sentiment qui lui avait èté 
départie. Où il lutte cou, re une destruction organique, 
l'homme combat sans relche pour une prolongation de vie 
spirituelle. Ici la différence des deux atures et des destins 
qui les attendent est parfaitement indiquée. Il n'a rien manqué 
à l'animal ; il ne pouvait prétendre àrien de plus que ce qu'il 
a obtenu. Sa fin le plus souvent sera pour lui un bieufa/t. 
Mais lorsque aprës des années consacrées au service d'un 
pays, je ois ravir à son siècle un de ces étres qui en ont 
dtA les bienlaiteurs ou la lumière, ou lorsque seulement un 
honnête père de famille est arraché à des affections ver- 
tueuse-s, je crois lire un de ces beaux ouvrages auquel man 
:luerait un dernier volume. Avec toutes ses vertus, toutes 
s qualilés tous ses souvenirs toutes ses prévisions, osons 

IMMORTALITÉ DI t. 
le dire, avec tous ses vices mme, l'homme, tel q'il appa. 
rait un instant dans cette vie suhlunaire, est un ¢:tre impar- 
fait ou plutOt inachevé. On dirait l'ébauche d'un ange de 
lumières ou de ténèbres, oubliée dans l'atelier du statuaire, 
au milieu de diverses figures de quadrupèdes auxquelles 
aurait été donnë le dernier coup de ciseau. 
Qu'il soit maintenu par la volonté libre des sociétés dont 
la Providence a préparé la réunion dës l'orine des choses, 
ou que l'intervention de la force publique contribue à l'en- 
tretenir, l'ordre règne sur la terre, mais avec de tristes et 
déplorables exceptions. Si nous retranchons un petit nom- 
bre d'élans généreux dans les masses et quelques nobles 
caractères qui  surnagent, de grands désastres composent 
toute l'histoire des peuples. Pour des Clairs de vertu qui 
traversent ces "ages éloignés de nous, on y voit que pres- 
que toujours une audace criminelle livre les nations à des 
ëtres corrompus et immoraux. Plus tard, le pouvoir se ré- 
gularise dans son propre intérèt ; car c'est là une des pre- 
mières conditions de son existence. ,lais ces archives de 
l'espèce humaine, trop souvent mensongères au gré de l'o- 
pinion dominante, sont loin de contenir toutes les attaques 
à l'ordre social, toutes les infractions de lois, toutes les vio- 
lences exercées contre les populations, toutes les exactions 
par lesquelles des tres pervers sont arrivés à la lortune, 
tous les attentats commis par un orgueil écraant on par un 
désir de jouissances acquises sans travail. Chaque matin 
les bonnètes gens ont ì gmir sur une perversité dont 1 
journaux déroulent trop complaisamment le tableau sous 
leurs )-eux. 
Que de fautes, que d'aberrations hontenses restent encore 
secrètes! la dureté de cœur, l'insensibilité qui laisse frof- 
dément succomber ì la porte d'un somptueux hOtel l'ou- 
vrier auquel il ne fallait que donner du travail; l'inatitude 
de l'enfant qui n'assassine pas avec le poignard les 
rents dont la longévité l'afflige, mais qui leur sert chaque 
jour, ì chaque repas, le poison lent et corrosif du chagrin; 
la cruauté reflécbie du séducteur qui, enveloppant de ses 
piéges une ]eune femme, a détruit pour elle, pour son époux 
et pour leurs enfants tout bonheur domestique; la mauvaise 
foi dans les transactions, les captations testamentaires au 
préjudice des familles, les hypocrisies de sentiment, de re- 
lion, de politique, rien de tout cela n'est justiciable des 
t,'ibunaux ; presque aucun de ces torts, de ces crimes mme, 
dont se compose une vie coupable ne parvient à la con- 
naissance des hommes ; dans le sens le plus rigoureux, il. 
y a donc impunité. 
Une plus éq, fitable rétribution est-elle au moins assurée 
à la vertu? Les sacrilices qu'elle s'impose obtiennent-ils ici- 
bas une suffisante indemnité? Mon Dieu, non ! elle aura pour 
elle le témoignage d'un bonne conscience, et ce sera tout: 
Froissée sur la terre, elle tourne des :}'eux noyés de pleurs 
vers le ciel, et elle se tait, car ce n'est pas pour elle que les 
hérauts de la publicité emboucheront la trompette. Elle ne 
demandera pas non plus aux feuilles du matin une place 
pour ses réclames. Sa renommé n'ira jamais jusqu'ao bout 
de la rue qu'elle habite, et le cri de sa douleur ne sera en- 
tendu par personne; ou si sa voix, trop sousent étouffée 
sous les doigts de fer de l'indigence, parvient aux tribunaux, 
elle ne lardera pas à s'éteindre au milieu des ambages et 
des subtibtés de la procédure. Que de fois en effet la 
lice humaine est mise en défaotl Elle ne saurait tout voir, 
tout entendre ; elle ne lit pas au fond des cœurs; et le ma- 
gistrat lui-mme, asservi aux formes hgales, a souvent la 
douleur de voiler de sa propre main sa sainte mais impuis- 
sante image. 
Je voudrais bien savcir ce q,e vous avez en réserve 
pour la jeune fille qui consume ses jours et ses nuits dans 
les soins donnés ì un père ou / une mère infirme ? qui, 
icl,e des seuls attraits dont la dota la nature, et qui, voyant 
p, ès d'elle la compagne des jeux de son enfance entrer en 
possession des douceurs attachées ì une vie voluptueuse 
résiste aux mèmes séductions pour rester chaste et pure? 



IMMORTALITÉ DE L'AME 
Quel compte tiendrez-vous ouvert avec ce caissier qui, 
manipulant tous les jours l'or d'autrui, et entendant 
chaque soir à son foyer le cri d'une falnille en proie au 
besoin ou avide de plaisirs, delneure incorruptible? Et 
l'innocence injustement condalnnée, et la probité calom- 
niée, et le mérite éconduit par l'intrigue, et les plaies 
de coeur qu'aucun baulne ne cicatrise, qu'aucune voix 
alnie ne console, et les espérances trolnpées après un 
travail irréprochable, et les regrets devant la tolnbe qui 
dëvore ce que nous chérissions! que ferez-vous de tout 
cela ? car le monde est plein de ces disonnances et de 
ces amères douleurs; il n'y Cot pas une rose qui ne 
finisse par ëtre arrosée de latines. De gràce, ne me parlez 
pas de colnpensations ! elles ne sont qu'un mensonge in- 
vente par les heureux du siècle, qui s'en font un doux 
oreiller, ou par une foi faible et douteuse, qui, prenant son 
point d'appui dans une fiction dépourvue de realité, ne s'a- 
perçoit pas que ce misérable système aboutirait à un ablme 
où s'engioutirait toute espérance hulnaine. 
Oui, le pervers consomme souvent en paix le fruit de 
ses rapines ! oui, le remords, s'il n'est étouffé, est sou- 
vent endormi dans son sein ! oui, les séductions par les- 
quelles il a corrompu l'innocence, naguère orgueil du toit 
paternel, lui donnent des souvenirs de triolnpl,el oui, la 
vertu a ses déboires, ses angoisses, ses lnisères et ses dou- 
loureux déchirelnents ! les privations la contristent; le spec- 
tacle d'une félicité temporelle, /t laquelle elle ne peut et 
ne veut atteindre, la fatigue. Vous aurez beau dire : il n'est 
pas gai de passer la nuit/ prévoir d'où viendra la nou,-ri- 
ture du lendemain. Vo)ez cette mère qui presse contre un 
sein desséché des enfants dont le sang est déjb appauvri : 
o/ est son indemnité.  Honte b ce système de colnpensa- 
tions qui placerait/t cté du crime une peine légère, b la- 
quelle il échappe; à cté de la vertu, une tranquillité 
stoique, qui n'existe pas, et qui, fUt-elle réelle, n'enlève- 
rait rien à sa détresse! La résignation dans nos souffrances 
personnelles peut s'admettre; quand elle concerne des 
étres qui ont droit b notre intérêt le plus tendre, elle n'est 
plus qu'une froide cruauté. 
Voilh donc que se dresse devant nous un nouveau pro- 
blème d'une solution assez difficile ; car nous ne saurions 
nous dissimuler qu'envisagé dans ses apparences, telle 
qu'elle se montre à nos)eux dans ses rapport lnoranx, 
la soci«té confvnd notre raison. Au premier aspect, on 
aperçoit qu'une série d'injustices et un tissu d'absurdités. 
Un tel ordre de choses, s'il était permis de lui donner ce 
noln, serait la plus lnonstrueuse des combinaisons. Il y a 
donc nécessairement une vie luture ! 
Admettons pour un moment la plus funeste, la plus 
épo,tvantable des suppositions que l'esprit de l'holnlne 
livré au paroxslne d'un délire fiévreux puisse se permet- 
tre contre lui-lnêlne. Ne voyons daus les promesses comme 
dans les lnenaces qui depuis des siècles partent de toutes 
les chaires évangéliques, pour rassurer un auditoire chrétien 
sur son avenir, ou lui inspixer des craintes sérieuses, ne 
,'oyons, dis-je, dans tout cela que prestige, déception, sa- 
crifice fait/t la peur, amour du lnerveilleux; foulons aux 
pieds les espérances données/t la vertu, et les terreurs sain. 
taires imposées au crilne; proclamons à son de trolnpe le 
néant après la mort, et notre argulnent en faveur de la vie 
future surgira du sein de ce chaos, étincelant d'une lulni/:re 
nouvelle et terrible de vérité t L'univers, nous en convenons 
tous, n'est pas un accident : nous y avons reconnu l'oeuvre 
d'une volonté intelligente. N'est-il pas vrai que le sublime 
architecte qui I'a conçue dans sa force, n'ayant pas jugé 
propos de prolonger notre vie par del/t ce bas monde, l'homme 
qui aura eu seul la pensée de cette perpétuité d'existence 
et qui l'aura crue nécessaire, dans un sentilnent de iustice 
distributive, aura eu aussi des vues plus profondes que 
l'ordonnateur des sphères lulnineuses appelées, par une 
voix divine, à rouler dans l'espace ? Ne jugez-vous pas ici 
la créature, faible roseau battu par les vents, souffle près 

309 
de s'éteindr dans une nuit éternelle, ne la jugez-vous pas 
plus avisée, plus grande, plus solennelle et plus majes- 
tueuse dans sa courte apparition sur la terre, que le Ceea- 
teur, de la main duquel elle est imprévoyalnlnent sor 
fie? Elle était pourtant digne de l'avenir qu'on lui dénie 
avec une sorte de cruauté : Ele I'a cherché ; si elle n'a 
cru l'entrevoir, elle I'a au moins ilnaginé comme unique 
condition de son existence sociale ; elle y a eu foi, elle I'a 
mérité. O douleur! la pensëe du Très-Haut s'abaisse ì un 
état honteux dïnfériorité en regard de la pensée humaine. 
Voilà donc la sagesse éternelle humiliée devant son propre 
ouvrage, et la toute-puissance créatrice de l'univers pri- 
mée par un obscur vermisseau, qui s'est ajusté un instant 
des ailes pour s'élancer vers une région lneilleure! Et pro- 
duction éphémère, il retolnberait tristement sur le sol; il 
y rentrerait tout entier... Non, cela n'est pas possbile; cela 
n'est pas.! 
L'homme se survivra donc/t lui-même, selon les bellc 
paroles du Fils de Da id ; il est ine:terminable. Vous nou 
demanderez comment il sera perpétué dans son identité spi- 
rituelle et corporelle? Ici se prësentent, non des impossi- 
bilités (car il n'y en aura jamais pour l'Ëternel, lorsque sa 
justice ou sa bonté y seront intéressées), mais deux dii- 
cultés : l'une tient/ l'essence de l",line, telle qu'il nous e.t 
permis de la concevoir, et c'est à notre avis la plu grande; 
nous l'aborderons la première; l'autre n'a qu'une origine 
voltairienne, elle sera plus facilement résolue. 
Il n'y a d'esprit pur qne Dieu lui-mêlne. Pascal, dans sa 
forte raison, a ciWconduit à dire qu'il pouvait se representer 
un holnme privé de tous ses membres, qu'on lui enlëverait 
successivenent ; mais qu'il ne saurait se i'ilnager sans 
tête. En effet, si le sentiment a diverses lnanières de sais[r 
notre ìme, il est préalablement averti par la pensée, qui 
elle-même se forme soit sur des rélniniscences intimes, soit 
sur le tlnoiguage extérieu r des sens. De cette série dïlnages 
réveilles, de sensations, de réactions, d'actes exécutes li- 
brement et en connaJ.sance de .cause, résulte un en»emble 
de faits constitutifsde l'identité de l'être, sous une condition 
essentielle : c'est que la mémoire en conserve le dép6. Ce 
registre a-t-il peri, l'holnlne s'efface, l'àme dès lors a perdu 
sa conscience : elle nese rend plus colnpte de sa ,le ; la chaine 
de ses jours est brisée; et dans le cas. o{ Dieu exercerait 
sesjugelnents sur un pareil tre, soustrait par continuati«m 
à ses souvenirs, il punirait ou il récompenserait sôns couse 
et sans motif. 
Ce que nous établissons à cet égard est d'une évidence 
palpable. Maintenant il reste b savoir si une aine pivée de 
toute texture organique, de toute communication avec la 
monde positif, peut exister, et surtout si elles peut se re- 
presenter sa vie passée, sans avoir le droit d'en parcour.r 
les feuillets. Une substance purelnent intellectuelle, en bonne 
logique, est inadlnissible. Parcelle échappée du sein de l'es- 
prit infini, cette sorte d'intuition en ferait un Dieu. Les 
an{es eux-mêlnes n'ont point été doués de ce priviiée, 
ainsi que nous l'avons prouvé dans nos lnduclions moral«z. 
et physiolo9iques par la chute des intelligences déchue, 
telle qu'elle est rapportée dans les livres saints. Ces sub- 
stances éthérées, pas plus que celle de l'homme dépouillé Ce 
tout organisme, ne sont s,sceptibles d'entendre, de com- 
prendre, que suivant leur portée, comme l'a si bien dit Bos- 
suer. Or, la portée d'un pur esprit ne saurait erre partielle ; 
elle est nulle ou totale, et celle-ci est exclusivelnent celle 
de la Divinité. Il nous est donc loisible de nous figurer le 
monde des esprits/t l'instar d'une immense échelle, sur les 
degrés de laquelle ils s'élèveraient successivelnent b mesure 
que leur tissu organiqne deviendrait plus fin et plus délié, 
sans que jamais, en leur qualité d'étres mixtes (et nous n'e 
admettons pas d'autres), il leur soit donné de se confondre 
dans l'essence divine. 
Le célèbre évêque de 5teaux tait tellement gêné par la 
diificulté de donner ì I' in e une existence identique à elle- 
lnêlne sans lui adjoindre un système sensitif, qu'il terlnine 



:: t 2 IMPÉNITENCE 
s-nt déchus de cet état et ont croupi longtemps dans le 
crime. La raison eu est toute simple : Pour revenir sincère- 
ment à Dieu, il faut qu'il soit resté et la foi dans l'in- 
clligenoe, et l'amour dans le cœur. Or, ces dons précieux 
n'habitent pas dans une grue qui, après les avoir possédés, 
les méprise et s'endort sur le bord de i'abime, sans entendre 
ni la voix de sa conseicuce ni celle de l'Eternel. Elle ne se 
réveillera qu'à l'appel de sou juge. J.-G. Cn^ss^¢oL. 
IMPENSES. La langue du droit appelle ainsi les alC 
penses faites pour i'amélioratiou, la conservation ou i'em- 
l,elfissement d'un immeuble. Au premier cas, les impenses 
out dites tiles ; au secoué, écessaires ; au troisième 
«Olul)tuttires. Lorsqu'un donataire fait rapport à t,ne 
succession, on lui tient compte des impenses utiles et néces- 
saires q, fil a faites, mais point des voluptuaires, parce 
qu'on n'est pas toujours certain de retrouver ce qu'elles 
,,ut co0té et que leur appréciation est une allaire de goftt 
,:! la plupart du temps méme de caprice. Il en est de méme 
I ont le possesseu.," ,le boune foi qui est soumis à 1 'é ri c- 
tion. 
LMPÉRATIF. C'est le mode des verbes que l'on em- 
ploie le plus ordinairement soit pour donner un avis, soit 
pour intimer un ordre, soit pour prier, soit pour solliciter. 
t'cite dénominalion porte avec elle l'idée du commandement. 
.tin«i : Fais cela, Viens ici, Sors de ces lieu:, Secoure'.- 
rtoL Dans n,,tre langue, l'impératif n'a réeilement qu'une 
:eule personne au singulier, la seconde (fais, viens ), et 
deux personnes au pluriel, la première et la seconde fai- 
ons, faites, venons, verte,.). Quant à la troisième per- 
sonne, au singulier comme au pluriel, elle revgt la méme 
formule que le subjonctif : 9u'il fasse, qu'ils fassent ; 
çu'd vienne, qu'ils viennent. Les Latins avaient deuK 
manières d'exprimer cette troisième personne, l'une comme 
en fi'ançais par le subjonctif, l'autre par la terminaison tu. 
Celle-ci était plus forte, plus impérative, que la première. 
Uimpéralif n'a point de première personne au singulier, 
parce qu'on ne se donne pas d'ordre à. soi-méme, ou du 
moins qu'on ne le fait jamais qu'en employant la seconde 
personne. Il n'en est pas de mème a, pluriel, parce que 
l'on peut très-10ien s'encourager, s'exciter les uns les autres 
a faire quelque chose : lanrnons notre courage! Courons 
a la victoire ! Les Iégislateurs romains employaient l'tropA- 
tarif dans la promulgation de leurs lois. Les Hebreux 
-aient usage «e la seconde personne du futur, formule qui 
a quelque chose de plus pressant encore. Uimpératif en 
,'flet ne s'exéctte que dans un court avenir ; ce n'est méme 
qu'un très-prochain avenir, eu sorte que le temps futur 
i,eut fofl bien remplacerlïmperatif. CA.LPAGNAC. 
IMPERATOR. Voye,. 
i.IIPÊIATBICE femme de l'empereur, ou prin- 
cee qui de son chef possède un empire. Faustine et Lucile 
sont les seules impératrices nees de p:res empereurs et 
qui aient frayé à leurs maris le chemin du tr6ne. Hlioga- 
baie en moins de quatve ans se mria quah-e lois. Les m- 
dailles de ces quatre impé,atrices sont fort rares; elles sont 
rest, es si peu sur le tr0ne, qu'on a eu à peine le temps de 
leur en fi'apper. D'un autre ,6té, les numismates ont 
f, rt souvent embarra.sés pour classer certaines médailles 
d'impératrices romaines, do.t on ne connait ni l'«poque 
ni leç actions, et dont leç noms sont le plus souvent ou cor- 
rompus ou omis dns i'histoive, tels que ceux de Barbia, 
Orbiana et Cornelia-Snpera. 
IMPERFECTIO IMPARFAIT. L'imperfection sup- 
pose un état possible de perfection, non complet, ni 
achevé, mais non encore parvenu à son but final. Le jeune 
être embryonnaire, la plantule, la larve, dans ses enveloppes 
fétales, bien qu'imparfaits, sont toutefois capables d'atteindre 
à l'entière perfection de leur espèce, si rien u'y met obstacle. 
Cependant, il peut survenir des causes qui suspendent, qui 
arrèlent méme cette parfaite ëvolution des organes; alors 
l'onimal, la plante, entrav6s dans i'accomtlissement normal 
.le leurs fonctions, demeurent imparfaits, et restent avor- 

tons, boiteux, bossns, manchots, difformes, inégaux, non 
symétriques, disgraciés par quelque vice congénial, par une 
décurtation des membres, par atrophie, ou délaut de nu- 
trition, par troncature naturelle, par épuisement de naissance, 
ou faiblesse et énervation, etc. 
La nature ne peut avoir pour objet final de donner nais- 
sauce à des créatures imparfaites, absolument parlant. 
Chaque Cre doit atteindre ses fins; le hasard seul, dans 
ses chances aveugles, pmduirait des étres sans but, sans 
formes constantes et alCerrainC vers un résultat quel- 
conque ; le crapaud, la vipère, tout repoussants qu'ils sont, 
ne peuvent étre considérés comme imparfai!s ; ils possèdent 
tout ce qui est nécessaire à leur existence, ', Inr reproduc- 
tion, puisqu'ils se perpétuent depuis tant de siècles et rem- 
plissent les humbles fonctions qui leur sont assisCs dan 
i'économie universelle. 11 y a des hiérarahies ou des 
dations qui ne résultent point d'im .rtections. 
S'il est permis de penser qu'à ?origine des choses des 
ëléments inorganiques, et rebell,:s encore, ont dominé la 
nature intellectuelle qui les vivifie, la masse prédominante 
alors du principe matériel doit finir par gtl'e domplée : 
ainéi nous voyous s'accomplir dans le cours des es la 
perle,tion des faces, et par une longue éducatior, ca per- 
fectibilité indéfinie de l'humanité se dêveloppor et s'agrandir. 
Dans les objets d'art, la principale imperfection résulte 
du défaut d'unitC d'ensemble et d'harmonie, car les œu- 
vres humaines n'ont, comme les ouvrages de la nature, le 
don de la vie qu'à la condition d'unité et de concours de 
toutes leurs parlies pour former un tout organisé, animé 
du méme esprit. Tel est l'ensemble exig6 dans l'ordonnance 
de toute pro.lucli,n du génie. J.-J. 
IMPEBFOB.,TIO. (du latin in, non, et perJorare 
percer, perforer). C'est en chirurgie un défaut d'ouverture 
dans quelqu'un des passades naturels. Des enfants naissent 
quelquefois avec l'anus imperforé. On remédie à ce dè. 
faut en faisant une incision à sa partie. 
IMPÊIIAL (Globe). Voile'- GLO,E IMPËPd.gL. 
IMPÉIIALE  nom d'une monnaie d'or russe équiva. 
lant  t0 r o u bi e s d'argent, qu'on a frappée en Russie de- 
puis le règne de l'impératrice Elisabeth. La derai-impé- 
riale de 5 roubles est devenue depuis 1817 la principale 
monnaie d'or de la Russie, od l'on a complétement cessë 
de frapper des impériales entiëres. L'or des unes et des 
autres est au titre de 22 carats. Les impériales frappées sous 
Êlisabeth ont près d'un quart de valeur de plus que les 
autres pour le poids et le titre. 
On appelle aussi impériale la parlie suiSCeure d'une di- 
ligence O.U d'une voiture de rosage. 
IMPEfIIALE ( Botanique ), espèce du genre.frit i l- 
luire. 
IMPÊBI &LE (,Ieu de i'). Le nom de l'inventeur et i'é- 
poque precise de l'introduction de ce jeu sont iguorés. On 
peut croire cependant que son orine remoute à l'une des 
guerres qu'a occasinnnes la successiou de l'Empire d'Aile- 
magne. Les six points exigés pour annuler ceux de l'adver- 
saire et gagner une impëriale représeutent assez bien le choc 
entre la majoritë et la minorité des suffrages lors de l'Ce,- 
tion du chef du salut empire romain. Quoi qu'il eu soit, 
Iïmperiale est nne modification du jeu de piqu et. On la 
joue avec trente-deux cartes : douze sont distribuées  cha- 
q,e joueur; la vingt-cinquième, qui est la première carte 
du talon, est retournée et alCermine l'atout. Celui qui donne 
gagne un jeton s'il a retourné une des cartes marq,»antes, 
qui sont le roi, la dame, le salet, l'as et le sept. Il n'y a 
point d'écarL Le premier en cartes annonce immëdiatement 
le nombre de points formé par la runion des cartes d'une 
mème couleur ; h points égaux, le premier en cartes obtient 
l'avantage. L'as compte pour onze, comme au piquet, bien 
qu'il soit primé par les fires, et ne l'emporte que sur les 
basses cartes. Celui q,ti gagne le point marque un eton. 
Ensuite, on nontre les tropCinies, qui sont les quatre rois 
les q«at:e dames, les quatre valels, les quatre as, ou 



IMPERIALE 
quatre sept, nu enfin une quatrikme majeure dans rune des 
couleurs. 11 y a aussi l'lineCiait de cartes blanches; au- 
tre[ois elle comptait double. Chacune de ces impériales dites 
de main vaut une fiche ou six points, et l'adversaire dé- 
marque les jetons qu'il adéjà acquis. 
La partie se joue ensuite comme au piquet, sauf les atout s, 
qui [unt une notable différence. Les cartes marquantes 
]ouC sans étre prises par l'adversaire et celles qu'on lui 
enlève par supériorité de figure comptent chacune un point. 
11 en est de mème de chaque levée gagnée en plus en plus. 
Lorsque l'on a fait six points, on prend une impériale, et 
l'adversaire démarque. Le capot vaut aussi une impériale. 
La partie se compose d'un certain nombre de fiches ou iln- 
périales c.onvenues d'avance. BETON. 
IMPEIA.LE (Bibliothèque). Vote-- BIBLIoTHÈque 
NATIONALE. 
IMPÉRIALE (Chambre). l'oyez ChArnue IMPÉRIALE. 
LMPÇBIALE(Cour). Voye'- Appel (Cours d'). 
IMPEBIALE (Garde). Voyez GAnDE IIPÉP, IALE. 
IMPÉBIALE (Imprimerie). Voyez la»raie 
I|&LE. 
IMPÉRIALES. Les numismates désignent ainsi les 
médailles frappées sous les empereurs romains. Elles com- 
mencent avec J,des Oesar, et par celles de ses mdaiiles sur 
lesquelles se trouve sa téte. Cet usage s'introduisit une fois 
qu'il eut été nommé dictotor perpetuus, et les empereurs 
suivants le conservèrent. Sur ces médailles, quel que soit le 
métal employé, or, argent ou cuivre, les ttes des empe- 
teurs sont toujours d'une grande valeur artistique, parce 
que les médailleurs gravaient leurs coins d'après des por- 
traits bien exCulC. L'exêcution mème garantit une extrême 
ressemblance ; et alors mme qu'il n'existe plus de traces 
de la légende, tout connaisseur un peu exercé, rien qu' 
voir la tte, dira tout de suite de quel empereur est la mé- 
daille. 
Autrefois on terminait la série des impériales à Héraclius; 
mais depuis on y a compris mme les médailles des empe- 
reurs byzatins. Suivant leur valeur artistique, on les divise 
en deux classes, dont la premiëre comprend les médailles 
frappées à l'époque oil l'art etait dans tonte sa sldendeur , 
et la seconde celles de sa décadence. On comprend aussi, et 
avec raison, sous le nom d'impcrales, la plupart des mé- 
daiiles d'i topWra tri ces, attendu qu'elles sont égaies aux 
types des medailles des empereurs. 
Pour les impoeriales grecques, voye'- GleCUS ( Mon- 
noies ).. 
IMPEBIALES (Villes). Voye'. VILLES IPÉBIALES. 
IMPÉRIAUX, nom que l'on a donne aux troupes de 
l'empereur d"Aile mn ag ne, et quelquefois aussi à ses mi- 
ni.tres plénipotentiaires. 
IMPERIUM. Ce mot alCigait, chez les Romains, la 
puissance de conmlander et le pouvoir exécuti[ dont avaient 
d'abord été investis les rois, puis, sous la république, en 
vertu de la lex cm'iata, divers magistrats supérieurs, tels 
que les consuls et les préteurs. L'idée représentée par le 
mot imperium differait de celle que représentait le mot 
potestas (pouvoir, puissance ), eu ce sens que le second 
ne désignait que la puissance attribuée à chaque magistrat 
dans l'exercice de ses fonctions. L'imperium, dont les lic- 
teurs étaient considérés comme la marque caractéristique et 
essentielle, était joint au droit d'employer les auspices su- 
prémes, et se manifestait surtout par l'exercice de la suprème 
puissance militaire et judiciaire. En ce qui est de la pre- 
mière ( imperium militare), les consuls et les préteurs, 
dans les temps postCieurs de la république, obtinrent, sous 
le titre de proconsuls ou de proprteurs, la prolongation 
ou prorogation de leurs pouvoirs expires; et ce fut en par- 
tie  cause de cela, et en partie aussi parce que les gou- 
verneurs des provinces étaient investis de l'imperium, que 
ce mot fut employé également comme le contraire de 
gistratls. Au temps des empereurs romains, les jnriscon- 
sulles distinguèrent en outre l'imperium merum, c'est-à- 
DlCT. DE LA CONV£nS.  T. XI. 

-- IMPÉTI60 3 
dire le commandement pur et simple, appelé aussi 91adi 
potestas, et dérivé de la puissance exerce par le gënér, 
d'armée, le droit de vie et de mort en matières criminelles 
que l'empereur conférait aux gouverneurs de province ainsi- 
qu'aux préfets de la ville ou du pretoire, de l'tmFerium 
tutu, qui avait rapport  la juridiction civile, et qui donnai 
notamment au magistrat le droit de procéder extraordi- 
nairement par .voie de cognition et de decret. 
IMPEBMEBILITE (de in, non ; per, au travers; 
zneare, passer). Absolument parlant, ou ne peut pas avau- 
cee qu'il y ait des corps au travers desquels toutes sortes 
de substances ne puissent circuler. Si les reCaux, les miné- 
raux, s'opposent ordinairement avec succès / l'écoulement 
des liquides, des gaz, ils sont incalables de retenir ou 
ne pas admettre le principe de la chaleor (le calorique), et 
probablement d'autres fluides qua nous sout inconnus; il y 
a plus, les reCaux eux-mèmes livrent passage à l'eao quand 
elle est pressée dans le vase qui la contient par une force 
supérieure. On sait que de l'eau contenue dans une boule 
creuse d'or s'en échappe en gouttelettes quand cette boule 
est fortement pressée. Nous avons vu un canon de fer forgé- 
dont les parois avaient l'épaisseur du doigt, et qu'on avait- 
recouvertes intrrieurement avec soin d'une couche d'étain 
pleurer de tous c6tés lorsqu'on bourrait, s'il est permis 
parler ainsi, de l'eau dans son interieur au mo)en d'nue 
presse. L'imperméabilité, ou la lacilité qu'out les corps d 
s'opposer avec plos ou moins de succès au passage des li- 
quides ou des fluides, dépend de causes qu'il nous est im- 
possible de signaler exactement, et que nous ne pouvon 
que soupçonner : nous savons par exemple qu'un vase de 
cristal contient parfaitement de l'eau, des gaz, tandis qu 
la lumière le traverse avec une facilite étonnaute ; un vase 
de bois peut contenir fort bien de l'air ou tout autre gaz. 
et se laisser péntrer à l'eau. Parmi les liquides, il eu est 
qui s'infiltrent plus facilement  travers les bois, la peau 
que d'autres; un baril plein d'huile est toujours suant, tan- 
dis que s'il contenait de l'eau, du tin, il serait parfaitement 
sec  l'extérieur. Tsssle. 
IMPEBMÉABLE (Tissu). l'oje 
131PEBTINENCE, (du 
IMPERTI.NENT 
latin 
tincns, ce qui ne convient pas). « Un impertinent est u 
fat outré, a dit La Bruyère ; il rebute, aigrit et irrite ceux qu 
lui parlent. ,, C portrait en deux lignes suffit à faire con- 
naltre le défaut, pour ne point dire le vice, d,,nt nous avoa» 
à nous L'Dnpertinence n'est en effet 
occuper. 
qu'une 
tuité outrée, arrogante, et dont la malhonnéteté ironique 
se gaze à demi sous les formes affectees du bon ton. 
eqt donc bien dislincte de l'insolence : cette dernière tieut- 
plut6t de la grossièrcte ; lïmpertinence est étudiee, et con- 
siste dans une affectation qui 'luit par tourner en habitule ; 
l'insolence, au contraire, est rarement étu,liée : elle ,t pus 
naturelle. L'impertinence pique au vif avec des deho, s de: 
légèreté; l'insolence blse avec des paroles brutales tf ab. 
irato. L'impertineuce et l'apanage de personnes dont l'es- 
prit est cu',tivé, tandis que l'insolence est plut6t le partage 
des gens sans éducation. 
Impertinence s'applique encore aux choses ou aux 
roles qui sont contre le bon -,eus ou contre la bienséanoe 
c'et ainsi qu'on a dit que les grands discoururs étaien 
sujets à dire beaucoup dïmlertinences. C'est à peu près 
dans le mëme sens que les avocats emploient l'épithèle dïm. 
pertinent, appliquée à un lait par opposition à pertinent. 
Un fait impertinent est celui qui ne rentre point dans la 
question, qui n'a rien de commun avec ce dont il s'agit . 
les faits i.mpertinents son inadmissibles en jurisprudence. 
IMPETIGO. Quoique les auteurs latins emploient ce 
mot dans le sens de drtre, il a ét transport dans la lan- 
gue française pour désigner une éruption cutanée qui 
forme, dans la classification d'Alibert, un autre genre de 
deratose. L'impétio est caractérisé par de petites taches 
rouges, circulaires, contenant un liquide îcre et séreux 
et ui le malade éprouve un prurit plus ou moins coid& 
o 



 t 4 IMPÈTI G 0 -- 
rable. Quand cette éruption est prioe ì son début, qtiel- 
ques lotions astringentes sulflsent pour la faire disparattre. 
Mais si elle est négligée, les boutons s'élargissent jusqu' 
devenir aussi grands que la paume de la main, et il tant re- 
courir au traitement de la g a I e. Plus fréquent dans les pays 
chauds que dans nos contrëes, l'impétigo est une maladie 
contagie.e. 
IMPETItANT (du latin impetro, j'obtiens ; fait de pe- 
fore, demander). On appelle ainsi, dans la pratique du droit, 
celui qul obtient de la justice ce qu'il a demandé dans une 
requête par lui présentée : ce mot s'applique également à 
celui qui, ayant demandé au prince la remise ou la com- 
mutation d'une peine / laquelle il était condamaé, obtient 
l'objet de sa demande. 
IMPIE IMPIÉTÉ. Si nous cherchions l'acception de 
ces mots dans leur ët:/motogie, impie serait synonyme de 
on pieu.z, et tout acte que n'aurait pas suggéré la pipiL serait une impMtœe. Mais il n'en est pas ainsi : d'un point à 
l'autre, il , a loin, pbts loin, nous osons le dire, que du 
vice/t la vertu: la p/téest la religion portée fi certain de- 
gré de perfection ; l'impiéN est t'irreligion ponssée à l'exO.s: 
Ce sont en fait de religion les deux extrémités du bien et 
du mal. Dans le langage de certaines personnes, impiete 
et incrédul*té semblent n'être qu'une seule et mème 
chose. Ce sont, il est vrai, deux sœurs qui ne se quittent 
guère : il est difficile de croire sans adorer, et plus difficile 
d'insulter ce qu'on adore, tandis que l'homrae sans loi se 
retranche le plus sou»eut dans son incrédulité pour blas- 
pbémer plus /i son aise, et déverse le ridicule et le mépris 
sur les croyances les plus respectables. Cependant, quelque 
intimité qn'il y ait entre ces deux filles de l'orgueil, elles 
ne doivent pas Cre confondaes : L'iicrëd«le peut n'Ire 
pas impte, surtout s'il estde bonne foi, et qu'il re«pecte la 
foi des autres ; l'mpie, h son tour, peut n'ètre pas iucre- 
dule : « Les doutons croient, » dit saint Jacques. L'incré- 
dule n'a point de foi, l',mpe point de religion : voilà toute 
la difference. 
131POLITESSE IXCITILITÊ. L'impolitesse consiste 
dans une certaine rudesse de manières et de langage, op- 
posée aux façonsd'agir et de parler consacréesdans la bouue 
société. C'est g/'nérMement un défaut d'éducation ; ttais 
c'est aussi un defaut de goùt, car le langage et les manières 
qui distinguent les Itommes polis se revèlent sans étude 
aux organisations délicates. Cependant, l'impolitesse peut 
n'Otre que l'effet de la distraction : si tel individu ne ré- 
pond pas quand on lui parle, s'il entre ou sort sans prendre 
congé de personne, ce n'est pas qu'il soit impoli, il est d i s- 
trait. L'icivilit semble avoir quelqne cfiose de plus 
cltoquant que l'impolitesse. L'oubli grossier, ou le dédain 
des égards qui. sont de règle dans les relations, voilà l'inci- 
vilité. Un homme impoli peut n'ètre qu'un rustre; l'incivil 
est presque toujours un caractè re désagreable, sinon méchant. 
L'impolitesse tient surtout à l'ignorance des usages du monde; 
l'incivilité nait [,lus souvent d'une vanit ombrageuse, qui 
redoute jusqu'à l'apparence de la soumission. La paresse, 
remettant sans cesse au lendemain l'accomplissement des 
devoirs de la bienséance, ou l'orgueil, qui nous fait juger 
les autres trop peu dignes de notre attention, sont aussi le 
principe de t'incivilité. L'iucivilité semble donc plus que 
l'impolitesse un vice de l",line ; elle blesse davantage, parce 
qu'elle procède plus de la volonté. 
Qu«»i qu'il en soit, l'impolitesse est un grave défaut. La 
vie de sociétd étant l'ëtat natm'el de l'homme, le liant des 
égard.% l'empire et le respect des bienséances convenues, y 
snt indi.pensables pour prévenir le choc des égoismes et 
les mortelles blessures des amours-propres constamment 
eu présence. On h'ouve cependant de ces espriL nés pour 
tout contester, qui ne donnent qu'un bl'me éq,ivoque aux 
hommes impolis, aux caractères incivils. A les entendre, I 
politesse ne œerait qu'un vernis menteur, la civilité qu'tm 
masque: il y a des hourrus bienfaisants, disent-ils, et le 
pa)'san du Danubc a prouv que sous des formes .ros- 

IMP 
I sières on pouvait cacher du bon seng. Dison donc un 
mot de ces héros de la franchise brutale. En sont-ils plus 
sages, pour affecter partout tant de rudesse, pour fouler 
aux pieds, dans leur conduite et leur conversation, toutes 
les bienséances de la politesse sociale? Ces gens-I/i prennent 
des airs superbes, avec leur longue barbe et leur pesante 
chaussure; au fond, ce sont tout simplement des sophistes 
ou des sols, qui, pour aimer la vrit, ne réussissent qu'à 
faire détester ce qu'ils aiment. L'impolitesse érigée en 
maxime n'est pas moins anti-sociale que l'impolitesse gros- 
stère des ignorants : les effets sont les mornes ; rien de 
plus fragile que des relations auxquelles ne président ni 
délicatesse ni .ménagements. L. Lgvm. 
IMPONDEI{ABLES (de in, non, et pondus, poids). 
En physique, on reconnalt des corps, dont l'existence est, 
du reste, fort problématique, qui ne sont point sensibles 
aux balances les plus délicates, ou, pour mieux dire, dont il 
est impossible d'évaluer le poids : on les qualifie du nom de 
substances irapondrables. Il en est sans doute nn grand 
nombre de cette espèce dont la plupart échappent/t nos 
moyens grossiers d'observation : celles dont nous pouvons 
assurer l'existence, du moins par les effets qu'elles produisent. 
sont le calorique, la lumière, les fluides électrique 
et magnétique. 
Les molécules d'une substance impondérable se mtvent 
en tous sens avec une indifférence absolue, c'est-à-dire qu'un 
oorp  lumineux, par exemple, projette des rasons de tous 
cotés avec lamémeénere. Malgré cette propriété des corps 
d;.s impoidérables, il est permis de douter qu'ils soient 
absolument dépourvus de la faculté de loeser. QxCest-ce eu 
effet que le poids d'un corps ? C'est évidemment la ten- 
dance plus ou moins forte avec laquelle il se porte vers 
le centre de la terre, et par laquelle nous jugeons de sa 
masse ou bien de la quantité de matière qu'il contient 
sous un volume donné. Or, un rayon lumineux, par exemple, 
se dètourne de sa route Iorsqu'il passe dans le voisinage de 
certains corps, tels que des cristaux, des reCaux, etc. Il 
est donc attirë par ces matières : d'où il suit que si nous 
pouvions mesurer la force avec laquelle le raon est déo 
tourné, nous aurions en quelqtm sorte son poids, relative- 
ment à la substance qui l'attire. Toutesles substances sans 
exception sont douées de la propriété d'tre attirees avec 
une certaine force par des corps d'espèce diffërente que la 
leur. Il n'y a donc pas, à proprement parler, de matières 
absolument impondérables; cette dénomination accuse seu- 
lement l'insuflisance de nos moyeus d'observation. 
IMPOPULAIAITÉ. De tous les pbénomènes que 
presente l'histoire des nations et des hommes, le moindre 
n'est pas de voir leur haine succéder à leur faveur, et 
leurs idoles couvertes de boue par ceux-là mime qui naguère 
leur prodiguaient l'encens. Un instant suffit souvent 
pour faire perdre la popularité. Malheur alors à celui dont 
l'éner#e s'est usèe au grand rOle qu'il s'était imposé : il 
n'aura méme pas la consolation de x oir son nom oublié; les 
malédictions suceéderont aux hénédictions ," le mépris / 
l'estime, la haine à l'amour, la froideur à l'enthousiasme. 
Et pour devenir ainsi l'objet de Pexécration publique, il 
suffit de céder à des séductions, hélas! tl, p nombreuses, 
de modifier insensiblement ses couvictions, de se montrer 
moins hostile à ceux que !'on a combattus. Il faut moins 
encore : pour voir tomber l'auréole de gloire dont il était 
entouré, pour voir ses lauriers flétris, noyés dans la fange 
des rues, l'homme politique n'a qu'à demeurer stationnaire, 
quand tout avance autour de lui ; car les masses, ravivées 
cl,aque jour par de nouvelles générations d'adolescents de- 
venus hommes, par de nouveaux besoins, par de nou- 
velles espérances, exigent, dans le cbef qtt'elles se donnent 
des ressorts dont la tension soit de plus en plus énergique. 
Voil tout le secret de tant de grandes et de malheureuses 
impopularits. Voilà pourqaoi dans les révolutiong tant 
d'hommes qui les ont connnencées sont dévores par elles, 



IMPOPULARITÉ -- IMPOSER 
pour ne pas s'tre identifiés avec chacune de teurs phases, I tope pour des valeurs considérables. Telle et en 
pour tre demeurés ce qu'ils étaient, quand les circons- 

tances au milieu desquelles ils ivaient ne restaient plus les 
mmes. 
Ce que nous venons de dire pourrait donner a croire 
que l'impopularité ne survient qu'anx hommes qui ont eté 
populaires. Ce serait cependant la une grande erreur. Il 
est une impopularité que nous pourrions appeler native : 
c'est celle qui, dans ses murmures improbatenrs, s'attache 
avec acharnement a certains noms malheureux, a certains 
hommes que l'ignominie de leur conduite, et la publicité 
de leurs vices livrent a la censure et a l'animadversion 
générale. Si l'on doit parfois gémir sur les suites terribles 
de l'impopularité, ce n'est certes pas  ces hommes-la 
que la sensibilité réservera ses larmes. 
.Napoléou GALLOIS. 
IM PORTJL'TS. Faction polilique qui se forma ï la mort 
de Louis XILI, et se composait de toutes les personnes qui, 
après avoir été proserites par R i c h e ! i c u, croyaient avoir 
droit sous le nouveau gouvernement  toutes les faveur». 
Le cardinal de Retz, qui rfusa d'y entrer, raconte avec 
infiniment d'esprit l'originede cette faction et sa déconfiture. 
« Le roi, dit.il, qui n'aimait ni n'estimait la reine sa femme, 
hfi donna en mourant un conseil nécessaire pour limiter l'auto- 
ritëde la régence, il ynomma M. le ca:dinal Mazar in, 
M. le chancelier, M. Bouteiller et M. de Chavigny. Comme 
tous ces sujets étaient extrèmemnt odieux au public, parce 
qu'ils étaient tous créatures de M. le cardinal de Richelieu, 
ils f, lrent sifflés par tous ieslaquais dans la cour de Saint- 
Germain, aussit6t que le roi eut expiré. M. de Bea u- 
fo rt, gouverneur des enlants d'Arme d'Autriche, qui était 
de tout temps a cette princesse et qui en faisait m.me le 
galant, se mit alors en tète de gouverner, dont il était 
moins capable que son valet de chambre. M. lëvëqne de 
Beauvais (Augustin Potier ), plus idiot que tons les idiots, 
prit la figure de premier ministre, et il demanda dès le pre- 
mier jour aux Hollandais qu'ils se convertirent a la reli- 
gion catholique, sïls voulaient demeurer dans l'allianee de 
la France. La reine eut lionte de cette momerie du minis- 
tre. Elle se mit entre les mains du cardinal Mazarin. M. de 
Beaufort, qui avait le sens beaucoup au-dessous du mé- 
diocre, forma alors contre la régente, contre le ministre et 
contre le., princes du sang une cabale de gens tels que 
Beaupt]y, Fontraiiles  Fiesqne, auxquels il faut ajouter 
les Guise, les Vendbme, le duc d'Êpernon, la duchesse de 
Chevreuse, la duchesse de Montbazon, le duc de Béthune 
et Montrésor... Tous ces politiques avaient la mine de penser 
crcux. Les princes unis contre eux tourrèrent en ridicule 
la morgue qui avait donné aux amis deM. de Beaufort le nom 
d'importants, et ils se servirent en mme temps trè.- 
habilement des maladresses de M. de Beaufort pour s'en 
débarrasser. Les imlortats furent chassés et dispersés, et 
l'on publia partout le royaume qu'ils avaient fait une entre- 
prise sur la vie de M. le cardinal. » 
La plupart des importants prirent part quelques années 
après aux troubles de la F r o n d e. Charles Nsan. 
IMPORTATION. L'économie politique donne ce nom 
à tons les produits qu'un peuple tire d'un territoire étran- 
ger par la voie du commerce. Réciproquement, on appelle 
expo rtat ion les produits qu'un.e nation laisse sortir de 
son territoire par suite des ventes conclnes avec d'autres 
nations ; en d'autres termes, l'importation et '-'exportation 
sont les deux aspects de l'Change, Iorsqu'on étudie ce 
pbénomène de peuple peuple. Cette seule définition suffit 
à montrer qu'il ne peut guère exister que dans la barbarie 
et l'enfance de toute civilisation un peuple qui ne soit pas 
tout a la fois importateur et exportateur. La nation chi- 
noise elle-mme, de tontes les nations du monde la plus 
concentrée, la plus étroitement emprisonnée dans le cercle 
de res vieux préjngés, la moins facile et la moins avancée 
dans les relations commerciales, figure chaque année 
oans le tableau des importations et des exportat!ons d'Eu- 

effet la 
constitution du globe et de l'humanité, que nul coin de 
terre n'est assez Ieureusement privilégié pont produir 
I lui seul l'infinie varierWde denrées nécessaires a la .satisfac- 
tion de ceux qui l'habitent, comme nul peuple n'est assez 
panvrement organisé pour pouvoir tenir éternellement en- 
fêrmés ses passions et ses désirs dans le cercle étroit que 
lui présente à parcourir sa production indigène. C'est donc 
une loi du monde moral aussi bien que du monde intel- 
lectuel et du monde physique, qu'entre les diverses terre 
et les diverses nations se forment, se maintiennent et s'ac- 
croissent les relations commerciales qui amènent le double 
phénomène de l'importation et de l'exportation. 
IMPORTUN, LMPOITUNITÉ. Il n'existe point de 
plus grand fleau que l'importun : malheur a ceux qu'il a 
choisis pour victimes, soit par desoeuvrement, soit par ne- 
cessité! Il s'achaçme sur eux, comme sur autant de proies 
qui nedoivent plus lui échapper, et avec une persevéranoe 
sans exemple. On peut dire de l'importnn ce que le bon- 
homme disait du naturel : 
Qfo, lui ferme la porte au nez, 
Il reçieodra par la fcoCre. 
L'importun est un homme a la fois ennuyé et ennuyeux 
il ne sait dépenser son temps qu'on détriment de ses amis 
ou de ses connaissances, quïl accable de sa présence. 
« C'est le r61e d'un sot que d'Cre importun, dit La Bruyère: 
un homme d'esprit sent qu'il ennuie. » lotre grand mora- 
liste avait peut-être tort d'avancer que l'importun ne sent 
pas cela. Quoide plus importun qu'un solliciteur? Et ce- 
pendant, qu'est-ce qu'un solliciteur, sinon un homme q ni a l'es- 
prit d'ètre importun jusqu'à ce qu'il ait obtenu ce qn'il de- 
mande. Le provincial fralchement débarqué, qui acoepare 
 la fois le lo#s, et les heures, et les pas de l'habitant de 
Paris assez malbeureux pour tre son parent ou son ami ; 
l'auteur qui veut décider un libraire à publier son œuvre, 
l'ëcrivain dramMique qui vient de terminer une tragédie ou 
un drame, et qui réclame le patronage d'un acteur tout 
puissant; le poête qui vous oblige a Conter d'un bout 
l'autre la lecture de ses chefs-d'oeuvre, sont autant de types 
divers de cette innombrable famille. 
Le mot importun s'emploie aussi adjectivement dans te 
sensd'incommode, fiîcheux, qui entraLne de l'ennui, qui 
de#ait. 
L'importunité n'est autre chose que l'action d'incommo- 
der, de fatiguer, d'ennuyer, de déplaire, soit par des assi- 
duites, soit par discours, soit par des demandes, soit par 
une présence trop assidue, etc. Elle est quelquefois si te- 
nace, que l'éloignement mme ne saurait en garantir ; 
elle fatigue alors par écrit, et suffirait a elle seule pour laite 
maudire l'invention de la poste aux lettres. 
IMPOSEPt EN IMPOSEIL Dans sa premiére significa- 
lion, cemot, derive dulat'mimponere, signifie poser sur. C'est 
dans ce sens que théologiquement on dit imposer les mains. 
Imposer se dit ensuite pour charger d'une chose embarras- 
saute, difficile, pénihle; et par extension, il signifie ordon- 
ner, prescrire, infliger. Enfin, il s'emploie mme dans le 
sens de faire, en quelque sorte, violence à une personne [mur 
qu'elle en accueille une autre, ou Four qu'elle reçoive une 
chose malgré elle . 
Dans le langage financier, imposer est synonyme de lever 
un imp6t : imposer un tribut, des droits, etc. ; imposer 
un pays une personne ; il faut une loi expreAse pour auto- 
riser une commune, un département, etc., à s'imznoser 
extraordinairement. 
Une autre acception non moins usitée du verbe imposer 
est celle dans laquelle on le prend pour inpirer du respect 
de la crainte : otre contenance mposa a l'ennemi. Ett 
imposer, au contraire, signifie abwer, tromper,.faire 
crmre; et c'est a tort qu'on l'a souvent pris dans la signi- 
lication précédente • Vous en impose'-. En imposer pardet 
airs de douceur. 



IMPOSITION, action d'imposer soit un nom, soit une 
Seine, soit une mission, soit un tribut, etc. 
En économie politique imposition est synonyme de c o o- 
ribul[ion, d'imp6t. 
Pour l'imposition, en typographie, voge: Covosmo,. 
IMPOSITION DES MAINS, action de poser, d'é- 
éndre les mains sur la tëte de quelqu'un. Cette pratique 
religieu était déjà en usage citez les Hébreux ; ceux-ci, 
lorsqu'ils priaient pour quelqu'un, mettaient leurs mains 
sur sa téte, en adressant des vœux à Dieu pour qu'il leur 
f0t favorable. Jésus-Christ, se conformant à cette antique 
coutume, imlJosait les mzins aux enfants qu'il voulait 
bênir, ot aux malades dont il opérait la guérison par ses 
prières. Les ap6tres imlJosaient les mins aux hommes à 
qui il conféraient le Saint-Esprit, et à ceux qu'ils ordou- 
tuaient mini-tres du christianisme, et qu'ils recevaient dans 
la loi. Les ecclésiastiques n'imposent les mains aujourd'hui 
que lo,squ'il coalh'ent les ordres. 
|MPOSTE. On désigne, en arcllitecture, par ce mot un 
cordon en saillie, ou espèce de corniche ordinairement 
peu ornée, et qui bien souvent consiste en une bande 
carrée qui reçoit la retombée des arclli¢oltes des arcades 
perches dans les murs d'un édifice. L'imposte quelquefois 
-n'est que le couronnement d'un pilier ; on a mme donné ce 
nom au bandeau sans ornement qui entoure les bords d'une 
fenètre. 11 y a des impostes brisées, c'est-à-dire qui sont 
coupées par les ouvertures d'arcades de fenoetres; d'autres 
»ont continues. Mors les arcs dont elles reçoivent les re- 
tombées ne présentent que des ouvertures demi-circulares. 
Tvssa. 
IMPOSTEUH, IMPOSTURE. L'imposture est un men- 
songe d'importance et d'un certain renom. Le menteur 
agit sur les individus, l'imposteur travaille plus en grand; 
il s'adresse aux masses, aux partis, aux peuples, qn-ïl cher- 
che à séduire par de faux miracles, ou par des doctrine» 
ronées. Si le monde avait pris au mot tous ceux qui se 
sont réciproquement traités d'imposteurs,-il est peu de 
philosophes et de th6ologiens qui eussent écbappé à cette 
qalification injurieuse. Les imposteurs abondent oU la crc- 
dulité domine, a dit Dulaure. Mais quel est le siècle o6 
la crédulité ne domine point ? L'histoire des imposleurs 
serait l'llistoire du monde. La c réd u litWne fait que chan- 
ger d'objet. Les hommes, scion Yauvenargues, semblent 
nos pour faire des dupes ou pour l'ètre eux-m6mes. Saint- 
Eremond avait dit avant lui qu'un imposteur roussissait 
mieux dans le monde qu'un bonnète Lomme rustique et 
sauvage. C'est décourageant pour la verto, mais c'est vrai. 
Deux grands llommes de l'antiquito, entre des centaines 
d'autres, l'ont si bien senti, qu'ils se sont appuyés sur l'im- 
posture pour faire comprendxe aux llommes de leur temps 
la justice et la vërité. Socrate ne croyait pas au génie 
{amiller dont il prétendait recevoir ses inspirations; .N u m a 
cavait très-bien qu'il mentait en parlant de son Egérie; 
mais ils faisaient servir le mensonge au triomphe de la 
raison. Que de poisons la pharmacie n'emploie-belle pas 
contre les maladies du corps humain ? Mais c'est à forte 
dose que les imposteurs administrent les leurs à l'animal 
prétendu ra!sonnable qui se dit supérieur à tous les autres, 
et tous ces charlalans ne sont point des uma ni des So- 
orale. 
La nonoen«loture des imposteurs à mauvaises itentions 
serait infinie. Le Ils re De tribus Imtostoribus, que le pape 
Grégoire IK attribttait à l'empereur FfCCie II, ou  son 
O,ancelier Pierre Desvignes, et que Voltaire prétend n'avoir 
iamais existé_', remontait à Moïse pour trouver le premier 
en date de ce trio, dont l'Europe presque entière s'accorde 
à retrancher le second, et dont le troigième est défendu 
par les populations de PAfrique et de l'Asie. Les plfilo- 
sophes, qui veulet trouver la raison de tout, regardent le 
buisson ardent et les merveilles du mont Sinai comme des 
tours de gobelet, et traitent Moise «le charlatan, il est 
dvident qu'ils ont tort ; mais leur tort serait plus grand 

IMPOSITION  IMPOSTEUI 
s'ils accusaient le législateur des Hébreux d'avoir inventé 
le charlatanisme sacréet profane. Les prétres de Brahma et 
ceux d'Osiris seraient d'une date plus ancienne : ce sont, à 
coup sot, les imposteur les plus anciens du globe; nous 
placerons aprb« eux tous ces roitelets de la Gréco qui se di- 
saient issus des dieux deleur pays. Quant à ces dieux, ce 
ne sont pas eux qui se sont donnes pour tels: ils sont de l'in- 
vention du charlatan Orphée, ou de tel autre ancien dont 
le nom a péri. Cet Or#ée, le plus grand théologien de son 
temps, avait décidé gravement, et après mr examen, que 
l'oeuf était antérieur à la poule. Des imposteurs ont fait 
verser des flots de sang depuis Constantin jusqu'à LouisXIV, 
pour des questions moins importantes que celle-là. A le x a n - 
d r e le Grand a dO une partie de ses conquêtes à l'imposture : 
il se faisait passer pour le fils de Jupiter-Ammon ; c'était 
cependant le siècle d'Aristote; et Platon, Socrate, P)thagore, 
ainsi que tous les grands poëtes d'Athènes, avaient jeté 
leur lumière dans le monde, qui n'y voait pas plus clair. 
Il y avait sept cents ans que lesa u g n re s romains imposaient 
à la crédulité du peuple, quand Cicéron s'avisa de se mo- 
quer d'eux. Mais les clartés que r6_paudirent les grands Ceri- 
nins du siècle d'Auguste n'emIchèrent pas de croire à la 
divinité de tous les empereurs morts, y compris Claude et 
Néron. 
La bonne foi, la v#rité, étaient alors dans les propaga- 
teurs ou confegseurs de la foi nouvelle. Mais, aprés la vic- 
toire, les charlatans ehrétiens remplacèrent les martyrs. 
Alors ceux qui s'étaient moqués de la nourrice de F, omulus 
firent nourrir leurs saints par des aigles, par des lions, par 
des colombes. On liquéfia du sang figé depuis des siècles, 
on conserva du lait frais pendant dix-huit cents ans. Des 
tètes, des clous, des suair¢s, des bras, des mains, a.ant ap- 
partenu à de saint personnages, se trouvèrent à la fois dans 
plusieurs lieux diflèrents, et produisirent les mêmes effets 
sur les populations; elles ne se doutaient point qu'à cent 
lieues plus loin le m6me objet de vénération opérait des mi. 
racles pareils; et ce qu'il y a de plaisant, ou de houleux, pour 
l'espèce humaine, c'est que les imposteurs qui attaquaient ces 
miracles en faisaient d'une autreespèce» pour assurer le triom- 
phe de leurs doctrines. C'est toujours ainsi qu'on remue I 
masses, depuis le Persan Zoroastre, qui fit croitre tmcyprës 
énorme dans vingt-quatre heures, jusqu'aux inventeurs de la 
croix de Migné sous la BestaurMion. On parle beaucoup de 
la dilfusion des lumières; mais il ne faut qu'aller à qne]qu 
kilomèh'es de Paris, si ce n'est dans qtrelque.uns de ses 
faubourgs, pour reconnattre le peu de progrès qu'ont faits 
ces philosophes si follement accusés d'avoir perverti les po- 
pulations. Il n'y a peut-erre pas de village où un paysan, 
un peu plus fin qtte les autres, ne guérise la fiévre et les 
fractures avec des paroles magiques, ou ne fasse retrouver 
des objets perdus avec des grimaces. Étonnons-nous après 
cela que les Arabes aient leurs mara bouts; les Turcs, 
leurs d e r v i c h e s; les Chinois, leurs b o n z e s; le« Siamois, 
leurs talapoins; les Japonais, leurs jammabos ; les Indiens, 
leurs fakirs¢ les Illinois, leurs manitous; les Lapons et 
cent autres peuples, leurs magiciens; les Tatars-Mongols, 
leur khutuktu; et d'autres OEatars, leur grand ama, qui, par 
parenthèse, fait bien le plus ennuyeux métier qu'on ait ia- 
mais lait dans ce monde. Tous ces imposteurs n'ont qu'un 
but, c'est de vivre dans i'abondan, e aux dépens des im- 
béciles; et si Voltaire obtenait la permission de revelfir 
sur la terre dan quelques milliers d'années, il y trouverait 
les mmes superstitions et les mêmes charlatans dont il a 
cru la débarrasser. 
E voilà plus qu'il n'eu faut sur les imposteurs sacrés; 
mais il en est de toute les sortes. Un certain Rocoles, que 
nous n'avons pas l'honneur de connaltre, a fait une bio- 
graplfie de tous les imposteurs qui ont lentWd'usurper un 
diadëme à Paide d'un nom supposé, suivant l'exemple donné 
par Jacob, qui se coovrit de peaux de bêtes pour usurper 
la bénédietion d'lsaac, son père, à la placed'Esaii, son aine. 
Le faux Smerdis, qui pritle nom du frère de Cambyse, 



I.IPOSTEUR 
est le premier dont l'histoire ail fait mention,et il a été le plus 
. beuren de tous, puisqu'il a régné sept mois avant d'Cre 
reconnu et mis à mort. C'est par I, que finissent ordinai- 
rement les imposteurs de cette classe, comme ce I:rançois 
de La Ramée, qui se disait fils de Charles IX, et que Henri 
fit pendre en place de Grève. L'Angle,erre a eu les siens 
sous le règne de son Henri Vil, dans Lambert Symnel et 
dans Perkin-V,'arbeck, qni prirent successivement la place 
du jeune Richard d'York. Le règne de l'usurpateur 13oris- 
Gdounof, en Russie, fut troublé par cinq imposteurs, qui 
se donnèrent suocessivement pour le prince D é m é t r i u s, 
assassiné par son Irère le tsar Fédor. Il en parut un sixième 
sous le règne de MicheI-Fédérowitz, pour tre Carrelé; mais 
Voltaire a tort de dire que ces aventures, presque fabuleu- 
ses, n'arrivent pas chez les peuples polieC, qui ont une forme 
de gouvernement ré,lière. Ces imposteurs n'y ont sans 
doute aucune chance de succès; mais il ne s'en présente pas 
moins. N'avons-nous pas eu; nous, le peuple polieWpar ex- 
cellence, ,»ne douzaine au moins de Louis XVII (voye'- 
Dxcrm.xs [ Faux ]) qui venaient, de temps en temps essa)er 
de la crédulité française ? Nous avons été, heureusement 
pur eux, plus humains que nos devaneiers. Le plus entëté 
de ces imposteurs en a été quitte pour quelques mois de 
prison. 
Au surplus, nous aurions trop à faire si nous roulions 
nous occuper de fous les cbarlatans politiques dont le pa)s 
fourmille, lls n'ont pas lous une couronne en perspective; 
ils laissent volontiers cette marque de la domination su- 
prime, pourvu qu'ils etendent la leur sur le peuple ; et cette 
race de charlatans, qui a pris naissance sur le mont Aven- 
tin, s'est prodieusement multipliée dans ces dernières épo- 
ques. Toute leur science consiste- bien rcconnailre les 
grands mots qui assent sur les populations de leur temps, 
et à les encadrer dans des phrases sonores. Chez les Ru- 
mains, c'etait le partage de terres, la loi agrai re et l'ava- 
rice des patriciens. Aujourd'lmi, c'est la liberté, la ré- 
f o r m e, le p r o g r è s, et autres mots quon se garde bien de 
dfimr, de peur d'tre compris. Mais le peuple sera toujours 
dupe de ces déclamations. Il y a plus de deux mille cinq 
ce,'als ans que l'histoire I,fi crie que les révolutions, quoique 
lattes par lui et avec lui, ne tournent jamais à son profit ; 
les imposleurs trouvent toujours le moyen de lui faire croire 
q«»e les révolutions à venir seront plus justes. 
Quant aux imposteurs littéraires, ils datent au moins 
d'au,si loin que les charlatans politiques. Il y a des cri- 
tiques qui prétendent que les deux poëmes d'H o m è r e sont 
*:ne imposture de Pisistrate. Celles-la du moins ne sont pas 
communes. Nous attendons encore la seconde, malgré les 
.olcils poCiques qui nous inondent de torrents de lumière. 
Annius de Vitcrbe e.t le type le plus imiversellement 
counu de ce, le espèce d'imposteurs. Mais il diffère des 
tres en ce qu'il mettait ses propres rêveries sur le compte 
d'auteurs apocr.phes, tandi. que nos charlatans actuels 
mettent sous leur propre nom les pensées d'autrui..Nous 
avons aussi en littërature d'autres imposteurs que les pla- 
giaires. Ce sont ceux qui portent aux nues de mauvais li- 
vres, et qui en déchirent d'excellents, avec l'intention bien 
a,érée de faire la réputation d'un ami et d'enrichir un li- 
braire aux dépens de la crédulité publique. Le règne des 
imposteurs n'est donc pas près de finir; mais le plus grand 
de tous ceux qui ont passé sous nos yeux est sans contredit 
le général qui en 1797 comparait la république à un so- 
leil, et qui la renversait trois ans après à son profit. 
Quant aux bonnes gens qui le confondent avec la liber,L dans leurs acclamations patriotiques, ce ne sont pas des 
imposteurs, mais les imposteurs en feront tout ce qu'il leur 
plaira. Vr,'ET, de l'Acadêmie Française. 
i.IPOT. L'impft est une valeur délivrée au gouverne- 
ment par les particuliers pour subvenir aux dépenses pnbli- 
-'t"es- 11 se mesure sur le sacrifice exigé dn conlribuable, et 
non sur la somme que reçoit le gouvernement, tellement 
lUe les frais de recouvrement, le temps perdu par le con- 

-- I3IPOT  l  
tribuable, les services personnels qffon exige de lui, etc., 
font partie des mpls. 
La valeur, sous quelque forme qu'elle soit, qui est sacri- 
fiée par le contribuable pour l'acquittement de rimp0t, n'est 
point réservée dans la société. Elle est consommée pour sa- 
tisfaire les besoins du public, et par conséquent de,fuite. 
L'achat que fait le gouvernement des denrées ou des ser- 
vices qu'il juge à propos de consommer n'est point une res- 
titution, mais un échange, dans lequel les vendeurs donnent 
en produits une valeur égale à celle qu'on leur paye en ar- 
gent. 
La société n'est donc indemnisée du sacrifice que lui coUte 
l'impfit que par la sOreté, par les jouissances quelcon- 
ques qu'il procure à la société. Si ces jouissances peuvent 
ëtre obtenues à meilleur compte, elle fait un marché oné- 
reux. 
Le sacrifice résultant de l'impft ne tombe pas constam- 
ment et complétement sur celui par qui la contribution est 
payée. Lorsqn'il est producteur, et qu'il peut, en vertu de 
l'impft, élev,:r le prix de ses produils, celle augmentation 
de prix est une portion de l'impôt qui tombe sur le consom- 
mateur des produits qui ont rencfiéri. L'augmentation de 
prix ou de valeur que les produits subissent en vertu de 
l'impft n'augmente en rien le revenu des producteurs de 
ces prod,,its, et ils équivalent à une diminulion dans le re- 
venu de leurs consommateurs. J:-B. Sv. 
Lïmpft est d'une nécessite absolue dans toutes les sociétés 
organisées. 11 riait avec la civilisation et se développe acc 
elle, si bien qu'aux procès successifs de l'industrie et de la 
richesse correspond infailliblement l'élévation graduelle des 
charges imposëes aux conlribuables. Le devoir et l'inlérèt 
bien entendu de Ëtats est d'empëcher que ce lardeau ne 
devienne trop lourd et qu'il n'écrase les citoyens, au lieu 
d'assurer leur repos et leur bien-tre. Il laut donc que la 
valeur du sacrilice demandé à la nation ne dcpasse pas les 
besoins réels du gouvernement ; il faut, en outre, que la 
quote part d'impft paé par chacun soit proportionnelle à 
la part qui lui revient dan le revenu géneral. Ceci est cern- 
forme aux plus vulgaires notions de l'equité. Enfin, les frais 
de perception de l'impft doivent ètre le moins onéreux que 
possible. 
Ces principes pusC, quel sera le meilleur système d'imp6t ? 
Question capitale et q,si de nos jours surtout a pris un in- 
tért immense. 
Nous allons successivement examiner les différentes ea- 
tégories d'ira 1,61% en adoptant l'ingénieuse classification pro- 
posée par M. Hippol)te Passy, et rechercher les inconvé- 
nients et les avantages qu'ils présentent. 
Les imp6ls direcls sont ceux que les conlribuables ac- 
quittent enx-mèmes et puer leur propre compte; les imp6ts 
indirecls, au contraire, sont ceux dont les fabricants ou 
marchands font l'avance h l'État, avance qui leur est rem- 
boursée par les consommateurs. 
Au nombre des premiers, il faut complet l'impfl sur les 
personnes, autrement dit c a p i t a t i o n ou c o n I r i b u t i o n 
p e r s o n n e ! ! e, qui frappe égalemeat le pauvre et le riche; 
les impfts sur la terre ou contribution f o n c i è r e, dont l'as- 
siette est fixée en France d'après les con,chances et les qua- 
lités du sol : la fixité mme de cette sorte dïmpft est la 
source de f',lcheuses iuëgalités, car elle s'oppose au remanie- 
ment des taxes que mille circonstances peuvent rendre nê- 
cessaire; les impfts sur les bAtimcnls, impfts proportionnels 
et d'une perception facile, mais qui retombent toujours, en 
fin de compte, à la charge des locataires, cest-à-dire des 
consommateurs  l'impft sur les portes et fenêtres, essentielle. 
ment préjudiciable à l'hygiène et a la salubritë publique; 
i'impft sur l'exercice des professions, ou pat en les, qui 
en réalité, est encore supporté par le consommateur, et 
qui d'ailleurs atfeint bien plus le petit que le bau! com- 
merce ; i'imp6t sur le revenu, incontest'blement le plus juste 
de lous en princip_e, mais dont la base est difficile à etablir 
x'is-à-.'i_ ds contribuables, intércsss à dissimuler leur for- 



lS I.IPOT  
tune; les imp6ts sur les transmissions par voie de succes- 
sion ou de donation, imp6ts justes en principe, mais que 
notre législation a rendus très-peu équitables, en ne tenant 
pas compte des dettes et descbarges qui diminuent la valeur 
réelle des liérilages ; les impôts sur les transmissions h 
titre onéreux, soit de propriétés foncières, soit de ,aleurs 
mobilières mentionnées dans les actes souscrits entre par- 
ticuliers et portant,  divers titres, obligation de payement : 
l'intert de l'agriculture et des affaires eu général s'oppose 
à ce que ces droits de m u t a tf o n soient trop considérables; 
l'imp6t du t i m b r e, anquel s'applique la mme ob_-ervtion. 
Les imp6ts indirects frappent certains produits agricoles 
ou industriels de droitsqui s'acquittent soit à l'orine, soit 
pendant la circulation, soit à l'entrée dans les villes, soit 
 l'arrivée ou h la vente chez les marchands ou dcbitants ; 
ils ont pour eet inévitable d'élever la valeur des prodits, 
et c'est le consommateur qui les supporte seul en définitive. 
Si les taxes indirectes portent sur des objets de première 
nécessité, dont chaque individu, riche ou pauvre, consomme 
à peu près la mme quantité, ce sont les plus miques de 
tous les imp6ts; tels sont les imp6ls sur le sel, les farines, les 
boissons. Lorsqu'au contraire elles n'atteignent que des oh- 
iets moins nécessaires aux besoins de l'existence, ce sont de 
simples cbarges somptuaires, comme les imp6ls sur le thé, 
le café, etc. Un des avautages des imp6ts indrects, c'est la 
facilité aec laquelle ils s'acquittent ; le puhlic en effet ne 
payant qu'en délail, par sommes insignifiantes, au fir et fi 
mesure de ses achats, ne s'en aperçoit pour ainsi dire point. 
Mais ils présentent aus¢i de grand inconvénients ; ils font 
naltre la fraude etla contrebande, etnécessitent l'empini 
d'une armee de commis pour les prévenir. Les imp6ts in- 
directs, quand ils frappent des productions nationales, por- 
tent le nom de c o n t r i b u t i o n s indirectes ; on les nomme 
douanes lorsqu'ils son' perçs aux frontières, soit sur 
le produits étrangers importés, soit sur les produits natio- 
naux exportés. Les villes lëvent en outre des oct rois sur 
les objets consommés dans l'tutCieur de leur enceinte. 
Au nombre des impôts indirects, on range encore ceux 
qui se perçoivent au moyen de m o n o p o I e s ou de régies, 
comme cen. qui existent sur le tab ac, la po udre, les 
cartes à jouer. 
Les énormes frais de perception qu'entralne en pure 
perte notre système d'imp6t a ramené quelques esprits à 
l'idée d'un imp6t unique. Cet impOts unique a été propose 
sur la propriété foncière par les uns, sur le revenu-par les 
autres. La propriété fonci/:re pourrait--elle subvenir h elle 
seule aux dépenses toujours croissates de l'État ? Pareille 
question ne se discute pas. Le revenu représentant tos les 
genres de richesse et de production n'offre pas la mme in- 
suffisance. Mais comment amener chacun  dire la vérité ? 
Ici commencent les difficulté. Peut-être, pourtant, le pro- 
blème n'est-il pas insoluble. Dé]à l'Êtat a souvent à lutter 
contre de lausses déclarations dans certains imp61s actuels, 
et cependant il les maintient. Enfin, quelques économistes 
ont préconisé l'irnp6t progressif, c'est-à-dire croissant sui- 
vaut une certaine progression avec la valeur de la matière 
imposable. Cet imp6t existe pour quelques contributions, 
mais ou n'a pas cru juste de l'Cendre à toutes, de peur de 
nuire aux productions deluxe, et c'est la mème raison qui a 
fait écarter de nos sociétés modernes les [rnp6ts ornp. 
tuaires. 
IMPtLÉCTION  du latin irnprecari, composé de in, 
contre, et precari, prier). Ce mot désie certains actes, 
certaines formule.% par lesquels on appelle la colère divine 
sur les autres, et quekluefois mme sur soi-mme. L'im- 
préeation qui n'est le plus souvent que le cri de l'indi- 
gnation o l'explosion d'une colère ou d'une fureur irritées 
par le sentiment de |eut impuissance, avait revêtu chez les 
ar, ciens, chez les Grec et les Bomains surtot, un carac- 
h're religieux dont elle est entièrement dépouillée dans la 
socivté moderne : aussi distinguaient-ils les imprécalions 
publique% les imprecations des particuliers, et les impréca- 

IMPRESSION 
i tions contre soi : ces dernières accompagnaient toujours le 
sacrifice d'un ciron'en qui se dévouait  la chose publique. 
Les irnproecatios tmblique étaient ordonnées par Pautorité 
dans certains cas, par exemple contre les impies, les 
criléges, les oppresseurs ; et comme le but principal de 
sortes de prières était d'attirer la vengeance céleste sur 
coupables, on invoquait les ministres de ces vengeances, 
et en premiëre ligne les F o r in s. Les Romaius avaient 
ane croyance si ferme dans l'efficacité des imprécatious, 
qu'ils n'imaginaient pas que celui qu'elles Irappaient pt ja- 
mais en détourner les effets. Cependant, lorsque l'innocence 
de ceux qu'elles aaient fra I pés venait  tire e ahlie, ih 
avaient recours à la rehabilitattou : on y procédait en im- 
molant quelques victimes aux dieux mmes dont on avait 
imploré l'intervention pour le châtiment du crime; mais les 
meurtriers, les assassins et les parricides étaient à jamais 
exclusdu bénéficede la rehabilitation. De roules les 
cations, les plus terribles et les plus efficaces aux yeu,, des 
anciens etaient celles des pères contre leurs fils parce que, 
selon leurs ingenieuses traoetions, les Furies, issues du sang 
d'un père outragé par son fils, de Coelus, mutilé par Saturne, 
s'étaient vouées spécialement au service des vea,eances pa- 
ternelles. 
Chezles Gaulois, les imtrécations Catent ausi un 
ressorts les plus énerques de la religion; mais il n'appar- 
tenait qu'aux d r u i d e s de les prononcer : du rete, on peut 
observer que tous les peuple» ont employé cet anathème 
contre les violateurs «lu sépulcre. 
Dans le vieux sens mythologique, les Imprëcaliorts (Diroe) 
étaient une des qualifications des déesses désignées autrefois 
sous les noms de Furies sur la terre, Eumenides aux en- 
fers, et I»prdcalions dans le ciel. 
L'irnprdcation est encore une figure de rhétorique par 
laquelle l'orateur invoque le ciel et les enfers contre un 
ojet odieux ; habilement manié, ce moyen oratoire est d'un 
and effet; mais il ne faut pas le prodi,,uer. Tout le monde 
connat les fameuses impréeation qui des thétres 
tfiènes et de Borne sont venues remplir de terreur et de 
pitie la scène française. Un des plus beaux exemples que 
l'on puisse citer de cette fiure est celui que Corneille, dan9 
ses Horaces, met dans la bouche de Camflle contre Ilome 
Puissé-je de m veu= y voir ton.ber la foudre, cte. 
Il faut citer aussi celle de la prière de Joad dans Athalie. 
IMPRÉGNATION. Vo[lez Co-co. (Physiologie). 
IMPBESABIO. Ou appelle ainsi, en Italie, le direc- 
teur d'une troupe de comédiens, qui d'ordinaire est en 
mme temps à ses risques et pertes l'entrepreneur du théàtre. 
Il obtient des villes où il donne des représentations la jouis- 
sauce gratuite de la l|e de spectacle, ou lien il en paye 
la location. Il recrute sa troupe, dont les membres ne dé- 
pendent que de lui, ct cumule le plus souvent les fonctiona 
de directeur artistique ave¢ celles d'administrateur et de 
caissier de Pentreprise. Tant que la comé.die improvisée, 
ce qu'on appelait la comédie de l'art, fleurit en Italie, ce 
fut à Fimpresario que revint le soin d'eu préparer le 
nation, que les divers acteurs exécutaient en scène. Bien 
rarement, c'était un poêle. Dans ces derniers temps l'impor- 
tanc prise par l'opCu a contraint l'impresario à  consa- 
crer tout son temps et toutes ses ressources. Les troupe 
d'opéra qui exploitent à Fétraner les su, ries òe Paris, de 
Londres, de Madrid, de Vieune, etc., sont toujours dlri- 
gíes par nn irnpreario. 
IMPIIESÇI/IPTIBILITÉ. C'est la qualité de ce qui 
n'est pas susceptible de prescription. Il  a des droits 
imprescriptibles; ce sont ceux qui sont inhérents à la na- 
tnre mme de l'homme. Voyez DilolT 
FAIPBESSION. Se dit et de l'action par laquelle une 
choe appliquée sur un autre y laisse une marque plus ou 
moins durable, et du résultat de,cette action. En technologie 
Fimtressinn se distingue de I'e m p re [ a t e en ce que celle- 



IMPRESSION 
ci suppose la production d'un creux ou d'uu relief. Le 
sens de ces deux mots diffère également au figuré : l'im- 
lressiort qui réulte d'une cause morale doit ètre profonde 
pont mériter le nom d'emIreinte. On sait combien il a été 
imprimé d'impressions de voaqes dans ces derniers tempç. 
Bornons-nous ì parler ici de l'impression dans les arts 
industriels. Au premier rang vient se placer l'impression 
typographipue. Cette opération s'éxécute ì l'aide d'une 
lPress e que fait mouvoir un ouvrier ou une machine. Quel 
que soit le mode employé, on obtient l'impression en appli- 
quant avec force une feuille de papier sur la Jorme encrée 
convenablement : cette pression fait entrer l'oeil du carac- 
tëre dans la feuille de papier, trop peu pour la déchirer, 
assez our y déposer l'encre dont il est couvert. Lorsqu'on 
se sert Ae la presse ì bras, quand toutes des feuilles sont 
imprimées d'un c0té, on change la forme, si cela est nces- 
.suite, et on recommence pour le second c6té; veut-on 
imprimer en plusieurs couleurs, on doit avoir autant de 
compositions que de couleurs diffërentes. Avec la presse 
mécanique, les deux oStes de la feuille s'impriment toujours 
.successivement, mais dans une mème opération, et on 
peut eu tirer de 6 A t2,000 par jour. 
L'impression de la gravure sur bois s'effectue de la 
mme manière, parce qu'ici le type qu'il s'a6t de reproduire 
est encore en relief. Mais il n'en est pas ainsi pour la gra- 
vure en creux, sur cuivre, sur acier ou sur plaque de plomb. 
Là il ne faut laisser de l'encre que dans les creu:x, et faire 
passer la feuille de papier ou d'étoffe étendue sur la planche 
entre deux rouleaux recouverts de langes qui font entrer le 
papier dans les creux de la gravure. Pour la I i t h o g r a p h i e, 
il n'y a ni creux ni relief, ou du moins ils ne sont pour 
rien dans l'impression. L'encre distribu par l'ouvrier ne 
prend que sur les parties dessinées sur la pierre lithoa- 
phique avec un crayon gras. Une sorte de rteau forte- 
ment fié sur la presse, et sous lequel passent pierre et 
papier, fait décharger l'encre sur le papier, et produit l'im- 
pression. 
L'impression a bien d'autres procédés encore. Ainsi, sans 
lmder des copies obtenues par des planches  jour, et dont 
nos affiches pelures offrent un exemple, il nous faut encore 
mentionner l'impression sur œetoffes, qui sera décrite à l'ar- 
ticle I.ms, et l'impression des papiers peints. 
IMPBESSIO. (Fautes d'). Voyez Facrs n'I,n.vesso. 
IMPBÉ'OYANCE, manque de p r é v o y a n c e, de- 
faut de ce raisonnement, de cette voe intérieure, par les- 
quels on annoncepresque h coup sur l'approche d'un Certe- 
ment. C'est une espèce d'étourderie vis-h-vis de l'aveu/r, qm 
entralne maintes fois les plus graçes inconvénients. La 
classe des imprévoyants est nombreuse ; et les maux que 
t'imprévoyance passée a lait naitre.sont malheureusement 
pour eux nne leçon trop souvent inutile. L'imprévoyance est 
bien moins rare dans les grandes villes que dans les cam- 
pagnes : aussi les vices y sont-ils beaucoup plus communs, 
:ar lorsque la misère, qui en est presque toujours la suite, 
est arrivée ì sa période la plus hideuse, ceux en qui l'ins- 
tinct de la conservation étouffe toute idée d'lionneur et de 
morale obéissent à la faim, et deviennent coupables. Les 
artistes dramatiques, les hommes de lettres, les étudiants, 
les grisettes de nos grandes villes, pourraient tre cités 
avec raison comme des modèles d'imprévoyance. Ou con- 
natt assez le sort qui attendla plupart d'entre eux et surtout 
d'entre elles, vers la fin de leurs jol,rs, après qu'ils ont souvent 
xécu dans l'aisance. 
IIPRIMERIE. Par son influence sur la civilisation 
et les proés de l'humanité en général, l'imprimerie oc- 
cupe un des rangs les plus distingués parmi les découvertes 
de l'esprit humain. Elle fait donc à bon da'oit époque dans 
l'histoire du monde. Après que l'on se fut assuré de la 
lmssibilité de multiplier facilement et avec plus de cé|érité, 
au moyen d'une impression en couleur, le dessin et l'é- 
crituçe, et que jusque alors on avait été réduit à imiter, soit 
«vec la plume, soit avec le crayon, progrès qui ne fut réa- 

IMPRIMERIE 319 
IlsA en Erope que vers le commencement du quinzième 
siêcle; et quand l'invention du papier, comme la meil- 
leure et la moins dispendieuse des substances propresà 
recevoir l'impression, eut pour ainsi dire, avec l'encre 
grasse et la prse à vis, complété l'attirail de l'imprimerie, 
il restait toujours encore à trouver le mode de laite les 
caractères les plus convenables et les plus durables. La 
gra v rire sur bois et celle au burin sur métal, qui exita 
déjà depuis longtemps, reçurent alors une nouxelle appli- 
cation de l'imprimeur en lettres et de l'orfèvre, et Iê pre- 
mier, qui ne produisait guère que des cartesà jouer et 
des images de piëté, fit des lors uge de caractères gra- 
vés en bois, pour l'impression de petits livres d'école, com- 
poses uniquement de texte ; ce frit un pas de plus fait vers 
la découverte de l'art de l'imprimerie proprement dit, en 
dautres termes, de la typographie. Quelques-uns de ces ira- 
primeurs en lettres paraissent méme avoir trouvé vers le 
milieu du quinzième siècle le moyen de produire des ira- 
pressions avec des lettres moulées mobiles; mais leurs eso 
sais typoaphiques furent surpassés et en mme temps 
guidés par l'invention faite h la méme époque à Strasbourg 
ou à Mayence, invention qui les éclipsa entièrement, par 
l'importance de son application dans une sphère beaucoup 
plus éteodue. Gutenberg, fut le premier qui conçut coin- 
piCment le projet d'imprimer uniquement açec de» ca- 
ractères mobiles, projet etudié, poursuivi et essayé pen- 
dant bien des années, non sans appui de capitaux étran- 
gers. Il réussit enfin à exécu/er l'impression de toute la 
Bible, au moyen de la typographie et à créer  Mayence la 
remière imprimerie proprement dite, qui dex'int le modèle 
de tous les autres, 
Dans l'imprimerie xylographique, il faut que l'ecrit à mul- 
tiplier soit gravé en bois, sur au moins doux fois autant 
de planches qu'il aura de feuilles d'impression. Quand ces 
planches en bois ont reçu l'encre asse, on en tire des 
éçreuves par la presse de l'imprimeur, ce qui auparavant 
se faisait avec nn rouleao, comme pour les cartes à jouer, 
et ne portait l'impression que sur un c6té du papier. Ce 
mode d'impression est encore en usage aujourd'hui chez les 
Chinois, où pourtant l'imprimerie date de plusieurs siCes 
avant qu'elle sïntroduisit en Erope. Leur langage écrit ne 
se composaut point de lettres, mais de mots, ils ont pu et 
dU se contenter de ce procédé; leur littérature n'en est pas 
moins redevable à lïmprimerie x.lographique d'une richesse 
de bibloethèques qui dépasse celle de bien des nations 
ropéennes. E Europe, au contraire, l'alphabet des langues 
dot conduire à tailler en bois, en plomb ou en étain, des 
lettres séparées pour les réunir dans une forme d'impres- 
sion, d'o0 on les retire, après la production des Creuves, 
pour les faire servir à une nouvelle c o m p o s i t i o n. Cepen- 
dant le découpage de ces lettre en nombre soffisanl, opéra- 
tion qui présentait à la lois l'inconvénient d'ëtre pénible et 
de donner des produits inégaux, avait encore le défaut que 
la nature molle de la matière première rendait ces lettres 
peu durables. Pour remédier  ces deauts, on cisela en 
acier des caractères qui, en forme de coins, s'incrustèrent 
dans des matrices en cuivre, o{ on introduisit une compo- 
sition métallique propre à donner des carne tè re s 
parés. 
Mais o et par qui a été inventée l'imprimerie ? Gutenberg 
parait bien l'inventeur des caractères mobiles. Avant lui 
sans doute on imprimait parla xylographie. Coster 
Hariem n'a probablement pas fait autre chose que d'impri- 
mer des textes et des images sur des planches de 
gravées, à la façon des imagiers. Mais Gutenberg a-t-il 
réussi h imprimer à 51ayence ou à Strashourg, où il avait 
été obligé de se réfugier? Tout fait présumer qu'il avait beau- 
coup avarieWson art à Strasbourg. L'argent lui manqua, et 
travers l'obscurité des émoignages on peut apercevoir 
que c'était bien la mobilité des caractères qu'il cherchait. 
Plusieurs penent qu'il l'avait tronvée. A Mayence il s'associe 
açee Faust, et en tt55 ou 1t56 parait la Bible dite de 
Gutenberg, livre de quarante-deux lignes  la page, for- 



320 
ruant deux volumes in-folio, et sans dale. Quand l'habile 
artiste-écrivain Pierre Schoeffer, gendre de Faust, eut pris 
un inlért dans l'imprimerie de gon beau-père, tou deux 
améliorèrent la fabrication des caractères au point de pou- 
voir imprimer avec des caractères beaucoup plus petits 
que ceux qui avaient }usque alors servi à.i'impression des 
missels. Ils augmentèrent le nombre de lettres des pages et 
diminuèrent le prix de revient. Le premier livre imprimé 
de quelque importance et porlant l'indication fut le psautier 
de 1,57 ; le Bntionnle de Durandus, qui est encore en usage 
comme livre de plain chant, date de 1459. L'un est im- 
primé en gros caractères de missel, l'autre en petits carac- 
tëres. 
A cèté de cette imprimerie', qui après la mort de Fanst 
aait été continuée par Schoeffer tout seul, puis qui le fut 
encore par ses descendants pendant près d'un siècle, Gu- 
tenberg en a'ait établi une autre après sa séparation 
d'avec Faust ; et en 1460 il imprima le Cntholicon de 
Janua, également en petits caractères, sans indication de 
nom dïmprimeur, mais portant à la lin du livre un Coge en 
faveur de Mayence, signalé comme le lieu oU le nouvel art 
a été inventé. La prise et le pillage de cette  ille, à l'occa- 
sion de la guerreprivée qui ëclata, en 1462, entre les deux 
archevêques Diether d'lenbourg et Adolphe de .Nassau, 
firent grand tort à ces deux imprilneries, qui furent rcduites 
/ l'inacti,,n et dont les employés et les ouvriers portèrent 
ailleurs la connaissance d'un secret que 5Iaycnce seul avait 
possédé jusque alors. Cependant les ateliers de Faust et de 
Schoeffer reprirent bient0t une nouvelle ie, tandis que celui 
de Gutenberg passait, de son.vivant même, entre les mains 
d'un autre propriëtaire. 
L'art de ]'imprimerie sïatroduisit bien ite à Cologno, et 
à Strasbourg; après ces deu villes l'on cite i]arnbrg, 
Augsbourg, .uremberg, Spire, UIm, Esslingen, Lubeck, 
Leipzig, 51emmingen, Reutlingen, Efurt, Magdebourg, 
Hauenau et autres lieux en AIlemagne, comme ceux oU 
l'imprimerie prit racine et fleurit de bonne heure. Les Mie- 
rounds Swe)nheim et Pannarz introduisirent cet art en 
Italie, d'abord au couvent de Subiaco, puis à Ruine, en 
146.1 ; et Jean de Spire l'importa à Venise, en 1469, d'ou 
il fut communiqué à toutes les autres villes d'ltalie. En 
1-170 des imprimeurs a]lelnands furent appeles à Paris, où ils 
établirent à la Sorbonue la première imprimerie tpogra- 
phique qu'il y ait eu en France. Dans ce pas, les impfi- 
oeeries de Paris et de Lson sont celles qui curent le plus 
d'importance. Dans les Pays-Bas, les premiers imprimeurs 
proprement dits parurent peu après 147o ; c'étaient surtout 
des natifs du pa)s. En ttollande, l'imprimerie avait garde un 
caractère particulier, indigène, jusque vers 1680 ; et c'est 
seulement  cette époque que l'influence allemande s'y dè- 
cèle au.si. Anvers, Lede et Am.,terdam étaient le siCe des 
principales imprimeries de ces contrees. En Suisse, Bàle 
se distingua à partir de 1-17-1 ; et c'est vers le même temps 
que la première imprimerie fut établie en Aneterre, par 
Earton,  Westminster; eu Espagne, par un Allemand ;  
Valence. On trouve dan le ttepertorigm bibliogrn]hicum 
de Hain { vol., Stutg., 186-t838) à peu de chose près 
le catalogue de tous les livres imprimés dans le quiuzieme 
siècle, et l'on y voit les progrès que cet art nouveau avait 
déj faits Ch Europe dans les cinquante premiëres années de 
sa création. 
Le vice-roi Antoaio de 3Iendoza Pintroduisit au 3Iex[- 
que en 1550, en y appelant un imprimeur lombard. Dans 
le mëme siècle, vers 1586, les jésuites imprimèrent à Lima, 
au Pérou, ç et là eu Chine, à Java, sur la c6te dn .lala- 
bar et peut-être mème aux Philippines ; au dix-septième 
siècle les ltaronites portèrent Pimpri,nerie au Liban, et en 
6¢ un ministre non conl'orraiste fit venir le premier impri- 
meur de Londs à Cambridge, dans l'Aalérique du ord, 
alors colonie anglaise. Boston et PI,iladelpl,ie eurent bient6t 
eurs imprimeries, et ce fi,t dans la de,'nière de ces villes 
que le célèbre Boni. F ranl, li n t,'availla dans sa jeoaesse 

IMPRL,IER 
I comme simple ouvrier imprimeur. Quand ce pays se fui 
sëparé de la mëre-patrie pour tormer la confédëration des 
Ètats-Unis, l'imprimerie y fit des progrè si rapides que ses 
ateliers drpassent aujourd'hui en nombre ceux de tous les 
autres pays, eu égard au chiffre de population. Les jour- 
naux ont longtemps constitué l'un des principaux produits 
des presses américaines; et ce n'est que dans ces derniers 
temps qu'elles ont commencé à livrer des ouvrages origi- 
naux et a s'occuper de la réimpression d'autres ouvrages, 
en concurrence avec l'Erope, Au dix-huitième siècle l'im- 
primerie se fraya un chemin vers les Index orientales, oh 
elle parut aussi h Ceylan et ì Batavia; puis elle prit son 
essor vers les lies de l'lnde occidentale, et atteignit vers la 
fin de ce siècle Sidne.% dans la louvelle-Hollande, surtout 
au moyen des feuilles publiques. Au dx-neuvième siècle son 
importance s'accrut par l'extension énorme que prit 
presse périodique et aussi par les productions des sociétés 
bibliques. Si la première accrut constamment son influence 
dans les nouveaux Eats ind#pendants de l'Amérique (bi 
,Nord etdu Sud, et se naturalisa jusque dans les étahlissemeats 
anglais de la Nouvelle-Hollande et de la terre de Van Die- 
mon, les publications des societés bi b I i q u e s la repandi- 
rent surtout aux Indes orienta]es et au dda des Indes, chez 
les Birmana, dans la presqulle de Malacca, dans les lies de la 
Sonde, aux loluqnes, en Af tique, au Cap et jusqu'à Iadagas- 
car, dans l'Australie, dans les lies de Sandwich et de la So- 
ciete. Il n'est pas jusqu'aux vaisseaux balancés sur les flos 
de la mer qui n'aient emporté avec eux des presses, comme 
on le ,oit sur le vaisseau ar, glais Caledonia, qui en 181'z 
et 1813 publiait des feuilles datées de la Méditerranée, et 
sur i'tiecla, lors de l'expedition polaire du capitaine Parry. 
Durant l'hivernage qui eut lieu de 1819 h 1820 dans l'lle de 
,lelleville, au milieu des glaces du p61e Nord, ou impri- 
mait à bord de l'liecla un jou,'nal intitulé Ga:ette de la 
'ouvelle Gorgie, ou chroni9ue d'hiver. 
Parmi les chrctiena de l'Orient, les Arméniens commen- 
cèrent à imprimer en 1587,  Venise et à Constantinople; 
aujourd'hui ils possèdent aussi des presses / Paris, ì 
Vienne', à Pétersbourg, à Etschmiadzin, le siége du che[ 
de leur Église, et au, Indus orientales. Parmi les seules en 
dehors de la chretienté, les juifs avaient deja fait usage de 
limprimerie au quinziene siècle, d'abord en Italie, en 
180, h Poncino, dans le duché de 31ilan, en Portugal, 
Constautinople, dans plusieurs pays slaves, en Grëce et 
dans l'Asie Mineure. Chez les Turcs, les sultans se mou- 
trèrent d'abord hostiles  l'introduction de l'imprimerie, et 
ce ne fut qu'en 1126 qu'il y eut un imprimeur du grand- 
seigneur à Coustantinople du nom d'lbrahim-Effendi. 
Avant ce temps les chretiens melchites et maronites avaient 
dëja imprimé en langue arabe, a Alep et dans le Levant. E 
E'pte, Oil du temps de l'expédition française on a,ait im- 
prime h Alexandrie, au Caire et h Gizeh, le vice-roi 
liammed-Ali fit mouler une imprimerie  Boulal,, près du 
Caire, en 189_. Consultes l'ouvrage de M. Ternaux-Com- 
paris intitalé Notice sur les imprmteries qui existent et 
9ui ont existë hors de l'Euro2e (Paris, 
Il serait sans doute superllu d'analyser ici le» bienfaits 
immenses dont on est redevable  l'imprimerie ; comment 
elle a, surtout au seizième siècle, contribuë  la renais- 
sance de la littérature classique, à la culture de l'egprit, 
la réformation ; et depuis la fin «lu siècle dernier, à l'affran- 
chissement des peuples en hàtant la conquètc de leur liberté 
civile, prodiges tous obtenus par Iïnfl«cnce de la presse 
périodique. C'est celle-ci qui e. été le plus puissant moyen 
d'échange et de ddveloppement pour les idées. L'histoire de 
la littérature moderne es en mème temps l'histoire des 
résultats dont nous sommes redevables à l'imprimerie ou 
la presse périodique, dont on a cherchê à préscuir les écarts, 
mais dont les avantages dépassent considérablement les 
ecès. 
Les lypograpbes des premiers temps élaienl t,our la ph» 
lat tout à fois rondeurs de caractères» nUl,rimeur s et 1- 



IMPRIMERIE 
bralres, quelquefois mme les auteurs des ouvrages qu'ils 
imprimaient, et souvent des hommes d'une science assez 
profonde pour corriger eux-mSmes les erreurs de texte des 
copies manuscrites des ouvrages classiques qu'il s'agissait 
d'imprimer. La librairie et l'imprimerie ont conlinuë à rester 
en génèral dans les ratines mains; seulement les collabora- 
teurs attachésà la seconde de ces industries ont été divisés 
en compositeurs, imprmeurs et correcteurs. La fonte, 
la ciselure, la gravure des caractères forment depuis le 
dix-septième siècle des branches d'industrie séparées. 
Les familles les phls célèbres parmi les imprimeurs sont 
celles des Aides Manuce, qui tlorissait de 1488 à 1580 ; 
des Giunti, de 1492 à 1592, et des Elzevir, de 1595 à 
1680. Parmi les modernes on distingue surtout les R reit- 
kopf, les Baskerville, les Didot, les Bodoni et 
autres. Dans les dix-septième et dîx-huitième siècles, l'art 
de l'imprimerie resta négligé et statiounatre, et ce ne tut 
que vers le milieu du dix-huitième siècle qu'il reprit sa 
marche progressive. Quant aux instruments, on s'appliqua 
d'abord ì créer des caractères pour tous les alphabets et 
pour tous les genres d'écriture en usage au monde, en mme 
temps que l'on s'occupait de la variété et de l'élégance à 
donner aux lettres. Sous le rapport de la variété des carac- 
OEres particuliers aux langues étrangères, 1' I m p r i m e r ! e 
i m p é r i a I e de Paris est la plus riche qui existe au monde. 
L'appareil moteur qui, depuis l'invention de l'imprimerie, 
avait ì peu pr conservé sa forme de presse à vis en bois, 
reçutses premières modifications de Haas à Ble, en 1772. 
Plus tard ce furent les Anglais et les Américains qui s'appli- 
quèrent avec persévérance à la construction de machines 
plus en harmonie avec les progrès des lumières en méca- 
nique. Le triomphe de l'invention à cet égard est la presse 
mécanique, où l'impression sopère avec une grande rapidité 
au moyen de cylindres. On a aussi essayé d'abréger le tra- 
vail de la composition à l'aide d'instruments dont l'un a 
reçu le nom de pianotype. Lastrotypie rendit 
«te grands services pour la production des ouvrages dont 
les dilions sont souvent répétées sans changement, tels 
que les classiques anciens et modernes. L'impression de la 
musique et des cartes géographiques est redevable ì 
bi. Duverger et à d'autres encore de plusieurs avantages, 
quoique les planches en cuivre ou en étain avec la lithogra- 
phie conviennent mieux/l cet objet. L'impression en carac- 
tères saillants est employée pour faciliter l'enseignement 
,les aveugles. L'impression en lettres d'or, qui avait déjà 
ëté en usage chez les anciens imprimeurs, et celle en dif- 
férentes couleurs ont été renouvelées dans ces derniers 
temps, avec le plus brillant succès, à l'occasion d'événe- 
ments extraordiuaires, ainsi que l'impression polychrome 
( plusieurs couleurs à la fois), etc. 
IMPRIMERIE (Encre d' ). Voyez Ercne, tome VIII, 
p. 568. 
IMPIMEiE IMPÉiALE à Paris, rue Vieille-du- 
Temple. Elle occupe l'ancien palais Cardinal, ainsi nommé 
parce qu'il appartenait au fameu cardinal de Bohan. Elle 
est administrée par un directeur, sous la surveillance du mi- 
nistre d la justioe. Son budget figure pour ordre au budget 
de l'État. 
Cet établissement est d'une grande importance, au double 
point de vue de l'administration et des sciences et des arts. 
L'État ' lait exécuter toutes les impessions nécsaires aux 
services publics; cette organisation lui offre des garanties de 
sreté et de discrétion qu'il ne trouverait pas dans les 
lices de l'industrie privée, et qui peuvent en certains cas Stre 
d'une haute importance. En outre, les caractères provenant 
de son matériel sont facilement reconnaisables à des signes 
particuliers, ce qui rend plus malaisée la supposition d'actes 
fficiels. Enfin, comme le service s' {ait avec une prompti- 
tude extraordinaire au moyen d'cm immense matériel, cinq 
mille formes y peuvent Stre gardées entièrement composdcs. 
Les chefs d'établissemeuts privés peuvent emprunter 
l'Imprimerie impériale les caractères spéciaux qui leur man- 
DICT. DE LA [ÀXNWER$. -- T. XI. 

-- IMPRIMEUR t! 
quent; ils peuvent mme, s'ils ont obtenu l'autorisation du 
garde des sceaux, y faire imprimer let ouvrages qui né, ces- 
sitent l'emploi de caractères erieutaux. 
Certains ouvrages d'érudition dont la publication doit tre 
utile aux sciences et aux lettres y sont imprimés, s'ils out 
té jugés dignes de cette laveur par un comité spécial. Les 
frais de ce impressions sont prélevés sur les bénéfices de 
l'établissement. D'autres ouvrages y sont encore imprimés, 
à l'aide de fonds spéciaux votés au budget; telle est la 
collection de Documents indits sur l'Histoire de France. 
La matériel de l'Imprimerie impériale comprend, sans 
comptelcs caraclères latins, les types de seize corps de ca- 
caractères diffëreuts employés par des nations d'Europe, et 
ceux de cinquanle-six corps de caractè rea orientaux, servant 
à écrire presque toutes les langues asiatiques connues, tan- 
anciennes que modernes. Elle possède, en outre, 126,000 
groupes chinois de différentes grandeurs, gravés sur bois, et 
plus de 3,000 aulres groupes qui, se décolnposant et se com- 
binant ensemble, suffisent ì la composition des inuombrables 
signes de cette langue singulière. Le poids total des fontes 
de caractères s'élève à 400,000 kilogrammes, euviron. On 
y compte 120 presses ì bras et six presses à vapeur, ce qui 
permettrait de tirer en un seul jour 278,000 feuilles. La con- 
sommation annuelle en papier d'impression s'élève, en 
moyenne, à 90,000 ram«. Des ateliers sont affectés aux 
nombreux travaux accessoires : fonderie, clichage, sté- 
réotypage, lithographie, séchage, satinage, pilage, piqîres, 
couture, roguure, réglure et reliure. 
On attribue généralemeut ì François I  la création de cet 
établissement public ; mais ce prince n'en posa, pour ainsi 
dire, que la pierre d'attente ; il se borna à faire graver des 
poinçons de caractères hébreux, grecs et latins et à les mettre 
libéralement  la disposition des imprimeurs parisiens. Quel- 
ques-uns d'entre eux, en outr% étaient subentionués par le 
roi et portaient le titre d'imprimeurs royaux; ce qui leur cou- 
ferait certains priviléges. Le véritable fondateur de l'Impri- 
merie royale, ce fut Louis XIll, ou plutôt Richelieu, qui 
l'établit au rez-de-chausséeet h.l'entre-sol de la grande galerie 
du Louvre. Une grande quanlité de types d'alphabets orien- 
taux furent apportés de Constantinople par les soins de Sa- 
vary de Bresves ambassadeur de France. Sébaslien Cra- 
m o i s y fut le premier direcleur de l'Imprimerie royale, qui 
occupaensuite l'l,tel de Toulouse, près de la place des Vic- 
toires, avant que d'$tre transférée en 1809 dans le local actuel. 
Cet établissement est toujours ì la hauteur de sa vieille ré- 
putation, et il s'euorgueillit de compter parmi ses clients le 
pacha d'Égypte, le roi de Prusse, qui y a tait exécuter le ca- 
talogue des livres chinois de la Bibliothèque de Berlin; la 
Société Asiatique de Londres et la Société Biblique. 
IMPIMEUI{. En France nul ne peut tre imprimeur 
sans avoir préalablement obtenu du ministre de l'lutCieur 
une autorisation qu'on nomme brevet. Le nombre des ira- 
primeurs est limité. Ce brevet peut leur Stre retiré par 
sure, administrative. Ils peuvent présenter leurs successeurs 
à l'agrément du ministre. Les possesseurs oU' dépositaires 
d'une imprimerie clandestine sont punis d'une amende de 
10,000 francs et d'un emprisonnement de six mois. Tout 
imprimeur est tenu de faire sa déclaration à la direction de 
la librairie avant d'imprimer quelque écrit que ce soit; il 
ne peut ni le mettre en vente ni le publier siil n'a fait le 
dépt du nombre d'exemplaires prescrit. Ce dépt est 
fait ì Paris au secrétariat de la direction de la librairie, 
au ministère de l'lutCieur, et dans les alCarlements au 
«rétariat de la préfecture. Le dfaut de déclaration avant 
l'impression et le défaut de dép6t avant la publication sent 
punis d'une amende de 1,000 francs pour la première fois 
et de 2,000 francs pour la seconde. Indépendamment du 
dépt légal, tous écrits traitant de matières politiques 
ou d'économie sociale et ayant moins de dix feuilles d'im- 
pression, autres que les journaux ou écrita périodiques, doi- 
vent, aux termes de la loi sur la presse du 29 juillet t$49, 
ètre déposés par l'imprimeur au parquet du procurent" 



8 IMPRIMEUR -- 
Impérial, sou« pe'me d'uue amende de t00 à -00 fraues. 
Chaque exemplaire des ouvrages sortis des presses d'un 
imprimeur doit porter l'indication de son nom et de sa de- 
meure, à peine d'une amende de 3,000 francs, et de 6,000 
si cette indication est fausse, sans préjudice de l'emprison- 
ne,ncnt. Les imprimeurs nt encore tenns d'avoir un livre 
cotë et parapbë par le maire de leur ville et d'y inscrire par 
or&'e de dates et avec une série de numéros le titre de tous 
les o,,vrages qu'ils se proposent d'imprimer, le nombre 
des feuilles, des volumes et des exemplaires, et le format 
de l'édition. 
Ce livre doit Cre présenté ì toute réquisition aux inspec- 
teurs dela librairie et aux commissaires de police chargés 
de rechercher et de constater toutes lescontrawentions. 
Les imprimeurs lithograpl,es et les Lmprimeurs en taille 
douce sont astreints aux mêmes obligations; ils doivent 
aussi avoir un brevet. 
Les imprimeurs en lettres sous l'ancien régime {ormaient 
une communauté, à laquelle étaient associés les I i b r a i re s; 
ils ëtaientaegés à l'université et soumis aux ordonnances 
et statuts du recteur; mais le gouvernement contesta à 
l'université ses antiques priviléges, et les réduisit peu , peu 
ì une suprématie fictive. On exigeait des imprimeurs une 
certaine instruction littéraire; ils devaient comprendre la 
langue latine et lire au moins la grecque ; en outre ils de- 
vaient donner caution et justifier de leur moralité. Un syndic 
et quatre adjoints, nommés po,r deux ans, étaient chargés 
de defen, lre les intérëts communs et de maintenir le bon 
ordre dans la corporation. Les imprimeurs étaient tenus de 
résider dans le quartier de l'Université ; ils pouvaient aussi 
s'établir dans l'enclos du Palais. 
Dès l'année 1789 lïmprimerie devint une industrie libre; 
et ce régime dura jusqu'au décret du 5 lévrier 1810, qui Il- 
mita le nombre des imprimeurs fi soixante pour Paris, et 
les atreignit à prendre un brevet et ì prëter serment. 
L'année suivanle le nombre des imprimeurs de Paris fut 
port à quatre-singts; il est encore le mème aujourd'hui. 
IMPROMPTU (des deux mots latins in Jrom1tu), 
petite piêce de vers composée, récitée ou cl,antée sans pré- 
paration, sur-le-champ, sous la forme d'un ma driga l, 
d'une c/i 9rare me, ou d'un couIMet. L'à-propos en fait 
presque tout le mérite. Dans un temps où l'on attachait de 
l'importance à ces bagatelles, un impromptu donnait de la 
célebritë à un nom obscur : le marquis de Saint-Aulaire 
fut de l'Académie Française pour un madrigal adressé im- 
prom[;tu-à la duchesse du Mairie. x'IOLLE'I=LEI)LC. 
IMPROVISATIONI. On regarde généralement l'Italie 
comme le berceau de l'improvisatiun, biais bien que cette 
contrée soit la patrie des arts, la terre aimée du ciel, la mëre 
feconde de toute poCic, d'autres pays avant méme que l'on 
cunntt la belle langue du Dante et du Tasse avaient eu 
leurs improvisateurs. Sans adopter l'opinion de certains 
érudits, qui prétendent qu'Homère a improvisé les plus 
heaux passages de l'lliade, nous regardons comme probable 
que la plupart des poëtes grecs, Tyrtée, Stésichore, 
A I cée,  livraient aux entralnements de l'improvisation. 
C'était un usage reçu chez les Iolnains d'inviterdes poêtes 
aux grands repas, à condition qu'ils improviseraient des 
vers. Mais les Grecs et les Romains ne sont pas plus les in- 
venteurs de l'art d'improviser que les Italiens. L'Épte 
a eu de tout temps ses a lmes savantes. Têlles étaient 
encore cl,ez les Hébreux, qui avaient emprunté des Égyp- 
tien« un partie de leurs goùts et de leurs coutumes, ces 
jeunes filles qui, pour célélwer la victoire de David sur le 
Pllilislin Goliatb, dansaient devant Saoi en ci,autant ces pa- 
roles improvisées : 
lcchh Safal balafaIu. 
Ve Daçid berivvoda], 
nu, sil'on veut : Percussit Saul raille, et Dauid decem 
tnillia. Telle étaitencore cette Hérodiade, qt,i demanda au 
farouche tétrarque de Judlatte de saint J e a n - B a p t i s t e. 

IMPA'W'F irai- 
Tout porte à croire qtm les  c a id e s du ord, les b a r d e  
d'Écosse, les tr o u b a d o u r s de Provence, improvisaient leurs 
poèmes, consacrés ì chanter les dieu.x, la guerre et l'amour. 
Enfin les nres n'ont-ils par leurs 9uiriots ou 9riots? 
Iléanmoins, htons-nous de le dire, l'llalie a vu naltre 
ì elle seule plus d'improvisateurs que tous les autres pays 
ensemble. Limprovisation y pénëtra avec la poésie pro- 
vençale au douzième siècle ; on est naturellement porté à 
croi, que Pëtrarque s'exerça dans cet art. Dès la re- 
naissance des lettres, il y eut dans la péninsule italique 
des personnes de l'un et de l'autre sexe composant d'ins- 
piration, et sans préparation aucune, des poêmes d'une 
certaine étendue. On se ervit d'abord de la langue latine, 
qui jusque vers la fin du quinzième siècle fut l'idiome 
dans lequel s'entretenaient les savants et les gens de lettres. 
L'amour de cet art séduisant était poussé jusqu'h la pas- 
sion sous Léon X et dans les cours de Ferrare, de Man- 
toue, de Milan et de ,Naples. L'un des plus anciens impro- 
visateurs fut Serafino d'Aquila, mort en 1500. Completement 
oublié de nos jours, il était pourtant le rival redoutable de 
Pëtrarque, quoiqu'il ftt surpassé lui-même par son con- 
temporain Bernardo A ccolti. Le Florentin Cristoforo l'é- 
galait presque, et avait été surnommé l'altizsimo. Parmi 
ceux qui marquèrent vers la fin du quinzième et le com- 
mencement du seizième siècle, nous citerons ,Nicolo Leo- 
niceno, Mario Filelfo, Panfilo Saffi, Ippolito de Ferrare, 
Battista Strozzi, Pero, Nicolo Franciotti, etc. Trois im- 
provisateurs de ce temps étaient aven#es, Chistoforo Sordi, 
Auretio Brandolini et son fr.re Bafaello. Léon X, très-ama- 
teur de fêtes, réunissait souvent des savants à sa table. 
L'un d'eux, Andrea Marune, son favori, në en 1474, mort 
en 1527, excellait dans l'art de l'improvisation. Un autre 
improvisateur du nom de Querno, remplissait auprès de 
Léon le rtSle de bouffon. Aprës la mort de ce pape, les 
improvisateurs cessërent de s'e.xprimer en latin, et adoptë- 
rent la lingua volgare. Il est hors de doute qu'ils durent y 
gagner beaucoup. Mentionnons encore Sih'io Antoniano, 
né à Rome, en 15-I0, et le chevalier Perfetti, ne à Sienne, 
en 1680. Mëtasta se aussi mourra dès sa tendre jeunesse 
un grand talent d'improvisation. On cite en outre Zucco, 
mort en 1764, à Y,.rone, Lorenzo et l'avocat Bernardi de 
Rome, sans compter Serio et Bossi, condamnés à mort tous 
deux et exécutés à Naples, en 1799. L'empereur lapoléon 
pensionna, malgré ses opinions républicaines, Francesco 
Gianni, né en 1760. 
Il n'a pas non plus manqué de femmes qui se soient 
illnstres dans la poésie d'improvisation en Italie. Quadrio 
en mentionne trois très-célèbres : Cecilia Micheli de 
Yenise, Giovana de Santi, et une nonne, Barbara de Cor- 
reg.o. Il faut ajouter à cette liste Teresa Bandettini, de 
Lucques. Mais aucune n'a acquis autant de gloire que la 
fameuse Maddalena .Morelli Yernandez, qui florissait en 
Toscane au temps de Pie VI, et qui excitait l'admiration 
de tous les voyageurs. Les membres de l'AcadSmie des 
Arcade« l'avaient surnommée Cofilla Olgmpica. Elle mon- 
rut comblee de gloire, à Florence, en 1800, et son sou- 
venir, on le sait, a inspiré à t ml de stael les plus belles 
scënes de sa Corinne. 
Comme on le voit, l'Italie est la to're classique de Irlm - 
provisation. Trois causes déterminantes y peuvent e.xpli- 
qner la disposition des esprits à ce genre de poésie : le 
climat, la langue , et la considoerat[on qui environne les 
imlrovisateurs. Le nombre des improvisatenrs et l'en- 
thousiasme qu'ils inspirent n'ont pas dJminué dans cette 
poétique contrée. On y en voit éclore par centaines sur tou. 
les points. Les plus distingués,-ceux que leur supériorité 
place au premier rang, occupent les académies, remplissent 
les tbéàtres  se font déifier dans les salons élégants. Toutes 
les classes ont les leurs : il en est pour les tables d:hble ; 
on en voit dans les café's, aux promenades, sur les places 
publiques» etc. 
On trouve fréquemment en Italie des hommes de lettres 



1MPROVISATION 
qui cherchent à se délasser de teurs travaux de cabinet dans 
des compositions imprvisées : tels.étaient le duc de Mollo, 
l'abbé Serio, et ce chevalier Baldinotti qui se fit entendre 
t Paris plusieurs fois en i'année 1788, à l'ancien musée 
de la rue Dauphine. Les improvisatrices modernes sont, 
andettini, Fantastiei de Florence, et Ma'-'-ei, ne Lanti. 
En t77, mourut à Vérune le célèbre improvisateur Zucco, 
qui laissa dans i'abbé Lorenzi un successeur digne de lui. 
L'avocat Bernardi était également célèbre à lome comme 
improvisateur. Au dix-neuvième si6ele, Gianni fut l'idole 
de sa patrie, et mérita ses triomphes; à Gianni succéda Pis- 
trucci, que nous avons applaudi à Paris, et qui aila laite 
fortune à Londres. Ensuite vint Sestim, l'improvisateur 
tendre et mélancolique, ravi par une mort prématurde. Puis 
celui qui les éclipsait tous, Sgricci, dont la verve tragique 
fut honorablement accueillie en France, en Angleterre, et 
qui alla mourir à Florence, en 1826. Enfin, le plus jeune, le 
plus instruit de tous, Luigi Cicx'oni, qu'un beau caractère 
et un talent de premier ordre avaient placé au sommet de 
l'échelle, vint faire consacrer à Paris l'dclat de sa réputation. 
A ces noms italiens ajoutons celui de Bindocci, de 
Sienne, sans compter deux noms al]emands, ceux de 
Wolff, d'Altona, mort prolesseur à Iéna, en 1852, et de 
bi. Langenschwar, ; et un nom hollandais, celui de Wil- 
lem de Clercq, né à Amsterdam, en 1793. Les improvisa- 
teurs sont nombreux en Espagne, en Portugal, au Brésil, 
dans les rdpobliques de l'Amerique du Sud, et chez les Et,s- 
cariens (Basques) des deux versants des Pyrénées, lesquels 
improvisent d'ordinaire vers et musique. 
De l'examen des œuvres des improvisateurs italiens il ré- 
sulte pour nous qu'il leur est plus facile de réussir dans les 
descriptinns que dans la peinture des sentiments profonds et 
vrais. Aussi trouve-t-on dans leurs drames beaucoup de com- 
paraisons, d'images, de morceaux descriptils, très-brillants, 
très-riches de détails et d'effet, mais qui ne seraient point 
soufferts dans une tragédie française, o/ l'on exige que le 
poête s'efface quand les personnages doivent parier et agir. 
La difficulté d'improviser en vers français a fait déclarer 
cet art impossible. Il est vrai que notre po6sie repousse une 
grande quantité de termes usuels, dont l'emploi donne au 
vers un tour familier et prosa,que. Néanmoins, la langue 
française est toujours assez riche pour qui sait s'en servir. 
Il est étrange cependant qu'aucun poëte, ne fUt-ce que 
par délassement, n'ait osé se risquer dans cette voie; car 
nous ne qualifierons pas du titre d'improvisateurs ceux qui 
ont "seulement essa)'é quelques vers. L" i top r o top t u, 
d'ailleurs n'est pas, ì proprement parler, une improvisa- 
tion ; Théophile, Maynard, D a n g e a u, P i r o n, le cheva- 
lier de Bou ffl e fs, de Ségur et tant d'autres, pour avoir 
rempli des bouts rimés, et produit deux ou trois qualrains, 
ne sont point des improvisateurs. 
On a beaucoup écrit sur l'improvisation, et mème en 
termes fort scientifiques ; mais presque toujours l'erreur et 
l'exagération ont égaré l'écrivain dans ses théofies, lious 
croyons, nous, qu'avec une instruction variée et la con- 
naissance suffisaute de sa langue, tout homme qui veut 
peut aborder l'improvisation. La volonté est une des condi- 
tions essentielles; mais on veut plus ou moins, et voilà le 
secret du succès. Des degrés s'établiront dans cet art, 
comme dans tous les autres, entre ceux qui parcourront 
la carrière : les facultés étant inégales, les études devront 
présenter de notables diffërences, et tout influera sur les 
r6«ultats. L'utilité de l'improvisation en prose est incontes- 
table : à une époque o6 la vie puhlique s'est inûltrée dans 
tontes les classes de la société, on ne serait pas fondé à 
soutenir la thèse contraire. Quant à lïmprovisation en vers, 
comme tous les arts, elle offre une récréation agrëable, 
des émotions vives, proîondes; c'est un noble délassement, 
qui niait en mesure du degré d'intelligence dont on est doué. 
Eugène riz 
On ne sera pas étonné de ne pas trouver dans cet article 
un coin que tout le monde  cherchera, en vo)'ant par qui 

 IMPUDICITÉ 323 
il est signé. On sait quel talent son auteur a déployé dans le 
genre qu'il cultive et avec quelle facilité il remplit inconti- 
nent les cadres les plus variés de vers faciles et élégants; 
mais beaucoup trouveront qu'en voulant reaever chez nons 
l'art d'improviser en vers, il a fait sortir l'art de sa voie ; 
que le l,aut style ne saurait se contenter de ces çluperies 
d'oreille qui trop souvent laissent l'esprit vide; qu'il ne 
suffit pas de mouler le vers d'un jet, en quelque sorte, qu.'it 
faut encore le fondre, l'adoucir, le ciseler, le polir : sinon 
point de poésie, l'oeuvre reste imparlaite. L. Lovz. 
IMPIUDENCE manque de cette qualité qu'on ap. 
pelle pr ucl ence. On est imprudent de plusieurs maniè- 
res: par caractère, lorsque l'étourderie s'est tellement 
rendue maltresse de nous, que nous ne calculons plus la por- 
tée de nos alAmarches et de nos actes ; par forfanterie, lors- 
que nous nous précipitons bénévolement dans des périls sans 
honneur, afin d'en retirer non une gloire réelle, mais l'ad- 
miration stupide de quelques personnes aux yeux desquelles 
les actions les plus insensées semblent des prodiges de cou- 
rage. Enfin, on est imprudent par ignorance : tels sont 
l'idiot et l'enfant, qui ne cbercbent pas à éviter un dan3er 
qui leur est inconnu, et qu'il n'est point donné à leur ima- 
gination de deviner. Du reste, les conséquences de l'impru- 
dence, quelles que soient ses modifications originelles, n'en 
sont pas moins graves, tant au physique qu'au moral. In- 
sisterons-nous sur la nécessité de prèvenir ce défaut, si na- 
turel dans le jeune 'Age, et contre lequei il est alors si facile 
d'ètre mis en garde, et de le reprimer peu à peu quand une 
paresse étourdie nous a habitués à agir sans délibération ? 
Cette ndcessité est assez sentie, mme par les imprudents. 
La loi punit quelquefois l'imprudence, notamment dans le 
cas d'ho mi.ci de. 
IMPUBEIAE  celui ou celle qui n'a pas encore atteint 
l'àge de puberté. L'homme aux yeux de la loi est impu- 
bëre jusqu'à dix-huit ans révolus ; la femme jusqu'à quinze. 
IMPUDENCE. C'est le vice qui couronne tous les au- 
tres chez les hommes corrompus de bonne heure. Loin 
de s'émouvoir d'un reproche mérité, l'impudent affiche l'in- 
différence la plus complète pour le blme qu'il encourt; il 
merde l'audace dans le mensonge, nie l'evidence, redouble 
de bardiesse en lace de la verré qui l'accable, et se porte 
avecle plus imperturbable sang-lroid aux actions que ré- 
prouvent la bienséance et l'bonnteté publique. L'impudence 
est cette insensibilité endurcie que l'aspect du mal ne alA- 
concerte pas, et qui engagerait sans remords la fo,tune et 
l'avenir des autres pour satisfaire la plus frivole passion, le 
moimire besoin. Peu importe que l'incorrigible audace de 
ses assertions soit constamment vaincue par les faits, l'im- 
pudence élude la puissance des faits le mieux constatés; 
avec un front d airain, elle affirmera qu'ils ne sont pas. 
C'est à force d'impudence que se soutient la vie de ruse et 
d'expédients que tant d'hommes de néant mènent dans les 
grandes villes. L'impudence brave tous les emharras : aî- 
fronts, respect humain, opinion publique, rien ne mord sur 
ce vice. Elle a créé l'art de devancer un éclat lé#time par 
l'explosion d'un courroux sans motifs, qui désarme et 
confon.«J à la fois. L. LtWL. 
IMPUDEUI. L'absence de cette réserve, de cette 
retenue pleine de modeste qui empèche de dire ce qu'on 
ne devrait point dire ; le mépris de la crainte que nous de- 
vons avoir de transgresser les lois de l'honnëteté et de la 
décence, constituent l'im/mdeur. Des discours obscènes se- 
ront donc ceux qu'on pourrait accuser d'impudeur. On 
appelle aussi impudeur ce sentiment sans frein qui porte 
certaines personnes à demander sans cesse, au fur et à me- 
sure qu'elles obtiennent des faveurs : les grands sollici- 
teurs sont insatiables; et malgré les places et les dons qu'ils 
reçoivent, ils n'en continuent pas moins à demander : 
cette persévérance acharnée à la curée est une autre espèce 
d'impadenr. 
IMPUDICITÉ. Comme l'i m p u d e a r, l'impudicite, 
elle aussi, est une absence de retenue, de bienséanco, mais 
4f. 



4 
tlment dans tout oe qui tient à la chasteté, à la dé- 
oenoe : ce mot est donc bien distinct de celui dont nous 
venons de nous occuper, quelle que soit d'ailleurs la fra- 
ternirWqui semble les unir. L'impudicité est l'amour effréné 
des plaisirs charnels : les B a c c h a n a le s des anciens, leurs 
Jeux Floraux, les Lupercales, le colle de Vénus, 
oelui du dieu Priape, n'étaient qu'un culte rendu à l'im- 
pudicité sous des noms plus ou moins doux, plus ou moins 
sonores, qui en réalité représentaient le méme vice. Lïm- 
pudicité n'est plus à l'ordre du jour des nations ; mais, 
lour cela, elle n'en existe pas moins dans les sociétés mo- 
dernes : combien ne pourrions-nous point citer de Messa- 
lines, de Lais I Combien de simples particufiers laissent en- 
core bien loin derrière leurs déportements scandaleux les 
lubricités obscènes dont la publicité au grand jour a déo 
ahonoré les peuples qui nous ont précédésl combien de 
joyeuses oryies, chantCs par les poëtes, enviC peut-être 
par le malheure»x, dont l'impudicité est le fond dominant 
Et ce n'est pas sans raison que l'impudicité a étd flétrie 
d'un blgme universel : elle dëM,onore celui qui s'y Ibre; 
elle abrutit l'me, détruit le corps, et les tue tous deux. 
IMPUISSANCE. C'est l'incapacité d'engendrer pro- 
duite par un vice naturel de conformation ou par un acci- 
dent (voyez A.xemomsle). La jurisprudence constante 
des tribunaux s'est refusée à voir dans l'impuissance un mo- 
tif detnullité du mariage, bien que quelques auteurs aient 
pensé qu'elle,pourrait l'entralner, si elle est le produit d'un 
accident antérieur au mariage et qu'elle ait té tenue cachëe. 
On conçoit en effet que cette dernière sorte d'impuis- 
sance est bien plus facile à constater que l'autre. Ainsi, 
quoique le mari ne puisse en alléguant son impuissance nu- 
lurette désavouer l'enfant conçu pendant le mariage, il le 
pourrait faire s'il prouvait que depuis le trois centième jus- 
qu'un cent quatre-vingtième jour de la naissance de ses en. 
lants il se trouvait, par l'effet, de quelque accident physique, 
dans l'impossibifitë absolue de cohabiter avec sa femme. 
Dans l'ancien droit on pouvait, par la scandaleuse Creuve 
du c o n g r è s, faire conslaler ]également l'impuissance. 
IMPULSION. En m6canique on nomme .force 
pulsion celle qui agit sur un corps avec une vitesse finie, 
pendant lin instant d'une durée inliniment petite, ou du 
moins inappréciable. Par exemple, le coup de raquette par 
tti«el on lance une balle est une force d'impulsion. 
IMPUNITÉ manque de p,mition, imlugence et par- 
don blàmable pour des fautes qui devraient Cre sévère- 
ment répdmées. C'est l'imponité qtti enhardit le crirse et 
donne aux criminels l'capCance d'échapper au Cil'aliment 
qui les excite à le commettre. L'impunité n'est aussi qtel- 
quefoLs que la tolérance qui accueille certainsdéfauts; c'est 
dans ce sens que Boilcau a dit : 
Tous les jours b la cour un sot de qualité 
Peut juger tle travers aec imptmité. 
IMPUTATION. En droit on appelle imputotion de 
payement l'indication que le payement fait par le débiteur 
s'applique à l'une de ses obligations. Celui qui a plusieurs 
dettes a le droit de déclarer, Iorsq,t'ii paye, quelle dette il 
entend acquitter; mais il ne peut pas nuire aux droits de 
son cr6ancier: par exemple, iorsqu'une dette porte intérét, 
il ne peut point, sans le consentement dll cr#ancier, im- 
puter le payement qu'il lait sur le capital, par préférence aux 
intérts; et le payement qui n'est point intégral s'impute 
d'abord sur les interC, à moins que le créancier n'ait con- 
sent/à ce qu'il en 10t autrement. La facult de faire l'im- 
putation au moment du payement est laissée au créancier, 
si le débiteur ne I'a pas faite. Pour que le débiteur pot 
attaquer l'imputation du créancier, il faudrait qu'il y e0t 
eu dol ou surprise. Lorsque la quittan¢o ne porte aucune 
imputation, le payement doit Atre impule sur la dette que 
le dëbiteur avait le plus d'int#rt.t à aequilter entre cellm 
qui sont pareillement échues; sinon sttr la dette échue, 
qoiquemoinsonéreuse qucccllcs qui ne le sont point. C'et 

IMPUDICITÉ  INAMOVIBILITÉ 
aux tribuuaux à apprécier quelle dette le débiteur a le pln 
intérét d'acquitter. Si les dettes sont d'égale nature, l'im- 
putation se fait sur la plus ancienne. Toutes choses égales, 
i'imputation porte proportionadIement sur chacune des 
créance.s. 
Dans le droit criminel on appelle imputation l'allégation 
d'tin fait blâmable à la charge d'une personne. Une trapu- 
ration peut Atre fausse ou calonmieuse; dan. ce dernier cas, 
c'est une d iffam ation. 
C'est encore un terme de la théologie protestante. L'im- 
putation des mérites de Jé, us-Christ signifie que ses soul- 
franoe, nous tiennent lieu de justification, et que Dieu ac- 
cepte sa mort comme si nous l'avions soufferte, par la 
mme raison sans doute qu'il nous impute le péché d'Adam 
comme si nous l'avions commis. L'Église catholique ne 
pas aussi loin, et croit setdement que les mérites de Jësus- 
Christ nous sont appliqts et non imputds. 
INACHUS, fondateur, en l'an t23 avant J.-C., du 
room,me d'Argos (voye5 AnçOLlU-), le plus ancien de la 
Grèce, dans le Pëloponnèse, a da à sa haute antiquitë d'dire 
appelé par les poëtes le fils de l'Ocean et de Thétis, si 
l'on ne voit plut6t dans ce titre empfiatique son origine 
d'outre-mer ; car l'histoire le croit Phénicien. Père de Pho- 
ronëe, son successeur, de Niobé, et d'fo, il fut la sou- 
che des Inachides, dont huit princes composèrent la dynas- 
tie, que reuw rsa l'Égyptien D a n a 0 s, qui s'empara du 
tr6ne d'Argos. Inachus t)3t divinisé dans un petit et mince 
fleuve, prenant sa source au mont Artémisius, traversant 
Argos, enUe ds lagtmes, et se jetant dans le golfe voisin. 
D..s£- B.no,. 
INALIÊNABILITÉ. Ce mot désigne la négation de 
cette fatuité par laquelle nous cédons à autrui un droit 
qui nous appartient en propre. Les choses qui ne sont à 
personne, res nullius, ne sont pas inaliénables : pour 
qu'il y ait inaliénahifité, il faut le concours de ces deux 
circonstances : une propriété et une impossibilité légale de 
la transf6rer à autrui. 
La Constituante, ,lans sa Dclaralion des droits de 
l'homme et du cito9en, appelait inaliénables certains droils 
naturels, comme la libertë de travail, de pensée, etc. Elle 
protestait ainsi contre les doctrines de ceux qui prétendent 
que l'ltomme en société peut renoncer à ces droits, et s'en 
remettre, pour en jouir partiellement, à l'arbitraire du pou- 
voir. Montesquieu a écrit ces belles paroles : « S'il n'est 
pas permis de se tuer, parce qu'on se dérobe à sa patrie, il 
n'est pas plus permis de se vendre; la liberté de chaqu 
citoyen est une partie de la liberté publique. Cette qualité, 
dans un état populaire, est mëme une partie de.la souve- 
raineté. » 
Notre Code civil dit : qu'on »te peut enqaqer ses services 
qu'à temps, ou pour une en teprise ddterminde (art. 1780). 
Les biens sont frappés d'inalienahitité lorsque leur pro- 
priétait-e, bien qu'il jouisse de tous ses droits civils, ne peut 
en disposer, quand aucune volonté ne peut, en se joignant 
à la sienne, lui donner le droit de l'aliënation; quand l'hypo- 
thèque ne peut jamais les affecter, ni le gage ou l'anticltrëse 
en dislraire la possession ou la jouissance, jusqu'à ce que le 
titre de proprité change ou s'étetgne. L'inahénabilité ne 
peut jamais s'asseoir, en réalité, que sur des droits ou sur 
d._s biens immobiliers; seuls ils ont une assiette certaine. Ce 
n'est que dans les gouvernements aristocratiques ou dans 
les monarchies absolues qu'on pratique cette institution 
de la propriété (voyez Msot,). Un curieux chapitre du 
traité de Ldgislation civile et pénale de Bentham traite 
des dangers économique:s de l'inaliénabilité «les biens. 
INAMOVIBILITE. Certaines fonctions, dans l'ordre 
judiciaire, ont, dès l'investiture qui en est laite, un carac- 
tère de durée tel que les personnes qui en sont revétues 
ne peuvent en tre dépouillées que par leur conntement, 
à moins de'jugement qui les condamne pour for fa i tu 
dest ce caractère de duree que l'on a appelé inamovibilit. 
Sont inamovibMs en France les membre de la cour 



INAMOVIBILITÉ 
cassation et des Comptes, ceux des cours impériales et des 
tribunaux de promiS.re instance, except les magistrats du 
ministëre public. L'ordonnance la plus ancienne touchant 
l'inamovibilité que nous ayons conrvée, au sortir du ci,nos 
de la féodalité, est celle du 2t octobre I7, par laquelle 
Louis XI déclare que les juges « ne devaient tre privés 
de leur charge que pour iorfaiture, préalablement jugée et 
déclarée |udiciairement, selon les termes de justice, par 
juge compétent ». De ce jo«r jusqu'à notre grande réé- 
nération de t7S9. l'inamovibilité des magistrats ne fut point 
mise en question; mais la constitution de 1791 fixa à quatre 
années la durée de l'office de juge. La constitution de l'an 
YIIl rétablit l'inamovibilité de la magistrature, lonaparte 
avait compris que c'était un principe étroitement IlWau 
système monarchique qu'il s'agissait de restaurer en France, 
et les differentes constitutions qui se sont succédé jusqu' 
celle de 1830 n'ont eu garde de reieter ce principe. En 1868 
lïnamovibilité fut détruite par un arrététsln gouvernement 
provisoire. La Constitution de 1868 la rétablit, et le prési- 
deut de la république procéda lui-reCe à la consécration 
de ce principe dans une solennité au Palais de justice à Paris. 
• L'inamovibilité rend excellents des clmix médio¢res, » a 
dit M. illemain. Il semblerait, au contraire, que l'amovibi- 
litWdu pouvoir judiciaire serait un gage d'excellence dans le 
choix; car les médiocrités pourraient Cre éliminées et avan- 
tageusement remplacées. On prétend cependant trouver dans 
lïnamovibilité une garantie de l'indépendance du pouvoir 
judiciaire, et l'on cite à cet égard l'exemple des tribunaux 
aglais, qui ont refusé les taxes arbitraires à Cromwell, 
comme ils I« avaient refusC à Charles I «. 
INANITION. Ce mot exprime l'Cut qui résulte d'un 
jeune plus ou moins prolongé. Mourir d'inzni/ion, c'est la 
méme chose que mourir de.faim; mais cettedernière expres- 
sion rappelle l'idée des souffrances causses par le besoin ir- 
résistible de se nourrir, tandis que celle d'inanition exprime 
surtout la faiblesse extréme résultant du défut de uourri- 
turc. La fa i m est la cause, l'inanition est l'eflct. Quand 
l'inanition est complète, la faim cesse ordinairement de .se 
faire sentir. L'inauition peut Cre produite par le manque 
total de nourriture; mais il n'est pourtant pas indispen- 
sable que le jetons soit complet; si les aliments sont en trop 
petite quantité, ou si leur qualité est telle qu'ils ne fournis- 
sent pas à l'économie une nourriture suffisante, l'inanition 
peut se déclarer, et nme causer la mort. Il n'est pas rare 
de voir des malheureux dans un état continuel d'inanition ; 
et c'est une des plus grandes causes de mortalité chez les 
indigents. Ainsi, le plus souvent l'inanition résulte du man- 
que ou de l'insuffisance de nourriture;quelquefis, cepen- 
-Jant, elle est produite par une cause interne, qui s'oppose 
à l'ingestion ou h la digestion des aliments : par exemple, 
dans certaines maladies du pharynx, de l'oesophage ou du 
pylore, les aliments ne peuvent plus arriver dans l'estomac 
ou les intestins, ou ils y pénètrent en si petite qaantité, que 
le malade ne larde pas i tomber dans un état d'inanition 
souvent mortel. Quand l'inanition n'est pas parvenue au 
dernier de,,ré, on peut y porter remède; il laut user alors 
des plus grandes précautions pour rendre à l'économie la 
nourriture dont elle a été lonemps privée ; l'estomac et les 
autres organes digestifs ont pour ainsi dire perdu l'habi- 
tude de leurs fonctions : ce n'est que peu à peu qu'il est pos- 
sible de la leur faire reprendre, en ne leur donnant d'abord 
à digérer que des aliments légers et en petite quantité à la 
fois. Si l'insu/tion est port au point de devenir incqrable, 
la peau est sèche, d6colorée, terreuse; elle parait collée sur 
les os par suite du l'émaciation des muscles; le pouls est à 
peine sensible; Io corps se refroidit ; l'haleine est fétide; les 
urines sont rares, épaisses, et répandent une forte odeur 
ammoniacale : la mort vient bient6t mettre fin à cet état. 
'. - P. AIQUETffl. 
INAPPÉTENCE (du latin inappetentia, formé de la 
particule négative in, et d'appelere, désirer), défaut d'ap- 
pétit. Va,fez 

 INCAPACITÉ 
INAUGUflATION du latin inau/urare, consulter, 
prendre les a'auure (c'est-à-dire interroger le vol ou le chant 
des oiseaux). C'était l'action de cette cérémonie paienne qui 
avait lieu chez les Bomains lorsqu'un pontile nouveau allait 
faire partie du cuitCe d'un temple, ou lorsqu'il s'agissait du 
choix d'un emplacement pour y élever une ville, un temple, 
un tombeau, une statue, un cirque, un theMre. Ainsi, 
dans un siècle d'éblouissante lumière, l'homme, auquel sa 
fatale raison donne la conscience de sa faiblesse, se mettait, 
lui et les pierres reCes, sous la protection des présages, 
des auspices, des aruspices et des augures. Les Bomains dis- 
tingmient l'inauçuralion de la cldczce; mais ce mot, 
to:,t profane, Cant passé, par contrebande, dans la langtm 
ecclésiastique, y signifia par extension conscrztion, dé- 
dicoEce , boendiciou. 
Une des acceptions que donne le Dictionnaire de l'Aca- 
dème à ce mot est celle-ci : • L'inauçuration est une 
cérémouie religieuse qui se pratique au sacre, au couron- 
nement des souverains. » C'est un véritable abus de mots 
de dire de l'inaçurzlion qu'elle est aussi m,e cérémoni 
qui se fait au sacre d'un prélat. C'est confondre le pontifa 
de Jupiter et le pontife du CI,rist. Le mot 
uc doit donc s'appliquer nullement chez les modernes aux 
édilices religieux, mais aux monuments civils,  nos statues 
de rois, de grands hommes, à nos colonnes triophales, à 
nos obélisques, à nos fontaines, et cela non quand l'ou pus, 
la première pierre de leurs fondations ou de leurs lases 
cérémonie à part, mais le jour qu'on les a degagés des 
échalaudages ou des voiles qui les cachaient aux regards 
des citoyens durant leur construction. Enfin, l'inauguralion 
ne saurait consister parmi nous aujourd'hui, ainsi que chea 
les anciens, en pratiques religieuses fixes et invariables dans 
leur pompe : nous en luisons simplement une fète populaire, 
changeante, capricieuse comme la mode, à laquelle se joi- 
gnent souvent, il esl vrai, les bonCictions de l'Église, mai» qui 
n'en sont pas l'objet principal, tandis que la cocrcttion, 
ou la ddicace, est une cérémonie ecclésiaslique, dont le 
fond consiste dans la bénédiclion du temple ou de l'aulel 
nouveau. 
On appelle aussi discours d'itau#uroEton ou discours 
inoEu#roEl, celui que prononce un professeur en prenant 
possession de sa chaire. DEmE-Bo,. 
INCANDESCENCE (du latin i»tcandescere, devenir 
tout en feu), état d'un corps qui, naturellement opaque 
devient visible dans un lieu plus ou moins obscm lorsqu'il 
est chauffé jusqu'à un certain degré. Un barreau de fer, par 
exemple, que l'on expose  un feu de large prend d'abord 
ne couleur rouge-brun; un peu après, il est de couleu¢ 
rouge oerise, puis rouge tirant sur le blanc; puis enfin sa 
couleur est d'un blanc éclatant; alors il rayonne h la ma- 
ni6re d'un corps lumineux : c'est le dernier degré d'incan- 
descence auquel il puisse arriver; car, quelqu'un augmente 
la violence du feu, son état ne change pas; mais il se dè- 
çonpose, en projetant de tous c6tés des étincelles brillantes. 
Tout porte à croire qu'il faut un mme degré de tempé- 
rature pour chaque tat d'incandescence auquel une sub- 
stance matérielle est susceplible de parvenir. On a chercbé 
h mesurer ces diverses température ; mais, à cause des im- 
perfections des instruments dont on s'est servi pour faie 
ces expériences, on n'a dù obtenir que des résultats vagues. 
Il ne faudrait pas confondre les corps qui brillent à la 
l,;mière avec les matières qui ne jouissent de cette pro- 
priété qu'autant qu'on les a chauffées à un certain degré. 
Le diamant, l'acier poli, ne sont pas des matières incan- 
descentes. TE¥SSÈDnE. 
INCAPACITÉ, terme de jurisprudence, qui désigne 
l'Cut des personnes auxqtelles manque la c a p a ci t é légale. 
Toute personne est capable en principe et celles-là seules 
sont incapables que la loi a déclarées telles. La loi, à vrai 
dire, ne règle que les causes d'incapacité; mais elle pro- 
cède diversement. En effet, tant6t elle établit, par forme 
directe les causes d'incapacité; tant6t elle dëtermine les 



contionqu onstituent la capacité, faisant implicitiment 
rsulter ]'incapacioE de l'absence de ces conditions. Ce 
dernier mode est ordinairement employé pour déterminer 
l'aptitnde aux fo n c t i o n s p u b I i q n e s. 
L'incapacité peut porter ou sur la jouissanc e des droits 
et aussi, par une conséquence nécessaire, sur leur exercice 
(car il ne peut dtre question d'exercer un droit qui n'existe 
pas), ou sur l'exercice des droits seulement. Cette distinc- 
tion est essentielle en droit pur. 
L'incapacité d'exercice résulte principalement de la fai- 
blesse de I ' g e, des i n t e r d i c t i o n s judiciaire et légale, de 
la qualité de f e m m e m a r i é e. S'il s'agit d'une p e r s o n n e 
ci v i le, elle est, par sanature mme, incapable d'exercer 
ses droits. Ces mmes causes produisent aussi, dans cer- 
tains cas, l'incapacitë de jouissance. Les droits dout jouissent 
les incapables sont exercés en leur nom par le mari, le 
t u t e u r, ou autre représentant, selon les personnes. 
Il faut aussi mentionner la mort c i ri le, qui enlève 
la jouissanoe des droiB les plus importants, et la perte de 
iaqualité de Français. Ajoutons que certains actes et contrats 
exigent une capacité spéciale; teB sont le mariage, le 
testament. 
Quant aux droits politiques, les causes d'incapacité civile 
y sont applicables, et la loi s'est méme montrée pins ri- 
goureuse en cette matière. Les conditions d'ge sont sou- 
vent plus sívères. Les femmes, mariées ou non mariCs, 
ne sont point admises à les exercer. Enfin, il existe des 
causes spéciales d'incapacité, certaines condamnations, la 
dégradation civique, par exemple. Deplus, comme 
l'exercice des droits civiques est tout personnel, l'inca- 
pacité d'exercice équivaut ì la privation de jouissance. 
Cette vérité souifre toutefois une exception notable, que 
nous devons signaler : Dans une monarchie héréditaire, 
le monarque peut ètre incapable de gouverner, soit à cause 
de son àge, soit à cause d'un dérangement d'esprit : on en 
a vu des exemples. Cette incapacite temporaire ou acciden- 
telle ne lui fait pas perdre le droit de la couronne ; seule- 
ment, les rnes de l'Eat, qui lui échappent momentané- 
ment, passent aux mainsd'un régent, qui gouverne au 
nom du monarque. 
INCAICERATION (du latin carcer, prison ). C'est 
l'action de mettre quelqu'un en prison ou bien l'état de 
celui qui s'y trouve (vo9ê= EaemSON.XET ). 
INCARNAT (du latin incarnatus, fait de caro, car- 
is, chair ), qui est d'une teinte intermediaire entre la cou- 
leur de chair et le rouge vif. L'incarnat plus taible prend 
le nom d'incarnadin. 
IC.kINATIF. En thérapeutique, on spécifiait sous 
cette appellation tant0t les substances médicamenteuses 
auxquelles on supposait la propriété de favoriser la régéné- 
ration des cbaies à la surface des plaies et des ulcères, 
tantôt les bandages et les sutures propres à les réunir. C'est 
ainsi qu'on disait n bandage , n remède incarnati]. 
INCAPtNATION action de la divinité prenant un 
corps réel, se manifestant au monde sous la forme humaine. 
Ce n'est pas cette sorte d'anthropomorpfiisme qni donne 
aux dieux d'Homère la forme et les passions humaines; 
c'est une véritable union de la divinité à l'humanité, par la- 
quelle Dieu accepte toutes les charges de la vie. Cependant 
ce n'est pas Dieu, en tant qu'ètre infini, absolu, qui s'in- 
carne, c'est seulement une émanation plus ou moins pure 
de la divinité. Chez les cbrétiens, c'est le Logus ou Verbe, 
dans lequel la pensée divine se réalise, qui s'incarne dans 
le sein d'une vierge sans tache, mème originelle, par l'opC 
ration du Saint-Esp ri t. ,, Le Verbe s'est fait chair, dit saint 
.lean, et il a habité parmi nous. • Dans la Trinité chré- 
tienne, le Verbe est dit le Fils de Dieu. Il s'est soumis aux 
souffrances et aux épreuves de la vie humaine pour rachete 
l'bumanité de la c h u t e o r i g i n e I I e. Sa Passion est le 
sacrifice qu'il offre  son Père, créateur de toutes choses. E 
vertu des mérites du B&lempteur, l'homme dont la vie est 
pure leut tre sauvé; sans ce sacrifice du divin aneau, 

INCAPACITÉ  I[CAS 
l'homme restait à jamais perdu, quel que f0t son propre 
mérite; les hommes qui ont vécu avant le Sauveur ne sont 
rachetés que par son intercsion. Ainsl, le mystère de l'incar- 
nation dans la religion catholique se rattache aux dogme» 
dela Trinité,du péché originel et de la lédemption. Il 
ne faut donc pas s'étonner si ce dogme a donné lieu à un 
grand nombre d'hérésies : les uns prétendaient que le Verbe 
ne s'était uni à l'humanité qu'en apparence, Dieu ne pou- 
vant souffrir ; les autres soutenaient que c'était la Divinité 
elle-mme, le Père, qui s'était incarné, pnisqu'il ne peut 
avoir qu'un Dieu ; Arius soutenait que Jésus-Christ n'était 
pas Dieu, mais une créature tirée du néant par Dieu; Nes- 
torius voyait dans le Christ deux natures, et par suite 
deux persomes : lapersonne humaine seule a souffert; Euty- 
chès, au contraire, ne trou rait qu'unenature en JésuChrist, 
la natnre humaine étant entièrement ahsorbée par la nature 
divine, etc. Le concile de Nicée a décidé que Jésus-Christ, 
fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles, con- 
substantiel su Père, et vrai Die comme lui, est descendu 
du Ciel, s'est incarné dans le sein de laVierge Marie par l'o- 
pCation du Saint-Esprit, s'est fait homme, a souffert sous 
Ponce-Pilate, a été crucifié, est mort, est descendu aux en- 
lers, est ressuscité des morts, et est remonté au ciel d'où il 
viendra juger lesvivants et les morts. Le concile d'Éphèse 
maintint que dans le Verbe incarné le Dieu et l'homme 
ne faisaient qu'une seule personne et deux natures. D'autres 
sectes ont nié depuis la divinité d! Chri; quelques an- 
teurs nient aujourd'hui le Christ ini-mme. En tout cas, 
rendons hommage, avec bi. Artaud, « ì la sublime simplicité 
de ces chroniques populaires qui nous ont transmis l'his- 
toire du Dieu qui s'est fait homme pour vivre dans la pau- 
vreié et l'bumiliation, qui enseigna la morale la plus pure, 
et qui pratiqua les vertus les plus héroiques pour expirer 
dans les tourments. ,, 
Les incarnations de la divinité jouent aussi un grand rle 
dans d'autres religions. Chez les Indous, chaqu.e grand 
progrès social est marqué par une incarnation : V i s c h n o u 
s'incarne aussi souvent qu'il est nécessaire pour assurer le 
triomphe de la vérité. Krischna, Bouddha sont des 
incarnations de Vischnou : seulement Vischnou prend d'a* 
bord le corps d'animaux ; ce n'est que dans les dernières 
translormations qu'il apparalt sous la figure d'un héros et 
d'un sage. Mais dans la religion indoue le dieu incarne 
s'ignore lui-mme; il n'a pas conscience de sa nature di- 
vine. On pourrait aussi retrouver les idees d'incarnation dans 
la m)tholoe .ëptienne. L. Loevr. 
|,'CARNE (Ongle). VO!l e- 
INCAS. On appelait ainsi les souverains du Pérou avant 
la conquête de ce pays par les Espagnols. L'histoire primi- 
tive de cette contree n'est pas moins obscure que celle du 
ffouvean-Monde en général, où, à une époque qui se perd 
dans la nuit des temps, dnrent exister, comme le prouvent 
les traditions et les ruines de monuments grandioses, des 
peuples puissants et régner une civilisation extrmement 
avancée, à laquelle succéda une longue période de dé- 
solation et d'abrutissement. Parmi les sauvages pérnviens, 
qui n'avaient pas mème conservé un souvenir bien pré- 
cis de ces temps primitifs et meilleurs, apparut tout à 
coup un étranger, blanco-Capac, se disant Fils du Soleil, 
qui sut s'assurer l'autorité et l'obéissance, réunit en un seul 
peuple des tribus séparées, et Iorma, d'après des principes 
théocratiques, un État, qui sous ses successeurs s'accrut 
au point de devenir le plus étendu et le plus puissant de tous 
ceux que l'histoire puisse signaler dans le ,Nouveau-Monde. 
Cet empire suhsista durant quatre siëcles environ; le trei. 
zième inca perdit le tr6ne et la vie, l'an 533, sous les coups 
des conquéranL« espagnols. 
Quelles que soient les incertitudes que l'on doive néces- 
sairement rencontrer dans l'histoire d'un peuple au«uel l'fi 
criture était inconnue, les renseignements les plus circ'onstï: 
ciés sur les institutions politiques et sur l'Cat moral des 
Péruvien» au moment de la conquête nous ont été transmis 



INCAS -- INCENDIE 
par les Espagnols témoins oculalres des faits et des choses. 
Ils prouveut que les Incas n'étaieut pas eulement regardés 
c6mme des souverains visibles, mais aussi comme des re- 
présentants et des organes.de la Divinité., auxquels était 
due i'obéissance la plus fllimitée, gnuvernaut toutefois avec 
autant de bonté, que d'babileté politique un peuple réparti 
en castes rigourensemeut déliraitCs et qui ne manifestait 
jamais la moindre volonté. Parmi ces treize Incas, il ne se 
rencontra, à bien dire, qu'un seul conquérant; tous les 
autres n'employèrent que des voies paciflques pour soumettre 
des fribus sauvages, qu'ils réussirent à civiliser en très-peu 
de temps; et ils agrandirent tellement leur empire, qu'à 
l'époque de sa chute il s'étendait de Quito au Chili. L'or- 
ganisation politique en était très-rutiére; mais elle ne pou- 
vait se maintenir que cbez un peuple peu riche et tranquille; 
elle ne permettait non plus que des progrès très-limitée. On 
avait attentivement pourvu aux besoins publics, au culte, 
duquel étaient exclus les sacrifices humains en usage chez 
les lexicains, et à la défense de l'empire. Les ruines de 
magasins et de temples immenses subistent encore; et de 
nos jours méme on continue à utiliser partiellement la chaus- 
sée des lnca, construction vraiment prodigieuse, traver- 
sant la cime des Andes et se prolongeant sur une étendue de 
près de vingt degrés de latitude, qui servait de route mili- 
taire, et dont les ruines peuvent méme tre comparées à 
celles de plus d'une construction égyptienne. 
On ne tulérait dans l'empire des Incas qu'une seule.langue 
et une seule religion ; partout l'oppression du peuple était 
prévenue par les lois; mais les princes et la noblesse, ap- 
pelés ore.oes par les Espagnols, se maintenaient constam- 
ment comme caste distincte et séparée du peuple ; ce qui 
justifie la conjecture qu'il desceudaient dme race de con- 
quérants étrangers. L'agriculture etait florissante; et malgré 
le manque d'instrumeuts en fer, plusieurs métiers étaient 
exercés avec succès. I! n'existait pas de commerce, parce 
que les trontières étaient sévèrement gardées, et que tout 
rapport etait interdit avec les peuples voisins non subjugués. 
Pourtant, le peuple se trouvait heureux de son sort; et il 
en lut ainsi jusqu'au moment où les Espagnols parurent, 
apporlant avec eux la misère, la dévastation et la dépopula- 
tion. La famille du dernier Inca s'éteignit; néanmoins di- 
verses familles mulâtres du Pérou font remonter leur ori- 
gine à des branches collaterales de cette maison, et dès le 
dix-septième 'siècle l'une d'elles obtint du gouvernement 
espagnol le rang de comte. Les renseignements les plus 
circonstanciés qu'on possède sur les Incas, quoiqu'il ne 
taille les admettre qu'avec réserve, sont ceux que nous 
ont donnés les conquérants espagnols eux-reCes, tels que 
Cieza et G a r ci I a s o d e I a V e g a, qui par sa mère descen- 
dait du oernier Inca. Bobertsou a fait un exccllent usage de 
leurs indications dans son Histoire d'Amérique. L'insipide 
roman Les Incas, par llarmontel, n'a aucune valeur Idsto- 
rique. Consultez Prescott, Hstory of the Conquest of Peru 
( 3 vol., Boston, 1847 ); Bivero et Tschudi, Antiguedades 
Peruanzs ( Vienne, 1852 ). 
INCENDIAIIES, ce qui met le feu, ce qui cause 
un incendie. Puis substantivement ce mot sert à désigner 
celui qui par malveillance met le feu à la propriété d'autrui 
ou à 1 sieune, celui qui se rend coupable du crime d' i n- 
c e n d i e. Au figuré, on applique i'épithète d'incendia|res 
aux doctrines que l'on prétend cpables de détruire les 
bases religieuses et politiques de la société. 
INCENDIAIIE (Fusée), ou fusée à la Congrève. 
Voyer..Fvs et CoctËv. 
INCENDIE. C'est un spectacle bien majestueux et bien 
teriible que celui des ravages du feu. Une maison, un ha- 
meau, et une ville tout entière dévorés par les flammes, 
le bruit des pontres qui craquent, des toitures qui s'écrou- 
lent, la désolation des habitants qui luient, quand l'in- 
ciendie neles a point surpris dormant et étouffés dans des 
tourbillons de feu et de fum, le tumulte inséparable des 
premiers moments de:danger, les efforts que l'on fait pour 

327 
arracher à la mort u»e persoune dont la vie est en pé; 
et des effets précieux à la destructiou ; les cris d'alarmo 
• et l'elfroi de tous, tel est i'événement dout ce tableau re: 
présente parmi nous les principaux traits. La flamme se 
precipite en langnes ondoyantes par les portes, par les 
feuetres, par les tulles, par les crevasses qu'elle s'est creu. 
sées dans les murailles calcinées : elle semble vouloir.en- 
vahir tout ce qui peut l'alimenter ; et cependant d'ordi- 
naire le secours de l'homme arrête ce terrible agent de 
dévastation, auquel il sembleque rien ne puisse s'opposer. 
Et souvent une seuleétincelle a produit tout cela  Combien 
de terreurs ne doit pas réveiller chaque incendie ! Cmbien 
ne doit-il pas faire redouter la moindre imprudence, ;a 
moindre négligence à celui dont la vie, dout la propriété 
peut ainsi tre consumée en quelques instants? Comment 
n'appellerait-il pas la rigueur des lois sur la malveillance 
qui fait mettre le feu pour satisfaire de mauvaises passions ! 
Combien aussi doit-il pousser l'homme prévoyant à con- 
tracter une assurance qui le met en garde coulre les chance 
malhe,renses d'nn événement dont il peut tre la • ictime in- 
noceute. Mais, si l'aspect d'une maison, d'une ville embra- 
sée, peut éveiller dans l'ame de tels senliments, combien 
celui d'un de ces vastes incendies qui, dans le conlinent amé- 
ricain s'aimentent durantdes anuéesdansd'in»menses forëts 
viergesdoit-il produire d'impression! Combien doit se glacer 
le courage du navigateur lancé dans l'immensité des plaines 
océaniques lorsqu'il a à disputer sa frle demeure aux fu- 
reurs du feu ! Le cœur se fend à songer à ses angoisses et 
à ses souffrances ! 
L'incendie est un des plus grands fléanx de la guerre. La 
vengeance politique et relieuse en a aussi trop souent al- 
lureC Dans lespays musulmans les incendies sont frequents; 
les Orientaux se préoccupent mëme àpeine de les éteindre. 
L'Anglo-Américain s'en affecte également peu. Les contruc- 
tions en boL et en chaume donnent lieu à beaucoup de 
ces accidents. Cependant a mesure que la richesse s'etend, 
on prend des mesures pour prévenir les incendies et s'en 
rendre plus promptement maitre. Partout, dans les pays 
vilisés, l'autorité publique prescrit des mesure destinées à 
rendre ces malheurs plus rares, soit en réglant la construction 
des édilices, soit en surveillant tout ce qui peut servir de fo)er 
à l'incendie. Les secours contre l'incendie ont eé aussi de 
mieux en mieux organisés. Aujourd'hui, partout les commu- 
nesimportautes ont des pompes a incendie et un corp 
de pompiers. 
[ Dans les incendies, une bonne et prompte direction des 
secours peut seule soustraire aux plus grands dangers; par- 
tout sans doute on rencontre des sapeurs courageux, mais 
il n'est peut-être pas une localité où les secours soient ap- 
porté avec une plus parfaite intelligeuce qu'a Paris, oU le 
corps des sapeurs-pompiers a acquis, notamment sous le 
commandement des colonels Plazanet et Paulin, un éclat 
tout particulier. 
Les feux qui se développent très-fréquemment dans le» 
cbeminées peuvent tre eteiots, dans la plupart des cas, 
avec beaucoup de facilité, quand on s'y prend à temps 
et, comme on n'a pas toujours le moyen d'appeler des 
ponpiers, il est important de savoir de quelle manière 
on doit s'y prendre pour parvenir à ce but. Si on a  sa lis- 
pnsition de la fleur de soufre, au lieu d'enlever le feu de 
l'tre, on l'y étale, on y jette une à deux livres de soufre, 
et l'on ferme immédiatement et exactement l'ouverture de 
la cheminée avec une porte, une table ou tout autre objet 
semblable que l'on a recouvert avec un drap, nne couver- 
ture, un rideau, etc,; le soufre en brdlant absorbe l'oxy- 
gène et produit en méme temps un gaz impropre à continuer 
la combustion ; le feu peut disparallre par ce seul moyen. 
Dans tous les cas, et en attendant les pompiers, qu'il ne faut 
jamais négliger d'ap?eler, parce que des crevasses ou d'au- 
tres conditions défavorables envent propager l'incendie, o, 
couvre la cheminée avec un drap mouillé, que l'on main- 
tient sur la tablette au moyen de quelques corps pesants» 



et, saisissant le drap par le milieu avec la main, on le fait 
pénétrer dans la cheminC, et on le retire rapidement en 
dehors pour produire l'effet d'une pompe ; on fait ainsi tom- 
ber la suie embrasée, que l'on éteint en y jetant de l'eau, 
et on continue de cette manière jusqu'à ce qu'il ne tombe 
plus de feu. 
Quand l'incendie s'est dveloppé dans un bAtiment, il faut 
diriger la plus grande quantitê possible d'eau sur le point 
incendié, en se servant de la pompe, dont le jet frappe si 
fortement les corps qu'il atteint, qu'il peut détacher facile- 
ent des parties embrasées. 
Dans un très-grand nombre de circon«tances, le feu se 
développe dans certaines parties d'un btiment qu'il faut 
traverser pour porter secours fi des individus exposés aux 
dangers les plus imminents ; parmi tes moyens sur lesquels 
des expériences ont été faites, nous signalerons les appa- 
reils d'Aldini, prolessenr de Milan. Davy a prouvé que les 
fils métalliques s'oppont plus ou moins complétement à 
la h ansmission de la flamme ; d'autre part, on sait que 
l'amiante ou asbeste ne peut brùler méme en la plaçant au 
milieu d'un foyer : Aldini a pensé qu'un individu couvert 
d'un vétement en tissu d'aroiante, protégé en outre par une 
enveloppe en toile métallique, serait b l'abri de l'action de 
la flamme, et les essais nombreux qu'il a faits surtout à 
Paris ont prouvé que des hommes pouvaient ainsi péuétrer 
dans un lieu incendié, et taveisei les flammes san» éprou- 
ver d'accidents. Un bouclier en toile métallique peut mme 
servir à éloigner sulfisamment la flamme pour permettre à 
celui qui en est muni de traverser une assez grande éten- 
due de flamme qu'il repous loin de lui. Mais les armures 
reCu|tiques gnent beaucoup les nouvenents, et les tissus 
d'amiante s'Chauffent au point de procurer ì ceux qui les 
portent une chaleur capable de dëterminer des accidents ; 
ces appareils peuvent servir dans quelques circonslances, 
mats à l'exception du bouclier, ils peuvent Cre bien avan- 
tageusement remplacés par les appareils dus au colonel 
Paulin, qui offrent le double avantage qu'ils permettent de 
pénétrer dans un espace rempli des vapeurs et des gaz le 
plus délétìres, et de s'y maintenir Ionemps sans courir 
aucun danger. La lumée seule produite par le bois et un 
grand nombre d'autres corps analogues suffit déjà pour fa- 
tiguer la respiration, et mettre bientôt nu individu dans 
l'impossibilité de rester dans uu lieu incendié; mais comme 
il se produit souvent en mme temps des gaz ou des va- 
peurs nuisibles, et que la combustion enlève à l'air sa par- 
tde respirable ; qu'en outre la chaleur elle-mme serait un 
obstacle à la station trop longtemps continuée- proximité 
<l'm point incendié, un oen qui permettrait à un homme 
de respirer librement de l'air pur, sans guer aucun de ses 
mouvements, et te soustrairait en partie à l'action de la 
chaleur, permettrait de porter des secours dans beaucoup 
de cas oh tous les efforts eussent été infruct»eux : ces con- 
ditions, l'appareil du colonel Paulin les remplit compléte. 
ment. 
On a plusieurs fois tenUWde faire pénétrer des hommes au 
milieu de gaz non respirables, en leur fouinissant de l'air 
pur, soit au moyen de pompes, comme dans la cloche du 
plongeur, soit au moyen d'appareils portatifs renfermant de 
l'air plus ou moins comprimé. La modification apportée par 
le colonel Paulin dans l'application de ces principes parait 
réaliser tout ce que l'on pouvait en attendre. Une casaque 
en cuir descendant jusqu'au dessous de la ceinture et por- 
lant des sur-cuisses, pour empclier l'habillement de remou- 
let, se trouve serrée autour du corps par le moyen d'une 
ceinture. L'extrémité des manches est lixée par le méme 
mo)'en ; le capuchon couvrant entièrement la tête, porte à 
la partie antérieure une lame épaisse de verre cintré, qui 
permet d'apercevoir tous les ob[ets sans tre obligé de tour- 
ner la téte; vers la partie in{érieure de la casaque, et sur 
le c6té, se trouve une monture en cuivre, sur laquelle on 
visse un tuyau fixé à la pompe que l'on fait manoeuvrer à 
ide; l'air gonfle in casaque, et, affluant sans cesse, permet 

INCENDIE 
au pompier de respirer toujours un air pur. Un sifl]et, plac 
sur la partie antérieure du masque, donne au sapeur la 
facilité de transmettre des signaux, et le boyau pourrait 
servir pour aider, avec le cordage qu'il l»rte avec lui, b 
retirer cet homme en cas d'accident. Revétus de cet appareil, 
les sapeurs pellvent rester quelque temps dans une cave, 
et s'y livrer b tous les exercices nécessaires pour éteindre 
l'incendie et en reconnaltre la caisse. Cet appareil simple, 
d'une construction facile et peu dispendieuse, a déjà rendu 
de grands services dans plusieurs incendies; il offre surtout 
ceci d'avantageux qu'il donne à celui qui en est revetu toute 
écurité, et que l'oblàgation d'avoir nue pompe dans tous les 
cas d'incendie ne force à l'emploi d'aucun appareil particu- 
lier, et surtout difficilement transportable. Le vtement 
dont nous venons de parler a également été employé pour 
pénétrer dans des puits, des lieux profonds ou infects, oh 
tout liomme aurait perdu la vie. 
Lorsqu'un incendie se développe dans la partie inférieure 
d'un édifice, les individus qui se trouvent placés dans les 
parties supérieures courent les plus grands dangers quand 
ils veulent en sortir : on a imaginé plusieurs échelles à 
incendie, qui permettaient bien de porter des secours dans 
ces cas, mais leur complication, le prix élevé de leur cons- 
truction, la difficulté de les transporter (car il fallait pluieurs 
chevaux ), les rendaient à peu près inutiles; on a depuis 
adopté l'usage d'chelles d'un tout autre genre, qui offrent 
les plus grands avantages : ces CUelle.s, en bois très-solide, 
et maintenant en fer, se plient au milieu de leur longueur 
pour les rendre pIus poçtativ ; un bouton qui forme l'un 
des échelons permet de les assujétir trs-rapidement quand 
on les déploie : " la partie supérieure, elles portent deux 
demi-cercles en fer, qui servent à les fier à l'appui de la 
croisée du premier étage, en cassant s'il le faut, par leur 
moyen, les vitres des croisées; deux sapellrs parviennent 
ainsi jusqu'à ce point, et en plaçant successivement, et de 
la mme manière, leurs CUelles à l'étage supérieuri ils ar 
rivent ainsi juqu'd la partie la plus élevée; lçun d'eux porte 
attaché à son vétement l'extrémité d'un petit cordage, au 
moyeu duquel il'amène à lui un tuyau en toile, dont la partie 
supérieure est garnie de quatre barres en bois, qui s'ouvrent 
pour former un cadre que l'ou fixe dans la baie de la croi- 
sée; l'extrémité inférieure du tuyau est soutenue au-dessus 
du sol par plusieurs hommes ; les individus qu'il s'agit de 
sauver, les objets qui peuvent tre eulevés, sont descendus 
au travers de ce boyau, et les sapeurs eux-mmes s'en ser- 
vent pour redescendre s'ils ne peuvent le faire au moen de 
l'échelle; en moins de dix minutes, deux sapeurs peuvent 
ainsi parvenir / la partie la plus levée d'une maison,  
sauveter plusieur individus et redescendre eux-mmes. On 
peut facilement juger par là de l'utiité d'un semblable 
moyen. 
Dans les cas d'incendie, la quantité d'eau que Pon peut se 
procurer est presque toujours insuffisante pour les besoins 
du service : on ne saurait donc trop multiplier les moyens 
de s'en procurer. On a adopté l'usage des seaux en toile 
portant une anse en corde, que leur extrème légèreté et la 
facilité de leur transport, soit avec les pompes, soit dans 
les chaines que l'on forme toujours en pareil cas, rend d'un 
usage extrmement précieux ; au moment of l'on ¥ met de 
l'eau, ils sont expusés à fuir un peu, mais ils s'abreuvent 
rapidement, et font un excellent service. 
H. GCLI"IEt nE CL,UnB¥. ] 
Toutes ces inventions ne semblaient pas cependant suf- 
fire. Les pompes subirent une loule de métamorplioses : on 
essaya mme en AraCique une pompe mue par la vapeur. 
Ailleurs on cliercha à éteindre le fen en dirigeaut dessus des 
gaz incombustibles. 5. Philips, ingénieur anglais, invenla, 
pour éteindre les incendies, un appareil auquel il donna le 
nom defire annihilator. Laissons-le exposer son procbte : 
« L'edu n'a point d'action sur l'air ni sur la flamme ; elle 
ne possède qu'une seule propriété contre le feu, celui de 
refroidir les corps combustibles et d'emp$cher la géné- 



IICEDIE 
ration des gaz imflammables : d'où il suit que l'air inaltéré 
par l'eau se précipite avec fureur vers le feu. La flamme, 
sur laquelle l'eau est également impuissaute, développe par 
la chalenr la combustibilité de toutes les matières qni l'en- 
tourent, les embrase; l'incendie se propage avec violence, 
jusqu'à ce que l'immersion lui dérobe ses aliments ; car l'eau 
n'agit que snr les points qu'elle a frappés et salutC. 
« Voici maintenant comme j'opére : 
• Si le principe de mon invention consiste dans I« produc- 
tion de gaz résultant de la combustion, ma machine porta- 
tire se charge avec »ne conjonction de charben de bois, 
de coke, de nitrate de potasse et de sulfate de chaax. Ces 
matiëres sont mèlées emsemble avec de l'eau et préparées 
en forme de brique. Pour mettre cette charge en action, 
une fiole, contenant un mélange de chlorate de potasse et 
de sucre an-dessus duquel est placée une petite bouteille 
d'acide snllurique, est introduite dans une cavité ménage 
au centre de la briqne. Cette charge ainsi préparée est placée 
dans un cylindre percé de plusieurs trous, et ce cylindre 
dans tin second fdns grand, également percé de trous pour 
le passage du gaz. Le tout est placé dans nne donble boite 
cylindrique, construite de manière  contenir dans la partie 
inférieure un peu d'eau. L'appareil ainsi préparé est fer- 
mA par denx eonvercles ayant une onverture pour i'échap- 
peinent des vapeurs. Une verge de fer pointn, surmontée 
d'un bonton et destinée à briser la fiole, est introduite 
par le centre des couvercles. La verge de fer, étant poussée, 
brise la fiole. L'acide sulfurique se répandant sur le mélange 
de chlorate de potasse et de sncre, l'ignition se prodniL 
La flamme se rëpandant sur la surface supérieure de la 
brique, nne seconde ignition a lieu instantanément. Des gaz 
à une haute tempêratnre se dégagent, lesquels passant  tra- 
vers les trou» des cylindres vont agir sot le réservoi¢ con- 
tenant l'eau, et prodnisent la vapenr. Cette vapenr d'ean se 
ntlant avec le gaz, s'écliappe avec eax par l'orifice dela ma- 
chine. Ce jet, qui conlinuelnsqn'àce que la charge soit entiè- 
rement brtlée et l'ean épuisée, Iorme un nuage épais et se 
répand dans l'atmosphère de fea. On comprend que la 
rédnction de la flamme, qni a lieu inslantanément, rédnit 
aussi le contant d'air par leqnel la combustion était entre- 
tenue, les matières enflammées, se tronvant enveloppées 
par les vapenrs sortant de la machine, la combnstion 
cesse, la chaleur est ab,orbíe, et Ic feu éteint. » 
bi. Philips ajoute que ses expériences ont été conronnfes 
d'un plein snccès. Cependant, en 1851, Paris a pn èlre 
témoin decellesqu'il tenta an Champ-de-Mars, et qui échouè- 
rent presqne complélement. 
Longtemps avaot M. Philips, on connaissait la propriété 
dontjonit la vapeur d'eau d'Ceindre les incendies. Ele avait 
été signalée par M. Dujardin en 1837, et par 1! Fourneyron 
en 1840. On cite plnsieurs casoùcette propriété a été mise 
/ profit. C'est, dans les filatares, dans tous les grands éta- 
biissements où on emploie la vapenr comme force motric 
nne précieuse essom «e en c.as d incendie; mais c'et snrtont 
a bord des Itiments à vapenr que l'on ne doit lainais en 
pareil cas oublier que le remède est à cfté de la cause du 
mal. 
Des villes entières ont quelquefois été le thé'àtre 'im- 
menses incendies. Un empereur, voulant ajonter nne nou- 
velle souillnre à son nom détesté, brtle lome dans une 
orgie. Le peuple russe, pour sauvegarder son indépendance, 
br01e Moscou en 181, et cet acte de patriotisme farouche 
artère les vainqueurs et change leurs victoires en dfaite. 
L'année 1666 fut funeste fi Londres, qu'nn immen.e in- 
cendie dévora presque entièrement. Depnis cette époque, 
les principaux incendies furent ceux de Coponhagne 
(1728, 1807), de Constantinople (178, 1784 ), du Port-au- 
Prince (1799), de Bercy (180), de Salins (185), de New- 
York (1835), de la Nouvelle-Orléans, de Charlestown (1838), 
de .Haro. bourg(181), de Memel ( 185),etc. 
INCENDIE (Droit). De minulieuses prescriptions ont 
été édiclées par les lois dans le but de prévenir les i n c e n- 
vie't, ve  cove. -- • xm 

-- INCESTE 
d ie s. Les autorités municipales sont chargées de prendre 
à cet égard les arrStés nécessaires, et les contraventions à 
ces arrètés sont punies des peines de simple police. L'in- 
cendie effectué devient un crime s'il a été commis volon- 
tairement; mais il ne constitue qu'un délit s'il est le fait 
d'une imprndence. L'incendiaire est pnni de mort Iorsqu'il 
a mis le feu à des édifices, navires, bateaux, magasins, 
chantiers, habités ou servant ì l'habitation, qu'ils lui ap- 
partiennent on non, ou bien à des édifices servant à des 
réunions de citoyens. Sa peine est celle des travaux Iorcés 
à perpétnité lorsque les objets ci-dessns énumcrés ne sont 
pas habités et ne servent pas/ l'habitation, ou s'il s'agit de 
forëts, bois taillis ou rcoltes sur pied ne lui appartenant 
pas ; des travaux forcés à temps si en mettant le feu à des 
objets qui étaient sa propriété il a volontairemênt cansé un 
préjndice  antrui, ou s'il a incendié des bois ou des ré- 
colles abaltnsqni n'étaient pas fi lui ; de la réclusion, enfin, 
si les objets incendiés qni ont occasionné dn préjndice à au- 
trui étaient sa propriété. Dans tons les cas l'incendiaire est 
puni de mort s'il a cans6 mort d'homme. 
La menace d'incendie est pnnie de peines différentes 
suivant les circonstances dont elle est accompagnée. 
L'incendie des propriétés mobilières on immobilières 
d'antrni causé par l'état de vétusté, le déîant de répara- 
tion et de nettoyage des foars, cheminCs, etc., on par impru- 
dence, est puni d'une amende de cinquante francs au moins, 
de cinq cents francs au plus. 
Ontre les ponrsuites criminelles, les crimes et délis 
d'incendie penvent donner lien à une responçabilité civile. 
Le locataire répond de l'incendie, à moins qn'il ne prouve 
qu'il est arrivé par cas fortuit, force majenre ou vice de 
construction, ou bien qnïl a été communiqné par nne 
maison voisine. 
Si l'incendie d'une maison as.nrée arrive par la faute du 
propriétaire, la compagnie d' a s s u r a n c e n'est pas tenue 
des dommages cansés. 
L'antorité mnnicipale a le droit de faire abattre les édi- 
fices voisins du loyer d'un incendie pour en circonscrire 
l'Cendue, après avoir pris conseil des ingéuienrs et archi- 
tectes. Les propriétaires des immenbles démolis sont indem- 
nisés par la commnne ou par tontes autres personnes 
responsables. 
Tont in,livh]u qui se ref, se à prèter secours en cas d'in- 
cendie, après y avoir été requis, peut être condaranéà une 
amende desix à dix francs. 
INCERTAIN. l'oye: ÉQUIVOQUE. 
INCESTE (du latin inceMum). L'inceMe est l'union 
illicfle des sexes entre ascendants et dccendants légitimes, 
naturel» ou par alliance, parents an premier degré et entre 
frères et soe,]rs, parents au second degré. 
Une promiscnité universelle a sans doute existé à l'ori- 
gine de toutes les faces humaines ; et c'est encore aujour- 
d'hui l'ëtat de quelques peuplades sauvages de l'Aîrique et 
de l'Auslralie. Mais à mesure que les sociétés se formèrent, 
les sentiments de moralité triomphèrent des instincts bru- 
taux, et ces sortes d'nnions furent j,tges odieuses et exécra- 
bles. Les mariages entre frères et soeurs, cependant, se main- 
tinrent longtemps chez les nations primitives. Chez les 
liébrcux, par exemple, on est fondé/ croire qu'ils fnrent 
autorisés jusqu'fi la loi de lléise. Les anciens Perses se Is 
sont permis beaucoup plus tard, ainsi que les princes de la 
terre infatués de lent grandenr et de la pureté de leur sang. 
Quant anx rapporls entre ,m père et sa fille, entre un filset 
sa mère, leur immoralite et cent fois plus grande encore. 
L'infamie qui s'est attachée au nom d'oEdi p e et de quel- 
ques autres grands incestueux, heureusement bien rares dans 
l'histoire, en est une preuve éclatante. 
La morale, cette base immuable de toute société, inspire 
pour ces rapprochements une sorte d'horreur sainte. Qu'un 
re«pect salulaire ne maintienne plus les enfants de sexe dif- 
férent sortis du mème sang dans les limites de la pudeur; 
que l'espérance leur soit laissée de légitimer un jour par le 



$$0 INCESTE -- 
mariage les écarts auxquels leur réunion sous un même 
toit, dans un mème lieu, sans surveillance aucune, leur 
permettrait si aisément de se livrer, et l'on frémira du dé- 
vergondage précoce qui pourrait prendre naissance dans la 
• ociété ! 
Notre législation n'a pas compris l'inceste au nombre des 
crimes qualifiés, et son silence est éloquent comme celui 
du législateur athénien qui n'avait pas voulu prévoir le par- 
ricide. Elle ne s'en occupe qu'incidemment, à propos des 
attentats à la pudeur, et prononce alors la peiue des 
travaux forcés à temps contre l'ascendant qui s'est rendu 
coupable dece crime, s'il a été tenté ou consommé sans vio- 
lence sur un enfant gé de moins de onze ans, et celle des 
travaux forcés à perpétuité, Iorsqu'il a été teurWou con- 
sommé avec violence sur un enfant au-dessous de I'-,tge de 
quinze ans, ou lorsqu'il présente les caractëres du viol. 
/-lors ces cas, l'inceste demeure impuni. La loi semble avoir 
réservé toutes ses rigueurs pour les enlants incestueux : ils 
ne peuvent être ni Iégitimés par le mariage de leurs père et 
mère, ni reconnus, ni appeles à leur succéder. Comptables 
envers le législateur d'une faute dont ils sont le fruit inno- 
cent, ils n'ont droit qu'à des aliments. 
Avant la loi du 10 avril 182, les mariage entre beaux- 
frères et belles-soeurs étant prohibés d'une manière absolue; 
les enfants qui pouvaient naitre de leur commerce etaient 
classés au nombre des enfants ihcestueux. 
Les rëgles canoniques adoptres par l'Elise sont moins in- 
dulgentes que les lois civiles. Avant le deuxième concile de 
Latran, elles defendaient l'union entre parents jusqu'au sep- 
tième degré inclusivement. Ce concile ne fit porter cette 
prol,ibition que jusqu'au quatrième degré; néanmoins, I'E- 
glise accorde des dispenses pour le mariage entre oncle et 
niëce, cousin et cousine germains. Enfin, i'Eiise reconnaR 
encore un inceste, qu'elle appelle spirituel, dans l'union 
de personnes qui ont contracté une alliance spirituelle par 
le sacrement de baptême ou de la confirmation, etc., le 
père ou la mère de l'enfant baptisé et celui ou celle qui l'ont 
tenu sur les fonts, etc. 
Quelques Iégislations étrangères pun/ssent encore sëvère- 
ment l'inceste. Ainsi, en ts, h Copenbague, une iille de 
dix-huit ans tut condamnée/ avoir la tëte tranchée par la 
bacle, son corps à être brille ensuite et ses cendres jetees 
au vent, pour inceste commis avec son përe. Ncanmoins, 
ces sortes de senlences sont rarement exéculees. 
I.XCHBALD ( ]LISABE'I'n SIMPSON, mislress), l'une 
des romanctères qui dans ces derniers temps ont fait le plus 
d'honneur h la Grande-Bretagne, était la tiilœe d'un fermier 
du Suffolksbire. Elle naquit en 1756, et mourut le I er aoot 
182l,/t Kensington, prês de Londres, dans un état qui pa- 
raissait voisin de la misère. La siugularité de son caractere 
tait égale. à la variéte de ses talents. Ele clair femme, et 
méprisait la beauté dout l'avait douée la nature; malgré 
un défaut grave de prononciation, elle monta sur la scène. 
Actrice, elle vécut en philosophe ; généreuse dans sa con- 
duite, parcimonieuse envers elle-m/me, bumble et pie,se, 
elle joignait à une austerité bizarre le mepris des opinions 
du monde. Elle poussa la singularité jusqu'au csnisme, 
l'oubli des convenances jusqu'à la folie, et le désintéresse. 
ment jusqu'a l'héroisme. Quelques romans d'une delieatesse 
exquise, d'un sic'le pur et ferme, d'une grâce achevêe, que 
toute l'Erope a admirës et traduits, qui ont fourni des su- 
jets aux thé6lres de France et d'Allemagne, ont rendu son 
nom cdèbre. Elle a aussi donné quelques comédies agréables, 
des mémoires très-bien ëerils, une excellente collection 
d'œuvres dramatiques, aceompagnés de commentaires et de 
.noies ingnieuses. 
Sa famille était ruinée par des sinistres en commerce; et 
elle avait seize ans quand elle monta sur la scène, afin 
de soulager par ses benefices futurs sa mère et son père, 
qui languissaient misérablement. Elle voulait ëtre actrice, 
et dle était bègue I Comment prononcer les vers de Shak- 
peare devant un public peu indulgent? Élisabeth résolut de 

vaincre cet obstacle ; et elle en vint à boni en cnoisissanl 
dans le dictionnaire tous les mots de'la langue qui, par 
leur longueur, par la bizarrerie de leur prononciation, par 
le nombre des consonnes, lui offraient le plus de difficultés, 
et s'ayait à I répéter ns se. Richard Gfiflitb, 
directeur du thétre de otwieh, 6it chef d'une troupe 
asz bien mont. Ce fut h lui que s'adres miss Simpson ; 
elle reçut de lui d oenseils et d enoeuragements. Il éit 
jee enoere, et ses quafis aibl plurent  la débun. 
Le jeune oeur de miss Simpson s'émut pour Griffitb, et oe tut 
la ule psion de sa vie. D son enfanoe elle avait eu 
des habitudes d'ordre svères. Chaque jour efle écrivait nn 
résum6 de s actions et de s sentiment, et ce résum6 
s't oenseé. On y trouve un comp rendu de tous les 
mouvements de ce jeune cœur. A i'6que où elle connut le 
direeur de orsich, elle a grasWle nom de Griffith en 
lettr majuscules, ponctnC apr eque oeractère, oemme 
les icriptions des mpl romains, et plus bas  ve 
de Pope : « Chaque lettre de oe nom t harmonieuoe h mon 
oreii. ,, 
Au nfilieu de cet passion, un autre prétendant s'offrit. 
bi. Inchbald, acteur de profusion, étourdi, libertin, pro- 
digue, mais bon homme au fond. icrdGriffith ëit aimé, 
et ne parlait pas de mariage : miss Simpson accorda  
main h Incbbd. Cette rolution pénible IoE co0 quel- 
qu dooureux combah. En, elle dëbu, sans oblenir 
beaucoup de succès, par le réle de la Femme jalouse. Cette 
piéoe offre le tableau d'un fort mauvais, ménage; et oel«i 
de mistriss lnchbald fut détesble. le gagnait peu, et le 
mati dépensait beauoeup. Tou spirituelle qu'elle fàt, dle 
n'avait pas buoeup de talent pour i'a dramatique : le 
pubc ne l'acoepit pas, et le direcur lui acoerdait trës- 
peu d'argent. Eile fut forcëe un jour, faute de provisions, 
d'aller dans 1 envions dela ville, déterrer des navets pour 
nourrir son mari. Garde-made de oe derer, que la d6 
bauche exténuait, et qui gardait le lit, contrainte à touf[er 
le sentiment que Griflith lui avait inspir, elle  con 
avec une veflu et une force d'me admirables. Son mari 
mourut, elle devint auteur; c'étt M véritable destination. 
Timide et oboersatrice, elle avait beaucoup soulfert el 
soutenu avec broïsme la lutte de la vie. Elle avait étudid 
quelque-uns d meifieurs auteurs anglais; elle debuh par 
d draes asoez mal trign, mah pleins d'observations 
fines, et qui réussirent. Ensuite elle plia un roman inti- 
tulé : Simple histoire, qui la pla au premier rang d ro- 
mancières de tous les mps. Elle vint h Lon : tout le 
monde voulut la connaitre. 5Iiss E d g e w o r t b la rederda, 
et devint son amie; I « de Staèi l'appela à eBe, mais il 
y avait trop d'impétuosité, de pompe, d'éloquence, chez 
ce tribun féminin pour ne pas effaroucher strs lnch- 
bald. Cette actrice, devenue auteur h la mode, logeait au 
cinquième ge, faisait son ménage elle-m$me, et  irait de 
pain et d'eau ; i'argeut que lui rapporient s publioetions 
et son engagement de thtre était envoyéà de vieux paren 
infirmes, et à une jeune oeusine orpfieline et sans fortune. 
Sa premiëre affection tromp i avait i une vive amer- 
tume dans I'me. 
Le béros de mistrs Inehbald ont de la diité, sans 
manquer de ssion; de la véhemenoe, sans toper da 
l'emph. Creatures gracieus et pathétique% s bro 
rpirent, vivent et aiment; leur langue est simple, il a 
de la force, de la grhoe, de i'élanoe. L réles seeondair 
eux-mm ne fatiguent jamais le Ioeteur. L'me de mistr 
Inchbald  rpand dans tout s fietions et en anime I 
moindr dtour». On y reoennalt oette femme remarquable, 
sagaoe et passio, qui savait mallriser 1 mouvements 
de n oeuf et souffrir en siIenoe. Sa volonté était rigide 
et opiniâtre : de lb qudqae chose d'insociable et d'amer de 
la lutte constante qu'elle a soutenue oentre les évnemenh 
ci contre elle-méme. EUe a vaincu, mais avec douleur, ap 
nnlong et magnanime oembat. Coe Jn-Jaequ Rous- 
su, ms plus pure que lui, elle avait rit s Con/sions. 



LNCHBALD -- 
que le scrupule des iteurs a malheureusement détruites. 
Philarète CnSLS. 
INCH-CAPE. Voyez BELL-ROCa. 
INCIDENCE (de in, sur, et cadere, tomber). En mé- 
canique, c'est la direction que prend uu corps qui va en 
frapper un autre On appelle angle d'incidence celui que 
forme la direction d'un corps avec une ligne ou uue surface 
qu'elle rencontre. L'angle d'incidence est égal à l'angle de 
réflexion : aiusi s'énonce nne loi de pbysique, qui s'ap- 
plique à la lois au choc des corps et à la marchedes 
rayons lumineux et calorifique.s. 
INCIDENT événement fortuit qui sutwient au milien 
d'une affaire, d'une action, d'une entreprise, etc. Daus un 
poëme, dans un ouvrage dramatique, tout événement plus 
ou moins important, toute action particulière liée à l'action 
principale, prend le nom d'incident. Boileau avec raison 
dit : 
N'offrez point un sujet d'incidents txop chargë. 
Au palais, on nomme incident une contestation acces- 
soire qui s'élève dans le cours d'un procès. Par exemple, 
Iorsqu'une partie à qui l'on oppose une pièce demande la 
vérification d'écriture, elle forme une demande incidente. 
Les demandes incidentes se forment par un simple acte, 
renfermant les moyens et les conclusions et l'offre de com- 
muniquer les pièces justificatives : elles doivent gère toutes 
latinCs simultanément quand les causes qui leur donnent 
naissance existent en mëme temps, à peine d'gère privé de 
répéter les frais de celles qui seraient proposAes sparément. 
Les incidents sont toujours jugés au préalable s'il y a lieu, 
et dans les affaires où l'instruction écrite a été ordonnée, 
ils sont portés à l'audience pour y gtre statue. C'est grace 
aux incidents que la chicane sait rendre les procès inter- 
minables. 
INCIDENTS (Jours). Voyez CmsE. 
INCISE. Les grammairiens donnent ce nom, ou celui 
de cnmma, à une sorte de petite phrase formant un sens 
partiel et entrant dans la composition du sens total de la pé- 
riode ou d'un membre de période. On donne aussi le nom 
d'incise, dit Dumarsais, aux divers sens particuliers du 
stle coupé : Turen ne est raort, la victoire s'artCe, la for- 
tune chancelle, autant d'incises. 
INCISION. Ce mot, traduction littérale du substantif 
latin incisio, désigne la solution de continuité des parties 
moPes du corps humain qu'on pratique à l'aide d'instru- 
ments divers. Les incisions supposent toujours une çertaine 
profondeur due à l'action de lames tranchantes : telles sont 
celles des scalpels, des bistouris et des ciseaux. Si 
la division e,t très-superticieile et de peu d'étendue en lon- 
gueur, on la nomme coupure. 11 en est qu'on distingue 
aussi par le nom de scarification, etqui sont produites 
par un instrument particulier. 
Les chirurgiens ne sont pas les seuls qui pratiquent des 
incisions, et cette opération n'est pas toujours employée 
dans un bat thérapeutique. Chez plusieurs nations, on 
trouve la coutume établie, principalement pour les femmes, 
de se faire de semhlables blessures en témoignage de regret 
et de doMeur. Les Abyssiniennes, par exemple, s'incisent 
les retapes à la mort de leurs parent ou amis, et à cet 
effet elles laisseut croltre les ongles des petits doigts. Du- 
rant les guerres que diverses peuplades de l'Afrique se font 
entre elles avec un acharnement traditionnel, les incisions 
n'ont pas e temps de se cicatriser, tant les occa_ions de dé- 
plorer la perle des hommes sont fréquentes. Cette coutume, 
qui ne permet pas de feindre la douleur comme chez nous, 
date d'une antiquité très-reculfie; car on lit dans le Deut. 
ronome (xtv, 6), une injonction auxJuifsde s'en abstenir : 
« Tu nete décbirerns pas le visage par rapport à ceux qui 
sont morte. » D r CHARBONNIEB. 
INCISIES (De.nts). Vove 
INCITABILITE. Voyez Bow (John)et Exc[xx[or, 
EXçlTAniLITI. 

INCLINAISON 
INCIVILITÊ. t'ove'- Im,orrss et CIVILITÉ. 
INCLÉMENCE 
dit guère, selon l'Académie, que de I'nclœemence (pour la 
rigueur) de l'air, dt, temps, de la mson, et, en poie, de 
'inclmence des dieux. C'est Racine qui le premier a 
employé cette dernière locution. Voltaire, qui s'est servi d 
la mSme expression, a prétendu qu'il était ridicule à un 
historien d'écrire l'inclmence des ars, parce que le mot 
inclmence, étant une métaphore, devait treexclusivement 
consacré à la poésie. Mais l'emploi s'enest bien étendu depuis, 
puisqu'on dit maintenant l'incléraence comme la cldmence 
d'un roi, et que Delille, peu aventureux cependant aux 
yeux de nos contemporains, ose citer, dans son poëme de 
La Conversation, l'inclémence du Parterre. Le qualifi- 
catif inclment a lui-mSme obtenu droit de cité dans le 
Dictionnaire de l'Académie de 1835. 
INCLINAISON (du latin incli»mtio). En gométrie, 
ce mot exprime la position relative dans laquelle des lignes 
ou des plans se trouvent les uns par rapport aux autres 
ainsi, l'on dit qu'une ligue est inclinée relativement à une 
autre Iorsqu'elle forme avec celle-ci des angles inégaux. 
Pareillement, denx plans sont inclinés entre eux Iorsqu'ils 
forment des angles différant d'un angle droit. Une ligne 
qui rencontre un plan lui e«t inclinée toutes les fois qu'elle 
forme des angles inégaux avec les droits qui passent par son 
pied dans ce plan. 
INCLINAISON (Astronomie). Tous les corps célestes 
qu'on appelle pianotes ou satellites de planètes décrivent 
autour du soleil des orbites dont cet astre occupe l'un des 
foyers. Les plans de ces orbites sont tous plus ou moins in- 
clinës relativement à celui de i'éclipti que. Cette incli- 
naison des orbites planétaires n'est pas constante ; tant6t 
elle augmente, tant0t elle diminue : ces variations sont 
causées par les attractions que les globes qui circulent dans 
les espaces célestes exercent les uns les autres. 
INCLINAISON (Magnaisme). Une aiguille d'acier 
non aimantée et suspendue par son centre de gravité se 
tient horizontale; si on l'aimante, elle s'incline d'une ma- 
nière très-notable; dans notre bémisphère, le p01e austral 
s'abaisse au-dessous de l'horizon; c'est le contraire dans 
l'hémisphëre austral. On appelle inclinaison l'angle que 
fait l'aiguille ainsi inclinée avec l'horizon. La détermination 
de cette inclinaison exige plnsieurs opérations pour ëtre 
exacte. 
Comme il est possible que l'axe magnétique ne coincide 
pas avec l'axe de la figure, on fait,deux observations, dema- 
nière que chaque face de l'aiguille soit successivement 
tournée vers l'est et vers l'ouest. Cette double opération ne 
suffit pas encore, parce qu'on n'est jamais certain que l'ai- 
guille soit bien centrée, c'est-à-dire que l'axe de suspension 
de l'aiguille passe exactement par le centre de gravité. 
Pour corriger ce défaut presque inévitable, on renverse les 
p01es de l'aiguille par le moyen d'un fort aimant, et l'on 
prend de nouveau deux inelinaisons. La moyenne des 
quatre résultat est l'inclinaison véritable. 
On a beaucoup moins observé la boussole d'inclinaison 
que la boussole de d é c I in ai s o n. Voici à peu près ce qu'on 
sait sur ce sujet. 
te L'inclinaison varie dans le mme lieu avec le temps : 
en 1798, elle était à Paris de 68 o 51' ; en t810, de 680 0'; 
eu tSt8 de 8 ° 35, et en 1825 de 68 o. Elle était le 28 no- 
vembre 1850 de 66 ° 37'. Cette diminution dans lïnclinai- 
son est générale en Europe ; elle a été observée à Loudres, 
à Berlin, à Florence, etc. On n'a pas reniarqué de rétro- 
gradation depuis les plus anciennes observations. 
20 Si les observations faites dans ces dernières années 
se confirment, ce qui est probable, l'aiguille d'inclinaison 
subit, comtne l'aiguille de déclinaison, des variations dinr- 
nes et annuelles, et, d'après les observations des astrono- 
mes, la diminution annuelle de l'inclinaison serait sensi- 
blement de 3'. 
3o L'inclinaison augme'te à mesure qu'on s'éloigne de 



l'équateur pour marcher vers les p01es. Cook en a observé 
une de 430 45'  600 40 ° de latitude; le capitaine Philipps 
a trouvé l'inclinaison de 820 9' so la latitude de 790 
Le piine Par a observé des inclinaisons peu différentes 
de 90 ° vers 7 ° 5'.  mme navigatenr a  so tte la- 
tide et sous la longitude de I00o PextrmioE nord de l'ai- 
lle se retourner et se diriger vers le sud ; oe qui prouve 
que oet intrépide navigateur avait dpass le p61e mogné- 
tique de la terre. Le capiine Ross dans une lon{ude dif- 
férente a c trouver le p#le çnoetique vers 70" de la- 
litude. D'apr oe petit nombre d'obseations, on peut 
admettre que oe p01e n't p très-éloigné de oette latitude. 
C. Desnexz, de l'Académie de Scienoes. 
INCLINATION (en latin i,cli,ato, fait d'i,clinare, 
incliner, pen«her), lçe: 
INCLINE (Plan). l'oe: Pc »c. 
IN COENA DOMIXI. ou Bulle de la Cèe, la plus 
remarquable de ut I bulles, remoute, quant à sa 
çreère riaclio» à une époque fort reculée, noMmment 
au temps d'Urbain V, de l'an 1362 à l'an 1370. Benouvele et" 
mifiée par Pie V en Ib67, et par Urbain Vlll en 1627, 
elle oentient l'expos le plus complet de tous les droitqde 
l'Ëise et leur dëfense contre les princes temporel% I con- 
ailes et les laïques, avec l'cxcommunication solennelle et la 
médiction de tous les hréliques. Conformément aux dis- 
poeilions de Pie V, elle devait ètre lue chaque année, le jour 
du jeudi saint, dans toutes les élises ; nnmoins, h cause 
de la ristance qu'elle rencontra, non-seulement en Frace, 
où elle excita de grds troubles en 158, ais encore en 
Allemae et ailleurs, cee prescription ne put ëtre suivie 
qu'h Borne, oh jusqu'h oes deiers temps on en a fait 
lecture publique. 
INCOGNITO  adverbe italien, oé de l'adjectif 
t incogmtus, inconnu. Depuis longtemp% il s'est natura- 
lis en France, où il représente l'etat d'une personne qui 
se pren/e sous un çaux nom, ne pouvant se Ihire con- 
naltre pour des raisons paiculières, ou qui se présente sans 
se faire connaitre. Si d particuliers nous nous ëlevons aux 
rois et aux princes de souche souveraine, nous avouerons 
franchement qu'il nous serait très-difficile d'en donner une 
exacte définition. L'incognito royal ou princier n'est en 
effet qu'un soeret de convention, que personne n'ignore. 
Comment pourrions-nous dire ici que cet incognito est l'é- 
t.d'une pernne qui  veut point se faire connaitre, 
quand nous lisons h ce sujet dans tous les journaux 
,, S. M. le roi de..., S. A. B. le duc de... sont arrives à Paris, 
incognito, sous le nom du comte de... et du baron de... 
Et les honneurs royaux ne [ont jamais défaut h ces illus- 
tres inconnu dont tout le monde sait le nom. 
INCOLAT (Droit d'). On appelle ainsi, dans quelques 
Ë modernes, le droit accordé par le souverain h certains 
etrangers, en veu duqoel i louissent d mèm prroga- 
tiv civiles et politiques que les indigène. 
ICOLOE (de in, san% et color, couleur). Toute 
ubstanoe marielle qui ne peut réfléchir aucun des sept 
rayons du spectre solaire est dite incolore. L'eau pe, 
plusieurs cristaux sont incolores. L corps noirs devraient 
bure rgés dans la classe des ncolores, puisqu'ils ne - 
Iléchissent aucun des rayons colorés du soectre. éanmoins, 
nous oesons qu'ils sont de couleur noire. 
INCOMBUSTIBLE' (du latin in, pris comme né- 
tion, et comb'ere, brOlr). On a cru Ionemps qu'un 
grand nombre de substanc n'étaient point.suscepfibles de 
brOler, que, par exemple, l'eau, les terres, les alcalis, avaient 
cette propriété; mais la chimie moderne étant parvenue 
décomposer c substances, on a reconnu qu'elles éent 
formes d'élémen qui avaient la proprité de se combler 
avec l'oxygène, et qu'en leur enlevant ce dernier principe 
efles devenaient combustibles ; l'eau, par exemple, étant 
une combinaison d'ox'gène et d'hydrogène, si on lui retire 
le premier de ces êlmen, l'autre devient combustible. 
On.rend le bois, les tissus, pl ou moins oepables de 

INCLINAISON -- INCOMMEtSUttABLI 
résister  l'action du feu en les imbibant de certaines ma- 
tières, telles que le sel marin, etc. Durant des s/ëcles, on a 
cru que l'amian te était inattaquable par le feu, et qu'une 
toile formée de filaments de cette pierre était incombus- 
tible : des expériences faites avec soin et sans préjugés ont 
appris que cette matière exposée au feu pendant un temps 
suffisant s'y décomposait comme toutes les autres matiëres 
solides." 
Certains individus, voulant sans doute exploiter la crédu- 
lité publique, se sont fait passer pour incombustibles, depuis 
les prêtres du temple d'Apollon snr le mont Soracte jus- 
qu'aux contulsionnaires du diacre Paris. Toutes/es mytho- 
Io#es font mention d'êtresdous de la facult* perpétuelle ou 
temporaire de traverser les flammes sans aucun danger 
pour leur personne. La science est forcée de reconnaltre 
qu'il est des hommes qui peuvent supporter sans inconvé- 
nient des températures trs-élevées, comme celles de cer- 
tains fours ; mais au delà, elle ne voit que dt» charlata- 
nisme plut ou mnin babilement déguls. 
INCOME-TAX ou Taxe sur le revenu, imp6t anglais 
déjà essa5é en t70, puis abandonné pour être repris par 
Pitt en 1798; aboli en 180, il fitt remis en vigqeur en 1803, 
et dura jusqu'à la tin de la guerre. Les besoins de l'Ëtat le 
firent revivre en 18-5. B. Peel le fit rétablir pour avoir le 
moyen d'effectuer la révolution commerciale à laquelle il 
a attaché son nom. L'income-tax devait être permanent, 
et ne fut roté que pour trois ans, cinq ans, dix ans; 
et la guerre que soulientJ'Angleterre en ce moment est venue 
l'aggraver et ajourner indéfiniment /'époque où on pourra 
cesser de le percevoir. 
Cette taxe est prélevée sur toutes espèces de revenus, 
soit qu'ils procëdent des propriétés foncières, des hypo- 
thèques, des fonds publics, soit qu'ils dérivent des char- 
ges cléricale, publiques, privées ; soit, enfin, de l'industrie 
en g,néral. Les revenu« provenant de l'étranger ne sont 
»as exempts de cette contribution, et il suit d'ètre rsi- 
dant des ries Britanniques et de jouir d'un revenu quelconque, 
s'Cevant au moins à t00 liv. sterling, pour y être sujet. 
Afin de remédier à l'impopularité de cette taxe inquisito- 
rime, qui donne au percepteur le droit d'examen des livres, 
papiers et titres du contribuable, dans le cas où il ne se- 
»-ait point satisfait de la somme déclarée, le gouvernement 
accorde aux négociants, marchands et industriels, en gé- 
néral, la latitude de composer avec les fonctionnaires pré- 
posés à cet effet, pour une somme déterminée, pendant 
un certain nombre d'années. A cette condition, l'abonné 
écbappe / cet espionnage légal, en payant régulièrement 
cl,aque année la somme convenue. Cette taxe inique pè 
le plus lourdement sur les contribuables  revenus limité.s, 
et met à la merci des employés du gouvernement le sec'cet 
des opérations de tous les hommes exerc, ant t,ne profes- 
sion ou un métier. Il fallait que ce ftt l'Angleterre, cette 
terre classique du respect à la loi, qui conçùt et exécutdt 
ce plan de contributions pour qu'il naq,tlt vialde. La per- 
ception ,les eontributions indirectes en France, 
contre laquelle la population n'a cessé de s'élever, est bien 
éloignée dq caractère odieux de ce mode arbitraire, in- 
quisitorial et souvent partial et injuste, de déterminer la 
quotité de la taxe à imposer. 
INCOMMENSURABLE IRRATIONNEL, expres- 
sions opposées, l'une à commensu table, l'autre à 
r a t i o n n e l. Une grandeur est dite .inco»mensurable 
)af rapport ì une autre qumd elle n'a pas de commune 
me»ure ave celle-ci, c'est-ì-dire quand il n'existe attcune 
grandeur de mëme nature qui soit exactement contenue. à 
la fois dans l'une et dans l'autre. Supposons deux droites 
limitées, A et B, et cherchons leur plus grande Commune 
mesure ; admettant que A soit la plus grande de ces droitcs, 
nous portons B sur A atttant de fois que laite se pourra: 
si cette opération ne laisse pas de reste, B est la Iongnt.or 
cherchée; autrement, on porte le reste R sur B, comme 
on a porté B sut" A, s'il .* a un nouveau rete R', on le pot- 



INCOMMENSURABLE -- INCONSËQUENCE 

fera a son tour sur R de la méme manière, etc., exécutant 
ainsi avec des lignes les opérations qu'exige la recherche 
du plus grand commun diviseur en arithmétique. 
Mais en continuant il peut se faire que l'on arrive à des 
restes assez petits pour que l'imperfection de nos instru- 
ments ne nous permette pas de pousser plus loin; on reste 
donc dans l'incertitude sur le résultat final. Le raison- 
nement doit alors intervenir, et nous faire savoir si 
cette recherche est susceptible de se terminer. On 
trouve alors, dans un grand nombre de cas, que les 
lignes que l'on considère n'ont aucune commune mesure; 
tels sont la diagonale et le c)té d'un carré, ou encore 
le rayon d'un cercle et le c6té du triangle équilatéral 
inscrit, tic. 
Si, au lieu des andeurs elles-méoEes, on considère les 
r, ombres qui les représentent, on constatera plus facilement 
encore leur incommensurabilité. Dans les exemples que 
nous vendus de citer, le diagonale est au coté du carré 
comme V'. est à 1, le cté du triangle équilatéral est au 
rayon du cercle circonscrit comme V'3-est ì 1. Or, les nom- 
Ores V', V'g, sont incommensurables ( sous-entendu avec 
l'unité). On démontre en effet que si la racine de deré 
quelconque d'un nombre entier n'est pas elle-mme uu nom- 
bre entier, elle ne peut ttre exprimée par un nombre frac- 
tionnaire, et si on exécute l'extraction de cette racine, l'o- 
pCation ne se termine pas ; on trouve une expression aussi 
approcbée qu'on le veut, sans jamais atteindre la valeur 
exacte. Bemarquons qu'il ne faut pas confondre les nombres 
qui résultent de ces opérations a'ec les quotients de divi- 
sions qui ne se terminent pas ; ces derniers nombres se 
composent aussi d'une infinit de d('cimales ; mais ils se dé- 
veloppeut en ff a cri o n s périodiques, et d'ailleurs on peut 
toujours compléter leur valeur ì l'aide d'une fraction or- 
dinaire. Aius|, de ce que -, reduit en déchnales donne 
0,33333... à l'infini, il ne faut pas conclure que  soit incom- 
mensurable : ce nombre infini de décimales ne provient que 
de la base du système de numération dans lequel on 
opère; au contraire, V', V':, etc., ne peuvent Atre exac- 
tement exprimées dans aucun système. 
Les 1 dg a r if h m e s des nombres commensurables autres 
que les puissances ou les racinesdela base sont incommeusu- 
tables. On prouve quee (désignation habituelle de la base 
«les Iogarithmes népériens), que  (rapport de la c i r c o n- 
ftrence au diamètre), sont des nombres incommen- 
surables. 
En arithmétique, incommensurable et irrationnel se 
disent indilféremment l'un pour l'autre. En algëbre, irra- 
tonnel qualifie plus spécial¢ment les expressions radicales 
dont on ne peut obtenir la racine algébrique. Ainsi, l'équa- 
tion x ÷ v/v --- 6 est irrationnelle par rapport h x; ce- 
pendant sa solution est x  4 ; et quand on substitue cette 
valeur, on trouve pour l'exlrression irrationnelle V', la 
valeur 2, qui est commensurable. E. 
INCOMPATIBILITËo C'est l'impossibilité qu'il y a, 
suivant les lois, de réunir chez le mme individu deux ou 
plusieursqualités ou fonctions. Une incompatibi[ité qui dérive 
te la distinction des pouvoirs est celle qui existe entre les 
fonctions administratives et les fonctions judiciaires; par une 
cause analogue, e servicede la g a r d e n a t i o n al e e.t incom. 
patible avec les fonctions de .ceuxà qui la loi accorde le droit 
de requérir la force publique. D'autres incompatibilités sont 
fondees sur la hiérarchie des fonctions, sur l'impossibilité 
rée]le de suffire à la fois à deux emplois, enfin sur des raisons de 
convenance.: telles sont celles des fonctions de j uré avec 
celles de ministre, de préfèt, de sous-prefet, de juge, de pro- 
cureur général, de procureur impérial, de substitut et de 
mimstre.d'nn culte quelconque, celles qui limitent l'exer- 
cire de la profession d' av dent. 
Le mandat de député au corps législatif est incompatible 
avec toute fonction rébibuée Le pensionnaire rétribué qui 
est Cu député est réputé démissionnaire de ses fonctions 

par le seul fait de son admisswn comme membre du corps 
législatif, s'il n'a pas opté avant la vérification de ses pou- 
voirs. Tout député est réputé démissionnaire par le seul fait 
de l'acceptation de fonctions publiques salariées. 
L'article 28 de la constitufione 1848 établissait le méme 
principe à quelques exceptions CumCées dans la loi orga- 
nique électorale du 15 mars 189. Sous la monarchie cons- 
titutionelle, il y avait incompatibilité entre les fonctions de 
député et celles de préfet, de sous-préfet, de receveurgé- 
néral, de receveur particulier des finances et de payer. 
Les officiers généraux commandant les divisions ou subdi- 
visions militaires, les procnreurs généraux,/es procureurs 
du roi, les directeurs des contributions directes et indirectes, 
de« domaines et enrestrement et des douanes ne pou- 
vaient tre élus par le collége électoral d'un arrondissement 
compris, en tout ou en partie, dans le ressort de leurs furie- 
flous. L autres Ionctions publiques salariées n'étaient 
pas absolument incompatibles avec celles de député. Mais 
leur acceptation entrainait de droit la démission du député 
crut pouvait Cre réélu. 
En morale, on dit qu'il y a cornpatibi?itd ou incornpati. 
bilitd entre certaines humeurs, certains esprits. L'incompa. 
tibilitd d'humeur a servi pendant un temps de cause suffi- 
sante pour réclamer et luire prononcer le d i v o r c e. 
IXCOMPÉTEXCE, défaut de eu mpdte»ce. Il ya 
incompétence Iorsqu'un juge ou un tribunal n'a pasle pou- 
voir de juger une contestation. Il y a deux sortes d'incom- 
pétenoe : lïncompétence à raison de la matière, Iorsqu'on 
porte devant un juge une affairequi n'est pas dans ses attri- 
butions; l'incompétence à cause de la personne, lorsque 
les parties ne sont pas, à raison de leur domicile, par 
exemple, justiciables du juge devant lequel l'action est in- 
teurC. 
L'incompéteuce fs raison de la matière peut étre proposée 
en tout état de cause; les juges eux-reCes doivent dans 
ce cas ordonner d'office le renvoi, quoiqu'il n'ait pas été 
demandé. Celle à raison de la personne doit l'Cre préala- 
blement h toutes autres except ton s et délenses. Elle est 
couverte par la défense au fond. 
Relativement  un fonctionnaire public, l'incompdtence 
est aussi la négation du pouvoir de faire tel ou tel acte qui 
n'est point de son ressort : c'est dans le méme sens que l'of- 
ficier civil est incomp.tent à prononcer le mariage dans 
toute autre commune que celle où il remplit les fonctions 
d'officier civil. 
|NCOMPRESSIBILITÉ (du latin in, non, et coin. 
primere, comprimer). Voilez COMPBE.¢IBILITÉ. 
INCONNUE, nom que donnent ordinairement les ma- 
thématiciens à la quantité dont on cherche la valeur dans 
la solution d'un problème (vo!le: Do/es ). 
INCOXSÉQUEXCE manque d'accord entre les prin- 
cipes, les opinions et la conduite. On appelle souvent in- 
cuisCue»te une action qui compromet la personne qui I'a 
faite. Tous les hommes sont plus ou moins inconséquents 
par nature ; car il en est très-peu qui osent professer l'a- 
mour du mal, bien qu'ils le commettent. L'inconséqu¢nce 
est uue suite de la faiblesse humaine, digne de pitié et de 
miséricorde, quand les actes en sont rares et qu'ils excitent 
la confusion; elle ne mérite que du mépris Iorsqu'elle est 
le résultat d'une vanité qui, sans examen, s'élance pré- 
somptueusement dans une carrière dont elle n'a point me- 
suré l'Cendue. On est forcé de reconnaitre que les lois sont 
inconsëquentes lorsque les mœurs d'un peuple les rendent 
à peu près impraticables. On trouve encore beaucoup d'in- 
conséquences dans plusieurs institutions peu en rapport 
avec les devoirs, les droits et les besoins de l'homme;.et 
c'est peut-être de l'inconséquence que dérivent les plates les 
plus graves des sociétés modernes. 
- On confon] parfois l'inconséquence avec la légèreté et 1'é - 
tourderie; elle en diffère par le caractère attribué h ce. 
lui qui la commet. Les sui{es" de l'inconséquence sont la 
déconsidération. On se préserve et l'on secorrige de rincon- 



34 II C031SÉOUEIICE 
séquence en se défiant de soi-mme, et en ne se hîtant ni 
de parler ni d'agir. C' E BnL 
INCONSTANCe. C't la mobilité et la légëre réu- 
nies : Pinconstance est le propre de ceux qui marchent au 
hasa, n'ayant pour moeurs que les pric qui leur 
passent par la lte. Elle çapplique h tout, aux chos les 
plus grav comme à II de minime imposante, et 
nous devons dire ici que le peuple franis 'est p de tous 
le moins inoensnt, si ttefois la palme ne lui apparient 
point en propre us ce rappo. En amour, l'inoetance 
est une ppe«sion au chgemen{, entratnant l'homme à 
voltiger de belle en belle, comme le papillon de fleur en 
fleur, au dire de feu Dorat. Appliquée aux fanisies du 
goOt, l'inconce constitue ce que nous sppelons  m o d e: 
la ileUe recherchée aujourd'hui sera dédaign demain 
pr notre înconsnt bu xe. Eu politique, l'inconstance 
est l'apane d'un oeractère faible et impressionnable ; elle 
constitue les innentes varit de la girouette : l'in- 
constant adopte ajourd'hui sans concfiou l'opinion qu'il 
combatit hier de mme, et à laquelle il reviendra demain 
pour un jour seulement; sa versatiIitf, à lui, n't le fruit 
ni de l'ambition ni dela rruption ; c'est tout simplent 
l'indioe d'une ianation vive et obile. 
INCONSTITUTIONNALITÉ  quali{é d'un acte ou 
d'une opinion oentraire à la constitution. Aux termes de la 
c o n s t i tut i o n de 1852 le s  n a t doit s'opser à la pro- 
mulgat,on des lois contrair ou qui raient atteintes 
la constitution. 
INCONTINENCE (Morale, Hçgièe) abus 
plaisirs de l'amour; mais quelle est la limite qui sépare l'u- 
sage de l'abu ? Grande qution, qui intéresse à la fois la 
morale, l'hyène, et mme l'co«omie sociale et politique. 
Sous le rappo moral, la limite de la continence t 
fixée d',memanière invaable et serine. Dans l'ét de 
age, il n'y a pas d'inoentinence morale; mais hors les 
liens cosacrés par la loi et la religion, les deux oexes ne 
peuvent pas avoir de rappo intim sans incoutinenoe. 
Il n'en est pins de mme sous le rap de l'hyène : ici 
la limite de l'ue et de l'abus devient incertaine et 
fiable; elle est loin d'¢e la mme pour chaque individu, 
elle est bien différente pour les deux sexes. Ge qui est 
tinence pour les u t incontinece pour les au. Il 
a plus de rle génrale, il faut que chacun s'en crée une 
particulière. Et pouvant, de la svère ohoervaon de cet 
règle d'hygiène dpendent la santé, la vie, souvent 
encore, l'luiCrilWet l'énergie des facultés intellect,elles et 
morales. Les plaisirs de l'amour sont sous l'empire de deux 
causes, les sens et l'imagination : toutes les fois que les sens 
seuls donnent l'éveil, on t prque toujou dans les li- 
mit de la continence; mais si le désir riait de l'imagination, 
il faut se tenir sur s gardes; oer eUe agit souvent à la 
légère, sans consulr les forc de l'conomie. Les résul 
de l'incontinence sont toujours fcheux, et quelquefois ter- 
gbles. ous ne parlons pas seulement d résul moraux, 
mais enoere de ux Çi intéresnt la san. 
.-P. 
INCONTINENCE (Mdeciae). Dans le langage mé- 
dil, ce mot ne s'appUque guère qu'à l'expulsion involon- 
taire d matières excrémentielles, le plus souvent l'urine 
quand celle expulsion rsulte du relchement du sphineter. 
L'incontinence d'urine est plus commune chez les enfants 
que chez I adultes, chez les rçns que chez les filles. 
L'époque de la pubeé est souvent le signal de la 
fin. Toufois, l'a ne rte pas dsarmé devant cee 
a[[fion; il trouve des seoeurs dans l'emploi de la noix 
vomique, des cantharides, de l'ëlectrici{é. Mais avant de re- 
courir h  moyens nergiques on devra essayer des exer- 
cices nmastiques et d'une nourriture suhsUntielle et 
lèoement stimulte; pour la nuit un lit un peu ferme, 
our le jour des vëtements propres à exciter latranspition, 
compltent les mur hygiénique, qui la plupart du 
temps amèneront la cessation de lïncontinence d'urine. 

INCORPORATION, iittéralement, union, 
d'un corps à un autre. Ce -ot s'applique spécialement aux 
corps politiques, ecclésiasiiques et mi|itaires : on incorpore 
un peuple à un autre peuple, un chapitre à un autre cha- 
pitre, un réçment à un autre rément, une province à 
une autre province. En droit, incorporation se dit d'une 
chose qui s'unit  une autre d'une manière tellement in- 
time, qu'elle ne murait plus en erre séparëe. L'incorpo- 
ration est un mode d'acquérir la propriété par acces- 
sion : tout ce qui s'unit et s'incorpore à la cho princi- 
pale appartient au propriétaire, et le Code Civil a régld 
assez longuement les rëgies de l'incorporation. 
INCOP, P, UPTIBLE  ce qui n'est pas sujet à c o r r n p- 
tion. 
Ce nom a aussi été donné à un parti d'Eutychiem op- 
poséà celui des corrupticoles. 
INCRÉDULE, INCRÉDULITÉ. Si la crddu li t œe est 
la facilité à croire toutes sortes de faits, l'incrédulité a un 
sens moins étendu, et ne se dit Euère que du defaut de 
croyance religieuse. Il peut arriver, comme l'expérience l'a 
plus d'une fois démontré, que l'incrédule soit en bien 
d'autres points d'une crédulité complète. Entre la crédu- 
lité superstitieuse, qui admet sans examen jusqu'aux choses 
les plus absurdes, et l'incrédulité opiniître, qui rejette jns- 
qu'aux preuves les plus convaincantes, il est un milieu, la 
fo i, qui en nous recommandant de nous teniren garde contre 
la doctrine des hommes,toujours exposéeà l'erreur, demande 
une confiance aveugle pour tout ce qui est foudé sur le tf- 
moignage de Dieu. L'incrédulité, dit-on, est la marque d'un 
esprit indépendant; elle natt de ce droit naturel à chaque in- 
dividu d'eaminer et de choisir dans sa croyance ce qui con- 
vient à sa raison. Nous passons ce prétendu droit, dont bien 
des hommes seraient fort embarrass, et nous aimons à 
croire que si l'on en faisait vraiment usage, il serait non 
la sot rce mais le tombeau de l'incrédulité. Il est en effet 
difficile à celui qui suit attentivement et sans prévention 
l'enchanement des preuves qui atstent la vérité de la reli- 
gion, de n'tre pas convaincu. « J'ai cru, disait La Hape, 
parce que j'ai examiné; examinez comme moi, et vous croirez.» 
Mais examiner, c'est un travail qui demande du temps, des 
soins, qui snppose des connaissances; il est bien plus facile 
et bien plus commode de ne rien croire  il ne faut pour cela 
ni talents ni étude. On sait le proverbe : Plus aegaret asi. 
nus quitta negaret philosophus. Ce proverbe n'est pas ici 
sans application : sourire au seul mot de religion t en pai|ër 
à tort et à travers, donner des assertions pour des preuves, 
des plaisanteries pour des arguments, répéter, bien mi mal, 
quelques objections de Voltaire ou de [ousseau, c'est là 
toute la science de bien des incrédules. Il eu est rtain* 
ment qui ne sont pas dépourvus d'érudition, qu'on peut 
mme dire très-instruits; mais en fait de religion leur sa- 
voir se réduit  peu de chose. 
L'homme ne nalt pas incrédule, il le devient : tant que 
le cœur est pur, l'esprit est docile; mais dès que les pas- 
sions ont élevé la voix, dès qu'elles ont pu nous porter à 
dsirer que la loi de Dieu f0t un préjugé, ses menaces une 
chimère, alors les doutes commencent. Un Dieu juste et sé- 
vère, qui voit le fond des cœurs, qui réprouve toute pensée 
criminelle, un Dieu qui réserve des supplices sans fin 
comme sans mesure à quiconque s'écarte du se0tier de la 
vertu, c'est une croyance qui gne celui qui voudrait se 
laisser aller à tous ses penchants et s'abandonner à tous 
ses désirs. Un cœur gîté ne s'accommode guère de Dieu 
ni de la justice. Et l'on croit fermer cet oeil scrutateur, 
teindre ces flammes vengeresses, en les niant'. Du moins, 
on cherche par.là à calmer quelques inquiétndes, à étouffer 
quelques remords. L'abbé C. 
INCIÉMENT. Taylor, Emerson et quelques autres 
malbématiciens anglais ont donné ce nom an changement 
de -alcur d'une quantit variable. C'est ce que Lacroix ap- 
pelle simplement difJ¢rence. On doit àTaylot ,n traite 



INCP, ÉMENT -- 
sur cette matiëre, intitulé : Methodus incrementorum di- 
recta et inversa ( Londres, 1717 ; in-4"). 
|NCROYABLES MERYEILLEUSES. Par une de ces 
réactions qui ont dans le caractère français, /l la som- 
bre tristesse qu'avait répandue le système de la Terrenr 
succéda, sons le Directoire, une sorte d'épidémie de dis- 
sipation et d'extravagances. Elle s'accrédita chez les jeunes 
gens qui s'étaient arrogé le monopole du supréme bon 
ton, depuis le choix du costume jusqu'aux formes dit lan- 
gage. De longues tresses de cheveux, tombant sur les épau- 
les, et que l'on nomma oreilles de chien ; un peigne d'é- 
caille relevant derrière la ttte des cheveux dont n'approchaient 
plus les ciseaux, trop vulgaires, et qui devaient tre coupés 
avec un ravir; des redingotes trës-courtes, avec des cu- 
lottes de velours noir on vert, tels furent les signes princi- 
paux auxquels on reconnut les élégants du jour. Leur 
manière de prouoncer les mots ne les signalait pas moins 
par a singularité et son affectation. La lettre r était tombee 
dans leur disgràce: ces messieurs, qui avaient doss 
notre langue, ne donnaient que leur paole d'honneu, 
leur petite paole; et leur racontait-on quelque chose qui 
les étonnait, ils s'Criaient : « C'est incoyable ! » Ce fut cette 
habitude qui leur fit donner dans la société le nom d'in- 
croyables, tandis que la classe plus wdgaire les appela 
des muscadins. En grande toilette, l'incroyable devait rem- 
placer sa redingote courtepar un habit à taille carrée et 
a grands revers; un chapeau claque d'une dimension mons- 
trueuse se gtisssait sous son bras, et ses souliers pointus rap- 
pelaient les chaussures à la 2oulaine du moyen àge. Les 
salons de Barras, le moderne régent ; ceux de M'e Tallien, 
le lycée-bai de i'htel Thelusn, tels furent les principaux 
lieux de réuuion de cette jeunesse dorée. On y voyait figu- 
rer, avec les beaux danseurs du temps, les Trënitz, les 
Lafitte, un certain nombre de jeunes gens, dont les noms 
aristocratiques avaient eu dans l'ancien régime plus d'un 
autre genre d'illustration. On y remarqua souvent un homme 
/l qui ne devait guëre coùter une extravagance de plus, 
le vieux duc de Lauraguais, imitant, outrant mème le bi- 
zarre costume et l'inintelligible goui!!ement de ces jeunes 
fous. 
On pense bien que nos élégantes de 1797 ne resterent 
pas en arrière de leurs cavaliers: leur toilette fut em- 
pruntée h l'antiquité paienne; les manteaux, les costumes, 
les tuniques à la 9recque, composèrent principalement leur 
parure, et le nom de merveilleuses, qui leur fut donné, lent 
sembla moins une expression railleuse qu'un hommage in- 
volontaire rendu à leurs attraits et à leur go0t. Quelques- 
unes, voulant se faire remarquer davantage, joignirent à 
l'adoption de ces costumes «les bizarreries qtli prètërent 
Ioeaucouph la critique. La reine des merveilleuses, madame 
Tailieu, imagina d'orner de bagues de prix les doigts de 
ses pieds, laissés " nu : ceci n'était encore qu'une folie; mais 
plusieurs de ces dames, rendant leur toilette, en quelque 
sorte plus indécent qu'une entière nudité, ne craignirent 
pas de se montrer, dans nos promenades et nos jardins 
biles couvertes seulement de gazes transparentes, de robe. 
si legères, si diaphanes, qu'on pouvait les nommer de 
l'air tissu. Le public s'en trouva scandalisé, et une ré- 
probation générale s'éleva contre ces ultra-merveilleuses, 
qui furent contraintes d¢ renoncer h ces audacieuses inno- 
vations. A cette époque, on vit aussi plusieurs parvenues 
du jour, dont la fameuse madame Angot offrait la charge 
burlesque, se travestir en merveilleuses, et porter les sè- 
tements grees avec une risible gaucherie : celles-là dii 
noins se bornaient h Cre ridicules. Carie Vernet, dont 
on a dit avec jusiice : 
Il fit de ses caricaturc, 
Les épigrammes du dcbsin. 
ebtint un succès populaire dans celle, où il représenta les 
Incroyables et les Me»'eilleu.,es : c'est une des meilleures 
productions de son pinceau satirique. Ovm-. 

INCUBATION 
INCRUSTATION (de in, dans, et crusta, croùtc}. 
Par ce mot on désigne les ornements qu'on forme sur 
des meubles, des ouvrages de tabletterie, etc., en intro- 
duisant et fixant dans les creux pratiqués sur leurs surfaces 
des découpures d'ivoire, de cuivre, d'ébène, etc. L'art 
d'incruster est fort ancien : on le pratiquait dans le sei- 
zième et le dix-septième siècle avec le plus grand succès. 
On trouve encore des meubles et des armes de ces époques 
qui en offrent des exemples admirables, tant pour la bcauté 
du dessin que pour la délicatesse des matiëres incrustées. 
Les découpures qui doivent ttre incrustées se font le plus 
souvent au mo}en d'une scie très-mince et très-étroite, 
avec beaucoup de célérité. La colle, les masties, qu'on 
emploie pour fixer les incrustations, suffisent pour remplir 
les rides produits par les traits. 
On donne aussi le nom d'incrustations aux déptts que 
forment sur tous les corps qu'elles rencontrent certaines 
eaux char#es de matière calcaire. Ces incrustations, tantét 
cristalines, tanttt compactes, ne doivent pas tre conlou- 
dues avec les pétrifications. L'eau d'Arcueil nous en offre 
de nombreux exemples. Mais les plus remarquables en 
France sont ceux que fournissent les fontaines de Saint- 
Ailyrre, près Clermont, de Véron (Yonne), et de Car- 
jac (Lot). Les incrustations qui se forment sur les parois 
des c h a u d i è r es " vapeur peuvent parfois occasionner leur 
explosion. 
INCUBATION (de in, sot, cubare, se couclier). On 
appelle ainsi l'acte par ieqmi les oisea u x, excitaut, au 
moyen de la chalenr de leur corps, le principe vital dugerme 
de leurs œufs, font cro|tre le poulet dans i'«uf, jusqu'a 
ce que, ayant consommé toute la substance dt jaune et du 
blanc, il casse sa coquille et en sort assez fort pour pou- 
voir marcher et manger. Tout œuf, pour ètre utilement sou- 
mis à l'incubation, doit avoir été fécondé par le mile : c'est 
lui qui place dans le germe l'clément de lavie. La chalenr de 
l'incubation altère très-promptement le blanc et le jaune des 
œufs non fi.condés, les rend ce qu'on appelleclairs, punais, 
tandis qu'elle ne decompose pas ceux qui le sont. A la mire, 
un œuf non fécondé parait clair et ns tache ; l'oeuf germC., 
an contraire, présente une tache plus ou moins opaque : c'est 
l'embryon non développé. Quand l'oeuf a passé bois ou 
quatre jours sous la poule, l'embryon a déjà pris un cer- 
tain accroissement. Aussi est-il bien plus lacile de distinguer 
alors les œufs Iécondés de ceux qui ne le sont pas. On retire 
ces derniers du couvoir : ils sont encore bons fi manger 
sans inconvénient. Les œufs qui ont un vide considérable 
sont trop vieux pour tre couvés : on doit les rejeter. 
Il est toujours trës-possible de substituer des œufs d'un 
autre oiseau domestique h ceux d'une couveuse : ainsi, on 
fait couver des œufs de canne / des poules, afin que les 
premiëres pondent plus longtemps. Les dindes ayant plus 
de volume que les poules, il est avantageux de leur faire cou- 
x er des œufs de celles-ci, attendu qu'elles sont d'exceilente 
couveuses, et qu'elles peuvent en couvrir un plus grand 
nombre que les poules. 
On reconnait qu'une femelle a le désir de couver ì une 
espèce de cri appelé 91oussement, à i'inquiétude qu'elle 
montre danssa de.marche, au hérissement de ses plumes, etc., 
et surtout à la ténacité avec laquelle elle se tient dans le nid 
où elle a coutume de pondre, mëme quoiqu'il n'y ait pas 
d'œufs : c'est le moment, si on le désire, de lui donner des 
œufs à couver. 
Les femeiles des oiseaux sont en général plus exposées 
à devenir la proie de leurs ennemis pendant le temps de 
l'incubation que dans toute autre circonstance 
la nature leur a donné l'instinct de déposer et de couver 
leurs œufs dans des lieux aussi retirés, aussi cachés que 
possible. Les oiseaux domestiques sont ordinairement 
couvert de ce genre de destruction. On place les couveuses 
dans un lieu isolé, dans lequel règne une faible lumière, 
éloigné de tout bruit, et inaccessible aux citiens, aux chats, 
aux rats, etc. Il ne faut pas mettre plusieurs ¢ouveuses, 



soit de mtme espèce, soit d'espece différente, dans un mtme 
local, à moins que chacune d'elles ne soit isolée de tous ctés 
par une cloison. Les femelles des oiseaux domestiques éta- 
blissent leur nid sur le sol mme ; elles le composent avec 
bien moins d'art et de perfection que la plupart des femclles 
des espèces sauvages. Après avoir Iormé avec tes matières 
«lui se trouvent à leur portée une sortede demi-boule creuse, 
elles en garuissent l'tutCieur avec des plumes qu'elles s'ar- 
rachent du ventre. On épargne une partie de ces soins h la 
couveuse en formant soi-mme un nid dans un panier de 
lutine et de grandeur convenables, dont on garnir l'tutC 
rieur de loin ou de paille froissée avec les mains. Dans tous 
les ca% te nid doit tre ptaoe dans tin endroit sec et tempéré. 
L'état d'une femelle qui couve est vraiment intéressant : 
ses yeux étincellent, sa peau est brOlante; elle se livre avec 
une ardeur et un plaisir extraordinaires à ses fonctions; 
elle mange peu, boit beaucoup. 11 est bon de mettre des 
aliments ì sa portée. Néanmoins, elle peut s'absenter pendant 
quelque temps sans inconvënieut, soit pour aller prendre 
de la nourriture, soit pour se rider : dans ce cas, elle a 
soin de couvrir ses œufs de plumes, afin qu'ils se refroidis- 
sent moins vite. Tous les jour à la mme heure, la couq 
veuse retourne ses œufs pour amener en haut le coté qui 
était en bas, afin que ce dernier reçoive de plus près à son 
tour la chaleur de son ventre. 11 arrive très-souvent quedes 
femellcs vont pondre et couver dans des granges, des gre- 
niers, des hales, des bois, et qu'au moment ou on s'y at- 
tend le moins, ou les voit arriver entoures d'uue noln- 
breuse famille. Ces ceuvées sont celles qui réussissent le 
mieux, Iorsqu'elles ne sont pas la proie des animaux des- 
tructeurs. 
On met ordiuairemeat quinze œuf» de dinde et trente de 
poule sous une dinde; quinze œufs d'oie et vingt-cinq de 
canne sous une oie; quinze œufs de canne sous uue canne, 
douze enfin de poule et dix de canne sous une poule. En 
général, il faut diminuer ces nombres dans les premières 
courCs, c'est-i-dire quand le temps est encore froid. 11 est 
rare qu'ou lasse couver aux nies, aux cannes et autres oi- 
seaux qui vont à l'eau, des œufs d'oiseaux qui ne sont pas 
aquafiques, tels que la poule, la dinde, etc. On ne doit ja- 
mais faire couver en même temps à une couveuse des œufs 
provenant de femclles d'espèces diffcrentes, par la raison 
que les uns venant à éclore plus t0t que les autres, il serait 
impossible à la mère adoptive de donner ses soins à tous 
les petits au moment de leur naissance. Parmentier conseille 
aux riches fermiers qui veulent ëlcver une grande quantité 
de volailles sans embarras et à moins de frais, de se pro- 
curer plusieurs dindes, qu'ils destineraient à faire les tons- 
tions de couvuses, par la raison que la ponte de ces oiseaux 
commençant et finissant de bonne heure, on aurait la faci. 
litA de leur confier des œufs de posde. Celles-ci auraient 
plus de temps pour continuer leur ponte, et l'education 
des poussins en rait d'autant plus facile qu'ils seraient nés 
dans in saison la plus favorable à leur développement. Lïu- 
cubation de la dinde dure 3 jours, celle de la poule 20, 
celle de la canne 9, celle de l'oie 3t, celle de la pintade 
8, celledu pigeon tS, celle du faisan 2, celle du paon 30 
environ. 
Voici un aperçu de ce qui se passe, suivant Haller, dans 
un oeuf de poule qui est soumis à l'incubation : au bout de 
douze henres, on aperçoit un commencement d'organisa- 
tion dans la tache gélatineuse appelée germe, laquelle oc- 
cupe toujours la partie supérieure du jauue, quelle que soit 
la position de Poeul ; à la fin du premier jour, on distingue la 
tëte et l'épine dorsale du poulet; à la fin du second, on 
reconnait les vertèbres et ic cœur ; le troisième Iournit au 
développement du col et de la poitrine ; le quatrième à celui 
des yeu. et Ou foie; le cinquième rend sensible. l'estomac 
et les teins; le sixième le poumon et la peau ; le septième les 
intestins et le bec; le huitième la véicule du fie| et les vert. 
tri.cles du cerveau; le neuvième les ailes et les caisses; Ic 
dixième, toutes les parties qui constituent le poulet sont à 

INCUBATION -- INCULPATION 
leur place ; les jours suivants, elles se dveloppent et pren 
nent enfin l'accroissement qui leur est propre. Comment 
vit le poulet ainsi développé par la chaleur que lui commu- 
nique la couveuse ? art x dépens du jaune, qui absorbe peli t 
à petit le blanc, et qui est ensuite presque inslantanément 
introduit, dans le ventre du poulet, auquel il tenait par une 
espèce de cordon ombilical. C'est le dix-septième jour que 
cette introduction s'effectue. Alors le poulet quadruple de 
grosseur; la poche des eaux se brise, l'air s'introduit à tra- 
vers la membrane dans le vide qui s'est formé; le poulet 
respire, prend de la force, et trois jours après, il rompt 
l'enveloppe qui lui a servi en mëme temps de berceau et de 
prison. 
Pour rompre sa coquille, le jeune oiseau n'emploie pas 
le bout de son bec, comme on le croit comtnunément ; c'est 
un tubercule osseux qui s'est formé sur la partie antérieure 
et supérieure du bec', qui perce l'enveloppe de l'oeuf : ce 
tubercule tombe après la naissance du poulet. Comme la 
m/re n'aide point, dit-on, le poulet  sortir de sa prison, 
et qu'il arrive souvent que le tubercule ne parvient pas 
à fendre la coquille, .il faut veiller attentivement sur les 
œufs le jour où l'on présume qu'ils doivent en sortir. 
TEvssÈDItE. 
lcubation artificielle. Cet art, né en lypte dans l'in- 
tervalle de temps écoul entre les ëpoques dal écrivaient 
llérodote et Aristote, resta ignoré en Europe jusqu'à son 
introduction en France par Iea u m or. Bonnemain le per- 
fectionna, en lui appliquant le chauffage à circulation d'eau. 
Le premier, il en fit la vase d'une importante industrie; long- 
temps il approvisiouna de poulets les marcbés de Paris. 
.Mais le haut prix de la nourriture nwessaire aux jeunes 
poussins empëcha cette industrie de prospérer. Ce- 
pendant l'incubation artificielle par de petits appareils por- 
tatifs est encore pratiquée dans beaucoup de fermes. On cite 
comme le meilleur des appareils employés dans ce but, le 
calcfacteur-cnuvoir de Lemare. Quel que soit le couvoir 
que l'on emploie, il doit toujours Cre muni d'un rgula. 
teur, qui y entretienne une température constante de 38 à 
39 ° ceutigrades, que l'on a reconnu tre nécessaire à la 
réussite de l'opCation. 
INCUBE et SUCCUBE. Dans un temps où l'on croyait 
que le diable pouvait avoir commerce charnel avec l'es- 
péce, humaine, on appelait incube le démon sous forme 
masculine, succube le démon sous forme fémiuine. Sous la 
première forme, il s'emparait des femmes, leur tendait mille 
piéges, et les prenait mme quelquefois par violence ; sous 
la seconde forme, il s'adressait aux homme% et roussissait 
quelquefois à les séduire. Saint Justin martyr, Clëment d'A- 
lexndrie, Tertuilien, saint Cyprien, saint Aug,stin et 
saint Jérme ont pensé que ce comrcerce tait possible; 
Clotrée, W.ver, Biermann, Godelmann soutinrent l'opinion 
contraire. Le jésuite Delrio chercha non-seulement  prou- 
ver la possibilité d'un tel commerce, mais prëtendit mtXme 
que les incubes povaicnt engendrer en recueillant de la 
semence humaine. Cardan et J.-B. Pro-la ont r,ardé ce com- 
mercecomme une illusion. Ce qu'il y a de certain, c'e.st que 
pendant le moyen ge on bru'da en Europe bon nombre 
d'hommes et «le femmes accusés ,le conjonctions avec le 
diable, ou qui se vantaient d'en avoir eu, mme  l'Arat 
de veille. Saint Bernard parvint à sauver une pauvre femme 
mariée, qui s'accusait de copulatton ave le malin esprit, en 
lui donnant son bton, qu'elle mit lans on ht et avec lequel 
elle chassa le diable. Pour les médecins, les mcubes ne sont 
autre chose que «le» hallucinations ou des cauche- 
mars, dans lesquels on croit voir str oi un diable sous 
forme pins on moins humaine, hallucinations ou Cauche- 
mar» produits par une tnanvaise digestion, iulempérance, 
exaltation «le l'esprit, débauche dépravation ou faiblesse, 
pouvant aller quelquefois jusqu'à la pollution ; chesl «'n un 
mot une variéoE de l'er otomanie. L. Louvcv. 
INCULPATION (,lu latin cutpa, faute). Dans le 
langage ordinaire ce mot est s!nonyme d'a c c u sa ! o n; 



mais dans celui du droit il répond plus exactement au terme 
de prêvention. 
INCUNABLES. C'est la dénomination dont on se 
sert généralement aujourd'hui pour désigner les ouvrages 
imprimés antérieurement à l'an.1500, et dont le nombre 
s'élève approximativement à 15,000. Le mot incunables 
vient du latin incunabula, qui veut dire berceau, et, par 
extension, commencement, origine ; il indique'que les livres 
auxquels on l'applique datent du berceau, des débuts des 
l'art typographique. La connaissance des incunables est 
d'autant plus importante qu'ils constituent souvent les seules 
sources de l'histoire de I' i m p r i m e r i e. En outre, beaucoup 
ont une grande valeur et un vifintérét, soit pour l'histoire 
des arts, à cause des ornements de divers genres qui leur 
servent d'accessoires, soit sous le rapport scientifique. A 
cette dernière classe appartiennent surtout les premières 
ditions des classiques anciens et modernes, les ditions 
principes, qui ont tant de prix aux ,eux du critique. 
Voici  peu près l'ordre dans lequel les collectionneurs 
rangent les incunables, et les conditions qui les détermi- 
nent dans leurs choix : 
t ° Les modèles et les premiers essais de l'imprimerie dont 
font partie les produits de laxylographie et les pre- 
miers imprimés proprement dits ayant une date authenti- 
que, à partir de la bulle d'indulgences de Nicolas V, donnée 
en 1454, bien que le premier livre imprimé avec date 
tout à fait incontestable soit toujours le Psautier de 1457. 
2 ° Les premiers livres imprimés dans certains pays, ordi- 
nairement tout aussi rares que les précdents. 
3 ° Les premiers livres imprimés en certaines langues ou 
avec un genre de t,pes particuliers. Les plus anciens im- 
primés sont en caractères dits 9othiques; c'est un peu plus 
tard seulement qu'on employa le type rond ou romain, 
bientbt adopté seul en Italie. Quelques mots grecs, gravés 
sur bois, figurèrent, pour la première fois, dans le 
De Q/ficiis de Cicron, publié en 1465, et dans le Lac- 
tance de la xnme année. Le premier ouvrage grec imprimé 
en caractères mobiles fut la Grammaire 9recque de Las- 
caris (Milan, 1476). 
4 ° Les imprimés provenant d'oflîcines ayant peu produit, 
telle que celles de H. BechtermOnze, à Eltville; d'Adora 
Rot à Borne; d'Arnold de Bruxella, à Naples; de Kune, à 
Memmin.en ; ainsi que des livres de certaine nature sortis 
d'autres oflîcfnes ou rénait plus d'activitê, par exemple 
les éditions d'anciens classiques romains, données par llen. 
telin. 
5 ° Les imprimes où apparaissent les premiers perfection- 
nements de l'arttpographique, par exemple le J. ,Sïderi 
Prceptorium divinœe Legis ( Cologne ; Koelhof, 1477, 
in-lol.), le premier livre imprimé qui porte une signature; 
tels sont encore le Sermo adpopulum proedicabilis (Colo- 
gne ; ther Hoernen, I70, in-4 ° ), le premier livre portant les 
chiffres de la pagination ; le De Officiis de Cicron, de 
I65s le premier livre qu'on ait imprimé in- °; et l'Ofylcium 
Eeatoe Marioe Virginis (Venise; Jenson, 1473, in-3), 
le premier ouvage publié en petit format. Les frontispices 
ne devinrent en usage qu' partir de 185. 
6 ° Les imprimés on ont complétemeut réussi les premiers 
essais tentés pour employer l'art à l'embcllisseueut de livres. 
Le premier livre imprimé avec des gravures sur cuivre est 
le Monte santo di Dio d'Antonio da Siena (Florence, 1477, 
in-fol.). Les meilleures gravures sur bois, dont l'imprimeur 
Gruninger de Strasbourg était grand amateur, se trouvent 
dans les imprimés allemands et italiens. On peut aussi ranger 
dans cette classe les exemplaires ornés de miniatures d'un 
fmi aclievé. 
7 ° Quelques exemplaires qui se signalent par certains 
accessoires particuliers, tels que des imprimés sur parche- 
min, en lettres d'or; le quinziëme siècle en offre déj quel- 
ques-uns. Parmi les ouvrages sur parchemin, si communs 
au début de l'imprimerie, que des éditions tout entières 
étaient firmes sur cette matière, et parmi les éditions pnslé- 
taCT. nf L CO,"Vr.J. -- T. X. 

-- INCURABLE 3-" 
rieures, telles que celles de la Bible latine de I62 dont 
les exemplaires sur papier sont aujourd'hui encore plus 
rares que les exemplaires sur parchemin, on recherche ds 
préférence ceux qui proviennent d'officines où l'on impri- 
mait peu sur parcliemin, par exemple de celles de Schweyn- 
heim et de Pannarz à Rome, dont on ne connalt que six 
ouvrages sur parchemin. Consoltez Van Praet, Catalogue 
des livres imprimes sur vlin (6 vol.; Paris, 1822-1828; 
et 4 vol., 182ç1826). 
o Quelques collections ou suites d'ouvrages, telles que 
celle d'Alopa de Floreuce, de 179-à 1496, imprimée en 
petites capitales, et contenant six ouvrages grecs (l'Antho- 
logie , Apollonius de lhodes, Euripide, Callimague , 
le. Gnomiques et Musée), ou les imprimés grecs de Milan, 
en magnifiques caractères ronds, dont le plus ancien est la 
grammaire grecque de Lascaris (147), et le Suidas 
(1499). On recherche aussi avec ardeur les imprimês sortis 
d'officines clèbres du quinzième siècle, par exemple 
de celles de Schwe,nheim et de Pannarz, qui ne faisaient 
point d'éditions considérables et tiraient au plus à 275 exem- 
plaires. 
Quant aux moyens propres à faire acquérir la connais- 
sance des incunables, les Annales typo9raphici de Panzer, 
avec ses Annales de l'ancienne littrature allemande, 
fournissent la nomenclature la plus complète qui existe de 
tous les livres publiés jusqu'à l'an 1536. Les Annales t9po- 
9raphici de Mettaire sont beaucoup plus incomplets; mais 
cet ouvrage entre quelquefois dans plus de détails, et va 
d'ailleurs un peu plus loin. Un ouvrage très-utile aussi à 
consulter sur ce sujet est le Dictionnaire biblio9raphique 
du quinzième siècle, par Serna Santander ( 3 vol.; Bru xelles, 
1805-1807), lequel contient sur les incunables d'Espague 
et des Pays-Bas beaucoup de details qui manquent dans 
Panzer. 5ais l'ouvrage capital sur cette matiè[e est celui de 
L. Hain: Eepertorium biblioffaphtcurn, in quo libri 
omnes ab arte typographica inventa zsque ad annum 
MD typis expressi ordine alphobetico recensentur (2 vol.; 
Stuttgard, 1826-1838, in./t °). En outre, on trouve de bonnes 
descriptions d'incunables dans les histoires locales de l'im- 
primerie, par exemple dans les ouvrages d'Audiffredi sur 
les imprimés romair, s et italiens, et dans ceux qu'ont donnés 
Panzer de Nuremberg, Sprenger de Bamberg (Nurem- 
berg, 1799), Denys de Vienne, Merkel d'Aschaffenbourg 
(Aschaffembonrg, 1832); dans les monographies relatives 
ì quelques imprimeurs du quinzième siècle, tels que Gu- 
tenberg, Jenson, Aldus, Giunti, etc.; et dans les ouvrages 
sur les incunables de Yossi, Dibdin, Braun, Seemiller, 
Strauss, Gross, Hupfauer, etc. Consultez anssi L. de La- 
borde, Dèbuts de l'imprimerie à Strasbour 9 ( Paris, 180); 
et du mme attteur : Débuts de l'imprimerie à Mayenc¢ 
et à Bomber 9 (Paris, 1840). 
INCUBABLE (de la particule latine négative in, et eu- 
rare, guérir). Ce mot peut s'appliquer à toute maladie pour 
la guérison de laquelle les secours de l'art sont impuissants; 
mais il s'entend surtout des malaàies qui ne menacent 
immédiatement la vie, et que la mdecine ne sait guërir, 
comme le cancer, la phtisie, l'a.«thme, la gontte, l'anévrysme 
du cœur, l'épilepsie, etc., etc. La pierre était autrefois à peu 
près incurable; on la traite avec plus de succès aujourd'hui. 
Du reste, si la médecine ne peut triompher de ces terribles 
affections, elle leur apporte du moins son baume, elle adoucir 
les souffrances, soutient les forces; l'habitude pallie 
aussi les douleurs ; et la vie incessamment menacée peut 
encore durer longtemps, surtout si, resignéea ì leur sort, 
les personnes atteintes d'affections incurables savent mé- 
nager les organes détériorés et retarder les progrës du mal. 
Combien de gens en parfaite santé enterrent les valetudi- 
noires ! Il n'est pas toujours bon d'ailleurs de guérir certain 
infirmités : la guérison des maladies de la peau, par 
exemple, occasionne parfois des désordres internes beau- 
coup plus graves que l'indisposition dont on s'est debax- 
rassi. 
43 



Il  a à Paris deux hospices-al'incurables : l'un, pour les 
rumines, rue de Sèvres, fondé en 1637, par les soinsdu cardinal 
François de La Rocbefoucault, contient 525 lits ; l'autre, 
potr les hommes, rue du Faubourg-Saint-Martin, contient 
480 lits. On y reçoit des indigents atteints d'infirmitésgra- 
es et reeonnnns incurables. Un certain nombre de lits ap- 
partiennent à des particuliers. Les hospices de vieillards, 
hommes et lemmes (Bieètre et la Salpétrière), renferment 
aussi des iucurables. 
INCURIE (du latin in, particule négative, et eura, 
soin ). C'est le manque de soin, la négligence extrème. Rien 
n'égale l'incurie et 1' i m p r é v o y a n c e de certaines popula - 
tions des grandes villes, véritables parias de la civilisation, 
et l'on peut dire que l'incurie et le pu upérisme mar- 
chent inévitablement ensemble. 
INCURSION (du latin incursio, fait de in, dans, et 
de currere, courir), course à main armée dans un pays 
avec lequel on est en guerre ou que l'on veut envahir. Les 
incursions des barbares en Europe ont retardé pendant long- 
temps Pheure de sa ciàlisation. 11 y a celle différence entre 
incursion et irrutglion que par le premier de ces mots 
on marque seulement l'action de faire une course, de se 
jeter dans une voie ou sur un obiet étranger quelconque 
pour en rapporter quelque avantage ou une satisfaction 
quelconque, tandis que par le second on entend plus spe- 
¢ialement l'action de rompre, de forcer les barrières et 
de fondre avec impéluosité sur un nouveau champ, une 
nouvelle terre un nouveau pays, un nouveau territoire 
ionr y porter et y répandre le ravage et la désolation. 
Edme 
IlXCUSES (de in, dans, et cudere, frapper; Irappé 
en creux ). On appelle ainsi les médailles qui offrent deux 
fois le mëme tpe, une fois en relief, et l'autre fois en 
creux, ce qui venait de la précipitation du monnoyeur, qui, 
avant de retirer la médaille qu'on venoit de Irapper, re- 
mettoit un nouveau flan, qui trouvant en haut le coin, et 
en dessous la médaille qu'on n'avoir pas retirée, marquoit 
des deux cétés le même tpe en relief et en creux, mais 
toujours frappée plus imparfaitement du cté du creux, 
l'effort étant beaucoup plus faible du ctté de la médaille 
que de celui du coin. Ces médailles incuses par la né#i- 
gence du monétaire, et qu'on trouve non-seulement dans 
les suites des médailles consulaires et impériales, mais en- 
¢.ore dans celles des rois et des villes grecques, ne doivent 
pas tre conIondues avec quelques-unes des plus anciennes 
médailles de la Grande-Grèce, et principalement celles 
de Caulonia, de Crotone et de Métaponte, qui olfrent aussi 
deux t)pes, l'un en relief et l'autre en creux. Sur les mé- 
dailles incuses ies deux types ou impreintes sont placés 
dans le mtme sens et chargés des mëmes ornements. 11 
n'en est pas de mëme ,les médailles de la Grande-Grèce 
qu'on vient ce citer, le t}pe en relief y est quelquefois très- 
dilférent du type en crenx. L'abbé Barthélemy, dans sa 
paloeographie numismatique, pense que c'ëtoil là une 
suite des anciennes aires en creux ; qu'en adoptant l'usage 
du double type sur les monnaies, les villes de la Grande- 
Grèce n'abandonnèrent pas celui de les frapper avec deux 
coins, dont l'un était gravé en relief; mais au lieu qu'au- 
paravant ce coin était hérissé de parties saillanloE et propres 
a relenir le flan, elles y mirent le type qui parait en creux 
sur leurs médailles. Ces medaiiles qui ont doE aires en 
creux sont communément antérieures à l'an 400 avant 
l'ère vulgaire. A.-L. blaLLm, de l'Institut. 
INDE. C'est le nom que les Grecs et les Romains ont 
donné au pays sitné au deà de l'Indus, et qui jusqu'a l'é- 
poque d'Mexandre le Grand leur était demeuré presque 
complétement inconnu, mais où déj les Phéniciens, les 
Carthaginois et les Egyptiens avaient habitude de trafiquer. 
Ce fut seulement aux conquètes des rois de Perse et aux 
expéditions d'Alex;mdre qu'on fut redevable de rensene- 
ments plus précis sur ces tégions. Lorsque l'Empire Romain 
«ùt cessé d'exisler, el surtout lorsque l'islamisme eut con- 

INCURABLE -- IN 
quis l'&sie, les communications directes de |'Europe avec 
l'lnde cessèrent presque complétement; et les Eurolens 
ne reçurent pins les produit de en pays que de seconde 
main, soit par l'intermédiaire de l'Égypte, soit par la 
longue route que les caravanes étaient obligées de faire à 
travers toute l'Asie. Du Levant re commerce passa aux 
mains des Pisans, des Vénitiens et des Génois. Comme 
le moyen ge, à l'instar des anciens, plaçait les richesses 
de l'lnde aux extrémités de la terre, il espéra parvenir 
dans cette régiou fortunée soit en doublant l'Afrtque, soit 
en naviguant directement à l'ouest. Puisqu'on croyait pou- 
voir atteindre le but par deux voies différentes, on dut na- 
turellement essayer de toutes deux à la fois. Ces idées e 
développèrent de plus en plus vers le milieu du quinzième 
siècle, époque où Toscaneili et C o 1 o m b, Ysottmxe et D i a z 
choisirent les deux routes opposées, pleins de confiance 
les uns et les autres dans le succès de l'entreprise. Colomb 
se didgea à l'ouest et prit d'abord l'archipel de l'Amérique 
centrale pour l'Inde. Vasco de Gama doubla l'Afrique a 
l'est, et trouva la route conduisant directement à la *éri- 
table Inde, à laquelle depuis lors on donna le nom d'In des 
orien raies, en mème temps qu'on dísigna sous le nom 
d'lndes occidentales les divers groupes d'lies qu'on 
rencontre avant d'atteindre le continent de l'Amérique cen- 
trale. Les habitants aborigènes du Nouveau Monde furent 
mëme désignés sous la dénomination d'l n d i e n s. 
Le mot lnde est incontestablement dérivé du nom du 
peuple Hi n d o u, le plus important de ceux qui habitaien! 
cette région, et celui que connaissaient le miettx les anciens. 
Ceux-ci, toutefois, ne comprenaient pas seulement sous 
cette dénomination l'i-lindostan propremeut dit, mais tous les 
pays situés au delà de l'Indus, quïls divisaient en lndia 
intra Gangem (le territoire situé entre l'Indus et le 
Gange, avec la presqu'lle de Dekan et l'lle de Ceylan, et 
en India extra Gantera ( i'[ndo-Chine actuelle, c'est-à- 
dire la presqu'lle située entre le golfe du Bengale à l'ouest, 
la mer de la Chine à l'est et le détroit de Singapour an sud, 
avec la lointaine Serica ou Chine) ; division qui s'est con- 
servée jusqu'a nos jours, et qui, bien qu'impropre dans les 
termes, puisque le Gange ne forme pas réellement la déli- 
mitation de ces deux régions, demeurera, parce qu'elle a 
pour but de distinguer les deux presqu'iles. 
Les naturels de i'Inde n'ont point dans leurs langues de 
mot servant de dénomination complexe et générique pour 
ces diverses courtCs que nous groupons sous un mëme 
nom. Ils appellent Djambou-DwiJgpa , c'est-à-dire ile 
de Varbre du Djambou, le territoire des Hindous pro- 
prement dit. 
i?;I)E mot quelquefois employé pour I n d i go. 
INDE ( Archipel de I'. Voye= lrwr..' (Archipel 
INDE (Bois d'). Voye'. Cxt[cm (Bois de). 
INDE ( Canne d' ). |'oe-- 
INDE (Coq d' . Voye: Dlno.. 
INDE ( Établissements lrançais dans P ). 
lYE'mxAGol, KmtKL» M,uÉ, Po.o|cnÉn¥, Y.'xoN et l_xnes 
OIIIENT&Les. 
INDE. (Œillet, iose d' ). l'oee OEecet 
INDECENCE  INDÊCENI'I Le mot indécence com- 
prend toute action, tout geste, tout propos, blessant les 
convenances ou Ja pudeur, toute reprenlation 
scènes dhounétes et obscènes. ç_ n'est qu'à mesure que 
les mœurs se sont épurées que les sociét ont classé 
parmi les indéeences ce qn'auparavant elles regarda.lent 
comme très-naturel et tre-licite. En  gui touchait sur- 
tout à la lubricit, les anciens portaient I'ind¢oenoe au su- 
prime degré. Leurs peintures que les siècles nous ont con* 
servées, leurs vases  leurs moeurs, leur langue mème. 
en sont autant de témoignages. Les débauches les plus in- 
f',lmes, les urgics les plus ordurièrement luxurienes des 
empereurs romains, n'ont-elles pas été coulées en bronze 
et transmises à l'exCtation des peuples par les fameuses 
m#daille, spintrienne*? La France du moyen Age, elle- 



INDICENCE- INDÉPENDANTS 
mSme, ma]gré la pureté et la simplicité de ses mœurs, 
admettait d'Cranges indécences. Les gteaux, les ptisse- 
ries affectaient alors souvent la forme des parties naturelles 
des deux sexes, et la pudeur des damoiselles du quatorzième 
siècle ne s'en alarmait pas. 
U est toutefois beaucoup de choses indécentes sans tire 
impudiques. Citons, entre autres, chez nous, ces luttes 
d'avocats s'emportant outre mesure, se menaçant du poing, 
aUant jusqu'à sïnvectiver, spectacle qu'offrent encore cer- 
tains barreaux de province, et qui à Paris soulèveraient 
de dégoOt juges et assistants. Et les mœurs parlementaires 
donc de nos bons voisins d'outre-Manche, siégeant au 
milieu des tables, des bouteilles, des verres, du grog, du 
porter, du punch, etc., etc.! Et le pugilat permanent des 
chambres législatives des États de l'Union l Que d'indé- 
cences q.ui ne sont pas impudiques ! 
INDECLINABLE, terme de grammaire, désignant 
des espèces de mots qui en toute langue gardent une 
forme immuable, parce que l'idée principale dont ils sont 
l'expression conserve touiours et partout le mème aspect. 
Dans cette classe figurent naturellement les p r ép o s i t i o n s, 
les adver bes, lesconjoncti ons et les interjectio us. 
Tandis que les autres mots varient sans cesse, suivant leurs 
fonctions, selon la place qu'ils occupent, ceux-ci, cons- 
tamment semblables à eux-mmes, n'éprouvent aucun chan. 
gement, aucune modification. Pour distinguer les mots 
déc!inables de ceux qui ne le sont pas, fl suffit d'examiner 
les définitions des parties du discours, et de séparer ensuite 
celles qui ont plusieurs fonction%  de celles qui n'en ont 
qu'une : ainsi, le nom, le pronom , l'article, l'adjectif, le 
verbe, ayant à faire face à un grand nombre d'objets di- 
vers, revétent forcément une forme nouvelle chaque fois 
qu'on les met en œuvre. Il n'en est pas de mime des mots 
compris dans la dénomination générale de p a r t i c u I es, 
lesquels ne sont chargés que d'une fonction unique : la 
préposition indique un rapport entre deux noms; l'adverbe, 
une modification du verbe; la conjonction unit les phrases ; 
l'interjection peint un mouvement de l"Ame. L doit se bor- 
ner la théorie des indclinables, dans notre langue parti- 
culièrement (roçez DÉCLINAISON ). CIIAMPAGAC. 
INDÉFINI se dit en mathématiques de toute grandeur 
dont les limites ne sont pas déterminées. « Il y a cette dif- 
férence entre i n fin  et i»d#fini, dit D'Alembert, que dans 
l'idée d'i»fini on fait abstraction de toutes bornes, et que 
dans celle d'indéfini, on fait abstraction de telle ou telle 
borne en particulier. La ligne indéfinie est celle qu'on sup- 
pose se terminer où l'on voudra, sans que sa longueur 
ni par co.nséquent ses bornes soient fixées. » 
INDEHISCENT. Voçe--- Diutscece. 
INDELTA. ;.oe= COLOSeS 
• INDEMNITE. On nomme ainsi ce qui est accordé à 
titre de réparation d'un dommage causé par une personne 
à une autre (voe» DOAGES-I,x/.ntS). Une indemnité 
ne peut résulter que d'une convention ou d'une disposition 
«le la loi, comme celle que dans certains cas le pupille 
peut réclamer de son tuteu r officieux, le mineur de 
son tuteur; celle qui est due par un époux envers l'autre, 
celle qui est due au gérant des affaires d'autrui, celle que 
t'on doit payer au propriétaire dont l'immeuble subit l'e x- 
propria ri on pour cause d'utilité publique, etc. L'indem- 
nité payée sous la Bestauration aux victimes de l'Cigration 
et des confiscations révolutionnaires a été diversement 
jugée comme acte politique. 
Dans la jurisprudence féodale, on appelait indcrnni un 
droit attribné attx seieurs sur les établissements reliçeux 
situês dans le ressort de leur seigneurie, pour les dédom. 
mager des redevances qu'ils auraient pu recevoir ultérieu- 
rement à chaque mutation, si le fonds acquis fut resté 
dans le commerce. 
INDÉPENDANCE. Toutes les définitions qu'on a pu 
donner de l'indépendance l'ont taire tellement semhlahle à 
la Il be riC qu'il est permis de croire ces deux mots iden- 

339 
tiques ; il y a pourtant entre eux une certaine nuance. La 
liberté est le pouvoir de faire et de ne pas taire, mais il y a 
dans l'indépendance quelque chose de plus réflécbi, de 
moins instinctif; il y a une idée de volocté uuie à une idée do 
pouvoir : l'homme libre est celui qui peut agir, faire, ne 
pas faire; l'homme indépendant, celui qui a la volonté de 
profiter de cette faculté, l'usage lui en f0t-il mme ravi 
momentanément. Un peuple est quelquefois indépendantpar 
lui-mme, bien que la liberté lui soit ravie par quelque op- 
pression qu'il s'apprête à secouer; il peut également tre libre 
el n'Sire pas indépendant, privé qu'il serait d'une direction 
et de lumières salutaires. Les États-Unis américains furent 
considérês comme indépendants du jour où ils commencèrent 
à secouer le joug de la Grande-Bretane : la guerre qu'ils sou- 
tinrent pour amener une émancipation h laquelle tendaient 
tous leurs vœux et tous leurs efforts, fut appelée guerre d« 
l'ind#pendance, car il y avait en eux la ferme volonté 
de conquérir une existence nationale. S'il ne se fat agi que 
de quelques franchises, de toutes les libertés qu'un peuple 
peut exiger d'un gouvernement, cette appellation eOt ét 
impropre : c'e0t été la guerre de la liberté, comme celle 
des esclaves révolt¢s, réclamant de Rome, les armes à la 
main, leur affranchissement et l'amélioration de leur sort._ 
On a aussi nommé guerres d'indépendance celles que sou- 
tinrent UEspagne pour chasser les étrangers, les colonies 
espagnoles pour secouer le joug de la métropo?e, la Grèce 
pour s'affranchir de la domination turque, etc., etc. 
Si des nations nous descendons aux corps politiques, la 
atome véité nous frappera : il est aisé d'établir qu'un sénat, 
un conseil lé,islatit, un tribuual, peuvent ètre libres san 
Sire indépendants, de mSme que souvent ils sont indépen- 
dants sans tre libres. 
L'indépendance de l'homme dans l'tat de société est 
le résultat soit de son caractère, soit de sa position sociale : 
elle consiste à se passer de tout secours étranger, dans tous 
lescas possibles ; à se mettre au-dessus de certains préjugé% 
de certaines nécessités, qu'un homme d'une trempe moi 
énergique, ou dominé par ses besoins, subirait machinale- 
ment. Celui qui peut se passer de tout le monde, aller où 
il lui plalt, vivre comme bon lui semble, refuser ce dont 
tous les autres hommes sont envieux, ue, t se proclamer in- 
dépendant, à la face de l'univers. L'homme de parti, f0t-il 
dans cette position, ne peut se dire tel : les idées qu'il a 
embrassées le dominent trop exclusivement pour lui laisser 
cette liberté de volonté qui permet de revenir sur ses pas 
quand on le juge convenable. Pour les peuples, l'ind#pen- 
dance est la force nationale. Se régir comme bon leur 
semble, choisir le mode de gouvernement qui leur semble 
le meilleur, faire respecter leur nationalité par ceux de leurs 
voisins qui seraient tentés de la violer, voilà ce qui cons- 
titue leur. indépendance. ;apoléon GLoss. 
INDEPENDANTS. Au nombre des sectes Teligieuses 
que fit éclore le protestantisme, celle des indépedants n'est 
pas la moius ¢élbre. Sortis des presb/t#rens, dont les 
distinguaient leur amour pour une réforme complète et leur 
dessein d'établir un gouvernement démocratique, ils en 
étaient encore distincts par le peu de séverité de leur doc- 
trine religieuse. D'après eux, chaque église, ou congrégatiou 
particulière, devait posséder en elle-reCe, radicalement et 
essentiellement, tout ce qui lui était nécessaire pour sa con- 
duite et son çouvernement ; elle avait sur ce point toute 
puissance ecclésiastique et toute juridiction; elle n'était 
stQette ni à une ni / plusieurs églises, ni à leurs députés 
ni à leurs synodes, ni à aucun évSque. Les résolutious des 
synodes leur semblaient ne devoir Sire considérées que 
comme des conseils d'hommes sages et prudents, dont on 
pouvait tenir compte sans ètre contraint, d'y déferer; ils 
admettaient également qu'une église pouvait en aide,- une 
autre de ses secours, de ses conseils, la reprendre méme si 
elle péchait ; mais ils ne lui reconnaissaient pas le droit de 
s'attribuer une atttorilé supérieure sur elle, et de l'excom- 
munier. Les inddpendants faisaient donc professien d  



340 
ronnaltre aucune supériorité ecclésiastique; leur 
gnance pour la dépendance n'était pas moins grande en 
politique. Aussi, lors des troubles qui, en Angleterre, ame- 
nèrent la" mort de Charles I er, tout ce qui était en- 
nemi de la revautC toutes les sectes opposées  l'Église an- 
glicane, se réunirent-elles à eux, et ils puisèrent dans cette 
union une grande force (voyez CaowLL). Les indépendants 
ne différaient des presb,tériens que sur des questions de 
discipline. Quant à ceux qu'on a nommsfau-indépen- 
dants, c'étaient pont la plupart des hommes sans foi re- 
ligieuse, sortis des rangg des anabaptistes, des sociniens, 
des familiaristes, des anlinomes,, des libertins, et au lres 
hrëliques. 
L'ind@endantisme n'a pris racine qu'en Angleterre 
et en Hollande (coye BaovmsTes) ; mais il a éiWimporté 
dans quelques colonie« de la Granrle-Bretagne. Un de ses 
sectaires, du nom de Motel, tenta inlructueusement de le na- 
turaliser en France, vers le milieu du dix-septième siëcle. 
Les atations politiq,es auxquelles ont pris part ces no- 
vateurs les signaient  l'histoire ; le calme semble avoir 
été pont ces hommes, d'un puritanisme turbulent et 
sans mesnre, ce qu'il est pour tous les hommes révolu- 
tionnaires, le signal de leur décadence. 
INDES (Compare des). Voyez tsues 
( Compagnie des ). 
INDES ( blet des ) ou OCÉAN II'DIEN. C'est le nom 
que l'on donne à l'une des cinq grandes mers de la terre, 
bornée au nord par l'Asie, au sud par la mer Glaciale du 
sud, à l'ouest par l'Afiqne et le méridien de son extrémité 
méridionale, à l'est d'abord par une ligne tirée depuis le 
détroit de Fou-Kian, sur la cote orientale de la Chine, jos- 
qu'au détroit de Terres, ì l'extrémité nord de la Nouvelle- 
Hollande, et le méridien de son extrémité sud-ouest. Dans 
ces délimitations, qui embrassent aossi la mer des lndes 
orientales ou de l'Iode au delà du Gange, comprise parlois 
dans l'osAan Pacifique, elle présente une superficie de 
976,000 myriamètres carrís; elle a donc environ 27.,00o 
myriamèlres de moins que l'océan Atlantique et 2,07t,000 
myriamètres carrés de moins que le grand Océan; aussi lui 
refuse-t-on quelquefois ce nom d'océan, et ne la considère- 
t-on que comme une espèce de golfe, immense à la vrité, 
dn grand Océan, situé entre l'Asie, l'Afrique et la Nouvelle- 
Hollande. La mer des Indes entoure toute la presqu'tle 
orientale et est située sous la zone torride en mme temps 
que sous la zone tempérée. Ce n'est que par deux de ses 
échancrures dirigées vers le nord-ouest, qu'elle s'ëtend aussi 
dans la zone rempotée du nord jusqu'au 30 e degré de lati- 
tude septentrionale. Le tropique nȍridional la divise en deux 
moitiés inégales ; celle du nord, fermée de trois ctés par 
des masses «le terre, forme trois grands golfes (la mer 
Rouge, le golfe Persique et le golfe du Bengale ou de l'Iode 
en deçà du Gange ), et une mer intérieure remplie et bornée 
par un grand nomhre d'ries, la mer des lies des lndes 
orientales, appelée aussi mer de l'Est par les Anglais, avec 
les golfes de Siam et de Tong-King, et les innombrahles 
détroits de l'archipel i n d ien. Elle est donc très-riche en 
lies, et en outre le thëtre d'une navigation extrdmement 
animée. La moitié méridionale, au contraire, en et ouverte 
de toutes parts, presque complétement dépourvue d'ries, et 
l'nne des mers les moins fréquentées du globe. En raison 
de la natnre peu attrayante et de l'état de civilisation de la 
plus grande partie de ses ctes, la mer des ludes a moins 
d'imporlance que l'océan Atlantique et que l'osCn Paci- 
fique; ce qui I,i en donne, c'est qu'elleest la route par la- 
quelle il faut nécessairement passer pour se rendre d'E,rope 
anx Indes orientales ou en Chine; nécessité qui cessera 
d'exister le jour où le percement de l'isthme de Panama 
permettra de se rendre directement d'Europe aux régions 
orientales et méridionales de l'Asie. 
Les courants de la mer des rodes dépendent dans sa partie 
oeptenlrionale des vents, qui n'y sont pas les moussons 
ordinair¢ des autres osons, mais des modifications parti- 

INDIPENDANTS  INDEb ut, t,,ur..t,» 

cuitCes à cette mer tropicale ; ils dípendent notamment des 
moussons qui y sonflqent périodiquenent, et dont l'influence 
s'étend au del de l'archipel indien jusque dans la partie 
occidentale de l'osAan Pacifique. Au sud de l'équateur, elles 
perdent leur régularité, et à partir du t0 • degré de latitude 
méridionale régne la mousson ordinaire avec le courant oc- 
cidental et équatorial qui lui répond. Dans la zone tem- 
péréedu sud, un grand conrant conduit du sud  l'OsCn, 
plus près de la c6te de la Nouvel|e-Ho|lande ; un autre des- 
cend vers la cote d'Afrique au sud, autour du cap de Bonne- 
Espérance. D'où il résulte qu'en se rendant dans l'Iode on 
navigue pendant la mousson occidentale plus près de l'Ans- 
traite. Dans les eaux de l'Archipel indien on est obligé de 
changer de route presque chaque mois. Des cotes de la mer 
«les lndes, il n'y a que celles du nord et du nord-est qui 
aient une configoration avantageuse ; celles de l'est et de 
l'ouest sont uniformes, pauvres en échancrures et en ports, 
et gínéralement plates. Ses lies, à l'exception du grand 
Archipel indien et de Ceylan, se trouvent généralement si- 
tuées dans sa moitié occidentale. On rencontre dans sa 
partie orienlale une suite de bancs et de récifs dangereux, 
ainsi que quelques petiles lies, telles qne les lies des Cocos. 
Des lies qu'on y rencontre à l'ouest, la plus importante 
est Madagascar. Il faqt ensuite citer i'lle Maurice 
(jadis lle de France), la Réunion (jadis 1le Bourbon), 
les Amirantes, les Séchelles, Socotora, les bial- 
d i v e s, et le lies Chagos. 
IN DE OCCIDENTALES. C'est le nom qu'on donne 
à l'archipel situé entre les deux moitiés continentales de 
l'AraCique, et qui, décrivant un grand arc dans la direction 
du sud-est au nord-est, forme  l'e.t la limite de la grande 
mer Intérieure de UAmërique centrale. Tout cet archipel des 
Indes occidentales, qui s'étend enlre le t0 « çt le 26  de- 
grés de latitude ptentrionale et le 42« et le 67  degré de 
|ongitude occidentale, depuis l'embouchure de l'Orénoque 
jusqu'à la presqu'lle de la FIoride et au Yucatan, est divi 
en groupes d'iles de différentes grandeurs, en général de 
configuration oblongoe, répondant à la direction des lignes 
auxquelles elles appartiennent. Ces groupes sont les petites 
A n t i I I e s, qui s'etendent dans la direction du sud au nord 
depuis l'embouchure de l'Orénoque Jusqu'ao 19  degré de 
latitude nord; les grandes Anti'.les, ou Porto-R ico, 
H a ri, la  amaïq ue et C u ha, qui, parlant de i'extré- 
mité septentrionale des petites Antilles, se prolongent dans 
la direction du nord-ouest ju«qu'à l'extrémité nord-est de la 
presqu'lle de Yucatan ; les ries B a h a m a ou L,cayes, qui 
s'tendent au nord de Hmti et dans la direction du nord- 
ouest jusqu'à la cte orientale de la FIoride, dont les sépare 
le nouveau canal de Bahama. On divise aussi le groupe des 
petites Anlilles en lles-d-Vent et en lies-sous-le-Vent. La 
superficie totale «les lies des lndes occidentales est évaluée 
3,250 myriamèlres carrés, dont environ 2,900 pour les 
grandes Antilles et 350 pour les petites. Toutes les AntiUe 
s'élèvent à une hauteur considérable au-dessus de la mer, de 
sorte qu'on peut les considérer comme les débris d'une 
charrie de montagnes qui a disparu, ou peut-Cre avec plus 
de raison comme les fragment d'une chalne qui ne s'est 
point encore ¢ompléement soulevée au-dessus des eaux. 
Les tlzs Bahama, au contraire, fort basses, nç se composent 
que de roches de corail. 
Les montagnes les plus élevées de tout cet archipel se trou- 
'eg,t dans la partie occidentale de Haiti, dans la paffie 
orientale de Cuba et dans la partie nord de la Jamaique; 
mais on en citerait à peine une qui ait plus de 2,600 mtres 
d'altitude. Dans les petites Antilles, les plaine« les plus 
vastes se rencontrent sur la rive orientale ; ce qui n'est pas 
le cas dans les grandes Antilles. Dans le plus grand nombre 
de ces lies, les plateaux sont sépar de la plaine par des 
versants fort earpés,  ttaiti notamment. Les nombre,s,.. 
baies qui échancrent leurs cotes offrent des ports .Ors. 
Les roches de corail et de matirCres, très-communes dans 
cette mer ont plus contribué  la formation de oe monde 



IDES OCCIDEITALES 
insulaire qu'/ celle de groupes d'lies situs dans l'osCn 
Pacifique. Cuba, les lies-Vierges et les Iles Bahama sont en- 
tourCs d'énormes labyrinthes de corail, qui atteignent la sur- 
face de la mer et sont couverts de palmiers. Plusieurs de 
ces lies portent aussi des vestiges de formation volcanique. 
Toutes les ries des Indes occidentales jouissent/ peu près 
du mme climat. La saison chaude et humide (le printemps 
des Indes occidentales ) commence en mai; le [euillage et 
les herbes prennent alors une couleur verte plus vive, et 
vers le milieu de ce mois la première pluie périodique tombe 
tous les jours vers midi. A quatorze jours de pluie succède 
un temps sec et constant, et I'é[é tropical apparait alors 
dans toute sa magnificence. La chaleur est tempérée pendant 
presque toute l'année par les moussons de l'est et par les 
vents de mer, dont l'action est put»sanie dans la plupart 
de ces lles en raison de leur faible étendue. L'humidilé con- 
tinue souvent dans la période la plus chaude, de sorte que 
les habitants des lles vivent poir ainsi dire dans un bain de 
vapeur, et que le climat dans les basses pl,iues des c01cs de- 
"ient extrmement malsain, surtout pour les Enropéens,  
cause de la fièvre jaune et]d'autres maladies particulières 
aux tropiques qu'il pruvoque. Un air plus tempéré et plus 
salubre règne dans les parties hautes des lies, et devient d'au- 
tant plus salubre qu'elles s'Cèvent davantage. Dans la saison 
des grandes chale, rs, les nuits sont d'une incomparable 
beauté; la lune et les étoiles brillent alors d'un éclat dont 
on ne pe,t pas se faire une idée en Europe. Vers le milieu 
d'aoOt, la chaleur devient intolérable, et les vents de mer 
cessent tout à fait de souffler. Les pluies d'automne de- 
viennent générales en octobre; les nuages se dissolvent en 
torrents; tous les cours d'eau sortent de leur lit, et inon- 
dent les pays plats. D'ao0t à octobre les lles sont sojeltes 
aux orages, qui causent souvent d'effra)autes dévastations. 
Vers la fin de novembre commence la belle saison ; le vent 
sou[fie alors du nord et du nord-est, et de décembre à mai 
dure le plus bel l,iver de la terre. De terribles calamités 
auxquelles sont exposées les Indes occide,tales, ce sont 
les ouragans et les trclnblen:ents de terre. On y retrouve 
d'ailleurs la richesse de végétation particulière au con« 
tinent américain. L'Européen a su  runir les produits 
de l'Orient à ceux de l'Occident. La plupart des plan- 
rations sont bordC d'orangers, de citronuicrs, de gre- 
nadiers et de flguiers; la plupart dcs arbres fruitiers de 
l'Europe réussissent data les parties montagneuses, tandis 
que les plantes tropicales les plus magniliques ornent les 
plaines. La principale richesse des habitants consiste 
dans les produits que donne la culture des plantes tropi- 
".ales. La vanille ne crolt à l'Cut saur: ge que dans les fo- 
:ëts de la Jamaïque, l'aloès à Cuba et aux lles Ballama. 
On rencontre l'indigo, le piment, le cacao, la noix de coco, 
le maïs, le tabac et le coton dans la plupart de ces lies. 
L'yam et la patate constituent la nourriture principale des 
nègres. L'arbre  pain a été inlroduit d'Otahiti  la Jurant- 
que. En fait de cérales, on ne cultive sur une large échelle 
que le maïs, et tort peu de [roment ; aussi est-on obligé 
'en tiret du Canada  des Élats-Unis. Les rands moyens 
:l'écl,ange des Indes occideutales sont le sucre et le café. 
La canne à sucre y fut apport/e des Canariesç au seizième 
siècle, par les Espaols, et le cafeier de l'Arabie, surtout par 
les Hollandais et ls Français. On cultive beaucoup de coton 
dans les lies dont le sol est sec et pierreux, mais l'humi- 
(lité rend souvent la récolte incertaine. Avant l'arrivée des 
uropéens dans les Indes occidentales, il ne s'y trouvait 
qu'un petit nombre de quadrnpèdes, et encore de l'espèce 
la plus petite, comme l'agouti, genre intermédiaire entre 
le lapin et le rat, le picari ou cochon du Mexique, Parma- 
dille, l'oposaum et de petites especcs de singes. Les scor- 
pions, les serpenls, les lzards y sont nombreux ; mais on 
ne rencontre de vipëres et de scorpions vemineux qu'à 
la Martinique et à Sainte-Lucie. Le vorace caïman habite 
les eaux tagnantes. On trouve de délicienses tortues à la 
Jamaïque. Les oiseaux sont remarquables par les brillantes 

couleurs de leur plumage. Le perroquet ci le colibri au plu- 
mage étincelant d'or animent les forts ; et d'innombrable 
oiseaux aquatiques peuplent les tirages. Tous les animaux 
domestiques ont été introduits d'Europe, le gros bétail et 
les cheva.x notamment, qui réussissent parfaitement dans 
les lies, riches en berbages, où, comme dans les savannes de 
l'AraCique méridionale, ils errent en bandes nombreuses et 
presque à l'état de nature. 
Les premières ries des Indes occidentales, Bahama, Cuba, 
Haili et Porto-Bleu furent successivemenl dcw.ouvertes par 
Christophe Colomb, / partir de l'année t/9l. Comme on 
pensa y avoh" rencnlré les rudes,/ la recherche desquelles 
Colomb était parti, quand on reconnut qu'elles faisaienl 
partie dçun monde tout nouveau, on leur donna ce nom 
d'l, ndes occidentales pour les distinguer des I ndes orien. 
raies. Le nom d'Anttlles [,t donné aux deux principaux 
groupes d'lies des Indes ooeidentales, d'après une Ile ima- 
ginaire qu'on appelait Antilla. On y trouva deux rases 
d'hommes différentes, les Caraïbes et les Arrowauk% à Cuba, 
ì Haïti, ìPorto-Bico, aux lies Bahama et à laJamïquï; les 
premiers, race belliqueuse, les seconds race douce et pai- 
sible, et diversifiés par des langues différentes. 11 se peut 
que les Caraibes aient exterminé les tribus faibles et pa- 
cifiques, de mtme q,' leur tour ils furent exterminés par 
les Européens. Il n'en reste plus que quelques débri% à la 
Trinité et sur les c6tes du coutineut américain, où ils fu- 
rent transplantés par les Espagnols. 
Ce fut à Cuba que les Espagnols fondèrent leurs pre- 
miers établissements ; et ils en opprimèrent cruellement les 
habitants indigènes, en leur imposant des tributs en or et 
en coton. Le sol ne commença à tre complétement réparti 
(repartimientos) entre le. Européens q,'/ partir de t503. 
Cette organisation eut pour résultat, contrairement aux in- 
tentions du gouvernement espagnol, de rluire les indi- 
gènes en esclavage; mais l'extermination de la race primitive 
ne fut complète qu'au commencement du dix-septième 
siècle. La culture et la population diminuèrent, parce 
les institutions despotiques du gouvernement espagnol 
étaient un obstacle 'au développement de toute force inté- 
rieure. Les gouverneurs d'lies étaient complétement indu - 
pendants du gouvernement. Le commerce fut aussi soumis 
de plus en plus à des entraves de tous genre. Aucun vais- 
seau d'une autre nation n'éta:t almis dans les porls, et les 
colons ne pouvaient commercer qu'avec une seule ville du 
la mère patrie (ce fut d'abord Séville, puis b partir de 1720 
Cadix). Plus tard encore, l'exportation des produils du sol 
fut limitée  ce que pouvaient charger certaines floltes dé- 
terrainCs. Avec un pareil état de choses, force fut  bon 
nombre de coloris d'émigrer, et les lies se dépeuplèrent. 
Toutes les petites villes bties sur les ctes furent détruiles, 
dans le but d'empcher la contrebande. La décadence crois- 
sante de l'Espagne amena une suile d'expéditions hostiles 
entreprises par les autres puissances maritimes ; mais ce fu- 
rent surtout les flibustiers qui, à partir de 1630, firent 
courir aux colonies les plus graves dangers ; et ils finirent 
mème par constituer une espèce d'État.pirate régv]iremeut 
organisé. Quand, au dix-septiëme siècle les autres puiauces 
européennes acquirent aussi des possessions dans les Indes 
occidcntales, on comprit toujours davantage l'immense 
importance de cette partie de l'Amérique pour le commerce 
du monde. Depuis cette époque, et surtout vers le milieu 
du dix-huitième siècle, les colonies des Indes occidentales 
parvinrent à un remarquable desWde prospérité; mais 
alors les puissances maritimes se les disputèrent, et il en 
résulta souvent de longues et sanglantes guerres. 
On évalue aujourd'hui le nmbre des habitants des Indes 
occidentales, approximativemtnt (à cause des renseigne- 
ments fort peu certains qu'on possède sur la population 
réelle des colonies espagnoles et de Haiti) tant6t  envi- 
ron 3,500,000, et tant6t à environ 3,800,000. En admettant 
que ce dernier chiffre fùt exact, on y comprendrait 
2..900,0O0 negres et roui/rires, dont 500,000 environ, tous 



842 INDES OCCIDENTALE$ 
habitant les colonies hollandaises et espagnoles, sont es- 
claves. La population nègre, qui commença à se former 
lors de l'introduction des eselaves d'Afrique, vers 151 I, si 
conserse toujours, indépendamment de sa propre multipli- 
cation, par l'introduction illégale d'esdaves noirs dans les 
colonies espagnoles. Dans les diverses colonies attglaises, 
l'esclavage est complétement aboli depuis 1834 (auge:; E- 
CL&N&6E et T[trE ries LNg6aEs). 11 l'est également à Haïti 
depuis sa révolution et dans les colonies danoises depuis 
1847, de mme que dans les colonies françaies depuis 
188. 11 existe encore dans les autres colonies des Indes 
oc¢identales, od d'ailleurs l'on rencontre beaucoup de nè- 
gres affranchis et dans les forais des nègres ëvadés, autre- 
ment dit aussi rnarrons. Tous ces nègres, i l'exception de 
ceux qui viennent d'être tout récemment importés d'A- 
frique, parlent un dialecte corrompu de la langue du peuple 
sous la domination duquel ils vivent. 
Le nombre d'habitants d'origine européenne des Indus 
occidentales est estimé à 900,000. Parmi les peuples qui 
dominent dans ces différentes ries, les Epaols sont les 
plus nombeeux, environ 800,000 ; viennent ensuite les An- 
glais, 70,000; les Français 30,000, et près de ,500 Hol- 
laodai% sans compter quelques Danois et Suédois. Les ha- 
bitants des tles sont chrétiens, à l'exception des nègres non 
encore convertis, Dans les lies appartenant à l'Espagne, 
ils ont tous, il est vrai, reçu le baptême, mais ils n'en sont 
pas moins restés patens pour cela. Dans les colonies an- 
glaises, hollandaises, et danoises, les missionnaires des frères 
Moraves et des Méthodistes ont beaucoup contribué, par 
leurs prëdications et par les écoles qu'ils ont fondCs,  la 
moralisation des Atric0ins. Les habilantd'origineeuropéenne 
participent généralemeut à la civilisation de leur mère pa- 
trie, quoique le résultat n'en soit qu'extérieur, leur activité 
intcliectuelle étant concentrée sur des occupations toutes 
matérielles. Leurs principales occupations sont la culture 
des terres et le commerce des produits coloniaux. Il n'y 
d'hommes de métiers que pour les besoins les plus indispen- 
sables. Tous les objets fabriqués et tous les articles de luxe 
viennent d'Erope. 
A l'exception de Haiti, qui depuis 1844 comprend deux 
États et sur une superficie de 960 myriamëtres carres une 
population mie 680,000 habitants (850,000 et mme 900,000, 
suivant quelques auteurs), de Pile 31argarita, dépendance 
de Venezuéla, et qui avec quelques Ilots voisins compte 
 1,000 habitants sur 15 myriam, carr. de superficie, toutes les 
autre« lies sont des colonies appartenant à six Ëtats européeus. 
Le. colonies e$paynoles des ltdes occidentules, quoi- 
que n'étant plus aussi vastes qu'autrefois, sont toujours celles 
dont la superficie et la population sont le pins considerables; 
elles comprenn .ni les lies de C u b a et de P o r t o- R i ce, avec 
leurs dépendances, faisant ensemble 1,1538 rnyr. car. avec 
une population de 1,650,000 Imbitant«, dont 800,000 blancs, 
355,000 hommes de couleur libres et eniron 500,000 
claves. 
Les colonies a»glaises des Indus occidentales, d'une 
superficie de 477 myr. car., avec 815,000 hab., dont enviroz 
300,000 nëgres, muIMres et Koul|snuvellement introduits, 
se composent : 1 ° des lies Babama; 2 ° de la J amaïque; 
 des lies Virgin-Cord«, Tortola et Anegada, appartenant 
aux lies ¥ierges et importanles pour le commerce de con- 
trebande, d'une superficie «le 8 myr. car., avec 9,000 habi- 
tants; 4  d'Angmla et de Bwfbada (4 mr. car. et 3,000 
hab.) ; 5 o de Saint-Kitts ou Saint-Christophe; 6 ° de 
evi ou lVewis (8 kil. car., 10,200 itab., dont 1,100 
blancs) ; 7 o 31ontferrat ( 1 kil. car., 7,800 hab. ) ; 8 « d'A n - 
t if ua ;9°de la D oto in  q uc; 10°de Sainte-Lucie (ï myr. 
carrés ci ?,600 hab. ); I 1 ° de Saint-Vincent ( « myr. car., 
28,000 hab. ); 12 ° de la Barbade ; 13 " de la Grenade, 
avec lesGrenadilles; i«o de "robag, o; 15 ° de laTri- 
ni t e, I plu» grandedes petiles Antilles. De tontes les puis- 
.sauces européennes qui po»sèdent des établissemenls dans 
es In,ies occidentales, l'Angleterre est celle qui. prend 

 INDE ORIENTALES 
plus de soins pour que l'administration soit dirigée dans un 
esprit libéral et en mme temps pour que ses possessions 
soient toujours en un état de défense convenable. Le gou- 
verneur d'une tic ou d'un groupe d'lies exerce le pouvoir 
exécutifau nom du souverain; mais partout il lui est adjoint 
un conseil de gouvernement, composé d'habitants de la co- 
lonie. Dans la plupart des colonies anglaises, il existe'une 
assemblée législative divisée en chambre haute et chambre 
basse, la premiëre compos 'ée d'un certain nombre de mem- 
bres à la nomination de la couronne, la seconde de repré- 
senlants Alus par les provinces. La puismce judiciaire y est 
indépendante, et la justice est rendue par diverses cours. 
Lescolonies fi'ançaisesdes lndes occidenlales compren. 
nent une superficie de 3 myr. carr., avec 9.55,700 habi- 
tants, et se composent des grandes llesla blartinique 
et la Guadeloupe et de leurs dépendances, et des lies 
Morie.Galante, les Saintes, la Détrade et la partie nord de 
Saint-Martin, qui fut mise en culture en 1638 par des Fran- 
çais et des Hollandais, puis partagée dix ans plus tard. 
Les colonies hollandaises des lndes occidenlale$ pré- 
sentent ensemble une superficie de IoE mr. car. avec 
28,700 habitants, et se composent des lies : C u r a ç a o, avec 
ses dépendances ; Saint. Eustache, qui n'est guère qu'un 
volcan éteint, d'environ 3 kil. car. de superficie, avec 1,853 
hab., dont !, 100 esclaves, jadis d'une grande importance pour 
la contrebande, et que les Hollandais occupèrent en 1639. ; 
de la partie sud de l'fie Saint-Martin, dont l'etendue totale 
est au plus de 14 kilom, carrés. 
Les colonies danoises des Indus occidentales, d'une 
superficie totale de-5 myr. car., avec 39,614 bab. ( recense- 
ment de 1s51), pour la pins grande partie nègres libres, 
comprennent : l°Sainte-Croiz 1 3 myr. carr. et 3,70 hab.), 
qui tut occupée en 1640 par les flibustiers, puis enleée aux 
Anglais par les Espagnols, lesqtels la endirent au Dane- 
mark en 1733. Elle est fertile et bien cultivée, riche sur- 
tout en ucre et a pour capitale et alCe du gouvernement 
Christlanstadt, avec un bon port, 8,7.56 Imbit., et plusieurs 
missions de Herrnhutes. 2 ° S a i n t-T h o m a s; 3° Sai,t-Jean 
et une partie de lïle des Crabes (7 kil. carr. et 2,28 hab.), 
deux établissements de missions, avec un port qui, de mëme 
que ceux de Snint-Thomas, est depuis 18t5 ouvert comme 
port franc à toutes les nations. 
La Suède ne possède que l'ilot de S a i n t- B a r t b é I e m y 
(5 kilom, car. et suivant d'autres 27 kil. carré, avec 
0,000 habitants). Consultez Montgomery Martin, The His- 
tory, 9eo9roph/ and stotistics othe West-lndics (5 vol. 
Londces, 1835); Duperré, IVotices stalisti9ues sur les 
loni, es. françqises ( 4 vol..,paris, 1840 ). 
IDES OP, IENTALÉ, S. On comprend sous cette 
dénomination, et dans son sens le plus large, toutes les 
contrées de l'Asie situées au sud-est du plateau de 1' I r  n, au 
sud du plateau du Thibet et  l'ouest de la Chine, de m6me 
que les lies de l'ouCn Indien qui les entourent, et qu'on ap- 
pelle aussi l'Archipel Indien ou Oriental. AppelCs tout 
simplement In de par les anciens, on leur donna ce nom 
d'lndes orientales pour le..« distinguer des lies de l'Amérique 
auxquelles Colomb avait donné le nom d'lndes occiden- 
/nies. Ce territoire est divisé en lnde en deçà du Gange, 
Indu au delà du Gange, et lles des Indes orientales. 
L'Indu en deçà du Gange (ainsi appelée parce que le 
delta du Gange et du Brahmapoutra la sépare de l'Indu 
au delà du Gange, ou pre.squ'lle située par delà le Gange, 
qui est h bien dire rlnde orientale), forme un carré irré- 
gulier, dont les angles sont dirig6s vers les quatre points 
cardinaux, tandis que ses c6tés sont limités au nord-est par 
les monts B '." ma lay a, an nord-otest par Plndns, der- 
rière lequel s'élève abruptement le plateau du Khorassfin, 
au sud-est par te golfe du Bengale, et an sud-ouest par la 
mer des Indus ou mer Persique. Ce carré, d'nne super- 
ficie d'envi¢on 46,000 mvriamètres carré., e»t divisé de 
nouveau, en raison de sa'constitution physique même, ca 
deux parties principales, formant de grands triangles iné- 



,-aux et séparés par uneligne à peu près droite se dirigeant de 
l'est à l'ouest et parallèlement aux monts ¥indhya, depuis 
l'embouchure du Gange jusqu'à celle de i'Iazlus, et aux- 
quelles on donne les noms d'ltindostan et de Dekan. 
L'Hindostan, c'est-à-dke le pays des Hindous, le plus 
zeptentrional de ces deux triangles, forme dans la plus 
grande partie de sa surface (qui est d'environ 28,000 myria- 
mètresearrés) une immense vallée, qui ne prend le caractère 
de pays de montagnes que dans sa partie nord-est, laquelle 
forme le] versant sud-ouest de l'Himalaya, et d'une manière 
moins marquée dans sa partie méridionale, laquelle forme 
le versant nord des monts ¥indhya, qui la séparent du Dé- 
kan. Il ne se compose donc que d'une vaste plaine s'étendant 
des bouches du Gange à celles de l'Indus, et le long de 
ce fleuve, sur sa rive gauche, jusqu'aux régions nord-ouest 
de l'Himalaya. L'Flindostan comprend dès lors tout le bas- 
sin du Gange et la gauche du bassin de l'Indus, que ne 
sépare d'ailleurs pas une ligne de partage bien prononcée, 
de sorte que les contrées basses de l'Indus et du Gange 
forment une plaine non interrompue, une seule et mme 
• "allée, dont l'extrémité orientale est limitée par le Brahma- 
pourra, après que ce cours d'eau s'est frayé passage ì tra- 
vers les monts Flimalala. En revanche, ces deux bassins 
,liffèrent essentiellement l'un de l'a,tre par la nature de 
leur sol. En effet, tandis que la plaine du Gange offre 
l'exemple d'une grande fertilité et d'un riche système d'ir- 
rigation, le sol arrosé par l'Indus et les al'fluents qu'il re. 
çoit su r sa rive gauche est en général beaucoup plus pauvre : 
etce n'est guère que dans le Pend job qu'il est un pe, 
mieux cultivé. Partout ailleurs on y rencontre de nom- 
breuses parties sablonnet]se et incuites, dont la plus 
etendue est le grand désert salé de Thurr, qui à l'est d, 
territoire sujet aux inoudations de l'Indus s'étend parallë- 
lement au cours de ce fleuve et dans la direction du nord, 
avec uue larger moyenne de 15 à 30 m)riamètres sur 
une longueur de 70 myriamètres au nord du Runn, abais- 
sement marécageux du sol de 1,400 mlriamètres earrés de 
superficie, situéau snd-est de l'embouchure de l'Indus. 
Le Delon, c'est-à-dire le pals situé à droite, et auquel 
ou donnerait à plus juste titre le nom de presqu'lle indienne 
et d'Inde en deç du Gange, q,i est rattaché par son c6té 
septentrional à l'Hindostan, s'étend de là en forme de tri- 
ane jusqu'à ce qu'il se termine au sud en une pointe au 
sol bas et marécageux. Il comprend avec l'lle de Ceylan, qui 
en lait partie, une surface d'environ 18,000 myriamètres car- 
rés, et constitue un plateau bordé par une ceinture de mon- 
tagnes. Les monts ¥indhya, fort peu accessibles et par 
suite demenrés assez imparfaitement connus jusqu'à ce jour, 
en forment le rebord septentrional, le long des limites de 
l'Hindostan,.base du triangle du Dekan; ils s'étendent de- 
puis la presqu'lle de Gouzou rate, située au sud-est de 
l'embouchure de l'Indus, dans la direction de l'ouest à l'est, 
jnsqu'aux pays où se trouvent platC les sources du Ner- 
budda, et delà envoient encore quelques ramifieations peu 
élevées jusqu'au Gange inférieur. Ils se composent de 
plusieurs chalnes parallèles, qui ne se rattachent qu'à l'est, 
prës d sources du erbudda, avec l'intérieur du Dekan, 
par des montagnes en forme de plateaux et hautes de 6 à 
700 mètres ; tandis qu'a l'ouest ils s'abaissent très-abrup- 
lement vers la vallée basse et profondëment creusée du 
lerbudda, qui, après avoir coulé dans la direction de l'est 
à l'ouest, va se jeter dans le golfe de Cambay. Sur le rebord 
du cOté ouest et sud-est du triangle q.e forme le Dekan 
s'Cèvent, au contraire, les Gares de l'ouest et de l'est, ainsi 
apl»elés des étroits défilés (Gares) par lesquels on traverse 
ces montagnes. Les Gates de l'ouest, séparés an nord par 
une solution de continuité de l'extrémité occidentale des 
monts Vindhya, commencent au sud des emboucbnres du 
Ierbudda et du Tapty placées précisément dans cette solu. 
lion de continuité ; ils se prolongent ensuite, couverts d'é- 
poisses forèts, en formant une crête dont la hauteur varie 
entre 700 et 1,200 mètres avec des pics atteignant une al- 

OP, IENTALES 3 4  
titude de 2,000 mètres, le long de la c6te du llalabar, 
séparés de la mer seulement pat'une plaine étroite, ju¢.qu'au 
onzième degré de latitude nord. La pente vers la cOte est 
roide et escarpée; mais à l'est elle est douce et insensible. 
Léévatiou du plateau intérieur peut tre évaluée de 7 à 
800 mètres. L'intérieur du Dekan n'est pas d'ailleurs un 
plateau proprement dit; mais sur sa base, qui est très-élevée, 
se trouvent quelques petites chalnes suivant diverses di- 
rections et atteignant, dit-on, ,ne ha,teur absolue de t4 à 
1,500 mètres. Autant donc on trouve de difficults à gravir 
la cOte du bialabar, autant on la redescend sans peine et 
insensiblement du cté de l'est, jusqu'à ce qu'on atteigne 
les Ghattes ou Gares orientaux, dont le versant est conduit 
aux plaines de la c6tede Cholomandel, vulgairement appelée 
Coromandel. Elles ne se composent que d'une suite de 
montagnes peu élevées, séparées par de nombreuses solu- 
tions de continuité, commençant sur la rive droite du Marra- 
haddi et longeant la cOte de Coromandel  une distance 
de 10 myriamëtres de la mer. Quoiq,e s'elevaut parfois 
à un maximun de l,OOOà 1,100 mëtres, ce n'est que du 
c6té de la cbte qu'elles apparaissent à l'Ci de montagnes; 
car elles forment moins un soulèvement particulier du sol 
que le versant oriental de tout le plateau. Par 12 ° de latitude 
nord, les extrémités méridionales des GaUles de l'est et de 
l'ouest sont unies par la montae des lVeil-Giri ou Mon- 
rognes blenes, qui atteignent une altitude de 2,700 mètres. 
Au sud-est, cette montagne s'abaisse de la manière la pics 
soudaine et la plus abrupte, en formant un renfoncement 
appelé Cap, espèce de profonde crevasse jetée à travers 
la montagne, qui parcourt eu forme de sinueuse vallée 
l'extrémité méridionale de la presqu'lle, dans la direc- 
tion de l'ouest à l'est et d'une mer à l'antre, et relie ainsi 
les cOtes du Coromandel à celles du blalabar. Au sud du 
Gap, la montagne s'élève de nouveau abruptement, en for- 
mant une masse compacte de 2,300 mètres de hautenr, 
avec des pics plus élevés encore, et remplissant toute 
la partie occidentale de l'extrémité mridionale de la pé- 
ninsule jusqu'au cap Comorin, qui en est le promontoire 
sitné le plus au sud. A l'exception du lerbudda et du Tapty, 
dont il a été lait mention plus haut, les grands cours 
d'eau du Dekan ot tos lenrssources au pied oriental des 
Gattes de l'ouest, parcourent tous eu se dirigeant du nord- 
ouest au sud-est toute la largeur du plateau, se frayent en- 
suite passage à travers les GaUles de l'est, et constituent 
à leur embouchure dans le golfe du Bengale des dépres- 
sious de sol considérables, par exemple le 5tahanaddy, le 
Godavery, le Kistna et le Cavery. La muraille de rochers 
esearpés des GaUles de l'ouest n'est, au contraire, franchie 
que par de petits cours d'eau, et la plupart en formant 
d'imposantes cataractes. Le système d'irrigation de tout ce 
plateau est d'ailleurs d'une richesse extrëme ; aussi présente- 
t-il, en raison del'heureuse nature de son sol, le dévelop- 
pement de la plus luxuriante végétation, et u'y rencontre- 
t-on nulle part de steppes ni de landes. 
En ce qui touche la constitution physique des Indes orien- 
raies comme du reste de l'Asie méridionale, il faut dis- 
tinguer les voltC et tes cales, réons ctzaudes et htmides, 
des pays de montagnes, où l'air est plus froid. Le climat des 
plaines de l'Hindostan et des basses vallíes fluviales de l'Inde 
au delà du Gange, de mme que de toutes les cOtes basses et 
plates des Indes orientales, diffère donc compiétement de 
celui des hantes terres des régions montagneuses, tant de 
celles des deux presqu'iles que de ces des |les et de celles 
de l'Himalaa. Ces basses régions sont earactérisées par 
tous les phénomènes physiques du monde des tropiques, 
par des chaleurs accablantes et par des pluies torrentielles. 
Mais si de ces profondes va,ées on puètre jusque dans 
la région des montag, es, l'air devient alors plu» frais et plus 
sec, en mëme temps que disparait le climat tropical pro- 
prement dit. Ceci est snrtout vrai du plateau du Dekan, 
qui, comme celui du Mexique, jouit du plus délicieux climat. 
On n'y souffre ni de l'ardeur tropicale ni des froids et dcs 



344 
neiges; e i n'y a jamais que les pics les plus élevées des mon- 
rgnes qui blanchissent en hiver. La rose et la pluie y ra- 
fralcbissent l'atmosphère, et il y règne pour ainsi dire un 
printemps perpétuel. Les saisons et les climats de la partie 
sud des Indes orientales située en deçà du tropique du Can- 
cer sontdéterminsd'une manièreremarquableparles mous- 
sons. Les rcoussons du sud-ouest apportent avec elles des 
brouillards, des ouragans et des pluies tropicales pellr la 
c6te occidentale de l'lnde en deçà du Gange, oi les Gattes 
de l'ouest forment la ligne de partage de la tempErature, en 
mettant obstacle à ce que les nuages apportés de la mer 
par les moussons allient plus loin. Pendant qu'ils s'abattent 
sur la cte du Maiabar, où la saison des pluies dure de 
mai à septembre, la c6te opposée, celle du Coromandel, jouit 
de la belle saison sèche. Ce n'est que lentement que la 
masse des nuages parvient à lranchir la haute muraille des 
Gattes de l'ouest, et alors commence la saison des pluies 
pour le plateau du Dekan. Enfin, quand finit la mousson 
du sud-ouest, après de furienses rempotes, accompagne- 
ment habituel de la transformation de cette mousson en 
mousson du nord-est, qui commence alors et chasse les nuages 
vers les c6tes orienlaies de l'Inde en deo du Gange, la saison 
,les pluies commence pour la c6te de Coromandel et y 
dure d'octobre à janvier; pendant qu'à son tour .la c6tedu 
Malabar jouit de sa belle saison sèche, et que le plateau, 
oi il n'y a point de saison régulièredes pluies, est rafraichi 
par quelques pluies légères. On observe les mmes phéno- 
mènes pour l'arrivée des saisons dans l'Inde en deçà du 
Gange et dans les lles des Indes rientales. Il y a une dif- 
lérence non moins tranchée entre les climats dans les vallées 
et les plateaux des Imles orientales, que pour ce qui est 
de la sic animale et végétale. 
Si l'on descend le versant méridional de l'Himalaya, on 
est subitement exposé à une tout autre nature. Du froid 
et de l'air pur d'une contrée alpestre on arrive tout à coup 
sous la chaleur tropicale et dans l'atmosphère humide du 
Bengale, contrée où les cours d'eau sont si vastes et si 
nombreux ; et des gracieuses f6rèts où dominent le bouleau, 
le pin, etc., on est transporté dans les forèts tropica]es qui 
couvrent le pied de la montagne, ainsi que dans les bois 
de palmiers et de rosiers de l'Hindostan. Mais là où l'eau 
manque, on voit se produire, mème dans les vallées de 
l'Hindostan, des steppes et des landes que dessèchent encore 
davantage des vents secs et brillants. Il en est ainsi daus 
les plaines qui s'étendent le long de l'Indus et des affluents 
de sa rive gauche. En revanche, la végétation du Bengale, 
des vallées et des fertiles c6tes des deux presqu'iles dont 
se composent les Indes orientales, de mme que celle des 
iles qui en dépeudent, placées sous l'influence du soleil 
des tropiques et de l'humidité de l'Océan, présente tout le 
caractère grandiose de celle du Brésil. On y trouve des 
arbres qui ont plus de 33 m6tres de hauteur, des fougères 
de la taille de nos arbres forestiers, des herbes dont la tige 
comme celle du bambou, ressemhle à des arbres creux, des 
forais aussi diverses que riches en bois de sandal et d'ebène, 
bois de tëak, dragonnières, palmiers de tous les gevxes 
et particuliers à ces conteC, par exemple le palmier om- 
bellifère, le palmier-chou et le palmier-sagou, dont les deux 
derniers servent de plantes alimentaires ; et il en est de 
mme du palmier à cocus. Sous ce rapport, le bananier et 
l'arbre à pain sont aussi d'une grande utilité. Mais ce qui 
distingue surtout les Indes urientales, c'est la diversité de 
leurs arbres et de leurs plantes aromatiques, qui y crois- 
sent sans aucune culture et en immenses quantités. On peut 
citer notamment le muscadier, le cannellier, le giroflier, en 
mme temps que de nombreuses espèces de poivriers. On 
peut en dire autant du r6gne animal. Les forèts maréca- 
genses situées au pied de l'Himalaya, sur les bords du 
Gange et au pied du plateau du Dekan, les taillis des forêts 
vierges de l'Inde au delà du Gange et des lies, de Celan 
notamment, et les immenses plantations du riz du Benga- 
le, etc., servent deretraiteà l'éléphant, qui est beaucoup plus 

INDES ORIEN'_ 
beau et beaucoup plus grand qu'en Attique, et qui, en raison 
de la facilité avec laquelle on l'apprivoise, est devenu nn 
animal domestique d'une grande utilité dans toutes les 
Indes orientales. On trouve également dans ce« forts, in- 
dépendamment d'une foule d'espèce« différentes de singes, 
le tigre royal, le lion, la panthère, le rbinocéros, des san- 
gliers et des bulfles de taille colossale, et d'aulres bles sau- 
vages qui l'emportent en ce qui est de la Iorce et de la fro, 
cité sur les animaux analogues de l'AraCique, comme sous 
le rapport de la taille sur ceux de l'Attique, en mme 
temps que des serpent.% des crocodiles et d'autres amphibies, 
qui ne le cèdent en rien, soit pour la force, soit pour I'- 
nere du venin, à ceux des rgions tropicales de i'Amrique. 
Les céréales d'Europe et celles des tropiques russissent 
également bien dans les parties cultivées de l'Hindostan, de 
mme que le coton, le sucre, le café, l'indigo, etc., dont la 
cullure devient de plus en plus exclusive dans les régions 
basses à mesure qu'on va plus avant vers le sud, et qui ont 
fait des lies des Indes orientales le pays producteur par 
excellence des denrées diles coloniales. Cependant, c'est 
le riz qui constitue encore l'objet alimentaire le plus re- 
pandu dans toutes Indes orienta]es, de mme que c'est. 
la plante la plus généralement cultivée dans les conlres 
basses. Dans les régions cuitivées on trouve tous les ani- 
maux domestiques d'Europe, à l'exception du cheval, qui y 
est aez rare; depuis longtemps le buffle et le chameau 
y sont devenus indigènes. A la diflrence des conteCs basses, 
que nous avons eu jusqu'à présent occasion de caractériser, 
l'empreinte tropicale qu'y ont la végétation et le règne 
animal s'y affaiblit de plus en plus ì mesure qu'on gravit le 
plateau. On , trouve des torèts de mangliers et de canelliers, 
le mnscadier, le giroflier et l'arbre à pain. A une élévation 
de 350 à 500 mëtrrs, le palmier à cocos disparalt ; à !,000 
mètres, le bananier, et la forme si caractéristique du pal- 
mier ne s'élève guère au delà. En revanche, on y rencontre 
d'épaisses forSts d'arbres levs, conservant pour la plupart 
constamment leur verdure, et la nature y déploie es richesses 
les plus immenses et les plus variées. Ces hautes régions, 
d'ailleurs, ne se perlent pas moins bien à la culture des 
plantes et des arbres aromatiques, le Dekan notamment. 
C'est là qu'on voit les céréales de l'Europe cultivées en mme 
temps que le café et le coton, et les espèces de fruits les 
plus délicats à cté des fruits des tropiques. 
En ce qui touche le nombre des habitants, on peut dire 
que l'Inde en deçà du Gange est un des pays les plus penpiés 
de i'Asie; car sa population ne s'élève pas à moins de 152 
millions d'mes. Les H i n d ou s proprement dits en Iorment 
la grande masse; ils habitent surtout les plaines du Gange, 
et on les rencontre ansi sur les diverses ¢Stes de la pé- 
ninsule : mais dans ces différentes contres, ils forment 
toujours de castes différant entre elles d'origine, de langage 
et de religion. A ctté d'eux existent en outre une foule depeu- 
plades tout aussi étrangères les unes aux autres, en ce qui 
est des nsages, de la religion, de la langue et de la confor- 
mation physique, et qui vraisemblablement sont les 
niers débfis des anciens habitants primitifs, restés jusqu'à 
ce jour purs de tout mélange avec la race des envahisseurs 
et des conquérants. Ordinairement iii habitent les endroits les 
plus inaccessibles des montagnes et des forSts, tandis que 
les vallées et les plaines, surtout dans l'Hindostan, sont 
habitC par les Hindous proprement dits. Mais partout ces 
peuples de montagnes et de forts, qu'il ne faut pas con- 
fondre avec /es Hindous, sont plus sauvages et plus gros- 
siers que ceux-ci, qui ont fondé dans les pays de plaines et 
sur les c6tes une civilisation particulière, et sont ainsi 
devenus, à propremeut parler, la nation civilisée de PAsie 
méridionale. Parmi les plus remarquables de ces peuplad 
plus ou moins étrangëres aux Hindons, dont venoas de par- 
ier, nous citerons les Rarnousts, fixes dans les Gattes, anx 
environs de Pounah ; les Pouharris, qui vivent de la chasse 
et de l'agriculture dans les sauvages contrées servant de 
fi'ontières au Bengale, au Behar et au Gondwana; les 



II'DES OBIENTALES 
d41da.$, race absolument indentique  celle des nègres, 
fixLts aux sources du Nerbudda; les Pindaries, qui vivent 
adonnés au brigandage, dans les parties les plus inaccessibles 
des monts Vindhya, et qui ont embrassé l'islamisme ; les 
Bhils, caste méprisée, qui vivent disséminés en hardes diver- 
ses et exercent gnéralement le brigandage dans les monts 
blalwas, dans le pays des Badjpoutes et dans le Gouzou- 
rate; les Chonds ou Gonds, qui forment la population 
autochtltone au nord du pays des Mahrattes, et surtout 
dans le Gondwana, dont ils sont les habilants; les Koles, les 
Kands et les Sauts, très-semblables à ces derniers et a)'ant 
vraisemblablement de grandes affinités d'origine, llxés dans 
les montagnes qui servent de limites  la province d'O- 
rissa ; les Koulis, établis sur la rive septentrionale du 
davery ; les Mianas, peuples mahomëtans, qui habilent 
aujottrd'bui paisiblement les environs de Koutsch; les 
Wandas et les Singalais, fixés dans l'ile de Ceillan ; enfin, 
un grand nombre de tribus réfugiées dans les monts Hi- 
rnalaya, par exemple les bouddbistes lVirwaris, dans le 
paul ; les Bhotijas, dans le Bhotn ; les Dores, en tout sem- 
blables aux nègres, dans les montagnes de Kamaoun; 
les habitants de Bissahir, citez lesquels rëgne la polyan- 
drie; les Kanawaris, peuplades agricoles, qui habitent le 
Setledge supérieur ; les Leptchas, les tlo«rmis, les Lin- 
bous, etc., établis dans les régions montagneuses de l'Hima- 
laya. Indépendamment de tontes ces popnlations autochthones 
de l'rude, que souvent l'on confond sous la dénomination 
génériqne d'Hindous, il existe encore aux lndes orientales 
plusieurs peuplades qui y émigrèrent dans les temps histo- 
riques. En premiëre ligne, il faut citer les Mongoles, des- 
cendants des "t'atares mahométans, qu'on appelle les con- 
quérants de l'Inde, généralemeut d'origine turco-persane, 
et qui de nos jours mème ne connaissent pas d'autre lan- 
gue que le persan. Plus vigoureux, plus grands, plus bel- 
liqueux que les Hindous, ils étaient devenus les maltres du 
pays, et ils ont propagé l'islamisme mëme dans la population 
autocbthone, avec laquelle ils se sont beaucoup mèlës. A près 
eux viennent les Af9hans (voile'. AFCnXlS'r,), que la 
conquéte a aussi mis en possession du territoire qu'ils bu- 
bilent, et que dans les Indes orientales on al»pelle liohillas, 
de méme que les Arabes qui, mahometans comme eux, se 
trouvent dans les villes du Malabar, à Calicut, à Gon, à Gou- 
zourate et dans le Moultàn, et dont les descendants, prove- 
nant de leur mélange avec les Hindous, sont appelés ltlapou- 
lers ou Moplas. Il faut encore mentionner les Parsis ( voyez. 
Gvt.nes) ainsi que les Juifs, qu'on prétend ttre arrivés dans 
l'Inde à l'époque de la captivité de Babylone, qu'on ren- 
contre comme agriculteurs, ouvriers ou encore marcfiands 
dans diverses parties du Malabar, et qu'on appelle les Jui/s 
blancs, pour les distinguer des Juifs noirs, qui, descen- 
dant peut-Cre d'indigènes convertis au judaisme, sont 
aujourd'hui répandus dans toute la péninsule. Enfin, il ne 
faut pas non plus oublier les ch'ítiens qui résident dans 
l'Inde en deçà du Gange; ils se composent, en partie, de chrd- 
tiens de saint Thomas ou/V es t o r i e n s, au Malabar; de pro- 
sélyes indiens-c.atholiqaes, dans les colonies françaises et por- 
tugaises; et de protestants, le plus généralement au Malabar; 
mais ilsne forment guère ensemble qu'un tolal de 1,100,000 
/lmes, y compris les Armmiens (rotiez APam), qui vivent 
dans le pays comme marchands, un petit nombre d'Abjssins 
(voile . Antssmr), et les Européens établis dans l'lnde. 
En ce qui est de la civilisation de l'Inde en deç du Gange, 
il est tout naturel, en raison de la diversité infinie des 
peuples qui l'habitent, qu'elle diffère extrémeme»t selon 
les lieux et les rases. S'il s'agit de la civilisation des Hindous, 
la plus répandue de cq rases, voici ce qu'on en peut dire 
d'une manière générale : toute la civilisation des Hindous, 
tout leur état social et moral, leur liftCature, dont Pimpor- 
tance est extrgme ( VOile'. Itessgs [ Langue et Littérature ], 
leurs beaux arts (voile« lntEssr.s [Peinture, Sculpture, 
architecture] ), reposent sur leur religion, et se sont déve- 
ioppés de la manière la plus intime avec elle (voile: lt- 
»lCr. n£ x coswns. -- v. x. 

345 
noEsre [Beligion]}. Cependant le culte de Brabma n'est 
nullement la religion unique de tous les peuples hindou% 
généralement parlant, puisqu'il en est beaucoup qui ott 
conservé leurs antiques religions primitives, la plupart 
de nature pol)théiste. Il ne domine, au contraire, que 
parmi les populations des contrées les plus accessibles, 
et surtout des villes ; mais lb mëme il se présente avec les 
différences les plus trancbées; car le nombre des sectes 
qu'il compte dans son sein est très-considérable. D'autres 
peuples bindous, par exemple à Ceylan et dans l'Himalaya, 
pratiquent le bouddhisme (rotiez. Bonnux ). En outre, un 
grand nombre d'Hindous placés sous la domination tatare 
ont etWcontraints d'embrasser l'islamisme, qui, après le 
brabmanisme, est la religion la plus répandue dans l'lnde 
en deçà du Gange. On calcule qu'il est professé par un I,ui- 
tième de la population totale. C'est ainsi que l'Hindouo 
race douce, timide et raffinée, vit après mille années envi- 
ron d'esclavage sous la domination de conquérants étran- 
gers, qui sans doute ont réussi a l'amollir, a le rendre indo- 
lent et rampant, mais qui ri°ont pu lui enlever le sentiment 
de sa dignité intellectuelle; conservant, au milieu des 
ruines de son antique civilisation et de sa gloire passée, son 
antique foi avec une persévérance qui étonne l'observateur; 
menant une vie contemplative, vegétative, toute dans les 
domaines de l'imagination, qui le rend grand dans la souf- 
france et la constance, mais qui lui enlève aussi tout es- 
pair de parvenir jamais à briser lui-mëme ses lers. Que si 
en effet on a vu de nos jours quelques individualités, s'é- 
levant au-dessus de leur nation, s'efforcer d'acquérir la ci- 
vilisation plus parfaite des Européens et travailler à la ré- 
surrection de leur nationalité, les masses n'en demeurent 
pas moins dans leur antique esclavage, fidèles à leurs an- 
tiques superstitions et à leurs vieilles idolatries. Il ne faut 
donc pas s'étonner que le christianisme n'ait jusqu'à ce 
jour fait que si peu de progrès parmi eux ; et il est probable 
qu'il n'en lera pas davantage tant que le mode d'activité 
employé jusque ici par les missionnaires restera le mème. 11 
est plut6t permis d'espérer que la puissance générale et 
purement humaine de la civilisat'ion chrétienne et des mœurs 
européennes exercera à la longue une influence dissolvante 
sur l'opini;Rre systëme de la division en castes, de l'antique 
relion et de l'antique civilisation hindoues. 
La civilisation industrielle de l'Inde en deçh du Gang 
est tout aussi ancienne que sa c!vilisation intellectuelle, bien 
que toutes ses populations n'y participent point indtstinc- 
tement. Il en est beaucoup, surtout celles qui sont demeu- 
rées à l'état sauvage, dans les régions montagneuses, qui 
sivent encore tout à lait h l'Cut de nature, comme pas- 
teurs, comme chasseurs ou comme brigands, ne prati- 
quant point l'agriculture, et quelquefois mème ne donnant 
aucun soin à l'ëlëve du bétail. E revanche les Hindous 
proprement dits, dans les anciennes contrées cultivées des 
bords du Gange, du Pendjab, du Kaschmir, des cètes de 
la presqu'lle et de Ceylan, n'ont pas seulement porte la cul- 
ture du sol, mais aussi les diffërents métiers techniques a 
un degré de perfeclion qui sous beaucoup de rapports a 
servi de modèle aux nations plus jeunes de l'ancien monde. 
L'incomparable richesse de produits de leur sol de mme 
que leur industrie ont donc fait de bonne fieure du pays 
qu'ils habitent l'ue «les plus riches contrées de la terre. Les 
guerres dévastatrices, soutenues tant à l'intërieur qu'à l'ex- 
térieur, qui depuis près de mille ans sans interruption ont 
affligé et ravagé l'lnde en deçà du Gange ont insensible- 
ment fait décboir son agriculture et smlout son indush'ie 
de leur antique prospërité ; l'emploi des machines et l'Cru- 
sanie concurrence des mana factures anglaises leur ont porté 
le coup de grAce, quotque dans ces derrfiers temp l'Angle- 
terre, n'obéissant en cela qu'a ses intéréts, ait beaucoup fait 
pour y ranimer l'agriculture, i;éanmoins, comme on a pu 
s'en convaincre lors de l'Exposition un iverselle 
de Londres, ce pays conserve encore de brillants débris de 
son antique activité industrielle ; et il fournit aujourd'hui • 



346 
dans des proportions toujours croissantes, une incalculable 
quantité de produiLs naturels, dont l'exportation va chaque 
jours en augmentant. Parmi les plus.remarquables de ces 
produits, il faut mentionner le riz et les autres espèces de 
céréales, le coton, l'indigo, l'opium, le sucre, le tabac le 
café, le lhé dans PAssam le poivre, la cannelle à Ceylan 
et divers autres aromates et épices, des bois pfécieux, de 
la soie, du fer dans le Koutsh, des diamants  Golconde 
et dans le Bundelkhound, des chameaux, des éléphant« et. 
aulres animaux domestiques, parmi lesquels la chèvre 
de Kaschmir est d'une haute importance. En raison de 
cette immense richesse de produits, le commerce d'expor* 
ration l'emporte naturellement de beaucoup sur le com- 
merce d'importation. En t848=1850 la masse totale des 
exportations pour l'Angleterre et les autres pays de la terre 
s'Ceva, d'après les rapports officiels de l'IndioE-llouse, à 
environ 450 millions de Iranc, tandis que ls imporlations 
n'atteignirent guère que le cl*ifle de 330 millDns. En fait 
de produits d'art, on peut citer les tissus de coton de Dacca, 
Madras, Surate, Lahore, AmriLir, etc., les tissus de soie 
de Mourschedabad, Bénarès, Surale, Moultfin, etc., les 
tissus de laine de Lahore et de Kaschmir, leurs mousselines, 
leurs draps de soie, leurs chales et leurs tapis, pour l'ex- 
cellence et la finesse de la fabrication, pour l'clat des cou- 
leurs; et qui, bien que d'un prix assez élevé et de mau- 
vais go0t, n'en conservent pas moins toujours leur vieille 
réputation ; en outre, les armuriers, qui, habiles à fabriquer 
l'acier et travaillant le fer d'une manière toute particuliêre, 
li¢rent à la consons-nation une foule d'articles d'excellenle 
qualité. On explore aujourd'hui le pays dans toute« les di- 
rections, afin d'y dcouvrir de nouvelles ressources, de nou- 
veaux objels d'exportation et ajouler  la masse de ceux 
qu'on possède déj. Ce que nous disons là s'applique surtout 
aux cotons et aux laines. 
Au point de vue politique, l'Inde en deà du Gange se 
divise en pays placés immédiatement sous la domination 
européenne, en contrées qui en relèvent indilectement, et 
en Ëtats protegés ou tenus à l'état de vasselage par les Eu- 
ropéens. 
Les possessions immédiates de l'Angleterre, ou l'empire 
lndu-britanniqt«e, sont divisées en quatre go,,vernements 
• ulgairement appelés prsidences, à savoir : 1 ° le Ue n- 
ga I e, cbef-lieu C a I eut ta ; 2 ° les provinces du nord-ouest, 
placées sous les ordres d'un vice-gouverneur, nommé par 
le gou erneur genoeral, chef-lieu A g r a ; 3 ° ,I a d r a s  et 
4 ° Bu m bay, avec les villes du méme nom pour chefs-lieqx. 
Quelques contres, telles que le Pendjab et les Eastcrn 
straits setleraents (étabIissements situés dans les eauc de 
l'et), Pinang, la province de Wellesley, Singapore et Ma- 
laces, sont placées sous l'autorité immédiate du gouverneur 
général. Les Etals relevant indirectement de la puissance 
anglaise diffèrent suivant les engagements réciproquement 
pris et les trailés. TantOt ces lats, tenus a titre de fiefs, 
ne sont pas astreints à d'antre obligation que celle de ne pas 
admettre à leur service des Européens et des Américains, et 
aussi d' laisser séjourner des résidents anglais; tanlOt 
ils sont tenus de recevoir des garnisons anglaises et d'ac- 
quitter certaines charges féodales ; d'autres fois ils doi- 
vent se soumettre à toute espèce d'inlervention dans leur 
administration intérieure et obëir aveuglément aux ,,¢dres 
du gouverneur général. Mais I;a où des traités de ce genre 
n'existent point, les autorités anglaises disposent au besoin 
et sans conditiuns de toutes les ressources du pays. Elles 
peuvent méme supprimer l'indëpendance nominale de ces 
Êtats et les incorporer purement et simplement au reste des 
possessions britanniques, commecela est déjà arrivé et comme 
tr-certainement cela arrivera encore plus d'une fois. En 
revanche i'Angleterre a pris l'engagement de protçer et de 
dO'endre ses vassaux contre leurs ennemi.% tant lutCieurs 
qu'extérieurs, et de leur garantir la paisible jouissance des 
droits qui leur sont reconnus. 
On évalue la superficie de la présidence du Bengale et 

LNDES ORIENTALES 
de celle d'Agra à environ t t,800 myriamètres carré.s, avec 7 t 
millions d'habitants; celle de la présidence de Madras, à 4,800 
myriamètres carrés, avec 16 millions d'habitants; et celle 
'.de la présidence de Bombay, ,3,700 myriamètres, carrés avec 
t0, 500,000 habitants. Il tant y ajouter, dans l'fade au delà 
du Gange, ,4ssam ( 600 myr. c.arr, et 102,500 hab. ), IVnteaA 
et Cachar (326 myr. car. et 30,000 bab.), Arakan (535 
myr. car. et 230,000 babitants), la c0te de Tenasserim, 
Martaban, Tavo V, etc. (I,055 myr. car. et 850,000 ha}. , 
et depuis le 20 décembre t852 le Pgu (population, t mil- 
lion d'Ames ). Les établissements du détroit de Malakka con- 
tiennent, sur une superficie de 52 myriamètres carrés, une 
population de 3o0,o00 mes. L'lle de Ceylan est une 
possession immédiate de la couronne, de 800 rnyriamètres 
carrés de superficie, avec 1,500,000 babitants. Parmi les 
États et les princes réduits à l'état de vasselage qui recon- 
naissaient en 1853 les droits de souveraineté de la Com- 
pagnie des Indes orientales (représentant ensemble une 
superficie d'environ 545,000 kilomètres carrés, avec une po- 
pulation totale de 43,767,159 habitants et 10,279,000 liv. 
st. de revenu ), les suivants se trouvaient placés directement 
sous les ordres du gouverneur gén_ral : le 'epaug (en- 
viron 5t,500 kil. car., avec 1,9i0,000 hab. et S0,000 liv. 
st. de revenu); Aoudh (23,700 kil. car.; 5 millions d'ha- 
bitants, 1,500,000 liv. st. de revenu); le lïzarn d'llçder- 
abad (95,000 kil. car., 10,666,000 hab. et 2 millions s. 
de revenu) ; IVagpore ou Berar(î6,O00 kil. car., 4,650,000 
hab., 00,000 liv. st. de revenu); Scindiah ou Gwalior 
(33,000 kil. car., 3,228,000 bab., 800,000 liv. st. de re- 
venu); Bopal (6,764 kil. car., 663,656 hab., 220,000 liv. 
st. de revenu); lloI]zr (8,300 kil. car., 815,000 hab.; 
220»000 liv. st. de revenu); Golab-Sin9h (5,23 kil. car.,. 
750,000 hab., 400,000 livres st. de revenu); Bhawalpour 
(2,000 myr. car., 600°000 hab., 140,000 liv. st. de revenu) ; 
Mysore (3,000 myr. car., 3 millions d'hab., 800,000 tir. st.) 
les trente quatre principautés du Bztndellhund ( 1,000 myr. 
carr., 1,082,000 hab., 300,000 tir. st. de revenu); les sept 
principautës des districts de Saojor et de l'erbudda ( t 2,000 
kilom, car., 1,560,000 hab., 300,000 liv. st- de revenu); 
les onze principautés dependant du résident anglais à Inclure 
(8,000 kil. car., 751,738 hab., 300,000 liv. st. de revenu); 
les neufprincipautés à l'est de la Djamna, comme Bhortpore, 
Bilanir, Jot«ssoulrneer, etc. {4,150 myr. car., ,5-5,000 
hab., 800,000 liv. st. de revenu); les dix principautés des 
ladjpoutes et leurs arrières-vassaux (7,800 myr. car., 
6,259,000 hah., 1,680,000 liv. st. de reveu) ; enfin, les nec! 
principautés ou fiefs des Sæ//hs (4,700 myr. car., t,005,000 
liab., 350,000 fiv. st. de revenu. On a subordonné au gou= 
vernement du Bengale les vingt comtés situés sur la frontiëre 
du sud-ouest (2,500 myr. car., 1,245,000 liv. st. de revenu), 
et les trente-un comtés de la frontière nord-est du Bengale 
(4,200 myr. car., 1,086,000 hab., 300,000 tir. st. de revenu); 
ensuite, au gouvernement d'Agra : larnpore (490 myr. 
car., 320,000 hab., 1,400,000 tir. st. de revenn), et les 
sept comtés de Delhy (788 myr. car., 800,000 tir. st. de 
revenu) ; au gouvernement de Madras : Travancore (,300 
myr. car., 1,0tI,82 habit., 300,000 liv. st. de revenu); 
Cochin (1,396 myr. car., 288,000 hab., 70,000 liv. st. de 
revenu ) et les Sernindars de la montagne (7,200 myr. car., 
391,230 bab., t00,000 liv. st. de revenu); enfin, au gouver- 
nement de Bombay : Gtticowar (3,000 myr. car., 325,52 
bab.), plus ses vassaux (2,156 myr. car., 2114,846 hab-), 
ensemble avec 800,000 liv. st. de revenu ; d'autres petits 
comtés (2,25 myr. car., 24,000 hab., 100,00D liv. st. de 
revenu ) ; Czttsch ( 4,560 myr. car., 500,000 hab., 1,600000 
tir. st. de revenu); Kolapore (2:400 myr. car., 500,000 
hab., 160,000 liv st. de revenu); Saivantvarr/ (560 
myr. car., I$0,000 hab., 30,000 liv. st. de revenn) et 
divers autres fiefs ou Jagirdars (ensemble ,650 myr. car., 
420,000 hab., tfo,000 liv. st. de revenu). Tous ces Êtats 
tributaires présentent donc une superficie de 69,547 myr. 
car., avec 52»91.23 hab. et 13 millions st. de revenn» 



INDES OBIENTALES 
biais sur cette somme il y a peine 600,000 liv. st. qui 
eUent dxus tes ffç des ands eudataires, et te reste 
t ver ur I bei  l'ée ns loe is bri- 
iquoe. D'autr prin dépoéd de leurs droi de 
souverne givent d ensio s'evant ensemble à 
406, liv. t. 
Les..sidenc nt suboei en rondents 
d'une surficoE varnt entre 3,000 et 6,oeo komètr en- 
giron, ave u popuiationde 0,000 à 1,000 000 d', 
.placée us I ordr de fonctionnair cumant I louc- 
hons de dirurs de  pooe et  oe9u d tax. 
L'admistraon de la joe est confie à d tbunaua s- 
.ciaux :.toutefois, en ucoup d'droits I llecurs d'i 
p6ts nt en mê mps investis de fonco judicir 
Un cein nombre d'as»isSU, I uns  servioe ordinre 
av des droits dterminés, les autr imp employës 
(covenanted et uncovenanld zervice }, nt adjoin au 
fonctioaires et aux jus. s deenies sont ordonne- 
ment des oegèn, dont I uvoirs nt 
révooebl.  employés infeeurs reçoivent un trmeat 
vaant entre I0 et 3o0 Hv. st. par an, et  de la der- 
nië'e oetégor ne nt guère mieux réibués que de im- 
pl ouvers.  mbre en est d'environ 2,000, et dans le 
nombre il ' trouve  reçoivent d émolumen 
de 800 à 1,000 ]ir t.; m I foncon ai etribuées 
»ont rateront c0nfié à des indèn. D fi d'officiers, 
des aventuers gls, d ocian fafi et autres in- 
oedus de cet espèoe, tel t  personnel ns I angs 
dquels se r l'aitration, qui les preoEre à 
inoeèn mme oepabl et jouisnt d'une reputation sans 
cbe. nmoins, c emploiera exeroent u influence 
pl géeEe que I .fonctioaires vt de droi déter- 
méS ; seuls ris ont chargés du ruwem d drai de 
doue et de tout  affaires relatives au monopole du 
oet et de l'opium. L traitemen atibtés aux fonction- 
nattes de p[eière , eactuiment choisis pari 
Augtuis, ont beaucoup plus levés, et ne saurent se com- 
par à ceux qu'on loue en Europe pour d fonctions 
unalo. Ainsi, Ic gouverneur gvéral reçoit un traiment 
de 25, 000 liv..st. (625,000 ff. ); I vice-ouvcrneurs de 
Bou&ay et de ladsas, chacun t,00, liv. st; et celui d'Aa 
,00 liv. st. ; chacun d surs, à Calcut, 10,000 v. 
a ladras et à Uombay, 6,200 liv. st. En 182, lord W. 
ntinck fut chargé du gouveemcnt gnéral des Ind 
orientiez, à la condition qu'il mettrait un terme au dordre 
des finc et éb&t Pëqle entre t dépens et 
cettes. Non-oeement il 'acquitt de  mission, 
oere, à son dcpart de l'Inde (1835), le budget se soldait 
par un exoEdant oensidérable; etil en fut de mme pendant 
les douze anné suivtes. L'ablmc du délicit se rouvrit 
lors d préparatifs faits pour la guerre contre les 
(1838-1839), et il en fut aii de us les budgets 
i'eercioe 189-t850. Dans oette de,lève annee la recelte 
brute (non compris le Pdjab, qui a son budget à part) 
s'leva à 27,757,8 liv. st. ; et le revu net à 21,686,t72 
liv. st. ; la d¢penoe,  0,621,326 liv. st., laissant un excé- 
,lt de 1,064,86 liv. st. de 1836 à 180, l'excant net hit 
e ,093,338 liv. st., et le déficit net de 13,171,096 liv. 
es recett du Pendjab pour l'exercice 1850 185t s'elevë- 
r¢ut à 1,849,3 liv. st., et les dépees  90,013 tir. st. ; 
,le soe qu'il resit un exdant de 1,359,490 liv. st. 
t»our l'armée et comme ubvention au trésor de l'empire 
ado-britannique. Ds la dernière ae, o6 le b,det 
 solda par un ex,durit de rttcs, la dette publique de 
i'Inde tait evuée à 0,6,49 liv. st. Depuis Io, 
n'a fait que s*aoEroltre, parce que le gouvemenent indo- 
brinnique s'est vu forc de pa)-er lui-mme les fr&» de ses 
conquttes et de s agrandmen de territoire. En 180 
che s'Cevait  5t,071,Tt0 liv. st., dont le seicc des inté- 
rts occasionnait une dëpen de , 30,3 liv. st. par an. 
Les contribuUons foncir et I isnpOts de consommation 
entrent pour deux cinquim dan les rocm imblics; un 

34? 
septième provient de l'opium, dont le produit est sujet 
d'ailleurs à bexucoup de vicissitudes, et un neuvième du 
monopole du sel. Lesdépenses faites pour l'entretien de 
l'armée, qui, d'après les états officiels de l'année 18,51, pré- 
sentait un effectif de 289,529 hommes sons les arme, dont 
49,408 européens, absorbaient Se p. lO0de la recette; la ma- 
rine qui compte 6 btiments, dont 27 vapeurs, jaugeant 
ensemble environ 18,000 touneanx, n'en absorbait que 2 p. 
100. Les dépenses du gouvernement, les frais de l'admi- 
nistration civile etjudiciaire, d'entretien et de constuction de 
routeset de canaux, le service des postes et celui de la mon- 
naie, y compris mme les frais faits pour le Sindh et d'autres 
dépenses extranrdinaires, ne montaient qu'à  tl p. t00 
de la recette, et co0taient par conséquent moitié moins que 
l'armée. Les intérëts de la dette publique, les dividendes des 
actions, puis les dépenses occasionnées par le gouverne- 
ment de l'lnde et par le diverses institutions relative« 
l'lnde existant en Angleterre, absorbaian| 17 p. 100. On 
voit dës lors combien minime est la somme que le gouverne- 
ment peut consacrer à l'amélioration physique et intellec- 
tuelle des populations de l'Inde, et que sous un paril état 
de¢hose% en dépit de toutes les miçsions et de toutes les 
écoles èe missionnaires, elle« doivent aller en se démorali- 
sant toujours davantage. 
Histoire. 
L'histuire ancienne de l'Inde en deç du Gange est com- 
-plétement mythique et obscure, car la littérature sanscrite 
est extrmement pauvre en ourages historiques, ou plut6t 
n'en posséde pas du tout, tous les ouvrages du genre des 
chroniques, etc., ayant un caractère essentiellement mythi- 
que, et étant mme plut6t de la poésie que de l'histoire. Tout 
ce que nous savons de l'histoire primitive de l'Inde se borne 
donc à des situations, à des résultats que nous ne constatons 
que par induction. Un fait qui se présente tout d'abord à 
nos regards avec tous les caractères de la plus irrécusable 
vérité, c'est que la plus ancienne cilisation de l'Inde fut 
le produit de la conquête. En effet, à une époque extrême- 
ment reculée, pent-6tre bien 2,000 ans av. J.-C., des con- 
querants de race caucasienne, et d'une civilisation beaucoup 
plus avancée, descendirent du sommet des hautes monta- 
gnes qui entourent l'In,l e au nord. dans les contrées basses, 
où ils subjuguèrcnt les hordes d'habitant autocbthones en les 
faisant participer à leur civilisation. C'est du mlange de 
ces deux faces dilférentes, encore bieu qu'il ait pu ne pas 
• tre complet, que provient le peuple hindou actuel, avec sa 
.division en castes; de mme que c'est de la civilisation plus 
avancée de la nation conquërante que sortirent la religion, 
la moralisation et toute la civilisation des Hindous, qui très. 
.certainement étaient à l'origine d'une nature plus pave et 
plus idéale que de nos jours, eprës avoir, dans le cours des 
:tges et sous l'action de l'antagonisme constant existant 
entre des castes supérieures et plus ClairCs, et des castes 
iufërieur moins genéreusement douées par la nature,dé- 
veloppé de plus en phis cette grossière supersUtion, cette 
rebgiosité franchement fanatique, celle idolâtrie matérielle., 
cette dcmarcation despotique des castes, qui constituent 
les traits les plus saillants du caractère de ces populations. 
Dans cette première période mythique l'lnde en deçà du 
Gange, notamment 'Hindoustan ( attendu que da/ls le 
kan, dont l'lutArieur est inaccessible, la civilisation ne se 
developpa jamais comme dans les plaines du Gange le vé- 
ritable foyer de la civilisation hindoue), était divisée en un 
grand nombre d'États iudépendants, tels que ceux d'Aj, 
dhja, de Mith9la , dans l'lnde supérieur% et de Magadha 
dans l'Inde centrale. Des rad]hs, c'est-/-dire des rois, 
des princes, étaient placés à la tte de ces Etats, dont plu- 
sieurs reconnaissaient souvent l'autorité suprême d'un na- 
iaradjah, c'e.t-à-dire d'un grand roi. Les bralmanes ou 
prêtres,, comm auteur et gardiens-des lois, exerçaient 
une grnde influence sur la direction de affaires publiques. 
Des constructions prodiieus, surtout des temples ratio 



48 
1 dans le roc vif, furent exCules par eux. D innova- 
tions relieuses, r exemple la Iondalon et la propaga- 
tion du bouddhisme (voyez Bonnn,«), occasionnèrent de 
lemps à autre de grands troubles. La religion et la civili- 
sation furent transportées aussi dans d'aulres pays, par 
exemple dans les lies de Java et de Ball Alors apparalt 
plus particulièrement comme grand conquérant le beros 
Raton, tant célébré dans l'épopée intitulée Ramayana, et 
qui porta ses armes jusque dans l'lle de Ceylan. Toutefois, 
ce n'est qu'avec les conquéles d'A ! e x a n d r e le Grand, qui 
pénélra jusqu'à l'Hyphasis, aujourd'lmi le Setledge, dans le 
Pendjab, et d'après les renseignements sur l'Inde rapportés 
lar les Gues, que commence l'hisloire et que son domaine 
devient plus lucide. Les princes indiens Taxile et Porns 
sont cités comme des contemporains d'Alexandre, lequel, 
après avoir vaincu le dernier, l'élablit roi dans les réons de 
l'lndequ'il venait «le subjuguer. Depuis lors, et peut-étre méme 
bien auparavanl, l'Erope entretint Ioujours des relations 
commerciales non interrompues avec l'Indu, soit par mer, soit 
par terre au moyen des caravanes ; et beaucoup de Grues al- 
lèrent trafiquer dans l'Indu, où ils finirent méme par s'éta- 
blir. A la mort d'Alexandre suret le roi indien .çanclracot- 
tus, qui régna sur roule la contrée située cuire l'Indus et le 
Gange. L'un des succes.¢.eurs d'Alexandre, Seleucus llicator, 
pénétra jusqn'aux rives du Gange pour chgtier Sandracottus, 
mais conclut la paix avec lui moyennant des présents, et 
lui donna méme sa fille en mariage. Depuis cette époque les 
relations de la Grèce avec l'Indu continuèrent sans interrup- 
tion, et le roi greco-bactrien Encratidas conquit méme, peu 
de temps aprës qu'Anlioclms le Grand eut entrepris son 
expédition contre le roi iudien Sophragasenus, une partie 
du nord de l'Indu en deç du Gange, qui fut perdue, il est 
vrai, peu de lemps après la décadence de l'empire greco- 
baclrien. Pb,s tard, les Saces ( Indo-Sctl,es ) devinrent 
puissants dans l'indu. L«.s P, omalns entretinrent également 
des relations avec l'Indu, et il est fait mention de diverses 
ambassades envoiAes de l'indu aux empereurs romains. Ce 
tut seulement à l'époque de la conquète de la Perse pat les 
Arabes mahométans et de leur propagation dans l'Asie au 
huilième siècle, quand, sous le kbalile Walid, une pallie de 
l'Indu en deçà du Gange fut conquise par eux, que cessèrent 
les relations directes de l'Europe avec l'Indê ; mais les Ara- 
bes se cbatgèrent alors de leur servir d'intermédiaires. C'est 
avec eux que le mahométisme commença à exercer sur 
l'Indu une influence qui a élé si fatale à celle contrée, le 
mahométisme qui, en provoquant le fanatisme guerrier de 
tous les peuples qui lui Catent dëvoués, précipita sur l'Indu 
une suile de conquérants dont les exploits dêtruisirent sa 
prospérité, parce que dans leur fanatisme religieux ils y exer- 
cërent d'impitoyables dévastations, anéantissant l'indépen- 
dancedes Eats septentrionaux de l'indu et y inlroduisant des 
éléments politiques, religieu et sociaux complétement hé- 
trogènes. Ce ne fut qu'au sud, dans les contrées moins 
accessibles du l)ekan, que se maintinrent quelques dnasties 
hindoues indêpendanles, tandis que lHindonstan proprement 
dit, sauf quelques parties isolées, n'a jamais pu recouvrer 
depuis lors son indépendance. C'est ainsi gue régnèrent suc- 
cessivement, et en fondant des empires mahométans, les 
dynaslies des Gh a s né v i d es, des Gbourides et plusieurs 
conquérant4 afghans, par exemple T i m o u r, jusqu'au mo- 
ment on le descendant de oe dernier, B a ho u r, fonda, en 
1526, l'empire dit du G r a n d-M o g o I, qui à l'époqne de sa 
plus grande prospérité, sous le règne d'A k ba r, comp,nait 
tout l'tlindonstan et une grande partie du Dekan. Les capi- 
tales du Grand Mogol étaient l)elhi et Agra. Il y avait alors 
desprovinces immédiatement soumises et gouvernées par des 
tzabobs, des provinces feudataires obéissant à leurs propres 
radjahs Itéréditaires, ayant leurs propres lois, et ne payant 
au GrandoMogol qu'un simple tribut. 
Pendant ce temps-la, et à la suite de la découverte de la 
soute conduisant aux Indus en doublant le cap de Bonne- 
lï, spet'ance es Portugais Cient parvenus, au commence- 

INDES ORIENTALES 
ment du seizième siècle, en construisant des forts et eu éta- 
blissant des factoreries, mais grgce surtout aux talents d'e 
leurs chefs, d'un Ahneida et d'un AIbuquerque, à 
rendre marres d'importantes possessions (voyez Go, 
qu'ils conservèrent pendant pr6s d'un siècle en méme temps 
que le monopole de l'important commerce des Indus. La 
puissance de cette nation et l'esprit d'entreprise qui lui était 
particulier ayant singulièrement déchu, méme au sein du 
Portugal, vers la fin du seizième siècle, les Hollandais réus- 
sirent ì s'emparer de la plus grande partie de ses posses- 
sions situées au delà des mers, et ì se rendre pour longtemps 
les mailres du fructueux monopole du commerce de l'Indu. 
Cela lenr fut d'autant plus facJJe que par leur tyrannie 
et par leur fanatique prosélytisme les Portugais s'étaient 
fait des indigènes de ces courtCs autant d'ennemis. Les 
Anglais ne tardërent pas non plus à figurer parmi les nations 
e,tropéennes faisant le commerce avec les Indus, surtout 
quand le monopole en eut été législativement accordé à une 
compagnie fondée en te00 ( voyez ci-après Irns 
[ Compagnies des ]). lials les Français avaient également 
réussi à acquérir quelques possessions territoriales dans 
l'Indu, dont le chef-lieu, P o n d i c h é r y, parvint de bonne 
I,eure à une grande importance. La constante rivalité de ces 
deux nations se reproduisit aussi sur .ces lointains tirages, 
qui devinrent également le théAtre deleurs sanglantes guerres, 
comme si l'Erope ne leur eOt pas suffi pour s'entr'égor- 
ger. D u p I e i x, gouverneur général des possessions Irançaises 
dans l'Indu, exécuta d'abord avec autant d'habile persévé- 
rance que de succès le plan qu'il avait conçu pour expulser 
les Anglais de ces courtCs ; mais son gouvernement, loin de 
le seconder, l'ayant rappelé et remplacé par des hommes qui 
n'avaient ni ses talenls ni sa connaissance profonde de l'Indu, 
les Français perdirent, aux termes de la paix de Paris ( 1763 
toutes les conqnétes q,e Dupleix avait su faire au sud de 
la Peninsule. E méme temps une révolution intérieure 
s'était accomplie au Bengale. Fatigués des incessantes 
avanies et des pr««judices de tous genres que leur faisaient 
essuyer les nabobs, à moitié indépendants, de l'empire du 
Grand-Mogol, dont la décadence était alors complète, et 
excités par le sucoës d'une attaque imprévue par suite de 
laquelle ils s'Clent empaJ-és de Calcutta, les Anglais se dé- 
cidèrent à recourir à la force des armes, et battirent si com- 
plétement l'ennemi dans plusieurs campagnes, que leur 
mination sur le cours inférieur du Gange s'en trouva anssi 
agrandie que consolidée. C'est ainsi que lord C I i ve devint 
le fondateur de la pui.¢mce anglaise dans i'Inde. Quelque 
peine que se donnàt la Compagnie des Indes pour suivre un 
système de politique pacifique, elle n'y put réussir. L'em- 
pire du Grand-Mogol, en effet, était parvenu au point 
extrëme de sa décadence. A la mort du puissant A u reng- 
Z eib, arrivée en 1707, on vit se succéder dans l'espace de 
cinquante années douze souverains, dont la plupart furent 
d'nne compléte nullité. Par suite de ces coutimtels char, ge- 
ments de trne, l'anarchie et la révolte étaient constamment 
à l'ordre du jour; et plusieurs des peuples qui avaient jus- 
qn'alors constitué l'empire du Grand-Mogol en profitèrent 
pour se déclarer indépendants avec leurs gouverneurs oir 
princes jusque alors tributaires, par exemple le soubab du 
Dekan, le nabob d'Aoudh, etc. De leur c6té, les S ik hs fon- 
dèrent le royaume de Lahore; et les M a h r a t t e s réussirent 
à enlever de grandes provinces à l'empire du Grand-Mogol. 
L'expëdiliou de Nadir, cbah de Perse, en 1730, et les con- 
quétes des Afghans, notamment "h partir de "1747, les con- 
quétes du chab Achmet-Abdallalt, lui furextt encore antre- 
ment rafales. Par suite de cette compléle décadence de 
l'empire du Grand-Mogol, il s'était constitué dans l'Indu en 
deçà du Gange une foule de petits États indépendants, dont 
les princes n'avaient d'autre politique que de tacher sans 
cesse d'agrandir leurs États rpectifs. De là des guerrea 
intestines continuelles, et la prépondérance que l'un ou 
l'antre de ces États aurait acquise n'eut Ira ètre que 
dangereuse pour les Anglais attendu que les Françail n'a. 



INDES ORIENTALES 
valent point encore renoncé à leurs anciens projets, et pre- 
naient à Iàche de susciter constamment à leurs rivaux de 
nouveaux ennemis, qui trouvaient anssitét aide et appui chez 
eux. Ils eherehèxent donc à obtenir de i'iuiluence : dans 
i'Hindoustan, chez les Mahrattes; dans le Dekan, chez les 
sultans de Mysure et le nizam d'Hyderabad. H y de r- A i i, 
sultan de Mysore, devait en partie sa puissance à l'appui de la 
France. Aprës avoir, dès 1767 et 1769, élé en guerre avec les 
Anglais, il projeta d'anéanlir la puissance anglaise dans l'Indu, 
alors que la guerre éclata de nouveau entre la France et 
l'Angleterre à la suite de l'insurrection des colonies anglaises 
de i'Amérique du Nord, guerre à laquelle les Indes orien- 
talus servirent aussi de thétre. Le nizam s'était allié avec 
les llahrattes. La Compagnie anglaise des Index orientales 
ne dut son salut qu'h.la prudence, à l'l,abileté et à i'énergie 
du gouverneur général, Warren H a s t i n g s. Celui-ci réussit 
a conclure la paix avec les Mahrattes, et Tippou-Saib, fils 
et successeur d'Hyder-Ali, abandonné par la France, fut 
réduit, en 1784, à conclure la paix avec la Compagnie, sortie 
victorieuse et plus puissante que jamais aux Indes orientales 
de cette redoutable lutte. 
Quelque paciliq,les que fussent les instructions don,es 
à lord Cornwallis, second successeur de Warreu Has- 
tings (t2 septembre 178{3,- 10 octobre 1793 }, les pro- 
jets de conquête constamment entretenus par Tippou-Sa,b 
le contraignirent à prendre les armes contre lui. La guerre 
de 1789 / 1792 cotta au sultan de blysore la moitié de 
ses possessions, que se partagèrent les Anglais et leurs ailiés 
les brai, raCles. Sir John Shore, qui succia à lord Corn- 
wailis dans le go,,vernement général des Index orientaies 
(28 octobre 1793, --12 mars 1798), en suivant une polilique 
pacifique nuisR beaucoup à son pays; sans compter que 
les Fran.cais, à la suite de la révolution qui venait de s'ac- 
complir dans ie,r pays, s'efforçaient sans cesse d'exciter 
tous les ennemisde i'Angteterre dans l'Indu. Une masse d'é- 
missaires et d'officiers français se rendirent dans l'Indu ; et 
ces derniers disciplinèrent, non sans succès, lestroupes des 
princes qui les avaient pris " leur service. A Golconde, Ray- 
mond commandait une armée de 14,000 i,ommes, et sur 
le territoire de Delhy, Perron avait réuni 0,000 I,ommes 
prêts à entrer en ligne, parfaitement a,-més et équipés, 
commandés par des officiers français et munis d'une nom- 
breuse artillerie. Tous les anciens amis de la France étaient 
préparés pour une attaque; et l'expédition de lonaparte en 
Égypte se rattachait à l'exécution de ces plans. Le marquis 
de Wei le si e y, le nouveau gouverneur géaéral des Index 
orientales (17 mai 1798,  30 juillet 1805), voyait approcher 
l'orage. Ses habiles négociations diplomatiques rattachèrent 
d'abord  l'Angleterre le nizam, qui conclut un traité des 
plus avantageux pour la Compagnie. Tippou-Saïb attaqua 
trop tét; il perdit le tréne et la vie à la prise de Séringa- 
putain, le  mai 1799, et quand la bataille navale d'Abou- 
kit eut rendu inutile l'expk[ltion française en Égypte, les 
autres partisans que la France comptait dans les Indus se 
virent abandonnés à leurs propres ressources. Aucun d'eux 
n'osa alors attaquer, et Wellesley put sans obstacle disposer 
librement des déstinées du Mysore. La chute de Tippou-Saïb 
accrut considérablement la puissance de l'Angleterre dans 
le Dekan, tant sous le rapport des territoires que sous ce. 
lui de l'influence. Pendant ces opérations, les Mahrattes 
conservèrent toujours vis-à-vis des Anglais une attitude me- 
naçante; mais les divisions intestines auxquelles ils étaient 
en proie htèrent aussi pour eux une catastrophe décisive. 
A la fro du dernier siècle, l'Angleterre se trouva déj en- 
gagée avec eux dans de longues guerres, qui abontirent, en 
1818, ;h leur ruine complète, et dës lors la domination des 
Anglais dans l'Indu se trouva complétement consolidée. 
Dans la longue lutte soutenue par les 51ahrattes, et à la- 
quelle presqne tous les autres Ë{ats de l'Indu en deçà dn 
Gange, restés jusque alors indpendants, se trou'ërent en- 
tralnés à prendre part, tous, jusqu'à l'ombre de souverain 
qui régnait encore à De lhi avec le titre de Grand-Mogol, 

349 
perdirent leur indëpendance, et furent obligés d'abandonner 
à i'Angleterre de va, tes parties de leurs territoires respectifs, 
à l'exception du maharadja de Scindiah, qui se maintint en- 
core quelque temps. Le radjah de épai, les Cits du 
Sind h et le maharadjah de Lai,otc furent les seuls princes 
indiens qui restèrent véritablement indépendants, et conti- 
nuèrent  inspirer de l'inquiétude aux Anglais. La guerre 
qui éclata en t86 entr la Compagnie et les Birmans se 
termina de mmc, en t2O, a,] d«triment de ceux-ci, par la 
cession du royaume d' A s s a m et d'une vaste partie de l'Indu 
en deçh du Gange. Cependant, plus la Compagnie avait 
étendu son territoire, plus elle s'était fortifiée à l'inCCieur, 
et plus elle se trouvait dans une position difficile relative- 
ment à l'extérieur, car elle eut alors affaire à des ennemis 
autrement difficiles à vaincre que ceux qu'erle avait rencon- 
trés jusque ici ; et elle se vit entratnée dans une foule de com- 
plications politiques, qui la contraiirent, bien n,aié elle, 
à recou,mccer de përilleuses luttes. La première fut la 
guerre contre les Afgl,ans, provoquée par les intrigue« de 
la lussie eu Perso et dans i'AIghauistan; cette puissance, 
ayant employé tous les moyens pour exciter les sous'crains 
de ces deux pays contre l'Angleterre, dans l'espoir de s'ou- 
vrir ainsi une route-par laquelle elle doit tét ou tard menacer 
et mme attaquer la puissance anglaise dans les Index orien- 
tales. La guerre commença en octobre 1s38, par ordre du 
ministère de l'indu, et les opérations en furent conduites par 
lord Auckiand, alors gouverneur gonCai des Indus; elle se 
termina en dccembre tS/l et janvier 18, par la désas-- 
trense retraite que l'armée anglaise fut foroee de faire depuis 
le Kaboul (voyez, Arc.uXNis'rAr et K,oc). Comprenant 
qu'il leur serait impossible de se maintenir dans le Kaboul, 
les Anglais se décidèrent h l'évacuer completement, [nais no n 
sans as'oir préalablement rendu par une brillante campagne 
•  leurs armes le prestige que leurs desastres avaient com- 
promis. Une seconde expédition fut donc ent,eprise par lord 
Ellenborough, qui,le 28 janvier 1, avait succedé à lord 
Auckland comme gouverneur général Le géneral.Xott, qui jus- 
qu'alors s'etait maintenu " Kandabar avec un corps de 10,000 
hommes, marchade là sur GI,asna, d'où iagarnison anglaise 
avait été cl,assée; et le géneral Pollock, à la tête d'un autre 
corps, marcha de Djellalabad, où le général Sale s'était si 
vaillamment défendu contre les Afghaus, sur Kaboul. Ce der- 
nier, à la suite de divers engagements heureux avec Akbar- 
Khan, s'empara effectivement de Kaboul, le 16 septembre 
t84% après que, de son coté, le gënral -ott se fut dei 
rend, ma/tre de Ghasna le  du même mois. Une fois l'bon- 
neur des armes ainsi rétabli, les troupes anglaises évacuè- 
rent complétement i'AIghanistan, après avoir détruit les. 
si[les d'lstalil et de Kaboul, et en d.vastant tout sur leur 
passage. Eu janvier 18f3 toutes les forces anglaises étaient 
revenues prendre position sur la rive gauche de l'Indus. 
Pendant cette lutte contre les Afgl,ans, une grande agi- 
talion s'était manifestée parmi les différents princes tribu- 
taires de i'Angleterre. Des conspiratious avaient ëclaté con- 
tre les Anglais ; et s'ils ne s'étaient pas bute d'évacuer 
l'Afgl,anistan, ils auraient eu affaire à deux ennemis à la fois_ 
Mais leurs précautions ayant etWbien prises " i'intérieur, 
les conspirations avortèrent. Dans le Scindiah seulement, 
on était ailWtrop loin pour pouvoir maintenant reculer; et 
la haine qu'on  portait aux Anglais était aussi trop profonde 
pour qu'elle ne provoquàt pas une guerre ouverte. C'est ce 
qui amena la courte mais dangereuse guerre conie le 
maharadjah de Scindi,iah, qui se termina, en 182, par sa 
complète soumission (voçe:, 5hna¢rs). Pendant lemtSme 
temps, les lleioutches, excilés par la guerre contre les 
Afgbans, s'étaient aussi soulevés contre les Anglais ; mai 
Napier dompta les premiers, et, h la bataille de Miani 
( 17 février 183), anéantit la puissancedes seconds, dont le. 
différents £1ats, après la prise d'Hyderabad, furent trans- 
formés eu une province anglaise (9e'- Shs»a ). 
Toutes ces conquêtes étaient loin de plaire aux dire- 
teurs de la Coraoagnie, qui les altribuaient à l'humeur gaer, 



35O 
royaute de lord Elleuborough. Celui-ci lut douc rappelé tout 
à coup, eu 18¢5; et remplac par sir W. H a r d i u ge, envoyé 
aux Lndes orieutalesa'ee les iuslruction les plus pacifiques. 
Mais celui-ci ue fui pas pl IOE arrivé qu'il se vil, bieu malgr6 
lui, eulralné daus uue guene coutre les 5ikhs, qui, les 12 et 
13 décemboe t85, frauchireut le 5lledge sous les ordres 
de Tj-$ingh, et s'en viureul attaquer les Auglais à l'im- 
proviste. Il en résulta une courte mais périlleuse guerre, 
dans laquelle la remarquable bravoure et l'incontestable 
habileoE militaire des Sikhs d'une part, et de l'autre le dé- 
faut.d'¢emble et les mauvaises combinaisons slraques 
 opérations de l'armée anaise, dirigées par le gouver- 
neur général, en personne ci pr le général en chef sir Hgh 
Gongh, faillirent faire éprouver de grands désastre aux 
ïoroes britanniques. Leur saluf tint nniquennt à ce que les 
Sikhs ne surent pas profiter de leurs avant.es, et aqi à. 
Pinconteslable upériorité des Anglais en stratégie. C'est 
ainsi qu'après les halailles de Moudki ( t8 décembre) et de 
Firozshah (2t et 22 décembre 1845) resV.s indécises, 
et à lasuite des deux décisives' sictoires d'Alfiwal (28 jan- 
vier) et de Sobraon ( 19 février 1866), les Anglais parvinrent 
à anéantir la puissance des Sikhs. Ceux-ci implorereut alors 
la paix, qui fut signée à Lahore le 9 mars, A des conditions 
équivalant à la destruction de l'indépendance du royaume de 
Lahore. On en opéra la division, au, termes de ce traitë; 
et Gholah-Sing, partisan secret de l'Angleterre, en obtint la 
partie septentrionale, le long del'Himalaya, avec le Kaschmir 
et le Hasara, en qualité de vassal de la Compagnie, et avec. 
le titre de iaharadjab, tandis que le maharadjah Dholip- 
Siag conservait le reste, mais en s'obfigeaut à entretenir: 
un certain nombre de troupes et à permettre aux Anglais 
de traverser ses États toutes les lois qu'ils le jugeraient à 
propos. Tous deux reconnurent en outre la Compagnie 
pour arbitre des difficultés qui pourraient, s,rgir entre eux, 
et s'engagèrent à n'admettre à leur service aucun Américain 
ni Européen sans l'agrément de la Compagnie. La fertile 
contrée qui s'étend entre Beas et le Sellerie fut en outre 
abandonnée à la Compagnie/ titre de possession immédiate ; 
et les vaincus curent aussi à payer d'importantes contribu- 
tions de guerre. 
Lord Hardioge crut alors la paix tellement assurée, qu'il 
fit opérer des réducfions considérables daus l'effectif de 
l'armée indo-britauniqe. D'ailleurs, il avait déjà depuis 
quelque temps sollicité son rappel. Son successeur, lord 
Dalhousie, arriva en lS8, et Gough conserva le comman- 
dement en chef do l'arm. lalgré l'espoir du maintien de 
la paix qu'on conservait dans l'East-lndia-ltouse, les 
Sikhs et les ?,fouleras, oubliant leurs antiques haines, s'é- 
taient conjur. contre leurs oppresseurscommuns. Un sou- 
lèvement génëral était dà tout organisé au commencement 
«le 1848, sans que les Anglais en eussent encore le moindre 
p,-essentiment. Dost i',lohammed et d'autres chefs avaient 
promis leur concours pour la guerre sainte. L'insurrec- 
tion fut commencée par Mahlradje, chef du MoultAn, qui 
se dëtacha ds Sikhs. Deux officiers anglais envoyés dans 
le pa)s pour déposer le gouverneur et établir l'orJre dans 
le pays turenf assassinés en avril 1818. Quand on reconnut 
que la lutte était inëvitable, on livra rapidement trois san. 
glantes batailles, d'abord à Bamnagar (22 novembre 18-18), 
sur la rive orientale du Djénab, puis celle qui eut lieu près d'un 
gué de cette riviëre, à Sadalapore (25 décembre t8-18), et 
enfin celle qui eut pour thtre le marais de Djilanoli- 
walah (13 janvier 189), dans lesquelles l'armée indo-bri- 
tannique demeura, il est vrai, maitresse du champ de 
bataille, mais qui en réalitë, surtout la bataille de Djilanoli- 
valah, poavaient 6tre regardCs comme desévëres defaites. 
L'affaire'décisive et lieu le 21 fërvier 189, à Goudjerate, à 
environ 10 kilomètres à l'est du Djénab. 
Les Sikhs étaient au nombre de 60,000 hommes ; l'armée 
anglaise n'en comptait que 2,oo0 ; de part et d'autre on 
massacra les prisonniers. Dost Mohammed, avecson fils et à 
la téte de 16,000 hommes de cavalerie, parviut/ s'échapper 

INDES OP,1ENTALES 
et à gagner l'nuire rive de l'Indus. Les sommes considé- 
rablesqu'onolfrit aux tribus moslems pour les engager  li- 
vrer les dëfilés du Kbeib, ne purent les déterminer à les 
fermer à leurs coreligionnaires. Pour prévenir de nouvelles 
guerres, l'incorporation du royaume des Sikhs à. i'Inde 
glaise ïut proclamée le 29 mars |899. Depuis cette époque 
les Anglais ont maintes fois annoncé et promis qu'ils 
voulaient plus faire de nouvelles conquétes; et cependant 
dès l'année 1852 ils se voyaient contraints de prend;e les 
armes de nouveau, et de guerroyer d'un autre cété contre 
l¢s,Birmans. Cette guerre eut pour canseles plaintes élevées 
par un certain nombre de négociants anglais,  qui, en 
raison de l'ëtat d'anarchie et de confusion régnant dans le 
pays d'Ara, on avait fait éprouver diverses avanies. 
condé. dans cette guerre contre les Birmans par une for- 
midable flotte de btiments à vapeur, les Anglais, dans 
courant du printemps 182 s'emparèrent rapidement et suc- 
cessivement, aus rencontrer nulle part de véritable résis- 
tance des villes de Martaban, Ranguun, Bassin, Pégu et. 
Prome, et ne tlrdèrent pas non plus à établir des relations 
d'amitié avec les Taliens et les Karins, fatigues de l'op. 
pression des Birmans, et qui forment les quatre cinquièmes 
de la population totale du Pégu. Le 20 décembre 152 
lord Dalhousie déclara que le royaume d'Ara avait encouru 
la confiscation du Pégu; qu'en conséquence les Birmans 
eussent à évacuer cette contrée et à implorer la paix. Le nom 
veau souverain, qu'une révolution intérieure donna alors au 
royaume d'Ava, ayant refusé, vers le miliea de t 853, de sous- 
crire à la cession du Pégu, on doit s'attendre à voir les 
Anglais pénétrer jusqu'à Ara et incorporer quelque jour 
tout l'empire birman à l'Inde anglaise. 
Les anciens donnèrent le nom d'Inde à tous les pays si- 
tuës/ l'est de la Perse, et cet usage s'est maintenu jus- 
qu'à nos jours. On comprend donc encore sous la dénomi- 
nation gënérique d'Indes orientales 1 ° PInde au delà du 
Gange, c'est-à-dire les conteAes situées à l'est de ce fleuve 
jusqu'au golfe de Tong-King, et 2 ° les lles des Indes orien- 
tales appel.s ordinairement Archipel Indien ou encore 
Arcl,ipel oriental. Les dénominations particulières de ces 
vastes contrées, entourées de trois c6tés par la mer et au nord 
par des montagnes, et appartenant les unes à l'empire du 
Milieu et les autres à l'Hindostau, varient beaucoup dans 
l'histoire. On les appelle tant6t lnde au deld Gange, tant6t 
lnde trans9an9tique, tant6t aussi lndo-Chine, et leurs 
populations lndo-Chino£ses. Il en est de méme des divers 
pays dont elles se composent et des villes qu'elles re.qlerment. 
Il n'est pas rare qu'elles aient des noms différents dans le 
pays de Siam et dans le pays des Birmans, dans le Cam. 
bodje et dans l'Anam, sans compter que les .Malais et les Chi- 
nois, leurs voisins, leur en donnent encore d'autres. La pres- 
qu'ile est divisée par six chalnes méridiennes en autant de 
longues vallées, arrosées chacune par un fleuve dëtermi- 
riant aussi bien ses rapports politiques que les événements 
dont elle a Ce le tfiétre. Conformément à cette configuration 
physique de son sol, la péninsule a formé tant6t six États et 
tant6t un nombre moindre; telle ou telle race, telle ou telle 
famille ont tour à tour dominé dans telle et telle vallée. Toute- 
fois, à la plupart des époqnes on y voit prédominer trois 
grands empires, correspondant aux trois fleuves qui la fer- 
tilisent, et qui, comme sa civilisation, ont leur source en 
. dehors de ses limites, l'lrawaddi, le Menam, le Makhaoum 
ou _1Ici, on. Ces trois grands empires sont : Anam, Shan 
( voyer, Lxos), et P e g u, autrement appelés Cochinchine, 
Siam et Erma. Les uns et les autres sont déjà cernés par 
les puissances européennes dominatrices des mers. L'An- 
gleterre domine au sud les pays de cotes de Mala.ka, de 
Tenasserim, de Yé, de Tavoy et d'Arakan, ainsi que le 
l'égu, et au nord les montaeuses contrées de Oshar, de 
-lounipour et d'Assam. Le temps n'est pas loin où les An- 
glais auront rëduil sous leur autorité immédiate l'intérieur 
mëme de la péninsule, qui renferme les plus fertiles con- 
trëes du continent asiatique. Le sol, d'une admirable fé- 



INDES OIIENTALES 
tenditC y donne sans efforts les produits les plus nom- 
breux et les plus divers, de méme qu'il abonde en richesoe». 
minérales de tous genres. Ses beaux fleuves, navigables dans 
tout leur parcours, assurent dans toutesles dire¢tion.s un com- 
merce intérieur qu'aucun obstacle ne pourra entraver, en 
mnte temps qu'une foule de ports, aussi vastes que sors 
et commodes, peuvent servir d'entrepris an commerce du 
monde entier, au commcrcc avec l'Indc et avec la Chine, 
comme à celui de l'Australic et de l'Afriquc. Les habitants 
de la presqu'ilc, de même que les Thibétains, présentent, 
au point de vue de la conformation physique et de la langue, 
beaucoup d'affinité avec les peuples de l'empire du Milieu ; 
cette affinité est d'autant plus grande, que les populations 
ont plus rapprochées de ce foyer commun de toute la civili- 
sation de i'Asicorientalc. A l'exception des hahitants d'Anam, 
ils ont tons reçu de l'Indc leur civilisation et leur religion. 
Leurs littératores se sont dcveloppées sur la base de livres 
religieux et d légendes du brahmanisme et du bouddbismc, 
introdnits de Ceylan. Les langues des Indo-Chinois occi- 
dentaux cux-mèmes, en adoptant une foule de mots indiens, 
ont en partie altéré le caractère monesyllabique et chinois 
qu'elles avaient ì l'origine dans les eontrées du Laos sup6- 
rieur ou Tong-King. En Coclsincbinc, dans le Yampa et 
dans le Cambodjc, le bouddhisme, qui n'y pénétra que dans 
les premiers siècles de notre ère, n'a pas plus réussi qu'en 
Chine ì supprimer les langues et les formes religicuses na- 
tionales. L'antique religion naturelle des Chinois s'y est 
constamment maintenue ì l'Cut de religion dominante. 
La constitution géologiquc des lies des Indcs orientales, la 
conformation physique, la langue et les traditions des indi- 
gènes, prouvent leur intime affinité avec le continent asia- 
tique. La masse gigantesque que forme cette partie de notre 
globe, prjetée dans la direction du sud, constitue un lent im- 
mense, qui, se continuant sous les eaux de la mer des indes 
et de l'onCn Pacifique, se soulève et s'étend tant6t plus, 
tant6t moins, ici par l'action même des eaux, là par celle des 
volcans. Une foule d'ries témoignent de cette direction don. 
née. Que si par suite des mouvements d'ascension et de dé- 
pression auxquels ces courtAes sont encore sujettes aujour- 
d'hui, le sol venait à se sotdcvcr encore un peu plus, on 
verrait les endroits peu pofonds de la mer se dessécher; 
les chalnes de montagnes de Sumatra, de Bornëo et de 
Java se rattacheraient, comme celles de la presqu'lle ma- 
laisieunc, au continent, et de grands fleuves traient se dé- 
verser dans la mer des Indes  travers les larges déprcssions 
de la mer de la Chine, de même qu'à travers les profomes 
et étroites passes des lies de la Sonde; la prcsqu'ilc d'Asie 
se continuerait dans les épaisses chalnes d'iles et de rochers 
qui s'étendent de Singapore à Banca et touchent à Suma- 
tra. Les ries de Boruéo et des Célèbes forment la vaste partie 
orientale du territoire sud-asiatique et Judo-chinois que sé- 
para autrefois de la Cldne une irruption de la mer. Enfin 
cet archipel est comme ceint d'une guirlande de volcans qui 
par leurs communications souterraines prouvent que ces 
tles et la partie du continent qui leur fait face appartiennent 
géologiquement au reCoteur. 
De m.n- que ces myriades d'lles forment une continua. 
tion dn continent, de méme leur population n'est que la 
continuation des faces sud-asiatiques ; et la direction q,e 
la force souterraine a suivie dans la formation des lles in- 
diqne aussi la voie suivie par l'Cigration. Des individus 
ou des familles isolées, qui prirent par hasard telle 
telle voie, devinrent ensuite la souche de tribus entières. La 
population, séparée par la mer des vastes plaines et des 
grandes railCs du continent, renfemée entre de hautes 
montagnes et d'épaisses forais, ne pnt s'accrotlre que peu fort. 
Les immigrations d'une tle à l'antre rencontrèrent les 
oIstacles, et furent tout aussi peu nombreuses. On peut 
dans l'histoire physique de ces ries distinguer denx grandes 
périodes : la première, dans laquelle les habitants du grand 
plateau asiatique, émigrant  travers les vallée et les mon- 
tagnes du sud-est, apparurent aux confins de l'archipel, oit, 

351 
sous l'influence de leur nouvelle patrie, ils devinrent 
rondes; la seconde, dans laquelle ils se répandirent sur es 
rives et dans l'tutCieur, des nombreuses lies, en.y fornmnt 
une roide de petites.tribus, qui, malgré leur affinité d'ori- 
gine, finirent pat avoir des langues et des mœurs particule 
lièrcs. C'est dans cet état d'isolement et d'abandon qne les 
tronvèrent les peuples ¢ivilisés, et voyageurs, lesquels ne 
nglirent rien pour pTopager parmi eu leur civilisation 
particuliëre, et y. réussirent effectivement. On divise ce grand 
monde insulaire en Laqu«oEives et Maidives, dépen- 
dant de l'Inde en deçà du Gange, et Ce.vlan d'une part; et 
de l'autre en Archipel [ n d i c n, entourant l'Inde au delà du 
Gangc; pays dont on trouvera la description physique, ethno- 
graphique et statistique, ainsi que l'histoire, aux artiiles 
spëciaux q leur sont consacrês dans ce dictionnaire. Consul- 
fez Biffer, Traitë de Géographte (ternes 3  6 ) ; Bjoernst- 
je.ma, L'Empire brit«nique et les Indes orientales (Stock- 
boira, 1839) ; Mell, lfistor9 of.British lndia (4  édit., 9 
volumes, Londres,-t842). 
, INDES ORIENTALES ( Compagnies des). Telle est 
la dénomination générale sous laquelle -on. a désigné les 
associations créées chez les principales puissances maritimes 
pour faire le commerce dans les Indes orientales. La plus 
importante et la plus puissante de toutes est la Compagnie 
anglaise des lndes orientales. 
Vers latin de l'année 100, plusieurs riches négociants 
de. Londres., ayant à leur tte le comte de Cumberland, 
présentèrent à la reine .iisabeth une supplique à l'effet 
d'&tre autorisés à créer une compagnie privilégiée pour le 
commerce des lndes orientales. Il fut fait droit  leur re- 
quëte par un acte ì la date du 31 décembre 1600. La 
nouvelle sociét, , qui prit le nom de Governors and Com- 
pany o.f nerchants of Lodon, tradin 9 te the Ect In- 
dies, obtint un privilége excluifde quinze .années pour faire 
le commercedans les placesd'Afrique, d'Asie et d'Amérique 
situées entre le Cap de Bonne-Espérance e le détroit de 
Magellan. Il lui fi]t en outre açcorde le droit de faire usage 
d'un .ceau particulier et d'elh'e un gouverneur et vingt 
directeurs, de méme que l'autorisation de prendre des ar- 
rêtés administratifs (bge-laws)ayant force de loi pour la 
Compagnie et ses agents. Avec un capital de 72,000 liv. st., 
qui fut tout attssit6t constitué, elle arma et ri-éta cinq na- 
vires, qui arrivèrent le 5 juin 1602, sous le commandement 
du capitaine James Lancaster, à Atchin, dans Vile .de Su- 
matra, L'expédition fit de si bonnes affaires, qu'il en partit 
une seconde en 1604, et nne troisième en 1610. Ce fut 
celle-ci qui, sous les ordres du capitaine Keeling, réalisa les 
bénéfice lespluscou.iderahle.. Pour que les relations créées 
se consolidassent, il fallait,  l'instar des autre nations 
rnpéennes qui trafiquaient avec l'lnde, et déjà regardaient 
d'un oeil jaloux ces nouveaux rivaux, obtenir le droit de se 
fixer et de commercer sur cerlains points. Une ambassade 
envoyée à cet effet dès 1608 au GrandoMogol avait compléte- 
mentréussi; mais les intrigues des Portugais empgchèrent 
les Anglais d'utiliser les concessio us qui leu r avaien t étë faites, 
Ce fut seulement en 1612, lorsque le brave capitaine Tho- 
mas Best eut à deux reprises battu dans les eaux de Surale 
les forces navates des Portugais, que la Compagnie put 
exercer sur ce point ses priviléges et tender de la-sorte .le 
premier. établissement de commerce que. l'Angleterre ait 
possédé sur le continent indiela. 
Quoiqu'elle eut obtenu un grand nombre d'avantages 
nouveaux, la Compagnie tomba de plus en plus dans une 
incurable décadence, par suite de la constante jalousie dont 
elle fut l'objet de la part des Portugais et des Hollandais 
ceux-ci ayant méme anéanti par un impitoyable massacre, 
en 1622, un premier établissement que les Anglais avaient 
es.¢ayé de fonder à Amboine. Cromwell, qui, en 1657, re- 
nouvela le privilége de la Compagnie, eut beau sacrifier 
 peu prs complétement les intérgts du commerce de 
l'Inde aux Hollandais, les Anglais n'en réussirent pas moins 
dans ces temps de calamités  jeter dès lors (160) le 



premiers fondements de Madras et de llooghly, devenus plus 
tard deux de leurs plus importantes possessions. Le 3 avril 
146|, Charles II non-seulement confirma les anciens pri- 
vilges de la Compagnie, mais encore lui accorda le droit 
de juridiction civile, le droit d'entretenir des troupes ainsi 
que celui de faire soit la guerre, soit la paix dans les Indes 
avec les nations infidèles. Il lui octroya en outre la posses- 
sion de Bombay à titre de fief, et aussi, quelq,es années 
luS tard, l'lle Sainte-Hélène. Jacques II, dans l'espoir 
de l'élever ainsi au meme degré de prospérité et de puis- 
sance que la Compagnie hollandaise des Indes oriealales, lui 
concéda encore le droit de construire des places fortes, de 
lever des troupes, d'établir des tribunaux militaires et de 
battre moanaie. Avec de telles immunités, les affaires de la 
Compagnie prospérèrent tellement qu'en 680 les India- 
Stocks (actions de la compagnle des Indes) se rendaient 
avec une prime de 360 p. 100. Mais le despotisme que la 
Compagnie exerçait dans l'Jnde, Joint à la jalousie causée 
par la prospérité toujours croissante de son commerce, irri- 
tèrent tellement contre elle les marchands de Londres, 
q,'en 1691 le parlement dut procéder  une enquete sur 
les griefs ailéués. Les intrigues des adversaires de la 
Compagnie écbouèrent» à la vé-ité, et en 169f elle obtint 
mëme le renouvellement de ses priviléges; mais ses enne- 
mis ne se tinrent pas pour batlus. 
En |698 les marchands de Londres ayant eu occasion de 
faire au gouvernement une avance de 2 millions de liv. st., 
obtinrent enlin l'aulorisation de créer une compagnie nou- 
velle pour le commerce des lndes orien[ales. Les deux 
compagnies cherchèrent nalurellement à se ruiner l'une 
'autre; mais, comme dans une situation pareille, il était 
impossible de songer à donner plus de développement aux 
affaires, elles finirent par comprendre qu'elles se ruinaient 
toutes deux sans profit pour l'une ou pour l'autre, et elles 
eureut le bon esprit de se fusionner en 1708, sous la dénomi- 
nation de UnitedEast-lndia ¢omany. Les actions furent 
portees au [chiffre de 500 liv. st., et tout porteur d'une 
de ces actions eut le droit de voter dans l'assemblée géne- 
rale (Generl Cotll't), tandis que les vingt.quatre direcleurs 
ne pouvaient être choisis que parmi les propriétaires «le 
uatre actions. Le commerce extérieur parvint bicnt6t alors 
 un degré de prospérité encore inouï, résultat auquel ne 
contribuërent pas peu les annéesdc paix qui suivirent la con- 
clusion du traité d'Utrecht (1713). La Compagnie, dont l'ac- 
tion devint toujours plus indépendante dans des colonies, 
dont le territoire prenait constamment plus d'extension, 
exerça dès lors une visible influence sur les affaires politiques 
de l'tnde. Dès l'année t767, époque o0 pour la première fois 
le parlement eut  s'occuper des affaires de l'Inde, l'opinion 
générale de la nation réclama l'abolition de lindépendance 
de la Compagnie et une rodification profonde de toute son 
organisation intérieure. On voulait que le gouvernement et 
le parlement exerçassent de l'influence sur l'administration 
des possessions ana;la!ses en Asie ainsi qu'une surveillance 
conplèle sur tous les actes politiques de l'East- Indien House. 
Lord [orth somnit à la chambre des communes, le 18 mai 
|773, un bill qui réglementait et régularisait les affaires de 
la Compagnie des Indes orientales, tant dans les Indes qu'en 
Angleterre. Les dispositions essentielles de cette loi, dési- 
gne d'ordinaire sous le nom de regulating-Act ont tou- 
jours été conservées depuis lors, et ont servi de base à tous 
les règlements postCieurs. Il fut en outre créé en Angleterre 
un ministère de l'Inde, sous le nom de Board o.fcountrol. 
En 1773 il y avait à la tête du gouvernement du Bengale, 
de Bifiar et d'Orissa un gouverneur général, auque! était 
adjoint un conseil investi des mëmes droiL« que lui et com- 
pnsé de quatre personnes. Le gouverneur gnéral aissant 
en conseil fut investi de toute l'administration civile et mi- 
l!la!re. A la présidence du Bcngale fut en meme temps at- 
taché le droit de surveillance sur les gouvernements de la- 
draset de Bombay ; de h.lle sorte que ceux-ci, .aul les cas 
d'absolue nécessit, ne pouvaient ni commencer une ëuerre 

INDES OIIENTALES 
ni conclure de traités de paix avec les princes indiens. Cest 
dans ces dispositions légales, désignées ordinairement sous le 
nom de Pitt's bill, que se trouvait placée la destinée des poo 
pulations de l'Inde et descontrées limitrophes. La Compa .gnie 
perdit ainsi sa position indépendante, et cessa d'ètre un Etat 
dans PÊtat. La Cour des Directeurs ne fut plus dès los 
qu'une autorité secondai e, chargée de mettre à exécution les 
résolutions prises par le président du Doord of Countrol, 
en d'autre. termes, du ministre des affaires de l'Inde, en 
tant qu'elles ont trait à l'éla! civil ou militaire, ou au bud- 
get de l'empire iudo-britamiue. Depuis lors les profits les 
plus réels et les attributions les plus importantes des ac- 
tionnaires consistent surtout danx la distribution des charges 
ct emplois. Comme les emplois dans les diverses prési- 
dences sont, pour la plus grande pa1'tie, à la nomination 
de la Cour des Directeurs, des gouverneurs et conseil- 
lers du gouvernement de l'Inde, les membres tic la Com- 
pagnie trouvent I l'occasion de pourvoir leurs proches de 
positions lucratives et viagères. Afin de former des fonc- 
tionnaires munis des connaissances spédales qu'exige l'ad- 
ministration de l'rude, on a fondé, en |806, l'école d'Hailey- 
bury pour le service civil, et celles de Woolwich et d'Addis- 
combe pour le service militaire. 
A l'expirationde son privilége, qui d'ordinaire lui était ac- 
cordé pour une période de vingt années (1795, 8|3, t833), 
la Compagnie s'est toujours efforcée d'en obtenir le renou- 
vellement, malgré les nombreuses restrictions qui y étaient 
alors apportées. Ainsi, la charte de renouvellement qu'elle 
obtint en |833 lui enleva tous ses priviléges commerciaux, 
notamment le monopole du commerce de la Chine (elle avait 
perdu dès tt celui de Flnde); la Compaguie ne fut 
plus en réalité qu'une corporation politique; elle conserva 
en effet le gouvernement de l'Inde, et le droit de patronat 
qui s'y rattache ne fut que très-peu modifié. Aujourd'hui le 
droit de décision suprême dans toutes les affaires civfles et 
militaires de Flnde appartient au gouverneur général, 
assisté de ses quatre conseillers ; depuis t33 il est anssi 
investi du droit de pren]re des arrè!és ayant force de loi. 
Comme le privilége de la Compagnie devait encore expirer 
en !85, un comité spécial fut formé dès t852,  l'effet 
de procéder  une enquête sur la situation de l'Inde; et à 
cette occasion il parut plusieurs volumes (désignés sous 
le nom de llue books, à cause de la couverture) des rap- 
l»Os de ce comi!é d'enquête. Le parti des libres chan. 
9istes et tout le commerce de Manchester réclamaient à 
r, ls cris la suppresion définitive de la Compagnie. Un 
projet de loi fut présenté le 3 juin 1853  la chambre des 
communes, dans leque! le ministère de lord Aherdeen prit 
n moyen terme. Le  ao0t 1853 un nouveau bill relatif 
u gouvernement de l'Inde fut promulgué pour être mis 
en vigueur à partir du 30 avril |854. Aux termes de cet 
acle, l'Inde anglaise doit rester jusqu'à nouvelle décision 
du parlement sous le gouvernement de la Compagnie des 
Indes, à diverses conditions. La Compagnie n'a plus que 
dix-huit directeurs au lieu de vingt-quatre. La reine d'An- 
gleterre en nomme trois. Les directeurs sont nommés pour 
six ans, mais ils sont rééligibles; ils doivent ètre propriétaires 
chacun de t,000 livres st. de fonds de l'Inde. De conseil- 
lers pris dans la législature s'adjoignent au conseil de 
l'Inde lorsqu'il s'agit de faire des lois et règlements; ils ne 
peuvent ètre choisis que sous l'approbation du gouverne- 
ment. Le gouverneur est nommé par les directeurs; mais le 
gouvernement doit approuver leur choix. 
Parmi les compagnies des Indes or!enraies créées par 
d'autres nations et encore existantes aujourd'Imi, il faut 
mentionner surlout : 
t ° La Copa9nie hollandaise des Indes orientales, 
dont lo fondateur fut Cornolius Hourra an. Elle se cons- 
ti!ua le 0 mars |60, par la réunion et la filsion de diverses 
petites associations qui faisaient alors le commerce de l'Inde, 
et sur des bases telles que tout citoyen de la république 
des Provinces-Unies pot y prendre part. On lui accorda 



ISIDES ORIENTALES 
four aussit6t le monopole de tout le commerce hollandais 
au delà du détroit de Magellan et du Cap de Bonne-Espé- 
rance, le droit de conclure des traités d'alliance au nom 
des états généraux, de construire des forteresses, de 
nommer des gouverneurs, ainsi que tous fonctionnaires mi- 
litaires et civils, enfin de réglementer elle-mme son orga- 
nisation intérieure. On divisa la Compagnie en plusieurs 
chambres ou bureaux ; mais pour la direction des affaires 
gnrales de la Compagnie on lut parmi les 60 directeurs 
des diverses chambres 17 directeurs (bewiT, dhebber), dont 
les dcisions durent avoir force de loi pour les chambres. 
La compagnie nouvelle obtint les plus brillants résultats. 
En peu de temps les Hollandais parvinrent à supplanter les 
Portugais, les "Espagnols et mme les Anglais dans les lies 
des Indes orientales, et leur commerce prit des dévelop- 
pements inouïs jusqu alors. Comme ils se bornèrent à peu 
près à expioiler les lies, ils chappèrent ainsi aux nombreuses 
complications dont la dissolution successive de i'empirc 
mongoi fut la cause pour les Anglais et les Français sur 
le continent indien, et ils s'attachèrent avec une rare cons- 
tance  développer toujours de plus en plus dans ces lies leur 
commerce, leur influence et leur considération. Acceptant 
toutes les humiliations, du moment où il y allait de leurs 
interts commerciaux, ils sacrifiaient à ce but suprême 
toutes espèces de considérations. En mème temps, on main- 
tenait avec rigueur le monopole; les employés de la Com- 
pagnie étaient l'objet de la surveillance la plus sevère, 
et ton ses payements s'eifectuaient avec la plus ponc- 
tuelle exactitude. C'est par une telle conduite que dès 
l'année 1605 la Compagnie hollandaise des Indes orientales 
se trouvait maitresse des lies Moluques; en 1607 elle ac- 
quit Ternate et Banda, et en 1637 le privilége exclusif 
du commerce du Japon; aussi pendant plus d'un siècle 
d'incalculables richesses arrivèrent-elles en Hollande. A la 
suite de petites luttes continuelles soutenues contre les indi- 
gènes des dilférentes ries, la domination des Hollandais s'y 
consolida tout à fait dans le courant du dix-septième sièclc, 
et ils en établirent le siCe à Batavia, fondée par eux 
en 1618 dans File de Java. Ils enlevèrent aux Portugais 
Malakka en 1641, Ceylan en 1658, les Célèbes en 1663, et 
à partir de 1665 les points les plus importants de la céte 
du Malabar. Au commencement du dix-huitième siècle on 
c»mptait dans l'Inde hollandaise sept gouvernements, 
luatre établissements directorianx, quatre commanderies 
et trois comptoirs. Jusqu'en t 697 la Compagnie ne contracta 
aucune espèce de dettes; mais depuis cette époque, le 
déficit alla toujours croissant, par suite d'une mauvaise et 
ruineuse administration, de la démorallsation de ptus en 
plus grande des empioyís, mais snrtout par suite de la con- 
currence politique et commerciale des Anglais, à tel point 
qu'en 1794 la Compagnie se trouvait endettée de t 18,265,447 
Ilorins. Le délabrement de ses finances attira enfin l'at- 
tention des tats #néraux. En 179! ils nommèrent une 
commission d'enquête, dont les travaux ne purent ètre 
terrainC, la Compagnie ayant et supprimée, le 15 sep- 
tembre 1795, par les nouveaux reprsentant prosisoires 
du peuple, quand on fonda la lépublique Batave à la suite 
des guerres de la rvolution française. Les possessions de 
la Compagnie furent dclarées propriété nationale, sa dette 
fut égaleraent déclarée dette nationale; et on abolit le mo- 
nopole commercial dont elle avait été jusque alors investie. 
En 1824 une nouvelle Compagnie des Indes orientales a 
ét iondée en Hollande, et a obtenu sous certaines condi- 
tions et restrictions l'ancien monopole du commerce dans 
les colonies hoilandaises de PAsie. Alors que tout est en 
progrès autour deux, les Hollandais persistent, comme on 
voit, à maintenir l'antique organisation de leurs colonies, 
système qui devra nécessairement y provoquer rot ou tard 
de redoutables crises. 
2  La Compagnie danoise des Indes orientales, fonde 
en 1618, fit un commerce assez considérable avec les Indes 
orientales jusqu'à l'époque où les Anglais et les Hollandais 
mcv. nE LA CO,'VEnS.  . XL 

acquirent une prépondérance marquée dans ces contrées. 
Dès 1634 elle était obligée de se dissoudre; mais on la 
reconstitua en 1670. Cette rësurrection ne fut pas de iongne 
durée ; en 1729 la Compagnie se vit forcée d'abandonner b 
l'État tous ses droits et possessions, notamment Tran- 
quehar, sur la céte de Coromandei. En 1732 il se re- 
constilua encore, sous le patronage de l'État, une nouvelle 
Compagnie, qui prit le nom de Compagnie Dano-Asiatique, 
et fit d'assez bonnes affaires pendant tout le cours du.siècle 
dernier; mais depuis ses bénefices sont tombés à zéro. On 
sait qt'en 1845 le Danemark a céd à l'Angleterre, moyen- 
nant une minime indemnité pécuniaire, ses possessions de 
Tranquebar et de Sérampore. 
3 ° La Compagnie suédoise des lndes orientales, fondée- 
[t Gothenbourg en 1741, s'est toujours bornée à faire Io- 
commerce ; et ses affaires ont étWassez prospères pour 
qu'elle ait pu à diverses époques distribuer des dividendes. 
de 26 p. Io0 à ses actionnaires. Réorganisée en 1806, cette- 
institution commerciale n'a pu jusqu'd présent acquérir 
d'importance réelle. 
[La France, elle aussi, eut autrefois sa Compagnie des 
lndes. Dès 1104 Henri |V avait accordé le privilége exc:usi[ 
du commerce à une Compagnie de marchands ignorants e  . 
avides, qui restèrent dans l'inaction. En 1616 et 1619, une 
nouvelle compagnie, constituée par des négociants de 
l;ormandie, fit à Java des expditions dont les bénéfices ne 
furent pas suffisants pour l'encourager à continuer ses en- 
treprises. Une tentative que des Dieppois firent sur Mada- 
gascar, en 1633, détermina le cardinal de Bichelieu à créer, 
en 1642, une espèce de Compagnie des Indes, qui voulut 
former un grand établissement à Madagascar. La perfidie et 
les cruautés de ses agent la rendirent odieuse aux naturels 
du pays; elle se ruina en peu d'années, et le maréchal de 
La Meiileraye ne put réussir à relever pour son compl 
cet établissement. Ces tentatives annonçaient déjà ce que 
la suite a bien prouvé, à savoir que l'inconstance, la va- 
nité, le peu de ténacité des Français, les rendent moins 
propres aux grandes entreprioes coloniales et commerciales 
que les flegmatiques et parcimonieux Hollandais, que l'au- 
dacieuse et opiniàtre race britannique. 
Si une compagnie des Indes eut pu rtlssir et prospére 
en France, ce devait erre celle que Louis XIV fonda, en 
1664, par les soins de Colbert. Un priviiége de cinquante ans, 
les concessions les plus honorables et les plus avantageuses 
une avance de 4 millions par an, qui en feraient 8 aujour- 
d'hui, devaient assurer sa durée et sa prospérité. Mais 
son début elle portait le foyer de la discorde qui devait la 
miner ; la morgue nobiliaire en fut la première cause. Deux 
gentilshommes du roi et trois députés de la Compagnie fu- 
rent envoyés au chah de Perse et ì l'empereur mongol. Le 
premiers prétendaient qu'étant nobles, leur avis devait pré- 
valoir; et les autres soulenaient avec assez de raison qu'etan. 
marchands, ils connaissaient mieux les vét-itables intért 
de la Compagnie. Ce fut en 1668 que les premiers directeurs 
a.rrivèrent à Surate, où A u ren 9-Z e t b leur avait permis 
d'établir un comptoir. Ils y firent, ainsi que la plupart de 
leurs successeurs, sottises sur sottises. La Cotnpagnie, qui 
aurait trouvé des avantages en Perse, préféra porter aiter- 
nativement ses vues du cété de Statu, du Tonquin, de la- 
Cochinchine et de Madagascar, où elle échoua, soit par 
l'inconduite et i'incapacité de ses chefs et de ses agents, soit 
par le décousu et la versatilité de ses opCations. Po n d 
ch é r y, son principal étabtissement, lui fut enlevé, en 1693. 
par les Hollandai», qui le rendirent après la paix de lis- 
wyck. Le directeur Martin, par ses talents et sa probité 
releva cette colonie. Mais le naturel du Franr.ais reprit le 
dessus. Une expédition dsastreuse à Madagascar obligea 
d'abandonner plusieurs comptoirs et de se concentrer 
Surate et à Pondichéry. La mauvaise gestion, la corrup- 
tion, les emprunts onéreux, avaient endette la Compagnie 
de 10 millions, iorsqu'elle obtint, en 1714, la prolongation 
pour dix ans d'un priviiége qu'dle n'était plus en état de 



854 INDES ORIENTALES 
faire valoir. En 1719 on la fondit avec la Compagnie d'Oc- 
cident, nouvellement étahlie; on reconstruisit son édifice 
avec les débris du système de Law. Pour la soufenir, on 
lui céda le monopole du tabac, le privilége des loteries. Mais 
alors elle devint une société de fermiers plutèt que de négo- 
ciants ;elle laissa incuiles et dépeuplésles pays les plus fertiles 
du monde; ellearrèta les progrës de noscolonies d'AraCique. 
Le contrOleur gënëral Orri la releva pourtant encore, et, à 
sa persuasion, le cardinal de Flenr lui accorda une protec- 
tion efficace. On fit alors un meilleur choix d'agents. Dumas, 
envoyé à Pondichéry, obtint de la cour de Dehly la permis- 
sion de battre monnaie et la cession du territoire de K a- 
r i k a I dans le Tandjaour. llahé de L a B o u r d o n n a i s créa 
la colonie de l'fie de France, dont il tait gouverneur, fit un 
commerce avantageux à main armée en ouvrant des 
bouchés avec le Thibet et les autres parties de l'Asie cen- 
trale, dispersa nne flotte anglaise, et prit, en 1766, Madras, 
alors le boulevard de la puissance britannique dans l'Inde. 
Dupleix, qui, après avoir fait de Cha n de rnagor un 
étabIissement commercial de la plus haute importance, 
avait remplacé Dumas / Pondichéry, se montra jaloux de 
La Bourdonnais; il le dénonça comme prevaricateur. La 
Bourdonnais, mis à la Bastille, y languit près de quatre 
ans, et n'en sortit que pour mourir de la maladie que sa 
prison lui avait causée. Mais Dupleix répara ses forts en 
1768 par sa belle défense de Pondichëry contre les Anglais. 
Les souverainetés de la soubabie du Dekan et de la nababie 
du Karnatik ou d'Arcat étaient vacantes. Il osa en disposer 
en laveur de deux princes sur lesquels il croyait pouvoir 
compter, se lit céder File de Scheringam avec une augmen- 
talion des ferritoires de Karikal et de Pondichéry, et devint 
si puissant que l'empereur mogol ne put se refuser/ le dé- 
corer du titre de nabab. Tandis qu'il soutenait la guerre 
avec succès dans le Karnalik contre les Anglais, qui avaient 
pris parti pour un autre prétendant, Bu.sy, à la téte des 
Français, faisait des conquëtes dans le Dekan aux depens 
des ailiés de i'Angleterre. Dupleix, à son tour, inspira de la 
jalousie aux directeurs de la Compagnie; il fut rappelé en 
/urope en 1756, publia contre elle des mémoires qui ne 
 estèrent pas sans réponse, et mourut du chagrin de n'a- 
xoir pu obtenir justice. 
Les chances de la guerre avaient changé dans l'lnde entre 
les Français et les Anglais, ou plutôt entre les Compagnies 
des Indes des deux nations. Le général Lai I y, gouverneur 
de Pondichéry, après plusieurs soccè-« importants, n'ayant pu 
s'emparer du fort Saint-Georges ni emptcher la prise de 
iondicbéry par les Anglais, en 1761, fut une nouvelle vic- 
time de la Compagnie française. Accusé de trahison, il périt 
sur i'échafaud, en 1766, quoiqu'il ait été bien prouvé de- 
puis qu'en raison de la violence et de la dureté de son carac- 
tère, tout le monde avait le droit de te tuer, excepté le 
bourreau. 
Cet ace de cruauté ne rendit point la vie à la Compagnie 
des lndes, qui d'ailleurs n'avait jamais paru florissante 
qu'en grands préparatifs, en magasins, en fortilications, en 
dépenses d'apparat, soit à Pondichéry, soit à Lorient en 
Bretagne, que le gouvernement lui avait cédë, et qui était 
devenu rentrep6t de son commerce avec l'lnde. Mais elle ne 
fit jamais de bénéfiees; dn moins elle ne donna pendant 
plu de cinquante ans aucun dividende à ses actionnaires. 
Le gouvernement, qui trop longtemps l'avait soutenue, se 
plaignait «l'un corps dont les membres cbangeaient tous 
les jours, et qui n'avait su faire ni le commerce ni la guerre; 
et la Compagnie reprochait au gouvernement de l'avoir en- 
¢halnée sous le jmlg d'un commissaire du roi, puis de 
deu:x, puis de trois, qui ne pouvaient s'entendre, et d'avoir 
ainsi ajoutë au despotisme la division et l'anarchie. Les mi. 
nistres vonlaien! la priver de son privilége exclusif; ils 
employ¢¢ent la plume de l'abbé I o r e I le t. La Compagnie 
trouva quelques dëfenseurs, et cette polémique, oh la plai- 
santerie et le ridicule se mèlèrent, comme il est d'usage 
chez les Français, amusa quelque temps le public, m,ne 

après qu'un arrèt du conseil, du 13 aot 1769, eut suspendu 
le privilége exclusif de la Compagnie des Indes, et accordé 
à tous les Français la liberté de naviguer et de commercer 
au delà du Cap de Bonne-Espërance. Les actionnaires de- 
mandèrent une liquidation, et cédèrent au roi, en 1770, 
moyennant 1,200,000 ff. de rentes perpétuelles, au capital 
de 30 millions, tous leurs vaisseaux, leurs magasins, leurs 
édifies et leurs esclaves, tant à Lorient que dans les di- 
verses places de l'inde et du golfe Persiqne. 
La Compagnie des indes avait eu un moment d'éclat; 
mais elle avait briIIë comme un météore qui se consume 
lui-mme. Ses faules et ses revers étaient la preuve irré- 
cusable de son inutilitë. Elle lut pourtant rétablie par arrèt 
du conseil du roi, le 16 avril 1785, et chargée de l'ancienne 
liquidati«m. Le ministre Calonne espérait sans doute s'en 
faire une ressource pour satisfaire ses prodigalités on ses 
dbprédations. Dès la mme année il parut des mémoires 
qui blâmaient, avec autant de force que de logique, cette 
mesure administrative et le monopole qu'elle établissait. 
L'abbé Morellet, ct ancien et terrible antagoniste de la Com- 
pagnie des lndes, prit encore la plume en faveur des députés 
du commerce de France, et signala les vices et les dangers 
de ce simulacre de compagnie, élevé par l'intrigue et la cupi- 
dité pour faire des dupes. Mais des evénements d'une plus 
haute imporlance, précurseurs de la révolution de 1789, 
firent ajourner la question de la Compagnie des Indes. Elle 
fut enfin Sllpprilnée par dëcrct de i'Assemblée constituante 
du 4 aoùt 1790. Les bureaux de Lorient et de Paris fu- 
rent rëunis au trésor public, et l'on maintint ceux de Pon- 
dichíry et de File de France jusqu'à ce que la liquidation f0t 
terrainC. L'Assemblée législative, par son décret du 9 juillet 
1792, crut devoir rétablir encore pour dix ans la Compagnie 
dans l'intérèt des actionnaires, qui Cutent eux-mtme.s leurs 
administraleurs, la plupart choisis parmi ceux de l'ancienne. 
Un second dècret du 13 septembre ordonna le rembourse- 
ment partiel des actions par la caisse de Fextraordinaire. 11 
y eut alors à Paris les bureaux de l'ancienne et de la nou- 
velle Compagnie, jusqu'au moment on la Convention natio- 
nale, qui envahissait tout, qui dëtruisait tout;, ordonna, en 
1793, l'apposition des scellés sur les magasins de h Com- 
pagnie, et prononça, le 2 aoùt, sa suppression définitive, 
comme ayant volW50 millions à la France. 
En 1796, Fab re d'Églantine, Ch ab dt, Delaunay 
d'Augets, etc., furent décrétés d'accusation et condamnés 
à mort comme coupables d'avoir falsifié le dernier décret 
relatil à la Compagnie des Indes, en aveur des administra- 
teurs qui les auraient gagnes par de brillantes promesses. 
Cette affaire n'a pas ëté bien éclaircie; mais il est cer- 
tain qu'avee eux përit le fameux abbé d'Espagnac, ràme 
dalnnee de Ca I orme, le père de l'agiotage moderne, et qui 
avait scandaleusement spéculë sur les actions de la Com- 
pagnie. H. AcmrFnET. ] 
IXDES OP, IENTALES (Etablissements français 
dans les). l'oçe: Cli..NDENkGOn, K..nlK.,L, .ffiAnÉ, PON- 
DICUERY et YA.NA.0N. 
iX'DESTRUCT1BILITÉ. Voye Dsravcm,x. 
INDÊTERMINÉ. C'est, en mathématiques, une gran 
deur qui n'a point de bornes prescrites, et que l'ou petit 
prendre si grande ou si petite que l'on veut. Un problème 
est dit indtermin Iorsqu'on peut le résoudre d'une infl- 
nitc de manières diffërentes, qui toutes satisfont à la 
question. Si l'on demande, par exemple, de trouver tre 
nombre qui soit divisible par 3, 4, 5, on comprend que 
tous les produih, tels que eo, 18o, etc., que l'on peut faire 
à l'infini de ces nombres, satisfero. à la question. En gé- 
néral, les problèmes indëterminés présentent plus d'iueon- 
nues que d'ëquations. Si l'on demande quels sont legs deux 
nombres dont la somme égale 2s, en représentant ces 
nombres, l'un par « et rautre par y, on aura l'ëquation 
x ÷ y  28, qui peut donner lieu à nue infinitë de solutions, 
si l'on admet qu'il est permis de prendre pour les valeurs 
des inconnoes x, !/, tel nombre positif ou négatif, entier 



INDÉTERMINÉ -- INDEX 
ou fractionnaire, que l'on voudra; car si l'on lait y Cai 
b , on aura x -- 27 . Mais si les valeurs des inconnues 
sont des nombres entiers et positifs, les solutions du pro- 
blème sont limilées. En eJfet, de l'eqnation x = 98 -- p, 
il résulte que la valeur de y ne peut pas excéder 28; et 
si l'on représente sa valeur successivement par 0, I, 2, 3, 4... 
28, les ,alenrs de  seront 28, 27, 26... 0; de sote que 
e problëme ne saurait avoir que 29 solutions différentes. 
Dans les recherches algebriques, l'iodétermiuation se 
induire sous diverses forme.ç, mais qui toutes peuvent 
se ramener au symbole -. La valeur que l'on cherche est 
alors le quotient d'un dividende nul par un diviseur Ca- 
lement nul. Or, en se reportant à la définition de la di- 
vision, on reconnalt que le quotient est quelconque, puis- 
que le produit de tout nombre par 0 est égal à 0. 
Il se présente quelquefois des problèmes dont le nombre 
de solutions est limité, et qui offrent quelques difîmultés, 
parce qu'il n'est pas toujours aisé de voir tout de suite 
quel est le nombre de ces solutions; en voici un exemple : 
on demande de combien de muni#res on peut distribuer 
40 ff. à 20 personnes, hommes, lmmes et enfants, en don- 
nant 4 ff. aux hommes, 2 ff. aux femmes, et ! fr. aux 
enfants ; on voit tout de suite qu'il s'agit de trouver com- 
bien il peut ' avoir d'hommes, de femmes et d'enfants ; ce 
qui présente trois inconnues; et néanmoins les conditions 
du problème ne permettent que de former deux èqtlatimls, 
qui sont, en repréoenlant le nombre des hommes par x, 
celui des femmes nar /, et celui des enfants par z -. 
z÷v÷z=20 
4 x ÷ 2 y ÷ -- ----=-- 40. 
De la premiëre on tire : 
Substituant cette valeur de -- dans la seconde, on a : 
 x+2 y + 20  x-- y - 60, 
et en réduisant : 
3x÷/0 
d'où x 
La valeur de x serait tout à fait iud,terrande si l'on pou- 
f'ait prendre pour y'telle valeur que l'on voudrait. Mais 
comme les inconnues représentent des unités entières (des 
personnes), il s'ensuit que 
ainsi que la valeur de x. 11 résulte encore de cette con- 
dition que • ne peut pas excéder 20 : car si x égalait se.a- ,, 
lement ce dernier nombre, la valeur dex serait O; et poor 
que cette valeur soit un nombre entier et positif, il laut 
encore qoe 0-- x soit divisibke par 3 sans reste. Faisons 
dnnc la valeur de 20  y égale t tous les multiples de 3, 
nous anrons: 
20--/ 9  tf 
20--/ 
Il n'est pas permis d'aller plus loin, car si nous [aision., 
20 -- V --- 21, il s'ensuivrait que la valeur de ?/serait égale 
à  t : or, cette valeur doit ètre positive. Du tableau ci- 
dessus, on tire les valeurs de x, qui sont 
x} ----- 2, etc. ; 
les valeurs de -- sont : 2, 4, 6, s_. t2. Le tableau suivant 
contient toutes les solutions dont le p, oblème est susceptible. 
V--- 8 a:4 z 8 
La recherche des systèmes des solntions des questions o- 
ddtermin6es ¢,t leurs nombreuses applications forment une 

355 
partie imporlante de l'algèbre, qui a dU ses plus grands 
progrès .au célèbre Eu ler. Tvss/oaz. 
INDETERMIN[SME. On appelle ainsi le point de 
vue pbilosophiqne où les actes de la volonté de l'homme 
ne sont point décidés par certains motifs ou causes, et, 
bien plus encore, celui où l'homme peut mme vouloir, 
sans raison, en dé[dt des motifs qui s'opposent à Vexer- 
cice de sa volont», le contraire de ce qu'il vent en réalité. Les 
actes de la volonte ne seraient, d'après ce raisonnement 
que de purs effets du hasard, c'est-à-dire indépendants de 
tonte causalité, soit que l'on considère l'indeterminisme 
comme l'action du libre arbitre, libe[as oexluilibrii ou 
ind.fferentioe, soit comme le résultat de la liberté trans- 
cendentale. 
INDEX. C'est le nom latin francisé du second do igt 
de la main, autrement dit indicateur. En bibliographie, on 
a donné ce titre aux tables des matières. Dans l'imprimerie, on 
nomme ainsi un petit signe qui représente une urain avan- 
çant le doigt indicateur, et employé pour appeler l'atten- 
tion. Les Petites A.ffichcs ont abusé de ce signe, et Font dis- 
crédité dans les journaux. L. Lou r. 
INDEX. Sous cette dénomination, prise pour Index 
brorum pvohibitorum, on designe le catalogue des Ih res 
dont l'Église catholique défend la lecture aux laiques, soit 
à causedeserrenrs qui y sont contennes, soit, en genêral, 
cause des opinions hérétiques qu'elle prète à leurs auteurs. 
On rencontre de semblables ordonnances dès les premiers 
siècles de l'Èglise, par exemple la condamnation des livres 
paier, s prononcee par le concile de Cartbage, en 400, et 
celle des écrits d'Arius par l'emperereur Constantin. Les 
ouvrages des pr,curseurs de la réformation furent êgale- 
ruent surveilles avec rigueur par la biérarchie romaine, et 
nous voyons, par exemple, qu'en 1408 le synode de 
Londres dêfendit la lecture des ecrits de Viclefl qui n'au- 
raient point été préalablement appronvés. Comme le nombre 
des livres s'accru à la suite de l'invention de l'imprimerie, 
on se mourra bien plus sëvère ênco, pour empécher la 
circulation des ouvrages qui paraissaient porter préjudice 
aux hltèrêts de l'Elise de Borne ; et après la rëformation 
on chercha à an,.antii tous les livres qui défendaient la 
nouvelle doctrine. C'est ainsi qu'en 15-6 l'université de 
Louvain fit, sur l'ordre de Charles-Quint, publier un cata- 
logue des livres dangereux, et qu'il en parut une nouvelle 
êdition en 1550. 
Des prohibitions de cette espèce parurent à peu près en 
méme temps à Venie,/ Paris, à Cologne, et ailleurs. Deja 
en 1357, puis en 159, le pape Paul IV fit publier par 
l'i uquisition, à lome, une liste des livres defendu% que 
l'on peut considérer comme le véritable premier Index ro- 
main. Vers la même époque, en 1558, ce souverain pontile 
interdit aux théologiens catlioliques et aux savants en gené- 
rai la lecture des livres Irétiques, qui leur avait été permise 
antérieurement par les pap« et par l'inquisition. Comme 
cette prohibition ne concernait autrefois que les livres héré- 
tiques d'auteurs condamnes, l'index fut par la suite divise 
en trois classes: à la première appartenaient les savants, 
callioliques compris, dont les œuvres avaient été prohibées 
en masse ; la seconde comprenait les livres interdits des 
auteurs dont les autres productions n'étaient point con- 
damnées ; et dans la troisième un trouvait les ouvrages 
anonymes, notamment tous ceux de cette espèce qui avaient 
paru depuis 1519. La prohibition s'étendait aussi à tous les 
livres où l'on défendait les droits de l'autorité temporelle 
contre le clergé, ou bien encore la considératiou et le pou- 
voir des évques et des annelles par opposition an saint- 
siCe. L'inquisition vnnlut mème que tous les livres impri- 
més par soixante-deux imprimeurs qu'elle d/ignait ne 
pussent point ètre lus. On décré{a en méme temps des 
peines sévères contre les lecteurs de livres alCendus, telles 
que révocation de fonctions, dégradation, etc., eu général 
la sentence du grand interdit, ce qu'on appelait excommu- 
nicatio latoe sententiœe. 



56 
 L'Index reç.ut des formes plus précises par suite des dé- 
¢isions du concile de Trente, aprës avoir étë annulé par 
Pie IV, à cause de son extrême rigueur. Dans sa dix-hui- 
tiëme "séance ( 1562 ), ce concile nomma une commission 
chargée de préparer un mode de poursuiles contre les livres 
hérétiques et de lui en taire un rapport. Mais te résultat de 
ce travail fut si volumineux, que, dans sa derniëre séance, 
le concile résolut de réserver la solution de cette difficulté 
au pape. Pie IV fitdonc connaltre, par sa bute de 1564, le 
catalogue des-livres à prohiber; et c'est ainsi que parut ce 
que l'on nomme Index Tridentinu, lequel indiquait dix 
règles à observer pour la condamnation des livres béré- 
tiques. Il fut imprimé sous le titre de Index librorum Iro- 
hibitorum, Alexandri Vil, pontif, max., jussu editus 
( liera., apudAldum Manutium ). Il en part dans l'année 
595 une nouvelle édition, augmentée par Sixte-Qaint et 
)ar Clément Vil, et qui désignait d'une manière plus pré- 
sise les rëgles adoptées pour le jugement. 
Vers la mme époque, Sixte-Quint créa une congré- 
O a t i o n de l'Index, dLargée de continuer le catalogue des 
livres prohibés, d'accorder aux hommes savants et religieux 
la permission de lire les livres défendus, et de présenter sur 
<le parcils ouvrages des rapports tendant  en faire permettre 
la lecture moyennant la suppression préalable des passages 
condamnes. D'ailleurs, l'inquiition de Reine conserva tou- 
jours le droit d'index sur ¢-erlains livres. Le nombre des 
.ivre prohibés s'Cendit de la sorte considrablemeut, et 
!'Inde. Tridentinus ne fut plus appele que l'Indexromain. 
L'Index librorum exlm 9dorum ou Index expurgato- 
çius contient l'indication des livres à purifier pour l'usage 
<les lecteurs cathollques. Jean-Marie Brasicheli (son  éri- 
table nom était Wenzell de Brisigella ) publia à Borne, en 
1607, une édition remarquable de l'Index, laquelle cepen- 
<lant fut supprimée par le pape, en 16t, après l'apparition 
de la premiêre partie; mais on l'a rëimprimee depuis d'aprés 
-,an exemplaire échappe à cette suppression. Le graud-inqui- 
iteur espagnol Autouio Sotomayor fit imprimer à 51adrid 
le catalogue complet de livres à l'index, sous le titre de 
Index libror«m proiibitorum et exlrgandorum ( 1648, 
in-fol. ). Plusiems Index romains ont été publiés depuis. 
onsultez, du reste,  cet égad Peigner : Dictionnaire 
critique, litteraire st biblwgraphique des principaux 
• livre condamnes au feu, spprimés ou cenurés (Paris, 
1806,2 volumes in-8 ° ), et Mendbam 
dice both proliibitory and expurgator 9 of the Church 
.of llorae. 
[ Jusque ici les sentences de la congrdgation de l'Index 
n'ont eu par e|les-mmes aucune force en France. Suivant 
Fleury, d'accord avec tous nos canonistes, les décrets des 
• ongrégations de Borne sont honcrés dans l'Église gallicane 
-comme des consultations de docteurs graves; mais, ajoute- 
t-il, « nous n'y reconnaissons aucune juridiction sur l'É- 
glise de France ». Ce serait donc seulement aux ésques 
qu'il appartiendrait, selon nos docteurs, de signaler les 
livres que les prêtres et les fidëles doiveut s'interdire de 
lire ou qu'ils ne doivent lire qu'avec précaution. Les évques 
usent rarement de ce droit de censure, et peut-être en 
lsent-ils encore trop, tant nos mœurs sont opposées  !'6 
4ouffement de la pensée. Ce n'est pas l'asis de la petite 
secte ultramontaine qui s'agite au milieu de nous; trouvant 
leurs pasteurs trop bons pour ceux qui ne pensent pas 
comme eux, voyaut les éviues aussi direux d'éviter le 
scandale que ces agitateurs turbulents sont ardents à le 
cvovoquer, les nocatholiques ont imaginé d'attacher- une 
grande importance aux décisons de la couégation de l'In- 
dex. Leurs journaux le reproduisent asec complaisance, 
firs qu'ils sont de ne jamais rien avoir  enregistrer de 
.quelqu'un de leurs amis, pas mème de dégottants pam- 
I,hlets fait pour soulever le oeuf des honn/.4es gens de 
to,s les partis. Voulez-vous savoir pourtant ce que l'Index 
denonce, ce qu'il est interdit de lire, d'acheter, de posséder 
us les peines spirituelles les plus graves( en attendant 

| 
INDEX 
qu'il soit permis d', joindre des peines corporelles, comme 
dans cette bienheureuse Toscane où l'on va en prison parce 
qu'on lit la Bible sans aller à confesse ), lisez un catalogue 
de l'Index : vous n'y trouverez pas eulement les noms de 
Voltaire, de Rousseau, de Diderot, de Dupuis, de Veiner', 
ou de quelque autre philosophe ayant attaqué au nom de la 
raison une religion par trop semée de mystères et de pra- 
tiques surannées ou superstitieuses, ou s'étant, au nom de la 
liberté humaine, élevé contre des actes d'intolérance et de 
fausse dévotion ; vous y trouverez encore et surtou.t 
noms d'hommes profondément religieux, des défensenrs 
zélés et savants du christianisme; ainsi vous  lirez les 
noms de Machiavel, Descartes, Malehranche, Baluze, 
J. Bodin, Érasme, Montaigne, Hen et Robert É-tienne, 
Scapula, pour son Lexicon G; eco.ltintm ! parmi les bis- 
toriens : Christophe de Thou, Guichardin et Robertson ; 
viennent ensuite le grand Arnauld et l'auteur des Provin. 
ciale; parmi les publicistes : Grotius, pour son traité /e 
Jure Belli et Paris, Puffendorf, Barbeyrac, Heineceius, 
pour leurs Tr«its du Droit de la iVature et des Gens 
Filangieri, pour sa Science de la LœegiMation ; parmi 
les jt,risconsnltes et canonistes lrançais : D u m o u I i n, le 
premier de tous ; P atru, pour un de ses plaidoyers ; Ed. 
mond Richer, syndic de la Faculté de Théologie de Paris; 
Louis Ellies Dupin, pour quelques-uns de ses traitës; 
Van Espen, le plus savant des canouites, pcer toutes ses 
œuvres; le sage F lenry lui-mme, pour son Introduc- 
tion au Droit canonique, qui n'en est pas moins restée 
parmi nous le livre élémentaire par excellence. On trouve 
aussi condamnes le livre des Libertés 9allicane, de P. Pi- 
tbou ; les Preuve de ces Libertés, publiées par Dupuy; 
leur exposition, par Dumaais ; le célèbre Trait de la 
concordance du Sa¢erdoce et de l'Empire, par P. de 
Marca, archevêque de Paris ; Ferret, auteur du Traité 
de l" Abus. Enfin, parmi les plus modernes : Lanjuinais, 
de Pradt, Tabaraud, G i o b e r t i, les abbés Barily et Lequeux; 
ce dernier pour avoir écrit ce qu'on enseigne dans toutes 
les églises de France, au dire de l'ancien évèque de Chartres, 
Clausel de Montais; l'avant-dernier, pour une théologie en- 
seignée dans tous nos séminaires. On peut en outre ajouter, 
pour la philosophie, le nom de 5L V. Cousin; et pour la 
science dudroit, M. Dupin ainé; puis, enfin, celui de Lamea- 
nais. Le Dictionnaire iiitorique de 51. Bouillet a dU subir 
d'assez nombreux changements pour tre ra-é de la fatale 
liste de proscription. 
L'Eglise, il est rai, s'est souvent rel;tchée de sa rigueur 
et après asoir mis un livre  l'index, on accordait à cet. 
raines personnes, quelquefois moyennant finance, la per- 
missiomt de lre te hvres defendus, pourvu qu'elles allé- 
guassent que c'était pour les retuter. Un arrêt du parlement 
de Paris, du 4 avril 1732, rendu sur les conclusions de 
l'avocat généxal P. Gilbert de Vosins, mit un terme 
à l'abus que faisait le nonce alors résidant en France de 
ces sortes de permi=,ions. Le célëbre Dumoulin était seul 
exepté de ces dispenses, tant était gramde la rancune qu'on 
lui gardait à lome pour son commentaire sur l'Cit'des 
petites dates, qui avait ruiné la caisse papale. Mais comme 
on ne pouvait se priver des lumiëres d'un si grand juris- 
consulte, on eut recours à nu expédient : on fit rëimprimer 
ses écrits sous le nom suppose de Gaspart Caballinus de 
Cingulo; et, à la faveur de ce déguisement, il tir per- 
mis de le citer m6r/te en ltalie. L. LovT.] 
INDIANA l'un des États-Unis de I'.-anérique du Nord, 
entre le Michigan, l'Ohio, le Kentucky, l'l!!inois et le lac Mi- 
chigan, enlra dès 1783 sous la protection de l'Union, fut 
éleve au rang de Territoire en 1811, et admis en 18H3 au 
nombre des États composant t'Union, aprês que les plan- 
teurs eussent acquis, dès 1795, la portion du sol qu'arrose le 
Wabash. Son nom provient'des nombrcnses tribus d' I«g- 
dt en s qui habitaient autrefois ces contrées. La superlicie 
de l'Etat d'lndiana est de 1,55 myria,nètres carré_s; 
1820 il comptait déjà une population d« t47,tT ;tmg: en 



INDIANA 
185o ce chiffre s'Cevait à 088,t6. Dans ce nombre d'ha- 
bitants figuraient 5,t00 hommes de couleur libres. Le soi 
n'est montagueux qu'aux environs de l'Obio; presque par- 
tout ailleurs il est plat, et ne forme gèrc qu'une immense 
l»rairie. Situé par 37 ° 5' et 1 ° t,T de latitude nord, le 
climat en est tempéré, le ciel toujours pur, le sol fertile et 
propre à donner tous les produits du centre de l'Amérique 
septentrionale. Plus de 270 myriamëtres carrés en sont 
dej complétement en culture. La houille ' est extraordi- 
nairement abondante (voyez ILLtNOIS), et on ' trouve 
aussi beaucoup de sources salées. L'Indiana est un véritable 
grenier à biC et se prépare à devenir un puissant dis- 
trict manufacturier. 11 a 56 kilomètres de cètes sur le 
lac Michigan. L'Ohio lui sert de frontière au sud, sur une 
étendue de t,6 myriamètres, et le Wabash sur une éten- 
due de t8 myriamètres au sud-ouest. Ce dernier cours 
d'eau est navigable pour bateaux " vapeur jusqu" La 
Fayette; et les cours d'eau de l'lutCieur sont navigables 
pour bateaux plats sur un parcours d'environ 290 myria- 
mëtres. L'industrieuse population de cet État a fait preuve 
d'une remarquable activité dans la construction des che- 
tains de fer. En 1852 on y comptait déjlt 90 myriamëtres 
de voies ferrées en exploitation, et 110 en construction. 
L'État d'Indiana envoie If présent onze repréoentantaau con- 
grès. Le gouverneur, qui reçoit un traitement de t,500 
dollars, est élu pour trois ans, et les cent représentants 
pour une année. Au 7 janvier tS5t la dette consolidée de 
i'tat s'Cevait à 6,775,552 doltars, et le fonds consacré aux 
écoles If |,690,215 dollars. 
Il a pour cbel-lieu Indianopolis, sur le White-River, 
avec uneécole de médecine et 8,03 habitants. Les autres 
calits importantes sont : lVew-Albany, avec 9,785 hab.; lï n- 
rennes, sur le Wabash, ancien établissement français, fondé 
vers le milieu du dix-huitième siècle ; lVew-Harmony, belle 
• ille, londée en t815 par Rapp, dans nne allée voisine du 
XVabash, près de laquelle Owen établit une colonie, où il 
voulait mettre son système en pratique, mais qui périt 
dès 1876; Vevay, sur l'Ohio, Iondé par. des émigrés 
suisses du canton de Vaud, d'où cette contrée est aussi 
appelée quelquefois la Suisse; Clareville, fondée par le 
général Clarke, sur les t 50,000 journau de terre dont le con- 
grès lui avait fait don en récompense de ses services ; Bloo- 
raiyto, avec l'université d'lndania, fondée en 1816. En 
lait d'établissements de ce genreon peut encore mentionner 
l'lndiini Ashbury-University à Greenville, l'Hnnover 
Colleee et le sénfinaire presbytérien " Hannover, enfin le 
It" abash Colleye ì Crawfordsville. 
INDIAN TEPRITORY (c'est-A-dire Territoire In- 
dien), l'un des territoires desEtats-Unis quiont été récemment 
organisés, est situé des deux cèts de l'Arkansas central, 
et borné à l'est par les États d'Arkansas et de Missonri, au 
ord par le Kansas-River, ì l'ouest par le 3  mridien, à 
l'ouest de Wasbington, de mème qu'un sud, vers I« Texas, 
par le Red-River. Il ne forme, pour ainsi dire, qu'une im- 
mense prairie de 6,t8 myriamètrcs carrés, où errent les 
Osaes, les Creeks, les Cberokees et autres tribus indiennes. 
INDICATEUP ou INDEX. l'oye'- DomcT. 
INDICATEURS (Jours). loyez 
INDICATIF. La grammaire appelle ainsi le mode des 
ver bes dont la fonction est d'exprimer les divers temps 
avec l'affirmation simple, sans dépendance d'aucun autre 
mot précédent. Ainsi, lorsqu'on dit : j'aime l'or; vous 
r'avez charmé ; il terminera son travail, l'affirmation 
est simple dans chacune de es phrasos. On nomme ce 
mode indicatif, parce qu'il indique oumarque directement 
et positivement ce qui est signitié par le verbe. L'indicatif 
diffère du subjonctif en ce que les temps de ce dernier 
mode n'affirment jamais qu'indirectement, étant toujours 
subordonnés à une affirmation directe et principale. Dans 
cette phrase, par exemple : je veux que vous marchiez 
droit, je veux exprime une affirmation directe et tout à 
fait indépondantc, tandis que l'affiymation exprimée par 

-- INDIEN . 
vous marchie: n'est qu'indirecte et subordonnée à la pre- 
mière. L'indicatif est donc le mode absolu et positif des 
verbes. Il indique l'existence considérée en elle-mme. Le 
temps du subjonctif sont tellement sous la dépendance des 
tnots ou conjonctions qui les précèdent, qu'on ne peut les 
en séparer ; tandis que les temps de l'indicatif n'ont au- 
cune sujétion de ce genre, et peuvent former seuls un sens 
clair et déterminé, en quoi consiste l'affirmation simple. 
Ainsi, dans ette phase : Je crois que nous irons à Romeo 
retranchez je crois que, le reste, nous irons à Borne 
présente à l'esprit un ens déterminé, et qui s'entend in 
dépendamment de tout autre mot. CaeCN.C. 
INDICATIFS (Adjetifs). Voyez 
INDICE, nombre qui exprime le degré d'une r a cine 
à extraire : dans  4 est l'indice; c'est donc l'exp«- 
sa rit de la puissance à laquelle il faudrait élever la racine 
pour reproduire le nombre donné. 
Les algébristes emploient souvent la mème lettre pour 
désigner plusieurs quantités différentes, mais offrant cer- 
taines analogies ; alors cette lettre est accompagnée vers le 
bas de nombres qui empchent de confondre toutes ces quan- 
tités ensemble, et qui servent en mème temps à désigncr 
le rang ou quelque propriété du symbole auquel ils sont 
affectés : ainsi on écrit a,, a, a» etc., qu'il ne laut pa 
confondre as ec a  ou a, «z  ou a X a, a 3 ou a X a < a, etc. 
Ces nombres placés au bas des lettres ont reçu le nom 
dïndices. 
En optique, l'indice de rëfraction est le rapport du sinu 
de l'angle d'incidence au sinus de l'angle de rëfraction. 
iXDICTION, INDICTION ROMAINE, période ou 
cycle de quinze ans, dont l'origine est assez obscure. On 
prétend que c'etait le nom d'un tribut (indictio tributa- 
ria) que les anciens Romains levaient tous les ans dan 
les provinces pour fournir h la paye des soldats qui avaient 
quinze ans de service. Sous leg empereurs, le mot ildic- 
tion signifia purement et simplement un espace de quitze 
années. Cette période commença, dit-on, sous Constantin, 
le 25 septembre, 312. Chez les Grecs du Bas-Empire, ce 
lut au I er septembre; et les papes, qui s'en servent en- 
core, la font commencer au 1 "r janvier 313. 
Si l'on compte la suite de ces périodes en remontant, on 
trouve que la première dut commencer trois ans avant 
l'ère chrétienne : ainsi donc, pour connaltre la période 
dïndiction dans laquelle on se trouve et l'année de cette 
période, il faut ajouter 3 au millésime de l'année, et diviser 
la somme par 15; si la division donne un quotient sans 
reste, ce sera une preuve que l'on se trouve à la fin d'une 
période accomplie; dans le cas contraire, le reste que don- 
nera la division indiquera le nombre des années d'une pé- 
riode non acbevée. 
INDIEN (Archipel), appelé aussi Australasie. il com- 
prend les diverses lies qui bornent la partie nord-est de 
l'océan Indien ou mer des Indes, ou la merde l'Est, 
comme l'appellent les Anglais, et qui occupent ensemble 
une superficie de 1,560 myriamètres carrés. Ces lies, en 
raison de leur position, Ibrmeat trois groupes distincts : 1 o la 
rangée extérieure, à l'extrémité est et nord-est, composée 
desMoluques, avec legroupe de Banda, Amboine et 
Tomate, et des lies P h i i i p p i n e s ou blanilles ; o la rangée 
iute'ieure, à l'extrémité sud et sud-ouest, à savoir : les lies 
A n d ara a n et Nicolas, les grandes ries de la Sonde, S u- 
m a t r a et J a v a, les petites lies de la Sonde à l'est de J ara, 
depuis 13ail jusqu'à Timodaut; 3 ° la rangée centrale, for- 
mëe par lesandes lies de la Sonde, B o r n é o et les C él è b e 
ainsi que beaucoup de petites lies, telles que Palawan, les lies 
Soulou, Billiton, Banca, l'importante Singaporc, etc. 
La rangée extérieure et la rangée intérieure [orment de. chal- 
nes volcaniques, Bornéo un seul groupe de montagnes, et 
les Célèbes une bizarre complication de chainq. D'après sa 
posilion, ce monde d'lies semhle comme les assises d'un pont 
ieté entre l'Asie et l'Australie ; mais par leur constitution 



a68 1NDIÉN 
physique il diffère complélement de ce dernier continent, 
tandis que les groupes des Marianes, des Carolines, etc., 
doivent y erre rattachés. Sa constitution physique pré- 
sente les analogies les plus Irappantes avec le continent des 
Indes orientales; on y trouve la mmevégétation, les 
mfmes espèces d'animaux et une égale richesse en produits 
précieux de toutes espèces. C'est ce qui explique comment 
ces lies ont depuis lonemps attiré si vivement les peu- 
ples les plus différents. Les habitants aborigènes sont divi- 
sés en une multitude de peuplades, mais appartiennent tous 
à la race, que, d'après le nom de l'une d'entre elles, on ap- 
pelle la race nalaise. Elles offrent entre elles de grandes 
diflérences pour ce qui est de la civilisation, ce qu'il faut 
attribuer sans doute à leur plus ou moins de rapports avec 
l'étranger. La civilisation et la religion indiennes y furent en 
effet introduites de bonne heure, et elles y ont jeté de pro- 
fondes racines. Vinren ensuite les Arabes, qui à leur torr 
y propagèrent l'islamisme. Enfinsont venus les Européens, 
et surtout les Hollandais, qui se sont emparés de presque 
tout l'archipel » tandis que les Espagnols u'y possèdent que 
les Philippines, les Portugais que Dilli avec un petit terri- 
toire dans l'|le de Timor, les Anglais que Singapore et l'lle 
Labouan, visine de la c6te nord-est de Eornéo. En outre, 
mle immense quantité d'industrieux Clfinois s'y sont établis 
à peu prës partout. On ëvatue le nombre des habitants de 
l'Archipel indien à 14 millions, dont 2 millions de metis de 
races diverses, un petit nombre d'Européens et dans leurs 
colonies un certain nombre d'esclaves nègres. Dans quel- 
ques-unes de ces lies on rencontre encore de faibles debris 
d',me race d'hommes particulière, du noir le plus foncé, et 
très-grossière, qqi parait avoir de l'affnité avec les nè- 
gres de la pallie australe de la mer du Su,l, les l'ëgrites ou 
Papous. et parmi lesquels les faibles Alphourons, Alfi.rè- 
ses ou H a n a f o r a s, également du noir le plus foncé, pour 
la plupar refoulés à l'tutCieur deg iles ou bien réduits en 
esclavage par leurs voisins, semblent n'être qu'une dëgéne- 
rescenee de la race malaise. 
INDIEN (Océan). Voye» I.xnEs (Mer des). 
INDIEN (Territoire). Voye-- 
INDIENNE. Voye-. TOILES PEIXTES. 
INDIENNE (Littérature). Les monuments écrits de la 
lilterature indienne appartiennent aux pins anciens que 
nous possédions d'aucun peuple. Dans la première période 
de son histoire nous trouvons les Hindous, parlant arique ou 
sanserit et habitant aux limites nord-ouest del'Inde, entre 
le pays des cinq fleuves (le Pendjab) et la montagne de 
Kaboul, comme un peuple agricole et pasteur, aux mœurs 
patriarcales les plu. sivnples. C'est i'ëpoque de la poësie re- 
ligieuse, d'où dérivent les hymnes et les prières. Quand 
cette race indo-arique pénétra plus avant dans les fertiles 
railCs situées entre l'Indus et le Gange, au milieu de ses 
luttes incessantes avec les barbares aborigènes de ces courtAes 
se développa la poésie épique, qui tant6t célèbre les guerres 
faites par les différentes races conquérantes pour obtenir 
la suprématie, tant6t raconte la propagation de la civilisation 
et de la religion brahmanes dans les parties les plus loin- 
laines de l'Inde. A cet ordre d'idées se rattache, en raison 
de la formation toujours croissante et toujours plus étendue 
d'une littérature d'érudition, les réunions d'antiques tradi- 
tions en compilations systëmatiques, Pexégè.e des anciens 
livres religieux, puis après la grammaire, la métrique et 
la lexicographie, enfin les livres relalifs aux mathématiques, 
ì l'astronomie, à l'astrologie et à la médecine, les codes des 
de lois et les systèmes de philopbie; et dans les cours des 
princes amis du faste fleurissent alors la poésie d'art, le 
drame, la nouvelle, etc. Tous les ouvrages de cette première 
période sont composës en san ser il, qui jusqu'à l'époque 
de Bouddha (500 ans av. J.-C. ) demeura la langue popu- 
laire, et qui plus tard conserva son importance jusqu'à nos 
iours comme langue de la science et de l'érudition. Le mé- 
lange avec des peuples primitifs étrangers, la séparation des 
populations en castes, amenèrent la corruption du sanscril, 

INDIENNE 
dont s'emparèrent les religions d'origine nouvelle des Boud- 
dhistes et des Djainas, pour agir sur les classes iufèrieures. 
Mais cette langue finit aussi par tre supplantée par les dif- 
férents dialectes qui se formèrent dans les divers Êtats de 
l'Inde par suite de ses convulsions politiques, qui sont au- 
jourd'hhi les dépositaires de la civilisation indienne, mais 
auxquels l'influence du génie européen réserve encore un 
grand avenir. Voyez INn (Langues). 
C'est ainsi qu'on peut, mieux que chez tout autre peuple 
de la terre, suivre chez les Hindous leur développement in- 
tellectuel dans des monuments écrits et authentiques datant 
d'une époque extrfmement reculée, de 1500 ans au moins 
avant J.-C., à travers toutes leurs phases jusqu'à nos jours. 
Les plus anciens témoignages du génie bindou ont été dé- 
posés dans les Voedas, qui nous ont été conservés dans 
quatre collections: lli9-vœla, Sdma-voeda, Yadchour-vdda, 
et Atharva.voeda. Chacune de ces collections est partagée en 
trois subdivisions, qui rëpondent à autant de de,és dans le 
développement de la conscience religieuse. La première di- 
vision d'un vëda en est appelee le Sanhitd, et comprend les 
chants, hymnes et prières dans lesquels l'Hindou invoque la 
bénédiction céleste pour ses troupeaux, salue le lever de 
l'aurore. La seconde subdivision, de beaucoup plus récente, 
se compose des Brdhmanas, qui contiennent les chants 
pour les sacrifices et les sentences relatises ì la sacrification, 
et dès lors les expliquant, soit philologiquement, soit en 
fait, ou bien faisant spéculativement et dogmatiquement le 
sujet des chants. Les Sfztras, courtes sentences dans les- 
quelles se trouve réuni, au point de vue du rite comme du 
dogme, tout l'ensemble de la matière, forment la troisiëme 
subdivision, la plus récente des trois. On ne sait encore 
que fort peu de chose au sujet de ces deux dernières collec- 
tions, qui sont aux anciens chants ì peu près ce que le Tal- 
mud est à la Bible. Les Sanhits, an contraire, ont déjà été 
presque tous imprimées, par exemple la sanhit du lig-véda, 
comprenant environ mille chants divisés en huit listes et 
environ 10,000 strophes, editëe par Bosen ( t vol., avec tra- 
duction latine; Londres, 1838) et par Mulller (avec les 
scolies complèles de Sayana; Londres, 1849 . 51. Langlois 
en a donné une traduction française complète (4 vol. ; Paris, 
188-t52 ) ; Wilson en a commencé une en anglais (Lori- 
des, 1850). Consultez 1ève, Étude sur les h/mnes du 
lig-vdda (Louvain, 1842 ). Benfey a publié avec traduction 
allemande (Leipzig, 1848 } la sanhit du Sma-véda, qui 
n'est qu'une anlhologic deschants du Big-véda, rédigée spé- 
cialement à l'effet d'accompagner dans tous ses stades la 
sacrification sainte du sacrifice de Somao. Weber a fait 
connaltre { Berlin, 189) la sanhita du Yadschour-véda, qui 
compreud surtout des sentences sacrificatoires et des prières, 
partie en forme rhythmiquc, partie en prose. Both et With- 
ney prëparent en ce moment une édition de la sanhit 
de l'Atfiarva-véda, qui est d'origine plus récente que les 
précédentes et forme une riche collection de cbants reli- 
gieux. Aux Védas appartient encore une collection de disser- 
tations didactiques, les Oupanishçt, provenant de périodes 
très-diverses, et qui sont les premières tentatives faites par 
le genie hindou pour fonder spéculativement les dogmes re- 
ligieux. AnquetiI-Duperron a donné une traduction latine, 
d'après une imitation persane, de 52 opantshat : quel- 
ques-uns ont été traduits et publiés par Bam-Mohan-Boy 
(Calcutta, 1818); Poley ( Bonn, :84); Bocr (Calcutta, 188) 
et Weber (dans ses Études sur l'Inde [Berlin, 18tt]). 
Consultez Colebrooke,Essa!l on the Veds. 
De l'antique poésie ëpique, il s'est conservé deux vastes 
épopées, dont l'une, le Mahdbhrata, raconte la lutte de 
deux-familles princières, lutte à laquelle prennent part une 
foule de souverains et de faces diverses, et qui se termine 
par l'anéantissement complet des plus nobles familles de 
l'Inde antique. A cette action principale se rattachent une 
innombrable quantité d'épisodes, tantôt d'un caractère épi- 
que otz i6gendaire, tant6t dun conten didactique, mais 
différant compiétement, et pour le sujet et pour l'ëpoque, de 



INDIENNE 
leur composition, de telle sorte que le tout a plutôt l'air 
d'un poëme cyclique que d'une épope renfermée par l'art 
dns des limites données. La tradition en nomme pour an- 
teur Vysa, nom qui veut dire collecteur ; mais ce n'est 
quo la personnification de toute une période de la iittératufe. 
Le texte sanscrit du Mahdbhrata forme 4 volumes, et a 
été publié en 1834 Calcutta. Bopp, Pavie, Wilkins, etc., 
en ont publié divers épisodes, texte et traduction en regard. 
La seconde épopée. le ldrndyana de Vaimiki, raconte la 
conquête de l'Inde par Rfima, dont un démon avait enlevé 
l'épouse. Dans ce poëme, il y a plus d'unité et d'art que 
dans le Mahfibhàrata, bien qu'il soit plus court. Guillaume 
$chlegel avait commencé une édition du texte avec une tra- 
duction latine en regard (fumes I et II; Bonn, I$29-1833); 
Gorresio en a donné une édition complète avec traduction 
italienne (fumes I  Vil ; Paris, 1843-t850 }. 
A ces deux poësnes Ciques se rattachent les porands, 
vastes compilations des antiques traditions, contenant la 
cosmogonie, l'histoire d dieux et des saints, avec beaucoup 
de digressions philosophiques et didactiques, et la plupart 
ayant pour bu! spécial d'exalter telle ou telle secte des ad- 
nérents de ¥isl,nou ou Siva aux dépens des autres. On 
pourrait mme dire que ce sunt les histoires écclésiastiques 
des diverses sectes religieuses des Hindous et l'exposition de 
leur dogmatique. On connalt dix-huit lourands, dont un 
seul, le Bhagavata-pourand , contenant l'histoire du dieu 
Yishnou, a été complétement publié, avec scolies ( Cal- 
cutta, 1830; Bombay, 1839; texte avec traduction fran- 
çaise par Burnouf, Paris, I S0). Wilson a traduit le Vishnou- 
pourand, dont le contenu offre beaucoup de rapports avec 
celui du Bhagavaa-pourani, mais qui est d'une époque 
antérieure. Dans l'introduction ì l'ouvrage précité, Wilson 
présente l'analyse des autres pouran/ts. Consultez 
Les Pourands (Paris, 1852). A ces ouvrages se rattache 
aussi le poëme ttari-Vansa, traduit en français par Lan- 
glois (9. vol. ; Paris, 1849. ) et imprimé comme appendice au 
blahhh/trata, off se trouve racontée l'histoire de Krishna 
comme incarnation de Vishnou, avec des ornements fan- 
tastiques. 
L'Hindou n'attache point au mot histoire le mëme sens 
que l'Européen; jamais le développement historique de 
i'humanité n'a eu d'importance h ses yeux ; et jusqu'à pré- 
sent il n'existe encore dans toute la littérature indienne 
qu'nn seul ouvrage qui puisse pins ou moins prétendre au 
titre de livre historique; c'est la ladja-tarangini (Cal- 
cutta, 1835 ; trad. eu français par Troyer, 3 vol.,. 1840), 
qui raconte en vers, et dans une style très-raffiné, l'l,istoire 
de Kaschmir depuis les temps les plus reculés jusqu'au 
seizieme siècle. 
Lë goùt pour i'épopée simple disparut peu à peu; et 
elle fut alors remplacêe par des poëmes artistement tra- 
vaillés et plus courts, écrits d'un style rechercbé et am- 
bigu, surchargés de petites images et de jeux de mots et 
de tout ce vain clinquant du faux bel esprit où il y a absence 
complète de poësie vraie et profonde. Ces épopées d'ar 
( kdvya ) racontent en résumé tout le contenu des an- 
ciens poîmes Ciques, comme le Bdlabhdrata d'Amara, 
tr/duiten grec par Galanos (Athènes, 1848), résumé du 
Mah'bhàrata, et le Rhagou-Vansa de Kalidàsa, texte sans- 
¢rit avec trad. latine par Stenzler ( Londres, 1830), où sont 
résumés les événements du B;im/tyana. D'autres traitent 
d'une manière plus détaillée certains épisodes des anciens 
¢cles Ciques. Ainsi, les sujets du Kir.tardschounf9a de 
Bharavi (Calcutta, 1814 ) et des Sisoupalabadha de Mggha 
( Calcutta, 1813 ) sont tirés du Mallbhrata; le premier ra- 
conte la lutte du héros Ardschouna contre le dieu Siva, dé- 
guisé en montagnard ( h'ridta ) pour la possession des armes 
divines ; le second célèbre la mort du héros Sisoupala. 
Deux autres de ces pommes traitent d'une manière brève, 
mais plus difficile, l'histoire rotanesque de lala : le Nalo- 
daya de Klid:',sa (texte sanscrit et trad. latine par Benary, 
Berlin, 1830; texte sancrit et trad. anglai+e, par Yates, Cal- 

cutta, 184; et avec plus détails, ns cependant le tfr- 
miner, le 'oichahila de Har.cbadeva (Calcutta, 1836). 
Dans la poésie lyrique et gnomique nous trouvons les 
poëmes les plns gracienx, pleins de sagesse pratique, de 
vrai sentiment, de tendre délicatesse, et de charmantes des- 
criptions de la nature. En ce genre il faut surtout citer le 
3leghadîta de Khlidsa, et le litosanhdra (le Cercle 
des saisons) du mëme poëte ; puis les Proverbes de Bhar- 
t ri h a r i, les cent Sentences d'amour (Calcutta, 1808) d'Ama- 
rou, etc. Les Chants de Dshayadeva sur le dieu Krishna, où 
il est raconté comment il vécut, déguisé en berger, parmi des 
bergères (Gffa9ovinda, sanscrit et latin par Lassen; Bonn, 
t836), est un véritahle dithyrambe d'amour, orné de toute 
la magnificence dont le langage est susceptible et des plus 
délicieuses descriptions de la nature. La Sansrit Antho- 
logy d'Hoeberlin (Calcutta, 1847) contient la collection 
presque complète des poésies lyriques des Hindous. 
Les Hindous sont le seul peuple d'Orient chez lequel la 
poésie dramatique se soit développée d'une manière sponta- 
née et indépendante; elle n'y naquit pas, comme en Grèce, 
de la po6sie lyrique, mai» directement de la poésie épique. 
Dans leurs poésies dramatiques, les Hmdous traitent soit les 
iégendes des dieux, comme, par exemple, dans la 
tald de Kalidasà, qui appartient aux chefs-d'oeuvre de la 
poésie de tous les peuples et de tous les siècles, et dans la 
tïÀramorrasi du mme poëte ; ou bien elles représentent 
de simples situations de la vie civile, par exemple le Mrits- 
chati de Sudral, a (publié par Stenzler ; Bonn, 1866), et 
3ldlatiet Mdhavade Bhavabhuti (Calcutta, 1830}. D'autres 
dram traitent des sujets d'histoire, tels que le loudrd 
Rdchasa de VisŒEkhadatta (Calcutta, 1831); ou bien ce 
sont des pièces h intrigues, comme le Mlavitî et l'Agn- 
rnitra de K/tlidsa et le Ratnval[ de Harschadeva (Cal- 
cutta, 1832). Il n'y a pas jusqu'à la farce qui flagelle les 
vices des brahmanes, leur hypocrisie et leur paillardise, qui 
n'ait été cultivée par les Hindous. Le Dhurtasamgama 
(c'est-à-dire l'Assemblée de fripons) a été traduit par Lassen 
dans son Anthologia sanscrita (Bonn, 1836). Ils n'ont 
point cultivé avec moins de succès le drame allégorique, 
et dans le Pradodhatschandrodaila de Krischna-Mira 
(puhlié par Brockhaus; Leipzig, t845), le poëte n'a pas 
craint de développer tout un s)'stème philosophique. Con- 
sultez Wiison, Select Specimens oJ the Theatre of the 
ltindus (3 vol.; Calcutta, 1827). 
La fable et la poesie de conteset de nouvelles ont exercé 
une influence considerable sur toute la iittérature de l'O- 
rient, et par suite aussi sur celle de notre moyen fige. 
Parmi les diverses collections de ce genre, il faut surtout 
mentionner le recueil de fables Pantscha tantra, et la 
re[onte postérieure de cet ouvrage sous le titre de Hito- 
padesa (VOile'- Bmpxï), de mëme qu'en fait de contes et de 
nouvelles les 25 Contes du Démon, les 70 Contes du Perro- 
quet, d'o0 proviennent les romans si répandus des S ep t 
Sages. Somadeva de Kaschmir réuuit au deuxiëme siècle', 
sous le titre de Katht-sari-sagara (publié par Brockaus; 
Leipzig, 1839, nne collection complëte de ce qu'il y a de 
plus important et de meilleur en ce genre. Les Aventures 
des dix princes de Dandin (Dasa-Koumdra-Tscharitram, 
publié par Wilson; Londres, 1846) sont plus artistement 
composées, et pour ce qui est de la forme et pour ce qui 
est de l'expositiou. 
Ge que les Hindous ont produit daus le domaine des 
ciences n'est pas moins important. A cet égard il faut ci- 
ter avant tout leurs travaux sur la grammaire sanscrite, 
qfi'on peut considérer comme n modèle de l'étude logique 
d'une langue, comme des productions de l'esprit d'analyse 
le plus profond et le plus ingénieux, exemptes de toute 
spéculation oiseuse. Si la connaissance des antiques formes 
plastiques de la langue sanscrite a exercé une influence 
considerable sur notre philoloe moderne et ses investi- 
gations, la méthode suivie par les grammairiens Hindous 
n'a pas été moins utile et fecon¢]e (voçe-'. 



La jurisprudence a été cultivée avec prdilection par les 
llindous. Indépendamment des anciens codes de Manou 
(Calculta, 1813; Iraduction françaisepar LoiseleuroDeslongs- 
champs; Paris, 1833); de Yadschanavalkya (texte sans- 
crit et trad. allemande par Slenzler; Berlin, 1839), qui 
posenl en courtes senlences rhylhmiques le principe de tout 
le droit polilique et ecclésiastique, du droit civil et crimi- 
nel et de la procédure, on possède des syslèmes complels 
de jurisprudence par ¥idshna-isvara (Mitkschara; Ca)- 
culta, 1812) par Rhaghounanda (Calcotta, 183.), et autres; 
el en nuire un grand nombre de dissertalions, soovent très- 
délaillées, sur diverses parties du droit, par exemple sur le 
droit de succession par Dschimutavhna (Catcutta, I813 ; 
trad. en français par Orianne, Paris, 183), sur l'adoption, 
par Panda (Daltaka »iransd; Calcutta, 1817 ; trad. en 
IPancais par Orianne, 18), etc. Consultez aui les travaux 
de Co le b r o o ke, et  Macnaghten (Prncples o/Hind 
Law ; Calcut, 
Dans les scienc mathématique, c'est surtout le calcul 
supérieur, nomment l'gbre, dont lb peuvent ëtre con- 
sidê comme les invenurs, que les Hindous ont cultivé. 
C'est incontestablement  eux que revient le mérite de 
l'inenUon du sstème de chiff sples, qu'ils appli- 
quaient déjà quatre siècles avant notre ère, qu'ils 
muniquèrent aux Aras, lqu«Is, à leur tour, l'ont 
Iransmis au rte du monde civilisé, et qui a provoqué une 
complète volutiou dans le domaine des hautes mathéma 
tiques. En fait de mathémaciens célbres, nous citerons 
Aryabhat, au premier siècle de notre ère, Brahmagoupta 
au sixième, et Bhskara au trzième siècle. Consulz Co- 
lebrooke, Indian Alçebra (Londres, 817). L travaux 
des Indiens en astronomie se distinguent par des observa- 
tions delicates et exactes sur les périodes de révolution de 
laterre et de la lune, et sur la déterinaton exacte de la 
conférence de la terre, etc L'un des plusandens manuels sys- 
tématiques d'atronomie est le Srd-Siddhdta, auquel 
çe ratchent les ouvrages deBrahmagoupta et dehàskara, 
qui ont bien été imprimés (Calcutta, I2), mais qu'on n'a 
point encore traduits. En ce qui touche l'astroloe, le grand 
ouvrage de Vahra-Mihira, du cinquième siècle, occupe 
premier rg; mais ou ne peut méconnaltre dans cee science 
l'fluence de la Grâce. En médecine, l'ouvrage le plus 
snom est le sysme de mdecine de Sousrou (Calcutt, 
1835; ad. en latin par Hessler, Erlang, t8-1851 ). Sur 
la rtorie, nous avons le manuel de Ysvantha (Sahi- 
tya-darana, Calctta, t88 ; traduit en anglais par l- 
lantyne, Calcutta, Io); sur la métrique, les poëmes 
didactiques de Klidsa (Srot-bodh, publié par Brock- 
haus; Leipzig, t85) ; de Gangda (Calcut, 1933 ), etc. 
11 existe aussi un grand nombre d'ouvrages relatifs à la 
musique et ax autres arts ; mais les Européens ne s'en sont 
jusqoe ici que fort peu occup. 
Les ouvrages philosophiques sont un cté autrement 
brilit e la littérature ienque de ]'de. On peut re 
'n droit u'apr les Grecs et les Allemands I Hindous 
sont la sle tion qui puisse se vanter d'avoir produit par 
elle-mme quelque chie d'important en phlosophie. Les 
comoeme de la spéculatiou philosophique remontent 
à une époque erèmement recul. Dans quelqueu 
d chants d Big-Véda on tuve déj d ntatives faites 
pour résoudre l'énigme de l'oçine du monde et d'autres 
questions sBabl. C'est ce qu'on remaue encore plus 
dans les parti postédeures des Védas, dans les Brahmanes 
et surtout dans les oupanihat.  ésie épique est che 
en grands épis didactiques, qui souvent affectent com- 
plétement la forme de pmes didactiques. Sous ce rap- 
prt il faut sudout mentionner le célèbre épisode du 
Mahbhta, la Bhogauadgffa. Il serait dicite de pré- 
cicr le mont o la spéculation scientifique se sépara 
 o] philo»ophiques distinctes; mais il remonte très- 
rtainent bien au del des commencements de notre 
èR. vec le temps, il  et surtout six sstèmes ui 

INDIENN 
propagèrent et recrutèrent de nombreux adherels. Ce 
sont la doctrine Stînkhja de Kapila, qui admet une ma- 
tièrepremière comme base du monde, et de laquelle il sortit. 
A cette doctrine, qui se perfectionna en se spiritualisant, 
se rattache la Yo9 a de Patandschali. La bl[m¢însi a surtout 
pour but de mettre d'accord entre elles les doctrines expo- 
sées dans les saintes révélations, et de fixer leur sens vé- 
ritable. Dans la plus ancienne Mlm,ns, celle de Djaimini, 
les préceptes sur l'activité réelle, sur les sacrifices, etc., 
sont le principal sojet qui s'y trouve traité ; la MImns 
plus récente, ou Vednta de Bdaryana, traite plutOt de 
l'essence du Dieu créateur et de ses rapporls avec le monde. 
Les doctrines de ces deux écoles forment la base dogmati- 
que de la religion qui domine dans l'lnde. Les deux écoles des 
Nyya de Kanda et de Gotama, qui formèrent surtout la 
logique, et qui admettent que le monde provient d'atomes 
qui, par la volonté d'un tre fixateur, se réunissent pour 
prendre des formes déterminées, s'y rattachent directement. 
Le but de toute la philosophie indienne est d'indiquer les 
moyens par lesquels l'homme sera affranchi de la malédic 
tion de la résurrection, et participera au bonheur éternel 
par sa complète réunion avec Dieu. Au reste, nos connais- 
sances sur la philosophie indienne sont encore trës-défec- 
tueuses. Sans doute les principaux ouvrages de quelques 
écoles, tels que ceux de la Sankhja (Sérampore, 1821 ), de 
la Ved/inta (Caicutta, 1818) et de la lyàya de Gotama 
(Calcutta, 188), ont déjà éiWimprimés; mais jusqu'à ce 
jour ils n'ont été ni traduits ni suffisamment commentC. Ce 
que l'on a encore de mieux sur les diverses écoles philo- 
sophiques de l'lnde se trouve dans les Essaus on 
Phlosoph 9 o.t the Hindus de Colebrooke ( 2  édit., Lou- 
dres'., 1828; trad. en français par Pauthier, Paris, 1833). 
Parmi les ouvrages spécialement relatifs ì tel ou tel sys- 
tème, il faut surtout mentionuer, sur la S/inkhja : Wilson, 
The SdnAh3a Kariki, or memorial verse. of the Sdn- 
khga philosoph 9 (Londres, 1827); Saint-Hilaire, Essai 
sur la Philosophie S6nkhUa (Paris, 1852); sur la 
dfinta , Windischmann, Sankara, sire de Theologzmenis 
l'edanticorzzn (Bonn, 1833); et sur la Nyya : Roer, 
BhdscMi paricheda, or division of the categories ( Cal- 
cutta, 1849); 5lfiller, On the lndian l, ogic ( Oxford, 185). 
On consultera aussi avec fruit sur la doctrine Vaiseschika 
une dissertation du mme auteur insérée dans les Mémoires 
de la Société allemande Orientale (1852). Mentionnons sur- 
tout ici Ballantyne, directeur de l'université de Bénarès, 
qui a commencé un Commentaire complet de tous les prin- 
cipaux ouvrages de la philosophie indienne. 
Indépendamment de cette lilté«ature s,xnscrite-brahma. 
nique, il existe encore une très-riche littérature sanscrite- 
houddhiste, mais qui s'est essentiellement bornée à la théo. 
logie. Burnout, dans son lntrodction à l'hitoires du Boud- 
dhisme izden (Paris, 1844 ), a présenté un aperçu complet 
de ces différents ouvrages, et en a donné quelques extrait 
Il n'y a encore de complétement imprimé usqu'ì ce jour 
qu'nne seule des principales sources du bouddhisme .. Le 
Lot{s de la bonne loi (publié par Burnouf; Paris, 1S52). 
La langue et le style des ouvrages bouddhistes écrits en sans- 
crit sont beaucoup plus simples et plus intelligibles que la 
langue et le style des ouvrages brahmaniqnes, parce qu'ils 
s'adressent surtout aux masses populaires. Pour ar encore 
plus sur toutes les couches de la population, les Bouddhistes, 
et plus lard les Dj[inas, employèrent aussi les dialectes plus 
grossiers immëdiatemeut dérivés du. sans¢rit, qu'on appelle 
ieprkïit, et plus spécialeme.nt an sud de l'lnde, le pal. 
Dans ce sanscrit corrompu et singulièrement énervé, on a 
de nombreuses inscriptions et des Iégendes monétaires da- 
tant du quatrième siècle avant J.-C., de mSme que'des ou- 
vrages relatifs à la théolagie, ì la jurisprudence, etc. ; des Ié- 
gendes de saints et surtout «les chroniques, qui sont d'une 
grande importance. Toute la littérature bouddhist a cons- 
tamment affecté le mépris d, beau ; il lui manque tout par- 
h,m de poéie ; .n expression est grossière; elle se 



INDIENNE 
Ilalt dans ce que la pensée et l'exposition des faits peuvent 
avoir de tautastiquement sauvage et de monstrueux. Jus- 
qu'à préseut on n'a encore imprimé qu'un petit nombre de 
livres appartenant ì cette littérature bouddhiste en prdkrit; 
nous citerons, entre autres, le Mahdvansa, histoire de Ceylan 
depuis l'epoque la plus reculée ( tome I e, en pali et en an- 
glais, publié par Turnour; Colombo, 1834) ; l'ouvrage li- 
turgique, Kammuva (en pali et en latin, publié par Spiegel ; 
]]onn, 1542); les fragments de la Collection de Iégendes, 
llasavdhint (dans les Analccta palica de Spiegel; Leipzig, 
1845); le Dictionnaire, Abhidhdna-ppadfpika { dans la Pali 
Grammar de Cloul; Colombo, 1824 ); The Kalpa Sutra 
nd Aava Tattva (traduit en aurais par Stephenson ; Lori- 
rires, 1848), etc. 
La littérature des langues modernes de l'Inde, tant celle 
du nord que celle du sud, est incommensurablement ricfie ; 
naiselle offre peu à glaner & l'invest!gateur scientifique d'Eu- 
rope, parce qu'elle apresque toutentière pour base l'ancienue 
littérature sanscrite; et elle ne se compose en grande partie que 
de traductions et d'imitations d'anciens ouvrages. Nous I 
trouvons cendant un grand poëme original, les Aventu- 
res de Prithivf lddja, par Tshand, en hindi, poëme 
épique au moins aussi étendu que le btahbhrata, dans le- 
quel sont décrites les luttes soutenues par les Hindous, sous 
les derniers rois de Delfiy, contre les conquérants mahomé- 
tans. En outre, toutes les poésies religieuses de l'époque 
moderne, qui souvent ont exercé une influence extraordi- 
cuire sur les destinees politiques de l'Inde, sont écrites en 
dialectes populaires, par exemple l'Adi-granth des Sikbs, 
les œuvres de Kabir, de Toulsida, de Tirouvallouver, elc. 
Ce qui a surtout de l'intérét pour nous, ce sont les nombreux 
chauts popuiaires, souvent d'une exquise dclicatesse de senti- 
ments. Mais ce n'est pas uniquement  l'lnde que s'est bornée 
l'influence exercée par sa littérature. Toute la littérature 
scientifique et une grande partie de la ,ittërature poétique de 
l'lnde au dela du Gange, des lies de la Sonde et du Japon, 
est d'origine bindoue; et la Chine elle-reAme n'a pu se sous- 
traire à cette influence. Ce que nous possédons en fait 
d'ouvrages de la littérature des peuples du Thibet, de la 
Mongolie et «lu plateau nord de l'Asie en géuéral, sont des 
imitations de livres hindous. L'influence immédiate de la ci- 
vilisation hindoue s'est mme ëtendue iusqu'aux limites de 
l'Europe, car au milieu des steppes de la Russie méridionale 
les Kahnoucks n'ont dans leur langue que des ouvrages d'ori- 
gine hindoue. Le Bibliothecæ Sanscritæ Specmen de Gil- 
demeistcr { Bonn, Is47 ) contient le catologue de tous les 
ouvra-s sans¢rits qui ont été imprimés jusque ici. 
I N D IEN X E, (F, eligio ). De dévdoppements nombreux 
et de la nature la plus diverse ont eu lieu dans la relion 
des populations de l'lnde; mais nous possédons trop peu de 
renseignements sur l'histoire de ces developpements pour 
pouvoir essayer d'en présenter en toute assurance une ex- 
position détaillée. Jusqu' prsent en effet nous ne connais- 
sons que par fragments les nombreux livres sacrés déposi- 
tait'es de l'expression des divers systèmes. En se butant sur 
les sources authentiques qui nous sont devenues aecessibles, 
xoici comment l'on peut établir l'ordre des développements 
successivement survenus dans la religion des Hindous : 
1  Antique doctrine des vdas. Suivant les b?mnes con- 
lenus dans les védas, on adorait d'une manière toute par- 
ticuli/:re, entre autres forces de la nature considérées comme 
• les ëtres celestes dont on ne parlait jamais qu'avec respect 
et piCC le soleil, la lune et lndra, c'est-h-dire le firma- 
.ment visible et la region des nuages .'lui répandent sur la 
terre la ferlilisante pluie, biais l'adoration des forces natu- 
relle.% qui peut-Cre pour la plus grande partie du peuple 
,.onsfiluait presque toute la religion, n'empëcha pas l'esprit 
de s'Cever à la pensée d'un créateur unique et infini du 
auondc, et prcsida.t aux Iorces naturelles qu'on considérait 
bien couune aulant de divinités, mais qui hors de lui nesont 
que de éheg infcrieurs et périssables. Ce createm, infini du 
n|o:t,le cci B r a h m a. C'-t sa parole qui a donne l'existence 
wcT. w L CO,VIS.  . xL 

361 
à tous les Stres du monde visible, et le soleil est l'une de 
ses principales mauifestations. C'est par la vertu, l'inno- 
oenoe et la piét que l'homme purifiera son me sur oette 
terre. prës la mort, l'Sine est transldrée dans un nouveau 
corps, suivant la mauière dont il s'est comporoE ici bas. A la 
fin, I"me complétement purifiée, retourne au sein de I'$tre 
créateur dont elle est étonnée. 
° eultephysifue postérieur, dont il est question dans 
pourands et dans les poëmes, et qui fut le developpement 
successif de la doctrine plus simple des védas. Ici encore 
les forces de la nature, les éléments et les tres physiques, 
apparaissant comme des divinités ou bien comme obéissant 
 des directeurs divins. Les traditions et les poetes expo- 
sèrent l'histoire de ces nombreuses divinités de la nature 
dans de vastes cercles de m?tbes. 
Les trois grande» divinités qui y apparaissent en première 
ligne sont Brahma, Siva et Vishnou. Siva, Cest-/-dir,; 
le Fortuné, vraisemblablement le feu considéré comme la 
force première, qui anime le monde et qui doit le détruire nn 
iour, est ,e principal objet du culte de la nombreuse secte 
des Sivaïtes, laquelle parait originaire du nord de l'Inde, 
mais qui de 1/ se répandit ensuite de plus en plus au sud. 
Siva porte les surnoms d'lsvara, c'est-à-dire Souverain, de 
Mahddeva, c'est-/-dire grand Dieu, de tioudra ou le Terrible, 
de .çthanou ou le Constant, etc., etc. Il est représenté avec 
une peau de couleur blanche, trois yeux, quatre bras, et por- 
tant un trident comme emblème de sa domination sur les trois 
mondes. Ses s?mboles sont le triangle avec la pointe re- 
tournée en haut (A), qui signifie la flamme, et le linga ou 
p h ail us pour désigner la force animatrice et productrice 
de Siva. Son épouse apparalt sous des iormes diverses, et 
est al»pelée tant6t Bhîvdni, c'est-à-dire la .Nature, tant6t 
Pdrvati, fille de la montagne, parce que Siva habite la 
montagne; tant6t Dourgd , ou encore Kdli., comme l'ef- 
frayante destructrice de l'univers. Les Sivaites se divisent en 
Saktas, qui adorent surtout Bb',lv'ni ou la force naturelle 
de la femme; en Lingis , qui adorent le iinga ou la force 
naturelle del'homme; et en ceux qui vénërent Siva comme 
Ardhandri, c'est-ì-dire homme-femme, ou comme reuni- 
saut la force productrice de l'homme et de la femme. 
Vishnou, c'est-ì-dire le Pénétrant, vraisemblablement 
l'cther, est, comme principe animant l'univers, le principal 
objet du culte de la secte des Vishnouites, laquelle parait 
tre encore aujourd'hui plus répandue ,lans l'lnde que toute 
autre. Il y a dans la nature de Visbnou quelque chose de 
plus doux que dans celle de Siva. Lui aussi, il a une foule de 
surnoms. L'un des plus usites est Haris ou le Vert, et on le 
représente aussi en bleu ou en vert. Un de ses principaux 
attributs est la fleur du lotus. Il semble souvent que Vi»hnou 
soit aussi pour les Hindons la représentation de l'eau ; et 
c'est peuttreà cela que se rapporte son symbole, le triangle 
avec la pointe renversée (V), comme emblème de l'eau. Son 
épouse s'appelle Sri, c'est-ì-dire bonheur, ou eucore £ak- 
.chmi, c'est-h-dire beauté. Le culte de Vishnou parait 
s'ètre propagé surtout dans la partie la plus éclairée «le la 
population, et la majeure partie de la littërature indienne a 
été écrite par des adorateurs de Vishnou. Le cycle de my- 
tfies relatifs h Vishnou a trait surtout h ses i n c a r n a t i o n s 
ou apparitions corporelles dans l'univers, appelees Avatdra, 
c'est-h.dire desccntes; il revêtir ces incarnations pour vaincre 
l'eprit du mal, et les pourands s'eu occupent surtout. Les 
dix plus clèbres curent lieu : comme poisson, lors du grand 
deluge; coin me tortue, lors de la rechercfie d u breuvage d'im- 
mortalité; comme sanglier, ì la mort du géant Hiranjakscfia; 
comme homme-lion, h la mort du géant Hiranjakasipou; 
comme nain, lorsqu'fl vainquit le tyran Mah',lbali; comme 
fiéros Balarma ou Parasour',ma, lors de la guet're couffe 
les Kscbatrias, ou la classe des guerriers ; comme dieu Kirs- 
chna, c'est-/-dire bleu, incarnation pendant laquelle il aima 
la n) mphe Radlta et tua le dragon Kalija; comme Bouddha, 
ou fondateur du bouddhisme ; et comme Kalki, incarnation 
«lui est encore h venir, et dans laquelle, montant nn clxal 



362 INDIENNE 
bhnc, il apparaitra alors pour détrtire i'tnivers et deLivrer 
toutes les mes du pécé. Ces incarnations contiennent 
tant6t des idées phsiqueset relieuses, tantôt d es traditions 
historiques. 
Vishnou est adoré sur la c6te de Coromandel et ailleurs 
sous le nom de Djagan-ndthn, c'est-à-dite le r, laitre de 
l'univers. Brabma, Siva et Vishnou sont souvent représeutés 
réuuis sons le nom de Trimori, c'est.à-dire à trois formes. 
Après eux figurent encore dans les croyauces populaires et 
dans les trat[itions des poëtes un grand nombre de }ivi- 
nités inférieures, dont la plupart sont des personnifications 
d'objets physiques. On oit d'abord en premiïre ligne les 
huit gardiens du monde : lndras, c'est-à-dire le firma- 
ment visible; Agnis, c'est-à-dire le feu; Jaraas, c'est- 
à-dire le monde ingcrieur ; Surjas, c'est-à-dire le soleil ; 
l'arounas, l'eau ; VaArus, le vent ; Prthîvi, la terre; et 
5omas, la lune; puis KartiAejas, le chef de la milice 
céleste ; Ganesas, le dieu de la sagesse et de la science; 
K¢imas, le dieu de l'amour, et Gangd, la nymphe du 
Gange. Vient ensuite une longue serte de demi-dieux, de 
drmons, d'êtres sacrés et de héros, par exenlple : les Gran- 
àharvas, ou chantres célestes, les Apsarasas, on nymphes 
celc_-ies, les aAc]as, ou gardiens des trésors enfouis dans 
le» montagnes, les Rakschasds, ou farïadeL, et Is 
;zaras, ou hommes des bois. Le culte exté¢ieu¢ de ces diet;x 
consistait et consiste encore aujourd'hui en sacrifices, en 
prières, en abluti,ms, en pëlerlnages à des lieux saints et en 
pcnitences. 3lais il régne à cet égard une diversitc extrème 
dans les ages des diverses villes et provinces; tel ou tel 
dieu etant adoré dans un endroit de preference à un autre, 
et alors sous tefies ou telles representation et formes sp6- 
ciales. D'alleurs, La division de la popukation ldndoue en , 
prêtres, gerriers, gens de métiers et serviteurs, ae¢ un 
rand uomhre de classes inlerieres, est etroitement liée aux 
m.thes reli-ieu: qui servent/t la sanctifier. 
3 ° Bouddhi, ne ou religion de B o u d d h a. 
4 ° eliffion des Djaina,, ou des adorateurs de Djina, qui 
semble être nue secte particulière du botuldhisme. 
ênviron vers le cinquiènte sièclede notre ère, elle prit, ì 
qu'il parait, du huitièue au onzième siècle, use grande 
tension dans l'Iode mridiinale, oU se troue encore aujour- 
d'fiui son principal centre. Il exizted'anciens et magnifiques 
temples de marbre des Djaina.s, surtout dans la province 
de Gouzourate et dans les Etats des Radjpoules. ll admet- 
tent le monde celeste des ltiadous, tout Colame les Yisch- 
noudes; mais ils vénèreut d'une manière toute particulière 
leui's  ingt-six plus anciens docteurs tirthalàras, 
3:.rc purilicateurs, et les temp]es sont décorés de leurs sta- 
it:e». Ils rejettent l'autorité des édas, cependant ils lisent 
Ifs l'ouranàs. Leurs livres saints sont en partie êcrits en 
1 ngue pràkrit. Cou,me les bouddhistes, ils recommandent 
une x le innocrnte et ascétique. 11 leur est défendu de tuer le 
moindre être ayant vie ; c'est pourquoi ils entretiennent des 
h6pitanx à l'usage de toutes les espèces d'animaux. Suivant 
eux, une xie pe elaire et illumine tellement l'bine, 
qu'elle peut finir par s'identifiez complétement avec l'ame du 
monde. Le centre principal de |eu¢ culte est ajourd'hui 
Balligota, non loin de Srhgapatam, dans le M)-sore, où 
réide aussi leur grawa-prre. D'ailleurs, ils se divisent en 
,raralds, c'est-à-dire auditeurs ou laits, et en Jatninas, 
c'est-A-dire ceux qui font des efforts, qui s'elforcent, en 
d'autres termes les prêtres. 
Il existe en outre une innombrable quantité de sentes 
reliieuses, qui ont surgi et se sont déveioppées depuis plu- 
sieurs siècles dans les Indes. Consultez WiIson, On the re- 
ligioz«s Sects of the Hindus (dans les tomes XVI et XVII 
de» Asiatic P, esearches). Toutes sont aujourd'hui mono- 
tht:i.te_% et s'eiforcent de réunir et de concilier les partisans 
des divers -ystèmes religieux. La plus importante de ces 
stries et celle des S i k h s, qui a joué aussi pendant quelque 
temps nn :'le politàlUe in, portant. On manque encore d'une 
brout exposition de la i-eligion hindoue, de ses idées dt- 

INI 
re¢trices, de son culte et de sa m)tholoe dans leur d 
veloppemeut idstorique. Les renseignements les plus satis- 
faisants qu'on possède à cet égard ont été donés par 
Anglais Colebrooke et Wilson, dans des dissertatinus sé- 
parées; Morte, dans son Hindu- Pan theon ( Londres, 1810); 
Vans Kennedy, dans ses Researches ito the nature of 
ltindz, Mgtholo9J (Londres, 1851); Coleman, da.s sa 
Mlthologl of the tlindus { Londre», 1852); Maicolm. 
Ward, Upbam, Beufey, Lassen, Roth, etc. Consultez aussi 
Polier, Mgthologie des tlindous { 2 vol.; Budolstadt, 
Bochinger, La Vie contemplative, asceti9u et 
9ne chez les lndous { Strasbourg, 1531 ); lève, Etudes 
sur le Rig- Vda { Louvain, 1842); Burnout, lntroàcton 
à l'Histoire du Bouddhisrne indien (Paris, 185). 
IXDIEN.'ES (Langues). Dans le !angage ordinaire on 
entend par langues idiennes les nombreuses langaes 
qu'on parle dans I']nde en deçà du Gouge ; mais scientifi- 
quement parlant oi ne désigne ainsi que les langues al,par- 
tenant à la famille des langues i tt d o-g e r m a n i q u es, et qtri 
en ïorment nn des sept groupes prit;cipax. En première 
ligne vient le san.crit, teur mère  toutes. Du souscrit 
quit la langue ,;nlgaire, appelée Far les Indous 
qui , ainsi que le démontrent des inscriptions remontant a 
l'epoque d'Asoka, était devenue dès le troisième siècle avant 
J.-C. la langue vulgaire dans au moins trois des dialectes 
principaux, en opposition au souscrit, qui, fixe par les 
grammairiens, ne survecut ptm dès lors que comme langue 
s.vante dans les écoles et dans les ouvrages de science et 
de littérature. Aussi, dans les drames indiens, les person- 
nages ditines, tels que les princes et les brabmanes, ne 
parlent que souscrit, tandis que les personnages du peuple 
et les femmes emploient les differents dialectes prSkrits. 
Il est très-vraisemblable que ce fut cet emploi du pr,krit 
dans la ldttérature dramatique qui engagea de bonne fleure 
à lui poser des règles grammaticales. Le plus célëbre des 
grammairieus pr.krits est Vararuci. Le pr,krit, d'aillenrs 
n'est autre qu'un sancrit négligéet corrompu, parle par les 
habitants primitifs de l'Iode quand ils curent eté subjugués 
par des émigrants de l'Asie. Les livres saints des Dainas 
sont rédigés en lin dialecte pr'dkrit; on peut encore mention- 
ner dan cet idiome, en fait de mou;minent littërah'e de 
quelque étendue, le poeme Setu Bandha. Consultez Lassen, 
Inatttutiones Linguoe Prkriticze {Bonn, 1837 ). 
D'un dialeae pràkrit qu'on parlait ì l'époque florissante 
du bouddhisme rtqnit le poli, que les bouddhistes em- 
ployèrent uamtes fois pour la redaction de lellrS livres 
sacrës, qui devint a'msi une langue sacrée pour les boud- 
dhistes, et se rêpandit avec le bouddhisme à Ceylan et dan 
rlnde au deà du Gouge. De nos jours encore l'emploi 
laali r6pond complëtcment à l'emploi du latin en Erope 
au moyen ge. Les on, rages destins à une grande circu- 
lation, notamment ceux qui traitent des sujets religieux, 
sont crits dans cette langte. Parmi les grammaires indi- 
gènesil faut mentionner celles de Balaatara, qui a été l'objet 
de nombreux commentaires en poli et en langue anglaise; en 
fait de dictiounaires, l'Abhidlmna trpad}piA« de Moggalana. 
Indépendamment des Livres saints des bouddhistes, qui ont 
été longuement commentés par Buddbaghosa, la !itterature 
poli comprend encore, entre autres, des recueils de légendes, 
tels que le Rasavahini, et d'importants ouvrages histo- 
riques en vers, dont I plus estimés sont le Mahavansa, 
composé pr [qahanama et continué Dhammakitti ; pois le 
Divapansa et le Dhataclhatuvansa. Spiegel et Burnouf, 
en Europe, ont beaucoup contribué à bien [aire couna[tre 
i poli. Consultez Burnouf et Lasseu, Essai sur le Poli 
(Paris, 1826). Vo!lez Ln;,-r. (Littérature). 
Dès avant le dixième siële les dialectes prkrits aaient 
donne naissanc.e à l'hindui, langue du moyen àge in- 
dien, écrite eeore en caractères devanagari, et qui est 
peu près au prakrit ce que hî langue romane est au brin. 
L'lindui modernisé parles Hindous eux-mêmes, mais conser- 
vant encore d'ordinaire le devanagari, porte le noln d'hindi 



INDIENNES 
iX forme aujourd'hui de préference la langue littéraire des 
peuples non mnsulmans de i'lnde, tandis que les musuimans 
• emploient l'hindoustani, généralement écrit avec l'alphabet 
arabe et persan. L'hindoustani est une langue essentiellement 
musulmane: aussi le désigne-t-on souvent sous le nom de mu- 
sulmdni bhdkhd, en opposition h i'hindi national, le thenth 
ou khari boli (c'est-A-dire langue pare ). L'hindoustani, 
hindi fortement mëlé de mots arabes et persans, naquit à 
partir de la lin du douzième siècle, après la fondation de la 
dynastie de Pathn à Delhy, mais ne se formacomplëtement 
que Imque Timour eut transferé son camp (ourdou) dans 
cette ville : aussi le désigne+on wuvent sous le nom d'out- 
don ou de langue enrdoue. Dans un style plus relevé on 
l'appelle llekhta (c'est-à-dire le mélangé). Vers la mme 
époque surgit de l'ldndi, dans la partie méridionale de l'lnde 
(Dckan), et par l'influence des conquerants musuimans, une 
langue Judo-musulmane, également melan,e, le dakni. 
Dans ces derniers temps l'hindenstani, extr6mement favo- 
ris6 par les Anglais, a presque completement supplant 
le persan, comme langue de l'administration et de la di- 
plomatie. Ce fut d'abord Ddhy, puis, à partir de la lin 
du siècle dernier, Lucknow, qui devint dans le nord de 
l'Lnde le foyer de la nouvelle littérature indo-musulmane. 
Le dix-huitiëme siècle fut sa ptriode brillante. Sans doute 
elle est extrmement riche; cependant, elle ne oe com- 
pose guère que de traductions du persan, de l'arabe et du 
»anscrit. Divers fondateurs desectes, comme Kabir, Nanak, 
Dadou, Birban, Bakbtavar, Sajjid Ahme, écrivirent leurs 
ouçrages en hindi ou hindoustani. Les poëtes les plus célè- 
bres de l'Inde eptentrionale sont Saoud, de Delly, mort 
en 1780, surnommé par les Hindous le roi des portes hin- 
dotlanis, que les Anglais comparent  Juvéai, et Mir- 
Mobammed-Taqui, mort en 1801. Parmi les portes du 
Dekan, oi le roman a d'ailleurs trouvé un soi favorable, 
le lus célëbre est Watt, dont M. Garou de Tassy a 
publid les œuvres (2 vol.; Paris, 1839); viennent ensuite 
Ouzlat, Siràj et Azd. Le grand potine historiqee de 
Cliand sur Prithwy-lidja, le dernier roi de Delhy, est 
compose en bindui de la fin du douzième siècle. C'est 
de 148 à 1516 que furent composees les oeuvxes eatlmusias- 
tes du rcformaieur Gourou-Kabir ou lnani. La liftCature 
de l'hindoui et d i'hiadi compte un rand nombre de Chroni- 
ques poCiques, parmi lesquelles nous mentionnerons plus 
particulièrement la Chatra-praish (trad. en anglais par 
Poon; Calcutta, 152 ) de Lal-Kavi, contenant l'histoire 
des anciens rajas de Bundeikund. La Ehdktamc du 
saint ,Nablmij, collecliondc biographles légendaires desaints 
céiëbres, date de l'an 1-600 environ. En lait de poemes 
cé.lèbres écrits en bindi, on peut encore citer le Prem Sa9ar 
(c'est-à-ttire Océan d'amour )de Sri-Liuji-Lal-Kavi, livre 
esentiellement populaire, et qui a été traduit dans la plu- 
part des langue vivantes de l'lade; le Sat-saï de Bihari- 
Lai (vers 100); le llaana de Tuici-lYs (mort en 
162 ), enoorc bien autrement popdaire dans l'lnde que 
la grande epopée sanscrite du même nom. Dans son lts- 
toire de la Littœerature ltindoui et ltindoutani ( Paris, 
1537-157, 2 xol ), M. Garcin de Tassy mentionne plus de 
sept cents écrivain- hindoui et hindoustani. Parmi les ii res 
à l'aide desquels on peut apprendre OE langues, nous cite- 
rons les Elements de la Langue Hindotani du mème 
(Paris, 1847 ) ; les dictionnaires bindoustani de Shakespearc 
(Serait.; Londres, 146 ) et «le Forbes (Lendres, 1846 ); la 
grammaire bindi de Ballantyne (Londres, 1839 ) et le dic- 
tionnaire hindi e Timmpson (Lendres, 8-). 
L'hmdi et l'hindoustani ont pour base locale le braj- 
bhalda, issu du prkrit, qui de nos jours est encore la langue 
du pays de Braj ( ou Bradj ) dans le Bundclkhund, mais «lul 
est desenu nnc ianaue littéraire, et que les poëtes surtout 
prlCent à l'bindi moderne ordinaire. Il eu est de mèu 
mais à un drgr moindre, du lourb-bhaMta, dialecte 
parlé a l'est ( p¢»urb ) de Deihy. Parmi les nombreuses aut,. 
langues provinciales «le l'Indc, toules doerlv.e d, sanscrit, 

363 
et ayant avec lui les mèmes rapports grammaticaux que 
les langues romanes vivantes avec le latin, plusieurs ont 
aussi formé une littérature qui ne se compose guère d'ail- 
leurs que de traductions du sanscrit, auxquelles sont rennes 
s'ajouter dans ces trente dernières années des ttductions 
de farabe, mais surtout du persan, de l'hindonstani et des 
langues européennes, ainsi qu'nn grand nombre d'ouvrages 
écrits par des Européens ou des indigènes,  l'effet de 
pandre l'instruction populaire, ou encore dans un but de pro- 
pagande religieuse. Les plus importantes d'entre OE langues 
modernes sont : 
1 ° Le be;ujali, parlé dans la partie orientale de i'Inde, 
dont Honghton a donné nne grammaire (182t) et un dic- 
tionnaire ( Londres, 183g ), et dans lequel Ram-ComaI-Sen 
a traduit le dictionnaire anglais de Johnson (2 vol. ; Scram- 
pote, 183 ). 
2 ° L'orissa, appelé aussi ourissa et outala, dont Sut- 
ton a donne une grammaire et un dictionnaire ( Kouttacl;, 
18gI-1843; 3 vol. ). 
3 ° Le vahratti, dont il existe des grammaires, par Curry 
( Sérampore, 1808 ), Stevenson ( lmbay, 843 ) et Ballan- 
tyne (Edimbourg, 1839 ), ainsi qu'un dictionuaire, par _Mo- 
lesworth ( Bombay. 1831 ; anlais-mahratti, Bombay, 1 S7 ). 
4 ° Le gouzerati, parle au nord-ouest de l'Iode. On en 
a une grammaire par Brummoud ( Bombay, 1808), et un 
lexique par ilirza-Moha,maed-Kazim ( Bomba?, 18-6). 
5 ° Le sindhi., parlé dans les contr6es de l'Indus inférieur, 
dont Wathen a publié une grammaire ( 'l'l'lmbay, 1836 ), et 
Stack un dictionnaire (Bombay, 1849 ). 
6 ° Le pendjabi, dans lequel sont ëcrits les livres ints 
des Sikhs, et dont on possède des ammaires par Curry 
(Sérampore, 1812 ) et par Leach ( Bombay, I,38 ), ainsi 
qu'un dictionnaire par Starkey ( Caleutta, I850 ). 
Le kawi, c'est--dire laugue des poëtes, dont on se sert en 
oésie à Java et dans les iles voisines, est par sa v..on,line- 
tion grammaticale une langue malaise; mais il a emprunte 
en grande partie ses mots de mème que sa littërature au 
sanscrit. Consultez G. de Humboldt. Essai sur la Langue 
Kawi ( 3 vol. ; Berlin, 1836-1840 ). 
Les langues pariCs au sud de l'In,te diffcrent compléle-- 
ment dans leur construction grammaticale de celles d'ori- 
gine sanscrite, et Ibrment une famille de langues dt Deka, 
tout à fait distincte de celle des langues indo-germaniques. 
Les plus importantes d'entre ces ianzes sont : 
1  Le tamil, qu'on appelle aussi le alabar, parlë sur 
les c6tesdu Coromandel et du Malabar. Il possede une riche 
et antique iittérature. Le Coral de Tirouvailouver, potine 
moral, est surtout célèbre. Dans le grand nombre d'ouvrages 
relatifs/ l'enseignement de cette langue, il faut citer les grain- 
maltes de Beschi (Madras, 1816 ; 2 « édit., 1899 ) et de Brown 
(Madras, 1Sg0), ainsi que le dictionnaire de Campbdl 
( Madras, 1821 ; 2 e édit., 1898 ). 
2  On en peut dire autant de la littérature du Telougoz 
et de celle du TamoulL Conltez Brown, On the Langua9 ¢ 
and Lilerature qf the Tel,9 u ( vol. ; Madras, 1840). 
3 ° Le Ianaresi, parlé dans la province de Karnatik, 
aux environs de Mysore. La langue pins ancienne, i'hala- 
kaara, possëde aussi une littérature assez considérable; 
mais le nombre des ouvrages écrits dans la langue vulgaire 
est Iort estreint. On en a une grammaire par Mackereli 
( M,-lras, IS21 ) et un dictionnaire par Bcevc { z vol., .',la- 
dras, 182--1832 ). 
4 ° Le mala9alam,  usage au Malabar depuis le cap 
Comorn ,nsqu't Ddli, ne possède qu'une iittérature ins{gni- 
riante. On en a des grammail'es par Pcct (Ot{ayam. 
et par Spring (Madras, ts39), et un dictionnaire par 
Bailey ( Cotlayam, 1 si6 ). 
5 ° Le snyalms, parlé a Ceylan. et don! la lang,e ,les 
Maledivc. n'el ,lU'U dialccte. La lilterature singalaise, qui 
se ment dans le m,.me cercle ,l'idëes quc celle du pah. e.,t re 
digéc daltg une lane ,'otite particuliëre, al,peler l:oe/ou, 
dilli'rc de I: !anue couununc par un riche u)é[a:)ge ,tc 



indiens et surtout sanscrits. Le plus célèbre des poêtes sin- 
galais hJt Gasco, Portugais de naissance. On en a une gram- 
maire par Chuter {Colombo, t315) et un lexique par 
Clough (2 vol., Colombo, 1821 ). 
On ignore encore si les langues parlées par quelques 
ddbris de peuples dans l'intériettr de l'lnde en deça du Ganse, 
les Chonds, par exemple, ont des rapports avec les langues 
dtl Dekan : ces dernières, d'ailleurs, n'ont point été scicnti- 
fiquement cultivées: 
INI)IENNES (Peinture, Sculpture, Architecture). De 
mdme qu'en littérature, les Hindous ont déployê dans le do- 
maine des beaux-arts une riche imagination, qui, il est vrai, 
se soumit dans ses caprices à certaines conditions d'art, 
mais qui, "a la différence de l'intelligent art égptien, accou- 
plu ses ceCllons sans règle et aboutit à une sorte de chaos, 
bien qu'on y rencontre ça et là quelques beautés. 
Dans la vie artistique du peuple hindou, on remarque 
deux périodes brillantes : la premiëre remontant à environ 
cinq cents ans avant J.-C., et à laquelle appartiennent, sui- 
vant toute apparence, les grands temples creusés dans le 
roc x'if; la seconde, contemporaine des premiers siècles de 
notre ère. Les monuments les plus importants et peut.être 
a,t.si les plus anciens de l'architecture hindoue sont les 
temples taillés dans le roc qu'on rencontre dans la partie 
occidentale du Dekan, entre Gon et Suture, notanmaent 
les grottes de Carli et de Mhar, les temples situés dans les 
|les de Salcette et d'El ep h a n t a près de Bombay, le temple- 
grotte de Pandou-Lena, enfin les constructions gigantesqttes 
d'Ê I I o r a et les groltes d'Adjounta. Ce sont tantOt des grottes 
véritables, tant6t des constructions indépendantes, taillées 
cependant dans le roc sir et isolëes. Le plus ordinairement 
les grottes sont carrées et reposent sur de nombreux piliers, 
ouvertes sur le devant, donnant sur un péristyle à colonna- 
des. Au fond, et enlour d'un espace libre, se trouve le sanc- 
tuaire, ménagé dans une espce de niche. Les piliers sont 
pour la plupart quadrangulaires jusqu'a une grande hauteur, 
et se terminent en forme de colonnes cannelees, supportant 
comme chapiteau une espèce de coussin deprimé surmouté 
d'un abaque cubique avec des consoles. Ensuite vient le 
plafond, avec des espaces rides semblables a des architraves. 
Ces piliers sont peut-être en fait d'oeu res d'art ce que l'ar- 
chitecture hindoue a produit de plus put-; ils ont tout ì fait 
le caractëre qui convient à des supports destines à soutenir 
une charge énorme, bien qu'on les retrou'e avec la même 
forme dans les constructions bindoues en plein air. Quel- 
quefois aussi on n' 5 voit que d'épais piliers quadrangulaires, 
tandis que dans d'autres un vigoureux rinceau indique Pen- 
droit ou le pilier se transforme en colonne. Toutefois, un 
arbitraire sans bornes a présidé à la construction de ces 
édifices en plein air. On voit des temples immenses reposer 
sur le dos d'un éléphant, et dans les details l'imagination 
la plus libre se produit quelquefois sous les formes les plu 
¢..a4wicieuses. Le plus colossal de tous ces monuments est 
le gigantesque Kailasa, taillé à EIIora d'nn seul bloc de pierre. 
Aprês ces monuments appartenant à la religion brahmaue, 
on y trouve aussi des temples-grottes et des temples eu plein 
air de la përiode bouddhiste, differant des premiers en 
ce quïls se termiuent eu rond, qu'ils ont des plafonds vottés 
et des façades fermées. Les plus remarquables sont les 
Dagops. Le temple bouddhiste le plus celèbre est celui 
de "'isvakarma, à EIlora. Il existe aussi d'autres temples- 
grolles extrèmement remarquables sur le plateau du Dekan 
et sur la cote orientale. Les premiers, situés à peu de dis- 
tance de la ville de Baoug, aver leurs fortes colonnes rondes 
sans socle cubique et avec un chapiteau semblable au cha- 
piteau dorique, rappellent l'art grec, et appartiennent peut- 
être bien à la pSriode pendant laquelle la domination des 
Diadocbes Cendit après la mort d'Alexandre la ci'itisation 
grecque jusque par delà l'Indus. Les monuments situés sur la 
¢61e orientale ne doivent guère erre plus anciens, par exemple 
ceux de la maguilique ille, aujourd'hui complétement alC 
serte, de Mahabalipouram, à quahe I, ilomêtres en'irou de 

Madras, connus sous le nom des Sept Paode». Plus lrd" 
enfin vinrent un grand nombre de eonstructions en plein 
air, surtout sur la ete orientale, et qui ne remontent pas 
plus loin que l'époque de l'invasion des Mongols. Ce sont 
les p a goal es proprement dites. L'une des plus magnifiques 
est celle de Djagarn a t, dans la province d'Orissa, qui 
ne fut lerminée qu'en l'an 1198 de J.-C. L'énorme grande- 
salle de l'hospice des pèlerins à Madura, dont les parties 
architectoniques se composent déjà en partie de formes d'a- 
nimaux et de formes humaines, est d'une époque encore plus 
récente, car la construction n'en fut commencée qu'en 
l'au 169.3. A cette époque, oit depuis longtemps déjh l'lnde 
gémissait sous l'oppression mougole, la population était eu- 
cure assez dévo pour rendre possibles les travaux prodi- 
gieux qu'entraluait le montage sur piliers de ces plafonds 
colossaux. On commençait par remplir l'espace de terre, 
puis l'on montait les plaques sur la surface oblique, aptës 
quoi on enlevait de nouveau la terre. 
il règne souvent une grande magnificence dans les eons- 
tructions civiles des Hindous; mais,/l l'exception des ruines 
d'Aoudh, il ne s'est presque rien conservé des anciens pa- 
lais des rois, attendu que les sultans et les blongols, surtout 
dans les contrées arrosées par le Ganse, les out ntilisés 
comme carrières à pierre pour leprs édifices de sle arabe 
et construits quelquefois avec une extrême magnilicence. 
Cepeudant la tradition de la véritable architecture indigène 
ne s'est point encore perdue, comme le prouve PEssay on 
tP.e Architecture of Che Hindus (Londres, 183-i ), qu'a 
publié Rammohoun-Roy, savant brahmane, qui rapporte 
des exemples frappants de la dégénérescence extrême de 
cette architecture. 
La sculpture et la peinture des Hindous trouvèrent dans 
leur riche mthologie des sujets, iuépuisables sans doute, 
mais trè-défavorables, à cause de la symbolique arbi- 
traire et capricieuse qu'y rattachaient les idêes populaire.s. 
En effet l'artiste, qui doit constamment représenter des 
disinités a trois tètes, et à quatre, h douze bras même, peut 
difficilement, dans de telles données, arriver  des repré- 
sentations réellement befles. 11 faut rendre toutelbis aux 
Hindous cette justice que souvent ils ont su donner de no- 
bles proportions et une grande délicatesse de lignes  des 
corps gênéralement nus, mais richement ornës. Dans leurs 
plus ridicules représentations de divinités, leur imaginatio 
n'a pas laissé que de donner un ensemble harmonieux  
leurs crémions. Mais la néeessité de compo»er des corps 
avec des parties symboliques si diverses a toujours rendu 
impossible de représenter les grandes qualités divine sur- 
un corps purement Immain en leur donnant une epression 
sublime. Il u'y a d'ailleurs que les plus anciennes seulpture. 
hindoues, simples hauts-reliefs pour la plupart, qui respi- 
rent I ëuie artistique ; les sculptures modernes manquent 
toujours de plus en plus de vie, et dégéuêreut eu monst roosités 
repoussan,tes. Les reliefs d'Elephanta, d'EIIora et de blaha- 
balipouram sont les plus célèbres de tous. Les minialures de 
ces derniers temps atteignent souvent une certaine grâce, 
quand elles représentent des scènes de la vie ordinaire, et 
pour ce qui est de la facilité du dessin et de l'expression, l'em- 
portent infiniment sur les miniatures chiuoises. On ne devra 
i,as être surpris que l'art hindou ait servi de type dans le» 
conteCs voisines. Ainsi les stoupas ou topes du Kaboulistan 
ne sont qu'une riche imitation des dagops bouddhistes de 
l'Inde, et datent des premiers siècles de notre ère. A la 
même époque appartiennent les deux colosses de Bamian, 
figures de haut-relief placées dans des niches, sur une paro 
de rochet', dont l'une a 40 mètres d'elvatiou. Plus tard 
le dagop a t-eçu des formes encore plus riches et plus guin- 
alCs dans les luxoevx monuments de Ceylan, de Nepal et 
de Java, dont une partie appartient a la derniëre moitié 
du moyen fige. Consultez Damell, The llindoo Excava- 
tions oflllora (Londres, 18o4 ); Langles, Monz«ments. 
onciens et »mdernes de l'Hiltdotstan (Paris, Iîl3) 
Lassen, Auliquiloes de l'lnde ( Bonn, t-1852 . 



INDIENS 
INDIENS. C'est le nom qu'on donna aux hahilants 
primitifs de i'Amérique, parce que les navigateurs qui 
les premiers découvrirent le Nouveau Monde crurent d'a- 
bord y avoir trouvé l'extrémité de l'Inde. Les Indiens lot- 
ment une race d'homme toute particulière et différant 
des autres de la manière la plus trancbée. On la désigne, 
en raison de sa couleur, sous le nom de race ouge , ou 
bien, d'après la contrée qu'elle habite, sous celui de race 
amœericaine. Au point de vue physique, elle est caractérisée 
par sa couleur cuivrée, par sa chevelure noire et plate, 
par son visage large, sans pourtant ètre plat, avec des traits 
accentués, par un front déprimé en arrière, paraissant 
court et borné extërieurement par une chevelure tombant 
très-bas. On comprend toutefois, en raison de l'immense 
étendue de l'Amérique, placée sous toutes les zones, et de 
l'extème diversitë de son soi et de ses produits, que ce 
sont la des traits caractéristiques qui doivent subir chez les 
différentes nations qu'on y rencontre des modifications 
sans nombre. Cependant toutes les peuplades américaines, 
depuis les cStes de l'OuCn arctique jusqu' i'extrémit de 
la Terre de Feu, présentent le mème t)-pe, non pas seule- 
ment dans la conformation du corps, mais encore dans la 
physionomie, les qualités physiques, la langue, les erC- 
tions de l'esprit. Partout, au Nord comme au Sud, le visage 
de l'homme rouge porte l'expression d'une graité sombre 
et indifférente, de la tristesse et de l'oppression. Sous t'in- 
fluence des excitations ordinaires, les traits de son visage 
s'animent à peine d'une manière perceptible ; ils deviennent 
complélement hébétés ou sombres, mme chez les plus no- 
bles nations, pleines de courage guerrier et d'amoufde l'iu- 
dépendance, aussit6t qu'en l'absence d'excitation extérieure 
se produit cet état de prostration dans lequel l'Indien tombe 
si facilement et semble mème se complaire. Plus les peu- 
plades sont sauvages, plus elles ont souffert de l'oppression 
d'ennemis, rouges ou blancs, et plus leur regard est timide et 
inquiet, plus l'impression de leur physionomie est humble. 
ClleZ les nations qui vivent  l'Cut de servage, ce qu'il y a 
d'énergique et de sauvage dans les traits de l'Indien qui vit 
independaut, disparait, et sa figure prend quelque CllOSe de 
mélancolique. 
Que si sous ce rapport tous les temoignages sont una- 
nimes, il est peu de questions au sujet desquelles se soient 
produites chez les investigateurs des opinions aussi profon- 
dément divergentes que celle des qualités intellectelles des 
autochthones américains. Peu de temps après la découverte 
du Nouveau Monde, il fallut méme une bulle du pape (I 537) 
pour décider et mettre hors dedoute que l'Indien fait partie 
de la race humaine. Cependant de rëcents observateurs, 
tr/'s-exacts et parfaitement exempts de préjugés, ont dé- 
montré que sous le rapport intellectuel l'Américain n'occupe 
pas à beaucoup près le mëme rang que la race caucasienne. 
La puissance de compréhension de la race rouge parait 
plus bornée, plus fente, l'imagination plus lourde, l'esprit 
bien moins excitable. L'Indien ne vit que pour le moment 
présent, et ne pense jamais à l'avenir. De là cette légèreté 
qui lui est propre, et qui est plus grande chez les peuples 
qui, comme les Brésiliens par exempie, ont le rooins de be- 
soins et peuvent le plus facilement les satisfaire. Comme 
l'Indien ne comprend pas l'avenir, s'il est avement ma- 
lade ou mortellemeat blessé, il verra avec indifference la 
mort s'approcher; et chez les tribus de l'AraCique septen- 
trionale ou du Chili, le prisonnier de guerre ne lera pas 
entendre une seule plainte en marchant à une mort inévi- 
table. La paresse de l'Indien est aussi proverbiale que son 
insouciance. Sa goinfrerie quand il se trouve au miliel de 
l'abondance, la tranquillité avec laquelle il supportera la 
disette qui succédera  cet état de choses, l'indifférence qu'il 
témoigne quand il s'at d'améliorer son sort, ou bien polir 
la propriété et l'organisation civile, peuvent de mème s'ex- 
pliquer par ses idées borníes. Il s'efforcera, par des Ilabi- 
rudes artificieiles et par une domination exercée sur lui- 
mime, d'augmenter encore l'insensibilité qui le caractérise. 

Mais que i'idée d'une injustice éprouvée s'empare une lois 
de son esprit, et il poursuivra sa.us relâche son ennemi avec 
la ruse et la dissimulation de la bète féroce, jusqu'à ce que 
sa vengeanoe soit satisfaite. L'esprit de vengeance est la 
cause des supplices crueis en usage parmi les peuplades de 
l'Amérique méridionale, de leurs guerres incessantes et de- 
l'affreuse coutume de i'anthropophagie chez quelques-unes. 
d'entre elles (Botocudes, Pouris, Calisecas, Capachos, etc.). 
La joie de l'Indien, quand les plus énergiques moyens I'y 
sollicitent, est sauvage et n'a rien qlù parte du cœur. Les 
défenseurs les plus zélés de l'Indien ont dt eux-mëmes re- 
connaltre chez lui l'absence de tolet sentiment profond et 
chaleureux; l'insensibilité qu'il éprouve pour les mau. 
d'autrui explique le sort cniel qu'il réserve à ses esclaves. 
L'imagination fait aussi bien défaut à l'Indien que l'intel- 
ligence sagace et directrice. C'est ce qui ressort de ses tra- 
ditious et de ses mythes, de ses idées religieuses, de ses 
discours. Seulement l'Américain du Nord se trouve à cet 
égard un peu supérieur aux autres tribus. Les idées reli- 
gieuses mme des anciens Mexicains et Péruviens étaient 
loin de répondre au reste de leur civilisation. En étudiant le 
monuments et les ouvrages d'art des nations civilisées dont 
nous venons de parler, on y remarque également l'absence 
d'essor et dïmaginatiou, de diversité et de mobilité de la 
forme. L'Américain est incapable de s'ëlever à des idée» 
abstraites ; de là son indifférence pour les doctrines supé- 
rieures de la religion et la grossièreté de ses idées cosmo- 
goniques. Quoiqu'au seizième siècle des indigènes s'occu- 
passent des sciences d'Europe et aient mme écrit quelque- 
livres, on ne connatt rien de leurs efforts dans le domaine 
des mathématiques. L'Indien ne comprend qu'avec beau- 
coup de peine les rapport« de nombre. Les langues des 
Américaius, qui toutes ont le mème type depuis la c6le 
septentrionale du Groenland jusqu'à l'extrémité méridionale 
de la Patagonie, participent de l'infériorité de leur puissance 
de conception. Elles font partie des langues dites s9nth/i- 
çes, dans lesquelles l'intelligeuce aride ne rattache que des 
mots isolés venant péniblement expliquer les d iverses idées; 
elles sont en outre assez souvent équivoques et obscures, et 
ne témoiguent dès lors que d'une intelligence qui a le travail 
lent. Comme une langue syntbétique ne peut jamais s'e- 
lever à l'ctat de la langue organique, l'Indien ne peut non 
plus parvenir jamais à un degré supérieur de conception. 
C'est ce que l'histoire prouve de reste. L'exemple des hlancs, 
de mème que les efforts faits par les missionnaires pour le 
conduire ì un état de civilisation plus avancë, n'ont jamais 
produit que des résultats insigniflants. Les quelques cas d'un 
procès spontanë et indépendant, comme par exemple chez 
les Tshiroquois, ne sont qu'une exception et n'eurent ja- 
mais rien de complet. Dans les pays de l'Amérique espagnole, 
o0 les indigènes ont beaucoup emprunté à leurs vainqueurs, 
ce n'a presque jamais etWle bien. 
En raison de i'extrème pénurie de renseignements satis- 
faisant et authentiques sur la plupart des innombrables 
tribus d'Indiens qui errent dans les différentes parties de 
l'Amérique, i'élément linguistique ne saurait pas toujours 
servir de base à un essai de classification des diverses na- 
tions eu grandes ramilles et en faces, et c'est souvent l'é- 
ICent géographique qu'on est réduit à adopter. D'après le 
pll]s récents travaux dont celle épineuse question a ét 
l'objet, on peut pourtant établir les grandes familles sui- 
vantes dans la population autochthone de l'AraCique : 
1 ° Les EsQc]S«vx. Ils se divisent en deux branches prin- 
cipales, les Esquimaux orientaux et les Esquimaux occiden- 
taux, et sous le rapport de la conformation physique sont 
en quelque sorte la transition aux peuples du type mongole 
du nord-est de l'Asie. Une partie des Esquimaux occiden.- 
taux, llabitant i'Amérique russe et vraisemblablement 
iangés avec la famille des Athabascas, portent le nom d'Es- 
quimaux du sud. Au groupe des Esquimaux appartiennent, 
entre autres, et sans compter les Aloutes, qui habitent un 
peu plus loin, les Kcuzokwinzes, sur les bords du Kous- 



366 
lowin, les Tschougatscies, au détroit de Prince-William, 
les lnolites, les Kad)akes et les habitants de la moitié 
orientale d'AIjaschka. 
2 ° Les Korocns, appelés aussi famille Nootka-Colum- 
bique, habitent l'intérieur, entre le détroit de Norton et le 
fleuve de Cuivre, et de là, en descendant la cOte au sud, 
jusque par delà les frontières russes C'est une race com- 
plëtemeut américaine, témoignant d'une civilisation plus 
avancée que ses voisins méridionaux. En font partie les 
Atnas, sur le Ileuve de Cuivre, les Keays, sur le Cook's- 
inlet, les A'oltschates, sur les affluent» nord et et du 
fleuve de £uivre, les Koloches propeement dits, aux environs 
du mont Saint-Elias et quelques autres tribus. A la mme 
famille appartiennent les peuplades de la cOte de la 
velle-Calédouie et des lies qui lui I<mt face, formant deux 
groupes, les Challans, oemprenant vingt-quatre tribus qui 
parlent les langues Challam et Corvmtzchim, du 48 « au 
b0 « degré de latitude nord ; et les Quakeolts, comprenant 
plus de 40,000 tètes, formant vin-sept tribus et habitant 
les cotes et les lies depuis le 0  jusqu'au 54  degré de la- 
titude nord. Les Massètes et treize autres tribus de l'ge 
de la reine Charlotte; les Indiens /Vass, formant quatre 
tribus, sur les bords du ffass; les Chgmsgan, formant 
dix trihus sur Ic dëtroit de Chatam, au Port-Essinon et 
dans les lies voine, les Indiens des détroits de Skeena, 
de Labassa et de 51ilbauk, frmant seize tribus dilférentes 
enfin vingt-quatre petites tribus dissemin¢s dans l'rie de 
Yancouver, sont d'autres peuplades, dont les langues dif- 
fèrent beaucoup entre elles. Ttes ce« tribus de la c6e 
sont surtout des peuples pècheurs ; la plupart ont des es- 
slaves, qu'elles traitent avec la plus horrible cruauté. Les 
rapports d'affinité existant entre leurs langues n'ont pas 
encore pu ètre déterminés jlsqu' ce jour. 
3 ° La fandlle des Anxsc_s se divise en deux rases 
pr:ncipales,.celle de l'el, et celle de l'ouest. A la premiëre 
appartiennent les Chepeyas, les ldies cuWrës, les 19o- 
9ribs (bomnae de la CsTte des Chiens), les Sro9bows 
( appelës aussi lndiens-Beaver, et Indieus Thickwood .), les 
Indiens de la Mota9te, les ldies des 
tes lndens-lièvres, etc.; à la seconde (ffouvelle-Cale- 
donie ), les Carriers (l'akellies), les Tsekanes, les IVo- 
hames, etc. Les Loucheurs ou Qerellers parlent un 
dialecte très-différent. 
4" Les nombreuses tribus de la grande famille des A- 
GO.XçUIIs*LE8A.PL; se divisent en quatre groupes princi- 
paux : ceux du nord, du nord-est, de l'est, et de l'ouest ou 
de l'Atlantique. Au groupe septentrional appartiennent les 
Ix'matinaux, vulgairement appelés Crees, les Mtagards 
et les Nascopies, les Ofibwags (appelés aussi, mais à tort, 
Chippeways), les Ottawas, les Potowotamies et le 
sirtsi9 s. Le groupe nord-est comprend les Sheshatopoush 
et les Scqffies, sur les rives septentrionales du golfe Saint- 
Laurent; les Micrnacs, à l'ouest de ce golfe, dans la lou- 
x'elle-Êensse, au cap Breton et à Terre-Neuve; les Etcht- 
nes et les Abetaks. Parmi les Algonquins de l'Atlan- 
tique, ont complétement disparu les anciens habitants de 
la I'-ouvelle-Angleterre, tels que les Peguots , tribu puis- 
sante autre|ois, les Massachusetts, les 1Varrangansetts, 
les Mohwans, les lrtacs et les $sqehannoks; des au- 
tres, tels que les Delawares et les Nanticokes, il ne reste 
plus que de misérables débris, dipersés au delà du Iffissis. 
sipi. Les Powhattans et les Pampticoes ont égalemeut 
péri. Le groupe occidental des Algonquins-Lenapes com- 
prend les 3tetomenies, les 31iamts, les Pakishaws, les 
lllinois presque complétement exterminís aujounl'hui, les 
Sankies et les Foxes, les hïckapous, les Sttawnoes, les 
lactfeet, les Shennes {Cheyennes). 
5 ° La amilledes ]oots, extrgmement redoutée desEu. 
ropéans aux premiers temps de la colonisation, comme 
une race de conquérants cruels et sanguinaires, forme deux 
groupes : celui du nord, qui est le plus considérable, et 
celui du sud. Les Iroquois du nord brmaient deux divi- 

INDIEIS 
sious, dont celle de l'est se composait de ce qu'on appelait 
les Cinç-Vations (les Mahawls, les Oneid.% les Onondaga.% 
les Caugas, et les Senecas, dans la coufedération desquels 
les Tuscaroras furent admis comme si,ièmenatiou, en 
et t715); celle de l'ouest comprenait les Wgattdots ou 
Huros, les Atllonandarons (nation eutre), les 
dames ou Guyandots, et les Crigas ou Cres (nation Chat). 
De ces quatretritms ooeidentals, s deux premières furent 
presque coml,létemeut et les deux dernières compltement 
exrmines par les Cinq-ations. Parmi les Iroquois du 
sud, les Meherris ou Ttttelocs et les Nottowatjs ont coin- 
piCement disparu, tandis que les Tuscaroras se faisaient 
admettre dans la cou,,alCation des Cinq-Nations ( mais 
n'en existe plus aujourd'hui que quelques fa'es débris, 
errant dans le pays et aux environs des grands lacs). 
6 ° l.,es peuples de la Floride, dans la partie sud des 
Etats-Unis, composent trois groupes, parlant des langues 
essentiellement différentes. La langue catowba est parlée 
par es Cato¢vbas et tes Wocans, lalaugue cherokee (tsehi- 
roquoise) surtout par les Cherokes, tandis que la langue 
choctaw-muskhogee est celle de toutes les tribus faisant 
partie de la confédération des Creeks, telles que les Chi- 
easas, les Choctaws, les ltlskhogees, les lt«tchitees, le 
Seminoles, et autres peuplades de la Floride. Is langues 
des Utchees , des 1Vatchez., des Alibamos, des Coosadas 
et de quelques antres peuplades diffèrent de ces trois lan- 
gues principales. Dans ces dernierstemps ces diverses tcilms 
indlennes du sud ont été transportAes à l'ouest du lli»sis- 
sipi..ç,vant cette opération leur nombre total était de 
fi7,00o tt¢s. 
7 ° Les tribus Stoux peuplent, a,t sud des Athabascas, la 
contrée située sur la cOte occidentale du Mississipi jnsqu'a 
l'Etat d'Arkausas et aux Montagnes-Rocheuses, par .t3 ° de 
lat. nord. Eles comprennent d'abord les sept peuplades 
confedérées, mais indép¢dantes *s una des autres, des 
Si o ux proprem¢at dits ou Datwotas (appelés aussi Nado- 
«vessi), puis les Winnebagoes et tes Asstuiboit ( lndieus- 
Pierres), q,i en vivent séparés. Viennent ensuite, comme 
second groupe, les trois peuplades Minetares (les Mandans, 
presque completement disparus aujour'J'hui, les Minetares 
et les lndiens-Crow ou Upsarokas), et omme troisiëme 
groupe, les Siouz mërid,onauz, qui se composent d huit 
tribus ( les Joways, les Puncas, les Omahows, les Oitoes, 
les Missouris, les Kansas, les Osages et les Quappas). 
g° Les Cxnnos, à l'ouest du Missi_sipi, dont la langue 
est parlée aussi par les Nandatws, les Inies ot Tachies 
(dont le Texas tire son nom) et les Rabedaches. Les Nat- 
chitoches, les Adayes, les Athacapas, les Chétimaches et 
quelques anh-es débris de pe,,plades errant à l'ouest du 
Mississipi parlent des langues diverses et digérant com- 
plétement de celle des Caddos. 
9 ° Les Pt, WmFS, composés des Pawnies proprement 
dits et des Ricares. 
10 ° Les Inms F_.S CXTmACWS (appelés aussi Indiens 
des Rapides ou Indiens Paunch) parlent une lane tout à fait 
différente, de mème que la puissante nation des Blaclfeet, 
avec les subdivisions formées par les Pai9ans (Picanos) et 
les ltdiens-San9, dsiés ordinairement, d'après la con- 
/rée qu'ils habitent, sous le nom d'Indiens Saskatchawines. 
t ° La famille des CoArc,,s, aujourd'hui la pl-s nom- 
breue de celles qui habitent l'AraCique septentrionale, est 
extrhnement répandue. Elle s'étend depuis le territoire de 
l'Orégon jusqu'au golfe de Californe d'une part, et usq«'au 
golfe du Me..ique de l'autre. Les quatre tribus principales 
de cette famille sont les .çhoslones, ou Indiens-Serpents, 
avec les Walla-Watlas, les /e=-Percds (ou Saptines) 
les Pichons, les Selipsh ou Flatheads, tes Moleles, les 
rfZaillaptous ou Cayouses, les Tlamath, les tunashly 
(ou Panacks, et encore Bonnaks) et les $o-'-onis; puis 
les Apaches avec les lutals ou Utahs, les Apaches propre- 
ment dit., les /'atmjoes et autres tribus, les paehes et 
les Comanches propremant dits, peuple de cavaliev et 



IzNDIENS 
formant de nombreuses subdivislons. Parmi ces peuples on 
peut considérer les Apach¢s comme celui qui dëtruisit la 
civilisation aeses avancée à laquelle étaient parvenus les 
naturels du Bio-Gila et du Bio del lorte, et qui existait en- 
core au seizième siècle dans le louveau-Mexique. On com- 
prend ordinairement les debris de cette nation plus civilisée, 
aprës les tribus plus puissantes, sous le nom de Mogui. 
On ne possède encore que des renseignements très-va- 
gues et très-insuffisants sur les langues et les rapports d'af- 
llnités des différentes tribus indiennes de la Californie, 
testCs d'ailleurs au degré le plus infime de la civilisation. 
Il n'y a pa de pays sur la terre où existent autant de 
lagues ¢omplétement différentes qu'au Mexique. Parmi les 
nombreux peuples de l'Amérique centrale, chez lesquels on 
a constaté l'existence d'an moins trente-six langues tout  
fait différentes, les descendants de l'ancienne nation civilisée 
des Aztèques occupent encore de nos jours le premier rang. 
Leur langue, appelée aussi de préférence le mexicain, est 
à bien dire la langue nationale, et est parlée par le peuple 
depuis Santa-Fé, au Nouveau blexique, jusqu'au lac de Ni- 
caragua, à l'exception du plateau où s'éleve la ville de 
llexico, où la nation des Otomis est la plus répandue après 
celle des Aztèques. Les autres peuples mexicains ne se 
compnseot plus guère que de débris. Dans le petit Eat 
d'Oaxa¢a seulement on compte dix-neuf peuplades di ffereutes. 
Les Zapotèquesy formaient avant la conqutte un Etat floris- 
sant, dont le souverain résidait dans la ville de Téozapotlan 
ou Zachila. 11 confinait au royaume de Mistecapan, qui 
avait pour capitale Tlaxia¢o; et il existe encore d'assez im- 
portants dt.bris de ses habitants, le« lffist9ues. Les habi- 
tants du royaume de Mechoacan, demeuré toulours indé- 
pendant des Aatcques et conquis en 1523 par les Fpagnols, 
étaient les T¢rrascos, dont les descendants habitent encore 
aujourd'liui l'État de 31eclmacan. En fait d'autres pettples 
moins importants, on peut citer, au nord, les Pirnas, les 
]'aqu, les Zoua9ues, les Tarahouraaras, les Coras, les 
'naloos, les Mayos; dans les Etats du centre et du sud, 
les Mi jus ou 3ltxes, les Matla'.it¢os, les lIouaztèq«¢s, 
les C hiehirnèfues , les Totonaques , les Tlapanèques , les 
ltouàbes ne Gouàves, les Chinantèques, les Couieatèq¢es, 
les Chatinos, les Mazatèques, les l'.catèques, les Chou. 
tales, les Chocos, les Zoques, etc. Les Ma9as sont le 
peuple qui domine dans l'Yucatan. La languepocanchi, ou 
le pocaman, est parlée principalement sur les cOtes de Guate- 
main, tandis que la langue 9uich est celle de la plus grande 
partie de la population indienne de l'Amérique centrale. 
Les ethnographes les plus récents ont divisé les Indiens 
de l'Amique du Si en trois graudes classes, comprenant 
chacune de nomb¢enses subdivision% à savoir : 
1 o Les Cunr.».m*sac,s avec les nations des louiscas 
ou Moseas, parlant tme tout antre langue, qui à l'époque de 
la conquète formaient un pe«pie à demeure fixe, agricul- 
teur et civilisé, dont la langue est aussi dite langue des 
Chibcha et était autrefois repandue dans tout l'empire ; 
plus les Panches et les Goairos. Les peuples indiens 
habitant, à l'ouest de la :Nouvelle-Grenade, le Popayan et 
Choco-eiva, avaient tos leur langue propre; mais les 
quelques debris qu'en laissèrent les vainqueurs ont fmi par 
adopter la langue nationale. 
2 ° Les P[v.ns, suivant Tsehudi, appartenaient à trois 
nations différentes, parmi lesquelles les QuicAuas étaient 
au temps de la conquète un peuple puissant, parvenu à 
une baute civilisation et qui avait fondé l'empire des Incas. 
La langne Qichua on lnca, sur laquetleTsehudi a publié 
un grand ovrage, fut élevée par les missionnah-es  Petat 
de langue écrite, et est encore de nos jours la lague qu'on 
parle généralement sur le plateau et tout le long des c6tes 
àu Péron, ainsi que d'une partie de la Bolivie, de l'Eeuador 
et des provinces nord-ouest de la république Ar-,tmtine. Les 
ïrnaras, qui liabilaient les provinces limitrophes du Pérou 
et de la lolivie, n'étaient pas moins civilisés; leur langue 
diffère à tous égards du quichua, et est généraleraent parlée 

367 
dans le pa)'s, mme par les descendants des premiers aven- 
turiers espagnols. 
3o Les Amas,sss. Sous cette dénomination on comprend 
plus de soixante peuplades, dont les demeures sont situées 
dans les chaudes et liumides régions du versant oriental des 
Andes, en Bolivie et au Pérou, et dont les langues, toutes 
complétement differentes, n'ont jusqu' présent été l'ubjet 
d'aucun travail d'investigation. 
o Les Aacc.s. Ils se divisent en deux nations : a. Les 
Araucans, les Araucanos des Espagnols, avec deux subdi- 
visions : celle des Araucans proprement dits, composée des 
Chonos (dans la langue locale Arauco), ou Arattcans dans 
l'acception la plus étroite de ce nom, et des Pehuenches; et 
celle des Aucas, comprenant les lionAelas et les Cltilenos. 
Toutes ces peuplades parlent la m6me langue, b. Les 
bitants de la Terre de Feu, appelés aussi jadis Peclterais, 
population misérable, vivant de la chasse et de la pèclie. 
$o Les oeuo.s us Pts, qui occupent les steppes 
immenses et les déserts de in partie orientale «le l'Amêrique 
du Sud, .lepuis la c6te mëridionale de ce continent jusqu' 
l'embouchure du fleuve de la Plata. On y compte dix na- 
tions environ, parlant tout autant de langues radicalement 
diflërentes. Les Puelches, Ioe Abipons et Guaycourous 
sont les plus connus. 
6 ° Les vOUl.xrms CmQuros, ainsi nommées d'après la 
plus considérable d'entre elles, les Chiquitos, divisée en 
trente-six peuplades, avec des langues difierentes, qui dès l'ori- 
gine pratiquaient l'agriculture et qui de bonne heure se 
convertirent au christianisme. 
7 ° Les pouu«lOS Moxos, ainsi nommées également du 
nom de la plus considérable d'entre elles, et inférienres 
aux précédentes, au moral comme au physique. 
8 ° La race des Gc.SlS ou Cxsmm, quoique diséminée 
en nations nombreuses, est répandue depuis les rives de 
la Plata,  travers tout le Br»sil et la Guyane, jusqu'à la 
mer des Antilles, dont elle occupait les petites |les à l'epoque 
de la découverte de l'Amerique. Elle est désignée au sud 
sous le nom de Guaranis ; dans les provinces centrales et 
les plus peuplíes du B,é_-il, sous celui de Fot«ps; enfin, dans 
les Guyanes, sous celui de Caribi. Le guarani ou toupi est 
la langue générale du commerce et des rapports sort.aux au 
Brésil, depuis l'fie de Sainte-Catl«erinejusqu'a l'embouchure 
du fleuve des Amazones.Toutes ces tribus, dont on évalue le 
nombre eniron soixante, parlent des lanAuesayant encore 
des rapports d'affinité; il n'y a que celles du territoire de 
l'Orénoque qui diflèrent sous ce rapport. Les Guaranis, ou 
Toupis proprement dits, comprennent six tribus. Parmi les 
nombreuses tribus de Caribes, les plus connues sont celles 
des Caribes proprement dits ( Caratbes) , des Aravaues , 
des Pamanaques, des Cltaymas et des Maypouros. 
9 ° Les Boocrs ou Aymores, au Bresil (voyc-. BorO- 
çI'DES ). 
10 ° Parmi les rL.nm Bns-'m, dont on n'évalue 
pas le nombre à moins de 200, dont la plupart diifèrent es- 
sentiellement les unes des autres et parlent des langues qui 
n'ont point ëtéencore étudiées, nous nous bornerons  citer 
les Pouris et les Kirris ( dans la province de Bahia). 
1 t°Enfm, les uts u 'Oea.OQUr, qui se divisent en 
plus de cent cinquante tribus, parlant toutes des langues dit: 
fërentes, et indípendantes des Caraibes ou Caribes, habitent 
•les contres baignées par l'Orénoque, par ses embranche- 
ments et ses aflluents. Celles dont il est le plus souvent fait 
mention sont les Gua»ws, les 31akousis, les Otomaues, et 
les Saliras, tribu agricole. 
Si, comme nous l'avons déjà remarqué plus haut, tous 
ces peuples ont le même type pource qui est de la ¢onfor- 
matitm plffsique, et si leurs languont toutes un ¢ractère 
commun, le grand nombre de leurs idiomes et leur diversité 
n'en demeurent pas moins un phénomène très-curieux, 
quand on les compare au nombre, relativement petit, des habi- 
tants au|ocbthones de l'Amírique. On évalue le nombre de ces 
derniers..v compris les métis, qui se rapprochent beaucoup 



plus d'eux que des blancs, à environ 9,500,000 ;mes ; celui 
des langues qu'ils parlent,/; cinq ou six cents, dont un bon 
tiers diffrent radicalement les unes des autres. Il n'y a qu'un 
fort petit nombre de ces langues, co,n,ne l'aztêque, le cree, 
;e quichna, le qniché, le muysca, le guarani, qui soient trës- 
Tépandues mme parmi des nations qui n'ont nullement la 
mème orine. Beaucoup d'autres langues, par exe,nple 
celles des peuplades du Brésil et de l'Orénoque, sont bornées 
- de petites tribus, composées seulement de quelques fa- 
milles. Cette absence dun idiome commun, intelfible 
des masses nombreuses, a singulièrement gué l'oeuvre des 
missionnaires. On évalue  en iron 3,700,000 ttes le nom bre 
des Indiens encore idoltres. 
En ce qui touche le degré de civilisation, on peut établir 
parmi les Indiens h'ois catégories : la première comprenant 
la population autocbthone des contrées qui  l'époque de la 
conquète {ormaient déj des États politiques ; la seconde, 
tes nations dont les mœurs ont été plus ou moins modifiées 
par le contact avec les Européens ; la troisième, enfin, les 
peuplades designCs sous la dénomination de Sauvages, et 
dont le genre de vieet les habitudes sont restées les mmes 
qu'avant la conquète. La première de ces catégories est, 
• eaucoup près, la plus nombreuse, et comprend plus de la 
moitié de la population rouge de l'Amérique ; dans certaines 
contrées, elle l'emporte sur la population blanche immi.'rée; 
«ur quelques points, comme à Puebla et à Oaxaca, elle 
compose les neuf des de la population totale. Les In- 
dien y cultivaient la terre plusieurs siècles avant la con- 
quète, et ils y demeurèrent attach.s au sol. Le changement 
de inaitres et l'introduction du christianisme n'exercèrent 
|int dïntluence sensible sur leurs mœurs, leurs lois, leurs 
langues, leur manière de vivre; et pour eux le contact avec 
les Eu,'opeens ne fut pas, il s'en faut de beaucoup, aussi 
dangereux que pour les peuples chasseurs de l'Amérique 
du 'ord. Quand la couquète par les Espagnols fut complète, 
la population indigène s'y accrut mme dans des propor- 
tions analogues à celles de la population blanche. 
Quand les diverses colonies de ]',mérique espagnole pro- 
clamèrent leur indépendance, on évaluait cette population 
indigène à six millions d'àmcs. Par suite des incessantes et 
sanglantes uerres civiles dont ces contrées ont été depuis 
lors le tbéàtre, ce chiffre a considérablement diminué. Dans 
i'Amérique septentrionale, où le blanc ne s'établit point 
comme conquérant, mais comme colon, la population indi- 
gène, qui viait exclusivement du produit de sa chasse, a 
complétement disparu, lorsqu'elle n'a pas été refoulée de 
plus en plus, de gréou de force, ou bien encore en vertu de 
prétendus marchés et acquisitions, sans espoir de pouvoir 
«chapper à une destruction entière et procl,aine..Autre fut le 
so't des peuples autocl,thones de l'Amérique du Sud, où, 
suivant toute apparence, la population a plut6t augmenté 
que diminué, du moins dans les contrees o0 les Européens 
ne sont point encore venus s'etablir. Cela tient d'une part 
à ceque ces peuples ne vivent pas uniquementdu produit 
«le la cl,asse, mais cultivent aussi le mandiocca et le 
sang; d'un autre cté, divers ordres religieux, et surtout 
les jésuites, ont réussi à civiliser bon nombre de peuplades 
qui depuis ont touiours eu des demeures fixes. Une partie 
de ces Indios catezisados, comme on les appelle dans 
ïArqérique espagnole, ou Indios mansos, comme on dit au 
Urésil, avait adopté la langue et les mœurs des blancs, et 
avait ainsi formé la classe des Indios redzcidos, llais 
comme pour la plupart de ces Indios reducidos la civili- 
sation acquise dépendait surtout de la vigilance et de la 
sollicitude constante des religieux qui l'avaient introduite, 
les jésuites n'eurent pas plus t6t été expulsds qu'on vit un 
rand nombre de tribus retomber completement dans leur 
état de barbarie primitive.; de sorte qu'aujourd'hul le 
nombre des Indiens de la seconde des catéguries que nous 
avons étal)lies plus haut s'élève à peine à un million d'mes. 
La troisième catégorie se compose des Indiens sauvages, 
appelés par .les Espagnols Indios b'aros» au nombre d'e,- 

INDIENS -- INDIF. .,.,,, 
viron quatre millions, qui vivent au nord de l'Amrique de 
la chasse et de la phe, et qui dans l'Amérique méridionale 
habitent paisiblementpendant la plus grande partie de 
l'année des illages. La seule influence appréciable que 
les blancs aient exercée sur leur genre de vie, ç'a été de 
leur fournir des cbevaux et des armes  feu, et de les 
transformer ainsi parfois en audacieux brigands, parfai- 
tement moutés et armés, qui commettent des déprédations 
de toutes espèces dans les régions occupdes par les blancs, 
leurs ennemis. 
Si les Indiens ont fourni aux poëtes et aux romanciers, à 
ceux des États-Unis surtout, une mine inépuisable à exploi- 
ter, ils sont aussi entres, dans ces trente dernières années sur- 
tout, dans le domaine des spéculations scientifiques; et le 
nombre d'ouvrages, souven t très-volumineux, consacrés à l'é- 
t,de de l'histoire, de l'antiquité, des mœurs et des usages, de 
mème que de la conformation physique des Peaux-louges 
(led-Skint) va chaque année en augmentant ,. non pas seu- 
lement en Amérique, mais aussi en Europe. Sans mention- 
ner ici les livres spcialement relatifs aux antiquités améri- 
caines, nous citerons plus particulièrement, d'abord sous 
le rapport anthropologique, blarton, Crania Americana 
(Philadelpliie, 1839 ; avec 39 planches); Gallatin, A Sgnopsis 
f the Indian Tribus, dans les transactions de la Société 
Américaine des Antiquaires; Mac Kenney et Hall, History 
of rte Indian Tribus (3 vol., avec 120 portraits; Washing- 
ton, t838-1841 ); Catlen, Lettersand notes on the Man. 
ners and Conditions of the ]'orth. 4mericarn Indians 
{ 4  édit., Londres, t$43); Schoolcraft, Oneota, or the lled 
Race in America (New-York, 154); le mëme, Htstor 
the Iroguos (186); Drake, Biogr«ph  and ltitor 9 of 
the 1Vorth-American l;ufians ( 8  Adit., Boston, 1848 
bloore, Hitor9 of the lndian Wars of rte United.States 
(New-York, 1849 ). Sur les indigènes de l'Amérique centrale 
et de l'AraCique meridionale, il faut consulter les ouvrages 
d'Alexandrede Humboldt, de Stephens, Squier, Tschudi, Spix 
et Martins, Schomburgk, d'Orbign?, le prince Maximilien 
de Neu'ied, etc., etc. ; enfin le magnifique ouvrage de livero 
et Tschudi, .Antiguedades Peruanas (Vienne, 1852 ). 
IXDIFFEEXCE. La définition de l'indifférence est 
dans toutes les tëles; le sentiment de l'indifférence est-il 
dans tous les oeufs? Il y; a une sorte d'indifférence qui 
»eut se confondre avec l'insensibilité. L'ame de ces 
hommes indifférents est à peine capable de sentir l'im- 
pression des événements favorables, ou, si elle l'èprouve, 
c'est pht(t par instinct que par réflexion. La trempe de 
leur ",1me est telle, que les traits de la mauvaise fortune s'y 
émoussent, comme les projectiles s'amortissent en fappant 
le salle. Cette insensibilité a son siége dans'le cœur de-ces 
hommes san affections et sans répugnances, dont la-na- 
ture dégénérCe s'abai=e presque usqu'au limites eu la 
vie végëtale. C'est peut-ëtre une laveur qui leur est 
partie par la nature pour compenser les biens et les maux 
de leur condition : car si elle les a privës de l'espérance, 
elle leur a té aussi le désespoir. 
Il ? a une autre indifférence» qu'on Pourrait confondre 
avec l'amour excessif de soi-mSme; elle se développe sur- 
tout dans le cœur de l'homme comme membre d'une as- 
sociation ci-ile, et exerce une influence plus ou moins 
grande sur ses actions selon la distance qui le sé»are de 
certaines personnes et de certaines choses. Ainsi, le cercle 
de nos affections est premièrement élargi par les sentiments 
de famille ou par ceux de Pamitié. L'indifférence commence 
seulement là où finissent les intérèts des personnes qui nous 
sont chërea. L'amour de la patrie, par exemple., embrasse 
un nombre d'individus d'autant plusgrand que les prejujés ou 
les passions lui donnent à nos yeux une signification plus ou 
moins étendue ; et les degrës de notre indiffér.ence pour- 
raient ètre dans ce cas mesurés à ceux de l'equateur ou du 
méridien. Les passions politiques et philosophiques, en 
créant de nouveaux amours et des haines nouvelle% dépla- 
cent les anciennes limites de notre indifférence; et quoique 



I'DIF FERENCE 
ordinairement l'attention des hommes soit tournée plus • i- 
vement vers les choses qui les approchent davantage, ils se 
montrent quelquefois plus attentifs au sort de la ville 
celui de la maison, préfèrent le soin des af|aires de la pro- 
rince à celui de la ville, et attachent plus de gloire à se 
réunir sous la mme bannière qu'/ naltre sous le mme 
ciel. Mais, soit que nous regardions notre personne comme 
le centre de toutes nos affections, soit que nous en plu- 
tions le principe ailleurs, il est bien certain que dans tous 
les cas nous laissons un grand espace à l'indifférence; elle 
n'est surtout jamais aussi étendue que chez les hommes 
dont le CœUr voudrait embrasser,dans ses affections l'uni- 
vers entier, parce que les affections de ces hommes s'aflai- 
]lissent en s'élargissant, et l'on n'est jamais plus froid en- 
vea'sles personnes qui devraient nous intéresser davantage 
que Iorsqu'on veut aimer tous ses semblables également. 
En somme, l'indifférence est un sentiment généralement 
répandu dans le cœur des hommes, c'est une qualité sub- 
tantielle que la nature leur a départie pour qu'ils puissent 
vivre paisiblement en société. Elle consiste alors en une 
modération de désirs et d'affections qui les porte à 
ployer leur zèle aux choses qui les frappent directement, 
préférant dans les affaires d'autrui éviter les dangers ou 
"fennui, que de rechercher quelque profit ou quelque hon- 
neur. CeUe indilférence a de profondes racines dans le 
cœur humain. Elle" existe à tous les ages de la société, 
excepté dans l'état primitif. L'homme alors est en même 
temps souverain pour gouverner sa famille, chef pour la 
défendre, pontife pour la bénir, chasseur, pêcheur ou p- 
tre pour i'limenter. Il doit donc toujours tenir éveillëes 
.ses facultés physiques et murales, afin de bien remplir 
tous ses devoirs. On a dit que les peuplades sauvages 
montraient la plus grande indifférence pour tout ce qui les 
concerne; nous croyons qu'on a mai interprété ce mot, 
quand on a voulu peindre leur état habituel de stupidité. 
les lois de la nature sont invariables : cette mère commune 
des hommes a voulu que celui qui ne peut pas partager 
avec les aulres les soins de sa conservation en sentit le 
besoin plus virement. Privé de la protection et de l'assis- 
ltance de ses frères, le sauvage doit nécessairement porter 
une attention plus soutenue/ tous les événements qui 
arrivent. Mais dès que nous nous Cevons à une société 
pins parhite, la condition de notre esprit change sous ce 
rapport. ToutcsociéoE politique est fondée sur des lois qui 
établissent les droits de chaque individu et sur la justice du 
goux'ernement qui les protège. La craintedela loi nous éloi- 
gnc des choses qu'elle défend; la confiance que nous avons 
dans la protection du gouvernement nous dispense de nous 
occuper aussi scrupuleusement de la défense de nos per- 
sonnes et de nos biens. Ainsi, Phomme, enchalnant ses 
désirs et apaisant son cœur par la certitudede sa tranquillité, 
réduit ses soins à un nombre très-limité, et, soit qu'il se 
,lddommage sur le peu d'occupation qui lui reste, de l'ac- 
tivité qu'il n'a pas pu employer dans une sphère d'action 
plus Cendue, soit que sa nature le porte à ne travailler 
qn'avec modération, toujours est-il qu'il contracte pour les 
affaires autres que les siennes une habitude de nonchatance 
qui commence par l'oubli et finit par rindifférence. 
Les premiers germes d'indifférence poussent avec plus de 
force encore lorsque la religion vient les féconder. La re- 
ligion élëve nos )'eux vers le ciel. Ici-bas, nous ne faisons 
que naltre et mourir, on vit seulement là-haut ; ici-bas, 
nous sommes entralnés maintes fois par le flot de la fortune 
plus haut que ne mériterait noire vertu, et maintes fois 
aussi plus bas que ne le mériter'aient nos erreurs ; là-haut 
seulement on est sfir d'une récompense ou d'une peine ap- 
propriée à chaque action. Ici les plaisi sont de courte 
durC, ou mî:h'.'s «le douleurs ; là-haut on goitre une joie 
et durable. Voilh le langage de la religion, voilà com- 
pare 
ment ceux qui rdcoutent, aspirant " une condition plus 
parfai{e, dédaignent ou au moins regardent sans passion 
choses périssables d'ki-bas. Et lors méme «-e la reli- 
tCT. UE LA CO.%VEItS.  T. XI. 

369 
sion ne suffirait pas pour nous conduire à cet état d'apa- 
thie, nous  serions naturellement portds par un autre sen- 
timent, celui de rinjustice des hommes. A quoi bon, disent 
toujours ceux qui en sont frappés, à quoi bon user nos fa- 
cultés à faire quelque chose au delà de ce qui" strictement 
nous intéresse, lorsque nous savons ce quon doit espérer 
de la droiture et de la fidélité de nos semblables ! L'histoire 
et l'expérience de tous les jours ne nous montrent-elles pas 
ce quiattend d'ordinaire ceux qui se rouent avec des moyens 
peu communa à la recherche de choses extraordinaires? 
Laissons aux autres leur ambition, réservons-nous ce qui 
est plus diflicile à obtenir et à garder, la tranquillité de rme. 
]I faut altribuer/ cette persuasion de l'injustice habituelle 
des hommes l'origine de cette philosophie moitié stoïque, 
moitié épicurienne, qui nous invite à ne pas nous soucier 
des ,choses de la vie. 
Pour mieux comprendre combien elle se fortifie par Pha- 
bitude, séparons les hommes en plusieurs classes, en com- 
mençant par la moins nombreuse, celle des hommes lleu- 
feux. Le bonheur, qu'il nous vienne de notre vertu, de notre 
fortune, doit nécessairement être fondé sur ce sentiment 
de satisfaction intérieure, dégagé de toute crainte, par le- 
quel l'homme, voyant que chaque chose lui réussit, jouit 
de cette uniformité constante entre ce qu'il souhaite et ce 
qui lui arrive. L'homme heureux redoute sans cesse les ha- 
sards de toute nouvelle épreuve, et reste par cela même 
cramponné à son sort. Ceux qui, d'une autre coté, ne sa- 
vent pas régler sur les bienfaits de leur fortune la modéra- 
tion de leurs jouissances ont aussi des raisons particuliëres 
de devenir indifféreuts. L'ambition et la cupidité grand/s- 
sent à leurs )eux la chose qu'ils souhaitent; non-seulemêrt 
ils préfërent peut l'obtenir les moyens les plus sfrs aux 
moyens les plus honnêtes, mais ils consentent même  ab- 
diquer toute autre pensée et tout autre soin pour s'occuper 
exclusivement de l'objet vers lequel les entrslne leur pas- 
sion. Voilà une autre indifférence, qui est fille du vice. 11 
en est encore une, fille du malheur, et que produit rabalte- 
ment de l'esprit, le désappointement, le manque d'eslrance, 
tout ce qui attriste le plus grand nombre dïnfortunés. 
Il y a enfin une autre indifférence, résultat non pas de 
la position dans laquelle nous sommes placés par le sort, 
mais de celle que nous ont faite nos opinions; et c'est cette 
indifference que nous voyons journellement dominer le cœur 
de la multitude dans tout ce qui a rapport aux affaires pu- 
bliques. Elles sont considérées sous deux aspects par ceux 
qui veulent bien s'en soucier. Il y a des approbateurs, il  
a des méconlents. Celui qui approuve est en réalitc bien 
peu éloigné de rindifférent, c'est-/-dire que tant quïl n'drri- 
vera aucun changement dans les lois et les principes d'ad- 
ministration qui lui conviennent, il jouira du gouvernemeut 
qui existe comme on jouit de la sérénité d'un beau jour 
sans y faire grande attention. Celui, au contraire, qui est me- 
content l'est ordinairement pour certaines raisons. Le re- 
dressement des griefs qui l'affligent ne lui procurera mëme 
aucun avantage personnel : dès lors le mécontentement 
s'insinue dans son esprit, et s'y établit d'une façon presque 
doctrinale, lapportant ì lui-même les dernières conséquen- 
ces de ces doctrines, il se dira, lui aussi : « Eh ! que m'im- 
porte à moi, si je dois comme auparavant porter mon far- 
deau ? ,, Il faut en convenir cependant, l'avantage gênerai 
qu'elles attendent aveuglément de certaines reformes est 
bien suffisant pour réchauffer les mes généreuses, comme 
le seul espoir de ce mëme avantage suffit pour entrainer les 
esprits inconsidérs; mais cela arrive très-rarement, à ne 
grands intervalles; et il n'en résulte pas moins que l'indif- 
férence dans laquelle on va retomber aussit6t après l'ac- 
complissement des nouvelles épreuves ne soit pas, comme 
nous disions, une qualité naturelle et universelle du genre 
humain. 
Il est jus!e d'observer, toutefois, que la nature a ge- 
ment agi en façonnant ainsi notre me. La condition des 
hommes serait encore heaucou lus malherense si le 



;o I:NDIFFÉBENOE 
plaintes qu'in entend chaqne jo.r paroot s.r la marelle 
des affair puhliqu éie» antre chose que des plaintes, 
et si l'indifference, remède salutaire, n'avait dëjà amolli 
«paisé ceux qui les éoeutent. 
B °n Joseph 5Io, de l'Académie de Tufin. 
INDIGENCE» INDIGENT (en latin indentia, ndi- 
çs, fails de la particule pvative in, et du verbe diger«re, 
qui signifie à la fois diçdrer et rrang, distriberL L'in- 
• gence est ,n ceflain état de besoin, approchant de la pau- 
vret6 et en différan[ seulement en ce qu'elle semble moins 
intense. L'indigent ne manque pas absolument du ncairc, 
mais de l'utile; il ne mendie pas, mais il n'a pas moins be- 
in de seoeurs: soes quoi il tombit bient6t dans le plus 
and dénOment; ainsi l'indigent peut travailler, mais les 
fo lui manquent pour gagner assez, ou bien son tra- 
vail est trop peu rétribué, ou bien le travail lui manque par 
un effet indépendant de sa volon[é. Une trop ande qu- 
tire d'enfanL amène aussi l'indigence. Enfin, l'indigence est 
relative, et telle peonne habitm.e à Fabondance tombe 
dans l'iodigence avec des revenus qui en meRraient beaucoup 
d'autr à leur aise. 
L'indigence n'e donc pas far{te à conster. Bi 
pauvres honteux échapnt à la statistique. En 
nous confondons d'ailleurs depuis la révolution tous les pau- 
vres sous le nom d'indigents. La loi ne parle jamais 
p.mvrt parmi nous, elle ne connait que des indigen[s. Elle 
les admet aox secours dislribués parles bureaux de bicn- 
t a i s a u c e ; elle Ira admet gratuitement dans I hôpitaux et 
les h o s p i c e s ; elle les dispenoe de payer certaines taxes, 
clic leur fait remise de certain amendes, elle a crée ur 
eux l'assistance judiciaire, enfin elle I fait inhumer 
çratuitement.  France, 9,336 oemmunes seulement possè- 
dent un bureau de bienfaisance. Dans c 9,336 communes, 
dont la population s'elèveà 16,521,883 , les indigen{s 
inscri  leu bureaux sont au nombre de 1,329,659, ce qui 
donne un indigent sur douze habitants. D'après le baron 
de Watteville, la mo)ee des sours annuels est de 
12 ff. T0 c. par indigent. Cette moyenne est de 10 centimes 
dans l'Avez,on, au Tel; de 2 centimes dans le h6ne, à 
Mardose, etde t centime ds l'Aih, a Marier, fanes qu'elle 
s'élète à 449 fr. 90 c. dans la Mayenne, au Genest; a 899 
ff. 12 c. dans le Doubs, à fonthard. Le baronde Wate- 
ri;le se plaint de cvt{e inégalit; mais il oublie que les com- 
unes qui donnent de si forts seoeors ne les trouvera{eut 
peu bètrc pas s'il fallait I diribuer à une ceaine alliance. 
It s'éleve aussi contre i'cparpiemcnt et la peëtuite des 
cours. ,, ous voyons ajonrd'bui, dit-il, inscrits sur les 
cor, tr61es les petifils d imligents admis aux secours 
blics en 1802, alors e le fils avat  en t830 alement 
porté sur I listes. Les al{sir{butions riodiqu h jours et à 
heures fixes donnent souvent à l'indigent un esprit d'impré- 
voyanoe qui arave sa situation, aoute le même économiste. 
;e vaudit-il pas mieux en donnant ququefo une mme 
asoez foe  une famille indigente, la fioer a tout jamais de 
la misère et lui faciliter les moyens de venir  jonr en aide à 
de plus malheureux. » On ne ut nier en effet que cela 
serait suvent pls utile ; mais oemment aver   choix, 
quand ou excite déjà tant de jalousi pour d cos 
miuimest Et puis quand la famiUe foement secouée 
aura perdu dans i affaou autrement  qu'on lui aura 
donnë, fandra:t-il recommenoer ou bien la repousser? 
A Pas la population indigente Cail en 1853 de 65,26 
idividus, ce qui, ur une population génrale de 1,053,252 
àm, éblit une moyenne d'un indigent sur 161 habitant. 
En tS, la population générale étant de 912,033 individus, 
on comprit 66,148 indigent% c't--dire 1 sur 13,7, et en 
1832, pour une population de 770,286 hMfitanls, le chiffre 
d indig s'elevait à 68,9S6, soit t indigent sur 11,1. 
a-t-il roellemcnt moins d'indigents parmi nous, ou est-on 
plus svre dans ! missions? Le nombre des ménages 
assist6s dans Pann6e 1853, levait a 9,l2; 7,937  lenrs 
c'ach seulement Calent n6s à Paris, i,368 dans la banlie, 

18,405 dans les départcments, I,32 à l'étranger. On 
trouvait 13,870 chefs de ménage inscrits an-dessous de 
soixante ans, et 1,349 au-dessus de quatre-vingds ans. Il y avait 
3,445 ménages cbargés detroisenfants, 125 qqi en avaient six, 
16 qui en avaient sept,  qui en avaient hnit. Çuant aux pro- 
fessions, voici comment se répartissaient les indigents. Pour 
les hommes : chiffonniers, 428 ; cochers, t64; commission- 
naies, hommes de peine, 1,578; cordonniers, 86t ; domes- 
tiques, 135; employés et écrivaia«, 150; marchands reven- 
deurs, 74t; ouvriers en ltiments, 1,875; jo]rnaliers et 
ouvriers de divers états, 4,874 ; porteurs d'eau, 1 I ; portiers, 
1,283; savetiers, 118; tailleurs, 537 ; sans profession, 1,652. 
Pour les femmes : blanchisseuses, 675; chiffonnires, 368 ; 
domestiques, 313; femmes de ménage, 1,140; garde d'en- 
fants, 9.2 ; garde-malades, 2t7 ; revendeuses, 81t ; ou- 
vrières à l'aiguille, 2,574; ouvriëres et ]onrnaliëres de di- 
vers états, 4,379; porteuses d'eau, 3O ; portières, 7t ; sang 
profession,, 3,108. L. Lotrvz. 
INDIGENE (du latin indë, employé pour in, dans, 
et 9enitus, engendré, c'est-à-dire engendr là ). On appelle 
indigènes les populations établies de tout temps dan un 
pay s. Ce mot n'est cependant pas snonyme d'a b o r i g è n e s 
ca autochthones. Dans nos départements d'AIgérie, 
:qus appelons indistinctement indigènes les Kabyles, des- 
cendants des Berbers, et les Arabes, qui n'ont envahi la con- 
tree qu'au huitième siècle de notre ère. 
Une plante indigène est une plante propre à tel on tel 
pays, qui y croit naturellement, qui n'y a pas ëté introduite 
d'une autre contréo, cas dans lequel on la nomme e xo- 
tiqte. 
I?IDIGESTiON. On spécifie par cette dénomination 
les troubles subies de la fonction digestive que l'on considère 
comme des indispositions passagëres. Les pert,rbations. 
de la digestion ainsi comprises sont extrgmement com- 
munes, et les médecins ne sont que rxrement appeids à y 
remédier; chacun a recours à des moyens popularisés par 
une longue tradition, qui'est une routine aveugle. Les in- 
digestions sont causées par un ëtat morbide des organes di- 
gestifsou par les substances alimentaires dont on fait usage, 
et parmi lesquelles on doit compter les boissons. Dans une 
affection aussi légère, aussi brève, ou ne doit pas supposer 
des altérations de tiggu, mais seulement des perversions 
de vitalité; autrement, la constance et la répétition des 
acciden{s dénonceraient des maladies organiques, telles 
la gastrite, l'enterre, etc. Comme c'est dans l'estom ac 
• que l'acte le plus important de la fonction digestive s'ac- 
complit, c'est anssi ce viscère qui est le théàtre des acci- 
dents principaux et les plus communs qui constituent cette- 
indisposition : sa vitalité normale est viciée dans ces cas 
par des causes diverses, souvent par des émotions morales 
trës-vives qu'on Aprouve inopinément pendant ou peu 
après les repas. D'autres fois cet effet est produit par l'in- 
gestion dans l'estomac d'une boisson glacée ou de la pré- 
paration sucrée appelée 9lace. La vitalité de l'estomac peut 
encore être dénatwrée pendant la chymification par des li- 
queurs spiritueuses, si on n'en a pas contracté l'habitude. 
L'état des intestins seul cause beaucoup moins l'indiges- 
tion : ce trouble n'arrive guére que quand les aliments n'ont 
point élé dissous par le suc gastrique. Les aliments et les 
boissons causent des indigestions par leur qualité et par 
leurquantité. En général, les herbes et les racines sont moins 
digestibles pour l'homme que les substances farineuses et 
celles qui appartiennent au règne animal On prend d'or- 
dinaire les aliments en trop grande quantité , la lois ; 
et cet excès est la cause la plus commune .tes indigestions 
la masse alimentaire n'est plus en rapport avec le suc gas- 
triqnequi doit la dissoudre par une action chimique que fa- 
vorisent la caloricité animale et les mouvements péristalti- 
ques de l'estomac. Pour montrer combien i'abasdes boissons 
spiritueuses peut engendrerd'indigestions, il suffit de citer 
des scènq que l'ivrognerie ne rend que trop communes. 
Toutefois, on s'accoultme h l'action ,h, vin or ,es liqueurs; 



INDIGESTION -- INDIGO 
;'estomac est un des organes les plus propres à endurer 
impunément l'exciiatiou. 
Les accidents qui signalent l'indigestion sont un malaise, 
une anxiété g('nérale, un sentiment de sulfocation qu'on 
appelle élooEfement, un mal de tle, surtout sur le front ; 
des renvois de la saveur des alimenis ingfrés, et qui prou- 
vent qu'ils ne sont point décomposes ; des hoquets et des 
éructations répétées, souvent infectes; des nausées et enfin 
,les vomissements : alors les matières qui n'ont point été 
travaiilées dans l'esiomac, ou qui l'ont été insuffisamment, 
sont rejetées au dehors, tandis que celles qui ont été chy- 
mifiées se rendent à leur destination naturelle. L'expulsion 
des alime-ts indigesles ou indigérés suffit souvent pour 
ramener le calme. 1tais si, au lieu d'ètre rejetés par la 
bouche, ils descendent dans les intestins sans avoir ítéal- 
teré., ils causent alors un malaise plus long et un état 
doublement pénible, dont les borborygtnes, les vents, les 
coliques, sont l'expression. Enfin, les substances indigérées 
sont évacuées par le dernier des intestins, et le calme re- 
riait après cet orage. Ces accidents qui éclatent tout à la 
fois dans l'estomac et dans les intestins sont quelquefois 
très-graves, et constituent la maladie appele choloe» ŒEE-mor- 
bus indigène. 
11 n'est pas toujours possible de se solstraire aux émo- 
tions morales dont la vivacité trouble la digestion, mais on 
peut toujours éviter de refroidir brusquement et fortement 
l'estomac par des boissons glasCs, qui ne conviennent 
que dans des cas de maladie, et qui doivent encore erre 
employées avec la plus grande prudence : on doit surtout 
se défier des glas quand l'estomac fonctiotme. On a 
publié à diverses époques des exemples de morts ainsi 
causées : ces cas font ordinairement supposer un empoi- 
sonnement, mais c'est ì tort : la gastrite produite par 
l'action du froid sutiit pour expliquer l'événement trac- 
que. C'est également ì tort qu'on prend en été des bois- 
sons glasC en mangeant ; cette coutume de luxe a des in- 
convénients -aves et tréquents : il suffit de refroidir les 
boissons à la température de l'eau de puits. La modération 
dans l'usage habituel du cafè et des liqueurs est nécessaire 
pour que la digestion stomacale s'aceomplisse; mais si on 
n'en a pas l'habitude, il faut s'en défier. On doit aussi re- 
noncer aux aliments indigestes ou de dilStile digestion, 
les corps huileux en général, et le lait pour certaines per- 
sonnes. Chacun doit éviter les substances qu'il digère dil- 
ficilement : c'est une connaissance que l'expérience_ seule 
fait acquérir. On doit aussi craindre celles pour lesquellês 
oa éprome une répuance instinctive. Si l'indigestion n'a 
pu être prévenue par les attentions que nous indiquons som- 
mairement, il faut  remédier en secondant les efforts na- 
turels : il convient de favoriser l'évaenation de l'estomac 
par de l'eau Il&le, et celle des intestins par des lavements 
cmollients. On est dans l'usage d'administrer en pareil cas 
du lhé; c'est le remède banal : il a des inconvénients gra- 
ves. Mieux vaudrait employer une infusion de fleurs de 
tilleul ou de véronique. L'eau sucrée et fralche, le repos 
du lit et la diète suffiraieat en général pour calmer ces 
troubles passagers. Cependant, il est des cas 06 une Ié- 
gère dose de médicaments opiaeés est très-utile ; le mé- 
deein peut aussi dans certains cas recourir à l'émétique. 
Dans la vieillesse, les indigestions sont les effets d'une 
ianervation ma!adive et souvent les précurseurs d'une al- 
laque de paralysie ou d'apoplexie. L'accident qui dans 
la jeunesse et dans la force de la vie était peu à crain- 
dre, devient alors redoutable. D  Cnxo.x.str.. 
LDIG:ATIO-  sentiment mlé de mépris et de 
colère, qu'excitent en nous certaines injustices inattendues. 
L'indignation approuve la vengeance, mais n'y conduit pas 
toujours foreCent. La colère passe, l'indignation, plus ré- 
flecnie, dure :'elle nous Cotie de celui que nous supposons 
indigne; elle est souvent rituelle, et d'ordinaire c'est plus 
par te geste que par la parole qu'elle Claie. Elle ne trans. 
forme pas, elle gonfle. Il est rare qu'elle soit i»juste. Nous 

somnies indignés bien des fois des mauvais procédés dont 
nous ne sommes point victimes. Une ame délicate s'in- 
«ligne aisíment des obstaeles qu'on lui suscite, des motif 
iniutes qu'on lui suppose, des rivaux qu'on lui erC, des 
récompenses qu'on lui promet, desíloges qu'on lui adresse, 
des préférences mme qu'on lui accorde, de tout ce qui, 
en un mot, indique qu'on n'a pas pour elle l'estime qu'elle 
croit mériter. 
INDIG,NIITÉ. En droit on appelle indigne celui que 
la loi prive d'une sueeessio n ou d'une libéralité exereée 
en sa faveur pour avoir manqué à un devoir essentiel envers 
celui auquel il devait sueeéder ou envers l'auteur de la li- 
béralité, soit de son vivant, soit après .sa mort. Le Code 
déelare indignes de succéder : 1" celui qui serait eondamné 
pour avoir donné on lentWde donner la mort au dëfunt ; 
2* celui qui a porté contre le défunt une accusation capitale 
jugée ealomnieuse; 3* rhéritier majeur qui, instruit du 
meurtre du défunt, ne l'aura pas dénoncé à la justice. Le dé- 
faut de dénonciation, cependant, ne peut ètre opposé aux 
aseendants et descendants du meurtrier, ni à ses alliés au 
mme degré, ni k sot époux ou à son ípue, ni à ses frères 
ou sœurs, ni à ses oncles et tantes, ni à ses neveux et niëces. 
Le_ enlants de l'indigne qui viennent à la succession de 
leur che! et sans le secours de la représentation ne sont 
pas exclus par la faute de leur père ; mais celui-ci ne peut 
en aucun cas réclamer sur les biens de cette succession 
l'usufruit que la loi aceorJe aux pères et mères sur les 
biens de leurs enfants mineurs. L'indigmití doit ètre pro- 
noncée par les tribunaux. 
i.DIGO matière colorante bleue, fournie printSpale- 
meut par plusieurs espèces d' indigot te fs. Il est de nom. 
hreuses variétés dans les procédés que l'on emploie pour 
extraire des tiges et des feuilles de lïndigotier leur fécule 
colorante ; mais tous ces procédés ont un méme but im- 
médiat, es.lui de déOfirer les mailles du tissu cellulaire, 
afin de pouvoir entrainer par des lavages à grande eau 
les globules amilacés qui , sont inclus; et en général 
quelque variété qu'ils offrent dans leurs details tous les 
modes d'extraction peuvent re elassés en deux catego, 
ries distinctes, l'extraction par voie de fermentation, 
et l'extraction par voie d'ébullition. Dans les proeedcs 
d:extraetion par voie de fermeutat!on, qui sont surtout 
emplo,és dans les colonies, on laisse mdeCer dans des 
ves pleines d'eau les tiges chargées de feuilles, jusqu'à ce 
que la fermentation pleinement établie ait brisé les mailles 
celluleuses de leur parenchyme, et libéré la féeule colorante, 
qui reste en suspension dang l'eau ; l'on fait ensuite écouler 
l'eau cl,argée de fécule dans une batterie, oh on l'agite 
iolemment jusqu'à ce que toute la féeule soit précipitée. 
La féeule ainsi isolee, et assez semblable ì une bouillie noi- 
râtre, est d'abord resserrée dans des sacs suspendus en 
l'air, qui laissent écouler l'eau surabondante ; puis elle est 
étendue eu plein air dans des caisses plates, oi elle prend 
une certaine solidité ; puis enfin elle est divisée en petits 
parallélipipédes, que l'on desséehe d'abord au soleil, et que 
l'on renferme ensuite dans des barriques, oh elle subit une 
certaine fermentation. Cette fermentation accomplie, les 
petits blocs de fécule sont de nouveau síehés au grand 
air, puis enfin livré au commerce sous le nom d'indigo. 
L'on admettait jadis que l'indigo était une combinaison 
en quelque sorte artificielle, qui s'effectuait pendant la fer- 
mentation à laquelle étaient soumises les plantes dont on 
l'extrayait : les expérienees de M. Chevrenl ont établi que 
l'indigo était un principe immédiat, qui existait tout formé 
dans leti«su parencbmateux de quelques végétaux ; qu'à cet 
état l'indigo était soluble et incolore, mais que pendant le 
ph¢.nomène de la fermentation ce principe immédiat, se 
combinant avec l'oxygène de l'air, devenait insoluble, et se 
précipitait à l'Cat de recule violette. L'indigo que nous li- 
vre le commerce doit donc ètre considéré comme formé es- 
sentiellement d'indigo ox)-géné, melangé à des quantités 
plus ou moins considérables .de matières étrangères, pro. 
t7. 



venant soit de la plante elle-mème, sort des ustensiles et 
des menstrues employés dans l'extraction. Ces matières 
étrangères, dont la nature est extrèmement variable, s'Cè- 
vent quelquefois à 70 pour f00. L'indigo pur, éparë de 
toutes ces matières étrangères, est d'un violet pourpre lors- 
qu'il est sous orme pulvérulente. Insoluble dans l'eau et 
dans l'akool froid, il se dissout dansl'acide sulfurique con- 
centré; fortement chauffé, il se votatifise; et sa vapeur, 
pourpre comme la vapeur de l'iode, se condense en cristaqx 
pourpres à reflets durC. L'indigo est insipide et inodore. 
L'indigo dissous dans Pacide sulfurique est connu sons 
le nom de bleu de Saxe; la solution se prépare en lais- 
sant digérer une partie d'indigo pulvérisé dans huit parties 
d'acide sulfurique concentré pendant l'espace de vingt-quatre 
heures, et en ëtendant ensuite la dissolution dans quatre- 
vingt-onze parties d'eau (Bergmann). L'acide nitrique con- 
centré agit sur l'indigo avec une grande énergie, et détermine 
quelquefois l'inflammation du mélange: étendu d'eau, il donne 
naissanceà quatre combinaisons distinctes : I ° une matière 
résinoide; 2  un principe amer au minimum d'acide nitrique; 
3 ° un principe connu sous le nom d'amer de Welther;  de 
l'acide oxalique. En traitant un mélange d'indigo et d'une 
matière facilement oxygénable par une solution alcaline puis- 
sante, l'indigo forme avec l'alcali une combinaison soluble et 
incolore ; en neutralisant l'alcali par un acide, l'indigo est pré- 
cipité de la solution sous forme de poudre jaun'tre, qui au 
contact de l'air passe instantanément au bleu. On admet au- 
jourd'hui que dans cette expérience l'indigo oxygéné se com- 
bine avec une certaine proportion d'hydrogène pour former un 
bydracide, que 51. Doebereiner a appelé acide isatinique, 
et que M. Chevreul a isol, en petits cristaux grenus et 
hlanehtres, qui acquièrent/ l'air le pourpre métallique de 
l'hydrogène sublimé. 
Il n'exisle pas de substance qui iournisse ì la teinture 
des couleurs aussi fouitCables que celles que peuvent don- 
ner certaines préparations d'indigo : les procédés au moyen 
desqt,els on applique l'indigo sur les éloffes de laine, de 
soie, de coton, et de fil, connus sous le nom de cuves de 
pastel et cuves d'Iode, reposent tous sur la propriété que 
nous indiquions plus haut en nous occupant des ca,'aclères 
chimiques de l'indigo. Dans tons, on mélange l'indigo avec 
une subslance oxygénable, et on traite le mëlange par une 
solution alcaline : ainsi, dans la cuve ì pastel, on trafic un 
mélange d'indigo et de chaux vive par une décoction de 
gande, de garance et de son ; dans la cuve d'Iode, on fait 
bouillir du son, de la garance et de l'indigo dans une lessivo 
de sous-carhonate de potasse. Dans tous ces procédés l'in. 
digo passe ì l'Cut d'hydracide soluble et décoloré; dans 
cet étai, on en imprègne fortement les tissus que l'on dé- 
sire teindre; puis on décompose l'l,ydraeide au moyen d'un 
acide ox/géné quelconque; et l'indigo, ainsi mis à nu dans 
les mailles mmes du tissu, reprend au conlact de l'air sa 
belle couleur bleue. 
L'indigo existe encore dans quelques planles autres que 
celle qui portent le nom d'indigotter : on en a retiré, en 
quantité assez considërable, du nerium tinctorium et de 
l'isatis tinctoria (voyez PAT£ o ; mais les indigoliers four- 
nissent la presque totalité de l'indigo qui se trouve aujour- 
d'hui dans le commerce. H. Brn-LerÈw. 
INDIGO (Plalt.). Voyez BLeU nt PçssE. 
I,DIGOTIEIt, gen,'e de la famille des Iégumineuses 
de .ussieu, de la diadelphic décandrie de Linné. Les indi- 
gotiers sont tanl6t des plantes herbueCs, annuelles ou vi- 
vaces, et tantôt de petits arbustes; leurs feuilles sont al- 
ternes et pinnées; les fleurs, en général petites, sont dis- 
pusCs en grappes ou en Cis axillaires ; et la gousse qui 
leursuccède est allongée, étroite, terminée en pointe, tant6t 
droite, tant0t falciforme, et renfermant un nombre variable 
de graines brun'tres. Les botanistes portent à qualre-vingts 
environ le nombre des espèces distincte que renferme le 
genre indi9otier, espèces qui ont été dstribuées en trois 
sentions, d'après la disposition de leurs b.nilles; les espëces 

INDIGO  INDISCnrttut 
à feuilles ailCs, les e«pèces à feuilles géminées  te,'nee, 
ou digitée% les espèces à feuilles simples; mais de toute 
ces plantes distinctes quelques-unes seulement, et en fort 
petit nombre, ont été soumises aux procédés de la grande 
clture, et fournissent presque exclusivement au commerce 
cette belle fécule colorante que l'on désigne sous le nom 
d'i n digo. Les espèces qui ont été cultivées jusqu'ici 
l'exclusion presque complète de toutes les autres sont sur- 
tout : f°l'indigotier bayard (indlgoferaanil , L.), petit ar- 
buste à tige droile, cylindrique, rameuse, qui atleint ì 
peine un mètre de hauteur : cette espèce est originaire des 
Indes orientales; elle est anjourd'hui naturalisée dans les 
Antilles et sur divers points du nouveau continent, o6 sa 
cuit,re rivalise presque avec celle de la canne h spcre et du 
café; 2° l'indigotierfranc(indigoferoE [inctoria, L.), qut 
ne se distingue guère de l'espèce précédente que par sa 
tige un peu plus glahre, ses fleurs un peu plus grandes, ses 
gousses un peu plus allongées, et qui, comme elle, est ori- 
ginaire des Indes, où elle est spécialement cultivée; 3 ° l'in- 
digotier fi feuilles argentdes (indigoferoE argentea , 
petit arbuste à tiges dressées, blanchAIres et pulvérulenles, 
dont les feuilles, arrondies sont couvertes sur leurs deux 
laces de poils blancs, soyeux et couchés, et dont les gousses, 
courtes et cotonneuses, sont terrainCs par une petite pointe 
recourbée : celle espèce est originaire d'lgypte, 06 elle est 
surtout cultivée ; 4 ° l'indi9otier de la Caroline (indigofera 
caroliniaa, Walter), plante aux tiges I,erbacées, aux 
feuilles alternes et imparipinnées, anx flenrs disposCs en 
grappes axillaires, fililormes, pédonculées; aux fruits glo- 
bt,leux, courts, poinus ì leurs deux extrémités. Cette es- 
pce est cultivée dans la Caroline, off elle croit aussi 
l'etat sauvage. 
Un terrain vierge, p,'ovcnant du dëfrichement des bois, 
et arrosé par de nombreux filets d'eau, offre le sol le plus 
favo,-able à la culture de l'indigotier; l'époque des se- 
mailles varie avec les conditions météorologiques dans les- 
quelles le sol se troqve placé ; or, se règle sur le retour pé- 
riodique des pluies : ainsi, les semailles se font à Haïti à 
deux époques diffërentes : dans la partie septentrionale de 
Vile, on choisit de préfërence la fin de novembre, époque à 
laquelle tombent les pluies qu'amènent les vents du nord 
tandis que dans la partie sud, on attend d'habitude les 
ploies d'orage de mars et avril. Les époques des grand 
pluies et des grandes sëcheresses sont également funeste 
à la plante. On sème la graine fraIche de l'indigotier dans 
des trous de huit à dix centimètres de profondeur : elle lève 
art bout de quelques iour. Les jeunes plante exigent des 
soins assidus et des sarclages fréquemment répétés, jusqu'à 
ce qu'elles soient devenues assez puissantes pour ëtouffer 
elles-mëmes les mauvaises herbes. Les premières fleurs appa- 
raissent environ trois mois après les semailles; et c'est alois 
aussi que se fait la première coupe ; puis les coupes se suc- 
cèdent de deux mois en deux mois, et sont plus ou moto» 
nombreuses suivant la nature du sol et les accidents du 
climat. B£Lr£Ln-LrrÈv. 
INDIRECT (Imp6t). Voye-. I:IpT et Cosvwo,.. 
INDISCIÉTION. Ce mot signilie deux choses« très- 
di[ferentcs : sa première et sa plus simple acception désigne. 
une intempérance de langue : 
Son ivdiseréfion de sa perte fut cause. 
dit la Fontaine, en montrant la tortue, qui, pour parler, 
tombe et crève aux yeux de ses admirateurs. L'indiscrétion 
est encore plus répréhensible quand elle a pour objet la ré- 
vélation d'un secret confié. Elle a ainsi bien des fois com- 
promis les intérèts des peuples, des rois, des famiUes, des 
individus. On est incapable d'occuper une place éminente 
de diriger aucune entreprise, si l'on ne peut former un plan 
en silence, et taire ce que l'on sait des plans.de ses asso- 
ciC. Si l'indiscrëtion fit écbo,,er la coupable conjuration 
de Catilina, il est une foule de circonstances où elle a tralà 
les espérances les plus légitimes. L'liumanité, l'honnenr 



IzNDISCRÉTION -- 
l'intért personnel, sont également compromis par l'indis- 
crétion, défaut toujours dangereux, et qui dénote un esprit 
faible. Ovide menace de la colère des dieux celui qui parle 
Indiscrètement; Horace recommande de le fuir; Voltaire dit : 

.... De vos secrets soyez toujours le maltre; 
Qui dit celui d'autrui.doit passer pour un traltre. 

Bien que le caractère de l'indiscret soit peu dramatique, Il 
a fourni à Destouclies le sujet d'une comédie qui n'est 
pas sans mérite. 
On comprend aussi par idiscrétio le peu de tact et de 
mesure de certaines personnes, qui ne savent point mettre 
de bornes " l'aisance et h la familiarité dans leurs relations 
sociales. L'indiscret abuse de la politesse, de la honte, de 
de l'amitié qu'on lui témoigne : il se présente à toute heure 
chez les gens qu'il connalt, donne des rendez-vous dans 
leur maison, s'y invite fi dlner, emprunte des chevaux, des 
loges, de l'argent ; il demande aux femmes d'oi vient leur 
migraine et aux enfants pourquoi ils ont pleuré; interroge 
tln ambassadeur sur les dépêches qu'il a reçues de sa cour, 
et rappelle à un député le vote qui hli a valu l'emploi de son 
lils. S'aperçoit-il qu'on le redoute, il en dit tout haut la rai- 
son, et s'accuse d'avoir deviné le premier le mariage que 
le fils a manqué, ou la cause dq refroidissement (qui n'existe 
plus) entre quelques parents, ou l'origine d'un procès scan- 
daleux, qui désole la famille. Il y a une teinte de fatuité 
et dïlUlertinence dans l'indiscrétion qui la rend souvent 
Iiaissable fi l'égal de la méchanceté, dont elle produit quel- 
quefois les effets. Aussi un bon cœur suffit-il pour en cor- 
riger la jeunesse : ce défaut ne petit devenir uue Iiabitude 
que parmi les gens qui manquent d'esprit, ou dont la pro- 
micro cducation a été très-négligée. La rdserve est la qua- 
lité opposée à l'indiscrétinn : on parvient à l'acquérir en crai- 
gnant d'embarrasser, de gner, d'ennuyer les autres, et 
surtout en évitant de se mler de leurs affaires, et en ne 
les obligeant pas à prendre part à celles qui ne leur sont 
point personnelles. C  OE BIAIh 
INDISPOSITION. Dans le lansae médical, indis- 
postio est synonyme de maladie légère et de peu de 
durée; son vent mëme l'indisposition n'est pas une m a I a d i e, 
ce n'est qu'un trouble passager de l'Cat de santé, et ceux 
mme qui en sont atteints peuvent h peine le définir. La 
santé parfaite est un état de l'économie extrèmement rare, 
ou plutOt le jeu des organes chez l'homme est si compliqué, 
tant de causes internes et externes peuvent en déraner l'ac- 
tion, qu'il est plus vrai de dire que la santé parfaite n'existe 
pas plus pour l'homme que le parfait bonheur. La santé 
n'est qu'un état relatif pour chaque individu ; ce qui cons- 
tih,e la santé ch les uns serait chez les autres un état d'in- 
disposition ; au contraire, un homme se trouvera malade 
dans les sèmes circonstances où un autre se jugerait bien 
portant. Le sexe, l'éducation, la fortune, ont la plus grande 
influence sur cette appréciation différente de l'etat de santé. 
I suffit, pour s'en couvaincre, de comparer le nombre des 
indispositions d'une femme élevée dans l'opulence avec celles 
d'un homme grossier et adonné à de rudes travaux. On sait 
qtte Marie de Médicis se trouvait très-incommodée par les 
plis que formaient sous elle ses draps de batiste. La sensi- 
bilité ne,-'euse portée à l'excès est la cause la ph,s active dos 
in:qpositions : l'extrme susecptihilité qui en résulte agit 
de "deux manières : elle rend d'abord l'économie bien plus 
sensible  toutes les causes de tronble qui l'environnent; et 
s'il survient réellement quelque trouble, elle ne fait que 
l'acroitre et l'exagérer. Ainsi, tout ce.qui augmente la sen- 
.,ibilité nerveuse est une cause indirecte d'indisposition : la 
faiblesse, le tempérament lymphatique ou nerveux, la vie 
sédentaire, les travaux de l'esprit, etc. 
Si en génëral on dilfère sur l'idée que Fou doit attaclier 
au mot indisposition, il est un point cependant sur lequel 
on est partout d'accord dans le monde, c'est que l'indispo- 
xition doit .tre sans fièvre; dès que la livre se déclare, il 

INDIVISIBILITÉ 373 
n'y a plus seulement indi»position, mais maladie; cest une 
opinion vulgaire que si on n'est pas malade àe coeur (c'est- 
h-dire avec fiëvre), on n'est qu'indisposé. Mais les médecins- 
ne peuvent pas admettre cette distinction, qui trop souvent 
serait fausse; ils sont forcés de reconnattre que l'indisposi- 
tion et la maladie se confondent entre elles, sans qu'il soit 
possible de les séparer par une limite bien tranchée. 
N.-P. ANQUWI2N. 
INDIVIDU, INDIVIDUEL, INDIVIDUALITÊ (du latin 
individuum, chose qui ne petit tre divisée ). D'après on 
étymologie et le sens particulier qu'il présente, le mot in- 
dividuel désigne ce qui appartient à un objet d'une manière 
indivisible et inséparable, de telle sorte qu'on ne peut l'en 
détacher sans détruire sa nature en tant qu'être particulier; 
et l'on appelle rdividualit l'ensemble des caractères par 
lesquels un objet se distingue des autres objets du meme 
genre. L'individuel est par conséquent un des sujets de 
l'observation, et ne peut ètre reconnu que par elle; le 9ndra[ 
ait contraire ne peut se déterminer que par la comparaison 
et la réflexion. Aussi les arts ne doivent-ils pas seulement 
idaliser, mais encore individualiser, parce que leurs pro- 
d,tctions doivent dvenir des sujets d'observation. Ce par 
quoi l'idée de l'individuel se rapproche de la conception, 
c'est l'image générale ou le schema de l'imagination, c'est- 
à-dire le type de la réglllarité, d'après lequel se forment 
les caractères individuels d'une certaine classe de choses. 
Plus une classe de choses peut recevoir de caractères divers, 
plus Iïndividualité s'y développe richement; et elle se de- 
veloppe richement partout oi la vie intellectuelle est sus- 
ceptible de se perfectionner par elle-même. En conséquence, 
on se sert surtout du mot individu pour désigner un erre 
possédant une activité intellectlelle qui lui est propre, qui 
ne peut etre séparée de lui, et qui lui appartient exclusive- 
ment; et l'on désigne par le mot individualit l'ensemble 
des propriëtés intellectuelles qui distinguent cet tre de tous 
les ètres de son espèce. Il faut pourtant se garder de con. 
fondre Iïndividualit avec le c a r a c t è r e. 
Les causes d'une individualit ddtermine peuvent ètre 
extrmement diverses, comme les différences des indivi- 
dualités; en tous cas, elles ne consistent pas seulement dans 
les règles de la vie intellectuelle, mais, en grande partie, 
dans le rapport qu'aflectent entre eux l'élément intellectuet 
et l'«.lément physique. Au reste, la question du principe de 
l'individualité ( principium indiîidationts ) a, dans un 
sens beaucoup plus étendu, longtemps occupé la méta- 
physique, notamment parmi les olastiques, et a donnê 
lieu à des doctrines très-diverses. Elle est venue de ce que, 
d'après le système de Platon, les idées générales ont été 
pruclamées l'expression de la véritable nature des choses, et 
de ce qu'on s'est ensuite truuvé tort embarrassé pour expli- 
quer l'origine des caractères individuels, par lesquels se re- 
vèle effectivement toute réalité. 
INDIVIDUALITÉ (Certificat d'). Foçe-- Cr,TrlCr. 
INDIVIS. Voye'- lll)iVlSlO. 
INDIVISIBILITÉ (du latin in, non, et dwidere, 
diviser). Mathématiquement parlant, il n'y a pas de quan- 
tité qui ne soit divisible par une autre quantité quelconque : 
l'unitWelle-mme est divisible, poisqu'il est toujours pos- 
sible de la convertir en une quantité d'unités toutes égales 
entre elles et plus petites qu'elle : cela est évident pour 
les nombres ; néanmoins, on dit généra]ement qu'un nombre 
n'est pas divisible par un autre lorsqu'il ne le contient pas 
tln certain nombre de fois sans reste : 16, par exemple, 
n'est pas divisible par 5, puisqu'on a pour quotient 3  
En physique, on convient que, métaphysiquement par- 
lant, la matière est divisible à l'infini, mais tout porte h 
croire que les éléments des corps ne sauraient tre divisé» 
par aucune des causes qui existent dans la nature, par I 
raison que si les principe des corps étaient divisibles  
l'infini, nous verrions tous les jours des composés nouveau. 
ci diflcrents : or, c'est ce qui n'arrive pas. Voye-. DlVlSlnILIT 
( Ph ysiq e ). 



374 INDIVISIBLES 
|NDiISIBLES (Méthode des). « Quelques années 
aprës que Kepler eut donné sa méthode pour déterminer 
les volumes des cunoides, dit M. Chastes, une autre théorie 
célèbre de la mcme nature, et destinée aussi à évatuer les 
grandeurs géométriques par leurs léments, la Géomdrie 
des indivisibles de Cavalleri (publiée en 1635), xint 
enricllir la science, et marquer l'époque des grands progrès 
qu'elle à faits dans les temps modernes. Cette méthode, 
propre principalement à la détermination des aires, des vo- 
lumes, des centres de gravité des corps, et qui a supplé 
avec avantage pendant cinquante ans au calcul i ntégra I, 
n'était, comme l'a fait voir Cavalleri Ini-nme, qu'une 
application heureuse ou plutOt une transformation de lamé- 
tllode d' ex h a z« s t i o n. • La méthode des indiisibles con- 
si,tait à considérer les différentes grandeurs géométriqnes 
auxquelles elle s'appliquait, comme étant la somme d'un 
nombre infini de rrandeœes infiniment petites, mais de 
mëme nature, c'est-à-direqne le volumedu soue, par exem- 
ple, était la limite de la somme d'un infinitéde cylindres 
de hauteur infiniment petite et de bases d&:roissant suivant 
u_ne loi qui définisait le cne. « Cavalleri, dit Montucla, 
imagine le e¢mtinu comme composé d'un nombre infini de 
parties qui sont ses derniers ëléments, ou les derniers ter- 
mes de la décomposition qu'on peut en faire, en les sous- 
divisant continuellement en tranches parallèles entre elles. 
Ce sont ces derniers éléments qu'il appelle ndivisbles, et 
c'est dans le rapport suivant lequel ils croissent ou décrois- 
sent qu'il cherche la mesure des figures ou leur rapport entre 
elles. » Mais le langage de Cavalleri manque souvent d'exac- 
tilude. Aussi, mal comprise, sa méthode a été critiquée, 
comme s'il ett vouln faire d'une surface la somme d'une 
infinit# de lignes, et d'un volume la somme d'une infinité 
de surfaces : c'est du moins ainsi que l'a entendue l'Enc!/clo- 
pédie. Le passage que nous avons citë plus hmR rétablit la 
vérité des faits. Est-il nécessaire d'ajoter que la rigueur 
de la méthode des indivisibles a été demontrée par Pascal, 
qui l'appliqua  un grand nombre de questions? 
E. Ment.roux. 
IX])IVISION INDIVIS. On appelle indivsion l'Cut 
des biens indivis, c'est-à-dire possédés en commun par plu- 
sieurs personnes. C'est un grand principe de droit que nul 
ne peut tre contraint  rester dans l'indivision, d'o0 il suit 
que le partage peut toJljours tre provoqué, nonobstant 
prohibitions et conventions contraires. 
IX-Bi X-HUIT. l'oye: Fon,,'r. 
IX'DO-'CtllNE. Voyez I.UES om-'rsr, p. 350. 
I,X1)O-GEILkNIQUES (Langues), appelées sou- 
vent aussi langues indo-europennes. On désigne aujour- 
d'hui sous ce nom les langues d'un grand nombre de peu- 
pies appartenant tous  la race caucasienne, et qui se sont 
repandus dans une grande partie de l'A,sie, dans presque 
toute l'Europe, et de là dans d'autres parties de la ferre, 
en Amérique notamment ; langues qui, en raison de leur 
I,rimitive urique commune, offrent entre elles dt nombreu- 
:es analogies. Dans cet arbre généalogique des langues, or, 
a établi six subdivisions, comprenant cllacune les langues 
«lui,  l'instar des peuples qui les parlent, ont entre elles 
des rapports d'affinité plus étroits qu'avec d'autres. Deux 
,le ces subdivisions comprennent le groupe des langues asia- 
tiques ; et les quatre autres le groupe européen, des langues 
indu-germaniques. 
Le groupe asiatique on urique comprend : t o les langues 
indien ries, en tdte desqnelles se trouve placé le sans- 
crit, comme la plus ancienne non-seulement des langues 
pariCs dans l'lnde, mais encore de toutes les langues de la 
mème famille ; 2 ° les langues i r a n i e n n es, appelées aussi 
mddo-persiques ou ariques, dont la plus ancienne est le 
zend, qui a des rapports étroits avec le sanserit, et aux- 
quelles appartiennent, indépendamment de la langue per- 
sane actuelle, la langue alghane ou pousehtoue, la langue 
kourde t la langue ossète (parle dans les gorges du Cau- 
case), ainsi que la langue arménienne, qui est mëlée d'un 

grand nombre d'éléments étrangers, et non indoegermaniques. 
La langue géorgienne, tout en portant des traces visibles 
d'iniluenees irauleunes, est en dehm-s de la famille des lan. 
gues indo-gereaniques. On ne sauraitdirejusqu'à quel point 
la langue des anciens Assyriens faisait partie des langues 
ariques, ou tout au moins indu-germaniques. Les langues 
plusieurs peuples qui dans l'antiquité habitaieet l'Asie Mi- 
neure, tels que les Lyciens, les Cariens, les Lydiens, les 
Paphlagoniens, les Lycaoulens, les Cappadociens, parais- 
sent avoir eu entre elles de grandes aIfinités et forme- 
raient peut-étre une troisième subdivision du groupe azia- 
tique des langues indu-germaniques, si elles étaient l'objet 
d'investigations plus approfondies. 
Le groupe cm'opCn se compose de quatre subdivisions 
1 ° la famille des langues 9rco-itali9ues, divisée en deux 
rameaux: a, celui des langues grecques ou helléniques, au- 
quel appartenaient les langues des différentes nations de la 
Grèce, de l'Asie blineure et de l'ltalie { Ménapiens), designées 
sous le nom de pelasgiques , et qui atteignit dans la lan- 
gue g r e c q u e son développement le plus parfait; b, les lan- 
gues italiques, parmi lesquelles la langue latine  son 
tour devint la mère des langues r o m a n es, qui depuis se 
sont tant répandues. 2 ° Les lanes celles, &visées en 
deux rameaux principau, le kymri et le gaélique, refoulés 
tout à l'extrémité occidentale de l'Europe. 3 ° Les langues 
germaniques. 4 ° Les langues slaves, divisé.es en 
deux groupes : le prusso-lithuanien, et le slave propre- 
ment dit. 
On est redevable d'tlne étude approfondie de toute cette 
grande famille de langues aux travaux de Bopp, dans sa 
Grammaire cornpartM (Berlin, VI parties, 1832-1852 ). Des 
efforts plus récents, tentés pour rattacher cette famille de 
langues aux langues sémitique, ég'yptiennes, malaises et 
caucasiennes, ont trouví peu de partisans. 
INDOLENCE. Beaucoup de mots ont été souventem- 
ployës pour dissimuler ce qu'il y a de vicieux dans cer- 
taines choses, et l'on est ainsi parvenu ì affaiblir graduel- 
lement te sentiment de répulion que le moraliste commande 
contre ces choses-là. Ainsi la paresse, flttrie sous ce 
premier nom, et placée par la religion au nombre des sept 
péClléS capitaux, aéré ensuite appelée.fa i n g a n t i s e, expres- 
sion humiliante encore pour celui ì qui elle s'adresse, mais 
qui ne représente déjà plus aussi énergiquement le vice 
qu'elle est destinée ì peindre; lafainéantise est bient6t de- 
venue te dolcefar-niente des italiens, e pour n'avoir 
rien à emier  nos voisins, nous l'avons transformée en 
indolence. Quel est en effet celui qui oserait de nos jours 
se prononcer avec la mëme sévérité contre l'indolence que 
contre la paresse? Et cependant, au fond, la diffërence qui 
les distingue est bien iperceptibIe. L'indotence est ggravt 
par une négligence souvent empruntée; souvent elle n'est 
elle-même qu'une affeOation de bon ton, qu'un vernis de 
haute société. L'indolent semble se mouvoir comme par 
grâce; s'il soulève sa téte, c'est pniblement, et comme 
accablé sous le poids d'une fatigue qu'il n'a jamais éprou- 
vée ; s'il parle, ses mots se tralaeat les uns après les antres 
plut6t qu'ils ne se succèdent dans sa boudle paresseuse; 
son e fié m i n a t i o n est poussée an dernier derë. Qu'il se 
trouve transporté tout à cottp dans des circonstances criti- 
ques où l'activité est nécessaire, il su¢combera sous leur 
poids, peut-être mgme n'essaera-t-il point de s'y soustraire, 
car il lui faudrait, pour tentcr qttelque effort, rompre la 
monotonie et le calme de ses habitudes. Toute peasée de 
travail l'effraye, et cependant ilparle sans cesse des travaux 
qu'il entreprend et des veilles qu'ils tuioeateut. Ses intimes 
le traiteront de bon enfant, car jamais il ne les co,qrariera. 
Au demeurant, Pindolence n'est pas alApourvue d'athaits, et 
si elle n'a pas donné de grands hommes à la terre, elle 
peut-gtre produit des Iteureux. 
INDOSTAN ou INDOUSTAN. Vo/ ltnr.s onm..vtLr. 
INDOUS. Vove= Hr,eouset 
IN-DOUZE. Voge'- 



INDRE -- INDE-ET-LOIRE 
lDRE, rivière de France, affluent de la Loi r e. L'In- 
dre prend sa source dans le département de la C r eu s e, ar- 
rose ceux de l' I n dr e et d' I n d r e- e t - L o i r e, auxquels elle 
donneson nom, passe par Sainte-Sévère, La Chàtre, Cl,'teau- 
roux, Buzançais, Pailuau, Chàtillon-sur-lndre, Loches, Beau- 
lieu, Cormery, btontbazon et Azay-le-Rideau, et se jette enfin 
dans la Loire, au-dessous de Tours, aprës un cours de 220 
kilomètres, dont 70 navigables depuis Locbes. 
INDP, Jà (Département de l'}. L'un des deux formés 
du B e r r y, ce dépatoEement tire son nom de la rivière d" I n - 
d r e, qui le traverse du sud-est au nord-ouest. Il est borné 
au nord pu; ceux du Cher, de Loir-et-Cher et d'Indre-et- 
Loire; à l'est par celui du Cher; au sud par ceux de la 
Creuse, «lela Haute-Vienne et de la Vienne; h l'ouest par ceux 
de la Vienne et d'lndre-et-Loire. 
Di-isé en 4 arrondissements, 23 cantons et 247 commu- 
nes, il compte 271,938 habitants; il envoie deux députés 
au corps législatif. Il est compris dans la 19  division 
militait-{,, l'académie de Poitiers, le diocèse de Bourges 
et le ressort de la cour d'appel de la mème ville. Il pos- 
séde 3 coll ïéges, t école normale primaire, 6 pensions, 317 
ecoles primaires. 
Sa superficie est d'environ 701,661 hectares, dont 401,52 I 
en terres labourables ; 83,303 en prés ; 73,013 en landes, 
ptis, bruyères ; 57,319 en bois; 18,1t0 en vignes ; 10,123 
en élangs, mates, etc. ; 4,610 en vergers, pépinières, jardin; 
9,749 en cultures diverses ; 2,557 en propriétés battus ; 
18,839 en routes, rues, etc.; lO,t03 en domaines non pro- 
ductifs; 2,244 en rivières, lacs, ruisseaux; etc. Il pa)e 
?,020,283 tranes d'imp6t foncier. 
La surface du département de l'Indre a sa pente vers la 
Loire, c'est-ì-dire au nord; elle et généralement plate ; les 
hauteurs qui couvrent certaines parties sont peu remar- 
quabics; pas une ne dépasse 80 mètres. Il est arrosé par 
le Citer et parson affluent i'Arnon, par i'Indre, par la Creuse 
et ses af fluents la Claise et l'Anglin. Etre l'ladre et la Creuse 
s'étend un plateau appelé la lrenne, couvert d'une multi- 
tude d'étangs, dont les émanations délëtè'es influent singu- 
lièrement sur la popdation ensironuante. Ecepté ce can- 
ton désolé, le reste du département est fertile, et dohne plus 
de biWet d'orge que n'en demande la conzommation. On y 
récolte aussi du sarrasin, du chanvre, des pommes de terre; 
mais ses deux principales ressources consistent dans ses 
vignobles et ses troupe.aux de bttes ì laine. Les vins sont 
généralement médiocres ; les meilleurs sont ceux de Va- 
lençay, assez bons vins rouges communs, et ceux de Cba- 
bris, vins blancs agéables. 
On s'y livre à I'leve des moutonz, dont un assez grand 
nombre sont de race améliorée; on y élève aussi du gros 
bélail, de porcs, ainsi qu'une grande quantité de vo- 
lailles, surtout des oies et des dindons. On s'y occupe en 
outre d'agriculture ; mais il y a peu d'abeilles, et le gibier 
n'est pas très-commun. Les étangs de la Brenne donnent 
beaucoup de poisson excellent; on y pèche aussi des sang- 
SUcs. 
Le département del'Indre possède de nombreuses et riches 
mines de fer, dont l'exploitation forme l'une des branches 
les plus intportantes de son indu»trie manufacturiére. On y 
compte quatorze, haut.» foorneaux et nne cinquantaine de 
forges. On exploite près de Cleauroux de très-bonne 
pierre litfiog'aplaique, de la pierre meuliëre dans d'autres 
lieux, des pierres h fusil, des marbres, des pierres ì chaux, 
des grès, de la marne, de la terre à porcelaine, du gypse 
et de la tourbe. 
Les deux branches importantes de l'industrie manufac- 
turiëre consistent dans la fabrication des fers connus sons le 
nom defers du'Berry, et celle des d'aps et lainages, dont 
Chateauroux est le centre. Il faut encore citer, parmi les 
autres produits fabriqnés, les cuirs, les parchemins, la bon- 
neterie de coton et de laine, etc. 
Six rout« impériaies, six routes dêpartementale» et 
,505 chemins vicinaux sillonnent ce département que tra- 

verse, en outre, un embranchement du chemin de fer du 
centre. 
Parmi lesiocalités remarquables, nous citerons C h d t • a u- 
roux, chef-lieu du département; i s s o u d u n ; Le lane, 
chef-lien d'arrondissement, sur la Creuse, qui la divise 
en haute et basse ville : celle-ci, appelée aussi faubourg 
de Saint-Etienne, est un peu mieux btie que l'autre. 
On y compte 6,788 habitants, quelques filatures de laine, 
de lin et de chanvre, et une typogl"apllie. Elle était autre- 
fois fortifiée et défendue par ts'ois chteaux. La route de 
Saint-Surin au Blanc porte le nom de Lvoee de Cdsar; 
La C, haire, a.sez jolie ville b'tie sur l'Indre, avec 4,970 
habitants, à'irnportantes tanneries et une promenade a,ra- 
ble. Une seule tour, qui sert de prison, est tout ce qui 
reste de son ancien château, il est fait mention de La Ci;a- 
tredèsle milieu duonziëme siècle; luzançais, agréablement 
situé sur i'Indre, qui s'y divise en plusieurs bra, que 
l'on passe sur cinq ponts. On y compte 4,979 habitants. : 
Argenton , bti sur la Creuse, au pied et sur le sommet 
d'un rocher, était autrefois défendu par un ch,teau flan- 
qué de dix tours, et que Louis XIV fit démolir. On v 
rompre 5,332 habitants et plus.leurs fabriques de drap'; 
l'alan..a!/, avec 3,627 habitants et un magnifique château, 
Lti sur les plans de Philibert de tortue, qui fut la pro- 
priét« de Talleyrand, et où a résidé,de lS08 ì 1814, le 
roi d'Espagne Ferdinand VII.; Chdtillon-sur-in- 
d re ; L¢vroux, très-importante sous les Romalns, qui lui 
donnaient le nom de Gabalum. On y voit diverses ruines 
curieuses ; son vieux château est digne d'attention. On v 
compte 3,576 habitants. ; |'alun -, lelabre ; zYeuv./-Sain- 
Sépulcre, etc. 
INDI'E-E-LOIIE (Département d' ). Formé de l'an- 
cienne Touraine, il est borné au nord par les dcparte- 
ments de Loir-et-Cher et de la Sarthe; ì l'est par ceux 
de Loir-et-Cher et de i'ldre; au sud par ceux de l'ladre 
et de la Vienne; à l'ouest par ceux de Maine-et-Loire et de 
la Vienne. 
llest divisé en trois arrondissements, 25 cantons et 251 
communes, et compte 315,641 lmbitants. Il envoie trot» 
députs au corps législatif, est compris dans la dix-hui- 
tième division militaire, le diocèse de Tours, l'académie de 
Poitiers et le ressort de la cour d'appel d'Oriéans. Il pos- 
sède 1 lycée, 2 collégcs, s peusions, 2{;t écoles primairoe 
de garçons, t37 de fille». 
Sa superficie est de 611,369 hectares, dont 33,910 
en terres iabourablcs; 79,641 en bois ; 62,979 en landes, 
pàtis, bruyères ; 35,004 en vigmes ; 3",$63 en prés ; ts,241 
en cultures diverses ; 4,416 en vergers, pépinières jardins ; 
2,950 en propriétés bties; 2,166 en étangs; 17,209 eu 
routes, mes ; 10,359 en domaines non productifs; 8,05 en 
rivières, lacs, ruisseaux. Il paye 1,617,095 francs d'imp0t 
loncier. 
Le département d'lndre-et-Loire est montueux au midi, 
mais plat ou onduleux dans le reste. Au milieu coule le 
large courant de la L o i r e, oh viennent se rendre le Cher, 
l'ladre et la Vienne, ses principales rivières. La Creu»e 
baigne seulement sa frontiëre méridionale; au nord, 
quelques petites rivières tributaires de la Loire et du 
Loir. Le sol varie beaucoup. Les parties centrales et les 
ri:csde la Loire surtout, particulièrement favorisCs à 
cet égard, déploient aux yeux tous le» dons d'une nature 
prodigue, et méritent à juste titre le nom de jardin de la 
France, qui leur a été donné. Contrée riante et fertile, 
elle réunit ì la végétation la plus brillante le climat le plus 
tempéré et le plus agrêable. Mais au delà, les landes in- 
cuites et les bruyères attristent trop souent la vue. Il 
et vrai que le cultivateur du midi tro,ve une ressource 
inépuisable dans iesfalu us, qui lui offrent un aussi bon 
amendement que la marne:ce sont des coquiiles'petri- 
ffCs en dépts immenses, qui couvrent, entre Loches et 
Sainte-Iaure, un espace de 35 à 40 kilomètres carrés. 
La vigne forme la principal richesse du département 



7« INDIE-ET-LOIIE 
d'lndre-et-Loire. Les vignobles couvrent près du seizième 
de sa surface, et donnent annuellement environ 830,000 
bectolitres de vins ronges et blancs assez estimés. Les meil- 
leurs viennent des coteaux de la Luire, et surtout des 
territoires de Vouvray, Bourgueil, Saint-Georges, Lan- 
-geais, Joué, Blèré, etc. Ses antres productions consistent 
en blé, seigle, millet, orge, légumes, et en fruits, lin et 
citanvre. Les belles campagnes du centre donnent surtout 
une incroyable quantité d'amandes, de poires, de prunes, 
d'oh proviennent les poires tapées et tes fameux p r u- 
n e a u x de Tou. On 3" voit crottreen abondance des piaules 
potagères de toutes espèces, la réglisse, l'anis, la corian- 
dru, le fenouil, l'angélique, le sénegrin; et la vente des 
fruits cuits y est considérable. 
Quoique propres à toutes espèces de produits, ses terres 
présentent cependant quelque différence dans leurs grandes 
«'uitures. C'est ainsi que la Champagne-Tonrangelle (entre 
Tours et l'Indre) est surtout cultivée en blè, et que le 
'on, qui s'étend au delà de l'Indre, vers Chinon, ne pré- 
sente pour ainsi dire qu'un immense verger. La récolte des 
,éréaies est au reste à peine suffisante pour la consomma- 
tion. 
Les forêts servent de refuge à des sangliers, des chevreuils 
et des cerfs ; elles s'étendent principalement des deux cotés 
de la Luire, et c'est I que l'on remarque celles d'Amboise 
et de Chinon, en arriëre desqelles on trouve celle de Lo- 
ches, Le hêtre, le chne, le frêne, l'orme, le châtaignier, en 
sont les principales essences. 
La culture du m0rier est bien déchue depuis la déca- 
dence des fabriques de soieries ; mais celle du noyer est 
très-suivie partout, à cause de l'huile qu'il fournit ; le peu- 
plier orne la plupart des vallées. On livre annuellement plus 
de fou,000 kilogrammes de bois de bourdaine, qui fournit 
le meilleur charbon pour la poudre. 
Malgrë l'Cendue des prairies etdes p'turages qui couvrent 
les bords des principales rivières, on ne nourrit guère 
qu'un quart des boeufs, des veaux et des montons néces- 
saires à la subsistance de la population ou aux besoins de 
l'agriculture et des transports, car on ne se sert que très- 
l',eu de chevaux. Les porcs y sont très-nombreux, et la 
volaille abondante. L'éducation des abeilles et des vers 
soie est assez importante. 
Il y existe des mines de fer, des carrières de pierres meu- 
IlCes et de pierres lithographiques, de sources reinCaies, 
et, près du Cher, de nombreux blocs de silex, qui fournis- 
sent une grande quantité de pierres à fusil. Les bords de 
la Luire sont formés d'un calcaire tendre appelé tuffeau, 
qui se réduit presque entièrement en salpêtre. Entre Ara- 
boise et Tours, les habitants y ont creusé la plupart de 
leurs habitations. 
L'industrie manufacturière de ce département a princi- 
palement pour objet la fabrication de toiles communes et 
de ménage, de cuirs, de draps et autres étoffes de laine; 
le travail du fer et de l'acier, la production du sucre de 
betterave. Il y aanssi des papeteries, des filatures de laine, 
et l'on exporte une grande quantité de conserves de porc, 
connues sous le nom de rillettes de Tours. 
Le départementest sillonné par de nombreuses voies de 
communications, trois grandes rivières, le canal de jonction 
de la Luire au Cher, les chemins «le ter d'Orléaus à Tours, 
de Tours à ffantes, de Tours à Bordeaux, six routes iml- 
riales, dix-sept routes départementales et 9,565 chemins 
vicinaux. 
An nombre des villes et des localités remarquables, nous 
citerons Ton fs, chef-lieu du département; C h i n o n ; Lo- 
ches; A reboise; Bourgueil, dans une ,ailée fertile sur 
le D.»it, avec 3,405 habitants; EIdrd, sur la rive gauche 
du Cher, avec 3,676 Itabitants; près de cette petite ville 
lève le château de Chcnonceau;; Langcais ' sur la 
Luire, où eilea un port. C'est une station du chemin de fer 
de Togrs à Nantes; elle est dominée par un vaste chfiteau 
gothique flanqué de-tours, d'une belle conservation; on 

compte 3,307 habitants; Rchelieu, ancien village, dont le 
fameux cardinal lit une ville régulièrement ltie, dont les mes 
larges et tirëes au cordeau aboutissent à une belle place. On 
y voit un vaste et magnifique château, avec un parc im- 
mense, bati par l'ilinstre ministre. On y compte 2,649 ha- 
bitants; Clteau-llegnauà ou Chdteau-ltenault, petite 
et ancienne ville, avec 3,70 habitants. Son nom romain 
était Carmnetum. Elle s'élève sut" la Brenne, et ressem- 
ble à nu grand village. Luyne, sur nue colline, dont le 
pied estbaigné par la Loire; ou y compte 2,|27 habitants. 
L'lle-Bouchard, sur la Vienne, avec 1,716 habitants, etc. 
O. Mxc-Cn. 
INDUCTION (en latin inductio, fait de inducere, 
conduire, amener). On appelle iàuction, e logique, le 
procédé par lequel on arrive à inférer une chose d'une an- 
tre, à recounaitre, à établir qu une chose doit ou peut être, 
puisqu'une ou plusieurs autres sont ou pourraient être. Tan- 
dis que les conclusions rigoureuses, les syiiogismes, 
avec leur sens limité s'appliquant du général au particu- 
lier qui en dëpeod, nous donnent toujours une certitude 
logique, les conclusinnspar induction,lorsque celle-ci n'est 
point complète, ne produisent que de la vraisemblance. 
Une inductio est donc complète ou incomplète, suivant 
que l'on prouve que toute la série des points principaux 
d'oh la conclusion doit se tirer a été épuisée et qu'at:cun 
cas n'a été omis, ou qu'une conséquence n'est que i'elfet 
produit par l'application aux points principaux des obser- 
vations résuitant de l'examen d'un nombre de points rela- 
lits. La géométrie se sert de l'induction complète pour des 
cas isoiés  les sciences naturelles sont obligées de se con- 
tenter ordinairement d'inàuctions incomplètes. 
En termes de scolastique, un fait qui contredit une con- 
clnsion inductoire, admise comme règle génerale, est ap- 
pelWune inMance; ainsi la baleine serait une instance 
contre l'assertion qu'il n'existe point de mammifères dans 
la mer. 
Les sciences qui reposent principalement sur l'induction 
prennent le nom d'nductives. 
INDULGENCE (Morale). Quel mot a plussouent 
frappé nos oreilles'/combien de fois n'aons-nou» pas en- 
tendu invoquer cette bonté aimable qui encourvge, con»oie 
et pardonne, sans prononcer le motp a r d o , souvent humi- 
liant et encore blessant plus souvent? A tous les àges, 
dans toutes les professions, dans toutes les positions, 
l'homme a besoin de réclamer l'indulgence de ses sembla- 
bles. A toutes les phases de la vie, ce secours nous est 
d'une égale consolation. Peut Cre aussi ctmx en qui nous 
le rencontrons Crouvent-ils à nous le donner la moeme 
satisfaction que nous éprouvons à le recevoir; peut-ètre 
pensent-ils qu'assez de dégoûts, assez de douleurs, vien- 
riront nous assaillir dans cette longue suite de jours qu'on 
a appelée existence, sans qu'une sëvérité excessive viut 
encore ajouter à leur amertume. 
En politique, dans des circonstances calmes, alors qCau- 
rune atteinte vinlente ne saurait ébranler un gouvernement, 
alors que l'existence de la société n'est point compromise 
par quelques tentatives isolëes, l'indulgence des forts doit 
laire oublier les coups que leur ont portés les faibles. 
L'inddgence est nu excellent mo)'en de rallier le. esprits 
les plus opposés; souvent rarae le machiavélisme l'a nti- 
lement exploitée, et il faut lui savoir gré de cette hypo- 
crisie. Mais si la société tout entière était mise en ques- 
tion, Iïndulgnce serait faiblesse de la part du pouvoir, et 
la punition qu'il n'infligerait point deviendrait un crime 
dont il serait comptable aux yeux-de tous. 
INDULGENCE (Thdologie)', rémission de la peine 
temporelle due au p é c h ë, et qui exempte du p u r g a t oi r e. 
Quand le pécheur a etenu de Dieu, par le sacrement de 
la pénitence, la rémission de la peine ëternelle, il lui 
reslc à satisfaire encore la justice divine par une peine tem- 
porelle. Jësus-Christ ayant donné aux pasteurs de son Egli 
le pouvoir de remettre les péciés, c'est à eux aus.i d'ira- 



INDULGENCE  INDUS 
poser aux pécheurs des pénitences proportionnées à lents 
fautes, et de diminuer ou d'abréger ces peines : consé- 
quemment, c'est anx papes et aux évoques qu'il appartient 
d'accorder des indlgences. On en voit un exemple dans 
saint Paul ( ! Cor., v), envers un incestuenx qu'il craint de 
pousser au desespoir ou / l'apostasie. As troisiëme siècle, 
les montanistes, au quatrième les novatiens, s'Cevèrent 
contre les indulgences. Pour faire cesser leurs clamenrs, 
on poussa fort loin la sévéritd des lois ecclésiastiques. Mais 
les pasleurs revinrent bient6t/ l'indulgence, et ils y étaient 
autorisés par les canons des conciles de NieC, d'Ancyre et 
de Lérida. Saint Basile et saint Chrysostome eux-mmes 
approuvèrent haulement celle conduile. 
Pendant les persécutions, des martyrs, des confesseurs 
retenus dans les chalnes ou condamnés aux mines réclamè- 
rent souvent cette indulgence pour des pénitents, et elle ne 
leur fdt pas refusée. Les mérites des martyrs étaient ainsi 
appliqués aux pénitents pour lesquels ils s'intéressaient. 
Plusicurs en abnsërent, dit saint Cyprien, mais l'Église ne 
renonça pas pour cela/ son indulgence. Saint Augustin, 
( Ad Macedon., epist. 5 ), nous apprend que comme les 
évoques intercédaient souvent auprës des magistrats pour 
les coupables, de mème les magistrats intercédaient auprès 
des éveques pour les pécheurs, correspondance mutuelle 
de charité, bien digne du christianisme. Aprës la conversion 
des emperenrs et la cessation du martyre, l'Église appliqua 
les mérites de Jésus-Christ, de la sainte Vierge et des 
à l'e:piation des péchés de ses enfants, et l'usage des in- 
dulgences conlinua. 
Bingbam blame la conduite de l"Église : t ° Dans l'ori- 
gine, dit-il, il s'.agissait seulement de remettre la pene tem- 
porelle, et non celle de l'autre vie ; 2 ° on ne songeait pas 
à faire aux morts l'application des indulgences ; 3 ° colin, 
le papes, sans aucun droit, se sont réserv« la dispensalion 
exclusive des indulgences. Mais  cela l'Église catholique 
répond : L'ëtablisssement de la peine temporelle pro,ve la 
croyance de l'Église qu'après la rémission du pécbé et de 
la peine éternelle, le pécheur est pourtant astreint / une 
peine temporelle. S'il ne s'en acquitte pas en ce monde, 
il lui faut y satisfaire dans l'autre. Il est donc impossible 
de l'en exempter pour ce monde, sans que cette indul- 
gence lui tienne aussi lieu pour l'aulre vie. Dès que le 
pécbeur, redevable / la justice divine, est sujet/ souffrir 
dans l'autre vie, et qu'il peut dtre soulagé par les prières 
de l"Église, pourquoi l'applicalion des mérites surabondants 
de Jésus-Christ et des saints ne lui servirait-elle pas? N'est- 
ce pas une conséquence naturelle de l'usage de prier pour 
les morts? Les papes n'ont point enlevé aux évdques le 
pouvoir d'accorder des indulgences, mais l'Êglise a réservé 
aux papes le dt'oit d'accorder des /ndu./gences plëniizres 
povr toule l'Église, parce qu'eux seuls ont juridiction sur 
toute l'Êglise. 
Il est vrai qu'il y a eu des abus, et des abus graves, 
et plus dans les derniers siëcles que dans les premiers. 
,0 Pendant longteps, dit l'abbé Fleu, la multitude des 
indulgences et la facilité de les gagner devint un obstacle 
au zèle des confesseurs. Il était difficile de persuader des 
jeOnes et des disciplines / un pécheur qui pouvait les ra- 
cheter par une légère aum6ne. Le concile de Clermont 
tenu en 1095, accorda une indulgence pléniëre à ceux qui 
prendraient les armes pour le recouvrement de la Terre 
Sainte. Celle indulgence tenait lieu de solde aux croisés. » 
Plus tard, ces faveurs spirituelles furent distribuées à tous 
les guerriers qui se mirent en campagne pour poursuivre 
ceux que les papes déclaraient hërétiques. Pendant le long 
schisme qui s'ëleva sous Urbain VI, les pontifes rivaux accor- 
dèrent des indulgences les uns contre les autres. Alexan- 
dre VI s'en servit avec succès pour payer l'armée qu'il des- 
tinait à la conqnëte de la Bomagne. Jules II avait désiré 
que lome eft un temple qui f0t le plus beau de l'univers. 
Pour accomplir ce" grand projet, il prétexta une guerre 
contre les Turcs, ct fit publier dans toute la chroetienle 

I$1CT. DE LA CON,En.o -- T. 

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de indlçencs plénières en faveur de ceux qui y pren- 
tiraient part. On chargea les dominicah de les prêcher e 
Allemagnc. Les augostins, longtemps possesseurs de cette 
îonclion, en furent, dit-on, jaloux, et ce petit intért de 
moines, dans un coin de la Saxe, aurait susoité les hérésies 
de Luther et de Calvin. Rien de plus sage cependant 
que le décret du concile de Trente au sujet des i ndlgence 
( sess. 25 ). On y lit : « Quant aux abus qui s'y sont glissés, 
le concile ordonne d'en écarter d'abord foule espèce de 
gain sordide; il charge les évèques de noter tous les abus 
qu'ils tronveraient dans leur diocses, d'en îaire le rap- 
port au concile provincial, et ensuite au souverain pon- 
tife, etc. » 
On appelle indulgence de quarante jours la rémission 
d'une peine équivalant h la pémtence de quarante jours 
prescrite par Ici anciens canins, et indulgence piCère la 
rémission de toutes les peines prescrites par ces mmes 
canons ; mais ce n'est pas l'exemption de toute pénitence._ 
INDULGENTS nom d'un parli sous la première ré- 
volulion. Voje. Connewas (Club des). 
INDULT (du latin idultum, privilége, fait d'in- 
dultus, grfice, pardon). C'est ainsi qu'on nomme une bulle- 
par laquelle le souverain pontife accordait aux princes sé- 
culicrs, cardinaux, évoques, archevèques et adres prélats, 
le privilëge de nommer, conlérer et présenter à cerlains 
bénélices, ou par laquelle il donnait  quelque commu- 
nauté, à quelque corps, on mème h nne seule personne, 
le droit de faire ou d'obtenir une chose ou plusieurs conlre • 
les principes du droit commun. Le nom de pontificiaria 
9ratia, qu'elle porlait, fait assez entendre que Iïndult 
était une sorte de transport des grâces expectatives que le 
successeur de saint Pierre avait le droit d'accorder. Ainsi, 
l'on entendait par indult des rois le privilége que le pape 
leur donnait de nommer aux bénéfices consistoriaux, soit 
par un trait, par un concordat, soit par une gràce parli. 
culière. On appelait aussi indult du parlement le privilége 
que le monarque accordait au chancelier de France, aux 
présidents, conseillers, greffiers, maitres des requêtes, 
greffiers et secrétaires du parlement, de reqnérir soit po:r 
eux-mmes, soit pour un autre, le premier [énéfice vacanl, 
tant régulier que séculier, sur un évèché, une abbaye, pos- 
sédés par lout autre prélat qu'un cardinal : c'était par la 
grfice d pape que le souverain avait cette faculté denommer 
h tel collaleur un conseiller ou officier du parlement, envers 
lequel le collateur était tenu. 
Induit a eté employé dans le commerce pour d,:signer 
les droils levés sur les navires venant d'Amérique par le roi 
d'Espagne. 
INDUS ou SIND, et encore Sindhou, le secon,l des 
fleuves de l'Inde en deçà du Gange, dont la longueur, y 
compris ses déto«rs, est d'environ 350 rnyriamètres, et 
dont on évalue le bassin , 13,650 myriamètres carrés. Il 
jaillit dans le Petit-Thibet, au pied du mont Kailasa, d. 
deux sources principales, le Ladak et le Sha,jouk, qui- 
en se réunissant au nord-ouest de la ville de Ladak ou Leh, 
prennent désormais le nom de Sindhou. Ce fleuve traverse 
alors cette conlrée dans une vallée formée par le versant 
septentrional de l'Himalaya et par le plateau du Thibet 
qui lui fait face, dans la direction du sud-est au nord-ouest, 
]«squ'au moment où il dècrit une courbe an nord du Kashmir 
dans la direction du sud-ouest. Aprës s'ètre frayé passage 
h Iravers l'Himalaya, en cet endroit mme où il touche un 
instant h l'Hindoukousb, il continue h couler dans la m/line 
direction sud-ouest, en séparant le territoire des Sikbs du 
Pendjab d'Afghanislan ; puis il gagne, à travers Ic Sind, le 
golfe d'Arabie, oh il se décbarge en formant un plateau. 
Dans son parcours, il reçoit les eaux d'un grand nombre 
d'aflhents; les plus considérables sont le Kaboul, qui prend 
sa source dans le montagnes de l'Afglanistan, et le Pend.;ab, 
dan lequel viennent se jeter les cinq rivières du Pendjab. 
Les villes les plus inportanles qu'il baigne sont Ladak 
ou Leh, dans le Pelit-Thibet ; lskardo, dans le Baltistàn ; 
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forteresse d'Attok, à l'embouchure d Kaboul, dans le 
ys des Sikhs; celle de Ealtkar, près de Bovi ; tlyder- 
,ad, au commencement du Delta, et Tatta ou Tatha, 
as le Sind. Les sanglautes batailles livrées dans ces dur- 
:res années par les troupes britanniques à un ennemi 
arageux et bien discipliné, les brillantes victoires qui en 
• eut le résultat, ont augmenté l'intêret historique tout 
rliculier qu'avait pour les Européens l'Indus avec ses 
Ters affluents, que firent connaltre pour la première fois 
campagnes d'Alexandre le Grand. Aujourd'lmi ce 
uve, a,ec les courtCs qui de ses rives s'étendent jusqu'aux 
mtagnes séparant l'Indu de la Perse, forme la frontière 
eidentale des possessions indu-britanniques. 
L'Indus n'est point favorable à la navigation intërieure, 
h t0 myriamètres encore anodessous de l'endroit où il 
andonne les montagnes, on ne saurait sans péril le des- 
ndre en bateau. On ne peut  naviguer qu'avec des 
teanx h vapeur plans. Mais par suite de la fertilité du 
'ndiab et de la grande proximité où son bassin se trouve 
celui du Gange au pied de la montagne, il n'eu demeure 
s moins une précieuse acquisition pour l'Anleterre, at- 
du qu'il domine ainsi les principales routes entre la Perse 
l'Indu (l'une par Kaboul et Peschaver, et l'autre par 
brai et Kandahar). Le delta de l'Indus, qui se compose 
,m grand nombre de bras et était jadis célïbre par sa 
'ilisation, n'est plus depuis longternps qu'un vaste d.sert. 
sis telle  est la fertilite du sol, qu'il sera possible de hfi 
mire un jour son ancienne prospérité, maintenant surtou! 
e les circonstances politiques ont complétement changé. 
a 10 myriamètres de long, et offre à la mer un dëve- 
ppement de c6les de 17 myriamètres. 11 n'y a guère que 
»is ou quatre de ses nombreuses embonchures qui soient 
tvigables, et une seule d'entre elles est susceptible de 
cevoir des navires de 50 tonncaux. La marée y remonte 
,ec une rapidité extrbme jusqu'à une distance de plus de 
 myriamètres, et la quantité de vase qu'elle y apporte est 
mense. Les inondations annuelles de l'Indus commencent 
'ec la fonte des neiges de i'ilimalaya, xers la fin d'a,ril, 
rient en juillet à leur loint d?clévation extrême, et se 
freinent en ptemhre. 
IDUSTRIE. L'industrie est l'action des forces phi- 
tues et murales de l'homme appliqnées ì la production. 
lusieurs auteurs se contentent de la désigner par le nom 
; trav ai 1, quoiqu'elle embrasse des conceptions et des 
mbinaisons pour lesquelles l'idée de traaif semble trop 
streinte. On la nomme industrie agricole quand elle 
pplique principalement à provoquer l'action productive 
: la nature, ou h recueillir ses produits; ndustrie 
'oEacturère quand c'est en trans[ormant les choses qu'elle 
ur crée de la valeur; industrie commerciale quand elle 
af crée de la valeur en les mettant à portée du censure- 
sieur. Toutes les industries se résol,ent à prendre une 
ose dan un état, et à la rendre dans un autre état, où elle 
plus de valeur, en considerant le lieu où setrouve la chose 
,mme faisant partie de son _tat, de ses propriétés. Dans 
u les cas, l'industrie ne peut s'exercer sans un capi- 
 l, car elle ne peut s'exercer à moins que ce ne soit sur 
elque chose et par le moyen de quelque clloe. Il y a une 
ustrie qui n'est productive que deproduits iramatrels, 
; produits nécessairement consormés en méme temps que 
"oduits. Telle est celle d'un médecin, d'un ionctionnaire 
iblic, d'un acteur. L'action des facultés humaines, ou 
ndustrie, quel que soit l'objet auquel elle s'applique, sup- 
i«e trois opérations : t ° la connaissance des lois de la 
ture : c'est le fruit des occupations du savmt; 2 ° l'ap- 
icatiou de cette cnnnaissance, dans le but de créer de 
,tilit¢ dans une ci,ose : c'est l'ind,strie de l'entrepre. 
eur; 3 ° l'exécution m la rnain-d'n:uvre : c'est le travail 
 l'ouvrier. 
Les nslruments de l'industrie sont ou non des pro- 
iètës. Les in-tr,,luents approprié. .sont ou des instruments 
flure!s, comme les terres cnllivables, les mine.% les Collrs 

INDUS  1NDUS' 
d'eau, etc., qui sont devenus des propriétés; ou bien ce 
sont des capitaux. Les instruments nun appropriés sont des 
matières ou des forces résu[tant des lois de la nature, 
qui se trun-ent tre  la disposition de quiconque eut s'en 
servir, et qui entre les mains de l'industrie concourent 
la [ormation des produits. Tels sont la tuer, qui porte nos na- 
vires, le vent, qui les pousse, l'élasticité de l'air, la chaleur du 
soleil, beaucoup de lois du monde physique, parmi lesquelles 
on peut citer la gravitation, qui fait descendre les poids 
d'une horloge ; la chaleur, qui se dégage par la combus- 
tion; magnétisme, qui dirige l'aiguille d'une boussc4e, etc. 
Les instruments appropriés ne livrent pas graluitement 
leurs concours; il faut le payer h leurs propriétaires sous le 
nom de loyer des terres, in t ér ê t s des capitaux. Les in. 
struments non appropries, au contraire, livrant gratuite- 
ment leur concours, la portion de production qui leur est 
due est un profit pour les nations, profit qui tourne , t'a- 
vantage des producteurs Iorsqu'ils réussisnt à faire payer 
une utilité qui ne leur co0te rien, et à l'avantage des 
consommateurs lorsque la concurrence oblige les produc- 
teurs ì ne pas faire payer cette utilité. Il résulte de là que 
les plus grands progrës de l'industrie consistent dans l'art 
d'employer les instruments naturels dont il ne faut pas 
payer le concours. Si les instruments naturels appropriés 
comme les terres, n'ëtaient pas devenus des propriétés, on 
serait renié de croire que les produits seraient moins chers, 
puisqu'on n'aurait pas besoin de paex le ioer de ces 
instruments à leur propriétaire. On se tompe. Personne 
ne voudrait faire les avances nécessaires pour les mettre 
en valeur, dans la crainte «le ne pas rentrer dans ses avances; 
ils ne concourraient h aucun produit, et les produits 
lesquels leur concours est nécessaire n'existeralent pas, ce 
qui équivaudrait à une cherté infinie, car rien n'est plus 
cher que ce qle l'on ne peut avoir pour aucun prix. 
Les facultœes industrielles sont des instruments appro- 
priés qui sont en partie donnés gratuitement par la nature 
comme la force et les talents naturels, et qui sont en partie 
un capital, comme la force et les talents acquis. 
J.-B. 
Depuis quelque temps, l'acception donnée au mot indts- 
trie s'est considérahlement agrandie. Il désignait primiti- 
ruinent, d'une manière vague, un labeur quelconque dirigé 
par l'intelligence. Il exprime aujourd'hui l'ensemble des 
ar« ntiles éclairés par les connaissances humaines. Suivant 
l'objet de ces arts, on distingue : 1 ° l'industrie agricole; 
2 ° l'industrie manufacturière; 3 ° l'industrie commer- 
çante. 
Il n'existe qu'un très-petit nombre de peuples chea les- 
quels ces trois branches de l'industrie soien à la lois 
prospères et très-perfe¢tionnées. Sans doute le prrès de 
chacune ajoute au progrès des deux autres, mis leur aaoe 
cernent est inégal, et diffère sui,aut le caractère, les habi- 
tudes et les penclmnts des populations. Le plus souvent, la 
nature des contrées détermine la prépondérance de telle 
o telle branche d'ind,strie. Les pays insu.aires, les conti- 
nents bordés de vastes ctes et sillonn,s par de beaux 
fleuves, s'adonnent surtout au commerce; les ltats à 
terroir fertile préfèrent I'a g r i c u I t u r e; enfin, les pays 
défavorisés de la nature cherchent dans l'imtustrie manu- 
facturière des moyens d'existence et de richesse. 
Le génie du Iëgislateur et l'essence des gouvernements 
peuvent beancotp pour déterminer la prépondérance d'une 
branche d'industrie sur les autres. Ainsi, lancienne Bore e 
honorait, favorisait l'agriculture, dédaignait les arts mauu- 
facturiers et méprisait te commerce. A Carthage, au 
contraire, les lois étaient toutes en faveur du commerce. 
DansAthènes, les lois favorisaient beaucoup le négoce et 
les travaux des ateliers, tandis qu'un lerritoiri aride 
n'offrait à |'agrEuiture que des misérables ressources. 
Chez les peuples modernes, i'A u t r i c h • et la C h i n e en- 
couragent les progr de Fagricutture, et ferment en grande 
partie leurs fronlières au commerce de peuple à penpte. La 



INDUSTRIE 379 
Hollande et les villes hanséafiques ont, au confraire, houvé  quel se nt brisés les efforts du plus grand, du pl puis- 
dans le commerce le iondement de leur force et de leur , saut genie qu'aient produit les temps modernes. 
opulence, comme faisaient au moyen àge les républiques La grandeur méme des Érats-Unis et leurs 

d'Italie. L'industrie manulacturière a fleuri dans les Pays- 
Bas de concert avec l'agriculture. Depuis quelques annces 
la P r u s se s'efforce d'encourager toutes les branches d'in- 
dustrie. La forme irrégulière de ses Ètats lui faisait une obli. 
galion impérieuse de chercher, par une confédération in- 
dustrielle, à se procurer une enceinte possible de douanes 
protectrices ; toute l'Allemagne centrale est entrée dans 
cetfe confédération qui caractérise les temps modernes. 
Il en résultera des conséquences, non-seulement commer- 
ciales, mais politiques, d'une baufe gravRé; conséquence 
frop peu prévues par les grandes natious circonvoisines. 
Des confédérations analogues pourraient se former enlre 
la France, la Ielgique et la Suisse; entre les États d'Italie 
et l'Aufricbe, si l'Autriche daignait devenir commerçante, etc. 
Une puissance qui fait de grands pas dans la carrière 
de lïndus;.rie est l'immense empire de R ussie. Les con- 
quëtes opérées au midi depuis le règne de Cafberine, les 
populations acerues sur les bords de la mer Noire, le dé- 
bouché du Bosphore ouvert aux navires russes par la 
force inspirant la peur, la mer Caspienne conquise et fout 
autre pavillon militaire que celui de Russie interdit à ses 
eaux, voil/t des voies commerciales nouvelles qui jusqu'à 
ce jour n'ont excité qu'une envie impuissante de la part 
du premier peuple commerçanf de l'univers. C'est du peu- 
ple anglais que je veux /arler. Ces habitants d'une ile 
exiguë, qu'ils ont fertilisée avec un art admirable, ayant 
eu le bonheur de posséder les premiers une adndrable 
forme de gouvernemenf, qui protégeait les biens et les 
personnes, ont perfectionné de front l'agriculture, le com- 
nlerce et les manufacfures. Les autres nations ont tour 
tour fait des conquêtes par amour de vaine gloire, par 
esprif de prosélyfisme, de haine ou de vengeance ; les 
glais ont conquis pour mieux commercer, pour mieux 
vendre les produits de leur industrie, toujours croissanfe. 
Ils sont maïtres aujourd'hui d'un immense territoire et de 
posles admirablemeut choisis dans toufes les parties du 
monde. En Europe, ils possèdent G i br a Ita r, M a I t e et 
les lies lori iennes, aux débouchés de la llediterranée, 
«le la mer d'Épte et de l'Adriatique :  possessions, 
en y joignant Jersey, Goernesey, Alderney, sur les cétes 
de France, Heligoland dans le Nord, sont larfaioEment 
situées pour lavoriser le commerce illicite ou licite avec 
les Eats du Nord, la France, l'Espagne et l'ltalie. En 
Afrique, l'Angleterre possède, outre quelques points utiles 
sur la cte ocddenlale la magnifique colonie du cap de 
Bonne-Espérance, conquise sur des amis, les Hol- 
landais, et ! aurice, la belle et Iéconde Ile de France. 
En Amerique, elle possède le pas du Canada, qui, joint 
aux possessions duNew-Brunswick, de Newfoundland, elc., 
présente à la navigation britannique d'admirables ressour- 
ces. Sous l'équateur sont les Anh'lles britanniques, qui 
naguère olfraient une somme d'importations et d'expor- 
tations égale à 800 millions par année, mais dont la for- 
tune est puissamment menacée par l'émancipation des non's, 
opérée avec la precipitatin la plus imprudenle, et proba- 
blement la plus tuneste pour une race d'hommes encore 
trop peu préparée à la liberté. Dans PAsie, l'Angleerre 
possède la plus étonnante de ses couqnètes indttrelles : 
80 millions de sujets, conquis ou dominés par une simple 
compagnie de marchands, qui fait et défait des rois. Un 
nouveau peuple britannique se développe sur les cétes de 
la Nouvelle-Guinée, dans cette cinquième et plus récem- 
ment déconverte de toutes les parties du monde. C'est 
parce que l'Angleterre a fondé sa puissance sur les quatre 
bases de la force militaire, de la foce navale, de la force 
commerciale intérieure, et de la force commerciale exté- 
fleure, qu'au lieu de llir, comme Atl:ènes et Carthage, 
comme la llollande et le Potugal, un colosse aux leds 
d'ar'le, elle a jeté les fondements d'un empire devant le- 

industriels sont l'oeuw'e de l'Anglelerre : c'est le sang bri- 
tannique qui donnela vie " cette puissance récente encore, 
et deja colossale : elle fait partie des œuvres indtstrietles 
de la Grande-Bretagne, et c'est son plus bel ouvrage. 
La France, avec son territoire de 40,000 lieues carrées, 
avec son climat temperé, mais offrant aussi des localités qui 
diffèrent extrèmement, depuis les neiges perpetuelles des 
Alpes et des Pyrénées jusqu'aux climats brlants de la Corse 
et de la Provence; la France, sillonnee de superbes fleuves, le 
Rhin, le 1Méne, la Sa6ne, la Gironde, la Loire, la Seine, etc., 
baignée par deux mers et richement traversee de routes 
et de canaux, la France peut porter au plus haut degré de 
prospérité toutes les branches de son industrie. J'ai calcul6 
que les produits annuels de son agriculture surpassent 
5,000,000,000 fr. (voyez Forces lroducl Wes et commer- 
ciales de la France) ; ceux de ses ateliers et manufactures 
surpassent 2,000,000,000 If. ; le reste des valeurs annuelles 
est créé par le commerce tant intërieur qu'exterieur. Ce 
dernier surpasse 1,0o0,000,o00 ff., tant en importations 
qu'en exportations. Aucun autre peuple, excepté le peuple 
britannique, ne présente un plus grand commerce. C'est le 
fruit de deux siecles et demi d'efibrts, où quelques règnes 
illustres ont secondé le génie uational. 
II faut remonter au rèbme d'llenri IV, à la fm du seàziëme 
siècle, pour trouver dans la volonte oe mnarque tes pre- 
miers encouragements procures a l'industrie mnufacuriere, 
tandis qne Sui ly dim'igeat ses efforts vers le progrës de 
1"industrie agricole. Col be rt donne à la ois l'essor aux 
manulactures, au commerce, à la nasition. Il et facile 
aujourd'hui de critiquer des reglements que le progres des 
arts a d faire abandonner, mais dont un grand nombre 
produisit dans le principe des effets salutaires. En dehors 
de ces règlemenh r-te l'impulsion immense donnee par le 
genie du grand ministre, aux tabriques,  la varine, au 
négoce de la France; c'est ce que jamais ne doivent onblier 
tes citoyens reconnaig_ants. Sous les ministres Sully, Ri- 
chelieu, Colber't, la France a colonis le Canada, Saint-Do- 
mingue, la llartinique, la G0adelonpe, les lies de France, 
de Bourbon, etc. Tant que le gouvernement metropolitain 
s'est montré puissant, et par la mème etficace dans sa pro- 
rection, les colonies françaises ont pris des déseloppements 
qui ont ri'al, pé les peuples d'admiration. 11 y a soixante-dix 
ans, SainbDomingue offrait a la Frauce, tant en importations 
qu'en exportations, un commerce de beaucoup superieur à 
200,000,000 ff. par année. C'etait la base d'uue pnissance 
nasale que Clbert avait devinee, qui ïut grande sus 
Louis XIV, qui perR sous l'administration d'nu prètre, le 
cardinal de F I e u r?, qui renaquit sons Louis XVI, et con- 
courut à 1"affranchissement des futurs Etats-Unisd'Ameriqe. 
On a cru dire un mot prolond en affirmant avec assurance 
que les Français ne savent Fus coloniser. Ils ont fait à 
cet egard comme le philosophe anqud on niait e mouve- 
ment : ils ont marché, biais sons des gouvernements de 
bon plaisir comme ceux d'un I.mis XIII et d'un Louis XV, 
à dcthut dnstitutions conservatrices, trop sotwent le pou- 
voir gouvernemental a fait défant aux colonies, en a trahi 
les intélts et sacrifié l'existence. Le pouvoir a rarement su 
comment administrer les colonies; mais les Français ont 
toujours su comment développer avec rapidRe leur in- 
dustrie coloniale. Puissent nos gouvernements se Inëtrer 
proïondémenl des conditions d'existence et de lro.éritë 
du petit nombre des psessions tras-tlantiqses qui nous 
restent. Il y va d'tre conmerce annuel de 100,O00,Oo0 de le., 
et d'une navigation égale an tier de nos tran.ports mari- 
times. Une autre grande source de p¢ospévité pour Iïndus- 
trie nationale, c'est la conquLte da pa)'s d'A|ger, t-gai en 
sperficie  la moitié de la France, 
donner la suprématie sur le IRtoral de la lqéditetratm occt. 
dentale. 



Malgré nos perles au dehors, depuis un demi siëcle, 
l'industrie nationale, oligéc par la guerre et pour la défense 
du pays de se sul6re à elle-mëme, cette industrie, dis-je, 
a fait d'admirables proès. Les théoicieus spéculatils et 
des spécu]ateurs plus trangers que Français ont voulu nier 
ces progrës; ils ont a|taqué, outragé, fl,tri, s'il était possible, 
l'industrie nationale! A les entendre, l'étranger nous sur- 
passe en tout; nous ne pouvons eu rien soutenir une libre 
concurrence, si ce n'est eu quelques produits, tels que les 
vins de l]ordeaux. Pour répondre  ces clamcurs insensées 
non moins qu'intéressée% il asufli d'offrir  l'admiration des 
¢ito)ens le spectacle périodiquc des iuventions et des per- 
fectionndmcnts de nutreindustrie progressive. ,'oilh ce qu'on 
a fait par l'ExlOSition desproduits de l'indus. 
trie, conception grande et belle, qui suffirait pour honorer 
le bienfaisant ministère de F r a n ç o i s de eufch',Iteau. 
Le temps qui s'est écoulé depuis la paix d'Amérique en 
17 est le plus digne d'tre étudié, relativement aux pro- 
grès de tous les arts utiles, arts dont la face, la nam même, 
ont changé, pour satisfaire aux besoins d'une soci,Zté mé- 
tamorplzeséc et d'nu peuple régénéré. Le caractère de cette 
grande époque, c'est le perfectionnement de la pratique par 
la théorie, c'est l'application des sciences aux arts. La 
gêométrie, la mécanique, la physique et la chimie, ont prëté 
leurs secours à lïndustrie. Elles ont créé des forces nou- 
velles; elles ont fait narre des arts dont on n'avait aucune 
idéc; elles ont, par degrés, propagé leurs lumières des sa- 
vants aux manulacturiers, des artistes aux ouvriers. Depuis 
treule-six ans, l'enseignement aux ouvriers de la géomctrie 
et dela mécanique s'est propagé, de Paris comme centre, dans 
un grand nombre de villes de France. Le cours normal lait 
au Conservatoire a successivement été répété daus les 
parlements, puis à l'etranger, en Belgique, en Hollande, en 
Suède, en Bussie, en Pobgne, en Al[emagne, en Italie, en 
Espagne, au Brésil. Les effets de cet enseignement ma- 
lhématique et de l'enseignement chimique ont paru dans 
tout leur jotlr lors des diverses expositions. Des récompenses 
aombrcuses du premier et du second ordre, ont elé reCitC 
et reçues par des chefs d'atelier et de manufacture, qui 
aaient commencé par ètrc simples ouvriers ; ils ont allié 
des connaissances théoriqucs à leur savoir pratique, et 
cette alliance a facilitë leurs d6couvertes et leurs amëlio- 
.rations. 
Dans un discours intitulé : De l'influence de la classe ou. 
crière ur le lrogrès de l'industrie n«tion«le, prononcé 
le 30 novembre 183, pour l'ouverture du cours de g,:omérie 
et de mécanique appliquées aux arts, nous avons tàché de 
montrer tout le mérite des simples artisans qui fnt avancer 
l'industrie : « C'est ici qu'il faut apprécier, avons-nous dit, 
toute la valeur des perfectionnements alCouverts par les 
artisans, qui sont ob[igés, pour vivre, d'exercer un métier 
manuel qui les occupe sans cesse. Déj nous admirons juste 
titre ces talents favorisés par la forlune et par l'éducation, 
qui, tirant parti de leurs loisirs, out etudié les sciences et 
s'eu sont fait un instrument pour perfectionner les arts. 
. devons-nous pas une estime p',us profonde et des éles pls 
- clatantsaux artisans qui, privés des secours d'uneinstruction 
vaste et profonde, u'ont pour eux que les ressources de la na- 
ture, et qui s'habituent à penser profondément en laissant 
leurs membres travailler, pour ainsi dire, par tradition méca- 
. nique ? C'est celte faculté pensante de l'ouvrier que je me 
suis surtout proposé d'exciter; c'est pour lui rendre faciles 
les applications à l'industrie que je me suis efforcé de popu- 
lariser les plus smples éléments de la géométrie et de la 
reCunique, et d'expliquer clairement un petit nombre de 
principes généraux qui peuvent guider les artisans, afin 
de perfectionner leurs outils, leurs instruments, leurs ma- 
chines, et jusqu'à l'emploi de leurs sens, de leurs mains 
et de leur corps. Je serai plus heureux et plus fier d'avoir 
.contribué méme indircctement au progrès des facoltés pen- 
. sautes de la classe ouvrière qu'à l'essor d'un petit nombre 
• d'elëves favoisés par la fortune, et qui partout trouveront 

INDUSTII. 
des moyens et des facilités pour féconder leurs talents et 
développer leurs facultés naturelles., 
Parmi les lmmmes que la classe ouvrière peut citer 
avec le plus d'orgueil, nous plaçons ,lacquart, Finven- 
leur d'un admirable métier, qui non-seulement épargne le 
temps et diminue la dépense, mais affranchit t'industrie 
du travail incommode et funeqe des tireurs de lacs. 
Cet homme de génie, dont la découverte a fait la fortune 
de tant de fabricants, vécut simple et content de sa 
diocrité -. une pension modique et la croix d'Honuenr com- 
Idèrcnt ses'voeux. Après sa mort, Lyon, sa patrie, enrichie 
par ses bienfaits, a vu s'ouvrir une souscription pour lui 
b'lir un monumen! bien modeste, et deux ans n'ont 
pas suffi pour atteindre une somme que le premier jour 
aurait d0 faire dépasser, si l'équité, si la gratitude comp.. 
talent pour quelque chose aux lieux où naquit Jacxiuart. 
A l'exposition de 183, nous avous vu pour le per- 
fectionnement le plus remarquable de la charrue, le 
pins utile des inslruments aicoles, la récompense du pre- 
»nier ordre obtenue par ,n simple garçon de ferme. Le 
laboureur Grangé s'est contenté d'inventer, laissant  d'au- 
tres le soin d'exploiter son invention. Vingt charrues à 
la Grang , ce qui signifie pilNes de Grangë, figuraient 
h l'exposition; lui seul n'avait pas envoyé sa charrue 
Grangoe. 3lais le jury cefitral a saisi  découverte à travers 
les variantes des imitateurs, et I'a rcompensé dans l'oeuvre 
des plagiaires, en lui décernant la médaille d'or, en lui 
faisant donner la croix de la Légion d'Honneur. Labou- 
reurs français! jusqu'à ce jor on célébrait le soldat qui 
revenait au milieu de vous reprendre le mancheren de la 
charrue, en cachant, comme aurait dit l'cloquent général 
Foy, sa décoration sous sa veste de travail ; aujourd'hui 
c'est la veste de travail elle-m6me que l'on décoe, c'est 
la charrue qu'on récompense, et la classe agricole tout 
enti6re qu'on bonore dans la pcrsonne de Grangé le la- 
boureur ! 
Nous terminerons cet article par les cousidérations 
raies que nous avons préseutées, en 183-, à uos auditeurs 
du Conservatoire des Arts et Métiers, dans le discours 
cité. « Etendons nos regards sur l'ensemble de notre in- 
dustrie nationale, de cette mine féconde dont nous ve- 
nous d'explorer quelques fiions. Partout vous trouverez le 
mème spectacle : un petit nombre de familles persévérantes 
et sages, qui continuent avec fidélité leur profession héré- 
ditaire; mais l'immense majorité des artisans et des artistes, 
adoptant des carrières nouvelles, et la plupart sans aulres se- 
cours que leur travail et le talent que le travail seul peut dé- 
velopper et rendre fertile. J'ai scruté soigneusement i'orine 
des plus grandes et des plus rapides fortunes conquises par 
les fabricatios; j'ai constamment trouvé qu'elles sont obte- 
nues par des hommes qui commen.caieut sans capital. Si 
l'observateur social veut se former une juste idée du peuple 
français, dans l'Ct où I'a placé l'heureux progrès de nos 
arts, il doit donc se représenter l'immense majorité des 
trente-trois millions d'individus qui composent la nation 
comme debutant sans capital, ou du moins avec un capital 
très-minime, s'enrichissan.t par le travail, l'observation et 
l'expérience; par l'activité, l'ordre et l'économie, chacun 
s¥1evant ainsi suivant ses facultés, son courage et ses 
vertus, pour tormer comme une immense pyramide, dont 
le sommet est atteint dans tous les genres par quelques- 
uns de ces hommes qui peuplent en foule les degrës inter- 
médiaires, et qui sont partis des degrés les plus tufCieurs, 
Ce n'est pas le hasard ni le caprice de la Iortune qui dis- 
posent ainsi le sort des masses, et qui classifient les indi. 
vidus . c'est ì tout prendre, je le répète, l'amour du 
travail, et l'intelligence, et la conduite plus ou moins sage 
et prudente. Nulle part en Europe on ne citerait un peuple 
où cet admirable mouvement d'ascension entre des citoyens 
égaux et libres fat aussi favorisWque par nos lois, amies 
de la véritable égalité; nul peuple n'a des droits politiques 
aussi prëcieux et des honneurs nationaux aussi nombreux, 



INDUbïtll  INDUSTIIE DES ANIMAUX 

aussi généreux, aussi sublimes que ceux du peuple français. 
Qu'on ne veuille donc en aucun point de l'échelle sociale 
cinder en deux la nation pour placer les uns dans le privi- 
Ege, les autres dans l'exclusion : tous sont aptes à tout par 
le fait, et les plus hauts honneurs sont acquis par les plus 
illustres sortis des rangs de la foule : marëchaux, anciens 
soldats; grands commerçanls, anciens commis ; et grands 
fabriants, anciens ouvriers. Voilà pourquoi l'rtat social que 
nos pères ont conquis, et que nous avons complété, 
rite notre amour et nos efforts pour le transmettre à nos 
fils dans sa gloire et sa pureoE. » 
Une cons:.quence encore des exemples remarluables 
que j'ai présentés : « Comparez le sort de cent jeunes 
£ens qui e font ouvriers dans un atelier, ou cou,mis 
• lans un comptoir, avec cent fils d'ouvriers qu'on parvient, 
à force de sacrifices et de secm,rs étrangers, à pous- 
ser dans un collége pour exploiter du grec et vire de 
latin. Au sortir de leurs fastueuses éludes, rhétoriciens, 
logiciens, métaphysicicns, qu'ont-ils appris d'immédiate- 
ment applicable ? Bien, qu'à rou[rir de prime-abord de leur 
p:«e et de leur mère. A l'exception d'un petit nombre, que 
leur génie tire de la foule, et qui partout auraient saisi la place 
narquée par leur vocation, quel est le sort des autres? C'est 
de vivre en mendiants de places et de faveurs. Dix fois plus 
nombreuse que les emplois auxquels elle aspire, la grande 
majorit$ d'entre eux reste dans la détresse ; elle n'éprouve 
d'autre passion que celle de hair et de punir un ordre so- 
cial qui n'a prod,;it que son malheur, en Icilitant ces 
raines connaissanc qui font abhorrer tout travail ma- 
nuel et productif. Les autres, au contraire, sïissont tou- 
ristes, actifs et pervSrants, trouvent tous du travail ; ils 
voient leur main-d'oeuvre mieux payée à mesure qu'ils de- 
,iennent producteurs plus habiles. S'ils restent dans les 
grands ateliers, ils deviennent chefs d'ouvrages, contre- 
maltres, et souvent associés de leur martre ; sïls pretèrent 
l'indëpendance, ils commencent par acquérir des outils, 
des instruments, au moyen de leurs premières épargnes 
et bient(t ils marchent d'eux-mSmes avec un suoees qui 
dépend d'eux seuls. Si nous parlons de l'honneur, je de- 
nande h ces Stres faméliques, qui mendient au sortir de 
leurs stériles Cudes, quel parallèle on oserait établir entre 
eux et le garçon de ferme Grangé, récompen par les dis- 
tinctions du premier ordre au grand jury national, et par 
le prix de l'Acadtnie des Sciences, et par les honneur» des 
,Ëtats élrangcrs, et par la croix d'Honneur? Quel parallèle 
entre eux et le Iéonnaire Cavé, qui place sa branche 
d'industrie au premier rang en Europe ? entre eux et l'an- 
cien ouvrier Jacquart, légionnaire aussi, bienfaiteur 
d'une ville de cent soixante mille Smes, qui lui décerne 
un monument et des éloges funèbres, pour l'eemple et 
l'ëmulation de tout un peuple industrieux ? 
« Ab ! .je voudrais que tous les pères de nos modestes 
familles pussent prendre connaisnce des faits nombreux 
que je viens de présenter, afin qu'ils se prnétrassent de 
l'avenir si divers qu'ils préparent à leurs enfants, suivant 
<luïls les font élèves de l'orgueil ou de l'utilité. J'aime à 
penser que les entrailles paternelles ne balanceraient pas 
dans le choix que dicterait leur affectation. Aujourd'hui 
d'ailleurs, avec nos écoles du dimanche.', pour expliquer 
aux jeunes artisans la gëométrie, la mécanique, la ph)- 
siqoc et leurs applications ; avec nos écoles du soir, pour 
les adolescents et les adultes, tout ce que la science offre 
d'u{e et de fécond est offert au peuple. Nous nous elforçon de 
le guider dans toutes les carrières laborieuses, de lui don- 
ner des idées justes sur le progrès et la perfection dans 
les arts de précision, et mme dans les arts de goût. Avec 
de tels secours, les jeunes gens le-uvent en toute confiance 
entrer dans les professions industrielles : si quelques-uns 
possèdent cette "/me forte qui produit les volontës persé. 
çérantes, qui donne le courage dans les revers et la 
retenue dans les succès, j'ose leur prédire qu'cux aussi 
narqueront leur place d'honneur dans les prochains con- 

381 
cours de l'industrie nationale. Leurs nccè6 seront la ré- 
compense de nos efforts pour populariser dans notre pa- 
trie l'enseignement industriel et scientifique de la classe 
ouvriëre. » 
B °n Charles 'DUPIN,e de l'Académie des Sciences. 
IXDUSTRiI (Exposition des prodifits de I'). Voge=, 
EXPO$1TtON DES PRODUIS DE L'INDUStE. 
INDUSTRIE (hevalier d' ). Voyez 
INDUSTRIEDÈS ANIMAUX. L animaux sont- 
ils réellement pabl de quelque industrie? Oui, répondra 
le vulgaire; oer il est des ouvrages faits par des animaux 
que l'homme le plus intelligent, le plus adroit, ne paien- 
dit jamais à ntrefaire. Quel t le chimiste qui oœerait 
ilatter de iabriquer un gatu de miel, et-il à sa disposition 
tout les fleurs d'une province Mais l'obrvateur phil 
sophe rpondra : Les facultés industriell dont on fait hon- 
neur à'ceains animaux ne sont qu'apparentes : c'est-a-dire 
que l'oison qui nsit un nid, le caser une cabane, l'a- 
raignée une toile, font oes divers ouvrages r i n  t i n c t et 
av le mme dré d'intelligenoe qu'iE emploient pour 
marcher, voler, gueltcr e proie. 
Sous le rapport de leur plus ou moins grande aptitude à 
exécuter rtains ouvrag, on peut classer les au,aux 
dans l'ordre que voici, en commençant par les plus main- 
droits, qui sont les poissons, es animaux domestiques, tels 
que le bœuf, le cheval, le mouton, la poule. Ces ëtres en 
effet ne savent pas oe construire un abri, encore moins 
amasser des provisions pour les mps rigom'eux de l'hic-er. 
Parmi les quadrupèdes qui vivent à i'rtat sauvage, il en est 
fort peu qui donnent des preuves de quelque adresse pour 
se constire des retraites qui les meRent à uvert contre 
I in{empëri d saisons ou les atques de leurs ennemis. 
Le renard, le lapin, le castor suout, Iont exoeptin. 
L'éléphant, t'urus, le lion, le tigre, le loup, vivent 
à ra'enture et en plein air, ,.té comme hiver. Comme 
dustriels, les oeaux se montrent de buoeup sufieurs 
aux quadrupëdes. La plupa d'entre eux excellent dans la 
construction de leurs ni ds; I'h iro ridelle, par exemple. 
En gnérai oe sont les pt faibl q sont les plus adroit. 
Le condor, l'aigle, le vautour, le corbu, depont leurs 
œufs, lèvent leurs tits dans des nids foés de hracbages 
sembl sans art. 
Les in sectes, après l'homme, sont, du moins en appa- 
rence, les plus intelligen d es organisés. Quoi de plus 
neeilleux que les produi des travaux de I' a b et I I e 
La gotrie la plus savante semble avoir prrsid à la cons- 
truction et à la di«position des alvéoles destinès à recevoir 
le sirop ou necr que les travailleu»es vont cueillir sur les 
fleurs. L guêpes sont presque aussi habiles qtte 
ailles; mais comme leurs produits ne sont d'aucune uti- 
lité pour l'homme, ees ne sauraient inspirer le même in- 
térët. Les fourrais ont de tout temps, chez les 
uout, été l'objet d'une sorte de vénération, moins pour 
leur industrie, il t vi, qui, bien que ande, nest pas a 
comparer avec celle de bucoup d'autres insectcs, mais 
plutôt à oeuse de leur préndue économie, et $uçtot;t 
I'stct de prévoyance qui les porte à foter les magasins 
d'o6 elles tireur de quoi vibre pendant l'hiver. Les natura- 
iist de nos jours ont bu¢oup rabattu de ce merveilleux. 
Les a r a i g n é e s, bien moins van que I fouis, sont 
tout aussi économes et de bucoup plus dustrielles ; leurs 
toile, la manière dont elles sont fil, tis, rendues, 
l'usage auquel l'insecte 1 deste, font l'adoration du 
naturaliste obsealeur. 
De toutes I industries des animaux, sans en expter 
oelle de l'ae, il n'en t pas de plus riche et de plus 
utile à l'homme que celle du bomboe, vulgrement v e r 
soie. L tius fai de la substance que file cet insecte 
merveilleux se vend,-nt autrefois h Rome au poids de 
l'or ; aujourd'hui la so i e forme uoe partie oensidSrable e 
la richesse acole et industrielle de la Franoe. 
De tous les animaux, I'h o m me et le  vériblement 



digne de la qualification d'induslrtcl; lui seul agit avc pré- 
méditation et discernement. Les autres aninmux lent toujours 
bien ou mal de la méme manifre et comme des machines 
aseuglea. L'homme au contraire, change et modifie, invente 
sans cesse. 
INDUSTitlEi. INDUSTIHEUX. l'Académie détinitin- 
dtstriel ce qui provient de l'industrie, ce qui appartient à 
l'industrie, et substantivement une personne qui se Ivre à l'in- 
dustrie, lndutrieuxest, seionle méme corps savant, eequi a 
de l'industrie, de l'adresse. Ce serait donc à tort que J .-13. Say 
aurait appe|ë industrieux cehfi qui travaille à la production 
des valeurs, c'est-/-dire/ la création des riclesses. C'était 
à¢striel qu'il devait dire. L'industrieux est considéré par 
lui cotatae un des moyens de production, indépendamment 
des capitaux et des instruments naturels qui sont ses ou- 
tils. ,, L'industrieux, dit-il, qui s'applique à la connaissance 
des lois de la nature est le avant. Celui qui s'occupe deleur 
application aux besoins de l'homme est un agrwulleur , 
un manulaclurier on un négociant. L'industrieux qui Ira- 
vaille manuellement, guide par les lumières et le jugemeu! 
des autres, est »n ouvrier. » 
INDUSTRIES (Arts). t'oye'- 
IND.UVIE. l'oye, CLCe. 
INEIT. Ce mot, qui ne se trouve pas dans les pre- 
mières éditions du Dwtwnnaire de l'Academie, ni dans 
celui de TfCont, signifie un ouvrage qui n'a pas Ce im- 
primé, publié, ditd, pour me servir d'une autre expres- 
sion de création récente. Quelle bonne fortune pour les 
éditeurs d'oeusres comphtes quand ils peuvent y ajouter 
quelques pièces inezlles. Malheureusement les amateurs 
out etë trop souvent pris au leurre de ce titre seduisant. 
Cinq ou six falassaires nous ont donné desfables inédiles 
de La Fontaine ; mais personne n'y a éle trompé, et, comme 
disait le labuliste, 
Un petit bout d'oreille, éehappë pr malheur, 
A découvert et la fourbe et L'erreur. 
Æ cet égard on peut dire, en retournant ,n vers connu : 
Mërae quand l'olseau vole o sent qu'il a des pieds. 
Ces speculations de librairie qui consistent h publier, pour 
un vil lucre, comme gnedite8 les œUVres supposées d'un 
auteur ont toujours etA réptouvées par la morale ; néan- 
moins, dans le sifcle dernier, combien de libraires de 
Bruxelles ou de SeufchoEtd ont da leur fortune  de pa- 
reilles spfcuiations ! Le prétendus legtaments de Bichelieu, 
de Louvois, de Colbert, d'Alberoni et de vingt autres bore- 
mes d'État ; les prétendues OEvres noueeltes de Saint- 
Evremond, commandées par des libraire% qui disaient à 
leurs stipendies : Faites-nous du Saint-Evremond; vingt 
ouvrages aUribués à ¥oltaire, de son tirant comme après 
sa mort, prouvent combien est inépuisable cette veine de 
profits illicites à faire sur le public, toujours si facile à 
tromper. Quelquelois cette espèce de dol littéraire a eu lieu 
dans un intérët de propagande. Ainsi, Voltaire a publié 
quelques pamphlets irréligieux comme oeuwes inddiles de 
Saint-Evremoud ou de Dumarsais. On doit savoir gré à 
certains éditeurs qui nous donnent des memoires ou des 
lettres veritablement iné.dites, lorsque ce sont des lettres de 
bi == de Sevigné, ou des memoires de Brienne, o1= de Tal- 
lement des gé.aux. Quant à ceux qui, comme Mnsset-Pa- 
thay, ont ssi de deux volumes d'oEuw'es inddiles assez 
insignifiantes lesoeuvres, dej si volumineuses, de J.-J. Bous- 
seau, ou exlmraé, comme nous ne savons plus quel antre 
éditeur. le Parrain magnifique de Gresset, on avouera 
qu'ils ont assez mal sêrvi la gloire de ces ecrivains. Ce zble 
à réimprimer des écrits inëdits tend h surcharger la litlé- 
rature d'un inutile bagage toutes les fois qu'il n'est pas 
guidé vers un but d'utilite spéciale : ainsi, l'on ne niera 
pas que es oembresopnlentgdes divergqs sociétés de biblio- 
philes, qui publient chaque année,  peu d'exemplaire.% de 
rares voimnes de piëces inëdites, souvent curieuses, n'aient 
pas rendu de récls services à la liltérature. 

11 y a Ionglemps qu'on a dit que certaines oeuvres, pour 
être imprimées, n'en sont pas moins inëdites. 
Les botanistes appellent iné.dites certaines plantes qui 
n'ont pas encore été découvertes et dérites. 
Charles D Bozom. 
INÉGALITÊ'. l'oye, ÊnALIrif'. 
INÉGALITÉ (Astronomie). On donne ce nom  plu- 
sieurs irrogularit qu'on obsetwe dans le mouvement d 
planètes : telles sont, pour la lune, i' 
tre, l'Cection, la variation; ces inégalités et toute 
celles qui, comme elles, n'éearteut une planète de son or- 
bitre que pour un temps très-court, sont dites périodiques. 
Les autres, que l'on nomme séculaires, parce qu'elles se 
produisent avec une extrime ienteur, ne devraient cepeu- 
danl pins être distinguées des précédentes, depuis que 
L a p lac e a démontré qfelles étaient tout axssi bie limi- 
tées quant/ leurs effets (voyez 
IXEPTIE. L'émoloe de ce mot, qui déxive du latin 
in privatif, et aptus, propre, indique suffisamment le sens 
¢énéral dans lequel il doit itre pris : il désigne le peu d'ap- 
titude que l'on a pour certaines choses, sans exclure les 
dons de l'esprit sous d'antrea rapports. Dans ce cas, Volney 
a dit inapte. Inepte, pris dans un sens absolu, est syno- 
nyme de sot, imperlinent, absrde : C'est un liomme 
inepte, dont on ne peut rien tirer de bon ; tout ce qu'il dit 
est melte. On dit un prince inepte, un ministre inepte. Il 
est des cas ou un ministre inepte est plus dangereut qu'un 
minière corrompu. Inepte, s'appliquant amt chose.% veut 
dire absurde, nconvennnl ; c'est en ce sens que Labruyére 
a dit : « Un auteur sérieux n'est pas obligé de remplir son 
esprit de toutes les pl, lication ineptes que l'on peut faire 
au sujet de quelques endroits de son ouvrage. » L'envie 
est la plus inepte de toutes les passions. 
Voltaire a fait un chapitre intitulé Des B«vues imprimes; 
on pourrait composer des volumes en recueillant toutes les 
inel¢es que la presse a mises au jour, et sous ce rapport 
elle ne se repose jamais. La Bruyère a dit : « On était alors 
persuadé de cette maxime que ce qui dans les grands 
s'appelle spleudenr, somptunsite, magnificence, est dissipa- 
tion, folie, ineptie dans les particuliers. » C'était là l'histoire 
du Bo,«rqeois .genlilhomrae. Charles Du Rozotr. 
IXEQUITELES. Voye Arxoe.m, t. I, p. 
IXEBTIE (du latin inertia, paresse, ou bien de in, non, 
et artus, membre). Par ce mot on désigne non pa% comme 
on l'a dit pendant longtemps, la propriété qu'ont les corps 
d'tre insensibles au repos ou au mouvement, mais bien 
leur indifférence pour un changement d'état, de position. 
Par là nous voulons faire entendre qu'un corps qui est en 
repos  restera tant qu'une cause étrangére ne le forcera pas 
h se mouvoir, et que si ce même corps est en mouvement, 
il ne s'arrdtera point, b moins qu'il ne rencontre un obsta- 
cle qui détrui le principe qui le fait changer continuelle- 
ment de place. Vu corps conservera constamment la forme 
qu'il aura reçue, tant que des agent quelconques ne rien- 
dront pas la modifier. 
Absolument parlant, tout corps doit être indifférent pour 
le repos ou le mouvement. Une pierre, par exemple, qui 
serait seule dans l'univers, resterait h la même place, car 
il n'" aurait pas de raison pour qu'elle se portàt plut6t vers 
un point quelconque de l'espace que vers tout autre. On 
conçoit encore que si la pierre avaR reçu une certaine im- 
pulsion, elle continlaerait a se mouvoir suivant la même 
direction pendant toute l'CernirC lr la raison qu'il n'y 
aurait pas de cause qui pdt l'arrdler ou la détourner de 
chemin. Mais les corps ont reçu du Créateur des propriëtés 
qui font qu'ils se comportent comme s'ils étaient doués d'une 
sorte de sentiment, soit de haine, soit d'affection : ainsi, 
une pierre qu'on jetle en l'air tombe parce qu'elle est attirée 
par la terre. L'eau monte dans un tas de sable, s'éléve auo 
dessu. de son niveau dans un petit tube de verre; mais, sl 
l'inéCieur da tulle e.q enduit de graisse, l'eau refuse d' en- 
trer. Ce I;quide se mële lacilcmeut au vin. à l'alcool ; il refuse 



INERTIE -- 
de se combiner avec rhuile, etc. Il résulte de ces ob»er- 
vatiuns et d'une foule d'autres qu'il serait facile d'indiquer, 
que physiquement parlant il n'y a pas de corps dan la 
nature qui soit complétement inerte. 
Ordinairemcnt, on appelle force d'inertie la résistance 
qu'un corps oppose ì la puissance qui tend ì le faire mouvoir. 
Cette expression n'est pas exacte, car il suffirait d'une force 
très-faible pour mettre le globe terrestre en mouvement, 
si ce globe était seul dans l'univers. Cependant un coup de 
marteau, par exemple, frappé sur le sol, ne déplace nulle- 
ment notre planète, ce qui, eu égard ì l'énormité de sa 
masse, ne doit pas surprendre, pas plus que la stabilité du 
niveau de l'Océan, après que celui-ci aurait reçu une goutte 
d'eau. -.,: TssËuaE. 
I[XÈs DE CASTRO fille de Pedro Fernande: de 
CsTao, et issue de la famille royale de Castille, était au 
lloabre des dames d'l,onneur de Constance, épouse de l'in- 
faut dom Pdre, fils du roi de Portugal Alpbonse IV. Sa 
beauté captiva tellement ce jeune prince, qu'après la mort 
de sa femme, survenue en t35, il l'épousa secrètement. 
Les deux amants jouissaient en paix, dans la solitude du 
monastère de Sainte-Claire, à Coïmbre, du bonheur après 
lequel ils avaient longmps soupiré; mais, jaloux de la fa- 
•eur toujours croissante des Castro, les pertides conseillers 
du roi, Diego Lopez Pacheco, Pedro Coelboet Alvaro Gon- 
salvez, pénétrèrent ce mystère, et réussireBt ì faire naltre 
dans l'esprit de leur maltre la crainte que cette nouvelle 
union de son fils ne devint par la suite préjudiciahle aux 
droits et aux iutérts d'un petit-fils, issu du premier ma- 
riage de rinlant. Celui-ci, interogé par son père sur ses 
rapports avec Iuès, n'osa pas lui avouer la vérité ; mais il 
n'eu refusa pas moins d'obéir aux ordres d'Alphonse, qui 
lui enjoignait de se marier. Dans un conciliabule tenu entre 
le monarque et ses conseillers, il fut résolu dès lors qu'on 
se débarrasserait de l'infortunée par un meurtre. En 1355, 
dom Pëdre s'étant absente pour ne grande partie de cbasse, 
le roi se rendit à Comabre; mais ému de pitié à la vue d'lnès, 
qui se jeta à ses pieds avec ses enfants, en lui demandant 
grâce, il ne se sentit pas la force de presider lui-mème au 
meurtre projeté. Cependant, ce premier mouvement de sen- 
sibilité passé, les conseillers d'Alphouse obtinrent son con- 
seulement à ce que l'assassinat rat commis; et une heure 
après Inès tombait sous leurs poignards. 
A la nouvelle de ce lche torfait, dom Pèdre lève l'étendard 
de la révolte ; ruais l'intervention de la reine et de l'arche- 
• èque de Braga reussit à opérer une réconciliation entre le 
père et le fils. Ce demier obtient mème diverses prérogatives 
nouvelles, et s'engage, dit-on, sous serment, à ne point se 
• enger des meurtriers d'lnès. Mphouse mem't deux années 
plus tard. Dëjà, de son vivant, les trois personnages sur 
lesquels pesait la responsabilité de rassassinat de la malheu- 
reuse Inès avaient, selon ses conseils, quitté le ro)aume 
et cherché un asile en Castille. Là régnait à cette époque 
P i e r r e le Cruel, dont les sanglantes barbaries avaient forcé 
divers nobles castillans à se réfugier en Portugal. 11 fit pro- 
poser à dom Pëdre de lui remettre ces réfugiés, en Change 
des assassins d'lnès. Le roi de Portugal accepte le marché; 
et en 1360 Pedro Coelho et Aivaro Gonsalvez sont entre 
ses malus. Plus heureux que ses complices, Diego Lopez 
Pacbeco a eu le temps de s'enfuir en Aragon. Les coupables 
sont iivrés aux plus cruels supplices. On leur arrache le 
cœur pendant qu'ils respirent encore. Leurs cadavres sont 
ensuite brtîlés sur la place publique, et le bourreau en jette 
les cendres au vent. Deux années plus tard, dom Pèdre 
convoque à Castanbeda les grands du royaume, et leur dé- 
chre, sous la foi du serment le plus solennel, qu'après h 
mort de sa première femme Constance, et en vertu d'une 
autorisation spéciale du saint-siCe, il a épousé Inès de Castro, 
à Bragance, en prence du prieur de Guarda et d'f:tienne 
Lobalo, l'un des gentilshommes attaebés à son service. Ce- 
lui-ci et l'archevêque sont sommés de rcndre témoignage 
à la sincérité de l'allégation du roi, et toute publicité est 

IN FXTENSO 383 
donnée au document émané du saint-siCe en vertu duquel 
a été béni le mariage de dom Pèdre et d'Inès. 
Le roi ne borne pas à cette déclaration la réparation qu'il 
croit devoir ì la mémoire de sa malheureuse épouse : il la 
fait exlmmer ì Coimbre et placer sur un tr6ne, revètue 
d'habits royaux et le diadème sur la tte. Tous les grands 
du royaume viennent s'incliner devant ce cadavre, baiser 
liumblement, ì l'instar de leur marre, le pan de son man- 
teau, et rendre à la reine, longtemps après sa mort, tous les 
homrnages qu'ils lui cussent rendus vivante. Cette cérémonie 
terrainC, les restes mortels d'Inès sont conduits, en grande 
pompe, au monastère d'Alcobaça, qui sert de dernière de- 
meure aux rois de Portugal : le roi, les évèttues, les grands 
et les chevaliers du royaume suivent ì pied la processiou 
funèbre. Des milliers de spectateurs portant des torches 
allureC, forment la haie sur les deux c6tés de la route. 
Dom Pëdre fait élever un magnifique mouumeut en marbre 
blanc sur la tombe d'laès; et quand il meurt, en 1367, ì 
I'ge de quarante-huit ans, laissant la rëputation d'un prince 
sévère, mais juste, il veut que sa depouille mortelle soit 
placée ì c6té des restes de sa clière Inès 
La lugubre histoire que nous venons de raconter a ins- 
piré une foule de chroniqueurs, de poëtes, de peintres, de 
romanciers, et surtout d'auteurs tragiques, en Portugal, 
en France, en Espace, en Italie, en Angleterre, en Hol- 
lande et en Allemagne. Duarte Nunez de LeAo, Anlonio 
Perreira et J.-B. Gomès parmi les Portugais, le comte de 
Sodan parmi les Allemands, R. Feith parmi les Hollandais, 
Lamotte et Lucien Arnault clu¢z nous, sont ceux qui ont 
traité ce suiet avec le phs de bonheur; mais cehfi qui e a 
tiré incontestablement le meilleur parti, c'est Ca m o e n s, 
qui a immortalisé le nom d'lnès de Castro dans un des 
plus beaux épisodes de son poeme d Lusiade. 
INEXACTITUDE. 11 est dans les relations sociales 
et particulières certaines convenances qui portent à ne ja- 
mais abuser, soit par négligence, soit par retard volontaire, 
de la patience de ceux avec lesquels on se trouve en rela- 
t;.on : c'est là ce que l'on nomme l'exact i rude, et sou- 
vent elle est tellement nécessaire, tellement indispem¢.able, 
telleent dans les bienséances, qu'on a été usqu'a l'appe- 
ler une vertu. Bien n'indispose plus que l'attente prolongée, 
surtout quand il y a d'un c6té autant d'exactitude que d'in- 
exactilude de l'autre. Il est juste aussi de dire que sou- 
vent l'inexactitude tourne contre celui qui s'en laisse do- 
miuer, surto.t quand il agit dans son seul intérèt. 
INEXPERIENCE suite nécessaire du manque d'avoir 
vu, d'avoir entendu, d'asoir senti, et dont l'homme ne peut 
és iter les ineonvenientsdaus beaucoup de circontances de la 
vie. Quelques maux que puisse entrainer l'inexpérience, la 
jeunesse, qui indubitabivmeut y est condamnée, ne doit 
point s'en alarmer, puisque une liaute raison, un esprit 
éclairé y suppleent, en se rendant propre l'expérience d'au- 
trui. L'inexpérience, partage de tous, sur un point ou sur 
l'autre, ne nuit qu'a la présomption, et n'alllige que la sot- 
tise, qui toutes detx prétendent  se suffire. La droiture 
d'intention, la sagaci'.é, la justesse de raisonnement com- 
pensent, et bien au delà, le tort de l'inexpérience; car 
nous voyons peu de supériorité résulter du nombre «les 
années et de la participation à beaucoup d'événements. Voir, 
entendre, sentir us discernement, sont d actes qui 
n'affectent point l'intelligence; tel a plus vécu par la pen- 
e en un jour, que tel autre en une longue suite d'années. 
A epfi peut réfléclfir, lire et converser, l'inexpérience n'est 
qu'un frein utile; l'imagination s'enricldt de l'inexpérience, 
tandis que la prudence s'en dette, et que l'Cude courageuse 
et persévérante la combat. Celui qui, en considération de 
son ge ou de la simplicité de sa vie, croit ì n inexpt- 
rience et a,.Àt d'après cctte opinion, a fait un grand pas 
vers la vérité, et profitera de la sagesse de tous. 
C sse nE 
I EXTEXSO mois latins qui çtgnitient dans toute 
son elendue : citer un discours in exlenso, c'est le rep o- 



a84 IN EXTENSO 
duire tout entier, sans en rien omettre; traiter une matière 
in extenso, c'est la considérer sous tous les rapports et 
en approfondir toutes les parties. 
IN EXTItEMIS. Cette locution empruntée à la langue 
latine signifie à la dernière extroemit, à l'article de la 
mort. Elle s'emploie surtout en jurisprudence : un mariage 
in exlrernis est un mariage contracté par un moribond, 
une disposition in extremis est une disposition prise au 
dernier moment de la vie. 
INFAILLIBILITÉ. « L'infaillibilit, dit Bergier, est 
le privilég.e de ne pouvoir ni se tromper soi-même, ni 
tromper les autres en les enseignant. », Il n'est point d'homme 
qui puisse se flatter de possrdcr de lui-même un pareil pri- 
vilCe; tous, pris sëparément, sont sujets à l'erreur. Point 
d'xception, même pour les talents, qui n'ont souvent que 
la triste prérogative de donner à l'erreur plus d'éclat ou plus 
d'attrait. Cependant, le concours, l'assentiment unanime 
d'un grand nombre d'hommes pour constater un fait, donne 
à ce fait un desWde certitude qui exclut toute espèce de 
doute, et devient un témoignage infaillible. Chacun de ces 
témoins en particulier a po se tromper, mais il n'est pas pos- 
sible que tous se trompent de la même manière, et moins 
encore que, sans ca|fiston prealable, ils inventent le mèmc 
fait, avec les mêmes circonstances, etc. Quand I' Ég I i s e 
catholique n'aurait pour ell que ce genre d'infaillibiIité, 
c'en serait assez pour justilier le privilège qu'elle s'attri- 
bue. Ele a reçu des apOtres les règles de la foi et des 
mWUl-S, que ceux-ci aaient puisC dans les leçons de leur 
di in ma|tre, et qu'ils ont consignées dans l'Eangi|e ; elle 
ne prétend pas imposer de nouvelles croyances, de nou- 
velles lois morales : elle n'a d'aulre soin que de conserver 
intact et sans alleration le depOt qui lui a etWconfié. Te- 
main toojours ivant de la foi de tous les siècles, elle 
maintient ce qui a toujoursCWCrll, et réprouve toute in- 
novation con»me étrangère à la tradition des ap6tres. Une 
nouvelle doctrine vient-elle à surgir, des réclamalions se 
Iont bienl0t entendre, des cris d'anathème s'Cèvent de 
toutes parts contre cehd qui fabrique de nouveaux does ; 
on oppose au nosateur la croyance antiqe et universelle, 
la vieille majesté des Përes : ,, Ce n'est pas ainsi, lui dit- 
on, qne croyaient les Augustin, les JetAme, les Basile, 
le» Chr./sostrme, tant d'autres qui, plus rapprocbés 
des ap6tres, unt puisé la doctrine à sa source. » Chaque 
evëque, interprète de son église, dépose que les idées nou- 
velles y sont totalement opposées à la foi commune ; que 
le contraire est enseigné de temps immemorial ; et |'accord 
unanime de ces dépositions est un tëmoignage irréfragable 
de la I,i de l'Eglise. 
3lais l'infiilibilité de I' É gl i s e repose sur d'autres bases, 
encore plus solides : ce sont les promesses de son divin 
Inhalateur, qui I'a btie sur la pierre ferme, contre laqoelle 
les portes de l'e»fer ne prevaudront )ornais (Matth., 
xw). « Allez, dit-il aux pasteurs de cette Église, en la per- 
sonne de ses apôtres, enseignez toutes les nations: baptisez- 
les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Eprit ! appre 
nez-leur à observer tout ce que je vous ai enseigné Je 
is tous le jours avec vo jusqu'à la consommation 
des siècles (Mattb., XXVll). ,, Il est tous les jous aec 
les pasteurs enœeignants, pour les prèserver de l'erreur, 
comme il est avec eux baptisants, pour attacher ses gr',ces 
à leur baptëme. « Celui qui vous ecoute, m'Coule, » dit-il 
ailleurs ( Luc, x ). Serait-ce écouter Jésus-Christ que d'C 
couler l'erreur, si l'Elise venait ì l'enseigner ? « Mon Père 
vons donnera un autre Paraclet, dit-il encore, alin qu'il de- 
meure avec vous pour toujours : c'est l'esprit de t.drild ,. 
(Joan., xv). Si l'Élise tombait dans l'erreur, que de- 
viendrait donc cet esprit de vérité qui doit demeurer avec 
elle in oeternumP Ces promesses et tant d'antres, dont 
on peut voir le dêveloppement dans tous les traités spd- 
doux, démontrent que l'Église est vraiment, comme le dit 
saint Paul, la colonne et l'appui de la verit# ; qu'elle est, 
»ar conséquent, infaillible. 

 INFANTADO 
En attribuant aux pasteurs de l'Église le privilége de l'ton 
faillibilité, les catholiques ne prétendent pas en gratifier 
chaque évêque en particulier. Chacun de ces pasteurs 
part à l'infaillibilite du corps qu'autant qu'il concourt au 
témoignage unanime, qui est la marque de la vérité. Un 
évque peut rail|if dans la foi, sans infirmer l'infalllibilité 
de I' .glise, pas plus qu'un faux témoin n'infirme le consen- 
tement universel des hommes. 
C'est un point controversé entre les théologiens d'Italie 
et ceux de France de dccider si le pape, comme chef de 
l'Église, est infaillible, même sans le reste des pasteurs. 
Les premiers soutiennent I'firmative, |esautres |a n(.gative. 
Cette question ne me semble pas mériter toute l'importance 
qu'on y attache : on ne peut sparer l'Église de son chef, 
ou le chef de son Êg|ise, pas pins qu'on ne sépare la tête 
du corps qu'elle dirige : la tête n'est rien ans le corps, le 
corps n'a plus de vie sans la tête. Quoiqu'il en soit de cette 
question, tout à fait étrangère à la foi, contentons-nous de 
reconnaitre ce qui est avoaé de :out le monde : 1 ° que l'É- 
glise universelle, soit dispersée, soit assemblée en concile, 
est infaillible dans ses décisions dogmatiques ou murales; 
2 que les jugements du pape ont la même autorité, la 
mtme inlailtibilité que les décisions des conciles généraux 
I dês qu'ils sont appuyés du consentement exprès ou tacite 
des pasteur de l'Église. L'abbé C. ],uNnEVlLLE. 
INFAMANTE (Peine). Voyez 
INFAMIE.Juridiquement, on al»Pe|le ainsi la flétrissure 
morale imprimée par la loi sur l'individu condamné à de ce- 
laines p e i n e s dites in.fa»tontes, auxquelles la loi attribue 
cet effet. La réb a bilita tion seule [»eut effacer la note 
d'infamie. 
L'infamie n'est pas toujours produite par une condamna- 
tion judiciaire, et celle que l'opinion publique attache au 
nom et à l'honneur d'un homme est bien plus terribleencore, 
car elle émane d'un tribunal qui reforme rarement ses juge 
INFANT IIFATE (du latin infans, enlant) Si 
nous recherchons l'origine de ce titre d'honneur dont ne se 
servent plus aujourd'hui que les Espagnols, et qui appar- 
tient aux enfants putoés du roi, I'alé de ses fils i,ortant le 
titre de prince des A.çturies, nous verrons, d'après une 
lettre de l'évque d'Oviédo Pélage, qu'il était déjà usité dès 
le règne de Vérémond II, c'est-a-dire en 999. A ce propos 
on cite souvent la plaisante mrprise d*a gentilhomme Fran- 
çais qui, écrivant à un prince royal espagnol, terminait sa 
lettre par ces mots : « J'ai bien l'bonheur de baiser la main 
de votre infanterie. » 
INFANTADO seigneurie de Castil|e, composée des 
villes d'Alcozès, Salmeron et Val de Olivas. On lui donne le 
nom d'lnfantado parce qu'elle était jadis l'apanage des 
infants. Cette seigneurie fut donnée, en lf69, à don 
Diego Hu3do de Mendoza, marquis de Santillana, comté 
de leal, en récpense du soin qu'il avait mis/ garder 
l'infante Jeanne. La terre de l'Infantado fut érigée en duché 
en 1,'5, et passa ensuite par mariage dans la maison de 
Silva. 
INFATADO (Duc de I'), homme d'État espagnol, né 
vers t773 et issu de la maison de Silva, lut élevé en France 
sous les yeux de sa mère, une prhcesse de Salin-Salin. 
Lors de la guerre de 1793, il leva/ ses frais un régiment en 
Catalogne, et se lin Craitement avec le prince des Asturies. 
Par suite de ces relations, il fut exilé de Madrid, eu 806. 
Cette disgrâce ne fit que resserrer davantage les iens qui 
le rattachaient à l'béri;.ier de la couronne et le jeta dans 
le parti des seigneurs ligués pour renverser le favori du 
roi, Godoy, duc d'AIcudia. En 180s le due de t'Infantado 
accompagna Ferdioand VlI à Bayonne; |1 y signa, le 7 juillet, 
laconstitution destinée  l'Espane parffapoléon, et accepta 
le grade de colonel dans la garde du roi Joseph. Mais il ne 
tarda point à donner sa démission et à appeler la nation espa- 
gnole aux armes contre la FranCe; acte qualifié de haute Ira. 
bison par Napoléon dans un ddcret en date du 12 novembra 



IFATADO -- 
lg08. L'année suivante, le duc de l'Infantado, qui comman- 
dait un des corps de l'armée espagnole insurrectionnelle, lut 
battu à deux reprises par les Français sous les murs de Saint- 
Sébastlen, et se retira à Séville quand on lui eut enlevé son 
commandement. En 1811, les cortès le nonnèrent prési- 
dent du conseil d'Espagne et des Indes, et lechargèrent d'une 
mission extraordinaire auprès du prince régent d'Angleterre. 
Ferdinand VII, à sa rentrëe en Espage en 1814, lui rendit 
toute sa favenr, et le nomma président du conseil de Castille. 
11 était alors devenu l'un des chefs du parti des serviles. En 
mars 1820, la constitution des cortès ayant été rétablie, il se 
alCit de ses divers emplois, et fut exilé à Majorque. En 18'3 
il fut nommé président de la régence instituée à Madrid 
pendant l'occupation de cette ville par les troupes fran- 
.¢ais, et plus tard membre du conseil d'État. En octobre 
1825 il fut appelé au poste de premier ministre; mais il se 
it contraint de donner sa démission dès l'année suivante, 
et il vécut alors comme simple particulier à Madrid, où il 
était l'objet d'une surveillance très-ombrageuse. A la mort 
de Ferdiuand VII, il lui fut permis de se retirer en France, 
off il mo|,rut, en 1832. 
INFANTERIE, nom génériquc des troupes combat-" 
tant à pied, troupes que les Bomains appelaient copize pe- 
destres, et les Grecs ««:dç ou tzwpai«, noms appro- 
riés à la nature de leur service. Chez/s nations modernes, 
elle porte également un nom indicatif de sa manière de ser- 
vir, par exemple fussuolk en allemand. Il n'y a que dans 
notre langue où cette analoe manque entièrement ;en vain 
cherclerait-on l'étymologie dïfanterie et de f an tas- 
sin dans le grec et le latin. A notre avis, ces mots ap- 
partiennent à l'ancienne langue gauloise, et se retrouvent 
encore dans rerse, qui en descend directement. Fart signilie 
marche (à pied ), promenade, d'où il résulte que fantair, 
ou fmztais, indique un narcher, un pidon : c'est de la 
que les Italiens ont pris le mot faute, qui a la mme si- 
gnification. 
Dès les temps les plus anciens, il y eut plusieurs 
pèces d'infanteries, distinguées par leur manière de com- 
battre, et conséquemment par leur armure, qui devait tre 
en relation avec leur genre de service. Les temps soi-disant 
béroiques ne sont,  proprement parler, que des temps 
sauvages. C'ëtait l'époque de l'enfance des nations et de 
l'absence de toute règle uniforme d'art militaire. La plus 
ancienne tactique soumise à des règles d'organisation cal- 
cuk'es pour les différents besoins «le la guerre fut celle que 
créa Philippe de Macédoine, père d'Alexandre le Grand. Le 
système qu'il tabtit comprit trois espèces d'inlanterie, dont 
deux, étant de formation régulière, entrè¢ent dans celle de 
la p h a I a n ge, qui était la véritable armée de ligne. Les ho- 
plites, ou pesamment armés, en formaient le noyau, ou plu- 
t6t le corps destiné an choc et à la résistance en masse, 
citadelle mouvante, qui servait d'appui aux autres parties 
de l'armce, dont les destinées dépendaient de la sienne. Mais 
la pesanteur de ses armes délensives, la longueur de ses 
armes offensives, nécessitée par la profondeur des files dans 
une troupe destinée à agir par l'impulsion de la masse, ne 
lui permettaient pas de se morceler et par conséquent d'a- 
gir sur tout terrain. La seconde espèce d'infanterie, ou les 
peltastes, dont les armes offensives étaient moins lonues 
et les armes défensives moins lourdes, n'étant plus destinée 
ì produire un effet décisif par son choc, n'avait pas besoin 
d'une aussi grande profondeur de liles. Sans tre précisé- 
ment une infanterie légère, les peltastes, oranisés, quant à 
la division des sections, de mme que les hoplites, pouvaient 
se subdiviser sans inconvénient, et combattre sur un terrain 
accidenté, sans courir les mmes dangers. A la bataille de 
C y n o c é p h a I e s, les peltastes avaient mis l'armée romaine 
en péril, lorsque la plraIange des hoplites, en s'engageant sur 
un terrain coupé, où elle succomba facilement, rendit la 
wctoire à Flamininus. La troisième espèce dïnfanterie, 
enez les Grecs, était irrégulière : elle se composait de dif- 
férents corps d'arcbers et de lroudenrs, vètus et armés 
me't. v" L co.xwas. -- . xL 

INFAhI'EBIE 385 
rement, et combattant à la débandade ; ils entama,ent l'ac- 
tion sur le champ de bataille, et se retiraient sur les der- 
rières h l'instant où les masses devaient se choquer ; ils 
harcelaient les fuyards, et, avec la cavalerie, complétaient 
la déroute. Hors du chanp de bataille, ils infestaient le front. 
les flanes, et souvent les derrières de rennemi, ravageaient 
le pays, et par là attaquaient les subsistances. 
Les Romains, dont le système de guerre était basé sur 
une plus grande mobilité, n'avaient que deux espèces 
d'infanterie. Les soldats loegionnaires, organisés par pelo- 
tons de 120 hommes, en douze files, formaient une pha- 
lange, en aboutissant sur une ligne au rooment du combat ; 
leur facilité à se subdiviser, non-seulement en cohortes, 
mais encore par manipules, leur donnait le moyen d'agir 
sur un terrain coupê; moyen dont les hoplites étaient privés, 
et dont les peltastes ne jouissaient pas eux-mmes aussi bien 
que les Iégionnaires. La seconde espèce d'infanterie clair 
les vlites, qui, bien qu'appartenant au corps de la légion, 
n'entraient pas dans son ordre de bataille, et passaient 
derrière la ligne au moment du choc. Les triaires, quoi- 
qu'ils eussent une arme offensive différente de celle des 
autres légionnaires (la demi-pique, au lieu du pilum), 
entraient dans l'ordre de bataille de la 1 é g i o n, et n'étaient 
qu'une réserve. 
La décadence de Fempire, qui précéda Constautin, dé- 
natura rapidement les imtitutions militaires des Romains. 
L'admission dans les armées d'auxiliaires étrangers, de toutes 
espèces, y porta une conlusion qui lit perdre les derniè- 
res traces d'organisation régulière : il est impes..ible, en 
examinant le document appel6 Notice de l'empire, de de- 
viner à quelle arme d'infanterie appartient cl,acun des corps 
qui y sont nom,nés en del,ors des lëgions. Chaque nation 
combattait selon ses usages ; chaque corps, selon l'armure 
que le caprice lui avait donnée. Bient6t l'adinission des sau- 
vages Germains, Gotbs, Hcrules, Huns, etc., fit disparaitre 
toute organisation régulière; les arraées des deux empires 
d'Occident et d'Orient ne furent plus que des troupeaux de 
sauvages, assez ressemblants aux Tatars : leur Iorce active 
commença à passer dans la cavalerie, rinfant«rie n'etait 
qu'un amas de pillards feroces, braves, mais mal af- 
més, sans discipline, et presque sans ordre, entre-reAlés 
de quelques gro,pes de paysans de l'empire, levés pour 
chaque guerre, et singeant de loin la phalange grecque 
ou la légion romaine, sans en avoir la discipline, l'instruc- 
tion, ni la consistance. Le mgme ordre de choses sub- 
sita sous la domination des barbares, qui renversèrent 
l'empire, épuisé et abatardi. L'infanterie cessa mème d'exis- 
ter comme élément regulier d'a,'m,:e; car on ne saurait 
donner ce nom à des levêes de paysans, rangés en corps 
inégaux sous les bannières de leurs communes, méprises 
par les chefs, qui ne savaient pas s'en servir, et souvent 
foules aux pieds par une cavalerie insubordonnée, soit 
qu'ils gènassent son impatience en avançant vers l'ennemi, 
soit qu'ils entraassent sa fuite, lo,-squ'un désastre im- 
prévu servait de cl,ati,neut à une audace insensée. Qu'on 
lise les relations des batailles de Crécy, d'Azincourt, de 
Poitiers ! 
La renaissance de l'infanterie comme un des éléments 
constitutifs des armées eut lieu successivement. Les lands- 
knechte de l'Allemagne, les onla9nards de l'Helwtie, 
les aventurieÆs itatiens, doiveut ètre regardés comme 
précédé l'infanterie française. Leur organisation était meil- 
leure, leur armement plus approprié à leur service que 
dans la milice informe des communes. Ce ne fut que sous 
le règne de François I  qu'on commença à essayer de 
donner à l'infanterie des institutions qui lui permissent de 
reprendre le rang qni lt,i est dO dans la formation des ar- 
tuées. Le premier modèle qu'on choisit fut pris dans les 
souvenirs de Borne. C'ëtait vouloir ramener un ordre de 
choses qui n'existait plus et qui ne pouvait plus revenir. 
L'invention des armes à leu produisait une révolution to-- 
talc dans l'armement et la tactique des troupes ; leur 



386 
usage, qui se g«çéalisait ,le jour en jour, devait avoir 
pour conséquence la création de nouvelles règles constitu- 
rives de fa guerre, qui  fussent appropriées, de mème 
que celles des Grecs et des Bomains l'étaient aux armes 
en usage de leur temps. Le pas le pins important ne fut 
cependant fait niiez nous que sous le règne de Henri IV, 
par la fnrmation des régiments et ramincissement de l'or- 
donnance de bataiile, conséqnence fooeée de l'emploi du 
fusil. 
Toutefois, pendant longtemps, l'oanisation réguliére 
ne fut appliquée qu' l'infanterie de bataille, celle qui, 
dans le nouveau s.stème de guerre, était destinée "h un 
service analogue "h celui des phalangites et des Iégionnaires 
«les Grees et des Latins. Celui de troupes Iégères fut fait. 
de méme que sous le Bas-Empire, par des corps irr«gu- 
liera, et méme temporaires ou accidentels, sous cent dé- 
nominations differentes. Ce n'est que bien plus tard que 
les partisans, qu'on formait accidentellement, les chasseurs, 
ou c.orps francs, dont la durée ne depassait pas celle de 
la guerre, furent remplaces par des corps permanents de 
chasseurs à pied, organisés sur les mèmes principes que 
l',nfanlerie de ligne, c'est-à-dire en balaillons : car, nous 
ne saurions trop le r«péler, le bataillon est l'unité fon- 
damentale, l'clament d formation pour l'arme de l'in- 
fanterie. Les guerres de la révolution, qui auraient dU 
cun-olider ce retour aux bons principes exigeant une 
arme spéciale pour chaque genre de service, curent, an 
contraire, pour résultat de nous faire reculer. Dans les 
premières campabnes, l'impossibilité de faire une guerre 
de man«.uvres et de batailles avec des troupes neuves, qui 
n'aaient que de l'eulhonsiasme et une brillante valeur, 
mais aucune instruction pour les mouvements d'ensemble, 
fit adopter la guerre de posilion et les combats de delail, 
qui se r6solvaient presque toujours en luttes individuelles. 
Les tirailleurs firent ce qu'auraient dU faire les corps ran- 
gés en masses continues. Dans ce moment, il n'y eut pres- 
que plus, à proprement parler, que de l'inJhnêcrie legère; 
et les bataillons légers de chasseurs ne faisaient pas un 
.service différent de celui des bataillons de ligne, des ré- 
giments et des demi-brigades. Peu à peu, l'instruction se 
rêtablit dans nos armtes, et la guerre se fit de nouveau, 
et à un petit nombre de changements près, d'aprës les 
principe de tactique que la révolution avait trousés éta- 
blis. Un de ces cliangemenls bt l'usage de couvrir le front 
de l'infahlerie par une ligne de tirailleurs chargés d'enga- 
ger le combat, de mème que les vélites chez les Romaius. 
.Mai. ebez ces derniers, les vdites, en quittant le champ 
de bataille, se retiraient derrière et en del,ors de la ligne 
de bataille des Iégions, tandis que nos tirailleurs ren- 
Daient, au contraire, dans le sein des corps qui les avaient 
fournis. Après n'avoir eu presque que de l'infanterie légère, 
nous n'etme. plus que de I'inhnterie de bataille. 
C'est en vain que nos annnaires militaires nous indiquaient 
depuis Ionemps, dans le cadre de l'afinC, un nombre 
de régiments qui portaient le nom d'infanterie l9ère, 
ce n'(:taient que des rémen{s de ligne, comme les autres. 
L'habillement, l'organisation, Farmemeut, l'instruction et 
le servici étaient le» mêmes; les seules différences con- 
sistaient dans la couleur des collels et celle des boutons, 
objets qui etaient plut6t du ressort des tailleurs que de 
celui des tacticicns. Nous n'avons point d'infanterie ld- 
9ère, formée, exercée et armée pour ce service si intéres- 
sant et si utile dans le afinCs, disaient alors nos mili. 
taires les pins expérimentés. Cette regrettable lacune a été 
enfin crablée, sous le règne de Louis-Pliilippe, par la 
création des bataillons de chasseurs/ pied, pourvus 
d'nu armement, d'un équipement, d'un costume spécial, et 
qui, avec les zouaves, ont rendu dei services signalés 
dans nos campagnes d'Algérie et d'Orient. L'effectif de 
cette troupe a été fort augmenté depuis le retour de l'em- 
pire. Mais qui pourra le croire l, lus tard ? ce n'est que 
de 185 que dale la fusion dans l'infanterie de ligne des an- 

INFANTERIE --* INF ......... 
tiens régimer.ls si improprement appelés d'infanterie ldgre 
lons ne lraiterons pas ici, quoique l'occasion s'en pré- 
sente, de la formation de l'infanterie en général; c'est un 
véritable Pro{ée, dont les formes varient à l'infini, non- 
seulement de nation/ nation, mais mème ebez nous 
chaque paroxysme de la fièvre de novation qui secoue no 
faiseurs. On peut dire, en général, qu'elle se compose de 
divisions, de brigades, de régiments, de bataillons et de 
compagnies ; mais le nombre de brigades de chaque divi- 
sion, celui de ré,ments par brigade, de bataillons par 
régiment, de compagnies par bataillon, sont des quan- 
tités non moins variab!es, dont les fixations successives 
n'ont paru dépendre jusque ici que du hasard, du caprice, 
ou du plus ou moins grand nombre de eréatures  doter 
d'un grade. Il nous manque encore une ordonnance mili- 
taire où la proportion des armes entre elles, leur organisa- 
tion, leur service, leur armement, leur équipement, 
soient établis sur des bases fixes et déduites des vrais prin- 
cipe de la eerre. G'a G. u VACVO.COnr. 
IXFANTEIE DE MARINE. Ce corps, appelé à 
protéger et à defendre les colonies, à garder les ports et 
les arsenaux , à faire toutes les expéditions de guerre ma- 
rilime, à accru|Ire la force militaire de nos vaisseaux, a 
été institué par les ordonnances des rg mai 1831, 0 no- 
vembre 1838, rg aofit 1840, 7 novembre 1843, 21 mars 
1847, par l'arrëté du 2, autel 1868, et enfin par un décret 
du 31 autel 185.t. Placé sous la direction du ministère de la 
marine, il estaujourd'hui composé de quatrerégiments, com- 
prenant ensemble 1 0 compagnies actives, quatre compagnies 
bots rang f,»rmant un effectif de 14,761 officiers, sous-of- 
ficiers et soldats, non compris les soldats des compagnies 
de eipafes, des compagnies noires et des corps speciaux. 
Le nombre des compagnies, aussi bien que leur effectif, 
peut tre augmente suivant les necessités du service. L'6- 
lat-major gënéral de l'arme se compose d'un général de 
division, inspecteur général, et d'un g,.néral de brigade, 
inspecteur adjoint. L'infanterie de marine fournit des ser- 
gents et caporaux d'armes à la flotte. L'unifirmi se com- 
pose d'un schako, d'une tunique bleu foncé, d'un pantalon 
gris bleute avec large bande rouge sur les c6tés. L'armement 
consiste maintenant en earabines à tige. L'infanterie de 
marine a pris part à diverses expéditions dans les colo- 
nies, notamment aux affaires de Dialmath et de Podor, au 
Sénégal. Ses compagnies ont fourni leur contingent au 
Pirée, à la Baltique, à la mer .Noire, devant Sé bu s topol; 
elles ont fait remarquer leur solidité en plusieurs rencon- 
tres, et notamment a l'attaque du momelon vert, le 
}uin 1855. L. LOLW£T. 
LFA.TERIEDIJO.X&ISE. Voyez M/ 
ISF.LTICIDF_, (du latin inf«nticidium, fait de in- 
.fans, enfant, et coedere, tuerL L'article 300 du Code Pénal 
d,.linit l'inïanticide le meurtre d'un enfant nouveau.né; ruais 
dans le langage ordinaire ce mot ne se dit que du meur- 
tre d'un enfant nouveau-në, commis par son père ou sa 
mère..Notre législation punit de mort l'infanticide. Cette 
peine avait Cé réduite pour la mère à celle des travaux 
forcés à perpétuite par la loi du 25 ju-n 1824; mais cette loi 
a etWabrogée parcelledu 28 avril 1832. Le jury a toujours, 
du reste, la faculté d'apprécier les circonstances atténuantes. 
D'aprës un travail de 51. Marheau, publie en tSztT, on comp- 
tait en France tous les ans en mo)-enne lOs infanticides. 
En 1851 le chiffre des accusations d'inlanticides était de 166 ; 
en 1852 il monta à 14, et en 1853 à 196. Cette aumen- 
tation est peut-ètre due en partie aux mesures prises pour 
rendre plus difficile l'admission aux hospices d'enfan t s 
t ro uvés. Presque tous les infauticides amènent la discus- 
sion médico-légale de savoir si l'enfant était n viable. Le 
médecin constate ce lait an moyen de la docimasie pu I- 
monaire. 
On sait que l'infanticide est chose licite en Chine, et que 
beaucoup de peuples anciens ne le considéraient pas 
van{age comme un crime. 



r Lt£ION -- 
|NFECTIOK. Ce mot dérive du latin inficere, infec- 
ter, qui représente l'action des émanations fetides ser le sens 
de l'odorat, et la pénétration des principes délétères dans les 
corps animés, comme il exprime au fiure la corruption 
des mœurs par des maximes pernicieuses. Il a donné nais* 
sance h l'adjectif infect, par lequel on spécifie les matières 
qui répandent Finfection. Tel sont, relativement à l'odo- 
rat, plusieurs produits végétaux, l'assa-foetida, par exemple, 
les subslances animales et • égélaies en putréfaction, l'haleine 
de certains individus, ainsi que leur sueur, surtout celle 
d pieds ; les excrements, les odeurs ftides, alCagées par 
des animaux comme moyen de delimse ; celles qui engen- 
drent dans les corps animés des foyers de corruption ; les 
substances dissoutes dans l'air atmosphériq,le, et qui for- 
ment des e fil uv es, des m i a s m es ; enfin, les émanations 
de l'homme dans diverses maladies. C'est sous ce rapport 
que l'infection on l'imprégnation des matières infectes est 
souvent confondue avec la contagion, dont elle ne dif- 
fère que par des modifications plus subtiles que rationnelles. 
L'eau contribue puissamment à élever dans l'air les exha- 
laisons infectes. C'est par l'action des vaisseaux absorbants, 
distribués sur les surfaces par lesquelles les animaux sont 
en relation avec le monde extërieur, que l'infection s'opère. 
Ainsi, il est difficile d'éviter les causes délétères disséminées 
dans l'air que nous respirons, et qui nous presse de toutes 
p.rt. Introluites daus les corps animes, les émanations 
lurettes agissent comme des germes d'une inflammatiou 
plus ou moins active, dont m g«nrne -t souxent le terme. 
L'àge favorise Faction de ¢s cau.e. delétres.; les eufants 
en sont principalement alfectes, l'irritabilité Oant chez eux 
très-énergique et les réactions très-puis»autos. En génral, 
tout ce qui affaiblit la vitalité dispose aux effets dt l'infec- 
lion. Les personnes débifitées par une alimentation insuffi- 
sante ou insalubre, par les chagrin, par la peur, etc.,-sout 
irappées par les maladies, tandis que celles qui sont robus- 
tes conservent la santé. On s'habitue au-i à limpression pro- 
duite par les émanations inlectes, et on finit par s'acclimater 
dans les pays malsains. Quelques individus ont sème le pet- 
vilCe d'ètre garantis des principes deletères, auxquels les au- 
tres ne peuvent échapper, par u ne orgnisation modi fiée selon 
des conditions inconnues. C'est ainsi qu'il y en a qui bravent 
l'infection des germes de ]a variole, de la scarlatine, etc. 
Deux conditions sont donc micessaires pour que l'infec- 
tion s'effectue : il faut des agents particuliers, et une aptitude 
organique à ecevoir leur action, comme certaines graines 
ont besoin de certains terrains pour croltre. Si Phomme ne 
peut pas toujours écarter de lui ces agents nuisibles, il peut 
les invalider en differents cas. Ainsi, il est parvenu -h de- 
truire les qualités infectes de plusieurs maliëres fétides et 
d,.lti.res. Les chairs putrides, les e,[créments, peuvent être 
d,.pouillés des émanations qui révoltent l'odorat, et servir 
utilement les arts ou l'ag.riculture. L'air sème, vicié par des 
particules invisibles comme lui, est corrigé par le chlore 
sous forme gazeuse. Un regime fortifiant, la propreté, l'c- 
nergie morale, les prdcautions hygiéniques enfin, sont 
encore des moyens de se soustraire à l'infection. On doit 
aussi avoir soin de se garautir des agents infects à l'epoque 
du jour où l'humidité de l'atmosphère leur fournit des ailes. 
Ams, quand on e»t entouré de ces influences, il convient de 
s'exposer le moins possible à l'air du matin ci du soir. II faut 
¢galement purifier i.or le ch I o r e les vêtements et toutes les 
substances qui peuvent retenir des émanatioas dél6téres 
( voye D.ts.rcrox ). D" Cno.,x. 
INFEOD.TION acte par lequel le seigneur recevait 
un assal à toi et hommage et le mettait en possession 
du fief qui relevait de sa mouvance. L'inféodation n'avait 
lieu que pour les fiefs : on l'appelait aussi dans ce cas i n- 
vestiture. La mise en possession des biens de roture 
s'appelait s aisi n e ou ensaisinenwnt. 
11 y avait encore infëodalion de rentes, charges et 
polhëques, qlmnd le seigneur reconnaissait ces charges im- 
posées par le vassal sur le fief qu'il possédait. 

INFIDÉLITÉ 
ious avons dé|à parlé ailleurs dis d I m e s inféodées. 
Dnv (de l'Yonne). 
INFEILXALç qui appartient à l'en ler. Les Romains 
appelaient dieu. infernaux, divinités ou puissances 
infernales, les dieux et déesses rsidant aux enters, 
comme Pluton, Proserpine, Caron, les Parques, les Furies, 
la Mort, la Nuit, le Chaos, etc. Les Grecs les nommaient 
divinitds Chthoniennes. Jupiter nfernal s'est dit quel- 
quefois aussi de Pluton. 
L'adjectif nfernal a été d'un fréquent uge dans la 
poésie tant qu'elle a mis largement à contribution l'enfer 
des païens : cela est peut-être bien passé de mode aujour- 
d'hui. Mais infernal se dit encore, au figuré, de ce qui 
annonce beaucoup de méehanceté, de noirceur, de eruaute, 
et fandlièrement, d'un grand bruit, ou de ce qui fait un 
grand bruit. 
On appelait les Infernaux, au seizième siècle, une secte 
fondée par Nicolas Gallus et Jacques Smi,lelin, qui en_ei- 
gnait que Jésus-Christ a soulfert avec les damnés, lors de 
sa descente aux enfers. 
INFEILALE (blachine). Voyez 3lxCmE 
INFERNALE(Pierre). Voge: ,Nrraxr. n'.cea-r. 
INFIBULATION. On appelle ainsi une opération par 
laquelle les organes de la génération chez l'un ou l'autre 
sexe sont, au moyen d'une boucle (fibula), d'un anneau, 
rendus incapables de l'acte conjugal ou d'excès contre na- 
ture pour un temps. L'emploi de cette operation remonte 
à la plus haute antiquité, et vient vraisemblablement de 
l'Asie, d'où il s'introduisit chez les Grecs, puis chez les 
Romains, qui la firent pdncipalemeut subir h des chanteurs 
et à des acteurs, dont on croyait conserver le talent 
d'autant plos sùrement qu'on leur rendait toute débauche 
impossible. L'infibulation des hommes est dja décrite par 
Celse, et mentionnée par Juvenal ainsi que par _Martial ; 
dans les temps modernes, elle a été de nouveau reeÇm- 
mand,.e et pratiquée mème quelquefois sur de pelits gar- 
çom et sur des jeunes gens pour les garantir de tout excès 
contre nature. 
La proposition émise par Weinbold dans son ouvrage 
Sur l'excès de population dans l'Europe centrale, etc. 
(Halle, 1827), d'infibuler tous les eélibataires pour arrëter 
"accroissement excessif de la population, a été réfutée 
avez le mépris qu'elle méritait, notamment dans l'eer:t de 
Wahrhold Sur l'excès de population de Weinhold (italle, 
t87). 
On ne peut admettre l'assertion suivant laquelle l'infi- 
bulation du sexe feminin aurait été généralement usitée 
chez certains peuples, jusque dans les temps les plus 
dernes ; il faut également reléuer au nombre des contes ce 
que l'on dit des ceintures de chasteté, au moyen desquelles 
des maris jaloux se seraient assurés de la fidélité «te leurs 
lemmes, au moyen ge, et particulièrement dans l'Europe 
méridionale. 
INFI DÉLITÊ  INFIDÈLE. L'infidélib « est un manque 
de foi volontaire, la violation d'une promesse sainte. Cepen- 
dant, les poêtes et les romanciers ont célebré Iinfidélité des 
amants. Le monde n'a guère non plus de blme pour les aban- 
dons anmureux, malgré le grand nombre de victimes qu'ils 
font. Mais du moment que la loi a chan;é des promesses, si 
souvent sans importance, en un lien indissoluble, l'infidélité 
deient odieuse, et de la part de la femme surtout elle 
est tellement révoltante que beaucoup de peuples punis- 
sent encore l'adult ère des peine les plus salières..Nos 
lois sont plus indulgentes; cependant, souiller le lit con- 
jugal, introduire dans les tamilles des enfants adultérins, 
à qui sont acquis les soins, la tendresse, la fortune de celui 
qui ne leur est rien, c'est là un grand crime que la momie 
publique ne saurait trop flélrir. L'infidélité en amitié en- 
traine aussi avec elle des idées odieuses : quoi de plus 
infàme que l'ami infidèle qui trahir sans hésitation l'estime, 
les secrets de son ami! Un caissier infidèle est celui qui 
s'approprie tout ou partie des deniers coufiOs à sa pr¢bité ; 



un copiste in]îdele, celui qui, par des omissions ou des 
altérations, dénature et change compIétement le sens de 
ce qu'il écrit; un gardien infidèle, celui qui remplit sa 
mission avec négligence ou mauvaise foi ; une domestique 
infidèle, celle qui trompe ses maitres et fait danser l'anse 
du panier, lous pourrions donner encore une multihsde 
d'acceptions de l'adjectif infidèle. Sachons nous borner 
lit ! Ce qui précède suffira pour faire comprendre qu'il se 
prend toujours en mauvaise part, et entraine toujours 
l'idee de parjure et de trahison. 
E théologie, on donne le nom d'infidèle à quiconque 
n'a point reçu la foi chrétienne, ou qui, l'ayant reçue, 
l'a repoussée (vo9e-. FmSLE). Ceux qui, n'ayant jamais été 
baptisés, et n'ayant jamais entendu la prédication de l'Ean- 
gile, n'ont pu fermer les yeux aux lumières de la religion, 
sont appelés des in[idèles nd9atifs. Ceux, au contraire, 
qui ont volontairemênt refusé de recevoir cette foi, après 
avoir entendu sa prédication, sont de» infidèles positifs. 
ISI:ILTI.X.TIOX {du latin in, dans, et filtrum, fil- 
tre). Par ce mot les chimiste% les pl,ysiciêns, les anatomis- 
tes, etc., désignent le mouvement d'un fluide qui passe au 
travers d'un lissu, d'une membrane, etc., ou qui s'insinue 
entre les molécules d'un corps solide : l'infiltration des eaux 
dans tes terres peul tes rendre fécondes ; ce sonl elles qui 
vont alimenter les réservoirs, les conduits, qui donnenl 
naissance aux sources. Les infiltrations des eaux dans les 
routes, les murailles, en halent souvent la de»truction. 
IXFi.i (du latin in, san.% finis, fin). L'infinité, en 
élendue, en durée, en quantilé, consid_rde dans le grand 
ensemble de l'univers, ne peut tre niée, parce qu'on ne 
saurait lui assigner aucune limite possible. L'nfinild est donc 
un altribut neessaire de l'ëlre ou de l'exislence qui em- 
brasse foules choses, c'est-h-dire de Dieu. En effel, l'es- 
pace qui s'étend sans bornes, par delà les mondes (si les 
mondes ne sont pas eux-mèmes infinis); le temps ou la 
durée, que rien ne peut faire cesser, alors mème qu'aucun 
ëlre, qu'aucune substance n'en attesteraiênt la mesure, fonl 
également parlie de l'infini. C'est l'inelfable essence de la 
Divinité q,te l'athée lui-mème est contraint de confesser 
comme principe premier et nécessaire de tout ce qui existe. 
/iais, disent quelques pl,ilosopbes, l'infini n'est rien de 
réel, sinon une notion de notre esprit, impuissant h con- 
cevoir la totalité indefinie et non connue de ces vastes 
globes, de ces lointains espaces qui échappent h notre com- 
Iwéhension. Cependant, il est manifeste  la raison que l'é- 
tendue, ladurée, la quantité, etc., sonl imbornables et doivent 
s'ablmer dans un éternel infini. La nature est incommen- 
surable en tous sens ; c'est le mérite de l'homme de senlir 
ici sa faiblesse, sa nu;lité d'un alome en présence de ces 
gouffres épouvantables o/l se précipile sa pensée Son or- 
gueil doit plier sous cette majeurWde l'auteur de l'univers, 
dont Pascal a dil que son centre est lgarloul et sa circon- 
J'érence nulle part. 
Parmi les anciens philosophes, A nax t mand re de Milet 
établit que l'infini est le principe de Coules choses ; q,te 
celles-ci Cirent de Pinfini teur origine, et qu'elles se résol- 
vent en lui ; que lui seul, existant par sa propre essence en 
virtualité, est capable d'engendrer et de détruire une roui. 
titude de mondes ou de sphères, relo,trnant successivement 
dans son sein pour y puiser de nouvelles formes ou rajeunir 
leur existence, de sorte que l'infini leur communique, et 
les matériaux, et les forces de vie, de mouvement, de com- 
binaison, de décomposition, qui les distinguenl, etc. Ton- 
reluis, ce philosophe n'a pas défini ce qu'il appelle l'infini, 
s'il est matière ou espace pur. Car, si l'infini n'est pas cor- 
porel, comment pourrait-il produire des éléments materiels 
pour la construction des mondes, des soleils et des planë- 
tes, etc. ? Son infini ne peul donc élre un principe simple, 
mais un chaos d'éléments pour fournir à tout. 
Parmi les modernes, S pi n o s a établit une substance unique 
et infinie, qui selon lui doit ètre conçue sous deux aspects, 
ou matériel, ou mtellecluet, parce qu'elle réunit ces divers 

INFIDÉLITE  
attributs en elle seule. Ainsi, le monde matériel serait im- 
prégné de la force divine ne la pensée, du mouvement, etc., 
de mgme que la pensée, le mouvement, seraient itt«épa- 
tables de la substance matérielle. En un mot, le Dieu-Ma- 
lière ou.le 3londe-Dieu de Spinosa est le grand tout infini. 
Tel est te panthéisme, opinion philosophique fort ré- 
pandue parmi les Hiudous et les sofys orientaux. Pour eux 
Brahma est le père spirituel et matériel de toutes cl,o¢es ; 
il remplit l'espace et le temps ; il tire de son sein les mon- 
des; c'est un océan immense, dans lequel tout s'engloutit et 
tout renatt tour à tour. Pour mieux dire, selon les brahmes 
pandits, les choses n'ont qu'une existence phénoménale; 
c'est une succession d'apparences et d'illusions de notre 
esprit; la vie humaine et ses impressions, ses croyance», ne 
sont qu',m fève (maya) ; le monde qui nous environne est 
un spectacle de panorama dont nous ne connaltrnns les 
ressorts et la vérité qu'en sortant de cette vie. 
A l'exception de ces dernières opinions, l'idée du pan- 
théisme règne sous deux formes philosophiques dans nos 
temps modernes. Les malerialistes professent qu'il n'existe 
dans l'univers qu'une substance infinie douée des proprié- 
tés malérielles pour constituer les mondes, et réunissant en 
mgme temps les attributs de la pensée, de l'organisation, 
du mouvement, etc. Les spiritualistes, au contraire, font 
de la s,tbstance matérielle un ou plusieurs éléments bornés 
en quantité pour construire les mondes, mais ils n'attribuent 
la pensée, l'organisation, la puissance, etc., qu' l'ètre 
infini, libre, volonlaire, remplissant l'espace et le temps, 
comme une pure essence immatérielle, qui est Dieu. Pour 
les spirituaiistes, les principes matériels, étant distincts du 
principe inlellect,,el, restent indiftërents, passifs, et n'ont 
qtte les propriétés départies par celui-ci. Sans cette iuler- 
venlion de la Divinilé, foule matiëre demeurerait inerte et 
incapable par elle-reAme d'organisation, de pensée, de toute 
activité. Lorsqu'on affirme, non sans raison, que Dieu 
existe en lout lieu et remplit l'univers de son omnipotence, 
comme tous les temps par son élernite; qu'il vit en nous 
et que nous voyons tout en lui, comme le disaient les stoï- 
tiens, puis Malebranche après sainl Paul, qu'est-ce autre 
chose que la doctrine de l'infini ou de l'absolu, comme 
s'expriment aujourd'hui, en Allemagne, les disciples de 
Schelling et d'Oken, o,t la philosophie de la nature? Cette 
opinion n'est point hdtérodoxe, et s'allie bien avec les 
religions les plus pures, s'il est vrai que in Deo vivimus, 
mureront et sumus, selon l'aprlre. C'est par la présence, 
comme par l'influence de l'Atre l'infini, pénétrant l'immen- 
sité et vivifiant la roulière, que s'opèrent les renouvelle- 
menls et tous les changements dont t'univers est le perpé- 
tuel ll,étre : Emitles spiritum, et ereabuntur. Si tous les 
èlres sont créés ainsi par son souffle ; s'ils périssent lors- 
qu'il le retire, comme dit la Bible, n'est-ce donc pas le 
témoignage de cette suprème puissance qui rèe éternel- 
lement dans les champs de l'infini? 5.-J. Vmx. 
IXFIXi (Mathématiques), quantité plus grande que 
toute quantité assignable. Quoique l'idée mème de quantités 
infiniment grandes renferme une négation de limites, l'ana- 
lyse constate l'existence d'infinis de differents ordres. Par 
exemple, dans l'équation y:, si l'on 
prend 
infini, 
sera, par rapport à a, un infini du second ordre, car cette 
y ', 
équation revient h :-- qui nous fait voir que si le second 
rapport est infini, le premier t'estaussi. On peut, du reste, ac- 
luérir de ce fait une notiun plus sensible en en cherchant l'ap- 
plication aux grandeurs géumétriques. Ious rouvons alors 
:lUïl y a en réalité, indépendamment de la longueur infinie 
et de la surface infinie, trois différentes sortes de solidité» 
infinies, qui toutes sont des çuantitates sui 9cricris, et 
que celles de chaque espèce ont des proportions données. 
Une longueur infinie ou une ligne infiniment longue est con- 
sidérée comme commenrant h un point et s'étendant in/i- 



...... ;I -- INFIRMERIE 
aiment d'un estWou bien des deux eStC, partant du mdme 
point, auquel cas, l'un qui est une infinité commençante, 
est la moitié d'un tout qui est la somme d'une inlinité com- 
mençante et finissante ;.ou parle ante et parte post d'une 
infinité, ce qui est analogue, quant au temps et à la durée, 
à l'CernirC off il y a toujours autant devant soi, d'un mo- 
ment de temps ou d'un point quelconque; et l'addition ou 
la soustraction d'une longueur finie ou d'un espace de temps 
limité ne saurait changer le cas d'infinité ou d'élernité 
puisque ni l'un ni l'autre ne forme une partie quelconque 
du tout. Quant h une surface infinie, toute ligne droite éten. 
due à l'infini des deux cStés sur un plan infini, divise ce 
plan infini en deux parties égaies, l'une h droite, Ihutre à 
gaucfie de cette re&me ligne; mais si d'un point quelconque 
sur un plan, deux lignes droites sont etendues infiniment, 
de maniere h former un angle, l'espace infini intercepté 
entre ces lignes droites intinies est h l'Atard de tout le plan 
infini, comme l'angle formé par ces lignes est à quatre 
angles droits. Si ces deux lignes infinies sont parallèles 
et supposées tracCs sur un pareil plan inlini, l'espace 
entre elles sera également inlini, mais contenu dans le plan 
un nombre infini de fois, et par suite infiniment moindre 
que l'espace intercepté entre deux lignes inlinies inclinces, 
quelque petit que soit l'angle de ces dernières; dans l'un 
de ces cas la distance finie donn,:e des lignes parallèles di- 
minue l'infini,Wdans un degré de la dimension ; tandis que 
dans un secleur il y a infinité dans les deux dimensions ; 
conséquemment les quantités sont l'une infiniment pls 
grande que l'autre, et elles sont hors de proportion entre 
elles. 
Cette méme considéralion donne naissance aux trois dif. 
Iérenles e«pèces d'espace ou de solidité inlinie ; car un pa- 
rallclipipède uu un cylindre infiniment long e.t plus grand 
qu'une grandeur finie quelconque, et tous les solides de ce 
genre, supposés formes sur des bases données, sont, ainsi 
que.ces bases, proportionnés l'un h l'autre..Mais si deux de 
ces trois dimensions manquent, comme dans l'espace con- 
tenu entre deux plans paralleles inliniment ctendils et à une 
distance finie, ou d'une longueur et d'une largeur infinies, 
aec une épaisseur iinie, tous les solides de cette espèce se- 
ront égaux eu,re eux cmnme les dt»tances finies données. 
Or ces quantités, infiniment plus grandes que l'autre, sont 
pourtant infiniment moindres que l'une ou l'aulre de celles 
dont toutes les trois dimensions sont infinies. Tels sont les 
espaces contenus entre deux plans inclinés infiniment Cen- 
dus, l'espace intercepté par la surtace d'un cSne, on les 
c6tés d'une pyramide également continuée infiniment, etc. ; 
car l'espace entre deux plans est au tout comme l'angle de 
ces plans est h quatre angles droits. Quant aux c5nes et 
aux pyamid¢s, ils sont comme la surface sphérique qu'ils 
interceptent est h la surface d'une sphère dccrite de leur 
sommet comme centre : ces trois sortes de quantités in- 
finies sont analogues h une ligne, à une surface et h un so- 
lide; et de la m(me maniëre elles ne peuvent pas être coin- 
parCs ou n'ont point de proporlion entre elles. 
En algèbre, les quantités infinies se présentent souvent 
sous la forme .m Il est évident qu'aucune quantité finie 
o 
multipliée par 0 ne peut donner le produit m ; on voit en 
méme temps qu'en considérant la fraction--, et en sui»- 
posant m constant et n variable, à mesure que n diminue 
le quotient augmente, et que quand n aura une valeur 
au-dessous de toute grandeur assignable, le quotient sera 
au-dessus de toute grandeur assignable : à ce caraetëre, on 
reconnalt lïnfini, que .les aitCris,es représentent par le 
signe oe. 
Remarquons que si a est infini par rapport à b, il en 
suite que b est infiniment petit par rapport à a; ainsi, la 
différentielle première d'une fonction est par rapport à celle- 
ci un intiment petit dis premier'ordre; la dilférentielle se- 

389 
conde, un infiniment petit du second ordre, etc. De là 
noms de calculée l'infini, 9domdtrie de l'infini, dunnés dans 
le principe par quelques auteurs au calcul i n f i n i t é s ira a l. 
lFl.ll.'tlE.T PETIT. Voye-. l.Fl.t. 
i.FI,iTÉSLIA.L (Calcul), ensemble du calcul dif- 
férentiel et du calcul intégral. 
INFIXITIFo Les grammairiens ont appelWainsi un 
mode des ve rbes qui est d'une nahlre differente des autres 
modes, en ce qu'il ne se fie point, comme eux, d'une maniëre 
déterminée avec l'une ou l'autre des personnes, mais simple- 
ment avec l'idce indéterminée et generale de personnalité. 
Par exemple, hair préente l'idée indeterminée d'une per- 
sonne en général qui existe dans l'Cat de fiaine. C'est ce 
qui fait que l'infiniIif est un mode abstrait on indcfini. 
L'infini,if n'est jamais accompagné d'aucune des trois per- 
sonnes ; en sorte qu'il est propre h figurer comme un nom 
dans certains cas, et quia l'exemple des noms, il peut 
cire accompagné d'articles et de prépositions, et servir de 
sujet, d'objet, de nominatif, comme dans cette phrase : 
I)ormir rdpar e les.forces ; ou dans cette autre: A i mer Dieu , 
c'est accomplir le premier de ses commandements, biais 
il faut considérer que dans ces phrases il y a ellipse. D'un 
autre c5té, i'infinitif, au lieu de peindre des objets comme 
les noms, ne peint que des actions ou des faits comme les 
verbes, et, comme eux aussi, il se rattache à l'idée des 
temps, idée qui est incomparable aec les noms. Ajoutons 
que l'infinitif diffère encoredes nomsen ce qu'il conserve le 
régime du verbe, qu'il n'a point de g»nre, et qu'on ne peut 
pas )' joindre d'adjectif. 11 y a néanmoins dans notre langue 
quelques erbes dont les inlinitifs sont devenus de rais 
noms, susceplibles de genres, de nombre et de cas, comme 
le boire, le manger, le diner, le souper, etc. 
CU.M'XçXAC. 
IXFIKIERIE INFIRMIER. Dans tous les lieux où 
existe t, ne grande agglomération d'llOnUnes, il est d'une 
sage prévoance de réserver aux malades un lieu isole, 
cessent le mouvement, le bruit de ceux qui sont en santé, 
et où le calme et le repos sont assures h ceux qui gémis- 
sent sur un lit de douleur. Des infirmeries ont donc été 
établies d'abord dans les couvents et communaules reli- 
gieuses, car cette expression d'infirmerie n'était appliquée 
/ aucun autre établissement du même genre. Est-ce / dire 
pourtant que les colléges, les écoles royales, aient été pri- 
vés de ces h6pitaux en miniature? Nous ne le pensons 
point ; cependant, le nom d'infirmerie ne leur a etc donné 
qu'h une epoque récente, ainsi qu'a ceux des prisons et 
des maisons de détention. Les infirmeries sont donc des 
institutions tout h fait pbilanthropiques, et leur nom m6me 
participe de ce caractère ; ce nom est en effet moins re- 
poussant que celui d'hdpital, et cependant qu'est-ce autre 
chose, au fond, bien que dans des proportions moindres? 
Les personnes qui y sont attachées portent le nom d'in- 
firmiers et d'inflrnières, suivant le sexe, et leurs fonc- 
tions ne sont pas celles qui exigent le moins de soins, le 
moins d'ígards, le moins de patience. Quoi de plus irri. 
table en effet, de plus acariatre, de plus difficile h manier 
qu'un malade? quoi de plus ingrat? Dans les 1if pi,an x, 
les personnes préposées à la garde et au service des ma- 
lades portent également le nom Cinfirmiers. l,lais qu'on 
ne confonde pas leurs fonctions avec c.elles des médecins, 
des internes : ceux-ci ordonnent, les infirmiers ne sont 
que les eéeuteurs de leurs preseriptions ; et il est souvent 
à regretter qu'ils n'apportent point dans ieurspénibles fonc- 
tions ces ëgards et cette aménité qui adoneiraient les maux 
de œux qui souffrent et le derniers moments de ceux q.d 
vont mourir. Une hru[alité repoussanle est trop souvent le 
lotde ces hommes qui ont à remplir les devoirs les plus 
rebulants, et la vue continuelle de la mort n'est probable- 
ment pas sans influence sur l'endurcissement de leur sen- 
sibilité. 
Dans les h6pitaux militaires, les fonctions dïnfirmiel'S 
sont remplies par des soldats organisés par compagnies, pat 



90 INFIRMERIE 
eseouades, et les règles de la hiérarchie militaire sont ob- 
serçées parmi eux. En 1853 on acréé un corps d'infirmiers 
de la marine. 
IXFIPIITÉ INFIIME (de la particule latine néga- 
tive m, etflrmus, solide). Ges mots, suivanl leur étymologie, 
sèmblent indiquer un certain état de faiblesse ; la faiblesse 
peut èlre momentanée ou habituelle : dans le prenier 
cas, elle est mise au rang des maladies ; si au contraire, 
elle se prolonge et devient habituelle, elle prend le nom 
d'infirmité. Cette distinction est cependant loin d'êlre 
bien tranchée : une infirmité est souvent une maladie ; et 
il est impossible de fixer le temps au bout duquel une ma- 
ladie deient une infirmilé. En general, on peut dire que 
l'inlirmilé est une maladie que l'on désespère de guérir, 
pourvu toutefois qu'elle n'empèche pas le malade de suivre 
à peu près son genre de ve habituelle ; autrement, elle prend 
lut6t le nom de maladie i n c u r a b l e. 
Les différentes foreesde l'économie peuvent tre frappées 
de faiblesse : il existe donc des infirmilés physiques, mo- 
raies et intellectuelles : les déviations de la colonne 
vertébrale, la snrd ité, sont des infirmités physiques; le 
defaut de courage ou de prudence constitue une infirmité 
morale ; le manque de mémoire u de jugement est une infir- 
mité intellectuelle. Ces trois genres dïnlirmitespeuvent être 
cengéniales ou accidentelles, e'est-à-diredépen,lre de la cons- 
titution mme de Pindividu, ou tre le résultat d'une maladie : 
ainsi, la cécité, la poltronnerie, le mauque de mémoire, sont 
desinfirmités qui resullent souvent d'un vice d'organisation ; 
au contraire, à la suite d'une fracture de la cuisse, nn 
homme devient boiteux ; ou, après la guérison incompltle 
d'une paralysie ou d'uneautre lésion du cerveau, un homme 
est pivé du libre exercice de ses facultés morales ou in- 
tellcctuelles ; ce sonl là des infirmités accidenlelles, ou 
qui suceëdent à des maladies. Le temps seul est lui-même 
une grande cause d'infirmités; il affaiblit les orÇanes d'une 
manière lente et insensible, sans avoir besoin du secours 
d'aucune maladie caractérisée. Il est bien rare, par exemple, 
qu' I'ge de soixante-dix ans, au plus tard, l'homme n'ait 
pas perdu une grande parlie de ses forces physiques. Heu- 
reux aussi quand ì cet ge il conserve torte sa Ibrce mo- 
rale et toute l'énergie de son intelligence : c'est une excep- 
tion h la rëgle commune, et en gënal le septu,gé_naire 
est considéré comme infirme. 
Les infirmités sont plus ou moins graves. Il en est qui 
méritent à peine ce uom, tanl elles incommodent peu ceux 
qui en sont atteints : ainsi, une lé_gère dillormilé de la taille, 
la faiblesse de la vue, sont des infirmités peu graves par 
elles-mêmes. 13ans ce cas, c'est souvent l'opinion qu'on y 
altache, bien plus que le mal réel qui en résulfe, qui donne 
de .l'imporlanee ì l'infirmilé. On sait que l'illustre lord 
Byron était profondément affligé d'avoir un pied bot, et 
qu'il aurait peut-être échangé son titre et sa fortune conlre 
un pied qui ne dépar$t pas sa personne, d'ailleurs remar- 
quable. C'est surtout pour les infirmités morales et intel- 
lectuelles que l'opinion contribue beaucoup ì les rendre 
graves ou lëgères; mais dans ce cas c'est ordinairement 
l'infirme lui-mème qui en souffre le moins; car c'est à 
cette socle d'infirmité que s'appliquent les paroles de I'Ê- 
vangile : .« On dëcouvre une paille dans l'oeil de son voi- 
sin, et on ne oit pas une poutre dans le sien. » 
Quoique le nom mème d'infir'mtd laisse peu d'e,poir de 
guerison, ilenest.ponrtant qe l'on parvient h guérir. D'un 
autre cté, les iufrrmités ré.ultent souvent de soins incom- 
plets ou mal dirigés ; et c'est alors le traitement qui trans- 
forme la maladie en infirmilé. Les progrès de la mé- 
decine • doivent donc diminuer le nombre des infirmi- 
tés eneoreplus que celui desmaladies. C'et ce que prouve 
en effet, l'expérience, et la proportion des infirmes est 
bien moindre chez les nations modernes que dans les 
temps de barbarie. Cette diminution porte principalement, 
sur les infirmités physiques. Quant. aux infi'rmités morales 
etintelleetuelles, c'est plus souvent-à Pëdueation qu'/ la 

INF 
médecine qu'il ar[,artient de les traiter ou de les préçetir, 
N.-P. AQU'rl. 
INFLAMMATION (du +erbe latin inflammare, 
inflammer, embraser), phétomëne pathologique caracté- 
risé par la chaleur, la douleur, la rougeur et la tumé- 
faction de la partie enflammée; elle peut attaquer tous les 
tissus vivants ; et dans la plupart des maladies, elle appa- 
rait, on comme pfiénomëne principal, ou comme compli- 
cation. L'afflox du sang et du fluide nerveux, plus eonsi- 
derable que dans l'état de :anté, détermine l'exaltation 
vitale qui constitue l'inflammalion. Elle marche et -se ter- 
mine de différentes manières selon son intensité, l'orga- 
nisation des tissus qu'elle envahit et la constitution du sujet. 
Dans certains cas, une partie du corps présente les phé- 
nomènes qui la caractérisent : ces phénomènes durent 
quelques heures, puis tout rentre dans l'ordre; alors la 
pfilegmasie se termine par à  I i t e s c e n c e. Quelques foi les 
fluides extravasés se résorbent et redeviennent circulants : 
il y aeu r'solulwn; d'autres fois, la +olence de la con- 
gestion ou la nature de l'agent qui I'a produite frappe 
les tissus de mort, et la an9rène s'en empare; dans 
des degrés intermédiaires h la résolution et à la gangrëne, 
la s upp u r a t  o n, Pnàuration rouge ou blanche, les 
lransformalions de tissus, I'h yp e r t top h i e de l'organe 
enflammé, des altëralions sœecrœetoWes, l'uieCation, l'etat 
chronique, snccèdent à l'Cac inflammatoire. Telles sont les 
différentes terminaisons de l'inflammation dans les tissus 
où elle éclate; mais le plus souvent son action ne se borne 
pas à ces derniers ; elle s'ëtend tanttt de proche en proche 
par propagation, tantdt par communauttJ de nerf s, 
tant6t par compression, par transmission et dissdmina- 
tion. Ce dernier mode d'exteusinn, aprè avoir porté le 
lrouble dans l'organisme entier, réat sur le c, entre circu- 
latoire, aceélère la c if c u I a tf o n, et rompt aussi l'équilibre 
dans les fonctions digestives, respiratoires, etc. Ce n'est 
pas tout : l'inflammation, qui se propage comme d'un c.entre, 
et fait sentir son influence aux points les plus élonés, 
peut aussi se déplacer; mais jamais elle ne devient gené- 
raie. A un certain degré d'intensité, lïnflammation aug- 
mente les sécrétions des organes enflammés; à un degre 
plus haut, elle les supprime. 
L'augmentation du fluide nerveux et du sang dans la 
partie enflammée est la cause la plos prochaine de l'in- 
Ilammation, mais cette cause est elle-même l'effet d'une in- 
finite d'actions differenfes : les nnes agissent sur un point 
de l'organisme et produisent rapidement la phlegmasie : 
tels le froid, la chaleur excessive, les violences extérieu- 
res, les substances irritantes et corrosives; les autres 
créent d'abord une modification génerale de l'économie, 
et sont, pour ainsi dire, prédisposantes : tels l'abus 
des alcooliques, l'habitude d'un régime trop stimu 
lant, le tempérament sanguin, etc. Ce phénomène ofl?e 
d'ailleurs un caractëre tout différent, selon qu'il est 
produit par des causes communes, ordinaires, ou qu'il 
résulte de causes spécifiques. Ses traces diminuent 
toujours et s'effacent quelquefois après la mort; le plus 
souvent, cependant, l'anatomie pathologique trouve, après 
les inflammatious aignês, la rougeur, l'injection, la tumé- 
faction, le ramollissement, la suppuration, l'ulcération des 
tissus enflammés. 
Le traitement de l'inflammation varie selon la nature 
des tissus, selon les causes qui la produisent, selon l'ge, 
le sexe, le tempérament, la force du stmjet qu'elle attaque; 
toutefois, les moyens tbérapeutiques pour la combattre, 
ayant toujours pour objet de diminuer et de détruire une 
coneentralion sanguine et nervuse, peuvent se réduire à un 
petit nombre d'indications générales. Ainsi la diète et les 
dëbilitants tendent h arrêter l'impulsion donnée anx fluides ; 
les saignees locales et générales, remploi du froid, les émol- 
lients, les narcotiques, les bains et les boissons tempérantes 
ont une actiou antiphlogistique directe; les purgatifs 
vomitifs, les vésicatoires, les sinapismes, les vento- , !es 



INFLAMSIATION -- INFUSION 39! 
cautère% le moxa, le séton, etc., altirent l'inflammation sur I forlune, disgrâce, suite de m a ! b e u r s auxquels l'homme 

des parties moins importantes que celle qu'elle occupe : ce 
sont des antiphlogistiques revulsi[s. Les antiphlogistiques 
dont l'action est jusqu'à ce iour inappréciée, et parmi les- 
quels nous comptons le quinquina, le mercure, etc., offrent 
dans beaucoup de cas une précieuse ressource. D'autres 
encore, dont l'action est spéciale sur tel on tel organe, 
entravent souvent les progrès de l'inflammation. 
P. GAUIT. 
INFLE3LION (de in, vers, flectere, fléchir). Cette 
expression désigne le changement de direction que prend 
une ligne, un rayon de lumière, quand il passe auprës d'un 
corps, etc. En musique, en entend par inflexion de voix 
le passage d'un ton  un autre. Dans le langage ordinaire, 
c'e».t encore l'action de flechir, de plier, d'incliner : 
iJlexon de corps. En termes de grammaire, il signifie 
la manière dedécliner ou de conjuguer { voyez, DIENce), 
ou les différentes formes que prend un nom quand un le 
décline, un verbe quand on le conjugue. 
On nommepoint d'in flexion dans une courbe le point o 6 
de concave elle devient convexe, etréciproquement. En ces 
points la tangente coupe la courbe. Les points d'inflexion 
appartiennent à la classe des p o i n t s singnliers. 
T'sso£. 
INI:LOI:tESCENCE, disposition des fleurs sui" la 
plante. Elle est très-variée, et ses modifications diverses ont 
etWramenées par les botanistes à plusieurs t) pes. Voici les 
principaux: le s p a d i c e , la c a l a t h  d e , le cëphalante 
ou capitule, l'ombelle, lacyme, le corymbe, la 
pa n icu/e,l'oepi, le thyrse, le chaton. 
INFLUENCE (dérivé de fluere in, couler dedans). 
Ce terme exprime l'action à distance d'tre corps sur un 
autt.e, ou l'empire qu'un ètre exerce sur d'autres, princi- 
palement à l'Cat de vie. Il est divers genres d'influences, 
comme celle des astres, qui verseur sur la terre la lumière 
et la chaleur, ou peut-ètre divers fluides capables d'agir, 
comme l'attraction, sur les créatures antreC. On nomme 
encore influences les transmissions des fluides magnétique, 
Ce,trique et galvanique à des corps différents, soit vivants, 
soit an6n6s. Les astrologues croyaient à une autre influence 
des astres sur la destinée humaine. Quelques-uns croient à 
l'influence magnétique. D'autres croient à l'influence d'è- 
tres surnaturels; d'autres, enfin, attribuent une certaine 
influence à des ètres naturels. On ne peut nier d'ailleurs 
l'influence d'un grand génie sur son siècle, d'un orateur 
sur une assemblée, d'un général sur son armée, etc. 
On dit qu'autrefois, sous le régime constitutionnel, les 
députés pour ètre réCus recouraient a toutes sortes de ruses, 
afin d'ar sur leurs éle,lents, et que d',in autre c6té ilstour- 
lneutaient beaucoup les ministres pour obtenir les moyens 
d'tre réCus : l'autorité s'en mèlait donc de toutes les la- 
çons, et souvent elle réussissait. C'est ce qu'on appela l'abus 
des influences. Maintenant que nous avons le suffrage univer- 
sel, et que l'autodté a ses candidats, l'abus des influences a 
dt cesser. 
I[.I,'LUENZA. Voyez GRIPPE. 
IN-FOLIO. Voye: FOaA. 
INFOIMATION. On appelle ainsi, dans le langage 
du droit, l'acte udiciaire qui constate les dépositious des 
t'moins et les renseignements recueillis et constatés dans tes 
premiers moments où l'on a eu connaissance d'un crime on 
d'un délit par les différents officiers de la police judiciaire. 
En matiëre civile les recherches judiciaires prennent le nom 
d'enquéte. 
Dans le langage ordinaire, on entend par informations 
les renseignements que l'on prend pour s'assurer de la véritè 
de certains faits, pour vérifier certaines allégations, connal- 
tre les habitudes, la conduite, les mœurs, les qualitésou les 
défauts, la probité ou l'improbité d'une personne : c'est dans 
ce sens que l'on dit : aller aux iv.formations. 
INçOR.MES. l'oçe: ËTm.l:, t. IX, p. 115. 
INFOP, TUNE mauvaise fortune, adversité, revers de 

n'a point donne occasion, et au milieu desquels il n'a point 
de reproche à se faire. Il s'emploie surtout dans le style sou- 
tenu. L'infortune tombe sur nous ; nous attirons quelquefois 
le nalheur : il semble qu'il y ait des hommes ifortuns, 
des ëtres que leur destinée promène partout où il y a des per- 
tes à éprouver, des hasards îacheux à subir, des peines à en- 
durer. Ainsi le monde est lait pour eux ; ainsi ils sont laits 
pmw le monde. 
INFRACTION (enlatin infractio, défivé de frangere , 
rompre, briser). Ce mot désigne toute violation d'une parole, 
d'un traité, d'une loi, elc. Les infractions aux lois se divi- 
sent en trois categories, les contraventions, les d«l ils, 
elles crimes. 
INFULE. On appelait infula chez les Romains la ban- 
delette de laine blanche dont les prètres, les vestal.es et les 
sacrificateurs se ceignaient la tète; deux cordons appelés 
vittce servaient à la maintenir. Les messagers de paix por- 
taient aussi l'inhale, comne un signe de sainteté et d'in- 
violabilit«. Des prêtres païens, elle passa aux év6ques cbré- 
tiens, et prit. alors le nom de m I tre. 
I.FUSE. Voyez. IrcsmN. 
INFUSIBILITE. La plupar des corps solides, soumis 
à l'action d'une température convenable, peuvent entrer en 
fusio n, c'est-à-dire passer à l'ctat liquide ; plusieurs ce- 
pendant résistent à cette action, et conservent leur état 
naturel. La chaleur de nos fourneaux, mème alimentés par 
le moyen d'un grand courant d'air, ne saurait îon, lre di- 
vers corps qui, soumis à l'action d'une plus forte cha- 
leur, pcuxcnt cependant changer d'Cat:ainsi, le pla- 
t i n e, qui n'a jamais pu ètre fondu dans aucun fourneau de 
furge, passe à l'Cut liquide sous l'influence d'un jet enflam- 
mé d'h,lrogène et d'oxygène; mais des corps oxydable» ne 
peuvent ëtre so,mis à ce genre d'action, qui en changerai/ 
la nature. La réunion rapide des électricités produites dans 
des appareils voltaïques très-puissants détermine le deve- 
Ioppement d'une chaleur extrèmement intense, au mo.en 
de laquelle on peut fondre les corps qui résLtent à toute 
autre action : ainsi, des tiges de platine d'un diamètre de 
plusieurs millimétres se fondent avec la plus grande facilité 
sons l'influence d'une forte pile; et au moyen du mème 
instrument des fragments de silice, de chaux, et d'autre» 
corps, qui n'Crouvent pas mème de changement sous le 
jet d'hydrogène et d'oxygène, présentent des phénomènes 
sensibles de ramollissement sur leurs angles. 
L'infusibilitè et généralement toutes les propriétés que 
nous observon dans les corps ne sont que relatives au 
moyen de les apprécier; si nous pouvions nous procurer des 
températures asse diverses, nous ponrdons probablement 
faire passer tons les corps solides à l'etat liquide; mais 
comme un certain nombre ne peuvent éprouver aucune ai- 
tCation par les moyens que la science possède, on les ds- 
signe sous le nom de corps infusibles, et on borne ordinai- 
rement ce caractère à la résistance que les corps oçposent 
à l'action du feu de [orge le plus violent ; si le corps est 
susceptible de se fondre et de se ramollir au c h a I u m e a u 
d'hydrogène et d'oxygène, ou au courant voltaïque, on in- 
dique cette propriçtc sans rien changnr à la dénomination 
précédente. Il. GAULTIEn DE CLAUBRI". 
INFUSION (en latin in, dans, et fundo, je verse). 
Les pharmacologistes définissent l'infi«son une opération 
dans laquelle on verse sur ,]es substances médicinales pré- 
parCs un liquide bouillant, dans le but d'extraire de .ces 
substances certains principes médicamenteux soluhles dans 
ce liquide. Dans le langage rigoureux, on ne doit employer 
le mot infusion que pour désigner le procède pharmaceu- 
tique que nous venons de désigner, et l'on doit appeler iEl)t- 
sure ou infusé le liquide obtenn par ce procedé. Il faut 
distinguer dans l'infusion le subMralum, c'est-'-dirc la 
substance médicinale dont on veut extraire cerlains prm* 
cipes actifs, et le vænslrue, le véhicule, l'ex, ip i eut, 
c'est-à-dire le liquide.bouil[ant dont on se veut servir iour 



a92 INFUSION -- 
extraire ces principes : le substratum appartient toujours 
au règne organique, presque toujours au rèe végétal ; 
pour menstrue, on emploie, suivant les principes que l'on 
veut extraire, l'eau, l'alcool ou l'huile; car la méme sub- 
stance ne livre pas les reCes principes médicamenteux  
ces trois ordres de véhicules. On prolonge le contact du 
substratum et de l'excipient pendant plus ou moins long- 
temps, suivant le but que l'on veut atteindre. L'élévation 
de la température du liquide, dans lïnfusion, augmente 
eaucoup l'énergie de son action ; mais cette énergie est de 
ourte durée, parce que le liquide en se refroidissant perd 
ì chaque instant de sa puissance dissolvante. Aussi l'relu- 
sion est un procéde que l'on réserve presque toujours pour 
les matières d'une texture délicate, dont le tissu se laisse 
facilement pénétrer par le liquide, et qui lui cder, t prompte- 
ment leurs principes aromatiques ou médicamenteux. On 
l'emploie encore lorsque l'on veut agir sur des corps qui 
renlrment des principes volatils qu'une chaleur trop long- 
temps prolongée pourrait dissiper : en ce cas, il importe de 
recousrir soigneusement les vases dans lesquels on opëre, 
afin d'éviter toute déperdition ; il importe aussi de diviser 
la substance que l'on fait infuser d'autant plus exactement 
que son tissu est plus serrë. BlLWlJ)-LcvËvnlL 
En chirurgie, on nomme infusion, une overation qui 
consiste h iujecter une liqueur dans une veine qu'on a ou- 
verte (voye-. 1,JECTO,), soit pour guërir une maladie, en 
faisant entrer directement dans le sang des médicaments li- 
quides, attirants et ívacuants ; soit pour taire quelques expé- 
riences anatomiques. La t r a n s f u s i o n d'un sang plus jeune 
ou plus pur était aussi mie sorte d'infi*sion. 
LXFCSOiIES. Dès que le microscope fut trouvé, ce 
merveilleux instrument vint ré éler ì Cornelis D r e b b e I I, 
son inventeur, aiusi qu'à Leuwenhoeck, qui l'avait 
perlectionnc, un nouvel univers, peuple de myriades d'èbes 
organisé[, dont jusque alors il avait été impossible de soop- 
çouner l'existence. Chacun put voir avec admiration la dé- 
cotapoition des corps dans un liquide produire d'autres 
corps dou6s de vie; véritables animaux, de qui la proesence 
inattendue d6moutrait que l'antiquité devina juste quand 
elle établit en principe ,, que toute corruption engendrait 
vie ». Comme ce tut d'abord au milieu des inlusions qu'on 
aperçut ces sortes d'animakules, il etait naturel qu'on les 
appelt des infusoires ; et i',luller, savant Danois, qui en 
fit le premier l'objet d'une etude a[,prolbndie, adopta ce 
nom, qui devint pour Gmelln celui d'un ordre dans la 
classe des vers de Linné. Jusque alors, les Itill, les Baker, 
les Joblot, les Ledermuller, les Eichorn, les Gleichen, et 
autres micrograples, s'étaient bornés ì mettre en técorn- 
position dans un liquide des parcelles de matiere végé- 
tale et animale, pour en observer les produits. La désigna- 
tion d'i»oEuoires pouvait donc Cre justifiable; mais dès 
que Roesel, dan un Appendice de son Histoire des In- 
sectes, eut si bien décrit et figuré quelques-unes des créa- 
tures in»isibles qn'enlantent les murCages, elle devenait 
vicieuse, puiu'elle exprimait une idée fausse. C'est en 
vain cependant que Bory de Saint-Vincent a cherché  
donner le nom de nicroscopiques aux êtres qui vont nous 
occuper. Le terme i»oE«soires, consacré par l'usage, a pré- 
valu. 
Dans ces derniers temps, les infusoires ont été étudiés 
par Nitzscb, l',leyen, l',l?,I. Peltier, Leclerc, Raspail, de 
Siebold, mais surtout par IM. Dujardin et Eh renberg. 
Ce dernier, aidé dans ses recherches par les perfectionne- 
ments du microscope, est parvenu ì reconnaitre la structure 
de ces animalcules, auxquels il donna le nom de ]9olygas- 
triques, indiquant les nombreux estomacs qu'il leur ac- 
corde : cependant tous les micrographes ne sont pas d'ac- 
cord avec lui ; ainsi, tandis que II. Ehrcnberg attribue aux 
infusoires un système nerveux et quelquetbis un oeil, un 
testicule, une vesicule sera[hale contractile et des œufs, 
i',1. Dujardin, d'accord avec M. de Quatrefages, les définit 
insi : « Animaux aquatiques, très-petits, non s'mëtri- 

ques, sans sexes distincts, sans œufs visibles, san cavité 
digestive dcterminée ou permanente, ayant tout ou partie 
de leur corps sans tégument résistant, et se propageant par 
division spontanée ou par quelque mode encore inconnu. » 
Les micrographes ont distribué les infusoires en un grand 
nombre de tribus, l',l. Dujardin, qui en sépare les v i b r i o n s 
divise les inlusoires en non ciliés et ciliés (pourvus de 
cils vibratiles servant/ la fois d'organes respiratoires et lo- 
comoteurs). Dans la première cathode entrent les amibiens 
ou/ rotdes, animaux la¢ges au plus de deu cinquiëmes 
de millimètre; les rhi'-:,poles, qui secrètent une coque 
molle ou dure, cornée ou calcaire; les «ctinophryens; les 
rnonadiens ( voye-. ?,lo,xvE ); les v o I v o c i e n s; etc. Parmi 
les infusoires ctliés, on distingue les trichodiens, les ero 
vil[eus, lesiaramdciens , les vorticelliens ( vwje-. VOaT- 
CELL ), etc. 
IXFUSUM. Voye-. IarVS0N. 
ING.'EVO.S nom de l'une des trois andes familles de 
peuples entre lesquelles étaient al[visées les populations de 
la Germanie, et qui provenait de Ing ou Ingo, l'un des 
fils de Mannus. Pline comprend au nombre des Ingoevons 
les Cimbres, les Teutons et les Chauces; suivant des recher- 
ches récentes, il faudrait encore y ajouter les Saxons, les 
Angles, les lutes, les Frisons et les Herules. 
IXGELBURGE ou ISEMBUBGE, fille de ,Valden.ar Ier 
et sœur de Canut VI, roi de Danemark, épousa, en 1193, P h i- 
l i p p e- A u g u s t e, roi de France : la jeune reine était aussi 
belle que vertueuse. Le roi conçut pour elle, dës le jour 
méme de ses noces, une aversion invincible, ce qu'on 
attribua  un sortilége. Sous prétexte de parenté, le roi lit 
déclarer nul son mariage, db.s le quatrième mois, dans 
une assemblee d'évèques et de seigneurs, tenue ì Com- 
piègne. Il relégua Ingelburge  Etampes, où on la traitait 
fort durement. Trois ans après il se maria avec Agnès de 
i',léranie. A la sollicitation de Canut, le pape In noce n t III 
mit alors le roi et le royaume de France en interdit. Le roi 
cependant reprit Ingelburge au bout de douze ans. Suivant 
i',lezerai, il alla prendre un matin la reine sa première 
femme en son logis, et, la montant en croupe derrière lui 
l'emmena où il lui plut, ayant fait dire au légat qu'il la 
reonnaissait et la voulait pour sa femme. Ainsi linirent les 
querelles entre le roi de France et la cour de P, ome. Ap és 
la mort de Fhilippe-Auguste, qui lui laissa par testament 
un revenu de 10,000 livres, lngelburge se retira  Corbeil, 
où elle mourut à l'/ge de soixante ans, en 1237. Elle fut en- 
terrée avec pompe à Essonne, dans l'église Saint-Jean, que 
desservaient les templiers. En 793, j'assistai /l l'ouverture 
de son cercueil, on y trouva une couronne en cuivre dorë 
et une quenouille. Ces objets furent déposés  l'arsenal de 
Paris. Ch er Alexandre 
IX'GEMAX'N (Bu-Sv,), l'un des plus remar- 
quables poêtes danois contemporains, est né le 28 mai 1789 
dans l'lle de Falster, où son père était pasteur : ses débuts 
comme poëte datent de lSo-, où, sous le titre de Digle, il fit 
para[tre un choix de poésies lyriques, Den sorte ltidder, et 
à partir de 1815 tout une suite d'œuvres dramatiques, 
telles que Masaniello, Elanca Hyrden of Tolosa, Love- 
ridderen, ltoesten i OErt;enen, lteinald Underbarner, 
Tasso's lefriede (18t9); puis une série de nouvelles et 
de contes, entre autres de Underjordisle (18 tT) et Eventyr 
09 Fortoellinger ( 
Le premier voyage qu'Ingemann entreprit en Ailemagne, 
en qrance, en Suisse et en ltalie dans les années 1818 e 
IS19, lui inspira ses tleiselyren (2 vol., 1820). A partir 
de 1522 ses ouvrages portent l'empreinte d'une direction 
historique et religieu«e. Sa remarquable ép,»pée Walde»ar 
de Store 09 hans Mœend (182-1) fut suivie de romans his- 
toriques, dans lesqels il chercha  représenter à sa manière 
sous une forme poétique le cté romantique de l'histoire du 
Danema-k au moyen ge. Nous citerons plus particuliere- 
ment WaldemarSeier (3 roi., 18.6), ErilMenvcd's 
13arndorm (la Jeunesse d' Erik Menved, trad. en 



INEMANN 
{ Paris, 1844 ; Boulé]); Kon 9 Erik 09 de Fredloese (t823), 
et Prid$ Otto o9 havs Samrid (1835). Son dernier 
roman, Trois semaines avant l'oël et la reille de l'oël, 
a paru en 1851. 
INGÉNIEUR. Ce terme vient, suivant les uns, du latin 
ingenium, génie, et suivant d'autres d'e n 9in, mot par 
lequel on désignait généralement les machines de guerre 
dont on faisait usage pour lancer des projectiles, battre les 
murailles, etc. Les armées ont donc eu de tout temps 
par,ui elles un corps d'ouvriersingénieurs, qui étaient charg, 
de la construction de ces machines. A proprement parler, 
la profession d'ingénieur est aussi vieille que le monde ; 
Oll en trouve des preuves cbez toutes les nations. C'étaient 
bien des ingnieurs qui jetaient des ponts suspendus sur 
les riviéres du Pérou. Les pyramides du Mexique, les cons- 
hactions extraordinaires que l'on voit en diverses contrées 
du nouveau continent, n'ont pu Sire conçues et exëcutées 
que pat" des hommes expérimentés, et doués d'une intelli- 
gence supérieure à celle du vulgaire. Si nous jetons un 
coup d'oeil sur le vieux continent, nous y vo.ons presque 
partout des monuments éclatants de la science de l'ingé- 
nieur, et qui remontent à la plus haute antiquité. La Chine 
possède des canaux magnifiques, l'Inde vous montre ses 
obélisques, ses temples immenses. Que ne devait pas Stre 
la science de ces Egyptiens, qui semblaient se rire des 
difiicultés qu'ils devaient rencontrer pour extraire de la 
carrière, transporter, ériger, ces masses colossales, qui 
feront en tout temps l'admiration et l'étonnement de ceux 
«lui auront occasion de les contempler ? Les Grees avaient 
des ingénieurs, qui ne le cëdaient point pour la hardiesse et 
l'intelligence à ceux de l'antique lgpte, et qui leur étaient 
mèlne supérieurs sous le rapport du goOt. Qui n'a pas en- 
tendu parler des voies romaines, ouvrages immortels ? Quel 
ingénieur de nos jours ne serait pas fier d'avoir construit 
le pont du Gard, l'aqueduc de Sgovie, les égoOts de 
Borne, etc. ? 
Un vëiitable ingénieur est un homme presque unixersel : 
de la main dont il dessine l'admirable colonne qui orne 
le Forum de Trajan, Apollodore trace le plan d'un pont 
de cent cinquante pieds de haut, que ce prince fait jeter sur 
le Danube. Michel-Ange b,tit des ponts, construit des for- 
tifications, compose l'Corme et magnifique temple de Saint- 
Pierre «le Rome, sculpte avec un rare talent l'image du 
ffgislatetir des Juifs, peint à fresque l'immense tableau 
Jugement dernier, et, qui plus est, au milieu de ces vastes 
occupations, il trouve encore le temps de tourner des vers. 
S'il i'ett voulu, ce grand homme eùt été astronome, géo- 
grapl,e, mécanicien, constructeur de vaisseaux, etc., du 
premier ordre. 
Les ingénieurs de notre temps sont des hommes d'un sa- 
voir accompli; ils possédent au suprème degré les mathé- 
matiquas, la physique, la chimie, la mécanique ; ils sont 
en outre bons dessinate,u, rs. Ce sont donc des hommes ¢a- 
lables de concevoir et d exécuter toutes sortes de travaux : 
il n'en est pas un qui, au besoin, ne fat en état de tracer 
le plan d'un temple, la composition et la coupe d'un vais. 
seau; il dirigerait volontiers une ,fonderie, une !,a, brique 
quelconque. [éanmoins, comme il n est pas donné/ I homme 
d'exceller également en tout, et qu'un savant de beaucoup 
d'instruction peut fort bien manquer de génie, on a depuis 
long temps distribué les ingénieurs en diverses classes, afin q ue 
chacun pot négliger sans inconvénient certaines parties des 
nnaissanc liumaines pour se livrer avec plus de force et 
d assiduité à I étude des sciences que son goOt et ses devoirs 
l'obligent de cultiver plus spécialement. Ainsi donc, nous 
avons des ingénieurs militaires, qui en temps de paix sont 
chai'gés de la construction de fortifications, des réparations 
qv'il convient d'y faire; et en général tous les b/Riments qui 
•ont du ressort du ministre de la guerre entrent dans leurs 
attributions. En temps de guerre, on leur confie la direc- 
tion des travaux qu'on thit exécuter pour l'attaque ou la 
dcfense des places, etc. (voye= G.x). Les ingénicul-S-géo- 

-- IIGLIS 393 
graphes s'adonnent particuliérement à l'art de lever les plans 
d'un camp, d'un champ debataille, la carte d'un pays, etc. 
Depuis 1831, cette spécialité peu nombreuse a été fondue 
dans le corps d'Cut-major. Les ingénieurs des ponts et 
chaussées tracent des routes, cons{,uisent des p,nts, 
creusent des canaux. Un ingénieur de la marine fera tout 
pour donner aux vaisseaux la forme et les dimensions qui 
les rendent propres à sillonner les ondes avec le plus de 
vitesse, etc. (voyez. GÉIIE M&RITIE). Un ingénieur des mines 
sera ncessairement un b ,n chimiste ; il saura quels sont les 
moyens les plus économiques dont on peut s'aider dans 
l'extraction «les minéraux du sein de la terre, etc. Un in- 
génieur hydrographe a dans ses attributions les ports et les 
cotes qui bordent les mers, dont il relève le gisement. 
Co n'est qu'au dix-septième siècle, sous Louis XIV, que 
les ingénieurs ont été organisés en corps divers. C'est encore 
à cette époque que l'on commença à leur faire subir des 
examens avant de les admettre dans les services publics. 
TEYSSÈDRE. 
INGÉNU. Chez les Bomaim, on distinguait parmi les 
hommes libres les a.ffranch is et les nç(nus. L'ingénu 
était celui qui, né libre, n'avait jamais cessé de l'Sire, / 
moins qu'il n'eut été esclave par erreur. Les ingénus jouis- 
saieut de certains droits que n'avaient pas les affranchis, 
comme de porter l'anneau d'or. Ils ne pouvaient ëpouser de 
courtisane ou de comédienne. 
I.,'GÉXUE. Le tiletre a encore ses in.qcdnge$ : là, c'est 
un réle, ou, dans le langage technique du lieu, un emploi. 
llolière, auquel il faut remonter pour tant de ceCllons, en a 
fourni le type dans son Agnès de L'Ecole des Femmes. 
11 '1« Debry, qui le créa, fut jusqu'à un age assez avancé 
une trës-séduisante ingénue. On peut citer parmi celles qui 
lui succédérent 11 «' G aussin et Doligny; et plus tard 
1I ''»Marg. Anals et Piessy. Ocnnv. 
INGÉNUITÉ. L'homme ingdnu est celui des lèvres 
duquel la vérité coule constamment et sans efforts; il est 
mieux que vrai • car il n'a point formé la résolution de l'ètre, 
et s'est trouvé tel naturellement. La sincérité ient des prin- 
cipes; l'ingdnuit¢ , du caractère. C'est, au surplus, la vertu 
ou la qualité q,ie notre civilisation ralfinée altère le plus 
promptement; il n'est guère d'ingénus parmi nos jeunes 
ilommes les plus Jeunes, et c'est tout au plus si l'on en trouve 
encore chez nos enfants. Nos mœurs, nos spectacles, la 
précocJté de leur entrée dans le monde, rendent aussi l'in- 
génuit bien rare parmi nos jeunes filles : tout contribue à 
leur enlever dès leurs premières années ce charme moral 
qu'on pourrait appeler le velout de la pudeur. X,'oltaire 
s'amusait tin peu aux depen de ses lecteur en baptisant 
son lluron du nom de l'Ingënu. Un sauvage peut-il ëtre 
autre CllOSe, transporté dans notre ordre social? L'ingénu 
phénomène, et m6ritant ce titre spécial, serait celui qu'au- 
raient laissé tel les leçons de l'éducation et du monde (vogez. 
CArabinE). Il est deux autres sortes dïngénuité, bien diffë- 
rentes de celle-ci, et dont il faut faire aussi mention. L'af- 
ficlie des mauvaises mœurs ou l'aveu qu'on en fait peut 
ëtre qualifié d'in9nuit du vice = elle fut commune dans le 
dernier siècle; heureusement, et par compensation à la perte 
de l'autre, ellela presque entiërement disparu de celui-ci. Il 
n'en est pas de mme de l'ingnuit de l'amour-propre. 
Si, dans l'auh'e siècle, Lemierre, Bartbe, etc., en filreut 
des modëles, on n'aurait que l'embarras du choix si l'on 
entreprenait de citer tous les litterateurs de nos jours, 
grands et petits, qui s'érigent de leurs propres mains un 
piédestal, du haut duquel ils planent sur l'humanité en- 
tière. Oumv. 
][GLIS (Sir Boa HRBY), l'un des champion 
du parti de la haute Église dans le parlement d'Anleterre, 
était le fils d'un directeur de la Compagnie des Indes 
orienta le s, sir Hugh I_xcus, et naquit le I janvier 176. 
Ëlevé/ Oxford, il se destina à la carrière du droit, ét se lit 
inscrire en 1808 comme barri.ter. En 18 il fut envoyé 
au parlement par les electeurî de Dundalk, et en 1826 par 



304 I[gGLIS 
ceux de lipon. Quand, en 189, sir lobert Peel dut ré- 
.qigner son mandat de représentant de Puniversité d'Oxford, 
par suite de son changement complet d'opinion au sujet de 
l'émancipation des catho|iques, sir lobert Inglis, se posant 
en champion de l'Eglise établie, reçut ì une forte majorité 
le mandat retiré  lobert Peel. Depuis lors, il ne cessa point 
de représenter t'université d'Oxford au parlement, ou on le 
vit combattre successivement, avec plut de cbaleur et d'ani- 
mation que de succès, l'émancipation des catholiques, la 
réforme parlementaire, l'abolition des lois qui interdisaient 
l'intxoduction des céréales étrangères en Angleterre, et tout 
récemment encore l'émancipation des juifs. Homme honnête, 
bienfaisant et sincère dans ses opinions religieuses, il e put 
e plier aux idees nouvelles, dans lesquelles il voyait un 
danger pour le maintien de la foi protestante; mais s'i| les 
combattait avec une persistance et une opiniatrete dignes 
d'un meilleur sort, il faut lui rendre cette justice que sa 
polémique n'avait jamais rien de personnellement blessant 
pour ses adversaires. Doué d'une érudition peu commune, 
il fut nommé en 180 professeur d'arciéologie à i'Academie 
royale des Beaux-Arts. La lfoyal-Society, la Seciéte des 
antiquaires et diverses autres societés savantes le comp- 
taient au nombre de leurs membres. Il est mort au mois 
de mai 
INGOLSTADT ville et place forte de la haute Ba- 
vière,  Pembouchure de la Schutter dans le Danube, ap- 
pelëe originairement ln9o[destadt, et dans tes eus rages 
latins du seizieme siëcle, Aurpolis ou Crysopolis, compte 
environ %000 habitants. Elle possède trois églises parois- 
siales, dont une pour les protestants, un couvent d'hommes 
et un couvent de femmes, qui est en mëme temps une mai- 
son d'education à l'usage des jeunes lilles, un h6pital, et un 
vienx chateauou l'on montre empaille le cleval que montait 
Gutave-Adolphe lors d'une reconnaissance qu'il vint taire 
de cette pince, et qui fut toc souslui d'un coup de canon tiré 
du rempart. En 1672 l'Cecteur Louis le Riche de Landshut 
fonda  lngoL-tadt une universite, oi l'on compta beau- 
coup «le prolesseurs lebres, B, eu chlin, entre autres. 
En 1773, lors de la suppression de l'ordre des Je-uites, 
Adam XVeisshaupt ) fonda son fameux ordre des I II u m i- 
nC. L'universite d'Ingolstadt lut transfèrée en 1800 
Landslmt, et de cette ville à Munich en 186. 
En 189.7 le roi Louis ordonna de reconstruire les fortifi- 
cations de cette place, qui avaient été rasC en 1800 par 
les Français. Cette opération a exigé près de vingt ans de 
travail, et a été execut#e de la manière la plus grandiose. 
On admire a hon droit la solidité et l'elegance des forts cons- 
truits sur la rive gauche du Dannbe. 
INGOUVILLE. Vove'. H.vE (Le). 
INGBATITUDE. ous sommes assez de l'avis de ce 
poëte qlii s'écriait : Qu'il est noble et beau de faire des 
çrots ! mai» qu'il aimerait mieux qu'or, tfit reconnaismnt. 
L'ingratitude est en effet de tous les vices le plus odieux, 
le plus méprisable : rien de plus cruel pom" celui qui n'a 
jamais eu que de la bienveillance pour quelqu'un, pour ce- 
lui dont les hienfaitg envers les autres ont été sans hornes, 
que de voir ceux qui hd doivent peut-être tout unir leurs e- 
orts pour lui nuire, le récompensant ainsi des bontes dont 
fi les a combles. Il existe cependant des inats, et le 
nombre en est bien plus grand que la laideur de l'ingratitude 
ne semblerait devoir le comporter. 11 est vrai qu"& l'aide 
des mots on parvient à enlever aux choses ce qu'elles ont 
de repoussant, et l'ingrat sait si bien profiter de cet 
avantage, qu'il trouve presque toujours des approbateurs. 
Ainsi il ne manquera pas de trouver des torts a celui qui a 
tont fait. pour lui. Lui a-t-i| surpris dans l'intimité quelque 
déaut, sait-i| quelque affaire de famille destinée  être 
ensevelie dans |e plus pro{ond secret, pour faire de la peine 
 celni qui fut son ami il n'aura rien de IdUS pressé que 
de l'ebruiter : semblable au serpent de La Fontaine, qui, 
 peine revenu de son engourdissement, commence par 
donner la mort  celui qui sient de le rechauffer, l'ingrat 

n'est jamais plus heureux que s'il parvient à nuire à celui 
qui l'obligea. C'est presque toujours entre amis et parents 
que l'ingratitude éclate avec force : elle est d'autant plus 
sensible à ceux qui en sont t'objet, qu'ils étaient moins en 
droit de s'attendre à ses coups. 
INGRÉDIENT. Ce mot, dérivé du verbe latin ingre- 
dior, j'entre, désigne en général diverses substances qui 
concourent à composer des mélanges, il est particulièrement 
usité dans le langage pharmaceutique : ainsi, on dit : ]1 
entre beaucoup d'ingrédients dans fa thériaque, etc. On 
en fait encore fréquemment usage en par|ant de diverses 
préparations de cuisine et d'autres arts. 
INGBES ou IXGBIENS. Vou.e,- F_'ots et Itçme. 
INGIES (JE.Li-DOUXtQVE-AuGuSTE), peintre d'histoire 
et de portraits..Bien peu, parmi les hommes illustres de ce 
temps, ont connu autant que M. Ingres les rigueurs ex- 
trêmes de la critique ou le fade encens de l'Coge. Ignor 
pendant la premiere përiode de sa vie, il a été dans la se- 
conde salué entame le plus grand artiste de ce siècle, et 
cependant leg lettrés et les gens du métier ont seu|s pris 
part  ces polémiques bruyantes, ans interêt pour le pu- 
blic, que la manière du maitre n'a jamais su irriter ou sé- 
duire. C'est que M. Ingres, placé par son originalité mme 
en dehors de fa tradition nationale, étranger  son temps 
et à son pays, a plut6t fait de l'archéologie que de l'art 
depourvu de passion, il n'a pin émouvoir la foule, qui ne 
jue que d'après sa passion. Quelques dëtai|s biograpbiques 
diront ce qu'est l'homme et ce que le peintre aurait voulu 
6tre..Ne  Montauban, au mois d'août t'/l, M. Ingres n'a 
pourtant rien dans sa manière qui révèle une origine gas- 
conne. Son père, qui était professeur de dessin, s'était mis 
en tete de lui faire apprendre le violon, et telle fut la pre- 
mière éducation du jeune Ingres, qu'il joua dit-on, avec 
succès sur le théatre de Toulouse un concerto de Viotti- 
La peinture, eepemlant, le tenta : il commença son Clie 
cation pittoresque chez Boques, peintre toulousain, qui sa- 
vait assez bien son métier, et qui a conservé jusqu'h sa mort 
( 1847 ) dans son sty|e et dans son coloris quelque chose de 
la coquetterie et de la gr;lce alfectée des mallres du dix- 
huitième siècle. Il ne parait pas que M. Ingres se soit beaux- 
coup souvenu de ses leçons. Attiré bientôt /l Paris par la 
réputation, alors sans rvale, de D a v i d, le jeune élève en- 
tra dans l'atelier de l'auteur du Serment des Horaces, et 
il remporta en 1801 le grand prix de l'Académie. Le 
suet du concours était l'Arrivée des ambassaleurs cl'A- 
9amemnon dans la tente d'Achille. Cette peinture, qu'on 
peut voir  l'École des Beaux-Arts, est propre, soignée, 
d'un got)t dejh élégant, mais d'un dessin très-faible. 
M. Ingres partit pour Reine en 1806. C'est Ih, devant 
les lresqttes de Raphael, qu'il songea  secouer le joug que 
le style de David tisait peser sur t'art français. Il avait d'a- 
bord accepté sans murmure, comme on le voit dans son 
tableau de conconrs, le type pseudo-grec que l'ancien con- 
ventionnel reproduisait  satiété; le moment de la rëvolte 
hfi sembla venu, et il commença, avec la patience qui lui 
tenait lieu de génie,  élever aute| contre autel. Il y eut 
la de la part de M. Ingres un immense effort, et il est 
iuste de lui en tenir compte, tout en reconnaissant que sa 
tentative avorta, lemonter, comme le fit M. ]ngres, a Ila- 
phael, à Pérugin, aux miniaturi>tès du moyen àge et pres- 
que attx Bzantius, c'était vouloir faire une rëvolution par 
le pastiche, par l'archaisme ; mais les révolutions ne se 
font qu'avec des idëes. Certes, c'était un art suranné que 
celui de David ; mais ce|ai dont M. Ingres allait chercher 
le modèle dans les marres primitifs, ëtait-ce un art plus 
vivant ? L'école française ne pouvait être et elle n'a rëel- 
lement été régênerée que par un retour sincère/l la nature 
dolaignee, que par la puissante émotion des Gros, des 
Géricault et de ceux qui curent comme eux le senti- 
ment de in vie moderne. Les débuts de M. In,es temoi- 
gnèrent d'une certaine hésitation, et le succès pobr lui 13tf 
troes-lent à venir. Son propre portrait (t804; celui de 



GBES 
Bonaparte (an xn); l'oEdipe, dont il puisa la donnée pre- 
mière dans un recueil de gravu res d'après des vases etrusques 
O808), ne réussirent que iaiblement. Une Dormeuse ; une 
Femme au bain; Jupiler et Thes (Musée d'Aix); Virgite 
liant l'£noeide à Au9usle ; le Songe d'Ossan; l'lnloe- 
rieur de la chapelle Sixline, se suivirent d'assez prè.; 
mais ce ne fut guère qu'au salon de lai9 que le nom de 
M. Ingres (qui déjà avait trente-huit ans) commença  faire 
du bruit. Il y avait exposé Philippe V dcorant de la 
'oison-d'Or le maréchal de JBerwick ; l¢oger alCivrant 
Angoelique, et L'Odali.sque. Les principaux critiquesd'alors, 
M. Kératry, dans ses Lettres sur le Salon, et Landon, dans 
les Annales du Musoee, traitèrent durement l'artiste, et lui 
lirent, à proposde ces de,ix dernières productions, des repro- 
ches qui, malgré la petilesse du point de vue, portaient juste 
en plus d'un point. « Il n'y a dans cette figure, disait 
Landon en parlant de POdalisque, ni os, ni nmscles, ni 
sang, ni v/e, ni relief, rien en/in de ce qui constitue l'imi- 
tation. » Les classiques s'indignaient. Plus tard, lorsque 
M. lngrns eut peintFrançoisede lqimini, L'Entroeede Char- 
les V b Paris (1822), Henri IV jouant avec ses enfants, 
la Mort de Léonard de Vinci et le VœU de Louis XIII 
(182.i), les coloristes, les adeptes de l'école nouselle, pri- 
rent à le»r tour la parole, et .',I. In[,,res se trouva exposé 
au Iu de deux batteries. 
Le malheur était que des deux c6tés on avait raison 
contre lui; car on ne trouvait dans son œuvre ni le style 
en ce qu'il a de correct et de pur, ni la réalite s ivante 
en ce qu'elle a de saisissant et de vrai. Par une consé- 
quence funeste du syst6me d'éelectisme que .',I. lnges avait 
adopté, l'unitWmanquait ì son de»sin comme à sa com- 
position. Et cependant, il y avait dans son moindre tableau 
une simplicité bien précieuse en ces temps @emphase et 
d'exageratinn, et mieux que cela, un caractère hardiment 
tranché, un culte sincère de rélegance, une poursuite in- 
cessante et parfois heureuse de la grandeur et de la gdtce. 
Le moment de la gloire allait venir pour M. Ingres. Ceux-là 
mème qui lai étaient le plus hostiles avaient été forcés 
de reconnaitre dans le Vœu de I, otzLç XIII les signes d'nne 
individualité imposante : l'auteur fut nommé membre de 
l'institut (1825). Le succès du Vœu de Louis Xlll, 
qu'on avait placé dans la cathedrale de Montauban, fut 
hient6t dépassé par celui de l'Apothoeose d'Homëre, que 
M. Ingres peignit au Louvre, dans l'une des salles du musée 
Charles X (187). Cet ouvrage, qui .a le sérieux dç.faut 
de n'ètre point conçu dans les conditions d'un plafond, est 
resté l'une des productions les plus honorables de 3I. ln- 
gres, malgré son deplorahle coloris et la froideur ,le sa 
composition, où les plus vulgaires lois du groupe sont mal- 
heureusement meconnues. Le Martyre de saint S9mpho- 
rien, qui fut exposé en 183-i et qui orne aujourd'hui l'e- 
gfise d'Autun, souleva des tempètes. L'éloge lut sans mesure 
sous la plume des amis de M. lngres ; mais la critique fut 
si siolente dans sa négation absolue, que M. lngres, dé- 
couragé, résolut de s'absenter désormais des expo.-itions du 
Louvre, et, comme un Achille irrité, se retira sous sa tente. 
• Nommé peu aprës directeur de rEole de Rome, il partit 
pour la ville éternelle, où il vécut six ans dans une solitude 
laborieuse. Là encore, les partisans de la tradition vaincue 
le poursuivirent, et i'Académie crut devoir protester par 
l'organe de son secrétaire, Raoul Rochette, contre l'ensei- 
gnement que 51. Ingres donnait aux élëves de l'Ecole. La 
Stratonice, qu'on n'a vue à Paris qu'en 18gO, est un fruit 
patient de ces années de retraite. Depuis lors M. In;eg, 
fuyant le grand jour des exhihitions publiques, a expose cfiez 
lui la Iïerge I. l'hostie (181), le portrait de Cherubini 
(18-12), et la Vénus anad9omène (188). Avant la révo- 
lution de Février, M. Ingres avait entrepris au cb',lleau de 
Dampierre, chez bi. de Lunes, de an«les peintures, qu'il 
n'a point achevées. Quoique restée à l'Cat d'ebauche, celle 
qui représénle L'Agc d'or, est une des conceptions les plus 
I«:ureases de l'auteur. Une œuvre plus récente, r Apotlose 

-- IN61ME 
de 3"apoléon à l'bStel de ville de Paris, a mon|rWque rat- 
tiste n'avait fait aucune concession à la critique. Une Jeanne 
d'Arc à e peinte en 185 fut exposée pendant les 
données par la ville d'Orléans à l'osion de l'inangu- 
ration de la shtueéquestre de h Pucelle par Foatier. Indé- 
pendamment du portrait de Cherubini et de l'Angdlique , le 
musée du Luxembourg conserve une importante toile ri- 
gieuse de M. lngres, J-Christ donnant les clefs du 
ciel à saint Perre. On voit chez M. Pourtaiès Raphael 
et la Fornarme, et chez M. Goup, une petite Odalique 
datée de 139, et différente par le dessin comme par la di- 
mension de celle qui a etc grav et critiquée par Landon. 
Parmi les portrai de M. Ingres, on a smtout remarqué 
ceux du duc d'Orlns, de MM. de Pastoret, blole et Bertin de 
Vau, de M mes d'Hausnsille et de Rothschd. Ces porai 
emprtent leur oeract6re ì une grande oecherse d'exCu- 
tion ; la lumière y est grise et terne, l'expreion et la vie 
en sont absentes. On doit aussi h M. lngr I cartons 
vitraux d chapelles de Dreux et de Saint-Ferdinand. Enfin, 
M. Ingres a occupé à luiseul un on de l'exposition uni- 
serselle d Bux-Arts de 1855. 
Avant et pendant n séjour à Rome, M. Ingres a [ormd 
divers éleves, qui lui sont regtés plus ou moins fidèle, et 
parmi iquels on cite bIM. H. Flandrin, Amaury Duval, 
Ziegler, Chaeriau, . Lefimann, et les Ireres Bae. 
M. Iagra voulu substituer un tpe nouveau au type 
roide et froid de David, et il a bien lhit ; mais sa science 
l'a trompe, et il n'a abouti trop souvent qu'a un edectme 
glacé. Plus tard, à une epoque ou le sens de la buté se 
perdait »oas la main fievreuse de peintres qui ne recher- 
chaient plus que l'expression, I- lngres htta avec courage 
oentre l'invasion de la laideur et de la vularite. Nul pire 
que lui ne s'est inquidé de la noblesse, de la simplicite, de 
l'eleganoe; mais, Idas[ a ne comiddrer qoe les r¢.sula/s 
obtenus, cette respectable piration vers hde est reste 
un rave magnifique,  rae non reaUsé. On a bucoup 
vautWla correction du dess de M. Ingr ; on a eu tort, 
oer là ou n't point l'ité, la correction ne urait ètre. 
Mais c't s(rtout le mode/d qui chez lui e»t facilement at- 
taquable; rimperfection en t sensible dans l'Odalisque, 
l'Angélique et l'oEdipe. C'est que le mode[ë et la lmnière 
se tieent, et que M. In,es n'a point suffimmet éié 
les lois du clair-obscur. Le ul bleau où il se it préoc- 
cupe de la justse de l'effet, c't l'Intcrieur de la cha- 
pelle Sixtine, qu'il a d'ailleurs peint d'apr nature ( 181. 
C'est le seul aussi dont la oeuleur ait quelque harmonie; r, 
sans répteç des critiques banal, il faut bien  e que le co- 
loris de M. Ingres est d'ordinaire pille, gris, terne, à mos 
qu'il ne soit franchement discordant et criard. La Stratonice 
est oemme un damier rouge et bleu, dont les todisparates 
blessent l'oeil le moins ddicat. Mais ce qui, ptus encore que 
 defauls, explique et motive les protestations que .I. - 
gr n'a jamais cessd de soulever, c'st l'absence de mou- 
vement et de pnsée, la froideur de laconception, la morne 
tristesse de l'ensemble. M. gr, il faut le dire et le rere 
toujours, n'a pa$ le sentimet de la ie; d n'exprtme pas, 
et dans les temps ou nous mmes ceux-la ses nt 
aimés de la foule qui savent la frapper au oenç. Paul 
IXGRIEparti« dugousernement de Saiu[-P6tersbour. 
On appelle ansi lacoatrde qui s'etCd entre le lac Ladoga, 
la cwa, le golfe de [inlaude, la Narwa et 1 gouverne- 
ments de Plekow et de Nowogorod. L babitan, appel 
d'après le fleuve luger ou Zscbora, lngriens ou Zsclwres, 
sont d'origine finnoise; mais dans le«rs mœurs et leur lan- 
gue ils ont beaucoup empruntWax Buses, avec ]quels 
ils vivent mçles depois longtemps. C'est une race paresseuse, 
iguorante, superstitieuse, et par conséquent très-misérable. 
Ce nom lngrie parut pour la prem[ëre fois dans l'histoire 
Ioïsqu'en 1617 ce pays fut céde ì la Suède par la Russie, 
 laquelle il avait apparten depuis le teiziëme siëoee. 
conquise par Pierre le Grand, eu 1702, l'lngrie a «te rdun 
en 1783 au g,,-.vernement deSat-Pd[ersbourg. 



996 INGUIIAL 
INGUINkL (du latin inguen , l'aine), qui appartient 
à l'ai n e. Les 91ondes in9uinoles sont celles qui se trou- 
vent situées ì l'aine : elles ont la grosseur d'une fëVeo 
Une h er n i e inguinale est celle qui vient  t'aine. 
INHALATION, action d'inhaler, inspirer. C'est un 
mot nouveau, qui n'a étWcreé qu'à t'occasion des propriétés 
qu'on a découvertes à l'ACher et au chloroforme de 
supprimer la douleur des opérations chirurgicales et géné- 
ralement la douleur physique, alors qu'aulieu de les prendre 
en substance, on les vaporisait sur un linge ou dans un 
vase pour les respirer avec l'air, pour les inhaler. 
INHERENCE (du latin in, dans, et hoerere, Cre 
altachë), union de deux choses inséparables par leur na- 
ture : la douceur est inhérente au miel, parce qu'il est im- 
possible d'enlever cette qualité à cette substance sans qu'elle 
change de nature. 
INHUMATION, dans son acception matérielle, est 
synonyme d'eterrer, mettre en terre, dëposer dans la 
terre (du latin ihdans, et humus, terre) ; mais, dans l'usage 
social, il a toujours dit plus qu'eterrer, parce qu'il ex- 
prime la sépulture I,'gale ou ecclésiastique. On ente,'re tout 
ce qu'on cache en terre; on ikume l'homme à qui on rend 
les honneurs funëbres. L'assassin enterre le cadavre de sa 
victime; les ministres de la religion inhment les fidèles. 
Aux termes de la loi français, aucune inhumation ne 
peut avoir lieu que sur l'autorisation de Foflicier de l'état 
civil; il ne la délivre qu'après la constatation du décès, 
faite par un oédecin à ce commis. Vingt-quatre heures 
doivent s'Cre écoulées depuis la déclaration de décès pour 
qu'on puisse procéder à lïnhumation. Ceux qui ns au- 
torisation préalable feraient inhumer un individu décédé 
seraient punis de si jours à deux mois d'emprisonnement 
et d'une amende de 1 francs  0 francs. 
Dans les cimetiéres publics une Iosse séparée doit 
Cre affectée à chaque inhumation; mais celle prescrip- 
tion n'ési pas suivie dans les grandes s illes, Cil l'excès de 
la population rend nécessaires les fo s s e s communes. La 
présenlation du cors à l'église ne &.pend plus que de la 
volonté du défunt o, de sa lamille. Le mode le plus con- 
venable pour le Cran,port des corps est réglé, suivant les 
localilés, par les maires, saut l'approbation des prefets. 
Les fab ri q u e s des églises et les cousistoires jouissent 
seuls du droit de fownir les voitures, tentures, ornements 
et de faire toutes les fournitures nécessaires aux inl,uma- 
lions. A Paris ce soin regarde t'administration génerale 
des pompes funèbres. 
On peut toqours se faire inhumer dans un autre terrain 
que le cimetière public, pourvu que ce soit à la distance 
prescrite de l'enceinte des villes et des faubourgs. 
Autrefois on ne pouvait sans un acte e.-près de la vo- 
lonté du testateur Ihire l'inhumation d'un corps hors de 
son église paroissiale. Ce lui vers l'an 12o0 que s'établit 
l'usage abusif et dangereux d'inhmner dans les églises leurs 
fondateurs et principaux bienfaiteurs. Plus tard, toute fa- 
mille riche, en payant la place au poids de l'or, put y 
thire inhumer ses dëfimts. Il. en résulla souvent des ma- 
ladies contagieuses. Cette pratique, contre laquelle récla- 
maient depuis lengtemps tous les philanthropes éclairC, n'a 
commencé d'Cre abolie que sous Louis XVI. Depuis non- 
seulement l'inhmmation a été interdite dans l'lutCieur des 
églises, mais encore dans l'enceinte des villes (roiC-. 
Oxdn). E 853 on patin d'un projet de Ici qui ara'ait 
autorisé avec certaines précautions la concession de sépul- 
turcs dans les églises. Sous l'ancien réme, les protestants 
et te iuif ne pouvaient ètre inhumés en terre sainte, c'est. 
à-dire dans les cimetières consacrés.. Ch. Dr P, ozon. 
|NHUMA.TIONS pBÉCIPITES. Les vieux re- 
cueils, comme les lournaux de notre temps, contiennent 
des anecdotes sinistres sur des iuhumations qui, biles avec 
trop de précipitation, auraient conduit à la terre des personnes 
encore vivantes. Que de gens ont Irémi au souvenir de ce 
gentilhomme qui se anime sous le couteau de Vesale, ou 

du cardinal Espinosa aisissant de sa main l'instrument 
qui vient de lui ou,tir le ventre, ou de l'abbé Prévost se 
réveillant sous le scalpel du chirurgien qui faisait son au- 
topsie ! Qui n'a lu t'histoire de Winslov¢, enseveli vivant 
deux fois d'après le jugement de son médecin, et mort à 
quatre-vingt-onze ans avec la crainte d'ètre enterré une 
troisiëme fois trop tél ; et celle de ce M. de Civille qui 
signait : De Civille, trois fois nort, trois fois enterr, 
et trois fois ressscitd par la 9rdce de Dieu. Molière a 
signalé.le danger des inhumations précipitées dans rËtourdi: 
Qui tét ensevelit, bien souvent assassine, 
Èt *.et est cru défun*, qui n'en a ¢[ue la mine. 
Les signes distinctifs de la m o r t réelle et de la m o r t 
a p p a r e n t e ne sont guère plus certains aujourd'hui qu'auo 
trefois. Il n'y a toniours de preuve infaillible que la putré- 
faction commençante. I. Lêguern, d'après les faits parve- 
nus à sa connaissance, fixe à 91 le chilfre des enterrements 
prëcipités auxquels le hasard a mis obstacle de 1833 à 1846 
en France. Ainsi 35 individus se sont réveillés d'eux-reCes 
au moment où on allait les porler en terre ; 13 par suite 
de soins exceptionnels ; 7 par suite de la chute du cercueil ; 
3 par suite de piqfires ou d'incisions lattes pendant t'ense- 
velissemcnt; 5 par suite de sulfocation dans le cercueil ; 
19 par suite de retards non calculés dans la cérémonie des 
furCailles, 6 par suite de retards cab:ulés. Si on ajoute 
ì ces 96 individus sauvés, i qui auraient été notoirement 
victimes des habitudes actuelles, on arrive an chiffre de 
118; et en admettant avec )I. Leguern que le chiffre des 
victimes inconnues soit le double, on trouve que le nom- 
bre des victimes des inhumations précipitées peut être éva- 
lué fi 27 par an en France seulement ! Mais tout cela est-il 
suffisamment constate ? Ne faut-il pas faire la part de t'exa- 
gération ? E tous cas les craintes sont trop légitimes pont 
ne pas haCirer toute l'attention publique. 
Pour parer à ces inconvénients, on a imaginé dans quel'- 
ques pays, en Allemagne, par exemple, de placer les morts 
dans des salles d'attente, avant de les livrer ì la terre. Un 
cordon de sonnette est attaché à la main de chacun, et un 
gardien est toujours prèt à entrer au moindre bruit qu'il 
entend. Dans certains etablissements français on a adopté 
le méme usage de mettre un cordon de sonnette aux 
doigts des mort dans les salles mortuaires. Combien ces 
précautions ont-elles donné de résurrections? 
Les anciens multipliaient les précautions destinées ì cons- 
tater la mort; l'usage de laver les corps, de les revétir de 
leurs habits de fète, et de les porter à découvert jusqu'au 
lieu de l'iubumation augmentait encore les chances de 
s'assurer que la vie était bien éteinte dans le corps dont 
on allait se éparer. En certains pas, comme en Italie, 
les morts sont encore portés en terre le visage découvert. 
Le respect religieux et une sollicitude intelligente doivent 
d'ailleurs veiller au chevet du moribond, mëme après qu'il 
a rendu le dernier soupir. Le défunt doit ètre gardé à vue, 
nuit et jour, son corps doit rester dans un état convenable. 
On ne doit ni le déposer . terre, ni le couvrir, ni à bien 
plus forte raison le placer dans un linceul, tant que la 
mort n'est pas complétement constatC. Les mesures pri- 
ses par la loi sont certainement suffisantes chez nous pour 
éviter les malheurs d'inhumations précipitées; mais dans 
les campagnes surtout on aclive trop souvent tant qu'on 
peut les tireCailles, parce que, suivant la remarque de 
M. Dupin, on n'a pas toujours deux chambres et on est 
très-pressé de succéder. Que les autorités veillent donc ì la 
stricte exécution des prescriptions légales; qu'elles ne crai- 
gnent pasdesurseoiràl'inhumation s,,r ramndôdice, et 
aucun accident de cette nature no pou p ire. 
INIQUITÉ, INIQUE, ce qui est contraire à 1' éq n ilC 
ì la justice, « ce qui est d'une injustice excessive, criante, 
manifeste, ,, dit l'Acadêmie. Il y a cette diffërence entre 
t'iniquité et Uinjnstice, que la première est surtout un 



UIT 
manque  ! quit, au droit nalurel suprleur tandis que 
la seconde est un manque au droit écrit. C'et pourquoi 
le mot iniquité s'entend plus généralement du péché, de 
la corruption des moeurs, du débordement des vices, des actes 
contraires ì la religion et à la morale. L. LOIVET. 
INITI&, INITIALE (du latin nitiura, commence- 
ment). On a appliqué cet adjectif à toute lettre, consonne 
ou voyelle, qui commence un mot, ainsi que le désigne 
son origine; mais les imprimeurs, aussi bien que les cal- 
ligraphes, s'en sont servi pour désigner la lettre qui 
commence un livre, un chapitre, et qui est toujours ma- 
juscule. Ces lettres dans les anciens manuscriis, sont fré- 
quemment, au moyen de la peinture, du dessin, de la 
calligraphie, ornées de figures ou d'emblèmes, usage que 
la typographie renouvelle dans les éditions qu'on nomme an- 
jourd'bui illustrees. Les lettres initiales des noms pro- 
pres sont également toujours majuscules. 
Initial est souvent employé substantivement et par abré- 
viation ; mais il ne se dit alors particulièrement que de la 
première lettre d'un prénom ou d'un nom propre : c'est 
ainsi qu'on signe quelquefois par ses seules initiales. 
INITIATION INITIÉ. Ces mots rappellent la céré- 
monie par laquelle les anciens recevaient un candidat au 
nombre de ceux qui professaient tel ou tel culte, et l'ad- 
mettaient à prendre part aux cérémonies célébrées en 
l'honneur de telle ou telle divinité; cérémonies qu'ils appe- 
laient mystères, parce que les initiés seuls avaient le droit 
d'y assister. 
De nos jours on s'est servi des mots initiation, initids, 
pour désigner l'admission de quelqu'un dans quelque société 
secrète : c'e»t ainsi que l'on dit : Il fut initié à la franc- 
maçonnerie, au ¢arbonarisme. Enfin, par extension, le mot 
initid a désigné celui qui avait la connaissance d'une 
chose, d'un art, d'une profession bornée à un certain 
nombre d'adeptes : c'est ainsi qu'on dit qu'un diplomate 
est initi aux secrets de la politique. 
INITI/TIVE ( du latin initium, commencement ), 
action de celui qui propose le premier de faire quelque 
chose. En droit politique, l'initiative est le droit «le pro- 
position des lois, dans les gouvernements et constitu- 
tf o us qfi exigent le concours de plusieurs pouvoirs pour 
leur confection. A Athènes l'initiative des lois appartenait 
à tous les citoyens. 
En France, la constitution de 179t attribua l'initiative 
des lois à l'Assemblée législative des représentants de la 
nation. Celle de l'an ni la réserva au Conseil des Onq- 
cents; mais le Directoire avait le droit de provoquer l'ac- 
tion de la puissance législative par un message. La cons- 
titution consulaire de l'an wh, en divisant le pouvoir lé- 
islatif en tribu nat et corps législati f, ne leur laissa 
que le droit de discuter, modifier et adopter les lois, dont 
le gouvernement seul avait l'initiative : la proposition des 
lois continua à appartenir au pouvoir exécutif sous les consti- 
tutions de l'Empire. Sous la charte constitutionnelle de 18t, 
le roi seul proposait les lois ; mais les chambres pou- 
vaient le supplier de faire présenter un projet de loi sur 
telle ou telle matiëre, en indiquant ce qu'il devait contenir. 
L'article 15 de la charte amendëe en 1830 portait: «, La pro- 
position des lois appartient au roi, à la chambre des 
pairs et à la chambre des députês. » L'initiative du ro 
s'exerçait sous la forme d'une ordonnance prescrivant la 
présentation d'un projet de loi aux chambres et par l'inter- 
médiaire des ministres,; celle des chambres se. manifes- 
tait par la voie de propositions CanCs d'un ou de plusieurs 
membres. 
Sous la constitution de f848, le président de la répu- 
blique partageait l'initiative des projets de loi avec l'as- 
semblée nationale. La constitution de 1852 la réserva au 
président seul. llaintenant cette prérogative appartient na- 
turellem_en t. à l'empereur. 
IJECT|O (du latin injectio, fait de inficere, projeter 
en dedans). L'acception génerale ci confuse de ce mot en 

-- INJURE 
latin, a été 'admise en fl'ançals avec une double significa- 
tion. L'injection chez nous désigne la projection d'un li- 
quide dans les cavités naturelles ou accidentelles du 
corps l,umain, ainsi que dans ses vaisseaux : d'une autre 
part, il sert à désigner le liquide qui est projeté. Le clys- 
terium donare, si effrayant pour une de nos anciennes 
connaissances, M. de Pourceangnae, donne une idee pré- 
cise de l'injection. 
Considérée comme action, l'injection est une opération 
dont l'emploi est très-fréquent en médecine, soit comme 
moyen d'étude, soit comme moyen thérapeutique. C'est en 
projetant dans lesartères d'un cadavre une préparation colo- 
riée en rouge qu'on parvient  distinguer les nombreuse« ra- 
mifications de ses vaisseaux sanguin¢. Cest aussi en injec- 
tant du mercure dans les conduitsde la lymphe qu'on peut 
les reconnaitre. On porte éalement divers liquides dans les 
reines durant la vie, afin de teparer les pertes de sang, ou pour 
modifier l'etat de ce fluide (voye: I.vçsm). Pourremedier 
à la débilite produite par les h,'morrhagies excessies, et 
qui peut ètre suivie de mort, on a injecté du sang puisé 
dans les reines d'un sujet robuste ( voçe: Tssvtms ). 
On a aussi injecté de l'eau pure et limpide dans les veines, 
espérant qu'on pourrait par ce moyen guerir l'affreuse ma- 
ladie appelee rage ou h y d r op h o b i e : mais l'ex prience 
n'a pas justifié l'attente. On a encore injecté, mais sans 
utilité reconnue, dans les reines de personnes malades, de 
l'eau chargée de substances pharmaceutiques, mème de 
l'émétique. Toutes les opérations qui exigent la f, hlébo- 
totale présentent de graves inconvénients, tant par l'inflam- 
mation qui résulte de la blessure que par l'introductkm de 
l'air dans les vaisseaux ; c'est pourquoi ces moyens sont 
peu usités, ou entièrement abandonnés. Les injections qu'on 
opère dans les ¢avités naturelles ou accidentelles des corps 
sont, au contraire, employées trés-communément : chaque 
jour, on projette dans les intestins de l'eau pure ou chargée 
de principes médicamenteux, pour vaincre la constipation. 
On injecte dans le conduit auditif de l'eau ou de l'huile 
pour remédier aux maux d'oreilles ou aux altérations de 
Fouie. On fait mème pén,.trer de l'air dans ces cavités 
comme moyen de distention : on lance aussi de l'eau dans 
les conduits des larmes chez les individus affectés de ff s- 
tules lacrymales. On a recours / la mme médication 
pour les conduits fistuleux qui se forment accidentellement 
dans les chairs, etc. ; l'eau sert encore à absterger certains 
ulcères et des foyers purulents. L'injection est enfin d'un 
usage très-fréquent dans plusieurs autre cas. 
Les instruments qui servent à pratiquer les injections 
sont des seringues, dont la forme et le calibre varient 
suivant un grand nombre de cas, et tous les jours on 
cherche à perfectionner ces agents mécaniques. Considérées 
comme liquides, les injections sont des prêparations phar- 
maceutiques dont la composition varie autant que celle 
des collyres : arme« dangereuses, que la prudeace nous 
prescrit de faire connaltre seulement pour nous eu defier. 
D r (n A.I BON'NIER o 
ISJO,XCTIO. Voyez 
IJURE offense, outrage fait, soit par écrits, soit 
par paroles. L'injure n'est, en général, l'apanage que des 
gens sans éducation, qui, faute de bonnes raisons, n'ont 
rien de mieux à jeter au visage de ceux h qui ils en veu- 
lent. 
En droit, l'injure n'est point tout à fait la méme chose 
que dans le langage ordinaire : elle consiste aussi en ex- 
pressions outrageante, termes de mépris ou invectives 
ne renfermant l'impuation d'aucun fait; car autrement 
elle deviendrait d i f f a m a t i o n. L'injure qualiflde est 
celle qui a été proférée dans un If eu pu bli c et qui con- 
tient l'imputation d'un vice déterminé : elle se. poursuit de- 
vant les tribunaux correctionnels et eçt punie d'une amende 
de lé ff. h 500 ff. Si l'injure n'a pas été profére publi- 
quement, elle se poursuit devant les tribunaux de simple 
police, et n'e»t punie que d'une amende de t à 5 francs ; 



398 
la contaTenfion disparait mme s'il  a eu provocation 
préalable. 
Lïnjure contre t'empereur prend le nom d'offense; 
celles contre les tands corps de PEtat, les officiers minis- 
tériels et les fonctionnaires publics s'appellent o u t rages. 
INJUSTE. Voye JusTE. 
JNJ USTICE,  iolation des droits d'autrui. Il n'importe 
qu'on les violepar aarice, par sensualité, par un mouve- 
ment de colère ou par ambition, qui sont autant de sources 
intarissables des plus grandes injtstires; c'est le propre, 
au contraire, de la justice de resister à toutes les tenta- 
tions par le seul motif de ne faire autunebr,¢heaux lois de 
la société humaine. 
On conçoit néanmoins qu'il y a plusieurs degrés d'injus- 
tice, et l'on peut les évaiuer par le plus ou le moins de dom- 
mage que l'on cause "fi autrui; ainsi les actions où il entre 
te plus d'injustice sont celles qui, troublant Fordre public, 
nuisent à un plus grand nombre de gens. 
DE JAuconeT. 
- 1N[EP,.MANN et d'ALMA ( Batailles d' ). L'armée 
française, après avoir bit ouaque deux h trois mois à Varna, 
à Gallipoli et aux en,'irons, dans un pays dont le climat 
meurtrier lui avait enlevé 6 à 7,000 de ses meilleurs sol- 
dats, et eniron 150 officiers de tous grades, partit, le 30 
acùt 185L pour Baidscbik, petit village buigare, port de 
mer assez important, où elle rencontra les trois flottes an- 
glaise, française et turque réunies, qui devaient la trans- 
porter en Crimée. Le 2 septembre toute la troupe était à 
bord de nos 'aisscaux, qui allaient lever l'ancre ; mais, les 
Anglais n'étant pas prèL% on ne put appareiller que le 7 au 
matin..  500 b/timents na'iguaient d conserve, sur trois à 
quatre lignes, dans un ordre parfait. L'aant-garde mouilla 
le 9 à 80 kilomètres environ de Sébastopol, pour rallier 
la flotte, et croisa jusqu'au 15 au matin, envoyant quelques 
bordées dans les camps russes pour dissimuler l'endroit du 
débarquement. Sur ces entrefaites, descendaient à terre les 
Anglais et les trois premières divisions ffançaises; la qua- 
trième suivait de pres, sans obstacle, quoique la mer fut 
houleuse et que les canots ne pussent arri»er jusqu'au ri- 
vage. Bientét cependant toute l'afinAe, Anglais, Français et 
Turcs, fut campée sur la gréve, près d'Eupatoria. 11 y avait 
là 60,000 hommes h peu près, aec tout.de matCiel de 
l'artilerie et du genie, les munitions et les vivres. 
Le 19 on quitta le camp du Vieux-Fort, dans un ordre 
adnfirable, par une chalem étouffante, a]ant à traverser un 
pays dépourvu d'arbre. Arrivé au bivouac, on entendit le ca- 
non et la fusillade d'assez près; c'ëtaient les lusses qui s'a- 
vançaient; quelques balles et quelques boulets legs arrètrent, 
et ianuit fut calme. Le |en,]emain, àsi heures du matin, on 
se remit en marche, et l'on fit balle à 1,500 mètres eniron 
de Scbastopoi. Les Anglais " gauche devaient attaquer i'ailt 
droite des Russes; la 2 « division française et une partie de 
la 1 e, l'aile gauche. Au centre, en première ligne, çtait massée 
une brigade de la 1 « division, et en plein centre la ,eo A 
droite des Anglais, toute la 3 « division, avec la 2 « dezoua- 
res et l'infanterie de marine; l'artillerie,avait sa place de 
bataille dans les intervalles séparant les divisions. 
Ce jour4, 90 septembre, à midi, toutela ligne s'bbranla 
en colonne serrée; à une beure, i'ais courut dans les 
rangs que la bataille allait commencer. En ce moment 
toutes les hauteurs étaient dejà couronnées par l'armée 
russe, avec de l'artillerie sur les crèls, dominant l'infan- 
terie échelonne sur les élévations, les ravins, les marne 
lons, derrière les murailles des jardins, au pied desquels 
coule la petite ri ière de l'Aima, très-tortueuse et très-escar- 
pée. L'armée'était tout à fait à découvert et entièrement 
exposde au leu de l'ennemi. La division Bosquet, qui atta- 
quait l'extrème gauche des Russes, cherchait à la tourne 
et aait pour auxiIiaires plusieurs b'Atimenta de la flotte. 
A une heure et.'demie, le premier coup de canon fut tiré 
par les lusses. Ce ne fut bientét que feux croisés, mouve- 
ments en tous sens. Bientét aussi les ¢oionnes du centre 

I,NJURE -- INKI 
défilèrent devant le maréchal Le Roy de Saint-A rna ud, 
déià malade, mais dont le front rayonnait au haut du ma- 
melon off il s'était placé avec son état.major. 
La troupe avance toujours en bon ordre vers l'AIma. Là 
elle sarrëte un instant ; mais tout à coup les deux ailes 
russes sont attaquées par les Français et les Anglai.% avec 
une intrépidité extraordinaire. Ceux des ennemis qui sont 
pris en flanc par la division Bosquet ne lardent pas , 
ëtre vigourcnsement balayés par l'artillerie de la flotte. Les 
zouave« des l " et 3 e divisions enlèvent pied à pied tous 
les obstacle» qu'ils rencontrent de l'autre coté de l'^lma. 
Les zouaves gravissent les hauteurs escarpées; sans sour- 
ciller, ils marchent, la poitrine alCou, crie, au-devant de la 
mitraille, de la fusillade et de la canonnade. Les Russes 
perdent du terrain et se replient sur les collines. Mais ils 
reviennent à la chargë, et les zouaves, à leur tour, dé- 
ployés en tirailleurs, commencent à faiblir, quand la tète 
de colonne du 39e accourt, repousse l'ennemi ; et le porte- 
drapeau du régiment s'élance pour le planter sur un bel- 
vedère voisin, llalheureusement un éclat d'obus le Irappe 
en pleine poitrine. L'étendard n'en reste pas moins af- 
bod. 
En ce moment, des escadrons moscovites affluent de 
toutes parts; mais une batterie française arrive, et les An- 
glais apparaissent à gauche; l'ennemi ne tient plus, il bat 
en retraite, la sictoire est aux armees alliécs ; cependant, 
tout n'est pas encore terrainW: elles subissent pendant une 
bonne fleure encore le feu bien nourri de l'arlillerie russe, 
embusquée derriêre un énorme tumulgs ; tous les soldats 
sont couchés à plat-ventre, ne pouvant, à leur grand re- 
gret, rendre coup pont coup. Enfin, Partillerie anglaise, 
entrée en ligne, lance ses fusees à la congrëve, et toute 
résistance cesse. 
Le premier coup de canon avait été tiré à une heure et 
demie, le dernier retentit à quatre henres trois quarts. 
Avant de commercer, le général en chel Menschikoff 
écrivait à son empereur : « J'occupe une position formi- 
dable ; dans six semaines les Français ne m'auront pas dé- 
busqué de là, fnssent-ils 100,000 encore ; c'est plus dillicile 
à prendre que Sébastopol ,, ; puis il dit : « Je tombe de 
sommeil, je vais me coucher; j'ai le temps de dormir avant 
que Pennemi arrive. » Plus tard, il s'Criait : • g-z, is il 
faut qu'ils soient fous ! » 
[,es lrançais curent l,s00 hommes hors de comhat, tant 
tues que blessés ; les Anglais 2,09S, dont 96 officiers. Les 
Russes étaient au nombre de 4,000 à 7,000 combattants; 
ils en perdirent environ 7,000. Les Français et les Anglais 
qui prirent part à l'action s'Cevaient à peine/ 35,OOO. Nos 
généraux se montrèrent plus que braves, ils furent temé- 
faites ; ils enlevaient le soldat. Le général Canrobert reçut 
une balle à l'épaule; le sous-intendant Blanc, un boulet à 
la cuisse, et il fut amputé; i'aum0nier en chef, abbé Para- 
bère, eut ,m cheval tué sous lui. Il est à regretter que les 
allies n'aient pas eu de ca»alerte. Avec quelques escadrons, 
ils eussent pris tuute l'artillerie des Russes, leur eussent fait 
1o à 15,ooo prisonniers, et seraient entrés peut-être péle- 
rugie avec eux dans Sébastopol. Quelques jours après, le 
marecl,ai de Saint-Arnaud, de plus en plus malade, était 
forcé de se rembarquer pour Constantinople, et mourait 
durant la traversée, enseveli dans sa gloire. Avant de s'dol- 
grief, il avait remis le commandement de l'atanée française 
au général Canrobert, qui plus tard devait  son tour don- 
ner une grande preus d'abnégation militaire en le rési- 
gnant entre les mains du général Pelissier, qu'il jugeait plus 
digne que lui d'occuper ce poste, et en se contentant non 
du commandement d'un corps d'armée, auquel l'empereur 
l'appelait, mais de celui d'une simple division. 
Après la victoire de l'Alma les armées alliées, contournant, 
par l'intérieur des terres, le périmètre de Sébastopol, à 
travers de profondes vallé¢s, dans lesquelles ils eussent pu 
gtre aisémeut écrasés par les Russes, si ceux-ci n'avaient 
po;.nt été démoraiisés par l'échec qu'ils venaient de terroir, 



INKEIMANN 
allèrent établir leur place d'armes et leur port militaire à 
Balaclava et à Kamiesch. 
A la suite de plusieurs attaques successives, dirigées 
contre les ouvrages avancés de la partie méridionale de 
la ville, et de nombreuses sorties de la garnison, constam- 
ment repoussées par les nétres; a la suite de f,quentes 
canonnades et tusillades réciproques, qui firent plus ou 
moins de mal des deux cfités, le S novembre 1856, avant le 
jour, l'armée russe, grossie par des renforts venus du Da- 
nube, par les réserves réunies dans les provinces du sud, 
et animée par la présence des grands-dues llichel et ico- 
las, essaya de prendre sa revanche en attaquant la droite 
de la position anglaise devant Sébastopol. Dès les pre- 
miers coups de fusil, des déserteurs révélaient aux Anglais 
la véritable situation des troupes ennemies sous le rapport 
de l'effectif; et les généraux alliés pouvaient mesurer l'C 
tendue des renforts qu'elles avaient successivement reçus 
depuis la bataille de l'Alma. C'étaient des conthgents venus 
de la cote d'Asie, de Kertch et de Kafla, 6 bataillon% et de 
forts détachements de marins arrivés de icolaieff, tt ba- 
taillons de Knsaks de la mer Noire, une grande partie de 
l'armee du Danube, et enfin les 10 e, 11 t, et 12 ¢ divisions 
d'infa,,terie, formant le I e corps, commandé par le général 
Dannenberg, transportC en poste, avec leur artillerie, 
d'Odessa à Simpbéropol. 
La présence des grands-dues surexcitait surtout cette 
a,'mée, qui avec la garnison de la place ne s'élevait pas a 
moins de 100,000 combattants. Dans ces conditions favo- 
rables, 45,000 hommes, favo,'isés par la nuit et le brouillard, 
surprirent la pointe des hauteurs d'Inkermann, que l'armée 
britannique n'avait pu occuper avec des forces assezconsidé- 
tables. ç,000 Anglais seulement, commandés par le génral 
Cathcart, qui fut blessé mortellement dans cette alfaire, pri- 
rent part a l'action, le surplus étant employé aux travaux du 
siCe; mais ils soutinrent vaillamment ce choc inattendu 
jusqu'au moment ou le général de brigade Mortel, puis le 
général de division Bosquet, accourant avec une partie de 
la division de ce dernier, purent leur prëter un énergique 
concours, qui détermina le succès. On ne sait ce qu'on doit le 
plus louer dans cette rencontre de l'inëbranlable solidité 
avec laquelle nos alliés firent face pendant Ionemps à l'o- 
rage, ou de l'intelligente vigueu," que les génraux Monet 
et Bosquet, entrainant une partie des brigades Bourbaki et 
d'Autemarre, déployèrent en attaquant l'ennemi qui les dé- 
bordait par leur droite. 
Le 3 ¢ rément de zouaves justifia dans cette circonta,ce, 
de la manière la plus éclatante, la vieille répu|ation de 
l'arme. Les tiraillenrs algé,-iens, un bataillon du Te léger et 
le ç de ligne rivalisèrent d'ardeur. On s'aborda trois fois à 
la baïonnette, par une pluie battante, et l'ennemi ne céda 
qp'ap,-es ce troisième choc le ierrai,, qu'il laissait jonché de 
ses morts et de ses blessés. L'artillerie russe de posit,on et 
de campagne était très-supérieure en nombre et avait une 
position dominante. Deux de nos batteries à cheval et une 
batterie de notre ¢ division d'infanterie n'en soutinrenl pas 
moins, concur,'emment avec l'artillerie anglaise, la lutte pen- 
dant toute la journée. 
Enfin, l'ennemi, rejeté dans la vallée de la Tchernaïa, se 
décida à battre en retraite en laissant en notre pouvoir plus 
de 3,000 morts, un t,'ès-grand nombre de blessés, q,,elques 
centaines de prisonniers et plusieurs eaissons d'artillerie. Ses 
pertes s'élevaient, dans leur ensemble, de .5 à %OOO hommes. 
Parmi les blessés, on citait, outre le prince llensehikofî, un 
lieutenant gënéral percé d'o,tre en outre, et qui snccomba 
promptement, trois géngraux majors, six colouels ou chefs de 
corps; le général Dannenberg avait eu deux cl,evaux tuês 
sous lui. Tout son entourage était blessé. 
Pendant que ces événements se passaient a la droite, 
.5,OOO I,ommes de la garnison effectuaient, à la faveur du 
brouillard et de la pluie, une vigomnse sortie, sur la gauche 
de nos attaques, par les tarins qui e, facilitaient l'approcl,e. 
I.s troupes de se,'vice à la tranchée, sous les ord,-es du gé- 

-- INNOCENCE 
néral de La Motte-Rouge, marchèrent droit aux assaillants, 
qui avaient déj envahi denx de nos batteries, et les repous- 
sèrent en leur tuant plus de 200 hommes sur place. Le 
général de division Forey, commandant le corps de siCe, 
par de rapides et habiles dispositions, arriva alors, avec les 
troupes de la tre division au secours de ses gardes de tran- 
cl,ée, et s'élança lui-mgme xers l'ennemi en tëte du .se ba- 
taillon de chasseurs  pied. Les Russes, refoulés sur toute 
la ligne, regagnaient précipitamment Sébastopol, après avoir 
éprouvé des pertes considérables, lorsque le jeune et bril- 
lant général de Lourmel, emporté par sa fougue chevaleresque, 
se jeta à let, r poursite, avec sa brigade, jusque sous les 
murs de la place, où il tomba tnortellement blessé. Le gé- 
néral Forey eut beaucoup de peine à retirer ces braves de 
la position critique où les avait précipités leur incroyable 
audace. La brigade d'Aurelle, qui occupait ì gauche une 
ecellentc position, eut la gloire de protéger cette retraite, 
qui s'eltectua sous le feu de la place, non sans des pertes 
sensibles. Le colonel Niol, du 9.6  de ligne, qui vit tomber 
sesdenx chels de bataillon, avait pris le commandement de 
la brigade de Lourmel, qui, voulant venger la mort de son 
général, continua à se montrer admirable d'énergie et de 
dévouement. L'ennemi, dans cette seule rencontre, a ait ì re- 
gretter un millier d'hommes tirC, blessés ou prisonniers. 
La bataille d'lnkermann et le combat soutenu par le corps 
de siCe furent glorieux, sans donte, pour nos armes; mais 
qtte de larmes ne coffrèrent-ils pas au peuple et ì l'aristocratie 
d'Angleterre ! Le soir manquaien t sou  le drapeau britannique 
seulement près de ,00 hommes, tués ou blessés, parmi les- 
quels buit généraux, dont troistués, ainsi que deux membres 
du parleme»t, les lieutenants-colonels Packenham, des gre- 
nadiers de la garde, et James Hunier-Blair, des tusiliers 
écossais, également de la garde. L'armee française eut 1,700 
tues uu blessés. La vue de cet «.pouvantable massacre causa 
une maladie nentale au duc de Cambridge, qui commandait 
la brigade de la garde, et qui dut venir se rétablit" ep An- 
gleterre. A la perte du général de Lourmel nous eumes ì 
ajouter celle du colonel de Camas, du 6" de ligne, toudroyé 
ì la tete de son rément. Le prince Napoléon, déjà très- 
souffrant depuis plusieurs jo;trs, ayant vu son etat eanpirer 
après les fatigues de la bataille, où il était resté toute la 
journée ì cheval, le général en chel crut devoir le forcer 
partir pour Constantinople, afin d'y aller rétablir sa santé. 
Eug. G. n llo;Ltvr. 
l MAXUS. Vole: lls:s. 
IXN, l'oEnus des anciens, le plus important des 
fluents du Danube, prend sa source dan le canton des 
Grisons, sur le versant sud-est du Septimer, dans la Itaute 
Engadine, et après s'ètre précipité ì travers l'effrayante 
gorge «lu l:instermUnz, court, torrent furieux et désor- 
donnë, vers le Tyrol, où il donne son nom a l'une des 
railC les plus grandes des Alpes et aussi des plus ricltes 
en beautcs naturelles, puis vient baigner I n s pru ck. Au- 
dessous de Kufstein, il entre en Bavière, où il tortue di- 
vers lacs, reçoit plusieurs aflluents, devient navigable 
ì Telfs, et se jette dans le Danube, après un coprs de 45 
myriatnètres, prës de Passau, où il est de cent mètres plus 
large que le Danube. 
Avant la réorganisation politique de lAutricbe, effectuée 
en 1869, cette rivière donnait son nom à un cercle ap- 
pelé l'Innviertel (Quartier de Içlnn), de 9 myriamtres 
carrés, avec la0,000 habitants, ayant Braunau pour citer- 
lieu, et qui, après avoir jadis appartenu tour a tour à 
l'Autricfie et ì la Bavière, fut d,:finitivement cédé par cette 
p;tissance ì l'Autriche, en 1816. La dénomination d'lnr- 
vierlel a cessé d'ètre ofliciellentent employé depnis 18-19. 
IN[YERVATION. On a donné ce nom ,à l'influence 
nerveuse sur la pensée (voye5 Nar). Selon quelqttes 
physiologistes, ce serait la formation de la pensée par un 
effet nerveux, cérëbral. 
IXXOCECE, 6tat lteureux de l'me q;ti n'éprouve 
ni repentir ni remot'ds. Les purs espt-its que nous nommons 



400 
anges ont reçu du Créateur une innocence parfaite, et 
l'innocence des enfants peut tre assimilée à celle de ces 
intelligences céles. L'homme achète l'innocence par le 
sacrifice de ses désirs et uar une lutte persévérante contre 
les paions inlérentes à la nature. L'innocence dans la 
première jeunesse est accompagnée d'une ignorance pleine 
de charmes; son expression augmente l'attrait de la beauté; 
on dirait que le monde sait bon gré à ceux qui ne le con- 
naissent point, soit confusion du peu qu'il vaut, soit es- 
l)oir d'en tirer profit. Tel est l'enchantement des pre- 
miers jours de la vie pour la jeune fille qu'une bonne mère 
a entourée de ses soins, pour le jeune homme dont un 
père dévoué a formé le CœUr et l'esprit, qu'ils rte voient 
que vertu là où ils en trouvent l'apparence; aimables et 
naives créatures, remplies de toutes les croyances au bien, 
qui se reposent ur les serments et ne voient dans l'al: 
lection qu'un accomplissement du précepte divin qui or- 
donne aux fiommes de s'aimer. Mais cette lelicite si douce, 
résultat c'une conscience innocente, se confiant en l'inno- 
cence d'autrui, ne peut se prolonger que dans un bien petit 
nombre de situations. 
On personnifie l'Innocence sous la figure d'nne jeune fille, 
vètue de blanc, couronnce de pahnes, unê main posée sur 
le cœur, les eux levés au ciel, aec un aneau couché " 
ses pieds. C »« v Bn.vt. 
INNOCENT. Treize pontlfcs de ce ttnm ont occupé la 
chaire de saint Pierre, dans l'intervalle de 02 à 172. 
INNOCET I « , rte à Albano, succéda au premier Anas- 
rase, en 0, sous le règne de l'empereur 11 o n o r i u s. C'était 
un prëtre renomme pour sa piét et sa sagesse. Il appuya 
saint Jean Cfirysostomc contre lesdécisions du concile de 
Chesne (près de Chalcédoine), qni avaient banni cet il- 
lustre évëque du siCe de Contantinople. C'est également 
vendant son pontificat que le moine Pélagc remplit la Pa- 
lestine de ses doctrines et de ses violences. Saint Jrme, 
per3écuté par les pclagiens, au nombre desquels se distin. 
guaient Tfiéodore de Mopsueste et l'évque Jean de Jéru- 
salera, écrivit au pape hmocent pour implorer sa média- 
tion apostolique. Saint Augustin vivait à cette époque : il 
dénonça la métne bcrésie au siCe de Rome, et les lettres 
d'innocent au éèques d'Orient forment uuê partie de son 
histoire. Plusieurs dccrétales, adressées aux evëques d'I- 
talle, des Ganles et d'Esjagne, attctent encore son zèle 
pour la discil,ilne de l'Eglise, et surtout son habilcté à 
faire tourner tous ces évënements, ces appels et ces dci- 
sinus, au profit «le la pap:uté. Son pontificat de quinze ans 
lut troublt" par l'invasion d'Alaric, roi des Golhs, qui mit 
cieux ioJ le siCe devant P, ome, et liuit par la livrer au 
pillage. Les ennemis du pontile l'accusent d'avoir menagé 
la colère du vainqueur en tolérant le rétablissement de quel- 
ques cérémonies paiennes. Baronius le delimd contre ce 
qu'il appelle une calomnie de Zosime ; mai» l'abbé Fleury 
ne se prononce pas. On conient plus généralement de la 
persécution quïl fit subir aux novatiêns et de leur ban- 
nis.ement par ses ordres. !1 mourut le 12 mars, ou le 28 
uillet 17. L'Église i'a placé au rang des saints. 
|NNOCE.NT II succéda, en 1130, à Honorius Il.  Il était 
Bomain, et se nommait Grgoire; c'était un moine de Saint- 
Jean-de-Latran, que Victor l!I avait mis à la tète du mn. 
nastère de Saint-blicolas, qtYUrbain II avad fait cardinal, 
et que Calixte Il avait envoyé en France comme légat. Les 
cardinaux du conciave se divisërent en deux partis. Deux 
dissidents lui opposèrent un antipape dans la personne de 
Pierre de Ln, cardinal de Sainte-blarie de Transtévère, 
qui priLle nom d'Anaclet II et s'empara à main armée de 
l'à basilique de Saint-Pierre, de plusieurs autres églises et 
de leurs trésors..Innocent II et dix-huit de ses électeurs 
se réfugièrent à Pise, et chacun des deux pontifes écrivit à 
tous les souverains de la chrétienté ponr les attirer dans 
son parh. Boger, duc de Calabre, fi,t le seul qui rec.onnut 
Anaclet. Il en tut récompensé par le titre de rot de Sicile, 
et que|eue viltçs d'Italie stavirent son exemple. Mat ',e 

INNOCENCE  IN,OCElOT 
reste s'unit à Innocent II. Il reçut en Frznce les hommage 
de Louis le Gros, à Rouen ceux de Henri 1 « d'Angleterre, à 
Liége ceux de l'empereur Lothaire II, qui s'abaissa jusqu'à 
lui servir d'Cuber. II tint à Boiras un concile, où il sacra 
Louis le Jeune, que son père associait à la royauté. Après un 
séjour de dix-huit mois dans les plus riches abbayes de France, 
il revint, chargé d'or, dans la haute ltalie. Saint Bernard 
I'y suivit, et l'aida à rétablir la paix entre les Pisans et les 
Génois. C'est à Pise que Lothaire vint le rejoindre pour 
le ramener dans Borne et s'y faire couronner lui-mème. 
llais l'antipape Anneler resta martre du château Saint- 
Ange. Roger l'y soutint contre les armes impériales. La fa- 
mine chassa Lotbaire, et Innocent lI revint il Pise, où il 
se vcngea par d'inutiles anathèmes. L'emperenr repnssa les 
Alpes deux ans apte.% en 1136, et porta la terreur dans la 
Pouitle. Sa mort inopinée replongea le pape innocent dans 
ses embarras. Roger reprit ses avantages, et il l'eut encore 
chassé de Borne si la mort d'Anaclet n'eut suivi de près 
celle de Lotbaire. Les cardinaux rebelles se b',tèrcnt de 
nommer un nouvel anti-pap, qui prit le nom de Victor IV. 
Mais saint Bernard le lit rougir de son acceptation, le con- 
duisit aux pieds du pape, et le 29 mai 1138 Innocent .fut 
universellement reconnu. 
Il iint le 8 avri| de l'année suivante, dans te palais de 
Latran, le dixième concile oecuméniqne, oh assistèrent plus 
de mille evêques. Il n'y donna point des temoignages de 
modération, traita les schismatiques avec la plus grande ri- 
gueur, cassa leurs ordinations, et leur arracha de ses mains 
leurs crosses et leurs mitres. C'est là que fut condamné 
Af u a u d de Brescia, disciple d'Abeilard. Le roi Roger 
vit également frappé d'êxcommunication. Mais il marcha 
sur Rome à la tte de son armee, et délit celle de l'Église, 
que le pape commandait en personne. Innocent Il, pri- 
sonnier de sort ennemi, fut contraint de lui confirmer la 
rosauté de Sicile, et le reçuten gràce, le 25 juillet lt39, 
comme vassal du saint-siCe. La condamnation- d'A b e i I a r d 
suivit celle d'Arnaud de Bresse. Mais les arnaudistes étaient 
nombreux à Borne. Ils se soulevèrent sous un prétexte assez 
frivole, rétablirent le sénat romain, et firent la guerre aux 
Tilmrfins, malgré le pape, qui les avait reçus à composition. 
Innocent Il employa vainement les prières et les menaces : 
on respectait son autorité spirituelle ; on lui constestait le 
temporel. Cette revolte prit un tel caractère de violence, que 
la douleur et le depit de ne pouvoir soumettre le peuple le 
conduisirent au tombeau, le 13 septembre 1143. 
LNNOCENT III, le plus puissant de tous les pontifes, 
était de la maison des comtes de Segni. Il se nonunait Lo- 
t]taire, clair né à Anagni, et s'tait distingué par ses Cudes. 
Cbanoine de Saint-Pieire, ordonné sous-diacre par Gré- 
golfe S'III, fait diacre et cardinal ,le Saint-Serge par CIC 
ment III, il fut lu pape à l'age de trente-sept ans, en 1198, 
après la mort de Cclestin III. Son premier acte politique tut 
de recevoir lbommage-lige du prélet de Rome, qui jusque là 
ne l'avait rendu qu'à l'empereur ; et son règne tout entier 
tut conlo,-me à ce début. I( s'oc¢upa en roi et en juge 
prime des affaires temporelles de ses Etats, et tint trois 
fois la semaine des consistoires publics, où son savoir et 
sa justice étaient admirés des pins savants jurisconsultes, 
heureux si, pour le repos du monde, il eut renfermé son 
ambition dans le gouw.rnement du patritnoine de saint 
Pierre. l|ais il porta la main h toutes les couronnes de la 
chrétienté, et mourra la résolution de les soumettre toutes 
à la domination du saint-siCe. Il s'essaya d'abord sur An- 
dré, roi de Hongrie, auquel il ordonna de partir pour la 
Terre Sainte, sous peine d'excommunication, et sur le jeune 
FfCéfie, anquel, après de longs refus, il n'accorda l'm- 
vestiture du royaume de Sicile qu'aprës l'avoir soumis à 
toutes les conditions du plus humble vasselage. Une double 
élection avait donné deux empereurs à l'Allemagne: Phi- 
lippe de Souabe et Othon de Saxe. Innocent III les soutint, 
ou les excommunia, l'un après l'autre, suivant qu'ils se 
montraient plus ou moins favorables à ses intër0ts tetap 



INNOCENT 
res ; et il entretint ainsi pendant dix ans la guerre civile 
dans l'Empire. En France, P h i I i p p e-A u g u s t e avait r- 
pudié I n gelb u rge de Danemark, pour tpouser Agnès «le 
Iléranie, et le pape Célestin avait toiCWce divorce. Inno- 
cent Ill ordonna au roi de reprendre sa première femme, 
et, lançant l'interdit sur le royaume, y souffla dix ans en- 
giers le feu de la discorde. 
La prédication d'une croisade nouvelle oe mlait à ces 
empiétements du saint-siCe. Ses légats parcouraient l'Europe 
entière pour exciter les princes et les peuples à combattre 
le fameux S a I a d i n. Richard d'Angleterre, Philippe de 
France, et un grand nombre de seigneurs, se croisèrent, 
et le pape écrivit h tous les princes cbrétiens de l'Orient, 
pour assurer le succès de cet armement européen. Mais 
les nouveaux croisés firent tout autre chose que de délivrer 
le saint-spulcre : ils prirent Zara, pour enrichir Yenise des 
dépouilles du roi catholique de Hongrie. Ils drtrénèrent les 
empereurs ecs de Constantinople, et ne parurent en Pales- 
tine que pour y donner le triste spectacle de leurs divisions. 
Innocent III s'épuisa vainement en excommunications. Cette 
croisade, qui bien dirigée aurait suffi à la conqutte de 
l'Asie, manqua entièrement son but, et ne fit que raffermir 
la domination des Sarrasins. Le pape s'en consola en rece- 
vant la soumission des Bulgares à l'Église romaine, et en 
donnant des rois à ce peuple ainsi qu'à la Servie. 
Une croisade plus odieuse, plus sanguinaire, fut iwèchée 
par Innocent III contre les malheureux Vaudois ou Albi- 
ge oi s. C'est en 1198 que commença cette persécution ar- 
reC, qui dépeupla le Languedoc, la Gascogne et le pays de 
Foix; les princes, les seigneurs y coururent ì la voix d'In- 
nocent III et de ses légats, parmi lesquels se distinguait 
saint D o m i n i q i, e, le fondateur de l'inquisition, pour hter 
l'extermination de ces malheureux sectaires. Mais, par un 
«onlraste que peut seule expliquer la cupidité du saint- 
siCe, le persécuteur des Mbigeois prenait les juifs sous sa 
protection, et défendait par ses bulles d'emplo)'er la io- 
lence pour les convertir. Cependant, la guerre civile conti- 
nuait à dévaster l'Mlemagne, et les deux prétendants, s'a- 
dressant tour à tour à la cour de Rome, lui sacrifiaient 
successivement toutes les prérogatives de l'Empire. Inno- 
cent III, dont les prédécesseurs attendaient la confirma- 
tion de l'emperenr avant de prendre possession du saint- 
siCe, prétendit que le pape avait seul le droit de confirmer 
 choix des électeurs germaniques. Un discord survenu 
entre le roi Jean sans Terre et le cardinal Langton fournit 
à Innocent III l'occasion de s'immiscer dans les affaires 
de l'Angleterre. Ce royaume fut mis en interdit, olfert à Pbi- 
lippe-Agnsle, adjugé h son fils Louis; et, le roi Jean s'é- 
tant soumis au saint-siCe au moment oi la flotte française 
allait exécuter le décret du Yatican, Innocent III lança 
l'anathème sur le roi de France, parce qu'il persistait dans 
une entreprise que le pape avait lntértt à abandonner, lIais 
cette fois Philippe-Auguste ne céda point à ses caprices, com,e 
il l'avait fait en abandonnant Agnès de lIéranie, pour re- 
prendre Ingelbu,'ge. Louis descendit en Angleterre, se fit 
reconnaitre dans Londres, malgré les Iégats de P, ome, et 
ne céda que plus tard, Iorsqu'il se vit abandonné des Anglais 
qu'il avait soutenus contre Jean sans Terre. Innocent III 
fut plus heureux en Allemagne. OIbon IV, se vo)ant seul 
maltrede l'Empire, après l'assassinat de Philippe de Souabe, 
reïusait de rendre au pape les terres de la comtes,se lla- 
thilde. Le pape l'excommunia pour la troisième fois, et lui 
donna un nouveau rival dans la personne de Frédéric II. 
Tels sont les faits principaux qui caractédsent ce ponti- 
Iicat; il n'est pas un souverain catholique, un seigneur 
considérable, que n'ait attaqué, insulté ou soumis Inno- 
cent III ; et, au milieu des embarras que lui suscitait son 
ambition, il ne perdait jamais de vue la délivrance de la 
Terre Sainte. biais la mort arrëta tout à coup ses grands 
desseins et ses usurpations. Il mourut d'une attaque de pa- 
ral)-sie, ou d'indigestion, suivant d'autres, à l'ge de cinquante- 
cinq ans, le 16 juillet 1216, après avoir porté la tiare pen- 
DIt.T. DE LA CO,NYEI.  T. 1. 

401 
dant dix ans. Platine a eu l'effronterie de le mettre au rang 
des saints. Sainte Lulgarde de Brabant prétend, au contraire 
l'asoir vu en enfer. Contentons-nous de re«onnaitre en lui 
un grand pontife, et dans son règne l'apogée de la puissance 
pontificale. On lui doit un volumine|,x recueil de lettres 
fort curieuses, d'intéressantes décrétales, un commentaire 
sur les sept Psaumes de la Pénitence, un livre de contro- 
verse sur les Sacrements, des discours et des homélies. 
INOCENT IV (SmxLn »g F,F.sQç) etait issu des 
comtes de Lavagne, du pays de Gnes. Cardinal de la pro- 
motion de Grégoire IX, il fut Cu, le g6 juin tgéB, à la place 
de Célestin IV, après une vacance de vingt mois. Son 
premier soin fut de terminer, par un traité, le long discord 
de F ré d é r i c I I avec le saint-siCe. Mais l'empereur n'ayant 
point voulu se soumettre aux Immiliantes conditions du 
nouveau pontife, Innocent IV craignit d'ëtre s,rpris daus 
P,o,ae, et, se sauvant, de nuit,  cheval, courut se réfugier 
à Gênes. Sur le refus des rois d'Aragon, d'Angleterre et de 
France, auxquels il avait demandé un asile, il se rendit 
Lyon, qui n'appartenait alors qu'à sou archevêque. Là, dans 
un concile auquel assistèrent les délégués de Fréderic II, 
emporté par le ressentiment de sa firite, il prononça la 
position de l'empereur, son ancien ami, et pressa les Cec- 
teurs d'en nommer un autre. Henri, landgrave de liesse, 
accepta ce përilleux honneur, qui lui copra la vie dans une 
bataille contre Conrad, fils de Fredéric. Le comte Guil- 
laume de Hollande prit sa place, et ïut battu dans plusieurs 
rencontres. Frédéric eut cependant pitié de l'Mlemagne et 
de l'lialie, que désolait une aussi longue guerre. ,lais l'in- 
tlexibilité d'Innocent IV repoussa toutes ses ouvertures, 
quoiqu'elles fussent appuyées de la mrdiation du roi de 
France, aint Louis. FfCCic ne trouva de paix qu'au 
tombeau, oi il descendit en 1251, après avoir échappe à 
une tentative d'empoisonnement, que les ennemis du pape 
lui attribuèrent. Conrad hérita de la haine d'Innocent IV, 
qui soutint vainement le comte de Hollande. Ce prétendu 
César fut contraint d'abdiquer'; et le pape offrit successi- 
vement la ouronne impériale au comte de Gueldre, au duc 
de Brahant, au comte de Cornouaill% et au roi de Nor- 
vège, Haquin. Les guelfes d'ltalie ayant cependant triompbé 
des gibelins, Innocent IV se décida a rentrer dans Pome, 
et fit prêcher une croisade contre Con;-ad, dont l'atroce 
avait déjà passé les Alpes. Les deux partis négocièrent et 
se battirent pendant trois années ; et la querelle ne fut as- 
soupie que par la mort de Conrad, arris-ée le 2t mai 
La maison de Souabe n'eut plus h sa tte qu'un enfant 
de deux ans, appelé Conradin. Son tuteur, blainfroi, re- 
connut la suzeraineté du saint-siëge sur la Sicile, et parut 
d'abord fidèle à son serment; mais l'ambition d'Innocent IV 
ne tarda point à renouveler la guerre, et il la Iégua à son 
successeur. L'excommunication des rois d'Aragon et de Por- 
tugal, sur les plaintes des évtques de leurs royat,mes, l'in- 
ortie publication d'une croisade pour secourir aint Louis 
en Épte, et une protection éclatante accord«e aux jui[s 
d'Allemagne, tandis que les Ets chrétiens ëtaient ruiné 
par les extorsions des Iégats, complètent l'bistotre de ce 
pape, qui mourut ì Naples, le 7 décembre 1254. Le frère 
Amat de Gaveson, historien ecclésiastique, l'a surnommé 
le Père du droit et de la vdrité; d'autres l'ont appelé le 
Père du mensonge. Mais tout le raonde est d'accord sur sa 
cupidité, si bien prouvée par ses dernières paroles à ses 
parents : « Pourquoi pleurez-vous, bonnes gens? leur dit-il ; 
je vous laisse tous riches. ,, 
INNOCENT V (Pn:eav. ne TARENTAISE) succéda ì Gré- 
golfe X, le 20 janvier lç6. C'était un moine, q;,i avait oc- 
cupé successivement les sieges de L.'on et d'Ostie. II ne 
régna qoe cinq mois et deux jours, et mourut le 22 juin de 
la mme annce, aprës avoir esayé «le raffermir la paix 
de l'Italie et de faire confirmer par l'e,npereur 5hcl,cl Pa. 
Iéologue la réunion des deux Églises grecque et :atine. 
INNOCENT YI (É+r..xv. AUBE, T). Né/ Beissac, près 
de Pompadour, dans le Limot,siu, il avait professë le droit 
bi 



402 
civil k Toulouse, était devenu juge-mage de cette ville 
en 1335, évéque de N'oyon en 1337. de Clermont en 1340, 
cardinal en t32, et evêque d'Ostie en 1351. Il fut enfin 
é1 pape à Avignon, on residait alors la cour pontificale, 
e 18 décembre 1352,  la place de Clément VI. Son début 
fat de casser un règlement fait par les cardinaux pendant 
la vacance, et qu'il avait juré de maintenir ini-m/me, et 
d'ordonner aux prelats d'aller résider dans leurs diocèses. 
Son legat, Gilles d'Albornos, fit une rude guerre en Italie 
aux nombreux usurpateurs du patrimoine de saint Pierre. 
Un autre légat se rendit à Ruine pour couronner l'emperenr 
Cl,arles IV, qui, l'cl,ement fidèle à ses promesses, J'osa 
pas mme passer la nuit does la ville des Césars. C'est à ce 
pape que Jean Paléologue soumit l'Ëglise grecque, pour 
l'engager à lui prëter les secours de la catholicite contre les 
Turcs. La persëcution de la secte des fraticelles est une 
tache  la vie de ce pontife; mais il n'en laissa pas moins 
une grande réputalion de savoir et de piCC malgre les de- 
clamations de Pelrarque contre les vice% trop réels, de la 
cour d'Avignon. Innocent VI n'est accusé par des écrivains 
impartiaux que d'a oir trop enrichi ses parents; il mourut, 
accable de vieillesse et d'infirmilés, le 12 seplernbre 1362. 
INOCE.NT Vil ( Cos-o MELIORATO  était n à SUI- 
moue, patrie d'Oide. Legat d'..,lain YI en Angleterre, 
archevëque de Bavenne, et cardinal de la promotion de Bo- 
niface IX, il fut elu le 17 novembre 1:04, à la place de ce 
pontife. Le grand schisme d'Occident durait encore. L'anti- 
pape Ben o i t X 1 11 ëtait toujours reconnu par la France ; 
mais le nouveau pape avait jure, avec les cardinaux de son 
conclure, d'emplo)er tout son zële, tous ses soins, à ternfiner 
cette longue querelle, dOt-il y sacrilier sa tiare. Cependant, 
à peine sur le saint-siege, il oublia son serment; et les deux 
rivaux ne cessèrent «le se jouer l'un de Fautre, ainsi que «les 
princes qui sollicitaient leur pieux concours pour mettre 
un terme aux discordes de l'Eglise. La ille de Rome etait 
livrée à deux factions diverses, qui la dominaient et la 
pillaient tour à tour. Celle es Gibelin, dirigee par les Co- 
lonne, et poussée par Ladislas, roi de .Naples, força le nou- 
veau pape à quitter la ville, peu de jours après son exaltation. 
Une paix plàtrée hfi permit d'y rentrer ; mais les mrnes 
intrigues le roeduisirent encore à la nécessite de se refugier 
a Viterbe, pendant que Jean de Colonne regnait au Vat[can 
au nom du peuple, qui lui donnait le surnom papal de 
Jean XXIII. Innocent Vil prit le partt d'excommunier La- 
dislas, et cet anath/:me fit un tel effet sur ce roi conspira- 
teur, qu'il supplia le pap de lui permettre de sortir du ch.- 
teau Saint-Ange et ,le retourner paisiblement dans ses Etats. 
A peine rentré dans Borne, Innocent VII fut enleé par une 
attaque d'apoplexie, le  novembre 1-106. On vante sa v-ertu 
et la douceur de ses mœurs ; mais les histuriens oublient 
te mépris de ses serments, et la tolerance qu'il eut pour les 
crimes et les assassinats de son neveu Louis Meliorato. 
LN_NOCE.NT Vlll (Je.x-BA.m CIBO) etait Génois. 
1é en 1432, il passa an service des rois de .Naples Alphonse et 
Ferdinand, fut cardinal etevêque de Savone sous Paul 11, 
dataire et vïque de Melfi sous Sixte IV, et succéda h ce 
dernier, le 24 aofit 18. Sa vie avait été jusque là si déreglée, 
que l'historien le plus favorable lui donne sept enfants natu- 
rels de diverses femmes. L'histoire des conclaves nous a révelé 
les intrigues et les marchés honteux qui lui valurent la tiare. 
La pacification de l'ltalie devint le premier objet de ses soins ; 
et son désir constanl fut de tourner toutes les forces de la 
cbrétienté contre Bai azet. Mais son ambition et son aa- 
rice ruinïrent ce grand projet, et il ne put accuser que lui- 
mme du peu de succès de ses prédications. Ayant en son" 
pou.voir le prince Zizim, frère du Sultan, qui lui avaitCL rem par le grand-martre de Rbodes, il reçut une ambas- 
sade de ce mme Bajazet, qu'il voulait anéantir, et consentir, 
moyennant ! 0,000 écus d'or, à se faire le ge6]ier du prince. 
Ses lëgats n' prbcbaicnt pas moins la croisade dans lunte 
l'Europe ; mais on ne tarda point à reconnaltre que le seul 
but d'Innocent Vlll était, sous ce prétexte, de prélever de 

de riches Iributs sur la crédulité des monarques et des 
peuples. Le roi de Naples, Ferdinand, ne s'y éta/t pas trompé : 
voulant affranchir son royaume de la suzeraineté du sainl- 
siége, il refusa de lui payer tribut. Le pape ayant alors as- 
semblé son armée, l'ltalie entière, divisée en deux camps, 
fut en proie h tous les désordres de la guerre civile. La mé- 
diation des cardinaux fit en vain espérer la paix. Ferdiuand 
ne voulut point accepler les conditions Immiliantes que Borne 
lui imposait, heureux s'il n'avait pas souillé sa cause et son 
règne par l'assassinat de quelques seigneurs romains dans 
un festin auquel il les aait invités. InnocentVlll, indigné 
de ses crimes, et las de ses injures, lança Iïnterdit sur son 
t royaume, l'adjugeaau roi de France Charles VIII; et 
l'assassin couronné, passant de la barbarie à la I',lcheté, 
implora le pardon du pontife, et lui paya tribut. C'est ce 
pape qui, en 186, confirma la couronne d'Angleterre à 
Heu ri Vil, et légitima le mariage dt ce prince avec Éli- 
sabeth d'York par la plénitude du pouvoir apostolique, 
comme le royaume d'Anglelerre était vassal du saiat-siége. 
5lais Henri X'II avait sollicité cette faveur, et le pape ne 
laissa point échapper celte occasion d'étendre son autorité. 
II fut moins heureux en France, o/ le roi, le parlement, l'u- 
niversité et les états, assembhs h Tours, s'opposèrent cons- 
tamment h la levée des décimes dont la cour de Borne 
voulait frapper les biens du clergé. Innocent VIII mourul 
à soLxaute ans, le 25 juillet 1492 ; et ce fut encore une at- 
laque d'apoplexie qui fit la vacance du saint-siCe. 
IN.NOCE.NT IX (Jx.'-A.xo.xE FACHINETTI ) était un 
noble bolonais, que Borne connai»sait sous le nomde cardinal 
de Santi-Quatro. Le peuple l'avait Cu avant le eondave, 
qui le proclama h la presque unanimité, le 19octobre 1791, 
pour succéder h Gr6goire XIV. Ses premiers soins furent 
d'alleger les misères du peuple. Il développa de grandes vues 
à ce soet dans le premier consistoire; mais il n'eut pas le 
temps de les réalier. Ce vcrtuenx pontife ne passa que den. 
ois sur le saiat-siege, et mourut le 3O décembre de la mrne 
anflee. 
I.NJOCENT X (J t.x-BxJsxe PAS]PHILI), noble romain, 
sncceda hUrbain YIII, le 15 septembre 16-, après trente-cinq 
jours d'intrigues. Successivement avocat consstorial, audi- 
teur de rote, nonce à .Naples, dataire de la légation de France 
et d'Espagne, il avait íte fait cardinal par son prédécesseur 
en 1629. La demolition de la ville de Castro, en punition 
du meurtre de son evêque, fut le debut de ce pontife; elle 
fut suivie de la persécution des Barberini, neveux d'Ur- 
bain VIII, auxquels il devait sa fodnne. Ma za ri n, ennemi 
du nouveau pape, prit ouvertement le parti des pros- 
crits, et la cour de Louis XIV devint leur refuge. Inno- 
cent X s'en vengea par une bulle qui ordonnait la confisca- 
tion des biens appartenant aux deux cardinaux Barberini; 
mais le parlement de Paris la cassa comme abnsive. La 
haine du cardinal Mazarin n'avait pas d'autre motif que le 
refis d'un chapeau sollicité par son frère, l'arcbevb.que d'Aix; 
mais cet impérieux ministre était habitué à sacrifier l'ctat 
à ses intírèts. Il menaça l'ltalie par les flottesde France, fit 
mine de confisquer Avignon, forçaainsi le pape à rappeler 
les Barberini, et h coiffer l'archevëqe d'Aix de la barrette 
rouge. Henri II, duc de G ui s e, médiateur de cette récoe- 
ciliatinn, en fut mal récumpensé par le ministre de Louis XIV 
qui le laissa manquer de tout dans son expédition de laples, 
par la seule raison peut-être que le pape l'avait protégee. 
Mazarin ne fu! pas plus reconnaissant envers le pontife, qui 
espérait recouvrer des mains de la France la principaute de 
Piombino pour son neveu Louis Pamphile. 
Innocent X prit sa revanche contre la France dans la trop 
fameuse dispute sur la gràce entre les jansénistes et les 
molinistes. Les jésuites avaient pour eux la cour de Rome; 
ils firent renouveler la bulle d'Urbain III contre le livre 
de Jansenius ; et seize brefs d'Innocent X défendirent aux 
vques de France et d'Allemagne d'admettre à la direction 
des ame les prêtres qui ne souscriraient pas cette condam- 
nation. Les jausénistes en appelèrent vainement au pape 



INNOCENT 
Im.mème. Un délnge de phampblets inonda la France : L'in- 
quisition romaine les condamma. Le parlement de Paris 
défendit aux érAques de les poursuivre : le clergé, divisé 
d'opinion, remplit les chaires de ses prédications contradic- 
luttes, et les deux partis envoyèrent des avocats au saint- 
siCe. Les jésuites l'emportèrent ; Innocent X foudroya cinq 
propositions comme extrai du livre de J an se n i u s. Mais 
les jansénistes ne se rincent point pour battus, lls soutinrent 
que l'évqued'Ypres n'avait rien dit de ce que lome avait con- 
damné; et cette ridicule dispute, changeant ainsi de nature, 
survécut au pape qui l'avait envenimée. Il fut peu recon- 
naissant du secours que lui prëtèrent dans cette circons- 
tance Louis XIV et Mazarin; car il prit le parti du cardinal 
de Retz contre eux, et i'accueillit à Borne asec une distinc- 
tion injurieuse pour la cour de France. La paix de West- 
p b a I i e, signée sur ces entrefaites, en 1648, déplut fort à 
Innocent X, en ce qu'elle confirmait dans les mains des prin- 
ces protestants les domaines enlevés au clergé catholique; 
mais la bulle qu'il ian.ca contre ce traité, que ses nonces 
n'avaient pu empêcher, ne lut qu'une vaine protestation. 
Il est difficile d'analyser le pontificat d'lnnooent X sans 
parler du cardinal Panzirolo, son ministre, qui le mena 
comme un enfant, et surtout de dona Olimpia, sa belle- 
sœur, que longtemps asant son exaltation les Romains 
lui donnaient pour maitresse. Ces deux personnages, se 
disputant le gouvernement de I'-Etat et de l'Eglise, Panzi- 
rolo rëussit à faire chasser Olimpia du palais pontifical, en de- 
nonçant au pape, ce que le pape savait très bien, que sa belle- 
sœur vendaR à prix d'or les bénéfices, les indulgences et les 
charges. Pasquin et Marforio la poursuivirent de leurs 6pi- 
grammes ; mais, à la mort de Panzirolo, après quatre ans 
d'une disgràce que plusieurs historiens regardent comme 
une comédie jou6e, et malgré les intrigues d'Astaili, espèce 
de cardinal-neveu que le ministre avait imposé à son mai- 
tre, dona Olimpia, rappeice au Vatican, reprit le cours 
de ses cxtorsions, et fit drpouiller le cardinal Astaili de ses 
titres et de ses honneurs. Elle réconcilia son beau-frêre 
avec la maison Barberini, par une alliance entre les deux 
familles, et quelques mois après lui ferma les yeux. Inno- 
cent X sentit venir la mort, et dit au cardinal Sforce, qui 
ne quittait par le chevet de son lit : « Vous vo)ez où abou- 
tissent toutes les grandeurs d'un pontile. » Il expira enfin, 
le 7 janvier 1655, à l'ge de quatre-vingts ans. 
INNOCET XI (Bxoix ODECALCHI). Né à G6me, en 
1611, il avait étudié sous les jésuites; et sa première pro- 
fession fut celle des armes. Une blessure le jeta dans l'Église; 
d'autres prétendent que ce furent les conseils d'un vieux 
seigneur, à son pasge par Borne. Urbain VIII le fit pro- 
tonotaire et gouverneur de lIacerala ; Innocent X le pro- 
tout au cardinalat en 16-i7, faveurs qu'il aurait d, sui- 
vant quelques-uns, aux bonnes gr'ces de dona Oiimpia. Il 
succéda enfin à Glémeut X, le 10 septembre 1676. C'était un 
llomme de bien, incorruptible, dcsiut6ressé, vertueux, 
mais inflexible sur les droits du saint-siCe. Touché des 
abus du népotisme, qui depuis soixante-dix ans avait coi)te 
17 millions d'or au tresor pontifical, il déclara à son neveu 
qu'il ne ferait rien pour lui, supprilua la charge de cardinal- 
patron, et donna celle de surintendant secrétaire-d'Etat au 
cardinal Cibo, qui devint i'àme de son pontificat. Ses en- 
nemis, rappelant à cette occasion la prophetie de i'Irlandaig 
blalacilie, qui avait annoncé ce pape comme bellucz insa- 
tiabilis, dirent qu'il l'était en effet, puisqu'il ne pouvait 
ètre un instant sine Cibo. 
Un grand déméIé avec la France remplit à peu près tout 
ce pontificat : les deux cours, animées du mème esprit de 
fierté, luttèrent à q se vengerait le mieux. Les ambassa- 
deurs avaient à lome le priviiége de c, ouvrir de leur in- 
violabilitè tous les criminels qui se réfugiaient dans les quar- 
tiers où leurs palais étaient situés. Depuis plus d'un siècle, 
les papes avaient vainement tenté d'abolir ces franchises, 
qui arrètaieut le cours de la justice : Innocent Xt résolut 
d'en veai a bout. La reine Cliristine de Suède donna 

403 
l'exemple de la soumission, qm ne fut suivi ni par l'envoyé de 
Venise ni par celui d'Espagne : celui-ci déclara qu'il s'en 
rapportait à ce que ferait la France. Cette puissance était 
aigrie par un autre empietement du saint-.iége. os rois 
avaient établi qu'à eux seuls appartenait le droit de donner 
aux évèques l'investiture de leur temporel. Ce droit était 
nommé la rçale, et il en résultait pour la couronne la 
jouiance du revenu de tous les bnéfices vacants. Inno- 
cent I, poussé par quelques évêques français, eut la préten- 
tion d'en priver Louis XIV et de renouveler la querelle des 
i n v e s t i t u r e s, qui avait trouble si longtemps l'Mlemagne 
et l'Italie. Ce lut une guerre de bulles et de protestations. 
La major/tWdu clergé prit parti pour le roi, et de ses as- 
sembiëes sortirent les quatre fameux articles de 1682, qui 
sont auiourd'bni le fondement des libertes de l'Église g a I- 
l i c a n e. Innocent XI lit braler à Borne ces quatre proposi- 
tions ; mais il menaça vainement le clerg de toutes les fou- 
dres du Vatican. Le même roi, les reAmes pr$tres qui revo- 
quaient l'Cit de antes et bannissaient les protestants du 
royaume, aux applaudissements du pape, resistërent à ce 
mème pape sur l'affaire de la régale. Cette conduite, en appa- 
rence si contradictoire, était tondée sur le mème principe de 
cupidité. Il y avait d'un céte le bénéfice de l'usulruit, de 
l'autre celui des conliscations. La querelle des francidses 
vint aigrir encore ce démëié. A la mort de l'ambassadeur d'E 
trees, la justice papale s'etant emparée du quartier français, 
le nouvel ambassadeur Lavardin protesta contre cet abus. 
Le nonce du pape à Paris lut gardé à vue; le parlement fit 
appel au futur concile ; le roi se saisit d'Avignou. Les poëtes 
s'en mèlèrent ; le bon La Fontaine fit des vers contre le 
pape. Innocent XI s'en vengea en refusant au cardinal de 
Furstemberg, protégé par la France, les bulles d'electeur 
de Coiogoe. Ces tracasseries, jointes aux querelles du jan- 
sénisme et des qui,.tistes, altérèrent la santé du vieux pon- 
tife, et le t aoàt IG9 la mort vint mettre un terme à son 
ambition et à ses peines. Il était infirme, gé de soixante- 
dix-huit ans, et en avait régné prës de treize. Le Menagiana 
peCend et prouve qu'il ne savait pas le latin. 
INNOCENT XII {Axorg PIGNATÈLLI), suoeéda, le 
12 juillet 1692, à AiexandreVIII : il avait alors plus de 
soixante-dix-sept ans. é à Naples, le 13 mars 1615, il avait 
été vice-légat du duché d'Urbin sous Urbain VIII, inquisi- 
teur de Malte et nonce à Fiorence sous Innocent X, nonce 
en Polngne et à Vienne sous Aiexandre Vil, secrëtaire de la 
congrégation des évèques sous Clément X, légat de Bo- 
logne et archevêque de Naples sous Innocent XI, qui le 
promllt au cardinalat. Le peuple, fatigué de la ion.gueur 
extraordinaire du conclure, l'accueiilit avec des tlan.gports 
de joie, et il se rendit digne de la vénëration publique par 
son zèle pour l'ordre et la justice, par ses libéralites envers 
les pausres, par l'abolition du m.potisme. C'est sons son 
pontificat qu'en 1693 Louis .-'IV et son clergé se dégradì- 
rent en retractant làcbement les réSolldions prises dans la 
mëmorable assemblée de 1682. Louis XIV avait alors be- 
soin de la puissante médiation du pape, et Innocent XII 
le récompensa de sa faiblesse en fracassant i'Autriclle et 
l'Espagne pour les forcer de luire la paix avec la France, 
en dctachant la maison de Savoie de leur alliance. Le roi, 
de son c6t, continua fi persécuter les jansénistes et à pour- 
snivre dans ses États les quiétistes, dont la secte mystique 
avait gagné i'Italie et trotlblé l'esprit de plusieurs ponhifes. 
Innocent XII eut à cette occasion le triste avantage de 
prononcer la condamnation de Fénelon. Il fut plus in- 
dulgent à i'eard des jé.suites, qui permettaient aux Chinois 
pretendus cons ertis les cerémonies de leur ancienne religion. 
Mais les enfants de Loola étaient alors à i'apogée de leur 
puissance. Innocent XII mourut le 7 septembre 1700. 
LNNOCFNT XI[I (MlcngL-A,,g CONTI). Clément X[ 
l'avait fait cardinal, et il fut Alu à sa place, le 8 mai 1721, 
à l'ge de soixante-six ans environ, par les voix unanilnes 
de cinquante-quatre cardinaux. Il ne lui manqua que son 
propresuffrage. Il débuta par luontrer l,eu de penchant peur 
51. 



404 
les Jésuites dans les querelles dujansénisme et de la bu lle Ui- 
9enitus, lancée par son prédécesseur, l1ais ce n'était qu'une 
adruite politique pour ménager les puissances, qui, à l'exem- 
ple de l'empereur Charles VI, se plaignaient des désordres 
que cette bulle apportait dans leurs Etats. 11 n'en fit .pas 
moins condamner par l'inquisition la lettre de sept évê- 
ques de France, qfi s'étaient prononoes contre la bulle ; 
mais, d'un autre cété, il donna iatislaction à l'empereur en 
lui accordant l'investiture de ffaples, si longtemps solli- 
citée. Ce mme empereur ayant voulu donner à son tour 
à don Carlos l'investiture des duchés de Patine et de Plai- 
sence, Innocent X/I! prolesta contre cet acte, qu'il regar- 
dait comme attentatoire aux d,'oits du saint-siégé, et se 
brouilla encore une fos avec Charles VI. Les revers dl 
cbeaier de Saint-Georges, qu'il soutenait de ses deniers, 
les dangers de l'ordre de Malte, que menaçait la puissance 
ottomane, aigrirent les infirmités de ce pape valétudinaire. 
La avelle et une hydropisie de poitrine l'enlevèrent, le 
7 mars 1724. 5Iais il recul assez pour enrichir scandaleu- 
sément sa nombreuse famille, quoiqu'i! rot débuté par lu/ 
défendre de se mëler des affaires de l'État. 
"VIEN'NET, de l'Académie Franc.aise. 
13,OCENTS ( Saints ). L'Église appelle de ce nom les 
enfants qu'Hérode fit mettre à mort par toute la Judée 
dans l'année qui suivit celle de la naissance de Jésus-CI,rist, 
parce qu'il lui avait été révélé que parnfi eux était né celui 
qui devait un jour régner sur lsrael et sur le monde entier. 
Saint Mathieu est le seul Évangéliste qui rapporle ce mas- 
sacre. L'Église honore les saints Innocents comme des mar- 
tyrs, et célèbre leur fête le 28 décembre. Cette fëte est une 
des plus anciennes; il en est fait mention dans les écrits 
d'Origène et de saint Cyprien. Au moyen ge la fèle des 
Iocents était la sah,rnale des enfantg de chœur, qui Ci- 
saient un d'entre eux évëque, le revëtaient des habits pon- 
tificaux et dansaient joyeosement dans le choeur. Le con- 
cile de Cognac, en 1220, s'éleva contre cet abus ; mais il 
ne cessa guère en France que deux siècles plus tard, ì la 
suite des vive remontrance.g de la Sorbonne. 
Une église de Paris ëtait dë,liée aux saints Innocents. 
Elle était située rue Saint-Dents, au coin de la rue a,x Fers, 
et sur une partie de l'emplacemen occupé aujourd'hui par 
le marché q,i porte encore le même nom. Suivant i'abbé 
Le Bœuf, elle avait été construite sous lerègne de Philippe- 
Auguste ; mais elle fut reb'tie en partie à différentes re- 
prises. A I'nn des cétrs du btiment était adossée une loge 
A:toile, oh des femmes dévotes s'emprisonnaient volontai- 
rement pour le reste de leur vie ; on les nommait recluses; 
elles ne recevaient l'air et les aliments que par une petite 
fenétre donnant sur l'église. 
Le cimetiëre y attenant était entonré d'une galerie voOtée 
appelée les ch arni ers. L'église et les charniers furent dé- 
molis en 1786. A peu près à la même cpoque la tontaine 
des Innoceuts et ses précieux bas-reliefs, chefs-d'oeuvre de 
Jean G o u j o n, furent transportés de 'angle de la rue Saint- 
Dents et de la rue aux Fers à la place qu'elle occupe en- 
coreen ce moment f1855) au centre du marché : comme elle 
n'avail que troi.s cétés, Pajou en fit alors nn quatrième. 
INXOMIE (Contrat). Voye-. CO-XTaAT. 
INNOVATION. C'est la substitution d'une mbthode 
nouvelle, d'un système nouveau, . une méthode, à un système 
existant antë_rieurement. Toule innovation n'est pas un 
progrès; s'il en est de sages, il en est aussi de folles et de 
dangereuses, inspirées par cet amour irréfléchi de la non- 
eanté qui est un des traits saillants du caractère de 
l'homme. Trop souvent abusé par son inconstance, il ré- 
pudie les meilleurs principes et les croyance lef plus justes 
pour des idées que ses passions du moment saluent comme 
l'éternelle et absolue vérilé, et dout il connalt pins tard à ses 
dépens l'inanité e[ le mensonge. C'est dans ce sens qu'un 
proverbe dit :  Le mieux est l'ennemi du bien. ,, Cepen- 
da,!, quelles que soient leg craintes que puisse faire naitre 
l'adoption du voies nouvelles, et malgré Ic perturbations 

INNOCENT -- INNS OF COURT 
profondes qui en résultent quelquefois, il est de l'essence 
même de l'humanité d'aller eu avant. Les innovations qui 
se sont suceédé dans le cours des siècles ne nous ont-elles 
pas amenés à ce haut degré de civilisation et de bien-être 
o/ nous sommes parvenus? Aux sophistes qui condam- 
nent le moude  i'immobilité, répondons par ce grand en- 
seignement de l'histoire, lon, le genre humain ne tourne 
pas dans un cercle vicieux ; il marche à la conquête d'un 
avenir qu'il ne lui est peut-ëtre pas encore donné de com- 
prendre ; et s'il recule parfois, sou élan n'en est que plus 
 if, lorsquil reprend ensuite son mouvement ascensionnel. 
Remarquons aussi qu'un salutaire contre-poids existe dans 
la société à ce vague et incessant besoin de changement qui 
la travaille : er contre-poids, c'est la force invétérée des 
habitudes, la résistance des interë.ts et des opinions. Et si 
la jeunesse se passionne pour les innovations, le réle de la 
vieillesse conservatrice est de défendre le corps social contre 
des attaques souvent prématurées et téméraires. Même celle 
répugnance instinctive de certaines classes pour tout 
changement a fait qu'en différents pays et à desépoquesdi- 
verses les ovateurs, dissimulant leur drapeau, se sont 
présentés comme des réformateurs jaloux de ramener à leur 
pureté primitive des institutions dégénéres. 
Que si nous considérons maintenant les innovations dans 
les sciences et dans les arls, il est de toute évidence que 
ces brillantes création du génie de l'homme n'eussent ja- 
mais Ce enfantCs sans ces essais patients, réitérés, ces 
ttonnements infinis qui les ont constituées pièce à pièce 
et graduellement amenCs au merveilleux développement 
qu'elles ont atteint aujourd'hui. 
Quant aux innovations en matière de religion, toutes 
celles qui n'obtiennent pas la sanction des conciles gêné- 
raux ou du pape sont des hérésies aux yeux de l'Eglise 
catholique. Vf..A. DtcliE¢r. 
INNSBRUCi. l'ose-. INPngCK. 
INNS OF COURT. C'est le nom qu'on donnera 
gleterre aux corporations de jurisconsultes. Il est dérivé du 
mot nn, qui dans la vieille Angleterre, comme en France 
le mot hétel, servait à désigner les édifices occupés par 
des administrations puhliques ou encore les habitations 
particulières des seigneurs et des gentilshommes. L'origine 
de ces corporation» remonte jusqu'au treizième siècle, 
époque où, et longtemps encore après, il n'était permis 
qu'aux fils de gentilshommes (filii obilium) de se livrer 
à l'étude de la jurisprudence. Au quinzième siècle on comp- 
tait près de 2,000 etudiants de ce genre; et il en existait 
encore t,000 sous le rèe d'Élisabeth. 
Les is o.f court sont administrés par des masters, 
des rincpals et autres fonctionnaires, et on y trouve 
des salles (halls) pour les cours que les étudiants sont 
tenug de suivre pendant un certain nombre d'années avant 
d'être admis ì pratiquer devant une cour de justice, lIais 
cette obligation n'est plus aujourd'hui que pure affaire de 
forme. Il y a sans doute toujours obligation de se faire ins- 
crire dan l'un des ins, mais il faut avoir prcalablement 
acquis une sullisante connaissance pratique du droit et de 
la jurisprudence, soit par l'Cude parliculière qu'on en 
faite, soit par un séjour plus ou moins Iongdans le cabinet 
de quelque avocat et les bureaux (chambers de tous les 
avocats sont situés dans les 
Les quatre principaux ins of court et qui possè]ent 
des revenus trb.-con«idérables • snt : ]'ler Teple et le 
Miclcll-Te»plc, jadis siège de l'ordre des T e m p I i e rs; 
Lincol's In, jadis l'hétel du comte de Lincoln, od l'on 
trouve une bibliothèque ; et Grag's I, autrefois la rési- 
dence de lord Gray de Wilton. 
A ces établissements se rattachent les is ofihancery, 
dans lesquels étaient ëlevés autrefois les jeunes gens qui se 
destinaient au service de la chancellerie, mais qui sont en 
grande partie habités aujourd'hui par des attorne9 s (avoués 
et des avocats. Le pi.u.s ancien de tous est havie"  " 
" ensuite 
qui date «h règne d'Edouard II; vennent C .- 



]NNS OF COURT 
ments lnn , Ch.ffcrd's lnn, Slople lnn , Lycn's Inn , 
Furnival's lnn, Earnard's Inn, Symcnd's Inn et .New 
Inn. Les élèves des inns jcu/rent un r61e assez impotlant 
au moyen ge, comme en France les clercs de la b a s o ch e. 
lls donnaient les ïtes les plus magnifiques, les mascarades 
les plus belles, des représenlalicns dramatiques, etc. Le 
premier drame historique du thàtre anglais, Ferrex et 
Porre, fut représenté en 15et devant la reine Élisabeth 
par des membres de l'lnner-Temle; et il en fut de méme 
ensuite de plusieurs pièces de Shakespeare, de Ben- 
Jchnscn, etc. La dernière cérémonie de ce genre eut lieu 
en 1733, en l'honneur du lord cbancelier Talbot. Consultez 
Pearce, Histcry of lhe lnns of court and chancery ( Lon- 
dres, 1848). 
INNVIEITEL Foyer. I. 
INO fille de Cadmvs et d'Harmonie, et seconde 
épouse d' A t h a m a s, atlira sur elle et son époux la colère 
de Junon, en ëlevant le jeune Baechus, fruit des adultères 
amours de Jupiter avec Sé rué 1é. Pour se venger, cette 
déesse envoya Tisiphone s'emparer du cœur d'Ino et 
thamas : cedernier, raconte Ovide, traqua dans son palais, 
changé en une forét à ses yeux, la reine et ses enfants, qu'il 
prenait pour des hères fauves, et les poursuivit jusqu'aux 
bords des flots. Vénus, ajoute-t-il, à l'aspect des vagues qui 
allaient engloutir lno et le petit Mélicerte, demanda meroi 
pour eqx à Neptune. Le dieu de la mer, en faveur de sa 
nièce, qui le secondait dans ses tendres penchants, dépouilla 
lno et Mélicerte de ce qu'ils avaient de mortel ; il changea 
leur.nom et leur visage; il les revêtir de l'auguste majesté 
des dieux. Ino prit le nom de Leucclhée, et Mélicerle celui 
de Palémcn. 
Si l'on en croit d'aulres poëtes, l'aimable Panope (celle 
qui porte,secours), nymphe amie des matelots, et fille de 
NéeC, le Neptune de la blëditerranée, avec cent nymphes 
marines, reçurent dans leurs bras l'enfant et la mère, et les 
conduisirent flottants sous une vote du liquide crislal, jus- 
qu'aux plages italiques, où Ino, toujours persCulée par 
J unon, q,d suscita contre elle les Bacchantes d'Ausonie, con- 
sulla Carmente, mère d'Évandre et prophétesse. Cette der- 
nière prédit à la reine de Thèbes sou immortalité et son 
apolhëose parmi les divinilës marines, sous le nom de Leu- 
cothoee (la blanche déesse) cl,ez les Grecs, et de Matuta 
chez les Latins, ainsi que celle du petit blélicerte, sous l'ap- 
pellation hellenique de Paldmon, et sous l'appellation latine 
de Portamns. Ce jeune dien présidait aux ports; il fut par- 
ticulièrement honoré en ]trurie, nationqui naviguait au loin. 
A Ténédos, où il avait des autels, on lui offrait, comme 
bloloch, des enfants en sacrifice. Leucothée, ou plutOt Ma- 
tuta, avait à Rome un temple, où il n'Cait permi» d'entrer 
qu'aux emmes libres. 
Leucothée et PalCon étaient des divinités riantes invo- 
quées par les matelots dans l'antiq,ité, et qui ne se mon- 
traient sur la race de la mer, h c6té de Panope, que dans 
les temps sereins ou après la tempêle, avec le cortége des 
néréides et des tritons. La blanche déesse et le petit PalC 
mon, sou fils, ont depuis longtemps disparu des mers en- 
chantCs de la Grène. 
IX-OCTAVO. Voyez FORIAT. 
INOCULATION. C'est la transmission volontaire d'un 
mal quelconque, effectuée pat: l'introduction dans l'économie 
d'un individu sain d'une parcelle de vi ru s empruntée à un 
sujet atteint de l'affection que l'on veut développer. Avant 
la découverte de la vacci n e, l'inoeulation de la vari ole 
en tenait lieu. Cette pratiq»e avait pour but d'exciter cette 
affection au moment le plus favorable, de manière à en ob 
tenir plus facilement la guérison. La tl»éorie de l'inoculation 
a été généralisée, et en ce moment mëme on l'applique àla 
ri ë v r e j a u n e dans les lieux où elle sévit d'ordinaire avec 
h, plus de violence, c'est-à-dire au Brésil et  Cuha. Le 
virus employé dans cette inoculation a été découvert par 
G. de Humboldt. 
INONDATION, déhordement des eaux, qui sot- 

-- INONDATION 405 
lent de leur lit et recouvrent des espaces que]que£ois im- 
menses. 
Un vent impétueux et soufflant constamment dans une 
direction opposée au c»urant d'un fleuve, le ralentit, en 
ëlève sensiblement le niveau ordinaire et peut produire une 
inondation. Ainsi, levent du nord, faisant refouler les eaux 
d, Nil  son embouchure, rend ses effets d'autant plus sen- 
sibles que Iorsq,,e le vent vient à tourner au sud, l'61éva- 
tion du fleuve diminue d'un quart en l'espace de vingt-quatre 
I,eures. La crue d'une rivière perpendiculaire à un fleuve 
peut en suspendre momentanément le cours et donner aux 
eaux supérieure une ëlevation susceptible de produire dans 
leur régime de notables changements. Telle on voit l'Arse, 
grossie par la tonte des neiges alpines, arrêter et quelquefois 
repousser au loin les eaux rapides du Bh6ne. La fonte des 
neiges et des glaces que l'hiver accumule sur la cime des 
montages élevées est une de ces causes puissautes qui pro- 
duisent sur les principaux fleuves de la terre des déborde. 
ments oceasionnés au printemps par les premiè,'es ardeurs 
du soleil, et q,,'augmentent encore les chaleursde l'Cé. Lors- 
que l'Cut de la température est longtemps modéré, la fonte 
des neiges s'opère graduellement, et Iorsqu'en automne et 
vers !a fin de l'hiver les pluies, sans Cre très-abondantes, 
sont continues, la crue des rivières est régulière et tranquille. 
l,lais Ioque les vents chauds da midi fondent tout à coup 
une grande quanlilé de neige et de glace, alors, au milieu 
de l'ëté et sans autre cause apparente, les cours d'eau aug- 
mentent promplement de volume, sortent de leur lit et alC 
bordent avec furent. Ainsi, comme on l'observe en Pro- 
renne, dans les Apennins, les Pyrnées, etc., les riviëres et 
mme de petits ruisseaox à peine remarqués deviennent tout 
à coup des torrentspuissants et irapêtueux ; de mme, quand 
de fortes pluies d'orage siennent tomber à flots dans les 
monlagnes, les cours d'eau qui y prennent naissance gros- 
sissent en un instant, se changent en torrent% éprouvent et 
produisent sur leurs rives de grandesperturbations ; ils ren- 
versent et entralnent les bateaux, les digues, les barrages, 
les Cis, les ponts, et tout ce qui s'oppose  leur impétuo- 
sité, et, se répandant au loin dans les campagnes, ravagent 
les moissons, enlèvent les hommes et les besliaux qui n'ont 
pu fuir, déracinent les arbres, détruisentjusqu'aux construc- 
tions les plus solides, et s'écoulent enfin avec la mme rapt- 
ditWqui avait accompagné leur passage, povr ne laisser après 
elles, comme après u n vaste i n c e n d i e, que l'image aflli- 
geante d'une affreuse dévastation. Ces circonstances accom. 
pagnent encore avec plus d'énergie peul-tre la d ébcle 
des glaces que vient rompre un dégel subit après vne lon- 
gue et forte gelée. 
Tels sont les causes et les effeL de ces débordemenls, 
malheureusement trop fréquenls, et contre lesquels l'art et 
les forces humaines peuvent h peine prévaloir, biais d'autres 
circonstances particulières et trapeCues, telles que la rup- 
ture des d igu es en Hollande, ou des refermes nat,»relles de 
ceins lacs, où de nombreux cours d'eau prennent nais- 
sance, n'offrent que trop souvent des exemples ïrappants de 
la force de transmission des énormes masses d'eau clouCs 
d'une grande vitesse, • 
On a remarqué de tout temps, dans le régime de certains 
fleuves, des inondations et des débordements dont le retour 
est périodique et la durée presque toujours égale. Ces fleuves 
on en général situes dans les régions équatoriales, où les 
plm»s abondantes a,nsi que la fonte des neiges ont lieu 
vers leur source annuellement et dans des saisons détermi- 
nées. Ainsi, le i I, dont les crues commencent vers le mi- 
lieu de juin, atteint son »mximum d'ciCation du 20 au 30 
septembre : alors arrive l'abaissement des eaux, qui ne 
sont complétement renteCs dans leur lit que vers le milieu 
de mai de l'année suivante, en sorte que les campagnes ri- 
veraines sont pendant onze mois de l'anne soumises  
ces inondations, auxcjaelles est due leur fertilité. Le mxi- 
num d'élévation du fleuve au-dessus des basses eaux parait 
lre de 9 rB, 80  ; le minimum 6 m, S0" : ce qui donne 7', 0  



406 
pour terme noyen.' Le ger, au rapport de Léon l'Africain, 
déborde dans le mb,ne temps que le .il, ainsi que le Zare 
dans le Congo. Le Gange, l'indus, |'Orenoque et le Missis- 
sipiau Bréi|, |e ]io de la Plata, divers fleuves que produit 
le lac de Chiagay, dans la baie de Bengale ; d'autres Ileuves 
sur la c6te de Coromandel, grossis par les pluies qui coulent 
des monts Ga[es ; l'Eupbrate en Méoepotamie et le Sus en 
umidie, sont aussi sujets à des crues périodiques annuelles 
et réguliéres, mais moins célèbres cependa,t que celles du 
lil. Quelques rivières et cours d'eau voisins des montagnes 
Crouvent toutes les vingt-quatre heures des crues sensibles, 
parsuite de la fonte des neiges operée en été par la chaleur 
du jour. 
Les fleuves et rivières de France le plus sujets à de fré- 
quents débordements sont ceux qui prennent leur origine 
dans les contre/;»rts primordiaux des systèmes alpique et 
pyrénen, tels que le YJ«6ne, la Garorme, l'Adour, le Ybin, 
et leurs principaux afiluerts. Puis, en descendant aux bran- 
ches secondaires de ces systèmes, la Seine, qui prend sa 
source dans le plateau de Lagres, et plus encore la Loire, 
qu'enfantent les flanes granitiques des montagnes céJêbres 
des Cevennes, participent / ces inconvcnient, pour ainsi 
dire insurmontables, tant sont faibles les ressources t, umaines 
contre les forces des éléments. Cpendant, si l'a, tne parvient 
à les dompter enfierement, dans une foule de circons- 
tances, il peut opposer des obstacles/ leurs ravages. 
E. GA;z. 
Le d é I u g e ne fut en ralité qu'une grande inondation 
cosmopolite; on cite en outre le deluge de D e u ca I i on et 
Pyrrha en Thessalie, et les inondations desastreuses dont 
le mottde, et principalment la Chine, ont eu / déplorer 
les suites dans l'antiquité. Les conteCs qui ont eu le plus 
à soufhir des inondafions durant «ne période de t,480 ans 
ensiron sont la Hollande, la Chine, l'Angleterre, l'Alle- 
ma[ne, la France, l'ltalie et l'Egpagne. Les euves dont 
les ravages ont été le plus considérables sont la Tandse en 
Angleterre; le lanuhe, le Rhin en Allemagne, le Tibre, 
l'Arno, le P6 en ltalie; le Guadalquisir et te Tage en Es- 
pagne et en Portu.',al. La mer. elle aussi, a couvert de ses 
eaux de grand.s e|endues de pays. Sans parler de l'englou- 
tissement de l'Atlanti,le, dont la mémoire n'est peut-Pt,e 
l,as aussi labulenge qu'on pense, elle a thit irruption, 
en 35:, sur une grande partie de l'Angleterre; en 1607, 
elle couvrir plu»leurs parties de c6tes, et s'a'ança jusqu'h 
9 kiom6tres dang l'lutCieur des terres dans certains 
cantons, et principale,nent dans le con«te de Sommerset. 
Eu llollande, elle a ouvert et forcë le pasage du Texei, 
en 1.'00 ; en 1-21, elle a d, coupé la c6te aux environs de 
Dordcecht et de Gertr,ydeuherg en une chaine d'ies, en- 
2loufi soixante-dix villages, des milliers d'honmes et d'a- 
nimaux, et changé le lac F|ëvo en Zuyd erzée actuel ; en 
152 t, elle a force plusieurs digues et [orm6 le lac Biesbocb 
en 1530 (le 5 novembre), ele a égalemcnt abandonné ses 
rives, détruisant plus de quatre cents villages, et formant, 
par la rëunion de plusieurs lacs, le grand lac ou mer de H a r- 
lem; en 1578, elle fit également irruption dans la Frise, 
I)ri.ant les digues, et jetant des vaisseaux dans l'intérieur 
des terres. II est  remarquer que la Hollande, par sa posi- 
tion, est la contree la plus exposée au fl,a des grands dé- 
borde,neufs : de 516 à 1273, on y avait déjà compte qua- 
tante-cinq inondations terribles, et de cette époque jusqu'h 
,os jours on en compte encore seize, dont les ravages ont 
«.té incalculables. La plus considérable, celle de 1634, 
périr plus de 7,000 personnes et de 50,000 animaux don«es- 
tiques. En ltalie, les eaux ont formé le lac Ro.nd, en 1557 : 
Borne, FIorence, furent en partie submergées. 
biais notre triche serait t,'op longue à remplir s'il nous 
fallait AhumCer les tri»tes résultats de chaqe débordement; 
nous nous bornerons à dire que les années les plus dé.as- 
lreuses ont Atê 40- (en Chine), 573 (Angleterre), 583 
( l'ari ), 6 i9, 738, ;61 ( Jtalie ), 808 ( llolh,nde ), 860, 9-5, 
tl0C (AIlemane et Anlel're), 119 (France : à Paris, 

INONDATION  I ...... 
les eaux forcerent Philippe-Auguste à abandonner son 
de la Cité et à se réfitgier à l'abba)e de Sainte-Genevc*e), 
1230 (Hollande); 10, 1296 (France, et notamm,mt 
Paris ); I t,00 (Hollande); 1 08 (Paris) ; 1421 (Hollande), 
1427 et V93 (France); 1521, 1530, 1532 (Hollande); 1550 
(Borne); t 557 { Allemagne, Angleterre, Chine, France, 
Hollande, Italie); 1571 (Allemagne, France : à Lyon, le 
faubourg de la Gnillotiëre est submergé par le Bh)ne ) ; 1578 
(Allemagne, France, Hollande ) ; 160"/ (Angleterre) ; 108 
(France : la Loire surtout cause d'épouvatables alCars); 
1 6 ( dsastres causé s par les eaux à Séville); t 634 (Chine 
et llolla,,de }; 141 (Hollande); 16-7 (Hollande et France : 
fi Paris, l'on va en botean dans les rues du Coq et du 
Mouton) ; 1551 (France); 1658, 1671 (Hollande); 1702 
(trafic et l-ome); 1707 / 1721 (An#eterre); 1709 
(France) ; 1722 (CI,iii, Holstein); 1726 (France) ; 1762 
(Allemagne, France, Italie); 1771 (ltalie : ffaples, Ve- 
aise) ; 1773 ( lndes orientales ); 1782 ( Angleterre, France, 
Hollande) ; 1787 @;avarre, friande) ; 1789 (Angleterre, 
Italie : à Plaisance); 1791 et 1792 (Angleterre); 1800 (Mie- 
magne : vingt-quatie villages détruits aux environs de Prés- 
bourg; Chine, Saint-Domingue, France, Hollande) ; 1808 
(Franoe, Hollande ); 1812 (la Tamise ì Londres : un corps 
,le 2,000 Turcs, stationné dans l'une des lies du Danube, est 
emporté par les eaux de ce fleuve ) ; 1818  Loulsiane, Ben- 
gale) ; 1816 (Hollande, hlande). Des inoJadations moins 
cruelles ont signale les années suivantes : la France, en 1834, 
a été ravaee sur tous les points par la crue de la plupart de 
ses grands fleues et de leurs aflluents ; en 1836, la Seine 
a également débordé deux fois, et dépassé un niveau de 
sept mëtres au-dessus des plus basses eaux. Depuis, la 
France a eu à sou[lrir des inondations de la Loire, en 184- 
et 186, puis du IOne et du Bhin, et enfin de la Garonne 
et du Cher, en 1855. Mais ces sinistrea deviendront sans 
doute «le plus en IAus rares,  mure que se ioerfeetionnera 
la canalisation de nos grandes voies navigables. Le reboise. 
ment des montagnes et une meilleure distribution des eaux 
seraient auasi probablement d'un bon secous. 
INOP, GANIQUE ou ANOPGANIQUE, ¢'est-à-dire 
prit'Wd'organsotion. On appelle ainsi les corps bruts ou 
dont les parties ne sont point disposées pour n but, pour 
un concours d'action. Tels sont les minéraux, terres, pierres, 
reCaux, sels, etc. Leurs molécules constituantes sont sim- 
ples et ont en elles seules In raison de leur existence, comtal 
s'expriment les philosopbes; elles shmisent parjuxta-po- 
s'tion extérieure, ou suivant des lois de cristallisa- 
t i o n : clmcune d'elles, pour l'ordinaire, possède les qna- 
lités du corps qu'elles forment. L'air, l'eau, la terre, etc., 
leurs particules intégrantes, en quelq,,e quantité on régula- 
rite géométrique qu'on les suppose, comme dans les sels 
le mieux crista]lisés, les pierres le mieux configurées, dan( 
l'asbeste et l'amiante, dapparence fibreuse, n'ont point 
d'organe, ni de but dëte'mi'ne à accomplir, comme en ont 
le plus simple végëtal (un lichen, un fucus) et l'animal le 
plus luiCieur ( nne monade ou protée, on autre animalcule 
polymorphe, gélatineux). D«j/, dans ces races, il existe un 
enstmble d'action, nn concert x irai, des parties arrangées 
pour opérer la nutrition, la reproduction, enfin un appareil 
de pièces et un mouvement simultané pour ces fonctions, 
quelque simples qu'elles puissent ètre. D'ailleurs, des tis- 
sus, ou celluleux, ou lamelleux, ou fibreux, plus ou moin. 
lraversés de vaisseaux remplis de fl,ides, exercent une ab- 
sorption, une intnssusception pour 1"accroissement intérieur 
chez l'ètre organise végétal et animal. Bien de semblable ne 
se inanileste dans les enrps minéraux ou bruts, dont chaque 
portion peut subsister isolée, indépendante, et en ètre séparee 
sans inconçénient. Le minerai ne constitue pas un individu, 
un ensemble, il n'a ni vie ni mort réelle ; il ne se perpét,e 
point par gén,'ation, ,nais se Iorme par agégation 
molécules, par attraction ou par combinaison cl,i,nique. 
Les tres orga, dsés peuvent contenir des corps inorga- 
niques. Ainsi, différents sels minéraux o du carbonate et d 



INORGANIQUE 
phosphate calcaires, des particules de fer, de manganèse, 
de soufre, de silice, etc., pénttrent «]ans les tissus animaux 
et végétaux, peuvent servir plus ou moins dans l'organisme 
vi art, mais seulement comme parties auxiliaires; par 
exemple, dans l'ossification, la formation des tests, des 
coquilles, la coloration du sang, la solidification des tiges 
et écorces, etc. Cependant, ces raatériaux ne s'imprègnent 
pas de la vie et de l'organisation eux.mmes. La plupart 
sont comme des éléments étrangers et éliminés par le 
Inouvement excrémentiel ou depuratoire qui repousse tout 
ce qui ne peut s'assimiler ou tout ce qui enraye et contrarie 
l'acte vital dans son concert barmonique. 
Les corps inorganiques ont des formes anguleuses, ou 
géométriques, ou i,Téguliëres, tandis que les organiques af- 
fectent des formes rondes, ou sphéroidales, on c.lindriques, 
engendrées de la sphère. Les inorganiques n'ont point de 
limites de grandeur et de petitesse; les orgauiques ont une 
mesure pour chaque esp{:ce. Les premiers ne présentent ni 
peau, ni enveloppe qui les entoure, ni acte spontané, ni 
durée dterminee; en un mot, la matière inorganique est 
en contraste perpétuel avec l'organique : celle-ci, 
mort ou h l'epoque de h disgrégalion de ses parties, rentre 
dans le domaine de Finorganique, état primitif de tous les 
matériaux qui constituent notre obe. J.-J. 
IN PACE. Voye'. PAC 
IN PABTIBUS, expression latine, que l'usage a fait 
passer dans la langue vulgaire. On appelle éveque in par- 
tibus celui auquel on a donné un titre d'évche dans un 
pays occupé par les infidëles ; on sous-entend toujours in- 
fidelium; alors in partibus ifidelium signifie dans les 
possessions des infidèles. Cet usage de donner des évécl,és 
m partibus commença lorsque les Sarrasins chassèrent 
les chrétieus de Jérusalem et des autres pa)s d'Orient. L'es- 
poir de reconquérir ces pays lit qu'on continua h nommer 
«les éveques pour les sieges où il y en avait eu deià; et 
depuis qu'on a donné .les coadjuteurs aux évques, l'usage 
a voulu que ces coadjuteurs, qui ordonnent et confirment, 
fussent en mme temps créés évoques in partibus. 
IN PETTO. Voyez PTT0 (In. 
IN-PLANO. 'o9e-- FORMAT. 
IN-QUA. RTO. l'ove-. FoRtxT. 
INQUIETUDE. Ce mot exprime la privation de la 
tranquillité et du calme, au physique comme au moral. Il 
provient du substantif latin D;qmeludo, dont la significa- 
tion est la ratine, ce substantif èlant f,»rmé de la particule 
i», signe de négation, et de quietudo, repos. La situation du 
«lu corps et de l'esprit, ainsi désignée, est la nuance la plus 
I.gère des affections pénible; al»xquelles l'homme est con- 
damné par ses besoins. Jouit-il des biens qu'il pouvait dé- 
sirer, il est inquiété par la crainte de les perdre; est-il privé 
,le ceux qu'il souhaite, son repos est troublé par ses efforts 
pour se les procurer. Les soin'ces de l'inquittude étant trop 
nombreuses pour pouvoir en prësentet" ici un simple aperçu, 
nous devons nous borner ì quelques considérations médi- 
cales sur ce sujet. 
L'inquiétude qui survient sans cause connue n'est point 
une maladie, exactement parlant, mais elle en est ordinaire- 
ment le présage et l'avant-coureur. Elle se manifeste par 
un malaise indefinissable, par une impulsion irrésistible ì 
changer continuellement de position, par une agitation invo- 
lontaire, une tendance h s'étendre. Cet état est souvent borné 
ou principalement marqué sur les extrémités lutCierres : 
on ressent dans leur longueur une sensation pénible ; on 
eprouve le besoin de les mouvoir; elles tressaillent et se 
roidissent : c'est ce qu'on nomme vulgairement avoir des 
inquitudes ou impatiences dals les jambes. Ces troubles 
sont l'effet d'une altération survenue dans l'Arat normal de 
!'appareil nerveux, le moteur principal de la vie ; et on peut 
les considérer comme des moniteurs utiles. Aussitôt qu'ils 
s'annoncent, il convient de rechercher dans son genre de 
vie habituelle ou dans les circonstances inaccoutmées les 
¢.anse, qui ont pu altérer la santé, afin de les éloigner s'il 

 INQUISITION 4o 
est possible. En tous c.as, un bain frais et une alimentation 
légè.re, si l'appétit a persisté, sont touiours des moyens 
auxquels on peut recourir sans inconvénient, et ils suf- 
fisent souvent pour ramener le calme. Si l'inquiétude per- 
siste et s'aggrave, il est nécessaire de consulter un méde- 
cin, plus puissant dans l'origine des maladies quedaus leur 
cours. 
L'atation d,, corps, dont nous venons d'esquisser les 
principaux traits, est très4réquemment produite par des 
causes dites morales, et se rallie à la or a i n t e : telles sont 
les inquietudes qu'on conçoit par l'appréhoesion d'un mal- 
. heur auquel nous sommes exposés, et dont Is sources sont 
aussi vadées que nombreuses. La crainte de la mort in- 
quiète surtout la ph,part des hommes, et plusieurs tombent 
pour cette cause dans un état trés-fcheus. Les inquiétudes 
gratuites ont des résultats comme celles qui sont fon- 
dêes, et elles ressemblent à la peur du mal, qui engendre 
le mal de la peur. 11 faudrait donc se garantir d'un tel 
état, mais la possibilité manque le plus ordinairement, et 
peu d'hommes ont un caracoEre assez ér.er#que pour en ëtre 
exempts. C'est surtout chez l'homme malade qu'il importe 
de présenir ou de faire cesser l'inquiétude : c'est un des 
premiers de oirs du médecin. 11 doit to,jours montrer l'es- 
pérance aux yeux de ceux qui invoquent son secours. Ce 
soin est principalement nécessaire dans les affections des 
viscères abdominanx, qui, plus que tous autres, inspirent et 
entretiennent la peur de la mort. Les assistants des mala- 
des doivent aussi seconder le médecin s,»us ce rapport; mais 
ils le n«gligent trop souvent, et fl en resulte journellement 
des accidents graves ou mortels. On ne saurait trop re- 
commander aux garde.malales et. aux autres personnes de 
ne rien manifester d'inqtfietant, soit par leurs gestes, soit 
par leurs paroles, quelles qt,e soient leurs craintes. 
S'il est nécessaire de prevenir et de bannir l'inquiétude 
pour la pluralité des hommes, il en est pour lesquels on 
doit prendre un soin contraire : ainsi, pour déterminer tel 
malade à subir une opération, ou à se soumettre ì un trai- 
tement medical, il faut l'alarmer sur son état, mais avec 
une mesure que le tact seul peut suggérer. En definitive, 
Finquietude, comme toutes les choses d'ici-bas, a des lu- 
courArieurs balancés par quelques avantages. 
D r CnARBOl-N.-I ER. 
lXQUISITION (du latin inquisitio, enquèie, examen). 
Quelques auteurs font remonter l'origine de lïnquisition à 
1184; ils en trouvent le principe dans une constitution 
faite au concile de Vérone par le pape Licinius, dans la- 
quelle ce pontife ordonnait aux évèques de s'informer par 
eax-romes (nquirere), ou par commissaires, des per- 
sonnes suspectes d'hérésie. Le pontile distinguait des degtés 
de suspects, de convaincus, de pénitents et de relaps, suivant 
lesquels les peines étaient diffcrentes. Après avoir employé 
contre les coupables les peines spiriluelles, l'Église devait 
les abandonner au bras seculier, pour 6tre punis de peines 
corporelles, l'expérience ayant demontré que les mauvais 
chretieus se mettaient peu en peine des censures ecclésias- 
tiques et méprisaient les punitions spirituelles. Peut-0tre 
est-ce d'après cette constitution et ses principes qu'lnno- 
cent III dépcha vers le midi de la France des mission- 
naires, h la fois guerriers et religieux, qui y fondèrent l'in- 
quisition, ou saint-office. Pierre de Castelnau et Raoul, 
tus deux moines de Citeaux, furent envoyés dans la Gaule 
narbonnaioe, et autorisés à ,iwer h l'autorité séo;lière, après 
les avoir excommunies, tous les hérétiques qui refuseraient 
de se soumettre; lents biens étaient saisis et leur personne 
proscrite. Le résultat de leur missiun ne répondit point ì 
l'attente du pontife. Les comtes de Toulouse, de Foix, de 
Béziers, de Carcassonne et de Comminges relusèrent d'ex- 
pulser des sujets soumis, dont la proscription anrait affaibli 
la population de leurs États et tari les sources de leur pros- 
perité. Mais les moines de Citeaux ne se découragèrent pas, 
et s'adjoignirent douze autres frères de leur ordre et 
Espagnols Diego Acebes, évèque d'Osma, et saint D o m i- 



408 
nique de Guzman, qui fut le premier iraluisiteur général. 
Pierre de Casteluau ayant été assassiné par les Albigeois 
lome profita de cet événement pour donner / ses mis- 
sionnaires l'autorisation de prêcher la croisadc contre les 
hérétique«, de noter les seigneurs qui se refuseraient  les 
exterminer, de s'informer quelle était leur croyance, de 
réconcilier les hérétiques qui se convertiraient, et de faire 
mettre / la disposition de Simon, comte de Mont[ort, qui 
commandait les croisés, ceux qui persévéreraient dans leurs 
erreurs. Le nombre des A I b i geo i s qui périrent dans les 
flammes est incalculable. 
En 1215, Innocent, dans le quatrième concile de Latran, 
autorisa les inquisiteurs dé|égnés à agir de concert avec 
les évèque, ou méme sans eux, ainsi que cela avait 
eu lieu fréquemment ; mais la mort enleva ce pontife 
avant qu'il eOt achevé de donner h Pinqnisition déléguée, 
«lui était distincte de celle des évëques, cette forme stable et 
permanente qu'elle prit sous les papes suivants. Il avait 
autorisé saint Dominique à crëer son ordre des dominicains, 
dont la seule mission ctait «le prêcher contre les hérétiqnes. 
En 122t, des symptômes d'hcrésie s'étant manifest(-s jus- 
que dons la capitale des États de l'Ëgfise, Honoril,s Iil, 
successeur d'Innocent, décréta une constitution contre les 
hérétiques d'Italie, et lui fit donner force de loi civile par 
l'empereur Fredéric Il. Trois ans après, lïnquisition exis- 
tait «lCjh dans toute l'Italie, h l'exception de la république 
de Venise, du royaume de Napleset de la Sicile. Frédéric II 
avait la reputation d'tre un assez mauvais chrétien; pour 
s'en laver, il se fit le protecteur de l'inquisition. Il rendit 
contre les hérétiques une loi par laquelle ceux qui étaient 
cundamnés comme tels par l'Eglise et livrés h la justice 
séculière devaient dire punis d'une manière proportionnée 
h leurs crimes. Si la crainte du snpp|icc en ramenait quel- 
ques-uns h l'unile de la foi, ils etaient soumis à une pëni- 
tence canonique, et enfermés dans une prison perpéluelle. 
Les herctiques, ceux qui les soutenaient on les protégeaient, 
ceux qui, ayant fait abjuration, deviendraient relaps, devaient 
ètre juges et punis de mort ; enfin, leurs enfants, jusqu'a la 
deuxième géneration, étaient déclarés incapables de remplir 
aucune fonclion publique et de jouir d'aucun honneur, e.r- 
cept,ceuxqti denonceraient leurspères. Aprés Frédéric 1 i, 
qui en mourant s'était repenti du pouvoir qu'il avait 
aux inquisiteurs ecclesiastiques, prévoant l'extension dont 
la puissancetemporclle des papcs serait redevable h l'inqzd- 
sillon, le pape Innocent IV érigea auxinquisiteursun tribunal 
perwtuel, et pri a les erCues et le.j uges séculiers des debris 
de pouvoir que leur aait laissés FfCCie. La juridiction 
inquisitorialc releva directement du saint-siCe, et ceux 
qui forent appelés h l'exercer, poussèrent leur zèle si loin, 
qu'un sou|èvenent ënéral des esprits mit fro h leur règne 
dans toute l'Allemagne. 
Protégée par saint Louis et par les conciles assemblés 
pourla diriger à Toulouse, Melun, Béziers, finquisition 
:ourba longtempsla France sous son joug; mais elle en dis- 
parut bientit, quoique l'histoire nous rapporte jusqu'en 
1/65 les noms de plusieurs inquisiteurs attitrés. Rétabli 
un instant sous le règne de ce François 1 « qui offrait son 
alliance aux luthCiens du .Nord tout en livrant aux Ilam- 
mes ceux de ses Ëtats, le terrible tribunal n'y eut cette 
fois qu'une durée momentanée, et les ligueurs en réclamë- 
rent vainement le retablissement lors des guerres de reli- 
gion : l'inquisition n'ëtait plus viable pamd nous. On la 
vit, en revanche, s'établir sans obstacle en ltalie; Venise et 
Naples avaient fini par l'accepter, et elle se perpétua dans 
cette terre classique de l'antiquité jusqu'au jour où la 
France révo|utionnaire y apporla ses armes et la liberté. 
Depuis ,a chute du premier empire napoléonien, sauf le 
le laps de temps fort court de la dernière république ro- 
maine, les États de |'Église y ont étéde nouveau soumis. Ha- 
tons-nous toutefois de reeonnaitre qu'elle n'a été nulle part 
plus douce, plus paternelle, que dans cette Italic, qui lui a 
donné naissance. La bien raremeht le bdcher s'est élcv¢ 

II/QUISITION 
comme en Allemagne, comme en France, pour punlr 
l'hérétique et le relaps ; la bien rarement des victimes ont 
été tralnées dans ses cachots et condamnées à Y fufir mi- 
sérablement leurs jours : des conseils, des remontra.ces» 
des expiations publiqc,es ou privées, ont plus souvent ra- 
mené le coupable dans le giron de l'Église. 
De toutes les inquisitions, la plus sanglante, la plus 
odieuse, a etWcelle d'Espagne. Son règne dévastateur y peut 
ètre divisé en deux périodes, celle de l'inquisition ancienne, 
introduite en Catalogue en 1232, et propagée ensuite dans 
Cou te la péniasule ibérique, et c, elle de l'inquisition mo- 
derne d'Espagnc, ou saint-office, établie en 1481, sous le 
le dgne de Ferdinand et d'Isabelle..D'aprës les règles de 
l'inquisition ancienne, les htrétiques impénitents étaient 
livrés / la justice séculière et punis du dernier supplice; 
les réconciliës devaient, après avoir fait abjuration publi- 
que au milieu de l'église, observer les pénitencesdont voici 
la formule : o Le jour de la Toussaint, les ïtea de Noël, de 
|'lîpiplmnie et de la Chandeleur, ainsi que tous les diman- 
ches de Carême, le rconcilié se rendra/ la calhédralc 
pour assister/ la procession, en chemise, pieds nus et les 
bras en croix ; il y sera fouetté par l'évèque ou par le curé, 
excepté le dimanche des Rame.aux, où il sera reconcilië. 
Le mercredi des cendres, il se rendra aussi ;i la cathédrale 
de la mdme manière, et il y sera chassé de l'église pour 
tout le temps du carême, pendant lequel il sera obligé de se 
tenir h la porte et d'assister de la aux offices divins; il 
cupera la mëme place le jeudi saint, jour où il sera roeconci- 
// de nouveau. Tous les dimanches de CarCe, il entrera 
à l'église pour tre réconci/i, et reprendra aussitôt sa 
place à la porte. Il porl«ra toujours sur la poitrine deux 
croix d'une couleur différente de c, eile de l'habit. » Cette 
péuiteueedevait durer trois ans pour les fauteurs d'hérésie, 
légèrement suspects, cinq ans pour ceux qui étaient forte- 
ment suspects, sept ans pour œux qui ëtaient violemment 
suspects, et dix ans pour les réeonciliés. Quant aux héré- 
tiques obstinés et impénitents, ils étaient livrés aux flammes, 
ainsi que les relaps : la seule grâce qu'on faisait à ces der- 
niers, s'ils manifestaient la résolution de revenir à la foi, 
oonsistait h les faire étrangler par le bourreau avant que 
le feu ftt mis au brocher. L'inquisition alla jusqu'à condam- 
ner des morts, parce qu'ils étaient hérétiques non réconei. 
tiés : ainsi, les ossements d'Arnauld, comte de Forcalquier 
et d'Urgel, et ceux d'un grand nombre de seigneurs et 
d'héretiques, firent exhumés pour ètre livrés aux flammes. 
Outre ces peines corporelles, l'inquisition infligeait des 
amendes péctmiaires et prononçait aussi la conûseation des 
biens. 
Tout Cait soumis à cette terrible juridictiou :abseuts et 
présents, morts et vix'ants, sujets et souverains, riches et 
pauvres; et les categories de ceux qui pouvaient dire soup- 
çonnés d'hérésie étaient nombreuses. La moindre dénoncia- 
tion pouvait attirer sur eux Pattention du saint-office; et 
du moment qu'une instruction prëparatoire les avait con- 
aincus du crime ou seulement du soupçon d'hérésie l'ar- 
rêt de prise de cors était lancé. Dès cet instant il n'y avait 
plus ni privilége ni asile pour l'accusé, quel que 10t son 
rang : on l'arr,.tait au milieu de sa famille, de ses amis, 
sans que personne os't opposer la moindre résistance. 
Aussitot qu'il se trouvait entre les mains des inquisiteurs, 
il n'était plus permis à qui que ce totale communiquer avec 
lui : il sevo)ait soudain abandonné de tout le monde et privé 
de toute espèce de consolation. Ses biens etaient invento- 
riés et saisis. Les prisonniers dont |'kérésiœe n'était pas 
constante étaient acquittés et absous ad cautelam, c'est-h- 
dire comme a)-ant été suspectés d'hérésie; mais si des char- 
ges graves s'devaient contre eux, ils demeuraient plusieurs 
années dans les cachots, et finissaient par tre appliqués 
la question : cette épreuve sufliit h rassurer la Conscience 
des luges. Les condamnés au dernier supplice avaient le 
droit d'en appeler au pape. L'exil, la .déportation, l'infa. 
mei, la perte des emplois, houneurs et d,gnités étaient en- 



INQUISITION 
oere au nombredes peines inlligées par l'inquisitiott espa- 
gnole. Chaque ville, chaque i,rosince, avait ses inquisi- 
tëurs, qui parcouraient la contrée, escortés d'un grand 
nombre d'alguazils, et recesaient les dénonciations, de 
quelque part qu'elles inssent. Pendant deux siècles, ils 
poursuivirent avec tant d'archarnement l'exterminati,m des 
h«rétiques, qu'ils manquèrent de victimes vers le milieu du 
quinzième siècle. 
C'est à cette époque que l'inquisition régularisfie (inqui- 
sillon moderne) fut inlroduite en Espagne, après avoir subi 
une réforme, au moyen de staluts et de règlements. Du règne 
de Ferdinand et d'Isabelle date pour cette institution lne 
ère plus affreuse encore. Les juifs convertis au christia- 
nisme, ou qui feignaient une conversion sincère, s'Cevaient 
alors dans la péninsule hispanique à près d'un million ; leur 
apostasie ne tardait pas à se detouvrir au milieu de la con- 
trainte dans laquelle ils vivaient, et ce fut contre eux que 
Sixte-Quint et Ferdinand établirent la nouvelle inquisiliou, 
qui surpassa la première en barbarie. Un grand-inquisileur 
général et le conseil de la supréme furent institués par une 
bulle de Sixte-Quint, et commencèrent cette extermination 
juridique qui coùta à l'Espagne plus de 5,000,000 de citoyens, 
proscrits de son territoire par l'influence du redoutable 
saint-office, ou livrés aux flammes de l'auto-da-Jé. Qua- 
rante-cinq inquisiteurs-généraux, en tgte desqqels nous 
placerons t'odieux T o r q u e m a d a, amenèrent ce résullat 
désastreux. 
Parlerons-nous maintenant des tortures attxquelles étaient 
livrés les malheureux suspectés d'hérésie? Representerons- 
nous leurs demeures rnéphitiques .9 Peindrons-nous les odieux 
traitements auxquels ils étaient en hutte de la part de leurs 
geôliers? tous renvoyons pour tous ces delails à l'ousrage 
publié par Llorente sur l'inquisition d'Espagne, et à celui 
qu'a publié Léonard Gallois, dans lequel nous avons filin- 
lement puisé les principaux documents de cet article, nous 
ne pouvons cependant, malgré les sentiments pénibles qu'in- 
spirent ces tristes souvenirs, passer sous silence les moyens 
par lesquels les inquisiteurs espéraient arriver à la connais- 
sance de la vérité. La question était appliquée devant les 
juges par les bourreaux, dans un appareil propre à inspi- 
rer la terreur aux patients que l'on martyrisait; elle se 
donnait de trois manières, par la corde, par l'eau etpar le feu. 
Dans le premier cas, on liait derrière le dus les mains 
du patient, au moyen d'une corde passée dans une poulie 
attachée à la voùte, et les bourreaux, aprè.,i l'avoir élevé 
aussi haut que possible, et tenu ainsi suspendu pendant 
quelque temps, l'chaient la corde de rnaniëre à ce qu'il 
tornbat à un demi-pied de terre : ces terribles secousses 
disloquaient les jointures; la corde entrait souvent dans les 
chairs iusqu'aux neifs, et elles étaient renouvelées sans 
cesse pendant une heure, jusqu'à ce que le rnédecin de 
l'inquisition déclarat qu'il y avait danger à continuer. 
La seconde application de la question se faisait au moyen 
de l'eau : Les bourreaux étendaient la victime sur une es- 
pèce de chevalet de bois, en forme de gouttière, propre à 
recevoir le corps d'un homme, sans autre fond qu'un baron 
qui le traversait, et sur lequel le corps, tombant en arrière, 
se courbait par l'effet du rnéeanisme du chevalet, et prenait 
une position telle que les pieds se trouvaient plus hauts que 
la tgte. 11 résultait de cette situation que la respiration deve- 
nait très-pénible, et que le patient éprouvait les douleurs 
les plus vives dans tous les membres par l'effet de la pres- 
sion des cordes, dont les tours pénétraient dans les chairset 
faisaient jaillir le sang avant rnème qu'on eut employé le 
garrot. 3'est dans cette cruelle position que les bourreaux 
introduisaient au fond de la gorge de la victime un linge 
fin mouillé, dont une partie lui couvrait les narines ; on 
lui versait ensuite de l'eau dans la bouche et dans le nez, et 
on la laissait fdtrer avec tant de lenteur, qu'il ne fallait pas 
motos d'une heure pottr qu'il en eft avalé un litre, quoi- 
qt'elle descendit sans interruption. Ainsi , le patient ne 
trouvait aucun intervalle poJtr respirer; à chaque ittstatt, 
»lCr. »g LA co,vgns. -- ï'. 

409 
il faisait un effort pour avaler, espérant donner passage 
un peu d'air ; mais on conç'oit crnnbien le linge mouillé et 
l'eau devaient opposer de résistance h celle fonction, la plus 
importante de la vie. !1 arrivait souvent que lorsque la ques- 
tion était linie, on retirait du fond de la gorge le linge tout 
imhibé du sang des vaisseaux qqe se rompaient par les 
grands efforts du torturé. Il faut ajouter qu'/ chaque instant, 
un bras nerveux tournait le fatal billot, et que les cordes 
dont les bras et les jambes étaient entourés entraient jus- 
qu'anx os. 
Pour appliquer la question au moyen du feu, les bour- 
reaux commençaient par attacler les mains et ies jambes du 
patient, de manière qu'il ne pùt pas changer de posilion : ils 
lui frottaient alors les pieds avec de l'huile, du lard et au- 
très matières pénétrantes, et les lui plaç.aient devant un feu 
ardent, jusqu'à ce que la chair fùt tellement crevassée, que 
les nerfs et les os parussent de toutes paris. Est-il étonnant 
après cela qu'on ait vu nombre de prisonniers dont la cons- 
cienoe était p,,re, s'accuser néanmoins de quelque délit, afin 
de ne pas ètre plus longtemps tturés et de ne pas mourir 
dans leur prison ? 
Telle fut l'inquisition en Espane jusqu'à ce que Napo- 
Iéon I r l'eut spprirnée, par un décretdu z décembre 1808. 
Rélablie au retour de Ferdinand ¥1I, elle ne put ètre abo- 
lie définitivernent par les cortés qu'en 1820. 
En Portugal, l'inquisition fut instituëe en 1557, à la suite 
d'une longue résistance. Après avoir arraché sa patrie à la 
domination de l'Espagne, Jean de Bragance essaya en vain 
de la détruire. Tout ce qu'il put lui enlever, ce éd le droit de 
confiscalion, et encore lut-il excomnmnié pour ce fait, après 
sa mort. Les Portugais inlroduisirent l'inqqisition dans les 
lndes, comme les Espagnols l'avaient introduite en Arné- 
tique. Gon lui dut une atroce renornrnée. Enlin, Jean VI 
supprirna le saint-office en Portugal, au Brésil et dans les 
Indes. Par son ordre les restres du terrible tribunal de 
Gon furent brùlés publiquement. 
Ve n i se aussi, et nous l'avon.q djà dit, eut dang le principe 
son inquisition ecclësiastique; mais son caraclère ne tarda 
pas à dégénérer compléternent, sang que la terreur qu'elle 
inspirait dirninuat en rien. L'inquisition y devint tout à fait 
politique, inquisition d'État. Trois membres du pouvoir 
étaient revètus de cette effroyable juridiction, sous le titre 
d'inquisiteurs : on en choisissait deux dans le sein dq 
Conseil des Dix, et le troisième, parmi les sénateurs asses- 
seurs du doge. Le pouvoir de ces trois iuquisiteurs était 
aussi illimité et aussi absolu que la dèfiance et la terreur 
par laquelle se maintenait le gouvernement oligarchique 
de cette république. Ils avaient droit de vie et de mort 
sur tous les citoyens, nobles ou plébèiens, et le sort qu'ils 
firent subir à Marino F a t iero témoigne assez que le doge 
lui-rngrne devait se courber devant leur toute-puissance. 
llall,eur au "¢énitien assez audacieux pour murmurer contre 
l'oppression sous laquelle il gémissait ! malheur hTétranger 
assez imprudent pour fronder ou blamer le gouvnernent 
de la république ! L'inquisition avait des sbires et des 
pions partout; pour elle les nmrs avaient des yeux et des 
oreille% tout lui était rapporté. La mort seule vengeait l'in- 
jure faite au pouvoir, et les eadasres trouvés dans les ca- 
naux, ou suspendus aux potences rnortuaires annonçaient 
en mgrne temps au peuple l'offense et le chgtirnent, terri- 
bles épouvantails qui comprimaient la plainte et la commi- 
sération ; car la pilié rnème était criminelle aux yeux des 
inquisiteurs. Si parfois ils accordaient la vie à celui qui 
leur avait été dénoncé, une prison plus cruelle que la rnooE 
l'attendait : les puits (/o-.-4), dont l'humidité méphitique 
glaçait lentement les membres du malheureux qui y était jete 
et le faisait périr de con_omplion ; les plornbs (pombi) 
non rnoius redoutables, sur lesq,lels un soleil dévorant 
dardait, chaque jottr, sa chaleur corrosive, folrnaise dont 
l'atrnospbëre embrasée faisait naitre une fièvre délirante, 
ébranlait les facultés intellectnelles, et réduisait à l'idiotie 
celui qu'elle ne ruait pas. Cette terrible inquisition dont 



410 
les sentences taienl sans appel, a cessé d'exi_ter, avec la 
f, rme aristocratico-répnblicaine du gouvernement vénitien, 
dans les dernières années du dix-huitième siècle. 
lapoléon G«1.cols. 
IXSALUBIITÉ IXSALUBRE. Lorsqu'one odeur dé- 
sagréal,le, émanée de quelques matières organiques en 
composilion, vient affecter nos organes, nous sommes nao 
turellement portés  lui attribuer une action plus ou moius 
déh'tère; cependant, elle est souvent incapable de produire 
des effets fitcheux sur noire économie, tandis que des 
mi as me s inodores ou d'une odeur ì peine sensible pro- 
duint quelquefois des effets funestes sur des populations 
entières. Ainsi, l'odeur tetide que développe la putréfaction 
des animmtx a peu d'action sur Iëconomie animale, quand 
elle peut se répandre librement dans l'air, et m6me dans 
des lieu peu spacieux et mal aeres, tandis que les mias- 
mes qui s'exhalent des piaules ou des vases des étangs, 
dont l'odeur est souvent a peine sensible, vont porter leur 
action dans tous les lieux oh l'inlluence des vents les dis- 
persent. Nous pourrions ajouter un grand nombre d'exem- 
ples ì ceux que nous venons de citer ; mais ils ne leraient 
que coufirmer le fait que nous avons signalé. 
Malgré les nombreux travaux qui ont été faits pour alC 
terminer la cause de l'iosalobrité que présenlent certaines 
localités ou diverses actions connues, on est encore dans 
Iïgnorance la plus complèle  ce sujet : ainsi, on a recueilli 
l'air des marais, l'eau que cet air transporle aec lui : on n'a 
i m y recoonaltre aucun principe particulier qui permit 
d'expliquer leurs tuneles effets ; on est donc forcé de se 
borner jusque ici ì signaler le fait sans pouvoir en donner 
aucune explication. 
Un grand nombre d'opCations des arts sont regardCs 
comme insalubres et nuisibles aux individus qui les pra- 
tiquent; cependanl, notre siëcle a eu beaucoup d'amelio- 
ralions sous ce rapport, itce aux progrès de la chimie et 
à l'initialive d'un certain nombre d'hommes, à la tëte des- 
quels nous devons placer M o o ty o n. 
Les etablissemeots off s'exercent les industries que nous 
venons de signaler, peuvant nuire par les émanations dont 
ils sont le siege, sont soumis à certaine conditions et rangés 
dans la seconde catégorie des établissements dan- 
gereux,insalubresou incommodes. 
Certains Iogemeols, soit par les emanalions qui s'y dé- 
gagent, soit par le manque d'air ou de lumiere, sont ré- 
put/s insalubres. Cci,codant la cupidité de quelques pro- 
prielaires ne reculait pas devant les cooséquences que pou- 
vait aoir sur la sauté de leurs locataires l'habitation de 
bouges tels que les caves de Lille, signalées par Blanqui 
aihC D'on autre c6lé, la misère contraignait souveut de 
pauvres ouvriers à habiter d'affrenx cloaques, où ils ache- 
vaient la ruiue de leur saulé. La loi du 22 avril US50 s'est 
efforcée de remédier à ces monstrueux abus. Elle donne aux 
conseils municipaux le droit de nommer des comn]issions 
speciales chargées de rechercher et d'indiquer les mesures 
indispensables pour l'assainisment des logements ou dé- 
pendances insalubres, mis en location ou occupés par d'au- 
tres que le proprictaire, l'usnfrui|ier ou l'usager. L'autorité 
municipale peut alors enjoindre au propriétaire d'avoir 
exécuter les travaux nécesires ou lui interdire provisoire- 
ment la location du logenmnt  tilre dhabitatim, saut appel 
au conseil de préfecture et dans le cas d'interdiction absolue 
recours au conseil d'Etat. Toute contravention de la part 
du propriétaire aux preseriptions de l'autorité est punie 
d'une amende. Enfin, lorsque l'insalubrité est le résultat de 
causes extérienres et permanentes, ou lorue ces causes un 
peuvent Cre dctruites que par des travaux d'ensemble, la 
commnne peut acquerir par la voie de l'e x p r o p r i a t i o n 
pour cause d'utih"u publique la totalilé des propriétés com- 
prises dans le pêrimètre des travaux à exécuter. 
INSCRIPTION (du latin inscriptio, fait de Oz, sur, 
et scribere, écrire; eu grec, [,-ttypct./). Ce mot s'applique 
gínéralement à tout ce qu'on écrit sur la partie extérieure 

I.NQUISITION  INSCPdPTIO 
d'un objet, comme un monument, un livre, nn meuble, etc. 
Quand il s'agit d'une inscription placée snr un monument, 
sur un ouvrage d'architecture ou toute autre "œuvre dart, la 
composition en devient un travail d'art En effet» on n'exige 
pas seulement d'une inscription qu'elle indique brièvement 
et en prose vulgaire la destination dn monument, on veut 
encore qu'au mérite de la clarté et de la précision el]e ajoute 
le bon got et l'élégance de la forme. Pour composer nne 
inscription dans ces données, il ne faut dtmc pas eu|ement 
avoir l'esprit inventeur, créateur ou penseur, mais encore 
connaltre b/en les ressources d'une langue et savoir l'écrire. 
11 suit de I/t que toutes les langues, et notamment les lan- 
gues modernes de l'Occident, ne se prétent pas également 
bien à l'inscription. 
Quand une inscription exprime en peu de mots une 
pensée profonde, on lui douve quelqKefois le nom dMpi- 
9 r a p h e, quoique beaucoup de personnes prétendent qu'on 
ne doit employer ce terme que lorsque l'inscription est en 
vers, ou bien contient une pensée ingénieuse, facile à 
comprendre sans qu'elle ait ma¢ rapport au monument, 
et forme ainsi en elle-mme un petit ouvrage pratique. 
Souvent, par exemple, sur des tombeaux, les épigraphes 
ou inscriptions sont de víritables épigrarames ou maximes. 
Comme dans presque tous les ]omaines de l'art, les Grecs 
et les Bomails ont servi de modèles aulx modernes pour 
la comp,sition des inscriptions. En ce qui est du goOt et de 
la pensée, les inscriptions romaines le cèdent aux inscrip- 
tions grecques; mais les premières l'emportent sur les 
secondes pour la bri/veté et la simplicité. On donne le 
nom de st'le lapi daire/ oette derniere maniére de com- 
prendre et de composer les inscriptions. Aujourd'lmi encore 
on emploie le plus gn6ralement la langue latine pour les 
inscriptions, parce qu'elle se prète mieux que toute autre 
aux exigences du stle lapidaire. 
En raison de l'importance toute particufière que les ins- 
criptions antiques ont comme monuments authenllques pont 
la connaissance de l'histoire des antiquitës et de la langue 
des anciens peuples, on s'est de bonne heure occupé de les 
réunir et de les commenter; aussi l'epigrophie est-elle 
devenue de nos jours une des bases de l'archéologie. 
« C'est par les inscriptions, dit M. Berger de Xivrey, que 
nous sont parvenus les plus anciens et les pins irréensables 
témoignages de l'histoire, mme quelquefois les euls qui 
nous restent de la langue d'anciens peuples. Ainsi l'antique 
chaldéen, les idiomes primi|ifs de la Babylonie, de la Me- 
die, de la Perse, un nous ont transmis d'autres traces que 
les inscriptions cunéiformes, recueillies sut les lieux 
où fleurirent ces ¢élebres Eats de l'antiquité. Les Phéni- 
ciens, qtd out joué un si grand r6le dans la civilisation du 
monde, ne nous ont cependant transmis d'autres monuments 
littéraires qu'un petit u¢mbre d'inçc.riptions, la plupart tu- 
nmlaires et Irt courtes. Dans ces inscriptions, l'on recher- 
che avec intétêt les formes primitives de l'alphabet conservé 
en parlie par legs Hebreux, et qui a servi de point de dé- 
part  celui des Grecs, des Celtibëres et des Êtrnsques. La 
langue des derniers et celle des Osques ne nous sont aussi 
coutures que par qlelques inscriptions. Les rn¢loers de la 
Norvège, quelques monuments du Danemark conservdnt 
l'écriture m)stériense des ru n es. Enfin, de nombreux do- 
cuments historiques sont contenus dan les inscriptions 
Idéroglypldques dont le célèbre C hampollion a ouvert 
les véritables voies d'interprétation. » 
[Les inscriptions remontent donc anx temps les plus re- 
culés. Le 2Vec plus ultra des colonnes d'Heronle, le Con- 
mis-to toi-mënw, du temple de Delphes, en fournissent 
depuis bien des si/.cles des exemples celëbres. Quel trait de 
théoloe dans ces trois mots placís par l'antiqai{# sur le. 
fronton d'un 6diftce religieux : Au D/eu inconnu . Quelle 
oraison funébre plus éloquente que ces autres mots au bas 
d'nne statue : A Cornële, mëre des G*'acques Quelqne 
inscriptions anciennes sont en vers ; mais là encore elles 
conservent leur caractère de brièveté et de naturel. OEels 



LNSCPdPTION -- LNSCI:IPTION HYPOTHÉCAIR E 

sont ces vers de Simonide, que fit graver le conseil des Am- 
phiclyoas sur le rocher des Thermopyles pour perpétuer le 
uvenir d'un héroïque dévouement : Passant, vu dire 
$parte que nous sommes morts ici en de[codant 
saintes lois. 
On a beaucoup discuté chez nous, dans les deux der- 
niers siècles, pour savoir si les inscriptions des monuments 
publics devaient .tre en latin ou en Irançais. Nul doule que 
no»te langue, embarrassée d'articles, de p, Cositions, etc., 
se préte difficilement -a la conëision du st}'le lapidaire ; d'un 
autre oS»C n'est-il pas bizarre qu'on place sur des monu- 
mente érigés par un peuple des inscriptions que la majorité 
de ce peuple ne peut comprendre ? Ce qui concilierai» tout, 
ce serait l'art heureux de renfermer, mème dans notre lan- 
gue prolixe, uue grande ou ingénieuse pensée en peu de 
mots. Une de ces bonnes for»unes, c'est sans doute l'ins- 
cription si connne : A Lovis .*t'lV après sa mort! On peut 
encore en citer une autre dans ces deux vers de ¥oftaire, 
pour une statue de l'Amour : 
Qui que tu soiS, ,oici ton mal»re ; 
11 t'est» le fut, ou le doit ëtre. 
Placé sur un tombeau, l'inscription prend le nom d'ép 
taphe; gravee ur nne medaille, elle se nomme ld9ende. 
Il y a aussi des cas oo elle devient une vert»able é pi gram- 
me. En voici une doublement m',digne dans sa natveté : Sous 
le règne de Louis XIV, les habitarAs de Pau, patrie de 
llenri IV, demandèrent la permission d'elever une statue 
à ce roi. On leur répondit tu les engeant à la consacrer 
plutOt au monarque régnant. Ils se rendirent à cette invita- 
tion, qui était un ordre ; mais ils placèrent sur le piédestal 
cette inscription en béarnais : Voici letgetit-lïls de lolre 
9rond Henri. Ouï,v. ] 
Quoique l'on ait commencé dès la renaissance des étuds 
classiques à recueillir les inscriptions anciennes comme les 
monuments les plus autbentiquês qu'on pùt consulter pour 
hien connaItre la langue, l'histoire et les mœurs publiques 
des Grecs et des l',omains, c'est récemment seulement qu'on 
s'est occupé de soumettre toutes les inscriptions aux règles 
générales de la critique, de mmeqn'/un examen rigoureu- 
sement scientifique. Il y aurait de l'injustice à ne point re- 
connaltre les nombreuses obligations dont on est redevable 
sous ce rapport aux érudits d'Outre-Rhin. Pour l'epigraphie 
spécialement romaine, les érudits italiens, en tète desquels 
il faut mentionner Labus et Borghesi, l'emportent sur ceux 
de i'Mlemagne depuis la fin du dix-sep»férue siècle, encore 
bien que dans le courant du seizième et du dix-septième 
siëcle les savants allemands et hollaa;dais avaient beaucoup 
fait en ce qui concerne la cullection et la propagation des 
inoeriptious. C'est de cette époque que date le Thesaurus 
Incriptiomtrn de Grnter et de Scaliger (Heidelberg, 1603 
et 1663), dont une nouvelle édition lut publiée à Amster- 
dans, en 1707, par Groevius et Burmann, suivie bient0t après 
du Novus Thesaurus veterum lnscriptiozzum de Muta- 
tort ( 4 vol., Milan, t739 ), puis des Supplementa de Donat 
{ 3 vol., I.ucques, 1765 ). Depuis lors il n'a plus paru de col- 
lection générale des inscriptions romaines. Le danois Kel. 
lermann aait projeté un ouvrage de ce genre; mais la 
mort le surprit avant qu'il l'eùt terrainW{ Consultez Jahn, 
Speciraen epigraphicum ; Kiel, 1841 ). 
L'Académie des Inscriptions de l'Institut de France pré- 
pare une collection complete de toutes les inscriptions latines 
connues jusqu'à ce jour. M. Léon Renier a été chargé par 
le ministre de l'instruction publique de la publication 
Recueil 9oezdral des inscriltions roraaines de la Gaule. 
Dans son ouvrage intitulé : lnscriptionum latinarum se- 
lectarum Collectio {2 vol., Zurich, 1828), Orelli nous a 
donné un choix riche et fait avec cdliqale. Dans ces derniers 
temps, l'Allemagne a vu paraltre un grand nombre de bons 
travaux relu»ifs fi des parties de ce pays dont l'histoire 
remonte jusqu'à l'époque des llomains, ou bien au droit ro- 
main. A cet égard nous citerons les ouvrages de Haubold 

Dirkn, Kienke, Spaugeberg, Mommseo et Goetllhg. La 
riche collection des lnscriptWnes 'eapolitanœe ( Leipzig, 
1772) a fdit époque dans la science. Les n,eilleurs t,-aaux 
qu'on ait encore publiés sur les inscriptions grecques sont 
ceux des Allemands ; et le Corpus Inscrptiinvm 
(3 vol. Eerliu, t82-tS5t), commence par 13«ekh et continué 
par Fraaz, mérite d'tre cité comme un modèle en ce genre. 
On peut encore mentionner le Sglloçelnscrphom«m dO- 
sann (lena, t32 ), le Sllloge Epiçrammalum de Welcker 
(Bonn, 18287, les £lementa Epi9raghices 9rwcœe de Franz 
(Berlin, 18-tl ). En fait de savants anglais et français qui 
se sont oc¢upés de ces matières en y jetant de ives lumiëres, 
il fhutsurlout ciler les beaux travaux de Leak et de Le- 
tronne, qui a publie, entre autres, un commentaire sur la 
fameuse inscription de Rosette. 
Au reste, il est de la nature méme de l'épigraphie qu'elle 
s'occupe de l'archéologie d tous les peuples dans la langue 
desquels il existe d'antiques iuseriptioas. C'est ainsi que 
pour la connaissance des inscriptions indienaes il faut con- 
sui»er les ouvrages de Prinsep et de Lassen ; pour celle des 
inscriptions perses, les ouvrages de Lassea, de Groteïend, 
Westergaard, Beufey et Rawlinsoa; pour celle des inscrip- 
tions phenieiennes, Gesenius, de Sau!cy, Judas ; pour celle 
des inscriptions arabes, Gesenius, Roediger, Ff hn, Fresnel, 
Teseh, cie. 
IXSCIIIPT|ON. En droit la ignification générale de 
ce mot, c'est l'enregistrement d'un nom, d'une qualitê, 
d'un droit ou de quelque autre chose sur des registres 
établis pour cet objet. C'est à peu prës dans le mème sens 
qu'on dit la,crtlliott d'un étudiant ; car cette formalite 
n'a d'autre résultat qtte de constater que l'ëtudiant declare 
suivre to0ours les cours de la Faeulte à laquelle il appar- 
tient, et se soumeltre à ses règles : ces inscriptions se pren- 
n,:nt de trois mois en trois mois : douze sont necessaires 
l'etudiaut en droit pour pouvoir passer sa these de licence, 
et s,.ize pour celle du doclorat. Le mme nombre est exige 
dans la Faculte de Medecine pour obtenir le mëme grade. 
Les inscriptions de droit coùteut quinze francs ; les inscrip- 
tions de medecine cinquante. Celles de la Facultc des lettres 
ne se paent que trois riunes. 
En liuances, on appelle inscription de redite le titre de- 
livré par lEtat et inscrit sur le grand livre de la dette pu- 
blique, qui con-tate la propriete d'une rente pêrpetuelle sur 
l'Ètat. On donne aus,i le nom d'inscr#ptWns aux obliga- 
tions émises par certains gouvernements, la Russie, par 
exenlIde , eu reconnais-noce de sa dette. 
En diplomatique, l'inscription prend le nom de snscrip. 
tion ; elle contient la designalion des personnes au nom 
desquelles les documents sont expédies et de ceux h qui ils 
sont ad:'essés avec les formulvs d'usage. 
L%SCRIPTION DE FAUX. On appelle ainsi l'acte 
par lequel on soutient en justice qu'une pic:ce produite dan« 
un procès est faue ou falsifiee. Les tribunaux de commerce 
et les juges de paix ne sont pas compétents pour admettre ou 
rejeter les inscriptions de faux. La cour de cassation peut les 
admettre ou les rejeter, mais une fois admises, elle ne peut 
statuer sur ci!es, et doit renvoyer aflx tribunaux ordinaires. 
INSCRIPTION IlYPOTHECAIBE. C'est la dé- 
claration faite par un créancier sur nn registre public de 
1' h .v p o t h è q u e qu'il a sur les biens de son déhiteur. L'in.- 
cription est pour ainsi dire le complément I,.gal de l'hypo- 
thèque; elle seule lui donne une existence reelle aux veux 
des tiers, elle seule lui assigne le rang qu'elle doii oc- 
cuper. 
L'inscription des hypothèques doit être faite au bureau 
du conservateur dans l'arrondissement duquel sont situés 
les biens qui y sont affectes. Pour opérer l'inscription, le 
erêaueier représente au conservateur des hyl»othèques l'o- 
riginal en brevet ou tme expédition autbenlique du jugement 
ou de l'aele qui donne naissance -a l'hypothèque. 11 y joint 
deux bordereaux écrits sur papier timbré, dont l'un peut 
tre porté sur l'expédition du titre et contenant les nom, 
.32. 



412 INSCRIPTION ItYPOTHÉCAIRE -- 
prénoms, domicile du créancier, sa profession, et l'éleetion 
d'un domicile dans l'arrondissement du bureau ; les nom, 
prínoms et domicile du débiteur, sa profession ou une dési- 
gnation telle que le conservateur puis le reconnaltre; la 
date et la nature du titre; le montant du capital des eréances 
exprimées dans le titre ou CaluCs par l'inscrivant, pour les 
rentes et prestatious, ou pour les droits éventuels, condi- 
tionnels ou indéterminés dans le cas ou i:ette évaluation est 
ordonnée, comme aussi le montant des accessoires de ces 
capitaux, et IYpoque de l'exigibilité; enfin, l'iudication de 
l'espèce et de la situation des biens sur lesquels il entend 
conserver son h)pothèque. Le conservateur fait mention 
sur son registre du contenu des bordereaux, et remet au 
requant le titre et l'un des bordereaux au bas duquel il 
certifie as'oir fait l'inscription. 
Les droits d'hypothèque purement légale de l'Éat, des 
communes et des établissemeuts publics sur les biens des 
comptables, ceux «les mineurs ou interdit sur les tuteurs, 
des femmesmariées sur leurs époux, sont inscrits sur la re- 
présentation de deux bordereaux contenant seulement les 
nom, peComs, profession et dunficile r{.el du créancier, et 
le domicile qui est par lui ou pour lui rlu dans l'arrondis- 
sement ; les nom, piComs, profession, dumicile ou desi- 
gnation précise d,t débiteur; la nature des droits à con- 
server et le montant de leur valeur quant a,lx objets 
d6terminé% sans qu'on soit tenu de le fixer quant à ce,tx qui 
sont conditionncls, éventuels ou indétermincs. 
Les inscrtptions conservent l'hypothèque pendant dix an- 
n,:es, à compter du leur de leur date. Leur effet cesse si 
elles n'ont pas ét,: 1-enouselées avant l'expiration de ce éclat. 
Les f'ais des inscriptions sont  la chargedu debiteur, s'il 
n'y a stipulation contraire ; l'avance en est faite par l'inscri- 
vant, si ce n'est quant aux hypothëques legaies, pour Iïns- 
cription de.quelles le conservateur a son recours contre le 
débiteur. 
Les inscriptions sont rayées du consentement des parties 
intdressées et ayant capacité à cet effet, ou en vertu d'o/l 
jugement en dernier ressol t ou passé en Iurce de chose iugée. 
Dans l'un et l'autre cas, ceux qui req,ièrent la radiation 
déposent au bureau du conservateur l'expèdilion de l'acte 
authentique portant consentement ou celle du jugement. La 
radiation non consentie est demandee au tribunal dans le 
ressort duquel l'inscription a été faite, si ce n'est lorsque 
cette inscription a eu lieu pour streté d'une condamnation 
éventuelle ou indéterminée, sur l'exécution ou liquidation de 
laquelle le d«bitcur et te crrancier prétendu sont en instance 
ou doivent ëtre jugës dans un autre tribunal; auquel vas la 
demande en radiation doit y ètre portée ou renvoyée. La ra- 
diation doit étre ordonnée par les tribunaux, lorsque l'ins- 
cription a été faite sans gtre fondée ni sur la loi, ni sur un 
titre, ou Iorsqu'elle I'a été en vertu d'un titre soit irrégulier, 
it éteint ou soldé, ou lorsque les droits de privilëge ou 
d'hypothèque sont effacés par les voies legales. 
Le doit de deman,ler la radiation des inscriptions, en ce 
qui excède la proportion convenable, est aceordë à tous les 
dcbiteurs dont les biens sont greves d'h) puthëques qui, par 
leur nature, s'étendel:t à la fois sur l'universalite des biens 
peAseuls et a venir : telles sont les hYlmthèques légales ou 
ludiciaires. Pour que la demande en réduction soit admise, 
il faut que les inscriptions prises par un crëancier, sans li- 
mitation convenue, soient portAes sur plus de domaitar.s 
différents qu'il n'est nëcessaire à la sftreté des créances. Les 
hspothèques eonventionneiles ne sont pas réductibles. Peu- 
vent aussi gtre réduites comme excessives les inscriptiotls 
pet.ses d'apres réval,tation faite par le créancier des créances 
qm, en ce qui concerne l'hypothèque à ctablir pour leur s- 
rets, n'ont pas dtWréglées par la convention, et qui, par 
leur nature, nt conditionnelles, éventttelles ou indëter- 
luthCs. La mesure dans laquelle il v a lieu de réluil-e les 
insoiptions est laist'.e à l'appréciatin du juge. 
INSCRIPTION MAPdTIME.C'est le mode particu- 
lier dorecr,demont pour la marine de rÈtat. Sont compris 

INSCIIPTIONS ET BELLES-LETTRES 
dans l'inscription maritime les gens de mer -agés de dix-huit 
à cinquante ans révolus; l'inscription s'étend méme aux 
marins qui naviguent sur les riviëres, mais seulement lus- 
qu'à la limite de la marée. Tout hOmlne qui a exercé la pro- 
fession de marin pendant un temps déterminé est inscrit, 
s'il déclare vouloir continuer la nav igation, ou si par le lait il 
continue à nasiguer. Tout marin inscrit est tenu de servir 
sur les Iraliments ou dans les arsenaux de l'Ëtat toutes les 
fois qu'il en est requis. 
En temps de paix, il dépend toujoursdu marin en renon- 
çant ";t la nasigation et à la pèche de se faire raer de l'ins- 
cription un an aprës sa déclaration : en casde guerre, cette 
renonciation est interdite. 
Dans chaque quartier maritime, les marins sont distribués 
en quatre classes ; la première comprend les célibataires, la 
deuxième les veufs sans enfants, la troisième les llommes 
mariés et n'a.vant pas d'enfants, la quatrième les pères de fa- 
mille. La seconde classe n'est mise en réquisition que lorsque 
la premiëre est épuisée, et ainsi de suite. 
Le marin qui a le moins de service sur les b-aliments de 
guerre est req,tis le premier ; et s'il y a égalité de service, c'est 
le plus ancien débarqué soit des bgtiments de l'État, soit de 
ceux du commerce, qui doit être pris. 
Lorsque l'État fait la réquisition, les adminislrateurs des 
quartiers marililnes répartissent parmi les différents syndi- 
cats compris dans leurs cil-souscriptions respectives le nombre 
de marins  fournir pour le service public, et les syndics à 
leur tour forment les listes nominatives po,tr chaque com- 
mune de leur syndicat. 
Certaines autres professions, celles des cbarpentiers de 
navire, perceurs, voiliers, calfats, pouliers, tonneliers, cor- 
diers et scieurs de long travaillant dans les ports et lieux 
maritimes, sont aussi assujctties à repondre à l'appel de 
l'Etat. En cas de guerre, de préparatifs de guerre ou de tra- 
vaux considérables, ils peuvent ëare didgés vers les ports 
militaires. A cet effet il est tenu un registre particulier dans 
le bureau de Iïnscription. 
[L'inscription maritime n'a pas cessé d'ètre en progrës 
dans les trente derniëres amiCs. Au t  avril 18.54 elle pré- 
sentait un total de 160,014 hommes; au 1 er avril 1853, 
l'effectif s'Cevait à 152,812 hommes; en 185:, à 166,90 ; 
en 1851, à l-l,0-t0. En 1S5, ,70 hommes étaient an ser- 
vice de l'État ; 19,808 naviguaient au long cours ; :6,81 
étaient employés au cabotage; 31,200 à la petite pgche; 
6,686 figuraient commeou»riers sur les chantiers du com- 
merce, '5,57 étaient en inactivité. Depuis cette époque les 
embarquements de marins sur les vaisseaux de l'Etat ont 
beaucoup augmenté, et ont dé monter au nombre de plus 
de c,0,000. L. LocvE. ] 
INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES (Aca- 
ddmie des ). Établie par Coibert, en 1663, elle fut longtemps 
connue sous le nom depetite Acaddmie, que lui avait donnë 
LouisXIV, soit parce qu'elle ne fut d'abord composée que 
de qqatre membres, pris dans l'Académie française, et dont 
deux, CItapelain et Casgne, ont été justement ridiculises 
par Boileau, soit à cause du peu dïmportance de ses pre- 
miers travaux. Ils se bornaient aux dessins des tapisseries 
d,t roi, aux devises des jetons du trésor royal, h Pexamen 
des projets d'embellissement de Versailles, à celui des tragé- 
dies lyriques de Quinault, etc. Elle fut ensuite cllargée de re- 
tracer l'ltistoire de Louis XIV à l'aide de médailles, et tint 
successivement ses séances chez Colbert et chez Louvois. 
Quinault en fit partie; plus tard, Racine et Boileau lui- 
mme y furent admis comme historiographes du roi. Sous 
le ministëre de Pontcbartrain, elle reçut le nom d'Acaddmie 
des nscriptions et médailles, qui indiquait assez bien le 
bttt de son institution et de ses travaux. L'histoire de 
Louis XIV toucbait à sa fin ; l'Académie, arrivée progressi. 
vement à dix membres, allait s'éteindre faute d'occnpation, 
lorsque, sur un rapport «le l'abhë Bignon, le roi assura son 
sort par un règlement qui sit le je,te le 16 juillet 170t. Le 
nombre des membres fut fixé  quarante, dont d/x I,ono- 



faites, dix pensionnaires et dix élèves : les plus anciens 
• curent le titre de velérans; un local particulier lui fut assi- 
gné au Louvre pour ses séances; on lui accorda des armoi- 
ries et un jeton académique. E fi.vrier 1"/12, des lettres 
patentes du roi confirmèrent son /.talissement. Ce lut en 
1715 que, pour la première fois, on y adroit, comme hono- 
raires, trois savants étrangers. Enfin, sous la régence, un 
arrèt du conseil d'Itat, du  janvier 1716, provoqué par 
une observation du duc d'Orléans, lui donna le nom d'A- 
cadémiedes Inscriptions et Belles-Lettres, nom plus vague 
que le précédent, car les belles-lettres proprement dites 
semblent Cre du ressort spécial de l'Académie Française. 
Le morne arrët supprima la classe des ëlèves, et porta à 
• ingt le nombre des associés. Deux mois après, on réduisit 
le nombre des vétérans. L'Académie fut honorée de la,visite 
du czar Pierre le Grand, qui la consulla depuis sur l'ins- 
cription de sa statue colossale et sur divers monuments dé- 
couverts dans ses ltats. En 1719, on crut lui décerner Ul 
nouvel honneur en la faisant présider par Louis XV, gé 
de huit ans. Dans la suite, elle fut augm.entée d'une classe 
d'académiciens libres, qu'on divisa depuis en résidents et 
non résidents; plus tard, le nombre des pensionnaires fit 
porté  vingt. En 1785, l,uit membres de cette academie 
furent choisis par Louis XVI pour publier des notices et 
des extraits de manusorits grecs, latins, orientaux et fran- 
çais du moyen ge, tant de la Bibliothèque du Roi que des 
autres bibliothèques. Un decret de la Convention, rendu le 
8 ao0t 1793, sur la motion de l'abbé G r é go i r e, su pprima 
l'Académie des Inscriptions ainsi que toutes les autres. 
A la création de I çl n s t i t u t national, sur la proposition du 
méme député, en septembre 1795, l'Académie des Inscrip- 
tions fut comprise dans la seconde classe (sciences morales 
et politiques )f Sou,s, le consulat, en 1803, elle devint la troi- 
siëme classe, dite d histoire et de liltœeralure ancienne, et 
se composa de quarante membres, pensionnés à raison de 
quinze cents francs, huit associés étraners, et soixante 
correspondants. Après la Bestauration, l'ordonnance ro)-ale 
du 2 t mars 1816, qui réorganisa l'Institut, en exclut quelques 
nembres et y en introduisit, par faveur, de nouveaux. La 
troisième classe devnt seconde, et couserva, en reprenant 
son ancien titre, sa méme organisation, sauf la création de 
dix places d'académiciens libres. En 1823, des mollis peu 
bono'ables pour la majorité qui la dominait la détermi- 
nèrent  réduire à trente le nombre de ses membres pen- 
sionnaires, afin d'augmenter leur traitement. Ce n'est qu'en 
1831 que le chiffre de quarante ïut rétabli. 
A toutes les ípoques, sous toutes les formes, celle aca- 
démie s'est toujours occupée de devises, d'inscriptions, de 
médailles, de matières d'erudition, d'antiquités nationales et 
étrangëres, de langues anciennes et orientales. La collection 
de es Mémoires ïorme une soixantaine de volumes in-4 °, 
non compris ceux qu'elle a fait insérer dans le Recueil gé- 
néral des Mémoires de l'Institut, au temps où elle en for- 
mait la troisiëme classe. A l'exception d'un petit nombre, 
ils n'apprennent rien de positif : basés le plus souvent sur 
des systëmes arbitraires, sur de simples conjectures, ils 
abondent en paradoxes, en erreurs, que rachëte rarement 
le mérite du style ; car tous ses membres n'ont pas été des 
Rollin, des Frret, des Lebeau, des Sainte-Palaye, des Cfia- 
banon et des Barthélemy. Aussi les séances de ce corps 
saant ont-elles toujours etWmoins suivies, moins gotées 
que celles de l'Académie Française et de l'Académie des 
Sciences. 11 est vrai qu'assez souvent elle a manqué de tact 
ci de convenance dans le choix et l'à-propos des lectures 
qui s'y faisaient. On se souvient d'un mémoire lu en présence 
du comte du Nord (Paul I « ), dans lequel on discutait fort 
inénieusement s les hommes du ord n'ayaient pas toujours 
été iniéfieurs  ceux des climats mridionaux, sous les 
rapports physiques et moraux. 
Jalousedela prééminence que le puhlic lui refusait sur l'A- 
endCie Française, elle avait arrétd qu'elle exclm'ait de son 
sein ce, x de ses membres qui solliciteraient leur admission 

BELLES-LETTRES -- INSECTES 41  
dans cette compagnie. Louis XV annula cette délibération ; 
cependant, quinze membres s'¢tant engagés sous erment 
 en maintenir l'exécution, et ayant fait contracter tacite- 
"rueur la mSme obligation à tous leurs nouveaux confrë,'es, 
Anquetil-Duperron assigna «levant les maréchaux de France 
le comte de Cboiseul-Gou/'fier, qui postulait un faute,fil 
l'AcnéCie Française ; mais ce tribunal se déclara incompé- 
lent, Choiseul-Gouffier obtint le fauteuil, et les rieurs ne fu- 
rent pas pour les érudits. Dans des te,nps plus modernes, on 
se rappelle la spirituelle diatribe de Paul-Louis C ou r r i er 
contre l'Académie des Inscriptions. 
Plusieurs commissions sont formées dans le sein de l'Acn- 
éCie des inscriptions et Belles-lettres : l'une es chargée 
de continuer les 'olices et Extraits des Manuscrils du 
Becueil des Ordonnances des rois de France, du Becueil 
des 11istoriens des Gaules et de la France, de la publi- 
cation des Historiens des Croisades, cte.;une autre se 
consacre h la confiction des Inscriptions et nddailles 
(lS06; une troisième continue l'Histoire lillëraire de 
France ( 1816 ) ; une quatrième, dite des Anliquilds de la 
France, fait l'examen et le classement des A'olices et 
Doct«menls dentandœes aux préfels sur les anciens monu- 
ments de notre hslo«re et les nesures à prendre 
leur conservation (1819). Les secrétaires perpétuels de 
l'AcnéCie des inscriptions, depuis 1701 , ont été l'abbë 
Talleraentç de Boze, Fréret, Bougainville, Lebeau, D«puy, 
Dacier, Daunou, Walckenaër et 5audet. Parmi ses autres 
membres on cite : Gédoyn, Secousse, Burigny, Bríquigny, 
Foncemagne, Sainte-Croix, Gaillard, de Brosses, Millin, 
Ga,-nier, Char,}pollion, Larcher, Rochefort, Laporte-Du- 
theil, Yauvilliers, Hae, Boissonade, Raoul Rochette, Jo- 
mard, Dureau de la Malle, Augustin TI,ierry, Burnoul, 
Stanislas Julien, Guizot, Paulin Paris, Le Bas, Magnin, 
Ch. Lenormant, et les orientalistes Fourmonl, Renaudot, 
Gallan,I, de Guignes, Sylvestre de Sacy, Chézy, Abel Ré- 
musat, Quatremère, Reinaud, Garcin de Tassy, etc. 
H. 
IXSECTES. Les premiers naturalistes désignërent sous 
le nom d'insectes tous les animaux dont le corps ëtait divisé 
extérieurement en plusieurs sections (insecta); et comme 
cette disposition répond toujours à l'absence ,le tout sque- 
lette interne, la classe des insectes se trouvait embrasser par 
cette définition tous les animaux dépourvus d'un appareil os- 
seux intérieur et articulé : ainsi, les anuélides et les apodes, les 
myriapodes, les mollusques, les hexapodes, faisaient partie 
de la classe des insectes, dont Aristote et Pline séparèrent 
néanmoins la grande classe des c r u s t a c é s. Linné sépara 
des insectes les annelides, qu'Aristote parait y avoir 
réunis; mais, par compensation, il y réunit les crustacés, 
qu'Aristote en avait séparés : les naturalistes qui se sont 
succdé depuis l.inné jusqu'-h Cuvier ont successivement 
paé de la classe des insei:tes, et réuni sous des distinctions 
spciales, les annélides, les crustacés, les m a I a c o z o a i - 
res, etc.; enfin, Latreille et M. Duméril ont restreint la 
dénomination d'insectes aux animaux articulés exlérieure- 
ment et dépourvus de squelette interne, mais ayant une 
Iète distincte du tronc, des pattes articulées, et respirant 
par des trachées ; définition que Blainville a encore resserrëe 
en limitant le nombre des patte» articulces à six seulement. 
Ainsi, de la classe des insectes, qui, comme nousl'avons dit, 
emhrassait dans le principe presque tous les animaux alC 
pourvus de squelette inteine, se trouvent aujourd'hui exclus 
les annélides, les vers, les chétopodes et les mollus- 
q ces, dont le corps n'est point a«-ticulé extérieurement ; 
les crustacés, qui respirent par des branchies, les a r a i 
gnées, à caités pulmonaires ; et enfin, suivant Blainville, 
les scorpioqs, les myriapodes, etc.,q,i onl plus de 
trois paires de pattes articulées. 
Le tégument externe des insectes est corné, et donne at- 
tache aux muscles iocomoteurs ; il est formé essentiellement 
d'un tissu cellulaire dansles mailles duquel ont été déposés 
des éléments calcaires, agglt,tinés par des produitsanimaux, 



et colorés par des princile. lmileux dnnt la nature varie 
dans les dilféretes espèces. Cette enveloppe externe subit 
de nombreuses modilicationæ, à mesure que l'insecte par- 
court les phases diverses de son existence, depuis t'état 
de larve jusqà celui d'insecte parïait, modifications qui 
alCendent surtout du développement que c, rtaines portions 
du tégument acquièrent aux dépens des autres : ainsi, dans 
la larve des insectes  mtamorpboses , comme dans l'vin- 
bruon des insecte, qui naissent à l'état partait, le tégument 
externe est toujours divisé en segments sensiblement égaux; 
et toutes les transïormations que subira pins tard ce tégu- 
ment consisteront exc|usivement dans le développement 
disproportionné de quelques sments, et des appendices 
qui y sont annexés. 
Le tégument exlerne de l'insecte parlait est divisé en 
trois grandessections plus ou moins proiondément distinctes : 
la tëte, le corps, l'abdomen. 
La tëte, qui forme une n»ase arrondie, ailongée tantdt 
transversalement, et tantdt longitudinalement, est formve de 
piëces soLides, qui le plus sou eut n'otfrent pa. traces de sou- 
drue; toutefois, il est aujourd'hui demoutré que la tète est 
formée par la juxta-positi»n de segments semblables inéga- 
iemeut déveioppés, et que les appareils annexés / cette 
tête, les antennes, les mandibules, les m'achoires, ne sont 
que des appendices analogues en tout aux appendices loto- 
moteurs des segmen[s ,lu tronc. 
Le tronc est iui-mêJne divisible en trois segments, dis- 
tincts ou conlondus, sëparés o» sou,ips cuire eux : leproto- 
lhorax, le méso-thorac te ruera-thorax ; mais le déve- 
Ioppement de ces trois segments, essentiellement composes 
de mêmes parties, nest jamais uniforme : l'un predomine 
toujours sur les deux autres. A la partie inferieure de cha- 
que segment s'articale, dans to,s les inectes, une paire 
de pattes, dans lesquelles on di«tingcte trois articles, une 
cuisse, une jambeet un la»se : tant6t ces pattes sont sem- 
blables entre elles; tant0t Pune des trois paires a reçu de 
nombreuses modifications pour en faire l'inslrument de fonc- 
tions spéciales. A la partie supérieure des segmeuts tho- 
raciques s'attacfieut les ailes, dont on ne compte jamais 
plus de quatre, et q»i quelquefois manquent tout à tait : 
peut-être taut-ii admettre que chaque segment thoracique 
porte à sa partie supèrieure une paire d'ailes, comme il 
porte une paire de parles à sa partie inferieure ; mais que 
l'»ne au moins de ee paires d'ailes avorte coustammeut. 
L'abdomen, qm forme la troisième section de l'insecte, 
s'articule de diverses manière» avec le tronc, et son orga- 
nisation est bien moins coJnplexe que celle que nous VendUS 
d'indiquer : il est tortu,, par in i,xta-positiou d'un nombre 
plus ou moins considerable d'anneaux ou de segments, 
dans lesquels o ne distingue plus de pièces distmctes, et 
qui décroissent graduellement  mesure qCiis s'eloignent du 
tronc : ces anneaux ne doune»t jamais attache à aucun ap- 
pendice locomote»r; et le dernier n'est differencié de tous 
les autres que parce qu'»l embrasse Pappareil externe de la 
dfécatiou et de la reproduction. 
Le slstème nerve»x des insectes consiste en cordons dis- 
tincts situés sur la ligme médiane et inléreure du corps, et 
réunis d'espac, en gpace par des reufleme»ts ganglion- 
nattes. A la partie antérieure de ce double cordon est uu ren- 
flemeut biiohé, situé daus la tête, et duquel partent des filets 
nerveux qui se rendeut aux antennes, à la bouche : iufé- 
rieurement, ce ganglion antétieur fouruit deux gros troncs, 
qui, après aoir formé un anneau autour de l'oesophage, 
se réunissenten un gauiion commun ; de chaque renfie 
ment ganglionnair« naissent des [tiers nerveux qui se distri- 
bueut aux muscles, au canal alimentaire, au tégument 
externe, à Pappareil trachéen, etc. "relie est la disposition 
générale de cet appareil; mais, comme cLiez les aimaux 
supérieurs, certaines portions de ce système se spécialiseut 
lour former des sens particuliers et pour percevoir les sen- 
sations spéciales du goùt, du toucLicr, de l'odorat, de l'ouïe, 
ttde la xue. 

IISECTES 
Le sens du toucher doit singulièremênt varier dons les 
diverses pLiases de la vie d'un insecte : dans sa vie de 
larve, les éléments crayeux et cornés se sont à peine 
posés dans quelques points t. son tégument externe, qui 
parait dofé d'unesensibilité as«ez vive, sensibilité qu'aug- 
mentent encore les »ombreux poils qui y sont insérés 
mais à i'etat d'insecte parfait, le sens du toucber doit tre 
ndcessairement obscur, et se trome probablement iimité 
quelques parties, les antennes peut-ëtre, ou l'extrémité des 
pattes. 
Les entomologistes accordent aux insectes le sensdu got)t, 
mais ils diflèrent quaut h son siege, les uns le localisant 
dans les palpes, les autres le plaçant à l'origine du pharnx : 
ils se fondent, pour admettre l'existence d'un seus special 
du go,t, sur ce que les insectes choisissent avec un parlhit 
disc, rnement les parties assimilables des plantes, et dê- 
laissent celles qui leur eraient nuisihles; mais il et Ci- 
dent que ce fait en lui-même ne prouve exactement rien, 
car ce choix pourrait être détermine par le sens de l'odorat 
seulement. Ce que l'on sait plus positivement, c'est que 
les insectes ue possèdent ni langue proprement dite, ni 
palais, ni mamelons papiilaires. 
L'existence d'uu sens de l'odorat parait mieux démontrée; 
et si les cxpériences qu'on cite sout parfaitement exactes, 
ce sens aurait acquis citez les insectes un développement 
très-remarquable; mais le siege de ce sens est aussi inc, r- 
tain que peut I'tre celui du sens du got)t : ainsi, M. Du- 
mérii l'a placé dans les stigmates, se fondant sur ce que 
ce sens devait ètre localisé là où l'air rapporte les émanations 
odorantes ; et d'autres entomologistes l'ont placé dans les 
antennes, qui reçoivent en effet des nerfs volumineux; tan- 
dis que les expérieuces de M. Hubert tendent " localiser, 
chez les abeilles du moins, le sens de l'odorat dans la cavit 
buccale. 
Il faut dire de l'ouïe ce que nous venduS de dire de l'odo- 
rat ; son eistence est à peu près certaine, son organe  peu 
près inconnu; toutefois, la plupart des naturalistes ont 
place cet organe à la basedes grandes antennes, et M. Strans- 
Durcbeim le localise dans les antennes elles-mêmes. 
Il n'en est pas de mme de l'organe et du sens de la vue, 
car il n'existe pas d'animaux qui offrent un appareil de ta 
vision aussi :omplexe que celui des insectes. Les )etx des 
hexapodes sont de deux espèces, simples ou lisses, com- 
posés ou cbagrinés; les yeux lisses ont ère nommës stem- 
nates ; ils manquent souvent. :ous ne pouvons insister ici 
sor in structure, extrëmement compiiquée, de ces appareils, 
qui n'a été parfaitement élucidce que par les travaux de 
M. Martel de Sert'es et de Blainville; nous nous bmnons 
dire que les -eux composes forment des reseaux à facettes, 
q»elquetois au nombre de plusieurs mille, qui répètent 
plusieurs milliers de fois le nff:me objet ; que ces yeux sont 
en génerai placés sur les parties iaterale» de la tête, ais 
que dans quelques familles l'oeil est placé, comme chez 
les crustacés, à l'extrémité d'un appeudice mobile, que l'in- 
secte porte au-devant de i'obv't qu'il veut regarder; et que 
citez d'autres espèces, qui dardent sur la surface des eaux, 
les yeux sont disposés à la pas'tic inferieure du corps, de 
manière à apercevoir les petits objets qui se meurent dans 
l'eau sous-inc, nie. 
Le s3'stème respiratoire des inseetes s'éloigne étrangemeut 
de tout ce que l'on observe dans les a»tres types du règne 
animal, et fournit une confirmation bien remarquable de cet 
axiome fondamental en anatomie fonctionnelle : qu'un but 
identique peut être atteint par des mo3'ens coutradictoires. 
Le but de la respiration chez tous les êtres orgauisés parait 
être de puiser dans le milieu ahnospbérique des éléments 
mcrémentitieis essentiels à la conservation des organes, et 
de rejeter dans ce même milieu des élements excréme,ti_ 
tiels deveuus inutiles h cette conservation : et ce double 
phénomène d'absorption et d,excrétion a toujours lieu à la 
s»rtace d'une membrane, en contact, sit immédiat, soit 
mddiatæ avec le mitiou atmospitçrique. Or» d,-ms la plupart 



INSKCTES 
des types organiques, cette membrane est localisée dans un 
seul point du corps, off elle s'étale en branchies, ou se re- 
plie en cellules pulmonaires; et c'e dans son passage à 
travers celle membrane que le sang subit, sons l'inflnence 
de l'atmosphère, la double transiormation qui doit le feu,ire 
propre à la e.trition de tons les organes. Mais chez les 
inscctes, oii le s_stème vasculaire n'existe qu' l'Cut rttdi- 
mentaire, et où il n'existe pas de circulation sanguine, les 
organes ne peuvent 6tre mis en contact médiat avec l'air 
atmosphérique, au moyen d'nn liquide qui circule sans cesse 
des organes à la membrane respiratoire, et de la membrane 
re.,ffiratoire aux organes : il devenait donc nécessaire de 
créer un s)stème qui mit l'organisloe tout entier, et dans 
tous ses details, en contact direct avec l'atmosphère; et ce 
système, c'est le système tracltéen. Le système trachéen 
ligure exactement un arbre dont le tronc s'insère directe- 
ment à la priphérie du corps, dont les rameaux se dicho- 
tomi,ent/i l'infini, en penetrant dans lïntérie,tr des organes, 
et dont les extrémités terminales forment/i tous les appareils 
organiques des réseaux vasculaires d't,ne merxeil[euse dé- 
licatesse : l'air atraospherique pénëtre dans cet arbre 
vasculaire par des orilices elliptiques toujours béants, q,,e 
l'on remarque dans l'enveloppe externe des insectes, et que 
l'on a nommés sligrnates ; il circule dans le nombreuses 
ramifications qui naissent des grands troncs acrifëres, et il 
pénetre enfin dans l'appareil rcticlllaire, qui parcourt le tissu 
de chaque organe : c'est dans celte division dc.rni6re que 
s'opère le double momement de transformation qui con.g- 
titue la respiration ; de telle sorte qu'il est exact de dire 
que chez l'insecte chaque cellule organique est nn appareil 
respiratoire. 
Le système aliraentaire renferlne deux ordres d'organes : 
le canal intestinal, que traverse le bol alimentaire, et qui 
5 puise les ëléments assimilables ; et les appareils ghmdu- 
lattes, qui verseur dans ce canal les prodléts de leur së- 
ceCion. Quant  la disposition de ces différents organes, 
il est presque ilnpossible d'Cabile des loi» gn,.rale.s, tant 
la diversité est grande de famille à famille, de genre h 
genre, d'espèce à espèce : disons toutefois que, chez les 
insectes le canal alimentaire est toujours un tube ouvert 
à ses deux extrémités, et que sa longueur ou, plus exacte- 
ment encore, l'étendue de sa surface absorbante est 
généralement en rapport avec la natnre des aliments qu'il 
est destinë à transformer : aingi, les insectes qui vivent «le 
matières animales ont en général le canal laie:final court, 
et s'étendant, presqlle sans inflexion, de la bouche h l'anus; 
tandis qne chez les insectes phytophages le canal alimen- 
taire se replie en nombreuses circonvolutions et offre «les 
dilatations et des étranglements de formes extrèmement 
ariées. 
Quant anx appareils glandulaires, la difficulté de poser 
des règles géoCaies devient plus grande encore par l'impos- 
sibilité dans laquelle on a éle jusqoe ici de determiner d'une 
manière rigoureuse les analogues de ces appareils chez les 
types supérieurs : ainsi, les eutomologistes ont admis des 
org.mes salivaires, des organes biliaires, des organes uri- 
noires, et quelquefois mme des organes sécreteurs du 
fluide pancréatique et du suc gastrique; mais les organes 
salivaires des uns ont été pour les autres des organes billot- 
res, les canaux hépatiqtms des vaisseaux urinifères, etc. 
Un vaisseau allongé, fusiforme, apparemment clos à ses 
t]eux extrémités, et renfermant un liquide incolore, occupe 
la région dorsale des insectes, et s'étend presque dans toute 
la longueur de leur corps : ce vaisseau est divisé par des 
cloisons transversales nombreuses, et donne des pulsations 
manilestes, fréquentes, irréguli(.res: Malpighi, Swammer- 
dam et l'admirable P. Lyounet, ont déclaré ce vaisseau clos 
à ses deux extrémites, et l'ont enxisagé comme une série 
de cœurs placís bout à bout. Comparetti, au contraire, 
y a vu l'origine d'un système vasculaire complet, qu'il a 
nfinutieusement décrit; mais M. Marcel de erres a de- 
taontré que les vaisseaux saugt,ins de Comparelt/ croient 

415 
ou des tracbées on des vaisseaux biliaires ; Cuer, Michel, 
Hérold, M. Strans-D,,rcheim, diffè,'ent tous dans la aleur 
fonctionnelle ou physiologique qu'ils assignent à cet organe. 
Enfin, les insedes nous offrent h un haut degré de dére- 
Ioppement une disposition organique qui parait remplacer 
chez eux les épiidoons des a,imaux supérieurs; c'est un 
tissu cellulaire, qui remplit tous les interstices que laissent 
entre eux les différents appareils que nous venons de dé- 
crire, et qui lui-reCe est tortuWde petites ésicules cellu- 
leuses pleines d'un fluide graisseux. Ce fluide s'amasse 
surtout dans les cellules pendant la belle saison, et se ré- 
sorbe lentement lorsque le froi«l de l'ider condamne les 
insectes h l'inanition : aussi les insectes sont-ils beaucoup 
plus maigres au commencement du printemps qu'à la lin de 
l'automne. 
Ainsi, en dépouillant successixement, et par couche, un 
insecte, nous trouxons : 1 ° une couche externe ou péri- 
pherique, dure, cornee, inflexible, si ce n'est dans les ar- 
ticulations, et /i laquelle s'attael,ent tous les organes de la 
locomotion ; 2° une coucl,e n,usculaire, d.'une complexitë 
effrayante, et dont les muscles innombrables, s'insérant à 
la couche tégumentaire par les deux extrémites, produisent 
par leurs contractions, diversifives/i Iïnfini, tous les mou- 
setaents dont celle couche tegumentaire est susceptible; 
3 ° un axe nerveux, r,'gnant dans toute la longueur de la ligne 
ventrale mediane ; 4 ° un tuyau va_culaire régnant dans toute 
la longueur de la ligne dorsale mediane; 5 ° on syslème 
t,acheen diq»osé symctriquement des deux cétés; 6 ° enfin 
un canal alilt,entaire s'ëtendant de l'extremité anterieure a 
l'extremite posterieure, et Iormant reellement l'axe central 
de l'indkidu. 
Il nous resteraith nous occuper maintenant des appareils 
destines  la reprod,Jction de l'espèc : mais ici les details 
sont si inlims dans leurs variétes, la description anatomique 
dexient tellement n,.cessaire et tellement minutieuse, que 
nous" sou,mes force, quoiqu'h regret, de renvoyer nos lec- 
teurs aux travaux speciaux, et su,tout aux belles recher- 
ches d'Aud ouin. 
.Nous axons essayé dans cet article de donner un aperçu 
rapide de l'anatomie genérale des in.sectes : c'est dans 
nos articles speciaux quïl tant chercher quelques dé- 
tails sur leur histoire naturelle. Seulement, et parlant par 
métaphore, nous dirons ici que parmi les insectes il en est 
«lui vont/i la guerre armés de piques, de lances, de halle- 
bardes, de flèches, de dards, d'n»truments à delonnation, 
de mortiers à bombes; quïl en est qui arrivent à la defense 
axec des boucliers, des cot!es de mailles, des plastrons, 
des baudriers, des cuissards, des casques, des visiëres ; que 
jamais paladin en Terre Sainte, jamais chexa[ier de Char- 
lemagne, ne se mit en campagne plus invulnerable dans sa 
cotte de mailles de Milan que ne l'e-t dans son armure dia- 
prée un scarabée nu un coleoptire; que jamais arsenal indua- 
triel ne mit /t la disposition douvriers plus infatigahles une 
colleclion plus variée de tenait!es, «le gouges, de ciseaux, de 
tarières, de  villes, de scies, de limes, de fancilles, de truelles, 
de béches, de pioches, de halais, de brosses, de crochets, de 
varlopes, pour scier, pour faucher, pour limer, pour tenailler, 
pour bro)er, pour pl/ttrêr, pour forer sans paix et sans relà- 
che. ions dirons encore que parmi les insectes, les 
noptères surtout, il en est qui, a)ant reçu l'instinct de l'asso- 
ciation, vivent en republique ou en monardde absolue, 
se batissent des métropoles, enhctiennent une police, ont 
avec les insecles voisins des traités de paix et de guerre, 
entretiennent des esdaves, font la traite, constituent des 
oligarchies dans lesquelles le petit nombre de privilégiés ex- 
ploite jusqu'à la mort le prolétaire, consomme beaucoup, ne 
»roduit rien, et n'a d'autres fonctions en ce bas monde que 
de briller en cour, et de former  la sultane un sérail d'a- 
dorateurs, à la sultane qui, etant chargée «le procréer tout 
un peuple, est en réalité, bien légitimement, la mère de ses 
sujets (Français d .Nantes). _ons dirons, enfin, que dans 
leur fecondNe I insectes dépassent] toutes les puissances 



416 INSECTES -- INSENSIBILITÉ 
de l'hyperbole, toute les ressources de la métapbore. Dans ' qui est ainsi caractérisé : Bec court, arrondi, tranchant; 
l'espace de quelques heures, les dermestes, les staphyles, mandibule supérieure courbée et écbancrée vers sa poine ; 

les sylphes et les nécrophores ont déhla5é des monceaux 
de cadavres ; dans l'espace de quelques jours, les feuilles 
d'une forèt tombent sous la faux des cbenilles; dans l'es- 
pace de quelques semaines, un oeuple de charançons engen- 
drent une famille assez nombreuse pour changer en un tas 
de poussière les céréales de toute une ville; enfin, des peu- 
plades entières sont contraintes d'émigrer sous l'invasion 
d'un troupeau de termites, et les Pharaons d'Egypte, dans 
toute leur puissance, se courbèrent devant ces re, ces de 
sauterelles que la Providence leur cuve)ait sur les ailes des 
vents. 
Nous indiquerons en terminant quelques-unes des sources 
où nos lecteurs pourront puiser sur ce sujet immense les 
renseignements les plus autbentiques : pour l'anatomie,/es 
travaux de 31alpigbi, de Swammerdan, de Pierre Lonnet, 
d'Audonin, de t131. Straus-Durcbeim et Léon Dufour, mais 
surtout l'Anatomie de la chenille du bois de saule, de 
L.vonnet, œuvre vraiment unique dans la science ;pour l'his- 
toire naturelle, les travaux de Béaumur, de Bedi, de 
De Géer, de Charles Bonnel, de Spallanzani ; pour les clos. 
• iflcations, les travaux de Fabricius, de Blainville, de 
Latreille et de 31. DuraAvil. BELFI£Ln-LEFVR£. 
Les classifications les plus férentes divisent les in,erres en 
broyeurs ou mandibules, et en suceurs ou haustelles. 
Les insectes broyeurs forment les ordre des coleo- 
ptères, des orthoptères, des ndvroplèrcs, des 
hr m t o p t è r e s, et des strepsptëres. Les insectes su- 
ceurs sont les tépidoptères, les hémiptères, les 
d i p t è r e s , les op t è res et les aphan ipl dres. Quelques 
auteurs ont formé d'autres ordres par le dénombrement des 
précédents ; les principaux sont ceux des homoplères et des 
homaloplëres, retires l'un des hemiptëres, l'autre des 
diplères. 
IXSEETES FOSSILES. Les vestiges d'animaux 
articules, et en particulier d'insectes proprement 
sont assez rares dans les couches du globe. Le terrain 
de sédiment inferieur est le plus ancien jusqu'a prdsent 
tz ceux qui ont offert des entomolithes. Est-ce  leur 
apparition plus tardive que celle d'autres classes d'in- 
vertébrés, est-ce à la fragilité de leur structure quïl faut 
attribuer ce lait? 11 est à remarquer que presque tous ces 
débris fossiles appartiennent à des sentes qui existent en- 
core de nos jours. Il est bon de savoir, d'ailleurs, que des 
insectes prétendus fossiles ne sont autre chose que des em- 
preintes produites dans le copal par des animaux de cette 
classe, qui paraissent avoir été englobés dans cette sub- 
stance, dit 31. Edwards, pendant qu'elle Alait encore sur 
l'arbre, à I'tat demi-liquide. Le mëme naturaliste a observé 
dans les terrains d'eau douce, de seconde formation, des 
corps tubuleux formes par l'assemblage de différents corps 
(notamment de petites coquilles ), et qui pavoisent asoir 
appartenuh des lares aquatiqte.;, aalogues a celle des fri- 
ganes par exemple. 
IXSECTIVORES (de latin insectum, insecte, et 
vorare, dévorer). On qualifie &insecliores toutes les es- 
pèces animales qui se nourrisseur presque exclusivement 
d'i n se e te s, à quelque famille naturelle, à quelque genre 
qu'ils appartiennent. Le mot e n t o m o p h a q e, synon me 
d'inseclWore, mais derivé du grec, est plus souvent employé 
en parlant des hommes et des p:uples. A cette définition 
g,.nerale il faut ajouter : t ° que parmi les mammifères car- 
nassiers, Cuvier a ëtabli une famille des insecliores, elle- 
mme subdivisée en deux petites tribus : cette famille vert- 
terme les sentes hdrissot , musaraigne, à 
scalope, chrysochlore,tenrec,taupe,etc.,animaux 
qui tous mènent une vie nocturneet souterraine, qui se nonr- 
rient principalement d'insectes et d'annélides, et qui ont, 
comme les cheiroptëres, des m',ldelières hérissées de pointes 
eoniques; ° que Temmiack, dans son Ornilholoie, a 
dtabli parmi les oiseaux un ordre des insecliores, ordre 

quatre doigts au, pieds, dont trois antérieurs. Cet ordre 
renferme un grand nombre d'espèces distinctes, répandes, 
comme les granivores, dans presque tous les pays des zones 
tempérées. Cette introduction de désiations significatives 
dans les classificalions d'histoire naturelle, offre un grave 
inconvénient, celui de heurter/ chaque instant la Ioçque 
des mots : car, de ce qu'une espèce animale appartient, dans 
les classifications de Cusier et de Temminck, à la famille ou 
' à l'ordre des insectiore, il ne s'ensuit nullement qu'elle 
doie se nourrir presque exclu4vement d'insectes; et, au 
contraire, de ce qu'une espèce animale se nourrir exclusi- 
vement d'insects, il ne s'ens»it nullement qu'elle doive 
appartenir à la famille ou à l'ordre des insectivores. 
BELFIELD-L EFËVR£. 
IN-SEIE. Vo . Fox. 
INSENSIBILITÉ se dit de toute incapacité de per- 
eevoir des impressions par des organes naturellement sus- 
ceptibles de les recevoir. Souvent ce n'est qu'une diminution 
partielle ou SertCaie de la faculté de sentir, car l'absence 
totale de celle-ci reduirait l'homme et la brute au réle passif 
ou inerte du végétal. En effet, nous avons montré que ra- 
ni m a I i t é résidait essentiellement et uniquement dans l'ap- 
pareil sensorial et les fonctions de relation, sources de toute 
sensibilité; que les animaux étaient d'autant plus perfec- 
tionnés, ou intelligents et sensibles, que leur système ner- 
veux (cérébro-spinal avec ses dépendances) était plus dé- 
velopp6 et plus étendu ; qu'enfin l'ho m m e, chef-doeuvre 
de la création, portait au suprème degré la sensibilitë. 
Ainsi, l'homme insensible ou stupide devient une béle, 
selon l'expression commune, et la bête se ravale d'autant 
plus bas qu'elle manque davantage de sentiment, que ses 
n er fs deviennent plus simples ou plus affaiblis par la dé- 
gradation de l'organisation, à mesure qu'on deseend l'éd,elle 
zoolo#que. En même temps, l'affaiblissement du système 
respirab»ire et le sang Iroid qui en devient la conséquence 
engotrdissent de pins en plus les falcultés sens;tives. En 
effet, si nous voyons que l'homme, les mammiFeres et les 
oiseaux, rares à sang chaud et à vaste système respiratoire, 
manifestent la plus ardente sensibilité ; si nous considérons 
que le froid des hivers engourdit les sens des marmottes et 
autres mammifères b i b e r n a n t s, allanguit, snspend presque 
entièrement leur circulation, leur respiration ; si le mêmes 
phénomèues d'apathie éclatent avec plus d'evidence encore 
chez les reptiles, les insectes et toutes les espèces à sang 
froid, à respiralion faible, il faut en conclure que la froidure 
est ennemie de la sensibilité, et qu'elle est, avec le défaut 
de respiration ou d'oxygénation, une cause de torpeur et de 
débilitalion du système nerveux. 
Partout oh se manifestent les causes qui produisenl du 
froid sur l'Cnnemie animale, on rencontre des marques 
d'insensibilité, soit physique ou externe, soit morale ou in- 
térieure, chez l'homme et les brutes. Ainsi, la vieillesse est ,me 
cause d'insensibilite, elle répand ses glaçons sur toutes les 
jouissances; on meurt à soi-mme avant de de<.endre au 
tombeau. Ainsi, rien ne refroidit davantage la sensibilitë que 
l'abus des jouissances, surtout celles de l'amour; ses dë- 
perditions excessives ramènent le corps à l'Cac d'inertie et 
d'affaissement analogue à celui des eunuques  omue 
animal languet a coitu. 
Les excès de la table débilitent encore extrmement la 
nsibilité. Quelles profondes impressious espérez-vous de 
ces abdomens Anormes, farcis d'aliments, encrott0 de 
graisse. Leurs nerfs, ensevelis au milieu des chairs, abreuvés 
de phlegme et de bmphe stagnantes dans cet épais tissu cel- 
lulaire, comme dans le lard des animaux pachydermes, sont 
désormais iaattaquables par la sensibilioE. Ces lourdes brutes 
sont presque toujours assm,pies, pionsCs dans nue letl,ar_e 
dont elles ne sortent que pour manger et boire ou acheï-et 
d'enterrer leur ame. Aussi le long sommeil devient-il une 
source de refroidissement pour l'or«anisme, en ral«,tLssanl 



ISESIBILITÊ -- ISlNUATION 
les moveœent vitaux, la piration et ta rcelaon; de 
i rsulnt le croupissement et t'cumu des Immeus, 
l'sment chez les animaux engourdis, us en repos, 
d« l'obscuri, oemme oes oi empà pour donner 
e foie gras. Aii deviennent lourds, prqee stupid, 
I psers dans leurs cachot, les leux dans leur 
oellule, mal de faibies ou mauça nouitur. D'ail- 
leurs, la iée, la débilitation du oes, refroidnt et 
allanguisnt l'activité neeuse : ainsi, la vie tente et pa- 
rseuse émoe la seihili. On dit la femme plus n- 
sle que l'homme. le a d nerls plus dlica et plus 
impressiunabie ans douoE, mais inement elie seut 
avec mos d'intensité et de profondeur qe l'homme; elle 
possède un tempérament pius humide et pius froid en gnr; 
 mplexion moll t uvent blonde, comme chez I 
ean mobiles, mas dont I impssio ne sont jamais 
que fuga, inconstan, passagère, oe qui prouçe qu'ell 
rt superficie]l ou légèr. 
La plupa d autuman, usant la seibilité r 
la eenoe d imprslons, finisseut par rendre les sens 
blasés et indifféren ; le cr perd mme de sa ndroe 
quand  abuse de s sentimenU I plus délio; il de- 
çient oeileux comme la main trop exerce. Toutes I ha- 
bitudes, suoet celles des voluptcs, éneent promptement 
la seibilité, or l'tre qui a le phs senti devint le moi 
capable de sentir encore, oemme les vieux libertins et les 
gourmands dégo0t, inamusabl. 
Il faut signaler une iusensibilit extérire {emporaire, due 
à Pét de contempiation .profonde, à Pexse ou à l'enou- 
siasme, & une tension convulsive de oer peonn ner- 
veuses, hystérique, hypochondaqu, ou maniaque, ns 
leurs paroxysm. Il semble que tou la sensibit se r- 
lue au cerveau chez les contemplatifs, I faki de l'Inde, 
I solitaires de la Thébaïde, etc., I fanafiques relieux 
et politiques ( tels que I oenvuisimmaires de Snt-lard, 
suppont I cps de b0cite, I marrs inoensibl, 
l'sasn de Kleber ), les maniaq soutenant le froid, la 
faim, I blessures, etc. Ch I hystéqu, la sensibilité 
abando»ne de mme les organ exte pour prominer 
dans l'appareil utédu et s dépdanoes, I ovaire, etc. 
Delvient aussi la merveilleuse araxie des extiqu 
dans leurs sions ascétiques, comme sainte Thérse, le 
prêtre Bestitutus dont parle saint Austin, qu'on blait 
sansqu'il le sentlt; oemme les épileptiqu dans leurs pa- 
roxy; les reptiles batraciens, dans l'acte génil, Crou- 
ver la mëme apaise momentanée. 
Un autre gre d'inssibilité fugace, chez les per 
nerveuse, rsulte aussi de la mobilité de leur imination 
vagande, comme jadis ch I possèdes du dœemo, ou 
oemme aujourd'h ch I somnambules magnétiqu. On 
se crée, soit de prétdees douleurs  tee partie du 
oerps, suit une sensibité  quque région, de manitre 
à pouvoir y enloncer des pingl ans te sentir. 
La trop vive seibité n't p un si grand bien : elle 
p[ectionne notre pt, nos conissances, elle aiise le 
go0t dans I beauxas ; elle donneoeUe finse d'apçus, 
cette fleur d'prit et de délicatse qui lout le chare d 
sociét polies; mais le appelle tous les maux de l'énea- 
tion, c vapeurs,  niaioe morbifiqu qui pullulent 
chez oes tres abl d'une indolente oisivet au in de 
nos villes opulentes et popeleuæs. Elle t ainsi la p 
d foe« ve4ns et de la ferme nt. J.-J. V. 
SÉPABA BLES. Ou a donaë oe nom à diver pe- 
tins espèces de p e r r o q u e t s appaenant au oupe d 
peuets nains (psit[acula), avec d joe empenné, et 
que se distinguent par leur grande siadité. Ils ne peu- 
vent vivre seuls en oeptivité, et quand l'un vient  mo 
sou compagnon ue {ae pas  avoir le mme rt. C't sur- 
*out au rroquet-paereau (psiltocus p«serlus), au 
perroquet-pigeon (psittocus pularus) et  quelqu autres 
esptoes encore, qu'on a donn ce nom dïIs«arables ; et on 
en voit beaucoup dans I volières. L perroquets nains 

4IT 
du Brésil voient ensemble par bandes de ptueurs ndltiera 
et ount de ds d dans les chps de maïs. 
se laissent prdre filent, mais ne ivent pas Ion 
en opvit. 
INSEBMENTÉS (Prêtre). Voyez Comsrrcrms ClçlLg 
DU CLGÉ. 
INSEBTION.  anatoe, soit animale, soit éle, 
oe ot se dit de l'atçbe d'une partie sur une autre. 
vement aux pai d'une fleur, l'inseion de la 
d m, des nir, etc., est oete piçyn, 
• INSIGNES (en ttiu instçnioE),distinction« bonorifiques, 
si exteu de pt6ssoe, de diit et de ditinctio 
politiqo ou sies. Les ii des rois chez I Bomains 
ient la uronne d'or, le siCe d'ioire et i douze 
urs, arm de aches, qui marchaient devant enx, que le 
couls consvèrent sous la rpubliqe, et qui escoivnt 
anssi, quoiqu'en moindre nombre, quelqu autr hauts 
dignitaires de l'ét. Les insi d anciens empereurs 
d'Allemae ient la couronne d'or, le sceptre dor, 
boule imçale dorée, I'çe de CUarlene, ile de saint 
blauoe, les perons dor, la dlmatique, et quelqu an- 
tres joyaux, consev A Wienne, oh ils ont té transferts 
en 1797, d'Aix-laCbapelle. Aujourd'hui la couronne 
sceptre sont les insid monarqu europns. Lese 
et I'cu ient les insign de la chevalerie. L btons de 
marcbaux, le bàt du Iord-aire de Londres, et I trois 
queu de cbeal d pacbas tur, sont I insign de cet 
diéreut diitir. L inigndu hatttctergétoliqu 
consistent dans le palli um, la mi tre, la crosse et l'an- 
neau. La main t l'insigne de la Ju»tioe, et  acbe celle 
ta juridiction 
On appelle aussi iniçn les alContions des dirents 
ordre« de chevalee. 
INSIU.T, q sait enter d I çri, et leur 
faire réer ce qu'd prop. L'oe iinuant a une 
quence q lui est propre. Elle a ectement le caractère 
que I tlogie attbut A la oe, pertinçens 
ni suavit e ortff. C'est I't de sir nos fibless, 
d'er de nos intrU, de nous en crer; il t çoéd 
les gens de cour et autr malheureux. Autums ou co- 
train ramçer, ils ont aççs A oebir tou orte» de 
. Fie avis e cum vole arbr.  sont aussi de ser- 
çents ; nt6t ils rampent A reçlis toueux et lent% tnt6t 
ils se drnt snr leurs quen, et s'ianoent, touur sou- 
pl, Ie, déliés et doux, me ds leurs ouvement8 
I pl violent. Mfiez-vodel'bomme insintmt; il 
doucement sur votre poite, et il a t'oreille ouvee pour 
ssir le n qu'elle rend. Il entrera dans votre aison 
clave ; mais il ne rde pa» h y comdeç en maltre 
dont vous çrendrez sa s I volont çour ie v6tr. 
DIDEBOT. 
INSINUATION (en latin iia, fait de 
je fis entrer, et formé Iui-me de n, ds, sl, sein 
Lorsqu'un orateur, qui asçire h çapter  enveillance 
de son auditoire, t app h prler d'e chose 
d'un sujet qui inpire de ta ruauoe u de 
ment, il se garde bien d'aller droit ,au but, oer il le man- 
quert infaillibleent; ms it commence par présenter 
œux qui l'Courent un autre objet qui I intéresse, et qui 
cependant, par  rappos avec l'autre objet dot il veut 
parler, prépare heureument tesespri, I guérit de leu 
prventions, et I aène d'une maniè insensible à voir 
d'un oeil favorable oe qui les aurait inoE tout d'ard. 
OEest oe tour d'loquence qu'on nomme iiuation. 
ron, qui a don nt de çroeçt et de modles de I'rt 
oratoire, prescriZ l'emploi de l'insinuation toutes I fois que 
ni qui est  cae, ou la «aue eile-e,  
 des oeuieurs ieu. S'agit-il, r exemple, d'un jeuna 
hommedont l'imprudenoe et l'inoenduite ot mt le 
univeel, eh bien, H faut parler de la oen»idraUon 
jouit la fiHe de i'acçusé, des vertus et d i 
3 



"41 s INSINUATION 
son pr«, qlm l'on montre gémissant des erreurs de son fils. 
Telle est la méillode de l'insinuation. Cet artifice est souvent 
employépar l'orateur romain, non-seulement dans ses sAur- 
des, mais aussi dans ses péroraisons. TantOt on le voit 
se présenter Ioi-mme à la place de l'accusé, tantôt il met 
ses paroles dan« la bouche de l'accusé lui- mme, tantôt il 
flt survenir à sa place ses larents, ses amis, sa femme, ou 
quelque personnage sacré qui semble venir plaider la cause 
dw prévenu. On cite comme modèles d'insiunation le dis- 
cours de Phéoix ì Achille pour calmer sa colère, au IX e li- 
vre de l'lliade, et surtout la fameuse scène de Narcisse et 
de Néron, au quatrième acte de Britannicus, sCèn dans 
laquelle lacin s'est moatré le plus insinuant des orateurs. 
C'est ordinairemtlt dans i' e  o r d e que l'insinuation est né- 
cessaire, excepté lorsqu'on veut heurter impétueusement ou 
des adversaires qui ne méritent pointd'ttre mènagés, ou une 
proposition totalement dépourvue de sens et de fondement. 
L'insinuation se pratique de plusieurs manières; elle consiste 
surtout h plaire, h exciter l'intért, à inspirer la confiance. 
Si l'auditoire est prévenu contre l'orateur, ou centre la cause 
qu'ildoit plaider, c'est alors que Iïnsinuation est plus diffi- 
cile, comme plus nessaire ; son r6te est de composer avec 
les passions pour les calmer, de céder à l'orage pour le 
conjurer. L'insinuation, ainsi qu'on I'a remarquë, est comme 
ces digues flexibles et puissantes, qui résistent [ar leur sou- 
plesse mme. CnAWAOe«C. 
INSINUATION (Droit). On appelait ainsi dans l'an- 
cien droit l'enregistrement des actes qui devaient tre livrés 
 la connaissance des tiers intéressés. Elle avait lieu au 
greffe du tribunal compétent. Ces sortes d'insinuations 
taient dites laïques, par opposition aux insinnations eccloe- 
siastiques, qui us se rapportaient qu'aux actes concernant des 
matières bènëficiales. L'e n reg i strement etlatran s c rip- 
tio n en sont l'équivalent dans la législation nouvelle. 
Les ltomains appelaient insinuatio le dép)t des actes que 
l'on voulait rendre authentiques. 
En druit canon, l'insnuation était la déclaration de leurs 
noms et surnoms que les graduès devaient faire tous 1 
ans à leurs collateurs. 
INSIPIDITÉ (de la particule latine native in, et 
sapere, sentir, avoir du go0t), qualité de ce qui n'affecte 
point l'organe du got3t d'une manière distinguée, comme 
l'eau parfaitement pure ( routez FsJ)eva). Au liguré, défaut 
d'agiCent, manque dç ce qui touche ou de ce qui pique. 
INSOCIABILITE INSOCIABLE, caractère de ce qui 
ne peut ètre joint, mèlé, ni associé ( insociabilis ). La 
physique déconvre souvent des corps qui sont insociables, 
des corps qui ne peuvent se lier, se mler', ni s'accorder. 
En parlant des personnes, insociable signifie fdcheux, 
incommode, avec qui l'on ne peut vivre en société, lso- 
ciabilit, en ce sens, est synonyme d'ncompatibilitoe : 
« On compte pour rien, dit ltontesquieu, ledégo0ts, les ca- 
prices et l'nsociabilit des hommes.» Ce dernier mot n'a- 
vait point encore obtenu droit de bourgeoisie au milieu du 
dix-huitième siècle ; il est aujourd'hui d'un usage gé- 
néral. 
INSOLATION (du latin tnsolatio, action d'exposer 
au soleil ; fait de sol, soleil ). En chimie ce terme est em- 
ploi-Wquelquefois pour désigner cette exposition au soleil 
qui est faite pour provoquer" l'action chimique d'une sub- 
stance sur une autoe ; une des plus frappantes expérienees de 
ce genre est celle de l'exposition de légumes, cumme des 
feuilles de choux fralcllement cueillies, dans un bocal en 
verre avecde l'eau : par l'action des rayons du soleil, il se 
produit alors une grande quantité de gaz oxygène. 
En médecine, on emploie ce mot pour exprimer l'ctiou 
du soleil sur l'économie animale. On s'en sert quelque. 
fois comme moyen thérapeutique/quand on ordonne, par 
eemple, aux su]ets mos et lymphatiques de s'exposer au 
soleil. L'action du soleil produit ordinairement sur la peau 
tne colorafion brune; parfois l'insolation occasions une in- 
Ilammation érysip(.lateuse nommée vulgairement coup de 

 INSPECTION 
soleilet tont  fait analog,ie au premier dégrée de la b r 11 u• 
INSOLENCE. Vo.yez IMPEP, TINENCEo ,'v 
INSOLUB! LITE, propriété particulitre que possède nu 
corps solide ou gazeux de ne pouvoir se c6mbiner'dans'" 
tel ou tel liquide. L'insolub|lité n'est que relative. Ainsi 
l'argent, insoluble dans l'eau, dans l'alcool, se dissout dans 
le mercure. Souvent au,si un corps insoluble dans un li- 
quide à la température ordinaire devient soluble en Ce- 
vant la température. Cette dernière considération nous 
fait entrevoir que l'insoiubilité du premier corps dans le 
second ne tient qu'à ce que sa c o h ë s i o n l'emporte sur son 
a iii n i té pour ce second corps : ['action du calorique dind- 
nue cette cohésion, et rend la combinaison possible. 
INSOLABILITÉ INSOLVABLE ( du latin in, pr. 
position négative, et solvere, payer ) L'insolvabilitë est l'Cat 
de celui qui ne peut payer ses d e tre s. Les personnes 
toirement insolvables ne peuvent devenir adjudicataires des 
biens qui sont vendus en justice, ì peine de nullité des 
judications (voyez DCONFITUBE, FAILLITE). :' 
INSOMNIE. Ce mot, littéralement traduit du latin 
omnia, désigne la privation du s o m m e i I. Diverses causes' 
produisent l'insomnie, et parmi elles plusieurs ne peuvent 
tre évitées. De ce nombre sont les peines murales : la 
crainte surtout nous tient ëveillés; la peur du cltiment, 
qu'ondécore du nom de remords, est pour le criminel. 
une cause d'insomnie assez cruelle pour tre une puni- 
tion sévère. Les douleurs physiques qui accompagnent 
tant de maladies nous privent encore du sommeil, si nbes- 
saire pourtant en pareil cas. Le excitants, en général, 
qui déterminent un état fcbrile, cavsent l'insomnie, ou du 
moins troublent le sommeil au point qu'il ne répare point 
l'énergie nerveuse, 'antrenent appelée les forces, il est 
certains excitants spéciaux, notamment le cafë, qui produi- 
sent surtout cet effet quand on n'est point habitué à leur 
action. L'ge exerce sur nous une influence sous ' ce rap- 
port : les enfoets et les jeunes gens dorment longtemps 
et profondément, tandis que les vieillards sont fré- 
quemment assoupis, mais s'éveillent au plus léger bruit. 
Toutefois, il n'y a pas de règles absolues à ce sujet : cer- 
taines personnes ont le sommeil profond et long durant 
toute leur vie, tandis que d'autres présentent une habitude 
contraire. En général, quand l'insomnie nous afflige sans 
cause connue et  l'improviste, on peut la considérer, 
ainsi que la fatigue immotivée, l'inquiétnde, l'anorexie et 
d'autres altérations Iégère de la santé, comme un présage 
de maladie. Alors elle doit, si elle persiste, éveiller la solli- 
citude afin d'en chercher l'origine et d'y remédier. 
Les moyens propres  nous ren& le sommeil sont les 
suivants : l'éloignement des causes, s'il est possible ; la 
soustraction partielle ou totale des excitants des organes 
des sens, un bain entier à une température pluU)t fraiche 
que cllaude, ou un bain de pieds; quelquefois un.repas 
léger, si on n'en a pas l'habitude, provoque au sommeil; 
les occupations monotones, et principalement les lectures 
dènuées d'intért. Dans un grand nombre de cas, il est " 
difficile ou impossible d'écarter les causes qui nous 1ri- 
vent du sommeil, ou qui le troublent au point d« lui ter 
es effets réparateurs; en une telle occurrence, on cherche 
souvent à se soustraire à l'empire de la raison par l'uge du 
vin ou de quelque autre liqueur alcoolique. C'est un moyen 
grossier, qui répugne, etqui d'ailleurs a de graves inconvt- 
nienf. Une autreressource est Po p i u m : cette substance 
produit à des doses modérées une sorte d'ivresse sopora- 
tire, qui la|t o/zbller momentanément les peines. Au surplus 
l'opium a, comme le vin, des inconvénients : on ne peut 
en user saos beaucoup de réserve, et l'habitude d'ailleur 
en dëtrult les effets.' ' D  CnAneo,l. 
INSPECTION  INSPECTEUR. I'impossibilité qu'il y 
a pour le chef de toute administration un peu considérable 
de voir tout par lui-mme et de surveiller tous les détails 
fait qu'il remet ordinairement ce soin à un service spécial 
qu'on nonme inspection. Les agents investis de cette mis- 



INSPECTION 
ion, toute de confiance, se transporteur sur les lieux, exa- 
minent, comparent, vérifient et adressent leur rapport, en 
conséquence et sous leur propre responsabililé,  l'autorité 
qui res a délégués. Ahsi, nous avons des inspecteurs des 
finances, de l'enregistrement et des domaines, des lorèt% 
des postes, des contributions directes et indirectes, de l'a- 
griculture, de la navigation, de la marine, des ponts et 
chanssées, des mines, des prisons, des maisons centrales 
de force et de correction, desétablissements de bienfaisance, 
du travail des enfants dans les manufactures, des poids et 
mesures, des poudres et salpètres, des tabacs, des thé.tres, 
des fortificatious, des hara o des écoles vétérinaires et des 
bergeries impériales, des eaux reinCaies, de la voierie, des 
batiments civils et monuments publics, des beaux-art% des 
monuments historiques et antiquités nationales, des halles 
et marché.s, etc. Le décret du 30 janvier 1852 avait créé 
ds inspeclenrs géné.raux et spéciaux de police; ils ont été 
supprimés par le décret du 5 mars 1853. 
L'université a des iuspecteurs généraux de l'enseignement 
supérieur, de l'enseignement secondaire et de l'enseigne- 
meut primaire. Elle a aussi des inspecteurs d'académie et 
des inspectenrs de l'instruction primaire; dans l'Ëglise de la 
confession d'Augsbourg on nomme inspection la réunion 
de cinq Églises consistoriaies. Elle se compose du pasteur 
et d'un ancien de chacune des Églises de sa circonscription. 
Les inspectenrs ecclésiastiques sont nommés par le gouver- 
nement, sur la présentation du directoire. 
[Au point de vue militaire, le terme inspecteur a eu 
des significations fort diverses : le mot, d'ab6rd purement 
génírique, ne s'est caractérisé qu'h l'aide de quantité d'él»i- 
thètes ou de gínitifs : ainsi, les h6pitaux, les poudres, cer- 
• aines manufactures d'armes, certaines fabriques d'étoffes, 
ont été soumis à la surveillance d'inspecteurs spéciaux ; ainsi, 
il y a eu des inspecteurs en chef, des inspecteurs généraux, 
des inspecteurs particuliers; ainsi l'infanterie, la cavalerie, 
le génie, la maréchaumíe, les ingínieurs géographes, la 
gendarmerie, la garde ro,ale, out eu des i nspecteurs, qu'il faut 
se garder de confondre avec les inspecteurs aux revues. Dé- 
crire toutes ces particularités serait entreprendre un travail 
beaucoup trop technique, une grande partie de ces fonctiuus 
n'est, d'ailleurs, déjh plus qu'une • ieille question d'histoire. 
De tons les fonctionuaires appelés inpecteurs, les inspecteurs 
aux revues ont joué le r6ie le plus important, le plus per- 
manent, le plus essentiel au jeu de la machine administrative. 
Créés au commencement du siècle, par le système d'organi- 
sation «te Bonaparte, ils ont peu survécu h la elmte du grand 
capitaine. Ils avaient été dotés d'une partie des atttributions 
dont le commissariat avait té dépouillé ; ils avaient vécu 
parallèlement avec lui, mais chargés de la branche la plus 
relevée de l'administration, le personnel. La suppression 
des inspecleurs aux revues, décidée en principe en t817, 
en mme temps que celle des commissaires des guerres, 
occasionna une refonte, un amalgame, qui, faisant r, vivre 
à peu prs des errements du dernier siècle, donna naissance 
au systëme appelé l'intendance wilitaire. 
Ce qui peut èlre de quelque intértt ici, c'est uniquement 
le tableau succinct de l'iustilution des inspecteurs de trou- 
pes, connus dans les documents officiels, suivant les temps, 
sous le titre d'inpecteurs, inspecteurs goenoeraux, ins- 
pecteurs d'armes. Étrangcrs d'abord ì l'administration, ils 
dirigeaient Porgauisation et la police : aussi s'appelèrent-ils 
galement directeurs. Vers la lin du quatroaièrn¢ siècle, un 
essai d'inspection eut lieu ; les soins en furent confiés aux 
lieutanants du grand-maitre des arbalétriers" et aux maté- 
chaux de France, dont on ne peut douner approximative- 
ment idée qu'en les assimilant aux maréchaux de camp de 
Louis XV.et de Louis XVI. François 1 « créa passagère- 
ment inspecteura, ¢'est-à-dire examinateurs de trouls, des 
seigneurs, qui dans l'accomplissement de leurs fonctions 
ne pouvaient tre guidés que par leur seul bon sens, 
eun précepte officiel, aucun principe écrit, n'existant en- 
core. Sous Henri Il, la qualification d'inspecteur fut ajoutée 

INSPIIATION 4 fO 
à e_.elle de quelques marécliaux de camp ou de quelque, 
mestres de camp; le détail des grandes nonstres (on açpe- 
lait ainsi les revues) était deleur ressort. Des sergent, de b- 
taille furent ensuite chargés de travaux du mème genre, et 
s'en acquittèrent jusqu'à la paix des Pyrénées. Louis XIV, 
sous lequel commencèrent/ se classer les armes, c'est-l-dire 
le personnel des troupes, mit rddlement en fonctions de véri- 
tables inspecteurs : l'un fol chargé del'iufanterie : c'était Mar- 
tinet, colonel du régiment du roi ; des mestres de camp devin- 
rent des inspecteurs decavalerie : ce furent Fonvielle et Des- 
fourneaux. Martinet, auquel on doit les premières idées en 
fait de campement, les premières applications raisonnées d8 
la tactique, exerça seul  l'égard de l'infanterie jusqu'en 
1678. Il y eut alors plusieurs inspe,eurs, et de simples ma- 
jors furent décorés de ce titre; ensuite des officiers géné- 
raux furent préposés seuls h ce genre de service, et depuis 
la fin du dix-septième siècle ils l'exercèrent, taut6t par af. 
mes, tant6t suivant des dispositions différentes, 'opérant 
par circonscription territoriMe, indépendamment des armes. 
La prépondérance des colonels, jusque la petits souverains 
daus leurs corps, avait infiniment décru depuis l'établis- 
sement de ces inspectenrs ; de mème, la puissance et l'im- 
portance des commissaires des guerres s'affaiblit sensiblo- 
ment dès que leurs opérations furent soumises au contr¢,le 
des inspecteurs. Le système d'organisation de l'armée prus- 
sienne de Frédéric Il fut une imitation, un raffinement, de 
ce mécauisme militaire des dcrnières années du règne de 
Louis XlV. 
Maintenant, un inspecteur général dans iufanterie française 
est ordinairement un général de division, qui opère en vertu 
d'un livret d'inspection, se rend au lieu où stationne chacun 
des corps qu'il a mission d'inspecter, recueille les états de 
revue qu'il a ordonné de dresser, rassemble les hommes 
sur le terrain, s'assure de leur eliectif, de leur instruction» 
de leur tenue, et, sur le vu des pièces qui lui sont fournies, 
juge de la régularité des admissions, de la légalité des feu- 
vois, de la justice des récompenses, de la nature des puni- 
tions, de l'Cat des armes, de la qualité du matériel. Prési- 
dent supérieur du conseil d'administration, examinateur de 
toutes les opérations dont l'intendance à dejà preparé et visL le travail, il y siege la plume h la main, con»rate la validité 
des pièces, la justesse des ailégations, l'obsel-vance de tout 
le dispositif des lois, vérifie les entrées en caisse et en ma- 
gasin, les sorties, les dépenses, les pertes, recherche la 
concordance des délibératious, des pièces comptables, des 
opérations administratives, se montre, enfin, dans le cercle 
complet de ses fonctions, le gardien des ordonnances, le 
père des soldats, le surveillant de leur bieu-ètre, le défen- 
seur de leurs droits, le répartiteur de leurs récompenses 
méritées, l'ame de leur discipline, et l'interprète de leurs 
VŒUX, de leurs réclamations, dont il rédige le tableau pour 
le soumettre au gouvernemeut et au ministère. 
G " Bm. ] 
INSPIPtATION (de in, dans, et spirire, souffler). On 
,xprime parcemot une des actions organiques dont la fonc- 
tion de la r es p i r a t io n se compose, celle par laquelle l'air 
atmosphérique pénètre dans les poumons, afin de servir h la 
sangnifi¢ation : c'est le temps oppos à l'expiration. 
INSPIPtATION. On se sert de ce mot, au figuré, en 
parlant des sentiments, des pensíes, des desseins qui sem- 
blent uattre spontanémeut dans le CœUr, dans i'erit, et 
qui paraissent en quelque sorte souftlds par le génie, l'en- 
tliooesiasme, la divinit elle-mème. En effet, l'inspiration. 
semble si sublime h l'homme, qu'il est porté à l'attribuer à 
une puissance surnaturelle. Par l'inspiration, la pensée sort 
de ses régions fiabiluelles; elle trouve d'abondance des 
images, des expressions, des mouvements magnifiques ; 
elle semble touclier au beau idéal. L'inspir croit voi le. 
ténèbres de la nature se dissiper pour lui; sa tle se troubl« 
et dans une sorte d'ivresse il pénètre le pins p[ofonds se 
crets de l'humanité. Comment ne placerait-on pas au-dess-ds 
du vulgaire le poële, l'artiste, le propliète, la sibylle qui 
53. 



;420 INSPIRATION 
parle ou cre d'inspiration? Comment ne pas croire que c'est 
un Dieu qui agit en eux? En tout cas, l'inspiration est un 
don divin; on la reçoit, mais on ne l'acquiert pas: néanmoins, 
le travail peut contribuer à la conserver el à l'ennoblir. 
INSPIRATION ou THÉOPIEUSTIE (Théologie). On 
appelle ainsi, d'une part, une communication immédiate, 
lar sonsquent surnaturelle, de Dieu avec les hommes, 
opCée par le souille de son esprit, de l'autre l'Cut de ceux 
qui agissent sous l'influence inspiratrice de l'Esprit divin. 
Une idée qu'on trouve universellement rpaudne dans l'anti- 
quité paienne et juive, c'est que les sages, les artistes, le 
lëtes, en général tons les bommes véritablement grands, 
étaient en rapport avec la divinité et placés sons son in- 
fluence inspiratrice, de mëme que c'était de Dieu lui-même 
que les savants tenaient le don de parler de lui et des choses 
divines (voye'- R£-v.ATmt). Aussi tous les fondaleurs de 
religion ont-ils préteudu avoir été immédiatement instruits 
par Dieu lui-intime. Les Hebreux attribuaient  leurs 
voyants o,, p r oph è t es un état de sainte sujetion spiri- 
tuelle; et dans le louveau Testament, la sainte écriture de 
l'Ancien Testament est désignée comme a)ant éoE inspirée 
par Dieu lui-intime, en tant que les saints de Dieu ont parlé 
sou l'inspiration de l'Esprit Saint. Suivant l'opinion des 
rabbins et celle de Philon, la loi mosaïque provient du ciel, 
et l'Ancien Testament est une œuvre de l'Esprit Saint, pour 
l'intelligence de laquelle il faut encore, suivant Pbilon, 
l'inspiration. : 
Le mot theopneuslie fut emploiWsurtout par Origène et 
par saint Jean Chrysostome; et ce dernier s'en servir dans 
le sens d'inspiration divine. L'Église latine se servir du mot 
inspiratio, que Tertullien applique d'ordinaire aux livres de ' 
IoEcritore, et qu'on rencoalre souvent aussi dans la Vulgate, 
où il est question du souffle ou de l'inspiration de Dieu. La 
langue de l'Ëgli.se primitive emplgyait eu genéral volon- I 
tiers l'expression d'inspiration de l'Ecriture Sainte; et sous 
I 
ce rapport AileCugure compare l'Esprit Saint à ,m joueur 
de flrite, de sorte que l'auteur n'est à ses yeu x que l'instrument 
dont se sert l'Esprit Saint. Dans la ttiéologie de la përiode 
posterieure, la signilieatinn dominante du mot inspiratio 
fut celle de su99estion de l'£sprt Sainl, encore bien que 
d'ordinaire la scolastique comprit sous cette dénomina- 
tion toute espèce de revélation. Dos lors on ne traça point 
une distinction assez précise entre les mots inspiration et 
rëcdlaton, que souvent méme l'on eonfoudit. On regarda 
comme agent réel de l'inspiration l'Esprit divin, en tant que 
force et personne divine ; et on employa pour cela les termes 
Dieu, Lo9os , sprt Saint ou divin, dans une signilication 
absolument ideutiqne. Toute[ois, on ne considéra l'inlluence 
de t'Esprit Saint que comme une force divine; et en méme 
temps on soutint, contre les mystiques et les fanatiques, 
que dans l'inspiration des pruphètes et des auteurs de l'É- 
criture Sainte il n'y avait point eu communication ou réunion 
de la substance divine avec l'homme. On se représentait 
plus ou moins rigoureusement le mode suivant lequel cette 
inlluence operait. D'après l'opinion la plus rigoureuse (et 
c'était celle de saint Justin, martyr, d'Attiénagore, de 1-h6o- 
philo et d'Origène, etc. ), les écrivains sacrés n'avaient été 
/ proprement parler que des instruments de Dieu, qui n'a- 
vaient plus eu la conscience d'eux-mêmes et qui avaient 
¢essë d'ëtre maitres d'eux-mOrnes : aussi les qualifiait-on 
d'organa, mus à volonté par la force divine. D'aprës l'opi- 
nion la moins rigoureuse (et c'éait celle de saint Ëpiptiane 
et de saint Augustin }, il n'y avait data l'inspiration qu'une 
assistance divine. Cette idëe fut accueillie et se répandit 
d'autant plus aisémeut dans l'Église, qu'elle paraissait plus 
propre a démontrer, à l'encontre des lanatiques, que le pro- 
lhetismen'avait point ét4.un enthousiasme fanatique, n'ayan t 
pas même la conscience de soi. Toutefois, il existait aussi 
dans l'Église primitive une idée, qu'on peut considërer 
comme la théorie de l'inspiration du Nouveau Testament, 
à savoir, que l'auteur du louveau Testament avait été 
plein de l'Esprit Saint (aimi pensaient Novatien et Tertul- 

INSTALLATION 
lien ). Mais à cet égard on pouss les ctioes si loin, que 
ce ne fut pas seulement le sujet, l'ensemble, main le« mots 
isolés, jusqu'aux simples syllabes et nme les lettres qu'on 
¢onsidéra comme inspirées. Avec de telles idées, on ne laissa 
pourtant pas que de tomber en même temps dans d'ëtranges 
inconséquences, qui se perpétuèrent dans l'Êglise jusqu'au 
dix-septième siAcie. 
Calez les scolastiques, la tborie de l'inspiration demeura 
sans développements uitCieurs. Ce qui s'y opposa, ce lut, 
avant tout, la tendance et l'lutCêt du dergé à soumettre de 
plus en plus l'antorite de l'Eeriture Sainte à celle de l'Eglise. 
Dans ce but, l'Église s'attaclia toujours avec une sollicitude 
extrdme à ce que l'on ne poust pas an-delà de certaines 
limites les discussions sur la nature de l'inspiration et h ce 
qu'on les restreignlt, au contraire, dans un cercle de formules 
générales. Un fait bien remarquable, d'ailleurs, c'est que 
dans l'Église primitive jusqu'au moment o6 la théorie de 
l'inspiration lut consacrée comme dogme, on ne ren- 
contre pas de démonstration proprement dite en laveur 
de l'inspiration de l'Écriture Sainte, mais de temps à autre 
de simples allusions à cette donnée. On se re[«rait tantôt à 
des passages de la Bible, et de prférence  11 Tire., 3, 16; 
tant6t à l'efficacité de la parole écrite, tanl6t à l'accord exis- 
tant cuire l'Ancien et le Nouveau Testament; tant6t, enfin,/ 
ce principe qu'il n'y a que l'antoritë de l'Église, comme pos- 
sédant seule la thëopneustie, qui s'est conservée par la tradi- 
tion (et en faveur de laquelle on ne donne pas d'ailleurs 
d'arg, ment ), qui puisse prouver l'inspiration de l'Ëcriture 
Sainte. Or, c'est celle opinion que l'Église catholique soutient 
et enseigne encore aujourd'hui. 
Bien que les rélormateurs du seizième siCie rejetassent 
d'une manière absolue, en cetle matière, les opinions de 
l'Eglise catholique appuyéessur la tradition, et soulinssent 
éuergiquement qu'il n'y avait point d'autre aulorité pour le 
dogme que celle de l'Ëcriture Sainte, on ne trouve cependant 
point chez eux, au sujet de l'inspiration, t'opinion rigoureuse 
qui se fit jour plus tard. Quaud ils prêchent l'autorité ab- 
solue de l'Ëcriture, Luther et bldanchlhon en ont surtout en 
vue le sens et l'esprit. Cependant Luther, comme le prouve 
sa discussion avec Zwiugle à propos de la communion, finit 
par adopter l'opinion de l'autorite de la lettre même. Les 
livres symboliques de l'Église luthérienne ne s'expliquent 
pas sur l'inspiration ; on n'y trouve que des assertions se 
rattachant aux termes emploés par la langue de l'Egllse 
primitive... 
INSPI:iUCI (en allemand lnnsbriick; en latin OEni- 
pontum, passage de l'lun), chef-lien de la prineipauté du 
Tyrol, à l'emboucimre de la charmante riviëre de Siil 
dans l'lnn, qu'on ¥ traverse sur deux ponts, est DAtte dans 
une situation ravissante, au centre de la vallée si pittoresque 
de l'lnn, que termine au nord une chaine de montagnes 
hautes de '2 à 3,000 mëtres. On . compte une population 
de 13,107 habitants, non compris la garnison, forte de 3,000 
hommes; onze églises, dont la plus remarquable est celle 
des Franciscains, contenant divers tembeaux de person- 
nages célèbres, et où, le 3 novembre 1651, la reine Chris- 
aine de Suède abjura le protestantisme pour embrasser le 
catholicisme. Cette ville, o6 l'on troue d'ilnportantes ma- 
nufactures de soie, de coton, de gants, de coutellerie et de 
cire, est aussi le centre d'un commerce de transit des plus 
actils entre l'Allemagne et l'Italie. Elle est le siCe d'une cour 
d'appel, d'un commandement militaire, d'une univerïité 
et d'un collége qui compte 350 élèves et 22 professeurs. 
Lors de l'insurrection dirigée par André H Ofer dont le 
Tyrol fut le théatre en t.09, et qui avait pour but d'en 
expulser les Français et les Bavarois, Inspruck fut succes- 
sivement pris et repris par les deux partis, et souffrir 
beaucoup des dévastations, suites inévitablea de la guerre. 
Ion loin de celle ville on trouve la magnifique abbaye de 
Prémontrés de Witlau. et le beau chSteau d' A m b r as. 
INSTALLATION (du latin installatio, dérivé de 
stallum» siége, chaire, dont on a fait installo» pour i: 



INSTALLATION 
ttallutn nitgo, placer quelqu'un sur le siCe qu'il doit oc- 
cuper ), action de mettre quelqu'un solennellement en pos- 
session d'une place, d'un emploi, d'une dignité, comme un 
président de tribunaJ ou de cour, un curé, etc. 
En marine, l'installation d'un navire s'etend du par- 
fait arrangement de tout ce dont il est muni pour naviguer ; 
c'est en quelque sorte son économie intérieure. On dit qu'un 
navire est bien ou mal installé selon que son gréement, ses 
emménagemeuts, ses appareils sont plus ou moins commo- 
dément disposés pour un service actif et pour l'ordre et la 
bonne tenue. L'installation diffère suivant le service des 
vaisseaux, suivant les pays qu'ils doivent fréquenter, etc. 
INSTANCE. On nomme ainsi l'action intentée devant 
un tribunal civil. La demande introductive d'instance 
est celle qui saisit le juge d'une cause. Une instance peut 
,tre déclarée périmée si le demandeur reste trois années 
entières sans faire aucun acte de procédure. L'instance est 
prescrite au bout de trente ans. Mais tant que la péremp- 
tion n'en aura pas été demandée ou tant que la prescription 
n'aura pas été acquise, le demandeur pourra toujours raviver 
son action en assignantson adversaire en reprsed'instance. 
Le mot instance se prend aussi pour désigner la juridic- 
tion : étre en lremière instance, c'est plaider devant le 
tribnnal du premier degré. Nous appelons méme les tribu- 
naux civils qui ont la compétence générale tribunaux de 
lremière instance, bien qu'ils prononcent souvent par 
appel sur les décisions d'une autre juridiction, la justice de 
paix. On ne dit pas seconde instance, mais alpel. 
«Instance, en termes de scolastique, signifie un nouvel 
argument qui a pour objet de détruire la réponse faite aur. 
premiers (voyez lnvcrms ). 
IN STATU QUO. Voye'- ST«TU Çuo. 
INSTINCT. Dans l'instinct consiste la première consé- 
quence vitale de l'organisation et, pour ainsi dire, l'essence 
de l'individualité animale ou végétale. Ce n'est pas seulement 
une faculté, une force, c'est une nécessité qui résulte de tel ou 
tel mode d'agrégation des molécules élémentaires dont se 
doit composer une créature pour cesser d',tre réputée brute. 
Dès que l'organisation se manifeste, l'instinct en émane in- 
dispensablement et proportionnellement  mesure qu'elle 
se complique; toute stimulation intérieure en devient alors 
une conséquence. Il se modifie selon cette forme essentielle 
qui constitue l'étre, et détermine celui-ci vers les fins qui 
lui sont convenables; forme sur laquelle, depuis Aristote, 
l'aveugle métaphysique a tant glosé, maislue Cuvier, parce 
qu'il ëtait naturaliste, a si bien caractérisée en disant: 
« La forme du corps vivant lui est plus essentielle que la 
matière. » En effet, cette forme détermine premièrement 
les phénomènes iris'inc,ifs, et par suite les phénomènes 
intellectuels, qu'il faut se garder de confondre. 
On a beaucoup raisonné, ou plut6, déraisonné, sur l'ins- 
tinct, que les philosophes de l'ancienne Enc91opédie re- 
gardaient uniquement comme « le principe qui dirige les 
bétes dans leurs actions ». Le Dictionnaire de l'Académie 
le définit ainsi : « Sentiment, mouvement intérieur, qui 
est naturel aux animaux, et qui les fait agir sans le secours 
de la réflexion; la nature a donné à tous les animaux l'ins- 
tinct de leur propre conservation ». Au mot sentiment près, 
en comprenant l'homme au nombre des animaux, cette dé- 
finition est assez bonne, ou du moins préférable à tout ce 
qu'a imané l'Eoete de Coï, dillac, entre antres, quand 
elle a prétendu n'y voir « qu un commencement de con- 
naissance, ou simplement l'habitude, prive de réflexion ,,. 
Buffon surtout en faisait l'attribut de l'animalité, en nous 
réservant exclusivement l'intelligence; mais l'intelligeuce 
est-elle autre chuse qu'un développement de l'instinct? Des- 
rat'tes avait été encore plus loin : il voulait bien avoir une 
me, encore qu'on l'ait soupçonní de matérialisme, mais 
il voulait que les animaux fussent de simples machines, non- 
seulement dépourvuesd'instinct mais encore desensibilité !... 
!1 e0t volontiers soutenu que les chiens disséqués vivanls 
par ces physiologistes qui expérimentent sur leurs viscères 

 INSTINCT 4té 
ne le senfent pas et poussent des gmissements commi 
l'orgue de l'église Saint-Roch joue des airs sacrés ou pro- 
fanes !.. Ce sont de telles absordités que sur l'autorité du 
maltre, et suivant l'école à laquelle ils appartiennent, de 
graves disciples admirent comme de sublimes découvertes, 
et qu'ils appellent tout au moins « les révesencore sublimes 
.du génie  quand, la déraison en deveuant par trop 
dente, il devient nécessaire d'employer certaines précautions 
toratoires pour la colorer. L'instinct est aux étres orgauisAs 
comme te son ou la pesanteur est aux corps bruts. Eu 
effet, il ne se peut faire que tel ou tel arrangement de mo- 
lécules métalliques, par exemple, ne produise tel ou tel bruit 
par la percussion, ou qu'un poids ne lasse pencher le bassin 
d'une balance, s'il vient à s'y trouver en opposition avoe 
quelq,te autre plus léger. De mme, il ne se peut faire 
qu'un ,tre organisé n'appète aux choses dont sa conservation 
dépend, et n'évite, autant qu'il lui est possible, ce qui lui 
pourrait nuire. 
C'est à cherder ainsi qu'h saisir cette distinction que 
l'instinct détermine, parce qu'il est en quelque sorte I"me 
ou la première faculté dont l'organisme soit le moteur. Il 
est plutôt un effet qu'un principe, et on le reconnatt jusque 
dans les plantes : c'est par lui qu'une racine perce un mur 
pour aller pomper de l'autre c6té l'humiditê nécessaire au 
développement d'un végétal ; que les deux sexes se rappro- 
chent dans la valisnérie, ainsi que deux filaments dans 
les salmacis; que les rameaux se redressent dans la posi- 
tion verticale quand l'arbre est abattu; que, dans les serres, 
toutes les brancfies, ainsi que les oscillaires des marah;, se 
dirigent vers la lumière; et, selon un plus grand dévelop- 
pement d'organisation, c'est toujours par lui que les polypes 
se reoemposent, et sans }'eux saisisseut la proie qu'ils se 
doivent assimiler, ou se contractent quand le moindre danger 
les menace; qu'une larve d'insecte, ì laquelle ses père et 
mère ne furent jamais connus, obéit aux mmes habitudes 
spécifiques qu'eux, après avoir comme deviné leurs habi- 
tudes ; que l'oiseau fait entendre le cri ou le chant propre 
 n espèce, l'élev't-on en cage, loin du couple qui le pro- 
créa; enfin, que le petit des mammifêres saisit de ses Iëvres 
inexpérimentíes le mamelon qui le doit nourrir, sans que 
le mécanisme de la succion ait pu lui ttre révélë par une 
autre impulsiou que celle de l'instinct. Ce véritable sens 
commun organique et primitif détermine, porte, pousse 
vers l'objet nécessaire la créature qu'avertit un besoin 
quelconque : il avertir aussi du danger. L'effroi conserva- 
teur et les appétits stimulants du courage sont entirement 
de son domaine. 
L'instinct est si bien nn effet indispensable de l'organi- 
sation, qu'il se manifte avant qu'aucun raisonnement ait 
pu avoir lieu chez les A,res où l'ètat parfait doit dèterminer 
une certaine élévation d'intelligence. Ainsi, le poulet sait 
propos briser la coque de l'oeuf qui le tenait emprisonné, 
et choisir le grain le plus convenable ì son estomac; ainsi, 
la progéniture de la tortue marine, abandonnee dans le sable 
du rivage ou le flot n'atteint jamais, choisit l'élément qu 
convient ì son existence dès que les rayons du soleil l'ont 
fait éclore, et, loin de s'égaer sur la terre, se précipite 
dans les flots par la ligne la plus courte ; ainsi, le foetus de 
l'homme s'agile dans l'utérus, afin d'y prendre la situation 
o6 ses membres, encore flexibles, se sentent le plus  l'aise. 
Ce sont de tels actes, purement instinctifs, où l'habitude et 
in sentiment ne sauraient entrer poux la moindre part, qui 
avaient suggéré ì l'anllquité le système des idées innées 
système que des modernes ne manquèrent pas de renou- 
veler; et l'on doit remarquer ì ce sujet qu'il est peu d'ob- 
servations justes dans le fond o6 l'esprit humain, pou 
par les contradictions qui l'assiègent, n'ait trouvé quelques 
SOllrC_,P.s d'erreur. ' 
Ce sont les animaux communément regardds comme les 
moins parfaits qui nous offrent l'apparence des effets les 
plus extraordinaires de l'instinct ; non que cet instinct soli 
chez eux absolument le seul mobile de pratiques singu- 



liër, r, étant touionrs en raison de la complication des 
organes, fl ne peut tre que borné, mais parce q 
boxes mmes, limint l'exerci de l'instinct à des actes 
que nufie cause d'abeffation ne saurait troubler, oes actes 
raissent toujou identiques et inaltérabl. En consi- 
dért, r exemple, la nomboeuse classe des insec- 
tes, où chaque nouveau-né, n'ayt reçu d'ensdgne- 
ment que de oes citiens rultant de la contexture 
qui lui est propre, pratique nanmos l'dustrie de ses 
devciers, avec lesquels il ne lut jamais en rapport, on 
dirt de fites machiu montées  t¢fie ou telle fin dé- 
rmin, comme une montre, qui, 'ëtant coms que 
pour marquer l l,eur, ne pourrait indiquer l nutes, 
les secondes, I jours de la maine et les phas de la 
lune, les rouag nsaires pour de ls rés ne lui 
ayt  éoE donnes. 
A mure que l'être organisé s'lève en complioelions et 
e le nombr¢ des sens s'aecroit en lui, les effe oens- 
1unes et ssillanh qui r6sultent de la combinaison de peu 
d'organes oe fondent, pour ainsi dire, eu s'algamant dans 
de noavell houles, et tïnsfinch comme fécondé par un 
surctt de perceptions, devient agent dans Io jugement 
mme qui rulte de la comparaison des objeh perçus ; il 
s'elève insenfiblement par I opérions de h mmoire 
pr devenir l'htefligence, laqu,.lle n'est pas l'attribut de 
l'homme sed, puisqu'il est tant d'homm à qui la nature 
la refus, et qu'on en voit des marques 6videntes dans toutes 
I cr6atures en proportion du d6eloppement des ss dont 
elles furent do et du mode d'exercice qu'elles en peu- 
veut faire. L'instinct doit donc varier de meure et 
due selon les changemen qui surviennent dans l'6tat phy- 
sique de chaque Cre : fiusi, l'instinct de la chenille ne 
saurait 61re cel du papillon, ni l'instinct du 16rd cel 
de la grenouille, ni l'instinct du foetus humain, cherchant 
s ais dans le sein de  mère, celui de l'lmmme, lors- 
que le délopme finit par donner t d'empire à son 
i n t e I I i g e n c e  qu'à peine l'imfinct conserve quelque in 
fluence ds s décons, biais tout I créatur oo se 
groupent des organes diffçrents, si leurs m6morphoses 
n'y ajoutent pas des ns nouveaux, uvent avoir, selon 
les oevers 6a par où ries passeront, un seul mode d'in- 
telligent, au moyen duquel, comme le Tyrésias de la my- 
tholoe, qui fut altnativement homme et femme, le 
pillon se rappellera en voltiger qu'il rampa, et le batra- 
ci adrup6de quïl fut poisson, ndis que l'homme ne 
comervera aucuue m6moire de ce qu'il éit avant que ses 
poumons s'oavrist aux impressiom de l'air et ses seux 
à la lumi6re. De là  modifications de l'instinct par l'in- 
lligence, lon I sonsacfiom ou les oetiom quïntro- 
duit la nature dans l'nomio orgique : et l'instinct, 
use denninan interne de l'hlligence, est si bien la 
poemi6oe source de celle-ci, qu'on t'anurie en mifiant 
l'instinct. L belles expériences phyfioqu de M. bla- 
geno et Flourem l'ont s prouvê : c van nom ont 
montré tel effet produit r tel organe asnt hors 
quilihre, ou s'exeront sefl d'une façon ex,sire aps 
gahlati de l'organe qui devait agir en contrids, et 
la vie diminut ou chgnt de mode sous leur spel 
invtigateur. 
11 parait que de la combinain des facult stinctiv 
et d pptions qui vieat par les sens ( combahon 
qu'ope Pintrucon d'un sysoEme .neveux d les ma- 
chiuës visant )naisst, à leur tour, s facul intell- 
tu; et d qu'un oe équihre vint à s'ébUr tre 
l'inclut et instinct, chez la crture convablent or- 
gani, ble enfin la raison, t rn, terreur d 
fourS, torce d g, rélatrioe irisfible, qui ne 
urait omr; le plus éminent, mah  pire rare d at- 
ibu de l'amioE  au plus haut teo de oembi- 
aai orgiqu; admirée rlt  h gn6ralisafion 
doe  dans e marine o s moindres pai doivt 
re en hmo pour h pruire sae et compl6te; trop 

IISTINCT -- INSTITUT DE FBANCE 
peu consultée, et contre laquelle s»élèvent avec une 
dplorable de faux docteurs, qui la proclament d'une part 
une émanation divine, quand ils sont parvenus à la fausser, 
et de l'autre une source pernicieuse d'incrédulité lorsque, 
s'affranchissant des entraves ou des sophismes dans lesquels 
il» la voudraient enchatner, elle se montro sublimo et 
s'exerce dans la plénitude de sa force et de sa liberté. 
lOllY DE SAINT-VlNCEINT, de l'Académie des Sciences. 
INSTITUT DE FRANCE. La Convention, qui, 
en 1793, avait ordonné la suppression de toutes les académies 
et sociétés littéraires patentées ou dotées par la nation. 
songea bient6t  les réorganiser sur un plan plus large, plus 
philosophique, en les remplaçant par un institut, embras- 
sant toutes les branches des connaissances humaines. La 
constitution de l'an m (t794) portait, à l'article 298 ; « 11 
y a pour toute la république un Institut national, chargé 
de recueillir les découvertes, de perfectionner les arts et 
les sciences. » En exécution de cet article, la loi u¢ l'ins- 
truction publlque, décréte le 25,octobre 1795, dan l'a- 
vant-dernière séance de la convention, règle comment ce 
but devra ètre atteint. L'institut fut compns6 de 166 mem- 
bres résidant à Paris et d'un pareil nombre d'associés 
répandus dans les différentes parties de la république, sans 
compter t4 savants ëtrangers, qu'il associa  ses travaux. 
I! fut divisé en trois classes, et chaque classe en plusieurs soc- 
tions. La I r« classe, dite des Sciences physiques et mathéma- 
tiques, comprit I0 sections ( 60 membres résidants, 60 
dans les départements); la 2 « classe, dite des Sciences o- 
rales et politiques, avait 6 sections, 36 membres résidants, 
36 dans les départements; la 3« classe, dite de Littepature et 
Beaux-Arts, se partageait en S sections : elle comprenait 
48 merabres résidaats, 48 dans les départements. Pour 
sa première formation, le Directoire nommait 40 membres, 
qui lisaient les 96 autre..«, et les 161 réunis choisissiaient 
les associés. Mais une fois l'Institut orgauisé, lui ul de- 
vait pourvoir aux places vacantes, sur une liste au moins 
triple, présentée par la classe oh II y aurait une vacance. 
Le 20 novembre t96 (29 brumaire an v), le Directoire 
nomma les membres devant former le noyau de l'lostitut. 
Le 6 décembre, ces 48 membres, parmi lesquels on 
marquait des noms illustres de l'époque et trois artistes 
dramatiques, Molê, Préville et Monvel, furent instalJés au 
Louvre, où ils s'occupèrent immédiatement de l'élection de 
leurs collb.gues et de la rédaction d'un projet de règlement. 
qui, pr«senté au Corps l¢gislalif par LacCère, le ! janvier 
1797, fut approuvé par un décret du 6 avril suivant. En 
l'an v ( 1797 ) cinq membres de l'Institut, Carnot, Barthélemi, 
Pastoret, l'abbé Sicard et Fontanes, .furent déporté» par suile 
du coup d'État du 18 fructidor. En vain un de leurs col- 
lgues, Delisle de Sales, eut le courage de publier un "Mé- 
moire à l'Institut pour réclamer leur réintgration; elle 
n'eut lieu qu'après le 18 brumaire, et a la suite tïora- 
genses séances dans le sein de l'Institut. Le 2 septembre 
1797, une députation de ses membres vint lire à la ban'e 
du Corps législatif le compte-rendu de ses travax de l'an- 
née» lequel fut imprimé par ordre des deux Conseils. Le 
décembre, le général Bouaparte fut Cu membre de l'Institut 
( t  classe, section de mécanique). En tl9 t'Institut pré- 
senta au Conseil des Anciens son rapport sm l'établissement 
du système m é t r i q u e. 
La Constitution de Pari vin (1800) maintint l'Iastitot. 
Le  mars 1802, un arrêtWdu premier consul ordonna lu'il 
lui serait lait par les trois classes un rapport sur l'ëtat et les 
progrès des sciences, des lettres et des arts depuh 1189. 
L'année suivante la classe des sciences mqrales et politiques 
lut su pprimee. Malgré cette suppression, te nombre des clas- 
ses, qui était de trois, fut port à quatre : P', Sciences phg- 
siques et matImatiue ; 2 , Langue et Littërature fran. 
çaises ; 3 , Histoire et Littoerature anciennes ; 4 , Beau,c- 
Arts. 11 y eut un remani.ement pour la rëpartition des mem- 
hres entre ces quatre classes. A la t " fut, en outre, ajoutée 
uue section de géographie et de navigation; ce  porta le 



INSTITUT DE FBAICE 
mnbre de membres résidants à 63; la e classe fut composée 
de 40 membres ; la z', d'un pareil nombre : elle put avoir 
 asociés étrangers, et 60 correspondants ; la 4e composée 
de S membres résidants, s associés étrangers, 38 correspon- 
danls, fut divisée en 5 sections. Un arrlé du 26 janvier 1-80,3, 
signé l]onaparte, contient la nomination.des membres des 
différentes classes : hii-mème figure dans la première, et 
son frère Lucien dans la seconde. Un autre arrtté, du 23 |an- 
vier 1804, défend aux correspondants de prendre le titre de 
membre de l'Institut et d'en porter le costume. 
Vers cette époque disparaissent les secrétaires tempo- 
raires, pour céder la place à des secrétaires perpétuels. Les 
premiers furent Delambre et Cuvier, Suard, Dacier et Le 
Breton. Éhisdans chaque classe par leurs collègues, coniirmés 
var le premier consul, ils remplirent tous leurs fonctions 
]nsqu'an rétablissement des académies, en 1816, o0 ils lurent 
tons appelés à les centin«er, sauf Le Breton, qui, remplacé 
par Quatremère, alfa fonder à Bio-de-Janeiro l'Académie des 
Beaux-Arts du Brésil. Le traitement des membres de l'Ins- 
titut avait été fixé à 1,500 francs sous le consulat. 
Une des premières pensées de lapoléou, parvenu 
l'empire, fut l'institution des prix dœecennau. En 
t806, l'Institut nalional quitte ce titre pour prendre dans 
son annuaire celui d'Institut de France, et dans l'Alma- 
nach impérial celui d'Institut des Sciences, Lettres et Arts. 
Un décret du 25 avril 1807 institue la commission du Dic- 
tionnaire de la langue des beau»arts, ouvrage qui n'a 
jamais vu le jour. La mvae année est créée la commis- 
sion pour la oontinuation de l'Histoire littdraire de France, 
commencée par les Bénédictins. En 18II, l'Institut prend 
enfin le t/Ire d'impérial. En I814, il devint royal, à 
suite de la chute de l'empire. La collection des mémoires 
publiés par l'Institut jusqu'en 1816 se compose de 25 vo- 
lumes in- °, dont 1 pour la classe des sciences, 5 pour 
la classe des Sciences morales, 5 pour la classe de littérature 
et Beaux-Art% S pour la base du sjstëme métrique, 2 pour 
les savants étrangers. 
A la seconde restanration, l'Institut est réorganisé. Par 
ordonnaoce contresignée Vaoblanc et Barbé-Marbois, les dé- 
nominations des quatre classes sont remplacées par les nom 
des anciennes académies; 1 ° Académie Française; 
2"Académiedesl nsc rip t lu ns et Belles-Let t re s ; °Aea- 
dmie desBeaux-Arts;4 ° Aeadémiedes Sciences. Le 
lien qui les unissait est rompu; on porte atteiote à l'inamo* 
vibilité des membres : on en expulse plusieurs, d'autres sont 
imposés par lepouvoir, et les titres littcraires ou scientifiques 
ne sont pas plus omptés pour la faveur que pour la disgrâce= 
L'Institut est conservé avec son titre ; mais il cesse d'exister 
comme corps organisé tel que l'avait compris sa fondation. 
Le gouvernement de Juillet ne to,lche h l'Institut que pour 
rétablir, par ordonnance du 6 octobre 82, sur le rapport 
de M. Guizot, ministre de l'instruction publique, l'ancienne 
classe des Sciences raorales et politi.ques sous le 
nom d'Académie, comme les autres classes. Le gouverne* 
ment y rappelle les dix membres et les deux correspondants, 
devenus depuis membres de l'Institut, qui en faisaient 
partie à l'époque de la suppression, et declare qu'ils seront 
chargés de compléter le nombre de trente par des élections 
successives. Eng. G. nf. 
Au mois d'avril If,55, un décret impériat a modifié l'br- 
ganiIion ¢}e l'Instiht, redevenu impérial, après avoir 
encore été pendant quelques années national Déormais les 
séances générales auront lien à la ;aint-Iapoléon. Un prix 
annuel de Io,o0o If. sera donné à l'invention la plus utile 
laite dans les cinq dernières années, Il est ajouté une 
tion de Politique, administration el J/nances à l'Aea- 
démie des Sciences murales et politiques. Cette section sera 
composée de dix_'membres, qu'un décret a nommés pour la 
première fois. 
INSTITUT D'ÉGYPTE  nom sous lequel on 
signe la commission des sciences et des arts qui fit 
partie de l'expédition d'lgypte. Ele eut d'abord lOUç 

 INSTITUT ])'EGYPTE 
ebels M  n g e et B e r t h o 
fo, ponr les sciences 7nathémaligues et leurs apllica- 
tions, 4 géomètres, 3 astronomes, 3 mécaniciens, 12 auxi- 
liaires;..2°, pour le gn|e civil, 19 ingéienrs des ponb 
et chaussées, 13 ingénieurs géographes,  ingénienrs des 
mines 3 °, pour les sciences naturelles, 7 chimistes, 
3 zoologues, 3 botanistes, 4 minéralogues; 40, pour la 
liftCature, 2 antiquaires, 8 orientalistes, 2 littérateurs; 
5o, pour l'ar de 9urir, 5 médecins et chirurgiens, 2 phar- 
maciens principaux, outre le corps médical et chirurgical 
de l'armèe-; 6 ° , pour les beaux.arts 
 architectes, 5 peintres et dessinateurs, I sculpteur, 1 gra- 
veur, à qui il laut joindre 2 élèves de l'¢ole Polytechnique, 
non encore classés, et 2 typographes en citer. Dans ce 
personnel on citait Bonaparte, 
Fourier, Girard, Desgenettes, Dubois,Geoflroy, 
Larrey, Caflarelli, Desaix, Denon, Parseval, 
K 1é bu r, le d ou t é, Lepère, etc. 
A peine le débarquement eut-il eu lieu, en juillet 1798, sur 
les ctes d'Afrique, que le travaux de l'lastitut d'Êgypte 
commencèrent ; les innieurs des ponts et chaussées re- 
levèrent toute la cte; les igénie«»rs géoapbes décrivi- 
rent Alexandrie; les astronomes determinèrent la longitude 
et la latitude du Phare et de plusieurs autres points prin- 
cipaux : en moins dedenx mois, le grand plan gométrique 
des trois villes grecque, arabe, turqs»e, et de leurs environs, 
était rëduit aux deux cartes qui fi3urent dans la Descriplion 
de l'Eg9pte. Puis, l'Institut se constitua au Gaire ; il tint 
sa première séance sous la présidence de Mange, et se di- 
visa en quatre sedions : mathématiques, physique, économie 
politique, arts. Chaenne se composait de t2 membres ; les 
procës-verbaux étaient envo,és a l'Institut de France. Mongn 
fut Alu président, Bonaparte vice-président, Fuurier secré- 
taire perpétuel. 
Dès que l'armée fut maitresse de l'Ég)pte inférieure, 
les travaux scientifiques prirent partout un nouveau dé- 
veloppement ; les membres de l'Institut, patagés en diverses 
sections, suivirent les divers corps d'armëe dans toutes leurs 
expéditions, parcoururent et etudièrent dans tous les sens 
le sol de l'Egypte, relevant, dans le marches, les posi- 
lions astronautique.% faisant des Iouilles dans les halles, 
dessinant les monuments, recueillant des papirus, des ins- 
criptions, des document de toutes espèces. 
Bonaparte, en qtfittant l'i:ypte, emmeoa Mange et Ber- 
Ihoilet. Leur départ ne alCourages pas leurs collègues : 
Fourier et Gostaz les remplacèrent. Le génëral en chel avait 
autorisé son successeur à traiter de l'evacuation après une 
perte de t,500 hommes et à renvoyer en France les membres 
de l'Institut à leur retour de la haute i:yple. Kléber fut 
bientôt à mëme d'accomplix cette dernière partie de ses ins- 
tructions ; les savants, réunis  Aleandrie, se préparaient au 
départ, quand eut lieu le manque de foi, si connu, de l'ami- 
ral anglais, suivi de la btaille d'Héliopoli% de l'assassinat 
de KIéber et de l'avénement de Menou. L'instilJt, rappelé 
au Caire, ne revint  Aiexandrie qu'après la défaite de Canope, 
quitta l'l,,ypte avec l'armée le. 
blarseille quarante-deux mois aprës son départ de France. 
• Bonaparte, premier consul, ordonna l'exëcution d'un 
unvrage renfermant tous les travaux de l'Institut d'Égypte, 
et le rëorganisa en commission pour l'exécution de ce mo- 
nument national. Le t  janvier 1808 !a commission pré- 
senta à l'empereur nue partie notable de l'ouvrage. La 
1  livraison ( 200 planches et 
parut à la fin dela mme année. L'empereur la reçut en 1809. 
La seconde In:. fut remise en 1813. En 181,  l'arrivée des 
coalisés à Paris, on interrompit les travaux, qn cada les 
cuivres, surtout ceux de l'atlas en 53 leuilles. La paix 
conclue, on se ferait à l'oeuvre. 1!. Jomard !ut envoyé à 
Londres pour y prendre des empreintes ou des copies des 
monuments recueillis par l'Institut de l'lïpte et euievés 
par les Anglais lors de l'évacuation d'Alexandrie. Les 3  et 
¢ livraisons furent présenlt à LouisXVIlI en 1517 et 1$21. 



4"21 
Charles X reç,,t, enfin, la dernière en 1825. Peu de temps 
après le libraire Panckoucke obtint du gouvernement l'auto- 
risation de faire pour son compte un second tirage des 
gnifiques planches de ce grand ouvrage. Les archives de 
l'Institut d'Égypte, rapportC en lrance par Fourier, ont 
disparu du ministëre de l'tutCieur, sans qu'on ait pu depuis 
en retrouver la trace. Eug. G. nE 
INSTITUTES. Telle est la traduction coutumiëre, 
mais certainement peu française, du mot latin Inst|tu- 
tiones, que les jurisconsultes romains donnaient le plus 
souvent pour titres à lesrs traités élémentaires du droit. 
Cette dénomination était reçue dans les pays de coutume, 
e'est-à-dire dans le nord de la France, et elle y prédomine 
encore; mais dans les pays de droit écrit, précisément ce,sx 
où régnait la loi romaine, on disait, et l'on dit plus com- 
munément Instituts. ]I est pen de personnes qui par ce 
nom entendent autre chose que l'ouvrage promulgué par 
l'empereur J usti nien. Cependant, lesens doit en tre plus 
généralisé. La dénominatiou d'Institnts formait un litre 
consacré en jurisprudence romaine pour les traités dans 
lesquels se trouvaient exposés d'une manière simple et 
méthodique les principes et les éléments généraux du droit. 
Les Instituts de Justinien ne lurent qu'une imitation et 
le plus souvent une copie de ceux qui les avaient préeé- 
clés de trois cents ans. C'est au beau siècle de la science, 
dans ce siècle qui commence à Adrien et qui finit à Alexan- 
dre Sévère, que nous trouvons en grand nombre ces sortes 
d'ouvrages ; ce sont les lnstitttls de Gains, composés de 
quatre livres, sous la dénomination de Commentaires ; les 
lnslituts de Florentin, en douze livres ; les Institnts de 
Callistrate, en Irois livres; les Instituts de PaI ; les lns- 
tituts d'Ulpien, chacun en deux livres; et enfin les lnsti- 
tts de Marcian, qui comprenaient seize livres. C sont là 
les instituts romaius. Les Instiluts de Justinien ne sont 
que des Instituts byzanlins, nés sur le sol asiatique, aux bords 
du Bosphore, dans le palais impérial de Constanlinople. 
Aussi l'observaleur éclairé ne manquera-t-il pas dy sentir 
virement la dilfrence d'origine, de peuple et de civilisation. 
De tous ces lnstihts, les premiers et les derniers seule- 
ment, e'est-à-,lire cetlx de Gaius et de Justinien, sont seuls 
parvenus jusqu'à nous. Leur comparaison nous permet d'ap- 
précier la transition qui d'un intervalle à l'autre s'est opérée 
dans les mœurs et dans les institutions. Quant aux aulres, 
ils ne nous sont connus que par quelques fragments epars, 
rapportés dans divers passages du Dipeste de Justinien. 
Les lnstiluts de G a i u s eux-mmes avaient subi le sort 
commun, et ce jurisconsulte, dont nous ne connaissions les 
ouvrages que par leur titre et par quelques citations, était 
confondu dans la foule illustre des prudents, ses contem- 
poralns, lorsque la main du hasard, après plus de dix siè- 
cles de ténèbres, I'a lait paraltre tout d'un coup  la lu- 
mière. Les Visigoths avaient inséré dans leur recueil offi- 
ciel de lois romaines, qu'on a nommé le Broeviaire d'A- 
laric, quelques iragments et le plus souvent une analyse 
mutilëe de ses lnstituts. Les jurisconsultes de l'Cule de 
Cujas, et notamment Pithou, son illustre élève, avaient 
extrait ces fragments et ces analyses, les avaient réunis et 
publiés en un volume : c'Cit là tout ce que nous pus- 
sédions sous le nom d'lnstituts de Gains. Cependant, ses 
véritab|es lnstituts avaient survècu; le moyen ge les avait 
possédés : qui sait en combien de manuscrits? lSiebUhr et 
Savigny déeouvrirent dans la bibliothèque du chapitre de 
Vétone un palimpseste qui avait porté le lexte prëcieux ; des 
tentatives réitérées ont permis de raviver et de déchiffrer 
l'ancienne écriture sous les .19itres de saint Hidrome, qui 
loi avaient été substituées, et les vrais Instituts de Gaius 
ont été rendus au monde saraut presque dans. leur intégrité. 
Quant aux lnstituts de oslinien (qui ont porté dans le 
Bas-Empire le tilre plus récent dInstituta, au lieu de 
eeltfx d'Instit«tiones, et nme la simple dénomination d'E- 
lementa), ils appartiennent à ,me autre civilisation. L'em- 
peRur avait déja promulgué le Cods des.constitutions ira- 

INSTITUT D'ÉGYPTE - INSTITUTEUR 
périales; il avait déjà ordonné le travail des pandecte 
ou Digese, qui avançait rapidement (voe - Concis 
Jis ) : • Ceci fait, gce/ Dieu, dit-il, dans sa constitution 
préliminaire, nous avons convoqué l'illustre Tribonien, mal. 
tre et ex-questeur de notre palaL« ; Théophile et Dorothée, 
hommes illustreset ant*ssenrs..., et nous les avons charges 
spécialement de composer, avec noire autorisation et nos 
conseils, des lnstituts, afin qu'a, lieu de chercher les pre- 
miersélémentsdu droit dansdes ouvrages vieillis et reculés, 
vous puissiez les recevoir émanés de la splendeur impé- 
riale .... Ces Instituts, dit-il ailleurs,' ont été tirés de tous 
cedex des anciens, de plusieurs commentaires, mais surtout 
de ceux qu'a faits noire Gaius, tant sur les Instituts que 
sur les causes de chaque jour (res cotidianoe) ». En effet, 
aujourd'hui que nous pouvons les comparerentreeux, nous 
voyons que les Instituts de Justinien furent en quelque 
sorte ealqués sur ceux de Gains; la distribution des ma 
tières y est la mme, et une infinit de passages sont iden- 
tiques. Rédigés sur le mème plan, ils sont divisés en quatre 
livres, comme ceux de Gaius en quatre commentaires'; 
mais l'empereur y voit une autre raison : il avait, selon ses 
propres expressions, partagé le Digeste en sept parties, « eu 
considératiou de la nature et de l'harmonie des nombres ; 
il partage donc les Instituts en quatre livres, afin qu'on y 
trouve les qualre oelments.., de la science. C'est de l'art 
cabalistique dans un cas, et dans l'autre c'est un jeu de mots. 
Les Instituts, dont la rédaction avait été promptement 
terminée, fièrent confirmés par l'empereur, le 22 novembre 
533 ; il assure les avoir lui-mme lus et revus. La confir- 
mation du Digeste n'eut lieu qu'un mois après, le 16 dé- 
octobre; mais ces deux ouvrages reçurent leur autorité Ié- 
gale à partir tons deux de la mème époque (du 30 décembre 
533). « Cet ouvrage, a dit bi. Dupin, en parlant des lus- 
tiluts de Justinien, offre un double caraclère : c'est un 
texte de loi, puisqu'il a été promulgué par un législateur ; et 
c'est en mème temps un liw'e dloementaire, car Jnstinien 
a ordonné de le composer précisément pour faciliter l'ensei. 
gnement et l'Cude du droit. Cétait tout à la fois le livre 
des maltres qui devaient Penseigner, et des élèves qui de. 
valent l'apprendre. De là tons les eiforts des jurisconsultes, 
docteurs et professeurs, pour eu interpreter tous les termes 
et en développer le sens. ,, Ces efforts ont commencé avec 
les Instituts eux-mèmes. Théophile, professeur de droit à 
Constantinople, l'un des trois rédacteurs des lustituts en 
publia lui-reCe une paraphrase grecque : écrit bien pré- 
cieux, dont l'authentieité ne peut plus tre aujourd'hui ré- 
voquée en doute, et que sou origine conlemporaine classe 
parmi les monuments du droit. Depuis, le nombre des com- 
mentaires sur les Instituts a étë tellement en augmenlant 
que plusieurs chameaux ne sufliraieut pas à les porter, 
comme le disait plaisamment Eunapius, en parlant des écrits 
des juriseonsultes romains; aussi en 1701 avait-on pubIi 
un ouvrage sous ce titre : De la délplorable mnltitndedes 
commentaires sur les lnstluls. 
l.-L.-E. OITOLAz'V, professeur : l'École de Droit de Paris. 
INSTITUTEUR homme qui fait profession d'instrre 
la jeunesse. Instituteur primaire eu France est le nom 
officiel du m nitre d'Cu I e, depuis un décret de la Con- 
vention du mois de d¢embre 1792. 
l,es institutenrs sont civilement responsables du dom- 
mage causé par leurs élèves envers la parlie lesC, saut 
lenr recours contre les përes, mères ou tuteurs, dans le cas 
oit ils prouveraient q¢il n'a pas dépendu d'eux de prévenir 
ni d'empècher le délit. Leur action en payement du prix de 
leurs leçons se prescrit par six mois. 
Les instiluteurs qui auraient commis un attentat à la pu- 
deur sur la personne des enlants confiés  leurs soins sorti 
punis de la peine des travaux forcés  temps. Le crime de viol commis dans les mèmes circonstances est puni des 
travaux iorcés à perpétuité. Enfin l'instituteur qui favorise 
babiluellement la corruption on la postitution des ealanta 
placés sous sa surveillance encourt la peine de deux à cinq 



INSTITUTEUR -- 
«ns de prison, de 3OO à 3,OOO francs d'amende, et l'interdic- 
tion de toute tulelle et de toute participation aux conseils 
de famille pendant dix ans au moins et vingt ans au plus. 
INSTITUTIONs nom d'une sorte d'élablissements 
particuliers d'instrsjcfion secondaire. 
Quelques institutions, dites de plein ezer¢ice, sont au- 
torisées à donner le méme enseignement que les iyeées ou 
ooliéges. Les autres ne peuvent s'élever au delà de la classe 
de seconde exetmivement; e mLme s'il y a un collége 
dans la ville où elles sont étabfies, elles doivent y envoer 
leurs élèves et borner les leçous de l'luiCieur aux élément« 
qui ne font pu« partie de celles d collége. Mais elles peu- 
vent faire la répétition de toutes les classes. Les institutions 
peuvent joindreà l'enseignement ordinaire le genre d'instruc- 
tion qui convient plus particulièrement auxprofessinns indus- 
trielles et mannfacturières; elles peuvent mme se borner 
à cette dernière espèce d'enseignement. 
Les chefs d'institution doivent être bacheliers ès lettres 
et és sciences. Ils ne peuvent exercer sans une autorisation 
spéciale, et payent un droit annuel de 150 francs " Paris et 
de 100 francs dans les départements. 
INSTITUTION CANONIQUE. On nomme ainsi, 
dans le droit canon, la concession d'un hénéfice de patrn- 
nage par le supérieur collateur, sur la préseotatinn du patron. 
Dans un sens plus générique, il se dit d'un bénéfice ou d'une 
provision quelconque.: 
En France aujourd'lmi il n'y a plus d'autres institutions 
canoniques que celles qui sont accordées par le pape, aux 
termes ducon cord at, à tout ecclésiastique nommé évtque 
par le chef de l'État, et celle qui est donuée aux prêtres 
par les évques après que leur nomination a ïlé agrée par 
le chef de i'Êtat. 
INSTITUTION CONTRACTUELLE. C'est une 
• donation faite par contrat de mariage aux ëpoux et aux en- 
fants qui naltront d'eux des biens existant au moment du 
décs du donateur. L'institution contraduelle participe 
tout enselnhle d,t testament et de la donation entre vifs ; 
eIle est irrévocable, comme celle-ci, et n'a d'effet qu'à la 
mort de Cellli qui fait la libé.ralité, comme le premier. 
INSTITUTION D'HERITIER. Le droit romain 
appelait ainsi la nomination faite par un testateur de celui 
qu'il choisissait pour représenter et continuer .sa personne 
apr lui. Sans institution d'héritier il n'y avait point de 
testament; tellement que si elle était nulle, toutes les autres 
dispositions tombaient, à moins que le testament ne con- 
ttnt la dan codiciilaire (ogez C0mCLLg ). 
En France les pas de droit écrit reproduisaient ce prin- 
cipedu droit romain; mais la plupart des ¢outumespor- 
#aient « q|finstitution d'héritier n'a lieu, » c'est-à-dire 
qu'elle n'était pas ncessaire pour la validité du testament 
ou codicille ; s'il y en avait une, elle valait comme legs, 
sans tre assujettie à aucune autre règle que celles qui étaient 
communes eux legs. 
Le Code Civil a suivi à cet égard encore le droit cou. 
tumier; et toute personne peut disposer par tes tament, 
soit sous le titr d'institution d'hritier, soit sous le titre de 
legs, soit sous toute autre dénomination propre à manitester 
sa volonté. 
INSTRUCTEUR. Ce mot du langage militaire n'ëtait 
pas encore en usage il  a un siècle, ou du moins on ne le 
connaissait pas sous l'acception qui va lui tre donnée. 
On conçoit en effet qu'il ne saurait remonter plus loin que 
les ordonnances touchant la tactique française. Or, au- 
cun document qu'on puisse considérer comme un rglement 
«ur l'exercice n'existait avant le milieu du siècle dernier. 
La chose cependant est hier ancienne. La nuptiale de la 
Macédoine avait des colléges et des professeurs d'art de la 
guerre, et à Borne le Champ-de-Hars retentissait du bruit 
des fouets que mariaient sans relâche les campi9ène , les 
camptdocteurs, c'est-à-dire des instructenrs comparables 
aux lanites des gladiateurs. $ocrate, Polbe, ¥égèce, en 
rendent témoignage. Les .éaules de blarius conservaient les 
»mer. us c« cosvans. -- . x. 

425 
empreintes des corrections qui lui avait inculqué son savoir 
de soldat; et malheur au recrue que flagellait le oampi- 
gène blaximin, ce gant barbare, que sa haute taille amena 
des fonclions d'instructeur à celle d'empereur I Ne perdons 
jamais de vue que le peuple-roi ne traversait le vestibule de 
la gloire que sous t'empire de l'escourge, s'il était tiron, et 
du sarment, s'il était légionnaire. Quoi qu'il en soit, le mot 
instructeur est trop jeune pour Ire d'origine latine ; 
instructor cloez les Romaius sigaifiait sergent de bataille, 
ou, comme on disait, arrayoun; et instructio ordinum 
signifiait ordre de bataille. G * Bnn. 
Tout dépt de régiment, bien organisé, doit tre pourvu, 
sous le commande'ment d'un major rompu aux exercices, 
de bons officiers et sous-officiers mstructeurs, afin que 
le régiment, en campagne ou non, ne reçoive de leurs mains 
que des sujets irréprochahles sous le rapport de la pratique. 
INSTRUCTION (du latin instructio, arrangement, 
dérivé de struere, construire). Ce mot s'entend du savoir 
ordinaire, de ce qu'on apprend dans les classes; avoir de 
l'instruction, c'est savoir ce qu'il convient à tout homme 
bien élevé; en savoir plus, c'est avoir une instruction su- 
périeure, c'est avoir de la science. L'instruction differe de 
i'ducation en ce que celle-ci emporte l'idée d'un bon 
emploi, d'un bon usage de la première; on peut donc avoir 
de l'instruction et une mauvaise éducation, si le savoir 
n'est pas relevé par de bonnes manières, de belles laçons, 
par l'usage du monde. 
On a longtemps attribué à l'ignorance la plus grande 
part dans la statistique criminelle. On disait que l'instruc- 
tion devait prémunir le peuple contre le crime; et on cal- 
culait, comme on calcule encore, combien il y a annuelle- 
ment dïllettrés dans les accusés devant les tribunaux. Le 
gouvernement de Juillet a beaucoup fait pour l'instruction 
du peuple.: cependant, il n'y a pas moins de criminels; les 
accusations se sont peut-Cre un peu déplacées, certains 
crimes sont devenus moins ¢ommuns, d'autres plus fré- 
quents; mais les plus grds coupables ne manquent pas 
toujours d'instruction. Nëanmoins, l'instruction est un droit 
supérieur qui appartient à tout homme en société; le gon. 
• ernement doit la mettre aussi largement que possible ì la 
portée de tous, surtout lorsque la hase de ce gouvernement 
est le suffrage universel. Quel usage pourrait faire, en 
effet, de ses droit pulitiques un peuple d'imorants ? C'est 
hier ce qu'a compris ans doute le ministre de t'instruc- 
tion publique Iorsqu'il a déclaré, dans une circulaire, que le 
gouvernement de l'empereur ne craignait pas le progrès 
de l'instruction. L. LovvLr. 
INSTRUCTION, INSTRUCTIO CRIMINELLE. 
L'instruction d'une affaire eu matière criminelle est la pro- 
cídure que l'on suit pour la mettre en état d'tre jugée. 
C'est l'ensemble des principes et des règles établis par la loi 
sur la manière de poursuivre en justice les auteurs des alC 
lits pour l'application de la loi pénale. Un de nos codes 
porte le litre de Code d'Instruction criminelle ( voyez plus 
ioin).Des officiers de police j udiciaire sont institues 
pour constater les crimes et délits. Un j u ge d'i n s t r u c t i o n 
préside ensuite à l'instruction. Il peut agir aussi sur la 
plainte de la partie lésée. Il appelle en témoignage les per- 
sonnes qui lui sont indiquées comme ayant eu connaissance 
du fait dénoncé ou de ses circonstAnce.c. Il se transporte 
partout où est besoin pour s'assurer des faits. Suivant les 
cas, ildcerne des m a n d at s de comparution,de dp6t, d'a- 
mener ou d'arrtt; accorde, en se conformant aux lois, la li- 
berté provisoire ou sous caution; chaque semaine la cham- 
bre du conseil entend le rapport de l'élat des affaires; et 
quand la procédure est complète, elle déclare s'il ya lieu à 
poursuivre et devant quelle juridiction. Pour les contraven- 
tions et les délits, Pinstruction est finie, et l'action de la 
justice commence. Le prévenu n'a plus qu'à comparaltre 
devant le tribunal de simple police ou devant le tribuual de 
police correctionnelle. Si les juges on l'un d'eux trouvent 
que le fait inculpé estde natureà tre puni de peine afllic- 



426 
v et in farnantes, l'aitaire est ren voyée  la chambre des mises 
en accusation de la cour impériale, qui commence un nouvel 
examen ; eUe peut encore renvoyer le prévenu de l'accusa- 
tion; autrement, elle l'envoie devant la cour d'assises 
s'il s'agit d'un fait qualiflé crime, ou devant une autre juri- 
diction si le fait indiqué ne lui parait pas de la compétence 
de cette cour. L'instructionest ensuite continuée par qui de 
droit. On comprend alsément de quelle importance est la 
bonne direction de l'instruction pour la prompte découverte 
de la vérité. Les juges ne sauraient y apporter trop de fer« 
meté, de bienveillance, de justice et d'impartialité. 
En matiëre civile, Iorsqu'une affaire est assez compliquée 
pour ne pas para|tre susceptible d'Cre jugée sur plaidoirie 
ou dél/béré, le tribunal peut ordonner qu'el|e sera instruite 
par écrit pour en Cre fait rapport par un des juges nommé 
par le jugement. Les articles 05 et suivants du Code de Pro- 
cédure civile règ|ent de quelle muniCe doit avoir lieu cette 
sorte d'in«truction. L. LOUVET. 
INSTBUCTION CBIMINELLE (Code d'). Un ar- 
rëté du |7 germinal an ix avait nommé une commission 
chargée de presen|er un projet de Code crim|nel. Ce projet, 
aprës avoir été discuté au sein du Conseil d'Êtat, fut tout 
coup laissé de coté et repris ulement quatre ans après, 
le 8 janvier 1808 ; mais sa forme avait été modifiée : au lieu 
d'un code, on en fit deux : le C od e P é n a I et le Code d'11s- 
truction cri»,ielle. Par suite de la suppression du Tri- 
bunat, ce fut ,mue commission du Corps legilatifqui en reçut 
la communication. Il ne fut mis en activttéqu'après l'adop- 
tion du Code Peual, le t ' [anvier 1811. Il se compose de 
deux livres, precédës de dispositionsprélirainaires, relatives 
à l'exercice des actions publique et civile eu {;énéral, et 
contient 63 articles. Le premier livre traite de la police 
judiciaire, c'est--dire de la recherche et de la constatation 
des crimes, délits et contraventions, et des ol'dciers de po- 
lice qui |'exercent. Le second, intitulé : De la Justice, s'oc- 
cupe du mode de procéder devant les tribunaux correc- 
tionnels et de police et devant le cour d'assises, de l'exAeu- 
tion des j«gements criminels, des demandes en cassation, 
eu révision, en renvoi ou en règlement de ju3es ; de la pro- 
cédure en matière de faux et de contumace, des infractions 
commics par certains fonctionnaires ou contre leur autorité, 
des lépositions des princes et fonctionnaires, des prisons, 
maisons d'arrèt et de justice, des dëtentions illégales, de la 
réhabilitation et de la prescription. 
Plusieurs modilications ont ét apportées à quelques dis- 
positions du code d'Instruction crimineUe par la loi du 
mai t82t sur le jury, par la loi du 8 octobre 1830 sur les 
délits de la presse et les dclits politiques, par celle du t0 dé- 
cembre t830 sur les juges auditeurs, par celle du f mars 1831 
sur lescours d'assises, par celle du 8 avril 183| qui a régie- 
menté la procédure en matière de pree. La loi du 28 
av,'il 1832 a introduit dans ce Code des changements plus 
i«aportants. Les dispositions incorporées dans celles du Code 
ont ét substituées au texte primitii, dont elles ont ainsi 
modifié les articles 206, 339, 34.0, 341, 34,b, 3f7, 368, 372, 
399 et 619. De nouveaux changements ont été encore ap- 
portes à quelques-,ms de ses articles, notamment par loi du 
10 avril t83 sur les associations, par les trois lois du 9 sep- 
tcmhre t835, relatives aux crimes et délits de presse, aux 
cours d'assises, au vote du jury ; par la loi du 12 mai 1836, 
concernant le vote du jury au scrutin secret; par les décrets 
du 6 mars et du 18 avril t88, relatifs à la maorité du juo 
et à la réhabilitation, et qui sont aujourd'hui abrogés; pa 
le décret du 25 février 1852, portant que les délits poli- 
tiques et ceux commis par la voie de la presse seront dé- 
férés aux tribunaux oorrectionnels ; par le décret du t e mars 
1852, portant que les fonctions de juge d'instruction peuvent 
Cre emplies par des uges suppléants ; par ceux des 28 
mars 185, 17 janvier et  mars 1853, sur les commissa- 
riais de police; la loi actuelle du 9 et I0 juin 1853, sur le 
jury ; la loi du 3 juillet 1852, sur la réhahilitation des con- 
damnes :, la loi du 4, avril 1855, qui modifie l'article 9f sur la 

INSTIUCTION -- INSTIUCTION PUBLIQUE 

liberté provisoire, et les mandats de dépt et d'arrét, etc 
W.-A. Duc-r. 
INSTP, UCTION PUBLIQUE. Eliese définit d'abord 
par son .contraire, l'i,struction domestique, ensuite par 
son complment, I'#ducation. L'instruction domestique est 
une affaire'de famille, l'instruction publique une affaire d'Ê- 
tat. La famille a droit et obligation de f, tire instruire les 
membres qui la composent; l'Êtat a droit et obKgation de 
procurer l'instruction au peuple. L'un et l'autre, i'Êtat et la 
f.'.mille, sont également libres dans l'accomplissement de 
leur devoir : dans la maniëre dont ils dirigent soit l'ins- 
truction publique, soit l'instruction domestique, ils ne con- 
sultent l'un et l'autre, après les lois, que leur conscience 
seule. De l'inst ruction se distingue l'éd ucation.CeUe. 
ci a pour but de développer les facultés murales ; ceJle-l, 
pour objet principal de former et d'enrichir les facuitds 
tellectuelles. Cependant, l'ëducation et l'instruction se ren- 
contrent et se confondent souvent, comme l'instruction Ira- 
brique et l'instruction domestique se confondent et se ren- 
contrent. 
Pour former les moeurs, il faut donner des principes; or, 
les principes ne s'établissent que par l'inteUigence; l'instruc- 
tion concourt donc à l'éducation, comme l'êducation, par 
ses habitudes d'ordre, de régularité et de travail, concourt 
à l'instruction. Ceserait la perfection que de toujours donner 
l'une par l'autre au degré désirable; ce serait encore la per- 
fection que de réunir, soit sur l'instruction publique, soit 
sur lïnstruction particulière, tous les avantages de l'une et 
de l'autre. Mais la première de ces perfections est un idéal, 
la seconde une impossibilité. Les choses s'excluent; et puis- 
qu'il est absurde de demander ce qui s'exclut, il est absurde 
de pousser trop loin les exigences, soit à l'égard de Pins- 
tructinn publique, soit à l'égard de l'instruction domestique. 
Entre l'une et t'autre, aceompagnées chacune d'avantages et 
d'inconvénients qui leur sont propres, il faut opter, quand 
on peut opter. Pour l'État, il ne le peut pas. e devant exer- 
cer aucune action sur l'instruction domestique o et se trou- 
vaut obligé, pour sa conservation, d'exercer sur l'instruction 
nationale une influence prolonde, il est foreWd'etablir un 
enseignement public, saut à concéder l'enseignement parti- 
culier dans les limites et sous la surveillance de la loi. 
L'Êtat ne peut pas mg,ne se borner a cette action. Il doit 
chercher à en exercer une antre sur l'éducation: il doit 
donnerlui.mémele plus d'éducationpossibe, car les mœurs 
font les lois, et les lois l'Êtat. S'il est à peine nécessaire de 
lui recommander le soin de l'éducation publique, il est 
peine nécessaire aussi de songer à lui en disputer le mono- 
pole. La nature de« choses fait elle-mème le partageau degr 
convenable. Dans la formation oes mœurs entrent  la fois 
l'élëment politique et Pélement religieux. Si l'Êtat dirige le 
premier, le second est du domaine de la conscience, de la 
famille, de l'Église. Comme l'Ëtat peut intervenir contre la 
puissance religieuse, dans tous les cas où elle devient ex- 
cl,tsive, prépondérante et despotique, l'Ëglise, la famille et la 
conscience, représentées par l'opinion publique, sont dans 
le cas d'intervenir contre le despotisme, la prépondérance et 
l'esprit exclusif de FÊtat. Donner une formule pour assurer 
l'intervention ordinaire et légitime de l'une et l'autre des 
deux puissances est chose impossible; nulle formule ne 
su re ni l'action politique ni l'action religieuse. La raison seule 
est cette mesure. Encore a-t-elle quelquefois peine à se faire 
écouter, méme quand elle a parlé par la loi. Lorsque dans 
i le sein d'une nation dominent les idées religieuses, ces idée 
dominent surtout dans ceux qui manient les intelligences des 
peuples,dans les interprëtes de la pensée nationale, dans 
I écrivains, les orateurs, les personues chargées de l'en- 
seiguement. Quand, au contraire, ce sont les intérêts poli. 
tiques et les questions sociales qui préoc.cupent les esprits, 
c'est cet ordre d'idées et de tendances qul envahit l'instruc- 
tion nationale. Les doctrines purement murales et philoso- 
phiques ont essayé quelquefois de se mettre en place des 
doctrine» relieuses et politiques; elles ont pu le diriex 



INSTRUCTION PUBLIQUE 
ou les modifier, elles n'ont pu les supplanter. Elles ne les 
tupplanteront jamais. Leur mission n'est pas si haute, et au 
mime degr qu'elles auront la prétention de régner, la reli- 
gion et la politique auront celle de les contenir. 
il est indispensable que. dans un État bien organisé, et dans 
une situation normale de la société, les quatre éléments, 
religieux, politique, moral et phflosophique, soient en jeu, 
en action libre et en influence réelle, et il est difficile d'as- 
surer  chacun de ce« élémen, sinon la ldace qu'il relame, 
«lu moins celle qui lui convient. Il est pourtant certain que 
dans leur éqttilibre est le secret du plus baut degré de gloire, 
de prospérité et de puissance d'un peuple. Toute prépondé- 
rancede l'un de ces élérnentssur les autres est une usurpation, 
toute usurpation a pour effet une souffrance qui y correspond, 
et toutesouffranceréclame une réaction. Or, les usurpations 
et les éactions colorent, altèrent, alfaiblissent toujours les 
Cué_es publiques. La science demande par conséquent un culte 
pur, dont ellesoit elle-mme l'objet premier. Pour qu'ellesoit 
forte, grande et utile, il fant la laisser libre. De sa nature, 
elle n'a ni nos intéréts ni nos passions; mais elle se laisse 
facilement asservir et corrompre. Elle se fait sophiste, adu- 
latrice, courtisane, fanatique dès qu'on la subjugue ou l'en- 
ivre. Elle s'altère toutes les fois qu'on l'abaisse à des ser- 
vices qui ne sont pas dans sa mission naturelle. Sa mis- 
sion naturelle est d'aller de fait en fait, d'idée en idée, de 
découverte en découverte, de progrès en progrès jusqu'à la 
connaissance absolue, sans égard pour les préventions des 
partisou les opinions du jour. 8on affaire est d'Cre savante. 
Cependant à cette hauteurabstraite, elle ne saurait remplir 
toute sa mission. L'Êtat a besoin d'elle pour ses nécessités, 
et tout en la laissant libre dans ses investigations idéales, il 
a droit de lui demander des services réels ; il a mme droit 
d'exiger qu'elle se fasse populaire, mais il ne doit jamais 
oublier ce qu'elle est de sa nature. De sa nature, elle est la 
plus haute affaire de l'intelligence et l'affaire des intelligences 
les plus élevées, des existences les plus libres, les moins as. 
sujetties aux nécessités et aux travaux vulgaires, aux mi- 
nimes intérts de la vie animale. Elle ne peut donc jamais 
Cre l'affaire de tout le monde. Vouloir élever pour elle toute 
la jeunesse, ce serait vouloir une absurdité, la ruine d'un 
pays. Et non-seulement l'État ne peut jamais concevoir une 
pareille chimère, il est obligé de s'oppuser tout ce qui ten- 
drait à en approcher ; car il est chargé de maintenir l'lui- 
libre autre les professions ¢jui fondent la prospérité publique. 
Il doit, pour maintenir cet équilibre, procurer à chacun ce 
qui lui est nécessaire, taire instruire gratuitement, dans ce 
qu'il est indispensable qu'ils sachant, ceux qui sont inca- 
pables de le payer. Mais là s'arrétent toutes ses obligations, 
non à l'Agaré de Ini-mme et à l'égard de la science, mais 
à l'Caré du peuple. A l'Caré de la science et de lui-mme, 
iL doit faire quelque chose de plus, récompenser dans leurs 
enfants cenx dont il n'a pu payer suffisamment les services, 
et élever pour la science ceux que la nature a faits pour 
elle, mais que la fortu a pu négliger. 
On le voit, l'instruction publique est chargée de rsoudre 
les questions les plus élevées et les plus délicates. La liberté 
de l'enseignement était inscrite en principe dans la charte 
de 1830, et appliquée à l'instruction primaire dans la loi de 
t33 ; elle a été successivement appliquée aux autres degrés 
de l'instiuction publique. Elle a surtJmt inspiré la loi du 15 
mars 1850, votée par l'Assemblée législative, mais que des 
décrets et la loi du 14 juin 185tt ont un peu modifiée. 
Dans !es pays avanes, l'instruction publique forme main- 
tenant une des principales hrencbes de l'administration, et 
la France a incontestablement la gloire d'offrir l'organisation 
la plus complète et la plus régulière de ce service. En An- 
gleterre, les divers degrés de l'enseignement manquent 
d'harmonie et de coordination. L'Allemagne, malgré l'ex- 
cellence d," quelques-unes de ses écoles et de ses métbodes, 
est encore lu'ivée de plusieurs de nos plus fortes institu- 
tions, surtout de celles qui sont affectées chez nous aux 
Cudes élevées et aux sciences spéciales. L'organisation des 

427 
Cudes n'est complète qu'enFrance. A peine ba,chée, sur 
le rapport de Talleyrand, par la révolution de t789, 
puissamment organisée sur les types de l'ancienne univer- 
sitë, par le génie qui créa l'empire, et qui la confia à Fon- 
t a n es, essentiellement modifiée, d'après les idées de C u - 
v i e r, de R o  e r- C o II a r d, de l'évque d'Hermopolis et de 
M. de Vatimesnil sous la Restauration, savamment perfec- 
tionnée, depuis 1830, par M. G u i z o t, aidé d'anciens collè. 
gnes, cette organisation a un code spécial, qui se compose 
de décreL«, de lois, d'ordonnances, de rëglements et de 
décisions ministérielies. 
L'instruction publique se distingue en France en trois 
grandes branches, l'enseignement, l'inspection, l'admi- 
istration. 
L'enseignement a trois derés : il est primaire, se- 
condaire, ou supérieur. L'enseignement primairesedivise lui- 
meme en deux degrés : il est élémentaire, ou supérieur. Élé- 
mentaire, il embrasse ce qu'il est nécessaire de savoir dans 
toutes les classes de la société, la lecture, l'écriture, le 
calcul., la morale religieuse. Les mmes choses sont en- 
seignes aux filles qu'anx fiarçons. Supérieur, l'enseigne- 
ment primaire comprend les connaissances nécessaires au 
bourgeois, à l'artisan et  l'ouvrier qui se livre à l'indus- 
trie et /t la culture moyenne, c'est-à-dire toutes le« notions 
usuelles sur les sciences mathématiques et physiques. A 
peine apprécié par l'opinion, cet enseignement supérieur, 
si nécessaire, n'est pas encore organisé pour les jeunes 
filles. Mais déj, pour assurer l'introduction géneraie de 
l'un et l'autre degré de l'enseignement élémentaire, pour 
former les malt«es qui doivent donner les laçons, de nom- 
brenses écolesnormales sont établies, soit par département, 
soit par académie, et. dans chacune de ces écoles ou 
enseigne à la fois les connaissances qu'il s'agit de propa- 
ger et les méthodes qu'il convient de suivre. L'enseigne- 
ment secondaire se disline également en deux degrés, dont 
l'un procure l'instruction générale, celle qui e.t nécessaire 
pour toutes les professions lettrées, l'autre l'instruction spé- 
ciale de chacune de ces carrières. Les I y c é e s et c o I I é g e s 
communaux, les uns entretenus par PÊtat, les autres par les 
communes; les institutions et les pensions, les unes 
autorisées/t donner une partie de l'enseignement, les autres 
simplement chargées de préparer et de répter les cours des 
colléges, sont des établissements consacrés à l'instruction gé- 
nérale, aux Cuées de liftCature ancienne et moderne, d'his- 
toire, d'histoire naturelle, de mathematiques, de physique, 
de ebimie, de philosophie. Les écoles f o r e s t i è r e, m i I i- 
f a i r e, de m a r i n e, donnent et complètent l'instruction 
spéciale. Une instruction analogue à celle qui procure des 
matiras à l'instruction primaire, une école normale, 
distinguée en deux sections, celle des lettres et celle des 
scietces, est ouverte à Paris sous la smweillance directe de 
la haute administration, et procure des professeurs à l'in- 
struction secondaire. A ce degré d'instruction manquent 
encore quelques institutions et quelques écoles spéciales, 
une école normale pour les personnes cbargées de l'ensei- 
gnement dans les institutions et dans les pensions de jeunes 
filles, une école publique des manufactures et des arts, une 
école de commerce, une école d'agriculture et une école d'ad- 
ministration; mais ces établissements doivent etre ajonrués 
jusqu'à ce que le temps ait fait mieux voir dans quel degrê 
il est convenable que l'Etat y iutervienne. L'enseignement 
supérieur se parta également entre deux sortes d'insti- 
[ tutions. Ces ont les fac u I tés des lettres, des sciences, 
de droit et de thêologie, dont les cours sont obligatoires 
pour ceux qui aspirent aux grades académiques; puis les 
I établissements spéciaux, tels que le C o I I é g e d e F r a n c e, 
la Bibliothèque impériale et le Museum d'Histoire 
naturelle dont les leçous ne sont obligatoires punr 
] patronne. L'École Polytechnique est une instilution 
spéciame vour les haules études que demandent les diverses 
branches du service public. 
A l ensegnem .ni de tous les degrs se rattachent de 
5. 



puissanb moyens d'ids{ruc{ion, des cabinets de physique, 
des laboratoires de chimie, des musées d'histoire naturelle, 
des bibliothèques, des observatoires, des jardins botani- 
ques, etc. 
L'inspection se divise en trois degré. Elle est pri- 
maire on départementale; et à ce degré elle embrasse toutes 
les écoles primaire, élémenlaires, supérieures et norma- 
les. Elle est secondaire ou académique, et à ce degré elle 
embrasse tous les calices communaux, toutes les instflu- 
Ùons et les pensions. Elle est supérieure ou générale, et à 
ce degré elle embrasse tous les établissements d'instruc- 
Ùon publique, à l'exception des écoles spéciales. 
[ L'administration de lïnstruction publique, telle qu'elle 
a été organisée par les dernières lois de 1850 et 1854, pré- 
sente les degrés suivants : le ministre, en sa double qualité 
de secrétaire d'État et de grand-martre de l'univers[tC le 
conseil supérieur de l'instruction publique, un 
recteur à la téle de chacune des seize académies. 11 s'ap- 
puie sur des inspecteurs d'Académie, qui sont ses lieute- 
nants dans chacune des subdivisions de son ressort, et sur 
un conseil académique, o/ domine l'élément universitaire. 
Le gouvernement de l'instruction primaire appartient dans 
chaque département au préfet; mais à cété se place un 
inspecteur d'académie, qui intervient d'une maniére suivie 
dans tontes les affaires de cet enseignement, et qui est le 
délensenr né d'un nombreux personnel dïnstiluteurs choisis 
et surveillés par ses soin% en méme temps qu'il est le 
gardien vigilant des rnéthodes d'enseignement, dont il ré- 
pond devant le recteur. Un conseil départemenlal, q,i ne 
défend en aucune façon du conseil acadëmique, et qui, par 
 nature et sa composition, en diffère complétemenl, con- 
nalt en premier lien de foules les affaires de l'instruction 
primaire du departement, en second lieu des affaires disei- 
plinaires el contentienses, relatives aux établissements par- 
ticuliers d'instruction secondaire : àce double point de vue, 
ses attributions sont exactement celles du conseil académique 
institué par la loi de 1850, dans chaque département. L'é- 
piscopat, le clergé, le« cuites diidents, la magistrature, 
les membres du conseil général y ont le méme acc6s, la 
mme atorité. Le conseil départemental désigne n ou 
plusieurs ddlués, résidant dans chaque canton, pour sur- 
veiller les écoles publiques et libres du canton. Le maire, 
le cré, le pasteur ou le délég,é «lu culte israelite, chacun 
pour les élèves de le,r culte, surveillent la direction morale 
de Penseignement primaire; dans les comnmnes de plm de 
deux mille mes, un ou plusieurs habitants de la com- 
mune sont en outre délégués par le conseil départemental 
pour le méme objet. ] 
Nous l'avons dit, il n'est pas de pays au monde qui pos- 
sède pour l'enseignement public des institotions plus com- 
plètes, plus homogCes que celles de la France. La Grâce 
n'a jamais eu d'enseignement complet. Plusieurs des chaires 
les plus importantes qu'a possedées Athènes n'ont été ins- 
tituées que sous la domination romaine. Borne elle-mme 
n'a jamais eu de véritable instruction publique. Ele a tou. 
jours négligé le peuple. L'Égypte grecque a fondé l'école 
d'Ale.'andrie ; mai cet éiahlissement offrirait plus de res- 
semblance avec l'Institut qu'avec l'Université: Les 
Arabes ont fait plus qae les Grecs et les Romains. Leurs 
croies ont été les types des universités du moyen Sge, ins- 
titutions trop spéciales, qu'on divisa, il est vrai, en fa. 
cultés et en colléges, mais auxquelles on négligea de don- 
ner la base qui seule pouvait les consolider, l'école primaire. 
Les principaux ouvrages sur l'instruction publique qui 
aient paru depuis la fin du dernier siècle sont de Talleyrand, 
Cuvier, de MM. Guizot, Cousin, Rendu, Saint-Marc Girar- 
din, aville, Thierch, $chxvartz, Niemeyer, etc. 
Mxl'rEl, ara:[en in«pec!cur génëral des études. 
INSTRUCTION PUBLIQUE (Mi,istre de I') ET 
DES CULTES. Ce ministère est composé de deux adminis- 
traitons : I  celle de l'instruction publique, 2 ° celle des 
t ulles. 

ISTBUCTION PUBLIQUE 
L'administration de l'instruction publique forme troia di- 
visions. La première s'occupede l°administration acadénique 
et de l'instruction supérieure; la seconde s°ocupe de Pins- 
truction secondaire ; la 3  de l'instruction primaire. Chaque 
division est séparée en bureaux du personnel et du matériel. 
L'adndnistration des cuites se compose du cabinet du 
directeur général, et de deux divisions pour le cult catho- 
lique, avec une section pour les cuites non catholiques. Elle 
s'occupe du personnel du clergé; des promotions au cardi- 
nalat, / l'archiëpiscopat, à l'épiscopat et au canon[cal, d« 
l'agrément du chef de l'ltat aux promotions de surC; des 
nominations/ diverses bouroes; des publications des b-lles, 
brefs et rescrits de la cour de Borne, des appels comme 
d'abus au conseil d'État; des plaintes contre les ecclésias- 
tiques, et de l'organisation des conseils de fabrique; des 
traitements, secours et pensions aux ecclésiastiques; du con- 
tentieux des fabriques ; des autorisations de congrégations, 
des acceptations de legs; de l'administration temporelle des 
établisements diocésains, de la construction et réparation 
des cathédrales, archevehës, évchés et séminaires, etc., etc. 
Le cabinet du ministre ou secrétariat se composede pin- 
sieurs bureaux. C'est là que ressortissent les souscriptions, 
missions, travaux historiques, les établissemertts scientifiques 
et litteraires. Une autre division est spécialement chargée 
de la comptabilité centrale de l'instruction publique et des 
cuites. 
Parmi les établissement. et institutions qtd hors de Vins- 
lruction publique et des cuites ressortissent à ce ministëre, 
nous citerons les comités historiques, Fécale française d'A. 
thènes, la commission des arts et éd[rires religieux, I'1 n.s- 
titutde France, l'Académie de Médecine, le Col- 
Iëge de France, le Muséum d'Histoire Natu- 
relle, le Bureau desLongitudes, les Observa- 
t o i r e s, l'École des langues or[enraies vivantes, l'École des 
Charte% les sociétés scientifiques et littéraires, lescongrës 
français et étrangers, les Écoles d'Accouchement, les B i b I i o - 
t h è q u es p, bliques de Paris et des départements, etc., etc. 
L'administration de l'instr,ction publique forme un mi- 
nistère spécial depuis 1828. D'abord elle avait té dans les 
attributions«lu ministre de I' irtt é r i e rt r, et dirigée par F o n- 
tartes, puis par Royer-Collard. En 182 elle avait été 
réunie aux affaires ecclésiastiques confiées à l'évdque d'Her- 
mopolis, Frayssinous. En ! 828 elle forma un ministreà part, 
confié à M. de Vatimesnil, avec 1,S25,000 fr. de dotation. 
L'année suivante elle était rénnie aux affaires ecclésiastiques, 
dans les mains de M. G, e r n o n-R a n v i ! I e. La révolution 
de Juillet donna une grande force d'impulsion à ce ministère, 
qui fut successivement confié à MM. de B r o g lie, G u iz o t, 
Villemain, Cousin, de Salvandy et autres. Les cultesen furent 
plusieurs lois séparés et réunis à la .ustice. A la révolution 
de Fëvrier, M. H. Carnot en fut le directeur; et l'on sait 
quel bruit firent ses circula[res aux instituteurs. Il y eut une 
vive réaction, et bient6t, sous le nom de liberté de l'ensei- 
gnement, on introduisit l'influence suprême d, clergé dans 
l'instruction publiqe. Sous le gouvernement impérial, les 
méthodes d'enseignement furent modifiées; l'autorité du 
chef de |'ltat reprit p|us de puissance. En 1853 le budget 
du ministère de l'instruction publique se répartissait ainsi : 
568,350 ff. pour l'administration centrale ; 1,23,010 ff. pour 
le conseil supérieur, les services généraux, l'École Normale 
et l'administration académique ; 2,786,726 l't. pour l'ensei- 
gnement supérieur ; 2,457,20O fr. pour l'instruction con- 
da[re ; 11,576,000 fr. pour l'instruction primaire; 586,300 fr. 
pour l'Institut de France; 180,000 ff. pour le Collége de 
France; 69,780 ff. pour le Muséum d'Histoire Ntn- 
relie ; 121,760 ff. pour les établissements astronomiques; 
338,287 ff. pour la Bibliothèque impériale ; t97,t,00 ff. pour 
les autres bibliotldques publiques ; 43,700 fr. pour l'Aca- 
démie de Médecine; 35,/00 ff. pour l'lcole des Charles; 
55,800 ff. pour lesEcoles deLanguesorientales ; 120,000 ff. 
pour des souscriptions; tsO,OO0 fr. pour des secours et en. 
couragements a,x gens de lettres; 30,000 fr. pour les soci. 



ISTRUCTION PUBLIQUE -- INSTIUMEI'T$ 

tés savanes; 65,003 fr. pour des missions et lectures du 
soir ; 120,000 fr. pour des publication inédiles; 750,000 ff. 
pour subvention aux caisses de rezraite; 18,000 fr. pour dé- 
penses de l'inslruction publique en Algérie; enfin, 37,500 ff. 
pour slabvention extraordinaire à la ville de Benues. Le 
budget de l'administration centrale des cuites montait 
262,608 ff.; les trailements et dépenses concernant les car- 
dinaux, archevques et éVlUeS, à 1,369,000 ff. ; les traite- 
ments et indemnités des membres des chapitres et du clergé 
paroissial, à 33,309,850 ff. ; le cbapilre de Saint-Dents, à 
97,000 ff.; les bourses des séminaires, à t,017,000 ff.; les 
autres dépenses du culte catl,otique,  6,135,500 fr.; les dé- 
penses du personnel des cuites proteslants, à 1,t95,550 ff.; 
le matériel des ratines cuites, à 84,000 fr.; les frais d'admi- 
nistration do directoire génëral de la confession d'Augsbourg, 
à 25,000 ff.; les dépenses du culte israélite, à 154,400 ff.; 
enfin, les dépenses des culles en Algérie s'Cevaient à 544, t 00 fr. 
L. LOuvLr. 
INSTRUCTION PUBLIQUE (Conseil impérial 
del'). Voye. COSE'L suBw n LINSTRUCTION PUBLIQUE. 
INSTRUCTIONS. Ce mot s'entend quelquefois des 
ordres, des explications, des avis qu'une personne doune à 
nne autre pour la conduite de quelque alfaire ou de quelque 
entreprise. Dans la diplomatie, il se dit surtout des expli- 
cations écrites ou verbales qu'un prince on un guuverne- 
menl donne à son ambassadeur, à son envoyé, à SOll délgué 
sur la manière de se conduire dans la mission dont il est 
chargé. Ces inslructions peuvent ttre rédigées en forme de 
rescrit, de mémoire ou de lettre. Elles contiennent l'histo- 
rique et l'exposé de l'état actuel des relations des deux 
gouvernemeuts, et l'on y trace la marche à suivre pour 
coutinuer, étendre, modifier, interrompre ou faire cesser ces 
relations. Ce sont là les instructions gnrales, nom sous 
lequel on les distingue d intruclions sp&iales, que l'on 
expédie pour quelque affaire déterminée ou dans certaines 
circonstances, et des ddpêches ordinaires, qui ne sont que 
des instructions particufières coutinuelles. L. Loueur. 
INSTRUMENTALE (Musique). Voye - llVSlQV. 
INSTRUMENTATION. C'est au propre, et dans 
l'acception la plus générale du mot, l'art d'exprimer la mu- 
sique par des inslruments; dans uue acception moins élen- 
due, c'est l'art de distribuer dans une partition les différents 
instruments qui entrent dans la composition d'un orchestre 
de manière à produire toutes sortes d'effets, soit par la dou- 
ceur des timbres et la variëlé des détails, soit par la force 
et.l'énergie des masses. Dans ce sens, le mot istrume- 
talion est de création moderne. Avant Hoendel, Mozart et 
Haydn, les compositeurs se bornaient dans leurs accompa- 
gnements à soutenir les voix ; d'ailleurs, le nombre des ins- 
truments ¢,ait trës-limité ; la musique inslrumentale som- 
meillait dansl'enfance, état de choses dU en grande parlieà 
l'imperfection des instruments en génral et des instruments 
à vent en particulier, dont plusieurs, qui sont aujourd'hui 
d'un usage universel, n'existaient pas encore. Haydn, le 
père de la masique instrumentale, et Mozart, le créateur 
de l'accompagnement dramatique, furent les premiers qui 
surent tirer parti de l'istrumetatio, celui-là dans ses 
belles sympbonies, celui-ci dans ses opéras. « Les accom- 
paguements d'une musique bien faite, dit M. Ftis, ne se bor- 
nent point à soutenir le chant par une harmonie plaquée; 
souvent on y remarque un ou deux desseins qui semblent 
au premier abord devoir contrarier la mélodie, mais qui 
dans la réalité concourent à former avec elle un tout plus 
ou moins satisfaisant. » 
Une bonne instrumentation exige bien des conditions du 
compositeur, qui prévoit, par la seule puissance de ses fa- 
cultés intellectuelles, l'effetde son orchestre, comme si cet 
orcbestre se faisait réellement entendre dans l'instant 
l'artiste se livre à ses inspirations. Il doit posséder, indépen. 
damment de ses connaissances approfondies en harmonie, 
la connaissance non moins indipensable de tous les instru- 
ments qui composant un orchestre, savoir leur étendue res- 

429 
pective, leurs timbres et leurs dilférentes qualités de son, 
connaltre les bonnes et les mauvaises notes de chacun; 
et l'effet qui peut résuller de leurs diverses combinaisons. 
Il faut de la variété en toutes choses et surtout en mu- 
sique. Celle qui peut résuller d'une sage et ingénieuse instru- 
mentation est infinie. Le grand nombre d'instruments que 
nous possédonsaujourd'hui, et quipenvent tons sans excep- 
tion trouver leur place dans un orchestre, ressource im- 
mense, qui manquait en partie  nos prdécesseors, doit con- 
tribuer nécessairement à la création d'une infinité d'effets 
neufs et pnissanls. Mais comme l'homme abuse de tout, il 
arrive quelquefois  nos'composileurs modernes d'employer 
cette profusion d'effets sans intelligence et sans discerne- 
ment. Souvent, il est vrai, tout ce tapage ne rt qu'à dé- 
guiser la pauvreté des idées du compositeur. Ch. Becn. 
INSTRUMENTER, terme de pratique qui se rapporte 
à tout acle judiciaire ou extra-judiciaire fait par le ministère 
d'b uissi er s, lesquels sont considérés comme les inMru- 
ments dela loi. 
INSTRUMENTi (de i, dans, et struere, cons- 
truire). Ce mot désigne une foule d'objels qui souvent n'ont 
aucun rapport entre eux. En général, un instrument est une 
sor{e de machine ou d'apparei! dont on s'aide pour exé- 
cuter un morceau de musique, tracer des figures, calculer 
les distances, les mouvemenls d'an astre, etc., etc. 
Les instruments de musique sont fort nombreux, et 
tous les jours on en compose de nouveaux. Tous ont pour 
objet de mettre l'air en mouvement pour le faire vibrer. On 
peut les diviser en deux classes principales : les instruments 
à vent et les instrume»ts à cordes. 11 y a quatre ou cinq 
sortes d'inslruments à vent : I ° ceu qui se composent de 
simples tuyaux, dans lesquels on souffle de l'air : tels sont 
lafl0 te dite de Pa ou syrige, la flfile traver.ière, etc.; 
2 ° les instruments dont l'embouchure se place ordiuairement 
entre les lèvres, et qui portent une languette contre laqneUe 
l'air va frapper et se diviser : de ce genre sont, le f I a g e o I e t, 
es tuyaux de I' o r g u e, dits tuyaux à bouche ; 3 ° les ins- 
truments dans lesquelsl'air est mis en mouvement par une 
languette élastique et vibrante, qulon appelle l'a  c h e: 
les clarinettes, leshautbois, tous les tuyaux dol'or- 
gue dits à anche, sont de cette espèce ; 4 ° les instruments 
qui, n'ayant ni anches ni languettes, reçoivenl l'airdont les 
vibrations lui sont imprimes par la bouche, les lèvres du 
musicien:telssontlescor sde chasse, les trom perles, etc. 
Parmi ces instruminls, il y en a dont les sons sont mo- 
difiés par la bouche de celui qui en joue, la trompette, par 
exemple; d'a,zlres sont percés de trous que le musicien ou- 
vre et ferme suivant qu'il veut obtenir des sons plus graves 
ou plus aigus : tels sont le serpent, l'ophicléide, le 
trombone, le cornetà pistons, les instruments de 
Sax, e[c. Les instruments  cordes sont aussi fort nombreux 
et très-variés; on peut les classer ainsi qu'il suit : I ° ceux 
que lion tait résonner en pinçantleurs cordes avecles doigts : 
la lyre, la harpe, la guitare, sont de cette espècë; 
2 o ceux dont on joue en frottant leurs cordes au moyen 
d'une roue, d'un archet, etc. : la vielle, leviolon, 
rendent des sons par ce moyen ; l'h armo ni c a, dont on 
joue eu frottant avec les doigts les verres qui le composent, 
peut tire en quelque sorte rangé dans la classe des instru- 
ments à archet; 3 ° les instruments de percussion, ou bien 
ceux dont on lait vibrer les cordes en frappant dessus avec 
des baguettes que l'on tient à la main, ou de petits mail. 
lets mcaniques : le tympanon, le piano, sont de cette 
espèce. On peut, par analogie, considérer comme apparte- 
nant à la mme classe les carillons, les cymbales, 
le tam-tam, et peut-être mme les tambours. 
Instruments de mathématiques. 11 ) en a de deux 
sortes : t ° ceux dont on fait usage dans le cabinet, pour 
tracer des figures, des plans : ce sont des règles, des luer- 
res en bois ou en cuivre, divers compas, dont un dit de r- 
ductio et un autre de proportioç des échelles, des r ap- 
p o r t e u r s; 2 ° les intrun:ents qui erveut à oprex sur le 



4au ISTRUMETS 
terrain, soit pour lever la carte d'une provinoe niveler une 
hauteur, faire le plan d'une propriété agricole. Les princi- 
paux de ces instruments sont des règles, des chalnes, pour 
mesurer des Iongueurs; la planchette, pour tracer dt- 
reetement sur le papier in figure d'un champ, d'un bois; 
l'binette dite d'arpenteur, la boussole, le grapho- 
mëtre, le cercle répétiteur, etc., pour tracer les lignes et 
mesurer des angles sorte terrain; les niveaux  fil de 
plomb, d'eau, à bulle d'air, servent à mesurer leshauteura 
des collines, les ondulations d'un terrain, etc.; e.n_fin, on a 
des instruments qui donnent le degré de pente d une mon- 
tagne, etc., etc. 
Instruments de physique. Les expériences nombreuses 
et souvent nouvelles que sont obligés de faire ceux qui 
cultivent cette belle science, les ont forcés à multiplier in- 
dfiniment, pour ainsi dire, les instruments dont ils s'ai- 
dent,dans leurs opérations. Nous ne pouvons donc signaler 
/ci que les principaux, qui sont des balances d'une ex- 
frime seusihilité, des I h e r m o m è ! r e s pour mesurer les di- 
vers degrés de chaleur; le b a r o mètre, qui indique le poids 
de l'atmosphère; le calorimètre, an moyen dvquel on 
évalue la capacité relative des corps pour le calorique ; 
l'appareil dit improprement machine p n e u m a t i q u e, 
dont on fait usage pour extraire l'air contenu dans une ca- 
pacité herméliquement fermée ; la machine élect rique, 
avec laquelle on fait une foule d'expériences sur le fluide 
qui produit la foudre, etc. ; ]'admirable pile de Yolta, au 
moyen de laquelle on excite l'éleetricité gaivanique. Des 
verres taills diversement pour décomposer la lumiëre, 
étudier sa marche, le microscope, qui grossit prodi- 
gieusemeut les images des objets, font partie d'un cabinet 
de physique bien composé. 
Instruments d'astronomie. Les principaux sont le quart 
de cercle mural, ainsi appelé parce qu'en effet il est 
fixé sur une construction en pierre de taille : il est divisé 
en degrés, minutes, etc., et sert  mesurer la graodeur des 
angles qu'un astre fait avec l'horizon, etc. ; l'équator,al, 
bel instrument, dont Ptolémée avait pressent l'utilité : il 
est fort commode pour suivre un astre dans sa course. 
Celui de l'observatoire de Paris et accompagné d'un mou- 
vement d'horlogerie qui fait tourner une lunette de telle 
sorte qu'il suffit à l'astronome de la pointer vers un astre 
pour qu'eUe en suive la marche avec autant de précision 
que pourrait le faire l'astronome lui-mime. Un bon obser- 
vatoire contient des horloges bien réglées, des lunettes, 
des téle s c o pe s, des boussoles, un appareil pour mesurer 
la quantité de pluie qui tombe dans l'année, etc., etc. 
Instruments de chirurgie. Parmi les nombreux ins- 
truments dont s'aident les personnes qui étudient la cons- 
titution du corps h,amain, ou qui s'occupent des mowenade 
remédier aux maladies auxquelles il est sujet, nous n'eu 
citerons que quelques-uns : le plus ingénienx est sans doute 
celui au moyen duquel on brise la pierre dans la vessie 
mime; quelques forceps, dont ou fait usage dana les ac- 
couchements laborieux, etc. En général, les instruments 
de chirurgie sont tranchants : aussi sont-ils fabriqués par 
des couteliers. 
instruments aratoires. Voye: om (Instru- 
ments). 
Nous ne pousserons pas plus loin cette notice sur les ins- 
truments; car elle serait interminable. Chaque profession a 
les siens : une aiguille à coudre, tne navette, sont de vrais 
inslruments. Cez plusieurs artisans, les instruments pren- 
nent le nom d'o uti fs. T£sslmn. 
INSUBOP, D|NATION » terme milliaire, snonyme 
d'indis¢ipline, de dchéissance et de désordre. « La d i s - 
ci pline étant la viede l'armée, a dit le général Le couru- 
fier, dans son Dictionnaire militaire, on ne peut rprimer 
..... ' *nte esnèce d'isubordination Ce qui 
.'est dans leshommes de létat cwt que ,e,e ru ¢ ne 
leur libre arbitre devient dans l'Cat militaire un acte d'in- 
unordinatiou. Un bourgeois reste dans son lit le matin si 

es affaires lui permettent un peu de repos ; le soldat est 
turcWde se lever à l'heure dite : ne pas sortir du lit serait 
une désobéissance coupable. » Il est donc nbsaire que le 
soldat s'habitue au frein de la discipline, car c'est par elle 
qu'il obtient la considératiun dont il a besoin aux jenx de 
ses chefs et de ses camarades, aux yeux surtout de ses 
concitoyens, qui la rclament dana l'lutCut du pays et de la 
gloire nationale. C'est particulièrement devant l'ennemi qu'il 
doit à ses chefs nne obéissance entière : là un acte d'insu- 
bordination peut avoir des consquences graves ; il peut 
entralner la perte d'une bataille, occasionner l'abandon 
d'un pays et compromettre la sOreté d'nne armée ou d'une 
place de guerre. La subordination est graduelle : le soldat 
doit obéissance à son caporal, le caporal à son sergent; 
celui-ci au sergent-major, et ainsi de suite, en montant I'- 
chelle de la hiérarcllie militaire, jusqu'à la dignité de mar6- 
chai de France. Le code militaire, portant application des 
peines contre la discipline, a sagement calculé tous les de- 
grs de culpabilité en fait d'insubordination : sévèrement 
punie dans l'lutCieur, elle emporte la peine capitale devant 
l'ennemi. Les militaires enclins à ce délit sont jugéspar 
des conseils de discipline; on les envoie lorsque le cas 
n'est pas assez grave pour tre porté devant un conseil de 
guerre, dans les compagnies de discipline, et ils y achèvent 
leur temps de service, si dans l'intervalle ils ne changent 
pas de conduite. Une amélioration sensible leur rouvre, au 
contraire, les rangs de I'armée. S,cxeo. 
INSUFFLATION (du latin in, dans, et su/tiare, 
sufller), action de souifler, d'introduire à l'aide du souffle 
un gaz, une vapeur dans quelque cavité du corps, comme 
Iorsqu'on insuffle de l'air dans la bouche d'une personne 
asphyxiée. 
INSULAIRE (en latin insularis, d'insula, lie), babi- 
tant d'une Ils. On a dit que la barbarie était plus tenace 
dans les ties que sur les continents, et Raynal n'a pas 
craint d'exprimer le soupçon qu'on pourrait en trouver des 
traces dans la Grande-Bretagne mme: c'est pousser nn peu 
trop loin l'application d'une véritë qui us sera pas contes* 
tée. ]! est certain que rétat d'isolement est eu généra] une 
cause de permanence, en ce qu'il éloigne plusieurs causes 
de changement. Mais les communications enlre la Grande- 
Bretsgne et le continent européen ont été si importa,tas et 
si multipliées, que cette lle peut ttre considérée comme te- 
nant encore à la terre ferme. On admet sans difficult que 
la nationalit doit ëtre plus fortement empreinte dans le 
caractère et les mœurs des insuiaires que chez Ies peuples 
du continent; on convient mme que l'esprit national, quoi. 
qu'il ne soit pas autre chose qu'un esprit de corporation, 
peut inspirer des rsolnfions fortes et généreuses, opérer 
quelques-uns des effets du patriotisme. Si e popuiation 
confinée dans une fie obtient un jour le bonheur d'y trouver 
une patrie, aucune force ennemie ne pourra la vaincre; elle 
prira tout entière, ou Iriompbera des attaques les plus 
opiniâtres ; les nobles exemples de Carthage et de 
mance seront aux moins égalés. Nous devons dire cepen- 
dant que, suivant une opinion asse géoératemeut rpandue, 
les tles sont moins favorables à la liberté que les conUnents. 
S'il était vrai que par rapport à l'Cai moral de l'homme 
les insulaires sont moins favorisés que les peuples des con- 
tinents, ne trouveraient-ils pas au moins quelque compen- 
sation dans le partage des hiens phsiques Ne jouisent-il 
pas d'une température moins inégale, d'un sol mieux art 
rosé,des ressources que la mer ajoute à celles du sol?Il 
est certain que si la surface des deux continents était di- 
visée eu petites lies dissémines sur- les m6mes parai]è 
et séparées par autant de détroits à peu près de mme 
largeur, notre globe serait en état de -.-.ourrir un bien plus 
grand nombre d'habitants : on ne verrait nulle part ni 
marais inlect% ni plaines arides ; les déserts de l'Afrique et 
les steppes de PAsie se couvriraient de grands arbres, et 
grâce à nos arts, les communications seraient bien plus 
faciles et plus promptes. 



INSULTE -- 
INSULTE. Ce mot s'entend d' i n j u r e s, d' o u t r a ge., 
de mauvais traitements de fait ou de parole, que l'on fait 
subir à quelqu'un dans le dessein de l'olfenser. Les in- 
sultes sont punies par les tribunaux; les d u e I s les vengeur 
trop souvent sur l'insulté lui-mères. 
INSUPJECTION. Voici un mot emprunté aux Latins 
par la langue française, et qu'on ne trouve cependant pas 
dans le Dctionnaire de Trvouz, ce qui donne  penser 
qu'il y a à peine un siècle qu'Il s'est naturalisé parmi nous. 
L'insurrection, d'après le Dictionnaire de l'Acadëmie, est 
un soulèvement contre le gouvernement. Ceux qui em- 
lloient ce mot, ajoute-t-il, y attachent ordiuairement une 
idée de droit et de justice. Cette dèfinition académique a le 
mérite de la concision et de la vérité; aussi nous bornerons- 
nous  la répeter, elle lait voir assez clairement qu'une 
insurrection est plus qn'une émeute, plus qu'une ré- 
volte, auxquelles on attache bien rarement une idée de 
droit et de justice. 
Il y a eu constamment des insurrections dtpuis l'orga- 
nisation des hommes en société, parce que toujours il y a 
eu ou des majorité opprimée ou des m[norites blessées 
dans leurs droits les plus saints, qui ont recouru à la force 
et à la violence pour amener un état de choses meilleur 
que celui contre lequel elles s'insurgeaient. Le succès don- 
unit a leurs insurrections le nom de r  v o I u t i o n ; quel- 
quefois elles n'amenaient que quelques-uns des resuilats 
auxquels ou désirait arriver -- telle fut, par exemple, 
la retraite du peuple romain sur le nont ,veutin, qui 
rentre dans la categorie de ce que nous pourrions appeler 
de insurrections neutres, que n'osent point maudire hau. 
lement ceux coutre quielles sont dirigs, et dont cependant 
ils ne se déclarent jamais les approbateurs. Enfin, il y a 
les insurrections vaiacues; les vainqueurs ne se font ja- 
mais faute de leur donner les noms de revoile de.[ac,euz» 
sdition, allentat, etc. : la distinction que nous veuons 
dëtablir ici prouve donc très-clairement que la légitima- 
tion de ces grandes explosions popuIaires est toute dans 
leur succès. 
Ious n'énumérerons pas ici les plus célèbres des insur- 
rections dont l'hlstoire nous a laissé le souvenir : ce serait 
I une rude tche, digne de l'historien le plus pat,eut, et 
les euseignements qui en découleraieut seraient pour l'hiso 
luire comme pour la philosophiede la plus haute importance. 
Nous ne nous prononcerons pas davantage sur le droit que 
font valoir ces insurrections intestines, expression violente 
des besoins, ou d'un parti opprimé, ou d'une faction imper- 
ceptible au milieu des nombreux ressorts de la machine 
gouvernementale et administrative, llais b coup sur nous 
ne blmerous pas ces insurrections toutes nationales d'une 
nation conquise, diriges contre l'êtranger dont elle porte 
le joug. Pour chercher des exemples dans des événements 
contemporains l'insurrection de l'Epagne coutre les Fran- 
çais en 1809 celle de la Belgique contre les Ifoliandais et 
celle de la Pologne contre les lusses en 830, bien qu'aant 
eu des résultats différents, ont toutes eu la mme origine, 
l'amour de la patrie. 
La France, depuis le commencement de la monarchie, a 
été le théâtre d'une longue série d'insurrections, produ,tes 
les unes par le malaise physique des populations, les au- 
tres par le malaise moral et politique des parias de l'star 
social : celle du 14 juillet 1789 a suffi pour renverser l'é- 
chafaudage gouvernemental de quinze siècles. Une ré- 
volution comme celle dont nos pères furent alors les té- 
noins ne pouvait renier son origine : aussi l'insurrection 
fut-elle placée au nombre des droits etdes devoirs du peuple 
par la déclaration des droits, de l'Assemblée constituante, 
qui proclamait et autorisait la résistance à l'oppression. 
On a attribué à Lafayette ce principe; mais il ne l'avait 
preuté qu'avec de si gran& ménagements et de tels pal- 
liatifs, qu'il faut rendre à qui de droit sa responsabilité, et 
laisser aux constituants ce qui leur appartient en propre. 
La Convention, dant la constitution de 1793, alfa plus loin : 

INTÉGRAL 43 t 
elle déclara que lorsque le corps social, ou lorsqu'un des 
membres du corps social était opprimé, l'insurrection était 
pour le peuple et pour chaque portion du peuple le plus 
sacré des droits et le plus saint des devoirs. Les constitu- 
tions suivantes ne renterment point cette disposition, toute 
dans les idées démocratiques sous l'influence desquelles on 
vivait durant le régime républicain, et l'insurrection est 
redevenue ce qu'elle était, un de ces faits qui ne se jugent 
que par les fruits qu'ils portent. 
En Hongrie, jusqu'aux évéuements dont ce pays a été le 
théâtre en 1, on appelait insurrection la levée en masse 
de la noblesse pour la défense des froutiëres. Dans les cas 
urgents, les rois faisaient appel  l'insurrection, et tout 
gentilhomme était alors tenu de prendre les armes et d'en- 
trer en campagne. C'est ainsi, par exemple, qu'à Raab, en 
109, le vice-roi d'italie Eugène Beauharnais eut affaire 
l'insurrection hongroise. 
IN-SUSPENSO expression latine, queiquelois em- 
ployée au lieu de sa traduction française en svpens. Une 
chose est-elle indécise, pendante, non terrainC, on dit 
qu'elle ¢ete in suspenso. 
INTAILLE. Vo/ez 
INTÉGBAL (Calcul). Remonter de la différentielie 
d'une fonction à cette fonction, ou, en d'autres termes 
trouver la fonction dont on donne la dêrivêe, ou encore 
revenir de la ri uxio n à la fluente, tel est l'objet du calcul 
intégral que ewton avait nommé calcul inverse des 
flt«zions. L'invention de ce calcul est contemporaine de 
celle du calcul différentiel, et l'histoire de ces deux 
branches du calcul infinitësimal est intimemeat IlC. Après 
 e w t o n et L e i b n i t z, le calcul in tégrai doit ses plus belles 
dêconvertes à Jean Bernouili, Eu let, D'Aiembert» 
Vandermonde, Lagrange, Monge, Laplace, Le- 
gendre, Abei, M. Gauchy, etc. Il a étë l'objet de sa- 
vants trail méthodiques, parmi lesquels nous citerons 
particuliërement ceux de Marie t g u e s i, de L a c r o i x 
de bi. bloiëno et de M. Dul,amel. 
Reportons-nous aux résultat, obtenus par'la diffêrentiation, 
et nous trou,erons, ,par exemple, que cosxd.r étant la 
diferentielle de sine, rêciproquement sin est 
de cosdz, ce que nous exprimerons ainsi : 
le signer (somme ou intoegrale) rappelant l'initiale du mot 
somme. Et eneffet, suivant les idées de Leibnitz, les dif- 
Iérentielles reprentant les accroissements infiniment petits 
les variables, il s'ensuit qu'une variable quelconque est la 
somme du nombre inlini d'aoeroissements qu'elle a reçus 
dep«is son origine jusqu'au moment où on la considère. 
Nous avons remarquê ailleurs que les constautes isolé.es 
disparaissent par la dilféreutlation. Or, dans l'exemple ci- 
dessus, rien ne nous dit si cos. dz. est la différentielle ',de 
sin. ou de cette fonction de v augmentëe d'une constante. 
Pour donner  l'égalité précëdente tou{e sa génëralité.o nous 
devons donc écrire : 
.fcos.zdz  sinz ÷C, 
C désignant une constante arbitraire. 
Le procdê que nous venous d'indiquer s'applique aux ré- 
suitats de toutes les diffêreutiations effectuée.s. Ainsi, des 
éalités -- 

on conclut : 



-- L. ÷ C, 
fèdz -- = ÷C, etc. 
La constante arbitraire qui accompagne toutes ces expres- 
sinus disparais dans les intgrales dflnies. On nomme 
ainsi celles où l'on suppose que la variable croisse ou dé- 
croisée depuis nue certaine limite a jusqu'à une autre limite 
b, ce que l'on Cil ainsi : 
Ç X d.z, 
.X,. étant une fonction quelconque de w. Remarquons : 1 ° qlle 
! on peut toujours faire sortir les coeflicients c,o.nstanL engagés 
sos le signer comme ceux qui se trouvent sous le signe d, 
de sorte que foEXdz  ct/'Xd.z; 2 ° que le signes f et d s'ex- 
cluent mutuellement, c'est-h-dire que dfXdx/' et fdX qui- 
valent, l'un à Xdw, l'autre à X. 
Toutes les fonctions sont accessibles aux métbodes du 
calcul différentiel. On ne peut en dire autant du calcul in- 
tégral. On ne saitencore intégrer d'une manière gnérate que 
les fonctions algébriques raLiounelles. Pour les autres, il 
faut ouvent recourir à divers artifices de calcul L'un des 
pis usités est I'int9ragion par parties, qui repose sur la 
relation d. uv -- udv "l- vdu, d'oh l'on tire 
dv  d.v  
et par suite furie  uv -- f vdu, 
formule que l'on emploiera chaque fois que l'intéation de 
edu sera plu facile que celle de udp. Quand les fonc- 
tions se montrent intraitables pr tout autre procédé, on 
trouve une dernière ressource dans leur développement en 
séries convergentes, dont on soumet ensuite les termes 
à l'intégration. On peut juger par les ditficultés qu'offre 
l'intégiation des fonctions d'une seule variable, de celles 
que ['on rencontre lorsqu'on traite des fonctions de plu- 
sieurs variables iudépendantes et surtout des ('quations dif- 
férentielles. 
11 laut souvent retrouver une fonction dont on ne con- 
nais que la différentielle d'un certain ordre. On doit alors 
faire autant d'intégrations qu'il y a eu de différentiations 
successi vus. éanmoins, les in[dgra[es mHiples, q,d s'ex- 
priment par la reptition du signer, se ramènent h des in- 
tégraies siml,les. Prenons pour exempte Fiulégra[e double 
tf Xd  ; i'intgvation par parties donne : 
ffX d.r. • - f d.r fX dz -- .z fX d.z  f X xdx. 
Il en est de mme pour les intégrales triples, quadruples, elc. 
Outre les questions d'analyse pure auxquelles il prète sa 
puissance, le calcul intégrai est de la plus grande utilité 
par ses applications géométriques  telles que la rectification 
des courbes, la quadrature des surface«, la cubature des so- 
lides. La dëtermination des centres de gravité, et génêra- 
lement la résolution des principaux problëmes de la science 
de l'quilibre et du mouvement appartielment au calcul 
intégral, que l'on retrouve dans toutes les théories de phy- 
sique mathématique et de mécanique cleste. 
INTELLIGENCE  INTELLECT. C termes dérivent 
d'talus et de lugera (choisir intérieurement). Ils disent 
plus que l' e n t e n d e m en t, qui semble n'exprimer qu'un 
retentissement à l'LaSCieur, une simple r¢eption des ira- 
pressions par l'ouïe (et par les autres sens) daus le senso- 
fiurn conmmne, qui accepte passivement des sensations. 
Mais l'intellect cons'ste en une compréhension, une faculté 
active qui choisit, et par conséquent juge ou pèse la va- 
leur entre pl.usieursidées, qu'elle compare, afin de préfrer 
la meilleure. Ainsi, l'entendement peut appartenir à plu- 
sieurs animaux douée d'un encéphale et de sens ; mais 
i0intelligence dans sa plus haute capacité est l'apanage de 
l'leomme ou de tous les ètres supérieurs par les laenltés. 
Ici commence ladifficulté: cet intellect n'est-il dansl'homme 
elles animaux qui en manifestent des degrés divers que le 
simple jeu (Ie o:gane cérébaux II l'Cas de vie un pbéno- 

INTÉGRAL -- INTELLIGENCE 
mène organique de la substance corporelle, et se dissol- 
vant avec elle  la mort ? ou existe-t-il dans le monde un 
principe intellectuel, spial, distinct, aéparble, tel que 
serait le fluide électrique ou magnétique, mais purement 
spirituel, et pour ainsi dire une émanation de la source 
divine, créatrice et organisatrice ? La question vaut la peine 
d'ttre examinée. 
Si l'intellect appartient en propre à la matièrt, soit 
brute, soit organisée, en tant que matière, i laut donc que 
cet intellectse fractionne eu particule à la mort de l'homme, 
comme le fait son cerveau, e dorganisant et se putré- 
fiant. Alors, l'intelligence reste l'une des propriétés in&in- 
sèques des molécules de la matière; elle fait partie de on 
essence, et ce caillou inorganique, ce rocher, etc., con- 
tiennent tous le» éléments de la pensée. Qu'est-i| besoin 
de chercher ailienrs ? Si la matière possède ainsi l'intelli- 
gence enfouie dans son ein, elle doit s'organiser d'elle 
seule, spontanément dans les mondes i produire piaules, 
animaux, hommes avex3 toutes les merveilles de leurs 
structures si habilement et profondément combines, comme 
l'oeil, le cerveau, etc. 11 faudrait bien admettre ces résul- 
tats si l'on adoptait cette hypothèse, puisqu'il n'y a rien 
hors de la matière, et qu'elle est en mme temps Dieu, 
comme l'établit Spinosa, en faisant la confusion du monde 
et de Dieu dans l'unitWabsolue. Si vous supposez ainsi 
qu'il n'y a point de principe spirituel distinct ni séparable 
de la matière corporelle, il faut donc que par elle se, le 
cette matière se constitue en organes avant d'aoir une 
organisation. En effet, les matériaux bruts de notre globe 
préexistaient évidemment avant qu'il  ett des tres nrg- 
nisés; ils fournissent la hase, les éléments, qui composent 
l'organisme. Par une conséquence nécessaire et force, le 
moins créera le plus, l'inorganique fel-a de l'organisme, 
'élèvera au plus sublime deé de science et d'intelligence; 
, lës cerveaux de Newton et d'Homre germeront, par 
|a suite des siècles, de la lange et de lapourriture, où let- 
meulent au hasard des matériaux en dissolution. Ces 
chances du hasard produisent la sagesse et le génie. Enfin, 
ordre et désordre, tout sera le résullat fortuit des mouve- 
ments des particules de l'univers, comme le jusle et l'in- 
juste, le bien et le mal, pour retomber, par de nouvelles 
catastrophes, dans un éternel chan$ ou dans une prodi- 
gieuse chatne de mélamorpllOSeS sans fin. 
I Si le sens commun universel repousse avec horeur de 
tels résultats, comme absurdes et monstrueux ; si ce qui 
est fortuit, dsordonné, ne peut posséder le principes de 
la régularit et de l'harmonie, il faudra bien recourir à 
d'autres causes qu'aux lmenls bruts et seulement maté- 
riels. Dès lors s'il existe une source spéciale d'intelligence 
et d'ordre ; l'organisation s'explique par cette puissance 
upérieure gouvernant la matiëre, la distribuant avec me- 
sure, prévoance, la développant suivaut des[ois constantes, 
dansune érie de gnérations normales, dispensant à chaque 
forme animée, des sens, avec la sensibilité, les moyens d'ac- 
tion, de spontanité, de volonté, les instln«ts, les deés 
d'intellect en rapport avec les besoins de chaque/tre. Donc 
il existe, à olre avi% deux principes dans cet univers : 
l" un monde spirituel, tout intelligible, constitué de forces 
productrices, cratrices ou organisatrices, causes de la ie 
et de la pensée, se manilestant dans ce merveilleux-ou- 
vrage, soit dans l'esprit de l'homme, soit dans les instincts 
des animaux et les plantes, présidant aux énérations, dten- 
dans sa providence snr les sociétës et toute la chalne des 
événement.% selon ses desseins supr6mes ou incomprében- 
sible; 2° le monde matériel, composé d'éléments divers, 
classes et ordonnés selon des lois de physique, de chimie, 
ou exécutant passivement les actes régubers que lui imprime 
la suprême intelligence. Tel est ce qu'on nomme la nature 
(natura naturata)ou le syst/.'me de la création. Nous 
ne pouvons donc supposer que t'intelligence se manifeste 
chez l'homme et les tres vivants aus qu'il existe réelle- 
huent un principe spirituel, infusë avec l'organisation al 



IITELLIGENCE 
parle mouvement vital dans des êtres corporels, mais qui 
se rpare de ces matières au moment de la dèsorgauieation 
et de la mort. 
Or, l'observation uous présente une èchdle ascendante 
d'organisation, depuis les plus siraples végètaux agames 
et cryptogames, les champiguons, lichons, mousses, jus- 
qu'aux végètaux compliqués, jusqu'h la sensitive et autres 
plantes décélant déjà des lueurs d'activité, et même dïns- 
tinct, pour s'ouvrir à la lumière et se fermer aux ténèbres, 
pour chercher les bonnes reines de terreau, etc. Mais c'est 
principalement daus la sèrie du règne animal qu'on voit 
éclore et oe développer depuis le zoophte à molécules ner- 
veuses, éparses ou Iondues dans ses tissus gélatineux, jus- 
qu'à l'appareil nerveux ganglionnaire avec des filets rami- 
fiés chez les a,ticulés (vers, annélides, insectes, crustaces), 
puis les masses nerveuses asseciées par divers cordons 
chez les mollusques ( testacés, bivalves, les ,nivalves, les 
céphalopodes, etc.) ; ensuite le système régulier, symétri- 
que, des nerfs céphaloerachidiens et leurs delendances auas- 
tomotiques avec le graud sympatllique dez tous les verté- 
brés (poissons, reptiles, oiseaux • mammifères } ; enfin, 
l'homme, chef suprême, animal nerveux et intelligent par 
excellence. 
Les animaux présentent d'autant plus d'i nsti net qu'ils 
ont moins d'intelligence ; et c'est pourquoi i'l,omme, si in- 
teiligaut, est le moins iustinclif des animaux. Le sire uni- 
que, essentiel de l'intellect est le cerveau, centre auquel 
viennent aboutir, par les portes ou les fenêtres de nos 
cinq sens extérieurs, les impressious ou les élments de nos 
idées, selon l'antique axiome d'Aristote : 1'hi est a 
tellectu quod no fueri t prus in sensu, proposilion déve- 
Ioppée si bien par Locke, et par Condillac dans la supposition 
«le sa stah,e an]race. Ainsi. l'acquisition denotre connaissance, 
de nos scieuces, est lerésultat de cette absorption prinfitive 
«les matériaux de la sen.ation, puis èlaborés, compa,'ës, 
]ugés, combinésà l'aide de la Inculte iutellecluelle, il en rë- 
ulle que les fouettons cérébrales se déploient sous l'influence 
de ces impressions ou transmissions externes, qu'elles se 
perfectionnentet s'agrandissent par l'éducation, Iïustruelion; 
que la volonté ëclairée nuit dh,n jugement ou d'un choix 
entre deux ou plusieurs idées, et d'une préférence raison- 
n6e; mais ala naissance l'esprit, dénué de toute idée, reste 
ignorant et dans i'obsc,wité, comme rait une table rase. 
Au contraire, l'instinct est dëja inné, vif, capable d'agir, de 
gouverner l'animal naissant, surtout dans les races les 
moins intelligentes et à faible cerveau. C'est une impul- 
sion interne, fixe proCabile, en rapport avec l'organisatiou, 
pressentautdéjì dans l'animal à cornes, par exemple, des 
défenses non encore sailla,tes. L'instinct, de même que 
les passions, agit sans le concours de la raison, et même 
contre la raison, comme Iorsqu'ii fait précipiter une mère 
au milieu d'un incendie ou des flots pour sauver son fils. 
L'instinct opère même d'autant mieux, dans les maladies, 
dans le délire, qu'il a moins dintelligence libre. Chez les 
animaux, l'instiuct est partait dès l'origine; il ue pe,t 
se Ierfectionner ni se dote, inter; l'abeille ne construit 
jamais ni mieux ni plus mal .,es rayons depuis des siè- 
cles, parce que les formes et les facultés de cet isecte 
demeurent également constantes et se correspondent. 
Ses beoius de nutrition, de conservation, de génération, 
restent pareils, parce quïls sont inappris. 
Si I'prit réside dans le cerveau, l'instinct a son siCe 
dans le oeur ou plul6t dans les entrailles. En effet, il est 
manifeste que des insectes prives de leur tëte, et que des 
iapins, des oiseaux, des reptiles, vivant quelque temps 
encore aprës avoir él décapitès, exercent néanmoins leurs 
instincta autant qu'ils le peuvent. De même» une multitude 
d'animaux naturellement acèpbales et sans aucun organe 
tenant lieu de cerveau ( les zoophytes, les écllinoderrnes, etc.) 
ont des instincts très.¢aractírisës; c'est ce que ne peuveut 
nier ni expliquer le docteur Gall et les pbrénologistes, qui 
s'obstinent» malgré I'vidence, ou par ignorance des faits 
DICT. nE LA CO"VF-,I.  T. 

43 
à placer les instincts au cerveau et à les rattacher à l'intellect. 
De tout temps, au contraire, on a ditingué le cœur de 
l'esprit : or, le cœur et les passions qu'il Crouve, les af- 
fections internes qu'on y rapporte, sont du domaine des 
instincls. Le cœur diffère tellement de l'esprit, que les fonc- 
tions cèrèbrales sont troublèes et égarées par les passions. 
lmpedit ira animum ne possit cernere v,.rum. 
Enfin, on sait que l'esprit est souvent la dupe du cœur. 
On n'aime pas avec son cerveau, et on ne réfléchit pas avec 
es entrailles. Voila donc deux sources bien dLqinctes et 
antagonistes de nos facultés morales, l'une naissant de 
l'estCieur pour la pensée, la rèflexiou ; l'autre de l'lutCieur, 
po,lr les alfections, les dcsirs, les besoins. L'intellect est 
adventice, contingent, non indi.pensable, factice, de quan- 
tités et de qualités variables; l'instinct est naturel ou natal, 
invariable, nécessaire ì l'existence, macbiual, irrfléchi. 
Il se transmet a,lx desceudants, comme la strucb,re, mais 
l'intelligence, étant acquise, ne passe pa du père au fils. 
L'homme habitué, daus nos éJucations perfectionné.es, à 
comprimer ses penchants et ses instincts, suivant qu'il con- 
ient à ses intérêts ou ì son ambition, se déguise, ne montre 
qu'une physionomie de commande (vultus.jussus, comme 
Tacite le dit de Tibère); mais c'est en vain : empreint dan 
les chairs avec la vie et l'organisation, ce sentiment intime 
renait invinciblement, et sa racine indestructible, im,nor- 
telle, persiste de génération en génératiou pour réagir sur 
le physique. 
Naluram expe]las furca, tamen usque recurret. 
Un cerveau, des sens externes et internes, également 
bien conformés, sont les instruments à l'aide desq,,els le 
s)stème nerveux déploie la plénitude de ses fa c u I t é s, tant 
qu'il est imprégné de l'esprit de vie. L'atteution est la 
coudition préliminaire pour obtenir des impressions, pour 
comparer et combiner les idées qui en résultent et asseoir 
nos jugements. A l'aide de reflexion, l'on obtient des i d é e s 
composées, abstraites, plus ou moins complexes, sur les 
matériaux primitifs avec lesquels on opère. Les faits u les 
idées se classent dans la mémoire ; la chalne des raisonne- 
ments ou des déductions se noue, et l'imanation, le génie, 
peuvent eufin tisser la trame plus ou moins brillante dont 
se compose l'esprit humain. Mais une haute question philo- 
sophique a éié ressuscitée de nos jours, savoir si tout notre 
systéme intellectuel émane uniquement de la son sali on, 
des irnpressious reçues par nos sens estírieurs, comme l'é- 
tablissent Aristote, Locke, Condiilac, Cabanis 
( en y ajoutant les impressions des sens internes ), puis D e s- 
tutt de Tracy, Volney et toute l'ëcole sensualiste du 
dix-huitième siëcle; o, s'il existe en outre un principe 
intellectuel par sa propre essence, ayant sa forme ou ses 
attributs independants, originels, inns, d'après D e s c a r t e s, 
Let b n itz et la philosophie spiritualiste moderne de 
cosse et de l'Ailerons-me. Dans cette dernière opiuion, Des- 
cartes établit que la peusée a son existence tellement spéciale, 
et constituant le moi humain, que par son intermédiaire 
seul le monde exterieur et tote matiëre nous sont connus. 
L'esprit pur pourrait exister et voir, comme en un songe ou 
dans nn panorama, col uniçers, qui ne serait qu'un spec- 
tacle phéuoménal, sans réalité autre que celle des idées. Tel 
est l'idalisme de Berkeley, et celui des iogbuis de 
l'Indoustan; telles sont encore les lypothèses des 
 a d e s, miroirs dans lesquels se rëfléchit l'univers, selon 
Leibnilz; celle de Ma I e bru n c ho, qui fait de Dieu l'in- 
tellect universel par lequel nous apercevons tuutes choses; 
celle de Schelling ou de Pètre absolu (Dieu-monde), 
constituant l'uuiversalitë intellectuelle et matérielle, renou. 
velant sous d'autres formes le panthéisme des ancien phi- 
losophes toïciens et le mysticisme des Hindous. 
Il est évident qu'en rèdulsant l'intelligence à n'tre que le 
produit de la sensation, l'on arrive à ne reconnaRre aucun 
dn«ipe intellectuel actif, mais seulelnent des résultats de 
organisation matérielle; une s¢rtion de rencèpbale, la- 



434 
quelle est la pensée, dernier degrë d'élaberatlon des ira- 
pressions des sell., llais dans cette h)pothèse on ne peut 
expliquer la formation des idées supérieures aux él6ments 
matériels, s'élever aux causes premières, établir les types 
immuables du vrai et dtl beau, les lois inné.es de la cons- 
cience, du juste et de l'injuste, le criterium de ptu. tlautes 
vérités de notre nature, comme l'avaient fait voir Hume et 
Kant dans leur critique. Or, il existe en nous une règle, un 
entiment du bon, de l'équité, de l'ordre, antérieur à toute 
sensation, comme i'a ddveloppé Hutcheson et l'Cule écos- 
saise, d'après les platonidens, biotre :me veut et agit ; elle 
se soulève sponbmdment contre riujustice, méme profitable 
h notre intérêt. L'esprit peut s'élancer au delà du présent 
dans les espaces éternels que n'atteignent aucune sensation. 
Il ne s'emprisonne jamais dans rétroile demeure de notre 
corporalité ; il est d'autant plus puissant qu'il est plus séparé 
des sens par une profonde meditalion, tandis que les ani- 
maux possèdent des sens d'autant pl«s vifs et énergiques 
qu'ils sont moins intelligents. Pins on éparp'fll.e ses sensations 
et ses idées, moins l'intellect a d'intensité : 
Pluribus intentus, minor et ad singula sensus. 
On recherche sans cesse les causes de cette éclatante su- 
périorit, intellectuelle qui resplendit dans les grands hommes, 
le vrais génies. On suppose en eux une organisation céré- 
brale d'une perfection extraordinaire. Sans doute, un en- 
céphale étroit ou comprimé, comme chez le crétin, le stu- 
pide Hottentot, ne permet pas un large développement aux 
lonction intellectuelles; sans doute, les hommes et les 
animaux à long col sont lents et sors, tandis qu'un ang 
chaud et pétillant avive sans cesse la cervelle des individus 
a col court; mais ces observations n'ont rien d'absolu. Ce 
ne sont pas les nations les plus intelligentes qui montrent 
le tètes les p|us volumineuses; le Bosse en a une plus grosse 
que le Suédois ; le. Kalmouk, le Tatar, présentent des 
crnes phts grands que tons les peuples civitisés de t'Europe 
et surtout de l'Asie, comme l'out prouvé Sandifort, Blu- 
menbach, etc. Des recherches recentes faites sur les vo- 
hunes des ltes d'élèves à l'école veterinaire d'Alfort ont 
donné pour résultat des développements de facullés intel- 
lectuelles en raison inverse du volume des oerveaux, selon 
M3I. Leuret et Guerry ; mais ces faits sont peu concluants. 
La te.te «le Napoldon n'avait que 0 m, 5ô3 de circonférence, 
d'après Antommarchi ; celle du sublime géomètre Lagrange 
ëtait encore moins ètendne, quoique les os de la face fus- 
sent assez developpés, d'après l'autopsie que nous en avons 
faite. Xav. Bichat, homme d'un grand g6nie anatomique, 
avait un c6té «lu cervea« plus resserré que l'autre; cette 
inégalité cetCraie ëtait manifeste aussi chez Louis XVIII et 
chez l'astronome Lalande. Aujourd'hui, ce n'est plus uni- 
quement d'après la masse de l'encêphale, de ses Iobes an- 
érie,rs et supérieurs surtout, que ron evalue les fonctions 
intellectuelles, bien que les terreaux volumineux de 
G. Cuvier (pesant 1,856 grammes) et de Dupuytren, etc., en 
montrent l'importance. 
On attribue plus d'efficacite au grand nombre de cir- 
convolutions et d'anfractuosités que presentent les hémi- 
sphres cërdbraux ; ce qui multiplie beaucoup leurs surfaces. 
Or, cette loi, préconisée par Desmonlins et d'autres ana- 
tomsles, se b'ouverait démentie chez beancoup d'animaux : 
le c.asto r, si iudn.trieux, par exemple, manque de ces 
circonvolntions. Les proportions relatixes entre la masse 
du cervelet et celle des hémisphères, celles de la prédo- 
minance de renc¢phale sur la mœlle épinière, d'après 
Soemmering et Ebel; la q,antité des lamelles du cervelet 
selon Malacarne, Beil et Tiedemann; enfin, les rapports 
cuire I'a n gl e fa ci a I, mesurd par P. Camper, on entre les 
os de la face et ceux dl cràne, uivant Daubenlon et 
xier, elc., n'offrent aucune infailfibilité ni constance pour 
élahlir la mesure intellecluelle. Lea énonciations de G a I i 
«,l «te Spurzheim sur la valeur des protubérances encé- 
phaliqucs, quoique mlifiées par de modernes phrnologisles, 

I/TELLIGEINCE  IITEMPE[tANCE 
ne trouvent guère croyance maintenant, au milieu des m- 
comptes que leur opposent des anatomistes. Les expériences 
de MM. Flourens et Magendie sur des animaux vivants ont 
été soumises à des ob}ections gavea par le docteur Gall et 
d'autres savants, car ces résultats sont pathologiques 
cessairement et variables. 
D'ailleurs, les conditions d« développement intellectuel 
se modifient selon'la précocité ou la lenteur des croissances 
et la nature des génies : ainsi, la muse tragique de Racine 
se déploya plutôt que robservation profonde du comique 
chez Molière. Des complexions sont plus ou moins favora- 
bles aux fonctions encéphaliques, ainsi que certains climats; 
puis les extrémes températures les entravent pour l'ordi- 
naire. Les aliments mmes altèrent nos facultés à la longue, 
comme les boissons. Personne n'igoore enlin c6mbien l'état 
d'esclavage ou de liberté comprime ou exalte l'essor de l'in- 
telligence; qu'il y a des époques d'asservissèment d'sprit 
pour les peuples, comme sous les ténèbres du moyen ge; 
des religions abrutissantes, telle que l'islamisme, ou des 
gouvernement« oppresseurs, mme avec des formes litté- 
raires, comme citez les CIdnois, enchatnés par le triple lieu 
d'une langue et d'une écriture symboliques, de leurs mœurs 
cérémonieuses, immuables, et de leur despostisme oriental, 
avec le régime du bambou. On sait, au contraire, combien 
l'horizon intellectuel s'agrandit au faite de la civilisation, 
aidée de tous les travaux d'une libre industrie, du concours 
des lumières des autres nations, et du long héritage de 
l'antiquité. Alors s'étendra indéfiniment le cercle des idées; 
elles-ratines deviennent le germe fécond de nouvelles dé- 
couvertes que recèlent les entrailles de l'avenir. Ainsi se 
déploient les vastes branches de ce grand arbre des connais. 
sances humaines florissant sur tout le globe aujourd'lmi. 
La science, éclose d'abord sous les cieux prospères de i'Inde, 
de l'Épte et de l'Orient, fécondée par la Grâce antique, 
a fait resplendir toutes le merveilles de notre civilisation : 
heureux si nous perévérons dans ces études pacifiques 
et glorieuses qui exhaussent la race humaine au-dessus de 
tons les étres et la rendent dominatrice de cet univers ! 
Heureux alertent l'tre privilégié qui pourra présenter l'union 
d'un beau talentet d'un beau caractère! C'est en effet de 
ce concours harmonique que résulte la plus haute énergie 
de l'intelligence, puisque les grandes pensées viennent du 
cœur. L'homme tout entier alors s'avance dans sa force et 
sa liberté. Malheur, au contraire, à l'Atre incomplet, mulilé, 
dont l'àme servile ou i.%he ne seconde pas l'élan de la 
pensée! Telle est la principale cause de la dé,,adation, de 
rénervation du génie, dans les siècles de la corruption du 
guet, qui suit inévitablement celle du moral. J.-J. 
INTEMPÊIANCE. Version littéraie du substantif 
latin intemperantia, exprimant le dèfaut de tempé- 
rance, ce mot désigne en lrançais les excès qu'on eommet 
dans la satisfaction des appëtits sensuels. Cette acception 
est gnérale, et s'etend mème an défaut de retenue dans 
rexercice de la langue ; mais on l'applique principalement 
 l'usage immodéré des aliments et des boissons. Chacun 
convient que les plaisirs de la table sont grossiers, et qu'ils 
nous ravalent au niveau des brutes ; néanmoins, la maie- 
rite d'entre nous les recherche, ou s'y laisse trës-bbnévole- 
ment entrainer ; plusieurs méme les glorifient en prose et 
en vers, et donnent un passeport de bonne compagnie t l'in- 
lempéranceen la nommant 9 o u r m a nd i s e, sans s'inquiéter 
si comme telle elle est un pdcbé capital. Des moralisles et 
des médecins se sont éverlués ì crier aux oreilles des in- 
tempèrants: a Vos excès nnisent à votre esprit commeà 
votre corps; le cerveau s'engourdit quand l'elomac est 
trop plein de produits culinaires, et votreraison se perd 
quand vous soulevez trop souvent la coupe. » L'intempérance 
exclut les actes mëmorahles dans les arts, dans les sciences, 
en toutes choses. Les rxcès de la table vous privent «le la 
santé, le premier des biens; ils dëformeut vos corp« en dé- 
veloppant monslrueuemenl vo. abdomens; ls vous con- 
damnent à endurer les tourments de la goutte ; ils abrènt 



INTEMPÉRANCE 
çov vie lr l'apoplexie, la paralysie, ou l'empoisonnent 
par mille autres maux. L'inmpranoe, en,n, a i de 
leate  d dédamaUons tellement pét et é qu'elles 
sont aujourd'hui ridicules comme des rabâchages. A quoi 
scrutait d'ailleurs d'sayer de I rouveler avec 
les rurs de la rhlorique Juu'à  jour ell ont 
él si sriles, 'on rougit aujourd'hui moins que amais de 
l'pilhè de 9ound. L boutiqu de comestible, vrais 
guet-ans, qui s'ouvoent de u pa, lémoignent de 
l'exoellenoe du méier par le mps qui oeu; et vo en- 
ocre si le public à Paspt d amoroes 1é devant lui 
ne r pas dans l'admiration, au lieu de témoier une 
diation eueuso. S't-il élevé dans Paris, cette 
blone de la gastronome, une ule société de t cm p é- 
ra n ce La pauvrelé me, pour qui la sobdét mble- 
rait ttre un privile for, n'exclut point Pinmranee, 
surtout He de l'u-de-vie, ou plutft de l'u-de-feu, 
comme les sauvages l'appellent pl senment que nous. 
Les hfpitaux sont oujours remplis de mades qui émoi- 
ent de la juslesse de notre remarque. W 
INTENDANCE magistrature administrative, judi- 
ciaire et finandëre, dont les attributions mprenaient sous 
l'ancien rime la justioe, la poli et les finances dans 
chaque génëralit. Chaque intendance élt diée par 
le nom de la ville qui était le sie de celte administration. 
On appelait aussi intendance l'hfld qu'habitait le titulaire 
et où étaient établis les bureaux. Les pnces avaien aussi 
pour la gestion supérieure de leur main, de leurs reve- 
nus, une intendance, qu'ou a enoere appele cncel- 
lerie. Les grands seigneurs, les prélats du premier or- 
doe, les rich financiers, les grands propétair imiien 
les prinoes sur  point. Dvrx (de l'Yonne). 
Sous Louis-Philip il y avait une intendance de la lise 
civile. Il  a eu aussi des intendances sanitaires, chargées 
de veiller aux mures de luhoE dans certains pos. 
Celle de Marsoille fut bds en 1850, pour s'lre op- 
posée aux mesures que prenait le ministre contre I qua- 
rantaines et les lazarets. 
INTENDANCE MILITAIRE. Les inndants sont 
sois d débris du commisat et de Pinspection aux 
revu; leur naiance a achevé de her leu parent; 
mais de mme que le phéni tenait plus jeune et plus vi- 
goureux de s ndres,  sont ardvés au monde mieux 
conformés, plas puissant, mieux dol; leur habition a 
ëté meilleure : oe sont eux qui l'ont conslruile; leurs fonc- 
tio ont été plus éndérant : ce sont eux qui en ont 
tra I règles; le ministre de la erre t devenu let]r 
quartier gnëral : ils en ont lait leur métropole ; l'adminis- 
Irafion est devenue une alchimie, dont ils peuvent seuls 
nier les alambioE. 
La hate capacioE d personnages qui d l'origine ont 
ft partie du cors de l'intendance explique, et la confianoe 
quïls ont acquise et le rfle élevé qu'i ont joué. Sous 
s XIV et Louis XV, un commissaire des erres 
avait rang de oepilaine de valerie, et il n't pas dé- 
montr 'en devenant oonnateur il arrivt à une assi- 
miliation plus avantageuse. Le membre de l'inndanoe qui 
devient intendant marche au oentraire de pair avoe le 
nér de brigade, et la pension de relraite h laquelle il a 
droit de prétendre à un ge encore peu avancé t égale 
celle d'un gn«:ral de dision. L'institulion de l'intendance, 
créée en verlu d'une simple ordonnanoe, et sans que les 
branches de la législature eussent t consulté, exci 
d'abord plus d'une rivalioE : la lmique qui suivie fut 
mme plas d'une fo désoblignle el injuste; mais l'hahi- 
leté et le mérile d membr de l'intendan triomphèrenl 
des oppositions. Tout  qu'il y a d'ouvg savan, éteu- 
dus, cliqnes, sur l'administration s mées, n% vu le 
jour qu« depuis que des inlendanls ont pris la plu. Les 
seioes qu'ils on t rçndusau dpaement de la guerre, bien 
qu'en  exagérant quelefois les criluoes, ont dispo des 
FubHcisles à se doeder s'il ne conviendrait pas également 

-- INTENDANT 4$ 
que les bureaux de affaires trangères fussent diriges par des 
consuls et des vice-consuls, ceux de l'intérieur par des pré- 
iets et des sous-prfets, ceux de la marine par des prfets 
maritimes et des commissaires de marine. Le maréchal 
Soult, interrog à la tribune touchant les bons services qu'on 
pourrait obtenir encore d'officiers en retraite, proclama en 
principe que son intention Cait de tirer un utile par[i de 
vieux guerriers, et quantité de membres de l'intendance 
continuèrent en effetleurs services au delh de leur retraite. 
Gal BJDIN. 
On entend par intendance ilitaire le corps des in- 
tendants, sous-intendants, adjoints et commis, délégués 
par le ministère de la guerre, pour tout ce qui est du ressort 
de l'administration des armées. Ce personnel contrfle, vd- 
rilie, arréte et vise les comptes produits par les chefs de 
troupe et les officiers comptables des divers services ad- 
ministratifs, ordonnance les mandats de pavement, veille à 
ce que l'armée reçoive exactement toutes les prestations 
en deniers et en nature auxquelles elle a droit, règle les 
services des subsislances, des fourrages, du chauffage, de 
l'habillement, de l'équipement, de l'armement, du campe- 
ment, des transports et convois, des lits militaires, etc.; as- 
sisle, enfin, anx marchés et adjudicalions, dont d prépare les 
bases. Les hfpitanx militaires .sont également sous sa di- 
rection immédiate. L'intendance pourvoit, en temps de paix 
ou de guerre,  toas les besoins de l'afinC. Sa création re- 
monte au mini.tère du maréchal Gouvion Saint-Cyr, qui, 
par ordonnance du 29 juillet 1817, la substitua au corps, 
peu homogène, des inspecteurs et sous-inspeeteurs aux re- 
vues, commissaires et adjoints aux commissaires de guerre, 
héritage de l'e[npire. Réorganisée par ordonnances des 10 
juin 1835, 27 aott 1840, et décret du 29 décemhre 1851, 
elle se compose de 28 intendants militaires ; 50 sous-inten- 
dants de 1  classe, 90 de 2e ; 52 adjoiuts de t , 26 de 2% 
total 26 fonctionnaires. 
Les adjoints de 2  classe sont pris parmi les ca- 
pltaines de toutes armes ; les emplois supérieurs sont don- 
nés, dans des proportions détermines par les règlements, 
 l'ancienneté et au choix, aux membres de l'intendance 
et à des ofliciers supérieurs en activité. Les places d'inten- 
dant ne sont dévolues, au choix de l'empereur, qu'à des 
sous-intendants de première classe, ayant au moins trois ans 
de service daus ce grade. 
Avant 1838 il n'y avait point de commis spécialement 
attachés au service des bureaux de l'intendance ; et à cha- 
que changement de réidence, à chaque départ pour l'af- 
mée, ce n'était pas chose facile que d'organiser les bureaux. 
Une ordonnance du 8 février 1838 eombla cette lacune, 
en créant un corps de commis enlretenus. Une aulre, du 13 
septembre 1840, les divisa en trois classes, ouvertes aux 
sous-officiers de l'armée. Il y a, en outre, des places de 
commis auxiliaires, destinées aux sous-ofiïciers, caporaux 
et soldats intelligents, aant au moins six mois de service, 
et h des jeunes gens .gés de trenle ans, lesquels, après un 
certain temps de pratique, concourent pour les emplois 
de commis entretenus de 3  classe. 
En 185 une part a été faiteà l'intendance dans le ser- 
vice de la justice militaire. 
INTENDANT délëgué du roi, sous l'ancien régime, 
pour l'administration de l'i n te n d a n ce. Les premiers in- 
tendants de provinces furent établis par Henri If, en 155t, 
sous le titre de commi.saires dd]artis : leurs fonctions- 
étaient spéciales et temperaires, comme celles des anciens. 
nissi dominici. Une ordonnance de Louis XllI, de 1635, 
agrandit leurs atlributions, et leur con féra le tilre d'intendant 
du militaire, justice, police et finances. Le parlement, les 
assemhlees d'états provinciaux, s'élevèrent souvent contre 
les intendants, dont les prétentions portaient évidemment 
atteinte aux droits des cours souveraines et h l'autorité des 
états. Leurs plaintes, renouvelées avec plus d'énergie et 
une imposante unanimité pendant la minorité de Louis XIV, 
en 16t8» réclamaient la suppression irrévocable des inten- 
55. 



dants. La uppression n'eut lieu que pour quelques pro- 
rinces ; mais ils ne roulèrent pas à Cre rétablis partout. 
Ils ont été entièremexat supprimés en 1790. Il y avait un 
intendant pour chaque 9 du dla lit d. Chaque intendant 
avait sous ses ordres, dans les principales villes de sa 
génëralité, des magistrats intérieur», qu'on appelait subdd. 
ldgus. Ces derniers présidaient au tirage des milices dans 
chaque localité; ils étaient chargés, sous leur responsabi- 
iiiC de l'exécution des ordres qu'ils recevaient de l'in- 
tendant. Les intendants étaient toujours choisis parmi les 
martres de requétes. En 1790, lors de leur suppression, 
leur trailement, y compris les gratifications et les frais «le 
bureaux, s'Cevaient pour toutes les généra]ités de France, 
à 1,00,000 francs par an..ucone municipalité ne pouvait 
intenter aucune action sans y Cre autorisée par une ordon- 
nance de l'intendant ; et le plus souvent ces actions Catent 
provoquées par les abus de pouvoirdesinlendauts eux-reCes, 
dont la responsabilité desenait tout à fait illusoire. 
Les ministres des finances s'appelèrent dans l'origine 
super-iffedant, puis snr-iffendant. Il y avait aussi, 
sous l'ancienne monarchie, des itffendants de marine, 
d'orrnde, de filalces, etc. 
Le gérant des affaires des princes, des seigneurs et mme 
des riches roturiers s'est aussi appelé intedant. Ce titre 
est devenu plus rare, mais il existe peut-Cre encore. Les 
plus modestes bourgeois n'avaient qo'u homme d'affaires. 
Sous la monarcl,ie constitutionnelle, l'administrateur s«p- 
rieur de la maison du monarque prenait le titre d'iten- 
dont. Ses attributions, tut,tes financières, étaient sous ce 
rapport les reCes que celles des anciens ministres de la 
maison du roi. Ceux-ci avaie,d eu outre le dëpartement de 
la haute police de la capitale et des lettres de cachet. Sous le 
régime actuel, l'administratiua de la liste civile appartient 
au ministre d'Etat. Duv (de I'onne). 
INTENDANT MILITAI[E f'oez 
kZlLITMnE. 
INTENTION (Morale). C'est la fin qu'un homme se 
propose en agissant. Elle peut être bnne ou mauvaise; ex- 
primee ou secrète. Il n'est permis qu't Dieu de connattre des 
intentions secrëtes. Souvent c'est l'intention qui excuse ou 
• qui aggrave l'action. La loi dis hommes, nécessairement 
isuparfaite, négligesouvent l'intention, et présume que celui 
qui a voulu l'action en a voulu aussi toutes les suites. Nous 
devons de la reconnaissance à celui qui 'tit bien intentionné, 
sans égard au sqccès. 1| ne faut pas perdre de vue la fable de 
l'Ours et de l'Homme qui dort. Un sot de la meilleure inlcn- 
tion nous casse la tête pour nous délivrer de lïmpurtunité 
d'une mouche, il y des casuistes qui ont imaginé une 
eerlaine direction d'iffeton, h l'aide de laquelle ils 
peuvent mentir, médire, calomnier, en sùrelé de consience. 
Les Iogiciens de l'Cule distinguent une ntentmn objecti.e 
et une irtlentionformelle. Celle-ci est la connaissance de 
l'objel, la première est l'obet connu, ris dishibuent l'une et 
l'autre en irtterttiort première et en ,rtterttiort sccortde. L'in- 
tention premiëre est des ath'ibuh egserdiels, l'intention 
coude est des attributs accidenlels. Dmo. 
L'enfer est pav de bombes ntentims, dit le proverbe, 
pour rappeler queles bonnes intentions ne suffisent pas, mais 
qu'il faut encore avoir la Iorce d'exécuter le bien que nous 
avons résolu, il peut y avoir en effet intention sans action, 
comme dans certaines circonstances il  a action sansintention. 
C'est donc à tort, et seulement par politesse, que l'on peut 
dire que l'intention est rputepour le fait. Un fait change 
souvent de caractère suivant l'intention qui l'a produil. Une 
bonne action tait généralement supposer une inlention loua- 
ble, qaoiqu'elle puisse Cre le fruit d'un motif indigne..Au 
contraire, on ne peut guère supposer une intention inste 
une action réprouvée par la morale. C'est là ce qui dïfit faire 
repousser l'excuse des casuistes qui ne craindraient pas de 
commettre le mal en se ré[ugiant dans l'honorabilité du but 
qu'ils croient poursuivre. L'intention ne saurait dans aucun 
cas justifier une nhauvaise action. La stricte morale défend de 

ITE[NDAIT  INTEBCALATION 
faire le mal, qmnd m.me on aurait la certitude qu'il 
sortira un bien. L. Lovv. 
INTENTION (Droit). C'est cette disposition de l'esprit 
qui fait que l'on a ou qu'on n'a pas la volonté de faire telle 
ou telle action. L'intention est la base de l'imputabilité mo- 
rale; un agent n'est responsable de ses fails qu'autant qu'il 
a eu l'intention, la volonté éclairée de les commettre. Sans 
intention, point de volonté, par conséquent point de puni- 
tion possible. 
Ce principe est formellement consacré par notre loi cri- 
miaefle; nous le trouvons écrit dans l'article 64 du Code 
Pénal, qui affranchit de tonte peine celui qui a commis une 
infraction êtant en état de démence ou pous par une force 
 laquelle il n'a pu résister. Il est encore écrit dans les ar- 
ticles e0 et e7 du même Code, qui prescrivent de poser la 
question de discern ement lorsque le prévenu est gé 
de moins de seize ans. Nous le trouvons exprimé d'une 
maniêre non moios formelle dans les articles 0, I et 
qui ne punissent les complices d'une infraction qu'antant 
qu'ils ont agi sciemment. C'est sur ce principe, enfin, que la 
loi a posé dans les peines un nznirnum et un maximum ; 
car l'intention, la volonté d'un agen! est plus ou moins ferme, 
le mérite ou le démérite moral ontde« degrësdivers, que mille 
circonstances peuvent révéler aux juges et qu'il fallait leur 
laisser le soin d'apprécier. 
Toule la partie de notre Iëgislation criminelle qui a rap- 
port aux crimes et aux dé|its est fondée sur ces principes. 
Mais en matière de police, le fait en lui-reCe constitue la 
contravention, abstraction faite de l'intention. On voit 
mme que ce n'est que par exception que dans certains cas 
la loi a admis t'intention comme élément constitutif de t'in- 
fraction ; elle prend soin alors de le déclarer d'une manière 
formetle. La jurisprudence s'est pus d'une fois expliquée 
cet égard. Elle a méme aiouté qu'en matière de contraven- 
tions fiscales, le fait matériel est punissable, quelte qu'ait été 
l'intention de l'auteur. 
La loi civile déctare que tout fait quelconque de l'homme 
qui cause un dommage à a«trni oblige celui par la faute 
duquel ce dommage est arrivé à le réparer. Elle ajoule que 
cl,acun est responsable du dommage qu'il a causé, non-seu- 
lement par son fait, mais encore par sa négligence ou par 
son imprudence. L'intention n'est donc pas regardée dans 
ce cas comme i'ëlément essentie| de la responsabilité. C'est 
q»'il ne s'at ici que d'une réparation civile, et non d'une 
action qui puisse motiver l'application d'une loi pénale. 
E. nE CUAenOL. 
Une loi républicaine du If, vendAreluire an m ëtait allée 
pi,as loin que le Code Pénal napo]éonien. Elle portait que la 
question itentionnelle serait posée aux jurés dans toutes 
les affaires, sous peine de md, litC Cette loi fut abrogée par 
un décret du 3 brumaire an v. 
INTEItCADENCE ( d,a latin iter, cuire, et cadere, 
tomber }. En médecine, ce mot se dit dan po u i s iorsqu'il 
offre par intervalles une pulsation surnuméraire. 
INTEICAL.IIE ( Ann ). Voye-. 
INTEB.CALAIPE (Jours), en médecine, l'oge: 
C|tlSE. 
INTEItCALATION ( en latin itercalatio, formé 
de ttcr, entre, et colore, appeler). Ce mot s'emploie pour 
marquer l'action d'Dtercaler, pour désigner une chuse 
itercolée. Il 3 a lieu à intercalatimt toutes les fois 
qu'on doit insérer un article oublié dans un compte, une 
ligne ou nne phrase dans un écrit, ou mème un mot dans 
line phrase. On nomme Dtlercalaires les choses ainsi ajt,n- 
tées. Le iour qu'on eioute au mois de février dans les 
nées bissexliles est une inlercalation, et prend le nom de 
iour intercalaire. Il y a aussi une lue intercalaire, une 
treizième lune, de trois ans en trois ans. Efin, on appelle 
rets intercalaires des vers répétés dans certains petits 
poëmes. Cn.tw.cx.c. 
Les intercalat,ons tans les actes Zlotariës rendenl nul ce 
qui est intercalé, et sont pentes d'une amende d« 10 ff. 11 



INTEBCALtTION -- INTEIIT 
est aussi défendu ax horaires d'en faire dans leur réper- 
Ioires. Les articles -2 et suivants du Code Napoléou pren- 
nent des précautions pour s'assurer qu'aucune intercalation 
ne pourra erre faite après coup dans les actes de l'état civil. 
INTERCESSION (du latin tntercessus, médiation, 
entremise, lait d'intercedere, tre entre). L'intercession est 
une demande, une prière faite eu faveur de quelqu'un, avec 
instance et avec empressement, pour lui obtenir quelque 
grâce, quelque avantage, et plus communément le pardon 
ou l'adoucissement de quelque peine. L'histoire ecclésias- 
tique est remplie d'intercessions des évques auprès des 
princes de la terre. L'Église catholique regarde les saint s 
comme nos intercesseurs auprès de Dieu. Voila pourquoi 
on les prie, pourquui on les honore d'un certain culte, pour- 
quoi ou c61ëbre leur fëtes, pourquoi ou se dévoue particu- 
lièrement à un pat fo n. 
INTEP, COSTAL (du latin inter, entre, au milieu, 
et costa, c6te), terme d'anatomie par lequel on qualifie ce 
qui est entre les c6tes. 
On s'est aussi servi de ce mot pour désigner le système 
nerveux grand-sympathique (voyez C[JeRA. [Sys- 
tème ] ). 
» INTEBCOUISE  terme emprunté aux Anglais par 
nos économistes modernes et servant à désigner l'ensemble 
des relations commerciales d'un pays avec nu autre. 
INTERDICTION» INTERDIT. L'interdiction en 
droit est une mesure de précaution ou une peiue. Comme 
mesure de précaution, il eu est fait usage à l'égard des in- 
dividus majeurs qui sont dans un état babituel d'imbécillit, 
de démence ou de freur. Elle peutCre provoquée par des 
pareuts, par l'Coux, et à défaot, daus certains cas, par 
le procureur impérial. La demande eu est formée devant le 
tribunal de première instauce du domicile de l'individu  
iuterdire, et pronoucée par jugement, après l'accomplisse- 
meut des forrnalités prescrites par les lois. L'effet date du 
jour où elle est prononcée. Le jugement doit Stre rendu pu- 
blic par l'inscription sur les tableaux affichés dans la salle de 
l'auditoire du tribunal et daus les études des notaires de l'ar- 
rondissement. L'interdiction cesse avec les causes qui y ont 
donné lieu ; les formalités obsarvées pour y parvenir doi- 
vent tre employées encore pour en obtenir la main-le- 
vée; et l'interdit ne reprend l'exercice de ses droits qu'après 
le jugement qui ordonne la main-levée. L'iiterdiction est 
souvent une arme dangereuse dans les mains de la cupidité 
ou de la veugeauce ; elle a plus d'nue fois servi d'auxiliaire 
à de basses passions; et la prudence des tribunaux n'a pas 
toujours suffi pour faire avorter les coupables desseins de 
pareuts intéressés. 
En rejetant une demaude d'interdiction, les tribuuaux peu- 
xent néanmoins nommer au défendeur un con seil j udi- 
claire. 
L'interdit est celui qui est en état d'interdicion. Tous 
les actes passés par l'iudividu qui est daus nu état d'inter. 
dictiou judiciaire, pour cause d'imbécillité, de démence ou 
de fureur, après qu'elle a été prononcée, sout nuls de plein 
droit. On peut aunuler aussi ceux qu'il aurait passës aaté- 
rieurement, si la cause en existait notoirement à cette époque. 
Il est assimilé au mineur pour sa personne et pour ses bier, s; 
il lui est donné un tuteur. Le mari est de droit le tuteur de 
 femme iuterdite ; la femme peut tre nommée tutrice de 
son mari. Les lois sur la tutèle des mineurs s'appliquent à 
la tulèle des interdits, sauf qu'elle est toujours dartre, à l'ex- 
ception de celle de la femme, qui appartient légalement au 
mari : tous autres que les époux peuvent s'en faire décharger 
après dix ans. 
L'interdiction de commerce est la défense faite par le 
gonvernement aux commerçants d'entretenir nu négoce avec 
une ai;tre nalion, soit à cause de l'Cat de guerre entre les 
deux pays, soit pour un aulre motif. 
L'interdiction Idgale est celle qui résulte de certaines 
condamnations pénales, comme celles des travaux forcés, 
de la déteution, de la réclusion..Elle existe pendant roule la 

437 
durée de la peine. Il est nommé au condamné un tuteur et 
un subrogé tuteur pour gérer et administrer ses biens. Se-; 
bleus lui sout rendus/ l'expiratiou de sa peine, et le tuteur 
lui doit compte de sa gestion. Mais pendant la durée de la 
condamnation il ne peut lui tre remis aucune somme, au- 
cune provision, aucune portion de ses revenus. Ainsi tandis 
que les bleus de l'iuterdit pour cause de démeuce duiveut 
ttre employs à soulager ses maux, l'interdit par condamna- 
tiou criminelle ne peut disposer des siens pour nu emploi 
anal%-ue. 
Il est encore une sorte d'interdiction qui a tous les carac- 
tères d'une peine, et que la loi prououce directement 
dans certaines circonslances. D'après les articles 42 et 43 du 
C__e Pénal, les tribunaux jugeant correctiounellement peu- 
vent dans certains cas interdire en tout ou en partie l'exer- 
cice des droits civiques, civi Is et de famille, lorsque 
la loi qu'ils appliquent l'aura permis. L'application de cetle 
peine a beaucoup dimlnué depuis que la loi électorale a exclu 
du vote bon nombre de condamnés à des peines correc- 
tionnelles. 
Enfin, une autre interdiction consiste dans la défense faite 
par arrêt ou par jugement " un magistrat, à un officier pu 
bile, à un avocat, d'exercer ì l'avenir, pour un temps 
donné, les fonctions de sa charge ou les devoirs de sa pro- 
fessiou. 
L'interdiction du feu et de l'eau était une formule de 
condamnation que l'on prononçait ì Rome contre ceux qu'on 
entendait bannir pour quelque crime. On ne les condam- 
nait pas directement aiosi  l'exil ; mais en défendant de les 
recevoir et en ordonnant de leur rcfisser le feu et l'eau, on 
les forçait à s'éloigner ; on les condamnait/ une sorte de 
mort civile, qu'on appelait legit)rnurn exilium. 
INTERDICTION DE SEJOUR. Une loi du 
juillet 1852 a donné à l'administration le droit d'interdir 
le sd)our de Paris et de Lon, ainsi que de la banlieue d 
ces dex villes, aux individus qui, n'Cant pas domiciliés dan 
le département de la Seine ou dans les communes de l'ag- 
glomératiou lyonnaise, ont subi depuis moins de dix an 
une condamnation fi l'emprisounement pour rébellion, men- 
dicité on vagabondage, ou une condamnation ì un mois de 
la mme peine ponr coalition ; ou aux individus qui n'ont 
pas dans les lieux su-indiqués des moyens d'existence. La 
durée de ces interdictions de séjour doit tre déterminée, et 
ne peut exdcr dix ans; mais l'interdiction peut Cre renou- 
velée. L'arrêtWd'interdiction de séjour est pris par le préfet 
de police ou par le peCet du Rh6ne et approuvé par le mi- 
nistre qui a dans son ressort la policegnerale. Il est notifié 
 l'indiridu qu'il concerne. Toute contravention est punie 
d'un emprisonnement de huit jours à un mois. L tribunal 
peut eu outre placer les coudamués sous la surveillance de 
la police pendant un an au moins et cinq an» au plus. En cas 
de récidive la peine doit tre portée de deux mois à deux 
ans d'emprisonnement, et le condamné doit tre placé sous 
la surveillance de la haute police pendant un an au moins 
et cinq ans au plus. L. Lov. 
INTEIDIT (Droit romain). C'était, ì ttome, une 
ordonnance du préteur qui enjoignait ou dïfeodait de laire 
quelque chose en matière de possession, afin de rétablir par 
provision ce qui y avait ëté interverti par quelque voie de 
fait, en attendant que l'ou statuer définitivement sur les 
prétentions des conteudants. Ces interdits avaient diffé- 
rentes formules. Il y en avait de prohibitoires, de resti* 
tutoires, d'exhil)itoires, etc., etc. 
INTEIDIT (Droit ecclésiastique), censure ecclésias- 
tique, excommunication générale que le pape prononce 
coutre tout un Eat, ou contre un diocèse, une ville ou autre 
lieu, et quelqnefois contre une seule église ou chapelle. 
Chaque évéque peut aussi en prononcer dans son diocèse. 
L'effet de l'interdit est d'empécher que le service divin 
soit clébré dans le lieu qui est interdit; qu'on y admi- 
nistre les sacrements, et qu'on accorde aux dfunts la 
pulture ecclésiastique. Ces sorte dïntedits sont appelés 



4S ITEP, DIT 
rls ou /oeou., pour les distinguer des interdits person- 
nels, qui ne lient qu'une peraonne, soit ecclésiastique, soit 
iaique. L'objet de ces sortes d'interdits n'était /t l'origine 
que de punir ceux qui avaient causê quelque scandale pubtic 
et de les ramener à leur devoir en les obligeant de demander 
la levée de l'interdit. Mais dans la suite ces interdits furent 
aussi quelquelois ernployds abusivement pour des alfaires 
ternporelles et ordinairement pour des intérts personnels à 
celui qui pronon.cait l'interdit. 
Par sa sentence d'interdit, le pape défendait de célébrer la 
me*se, d'administrer les sacrements dans les lieux indiqués; 
injonction était faite de se laisser croltre la barbe, délense 
de se nourrir de viande et de se saluer mutuellemeut; les 
reliqtses étaient enlevdes de leurs chasses, éteudues sur le 
pavé des église« et recouvertes d'un voile; on alCendait les 
cloches et on les mettait dans les caveaux ; les morts n'C 
talent plus inhumés en terre sainte ; enfin le royaume était 
dclaré appartenir au premier occupant, mais le pape pre- 
nait totsjo«rs soin de désigner par une bulle spéciale le 
prince qu'il gratiEait de la couronne vacante. 
Le premier interdit local que l'on rencontre dans l'histoire 
de France est cehù que lança Leudovald, évque de 13ayenx, 
sur toute« les église« de Bouen, à la suite de l'assassinat de 
l'évque Prétextet. En 1200 Innocent I11 mit le royaume 
en interdit pour punir P h i I i p p e- A u g u s t e, qtti s'était marié 
avec Agnès de Méranie, aprês avoir répudié Inge I bu rte. 
B o n i fa ce ¥ I I 1, en 1303, fuirnina la mrne peine contre 
Phi lippe le Bel. Jules II, en 15t2, lança encore l'interdit 
contre le roTanrne sous Louis XII. Grégoire Vil abusa 
surtout de l'interdit. Adrien IV mit la ville de Borne en 
terdit. Innocent I11 interdit l'Angleterre. Aprsle rn&sacre des 
Vpres siciliennes, Martin IV mit le roTaurne d'Aragon en 
interdit. Grégoire X interdit le royaume de Portugal, etc., etc. 
Le« peuples n'abandonnaient pas toujours leurs princes dans 
ces circonstances, et l'Ëglise dut rnodérer ses sévérités. Elle 
permit d'abord de donner le baptéme et l'extrërne-onctlon, 
ensuite de précher, d'administrer la confirmation, puis de 
dire une messe basse toutes les semaines sans sonner, les 
portes ferrnées, enfin de dire chaque jour une messe sans 
chant, et de célébrer les quatre grandes fétes solennelles. 
Lïnterdit local n'est plus en uge maintenant que Iorsqu'nne 
église menace ruine, ou Iorsqu'elle a été soniUée par un 
crime, jusqu'à ce qu'elle ait été consolidée ou purifiée; dans 
les deux cas, c'est l'évque qui le prononce. 
L'interdit est la troixiëme des peines dicipliuaires que 
l'on nomme c e n s u r es ecclsi ostiq ues. L'interdit personnel 
peut tre illimité ou tcrnporaire. Il est prononcé contre le 
prétre qui a contrevenu gravement aux devoirs de sa pro- 
lession. C'est l'évque qtsi inflige cette peine. Les otlicia- 
lités n'étant plus reconrnes par la loi, l'ëvéqtte ne semble 
enchalné par aucune rëgle, car le recours au Conseil d'Êtat 
par appel comme d'abus ne saurait amener aucun ré- 
sultat. Le prêtre interdit ne peut administrer les sacremenls, 
ni célébrer les offices. 
]1 est du bon ordre, dit l'lglise, qu'un clerc rélractaire 
aux lois de ses supérietsrs puisse Cre puni par la privation 
des avantages et des priviléges qu'il en a reçus : cePà est 
nécessaire, ajoute-t-elle, pour le contenir dans le devoir, 
réparer le scandale qu'il a donné et l'ernlcher de le conti- 
nuer. Telle a été la discipline dès les. premiers siècles. Dan 
les decret« qu'on appelle Canons des Ap6tres, qasi ont été 
faits par les conciles dès second et du troisième siècle, l'in. 
terdit est exprimé par le mot segregare ( séparer, écarter) : 
un clerc pouvait l'encourir potsr une faute trës-légëre, par 
exemple pour s'Cre rnoqué d'un estropié, d'un sourd ou 
d'un aveule. L'interdit perpétuel ëtait appelë dposition ou 
ttd#radation : il rédtsisait un clerc à I'«:tat de simple lais. 
La peine avait aussi diflérents degrés. Quelques fois on privait 
seulement un clerc pour quelq,e temps des distribntions ma- 
n,elles qui se laiient pour fonrnir mtx ecclésiastiques leur 
suhsi,tance, et que l'on appetait dit'isio ensurna; d'autres 
fois on lui interdisait seulement l'exercice d'nne fonclion 

particulière, sans lui 6ter les autres. Si le cas Atait plus 
grave, o.n le. privait de toute Ionction. 
INTEBET, au moral, est cetamonr de noue-méme qui 
nous porte à rechercher tout ce qui nous ceuwient, de quel- 
que manière que ce soit, tout ce qui nous parait propre à 
assurer on angnmnter notre bien-féru. On a dit dans ce 
sens, depuis bien des siècles, que l'inéCéé gouverne les 
hommes, et cette maximi n'est pas encore devenue men- 
songère ; l'intdrdt est en effet un puissant mobile, et, depuis 
le plus pauvre jusqu'au plus riche, tant le monde en subit 
l'empire. L'intérdt s'empare de nous au sortir.de l'infance, 
grandit avec nos passions, et finit par étouffer dans cer- 
taines mes taule idée de iustice, d'équité, de bienveillance, 
de générosité, qui lui serait contraire. Des hommes l'in- 
tér est passé dans les nations, et l'on a dit : l'intérêt 
public, l'intérêt 9duCai, grands mots par lesquels on dé- 
signe les boeoins publics, et dont trop souvent d'habiles 
chadatans abuoent dans leur inlért personnel. C'est dans 
ce sens que l'on dit : Bien entendre ses intérêts; avob, un 
grand intért à une chose; embrasser les intérêts de qud- 
qu'un; concilier, blesser les inloerts; l'intért est la pierre 
de touche de l'amitié, etc., etc. 
Dans une signification prise en moins mauvaise part, in- 
lërt signifie l'affection, la bienveillance, les sentiments 
d'attachement qu'on a pour une personne, la part que l'on 
prend à ce qui lui arrive de fcheux ou d'agréable : c'est 
ainsi que souvent certaines personnes inspirent de l'intër 
dès la premirevue, et que l'on dit de quelqu'un qu'il est 
digne de cet intérêt, et qu'on prend intérêt à sa situation. 
Dans le langage litéAraire, on entend par intrét ce qui 
dans un o,vrage est propre à attacher, à charmer, à tou- 
cher I'rne : les romans et les piëces de thétre doivent tou- 
jours tre pleins d'intéré, sous peine d'Cre froids et inw 
nimés. 
[ On sait qu'il est une philosophie développée par L o c k e 
et par  successeurs, surtout H elvétins, Cabanis, 
Volney, soutenant, d'après Hobbes, que les bases de 
la morale ne pouvaient tre autres que celles de l'in,rUt 
privé, ou une réaction de l'amour de soi-m,me et de l'a- 
mour-propre, enfin, d'un intérêt quelconque. Ddjà L a R o- 
chefoucau Id, dans ses ]laxirnes, avait cru découvrir 
que nos vertus et nos plus belles qualités appartiennent à la 
vanité, à l'amour de soi ou à des motifs intéressés. Mais, 
sans nous croire meilleurs que nous ne le sommes en effet, 
il est impossible de confondre les notions du j u s t e et de 
l'injuste lors m,me qu'a,,cune loi n'existerait. Avant qu'il 
exister un cercle, tous les rayons partant du centre devaient 
tre égaux, dit Montesquieu, et avant que les lois fussent 
écrites, le,rs bases se trouvaient nécessairemeut dans les 
rapports naturels et rëciproques des hommes entre eux, 
comme l'avait dérnontré Cudworth (De .E[ernisjusti et 
Honesti _,'otionibus, cap. t ). Ces rapports étan donnés par 
notre organisation, il s'établit des règles d'équilibre indis- 
)ensables pour l'Ct social, cemme celle-ci : A'«.fats pas ¢ 
a«trui ce que tu ne reuz pas qu'on te fasse! Par là 
chaque nature est fixée, coordonnée dans ses limites et sa 
carrière. Le bien et le mal ont leurs relations ddfiuies ; par 
toute la terre les fondements moraux du juste et de l'injuste 
ne sont plus le résultat de coutumes arbilrah-es, mais dëri- 
vent de la constitution méme des étres, selon leur nature 
et leurs réciprocités d'action. 
Par là sont réfutées les opinions de Jérérnie B e n t h arn, 
soutenant qu'il n' a point de lois naturelles, et celles de 
l'immoral Mandeville, qui prétend démontrer les avantages 
du vice et des crimes dans la politique et la philosoplfie, etc. 
Au contraire, lord S h a f t e s b ur y, avec A d d i s o n, P o p e, 
Adarn S rn i t h, H u t c h e s o u et toute l'Cle écossaise. ont 
prouvé que dans nous il existe un principe de s.xnpathie, 
de pitié, de bonté naturelle au cœur humain, ou plut6t un 
sentiment divin de conscience, qui nous transports  
des actes de vertu exempte de tout intdrt privé, et capable, 
au contraire, de s'immoler par simple génërosité, par gran- 



deur d'Ame, selon la dignité de notre Cire. Dans cette source 
pure, nous puisons tous les éléments d'élévation, de génie 
et de sublimité qui portent aux actions les plus ravissantes 
de l'héroïsme. Ainsi, en toutes les classes d'êtres, la mère 
se sacrifie pour sa progéniture, l'individu se doit à l'État, 
par une subordination patriotique, comme une'nation se sub- 
odonne au genre humain, et celui-ci au suprême arbitre 
de toutes choses. De là résulte le concert universel de la j 
rite, de l'équité régulatrice du monde, tandis que le vice 
difforme et destructif ne serait que la ruine et l'anéantisse- 
ment de toute societ et du genre humain, si le principe 
d' ë g oï s me individuel était la règle générale. 
J.-J. VinEr'. ] 
• INTÉP, ÈT t Littérature), affection de l'me qui lui est 
chère, et qui l'attache à son objet. Dans un récit, dans une 
peinture, dans une scène, dans un ouvrage d'esprit en gé- 
néral, c'est l'attrait de l'émotion qu'il nous cause ou le 
plaisir que nous éprouvons ì en ëtre émus de curiosité, d'in- 
quiétude, de crainte, de pitié, d'admiration, etc. 
On di.tingue l'intért de l'art et celui de la chose. 
L'art uous attache, ou par le plaisir de nous trouver 
nous-mêmes assez éclairés, assez sensibles, pour en saisir 
les finesses, pour enadmirer les beautés, ou par le plaisir de 
voir dans nos semblables ces talents, cette àme, ce génie, 
ce don de plaire, d'éraouvoir, d'instruire, de persuader, etc. 
Ce plaisir augmente à mesure que l'art présente plus de 
diflïcultés et suppose plus de talents; mais il s'aflaiblirait 
bientôt s'il n'était pas soutenu par l'intérët de la chose; et 
tout seul, ilesttrop léger pour valoir la peine qu'il donne. 
Le poëte aura donc soin de choisir des objets qui par leur 
agrément ou leur utilité soient dignes d'exercer son génie ; 
sans quoi l'abus du talent changerait en un [roid dédain 
ce premier mouvement de surprise et d'admiration que la 
difficulté vaincue aurait causé. 
L'intérët de la chose n'est pas moins relatif ì l'amour de 
nous-mme que l'intért de l'art. Soit que la poésie, par 
exemple, prenne pour objets des ëtres comme nous, doués 
d'intelligence et de sentiment, ou des ttres sans vie et 
sans me, c'est toujours par une relation qui nous est per- 
sonnelle que ce sentiment nous saisit. Il est seulement plus 
ou moins vif, selon que le rapport qu'il suppose de l'objet 
h nous est plus ou moins direct et sensible. 
51AIOIOTïI.. 
INTÉRËT loyer d'un capital prét, ou bien, en 
d'autres termes plus exacts, achat des services productiJs 
que peut rendre un capita I Le capitaliste qui reçoit 
un intért cède ses droits au profit que son capital peut 
rafle; il renonce aux services productifs que son capital 
peut rendre pendant tout le temps ui il est prêté. L'en- 
trepreneur qui emprunte gagne ou perd sur l'intírët payé, 
selon qu'il tire du capital des profits supérieurs ou infé- 
rieurs à cet intérët. L'intertt d'un capital prëté peut, pres- 
que toujours, se decomposer en deux parts, l'une qui re- 
prCente et qui paye le service que peut rendre le capital, 
comme instrument de production : c'est l'inlérét propre- 
ment dit l'autre, qui représente le risque que le préteur 
court de ne pas rentrer dans son capital : c'est une espèce 
de prime d'assurance. La rareté de capitaux disponibles, 
l'abondance des emplois lucratifs et sors, tendent à faire 
hausser le taux de l'intért proprement dit. Les circons- 
tances coniraires tendent ì le baisser. J.-B. S. 
Les capitaux, fixes ou circulant sous forme de numé- 
raire ou sons toute autre forme, ne «ont en réalité que des 
instruments de travail. Tous les fruits du travail se divi- 
sent, après le travail accompli, en trois portions : l'une qui 
reste, sous le nom de salaire, entre les mains des ou- 
vricrs qui ont exécuté le travail; la seconde revenant, sous 
le unm de profit, aux chefs de ce travail, ì ceux qui l'ont 
préparé, conduit etdirigé; la roisiëme, enfin, pas, à titre 
de loyer, dans la bourse des propriétaires fonciers ou des 
capitalistes qui, restés de leur personne parfaitement étran- 
7,,'rs  l'oeuvre  accomplie, avaient abandonné temporaire- 

439 
ment et moyennant prix convenu l'usage des instruments 
nécessaires à son exécution, et qui se trouvaient leur pro- 
priété. Ce loyer, que l'on nomme fer tna 9e quand Fins- 
trument de travail cédé est une terre, plus spécialement 
loyer si cet instrument est une maison, prend le nom 
d'intérêt quand il représente le prix de jouissance d'une 
s,mme d'agent. L'intérêt est donc le prix que l'on paye au 
propriélaire d'une somme d'argent, pour en avoir tempo- 
rairement la disposition et la jouissance. Le taux de cet 
intért se compose naturellement de deux éléments, l'un qui 
repré.ente le loyer, c'est-à.dire le prix de la jouissance de 
la somme prtëe; l'antre, qui constitue une sorte de prime 
d'assurance, dont le prélèvement doit couvrir le proprié- 
taire du capital prtté des risques auxquels expose toujour 
la location d'un capital mobilier et circnlant, habituelle- 
ment consommé tout de suite par celui qui l'emprunte. 
Cette observation explique et justifie la différence qui se 
fait constamment remarquer entre le tanx des termages et 
le taux de l'intért : ce dernier est toujours le plus élevé, 
parce que l'emprunt dont il est le prix expose les capitaux 
prêtés ì de risques infiniment plus nombreux et plus 
grands que ceux qni menacent les capitaux onciers. 
L'intérêt de l'argent étant le prix que paye le travailleur à 
l'homme de loisir pour avoir la disposition de l'instrument 
de travail que pus-le celui-ci, la baisse de cet intértt est 
en général favorable aux travailleurs, et par conséquent ì 
la société tout entière, dont les intérêts sont toujours d'ac- 
cord avec ceux du Iravail et contraires ì ceux de l'oisiveté. 
Pins l'intérët de l'argent et 1é taux des fermages seront bas, 
plus il deviendra facile au travailleur de se procurer les 
instruments sans lesquels son talent, son génie, son cou- 
rage, sa force, languissent inféconds ; moins considérable 
sera le tribut prélevé par l'homme de loisir sur le produit 
du travail, plus grande sera la portion de ce produit ap- 
plicable soit ì la rétribution des travailleurs, soit au per- 
fectionnement du travail. Le bas prix auquel les travailleurs 
de tout ordre peuvent se procurer les capitaux nëcessaires 
amène par la diminntion des prix de revient la diminution 
des prix de vente; celle-ci ì son tonr produit une consom- 
mation plu forte et plus étendue, et répand jusque dans 
les extrémités du corps social l'aisance et la prosperité. En 
effet, cet universel élan de l'indu-trie dont profitent et les 
manufactures, et le commerce, et l'agriculture, ne cause 
de tort qu'à la classe fort peu nombreuse des non travail- 
leurs, propriétaires onciers ou capitalistes, s'ils ne prennent 
point le parti de conduire en personne la culture de leurs 
champs ou d'employer eux-mme à quelque entreprise 
d'industrie les capitaux pecuniaires qu'ils possèdent ; s'ils 
veulent, comme par le passé, se borner à les louer, leur 
revenu, et par suite leur aisance, diminue et décrolt peu à 
peu. La terre qui leur donnait 1,200 francs de fermage n'en 
donne plus que 1,000, et l'industriel qui leur payait 6 
pour t00 de leur argent ne veut pl,s leur en donner que 
5 ou 4, parce que le plus grand nombre des capitalistes les 
offrent à ce taux. La baisse de l'interèt est un fait tellement 
favorable, qu'il faut y voir en général le signe le plus in- 
faillible d'une grande prospérité sociale. Cette baisse pour- 
rait bien, il est vrai, provenir d'une autre cause, comme 
I'a fait remarquer un économiste moderne : la suspension 
des affaires et Pinaction des travailleurs pourraient faire 
tomber le taux de l'intért, parce que les capitalistes, n'en 
trouvant pas l'emploi, seraien! les premiers ì provoquer 
cetle baisse ; mais il faut convenir que si ce phénomène 
n'est pas impossible, il est bleu rare : en pareil cas, les ca- 
pitalistes sont plus empresses à retirer leur argent des af- 
faires qu'à I'y faire entrer; ils aiment mieux vivre quelque 
temps sur leur capital et laisser passer la crise que de 
courir pour un modique revenu la chance d'une perte to- 
tale. 
Du reste, ce n'est point la théorie seule qui indique l'a- 
baissement du tanx de l'intert comme un smpt6me de 
prospérité, l'histoire économique de tons les peuples dt 



440 
l'Europe moderne démontre la justesse de ce prinçipe. Ce 
que nous venons, par hypotttèse, d'imaginer sur les effets 
heureux que produit la baisse de Pintérét n'est que le récit 
exact de ce qui se passe en Europe depuis le moyen ge. A 
mesure que les habitudes et les mœurs gtserrières ont re- 
culé devant les mœurs paciflques et les habitudes labo- 
rieuses; à mesure que l'absurde préjugé qui faisait noble 
la vie oisive s'est atfaissé; à mesure que l'industrie a brisé 
ses chalnes, et cooquis dans la société la place immense 
qu'elle y occupe aujourd'hui ;  mesure que le crédit s'est 
perfectionné, et que les condilions dans lesquelles sexécute 
le travail se sont assez améliorées pour que les chaoces de 
gain contre-balançassent avantageusement les chances de 
perte et de spoliation, on a vu, parallèlement  ces pro- 
grès, l'in|ért de l'argent s'abaisser suivant une loi cons- 
tante. Dans la baisse constante du taux de l'intérét, baisse 
inévitable, parce qu'elle résulte de l'accroissment mème de 
la prospérité sociale, nous voyons l'un des germes les plus 
elficaces de la régénération sociale, doot tant de sympté- 
mes cachés jtssque ici commencent à se manifester depuis 
quelques années. 
La conséquence directe de ce qui vient d'ëtre dit, c'est 
qu'une société bien gouvernée verra noo-seulement sans 
alarme, mais encore avec satisfaction, la baisse de i'intérét ; 
car les sociélés ne doivent point périr, mais elles doiveot se 
regbnrer; et la régënération sociale est desormais au prix 
de l'emancipation da travail et de l'affraocbissement des 
travailleur.q. qon point que nous entendions provoquer par 
ce conseil des lois sur l'usure : l'argent est une marchan- 
dise comme une autre ; il est naturel et mëme nécessaire 
que, suivnnt qu'il est offert et demandé, selon qu'on a ph 
ou moins besoin de ses services, selon le risque plus ou 
moins grand couru par le peCur, le prix paye pour sa lo- 
cation s'élève ou s'abaisse. Comme ioute denree, l'argent est 
soumis à la loi de concurrence, devenue anjo'-,rd'hui, sous le 
rapport industriel, le droit commuo de la plupart des so- 
ciétés. Cela et bi vrai que toutes les lois faites dans le but 
de fixer à un certain chiffre le taux de l'interët sont res- 
tées sans action, et que partout et toujours elles ont été 
publiquement éludées. Charles LEOIE/. 
INTÊRËT (Bègle d'). Lïntértt de l'argent se calcule 
ordioairement en prenant pour base l'intcrèt rapporlé par 
une somme fixe de t00 ff. pendant une période d'une 
année ; c'est ce qu'on appelle le taux de l'iotérët : si le 
taux, par exempte, est 3, on dit que le capital est placé à 3 
pour cent, ce que l'on écrit ainsi : 3 p. 0/0, ou, plus simple- 
ment, 3 0.0. La rëge d'inlërêtest fondée sur ce principe 
que l'inlért d'un capital est à la fois proportionnel à ce 
capilal, au taux, et enfio au temps, c'est-d-dire à la durée 
du placement. Ainsi, seut-on calculer ce que rapporteraient 
6,/80 ff. plac6s à 4 pour fo0 pendant 8 moi», la proportion 
100: 6-180: : 4 :. 
nous donne z = 259 ri. 20, somme rapportée par 6,480 ff. 
en une année. Pour résoudre la question, il n'y a plus qu'a 
multiplier ce résultat par le rapport de la durée du pla- 
8 2 
cernent " l'unitWde temps, c'est-à-dire par  ou , et on 
trouve enfin 172 Ir. 80 pour la somme demandee. 
En général, soit a le capital, i le taux, t le rapport de la 
d',rée dt placement à l'unitWde temps; l'intérèt I est donné 
w-r la formule 
I _ait 
q ui s'emploie également dans I'e s c o m p t e commercial, et 
dont nous avons à ce snjet indiqué quelques simpliflca- 
|ion.q propres à certains cas particuliers. 
Ce que dons venons de dire ne s'applique qu'h l'intdrét 
simple. L'in/érét composé est celui qui, au lieu d'Cre 
l,ay, chaque année, s'ajoute an capital pour porler lutCéf 
 son tour. En représentant par r l'in|érét annuel de t fr., 
ce ,lui revient  poser i 100 r, on trouve que le capital 

ITÉBËT 
a, placé  intéréts composés, devient an bout de n années, 
A=a(t÷r)a. 
Le calcul de A s'efl'ectue h l'aide des Iogaritl,mes : on a 
Log A--Loga÷nLog(t÷ 
La tl»çorie de l'intérêt composé, toujours vraie au poiut 
de ¢-ue purement arithmétique, deviendrait pratiquement 
absurde si on voulait l'appliquer sans restriction  des opé. 
rations dont la durée dépasserait certaines limites I comme, 
par exemple, le célèhre testament de T h e 11 u s s o n ). Qui 
ne sonnait le tameux paradoxe du centime de Charle- 
magne ? Par la formule, on trouve que, si c.et empereur 
eut, lors de son couronnement (en 800, placé un seul 
centime à 5 pour t00 au profit de la génération actuelle, le 
Iogarithme de la somme résultant de cette faible épargne se- 
rait auourd'hui (tsar) Cai  
Log 0,01 ÷ 155 Log 1,05 
 -- 2 ÷ t055 ÷ O, 02t t89g  20, 35rTtt5, 
ce qui indique un nombre de francs représenté par 21 chif 
fres. Chacun des 5 millions d'habitants de la France au 
rait actuellement un revenu annuel de plus de cent nil 
liards L.. Ce résullat indique seulement la rapidité de l'ac- 
croissement des termes d'une progression géométrique 
dont la raison est plus grande que l'umté. Il est du reste 
facile de concevoir qu'un capital placé à 5 pour 100 est plus 
que doublé en quloze ans, plus que quadruplé en vingt.neuf 
ans, plus qn'octuplé en quarante-trois, ans, etc. Tout ce 
que nous devons conclure de là, c'est que si le calcul des 
iotëréts composés doit entrer comme élément essentiel dans 
certaioes questions, telles q ue celles d'a n n u i t é s, d' a s s u - 
ç ances, etc., il faut cependant se défier des conséquenceg 
que pon.rrai[ en tirer l'économie sociale. E. lIaaux. 
IOETERET (Droit]. En droit, ce mot s'entend du profit 
qu'un créancier peut tirer de l'argent qui lui est d/, et aussi 
de la part qu'on a dans une s o c iWt é, dans une entreprise, 
dans un bail, etc. 
Les Iégislateors se sont de tout temps occupés de fixer 
le taux légitime de l'intérèt de l'argent, qui est, à propre- 
ment parler, le loyer payé au proprietaire du capital par celui 
auquel il le confie il qui en lait usage. Aussi, le laux de 
l'iutert a-t-il varié avec les besoins, les mœurs, les carac- 
tères et les climats des nations. A Borne, le terme moyen 
fut de 12 p. t00 par an. E France, un édit de Charles IX, 
de t576, fixa le taux de l'intérét au denier t2, c'et-à-dire a 
8  p. 100; sous LoulsXIV, un édit de 1695 le fit descendre 
au dernier 20 ( 5 p. I00 ). Sous Louis XV il fut encore réduit. 
11 ne cessa de varier qu'en 1807. La loi du 3 septembre de 
celle année lut rendue en exécution de l'article t907 du 
Code Civil, ainsi conçu : « L'intérét est légal ou conven- 
tionnel ; l'intert consentionnel peut excéder celui de la loi 
toutes les fois que la loi ne le prohibe pas. » Ele Cit les 
principes qui régissent aujourd'hui cette matière. « L'intérêt 
conventioonel, dit cette loi, ne pourra excéder en matière 
civile cinq pour cent, ni en matière de commerce six pour 
cent, le tout sans retenue. » L'intérèt légal sera en matière 
civile de cinq pour cent, et en matière de commerce de six 
pour cent, aussi sans retenue, • Lorsqu'un prèt conven- 
tionnel aura été fait/ nn taux excédant celui de la loi, les 
tribunaux doivent ordonner la restitution on la réduction, 
et s'il  a habitude de prêts semblables, le délinquant peut 
ëtre puni pour nsu re. 
Les intérèts se subdivisent en plusieurs sortes, suivant les 
circonstances qui leur donnent naissance. Les intérts 
sont d2s de plein droit, de mme que le capital, et sans 
qu'il soit besoin de demande judiciaire, Iorsqu'il s'agit ou 
de restitution d'un objet produisant des fruits, ou d'ue 
indemnité à défaut de restitution. En matière de commeroe, 
les créances provenant d'opérations commerciales régls 
par compte courant sont productives d'intérts d'après l'u- 
sage constant du commerce. Le solde d'un compte courant 
est productif d'intérèts comme la créance originaire. Le 
avances entre commerents pour remboursements des billets 
en souffrance sont productives d'intérëts. En matie de 



ISTÉRÉT -- INTERFÉREI£E 
tulelle, le tuteur doit tutCit pour toute somme formant 
un capital assez considérable pour être employé en cons- 
titution de rente on en acquisitions d'immeubles. En 
fière d'l,éritage. Iorsq,t'un héritier doit rapporter quelque 
chose à la succession, les intérêts partent du jour de l'ouver- 
ture de la succcsion. En tait de mariage, les intérëts de la 
dot courent de plein droit du jour du mariage. En matiCe 
de vente, l'acheteur doit l'intérêt depuis la vente jusqu'au 
payement du capital dans les trois cas suivants : s'il a été 
ainsi convenu lors de la vente ; si la chose vendue et livrée 
produit des truits ou autres revenus; si l'acheteur a été 
sommé de payer. Dans ce dernier cas, l'intdrt ne court 
que dep,is la sommation. En matière ,te mandat, Pintérêt 
des avances faites par le mandataire lui est dt par le man. 
riant à dater du jour des avances constatC. 
On nomme intrts conven¢ionnels ceux qui résultent 
d'une promesse autorisée par la loi. Dans l'ancien droit, les 
cas où il était permis de stip,der des intérêts étaient déter- 
minés par des dispositions Iéslatives; a,,jourd'l,ui il est 
permis de stipuler des intérêts pour simple prêt, soit d'ar- 
gent, soit de denrée, ou autres ci,oses mobiliéres. On peut 
stipuler des intérêts dans toute espëce de contrat. Dans 
le cas où ils ne sont pas stipulés, on ne peut les suppléer. Le 
taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. 
On peut stipuler un intérêt moyennant un capital que le 
préteur s'interdit d'exiger. Dans ce cas le prêt prend le 
nom de constitution de rente. 
Les intgréts.iudicioires et moratoires, à la différence des 
intérêts qui sont de droit et de ceux qui sont conventionnels, 
ne s'obtiennent que par tme demande judiciaire intentée par 
le créancier contre son débiteur ou par une mise en demeure; 
«le là le mot moratoire ( de nora, retard ). Ainsi le dé- 
positaire ne doit aucun intért de l'argent déposé, si ce n'est 
1lu jour oil il a été mis en demeure de faire la restitution. 
Le mandataire doit l'intért des sommes qu'il a etnplo,ées 
à son usage à dater de cet emploi, et de celles dont il est 
reliquataire à compter du jour qu'il est mis en demeure. La 
demande d'intérgts formée contre l'un des débileurs soli- 
claires fait co,trir les intérëts à l'égard de tous. La citation 
n conciliation tait courir les intérêts, pourvu que la de- 
mande soit Iormée dans le mois à dater du jour de la non- 
¢omparution et de la non-conciliation. En cas de non-paye- 
ment d'un effet de commerce, les intérêts moratoires ne 
courent point du lour de l'écl,éance, mais seulement du 
iour du protêt à défaut de payement. 
Les intérêts écbus des capitaux peuvent produire des 
intérêts ou par une demande judiciaire, ou par une con- 
vention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit 
dans la convention, il s'agisse d'intérèts ds au moins pour une 
année cuitCe.Cette lac,tirWde faire produire des intérèts à un 
capit al formé d'intérëts s'appelait autrefois a n a t o c i s m e. 
Dans l'ancienne législation, il était dfendu, et très-peu 
d'exceptions étaient accordées. On a levé cetle prohibition 
dans le Code Civil, parce que les intérêts échus forment pour 
les créanciers un capital qui produirait des inlérgts s'il l'avait 
entre Is mains et pouvait le placer. L'anatocisme, quoique 
permis, est cependant dangereux, parce qu'il est lacile d'en 
abc,ser pour se procurer des prolits illicites. 
L'emprunteur qui a payé des inférgts qui n'éiaient pas 
«tipuléa ne peut ni les répéter ni les imputer sur le capital. 
Cette maxime ne s'applique pas aux intérgls nsuraires. 
On nomme intérêts citils les dommages-intérêts 
iue l'on réclame dans une affaire criminelle. 
Les intérêts des sommes prêtCs et généralement tout ce 
qui est payable par année ou à des termes périodiques pl,ls 
courts, se prescrivent par cinq ans. Les intéréts moratoires 
résultant de condamnafions judiciaires, qui sous l'ancienne 
iurisprudence n'étaient soumis qu'à la prescription de trente 
an, se prescrivent aujourd'l,ui par cinq an. 
E. ne Cuannoe. 
La loi des 3uifs leur interdisait entre e,x tout prêt à in- 
{rêt. Les Pères de l'Elise chrétienne renouvelèrent l'ana- 

441 
rbCe contre l'usure, mot qui h,t longtemps synonyme d'in- 
térèt. On alla jusqu'à assimiler l'usure au vol. Mahomet 
proscrivit également le prêt à intérèt. Les philosopl,es grecs 
s'étaient déjà éloq,emment élevés contre cet usage de tirer 
profit de l'argent prêté. La loi civile tenta au,si de prohiber 
l'intérêt; mais elle s'arrèta vite, dans la crainte d'anéantir 
tout commerce. On essaya alors de fixer un intérgt légal. 
Ruine régla cet intérêt à plusieurs reprises : les nations 
modernes l'ont imitée. Mai à c6té de l'intérêt il faut placer 
une prime d'assurance qui s'lève suivant les chances de 
perte. L'abaissement tin taux légal eut donc souvent pour 
effet d'élever la prime d'assurance, qui se dém»i.e de mille 
façons. Le péril d'une contravention augmente toujo,lrs le 
prix du loyer de l'argent. Plus on rançonna les juifs, au 
moyen tige, plus ils se montrèrent ingénieux à faire monter 
le prix de leurs capitaux. Le numéraire, l'argent, est une 
I marcl,anllise comme une autre, «lisent les adversaires du taux 
légal ; po,lrquoi, si vous ne voulez pas souffrir de transac- 
tions particulières a,t-dessus d'un certain taux, en permettez- 
rons tous les jours dans les affaires publiques ? Quelques 
emprunts publics se sont laits au-dessns du taux légal. Le 
nont de piëté, qui est parfaitement gara,,ti, loue son argent 
à un ta,x tnonstruenx I Pourquoi est-il permis de prèter à 
t0 pour t00 en Algérie? Prêchez donc d'exemple. Vuus ne 
le pouvez pas ; alors laissez chacun libre de traiter comme 
il lui convient d,t prix de l'argent, ainsi qu'on le fait dans 
certains pays,'en Danemark, par exemple. A cela on répond : 
Ie pas fixer un maximt,m d'int6rgt, c'est livrer à ,,ne mi- 
sère prochaine le jeune I,omme sans expérience, l'homme 
nécessiteux qui, pour une journée «le plaisir ou un morceau 
de pain céderait parfois un avenir brillant. Ce serait sti- 
muler le commerçant, l'agriculteur à se jeter dans les affaires 
les plus I,asardeuses, à.jouer le plus gros jeu. Si maintenant 
il tombent sous la griffe d'un usurier, ils peuvent «lu moins 
faire réduire leur créance par les tribunaux. On aurait tort 
de confondre le prix de l'tutCêt avec les frai d'actes qu'en- 
tralne le prt. Ces frais aug+nentent bien à la vrité le prix 
du loyer de l'argent : mais le prètenr n'en tire aucun profit : 
c'est une prime d'assurance, paȎe non pa., an bailleur, 
mais à l'Etat, et une commision à l'entremette,w. De bonnes 
lois, de bonnes mesures administratives peuvent réduire 
beaucoup ces frais. 
Une école socialiste a demandé l'abolition «le l'intérët; mais, 
pour sauve garder la liberté individuelle, elle était obligée 
de réserver une prime d'assurance. Dans le système de 
51. Proud h,n, toutes les marcbandises, en y comprenant 
l'argent, le numéraire, l'habitation, toute espèce de service, 
s'échan._'ent co,,tre d'antres marcl,andises, d'autres services, 
sans jamais produire d'intèrêts : le locataire devient proprié- 
taire en payant son loyer ; le cordonnier paye son cuir et son 
pain par une certaine quantité de souliers labriqués; mais dans 
les ëchanges interviennent nécessairement des primes 
surances contre les pertes possibles, contre les erreurs «lu në- 
goceet de la fabrication. A quel taux s'élèveraient ce primes 
L'expérience seule le dirait : l'auteur pensait qu'elles s- 
raient tfC-faibles ; d',utres ont pu croire qu'elles dépasse- 
raient le prix actuel du loyer de l'argent. Comment cela se- 
raitlil possible, demandera-t-on, puisqu'une prime d'assu- 
,anse se joint a,tjourd'bni à l'intérgt ? C'est qu'elle peut 
être d'a,tant plus faible que le systeme de l'int¢.rèt semble 
mieux la garaptir. L. Lovv. 
i.XTERFEENCE (d,! latin inter, entre, et .ferre 
porter }, mode particulier d'action que les rayons lumine,lx 
exercent les uns sur les autres, et en vertu duquel, ainsi 
que l'ont successivement constatë Grimahli, Young et 
F r e s n ci, dans certaines conditions, la lumière ajoutée à 
«le la lumiëre produit de l'obscurité. Le principe général 
des interférences, qui appartient au sysme de l'ondulation 
de la lumière, s'énonce ainsi : Si deux rayons h,mineux 
homogénes, émanés d'une même source, se rencontrent 
sous ,,ne petite obliquité et après avoir parcouru des ci,e- 
tains ëgaux, ou dont la différence soit un nombre pair 



44  INTERFÉRENCE 
demi-ondulations, leur intensité 'ajoute; si an contraire 
ces deux mimes rayons out parcouru des chemins qui 
différent d'un nombre impair de demi-ondulations, leur ac- 
tion se détruira, et on aura de l'obscurité. Ce principe, que 
l'on peut constater par l'expérience, s'établit par le raison- 
nement. La théorie des interfèrences explique la dit-- 
fraction, les anneaux colorés, la scintillation 
des étoiles, et une foule d'autres phénomènes d'optique. , 
Les m_mes principes ont été appliqués aq son. 
INTÉRIEUR (Ministère de I'). Le ministère de l'in- 
!Cieur embrasse actuellement dans ses attributions la po- 
lice et la srelé générale de l'empire, les lignes télégraphi- 
ques, l'organisation municipale et départementale, le service 
des gardes nationales, le personnel des préfets, sous-préfets, 
conseillersde prefecture, et des maire% les Imspices, bureaux 
de bienfaitrice et monts de piCC les établissements péni- 
lenliaires, excepté les bagnes, les régies, etc. 
L'origine du ministère de Piut¢rieur ne remonte pas au 
delà de la Révolution. Il lut créé par l'Assemblée consti- 
tuante, et l'administration civile du royaume lui Chut en 
partage; il comprenait tous les établissements de science, 
d'art, d'industrie, d'utilile générale, d'instruction publique. 
Le décret du 2 germinal le supprima avec les cinq au- 
tres ministères ; etsix commissions lui furent substituées, 
entre lesquelles furent rparties ses atlributions multipliées; 
mais le système de la Constituante prevalut de nouveau 
l'année suivante, et le ministère de l'lutCieur fut rétabli 
sur.les mmes bases qu'auparavant. Eu l'an v eut lie, le 
premier demembrernent de cette grande machine politique, 
qui en a tant subis depuis. Le Directoire forma avec une 
de ses directions générales un nouveau ri,si.tère, le minis- 
tère de la police. De méme, en l'an xp, un minislrre des cultes 
fut encore cré à ses dépens ; enfin, en lit I un nouveau d- 
membre:nent érigea en ministère les sec!tons relatives aux 
manufactures et au commerce. Sous le gouvernement de la 
Restauration les remaniements ne lutent pas moins fréquents. 
Rinégré d'abord dans la plcnilude des attributions qui lui 
avaient été primitivement dévolues en t791, par la suppres- 
sion des alCarlements des tulles, du commerce et de la 
police géncrale, on ne tarda pas à le demembrer de non- 
veau, pour créer le ministère de lï n s t r u c tin n p u bl i- 
q u e e t d e s c u l te s, ainsi que celui des travaux publics, 
lbr,né quelques semaines seulement avant la révolution de 
1830. De nombreux changemements furent encore apportés 
à l'organisation générale de ce ministère, sous le règne de 
Louis-Philippe, à cause de l.'extension toujours croisnte 
des services publics et à caisse aussi des convenances par- 
ticulières des indiidualitës appelées à se partager les por- 
teleuilles. Le ministère de l'lutCieur prit une grande ira* 
portance sous le gouvernement provisuire de t 88, sans que 
ses atlributions pourtant eussent été notablement rendi- 
tC. Depuis le coup d'État de t$St on en a successivement 
distrait l'agriculture ri le commerce, réunis maintenant aux 
travaux publics ; la police génërale, qui forma pendant quel- 
que temps un ministëre spécial, et qui lui est revenue; la 
divi.ion des beaux-arts et la section des théàtres, qui ont 
été transférées au ministère d' Ëtat. 
INTERIM mot latin, passé sans modification dans 
notre langue, et signifiant, d'après l'Académie, I'entre-tenps : 
iL ne s'emploie généralemeut qu'en parlant de fonctionnaires 
appelés à remplir provisoirement ou pendant un laps de 
temps assez court les fonctions d'un autre, qui ne peut les 
remplir au moment oùils le uppléent ; c'est ainsi qu'on dit : 
un rainistre par on ad intérim, un préfet par intrira; tel 
Iouctionnaire remplira l'interirn. 
INTÉRIM. C'est ainsi qu'on dé.signa au temps de la 
Réformation une ordonnance de l.'empereur qui réglait 
provisoirement {intrira) de quelle laçon on devait pro- 
céder dans les affaires de religion objet d'un litige, jusqu'à 
ce qu'elles eussent ëté decidées par un concile universel. 
Dès i'année 151, Granvelle avait rends à une commission 
établie à Ratisbonne pendant la dièle de l'Empire à l'effet 

-- INTERLAKE[ 
de rétablir la paix dans i'Eglise, et dont faisaient partie Eck, 
Pflug et Gropper pour les catholiqnes, blélanclithon, Bucex 
et Je«n Pistorius pour les.protestants, un mémoire conte- 
nant les bases d'un projet de conciliation. Plus tard on 
donna à ce mémoire le nom d'Intérim de Ratisbonne, 
çt les protestants celui de la ltgène, parce qu'ils crurent 
que le but de cet écrit Cait de les ramener au catholicisme 
par ruse et par surprise. Les Iégats du pape Contarini et 
lloraui le revisèrent avec soin. On ne tarda pas  tomber 
d'accord sur le dogme de la perfection humaine avant la 
chute de l'homme, sur le libre arbitre, sur le péché originel 
et la justification ; main des différends sur la nature des 
sacrements et sur le pouvoir de PÉglis¢ firent échouer ce 
premier projet de réunion, et dans le recéz de la diète 
{ 29 juillet 1541 ) l'empereur annonça que les négociation 
cnmmencées seraient reprises dans ur. concile, et que les 
proteslants ne devraient plus ni combattre les articles.,s,,r 
lesquels on s'était accorde, ni en sortir. 
A la nouvelle diëte de l'Empire, tenue a Augsbourg, en 1548. 
l'empereur proposa encore un nouvel lntrira, dont la ré- 
daction avait été confiée à PIlug,  Heiding et à Agricola, et 
qui est connu dans l'histoire sous le nom d'Intérim d'Augs. 
bourg. On y concédait aux protestants la communion sous 
les deux espèces, le mariage des prètres et dautres points 
moins importants. Il n'en rencontra pas moins la rësistance 
la plus vive, et ne put Sire adopté qu'un midi de l'Allemagne, 
parce que l'autorité de l'empereur l'imposa de vive force; 
mais au nord il fut ou positivement rejeté ou singulièremenl 
modifie. 
A la diète tenue à Leipzig le 22 décembre, i'ëlectear blau- 
rice de Saxe fit rédiger i'lntrim dit de Leip'-.ig, qui ga- 
rantissait la foi protestante, accordait la plus grande partie 
des cérémonics callmliques comme indifférentes en elles- 
reCes, et reconnaissait mme la puissance du pape et celle 
des évêques, du moment o0 ils n'en abusaient pas. iédigé 
par Mélanchthon, Bugenhagen et Major, cet Intérim adopta 
de nouveau quelques usages catboliques ; ce qui irrita sin- 
gulièrement les lutliériens rigides, et fut l'origine des pre- 
mières divisions intestines qui éclatërent dans l'Êglise r- 
formée. L'Dttërim cessa dëtre en vigueur après le traité de 
Passau. 
INTERJECTION, terme de grammaire qui sert de 
dénomination à la dernière des parties du discours. L'inter- 
jection est un mot qui exprime ordinairement un mouve- 
ment, un sentiment de i'àme, comme la joie, la douleur 
la crainte, la «urprie, etc. : Aht oh! hé! helas!hol! 
eh bien ! oh ciel! ;non Dieul sont des interjections. « Sous 
le nom d'interjection, dit un savant grammairien, on 
comprend ces sons exclamatils que nous arrachent les sen- 
timents dont nous sommes affectés, et par lesquels ils se 
manifestent liors de nous ; ces cris de plaisir ou de douleur, 
de joie ou de tristesse, d'approbation ou de mépris, de 
sensibilité, en un mot, que nous proférons par i,ne suite 
des sensations que nous éprouvons, quelle qu'en soit la 
cause. Peu variées entre elles par le son, elles le devien- 
nent à lïnfini par le plus ou moins de force avec laqndle 
on tes prononce, par le plus ou oin« de rapidité dont 
elles se succèdent, par les changements qu'elles occasion- 
nent sur la physionomie, par le ton qu'on leur donne. Sous 
les diverses formes qu'elles prennent, éclatent le cri de la 
douleur, les sons admiratifs, les diverses espèoesde ris, etc. • 
Le mot interjection, composé de deux murs latins, et qui 
signifie prnfére par intervalles, convient très-bien à cette 
partie & discours, qui est semée, pour ainsi dire, avec les 
autres sans se lier avec aucune. En un mot, l'interjection 
est un signe de ce qui se passe dans l'Ame de celui sud la 
laisse échapper. C'est surtout par elle que nos scntions 
se communiquent à lOS semblables, dans le degré néces- 
saire pour qu'ils puissent y prendre part. 
CHAMPAGAc. 
INTERLAI{EN, chef-lien de bailliage du canton de 
rne, oemprenaut une population de 19,6o0 habitants. 



INTERLAKEN 
est situé à 595 mètres au-dessus du nivau de l'Océan, dans 
l'une des plus ravissantes coatrées de l'Oberland bernois, 
eu face de la pelite ville d'Untersecn, entre le lac de Brientz 
et le lac de Thun, or à l'issue de la vaP, ée de Lauterbrnnn. 
Il s'y trouvait autrefois deux ¢ouvents d'angnstins, qui 
furent supprimés à l'époque de la Réformation. Le bourg 
d'Interlaken s'est formé par l'accumulation successive des 
l,telleries et des penious qu'on a établies autour du chg- 
teau, et où viennent séjourner tous les ans un grand nom- 
bre d'Crangera, appartenant en général aux classes élevées 
,le la société. C'est surtout depuis une trentaine d'années, 
par suite de la création d'un établissement où le petit lait 
«st employé comme moyen curatif, que le nombre des vi- 
.,itenrs étrangers y a toujours été en angmentant. 
INTERLIGNE. Voye:, CoPosmo, ( Typographie ). 
INTEP, LINÉAIIE (de inter, entre, et linea, ligne ). 
Ce mot se dit de ce qui est écrit entre les lignes d'un ma- 
uuscrit ou d'un livre. 11 est défendu aux horaires et autres 
officiers ministérieis, grelflers, etc., de rien crire entre 
les lignes des actes; les commerçants ne doivent non plus 
ricn écrire entre les lignes de leurs registres. On nomme 
traduction interlinéaire celle qui est faite mot b mot ou 
par phrase entre les lignes du texte original. Ces traduc- 
tions mot  mot ne peuvent guère servir qu'anx étudiants ; 
mais elles ont i'inconvénient de rendre l'original d'une 
manière incorrecte, en ne tenant pas suffisamment compte 
«le la différence du génie des langues, et d'habituer l'Cève 
t la paresse. 
INTEIALOCUTOIIAE (Jugement). Décision judiciaire 
en première instance ou en appel, qui ordonne avant faire 
droit au fond, et en tout état de cause, que préalablement 
il sera fait uue vérification, une preuve, une instruction 
préjugeant le fond. Il peut Cre fait appel d'un jugement in- 
terloc,toire avant que le jugement défiuitif ait été prononcé. 
Il ne faut pas le confondre avec le j u 9 e me n t prépara- 
toire, qui prescrit des mesures ayant pour but d'arriver  la 
,lëcouverte de la v6rité, mais sans rien préjuger du fond. 
Le mot interlocutoire est aussi employé comme subs- 
tantif, pour exprimer l'incident qui le provoque. Ainsi, on 
«lit : Faire appel ou se pourvoir en cassation contre l'interlo. 
cutoire. 
INTERLOPE. Ce mot se dit du commerce qui a pour 
!tut d'introduire dans un pays des marchandises prohibées 
,m sujettes aux droits, sans payer ces droits. Les marchan- 
dises ainsi introduites en contrebande prennent le nom de 
narchandises interlopes. On donne le méme nom aux bti- 
ment de mer employés à ce commeroe. Au commencement 
,m nommait interlope un navire marchand trafiquant en 
fraude dans les pays de la concession d'une compagnie de 
commerce ou dans les colonies d'une autre nation. 
INTERMÈDE. Au théâtre, c'est le nom générique de 
tout ce qui se trouve intercalé entre les actes d'un ouvrage 
dramatique, danses, cou#ets, etc. Les choeurs des tragiques 
;recs rentraient aussi dans ce genre, ainsi que les satyri 
des Bomains. On le retrouve dans nos premières représenta- 
tions en langue vulgaire; et plusieurs nstères sont cou- 
pés par des hymmes ou des psaumes. L'intermède était 
tort  la mode dans le siècle de Louis XlV : Moliére dut 
en placer dans toutes celles deses pièces qui furent jouées 
,l'abord à la cour; on n'en a guère conservé que les inter- 
mèdes buriesques du Malade imaginaire et du Bourgeois 
9entilhomme, off l'on retrouve encore quelque chose de sa 
verve comique. Dulresny et Dancourt mirent aussi de i'es- 
pri.t et de la gaieté dans leurs intermdes. Eu Angleterre, les 
tours de force-ou d'agilité des c iv w n , en ltalie la danse 
.les 9rote$chi, en Espagne les bouffonneries du gracioo, 
font principalement les frais des intermèdes des pièces sé- 
rieuse.s. Diderot avait voulu en innover une autre sorte en 
proposant de remplir les entr'actes par des scènes mimées, 
,lui auraient servi de complément à l'action. Les couplets 
Iouffons qu'on chante dans les entr'actes sur plusieurs 
ieène$ de vandevilles sont encore des inlermèdes. Sout 

-- INTERNE 44 
Louis XIV, on avait encore donné le nom d'ntermèdes, ou 
eu tremets, à des dans es qu'on cxécutait entre le dlner 
et le souper. 
Dans le siècle dernier, on appelait également ainsi 
petits opéras en un acte, tels que La Servante maftresse, 
Le Devin du village, etc. C'est l'Académie royalo de Mu- 
sique qui, tout en dérogeant jusqu' l'opéra villageois ou 
comiqoe, avait vonlu sauver sa dignité en les désignant par ce 
titre inusité. Il n'y a plus aujourd'hui d'intermèdes dans ce 
sens, et Le Philtre est qualiflé d'opéra sur l'affiche, comme 
La Muette ou Bobert le Diable. Owx. 
INTERM ÈDE (Pharmacie). Voyez Forawz. 
lXTERMISSION. Voyez Accès. 
INTERMITTENCE (du latin inter, entre, et mittere, 
placer), intervalle de temps pendant lequel un mouvement, 
un effet cesse et recommcnce alternativement. Ainsi, par 
exemple, il y a des fontaines qtfi tarissent pendant un 
certain temps, puis recommencent  donner deiMau comme 
auparavant. Les accés de certaines fièvres dites inter- 
mittentes, de la folie, sont dans le mème cas. Dans les 
jeux de hasard, on al,pelle intermittences des sédes qui 
se composent de coups qui appartienneut alternativement a 
deux chances différente« et opposes. 
IXTE'MITTÈXTE (Fièvre). Vogez Fi/v 
INTERNATIONAL (Droit). Voge: JR01T DES GENS. 
IXTEXE. Ce mot, dérivé du latin, est reçu en flan- 
çai% tant6t comme adjectif, tant6t comme substantif. Dans 
la première de ces acceptions, il sert à désigner en général 
tout ce qui est au dedans, ainsi que l'adjectif externe ex- 
l,rime tout ce qui est art dehors. On peut le cousidérer comme 
étant synonyme d'ntPrieur; car les nuances q,fi différencient 
ces deux expressions sont subtiles et plus spécieuses que 
rationnelles. 
En medecine, on emploie adjectivement le mot interne 
pour distinguer les maladies dont les siéges sont cachés 
dans l'mlCeuf du corps, d'avec celles qui sont visildes 
extérieorement. C'est ain»i qu'on a partagé l'art de guérir 
en deux divisions principales : la pathologie fnterne, ou 
m é d e c i n e, selon l'acception commune, et la laathologie 
externe, ou c h i r u r g i e. Ces distinctions, encore admises 
dans l'enseignement médical, sont cependant peu senMes, 
p:,r¢e q,e toutes les parties du corps sont tellement liées 
entre elles qu'elles ne peuvent éprouver d'altérations un 
peu notables sans qu'il ne s'en manifeste des signes au de- 
hors comme au dedans. On reconnalt mème aujourd'hui 
qu'on ne peut ttrc chirurgien sans tre médecin. Cette don- 
nC, érigée er principe, lors de notre régénération poli- 
tique de 1789, honore la raison contemporaine. 
L'adjectif interne, riaitWen géométrie, l'est principalement 
dans l'etude de l'anatomie, qui a emprunté à cette science 
mathématique une partie de son langage pour décrire con- 
venablemcnt les formes et les rapports des diverses parties 
du corps humain. 
EmploiWcomme substantif, le mot interne, pris isolé- 
ment, dësigne les étudiants qui demeurent dans les écoles 
le pensions, les colléges, les etablissements destinés à 
l'instruction de diverses connaissances. C'est par ce nom 
qu'on distingue les éléves atla¢hés au service des h6pitaux 
civils, oh ils montent tour à tour la garde, font les panse- 
ments, et pratiquent les opérations ¢hirnrgicales qui sont 
les plus simples, off ils sont en outre chargés de suivre les vi- 
sites de« médecins et chirurgiens, afin d'enregistrer leurs pres- 
criptions d'aliments, de m,:dicament% et leurs observation_-- 
relatives aux maladies. Leur service, enfin, équivaut/i celui 
des chirurgiens sons-aides dans les hpitaux militaires. Ces 
places, qui s'acquièrent par la voie des concours, excitent 
virement l'ambition des étudiants zé16, parce qu'elles ac- 
croissent beaucoup les moyens d'instruction, en facilitant 
l'ëtude de l'anatomie normale et pathologique, ainsi que 
celle de la médecine eliniq,e. Alssi les internes des hpi- 
taux de Paris et ceux de l'école pratique composent-ils 
56. 



444 
l'élite des étudiants, et tout démontre aujourd'hui l'avantage 
de cette institution. L'emploi d'interne, enfin, est si im- 
portant pour les Cudes mëdicales, qu'on devrait imposer 
aux élèves cette condition indispensable, à laquelle ils peu- 
vent satisfaire dans toutes les villes. 
On distingue encore par le mme nom, dans les coiléges, 
comme dans les pensionnats, les élèves qui demeurent dans 
ces établissements d'avec ceux qui n'y passent qu'une partie 
de la journée, étant Iogés et souvent mëme uourris au dehors. 
D r Cno;,I. 
IXTEBXEMENT, INTEBNÊ. L'internement est une 
sorte de haute s u r vei I I a u ce administrative, mise en pra- 
tique après les événements de 1851, et qui consiste  im- 
poser a la personne désignée le séjour d'une ville ou d'un 
endroit plus ou moins limité, avec l'obligation de se mon- 
trex aux autorib:s certains jours et a tontes réquisitions. En 
cas de contravention, l'interné peut Cre éloigné de France. 
Des commissions spéciates ont place les suspects dans dif- 
férentes catégories, dont t'internement est une série. Pour 
sortir du département l'interné a besoin de l'autorisation du 
ministre, sauf certains cas d'urgence. 
INTEILONCES. C'et le titre que portent les am- 
bossadeurs accrédités par le pape auprë des petites cours 
etrangeres ou auprb des gouvernements républicains, a la 
difference des nonces, qui sont accrédités auprès des 
grandes puissances. L'ambassadeur d'Autriche à Constan- 
tinople porte aussi le titre d'internonce. 
IXTEB.PELL.kTiOXo En justice, ce mot e-«prime la 
sommation que Pon adresse  quelqu'un pour obtenir 
une reponse sur un fait que t'on veut éclaircir. Dans le lan- 
gage ordinaire, le méme mot s'entend ,le toute qlestion nn 
peu sire. Dans le droit parlementaire, l'interpellation est 
une questiun faite aux ministr sur un point ordinairement 
en dehors «le la diseusgion des lois, mais touchant la si- 
tuation exterieure ou intéieure du pa)s, i'exécution des 
lois, etc. En génîral, le memhre qui veut adresser une inter- 
pellation  un minigtre dépose d'avance l'objet de sa de- 
mande, et l'assemblée fixe u jour pour le développement 
d interpellations. Il est bien rare que ces discussions abou- 
tissent à rien de déliuitif; mais elles out l'avantage de faire 
connaltre au pa.vs la situation de ses affaires. Les interpel- 
lations sont réquentes en Angleterre, en Belgique et dan les 
pays libres. L. Locv. 
IXTEPOLATIOX {Diplomatique), introduction 
sub:eptice, dans un manuscrit ancien, d'un oit plusieurs 
mots, une ou plusieurs phrases, et mème de chapitres en- 
tiers, n'appartenaut pas a l'auteur primitif de l'oeuvre, et pla- 
ces uiterieurement dans le texle comme en faisant partie, 
genre d'altération qui a souvent exercë la saacité descriti- 
qu et la témérite des amateurs de paradoxes. Les premiers, 
tels que Saumaise et Casaubon, épurant les textes, les out 
souvent depouillés, avec bonheur, d'interpolations évidentes. 
Les seconds, comme le [»ère Hardoin, ont traité sans pi- 
tié d'interpolations tout ce qu'ils ne comprenaient pas, ou 
tout ce qui s'accordait mal avec leurs systèmes arrètés 
d'avaflce. 
Diverses causes ont donn naissance aux interpolations. 
Tantét, mais rarement, la prétention deplace d'un co- 
piste ignorant, jaloux d'ajouter quelque chose de son cru 
au texte de l'auteur qu'il transcrivait ; tantét, et plus frd- 
quemment, sa meprise en insërant la gin se dans le texte 
eten prenant la note explicative d'un commentateur, crite 
à la marge d'un manuscrit, pour une plirase de l'oeuvre, 
omise par inadvertance. Viennent ensuite les infiddlités coin- 
mises de propos délibéré, dans quelque intérèt plus grave. 
Aucun ouvrage ne fut plus en butte à ce genre d'interpo'.a- 
tions que I pommes d' H o m  r e. Le texte ,le la B i b t e n'est 
lui-mme admis «l'une maniêre uniforme ni par les jnifs, ni 
par les chréticns, ni nëme par différent++ commun!uns chié. 
tienne. 
IXTEBPOI.ATIOX (Mathnlotiques). Lorqu'erl 
as!runotnic, en ph.sique, on a fait un certain nombre 

INTERNE -- INTEPBÉTATION 
d'observations isolées sur l'arriv& de plusieurs faits dont 
la marche n'est point régulière, on lie ces observations, ainsi 
que les calculs auxquels elles ont donné lieu, au mu?en 
d'une opération qui fait connaitre plus ou moins exactement 
les résultats qu'on aurait trouvés si on avait étudié le phé- 
[ nomìne entre des observations consécutives : c'est cette 
opération qui a reçu le nom d'iiterpolation. Le problème 
qu'elle résout peut ètre énoncé d'une manière générale : 
Connaissant les aleurs que prend une fonction Iorsqu'on 
[ donne à la variable certaines valeurs particulière-s, trouver 
ce que devient cette fonction pour toute autre valeur donnée 
à la ariable. 
Briggs est l'auteur de lapremière méthode d'interpola- 
tion. Il s'en servir pour calculer ses tables de Iogaritbmes. 
D'autres formules propres à l'interpolation ont été trouvées 
depuis : l'une des plus simples est celle de Lagrange. 
Mais comme c'est surtout dans l'astronomie que l'inter- 
polation estd'un fréquent emploi, nous emprunterons àcette 
science un exemple qui fasse comprendre l'utilité de cette 
opération. 
On sait que la Connaissancede Temps renferme, calculC 
à l'a ance, les positions desastres de notre systèmeh des épo- 
ques données, plus ou moins rapprochées, suivant que le 
déplacement de ces astres est plus ou moins rapide. Ainsi, 
la déclinaison de la lune y est donnée pour des époques éloi- 
gnées de douze heures I'u ne de l'autre. Or, on a sera eut besoin 
de connaitre cette d«clinaison pour une époque intermé- 
diaire. Si le mouvement de la lune était proportionnel aux 
intervalles écoulés, rien ne serait plus simple, mais il est 
loin d'en tre ainsi. Il faut donc interpoler. Ici la variable 
est le temps, et les valeurs partieulières qu'on lui a données 
offrent une différence constante de douze bernes. Dans tous 
les cas analogues, où la variable croit en progression arithmé. 
t/que, la formule dont on se sert est trës-simple. 
INTEBPOSITIOX. C'est l'etat d'une chose ou d'un 
corps place entre doux aute. choses ou deux autres corps. 
Au figuré, on donne le nom d'interposition a l'interveau 
d'une autorité sppérieure dans un conflit. 
INTEBPBETATIOX (du latin interpretatio, ex- 
plication, traduction ). Interprcer quelque chose, c'est l'é- 
claircir ; quelquefois pourtant on arrive  un résultat tout 
contraire. Une inlerprclation jcsuilique , c'e.t une inter- 
prétation faite de mauvaise foi. E effet, grâce aux r_'- 
trictioas mentales, il n'était pas un texte quip'3t embarrasser 
quelques-uns des bons pères. L'iiterçrdtatioa judaique 
n'est pas moins fameuse ; elle est fille de l'ignorance, elle 
mécounait l'esprit, qui vivifie, et ne suit que la lettre, qui 
t,,e. 
L'interprétation d'une loi est nécessaire toutes les foi 
que le tete en est obscur ou équivoque. Dans certains cas 
l'interprétation doctrinaleou scientilique de la loi est donnée 
par les juges cbargës de l'appliquer, qui alors se guident 
tantét par les règles d'interprétation que la Igislation a elle- 
mëme fixees (analoe des los, principes naturels de 
droit, etc. ), tant6t par l'autorite des jurisconsultes qui ont 
écrit sur la matiëre, ou bien encore par les décisioas rendue 
par iescours supérieures. Quand une disposition de la ioiest 
tellement obscure et quivoque, que l'interplétation do¢- 
trinale est insuffi.ante pour déterminer quelle a eté la ve- 
ritable intention du I('slateur (d'oU il resulte dans la pra- 
tique que les divers tribunaux Finterprèteut et par suite 
l'appliquent ebaeun d'une maniëre différente), une inter- 
prO.laiton autltentiquedevient nécessaire; et c'est le Iégisla- 
teur seul qui peut ordinairement la donner. En France 
terprëtation authentique de la loi est maintenant réservée 
la cour de cassation. 
L'inrprétation des conventions est dit domaine des tri- 
bunaux : elle se fait en reclterchant la commune intention des 
parties contractantes (t,oge. 
L'interprêtation des livres saints constitue une science 
laq,elle on donne en Allemagne les noms d'/ er m t n • u 
tique et d" exé9.se. 



INTERPRÉTATION 
Les peuples de i'antiquioE, les Égyptiens surtout, avaient 
fait une grande science de l'interprétation des songes ; on 
sait qu'elle fut l'origine de la fortune de J o sep h. On in- 
terlyrétait encore les o racles, rendus la plupart du temp.¢ 
sous une forme obscure : c'était l'office des prètres, desdevins 
et des augures.. 
INTEP, PP, ETE. Au propre c'est un truchement, un 
homme qui sert à traduire la parole, un discours d'une langue 
dans une autre. Le gouvernement français entretient un cer- 
tain nombre d'interprètes pour les langues orientales ( voile'- 
DaocAs, ÉCOL Dg JEu:es DE LmCUE). Des interprètes 
organisés militairement sont en outreattachés à notre armée 
d'Af tique. 
E matière criminelle, dans le cas où i'accusé ou quel- 
qu'un des temoins ne parlerait pas la même langue, il est 
nommé par le président un interprète, gé de viol-et-un 
ans au moins; il doit, h peinede nullité, prèter serment de 
traduire fidèlement les discours à transmettre entre ceux 
,lui parlent des langages différents. Il est sujet h récusation, 
et ne peut ètre pris ni parmi les témoins, ni parmi les juges, 
ni parmi /es jetC. Si l'accusé est sourd-muet et qu'il ne 
sache pas écrire, il lui est aussi donné un interprète cboisi 
parmi les personnes qui ont le plus d'habitude de converser 
avec lui. 
Pour les actes de commerce il y a des courtiers inter- 
prètes qui font le courtage des affrétements, qui seuls ont 
le droit de traduire, en cas de contestations portées devant 
les tribunaux, les déclarations, chartes-parties, connais- 
sements, contrats, et tous actes de commerce dont la traduc- 
tiun serait nécessaire, et de servir de truchements ì tous 
trangers, maltres de navire, marchands, équipages de vais- 
seau, et autres oeersoflfles de mer. 
INTEBPIETES {Les LXX). Vo9e--. 
ITEBBÈGNE  temps pendant lequel un royaume 
se trouve sans roi, un empire sans chef. Les interrègnes 
sont fréquents dans les mouarchies électives; mais ils sont 
rares dans les monarcbies béréditaires. L'lùsloire de France 
ne compte que trois interrègnes, deux sous la premiëre 
race : 1 ° après la mort de Cbildéric; 2°après cellede "[hier- 
ry fil un seul sous la troisième race, après la mort de 
Louis le Hutin, et pendant la grossesse de la reine Clëmence, 
sa veuve. Philippe, frère du roi défnnt, prit les rënes du 
gouvernement en qualité de régent : il fut le premier re- 
vëtu de ce titre. Avant lui, ceux " qui le gouvernement de 
l'Êtat était confié pendant la minorité de l'béritier présompti/ 
,le la couronne, ou en l'absence du roi, étaient qualifiés de 
tuteurs, dëfenseurs et gardes d,t royaume. Les interrègnes 
«nt té la cause principale de l'affranchissement de l'auto- 
rité impériale en Allemagne. Les Romains appelaient aussi 
interregne l'intervalle qui s'écoulait entre l'époque off finis- 
saient les fonctions des consuis et celle où leurs successeurs 
traient Cus. La France depuis 1792, époque de la dé- 
«héance de Louis XVI, jusqu'en 1814, n'avait pas manqué de 
gouvernements, qui après de longues guerres avaient été 
reconnus par des traitès solennels de toutes les puissances; 
et néanmoins, Louis XVIII, en remoutant sur le tronc de 
ses a;eux, data les premiers actes de son autorité royale de 
la dix-neuvième année de son règne, en appliquant méme 
aux longues années qu'il avait passées hors du territoire 
français l'ancien principe de snccessibilité au tr0ne. Il y a, 
de fait, interrègne à chaque vacance du trône pontifical ; et 
ils filrent surtout fréquents au moyen ge, lorsque l'on comp. 
tait souvent plusieurs papes à la fois qui s'excommuniaient 
réciproquement. Souvent aussi la vacance du int-siége 
se prolongeait pendant deux ans. Dans tous les cas de va- 
cance par suite deda mort du pape régnant, les fonctions 
papales sont dévolues par interim an doyen du sacré col- 
h[ge. DLTE¥ ( d I'¥onne). 
Les historiens allemands désignent plus particulièrement 
par 9rand interrègne le temps qui s'écoula entre la mort de 
l'empereur Conrad IV e l'élection de Rodolpfie I r ( 
t$73) intervalle pendant lequel l'Empire resta sans chef 

INTEIIO6ATOIIE 445 
proprement dit. Sans doute, après Guillautne de Hollande, 
qui mourut en 1256, on Cut pour rois Alphonse X de 
Castille et Richard de Cornouailles; mais ni l'un ni l'autre 
ne réussirent h se faire reconnaltre en cette qualité, et AI- 
phonse ne mit méme jamais le pied en Allemagne. latu- 
rellement l'anarchie la plus complète régn«pendant cetemps- 
la dans l'Empire, en proie sur tous les points aux guerres 
privées, et où le brigandage et l'assassinat étaient en. 
quelque sorte devenus choses normales. Aussi cette époque 
est-elle h bon droit regardée comme l'une des plus calami- 
teuses de l'hisloire d'Allemagne. Il n'y eut que les villes 
qui surent mettre/ profit cet état de confosion générale 
pour se confédërer et créer ainsi une puissance nouvelle, qui 
ne devait pa tarder à faire contre-poids/ celle de la noblesse. 
INTEBBEX. On appelait ainsi h Rome le magistrat 
qui a l'origine, lorsque le roi (rex) venait à moorir, était 
institué pour procéder à l'élection d'un nouveau roi. Le pre- 
mier interrex, choisi par le sénat dans son sein, ne présidait 
cependant pas l'élection ; c'était le second, qu'il désignait 
lui. mëme; et nn autre, quand I'iection ne se faisait point 
pendant la durëe des pouvoirs de celui-ci. Le temps pendant 
lequel des interreges étaient en fonctions, chacun pendant 
cinq jours, s'appelait aus«i interrègne. Sous la rcpubli- 
que, notamment pendant les deux premiers siècles de son 
existence, on trouve de ces itterreges nommés pour la te- 
nue des élections consulaire% quand les consuis dont les 
pouvoirs allaient expirer en étaient emp/chés. Cette dignité 
resta toujours un des privilë.es du patriciat ; et alors mëme 
que les plébëiens furent admis h faire partie du sénat, les 
sénateurs patriciens furent seuls capables d'ch ètre_revètu% 
de mbme que seuls ils dsignaient le candidat. 
INTERROGATION ( en latin interrogatio, dérivé de 
inter, entre, et rogare, demander), question, demande 
que l'on fait à quelqu'un. En rhétorique, c'est une figure de 
pensée qui consiste non pas " demander/ ètre instruits de 
ce que nous ignorons, mais à interroger sans attendre de 
réponse. Par fois l'interrogation presse, accumule les ques- 
tions; d'autres fois ;,ne seole qoestion jetée à propos etsou- 
dainement au milieu d'uu discours, fait beaucoup d'effet. 
Cette figure, très-simple en elle-mSme, est cependant une 
des idus.promptes, des plus énetgiques et des plus dotal- 
hantes. L'interrogation ne suppose pas toujours dans celui 
qui l'emploie une émotion violente. On s'en sert aussi dans 
le cours d'une discussiun sérieuse ou d'vu simple récit, pour 
varier et animer les mouvements du style. Quelquefois aussi 
on s'interroge et l'on fait soi-mëme la réponse, soit pour 
ep«imer le doute, l'hésitation, soit pour exciter l'attention 
et l'inlérbt. Aug. Hssos. 
|.TEROGATIO. ( Point d'). Io9ez Poc+,Txo.x. 
IN'TEl{ROGATOIRE On appelle ainsi les questions 
que tait un joge sur des faits civils ou criminels, et les 
réponses que lait celui qui est interrogè. On donne aussi ce- 
nom an procès-verbal qui contient ces questions et ces ré- 
ponses. 
En ri;artère criminelle, l'interrogatoire est un des actes les. 
plus importants de l'instruction. Son but évident est d'ob- 
tenir, de la bouche même de celui qu'on accuse, l'aveu du 
crime qui lui est imputè. Quant h la manière d'y procéder, 
elle t réglée aojourdhui par le Code d'lndruction erimi« 
nelle. D'après ce Code, l'accusé doit subir diverses epèces 
d'interrogatoires, sui ont les diverses phases de la procédure 
et le degré du crime qu'on lui reproche. D'abord le juge d'ins- 
truclion doit procéder/ l'interrogatoire du prévenu, dès 
qu'il s'est présenté ou a été amené devant lui, sur-le-champ 
en cas de mandat de comparution, et dans les vin-quatr«î 
heures en cas de mandat d'amener. Cet interrogatoire n'est 
soumis / aucune formalité par le Code. Cependant, en se 
reportant h la législation antërienre, et en considérant le 
but de l'interrogatoire, il est évident que le juge doit ètre 
assisté de son greffier, lequel rédige le p;ocès-verbai. Ce 
procès-verbal doit mème ètre signé du prévenu. En cas de 
refus ou d'impossibilité» il doit en lxe fait mention, Dans 



446 IITERROGATOIRE 
le cas de flagrant délit et de clameur publique, comme il est 
de l'intértt de la justice que les actes d'instruction oient 
faits avec promptitude, le juge peut, ans attendre les 
réquisitions du procureur impérial, et en loi donnant un 
simple avis, se rendre sur les lieux et interroger le prévenu 
s'il est arrêtA. D'un autre c6té, le procureur i.mpédal et 
les affalera auxiliaires procèdent à l'information et font su- 
bir des interrogatoires. Dans ce cas, et pour assurer plus 
de garanties à la justice, des formalité plus nombreuses 
entourent les procès-verbaux. Anlnt que possible, ils sont 
rédigés en la présence et revttus sur chaque feuillet de la 
signature des commissaires de police de la commune dans 
laquelle le crime ou le dlit a été commis, ou du maire, ou 
de l'adjoint au maire, ou de deux citoyens domiciliés dans 
la mème commune. Les cas de flagrant délit et de clameur 
Imhliqle sont les seuls dans lesquels il est dérogé à la règle 
gén#rale. Hors ces cas, c'est toujours le juge d'instruction 
<lui interroge , et qui peut mème renouveler ses interroga- 
luiras toutes les fois qu'il le croit utile b la découverte de 
la vérité. 
En sorLant des mains du juge d'instruction autrement que 
par une ordonnance de mise en liberté, le prévenu doit en- 
<are élre interrogé. ]lais il y a sur la forme des interroga- 
luiras qu'il doit alors subir une distinction à faire entre le 
cas où il doil ëtre traduit devant le tribunal correctionnel 
et celui ad il et traduit devant la cour d'assises : au pre- 
mier cas, le prévenJ ne doit tire interrogé qu'à l'audience ; 
au deuxième cas, l'accusé a deux espèces d'interrogatoires 
a stbir. D'abord, il est interrogé de nouveau par le prési- 
dent ou par un des juge que celui-ci commet à cet effet. 
Proc6s-verbal en est dressé par le grellieret signé par rac- 
eu. Cet interrogatoire a lieu en |'absence dit conseil de 
l'accusé. C'et ce qui résulte des art. 302 et 574, qui por- 
tent qt,e le conseil ne pourra communiquer avec l'accusé 
qu'après son interrogatoire. Ensuite, lorsque les débats sont 
cuerts, l'accusé est tenu derépondre publiquement b toutes 
les questions qui lui sont adresses par le président, les 
juges, le procureur général et les jures. Alors il est assist 
de son conseil,qui peut présenter toutes observations en sa 
faveur, «4 ,mtme s'opposer à ce que certaines questions lui 
soient pusCs. 
Telles sont les diverses espèces d'interrogatoires qu'un 
accusé peut subir avant son iugement. Le but de fautes 
les questions qui lui sont adressées par ses jtges c'est de 
lui arracher des aveux. On comprend dès lors l'immense 
portée de ce ode de procéder. ,lais on peut se demander 
si ce mode est conciliable avec les garanties qui data 
vent toujotrs entourer un accusé, et s'il est de la loyauté 
qtd doit toujours pr6siderà une action crim;nelie de forcer 
un homme par ses réponses, par ses réticences, par ses 
aveux, à metlre dans les mains de ses adversaires une arme 
redoutable. La lègislation anglaise, en cela peut-élre supé- 
pleure  la n6tre, ne permet pas que l'on interroge les pré- 
venus ou que l'on se prevale de leurs aveux. Aux débats, 
le magistral qui préside ne lui adresse que cette question : 
l.tes-vous copable, ou non ? et pendant tout le cours de 
l'examen, s'il prescrite des observations, c'est de lui-reCe 
et sans y tlre provoqué ; encore le président a-t-il soin de 
l'avertir de ne ren direde contraire à sa défense. Ce systeme 
cci-il meilleur Nous ne voulons pas trancl,er la question ; 
nous croyons seulement que les législateurs français ont été 
top préoccupés de Piuterét de la société. 
Nous dirons peu de chose de l'interrogatoire eu matière 
civile : ce mot s'emploie seul pour désigner les questions 
qld sonl faites par le j,,ge à une personne dont l'in te rd i c- 
tion est poursuivie. En tout autre cas, on dit itterroga- 
taire sur faits et articles ; il est réglé par le titre XV du 
liv. Il du Code de Procédure civile, dont l'art. 32 est ainsi 
conçu : « Les parties peuvent, en toute matière et en tout 
Cai de cause, demander de se faire interroger respecti- 
vement sur faits et articles, perti,ents, concernant set,le- 
nt |a matière dont il est qestion, sans retard de Fins- 

-- INTE[VALLE 
trucLion ni du jugement. » Les articles suivanls eglent la 
forme de l'interrogatoire. Louis SaV»SSWL, avocat. 
INTERRUIION {en latin interruplio), action d'in- 
terrompre, de couper, de rompre la continuité d'une chose. 
11 s'emploie d'une maniëre spéciale, en parlant de l'action 
de couper la parole bquelqn'un, et nolamment  un orateur. 
Dans les assemblíe délibérantes, l'interruption joue un 
grand r01e. Le Moniteur a consigné un bon nombre des 
interruptions du régime parlementaire. Tontes ne s' trouvent 
as pourtant. On peut en retrouver de fort curieuses dan 
d'autres journaux ou dns la mëmoire des amateurs. Les 
orateurs, en revoant ioJrs discoura au journal officiel, 
modifiaient souvent sans géne les interruptions qui les 
!relardaient. Ils en inventaient quelquefois. Le ministres 
surtout ne se gênaient guère. !  avait de iterruption 
favorables; mais elles ëtaient rares. C'éhient quelques foh 
des paroles, d'autre fois des cris, des bruits de pieds, de 
cannes, de couteaux à papier, etc.; tout cela se habit: bruit, 
tumulte. Les nssemblées souveraines ont eu surtout de vio- 
lentes interruptions. On se rappelle aussi celles qui sous la 
monarchie constitutionnelle accueillirent certains discours 
de Fo, de llanuel, de 1. Gutzot, etc. Tous les partit 
se sont servisde cette arme; certain Iégitimistes, à i'Assem- 
blée législative, ne le cédaient guère pour le brnit aux mou- 
tagnards, seulement ils étaient moins nombreux. Du reste, 
les interruptions tiennent à la vie parlemen{aire. Comment 
discuter tranquillement quand on est agité par de grandes 
passions  comment ne pas s'échauffer quand on discute 
tihremeut le sort des peuples? L. 
|NTERRUPTION figure de rhétorique. Voyez I- 
"r|cENCE. 
INTEBSECTION (de inter, entre, et secare, couper ). 
On nomme point d'intersection le point où deux iigne 
se coupent. L'intersection de deux surfaces est la ligne com- 
mune  ces deux surfaces; si les surfaces sont planes, 
i'interection est une ligne droite. 
INTERSTICES ( de inter, entre, et statu, Cre placé), 
»etits intervalles qui se trouvent entre les molécules cern. 
posantes des corps, qu'on appelle autrement p o r e s. 
INTERVALLE (de in, entre, et vallurn, palissle). 
Les amciens Romains donnaient ce aura à l'espace qui était 
compris entre deux palissades ; dans la suite, et par exten- 
sion, ou a applic[ué ce mot b toute espèce de grandeur, pou 
indiquer une sorte de síparation. 
INTERVALLE (}lue), rapport de deux sons 
inégaux, u égard à leur degré d'é|évatio, pa opposition 
l'unisson, qui est celui de deux sons égaus. Ces rapports 
sont appréciables pour l'oreille, de méme que ceux de deux 
points confondus ou séparés dans l'espace sont appréciables 
pour les eux. L'intercalle est donc la distance qui existe 
entre un son et un antre son plus grave ou plus aigu, dis- 
tance exprimée en musique par le nom que porte chacnn 
de ces intervalles..insl, l'ou appelle seconde l'intervalle 
formé des deux sons les plus rapprochés, tierce celui 
se trouve comp entre deux sons séparés par un troisième, 
çuarte celui qui renferme quatre tons, çuinte celui qui en 
comprend cinq, et ainsi, à mesure clue la dstance s'acerolt 
d'un son, sixte, septiëme, oclave, neuviëme, dixiëme, etc. 
lanmoins, dans la pratique de l'harmonie, l'on est con- 
vcuu de conserver aux intervalles qui excèdent la distance 
dnne neuvième les dénominationsde tierce, çuarte, quinte, 
sixte, etc., parce qu'ils ne sont, à proprement parler, que 
les doubles de ce dernières. Les intervalles leUvent 
moditiés de différentes manières selon que les sons dont ils 
se composent sont eux-ratines modifiés par un bémol, nn 
bécarre ou un dièze : de là leur classification en 
mineurs, najeur et au¢ments, termes qui expriment 
leurs différents degrés d'extension par rapport au mOde ou 
à h tonalité. Tous les intervalles ne produ!se»t pas les 
mëmes effets sur nos sens : les uns nous pmiseut par la 
douceur de leur harmonie : ce sont tes 
ou intervalles consonnants; te autre», au ontraire, 



INTERVALLE 
peuvent ètre entendus avec plaisir que lorsqu'ils sont com- 
binés ou enchatnés avec les premiers : ce sont les dis- 
»onnances ou intervalles dtssonnants. Deux ou un 
plus grand nombre d'intervalles qni se font entendre simul- 
tanCent constituent ce qu'on appelle un accord. 
Dans la théorie matbématiquœe de l'acoustique, l'inter- 
valle de denx sons est représenté par le rapport du nombre 
de vibrations qne font dans un même temps les cordes so. 
nores qni rendent ces sons. L'intervalle de seconde est alors 
exprimé par , celoi de tierce par ,s_, etc. 
Tous les intervalles ont la propriété de se renverser» 
c't-à-dire qu'on peut mettre au grave la note qui était d 
l'aigu, et réciproquemcnt. Ainsi, ut grave et mi aigu forment 
entre eux un intervalle de tierce ; mais en renversant ces 
deux notes de manière à avoir mi grave et ut aigu, l'inter- 
valle de tierce devient une sixte. Les unissons renversés 
donnent des octaves, les secondes des septièmes, les tierces 
des sixles, les quartes des qnintes, les quintes des quartes, 
les sixtes des tierces, .les septièmes des secondes, et enfin 
les octaves des nnissons. Ch. BCUEM. 
INTEP, VENTION (Droit ciri/et commercial). L'in- 
tervention est l'action d'intervenir dans un acte, une ins- 
tance, dans un procès où l'on ne figurait point, bien qu'oq 
e0t intért  la contestation qui s'aitait. L'intervention cq 
rnatiëre civile est dispensée du préliminaire de conciliation ; 
elle peut tre effectuée en tout état de cuse, sans qu'elle 
puisse retarder le jugement de la cause principale, si celle 
cause ëtait elle-même en état d'tre jugée; elle est reçue 
sur l'appel, mais de la part seulement de ceux qui auraient 
le droit de former tierce o p p o s i t i o n. En sa forme, l'inter- 
vention est une demande incidente, qui doit ëtre faite par 
simple requête et conclusions moÙvées, sans aucun déve- 
loppement. 
En droit commercial il peut y avoir intervention lors 
lu proltt d'une lettre de change et d'un billet, si quelqu'un 
se présente pour faire bonneur d l'une des signatures portCs 
sur la lettre ou le billet. L'intervention et le payement sont 
constaté« dans l'acte de protét ou  la suite de l'acte. 
INTERVENTION ( Droit politique). Voyez Do 
riES GEns. 
INTESTAT ( Ab). Mourir ab intestat se dit de celui 
qui meurt sans avoir fait de testament. A lome c'etait un 
désbonneur de mourir ab intestat; et tout citoyen ayant 
droit de tester ne manquait pas d'instituer par acte solen- 
nel Pfiéritier qui devait aprës sa mort continuer sa per- 
sonne. Mais comme celui-ci pouvait refuser l'bér,:«ltë et 
rendre ainsi illusoires les volontés du testateur, la loi des 
Douze Tables avait accordé au maitre la faculté dïnstituer 
son esclave héritier nécessaire. L'esclave ainsi institué 
était forcé d'accepter. Les poursuites des créanciers étaient 
diriçées contre lui ; et lïnfamie rejaillissait sur sa tête si 
le délunt était insolvable. La liberté était la compensation 
des chances qu'il courait. Ces motifs firent que les héré- 
dités ab intestat étaient excessivement rares; la loi réglait 
alors elle-mime la succession du défunt. En France, dans 
le commencement de la monarchie, l'Êglise essaya de res- 
susciter en sa favenr l'idée déshonorante que le droit ro- 
main attachait aux successions ab intestat. Elle priva de 
prières et quelquefois de sépulture ceux qui ne faisaient 
point de testament pour hd léqeer quelque part de leur 
bien, et l'autorité civile fut obligée d'intervenir pour mettre 
un terme à cet abus. Dans le droit ancien, la l#gislation 
sur les testaments était aussi variée que les nombreuses 
coutumes qui partageaient la France. Elle était même dif- 
férenle dans une mèmç coutume, selon le rang et les cas- 
tes. Celle de ormandie, par exemp,e, qui laissait aux 
nobles un pouvoir illindté de tester, interdisait aux rotu- 
riers la faculté de disposer par testament de tout autre 
bien que les acquèts. Le Code Civil abolit enfin toutes ces 
lois et ces usages particuliers. I! permet encore de tester; 
mais il empche les abus ,le ce droit, en réservant une part 
détermlne aux enfants du testatenr et  ses ascendants 

 INTESTIN 447 
dans certains ca.. Lorsque le défunt est mort ab intestal," la 
succession est défére aux descendants; à défaut d'enfants, 
aux frères, sœurs ou descendaots d'eux. Depuis la pro- 
mulgation du Code, qui du reste n'a fait que reproduire 
nne novelle de Justinien, les successions ab intestat sont 
les plus communes. 
INTESTIN. Ce nom, admis comme substantif et ad- 
jectif, est une traduction liftCalc du mot latin intestinum, 
qui veut dire intérieur, au dedans. Dans sa premiëre ac- 
ception, il désigne la majeure partie du tube musculo-mem- 
braneux dans lequel les actes de la digestion s'accomplis- 
sent chez l'homme. Cette portion de l'appareil dip.estif qu'on 
nomme intestin, ou tube intestinal, en la considérant en 
général, prend t,n nom au pluriel quand on l'examine par 
divisions et subdix isions. Ainsi, les anatomiste oqt partagé 
ce tube d'après la différence de son calibre, en itestins 
#ré/es et en çros itestir. Les premiers sont ensuite sub- 
divis en différentes portions. Celle qui succède immédia. 
tement à l'e s t o m a c, et qui est le commencement du tube 
intestinal, a été. appelée d u o d d n u rit ; c'est dans cet in- 
testin que les substances detioées b la nutrition descendent 
après avoir franchi le py lofe, et deux conduits y versent 
la bile et le fluide pancréatique; la seconde porÙon des in- 
testins grêles est le j ju n u m, ainsi appelé parce qu'on le 
trouve toujours vide : on dit qu'il est jeun; la troisième 
est distinguée par le nom d'i/on, en raison de es con- 
tours nombreux. La demarcation entre le jéjunum et l'iléon 
est peu précise; leur longueur est considérable, et compose 
 peu près les trois quarts du tube intestinal. Les gros in- 
testins succèdent aux précédents, et en sont la continuation : 
le premier est le c oe c u m, ainsi nommé, parce que son 
union avec l'ilCon, forme une sorte d'impasse : il  distingue 
par cette disposition ainsi que par l'augmentation du dia- 
mètre du canal, et surtout par une valvule ou sorte de sou- 
pape qu'on appelle aussi barrière des opothicaires, parce 
que la puissance des seringues est, dit-on, limitée d ce 
point. Le diamètre de la seconde partie des gros intestins 
appelée colon, augmente encore, et surpasse celui de 
tous les autres. C'est dans son intérieur que la dessiccation 
s'opère principalement. La troisième partie, le r ec tu m, 
termine ce long canal, et s'ouvre au dobors pour l'exonéra- 
tion du résidu de la digesÙon. Toutes ces parties, réunies et 
comprises sous le nom d'intestin, ont une étenJue qu'on 
évalue /t six  sept Ibis celle du corps de l'homme. 
Les intestins concourant en grande partie  l'entretien de 
la vie et étant en contact axec les corps extërieurs dont 
nous extrayons notre propre substance, on peut concevoir 
qu'ils sont les siéges de maladies nombreuses et qui reten- 
tissent plus ou moins dans tout l'organisme. Ce tube peut 
ëtre Iésé dans des blessures de l'abdomen, et celles cau- 
sses par les armes  feu, ainsi que par celles qu'on nommo 
armes blanches, en fournissent des exemples communs. 
Des contusions violentes sur l'abdomen peuvent affecter 
également les intestins et mème morteUement. Les intestins 
se déplacent aussi communément par diverses causes : tantôt 
on les voit saillir au dehors par les plaies de l'abdomen, 
tantôt sous la peau, en Irancbissant desouvertures naturelles 
aprës de violents efforts, c'est ce qu'on nomme des her- 
n les. Un accident grave qui advient spontanément altère 
encore le tube intestinal au point de causer la mort : une 
de ces portions supërieures peut s'engager dans celle qui 
la suit, c'est ce qu'on nomme intussusception, invagi- 
nation : ils peuvent aussi se tordre, ce qu'on nomme vol- 
vulus. Les intestins grêles recèlent communément des vers 
de diverse« e.«pèce.% qui dépravent plus ou moina la/'onction 
nutritive, et qui excitent en outre divers accidents sympa- 
thiques. Due gaz qui se forment dans ce canal sont en outre 
une source d'incommoditès diverses appelées maladie ven- 
teuse. Des irritations et des inflammations, dont les causes 
sont très-variées, éclatent encore le long des intestins, et 
occassionnent un grand nombre d'affections géuérales : les 
plus remarquables sont les deux espèces de choléra- 



448 INTESTIN -- 
orbos, surtout eel appelé asi«tique. Les fièvres les 
plus graves ont, selon l'opinion «le plusieurs médecins 
moderne, leur origine dans des affections inflammatÇires 
des intestins. On peut dire que, causes ou effets, les inflam- 
nations intestinaes se rencontrent dans la majorité des 
maladies fébrile. Des hémorrhagies peuvent encore pro- 
venir de cette méme source, et il n'en est pas de plus com- 
munes que celles qui accompagnent les irritations du rectum 
appelées h énorrhoïdes. Nous avons lait cette mention 
rapide des affections intestinales, afin de montrer combien 
il est nécessairede ménager, en se conformant aux préceptes 
hygiéniqnes, des organes aussi importants : c'est surtout 
des purgatifs qu'il ne faudrait pas abuser, ainsi qu'on le fait 
communément. N'oublions pas que les racines par lesquelles 
nous puisons les matériaux qui nous ourrissent sont dis- 
séminées sur ce tube, différentes en cela «le celles des 
gétaux, qui sont plusCs  l'extérieur. D r Cu.eOSl. 
INTIMATION, INTIMÉ. On donne le nom 
au défendeur en appel. Cette dénomination vient des par- 
lements, qui ne voulaient pas qu'on se servlt devant eux 
des mmes termes que devant les tribnnaux inférieurs : 
on imaginait donc que l'huissier chargé àe signifier l'acte 
d'appel intimait, au nom de la cour, J'ordre au alConde,if 
de se présenter devant elle. Voilà pourquoi l'acte d'appel 
prend aussi le nom d'intimation. 
INTOLÉBA'CE, défaut de tu I é ra n c e, disposition 
à violenter,  persécuter ceux avec lesquels on diffère 
pinions. Il se dit surtout en matière de religion. 
INTONATION (du latin itm/o, tonner, faire du 
bruit), action d'entonner, manière d'attaquer une note, un 
son. « L'intonation, dit J.-J. Rousseau, peut tre juste ou 
fausse, trop haute ou trop basse, trop forte ou trop faible, 
et alors le mot intonation, accompagné d'une épithète, 
c'entend de la manière d'entonner - 
lonalion signifie aussi, surtout dans le pain-cUant, 
t'action de mettre un chant sur le ton dans lequel il doit 
Ctre. Enfin, ce ot s'entend par extension des divers tons 
que l'on pren,l en parlant ou en lisant. 
INTIADE, nom qui signifie entrée, et quel'on donne 
quelquefois à ,in petit morceau de musiq,ze placé en tête 
d'une composition iustrumentale, fantaisie ou air varié ; c'est 
une sorte d'introduction resserrée. 
|TBADOS, partie intérieure d'un cintre, parlie inté. 
rieuoe et concave d'une voOte : on lui donne aussi le nom 
de douelle intérieure. Il y a nn siècle, quelques alzti,,rs 
écrivaient itradosse, qu'ils faisaient du genre fcminin. 
IN'TRENTE-DEUX. Voçe'. FOM. 
INTEtlGUE, INTRIGANT. L'intrigant est celui qld 
fmploie sous main tous les ressorts, tous les moyens, Il- 
cites on non, nécessaires pour qu'il atteigne son but. Soit 
qu'il cherche  réussir pour lui-mme, soit qu'il vise à em- 
pcl,er le succès de autres, il est to.Jjours mépriçable, 
et doit ëtre marqué du stigmate de la réprobation. L'intri- 
gant n'a en effet ni dlicatesse, ni géuérosite, ni amitié, 
i aucun de ces sentiments agréables dans les relations de 
la vie privée il publique : l'intért seul le dumine, mais 
l'intért joint/ l'astuce, à la fourberie, à la perfidie. Ses 
paions sont basses et vites; car son rle est to,jo»rs très- 
secondaire, et le phzs souvent il se met aux gages de pro- 
tectenrso dans l'intért desquels il pratique en secret ses 
talents de dissimulation, d'hypocrisie et d'espionnage. 
Après ce porlrait, serait-il nëcessaire de nous élever 
contre cet assemblage de vices et de passions dont le con- 
cours vers un mme but constitue l'intrigue? Avons-nous 
besoin de dire que l'inlrigue est tonjours tellement téné- 
breuse, tellement embrouillée, tellement souterraine, qu'il 
est ordinairement bien difficile d'en démêler les fils et d'en 
trancher le nœud ? Les cours ont été et sont encore le théà- 
tre des intrigues les plus basses; car presque tousceux qui 
approclzent des sources des faveurs terrestre% dans le but 
d'en obtenir, sont assez peu d|iiat sur les mo)-cns d' 
arriver» pourvu qu'ils  arrivent : les ministres, les Izauts 

INTRODUCTION 
fonctionnaires, covent parvenus à leur poste par l'intrigue, 
sont à leur tuer encensés par une tourbe d'itrigants subal- 
terne% qui silficitint pour eux-mme% on pour d'autres in- 
trigants de plus bas étage encore, ne cherchant qu'/ se nuire 
les nns aux autres, échafaudant leur bonheur sur le malheur 
de leurs voisins. 
Dans le langage dramatique èt dans la liftCature, ino 
trigue se prend en meilleure part qu'en morale; il signifie 
les divers incidents qui forment le nœud d'une pièce, d'un 
roman; ainsi, l'on dit l'intrigue est bien conduite dans 
cette pièce; cet acte, ce roman est ben intrgud. « Un 
principi général puni ces divers gem'es de compositions, 
c'est que l'intrigue, dit O.iry, mëme la plus Colupliquée, 
ne doit jamais préenter une obscurité impénétrable, ou 
mëme Ire trop difficile à pénétrer, qu'elle peut s'entourer 
de mystère, mais non de ténëbres, eeroer Pesprit du lec- 
teur ou du speclatenr, et non le tourmenter on le rebuter... 
Une autre loi imposée à l'intrigtxe en litlérature, et plus 
souvent violée encore, est celle de la vraisemblance. Le 
désir de chercher à tost prix ce qu'on appelle l'e/fel est 
promue toujours la cause de ces écarts ; et il est rare qu'il 
proàuise des résultats qui, du moins aux yeux d'une critique 
éclairée, puissent les rendre pardonnables. ,, Les ouvrages 
dramatiques des anciens étaient peu intriguds. Après lant 
de combinaisons thétrale res.ssées, on est en droit 
d'exiger dans les n61res des intrigues plus fortement nonCs, 
p|us corsCs. 
Le mot intrigue s'applique enfin  des liaisons galanles. 
Il fait supposer qu'il  a dans le commerce de ceux qu'on 
accuse d'inlrignes amoureuses quelque chose de secret et de 
mystérieux, et qu'ils cherchent à les dérober aux eux du 
public. 
INTP, IGUE (Comédie d'). Vo!/e-- Cot. 
INTI:tINSÈQUE (du latin intrinÆecus, au dedans, 
intérienrement ). l'oçe: 
INTRODUCTION ( du lalin intriductii, composé 
«le duccre in, conduire dans, introduire). C'est l'action d'in- 
troduire qnelqu'un, qnelque chose. L'on donne des lettres 
d'introductiin à une personne qne l'on veut faire bien 
accueillir chez une autre; l'introduction d'un ambassa- 
deur et à la cour une cérémonie importante, dans laquelle 
le ministre étranger remet ses lettres de créance, de rappel, 
une letlre autographe de son souverain, etc. Il y a un 
maltre de cérbmonies qui porte le titre d'introducteur des 
amhassadenrs. 
Figurément, et app]iqué aux choses murales, anx scien- 
ces, introduction se prend pour acheta:hument, et dé- 
si,ne ce qui sert de préparation, ce qui prélude -. ainsi 
l'on dit l'introduction aux sciences physiques, à la vie dé- 
vote, etc. 
Appliqué  des choses moins releves et plus matérielles, 
il signifie l'action dïntroduire, de faire entrer dans : l'in- 
troduction dela sonde dans nn puits artésien, c'est l'action 
«le I' faire entrer ; l'introduction d'une coutume, c'est son 
importalion et sa naturalilîon sur un sol o6 elle est no,- 
relie. L'introduction d',me iastance, au palais, c'est le com- 
mencement d'une procédure. 
Un mot, pour en finir, sur ces introductions placées par 
les auteurs en tte de leurs ouvrages, et flanquées souvent 
d'une préface et d'un avant-propos; ce sont des sortes de 
discours préliminaire% destinC, soit  expliquer le but du 
livre, soit à mettre le lecteur au courant de certains faits qui 
en facilitent l'intelligence. Les iutroductions ne sont sou- 
vent que des bors-d'oeuve; généralement le lecteur les 
passe avec la mme défiance que le préfaces et les avant- 
propos, enfants de la mème famille, frères et sœurs de 
l'introduction. 
INTRODUCTION (Musique), morcean de musique 
d'un mouvement grave, composé d'un petit nombre de 
phrase.% souvent mëme de quelques mesures ou de quel- 
quesaccurds soleunels destinés à annoncer le premier allé. 
9rod'une sym p bon ie, d'uneouer t ur e,d'une se ha t e 



IïlIODU(I'I03[ -- 
ou detoute autre pièce instrumentale. L'ouverture d'Iphi- 
çênie en Aidide, La Flîte enchantde, commencent par 
une introduction. Quelque$compositeurs dramatiques, don- 
nant plus d'extension et un mouvement plus animéd l'in- 
troduction, lui ont fait tenir la place de l'ouverture, dont 
ci Je n'a pourtant ni la forme'ni les développements. Ario- 
riant de Méhul, lobert le Diablede Meyer Beer, s'ouvrent 
par une belle introduction. 
Lorsque la pièce etale en commeuçant un aud spectacle, 
lorsqu'elle dêbute par quelque pompe triomphale, par Far- 
risée d'une foule innombrable, une entrée magnifique, quel- 
quesacrifice solennel, quelque cérémonie auguste, quelque 
phénomène terrible de la nature, comme un naufrage, une 
tempête, tous ces objets sont si beaux, que le musicien peut 
les montrer d'abord sans les annoncer ; ils n'en frapperont 
que davantage. C'est ainsi que Gluck a supprimé daus lphi- 
9dnie en Tazride l'ouverture propreloent dite, pour y 
substituer la représentatiou du premier évenement de la 
pièce. Son draine debute par le grand taldeau calme d'une 
tempête qui lui succède, de la foudre qui éclate, de la mer 
soulevée qui menace de tout engloutir, de la désolation 
d'Iphigénie et des prêtresses de Diane, dont les «:ris plain- 
fils, les voix touchantes, les prières tendres etauimëes con- 
trastevt avec les mugissements des flots, lesifllements des 
vent et le fracas retentissant du tonnerre. Cette manière 
de commencer un opéra par un tableau pittoresque, une 
scène mëlée de récits et de sentiments, d'action et de pas- 
sions, est très-brillante. 
Le morceau de musique composé sur ces élémeuts divers 
s'appelleaussi introduction. Il y a donc deux sortes d'in- 
troduetions. La première est purement symphonique, j'en 
ai déjà parlé :c'est l'ébauche d'une ouverture, une pièce 
dontla briëveté semble être motivée par le desir qu'éprouve 
le musicien de nous livrer le phls tt possible un objet 
d'uu intérèt plus grand, en nous offrant/ la fois les char- 
mes de la poésie et de la musique. L'introduction de la 
seconde espëce est faite, au contraire, pour captiver l'at- 
tention chi spectateur au lever du rideau, eu lui présen- 
tant de magnifiques images, une action dej/ lice, et l'ex- 
pression des sentiments, quand il ne s'attend qu'aux recits 
de l'expositiou. Ces récits viendront ensuite, et on leur 
donnera tous les développements néce»saires pour l'ins- 
truire de ce qui s'est passe et de ce que l'on va faire. Il est 
beau de marquer le début d'un drame par tin morceau 
d'éclat. Le dessin, la coupe de cette introduction arient 
selon la situation des personnages, le lieu de sa seCe, la 
nature des événements que l'on prépare : tant6t c'est un 
air, un duo, un chœur; mais ce choeur, ce duo, cet air, 
ont des formes particulières à l'introduction, et tienuent 
tous du genre descripti! ou du récit; car il faut necessai- 
rement que les écoutants sacbent de quoi il s'ait, et tin air 
consacré entiêrement aux passions ouvrirait mal un opéra, 
pnisqu'on ne connaltrait point la cause qui les a exoitées. 
Le premier air de Joseph est nu heureux mélange de 
récit et de seutiments. Celui qui ouvre l'opera de Bien est 
tout descriptif. Ëlisa, de Cherubini, commence par tin 
chwur, Les 1'oce$ de Figaro par un duo, Don Juan par 
une scène ravissante et sublime, où figurent quatre person- 
nages seulement. Les introductions seCiques de L« Pie 
voleuse, de Sdmiramide , de Cenerentola, de Guillaume 
Tell, mettent en action presque tous les personnages du 
drame, et produisent tin très-grand effet. CASIL-BLzE. 
LXTI{OIT  entrée de la m e s s e, cmnposée d'une an- 
tienne qui annonce le sujet du mystère ou de la fête qu'on 
va célebrer et du premier verset d'un psaume changeant 
aussi pour cbaquesolennité, et terrainWpar le Gloria Potr1. 
Autrefois on disait le psaume entier, pendant que les fi- 
dèles m plaçaient. II n'y a point d'introt le samedi saint ni 
la veille de la i'entecte, parce que ce.» jours-lb, dans l'an- 
cienne Ëglioe, te peuple élait déjà assemblé depuis Iong- 
h'mlls pour le baplème ,les catécbumènes. Vers la tin ,iii 
cbanl ,te !'inlroit le célébrant parait au £htl.ur» accumpagné 
I$1CT nE lA CONVgIS. -- t. Xl. 

INTUSSUSCEPTION 
des diacres et précédé de la croit, de cierges, etc. II ny a 
pas d'introït ant messes basses. L. LouvE't. 
INTItOUVABLE (Chambre). Voyez, Cnxnnn 'TO- 
VABLE. 
I,TUITIOXI INTUIT1F (d'intueri, regarder, con- 
templer, avoir la vue sur une chose). Intuition est un 
terme originairement emplo)é par les théologiens pour si- 
gnifier la vision ou connaissance immédiate de Dieu et des 
mystères «le la foi, telle que les bienheureux doivent l'avoir 
dans le ciel. Par suite, il s'est dit de la connaissance claire, 
directe, immédiate, des vérités qui, pour ètre saisies par 
l'esprit humain, n'ont pas besoin de l'intermédiaire du rai- 
sonnement. Intuitif a également les deux sens. En langage 
tbéologique, on dit, par exemple, que les anges et les bien- 
heureux mit la vision ou la connaissance intuitive de Dieu. 
En philosophie, cette même expression, sous sa forme ad- 
jective comme sous sa forme substantis e, et avec la seconde 
signification indiquee plus haut, est d'un usage beaucoup 
plus fréquent. 
En philosophie, on oppose la connaissance ou l'évidence 
intuitive i la counaissance ou h l'évidence discursive, 
c'est-à-dire celle qui résulte d'une apereeption immédiate 
de la vérité, h celle qui resulte d'une suite plus ou moins 
longue d'idées, parcourue pas h pas, et à laque!le ou n'ar- 
rive, pour ainsi dire, qu'a force de discourir. Mais les tins, 
Locl, e / leur tête, ne donnent le nom dïntt, tives qn'anx 
connaissances et aux verités que notre esprit saisit par une 
comparaison d'idées, idees entre lesquelles il voit tout à 
coup une convenance ou une disconvenance : telles sont 
les deux idées decorpsetd'espacedans la proposition : tout 
corps est dans l'espace; les autres Iêdonnent aussi /l des 
croyances,/l des cou,lutions naturelles, itopliquée dans une 
foule de raisonnements, que nous ne posons presque ja- 
mais sous forme de propositions, dont la erite nous guide 
plutôt qu'elle ne nous Irappe, et qui ne supposent aucune 
comparaison d'idées: telles sont la croyauce h notre identité 
personnelle, la croyauce fi la constance des lois de la na- 
ture, etc. Toujours est-il qu'intuition et intuitoEsont des 
termes de raisonnement ; et on voit asez pourquoi on op- 
pose l'intuition à la ddduction, et les erités intuitives 
aux véritds dddt«ctives ou discursives. 
Dans la philosophie allemande, ce sont aussi des termes 
d'idolo#e. Lb une intuitWn c'est une idée telle qu'elle 
résulte de la manifestation des réalites/ notre esprit, et 
avaut que notre esprit l'ait travaillée par l'abstraction et 
la geuéralisation. Aussi des auteurs d'outre-Rhin oppo- 
seut-ils la philosophie intuitive, otl l'tntuilion, à celle de 
l'abstraction ou de la réflexion. Cette acception, du reste, a 
beaucoup d'analogie avec le sens philosophique génêral, 
suivant lequel Iïntuition est une aperception du s'rai, fa- 
cile, immédiate, sans détours. Il en est de mème de la 
suivante. 
Eu mathématiques, et parliculièrement en géométrie, 
tout eu cherchant / démontrer lentement, pas à pas, 
l'aide du raisonnement pur, certaines propositions, on se 
sert de figures pour en faire sentir la vcrite, m6me h l'oeil; 
et l'ou dit qu'on aperçoit intuitivement, ou par intuition, 
la verité d'une propogition, quand on l'aperçoit  la ule 
inspection de la figure destinée  la rendre sensible. Ainsi, 
on voit inttitivement, ou par ituition, que dan» tout 
triangle l'un des c6tés est plus petit que la somme des deux 
autre avant que le raisonnement l'ait délaontré discursi. 
vement ou dcductivement. 
Enlin, l'histoire de la philosophie préseule le mot intuition 
dans tin sens «lui se rapproche plut6t de l'acception rbCie. 
gique primitive. Livrés à leur imaginatiou delirante, des 
philosophes, principalement dans l'Cule d'Alexandrie, se 
sont attribue un «oï dntuition, c'e-«t-à-dire la faculté de 
recevoir «les rcv61ations directes et particulières sur les 
choses divines et surnaturelles. Benjamin 
IXTL'SS|'SCEPTION (du latin totals, dcdaus, in- 
t(:ricurcmenl, et suscetio, formë de suscipcre, recevoir, 



4,0 
commettre), accçoissement d'un corps par l'addition ou la 
réception d'une substance qui se répand dans tout l'intérieur 
de la masse. Les animaux et les vgétaux croissent par intus- 
usceptiott (voye CossAce). 
En médecine on nomme intussusception l'entrée contre 
nature d'une portion d' i n tes ri n dans une autre, comme 
il arrive quelquelois dans l'ilCs. 
INULINE principe immédiat que l'on retire des tu- 
bercules de daldia, des racines de pyrèthre, de colchique, 
de chicorée, etc., et principalement de la racine d'aunée. 
C'est aussi ì cette dernibre plante (en latin inula) que 
l'inuline doit son nom. Une decoction de racine d'annee 
étant refroidie, l'inuline se dépose at fond du vase. Elle 
se présente alors en une poudre blancl,atre, ressemblant 
à de l'amidon, et, comme lui, se convertissant en sucre de 
raisin, sousl'influence de l'acide sullurique étendu d'eau et 
bouillant. Mais l'inuline n'est pas colorée el bleu par l'iode, 
ce qui suffit poLr la distinguer de l'a m i d o n. 
IXUTILITE. Comment décrireet nombrer tout ce que 
l'esprit inventif, inquiet et capricieux de l'homme a créë 
pour satisfaire la varierWde ses goOts, si souvent inexpli- 
cables? Depuis lolgtelups, il est abusé sur les besoins que 
la civilisation a multiplies, qu'elle accroit chaque jour, et 
que la nature avait borués en mère prudente. Mais peut-ou 
mettre en opposition la nature et la civiliçation, et cette 
derniëre ne serait-elle pas l'état oulu par l'organisation de 
l'homme? Cette question serait une inutilte; car pour 
une grande partie de la terre elle est dccidee par le lait. Il 
et necessair «le se nourrir, de se vèlir, de se loger : il est 
utile de choisir des aliments selon son tempérament, des 
habits selon sa taille, une demeure selon les f, mclious que 
l'on exerce. Ne l,ourrait-on pas appeler inutditoes la re- 
cherche des appl'ëls dans les premiers, le chanelnent des 
formes, les accessoires, le nombre des autres ? Les hommes, 
pour discuter de leur devoirs et de leurs droits, compo- 
sent des assemblées utiles : le contraire pourrait se dire 
quand on les voit s'atlroupT devant un luime, ou autour 
d'une table de jeu. Faut-il appeler i»ltiltés tout ce qui 
ne contribue qu'au plaisir? Non, car se maintenir en joie, 
c'est se conserver sain et propre au travail. Eh! eotnment 
déclarer mutilités les uniqt,es occupations des oisifs dans 
une societé on la consid,:ralion et le bonl,et,r semi»lent êt,e 
leur partage exclusivement, dans ute société qui subsiste 
par ces itttilttds reCes ! Que deviendraient les populations 
de Sëvres, de Lyon, de Saint-Gobin, et ce monde d'enlu- 
minenrs, de brodeors, de passementiers, de himbelottiers, 
si vous anath,'matis.ez les inutddd.ç? Que fe,-iez-vous de 
la majorité des auteurs, si la p,'esse refusait de publier les 
inttttlités politiques, scientifiqt,es, litteraires ? Car partout 
les inutilités surgissent du nécessaire et de l'utile i elles enva- 
hissent les gouve,-nements, les a,lministrations, les acadé- 
mies, conme les ,nusees et les appartements. 
Il faut remarquer, au reste, que les i,mtilites dégoatent sans 
rassasier, et qu'il est très-rare de les apprëcier inutdtës 
sans ëtre forcé de les reconnaitre nuisances. La qnestion : 
Qu'est-ce que cela preuve? est à l'usage de peu de gens, 
et on peut y répondre de tant de manières, qu'aux yeux d'un 
grand nombre elle ne se, a jamais éclaircie : A quoi eel«t 
sert-il ? est une demande précise, qt'il faudrait lui substi- 
tt, er : cette demande ne peut rester sans roeponse positive ; 
et pourtant elle embar,'asserait h l'excès la majorite des hu- 
,nains : le dérangement qt,'elle apporte.rait dans nos insti- 
tutions est incalculable, d'al,tant pins que l'on ne s'accor- 
derait pas plus sur les inutilités que sur mille autres points, 
cl,acun désignant cçmme inutlitds ce qui lui déplait ou 
cesse de i'mtéresser. Représentons-nous le monde renon- 
çant aux inutilités : jamais ,'ëvob,tion n'aurait eu des 
suites plus éteudt,es. Que d'emplois supprim,'s ! que d'es- 
paces vides', q,,e de iemps dispotible . que d'hommes, de 
mmes épo'dusl La reforme des int,tilitës serait la ph,s 
oensible de toutes celles qu'a subies la société et la plus 
ttlraant« pour la multilude. ,lais  attcune poqua ce 

INTUSSUSCEPTION  INVALIDES 
danger n'a été à redouter, l'homme créat les itmtilités 
avec une facilité merveilleuse, et celles-ci semblant se repro- 
duire d'elles-mêmes, comme pour lui complaire, dès qu'il 
manifeste quelque penchant en leur faveur. Les inulilitds, 
confondues avec le superflu, n'ont de alCracteurs que parmi 
quelques philosophes, jaloux de leur indépendance phy- 
sique au moral, et uniquement soucieux d'un bonheur qui 
ne provient que d'eux-mgmes : cette sorte de gens, tou. 
jours en minorité, n'exercent aucune influence, et les 
inutilités excitent plut6t leur pitié que leur colère, biett 
qu'à les en croire l'homme leur doive plus de matx que 
de biens. Les inutilités, de quelque nom qu'on les déore, 
quelle que soit la place qu'on leur assigne, demeureront 
en possession du rang qu'elles ont occupé jusque ici, et 
continueront à prévaloir sur la nécessité, reine que son 
absolutisme a trop Iëgtimée pour que l'horome se soumelle 
par choix à sa pui«sance. C 
IXVAGINATION (du latin invaginare, rengainer, 
mettre dans la gaine), introduction d'une portion d'i n tes. 
tin dans celle qui la prcède ou la suit. 
INVALll)E. Les temps qui suivront les nOtres con- 
serveront-il, étendront-il le système qui consiste à vo,ter 
à une nulitb absolue, à une oisiveté écrasante, des hommes 
nés en général au sein des classes laborieuses, et dontla 
 le a etc un cercle de travaux pénibles et de fatigues inouies 
La questi,m sans doute ne saurait s'appliquer h cette res- 
pectable portio,t de mutilés, de trembleurs, de frères lais 
ou c o n v e r s, que le fer «le l'enneml et les sui|es de longes 
guerres ont réduits à n'gtre plus que l'ombre d'eux-mëmes, 
/ ne plus vivre, pour ainsi dire, que de leurs glorieux sou- 
venirs : h ceux-là, un asile conventuel où ils soient dégagés 
de tons soins, doit ìtre assuré. Ilais cette quantité de mi. 
litaires, non moins estimables, mais plus heureux, dont les 
blessures se sont cicatrisées, dont la complexion robt,ste a 
amené une vieillesse llorissante, peut-elle gtre condamnée 
à une ie monacale ? peut-elle entendre la patrie lui dire : 
« Yégète inactive, le pays n'attend plus rien de toi, et il 
consent à dépenser une lois plus pour te laisser oisive que 
tu ne lui co0terais, convenablement récompensée et utile 
encore. ,, Ces remarques concernent les établissements Ira,- 
çais des invalides de terre; quant aux ittvalidesde la 
marin e, ils n'ont pas encore d'hOtel comparable à celui 
de C h e I s e a en Angleterre. Cependant, un immense édilice, 
coa.truit près de Toulon, sous le rëgne de Louis XVllI, 
paraissait leur être destiné. 
La France et le pa)s qui le premier a senti qu'une 
dette sacrée était contractée par le gouvernement envers les 
guerriers qui lui consacrent leur existence et combattent 
pour sa gloi,'e ou son salut. On nous parle, il est vrai, de 
ces viet,x soldats d'Athènes que Pisistrate faisait nou,-rir 
aux frais du trésor, on nous parle de ces colonies ro- 
maines, de ces dotations terriennes qui assuraient l'avenir 
des réfCans des légious; mais ces récompenses n'emanaient 
pas de lois stables : elles étaient accordêes par les faveursde 
la puissance, par le bon plaisir des généraux. Les bénéfices, 
les fiels des premières faces furent des rémunérations mi- 
litaires, mais au prolit des cl,efs; quant aux subalternes, 
des emplois de domesticité étaient accordés à quelques-uns; 
mais la plus grande partie n'avait de ressources que dans 
une vie d'aventures, c'est-'a-dire de brigandage. Le moyen 
gge vit ensuite s'établir, depuis Charlemagne, les o b I a ts, 
moines laïques, qui passaient du métier des armes à celui 
de sonneurs de clocl,es, de chanlres, de balayeurs d'église, 
mais ces places, pett nombreuses, étaient une rare faveur. 
La mendicité pourvoyait aux besoins des invalide« que le 
sort abandonnait à eux«nèmes, et il n'y a pas un siëcle 
qu'en un royaume voisin une médaille accordée aux mili. 
taires devenus inhahiles aux armes les autorisait à deman- 
der leur pain à la charité publique. Au système des oblats 
sucoMa celui des m o r t e s- p a y e s, espèce de vétérans, aux- 
q,,els élait laissée en temps de paix la garde de nombreux 
ch6teanx. Ils êtaient comme :es gardes du crps des castel- 



LNVALIDES 
lans et des gouverneurs, mais ne touchaient pas une solde 
royale. 
Les qu inze-vingts revenus de la Pales]inc, les mala- 
dreries, les sanitas, créés par Louis IX, furent un essai 
d'b6tels d'invalides. Son prédécesseur Philippe-Auguste avait 
projeté de fooder un asile central pour les ieux guerriers ; 
mais il prétendit les soustraire à la juridiction que les 
évques exerçaient sur les moines lais ; le pape Innocent III 
se réfusa à y donner les mains, et sa résistance au désirs 
du monarque fit avorter les bo]lues intentions de Ptlilippe. 
Henri IV ayant à récompenser de vieux officiers, la plupart 
lroteshants, leur ouvrit un refuge rue Saint-Marcei. Ils passë- 
rent ensuite «le la rue de l'Oursine à B i c è t r e; mais Louis XI 11 
ne permit d'y admettre que des catholique% ce qui futuneen- 
]rave de plus à une institution permanente, et qui d'ailleurs 
n'etait pas ouverte aux simples soldats. Enfin, Louis 
onda en t65 et ouvrit en t670 le magnifique palais des 
nvalides, qui eut le privilége de n'ètre pas oumis aux i- 
sites du grand-aum6nier. On se demande qui l'elnporta dans 
l'esprit du monarque, ou de sa philantfiropie ou de son 
amour pour la bàtisse, quand il se decida àcette prodigieuse 
depense : il choisit le point du royaume oiz cette Iondation 
était le plus mai placee; mais si l'on doute des motifs, il 
faut du moins honorer les elfets, et ì la fin de son règne 
dix mille invalides de tous rangs animaient ce sompbieux 
difice. De grands abus s'introd,]isirent : sous le règne de 
Louis XV il y avait dans i'htei quantité dïnvalides de 
faveur. C'etaient d'anciens laquais ou coureurs de grands 
seigneurs que le crédit de leurs martres faisait admettre 
aux invalides, quoiqu'ils n'eussent jamais pertë les armes. 
Saint-Geru]ain, devenu tre de la guerre, ne manqua pas 
de travailler à la répression d'aussi criantes illegalites ; ]nais 
dans cette entreprise tout ce qu'il essa}'a fut loin d'atteindre 
aux économies dont il sentait le besoin. 
'En 1789 l'h6tei jouissait d'un revenu qui se montait 
à 1,700,000 ff.; mais successivement ce ]eveuu alladécrois- 
saut. En 1790 le trésor public eut à subvenir a l'extinction 
du genre de rentrées qu'on appelait la prestation des oblots : 
¢'etait une somme dont le clergé s'etait chargé d'el)ctuer 
le payement, depuis que les abbayes et les munastères de 
fondatiun royale sëtaient tache]es, moyennant linances an- 
nuelles, de l'obligation de nourrir et d'entretenir les frères 
oblats. EII 1792 les invalides propres encore  rendre quel- 
ques services militaires commencèrent à ètre detachés de 
l'h«tel, sous le nom de compagnies de v é t é r a n s. En cette 
mcme almee un Cat-major i]nmensment émolumenté, et 
qui occupait le quart de i'b6tel, cessa d'en absorber en 
grande partie les fonds. L'étab[issement restait encore pro- 
priëtaire de revenus assis sur des constructions importantes; 
il jouissait d'immunités, il possédait des rentes : toutes ces 
ressources lui échappërent en l'an n de la république, et ce 
fut aux finances de PEtat à subvenir à ses dépenses, qu'un 
budget commença à régulariser en l'an vt. Au comlnence- 
ment du Consulat, une succursale était établie à Versailles; 
deux autres le furent bienttt à Avignon et à Louvain ; car 
le total des invalides montait.h cette époqueà prës de 15,000; 
on en comptait 26,000 en 1813. Deux ans auparavant, Na- 
poiéon avait fait revivre l'ancien faste d'un état-major sura- 
bondant, et il avait r ,églë suivant de nouveaux principes 
les dotations, l'administration, la police de ce gouvernement 
de mortes-payes. En outre desinécures militaires «ans nom- 
bre, il s'y voyait des nuC d'employés civils, et un maré- 
chal de France y jouissait d'une brillante retraite. Sous la 
Bestauration, un ministre aila jusqu'à instituer une dispen- 
dieuse musique d'harmouie» afin de rendre plus pompeuses 
les cérémonies du culte. 
On conçoit qu'au temps o/ le terrain des invalides était 
itors de Parts, et e,]v;r,nné d'un soi iivr fila culture, on y 
vA rassemblé des militaires qui pouvaient s'ylivrer  quel. 
ques travaux champetres et y vivre dispensé.s des frais d'm- 
tree et d'octroi; on couçoit que l'administration, monacale- 
ment colldllite, a}ant bénélicië par le hasard de i'accroisse. 

451 
ment du prix des terrains, ayant thsaurisé, ayant couvert 
de constructions un sol qui lui assurait un revenu impor- 
tant, on ait conservé leur destination ì des btiments aussi 
immensément disproportionnés'par leur teud,m aunombre 
de ceux qui y trouvent asile; mais on ne conçoit pas qu'il 
faille un teiétat-major à un pareil établissement ; on ne con- 
çoit pas que depuis cette ceinture d'octrois dont le recule- 
ment des barrières a enveloppé i'htei on s'obstine à nour- 
rir de vieux et braves guerriers une fois plus dispendieuse- 
ment que si on les tenaiten des pas d'une vie bien moins 
chère, et dans des contrées peu peuplees, que leur pré- 
sence enrichirai], et dont le sol pourrait erre fecondë par 
les bras d'nne grande partie d'entre eux. G t BAI. 
INVALIDE.S (H¢Stel des). L'hOtel des Invalides de 
Paris est situé à l'extrmité occidentale du faubourg Salut- 
Germain, vis-à-vis des Champs-Eiysées, avec lesquels il 
communique par le Pont des Invalides. II fut fondé par 
Louis XIV. Sa construction, commencée le 3O novembre 
1671, par Liberal Bruant, fut continuée par Mansard, qui est 
l'auteur du dOme. 
Ce dOme, vu de l'extérieur, est d'une aisance si extraordi- 
naire dans ses dimensions g(:nérales, si juste dans la com- 
binaison «le ses lignes, et d'une iëgèreté si adroit,able dans 
son exécution, qu'on le regarde, non-seulement comme une 
des plus belles conceptions d'architecture qui soieut en Eu- 
rope, mais encore comme le plus étonnant chef-d'oeuvre de 
pondération : on dirait qu'il est descendu du ciel pour se 
poser sur le portail de l'édifice. 
Une vaste esplanade, plantée d'arbres et s'étendant jusqo'/ 
la Seine au milieu de laquelle on avtit ldacé, sous Nap- 
léon I , le Lion de Saint-Marc, une superbe grille, m.e 
cour enlour,'e de fossés avec des pièces de canon de diffe- 
rents calibres, donnent à i'H0teldes Invalides le caracti:re 
d'une place de guerre. 
La porte principale de la façade du nord est décorée des 
figures ceiossales de Mars et de Minerve, et dans i'archivolte se 
voit la statue equestre de Louis XIV. Toute cette sculpture 
est de Coustou le jeune. La cour est carrée; elle est entou- 
rée d'un double rang de portiqces en arcades. Au rez-de- 
chaussée sont de grands réfectoires, décorés depeintures re- 
présentant les conquëtesdeLouisleGrand par Parocel. Dans 
les étages supérieurs sont les appartements. La Bibliothëque, 
fondée en 1800 par Bonaparte, occupe Paile du milieu : elle 
contient environ 30,000 volumes. L'aile droite et l'aile gauche 
sont réservées au grand etat-major de l'htei. La salle du 
conseil contient les portraits de tous les maréchaux de 
France. Les célèbres plans dës villes fortes sont placés dans 
les combles.. 
Au lond de la cour se trouve i'entrée de i'égllse, sur- 
montëe d'une statue en pied et en marbre de FIapolëon. 
Elle est d'une architecture Iort simple. Le pave, entiërement 
en marbre, est incrusté à la maniere des ouxrages en mar- 
brerie «le FIorence. Sous le premier empire, elle était pour 
ainsi dire eucombrée de drapeaux des ennemis qu'après 
chaqte campagne on appendait à ses vofites. Avec les Bout- 
bons, l'étranger vint en reprendre line partie. Depuis lors 
i'expëdition d'Espague, celle de Murée et celle d'AirArie ont 
contribué à recouvrir un peu la nudité de ces murs con- 
sacrés à la gloire. Les peintures de la coupole reprësentent 
la gloire des bienheureux par Charles de La Fosse. Les 
Eangélistes figurent dans les pendentils, et les do«ze Apt- 
tres qui se trouvent autour de la lanterne sont peints par 
Jouvcuet. Le dOme, séparé de 1'6glise, semble en former 
une seconde. C'est sur un des piliers ornës de bas-reliefs, 
figurant des sujets de la vie de saint Louis, que apoleo 
fit placer le tombeau de Turenne. Autour du plan circulaire 
dt d6me sont six chapelles, richement ornées de peintures 
et de sculpt,res. Quatre de ces chapeiles sont dédiées aux 
Pères de i'Eglise latine; chacune d'elles est surmontée d'un 
petit d6me peint à fresque par les idus habiles peintres de 
i'Académie royale. Les chapelles Saint-Jér6me et Saint-Au- 
gustin sont l'ouvrage de Michel Corneille, celle de Saint 
57. 



4 
.&mbroise est de Boulogne, et celle de Saint-Grégoire 
est l'ouvrage de Gabrie|-François Doyen, que Louis XV 
chargea de renouveler ces peintures, parce qu'elles tombaient 
en ruine. 
Depuis le 15 décembre 180, la dépouille mortelle de 
I a potéo n repose dans la chapelle Saint-Jér0me, en atten- 
dant l'achèvement du magnifique tombeau qui lui a été érigé 
dans une crypte au centre mème de l'édifice. Les caveaux 
de Uégtise contiennent en outre les tombeam¢ de quelques 
murChaux et g,«néraux, des victimes de F iv s c b i, etc. 
Les autres parties de l'h6tel, d'un caractère sévère, sont 
affectées au logement des invalides, aux dortoirs, qui con- 
tiennent environ cinquante lits chacun, aux cuisines, avec 
leurs fameuses marmite% qui contiennent t,200 litres de 
viande, aux offices, à l'infirmerie,  la lingerie,  la manu- 
tention, aux magasins, etc. Sept cours plantC d'arbres 
séparent tous ces btiments. 
L'll6tel des Invalidespeut contenir près de 5,000 hommes; 
et son effectif actuel ne doit pas tre éloigné de ce chiffre de- 
puis la suppression de la succursale d'Aviaon, qui a eu lieu 
par décret du 27 foevrier 180. La mme nourriture est 
servie aux officiers, sous-officiers et soldats; mais les officiers 
mangent à part, et ont seuls le privilége hiérarchique de se ser- 
vir d'argenterie, donnée par Marie-Louise  l'occasion de son 
mariage. Les capitaines et lieutenants prennent leur repas 
en commun; les officiers superieurs peuvent se faire servir 
dans leurs chamb«s. L'entretien de chaque invalide co0te 
à l'Etat I ff. 80 cent. par jour, et celui d'un officier 2 ff. 
20 cent. Ces s'feux braves jouissent ainsi d'une existence 
paisible et douce et de beaucoup supérieure à celle q,'ils 
pourraient attendre de leur retraite. Aussi atteignent-ils 
pour la plupart, quoique criblés de blessure un Age très- 
avancé. Ch r. Alexandre Lg.xom. 
INVALIDES CIVILS. Des le 24 février 1868 le 
gouvernement prosisoire rendait un décret ainsi conçu : 
« Les Tuileries serviront désormais d'asile aux 
du travail. ,, Et anssit6t on écrivait  la craie sur toues 
les portes du chAteau : tldtel des invalides civils. C'était 
en effet une des pensées  l'ordre du jour de faire pour 
les blessés et les mutilés de l'iné,strie ce que I',tat faisait 
pour les glorieux blessés de la guerre. MMs on ne songeait 
sans doute pas serieusement à effecter  ce service le lieux 
palais des rois; par la cependant on en arrêtait le pillage et 
la alCas»arien. La révolotion ne tin» pas ses promesses, et 
la creation d'asiles pour les ousTiers invalides demeura, 
comme tant d'autres, à l'Cut d'utopie. 
Le 8 mars tss5, cependant, l'empereur Xapoléon 11I a 
rendu un décret en ,ertu duquel il doit être prochaine- 
ment établi sur le domaine de la couronne, à ,'incennes 
et au ¥ésinet, deux asiles pour les ou'riers. Ceux qui sor- 
tent des hospices et sont encore trop faibles pour reprendre 
leur vie laborieuse y pourront faire leur convalescence, 
au lieu dela »ruiner dans la misère; et ceux qui se trou,e. 
raient mutilés dans le cours de le,fs traxaux y prendront 
une retraite définitive. A la dotation de l'asile est affecté 
n prélèveroent de t pour leU sur le montant d travaux 
publics adjugés dans la ville de Paris et sa banlieue. Le 
gouvernement parait aussi compter sur les abonnements 
que prendront Pindustrie privée et les sociétés de secours 
mutuels. Avant d'tre admis dans ces asilcs, tout ou,rier 
devra iustifier qu'au moment de sa maladie ou de sa bles- 
sure motivant son admission, il travaillait soit - un chan- 
lier de travaux publics soumis au dit prçlèvenement, soit 
dans une usine dont .le maltre a souscrit avec l'asil un 
abonnement pour ses ouvriers, ou qu'il appartient  une 
société de secours mutuels abonnée à l'asile. Une comrois- 
sion administrative est chargée de prëparer les règlements 
nécessaires, de fixer les conditions de l'admission tempo- 
raire o» viagère, de déterminer mème les travaux aux- 
que[s les pensionnaires pourront ètre employés. 
|XVALIDES DE LA .IABIXE. Les invalides de 
la mari»te ne sont pas, comme ceux des a»'mées de terre 

IIgVALIDE, -- IVASION 
logés aux frais de l'État, dans un splendide palais ; mais il 
esiste en teur faveur une belle institution, vre dt génie 
de Colbert : la caisse des invalides de la marine, véritable 
ton»inc, qui assure tes meilleures chances pog«ibl¢s à tous tes 
membres de la grande famille maritime. Line commission 
de cinq membres est chargée de surveiller la gestion de l'é- 
tablissement impérial des invalides de la marine. La caisse 
s'alimente d'une retenue opérée sur la solde ou les gages de 
tout le personnel de la marine et des colonies, d'un prélè- 
vement fixé sur le prix des marcbés qui concernent la flotte, 
et surtout des rentes immobilisées dont elle est propriétaire. 
Ces ressources tuf permettent de faire face à «les charges 
nombreuses; elle sert des pensions dites de demi-solde, 
des pensions pour ancienneté et pour blessures , des pen- 
sions aux veuves et aux enfants en bas axe des marins 
demi-soldiers, des secours, etc. 
INVASION («lu latin invasio, dérivé de invadere, 
dere in, se jeter sur). L'homme, les tribus, les peuplades, 
les nations, dans les siècles qu'on al»pelle barbares, comme 
dans ceux qu'on appelle civilisés, ont tour  tour fait des 
invasions. De m6me que la société humaine est sertie des 
ténèbres qui enveloppaient le premier fige du monde, l'lu- 
I vasion se perd dans la nuit des temps: les traditions ont 
transmis sa vie à l'histoire; l'histoire a continué  la suivre 
dès qu'elle a pn s'en emparer dan l'état social. Invasion 
est donc un terme qui a acquis le droit de vtérance parmi 
les plus anciens mots, dont tous les idiomes et toutes les 
langues se composent. Toutelois, ce mot se trouve  peine 
mentionné dan la multiplicité des dictionnaires de la langue 
fran.caise. L'Académie ne lui consacre que ces insigni- 
tire»tes paroles : « Inversion, irruption faite dans le dessein 
de piller un pays ou de s'en emparer. L'invasiou de la Chine 
par les Tartares. Grande, subite invasion, de frëquentes 
invasions, faire une invasion. Les Tartares firent nue in- 
vasion dans la Pologne. Guerre d'invasion, • Nous en deman- 
dons pardon  l'Académie; mais le mot invasion, dans 
l'acception militaire que te Dictionnaire academique lui donne, 
n'est pas, selon nous, identique a,ec le mot irruption, et 
nous cru}uns que l'illustre Aréopage a eu tort d'en faire des 
synonymes. ons pensons également qu'il a manqué d'exac- 
titude quand il a attribuë à l'invasion l'unique dessein de 
piller un pays et de s'eu emparer. Il a confondu tes in- 
vasions des peuplades sauvages avec les invasions des peu- 
pies civilisés; il a eu tort: ces deux sortes d'invasions n'ont 
pas irreçocablement eu le même caractëre. 
Ce qui étonne plus particulièrement, c'est que les publi- 
cistes Grotius, Puffendorf, V(o|f, Barbeyrac, Wate|, dans 
leurs divers traites du droit naturel et dt» droit des gens, 
n'ont appliqué aucun chapitre s#cial à l'invasion, comme 
si elle leur était inconnue, de manière que les historiens en 
ont seuls expliqué les causes et les effets. Ici une autre ob- 
servation se présente : les historiens n'ont considéré l'in- 
vasion que comme un événement de guerre ; la société s'est 
accoutumée à l'envisager comme eux. Xous pensons que 
c'est également une erreur, o» que du moins c'est renfermer 
te mot invasion dans un cercle trop resserré. Il peut y avoir 
invasion dans l'ordre moral comme dans l'ordre matCel. 
lgous disons il peut; nous alertions dire il y a. Il I a 
invasion du pouvoir Iorsqu'il cède les rènes de l'État à des 
mains imputes, qui l'entralnent dans des routes funestes. 
Il y a invasion dg trdne lorsque le tr0ne est dates la dé- 
pendance de l'autel. Il y a invasion de la justice quand sa 
balance et son glaive sont à la disposition de juges préva- 
ricateurs. Il y a invasion de la tiberN, lorsque le despotisme 
peut impunément opprimer, il y a invasion de 
quand il y a des castes et des privildges. Il y a invasion du 
droit de tous, quand les droits ne sont pas les mmes pour 
tous. !1 y a invasion de la souverainet du peuple, lorsque 
le peuple est courbé sous la souveraineté du droit divin. 11 
y a invasion de la loi, quand l'anarchie fait. taire la loi. 
a inrasion de la presse, lorsque la censure est maltresse de 
bAillonner la presse. 11  a invasion des chambrez 



INVASION m 
rives, quand la vénalité est le chemin le plns star pour ar- 
river à la représentation nationale. Il y a invasion partout 
où ce qui est a pris la place de ce qui devrait ttre. 
Revenons à l'invasion dans so n acception purement mi- 
litaire. Lïnvasion, c'est l'entrée subite d'une armée dans un 
pays auquel on n'a pas préalablement déclarë la guerre : par 
conséquent, l'invasion est destructive du droit des gens. 
C'est un torrent, qui, dans son débordement, brise et entratne 
tout ce qui ne s'est pas mis en garde contre l'impétuosité 
de ses ravages. Elle est toujours injuste dans son principe, 
qt-and elle a un principe ; elle est constamment tyrannique, 
mëme cruelle, dans son développement. Les fastes de cl,aque 
siècle ont des pages ensanglantées par elle. Les Ga uloi s, 
peuple éminemment et uniquement guerrier, dont l'origine 
nous est inconnue, ne xivaient que du produit de leurs in- 
vasions, et dans plus d'une circonstance leurs invasions, 
franchissant les Alpes et les Apennins, firent trembler le 
premier et le plus grand de tous les peuples. Cependant, les 
Romains finirent par vaincre les Gaulois. Quatre siècles 
s'écoulèrent : une invasion des Francs, peuple issu de la 
Germanie, repoussa les Romains, subjugua les Gaulois, et 
les envahisseurs triomphants donnèrent leur nom et leur 
bannière au sol envahi. Les Gsulois furent effac6s de la 
liste des nations. L'invasion a donc été le berceau de la 
France. 
Cette vaste contrée ne fut pas cependant une et indivi- 
sible. On la diisa et on la sub&visa. Elle eut une infinité 
de rois. Chaque division, ou subdivision, souvent d'une exis- 
tence précaire, prenait le titre de royaume, et tous ces 
royaumes, ayant des intéréts divers, étaient sans cesse la 
cause ou le prétexte de guerres générales, ou de crimes 
particuliers. Le peuple franc n'était pas plus civilis que le 
peuT»le gaulois, il l'Cit mme moins ; et ses guerres extd* 
fleures ou itd.érieures, o{ien,.ives un défensives, se bornaient 
il envalfir ou ì s'opposer ì Fen-vabissetuenL C'étaient des 
masses sans ordre se heurtant contre des masses sans ordre. 
Peptn envahit le tr6ne des Mérovingiens, et cette invasion, 
usurpatrice de la Iégitimité, donne naissance a la seconde 
race des rois de France. Le génie de Charlemagne dispense 
le baptême de la légitimité à l'invasion usurpatrice de Pe#n. 
Charles le Chauve institue le gouvernement féodal; et cetle 
institution, féconde en petits souverains, en petites guerres, 
brisant le lien d'unité sociale, permet aux Normands d'en- 
vahir une partie de la France, et de s'établir ensuite dans 
la Ieustrie. La cession de la Neustrie fut loin de mettre 
un terme aux invasions des Normands : ils les renouvelè- 
rent maintes fois. La force de la monarchie française alla 
en décroissant jusqu'à l'avénement de la troisième race. 
La troisième race fut encore le fruit de l'invasion du tr6ne, 
et de l'usurpation de la légitimité. La civilisation faisait 
peu deproès ; cependant, elle en faisait. C'est par elle que 
Louis le Gros affrancbit les communes et créa une milice 
citoyenne, qui sous lhilippe-Auguste devint une armée 
permanente. 
Dès lors la guerre eut un caractère moins féroce : les opéra- 
tions militaires furent soumises à des combinaisons; les en- 
vahissements ayant pour but la dévastation devinrent moins 
fréquents. Mais la fureur ëpidémiqne des c r o i s a d e s re«sus. 
cita l'invasion : celle-ci eut du moins un résultat populaire 
avantageux pour la France, qu'elle avait pourtant épuisée 
d'hommes et d'argent. En effet, les croisades ruinërent 
tous les seigneurs tëodaux, et par cela mème facilitèrent 
la destruction de la puissance féodale, qui était à la fois 
et le fl,au des peuples et le fléau des rois. On avait préludé 
aux dernières croisades d'outre mer par la croisade contre 
les albigeois. Ce fut aussi une invasion. Des atrncités inouïes 
en marquèrent la durée. Louis IX, lui-mme, prince d« 
raison et de vertu, se laissa aller au fanatisme religieux 
de son époque! il sacrfia le bonheur de la France à 
l'espoir décevant de terminer l'invasion de la Terre Sainte. 
Philippe de Valois envahit la Flandre pour secourir un 
tyran qui opprimait le peuple flamand. Cette invasion eut 

INVENTAIRE 4 5 a 
l'influence la plus fatale sur les commencements de la guerre 
que l'Angleterre déclara à la France, guerre dont la durée 
désstreuse e prolongea près de cent ans. La rage d'envahir 
l'ltalie avait succédé à la rage d'envahir la Palestine. Ces 
nouvelles invasions occasionnèrent de nouveaux malheurs. 
La France y perdit ses braves et ses trésors. Les guerres 
intestines curent leur tonr : ici c'étaient des tentatives d'in- 
vasions monacales pour replonger la France dans les té- 
nèbres de lïgnorance. La France eut à supporter les vicis- 
situdes de guerres de succession dynastique, guerres sans 
intérSt national, qui conduisaient droit à l'épuisement de la 
fortune publique et il l'invasion des fortunes privs. 
Franchi«sons l'espace qui nous sépare de 179. La r#gé- 
nération du peuple français avait épouvanté les souverai- 
netés despotiques, et, dans leur effroi, la liberté leur était 
apparue comme la destrnctrice des trtmes. Les déclarations 
de Pavie et de Pilnitz annonçaient l'invasion et le partage 
de la France. Une armée formidable envahit notre patrie ; 
Brunswick la commandait. Nouvel Attila, il avançait en 
menaçant Paris de n'y pas laisser pierre sur pierre; mais il 
perdit sa ieille gloire dans les plaines de la Champagne, 
et les jeunes stàats répuhlk.ains repoussèrent l'invasion jus- 
qu'aux lieux d'on elle était partie. Les guerres de la révo- 
lution ont été de la part de la France des guerres de droit 
et de devoir, car il s'agissait pour elle d'Cre ou de ne pas 
Cre, et la postérité dira que l'Europe monarchique a tou- 
jours plus ou moins fore# la nation française à rester sous 
les armes. Cependant, le Directoire fit deux guerres d'in- 
vasion, celle de la Suisse et celle de l'Égypte. Nous ilCris- 
sons l'envahissement de la Suisse; nous n'osons pas blmer 
celui de l'Égypte. La France doit à jamais rour d'une autre 
guerre d'invasion, qui est son bontêux ouvrage: celle-là 
n'est pas une guerre de la rëvolution, elle appartient à la 
contre-révolution : c'est nommer l'invasion de l'Espagne 
en 183, guerre sacril:ge, de laquelle il ne surgit ni un rayon 
de gloire ni une étincelle du feu sacr,.. 
Que l'Académie .v prenne garde pour se rectifier : ces 
tros invasions n'avaient pas pour but de piller. 
Telle est l'invasion, telles ont été les invasions par rap- 
port ì la France. L'invasion est contraire aux mœurs ac- 
tuelles de la société; les continuateurs de le restauration 
contre-révolutionnaire le comprirent bien : aussi la nom- 
mèrent-ils intervention. Mais ce subterfuge ne trompa per- 
sonne ; le masque était transparent. Les nations n'ont aucun 
intért à envahir ; elles ne peuvent que perdre à tre en- 
vahies. Il faut donc qu'elles ne s'y prëtent pas : les inva- 
sions ne profitent qu'aux rois : l'invasion se brisera toujours 
devant les peuples animés de l'amour de la patrie. 
Poss (de l'Herault). 
INVENTAIRE (du latin inven[re, inventum, trou- 
vé). L'inventaire est un état détaillé de tous les objets trou- 
vés dans une recherche faite à cet objet; il a pour but de 
conserver les droits des tiers intéressés et de mettre obstacle 
à la fraude. 
La loi a prescrit cette formalité en bien des circonstances. 
il est exigé de la part de ceux qui sont envo#s en posses- 
sion provisoire des biens d'un a b s e n t ; de la part du t u- 
teur, à son entrée en fonctions ; de l'Coux survivant, et 
de l'Etat à qui une surcession et dévolue; de l'héritier bé- 
nificiaire ( VOile: B.c n'lsv,-rm) ; du c u r a te u r à 
une succession vacante ; de I'e x é c u t e u r t e s t a m e n- 
taire Iorsquïl y a des béritiers, mineur.% interdits ou ab- 
sents ; de celui qui est grevé de restitution ; de l'usufruitier 
à son entrée Ch jo,fissance ; de celui qui a un droit d'usage 
ou d'habitation à exercer; du mari, Iorsqu'fl snrvient une 
succession aux «'poux vivant en communauté; de la femme 
survivante qui veut conserver le droit de renoncer à la com- 
munaut; et des é[,ux qui se marient sans communauté. 
L'inventaire peut ëtre dressé par acte sous seing-prieW; 
mais pour l'opposer en justice, il doit ètre fait en la forme 
authentique. Ce sont donc les notaires qui sont chargés de 
dresser ces sortes d'actes. Régulièrcment l'inventaire est 



454 
précdé de l'apposition des s c e I I é s : cependant cette pre- 
a, ière opération peut ne point avoir eu lieu. Il doit conlenir 
en outre les formalités communes à tous les actes notariés : 
I ° Les noms, professions et demeures «les requérants, 
des comparant», des alCaillant» et des absent, s'ils sont 
coin,u3 du notaire appelWpour reprêseater, des commis- 
saires-priseurs et experts ; 2 ° l'indication des lieux oi l'in- 
ventaire est fait; 3 ° la description et estimation de.g effets, 
laquelle sera faite  j.ste valeur et sans crue ; 4 ° la dési- 
gnatiun des qualité, poids et tilre de l'argenterie ; ,° la dé- 
signation des espèces en m,mëraire; 6 ° les papiers seront 
cotés par premier et dernier, ils seront paraphés de la main 
d'un des horaires ; s'il y a ,tes livres et regislres de com- 
merce, l'Cut en sera coutate, les feuillets en seront pa- 
reiilement cotés et Farapl,és, s'ils ne Ic sont ; s'il y a des blancs 
dans les pages écrites, ils seront btonnés ; 7 ° in alClora- 
tion des tilres actif» et passih ; 8 ° la mention du serment 
prêtA, lors de la cl6ture de iïnventair, », par ceux qui o,,t 
été en possession des obieh avant l'inventaire, ou qqi ont 
habite la maison dans laquelle sont lesdits objets, qu'ils 
n'en ont détourné, vu détourner, ni su qu'il en ait etWde- 
t,mrnc aucun; 9  la remise des eïfels et papiers, s'il y a 
lieu ,. entre les mains de la personne dont on cou»tendra, 
ou qui, à. defaut, .sera nommëe par le président du tribunal. 
S'il n'y a rien/, inventolier ou dresse procès-verbal de 
carence. Les personnes qui ont le droit de requérir l'in- 
ventaire sont lus personnes interessées; celles qui ont le 
&oit de requérir la !evee «legs scellés. 
Le.g persounes dont la présence est absolument indis- 
f:eusab',e / la confection de Iïnveutairê sont : 1 ° le con- 
joint sur»iront; 2 ° les hbritier» prësomptil ; les exCureur» 
testamentaires, si le testament est connu; les donataires 
ou Iégataires universels ou a titre universel 
Les riais de Pinventaire se prelèvent, bien entendu, sur 
les biens inventories. 
En matière de commerce, l'inventaire est un état de- 
raillé de roules les valeurs actives et passives du commer- 
çant. Tout negociant est tenu de faire tous les ans, sous 
seing privb., un inventaire de ses eflets mobi!iers et im- 
rcbfliers et de ses dettes actives et passives, et de le 
copier année par année sur un registre spécial qui se 
nomme le livre des inventttires. Ce livre doit ètre paraphe 
à chaque page; et il doit ètre en outre visA tous les ans par 
le juge. 
13,'VE3,'TAI[tE ( Bénéfice d' ). Vo/e-. 
I.VETIO (d'invenire, trouver). L'homme ne 
crue point, il troue, il décousre. Toutes les richesses de 
la nature out etc toise» à sa disposition ; il est chargé d'en 
reconnaitre les propriëtés et les rapports pour les accom- 
moder à son usage. Des sentiments et des talents divers lui 
out été donnés comme autant de germes dont il doit soi- 
gner le développement, diriger les effets ; car il a été crée 
pour vivre en sucrerC II n'y a développement qu'où il y a 
société. Les premières inventions, simples comme les pre- 
mières pensées, suffirent aux premiers besoins. Mais la 
progression assignée, sinon ì l'esprit, certainement aux 
decouvertes de l'homme, ne s'arrête pas Idus que le temps. 
L'iusentiun a vaincu les elemeuts, soumis toutes les forces 
de la nature, et de là les miracles de la science et tic 
t'lad u strie ; elle a sondé les profondeur» du .sentiment, 
étudie les penchants de l'esprit, repondu à l'appel des sens, 
et de là tous les arts de ['i m a g i u a t tu n. 
M me .fACSSION. 
Riureusement parlant, dëcotwrir "et nventer ne si- 
gnifient pas tout à fait la même chose : ce qu'on découvre 
existait déjà ; tandis qu'une invention est presque toujours 
le résultat d'une combinaison d'éléments matériels qui se 
trouvent épars dans la nature, et qu'un runit d'une ma- 
nière quelconque pour en obtenir un certain effet. Ainsi 
donc, on dit bien : découvrir une ile, ue plaèle, une 
nine d'or, une carrière de marbre.., iiais c'est en mêlant 
ensemble du nitre, du soulre et du charbon qu'on a in- 

INVENTA[IE -- INVENTION DE LA CROIX 

venN la poudre; l'admirable machine qu'on appelle hor- 
lo9e tir inventée quand un homme de génie combina 
des roues de taçon à leu. faire marquer les heures (vojez 
DcouvoE ). 
Dans les arts, ivénter c'est composer d'une manière 
originale, sans suivre aucun modèle. « Ce n'est pas copier la 
nature, dit un critique ingénieu, mais bien lui prèter les 
charmes poétique. du beau idêal. ,, Cette de6nition est en- 
core incomplète ; car la peinture du laid, d lhorrible idéa- 
lisë est aussi un fruit de l'invention. L'invention est donc 
l'arrangement original d'un sujet; c'est la découverte de tout 
ce que ce sujet comporte, quel que soit le moyen employé 
pour rendre nos idee-% p]ume, parole, pinceau, ciseau, ins- 
trument de musique. Elle est aussi bien le produit d'une 
imagination ardente et prorapte que d'une mitation pa- 
tiente et profonde. Et ce seag le mot inventer a une grande 
analogie asec imaginer. « Imaginer n'est au .fond que 
se souvenir» » a dit La Harpe, après Sucrate. ,, Oui, sans 
doute, répond M. G. Planche, la meilleure partie du génoe 
se compose de souvenir:, et ceux qui ont vécu inventent 
metseilleuoement ; les livres ne suppléent pas la vie, 
livres sont une lettre morte pour le cœur que la réalité n'a 
pas éprouvë. De savoir à créer il y a l'osCn tout entier. 
Personne encore n'a vu le pont qui mène de la mémoire 
l'iroagiuation. » 
On s'et beaucoup prt'.occupé dans ces derniers temps des 
interêts «les inventeur»; on a demandé de constituer pour 
eux une propriété qu'on a appelé intellectuelle, et qu'on 
a voulu assimiler à la propriété fonci6re. Plusieurs amélio- 
îations ont même passé dans les lois eu France et à l'étranger 
pour protèger plus efficacement la p r o p r i ë t é i i t t e r a i r e 
et les brevets d'tu vention, des convenlions interna- 
tionales out Clé signées dans le mème but; tout ce que l'on 
fera dans cette direction doit être favorablement accueilli, 
poursu qu'on ne depasse pas la limite ou l'intérét public 
ordonne «le s'arrëter. 
En parlant de reliques, le mot invention est resté syno- 
nyme «le dccourerte. C'est ainsi que l'Église OEte l'invention 
«le la iute Croix, qu'on parle de l'invention des reliq»es 
de saint Ëtienne, etc. 
Dans le ian,age familier, on qualifie d'inventions certains 
mensonges. C'est une Idstoire de son incetion ; ce sont des 
inrentions. L. LOUVL-r. 
INVENTION (ltbëtorique). On donne ce nom à la 
première partie de la rhétorique, consistant dans la con- 
naissance et le choix des moyens de persuasion. La per- 
suasiun s'opère par trois moyens, tantét séparés, tantét 
réunis, instruire, plaire, émouvoir, probare, delectare, 
flectere, dit Cicéron ; mais ['ccrivain n'a pag toujours la 
persuasion pure" objet; il peut n'avoir pour but que de 
convaincre, sans vouloir éveiller ni la sensibilitë ni 
maginatiou. Souvent aussi il ne songe qu'à, recréer, à Cou- 
voir. Il n'emploie donc pas dans tous les cas, et simultane- 
ment, les trois moyens qui produisent la persuasion. On 
instruit par des pensées, par des preuves solides, par des 
raisonnements bien enchalnés : c'est le fruit du jugemenl. 
On pla[t par la banne idée que l'on donne de soi-mème, 
par des pensées intéressantes, par des images agréablcs, par 
des ornerc, ents choisis, par une ëlégance naturelle et sou- 
tenue : c'est l'ouvrage de l'imagination. On ëmeut par des 
pensëes énergiques, par «les mouvemenls rapides et passion- 
nés : c'est le produit de la sensibilité. Le jugement, lima- 
gination, la sensibilit#, sont des dons naturels, dont ['écri- 
vain ou l'orateur a besoin pour être éloquent; mais ces dons 
ne luisuflisent pas encore : il faut de plus qu'il ait une pro- 
vision toute faite d'idées, «le principes, de faits, de con- 
naissances variées et Cendue»; l'expérience et l'Cude en- 
richi.ent et iècondent l'esprit. Auguste 
INVENTION (Brevets d' ). Voyez Ileevers 
tION. 
INVENTIO DE LA CROIX. Voye:Cnox (lnve. 
tion de la). 



INVEINESS, comté du nord de l'Écosse, le plus grand 
dU l'o)-all, itué entre i comt de Ross, de aim, d'EI- 
n, de Bff, d'Aberdeen et d'Argyle, et l'oan Atl- 
tique, que les Éoessais ont l'hitude d'appeler id, à l'ouest, 
r de Calédonie, et qui au nord-est forme le golfe de Mur- 
ray ou !o Moray-Frith. La surfice de ce comté est de 
10 myfiamètres rrés, dont plus du quart oevient aux 
IIg« qui en font partie, et sa pulation s'Cève h 96,328 
habitants. La terre-ferme 7 t extrmement pre, sauvage 
et montueuse; h Ben-Newis, le poiut le plus élevé de 
toutes ! lies Bnniqu, l'altitude au-dessus du niveau 
de la mer t de 1366 mètres. L lacs et les toents de 
montagnes ondent data les vall profondes et sinueus 
dece comté; et on y renoentre aussi de vast fort% landes 
et marais. Le sol mis en culture t suflout celui des bses 
terres qui avoisinent le Moray-Frith, et q;elques lacs et 
rières. Les pturages des montagn favorisent l'éduca- 
tion du gros béil et des mourons, qui forme la principale 
ooeupation de la population. C'est dans la diection du nord- 
est que le sol va toujours en s'abaissant, comme l'indique 
le cours des fleuves les plus considrables, tels que le 
Spey, le Ness, le Findhom, le airn et le Buly, qui tous, 
mais les deux premiers surtout, sont d'une grande iront- 
tance, à use de l'norme quantité de umons qu'on 7 
pche. 
Le comté d'Inverns t divi en deux paflies gales 
par la longue et profonde valle qui s'lend dans la direction 
du sud-ouest depuis le 5Ioray-Fritl» jusqu'au Loch-Linnbe sur 
la cote ooeidle, et que traverse le canal de CalCon le. 
Parmi les II qui en dípendent, prntant tous ! rac- 
lèr physiques de la terre ferme et iaisant partie du groupe 
des H é b r i d e s centrales, les plus importantes nt SA 9 
( 26 myfiamètr rrés, sol nOt montagneux et ntOt cou- 
vert de prairies), orduist, St«duist et le rocherde Saint- 
Kilda. La laque lteest la langue dominaute ; et uue grande 
pae occideutale du oemté ne oempreud même pas l'anglais, 
qui n'est guère en uge que dans I hautes classes. Au sigle 
dernier, par suite de son complet isolement et de l'absence 
de rout pratioebles, les habints du comté d'Inverness 
Calent enoere très-mirables, courbés sous le poids des abus 
et des vices d siècl préents ; mais depuis lors la créa- 
tion d'un bon sTstème de voies de communication y a fait 
pénétrer la civilisation. Ce comté est divisé en 35 paroisses, 
et envoie un deputé au parlement. 
INVERESS, n chef-lieu et la seule ville importante 
q;'on  trouve, compte 1,700 habints, preue tous d'o- 
rigine anglaise. e possède un bon pot, protég par deux 
fos, uu chenu fortifié, une académie et plusieurs bonues 
écoles. C't le and marcbé des mongna;]s écoesais, qui 
ennent  vendre leurs difléren pdui. Les rois de 
Calédonie résident dans le voisiaage ; mais il n'existe plus 
aujourd'lmi que quelqu nes, h peine reconnaissables, de 
leur chu. Cette ville t lèbre dans l'hisire par l'heu- 
reux combat qu'h la suite de sa victoire de Falkirk le pré- 
tendant C h a r I es-É d o u a rd 7 rempo en février 176 sur 
le général Loudon. 
IVERSIO c'est-h-dire transposition, figure de 
sle et de rhétorique, qui inque le díplaoement soit d'uu 
mot, soit d'une phre entière, hors de la stricte construc- 
tion grammacale, afin de I mettoe en évidence et d'attirer 
l'aution ; r exemple : Pour jir ne no«s a point crgs 
Dieu, au lieu de :  ne nous a point erCs pou jouir. 
En polie, l'inversion est suut employ pour flatr l'o- 
reille et pour favoriser le rbythme. Dans les langues an- 
ciennes, ue et latte, une hbeé de construction ex- 
aordinai admeit une profusion d'inversions, ndis 
que dans l lan mernes, sueur does la Ie 
[rançaise, elles sont bucoup moins eu usage. L Romains 
entendaient d'ailleurs par version, OEs le sens d tro- 
pes, Pir oie. 
En term de tactique mifitre, une inversion est un mou- 
vemoel d'évolution par luel s'opére un changementde pla 

IN'VEST1TUIES 
ou de position, avec plus de promptitude et d'ensemble, 
an oen(lt«ion. CB 
INVEBTÉBBÉS qui n'a point de vertèbres. La. 
marck avait divisé le rgne animal en deux grand s- 
tions ; l'une renfermait les animaux dout les appareils or 
ganiques éient distribues symelriquement des deux cotés 
d'un axe veflbral : c'éient les vertébrs ; l'autre renfeait 
le animaux symétriques ou nou symtriques qui ne pré- 
sentaieut point d'axe vertébral : c'ehieut les invertbrds. 
Cette division tvoye A»e), oenserve par M. Dumril, 
n'a pu« ét6 a,loptOe par Cuvier. 
INVESTISSEENT, opération de siCe offensif, 
qu'ou a d'abord appelee m,estiture. C'c l'action d'enve- 
lopper avec des troupes une place attaquée; c'est la boucher, 
suivant le style ancien. On nomme complets ou [ncom- 
plets les iuvestissements, suivaut qu'ils interceptent ou non 
toute communication entoe les açsis et l'extérieur. Le 
rOle de la cavalerie est de commencer les investissements, 
en refoulant proe»sivement dans le cœur de la foeresse 
les postes avancés qui veilleur h l'entour. SitOt que le ter- 
rain est libre, les officiers du genie, protégés par des ou- 
pes Iégëres, explorent les abords, se vrent aux travaux 
des reconuaissances, et décident quels seront les points d'at- 
taque et la direction du chemiuement. Sous le poiut de vue 
de la défense, le devoir du commandant de la place insuItoe 
est de chicaner par d sosies les asiégnts, de leur faire 
acfieter pied h pied le tea, de combler leurs travaux de 
tranches, mai en ne tirant d'abord sur eux de osses 
pièces que iaiblemeut cbarges, alin de les abuser sur la 
mesure véritable des p«,rte. G  B«m. 
INVESTITURE ( du latin invtire, revêtir). On ap- 
pelait ainsi sous le rme de la Iéodalité le droit 
dïnvestir quelqu'uu d'uu fief et l'acte par lequel ou l'en 
investissait, après la prestation de l'aele de foi e t h oto- 
mage. La forme de invetitur etait des pire cueuses et 
des plus arié. Il y avait une invtiture qu'on aplait 
des ciseaux, parce que la chàtelaine, ayant daus les 
malus ce s)bole de s occupatious domestiques, priait 
quelquefois le seieur de donner un fief h quelque per- 
sonne, et le seigneur, preuaut les cisux de la main de sa 
dame, les metit, cmme signe d'investiture, as celles 
du nouveau vsal. On donnait de la même ma»iëre l'inves- 
titure d'uu iieI avec une touife de cheveux, avec une 
feuille de noyer, avec un gant, uu grain d'encens, un 
joue, une pierre, ufl livre, un lUaUche UB noeud 
baioer : daus ce dernier cas, on faiit naturellement une 
exception en faveur ou en considération des des. Nous 
lisons dans une chae euregistree par Du Cange, qe 
5Iaino, fils de Gualon, avec le coneutement de n iils 
Eudon et de sa femme Viette, faisait douation  Dieu et 
h saint AIhin de sa terre de Bilchriot, et que pour oenfi«mer 
cette donation le père et le fils avaient balsWsur la bou- 
che le moine Gautier, tandis que madame, eu dgard à l'u- 
sage , ç«t ne lut permettait pas de donner un baiser à 
« noie dans c occasions, baisait, au lieu de celui- 
ci, ais a'ec la méme inlention, un certain Lambert 
gui tait là prse»tt. Et je ne sais pas s'il n'y eit pas ex- 
près pour cela. B " Joseph 
Eu term de droit eoelésiatique, l'investiture, c'est l'acte 
confirmatif de la collation d'un bénfice. La forme en était 
tr-différente, oelon la dignité des bénéfic; le chanoin. 
était invti par le liwe, l'abbé par le baron pastoral, 
l'évêque par le bton et l'annu. 
Il y a encore une sor d'investiture conserv parmi 
uldeS musulmans. En AIgerie I hau fonctionnair 
arab revivent un burnous d'invtiture des autorités 
francises. 
INVESTITURES ( Querelle des ). On désire ainsi, 
dans l'histoire du moyen age, le différeud q6 la h propos 
de la loi d'investiture, rendue en l'an 1075 par le pape 
Grégoir e VIL Cette loi interdi«ail oemme acte de si- 
moe, et us peine d'exoemmucatio l'invtit¢ 



456 INVESTITURES 
temporelle, c'est-h-dire l'oclroi des ens ecclésiastiques 
fait par la puissance sécnliere à u ecclésiastique. L'em- 
pereur Henri IV, au synode tenu h Worms le 24 janvier 
1076, fit, il est vrai, d,poser le pape comme un tyran qui 
attentait aux droitsde l'oint du Seigneur; mais, irappe d'ex- 
communication, il dut finir par céder et s'immilier. Puis 
la querelle prit un autre caractère, et de part et d'autre 
on recourut a la force des armes. Gregoire mourut en 1085, 
sas avoir pu tre vaincu, et Henri IV, vinS-et-un ans 
plus tard, en ri06, et toujours sous le coup de l'excom- 
munication dont il avait ciWfrappé. L'empereur ilenri V 
continua h accorder des investilures, et Iorsqu'en 1110 il 
se decida à franchir les Alpes à la tëte d'une armee, le 
pape Pacal Il coDsentitfi lui reslituer les fiefs épi»copaux 
de l'Empire, a la condition qu'il renoncerait à sa pretention 
de nommer les évèques. i%lais dans le synode tenu à Larron 
en tlloE cette concession du pape fut considéree comme 
un acte de I,aute trahison à l'égard de l'Eglise, et cette 
assemblée le contraignit à la retirer. Enfin, en ! 122, un con- 
cordat fut signé entre Calixte Il et Henri V, aux termes 
duquel Henri abondouna au pape le droit d'investiture 
par l'anneau et la crosse, s'engagea a respecter la liberté 
des électuns épiscopales, sous la suveillance de l'autorité 
séculière cependant, tandis que le pape curieCa à l'em- 
pereur le droit dïnvestir les prèlats de fiefs imperiaux en 
vertu des prérogatives attacfiees au sceptre imperial et de 
recevoir d'eux, avant leur consécration, le sermeDt de 
féodalité. Des transactions identiquc mirent fin aux longues 
querelles que les papes avaient eu egalement  soutenir 
sur cette que.qion avec les rois de France et d'Angleterre. 
Toutefois, l'empereur Lothaire il modifia, dès  125, les ter- 
mes du concordat en n'exigeant plus des prdats que le 
serment ordinaire des sujets et en permettant que la con- 
sécration precedt l'investiture. 
IN-VINGT-QUAi'RE. Voçe - 
IX'iOL.i31LITE C'ezt le droit d'ètre ì l'abri de 
toute violence. La législation de tous les États libres pro- 
clame l'inviolabilité du domicile des citoyen% en ce sens 
que i'autorité publique n'y peut penétrer qu'après l'accom- 
plissement des lormalites l¢gales. Lïnviolabifité du domi- 
cile est une des garanties de la liberté individuelle. 
« Le premier droit de la souveraineté, dit Puffendorf, 
c'est d'être sacrée et inviolable. » Ce p«'incipe est fondè dans 
les gouvernements absolus sur ce que le roi est le représen- 
tant de Dieu sur la terre, et dan» les gouvernemenh cons- 
titutionnels sur cette maxime d'ordre public : Le roi ne 
peut ¢aal faire ; il in,plique alors comme corollaire indis- 
pensable la responsa bi litA des ministres. 
La souveraineté du peuple est inviolable, en vertu du 
même principe, dans les Eats dëmocratiq«es, et la repré- 
sentation nationale l'est au mb.me titre, lndividuel|ement 
chaque député, mandataire du peuple, est inviolable comme 
lui; mais hors du cercle de ses attributions politiques il 
reste sujet de la loi, qui confëre h la justice une action im- 
médiate et sans contr6le dans le cas de l|arant delit. 
Pourquoi faut-il que l'inviolabilité soit presque toujours 
lettre morte, et que ce mot de Benjamin Constant soit éter- 
nellement vrai : « On aura beau décréter l'inviolabilitê sacro- 
inte, la force des choses sera toujours plus forte que les 
lois écrites.» 
Les ambassadeurs sont inviolables de par le dr,it des 
gens, comme les léciaux à Ruine. Jadis le criminels le 
pouvaient devenir en vertu du droit d'asile. 
Enfin, l'inviolahilité «les lettres et de la correspondance 
privée est un devoir sacré imposé aux gouvernements. Les 
pouvoirs qui y manquent invoquent d'ordinaire la raison 
d'Et pour légitimer cette viola|lori de la foi publique qui 
soulève toujours conlre eux l'opinion (VO!le: Cxm,xx om ). 
INVOCATION. Ce mot, composè de la préposition la- 
tine in, dan% et du substantif roccztio, appel, est dela plus 
haute antiqnité : il st trouve h chaque page, sous la forme du 
'erhe hébreux//ara (appeler), dans la Bible. C'est l'action 

-- INVOCATION 
d'appeler danssoi-mme, ou  son secours, la divinilé- L'in- 
vocation était en usage chez les paens dans leur mystères, 
leurs sacrifices, leurs hymnes, «et jusque dans leurs choeurs 
dramatiques. Dans notre litmge, l'invocation des s a i ni s 
est aussi ancienne que l'Église, il clair donné " cette sublime 
communion de placer comme intercesseurs entre la majesté 
de Dieu et la faiblesse humaine, des sages, des justes, des 
saints, disparus de la terre avec la palme du martyre ou 
de la vertu. On honore, on invoque lessaints, mais on ne 
les adore pas : ce point de liturgie a été un long sujet de 
dispute entre les catholiques et les réformés : ces derniers 
vont jusqu'à nier l'efficacite de Iïnvocation de la sainte des 
saintes, de la Vierge. Dans la litqr.,ie grecque et orientale, 
après que le prêtre a rapporté, dans le sacrifice de la messe, 
les paroles de Jésns-Christ, il prononce une dernière prière 
que les Grecs nomment iïnvocation du Saint-Esprit, et 
qu'ils croient essentielle dans leur rit à la consécration. 
Au troisième siècle, on invoquait aussi les anges. Origène 
invoquait son ange gardien. Les devins, les IOthonisses, 
les magiciens, invoquaient les démons. Les plus anciens 
Pères de l'Eglise ont souvent nommé prières et invocations 
les formes des sacrements. 
Du pied des autels l'invocation dut nécessairement passer 
chez les païens au frontispice de ces hauts monuments 
poCiques si l,|eins de moralité et de grandes ]eçons pour 
les hommes, les poëmes Ciques. Dans les siècles des pa- 
triarches, au temps d'Hesiode et d'Humère, on n'invoquait 
que la déesse : « Chante, 6 déesse, la colère d'Achille, » 
dit simplement ce poëte divin. On invoquait aussi les Muses, 
ces vierges mysterienses, comme le dit leur nom. Enfin, 
les poëtes cheCiens appelërent / leur secours l'Esprit-Saint, 
comme Millon ; ou l'auguste Vérité, comme Voltaire. De nos 
jours, on rirait d'un poete invocateur. Au surplus, lesmuses 
antiques, et l'esprit de Dieu, dans ces temps oi toutes 
croyances sont mortes, se refuseraient  intervenir dans 
ce chaos téndbreux et rh.thmé dun idéalisme inintelligible, 
ou dans ce matériel informe de descriptions sans fin qui 
rëgne dans les poésies du siècle, et qui laisse comme un 
jouet aux enfants des écoles le psychisme trop simple du 
divin Platon. Il faut nécessairement que lïnvocation ait 
rapport au sujet que l'on traite. Virgile, ainsi qu'Homère, 
appelle  son aide la seule muse, dans l'Eneide. Dans ses 
Georgiques, il invoque Baccl,us, Cerès la bienhisante, 
eptnne qui lit jaillir un coursier de la terre, blinerve qui 
enfanta Polivier, les faunes, les dryades, Pan, le jeune Syl- 
vain, Triptolème ou Aristée, tous les dieux et toutes les 
déesses champtre, et enfin le grand Císar. I| n'y a d'in- 
 ocation plus complète dansaucun poëme. Lucrèce, dans son 
poëme De la Yture des Choses, demande ses inspirations 
 la génératrice des humains,  Vénus; Ovide appelle  son 
aide, dés le déhut de ses Metamorphoses, tous les dieux 
que la magie de son imagination fait successivement parai- 
tre sur une scène merveilleuse. Enfin, les poëtes modernes 
»nt à leur service, dans leurs invocations, des muses de mé- 
lancolie, d'amour, de solitude, en un mot toutes les muses 
qui peCide.ni ax mystères de la nature. D,-Bnos. 
INVOC_TIO,N (Diplomatique). C"est la formule par 
laquelle l'auteur, l'écrivain, le dataire ou les temoins d'une 
charte s'adressaient à la divinité pour la supplier de sanc- 
tifier ce qu'ils allaient faire. Sa plaee se trouvait ordinaire- 
ment en téte des dipl6me, des dates ou des signatures. 
Dieu, le Christ, la Sainte-Trinit6. ou quelques saints en 
étaient ordinairement l'objet. Il est à peu prës prouvé 
que les rois fi-ancs de la première race nëgligeaient l'invo- 
cation. Ceux de la secomle l'employèrent au commence- 
ment de bulles et dipl6mes ruraux, soit d'une manière 
directe et formelle en l'exprimant tout au long, soit en la 
représentant par «les ,uonogrammes ou des signes tels que 
le labarum. 
Les empereurs d'Orient, lesrois visigotfis, anglo-saxons, 
de sixii:nne, septi6nue et huitième si6cles, fifisaient des 
invocations détaillèes. Tous les cmpeeurs d'Occident jus- 



AVOCATION -- IODE 
qu'au treizième siècle firent de méme; nos rois, depuis 
Charlemagne jusqu'à Philippe le Bel, y furent presque 
touiour» exacts. Peu après, on renonça entièrement à cet 
usage. P.-B. 
INVOLUCRE assemblage de bractées disposCs 
symétriquement en verticilles ou coilerettes, formant une 
enveloppe extérieure à une seule fleur, comme dans l'a n 
mn ne, ou à plusieurs, comme dans les compesées, 
Linné lui avait donné le nom de calice commun. L'invo- 
lucre est di-, tri-, tetra-, penta-, p)lphlle, oelon le nom- 
bre de folioles qui le composent. L'involucelle est un invo- 
lucre partiel, dout les ombelliïères nous offrent l'exemple. 
lichard avait donné le nom de périphorante à l'inolucre. 
|O  fille d" I n a c h u s, fondateur et roi d'Argos, eut pour 
mère Ismène, et paya la célebrité de sus charmes des deux 
tiers d'une vie sans repos. Le Jupi{er de l'Olympe, selon 
la fable, mais sans doute, selon l'histoire, le Jupiter de 
Crête, ce ravisseur de toutes les belles parmi les Hellènes, 
l'enleva; et pour dérober son amante et ses amours 
jalouse curiosité de Junon, il les enveloppa d'un nuage 
tenébreux. Cette tache noire et vaporeuse, qui surgir tout 
 coup dans la sérénité de l'atmosphère, éveilla les soup- 
çons de l'épouse du martre des dieux; elle la dissipa d'un 
souffle, et trouva sur les lieux Jupiter, à c6té d'une é- 
hisse blanche comme la neige. Le dieu venait de chaner 
ainsi la malheureuse fille d'Inacbus. « De quel troupeau 
est cette énie? demanda la reine de l'Olympe. -- 
vient de naltre de ces glèbes », rcpliqua l'époux menteur. 
La divine matrone ne fut point dupe de cette imposture ; 
elle exigea que la génisse lui lùt livrée. El[e la donna incon- 
tinent en garde à un ptre enfant du la Terre, dont cent 
eux cosxraient le corps ; son nom était Ar us (Paop- 
ls, celui qui voit tout), nom ci.lèbre epuis, et appliqué 
aux vieux tuteurs de pupilles et aux maris jaloux. 
Cependant Jupiter, touché des malheurs inoms dont 
son amour avait frappé la plus belle vie qfil  eOt alors 
sur laterre, envoya Mercure, qui, sous la forme d'un 
tre, ayant endormi, par le charme de sa flore, le 
Argus, lui trancba la tète de sa hrpé, ou 
Toutefois, Junon ne céda point : après avoir mis son vi- 
gilant gardien au ran des oiaux-dieux, sous la forme 
du paon, et recueilli ses cent yeux sur la queue éblouissante 
de ce nouvel bte et messager emplumé de l'Of)tope, elle 
ucita une furie, d'autre disent uu taon, à la poursuite 
d'In, qui la rendit folle et vaabonde par toute la terre. 
Quadrupède ruminant, de princesse qu'elle fut, la mer ne 
fut point pour elle un obstacle ; ele traversa jusqu'à la 
plae illyrienne les flots auxquels elle donna son nom, et 
qui laissèrent jusqu'à nos jours la douce appellation d' lo- 
ri i e n  e s aux iles qui les embellissent. Io franchit bien- 
tSt, dans ses tourments, les hautes barrières de granit 
de l'Htcmus, descendit dans la Thrace, puis se précipi{a 
vers le Cancase, oi Prométbée, le ravisseur du feu cé- 
leste, loi prédit encore de lonues et pénles courses, 
_i'affreu périls, et enfin un doux repos couronné d'une 
élicité que rien ne pourra plns désormais altérer. Du Cau- 
case, Io courut se jeter dans le détroit de la Thrace, que 
depuis et toujours on appelle Bosphore ( passage du 
de là, laissant derrière elle l'Europe, elle atteignit l'Asie, 
et courut ì travers i'A[rique, jusques aux monts Etbio- 
piens, le long du il, qu'elle redesoendit jusqu'au Delta, 
où, par les douces caresses de Jupiter, qui lui rendit sa 
forme de femme, dit le grave Eschyle dans son Prornd- 
hée, elle mit au jour le noir Èpaphus, qui depuis réna 
en Égypte. In mourut peu de temps après, honorée et res- 
pectée des Égyptiens, à cause de sa patience, de sa douceur 
et de sa résignation à souffrir les maux de la vie : elle ft 
divinisée sous le nom d'lsis. D-Bno. 
 Ce qu'il y a de curieux dans l'histoire d'In, qui ne 
emble d'abord, dit M. Saint-Marc Girardin, qu'une des 
ombreuses aventures d'amour de Jupiter, 
Atque chan deasos Di¢6m narrabat amores, 
DIL'T. DE LA CONVERS,  T. X|. 

457 
C'est que, quelle que soit la diversit des traditions réo 
pandues sur sa course, elle s'accordent pour lui faire tou- 
cher les positions les plus importantes du monde grec. 
Ainsi, elle touche à la mer d'Innie, et, selon Ecbyle, lui 
donne son nom ; c'est par cette mer que la Grèce cornu 
munique avec l'Occident et colonise l'l{alie. Elle touche au 
Bespbore de Thrace, qd est la clef de la Méditerranée 
et de la mer Noire; au Bospbore cimmérien, qui met la 
mer -oire en communication avec le nord de l'Europe ; à 
l'lgypte eniin, au- lieu od sera lexandrie, c'et-à»ire 
au point de jonction [entre le commerce des Indes et le 
commerce de l'Europe. Paou{ oU le génie grec voit un 
lieu iportant, partout où le commerce et la pnisnce doi- 
ventenir se placer, la fble y couduit Io, qui, sous 
fouet de cette Tisiphone qui ne la pousse qu'où il faut al 
fer, devient ainsi l'emblèe de l'activité de la race hellé- 
ique. » 
IODE (de [, violet), corps simple, déoeveen 
par Courtois, dan« la cen«lre des fucus qui croissent au 
bord de la mer. L'iode est solide, d'un s d'acier, lamel- 
leux, d'une odeur particulibre, qd ressemble ucoup ì 
celle du chlore;  vapeur exerce sur{out une action vive 
Chauffé, ce corps ce fond ì une tepéraure de 107 , et 
se volatilise ì 175 ° environ, en produisat une vapeur o- 
leHe extrmemen{ intene, qui, en se condensant, dSpose 
d aiguilles brillantes et d'un éclat presque métallique; 
sa vola[ilisation avec l'eau est due à la tendance qu'elle 
a à passer à l'Cat de vapeurs, qd se mlent avec cell 
de l'eau, malgré la dilférence de temp.rature qui les pro- 
duit, parce que la vaporisation de i'u, renouvelant sans 
cesse l'atmo»phère, permet à une nouvelle propoion de 
vapeurs de se former : ce phènomène se présente avoe tous 
les corps volatils mlés en»emble. 
L'iode ne ut se combiner diroetement à l'oxygène, 
mai il est usceptible de s'y unir par des actions indirectes : 
ainsi, toutes les fois que l'on traite l'iode par une dissolu- 
tion aloelie concenée, i'oygène de l'oxy«le, parexemple, 
la poe ou la barste, se combine avec une partie d'iode 
pour former de l'acide iodique, qui se réunit à une por- 
tion d'oxye, ndis qe le mël, mis à nu, se combine aec 
ue autre portion d'iode, pour donner nsnce à une 
iodure; après avoir séparé ces deux sels, on enlève la 
balle par le moyen de l'acide sulrique. L'iode s'unit aussi 
à l'hydr3ne, mais également d'une manière indirecte : par 
exemple, quand on le met en contact avec I'u et l'acide 
sulfiydrique, le soufre de ce dernier acide  sépare, et 
l'hydrogène se combine à l'iode, pour former de l'acide 
i o d h y d ri q u e. On l'obtient aussi, et alors à l'état gazeux, 
en chauffant légèrement des pbosphures et de l'iode trè 
irement humeds : l'oxygène de l'u se combine avec 
le phosphure, et i'hydrogene avec l'iode. Enlin, l'iode se 
combine avec la plurt des mé{aux, ur former des 
iodur. GULTIER DE CLAUBRY. 
Depuis la découve de l'iode jusqu'au premier travail 
de M- Chatin, qui date de 1850, oe corps simple n'avait etL sial que dans un petit nombre de produits naturels. Ce 
fut d'abord Day qui en démontra la préoence dans dlfférets 
fucus marins ; plus rd, MM. Colin et Gaultier de Claubry 
ayant fait connadre l'action oeracristique que l'iode exerce 
sur l'amidon, la nsibi[ité de oe nouvu réactif rmit 
d'étendre les recherches et de conster plus facilement 
'existence de oe corps simple. Angelini et Cdntu signalè- 
rent t'iode dans un cerin nombre d'ux minral su 
ureuses. M. Bard l'indiqua dans divers mollusques et 
polypiers marins ; Vauquelin, dans un nai d'argent du 
Mexique; dei Bio, dans Pargent rn de Temeroo; 
Yniesira et Busmente, dans le plomb blanc de Catorce. 
pendant, l'iode paait encore pour l'un des corps les 
mos répandus dans la nature, lorsque M. Cbatin en ouva 
dans I cendr des plantes vivant dans les ux douces, 
puis dans oes ux eil-mëmes, pds dans I Ierre qu'ei 



arrosent, on plntt dnt elles opèrent un lavage naturel, 
puis encore dans l'eau de pluie, et enfin jusque dans l'air 
atmosphérique. 
Pour coustater l'existence de l'iode dans l'atmosphère, 
M. Chatin s'est servi d'un appareil très-simple, composé 
d'un grand vase aspirateur et d'un système laveur consistant 
en une série de tubes à boules de Liebig. Il est ainsi arrivé 
à reconnaltre que 4,000 litres d'air renferment très-approxt- 
mativement,/ Paris,  de milligramme d'iode. Il a, en 
outre, établi que l'air respiré perd le  de son iode. « Si 
l'on considére, dit-il, que le volume d'air consommé en un 
jour par un homme est de 8 mbtres cubes ou de 8,000 litres, 
son voit que c'cci  de milligramme d'iode (je ne donne 
aujuurd'hui ce cbif{re que comme une approximation mini- 
mum qui se met en rapport dans ce laps de temps avec la 
muqueuse pulmonaire; et il est dignede remarque que cette 
quantité est/ peu prs égale à celle que prend un homme 
buvant par jour deux litres d'eau médiocrement iodurée, 
celle d'Arcueil par exemple. Un habitant du faubourg 
Saint-Jacques absorbe ainsi autant d'iode par l'air que par 
l'eau, et dans beaucoup de pays, Nanterre, Prs Saint- 
Gervais, Saint-Germain, la vallée de Montmorency, etc., 
la proportiou iournie par l'air l'emporte de beaucoup ur 
celle empruntée à l'eau. » 
En 1851, M.Chatin reconnut par l'analyse l'absence presque 
complete d'iode clan« ces railCs des Alpes que désolent le 
crétinisme et leoitre. M. Fourcault, qui étudiait à 
la mème époque l',-tiologie de ces affections, posa cette 
conclusion : L'absence ou iïnsnlfisance de l'iode dans les 
eaux, dans les sub«tances alimentaires, doit ètre considérée 
comme la cause primitive, spéciale ou sui 9eneris, du 
goitre et du crétinisme. Cette opinion a rencontré des ad- 
versaires. Cepen«lant, le traitement par l'iode a amené 
quelques guérisons. Ce traitement a ëté également appliqué 
avec succès t la pourrilure ou eachexie aqueuse des bêtes t 
laine. On sait aussi que les solutions d'iode sont un puissant 
antidote contre la morsure des sêrpents venimeux, et aussi 
contre les poisons américains connus sous le nom de c u r a r e. 
IODE'X (Acide). VO!le: lomQvE (Acide). 
IODHYDIIQUE (Acide). L'acide iodhvdrique est 
gazeux, d'une odeur piquante, excessivement oluble dans 
l'eau ; en contact avec le mercure, il abandonne son iode, 
qtd s'unit au métal, et l'b)drogëne, dont le volume est moi- 
tic moindre que celui du gaz, se dégage. La dissolution sa- 
turée de ce gaz fume à l'air, et d'incolore qu'elle était, elle 
se colore bientôt plus ou moins fortement en rouge-brun ; 
l'uxygène de l'air htùle une partie de l'itydrogène, et l'le d e 
séparé se dissout dans la partie indécomposée. 
GAULTIEB. U 
IODIQUE (Acide). Cet acide, dont l'odeur rappelle 
celle de I' i o d e, dont la saveur est cre et astringente, se 
présente sous l'aspect d'une pondre blanche. Il est assez 
pu.,ant, liquide, décomposable par la chaleur, en donnant 
de l'iode et de l'oxygène; ses sels fusent sur les charbons, 
mais beaucottp moins virement que les chlorates ; l'acide 
sulfureux décompose l'acide iodique, comme ses combinai- 
sons, en se séparant de l'iode. L'acide iodeua de quelques 
chimitea n'est autre chose que l'acide iodique. 
IODUIE. L'acide iodb ydrique, en agissant sur 
les oxydes, donne naissance  de l'eau et à des iodures : 
nous ne devons signaler ici que ceux qui offrent un grand 
intérët par leurs propriétés. 
L'iodure de otosum cristallise en cubes, en octaèdres, 
on en trémies ordinairemeut opaques, très-solubles dans 
l'eau, et très-déliquescents, [ublcs dans ['acool. Ce sel, 
21ui parait exister dans toutes les eaux al:ou l'on extrait 
l'iode, est facilement décomposé par l'acide sulfurique, dont 
une partie se decompose en fournissant de l'oxygène au 
potassium, et l'autre s'unit à l'oxyde formé, tandis que 
l'iode est mis à un : c'est sur cette propriété qu'est fondé 
le procédé Io plus ordinairement emplové pour l'extraction 

IODE  ION 
L'todure de plomb, quWl'on obtient par le- malange ,l'un 
iodure et d'un sel de plomb solubles, se présente 
forme d'une poudre jaune sale ; mais si on fait bouillir la 
liqueur, l'iodure précipité se redissout, et par le refroidis- 
semeur se précipite de nouveau, sous forme de belles lames 
jaunes d'or. 
On obtient, soit par préeipitation, au moyen du sublimé 
corrosif et d'un iodure, soit par l'action de la chaleur sur 
un mélange d'iode et de mercure, un iodure de ce reCoi 
d'un rouge très-brillant, qui se sublime et se dépose en 
cristaux d'une teinte magnifique : malheureusement ce cam- 
posWperd rapidement sa couleur à l'air. On avait pensé 
pouv6ir le substituer au vermillon pourla peinture : l'ai- 
tCation qu'il subit ne permet pas de s'eu s'ervir pour cet 
umge. Cependant, en Angleterre, on i'a employé dans la 
teinture, et l'on en a obtenu des effets remarquables : 
iodure se combine facilement avec celui de potassium, et 
forme un sel double, qui est en usage pour cet objet. 
Comme i'iodure de potassium, l'iodurede mercure est trës- 
usité en th#rapeutique, particulièrement contre certaines 
affections scrofuleures et syphilitiques. 
Les eaux-mères des lessivages de soudes de varees ren- 
ferment un grand nombre de Is différents, parmi lesquds 
se trouve l'iodnre de potassium. Quand on les traite 
chaud, par l'acide sulfurique, on obtient l'iode, qu'un simple 
lavage précipite facilement. On peut aussi l'obtenir en fai- 
sant passer un léger courant de chlore dans la liqueur : 
l'iode s'en sépare en abandonnant le potassium au chlore, 
et se précipite. H. Gxvcxma nE CLVv. 
IOLAUS fils d'lphiclès et d'Automéduse, est célèbre 
comme ayant été le compa_,2non fidèle d'Hercuie. Entre att- 
Ires hauts faits qu'on lui attribue, on citele prix qu'il remporta 
aux jeux olympiques avec les chevaux d'Alcide. 11 fonda, 
aidé des fils des Thespiades, une colonie en Sardaigne, o/, 
dit-on, il finit par ètre adoré comme dieu. De i il alla re- 
trouver son maltre, à la mort duquel il assista, et eu 
l'honneur de qui il Ceva vu immense monument ett terre. 
Quand il bd devenu vieux, Hercule obtint d'Hébé qu'elle 
le rajeunirait. C'est en son honneur et en celui d'Alcide 
qu'on célébrait ì Thèhes les lol#es, fêtes dont le premier 
jour était consacré ì des sacrifices, et le second à des cour- 
ses de chevaux, off le vainqueur gagnait une couronne de 
myrte. 
IOLE, fille d'Eritus, roi d'CEchalie. Hercule en devint 
amoureux ; mais ayant éprouvé une vive résistance de la 
part d'Eurytus, il le tua, et enleva sa fille. Après la mort 
du béroq, foie Censa H. Ilus. 
IOLEES. Voye: Ionvs. 
ION Cait, à bien dire, le fils d'Apollon, qui l'eut en 
secret de Créuse, fille d'Érechthée, roi d'Athènes, avant 
qu'elle épous/t Xuthus. Eposé dans une corbeille par sa 
mère dans la grotte mème où Apollon lui avait prodigué ses 
embrassements, il fitt,  la prière de ce dieu, ramené par 
Mercure à Delphes où on l'Ceva. Le mariage que Créuse 
contracta phs tard avec Xuthus étant demeuré stérile, 
Apollon résolut de faire croire  Xutbus qu'il était le père de 
son fils, parvenu pendant ce temps là à i'àge de puberté; 
et voici comment il s'y prit : Xuthus étant venu consulter 
l'oracle sur la stérilité dont son mariage avec Créuse était 
resté frappé, l'oracle lui réoondit qu'il avait déjà un fils, 
lequel n'était autre que le premier jeune homme qu'il ren- 
contrerait à sa sortie du temple. On devine que ce fut le 
fils d'Apolion. Or, Xttthus, qui se rappelait avoir eu autre- 
fois quelques privautés avec une fille de Delphes, h Foc- 
casion des fètes de Bacehus, s'imaginant que ce jeune gars 
devait ètre le fruit de ce commerce ill'égitime, l'accueiilit 
en p,re et lui donna le nom d'ion. Créuse, au contraire, 
fut virement contrariée de cette adoption, et sa haine pour 
le fils que lui donnait son époux en vint à ce point qu'elle 
résolut de l'empoisonner dans nn bouquet que Xuthns 
avait fait préparer pour traiter quelques amis. Une co- 
lombe, qui, pour avoir gentWau breuvage qu'elle venait 



ION  
de verser dans la coupe d'lori, étant tombée roide morte, 
découvrit l'odieux projet formé par Créu. Condamnée 
à ttre lapidée, celle-ci se refugia près de l'autel d'no lon 
allait l'arracher, quand parut une prêtresse tenant à la main 
la corbeille dans laquelle Creuse avait autrefois exposé son 
enfant. Créuse la reconnut aussit6t, de mtme que son propre 
fils dans lon, ì qui elle apprit qu'Apollon était son pre. 
Mais la prïtresse qui leur confirma la chose ì tous deux 
leur persuada de la laisser ignorer à Xuthus, qui continua 
ì regarder lori comme son fils. Euripide a composé sur 
cette donnée sa tragédie d'lon. 
Ion, suivant la tradition, se di«lingua de bonne heure par 
ses hauts laits, et, vers l'an 106 avant J.-C., il conduisit 
une colonie dans le Péloponnìse. Il y obtint le royaume 
d'Eyale, et donna au pays son propre nom, Io n i e. Choisi 
pour chef par les Athéniens dans une guerre contre les 
habitants d'Eeusis, il vainquit les Thraces, et lut reconnu 
roi par les Atbéniens, qui se firent appeler loniens en 
son honneur. Vers 1350 avant J.-C., il alla s'établir sur 
la cote occidentale de l'Asie. Une autre tradition le fait re- 
venir plus tard et mourir ì Athnes. 
ION.[. Voye.'. ICOLIKILL. 
Il)NIE ç IONIENS. I o n, fige d'une des trois principales 
branches de la famille hellénique, avait pour père Xulhus, 
pour aieul Hellën, Deucalion pour bisaïeul, puis, en re- 
montant, Promélhée et Japhet pont ancêtres; enfin, Achéus 
était son frère a|né. Tandis que ce drnier quittait le Pelo- 
ponnèse pour aller régner en Thessalie sur les domaines de 
ses ancëtres, Ion, comme son frère, conduisait une co- 
lonie dans l'Egyalé ( partie du Péloponnèse situëe sur le golfe 
de Corinthe). Comme il marchait les armes à la main, et 
s'annonçait en conquérant, Selinus, roi du pays, lui envoya 
offrir sa fille en mariage, et l'adopta pour son heritier pre- 
somptif, lon accepta ces propositions, et b'atit uue ville ap- 
pelêe H¢lia, du nom de son épouse. Il succeda à son beau- 
përe Sélinus, l'an 103 avant J.-C. Il régnait dans l'Eyale, 
lorsque les Athénieus, en guerre avec ceux d'Eeusis, lui 
donnèrent le commandement de leur armée; mais il mourut 
quelque temps après (1360). Ses descendants se maintin- 
rent sur le tr6ne de l'Égyalé, qui prit alors le nom d'lonie : 
ils y bitirent douze villes ; luais au temps du retour des 
Héraclides, en 1189, les Achéeus, chassés aussi d'Argos 
et de Myeènes par les Dorieus, se rfngièrent au nord du 
Péloponnèse, et, secondés par ces mëmes Doriens, forcèrent 
les loniens de leur abandonner l'Ëgyalé; et cette contree 
changea son nouveau nom d'Ionie contre celui d'Achaïe, 
qu'elle conserva toujours. 
AIor% les lonieus se réfugièrent en Attique ; car A t h ì n e s 
passait pour la métropole de toutes les tribus toniques. Les 
Athéniens mirent d'autant plus d'empressement à recevoir 
ces h3tes, dont le nombre allait augmenter leur population 
et leur puissance, qu'ils y trouvaient un moyen de contre- 
balancer l'accroissement de terntor et de force que ve- 
naient d'obtenir les Doriens par leurs rapides conquètes. De 
là naquit entre la race dorique et ionique cette rivalité 
fameuse, qui subsista jusqn'aux derniers temps des républi- 
ques helléniqu«. Dès le règne de Codrus cette haine 
conduisit les Doriens à envahir les Irontiëres de l'Attique 
{1132). Les Athenieus perdireut alors la Megaride, et, 
trop resserrés dans leur territoire, peu lertile, se virent hors 
d'ëtat de donner plus ionemps un asile aux Ioniens. 
Une emigration lointaine devint nécessaire : lélée et 
Androclus, fils de Codrus, mécontents d'ttre réduits à la 
condition privée dans nn pays qui avait vu régner leur 
père ( car on sait qu'après Codrus les Athéniens n'avaient 
plus voulu de roi), se mirent à la tte d'une nombreuse 
émigration (1130). Aux Ioniens, qui en formaient, pour 
ainsi dire, le noyau, se joignirent des habitants de la Pho- 
cide, de la Béotie et des provinces voisines : on lit voile 
vers l'Asie llineure; on chassa des tirages mëridionaux 
de la L)die et du nord de la Carie les anciens habitaut% 
qui niaient une race mlce de Lydieus, de Caricn et de 

IONIE 
Plasges. Bient6t les Ioniens joignirent a leurs pos«essions 
continentales les lies de Samos et de Chios. Douze villes 
furent fondes, ou du muin repeuplées par eux : c'étaient, 
sur la terre ferme, Phocée, Erythrée, Clazomènes, Téos, 
Lébédus, Colophon, Ephèse, Priëne, Myunte, Milet; et 
dans les lies, Samos et Chios. Ces villes formaient la con- 
lderation ionique. Situées sons le plus beau climat du 
monde, elles devinrent bient6t florissantes : elles avaient 
toutes un temple commun, bti non loin d'Ëphèse, sur le 
promonloire de Mycale, consacré à Neptune, et nommé le 
Pamonion. L/ chaque aunée les douze illes célébraient 
une fète nationale et religieuse, et envoyaient leurs députés, 
qui délibéraient sur les affaires genérales de la coulédé- 
ration. 
A cette époque, presque tout le littoral de i'Asie 
heure devint grec : les Éolieus avaient mème précédé 
les lonien dans cette émigration 1193-1151 ) : ils oecuo 
paient le rivage de la 3Iysie et de la Ly,lie, depuis le pro- 
montoire Lecture au nord, iuqu'au lieu ou fut bti Smyrne, 
et qui confinait à l'l,mie. Po¢terieurement, une partie des 
Doriens, se trouvant eux-mèmes h l'eIril dans le Pél 
ponnèse et dans la Mégaride, allèrent se fixer au midi de 
l'Asie Mineure, sur la c6te «le la Carie, qui prit alors le 
nom de Doride. Ils peuplèrent aussi la Crele, Rhodes, 
Mélos et d'autres lies ( 1 t31-1116). Comme le loniens, les 
Éoliens et les Dorieus formërent de,x conléd,-ratious dis- 
tinctes. Pendant deu siècles, les Ionieus curent à com- 
battre les rois de Lydie, depuis Gyès jusqu'/ Crësus, à 
qui la conqnète de l'Ionie et celle de l'Ëolie etaient rservées ; 
mais il repecta la liberté intérieure des différente¢ cités, 
qui conservèrent leurs lois et leur gouvernement particulier. 
Le moment int où Crésus, vaincu à Thymbrëe par Cyrus, 
roi de Perse (55), lui céda avec son royaume héréditaire 
sa domination sur tutoie l'Asie Mineure. Ici l'on trouve la 
noble emigration des P hueCn s, qui, désertant leur vlle, 
occupée par les Perses, allèrent s'étzlir sur la c6te méri- 
dionale de la Gaule, et fondent notre antique et toujours 
florissante cité de M a r se i I I e. 
Confondues ainsi dans une mème conqù'.te, les colonies io- 
niennes, éoliennes et doriennes, demeurërent toujours sépa- 
rees, sous le rapport du langage, des moeurs et des prjugés 
nationaux. La langue grecque fut mëme assujettie au mo- 
difications des trois dialectes ionien, tolien et dorien. L'io- 
nien différait un peu de l'attique, ce langage si beau, que 
les Athéniens seuls parlaient dans toute sa pureté. L'él- 
sance et la douceur donnaient un charme particulier au 
dialecte ionien, dans lequel ont ecrit H i ppoc rate et Hé- 
rodote. Les mœurs des Ionieus et leur» ad_ présentaient 
la mème physionomie de douceur et d'dégante mollesse. 
Durant les siècles de paix et de bonheur qui s'etaient écoulés 
entre l'Cigration des loniens et la conquète persane, leurs 
colonies, aussi bien que celles des loliens et des Doriens, 
ne lardèrent pas à devenir l'entrep6t d'un commerce dont 
les habitudes et l'activité se sont perpétuees d'e en àge, 
sans interruption, jusqu'à nos jour% dans les Ëchelles du 
Levant. Apportant l'esprit actif, ingénieux, entreprenant, de 
la nation hellénique dans un pays qui avait de fréquentes 
communicatious avec la haute Aie, alor très-civilisée, les 
nouveaux habitant« de l'A»ie Mineure surpassèrent de bien 
loin les Grecs de l'Europe par leurs progrès dans les arts et 
dans les sciences. Des temples qui réunissaient à l'élégale 
des proportions la magnificence «les ornements s'étaient déjh 
élevés dans Plonie, alors qu'Athènes, sa métropole, atten- 
dait encore les monnments de sculpture et d'architecture 
qui «levaient l'embellir. 
Paisibles et soumis sous le rëgne des dominateurs per- 
sans, Cyrus, Cambyse et Smerdis, les Ioniens se soule- 
vèrent l'an 502 sous le règne de Dariu% et chassërent leurs 
tyrans. Pendant six ans, les Ioniens opposb_rcnt une rési.- 
tance hé:oïqueau, Iorces du grand roi. Milet, assiégé par 
terre et par mer, suecomba enfin, et avec elle l'lonie. La 
victoire fut cruelle : les femmes et les eulants furent 

58. 



4¢0 IONIE 
menés captifs, les hommes faits passés an fil de l'épëe. 
Plusieurs autres cités eurent le mgme sort; une foule d'lo- 
nieus allèrent au loin, en Italie, en Sicile, en efrique, cher- 
cher un asile et la liberté. 51ais comme une nation ne meurt 
pas facilement, l'Ionie ne tarda pas à redevenir florissanle. 
Durant les guerres médiques, les rois de Perse se servi- 
rent contre les recs des forces de i'lonie ; mais à Sala- 
mine, mal en prit  Xerxès d'a'oir compté sur leur flotte : 
au milieu du combat, ils firent defection, et ce mouvement 
entraina la déroute des Perses. Au promontoire ionien de 
lIycale, les Perses» vaincus par les Grecs, auraient pu encore 
opérer leur retraite; mais les lilesiens, qu'ils avaient 
chargés de garder les defilés de ce promontoire, arrgtèrent 
leur fuite, au lieu «le la favoriser; el les Spartiates, qui 
combattaient de ce c6té, purent à loisir égorger les fuyards. 
Les vaisseaux des Perses, leur camp, la liberté de i'lonie, 
furent le prix de cette mémorable journée de ,lycale, éclairée 
du mme soleil que la victoire de Platée ( 27 septembre ,9), 
remportée sur les Perses au sein de la mère-patrie. Depuis 
lors, lïnlhtence d'Alhènes fut assurée en Ioniœe. L'Alhénieu 
Cimon {669), après une suite de victoires ëclatanles, dicte 
aux Perses le traité par lequel ils reconnaissent la liberté 
des villes grecques de l'Asié. 
La guerre du Péloponnèse, qui gclale en 631, et qui doit 
durer près d'un demi-siècle, donne une nouvelle impor- 
tance politique aux cités ioniennes, éoliennes et doriennes 
de i'Asie Mineure. Les parties helligrantés, Albènes et 
Sparte, reconnaissent que de leur concours oit de leur pos- 
session alCendra le triomphe. Les Grecs d'Asie, entrainës 
par les Ionien% embrassent naturellement d'abord le parti 
d'Athènes; mais plus tard les efforts de Sparte réussirent 
à faire passer sous sa loi Ioniens, Eofiens et Doriens. Enfin, 
par le traite d'Antalcidas (387), Sparte, delruisant le noble 
ouvrage d'AII,ènes et de Cimon, iivru au grand roi l'indé- 
pendance des villes grecques de i'Asie 51ineurc. Il ne paruit 
pas que le joug des Perses ait été bien écrasant pour 
elles; car elles ne cessèrent pas d'ëtre riches et tlorissanles 
de jouir de la liberté de lear commerce, comme de leurs 
institulions inlèrieures. Surpassés depuis le siècle de Péri- 
clés par les Atheniens dans les plus nobles productions de 
la poésie, la sculpture et l'architecture, les Ioniens n'en de- 
meurèrent pas moins les maitres en l'art d'embellir l'exis- 
tence, par tous les prestiges des arts et de la mollesse, et 
par tous les plus doux loisirs de la science et de la volupté. 
Enfin, à cet egard ils reprirent leur superiorilé lorsque la 
Grèce dégenérée se laissa subjuguer par la mollesse. Philo- 
sophes, courlisanes, poëtes, courliers, peintres, ouvriers, 
prosateurs, cuisiniers, tout ce qui donnait tant de charmes 
à la vie, dès lors si gaie et si ellëminêe, des Grec% se Irou- 
ait à Milet, à Smyrne,  Colophon. Charles Dr Bozom. 
IONIEN (Dialecte). Voyez Ioxtr. 
IOXIE (Mode). Dans la voluptueuse Ionie, la musique 
dut nécessairement suivre les intonations, les inllexions 
molles de la langue : aussi son mode musical était le plus 
efféminé de tous. D'abord, la musique des Gecs s'échelon- 
nait sur trois principaux modes : le plus grave s'appelait le 
dorien ; le phr.en tenait le milieu ; le plus aigu etait le 
i)dien. Les fendamentales de ces trois modes ëtaient à un 
ton de distance rune de l'autre : on partagea chacun de ces 
tons en deux intervalles, et l'on lit ainsi place à deux au- 
tres modes, l'ioiien et l'ëolien, dont le premier fut inséré 
entre le dorien et le phrgien. Dans la suite, le système 
s'ëtant ëtendu à l'aigu et au grave, on eut, parmi les nou- 
velles dënominations que l'on donna ces innovations dans 
le. système musical, l'hyper-ionien ( le dessus-ionien ou l'io- 
nlen aigu). Le mode dorien était le centre de tous ces 
modes. Le mode_ionien convenait a«tx fëtes et aux danses 
voluptueuses de l'Asie, cette belle contrée aujourd'hui des 
almas et des ba.adères. 
IOIENXE (Ecole). Voyez Io,xtQv (Ecole). 
IONIÈNNE (lIer). On donne ce nom à la partie de ia 
•ner léditerranée situee entre la c6te occidentale de l'AIba- 

IONIENNES 
nie, le royaume de Grèce et la c6te orientale de la Calabre; 
elle le doit incontestablement aux loniens, qui habitaient ,a 
c¢Ste occidentale du Péloponnèse. Cette mer forme le golfe 
de Tarente, entre la Calabre, la Basilicate et la Terre d'O- 
trante; plus loin, le golfe de Patra% etan delà du détroit de 
Lépante, celui de Corinthe ou de Lépante, tous deux situés 
entrele Péloponn6se et la terre ferme de la Grèce; puis celui 
de l'Arcadie (le golle de Chpre des anciens ), à l'occident 
du Péloponnèse; et enfin celui d'Arta (le golfe Ambra- 
cique des anciens ), sur la cte de l'Epire, entre la Grc 
et i'Aibanie. 
IONIENNES (lies). On désigne sous ce nom géné- 
tique les lies de C or fou ,de Paxo (la plus petite de toutes, 
avec 5,5OO habitant% sur une surface d'un myriam6treoe,é, 
environ), de Sainte-Maure, de Cdphtdonie, Zante, Thaki 
(Ithaque), situées dans la mer lonienne, près de la c6te 
occidentale de l'Albanie et du royaume de G rè ce, ainsi 
que i'lle de C e r i 9 o, voisine ge l'extrémité méridionale du 
Péloponnèse, et les divers iiots qui en dëpendent. Elles sont 
d'une grande importance en ratson de leur position, qui do- 
mine les mers du Levant, et Iorment une républiqne grecque 
particuliére, placée sous le protectorat de l'Angleterre, la- 
quelle s'y tait représenter par un lord haut comnfissaire. Ces 
lies ont ensemble une superticie d'environ 36 myriamètres 
carrés, et sont très-montagneuses. Ferliles dans les railCs 
et sur les c6tes, elles sont d'une stérilité extrgme sur les 
crètes denudces des montagnes, dont l'une atteint à Gépha- 
lonie 1,700 mètres d'el,.vation. On y jouit d'un climat déli- 
cieux, bien que très-chaud en été ; mais elles sont sujette 
aux ouragans et aux tremblements de terre, et l'eau y fait 
défaut sur plusieurs points. Sous le rapport physique, du 
reste, elles participent complétement de la nature du soi de la 
Grèce, et notamment de la Grèce insulaire. On n'y trouve 
pas de furëts ; et en fait de céréales, elles produiseut à peine 
le fiers de leur consommation ; en revanche, le vin, les fruits 
de toutes epèces, les rai-ins secs, l'huile et le sel forment 
avec le coton et le chanvre leurs principaux articles d'ex- 
portation. On y élëve peu de gros bétaii, un peu plus de 
mourons, de chèvres; mais i'éducation des pigeons, deg 
abeiiles, des vers à soie, la chasse aux cailles et la pgche y 
donnent d'importants produits. Le règne minëral y fournit 
du sel, de la houille, du soufre, du marbre et du bitume. 
Le nombre des habitants, après avoir pendant quelque 
temps beaucoup diminué, par suite de fortes émiations en 
Grèce et de la décadence du commerce, atteignait de nou- 
veau en t852 le chiffre de 230,000 $mes. Sauf environ un 
millier d'An$iais ( la garnison non comprise ), 5  6, juifs 
et 8,000 Italiens, tout le reste de cette population est de 
race grecque ou albanaise. Sanf les juifs et les protestants 
anglais, un sixième prolesse la religion catholique ; et les cinq 
au'tres sixibmes appartiennent à la religion grecque. Le plus 
haut dignitaire de rEglise grecque est l'éparque, dont les 
fonctions sont tour à tour exercées par les quatre métro- 
politains de Corfou, de Zante, de Sainte-Maure et de Cé- 
phalonie. Le haut clergé est salarié par l'Etat, mgme celui 
de l'Èglise catholique, qui n'y iouit pas de toute son indépen- 
dance et à la tëte de laquelle sont placfis un archevëque et 
deux Arg.ques. Le clergé ne peut correspondre qne par l'in- 
termëdiaire dit sénat avec des prgtres ou des autorités tem- 
porelles étrangères. Il a été amplement pourvu aux besoins 
de l'instruction publique par des écoles partienliéres et cen- 
trales, par detx gymnases et par une université à Cotlou ; 
aussi les Grecs des ries Ioniennes l'emportent-ils en ce qui 
est des lumières et de l'instruction sur tous les autres Grec.s. 
La population est divisee en nobles {avec des titres italiens), 
propriétaires de la plus grande partie du soi, en bourgeois 
et en paysans, qui ne sont que lermiers ou métayers. La 
culture des terres, avec les industries qui s'y rattachent, la 
pêche, la navigation et le commerce sont les principales oc- 
cupations de la population, qui devient parfois trop nom- 
breuse et dont l'excédant doit alors aller gaguer sa ie sur 
le continent. Le commerce, qui de mgme que la lrrospérité 



IONIENNES 
générale du pays, est aujourd'hui en voie de progrès, 
lève à prbs de onze millions de francs pour l'importation 
| en t 848, l'importation, pgur les provenances de la Grande- 
Rr¢tagne seulement, s'Ceva fi 1"/8,881 livres sterling; et 
en t849, à 165,800 livres sterling ), et à plus de rg. millions 
de francs pour l'exportation. Les seize ports qu'on trouve 
dans ces lies, et entre lesquels celui de Corfou occupe le 
premier rang, sont tous des ports francs. La marine mar- 
chande ne laisse pas que d'avoir une certaine importance. 
Cphalonie, à elle seule possède au-delà de quatre cents na- 
vires. Des services ruliers de bateaux à vapeur les relient 
aux principales places de commerce de l'ltalie et du Levant. 
Les revenus publics, qui consistent en grande partie dans 
le produit des taxes indirectes, s'Cèvent à t9.0,9.36 livres 
sterling, et les dépenses à 143,t77 livres sterling, non 
compris l'entretien de l'afinC, qui ne coOte pas moins 
de 130,000 livres sterling par an, et accrott dès lors no- 
tahlement le déficit. La dette publique est évaluée 
à 9.,500,000 ff., et la valeur du papier monnaie en circulation 
à rg. millions de francs. La garnison anglaise se compose 
de 3,000 hommes, à quoi il faut ajouter quatre régiments 
de milice indigène, forts chacun de 800 hommes, et orga- 
nisés par le lord haut commissaire. La flotte militaire se 
compose de deux vaisseaux de guerre anglais, stationnés 
à Corfou, d'une ffCalle et d'une corvette, et de deux bg- 
timents à vapeur faisant sous le pavillon de la rèpublique des 
Iles Ioniennes le service des sept ries. 
Aux termes de la constitution demeurée jusqu'à ce jour 
en vigueur, et qui n'a quetout récemment subi.q.elques mo- 
difications, l'Êglise grecque est la religion dominante, de 
mème que la langue grecque est la langue officielle, natio- 
nale. L'assemblée Iègislative ou pro'lement, qui a mission 
de régler les dépenses publiques ordinaires, se compose de 
quarante membres, ' compris le président. Sur ce nombre, 
onze sont nommés par le lord haut commissaire, et consti- 
tuent ce qu'on appelle le co»seilpri»mire; les vingt-neuf 
autres sont Cus parmi les nobles propriétaires du sol, par les 
éle«.teurs de chaque tic, dans la proporlion de leur popu- 
lation respective, mais sur une liste dressée par le conseil 
primaire. Les pouvoirs du parlement durent cinq ans ; es- 
pace de temps pendant lequel il tient trois sessions, de trois 
mois chacune. Le pouvoir exécntif et Pinilialive sont confies 
à un sénat composé de six membres, , compris le prèsident, 
et qui autrefois était aussi investi d'un droit de veto. Le pré- 
sident du sénat, qui porte le titre d'Altesse et doit-ètre 
noble et Ionien de naissance, est nommé pour deox ans et 
demi, sur la proposition du lord fiaut commissaire, tandis 
que les cinq sënateurs sont Cus pour cinq ans par l'assem- 
blée législative, qui lesehoisit dans son sein. L'administration, 
cunfiée au sénat, est divisée en trois départements : le dé- 
parlement général, le département pohtique et le départe- 
ment des finances. Le lord haut commissaire nomme le se- 
crétaire du premier de ces départemeqts ou ministères; ceux 
des deux autres le sont par le sénat, sauf l'approbation de 
l'assemblée législative et du lord haut commissaire. Dans 
chaque tic existe une commission spéciale de cinq membres 
pour tout ce qui concernel'agricultu re, l'instruction publique, 
l'industrie nationale, le commerce, la navigation, les sub- 
sistances, la police, les établissements de bienfaisance, les 
cuites et" l'économie politique. Le lord haut commissaire est 
investi de pouvoirs extrmement Cendus. C'est lui qui dresse 
les listes électorales; et il peut convoquer extraordinairement 
l'assemblée législative. Il confirme ou rejette les choix faits 
par le sénat, de même que toutes les lois et ordonnances ren- 
dues par le sénat et toutes les décisions prises par ce corps, 
n'importesur quelle matière. En outre, c'est lui qui nomme 
la plupart des Ionctionnaires de l'administration civile et 
fiuancière, et méme jusqu'à un certain point de l'ordre ju- 
diciaire ; et il a la direction supérieure de tout ce qui a trait 
à l'administration des finances, à la police et à la streté 
pblique. Enfin, le roi d'Angleterre, protecteur de la Répn- 
blique de lies loniennes, est im'esti du droit d'opposer 

461 
pendaut un an, à partir du jour de leur promulgation, son 
veto à toutes les lois rotCs par l'assemblée législative et 
approuvées par le lord haut-commissaire. Les Iles loniennes 
ne jouissent pas de la liberte de la presse; les imprimenrs 
' sont placés sous la surveillance et la direction spéciale 
du .sénat et du lord haut commissaire, dont l'autorisation 
est nécessaire pour en établir de nouvelles. 
Histoire. 
Dès les temps hroïques de l'antiquité grecque, on trouve 
ces liens habitCs par des populations fielléniques, obéissant à 
des rois indigënes, que remplacèrent plus tard des institutions 
repubficaines. Après l'époque florissante de la Grëce, elles 
passèrent toutes sous la domination.des rois de Macédoine, 
et ensuite sous celle des Romains. Lors du partage de l'Em- 
pire Romain, elles Chutent à l'empire de Bzance. Dans les 
guerres soutenues contre cet empire par les Normands de 
ffaples et par les Véniliens, elles furenl tant6t conquises et 
tant6t reprises, jusqu'fi ce qu'au quinzième siècle les Vé- 
nitiens filtrent par s'en rendre Colnpletement les maitres ; 
et ceux-ci, tout en leur laissant leur organisation civile et 
ecclésiaslique, les firent gouverner par des provoediteurs, 
en même temps qu'ils réussissaient/ en conserver la pos- 
session, en depit de tous les efforts tentés par les Turcs pour 
les leur enlever. Lorsque la rëpublique de Venise disparut 
en 1797, elles passèrent sous la dominafion française; mais 
dès 1799 elles tombaient au pouvoir des Turcs et des 
Russes, et en 1800 l'empereur de Russie, Paul l "r, en 
constilua une Rdpublique des Sept lles-Unies, placée sous 
la suzeraineté de la Porle. Elle ne se maiulint, au milieu de 
violentes commotions interieures, et encore grace seule- 
ment a la presence d'une garnison russe, que jusqu'en 1807, 
époque ou les Français s'en emparèrent. Mais a leur tour 
ceux-ci ne purent en conserver longtemps la possession. 
En 181 t des forces anglaises vinrent occuper les lies lonien- 
ries, à l'exception de Corfou, que la paix de Paris, en 
1814, adjugea se»le à l'Angleterre. 
Aux termes du traité conclu à Paris, le 5 novembre 1815o 
entre l'Angleterre, l'Autriche, la Plusse et la Russie, ces 
lies furent alors constiluées en un Etat-Uni des lles 
loniennes, placé comme Etat libre et particulier sous la 
protection immédiate et exclusive de la couronne d'Angle- 
terre. Le traité confèrait ì cette puissance le droit d'y en- 
tretenir garnison et le commandement supérieur des troupes 
indigènes. Elle devait exercer son protectorat par un lord 
haut commissaire cltargé de présider a l'administration inté- 
rieure, et de r«,glémenler, d'accord avec un conseil seconde 
par une assemblée legislalive, les rapports de l'Êtat-Uni avec 
la puissance protectrice. Une constitution, à la discussion de 
laquelle ne prirent part que onze indigènes notables, publiée 
le 9.6 aoftt 1817, régulat isa ce nouvel ordre de choses ; mais 
elle accordait à la puissance protectrice des pouvoirs tels 
qu'ils équivalaient à une soueraineté absolue. Il en résulta 
des plaintes conlinuelles, qui, agravees encore par la con- 
duite altière de la plupart des Iords hauts commissaires et 
fonctionnaires anglais, se transformèrent bient6t d'abord 
en une résistance passive et en conspiralions occultes, puis 
en opposition ouverte et même en ins,rrection déclarée, 
à l'époque de la guerre entreprise par tes Grecs du confi- 
nent pour leur independance, lorsque le lord haut com- 
missaire Maitland pretendit faire brver la plus stricte 
neutralité. Cette insurrection, bien que comprimée, n'en 
couva pas moins sous la cendre pendant longtemps encore, 
quoique le gouvernement anglais fit beaucoup pour le bien- 
ttre matériel du pays, en y fondant des écoles, en y cons- 
truisant de bonnes routes, etc., etc. 
Les mesures de violence adoptées en 1839, 1841 et 18-t3 
par le lord haut commissaire Howard-Douglas provoquèrent 
] l'opposition la plus vive; et depuis lors il s'est manifest6 
dans la population une tendance de plus en plus prononcée 
à s'affranchir du protectorat de l'Angleterre pour se réunir 
à la Grèce. Sous l'administration du successeur de Douglas 



462 IOSIEiNFIES 
de lord Seaton qui partageait de tous points sa manière de 
voir, des Cnnemies Iurent bien proposCs au parlement ; 
mais, d'un autre coté, on pro jeta de nou elles depenses pour 
création de ports, de jetCs, etc., toutes dépenses bien plus 
utiles à l'Angleterre qu'aux lies loniennes eles-mmes. Par 
suite de l'attitude franchement hostile que l'Angleterre en 
vint ì prendre alors vis-/l-vis de la Grèce, la situation des 
lies loniennes alla tou]ours en empirant ; et les resures 
rigoureuses auxquelles eut recours le gouvernement anglais 
ne fit qu'angmenter encore le mécontentement génëral. 
Les habitants des Iles loniennes participèrent aussi à la 
commotion générale produite en Europe par la révolution 
de fcvrier 1848. Par une ptition en date du 77 mars, 
on réclama de l'Anleterre la liberté de la presse, l'élection 
directe des mandataires du peuple, le scrutin secret, la 
création d'une armée nationale ;mais l'Ang]eterre refusa de 
donner satisfaction à ces va.ex si légitimes. Il en résulla, 
le 27 septembre 1848, à Cëphalonie, une insurrection 
qui gagna bient0t toutes les antres îles et dont le mot 
d'ordre fut Libertd et runion à la Grèce. Le gouverne- 
ment anglais employa des Iooyens vigoureux contre ce 
mouvement, auquel il eut |'iabileté de prêter des tendances 
communistes, et russit de la sorle à le comprimer. Le 
lord haut commissaire actuel, en fonctions depuis le mois 
de mai t,9, rendit une amnistie dont furent cependant 
exclus tous les individus qui aaicn! eu la précaution de se 
refugier ì l'éiranger. Cependant on n'était en rëalité parvenu/i 
rêtablir le calmequ'a la surface : des le 30 et le 3t aoùt t849 
eclatait/i Céphalonie une insurrection nouvelle, organiséepar 
un parti en relations ëtroites aec le parti rpublicain de la 
Grèce, qui, sous le nom de Jeune lonie, poursuit la rea- 
lisation des utopies socialistes du radicalisme. Après quel- 
ques engagements, les troupes anglaises parvinrent com- 
pb'tement à réprimer ce mouvement, dont les rësultais les 
plus appréciables furent des executions capitales ordonnées 
par des conseils de guerre, des persécutions, des arresia- 
tions et des condannatioos judiciaires; et l'amnistie qu'on 
publia ensuite coniint de nombreuses exceptions. 
Le parlement qui s'ouvrit le 10 novembre de la mëme année, 
et duquel on attendait beaucoup, notamment une révision 
de la constitution dans le sens liéCai, ne valut guère au 
peuple ionien qu'une réglementalion meilleure et une ex- 
tensiondu droitélectoral. Le nouveau parlement Alu en 1850, 
et dont la session commença le 30 mars, fut prorogé dès 
le 17 juin, en raison de l'attitude hostile qu'il avait prise vis- 
à-vis du gouvernement. Les prétentions que l'Angleterre 
Ceva'la même année, au nom des lies loniennes, à la 
possession desiles d'Ëlaphonisi et Sapienza sur la cote occi- 
dentale du Péloponnëse, n'avaient dautre but que de vexer 
la Grèce. Le parlement convoqué vers la fin de 1,50, et h 
l'ouverture duquel sir G. Ward annonça le rétablissement 
prochain des restrictions auxquelles etaien! précédemment 
soumis le droit d'élection et le droit d'éligibilit6, en mëme 
temps qu'il detruisait tout espoir de voir jamais l'Angleterre 
renoncer volontairement h la possession des Iles loniennes, 
fut subitement prorogé à six mois, sous le pretexte de coi- 
lisions nouvelles entre les représentants du peuple et le 
sënat, mais en réalit parce que le lord haut commissaire 
craie-trait de voir l'assemblée adopter un decret ( $ décem- 
bre 1850 ) par lequel les Iles loniennes déclaraient leur indé- 
pendance ainsi que leur réunion à la Grèce, et qui devait tre 
adressée à la puissance protectrice pour tre eommuniqué 
aux autres grandes puissances. Si dans ces derniers temps 
le gouvernement anglais s'est montré plus disposé à faire 
quelques concessions relativement à la constitution du pays, 
on peut tre sur que jamais il ne renoncera à son droit de 
protectorat; car la possession de ce groupe d'lies est comme 
station militaire d'une importance extrëme pour l'Angieterre, 
quelque tournure que prennent les affaires d'Orient. 
IONIENS. Voye-- Iorm. 
IO.IQUE ( École ). On comprend sous cette dénomi- 
nation les plu anciens plfilosopies grecs, tels que "£ h a- 

-- IOWA 
Iës, Anaimandre, Anaximèue, Héralideet A naxa- 
goras, qui dans l'interprétation de la nature saivirenl 
une mne direction d'idées : ce nom vient de ce qu'ils 
étaient pour la plupart originaires de l'Ionie (vo9 e" Gn6o 
QVr [ Philosophie]). 
IONIQUE (Ordre). Vogez Onvngs n'cz -c'rn, Cn. 
PITEAU, COLOINE, eIc. 
IONIQUE, ou IONIEN (Vers), ainsi nommé soit qu'il 
fùt né dans l'ancienne lonie, soit qu'il ett été imité de 
Ioniens. C'est un ver latin, composé de trois mesures, dont 
chacune est de deux brèves et deux longues. On en trouve un 
exemple dans la douzièr0e ode du troisième livre d'Horace. 
IOTA nom grec de la lettre i, qui chez les Grecs, comme 
dans les premiers temps chez les Bomains, n'a jamais été 
considérée comme consonne, ruais est toujours restée 
voyelle. La forme excessivement simple de cette lettre, 
qu'en grec on se contente, dans certa'ms cas, de marquer 
par un petit trait sous certaines vo)elles, et qu'alors on ap. 
pelle io/a souscrit, a donné lieu à la locution proverbiale -_ 
il n'y manque pas n iota, Cest-à-dire absolument rien. 
IOTACISME, {de iota, nom grec de la lettre i), dë- 
faut de conformation daas les organes de ta parole, qui em- 
pbe de prononcer correctement les lettres jet 9 mouillées. 
On désigne aussi par ce mot l'emploi fréquent de la let- 
tre i dans une langue. Le grec moderne et l'italien abu- 
sent de l'iotacisme. 
Enfin, on entend parle mëme mot unefaute d'orthographe 
dans les manuscrits grecs, oiJ les copistes ont confondu les 
lettres et les dipthongues u, ci, é, ni, i. 
IOSVA (on prononce Eiowe), l'un des États-Unisd¢ 
PAraAtique seplcntrionale,, entre le Iississipi et le Mis- 
souri, les États de Wiscousin et d'Illinois à l'est, l'État de 
blissouri au sud, les Territoires de Nebraska à l'ouest et de 
llinnisota au nord, faisail jadis partie du grand Territoire du 
ord-Ouest, reçut ses premiers celons en 1831, fit partie 
partir de 1836, à titrede district, du Territoire de Wis¢onsin, 
puis tut organisé comme Territoire particulier en 1838, épo- 
que où il contenait à peine 2,000 habitants, et enfin fit ad- 
mis, en IAS, à |aire partie de l'Union comme État indépen- 
dant. En 1850, surune superficie de 1,682 myriamètrescar- 
rés, on comptait déjh une population de 19fl,214 habitants, 
dont nfille hommes de couleur libres. Il n'existe point de 
montagnes ou de hauteurs considérables dans ce pays : ce- 
pendant, il n'est point partout plat et uni  il forme, au con- 
traire, sur de vastes étendues un plateau onduleux formant 
le point de partage entre le bassin du Mississipi et le Mis- 
souri. Le premier reçoit, entre autres affiuents et dans la 
direction du sud-est, la rivière d'lowa, dont le parcolrs est 
de 45 mriamètres, et le Keosagua ou rivière des Moines, 
dont le parcours est beaucoup plus considerable et que les 
bateaux à vapeur peuvent remonter jusqu'à une distance 
de 15 myriamètres. Les rives de ces di[férents cout d'eau 
sont géneralement couveres de riches forèts; iennent 
suite des prairies, manquant absolument d'arbres, occupant 
près des trois quarts du sol, et couverte tantOt d'herbes, 
tant6t de brousail|es, notamment de sa»afras. Le soi est 
presque partout d'une fecondite extréme, particulièrement 
propre  la culture des céréales et à l'élève du bétail, et les 
parties le plus elevees du pas sont très-salues..lusqu'h 
présent il n'y a de population m peu compacte qn'au sud- 
est et dans la partie de territoire riveraine du .',Iissis- 
sipi; mais la culture va toujours en pénétrant davantage 
dans l'intérieur des terres. Au total, il n'y a guère encore que 
t myriamètres de mis en culture. Le froment, le maïs et 
letabac (8 à 10 millions de kilogrammes), le sacre d'Cable, 
le beurre, le fromage et la laine forment les principaux pro- 
duits de t'agriculture. Toutefois, la grande richesse de 
Êtat consiste encore dans ses mines de plomb, près desquelle 
se trouvent aussi des mines de houille. 
Le gouverneur et les t9 sénateurs sout Cus ponr quatoE 
ans, et les 39 représentants pour deux ans. L'État d'lowa 
envoie maintenant deux repréentants au congrès national 



m OWA -- 
La valeur de la propri|é productive s'y élève à t,27,139 
dollars et la dette publique (185t) à 79, dollars; les 
dépenses ordinaires (non compris le service des intérèts de 
la dette et le chapitre de l'instruction publique), à 5,000 
dollars ; le fond d'école, à t,909 tin|lai's. L'État possède 
une université établie h Mount-Pleasant, dan l'arrondis. 
soment de Henry. Le chef-lieu de l'État, lowa-City, 
compte ,500 habitants; il s'en faut toutefois que ce soit le 
centre de population le plus considérable. 2Dubuçue, sur la 
rive droite du lIississipi, situé sur une terrasse au milieu 
de la réçon plombifère, centre d'un commerce important 
avec l'lutCieur de l'État et avec les États d'lllinois et de 
x, Vis¢onsin, a 3,'100 habitants ; et Burlington, aussi sur le 
lIississipi. Dans ces derniers temps beaucoup de Hongrois 
sont enus s'y établir, e.t en 1851 des émigrés du Mecktem- 
bourg y ont fondé une colonie socialiste, sous la direction 
d'un certain Brockmann. 
IPÉCACUANHA. llar%,,raaff et Pisou, dans leur 
Histoire naturelle et rnœedicale dt Brésil, publiée au mi- 
lieu du dix-zeptième siècle, avaient donné la description 
et la figure d'une plante designée au Brésil sous le nom d'i- 
pdcacuanha, et dont les merveilleuses propriétés médici- 
nales devaient faire sinon une universelle panacee, du 
moins un agent thérapeutique de la plus haute impor- 
tance. Malheureusement, la description écrite et la délinéa- 
tion graphique étaient également vagues, également incom- 
plètes; et il fut impossible de rapporter avec certitude la 
plante alCignée par Marcgraal[ et Pison h aucun genre alors 
connu. Il résn|ta de là qu'une multitude de plantes appar- 
riant aux familles botaniques les plus éloignée.s, et n'ayant 
entre elles et avec la plante du Bril qu'un seul caractère 
commun, celui de déterminer des vomisselents, furent 
introduites dans le commerce et usit6es en thérapeutique 
sous le nom d'ipœecacuanha ; et aujourd'hui encore ou ap- 
pelle ipêcacuanha annel et ipdcacuanha trid deux 
plantes appartenant à deux genres distincts de la famille 
des r,lbiacées ; ou appelle ipdcacuanha blanc (jonidium 
ipecacuanha, Vent; pornbalia ipecacuaiha, Vandelli) une 
violariée connue au Brésil sous les noms de oaga, poaga 
branca; ipëca«anha brun, une apocyuee, etc., etc. De 
toutes ces espèces végétales confondues dans la mme déno- 
minatiou et employées dans le même but, deux seulement sont 
aujourd'hui répaudues dans le commerce, h l'exclusion h 
peu près complète de toute» les autres : c'est l'ipdcacuanha 
anield ( callicocca ipecacuanha, Bro|. ; cephoeli ipeca- 
cuanha, Schwartz; ipecacuanha ofjiciialis , Arruda)et 
l'ipecacuanha strid (psgchotria emetica, Mutis), tous deux 
appartenant h la famille des rubiacées, mais à des genres 
différents. La première de ces espèces est originaire du 
Brsil : ses racines, grosses comme une plume d'oie, ir- 
réguliìres, ¢oudées, fameuses, sont tortuC de petits an- 
neaux aplatis, inégaux, et séparés par des étranglements 
très-narqués. La seconde e«pèce, beauco,p moins répandue, 
non« vient du Pérou : ses racines c.lindracées sont moins 
contournées et plus rarement fameuses que dans l'espèce 
préc6dente, et leur écorce, brune, sillonnée dans toute sa 
longueur par des stries plus ou moins marquées, est di- 
visëe, de loin eu loin seulement, par des étranglements 
¢irculaires. Dans ces deux espèces, il faut distinguer la 
partie centrale, ou l'axe de la racine, de la partie périphé- 
rique, ou l'écorce. L'axe est presque exclusivement formé 
de ti.su ligneux : aussi cette portion de la racine est-elle 
 peu près inerte; l'écorce, au contraire, a une saveur tcre, 
résineuse, amère, qui indique des proprièté.s médicinales 
énergiques, beaucoup plus énergiques du reste dans l'ipé- 
¢acuanha annelé que dans l'ipécacuanha strié. 
Les ipécacuanhas ont Cé l'objet de nombreux travaux : 
l'analyse chimique y a constaté l'existence : t ° d'une ma- 
tière huileuoe, brnne et très-odorante, qui donne h la racine 
sa saveur et son odeur nauséabondes; 2 ° un principe im- 
médiat (l'd  dt i n e), dans lequel résident les propriétés 
émtiques de la racine; 3 ° de la cire végétale, du ligneux, 

IPHICR ATE .t 
de l'amidon, quelques traces d'acide gallique, cte. L'ëmé- 
tine a été retrouvée dans la plupart des espèces égetales 
qui ont été usitées en médecine sous le nom d'ipécacuan- 
ha; ce qui explique les analoes qui existaient entre toutes 
ces espèces, en'isagées comme agents thérapeutiques 
mais dans aucune d'elles ce principe actil n'existe en des 
proportions aussi cousidérables que dans l'ipéeacuanha 
annelé : aussi ne doivent-elles être envisagées que comme 
d'utiles succédaués. 
Ce fut vers 169 que Pison inlrodui.it l'ipécacuanisa 
dans la thérapeutique, comme un remede puissant dans 
les affections dysentériques; en 167, un médecin nommé 
Legros en importa une quautité considérable, qui fut mise 
eu vente dans une pharmacie alors celëbre de Paris, et 
en 1686 l'emploi de Iïpbacuanlsa fut introduit aec suc- 
c6s par Itelvctius le père, dans la pratique des h6pitaux. A 
dater de cette époque, l'emploi de ce médicament est de- 
+cru de plus en plus général, et l'introduction de faux 
ipécacuanhas dans le conmaerce a élé de plus eu plus fré- 
quente. Aujourd'hui, la racine oriuellemcnt apportée par 
Pisou du Brcsil, l'ipecacuanha annelé, est presque seule 
employée; mais elle n'est plus envisagée comme un spé- 
cifique contre la dysenterie ; on la prescrit surtout dans le 
but d'cvacuer imlsédiatement l'estomac surchargé, ou de 
combattre une plslegmasieaiguë du trgument extel-ne ou des 
me;sbranes muqueuses, en determinant une congestion 
subite vers la muqueuse intestinale. On administre i'ipéca- 
cuanha sous forme de poudre, de pastilles et de sirop. 
lPttiCRA.TE eut pour patrie Athènes, et noue përe un 
cordonnier. Enr{SIé de bonne heure dan» les troupes 
niennes, il passa rapidement du rang de sinple soldat aux 
charges les plus importantes de l'arntée, et dut son illus- 
tration moins à l'éclat de ses exploits qu'à la profondeur de 
ses connaissances stratégiques. Fort jeune encore, place à 
la Iête des troupes envoyees contre les Tbraces, il ferait Sen- 
ti;ès sur le trône. A ingt ans, il marcha, avec Coron, contre 
Agésilas, qui menaçait la liberté d'Athènes, fixa les regards 
et réunit tes suffrages de ses coucito)ens. Au siege de Co- 
rinthe, il introduisit une discipline si sévère, qu'il n'y eut 
jamais dans la Grèce de Iroupes mieux aguerries ni plus 
soumises/ leur chef. C'est avec une telle armée qu'il enleva 
le fameux corpsd'inlanterie lacédémonienne, exploit cëlébrê 
dans la Grìce entière. Depuis, Sparte laissa respirer sa 
rivale, et implora mème son secours, quand d'autres me- 
nacèrent sa liberté. Lorsque Artaxercès résolul de polter 
la guerre en Egypte, il demanda un genéral aux Atbéniens : 
ceux-ci ne crurent pas pouvoir envoyer un capitaine plus 
expérimenté qu'Iphicrate. Mai Artaxerxìs lui adjoignit Phar- 
nahaze. Le satrape, par son ignorance et sa Itcheté, fit 
échouer l'expédition, retourna en hte h la cour, calomnia, 
noircit Iphicrate, et manceuvra si bien, que sou maitre ac- 
cusa ce dernier auprës des Athéniens; mais les Athéniens 
connaissaient l'habileté de le;If géncral, et ils ne tireur au- 
cun cas de l'accusation. 
Plusieurs antres expéditious justifièreut la haute opinion 
que l'on avait de ses talents. Eulïn, vers l'an 357 avant 
J.-C., il fut envoyé, avec Timothee et Charès, pour remettre 
sous la puissance d'Athènes B)zance et plusieurs autres 
'illes qui s'Alatent séparees de son alliance. Les flottes étaient 
en présence. Une tempête horrible dispersa une partie des 
vaisseaux d'Athênes. Néanmoins, Charès voulait que l'on 
combattit. Ipl,icrate et Timothëe s'y opposaient. L'autre les 
accusa devant le peuple. Le peuple les condamna d'abord. 
Iphicrate se défendit avec autant de noblesse que de cou- 
rage, et déptoya dans cette allaite un genre d'éloquence tout 
nouveau : il arma quelques jeunes gens de son parti, et les 
plaça dans le tribunal, où ils montraient de temps en temps 
les poignards quïls tenaient sous leurs mateaux. Les juges, 
s'en étant aperçilS, semblaient lui en faire un reproche : 
« N'est-il pas juste, s'Acrin l'illustre guerrier, que cehli qui a 
constamment portë les armes pour sa patrie les prenne éga- 



464 IPHICBATE 
lement quand il s'agit de dfendre ses jours? • Il triomphe, 
fut absous, mais quitta immédiatement le service militaire. 
Il parvint à une extrtme vieillesse, et emporta au tombeau 
l'estime générale et l'affection de ses concitoyens. Tout fils 
de cordonnier qu'il était, il avait épous la fille de Cotys, 
roi de Tbrace. Son génie retrempa la discipline, et organisa 
la victoire. Quelqu'un, d'une naissance illustre, lui repro- 
chant l'obscurité de la sienne : « Je serai le premier de ma 
race, lui répondit Ipbicrate, et toi, tu seras le dernier de 
la tienne. » Ce fut lui, dit Coruelius ffepos, qui changea 
l'arumre du fantassin. On avait porte jusque alors d'énormes 
boucliers, de courtes javelines et de petites épées : il doubla 
la longueur de l'épée etde la javeline, et, adoptant une 
autre matière pour la conïection des boucliers, sobstitua le 
lin à l'airain et au ter. Désormais plus libre dans ses mou- 
vements, le soldat eut une armure qui le protégeait sans 
l'accabler. Enfin, et ceci donne une idée de i'babilet des 
soldats élevés à son é¢ole, on les appelait dans la Grèce 
les phicratiens, comme / Rome on appelait fabieis les 
soldats aguerris par Fabius. I}ONALOT. 
IPIIIGENIA. l'oge= DE. 
IP|IIGÉNIE ou ]PHIANASSE, était fille de Cly tem- 
nestre et d'Agamemnon, et rainee d'Electreet d'O- 
reste. Tonte la Grèce, accourue à l'appel de Ménélas, 
sur le détroit d'Euripe, n'attendait qu'un vent favorable 
pour s'élancer sur les rivages de |a Troade ; mais un calme 
continuel encfiatnait leurs vaisseaux en Aufide, et désespé- 
rait leur impatience. L'oracle e_t consulté, et Calcbas 
répond que la déesse de ces |Jeux rendra les vents à leurs 
voiles si le sang de la jeune ]phigénie arrose son autel. La 
ierge, victime dévonée à l'ambition paternelle, à la ven- 
geance de Ménélas, à la gloire de la Grèce et au. menaces 
de l'armoe, est couronnée de fleurs et marche avec rési- 
gnation vers le temple; mais Diane descend au milieu d'un 
nuage, dérobe l'innocente au sacrifice, et le conteau du prétre 
ne trouve, au lieu d'Iphig,nie, qu'une biche, offrande moins 
odieuse à la dëité. Transportée dans la Tauride, cetle fille 
d'Agamemnon voulut consacrer au culte de Diane une vie 
qu'elle devait à Diane; mai Thoas, le tyran de la Cfierson- 
ni:se, arrosait les autels de la déese du sang des étrangcrs 
que l'ignorance, le hasard, ou le malheur jetaient sur ses 
rages. Oreste y vint sur la promesse des oracles; là, des 
cérémonies expiatoire devaient ramener le repos dans son 
ime obsëdée par les Fnries. Cependant, la loi du tyran con- 
damnait l'etranger au couteau de la prètresse : lpbigénie 
allait immoler son frère, quand la Pro idence désarma son 
bras, en loi dccouvrant Oreste dans la victime. La mort 
retourna donc au tyran, qui Penvoyait au frère par les mains 
de la sœur ; et les enfants d'Agamemnon quitërent ce pa}'s 
inhospitalier, emportant avec eux la statue de la déesse, 
denx foi libératrice. Hippolyte F,ccue. 
IPSARA ou PSARA, aplée par les anciens Psyra 
petite Ile couverte de rochers, dans la mer gée, située à 
l'ouest et  peu de distance de Saki ou Chios, et dépendant 
du sandjak turc de Saki, comptait, avant la guerre de rln- 
dépendance grecque, plus de 20,000 fiabitant, qui devaient 
leur aisance au commerce et à la navigation, et forma avec 
Hydra et Spezzia, durant cette goerre, la principale force 
maritime des Grecs; mais, malgre sa courageuse résistance 
elle fut prise par les Turcs, le 3 juillet 184, horriblement 
dévastée et dépeuplée. Sa ville principale, qui porte le mëme 
nom, compte actuellement environ 500 habitants, vivant 
de la pcbe et un peu aussi de piraterie. 
IPSO FACTO ( mot à motpar le fait méme), expres- 
sion ad,erbiale, empruntëe au latin, et désignant la 
quence immédiate, infaillible, d'un fait quelconque. En- 
courir une peine ipso facto, c'est s'exposer  ce qu'elle 
vous soit appliquée, sans autre forme de procès, nonobstant 
toute rclamation ou protestation. On employait [réquem- 
ment cette façon de parler dans l'ancien droit canon. Elle 
y qualifiait spcialement toute excommunication encourue 
par le seul fait : frapper un prOtre, c'était encourir l'ex- 

 IRAN 
communication ipsofacto. Pie IX a dclar ex¢ommunié 
ipsofacto ceux qui ont concouru à la sécularisation des 
biens du clergé en Piémon, en Suisse, en Espagne. 
lPSUS ou HIPSUS, ville de la Grande-Phrygic, province 
de l'Asie Mineure, est célèbre dans l'histoire par la bataille 
qui se livra sons ses murs, l'an 301 av. J.-C., et dans la- 
quelle A n t i g o n e, complétement battu par Sdleucus fficator, 
perdit son tr¢ne et la vie. 
IPS,VICH {on prononce Ipsitsh), chef-lien du comté 
de Suffolk, dans une vallée, sur rorwell, fleuve navigable, 
qui, à peu de distance, se jette dans une profonde baie de 
la mer du ord, est une ville aux rues étroites et irrégu- 
lires, mais bien batic, trbs.animée, et dont la population 
jouit d'une grandeaisance. O n yremarque un grand nombre 
de maisons et dëdifices, notamment i'ardique h¢tel de ville 
(Guildfiall), ornés de sculptures d'un beau travail. On y 
trouve des chantiers de construction, un bureau de doua.nes, 
plusienrs écoles et établissements de bienfaisance, et une 
Sociétéscientifique (Mechanic Institution ). On y voit douze 
églises, un palais appartenant à l'ëvque de Norwich, et une 
riche bibliothèque. Les fabriques jadis florissantes de toiles à 
vo/les et de lainages ont disparu ; mais le commerce des cd- 
réales et de la drcfie, la navigation dans les mers tin GroC- 
land et la fabrication des bulles de baleine lui ont rendu une 
nouvelle importance. Le port d'lpswich expedie surtout des 
céréales à Londres, et des bois de contruction provenant des 
forCs voisines de l'Orwell, à Chatam et à Sheerness. Sa 
population, y compris le faubourg de Stoke-Hamlet, situé 
sur l'aulre ri'e de l'Orwell, qu'on 5' pase sur un pont, est de 
33,000 mes. 
IRAi-ADJE.'tli  la plus grande province de la Perse, 
compte sur une superfice de plus 3,000 mriamètres carrés 
environ 2 millions et demi d'habitants; elle est située en- 
tre i'AserbiJj-n, le Ghilàn et le Masanderàn au nord, le 
Kourdistàn  l'ouest, le Louristfin et le Farsistm au sud, 
et le grand désert Salé à l'est; elle répond à l'ancienne 
! é d i e. Ce vaste ter ritoire et en partie couvert de mon- 
taches, d'ailleurs presque partout fertile, et en partie assez 
bien arrosé et cultiv& Du reste, i'Irak-Adjemi est singulié- 
rement déchu de ce qu'il était anciennement sous le rapport 
de la popnlation comme sous celui du bien-tre et de la 
civilisation. Une Ioule de villes et de villages ne sont plus 
aujourd'hui qe des monceaux de mines. Les villes les plus 
importantes de cette province sont Ispaha n et Téb éta n. 
lflAI-ARAB!, l'ancienne flabyloie, province 
située ì l'extrémité sud-est de l'Empire Turc, entre la Perse, 
la Mésopotamie, le désert de Syrie, l'Arable et le golfe Per- 
nique, forme une aste plaine sur rEuphrate et le Tigre 
inférieurs, qui s'y réunient et vont se jeter dans le golfe 
Persique sous le nom de Schat-eI-Arab. A rouest de 
rEnphrate, ce pays n'est qn'un désert de sable ; mais par- 
tout ailleurs, et particulièrement sur les rives de rEuphrate 
et du Tie, il est fertile, quoique mal cultivé, ce qui 
le rend malsain. Il en ëtait autrement dans t'antiquité et 
mëme encore au moyen Sge, époque où cette contrée tait 
l'une des mieux cultivées du globe. L'asphalte, le dattes, 
les chameaux, les bufiles et les moulons sont les principales 
productions du pays, dont les habitant_, pour la plupart 
de race arabe, habitent de misérables villages mal batis, 
et le plus souvent ivent encore à l'état nomade. Les villes 
les plus importantes sont Bagdad et Bassora. 
IRAN. On appelle ainsi en général, par opposition an 
Tourdn, pas bas de la Turquie, le grand plateau asia- 
lique qui s'Cend, avec une élévation moyenne de 1,20o à 
1,00 mètre% depuis la cbalne de rHindoukousch, du 
Khoraçan septentrional et de rEbrous, jusqu'au golfe Per- 
nique et  la mer Indo-Persique au sud, comprenant, à 
l'est, l'Afghanistan et le Beloutschistan, et, à 
l'ouest, la P e fs e proprement dite. A l'est, la pente de ce 
datean vers l'Indus est fort rapide ; mais ì l'ouest, du golfe 
Persiqe au platea d'Arménie, il a pour limites une suc- 
cession de chalnes de montagnes que les anciens ¢ompre- 



IRAN -- 
taient sous le nom général de Za9ros, et qu'on appdle 
aujourd'hui les montagnes du Kourdistan. Le centre de cette 
contrée n'est qu'nn immense désert de sel. 
IRANIENNES (Langues) o,a langues de l'Xran. On 
appelle ainsi, du nom de la cuntrée où elles sont surtout 
parlées, une famille des langues i n d o-g e r m a n i q u e s, à la- 
quelle appaaennent notamment le z e n d, l'ancienne langue 
rse proprement dite, contenue dans les inscriptions cunéi- 
formes de troisième ordre, le pehlwi ou houswarcsh, 
l'ancienne langue des Perses occidentaux, fortement mélangée 
de mots sémitiques, le parsi, jusqu'à présent appelé pa- 
zend, et la nouvelle langue persane, indépendamment de 
laquelle existent encore beaucoup de dialectes particuliers, 
tels que ceux de Ghilàn, de Masenderan et de Tabaristn. 
Un peu plus loin on rencontre le kourde, avec ses nom- 
breux dialectes, et la langue afghane ou potshtott, de- 
venue aussi tout récemment une langue écrite et divisée en 
deux dialectes principaux. La langue des Ossètes, disséminés 
dans les gorges du Caucase, fait également partie du groupe 
des langues iraniennes. On n'a pas étudié suffisamment jus- 
qu'à ce jour les rapports existant entre i'arménien et les 
langues de l'Iran, et encore moins ceux des anciennes lan- 
gues des Indes et de. Assyriens. 
IBASCIBILITE IRASCIBLE Vogez 
(Morale). 
IRATO (Ab). lrotez Ah Ino. 
IRAVADD|, le plus grand fleuve del'empire birman 
et l'un des plus importants cours d'eau de l'Inde en deçà du 
Gange, prend sa source dans les mëmes montagnes que les 
af fluents orientaux du B rah m a po u t r a ; seulement elle 
ce trouve un peu plus au sud. II traversedes contrêes encore 
inconnues des Européens; mais il parait etre déjà navi- 
gable pour des barques un peu au-dessus de la ville d'A- 
marapoura, d'où, en se diligeant au sud, il entre dans la 
plus belle et la plus riche plaine du Birma. Il y reçoit les 
eaux de deux énormes af fluents, l'un provenant de la pro- 
vince de Chine qu'on appelle lotn-nan, près de la ville 
d'Ara,  69 myriamètresde la mer. Depuis Ara jusqu'à son 
delta, Plrawa,tdi est tin fleuve de toute beauté, large par- 
fois de sept kilomètres et couvert d'lies. C'est dans cettepar- 
tie de son pareoursqu'il reçoit les eaux des plus considé- 
rables de ses affluents, et dans son delta il forme un des 
plus vastes systèmes de navigation intêrieure qu'on puisse 
citer. Le lqango«n est à son embouchure le seul de ses 
bras qui soit en tout temps navigable ; aussi tout le com- 
tnerce de l'empire s'y trouve-t-il concentré. La réunion de 
deux embranchements de l'frawaddi en forme de delta, et 
particulièrement propres à la navigation, qui a lieu avec 
les rivières appelees Salween et Pegoa au moyen de canaux 
'¢éritabtes, ajoute encore à la richesse des voies de communi- 
cation de ce pays. L'embranchement relié à la première de 
ces rivières a près de 30 myriamètres de long : le canal 
conduisant à la seconde n'est navigable que par les hautes 
eaux. 
IRÈNIE  la déesse de la paix, fillede Jupiter et de Thémis, 
la plus jeune des H e u r e s, appartient seulement à la myiho- 
logie la plus moderne. Pausanias mentionne deux figures 
d'elle existant à Athènes dans la Prytanëe. Vespasien lui 
éleva !m temple magnifique à Rome. 
IRENE  impératrice grecque, non motos célèbre par 
son esprit et sa beauté que fameuse par ses crimes, na- 
• quit ì Athènes, et épousa, en 769, l'homme qui occupa 
depuis le tr6ne de Constantinople sous le.nom deLdon 1t'. 
Après s'erre débarrassée de son mari au moyen du poi- 
son, en 780, elle le remplaça sur le tr6ne impérial par son 
fils Constantin ¥I, qui n'avait encore que neuf ans, secon- 
dée qu'elle fut dans cette usurpation par les grands de l'em- 
pire; et elle consolida sa puissance en se debarrassant éga- 
lement des deux frères de son ëpoux, qui furent condam- 
nés au dernier supplice, comme ayant conspiré co»tre 
on autorité. Charlemagne, qui menaçait alors l'empire 
d'Orient, fut d'abord dupe de se belle promesses ; mais 

IRETON 
quand la lutte éclata entre les deux empire% il barrit com- 
plétement en Calabre l'armée d'Irëne (en 788). L'année 
précédente, en 787, Irëne avait réuni à Nicée le septième 
concile œcuménique, qui rétablit le culte des images. Èn 
790, Constantin "¢I réussit à éloigner sa mère des affaires 
et à se soustraire à sa fatale influence; mais sept annees 
plus tard Irène s'empara encore une fois du tronc, après avoir 
fait arréter son fils, à qui on creva les yeux par son ordre, 
et qui mourut à quelque temps de là. 
Irène fut la première femme qu'on vit exercer la puis- 
sance souveraine en Orient. L'entrée qu'elle fit à Constanti- 
nople, sur un char triomphal étincelant d'or et de pierres 
précieuses, ses libéralités envers la populace, la liberte 
qu'elle fit rendre / un grand nombre de prisouniers, et 
d'autres artifices de politique auxquels elle eut recours, 
furent impuissantsà ta présetwer des ]ustes suites de ses 
crimes. Elles avait exilé plusieurs seigneurs, dont elle se 
défiait ; et pour donner encore plus de stabilité à son tr6ne, 
elle avait résolu d'épouser Olarlemagne, quand, en l'an 
80, Nicéphore fut proclamé empereur. Celui-ci la bannit 
alors dans l'llê de Lesbos, où elle mourut en l'an $03. 
IRÈXE (Astronomie), plançte déecuverte par M. Hind, 
le t9 mai 1551. Sa distance solaire moyenne est t,58, celle 
de la terre ¢,tant t. 
IRÉIÉE (Saint), l'un des plus célèbres Përes de l'É- 
glise, naquit vers l'an 140 de J.-C., probablement dans l'A- 
ste Mineure, et fut élevé par saint Polycarpe, évèque de 
Smyrne. Ses Arudes une fois terrainCs, on l'envoya avec 
quelques compagnons dans les Gaules, doat les provinces 
voisines de la Narbonnaise avaient seules entendu prgcher 
l'Evaugile. Saint Pothin, premier évèque de Lyon, l'or- 
donna prëtre et l'agrégea au clergé de ce diocése, dont il 
devint évgque à son tour, à la mort de saint Pothin, et 
où il mourut tnartyr, en 202, lors de la grande persecution 
ordonnéecontre les chrétiens parq'empereur Sëvère. Plein 
de zèle pour la propagation des doctrines chrétiennes » Ire- 
née avait écrit en grec, ers l'an 176, une réfutation des 
hérésies professées par les diverses sectes gnostiques; dis- 
sertation qui n'est parvenue jusqu'à nous que dans une 
mauvaise traduction latine intitulée Contra hoerettcos, mais 
quia beaucoup dïmportance pour l'histoire des,dogmes. 
l',Ils par l'Eghse au nombre de ses saints, on oelèbre sa 
fète le 28 juin. 
Un autre I,f«, évèque en Syrie, souffrit aussi le mar- 
tyre, au troisième siècle, sous l'empereur Dioclétien; l'Eglise 
honore sa mémoire le 25 mars. 
IRETON (H¢.a), général et homme d'État qui exerça 
une grande influence a l'epoque de la révolun d'Angleterre 
sous C harles 1 er, descendait d'une bonne famille, et se 
consacra d'abord/ï l'Cude de la jurisprudence. Lorsque la 
guerre civile éclata, il offrit ses services au parti parlemen- 
taire, et grceà la protection de C tomwel l, dont il avait 
épousé la fille Brigritte, il ne tarda pas ì ètre nommë 
commissaire général de l'armée. A la bataille de Iaseh?, 
en lfi-ts, où il commandait l'aile gauche de l'armée du par- 
lement contre le prince-palatin Rupert, il fut battu et fait 
prisonnier ; mais a peu de temps de là Cromwell le délivra. 
Caractère non moins énerque et prudent que fana- 
tique, Iretun fut après Cromwell l'un des principaux 
meneurs de la révolution. Tous deux s'efforcèrent de 
soumettre le parlement h l'armée, et de perdre sans 
retour le roi, une fois qu'il eut été livré par les Ecos- 
sais. Ce furent eux qui insinuèrent h ce prince de s'enfuir 
de Hamptoncourt pour aller se réfugier dans l'ile de Wight, 
qui soulevèrent et fanatisèrent les troupes, et qui provo- 
quèrent les violences dont le..parlement fut l'oblet, ladC 
pendant des plus exaltés, Ireton fut membre du tribunal 
extraordinaire qui cundamna Charles I e« à mort; et comm 
Cromwetl hësitait à exécuter cet arrét, ce fut lui qui triom- 
pha de ses scrttpules. 
En 169, lreton alla avec son beau-përe soumettre l'If- 
lande. L'un et l'autre rëpandirent des torrents de sang dans 
59 



466 IRETON 
cette malheureuse contrée, où s ne se proposaient rien 
moins que l'entière extermination des catholiques. Lorsque, 
]'année suivante, Cromwell quitta l'friande pour aller 
chttier l'Ë¢osse, frelon prit le commandement en chef de 
de Parmée d'occupation, et ne rexerça pas d'une manière 
moins sanglante. Tous les individus accusés d'avoir pris 
une part quelconque au massacre de 16.il furent impi- 
to?ablement mis à mort. Enfin, dans l'automne de 1651, 
l'friande état presque entièrement aincue, il entreprit le 
siège de la dernière place, Limerick, demeurée au pouvoir 
es rebelles, et s'en rendit marre après une résistance des IdUS 
opini',ttres. Quelques jours plus tard, le 2fi novembre 16:,1, 
il succomhait à une lièvre violente, après avoir tait encole 
massacrer malgré une capitulation formelle la phls grande 
partie des débris de la garnison de cette ville. Cromwell, 
qui redoutait le caractère indomptable et le fanatisme ré- 
publicain de son gdre, ne le regretta pas. Quant a la 
•euve d'lreton, sa douleur ne fut pas de longue durée, car 
elle se remaria bientOt aprës au général F ! e e t v o o d, qui 
joua pu and r01e après la mort de Cromwell. 
IRIARTE ( Toas ne. ), poëte espagnol qui oblint en 
poésie tout le succès qu'on peut obtenir sans avoir eu en 
partage le feu acre, c'est-a-dire par la clarté et la cor- 
rection élégante du vers, naquit en 1750 à Orotava, dans 
l'île de Tenériffe, et vint à Madrid se perlectionner dans 
]es belles-lettres, les langues modernes, la poésie et la musi- 
que, sous la direction de soq, oncleJuau de Iriarte, biblio- 
tiéeaire et interprëte au ministère des affaires étrangères. Sa 
comêdie Hacer que hacemos (Madrid, 1770 ), publiée sous 
l'anagramme de Trso lmareta, fut suivie de la traduc- 
tion de diverses pièces «lu répertoire du lbCire francais, 
et de qt,elque pro:luctions originales. Après la mort. de 
son oncle, il lui uccéda dans ses lonctions au ministère 
des affaires élrangres. En 1772 on lui conlia la rédaction 
du Mercurio historico v poltico de Madrid; mais la mul- 
tiplicite de ses travaux au ministère ne lui perufit pas de la 
garder au delà de quelque« mois. Iriarte doit surtout sa 
reputation h un poëmedidactique intitulé La Musica ( tTS0 ) 
et / ses Fabulas literarias (t78) ; deux ouvrages qui 
ont obtenu un trës-gran,l nombre d'editions et ont etWtra- 
duits dans presque toutes les langues de l'Europe. Le der- 
nier surtout excila ivement l'altention, par les répliqqes 
de ceux qui s'y Irouaient attaquës. On a encore de lui la 
traduction en ers des quatre premiers chants de l'Endide, 
plusieurs livres élbmentaires pour les écoles, composés à la 
deman,ledu comte Fiorida Blanca ; une com,'die intitulée La 
enorita mal cmada ; un monologue, 6u:ma el Bueno, 
et une satire en latin maoeronique contre le mauvais goflt 
qui régnait encore alors daus les/.'cules d'Espagne. Iriarte 
mourut le 17 septembre 179t. 
IPdDIEM mtal découvert dans la mine de platine 
par Des¢otils, et rangé dans la 6 e section de Thénard. Il est 
solide, blanc, grisMre, legèrement ductile, dur, et fort diffi- 
cile à fondre. Son poids spécifique n'a pas encore été bien 
déterminé. Les acides sulfurique, nitrique et cltlorhy- 
drique n'agissent point sur lui. L'eau régale ne l'attaque 
qu'il grand peine. Suivant Vauquelin, l'indium est sus- 
ceptible de fortuer deux o.xydes et de donner des sels qui 
ne sont jamais simples, mais toujours avec excès d'alcali. 
Leur.g dissolutions présentent des nuances de differeutes 
couleurs, suivant qu'on les chauffe ou qu'on les met en 
contact avec du chlore. C'est à raison de cette proprieté 
qu'on lui a donné le nom d'iridium, dërivé d'iris (arc-en- 
ciel ). Il est sans usage. 
il/IS nom du metéore que l'on nomme vulgairement 
arc-en-tic l. 11 se dit, par extension des couleurs qui 
paraissent autour des objets que l'on regarde avec des lu- 
ettes (voye--Acur.osxts). On appelle aussi iris cette 
partie colorèe de P ce i I qui entoure la impille. 
IRIS (ou l'arc-en-ciel), désiguée par les poëtes comme 
la messagère «les dienx, est fille de Thaumas, l'un des Cen- 
taures qui prirent la fuite dans le combat qui eut lieu aux 

 IRIS 
noces de Pirithoiis et d'Électra. Hésiode, dans la peinture- 
qu'il lait des dieux de l'Ol'mpe, n' pas négligé de per- 
sonnifier l'arc-en-ciel sous le nom d'Iris, et de peindre 
l'admiration de tous les peuples pour la beauté et la richesse 
de ses couleurs. Homère la regarde comme la plus fidèle 
des compagnes de Junon ; il la compare à Mercure pour 
son habileté à remplir certains messages dont elle est char- 
gée par Jupiter : ce poëte la nomme la messa9ère ana: 
piedi l9ers ; et dans l'lliade il lui donne des ailes d'or. 
Suivant Théoerite, Iris prëpare le lit de Junon, et selon 
Apollonius, elle remplit aoprès de la déesse le r61e de cham- 
bellan, c'est-h-dire qu'elle introduit dans son palais ceux 
qu'elle demande. Elle allait puiser, dans une coupe d'or, 
l'eau du Styx nécessaire aux serments des dieux. Véaus, 
blessée au siAge de Troie, est reconduite dans l'Olymlm 
ar Iris sur le char de Mars. Enfin, Virgile, dans son 
nide, lui attribue auprès des mourants une fonction qui 
appartient ordinairement à Proserpine : elle coupe à Didon 
le cheveu fatal par lequel cette princesse tient à la vie, et 
dont la privation la conduit mourante an Tartare. 
C *r Alexandre LENOIR. 
IRIS ( Astronomie ), planète découverte ì Londres, par 
M. Hind, le 13 aoftt t87. Sa distance solaire moyenne 
est ,39, celle de la terre étant 1. Son exeentricité est 
et sa révolution sidérale s'effectue en ta« jours. 
IRIS (Botanique), genre de plante de la triandrie 
monogynie de Liunë, et de la famille des iridees. Les iris 
sont des plantes s.ivaces et herbaeèes ; leurs racines sont 
en général montes d'un rhizème horizontal tubéreux et char- 
nu ; leurs feuilles, allongëes, aiguës, tranchantes par leurs 
bords, uniformes, engainent par leurs bases une hampe 
tantèt clin,lrique et tantèt anguleuse, qui porte de grandes 
fleurs, sessiles ou pédonculées, enveloppées dans des spa- 
thes searieuses, et huantAes des couleurs les plus riches et 
les plus variées de l'arc-en-ciel. Le calice de ses fleurs est 
nul ; leur corolle, monopetale et irrégulière, est tuhulee 
in¢erieurement, et son limbe est profondément séparé en 
six disisions onguiculées et inégales : leur ovaire, inère et 
ovmde, ct surmonté d'un slyle court, terminé par trois 
stigmates pétaloïdes qui recouvrent les Alamines ; leur fruit 
est une capsule oblongue et triloculaite, dont chaque loge 
renferme plusieurs graines arrondies. 
Dans le Syslema vegelabilium de Rcemer et de Schulles 
sont dénommées et décrites quatre-vingt-douze espèces d'iris 
parmi celles-ci, les unes croissent à l'Cut sauvage en Eu- 
rope; les autres sont originaires de l'Asie, de l'Mrique 
méridionale, de l'AraCique Nous n'en citerons ici qu'un 
fort petit nombre, et nous cloisirons de préférence celles 
que l'on cultive dans nos jardins, soit pour la beauté de 
leurs fleurs, soit pour leurs propriétés medicinales. 
L'iris de Florence ( iris floréntina, L. ) croit naturelle- 
ment dans les parties meridionales de lEurope; sa racine, 
noueuse et odorante, supporte une tige hante de 0',30 en- 
vron, engainée à sa base dans des feuilles glabres et uni- 
formes, et en ironnee à son sommet de grandes fleurs ses- 
siles blanches, striées de jaune, et d'une odeur extrêmement 
suave. La racine de l'iris de Ftorence rédfite en poudre et 
prie à l'int,«ieur est légi.rement émétique; tournée en petites 
boules et inh'oduite dans le derme, elle dètermie ces pe- 
tites suppurations locales que les médecins appelle exu- 
toires; renfermée dans des sachets de soie, elle exhale 
un parfum qui se distingue difficilement du parfum de la 
violette. 
L'iris 9ermanique (iris 9ermanica, L. ), vulgairement 
flambe ou flamme, qui croit dans les lieux secs et 
acides, dans les-vieux murs délabrés de l'Allemagne, de la 
Suisse et de l'traite, se distingue par ses belles fleurs pé- 
doncnlées, violette», et disposes au nombre de trois à 
cinq au sommet de la tige. Le sue exprimé de la racine 
fraiche de l'iris gerlnanique est un éméto-eatharique assez 
puissant, mais il détermine une sensation vive et hrèlante 
à la gorge, et quelquefois aussi des tranchées iolentea. 



IRIS  IRLASDE 
L'ir fiyrde porte une fleur plus grande que celles des 
autres espéces, nne fleur bruue, panachée de veinules d'un 
pourpre violet : dans l'iris ragée, la fleur jaune est égale- 
ment striée de pourpre et de brun; et dans l'irisfrang¢e, la 
fleur, d'un bleu pale, est parsemée àe taches jaunfitres. 
L'iris des 7narais ( iris pseudo-acorus, L.) est vulgaire- 
ment connue sous le nom d'iris jaune, flambe d'eau, 
91açeul des marais, etc. 
L'iris fd.tide (iris foetidissima, I,.), que l'on nomme 
aussi glayeul puant, n'affecte cependant desagréablement 
l'odorat que Iorsqu'on passe ses feuilles entre les doigts. 
Les fleurs sont petites, d'une teinte rougeâtre sale. Cette 
espèce est essez commune en France, dans les lieux cou- 
verts et frais. BELFIELn-LErÈVae. 
IRIS (Pierre d'), vadété de quartz hyalin, dont les cris- 
taux r«fletent les couleurs de l'arc-en-ciel. 
IPJS (Vert d'), belle couleur verte, doutles peintres iont 
usage, surtout pour la miniature. Ou la prépare avec des 
fleurs d'iris germanique macérées et mlées à de la 
chaux. 
IRIOUTK  l'un des deux gouvernements de la Sui- 
bérie orientale, confine à l'ouest au gouvernement de 
leniséisk, à l'est à la grande province àe Iakout»k, qu'il 
comprenait autrefois dans sacirconscription, et au sud à la 
Chine. Divisé en cinq cercles, Irkoutsk, Kirensk, 
chnd-Oudinsk et Werchnd-Oudinsk, et IVertschisk, il 
compte 530,000 habitants sur une superficie de 15,000 
riamètres carrés. 
IRKOUTSK, son chef-lieu, au confluent de l'Irkout 
et de l'Angara, non loin du lac Baikal, après Tobolsk la 
ville la plus importante de toute la Sibérie et siCe d'un 
archevché, compte 20,000 habitants, parmi lesquels 
existe une commune allemande avec son église propre. 
Cette population fait un commerce important, surtout en 
provenances de la Chine. On trouve aussi à Irkoutsk un sé- 
minaire théoloque, un gymnase, où l'on enseigne le chi- 
nois et le japonais, un séminaire pour les jeunes Tongouses 
et Bourétes, une école de navigation et une école militaire, 
plusieurs collections scientifiques, un tbé,tre, une grande 
fabrique imperiale àe draps et des distilteries considérabtes. 
On peut encore citer ertschi n sk, Selençisk, avec 
1,000 habitants, sur les bords àe la Selenga, le marché prin- 
cipal qu'on rencontre entre Irkout.k, et Kiachta, qui 
appartient au méme cercle et est situé sur la fronlire de 
la Chine; Werchnd-Oudinsk, ville d'tape, avec 4,000 ha- 
bitants; et Barçousinsk, autre ville d'étape, au voisinage 
de laqnelte sont situéesdes sources thermalestrës-renommées 
pour la gaédu des rhumatismes et àu scorbut. 
IRLANDAIS-UNIS (Affaire des ). Voye . IaLn 
et FTZ-GÈeLn. 
IIgLANDE  Ireland, appelée Érn par les Ires ou 
habitants aborigène.s, la seconde àes deux grandes lies bri- 
tanniques, et royaume uni / la Grande-Bretagne. Elle est 
baignée à l'est par la mer d'Irlande, àes autres c6tés par 
l'océan Atlantique, et séparée àe la Grande-Brctagne par 
le eanal Saint-Georges. Sa superficie est de ! ,088 myriamè- 
tres carrés. La c6te, à l'est, va en s'inclinant en pentes 
douces, tandis qu'à l'ouest et au sud elle est profondément 
et abruptement échancrée par des baies et des promontoires. 
Une partie de la c6te septentrionale est entourée d'énormes 
roches ba«altiques, qui à la Chaussée des Géants et an cap 
Pleaskin font saillie dans la mer, od elles forment comme 
une espèce de colonnaàe fautastique. Sur toutes ces c6tes, oh 
l'on remarque d'ailleurs l'absence d'ries un peu considérables, 
on trouve des ports aussi commodes que nombreux ; car on 
n'en compte pas moins de soixante dans un circnit àe cent 
soixante milles géoaphiques. Les plus en renom sous Bal- 
lina, Ballimore, Belfat, Coleraine, Cork, Droçeda, 
Dublin, Dundalk, Galway, Limerick, Londonderry, 
.Newry, loss» Sliço, Tralee, Weslport, Waterford 
Weford. 
La surface du sol de rlrlande présente "une aéable suc- 

467 
cession de plaines et de collines, qui rarement se tranfor- 
meut en croies àe montagnes. La plaine la plus vaste s'C 
tend par le centre de l'lle d'une mer à l'autre. La partie la 
plus montueuse de l'/rlande est sa moitié occidentale; mais 
là mme les mon.tagnes forment plut6t des groupes isolés 
que des chalnes. Les montagnes les plus élevées, mais ne 
dépassant pourtant pas mille mètres, sont, dans la presqu'lle 
que forme le Counaught, le Nephin et le Croa9h.Patrick; 
au nord-ouest le mont Lo9field; et au sud-ouest, le Man- 
gerton, le Marc-Gillicuddy et le Sleevebo9her. 
Le fleuve le plus considémble de PIrlande est le Shannon, 
qui en traverse une grande partie dans la direction du nord 
à l'ouest. Il n'est accessible que jusqu'à Limerick pour des 
bfitiments emploés au long cours; mais à partir de là 
jusqu'au lac dAllen d'importants travaux ont permis aux 
bateaux h vapeur de le remonter sur une étendue de 29 
mydamètres. Parmi les autres cours d'eau, mentionnons 
encore le Bandou, la Lee, le Blackwater, la Sure, la Liffy, la 
Boyne et le Bann. Eu fait de lacs, on remarque surtout le 
Lough-Erne, au nord-ouest de rlle, consistant en deux 
bassins, et d'une longueur d'environ 35 kilomètres; le Lough- 
Nea9h, au nord-est; enlin le Lough-Corrib, les trois lacs 
de hïllarney, si célbres par les ravissants environs, et le lac 
Mucross, au sud. E fait de lacs d'eau sal, véritables bras 
àe mer, il faut citer le Lough-Conn, ou baie de Strangforà, 
à l'est, le Lough-Foyle et le Lough-Swilly au nord. Le plus 
important canal qu'on ait encore creusé en Irlande est celui 
qui relie Dubliu au Shannon. Lesol del'lleest au total fertile, 
notamment au centre et au sud. Les vastes marécages (ho9 s) 
qui en diminuent la fertilité en sont un des caractères par- 
ticuliers. Ils'ne sont point plats et unis comme en Angle- 
terra, mais forment parfois comme des soulèvements du 
sol, et se divisent en marais ì herbages, dans une partie 
desquels les troupeaux vont paltre en ét-, en marais fan- 
geux et inaecessibles, eu lacs couverts de joncs et de ro- 
seaux (hasocky bogs), et en tourbières. Il ne subsiste que 
quelques débris des immeuses forèts dont le pays était 
autrefois couvert, parce que àepuis la conquête àe Pile par 
les Anglai, elles ont été ou defrichées ou dcvastées. Grâce 
à la prédominance des vents douest et de sud-ouest, le cli- 
mat est très-tempéré, et i'humidité de l'atmosphère con- 
tribue à la fertilité d'un sol, qui n'a que peu de profondeur 
et repose sur un fond de rochers. Les saisons y sont plus 
irrégulières qu'en .ngleterre; mais la temperature y est plus 
douce et plus élevée en moyenne pour ?année. La pluie est 
surtout fréquente en hiver : la neige et la gelée y sont 
rarement durables. Le climat, les rëgions montagneuses 
et les marais favorisent le développement ,le plusieurs 
plantes particuhères au sol. On tronve en hlan,le presque 
tous les animaux qui vivent dans la Grande-Bretagne. Jux- 
qu'au commencement du àix-huitième siëcte, les grnonilles 
et les pies y furent inconnues, et aujourd'hui encore ou 
n'y rencontre ni taupes, ni crapauds, ni aucune espèce de 
• vipères. Les btes fauves y deviennent de plus en plus rares. 
Les fleuves et les lacs sont trës-poissonneux, et les bancs 
de Carling[ord fournissent des hutres excellentes. 
Outre le granit, qui forme la base des montagnes de Pile, 
différentes espèces de pierre calcaire sont communes. Sur 
plusieurs points il existe du marbre;le plus beau provient 
de Kilkenny. Le basalte, dont la couche s'élend depuis Pem- 
bouchure de Carrickfergus jusqu'au Lough-Fogle, et dans l'in. 
térieur des terres jusqu'aux bords du Lough-lVeagh, doit 
ètre compté, à cause de la régularité et de la variété de for- 
mes qu'il affecte, parmi les phénomènes géoioques les 
plus intéressants. On rencontre aussi sur plusieurs points 
des amcthystes, àu jape, et autres pierres prcieuses. Un 
torrent du comté de Wicklow roule de l'or natif. Jaàis on 
trouvait fréquemment àe l'argent dans les mines àe plomb 
du nord, de l'ouest et du sud; mais l'exploitation de ces 
richesses fut abandonnée au dix-septième siècle; et de nos 
jours on n'exploite plus que deux mines àe plomb. Le cnirra 
n'est pas rare; le fer est commun, mais il ne" reste plus qu'un 
59. 



petit nombre de nes de fer qui exfaienf aux seizième er 
dix-septième siècles. On trouve des nes 
dveres parties de File : la plus çro&cfive ci la meilleure 
e clle de Çafle-Uooer, dans le cooE de enler ; as 
elles ne suffisent pas aux besoins de la consommation, et 
elles ont d'ailleurs l»inconvénent dètre trop éloees des 
dvers pos de mer. 
L'friande est dvise en are provinoes : l U, au 
nord, sudiviséeen neu[comës : o Armaçh, own, 
Londonderry, Donnegal, Tyrone, Ferzna9h, Cavan et 
Monaghan; 2  LEsn, h I't, sudivis6e en douze com- 
s : Louth, Mealh, Dubln, ildae, 
.lord, KilA-enny, Carlow, Queen's County, ging's County, 
[Ystmeath et Longford; 3  CosAcn, h l'est, in pl 
pclite de louiez, ne comprenant que cinq comtés : Gai- 
au sud, et la plus grande, quoiqu'on n'y comple que six 
con»les : CorS, 'err 9, Cidre, Limemc, Tpperary et 
II'aterJord. Les villes I plus impoantes, après la capi- 
laie, Dublin, sont CorA, Limer«À, Be(¢hst, Sligo, 
Gallwag, Wteçford el Klenny. Presqueloules les illes 
considérables sont en communication avec la mer. La pro- 
vince de Leinler est, relativement h  superficie, celle 
qui compte le plus and n«_,mbre de paroisses et aussi la 
pins orte population; oe qui tient fi ce que la première elle fut 
occupée par les Angla. Le droit de issession de presque 
touls les propriétes focières de l'lrlande repose sur d 
donations, ocltoees pour la plupa graluitem¢nt fi la 
uile de confiscations ous Hemi VIII, Eli»abelh, Grom- 
well et Guillanme 111 ; et il n'y a guère que le Gonnaught 
oi l'on troue encore quelques faxailles dont les pwprietes 
out pour base d'antiques droi patrimoniaux. La propriété 
lbncire est organiée en h-lande autrement qu'en Angle- 
terre, et il ne s'y rattache point de droits feodaux. Les 
propriétaires ne firent souvent de leurs rres qu'un cens 
mediocre, parce que l'usage était autrefois de les affermer 
à de très-longs termes, et même h perpétuite ou à 999 
ans. Il existe peu de pefils proprieires, et le 
des [ranoe-tenanciers reeholders)ne dépasse guère le 
chiffre de cinquante ndlle, dont vingt mille ont un revenu 
de I0 liv. st., dix mille un revenu du double, et environ 
ingt mille  revem de 50 liv. st. Ils possèdent tous en- 
semble au plus un million et demi d'arpents de terre. Le 
surplus du sol, e>timé h environ vingt millio d'arpen[s, 
est entre les mains du clergë et de ands propriélair, 
dont plusieurs possèdent usqu' cinquante mille arpent. Il 
existe en friande une clse d'indi-idus, qu'on ne rencontre 
pa ailleurs, et qui a exercé la plus [cheuse influence 
sur l'agriculture ; nous voulons parler de oes »tiddlemen, 
espèce de localair principaux, qui afferment en 9ros et 
Ionent en dtail à des sous-locaires, lesquels parfois 
trouvent le moyen de sous-louer encore leur lot de terre 
en d.tail ; de telle soe qu'entre le proprietaire du sol et 
celui qui le cultive réellement se trouver uvent trois ou 
quatre inlermiaires et quelquefois mème davantage. Celui 
qui cultive un champ t responsable non-seulement du ns 
qu'il dut payer à son bailleur dirt, mais doit enco se 
suhstiluer aux obligations pris par chaque soulocataire 
à l'egard du locataire principal ou par celui-ci h l'égard du 
propriéit. Les sous-locataires n'ont d'ailleurs aucune ga- 
rantie contre le propriire, qui ne les connMt oint ; et 
lorsque le Iooetaire principat est changé, ils -sont aussitOt 
congediés. Ce sstème naquit de la pauvreté des fermiers 
illandais, et doit contribuer nécessairement h accro[tre en- 
ocre la misère dans le pas. Toute[ois, dans l'intervalle 
compris entoe 1840 et 187 on a  le nombre d petites Io- 
eatur diminuer oensidérablement, e mme temps que 
s'augmentait celui des grandes fermes, dans le Connaught no- 
tammt. Ce. qu'on ppelle.le pan irlandais n't  bien 
dire quhm journalier oeavaillant pour d'autres et 
à peu près pour tout salaire de son oeavail la ]omssance 
d'une hutle en terre ou en torchis avec un lopin de terre 

IIRLANDE 
de 3  4 perches, dans lequel il sème des pommes de terre. 
Pour payer le loyer de sa hutte et de son lopin de terre, 
il est obligé de donner 100 et m6me quelquefois tSO 
journées de son travail et plus. L'industrie agricole, qui se 
divise en trois classes, la culture du sol, le travail 
du laitage et l'élève do bétail, n'est pas aussi perfectionnée 
qu'en Angleterre et en Écosse; pourtant l'agriculture s'est 
un peu relevée dans ces derniers temps, et l'on exporte 
maintenant plus de biWqu'autrefois. Ce qui entrave les 
progrës de l'agriculture, c'est, indépendamment de la trop 
grande division du soi, le systèrae de l'exploitation en com- 
mun en usage dans les villages de l'ouest ; c'est le trop 
grand nombre de petits fermiers qui existent dans la pro- 
ince d'Ulster, o/a ils se partagent entre la culture de leurs 
champ et les travaux de l'industrie manu[acturière ; enfin, 
c'est l'Cendue beaucoup trop considérable de la partie du 
sol réservée aux p'lurages et pacages sur d'antres points 
de File. Une autre plaie de l'agriculture en Irlande, ce 
sont les immenses propriétés q,i s'y trouvent agglomérées 
entre un petit nombre de mains ; propriet grevées pour 
la plupart de dettes énormes. 5lais depuis 189 il a été ins- 
titué une commission royale, chargée de faire vendre au plus 
.offant et dernier enchérisseur, et au profit des possesseurs 
acluels, les doaines placés dans de telles conditions, sans 
avoir egard aux réclamations et oppositions des collateraux. 
En 1850 s'est Iormée en outre une association de fermiers 
( e tenant-right legue ) ayant pour but d'obtenir l'inter- 
venlion législative pour contraindre les proprietaires à affero 
mer leurs terres h des taux raisonnables. 
Les progrès pratiques et scientifiques que l'agriculture 
a faits en Angleterre et en Ecosse n'ont pas ]usqu'h ce 
jour profité h l'ldande, parce que les hommes actifs et in- 
dustrieux n'ont pu songer  employer leurs capitaux dans 
bn pays dont la situation morale continue toujours à n'of- 
frir aucune garantie de sécurité pour la vie et la proprieté. 
Il est juste dereconnaltre, cependant, qu'onadéja beaucoup 
fait ; mais il reste encore beaucoup h faire pour porter 
remède à un pareil état de choses. ans les comtés de Tip- 
perary, du Bol et de la P, eine, de Wex[ord, de Wicklov, de 
Kilkenny, de Kildare, de Meatb et de Loutb', l'agriculture 
a fait plus de proë que dans le» autres, grâce h Iïno 
troduction de la mêthode alterne. Parmi les cereales, la 
plus cultivée est l'avoine ; le froment ne l'est encore que 
I,eu; et d'ailleurs il est moins beau que celui dAngleterre. 
La pomme de terre, largement cultivée, vient bien par- 
tout, est d'excellente qualité et forme avec le pain d'a- 
'oine et de seigle la principale nourriture du peuple. On 
cultive aussi le lin presque partout, mais le chanvre en petite 
quantité. L'usage des prairies artificielles 3 est encore fort 
peu répandu. La production du beurre a pour centres di- 
verses contrées des provinces de Leinster, de Connaught 
et de 5Iun»ter; et au sud elle a pour base, d'après le 
système anglais, une redevance fixe pour chaque vache et 
pour le terrain qui lui est assigné. Les meilleurs beurres 
s'expédient en Angleterre. L'Cève du bétail n'est pas, 
comme en Angleterrre, l'une des branches principales de 
l'industrie agricole ; et de grands districts n'y sont pas non 
plus affectés tout entiers, comme en Écosse. On engraisse 
principalement dans quelques parties.des proincesde Leins- 
ter et de 5Innster. La race bovine primitive d'Irlande a 
presque entiérement disparu; et celle qu'on y voit mainte- 
nant :y a été introduite d'Angleterre. On s'occupe spécia- 
lement de l'Cève des mourons dans quelques districts de 
provinces de Connaugbt et de 5lunster. Le mouton indi- 
gène, dont la toison est soyeuse, n'est plus très-nombreux ; 
et de son croisement avec la race anglaise est provenue nne 
race métisse, dont la lainoe est plus longue et plus fourni 
Les che'aux irlandais sont forts et sîrs. On trouve beau- 
coup de chèvres dans la région des montagnes. L'élève des 
porcs est plus particulièrement etre les mains des culti- 
vateurs qui se livrent h la poducfion du beurre; et ils le 
engraissent généralement avec de pommes de terre. L 



1RLANDE 
pche, quoique les ctes de l'Irlande abondent en pois- 
sons de tous les genres, est bien moins productive qu'en 
Écosse. On compte cependant en Irlande près de 20,000 
bateaux pcbeurs. L'apiciculture est singuliVrement déchue 
de nos jours. 
La filature du lin, la principale industrie manufacturière de 
l'Irlande, fut fondée dans le dix-septième siècle par le comte 
de Strafford, qui introduisit la graine de lin de la Hollande, et 
fit venir des Pays-Baset de France des fileurs et des tisse- 
rands. Le commerce des toiles de lin, fondé vers l'an 1670, 
devint au commencement du dix-huitième siècle l'objet de 
la protection du parlement. La fabrication des batistes date 
de 1737. Jusqu'au commencement du dix-neu ième siècle oaa 
fila le lin presque exclusivement à la main, et maintenant 
mëme l'usage des machines n'est pas encoregéneral, parce que 
le bas prix du salaire rend le filage à la main moins cher 
que ne l'est le travail des machines en Angleterre. C'est 
surtout dans la province d'Ulster et dans quelques districts 
de celle de Connaught qu'on se livre à la fabrication de la 
toile. Les blanchisseries les plus importantes sont situées 
dans les comtés de Fermanagh et de Sligo. Lisburn, dans 
l'Ulster, est le centre de la fabrication des toiles damassees. 
Les manufactures de coton sont de creation toute récente. 
La première filature hydraulique date de 1784 ; cependant, dès 
le commencement du dix-neuviëme siècle cegenre d'industrie 
avait pris une extension considérable. Son siCe principal 
est Belfast. La fabrique de laine n'a pas la méme importance, 
quoique les entraves mises autrefois a son développement par 
la jalousie de l'Angleterre aient été abolies depuis l'Union. La 
distillation des eaux-de-vie s'y fait sur une large échelle ; 
et la brasserie est une industrie qui tend /t se géneraliser 
de plus en plus. Le commerce a fait d'incontestables pro- 
ès dans le dix-neuvième siècle. Grâce à la navigation à va- 
peur l'Irlande est bien véritablement de enue de nos jours une 
province d'Angleterre, qui a une importance immense pour 
son commerce intrrieur. En 1816 il n'y existait pas encore 
un seul bateauà vapeur, tandis qu'en 1849 on y en comp- 
tait II I, jaugeant ensemble 236,639 tonneaux. Les princi- 
pales exportations pour l'Angleterre et l'Ëcusse consistent 
en céreales, farines, bestiaux, lard, viande salée et beurre. 
Ces trois derniers articles sont désignés dans les affaires 
sous la dénomination générique de Irish lrovisions. De 
1816 à 1833 l'importation des céréales d'Irlande en Angle- 
terre s'Ceva en moyenne à 1,729,890 quarIers par an. 
En 1818 elle fut de 1,326,916 qzarters de froment, et 
1,496,814 quarters de farine de froment. Les importations 
de la Grande-Bretagne consistent surtout en fer, articles 
de grosse quincaillerie, houille, dem'ées coloniales, bire et 
produits manufacturés. L'Irlande fait un commerce consi- 
derab!e avec la France et l'Amerique du Nord, oi elle trouve 
surtout un vaste débouché pour ses toiles. Sans comprendre 
les b-Atiments employés au petit cabotage, elle possédait 
an t er janvier 1551 : 2,055 navires à voiles immatricuiés, et 
jaugeant ensemble 333753 tonneaux, plus 114 bàtiments 
 vapeur, jaugeant 27,679 tonneaux. Le commerce intérieur 
de l'ile est favorisC independamment de voies de communi- 
cation fluviales, par un réseau de cbemins de fer qui au 
t « janvier 1851 comprenait déjà 82 myriamètres de 
parcours. Le plus important de ces chemins est le Great 
outhern and Western Bailway. 
En 1695, d'après le premier recensement un peu exact qui 
ait été fait, l'lrlande comptait 1,634,162 habitants : chiffre 
qui en 1731 était déj portë à 2,010,221. En 182t, époque 
oU commencèrent les premiers recensements officiels, la 
population était de 6,8t0,827 habitants, et en 1831 de 
7,765,518 (augmentation de plus de 14 pour I00 en dix 
années). Elle etait en 1841 de 8,t75124 habitants (aug- 
mentation de 5-'. pour I00 en dix ans). biais en ISSl ce 
chiffre était redescendu à 6,515,794 h. La diminution avait 
donc été en dix ans de 1,659,230 hab., soit de 20 p. I00. 
Dans le Connaught, la diminution avait mème été de 28 
p. I00, et d« 3o p. I00 dans le comté de Roscommon, tan- 

469 
dis qu'elle n'avait été qu de 16 pour 100 dans l'Ulster. Un 
resultat de cette nature s'explique par l'extréme misère à 
quelle ce pays est en proie et par le mouvement de plus 
en plus prononcé d'émigration en Angleterre et surtout aux 
Etats-Unis. 
La plus grande partie de cette population est pauvre ; 
et les ouvriers employís dans les manufactures de toile 
de l'Ulster sont seuls dans une situation un peu meilleure. 
Les journaliers et mme les petits fermiers croupissent 
dans l'ignorance et la misère; le commun des pa)sans 
habitent de misírables cabanes en terre, souvent sans fenè- 
tres ni cheminC, et cultivent dans leur petit chanp de» 
pommes de terre, de l'avoine et du lin, On a cherché 
diminuer la misère par le Poor law extenston net du 8 juin 
1847, et dans la mme année au moyen d'un secours de 
t o,0o0,00o lin. st. rotWpar le parlement. En 18-9 on comptait 
131 dépéts de mendicite de district. Mais au milieu mëmede 
cette oppression et de cette misère apparait toujours le ca- 
ractère par lequel l'h'landais se distingue de l'Anglais : on 
est frappe de sa vivacité d'esprit, de sa plus grande facilit 
d'intelligence, de sa propension plus marquée pour la vie 
sociale. En revanche, il a moins de fermeté dans l'esprit, 
et est moins capable de se dominer. 
Sous le rapport ecclésiastique, le pays est di-isé en 
quatre provinces : Armagh, Dublin, Cashel et Tuam, gou- 
vernées chacune par un archevèque de l'Eglise anglicane ; 
et le nombre des éVOlUes suffragants s'eleve ì dix-huit. 
Ces archevéchés et évéchés sont dotës de plus d'un million 
d'arpents de terre; et on évalue la totalite des revenus de 
l'Êglise épiscopale ì plus d'tin ndllion et demi sterl. Cette 
Êglise, qui compte tout au plus cinq cent mille fidèles, est 
desservie par un clergé dont le personnel atteint le chiffre 
de tT00 individus. 
Les catholiques forment au moins les trois quarts de la 
population totale. Dans les parlies nord et nord-est de l'UI- 
ster les presbytériens sont plus nombreox qu les adhérents 
de l'Église anglicane. Les dimes que doivent acquitter les 
dissidents sont ì leurs yeux ce qu'il y a de plus inique et 
de plus vexatoire dans les revenus assignés au clergé 
episcopal. En effet, les catholiques et les presb)tériens ont 
non-seulement h subvenir aux besoins de leur propre clergé, 
mais encore ì rétribuer les titulaires des paroisses épis- 
copales dans la circonscription desquelles ils se trouvent 
placés. L'Eglise catholique est gouvernée par un archevèque 
et plusieurs ívèques. Le nombre des prètres catboliques 
s'élève à deux mille, celui des ministres presbytíriens ì 
deux cent quarante, chiffres auxquels il faut ajouter encore 
cent quarante-cinq prëtres de diverses autres confessions. 
Il n'y a pas encore asoez d'établissements pour l'instruction 
du peuple, parce que la discorde et la jalousie qui existent 
entre les catholiques et les protetants ont été toujours jus- 
qu'a présent un obstacle absoln à tout essai d'amelioration. 
L'lrlande possède à Dublin une université dotée de riches 
ressources, et à Maynootli un grand séminaire cathofique, 
entretenu aux fi'ais de l'Ëtat. 
A la tte du pouvoir exécutif est placé un gouverneur 
(lord lieulenant), qui rêside ì Dublin et dont le premic-r 
secrétaire dirige les affaires administratives. Il est subor- 
donné au ministère britannique, auquel et égalementadjoint 
un chancelier lour l'lrlande. Depuis l'Union, l'friande est 
représentée dans le parlement anglais par 'ingt-huit pairs 
et quatre évtques, membres de la chambre haute; et aux 
termes du bill de rclrme de 1832, par 105 membres de la 
chambre des communes Cus par les villes et les comtés. 
Dans les trente-deux comtés 60,607 électeurs nomment 
soixante-quatre députés, et dans trente-quatre villes et 
bourgs 11,545 électeurs en nomment quarante-et-un. 
Histoire. 
Les premiers habitants connus de l'Irlande furent les 
Galls (vote'- Czs), qui à l'ëpoque de» conquètes.des 
P, omains en Gaule t en Bretagne inrent s'y refugier t 



conservèrent leur nationalité dans toute sa pul'eté. Les Galls 
donnèrent à l'lle le nom d'Erre, c'est-à-dire fie occiden- 
tale, dont les Grees fire,t lerne et les Romains Hibernta. 
Dans la longue période où la Bretage fut une province ro- 
maine, les renseignements historiques sur l'Irlande nous 
manquent tout à lait. Les nombreux chroniquenrs irlandais, 
qui d'ailleurs n'ont pa écrit avant le dixième siècle, ont 
rempli cette antique époque des fables les plus romanes- 
ques. Jusqu'au neuvième siècle, la communauté d'origine 
lit donner aux Irlandais le nom de Scots ; et dans les pre- 
miers temps du moyen ]ge, les écrivains orientaux dési- 
gnent encore leur fie sous le nom de Grande-Écosse ($cotia 
Major). Les anciens Irlandais vivaient par tribus, sous l'au- 
torité de chefs béréditaires, possédaient le sol en commun 
et se livraient presque exclusivement  l'élëve du bétail. 
Vers l'an 430, le missionnaire Patrick, Écossais de naissance, 
vint leur prêcher l'Évangile et en méme temps leur apporta 
l'écriture et quelques élé,loeuts de connaissances scientifiques. 
La profonde tranquillité dont il hlt donné/ Flrlande de 
jouir pendant que l'Europe méridionaie était dévastée par 
les hordes germaniques, y favorisa le développement d'un 
savant corps monastique. Dès le sixième siècle ce pays 
devint le foyer des sciences dans l'Occident; des écoles an- 
nexées h ses monastères sortirent des missionnaires qui allè- 
rent porter sur le conlineut les lumières du christianisme, 
et dont on œe retrouve encore les traces dans les eouvents 
dits cossais. Cette civilisation monastique, qui sans doute 
eut peu d'action sur les peuples, s'éteignit lorsqu'au neu- 
vième siècle les Normauds, dans leurs courses sur mer, 
visilèrent aussi 1'1 rlande. En 835, des pirates danois conqui- 
vent l'tic tout entière, et y déduisirent eglises et monastères. 
Les Danois, nommés par les indigènes hommes de l'est, 
furent, il est vrai, expulsés d'lrlande l'année suivante; 
mais en 849 ces étrangers, qu'un chef indigëne avait appelés 
à son secours dans une guerre privée, revinrent plus nom- 
brenx que jamais. Ils s'établirent alors sur la c6te orientale, 
et y fondèrent, en 851, une itle, qui devint plus tard Du- 
b lin. Vers 83, un conquérant norvégien, nommé Olav, 
qui aborda en h-lande, s'imposa comme roi suprème à tous 
les Normands établis dans File, et conlraignit les indigènes 
à lui payer bibut; Valerford et Limerick forent tondées 
par ses [xères, Sitric et lvor. Ce ne hR qu'au commence- 
ment du douzième siècle que les Danoiz d'lrtanàe secouèrent 
le joug des fforvégiens. Lorsque,/ partir du milieu du 
dixième siècle, les hommes de l'est e»rent aussi embrass. 
le christianisme, le grand concile tenu en t 152 à Drogheda 
soumit toute FÉglise d'lrlande au siCe pontifical; et parmi 
les quatre arcbevèchés, celui d'Armagh, fondé par saint 
Patrick, fut íleé au rang de siCe primatiat. 
Vers ce méme temps, les ormands d'Angleterre com- 
mencërent aussi / tourner leurs regards vers l'lrlande. A 
celle epoque, l'fie, sauf les c6tes habitees par les hommes 
de l'Est,, était divisg'e en quatre royaumes : £einMer, 
Munster, Ulsler et Cm»mu9t, subdivisés à leur tour en 
fiefs hélitaires, subordonnés les uns aux autres et gou- 
vernés par des chieflains dépendants. Un roi suprême exer- 
çait sur le tout une autorité féodale limitée. De fréquentes 
guerres intestines et dirigées souvent aussi contre les born- 
oies de l'Est, que l'on continuait à considérer comme des 
ennemis, cetenaient les indigènes dans une profonde bar- 
barie et les affaiblissaient contre les envahisseurs étran- 
sers. Dermod, prince de Leinster, a,ant enlevé la femme 
d'O'Rourke, chieftain du pays de Meath, fut, par suite de 
l'intervention du roi suprëme, Roderich n'Connut, dans ce 
demèlé, expulsé de ses possessions et en 1167 s'en alla 
chercher aide et protection en Augleterre. Le roi Henri Il, qui, 
d'intelligence as'ce, le pape Aérien IV, avait projeté depuis 
longtemps la conquête de l'lrlande, ne put pas profiter pour 
le moment de cette occasion; raais il autorisa ses vassaux 
anglais à prendre la défense de Dermod. En conséquence, 
en 1169. les harons anglais Pobert, Fitz-Stephen et Mou- 
rite Fitz-GëraId débarquèrent en Irlande avec un petit corps 

IRLANDE 
de troupes, et rétablirent Dermod en possession de ses do- 
maines dans le pays de Meath. Ap ès avoir cëdê ì sés alliés la 
ville de Wexford, Dermod espéra alors soumettre toute l'fie, 
et, dans ce but, fit encore alliance avec le comte $Lrongbow 
de Pembroke, qui débarqua à son tour en Irlande en 1170, 
avec quelques troupes, eterdeva aux hommes de l'est Water- 
lord et Dublin. C'est à ce moment que Henri II, jaloux des 
succès obtenus par ses barons, debarq,m en personne en 
Irlande ( octobre ttTt ), avec quatre cents chevaliers et 
quatre raille hommes de guerre, et oceupa tout d'abord 
Vaterford. Comme il appu)ait son droit de conquête 
une bulle du pape, le clergé se dídara en sa faveur. Les 
princes de Leinster et de Munster se soumirent aussi à la 
suzeraineté anglaise, tandis que Boderich de Connaught, 
contédéré avec quelques autre« chieftains, opposait la plus 
opiniâtre résistance/ la domination étrangère. Henri, après 
s'Cre emparé de Dublin ainsi que de toute la te, y dis- 
tribun de vastes domaines / ses barons, et y introduisit le 
droit et l'organisation administrative en usage en Angle- 
terre. Ce territoire conquis fut appelé la Marche (the 
Pale . 
Enfin, en octobre 1 t 75, Roderich, / son tour, consentit à 
un arrangement, en vertu duquel l'Irlande fut definitivement 
partagée. Henri garda la partie sud-est; Roderichprit pour 
lui le nord, mais il se reconnut en mème temps vassal de 
la couronne d'Angleterre pour Connaught, et s'obligna h palet 
un tribut. Cette transaction décida pour des siècles du sort 
de Iïle. Tout d'abord les barons anglais se mirent de vive 
force en possession des fiels et des terres dont ils avaient 
obtenu l'investiture, et dont ils expulsèrent les chiefl«ins 
indigènes. Ces violences les rendirent naturellement l'objet 
des haines les plus ardentes. Bient6t d'ailleurs, comme le 
traité était conçu en termes équivoques, les Anglais 
sidérèrent l'/le entière comme leur propriété, et, bien qu'i- 
solëment et h l'aventure, ils pénétrèrent toujours plus avant 
dans l'interienr. Les guerres avec les indigènes, l'arbitraire, 
l'ambition et les luttes intestines des barons, de fausses 
mesures administratives inspirées par Pinquiétude et le 
soqpçon, firent sans interruption de lIrlande un thttre de 
discordes, de désordres et de barbarie. Cependant, / la 
loog,,e, des rapprochements s'opérèrent entre les indigénes 
et les étrangers. C'est ainsi que dès le milieu du treizième siè- 
cle beaucoup de chieftains irlandais se mirent directement 
sous l'autorité fie la couronne d'Angteterre; par lb ils se 
placërent dans la méme position que les barons, et con- 
servèrent en toute propriété, eux et leurs descendants, 
les domaines qu'ils avaient possédés antérieurement à titre 
bèrídilaire. Celte fusion des vaincus avec les vaiuquenrs, 
que les rois favorisèrent de tout leur pouvoir, rencontra la 
plus opiniàtre résistance parmi les nouveau venus d'An- 
gleterre, qui perdaient / cela des pretextes de pillage et 
des occasions de conquéte. 
Lorsque Robert Bruce eut placé sur sa tète la couronne 
d'Écosse, certains chieftains irlandais implorèrent son assis- 
tance. Par suite de cet appel, son frère Edouard débarqua en 
t z t5 en lrlande, à la tète d'une armée, et s'? lit proclamer 
roi par les mécontents. Mais, après Irois années d'une lutte 
qui cansa dans l'lle d'épouvanlables ravages, il fut vaincu 
par les Anglais, dont le triomphe fut en mme temps celui 
d'un désordre et d'une anarchie sans bornes. Les moyens 
de gouvernement auxquels recoururent les dominateurs an- 
glais empècllèrent toute fusion des deux nationalités et pee- 
p,'tuèrent l'état de guerre avec les indigènes. En effet, une 
loi de l'an 1367 dé¢lara les Irlandais des ennemis publics, 
avec q,,i il était interdit de contracter aucune alliance de 
famille; de méme que defense expresse fut laite aux Anglais 
d'adopter, sous peine de houle trahison, I¢ar langue et leurs 
mœurs. 
Pendant la guerre des deux Ro.¢s, les partisansdc la 
maison d'York curent le dessus en Irlande. Èn consé- 
quence, Henri Vil envoya une armée et un nouveau lieute- 
nant en Irlande, pour soumettre les barons de ce pays de- 



IRLA-DE 
venus presque indpendants. La constitution politique de 
i'He, dans ses rapports de sujétion vis-h-vis de l'An]eterre, 
reçut, en i95, par l'ordonnance dite acte de Poyning, du 
nom du tord lieutenant alors en fonctions, une base nouvelle, 
demeurée en vigueur jusque dans ces derniers temps. Le 
parlement irlandais, où ne siégeaient pourtant que les Anglais 
établis dans File, ne put désormais s'assembler qu'avec l'as- 
sentiment du gouverneur ; et avant de discuter les proposi- 
tions de loi présentCs par ses membres, il dut les soumettre 
à l'examen et à la sanction préalables du gouvernement. 
Quelque force que prlt l'administration en Irlande, h me- 
sure que le pouvoir royal devenait prépondérant en Angle- 
terre, on ne fit rien pour améliorer la position des popula- 
tions indigènes; et la tyrannie, ainsi que la dureté avec 
lesquelles on les traitait les maintinrent dans l'exaspération, 
la barbarie et une sauvage indépendance. 
Au commencement du seizième siècle, et sous l'empire 
de semblables circonstances, il s'en fallait de beaucoup que 
la plus grande partie de Vile fol encore réellement soumise 
aux Anglais, bien que l'on se fùt habilué h considérer c 
pys tout entier comme une conquête de l'Angleterre. Sui- 
vant leur antique organisation, les Irlandais ne reconnais- 
saient guère alors d'autre autorité que celle de leurs chier- 
tains héréditaires, et par leurs mœurs et leur manière de 
vivre ils différaient encore assez peu des sauvages. Henri "VIII 
s'efforça d'introduire aussi parmi eux les innovations en 
matière de culte qu'il avait fait triompher en Anglet«rre; 
mais les chieftains et mëme beaucoup de gens qui avaient 
adopté les mœurs anglaises ne se soumirent que par la 
force à la volonté royale. L'attachement opinifitre que les 
Irlandais témoignèrent à ce moment pour leur antique foi 
ne provenait pas seulement d'un défaut géuéral d'instruc- 
tion et de lumières; à leurs ?eux le grand tort des innova- 
tions religleuses préconisees par la réformation, c'était de 
leur ëtre présentées par leurs ennemis, les Anglais; et les 
jésuites, introduits dès 1551 dans l'fie, s'attachèrent par- 
ticulièrement à y fomenter la haine contre un roi schisma- 
tique. Henri VIII chercha bien à fortifier son autorité en se 
faisant proclamer, le 23 janvier 15-t2, roi d']rlande par les 
parlements anglais et irlandais; mais il ne fit rien pour 
ameliorer la situation des masses. La réforme, qui sous son 
règne et sons celui de son fils Edouard YI n'avait jeté que 
de faibles racines dans les cantons anglais de l'Irlande, en 
fut donc facilement extirp:e sous blarie. Lorsqu'en 1558 
Élibetb monta sur, le tr5ne, elle songea d'abord a m,.nager 
la foi des Irlandais; mais bientSt, provoquée par l'hoti- 
litWdu pape et du parti catholique, elle résolut de rétablir 
la réformation en Irlande et de confisquer les revenus de 
]'Eglise catholique pour en doter le nouveau clergé. Dès 
i560 on vit éclater, par suite de ces violences, des révoltes 
continuelles, (omentëes par des émigrés anglais, par le pape 
et par la cour d'Espagne. Le gouverneur, sir John Perrot, 
conseilla vainement a la reine d'opérer des réformes radicales 
et de tout faire pour contribuer au développement industriel 
de l'friande ; les seigneurs anglais, qui entouraient Élisa- 
heth,jngèrent cette politique périlleuse et surtout trop dis- 
pendieuse. Les revenus que la couronne tirait de l'lrlande 
ne s'devaient guère, en effet, à plus de 6,000 liv. st. ; et 
]a reine était obligée de dépenser annuellement en surplus 
20,000 livres pour conserver la suzeraineté, à peu près nomi- 
nale, de l'fie, au moyen d'un corps de troupes taibles et mal 
payees. 
o Eclus de toute participation à la vie publique, les Irlan- 
dais entraient fréquemment alors au service de l'Espagne 
ou à celui dela France, et revenaient dans leurs foyers 
çonnés h la tactique militaire. Cet avantage fut mis h profit 
par un chieftain audacieux et expérimenté, Hug O'Neill, 
que la reine avait élevé au rang de comte de Tyrone. A 
l'instigation de l'Espagne, il donna, en 1595, le signal «l'un 
soulèvement ayant pour but de délivrer file du joug anglais, 
et qui fit de rapides progrès. E mars 1599, la reine envoya 
enfin en friande son favori, le comte d'Essex, h la téte 

471 
d'une armée de 2,000 hommes; mais Essex n'arriva qu'à 
des résultats insignifiants : il conclut un armistice avec Ty- 
roue, et évacua volontairement l'ile, 0% après son départ, la 
révolte éclala de plus belle. Lord Monntjoy y fut alors en- 
voyé avec des forces imposantes, et ce nouveau lord lieute- 
nant, qui ne se fit par scrupule de répandre le sang par 
torrents, eut hientSt achevé la soumission de l'lle. Toute- 
fois, quatre mille Eçpaguols, commandés par Aquila, qui 
prenait le titre de restaurateur de la foi, étant débar- 
qubs h Kinsale, le 23 septembre 1601, et bient6t après une 
autre armée, sous les ordres d'Ocampo, ayant envahi le 
sud de l'friande, la population tout entière courut encore 
une lois aux armes. Tyrone se réunit à Oeampo; mais, le 
2-1 décembre 1601, trois deux furent battus devant Kinsale 
par .',lountjoy, qui leur fit 6prouver de grandes pertes. Les 
Ecpagnols évacuèrent l'friande en jansier 1602, et Tyrone 
dut alors se rendre à discrétion. A la mort d'Ëlisabeih, tonte 
l'Irlande était soumise à l'Angleterre. Mais pour étouffer la 
révolte il avait fallu exterminer une partie des habitants 
et prononcer des confiscations en masse; affreuses violences 
qui sont la cause premièredu déplorable état de choses dont 
l'lrlande souffre aujourd'hui. Plus de 600,000 arpeus de 
terre furent enlexés par la couronne aux chieftains irlan- 
dais et à leurs familles, et distribués en majeure partie h 
des colous anglais. 
Le roi Jacques I r conçut le plan d'améliorer l'état de 
l'Irlande au moyen de réformes politiques. Avant tout il 
oulait mettre un terme à l'autorité arbitraire qu'exer- 
çaient les chieftans irlandais, lesquels avec le temps 
avaient fini par devenir de véritables barons anglais, et de 
faire des Irlandais des hommes aussi libres que les Anglais 
et jouissant comme eux de tous les droits attachés au titre 
de citoyen. Mais pour réaliser :es vues il fit revivre l'odieux 
systëme des confi,cation. Tout seigneur irlandais fut obligé 
de produire la charte constataut son droit de propriéte sur 
les terres dont il était en possession : et quand cette charte 
n'exisiait pas, ou bien encore si l'on y découvrait le moin- 
dre vice de forme, les domaines étaient impito?ablement 
confisques au profit dela couronne. La plus grande partie des 
800,000 arpents de terre qui écburent de cette manière an 
roi dans le nord de lïle, au lieu d'ètre distribués à la classe 
pauvre, furent vendus à des Écossais ou à des spéculateurs an- 
glai% qui Ion,lércnt la ville de Londonderry. Cette révoltante 
iniqnit: fit avorter les mesures, bonnes au fond, prises par 
Jacques I  pour civiliser l'lrlande. Il divisa le pays en cir- 
concripfions ecclesiastiques, abolit les barbares coutnmes 
judiciaires qui y étaient encore en vigueur et leur substi- 
tua le droit anglais, en déclarant que tous les habitants de l'lr- 
lande étaient désormais cito)ens libres. Un parlement natio- 
nal, qui s'assembla pour la premiëre {ois en 1615, et auquel 
assistèrent aussi, par conséquent, des seigneurs irlandais, 
confirma ces innovations. Toutefi% on ne comptait qu'un 
très-petit nombre de eatholiques parmi les 25 Iords qui avec 
25 CiSques protestants en formèrent la chambre haute; et 
sur les 226 membres dont se composait la chambre basse, 
125 pro{essaient la religion protestante. En outre, par suite 
de leur refus de prëter le serment de suprématie qui dé- 
signait le roi comme chef suprème de l'Elise, les eatho- 
liques demeurèrent exclus de toutes les fonctions publiques. 
D'un autre ¢5té, le pape exhorta ceux qui refusaient ce ser- 
ment (recusants) h persévérer, et en face de l'Ëglise 
protestante, il reussit à reconstituer sur tous les points de 
l'lrlande la Ifiérarchie catholique. A ce schisme relienx, 
entretenu avec le plus grand soin par des prêtres élevés à l'é- 
tranger, inrent s'ajouter encore, sous Charles I er, des trou- 
bles civils. Le principes religieux et politiques des puritaius 
faisaient de jour en jour plus de progrès parmi les colous 
anglais établis en Irlande ; et, comme on sait, les tendance 
de ce mouvement étaient bustiles h la rnyautè, l,lais les Ir- 
landais firent surlout révollds de la conduite du lord lieu. 
tenant S t r a { fo r d, qui en toute occasion clelmit à com- 
primer et à élouffer parmi eux l'esprit de nationalité, et qui 



47 
continnaR, sous mille prétcxtes, le système oieux des con- 
fiscations. Dans l'exagération de son zle, ce représentant 
de l'autorioE royale en vint jusqu'a vouloir convertir la 
province de Connaught tout entière en propriété de la cou- 
ronne. Ls Irlandais résolurent donc de mettre à profit les 
embarras de Charles I er pour secouer le joug britannique. 
Une armée nombreuse, concentrée alors en friande et desti- 
née à agir contre les Ëcossais, tait presque entièrement 
composée d'Irlandais. Un certain Ruser More, issu d'une 
• ieille famille irlandaise, conçut le projet de la soulever 
et, à l'effet de le réali.er, se mit en rapport avec |oral 
Maguireet avec le chevalier O'Neill, tous deux deseendants 
d'anciennes faces de chiefl«ins. La conspiration fit de ra- 
-pides progrès parmi les chefs de vieilles iamilles irlan- 
daises, sans que les proteslants anglais en eussent le rapin. 
dre soupçon. Le 23 octobre 1661, O''eill prit les armes 
dans la province d'Pister, ou une partie de la population 
était depuis longtemps réduite à errer sans asi|e dans les bois 
et dan» les ma/.cages. Ce que les meneurs avaient en vue, 
c'étit une révolution politique, et non une guerre (le re- 
ligion ; mais un clerg6 lunatique pouss le peuple h com- 
metlre d'épouvantables massacres, si bien q,,'en quelques 
jours quarante à cinquanle mille protestant anglais furent 
égorgés sur divers points de Pile, et qu'un plus grand nom- 
bre encore périrent en cllcrchant leur salut dans la lutte. 
Les Anglais accusèrent leur mallleureux roi d'avent' Ce l'ins- 
tigatcur de cette horrible boucherie, qm exerça une influence 
réelle ut la marche ultérieue de la rëolution d'Angleterre, 
alors à ses débuts. Charles I  fut forc de remettre le soin 
de châtier les Irlandais rebelles au parlement anglais, donl 
la première mesure fut de confisquer en friande 2,500,000 
arpents de terre pour en employer lu prodnil en preparatifs 
de guerre. Mais l'expédition destinée / venger le sang an- 
glais ainsi répandu u'eut pas lieu, parce qu'alors précise- 
ment commença la lutte du parlement conlre la puissance 
royale elle-mëme. 
Le marquis d'Ormond, lord lieutenant d'friande pendant 
la guerre civile, ne negligea rien pour décadre dans ce 
pays la cause de son mailre; et en 16:6, aprës leur aor 
garanti lamnistie complète du passé et la libertë religieuse 
l,ur l'avenir, it conclut avec les principaux chef ds Ir- 
la.dais catholiques un traité par lequel ceux-ci s'engagèrent 
à mettre un corps de 10,00o hommes a la disposilion «lu 
roi. Le nonce du pape, tiinuccini, apporla des enlraves a 
l'exécution de celle convention ; et Ormond, redoit a quilter 
l'lrlande, dttt mëme livrer les places fortes aux troupes du 
parlement. Mais quand le nonce eut Ate expulsé du pays, 
les négociations furent reprises; et Ormond put former une 
armée considerable d'indigènes, avec laquelle il fit éprous er 
plus d'un echec aux troupes du parlement. Aprës le supplice 
de Cllarles I  et la proclamation de la république en An- 
gleterre, les Irlandais catholiques, toujours placës sous rin- 
iiteuee toute-puissante d'Ormond, se disposèrent h pro- 
ciamer le prince de Galles roi, sous le nom de Charles II. 
Ù'est à ce moment que le parlement nomma Cromwell lord 
Lieutenant d'lrhde ; celui-ci ' debarqua le 1  aoét 16.9, à 
la tgte d'une armée eonsidërable, dont le fanatisme politique 
et religieux décuplait encore les forces. Cromwell, sans perdre 
de temps, enleva d'assaut les villes de Drogbeda et de 
Wexford, dont il fit massacrer les habitants sans distinc- 
tion de sexe ni d'ge. Celle atroce exécution, gage de rira- 
pitoyable rigueur avec laquelle il était déci,lé a procéder à 
leur égard, inspira aux Irlandais une telle terreur, que 
pour la plupart ils abandonnèrent volontairement leurs 
places fortes lur aller se refugier dans les marais. 
En moins de neuf mois, après avoir verse des flots de 
sang, Cromwell avait soumis presque toute l'de, Iorsqu'il 
ferait le commandement en chei .à son gendre I r e t o n, qm 
poursuivitimpitoyablement l'exécution d'un plan qui n'allait 
a rien moins t[u'à |'entiere extermination des catholiq ues. C'est 
ainsi qu'il coatraigait près de quarante mille Irlandais en 
etat de prter les armes, etqui auraient pu devenir quelque 

IRLANDE 
#out dangereux pour leurs oppresseurs,  fuir loin de leur 
pays; et ces émigrés entrèrent alors tes uns au service de 
rEspagne, les autres à celui de la France. A partir de ce mo- 
ment une commission ang}aise tut chargëe d'administrer les 
affaires civiles du pays; et comme, en dépit de l'affreuse per- 
sécution dont ils etaient l'objet, les catbotiques irlandais per- 
sistaient opinitrément dansleurs antiques croyances, Crom- 
ell imagina un beau jour de déporler en masse aux ries des 
Indes occidentales cette nation tout entière, reduite par la ter- 
reur à se cacher ah fond de ses boiset de ses marais. On com- 
prit toutefois que c'était I/ un projet impossible à exécuter. 
Alors le Protecteur ordonna d'expulser tous les Irlandais de 
leurs terres, de les refoulera l'ouest de l'ile0 dans l'ancien 
royaume de Connaught, et de les y renfermer dans des places 
fortes, sous la surveillance de la population protestante; mais 
malgré toutes les barbaries auxquelles on eut recours, ce 
plan ne put encore ëtre exCutA que d'une manière extrème- 
ment incomplète..Neanmoins, les terres arables qui se trou- 
vèrent abandonnées par suite de ces sauvages exécutions fu- 
rent distribuées àdes soldats et à des coloris anglais, tandis 
que des centaines de milliers d'indigènes périssaient de faim 
et de froid dans leurs marais. 
La restauration n'apporta en somme que peu de change- 
ments à la malheureuse position des eatholiques irlandais. 
Charles li fit, il est vrai, cesser la persécution religieuse; 
mais les protestants gardèrent les proprietés confisquées sur 
les eatholiques et qui leur avaient etA données gratuite- 
ment. 11 n'y e0t qu'un nombre extrëmement rainime de ea- 
tholiques irlandais, ceux qui etaient assez ricbe pour pou- 
voir enlamer de Iongset ruineux procès en revendication, qui 
parvinrent/ recouvrer par celle voie leurs propriétes. La 
action catholique dont le règne de Jacques II devint le 
signal fut saluée d'acclamations de joie en lrlande. Quand 
ce prince eut perdu sa couronne, il y opéra, au commen- 
cement de 1689, une descente avec un corps auxiliaire fran- 
'ais de ,000 h6mmes. Les ealhotiques accoururent en foule 
auprès de lui ; bientbt son armée presenta un effectif de 
.8,000 hommes, et les troupes anglaises perdirent suecessi. 
vement toutes les places Ibrtes, -.i l'exception de London- 
derry et d'Eunildllen. Par suite de cette eontre-révolution, 
environ g,600 proprietaires protestant se virent foreés d'a- 
bandonner leurs terres aux catholiques. 3lais au printemps 
de 11390 le roi Guillaume 1II debarqua ert friande avec 
un corps d'armée considérable, et remporta sur l'armée 
ealholique deux victoires décisives ; l'une, le 1 « juillet, sur 
les rives de la Boyne, non loin de Drogheda, et la seconde, 
le 13juillel 1691, près d'Angrim. La revolte fut par I-h com- 
primée; et File se trouva presque entierement soumise à la 
nouvelle dynastie. Dès le mois d'aott les catholiques du- 
rent livrer leur dernière place, Limeriek ensuite de quoi 
iutervint avec le général anglais Ginkel un traité en vertu 
duquel tes Irlandais eatholiqu devaient jouir du libre 
exercice de leur religion, comme sous Charles 11. Plus 
de IX,000 Irlandais, qui avaient combattu pour la cause 
de Jacques 1I, se condaumërent volontairement à l'exil. Un 
arrèté du parlement anglais conlisqna de nouveau dans Pile 
un million d'arpent-.- de terre, qui cette fois encore lutent 
distribués à de protestants. En outre, les protestants for- 
mërent dans les villes, pour soutenir l'intérët dynastique 
de. sociétés diles oran9istes, qui persécutérent et oppri- 
reCent avec urt zèle fanatique la population catholique. 
Pour comprimer tout essor de relëment catholique et na- 
tional, on eut recours à de barbares lois pénales, désignées 
sons le nom de penal laws. Aux termes de ces lois, les hauts 
dignilaires ecelésiastiques durent quilter l'fie ; il tut interdit 
aux membres du bas clergé de sortir de leurs eomtés res- 
pectifs; l'enseignement catholique fut interdit, ainsi que les 
signes extérienr. du culte; aucun catholique ne put valable- 
ment remplir des fonctions publiques, acquérir de propriétës 
foncières, contracler mariage avec une protestante, tester 
librement, etc. Une disposition particuRère enjoignait méme 
aux catholiques de ne monter que des .chevaux d'un va- 



IILANDE 
leur de cinq livres; et en cas de contravention, tout pro- 
tsstant avait le droit d'enlever le cheval au propriétaire en 
lui payant ladite somme de cinq livres pour toute iddem- 
n/tC 
Bien qte ces lois ne fmmssent pas toujours rigoureusement 
appliquées par les mastrats proteslants, elles n'entre- 
tenaient pas moins dans le peuple des haines violentes 
contre la nation anglaise, qlfi les lui avait imposées, et elles le 
pot]ssèrent souvent à des tentatives désespérées. La crainte 
que de son c6té l'Irlande inspirait au gouvernement anglais 
le détermina à chercher les moyens de tarir les sources de 
la richesse nationale de ce pays, o/] la fabricatiot des étoffes 
d elaine commençait à prendre d'importants développements. 
Tous les prodtfits naturels et industriels de.l'ldande furent 
donc frappés de droits de sortie si exorbitants, qu'ils équi- 
valaient à une prohibition. 
Dès 1695 le parlement irlandais avait réclamé le rappel 
de l'acte de Po/ning, et par conséqtent son indépendance 
gislative. Ses VœUX furent repoussés en 1719, sous Georg I er, 
par le parlement anglais, qui, au contraire, renonvela expres- 
sément l'acte dont on demandait l'abolition ; et en 1727 il 
retira mme aux catholiques le droit de concourir à l'Ceu- 
tion des membres du parlement. Les Irlandais g«mirent 
alors pendant plus de trente ans sous la plus dure oppres- 
sion. Lors da soulèvement «les jacobites écossais, en 175, 
le gouvernement anglais avait ëté assez politique pour mon- 
trer des dispositions plus conciliantes à l'égart de l'Irlande; 
mais après la bataille de C u I I o d e n il était revenu bien vite 
à son ancien système «le rigueur. L'oppression exercée par 
les grands propriétaires fonciers et par les curés protestants 
provoqua successivement à partir de ce moment, parmi les 
Irlandais catholiques, la création des associations politiques 
connues sous le nom de de.fenders, et qui io.ent ,n r61e si 
important dans l'histoire moderne de l'lrlande. Vers 1760 
parurent les u, lzitebo!ls ( les garçons blancs), ainsi appelés à 
cause des chemises qu'ils portaient par-dessus leurs vête- 
ments. C'taient des iouraliers, des ouvriers sans pain, des 
fermiers congédiés, qui se rassemblaient la nuit pour chàtier 
et mme po.r égorger des propriétaires, des c,rés, des agents 
de police, des magi.qrats, qui se montraient plus particu- 
lièrement impitoyables à l'égard des catboliques ; et d'or- 
dinaire, ces sanglantes esCutions une fois accoroplies, il 
était impossible de retrouver les traces des coupables, car 
dans la crainte de s'exposer aux redoutables effels de leur 
vengeance, aucun Irlandais n'ett os déposer en justice 
contre les whiteboys. Vinrent ensuite, en 1733, les hearts 
oJ" ou/, c'est-à-dire les cœurs de chne, dont le soulèvement 
eut lieu à propos des corvées oppressives établies pour la 
construction des routes. En somme, ces recours à la force 
brutale ne changèrent rien à la situation du pays. Ce fut 
seulement à l'époque de la guerre entreprise pour la dé- 
fense de leur indépendance par les colonies anglaises de 
l'Amériqne septentrionale, que le peuple Irlandais profita 
des embarras dt gouvernement anglais pour lui arractter 
quelques concessions. Les lois pénales jusque alors en vi- 
gueur contre les catholiques furent donc un peu ado,,cies 
en 1778, de l'assentiment dt parlement anglais, qui les 
a,torisa en outre à courtaud.er des baux de 999 ans. La 
France ayant alors fait mine de vouloir tenter un debar- 
q|,ement en lrlande, les Irlandais, sous prélexte de dé- 
limd,'e leur pays, que le gouvernement anglais s'éta/t va 
contraint de dégarnir presque entiërement de troupes, orga. 
nisërent en 1779 des corps de volontaires (lrislz voltt- 
taries), qui au boat de det, ans présentaient tn elfectif 
de 0,000 hommes. La nation sentit dës lors sa force. Ces 
volontai,'es présentèrent des pétitions les armes à la main 
et le gouvernement en fut d'autant plus effrayé, qu'à ce 
moment les protestants irlandais e,,x-mmes se joignirent 
atx catholiqaes pour réclamer une large réforme politique. 
On demandait la complte liberté du cgmmerce de l'friande, 
l'abrogation des peal laws, mais surtout l'indépendance 
da parlement irlandais et la rèfo,'me des monstrueux bus 
DIC'r. Dg LA CUN*¢'EIIS. -- T. XI. 

47.3 
de la loi élecorale. Pour prévenir un soulèvement roiversel, 
le parlement anglais se vit donc forcé, en 1782, de sup- 
primer l'acte de Po!lnin9 et de consentir h I'indépendance 
législative du parlement irlamlais. En méme temps les lois 
pénates portees contre les calholiques furent sinon abrogées, 
du moins considérahlement mitigêes. C'est ainsi qu'ils furent 
désormais autorisés à acquérir des propriétés fonciëres, 
h établir des écoles et à accoroplir pins librement les cé- 
rémonies de leur culte. De toutes les mesures tyranniques 
dont se plaignaient avec tant de raison les Irlandais, la plus 
oppressive était peut-ttre l'obligation qu'on leur avait im- 
posée de payer la dme aux roinistres protestants, alors qu'ils 
avaient à subvenir en outre h l'entretien de leurs propres 
églises. La dureté impitoyable avec laquelle beaucoup de 
ministres exigeaient des pauvres lermiers le payement des 
dimes donna naissance, en 1786, à une société secrète dont 
les membres prirent le nom de rightboys, c'est-à-dire 
gars du droit, et se chargèrent de faire expier plus parti- 
culièrement aux mini«tres protestants la tyrannie sous la- 
quelle gdmisaient letrs concitosens. Les rihtbo!s fai- 
saient premlre au peuple l'engagement sous serment de ne 
pas acquitter de dimes, ou de ne les payer que d'après un 
taux fixé, et ils punissaient ceux des conlribuables qui 
manquaient ì leur parole. A partir de ce moment les 
luttes provoquées par la question des reenus de l'Église 
proteslante prirent parfois le caractère d'une guerre sociale. 
Lorsque la révolution française éclata, on comprend 
qu'elle dut provoquer les sympathios les plus vives en Ir- 
lande, dont la population s'abandouoa aussit6t atx plus 
vastes espérances. Du sein des volontaires, qui pourtant 
s'étaient dissous depuis plusieurs années, se forma, en 1791, 
à Dublin, l'association des Irlandais-Unis ( Umted Irish- 
7en ), à laquelle s'alfilièrent mme un grand nombre de 
protestants. Cette association avait pour but ostensible 
de propager et de discuter les principes et les faits de la ré- 
volution française; mais en secret elle préparait une révo- 
lution qui devait transformer l'lrIande en république indé- 
pendante. Des relations secrètes s'établirent bient6t entre 
elle et la Convention natipnale; on arma de nouveau les 
volontaires, et il fut convenu qu'à l'arrivée d'une armée 
française íclaterait eu Irlande un soulèvement général. 
En dehors de ces menes occultes de quelques conspira- 
teurs, les catboliques irlandais, profilant des embarras du 
gou ernemeut anglais, réclamaient en t 792, dans one grande 
assemblée tenue à Dublin, leur complèle assimilation aux 
protestants pour l'exercice des droits politiqtes et civils ; et 
le parlement s'efforça alors de conjurer l'orage en sui, pri- 
mant les entraves imposées au commerce et à l'industrie 
0e l'lrlande et, à peu de chose près, les lois si justement 
odieuçes dites penal laws. Les catholiques obtinrent le 
droit de plaider devant les tribunaux, et purent désormais 
contracter mariage avec des protestants. En 1793 on abolit 
les peines qu'ils encouraient en ne fréquentant pas le di- 
manche les églises protestantes; on leur accorda aussi le 
droit de prendre part aux ílectionq pour le parlement, sans 
pourtant tre eux-mmes élibles, et celui d'arriver aux 
emplois luiCieurs. D'autres réclamations élanl restées sans 
résultat, l'Association ,les Irlandais. Un is n'en laissa percer 
que plus bardiment ses desseins ré'¢olutionnaires, et le gou- 
vernement anglais résolqt enfin de conjqrer ce p,:ril par 
l'emploi de la force. L'habeas corp«s, inlroduit en 
lrlande deptfis 1782, fut révoqué; de fortes garnisons fu- 
rent mises dans les villes; l'Association des Irlandais-Unis 
fut dissoute et darmée, biais, comptant bien sur l'assis- 
tance de la France, les conjurés ne perdirent pas courage 
pour cela ; et en décembre 179t3 parut sur la c6te d'lrlande 
une flolte française portant 25,000 hommes de troupes de 
débarquement, solos les ordres de Ho c h e ; cependanl, par 
suite d'accidents de mer et surtout de l'impéritie «le l'amiral, 
celle flotte dut s'éloigner ns avoir rien tenlé. 
Le gouvernement anglais adopta alors à l'égard de l'If- 
lande des mesures »lus riïourenses que jamais, et dé¢lara 



4 IRLADE 
tout entière en étt de siCe ; mesure bien laite pour , anciennes loges orangistes; de là bient6t entre catholique 
achever d'exaspérer la population. En 1797 l'Association et protestants de sanglants et incessants conflits. En 18`25, 

des lrlartdais-Unts se réorganisa oeorètement, et en se 
donnant cette fois une organisation militaire trës-babile. 
A sa tte était platWun directoire composé de cinq mem- 
bres, dont les noms n'étaient connus que des délégués des 
cinq commissions provinciales. Déjà l'Association comptait 
plus de 500,000 conjurés, lorsqu'en janvier 1798 le gou- 
vernement reçut d'un parjure les révélations les plus com- 
plètes. Malré cette trahison et l'arrestation de plusienr 
chefs, qui en fut la suite, le soulèvement éclala an mois de 
mai sur plusieurs points du pays  la fois. Les insurgës 
étaient pour la plupart catholiques : aussi leur premier soin 
fut-il de se venger des oranstes ; toutefois, des forces mi- 
litaires imposantes empéchèrent la revolte de prendre plus 
d'e,lension. Des colonnes mobiles parcoururent l'ile, et 
comprimèrent la sédition en repandanl le sang à flots. Les 
commandants de ces détachements arrêtaient les suspects, 
et les ïaisalenl pendre sans autre lormalité. Le nombre des 
victimes s'eleva a environ trente mille,  compris bet]coup 
de protestant» égorgés par les catholiques. Ces scencs sau- 
vages avaient à peine cess, , qu'au mois d'ao0t 1798 parut 
sur la cote d'Irlande une nuire escadre française, aux or- 
dres de Savary, qui déharqua dans la baie de Killala un 
millier d'hommes aux ordres du général Humbert. Une foule 
de patrivtes irlan, lais vinrent se joindre aux Françis; 
mais les troupes anglaises rëussirent à comprimer ce soulë- 
vement, qui pouvait deenir général, et contraignirent les 
inurgés  mettre bas les armes. Une autre expedition fran- 
çaise, qui, en seplembre, s'approcha des cttes sous les or- 
dres du gdnéral Itadry, avec 3,200 hommes de debarque- 
ment et d'immen«es approvisionnements de guerre, fut 
interceptée et capturée presque tout entière par l'atniral 
Warren. Diverses autres tentatives de debarquement lattes 
par les Françai jusqu'en novembre ëchourent également. 
A la suite de ces desastres éproués coup sur coup par le 
parti national irlandais, le gouvernement anglais rdsolut enfin 
d'enlever  l'lrlande sa représentation particulière et de 
réuir le parlement qui fonctionnait à Dublin avec le par- 
lement d'Angleterre. Une motion faite à cet effet dans le 
parlement d'hlande ayar, t Ce repoussée avec une vive in- 
aliénation, le cabinet eut recours aux voies de la corr,ption. 
Les b o u r g s p o u r r i s, desquels dependaient la plupart des 
suiCes du parlement d'|rlande, furent arhetés à prix d'or. 
Le gouvernement les paya chacun plus de vingt mille livre. 
Grâce à cette operation, l'union legislative entre l'lrlande et 
la Grande-Bretag'ne, dite itnion ]inale, fut votee à une 
grande majorité, le 26 mal 1 s00. 
Il avait etê convenu que l'lrlande serait désormais reprí- 
sentée dans la chambre haute du parlement siégeant h 
Westminster par 3'2 lords élus parmi les pairs irlandais, 
dont qultre évëques, et à la chambre basse par 100 dèputés 
des curerC,  illes et hourgs; en outre, que les Irlandais 
jouiraient des néme droits et libert,.s que les Anglais, et 
que des relations complétement libres existeraient èntre les 
deux peuple.c. L'lrlande s'obligeait en retour à supporter 
pendant les xingt années suivantes deux xingt-cinquièmes 
de la totalité des charges de l'Eat. La premit.re session du 
parlement-uni eut lieu au commencement de t01. Pour 
gagner les masses, Pitt avait promis de plus la complëte 
émancipation politique des catholiques ; il avait preparé 
l'acte qui devait ètre soumis à cet effet au parlement ; mais 
il lui lut impossible de décider le bigot Georges III à faire 
cette concession. Les catholiques irlandais, justement irrités 
de ce manque de parole, Iondèrent dès 1802, à Dblin, 
nne grande assoOation polilique ayant pour but d'obtenir 
l'émancipation. Dans l'espace de dix ans, cette association 
devint le foyer de toute vie politique en friande, et parvint 
h exercer un empire absolu sur.les catholiques. La rare 
actix-ité qu'.elle dploya surtout à partir de 1812, Iorsquïi 
commença a se manifester au .ein «lu parlement quelque 
sympatlde çour l'trlande, provoqna la résurrcction des 

le gouvernement ayant prononcé la dissolution des deux as-. 
I sociations, orangiste et O 'Connel ! ut donner 
catholique, 
à l'association catholique une nouvelle forme, grâce h la- 
quelle celle-ci put sans violer la loi continuer son oeuvre. 
Ce ne lut toutefois qu'à la mort de Cannivg, en 1827, quand 
,Velliagton prit en main la direction des alfalres, que l'If- 
lande, renonçant h l'attitude calme qu'elle avait gardée jus- 
qu'alors, devint le thëtre de la pins violente agitation. 
L'association fut complétement organisée dans tous les 
comtës, et s'attacha surtout h influer sur les élections, dont le 
resultat ïtt decidé par les petits cultivateurs. Tous les ca- 
tholiques s'ohligèrent à payer une cotisation h l'elfet de for- 
mer un fonds destine à ètre employé au mieux des interêts 
de la cause commune et notamment h venir en aide aux 
ïermiers congédies par les propriètaires protestants. Par 
contre, d'autres associations protestantes se reconstituë- 
rent sous le nom de clubs de Iruru.ici; et l'antagonisme 
des deux partis religieux en preseuce devint tellement vio, 
lent, qu'on dut craindre de le voir dégenérer en guerre 
cixile. Dans de telles circonstances le gouvernement anglais 
eut le bon sens de comprendre qu'il ne lui restait plus 
d'autre ressource que de prevenir par une large concession 
les graves dangers que courait la tranquillité publique. 
Aprés aoir ordonn la dissolution des associations, Wel- 
lington propo:a au parlement un bill dit d'macipato, 
qui rendait aux catholiques l'exercice de leurs droits poli- 
tiques, qui fut adopté malgré l'opposition des ultra-tories, 
et sanctionné le 13 avril 1829 par Georges IV. Un nouveau 
serment de fidelilé à la couronne et à la constitution, rédigé 
dans des termes tels que les catboliques purent le prêter, rexn- 
plaça l'ancien, et des lor les catholiques purent sieger au 
parlement, de même quïls deinrent admissibles  toutes les 
fonctions publiques, sauïcelles de lord-chancelier d'friande. 
Cette mesure reparatrice lut accueillie par les catholiques 
irlandais avec les demonstrations de la .atisfactiou la plus 
vive. Usant tout aussitOt du droit de saisir directement la 
législature de la question des remèdes à apporter aux souf- 
frances sans nom de son pays, O'Counell présenta une 
motion ayant pour but la suppression de la dlme que les 
catholiques étaient tenus de paer aux ministres du ote 
protestant ; impOt inique et oppressif, dont les catholiques 
resolurent de refuser désormais le payement. 
La resistance devint encore plus génerale, lorsqu'à la fin 
de tf,30 le ministère tory succotaba et lut remplace aux af- 
faires par une admistration whig ayant pour chef lord 
Grey. Le nouveau ministëre, qui devait s'attacher à se 
concilier les masses dans l'tutC-dt du triomphe de la réforme 
padementaiiei annonça la prësentation prochaine d'un bill 
relaliï au rachat des dlmes en friande. Ce bill, lord Stanley, 
secrétaire d'Et pour l'lrlande, le présenta effectivement 
au parlement dans la session de 1832. Les deux chambres 
l'adoptërent ; mais on reconnut bient6t que ce n'était encore 
la qu'un impuissant palliatif. Au lieu de consentir à se 
racheter de la dime, les catholiques prirent le parti d'en 
reluser purement et simplement le payement : et ce refus gé- 
neral, fait avec un admirable accord, causa une telle per- 
turbation dans la situation du clergé protestant, que le par* 
lement se  il obligé de lui faire une avance d'un million 
sterting. C'est h ce moment qu'O'Connell déclara qu*il con- 
sacrerait désormais tous ses efforts à obtenir le rappel de 
l'union leislatix-e entre l'lrlande et la Grande-Bretagne; 
car suivant lui une législature indëpendante pouvait seule 
faire droit aux griefs de l'lrla.nde. Cette menace, qu'O'Con- 
oeil lui-mème ne croyait sans doute point realisable, nais 
dont le but l'Ci était d'entretenir en lrlande cette agitation 
politique h laquelle le bill d'emancipation était venu mettre 
lin, produisit en Irlande un effet electrique. D'une exti-émile 
de lïle à l'aulre, la dissolution de l'Union devint le mot de 
ralliemcut de la Ioule ; et O'Counell fonda alor l'assooation 
dite du rappel (Repeal-Asocalion), devenue bieut6t le 



IlLANDE 47 
centre d'action de l'opposition. L'irritation des classes po- I tratifs, et à tenir en bride l'insolence du parti protestant. 
pulaires devint telle, qu'O'Connell lui-mème eut toutes les I u ordonnance rendue par lui en 1836 supprima même .les 
peines du monde à empcher un soulèvement et à mainte- associations orangistes. 
nir le peuple dans lesvoies légales. Dans une tellesituation, Cependant, les affaires d'Irlande continuèrent à être dans 
il tait naturel que la question d'Irlande absorbàt toutes les le parlement l'objet de vives discussions. Le gouvernement 
autres; aussi dès la session de 1833, la première qui se tlnt présenta dans trois sessions conécutives lu bill sur les dt- 
après la réforme parlementaire, lord Grey, voyant l'oindre mes d'Irlande, qui échoua deux fois dans la chambre haute, 
publ4c gravement compromis, n'hésita-t-il pas à soumettre à cause de ce qu'on appelait la clause d'appropriation. 
à la sanction du parlement une loi (lrish coercion bill ) En 1838, les ministres ayant consenti ì abandonner cette 
qui conférait au lord lieutenant d'Irlande le pouvoir d'inter- clause, le bill fut adopté à peu près dans la Ibrme où il avait 
dire, sans autre formalité, toutes les assemblées populaires, été pour la premië[e fois proposé par Lyttleton. Une ten- 
et au besoin de proclamer l'état de siége. Une armée de tative laite pour porter remède à l'Cat de confusion où 
6,000 homme.% ilanquée de 6,00o agents de police afinC, se trouvait le rëime municipal en Irlande écloua contre 
lut envoyée en Irlande pour prêter main forte à l'exécution le mauvais vouloir de la chambre haute. Il en fut de mème 
de cette loi; et quelques disctricts furent effectivement dé- de toute une serte de mesures moins importantes, destinees 
clarés en état de siCe. Pour apaiser jusqu'à un certain point à &.feutre quelques-uns des abus existant dans ce pays ; et ce 
l'exaperation générale, le ministère proposa une seconde ne tut pas sans peine qu'en 183 le ministère arracha à la 
loi, le bill relafifà l'Égfise d'Irlande, qui abolissait les ira- chame haute un bill qui créait en Irlande des juges de paix 
pSts ecclésiastiques, diminuait les revenus des prebendes et des magistrats de police salaries, amélioration qui met- 

et supprimait les paroisses et évèchés protestants inutiles. 
Cet acte ayant été adopté au grand mécontentement des 
protestants zélés, le libéral lord Lyttieton, qui avait rem- 
placé lord Stanley comme secrétaire d'État pour l'Irlande, 
présenta un nouveaa bill des dlmes, qui substituait à la dime 
une rente foncière due par la propriéte territoriale; rente qui 
n'equivalai d'ailleurs qu'aux trois cinquiemes des anciennes 
dlmes. En somme, les Irlandais devaient donc ètre déchargés 
des deux cinquièmes de cet impSt. La chambre bassedopta 
le bill de lord Lyttleton ; mais les Iords le rejetèrent, parce 
qu'il contenait une disposition subsidiaire en vertu de la- 
quelle l'excédant obtenu sur le revenu ecclésiastique par suite 
de l'application du bill de l'Eglise, «levait tre employé au profit 
des écoles et des communes en Irlande. Les tories virent la 
une spoliation commise aux d6pens de l'Elise protestante 
et appelèrent cetCe disposition la clause d'appropriation. 
Au milieu de l'agitation que le rejet du bill des dtmes 
causa en Irlande, lord Grey donna sa dmission, parce 
que dans le cabinet mëme de graves dissentiments s'étaient 
élevés au sujet du coercion bill; et lord Melbourne arriva 
en juillet 1831 à la tète des affaires. Le coercion-bill fut 
aussit0t retiré, et la nouvelle administration suivit à l'egard 
de l'lrlande la politique la plus conciliante. O'Connell, avec 
qui elle entra mme en d'etroites relations, n'hésita point 
à dissoudre l'association du Bappel, en déclarant à ses coin- 
patriotes que les intentions des whigs étaient des garanties 
suffisantes d'un meilleur avenir. Les tories furent tellement 
irrites de cette alliance du gouvernement avec le parti po- 
polaire irlandais, qn'ils recoururent à toutes les ressources 
les plus souterraines de l'intrigue pour determiner en novem- 
bre 183 b , le crédule Guillaume IV à congédier brusquement 
son ministère. Le nouveau cabinet tory, présidé par Peel, 
espra dctourner l'orage menaçant que ce changement d'ad. 
ministration souleva en lrlande, en présentant dans la ses- 
sion de 1835 un bill sur les dimes qui differait peu du pré- 
cédent, llais la chambre basse ayant de nouveau adopté, 
sur la motion de lord J. P, ussell, la clause qui consacrait l'ex- 
cédant de revenu de l'Eglise d'Irlande à des objets d'utilité 
publique, les tories durent se retirer dès le mois d'avril, et 
Melbourue reprit la direction des affaires. 
Dans cette lutte opiniàtre, c'étaient les membres irlandais 
du parlement qui avaient décidé pour la première fois par 
leur vote une question de cabinet. Les whigs, reconnaissants, 
nommèrent lord lieutenant d'Irlande, en mai 1835, le 
comte Mulave, connu plus tard sous le nom de marquis 
de fformanby, noble caractère, en qui les libertés nationales 
avaient constamment {ruuvé un défenseur zélé. Pour la 
première fois depuis des siècles, l'Irlande entra, sous l'ad- 
ministration «le ce nouveau lord lieutenant, dans une situa- 
tion tranquille et normale. Mulave n'hésita point à.appeler 
des catholiques aux fonctions les plus importantes, à faire 
présider une stricte impartialité à la distribution de la us- 
lice à déclarer une guerre impito)-able aux altos adminis- 

tait enfin un terme au pouvoir arbitraire dont les proprié- 
taires fonciers avaient jusque alors été invetis. Malgré le 
mauvais vouloirCident que luitémoignait la chambre haute, 
organe des rancnnes de l'aristocratie anglaise et du clergé 
protestant, le peuple irlandais, qui à la suite d'une mau- 
vaise récolte, eut à souffrir d'une affreuse disette, resta 
tranquille sous l'administration de Mulgrave et sos celle 
de son sccesseur, lord Fortescue. Ce fut seulement en mai 
1839, quand la defection des radicaux contraignit les higs 
à abandonn,.r momentanément la direction des affaires, que 
les vieilles haines se ranimèrent, et la fermentation y devint 
telle, qu'il eOt suffi alors d'un simple signe d'O'Connell pour 
que la gerre civile clat/t partout en lrlande. 
La grande faute, le grand malhetr des hommes d'État, 
aussi bien whigs que luttes, qui depuis trente ans ont di- 
rigé les allaites de la Grande-Brelan-me, et pour qui l'lrlande 
u'a pas cessé d'ètre le plus affreux des cauchemars, c'est 
de ne pas avoir compris qu'il etait impossible de maintenir 
plus longtemps das ce pas une organisation de la pro- 
priet foncière qui a fini par exheréder plus des dix-neuf 
ingtièmes de la population, réduits par la misère et les 
ices qu'elle engendre, à une situation à peu près analogue 
à celle des i[otes chez les Spartiates ; qu'il s'agi.sait là en 
rcalitë bien moins «le liberte religieuse ou de droits poli- 
tiques que d'une question sociale. Avec les sommes que 
l'Angleterre a dépensées depuis un Jemi-siècle, pour faire 
chaque année l'aum¢ne aux classes necessitcuses de l'blande 
et les .oustraire ainsi plus ou moins efficacement aux tor- 
tures de la taire, un gouvernement sage et habile, s'il n'avait 
pas cr devoir modifier Iêgislativement les baçes donu,:es à 
la propriéte par la [eodalité, eOt pa da moins rache{er à 
l'amiable près du quart du sol de l'Irlande, et y eOt créé 
toute une population de petits proprietaires, dont la paoEi- 
cipation au rendement de l'imp6t représenterait aujour- 
d'hui bien au delà de l'intérêt du capital employé à cette 
transformation pacifique du sol. La régénération morale et 
politique de l'Irlande était à ce prix  jusqu'a ce jour le gou- 
vernement anglais ne s'est pas senti iecoeur de l'entreprendre. 
Au lieu de se jeter dans cette voie résolument, on le voit, 
en 1838, présenter à la sanction législative an bill des p«u- 
vres pour l'Irlande, dont toute l'é-onomie consistait à cons- 
I fuite dans les différents comtés des dépots de mendicilé, des 
maisons de travail pouvant recueillir de 70 à 80,000 indi- 
vidus. Cette mesure, virement combattue par les chefs du 
parti irlandais, fut adoptée par le parlement, dévora des 
sommes immenses, et ne changea rien à la situation La 
rentrée des tories aux affaires lut eu effet tout aussitôt 
suivie en Irlande de la idus menaçante agitation ; et O'Con- 
nell de reconstituer alors, put-tre niquement pour tenir 
le peuple en haleine, l'association pour le Bappel de l'Union. 
En t8"3 l'ile était véritablement en feu, et chaque jour 
èclataient «le sanglantes collisions entre les catboliques et 
I-es protestants. 
0. 



476 
A la »ulte d'une assemblée monstre de repealers (parti- 
sans du rappel)tenue au mois de mai t813 à Mallow, les 
conseillers de la couronne crnrent devoir venir déclarer 
tolennellement devant le parlement qu'ils ëtaient fermement 
résolus à maintenir co0te que co0te l'union législative des 
deux pays. Le bill qui interdisait le port d'armes en If- 
lande fut renouvelé : ou y envoya des forces imposantes, et 
les fonctionnaires publioe membres de l'association du Rap- 
pel furent destitues. Une autre assemblée monstre de re- 
pealers, couvoquée en octobre  Clontarf, fut interdite, et se 
dispersa sans opposer de résistance s,'ieuse. Mais dans 
les assemblées hebdomadaires de l'association, O'Connell 
faisait adopter des résolutions o/, tout en recommandant 
de respecter la tranquillité publique, on déclarait les actes 
du gouvernement illégaux, en mme temps qu'on y prenait 
l'engagement de persister dans la résistance légale tant que 
l'Irlande n'anrait pas recouvré son propre parlement.. 
En présence de ce dfi jeté au pouvoir, les ministres 
n'hésitèrent point à intenter au célbre Atateur et à ses ad- 
bérenton procës qui se termina, en mai t6, par une con- 
damnation  une année de prison contre les inculpés. Un 
vice de forn)e fit casser cet arrtt par la chambre haute, et 
les condamnes furent remis en liberté. 
La question religieuse int alors compliquer encore la si- 
tuation : un bill proposé par Robert Peel à l'effet de créer 
en Irlande trois grands colléges d'enseignement mixte pour 
toutes les matières profanes fut aussi ivement combatlu 
par les anglicans zélés et intolerants que par les catholiques, 
dont les évéques protestèrent solennellement contre cette 
esure et transmirent leur protestation  la cour de Borne. 
De nouvelles assemblées monstres tenues par les repealers 
provoquèrent, en 15, des eontre-démonstrations de la part 
des oranstes ; et les collisions sanglantes recommenrent 
de plus belle entre les deux partis. L'année lt6 fut si- 
gnalée dans la plus grande partie de l'Europe par une mau- 
vai»e récolte, et l'l rlande en souf{rit peut-être plu que tout autre 
pays, car, par suite de la aladie des pommes de terres, la 
récolle de ce précieux tubercule, qui constitue à lui seul la 
nourriture des trois cinqniemes de la population, y manque 
complétement. Le gouvernemenl, pour venir en aide aux 
populations nécessiteuses, ordonna de grands travaux d'utilité 
publique, fit dessédler des marais, construire des routes, 
rendre à la culture d'immenses Cendues de terrain jusqu'a- 
lors restées incultes, distribuer des vivres au-dessous du prix 
de revient; mais tous se» efforts, tous ceux que renièrent 
de leur c6té les classes sisCs pour venir en aide aux pauvres, 
ne furent que de valus palliatifs. Les sacrifices immenses 
faits h peu près inutilement en 15,, il talint encore les re- 
nouveler en IS-17, et cette fois sur une échelle beaucoup 
plus large. A la fin de jillet lgtT, le gouseruement avait 
dépensé en Irlande, dans l'espacede douze mois, près de 250 
millions de francs. Ce fut d'ailleurs un bonheur pour lui, et 
aussi pour l'Irlande, que la direction supérieure des 
faites de ce pays se trouv.t entre les mains d'un homme 
aussi humain, aussi juste, et aussi conciliant que le comte 
13essborough (mort en mai t847 ), qui eut un digne succes- 
seur en lord C I a r e n d o n, dont la bienl'aisante administration 
a fait époque en lrlande. C'est au plus fort de cette crise 
que le célèbre O'Connell mourut, à Gnes ( 15 mai 187 
en se rendant à Rome, et l'agitation pour le Rappel s'étei- 
gnit avec lui. 
Aussi bien, O'Connell était delmis longtemps débordé, et 
son action, jadis si puissante, . peu près annulée par celle de 
la jeune lrlande, parti essentiellement révolutionnaire, aux 
yeux duquel l'agitation lœegale n'tait qu'une vaine momerie, 
t qui n'attendait de salut pour le pays que de l'insurrec- 
tion. L'abondante récolte de 187 vint heureusement cire- 
iriser bien des plates matérielles ; mais alors il y eut recru- 
descence de la maladie morale, à la suite du caractëre de 
l«s en plus envenimë que prit la question religieuse. Le pape 
sa prononça de la manière la plus lormelle cont,'e le projet 
des ¢ollCges nixt de Robert Peel ; jamais l'antagonisme 

IRLAI'DE 
des deux partis religieux ne prit un caractère plus violent. 
Les collisions sanglante.% les meurtres isolé.s, provoqués sur- 
tout par la question agraire, devinrent  l'ordre du jour; 
et en présence de cette effroyable anarchie, fomentée par un 
clergé ultramontain, le gouvernement, ne se seutant pas la 
force nécessaire pour la faire cesser," 'iot demander au 
parlement l'augmentation des moyens énerques de répres- 
sion mis déj  sa disposition, et eotre autres la suspension 
des lois garantissant la liberté individuelle. 
On comprend de reste quela révolution de févrieri t848, 
avec les espérances sans limites qu'elle fit nattre et les ho- 
rizons nouveaux qu'elle découvrit, ne put qu'aiouter encore 
aux perils de cette situation si tendue. Les chefs de la 
Jeune Irlande, reniant hautement la politique temporisatrice 
d'O'Connell, crurent le moment venu d'en appeler à la force. 
Ils se mirent eu rapport avec les hommes de l'l6tel de ville 
à Paris, et engagèrent ouvertement les masses à se tenir 
prétes pour la lutte. Le parti d'O'Connell (désigné aussi 
sous la dénomination de raoralJorce part9, en opposition 
à la jeune Irlande, désiaée sous celle de phIIsica[ force 
partg) perdait chaque jour du terrain ; et effrayé de ce qui 
se passait en lrlande, de méme que de l'attitude prise eu 
Ang!eterre par le parti charliste, le ministère dut présenter au 
parlement un bill pour la protection de la couronne. 
prononça ensuite la dissolution d'une espèce de conrenlion 
nalioale composée de 300 députés et convoquée à Dublin 
par Smith O'Brien, ainsi que celle d'une'garde nationale 
qui était alors (mai 186) en voie d'orgauisation. Smith 
O'Brien et 3Ieaghir furent en outre traduits devant les tri- 
bunaux, sous l'accusation d'avoir excité le peuple à la 
volte; mais le'jury ne put rendre son verdict. John 5titchell, 
rédarte,w d'un journal intitulé : The united Iris hman, oo l'on 
prhait ouverlement l'insurrection, fut condamnéàlquatorze 
années de déportation ( 2juin). Ehardi par l'impunité, 
Smith O'Brien se posait en chef du parti national, et dans 
les r(unions publiques anuongait hautement que le jour de 
l'insurrection armée approchait. Une partie des anciens re- 
ealers, abandonnant les fils d'O'Connell, venait se gronper 
sous le drapeau de la jeune Irlande, et constituait l'Irish 
league. D'un bout de l'tic h l'autre, ce n'étaient plus que 
clubs révol,tionnaires et assemblées d'hommes en armes, 
tandis que des feuilles nltra-démocratiques, telles que The 
Iristz Felon et he 2Vallon excitaient et déchainaient de 
leur mieux les passions les plus extrèmes. Le gouvernement 
traduisit de nouveau )feaghir en justice ( 18 juillet ), et dé- 
clara la ville de Dublin et les comlés de Cork, de Waterford 
et de Drogheda en état de siCe. 
Le parlement investit encore alors le gouvernement de 
nouveaux moyens de répression, et le lord lieutenant donna 
l'ordre d'arréter Smith O'Brien, en mme temps que la pu- 
blication des feuilles révolutionnaires était interdite. Les 
chefs du parti dèmocratique secachèrent ou prirent la fuite, 
et la plupart des clubs se fermèrent. Pendant ce temps-là 
Smith O'Brien, salué par les masses populaires du titre de 
roi de Munsler, groupait autour de lui des bandes armées, 
à la tète dquelles il parcourait le pays à l'aventure; un 
engagement sanglant, qui eut lieu te 29 juillet entre les siens 
et la force armée, engagementauquel on donna par dérision le 
nom de bataille de Bouiagh , mit fin à ces désordres en provo- 
quant un sauve-qui-peut général parmi les bandes armées 
et leurs chefs. Dans toutes ces démonstrations du parti dé- 
raocratique, il n'y avait en r('allté que de la menace et de la 
forfanterie, car il n'v eut nulle part de résistance sérieux. 
Le 5 avril Smith OBrien fut arrèté et traduit en justice 
avec Meagbiret autres. Au mois d'octobre, il fut rendu con- 
tre eux une condamnation  la peine de mort, que le gou- 
vernement commna en déportation. 
On ne saurait refuser au gouvernement anglais la justice 
de reconnaître que tout en ne renonçant point à l'usage 
deg mo)-ens de répression vigoureuse dont il était armé, fl 
fit tous ses efforts pour gnérir les plates de l'lrlande. En 
fevrier 18-19, un bi|l introduisit ue taxe desixleace par livrv 



IRLAIDE 
slerling de reenu; pour le prduit:en tre appliqué au 
soulagement des pauvre. Mais cet expédient ne détruisit 
point la misère. L'lrlande était revenue à une situation pa- 
reille à celle des plus mauvais jours de l'année 1846-18t7, 
et pour comble de calamité le choléra vint alor y effectuer 
d'effrayants ravages. En quelques semaines plus de 200,000 
individus fuirent loin de ce malheureux pays, où d'immenses 
tendues desol restërent abandonnées et sans culture. L'es- 
prit de parti, malgré ces désastres publics, persistant dans 
la politique de l'agilalion, le gouvernement obtint de la 
législature un bill qui interdisait en friande toutes réunions 
publiques, aussi bien celles des catholiques que celles des 
orangistes (mai 1850). Le mois suivant le parlement volait 
un secours extraordinaire de 300,000 liv. sterl, pour les dè- 
p6ts de mendicité, où le choléra avait sévi d'une maniëre toute 
particulière, en mëme temps qu'un autre bill élargissait la 
base du droit électoral et déclarait électeur tout fermier dont 
le bail s'Cevait à la somme de 2 liv. sterl. Tant d'eflorL% 
tant de sacrifices amenèrent bien une certaine amélioration 
dans la situation, et la population commença  témoigner 
alors pour oes intérêts matériels une partie de la préoccu- 
pation qu'elle avait jusqu'h ce moment concentree unique- 
ment sur ses iutérts morau ; mais cette amélioration n'exis- 
tait qu'à la surface, et comme toujours les actes de violence, 
les meurtres et les assassinat« commis dans les rapports de 
propriétaires "/t fermiers continuaient de répandre la terreur 
dans le pays. L'agitation polti9ue venait-elle à cesser, aus- 
sit6t c'était l'agitation religieuse qui la remplacait; et le 
clergé catholique, fidèle aux instructions de la cour de Rome, 
creait au pouvoir de nouveaux embarras par son opposition 
baiueuse à toutes les mesures où la puissance temporelle lui 
semblait usurper sur les droits de l'autoritéspirituelle. On put 
toutefois constater un fait consolant, c'est que preoccupées 
maintenant beaucoupplus de leurs intérèts matériels, les mas- 
ses se laissaient entrainer bien moins facilement qu'autrefois 
aux excitations et aux provocafions des partis. Aussi bien, le 
mouvement de l'Cigration causé par la chèreté relative des 
subsistances et par l'impossibilitê pour le plus grand nom- 
bre de trouver une rétribution suffisante du travail, prenait 
une extension de plus en plus rapide ; et le recensement de 
1851 constata une diminution de plus d'un million et demi 
d'habitants sur celui de 18tl ; diminution dont le résultat 
immédiat fut une amélioration sensible dans la situation 
générale. Sans doute l'agricultur.: s'est visiblement relevée 
et l'esprit de commerce et d'entreprise commence à faire de 
notables progrès dans le pays, dont la surface parait en ce 
moment calme et tranquille; mais nous craignons bien que 
le feu ne couve sous la cendre; et ce qui nous porte à le penser, 
c'est qu'il y a là une nationalité opprimée, des cro)ances 
religieuses violentCs: deux causes dïnévitables révolutions. 
Consultez Cox, tlberma anglicans , or the h,stor o/Ire- 
land from the invasio o/Henri II, wth a prelimnar 9 
d iscourse on the ancWnt state of that K ngdom ( vol., Lon- 
dres, 189-t690); Mac Geoghegan, Hstoire de l'Irlande 
ancienne et moderne (Paris, 17 ); Gordon, ltstor 9 of 
Irelad from the earliest accourt« to the accomplishment 
of the union tvffh Creat-Br[ain ( 2 vol. 1806) ; Thomas 
Moore, Hisoril of Ireland (2 vol. Londres, 1535); Beau- 
mont, L'Irlande sociale, politique et religieuse ( Paris, 
1839). O'Connor a aussi publie les anciennes chroniques de 
i'lrlande, texte original avec traduction anglaise en regard, 
sons le titre de Rerum Hibernicarum Scriptores ve[eres 
(4 vol. Londres, 181t-1826). 
! RLADE ( Nouvelle - ). Voile:, louwLtv.-Im».:nz. 
IR.MENSUL ou IRMINSUL. Voile:, lm. 
IILMIN mot qu'on retrouve dans toutes les langues ger- 
maniques, qui dès lors a déjà beaucoup vieilli, et qui vrai- 
semblablementCait A l'origine synonyme de vasle, immense. 
Toutefois, dans les plus anciens monuments écrits que l'on 
possède, et où il ne figure plus que comme première partie 
de noms et de subslantils (par exemple, ir»linman, irmin- 
9ot, trminfrit, irraangart), sa signilicalion première s't 

-- IRCIE. 477 
tellement effacée  qu'il n'est plus que l'augmentatif de l'i- 
dée contenue dans la seconde partie du mot à la formation 
duquel il concourt. Il est extr6mement probable que chez 
les nations germaines proprement dites lrmine 6tait lo sur- 
nom sigaificatii du dieu dont l'une des plus antiques tribus 
germaines, les Herminons, peut ètre bien aussi les Hermun- 
dures, prétendaient descendre. On a ou reconnaitre dans 
ce surnom Wodan, ou encore ( et ce semble par des motifs 
plus conduants) Ziou, personnification de la brillante clarté 
du jour, que l'on avait transformée en farouche divinité des 
batailles. Il est probable que c'est à ce dieu qu'é{aient con- 
sacr6es ce q«'on appelle aujourd'hui les colonnes d'lrmen ; 
car c'est il tort que jusqu'au treizième siècle les écrivains 
ceux de la Franconie surtout, ont employé ce terme pour 
dësigner toute grande colonne ou statue. La plus célèbre des 
colonnes d'lrmen (Irminsul) lut d«truite sur l'Eresberg, 
près de la Dremel, en Hesse ou en Westphalie, par C h ar- 
I e m a g n e, lors de la grande victoire qu'il remporta sur les 
Saxons en 772. Il parait qu'il en existait une autre, non 
moins ancienne et moins vaste, -/t Scheidungen sur l'Uns- 
ttut en Thuringe. Divers motifs se réunissent pour donner 
à penser qu'il y avait une corrélation intime entre ces co- 
Ionues ou plut)t ces ba]iveaux ( car il est difficile d'admettre 
qe (aient etWdes statues ), et Ygdrasil, l'arbre du monde 
dans la mythologie scandinave, de mëme que plus tard les 
colonnes de Roland qui existaient dans bon nombre de 
 illes du nord de l'AIlemagne. C,msultez Grinun, Miltho- 
logée aileron»de ( Goettingue, t 84). 
IROX'IE figure de rhetorique, où la parole est di- 
rectemeut opposée A la penëe, biais, loin de cacher la 
pensée, cette manière d'employer la parole fait ressortir 
avec plus de force ce qu'on a daus l'esprit. Dumarsais dis- 
tingue deux espèces d'ironies : l'une est un trope, à mn 
avis; l'autre, une figure de pensée. Celle-ci est l'ironie sou- 
tenue ; celle-I consiste dans un ou deux mots. Tel est cet 
exemple où Déipbobe, mutilé par la trahison d'Hélène, 
montre ses plains, et dit avec amertume : « Voici Is gages 
que ma vertueuse épouse m'a laissés de son amour. » 
L'ironie ne convient pas aux passions, dit Voltaire ; elle 
ne va point au coeur. Sans doute, il a voulu parler de l'i- 
ronie prolongée, dont les idées suivies dans un ordre où 
la rexion est trop marquée, s'accordent peu avec la 
marche impétueuse et brusque des passions. En effet, 
comme l'ironie est un parallèle qui se fait dans l'esprit, elle 
suppose une àme calme pour tracer ainsi le tableau de ce 
qu'une chose est avec les traits de ce qu'elle n'est pas. Sous 
ce rapport, et parce qu'elle est une moquerie légère ou pé- 
nétrante, douce ou amère, elle convient mieux au ton de 
la comédie, léanmoins, il en est d'elle comme du rire : 
expression ordinaire de la gaieté, elle peut ètre encore ins- 
pirée par le désespoir ou la rage. 
L'ironie a différents caractères, comme elle a des sour- 
ces variées, et ses noms changent suivant ses modifica- 
tious. On l'appelle astime lorsque, inspirée par l'estime 
ou l'amifié, elle couvre un éloge sous le voile du bIAme. 
Tel e,t le discours de la mollesse dans le Lutrin. Tant6t 
elle se revèt de grAce et dëlëgance, et son badiuage #ait 
à ceux mëme qu'il touche avec des traits aimables : c'est 
le chartienisme. Tant6t, quand elle vient de la haine, du 
mépris ou de la colère, elle parodie le ton, les gestes et les 
paroles d'un autre, afin de lui donner un ridicule : on la 
nomme en ce cas mimèse. On en trouve un exemple dans 
la scène du Misanthrope entre Arsinoé et Célimène. Vou- 
lez-vous un speeimen du chlénasme, lisez le discours de 
Turnus à Drancès dans l'Ênéide. Ici, par moquerie, on nous 
supposons nos belles actions dans un rival, ou noussup- 
posons les mauvaises actions du rival en nous-mme. Le 
d a s vrm e consiste dans un mot qui ressemble à celui 
de Diogène jetant à Piston un coq dépouillé «le ses 
mes, et criant aux elëves «lu philosophe : Voilà l'homme 
de Piston ! C'est, dit Beauzée, une espèce d'ironie dédai- 
gnense ou maligne, qui par une raillerie hmuiliante dé- 



478 
roue au mépris la personne qui en est l'objet. Enfin, le sar- 
casino, qui »zord dans hz chaire vive, comme l'indique 
son étymologie { sarx, en grec ), est la parole outrageante 
du vainqueur  son ennemi terrassé; c'est le mot de Tho- 
myris qui plonge la tSte de Cyrus dans un vase de sang, 
ou le reproche amer du Parthe qui verse de l'or fondu 
dans la bouche de Crassus ; ou l'exclamation du poëte  
la vue de Balthazar expirant sous les traits du Mède ; 
/'hune, arque Denm factls illude neiandis ! 
Hippolyte FAVcnE. 
IBOQUOIS. Les ethnographes les plus récents dési- 
gnent sous cette appellation générique un groupe de tri- 
lus indiennes ayant entre elles plus ou moins d'affinitë, et 
qui jadis étaient puissantes et influentes. La nation iroquoise 
se divise en deux groupes, le plus grand au nord, elle moin- 
dre au sud. Le oupe septentt'ionsl forme à son tour deux sub- 
divisions, celle de l'est, et celle de l'ouest; la première com- 
posée des Cinq-Nations, comme les appellent les Anglais, 
on des Iroqnois, comme les avaient nommés les Français 
du Canada, la seconde des WyandoLs ou H u fo n s et des 
Athionandarons ou nation neutre. Les Iroquois propremeut 
dits, ou les Cinq-Nations, à savoir les Mohawks, les Onéi- 
das, les Onondagas, les Cayougas et les Sénécas, habilaient 
an sud du Saint-Laurent et du lac Ontarin, et étaient rèpan- 
dus depuis l'Hudson jusqu'aux ramifications supéricures 
du fleue Allegbauy et jusqn'aux lac Crié. La confedération 
politique qu'ils fottaient était très-puissante avant l'a- 
rivée des Européens et con-'lmment engagée dans de san- 
glantes guerres, taut6t avc des nations appartenant à la 
vaêmerace,tant6t avc des nations étrangères. Ils montraient 
dans la direction des opérations de la guerre beaucoup plus 
d'intelligence que les diverses nations des Algonquius Lé- 
napes, leurs voisines, et de meme étaient bien plus avancés 
qu'elles dans l'aicullure, dans la fabrication des armes et 
les autres méliers. Une circonstance qui ne tarda pas non 
plus à beaucoup accroitre leur prééminence sur leurs oi- 
sius, c'est que les premiers ils se trouvèrent eu contact 
avec les Européens, de qui ils apprirent l'usage des armes 
à feu. Ils ne laissèrent pas non pins que de prendre une 
part assez importante aux guerres dont ces courtCs furent 
le thé,tre entre les Anglais et les Français. Il parait cepen- 
dant que le nombre de leurs guerriers ne s'clora jamais à 
plus de 5 à ,000 hommes. Depuis que leurs descendants 
ont été transportes du territoire de l'Uuion Américaine 
dans l'ouest du continent, il n'eu reste plus que d'insigni- 
fiants débris dispersés dans le Canada au voisinage des grands 
lacs. En 1714 et 1";15 les débris des Tscaroras avaient 
encore étë accueillis comme Sixième nation dans la con- 
fédëraÙon des ]roquois. Ces Tuscaroras s'étaient vus con- 
traints d'émigrer à la suite de guerres malheuretses contre 
les habitants de la Caroline, où ils formaient autrefois une 
nation très-puissante, et constituaient, a ec les 3leherrins ou 
Tutelocs, dont il ne reste plus de vestiges aujourd'hui, et les 
attowa's, le groupe des lroquois du sud. Consultez School- 
craft, History o.f the Iroqums (cw-York, 1866). 
IBIADIATION ( de in, sur, et radiare, lancer des 
rayons). Les rayons que lance un corps lumineux s'écar- 
tant les uns des autres  mesure qu'ils s'ëloigneut du foyer 
qui les produit, il arrive que le corps lumineux nous pa- 
rait plus grand qu'il ne Post en effet : ce phénomène s'ap- 
pelle irradiatn. Lorsqu'on observe le soleil et les autres 
astres au moyen d'une lunette, on remarque que leur dia- 
mètre diminue considérablement; il suffit de regardex ces 
astres au travers d'un trou d'ëpingle pratiqué dansuue carte 
pour faire la m[me remarque. Ce ne sont pas seulement les 
astres lumineux pareux-mèmes qui nous donnent une fausse 
id6¢ de leur grandeur; la lune elle-mgme, qui est un corps 
opaque, nous parait plus grande Iorsqu'elle est éclairée par 
le soleil : si on la regarde avec attention quand elle n'offre 
qu'un croissant, on observe que la partie éclairée sëlève 
pour ainsi dire au-dessus de la partie obscure. C'est aussi 

IIONIE  IIIÉSOLUTION 
à lïrradiation qu'il faut attribuer les variations de grandeur 
que présente un objet diversemcnt coloré. Une même boule, 
par exemple, nous semblera plus grande si on la peint en 
blanc, en rouge, que si elle est couverte de couleur noire. 
Le vulgaire sait fort bien qu'un habit blauc fait parattre 
eehfi qui en est revêtu plus volumineux qu'on ne le croit lors- 
qu'il est habillé de noir. C'est encore Pirradiation qui nous 
fait croire que les étoiles ont plusieurs branches ; cepen- 
dant, on a de bonnes raisonç pour penser qoe ce phénomène 
est produit en nous par une conformation particolière de 
l'oeil ; car deox individus ne donneront pas  une même 
étoile un même nombre de rayons; en outre, chacun d'eux 
les croira diversement idacés. Qui plus est, cette disposition 
de l'oeil varie avec l'àge de l'individu. TL'SsÈnne. 
IBRATION'NEL. Voge'- ICOIEXSVn-IL et RO- 
NEL. 
llfÉDUGTIBLE. Une f r ac 
tible quand il n'existe aucune fraction de même valeur 
exprimée par des terme« respectivement moindres. 
En algëbre, on donne le nom de cs irréductible à 
lui que présente une équation du troisième deë dont les 
racines sont réelles et inegales. Dans ce cas, en effet, si on 
veut résoudre l'équation en appliquant la formule géné.raie, 
on trome des valeurs compliquées d'imaginaires engagées 
sous des radicaux cubiques. Il faut développer chacun de 
ces radicaux en série; on reconnalt alors que les termes 
réels restent seuls dans le résultat final. Mais les séries que 
l'on obtient étant rarement convergentes, on a d chercber 
une autre m4bode. L'emploi des foctinns trigonométriques 
doune un myen beaucoup plus rapide pour résoudre ces 
sortes d'.quations. 
IRRELIGION» manque de reli gi on. La religion ne 
ous présenle rien que de conforme à la raison, que d'ai- 
mable, que de touchant, que de digne d'ètre admiré dans 
tout ce qui regarde les sentiments qu'elle nous iaspire et 
/es mœurs qu'elle exige de nous. L'unique point qui puisse 
révolter notre cœur est l'obligation d'aimer Dieu plus que 
nous-mme, et de nous rapporter entièrement à lui. Mais 
qu'y a-t-il de plus juste que «le rendre tout  celui de qui 
tout no,as vient, et que de lui rapporter ce moi que nous 
tenons de lui seul? Qu'y a-t il, au contraire, de plus injuste 
que d'avoir tat de peine à entrer dans un sentiment si juste. 
et si raisonnable? 11 faut que nous soyons bien éEarés dans 
notre voie, et bien denatnres, pour ètre si révoltés contre 
un subordination si légitime. C'est l'amour-propre aveugle, 
elfi-éné, insatiable, tyrannique, qui veut tout pou !ui seul, 
qui nous rend idolâtres de nous-reCe, qui fait que nous 
voudrions ètre le centre du monde entier, et que Dieu méme 
ne servir qu'à flatter tous nos vains désirs. C'est ini qui et 
l'ennemi de l'amour de Dieu : voilà la plaie profonde de 
notre cœur, voilà le granà principe de l'irrëlion. Quand 
est-ce que l'homme se fera justice? quand est-ce qu'il se 
mettra dans sa vraie place ? quand est-ce qu'il ne s'aimera 
que par raison, à proportion de ce qu'il est aimable, et 
qu'il préiérera à si non-seulement Dieu, qui ne ouffre 
nulle comparaison, mais encore tout bien public de la so- 
ciété des autres hommes, impaHaits comme lui. • Encore 
une fois, voilà la religion : connattre, craindre, aimer Dieu, 
c'est là tout l'homme, comme dit le Sage (Eccloes., XII, 13 ). 
Tout le reste n'est point le vrai homme ; ce n'est que l'homme 
dénaturé, corrompu etdégradé, que l'homme qui perd tout 
en on,riant follement se donner tout, et qui va mendier un 
faux bonheur chez les crëatures, en méprisant le vrai bon- 
heur que Dieu lui promet. Que met-on à la place de cebien 
infini ? Un plaisir houleux, un lant6me d'honneur, l'estime 
des homme. que l'on méprise ! Fo. 
IBRÉSOLUTION situation embarrassante de l'esprit, 
qui peut provenir d'une trop grande facilit d'examen fai- 
sanl discerner à la fois toutes les faces que prësente une 
affaire, et en laissant combiner tous les résultats probables 
et possibles; plus souvent encore, l'irrésolution prouve la 
timidité, le défaut de discernement et la consiene de ce 



IRItI_SOLUTION -- IRRIGATION 
défaut. Mais c'est en général au manque de principe que 
i'irrësolution en matières graves peut tre attribuee. L'ir- 
résolu est aiternativement brave et iìche, fidèle et perfide, 
probe et fripon ; il met en regard le vice et la vertu, et 
trouve que l'on peut excuser l'un et biAmer l'autre ; "s'il 
juge sainement nn jour, plus communément encore il est 
paradoxal et sophiste. Les passions ne mettent pas plus 
l'homme au pouvoir d'autrui que l'irrésolution. 
Oui ne peut se résoudre aux conseils s'abandonne, 
a dit Voltaire. Le commerce des gens irrésolus est en- 
unyeux, et ils attirentsur eux à peu près autant de maux que 
les étourdis et les ohstinés. Les anciens, les Spartiates sur- 
tout punissaient sévèrement l'irresolotion. Destooches a 
.'ait un comédie de L'Irrésolu, caractère peu dramatique : 
a Phresolution qui le jette successivement dans diverses pro- 
fi'ssions, le heros joint l'irrésolution qui l'empëche de choi- 
sir pour femme Julie ou C.lmène : décidé enfin à s'unir 
à la première, il s'Crie : 
J'aurais mieux fait, je crois, d'èpouser Cètimèoe. 
Ce vers, le dernier de la pièce, est reste proverbe. 
C sse DE BRADI. 
IIIIGATION, action d'arroser les terres. Il ya plu- 
sieurs moyens pour arriver à ce rësoltat : le plus simple et 
le plus efficace consiste, lorsque les circonstances le per- 
mettent, à diriger des courants naturels d'eau sur le soi 
qu'on veut arroser. Si, par exemple, on veut humecter les 
flanes d'une colline le long de laquelle coule un ruisseau, 
on détourneceini-là de son lit, et on le fait couler dans un 
canal horizontal, qui serpente sur le flanc de la colline. 
Pour que ce moyen soit praticable, il est nécessaire que 
le ruisseau ait beaucoup de pente. Dans les pa)s de monta- 
gne% on forme dans des creux, que l'on ceint en partie de 
digues, des ríservoirs, dans lesquels se rendent les eaux 
qui tombent sur les hauteurs environnantes; et lorsque 
les temps de sécheresse sont arrivés, on lache et l'on dirige 
sur les prairies, etc., les eaux de ces réservoirs. Quand on 
n'a pas/t sa disposition des eaux courantes que l'on puisse 
diriger à volonté, on a recours a des moyens mécaniques, 
qui, faisant jouer des seaux, des pompes, etc., éiëvent les 
eaux a la hauteur désirèe. Les plus économiques de ces ma- 
chines sont celles que les eaux elles-mèmes mettent en mou- 
vement. Il y en a de si simples qu'elles se composent d'une 
seule roue, portant une suite de vases h sa circonférence : 
telle est la roue dite chinoise. Si le courant d'eau n'a pas 
assez de force pour faire jouer les machines, le vent peut y 
suppleer avec succès ; mais alors les appareils deviennent 
plus compliqués et plus co0teux; et comme les machines 
à vent chément une partiede l'année, on est obligé de cu- 
muler leurs produits dans un reservoir, si l'on veut avoir 
des eaux disponibles à volonté. Quand les moteurs natu- 
rels manquent, on a recours à la force des animaux : c'est 
ainsi que des jardiniers firent des eaux de leurs puits à l'aide 
d'un manCe qu'un chesal fait tourner; d'autres font 
monter et descendre des seaux au moyen de cordes, de peu- 
lies, ou bien ils font jouer des pompes à force de bras. Les 
Eyptiens, les Chinois, ont des moyens d'arrosement 
fort simples : quelquefois c'est une sorte de poche fixée au 
milieu d'nne corde que deux hommes tiennent par les bonts; 
munis de cet appareil, ils se placent sur le bord du canal 
du réservoir, plongent la poche dans l'eau, et vont la vider 
en faisant un demi-tour dans un réservoir creusé au-dessus 
d'eux. Un système d'irrigation bien entendu est un témoi- 
gnage de l'intelligence des habitants d'un pays, et du 
zële qu'ils apportent à la culture de leurs terres. 
TE.ÈDnE. 
L'eau combinée avec la chaleur est le principe de la vé- 
gétation, et l'indifférence avec laquelle on laisse se perdre 
ce précieux élément dans les pays chauds et sur des sols 
secs et sablonneux est vraiment inconcevable. Chaque goutte 
de pluie renferme un germe de végétation, et chaque cours 
d'eau offre.à tous ses riverains des moyens de fertilisation. 

479 
Il n'est terre si aride et si sèclic que l'on ne puisse fécon- 
der, si l'on a des eaux à sa disposition, soit en les fmsant 
dëriver d'un fleuve ou d'une rivière, comme on en use pour 
le P6 et pour la Durance ; soit en les faisant descendre des 
lacs et des glaciers des hantes montagnes, comme on le 
pratique avec une intelligence remarquable dans les Alpes ; 
soit en creusant des puits que l'on vide par des moyens 
hydrauliques ; soit en recueillant les eaux pluviales dans 
des citernes ou bassins, et en les dirigeant sur les tes'res que 
l'on vent abreuver. Si ces eaux sont froides, on les retient 
dans des réservoirs où elles s'íchaulfent; si elles renfer- 
ment des principes salins ou ferrugineux, on les purifie en 
les faisant filtrer à travers des fascines; si elles charrient 
des sables et des graviers, on retient ces eaux par des bar- 
rages, jusqu'à ce qu'elles aient déposé les parties solides 
qu'elles entralnent avec elles. 
On procède à la distribution des eaux sur les terres par 
la submersion, par l'infiltration ou par l'irrigation. Le pre- 
mier mode convient aux terres armes et brillantes qu'il s'agit 
de rendre arables. Le second est applicable aux récoltes qui 
veulent de la [ralcfieur et non de l'humidité, et une ceinture 
de fossès toujours pleins d'eau remplit cet objet. Le troi- 
sième mn)en, qui convient surtout aux prairies naturelles 
et permanentes, nécessite des frais considèrables de premier 
étahlissement; mais une fois que cette dépense est faite, il 
n'exige plus que de l'attention et quelques frais d'entretien. 
La prensière dépense consiste en un canal de derivation, 
ou un simple fossé de prise d'eau, en grandes rigoles d'in- 
troduction, en fossés de vidange. Pour le service de toutes 
ces eaux et leur distribution, il est nécessaire de construire 
des vannes, des portes, des écluses, des boudes, qui fassent 
monter les eaux assez haut pour abreuver les parties les plus 
élevées de la prairie, si elle n'est pas parfaitement nivelée. 
On doit toujours b.qt,r les ecluses dans de justes propor- 
tions avec le volume et la force des eaux. Les vannes a 
potrelles, inventées en Hollande, ont été introduites en 
Saintonge. EUes consistent en potrelles mobiles, que l'on 
applique dans des coulisses pratiqu.'es dans la culée de la 
berge, qui doit, dans ce cas, tre faite en maçonnerie. 
Comme ces pièces de: bois sont toujours pourvues d'un 
anneau, on les retire à volonté avec de grands crochets, et 
on les place partent où il en est hesoin. 
Pour prévenir l'invasion des eaux qui descendent avec 
impétuosité et ravinent le terrain, on fait des plantations 
d'arbres, que l'on coupe quand ils ont pris de l'accroisse- 
ment, A quelques pieds au-de«sus de terre, et dont on laisse 
sur la place mëme les branchages, qui amortis«ent le cours 
des eaux, tandis que les arbres, par l'entrelaeement «le 
leurs racines, rendent le terrain plus solide et fortifient la 
digue. Il y a une circonstance fort embarrassante ; c'est ceUe 
où il se trouve dans les près, et en dedans de la digue, des 
eaux stagnantes qu'il faudrait vider en dehors, et qu'on ne 
peut fa2re écouler, parce que la digue qui vous preserve des 
eaux extetaeures s'y oppose. Pour remëdier a cet inconve- 
nient, les Hollandais ont iminé de placer dans la maçon- 
nerie de la digue des portes à clapet, qui se ferment na- 
turellement par la force des eaux qui coulent en dehoi's, 
et qui lorsque ces eaux sont basses s'ot,vrent et facilitent 
ainsi la vidange des eaux interieures. L'entretien et le jeu 
mobile de ces clapets, qui s'ouvrent et se ferment pour les 
eaux du dedans et celles du dehors, suivant que les unes et 
les a,atres sont plus ou moins hautes ou basses, exigent nne 
inspection et des soins journaliers. 
L'irrigation produit la destruction des taupes, des han- 
netons, et principalement des bruyères qui s'emparent des 
prairies sèdtes et montueuses. Il y a mieux encore : on dé- 
truit par l'eau courante, sagement ménagée, les inconvénients 
des eaux stagnante«i qui produisent des nymphoes, des 
roseaux, des carex, des iris, etc. Après avoir fauché ces 
mauvaises plantes, si vous faites passer un cours d'eau 
sire, il s'insinue daus leurs tiges durant l'hiver et la glace 
qui dy forme fait éclater leur épiderme et les fait périr. Une 



.180 IRRIGATION -- 
couche d'eau est «ne eèce de se«e chaude, qui pour 
produire un effet lavorable doit avoir trois pouces de Iau- 
teur dans le midi, tandis qu'un pouce suffit h la végétation 
dans le nord de l'Europe. Il faut se préserver des eaux tour- 
beuses, sëléniteuses, ou chargées de parties reinCaies ou 
granitiques, ainsi que des eaux de neige ou de fontaine, 
qui ne sont pas suffisamment arées. Les meitleures eaux 
sont celles qui, après un long cours, ont peru leur crudité, 
et se sont chargées, dans leur traversée, de sédiments d'ar- 
gile, d'humus et de terreau. Il y a alors un grand avantage 
à les |aire séjourner dans les prés et dans les terres ; et 
c'est ce qu'on appele en Angletere u, arler ( voye-. P- 
m). C te Ft.xç.us (de Nantes). 
L'origine des irrigations remonte aux temps les plus recules. 
L'Orient, la Chine, l'Eg: pte, l'lude, en présentelt des exem- 
ples nombreux. En France mme outrouve les tclnoignages 
les plus conduants en faveur de cette précieose mcthode. 
Dës le siècle dernier, le voyageur Arthur Young constatait 
que dans la vallee de Pin, prës de Perpignan, les terres non 
arrosëes se rendaient 1,252 If. l'hectare, taudis que celles 
qui étaient irriguées alaient 2,086 ff. A Campan elles se 
endaicnt le double. Dans les environs d'Orange, 51. de 
Ga.parin estime que sur 258 hectares irrigues incompiéte- 
ment, et qui rapportent neanmoins 124 |r. |'hectare, on pour- 
rait amener ce produit / 250 ff. Il y a mème des terres 
d'un prix de ferme de 136 ff. qui se louent 23 ff. quand 
elles sont arrosees. Lors de la presentation aux chambres 
de la loi sur les irrigations, le ministre disait que des terres 
couvertes de galets sYtaient vendues 4,000 ff. l'hectare 
étant arro.,es par la Grau. Dans les ¥osges, des terres irri- 
guées ont acquis .5,000 ff. de valeur. A Autun, après six ans, 
certaines telres ont monte de 900 ff./ 5,000 ff. A Vaison et 
à ilalaucène, des [riches se sont elevoees de 500 à 5,000 ff., et 
d'autres mauvaises terre% primitiement sans a|eur, ont 
été vendues de 12/t 1,00 ff. |'hectare. A Cavaillon, l'eau 
de la Dt]rance a en certains lieux decuplé la valeur du sol : 
des garrigues qui valaient ì peine 500 ff. l'hectare eu valent 
5,000aujourd'hui. C'est par miiliers qu'on pourrait citer 
de pareiis faits. II y a des exempies de récoltes triplées, 
quadruph'es et mème dcuph.es. On a été jusqu'h constater 
qu'/ Sorge des landes avaient centuplé de II'iX. 
Ou ne doit donc pas s'étonner de voir les sociétés et les 
comices agricoles recommander les irrigations et les encou- 
rager par des exemlde, par des publications et par des 
rroempenses. Il faut d'abor a.pelerPttention sur l'effet 
des matiëres fertilisantes que charrient les eaux, souvent 
dans desproportions telles que les terrains qui les reçoivent 
en dép6t en sont modiliés ; car le limonage non<eulement 
augmente la couche végétale du sol; mais il contribue 
encore/ l'amender, à rendre utiles les parties testCs neutres 
jusque alors thute de alComposants convenables. Quand 
on le peut, c'est l'époque des pluies abondantes qu'il faut 
prëfcrer, parce que |es eaux sont alors plus char'gées. L'au- 
tomne, lepriutem ps et mme l'hiver, on peut avavtageusement 
irrigueren se guidant d'après les circonstances. Mais dans 
t'été i| faut éiter surtout les inondations, qui retardent la 
'gétation et envasent les fourrages. C'est dans ce cas que 
les canaux de dérivation sont utilement emplo}'és. 
Au printemps et à l'automne, des masses d'eau charges 
d'engrais s'écbappant des villages ou des champs récemment 
cultiv.és, se perdent pom'lant dans des fossés, au détriment 
de la santoe publique, souvent sans que personne songe à 
s'en emparer au prolit de l'agricultu[e; Pemp|oi de ces eaux 
ne serait cependant, dans la plupart, des cas, ni difficile ni 
dispendieux. Un simple canal de dérivation avec quelques 
pehtes rigoles creusëe. dans les prés suffiraient ordinaire- 
ment pour , amener l'engrais, qui assurerait une récolte 
abondanteet é3argnerait le fimier. Une ressource non moins 
précieuse serait encore le fontaines et les ruisseanx, dont 
les eaux, au lieu de fécunder les terrains qu'elles frayer- 
seul, les dterioreat en le rendant marécag«'.ux. Afin d'uti- 
liser ces eaux, en {;en,rai d'un faible volume, on n'aurait 

IRRITAB[L[TI 
qu' les retenir et à les rassembler. Les réservoirs doiven[ 
Atre parfaitement imperméables, et le fond doit Atre an moins 
de niveau avec le sol de la prairie arrosée. Il est plus sage 
d'y accumuler une quantité d'eau suffisante pour arroser 
en une fois la prairie, sans quoi l'eau se perdrait. 
Qu'on se procure l'eau par des barrages ou par l'utilisa- 
tion des crues, ou par tout autre procédé, il faut é-iter 
le ravinage et les érosions que causent des pentes trop 
rapides. On y parvient en abaissant en minces talus le 
sol gazonné qui est au dessous du niveau moyen des eanx. 
Quand l'irrigation a lieu par infiltration, il faut s'attacher 
surtout à ne pas laisser sejourner les eaux. Le drainage 
vient ici, en certail»s cas, offrir uneprécieuse ressource. Dans 
les Vosges, les surfaces planes sont aussi bien irri,mlées que 
les autres. On fait alors arriver Peau par des ahreuvoirs creu- 
sés sur la crête, de planches bombé.es, de quatre mètres de 
largeur environ. De 15 elle se déverse à d,'oite et  gauche, et 
s'ëchappe par des égouttoirs formés au fond de l'entre-deux 
de celles.ci. Cette méthode a étë récemment mise en pra- 
tique dans les landes de Bordeaux,/ la satislaction des pro- 
priëtaires. Dans le dëpartement de l'Yunne, pour arroser 
les prairies, on fait u.î'age de siphon qui s'amorcent d'eux- 
mmes au moi'en d'un vase dans lequel plonge la branche 
extérieure et que le trop-plein du reselvoir remplit. 
Dans le but d'ëtendre la pratique des irrigations, le législa- 
teur a fait sortir cette mati/re du droit commun. Aux termes 
des lois des 29 avril t845 et 15 juillet 1.7, tout propriétaire 
qui voudra se servir pour l'irrigation de ses propriétés des 
eaux dont il a le droit de disposer, peut en obtenir le pas- 
sage sur les fonds intermédiaires, à charge d'indemnité. 
Il peut également, aux mêmes conditions, obtenir la faculté 
d'appuyer sur la propriété du riverain opposé les ouvrages 
d'art nécessaires h sa prise d'eau, mais le riverain peut tou- 
jours demander l'u«age commun du barrage en contrihuant 
pour moitié aux frais d'établissement et d'entretien. Les 
proprietaires des forais inf6rieurs sont remis de recevoir les 
eaux s'écoulant des terrains ainsi arrosés, sauf indemnité 
également. La mëme faculté de passage sur les fonds in- 
termédiaires peut ètre accordée au propriétaire d'un terrain 
submergë, à l'effet de procurer aux eaux nuisibles leur écou- 
lement. Sont exemptés de ces servitudes les maisons, cours, 
jardins, parcs et enclos attenant aux habitations. 
L. LOÇVET. 
IRI:tlTABILITÉ  aptitude à ëtre irrité ou / réagir. 
Telle est la signification la plus genrale de ce mot; mais 
il a reçu en physiologie une acception plus précise, sur- 
tout de la part de H al I e r, et depuis cet homme celèbre, 
qui a fait de i'irritabilit le sujet d'un de ses grands travaux. 
L'irrilabilit, dans le sens pllsiob»gique, t cette pro- 
priêté qu'a la fibre charnue de se raccourcir en oscillant et 
se fronçant à l'occasion de certaines excitations, soit mé- 
diates, soit immédiates, mëcauiques, chimiques ou galva- 
niques. Haller pensait, lui et ses partisans, que l'irritahilité 
est complëtelnent indépendante des nerfs. Pour le prouver, 
ils arrachaient le cœur de la poitrine d'un animal, ou bien 
ils isolaient un de ses membres, un tronçon de ses cbairs; 
or, comme après cette complète sëparation ils vo'aient ces 
parties isolee continuer de se contracter, de palpiter au 
moindre attouchement, et cela pendant une ou plusieurs 
heures, ils en infëraient que les muscles étaient irritables 
sans la participation des nerfs. Il est curieux de voir les 
vives convulsions quexcite soudain dans une jambe 
d'horome qui vient d'ètre amputée un bistouri enfoncé dans 
les clairs de ce membre : c'est un fait d'irritabilité qui 
donne à penser et fait frémir. On a objecté à Haller quecette 
irritabilité, qu'il croit etrangìre aux nerfs, dépend en réa- 
litWdes |tiers nerveux qui se dispersent çà et là dans les 
muscles. C'est un reste de l'action nerveuse topique et 
tente dans cloaque fibre, et qui ne se divulgue qu'au con- 
tact irritant d'un corps extérieur ou sous Iïmpldsioa dugal- 
vanisme. Quan,I on c;è.ve et qu'on test.que (extirpe) le 
nerf moteur qui  distrihue dans de:; muscles, ces rouages 



IRRITABILITÉ  IRVING 
perdent aussitft leur mouvement arbitraire ; ils devien- 
rient sourd à la volonté, mais ils restent irritables A l'ac- 
tion du galvanisme durant quatre jours, iarnais au delà. 
Ils restent irritables aux autres provocations extérieures 
pendant trois ou quatre mois, et peut-erre davantage. Un 
jeune anatomiste a fait sous ce rapport des expéricnces 
d'un grand intérèt. Il est d'autres actes d'irritabilité muscu- 
laite qui s'accomplissent sur la provocation de douleurs et 
sympathies physiques, et mëme de sentiments moraux. 
C'est ainsi que la peur et diverses impressions murales pro. 
roquent l'irritabilité des intestins; le chatouillement de nez, 
l'irritabilité du diaphragme ; l'ennui, celle des muscles du 
cou ; l'attouchement de la luette, celle de l'estomac; le 
froid des pieds, les cantharides et la gravelle, l'irritabilité 
de la vessie. Un grand nombre d'émotions murales abou- 
tissent ainsi à l'irritabilité des entrailles, et donnent lieu 
d'innombrables seusatious. D r Isidore BooRnos. 
IRRITANTE (Clause), du latin irritans, qui annule, 
qui rend inutile. Voçe. 
IILPITANTS. La signification de ce mot, usité dans le 
langage médical comme adjectif ou comme substantif, 
manque d'une précision exacte : ceux qui assimilent i' if - 
ri tation à l'exc itati on considèrent les irritants comme 
des e x c i t a n t s ; d'autres n'accordent cette dénomination 
qu'aux causes qui exagèrent l'exultation normale, qui est 
inh,'rente aux tissus, et une condition élërnentaire de la 
• ie. C'est, il nous semble, à cette dernière limite qu'on de- 
vrait borner l'acception du mot irritant, afin d'éviter 
une confusion très-nuisible à l'intellience des choses. On 
ne saurait tre trop réservé dans l'emploi des irritants, dont 
la liste est aussi nombreuse que variée, parce que toute 
sur-exultation, au physique comme au moral, a desincou- 
vénients plus ou moins g,'aves. Les aUections murales, qu'on 
appelle [rritantes, altèrent nos tissus en dépravaut l'trier- 
ration, et finissent par ìtre corrosives ainsi que des poi- 
sons rnineraux : il faut doue, autant que possible, contenir 
l'exultation crébrale dans des degrés modérés. L'usage des 
excitauts physiques doit ëtre également pondéré, afin qu'ils 
ne deviennent pas irritants : il fat,t mème s'en abstenir 
quand les organes ne sont pas aptes à recevoir l'exultation 
normale. Ainsi, la privation des aliments est nécessaire 
dans la plupart des maladies o0 l'estomac est intéressé; il 
faut se soustraire à l'action de la lumière quand les yeux 
sont iatignés ou enflammés ; il faut renoncer au tabac si la 
membrane pituitaire est affeclée, etc. Toutefois, tes ivri- 
tants sont nécessaires dans des cas, et plusieurs d'entre eux 
composent une grande partie de l'arsenal pl,armaceutique. 
D r CflABBONIEn.. 
II[kITATIO] (en latin irritatin ), « Action de ce qui 
irrite les membrane.s, les organes, les nerfs, etc., ou 
l'état qui résulte de cette action, » dit i'Acadérnie. Mais 
qu'est- ce qu'irriter . Il se dit en médécine, suivant le 
lëme corps savant, « de ce qui détermine de la douleur, 
de la chaleur et de la tension dans un organe, dans un tissu 
quelconque. » On voit par cette définition me que de l'r- 
ritation i I' i nfl a m n a t i o n la nuance est très-dëlicate. 
La brfdure, dans ses divers degrés, peut ètre peCentC, 
suivant le docteur Ratier, comme donnant une juste idée 
de l'irritation. Quoi qu'il en soit, le mot irritation a pris 
une importance particulière sous l'influence de B r o u s s ai s, 
qui en a fait la base d'une tfiéorie médicale qui a gardé son 
nom. Suivant ce médecin, l'irritationconsiste, comme l'ex - 
c i t a t i o n de J. B r o w n, dans l'augmentation de l'action or- 
ganique des tissus; elle nait, se développe, s'asseoir, se trans- 
met, dcrolt et se dissipe en se conformant aux lois qui 
président au développement régulier de l'action organique. 
Elle est toujours primitivement locale, et ne peut jamais 
exister à la fois et au naìme degré dans roules les pro'lies du 
corps. L'irritation trouble, dërange, affaiblit la fonction du 
tissu qu'elle occupe, et peut oilrir divers degrés d'iuflau- 
naatiou, scion la puissance des causes et la faculté irritable 
des tissus. Ordinairement elle est conti»ue dans a qaxche 
DIS'e. DE LA CO,iVEnSo -- T. XI. 

quelquefois elle affecte une forme inlerrnitlente. Enfin, ell 
est susceptible de six modilications principales, comprenant 
la totalité des maladies : t ° l'irritation inflanrnatoire ou 
inflammation, où le sang est appelé dans les tissus plus 
abondamment que les autres fluides ; 2 ° la sublnJlanra- 
tion, ou appel des fluides blancs; 3 ° l'h$morrhagie, 
ou issue du sang  la surface ou à l'laiCieur des tissus 
° la n é v r os e, ou irritation nerveuse sans appel de fl uides 
5 ° l'irritation nutritive, dans laquelle l'assimilation est 
exagérée; 6 ° enfin, l'irritation s$crtoire, qui s'annonce pav 
une augmentation notable des sécrétions. En ajoutant le 
irritatious sympathiques surgissaut de causes éloiguées, on 
a l'ensemble du système qui prétend expliquer par l'irrita- 
tion tous les phénomèues de l'état morbide. « On sail, dit 
encore le docteur Ratier, quelles fausses conséqueuces on 
a tirCs pour la pratique de cette théorie séduisante par sa 
sirnplicité, et de quelle manière, sans doute contre l'inten- 
tion de l'auteur, on était arrivé à une rnédecine de sangsues 
et d'eau claire, qui regardait comme un irritant funeste un 
simple bouillon de poulet. » On dut bien site renoncer 
cette médecine expéditive, tant les faits apportaient d'ex- 
ceptions aux pré[endues règles générales. 
IIBITATION (Morale). Ou comprend sous ce nom 
une sorte d'exaspération, d'agitation vive mais fugace, une 
effervescence de l'esprit, violenle mais sans prolondeur. 
L'irritabillt$ s'entend de la disposi[iou, de la facilité 
s'abandonner à l'irritation. Le moindre mot enflamme 
l'homme irritable, la moindre opposition l'Chauffe. Il s'em- 
porte d'un rien, mais en gënëral il revient vite. I.es poëtes. 
ont de tout [emps passé pour ètre facilement irritables : 
Genus irritbile vatum, dit Horace. J.-J. Rousseau res[era 
le type de l'homme irritable. Ce défaut le rendit d'ailleur» 
bien malheureux. Les personnes irritables sont en effet fort 
à plaindre. Par bonheur, comme on I'a souvent remarqué 
les gens prompts  s'irriter s'apaisent avec autant de promp- 
titude. Ils savent mme souvent reconnattre leurs torts. 
et se les faire pard,mner. C'est la ce qui les distingue des 
gens irascibles. L'hornrno irascible concentre sa colère, 
la dissimule au besoin, lui donne un objet déterminé, et 
sentiment est susceptible de durée. L'irascibffit, comme le 
dit M. Lafaye, tient davantage au caractère, l'irritabilit 
au temps.rament. L. LOUVE'e. 
IBIUP'I'i«.NI (du latin irruptio), entrëe soudaine 
imprévue des ennemis dans un pays (voye-- I.'consorv ). Par 
extension, ce mot s'emploie en parlant du d é b o r d e m e n t 
«le l'euvahissement de la mer, d'un lac, d'un fleuve sur les- 
terres. 
IITISCHç grande rivière d'Asie, qai prend sa source 
en Chine, dans la province de Tarbagataï, dans le gouver- 
nement du Tchiau-pe-ios, au pied du grand Altaï, et qui 
par la longueur de son cours (290 myriarnètres), par l'im- 
mense volume de ses eau_ et par sa largeur, devrait ètre 
considéré comme la branche principale de l'Obi, au lieu de- 
n'en tre que l'affluent le plus important. L'Irtisch passe par 
Boukhtarminkaïa, Sérnipotalinsk, Ornsk, Tara et Tobolsk, 
reçoit à sa gauche les eaux de l'Ichim et du Tobol, se jette 
dans l'Obi, près de Sarnoravo, et appartient au grand s- 
tème de communication fluviatile qui relie Saint-Pétersbourg 
 l'osCn Pacifique. De nombreux rapidea en rendent la 
naviga.tion des plus difticiles. 
IIUSç mendiant de l'lle d'Ithaque que l'Odgsse a im- 
mortalisé, dont le véritable nom était Arnoeus, et que les 
arnant de Péuélope employaient pour diverses commissions. 
Quand, h son retour, Ulysse, déguisé lui-mème en mendiant, 
s'approcha de sa demeure pour y surprendre les importuns, 
Irus cfiercha à i'ernpìcher d'entr, et le provoqua m{rne 
en combat singulier. Grand, mais faible, Irtm fut tué par 
Ulysse : sa pauvreté était déjà devenue proverbiale chez le 
anciens, en opposition surtout à la richesse de C r é s u s,_ 
et on dit encore aujourd'hui paurre comme 
I'IXG { E»ot, fondateur de la secte relilllie.llïe 
lringiens, né en 1792:, à Annan, dans le comt 



Dumfries en :F_osse, devint, en /si0, professeur de 
mathèmatiques à Haddinglon, en 1812 directeur dis gmna. 
de Kirkaldy, plus tard vicaire du pasteur Chalmers à 
Glasgow, et depuis 1822 prédicateur de i'Eglise nationale 
écossaise de Londres, o6 ses serinons curent pour but de 
ramener l'Ëglis¢ à l'organisation primitive qu'elle possëdait 
au temps des apétres. Ayant ensuite commencé, / partir 
de 1827, à exposer sur la nature humaine du Christ des 
idees contraires aux croyances reçues, et étant allé, non- 
seulement dans ses pratiques de dévotions domestiques, 
mais encore, depuis t831, dans l'Église mme, jusqu'à 
se livrer à des jongleries mystiques et à des rêeries mil- 
Iénaires, le Presbytère se vit forcé d'intervenir, et enlin, 
tous les avertissements étant restés sans résultat, de le des- 
tituer en 1832. Édouard Irving n'en continua pas moins/ 
prêcher les mèmes doctrines aux adhéren qui se grou- 
paient autour de hi; il fut en conséquenoe exclu du sacer- 
doce par le synode général d'Eosse tenu en 1833. Il mourut 
à Glasgow, le 7 décembre IS?A. C'était un homme d'une 
piCWsincère, du caractère le pins bienveillant et doué 
d'éminentes facultés, mais que le fanatisme et l'orgueil re- 
ligieux égarèrent. Ses serinons ont para sous le titre de 
Oracles of God (Londres, 1822), et sous celui de Ser- 
ruons, lectures and speeches ( 1828 ). 
La constitution rdigieus¢ de l'lrvinyianisme est une 
théocratie pure, se rapprochant beaucoup du catbolicisme 
par la soumission absolue des laiques à l'autorite spirituelle. 
L'organe de cette se£te est The mornin9 Watch, journal 
paraissant à Londres. 
IP, VING (WAsnLç), ingénieux crivain araCi- 
tain, est ne le 3 avril 1783, à New-York. Menacé de phthisie 
dans sa jeunesse, il voyagea pendant deux années pour 
,'établir sa santé, en ltalie, en France, en ltolIande et en 
Angleteare. 11 se fit conuaitre d'abord dans le monde lit- 
térai,'e par ses Letters o./Jonathan Oldstyle, qui parurent 
dans le ffornin 9 Chronicle, iouraal publié Ir son frère. 11 
rédigea ensuite un journal satirique, £e 5almiynndgs, puis 
ri! paraltre sa spirituelle Hstoire de 2Vew- York par Die- 
drich KnicRerbocker. Eu mme temps qu'il se livrait à 
ces travaux, il étudiait le droit; mais il renonça bient6t/ 
i'idée de se faire avocat, et entreprit alors un commerce 
en societé avec son fr/re. La guerre de 1812 étant venue 
suspendre les affaires, Washinon Iring remplit pendant 
quelque temps les fonctions d'aide de camp près du gouver- 
neur de lew-York, l"ompkins. Au rétablissement de la 
paix, il reprit son commerce. Un voyage d'affaires qu'il fut 
obligé d'entreprendre en Angteterre lui fournit l'occasion 
de recueillir des observations sur les mœurs anglaises, qu'il 
publia plus trd dans son Sketchbook of Geoffi'e9 Crayon 
( 189.), quand il se fut ruiné dans ses opérations commer- 
ciales. Ensuite il s'en alla voyager de nouveau en Europe, et 
écrivit/ Paris son Eracebridye-Hall, ou les humoristes 
(1823). 11 passa tes année. 1822 et tS en Allemagne, et 
l'ann 1824 en Angleterre, ou il publia ses ontes d'un Voya- 
9eut. De là il se rendit dans le midi de la France, d'où il 
gagna l'Espagne, où un séjour de quatre années lui permit 
ci'acquérir une connaissance parfaite de ce pays et de con- 
sulter dans la bibliothèque de l'Escuriai tous les ouvrages 
et les manuscrits aant rapport à la découverte de l'Amé- 
rique. Le premier fruit dt ces patientes éludes fut son 
litoire dela Vie et des Voyayes de Chritophe Colomb 
( 1888-1830 ), qu'il compléla dans ses Voyayes et Dcouvertes 
des Compaynon de Colomb {183t). Les chroniques es- 
pagnoIes et les mannscrits d'Antonio Agapida tuf founfireat 
le sujet de ses Chroni9ues de la Conquéte de Grenade 
( 12 ). A son retour d'lpagne, il /ut nommé secrétaire 
de la légatiou américaine à Londres, où, plein d'enthousiasme 
pour la munificence et les moem mauresques, il écrivit 
son Alhambra (1832). En t832 il revint aux Èats-Unis, 
dont il parcourut alors toute la partie située à t'ouest du 
Mgs.«igsipi; tourn6e au retour de lqueile il habita Wa- 
ihington jusqu'à ce qu'en 18il il cor 61é nommé luinistre 

IBVIiNG  IRVINGIENS 
des liats-Unis  Madrid. Dans cet intervalle il avait fait 
raltre des Méayes, contenant un Vo!laye aux Prairies 
Abbotsford and «Yewstead Abbey, Leyends of the Con9uet 
of 8pain, Adventures of captain onneville {3 vol.; 
tg7 ) ; puis son Sketch-flook ( 139 ). A 51adrid, ou il passa 
près de cinq années, il continua ses recherches historiques 
dont il publia le résultat sous le titre de Hitor!/of 
iomet and his successors ( Londres, 150 ), quand il eut 
été rappelé par !e président POlko Cet ouvrage brille moins 
par la profondeur que par l'élegance du style. On a aussi 
de Wasthington Irving : Oliver Goldsmith, a bioyraph  
{ Londres, 1849). Il ré.gide aujourd'hui dans son petit do- 
maine de Woolfesty-P, ack, prés de New-York.  Demeuré 
célibataire, il a adopté les enfants laissés par un frère alaé. 
[Washington Irving, demi .prosateur et demi-poêle, 
demi-romancier et demi-historien, est tout à {ait un de 
ces é¢rivains sans originalité, mais non pas sans esprit, 
que vous rencontrez à coup ser parmi toue nation qui 
est venue tard en ce monde, et qui a commencé tout d'a- 
bord par tre une nation toute civilisée. A des nations 
ainsi faites, il n'est gu/re besoin de poésie : elles mépri- 
sent l'idéal comme chose inutile et vaine; le positif est 
tout pour elles, et elles donneraient sans contredit toutes 
les œuvres d'Homëre pour une mélhode d'arithmétique 
simplifiée et abrégee. Quand par hasard les peuples mar- 
chands se mêlent de faire de la littérature, c'est plutét par 
vanité que par besoin. Leur littérature n'a rien de neuf, 
rien d'inspiré, rien d'imprévu, ceux qui la fabriquent auraieut 
tout aussi bien construit des ponts ou des chemins de fer. 
Telle est la littérature américaine. Comme tous les arts 
mécaniques de i'Angleterre, leur mère-patrie la poésie 
des Américains vient directement de l'Angleterre ; ce n'est 
pas un produit du sol, c'est une exportation, qui a le grand 
avantage de ne pas payer de droits. C o o pe r, l'Américain, 
est à coup star un très-spirituel romancier, mais un roman- 
cier de I'¢w, ole de sir Walter Scott, avec autant de talent, 
il est vrai, et même avec autant d'originalité que peut 
en posqder un homme qui n'a pas créé sa maniëre et sa 
forme. Iring, lui, imite tout simplement tout le monde 
on voit quïl a voulu le d'abord Américain, comme 
Couper, mais il i'a été moins sincèrement, c'est-à-dire avec 
moins d'enthousiasme. Dans sou esprit et dans sou style, 
Voltaire nuit beaucoup/ Walter Scott : on voit à chaque 
instant qu'Irving a beaucoup lu Candide et Ivant, ces 
chefs-d'oeuvre de la moquerie et de la naiveté, ce qdi lait, 
à vrai dire, un singulier mélange quand on s'avise de les 
accoupler l'un/ l'autre. 
Irving est sans contredit un homme d'esprit, mais un 
homme d'esprit qui copie les uns et les autres. Il ne sait 
encore à quoi se décider, et, après avoir déjà beaucoup 
écrit, il est/ chercher entre l'ironie et l'enthousiasme. 
Comme tons les esprits qui ne sont pas sors d'eux-reCes, 
celui-là excelle surtout dans les petites choses. Il doit ëtre 
la providence d revues dans son pays, pour nous servir 
d'un expression usitée en ce pays-ci. On a traduit chez 
nous presque tous ses ouvrages; ce qui, jusqu'à un certain 
peint, ne prouve pas grand chose en laveur des gloire-" 
exotiques. On a lu avec plaisir ses Contes d'un Voyayeur : 
c'est une suite variée, et sans tiens entre eux, de petits ré- 
cits pleins de bonne humeur et de cette facile obsersation 
qu'un homme d'esprit a toujour à sa disposition, tant qu'il 
a du bon vin dans son verre et du bou tabac dans sa pipe. 
Sa Vie de Chr£stophe Colorab, 131eine de recherches, de 
précieuses découvertes et de faits curieux, serait sans con- 
tredit un excellent ouvrages si on n'F rencontrait pas de 
temps à autre, peut-Ce à l'insu de l'auteur, des traces très- 
sisibles et trés-mal-séantes de cet esprit goguenard et voitai- 
rien qui a été si souvent nuisible/ tant d'écrivains êtrangers 
qui ont la rage de vouloir nous donner la pale en français. 
• ules J..] 
iIIGIENS, secte ainsi nommée d'après son fon- 
dateur, Èdouard I r v i n g; subsisle Ioujours, et a mémc lait 



IRVlNGIENS 
dans ces derniers temps bon nombre de prosélytes sur le 
continent, notamment en Bussie. D'après les sept étoiles 
dont il est question dans l'Apocalypse, elle forme sept com- 
munes rëgies par sept présidents, appelés anges. Il existe 
aussi dans son sein des prophtes, des évaagéllstes, des 
ap6tres, des diacres et des anciens; toutes dénominations 
ayant pour but de rappeler les temps apostoliques et l'Eglise 
primitive. Le principal dogme des Irvingiens, c'est que 
le Christ est, comme tons les autres hommes, né dans le 
péché, et n'en a été prservé que par la résistance qu'il 
lui a opposée en vertu de l'Esprit-Saint. Tout autre homme 
peut engager une lutte identique et en sortir pareillement 
victorieux, l'Esprit-Saint lui venant  cet effet en aide. L'Ë- 
glise a conservé dans toute son étendue, comme au temps 
des Ap6tres, le don de prophétiser, de parler toutes les 
langues étrangères et mcme de faire des miracles; et c'est 
à l'impiíté des hommes qu'il faut attribuer la rareté des 
manifestations de sa puissance. 
ISAAC fils d'Abraham et de Sara, naquit l'an 1896 
avant J.-C. Sa mère était alors :tgée de quatre-v in-dix ans et 
son père de cent. Le nom de ce patriarche dérive de tsahak 
(rire). Prédite à ses parents, la naissance d'Isaac vint les 
combler de joie dans leur vieillesse. Fils unique, il devait 
¢tre offert en holocauste sur la monta,me de Moria, l'an 
1871 avant J.-C. :il n'échappa à ce danger que par un mi- 
racle. Cet événement biblique est connu sous le nom de 
Sacrifice d'lsaac. La synagogue le clëbre à la solennité 
du nouvel an : elle invoque les bontés de Dieu pour israel, 
en mémoire du sacrifice volontaire d'Isaac; l'Ëglise voit 
dans ce sacrifice le type de celui du ChrisL Comme son père, 
Isaac se distingna par sa piété et par sa constance dans le 
culte du vrai Dieu, malgré son séjour parmi les païeus; 
mais il ne fit pas, comme Abraham, de rares actions, et 
ne déploya pas une grandeur d':troc égaie à la sienne. Le ca- 
ractère patriarcal se montre en lui plus doux, plus tendre 
que chez son père, plus pur et plus noble que dans son fils 
Jacob. Accoutumé plus que l'auteur de ses jours ì une vie 
tranquille, vers laquelle l'attiraient ses travaux agricoles, 
menant une existence moins nomade que ses ancêtres, in- 
dulgentetpatient dans les contestations, il se montre dans 
son intérieur père tendre, mais faible, assailli de bonne heure 
par la vieillesse et facile à tromper; aussi finit-il par se lais- 
ser prendre ì la ruse de Jacoh au préjudice d'Ësa fi, plus 
vif et plus franc. Le mariage d'lsaac avec B é b e c c a offre 
un tableau charmant de mœurs patriareales, et peut Cre 
considéré comme une idylle bibfique. Isaac mourut à I'ge 
de cent quatre-vingts ans, 1716 avant l'ëre vulgaire. 
S. CA, traducteur de la Bible. 
ISAAC COMNÈNE. Voye'- 
ISAAC L'ANGE. Voye.'. 
ISABEAU ou ISABELLE DE BAVIÈBE, reine de 
France, femme de Cha ri es VI. Elle était fille d'Étienne II, 
duc de Bavière et comte palatin du Bhin, et naquit en 1371. 
Elle n'avait que quatooEe ans lorsque la politique l'unit au 
roi de France, plus gé seulement de trois ans. Sa figure 
était charmante, et toute sa personne pleine d'élégance et 
d'attraits: anssi le jeune prince en devint tout d'abord éper- 
duement amoureux. Leur mariage fut célébré par des fêtes 
magnifiques. Le couple royal fit ensuite son entrée so- 
lennelle dans Paris, au milieu d'un faste inoui. De nombreux 
divertissements suivirent cette cérémonie; et ce fut ì la fa- 
vent de la liberté d'un bal masqué que prit naissance la pas- 
sion coupable de la reine lmur son beau.frère, le duc 
d'Or léans. L'intelligence vacillante du roi laissait un libre 
cours à tous ces désordres, et l'anarchie désolait le pays ì 
cause de la rivalité du duc d'Oriêans et du duc de Bour- 
gogne, Jean sans Peur. 
Lorsque la folie du roi, doyenne impossible h oacher, eut 
nécessité i'établissement d'une rence, on confia ì Isabeau 
la garde de son époux. Elle s'occupa plutôt de venger la 
mort du duc d'Ofléans; mais elle ne put s'entendre avec 
I, connétable d'A r m a g n a c, devenu chef de parti opposé 

-- ISABELLE 483 
aux Bourguignons, Et celui-ci révéla à l'imbcile Charles VI 
la conduite scandaleuse de la reine et ses amours avec un 
gentilhomme du nom de Bois-Bourdon. Le dauphin, fils 
d'Isabelle, qui fut depuis C h a rl e s V I I, se joignit en cette 
occasion aux accusateurs de sa mère, et prit part au supplice 
de son amant. 
Une haine éternelle les sépara dès lors, et cette haine fut 
a«sez forte pour faire oublier à Isabeau le meurtre du duc 
d'Orlëans et pour la rapprocher de son assassin, Jean sans 
Peur. Aussitôt la faction de Bourgogne reprend le dessus, et 
la reine ressaisit le pouvoir. Mais ce triomphe ne fut pas de 
longue durée ; J e a n s an s P e u r, à son tour, est assassiné 
sur le pont de Montereau: Isabeau n'a plus d'autres res- 
sources que de se jeter dans les bras de l'Anglais, qui vient 
d'entrer vainq,eur à Paris. Elle signa alors ce fameux traité 
de Troyes, qui a roué son nom à l'infamie. La couronne de 
France, après la mort de Charles "¢I, était assurée à Henri V 
d'Angleterre, qui épousait sa fille Catherine. Charles Vil 
était ex«lu, comme incapable et iudigne. Après la mort de 
son époux, Isabeau de Bavière, oubliée des Parisiens, mé- 
prisée desAnglais, ne se mèla plus aux affaires de l'Etat. Elle 
mourut à Paris, dans l'h6tel Saint-Paul, le 30 septembre 
1f,35, gée de soixante-quatre ans. On dit que pour épargner 
les frais de es lnnérailles, on envoya son corps à Saint- 
Dents par eau, dans un petit bateau, avec un seul prètre 
et deux batetier pour ramer. 
ISABELLE (Couleur). On désigne sous ce nom une 
couleur brun-clair, de la nuance café au lait. Ce nom lui 
vient, dit-on, de la princesse espagnole Isabelle fille de 
Philippe lI, qui, Iolque son époux, l'archiduc Albert d'Au- 
tri«fie, s'en vint, en 1602, assiéger Ostende, fit vœu de ne 
point changer de chemise tant que cette place ne seraitpas 
prise. Or, le siCe ayant duré trois années jusqu'en 1604), 
sa chemise finit naturellement par ttre de la couleur dont 
il s'agit. 
ISABELLE. L'Espagne compte deux reines de ce nom. 
ISABELLE DE CASTILLE, reine d'Espagne, fille du 
roi Jean H de Castille et Léon, né le 23 avril 1450, et ma- 
riC, depuis 1 ««69, h F e r d i n a n d V le Catlmlique, roi d'A- 
façon, monta sur le tr6ne de Castille en 1474, après la mort 
de son frëre Henri IV, ì l'exclusion de Jeanne, sa sœur 
aihC. Déjà, du vivant de son frëre, elle avait rénsi à ga- 
gner à sa cause les états du royaume, qui ì la mort de 
Henri IV se déclarèrent en grande partie pour elle ; elle 
força les dissidents ì se taire devant les armes deson époux, 
vainqueur ì la bataille de Toro, en 1476. Les royaumes de 
Castille et d'Aragon ayant été ainsi réunis, Ferdinand et 
lbelle s'intitulèrent roi et reine d'Espagne. A la gràce et 
à l'amabilité de son sexe, Isabelle joignait le courage d'un 
héros, l'habileté politique d'un ministre, la pénétration d'un 
lé4lateur et les brillantes qualités d'un conquérant. Elle 
assistait constamment aux délibérations de l'Êtat, et tenait 
expressément ì ce que dans les actes publics son nom 
figuràt à c6té de celui de son époux. Elle regardait comme 
la plus grande œuvre de son règne l'expulsion des Maures 
d'Espagne; et l'appui que trouva Christophe C ol o m b au- 
près du gouvernement espagnol fut en majeure partie son 
ouvrage. Dans toutes ses entreprises, elle était assistée d'un 
habile politique, dn cardinal X i m é n è s. On lui a reproché 
«le la dureté, de l'orgueil, de l'ambition, un esprit déme- 
suré de domination ; mais ces défauts ne contribuèrent pas 
moins au bien du royaume que ses vertus et ses talents. 
Un génie comme le sien était nécessaire pour humilier Far- 
rogance des grands sans les révolter, pour conquérir Gre- 
nade sans attirer en Europe les bordes d'Afrique, et ponr 
déshabituer de leurs vices se sujets, abàtardis par une man- 
valse administration, sans mettre en danger la vie des gens 
de bien. En introduisant à sa cour uncérémonial sévère, elle 
put éloigner de la personne du roi une noblesse nombreuse 
et arrogante, et lui enlever ainsi toute influence pernicieuse 
sur son esprit. Elle mit fro an droit du plus fort, qui u«que alors 
61. 



és4 ISABELLE 
avait èté la loi dominante, en assurant le maintien de la 
paix pulliqae, ainsi qu'en rendant plus expéditive l'adminis- 
tration de la justice. Le pape Alexandre VI confirma aux 
deux époux le titre de majest catholique, dont ils se mon- 
trèrent digues par leur zèle pour l'Éise. Ce lot toutefois 
moins leur zèle pont la religion qne l'intention d'établir un 
ribtmal de persécution politique qui les détermina  intro- 
duire I' i nq ui s i t i o n en Espagne. Les dernières années du 
règne d'Isabelle avaient été attristées par la mort de son fils, 
don Juan, prince des Asturies, et desa f-dle, reine de Portugal. 
Elle mourut g Médina dal Campo, le 26 novembre 1504, 
après avoir exigé de son mari, dont eUe s'ëtait toujours 
montrée fort jalouse, le serment de ne point se remarier. 
ISABILLE II (MAraE-Lools£), reine d'Espagne, née le 
I0 octobre 1830, est fille de Ferdinand Vil et de Ila- 
r i e.C h ri s ri n e, sa quatrième femme. Comme Ferdinand Vil 
v'avait point de fils, et qu'en vertu de l'ordre de succes- 
sion alors établi, la couronne serait revenue " son frère don 
Crlos, il voulut assurer le trbne  l'héritier direct qu'il 
espérait avoir de son quatrième mariage, et abolit la loi dite 
.aliqtte, le 9 mars t830. C'est ainsi que la fille qui lui naquit 
plus tard devint apte  bériter du trône. Prévoyant sa mort 
prochaine, Ferdinand Vil, par on testament, ntmma sa 
femme régente du rolyaume et tutrice de sa fille pendant la 
minorité de celle-ci. Il mourut effectivement le 29 septembre 
"t83, et Marie-Cbristine prit la direction de affaires au nom 
de sa fille, avec le titre de reine-rente. Mais lorsque la 
guerre civile, allumée par don Carlos et ses partisans, eut 
etWétouffée par les armes victorieuses d' E s p a r t e r o, la 
reine-rgente se vit obligée d'abdiquer, le 10 octobre fS-10, 
et de quitter l'Espae; après quoi, Espartero fut clu ré- 
gent, et Arvuelles déclaré tuteur de la reine. Espartero 
n'était pourtant pas non plus destiné  voir arriver en 
pzwe le jour de la majorite de la jeune reine (19 octobre 1844), 
ni . remettre entre ses mains le pouvoir qui ini avait ét 
confié par le peuple. II fut renversé par une coalition contre 
ature formée entre le parti républicain ou progressiste et 
-celui de Chrisiine, et contraint  prendre la fuite. Le nou- 
veau gouvernement provisoire 6la tout d'abord la D,telle de 
la jeune reine à Arguelles pour la donner . Cas{afios, duc 
• de Baylen; mais une résolution des nouvelles cortès declara 
Isabelle majeure, dès le 8 novembre 18-$3. La question du 
mariage de celle princesse devint une question euro- 
péenne, et amena une sérieuse mésintelligence entre l'An- 
gleterre et la France, quand, à l'aide d'obscures intrigues 
]e palais, Louis-Pl, ilippe l'eut fait décider dans son interC. 
Le l0 octobre tSt6 la jeune reine ëpousa son cousin Fran- 
çois-d'Assise-Marie-Ferdinand, fils de l'infant François-de- 
Paule; et en même temps fut conclu le mariage de sa sœur, 
t'infante Marie-Ferdinande-Louise, a'ec le duc de Mont- 
-lensier, l'un des fils du roi des Français. 
Dès qu'elle eut pris en mains les rénes de I'Èat, Isabelle 
-s'efforça de se concilier aussi bien les progressistes que les 
-carfistes, et elle réussit effectivement h effacer ainsi quelques- 
unes des traces profondes qu'ont laissées en E s pa gn e les 
• longues gerres civi[es auxquelles ce pays a té en proie 
lendant la plus grande partie de ce siècle. D'un caractère 
bon et bienveillant, mais s'abaudonnant trop facilement 
à l'influence de son entourage immédiat, et aussi plus adon- 
• ée aux plaisirs que la gravité de son r01e ne le permettrait, 
cette princesse n'a pas laissé que d'acquérir en Espagae une 
grande popularité personnelle, en raison su.rtout de la ré. 
sistance qte pendant Ionemps elle opposa aux projets de 
-,coups d'Etat et de contre-revolution incessamment formés par 
les hommes de la camarilla. Son mariage n'avait pas été 
.pour elle la source de la félicité qu'elle avait p u rver ; et 
lmir suite des fréquents nuage_s qui étaient venus troubler la 
,vie infime des deux jeunes époux, on croyait assez géné- 
'alement que l'union d'Isabelle Il et de son cousin François- 
• PAssise resterait stérile. La naissance d'une fille, Marie- 
lsabelle-Françoise, née le 20 décembre 1851, aujourd'hui 
.trtncesse des Asturies, dmentit, ces prévisions. Le 2 dé- 

 ISABEY 
cambre i52, au moment où la reine se disposait à se rendre 
avec sa fille  l'église d'Atoedaa, un prètre fanatique, Martin 
Marino, tenta de l'assassiner, mais ne réussit qu' la bles- 
ser légèrement. Cet attentat, habilement exploité par le 
parti de la réaction, auquel les événements survenus quel- 
que temps auparavant en France avaient donné une force 
nouvelle, servit de prétexte au cabinet de Madrid pour dis- 
soudre l'assembléedes cortès et museler la presse. A l'article 
Est,c.re de ce dictionnaire on trouve le rícit des laits qui 
s'en suivirent. Ce récit s'artC au triomphe complet de la 
réaction et de la contre-révolution, au moment or) il n'y a 
plus en Espagne de gouvernement constitutionnel véritable. 
Mais le 28 juin 1854 éclatait au Campo de Gicardias, près 
de Madrid, une insurrection militaire ayant  sa tte les 
généraux O'Donnell et Domingo Dulce; insurrection restée 
dëfinitivement victorieuse, et par suite de laquelle à un 
gouvernement contre-révolutionnaire a succédë en Espagne 
nn gouvernement franchement révolutionnaire. 11 est encore 
au pouvoir au moment où nous écrivons, et tout se réunit 
pour faire caindre que les eataltados ne réussissent quelque 
jour  briser le trbne et à proclamer la république dans la 
Pénin»ule. 
ISABELLE L.. CATHOLIQUE (Ordre d'J, fondé 
en 1815 par Yerdinand VII, qui le plaça sous l'invoca- 
tion de sainte Isabelle, reine de Portugal, morte en 1036, 
était destiné, dans l'origine, h récompenser les services que 
rendraient h leur roi les Espagnols chargés d'opérer le re- 
tour des colonies américaines sous les lois de la mère-patrie. 
Il est un de ceux qui coulèrent la noblesse prsonnelle. Les 
insignes consistent en une croix d'or  huit pointes, émaillee 
de rouge et anglée de raons d'or. Sur la croix des simples 
chevaliers et inscrite, avec le chiffre royal, cette légende : 
Pur lsabella catolica. La croix des commandeurs porte sur 
un champ de couleur un double globe émaillé de roue et 
de:tx tours sur le rivage, avec les légendes : Plus ultra et 
A la lealtad acrisolada. Le ruban est moiré blanc avec 
liséré orang. 
IS.kBEY (JE.t.x-Bx»[sg), naquit à Nancy, le 11 avril 
1767. Ses premiers martres furent Girardet Claudot et Du- 
mont, dans l'atelier duquel il entra en 1786, à son arrivée 
à Paris. Deux ans après il devenait élève de David. Ses 
Cudes auraient pu le conduire  peindre l'histoire et a conti- 
nuer la peinture  l'huile; mais il préfëra suivre une route 
dans laquelle des concurrents moins nombreux lui laissaient 
la facilité d'arriver au premier rang. M. Isabey débuta d'a- 
bord par quelques portraits au crayon noir estompé, dans 
une manière particulière, fine et douce, à laqueUe cepen- 
dant il sut donner de l'effet, et qui porta son nom. Un de 
ses premiers ouvrages fut le portrait de Bonaparte en pied, 
dans le jardin de la Malmaison, lequel a été gravë par 
Lingé, et eut alors un grand succés. Bienttt il voulut faire 
voir que, tout en faisant des portraits en miniature, il pour- 
rait se livrer à des grandes compositions, et il exposa au 
public, en 1802, la revue du premier consul dans la cour 
des Tuileries. Ce dernier, d'une très-grande dimension, con- 
tenait les portraits d'un grand nombre de personnes qui ac- 
compagnaient le premier consul : il fut très-goOté du public. 
Il fit ensuite une Visite de l'empereur  la manufacture 
d'Oberkampf, à Jouy. Il lut aussi chargé de diriger l'exCa- 
tion de l'ouvrage relatif au sacre de lapoléon : il dessina 
lui-même un grand nombre de figures, et ht alors nommé 
officier de la Légion d'Honneur. En 1817 il donna une autre 
grande composition, également dessinée au crason noir es- 
tompé : c'est une des courCances du congrès de Vienne. Il 
exposa au mme salon une aquarelle d'une grande dimen- 
sion, véritable chef-d'oeuvre, représentant une vue de l'es- 
calier du Musée, avec une foule de curieux, parmi lesquels 
on reconnaissait plusieurs artistes ou amateurs. ['ous ne 
parlerons pas des beaux et nombreux portrait- en miniature 
d'lsabey ; mais nous rappellerons qu'il a peint une table en 
porcelaine où se trouvent les portraits de Napoléon et des 
plus illustres géneraux français. Cette table, connue sous 



ISABEY -- 
le nom de Table de Mardchaux, fut donnée par l'empe- 
reur a la ville de Paris. En 1816 un particulier la reçut en 
payement c'une créance de la ville, et en 1835 elle fut 
vendue à l'encan. Isabey fit aussi un voyage à Pétersbourg, 
et il y peignit en miniature les portraits de remperenr et de 
Pimpératrice de Russie, ainsi que de beaucoup d'autres 
personnages de cette cour. 11 est mort à Paris, le 18 avril 
1855. Dccns alné. 
ISABEY (EçC/E-Lovm-GAnmEL), né à Paris, le 22 juillet 
180, est le fils de l'habile miniaturiste dont il a été ques- 
tion dans l'article qui précède; mais, peu soucieux de 
lutter avec la gloire de son père, c'est dans un anlre genre 
de peinlure qu'il a su se rendre célèbre. Dès 1524 il en- 
voyait au salon un cadre de marines et de paysages, et 
lorsqu'en 1827 il exposa la Plage d'Hon]leur et l'Ouragan 
devant Dieppe, on salua en lui un rival redoutable pour 
M. G u d in. C'était chercher une analogie ddmérique entre 
deux artistes qui ne devaient avoir de commun que lesuceès. 
M. Eugène Isabey a montré une grande fécondité : parmi 
les ouvrages qu'on a de lui, il faut surtout citer le Port 
de Dukerque (1831); les tïeilles Barques (1836); le 
Combat du Texel (1839), tableau plein de sentiment et de 
science, qui est aujourd'hui placé au musée de Versailles; la 
tue de Boulogne ( 1843 : musée de çoulouse), l'Alchimiste 
(1845), une Cdrmonie dans l'oeglise de Dclft ( 187 ), et 
l'Embarquemen t de luyter (t 851 : musée du Luxembourg). 
M. Isabey a peint aussi Louis-Philippe recevan¢ la leine 
tïctoria au Trport (184), et le Dpart de la Reine d'An- 
91eterre. Il s'est tiré en homme adroit des difficultés que 
présentaient ces sujets officielset médiocrement pittoresques. 
M. Eug. Isabey, dont les arts peuvent encore beacoup at- 
tendre, a déjà eu deux manières. Dans la première période 
de sa carrière, son coloris était terne, rembruni, monolone, 
et d'une vérité très-imparfaite ; depuis 180  peu près, son 
talent est entré dans une phase nouvelle. C'est à cette se- 
conde manière, encore moins vraie peut-Cre que la pre- 
mière, mais beaucoup plus souriante et variée, qu'appar- 
tiennent les derniers tableaux que nous venons de citer, et 
notamment la Crmonie dans l'glise de Delft et le Ma- 
ria9 e de Henri IV, charmant specimen de cette piquante 
méthode. La palette aujourd'hui n'a plus pour M. Isabey de 
tons trop vifs, de nuances trop chatoyantes; sa touche est 
spirituelle et dégagée. C'est là sans doute un art factice et 
menteur, mais c'est un art fait pour séduire. 
ISAGOGIE (du grec stç, dans, et ,-f, action de con- 
duire ), introduction, interprétation des crits Iogiques d'A- 
ristote, et principalement de l'Organoa et des Cat9orèmes; 
inRiation aux philosophies de Platon et d'Épicure; les plus 
connues sont celles d'Alcinot}s et d'Albinus. Ce mot, comme 
prouve son étymoloe, est synonyme d'claircissements, 
¢oTnmentaires. II est d'ailleurs très-peu usité. 
ISAGOBAS  Athénien, rival de Clisth ène, qui, en 
509, après l'expulsion des Pisistratides, avait constitué un 
gouvernement démocratique dans sa patrie. Il tenta, avec 
l'assistance du roi de Sparte Cléomène, de rétablir l'oligar- 
chie, chassa Clisthène et fit banir sept cents familles athé- 
lniennes; mais, assiégé par le peuple dans la citadelle, il se 
vit contraint de capituler, et fut banni à son tour. Clisthène 
ayant été alors rappelC le gouvernement démocratique fut 
rétabli de nouveau. 
ISAÏE ou Esaïas est le premier des quatre grands pro- 
phëtes chez les Juifs. Fils de prophète, sa femmeelle-mème 
était prophétesse. Une des plus vigoureuses branches de la 
tige de Jessé, il était de sang royal. Amos, son père, était 
frère d'Amasias, roi de Juda. L'homme de Dieu trace lui- 
mme, mais avec humilité, sa génëalogie, son nom, sa 
vocation, l'époque de sa vie. Qui versa au fils d'Amos toutes 
ces sublimes inspirations ? C'est, comme il le dit lui-reCe, 
« le Se'.w.neur-Dieu, assis sur son tr6ne ëlevé et rempli.sant 
le temple du bas de ses vÇtements; ce sont les séraphins, 
voilés chacun de six ailes, branlant la porte du sanctuaire, 
plein de fumée, de ce cri : « Sait, t, saint, saint, est le Dieu 

ISATINE 485 
« des armées : la terre est toute remplie de sa gloire. » OEes! 
au charbon ardent app|iqué sur ses Iëvres par un de 
anges aux sextuples ailes qu'i| dut ce feu propbëtique et 
inextinguible qui l'embrasa cent années. Aussi toute la 
pureté de l'idiome hébralque éclate-t-elle dans Isaie : élevé 
à la cour de J«da, il parle la langue, mais la langue per- 
fectionnêe, de David et de Salomon, cependant tonte floris- 
sante de sa virginité première. Il excelle à faire jaillir ins. 
tantanément les Clairs des tén6bres. Dans ses arts les plus 
hyperboliques, le génie d'ordre d'Aristote se fait toujours 
aperce oir, et dans la série de ses idées, et dans l'agencement 
de ses périodes, et dans la distribution de ses chapitres. 
Comme l'aigle, en un clin d'oeil il se précipite du ciel sur la 
terre et s'élance de la terre au ciel. Les comparaisons le 
plus communes, souvent les plus ignobles, lui sont familib.res; 
mais il sait les enchâsser dans l'or et les perles. Abondance 
et variété.', noblesse et simplicité, calme et fureur, énergie 
et gràce, tout est réuni dans ce Juif, le roi «les poëtes. 
Dans ses prophéties, lsaïe s'est la plupart du temps servi 
du rhythme, ì peu près connu, de la poésie bébraique, qui 
consiste dans le parallélisme de lignes et des phrases. Sa 
harpe n'était ni la harpe laudative de David, ai le kinnor 
voluptueux de Salomon ; les accords de la sienne ressem- 
blaient aux éclats du tonnerre, aux rugissements des lions. 
La grave et colossale figure d'lsaie était placée, comme 
celle d'un juge inflexible, entre Jéhovah et les rois de Juda 
quand il frappait ì leur porte, ils frissonnaient. Bab)lone à 
son nom tremblait sur ses fondements, et Memphis eut 
voulu se cacher sous les roseaux de son Nil. L'inf'Arne et 
impie Manassé, importuné des reproches du veillard, de sang 
royal comme lui, le fit scier en deux avec une scie de bois. 
Alors on oint s'teindre, ran du monde 3306 et 696 av. J.-C., 
cette voix grave et retentissante, que cent années de vie 
n'avaient point altérée. 
On peut partager les prophéties d'lsaie en trois parties 
la première comprend six chapitres qui regardent le règne 
de Joalhan; les six chapitres snivants regardent le rgne 
d'Achaz; tout le reste est du règne d'Ezéchias. Dans les six 
premiers chapitres, le prophète tonne coatre Jérusalem in- 
fidèle; dans les six suivants, il prévoit le siCe de la cité 
sainte par les rois de Samarie et de S) rie, Phacée et Razin; 
sous le nom d'Emmanuel (Dieu avec nous), il prédit la 
venue du Messie (i'oint du Seigneur) ; enfin, dans ce qu'il 
écrivit sous Ézéchias, Babylone, Samarie, Tyr, Damas, Moab, 
l'Êgypte, la Judée mème, furent l'objet de ses imprécations 
sacrées. Depuis le 45  chapitre jusqu'au 9 e, Isaie prédit, ì 
ne pas s'y méprendre, le règne de Cyrus, qu'il nomme ex- 
pressément, et le retour de la captivil, et dans les suivants 
l'avénement du Messie et ses persécutions, et enfin l'établis- 
sement de I'glise. Les prophélies d'lsaïe sont si claires que 
les Përes disent qu'il est plut6t évangéliste que prophète. 
Isaïeeut deux fils, auxquels il donna des noms sombres et 
effrayants, comme son génie, et paraboliques sans doute : 
il nomma le premier, Sear-Jasnb (le reste reviendra), et 
le second, Chas-Bas (hdte-'.-vous de ravager ). Il aurait 
eu de plus une fille, qu'il aurait donnéeen mariage ì Manassé, 
roi de Juda, si l'on en croit quelques targums ( interpréta- 
tions ). DErr-Bxtos. 
ISAB run des aflluents méridionaux du Danube, prend 
sa source dans la seigneurie de Tauer en Tyrol, sur l'Het- 
senkopf, au nord d'tnspruck. Son parcours total et de 28 
myriamètres, et il se jette dans le Danube, en face de Deg- 
gendorf. Le commerce et le llottage des bois pour M«mich, 
l'éducation du bétail, l'exploitation de carrières de pl;Rre, 
de pierres à chaux et de marbre, constituent les principales 
ressources des riverains. Le plateau de rIsar abonde en plaines 
marécageuses. L'anciencercle de l'Isar porte anjourd'hui le 
nom de Hante*Bavière. 
ISABD. Voye Cuttos. 
ISATINE (du latin isalis, pastel). Si l'on traite l'in- 
digo du commerce par un mdlange de parties égaies d'a- 
cide sulfurique et dc bicbromate de potasse dissous dans 



4s6 ISATINE -- 
ou 30 parties d'eau, on obtiem, par i'évaporation de la li- 
queur, une matière cristalline rouge jaunMre, soluble dans 
l'eau bouillante et dans l'alcool. Cette matière, qui a reçu le 
nom d'isatine, se tranforme en acide isatinique, sous l'ac- 
tion de la potasse caustique. La chalenr suffit pour décom- 
poser l'acide isatique en eau et en isatine. 
ISATIQUE ou ISATLNIQUE (Acide). Voyez I.,mmo et 
]SATINE. 
ISAUIE ( CLÉMEICE ), femme clèbre qui passe pour 
avoir institué, ou du moins restauré, au quatoième siëcle, 
les j en x ri or au x  Toutouse, sa patrie. Ou les célbre tous 
les ans, au mois de mai. Ou pononce sou éloge et l'on cou- 
tonne de fleurs sa statue en marbre blanc qui est au Capi- 
tale. D'après sa "volonté, dit-on, une messe, an service, 
des auménes, devaient prh:éder la distribution annuelle de 
fleurs mêtalliques léeC par elle à ceux qui auraient le 
mieux réussi dans divers genres de poésie indiqué.s. On ne 
sait rien, du reste, sur sa vie; ses amours et ses malheurs, 
résumés dans une romance de Florian, paraissent tout 
simplement une fiction. Suivant tes traditions du Lan- 
edoc, elle aurait appartenu à l'une des grandes familles 
du pays ; mais on ne cannait les dates ni de sa naissance 
ni de son décès. On croit seulement qu'elle mourut à l'àge 
de cinquante ans, ns avoir été mariée. D'ailleurs elle n'au- 
rait fait que renouveler et accroRre par ses libératités Fins- 
titulion déjà ancienne da Collge du 9ai sçavoir, dirigée 
par sept poëtes toulousains; institution dont les guerres 
civites avait amené la décadence. Catel a prétendu que 
Clëmence Isaure était un personnage imaginaire; mais il a été 
réfuté par dura Vaissette, dans son lhstoire du L«u9uedoc. 
On peut aussi consulter les Annales de Toulouse, par La 
Faille, et le Mémoire imprimé, en 177¢, aunom de l'Aca- 
alCie des enx floraux contre les entreprises du corps de 
ville, ,, où il est solidement prouvé, dit Chaudon, que l'il- 
lustre Tonlousaine a existé, qu'elle est l'institutrice des Jeux 
Floraux, et qu'elle en a assuré à perpétuité la célébration, cri 
laissant de grands biem aux capitonls, à condition qu'ils en 
lutaient l'empl,A prescrit, • .Néanmoins, en 18, M. Noulet, 
membre de l'Acadëmie des Sciences, Inscriptions et Belle«- 
lettres de Toulouse, a lu à cette assemblée un mëmoire 
dans lequel il établit que Clemence lsaure n'est qu'un mythe, 
et que son nom a Cé substitué par un enchalnement d'er- 
reurs à celui de la sainte Vierge, qui fut primitivement l'objet 
du culte poétique des troubadeurs. L. Locer. 
ISA.UFIIE, province du sud de l'Asie Mineure, entre la 
Pamphylie et la Cilicie, que les habitude» de brigandage de 
ses habitants avaient rendue f«meuse dans l'antiquité. Après 
avoir de bonne heure infesté toute la Méditerranée comme 
pirates, ils  constituèrent, ainsi que dans la sauvage Cilicie, 
qui l'avoisinait, une répuhlique particulière, et déployèrent 
toujours plus d'audace à parlir de la première guerre de 
Mitiridate (de l'an 87 à l'an 8 av. J.-C.), qui s'allia à eux 
contre les Bomains. lome ayant résolu de les chMier, le 
proenugul P. Servi|lus, à qui ses succtxs dans une guerre 
qui dura plus de trois ans (de 78 h 75 arc J.-C. ) fa'eut donner 
le surnom d'lsauricus, s'empara des points les plus impor- 
tants de leur pays, qui fut tranformë en province romaine; 
mais ils n'en continuèrent pas moins leurs déprédations jus- 
qu'à ce que Pompée, soutenu par une flotte nombreuse, les 
eut ¢omplétemenl battus, l'au 67 avant notre ère. Ce désastre 
n'anéantit cependant pas leur puissance ; car au troisième 
siècle, sous le rëgne de Gallien, on les voit se soulever sous les 
ordresde . Annius Trebellianus. Probus, il est vrai, les vain- 
quit; mais plus tard ils reprirent la plupart des villes ro- 
main de la cote de Cilicie, et pillèrent encore au cinquième 
siêcle Séleu¢ie en Ssrie. Depuis lors il n'en et plus fait 
mention dans l'histoire. Leur capitale, lsaura, située pr 
du mont Taurus, avait étWdétruite une première fois par 
Perdiccas après la mort d'Alexandre; elle le flt encm'e plus 
tard par le proconsul romain Servilius. Sons le règne d'Au- 
guste, Amntas, roi «le Galatie, la reb'tlit h peu de dis- 

ISEMBUBGE 
tance de l'emplacement qu'elle occupait autrefois ; mais de 
cette ville nouvelle il ne reste plus aourd'hui que 
ruines. 
ISCABDO. VoVe'- 
ISCHIA (prononcez lskia), l'Anaria des anciens, pe- 
tite lin d'origine volcanique, à l'entrée du golfe du lla#es, 
au sud.ouest du cap Misènc, est aussi célèbre par sa ravis- 
sante position que par sa fertilitë, ses excellents vis et ses 
eaux tbermales. Ellea une superficie d'environ dix kilomè.. 
tres carrés, et on y compte 24,000 habitants. La plus haute 
montagne de Vile est le volcan d'Epomeo, haut de 785 mè- 
tres, qu'on appelle aussi Monte San-NicolÇæ dont les érup- 
tions ne cessèrent qu'au quatorzième siécle, et sur la crêle 
duquel on a construit un couvent. 
Les principales localités sont lschia, sur la céte orien- 
tale, avec 500 habitants et un grand port protégé par 
château situé " 200 mètres d'élévation sur un rocher basal- 
tique qui le domine complétement; et Foria, sur la céte 
cidentale, d'où l'on exporte les productions du pays. Les bains 
les plus renommés sont ceux de Co.samicciola, avec un h6- 
pital où trois cents malades sont soignés gratuitiment, les 
bains de vapeur de Castiglione, San-l, oren=o et Santa- 
Bestituta, près du village de Lecco. 
Les Eubéens, les premiers qui s'établirent dans cette fie, 
en furent cfiassës, de même que les Syracusains, qui la pos- 
sédèrent après eux, par la violence des éraptions de 
pomeo. L'lin resta ensuite longtemps inhabitée, jusqu'à ce 
que ses voisins, les Ilapolitains, la firent occuper par de 
nouveaux calons, qui durent bient6t se soumettre :i h domi- 
natiou romaine. Beaucoup de riches Bomains avaient de» 
maisons de campagne à Ischia ; AugLte y possédait 
ment un palais, dont les ruines exis.ent encore. Une race de 
sing, indigène à lschia et dans Vile de P r o c id a, qi l'avoi- 
sine, les avait fait désigner toutes deux dans l'antiquité sou» 
le nom d'lies Pithécses. 
ISCHION (en greci-X[ov). Voçez Bxsm, {Anatomie). 
ISCHL, bourg de la capitainerie de Gmanden. dans 
Sal:karnrner9ut (satines de la chambre impériale) de 
Haute-Autriche, sur la Traun, à 5»219 mètres au-dessns du 
niveau de la mer, situé au centredetrois railCs qu'entourent 
les pittoresques monts Kalkalp. On y compte 2,000 habi- 
tants, et il existe non loin de là de grandes salines. Les bains 
qu'on a établis dans ce bourg, en 1822, l'ont rendu clèbre, 
et y attirent chaque année un millier de baignears. Les en- 
virons d'Ischl ont si attra,auts, que ce bourg es! devenu 
le rendez-vous favori de l'aristocratie autrichienne. On 
trouve toujours des baigneurs appartenant à la grande so- 
ciété européenne ; et il est déjà arrivé plus d'une fois à de» 
souverains et à des diplomates d' avoir des conférences poli- 
tiques, par exemple, en août 1.50, le prince de Schwartzen- 
berg, président du conseil des ministres d'Autriche, 
comte de Nesselrode, ministre des affaires étrangïres de lns- 
sic, et le baron de Meyendori, ministre de Russie à Bedin 
en 1851, l'empereur d'Autriche et le roi de Prusse. 
ISCHUBIE ( du grec o7.«, dérivé dïoxw, je retiens, 
et orpov, urine), terme scientifique dont les mëdecins se ser- 
vent pour désigner une rtent Jan on une eatiëre suppres- 
sion d'urine causée par tout ce qui peut intercepter les con- 
duits des reins ou le canal de la vessie. 
ISÉE, orateur attique, orinaire de Chalcis en Eubée, 
et selon d'autres, d'Athènes, où du moins il s'établit de bonne 
heure, florissait vers l'an 357 av. J.-C. 11 eut pour maltre 
L]'sias et Isocrate ; retiré plus tard des affaires publiques 
il donna des leçons d'éloquence, notamment à Démosthène, 
et écrivit pour d'autres des plaidoyers. Sur cinquante ba- 
rangues qu'il prononça, onze seulement se sont conservées; 
elles brillent par la simplicité et souvent par la vneur du 
stle, et ont trait pour la plupart à des questious de succes- 
sion. leiske les a comprises danssa collection des Oralores 
Attici I t vol.  Leipzig, 170-tT/5). Igous en 
traducliin française par Auget (Parig, 17). 
ISE31BUitGE. Volte-- 



ISERE 
IsÈRE (Département de F), un de ceux de la frontière 
orientale, est formé d'une partie de l'ancien D a u p h i n é 
Au sud-ouest et an sud, il a pour limites celui du Doubs; 
à l'est et au nord-est, la Savoie; le Rb0ne le sépare au nord 
de celui de PAin, et à l'ouest de ceux du Rhéne, de la 
Luire et de l'Ardèche. Divisé en  arrondissements, dont 
les cbefs-lieux sont Grenoble, La Tour-dn-Pin, Saint- 
Marcellin, Vienne, 45 cantons et 550 communes; il compte 
603,97 habitants; il envoie  dëputés au corps législatif; 
il est compris dans la buitième division militaire, l'acadé- 
mie et le diocèse de Grenoble et le ressort de la cour im. 
lriale I de la mème ville. 11 possède 1 lycée, 3 colléges, 
1 école normale primaire, 2institutions, 11 pensions, t34! 
écoles primaires. 
Sa superficie est de 829,0M hectares, dont 316,387 en 
terres labourables; 170,990 en landes, p.tis, bruyères; 
168,420 en bois; 66,713 en prés ; 27,698 en vignes ; 7,109 
en jardins, vergers, pépinières; 4,33t en propriet( bàties; 
2,305 en cultures diverses; 1,778 en étangs, canaux d'irri- 
gation» etc. ; 998 en nseraies, aunaies, saussaies; 33,792 en 
forts et domaines non productifs; 13,711 en rivières, lacs, 
ruisseaux; 13,616 en cbemins, places publiques, etc. ; 190 
en bItimeuts publics, cimetières, etc. 11 paye 2,427,827 fr. 
d'imp6t foncier. 
La surface du département de l'Isëre, plate au nord-ouest, 
devient de plus en plus montagneuse à mesure que l'on 
s'approche de l'Isëre, qui traverse sa partie centrale, et 
se œuvre au delh de cette rivière de hautes montagnes 
qui appartiennent aux Alpes de la Savoie. Là, le pays, 
d'une nature imposante, offre tantét de larges et fertiles 
railC, comme celle de Grésivaudan, qui donne les 
llrluits les plus variés, tantét de railCs étroites, cou- 
vertes de gras pturages, arrosées de torrcnts rapides, 
mais dont la culture, limitée à quelques céréales, est sou- 
vent difficile; de rocbers arides et de vastes glaciers, au- 
dessus desquels s'élancent en pics ou en aiguilles les som- 
mités de montagnes sans nombre. Tels sont l'Ollan, qui a 
3.860 mètres, le mont des Cballanches (2,664), la 1iou- 
cberolle (1,800). L'Isère est la principale rivière du pays; 
tontes celles des montagnes ne sont que des torrents; les 
plus considérables sont le Drac, la Romancbe et le Guiers. 
Le Rbéne reçoit les eaux qui arrosent le reste du pays. Le 
climat est vif et pur, mais très-variable, à cause du voisinage 
des montagnes. Dans les grandes vallées et dans les plaines, 
on éprouve souvent de très-fortes cbaleurs et un froid 
quelquefois assez intense ; dans les parties élevées, fl n'y a 
que deux saisons, et l'CWn'y dure guère que trois mois. 
La belle vallée de Grésivaudan, que commande Grenoble, 
et quelques autres, jouissent seules d'un sol fertile ; au nord- 
ouest, il est sec et aride, et ne produit qu'à force d'engrais. 
Au reste, la manière dont il est cultivé partout mérite les plus 
grands éloges. Le seigle, l'orge, la pomme de terre, le chou 
commun et quelques légumes, sont les principales prodnc- 
tions agricoles des districts montagneux ; mais l'abondance 
des fourrages leur olfre de précieuscs ressources, en permet- 
tant d'y élever beaucoup de bestiaux et d'en nourrir de 
grands troupeanx amenés des départements voisins pendant 
|'etC Le reste du département donne assez de blé poqr la 
onsommalion. On y recueille aussi du cbanvre, beaucoup 
de fruits et des vins estimés : le plus célëbre est celui dit de 
l'Ermitage; ceux de la Céte-Rétie, de Seyssuel et de 
Cl'teau-Grillet, sont aussi fort renommés. On fait dans 
les pturages de Sassenagc et d'Oisans des fromages 
estimés. Ceux de Clievrières, des environs de Saint-1lar- 
cellin, sont aussi très-connus. La culture du m0rier est 
tcndue, et l'éducation des vers h soie fort importante. 
Une multitude de plantes médicinales s'offrent de toutes 
parts dans les montagnes. Celles-ci possèdent aussi de 
grandes et magnifiques fortts, dont le salfin forme l'essenoe 
principale. Independamment du grand nombre de nmutons 
qu'on lève, et qui donnent une laine fine et modeuse, on 
net:frit aussi beaucoup de chevaux et d'ancs d'une petile 

ISIAQUE 487 
taille, des porc« et des chèvres. L'ours, le ,onp-cervier, le 
bouquetin, le cbamois, errent dans les parties reculCs des 
montagnes, fort abondantes en gibier, et surtout en lièvres 
blancs, perdrix blanches et rouges et bartavelles. On 
{a'ouve aussi une grande quantité de faisans, d'aigles et de 
vautours, des hérissons, des martres. Le poisson abonde 
dans les rizières, les lacs et lesétangs. 
Ce département est l'un des plus riches de la France 
en productions minérales. Il y existe de l'or, de t'argent, 
du plomb, du cuivre, beancoup de fer, de l'antimoine et 
du charbon de terre, du cristal de roche, des marbres, 
des pierres et des terres aussi variées qu'abondantes. Il y 
a aussi des sources minérales, dont les plus connues sont 
celles de Grenoble et d' U r i a g e, avec des établissemeut-s de 
bains. Les mines de fer, de plomb, de cuivre et de bouille 
sont les sanlcs exploitcs; celles d'or et d'argent ont éh 
abandonnées.On compte 9 hauts-fourneaox, 23 foyers d'affi- 
nerie et 26 netCies. Lïndustrie manufacturière de ce dé- 
partement consiste dans la fabrication de toiles fines, ordi- 
naires et à voiles, de drap, de mégisserie, de ganterie, 
qui a son principal siCe à Greuoble ; de liqneurs, dont les 
plus renommées sont celles de la céte Saint-André, les eaux 
dite de la COte, et le ratafia de Grenoble. Il y a aussi des 
papeteries, dont les plus reuommées sont celles de Vienne; 
des filatures de soie et des tanneries. 
Son commerce e.st favorisWpar la navigation de l'Isère 
et du RbOne, par 7 routes impériales, 13 rentes départemen- 
tales et 2,535 chemins icinaux. On en experte des vins, 
des eaux-de-vie, des liqueurs, des chanvres, des bois de 
construction, des solos, des laines, des toiles, des draps, 
et autres produits de ses manufactures. Parmi les villes et 
localités remarquablcs, nous citerons : G r e n o b I e, chef-lieu 
du département; Vienne, Voiron, ville sur la Morge, et 
très-connue par ses toiles, avec 8,48O babitants ; Céte-Saint- 
Androe, petite ville au pied d'une montagne, à l'eutrëe de 
la grande plaine du mème nom : elle était adis lortifiée ; 
on y compte 4,429 habitants ; Tullins, petite -ille sur un 
monticule qui domine les rives de l'Isère, avec 4,618 ha- 
bitants ; Bourçoin, dans une plaine fertile, sur la Bourbre, 
avec 4,79 babitants, des impressions sur soie, des manu- 
factures d'indiennes, des fabriques de toile, un grand com- 
merce de farine, de chanvre et de sucre; Saint-Marcellin, 
jolie petite ille, au pied d'une colline, près de l'Isère, aec 
3,460 habitants ; La Tour-du-Pin, petite ville sur la Bour- 
bre, avec 2,572 babîtants ; C I e r fa o a t, ancienne baronnie; 
Vi'-ille, petite ville sur la Romanche, que l'on y passe sur 
un beau pont : elle est célèbre par la réunion des étais 
généraux du DauphinWqui s'y tint en 1789 ; on y compte 
2,t5 habitants. Le monastère de la Grande Chatreuse, 
aux portes de Greuoble. Au haut de la vallée de Grési- 
vaudan, sur la frontière de Savoie, s'élève le fort Bar- 
re.aux, position militaire très-importante. 
Oscar tc-Cnv. 
ISÉIiNE. L'isérine (nigrine de Beudant) est une des 
plus importantes variétés de ! e r oxydé. On la nomme 
coreJ'er titanoe cubique, parce qu'elle est composée d'oxyde 
de let combiné avec de l'oxyde de titane. L'isérine se ren- 
contre en cristaux ou en grains disséminés dans les roches 
volcaniqnes, et sous la forme de sable dans le voisinage de 
ces roches. Ces sables sont quelquefois assez abondants et 
assez riches en fer pour qu'on puisse les exploiter comme 
minerais de ce métal. 
ISIAQUE {Table), Mensa lsiaea, appelée aussi 
Bcmbina, antique et cél/:bre monument égptien, consistant 
en une table de bronze carrée, couverte d'un émail d'azur, 
et artistement incrustée de filets d'argeut. La figure princi- 
pale représente lsis assise ; mais le sens des autres figures 
est douteux. Après le .sac de Rome, en 1527, cette table 
passa aux mains du cardinal Bembo; rr, aintenant elle lai;. 
partie «le la collection égyptienne du musée de Turin. Elle 
a Ce pour la premiëre fois gravée sur çuiw'e par Eneas 
Vicus ( Venise, 1559). 



488 ISLDORE 
ISIDORE DE PÉLUSE, moine de Péluse, dans la basse 
Èyple, qui vivait de la manière la plus austère et blmait 
énegiqnement les mœurs dépravées des ecclé-iastiques de 
son temps, naquit à Alexandrie, et mourut vers l'an 450. 
.s nombreuses lettres, qui existent encore (Paris, 1638, 
in-fol.), sont d'une certaine importance pour l'exégëse et 
pour l'histoire ecclésiastiqJe. 
ISIDORE DE SEVILLE (Saint), évëque de celle ville 
(Hispatensis), l'un des prëtres qui ont mérité le plus de 
Êghse d Espagne, naqmt à Carthagène. Son père, SerCien, 
était gouverneur de Séville; saint Léandre et saint Fulgence 
étaient ses frères, et sainte Florentine sa sœur. Il mourut le 
6 avril 635, après quarante ans d'ëpiscopat. Ce prélat a donné 
dans ses Sententiarum, sire de summo BOHU, Libri II1 
une sorte de doctrine de la foi, d'apr les décisions des 
anciens docteurs de l'lglise, et dans ses Orignum seu et- 
raologiarum Lbri XX, une sorte d'enc)clopedie. On lui 
doit encore plusieurs ouvrages de grammaire, d'histoire et 
de théologie, entre autres De Differentiis Verborum Libr 
tres  S ?lnOn ?lmUrum Libri I1; et Liber G lossarum  le C hro- 
icon usgue ad annum V Heraclii ; une Histoire des Goths 
de l'an t76 à l'an 628; une Chromtue des Rois visogoths; 
un Liber de Scrittoribus ecclesiasticis, et enfin une Col- 
leclio Canonum Ecclesioe //ispanioe, ouvrages qui eurnt 
une grande autorité en Espague et au dehors, et qui par la 
suite ont été plusieurs fois augmentés et continues. La meil- 
leure édition des œuvres completes d'lsidore de Séville a 
ëté donnée par Faustus Arevolo (7 vol., Ruine, 1797-1803, 
in-4o). 
ISIDOP, MERCATOB ou PECCATOR, éëque de 
Badajoz vers l'an 550, est l'auteur présumé des fausses 
D«cr etales. 
ISIGNY chef-lieu de canlon, dans le département du 
Calvados, sur la rive gauche de i'Esque, près de son 
confluent avec la Vire, comple 2,263 habitants, et possède 
un tribunal de commerce, aiusi qu'un entrepet reel des 
douanes. On y fabrique beaucoJp ,le salaison% ci on en ex- 
porte annuellement environ 1,600,000 kilogrammes de 
beurre très-renommé. Son pooE reçoit des navires de 100 
à 10 tonneaux. 
lSlS divinité égyptienne que les Grecs comparaient à 
leur Demler ou Cerès, et dont le nom se prononçait hié- 
roglyphiquement Hës ou His. De méme que son frère et 
époux O s i ris, elle faisait parlie des plus antiques divinités 
de i'Egyple, et l-lérodote nous apprend que tous deux étaient 
les diviniles le plus généralemeut adorées dans ce pays. 
C'est à This, dans la haute Ëpte, première capitale des 
souverains de l'Égypte, que leur culte Cait le plus ancien. 
Les autres temples les plus célèbres d'Isis étaient situés à 
Phloe,/ "ïent)ris (Dendérah), à Memphis et à Busiris. Son 
culte se rêpandit plus tard jusqu'en Grèce et à Ruine, où 
l'on fit obligé d'adopter des mesures de répression pour les 
scandales et les «bus auxquels donnait lieu la célébration 
des mystères d'isis. D'ordinaire elle est représentée avec un 
disque solaire placé cuire des cornes de xache, ou assise 
sur un trÇue, la tte surmonlée des signes hiéroglyphiqoes de 
son nom. Ce m)the se rattachait de la maniére la plus in- 
tixne à celui d'Osiris. 
[ Apulée, qui s'était fait initier aux mstères d'lsis, et 
qui nous a laissé un portrait de cette divinité dans son 
livre intitulé £'Ane d'Or, révèle dans ses discours qu'à 
la suite de on initiation la déesse lui apparut, qu'elle lui 
lit connaltre ses attributions, ses différents noms, et 
qu'elle lui patin en ces termes : « .le suis la nature, mère 
de toutes choses, maltresse des éléments, le commence- 
ment des siècles, la souveraine des dieux et des déesses, 
et la reine des mnes ; c'est moi qui gouverne in subli- 
mité des cieux, les vents salutais des mers, le silence lu- 
gubre des enîers, la divinité unique est I,onorée par to,t 
l'univers, mais sou di[férenles fouines, sous divers noms, 
,t par dilférenles cérémonies. » Apulée décrit ensuile Ious 
les noms sous lesquels les Égyptiens et les autres pet,pies 

adoraient cette déesse. , Les Egyptiens, continue Apuiée, 
qui ont CA instruits de l'ancienne doctrine, m'honorent 
avec des cérémonies qui me sont propres et convenables, 
et ils m'appellent de mon véritable nom la reine lsis. 
Comme on le voit, i'initiation égyptienne, sous le nom de 
mystères d'l$is, était uue véritable autopsie, c'est-à-dire 
une contemplation ou vision intuitive, qui plaçait l'ame 
du néophyte en rapport avec la divinité. Par cet état de per- 
fectibilité, l'initié arrivait à la connaissance positive de la 
morale; mais avant de recevoir l'enseignement philosophique 
que l'on y pratiquait, il fallait passer par des épreuves 
physiques qui devaient assurer de la discrétion du néophyte. 
Isis enseigna l'agriculture aux Égyptiens : une faucille à 
la main, elle daignait elle-mme diriger la moisson. F_AIe 
leur apprit l'art de filer le lin et de le tisser, celui d'extraire 
l'huile des olives, dont elle porte les rameaux à la main; 
elle présidait à la navigation ; elle apaisait la tempête et les 
flots irrités. Celle déesse avait en Epte une fète célèbre, 
connue sous le nom de fdle de la ;'avigation. Suivant 
Apulée, Isis pre-crivait elle-rame l'ordre de cette fle. Elle 
se cëlébrait tous les ans au mois pharmuti ou mars. Les 
prêtresdevaient offrir à la reine des cieux, de la terre et des 
mers, un navire neuf. La représentation de cette fëte solen- 
nelle est souvent répCée dans les temples consacré  la 
deesse Isis. Une autre féle non moins solennelle, connue 
sous le nom de procession d'lsis, se célébrait à Thèbes une 
fois l'an avec la plus grande pompe; les habitants de la 
haute et de la basse Egypte s'y rendaienI en fouie. Isis 
sous la lutine d'une ourse, y paraissait assise sur un trene 
placé sur un brancard, qui clair porté par quatre ndocores, 
les desservants de ses autels : elle ouvrait la marche de cette 
auguste cérémonie. On y portait aussi les statues de tous 
les dieux del'Eglple ; l'encens et les fleurs n'' étaient pas 
épargnes. 
Eu fin, Isis ou la Salure, en sa qnalilé de femme ou de 
mère conservatrice, était supposée contenir en elle seule le 
bien et le mal. Cette supposition toute mystérieuse a rendu 
son culle plus célèbre que celui d'Osiris, son époux. Isis est 
elle-même une triuilé, une divinité uniçerselle; aussi les 
É--yptiens lui adressaienl-ils cette prière : Grande deesse 
Isis, çuidles ne et mère de toutes choses! etc. Suivant 
Plutarque, elle avait nn temple à Sais, sur le fronton du- 
quel on lisait cette célèbre inscriplion : Je suis tout ce qui 
a (té, ce qui est et ce flUi sera, et nul mortel n'a encore 
levé mon voile. C  Alexandre Lz-om. 
ISRA.NDÉRIEH. I'oye.'- 
ISLA ( Jos-Fn2osco ni ), satirique espagnol, né en 
tTlt, à Ségovie, entra dans la société de ,lésus, et se dis- 
tingua comme prolesseur et comme prédicateur. Quand les 
jésuites curent été chassés d'Espagne, il se relirai à Bologne, 
où il raourut, en 1783. Le plus cblèbre de ses ouvrages est 
celui qu'il publia sous le titre de ltistoria del.famosopre- 
dicador fray Gerundio de Campasas, alias Zote (t75B), 
et qu'il signe du pseudonyme de Francico Lobon de Sa- 
la'.-ar. Prenant Cervantes pour modèle, il persilfle si fine- 
ment les prédicateurs de son temps, buvards sans got et 
sans esprit, que son livre fut défendu par l'inquisition, et 
que la seconde partie n'en put paraltre qu'en 1770. On en 
a une traduction française par Cardini (2 ,ol., Paris, 
lsla, eu outre, a donué plusieurs traductions du français, 
dont la plus importante est celle du Gi/.Blas de Le.sage, qtt'il 
avait terminée dès 1781, mais qui ne parut qu'apr sa mort 
( ladrid, 177 ). Isla prétendait que ce roman, éc,'it dès 
1635 par un Espagnol, avait valu à son auteur des désa- 
gréments, par suite desquels il serait venu se rélugier eu 
France, oin il serait mort en 1640; et que Lest'ge n'aurait 
fait quïmiler l'ouvrage du réfugié, lequel en avait emporté 
avec lui une copie, tombée plus tard aux mains de l'auteur 
de Turcaret. 
! SLAM • I SLAMISME, religion de Mahomet, m a h o - 
m Ci s me. Les musulmans ppellent leur religion islam 
ou eslam, dont d'Herbelot a lit islamisme. Ces mots 



ISLAM -- 
viennent du verbe soloma, qui signifie se résigner, se sou- 
nettre  la volonté de Dieu ( voyez Dw ). 
1SLANDE, Ile située tout au nord de notre hémisph:re, 
entre le 63" 23' et le 66 ° 33' de latitude septentrionale, le 
15 ° rto' et le 26" 51' de longitude orientale, à 105 myriamè- 
tres des cotes de la Norvège, 2re de celles du Groênland, et 
appartenant au Danemark, est l'un des points les plus inté- 
ressants du globe. Sa superficie est d'environ 98rt myria- 
mètres carrés ; mais elle n'est habitée que sur sa cote sud- 
ouest, et offre à l'intérieur l'aspect de la plus effrayante désola- 
tion. Entouréedemerstempétuensesetleplus souvent héris- 
sées de gigantesques glaçons, bordée de rochers et d'écueils, 
l'oeil n'y aperçoit que des plaines de glace s'étageant en forme 
:le terrasses et dominées par des montagnes couvertes de neige 
et de glaces éteruelles; que des rochers confusément roulés 
les uns sur les autres ; que d'immenses champs de lave; 
partout les traces d'effroyables tremblements de terre et des 
plus horribles cataclysmes; nulle part d'arbres, et presque 
point de traces de végétation, à l'exception de quelques 
railCs voisines des cotes. C'est là un spectacle qui frappe 
d'autant plus le voyageur de surprise et d'effroi qu'il sait 
que cette contrée était autrefois plus florissante et plus ha- 
bitée que de nos jours, et que les sciences et la poésie y bril- 
laient alors d'un vif éclat. La montagne, qui au glacier 
d'Orœefa (Orrfojoekul) atteint une élévation de 2,0so mè- 
tres au-dessus du niveau de la mer, est toute couverte de 
gigantesques glaciers (loekuls), des flancs desquels s'échap- 
pent de temps  autre d'effroyables avalanches ou snoeflods, 
qui vont deffondrer dans la plaine. Parmi les pics qui vo- 
missent du feu, I'H é k I a, situé sur la cote méridionale, est 
le plus connu ; on prétend qu'il était déjà en activite en 
I tort. En fait d'autres volcans, on peut encore citer le Kra- 
bltz, le Leirniukur, le Biornafloç et le Hit.'.ool sur la 
cote septentrionale, le Koetligiou et l'Oroefajoekul sur la 
cte méridionale, qui ne datent les uns et les autres que 
de 1724. Les innombrables sources d'eaux thermales qu'on 
rencontre, sur la cote sud-ouest surtout, sont en rapport in- 
time avec les volcans. On les divise en laugar, c'est-à-dire 
bains ( e, sont celles qui coulent tranquillement), et en hcer 
(sources jaillissantes) ou 9 e is e r ( remous ), qui sourdent 
sous forme de fontaines jaillissantes dont la température 
varie entre 20 ° etl00 ° centig¢.,et dont les eaux sont tantOt 
potablês et tant0t sulfureuses. Ces sources sont d'ailleurs 
sujettes à de grandes vicissitudes, et disparaissent avec la 
méme vitesse qu'elles apparaissent. 
En raison de la constitution physique de son sol, l'Islande 
• st sujette à de fréquents tremblements de terre; les ravages 
qu'exercërent ceux des années 1755 et t753 furent épouvan- 
tables. Les orages y sont très-rares, et les au rares ba- 
r é a I e s fort communes. L'hiver y est d'une rigueur ext réme, 
et le climat semble y devenir de plus en plus rude. Le règne 
animal présente de 30 à rt0,000 pièces de gros bétail, géné- 
ralement dépourvues de cornes ; environ 500,000 moutous, 
.qui en revanche en ont souvent quatre et mëme cinq; des 
chevaux petits, mais vigoureux; des chieus, des rennes, 
espèce qui n'y a été introduite qu'en 1770; des chiens de 
mer, des faucons, des cygnes, et une innombrable quantité 
d'oiseaux aquatiques. Le règne végétal offre d'utiles lichens, 
entre autres la nousse d'lslande, et quelques baies; et dans 
les jardins, des pommes de terre, des raves, des choux, des 
pinards, du persil, du chanvre, mais surtout du raifort, du 
nevé et du cresson. Le règne minéral fouruit du plMre, du 
soufre, du fer et une espèce de bouille appelée surturbrand, 
qui, avec les longues piëces de bois que les courants jettent 
régulièrement chaque année sur le cotes septentrionales et 
orientales de Plie, et provenant sans doute des grands fleuves 
d'Europe, d'Asie et d'Amérique qui se dechargent dans la 
mer Glaciale du lord, y supplie le bois de chauffage. Grac¢ 
.à ces envois tout providentiels de bois dans un pays où il 
ne peut en croltre d'aucune espëce, l'Islandais possède les 
matériaux nécessaires pour construire la hutte qui lui sert 
de demeure et la barque qui lui est nécessaire pour la pche. 
DICT. DE L& LNv.IBS. -- T. l. 

ISLANDE 
Les arbres et les céréales, que, d'après des témoign " au- 
tbentiques, on y pouvait cultiver autrefois, n'y rcnssisse:t 
plus maintenant. Si la terre d'lslande est ingrate, la mer 
traite du moins les Islandais avec plus de largesse. Rarement 
ils s'en reviennent de la péche sans que leurs bateaux soient 
remplis de poisson; et Iorsqu'ils nevenlent pas aller si loin, 
plusieurs lacs et rivères, telles que la Thwrsa, la Kvita, 
le Lalelv, leur donnent en quantité des hreules et de 
saumons. Mais ils gardent et salent ou font sécber la plus 
grande partie de ces poissons pour les vendre. 
D'après un recensement fait au commencement du dou- 
zième siècle, le nombre des habitants de l'islande était en- 
viron 100,000; le dernier recensement, opéra en 1845, a 
donné le chiffre de 57,rt53 grues. Les Islandais sont d'ori- 
gine germanique, sérieux et i,robes; leurs mœurs sont lmres 
et leur instruction généralement fort étendue. Tons appar- 
tiennent  la religion protestante. Leur langue est l'ancienne 
langue norvégienne, qui s'est conservée parmi eux dans 
toute sa pureté primitive; sur la cote la population parle 
généralement au,si le danois. 11 est rare de rencontrer un 
Islandais ne sachant ni lire ni écrire. La plupart sont trës- 
versés dans la connaissance de l'histoire de leur pays, con- 
serrée dans des traditions et des poemes. En general ils 
sont de taille moyenne et d'assez faible constitution ; aussi 
parviennent-ils rarement ì un ŒEge avancé. La goutte et le 
scorbut sont les maladies les plus communes parmi eux. La 
fecondité des femmes est cfiose vraiment merveilleuse, et 
rien de plus ordinaire que de voir des mères elever douze 
et quinze enfants. Leurs habitations consistent en buttes 
basses, construites avec des morceaux de tourbe ou bien de 
lave, dont les interstices sont calfeutrés avec de la mousse, 
et recouetles de gazon. Il n'existe pas, à bien dire, de villes 
ni de villages en lslande, parce que chacun construit sa de- 
meure suivant ses besoins et la nature du terrain. Au prin- 
temps, les marchands danois abordent sur plusieurs points 
de pile. Les habilants leur portent la laine, le suif, le poisson 
sécbé ou salé, les peaux de renard, et prennent en ecbange 
l'eau-de-vie, le sucre, le seigle et les autres deurees dont 
ils ont besoin. Quand la foire est finie, le paysan revient tra- 
vailler à sa ferme, récolter Iherbe de son enclos, et Iorsquil 
a une heure de loisir, il l'emploie à fabriquer les meubles 
qui lui sont nécessaires, à forger des instruments de travail ; 
car il est obligé toujours de se suffire à lui-mème. Sa femme 
le seconde avec zèle dans tous ses travaux. C'est elle qui 
file la laine, qui prend soin des bestiaux. Ainsi vivent les 
Islandais; et malgré les rudes travaux auxquels ils sunt 
condamnes, malgre l'aridité du sol et les rigueurs du climat, 
ils sontbons et hospitaliers, ils aiment leur pays, et ne peuvent 
se résoudre à le quitter. 
La péche, la chase aux oiseaux, la fabrication des bas 
et des gants, le commerce de l'édredon, la laine, constituent 
les principales sources de profit des Islandais. Le pain est 
nne délicatesse que les ricltes seuls se permettent. On con- 
fectionne aec la mousse une farine qui se consomme d'une 
foule de maniëres. Le poisson de mer salé est la hase de 
l'alimentation, et on consomme aussi beaucoup de lait. Pen- 
dant la mauvaise saison, on nourrir le betail avec les arètes 
de poisson. Quoique très-pauvre, l'Islandais, en raison de 
son extréme sobriëté, ne manque jamais d'aliments. 11 n'y 
a pour lui de disettes, mais alors elles sont affreuses, que 
lorsque quelque éruption volcanique lait disparaltre les prai- 
ries, o,J bien lorsque les glaces flottantes sont un obstacle a la 
pgche de méme qu'à l'arrivée des navires d'Europe. 
L'lslande est administrativement diviséeen quatre districts, 
empruntant leurs dénominations particulières aux quatre 
points cardinaux, et subdivisés en plusieurs cantons, dont 
le chef ou sysselmand est ì la fois juge de paix, percepteur 
et notaire. Faute de numéraire, les imp0ts sont perçus en 
nature. Il n'y a dans Pile ni milice ni gendarmerie. Le seul 
endroit qui ait quelque apparence de ville est Beylqacik 
( baie de la fumée ), sur la cote occidentale, dans le Faxe- 
liard. Les maisons ne sont pour la plupart que des hnttes da 
ri2 



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pOcheurs, comme dans le reste de Pile; mais celles d négo- 
ciants danois sont b'ties en bois, et celle du gouverneur, 
qui paraltrait mesquine auprès d'une de nos belles fermes 
de lormandie, ressemble là à un véritable palais. C'est là 
que réident le bailli et l'eêque, et on y compte 700 habi- 
tants. On y trouve une biblinthèque riche de 8,000 volumes, 
une Société royale islandaise, un observatoire et une pbar- 
marie. Il tant encore citer Havnefjord, avec un bon port, 
Bessoestndir ou Bessestads, oi existe une école d'enseigne- 
ment supérieur, et Leirnr, au nord de Bcykjavik, où se 
trouve la seule imprimerie qui existe dans l'lle. 
Des te Imitième siècle, des moines irlandais vinrent s'éta- 
blir sur différents points de la c6te d'lslande; mais c'est de 
la _Norvëge qu'elle reçut la plus grande partie de sa popu- 
lation. Ce lut à la suite des expeditions qu'y entreprirent 
successivement, de l'an 860 à l'an 8"/0, leurs compatriotes 
laddud, Gardar et Ftokki, que les orvegiens apprirent 
l'existence de cette Ile. laddod, viki 9 (pirate) norvë- 
gien, dans un voyage qu'il faisait aux lies Faroe, fut jeté 
par la tempête sur les c61es d'lslande. Il y descendit ì terre, 
n'y trouva point de traces d'babitatinns, et rapporta en 
lo vège les premiers renseignements qu'on eut encore eus 
sur cette ile, à laquelle il donna le nom de Ænoeland, terre 
de la neige. Flokki, ou P,a[na-FIokld, comme on le sur- 
nomma, à cause du corbeau qu'il Iàcha et envoya à la dè- 
couverte de l'ile, la nomma lsland (Terre de la glace), 
à cause des masses de glaces flottantes q'il trouva amon- 
ce[ëes dans les baies. Le premier Norvègien qui s'y etablit 
d'mm maniere fixe, d'abord (en 870) sur la c6te méridio- 
sale, puis délmitivement ( eu 87 ) dans l'endroit qui depuis 
est desonu leykjavik, fit Ingolf avec ses parents et sa 
mille. Il y fut bient0t suivi par i,lusienrs autres de ses coin- 
patriotes. Vers oette mème opaque, le roi Harald Haarlhgcr 
( aux beauoE .cheveux), apres avoir vaincu tous les anlrcs 
rois de la iorige, et s'en ëtreconstitue l'unique souverain, 
ayant réduit  l'tat de simples [ermiers les propriétaires 
libres, en raison des taxes qu'il imposa sur les terres, tous 
ceux qui ne voulurent point accepte,, le nouvel ordre de 
choses abandonnèrent le pays et s'eu allèrent les uns à l'est, 
n Suède; les autres au sud, en France et dans les les Bri- 
tanniques, liais le grand courant de l'Cigration se dirigea 
vers l'islande, et soixante ans plus tard toute la partie ha- 
liitable des cotes êtait déja oceupëe. Tels sont les documents 
que le Landnaa Bok, livre d'histoire écrit au dixieme 
siècle par le prètre Aroe, nous fournit sur l'occupation de 
l'lslande par les lorvegiens. Il parait bien démentrè que 
l'de de Tliulé, ultmta Thule, dont parlent tous les poêtes 
et les historions Intrus, n'ëtait pas Ilslande; et jamais la 
science géographique des anciens n'avait pnérè si avant 
dans le Iiord. 
Comme c'étaient surtout les personnages les plus impor- 
tants et les plus considérés de la lorvège qui s'êtaient retires 
eu lslande avec leurs mrmlles et.leurs serviteurs, il y eut pour 
eux besoin de continuer à mener dans leur nouvelle patrie 
le ml)me genre de ie que dans l'ancienne ; circonstance qui 
n'exerça pas nne médiocre inllueuce sur le développenent 
&: l'organisation que File reçut alors. Fondee d l'origine dans 
les diverses prise. de possession du sol, tontes indèpen- 
dautes les unes des autres, sur la puissance à la fois sacer- 
dotale et judiciaire des chais des temples (9arien), cette 
organisation fut d'abord hiérarchique et arislocratique; 
mais quand les diverses seigneuries, jusque alors isolèes, ar- 
ière,tt a constituer un tout oganique, elle devint aris- 
tocratique et républicaine. La lègislation commune donnée à 
toute l"fie par Ulfliot, et la création par le'même de i'Al- 
thinç, assemblée composée des hommes les plus capables 
et les .plus instruits de tous les districts de l'fie, en fit la 
base..Cette assembiée se réunissait tous les ar au mois de 
jdllet, pendant l'espace de quinze jours, sous la présidence 
da logrnatlr ( l'homme de la loi ), dans la grande plaine de 
"l'hiugvalla, exerçait le droit de juridiction suprëme et dli- 
bèrait sur les affaires du pays. Cet Alth9 unique parais- 

ISLADE 
saut insuffisant, on établit, en 96, un nombre de things 
semblables dans les divers districts, et à oet effet l'fie fut 
divisée en quatre quartiers. Enfin, en l'au t004, Ijal y ajouta 
un tribunal supreme. 
Le christianisme, déjà professé par un certain nombre d'ha* 
bitants, fut lègalement adopté en l'an 1000, mais non sans 
avoir à triompher de diverses réistanees. En mme temp 
on erCdos Cules, et Van établit denxévechés, l'un à IIollar 
et l'autre à Salholt. La connaissance de l'écriture et de la 
langue latines, de la litterature et de l'érudition de l'Occident, 
introduite en mtme temps que le cbristtanisme en Islande, 
y trouva un terrain d'autant plus favorabIement disposé, que 
la poésie et la narration historique y -etaient déjà depuis 
longtemps l'objet d'une culture tonte particulière, et bien 
autrement avancées que dans tonte autre contrée du nord ger- 
manique ( raye.'- ScnmAv.s [Langue et Littérature ]. ). 
Les fréqnents voyages entrepris par les Islandais, qui pré- 
cédemment avaient surtout pour but les pays du fford, et 
qui amenèrent la découverte d'abord du Groënland (932), 
puis (934) d'une partie de l'Ameriqne (appelée par ces pre- 
miers navigateurs islandais Vinland), clmngèrent alors de 
direction, et curent surtaut paur but les rélons du Sud. On 
visila maintenant l'Orient ainsi que l'Occident de l'Europe, 
pour satisfaire des besoins religieux ou scientifiques. Alors 
les jeunes gens de famille s'en allaient étudier en Aile- 
magne, en France, en ltalie, et revenaient fidèle.ment rap* 
porter à leur terre natale ce qu'ils avaient appris. Les rap- 
ports politiques, de mëme que l'Aoint de la vie intellectuelle 
et de l'actif commerce avec l'étranger, avaient atteint leur 
apogée au milieu du douzième et au commencement du 
treizième siècle; opaque qui forme, à bien dire, Pge d'or de 
l'Islande et de sa civilisation. C'est alors que Soemaud recueille 
le chant.» mythologiques de l'Edda ; que Snorri Sturluson 
compose la seconde Edda et la Chronique des rois de .-Norvège 
( lleimshringla ) ; que les skaldes chantent, et que les 
teurs des Safla rassemblent dans leurs nuits récits les laits 
conservés par la tradition. Les éruptions de volcans, les 
guerres civiles, les épidemies, des fié.aux de toutes sortes 
inrent paralyser ce beau mouvement poétique. Toutes les 
grandes familles de |'fie, naturellement jalouses de leur 
puissance, se liguèrent les unes contre les autres. On vit 
alors des bandes de 1,200 hommes traverser le pays en 
armes, incendiant les églises, pillant les habitations et mas- 
sacrant les paysans. L'Islande en avait donc assez de 
narchie sanglante à laquelle la liwaient en proie l'orgueil et 
l'ambition des divers seigneurs, quand, grfice aussi à la con- 
nivence secrète du traitreSnorri Sturluson, le roi de 
lorvège ttakon VI réussit à soumettre Vile à son autorité 
( « ). 
En i380 l'Islande passa en mëme temps que la 51orvège 
sous les lois du Dauemark, dont elle n continné de faire 
partie jusqu'à ce jour, tandis que la Iorvège en a été dê- 
tachée en 18t4 pour être réunie à la Suède. Longtemps en- 
core après la termina de l'Islande au l)anemark, son com- 
merce était demeuré libre; et les négociants des ilIes 
hansíatiques, de la Suède etde l'Angleterre venaient chaque 
année I,ai apporter les productions de leur sol. Il y avait 
la ana concurrence qui ne pouvait qu'ëtre très-avantageuse 
au pas. Mais plus tard les rois de Danemark réservèrent 
a leurs sujets le privilce exclusif de ce commerce. Plus tard 
cenre le gouvernement danois aflerma oe privilége à une 
compagnie, et ce fut un grand malheur pour l'lslande, car 
ceux qui avaient payê le droit de lui apporter lers mar- 
chaudises ne pensèrent qu'h en tirer le meilleur parti pos- 
sible. Plusieurs fois d'énergiques r4elamations s'élevèrent 
contre ce monopole, mais elles ne furent pas entendues. Le 
gouvernement renouveln son bail de commerce, pins il crut 
mieux faire en l'exploitant lui-mème; mais Pislande ne s'en 
trouva pas mieux. Enfin, dans les dernières années du dix- 
huitiëme siècle, cette loi d'iniquité a Cê abolie, et lecom- 
meree de l'Islaude est redevenu libre, sinon pour tontes les 
nations indifféremment, du moins pour les nëgociants danois. 



ISLADE 
Vers la fin du quatorzième siècle, les sciences et les arts, 
qui depuis l'iutroductiou de la domination norvégienne 
avaient commencé ì décliner, tomhèrent dans une complète 
décadence en Islande. Des temps meilleurs revinrent cepen- 
dant, lorsque le roi de Danemark Christian III y introduisit 
la Réformation, qui n'y fut complétement établie qu'en 1551. 
Au dix-seplième siècle, l'Islande fut visitée par des pirates 
algériens, qui la pillèrent et y égorgèrent un grand nombre 
d'llOmmes, en 1627. Dans le courant du dix-huitième siècle, 
en y eut quarante-trois mauvaioes récoltes, et on y éprouva 
dix-huit disettes complètes En 1707, la petite vérole y fit 
périr près de 18,000 individus, et environ 9,000 autres 
noururent de faim dans les années 1784 et t78-. Il s'' forma 
néanmoins vers le milieu du dix-huitième siècle diverses 
sociétés savantes, qui ont singuliërement contribué ì la pro- 
pagation des lumières et ì la moralisation dn penple ; et 
c'est à cette époque aussi quo l'Islande a eu trois savants 
qui ì eux seuls sulfiraient pour l'illustrer; c'est Torfesen, 
l'auteur de l'Histoire de Norvèga; Magnussen, l'éditeur de 
l'Edda, Finssen, l'auteur de l'Histoire ecclésiastique; sans 
parler de poëtes et de naturalistes distingués, entre autres 
Olafssen, qui a publié sur son pays nn rand ouvrage, très- 
estimé. 
En 1809, à.l'époque où le Danemark était en guerre avec 
l'Angleterre, un matelot danois appelé Yoergen-Joelgensen, 
qui avait déserté aux Anglais et s'tait rende à, Rcykjavik 
avec Ull btiment anglais armé en course, s'empara de cette 
ville sans défense et du pouvoir suprème en lslande; mais 
six semaines après, en aott 1809, les Anglais eux-mêmes 
l'en chassèrent, au moment même où éclatait une conspi- 
ration ayant pour but de mettre un terme à l'usurpation 
de cet aventurier. 
En 1824 et t825 Plsiande éprouva de nouveau toutes les 
horreurs de la disette, à la suile des éruptions volcaniques 
qui avaient oit lieu dans les années précdentes, et Ch 1ô27 
une violente épidémie n'y fit pas moins de victimes. Aprës 
avoir subsisté pendant neuf siècles entiers, l'Althin9 lut 
supprimé dans les premières années du dix-neuvième siècle ;. 
et c'est seulement en vertu d'une ordonnance rendue par le 
roi de Danemark le 8, mars 18/3 qu'une assemblée d'états y 
a été réorganisée sur le modèle des assemblées provinciales 
du Daneraark. Consultez Glicmann, Description 9oeogra-. 
lhique de t'lslande (Altona, 1827 ); Sartorius de Wal- 
tershausen, Esquisse physico-goeographiue de l'lslande 
( Goettingue, 1847 ); Tbienemann et Gunther, Voyages 
dans le lVord de l'Europe, lend«nt les «nnoees 182oet 1821 
( Leipzig, 1827 ); Leo, Détails sur la vie et le mœUrS de 
l'lslande eux temps du aganisnte , dans l'Almanach his- 
torique de Ranmer ( 1835 ) ; et le Voyage d'Olafisen, tra- 
duit en français ( 5 vol. ; Paris, 1800). 
ISLA-NDE ( Lichen d'). Voile'- Lcur« 
ISL' ( Bataille de 1'). L'lsly, paisible rivière de la pro- 
inee de Riï, sur la limite du Murer et de l'Algérie, où 
de temps immémorial ne venaient s'abreu.voe que de rinces 
chevaux des montagnards herbères, n'est plus depuis 184 
un nom géographique vulgaire, mais un glorieux uvenir 
historique pour notre armée et pour le maréchal Bu- 
geaud. 
Après la dispersion de sa smala, en 1843, Abd-el- 
Kader s'était réfuié dans le Rif, province du llaroc, 
voisine de nos possessions africaines, où sa qualité de 
marabout l'avait fait accueillir avec enthousiasme. Le gou- 
vernement français, voulant mettre son infatigable ennemi 
dans l'impossibilité de lui nuire désormais, demanda ' Abd- 
¢r-Khaman de l'interner dans son empire. Mais non.seu- 
lement Abd-er-Rhaman ne répondit qu'evasivement à ces 
ouvertures, mais encore il aUa jusqu'a prétendre, sur l'ins- 
tigation de son dangereux h6te, que les Français, en dëpas- 
»ant la Tafna, avaient franchi les limiles de son empire, et 
il envoya sous les murs d'Ouchda une nombreuse infan- 
terie, soutenue par 5 à 6,000 cavaliers, pour soutenir ses 
droits. 

C'était la guerre qu'on déelarait à la France : le matChai 
ne s'y trompa.point; voulant toutefois éviter une effusion 
de sang inutile, il demanda aux lientenants de l'emperemr 
une conlerence, qui fut acceptée, mais n'aboutit qu'à laite 
ressortir plus clairement les dispositiuns lmstiles du Maroc 
nos plénipotentiaires même y furent insultés. Le maréchal, 
ayant tiré vengeance de cette injure, écrivit à Guennaomli, 
génral de l'empereur : « Après tant de déloyauté de la pari, 
j'aurais le droit de pénétrer bien loin sur le territoire de ton 
maltre, de briller vos villes, vos villages, vos moissons; 
mais je veux encore te prouver mon Immanité et ma mo- 
dération :je me contenterai d'aller à Oucbda pour montrer 
à nos tribus, qui s'y sont réfugis, que je puis les atteindre 
partout. » 
Bugeaud posa ensuite un ultimatum précis par lequel il 
réclamait, comme dans le principe, l'internement d'Abd-el- 
Kader, et la possession incontestée de tout le territoire de 
l'ancienne régence. Cet ultimatum étant resté sans réponse, 
l'armée fran.eaise se mit en marche, le 17 juin 184, pour 
Ouchda, où elle entra le surlendemain, sans avoir brtlé 
uneamoroe. Le mécl»al y laissa un bataillon, et établit son 
camp plus loin, sur la route de Tbaza. 
Sur ces entrefaites, le général Lam o ri ciè re se portait 
du c6té de 5Iascara pour défendre les région du sud et 
du sud-ouest, déjà couvertes par les colounes ecbelonnees 
 Seldou sous le général Tempoure, h Saida sous le colonel 
E'nard et à Tisret sous le général Marêy. Le énêral Le 
Pays de Bourjolly, campé sur la Mina, devait, au premier 
avis, accourir vers les points menacés. 
De son cté, l'armée marocaine se préparait au cmbat : 
malgré les protestations pacifiques de son nouveau général, 
Sidi-Ilamida, elle continuait à se grossir. Le fll de l'empe- 
reur lui-mme, escorté des Abrid-Bokarys, soldats de la 
garde noire d'Abd-er-Rbaman, les plus braves du Maroc, 
était venu la joindre avec 0,000 Immmes. 
Le 12 aott, le général Bedeau ayant rallie le maréchal 
avec 3 bataillons et 6 escadrons, on se mit en marche le 13, 
/ trois heures de l'après-midi. A l'entrée de la nuit, on 
pair dan»l'ordre de marelle, en silence, sans feux. A deux 
hcuresdu matin on se remettait en route; on passait l'l»ly 
au point tin jour, et Irait heures après, des hauteurs de 
Djarf-eI-Akbdar, on apercevait les camps ennemis ceux tant 
les collines de la rive droite, au nombre de neuf, dont celui 
de Sidi-Muley-Abd-er-Rhaman était, ì lui seul, plus grand 
que le n6tre. 
La tente du fils de l'empereur frit désignée comme but de 
l'attaque. Maltresse de ce point, l'armée françaiso devait 
converger à droite et se porter sur les autres camp, en 
tenant le sommet des collines avec ! face gauche du carr 
des carrís. Soudain nos tambours battent "1 chare et nos 
troupes descendent vers les gués au pas acéleré. La cava- 
lerie marocaine essaye en vain de dëfendre le passage : rien 
ne résiste à l'élan des Français, la. rivière est fr,mchie, et 
nos drapeaux flottent sur le plateau voisin de celui ou campe 
le fils de l'empereur. Delà noire artillerie tonne, et ses ra- 
vages jettent le trouble parmi les soldats de la garde noire. 
lIais en ce moment débouchent, ventre a terre, des 
flancs des collines, des masses de cavalerie marocaine, qui se 
précipitent sur nos carrés d'infanterie; mais elles se brisent 
contre une forèt de baiunnettes dont les angles vomissent 
la mitraille. Mrs ces masses confues, tourbillonnant sur 
elles-mêmes, reculent CuvantCs. L'armée française, pour- 
suivant sa marche, enlève au pas de charge le plateau où se 
trouve la tente du fils de l'empereur, et opère ' l'instant 
mme sa conversion sur les camps. lotre cavalerie s'Cance 
 la rencontre de l'infanterie et de la cavalerie marocaines. 
Sous les ordres du colonel lus»nf, six ecadrons de spahis, 
soutenus par trois escadrons de chasseurs, envahisoent pied 
ì pied le camp de Sidi-_Inle.v-Abd.er-Rhaman, et s'en rendent 
maitres sur des monceaux de cadavres. 
Cependant le colonel Morris, ì la tête de six escadrons 
de chasseurs, s'est précipité sur le flanc d'une masse de 



49 
cavalerie qui menace notre aile droite. Nos braves ont déj':, 
fa"t mordre la poussière à 300 cavaliers, berbères ou abid- 
bokbaris  ruais ils s'épuisent à frapper un ennerui qui se 
renouvelle sans cesse, quand trois bataillons, de zouaves, du 
15  léger et du 9 e de chasseurs à pied, tombent enfume 
la foudre au ruilieu de cette lutte héroïque, rendent l'of- 
fensive au colonel Morris, qui refoule les Marocains. 55O 
chasseurs français avaient soutenu le choc de 6,000 cava- 
liers enneruis. 
Entre-terups, les troupes de l'empereur se sont ralliées 
sur la rive gauche de l'Isly, dans l'intention de reprendre 
leurs camps. Mais notre artillerie franchit la rivière ; l'infan- 
terie, protégée par son feu, gagne l'autre bord ; les spalmis 
les suivent, soutenus par trois escadrons du c e et deux du 
1 er de chasseurs, avecdeux escadrons du 2¢àe hussards, aux 
ordres du colonel Gagnon; l'ennemi, bala}é, s'enfuit de 
toutesparts, et disparalt, à midi, en pleine dëroute, du coté 
de Thaza et dans la direction des valléês des Beni-Senassen, 
laissant sur le champ de bataille 8O0 morL et 2,000 blessés, 
tandis que notre perte ne dépasse par 4 officiers tués et I0 
blessës, 23 sous-officiers ou soldats tués et 86 blessés. 
I i pièces de canon, IS drapeaux, 1,200 lentes, au nombre 
desquelles se trouve celle du fils de l'empereur, le parasol 
signe du commandement, une grande quantite de munition. 
de guerre et un butin considérable deviennent le partage de 
nos troupes rentrées victorieuses dans le canp du sultan. 
Leur eflectif ne s'Cevait pas pourtant au-dessus de 8,500 
fantassins, 1,400 cavaliers réguliers, et 400 irrégulier» ; tan- 
dis que l'armée ruarocaine comptait 30,000 cavaliers et 
10,000 lantassins. 
Le ruaréchal Bugeaud fut créé àuc d'Isll en récorupense 
de cette victoire. Eug. G. bE 510,CLVE. 
ISLY ( Dtc d'). Vol/e: Bucun. 
ISMA EL (c'est-à-dire D[e[ exauce), fils d'A b ra h a m 
et de sa servante A ça r, alla s'établir avec sa mère, chas- 
sée par S a r a, vers le désert de Pharan, no il grandit et 
devint très-habile/ tirer de l'arc. Quelque temps après, il 
épousa une femme égyptienne, qui le rendit père de douze 
enfant. L'Écriture nous dit qn'Abraharu fut enterré par ses 
deux fils, Isaac et Ismael. Ce dernier serait donc retourne 
auprès de son père après la mort de Sara. Il avait cent 
trente-sept ans lorsqu'it ruourut ; sa posterité était dia nom- 
breuse, et il fut enseveli au milieu de tout son peuple. Le 
souvenir d'lsmaei s'est conservé précieuseruent parmi les 
ruahoruétans ,qui le regardent comme leur père et l'un des 
plus grands patriarcbes. Dans le Cornu, Mafioruet se 
glorifie d'lre descendu de ce fils d'Abraham, et il en parle 
comme les Juifs parlent d'l saac, avec le plus profond res- 
pect et la plus grande admiration. Ses des¢endants ont con- 
servé son caractère indépendant etsauvage. Toujours errants 
et indoruptés, leur ruain s'est levée contre tous, et les mains 
de tous se sont levées contre eux, selon les paroles de l'Eri- 
lute. Les douze fils d'lsruael lutent la souche de douze tri- 
bus arabe, qui se sont conservées longtemps intactes. 
IS$1AÉLIENS ou ISMAËLITES. Les ruusulmans, qui 
ont dans teur religion rurue les germes du e o ru va u n i s m e, 
comptent plusieurs sectes qui l'enseignent positivement. La 
plus célèbre est celle des imalicns. Elle doit sa célé- 
brité au r01e politique que ses ruembres ont joué :a diffé. 
rentes époques, surtout / celle d» c r o i s a d e s, sous le 
noru d'assassins, ou pour mieux dire de haschichins, 
c'est-h-dire boveurs de h a s c h i c h, lesquels, selon les écri- 
nains ruusulruans, dans l'espoir d'Cever leur puissance sur 
les ruines de l'islamisme, favorisèrent les croisés et leur fa- 
cifitèrent la conquête da iittoral de la Syrie. 
Les isrualieus ne sont que les continuateurs de l'an- 
cienne secte coruruuniste que llazdak propagea en Perse, à 
la fin du cinquième siècle de notre ère et au commence- 
ment du sixième,secte que le roi sassanide Cobad 
 Cavades ) protêgea, et dont il adopta ruêvae tes principes 
4ans son gouverneruent. 
llazdak enseignait purement et simplement la coruruu- 

ISLY -- ISMAËLIENS 
nauté des biens, corume nos socialistes ruodernes, e, par 
une conséquence toute naturelle, celle des temrues. I! 
exposa la théorie de son systrue dans un livre intitul 
Desnad, que ses partisans ont encore entre leurs ruains. Il 
tant voir les bonnes raisons qu'il  donne de cette double 
communauté. « Puisque, dit-il, les crimes n'ont génerale- 
ment lieu qu'à cause des richesses et d femmes, le plus 
court ruoen d'aruener la vertu sur la terre, c'et d'avoir 
les biens et les femmes en commun, pour qu'on en ouisse 
également, comme on jouit de l'air et de l'eau. Il est souve- 
raineruent injuste, ajoute-t-il, qu'un bomrue ait une femme 
cbarmante, tandis que son voisin en aura une laide et dé- 
sagrëab}e; il faut donc qu'ils en fassent, an moins de 
temps en temps, un échane fraternel pour rétabfir l'éga- 
litWnaturelle. Il en est de mrue des biens et des avanta- 
ges temporels. Pourquoi les uns posséderaient-ils des riches- 
ses, occuperaient-ils un rang élevé, tandis que d'autres se- 
raient dans la ruisère et l'abjection ? Il est donc juste 
d'effacer la distinction des rangs et de céder ses biens à 
frères pour établir entre tous une juste égalité. » 
Quant aux dogmes religieux, Mazdak adoptait ceux des 
anciens Perses sans accepter les modifications que la réforme 
de Zoroastre avait introduites, c'est-ì-dire un bon et un 
mauvais principe, la lumière et l'obscurité, Ya:dan et Ahri- 
ruan : le premier, auteur de la vie et de la santé; le se- 
cond, de la mort et de la maladie. Il croyait ì l'CernirL de la ruatière et à la métempsycose comme moyen de pu- 
nition et de récompense. Par suite, il défendait absolument 
de tuer les animaux et de manger leur chair. Il voulait 
qu'on ne se nourrtt que de végélaux, d'œufs et de laitage. 
L'application du système abominable de bazdak boule- 
versa la Perse entière. Enfin, il  eut une révolution réaction- 
naire, et Cobad, désormais plus sage, se contenta de toiC 
ter 5Iazdak et ses partisans, mais cessa de professer et 
d'appliquer s exécrables principes. Son fils, le gran,: 
Khosroës, surnommé le Juste, n'aait jamais partagé les 
erreurs de son père. Il ne tut pas plus t0t ruonté sur le 
tr0ne qu'il travailla  détrnire radicalement la secte de 
5lazdak. Il le fit saisir, lui fit trancher la tète, et fit pen- 
dre, dit-on, en un mme iour, cent mille de ses principaux 
partisans. Il restitua aux Iégitimes propriétaires les biens 
dontils s'étaienteruparé% et rendit/ leurs époux les ferurues 
qu'ils avaient enlevées. Les Persans, qui avaient fui leur pays 
dégradé par le communisme, revinrent en foule, et Kbos- 
roès rípara autant qu'il le put les pertes et les domruages 
qu'ils avaient éprouves. 
Les a'.datesou cobadiens, comme on les appelait 
aussi, du noru de leur ancien fauteur, ne furent cependant 
pas entièreruent anéantis, car nous tes voyons reparaitre 
environ trois siëeles plus tard au sein de l'islaruisrue, qu'ils 
aaient été ohligés d'embrasser extérieureruent. Cette fois 
ils adoptèrent de préference l'appellation d'ismal[ens, ce 
qui n'erupcha pas qu'on leur donner les autres noms et 
plus comruunéruent celui d'vapies (malahid). Le noru d'is- 
maCiens leur vient d'lsmael, fils de Jafar Sadic, selon eux 
le septièrue et dernier iruru. Ce fut eu effet Mubarurued, 
fils d'Isruael, que ces sectaires identifient à son père, et 
auquel ils attribuent la qualité d'imdrn ternel, qui ì la 
fin du huitièrue siècle rajeunit par les idées ruusuLrnane 
la secte antique. Les nouveaux ruazdakins ne se ¢onten- 
tërent pas de répandre paisiblement leurs principes ; ris 
prirent les armes, se rendirent bient6t redoutables aux 
khalifes, et finirent par établir des dynasties en Égy. pie, 
dans l'Irak et dans l'Yéruen. Leur règne fut court dans ce 
dernier pays; mais en Afrique leur dynastie, dite Fati- 
ruite, fondée au commenceruent du dixième siècle, dura 
deux cent soixante-deux ans, et fournit le fameux Hakim- 
bi-Arur-Mlab, ce fou m.chant qui se fit passer pour dieu 
et qui fonda la secte des d r u se s, qui ne se distingue de 
celle des isruaéliens que par un plus grand devté d'ex- 
travagance, ainsi qu'on le voit dans l'Expos de la reli- 
gion des Druses de l'illustre 5. de Sacs. 



ISMAELIES 
La dynastie que fonda en Irak Haçan, fils de Sabbah (le 
Vieux de la [nonlagne), en qualité de député de lï[n[n, 
vrs.la fin du onzième siècle, dura cent soixante-dix ans. 
Les sectateurs de ce dernier imposteui poussèrent jusqu'au 
cynisme le plus révoltant la pratique de leurs détestables 
maxi[nes. Heureuse[neuf le conquérant [nogol Houlakou 
détruisit la' pu'sanc politique des ismaéliens et les ré- 
duisit au r61e de sectaires religieux. En cette dernière qua- 
lité ils sont loin d'tre anéantis, et on en compte encore un 
bon no[nbre en S)rie, en Perse et dans l'Inde. 
Quoique la secte des fs[nuCiens soit en réalité la In,me 
lue celle de lazdak, et qu'elle professe les [n[nes opi- 
nions fonda[nenlales socialisles et relieuses, elle diffère 
néan[noins en apparence de l'ancienne secte, parce que la 
secte nouvelle s'est manifestée dans l'isla[nis[ne et en porte 
le cachet. Il en réulte un symbole contradictoire dont voici 
les principaux points. 
Les is[naélieus disent d'abord qu'ils ne confessent ni ne 
I 
nient l'existence de Dieu. Toute[ois, ils admettent gén,.ra- 
lement les de»x principes de Mazdak. Il )' en a cependant 
parmi eux qui admettent dans la divinité un précédent et 
un suivant; un fécondant et un fécondé; un premier 
tre et un autreëtre qui est son ordre ou sa parole. D'une 
part, ils disent qu'il ne peut y avoir ancnr, rapport entre 
Dieu et l'bore[ne; et d'autre part, ils admettent générale- 
ment, du moins à l'extérieur, le système de l'infiJsoin suc- 
cessive de la Divinité dans la personne d'AI i, auquel ils 
attribuent la formation du monde, des imà[ns, ses suc- 
cesseurs, et méme d'autres che[s de leur secte. 
Ils divisent la suite des siècles du monde actuel en sept 
periodcs, car les is[naéliens affectionnent le nombre sept. CI:a- 
que période a son prophète ou orateur, et à sa suite il 
a sept vicaires, dont un principal. Ce sont Ada[n et Seth, 
oé et Sein, Abraham et Ismael, Moise et Aaron, Jésns le 
blessie et Si[non Pierre, Mabomet et Ait, Is[nael et son fils 
l,luham[ned, qui selon eux est encore vivant. Ces vicaires 
ou i[nms ont chacnn à leur tour douze ministres, cfiargés 
de prècfier la religion dans les différents pu)s. CI,acun de 
ces propbètes a établi selon les ismaélieus une relion 
nouvelle, dont la dernière est la plus parfaite. C'est 
qui est le martre du monde extt.rieur; c'est de lui seul 
qu'on peut obtenir la connaissance de Dieu. 
Les is[naéliens rejettent la tradition, et quant au Coran, 
que le» musui[nans considèrent comme la parole de Dieu, ils 
nient sa divinité; ils allégorisent ses dogmes, et enseiv, nent 
ques es prescriptions ne sont pas obligatoires pour ceu. 
qui en connaissent le sens mystique. Ainsi, la fin du [nonde, 
la rurrection, le jugement dernier, le paradis et l'euer 
ne sont selon eux que des expressions allgoriques pour 
signifier le cataclysme du ciel et de la terre et les clmnge- 
ments qui le suivront ; ou bien le paradis, c'est la vraie re- 
ligion, c'est-à-dire l'is[naélisme; l'enfer, les autres reli- 
gions. Ainsi, ils n'ont ni te[nple ni culte public ; cependanl, 
ils observent hypocrite[nent les pratiques extérieures du 
culte musulman quand ils le croient utde à leur intcrèt. 
Ils sot circoncis et portent des noms [nusulmans. llais ou 
leur enseigne que l'ablution c'est la reconnaissance de l'i- 
ra[n ; la prière, sa parole; le je0ne, le secret ì garder sur 
les doctrines de la secte envers les profanes; l'aum6ne lé- 
gale, le soin de soi et de sa famille ; le pèlerinage à La 
llecque, la visite à l'i[n[n e. l'obéissance qu'on lui doit ; 
en un mot, ce qui est défendu, c'est ce qui déplait ; ce qui 
est ordonné, ce qui plait : ainsi plus de vertu, plus de vice, 
plus de bonne action, plus d'action criminelle. 
Les is[naêliens disent que l'extérieur est le reflet de Iïn- 
lérieur, qu'a chaque ci,ose extérieure répond une ci,ose 
intérieure ; qu'en conséquence on ne, doit rien prendre lit- 
téralement, mais chercher toujours le sens [nystique de 
ute chose ; que ce qu'on nomme la 'évlatlon nous fait 
connaitre l'extérieur, la doctrine exotérique, mais que 
c'est à nous d'en chercher l'explication et de trouver ainsi 
l'tutCieur, la doctrine »otérique. lls anéanlissent ainsi 

-- ISMAIL 493 
toute révélation, et n'admettent pur expliquer les mys- 
tères de la nature que la méthode rationnelle. Donc ils reo 
jettent la création ; et quant à l'existence de l'univers, ils 
pensent qu'il y a eu plusieurs séries de créatures humai- 
nes avant la race d'Ada[n, et qu'apr le monde actuel il 
y aura un monde nouveau. 
La science des no[nbres et des lettres occupe une grande- 
place daus leur systè[ne; et ils font observer les no[nbres 
qui sont dévolus aux divers objets de la nature et qu'ils 
appliquent à leur religion. Ainsi il y a sept planètes, sept 
cieux, sept terres, sept ouvertures dans le visage de l'ho[n- 
[ne, etc., ce qui est l'emblème des sept prophètes et des sept 
i[nàrs dont nous avons parlé. Il y a douze signes du zoàia. 
que, douze mois de l'année, douze chefs de tribu d'lsrael, 
etc., ce qui représente les douze ministres des i[nms. 
Quant aux lettres, ils en distinguent de lu[nineuses et d'obs- 
cures, de substantielles et de corporelles ; elles expriment 
selon eux les maisons de la lune, les signes du zodiaque, 
les planètes, les éléments, etc. 
Les principes que nous venons d'exposer sont dévelop- 
pés peu à peu à l'adepte, et ils constituent neuf diflrents 
degrés d'initiation, car ce n'est que pas h pas qu'il est 
amené à admettre le pur matérialisme, q,i est en définitive 
l'essence des doctrines rationalistes de la secte. Le mission- 
naire ou da[ ( dey ) doit d'abord paraitre [nnsul[nan avec 
les mnsul[nans, chrétien avec les chretiens, juif avec les 
juifs, i[npie avec les i[npies, et prendre le costume que les cir- 
constances exient. Puis il parle adroite[nent de l'incertitude 
qu'on éprouve en matière de religionetdela nécessité de se 
soumettre à une a,torité incontestable. Il annonce comme 
telle celle de l'i[n[n, et aussit6t que l'adepte parait ad- 
mettre les principes que le daï veut lui inculquer, celui-ci 
exige de lui le serment de ne jamais reveler les secrets 
de la secte. Puis il arrive avec beaucoup de précautions au 
développement successif des autres principes ismaéliens ; 
enfin, il exige le serment de l'obéissance passive, qui doit 
aller jusqu'au meurtre et au suicide. Quand le missionnaire 
a obtenu ce serment fatal, l'adepte n'est plus qu'un auto- 
mate, qu'il fait mouvoir ì son gré. 
GAICI DE T,sY, de l'Institut. 
IS3LkÉLITES. La Genèse fait [nention d'une tribu de 
ce no[n,/ l'occasion de la vente de Joseph par ses frères. 
L'Ancien Testament confond d'autres fois les Is[naëlites et 
les Madianites, et les Arabes eu général sont désignés sous 
ce no[n, qui n'appartenait sans doute pas exclusivement 
aux descendants d' I s In a e I, fils d'Agar et d'Abraha[n, puis- 
qu.'au temps de Jacob les Is[naélites se[nblent dëjà ètre une 
peuplale ..ou tribu nombreuse. 
ISM.LIL la plus importante des places fortes de la 
Bessarabi e, en [nè[ne temps port et station de la flottille 
du Danu be, située sur la rive gaucbedu bras de ce fleuve 
appelé Kil#¢, élaitencore autre[nent i[nportante avant ! 789, 
époq,,e où Souvaroff, à la suile d'un affreux bo[nbarde- 
ment, l'enleva aux Turcs, et comptait alors au delà de 30,000 
habitants, lestée pendant Iongte[nps un amas de ruines, 
elle ne se releva que lorsque la paix conclue en 1812, 
Bucharest, l'eut cédée ì la Bussie. En 1838 on y co[nptait 
déjà 2t,900 habitant% douze églises, deux écoles et seize fa- 
briques: aussi sa population doit-elle étre revenue aujour- 
d'hui au chiffre de 30,000 à[nes, car là co[nme à O de s s a le 
com[nerce a singulièrement lavorisé l'accroissement de la 
population. C'est avec Constantinople surtout que se fait 
le commerce d'ts[naïl, qui l'emporte de beaucoup en impor- 
tance sur celui de Kilia et celui de Beni, aucune de ces 
villes ne comptat au dei de 10,000 habitants. E t850 
il n'arriva à Ben'; qu » bti[nents : c'Cit encore 36 de plus 
qu'en 18-9 ; l'importation et l'exportation y avaient donc 
doublé. Mais comme il ne se trouve pas en cet endroit 
de ngociants établis à demeure fixe, les opérations 
font pour le co[npte des places de Galatz, Ismail, Toultscha 
on Constantinople. Un service rgulier de bateaux ì va° 
peur existait avant la glerre actuelle entre Odessa et Beni 



494 ISMAIL 
toutefois, il n'en a point résulté d'augmentation pourle com- 
mexce de Reni et d'Ismail, à ca«se des nombreuses et gnan- 
tes formaiités de douane auxquelles les expéditions y sont 
soumises, et par suite desquelles on préfèrerenoncer h faire 
des opérations. 
ISNAP, D (MAxml), néàGrasse(Var), le 16 février 1751, 
était par conséquentàgé de trente ans lorsque son dcpar- 
lement le députa  l'Assemblée Iéslative. il tait le second 
filsd'un riclie négociant, jouissait d'une honnête fortune, 
et avait reçu une bonne êducation, qui développa en lui 
sous la double influence du beau ciel du midi et de l'a- 
mour de la liberté, cette éloquence vigoureuse et brillante 
qu'il ne tarda pas à signaler d la tribune de i'Assemblée 
législative, et peu après  celle de la Convention natio- 
nale. Ses principesClent ceux de la Gironde. !1 ne lit 
qu'exprimer les sentiments de l'immense majorité de la 
nation, quand, le 14 novembre lt79!, il réclama des me- 
sures propres à réprimer les menues du ciCgWet les écrits 
des prêtres, abusant de leur inlluence pour calomnier la 
révolution, détruire la liberte, ressusciter les alus et 
préparer la guerre civile. Il ne fut pas moins énergique. 
ensuite contre les émigrés. Ce n'était pas setdemcnt l'in- 
dignation qui électrisait sou 5me, il trous'ait de touchantes 
expressions pour inviter  la concorde ses collêgues divi- 
sés. La Gironde, ayant ChouWdans ses tentatives pour 
samer il la fois la liberté, le roi et la constitution de 1791, 
fut entrainée vers la république, seule institution qui pàt 
alors sauver la France. Isnard avait trop brillamment ius- 
liftWson premier mandat pour n'tre pas Cu, en septem- 
bre 1792, . la Convention nationale. Là il montra le 
même talent; mais ses adversaires ne furent pas les 
mmes : comme ses amis de la Gironde, il êprouva une 
amëre et prolonde douleur il l'aspect du triomphe des 
plus dangereux ennemis de la liberte : la dmagogie et l'a- 
narchie. Proscrit par les meneurs de la commune de 
Paris, il ne lui resta plus qu'à partager les luttes et les 
périls des Giroudins : il ne cessa pas d'ëtre digne d'eux 
et de lui-mëme. Mis hors la loi, il fut plus heureux que 
ses amis, ecbappa au fer de Robespierre, et reparut après 
le 9 thermidor, mais découragé, quoique fidèle  ses an- 
ciens principes, cherchant en vain dans la Convention mu- 
tilée les grands orateurs que la hache avait frappés, elfrayé 
surtout de i'état où se trouvait la France. Il brilla peu au 
Conseil des Cinq Cents. Son cœur généreux était brisé, 
cette brillante voix avait pli, et, quelques années après, 
l'attentat du 18 brumaire acheva de contrister son ",hue 
découragée. Retiré dans sa ville natale, il y mourait, 
en 1830. 
Louis Du Bois. 
|SOBAROMÉTBIQUES (Lignes), du grec 
gai, et 6=p6po, haromëtre. Ou appelle ainsi des lignes 
que l'on se reprësente comme passant par des lieux 
graphiques où les modilications barométriques annuelles 
et moyen.nus sont égaies ( VOile.'. B.am/ri ). 
ISOCELEet mieux ISOSCÈLË (de Itro, Cai, et 
jambe ). Un triangle est dit isocèle, quand il a deux de 
ses c(tés égaux entre eux. On démontre kës-facilemeut 
que les anales.opposés/ ses c6tés égaux sont aussi egaux. 
ISOCHIMENE (de tro, al, et ZqoSv, hiver). Voyez. 
SOTH'a E,.'.. 
ISOCHIOME ISOCBBOMIE (du grec I;, al, et 
Zp,:,tz, couleur ). Isochrome se dit de plusieurs objets qui 
sont également celerC. Isochrornie est quelquefois em- 
ployê comme synonymede lit hochrom i e. 
ISOCHPONE ( de .o, égal, et 7.ë6vo;, temps ). Tout 
mouvement qui se fait eu des temps égau, est dit isochrone. 
Les oscillations du p e n d u I e sont parfaitement isochrones 
lorsque, par unedisposition fort ingenieuse, on lui fait dé- 
cre un arc de cy c io ï d e. Néanmoins, dans la pratique, 
on se contente de suspendre le pendule tout simplement 
de fa.con qt,e sa lenfille décrit des arc de cercle ; car on 
a fait l'observation qu'un are de cercle qui est fort cour 

ISOCRATE 
ne diffère pas sensiblement d'une portion de cycloïde. Un 
pendule emploie toujours le même temps pour décrire des ' 
arcs plus ou moins grands, pourvu que sa longueur ne varie 
pas : si i'arcest petit, le mouvement est plus lent; il de-. 
vient accéléré . proportion que l'are augmente. 
Les géomètres ont cbercbé et tronvé des lignes suivant 
lesquelles un corps pesant doit s'avancer vers tin point 
donnë d'un mouvementconstamment uniforme° Leibnitz est 
le premier qui ait démontré, en IG9, les propriëtés de 
plusieurs de ces lignes, qui ont reçu la qualification d'/so- 
chroes. 
ISOCP, ATE un des pluscélèbres orateursde la Grëce, 
était né h Athënes, la première année de la 86 e olym.piade 
(436 ans avant ,t.-C. ). Sou përe, Théodore, qui avait une 
fabrique d'instruments de musique, s'étant enridfi dans 
ce commerce, ne negligea rien pour Péducation de son 
fils. Le talent de la parole était alors le moyen le plus sùr 
pour arriver aux emplois publics et pour exercer de l'in- 
fluence sur le gouvernement de l'État. Isocrate eut pour 
maitres les rbCeurs les pins célèbres de son temps, Pro- 
dicus de Cées, Gorgias de Léontium, Tissias de Syracase, 
et Théramène, qui fut ensuite un des trente tyrans. Mais 
la faiblesse de son organe et une timidit6 insurmontable 
ne lui permirent pas de se faire entendre en public. Ne 
pouvant tirer de ses Cudes oratoires le fruit qu'il s'en 
etait promis, il se mit d composer des discours et des plai- 
do)ers pour ceux qui n'étaient pas capables d'en faire eux- 
mëmes; puis il ouvrir une école de rhétorique, où il en- 
seigna son art avec Iv plus brillant succès. Il vit accourir 
l'élite des jeunes Grues, attirés par le déir de se distin- 
guer dans la carrière politique. Il compta parmi ses élëves 
une foule d'orateurs et dhommes qui s'illustrèrent en- 
uite par leur éloqueuce ou par 1 talent d'écrire, Isée, 
Hyperid e, Timotbíe, Xénop bon, les historiens Tbéo. 
pompe de Chie, Epbore de Cyme. Cicéron a dit que l'é- 
cole d'Isocrate était une fabrique d'orateurs, et qu'ils en 
étaient sortis aussi nombreux que les héros grues du cbe- 
val de Troie. Il amassa ainsi une grande fortune. On 
lui reprochait de faire payer ses leçous un prix considéra- 
ble. Il reçut de Nicoclës, roi de Chypre, 20 talents ( plus de 
100,000 fr. ) pour un discours. lalgré ses succès comme 
professeur d'éloqueuce, il ne se consola jamais de n'avoir 
pu déployer à la tribune ses talents d'orateur. Il ne montra 
pas cependant toujours la même timidité; plus dhme fois en 
sa,vie il fit preuve d'un noble courage. Le lendemain de la 
mort de Socrate, quand les disciples du philosophe, constor- 
ués, se cachaient ou prenaient la fuite, il osa se montrer seul 
en habits de deuil dans Athènes. Il était alors gé de trente- 
six ans. Précédemment, dans sa jeunesse, il avait donné un 
autre exemple de fermeté. Quand son maitre, Théramène, un 
des trente tyrans, proscrit par ses collègues, dont il ne parta- 
geait pas les fureurs, se réfugia en pleine assemblée auprès 
de l'autel des dieux, Isocrate se leva pour prendre sa dé- 
fense, et il fallut que Tbéramène lui-même prit son jeune 
discipli de lui épargner la douleur de le voir mourir 
avec lui. 
Il resta lié tuute sa vie avec Platon, dont il avait té con- 
disciple, et qui, dans son Phèd,'e, met ces paroles hotm- 
rables dans la bouche de Socrate. « Isocrate me parait 
avoir trop de talent naturel pour tre comparé à Lysias; 
il a aussi des incllnations plus généreases, en sorte que je 
ne m'étonnerais pas, inrsqu'iI avancera en age, si, dans 
le genre auquel il s'applique maintenant, ceux qui l'ont 
précédé dans l'art oratoire semblaient des enfants auprës 
de lui ; et si, peu content de ces soins insuflïsants pour 
remplir son àme, quelque inspiration divine le poussait 
vers de plus grandes choses, car il y a dan» cette jeune 
intelligence quelque chose de naturellement propre à la 
philosophie. ,, Après. la bataille de ChCouée, qui assura la 
la domination de Philippe, roi de ?,lacédoine, sur toute la 
Grèce, Isocrate, ne voulant pas survivre  l'indépendauce 
de sa patrie, se laissa mourir d'inanition, la truisoeme 



ISOCRATE 
année de la I t0 e olympiade (338 ans av. J.-C.) : il était alors 
dans sa quatre-vingt-dix.nenvième année. 
Il nous reste vingt-et-un ouvrages sous le nom d'lsocrate. 
On peut les diviser de la manière suivante: trois dans le 
genre moral : t ° A Ddmonicus : c'est un recueil de maxi- 
mes détachL«es, que les meilleurs critiques attribuent ì un 
Isocrate d'Apoilonie, dont Suidas et Harpocration ont con- 
servé la mémoire, et qui fut disciple et successeur de 
rateur ; 2 ° A 1Vicoclès, fils d'Évagoras, prince de Salamine, 
sur l'art de régner ; 3 ° lïcoclès : c'est ce prince qui parle 
et qtti expose les devoirs des sujets envers leur souverain. 
Cinq dans le genre délibératif : 1 ° le Pmlé9yrique , ou dis- 
cours prononcé dans ana des assemblées solennelles de la 
Grêce ; c'est le plus achevé des ouvrages d'lsoerate ; on pré- 
tend qu'il mit dix ans à le polir eth leretoueher. 11 a pour 
objet d'unir tous lesGrec contre les Perses et de montrer que 
parmi les États eonfédérés la prééminenee est due aux 
AihCions, de préférence aux Spartiates; 2 ° A Philippe de 
31acédÇine, pour l'engager ì se porter médiateur entre les 
villes grecques et à faire la guerre aux Perses; 3 ° Archi. 
da»tus : sous le nom de ce prince, fils d'Agésilas, et qui 
fitt ensuite roi de Sparte, il engage les Lacédémeniens, après 
la bataille de llantinée, ì ne pas consentir au rétablis- 
sement de la ville de Messène, exigé par les Thébains; 
6 ° Ardopagiliq«e, ainsi nommé, parce que l'auteur y vante 
beaucoup l'influence de l'aréopage : c'est un «les meilleurs 
discours d'Isocrate ; il y propose une réforme de la repu- 
bliqne mise en përil par l'anarchie et la licence, et conseille 
aux Athéniens de rétahlir la constitution de Selon, modifi6e 
par Clisthène ; 5 ° De la Paix : dans ce discours, composé 
après le commencement de la guerre Sociale, il engage les 
AihCions a faire la paix avec Chie, Rhodes ci Byzance, 
età renoncer à,la suprématie. Quatre éloges : 1 ° Oraison 
fuèbre d'Evagoras, roi de Salamine dans l'fie de Cbypre ; 
2 ° Éloge d'HelèIe; 3  Éloge de flusiris, déclamation d'un 
genre trè»usité dans les écoles des sophistes ; 6 ° Pana- 
thenaïque, ainsi nommé, parce que ce discours fut pro- 
henné dans les Panathénées, fgte de blinerve h Athènes : c'est 
l'eloge de la république athénienne, et un des meilleurs 
morceaux d'Isocrate. Huit discours judiciaires : t ° Plainte 
des habitants de Platée contre les Thébains, qui, en 
pleine paix les avaient expulsés de leur patrie ; 2  Sur 
l'dchage de.fortune; 3 ° Sur m procès intenté au flls 
d'Alcibiade, au sujet d'un attelage de chevaux ; 6 o Gontrc 
le banquier Pasion, niant un dép6t à lui centiC 
5 ° contre Callirnaque : 6  Discours prooncg à Éginc 
dans une affaire de succession: 7 ° Plainte pmtr violeccs 
contre les Lahites ; 8 ° Pour/Vicias contre Euthynoos, dé- 
positaireinfidèle, qui comptait sur l'impossibilité deprouver 
le dép6t, faute de témoins. Un discours Contre les 8aphte* 
es, qui abusent le public par de fausses promesses ; et dix 
lettres adressées à Philippe de liacédoine, ì Alexandre son 
fils, aux fils de Jason,tyran de Thessalie ; ì Timothée fils 
de Clarque et prince d'Héraelée; aux magistrats de blity- 
lène, ì Archidamus, ì Denys de Syracuse. Des doutes 
fondés se sont Cevis contre l'authenticité de la dixième, 
qui n'est qu'une déclamation mise par quelques eophistes 
sous le nom d'Isocrate. 
C'est surtout comme écrivain qu'il est estimé, bien que 
son goOt ne soit pas toujours irréprochable. Cmme il avait 
tenantWa]x triomphes de la tribune, et qu'il n'Cuvait guère 
que pour ttre In dans le silence du cabinet, il s'attacha 
principalement à l'élégancedu style et à l'harmonie du lan- 
gage. Les critiques de son temps lui reprochaient de travail- 
ler plut0t pour flatter l'oreille que pour toucher le cœur, 
de trop arrondir ses périodes, et de sacrifier souvent la pen- 
ée à l'éclat.de l'expression. Il laut re¢onnattre néanmoins 
qu,il traita-dans ses ouvrages les points les plus imporlants 
de la politique et de la morale, et que s'il n'atteignit pas 
la perfection de l'éloquence populaire, il conserva du moins 
la renommée d'un écrivain habile et d'un bon citoyen. 
ATAD. 

-- ISOLOIR 495 
ISODYNAMIQUE (de o, Cai, et Ùv«tt:, force). 
se dit de deux animaux, de deux machines qui sont de mme 
force. 
ISOLAN! (JEr-LOiS-HCTo, comte n'), g_nérai au 
service de l'empereur à i'époque de la guerre de trente ans, 
né en 1586, descendait d'une famille noble de l'ile de 
Chypre, et, comme son père, prit du service en Autriche. En 
1602 il fut lait prisonnier parles Turcs; mais il parvint ì s'é- 
chapper, et obtint bientôt après le commandement d'un ré- 
giment de Croates. Au commelcement de la guerre de trente 
ans, il combaltit d'abord contre le comte de Mansleld, et 
servir ensuite sous les ordres de Save|li en Poméranie. Promu 
au grade de général, il fut battu, en 1631, à Sihlbach, et en 
1631 h Lutzen. Grand-maltre «le l'artillerie, il obtint en 163I 
le commandentent supériear des .Croates, et tors du partage 
des domaines de Wallenstein, il reçut, en recompense de sa 
trahison envers ce grand homme,les seigneuries d'Aicha et de 
Friedenstein, avec le titre de comte. Plus tard il combattt 
à lordlingen, en Bourgogne, en 1637 en Hesse, en 1638 en 
Poméranie, en 1639 sur le haut Rhin, coutre le duc Ber- 
nard «le Weimar et le marechal de G u e b r i a n t, et mourut 
en 164o, à Vienne. 
ISOLATI  Menti ). Voye-- Eeç_ (Menti). 
ISOLEMENT. Si avant de définir ce mot nous com- 
mençons par en chercher l'étymologie, nous trouverons 
qu'isolement est derivé de l'italien iola, venant lui-mème 
du latin insula, lle. Soit en effet qu'on l'applique à un 
homme ou à une agglomération d'hommes en un corp» 
distinet, soit qu'on l'emploie dans le langage architectural, 
ce mot d'isolement repre.eute toujours l'etat d'on corps 
ou d'un objet sépare des autres, de la mme manière 
qu'une fie est séparée des autres ries ou d continent par 
l'eau qui l'environne. Belativement aux choses, leur état 
d'isolement via-a-vis les unes des autres est quelquefois 
commandé par la prudence : c'est ainsi que les poudrières, 
les moulins ì poudre, devraient ètre placés à une ande 
distance des maisons, établissements, villages, etc., qui 
pourraient tre détraits par leur explosion; que certains 
étahlissements, certaines manufactures considërés cerf- 
me insalubres, doivent être également iso/ds et placés 
hors des villes ; c'est ainsi encore que, dans l'art des loi-- 
ride.allons, les citadelles, les forts, doivent tre ilés de 
tout ce qui contriboerait h faciliter leur attaque et de tous 
les points d'oà on pourrait les dominer, 
Belativement à l'homme, l'isolement est I'tat anormal 
dans lequel il tombe, soit par misanthropie, soit par pen- 
chant vers les idées religieuses, soit par salle de malheurs. 
Le premier de ces états est tout ì fait volontaire; mais l'i- 
solement auquel se condamnent les moines et les religieuses 
qui adoptent la vie claustrale ne peut ètre dans certains pays 
rompu au gré de celui qui s' est vauC Les condamnes sont 
aussi dans un état d'isolement à l'égard de la société, qui 
les parque tout à lait en dehors des autres hommes. On est 
ailWplus loin; on a pensé que l'amélioration morale des con- 
damnés serait plus grande dans un isolement plus complet ; 
on a voulu les séparer les uns des autres dans des cellule» 
partienlières : de là le système cellulaire, ou des péniten- 
c te rs. Cependant l'isolement est une punition bien dure, 
bien sévère, pouvant facilement mener h la démence, car 
l'homme n'est pas né pour vivre seul ; mais on objecte Pin- 
lérot de la société, on mulfiplie les visites du dehors, de» 
visites choisies; on demande les secours de la relion, on 
appelle les visites charitables pour apporter l'cepCance 
dans ces prisons. Les lois ont tellement compris l'horreur 
de ces spulcres vivants, qu'elles ont dU réduire le temps de 
la peine passée dans les pénitenciers, ou permettre aux pri- 
sonniers la prière e! le travail en commun au rallient «lu si- 
lence; mais alors comment les empcher de se eonnaitre'. 
ISOLOII. Dans les expériences de physique, «le chi- 
mie, etc., on se trouve souvent dans la nécessité de sou- 
fraisée un flaide à l'influence de corps qui peuvent l'attirera 
lui livrer passage, etc. On parvient à ce résultat de deu 



manières : t° en ê|oinant du fluide es corps qui 
air ur ioi : c'est i, ça exemçle, qu'on n'étude les 
çénomnes çrodul» pot lamant tue dan  neux où 
il ne e trouve point d fe, de ikei, elc., mi 
ont la propriété d'attirer i aiguiU aimantCs, et de leur faire 
prendre par oenMquent de lausoes direcons; 2  on isole 
I fluides, ou mme l solide, en les entourant de matièr 
qui nentralint, du moins en partie, les actions que d'au- 
tres rps uvent exeroer sur eux, ou bien qui empchent 
 fluides de se répdre : Iorsqu'on veut, par exemple, 
cumuler du fluide éctHque sur un tube de cuivre, on isol8 
celui-ci en le soutent r des tub de verre enduits de 
matièr résineuses, telles que la gomme laque :  appa- 
rus empchent le fluide électdque de se répandre ns le 
sol, ou le rEserroir mm. Le fluide Eltrique travernt 
difficilement la soie, le verre, les plum les résines, l'air 
sec, etc., tout ces matières sont plus ou ioins propres 
faire des isoloirs pour les machines electriques. L fils 
électriques des tdégraphes sont sparís sur  poteux par 
des isoloirs. 
Les isoloirs, méme ceux qui psent pour les meilleurs, 
ne sont jamais tout à fait imrméables aux fluides que 
l'on veut retenir; mais leur effet augmente en propoion 
de i'épaisseur qu'i présentent aux fluides qui cherchent 
les traverser, c'est-h-dire qu'un tube de xerre d'un deci- 
mètre de long isolera moins bien que si sa longueur était 
double, triple. De tous I fluides, le calorique est un de 
ceux dont il est le pl difficile d'affûter la marche : il 
n'est pas de substanoe qu'il ne puis»e traveer dans un 
temps plu ou moin long ; oendant, il  a d corps qu'il 
averse bien moins facilement que d'autres; les duvets, 
les plumes, I poussières iégères, le veffe, les rësin, l'air 
calme, le charbon, sont des matières propres à la retenir. 
" ISOMÈRES (Corps). Voyez Iso. 
ISOMÉBIE ou ISOMËBISiE (t«op;, msé de 
parties égal). Loque l'analyse cldmique démonre dans 
des combinaisons l'existence d mèmes ílemenls en propor- 
tions semblables, on ne peut douter, à ce qu'il semble, de 
l'identit de leurs oeractëres; de nombreux [ai, observ 
depuis quelques années, sont venus modifier sing.lière- 
ent les idées h oet égard : on connait maintenant un grand 
nombre de composés renfermant I mmes élëmeats en 
mmes prqportions, dont ! propriét diffërent si essen- 
liellement que les uns sont lides, tandis que d'autres sont 
gazeux ou liquides, et ainsi pont beaucoup d'autr proe 
prions. Ainsi, par exemple, le gaz de l'Cintrée, suppo 
h son état de pure, l'esoenoe de rébenthine, l'huile m- 
ntielle de ise ont ectemeni la mème composition. Cette 
popfiété a reçu le nom d'isomërie. 
Nous trouvons donc ici une propriét absolument op- 
osée h i'is o m o r h i e, et l'on conçoit facilement com- 
bien son extension doit appoer de différen ds les vues 
que l'on s'était naturellement foées sur la nature des 
corps; h mure que i observations se multiplient, Ic 
nombre d corps isomèr augmente rapidement, mais 
jusque ici rien n'a pu faite prévoir la use de oette singulière 
proprit : on pense, à la vérité, que les élément des oerps 
sont dissés d'une manière différente; mais tout se rduit 
à d supposifions. 
Un fait très-remarquable relativement à i'isomérie t 
que le oemposé qui avait le premier attiré i'altention d 
d6mistes, et olIert Ihdée d'une oemposition oemblable avec 
des propiét différens, n'est réellcment pas un 
mère, comme l'uni prouv les recherches postéeures; 
mais la loi indiquée se trouve justifiée chaque jour par de 
nombreux et tçès-remarquabl exemple. 
ISOMÉRIQUES (Corps), ou plutbt ISoMËB. Voyez 
ISOMÉTRIQUE (Uiço:, al, et zzçov, mesure) se 
dt en guéral de deux ou de pusieurs obje qui ont des 

ISOLOIR -- ISOPÉRIMETRE 
dimensions égales ou une commune mesure; et c'est plus 
particulièrement le nom d'un cristal composé d'un rhom- 
b6ide à arcs égaux et d'un dodéeaëdreà triangles scalènes, 
dans lequel la ïomme des deux parties qui excèdent l'axe 
du noyau est égale  cet axe {exemple : haux arbonat« 
isomëlrique ). 
On donnait autrefois le nom d'isoratrie  l'opCation d'a- 
rithmétique ou d'algèbre par laquelle on réduit deux ou 
plusieurs fractions au même dénominateur. 
ISOMOIPltES (Corps). Voyez Isotome. 
ISOMORPlilE ou ISOIIORPHISME. Il'attention des 
minéralogistes était depuis longtemps fixee sur nne anomalie 
singulière que présentait une espèce de carbonate de chaux, 
dont la forme cristalline primitive ne pouvait se rapporter h 
eelledes autres variétés : en effet, I'a r rag uni te a pour 
forme primitive un prisme rhomboïdal, tandis que le car- 
bonace de chaux ordinaire a pour noyau un rhomboèdre. 
]Les analyses les plus soignées n'avaient pu démontrer la 
plus légère différence dans le rapport des élëments de ces 
deux corp«, et l'existence du earbonate de strontiane, alC 
couvert dans quelques variétés, et regardé comme la cause 
de cette singulière dilférence, avait perdu toute l'importance 
qu'on lui avait attribuée, puisqu'elle etait iuin d'Ce gèné- 
raie. Une observation faite sur un corps simple, le s o u ff e, 
vint ouvrir un nouveau champ aux recherches des cfiilniS- 
tes et des minéialogistes. 5t i t se h e ri i ch ayant demontré 
que le soufre peut s'offrir sous deux formes primitives dif- 
férentes, l'octaèdre à bases rhombes, et le prisme oblique 
à bases semblables, il ne fut plus nécessaire de chercher des 
ditférence de composition pour expliquer les différenees 
qu'oflrent les formes cristallines de deux corps. 
D'un autre coté, les minéralogistes avaient classé dans 
une mème famille, pour une série de proprièt physiques, 
divers corps, comme les grenais, les pyroxènes» etc., dans 
lesquels l'analyse avait démontré l'existence de corps diffé- 
rents : taut6t l'alumine était remplacée par l'oxyde de fer, 
la soude par la potasse, etc. ; et cependant les composés ne 
àiffëraient par aucune des proprietés qui les caracterisaient 
particulièrement : nous pourrions multiplier beaucoup les 
exemples, mais ils ne ieraient que confirmer ce que nous 
avons dit précëdemment. 
En qualifiant ces faits isolés, i',littscberlich est parvenu a 
démontrer qu'un certain nombre de corps penvent se sub- 
stituer les uns aux autres dans des combinaisons, sans faire 
varier leurs formes cristallines, et cette propriété, d'abord 
reconnue dans les bases, s'est depuis étendue  quelques 
acides : ces corps sont dits isomorphes (voyez CS«L. 
SATIO.'q, tome Vl, p. 758). H. Ght;LT, ER nE Ct.hUBlt¥. 
ISOPÉPdMTILE (de lao;, Cai, et eéllz«xpov, pé- 
rimètre). Deux figures sont dites isopérimètres quand leurs 
périmètres sont égaux. Leur surface peut être différente : elle 
ne peut cependant dépasser nne certaine limite; -a un I- 
rimëtre donné correspond toujours une surface m a x i m u m. 
Supposons d'abord qu'il s'agisse de pol)gones dont le nom- 
bre des c6tés soit dëterminé : la gëometriœe nous apprend 
que de tous les polygones isopérimètres d'un mème nombre 
de c6lís, celui qui offre la plus grande surface est le polygone 
régulier. Si, au contraire, le nombre des ctés de la figure 
n'est pas limité, nous reconnaissons que de deux pol)gones 
rëguliers isopérimètres, le plus grand est celui qui a le plus 
grand nombre de c6tés, et enfin que le cercle est plus grand 
que toute surface de mëme contour. ]La théorie des figures 
isopérimètres a été traitée d'une maniëre générale par Jae- 
que Bernoulli et par Euler. 
On a donné le nom de rnthode des isopérimètres à 
l'un des plus simples procédés qu'emploie la géométrie éié- 
mentaire pour déterminer nne valeur aussi approchée que 
l'on veut du rapport de la ci rconférence au diamèlre. 
Dans cette recherche, on suppose connne la longèrent d'un« 
certaine circonférenee, et on se propo de trouver Celle du 
rayon dont le double est le second terlne dl, rapport cher- 
céC Supposons, pour fixer les idêes, qne nous construi- 



PÉRIMÈTRE -- ISSER 
sions un carr aant pou cté l'unitC et que nous roulions 
oe=bercher le rayon de la circonférence isopérimètre. Le pé- 
mètre du é étant reprisentWpar 4, il en t de mème 
de la longueur de la circonféren, eç x d6siant le rayon 
4 2 
de oette ciéren, on aura   . Or, si l'on con- 
sid6re que x est nesirement comprh entre R et r, rayons 
des cercles circonscrit et inscrit au orré dont nous senons 
de parler, on reconnaltra que  est de m6me compris entre 
2 2 
 et ; mais oes limites ne nous donnent.qu'une grossiêre 
I 
approxafion, oer R  2 et r  --2" Imaginons alors 
l'octogone régulier ioepérimë[re avec le rré; des formules 
gén6rales nous permettant de calculer le rayon et l'apo- 
tbeme de ce nouvu polygone en fonction de B et de r, 
nous aurons ainsi deux nouvelles limit de , plus rap- 
prochées que I prdentes. De là nous pouons passer 
par I mm formul aux raons et apothemes des - 
lygonruliers isopérim6tres de 1, 3, 64, I8 c6t6% etc. 
Les limit entre lesquelles l'inconnue  oera compse se 
resserreront de plus en plus: et en calculant c limis en 
decimales on arvera, après un nombre suffisant d'opéra- 
tions, h leur trouver aulant de chiffres oemmuns qu'il ra 
écsalre pour obtenir = avec l'approximation demandée. 
Si, au lieu de prendre le rré pour point de dcpart, on 
tenir choisi le triangle q,filaral ou tout autre polygone 
cgulier, on arriverait absolument au méme résultat. 
E. Mcx. 
ISOPODES (de, semblable, et ,6, pied), 
<quième ordre ctabll par Latreille dans la classe des c r u s- 
t auWs, section des malacostracés. Cet ordre, qui corres- 
pond en partie au grand genre cloporle de Linn6, est ainsi 
caracterisé : Corps ddprimé, sez large, souvent ovalaire ; 
tte peti; yeux plac6s sur les c6és de la çaoe supérieure ; 
quatre anlenn de longueur mcdiocre, situées à la pavie 
antërieure, et dirigé horizontalement en dehors ; bouche 
comsée d'un 1abre asoez grand, d'une paire de fortes 
man,libules bien dentCs, d'une lèvre inféeure bilobée et 
de deux pair de mchoires, dont la conformation varie ; 
thorax de sept annux ; pattes presque toujours au nombre 
de sept paires, souvent prehdmiles, termin6es par un ongle 
.plus ou moins acéré; faus pattes de la sixiëme paire for- 
manl le plus sou enl une soe de queue st)}ifo me. L'ordre 
des isopod a été divisé par M. Ulne-Édwards en trois sec- 
tios : sopodes rche«rs, 8oodes nçeurs, et io- 
podes sédentaires. A }a premiëre appaiennent les genoes 
rclotde, «selle, lçde, cloporte, armgdille, etc. Les 
iopodes nçeurs se roeonnaissent à leur abdomen terrain6 
par une gran le nageoire garnie laiéralement de pies la- 
aellens provenant d fausses patt de la quatrième 
paire : tels sont les genr code, cmothée, etc. 
Efin, les sopodes sé(letttires viven ous parasis d'autr 
crustacés : cette seion compnd les deux genr ione et 
6opre. 
ISOSCLE. Voe: lc. 
ISOTHEBE (de o éI, et 0Fto:, d'té). Voici 
]SOTHMES. 
ISOTIlEMES (de «o», al, et 0pn, chaleur). On 
dit que deux villes, deux pays, sont isothers, pour faire 
entendre que leur terapérature moyenne est la même. On 
appelle liçnes isotherm d lignes qui pasoent par des 
lieua isolbermes ; isothèr» oelles i poent par d eux 
d'une égale choeur d'été; ochimènes» oelles qui passent 
par des lieux d'un froid d'hiver . Si le globe terrtre 
eit parfaitement rgalier, c't-à-dire s'il n'ëhit hésé ni 
de monhgnes ni de collines; si en ouire  surfa était 
composée de matières homogène, il est éident que  li- 
gnes  confundraient avec I para]lël. Mais il n'en est 
 ainsi; ces lign sont des courbes h double courbu : 
dans l't de l'Euro I isoch}mènes s'abaissent vers 

49 
Féquateur, et dans l'est elles s'Cèvent vers le p61e; c'est 
le contraire pour les isothères. On conçoit l'influence de ces 
lignes sur la végétation et l'existence des animaux. 
L'auteur de ces dénominations est Alexandre de H u m- 
boldt, qui le premier a soumis toutes ces lignes des re- 
cherches exactes. 
ISOUARD (Ncots). Voyez NlCOLO. 
ISPAiIAN ou ISFAHAN, i'.$padana des anciens, 
jadis la florissante capitale de la P e r s e depuis le règne de 
Chah Abbas le Grand jnsqu'a celui de Nadir-Chah, et au- 
jourd'hui encore après Téhéran la ville la plus imper- 
tante du royanme, est située dans l'Irak-Adjémi, au mihch 
d'une belle contree, la mieux cultivée de toute la Perse, 
sur le versant oriental du mont Zagros et sur les rives du 
Zendéroud, qu'on y traverse sur deux beaux ponts. Bien 
que cette ville soit toujours célebre par ses écoles, qu'elle 
conlienne beaucoup de fabriques et fasse un commerce con- 
sidérable, elle n'a plu% depuis qu'elle a cessé d'être la resi- 
dence des chahs de Perse, que rombre de son ancienne 
splendeor, dont la décadence a suivi celle de tout l'empire 
persan. De 700,000 babitauts, qu'elle comptait au dix-sep- 
tième siècle, sa population est descendue h 200,000 et mème, 
lon d'autres données%  50 ou 60,000 seulement; et la plu- 
part de ses anciens êdilices sont en ruines. Les juifs ét les 
Arméniens sont très-nombreux à Ispaban et habitent deux 
faubourgs particuliers ; le p[emier s'appelle Jahudia, le se- 
cond Jodfa. Quoique située  138o nètres au-dessus du 
niveaude l'OuCn, cette xil]e jouit du plus beau, du plus 
tempérë, du plus constant des climats; et les charmes tout 
particuliers «le son printemps sont celëbres en Asie. 
ISPANSCIIAFT. Voyez Gr.sl,x.xscnXrT. 
ISPEGUI ( Combat d'). Voyez ALvnr, s. 
ISILkEL. Ce nom fut donné au patriarchcJacob a 
loccasion deza lutte contre un être divin {Genèse, XXXII, 
_3 et uiv.) : il dérive de sara, combattre, et Et, Dieu. 
ISRAEL ( Pas d'). Voyou C,.x. 
IS/IAE (Royaume d'), un des deux royaume qui se 
Ion/renl, l'an 962 avant J.-C., dans la Jpdce après la mort 
de Salomon. Opposé au royaume de Juda, il se coin- 
posa des dix tribus d'Aser, Nephtali, Zabulon, Issacbar, Ma- 
nassé, Epbratm, Dan, SireCn, Gad, P, uben, et comprit la 
Galilée, laSamarie, la Pérëe et une partie de la Ju6ée pro- 
prement dite. Plus vaste par conséquent que son rival le 
royaume de Juda, il eut successivement pour capitales Si- 
chem, Tbizza et Samarie, ou Sebaste, et dura 24 ans. Sans 
cesse en guerre avec son compctiteur, ainsi qu'avec le rois 
de Syrie et d'Assyrie, il fut detrui! en 718 par Salmanasar, 
après avoir eu pour rois Jéroboam I , Nadab, Baara, Èa, 
Zamri, Amri, Acbab, Ocbosias, Joram, Jéhu, Joacbaz, Joa% 
Jeroboam Il, puis, à la suite d'un interrëgne, Zacharie, 
Sellum, Manahem," Pbaceïa, Pbacee et Osée. 
On donne quelquefois, par extension, le nom de royaume 
,l'lsraei à toute la Judée sous Satil, David et Salomon. 
|SRAEL DE PODOLIE, dit«al Schem. Voye'- Cw. 
SIDIM. 
ISP, AELI. l'oc-. D'tsILI. 
ISRAÉ LITES, nom donné aux descendants d'l s r a e !, 
c'est-à-dire aux H c b r e u x. Depuis l'exil de Babylone on les 
appelle J u (fs. 
ISSANT ISSANTE. Dans le langage du blason, ces 
mots se disent des animaux dont on ne voit que la partie 
supérieure, lorsqu'elle parait sortir d'une autre pièce de l'Cu 
et non être isolée, comme dans l'animal aissant. Em- 
ployé substantivement le mot hissant, dans le intime art, 
signifie la figure d'un enfant h mi-corps sortant de la gueule 
d'un animal, blilan porte une bisse d'azur couronnée d'or, h 
l'issant de gueules. 
ISSER riviëre de l'AIgérie, qui se jette dans la MeAi- 
terranee près du cap Djinet, h environ 5 mœeeriamètres à l'est 
d'AIger, par 17' de longitude orientale. Elle est formëe par la 
réunion de phsieors cours d'eau, comme l'oued Bou-llao 
mout, l'oued Azizc et l'out,! Zciloun ; ce dernier formé lui- 



mème riel'oued iehbech e! de l'oued Acbyre, lesquels ont 
enr source aux environs de ! édéa b. L'tsser prend ce 
nom h  on  myrmëres seulement de son embouchure. 
En le remontant, on trouve près de ses bords l'haouch Nakel, 
l'baouch Negnato, Souk ci Djemaa; au-dessus il est tra- 
versWpar la route d'Mger h Callah. L. LoOvET. 
ISSOUDUN chef-lieu d'arrondissement dans le dépar- 
tement de I'I nd re. C'est une jolie et ancienne ville siluée 
sur le penchant d'une colline et dans une plaine qu'arrose 
la Théolle. Après son incendie par les Gaulois, elle prit le 
nom dAuxellodunum, changé par la suite en Issoldunur. 
Son origine est couverte de ténèbres. L'histoire en fait men- 
tion pour la première fois sous Louis d'Outre-Mer. Jusqu'au 
treizième siècle, elle eut ses comtes particuliers, qui y 
b'alircnt un elrateau, dont on voit encore une tour. Dans le 
courant de l'an 1589, les habitants d'lssoudun ouvrirent 
leurs perles à Henri IV, après en avoir chassé les ligueur;. 
Une cérémonie perpétua jtt«qu'à la rvolution le souvenir 
decette journée. On y compte 12,234 habilants. La ville 
possède «les tribunaux de premiëreinstance et de commerce, 
un comptoir d'escompte, un collëge, une typographie, nne 
f3brieation de draps, de mécaniques pour laines et draps, 
des tanneries, des blanchisseries de toiles, un commerce de 
laine, blés et vins. 
ISSUS ville maritime de la Ci lieie, sur le goll du 
re«ame nom, probablement l'Ajazzo actuel, dans l'Anatolie, 
et célëbre par la seconde victoire qu'A I e x a n d r e le Grand 
y remporla sur Darius, Pari 333 avant J.-C., et qui fit 
tomber en son pouvoir tout le camp des Perses avec la b,- 
mille de Darius. C'est h la suite de cette journée qu'Alexan- 
dru conçut le projet de démembrer la monarchie pere. 
ISTJEVONS et mieux, suivant Jaeob Grimm, Istl,-.- 
vo»s, nom d'une des trois grandes peuplades dont se com- 
posait la nation germaine, et dérive d'Isk ou lsko, l'un des 
fils «le Mannus. Les peuples Gotls, de mme que les Gepides, 
les Burgundions et les Semnons appartenaient il la race des 
ls|,'Pvons. - 
ISTAAR nom que portait sous les Sassanides la 
conlrée où se trouve PersColis. C'est encore aujotu-d'lmi le 
nom d'une bourgade ,à quelque distance des ruines de Per- 
s é p o I i , appelée Tchil-Minar. 
ISTAMBOUL. Voyez CONSTAN'rlNOPLE. 
ISTHME (du grec 01z6; ), partie de tere resserrée 
entre deu masses d'eau, qui établit la jonction d'une pres- 
qu'lle à un continent ou à une lle. Le principaux isthmes 
sont ceux de Panama, de Suez, de Corinthe, etc. 
On a cherohé à plusieurs reprises à percer ces trois isthmes, 
pour abréger la navigation. C'est-encore à l'heure qu'il est 
un rève de la science moderne. 
On donne aussi le nom dïsthme à différentes parties dt, 
corps : l'[sthme de la 9orge, c'est la séparation ëtroite qui 
est entre le larynx et le pharynx. L'isthme de Vieussen et 
l'éminenee que forment le» trousse.aux de fibres qui se crut- 
seul autour du trou ovale dans l'oreillette droile du eoeu r. 
ISTitMIQUES (Jeux). Ainsi nommés de l'isthme de 
Corintle,,où'ils,se tenaient. Ces jeux grees avaient été insti- 
tues par"8" .rayée,. duns le quatorzième siècle a'ant J.-C., 
pour honorer la mémoire de Mélicerte, qui pour échapper 
i la fureur/dAlhamase-sétalt précipité dans la mer avec I n o. 
lle avaient,lieu 'ons ,les cinq ans, selon certains auteurs ; 
d'autres ont prétendu qu'on les eélébrait de trois ans eu 
trois ans. lls tombèrent en dsuétude, et furent mëme in- 
lerrompus jusqu'à Tlésée, qui leur donna nne nouvelle or- 
ganisation, en l'honneur de eptune. Cypèle, fils d'Aétion 
ri de Labda, qui exerc..a pendant trente ans l'autorité sou- 
veraine à Corinthe, les laissa déchoir une seconde fois; 
:is ils se relevèrent quelques années après la mort de ce 
prinee, durèrent plusieurs siècles avec splendeur et magni- 
ficence, et survécurent mme à la ruine de Corinthe ; mais 
isqu'au rétablissement de celle ville, les Romains conlerè- 
r,.nt aux S[eyoniens le droit eclusif d'y siéger comme juges. 
Outteles combats pour le prix de la lutle, de la course, 

ISSER  ISTlqlE 
du saut, du disque, du avelot, il y en avait, si l'on en croit 
Plutarque, pour la musique et la poésie. Les vainqueurs re- 
cevaient une guirlande de feuilles de pin. Les principaux 
membres des villes pouvaient seuls ètre plaeés à ces jeux, 
tant était grand le concours des peuples de la Grèee. Mu- 
lieue, femme d'Acier, avait lancé de terribles imprécationa 
contre les EIéens, s'ils osaient jamais y assister. Ces peuple 
seuls n'y venaient pas, pour éviter l'accomplissement de ces 
imprécations. Les Romains ajoutèrent encore  l'éclat de 
ces f0.tes. Avec les exercices ordinaires, on donnait en spec- 
tacle les animaux les plus rares, amenés de toutes les parties 
du monde : ces jeux servaient d'ère aux Corinthiens. Ils 
furent entièremcnt abolis vers l'an 130 après J.-C., sous le 
règne d'Adrien. Victor Bov. 
|ST|OPHOIE ou HISTIOPHORE (du g«e 
voile, et çço, je porte), genre de poissons acanthopté- 
rygiens de la famille des scombéroïdes. Ce sont «les espëee 
de très-g«nde taille, qui ont le museau en forme de stylet, 
deux petites crétes saillantes de chaque c6té de la eaudale, 
comme chez le nlaquerérdu, des ventrales longues, grdles, 
deux rayons, et une dorsale très-haute, qui leur sert de voile 
quand ils nagent : d'où leur nom vulgaire de oiliers. Une 
des principales espèces, le scomber gladius de Broussonnet, 
que les marins aplmllent brochet lant, habite la mer de..; 
lndes. D r SAOC£nO'I'rE. 
ISTRIE priueipauté et margraviat de la monarchie au- 
trichienne, l'un des deux cercles dont se cmpose le Ter- 
ritoire de la Couronne  Kronland) qui a été récemment 
formé «le l'lstrie, des comtés de Goritz et de Gradiska, et de 
la ville de Trieste avec son territoire, et compris dans le 
royaume d'Il I y r i e. C« Ire province, bornee au nord par 
Trieste, Goritz et la Carmole, à l'est par la Croatie, la Dal- 
matie et le golfe de Quarnero, au sud et à l'ouest par I'A- 
driatique, comprend avec les ries Quarneri une superficie 
de ô3 m)riamètres carrés et compte une population de 
33,000 rimes, répartie eu 4 villes, 9 bourgs à marché, 
et 479 villages. Cette population est en genéral peu instruite 
et douce de peu d'activité; elle se compose pour les deux 
tiers de Slaves illyriens; l'autre tiers, répandu surtout dans 
les villes etsur la c6te, parle italien. Pays de ctStes et lormant 
à son extrémite méridionale le promontoire aigu qu'on 
appelle la presqu'ile d'lstrie, l'lstrie abonde en ports et 
en baies, et y compris le tenitoire de Trieste présente un 
développement de cotes de 40 myriamètres. Le sol en est 
partout calcaire et pierreux ; cependant il a été sur divers 
points rendu propre à la culture. Dans la partie inferienre 
du cours de l'lsonzo, au sud de Goritz, commence le Carso, 
plateau calcaire, aride et dessécbé, profondément déchiré par 
une foule de tarins et de fonddères, qui s'étend dans la di- 
rection du sud-est jusqu'à Finme et se termine abruptement 
vers le golfe de Trieste. La nature géologique du Carso 
domine également dans la presqu'lle d'lstrie, qui au nord- 
est, sur les bords du golfe Quarnero, forme une cbaine 
de hautes montagnes atteignant au Monte Ma9çtore une al- 
titude de 1,/33 mëtres, et présente partout une suite de 
cimes escarpées. On y trouve quelques petits cours d'eau, 
parmi lesquels nous citerons le Qiello, prs de Cita-ffova, 
et i'Arsa, sur la cote orientale. Le climat est celui de 
talie pour la chaleur, génëralement sec, surtout en été, 
epoqne oti il ne pleut jamais. L cOtes sont exposées à 
des vents violents, notamment au sirocco, au vent de sud- 
snd-otest et au redoutable vent de nord-ouest appeld bora. 
Le sol produ il en abondance de l'huile de première qualité, 
des ligues et en genéral tous les fruits du sud, mais sur- 
tout du vin, dont les meilleurs sortes se récoltent dans les 
distriets de Capo-d'lstria et de Muggia. Les vins rouges de 
Befosco et de P$ccollt, les vins blancs de Cibedm et de 
Btbolla sont céièbres, mème à l'étranger. On y trouve de 
vastes forèts, riches en bois de construction, et d'où l'on 
tire beaucoup de noix de galle, d'écorce de chène, de 
charbon de bois, etc. Le miel, le marbre, la pierre à 
tir, le sri sont d'autres produits qui ont leur importance. 



ISTRIE 
La lhe constitue une des grandes ressources de la popu- 
lation des cotes. Il y a absence complète de fabriques et 
de manufactures, toute i'activité se concentrant sur la cons- 
truction des navires, la navigation, la pche, l'extraction du 
sel marin, la culture de la vigne, de l'olivier et l'Cève des 
moutons. On compte sur la cOte et dans les lies quatre-'ingts 
ports et lrente rades. Les ports possèdent un and nombre 
de batiments de iong.eours, sans compter les bàtiments 
moindres, employés au cabotage, et les barques pour la 
pëcbe; et les plus importants d'entre eux, tds que Rovigno, 
Cape d'Istria, Pirano, Quietto, sont les centres oin viennent 
converger tous les inlérts de la population. Rovigno ou 
Trevigno joue ce réle à l'égard «le tout le sud de l'lstrie et 
des lies Quarneri; tandis que le nord de la provincb gra- 
:ire dans la sphère de Trieste. 
Le cercle d'Islrie forme sept capitaiueries, h savoir : 
Cape d'Islria avee P irano, Isole avec le village de Salvore, 
remarquable par son phare, haut de 35 mètres, Meulons 
avec Cila-'ova, Rovi9no, Di9nano avec le port mill- 
Iaire de Pole, Pisino ou Jlillerburç aveo Albona et 
Fi«m«na,. Volosca avec C«*slua et Lussinpicolo. Cette 
dernière capitainerie comprend les iles Lussinpicolo, Ve- 
çlia, Cherso, Ossero, etc. Le gouverneur gén6rai de 
tout le Territoire de la Couronne (Kronland) formé «le 
GorioE-Gradiska, de i'lstric et de Trieste, réside  Trieste. 
L'lstric ou Histrie, ainsi appelée de la peuplade illyrienne 
des lslri ou Hislri, qui au temps des Romains avaient la 
réputation d'ètre d'audacieux pirates, lut subjuguée par 
l{otue au h-oisième siècle av. J.-C., et réunie soirs Auguste 
à l'Italie jusqu'à l'Arsia (aujourd'hui l'4rsa), fleuve qui 
en forma la IronIiëre à l'est. Au sixième siècle de notre Ce 
les Goths s'emparèrent de ce pays; les emperears de By- 
zance le leur reprirent plus tard, et oeux-ci h leur tour 
se cirent contraints de le eéder aux Carlovingiens. A partir 
du milieu du dixiëme siècle, i'lstrie constitua un margra- 
• iat ltartieulier, qui plus tard appartint de nouveau au 
duché de Cminthie jnsquen 1170, époque où elle passa 
sous la domination des comtes d'Andecbs, dues de Dal- 
matie. En 120,7 le due Henri de Dalmatie ayant été pro- 
scrit par le roi Philippe II, l'lstrie ecliut aux patriarches 
d'Aquilëé, qui plus tard s'en vivent enlever la plus grande 
partie par les Vénitiens. C'est ainsi que jusqu'en 1797 
presque toute la presquile d'Istrie faisait partie des posses- 
sions de la républiqne de Venise. Il n'y avait que la partie 
nord-est, dite Islrie aulrichienne, et eomposée du ceintL -le Mitteilmrg, qui h l'extinction de la famille de ses derniers 
possesseurs, les comtes de Goritz, eftt fait retour à l'Au- 
triche, qui l'ineorpora au duché de Carniole. Après la paix 
de Campo-Formio, l'Autriehe occupe aussi la partie véni- 
tienne du pays, à laquelle on ajouta encore diverses au- 
tres possessions ci-devant vénitiennes. En 1805, aux 
termes de la paix de Presbourg, l'Autriche ayant da re- 
noncer h tout ce qu'elle possédait de l'ancien territoire 
venitien, i'lstrie passasous la domination française. En 1808 
Napoiéon octroya le tire de duc d'Islrie au maréchal B e 
sières, en récompense des services qu'il venait de lui 
rendre en Espagne. Plus tard apoiéon réunit l'lstrie aux 
provinces Illyriennes, que l'Autriehe reeonquit en 181/. 
Depuis 1815 elle forme avec queiqaes ries du golfe de 
Quarnero le cercle d'Istrie on de blitterburg (71 myria- 
mètres carrés et 195,000 habitants) du royaume autrichien 
d'I I I y r i e, dont le ciœel-lieu est blitterbnrg ou Pisino, 
,ville dont la population est aujourd'hui d'environ 2,000 nes. 
C'est de 1850 que date l'organisation actuelle de i'lstrie. 
ISTRIF (Due d" ). Voye'- 
" ISTURITZ ( Don X.tvl£n ng ), homme d'Ëlat espagnol, 
est ne en 1790, h Cadi.% où son përe, originaire du pays 
basque, avait fondé une grande maison de commerce. Xavier 
de Isturitz et son frère, TAomas, qui avait éoE députe 
aux eodès de 1812/ 181/,, se firent eonnaitre dans le monde 
politique, après le rétablissement de la monareliie absolue, 
_n mettant h la disposition des mécontenlz, comme point 

ITALIE 499 
central de réunion, leur maison de Cadix, où fut pr6parêe 
l'insurrection «lui éclata le 1 « janvier 182o, sons la direc- 
tion de Quiroga et de Rie.go. La constitution une fois rét.- 
bile, Xa-ier de Isturitz se rendit à Madrid, oh, d'accord 
avcc Aleala Gaiiano et autres libéraux, il amcuta l'opinion 
publique coutre les ministres Argnelles, Martiucz d la 
Rose et leur parti..Nommé membre des eort en 1822, 
et pr'sident de cette assemblée en 1823, il les suivit d 
Séville, o/a il vota la suspension du roi, etde 1 - Cadi. Con- 
damne h mort après la Restauration, il s'curait, en Angle- 
terre, o/a il devint l'un des assoeiés de la maison Zuiueta. 
Amuistié en 183 par la reine régente, il revint en Er, pagne, 
et fut eltt par la province de Ce.dix prourador aux cor- 
lèse A lladl-id, il se rattacha de nouveaa au Imrti exalté, 
et avec Aleala Galiano, Calatrava, Caballero Las ]qavas et 
autres, il provoque, le 15 spot 1835, le soulèvement de 
la milice qui avait pour but le renversement du ministère 
Toreno, mais qui fut comprimé par le genrai Qnesada. 
A qnelq»e temps de I, son ami llendizabai aant été mis 
 la tète du ministère, une brillante earriëre s'ouvrir pour 
lui. L'un des confidents' du nouveau président du conseil, 
il fut appdé h la présidence.de la ellambre des procuradores 
réunie en novembre 1835, puis dissoute par Mendizabal 
en janvier 1836. Cependant, il ne tarda pas alors àse brouiil 
avec )Iendizabai, qui l'empèeha dëtre elu président par la 
nouvelle chambre des procuradores; et de son eété il tra- 
vaille alors de son mieux au renversement de Mendizabal, 
l'objet tout particulier de la haine des classes superieures, 
de la cour et des grands, et apporta dans cette lutte tant 
de passion, que Mendizabal le provoque en dael. 
Après la chute-de llendizabal,.lsturitz fut nommé, le 15 
mai 1836, ministre des alfaires 6trangères et président du 
conseil. Considéré comme un apostat en politique, son ca- 
ractère arrogant le rendit odieux, non-seulement aux certes, 
mais aux classes populaires; et a la suite de la révolution 
de la Gran3a, force lui fut de se derober par la fuite 
aux fureurs de la foule, et de gagner Lisbonne  la faveur 
d'un déguisement. De i il s'embarqua pour i'Angleterre. 
Peu de temps après il se rendit à Paris, ofx il se lia avec 
Torche, .lirallores, le due de Frias et autres aristocrates 
espagnols émigrés. Ayant prèt6 serment h la constitution de 
1837, il fut Cu par la province de Cadix député aux cortës 
de 1838, et président du congrès, fonctions qui lui furent 
encore eonfiees l'année suivante. Quoique ennemi person- 
nel d'E, partero, il sut pendant la régence de celui-ci se 
maiutenir en Epagne  Ibree d'adresse, et travailler dans 
les iutérts de la reine .larie-Christiue ; après le retour ,le 
celle princesse et l'expulsion d'Espartero, à laquelle il avait 
beanconp contribué, il desint président du conseil des mi- 
nistres et sénatenr. C'est sous son ministëre que se firent 
les fameux mariages espagnols. En 180 il fut envoyé comme 
ministre plénipotentiaire d'Espagne en Angleterre, et ne 
cessa ses fonctions qu'après la révolution «le juillet 15-i. 
ITALIAiSIE manière de parler propre à la langue 
italienne, tour italien, expression italienne transportée dans 
une autre langue. 
ITALIE, grande presqu'ile d'Europe, située entre 37 ° 
50' et to ,70' de latitude scptenlrionale, et 3 ° 17' et 16 ° 9 
de longitude orientale. Elle ne se rattache au continent que 
dans sa partie nord, o/a elle est limitée à l'ouest par la 
France, au nord et h l'e.t par la Suisse et par l'Allemagne; 
la .léditerranée la baigne aussi l'ouestet ausud, de mème 
que la mer Adriatique h l'est. Avec les lies qui s'y ratta- 
cfient, sinon politiquement, du moins ethnograpldquement 
parlant, comme la Sardaigne, la Sicile, la Corse et quelques 
autres de moindre ètendue, elle comprend une superficie 
de f%195, et sans ces lies, de 2,327 myrimnètres carrés. Au 
nord, elle est sépal'ée du reste de l'Europe par les Alpes, 
qui s'étendent dans sa partie septentrionale en forme de 
demi-cercle, depuis leur extrémité occidentale, appeiëe 
Alpes Marilimes, jusqu' leur extrémité orientale, appelée 
Alpes Juliennes, et dont le point le plus élesédu c6té de 
63. 



$00 
l'Italie est le 51 o n f-B I a n e./m sud de la chalne dos Alpes, 
qui s'abaisse abrnptement vers l'Italie, s'étend la grande 
plaine de la Lombardie, qt,i va en s'inclinant toujours dans 
la direction de l'est, et qu'il faut protéger par des digues 
en beat,coup d'endroits près de In mer Adriatiq,,e, le long 
des cotes de laquelle elle forme de andes lagunes, puis 
se relève insensiblement au sud-ouest jusqu'au Apen- 
n iris, qui dëterminent la configuration de foule la pënin- 
sule. Indépendamment dela plaine de la Lombardie, on ren- 
contre encore des contrées plates et unies à l'ouest de l'l- 
tu}le, dans le bassin inférieur de l'Arnn ; p}us }oin au sud, 
la Campagna di Roma, avec les marais Pnntins;et enfin 
près de aples, la Campagna Felice, au sud de laquelle 
s'élève le Vésuve. A l'est, la plaine la plus considérable 
est celle de la Pouille. Le sol de l'ltalie varie beaucoup 
la vérite ; mais il est pçesque partout susceptible d'ètre mis 
en culture, et sur un grand nombre de points, I surtout où 
ne manquent point les moyens d'irrigation, il est d'une 
extrème fécondité. Dans la plaine de la Lombardie, où l'a- 
griculture a atteint un haut degré de perfection, la terre 
est forte et semblableà celle des ltarches; dans les mon- 
tagnes, dont les crëtes sont génralement dénudees, elle est 
sèche et aride, mais fertile dans les vallees; dans les 
r e m m e s, près de la Mëditerranee et dans la Campagne de 
Borne, elle participe de la nature des steppes; au sud de 
l'ltalie, o0, aux environs de Naples et de Capnue, elle n'est 
redevable de sa remarquable td¢ondite qu'a son origiae vol- 
canique, elle est Iëgère et moius productive. Le climat de 
l'ltalie, à l'exception de la rrgion des montagnes les plus 
élevées, est, en raison de sa douceur, l'un des plus beaux de 
l'Europe. On distingue sous ce rapport quatre grandes ré- 
gions : 1 ° La haute ltalie, au nord de l'Apennin, où le 
thermomètre de Réeaumur descend quelquelois en Iiver 
jusqu"h 10 degrés au-dessous de o, oh les cltamps restent 
souvent couverts de neige pendant plusieurs semaines, 
o( les lagunes se couvrent méme de glace, et off les plus 
beaux fruits du sud ne rënssissenten pleine lette que dans 
les endroits bien abrites ; * L'ltalie cenlrale, s'etendant 
avec G è nes jusqu'au 4t ° 30' de latilude septentrionale, 
o/t il n'y a d'hiver proprement dit quedans les montagnes, 
on la glaceet la neige persistantes sont rares, oh l'olivier et 
l'oranger croissent parlout en plein air ou dans les bas4onds 
3 ° la basse 1talle, s'etendant jusqu'à l'extrémitë sud de 
la peninsule, où le thermomètre deseend rarement à 3 de- 
grés au-dessus de o, off la neige n'est pas moins rare, 
et ou les arbres fruitiers les plus délicats passent l'lfiver 
en plein air; ° i'extrëmité méridionale du royaume de 
Igaples, la Sicile et Malte, où le thermomètre ne descend 
presque jamais au point de congélation, où le figuier et le 
dattier de l'lnde, la canne à sucre, réussisent parfaitement, 
ou l'aloès et le papyrus sont utilisës comme bordures de 
champs. En été le ciel reste presque constamment sereitt 
et la chaleur est tempérée par les vents de mer; mais le 
pays souffre souvent pour cela morne de la sëehcresse, et 
subit l'influence délétère du sirocco. Les exhalaisons pro- 
venant du sol mgme, et connues sous le nom de raataria 
ou d'afin caltira, sont encore plus nuisibles dans un 
grand nombre de localités, par exemple dans les Murera- 
mes, dans la Campagne de P, ome, et en SdnCai dans 
beaucoup d'endroits de la ette de l'Italie centrale et de la 
basse Italie. Cette dernièreet la Sic, ile, o6 se trouve le mont 
Etna, sont sujetles à des tremhlements de terre et à des 
érupiions volcaniques. 
Parmi les lacs que renferme l'itaiie, on remarque sur 
le versant sttd des Alpes le lac Majeur ( lapo 31a99iore), 
le lac de C0me, le lacée Lugano, le lac de CIdavenna, le lac 
d'Iseo et le lac Garda ; dans tout le reste de la péninsule, 
on ne tronveque le lac de Castiglione, en Toscane; les lacs 
de Perngia, de Bolsena et de Braeeiano, dans les Etats 
de l'Êglise, et celui de Célano, dans les Ahruzzes de Nu- 
pies. L'llalie n'a que deux grands lleuves; le P 6 et r A- 
dige. 11 laut encore mentionner dans la haute Italie la 

Brenta, la Piave et m, q'«,«: .... ^ aui se jettent dans la 
ëaené A,dria_t!.qe; et dçnïërC'"tê'dë ltalie,'l'mo en 
ne, te ï,nre, te Garigliano, l'impétueux rolturno et le 
Sele. Les nombreux coarz d'eau qui ont leur source dans les 
Apennins et vont aboutir à la mer Adriatique, ne anal 
que de petites rivières non navigahles. C'est seulement dans 
la haute Italie que la navigation est favorisée par des ca- 
naux, tels que le canal Tieinello, et ceux de Milan» de pavie, 
de Monselice, de Bologne et des lagunes de l'Adriatique- 
On trouve dans le pays de nombreuses sources minérales, 
et quant aux produits du sol, les principaux sont : les cé- 
réales, qu'on y cultive partout, mais cependant pas encore 
sur une assez grande échelle pour suffire à la consommation, 
le mats, le millet, le riz, le vin, l'huile, les raisins secs, les 
chataignes, les amandes, les fruits da toutes espèces, le tabac, 
la réglisse, le carouge, le IlCe, la noix de galle, lechanvre 
et le lin ; le gros bétail, les montons, les pores et les che- 
vaux ; lebuffle, la chèvre, l'Une, le mulet, beaucoup de vers 
à soie et d'abeilles, de la volaille de toutes espëces; de l'or, de 
l'argent, du fer, du enivre, du plomb, de la houille, du sel, 
du salpëtre, du soufre, de l'alun, du sel ammoniac, de belle 
pierre à bgtir, notamment du marbre de la pouzzolane et 
du manganèse. 
On évalue le nombre des habitants de l'ltalie/ 27 millions,. 
qui parlent cinq langues principales : l'italien et ses nom- 
breux dialectes, dans la plus grande partie du pays; le 
;rançais en Savate; l'allemand dans les selte et les Iredeci 
sofa.muni du royaume lombardo-vdnilien ; la langue 
Iée d'arabe et d'italien qui est en usage à Malte, et le grec 
moderne dans quelques localités du sud de l'lin|le et de 
la Sicile. UÊglise catholique y est l'f;glise dominante, et 
dans le pins grand nombre des États de la Peninsule c'est 
la seule qui soit Iégalement reconnue. C'est uniquement 
sur quelques points que tes Grees, les Arméniens sehisma- 
tiques, les prolestants, les Juils et les Turcs ont par toiC 
rance oblenu l'exercice de leur culte. Le commerce et 
l'industrie de l'Italie, après avoir étë pendant toute la du- 
rëe du moyen ge les plus importants de l'Europe, sont 
bien déchus aujourd'hui. On y trouve cependant encore- 
d'immenses fabriques de soieries, de verreries, de faience, 
de chapeaux de paille, de fleurs arti/ieielles, de corail, 
macaroni et de savon. Le commerce n'a conservé dïm- 
portance qu'à Ggnes, à Livourne et à Yenise, et consiste 
surtout en exportation de produits naturels ou de pro- 
duits de l'art. La navigation, qui au moyen "ge l'empor- 
tait sttr celle de toutes les autres halions, est aussi bien 
déchue de nos joins, ci ne s'ëtend guère au deIa des il- 
mites de la llëditerranée. Cci:cariant les divers gouverne- 
mentg italiens, il faut le reconnaitre, rivalisent d'efforts, 
pour la ranimer, de mëme que le commerce et l'industrie. 
Les géographes divisent toute l'ltalie en trois parties prin- 
cipales : i ° La haule 1talle, comprenant la monarchie 
sarde, le royaume Lombardo-Vënitien et les duchés 
de P a rm e et de M o d è n e ; 2 ° l'Halie cenlrale, compre- 
nant la Toscane, les États de l'Église et la république 
de S a n.M a r i n o; 3 ° La basse ltalie, composee du ro.aume 
des Deux-Siciles et de Malte, à quoi il faut encore ajouter 
les lies de Sardaigne" et de Corse. 
Histoire. 
L'hisloire ancienne de l'ltalie jusqu'à la dissolution de 
l'Empire Romain est trop intimement liée à celle decetem- 
pire, pour que nous n'y renvoyions pas lelecteur I voyez 
« [ Histoire]). 
La première pdrioàe de l'histoire moderne de l'llalie 
comprend le temps qui s'écou|a depuis la chute de l'an. 
cien Empire Romain d'Occident j usq'à la fondation du nou- 
vel Empire d'Occident, ou jusqu'à la création de diffê- 
vents Etats germains, à la suite de i'émiation viclorieuse 
des peuples germains, e'est-à-dire de l'an b.76 à l'an 77, 
aprés J.-C. En 76 Odoacre renversa l'empereur romain 
Romulus Augustulus, et s'empara du tronc, sous 



ITALIE 
nom de roi d'[talle, et la Péninsule se tronva de la sorte 
séparée pour la première fois de l'ensemble de territoires 
qui avaient indue alors constitué l'Empire lornain. Cette 
séparation tut encore plus tranchée quand T h é o d o r i c 
le Grand, qui en 493 renversa l'empire d'Odoacre, eut 
conquis avec ses Goths toute l'Italie, depuis les Alpes jus- 
qu'à la Sicile, et y régna comme roi. Plus son rëgne jeta 
d'éclat et plus rapide fut après sa mort la décadence du 
royaume qu'il avait fondé, parce que les Goths, peuple 
barbare, ne surent dans leur contact avec la civilisation 
romaine, si corrompre, s'assimiler que les vices des vaincus. 
Les victoires remportées par Bélisaire et par 1arsès, 
généraux des armées byzantines, mir,.nt fin, dès le milieu 
du sixiëme siëcle, à la domination des Goths en Italie, et repla- 
cèrent la Péninsule sous l'autorité des ernpereurs de 
zance. Ceux-ci la firent gouverner en leur nom :par un 
gouverneur auquel ils donnèrent le titre d'exarque, et 
qui établit sa ridence ì Ravenne. Mais, pas plus que 
les anciensernpereurs de Rome, ces gouverneurs ne purent 
repousser les invasions des conquérants germains. Dès 
l'an 58 les Lon9obard. ou Lombards envahissaient la Pé- 
ninsule avec leur roi Alboin, et en peu de temps ils eurent 
conquis presque toute la haute Italie et des parties consi- 
dérahles tant de l'Italie centrale que de la basse ltalie. La 
fondation du royaume des Lombards est pour l'Italie le 
moment de transition où se lorraine l'histoire ancienne et 
où commence celle du moyen age. En effet, c'et alors 
seulement que le grand travail de rénovation provoqué 
dans la péninsule par l'invasion des barbares, par le m- 
lange de ses populations avec des ílërnents germaius', eut 
pour résultat de substituer comp[étement à l'ancienne civi- 
lisation romaine, déjà bien modifiée par le christianisrne, 
les formes politiques et l'état social du moyen ge germa- 
nique. C'est ainsi notamment que les Lombards firent do- 
miner en Italie la féodalité, qui sous eux parvint à un 
haut degré de splen,leur. A c6tc de ce nouveau royau'.:e, 
et en quelque sorte en antagonisme pohtique avec lui, ha. 
quit et se développa vers la mèrne époque la répuhlique de 
Veni se, fondée par des réfugiés qui avaient fui devant 
le flot de l'invasion des barbares et étaient venus chercher 
dans les tagunes de Venise un dernier refuge pour leur 
liberé. Ce nouvel Ëtat fut le précurseur des républiq»es 
qui se constituèrent plus tard dans diwrses villes d'ltalie. 
Pendant ce temps-la, toutefois, le ïaibles ernpercurs de 
B)zance conservaient encore en Itahe, mais bien précaire- 
ment, l'exarchat, reduit par les victoires des Lombards 
à la possession de Ravenne, de la Romagne et de la Pen- 
tapole (les cinq villes maritimes Bimini, Pesaro, Fano, 
Siniaglia et Anc6ne ), une partie des c6tes de la basse ltalie 
(oi Amalfi et Gaète avaient leurs dues particuhers, grec» 
d'origine), ainsi que la Sicile et Rome avec son territoire 
( qu'adrninistrait au nom des empereurs de Byzance un fonc- 
tionnaire qualifié de patrice). Mais la dépendance, le plus 
souvent nominale, dans laquelle se trouvaient ces divers 
Etats par rapport à la cour de Byzance, cessa complete- 
)'nent d'exister au huitième siècle, quand l'empereur Léor 
l'Isaurien s'ailCales affections de l'orthodoxe Italie en 
prètant main forte aux fureurs des i en n oui as tes. Beau- 
coup de villes chassèrent alors les fonctionnaires qui les 
administraient au nom de l'empereur de Byzance, se don- 
nèrent des consuls et un sénat, à l'instar des auciens temps. 
En outre, Rome adroit, non pas positivemcnt le droit «le 
souveraineté, mais une certaine autorité paternelle exercée 
lar ses évques rnème en matières ternporelles. Les papes 
]e lardèrent pas d'ailleurs à avoir des dèmlés avec les 
Lombards. L'accroissement incessant de leur domination, 
qui finit par comprendre mërne l'exarchat de Ravenne, et sur- 
tout cette circonstance que les Lombards parta,eaient l'hé- 
résie d'Ariu% sui'lisaient d:jà pour provoquer entre eux et 
les papes une irr(médiable scission. Ceux-ci invoquërent 
en conséquence c«mtre les Lorr, Lards l'appui des rois francs, 
qui se montraient lavo-ableaen-  disposés pour leur cause. 

50t 
Pépin le Bref, en reconnaissance de ce que le pape l'aval. 
sacré comme roi des Fra,cs et nommé patrice de Borne 
en rnme, ternps que haut protecteur du saint-siége, fit la 
guerre aux Lornbards, et donna au pape Étienue Il l'exar- 
chat qu'il leur avait enlevé. C h a ri ernagne, enfin, dé- 
truisit le royaume des Lornbards, et l'incorpora, en 75-,  
la monarchie franque. 
A ce moment commence la seconde période de l'histoire 
d'ltalie, de 774 à 961, comprenant le régne des Carlovin- 
gens avec l'interrègne qui le suivit, c'est-h-dire l'époque o0 
la puissance de la féodalité devint compléternent prédo- 
minante. La transmission aux rois francs de la domination 
sur l'ltalie, eut ceci d'important qu'elle amena le rétabfisse- 
ment en Occident de la dignité d'empereur romain, et qu'elle 
devint la base la plus solide de l'autorité spirituelle des 
papes. Quoiqu'fl e,t été sacré empereur omain, Char- 
lemagne ne put cependant réduire toute l'ltalie sous ses 
lois; il échoua dans ses entreprises contre le duché de Béné- 
vent et les r_publiques de la basse Italie, où notamment 
Naples, Amalfi et Gaète étaient parvenues à posséder de 
grandes richesses, rce ì l'extension qu'avaievt prise leur 
navigation et leur commerce. Ces villes et d'autres cités 
indépendantes, Borne exceptée, se rattachèrent de nouveau 
et plus solidement que jamais à l'empire de B)zance, dont 
la puissance en Italic acquit ainsi de nouvelles forces. Le 
reste de l'ltalie, au contraire, demeura une partie im- 
médiate de la monarchie franque jusqu'au parlage effectué 
en l'an 843 par le traité de Verdun ; trait," qui l'adjugea à 
Lothaire I e, avec la dignité d'empereur et le [ays appelé- 
plus tard la Lorraine. Celui-ci abdiqua en 80 en faveur de 
on fils Lo6s Il, le plus remarquahle des princes italien» 
de la race carlovinienne. Aprè la mort de Louis Il, arri- 
vée en 75, l'ltalie devint une cause de discorde pour 
toute sa maison, jusqu'àce qu'elle Chut, en 880, à Louis le 
Gros, qui pour la derniëre fois réuuit sous la mêne main 
tous les Etats composant la monarchie franque. Lors de sa 
déposition, en 887, commença pour i'ttalie une époque d'a- 
narchie et de guerres civiles. Le duc Bérenger de Frioui et 
le duc Guido de Spolète, ainsi que le marquis d'IncC, se dis- 
putërent la couronne. Guido fut enfin Cu pour roi en 888, 
puis en 891 pour empereur d'ltalie, et à sa mort, arrivée 
en 89-L il eut pour successeur son fils Larnbert, mort 
en 898. Le roi carlovingien des Allemands, A r n o u I, fit bien. 
valoir de nouveau en 89 son druit au titre de roi et d'em- 
pereur d'Italie ; mais il ne put le faire triompher. A la mort 
d'Arnoul ( 899), le duc Berenger I , de Frioul, qui dès 89 
avait été couronné en qualité de roi d'Italie, le roi de la 
basse Bourgogne, Louis, que le pape saura en 90! comme 
empereur d'ltalie, et le roi de la haute Bourgogne, Ro- 
dolphe 1 , se disputërent la souveraineté de la péninsule. 
Bérenger 1 e finit par en rester paisible possesseur et fut cou- 
ronné empereur en 915. Toutelois, en raison de l'état de 
dissolution dans lequel était tombé l'empire, il lui fid im- 
possible, à partir de 890, de le protéger efficacement contre 
les irruptions réitéríes des Sarrasins, et contre celles des 
Hongrois, qui inquiétèrent por la première fois l'Italie 
en 99. Après l'assassinat de Berengr I « (924), Rodolphe Il, 
de la haute Bour,ogne, abandonna, en 930, au comte Hus 
gues de Provenue ses prétentions sur l'Italie moyennant la 
cessio du royaume d'Arles. Hugues «le Provenue s'efforç 
de se maintenir en possession de i'Italie par la plus san- 
guinaire des tyrannies; mais il fut renversé en 945, par son 
neveu, le marquis Bérenger Il d'Ivrée, qui en 9-0 était 
all chercher en Allemagne auprès de l'empereur Othon le 
Grand un relnge contre les embOches de son oncle, et qui 
revint en Italie avec une armée composée d'émigrés et 
d'exiiés italiens. II eut pour successeur son fils Lothaire, 
objet de haines moins profonde% et dont Bérenger fut le 
premier conseiller. Lothaire étant mort en 950, empoisonné, 
dit-on, par Bèrenger, céleri-ci vouht marier malgré elle sa 
veuve, la lu,lié A,b;laïde, avec son fils A«lelbert. Ëchappant à 
ses rxauvai., IraitemeoL et à laprison où il l'avait renfermée, 



cette princesse rouva abr e prolectio au d'Ateau de C- 
tossa. Assiégée dans ce choEtu par Bérengcr I!, elle im- 
l»lor :'appui du roi des lemands Olbon 1', qui frcbit 
les Alpes, I dliv, s'empara de Pavie, et  Il[ couronner 
en 951 comme roi d Lombards. rengr ayl 
tit sa umission et lui ayant oedë I dWde PIlie, le 
arquisat de rioul, dont Otlon investit on frère 
«»hon oensentit à I'y laisser oe¢ son vassal. 51ai di ans 
l'l rd tes seieues iIas aat Cord des plaint 
«.ont Bdrenger, O[hon repassa I AIp en 96l, le 
I «sa, et se fit couronner en qualité de roi et d'empotera" d'I- 
laite, en 962. Pendant tte période, le» répulliques de 
pics, de Gaë et d'Amalfi, dans la boe llie, maintinrent 
encore leur indépendance ¢ontrele duclm Iombard de 
re, veut. Cel leur tt d'au,rit plu facile que [¢ dché de 
l:néent avait subi de nombreux parage% et que I r- 
publiques e[ les dues avaient en outre à se fendre conire 
-n ennemi commun, les Sarri, quïls aient appel 
«-u-mmes de 5ioEle, e830, pour leur s¢wir d'auxiliaires 
dans leurseffes instines,, et qui avaient lins pars'ctablir 
t'une mète permanente dans I Pouille. Alors mme 
,lus I'peeeur Louis I1 et Basil¢ le MaoEdoni¢n, 
plus td emreur de Byzanoe, en réunissant leurs [oroes, 
lutent vennsa bout d'exrminet I Sarrasin% en 866, il 
iapoible au premier de se maintenir dans la basse ltMie. 
s Grecs, au contraire, s'y obdrent. Av le 
ire enlevé aux Sarrasius, ils constituèrent une province 
'n propre, sous la dénomition de Them« de mbardie, 
uverne« par un ca[ap«a, ou ouerfleur enéral, i 
avait sa résidence à BarS; et elle dcmeura sous leur 
minafiun pendant enco pins d'un sigle. L'empereur 
Otlmn lui-mères échoua dons ses effor pour les expul 
,te la péusule et pour soumettre toute la bae llie a son 
autorilé. 
La troime p6riode de ['ltoke d'Ilie commence a 
moment où, par suite du oeuronnement d'Othon 1  la di- 
antre impériale paa aux rois afiemands; c'est l'epoque de la 
domination et de I prepondéranoe des emreurs allemds, 
pendant laqefie ¢endant l'siCent communal et sacer- 
duel, bien que complétement domino par la puisce ira- 
perlais, oemmença à se de[opr; poque comprenant 
l'intervalle q s't«nd depuis le ne d mpereurs de la 
maison de Saxe et de la maon de Franconie jusqu'fi la 
mort de llenri iii, c'est--dire de 961 à 1056. Otbon I 
ratifia ses lemauds d'un and nomboe de lie[s en llie, 
«.t conç aux vies de la peninsule d privilég qui 
• inrent plus tard la baoe de leurs institutions libres, OE 
leur indu»pendante et de leur puissanoe, lesquel[ se d- 
-eloppn[ rapidement au milieu de l'Cat d'anarchie o 
 trouçait ors l'IoEie. Pendant oe temps-là la cour pon- 
tificale éi[ devenue le IIéAtre de durdr et de pro- 
lanalio de toutes espèoes. Othon désa en coéquence 
I pe 3n XII, qui daifiers avait pis I es contre 
Ifi, fit Cice  sa place Léon VHI, chia les B«mains 
bdl se p[ i in .pape us sa complte depence. 
E 980, un gereux Romain, le oensul Cresson ri us, lut- 
tantoere l'influenoe d comtes de T¢um, q en l'ab- 
nce de l'empereur préteadaient le remplaoe¢ da la lle 
ernelle, eaa de rétablk à Ruine tout au moins Pap- 
pareuse de oes oetiques libes. Occupé de projc de con- 
quès ds la b Itae, qui  terminèrent assez mal, 
thn n'appor ¢un entrave à la orieuse administra* 
tion de Crescenti q sut æ rend redoubl aux 
dites papos Boniface VH et Je XV. Mais Olhon III mi 
»n rme a l'autorité de Crescenlius, ëblit d pap de 
n ctioix, ettint les omains en bride par Pemp[oi de la fooe. 
A la mo d'Othon III (100), les lliens oensidérèrent leur 
union avec l'Empire d'Allemane oemme sou. On elut 
pour roi le marqu Hardouin d'Ivre, qui tut couronné à 
Pavie, ndis qu'un autre pti déceait le mmc titre à 
l¢nfi Il, empereur d'Allemae. 11 en résulta surtout entre 
s villes de 3tilaa et de Pavie une ee civile, qui se 

ITALIE 
termina au profit de Henri I|. Conrad II, qafi lul suec 
en 1006, co[me empereur et comme roi, s'efforça bien de 
rctablir de vire force l'ordre et la pai parmi ses vassaux 
et le villes, an nombre desquelles figurait déj/en première 
ligne celle de _Milan, et par là de donner à l'lîtat du calme et 
de la stabilité. 5lais il n'y réussit point; les guerres- prieCs 
sé'irent plus que jamais, d'une patoE entre les villes et 
év¢zques, dont la puissance allait toujours en augmentant, 
pois de l'autre entre la noblesse et ses vassaux. Pas plus 
Henri II et Conrad lI que les papes ne parvinrent d'ailleurs 
à soumettre Ruine, où dominait l'id républicaine et 
la famille Cresnentius conliunait  exerce une grande in- 
fluence. Quand Henri III, fils et successeur de Conrad, 
arriva en ltalie, en 106, il y trouvatrois papes. Après 
avoir dépoes tous trois, il plaça sur le trdne pontifical un 
pape de son choix, et plus digue d'une telle dignité ; cette 
ré[orme donna aux papes une nnuelle considération, qui 
dus tard devint fatale aux successeurs de ceprince. Henri III 
mourut en 1056. Depuis Otbon III, c'était l'empereur 
d'Allemague qui vait exercé sur l'lLalie la domination la 
plus énergique et la moins oentestée. 
La quatrtne periode de t'histoire d'Itaiie commence 
la mort de Henri lll, de 1056 à. 1259 ; c'Pet l'époque de la 
grande lutte entre les empereurs et les papes pour l'exercice 
de la puissance sttprëme, et entre les empereurs et les ville 
italiennes pour la domination de l'Italie, époque oh eut lieu 
la réaction de l'ciCent romarin-italien contre Pélement ger- 
main et féodal. Pendant la longue minorit de Henri III, 
la politique des pape.s, diriges surtout par le moine Hiide- 
brand, devenu plus tard pape sous le nom de G r é go i r c V l 
rënssit  organiser contre la puissance temporelle une op- 
position qui ne tarda point à prendre les plu» gigantesques 
proportions. Les Normands, qui s'étaient établis dans la 
basse ltalie,, et en qui les papes trouvèrent «le puissants anxi- 
liaires da leur lutte contre tes empereurs, y contribuèrent 
d'une manière tonte particulière. Tandis qu'un sud de l'ltalie 
beaucoup de petits Eta[s se teunissaient pour n'en plus for- 
mer qu'un grand, le royaume gondWau nord de la penin- 
sole se démembrait pour constituer plusieurs petits Eta[s. 
Les villes Iombardes jetaient les baes de leux puissance, 
devenue pl tard si considérable. Vent»e, GoEnes et 
P i se etaient déjb. de grandes et florissantes cités. En t077 
Gregoire VIl bumilia Henri IV ; Urbain Il excita à la re- 
volte les propres fils de l'empereur. Conrad, iris aihWde 
Iieuri IV, lut couronne roi d'Italie en t093; et après la 
moït de Conrad (Il01), son frère Henri enleva b.son père le 
t6ne impériaL, ltenri V, créature du pape, ne tarda point 
à se trous'er engagé ae¢ sou prote¢ttu dans une lutte io- 
lente, au sujet notamment de ['héritae d« la comtesse .',la, 
t h i I d e de Toscane; lutte qui provoqua de perpétuels con- 
Ilits dans tout le cours du douzicme et da treizième siëcle. 
Pendant ce temps-là, au sud de l'Italie, l'État normand se 
conçtituait sous Roter I « ( t 130) en royaume, sur les debris 
des republiqupe, de la domination des Gre et des Loto- 
barris. Dans [es petites répubtique_A du nord., la puissance 
etait d'ordinaire aux mains de conanls, d'un petit conseil. 
(creden.«), d'un grand conseil, et d'une assemblée du 
peuple (p«rlianento) ; de petites guerres intestines d 
Ioppaient l'énergie juveuile de ces ]ta. Il OEut mentionner 
entre autres celle que termina en 1111 la destruction de LOd 
par les 5ilanais, et le siCe de C6me par l'armée de tours 
les villes lombardes, siée qui dura dix années 
La soumission de cette ville fit de Milan la plus puissante 
cité de l'llalie; et la plupart des villes qui l'avoisinaient se 
confédérèrent avec elle, tandis que quelqnoe autres con- 
tractèrent des alliances semblable» aven sa rivale, Pavie. 
Des querelles qui ëclatèrent en I t29 entre les deux coulé. 
dératiuns provoquèrent la première guerre, qui bient6t chan- 
gea la nature de la lutte de Lothaire I I et de Conra¢I III 
pour la couronne. C'est à ce propos que surgirent les partis 
connus dans l'histoire sous les noms de guelles etde 
g i b e I i n s. A Ruine, l'esprit de liberté, comprimé par Gré- 



ITALIE 
goire, se réveilla avec une force telle, que ses successeurs 
n'y r ,èrent plus qu'avec une puissance fort amoindrie; et 
A r n a u d d e B r e s c i a réussit à riablir pour quelque temps 
le simulacre d'une république romaine. Toutefois, la lutte 
pour la souveraineté de l'Italie et pour l'autorité suprème 
ca matières spiritueltes et temporeltes, en consolidant '-es 
Ho benst a ufensur le tr6ne impérial, donna à toutes ces 
«tivisiens intestines un caraclère plus grandiose, et fat sou - 
tenue de part et d'autre avec un vigueur encore inconnue 
,usque alors. Frédéric ler de Hoben.tanfen apporta dans 
/'exécution de ses plans pour consolider la domination de 
la puissance impériale sur rttalie, impatiente du joug, etsur 
le pouvoir sacerdotal, une opini«treté, un déploiement de 
ressources et une vigueur d'intelligence qui pendant long- 
temps promirent d'tre couronnés par le succès le plus 
complet, mais qui éclouèrent par suile des malheurs des 
temps et des obstacles invincibles qu'on lui opposa. Sans 
doute pas plus les papes que les villes récalcitrantes, qui à 
partir de rannee 1167 organisèrent entre elles la ligue lom- 
barde, ne remportërent des avantages décisils sur rempe- 
teur ; mais celui-ci vit écboner, également ses projets, et une 
suile de revers qu'il éprouva après de brillants succès le 
contraignirenl, vers la fin de sa carrière, à consentir à un 
compromis entre lui et ses principaux adversaires, les papes 
et les villes. Il n'y eut qu'un seul de ses projets qu'il lui lut 
donné de mener  bonne fin, le mariage de son fil» avec 
Constance: l'béritière du royaume normand de Sicile. En 
acquérant le royaume des Deux-Siciles sa maison ne gagna 
pas seulement un héritage considérable, mais elle enleva 
en méme temps au saint-sie rappui du principal auxiliaire 
qu'il eut eu lusque alors dans ses luttes contre la puissance 
impériale. I-1 en r i V I, successeur de Frédéric I ce , régna 
trop peu de temps et tut trop occupé du soin de consoli- 
dcr sa puissance dans les Deux-Siciles pour pouvoir donner 
beaucoup d'attention aux autres affaires «le l'Italie. C'est 
de la sorte que l'anarchie et les disisions des guelfes et des 
gibelins prirent de plus en plus d'extension dans le nord 
de l'ltalie. Parmi les gentilsbommes, les seincurs da Ro- 
taano et les marquis d'Este se posèrent en chefs de parti, 
les premiers du cté des gibelins, et les seomds du c6té 
des guelfes. Pendant la minorité de Frédéric 1I et la que- 
relle pour la succession au tr6ne qui éclala alors en Aile- 
magne, le pape Innocent ILI, en qualité de tuteur de Fré- 
dëric If, réussit/ relablir raulorité temporelle du saint- 
siege sur Rome et so, terriloire et " faire valoir ses prélen- 
tions sur ifs donation de Pépin et de Mallfilde. En 1197 
il arracha aussi la plus grande parité de la Toscane au 
parti guelfe. Pise ule lui résista. C'étaienl bien plul6t d'a- 
veugles haCheS héréditaites que rintérèt réel de leur cause 
qui animaient les partis; car Iorsqu'on vit un guelfe par- 
venir à la couronne impériale en la personne d'Otbon IV, 
les guelfe prirent laR et t.ause pour lui, tandis que les gi- 
belins épousèrent les inlérLs du pape. 5faiq quand la di- 
gnité impêrial¢ t retor  la m«son de Hobenstaufen en 
la personne de Feaéric I1 (1212), les anciens rapports de 
ces dex partis se rtttablirent. A Florence cet esprit de 
parli politiqu servit dt prétexte et d'aliment aux querelles 
,les Bnondelmonte et de» Don«ti avec les Uberti et les Ami- 
dei ; querelle» aant lmur on,ne ,les otlenses toutes pri,ées. 
Dans les vill, la population se trouva de la sorte divisée 
presque partout en gueffds et gibêlins. En 122G .les villes 
.uelfes de la Lombarde réorganisërent la ligue lombarde. 
Yers cette époquc le domiæain Jen de Vi cente, esprit 
supérieur, s'dleva avec torce dans la chaire contre ces guerras 
impies de frëre à Irère dans lesquelles il essaïa le r61e de 
médiateur. L«smbië tenue en 1233 à Piaqnara parut ch 
momen! couronner ses efforts; mais il se perdit en vou- 
lant s'emparer d« la puissance lemporelle à Vicence. C'est 
ainsi que le règne de FfCCic 11 ne fut qu'une lutte de vie 
et de mnrt contre le pouvoir sacerdotal et conlre les répu- 
bliques italiennes; lutte .soutenue de part et d'autre avec un 
auvage acharnement et avec une dgpeme énorme de force 

503 
et d'énergie. Assez heureux d'abord, l'empereur éprouva 
plus tard désastre sur désastre ; et au moment oi ses affaires 
commençaient à prendre une meilleure tournure, la mort vint 
le frapper, en t250. Les guelfes triompbèrent alors du pari 
gibelin,  qui d'ailleurs les rancune'des ordres mendiants 
avaient beaucoup nul. Parme, restée jusque alors fidêle aux 
gibelins, les abandonna. La supériorité que les gibelinsobtin- 
rent à Florence(12-8) ne dura que deux années; et celle que 
leur vahrt plus ard la victoire remportée  Monte-Aperto 
0260) n'eut non plus que six années de durée. Les Bolonais 
contraignirent tontes les villes de l'Italie  entrer dans une li- 
gueguelfe, et curent le bonheur, à la bataille livrée en 12f9 
près de Fossalta,de faire prlsonuier le roi E riz i o, qui iamais 
depuis ne recouvrasa liberté. C'est ce qui explique comment, 
pendant le séjour de trois années qu'il lit en Italie, Conrad IV 
n'obtint que des avantages nésatifs, et comment sa mort, 
arrivée en 1251, la chute de la domination des l-lobens- 
taufen lut  peu près décidée, malgré la constance et la 
bravoure que Ma n fr éd déploya pour la défense des droits 
de sa maison. Ce lut seulement dans la Marche de Trévise 
que le pari gibelin, représenté par E zz el i n o, l'emporta et 
consvrva sasupériorité jusqu'au moment oi ce chef succomba 
dans la croisade enlreprise contre lui par tous les guelfes. 
I liberté, au milieu de ces luttes si ardentes, subit des 
restrictions de plus en plus fortes. La maison delta Scala 
succéda alors a celle des Romano dans l'exercice de la do- 
mination snprème, et la ville de Milan elle-mëoee ainsi 
qu'une grande partie de la Lombardie passèrent sous les lois 
de la mai«on della Torre (aujourd'hui Tour-et-3.s). Des 
tyrans surgirent partout ; et il n'y eut que les républiquv- 
maritimes et la république de Florence qui demeurërcnt 
libres. 
La cinquième période de l'histoire d'ltalie comprend le 
temps qui s'écoula depuis la chute des Hohenstaufen jus- 
qu'h la création de nouveaux Elats, de 1259 h 1530 ev- 
viron. C'est l'époque du triomphe de l'élément romain, re- 
présent6 par la prédominance de la puissance pontificale et 
par l'indépendance maintenant incontestée des république» 
italiennes, de mme que par l'éclat brillant que la vie ita- 
lienne jeta alors sous tous les rapports, mais qui ne tard., 
point h dégénérer, par suile de la décadence intérieure de 
papauté et de la dominalion que des tyrans parvinrent i0 
eaercer dans les républiques, et enfin par suite de la erC- 
tion de monarcbies absol»es. Du moment où Cllarles 1 '-, 
roi de lIaples, par la 'ce du pape, ambilionna la co:- 
conne de roi d'ltalle, les noms de guelfes et de gibelin 
prirent une autre signification. Le premier désigna le; 
amis des Français, et le second leurs ennemis. A ces parti 
s'ajoutaient encore dans les républiques les factions de L-t 
noblesse et du peuple; or, presque partout ce fut la fac- 
tion populaire qui remporta. Les efforts du pape Gré- 
golfe X pour rétablir la paix furent inutiles; mais son 
successeur, licolas III, qui redoutait que Charles ne de- 
vint to»t-puissant, fut plus heureux. A partir de 1280, le» 
gibelins lurent perséc»tes avec un redoublement de fureur 
par le pape lartin IV, à qui Charles I « était servilement 
dévoué. C'est un autre intérét, l'intért de leur commerce 
et de leur navigation, qui porta les républiques maritimes 
à se laite muluellement la guerre. En 1261, les Génai 
aidèrent l'empereur byzantin 51icbel VIII Paléologue 
reprendre Constantinople aux Vénitiens ; de mème, à la ba- 
taille de lleloria, livrée en 128-i, ils anéantirent la puis- 
smace maritime des Pisans, et achevêrent de se rendre le» 
dominateurs souverains de la mer, par la victoire qu'il. 
remportèrent, eu t98, sur les Vénitiens à Curzola (vol/e: 
Gg,'OEs). En bannissant complétement de ses murs la 
blesse (1282), Florence compléta son organisation essen- 
tiellement républicaine, et le parti guelfe s'y consolida par 
de sages institutions. lais dès l'an 1300 une querelle nou- 
velle, qui eut son origine dans la ville de Pistoia, vint 
partager toute la Toscane et les guelfes eux-mëmes en 
deux taclions, celle des noirs et celle des b I a n c s ; ci ces 



04 
lngues discordes ne se erminèrent que par le bannsse- 
ment des blancs (voyez Toscx ). En Lombardie la libe 
agonisante sembla jer  dernière flamme, de 1202 à 1306 ; 
le people, dans les divers vi{l, [afigué des guerr inoes- 
sautes que se faisaient s différen tyrans, se souieva en 
mme [em contre eux, et { chase, entre autr [ Vis- 
couci, q en 1277 avaient en{e6 aux della Torre la 
veraine puissanoe sur Milan. A oe moment, après nn 
long intealle, apparut en Iie un emrenr d'Al{emagne, 
B en ri VIl, pour  rétablir ['auOrité impériale. Il rem- 
po d'ard, il est vrai, de noabl avang; mais en 
définitive tous s plans échouèrent successivement, parce 
que depuis la chu des Hohen«laufen l'anarchie 6[ait tel- 
lement devenue en ilalie la situation normale, quMne monar- 
chie tempér  it impossible. Ce lht surtout Florenoe qui 
fit avorter ses projet. Cette ville, arrivée h jouer main{enant 
le mme rfle qu'autrefois Ulan, rsis énergiquement 
 [ous les effor n[és pour faire de l'Halle une puissance 
unitaire; et par son esprit d'indépendance elle conserva 
longtemps son hégémonie, alors que le resle de l'I{alie 
fourmillait de rans. A la mo de Henri, arrivfe en 1314, 
Pise la beline passa sous l'autofité d'Ug»ccione della Fag- 
uola; et Lucques, oh dominait le mme ran, aprés 
l'avoir chas de ses mors, en t3tf, pas sous {'autori 
de Castruccio Castracani. E 1318 Padoue hulà la 
maison de Cul,ara; les Visconti de Milan héri[èrent d'A- 
lexandrie, ainsi que de Toone en 1315 et de Cremone en 
1322; Mantoue, ou les B o n a c o s s i avaient régn6 dopuis 1275, 
1omb en 1328, sous l'autorité d Gonzaga ; h Ferrare, la 
domination de la maison d' Eh t e, longtemps contest, finit 
par se consolider ; les Po[enla gouvernaient Bavenne dos 
l'année 1273; I Scala, Xërone et quelques autres vles 
depuis le oemmencement du treizième siècle; les Pepoli, 
Bologne  punir de 1335, etc. Dans les aulres illes exis- 
ient de mme des tyrans, dont le pouvoir 6it d'autant 
plus opprif que les changements de maisons souveraines 
éient plus frfquenh. C petits princes contrebanient 
les proje d'agrandisoement onçus par le roi obe de 
aples, nommé par le pape Clement V vicaire de l'Empire; 
et l'empereur Louis le Bavarois, qui en 1327 descendil en 
lhlie pour en finir av les prince de la maison d'Anjou 
et avec les guelfes, se vit obligé de lutter lui-mme contre 
I giIi ; en mme temp» que d'un autre coté la per- 
versité du pape Jean XXI[ r¢lroidissait tellement le èle 
d lfes, e les deux partis, connaint 
qu'ils avaient cgalement h ètre libres, se rappcbìrent. En 
1330 le roi Jn de Bohëme parut subitement en Ilalie. 
Appelé par I habilants de Brescia, favoris6 par le pape, 
Cu pour souverain par Lucques, jouant parto»t le rOle de 
médiateur et de pacificateur, il eOt rëusgi  {onder la puis- 
sance qu'il avait en vue, si I Florentins ne s'éient pas 
is à la traverse de s plans avec Ao Viseonfi, Mastino 
della Sla et Bode 5aples. Jn de Bohème n'eut pas 
plus lot été nversé, que Mastino della Scala, marre souve- 
rain de la moitié de la Lombardie et de Lucques, menaça la 
liberté du ste de la Lomrdie. FIoçence ge mit également 
h la tte de la résisnoe organisée contre ses ambitieux 
roiets, et lui vsci une guee fédérale, dont le seul avan- 
luge pour elle fut de nsolider sa lirté. A Borne, arra- 
chée h la puiance de la nobleoe, çola B le n zi domina 
pendant quelque temps, à pair do 137. Les Gënois, fa- 
ti d éterneiles querelles d Sphola et des Dofia, 
gihdins, et d Grimaidi et des Fieclfi, eifes, expulsërent 
s di¢er iamilt de leurs murs, et se donnèrent pour la 
première fois  dose en la peonne de Simon Bocoenegra. 
En 1347 one horrible famine réa sur tous les poin de l'l- 
talle; en 138 oet contrée fut ravagée par une ste plus 
eflyable, la pte noire, i enleva I deux tiers de la po- 
pulation. L dévasfio commis r les bandes meroe- 
nres oennues sous le nom de 9rand rompu9 nies, ¢tqui 
an réblissemt de la paix continuèrent la guee pour 
 pore compte, pillant et incdiant tout sur leur pas- 

ITALIE 
sage, ne furent pas un moindre fléau ; et l'histoire a plus par- 
ticulièrement conservé le souvenir des horreurs auxquelles 
se livrèrent les bandits commandés par le comte VCerner en 
1348 et par le chevalier Montréal en 1356. C'est ainsi qu'avec 
le déclin de la puissance impériale, au quatorzième et au 
quinziëme siècle, l'ltalie tomba dans une désorganisation po- 
litique de plus en plus complète, et présenta lespectacle d'une 
dissolution des liens moraux comme l'histoire en offre peu 
d'exemples; tandis que, chose bien dine de remarque, les 
arts, les sciences et la vie industrielle arrivaient en mEme 
temps à y jeter un éclat toujours plus tir. Au sein de cette 
anarclde générale, on voit dominer surtout cinq points an- 
tour desquels viennent se grouper to,s les autres, et qui 
donnent le ton au reste de la Péninsule à savoir : la basse 
ltalie, les États de l'Église, Fiorence à la tète de la Toscane, 
Milan sous l'autorité des Visconti, et Venise; les uns et les 
autres servant de centre commun à des efforts déterminés 
et particuliers. C h a ri e s IVessaya encore une fois de rendre 
à la puissance impériale son ancien prestige. Il descendit 
en Italie en 1355, sonmit aussitft à ses lois toute la Tos- 
carie, mais linit par échouer contre l'esprit de liberté des 
braes habitants de Sienne et ,le Pise. De 135 à 13130 le 
pape Innocent ¥I réussit  reconquérir tous les États de 
l'Elise. Mais, poussées au dése«poir par les actes oppresifs 
des Iégats du saint-siCe et soutenues par FIorence, toutes 
les villes conquises abandonnèrent sa cause; après quoi 
la liberté de ces villes, ou plutft la domination des tyrans 
qui les gouvernalett, se trouva consolidée. Pendant ce temps- 
là, les Visconti, persistant toujours dans leurs plans de 
conquètes, e.xcitërent tout ce que l'Italie avait d'énergie à 
la résistance, et en présence du danger imminent Cirent 
oublier les xieilles divisions des guelfes et des gibelins. 
Gënes se sounfit eu 1353 à Giovanni ¥isconti, qui en 1350 
avait acheté Bolote aux Pepoli: mais Pentreprie qu'il 
tenta contre la Toscane ccboua, par s,ite de la resistance 
qu'elle rencontra de la part des républiques toscanes con- 
fédérées. En t5-t les Yenitiens formërent contre lai une 
autre ligne avec les petits tyrans de la Lombardie, iuqu'au 
moment oi enfin, après avoir longtemps lutté contre les 
Visconti, tous ces petits tyran% d'adversaires qu'ils étaient 
de leurs plans de conquêtes, devinrent leurs imitateurs. 
En 1395, Giangalea2zo Visconti obtint de Pempereur ,Ven- 
ceslas Iïnvestiture du duché de Milan ; en 1399 Sienne lui 
fit sa soummission, exemple suivi en 1400 par Perugia 
et en t40 par Bologne; de sorte que FIorence, sérieuse- 
ment menacée, se trouva seule pour défendre contre lui la 
cause de l'indépendance. 3lais apr&ç sa mort, arrivée en 
et pendant la minorité de ses fils, on reperdit une grande 
partie de ce acquisitions. Lorsqu'en ri09 LadisIas de 
Naples, mettant le schisme à profit, s'empara de tous les 
Êtats de PEglise, et menaça la malheureuse ltalie d'une 
nomelle tentative de conquète, ce fitt encore Florence 
qui osa seule lui résister. Mais c'était là un danger passager; 
et les Yisconti ne lardèrent point à se relever. De tfd6 à t-ï20 
le duc Filippo Yisconti reconquit toutes ses possessions de 
Lombardie, et en 11 Gènes, elle aussi, se soumit à son 
autorité. Alors, en t-125, FIorence se ligua de nouveau 
contre lui avec les Véniticns, qui s'emparèrent de tout le ter- 
ritoire situé jusqu'à PAdda et le conservërent jusqu'à la paix 
conclue à Ferrure, en t 428. A Perugia, B r a c c i o de M o n - 
toue réussit, en 1616, ì se rendre maRre de cette ville ainsi 
que de toute POmbrie, et mme de Borne pottr quelque 
temps. En t630 les Petrueci parvinrent à consolider leur 
puissance à Sienne. 
Par suite de l'affaiblissement qui était résulté pour les Mi- 
lanais des efforts tentés en commun par les Vénitiens et les 
F|orentins, et en raison des inquiëtudes continue|les causées 
à 3;ap|es au roi AIponse d'Aragon par leç p.artisans de la 
maison d'Anjou, il n existait plos en Italie d'Etat qui nar la 
supériorité de ses forces rnenaçAt l'indépendance des atre 
encore bien que leurs jalousies mutuelles provoquassent 
entre eux de fréquentes guerres, dans lesquei!es on retrou. 



1TALLE 
rait en lutte les deux vieux partis dans les mercenaires 
qu'ils prenaient à leurs soldes, les Bracheschi et les Sfor- 
zeschi, ainsi appelés, les premiers d'aprês Braecio de Mon- 
tone, et les seconds d'après Sforza Attendolo. A l'extinction 
dela famille desVisconti, Franceseo S fo r za réussit, en t 450, 
 s'emparer de tout le Mlanais. Les Vénitiens s'Cant ligués 
contre lui avec divers princes, il trouva un alli dans Flo- 
rence, où à cette époque la maison de M é d ici s'leva par 
ses richesses et son habileté au-dessus de toutes les autres. 
llilan, où les Sforza se consolidèrent; Venise, qui possédait 
la moitié de la Lombardie; Florence, sagement gouvernée 
par Lorenzo Medici; les Ëtats de l'Église, restitués en grande 
partie au «aint-siége, et aples, qui était hors d'état d'em- 
ployer sa puissance à des attaques dangereuses pour les 
autres, constituaient au quinzième siècle l'équilibre politique 
de l'Italie ; de sorte que dans les guerres privées que se 
faisaient continuellement ces divers Êtats, il n'y en avait pas 
un seul qui pot menacer l'indpendance des autres. C'est 
alors que, en 1494, le roi de France Charles VIII, en sa 
qualité d'héritier de la maison d'Anjou, envaldt l'Italie et re- 
conquit la Sicile enlevée aux Français par la journée des 
Vpres Sicilie nnes. LodovicoSforza, surnommé Moro, 
d'abord son allié, se tourna ensuite, il est vrai, contre lui; 
mais le pape Alexan,]re VI, dans l'espoir d'asurer ainsi 
les grandeurs deson fils César Borgia, seconda les plans 
du roi de France. Cbarles VIII, à la suite des sanglantes 
victoires remportées par son armée, eut bient6t conquis le 
royaume de Naples; mais la jalousie qu'il inspira alors aux 
autres grandes puissances permit bient6t à AIuhonse d'A- 
raton de le lui reprendre. Le successeur de Charles VIII, 
Louis XII, fut également expulsé en 15o par Ferdinand 
le Catholique du royaume de .aples dont il avait réussi à 
faire la conquëte. Louis XII avait Ce plus heureux dans 
son expédition contre le Milanai., qu'il soumit compléte- 
ment en l'an 1500, après avoir invoqu en sa laveur des 
droits d'hérédité. Les plans que César Borgia avait formés 
pour s'assurer la domination de l'Italie furent djmés par 
la mortde son père, survenue en 15o3 ; après quoi le belli- 
queux pa,p,e Jules Il acheva la complète soumission des 
États de I Église, commencée avant lui. En 1508 il conclut 
avec l'empereur Maximilicn ! , Ferdiuand le catholique et 
Louis XII la ligue de Cambrai, dirigée contre les plans d'a- 
grandissemenUdes Vënitiens ; mais ceux-ci, par leur poli- 
tique habile, rnssirent bient6t à diviser cette ligue, qui 
menaçait d'anéantir leur puissance ; et alors, en 15o9, in- 
tervint entre les Vénitiens, les Espagnols et les Suisses la 
sainte ligue, dont le but était d'expulser les Français de 
l'Italie, mais qui n'y réussit pas. La querelle entre les 
Sforza, et plus tard entre l'empereur Cbarles-Quint, et les 
Français au proiet du llilanais, se continua et ne se termina 
que par la droute que le roi de France François I c, 
essu)a en 1525 sous les murs de Pavie. Il en résulta que 
Milan resta ì Fraucesco Sforza, ì la mort duquel 
son fils Filippo Sforza hérita de sa puissance. 
Le» papes de la maison de Medici, Léon X (1513-1521) 
et Clément VII (1525-153-), montrèrent un grand zèle pour 
l'aandissement de leur famille. Charles-Quint, devem, 
depuis la bataille de Pavie l'arbitre suprême des destinées 
de l'Italie, dé.iona, il est vrai, les projets conçus par CI- 
rncnt VII à l'effet de diminuer sa p,tissance. En 1527 il p il 
Rame d'assaut, et la livra au pillage ; mais se réconciliant 
bient6t avec le pontife, il accorda le titre de prince aux 
bledici. Fiorence, à qui sa démoralisation intérieure avait 
coolWla perte de ses antiques libertés et qui en ralité/-tait 
depuis longtemps gouvernée par les Medici, entra alors 
officiellement au nombre des principautés italiennes sous 
le règne du duc Alexandre I ¢. A partir de ce moment la 
politique Ita!ienne, dont Florence avait jusque alors étë 
l'ame, manque d'un esprit homogène, de mme que l'his- 
toire de l'Italie manque d'tin centre commun. 
La sixième lériode de l'histuire de l'ltalie comprend le 
temps qui s'écoula depuis la décadence de tout i'élément 
DIGT. Dla LA UO,'',lal«. -- I'. XI. 

50g 
italien, manifestée en politique par le retour de la do- 
mination étrangère et de l'influeuce exclusive de l'dtrangero. 
qui détermina toutes les révolutions et changements int,- 
rieurs subis par les divers Ëtats italiens jusqu'à la révolu- 
tion française. Lors de l'extinction de la ligne mle de, 
marquis de blonfferrat, i'empereur Charles-Quint octroya 
en 1536, ce pays à Gonzaga de Mantoue. En 1545 le pape 
Paul III érigea en duché Patine et Plaisance, conquis par 
Jules II au profit du saint-sige, et en investit son btar& 
Pietro-Luigi F a r n è s e, dont le fils Octavio obtint, en ! 556, 
l'investiture impériale. En 1523 Andrea D o r i a délivra 
nes de la domination française, que la conspiration tramae 
en 1517 par Ficsquc n'avait pu renverser. Dès 1553 
Charles-Quint, indëpendamment du liilanais, céda aussi 
ffaples à son fils Philippe II d'Espagne; et c'est ainsi que, 
pour le très-grand malheur de ute l'existence politique 
et intellectuelle de la péninsule, l'influence austro-espagnole 
domina en ltalie pendant un siècle et demi. Cependant 
paix de Cateau-Cambrésis, conclue en 1559, restitua le Pié- 
nont au duc EmanueI-Pbilibcrt de Savate. Dans la seconde 
moitié du seizième siècle, la prospérité de l'Italie se releva 
al,tant que cela était possible après qu'elle eut perdu le 
monopole du commerce du monde, trace à un Ion dal 
de paix qui dura jusqu'/ la querelle de suoeesssion survenue- 
au sujet de 5Iantoue et du llontferrat, laquelle entralna 
l'Italie à avoir sa part dans les calamités de la guerre de 
trente ans. Par suite de l'état critique où il se trouvait 
duit en AIlemagne, l'empereur Ferdinand II se vit con- 
traint, en 1631, d'accorder à titre de fiefs ces deux pays au 
protégé de la France, Charles de Ncvers, dont la descen- 
dance en demeura en possession jusqu'/ la guerre de la 
succession dEspagne. Par suite de l'extinction de la maison 
della Pavera, Urbino écbut, en 1631, au saint-siege. Sauf les 
expéditions entreprises par Louis XIV en Savate et en 
PlUmant, la paix de l'Ilalie ne fut point troublée pendant la 
seconde moitié du dix-septième siècle; et le traité de neu- 
tralité signé à Turin en 1696 semblait la garantir pour 
longtemps, quand éc!ata la guerre de uoeession d'Espagne. 
En ! 706 l'Autriche conquit le Milanais, Mantoue et le Mont- 
ferrat; ellegarda les deux premiersde cesterritoires, ltantoue 
a)-ant été confisquée sur le duc, mis au ban de l'Empire. 
comme coupable de félonie, et donna le troisième  la Sa- 
raye. La paix d'Utrecht adjugea en outre à l'Autriche l'lle 
de Sardaigne et le royaume de aples, et la Sicile à la Sa- 
voye, qui l'Changea avec l'Autriçbe contre la Sardaigne. 
Quand. en 1731, la maison de Farnèse vint à s'éteindre 
Patine et Plaisance furent attribués à l'infant d'Espagne- 
Charles. Lors de la guerre qui éc[ata en 1"133 pour la suc- 
cession au trône de Pologne, Cbarles-Emanuel de Savoye 
lieuWavec la Franceet l'Espa-ne, conquit le Milanais; mais 
la paix de Viennede 1738 ne lui en laissa que Novare et 
Tortone. L'Infant d'Espagne Cbarle. devint roi des Deux- 
Siciles, et céda à l'Autriche Parme et Plaisance. La famille- 
de Medici étant venue à s'éteindre eu 1"137, le duc Frau- 
çois-Êtienne de Lorraine reçut, aux termes des prélimi- 
nattes de paix de Vienne, la Toscane, qu'il ériea en apa- 
nage de la ligne cadette de la maison d'Autriche-Lorraine, 
lorsqu'il monta sur le trône impérial, en 17-5. Dans I 
guerre de succession d'Autriche, les Espagnols s'emparërent 
de Milan, en 1745 ; mais ils en forent chassés par Charles- 
Emanuel, à qui Marie-Thérèse témoigna sa reconnai÷sanc 
en lui cedant quelquesdistricts du Milanais. llassa et Carrara 
devinrent dès 1743 l'hérilage de Modène. L'infant d'Es- 
pagne don Philippe conquit Patine et Plaisance, qu'il re- 
perdit bientôt, il est vrai, ,nai que la paix d'Aix la Cha- 
pelle lui retitua en 1748; comme duché héréditaire. C'est* 
ainsi que dans le cours du dix-huitième siècle les maisons 
de Lorraine, de Bourbon et de Savoye se partagèrent toute 
l'Italie, ìl'exception des États de l'Elise, deModène et des 
Républiques, véritables sépulcres blanchis qui demeuraient 
témoins i,npassibles des événements de l'époque moderne, 
auxquels leur faiblesse extrême les empëcbait de prendra 



$o« ITALIE 
pays une constitution nouvelle, calquée sur la constitution 
part, tandis que l'Espagsse et l'Autricbe se disputaient la du- [ française et  réunit Guastalla, en meme temps qu'il octroyait 
mination de i'Italie. 
La septième periode de l'histoire d'Italie comprend le i à sa sœur, Eisa Bacciochi, Piombino et Lucques, érigés en 

temps qui s'est écoulé depuis la révolution française de 1789 
jsqu'à nos jours ; époque de tentahves malheureuses faites 
pour donner à l'ltalie une nouvelle indépendance et une 
nottve||e vie nationales. C'esoE au mois de septembre 1792 
que les troupes françaises entrërent pour la première fois 
en Savoie ; en 1793 elles en fureur, il est vrai, passagère- 
ment expuisées, mais à la fin de cette même année elles en 
ëlaient de nouveau maltresses. La Comention nationale 
avait aussi déclaré la guerre au roi de aples dès le mois de 
lévrier 1793. En avril 1794 les Françaisenvahirentle PiCont 
et l'État génois; mais en juillet 1795 les Autrichiens, les 
Sardes et les lapo|itains les chassèrent de nouveau du ter- 
ritoire de l'ltalie. apoléon Bonaparte ayant reçu en 1796 
le commandement en chef de l'armée française en Italie, 
contraiguit d'abord le roi de Sardaigne à faire la paix et 
a céder à la France la Savoie avec le comté de .Nice. Après 
avoir tout aussit6t après conquis la Lombardie autrl- 
chienne, imposé des contributions au duc de Parme et au 
pape, et causé au roi de aples une frayeur telle que ce 
prince imptora la paix, il fonda en t7 la rcpub[ique ci- 
,alpine, quïl forma a ec le llilanais, le 51antouan» la parIie 
du duché de l'arme en deçà du P6 et Modène. Les Ëtats de 
l'Elise devinrent en 1798 la rdpubli,tue romaine, tandisque 
Gënes était transformée en rdIu6lique ligurienne. Venise, 
elle aussi, quand tes troupes françaises traversèrent son 
lerritoire pour envahir l'Autriche, fut occupée par elles; et 
cette république aristocratique reçut d'autres bases. Le 
paix de C a m p o F o r m i o abandonna à l'Autriche |a partie 
du territoire w»nitien limitée par l'Adige, et en rcunit le 
reste à la republique cisalpine. Le roi de Sardaigne con- 
chd, il est vrai,/ la date du 27 octobre 1797 un traitë d'al- 
liance et de subsides aec la France ; mais en 1798 le Di- 
rectoire, attaqué à Borne par suite de la coalition nouvelle, 
jugea utile de lbrcer le roi de Sardaigne à cëder à la France 
ses Itats de la terre fer'me, tNaples elle-ranime fut occupée 
eu 1799 par le général Championnet et transformée 
en rpubliq ue Parthenopeen ne, et la Toscane de même que 
le Piemont furent militairement administrés par les Fran- 
çais. Cependant,/ la suite des avantages remporlés par la 
la coalition, les lroupes françaises turent encore une fois 
expulsées de aples, de Borne etde tout le reste de l'ltalie à 
l'exception de Gënes; et le roi de Sardaigne ainsi que le pape 
purent redrer dans leurs capita|es. ,iais dans sa brillante 
campagne de 1800 tNapoléon an6antit presque ton les avan- 
tages remporlés par la coalition dans la haute Italie, dont 
il reoenquit la plus grande partie. La paix conclue à Lu- 
riCille en I S00 confirma à l'Autriche la possession de Ve- 
nise ; et la Toscane fut érigée en royaume d'Et r u r i e au 
profit du duc de Patine. L'existence des républiques ligu- 
rienne et cisalpine fut garantie par la France et par l'Au- 
triche, et on réunit aussi ì la seconde les fiefs impériaux. 
Le roi de Igaples se vit alors toroE de signer la paix à Fin- 
renne (28 mars 1801 ) et de .ouscrre à un traité en vertu 
duquel il abandonnait Piombino et le Statu degli presidi, 
réuni de nouveau par la France au royaume de l'Ètrurie, 
ainsi que la moitié de l'lle d'Ebe. Aux termes de la paix 
d'Amiens O801), les Français dureut vacuer ,Napfes, [tome 
et l'fie d'Elhe. En 101 |e premier consul donna encore une 
nouvelle organisation aux républiques de Lucques et de 
Gnes. E janvier 1802 eut !leu la transtormation de la 
république cisalpine en une républ¢ue italienne d'après 
le modèle de la constitutiou fran.caise, et Bouaparte en fut 
nommê président. Gènes, elle aussi, subit une transforma- 
tion nouvelle et reç«t pour doge Girolamo Durazzo ; mais le 
PiCont futcomplétement incorporé h la France. Cepeudant, 
ds 1805 l'empereur apoléon transformait la répbliqne 
t:dienne en rolaume d'italie, dont il se dèclara te roi, eu 
mme temps qu'il y Caidissait son beau-fils, Eu g/:ne 
Beauharnai% commevice-roi. Il donna ch m'me temps au 

principauté, qu'elle Knt à titre de lier relevant de l'empire 
français. La paix signée en 1806 à Presbourg acheva de 
placer l'ltalie.sous la complète dépendance de la France. 
La partie des États véuitiens préclemment adjugée à l'Au- 
triche fut avec l'lstrie et la Dalmatie réunie au royaume 
d'ltalie, qui comprit alors une superfine de 1170 myriamètres 
carrés ave une population de 5,657,000 habitauts. Guas- 
talla, la république Ligurienne, Patine et Plaisance furent 
déclarées provinces fiançaises par une série de décrets en 
date dea2 et 25 mai et 21 juillet 1806. Dans la même 
année 1806 une armée française occupa aussi Naples, que 
par un décret en date du 31 mars lapolon adjugea comme 
royal,me à son frère J o s e p b Bonaparto ; celui-ci, malgré 
l'insurrection qui  éclata et un débarquement opéré par 
les Anglais, en prit elfectivement possession. 5lais deux 
ans après, en 1808, Joseph étant passœe roi d'Espagne, le 
grand-duc de Berg, bi u r a t, fut appelé à le remplacer sur le 
tr6ne de ffaples, tandis que les Anglais, maltres des mers, 
assuraient au roi de Ferdinand la possession de la Stalle. En 
18o8 l'Étrurie fut encore iucorporéeà la France, et en 1809 
l'empereur donna à sa sœur Éfisa le gouvernement de la 
Toscane avec le titre de 9rande-duchesse. La même année 
eut lieu lïncorporation complète des Êtats de l'Eglise au 
ter, itoire de l'empire Français. Aux termes de la paix de 
Vienne, l'Istrie et la Dalmatie furent distraites du royaume 
d'ltalie et incorporées au nouveau royaume d'Illy rie. 
La Bavière dut abandonner au royaume d'Italie la partie du 
Tyroi qu'on appelle le cercle de ['Adige, une partie du cercle 
de l'Eisack et l'arrondissement de Clausen. 
La puissance de apoléon paraissait donc consolidée en 
Italie ; mais elle ne devait pas tarder à s'écrouler, à la suite 
de l'expéditioa de Bussie. Mural déserta la cause de la France 
et conclut, le il ]anvier 1814, un traité d'alliance offensive 
et défensive avec l'Autriche, dont l'afinC, aux ordres de 
Uellegarde, envahit le territoire italien; et malgré la résis- 
tance courageuse q'il opposa à un ennemi supérieur en 
forces, le vice-roi Eugène Beauharnais fut contraint, aux 
termes de l'armistice signé le 23 as ril 1814, d'évacuer toute 
|'Italie avec l'armée française placée sons ses ordres. Con- 
formément a,x stipulations du congrës de Vienne, Mural 
couserva ffaples; mais la malheureuse levée de boucliers qu'il 
teuta en 1815 eut pour suites la restauration de l'ancienne 
dynastie, l'expulsion et la mort du beau-frère de apoléon. 
Pendant ce temps-lb, l'acte du congrès deVienne en date du 
9 juin 1815 avait réglé le sort de l'Italie. Le roi de Sar- 
d a i gne recupera ses Etats, et la maison d'Autriche-Egle 
rentra en possession de M o d è n e, de Beggio, de Ilirandola, 
de 51assa et de Carrara; l'impératrice Marie -Louise reçut 
Parme, Plaisance et Gua-talla; |'archiduc Ferdinand d'Au- 
triche redevint grand-duc de Toseane ; l'infante blarie-Louise 
reçut Lucques ; les Êtats de l'Église furent rétablis dans !es 
limites qu'ils avaient en 1789, sauf la cession de la partie 
de territoire située sur la rive gauche du PO; enfin, le roi 
Ferdinand IV fut de nouveau reconnu en qualité de roi ,te» 
Deux-Siciles. Les Anglais demeurèrent en possossion de 
l'fie de llalte. La république de San-Slarino et le prince 
de blonaco n'aaient d'ailleurs presque pas été Iésés au 
milieu des bouleversements politiques subis par l'Italie de- 
puis la révolution française. La domination des Autrichiens 
sur l'Italie se trouva dës lors plus raffermie que jamais ; 
mais sur les c6tes et dans les mers de l'Italie la suprématie 
appartint à l'Augleterre. Malgré tous ces arrangements, on 
nëtait pas parvenu à étouffer parmi les populations de l'l- 
talle l'aspiration ì l'unitWet à l'indépendance. Presque par- 
tout alors se manifesta le VœU d'obtenir des constitutions 
reprégentaliveg; et ce fut bien inutilement que les gOUver- 
uements sévirent, notamment à Naples, à Rame et à 
Turin, contre les sociétés secrë.les, comme les Unilaires, 
les Garbonari, etc., et lcême contre les francs-maçons, en 



ITALIE 
rélablissant en oulre l'inquisition et les jésuites, et en s'en- 
tonrant d'une armée d'espions. L'esprit du carbonarisme, 
surexcité par la révolution d'Espagne de 1820, et dont le but 
tait la création d'une con lédération italienne soustraite à l'in- 
tloence de l'étranger, de VAutriche surtout, menaçait de bon- 
leverser l'Cat politique de l'Italie en général et l'ébranla en 
réalité partiellement, à Iaples et en Sicile notamment, où 
le roi Ferdinand I  fut contraint, en 1820, de promettre une 
constitution libérale, semblable à celle que les cortès de 
tSl2 avaient donnée à l'Espague; et les mêmes faits se 
reproduisirent dans le royaume de Sardaigue, on en t82t 
le roi Victor-iEmmanuel abdiqua en faveur de son frëre 
Charles-Félix. Toutefois, les cabinets des andes puissances 
parvinrent à maintenir le principe de la stabilité, en étouf- 
fant rapidement chacune de ces révolutions. L'Autriche, 
comme la puissanoe la plus directement intéressée dans les 
insurrections qui éclataient en Italie, et qui déjà en 1815 s'é- 
tait opposée à ce qu'on introduislt le système représentatif 
dans la péninsule, entreprit, d'accord avec les autres puis- 
sances réunies en congrès à Laybach, de rétablir par la 
force des armes les droits légitimes de l'autorité ro.ale à 
I-aples et en Sicile, de mme qu'en Sardaigne. Quatre jours 
de .lute contre l'armée révolutionnaire de Naples ( du 7 au 
10 mars 1821 ), et trois jours seulement contre le parti de 
la fédération en Pimont ( du 7 au 9 avril 182! ) sortirent 
aux Autrichiens pour r#tablir la tranquillité et l'ancien ordre 
de choses en Italie. Depuis lors, conformément aux principes 
politiques du système de répression posés aux congrè de 
Laybach et de Vérone, /es différents gouvernements ita- 
liens apportèrent une rigueur extrëme dans l'exercice de 
leur autoritê. Tandis que dans différents États le pouvoir 
organisait systêmatiquement la réaction, lesjénites et l'em- 
ploi de moyens analogues, d'un autre c6té les soeétés se- 
crètes y prenaient toujours plus d'importance; et les divers 
gonvernements recoururent alors aux moyens les pls vio- 
lent pour combattre les menées de ces associations. La ritenr 
fut même poussée jusqu'à la cruauté à Iaples et en Sicile 
contre les suspects politiques, mais surtout à Modène, dont 
le dc François IV s'était mis dès 182! à la tête d'une police 
secrète embrassant toute l'Italie. Les metres prises dans le 
royaume Lombardo-Vénitien, b, Parme et à Lucques, ainsi 
qu'en Toscane et dans les Ëtats de l'Église, furent empreintes 
de moins de rigueur. Pie Vil, dont le secrétaire d'Elat, le 
cardinal C o n s a I v i, avait beaucoup fait pour la récoucilia- 
tion des esprits et le rétablissement de l'ordre  VintCeur, 
et opéré d'utiles rëformes dans l'administration, et après lui 
ses SltCCeSseurs, Lëon XII et Pie ¥III, se contentèrent d'ex- 
communier les carbonari, ainsi que tontes les autres société 
secrètes, sans exerce de poursuites contre les individus qui 
avaient pu prendre part précédemment à leurs menées. 
U en fut.de même à Parme et à Lucques, ainsi u'en Tos- 
cane, quand Léopold If eut succéd, en 1824, à son père 
Feroenand 1IL 
Iulle part cependant on ne songea à faire disparattre les 
causes qui avaient provoqué en Italie les rëvolutious de 1820 
et 182! ; la proscription-et Pincareératien de tant d'hommes 
condéres et estimés ne firent ]onc qn'irriter plus pro- 
Ibndément les esprits. A la suite de l'atation génerale 
que la révolution de Juillet produisit en Europe, on «.rut 
egaiement en Italie que les circonstances étaient favorables 
pour un soulèveaaent dans Pintért de la libertë politique 
et,nationale. Avant que ce mouvement éclatàt, Ferdinand II 
était monté sur le trône des Deux-Siciles, le 8 novembre I $30, 
et Grgoire XVI ava ceint latiare le 2 février IS31. 
gr les nombreux indices de la profonde irritation dt esprits, 
le duc de Modène sefforçait de maintenir dans toute sa 
tigoeur le système de la répression ; ans.i f,,t-ce à blodène 
que a tempête ira|trique éclata d'abord. Une première in- 
surecqion, cpti eut lien dsr les journëes dn 3 su 4 fevrier, 
fut, il et vrai, comprimée par la force de armes; mais tan 
,nouvement identique aysnteu lieu I¢ m$me jour à Bologne, 
llodène se soule'a de nouveau, et cette fois le duc fut 

507 
obligé de se réfugier à Mantoue. Les troubles dont la ville 
de Parme fut le théâtre le 15 contraignirent la duchesse 
Marie-Louise à prendre également la fuite. Dës le 8 février 
la ville d'Anc6ne s'était prononcée en faveur de la révolu- 
tion, et plus tard le pape se vit menacé dans ome même. 
Grégoire XVI, hors d'Ct de comprimer ces troubles par 
la force, essaya d'opérer une contre-révolution; mais se» 
efforts furent vains. Le 2e février les déput des provinces 
italiennes qui s'étaient soulevées se réunirent, et proclamë- 
rent les diverses provinces représentées dans l'assemblée 
complétement émancipées de l'autorité temporelle du pape. 
II déclarèrent qu'elles formaient désormais un seul et même 
Etat, régi par un seul et mème gouvernement, qui se com- 
poserait d'un président, d'on conseil des ministres et d'une 
consuIta lëslative, dont les membres furent Cus des le  
mars suivant. Mais les cabinets des grandes puissances eu- 
ropéenne avaient résoln de mettre encore une fois en pra- 
tique  l'égard de l'Italie le système de l'intervention. Le 9 
mars le duc de 51odènc rentrait sans résistance dans sa ca- 
pitale aec ses troupes flanqnées d'un corps auxiliaire ml- 
tricbien. Le gnéral Zucchi fut donc forcé de se rfil,'ier 
sur le territoire de Bolo,-me avec une partie de la garde na- 
tionale de Modène et la plupart des individus compromisdan 
celle échanffooree. Pendant ce temps-là les Autrichien.» 
avaient occupé Ferrare dès le 5 mars. et le 13 ils entraient 
également à l'arme. Les Bolonais refusant encore de croire 
à la possibilité d'une inter'ention, Cutent le géneral Zuc- 
chi pour commandant supérieur; et quand les Autrichiens 
s'approchèrent de leur ville, ils translérêrent le gou ernement 
provisoire à Anc6no. Mais après un engagement soutenu le 
25 mars près de Bimini par les insurgés contre les forcc. 
autrichiennes, le gouvernement provisoire fut contraint de 
se dissoudre. Le 27 mars AnoEne, a son toor, ouvrit ses portes 
aux .t, utrichiens; et le 4 avril, aprës que les Italiens commandes 
par Sercognani curent déposé les armes. Spoleta fut occupée 
par les troopes pontificales. Les individus les plus compro- 
rais cherchèrent à se rêfugier aux lies Ionlennes ; mais ils 
furent faits prisonniers par les Autrichiens, et plus tard livres 
à leors gouvernements respectifs. 
Depuis son retour dans ses Etats, le duc de 5lodène gon« 
vernait avec une main de fer. Le goovernement pontifical, 
lui aussi, organisa une violenle relction ; mais une fois q e 
ls Autrichiens eorent évacué Anc6ne et Bologne, il lui fut 
difficile de maintenir la tranquillilé. De nouveaux troubles 
qui éclatèrent dans les Etats de l'Eglise amenèrent en lb-2 
unenonvelle invasion des Autrichiens, et donnèrentoccasion 
à Casimir P é r i e r de faire occuper Anc6ne, le 22 février ! 832, 
par Jan corps de troupes françaises ; mesure contre laquelle 
le gouvernement pontifical protesta vainement. Apre 
son retour à Parme, la duchesse Marie-Louise s'appliqua  
calmer les esprits par des mesures de conciliation et en 
remédiant à divers abus. En Sardaigue le roi C barles- 
A Ib ert, eaontë sur le tr6ne en 1831, sut d'abord préserver 
ses Etats de toute insurrection eu adoptant un système libéral. 
de gouvernement; mais plus tard ce prince changea de po - 
litique, et s'abandonna surtout à des influences jésuitiques-. 
Des conspirations de peu, d'importance provoquèrent donc 
aussi en 1833 dans les Ets sardes de sanglants conflits, 
suivis en 1,3 d'une folle irruption en Sabote d'une bande 
de réfoés polonais et italiens. 
A ces entatives avortées d'insurrection, suivies d'une san- 
glante répvession, snocéda, il est vrai, en Italie un calme ap- 
parent ; mais ce calme n'était que celui de l'ëpuiment. L'in. 
fatigable activité des sociétés crëtes, qui maitenanl, avec 
la Giovine ltalia de bi a z z i n i, prirent des tendances répu- 
blicaines, s'Cendit dans une grande partie de la PCminsule. 
Anc6ne lut évacuée (décembre 1838) par les troupes frau- 
çaises ; les troopes autricldennes sortirent en meme temp. 
des États de l'Eglise; et l'amnistie proclamée qnolqoe temps 
auparavant ( octobre ) dans le royanme Lombardo-Vénitiea 
sembla contribuer poissamment ala conciliation des esprits. 
llais le nécontentement couvait en secret, et les incea- 



,ntes menes des bannis et des émigrés contribuaient  l'en- 
tretenir. Quelques troubles en Bomagne ( 1843 et 1844 
le soulèvement de Bimini (1845) étaient du moins des symp- 
6mes «ignificatifs; et la manière dont le gouvernement 
ontifical agit dans ces circonstances ne pouvait qu'aggraver 
le mécontentement. Un incident qui produisit la plus vive 
impression, ce fut le débarquement lentWsur la cte de 
-Calabre par les fils de l'amiral autrichien Ban diera, en 
• ecrte intelligence aven Mazzini. Faits prisonniers par le 
gouvernement nspolitain, ils furent fusillés avec plusieurs 
<le leurs complices (Inillet 1544). A cté de ces tendances 
révolutionuaires se manifestait de plus en plus dans la partie 
clairoe de la population une aspiration à des réformes mo- 
dérées. On en avait pu reconnaltre les premiers indices 
dans les opinions émises au sein des congrès scientifiques 
italiens, où l'on.n'avait pas craint de parler d'unitWnationale, 
»ù l'on avait soutenu et dévelopl l'idée d'une union doua- 
iëre italienne. Le gouvernement doux et éclairde la Tus- 
carie, les progrès pacifiques que les idées liberales faisaient 
en Sardaigne, étaient le sujet de vives espérances d'un avenir 
ncilleur. Les gouvernements de Naples, de Borne, etc., 
talent aliéné toute le« sympathies; et dans la hante Italie 
le gouvernement autrichien, en dépit des nombreuses améo 
lioratiins matérielles dont on lui tait redevable, n'avait 
pas su se concilier l'opinion lib.rale et nationale. Aussi bien, 
comme les événements ultérieurs le démontrèrent surabon- 
damment, l'administration autrichienne elle-intime était 
minée et énervée par cette lassitude et cette inaction géné- 
rale qui l'œempdcbaient de s'assurer des moyens de résister 
• énergiquement  un soulëvement s'il venait jamais  éclater. 
Dans ces nirconstances, la mort de G r é go i r e XVI ( I  iuin 
1846) et l'avénement du cardinal Mastaï FerretIi au tr0ne, 
pontilical sous le nom de Pie IX), firent époque en Italie. 
L'intronisation de Pie IX coincida avec le développement 
toujours croissant du sentiment national, avec l'essor pris 
dans celle direction par une littérature des plus actives et 
des plus popolaires  rappelons  ce propo« les noms de G i 
• terri, de Balbo, d'Azeglio, etc.), avec la répulsion 
de plus en plus profonde de l'opinion pour la politique per- 
«Cutrice qui dominait encore dans la plupart des ouverae- 
ments italiens. Or, n'est précisement dans les Etats de l'É- 
glise que la compression politique, la profonde incurie pour 
tort ce qui était intéit matériel avaient atteint leur apogée, 
• ous le gouvernement corrompu et incapable de Gré- 
goire XVI. Pie IX ayant tout d'abord débuté par des me- 
sures de conciliation, notamment par une large amnistie, 
puis ayant remédié aux abus les plus criants, s'entoura 
d'hommes éclairés et libéraux, accorda un peu plus de li- 
berté  la pree, qui jusque alors avait été rigourensement 
muselée, opéra diverses réformes utiles et en mme temps 
se prépara  réformer la constitution et l'administration. Ce 
furent I autant d'actes qui émurent profondément l'Italie et 
dont l'effet se fit sentir bien plus loin encore• Pie IX de- 
vint dans toute la péninsule le symbole des tendances li- 
• léraleso unitaires et réformatrices. C'est en Torsane qu'on 
• en put tout aussitôt constaterl'influence bienfaisante. A une 
mouvelle loi sur la presse (mai 1547), sous la tolérance de 
laquelle se développa rapidement une presse périodique 
• aussi influente que remarquable par le talent des éerivains, 
• uceédërent la promesse de grandes réformes dans Vadi- 
nistration et la législation, la création d'une garde ratio- 
malé, la formation d'un ministère libëral. Bient6t la Sar- 
• daigne ne put résister plus longtemps à la force du cou- 
tant. La promesse deréformes essentielles dans la législation 
• et l'administration de la justice ne tarda point à tre sui- 
• ie de plus de laisser-aller accordé à la presse et de l'an- 
monce d'une union dananire italienne. 
Tandis que la polifique nouvelle l'emportait ainsi  Borne, 
.à Florence, à "l'urin, et que la population saluait avec en- 
thousiasme le commencement d'une ère nouvelle, dans le 
• rené de Pltalie les plainle contre roppressiun et conlre 
,'incurie du pouvoir  l'tSgavd de ce qui avait Irait aux in- 

I'£ALIE 
térdts généraux des masses devenaient toujours plus ives. 
C'étaient surtout b;aples et PAutriehe qui gardaient encore 
une attitude bostiie en face de la llitique nouvelle, dont 
Pie IX ëtait regardé comme le représentant. A Taples on avait 
encore une fois réussi  comprimer diverses tentatives du 
soulèvement qui 7 avaient éctaté dans t'été de t47, mais 
sans pour cela pouvoir arrdter les progrès de la lermen- 
talion génrale des esprits. En Lombardie, PAutriehe persis- 
tait dans le vieux système; et l'occupation de Ferrare 
(ao0t t847) fut de sa part une vëritable déclaration de 
guerre faite  la politique adoptée par le pape. Parmi les 
petits Itats, ltodène, où depuis janvier 1546 le due Fran- 
çois V avait suceédé  son përe, repoussait toute idée de 
réforme, plein de confiance dans la protection des baion- 
nettes autrichiennes. Aux termes des traités, Lucques pas- 
sait en octobre 1547 de la sonveraineté d'une branche de 
la maison de Bourbon sous celle de la Toscane, tandis qu'a- 
près la mort de la duchesse Marie-Louise (décembre 
1847 ), Patine, Plaisance et.Guastalla faisaient retour à cette 
mdme branche des Bourbons. Là comme  Modère on es- 
saya de s'appuyer sur la puissance autrichienne, qui ton- 
tefois se vit bientôt occupée et attaquée sur son propre 
territoire. L'opposition de la population lombarde, alimentée 
par des antipathies politiques et nationales, prenait chaque 
jour un caractère plus décidé• Des simples démonstrations 
on ne tarda point à passer à des actes patents d'hostilitë 
et à une résistance passive aux autorités constituées. D'un 
bout de l'Italie  l'autre la haine pour l'Autrichien était sys- 
tematiquement nourrie, en mëme temps que peu  peu on 
imprimait à toute l'agitation une direction offensive pour 
l'Autriche. Sans doute, la population iombardo-vnitieune 
s'en tint d'abord à des démonstration.%/ des tiraillements et 
a des provocations; mais il suffisait d'une étincelle pour  
allumer la flamme de l'insurrection. La vieille politique au- 
trichienne, arrivée au dernier stade de son agonie, se mon- 
trait d'ailleurs complétement incapable de prévenir en quoi 
que ce f0t l'orage qui s'approchait, et n'avait en outre aucnn 
appui à attendre de l'étranger. La France, a la veille elle-intime 
d'une révolution, approuvait tout an moins les réformes mo- 
dérées du pape. Quant  l'Angteterre, elle s'était osteusble- 
ment placée a la tte du parti le plus avancé. En outre, le 
12 janvier 1548, en Sic'de, depuis plusieurs mois en proie à 
uue violente fermentation, et où la population avait vu re- 
pousser opiniatrément ses demandes pour obtenir de bien 
modestes réformes, éclatait une insurrection dont le triompbe 
arracha  Ferdiuand I! les concessions si longtemps refusC. 
5lais elles venaient trop tard. Le mouvement de la Sicile se 
communiqua au royaume de Naples; et alors le roi ne crut 
pouvoir prévenir une insurrention générale qu'en appelant 
d'au tres hommes  la direction des affaires (29 janvier 158  
et en promettant une constitution. La Sicile jugea ces con- 
cessions iusuffisantes; on y ríclama la constitution de 18t 
et la séparation complète de la Sicile d'avec le continent. 
l;aples ayant ainsi précédé tous les autres États de l'llalie 
dans l'adoption du système représentatif, il était imls- 
sible d'hésiter plus longtemps là où le mouvement avait 
commencé plus t6t et sur des bases plus solides. Les insti- 
tutions constitutionnelles se suecédëreut donc maintenant 
rapidement en Sardaigne {8 février), en Toscane (17 février) 
et mrns dans la Borne des papes (14 mars). L'retire des 
Jésuites, dans lequel l'opinion publique voyait l'appui de la 
réaction, dul évacuer l'llalie. 
C'est  cette poque de fermentation universelle et de ro 
formes politiques qu'.clata en France la révniutiou de fé- 
crier 158, dont toute l'Erope centrale reçut aussitôt I 
contre-coup,et qui ébranla jnsqu'aux gouvernements absolus 
de l'est, et notamment l'Autride. Le désaccord profond 
existant en Lombardie et dans les anciens Êtats-Yéniticns 
esstre les populatious et le gouvernement autrichien, s'ètail 
déj traduit en sanglants conflits (janvier t5;8); et le pou- 
voir avait essa)-é dr faire de la force contre les chefs du 
mouvement, par exemple  Vertige, mais n'avait 'éus, 



ITALIE 
lmr là qu'à augmenter encore l'irritation des esprits. La mise 
du pays en état de siCe (20 février ISS ) était, en raison 
de la décadence visible de la puissance autrichienne» une 
xnesure impuissante à répandre la terreur qu'on voulait 
ériger en moyen de gouvernement. Quand on y apprit In 
événements de Paris, la haute Italie sortit de la réserve 
prudentequ'elle avait jusque alors gardee, et l'étourdissante 
ouvelle de la révolution de Vienne eut bienl6t acbevé de 
déterminer un bouleversement général. I'a)ant pas la sin- 
cère volonté d'opérer de larges réformes et hors d'état de 
l'emporter par l'emploi de la force des armes, la politique 
autrichienne flottait incertaine entre la peur et la violence. 
L'insurrection qui éclata le 22 mars à Milan, et fut appu)'ée 
par des mouvements analogues dans presque toute la 
haute Italie, contraignit les troupes autrichiennes comman- 
dées par Badetzky à évacuer la capitale de la Lombardie 
et à se replier sur Vérone, tandis que presque en mme 
lemps Venise devenait indépendante par la capitulation pré- 
cipitée des autorités autrichiennes, et qu' Parme et à Moo 
dène toutes les autorités étaient renversées. 
Le roi de Sardalgne, Charles-Albert, dont le libéra- 
lisme avait tout aussit6t visW la fondation d'une bégémonie 
italienne, avait dans l'intervalle pris ses mesures pour com- 
mencer la lutte contre l'Autricbe. Le jour mme où llilan 
se soulevait (25 mars), il franchissait les frontières de la 
Lombardie et déclarait la guerre  PAutricbe au nom de 
]'ind,;pendance italienne. Les troupes autrichiennes se trou- 
vèrent alors refoulées sur la lignedu Mincio et dans les places 
fortes de Vérone, de Mantoue, du Pescldera et de Legnano, 
tandis que toute l'Italie se préparait  les combattre. Les 
gouvernements de Florence, de Naples et de Borne recon- 
m, rent l'impossibilité de résister  l'élan national. En peu 
de temps la diplomatie autrichienne se trouva complétement 
battue sur ces divers points, et des troupes romaines, tos- 
canes et napolitaines se mirent en marche pour aller grossir 
dans la haute ltalie les rangs des défenseurs de l'indépendance 
nationale. S'il y avait eu parmi les Italiens de i'nnion et 
de la modération politique, il est extrëmoeent vraisemblable 
qu'en raison de la situation des choses ils eussent pu ga- 
gner ì la lutte des résultats réels. Profondément ébranlée 
par a rvolution in{érieure, l'Autriche se montrait h ce mo- 
ment disposée ì consentir h un compromis qui eut assuré 
en grande partie l'indépendance de la haute Italie; mais les 
Italiens préumèrent trop de leurs forces et ne surent pas 
mettre  profit l'instant favorable. Les dissensions des lil- 
taux et des radicaux, les folies du parti extréme, le défaut 
d'habitude militaire des Italiens, rendirent Iout aussit6t la 
position du roi de Sardaigne des plus difficiles. On réussit 
bien ì mater la faction républicaine en Lombardie et  
faire prononcer la réunion de cette province h la Sardaigue 
(juin 18t$ ); mais tout le poids de la lutte continua à peser 
sur le roi Chades-AIbert et sur son armée, attendu que les 
volontaires lombards, les crociati, etc., étaient des auxi- 
liaires plus embarrassants qu'utiles, et que les contingents 
apolitain et romain ne lardèrent point  Cre rappelés du 
thé'tre des opérations actives. Le mouvement du 15 mai, 
que le roi de aples parvint ì comprimer, peut ëtre consi- 
déré comme le début de la raction intérieure; mais les 
victoires que les troupes autrichiennes remportèrent en juin 
et juillet, celle de Custozza (25 juillet) notamment, et qui 
amenèrent en peu de temps la dissolution de l'armée sarde, 
la prise de Milan et l'armistice du 9 aoùt, furent des événe- 
ments autrement décisifs pou les destinées uitCleures de la 
péninsule. A ce moment où l'Autricbe était parvenue  triom- 
pher de la force la plus importante de la révolution et où 
on ne songeait plus à ienne  tenir les conditions antrien- 
• ement poes pour la paix, le parti démocratique exlrëme 
Iwit, maiheureusemen! pour la cause do l'indépendanceita- 
benne, le deçs«s dans l'italie centrale. E Toscane, par 
suile de la faiblesse du gouvesemen[, les débu{s de la mie 
en pratique du s}'slème constitutionnel furent snivis bienlt 
,le la propagalion «le l'esprit d'anarchie dans les masses et 

509 
on imposa au grand-ducle ministère radical Montanelli.Gue- 
ra:--i. Le comte Bossi, que le pape Pie IX avait appelé 
à Borne h l'effet d'y prendre la direction du ministère lut 
traltreusement assassiné (15 novembre); après quoi le pou- 
voir se trouva complétement aux mains du parti répnbli- 
tain, et le pape se vit forcé d'appeler aux affaires le cabinet 
radical Mammiani-Serhini. Le 2 uovembre, le pape, ì 
l'aide d'un deguisemenl, parvint ì s'enfuire ì Gaìte. En Tos- 
carie, le parti extrême amena un dénotment analogue de 
la crise. Aprës s'ètre laissé arracher sa sanction/ un décret 
qui convoquait une assemblée constituante chargée de dé- 
cider seule de l'organisation politique à donner à l'traite, le 
grand-duc quitla subitement Florence (7 février 189), e 
acheva par là le triomphe complet du parti démocratique, 
auquel appartenait d'ailleurs son propre ministère. A la 
mme époque une assemblée constituante se réunissait / 
Borne et y proclamait la république. En Sardaigne, on se 
laissa également entralner de nouveau  faire la guerre ì 
l'Autricbe ; mais la glorieuse campagne de trois jours de 
Badetzky (21-23 mars 189 ), les ictoires de Mortara, de 
Vigevano et de Novare achevèrent le triomphe de la poli- 
tique de restauration en traite. Le loyal Charles-Mbert, navré 
de douleur, abdiqua la conforme au prolit de son fils Vi c- 
tor.Emmanuel, et se condamna à un exil Volontaire, dans 
lequel il ne tarda point ì descendre au tombeau. 
Le résullat immédiat de la défaite essuyée par les armes 
sardes fut la restauration de la puissance autrichienne, non 
pas seulement en Lombardie, ou la révolution tenta encore 
desuprmes efforts, qui n'abontirent qu'à une sanglante ré- 
pression, notamment à B r e s c i a, mais encore à Modénc, à 
Patine et en Toscane. L'oecupation de la Toscanc par le» 
troupes autrichiennes eut lieu en avril et en mai, en mme 
temps qu'»me armée lrançaise auxiliaire débarquait dans 
les États de l'Église h l'effet d'y rétablir, d'accord avec des 
troupes espagnoles et napolitaines, la souverainelé du pape. 
Diverses attaques tentons par les Français furent, il est vrai, 
d'abord repoussées; mais le moment n'était pas loin cepen- 
dant où Borne ì son tour devait succomber. En Sicile la 
révolution touchait également ì sa dernière heure. La dé- 
chéance de la maison de Bourbon et l'élection d'un prince 
,le la maison de Sardaigne pour roi de Sicile ( ts8 ), avaient 
été suivies d'une lutte armée contre les forces napolitaines ; 
et cette lutte, qui prit une tournure de plus en plus favo- 
rable  la répres.ion, se termina par la soumission absolue 
de l'fie sans qu'elle obtint une seule des conditions qu'elle 
avait si orgueilleusemeut repoussées dix-huit m»is aupara- 
vant. Dès lors la restauration s'opéra sur tous les points de 
la péninsule. En Lombardie, ì Modéne, ì Parme et en Tos- 
carie, dans les Iégations romaines méme, l'Autriche organisa 
un sévère gouvernement militaire, avec l'intention haute- 
ment annoncée de rétablir Pancien ordre de choses dans 
toute sa rigueur. Ce fut en vain que dans les Ètats de I'E- 
glise la France s'efforça d'arracher quelques concessions au 
pape, qui en aoOt 189 avait repris l'exercice de son pou- 
voir temporel confié par lui ì une commission de gouver- 
nement. La haine pour tout ce qui rappelait l'époque des 
troubles, la défiance pour toutes les améliorations, et l'im- 
patience vindicative du parti de la réaction, qui avait pris 
bien vite une grande influence, l'emportèrent I' comme 
parlout ailleurs. Nulle part, toutefois, la restauration n'af- 
fecta des formes plus violentes qu'à aples, où toutes les 
concessions furent retirées toutes les promesses oubliées, 
où le règne du sabre se produisit dans toute sa sauvage 
naiveté, et où les persécutions politiques et le procès de 
{endances fnrent plus que jamais h l'ordre du jour. Venis«, 
après une hér6[que résistance, finit aussi par suecomber; 
le 28 aoOt 1839 Badetzky y fit son entrée triomphale, et la 
dernière trace de la résistance révolutionnaire sur le sol 
italien se trouva effacée. 
La Sardaigue seule fit une honorable exceplion à la pré- 
[ cipitation passionnée avec laquelle on s'ellorça partout de 
r,:lablir les clsoe ur l'ancien pied. Aprb avoir conclu la 



b t o ITAL1E 
paix avec l'Autriche (aoùt 18-i9 ), le gouvernement sarde 
,/ la t¢ duquel se trouvait Azeglio) porta toute son atten- 
tion sur les amliorations/ effectuer à l'inlérieur. Dans ce 
pays le parti radical avait sans doute encore le dessps ; mais 
la dissolution des chambres amena une forte majorité cons- 
tit,tionnelle (décembre tS9) et préserva la couronne de 
la tentation de se jeler dan« les voies réaclionnaires d'une 
restauration. La Sardaigue fut donc le seul Ëtat italien qui 
s'efforça de conserver les institutions constitutionnelles 
goCs en 1848 au prix de tant de sacrifices, et ce sera l'éternel 
honneur des hommes dËtat placés à la tête des affaires de 
ce pays, que d'avoir su resister / toutes les suggestions de 
l'étranger qui les poussait à suivre la politique opposée. 
Le royaume Iombardo.vénitien fut réduit a l'ctat de pro- 
rince de l'empire d'Antriche ; ci, mMgrë quelques mestres 
utiles et conciliatrices prises pat le gou ernement aulrichicn, 
telles par exemple que l'Cection de Yenise en port franc, 
la dictature milliaire continua d'y subsister sans rénssir h y 
detrnire une sourde fermentation. Ruine, où le pape était 
revenu résider en avril 1850, continua d'Aire occupée par 
de» troupes françaises; et la réorganisation administrative 
qu'on  opéra alors rétablit le gouvernement sacerdotal 
comme par le passé, sans qu'il fat autrement qttestion de la 
constitution accordée en 1848 par le saint-père à ses sujets. A 
Nap|es on supprima les derniers vestiges des libertés publi- 
ques, et on iutenta aux auteurs et fauteurs du mouvement 
de t8-18 une série de procès dont certains incidents proàui- 
irent une vive impression à l'étranger. En Toscane, où une 
convention militaire passée avec l'Autricbe mettait le pu.vu 
sous la complëte dépendance de cette puissance, qui y en- 
tretenait une armée d'occupation, l'absolutisme et le peu- 
voir sacerdotal reprirent idns d'influeuce que jamais. Les 
garanties constitutionnelles  furent d'abord snspenàes 
(septembre 1850), puis definitivement abolies (mai 1851 ). 
Dans de telles circonstances, il ne tant pas s'étonner que 
la situation générale de l'ltafie soit re>t des plus tendues, 
et aussi tste qu'incertaine ; et jttsqu'à présent quelq,es pro- 
grès matériels incontestables (construction de chemins ,le 
r, accession à l'union postale autricldeune, liberté de la 
,aigalion du PO, etc.) ont été impuissants  la modifier. 
L'accroissement extraordinaire des actes de brigandage, sur- 
tout dans l'llalie centrale, la persistance des sociëtés secrè- 
les, malgré les sanglanles répre.ions dont elles sont l'objet 
quanà on les décore re,les incessantes explosion« de la haine 
des populations pour les autorités constituées, en depit de la 
rigueur des lois nn'litaires, comme celle qui éclata à llilan 
le 6 février 1853, sont autant de faits qui indiquent 
samment combien peu l'ëtat uial et publique de la pénin- 
sule offre encore de sécurité. 
On ferait un livre rien qu'avec l'indication du titre des ou- 
f-rages qu'on peut consulter sur l'histoire ancienne et mo- 
derne de l'ltalie. Nous nous bornerons à indiquer les sui- 
vants : 11 uratori, lerum Ittdicorum Scriptores 
cipui {25 parties; llilan, 1723-175t), avec le supplément 
deTartini (Florence, 1748-1770 ); Archivio Slorico ltaliano 
(t. I h XVI; Flurence, 1838-1851 ); précieuse collection, pu- 
bliée de nos jours par le libraire Viensseux; Guicciardini, 
Detl' lstoria d'ltalia libri XVI (FIorence, t56t}; la meil- 
leure édition est celle de Bossini (Pise, 18i9); bluratori, 
.tnno/i d'ltalia ( 12 vol. ; dern. édit., 18 vol. ; Milan, 1818- 
152t), avec les suites de Vincenti (Ruine, 1790) et de 
Coppi (Ruine, 1818; e édit. 1848-1851 ) ; les Storie d'l- 
talht de Campiglio (t837), de La Farina ( l S-tC, et de Balbo 
(18ztt). Pour l'histoire moderne de l'ltalie, nous rappelle- 
rons les ouvrages de Boira, de Cant6 ; et pour le récit des 
derniers événements dont elle a été le théttre, Gualterio, 
Eli ult;mi Rivoligmeni ltoliaui (Florence, 1850-185t); 
Ranalli, Gli Avvenimenti d'Italia doto t'esalla-.one di 
Pin IX (Florenc% t 5). Consultez aussi Fantin-Desodoa,x]s, 
Histoire de l'ltalie ( Paris, 1803) ; Sismoudi, Histoire 
.'.les Républiqltes llttlitmnes du motjen dge (16 vol., 
:Ç édit.; Paris, 

ITALIEN N E 
ITALIEXE (Langue). La langue italienne, l'Une 
languesromanes,comme il est facile de le reconnaltre ì pre- 
mière vue, n'est point immediatemeut dérivée du latin clas- 
sique parlé par les classes élégantes et pollen, mais bien de 
la langue vulgaire, devenue dans les derniers siècles de l'em- 
pire romain de plu.; en plus rustique et dégénérée, que, en op- 
position -,i la langue plus noble et plus pure, on nommait 
lingua romona rustico, ou latin des paysans, et dont il 
existe encore de frappants spécimens dans des milliers d'ins- 
criptions et de pierres h,mulaires. Ce qui caractérise sur- 
tout ce lalin rustique, c'est que les désinenees de mots déter- 
minées par les cas  sont toujours de plus en plus négligëes; 
c'est l'emploi impropre des prepositions avec des rëgime. 
autres que ceux dunt elles doivenl être suivies; c'est l'omis- 
sion, wis la suppression complète de certaines formes d.u 
verbe, telles que le déportent, l'infmitif esse, velle, posse 
ferre, elc., le passif, le plus- que-parlhit, et, œee qui était 
inévitable avec l'omission des désinences des cas, l'emploi 
toujours plus frequent des pronoms démonstratifs, d'où 
proviennent les articles de la langue moderne. De même il 
ëtait naturel qu'un grand nombre de mots du style noble, 
dont legs gens du commun faisaient peu usage, disparussent 
complëtemenl et fussent remplacés par les expressio»s plé- 
béiennes, comme bellus, cobollus, caso, bucco, resta, au 
lien de pulcher , equts, dorons, os, caput, etc. 11 serait 
dilficile de préciser l'influence qu'eut sur la langue l'inva- 
sion de l'ltalie par des conquérants germains : ce qu'il y a 
de certait seulement, c'est q,e eu conflit de deux langues 
aussi différentes que celles des populations romaines et des 
Germains dut nécessairement accélérer la ruine de l'ancienne 
langue et la naissance de la nouvelle, de même que modifier 
considérablement la prononciation. Quant à la grammaire 
et aux formes de la langue, l'inlluence des barbares fut à- 
peu près nulle, et la langue ne s'enrichit que d'un très- 
petit nombre de mot emprtmtés aux idiomes germaniques, 
et relatifs pour la plupart aux armes, h la guerre, ì la chasse 
et ì certains rapports civils. Toutefois, la transformation de 
la romarin rutica en italien s'eifectna si lentement et 
d'une manière si imperceptible à travers les siècles, que le 
peuple n'en eut mme pas la conscience et qu'il continua 
pendant Iong|emps encore à donner à la langue qu'il parlait 
le nom de li;,9ua latina ou roraana, à la différeee de la 
lingua francisca ou theotisca, dénominalion sons laquelle 
on comprenait le» langues parlées par les vainqueurs. Plus 
tard on employa pour la lanae nouvelle le nom de li9ta 
vulgoris (volgore), par opposition au latin désignê sous le 
noms de lingua 9rammatica; s'en servir, c'était 9rom- 
motice In,lui. 
Il s'en faut d'ailleurs que eel te langue nouvelle ftt la méme 
dans toutes les parlies de l'Italie; et si déjà aux plus beaux 
temps de Borne le latin avait étA parlé par le peuple d'une 
manière autre dans l'Apulie, par exemple, qu'on nord de 
l'ltalie, de méme il y suret un grand nombre de dialeetes : 
ce qu zrrive toujours dans les pays de grande étendue. La 
seule différence, c'est que non-seulement ces dialeeles ont 
persisté partout juu'ì nos jours et sont employés dans la 
vie commune, méme par les classes élevées et instruite»» mais- 
encore que plusieurs d'entre eux ont été l'objet d'un per- 
fectionnement littéraire important. Au treizième et au qua- 
lorzième siècle, le D note, dans son livre De Vulgari Elo- 
quio, compte déjà au moins quatorze dialeetes, qu'il 
tiare tous, sans en excepter le floreutin, impropres pour 
des œuvres littéraires; aussi recommande.t-il à ceux qui 
veulent écrire de n'employer que la langue élevée, n'appar- 
tenant en propre à aucune partie de l'ltalie, mais commune 
à tottles les classe: inslrnites et pollen, lan=,ne qu'il appelle 
t'ulgare illustre, oulicum , curiole , cardinale. L'histoire 
a confirmé la justesse de son opinion ; car la langue que 
nous appelons l'italien n'est sur aucun poinl de l'ltalie la 
vérilable langue dit peuple. On voit ds lors combien est 
mal fodëe la prélenlions des Florentins, qti parce que 
leur da|ccte est ce:ni qu:. incoutcstab!emeut se rapprocl:e 



ITALIENNE 
llus de la langue élevée qne tont autre dialecte it,'dien, vou- 
draient que cette langue élevée ne fut pas appelée lin9ua 
italiana, mais fiorentina on tout an moins toscana. Sans 
doute les dîalectes aujourd'hui en usage en Italie ont éprouvé 
d'importantes modifications depuis lëpoque du Danle; la 
plupart ont cependant conservé les principaux traits carac- 
téristiqttes qu'y signalait déj l'illustre poëte il a six cent.ç 
ans. Il faut d'abord remarquer la dissemblance existant entre 
les dia]ectes du nord et ceux du sud. Dans les premiers, les 
consonnes dominent, mme dans les désinences de mots, 
comme aussi les intonations romaines primitives sont forte- 
ment tronqnées ; tandis que les vo)-clles dominent dans les 
dialectes ,lu sud, et notamment les sons sourds de l'u et de 
I'o. C'est a*a centre de l'Italie, en Tuscane et dans les États de 
l'Église, où l'influence des étrangers fut relativement moindre, 
que la langue a conservë le plats de formes et d'intonations 
romaines : aussi ne doit-on pas s'ëtonner que ce soient les 
classes élevées, en Toscane et il Rome, qui parlent incontes- 
tablement l'italien le plus pur. Le nord de l'traite, à son tour, 
e divise en trois langues bien distinctes. C'est au centre 
que dominent la rudesse et les mntatinns de la prononcia- 
lion germahte. A l'est, dans la ville de Venise, où la vie était 
toute maritime, il se Iorma un dialecte d'une nature tt;utê 
laxticulière, portant le caractère de la mollesse et mb.me de 
l'enfantillage, qui est de tous les dialectes italiens celui qui 
se propagea le plus et qui reçut aussi la forme la plus lit- 
térai[e. A l'ouest, on remarque l'influence du français ; elle 
de, lent moindre dans le pays de GSnes, mais elle est pré- 
dominante en PiCont, de telle sorte, qu'on pourrait jusqu'h 
un certain point nier que le dialecte piContais soit un dia- 
lecte italien, et le ¢onsidérer comme une langue ì part. 
Indépeudarament de ces dialectes, il exista dejì de très- 
bonne heure, à partir du douzième siècle, comme le Dartre 
le fait observer avec raison, une langue plus noble, c'est-ì- 
dire plus rapprochée des formes romaines primitixes et par 
conséquent mieux faite, qui fut d'abord en usage en Sicile, 
à la cour de Frédéric Il, maisqu'emplo)èrent ensuile la 
plupart des poëtes de toutes les parties de l'ltalie. Au qua. 
torzième siècle disparaissent, en poésie tout au moins, les 
lraces tant de la diversité des dialectes qse des formes et 
des expressions françaises e t provinciales, qu'on rencontre 
encore très-fréquemment chez les pins artciens écrivains. 
La langue de la poésie, qui n'est plus aujourd'hui qu'une 
langue de convention, mais consacrée par plusieurs siècles 
d'usage, fut formëe et, on doit le croire, fixée à jamais, d'abord 
par le Dartre, qui avait la pleine conscience de ce qu'il fai- 
sait, et ensuite par P é t r a r qu e. A l'Card de cette langue, 
il n'y a pas de discussion; elle est demeurée essentiellement 
la mme depuis l'époque du Dante jusqu'à nos jours. II 
n'en est pas tout à latt ainsi pour la prose. Là aussi les plus 
anciens écrivains furent des Toscas ou FIorentins, et 
parmi eux Bo¢cace prend à bon droit le premier rang ; 
seulement, dirigé en cela par Iétude des anciens classiques, 
il s'eftorça de donner à sa langue une abondance peu na- 
turelle et une construction embarrassée de la période qui 
alCara pendant longtemps la prose italienne et qui anjour- 
d'Irai encore trouve des admirateurs et des imitatenrs. 
L'Italie n'a jamais formé un empire unitaire; il n'y surgir 
jamais une capitale devenant, comze Paris par exemple, 
le foyer des luraières et des sciences ; et aucun prosateur 
'y acquit une influence tellement prépondérante qu'il pot 
ëtre généralement considéré comme un modèle. Il en est 
i-ésnlté que de nos jours mme il ne parait pas d'ouvrage 
nouveau sans qu'on n'en discutela valeur an point de vue du 
syle, que les uns raillent et tourneur en ridicule, alors que 
d'autres critiques le portent aux nues. L'influence exercée 
an dix-septieme siècle et jusque pardelà le milieu du 
dixhuitiëme siècle par la littérature fran.caise sur la langue 
italienne fut déplorable. Aveuglés par leur peCilection pour 
les ouvrages des Français et ce qu'on appelait leur pldloso- 
phie, beaucoup d'Italiens en vinrcnt jusqu'/ nier l'originalité 
de leur belle langue et/l n'écrire cal ralit qu'en français tout 

$11 
eu se servant de mots italiens. Ce n'est que x'ers la fin du 
dix-hnitiìmo siècle et au commencement du n6tre que des 
hommes aussi instruits qu'animés de sentiments patriotique, 
tels que les Monti, les Perllcari, etc., mirent un terme  ce 
désordre en prcbant d'exemple. Ainsi la langue italienn 
n'est point parvenue à une forme constante et unilrmement 
progressive, mais a subi alternativement des périodes do 
progrès et de décadence; et l'époque du Dante, de Petrar- 
que, le quatorzième siècle, considëré ì bon droit par les 
Italiens comme le premier àge d'or de leur langue, est ap- 
pelée par eux il gran secolo, ou encore |[ trecento. Apres 
avoir été négligée pendant quelque temps au qninzieme 
siècle, époque ou tous les savants se príoccnpërent beau- 
coup de l'étude des langues classiques, elle parvint au 
seizième siècle, avec l'Arinste, G u a r i n i et Le T a a $ e, ì l'a- 
pogée de sa perfection, pour subir aux dix-septième et dix- 
huitième l'influence pernicieuse du gallicisme; mais depuis 
une cinquante d'années clic est en  oie de régcnération. 
Les Italiens ne peuvent, ì bien dire, se flatter d'avoir fait 
de leur grammaire l'objet de travaux approfondis. Le pre- 
mier qui reeueillit des observations sur la langue fut le car- 
dinal B e m b o, dont le travail, commencé lleUt-etre déiì en 
1500, ne vit le jour qu'en 1525, sous le titre de Prose; 
divers autres ouvra,es de moindre importance sur ce sujet, 
tels que ceux de Fortunin, de.Liburnio, de Flaminio etc., 
ne parurent que plus tard encore. L¢a Prose de Uembo sont 
en forrae de dialogue; et ce livre, où il n'est question que 
de Boccace et de l'étrarque, n'et ni complet ni solide. Les 
eftorts de Giangiorgin T r i s s i n o, pour rgler Portlaograpbe 
et la fixer par l'emploi de nouveaux signes, entent pour ré- 
sultat, après de longues discussions, d'inoeoduire les lettres v 
et j comme consonnes. Parmi les autres essais grammati- 
canx qui exercèrent une influence durable sur l'Cude de 
l'italien, il faut citer : I'Ercolano de Yarchi ( FIorence, 
dont le but unique était de faire prévaloir la suprematie ab- 
solue des Florentins en ce qui est de la langue; les Avcrti- 
wnti della Lin9ua de Salviati, o6 il n'est question, et avec 
une insupportable prolixité, que des lettres, des noms et de 
l'article ; Della Lingua Toscana de Buommattei ( Florence, 
1648), la première grammaire à peu près complëte, que 
l'Accudemia dellaCrusca adopta comme sienne, et qu'elle 
réimprima à diverses reprises. Les Osseva-.inni dellu 
9un de Cinonio dern. édt. Milan 1809), où il est traité par 
ordre alphabétique du verbe et des particules, sont une riche 
mine d'observations et d'exemp!e». L'ouvrage un peu hardi 
de Bartoli, Il torlo e'l dirtto dol non s pul ( Rome, 
1655), n'est pas moins instructif. La premiëïe grammoire 
systématique complète et appu)ée de bons exemples, et 
tons les grammairiens postCieurs ont largement puisé, est 
celle que Corticelli publia sous le titre de tegole ed Osser- 
va-.ioni (Bologne, 1785). Parmi les ouvrages modernes, on 
peut citer cotonne un vritable chef-d'oeuvre celui de Mastro- 
aini, Teoria e Prospetlo de' Verbi Italiani ( 2 vol., lïome, 
181 b. ). Une mention non moins honorable est due aux tra- 
vaux de Gberardini, d'Antolini, et surtout de lainucci, qui 
ì paa'tir de 1813 puhlia plusieurs ourages sur les temps et 
les substantifs, où il démontre surtout l'affinitë des langne 
provenç-ale et ilalienne. Les grammaires récemment publiées 
parAmbro»o|i, Ponza, Biagioli, Yalentini, Bobello, etc., sont 
aussi, à tout prendre, de bons ouvrages; mais la plupart 
n'ont êtê ¢omposés que pour les besoins ordinaires et ont 
pour hase les travaux de Corticelli. 
La lexicograplde, comme la grammaire, ne date en ltalie 
que du seizieme siècle. Les dictionnaires de/dinerbi ( 1535 ), 
de Fabricio de Luna (t536) et d'Accarisio (153) ne sot 
guère que la collection des mots employés par Boccace et 
par Pétrarque. Il y a déjà un peu plus de richesse dans les 
ouvrages de Francesco Alunno, Le Richer,:e della Lngua 
Vol9are (Venie, 153) et Della Fabrica del Mondo (156). 
Le premier lexique un peu complet est le Memoriale della 
Lingua de Pergamini (¥enise, 156s). Enfin parut, d'abord 
à 'enise (1612) le l'ocabolario de9li Accademici della 



Crusca, qui se bornait, avec une pédanlesque sévérité, à ne 
citer presque exclusivement que les écrivains du Trecento 
et des ícrivans florentins, et où ,e trouvaient rectleillis avec 
un soin extrême toutes les mutilations, toutes les expres- 
sinus ordurières et toutes les laçons de parler du peuple, 
mais qui passait complétement sous silence la langue de la 
conversation ainsi que la langue des sciences et des beaux- 
arts. Il en parut encore une seconde édih'on, peu modifiée, 
Venise { 1623); la troisième, considërablement augmentée 
(3 vol., 1691 ), et la quatrième (6 vol, 1729-1738) furent 
imprimées à Florsnee. Depuis, en 1743, l'Académie en 
publia une cinquième édition, qui est sans doute d'une ri- 
chesse extrême en formes «le mots et en exemples, mais 
conçue dans te même esprit que les précídente-. Cet ouvrage 
a été d'ailleurs l'objet de nombreuses imitations et de non 
moins nombre,ix abrégé.s. L'édition qu'en a donnée Cesari 
(6 vol. Vérone, 1806) est un trésor de sotles antiquilés, 
de mutilation et d'expressions ordurières. Le premier vëri- 
table dictionnaire, non pasJlorenlin, mais italien, est 
le Di.-.ionm'io Enciclopedico de Francesco Alberti ( 6 vol. 
Lucques, 1806), dans lequel sont admis aussi les termes 
d'arts et de sciences. Le Di=ioario della Lingua Italiana 
(17 vol., Bologne, 18tg-t$26) est d'une utilitc toute parti- 
ticulièrc. Depuis lors il a paru une foule d'ouvr«ges du 
mme genre; mais tous n'ont point Ce terrainC. Le plus 
conidérable est le Vncabolar[o Universale llaliano (,a- 
plot, t829-t840, 7 vol. ). 
ITALIENNE (Littérature). Si l'on a depuis longtemps 
cessé de regarder les Italiens comme les descendants directs 
des anciens lqomaius, et leur ]ittbrature comme la conti- 
nuation de la littíratJre romaine, opinion que partageait 
encore Pétrarque, on ne saurait nier cependant que le sou- 
venir de la langage, des chefs-d'oeuvre et du génie de l'an- 
cienne lome, n'ait exercé à toutes les épeques sur la litté- 
rature italienne une influence plus imporlante que ce n'a 
été le cas chez les autres nations omanos. ]Jabitant le paTs 
et les villes des anciens Romahas, les Italiens s'efforcèrent 
fox,jours de prendre le génie romain pour modale et pour 
guide. Mais bien avant qu'ils en eussent mème la conscience, 
les Provençau x avaient déjà exercé une influence consi- 
dérable su l'traite, où leu poëtes ambulants étaient l'objet 
de l'hospitalité la plus empressée ì la cour des petits sou- 
xerains de ce pays, notamment au nord, et où ils curent 
de nombreux imilaleurs. Beaucoup plus tard, quand la 
civilisation fi'ançaise en vint à dominer l'Europe, les ou- 
'vrages des poetes français excitèrent en Italie une admiration 
universelle, et provoquèrent une foule d'imitations, jusqu' 
ce que des idées pires salues prévaluërent enfin, à la suite de 
grandes révolutions politiques, et ratlacbassent les esprits 
ce que l'antique génie national avait de grandeur, de puis- 
sance et d'originalité..Nous xennns indiquer, en ce peu de 
mots, les limites extrèmes des cinq grandes époques princi- 
pales qu'on doit distinguer dans l'histoire de la littérature 
ilalienne. La Iremière comprend le réveiI de la poésie en 
Italie, d'abord sous l'influence de la poésie proençale, et 
l'apparition des premiers grands poëtes et grands écrivains 
italiens ; la seconde est délerminée par la préeminence des 
éludes classiques ; la troisième présente l'heureuse fusion 
de la véritable civilisation italienne avec l'antique; la 9ua- 
trime, l'époque de la décadence sous l'influence française; 
la cinguième, enfin, c'est l'epoque actuelle. 
Plem/.. P/-on. La connaissance de la poé.ie proven- 
çale, car il n'y eut guère que cette poésie 1" qui pénêtra en 
ltalie, porta plusieurs Italiens à essayer de composer des 
poëmes analogues dans leur langue, et mëme à employer 
d'ahord à cet effet la langue provençale, notamment Folco 
«le l'larseille, le marquis AIberto Ital, aspina et le plus 
lbre de tous, Sordello de l'tantoue, l,lais bientOt, c'cst-'-dire 
 pat'tir de la fin du douzième et au commencement du 
treizième siëcle, il surgir dans toutes les partie« de l'flalie, 
d'abord'.en Sicile, puis en Toscane et dans l'État de l'Église, 
des poëtes, qu . écrivirent encore, il est rai, dans l'e.,prit et 

ITALIENNE 
la forme des Provençaux, mais qui du moins »e servirent 
de la langue nationale. La cour de Frédëric If, à Palerme, 
fut le premier foyer d'où la poésie et les lumières se répan- 
dirent dans le reste de Pltalie. Frëdéric Il lui-mème, son 
chancelier Pelrus de Iïne/.% et son fils naturel te roi Enzio 
de Sardaigne, étaient poëtes; leur exemple fut suivi par tes 
deux Colonna, Guido et Odo, par ,Iacopo da Lentino, 
nieÆi et P, uggiere de Palerme, et par beaucoup d'autres encore. 
Le poëme le plus ancien, compos au commencement du 
treiziëme siëcle, est un dialogue d'amour par Ciullo d'Menton. 
Alors parurent en traite mème Guittone d'Arezzo, Buona- 
giunta da Lncca, Guido Giudicelli de Bologue, Gnido Ghis- 
lieri, æabrizio et Onesto de Bologne, Guido Lapo de blan- 
toue, Folcalchiero de' Folcalchieri de Sienne, Dante 
l,lajano et sa maltresse lina, etc. Tous furent surpassés 
en génie et en profondeur de sentiment par l'ami du Dant¢, 
Guido Cavalcan ri de Florence, mort en 1300. Les œuvres 
de ces différents poëtes et de quelques a«tres encore ont 
été recueillies dans diverses collections, tant anciennes qne 
modernes, faites d'ailleurs sas critique. ou. citeros 
surtout, parmi les anciennes collections, les lime antiche 
( Venise, 1518) ainsi que les Poeli antiche d'Alacci (ffaples, 
t66t ) ; et parmi les modernes, le Manuale della Littera- 
lura del lorimo Secolo de Rannucci (Florence, 1837). 
Presque tous ces poëtes se livrent à de subtiles et dès lors 
h de froides et insipides lamentations d'amour, où ne se 
produit jamais nue idée, soit politique, soit réligieuse, de 
quelque elévation. Ils n'offrent, par conséquent, dïnt@èt 
qu'au point de vue de la langue. Les poëmes du moine Ja- 
copone da Todi, mort en 1306, et h qui on va jusqu'h attri- 
buer le $tabat Haler, en diffèrent complétement, malgré 
leur .forme encore rude et grossière, parce qu'on y troue 
du moins quelques pensées vives et ingénieuses. Le chan- 
relier de FIorence, Brunetto Latini, mort en 129$ et qu'on 
prélend avoir été le maitre du Dartre, se distingue par plus 
de connaiances politiques et scientifiques. 
Au-dessus de tous ces poêtes, au total peu importants 
s'éluve solitaire, sans prëdécesurs ni successeurs, le gi- 
gantesque génie de Dante AIlighieri. Sans parler de 
son immortelle Divina Comrnedia, il dépassa de cent cou- 
dées dans ses poêsies I.wiques, notamment dans sa 
l'uova et dans son Convilo, tous les poëtes venus avant lui., 
en mème temps que dans le Convilo il offrit le premier 
exemple qu'on eut encore eu en Italie d'une prose savante 
et harmonieuse. Le ton qu'il avait pris dans sa Dirina Com- 
nedia ne pouvait manquer de provoquer des imitateurs 
mais si le Quadriregio ou Quadriregno de Federigo Frezzi 
n'est pas tout à fait sans valeur poétique, la confusion pe- 
nible et fatigante qui y règne d'un bout  l'autre le met biet 
au-dessous de l'ordre admirable qui règne dons la 
Com»edia ; et le Dilta Modo ( Dcl« Hudi) de Fazio 
degli Uberti (mort en 1366) n'est d'un bout à l'autre qu'une 
lourde et ennuyeuse production. On ne peut citer comme 
rival du Dartre que le malheureux Francesco Cect:o d'Ascoli, 
brOlé vif en t 327, comme bérétique, dont le sinbmlier poëme  
Acerba, est un mélange d'ërodition, de sagacite et de su- 
perstition. Les Docume»ffi d'Amore et le Del legimento, 
e de' Coslumi delle Donne de Francesco Baberino (mort 
en t2) appartiennent plut6t à la poésie populaire qu'h la 
poésie d'art. 
Dans cette période brille encore entre tous Pét ru rque 
dont le génie poétiquedominetou les siècles de la l, ittérature 
italienne, mais à qui, h la différence du Dante, les prédé- 
cesseurs ni les slccesseurs ne manquèrent point. Parmi le» 
premiers il faut surtout citer le clèbre ]urisconsulte Cino 
de Pistoja (mort en 1336). On n'admire d'ordinaire dans 
Pétrarque que le chantre de Laure, et b. vrai dire c'est lui qfi 
est devenu pleur toujours le modële de la poésie consacrée 
célébrer l'amour ; mais pour aller à l»immorta]itë il comptait 
lui-mme bien davanlage sur ses a,uvres lalines. Partni les 
¢ontemporains et les imitateurs de Pétrarque, nous citerons 
nuire Boccacc, Anlonio da Ferrara, Francesco degli Albizzi, 



ITALIENNE. 
$ennuccio del Bene, Zenone de' Zenoni et le fondeur de clo- 
ches Florentin Antonio Pucci, qui donna le premier modéle 
de poésie burlesque. 
Le troisième grand écrivain de cette époque fut B o c c a c e 
de Certaldo, qui ne mérita pas moins de la prose que le 
Dartre et Pétrarque de la langue de la poésie, lious le ci- 
tons ici comme celui qui le premier traita la langue d'une 
manière savante; cet ëloge ne s'applique d'ailleurs qu'h son 
cêlèbre Dectrnerone, ouvrage dans lequel il sait avec un 
admirable talent modifier la langue suivant les difl,»rents 
personnages et les différentes classes qu'il y fait figurer ; 
car dans ses autres écrits, et le nombre en est considêrable, 
il s'est malheureusement attaché ì reproduire la construc- 
tion de la phrase romaine, imitation qui rend son style fati- 
gant. C'est lui qui a fait de la nouvelle l'un des genres de 
poésie favoris des Italiens. Sans doute il existait longtemps 
avant lui une collection anonyme de nouvelles et de face- 
ries, connue sous le.titre de Cento 1Voyelle antiche; mais 
la gloire d'avoir le premier traité ce genre d'une manière 
vraiment littéraire appartient fi Bocca¢e. Parmi ses suc- 
cesseurs, on ne peut citer dans cette période que Franco 
Sacchetti (mort après 1400) et ses ovelle, et que le Pe- 
corone de Ser Giovanni. En raison de ce que depuis long- 
temps les romans de chevalerie provençaux et français 
étaient connus et aimés des Italiens, il est naturel que ces 
sortes d'ouvrages aient souvent eté traduits en italien et 
en aient méme fait naitre d'autres. Parmi les ouvrages 
analogues, partie traduits et partie originaux, nous men- 
tionnerons les leali di Francia, histoire de la jeunesse de 
Charlemagne, source à laquelle puisèrent bon nombre de 
poëtes postCieurs : le Guerino il ltleschino, les romans 
de Lancelot, de Tristan, du roi 5leliade, etc. Le Fortuna- 
tus Siculus, ossia l'avventuroso Sicilano, de Bosone da 
Gubbio, contemporain du Dartre, semble être nne composi- 
tion originale. Le Trattato dell" Agricoltura de Piero de' 
C r e s c e n zi, les œuvres du dominicain Jacopo Passavanti 
( mort en 1357 ), de Dominico Cavalez (mort en 13t2 ), les 
Amrnaestrarneati degli Antichi de Bartolommeo da San- 
Concordio, et enfin le Trattato del Governo della Farni- 
ff lin d'Angelo Pandolfini (mort en lf6), sont d'un genre 
plus grave, presque scientifique ou ascétique. 
Cette époque, si riche en changement pobtiques, fit naltre 
de bonne heure le désir de fixer par écrit le souvenir des 
évínement contemporains. Le plus ancien o.'«vrage «le ce 
genre, ce sont les Diurnali (Giornali) de Matteo Spinelli, 
en dialecte napolitain, qui racontent la chute du roi Man- 
• fred. Les œuvres historiques ou plut6t les chroniques de 
Francesco 5lalespini ( mort après 1286), le court mais tutC 
ressaut fragment d'histoire de FIorence (de 1280 à 1312) 
de Dire Compagni, et plus particulièrement le grand et c- 
Iël,re ouvrage de V i I I a n i de FIorence ( mort en 138), con- 
tinué jsqu'h 136 . par son frère Matteo Villani et le fils de ce 
dernier, Filippo Villani, sont écrits d'un st)le plus noble et 
plus pur, quoique la langue en soit encore infinie. Indépen- 
damment de ces grands et clébres ouvrages, nous pourrions 
en citer bien d'autres encore, dont une partie restës inédits 
iusqu'ì ce jour, par exemple ceux de Puce da Certaldo, de 
Donato Velluti, de Paolino Pieri, de Coppo Stefani, de 
Monaldi, etc. _N'oublions pas non plus un écrivain latin, 
AIbertinus Mussatus (mort en 1330), dont l'Historia Au- 
9usta est en partie écrite en hexamètres, et le clèbre 
voyageur vénitien Marco-P o I o. 
Scon Pone. Le quinzième siëcle est l'époque où la 
philologie fleurit en ltalie. Les effort« de Boccace et de 
Petrarque pour réveiller l'êtude de l'anfiquitë et surtout 
telle «le la langue grecque, secondés par les savants Grecs qui 
vinrent s'étahlir en ltalie avant la chute mme de Constan- 
tinople, produisirent dans ce siècle de remarquables résul- 
rais. Tou. les hommes de quelque intelligence cherchèrent 
alors h se faire un nom en composant des ouvrages en latin, 
ce tcaduisant «lu grec en latin, ou encore en faisant des vers 
latlns. Cette ardeur philologique fut mme portée si loin, 
cr. ï ex co.was. -- v. x. 

,513 
qu'on ngligea l'ëtude de la langue nationale, et on poms 
l'amour de l'antiquité jusqu'à prendre le christianisme en 
haine, flous nous bornerons à citer ici les noms des plus 
cëlèbres philologues de ce siècle, Jean «le Ravenne, Guarino 
de Verone, Jean Aurispa, Barzizza, Yittorino da Feltro, lfe- 
rula et surtout Pogo Bracciolini, Laurentius Valla, Leo- 
harde Brnni, Ambrogio Traversari, Chritophorus Laudinus, 
Ange Politien, Marsile Ficin, Pic d e la Mirandole; 
les Grees C h ry sol o ras, B ess a rie n, Constantin Lacaris, 
Chalcondyle, Gemisthus Pletho; les antiquaires Flavio 
Biondio, Pomponus Loetus, Platiaa, ainsi que les poëtes la- 
tins llatteo Yeggio, Vespasiano Strozzi, Battista lIantovano, 
Antonio Beccadelli, plus connu sous le nom de Panormita, 
Giovio Pontano et Marullus Tarchaniota. Déj plusieurs so- 
ciétés savantes ou académies s'étaient fondCs pour favoriser 
les oetudes philologiques. Par contre, cette époque, dans ses 
commencements du moins, est fort panvreen ouvrages écrits 
en italien; car le plus grand nombre des écrivains mépri- 
saient alors leur langue malernelle, lious ne pouvons men- 
tionner ici qu'un phle imitateur de P«.trarque, Giusto 
de'Centi (mort en t4Ag), dont les poésies parurent sous 
le titre de La bella Mano et par leur esprit appartien- 
nent encore completement au siècle precédent, et le jo)-eux 
barbier de FIorence, Bu rch telle ( mort en lA8 ), dont les 
sonnets burlesques abondent en locutions et en plaisante- 
ries floentines, de sote qu'ils sont aujourd'hui presqua 
inintelligibles pour les FIoreutins eux-reCes. C'est seule- 
ment vers la fin de cette période, au moment où ce beau 
zèle pour les êtudes philologiques commence à se refroidir, 
que la polie nationale se relève de nouveau pour atteindre. 
ensuite son apogée au siècle suivant, ,race à Pmtluence de 
l'excellent Lorenzo de'.Medici (mort en 192). Lui-mme, 
quoique accablé sous le poids des plus importantes affaires 
d'Eat, il trouva encore le temps nécessaire pour compo- 
ser de petites et graieu.es pièces de vers. Le» stances 
d'Ange Politien (mort en 19.$), qui le premier fit voir d . 
quelle gràce l'Ottave est susceptible, sont encore plus c- 
Ièbres. C'est lui aussi qui con«posa le premier ouvrage dra- 
matique original, la Favola d'Orfeo. Précédemment on 
avait e»saye «le représenter des pièces de Plaute et de Térence, 
d'abord en latin, puis traduites; les représentation de 
sujets tirés de l'histoire sainte, ce qu'on appelait des Mts- 
tëres, espèces de compositions deja en usage en ltalie de- 
puis plus d'un siècle, n'enrichirenl en rien la littérature. 
Parmi les amis et les commenaux de Lorenzo de'Medici 
on cite surtout, outre An,elo Poliziano, les frères P u I c i, 
Bernardo, Lu¢a et Lui,i, dont le dernier seul mort en 
187) s'est fait un nom durable. 
Le c$cle des legen,les de CI,arlemagne et de ses paladins 
a;ait déjà fourni en France et en Provence de» sujets de poé- 
sies romantiques, dont les unesCalent devenues des livres po- 
pulaires en Italie au moyen de traductions, et dont les autres 
avaient ét iraitCs par plusieurs poêtes dont les noms se 
sont perdus. C'est ainsi qu'il existait déjà un grand nombre 
de ces épopëes chevaleresque% datant peut-être de la fin du 
treizième siècle, et dont nous ne citerons que les plus connues: 
Euovo d'Antona, La .çpaffna, La reffina Ancroja, Alto- 
belloe re T'ojano, lnnamorantento di re Carlo, Leandra 
par Durante da Gualdo. Toutes, il est vrai, sont ClipsCs 
par le Morgante 31açgiore de Luigi Pulci, quionvre la bril- 
lante série des poëmes romantiques de chevalerie italiens. 
L'Orlando innamorato de Bojardo, dont l'Arioste, 
son successeur, rira un si grand parti, l'emporte sur toutes 
les épopées que nous venons de mentionner. Ce magnifiq,te 
ouvrage efit sans doute fait grand tort à la gloire de l'A- 
tteste, s'il n'était pas écrit dans nne lane encore rude et 
qui en outre a vieilli. C'est pour cela que l'original est devem, 
rare, mème en Italie, et qu'on n'en lit pins guère rpe les imi- 
tations postéreures. La première, par Domenichi,  borne 
presqe à la correction de la langue; l'autre, celle de Be r n i, 
a travesti en burlesque le ton gén,;ral de ce noble I«oëme, 
et cest cependant la seule qu'on lise aujourd'hui. Oureces 
65 



f4 
deux grandes popies du quinzibme siècle, il faut encore 
mentionner le Mambriao de France»no Cieco de Ferrure 
(mort en 1495), moins connu qu'il ne le mérite. En opposi- 
tion à cette tendanceirrëligieuse de l'ëpoque, nous ne pouvons 
ous dispenser de nommer l'excellent disciple de Savon a- 
f o I a, Girolamo Benivieni ( mort en 1542), dont les poCic» 
sont le miroir fidèle de sou e«prit vraiment religieux. La 
Città di Vita de Matleo Palmieri (mort eu 1475) est moins 
connue, parce que l'inquisition en interdit l'impression; c'est 
eu quelque sorte un dernier clm de la poésie du Doute. 
Cette époque, sur la fin notammenl, compta aussi un cer- 
tain nombre de poëtes lyriqnes ; mais il n'en est pas un seul 
qui ait obteuu une gloire durable, quoique beaucoup d'en- 
tre eux aient été fort admiçés de leur temps. Dans le genre 
burlesque, Burcldello eut pour imitatenrs Bernar,'lo Beilin- 
cioni (mort en 1691 ), Feo Belcari, Antonio Alamanni, Gio- 
x-anni Aequietini, etc. La manière de Petrarque fut imitée 
par Francesco Cci de Florence, Gasparo Viscouti «le Milan, 
et surtout Serafino Aquilano d'Aquilée, qui se serv:t du dia- 
lecte napolitain, Antonio Tebaldeo de Ferrare (mort en 
1537 ), Bernardo Accolti d'.rezzo, surnomme comme impro- 
visateur L'çnico. 
La prose dut encore plus souffrir que la poésie de la pré- 
dilection de cette époque pour les langues classiques et de 
l'ttat de négligence dan» lequel était tombée la langue natio- 
nale; car du moins pour la poésie il existait depuis Pétrarque 
des rê»le fixes et un st)le géneralement convenu. Aussi ne 
pourrait-on dans cette pcriode citer un seul prosateur de 
quelque distinction ; on n'y trouve que qnelque auteurs de 
nouvelles en vers et un petit nombre d'historions. Les plus im- 
portants, parmi les premier», sont Gentile Sermini de Sieue, 
Giovanni Sabadino de Bologne, auteur des zYovelle Porre- 
tune, et le plus remarquable de tous, .Xlasuccio Salernitano, 
d, ,nt on possède cinquante Nouvel les sous le fitre de .Yov« llino. 
Les historien» de cette époque sont : Pandolfo Collenuccio 
 mort en tS0), auteur d'une histoire de Naples, Bernardie.o 
Corio (mort en 1519), auteur dhme histoire ,le .Milau, vcri- 
diqne, mai» mal écrite. Un bien plus graud nombre d'his- 
t,riens se.ervirent de la langue la'.iue, et quelques-uns de leurs 
ouvrages sont à tout prendre de bons livres, par exemple l'his- 
toire,le son temps et du concile de Btl« par Sylviu» P ic c o- 
1 oto i n i (Pie Il), la première Ilistoire un peu consi,lerablede 
X'enise par Marcantonius Sabellins (mort en 1506 ); l'hisl/,ire 
ancienue de Venise par Bern. Giustinianus (mort en 14S9); 
l'histoire de Génes par Giorgius Stella (né en 1.10). Deux 
artistes, dont l'un fat undes plus ands artistes detous les 
siècle% se distinguèrent également comme éedvains : ou a 
de L.on Battista Aih e r Ci mort en 1t7), outre quelques 
poïmes, un dialogue Della Famiglia , et de Leornardo da 
¥ i n c i ( mort en 1519  un Trczttato della Pittura. 
Tnosffsm PaonE. Le seizième siécle nous présente l'a- 
pogée de la poésie et de la civilisation italiennes en »C 
riCai, époque que d°antres considerent comme le commen- 
t.ornent de la décadence. Avec les luttes pour la liberté, qui 
remplisut les siecles précédents, dispaialt aussi l'esprit 
de liberté; le pouvoir absolu des princes s'est partout con- 
solidé, et laréaction del'Églisecontre l'invasion de la réfor- 
nation étouffe en méme temps la liberté dexamen et eu gé- 
níral toute instruction supérieure. L'ëpnisement, l'exagéra- 
tion, l'effemination des mœurs et des sentiments, l'esprit 
servile se reflètent dans les productions postérieures de 
cette époque. Les Cudes classiques fleurissaient encore au 
commencement de ce siècle, et beaucoup d'hommes distin- 
gues rougissaient encore d'employer leur langue maternelle. 
L'admiration pour l'antiquité, séduisit mme à ce point quel- 
ques-unsd'entre eu, qu'ils essayèrent d'imiter la maniëre des 
anciens dans leur vers ilaliens. Beaucoup des meilleurs 
poetes latin» modernes, tels que Sadoletus, Sa n n a z a r, 
V i d a, tavagerus, Faernns, Marcantonius Flaminius, M a r- 
cellus Palingenius Steatu., Aoniu Paleanus, brtlé vil 
comme liérétique en 1570, enfiu le médecin naturaliste 
Girolamo Fr acas tor, et beaucoup d'autres encore, appae- 

ITALIENNE 
tiennent à cette époque. Un poëme épique, la ,çias d'Angelio 
da Bar»a, parut presque en mtme temps que la Gerttsalemme 
liberata de Tasso. Le comte Giangioro Trissino écrivit son 
Italia libêrata da" Goti tout à fait à la manière, si non dans 
l'esprit des anciens. L'Avarchide de Lnigi Alamanni, cal- 
quée sur l'lliade, et plus encore son Girone i[ cotte»e, em- 
pruntWau cyclede légendes du roi Arthur, fut un essai autre- 
ment heureux et poétiq,e. C'est à Lodovico Ariosto qu'ap- 
parlient la gloire immortelle d'avoir dot son pays de la 
première épopée romantique répondant véritablement au 
génie national. Dans n Orlanffo ri(tin»o, il suivit sans 
doute les traces de l'excellent Bojardo, mais il le surpassa 
de beaucoup, sinon polir le don de l'invention, du moins 
pour la grâce, la finesse ingrnieuse et la délicatesse du 
style. Quoique la plupart des Italiens lui préoErent encore 
le Tab, e, tout homme sans préventions et lon du vé- 
ritable sens poétique n'bésitera pas à donner la palme à 
l'Arioste. Une foule d'imitateur» sans esprit, teh que Lo- 
dovico Doice, qui ecrivit un -'rand nombre de poëmes épi- 
ques, dont les sujets-sont emprnntés, le» uns à l'antiquité, 
les autres a, Iêgendes du moyen age; ¥incenzo Brusan- 
tini de Ferrure, le fameux Pierre Aretin, Dragoncino da 
Fano, etc., ne méritent d'ëtre mentionnés ici qu'en pas- 
sant. Le nombre des poêmes de chevalerie devint si con- 
siderable, qu'il n'y eut pour.ainsi dire pas un seul des per- 
sonnages do il est que«tion dans la cycle des le»endos de 
Charlemagne r/tri ne devint le sojet d'une épopée speciale. 
Parmi les meilleurs poêle» de cette époqe, il faut incon- 
testahlement compter le père du Tasse, Bernardo Tasst 
 mort en 159), dont le grand poîme hga'oïque Amadigi n'a 
ëtí éclipsé que par la gloire de son fils. Torquato T a s s o passe 
généralement aujourd'lufi po,:r le poëte lavori de son pays ; 
et on ne saurait évidemment lui contester de hautes facul- 
tes potiques. Personne n'a su comme lai donner des sons 
doux et harmonieux à la lan.',ue nationale, et des milliers 
de passa»es de son grand poëme seront éternellement con- 
sidéré.» co.me les plus belles fleurs du Parnasse italien. 
51ais ce qui lui manque, c'est la rbflexion, la puissance 
d'invention, la confiance que le génie doit avoir en lui- 
mème; etpartout son œuvre est déparde pari'imitation ser- 
vile des moàèlesétrangers, par l'absence de pens% par e 
qu'il y a de pénible et de tourmentWdans l'exposition, 
par la pauvreté de Pexécotion. Ses perpétuelles hésitations 
entre son admiration pour l'antiquité et ce qu'il y a de 
romantique dans sa propre nature, son caractêre inquiet 
et inconstant, qui ern?oisonn, son existence, se refletent 
dans son meilleur ouvrage, dans sa Geru.alemme libe- 
rata, et davantage encore dans la malencontreuse suite 
qu'il donna plus tard h ce poCe sous le titre de Gerusa- 
lemme conquistata. Évidemment, il était né poëte lyrique; 
et c'est en vain quïl vouh]t suppléer par l'étule à ce que 
la nature lui avait refusé. Ses SeCte Giorate en vers 
blancs, le dernier ouvrage qu'il ait écrit en vers, sont pres- 
qu e illisilles, par suite de l'érudition scolastique qu'il y déploie. 
Son exemple entoura»eu une fouie de poêle» obscurs à s'es- 
sayer, eux aussi, dans la poésie épique; leurs oeuvres, comme 
le Fido amante de Curzio Gonzaga, Il Mondo Xuovo de 
Giov. Giorgini, La Mollede, de Giovarmi Fratta, La 
rusalemme distrutta de Francesco Potenzano, L' Universo 
de lafaele Gualterotti, et beaucoup d'autres  sont depuis 
Ionemps cemplétement oubliCs. 
Si dans l'oeuvre du Tasse se man!leste toute la gravité 
du sens moral et d'une reliosilé poussée jusqu'à l'entloeu- 
siasme et à l'ascétisme, en revanche ou remarque dans celles 
de beaucoup d'autres la ïrirolitë qui dounait bien pins de li- 
cence aux hommes instruits de cette époqtoe et qui leur 
permettait de tomxaer en raillerie toutes les choses saintes. 
Cette direction d'idées fit nailre les poêmes moitié pi- 
ques et moitié .atiriques de ce siècle et du siècle suivant. 
A cette eutCot'le appartiennent les ouvrages du muine li- 
bertin Teofilo Folcngo, plus connu sous le nom de Medino 
Coccaio, sinon celui qui iuventa, ln moins celui qui per- 



ITALIENNE 
fectionna singulièrement h polie dite mccarouique. Ou a 
de lui, eutreautres, le Maccaronicorum opus, le Caos riel tri- 
per zno, et son Orlandino, poëmev;aimentgracieux. Il faut 
y rattacher encore toute une suite de petits poëmes Ciques 
se rapportant les nus aux autres, comme la Giganteade Be- 
nedetto Arrigbi, La l'azzea d'un auteur inconnu, et La 
Gzterra de' Mostri du spirituel Antonio Francesco Graz- 
zini, surnommé Il Lasca, l'un des meilleurs romanciers.de 
ritalie. Ge qu'il y a dans le caractère italien de tendances 
naturelles à la moquerie, à la satire et  robscènité, a le 
plus souvent trouvé son expression dans une foule de 
poëmes burlesques en terza rima, ordinairement appelés 
capitol}. Presque tous les poëtes de cette epoque, et un 
grand nombre de graves savants ou hommes d'Eat s'exer- 
cèrent dans ce genre, et plus particulièrement Francesc 
B e r u i, d'après qui cette poésie railleuse a été nommée 
poesia Berzziesca. Après lui on peut encore citer son ami 
Giovanni Manro et Cesare C a p o r a I i. Le plus ordurier de 
tous les écrivains italiens, Pietro Aretino, s') est aussi dis- 
tingué. Les tentatives assez fréquentes faites dans te do- 
maine de la véritable satire romaine n'ont laissé que peu de 
traces. En ce .genre les meilleures productions sont les sa- 
tires d'Antoaio "vïnciguerra et surtout celles d'Ercole B eu- 
t i v o g i i o ( mort en 1573). La poésie didactique, espèce de 
poésie plut{)t savante que védtablement nationale, pour la- 
quelle Virgile servir toujours de modèle, peut cependant 
citer quelques ouvrages remarquable.s, entre autresZa Col- 
tivazione de Luigi Alamanui, dont il a djà tt question 
pins haut, et l'4pi de Giovanni R uccellai (mort en 1526). 
En seconde ligne viennent deux poëmes sur la chasse, La 
Caccia, l'un de Giovanni -Scandianese, et l'autre, le meil- 
leur, d'Èrasmo da Valvasone; La JVtutici de Bernardino 
-Baldi (mort en 1617), dont on possède en outre quelques 
jolies idylles, et la Fisiii de Paolo del Bosso (mort en 1569). 
Citons encore Lui Tansiito (mort en 1570), connu »urtout 
par un ouvrage qui obtint de son tempsun immense succès, 
Le La9rime di San-Piero, et dont on a le Podere et la Ba- 
lia. 
Dans ce siècle mme, 1 ne manqua pas de ens qui es- 
suyèrent encove de composer en latin des œuvres drama- 
tiques. La meilleure de toutes est l'lmber aureus d'Antonio 
Tilesio et le Christus d'Angelo 5Iartirano (mort en 1551). 
L'admiration.générale pour les anciens semble avoir depuis 
longtemps déjà nul à la poésie dramatique des Italiens, et 
notamment  kur tragédie. Sous ce rapport, tout ce qu'on 
pourrait citer de productions du seizième siècle se reduit ì 
des imitation plus ou moins froides et décolorées des an- 
ciens, par exemple la Sofomsba de Trissino, la ttosmunda 
de P, uccellai, te Torrismondo du Tasse, la Canace de Spe- 
ton Speroni, l'Ora'.ia de Pietro Aretino, la Merope, sujet 
traité avec fort peu de bonheur par trois poëtes diffêrents, 
Antonio Ca'alierino, Livieraet Pompeo Torelli. il y a plus 
d'originalité .mais moins de vigueur dramatique dans la 
Sofonisba de Galeotto del Caretto et dans les tagédies de 
Giambattista Giraldi, le premier qui mit en œuvre des 
sujets imaginés par lui-reCe ou bien empruntés à ses 
propres ouvelles. La comédie, elle aussi, eut une origine 
savante ; elle provint de Pimitation des anciens, et servir 
dès lors uniquement à l'amusement des cours et des cercles 
éle'és, le peuple ayant sa comêdie à lui. La com(=die savante 
(Commedla ergdita) fut traitée presque en méme temps 
par Bernard Dovizio da Bibiena, par l'Arioste, par lIachia- 
vel; toutefois, les prétentions de rArioste à h priorité 
sont celles qui paraisssent les mieux Iondées. On a de 
lui cinq comédie« dont les deux premières avaient d'a- 
bord été écrites en prose. On n'a qu'nne pièce de Bibiena, 
C«landra, deux de Macchiavel, La Clizia et La JIandra- 
9ola. Cs trois comédies sont aussi en prose. Is pièces 
de i'Arioste ont plutSt trait aux mœurs des aciens ou bien 
ì celles du peuple ; quant aux comédi des deux antres, 
elles ont, comme la plupart des produclion. anal,ues de 
cette époque, pleines d'équivoques et d'obeuits. Les 

nillimi de Trissiuo, les comédies de P. Aretin, de Graz- 
zini, de Lodovieo Dolci, de Firenzuola, de Parabosco, 
d'Ecole Beufivoglio, de Gelli et de beaucoup d'autres, ont 
bien moins d'importance. Les comédies de Giammaria Cec- 
dfi et de Fancesco d'Ambra ont plus de mettre. On a aussi 
conseré une petite pièce en prou, et appartenant au bas 
comique, composée par le philosophe Giordano B r u n o, Il 
Candelajo. Tandis que les cours et les gens du beau monde 
prenaient goût  ces imitations de rantiquití, le peuple, 
nous l'avons dit, avait aussi sa comédie à lui, la Cornmedia 
del aele, off le poëte se bornait à tracer le plan et  indi- 
quer les principales sittations, tandis que le dfalogue était 
abandoun,: ì la verve des acteurs eux-mèmes. Ainsi naqui- 
rent les veritables masques italiens, personnages comiques 
qui ne changent point, qui reviennent dans toutes les 
pièces, Pattalone, Brighella, Arleceb.inno, Tartalia, Sca- 
pino et beaucoup d'autres, qui se sont maintenus jnsqu' 
nos jours en possession de la scène. Parmi les poëtes qui 
composèrent ce sortes d'ouvrage, pour la plupart perdus 
aujourd'hui, on remarque Flaminio bcala, Augelo Beolco, 
surnommé il ru=zate, et Andrea Colmo. Ce dernier a écrit 
en dialecte vénitien La palorale, qui fut toujours eu pos- 
session de charm.'r d'aulant plus les cours qu'à.lies étaient 
pln ciCantes et plus ratfin .es, atteiguit a ssi daus ce siëcle 
son point extrême de perlec',ion. O. peut con,id.rer comme 
les premiëres tenlalives faites dan, ce genre l'Ameto de 
Boccace et l'Arcndia de Sannazar. 
llais il ne prit pour la premiere fois une forme drama- 
tique que dans la Favola di Gefalo ou L'.I urora de Niccolo- 
da Corre%-io Visconti (mort en 1506). A ce poêle en suc- 
cedèrent bientOt beaucoup d'autres, par exemple Giral,li 
avec son £9le, Beccari avec sf, n Il S«crificio, Luigi 
Groto avec son Galisto et son Il Pentimento mnoroso, 
Argenti avec son Lo Sfortztnato, etc., cie.; toutes ces pro- 
ductions furent ClipsCs par rAminta du Tasse, oeuxre 
très-faible comme drame, mais ravissante par les charmes 
enchanteurs du st]/le. Cependant le Pastor fido de Giam- 
battista Guarini (mort en 1612) demeurera toujours le 
chef-d'oeuvre de ce genre. L'Aleeo d'Anton;.o Ongaro, Lz 
Dan:a di Vezzere d'Anglo lngeneri, et les Fill d Sciro 
da comte Guido bello de' Bonarelli (mort en 1607), n'en 
sont que de pales imitations. Les choeurs qui sont joints à 
ces pastorales se chantaient d'ordinaire; delfi vint l'idéed'ac- 
oempagner de musique des pièces entières, et les premiers 
essais en curent lieu dans ce mème siècle. Ottaio Rinuc- 
cini (mort en lfi2t ) et le musicien Jacopo Peri s'as«ocièrent 
à cet effet; le premier écrivit sa Darne, et le second y adapta 
la musique. Telle fut l'origine première de l'opéra (opera 
per musica), genre que les poêtes exploitèrent depuis/ 
l'envi, et qui obtint un succès si immense que l'opCu est 
jusqu'a nos jours demeuré le drame favori ,]es Italiens et 
a singulièrement nul aux progrès de la tragëdie. 
Il serait difficile, parmi tons les écrivains de ce siècle, 
d'en citer un seul dont on ne possède pas au moin quelques 
lime, c'et-à-dire quelques poésies lyriques. A près les grands 
poêtes précëdemment nommís, l'Ariosle, le Tasse, G ua. 
ri n i, il n'y a guère de distingués, parmi ceux qu'on peut de 
préférence appeler des poëtes lyriques, que le cardinal Pietro 
Bem ho, imitateur quelque peu prdantesque de Petrarque ; 
puis France«co Ma-ia Molza; Giovanni Guldiccioni; Gio- 
vanni della Casa (célèbre aussi par un ouvrage finement 
écrit sur le commerce du monde, Il Galateo); Annibalc 
Caro, dont la traduction de l'Énéide est fort estimée; Angélo 
çostanzo( mort en 1591 ) et le and Michel-Ange Buonarotti 
(mort en t561). Force nous est de Iasser sons silence uno 
foule d'auteurs d'un ordre inférienr. Quelques femmes ac- 
quirent aussi dans ce genre assez de célebrité, notamment 
Yittoria Colonna, dont tous les poëtes du temps chan- 
térent les vertus, Yeronica Gambara { morle en 1550) et 
Gaspara Slampa (morte en 1534 ). N'ouhlions pas non pins 
Tnllia d'Aragona, plut6t fameuse que cílëbre. 
Le roman fi;t à peu près ;emi;k,t-,. jusqu'à nos jours [ar 
13. 



6 
la nouvelle et par l'épopée romantique. Le seizième siècle 
compte un grand nombre d'auteurs de nouvelles, dont 
cun cependant n'atteignit la gràce ci la fralcheur de Boccace. 
Les plus c,.lèbre sont ,lalteo B a n d e I I o, dont I nouvelles, 
au nombre de eux cenl quatorze, racoulenl pour la plupa 
d événemen réels, mais écrites d'un slyle néglig, quoque 
ne mauquanl pas d'une cene groe. Les nouvelles du moine 
Annule hrenzuolo ( mort en t58) sont InLqu et or- 
durière, de mme quesa traductioude L'Ane d'Or d'Apulée : 
t on en peut dire à peu près aunt de la Cenede Lasca, 
poëte dont nous avons déjà parlé, quoique cet ouvrage suit 
d'ailleurs parfaitement écot. s Pacevolissime otti de 
Giaulrancco Straparola, qui puisa en partie ses sujets dans 
les poules antéeurs, nomment dans Girolamo Morlino, 
sont du mme genre. Ses vouvelles furent défendues par Pin- 
quisition, à caust"  leur océnité, et dès lors sont devenues 
fort rares. Les porti de Girolamo Parabos, et I 
catonmiti de Galdi nt pl intéresau ; le Sui Gior- 
ate de Sbastiano Erizzo sont sans importance, quoique 
moins impudique. Outre ces grandes collections, on a encore 
quelques novelles d{achées, dont qelques-unes sont 
des moreaux dun and mrite, comme cell de Macchia- 
çelli, dont le Belfagor est un vérible chel:d'oeuvre, de 
Giovanui Brevio et de Luigi de Porta. On préférait traiter 
des sjets plus serieux, h la aniìre des ancien«, 
forme de dialogu. On pe«t citer en çe'enre I Asolan 
de Bulbe, plusie«rs des dialogues de Torquato Tasse, bien 
que la prolixité it un peu leur defaut, les Dialogues de 
Speron Speroni, ceux de Lodovico Dolci, de Muzio et de 
bucoup d'autres. Ce qu'a crit en ce genre Giambattis{a 
Gel de lorence t extrmement ingënieux; sa Circe et 
surtout s Capriccj de[ botta)o, m«ites fuis d¢lendus 
par Pinquisition, peuvent ëtre citës comme des modles. 
Le Cortigiano do comte Baldassare C a s t i g I i o n e (mort en 
1529), qui y trace le porbait du pariait courtisan, jouit de 
on temps d'une grande réputation. 
Il n'y a pas de pa)-s au monde qui à cette époque pr 
sente un aussi grand nombre d'riains poliliqu et d'his. 
ten que l'l[alie. Parmi les çain« politiques et les hom- 
m d'Ét proprement di iolo M a c c h i a v e I I i occupe 
inconestablement le premier rang. Il se monte grand 
et profond politique dans s Dcorsi spra la prima 
doea dt T. Livio, dan les livoes Dell' Arte della Gerra, 
et surtout dans son Principe;  Stria Fiorentina t un 
chef-d'oeuvre. Sans pouvoir lui ète comparés, les Dscrsi 
serra C. Tacite de ipione Ammirato (mort en 
n'en sont pas moins un ouvrage remarquable ; on en peut 
dire au,rit de FHistoire de Florence du mme, des Discorsi 
politici de Paolo Paruta et de l'ouvrage, beaucoup moins 
connu, de Giov. Bottero (mo en 16i7), qui est intul 
Della Ragione dt Stato e rela:ioni niversati. Paolo 
Giovio (mort en 1552), Bern. Rucellai, Galzzo Capra 
et Giorgio Florio ont écrit l'histoire de leur temps en latin. 
Le lèbre G u i cci a r d i n i, dont le témoignage ne mérite 
cependant pas rondeurs toute oenfiance, crivit en italien, de 
mme que Pier-Francesco Giambullari, Giaml»aista Adriani 
et Patrizio ' os. Florenoe est parliculièrement riche 
en histoires spéciales de ¢ein vBles et de certaines épo- 
qs; et Pt surtout Phistoire de la ruine de s libertés 
au commencement du ¢izième siècle dont s'occupèrent un 
grand nombre de ses écr[vains, le plus ouvent tout h la 
fois teurs et témoins dans les faits qu'ils rapportent. L 
principaux sot Jacopo ardi ( mort en 1555 ), Filippo fferli, 
Gioni Cavalcanti (mo en 1556), Benetto Bar- 
chi ( mo en t 5ç ), rnardo Sni ( mot en 1558 ). Il faut 
mentionner encore I petits ouvrages de Cino Ca p pont et 
de son fils e6. Un Vénitien, Michele Brute (mort en 1594 
est aussi Uauteur d'une histoire de Florenoe en latin. Le 
premier qui ait consacré u grand ouvrage h l'histoire de 
Venise t te oerdinal Pietro Bembo ; de mme que Paolo 
Paru, [I ícrivit par ordre de la rpoblique. Gnes a eu 
des historiens distingués dans Jacopo Bonfadio et Ubeo 

ITALIE_NE 
Foglietta; Ferrare, dans Giraldi Cinzio et Giambattista Pigna. 
Pour aples, on n'a que Ponvrage, assez pelJ digne de foi d'An- 
gelo de Costanzo et celui de Gianantonio Summonte (mort 
en 1602), qui mélite autrement créance. L'histoire des pays 
étrangers a été aussi maintes fois écrite par des Italiens, qni 
y avaient occupé des fonctions publiques ; mais le plus 
grand nombre employèrent la langue latine. Parmi les 
x'rages de cette espèce écrits en italien, on doit mentionner : 
Le Scisma d'[n9hilterra par Beroardo Davanzati, célèbre 
comme puriste, et les Cornnenta»j delle Cose d'Europa 
de Lodovico Guicciardini. Ce furent seulement les travaux 
des réformateurs allemands qui forcèrent |'Ëg|ise catholique 
de songer à faire de son c6té une exposition de l'histuire 
ecclésiastique; et c'est aisi que parurent dans ce siècle les 
Annales ecclesiastici de Baronius (mort en t607). Le 
haut degré de perfection que l'art atteignit pendant ce siëcle 
,orta h réflécbir et h rire aussi bien sur t'histoire de l'art 
que sur sa théorie et sa pratiqoe. Ainsi furent publiés les 
cellents ouvrages intitMés Vite de pii eccellenti Pittor[, 
Scultori ed Arch|tetti, par Guerre V a s a r i, et f1 Riposo, 
dialogue sur la peinture et la sculptuçe par Bafaello Borghini. 
L'architecture, en particulier, fut traitée avec un remarqua- 
ble talent par And rea Palladio et Vincenzo ScammozzL 
L'autobiographie de l'orfèvre Benvenuto Cel lin i (mort 
en 570), aventurier plein de talent, et quelques-uns de ses 
ouvrages re|atifs à l'orlévrerie, à la sculpture, etc., ne .ont 
pas non plus sans mrite. L'histoire [ittéraire, qui est une 
des gloires de l'ltalie, commence seulement dans ce .iècle, 
par les ouvrages, assez pe importants d'ailleurs, de Giam- 
maria Ba bieri et de Francesco Ooni. La philosoplde, qui 
jusque alors n'avait presque lait que égéter au service du 
système ecc|siastique dominant, commença pour la pre- 
mière fois dans ce siècle à témoigner d'uue vie indépendante, 
mais le plus souvent, il est vrai, pour le malheur de ceux 
qui osèrent sortir des ornières de la routine. Cependant les 
ouvrages d'un Girolamo Cardan, d'un Giordano Brun o 
et d'un Giutio Cesare Vani ni sont pour la plupart écrits en 
latin. La plupa et les plus eonsidérables des académies 
qui avaient surgi das le cours du quinzième siècle dispa- 
rurent au seizième, étooffées par l'inquisition » et furent rem- 
placées dans toutes le villes d'Italie par une foule de so- 
ciétés n'a.vant d'autre but que la poésie, la langue ou les 
plaisirs de la couersation. On ne peut guère citer dans le 
nombre que l'acadêmie des lozzi à Sienne qui s'occupa .ur- 
tout «le composer et de faire représenter des poëmes dra- 
matiques écrits dans le patois des campagnes environnantes, 
et 'Accadem|a della Crusca, qui existe encore aujour- 
d'hui à Florence. Ses membres s'ètaient d'abord désignés sous 
le nom de GI1 Umidi; plies tard ils prirent le nom d'Acca- 
dernia Fiore»tna, et ce ne fut qu'en 1587 q»l'ils adop- 
tèrent définitivement celui d'Accademia delta Crusca. 
Qwxmtu r[mon. Le dix-septième siëcle, il seicento, 
marque la decadence des Cudes claiques et de la poéie, 
et sa perniciense influence s'Cendit sur la pins grande paloEie 
du dix-huitième siècle, h la fin duquel nous saluons la ve- 
nue de la régénération de l'Italie. En dépit de tous tes ob- 
stacles que leur opposaient les inquiètes defiances et les per- 
sécutions de l'Église, les sniences naturelles, après un long 
sommeil, se réveillèrent et produisirent dès le commence- 
ment de cette période tout une série d'hommes remarquables. 
Il se forma des associations savantes, comme celle des Lincei 
ì lome dès 1605, qui a péri plusieurs fois, il est vrai, mais 
que de nos ours encore Pe IX a de nouvesn rappelée à 
la vie. A lome l'Accademia del Cimente jeta mme encore 
plus d'èclat, mais pour bient6t disparaitre à jamais. Parmi 
les hommes qui ont acquis un nom immortel en astronomie 
et dans les autres sciences physiques, Galileo G a I i I e i occupe 
incontestablement le premier rang. Après lui nous distin- 
glmns Vincento Viviani, Evangelista Torricell i, les Cas- 
sin i, père, fils et petit-fils; les astronomes Giambattista 
Biccioli et Francesco Grimaldi ; les naturalistes M a I p i g h i, 
Lorenzo Bellini et surtout le médecin poëte Francesco ledi 



ITALIEIqNE 
d'Arezzo (mort en 1697), auteur du célèbre dithyrambe Bacon 
en Toscagne. Les sciences philosophiques, elles aussi, 
furent cultit Cs à cette époque par un grand nombre d'hom- 
mes remarquables, enmme cet infortuné Tommaso Ca m- 
panella.(mort en 1659), qui a laissé de fort intéressantes 
poesiefaosofiche. Giambattista V ico ( mort en 1744 ), dont 
les Primipj di Scien-.a «''uova ont fait vraiment époque; 
les juriseousultes Cesare Beccari a, Gaetano Fila ng i e ri, 
appartiennent déjà à une époque plus rapprochée de la notre. 
llous ne devons pas non plus omettre les noms d'Antonio 
Genovesi (mort en 1769), de Ferdinando Galiani (mort 
en 1787), de Maria Pagano (fusillé en 1799), et les frères 
Verri, dont l'un, Alessandro, est surtout connu par ses «'otti 
llomani. L'histoire, dont la mission consistant à retracer fi- 
dèlement les événements fut rendue singulièrement dilficile 
par les malheurs des temps, a été cultivee par un grand 
nombre d'écrivains; mais il n'en est qu'un petit nombre qui 
aient decrit les événements auxquels ils avaient assisté. Tels 
furent, par exemple, Arrigo Caterino D a v i I a, assassin en 
1631, auteur de l'histoire Delle Guerre Civile di Francia ; 
et Guido Bentivoglio (mort en 164 ), auteur d'une Storia 
delle Guerre dt Fiandra, écrite avec autant d'impartialité 
que le hti permettait le point de vue oi il était placé. 
Les autres ouvrages historiqtes de cette époque sont tous 
sans exception uniquement le fruit de savantes et laborieu- 
ses investigations. De ce nombre sont les ouvrages latins du 
jésuite Famiano Strada (mort en 1649 ), l'histoire de Naples 
par Francesco Capecelatro (mort en 1670}, de Venise par 
Battista liani (mort en 1678), l'histoire de son temps par 
Pietro Giovanni Capriata de Gènes, et les nombreux mais 
peu solides ouvrages de Gregorio Leti. Parmi les historiens 
posterieurs, on doit honorablement citer : Pietro G i a n n on e 
(mort en 74), dont le principal ouvrage est la Storia 
Civile del Begno d .¥apoli; et la Storia di Milano de 
Pietro Verri (mort en 1797) continuée par Pietro Custodi 
et Stefano Ticozi. Les nombreux ouvrages de Carlo Maria 
Denina (mort en 1813 ) sont trop superficiels, et la 
plupart écrits en français. Le don de patiente investigation 
qui de tous temps distingua les Italiens produisit encore 
dans cette période deux hommes distingués : Lodovico An- 
tonio .Muratori (mort en 1750), dont les nombreux ou- 
vrages sont pour la plupart écrits en latin; et le marquis 
Scipion Maffei (mort en 1755), qui ne lui cëde en rien 
pour la patience et la profondeur des rechet-ches. Dans le 
domaine de l'histoireecclésiastique, il n'y a, à la verité, qu'un 
seul grand ouvrage à citer, mais d'un merite immense, l'his- 
toire du Concile de Trente par Fra Paolo Sarpi (mot't en 
1623 ). L'histoire des beaux-arts a été l'objet de reclterches 
nombreuses, les unes ayant trait à l'ensemble mème des arts, 
les autr-s bornées à telle ou telle branche spéciale. Parmi les 
plus anciens ouvrages de ce genre, nous mentionnerons 
ceux de Filippo Baldinucci (mort en 1696), qui essaya 
de compléter et de rectifier Vasari; de Carlo Dati ( mort en 
1675) ; et les biographies spéciales d'artistes de Giovanni 
Baglione. La fait d'ouvrages nouveaux, il faut citer la Storia 
tittorica de Luigi Lan z i, qui a pttblié un savant Sa99io 
di Lingua Etru,ca, et la Storia della Scultura de Leo- 
poldo Cicog n ara. On a une histoire spéciale de l'opéra 
par Pietro Signorelli (mort en 1815). 
C'est surtout dans le domaine de leur propre ltistoire lit- 
téraire que les Italiens ont déployé une remarquable activité; 
à cet égard on peut citer les noms de Gianvittorio Rossi et 
de Giovanni Cinelli ( mort en 1706), de Giusto Fontanini, de 
Giacinto Gimma, de Giovanni Maria de Crescimbeni, de 
Saverio Quadrio, de Giovanni Mazzucchelli (mort en 1768), 
mais surtout celui de Girolamo Tiraboschi. Giambattista 
C o r n i a n i et le bien plus ingénieux Camillo Ugoni traitèrent 
d'un certain nombre d'écrivains éminents, mais uniquement 
au point devue biographique. & cesrichesses Iittérairesil faut 
ajouter les nombreux ouvrages relatifs à l'histoire de la lit- 
trature et des savants dans les divers États et villes d'ltalie. 
S'd n'a pas manquéen ltalie de patients collectionneurs par 

,517 
contre c'est la critique et l'instruction #n'rale qui y [ont 
défaut. Ce qu'on pourrait citer à cet égard est devenu au- 
jourd'hui le plus souvent hors d'usage en raison de sa vétusté ; 
. par exemple, les Proginnasmali de Benedetto Fioretti, 
connu sous le nom d'Udeno ,Nisieli ; le Tfaltato della Bel- 
le=-'-a della Volgar Poesia de Crescimbeni; Della regione 
Poetica de Vincenzo G r a v i n a, et Della perfelta Poesia 
de Muratori. Il y a beaucoup plus d'eprit dans les R«99uagli 
di Parnasso de Trojano Bocealini, et surtout dans la Frusta 
letteraria, espèce de journal critique, de Giuseppe Baretti 
(mort en 179). Le premier journal critique qu'ait eu I'[- 
talie fut le Giornale de" LetteraD, fondé par Francesco _Na- 
zari, en 1668, continué par divers tusqu'en 1689. Vint ensuite 
la Galleria dt Minerva, le Giorn«le de" Letterati d'ltalia, 
fond par Apostolo Zeno les IVovelle letterarie de Lami ; 
la Storia letteraria d'Italia de Zaccaria, et le Giornale 
Pisano de Fabbroni. Parmi les jomnaux moderne% et exis- 
tant encore aujourd'hui pour la plupart, on peut citer comme 
les plus importants : le Giornale 4rcadico, à Rome; l'An- 
tologia di Firen,e de Vieusseux, supprimé en 1833 par or- 
dre de l'aulorité supérieure; le Giornle de' Lctterati, à 
Pise; les Effemeri romane de D. Rosi; le Poligr«oEo; 
le Concilialore de Milan, supprim depuis Ionemps; 
le Giornale enciclopedico de Naples; la Biblioteca ira- 
liane de Milan, réunie depuis tSI avec le Giornale dell' 
1.-1L 1.stituto Lombardo ; la Bez'sta Europea, etc.»'etc. 
Un fait bien remarquable assurément, c'cci qfie la nouvelle, 
autrefois le genre de poésie favori des Ilaliens, disparut 
presque complètement au dix-septième siècle ; et depuis lors 
on n'a plus rien vu publier de bien important en ce genre. 
En effet, les 1Voyelle Moroli de Francesco Soav sont 
d'une platitude extrgme; les contes d'un maitre d'école, 
de Ce«are Balbo, ont infiniment plus de mérite; et en 
fait d'écrivains contemporains on ne peut guère citer que 
les _X'ouvelles de Gaetano Parolini et les ¥ovelle Morali de 
Scarabelli. 
lxons avons déjà dit plus haut que vers le miliet du dix- 
huitième siècle l'ltalie avait etWtravaille par une véritable 
9allomatie. dont l'infltence s'était aussi fait sentir sur la 
langue. Les .hommes qui suit ir.nt cette direction pensaietit 
sans doute rveiller ainsi leur nation de la paresse et de l'en- 
gourdissement d'esprit dans lequel elle tait tombée. Ils aban- 
donnërent donc la voie du véritable développement national, 
et leurs succès ne pouvaient tre que de courte durée. Les 
principaux fireut : le comte Franceseo A I g a fo t t i (mort en 
1764), l'un des favoris de FfCCie le Grand, mais qui n'a 
laiss qu'un fort petit nombre d'ouvrages ; Saverio Betti- 
nelli (mort en 1808), qui dans ses Lettere Virçiliane, di- 
rigées surtout contre le Dartre, prouva qu'il clair complete- 
ment incapable de comprendre un veritable poëte; et surtout 
Melcitiore Cesaro tri (.mort en 1808). Les poetes de cette 
période portent encore plus que les autres écrivains la triste 
empreinle de leur temps. L'engourdissement, l'absence de 
senliment, le foot pour de vains jeux de mots, pour les an- 
tithèses, les métaphores asburdes ou les concetli, comme on 
dit d'ordinaire, une certaine sensiblerie pastorale, un vain 
cliquetis de mots au lieu de pnsées fortes et viriles, et une 
lubricité effrontée caractérisent la plupart des productions 
poCiques de cette période. Le petit nombre d'éerivains qui 
cherchèrent à s'élever au-dessus de ce uigaire niveau tom- 
bèrent dans l'enflure et l'exagération, signes évidents de 
l'absence de force véritable. Tous ces indices de la d6c.a. 
dence de la nation, plus encore que des poëtes eux-mëmes, 
apparaissent de la manière la plus saillante dans les innom- 
brables poésies lyriques de cette époque. Il faut placer en 
tëte de tous ces poëtes du dix-septième siècle Giamhattista 
Marini (mort en 1625), lequel, tout en participant de 
leurs défauts, les domine néanmoins presque tous par l'ima. 
gination et par l'harmonieuse richesse de l'expression. Sauf 
le genre dramatique, il s'essaya à peu près dans tous les feu- 
res. Le plus important de ses ouvrages est son grand poeme 
épiqtm et mythologique, Adone. Son talent a immortaiis6 



n nom ; et par rípithète de rnarinistes on désigne aujour- 
d'hui tes poëtes qui ont exagéré et reproduit sa manière et 
ses défauls, sans lui ressembler dans ce qu'il a de véritable- 
ment bon. Nous citerons comme les plus mauvais entre les 
malheureux imitateurs de Mariui, Claudio Achilini et Girolamo 
Preti. Cemauvais goftt, dont il ne serait pas difficile d'ailleurs 
de montrer déja les premières traces dans Pétrarque, et au- 
quelsacrifia souvent Torquato Tasso, dura jusqu'a la lin du 
dix-huitiëme siècle ; et l'Académie de i'Arcadie, à Borne, qui 
dbs 1690 a'efforça de remédier à ce déordre en introduisant 
l'innocence ouplut6t la fadeur pastorale dans la poésie, n'a- 
vait. assurément pas choisi le moyen convenable. C'est en 
vain qu'on chercherait de la sensibilité vëtitable et des pen- 
sées viriles chez les I) tiques les plus célèbres de cette époque, 
citez Benedetto Menzini, Alessandro Guidi, Giambattista 
Zappi, Francesco de Lemeue, Carlo Maria Maggi, Laurenzio 
Frugoni. Legrave Gahriello Chiabrera (mort en 1687), qui 
a plutét quelque chose d'antique dans sa manière, évite, il 
est vrai, ce qu'il y a de mou et d'eh'eminé dans le faire de 
ses contemporains, mais arrive ainsi a tomber dans l'emphase 
et un prétentieux pathos. Fulvio Testi (mort en 1 ¢146) et 
Vincenzo Filicaja (mort en 1707) lui ressemblent/ tous 
Carda. Dans le petit nombre de postes distingues de cette 
cpoque on peut citer Euachio Manfi'edi (mort en 1738 ), 
Paolo Roili (mort en 1767 ), et méme aiouter à le,»rs noms 
ceux de Ludovicu Savioli ( mort en iS0-1) et d'Onoflio Min- 
roui (mort en tSt7 ). 
A une époque o6 la polihque et les sciences étaient tom- 
hées .si bas, on n'a pas le droit de s'attendre à trouver de 
grands ouvrages ëpiques; et en effet, des nombreuses ten- 
tatives laites dans cette voie, il n'en est pas une seule qui 
se sot élevée au-dessus du médiocre. Le plus interessant ou- 
vrage a citer en ce genre, c'est peut-étre bien encore le 
icciardetto de Niicolo F o r teg u e r r a ( 1735 ), qui essaya 
avec assez de bonheur de ressusciter le poëme héroque et 
romantique, autrefois si aime du pddic. 11 n'y a guere qte 
tes hommes faisant de rhi»toire liftCaire l'objet d'une étude 
spéciale qui aient entendu parier du londo 'uovo de 
Tommaso Stigliani, et du Mondo Trea/o de Gasparo iIar- 
tola, l'un et l'autre datant des premières années du dix- 
septieme siècle. La meilleure production de cette epoque 
egt encore Il Conq|sto di C, ranata de Girolamo Graz- 
ziani ( mort en 1675); le Boemondo de Semproni et rIm- 
perio vendcato d'Ant. Carmccio sont bien plus faibles. Il 
y a beaucoup d'originalite dans i'Adamo de Tommaso Cam- 
pailla et dans les Visioni sacre e 7orali d'AIpon.o Varano 
(mort en t788). L'époque moderne n'a rien prodlit non 
plus de bien remarquable en ce-genre : les seuls poëmes 
qu'on cite sont 1 Cadmo de Pietro Bagnoli, La Gerusa- 
lemme distrutta de C, esare Acici ; La Colombiade de Ber- 
nardo Beilini, La ltussiade d'Orti, et Camillo o l'eja 
conquistata de Carlo B o tf a. Une époque qui avait la cons- 
cience d'Cre incapable de rien produire de grand devait 
tre naturellement portée à déprécier et à tourner en ri- 
dicule la grandeur des temps anciens ; de la l'Anorme quan- 
filWde poëmes heroï-comiques et de parodies à laquelle 
elle donna le jour. Et cependant il n'y a, à vrai dire, qu'un 
seul poële qni se soit fait un nom durable en ce genre, 
Alessandro T a s s o n i ( mort en 1625 ), dont la Secchia apita 
su lit bien encore de nos Iours, mais n'offre plus de véri- 
table interC. Ce que nous disons là est encore plus vrai du 
poërae de Francesco B r a c cio I i n i ( mort en 1645) qni a pour 
tih, e Lu Scherno degli DeL Le Malmantile racquistato 
du peintre Lorenzo Lippi (mort en 166), poëme essen- 
tiellement florentin, raais presque inintelligible aujourd'hui, 
obtint de son temps un grand succb.s. Les autres poëmes 
de es nre : Il Torrachione desolato de Corsini, L'.4sino 
de Carlo de' Dottori, Il Lameto di Cecco da Varlung« 

ITALIENiNE 
poëme en cen! un chants de Passeroni (mort en fS03) t cause 
de sa bonne et franche gaietë vraiment italienne. Les pod- 
sies, assez .pirituelles sans doute, mais ordurières et compo- 
sées tout à fait dns le goret français, de Giambatista C 
ri : Gli Annimli parlanti, et ses l'orelle, obtinrent un 
grand succès à une époqce aussi frivole que celle o/ elles 
parurent. La plus récente production en ce genre est le 
Puera di Teatro, de Filippo Pananti (mort en 137 ). On 
a aussi à cette époque revètu de formes poCiques les anciens 
livres populaires, tels que les Astu:ie di Bertoldo et les 
Facoeties de Gonella. En fait de fabulistes, nous mention- 
nerons Bertola, Pignotti, Luigi Clasio (Fiaechi) et Gae- 
tano Pero. 
La satire romaine ne fit pas fortune pendant cette pé- 
riode. C'est tout au plus si on doit citer les satires de Chia- 
breri et de Soldani, et plus tard celle de Gasparo Gozzi 
(mort en 1786), que le purisme de son style a rendu cé- 
ièbre. Les satires du célèbre peintre Salvator Boss (mort 
en 1675), qui le plus souvent avaient pour point de dé- 
part des improvisations préalables, ont une incontestable. 
originalité. E fait de satiriques modernes, il faut nommer 
Giuseppe Zanoja (mort en 18t7 ), Gianantonio de Lucca et 
Angelo d'EIci. Ce que la poesie didactique offre de mieux, 
c'est La Rseide de Giambattista Spolverini ( mort en 1767 ); 
on peut mentionner encore le Statu ïustico d'hnperiali, 
la Coltiva.ione de Mo.ti de Bartolommeo Lorenzi (mort 
en lSO), les Bachi da sera de Betti, la Coltivazione 
degli ltlivi, I coralli et La Pastori:ia, poëmes lort 
timés de Cesare Arici (mort en 1820), ainsi que la Colti- 
ra:ione de Cedi de Giuseppe ,iccolini. 
L'iutrét de plus en plus grand que le public prenait à 
l'apéra empcha que rien d'important se produisit à cette 
époque dans le genre dramatique. Les tragédies de Giova- 
lioi Delphino et d'Antonio Carroccio sont aujourd'hui com- 
plétement oubliées ; et ce ne fut que vers la fin de ce 
siccle, et mme plus tard encore, alors seulement qu'on 
connut le thétre franç.ais, que quelques ëcrivains s'es- 
saèrent dans ce genre. Le plus célèbre de son temps fnt 
Pier Jacopo Martelli (mort en t727), qui employa mme 
une forme de vers imitée du français, et appelée d'après 
loi martellienne, mais/ laquelle on ne tarda point à re- 
noncer, du moins pour la tragédie. En ,evancb% il faut 
honorablement citer la Merope de Scipione M a ff ci ; après 
cette tragédie, il n'y a plus guère que les pièces du mathé- 
matioen Antonio Conti (mort en 179) dont il soit per- 
mis de parler, tandis que les ouvrages de Pietro Chiari 
sont depuis longtemps tombés dans l'oubli. Les efforts de» 
Italiens dans la comédie furent plus heureu et empreints 
de plus d'originalité. La commedia dell' arts continua 
faire les délices du peuple; et Flaminio Scala (mort en 
1620), ïibeno Fiorillo (mort en 169,), noms auxquels 
on peut encore ajouter celui du peintre Salvator R o s a, ob- 
tinrent de grands succès en ce genre. Plusieurs poëtes de 
talent, comme Giambattista Porta, le d*c de Sermonetta, 
Filippo Gaetano, Scipione Errico, etc., travaillèrent surtout 
pont le théAtr% à aples, avec le plus grand succès. Les 
deux pièces de Michel-Ange Buonarotti le jeune (mort en 
1646), La Tancia et La Fiera, l'une dans la langue en 
usage à la ville, et l'autre dans le patois des paysans, sont 
des productions fort originales, et furent rompusCs par 
l'auteur à l'effet de fournir à l'Accadernia de la Crusc 
pour son dictionnaire des exemples de la langue populaire. 
Sons ce rapport le dix-huitième siècle fut plus riche. Sans 
doute Girolamo Gig I i (mort en 1722) ne fit que uopier Ba- 
cine et Molière » et les pièces de Liveri de 5]aples et de 
Chiari (celui dont il a déjà été question) sont tombëes 
dans un profond oubli; mais enfin parut le plus grand 
poëte comiqne de i'Italie, Carlo Goldoni, de Yenise 

de Baidovino, La Cicceide de Lazzarelli, La Moscheide et (mort en 1792 ). Il s'efforça d'écrire à la manière de Ilo- 
La k'ranceide de La]li, La Bucchereide de Bellini, La Presa [ lière et surtout de remplacer la comrnedia dell' arle par 
dt son. #liniato de eri, sont depuis longtemps oubliés, la comédie de caractère. S'il n'y réussit point, du moins 
En revanche, on lit encore aujourd'hui le Cicerone, grand les tableaux fuièles qt'il a tracés des caracteres et des rattmrs 



ITALIEI_NE 
des Ihliens, et la facilité ainsi que le naturel de son style 
l'ont readu l'auteur comique favori de ses compatdotes. Il 
régna seul sur la scène de Venise pendant dix années, jus- 
qu'au moment oi, avec ses créations vraiment originales, le 
comte Carlo G o z zi parvint à Féclipser. Gozzi entreprit de 
dramatiser toute une suite de conles de gradé'mères, Fiabe, 
et obtint ainsi de son temps d'immenses succès. Les autres 
ouvrages ne valent pas la peine qu'on en parle. Dans les 
dernières années du dix-huitième siècle, le goOt du public 
italien bésita enlre les modèles français et les modèles al- 
lemands (Iffland, Kotzebue); et Camillo Federi ci, Gbe- 
rardo de Rossi, Capacelli, Signorelli, le comte G i r a u d, 
Alhero  o la et Augusto Bon sont incontestablement des 
écrivaius de mérite. L'opCu, genre qd jusque alors n'avait 
encore été Irailé que par des écrivains tout à fait tufCieurs, 
atteign;.t pendant le cours du dix-huitième siècle le plus 
haut degré de sa splendeur et de son éclat, grâce aux pe 
duetions de deux poëtes que les llaliens tiennent encore 
aujourd'hui en grande estime, le savant et grave Apos- 
tolo Z,'no (mort eu 1750) et le t'avod de ses compa- 
trioles, Pietro Trapassi, plus connu sous le nom de Me- 
t a s t a s e (mort eu t782 ). La plupart de ses contemporains, 
F ru go ni, Rolli, Bezzonico, Calsabigi, elc., n'onl rien 
produit d'important. Dans ces derniers temps le public a 
accueilli assez lavorablement les opéras de Cristoîoris et de 
Felice Bornant. 
CQl/s Pmon. Un esprit meilleur commença à se 
manifester vers la fin du dix-huitième siècle et au commen- 
cement du siècle actuel. La révolation française, les guerres 
et les bouleversements qu'elle entraina à sa suite pour l'Ita- 
lie, l'esprit militaire qu'elle réveilla, de mëme que les as- 
pirations à l'unité politique de l'ltalie qu'elle provoqua de 
toutes parts, ilhrminërent les esprits, et engagèrent une roule 
d'lmmmes distingués à abandonner, même en littrature, 
les sentiers iusque alors frayés et baltns pour revenir atx 
voies anciennes et nationales, avec le Danle pour uide. Dans 
la langue, ce mouvement de rénovalion se manifesta par une 
tendance visible à l'expurger du galicisme, qui menaçait de 
corrompre et d'étouffer le noble langage de l'lhlie; dans 
la poésie, par la lulte qui s'ëtablit entre les classiques et 
les romantiqnes, c'est-à-dire entre ceux qui suivaient l'an- 
cienne direction mytholoque, et ceux  q,d la connaissance 
des lillératnres anglaise et allemande vaient far entrevoir 
de nouveaux horizons dans le domaine de l'intelligence. En 
ce qui est de la langue, les puristes ont incontestablement 
triomphë ; mais il serait encore difficile de dire ce qui résultera 
en délinitive de la lutte des romantiques et des classique»; 
car dans l'état d'oppression et de surexcitation o/ se trouve 
aujourd'hui l'opinion publique en Italie, elle se préoccupe 
de progrès tout autres que ceu qui se ratlaehent à une 
simple queslion liltéraire. Le parti des purisles reconnaissait 
sans conteste pour chef Antonio C e s a r i (mort en 1S2). 
Dans tous ses ouvrages, cet écrivain a poussé jusqu'à l'affëc- 
ration sa peCilection pour la languo du Trecento. Il eut 
un digne successeur en Pellegrino Farini (mort en 1848 ). 
Vincenzo M o n t i ( mort en 1828 ) dëfendit la mEme cause 
comme aussi celle de classiques, avec plus de goret et d'es. 
pril ; et il fut fidëlement secondé dans tous ses effort par 
son gendre, le comte Giulio Perticari en (mort 1822), 
écrivain profondément versé dans la connaissance des an- 
tiqaités ilaliennes. Plusieurs poëtes distingués, ne se ratta- 
chant en rien à ces hommes engagés dans les luttes des 
partis politiques, avaient déjà adopté un style meillearet plus 
énergique. C'est nn mérite qu'eut surtout Giuseppe P a r i n 
(mort en 1799), qui dans son gracieux poëme II Gioro avait 
employé l'élgance la plus exlrEme de la langue .', fla- 
geller la misérable nullilé de la vie des hautes classe de 
la société de son siècle. Après lui il faut surtout citer Ip- 
polito P i n d e m o n t e (mort en 1828). Un homme de talent et 
d'un caraclère bizarre, mais d'une éducation défectueuse, 
dont plus tard il s'efforç.a de combler les lacunes au mover 
d'tudes epiniàtres, le comte ¥iltorio A I f ter i, se crut 

519 
pelé à devenir le réformateur du théMre italien. Son aver 
sion pour la fadeur des drames alors a rpertoire, qui 
les faisait ressembler à autant d'opéras, le fit tomber dans 
l'exlrème opposé. Au lieu d'Atre simple et naturel, il ne 
rénssit qu'à Cre rude et abstrait, saus savoir donner de la 
coule,,r à ses sujets nou plus que do la vérité à ses carac- 
tères. Au fond, son système est tout , fait celui de la tra- 
gédie française, avec cette seule difference q,a'il écartait tout 
ce qui lui paraissait sperflu, ne conservant dans son ac- 
tion que trois on an plus quatre persounages, qui lutteur 
alors entre eux de fiévreuse passion, Cette innovation n'en 
fut pas moins accueillie avec enthousiasme. Ses autres ou- 
vrages sont assez insignifiants et trahissent [,lus d'aigreur 
et d'emportement de caractère q,,'ils ne témoignent de 
nétration et d'inçtruction. Ugo F o s c o I o (mort , Londres, 
en 189.7), plus célèbre par ses Ultime Ltere dt Jacopo Or- 
tis, imitation de Werther, et par ses travaux sur le Dante, 
Pétrarqae et Boceace, que par ses tragédies, traitées de celles 
d'Alfieri, offre certaines analoes de caracoEre avec lui. 
Lesécrivains dramatiques plus récents se sont sagemeut 
éloignés de la rudesse et du laconisme contre nature d'Al- 
fieri, et déjh Monti leur avait à cet égard indiqné une voie 
meilleure. Le premier de tous est sans conteste Giambattista 
Niccol ini de Florence, qui d'abord, il est vrai, emprunta 
ses sujets , la m)oEholoe et à l'antiq«ité, mais qi plus tard 
s'est avec bonheur rapproché d moyen age. Les ouvres 
dramatiques de Sylvio P e I I i c o et celles de son compagnon 
d'iufortune Carlo Maroncelli ( aujourd'hui fixé en Ameriqne} 
sont beauco,p pins faibles. La réputation de quelques au- 
tres poëtes modernes, tels que Ltii Scevola, Cesare della 
Voile, Francesco delle Voile, Cosenza, etc., n'a point dé- 
passe les frontières de l'ltalie. 
Ce n'est pas Alieri qu'il faut cousidérer comme le vérilable 
réformateur du lh,-Mre italien, mais bien Alexandre Man- 
zon i. Ses deux piëces II Conte dt Carmagnola et Adel- 
chi sont les ouvrages qui les premiers ouvrirent en Italie 
des voies nouvelles  l'art dramatique, de méme que dans 
ses Inni sacri il a pris un ton jusque alors Inconnu dans 
pays. 11 faut mentionner comme de faibles imilateur_ Te- 
baldo Fores, De Cristoforis. lo«ini et Carlo Marenco, qui 
ont traité dramatiquement tous les ands événements ar- 
rivés au moyen ge dang leur patrie. Quelques poëtes mo- 
dernes ont modestement donné le nom de drarnrni  leurs 
tragédies, par exemple Giuseppe Revere, Antonio Gigliani, 
Felice Turalli et Giacinto Battaglia, qui ont essayé, sans ob- 
tenir des succès bien remarqaables, de mettre en scène la 
idupart des romans qui ont fait du bruit de nos jours. On 
vante d'ailleurs beaucoup les travaux de Giovanni Sabat- 
tini de Modëne, aute,r de plusieurs dramrni storici, qui 
sont moins des œuvres dramatiques que des scènes histori- 
ques, e le Fornaretto de Francesco dell' Ongaro de Tvieste. 
Le méme a au imprimé une Dnae, et un tab/eau de 
mœurs nationale I Dalm«ti. Dans ces derniers temps, à 
c6té du répertoire de Goldoni et de ota, toujours en pos- 
session d'attirer la Ibule, Gberardo del Testa n'a pas laissé 
que de réussir à se faire une place honorable au thdàtre. Si 
de temps à autre on voit représenter sur la scène italienne 
quelques traduction. des tragédies de Schiller on des dra- 
mes de Kotzebue, il faut reconnaltre qu'elle est littéralement 
enxahie de plus en plus par de« traductions de pièces 
française. Le théàlre tout entier de M. Scribe y a passe. 
L'épopée, dans le sens antique attaché à ce mot, après 
avoir été maintes fois essayée en Italie, semble de nos jours 
complétement abandonnée. En revanche les petits récits 
épques, qu'on pourrait à bon droit qualifier tout simple- 
ment de romans m de nouvelles, sont toujours aceueillis- 
avec beaucoup de faveur. L'ouvrage le plus important sous 
ce rapport est celui de Tommaso Grossi, qui a pour titre 
Lornbardi lla primo crociata et se compose de quinze 
chants.Production remarquable' tous ígar.ds, cepoême donne 
lieu à d'intéressants rapprochements avec celui du "fasse. 
Le méme auteur ava!t déjà denné qlelques nenveiles : La 



52O 
Fuggiliva et Ildegonda, et plus tard Ulrico e Lida. On a 
eucore remarqué La Pin, épisode du Dante, par Benedetto 
Sestini; un Torquato 7asso, de Jacopo Cabianea, plusieurs 
petits poëmes épiques de Ricci, et les poésies publiees par 
Silvio Pellico sous le titre d'Atiche. L'avocat Costa a donné 
une découverte de l'Amérique en versi sciolti. L'affran- 
chissement de la Grèce a aussi inspiré deux poëmes : La 
Pace d'Adrianolaoli par Domenico Biorci, et La Grecia ri- 
9enerata dt Giovani de 1artino. 
.. L'état d'exultation politique où se trouve i'ltalie, n'est 
guère lavorable  la poésie lyrique. Beaucoup d'entre les 
poêtes que nous avons díjh mentionnés, tels que Parini, 
Pindemonte, Alfoeri, Monti, Silio Pellico et surtout 
blanzoni ont, il est vrai, composé des poCes lyriques, dont 
quelques-uns sont de« morceaux remarquables; mais au 
total on ne peut nommer aujourd'hui qu'un très-petit nombre 
de poëtes lyriques importants. Le premier de tous tut incon- 
testab[ement le comte Giacomo L e o p a r d i (mort en 1837 ) ; 
aprés lui on ne peut guère citer que Luigi Carrer, Gin- 
vanni B e ru het, Agoslino Cagnoli (mort en tS-16 ) et Gio- 
anni Prati, qui vit encore aujourd'hui  Turin. On a de 
Giuseppe Gi ust i (mort en 1850) quelques inléressants 
poëmes patriotiques en diaiecte populaire tvscan. Les trou- 
bles qui ont até l'ltaiie dans ces derniers temps ont sans 
doute donné naissance à tme foule d'odes, d'hymnes patrie- 
tiques, etc.; mais il n'y a guère que les cliants de Brof- 
ferio de Turin et les caco di z Menestrello laliao par 
un anonyme, qui mritent d'ètre cités dans cette rapide enu- 
reCation. Giuseppe Vedova a publié depuis t836 le choix 
des meilleures morceaux de poésie composés de nos jours 
par des femmes. 
Le romau, qui, par [s causes que nous avons déjà 
diquées plvs haut, lit presque complétement défaut / l'l- 
talle, y est dvenu de nos jours, comme dans le reste de 
l'Europe, la lecture favorite du public, le roman historique 
surtout; résultat qu'il faut sans doute attribuer à l'immense 
succès des romans de Wa[ter Scott. Nous ne citerons ici que 
pour mémoire les nombreux et au total assez peu importants 
travaux de Bertolotli. t-n revanche, ici comme au th'lre, 
ce fut Alexandro llanzoni qui donna Iïmpulsion première 
avec ses Prornessi Sposi; ouvrage ni] il traça de la manière 
la plus brillante le tableau des mœurs et de l'histolre du dix- 
septième siècle au nord de l'ltalie. Une foule d'écrivains 
ont depuis suivi les mèmes voies avec pls ou moins de 
succès; en tte de tous on doit placer Ginvianni B o s in i, 
['auteur de La Moaca di Monta et de Ltisa Stro*.:i ; tout 
ce que l'on peut lui reprocher, c'est de laisser la partie poli. 
tique et littéraire de ses ouvrages trop empiéter sur leur par- 
tie poétique. L'Ettore Feromosca et le liccolo de' 
de 1Massimo d'Azeglio, ainsi que le Marco t'iscoti de 
Tommaso Grossi, sont des œuvres beaucoup plus remar. 
quables. En lait de romanciers, il faut encore citer Varese, 
]azzoui, Falconetti, Lanzetti, Guerazzi, Defendente Sacchi, 
llarocco, Zorzi, Luigi Vigna, le prince de Santa-Bosa, Gia- 
cinto Battaglia, Cesare Can to, Tommaseo et Banieri. 
L'Ebreo dt Veroa, par fie jësuite Iresciani, est un roman 
à tendances bien arrtëes. 
L'histoire a aussi élé cultivée dans oes derniers temps, 
avec autant de soin que de succës. En fait de travaux d'in- 
vestigation savante, il laut mentionner en première ligne 
ceux de Giuseppe Micali et de Garzetti. Le plus remar- 
quable ouvrage historique de notre époque est l'histoire 
universelle de Cesare C a n t ù. Cesare B a I b o, Luigi Barri, 
Giuseppe Coropagnoni et Ant. Coppi se sont ocxupés de 
l'histoire générale de l'ltalie. Les révolutions politiques de 
notre poque ont engagé plusieurs écrivains à écrire l'histoire 
dt leur temps, it quelques-uns celle des événements dont ils 
avaient eux-mmes été témoins. Dans le nombre, fl faut 
citer la Storia della Guerra delP lmpede:a degli Stati 
Uniti d'Arnerica de CarloBotta (mort en 1837 )et sa 
5loria d'ltalia; l'histoire de la révolution de ,Naples par 
• "incenzo Cuoco; l'histoire de la guerre des Français en 

ITALIENNE 
Espagne par CamilIo Vacant, qui lut acteur dans les é- 
nements qu'il raconte; l'histoire moderne de Naples, par 
Pietro C ni le t t a ; celle de Sicile, par Pietro Lanza, prince de 
$cordia. Gualterio et Ferdinando Banalli ont publié ce que 
l'on a de mieux sur l'histoire des derniers évënements don! 
la pénensule a été le thétre. L'histoire spéciale des pro- 
vinces et des villes a également été l'objet de vombreux 
travaux ; nous citerons plus particulièrement l'bistoire de 
Naples par Pagano; les Vpres $iciliennes de Michele Amari ; 
les Tavole croologiche della $toria Iîoretia d'Alfr. 
Reumont; l'histoire de Toscane par Lorenzo Piguotti (mort 
en 1812 ); celle de Pise par Bonaini; celle de Milan par 
Pietro Custodi ; celles de Gènes par Catin Varese et par 
Girolamo Serra; celle de Sicile par Giuseppe Alessi, et celle 
de Venise par nn anonyme. En lait d'historiens modernes, il 
faut encore mentionner Ligi C i b r a r i o à Ttlrin ; Citadel[a, 
à Padoue; Tullio Dandolo, à Venise ; et Troya  Naples. 
Les Famglie celebri d'l[alia du comte Pompeo Litta 
sont un ouvrage de vastes proportion% et qui a exigé d'im- 
menses travaux. Dans ces tout derniers temps les ouvrages 
politiques de Gioberti, de Balbo et de llazzini, ont 
produit une sensation extrème. Le parti de la réactionjé- 
suitico-catholique a pour principaux organes les journaux 
Scien=a e Fede à Naples, La ;'oce della ;'erita5 31odëne, et 
la Cwit{a catolica rédiée à Rome depui 1850 par des 
Cuites; tandi que Gioberti I'a cmnbattue dans son Gesuita 
• noderno, et Bosini dans ses Cinue Piaghe della Chiesa. La 
plupart des journaux politiques que firent naltre les derniers 
ívénements ne purent avoir qu'une existence éphemère. 
Dès 1835 l'excellente Antologia dt Fren:e avait Ate sup- 
primée; et il ne subsiste plus aujourd'hui à Turin que le 
lisorgimeto , qui a pris depuis 153 le titre de Porla- 
mento. La £ibl,oteca ltaliana de Milan elle-mme, quoi- 
exclusivement littéraire, a étëabsorbée par le Giorole dell' 
lstituto Lombardo. L'h!st,ire des beaux-arts a éte cultivée 
avec un remarquable succès par Lanzi, que nous avons déjà 
eu occasion de nommer, par Cigognara, et dans ces derniers 
temps par Giuseppe Bossi, Fumigalli, Giulio Ferrario, 
Inghirami, Rosini et Enuio Quirinio Yiseonti. Malgré tout 
ce qtte nous venons de dire, on peut considérer comme 
dvplorable t'état actuel de la litterature en géneral, et 
plus particulièrement celui des belles-lettres en Italie. Il 
manque d'esprits créateurs et novateurs capables de de- 
venir les chefs et les guides d'un roouvement complet de 
rénovation et de régénération ; il y a absence absolue de 
direction commune, anarchie et confusion dans les esprits ; 
les Italiens les plus considerés eux-mêmes ont per.tu tout 
espoir dans l'avenir, du moins dans un avenir prochain. 
Ajoutez à cela le contre-coup d'une époque de revolution, 
les amères déceptions qui s'en sont suivies, l'apatliie mo- 
rale qui d'ordinaire succëde aux grandes crises politiques, 
pèse alors comme du plomb sur toutes les intelligences, et 
met obstacle à tout libre essor du génie. 
En fait d'ouvrages relatifs à l'histoire de la litterature 
italienne, nous mentionnerons surtout : C r e s c i m b e n i, 
Storia della Folgar Poesia ( Borne, 1698 ); Quadrio, Sto- 
via e regioe d'ogni Poesia ( Bologne, 1739); 5loEuchelli, 
Gli Scrittori d'ltalia (Brescia, 1753); Tiraboschi, 
8toria della Letteratura ltalana (14 vol., Modëne, 1772- 
1782), ouvrage souvent réimprimé, et dans lequel out lar- 
gement puisé les écrivains qui depuis lors se sont occupés 
de l'histoire littéraire de Fltalie ; Ugoni, Della Letteratura 
ltaliana (Brescia, 1822); Maffeï, Storia della Lellera- 
tura ltaliann (Milan, 13); Cimorelli, Origine e Pro- 
9ressi delle Belle Leltere Italiane (Milan, lts5 ) ; Giudici, 
Compendio della Storia della Letleratura l talania (Fin- 
tenue, lSt ). Consultez aussi Ginguené, Histoire littoeraire 
d'Italie (9 vol., Paris, 1811), continuée par Salfi (4 vol., 
1823-135). 
ITAL1EXi Musique). A la diffërence de l'éiAment 
profond et harmonique de la musique allemande et de l'é- 
lément déclamatoire de la musique française, la musique 



ITALIENNE bl t 
italienne moderne a pour base essentielle l'harmonie p'.e, i posait que d'une série de quartes aseendantes et desoen- 
comme l'indique la prééminence d'une belle mélodiê sen- [ dantes avec ou sans redoublement d'octaves; et en fut 
I précisément en Italiê qu'on y fit le moins attentiou. Après 
mème que d'importants perfectiounements eussent été es- 
l'harmonie, et lui reste, au contraire, toutà fait subordonnée; sayés dans la musique mensurable et dans l'harmonie par 

soelle, dont un rbythme vif, et cependant simple et clair, 
réhausse le cfiarme, mais qui ne se confond nullement avec 

d'où il résulte qu'ou la traite assez souvent d'une manière 
fort indifférente et que mème on la nëglige quelquefoi. com- 
plétement. De mème, dans la nouvelle musique italienne, 
l'accord caractéristique de la mélodie avec les situations ou 
avec les dispositions de l'esprit reste constamment surbor- 
donné et mme est parfois cemplétement sacrifié à l'effet 
harmonique. Cette musique moderne italienne est arrivée 
à l'apogée de sa perfection avec lossin i; et elle conserve 
encore son empreinte originelle dans Bel lini et Do- 
nizetti, bien que déjà ils l'aient beaucoup modifiée. Il en 
est tout autrement de l'ancienne musique italienne, qui, dé- 
veloppée et perfectionnée sans doute en Italie, od P a I es- 
triua est le plus illustre de ses représentants, n'en fut pas 
moins à l'origine transplantée des Pays-Bas dans ce pays 
par des maltres flamands, lesquels furent aussi ceux qui l'y 
cultivèrent avec le plus de soin. Sa base fondamentale, c'est 
l'harmonie, ou pour parler plus exactement, l'emploi des 
masses vocales. Mais ce qu'on entend aujourd'hui par mé- 
lodie, c'est-h-dire la prééminence d'une pensée caractëris- 
tique, une suite de tons d'un caractère décidëment rhyth- 
tique et mélodieux, pouvant Atre relevés, soutenus et plus 
clairement exprimés par l'harmonie, et cependant com- 
préltensibles déja en eux-mmes, avec un sens précis et 
determiné, ne s'y rencontre qu'à un degré presque imper- 
ceptible ou méme ne s'y trouve pas du trait. En effet, quant 
à ce canlofermo dont on faisait la base d'une foule de mo- 
tifs, en employant souvent des mélodies populaires déj 
bien connues, étant admis mème qu'il restt reconnaissable 
dans les tons démesurément longs et dans la monotonie 
rhythmique, il était tellement dominé par les voix de con- 
tre-point qu'il ne pouvait jamais avoir d'effet caractéristique 
sur le morceau ; sans importance réelle pour l'auditeur, ce 
a'etait guère pour le compositeur qu'une manière de préluder. 
Il faut en outre observer que l'barmonie, dans l'acception 
rigoureuse de ce mot, c'st-à dire une simple suite d'ac- 
cords, ïtait bien plut0t le produit de la conduite des voix, 
que basée sur les rapports d'affinite des accords entre eux; 
mais que c'est aussi là précisément, et dans le maintien 
des tons dits ecclésiastiques ou grecs, qu'il faut chercher 
la base de ces modulatious toutes particulières qui nous 
parlent dans ces avciens chants d'une manière si étrange, et 
cependant si merveilleusement saisissante. 
Ce fait si remarquable, que ces deux extrèmes apparents 
aient pu s rencontrer dans la musique d'un seul et méme 
peuple, explique toute l'histoire du développement de la 
musique italienne. De mme que tout art nouveau, la mu- 
sique trouva dans l'Église chrétienne le point d'appui qui 
devait servir de base à son développement. Il est impos- 
sible de déterminer la proportion dans laquelle la musique 
grecque ou hébraïque se transforma en musique cfirétienne. 
On attribue, il est vrai, à l'évque de Milan saint Am- 
hroise lintroduction en Occident du chant en usage en 
Orient pour les bymnes et les psaumes; et il est prouvé 
aussi que plus tard on s'efforça pendant longtemps eucore 
d'ériger un système de musique d'après les principes des 
Gl'ecs. Mais il n'est pas moins certain non plus que la mu. 
ique nouvelle ne se perfectionna qu'autant qu'elle s'affran- 
chit des liens dtl système qui lui avait été imposé contrai- 
rement ì sa nature. Sa premiëre pfiase de développement 
date du pontificat de Grégoire I « dit le Grand, mort en 60. 
11 augmenta le système des tons, améliora la notation et 
introduisit une métbode de chant lente et solennelle, pour 
établir une différence entre le sacré et le profane. Mais de 
longtemps encore il ne fut pas question d'harmonie. Ce fitt 
seulement au dixième siècle que le bénédictin flamand 
Hnebald tenta le premier de faire résonner plusieurs tons 
à la fois. Mais ce qu'on appelle son organon ne ze com- 
OICT. fie L& C.ON'F-.JtSo 

Guido d'Arezzo, vers l'an 1020 ou 1040, pal" Franco de 
Cologue, au commencement du treizième siècle, et plus tard 
par Marchettus de Padoue, Jean de Muris à Paris, au 
quatorzième siècle, il fallut que des étrangers, des Flamands 
notamment, les tissent connaitre ì l'Italie. Mais avec Pa- 
lestrina (1560-1600) commence l'époque brillante du sa- 
vaut contre-point de la direction purement religieuse de la 
musique. Cependant le maitre de Palestrina lui-mme, 
Goudimel, était encore un Flamand. On fonda alors des 
écoles préparatoires, et l'ltalie, lome et Venise surtout 
payèrent avec usure à l'étranger ce qu'elles en avaient reçu. 
Les noms les plus illustres de cette époque sont, outre 
Palestrina, Feli« Anerio, Andrea et Giovanui Gabrieli, 
L. Marezio, Ianini, Za r I i n o, l'Allemand, L. Hassler et le 
Flamand Orlando Lasso. 
Mais dès cette époque mème, c'est-à-dire à la fin du 
seizième et au commencement du dix-septiëme siècle, se 
préparait un essor q ui, favorisWpar le concours de beaucoup 
de circonstances heureuses, donna à la musique une direc- 
tion qui la modifia esseutiellement. C'est alors en effet qu'on 
tenta les premiers essais de ste'le dramatique. Que si les 
premières tentatives d'un Orazio Voechi  Modène, de Giulio 
Caccini et d'Emilio del C a v a I i e r e  lïome, de Peri/ FIo- 
rence, etc., ne sauraient prétendre à la qualification d'o- 
pCas, il y avait toujours là le début d'une direction nouvelle, 
dont la condition premiëre, à savoir l'originalilé de la 
mélodie, se trouva enfin réalisée. Aprës les heureux essais 
de Vincenzo Galilei, on cessa de mépriser plus longtemps 
le chant solo avec accompagnement d'un instrument, comme 
u'étant bon que pour le peuple. Les fetes ecclésiastiques, 
les mystëres, les oratorios, les concerts religieux, de mème 
que l'exécution instrumentale successivement perfectionnee 
par Scarlatti, Tartini, ardini et Pugnani, contnbuèront 
à la propagation de la nouvelle manière, qui, en raison 
méme du caractère des populations meridionales, devait 
exciter de ives sympathies. Le chant artistique se forma 
en mme temps que l'exécution in,trumentale et que la 
musique de chambre et de concert, résultat auquel ne 
centribua pas peu l'école de chant fondée h Bologne par 
Bernaccbi. Veuise et ffaples devinrent les pépinières de 
la direction nouvelle que favorisèrent successivement 
A. Scarlatti,Leonardo Leo,Durante, Jomelli,Per- 
golese, Saccb ini, Picci ni, Carissimi, Cimarosa, 
P a fs i e I I o, Z i n ga r e I I i, etc., etc. Ainsi grandit le nouvel 
enfant de l'ltalie, i'opéra, objet des soins et des prdi- 
lections des artistes tant nationaux qu'étrangers. L'intro- 
duction des airs de bravoure eut surtout pour résultat 
d'imposer des entraves à la vérité dramatique et d'éléver le 
chanteur au-dessus du personnage représen. Le chanteur 
dès lors fut l'unique objet de la préoccupation des audi- 
teurs, qui ne virent plus dans l'oeuvre dramatique qu'un 
remplissage de convention pendant lequel ils causaient li- 
brement entre eux lorsque le chanteur n'occupait pas la 
scène avec le morceau à effet. Efin vint lossini, génie 
bots ligne, débordant de mïlodie, connaissant bien on 
(.poque, familier avec les perfectionnements opCés ì l'é- 
tranger dans la musique iustrumentale, qui sut admira- 
hlement amalgamer les trésors de son propre fonds avec 
ceux du passé; et ses opéras obtinrent un succès européen, 
universel, comme pas un compositeur n'en avait obtenu 
avant lui, non plu qu'en aussi peu de temps. Dans la 
foule de ses successeurs, on ne peut citer que Bellini et 
D onizett i. Le premier, nohamment, fit preuve d'une vi- 
gueur toute particulière, et mourut ì la fleur de PAge, lais- 
sant au second la suprématie incontestée. Il nous faut encme 
mentionner ici Idusienrs luaitres qui, italiens «le natssanee 
mais fixés à l'étranger, sui-it'ent dan leur musique un 



$22 
direction n'ayant que de bien faibles rapports avec celle de 
leur patrie; ce sont Cherubini et Spontini, qui se 
rattachèrent à l'Cole française, S a I i e r i et B if b i n i, qui 
inclinèrent davantage vers l'ecole aliemande. Peu de mots 
nous suffwont pour ce qu'il y a à dire de l'Italie en lait de 
musique, quand on fait abstraction de l'opCu. Pour la mu- 
sique religieuse, les cbants qu'on entend lndant la semaine 
sainte dans la cbapelle du pape sont les seu|s débris tra- 
ditionnels de l'antique sldendeur du genre; et quant à la 
musique instrumentale, ce pays est resté fort en arrière 
de l'Allemagne et de la France, aussi bien pour la compo- 
sition que pour l'exécution. Il a produit cependant quel- 
ques-uns des violonistes les plus éminents, par exemple, 
Tartini, Covelli, Paganini; de même qu'A m a t i et S t r a- 
d i v a r i u s de Crémone portèrent la fabrication du violon 
un degré de perfection que personne n'a atteint depuis. 
ITALIENNE (Architecture). Quand les barbares en- 
vahirent l'ltalie, ils trouvèrent ce pays couvert de monu- 
ments magnifiques, consacrés aux usages les plus divers, et 
en mme temps de ruines. CheCiens déjà ou convertis 
bientdt après au christianisme, et inspirés par le g¢nie de 
la civilisation, ils prirent soin de conserver pour les be- 
soins de leur culte les basiliques, dont la îorme leur 
servir ensuite de modèle quand ils construisirent de nou- 
velles églises. II est assez vraisemblable que le roi Théo- 
doric fit élever un grand nombre d'édifices et d'un genre tout 
particulier; mais en fait de monuments anthentiques on n'a 
plus de lui que son tombeau, aujourd'hui l'église de Sauts- 
Maria della lotoda à Ravenne, très-certainement le plus 
important de tous, la basili,lue de San-Apoll$are, le bap- 
tistere de Santa-Maria à Cosmedin, et quelques débris 
dnne résidence royale, le tout à Ravenne. Certains détails 
de ces divers édifices, qui appartiennent encore au style de 
la décadence de l'empire romain, sont aussi bien et aussi 
vigoureusement exécutés que cela était possible à une pa- 
reille époque. Plus tard, d'ailleurs, les historiens de l'art 
italien comprirent à tort, sous la dénomination de style 
gothique, tout ce qui ne répondait point à leurs id¢es sur 
le style classique, et par suite tous les monuments du moyen 
ge jusqu'au quinzième siècle. Les constructions de l'exar- 
chat byzantin de Ravenne, par exemple la coupole octogone 
de t'église San-,Stale, forment un ordre particulier, bien que 
par leur style et leurs dispositions elles s'accordeur dans 
leurs parties les plus essentielles avec les constructions de 
l'empire romain d'Orient. Les Lombards succédèrent aux 
Goths dans la domination de la haute ltalie. Le petit nombre 
de leurs monuments, par exemple ce qui subsiste encore 
aujourd'hui des fondations de l'aqueduc de Spoleto, sont 
remarquables par le fini du travail, par la solidité de la 
tisse et par l'absence absolue de toute espèce d'ornement. 
Un.genre qui à cette époque demeura tout particulièrement 
stationnaire à Rome, ce fut celui des basiliques, oi l'on 
n'aperçoit nuLLe part d'innovation essentielle. L'époque du 
règne de Charlemagne, aprës la destruction du royaume 
Iombard, aurait été favorable à l'architecture, sans l'ap- 
pauvrissement genéral qui fut bientOt après le résultat des 
nouvelles irruptions de barbares. Ce lut seulement au 
dixième siècle que commença dans les diverses contrées de 
l'Italie une nouvelle ère pour l'architecture. Un esprit par- 
ticulier/ chaque province pénétra dans les antiques formes 
traditionnelles provenant soit de Rome, soit de Byzance, en 
les modifiant et en leur communiquant comme une vie 
nouvelle. Ce fut la Toscane qui en fait demeura le plus 
fidèle à l'ancienne basilique, tout en la traitant avec une 
élégance nouvelle et originale et en lui donnant un extérieur 
plus omê, alors que dans les vieilles basiliques chrétiennes 
des murailles latérales nues et grossières croient en desac/- 
cord avec la riche mosaique de la façade. Si à Florence on 
s'efforçait de prêter aux façades quelque chose de gai en y 
accumulant les détails d'ornemeutation, à Lucques et à Pise 
on alla plus loin encore ; et on leur donna, ainsi qu'anx ro- 
tonde% une apparence plus brillante en , ajoutant plusieurs 

ITALIENNE 
rangées de colonnes snperposées, avec des cintres. San- 
Frediano à Lucques, mais surtout la cathédrale, le baptis- 
tèe, la tour penchée, et diverses églises à Pise, tous edi- 
fices appartenant aux onzième et douzièm siècles, et offrant 
à l'intérieur de riches colonnades, représentent ce système 
dans toute sa richesse; cependant on remarque aíjà dans 
la cathédrale l'introduction de la coupole, qui joue un si 
grand r61e dans t'architecture venitienne. Byzance, qui de. 
l'ancienne architecture romaine s'était moins approprié 1o 
style et le système de colonne des Greca que les voOtes 
et les coupoles étrusques, exerça une influence directe sur 
Venise, comme precédemment sur Raveime. (Yest ainsi que 
l'église de Saint-Marc, construite de 976 à 1071, Iorme une 
croix grecque surmontée de cinq grandes coupoles. Les has- 
cotés sont, comme à Sainte-Sophie de Constantinople, sé- 
parés par des arcades des vaisseaux principaux qui se croi- 
sent; et à la manière d'Orient un porche surmonté de 
petites coupoles se prolonge sur les trois ctés. Quand on 
eut arraché la Sicile aux Arabes, on y conserva bien la ba- 
silique, mais avec le arcs à pointe desArabes, et queiquelois 
surmonlée de trot» coupoles, avec la plus riche ornemen- 
ration en mosaïque, comme la chapelle de Roger  Palerme 
et la catbédrale de Montreale en sont des exemples. L'ar- 
chitecture lori,barde en diffère en ce qu'elle offre l'emploi 
de vo0tes et de piliers élancés, en usage peut-être plutOt I 
que partout ailleurs, sauf l'Allemagne. Mais on }' retrouv 
toujours le plan de la basilique. Toutefois la façade se com- 
pose d'une muraille de parade ornee d'un portail et de ga- 
leries. 
Pendant ce temps-l, le style ogival s'était successive- 
ment developp au nord de l'Europe, et etait arrivé à y 
dominer completement dans la première moitié du treizième 
siècle. Ce mode de construction offrait des avantages si cri- 
dents et repoldait si bien sous tant de rapports aux besoins 
du ctdte, qu'on i'a'ppliqua aussi en Italie, quoiqu'il }' ait 
l,lUS influé sur t'extérieur que sur t'ensemble des édifices, 
comme le prouvent le clocher de Giotto à Florence, les 
églises d'Asisi et d'Orvieto et la Lo99ia de FIorence. Mais la 
perscvcrance des Italiens -A conserver les formes tradilion- 
nelles du style classique et romain eut ce résultat que dans 
les phrs magnifiques constructions de ce genre, par exemple 
tes cathedrales de llilan { 1386) et de Florence (t300), la 
ligne I,orizontaledomina toujours dans l'entablement, malgre 
les details gothiques qu'on y intercala; ce qui prouve par- 
faitement que ce st)le demeura toujours pour l'Italien quel- 
que chose d'emprunté à l'etranger. L'architecture itafienue 
brilla de son plus vif eclat au quinzième siècle, moment où 
le ré'eil de la littcratue classique coïncida aec l'emploi 
nouveau des anciennes formes de construction et oi com- 
mença ce qu'on appelle le cin9uecezto , l'une des plus 
grandes époques de l'histoire des arts. La transition de Far- 
bilraire/ la rèe, la réunion de la fantaisie du moyen ge 
avec la gravite de t'antique, caractérisa cette periode. 
Tandis que Fra Giocondo et Leo Battista A|berti s'ef- 
forçaient de trouver et de fixer les anciennes formes, Fi- 
lippo Brunelleschi (1375-1444) arrivait à l'application 
la plus large des nouveaux principes. Dans sa gigantesque 
coupole de la cathédrale de Florence, il se tenait encore . 
l'arc à pointe; mais il fut plus fibre et plus pur dans le plan 
des deux églises de San-Lorenzo et de Santo-Spirito. Son 
plus bel ouvrage, toutefois, est le palais Pitti à FIorence, com- 
posé de simples murailles rustiques avec des fenètxes à moitié 
rondes, mais d'une grande heauté de proportions et d 
puissantes dimensions. L'ensemble a le caractëre grave d'un 
chlteau, caractère qu'ont aussi conservé le palais cons- 
truits par les élëves de Brunelleschi ; avec cette différence, 
cependant, que dans ces palais les détails, notamment les fe- 
nètres et les corniches, paraissent encore plus délicatement 
ornés. Leo Battista Alberti, le premier théoricien qui sivit 
cette direclion, est l'auteur de deux palais ì Florence, «le 
la rotonde dit chœur de l'eise de Santa-Annunciata de la 
même ville, des é_ises de San-Andrea à lIantou_e» et d 



ITALIENIE 
San-Francesco à Bimini; et cette dernière, dont la la.cade 
ressemble/un arc de triomphe, passe pour son chef-d'oeuvre. 
A Venise, cette direction nouvelle de l'architecture fut re- 
présentée par la famille Lombadi, qfi y construisit un 
grand nombre de palais avec d'él éants ornements en mo- 
sa/que et de riches loççie. Leurs églises ont moins de 
mérite. D'ailleurs, sous le rapport de la gracieuse trans- 
formation de l'antique, cette përiode répondit an style plus 
coquet de la renaissance française. 
Avec le seizième siecle s'introduisit une sévérité plus 
grande relativement aux formes antiques de l'architecture. 
Le st)-le devint ainsi plus pur, mais plus. sec, là ou les rè- 
gles furent péniblement déduites des anciens monuments et 
des livres de Vitruve, plus animé en revanche là ou l'on 
mit la forme traditionnelle au service de l'esprit nouveau 
qui visait à produire avec des masses de grands effets pitto- 
resques et ne reculait pas devant l'accouplement des choses 
les plus disparates. A cet égard la transition fut opérée par 
l'illustre Braman'e (1444-151,), lui dont les monuments, 
pour la plupart situés dans la haute ltalie, ont encore toute 
la grâce du styl cinquecento. Plus tard,  lome, il s'ap- 
proprio un style plus sévère, plus sec, par exemple dans 
le palais de la Cancellaria de cette ville. Ce fut sur ses 
plans, abandonn(.,s plus tard, il est vrai, qu'on commença la 
construction de la nouvelle église Saint-Pierre à Borne. P e- 
ruzzi (1481-1536) est l'architecte qssi  rapprocha le 
plus de Bramante; Rome lui est redevable de quelques-uns 
de ses plus beaux palais, entre autres du palais Massimi et de 
la Farnesina. Son élève, Seh. Serlio, qui lsabita longtemps 
la France, où il prit part aux travaux du Louvre et du 
teau de Fontaineblean, est l'auteur d'un excellent blanuel 
d'Architecture. Le neveu de Bramante, Rafael Sanzio, fut 
aussi un architecte de premier ordre. Les ps-incipaux édi- 
flces dont on hii est redevable sont le palais Cafarelli à Rome 
et le charmant petit palais Pandolfini ì Fiorence. Comme 
l'un des architectes empioyés à la construction de l'élise 
Saint-Pierre de Rome, il a aussi laissé un plan fort ingé- 
nieux, mais qui ne fut point exécuté, d'après lequel un 
vaisseau colossal devait se rattacher à la coupole de Bru- 
mante. Son élève en peinture Jules Romain (1492-146) 
suivit son style dans l'architecture. Les villas ladama et 
Lante à Borne sont de lui. Plus tard toute son activité eut 
pour thétre la ville de Mantoue, ou le palais Te, d'une 
composition un peu sèche, et la cathédrale sont de lui. An- 
tonio Sangallo de FIorence (mort en 1546) construisit à 
l'ome ce grandiose palais Farnèse, ou la dignité et la ma- 
jesté du style des palais de Florence s'unit admirablement ì 
la richesse de ceux de Borne. iicbel-Ange luonarotti 
(lf74-tStt) exerça sur l'architecture italienne une grande 
inlluence, sans qu'on puisse dire précisément qu'elle ait été 
favorable; la célèbre corniche du palais Famèse est de lui. 
Les maltres que nous avons nommés jusqu'a présent conciliè- 
rent dans l'ensemble de leurs œuvres les exigences les plqs 
essentielles de l'art antique en même temps qu'ils y firent 
prévaloir le sentiment pittoresque, de leur époque par la 
narre delicatesse des détails. Michel-Ange, au contraire, basa 
sa composition sur l'effet pittoresque, et, malgré tout le 
gs-andiose de l'ensemble, introduisit beaucoup de caprices 
dans les détails. La sacristie de San-Lorenzo, la reconstruc- 
tion du Capitote, la cour du couvent de Santa-Maria deii 
Angeli, surtout Pachèvement des principales parties de l'é- 
glise de Saint-Pierre de Rome, notamment de la coupole, à 
partir de 15/t6, sont regardes comme les plus importantes 
de ses œUVres originales. ,lais la Porta Pin, qui date de 
l'année mme de sa mort, temoigne déjà d'une profonde 
corruption de son style. Parmi ses contemporains qui 
réagirent avec succès contre l'arbitraire du grand maltre, 
il tant surtout citer Giacomo Barozzio, dit Vignole 
(1507-1573 ), qui, par son blanuel d'Architecture, préserva 
d'une grossière corruption les formes de detail de l'art pen- 
dant deux siècles et desni tout an moins. A l'école romaine 
appar tient également Galeazzo A I e s s i ( ! 500-1572 ), qui 

plus tard consacra toute son activité à la ville de Gnes, et 
y construisit un grand nombre de palais, de wllas et d'é- 
glises. Andrea Palladio de Vicence (1518-1580) donna 
une physionomie encore plus remarquable à sa ville natale 
et à Venise par la foule de palais et d'églises qu'il y cons- 
truisit. S'il ne fut pas l'artiste le plus grand en son genre, il 
fut du moins le plus habile. II se tint loin du caprice et de 
la hardiesse de Michel-Ange; et s'il n'est nulle partgran- 
diose, en revanche il n:est jamais bizarre, et reste toujours 
l'observateur scrupuleux des règles dans l'ensemble et dans 
les détaiis. Comme son successeur Scamozzi, il s'est rendu 
célèbre également par un Manuel d'Architecture. A la mme 
époque florissait le dernier des rands architectes l]orentins, 
Bartolommeo Ammanati ( 1510-1592, qui termina le palais 
Pitti en coiossales dispositions rustiques et exécuta le Pont 
de la Trinité, composé de trois belles arches, projetCs avec 
une légèrete extrême. 
A partir du dix-septième siècle, le caprice se fit de plus 
en plus sentir dans la composition et dans la forme; et en 
visant à l'effet on perdit tellement de vue la si,'mification de 
la forme, qu'on se laissa aller aux accouplements les plus 
monstrueux. L'ornement, pauvre interieurement eu depit 
de la prodigalité dcployée dans l'ensemble et dans la matière, 
et un détail des masses poussé à l'inlini, rendirent presque 
mconnaissables les formes fondamentales. Le nombre des 
palais et des églises datant de cette époque est immense, et 
il en est beaucoup oh l'on ne saurait meconnaltre une con- 
ception grandiose. Parmi les meilleurs architectes de ce 
temps-là, il faut citer Domenico Fo ntana (1543.1603), 
Carlo Maderno (1556-1629), qui termina l'ëise Saint- 
Pierre et y ajouta une façade triviale, et Lorenzo Bernini 
(;1598-1682 ). Francesco B o r r o m i n i ( 1599-16{37 ), daus 
les édifices duquel toutes les lignes paraissent se terminer 
en courbes et en volutes, représente le mauvais goOt par- 
venu à son point suprême. Depuis le commencement du 
dix-huitième slëcle l'architecture se mourra, il est vrai, 
plus modêrée dans la forme, mais aussi encore plus épuisee, 
s'il est possible, quant à l'invention. Les jésuites et les 
Français devinrent les régulateurs suprmes de l'art, et 
quoique l'on eut sous les )eux de si admirables modèles, on 
continua en Italie, jusqu' la fin du dix-huitième siècle, à 
construire d'une façon d'autour plus deplorahle qu'elle fut 
imitée dans les pa)'s étrangers. Ce fut seulement lorsque des 
étrangers curent rappelé à l'observation des règles» po'es 
par les anciens, lorsque Piranesi et d'autres curent mesuré 
et examiné d'une manière plus exacte les monuments exis- 
tants, lursque Milizia eut attaqué sans rel'Ache la foi aveugle 
en l'autorité, qu'on en revint au principes ; retour d'ou date 
la création d'une meilleure école, à laquelle appartiennent le 
marquis Cagnola, Simonetti, Campesi et Stern, architectes ì 
qui on est redevable de la construction des édifices les plus 
importants dont les iiles de Mdan, de Rome et de aples 
se soient enricldes dans ces derniers temps. 
• ITALIENNE (Gravure). Les Italiens sont aussi arrivés 
dans la 9rayure ì un haut degré de perfection. Tommaso 
Finiguerra, le premier maitre qui se soit fait un nom 
dans cet art, eut pour élève, vers le milieu du quinzième 
siècle, Baecio Bandini. Il eut pour successeur ,lontegua; 
mais ce lut Marc-Antoine I'a i mo ndi qui, vers l'an 1500, 
introduisit plus de liberté dans ses rav«res ; et ses travaux 
d'apr.s laphael conservent toujours anjourd hui u[ grande 
valeqr,- cause de la correction du dessin, Bonasone, Marco 
dt Bavenna, les G h i s i, travaillçrent de la mme manière que 
lui. Dans un autre genre, Agostino Carracci, Parmegianno, 
Carlo Marotti et Pietro TesL produisirent d'excellentes 
cltnses au pointillé. Stefano deila Bclla se distinguo par des 
plattches élégantes et spitituelles. Parmi le artistes mo- 
dernes qui ont introduit une manière inconmte avant eux et 
extt-êmement soignée, il laut citer B a r t o I o z z i, Cune,,o, 
Volpato et Bettelini, mais au-dessus de tous le Florentin 
Rafael M orgh en, qui porta lalgravure àun degré de per 
rection qu'on ne so:tp.onnait pas avant lui. Le besoin.qu'é. 



524 
prouvèrent les graveurs de se fixer aux grands modèles des 
anciens maitres «forma à cet art un caractère indépen- 
dant. ffaguère servante soumise de la peinture, la gravure 
s'Ceva aussi  llne dignité qui lui est propre ; et les œuvres 
de Morghen ainsi que celles deLonghi, peut-être lesdeux plus 
remarquables graveurs «les temps modernes, celles de Tos- 
chi, d'An d e r I o n i, de Folo, de Palmerini, les esquisses de 
Lasinio, les planches terminées de Garavagl ia, de Lapi, 
de Schiavonetta prouvent une activité à laquelle le goret des 
riches voyageurs et la foule d'ouvra-es de luxe publiés sur 
d'imporlants édilices assu renl fou jours de nouveau x éléments, 
en mthne temps qu'ils poussent dans la voie des perfection- 
nements. Consultez Lanzi, Histoire doe la Gravure en 
ltalie; et Young Ottley, ltalian School of Design ( Lori- 
rires, ! 823 ; avec 84 planches). 
ITALIE.XE (Peinture). La peinture italienne, dans 
ses origines, remonte, d'une part h l'antique tradition ro- 
maine, et de l'autre à l'influence byzantine (vo!/e-. ÉcoLE 
B'ZA.Xl,X). Une brillante imagination, line vie douce et facile, 
le senhment inné du beau, une pic.tWenthousiaste, la con- 
templation continuelle d'une belle nature et des chefs- 
d'oeuvre de l'art antique rendirent la peinture plus floris- 
sante et plus féconde en Italie que dans tout autre pays; et 
les Italiens sont restés dans le st.le idéal de la peiuture aussi 
supérieurs à tous les autres que les Grees dans la statuaire. 
D'ordinaire on fait dater du douzième siècle les débuts de 
la peinture en Italie; mais on y peignit bien plus t6 encore 
à f r e sq u e sur des tablettes, sur parchemin et sur elnail. 
L'extase spirituelle qui sert de base à ces tableaux est sou- 
vent encore le résultat de la s)mbolique de l'antiquité; les 
fleuves y sont réprésentés par des génies aquatiques, les 
montagnes par des divinités de la ontagne, la nuit par 
une femme oilée. On en possède encore un grand nombre, 
provenant pour la plupart des catacombes. Sous le ponti- 
ficat de Léon I er ou le Grand, on exécuta e -4! dans la 
basilique de Saint-Paul, sur la route d'Ostie, detruite par 
un incendie en !s_, un rand tableau en mosaique; et les 
portraits de quarante-deux évëques, qu'on voyait aussi dans 
cette église, dataient, à ce qu'on prítend, de la mme époque. 
Les mosaiques et les tableaux à l'encaustique etaient alors 
chose ordinaire; plus tard on se mit à peindre ave une 
espëce de couleur en dêtrempe, qu'on appela a ternpera. 
Vers la fin du sixième siècle, on moutrait beaucoup de ta- 
bleaux qu'on prétendait avoir étë peints, non par des hommes, 
mais par des auges et des bienheureux. A cette classe ap- 
partient un des plus célèhres portraits du Sauveur, peint 
sur bois, appelé Acherotita, et qu'on voit  lome. On a 
beaucoup discuté sur la question de savoir si saint Luc 
l'Évangéliste, pris plus tard pour patron par toutes les 
corporations de peintres, était ou non peintre lui-mëme; 
quoi qu'il en soit, on lui attribue à lome plusieurs 5la- 
doues. Au huitiène siècle la peinture en mosaïque sur fund 
d'or et la peinture sur émail étaient dt.ja fort en usage en ftalie 
et pratiqués par des artistes tant indigènes que byzantins. 
L'un des plus anciens parmi ces vénérables monuments 
de l'art est le Christ en croi. qu'on oit dans Iélise de la 
Trinité/ Florence, laquelle le possédait djà en l'an 1003. 
'ers l'an 1200, un artiste grec, Thíophane, fondait une école 
de peinture à Venise. 
Le véritable style italien fiera it d'abord ì FIorence, et sera 
considéré ici dans ses trois principales périodes, à savoir de- 
puis Cimabue jusqu'à laphael, depuis laphael jusqu'aux 
Carrache; et depuis les Carrache jusqu'à nos jours. 
Dans la première pdriode, la peinture fut complétement 
la servante de l'Ëise. Avec des moyens d'exécution encore 
peu developpís, tous ses efforts se concentrèrent sur une 
belleet riche symbolique, en mme temps que la pureté 
de penséedes artistes se reflétait dans la dignité et dans l'ex- 
pressicn pieuse des figures. Un style limit d'un c¢té par 
les exigences architectoiques et de l'antre par l'exiguité 
des moyens, borné en outre à un petit nombre de {ypes, 
r,e maintiat depui- Giotto, pendant près d'un siècle, jusqu'au 

ITALIENNE 
moment où, au quinzième siècle, commen.ca à se maniles[er, 
sous 51 a s a c ci o, la tendance à reproduire la nature dans 
toute sa vérité ; tendance qui aboutit avec Léonard de Yinci 
à une pénétration complète de la nature. Il en résnlta pour la 
peinture une richesse de moyens d'exposition, qui attei- 
gnit son apogée au commencement de la secondelriode, 
sous Iaphael et MicheI-Age, Titien et le Corrége. Par suite 
de l'opinion du siècle et de sa propre direction, la peinture 
se sépara bient¢t de l'Église. Abandonnée à un arbitraire 
complet, elle embrassa alors avec une liberté illimitée les 
sujets profanes comme les sujet religieux, mais perdit ainsi 
la profondeur et la noblesse de la conception, et dégénéra 
en exposition légère et susperficieile. Polidoro Caldara, 
dit le Caravage , chercha ensuite, par une imitation directe 
de la nature, à se créer un 3enre à lui ; mais il tomba ainsi 
dans la vulgarité, défaut dont l'école éclectique des Carrache, 
qui Olvre la troisiëmepriode, tut impuissante à préserer 
l'art, en dépit de toute sa science et de ses efforts pour 
atteindre partout la correction, parce qu'il n'existait phts 
de point de repère intérieur pour la pensée artistique. 
A partir de cette époque la peinture continua d'tre exercëe 
en Italie par des artistes habiles sans doute, mais avec un ar- 
bitraire maniéré et sans la chaleur et l'inspiration de la 
graade époque. Dans ces derniers temps, l'école de David 
avec ses exagérations a trouvé de nomhreu partisans parmi 
les peintres italiens demeurés rebelles à l'influence et à la 
direction de l'école de Dusseldorf, représentée par Overbeck 
Cornelius et Ioch. 
'oici les écoles et les artistes qui dans lapremièrelriode 
furent les représentatants de la direction que nous vendus 
de signaler dans l'art. En tte se place la Toscane 
Écoce rcon,x,e ), où l'on remarque l'existence de deux 
écoles principales : l'Cule de Florence et l'école de Sienne. 
Le cachet de la première, c'est un sentiment vit, s'attachant 
surtout aux manifestations extérieures de la vie et uni à une 
grande richesse d'idées; chez les peintres de l'école de Sienne, 
a contraire, il y a pour ainsi dire plus de recueille- 
ment joint à une douceur d'epression qui -a à l'me. 
L'école de Florence commence avec Cimabue ( 
1300), qui le premier observa avec pbs d'exactitude les 
rapports de forme, donna à ses figures plus de vie et d'expres- 
sion qu'il n'etait d'usage avant lui. Son élève Gloriole sur- 
passa pour la grâce; c'est lui'qui hasarda le premier des 
raccourcis et qui sut draper d'une manière naturelle et gra- 
cieuse. Cepeudant, son st).le est encore sec et roide. La vie du 
Sauveur et celle de sa mère, la sainte Vierge ?,Iarie, furent ex« 
'clusivement les sujets que traitèrent les chefs de cette école. A 
leurs œuvres se rattache, comme important monument de la 
peinture au quatorzime siècle, le C a m p o S an tode Pie, 
d'O r c a g n a, avec ses peintures murales représentant le ciel et 
l'enfer. L'Ëcole de Sienne, qu'on pourrait appeler l'Ëcole 
lifique, eut pour chef Simone de Matino, que Pétrarque 
célèbre dans ses sonnets comme le Dante dans ses terzine 
célèbre Giotto. La douceur et l'attachement aux sujets anti- 
ques sont ce qui caractérise les artistes de cette école pendant 
tout le quatorzième siècle; mais ces qualités ne laissent pas 
que de dégénérereu épuisement et en faiblesse. La plus ex- 
trême suavité, quelque chose de saint; on pourrait mëme dire 
de divin, domine dans les ouvrages du FIorentin Fiesole 
(1387-1455), qui subit l'influence de l'école de Sienne, et 
qu'on peut,considérer comme le représentant de la pein- 
ture spécialement"religieuse. Il persévéra avec un saint 
respect dans la méthode traditionnelle, et n'eut point de 
rivaux pour la représentation des saints ; mais il est dfec- 
tueux, faible et timide quand il s'agit de représenter des 
hommes ou bien des passions terrestres. A Bolo-,ne, Franco 
Boloese, dont parle le Dartre, forme le point de transition 
• de l'école byzantine à une exposition conforme à la nature. 
Il en est de mème, à Padoue, des toilesimportantes de d'A- 
vauzo. Ce fut peut-être 1'é c ni e vén i tien n e qui resta Io 
plus Iontenps fidèle aux procédés de l'art b)zantin, dont 
on  pe:-' sui're la trace jusqu'à la fin du quinzième siècle. 



ITALIEN N E 
D'ailleurs, la peinture du quinzième siècle semble avoir 
eu surtout pour mission d'opposer son réalisme à l'idéa- 
lisme qui avait animé les types du quatorzièine siècle 
réalisme qui seul fraya la voie  la beauté et  la liberté 
vëritable de la forme. Daus l'école florentiue, Masaccio s'ap- 
propria cette liberté dout Leonardo da Viuci atteignit l'a- 
pogée. Dansl'école d e M a n tou e, doutAndrea M a n t e g nu 
fut le fondateur, on adopta, au contraire, les formes de la 
nature même, et la sculpture antique servir  cet égard de 
modèle. D'autres écoles de peiuture eureut pour ceutres les 
villes de Vérone, de Bassano et de Brescia. Eu Lombardie on 
dislingua de bonne heure plusieurs écoles (voyez EcoL 
OBVES), notaininent une ancienne école milanaisa et 
une ancienne école de 51odèue. Appelé  Milau 0482), 
Léouard de Vinci y apporta une vie uouvelle et féconde. 
L'école de Venise, sur laquelle celle de Padoue exerça 
d'abord une grande influence, se proposa surtout l'élément 
de la couleur (Giorgioue, le Titien), tandis que l'école 
d'Ombrie torinait une espèce d'opposition à la direction et 
aux besoins du siècle. 
C'est dans la seconde période de l'histoire de la peiuture 
en Italie que vécurent les plus grauds maitres de tous les 
Sges; chefs des quatre priucipales coles, ils portèreut pres- 
qu'en Inêine teinps toutes les branches de l'art au poiut 
extrème de la perfectiou. On les désigne, eux et leurs élè- 
es, sous le nom de Cinquecentti, dérivé du chiffre.inêine 
de leur siëcle. Léouard de Vin c i avait fixé daus l'ecole 
floreutine aussi bien les règles relatives de la figure que 
coBes de la perspective et de la lumière. Le gënie de 51 i- 
c h e I-A n g e Buonarotti ( ! 4"/4- ! 564) embrassa ax ec autant 
de vigueur que de profoudeur la sculpture, l'architecture 
et la peinture. Sa chaleur de composition, sa couuaissauce 
profonde de l'anatomie, la hardiesse de ses contours et de 
ses raccourcis lui Ira)èrent une voie ueuve et iudépen- 
dante, lIais à tout prendre il u'en fut pas moins pour l'art 
uu modèle pernicieux : ses imitateurs devaient finir par 
tomber daus l'exagératiou et mépriser le style simple et 
pur. Ils négligèreut trop souveut le coloris pour des dispo- 
sitions extèrieures violentes. Eu 1580 Lodovico Ci g oit et 
Gregorio Pagani, en revenant à la natnre et à un go0t meil- 
leur dans l'emploi du clair-obscur, iutroduisireut un esprit 
nouveau dans la peiutore. A la tSte de I'é c o I e r o m a i n e 
se place le premier de toos les peinlres, Rafael S a n z i o 
d'Urbino (183-1520). Sa fraudeur consiste dans la plus 
sublime conception de la noblesse iutellectuelle de la na- 
ture humaine qu'artiste ait jamais eue, et dans un ta- 
lent d'expositiou qui jamais, daus l'emploi de ses gigan- 
tesques moyeus, ne viola les lois du style. Son géuie ue 
faillit jamais, et apparalt dans chacun de ses tableaux avec 
la mème beauté ctiaste et solennelle. Ses élèves furent des 
Inaitres habiles; mais ils ne tardèrent point b abandonuer 
les voies de leur illustre modèle ponr toinber dans la ma- 
niëre. Les deux excellents coloristes Giorgione 
1511) et le Titien (!77-157f) sont les chefs de l'école 
v é n i t i e tt n e. Les portraits du premier sont célèbres par 
leur chaleur et leur vérité. Le secoud fut grand dans tous 
les genres de l'art, iniinilable dans la manière de fondre 
les teiutes de la chair, admirable ¢oinine peintre d'histoire 
et de portraits, et en outre le premier grand maitre que le 
paysage ait compté. Le Titieu fut atssi le premier qui re- 
présenta la carnation du corps Immaiu avec une complète 
vérité. L'école venitienne arriva avec lui à son apogée, sur. 
Iout pour la noble conception de la vie humaine consi- 
dérée deson c6té job, eux et magniflue. Il nous moutre 
moins l'homme daus sou suprême développement religieux 
que dans son supréme développement temporel. Paul 
r o n è s e (1530-158S), artiste plein d'imagination et grand 
admirateur du luxe et de la Inagnificence, possédant au 
plus haut de,ré toutes les ressources techniques de son 
art et toute la richesse d'exposition de son école, repré- 
senta ses convives avec les costuines des époques les plus 
d»verse, et lut avec Cado Cagliari de ¥érone la gloire de 

l'école vénitienne, llais elle dégnéra à son tour, eucore 
bien que moins que toute autre elle ait sacrifiea la maniëre. 
Le seutiinental et acieux C o r r è g e fut le chef de l'école 
Iombarde p»stérieure. 
La troisième période de l'histoire de la peiuture italieune 
cominence  l'époq»e des trois C a r r a c !1 e, dont uu ma- 
gnilique succès couronna les efforts pour rétablir la pureté 
du st)le et redouner, par l'Cude combinée des anciens 
Inaitres de la uature et de la science, un nouvel eclat à l'art 
tombé partout eu décadence. A partir de ce moment les 
diffërences qui séparaient auparavaut les diverses écoles 
s'effacent toujours de plus en plus ; et on ne distingue plus 
que deux fraudes classes d'artistes : les successeurs des 
Carrache, autreinent appelés éclectiques, et ceux de ,Iichel- 
Auge Mort{bi, dit le Ca r a v a g e, autremeut dits les natu- 
ralstes. 
Cette division qu'il ne faudrait peut-être pas rigoureusement 
adopter daus les détails, était tout à fait couforine à la na- 
ture. Deux routes pouvaient conduire à sortir du desordre 
dans lequel les Inanieristes avaient jeté l'art; et ou les prit 
toules deux. En adoptant ce qu'il y avait de bon dans 
chaqueécole les éclectiques esperèrent créer nn style 
veau, fondé sur des règles précises; ils s'elTorcèreut ,le 
preudre leur dessin de l'antique, leur couleur du Titien, 
leur clair-obscur du Corrége, etc., et deproduire de la sorte 
des ouvrages semblables aux anciennes creations pour les- 
quelles la nature aait servi de règle et de base. Comme ce 
résultat ue fut que trè-imparlaiteineut obtenu, les natura- 
listes nous lutCessent davanlage, nalgré ce qu'il y a «le 
violent et de rude dans leur mauière, car on retrouve Inëme 
dal leurs plusgrandes extravagauces la.réalité comme base. 
Auuibale Caracci pent aussi ëtre regardé comme le créateur 
du paysage italien. Parmi les iuuombrables élèves des Ca r- 
ru c h e, les plus cclèbres s'ellbrcrent d'uuir la gr$ce 
Corrége à la fraudeur sévère des maiE'es roinains. Il faut 
citer, entre autres, G u id o R en i (1571-642), remarquable 
surtout par la beauté idéale de ses tètes, par l'expression 
aimable de ses tètes d'enfant et par l'extrème facilité avec 
laquelle son pinceau ponvait ëgaleinent traiter tous les su- 
jets ; Francesco Mbani (1578-1660), qui peudaut toute sa 
vie fut le rival de Guido; Doinenico Zainpieri (151-1641); 
Guer¢ino, dit le Guerchin (1590-1666). Eu ttte des nutura- 
limes qui n'imitèreut que la uature, sans choix et sans 
sentiineut épuré dela beauté, aec un pinceau hardi et sou- 
veut mème elfrouté, se place Michel Angelo C aravage 
(1579-1609). Son rival priucipal fut à oine le chevalier 
d'Alpino, chel des idéali.tes ou plutôt des maniéristes de 
culte école. Caravagio et ses successeurs prireut souveut 
pour Inodèle la nature la plus vulgaire, qu'ils iinilërent ser- 
vilement, en abaissant aiusi la dignité de l'art, bien qu'on 
ne puisse leur deuier ni la vigueur ui le fente. Au commen- 
cement du dix-septième siècle Peter Laar fit prévaloir 
à Rome le tableau de genre sous la forme à laquelle on a 
douné le uom de bambochades ; et beaucoup d'artiste, 
notamineut Michel Angelo C e r q u o z z i, se couformèreut 
à cette Inodeavec plus ou moius de gaieté etde gr'5ce, tandis 
quel'écleclique Audrea Sacobi désertait quelquefois le genre 
héroïque pour exploiter le genre à la mode, malgré l'iucom- 
patibilité d'humeur de la peinture historique et de la pein- 
ture de genre. Parmi ses élëves, il faut uominer Carto Ma. 
ratti ( 1625-1713), Antouio Canule tto, Carto C i g nu u i 
(16281719). Pompeo Battoui (1708-1787 briila surtout 
parmi les peintres romains, quoique sa gr.ce sans préten- 
tion n'ail pu soutenir la lutte coutre le nouvel et vigoureux 
éclectisme d'un Rafael M e n g s. Angelica K a u fro a n n më- 
rite d'être meutionne comme ayaut excellé à peindre a ec 
grìce. Les écoles napolilaiue et génoise ne furent que des 
écoles accessoires de la peiuture italieune. 
Le plus célèbre de tous les peintres italiens modernes fit 
Ca in u ccin i (mort en 181). Son stle est graud et véri- 
tablemeut historique; mais ses folles laisseut le spectateur 
froid. Laudi se dilingua à Rome comme portraitiste» bien 



qu'on trouve également son coloris froid. Parmi les jeunes 
artistes il faut citer Agricola. L'aiste le plus remarquable 
q««'ii y ait aujourd'hui à Fiorence est incontestablement 
Benvenuti, qui a récemment décoré le palais Pitti de pein- 
tures  kesque. Il a pour rival le peintre français Fabre, 
fié à Fiorence, et dont les paysages ne sont pas moins re- 
marquables que ses tableaux historiques. Le FIorentin Sab- 
batini jouit a Milan d'une grande réputation pour ses dcs- 
ins à fa plume. Hayez et Pe[agio Palage passent pour les 
plus célèbres peintres d'histoire qu'il y ait dans celle ville. 
Iligllara (mort en 1837) s'tait fait un nom comme peintre 
d'architectm.e. Ermini, à Florence, a exécut de jolies mi- 
niatures dans le genre de celles d'isabey. La plupart des 
artistes que nous venons de nomner en dernier lieu furent 
ou sont encore sous l'influence de l'Cnie fi.ançaise de David, 
comme le prouvent bien les belles [nais ïroides .fresques du 
lilanais Appiani. 
ITALIEn-NE (Plastique). A la suite de l'invasion des 
peuples germains, la plastique italienne se corrompit tou- 
jours de plus en plus, jusqu'/ ce qu'elle eut fini par perdre 
toute indepen«lance et ne plus recevoir d'inspirations que de 
lyzance. Beaucoup d'ouvrages importants lutent mme 
pediès directement de Byzance en ltalie, par eemple l'autel 
doré de San-Marco à Venise (976 J et les porles de bronze 
de l'église Saint, Paul à Borne, sur lesquelles les contours des 
figures sont exprimés au moyen de ils d'or et d'argent et 
remplis d'émail. Le nom de l'un des plu anciens artistes 
italien en ce genre, Bonnanus de Pise, se trouvait inscrit 
sur deux portes en bronze, d'un travail assez grossier d'ail- 
leurs, de l'an ils0 et l'an tt86, qu'on voit dans les cathé- 
drales de i',fontreale et de Pise. Une porte en bronze, de 1203, 
qui se trouve dans le baptisoEre de Saint-Jean de Latran 
Iome, est dejì d'un travail meilleur, et porte les noms de 
Hubert elde Petrus de Plaisance. Les sculptures sur pierre 
du onzième siëcle, nolamment dans les egli»es de la bau[e 
[talle, par exemple / Modène, / Verone  Ferrare, 
Patine et/ Lucques, s'Cèvent rarement au-dessus de la 
barbarie. Ce fut 5icola Pi s a n o qui le premier eleva tout 
à coup la plus[fque / un haut degre de perfectionnement, et 
qui l'affranchit de la sèche roidenï qu'elle avait eue jusque 
alors. La sculpture allemande brillait/ ce moment de son 
plus viféclat, et il est vraisemblable que le g.nie de icola 
Pisano fut excité par la vue des ouvrages du Nord, ou par 
les aoEistes du Nord qui venaient voyager en Italie, en mme 
temps que les modèles antiques qu'il avait sous la main lui 
étaient utiles pour se travaux. En effet, ses figures en por- 
tent plut6t le caractère que celui de l'expression particu- 
lièrement bienveillante qu'offrent toutes les sculptures al- 
lemandes à cette époque. Après Nicola de Pisano la pléuilude 
de formes et la mol/esso antiques se perdirent de nouveau ; 
et les artistes qui lui succédèrent se rapprochèrent du style 
plus sévre qui régnait de leur temps en Allemagne; par 
exemplela famille des Cosmates, arlistes qui habitai,.nt Borne 
( vers l'an 1300 ), et Giovanni Pisano, fils de Nicola, auteur 
«le la fontaine ornëe de bas-reliefs qui se trouve sur la 
place de la catllrale de Perugia, d'une belle Madone, ad- 
mirable de simplicité, qui se trouve dans la cathédrale de 
Pise, et de l'église San-Andrea à Pistoja. Beaucoup d'artistes 
allemands vivaient à cette époque en ltalie, et on en peut 
citer quelques-uns comme ayant travaillé au sculptures 
de la catl,édrale d'Orviéto. Pendant presque toute la durée 
du quato-zième siccle, ils n'eercèrent pas seulement une 
grande in[lnence sur la sculpture en Italie, mais encore ce 
rent eux qui y itroduisirent l'architecture gothique. G i o t to 
parait aui avoir influé comme peintre et comme archi- 
tecte sur la sCUllture; du moins les reliefs symboliques 
qu'Andrea Pisano (1280-t345) exécuta sur la tour du cio- 
cher de FIorence/ partir de 1334 doivent avoir été tout à 
tait de son irrvention. Andrea Pisano est ëgalement l'auteur 
d'une belle porte plus ancienne, en bronze, dans le bap- 
lisière situé en face. Le peintre et architecte Andrea Or- 
Cag nu ne se distingua pas .mius comme sculpteur; mais 

ITALIEffNE 
il y a déjà dans les sculptures dont il a orné le tabernacle 
d'Or San-Michele à FIorence quelque chose du naturalisme 
qui au quinzième siècle domina dans l'Cnie de peinture de 
Florence. Quelques monuments de la hante Italie sont ma- 
gnifiqueseomme effet d'enscmble, mais moins purs de formes; 
par eemple le monument de San-Eus4orgio à Milan  fait 
en 139 par Giovanni Balduccio de Pise, et à Vérone celui 
du Can della Scala, ainsi que le tombeau de saint Augustin 
dans la cathédrale de Pavie, œuvre de Boaino da Campione, 
élève de Baldnccio. Venisc et ffaples possèdent également 
d'importants ouvrages de cette époque. 
Le quinzième siècle fut aussi pour la sculpture une épo. 
que riche en déveioppements grandiose«. Ce qe fficola 
Pisano avait lentWisolément, la résurrection de l'art an- 
tique, redevint den cents ans plus tard le principe de vie 
de l'art s'efforçant d'atteindre l'expression suprême de la 
randenr extérieore et intellectuelle, de la profondenr et de 
la beauté. En Toscane, cette époque de transition ïut mar- 
quée par Jacopo della Quercia (mort en |44), dont les prin- 
cipales œuvres se trouvent à Lucques. Mais à cet égard il 
faut surtout citer le F[orentin Lorenzo Gh i b e rti, qui re- 
présenta la nature avec une grâce extrême et dans nn style 
noble et purifié par i'étude de l'antiqge. Dans ses célèbres 
portes de bronze du baptitère de Florence, il a renoncé, il est 
vrai, à lasévérité de l'antique style de relief, et a suivi une 
disposition pittoresque bae sur la perspective; mais la 
pureté des formes, la noblesse de la conception et de la dé- 
cotation, ainsi que la perfection de la fonte, font oublier ce 
déïaut. 'ers la mëme époque Lucca della Bobbia (entro 
100 et 1480) creait un nouveau procédé d'art, à savoir 
la terre cuite revêtue d'émail, dans lequel il exécuta une in- 
nombrable quantité de reliefs, principalement des figures 
blanches sur un fond bleu avec de riches ornements. Della 
Bobbia uccupe aussi une place importante parmi les sculp- 
teurs et les rondeurs en bronze; mais ses oeuvres en terre 
cuite, imit«es et propagees par de nombreux élèves, lui firent 
bicn plus de réputation. Donatello de Florence (1383- 
t466), dans ses nombreux relieîs et statues, parait plus 
puissant dans l'expression de la passion, et en mEme 
temps plus adonné  la conception de l'antiqe. Andrea Ve- 
roccbio de Florence (1432-1488), dans ses statues d'Or 
San-Michele et de l'Académie de Florence, semble avoir eu 
plus de propension au naturalisme. Ce tut, dit-on, lui qui le 
premier lit mouler en pltre des parties du corps humain, et 
prit le premier les masques de murts,/ l'effet de faciliter l'C 
rude du dessin. Il était dans l'habitude de revêtir ses sculp- 
tures de couleurs naturelles, et il existe aussi de cette école 
d'excellents bustes-portraits en cire revU[ne de couleurs. Les 
artistes coutemprains qui habitaient alors les Êtats Véuitiens, 
la Lombardie ou le royaume de Naples, ont exécuté aussi un 
grand nombre d'ouvrages importants. Mais le Napolltain 
gelo-Aniello Flore (mort vers 1500) est le son! généralement 
connu,/ caose de ses beaux monnments funéraires. L'art 
du ddaillezr se réveilla au, si au quinzième siëcle; et une 
énorme quantité de grandes médailles fondnes, devenues au- 
jourd'hui d'une immense valeur pour les collectionneurs, 
datent de cette époque. Vittore P is a n o, dont les principaux 
ouvrages furent exécutés de I9  1459,est celui à qui l'on 
doit le plus grand nombre et les plus belles de ces médailles. 
C'est au commencement du seizième siècle que la sculp- 
ture italienne brilla de son plus vif éclat. Par une Code 
opiniatre de la nature et de l'antique, on n'était pas seu- 
lement parvenu à posséder parfaitement les élements 
d'exposition et les procédés techniques, mais encore 
dominer complétement l'expression idëale, intellectuelle 
et corporelle. Le go0t des princes pour la magnificence 
et un immense travail qui s'opérait alors dans tous les 
domaines de l'intelligence ne contribuèrent pas peu non 
plus aux développements pris à cette époque par l'art. On 
n'a malheureusement conservé des illustres élèves de 
rochio, Giovanni-Francesco Rustici et Leonardo da V i n c i, 
qu'un magnifique groupe de bronze du premier et que des 



ITALIENNE 
d[ails pleins d'enthousiasme sur une statue équestre qu'a- 
rait exécut le premier. Andrea San sovino l'ancien 
.mort en 1529 ) produisit aussi des ouvrages d'une simpli- 
cité grandiose. Lui et ses élèves sont les auteurs du magni- 
fique revétement donné à la sainte maison de INotre-Dame 
de Lorette. blicheI-Ange Buonarotti (t474-1564), qui 
d:abord s'était voué à la sculpture, la porta  son point 
culminant, mais en méme temps l'entralna vers sa déca- 
dence, parce qu'il s'attacba moins fi la représentation de 
la beauté calme et simple qu'aux expressions grandioses 
de la vie ; tendance par suite de laquelle ses imitateurs 
s'arrêtèrent à l'eflet violent de la forme. Ceux de ses ou- 
vrages qu'il composa à Florence préseutent ce défaut  un 
degré bien moindre, mais n'ont pas tonte la grâce délicate 
de cette école. On en peut dire autant de sa magnifique 
tatue de la Piété  Rome, de son Bacchns et de son Da- 
vid à Florence. Un Amour, qu'il avait fait enfouir  Flo- 
rence, puis qu'il fit déterrer, fut généralement tenu pour 
un antique ; et pour faire cesser l'erreur, il fallut que l'ar- 
tiste produislt le bras de cette statue qu'il avait mutilée lui 
mëme. Appelé à Iome en 1503 par le pape Jules lI, il y 
commença le grand tombeau de ce pontife. Mais, continuel- 
lement distrait de ce travail par le pape, qui lui commandait 
tant6t des fresques et tant(t de grands édifices, il ne put 
exécuter, des nombreuses statues destinées  ce tombeau, 
que le Moïse, la Iachel et la Lia, ainsi que les deux hommes 
enchalnés qu'on voit de lui au Louvre, et qui déjà partici- 
pentde cette grandeur sauvage et titanique qui est comme 
le cachet particulier de ses ouvrages ultcrieurs. Ce n'est 
qu'après ces travaux qu'il exécuta son chef-d'oeuvre, les 
monuments de Julien et de Laureut de Médicis dans i'é- 
glise San-Lorenzo à Florence. Son rival, Baccio B a n d i n e I I i 
(1487-1559), était déjà tout'. fait sous l'influence de son 
style, et s'en appropria ce qu'il avait de violent et d'ext- 
rieurement imposant, comme en témoigneut son Herculeet 
Cacus, ses reliefs snr les monumenls de Léon X et de CIC 
ment VII et ses Slatues pour l'enclOture du Chœur de la ° 
cathédrale de Florence. Benvenuto C e I I i n i, contemporain 
et ennemi du grand homme, a déposé dans son inappreciable 
antobioaphie une foule d'éclaircissements sur ce qui cons- ] 
tituait alors la vie d'artiste. Comme orfèvre et médailleur il 
a une importance toute particulière pour l'histoire de l'art. [ 
A Venise florissaieut vers la méme époque Pietro Tullio 
et Antouio Lombardi, ainsi que Jacopo Sansovino le jeune, 
dont le véritable nom tait J. Tatti de Florence ( 1479-1570 ), 
l'elève de Sausovino l'ancien. Après avoir suivi pendant 
quelque temps la direction de Michel-Ange, il l'introduisit 
à partir de 1527  Veuise, mais d'une manière plus délicate 
et plus libre, et fit êcole. La Lombardie vit encore briller 
l'ancien Bambaja, qui se consacra plus particulièrement à 
l'art de la dècoration, et Marco Agrate. Ce dernier est l'au- 
tenr de la statue de saint Barthélemy écorché, qu'on voit 
dans la cathédrale de Milan. Vaierio Vientino se distin- 
gua surtout comme graveur sur pierres fines et graveur 
sur poinçons, après Benvenuto C e I I i n i. La plupart des 
travaux de la seconde moitié du seizième siëcle suivirent 
la direction donnée par Micbel-Ange, jusqu'à en devenir 
maniérés. Il faut mentionner sous ce rapport les œuvres du 
Milaaai Gglielmo della Porta, qui restaura si bien les 
jambes de lHercule Farnèse, que Michel-Ange ne les jugea 
point inférieures aux véritable.s, qu'on retrouva plus tard. 
Il est l'auteur du grandiose tombeau du pape Pie III qu'on 
voit  Saint-Pierre de Iome, ainsi que des quatre grands 
prophètes placés dans les niches des piliers de la première 
arcade. Bartolommeo Ammanati, qui était en mêm temps 
architecte, travailla dans la maniëre de son maitre Bandi- 
nelli, et exécuta, entre autres, la grande fontaine qui dé- 
cote la Piazza del Gran-Duca  Florence. C'est alors aussi que 
le Flamand Jearl de Bo Iog n e, natif de Donai (1524-1608), 
exécuta dans le mëme style ses portes de bronze de la ca- 
thédrale de Pise, la. statue équestre de Cosme I er, et le 
célébre enlèvement des Sabines à Florence. 

.527 
[ Une période de dégénérescence complète commença avec 
Lorenzo B e r n i n i (1598-1680), et ses nombreux élèves 
l'outrèrent encore. Bernini lui-même, qui prit une position 
analogue en architecture, tout en négligeant complétement 
les lois révères du style plastique, imposa encore par un 
vigoureux naturalisme et par une expression souvent exa- 
gérée de la passion, tandis que ses élèves ne fardèrent point 
à tomber dans le faux, le tourmentWet l'affecté. Les étran- 
I gers qui travaillèrent alors en Italie firent preuve de plus 
de rectitude d'idées et de sagesse de jugement que les suc- 
cesseurs de Berniui, dont les travaux encombrèrent bientôt 
toutes les églises d'I{alie et y remplacèrent maints chefs- 
d'œuvre du ciqueceto. On peut citer notamment le Fla- 
mand François Duquesnois, dit Il Fianin9o (159,-1), 
Arthur Quellinus, et le Français Pierre Puet, qui toujours 
resta fidèle  la nature. 
Dans la seconde moitié du dix-huitiëme siècle, l'influence 
de Iafaêl M e n g s et de Winkelmann eut pour résultat de 
provoquer jusqu'à un certain point l'aban,lon de la ma- 
nière et le retour à la pnreté antique. Le représentant de 
cette direction fut Canova (1757-1822), qui, dans des 
ouvrages extrënemeut nombreux, fraya les voies  une 
conception nouvelle de la nature. Son style est souvent mou, 
mais d'une pureté  laquelle on n'était plus habitué depuis 
les grands maltres du seizième siècle. L'influence qu'il 
exerça sur l'art moderne, et surtout sur l'ad français, est 
acalculable. Parmi ses élèves on peut citer : Antonio d'Este, 
célèbre par ses bustes et ses reliefs; Giuseppe Fabri, dont 
les ouvrages, par exemple les monuments du Tasse et de 
Léon X, manquent quelque peu de style ; C. T ad o I i n i, 
G. Finelli, les deux F e r r a r i, L. B a r t o I i n i à FIorence, 
celui de tons qu'on doit peut-être considérer comme le seul 
béritier direct de Canova, et Pompeo Marchesi, de 
Milan (né en 1796), l'un des premiers sculpteurs aujour- 
d'hui vivants. En fait d'autres célëbres artistes milanais, on 
peut encore mentionner Gaelano Monti, B. Coraolli, San- 
or,io et Pu{ti. L. Pampaloni à Florence et L. Persico  
aples jouissent d'une grande réputation. De nos jours enfin 
le Danois Thorwaldsen a exercé une influence consi- 
«lérable sur la sculptnre ilalieune. Indépendamment de 
L. Bienaimé, de Galli, de Benzoni, etc., il a aussi pour Cève 
Pietto Te n er an i, de Carrare, le premier sculpteur qu'il 
y ait anjourd'hui en Italie. Toutefois l'art français et l'art 
alleman,l ont pris de nos jours un essor tel, que pendant long- 
temps ils influeront plus sur la sculptnre i{allenne qu'ils ne 
s'inspirerout d'elle. 
ITALINSIY (Asn), diplomate russe, dont le véri- 
table nom clair Andrej Ixnowrvxscn, descendait d'une 
famille de Cosaques Zaporogues, qui,  la suite des troubles 
cansés par Mazeppa, s'était établie non loin de Kiew, ou 
il naquit, en 1743. Durant son séjour à Saini-Pétersbnu » 
où il étudia  partir de 1761 la médecine et la chirurgie, 
il lut, à ce qu'il paralt, temoin de très-près de la révolution 
qui plaça Calherine II sur le tr6ne. Il se rendit, pour se 
perfectionner dans la science  l'étude de laquelle il s'était 
voué,  Londres, puis à Ét[imbourg, où il séjourna plusieurs 
années. A Paris, il fit la connaissance de Grimm ; et celui- 
ci, en 1780, le présenta au grand-duc Paul, qui voyageait 
alors sous le nom de comte du l'ord. Dès l'année suivante 
il fut nommé secrètaire d'arahassade  Naples. La liaison 
intime qu'il contracta dans cette ville avec sir Willam H a- 
milton le conduisit à etudier l'archéologie et à se créer, 
lui aussi, une riche collection d'antiquités. L'empereur Paul 
étant monté sur le tr6ne, il fut nommé conseiller d'Êtat 
en oervce ordinaire, chambellan et ambassadeur à aples. 
Dans les premières annees de son règne, l'emperenr 
Alexandre l'envoya avec.le méme ti{re  Constantinople, où il 
resta jusqu'au moment où éclata la guerre eutre les Russes 
et les Turcs,  laquelle mit fin, en 1812, la paix de Bucha- 
rest. Il négocia et signa ce traité en commun avec le géneral 
Kutusow; après quoi il retourna  Constantinople, en qua- 
lité de ministre plenipotentiaire. En 1817 il passa avec I 



528 ITALINSKY 
mme titre à Rame, où iI sélourna jusqu' sa mort, arrivée 
le 27 janxier t827. 
ITALIQUE. Dans l'usage actuel, on emploie cet ad- 
jectif pour designer ce qui e rapporte  Pltalie antique, à 
ses populations, etc.; tandis qu'on rserve te mot italien 
au mo.en gge ou à t'ère nouvelle de l'Italie. C»est ainsi qu'on 
dit les divinités, les médailles, les,langues, les peuples italo 
qws, et que dans Phistoire de la philosoplde l'Cale de Pytha- 
gare est ouvent désignée sous le nom d'dcol¢ italique. 
Par lang«es italiques la philologie moderne désigne un 
groupe de la ïandlle greco-italique des langues i n d o-ger- 
man ique, indigène en Italie et a,ant les plus grandes 
aflinitës avec celui des langues greco-plasgiques. Sans 
compter la langue I a t i ne, d'où sont provenues les tan- 
,,nés romaines, les langues qui font partie de ce groupe 
s,mt celles des Ombriens, des Osques, des Volsqnes 
t des peuplades salelliqnes. Il existe encore de ces diver- 
ses langues des monummenls plus on moins nombreux et 
considcrables, qui, sauf un petit nombre de mots rap- 
portes par les écrivaius latins, ne consistent plus qu'en 
inscriptions et en legendes mortuaires. Ce n'est guère que 
dans ces derniers temps qu'on s'est occupé de leur intcr- 
pretation scientifique : et l'on doit surtout mentionner à 
cet égard les travaux de» érudits allemands, notamment 
ceux de Kirckhoff ( Mordu»tends de la Langue Ombriqte ; 
2 vol. Berlin, 186-9-1851 ) et de Lepsius (lnscriptimws 
Lin9: UmOricœe et Osczc ; Leipzig, l;il ). Dans mine 
acception plus générale on comprend aussi sous la dénomi- 
nation de langttes taliques les langues des Ménapieus, 
des Etrusques, et des peuplades gauloises, rhetiques et 
ligmiennes qui habitaient le nord de l'ltalie. 
ITALIQUE (Tgpoçraphe). Le caractère de ce nom 
tire son origine de l'cc, iture de la chancellerie romaine de- 
signée par les mots cursiv««us set cancellarius, d'où 
lui iut le nom de cursive. Ce caractëre a aussi été connu 
sous le nom de lettres vdnitiemzes, parce que les premiers 
poinçons ont etWfaits à Venise, ou sous celui de let/res 
tldizes, parce que Aide Marinée s'en estservi le premier; 
cnlin, le no,n d'italique lui a Ce donné en France, parce 
quïl vient d'ltalie, et ce nom a prévalu. C'est Ca Il nés qui 
le premier s'en est seri dans notre pays. On en a tait des 
livres entiers, puisdes préfaces, des dédicaces, des tilres, etc. 
Son usage le plus habituel aujourd'hui est de servir h faire 
ressortir les mots, les plJrases, sur lesquels on ve,t appeler 
l'attention du lecteur. Aussi les imprimeurs doivent-ils avoir 
pour cl,aque corps de caractt=res romains q,ïls emploient 
un italique qui y corresponde. L. Louv. 
ITilAQUE (aujourd'lmi Tea,i ou Tliaki), après 
Parus la plus petite des sept iles I o n i e nn e s, de 2 myria- 
mètres carres de superlicie, en face de la province du 
ro)aume de Grèce appelée l'Acarnanie, au sud de Leucade 
ou Sainte-Maure, au nord-est «le Céplialonie, dont la sépare 
le canal de Guiscard, était célèbre dans l'antiquité comme 
a)ant Ce la patrie et le royaume d'U lysse. D'après la des- 
cription qu'en lait Homère dans l'Od/ssde, description qui 
du reste provoque bien des doute% en raison de la nature ac- 
tuelle du sol, cette rie, quoique I,étissée de montagnes et de 
rochers, produisait une grande quantité de vin et de bld ; et 
indépendamment de la capitale qui portait le même nom et 
ou était situé le palais d'Ulysse, le pacte cite cormne localités 
remarquables les monts 'eritos ou Neriton (aujourd'hui 
Saint-Elias), et 'ewn (aujourd'hui Stelano), qui Iormaient 
le port appeld lheithrwz, et le cap Corax, ou rocher des 
eorbeaux, où se trouvait la fontaine Aréthuse. 
Tl,iaki compte aujourd'l,ui 11,000 I,abitants, dont un 
cinquième dans le cliel-lieu, Vathi, petit port de mer. Ses 
principaux produits sont l'liuile, le vin et surtout les raisins 
secs, dit;r.aisins de Corintne. 
]TINEIAIRE (du latin itinerariunt, descriptio 
itincris, description du chemin), on appelle ainsi une liste 
des stations, des ètapes en quelque sorte, situées entre deux 
¢.ndroitsprincipaux, avec l'indication de leurs oestances res- 

 ITUBBIDE 
pectives. Si des itinéraires de ce genre, quand il ne -'tgit 
mme que de rouirAes encore peu ou mal connues des Eu- 
ropéens, sont déjà d'une grands utilité pour les géographes, 
leur utilité est encore bien autrement grande quand il est 
question de géographie ancienne. Les ouvrages les plus im- 
portants en ce genre que nous pussédions sur l'antiquité, 
sont : 
1 ° Le« Itineraria Antonini,  savoir : l'Itinerari 
Provinciarm, contenant un grand nombre de routes de 
voyage à. travers les provinces romaines, en Europe., .en 
Asie et en Attique; et l'llinerarium naritirnum, qm in- 
dique les voies les plus usitées, soit pour le voyageur qui 
longe la c6te par terre, soit pour le navigateur, / l'effet de 
se rendre d'un point donné à nn autre. Tous deux ne sont 
d'ailleurs qu'une aride nomenclature. Suivant Pinder et Par- 
they, ils n'altraient point pour base l'opCation entreprise 
de l'an 44 h l'an 19 av. J.-C. à l'effet de mesurer l'Empire 
Bomain, mais les listes qu'on avait dressées des différentes 
places lattes avec l'indication des routes qui y conduisaient; 
listes qtti étaient déposees à Borne. Leur publication, avec 
les rectificalions et les additions dont elles étaient suscepti- 
bles, aurait eu lieu d'abord sous Antoninus Caracalla, dont 
le nom serait resté à ces itinëraire«. Destinés a l'origine uni- 
quemcnt b. l'usage des fonctionnaires civils et militaires, 
ils arrivt'tent plus tard à prendre h peu près la forme de 
nos livres de postes et de nos guides «lu voyageur. Cons- 
tamment revus et augmentés, ces deux itineraires, dans 
leur forme actuelle, appartiendraient ì J'époque de Dio- 
ciCien. 
2 ° L'ltiwrçri«m Hierosolym1[anum, composé par un 
clirétien, l'an 333 de notre ère, à l'usage des voyageurs 
qui de Burdigala (Bordeaux) voulaient se rendre à Jéru- 
salem. 
L'édition de ces deux itiuéraires donnée par Pinder et 
Parthey (Berlin, 18-18 ) a rendu inutiles toute« les precéo 
dénies au point de vue de la critique. C'est de nos jours 
seulement qu'lngelo Maï a publié (Milan, IS17), sous le 
titre d'ltinerariunt Alexandri, une courte description de 
l'expédition d'Alexandre le Grand en Perse; ourage com- 
posé vers l'an 338 de notre ère. 
Le modernes ont donné le nom d'ititwraires à des es- 
pèces de guides du voyageur, lui indiquant pour ainsi dire 
son chemin, les curiosités, etc. C h à tea u b r i a n d a donné 
tin litéfare de Paris à Jdrusalem d'une nature pins 
relevée. 
On nomme colonne itinéraire une colonne ou poteau 
placé dans un carrefour, sur un grand chemin, et qui in- 
dique les différentes routes par des incriptions. 
Les nesures itJnrares sont celles dont on se sert pour 
indiquer la longueur des chemins, comme le k ilomèt r e, 
lalieue, le mille, etc. 
Dans l'art militaire, on nomme itindrai'e l'ordre et la 
disposition des marches d'un corps de troupes ou d'une 
armée qui indique la route qu'elle doit tenir. On se sert du 
tnême mot dans le commerce et dans le langage ordinaire 
en parlant des villes qu'un commis ou qu'une autre per- 
sonne doit visiter. 
ITUBBIDE (Don Avcusrt.x ne), empereur du Mexi- 
q u e, né en 1786, et suivant d'autres en 1790, à Valladolid, 
au Mexique, était le fils d'tin gentilhomme de la Biscaye, 
qui était venu s'établir au Mexique, et d'une ricliecréole. En 
1810,  i'époque de la première insurrection du 5lexique, 
il habitait ses domaines, était revgtu du grade de lieutenant 
dans la milice de sa proince et repoussa alors énergique- 
ment toutes les propositions que lui firent le« insurgís pour 
le ddcider à venir faire cause communeavec eux. Répondant 
au contraire, ì l'appel du vice-roi Apodaca, il prit le com- 
mandement de la milice de sa province, et opéra si habile- 
ment à sa tëte, que les bandes insurgées durent, aprè. 
maiJtes défaites, se disperser. A partir de 1816 il vécut de 
nouveau dans ses domaines, jusqu" ce qu'au mois de 
vrier 1521, à la suite du nouveau soulèvement qui avait 



ITURBIDE 
clat en 180 au bleique, le ice-rni Apodaca lui couûa 
le commandement supérieur des troupes royales. Mais Itur- 
bide se rapprocha bient6t du parti des insurgés, et finit 
.par se mettre " leur t6te. Après d'inutiles négociations suivies 
avec le vice-roi pour le déterminer/ donner au pays une 
constitution particulière, il vint le bloquer dans la capilale 
nSme, qui lui ouvrit ses portes, le 24 aoOt 1821, en ver{u 
d'une convention signée à Cordova, laquelle, tout en ré- 
servant le sceptre du llexique aux Bourbons d'Espagne, 
prononçait la séparation définitive du pays d'avec la mère 
patrie. Le génèral y prenait le tilre de cher de l'armée mexi- 
caine des trois garanties, garanlies stipulées dans un aele 
connu sous le nom plan cl'Iguala, à savoir : l'indépen- 
dance, la religion, et l'union. 
Odieux au parti républicain, |htrbide fit son entrée à 
Mexico le 17 septembre 1821, et installa le jour méme une 
lunte de régence. Aussit6t une lutte s'engagea entre ce pou- 
soir, dont l'esprit était démocralique, et Iturbide. Celui-ci 
ayant destitué trois membres de la junle, en raison de l'op- 
position violente qu'ils lui faisaient, la junte peCara une 
toi qui devait établir en principe l'incompatibilité des fonc- 
tions civiles et militaires. Menacé dans sa position politique, 
Iturbide songea à parodier de l'autre c6té de l'Atlantique le 
18 brumaire. Lui, il eut son 18 mai (1822); journée 
dans laquelle la garnison et la populace de Mexico le pro- 
clamèrent empereur, sous le nom d'Augustin I«,. Il parut 
bésiler d'abord à accepter une couronne; puis il feignit de 
se laisser vaincre, et se presenta le lendemain au congrès. 
Sur 184 membres dont se composait celle assemblée, 94 seu- 
lement êtaient présents; 77 volèrent par peur l'établisse- 
ment de l'empire; 15 se retirërent et déclarèrent qu'ils en 
réléreraient à leurs commettants. Iturbide convoqua alors un 
nouveau congrès, qui cette {ois consacra par un vole rendu 
à l'unanimité, le 22 juin, la dignité impériale en faveur d'l- 
turbide, et déclara la couronne héréditaire dans sa famille. 
Le 21 juillet suivant Iturbide se faisail, en conséquence, sa- 
crer en grande pompe empereur du Mexique. Mais les coffres 
du trésor public s'etaut trouvé complétement rides à quel- 
que temps de là, les partis qui existaient au sein du con- 
grès se coalisèrent pour faire de l'oppnsilion fi l'empereur. 
lturbide n'était pointdetaille à faire face aux nécessites de 
sa position, à tenir les factions en bride, à faire régner l'ordre 
dans l'administration et à pourvoir aux modifications ur- 
sentes que réclamait la législation. Plusieurs des généraux 
les plus influents conspirèrent sa chute, et uue insurrection 
éclata contre lui. l/euf mois après la proclamation du nouvel 
empire, le 20 mars 1823, Iturbide était réduit à abdiquer 
et  déposer ses pouvoirs entre les mains du cou,ès. Cette 
assemblée accorda à lui et à sa famille une pension de 
25,000 piastres, à la condition qu'il irait se fixer en ltalie ; 
et en conséquence il fut conduit à Livourne. 
Quoique indignement calomnié par la haine des partis, 
Ilurbide, à qui on ne pouvait reprocher aucun acte de des- 
potisme ni de rapacité, ne laissait pas que d'avoir toujours 
d'assez nombreux partisans au Mexique. Instruit d'une 
conspiration qu'ils avaient tramée en sa faveur, il quitta 
l'ltaliœe, et se rendit à Londres au commencement de l'au- 
,ée t$2, avec l'intention de gagner de là quelque port 
de la c6te du Mexique. Mais tenu au courant de ses projets, 
le congrès mexicain le déclara hors de la loi par un decret 
rendu le 2 avril t82t,, et qui ordonnait de le faire fusiller 
anssitSt qu'il mettrait le pied sur le territoire mexicain. 
L'ex-empereur, après s'tre embarqué Southampton le 
l I mai, sous un travestissement, était le 8 juillet en vue de 
Solo de Marina, où commandait le général Gazza. Le 16, 
entrainWpar son ardent de ressaisir sa couronne et par les 
nouvelles favorables que de secrets émissaires lut four 
lasser de l'lutCieur du pays, il se jette sur la plage. Mais ar- 
rêtWpar le général Garza, il n'essaya point de résister, et 
lut dirigé de Solo de Maina sur Pad[lla, où le 19 juillet on 
le passait par les armes. Le congrès se monlra encore géné. 
eux OE l'égard de la veuve et des enant que laissait Itur- 

 IVAN 
bide. Il leur vota une pension de 8,000 piastre% à la condi- 
tion de rsider désormais dans la partie du territoire de la Co- 
lombie qui leur serait désignée. Onze ans plus tard, en 1835» 
le congrès accorda mme aux hérities d'lturbide une 
indemnité d'un nillinn de piastres, et, leva,,t les lois de 
proscription qui pesaient sur eux depuis 1823, leur accorda 
en outre, ì titre de proprièté particulière, une etendue de 
terrain de 14 myriamètres cureC. On a d'llurbide une au- 
tobiographie, traduire et publiée en Anglais par Quin (Sis- 
lement of some of the principal events in the Imblic lire 
of Augustin de llurbide [ Londres, 182 ]). 
ITYS. Voe-. 
ITZSTEIN (Jt-KD^ n), célèbre membre de l'op- 
position libérale dans la ci,ambre des députés de Bade, 
il entra dès 18OEOE, est né à .Maycnce, le rg septembre 1775, 
et appartenait à l'ordre judiciaire quand la confiance 
élecleurs l'investit de fonctions Iégistatives. A la mort 
Rotteck, c'et à lui q'échut la tache de continuer et 
diriger l'agitation libérale dans le parlement, r61e auquel 
le rendait éminemment propre un lalent d'orateur des plus 
disfingu6s, biais sa capacité comme homme politique ne 
répondait pas complétement à ce que pouvait faire espérer 
de lui une parole toujours lacile et eleganle. En 18t8 une 
partie de ses anciens amis politiques se séparèrent de lui, 
parce que ses tendancesdevinrent alors républicaines. Nommé 
membre de l'assemblée nationale de Francfort, il  prit 
place à l'extréme gauche ; mais son nom n'y fut remarqué 
que lorsque la gauche le présenta comme candidat à la 
dignité de vicaire de l'Empire, lI. d'ltzstein ne prit aucune 
part aux mouvements révolutionnaires dont le grand-d,tché 
de Bade fut le tfiétre en 1849 : des chefs plus ardents et pro- 
fessant des iddes encore plus avancées l'avaient supplauté 
dans les faveurs de la foule. Il n'en crut pas moins pru- 
dent de les accompagner dans leur relraite sur le terril,Are 
étranger, quand l'insurrection eut été comprimée par tes 
Prussiens. Poursuivi alors par coutumace (1850), il n'en 
a pas moins obtenu depuis la pension de retraite à laquelle 
lui donnaient droit ses services dans l'ordre judiciaire ; et 
complétement étranger aux affaires politiques, il habile au- 
jourd'hui son domaine de Hallgarten dans le lheingau. 
ITERBOECK { Bataille de). Vo/e. D.'w,xz ( Ba. 
taille de). 
IV./ ou IWA.I, nom de plusieurs grands-princes et 
tsars de flussie. 
IV'AN I ce, surnommé KalitŒE, and-prince de Mosceu 
( 1328-1340 ), chercha, tout en se trouvant sous la dépen- 
dance des Tatars, à s'élever au.dessus des autres dnasles 
russes età faire de Mosoou la capitale de la Bussie; tentative 
qui lui réussit en partie, puisque cette ville devint 
son règne le siége du métropolitain au lieu de Vladimir. 
IVAN I1 (1353-1359), fils d'lvan I er, n'avait point les 
qualité qui lui eussent été nécessaires pour lutter conte 
les autres grands-princes de flussie et pour repousser les 
invasions des Lithuaniens, qui lui enlevèrent des portions 
considérables de territoire sur les bords du Dniepr. 
" IVAN III et comme tsar ls, I er ,VxssILI[:VII'CJI 
1/62-1505) est regardé comme le fondateur de l'empire 
russe. 11 réunit successivement à la graade-principauté de 
l[oscou les autres principautés de la Russie, telles que Tver, 
Mosbaisk et Wologda, s'empara, en 178, de la puissante 
Novogorod, où les marchands appartenant à la banse fu- 
rent pour la plupart égorgés, et s'affranchit complétement de 
la domination des Tatars en profitant habilement de l'affai- 
blissement qui avait été pour le khan du Kaptchak le résul- 
tat des partages des khanats et des conquêtes de Timour. En 
172 il épousa Zoé, fille deThomas Paléologue, frèredu der- 
nier empereur de Byzance, qui introduisit en Russie les 
mœurs eurolennes. C'est par suite dece mariage que l'aigle 
à deux tt% insigne des empereurs de Bzance, figure dans 
les armoiries russes, lvan érigea le premier en loi fonda- 
mentale de l'État l'unitWet l'indivisibilité du territoire russe 
et le premier aussi il prit le titre de tsar de la Grande-Russio, 



.ao IVAN 
IVAN Il WXSS[LiViTCn, surnnmmé le Terrible (1533- 
1583 ), parce que jams souein si cel n'avt encore 
é sur la Russie, oentibua oependant plus que us  pré- 
décesseu  proper quelqu germes de civifition pmi 
s suje, alors encooe  moitié uvag. Il ttira en Russie 
d ouvriers, des aiss et des lettrés allemands, intuisit 
les prér imprimefies, ea le commeroe extérieur en 
ntractant e nvenfion oemmerciale avec la reine d'An- 
gleffe Eeth, quand les Anglais entent dëuvert la 
rou de mer conduisant  Arkaugel; et, en 1545, il fonda 
e arm permente, I strelitz. En 1552 il s'empara 
de Kasan, et en 1554 d'Astroen. Mais ayant voulu eever 
la voe aux chevaliers de l'oe Teuto&qne, les Polo. 
na, les Sudo et les Dois se liguèrent ntre lui. Bë- 
dt par Eee Batho à e situation critique, Ivan II 
plora les secos de l'empereur RoJolphe II et du pape 
Groire XIII. Ce denier, dans l'espoir de rener ainsi le 
ar et ses suje u giron de l'fise catholique, envoye 
en Pussie  nonce du nm de Possevin, qui, en 
cna l'armistice conclu à Zapola entre Batfiori et Ivan, 
convention par suile de laquelle lan renon a  droit 
ser la vonie. En 1570 Ivan entreprit une exdition contre 
Novogorod, dont l'epri[ dïndependanoe l'olfusquait; et il 
y fit «.rger oh,000 individus dans l'espace de six semaine. 
Des massacres alou entent tien a Tver, k Moscou et 
»ur plusieurs autres in encore. Cest sur la fin de son 
re que I erma k entreprit son expedition de Sibérie. 
IVAN llI Axewxca, frère oensanuin de Pierre I er, 
nWen t663, mourut en 1696. Quoique proclame tsar, il 
ne prit que pu de part angoueruement, a cauoe de la 
débffit de  facu[t intel[ectuelles; et il finit mème, en 
t88, par tooEbcr da un état di.litic coca,let. 
'AN IV, ne le 23 aoù[ 170, etait fils du duc Antoine- 
Ulrich de Brunswick-Wolfenbttel et de la grandcncbesse 
rsse Anna Curlovna« L'imperatri Arme Ivanovna 
dopta tout aussitôt après sa »sance, le déclara on 
ritie quand ee se 'it fi la veine de mourir et nomma 
son favori B iren tuteur du jee prin et regent de l'em- 
pire pendant  uinori[e. L'impératrioe ënt mor le 28 
octobre 1740, Bi en lit aussi[6t proEamer emreur Ivan IV, 
àgé de deux mois à peine; et lorsque il eut Ce dné à 
l'exil, oe furent le père et la mëre mmes d'l'an IV qui 
exerctrent la régence. Tou[ois, dès le 5 decemboe de l'an- 
née suivante, la fille de Pierre I er, Elisabeth, s'emparait du 
tr6ne, renvoyait en Allegne les paren du jeune lyon, 
et le luisait renfermer lui-mème a Ivdnogrod non loin de 
arva. Un moine aant pénétré dans sa prison, l'enleva, 
dans le dessein de te conduire en lemne s le prie 
fut repris d Smolensko et confine de nouvu dans un 
monastère de la ille de daï, sur la route de Pé[ers- 
bourg à Moscou. Plus lard, Ivan fut ramene dans la 
son de Sch[u»selbourg. Des soldats commandés par Miro- 
vitcb, gentilhomme de l'Ukrae q faisait partie comme 
eutent de la arni»on de Schlusoelbourg, aant lentWde 
tirer ce maoEeureux prinoe de son oechot, afin d'opérer av 
lui une revolution, s gardiens, d'prës les instructions 
doé par l'p«ratrioe Êfisabe[h pour le oes ou eclerait 
un mplot de cegenre, le mascrèrt, le 5 déoembre 76. 
Ên Rsie, on a toujours étre ou poiardé les p- 
tendants, et jusqu'a prnt on ne s'en [ pas mal trouvê. 
Un hisgn rappoe que le lendemain on exposa le 
d'Ivan, revëtu d'un simple hit de matelot, devant la po 
de i'[ise de Scldusselbourg; qnïl avait six pieds de haut, 
une blonde et superbe chevdure, d trai régu[ie et la 
pu d'unextrme blancheur. La chapelle no l'on avait de- 
posé oes resl moe fut depuis mplétement détruite. 
IVETOT. l%e« Yv. 
IYETE MUSQUÉE. Voye: Gag 
IVIÇA (dans ['antiquité Ebu), qui, avec l'lle de For- 
munira, situ plus au sud, et plusieurs autres llo, forme 
le grovpe des ile Pituses ou lles des Pins, et l'une 
» six juridicIions qui oempon[ la province espaole des 

IV'/tAIE 
lies Baiéares, comptait en t8t, 5,505 habitants, sur 
une superficie d'environ 6 myriamètres carrés. Le sol en 
est montagneux, boisé et bien arrosé; et malgré un cul- 
ture trës.insuflisaute, il ne laisse pas que de produire beau- 
coup d'huile, de vin et de fruits. Les habitants descendent 
vraisemblablement des Phéniciens qui vinrent de Carthage 
s'y établir au huitième siècle avant J.-C. ; ils parlent un 
dialecte particulier, se livrent h la ptche et à la navigation, 
et fabriquent beaucoup de sel de soude. Cette. tle fut enle- 
vée aux Cartbaginois par les Bomains; plus tard, les Maures 
s'y établirent, et l'occupèrent jusqu'en 1235, époque oi ils 
en furent chassës par Jacques I « d'Aragon. Le chel-tleu de 
File, qui porte le mme nom, avec 5,2St habitants et une ca. 
lbCrain, est forti6é et a un port de mer. Forrnentera, appelée 
par les anciens Pityua minor O,l Ophiusa, c'est-à-dire ile 
aux erpents, est placée dans les ravines conditions phy- 
siques, et forme l'un des six ayuntamientos d'Iviça. Elle a 
pour chef-lieu San-Fracco de Xavier, et ne compte guère 
en tout qte t5 à t,600 habitants. 
IVOllï (du latin ebur). C'est le nom de la matière 
qui provient des de[enses des léphants, des dents de 
l'fiippopotame, de la flèche du narval. Les elémentsqui com- 
posent lïvoire sont a peu près les mèmes qt]e ceux des dents 
et des os : en effet, de l'ixoire on tire de la gelatine, du 
phosphate de chaux ,du phosphate de manésie, de l'oxyde 
de manésie et du fer. Sa contexture ressemble en quelque 
sorte h celle des vegétaux : comme les tiges de ces der- 
niers, il off-e des fibres entrelacées, de manière à prèsenter 
des figures qui ressemblent plus ou moins a des losanges. 
L'accruissement des défenses de l'éléphant s'opère par cou- 
cbes superposées comme les troncs des arbres : leur cou- 
leur est d'un blanc tirant sur le jaune; lorsqnelles sont ré- 
cemment detachees de l'animal, leur intérieur offre diverses 
nuances, par lesquelles on juge de la boté de l'ivoire : le 
plus estime est celui qui tire sur le vert : cette matière, en 
'ieillissant, devient d'un blanc mat, et les ouvrages qui en 
sont faits sec«uvrentavec le tempsd'un iaunesale. Comme 
le bois, l'ivoire est sujet a se rendre. Outre l'ivoire que pro- 
duisent les clephants qui vivent de nos jours, on trouve 
dans le sein de la terre de diverses contrees des zones lem- 
pérées, et jusqu'au Sibérie, d'énormes tronçons de défenses 
d'éléphant, dnt l'ivoire est assez bien conservé pour en 
faire des ouvrages d'ornement de sculpture, elc. Lorsque 
l'ivoire fossile est impoegne d'oxyde de cuivre, il devient ce 
qu'on appelle des turquoises, pierres ainsi nommees parce 
les premioeres qu'on ait vues eu Europe venaient de Tur- 
quin. L'ivoire étant poreux, est susceptible de prendre di- 
verses couleurs : on le teint en vert par le vert-de-gris, etc. 
L'ivoire jauni se blanchit avec le chlore ou avec de l'eau de 
chaux : une lessive de savon noir blanchit aussi cette sub- 
stance. Le oir d'wore s'obtient en faisant brOler cette 
substance dans des vases clos. 
On fait en ivoire une intinite de petits ouvrages de sculp- 
ture et d'ornement, tels que statuettes, pommes de canne, 
manches de couteaux, etc. ; mais les ouvrages en ivoire que 
l'on fait chez les modernes ne sont rien en comparaison 
de ce qu'on exécutait en cette matière chez les anciens. 
Comme les cléphants étaient beaucoup plus communs dans 
ces temps reculés que de nos jours, les anciens faisaient 
en ivoire des tables, des chars, des chaires, des tr6nes 
ils en couvraient les portes et les murs des temples, et 
jnsqu'h des statues colossales de dix mètres de propor- 
tion. M. Simart a renouvelé de nos jours ce travail en 
exécutant pour le duc de Luynes une blinerve dont les 
chairs sont en ivoire. 
IVOIIE (Cbte d' ). Voile'- C6xa oas 
IVRAIEç genre de la famille des graminées de Jus- 
sien, de la triandrie digynie de Linné. Les ivraies sont 
des plantes herbacées, annuelles ou vivaces, que les bo- 
lanistes caractérisent ainsi : Épillets distiqnes, multiflores, 
parallèles a l'axe de l'Ci; glumes à deux vulves luneCtCs, 
l'extrieure aristée au-dessous du mmet; ovaire surntonté 



IVRAIE -- 
de aeux stigmates plumeux. L'ivraie se distingue essen- 
tiellement du froment par la position de ses épillets, qui 
regardent l'axe de l'Ci par l'une de leurs faces, et non pas 
par l'un de leurs cètés. On en distinguo environ une 
dixaine d'espèces : l'ivraie vivace (lolium perenne, L. ) et 
l'ivraie enivrante ( lolium temulentum, L.) sont sur- 
out communes dans nos champs d'Europe : la première 
de ces deux epèces croit à l'Cat sauvage sur le bord des 
hemins et dans les lieux incuites; elle présente le double 
avantage d'ètre très-préeoee, et de repousser promptement 
sous la dent des bestiaux ; aussi fournit-elle d'excellents 
pturages. '_Mais l'ivraie enivrante (zizanie, herbe d'i- 
vrogne), plante annuelle à tiges raides, droites et hautes 
de o m, 6o h un mètre, croit d'habitude dans les champs 
ensemencés de froment, d'orge et d'avoine, et dans les 
étés humides elle se multiplie tellement dans les moissous 
qu'elle finit par dominer eomplétement les céréales, qu'elle 
étouffe : 
Grandi sœepe quibus mandaimus hordee sdcis, 
Infelix lolium et steriles dominantur avenoe. 
La tradition affirme qu'en certaius cas la graine du fro- 
ment dégénère et se transforme en ivraie. 
La graine de la zizanie a une saveur cre, acidule, nau- 
séabonde; mélangée avec le froment en quantités un peu 
notables, elle donne à la farine des qualités délétères, et 
détermine des nainCs, des vertiges, des vomissements, 
en génral tous les sympt6mes de l'ivresse portée à l'ex- 
frime. La dessiecation complète fait perdre à l'ivraie ses 
propriétés malfaisantes, et Parmentier aure que l'on peut 
manger sans inconvénient du pain fait avec de la graine 
torréfiée du loliura arvense. 
Dans la langue symbolique, l'ivraie désigne le mal, l'hé- 
résie : « Séparer les bons des méchants, Segregare triti- 
C/?'/  .i.42Ttia. » BELFIELD-LEFÈVRE. 
IRÉE (l'ancienne Eporadia), ville fortiliée, avec 9,000 
habitants, une cathédrale et un séminaire, est en mme 
temps le chef-lieu de la province sarde d'Ivrée, qui compte 
! 7O,OOO Iabitants sur 18 myriamètres carrés. Cette province 
s'est formée du marquisat d'lvrde, que Charlemague y 
avait fondé après la conquête du royaume des Lombards. 
Après la déposition du roi Charles le Gros, en 887, les mar- 
quis d'Ivrée figurèrent an premier rang des prétendants à 
la couronne d'Italie. Le marquis Bérenger If réussit mme, 
vers 950, à s'emparer dn trène; mais il dut y renoncer bientOt. 
Lui et ses successeurs, qui portaient aussi en Bourgogne 
le titre de ducs,-eouservèrent le marquisat d'lsTée jusqn'en 
1018, époque oà l'empereur Henri Il l'chiera aux fil» du 
turbulent marquis Ardouin, et l'ineorpora h l'Empire, au- 
quel il demeura nni jusqu'en 168. A ce moment l'etnvereur 
Frédéric II en accorda l'investiture à Thomas, comte ce 
Savate, dont les descendanLq s'en maintinrent en possession 
malgré les prétentions qu'y Cevèrent pendant quelque temps 
les marquis de Montferrat. 
IVRESSE  suspension instantanée des lacultés ra- 
tionnelles, qui va quelquefois jusqu'à les anéantir. Toute 
sention ou émotion violente peut produire cet effet : on 
est ivre d'amour, de joie, de haine, de fureur. Il n'est point 
de passion qui ne puisse altérer la faenltè d'examiner, de 
discerner, de choisir, et qui ne développe qudques-uns de 
"ces iustinets et besoins physiques de l'homme, rprimés 
habituellement par la eousdence qu'il a du bien et du mal, 
ou par la crainte des lois que s'est imposées la sauterC L'ex- 
pression du visge, les mouvements du eorp% semblent Cre 
dans ce cas indépendants de la volonté. L'homme parait 
en cet état descendre bien au-dessous de la brute. Ivresse 
s'entend surtout du délire produit par l'usage immodéré du 
vin etdes liqueurs fermentCs, par les narcotiques, etc. 
C ne DE 
L'excitatlon du cerveau et le désordre de ses fonctions 
par suite des boissons fermentCs, alcooliques, se fait quel- 
quelois d'une manière très-prompte. Les suhstances intro- 

1VBESSE 53! 
i duites daus l'estomac agissent par une stimulation propre, 
qui se propage au cerveau par les rapports sympathiques 
du système nervenx, avant que ces substances aient pu 
avoir le temps de se mtler au sang par les voies digestives. 
Le premier effet des boissons spiritueuses est de réveillec 
l'activitë des forces vitales et du cerveau en particulier ; la 
physionomie s'anime, les mouvements sont plus faciles; 
l'imagination est vive, la parole est plus promlqe; on est 
plus libre ou plus indiscret, et les divers sentiments se 
manifestent avec plus de promptitude et d'aisance. Jusque 
là il n'y a pas de désordre dans les fonctions du cerveau ; 
mais si l'on continue à boire, les sengatious commencent à 
se troubler, les yeux ne distinguent plus clairement les 
objets, on voit doable; les ore(fles n'enlendent qu'impar- 
faitement; la langue ne se prête pinsà la parole : on pro- 
nonce mal, on balbutie, la langage est dpaisse, on commence 
enfin à ddlirer. Successivement, l'ivresse gagne, le sang 
monle à la téte, les traits de la figure se décomposent, les 
mouvements du corps cessent d'dire dirigés par la volonté : 
ils sont incertains ou cessent entièrement. En mime temps 
que cela arrive, les idées se confondent : on s'exalle, on 
dispute, on est dans un delire complet. Quelquefois on passe 
du délire au sommeil, à l'assoupissement, à la stupeur. 
Ce genre de délire varie selon la nature de lïndividu 
ou selon la qualité des substances enivrantes. Les enfants 
et les femmes tombent dans le délire de l'ivresse avec la 
plus grande facilité, en raison de la sensibilité et de l'irri- 
tabilité de leur syslème nerveux. Il y a des personnes qui 
peuvent supporler des quantités considérables de vin ou 
de liqueurs iortes sans en ressentir aucun mauvais effet. 
Le vin produit des effets dilférents selon la diversRé des 
tempéramenB, et spécialement selon la dilléreute organi- 
sation cérébrale des buvenrs. Ainsi, les uns son! gais, aima- 
bles, amoureux, les autres turbulents, querelleurs, lemé- 
rires, imprudents, cruels ou furieux. Il y en a d'autres 
qui sont triss, maussades, silencieux et graves : celui-ci 
chanle, un autre bavarde, et un Iroisième fait des vers ou 
des calembours. Comment espliquer une si grande variété 
des phénomènes résultant d'une méme cause? La pluralité 
des organes nous l'explique parfaitement. Selon qu'uu in- 
dividu a un organe cérebral plus ou moins développé, actif 
ou irritable, l'excitation générale causée par la boisson 
meRra en activilé ces reCes organes de préférence aux 
autres, et conséquemment nous aurous la manifestation et 
l'exaltation d'une ou de plusieurs qualités delerminées, de 
celles précisément qui sont/es plus predominanles ou les 
plus excRabls dans l'individu. L'observation qui a donné 
lieu au .proverbe in vino veritas est très-ancienne, mais 
l'explication est tout à fait moderne : elle et due aux con 
naissances précises de la physioloe du cerveau. 
Le aélire de l'ivresse oesse ordinairement au bout de 
qnelqnes heures : il est rare qq'il faille aoir recours à des 
moyens médicinaux pour le faire cesser. Les vomissements 
naturelsou procnrés soulagent promptement le patient. L'u- 
sage du café t un excellent moyen pour faire cesser l'i- 
vresse : les boissons fraches aciduiees font à peu près le 
mime effeL L'application de l'eau froide  la tte ou l'asper- 
sion générale de tout le corps sont des moyens très- 
utiles. 
On ne peut pas atlrihuer à la seule présence de l'alcool 
la propriété qu'ont les snbstances spirilueuses de produire 
le délire de l'ivresse : il parait que d'autres principes dé- 
lélères y contribuent également. L'ivresse de la bière ne 
ressemble pas à celle du vin et de l'eau-de-vie : elle produit 
sur nos facnltésun effet analogue à celui des narcotiques : 
elle aseupit, elle donne le sommeil plut6t qn'elle n'exal 
les facultés. 
Les n a r c o t i q u e s açssent puissammeut sur le eervean, 
et s'ils sont administrés à une dose trop forte, ils causent 
une sorte de délire qui remhle h l'ivresse. Le règme vé- 
gétal seul les fournit ; il y en a un très-grand nombre, et ce 
sont des médicaments très-utile quand ils sont donnés à 
67. 



592 
propos : tels sont l'opium, l'aconit, la belladone, 
la c i g u ê, le stramonium, etc. I! y a des champignons qui 
font nattre un dëlire plus ou moins grave et rendent comme 
fous ceux qui en mangent. Le délire e.aasé par les narco- 
tiques est triste : il y a stupéfaction, étonnement, confusion 
didées plul6t que mouvement, vivacite, exaltation; et si 
la dose a ïlWplus forte, l'engourdissement général, l'as- 
soupissement et la stupeur se manifestent. Dans ce cas, le 
système sanguin cérébral est gorgé de sang. Les Orienlaux, 
qui abusent assez souvent de l'opium, corrigent cet excès 
par le café. II parait donc que le café a une action sur notre 
organisme opposée , celle des Iiqueurs spiritueuses et de 
l'opium. L'expérience nous a convaincu que le café a la pro- 
priél6 de dégager le cerveau de la trop grande quantité de 
sang qui s'y porte, soit par Faction des subslances narcoti- 
ques ou spiritueuses, soit par un travail d'esprit trop pro- 
longé, soit par roule autre cause. Si le vin et l'opium causent 
le sommeil, le café cause la veille. Tous les narcotiques n'a- 
gissent cependant pas sur l'organisme et sur le cerveau de 
la méme manière que Popium et les boissons alcooliqnes; 
il y en aqui assent d'une manière opposée, et leurs effets 
dangereux ne peuvent Cre alCruits que par le v/n, les 
alcooliques, et antres stimulants véritables : tels sont la bel- 
ladone, les cbampions, etc. 
Le h a c h i se b produit aussi, comme on sait, une ivresse 
particuliëre. D c Foss_tTI. 
lçlOGNE  celui qui se livre  l'ivrognerie. 
IVIOGNE [ Herbe d' ). Voye.'- 
IVROGNERIE, intempërance dans l'usage de» huis- 
sons spiritueuses, dont les vapeurs affeclent le cerveau et 
troublent la raison. Ce vice annonce le défaut absolu d'é- 
ducation et les habitudes les plus grossières. Il engendre 
la misère parmi les pauvres et provoque tous les hommes 
au crime. Vainement on a voulu poétiser l'ivrognerie en lui 
donnant le nom d'ivresse. Quelle abstraction des sens 
ne faut-il pas fire pour chanter l'ivresse oceasionnée par 
l'excès du vin? Que les anciens n'aient point partagé pour 
l'ivrognerie le dgott des modernes, c -t ce que l'on potrr- 
rail discuter avec /lontaigne; mais certes les Spartiates 
l'appréciaient, quand pour en préserver leurs enfants, ils 
se contentaient d'exposer à leurs eux les ilotes pris de 
vin. Voyez l'essor immense donué en Angleterre et dans les 
États-Unis aux nombreuses sociétés de tempërance qui 
s'efforcent; avec plus ou moins de succès, d'arracher 
l'humanite h ce vice dégradant ..... C'est en raison de leur 
civilisation que les nations europeennes se sont meurtCs 
sobres; et l'on ne peut s'enivrer aujourd'hui sans ètre exclu 
de celle portion de la société qui, bien qu'en minorité, dc- 
cidera toujours des choses et classera les gens. Être ivrogne, 
c'est renoncer à exercer aucun droit dans sa patrie, c'est 
se démettre de la puissance paternelle, abjurer le respect 
filial, insuller à roules les affections que l'on peut inspirer; 
c'est dégrader la plus magnifique des erAallons du Tout- 
Puissant ..... Triste et aflligeante dans le jeune homme, l'i- 
vrognerie devient hideuse dans les vieillards et dans les 
femmes. Quand, par une infirmitë dont la cause peut de- 
meurer inconnue, le goal des boissons enivrantes se ma- 
nifeste avec quelque vivacité, il tant à l'instant s'en interdire 
l'usage, ce vice étant de ceux avec lesquels on ne transige 
point; autrement, il faut s'attendre ì la dëmence et à l'l. 
diotisme, qui heureusement prëservent quelquefois les 
ivrognes du crime et de l'échafaud. C'se  B. 
L'alcool es[ si promplement absorbé dans l'eslomae, et 
si grande est son affinité pour l'oxygène, que ce liquide 
peut occasionner la mort en quelques instanls par une as- 
phyxie comparable  celle qui a pour cause le charbon ou 
I acide earbonique. L'alcool est aussil6t absorbé par les vei- 
nos, et jamais on ne le trouve mëlé aux aliments ni au cbyme, 
ce qui le mitigerait. L'ox-gène de l'air ne ravilaille plus le 
sang, et celui-ci devient noir du moment oi, au lieu de 
carhonier le sang, l'o,gène se combine par prefrence avec 
"-'aie»et. Un anima qui, comme le chien, absorbe rapide- 

IVflESSE  IVflOI31EIIE 
ment l'alcool, peut mourir esplq'xié en quelques instant% 
quand mème la dose de ce dangereux liquide serait peu 
considérable ; et de mme pour l'homme. Plus l'estomac est 
spacieux, si en mme temps il est vide, ci plus l'animal 
qui prend l'alcool court risque de s'enivrer; or l'ivresse est 
un commencement d'aspb'xie. Ceux qui font abus de 
l'alcool uni moins d'urines, moins d'urée  mais beaucoup 
plus d'acide urique, principal élémenl des calculs et de la 
gravelle, dans les vingt-qualre heures qui suivnt de tels 
excès. L'ivrognerie expose doneà la gravelle, aux calculs, 
de mme qu'à la paralysie, qu'aux tremblements et à l'op- 
pression. D  lsidore Bono. 
En 1852, le révé'end J.-B. Owen, de Bilslon, faisait le 
tableau suivant des résultats de l'ivrognerie en 
terre : « L'ivrognerie, disait-il, est le mauvais démon de 
la Grande-Bretagne. Depuis le commencement du siècle, 
le peuple a dépensë pour boissons enivranles deux fois 
autant d'arenl qu'il en aurait fallu pour payer roule nuira 
énorme dette nalionale. . Londres seul il  a 180,000 
buveurs d'eau-de-vie, et dans cette ville on en consomme 
par an pour lrois millions de livres sterling { 75 millions de 
francs). Pendant les treize dernières années, t9,000 hom- 
mes et 183,921 femmes y ont été arrëtés pour ivrognerie. A 
llanehester, les classes laborieuses dépensent plus d'un 
million de liv. sterl. (b millions de Ir.) par an en eau- 
de-vie. A Edimbourg, il y a 1,000 dëbits d'eau-de-vie, 
tandis que l'on y compte seulement 00 boutiques de bou- 
langers. Sur 7,000 cas de paupírisme, 0,000 au moins 
doivent ètre altribués .q l'ivrognerie. A Glasgow, la taxe des 
pauvres s'ëlève - 100,000 liv. sterl. ( ,500,000 lr. ) par an, 
et, au dire d'Alison, 10,000 individus s'enivrent tous les 
samedis soirs, et restent dans cet état les dimanches et les 
lundis, au point qu'ils ne peuvent relourner à leur travail 
que le mardi et mème le mercredi. Dans la mème ville de 
Glasgow, on d,.pense tous les ans pour boissons alcooli- 
ques 1,200,000 liv. sterl. (30 millionsde francs), et on arrèle 
par an 20,000 fmmes ivres-rouvres. 
,, Et quels sont les résultats moraux de ces effra'anlea 
slalistiques? C'est l'aiénalion mentale, la misère, la pro- 
stitulion et le crime. Quant à l'aitCation mentale causée 
par l'ivrognerie, l'ëvque de Londres a constatWque su 
1,271 maniaques dont on a pu découvrir les anlécëdenls, 
.t9, dest--dire plus de la molliC ont eu la raison aRërée 
par les boissons alcooliques. Quant au paupérisme, leur le 
monde sait que les deux tiers de nos pauvres sont directement 
ou indirectement victimes du mème vice. Pour se convaincre 
combien Iïvrognerie contribue à provoquer à la prostitu- 
tion, il suffit de se rappeler qu'il y a plus de 80,000 femmes 
publiques à Londre«, et que toutes nos autres grandes villes 
sont également inleslëes d'Cormes essaims de ces malheu- 
reuses. Personne n'ignore que l'ivresse mène au crime. 
Dans la prison de Paddmnl, sur 5o0jeunes détenus, il 
en a tonlo,rsau moins 600 qui dès leur enfance ont nris la 
funesle habitude de boire. Le ehapdain de la ge61e de 
amplon m'a agsuré que sur 30 individus qui pendant le 
dernier semestre y étaient détenus, 173 avaient Cé conduits 
au crime par l'ivrognerie. Parmi ces 173 individus, il  en 
avait 6t qui avaient dèpensé par semaine de  shellings 
6 derniers jusqu'à 0 sheRings {3 fr. 15 ¢. à  fr. 50 c. 
pour boissons alcooliques; 15, de 10 shellings à 17 
shelling (1 fr. 50 e.  1 ff. 5 ¢.), et 10 avaient dé-" 
pensé en eau-de-vie tout ce qu'ils avaient gagné. 
Dans l'espoir de réprimer ce fàebeux penchant, des éco- 
nomistes ont conseillè l'èlévation des droits sur l'alcool et 
sur les boissons fcrmentees. Les gouvernements sont volon- 
tiers entrés dans celle voie ; niais il est permis de douter d 
l'efflcacité de ce moyen. D'abord la conlrebande supplée en 
partie aux rides produits par les exigences du fisc; puis les 
falsificalions multillient , au grand détriment de la santé 
publique, les boissons que l'on voulait éloigner de la con- 
sommalion; colin, l'appàt du fruit défendu s'y Joint : s'il est 
plus cher, on s'en donne moins souvent, mais on s'en donne 



IVROGNERIE  IVRY 
davantage quand on y est. L'État  gagxe peut-ètre quel- 
que chose, l'i, rugnerie n'y perd rien. M. Villermé deman- 
dait que tout ivrogne incorrigible for banni des ateliers. 
Alors qu'en fera-t-on ? !1 faudra le nourrir à rien faire, l'en- 
fermer à l'h6pital ou en prison! Qu'y gagnera la société ? 
En Amérique, la léslature de New-Jerse a mis les ivrognes 
sur le mtme pied que les aliénés, et les a déclarés incapables 
de gérer leurs biens. Belle punition pour des gens qui ordi- 
nairement n'ont pas de pain ; car, il ne faut pas l'oublier, c'est 
souvent la pénurie, la d6tresse, qui engendre l'ivr%merie! 
En Suède, rivresse est punie d'amende, puis, en cas de réci- 
dire, de la perte du droit de voter et d'Cre Alu, du pilori, 
de la prison correctionnelle a,ec six mois ou un an de tra- 
vail forc. Quiconque pousse h Professe subit aussi une 
amende, est suspendu ou destitué de ses Ionctions s'il 
en occupe. Dans ce pays, l'ivresse n'est jamais acceptée 
comme excuse, et un homme mort en état d'ivresse 
n'est pas inhumé dan. le cimetière. Tout cela est d'une effi- 
cacité douteuse. L'instruction, raisance, des instit utious d'une 
philanthropie éclairée, les boissons salues h un prix raison- 
nable, voilh les vrais remèdes h opposer ì l'ivrognerie. Le 
gouvernement a beaucoup fait contre les cabarets; il s'est 
donné le droit de les supprimer sans indemnité; il leur a 
dëfendu de donner à boire aux mineurs et aux hommes 
dej en état d'ivresse; il a augmenté les droits de consom- 
mation ; il a diminué la quantité de boissons que l'on peut 
acheter avec des droits moindres dans les ménages. L'ab- 
sence de récolte a fait plus encore pour la répression de 
l'ivrognerie, qui se r6pandait mème dans les campagnes ; 
mais quand l'abondance reviendra, les mesures du gouver- 
nement seront-elles suffisantes? L. LOQUET. 
]VRY ( lataille d'. Ivry-la-]3ataille, bourg de 950 habi- 
tants, avec des tanneries et des filatures de coton, situé sur 
la rive gauche de l'Eure, dans l'arrondissement d'Evreux, 
et qu'il ne faut pas confondre avec le village d'lvry-sur- 
Seine, dans la banlieue de Paris, peuplë de près de 7,000 
mes, tait au onzième siècle une place Iorte, qu'Ordéric 
"Vitaldésigne sous le nom d'lbreiurn. 11 lut le théàtre d'une 
entrevue de Louis le Jeune et de Henri I1 d'Angleterre. Pris 
d'assaut par Talbot en 1418, il était de nouveau assiégé en 
1424, sous Charles VII, par les Anglais; il dut se rendre 
le 15 an0t, mais la place fut reprise en 14-19 par Dunois, 
qui la dmantela. 
Les plaines voisines d'Ivry ont té ì leur tour le thë/tre 
d'une des plus célèbres batailles gagnées par Henri I V sur 
les ligueurs, le 14 mars 1500. H e n ri IV assiégeait la ville de 
Dreux. Mayenne, à qui le duc d Patine avait envoyé un 
renfort, sort de Paris, h la tète de toutes les forces dont 
peutdispeser la Ligue, afin d'essayer de forcer le roi h 
lever le siégé. Cette armée, composée d'éléments divers, 
ne comptait pas moins de 12 à 13,000 fantassins et 3,000 
cavaliers, mais seulement quatre pièces de canon; elle s'le- 
x,it h près du double de l'armée royale. En apprenant que 
llayenne approche, Henri IV lève le siëge, et dans les ins- 
tructions qu'il donne on trouve cette recommandation nou- 
velle, devenue depuis un axiome de guerre : Faites avancer 
les troupes dans çordre oi elles doivent combattre. 
Les deux afinCs se rencontrent entre l'Eure et l'lthon. 
Gràce à son ordre de marcbe, celle du roi est la première 
en bataille ; elle compte 8,000 fantassins, 2,300 cavaliers, 
y compris 700 gentilshommes, amenés par le duc d'l]umiè- 
res au commencement de l'action, et six pièce de canon. Le 
roi la range en ligne droite, en faisant alterner les batail- 
lons et les* escadrons; le maréchal d'Aumont commande 
raile gauche, ayant à ses c6ts le duc de Montpensier; 
Ilenri, à la tète de la gendarmerie française, se réserve le 
commandement de l'aile droite. En avant de l'aile gauche 
s'échelonnent une partie des enfants perdus, quelques es- 
cadrons de cavalerie légère, et l'artillerie aux ordres du 
comte de Guiche; l'aile droite est prëcédée et flanquée par 
300 relires. Le roi, par-une sage disposition, h laquelle il 
dut la victoire, et qui est devenue la règle fondamentale 

de la tactique moderne, forma en arrièredu centre une rserve 
d'infanterie et de cavalerie, dont il confia le commandement 
au maréchal de Biion. 
Li matin de la battaille, Henri IV, parcourant le front 
de son armée, adresse aux troupes cette courte allocution mi- 
litaire ,que nous a conservéed'Aubigné: « Mes compagnons, 
Dieu est pour nous; voila ses ennemis et les n6tresl Voici 
votre roi. Tombons sur eux 1 Si vous perdez vos enseignes, 
cornettes et guidons, ne perdez point de vue mon panache 
blanc.* Vous le trouverez toujours sur le chemin de l'hon- 
neur et de la ictoiro. » L'armée lui rêpond par des cris 
de vive le roi : 
Mayenne rgla son ordre d'altaque sur celui de Heri, en 
omettant toutefois de se ménager comme lui une retraite; il 
plaça sur sa gauche, is-à-vis du roi, ses meilleures troupe 
et les lances espagnoles et flamandes du comte d'Egmont ; 
au centre, les dues de .Nemours et d'Aumale ; à l'aile droite, 
le baron de Rosne. Entre dix et onze heures du matin, le roi 
ordonnait au comte de Guiche de commencer le feu de son 
artillerie qui, grâce h l:avan/age de sa position et à Iha- 
bilete de es pointeurs, donnait en plein dans les rangs des 
ligueurs, tandis que celle de l'ennemi, mal servie et mal 
dirigée, tirait sou eut sans atteindre, et causait peu de dom- 
mage. 
Rosne envoie une partie de sa cavalerie contre elle : cette 
attaque est repoussée par le maréchal d'Aumont. Une se- 
conde, dirig6e avec plus d'ensemble et de igneur, va avoir 
un plein succès, quand Biron accourt avec la réserve, tient 
tête aux ligueurs, et les met en fuite. Mayenne tombe en 
personne sur l'aile droite, od le roi se di»tingne au premier 
rang;.les tertres de la Ligue, déja ébranles par le leu de 
l'artillerie royale, se battant d'ailleurs aec o]Jes»e on[re 
un protestant comme eux, f,»nt volte face. L'impatience 
s'empare du jeune comte d'E,mont, qi les suit avec ses 
bandes wallonnes et espagnoles; sans attendre la troisième 
décharge, il s'dance sur les batterie» ; l, par une folle bra- 
vade, il tourne contre la gueule des canons la croupe de son 
cheval, et donne à ses hommes l'exemple de cette bizarre 
insulte à une arme qu'il déclare tre celle des berCiques et 
des IAches. Biron, le mar6chal d'Aumont et le grand prieur. 
ont aisément bon marché de cette cavalerie en désordre; 
d'Egmont est tué, et les ligueurs l]echissent. 
La victoire va se dêclarer pour l'armée royale  mais un 
mouvement d'hésitation s'y manifeste : un jeune seigneur, 
qui se retire, accompao-nant la cornette du roi, gdëvement 
bless6, porte un panache blanc comme Henri IV : on le 
prend pour lui. Le Béaruais s'aperçoit de l'erreur, et se met 
h parcourir au galop les rangs de sa petite armée aux cris 
mille fois r#pétés de rive le roi ! Par bonheur, en ce mo- 
ment un autre incident vient jeter le dësordre parmi les 
reitres de la Ligue : on laissait d'ordinaire ì ces escadrons 
irréguliers un espace entre les lignes de l'infanterie, pour 
qu'ils pussent s'y reformer aprë chaque charge. Cet expace 
leur manque tout à coup, par suite d'un mouvement mal 
combiné du vicomte de Tavannes, et ils vont donner en 
plein, de toute la force d'impulsion de leurs chevaux, contre 
les lanciers de Mayenne. ;ainement celui-ci s'efforce de 
rétablir l'ordre. Le roi, qui vient d'Cre si bien accueilli par 
ses troupes, profite du trouble des escadrons ennemis pour 
les charger, h la tête de sa noblesse; et chefs et soldats ne 
saveut plus que fuir. L'iulanterie tient encore bon, dans la 
plaine, exposée seule à tous les coups de l'arue royale; mais 
les Suisses, au nombre de 4,000, livrent leurs armes : on 
les reçoit/ merci. Les lansquenets veulent en faire autant; 
le roi est forcé de les abandonner à la vengeance de ses 
soldats, qui n'ont pas oublié leur trahison : tout ce qu'il 
peut faire, c'est de leur crier : « lIes compagnons, sauvez 
les Français 1 Main basse sur l'tranger ! » Au reste, ce 
qu'il prescrit aux autres, il l'exécute lui-reAme avec tant d'a- 
charnemenl, qu'il tue de sa main l'écu)-er du comte d'E- 
moul, et que sans le prompt secours que lui porte le comte 
d'Auvergne, il était pris par les cvalier» wallons. 



634 
Cinq mille Rgeursreslrent sur le champ de bataille; beau- 
coup se noyëreut daus l'Eure. Mayenne rallia tout au plus le 
tiers de ses forces; l'armée royale n'avait perdu, dit-on, 
que 500 hommes. Cette belle victoire lot consacrée par une 
pyramide, que détruisit la revolution de 1793, mais que 
/onaparte, consul, ordonna de relever, le 29 oclobre 1802, 
ci sur laquelle il lit graver, entre autres inscriptions, ces 
lignes significatives : « Toute famille, tout parti, qui appelle 
les pu/ssances étrangères b. son secours a mérité ou mëri- 
tera la malédiction du peuple français. » La poésie a sou- 
vent célébré ce triomphe ; et Voltaire, dan.s sa Henriade, 
lui a consacré un de ses pins brillants épisodes. 
IVAN. Vo[/e. IVAS. 
i VEIN est le nom du héros d'une legeude bretonne ap- 
partenant au cycle des Iégendes du roi Arthur, que C h ré- 
t i en de Troyes, troovè| du nord de la France, qui ilorissait 
au douzième siècle, traita sous le Ùtre de Le Clzevolier 
Mu lion, et qui Iournit au poëte allemand Hartmann von 
.ue le sujet du meilleur de ses poëmes, lwen. Un conte 
gallois La Femme de la Fontaine, couteuant la legende 
d'hvein, mais qui n'est pourtant pas la source du poCe 
rançais, a té publié d'après ou manuscrit du quatorzième 
siècle en lan]e gaélique par lady CharlotteGuest, dans la 
première partie de son M«bogrm ,Londres, 1838). M. Th. 
,le la Viilemarqué I'a tradtfit en français, d'après un ma- 
nuscrit «lu treizième siècle, dan« ses Contes populaires des 
nciens retons ( vol.; Paris, 18-12). La.ly CharioRe Guest 
a publié aussi pour la premiere fois, dans le mème recueil, 
le poeme entier de Chrétien de Troyes» qu'on ne connais- 
sait encore en .ngleterre que par des extraits insulfiants 
du fra.nçais et par la vieille traduction anglaise que Ritson 
en avait donnée dans ses Ancient English mericl o- 
naces (Londres, 1802), d'après un manuscrit de Paris. 
.eller en a publié, d'aprës un manuscrit de la Bibliothëque 

IV-RY  IZEDS 
du Vatican, des fragments considérables, dans £| lloman 
dou Chevalier au leon (Tubingue, 182il) et dans son 
mort (Manheim, 184). 
IXION, roi de Thessalle et, suivant l'opinionla plus 
commune, fils de Phiéas, épousa Dia, fille de Déi on é e, 
et fut le premier qui se rendit coupable d'an meurtre dans 
sa famille, en faisant périr dans une fosse ardente son beau- 
père, Iorsqu'ii vint le trouver pour recevoir son présent de 
noces. Ixion, il est vrai, s'en repentir plus lard, et alla 
chercher dans les mystères la réparation de son crime ; 
mais elle lui fut refusée. Il devint alors furieux. Jupiter, 
plus indulgent que les prttres de l'initiation, lui pardonna, 
et l'ayant absons, le reçut dans i'Oiympe, où il lut admis au 
festin des dieux. Mais, se sentant épris d'amour pour Ju 
non, il chercha à satisfaire sa passion; et Jupiter, pour 
prévenir un crime inconnu dans POlmpe, donna la forme 
de son épouse à une nuée : Ixion en eut un monstre connu 
sous le nom de Centaure, et le marre des dieux, irrité de 
tant d'arrogance, le punit en le précipitant dans le Tarlare, 
où il fut attaché à une roue, qui tourne conti,_uellement 
avec la plus grande vitesse. La fable ajote que 
Proserpine fit son entrée aux enfers, il fut délié pour la 
première fois. Ici l'astronomie apparoir facilement, car on 
peut considérer la roue d'lxion comme le zodiaque, snr 
lequel le soleil tourne sans s'arr6ter: mais lorsque la cons- 
tellation de la Vierge, qui prend le nom de Prosepine, 
monte à l'orient de l'horizon, elle entraine à sa suite Ophi- 
chu% ou le Serpentaire, et le Centaure, sur lesquels le soleil 
passe tour a tour. Virgile suppose que les accords méio- 
dieux d'Orphée suspendirent la roue à laquelle était atta- 
clw Ixion. Ch e Alexandre Lom. 
IZEDS. Dans la religion de Zoroastre, cesont des génie 
bienfaisants, opposés aux Dew s, ou genies du mal. Cr6és 
par Ormuz,I, ils sont au nombre de singt-huit. 



J la dixième lettre de l'alphabet français et la sep- 
tième des consonnes. Sa fonction particulière étant de re- 
présenter l'articulation sifflante qui se fait sentit au com- 
mencement des mots jactance, jaillir, jalousie, etc., on a 
cru devoir donner à ce caractère d'abord le nom defi, puis, 
avec les grammairiens de Port-Royal, celui de je, en le 
prononçant comme dans le pronom de la première per- 
soune. La lettre j est une consonne linguale, silflante, et 
faible comparativement  l'articulation forte du ch dans les 
mots Chactas, chailletie, chaland, etc. Il y a dans l'al- 
phabet • grec et dans l'alphabat hébreu une lettre que les 
premiers rendent par th, et les seconds par t, et qui se 
prononce comme une espèce de  aspiree. C'est cette let- 
tre que nous avons remplacée pari. Le j peut tte regardé 
comme propre à l'alphabet français; car aucune des langues 
anciennes n'employait l'articulation dont elle est le signe 
représentatif, et parmi les langues modernes qui en font 
usage, il est à remarquer qu'elles la représentent par des 
signes différents du ntre. Ainsi, en italien, pou dire ja- 
mais, jardins, jonc, on écrit 9iaznma, 9iardini, 9iunco. 
Les Epagnols, tout en l'adoptant, la prononcent d'une ma- 
nière particulière, qui lui donne presque la valeur d'un 
tiré du fond de la gorge, et proféré en tournant le bout de 
la langue vers le haut du palais. Dans la prononciation 
du français/es Allemands confondent souvent j'ose et chse, 
et les Italiens substituent le :e au je. 
Autrefois, on donnait à la lettre j le nom d'i consonne ; 
mais cette dénomination n'était point fondée. En effet, le 
j n'a rien-de commun avec l'i, ni la forme, ni le son, ni 
l'emploi..Il est donc inexact de revétir ces deux lettres de 
la méme dénomination, et surtout de les confondre en- 
semble dans les nomenclatures par ordre alphabétique, 
comme l'ont tait Ionemps tous les dictiunnaires. Le j a 
été appelé i d'Hollande par les imprimeurs, parce que ce 
rent les Hollanda'Ls qui introduisirent les premiers ce ca- 
ractère dans l'impression. Chez quelques auteurs, cëtait 
un signe numéral qui signifiait cent. 11 figure comme abrë- 
viation dans J.-C., Jësu-¢hrist. CnA.I'pAGNAC. 
JA BIPU. Voye= 
JABLONOVSII. Voye-'- IAL0OWSaL 
JABOT, dilatation de l'oesophage, qui dans la plupart 
des oiseaux, particulièrement chez les granivores, emble 
lenir lieu de premier estomac. Les aliments y séjournent 
quelque temps avant de descendre dans le gosier, et s'y 
imbibent d'un fluide analogue à la salive (voyez GtSln). 
Jabot se dit aussi de la mousseline plissée qu'on attache 
comme ornement à l'ouverture d'une chemise, au devant 
de l'estomac. Faire jabot, an figuré, c'est se rengorger, 
se donner de grands airs. 
JABOTER. Voye 
JACASSER oaomalopée du cri de la pie, dont on fait 
un fréquent usage à Paris, dans son acception figurée, et 
qui signifie babiller comme une pie. Ce mot vient d'a9asse 
ou agacf, l'un des noms de ce volatile. 
JACEE. Voyez 
JACHÈBE ( du latin jacere, ëtre conché). On désigne 
par ce mot l'Arat de repos dans lequel on laisse une terre 

labourable qui vient de produire. L'usage des jachères se 
perd dans la nuit des temps; mais dans le principe c'etait 
plut6t au défaut de bras pour cultiver les terres et à l'C 
tendue de celles qui étaieat échues en partage à chacun 
qu'il faut l'attribuer : c'est ainsi que de nos jours encore 
la plupart des peuplades sauvages ou nomades, après avoir 
ensemencé un champ plus ou moins vaste et recneilli ses 
produits, vont plus loin défi-icher un champ inculte, auquel 
ils demandent des productions que ne leur relnserait point 
cependant celui qu'elles abandonnent. Plus tard, un préjugé 
a fait passer en habitude ce qui tenait pent-tre plutôt au 
caractère des agriculteurs ou aux circonstances où ils se 
trouvaient. , La terre, disait-on, s'épuk, erait à produire 
trop long temps de suite; le repos lui est donc nëcessaire 
pour réparer la déperdition de forces qu'elle éprouve par 
une exploitation continue.., Et ce premier point une fois 
pasC le seul moyen qui se présentat a l'esprit consistait à 
laisser en friche et irnproductii le cbamp que l'on regar- 
dait comme épuisé par les récoltes qu'on en avait obtenues. 
Les cnltivateurs anciens laissèrent reposer leurs terres pen- 
dant des époques plus ou moins longues, tant qu'ils ju- 
geaient qu'elles n'avaient point récupere leurs forces produc- 
tives et leur fécondioE primitive. 
La durée des jachères a d0 ètre excessivement variable, 
selon les circonstances, le climat et la nature du sol ; cet 
état d'improdu¢tion a deux modes bien distincts :il est 
absolu et complet, ou relatif et incomplet. La jachère ab- 
solue et complële est celle qui dure une ou plusieurs an- 
nées, pendant lesquelles la terre ne reçoit aucune espèce 
d'ensemencement. La jachère ncomplète et relative est 
celle qui ne dure qu'me partie plus ou moins courte de 
l'année, selon les circonstances : ainsi, les jachères d'hiver, 
nécessitées par la préparation des terres à de nouveaux 
produits et par d'autres opération aratoires, non moins 
que par la position et l'accès difficile de certains champs, 
et les jachères d'ëtoe, nécessites, immédiatement après la 
récolte, par la chaleur brillante des climats méridionaux, 
ou mëme par t'incurie des propriétaires, qfi ont laissé 
envahir leurs champs par un gazon epais, et des plantes 
vivaces et peu aisées à extirper, reutrent dans cette der- 
nière catégorie, et sont presque toujours utiles', quelquefois 
mbme indispensables. Mais nous sommes beaucoup moins 
disposés à nous faire les apolostes de la jachère absolue. 
On peut considérer celle-ci comme annuelle, bisannuelle, 
et pérenne, d'après la distinction établie par le savant 
M. Yvart : annuelle lorsque la terre est soumise durant une 
année à des travaux et à des opérations aratoires destinées 
à la préparer à la récolte suivante ; bisannuelle lorsque 
la terre, après un repos d'une année, est soumise durant 
la seconde à ces reAmes opérations, et pdrenne lorsqu'on 
l'abandonne entièrement fi la raature, qui répare, après un 
temps plus ou moins long, les maux qu'une culture avide 
et barbare a cansés. 
Mais pour recunnaitre comme juste et raisonnable le 
système des jachères, pouvons-nous admettre que la terre 
épuise ses forces et qu'elles ont besoin d'tre reuouvelées? 
ul doute, c'est là un de ces préjuges si nombreux chez 

535 



536 
les hommes qui s'occupent d'agriculture, contre lesquels il 
n'est pas besoin d'entrer dans de longs raisonnements : la 
verdure éternelle des forCs, des prairies, etc., est une ré- 
ponse vivante que la nature fait elle-même b. ceux qui l'ac- 
cusent ainsi de ne produire que forcée par nous, et qui, 
l'assimilant à leur propre faiblesse, la supposent incapable 
de produire longtemps sans avoir besoin, comme nous, 
d'un repos réparateur d'assez longue durée, ou, si nous 
pouvous rappeler ici cette expression pittoresque d'un 
paysan, de foire elle ossi son dimanche. Au lieu d'a- 
dopter un système dont personne ne reConnaît les innora- 
brables inconv8nients, il e0t été plus logique d'examiner 
si le principe sur lequel il était fondé était vrai. On e0t étL conduit à reconnaltre, par l'observation, que la diminution 
dans la production provient non de l'épuisement des forces 
«le la turfC mais des suites de son encrassement autant que 
de la succession des cultures épuisantes qu'on lui demande : 
on e0t alors été amené, en dernière analyse, à dire qu'il 
filait non point la laisser en jachëre, mais la corriger par 
ds engrais, des amewlements, des ameublissements; par 
la culture de plantes amelioranles et réparatrices, qui la 
nettoyeur en mème temps, et remplacer la jachère par un 
assoI cm en t ou rotation de culture sagemeut combiné : 
Pexpérience d'un grand nombre de propriétaires qui ont 
agi ainsi a biWconcluante contre les jachères. 
JACINT||E. De toutes les plantes cultivées pour l'or- 
ne'ment des jardins, la jacinthe orientale (hyacinthus 
oriento[is, L. ) est une des plus répan«lues et des plus re- 
çherchées pour la beauté de ses fleurs, aux couleurs les 
[,lus vives et au parfum le plus suave. En hiver elle em- 
I;aume l'air des appartements et des serres, od elle fleurit 
aussi bien qu'en pleine terre, soit dans des vases remplis 
d'eau, soit dans des pots, des jardinières ou des caisses. 
Au milieu des jardins, dës le premier prinlemps, la ja- 
cinthe élève une tige de 0m,30 à 0m,50 de hauteur, chargée 
,le fleurons des couleurs les plus variées, et dont le dia- 
mètre dépasse souvent cinq centiraëlres. Elle prïsente un 
,,rand nombre de variétés, soit h fleurs simples, soit a fleurs 
doubles, toutes fort recherchées des amateurs. On en 
compte jusqu'a deux mille bien distinctes, cailleAes dans 
les collections de France et de Hollande. Les variétés 
fleurs simples portent le nom de passe-tout, et se mulli- 
plient par leurs bulbes et quelquefois aussi par leurs 
mences, qui donnent naissance à des variétés nouvelles et 
précieuses. 
Outre la jacinthe orientale et ses innombrables variétés, 
on cultive un grand nombre d'autres espèces de jacinthes, 
qui toutes sont remarquables par leur port et leur parfum ; 
ce sont : la jacinthe des pr#s ( hyacnlhus protensis ), 
aux fleurs bleues et nombreuses, qu'on reCe avec goal 
aux crocus, aux colcldques et aux perce-neige, dans les 
gazons d'agrément, od elle se multiplie très-bien ; la 
cnthe penchée { hyacnthus cernuas ),  fleurs roses; la 
jacinthe à flcurs vertes {hyacinthus iridis); la ja- 
cinthe fi fleurs pdles ( hyaeinthus serotinus ) ; la )acinthe 
à fleurs rouldes (hyacinthus revolutas), à fleurs cam- 
panulées verdttres et d'un effet très-remarquable ; la ja- 
cinthe d'ltalie ou jacinthe romaine (hyacinthus ro- 
manus), à fleurs blanchîdres et d'un arome très-prononcé 
la jacinthe pauicul(e ( hyacinthus rnonstruosus ), 
qui porte les noms de raascari raons{rex et de lilas 
de terre, à fleurs bleutres et groupées autour de la 
hampe, l'une des plus cultivées ; la jacinthe à fleurs en 
t$te, jacinthe à toupet ( hyacinlhus comosus, rauscari 
cornosurn ), à fleurs bleues formant une téte au sommet 
de la hampe, d'où lui vient son nom ; la jocinthe arrd- 
thiste (yacinthus amethystimls), aux fleurs bleues et 
l'une des plus élégantes; la jacinthe botride {hyacinthus 
botr9oides), h fleurs violettes et nombreuses; la jacinthe 
à feuilles de jonc (hyacnthus racemosus), à fleurs bleues 
et très-odorantes ; ia jacnlhe leu#e ( hyacinthus elatus ), 
 fleurs verdtres en dehors, blandes en dedans ; et enfin 

JACHÈRE -- JACKSON 
la jacinthe muguet ( hyacithus convelfaroides), à fleurs 
jaunes et d'un très-bel effet. 
Toutes les jaciblhes se multiplient par leurs bulbes, qu'on 
planle dru'ont tout l'automne et jusqu'en mars. La jacinthe 
est de la famille des liliacées, si riche en plantes bulbeuses 
d'ornement et faciles à forcer, c'est-h-dire à faire fleurit 
l'hiver dans les appartements on les serres. 
TOLLnn aihC 
JACESON (A_-mw), président des Etats-Unis de 
reCique du Nord (1829-1837), naquit le 15 mars 1767, à 
Waxsaw, près de la ville de Camden, dans la Caroline du 
Sud, de parents originaires d'Irlande, et fut d'abord destiné 
à l'Cut ecclésiastique. Mais-lors de l'irruption de sa pro- 
rince par les Anglais, il déserta à l'ge de quatorze ans 
seulement les bancs de l'ecole, et entra dans les rangs des 
défensenrs de l'indépendance américaine. Ses deux frères 
étant mor[s au champ d'bomeur, et son père et sa mère 
ayant peu de temps 3près rejoints au tumbeau Andrew 
Jackson, alors gë de dix-sept ans, renonça au service 
pour étudier le droit ; et en 1787 il débuta comme avocat 
dans la Caroline du Nord. En 1790 il alla s'élablir sur le 
nouveau territoire de Tennessee, oi] il fut nommé procureur 
général par le prêsident Washington, et où, en sa qualité de 
commandant de la milice locale, il eut occasion de repousser 
maintes fois les irruptions des Indiens. Quand le Tenuessee 
fut admis au rang d'État membre de l'Union, il fut Cu 
membre du comité chargé d'elaborer le projet de constitu- 
tion du nouvel Etat, projet adopté en t796. A peu de temps 
de là, il alla représenter ses concitoyens au congrès, et fut 
Cu sénateur dës 1797. La prépondérance que les fédéraliste 
obtinrent à ce moment le dclermina bient6t à renoncer à 
toutes fonctions publiques. Le Tennessee formait alors 
l'extréme frontière de l'Union. Sa population, constamment 
exposée aux attaques des Indiens, avait contracté des habio 
rudes sauvages : on marcliait toujours armé, et guerroyer 
était devenu un tel besoin, que lorsqu'on n'allait pas a la 
chasse aux Indiens, on s'entr'égorgeait au milieu ou à la 
suite des excès de l'ivresse ou du jeu. Andrew Jackson, 
qui exploitait une fermesur les bords du Cumberland, était 
devenu l'un des héros de cette vie d'aventures et d'orgies, 
lorsqt'en t12, au moment où la guerre ëclata entre les 
ltats-Unis et l'Angleterre, l'Êtat de Tnnessee lui défera 
le commandement supérieur de la milice avec le grade de 
général major. A la tte d'un corps de 2,500 hommes, Jack- 
son descendit le Mississipi, pour mettre les e6tes de la 
Louisiane à l'abri d'un coup de main  puis il marcha contre 
les Indiens Creeks, qui, secondés par les Espagnols de Pen- 
sacola, portaient le fer et le feu dans le po)s, les batlit, les 
rejela dans la FIoride, et s'empara méme de Pensacola. Les 
Anglais ayant, à quelque temps de là, menacé la Nouvelle- 
Orléans, Jackson reçut du congrès le commandement des 
troupe de ligne. A sou arrivée dans cette ville, il n'y troua 
ni soldats, ni armes, ni munitions. Ces circonstances dif- 
ficiles lui fournirent l'occasion de déployer toute l'énergie 
de son caractère. Il proclama la loi martiale dans toute sa 
rigueur, suspendit les pouvoirs de toutes les autorités ci- 
elles sans distinction, déclara l'assemblée législative de la 
Louisiane dissoute, fit fermer et garder militairement le 
local de ses séances, et appela toute la population aux armes, 
menaçant les habitants de la I%uvelle-Orléans d'incendier 
leur ville s'ils ne faisaient pas bonne contenance devant l'en- 
nemi. Aussi se trouva-t-il bient6t en mesure de repousser 
toutes les attaques que les Anglais pourraient tenter cout 
le chef-lieu de la Louisiane. Ceux-ci, qui comptaient danl 
leurs rangs dix mille hommes de vieilles troupes éprouvées 
par les campagnes d'Espagne, ayant essayé le 8 jan- 
vier ! 815 d'enlever d'assaut les retranchements que les Am- 
ricains avaient élevés à quelques milles en avant de la Nou- 
velle-Orléan% furent repousses malgré la supériorité de leur 
nombre. Le lendemain on signait un armistice, et quelques 
jours après les débris de l'armée anaise évacuaient le tex- 
ritoire de l'Union. Cette victoire popularisa exttvaement lu 



JACKSON 
nom d'Andrew Jaekson aux Etats-Unis; cependant, les pro- 
cdés par trop violents et arbitraires dont il avait cru 
voir user dans l'eercice de son commandement lui valu- 
rent des poursuites judiciaires, par suile desquelles il filt 
condamné à une forte amende. De t817 à 1818, Andrew 
Jackson, reprenant son ancien méfier de chasseur d'In- 
diens, se distingua dans une guerre d'extermination que 
l'Uniou déclara alors aux tribus Seminoles; ruais le sans- 
gne avec lequel il fit fusiller deux marclmnds anglais, ac- 
cusé« d'avoir excité les Indiens à prendre les armes, fut 
encore pour lui la source de nombreux désagréments. 
L'incorporation de la lloride aux Etats-Unis était à ce 
moment la pensée qui préoccupait toute la population de 
l'Union, comme de nos jours ellc convoile el rve la con- 
qute et l'annexion de l'ile de Cuba. Andrew Jackson devint 
plus que jamais l'homme de la démocratie, en flattant ses 
go0ts et ses passions. La démocratie américaine trouvait la 
Floride à sa convenance ; Jackson s'arrangea de façon à la 
lui faire avoir, bin gré mal gré. Le gouvernement fédéral se 
prta d'ailleurs hypocritement à une petite comédie diplo- 
matique, désavoua bien Iiaut les procdés de Jackson, mais 
le laissa faire. Jackson put donc envahir librement les IIo - 
rides de I mme façon que procédaient autrefois les fl i- 
bu st i e r s, et, sans que les autorités espagnoles eussent 
fourni à l'Union le moindre prétexte d'hostilités, il planta 
successivemenl le drapeau américain sur les dilférentes 
place« fortes que l'Espogne possëdait dans celle contrée. La 
Floride une fois conquise de fait, le cabinet de 1ladrid, 
déjà bien assez embarrassé de la lutte qu'il lui fallait sou- 
tenir à ce moment contre ses colonies insurées, dut se 
résigner  la céder aux tats-Unis (182t). 
En 1823 Andrew Jackson fut de nouveau Cu sénateur 
par le Tennessee. L'année suivante l'assemblée léslative 
de cet État le présenta comme candidat à la présidence, 
et il obtint, surtout dans le sud, un nombre considérable de 
voix. Les élections n'ayant pas donné la mjorité voulue 
ce fut, aux termes de la constitution, à la chambre des 
présentants qu'échut la mission de désigner le nouveau 
président ; et cette assemblée Cut A d a m s. Toulefois, aux 
élections suivantes, le parti démocratiq|le auquel apparte- 
nait Jacltson obtint une majorité considérable ; et le 4 mars 
1829 il fut appelé à s'asseoir sur le siCe présidentiel. 
On doit lui rendre cette justice que dans l'administration 
intérieure il apporta plus de modération qu'on n'était en 
droit d'en attendre de lui, et qu' l'extérieur, tout en sachant 
faire respecter les droits des États-Unis, il s'efforça en gé- 
néral de maintenir la paix avec les puissances étrangères et 
d'étendre le commerce de l'Uuiou américaine, en adoptant 
une politique libérale. Le gouvernement de Louis-Philippe, 
plac entre une guerre avec les États-Unis et la nécessité 
de liquider une vieille dette plus ou moins fondée, réclamée 
par Jackson avec une fermeté qui imposa au cabinet des 
Tuileries, trancha la difficulté en payant les 25 millions 
qu'on lui demandait. Sans doute, en assant de la sorte, 
les conseillers de Louis-Philippe pensaient que la France 
dtai assez riche pour payer la paix, qui après tout est 
le plus grand bien..Ne devait-on pas quelques années plus 
tard proclamer que la France est bien assez riche pour 
payer sa 9loire! Les 25 millions d'indemnité payés par la 
France, sur les réclamations aussi hautaines que provo- 
quantes du énéral Jackson, demeurèrent un des plus puis- 
sants griel;s de l'opinion contre l'Cu des barricades. 
L'oppositiou évita de hltter dans le congrès contre le pre- 
sident ; et ce ne fut qn'en 1831 qu'éclata de nouveau la lutte 
des partis provoquée par les importantes questions du re- 
nouvellement du pfivilége constitué en faveur de la Banque 
de États-Uniset du tal-ifdes douanes, et par les querelles avec 
les Indiens que depuis 1830, d'aprés les plans de Jackson, 
on s'était rai» à refouler toujour. de pllls en phls sur la rive 
droite du ,lississipi. Dans l'ëlé de 1832, la résistanceau tarif 
de.« douanes pi'il daus la Caroline du Sud une n«rgie telle, 
qu'on put un moment four craindre |,out la Iranquillite de 

-- JACOB 537 
l'Union, et mme pour sa durée. C'est au milieu de cetle 
crise redoutable que Jackson fut Cu président nour la se- 
conde fois. A la Caroline, qui pour obtenir la uppression 
du tarif menaçait de se séparer de l'Union, il adressa une 
proclamation où l'esprit de conciliation n'excluait ni l'é- 
nergie ni la dignité, en mme temps qu'il fil des préparatifs 
militaires pour que force rest,t  la loi. L'abaissement 
du tarif eut à peine détourné ce péril, que la question du 
privilégi de la Banque en provoqua d'autres. Jackson 
posa son veto au renouvellement du prkilége de cette ins- 
titution, parce qu'il y voyait un monopole constitué uni- 
qnement en faveur de l'aristocratie des écus ; et il retira 
mme des coffres de la banque les fonds appartenant à 
l'Etat. Il en résulta entre le prident et les Iiommes d'ar- 
gent une lutte d'autant plus générale et plus vive, que dans 
de telles circonstances la banque se it nécessairement 
forcée de reslreindre les facilités et les avantages qu'elle avait 
faits jusque alors au comlneree. La banque finit par suc- 
comber; mais sa défaile porta un rude coup à la prospérité 
du commerce de l'Union. Quoi qu'il en soit, Jackson avait 
atteint son but : imposer des entraves aux spéculations exa- 
gérées des hommes d'argent, et mettre la démocratie et ses 
institutions à l'abri des enahissements et des usurpations 
de la ploutocratie. Cette polilique donna lieu aux contradic- 
tions et aux attaques les plu vive» ; mais elle obtint au plus 
haut degré l'assentiment des masses, comme le prouva bien 
en 1836 l'élection de Martin Van Bul-en/ la pré.«i,lence, faito 
sur la présentation de ce candidat par Jackson lui-mème. 
Au mois ,e mars 1837, le général Andrew Jackson se 
retira dans le domaine qu'il possédait dans le Tennessee, off 
il resta désormais témoin, sinon actif, du moins s.mpa- 
tllique des événements. Membre zéle de l'Église presbyte- 
tienne, il fit aussi preuve, dans les dernières années de sa 
vie, d'un grand esprit de relioité, qui lui ai,la à supporter 
patiemment de rudes Creuve% telles que de graves infir- 
milé. physiques et la perte d'une notable partie de sa for- 
tune. A la suite d'une longue «'t douloureuse maladie, il 
mourut dans son domaine de l'Hermitag», près de Mash- 
ville, le 8 juin 18i5, emportant les regrets de ses adver- 
saires politiques eux-mmes, forcés enfin de reconnattre 
qu'en tout et partout il n'avait jamais eu d'autre mobile 
que l'intérët généml. 
JACISON, chimiste de Boston, a élé l'un des inven- 
teurs de l'éthérisation. 
JACO, nom commun du perroquet cendré, un des 
types les plus communs de l'espëce. Ce perroquet, suivant 
Blflfon, est celui qui se lait le plus aimer en Europe, tant 
par la douceur de ses mœurs que par son talent et sa do- 
cilité, en quoi il égale au moins le perroquet vert, sans 
avoir ses cris désagreables. Le nom de jaco, qu'il parait se 
plaire à prononcer, et le nom qu'ordinairement on lui 
donne. Toutefois, jaco n'est pas son cri naturel, et ceci 
n'est qu'un mimologisme. La plupart de ces perroquets nous 
viennent de la Guinée. On en trouve aussi ì Congu et sur 
la céte d'Angola. 
JACOB, second fils d'Isaac, fut le dernier des pa- 
triarches et la souche des lsraélites ou Juils. bloyen- 
nant un plat de lentilles, il amena son frère aihC Ésai, 
à lui céder son droit de primogéniture; plus tard encore, 
à l'instigation de sa mère, il surprit à son père la béné- 
diction que celui-ci croyait donner à son fils ainé ; bené- 
diction  laquelle se rattacllait l'accomplissement de la 
promesse talle à Abraham. Redoutant la vengeance du frëre 
qu'il avait si gravement offensé, Jacob se réfuia en Méso- 
potamie, aoprès de son parent Laban, qu'il servir pendant 
quatorze ans pour obtenir de hli ses deux filles, Lia et Ba- 
chel, en mariage, et encore pendant six ans de plus pour 
acquérir aussi la pl'oprilé d'un troupeau, il s'enfili! ensuile 
de chez Laban, avec ses femmes, ses enfanls ci ce qui lui 
appartenait: poursuivi dans sa filtre par son heau-pore, 
il se racc.mmoda avec lui par une transaction amiable. 
Jacob revint alors dans la terre de Canaan, d aprè 
6 



538 JACOB 
réconcilié avec son frère, fl y mena la vie de pasteur. Il 
eut la douleur d'y perdre sa bien aimëe Bachel, et le fils 
d'un prince des Hévites viola sa fille Dina- 
Jacob eut douze fils, dont six de Lia : lubeu, Siméon, 
lvi, Juda, Isascbar et Sebulon ; deux de Bachei : Joseph 
et Benjamin; deux de sa concubine Biiha : Dan et NaphtaIi 
deu, d'une antre concubine, Silpa : Gad et Asser. Son fa- 
vori Joseph fut vendu par ses frères à des Ismaélites, qui 
l'emmenèrent avec eux en Égypte. C'est là que son père le 
retrouva comblé d'honneurs et de dignités ; et à sa sollici- 
tation, Jacob vint s'établir dans le pays de Gosen, riche en 
pàturages, où il mourut, à ràge de cent quarante-sept ans. 
On ne saurait nier que te caractère de Jacoh, surtout dans 
les premières années de sa vie, est loin d'ètre à l'abri de 
tout reproche, au point de vue de la morale, et bien an- 
dessous de la candeur et de la loyauté de son atné ÊsaU. 
JACOB (Louis), dit de Saint-Charles, savant biblio- 
graplie, appartenait à l'ordre des Carmes. Né à Chlous-sur- 
Sabne, en 160S, il devint bibfiotbbcaire d'Achilte de Harlay, 
et mourut chez ce magistrat,  Paris, en 1670 ( 
GRAPlIlF ). 
JACOB ( Bton de), nom de trois étoiles de la anus- 
tel|arien d'O r i o n. 
JA.COB (Bttun de) ou ASPHODËLE JALE. Voe-- 
BATO. n JLco. 
JACOBEE de Hollande. Vo?/e= 
JACOBÉE MAIITIME. Voye: 
JACOBi, Voye= heure. 
JACOBIN (Histoire naturelle). On désigne sous ce 
nom, en ornithologie, plusieurs espèces d'oiseaux, d'aprës 
leur plumage. Une de ces espèces appartient au genre 
corbeau, l'autre au genre 9rëbe. Ce nom est encore syno- 
n)me de morillon, espèce de canard. La femelle de l'éxiolie, 
espèce du genre coucou, a été appelée jacobin huppe. 
Une espèce d'oiseau-mouche et la corneille mantelée »ont 
aussi connues us le nom de jacobine. L'n gros bec des 
Indes, un ortolan dë l'AraCique septentrionale, ont été en- 
cote nommés jacobins. Efin, un champignon du genre 
aaric, appelé ventre brun et ventre blanc, a été désigné 
par Paule! soin ce mme nom. L. 
JACOBINS. C'est ainsi qu'on appelait autrefois en 
France les dominicains. Sept moines de cet ordre s'é- 
tablirent en 1219  Paris, dans nue maison destinée au 
pëlerins, près de laquelle était une chapelle dédiée à saint 
Jacqu% qui donna son nom à la rue ou elle était situee et 
d'oh ses ouveaux desservants reçurent celui de Jacobins. 
Eu 1221 ils reconnurent ruuiversité pour dame et pa- 
tronne. Les jacobins étaient des moines mendiants, três à 
la mode comme directeurs de conscience; ils se firaient à 
la prédication, et sous la Ligue ils se signalèrent par leur 
fanatisme entre tous les ordres religieux. Jacques CIë- 
m e n t était un jacobin. A la révolution, les jacobins possé. 
daieut/t Paris trois maisons, celle de la rue Saint-Jacques, 
qui s'etendait jsqu'/t la rue des Grès, celle de la rue 
Saint-Honoré, qui servit pins tard au célëbre club des in- 
c o h i us ; eulio, celle de la rue Saint-Dominique, aujour- 
d'hui (glise Saint-Thomas d'Aquin, musée et dëpbt d'ar- 
tillerie. 
JACOB|NS (Club des). Cette-spotCWfameuse fut ainsi 
nommée parce qu'elle siégeait dans l'ancien couvent des 
Jacobins, converti depuis en matchWpublic, sous le nom 
de-larché-Saint-l%nore. Parmi les diverses sociétcs, con- 
lerences ou cercles politiques qui se formërent à Versaii- 
les, en 17s9, dès l'omerture des états généraux, on re- 
m»;qua tout d'abord la réunion des députes de la Bretae 
connue sous te nom Cltb breton, et composé exclusive- 
ment, dans le principe, des représentaots de cette pro ince; 
mais bient6t s'y affilièrent «uccessivement d'antres députés, 
et qudques Immmes infIuents de i'époque, qui n'apparte- 
naient à aucune députation. C'est dans cette societé que fut 
faite la proposition ,le constituer les états énéraux en assem- 
hlee nationale, proposition qui flt dccrete par cette assem- 

JACOBLS 
blée le 17 juin t789. Après la Itanalation de cette assemo 
biée à Paris, eu otobre de la mëme année, te club breton 
y reprit le cours de ses seanees, dans nn local privé, et 
dès le mois de novembre suivant le club s'organisa sur 
le plan du Club de la liérolutin établi / Londres, et prit 
le mme titre, auquel il substitoa, en 1790, elui 
de la Constitution. L'objet de ce club était de discuter 
l'avance les questions qui devaient tre proposée  l'As- 
semb|ée nationale, de s'assurer des nomivations à faire au 
bureau de l'assemblée et dans ses «omités, et de détermi- 
ner la majorité des voies par des scrutins prélmratoires. De 
là sortit la première idée de la Dlacation des droits de 
l'homme, et pour la propager le club crea sur la surface 
eutière de la France des myriades de sociétés affiliées à 
à celle de Paris, qui s'attribna à leur égard le titre de $o- 
ciétë nëre. 11 y avait cependant déjà dans son sein diver- 
gence d'opinions et de but, des hommes stationnaltes et des 
hommes de progrès. Une scission Cata, et les dissident 
formèrent une avtre'réunion, qu'ils appetërent $0cielé de 
1789, et plu tard Club desFeu i llants, dunom de Pap- 
cien coureur où elle siégesiL L'autre partie, restée fidèle à 
son dapeau, et q»i formait la majorite, se donna d nou- 
veaux règlements, soumit ses membres à une épuration 
vère, et fixa des cor, ditions d'admission rigoureuses. 
Le nombre s'en êtait considérablement accru ; ses débats 
excitaient i'interêt ; ses séances devenaient plus graves, 
plus antreCs. L'ëvíemeat de Varenne avait n,i en 
question jusqu'a la forme mème du gouvernement. Une 
lettre de Perpignan souleva pour la premiëre fois cette 
question dans son sein. La proposition de l'établissement 
d'une république fol repoussée  une immense majorite. 
Cette discussion exprime l'opinion dominante de l'epoque. 
Bouche presidait cette mémorable seance. « Passons-nous 
de roi, s'ëtait-il écriC et nous anrous  craindre un dan- 
ger de moins de la part d'un homme ennemi, par sa 
place, de notre constitution, et  qui on a donné pour la 
combattre 30 millions de revenu par an ; car, il faut en 
convenir, vous avez eu une idëe peu philosophique ennous 
deunant un roi si riche. PuLque l'occasion se prnte, 
debarrassons-uous de ce fardeau : faisons de la France 
*me république ...... A ces mots, toute la salle se sou- 
lève; mille personnes demandent la parole ou s'en em- 
parent. Un membre ëlëve la voix au-dessus du tumulte, 
et dit an président : • Permettez-moi, monsieur, de repré- 
senter au secrétaire qui a lu la lettre de Perpignan, en 
nonçant qu'elle nous ferait plaisir, quïi eut mieux lait de 
lire le passage suivant de nos réglements : « La fidélité 
 la constitution, le dévouement à la défendre, le respect 
« et la soumission aux pouvoirs qu'elle aura ëtabiis, seront 
« les premières lois imposées  ceux qui voudront tre admis 
« dans la société. ,, Nous sommes engagés par serment 
h maintenir la constitution; parler contre les dccrets cons- 
titutionaeis, lire des ecrits qui leur nt opposés ou perme[- 
tre qu'on les lise, est un parjure. Il faut renoncer à la so- 
ciété et sortir de son sein, etc., etc. » 
CeRe proposition, si éuergiquement repoussée, fut re- 
nouveiée à la séance du 2 mars suivant : Bobepierre la 
combattit. « Oui, Messieurs, dit-il, j'aime le caractère 
répubticain : je sais que c'est dans les républiques que se 
sont ílevês toutes les grandes Ames, tous les sentiments 
nobles et généreux ; mais je crois aussi quïl nous convient 
dans ce moment de déclarer tout haut que nous sommes 
des amis décidés de la constitution, iusqu'A ce que la vo- 
lonté générale_, éclairée par une plus more expérience, dé- 
clare qu'elle aspire à on bonheur plus grand. Je déclare, 
moi, et je le fais au nom de la socialC qui ne me démentira 
pas, que je préfCe iïndividu que le hasard, la naissance, 
les circonstances, nous ont donné pour roi, à tous les rois 
qu'on voudrait nous donner. (Applauents univer:-,eis ). 
Je conclus  ajourner l'envoi de l'adresse après la discussion 
qui sera ouverte ici dimanche, • La réptblique ne fut 
décrëtée que le 20 septembre suivant. 



ACOBhNS m 
Sous la Convention, ce club, qui prit le titre officiel de 
SocialWdea Amis de la Liberté et de l'Égalitoe , éprouva un 
grand changement dans s tendan et  opinions, ar 
l'dmission dans son sein d memboes de la députation de 
Ps, qui en mjorioE appartenaient au club des Cor- 
d el i r,. Leur iniluenoe s'accu« par la retraite et la pro- 
seriptien d ci r o n d i n s. Il n' a point de imes en re- 
volution, avait-on osé dire dns une de lenn séanc. 
Déjà us len efforts se tenaient contre Louis XVI; 
d'innombrables circulaires ex#iíes pr la société mère à 
ses t,00 fill d déprtemen, I prisaient d'unir 
effofls aux ien, près de la Convention, pour hA«er le sup- 
plice du dnier tran. Le roi à bas, on ,il la loi d 
ts, puis celle du imum flir des déHbírafions des 
Jacobins. Le 18 novembre 1793, le comi de lut public 
avait invioE la iété à lui digaer les ciens les plus 
apt à remplir I fonctions publique. Cette société devint 
bien«ét l'auxiliaire du comité, qui véritablement gouvernait 
la France. Pour lui donner plus de puissance, on supprima 
les autr sociétés popair qui existaient ou qui tenaient 
de  toper. 
Le 3 niv6se an u, le» Jaoebins répudièrent le bonnet rouge, 
dont tant d'aristocrates se coiffaient alors, et alCatèrent ne 
roeonnattre d'autre signe patriotique que la cooerde trico- 
Io. Ils dérogèrent cependant, par exoeption, à cet règle 
le l janvier 1794, anniveire du supplioe de Louis XVI, 
en snt à la ance coiés du boet phrygien, le 
président étant de plus armé d'une pique. 
Après la chute des deux pas extrëmes, les rappo d 
Jacobs avec la représentation nationale changèrent. Dejà 
à la Convention la motion avait ét6 faite d'obliger exprè- 
sCent la force armee à jurer de n'obéir qu' l'semblée 
et au comité de sabot public; es acobius, en apuant 
cette proposition, avaient ahdiqué leur droit d'in«urrection ; 
néanmoins, interprètes, disaient-ils, des solliciludes du 
pple, ils vinrent, le 7 thermidor, sommer la Convention 
de frapr sans dilai I conpiteurs, dont les tram 
funest menaçaient encore la liberC Le lendemain R o- 
bespierre prononçait à la ribnne de l'asoemblée une 
philippiqne cone la majorité du comité de salut public, 
qui était froidement accueillie, mais qui, répétée le soir à 
la tribune des Jacobine, sous le titre de Mon Testament 
de »iort, y obtenait un succbs d'entboime; ce qui n'em- 
pcha as la pte de leurs chefs. 
Au 9 t h e r m i d o r, les Jacobins, se déclarant en perma- 
nence, fent afficher un placard poant e douze membres 
choisis par la socié se rendraient immédiaement à la maison 
commune pour y prendre pa h ses déliberations. Dans la 
soirée, L egend re, à la tte de quelques hommes rolus, 
se présente dans la salie, et somme, au om de la Conven- 
tion, le club populaire de se dissoudre. Sur son refus, il 
fait évacuer le local de force, et eu dépoee les clefs sur le 
buru de l'assemblée. Le our suivant une foule de Jaco- 
bins montaient à l'échafaud avec Robespiee. Le I t une 
dëputation compos, disait-elle, d seuls, des vcritabtes 
Jacobins gm de oe titre, est admie à la barre pour ré- 
pudier toute solidarité aec le tçran qui vient d'tre ren- 
versé. Le 13 tous les dputés expulsés de la société 
comme antagonistes du parti vaincu y sont rappelés avec 
beaucoup d'autres citosens. On vote une adresse à la Con- 
vention pour prouver  l'Europe que les Jacobins  sont 
pas morts, mais qu'ils sont toujours patriote, toujours 
brfllanls, toujours énerques. Effo supflusl leur puis- 
sance était tomb av celle des tdumfin. Aussi leur sur- 
prise, leur désappointement, lutent-ils au oemble quand 
rent se développer axec une rapidité irristible la réac- 
tionn du 9 heidor. En vain essaent-i[s de faire de 
leur club anarchique un centre d'action ; en vain le la bru- 
maire an m ( 3 novembre 179 ) BillaudWarennes annonça- 
t-il du haut de leur tribune que le lion n'oetait p mort, 
l'heure de la retraite avait sonné pour eux.  19 bmaire 
uu décret ayant ordonné la suspension provisoire des 

3 ACOBITES 5 39 
séances de la société des Jacobins, des membres qui vou- 
lurent s'assembler au mépri» «le ce décret se virent assiéger 
par la jeunesse dorée, à qui le courage ëtait revenu après la 
chute du parti extrème. Les portes du local furent for- 
cées, les ri«res cassées, l'enceinte envahie, non sans résis- 
tance. On se plaignit vainement de cette attaque à la Con- 
vention : la séance devint orageuse, rien ne fut d6cidé ; mais 
le soir, des groupes s'étant reformés plus menaçauts, un 
arrêtWdes comités de gouvernement ordonna la cl6ture de la 
salie, qui eut lieu le 2t ( t t novembre t79- ), et les clefs en 
furent immdiatemen t remises au comité de s0ret  gënérale. 
En 1799, ous le Directoire, la Société des Jacodins essaya 
de se reconstituer dans l'ancien manCe, près des Tuileries, 
puis dans l'ancien couvent des Jacobins de la rue du Bac ; 
mais le 18 aoùt Fouché, qui avait été des lents pourtant, 
les fit expulser de ce dernier asile. 
JACOB|TES. C'est le nom que se donnèrent, d'après 
le moine Jacob Baradai ou Zanzalos, mort en 578, les m o- 
nopl»ysites, qui, après avoir eté dispersés sous le règne 
de Justinien, se réunirent de nouveau en parti religieux 
indépendant. Ils formaient en Syrie, en ],,ypte et en Méso- 
po«amie de nombreuses communes, à la tète dcsquelles se 
trouvaient des ëvèques et des patriarches; et sous la do- 
mination des Arabes, qui ers le milieu du sel,ti/:nm siècle 
conqoirent l'Orient, ils réussi rent à se mainteni r avec d'au tant 
plus de facilité qu'ils étaient séparés tout à la fois de la 
communion romaine et de la communion grecque. Mais 
plus tard les Jacobites ayant abusé de la faveur toute spe- 
cime que leur accordaient les Arabes, ils furent de leur part, 
en 1352, l'objet d'une sanglante persecution. Gnés alors 
dans l'exercice de leur culte, et separés, comme ils l'elaieut 
devenus à la longue, de leurs freres d'Asie, les jacobites 
ég).[tiens formèrent depuis ue secte particuliëe, qui sub- 
siste encore dans ce pa)s sous la dençminalion de chre- 
tiens coptcs. Des discordes lntérieures et des motifs poli- 
tiques provoquèrent vers la méme époque la scission des 
monoph) sites d'Abyssinie et d'Armënie. 
Les jacobites de Syrie et de Mesopotamie, aujourdhui au 
nombre de 30 ì o,oc, o familles, malgré les nombreuses 
tentatives de réunion faites par l'Église catholique, se sont 
maintenus jusqu'a nos jours a l'Ca« de seule independante. 
Ils sont placés sous l'autorité de deux patriarches, dont 
l'un, résidant h Diarbékir, goux erne les commtnes sriaques, 
et l'autre, rësidant au couveut de Saphran près Mardin, gou- 
xerne les communes de la Mésopotamie. Ils ont de commun 
avec les coptws et les Abyssiniens Fusage de la circoncision 
avant le baptëme et le dogme de l'unitWde nature en Jésus- 
Christ; de Iii leur nom de monophg.*ites. Mais en ce qui est 
de la liturgie et de l'organisation ecclesiastique, ils diffèrent 
moins de l'Êglise grecque orthodoxe que les diverses autres 
communautés monophysites. 
JACOBITES. On a donné ce nom, en Angleterre, 
aux partisans de J a cq u e s I I, chassé du !r6ne en 1689, 
ainsi qu'il ceux de son fils, reconnu par les puissances eatho- 
liques sinus le nom de J a c q u e s I I I, et de son petit-fils, le 
prétendant C har I e s-É do u ard. Un grand nombre d'An- 
glais et d'Écossais, les premiers par motifs de religion, les 
autres par attachement pour leurs rois, accompagnërent 
Jacque Il en France, et, avec l'appui du cabinet français, 
s'y livrèrent à toutes sortes d'intrigues et de machinations 
pour rendre la couronne d'Angleterre aux Stuarts. Cepen- 
dant, le parti que la dnastie proscrite avait conservé en 
Angleterre et en Ecosse était pour elle d'une importance 
bien utreque les efforts de ces quelques rugi«ifs. Tout« la 
noblesse des lt,jMands ( Hautes Terres ) d'Écosse était jaco- 
bite, parce qui là les interéts du pays se trouvaient con- 
fon«lus avec ceux de la d)'nasfie. L'union de l'Écosse et de 
l'Angleterre, en raison de la résistance des jacobites, ne put 
re effectuée qu'en 1707. La reine Anne, d'accord sur ce 
point avec la grande majorité des membres de la chambre 
haute d'Anglcterre, 'était pas éloinée de reconnaitre pour 
on suecessetr Jacq«tes ! ! !, son demi-frère, à l'exclusion de 



o JACOBITES 
la maison d« Hanovre, qui n'avait que des droits fort éloi- 
gnés . faire valoir ; mais le prétendant, dirigé par ses con- 
seillers catlloliques, refusa obstinément de faire acte d'adhé- 
sion à l'É, ghse" " protestante, condition sine qua non imposée 
par la reine. Quand. à l'avénement de Georges I er au tr0ne, 
les whigs arrivèrent au pouvoir, les jacobites opprimés osë- 
rent lever l'étendard de la révollc, un comte de Marr se 
mit/t la têtede quinze à ingtmille Êrossais, et en 1715 
Jacques vint en personne en Écosse se faire proclamer roi. La 
rsolution du parlement eut bientét triomphé de cette in- 
surrection.Sous Georges Il, le prétendant Charles-Édouard 
tenta encore une fois de reconquérir lacouronne de ses 
pères. En juillet t745 il débarqua en Ëcosse : presque ;.out le 
pays courut aux armes et le reconnut pour son souverain 
légitime; mais la bataille de Culloden, livrée en avril 
1746, Coutra dans le sang cette nouvelle levée de boucliers. 
Les clie|s les plus importants du parti ayant péri de la 
main du bourreau, l'importance politique des jaeobites fut 
anéantie à jamai,..Néanmoins les Ecossais ont conservé 
jusque dans ces derniers temps un respect enthousiaste 
pour leur ancienne maison royale; sentiment qui est mme 
devenu un des élements de la poêsie populaire. En fait de 
poésies et de raémoires relati[s aux Jacobites, nous 
levons plus particulièrement les Culloden Papers (Londres, 
! 815) ; Hogg, Jacobite lelics (Ëdimboorg, 1819) et Cham. 
bers, Jacobffe lemoirs (183-$). 
JACOTOT (JEx.-JosEen), inventeur et fondateur de 
la méthode enseignante dite enseinement unig'crsel, naquit 
à Dijon, en 1770. Il (.todia les matbématique sous l'abbé 
Bertrand, et entra d'abord dans la carrière militaire. Il etait 
capitaine d'artillerie avant la révolution de 1789. Lorsque, 
après les mauvais jours de cette mémorable ép,que, le 
calme commença à renaitre en France, il fut appelé à la 
chaire de matliématiques transcendantes, à l'École ,Normale, 
qui venait d'être creée. Jaeolot n'avait jamais exercé le pro- 
lessorat; mais, fort de sa volonté, il crut devoir accepter, 
et mettant à profit les trois mois qu'il avait pour se pre- 
parer, il se trouvaen état de faire son cours avec distinction. 
II remplit successix ement et avec le mme succés une chaire 
de langue orientale et une chaire de droit. Il est digne de 
remarque que pour acquérir des connaissances aussi di- 
verses et aussi ardues Jacotot travailla constamment seul, 
et ne dut la rapiditë de ses progrès qu' l'énergie «le sa 
volonté, t son asiduité, à la persévérante ténacite avec la- 
quelle il s'atlachait à l'etude. _Napoléon le nomma d'abord 
secrétaire du ministère de la guerre, puis sous-directeur de 
l'École Potyteclinique. Plus tard, tes suffrages de ses conci- 
toyens l'appelèrent à la chambre des représentants. Mais 
lors de la reotréedes Bourbons en France, en 1815, faligoé 
de toutes les révolutions politiques qoi depuis tant d.'années 
tourmentaient notre patrie, il se retira olontairement en 
Belgique, dans une petite propriété de sa iemme, et s'y li- 
vra en toute liberlé à ses go0ts studieux et philosophiques. 
Bientét, nommé lecteur à l'université de Louvain, il y fut 
chargé du cours de lit|érature française, et devint enfin di- 
recteur de l'École Normale militaire en Belgique. Ce fut là 
qu'il mit le sceau  sa réputation, en publiant, en 1818, l'En- 
seienement universel. 
Les premiers essais de Jacotot dans cette nouvelle mé- 
thode d'enseignement remontaient à l'époque o0 il proles- 
sait la littératore française à Louvain. Voici à ce sujet ce 
que l'on raconte :« Parmi les premiers élèves qui se présen- 
tèrent à Jacotot pour apprendre le Irançais, un grand 
nombre ne comprenaient pas du tout cette langue; il mit 
entre leurs mains un Telœemaque, avec une vieille traduc- 
tion dans leur langue materne|le. L'un d'eux, servant d'in- 
terprète, leur dit, de la part du professeur, d'apprendre le 
texte français, en les invitant a s'aider de la traduction 
pour le comprendre. Ces jeunes gens apprirent avec zèle la 
moitié du premier livre. Alors on leur fit dire de répéter 
sans cesse ce qu'ils savaient, et de se contenter de lire le 
reste pour le raconter. Puis on leur dit d'ecrire en français 

 SACOTOT 
ce qu'ils pensaient de tout cela. Le professeur avait été ex- 
plicateur toute sa vie; il croyait par conséquent que les 
explications, et surtout ses explications, étaient né¢esaires : 
quelle tut sa surprise quand il it qu'on pouvait rien pas- 
ser! Le fait était sous ses .eu ; il ne lui était pas possibla 
de le révoquer en doute. II prit donc son parti; il se décida 
à ne rien expliquer pour s'assurer jusqu'o/ l'Cève pourrait 
aller ainsi ns explications, et il fit continuer de la mme 
manière. Il arriva que bienl0t les élèves s'exprimaient et 
écrivaient en franç'ais avec toute la correction du texte qu'ils 
avaient appris ou médite; que les formes du Tél#maque se 
reproduisaient dans leur bouclie et sous leur plume avec 
facilité. Il fit faire un grand nombre d'exercices sur tous 
paragraplies, toutes les pendCs, toutes les epressions de 
l'auteur. La raison de cliaque élève était abandonnée . ses 
propres forces, et la langue fut connue, parlée et écrite 
sans le secours des règles et des explications : les règles 
lutent devinées. » 
Tel fut le point de départ de la méthode Jacotot. Bient0t 
et successivement l'expérience le mit  même de proclamer 
plusieurs maximes, qui .ont regardC par ses élèves comme 
la base de sa doctrine. Les voici : Qui veut peut.  LMme 
humaine est capable de s'in.çtruire seule et sans le se- 
cours des maitres explicateurs. -- Apprendre ou savoir 
quelque chose et V rapporter tout le reste. -- Tout est 
dans tout.  Toutes les intelligences sont ¢gales. -- 
On Feut enseigner ce qu'on ignore. Quelque.s-unes de 
ces formules, eprimées d'une manière trop laconique 
ou trop générale, ont été rardées comme d'insoutenables 
paradoxes ; elles ont été l'objet de vives et nombreuses 
attaques, de sarcasmes plus ou moins piquants, il faut 
l'avouer, dire seatencieusement toutes les intelligence, 
sont gales devait choquer d'abord toutes les notions re- 
çues. Il nous semble néanmoins que cette maxime peut tre 
admise jusqu'a un certain point, si l'on veut bien n'y voir 
qu'une pensée encourageante, qui donne aux élèves une 
certaine confiance en eux-mmes, en leur montrant dans 
tous les hommes d'une organisation régulière une égale ap- 
titude à voir, à juger,  comparer, à déduire. II n'est pas 
aussi facile de rendre raison de l'axiome : Toutest dans tout, 
qui parait signifier que tout m tenant dans le monde, que 
tout se liant dans la nature, il n'et personne qui ni sache 
quelque chose, et qui ne puisse en conséquence y rapporter 
autre chose, et par ce mo.en tout apprendre. Quantà cette 
proposition : On peut emeigner ce qu'on ignore, elle a 
besoin aussi d'un commentaire pour devenir évidente. Elle 
signifie seulement que chacun peut, avec de la confiance 
en lui-mme et avec de la volonté, vérifier si un autre sait 
bien ce qu'il a appris. De nombreux exemples ont prouvé 
tout le parti qu'on pouvait tirer de cette v«rité dans i'edu- 
cation publique, et surtout dans l'éducation privée. On a 
vu et l'on voit des mères, initiées à la pensée de l'enseigne- 
ment universel, enseigner à leurs enfants le latin ou d'autres 
langues totalement ignorées d'elles ; et remarquons que la vo- 
Ionte est le principal instrument mis en jeu pour l'enseigne- 
ment universel. Sans la volonte, rien de possible ; mais aussi 
qui reut peut ; il est prouvé par une foule de faits qu'une 
volonoE forte peut opérer des pro.liges. Donc, dans l'en- 
seignement universel, la principale mission du maltre est 
de taire naitre et d'entretenir constamment cette volonté 
dans les élèves ; car l'attention et le travail sont indispen- 
sables pour le succès. Les résultats d«-j obtenus, dégagés 
mme de toutes les louanges hyperboliques des entbousiastes 
de la doctrine, prouvent que cette manière d'enseigner 
est loin d'tre illusoire. Elle offre deux grands avantages, 
l'économie de temps et l'économie d'argent. Elle a justifié 
son titre d'engeignement universel, puisqu'elle s'applique 
à toutes les branches des connaissanees humaines,  la 
simple lecture comme à la cliimie et t la physique, au dessin 
comme à la musiqne, aux langues anciennes et modernes 
comme aux mathématiques, et toujours de la mme manière. 
Une chose très-importante dans l'enseignement universele¢A 



.COTOT -- 
la répétition continuelle des mmes faits pour les graver 
dans la mémoire d'une manière ineflaçable, et pour qu'ils 
soient toujours prets/, se présenter au besoin; il faut aussi 
exercer continuellement le jugement, pour comparer les faits 
esstre eux, les anabser et les syntbétiser successivement. 
C'est dans ces deux opérations qu'est tout le secret de la mé- 
thode. D'où lui vient le nom d'oemanctpation intellectuelle, 
que lui donnent ses partisans? De ce que par elle on cesse 
d'[tre assujetti au joug funeste des explications et au pré- 
jugé dëcourageant de l'inégalité des intelligences. Ce prin- 
cipede l'egalité des intelligences fut surtout le point de mire 
des attaques de ses adversaires; le duc de Levis combattait ce 
principe comme de nature à inspirer de l'orgueil aux enfants, 
et s'évertuait à demander aux defenseurs de la metbode 
s'ils comptaient bleu[Of faire de leurs élèves autant de génies 
du premier ordre. « Bien loin, répondait M. Deshouillèreso 
de se croire les égaux des grands hommes, nos ëlèves ap- 
prennent, au contraire, par leurs propres efforts/ murer 
toute la distance qui lessépare des génies supérieurs. Pour- 
quoi donc nous demander ironiquement où sont les grands 
hommes produits par l'enseignement universel? Où sont 
nos Rousseau et nos Racine de dix ans, nos Bossuet et nos 
Fénelon de quinze ? Quoi donc! offrir aux élèves le moyen 
de parcourir en trois ans le cercle des étudeç où l'on rou- 
lait ì si grands frais pendant dix ans, est-ce donc là pré- 
tendre en faire de grands hommes ? et ne sommes-nous 
pas les plus empressés à reconnattre qu'un grand homme 
n'est produit que par un heureux ensemble de circous- 
tances, et surtout par un lollg courage? » 
C..MPAGN..C. 
Jacotot est mort le 30 juillet 180, à Paris, 06 il était venu 
se fixer en 1$3$, après ètre reste plusieurs années à Valen- 
ciennes. Il laissait deux fils. 11 a publié sous le titre général 
d'Enseignement universel les traités suivants : Langue 
maternelle ( Louvain, t822 ); Langue dtrangère ( 1823 
Musique, Dessin, et Peinture ( 182 ); Mathématiques 
(1827); Droil et Philosophiepandcastiques (Paris, 1837) ; 
Lettre du fondaient de l'Enseignement universel au 
rndral La[ayette (Louvain, 1829). On a publié pou re[ conlre 
la méthode Jacolot une foule de brocbures. 
JAGQUARD ( Jostt'n-MatE ) invenleur du métier 
à tisser qui porte son nom, naquit h Lou, le 7 juillet 1752. 
Son père était ouvrier en étoffes brocbées ; sa mëre, liseuse 
de dessins, aidait son mari, et peut-être lui-reAme fut-il 
employé quelquefois dans son enlance à tirer les lacs. 
Sans doute en présence de ce travail, aussi abrutissant que 
pênible, il rgvait déjh la suppression de ces deux auxiliaires 
de l'oasfier principal ; et la mécanique, pour laquelle il 
monba de bonne heure un goat très-prononcé, devait un 
jour lui donner le moyen d'opCer cette suppression. 
pendant les premières années de sa jeunesse se passêrent 
dans l'atelier d'un relieur, puis il entra chez un habile fon- 
deur de sa ille natale. En 1793 il était oeeupë à l'exploi- 
tation d'rote carrière à plâtre dans le Bugey, lorsque l'insur- 
rection de Lyon le rappela dans cette ville, oia il eombattit 
les soldats de la Convention. Après la chute de ce[le mal- 
heureuse cité, il dut son salut à son fils,/lgé de quinze ans, 
qui, s'étant fait délivrer deux feuilles de route de soldat, 
l'emmena aee lui pour rejoindre le régiment de Rhane et 
Loire. Le jeune homme périt victime de son dévouement et 
de son courage. Blessé mortellement dans un combat, il 
expira dans les bras de son père. Jaequard quitta Mors le 
.service, et revint à Lyon, où il retrouva sa femme, qu'il avait 
pu prévenir de sa lui[e, occupée dans un grenier à tresser 
de la paille pour des chapoaux ; il fut réduit lui-mgme 
partager ce tnisérable travail pour vivre. Enlin, de meilleurs 
jours allaient luire. Jacquard reprit les perfectionnements 
d'un nouve.an métier à tisser quïl avait imanë dès 1790, 
et il put en présenter un modèle a l'exposition de fS01. Le 
jur) lui décerna une mëdaille de bronze, comme « inventeur 
.dhm mécanisme qui supprime dans la labrication des étoffes 
brochées l'ouvrier appelé tireur de lacs. ,, Le 23 décembre 

JACQUELINE 54  
de la mme année, Jacquard obtint un brevet d'invention 
pour oette machine, qui devait rester longtemps encore sans 
tre appréciée  sa juste valeur. 
La paix d'Amiens avait rouvert les communications ave 
l'Angle[erre. Jacquard apprend qu'un prix est proposé dans 
ce pays pour la fabrication au métier des filets de pche. 
Il se met à la recherche, et trouve la solution du problème; 
mais il ne parle de sa découverte qu'à quelques amis. Ce- 
pendant le pré[et en est instruit, et prévient les autorités 
supérieure. Aussitôt Jacquard est appele à Paris, et Carnet 
lui demande s'il n'a pas prétendu taire l'impossible : un 
nœud avec un fil tendu ? Jacquard répopd avec simplicité 
qu'il espère y arriver, et après avoir démontre son molen 
devant une rëunion de savants, il est attacbé au Conserva- 
toire des Arts et lletiers. En 1501 Jacquard retourna 
Lyon, où il dirigez d'abord des ateliers ; et enfin, au bout de 
deux ans, il fut assez heureux pour monter un met[er de sa 
façon. Un dccret impérial lui assura alors une pension de 
3,000 ff., sous la condition de s'occuper du perfectionne- 
ment de son métier, de chercher à le [aire adopter par les 
manufacturiers de Lon, et de diriger les travaux de fa- 
brique des établissements communaux. Le md[er Jacquard 
se faisait connaltre peu à peu par les soins de quelques ma- 
nufacturiers; mais soit imperfection dans les de[ails de sa 
construction, soit routine de la part des ouvriers, une cer- 
taine opposition se manifesta contre son introduction dans 
les ateliers. Bien[g[ méme, quand on s'aperçut que le mé- 
canisme supprimait les auxiliaires que l'ancien mëtier exi- 
geait, l'animosité contre son auteur fat au comble. Jacquard 
fut traduit devant le conseil des prud'homntes par ceux qui 
n'avaient pas s,t mettre en œuvre sa machine. Insulté, 
poursuivi, il eut plusieurs fois à essaier les outrages de la 
brutalité : il fallut mgme un jour l'arracher des mains de 
[urieux prèts à le jeter dans le Rh6ne. 
Ces violentes ne le découragèrent point. Les offres bril- 
lantes de l'Cranger ne purent le séduire ; il ne songez méme 
pas à porter dans une autre ille de France une industrie 
qui pouvait ruiner sa ville natale. Pour toute récompense, 
il demanda au gouvernement qu'il lui f0t accordé une 
prime de 50 fr. sur chaque métier de son invention. En ts0o 
son métier commençait à se répandre, en Is12 il etait gc..- 
néralement adopté, et a l'exposition de læt9 Jacquard re- 
cevait la médaille d'or et la croix d'Honneur. « Les machines 
qu'on employait autrefois, disait le rapporteur du jury cen- 
tral, étaient compliquées, cbargées de cordages et de pe- 
dales, plusieurs individus étaient nécessaires pour les mettre 
en mouvement; ils appartenaient au sexe le plus faible et 
souvent à l'aae le plus tendre : ces ousrières, qu'on dési- 
gnait sous le nom de tireuses de lacs, étaient obligées de 
conserver pendant des journées entieres des attitudes for- 
cées, qui dé[ormaient leurs membres et abrégeaient leur  le. 
A cet appareil imparfait et compliqué M. Jacquard a sub- 
stitué une machine simple, au moyeu de laquelle on exécute 
les tissus [açonnes sans avoir besoin du minislère des ti- 
reuses de lacs, et avec autant de facilit que si l'ouvrier 
fabriquait une toile unie. On doit ainsi à cet artiste luge- 
ri[eux d'avoir, en perlectionnant les moyens d'exécution 
al[ranch[ la population ouvrière d'un travail dont les suites 
étaient si déplorables. » Avec sa modeste pension, Jacquard 
se trouvait heureux. Il s'Ce[gui[ doucement, le 7 aoOt 
183tf, à Oullins, près de Lyon, où il s'était retiré. Sa statue 
en bronze, due au ciseau de 31. Foyatier, dêcore la place 
Sathonay à Lion. Elle a éoE maugurée le lfi ao0t 18t0. 
L. Locwr. 
JACQUELINEç fille et héritiè,'e de Guillaume 
comte de Hollande, de Zélande et de Ha[haut, ëtait nec 
en 1600. Aprës la mort de son përe, arrivée en 1-119, et 
déjà veuve du danpbin de France, elle entra en possession 
de sa souveraineté, et épousa Jean IV, duc de Brabant, de 
la maison de Bourgogne. Jamais nnion ne !ut plus ma! 
assortie. Jean était indolent, énervé, sans ressort ; Jac- 
quel[ne, impétueuse, hardie, excesivement Part6o '- l'a- 



42 ACUEL|E 
monr, mlait aux faiblesses de Marie Stuart un peu de la 
virilité de Catherine I[. Irritée de oir ses charmes dédai- 
gnés, hunteuse de l'incapacité de son époux, qui avait aban- 
donn6 pour dix ans la Hollande, la Frise et la Zélande à 
Jean de Bavière, fatiguëe de sa tracassière tyrannie, elle 
s'adresse au peuple, auquel il faut toujours en revenir, et 
au pape, qui rejette son appel et refuse de rompre ses liens. 
Rebutée par Martin V, elle a recours à l'anti-pape Be- 
noR Xltt, qui lui accorde une dispense pour s'unir/t Hum- 
froy, due de GIocester, fr/re de Henri V, roi d'Angleterre. 
Philippe de Bourgoe, surnommé le Bon, feint d'tre 
gravement offensé d'un ëvënement qui lui permet de hter 
la ruine de sa nièce. I! prend si bien ses mesures que GIo- 
cester, après s'ëtre montré sur le continent, et y avoir fait 
quelques bravades, s'enfuit en Angleterre, laissant sa femme 
au pouvoir du duc de Bourgogne. Ele s'échappe cependant, 
déguisée en homme, et ,'a conlier sa de|ente aux Hoecks ou 
//ameçons, un des partis qui ag;.taient la Hollande ( 
CAmtro ). Son mariage avec Humtroy ayant été déclaré 
nul, elle épousa en secret François de Borselen, qd lui 
avait géné'eusement offert son appui, et pour lequel elle 
avait coniu une passion violente. Philippe, qi n'avait rien 
à redouter de B,»rlen, apprit cet bmen avec joie, parce 
qu'il y trouvait un prëlexte de dépuiller définitivement .lac- 
qaeline. Il fit arrêter son mari, et le menaça du dernier 
pli,e. Jacqueline pour le satver renonç.a à des Etats, qu'elle 
ne possédait déjà plus,  des titres qui trnmpaient du moins 
ses r%,,rets, et-ne se reserva que quelques seigneuries, avec 
la grande-maltrlse de forêts et l'intendance des digues de 
la Hollande. A ces conditions, Philippe fit grtce6 Borselen, 
le créa comte d'Ostrevant, en Haiaaat, et lui donna le 
collier de la Toison-al'Or (It33). Alors Jacqueline chercha 
a se consoler en faisant eclater publiquement sa tendresse 
pour un homme qui, au surplus, n'en était pas indigne; 
mais elle ne put survivre à la perle de toutes ses grandeurs, 
et mourut, en tt36 au château de Teilingen» dans le lhin- 
land, eonumée de lan'.'ue:tr et désahusée de Pamour, qu'elle 
avait mal compris. Là, dit une tradition dont A. Loosje, 
auteur du roman de FranÀ .van Borselen en Jacobt van 
Bei)eren, aurait pu tirer un paru plus heureux, elle s'a- 
muit, après avoir tiré au perroquet, à vider une cruche, 
et à la lancer par-dessus sa tèle dans les étangs du vieux 
manoir. D'autres ont cru qu'elle soccupait  fabriquer 
elie-mme les vases qui portent son nom. 
Quelques auteurs vacoutnt qu'au dix-huitième siècle 
on montrait encore l'apparlement de ciome Jacgueline 
dans les ruines du château de Teilingen. Plusieurs de ces 
,ruches furent alors retirëes des fossës, et Fou asore que 
l'une d'elles présentait dans un cercle l'inscription suivanle, 
que nous tradfisons du hollandais, et qui semble avoir 
été faite aprës coup : Snehe'- que dame Jacq«eliae, après 
avoir bu ne seule fois dans cette crche, la jta par- 
dessus sa téte dans ce fosse, où elle dispart.On ajoute 
que de pareilles ,ruches ont Cé trouv6es entre Leyde et 
La Haye, et dans les fossés du château de Zand, quhabita 
cette princesse. En IS27, lors de la démolition de l'aile droite 
de l'bOtel du gouvernement à Gand, un de ces vases fut 
découvert dans les décombres et offert à l'université. 
JACQUE[LIT on JAQUE.MAT, flure de fer, 
de plomb ou de fonte, qui représente un homme armé et 
qu'on met quelquefois sur le haut d'une tonr pour frapper 
les heures avec un marteau sur la choche d'une horloge, 
comme on en voit à Dijon. 
JACQUEMitXOT (J:..-Ft'.h.çois), gén@al de divi- 
sion, député, pair de France et commandant supérieur 
de la garde natioale de la Seine sous le gouvernement de 
Juillet, naquit à lancy ( Meurtbe ), le 23 mai t 787. A la chute 
de l'empire, il 6tait colonel. Mis en demi-solde ì la Res- 
tauration, il fonda une filature  Bar-le.Duc. En 1828 
f,t nommé député par le département des Vastes, et fit 
partie des 221. Apr la révolution de uillet, il aida de tout 

-- JACQUERIE 
son pouvoir  I'êtablissement de la nouvelle dynat;e; à la 
retraRe du général Lafayette, il fut nomm marëcha! 
de camp et chef d'Arat-major de la garde nationale de Paris. 
Un mariage vint h cette é.poqueaccroitreeonsidérablement sa 
fortune, léélu dans lesVoes jusqu'en 153, il échoua alors ; 
mais le premier arrondissement de Paris répara cet échec, 
et lui renouvela fid/lement son mandat. En 1836 il pré- 
seuta le rapport d'un projet de loi relatil ì la garde natio- 
nale de la Seine. Devenu vice-président de la chambre des 
députés, il défendit avec vigueur la politique ministérielle, 
eombattit la coalition, et se prononça contre le cabinet 
du 1 e= mars sur la question d'Orient. A la retraite du ma- 
réchal Gérard, en 18t2, il fut choisi poor commandant su- 
périeur des gardes nationales de la Seine ; depuis le 24 
aott 1838» il était lieutenant général. Le 27 juin 1846 son 
dévouement fut recompensé par le titre de pair de France. 
C'est sous son administration, que, par une loi, l'uniforme 
devint obligatoire pour tons les gardes nationaux. La révolu- 
tion de Février le trouva dans ce poste; mais il n'east pas 
la force de s'opposer aux manifestations de l'esprit pablic : 
vainement il engagea ses camarades à ne pas se réunir 
sans t orore ce leurs chefs ; la garde nationale se mourra 
at tes groupes : il fallut la convoquer, et elle prolégea 
la révolution et le dpart de la royauté. Déjà dans la nuit 
du 23 au 2 lévrier le commamlement de la garde nationale 
avait passé au maréchal B u g e a ud, puis au général L a- 
ra o r i c i è re. LhGtel du commandant de la garde nationale 
lut pillé, et une somme considérable en bons du trésor ap- 
partenant au général fut enlevée. Le gouvernement provi- 
soire mil le gOnCai Jacqueminot à la retraite en avril t848. 
Un décret de l'Assembl(.e législative le rétablit dans ses droits 
l'année suivante, mais il n'en profita pas, et il est resté, 
dit-on, fidèle ì la cause de la dynastie de,hue. Céé baron 
sous i'Enpire, nous lui trouvons le titre de vicomte 
sous Louis-Philippe. L. LouvE-t. 
JACQUEMOXT (Vc¢oe), voyageur français, né h 
Pdris, le 8 ao,t 1801, mort à Bombay, le 7 decembre 1832, 
au moment mème 06 il se disposait  revenir en France,. 
demanda aux quelques amis réunis autour du lit où il 
agonisait qu'on inscrisit sot son tombeau pour épitaphe, 
après la de.iation de son nom, du lieu de sa naissance et 
des dates que nous venons de rapporter, ces mots, si rira- 
pies : après avoir vo9ag trois ans et demi dans l'lnde. 
C'est en effet à ce voyage, à la manière dont il le conçut 
et l'exécuta, que Victor 3acquemont est feriez-able de la juste 
célebrité qui s'attache à son nom. Le gouvernement lui 
avait confié la mission d'aller dans les montagnes de l'1nde 
recueillir des collections pour le Museum d'Histoire Naturelle 
de Paris, et il s'en-acquitta avec un zèle et une intelligence 
au-dessus de tout éloge. Le gouvernement ne fut que j,ste 
envers sa mémoire en ordonnant la publication, aux frais 
de l'Etat, de la relation scientifique de ce vo) age, qui forme 
/'.- VOl. in-f ° avcr 300 planches." biais ce qui a surtout po- 
polarisé le nom de cet écrivain, enlevé aux lettres et aux 
sciences par une mort prématurée, c'est la publication de 
sa correspondance avec sa famille pendant le cours de son 
expédition. Cet ouvrage est intitule:CorreslOndance de 
V. Jacqttemont avec sa famille ce plusietrs de ses amis 
pendant son voyage dans l'lnde ( Paris, 1533). 
Vi¢tor Jacquemont, qui avait penetrë au dela de PHi- 
malaya et jusqu'aux fi'ontières de la Chine, rencontra dans 
le royaume de Stade, gouverné alors par Rtmjet-Singb, un 
de nos eompatriotes, le genéral A I I a r d, devenu minislre 
de ce sultan après lui avoir créé une armée régulière  l'eu- 
ropéenne. Les lettres de Jaequemont, utiles à consulter 
quand on veut appréeier la situation morale des eontrées 
qu'il lui lut donné de viier, d'ailleurs pleines dïnlért, 
de coloris et de mouvement, inspirent au lecteur le plus 
vit inlérét pour l'homme et pour le savant. 
JACQUERIE. De tous les temps de notre histoire, le 
milieu du quatorzième siècleest peut-être l'époque 06 le: 
peuple des campagnes eut te plus à souffrir des violeaces 



JACQUERIE • t de la tyrannie des seigneurs féodaux. L'autorité royale 
6tait alors sans force, et tout noble possédant un chttean 
fort s'érigeait en souverain absolu à l'égard de ses vassaux, 
et faisait peser la plus cruelle oppression sur les serls de 
ses domaines. La captivité du roi Jean, laissant le sceptre 
aux mains de son fils, trop jeune alors pour le porter, brisa 
le dernier frein qui arrêtait encore les excès de la noblesse. 
Ce fut surtout dans la province de i'Ile-de-France que les 
gentilshommes accablaient les paysans de toutes sortes 
d'avanies, d'exactions, d'insultes et de traitements barbares, 
tant6t enlevant les grains et le betail de ces mallleureux, 
à qui ils avaient donn6 par dérision le sobriquet de Jac- 
ques onhomrae; tantôt caressant impudemment devant 
eux leurs femmes et leurs filles; tant6t mème torturant et 
hr01ant des inforhnés avec un fer rouge, pour leur extor- 
qt,er de t'argent. A la fin, Jacques Bonhomme, las de tant 
d'injures et de cruautés, se ressouvint qt'il appartenait à 
la famille d'Adam tout aussi bien que s oppresseurs, et 
il prit une bien terrible revanche des maux qu'il avait souf- 
ferts si patiemment jusque là. 
Laissons Froissart, contemporain des événements, nous 
retracer, malgré sa partialité évidente pour la noblesse, le 
tableau sanglant du soulèvemeut genéral qui eclata le 2t 
mai t358 parmi les paysans de i'lle--de-France. « Advint, 
dit-il, une grande merveilleuse tribulation en plusieurs 
parties du royaume de France, si comme en Beauvoisis, en 
Brie et sur la rivière de lIarne, en Valois, en Lannois, 
en la terre de Coucy et entour Soissons. Car auctlnes gens 
des villes champtres, sans chef, s'asemblèrent en Beau- 
voisis, et ne furent mis (pas) cent hommes les premiers; 
et dirent que tous les nobles du royaume de France, che- 
valiers et écuers, honnissoient et traltissoient le royaume, 
et que ce seroit grand bien qui tous les dítruiroit. Et chacun 
d'eux dit : « Il dit voir (vrai), il dit voir ; honni soit celui 
par qui il demeurera que tous les gentilshommes ne soient 
détruits ! » Lors se assemblèrent et s'en allèrent, sans autre 
conseil et sans nulles armures, fors que de btons ferrés et 
de couteaux, en la maison d'un chevalier qui près de là 
demeuroit. Si brisèrent la maison et ruèrent le chevalier, 
la dame et les enfants, petits et grands, et ardirent (hr0- 
Ièrent) la maison. Secondement, ils s'en allèrent en un 
antre fort chAtel, et firent pis assez, car ils prirent le che- 
valier et le li6rent/ une egtache (pieu) bien et fort, et vio- 
Ièrent sa femme et sa fille les plusieurs, voyant le chevalier; 
puis ruèrent la dame, qui était enceinte et grosse d'enfant, 
et sa fille, et tous les eulants, et puis ledit chevalier à grand 
martyre, et ardirent et abattirent le ch'tel. Ainsi firent-ils 
en plusieurs chteaux et bonnes maisons. Et multiplièrent 
tant que ils furent bien 6,000, et partout là où ils venoient, 
leur nombre croissoit, car chacun de leur setnblance les 
suivoit. Si que chacun chevalier, dames et écuyers, leurs 
femmes et leurs enfants, les fuyoient; et cmportoient les 
dames et les damoiselles leurs enfants dix ou vingt lieues 
loin, où ils se pouvoient garantir; et laissoient leurs malins 
toutes vagues et leur axoir dedans; et ces méchants gens, 
assemblés sans chef et saus armures, roboient (volaient) et 
ardoient (brûlaient} tout, et tuoient, et efforçoient, et 
violoient toutes dames et pucelles, sans merci, ainsi comme 
chiens enragés.., et cil (celui) qui plus en faisoit Coit le 
plus prisé et le plus grand maltre entre eux. Je n'oserois 
écrire ni raconter les horribles faits et inconvenables que 
ils faisoient aux dames, biais entre autres désordonnances 
et vilains faits, ils ruèrent un chevalier et boutèrent en une 
broche, et le tournèrent au feu, et le r6tirent devant la 
dame et ses enfants. Après ce que dix ou douze eurent la 
dame efforcée et violée, ils les en voulnrent faire manger et 
par force; et puis les ruèrent et firent mourir de maie-mort. 
• , Et avoient fait un roi entre eux, qui étoit si comme on 
dirait adonc, de Clermont en Beauvoisis, et l'élurent le 
pleur (pire) des mauvais; et ce roi on appeloit Jacques 
Bonhomme ( Les Grandes Chroniques de France le nom- 
ment Guillaume Callet ou Ca il let). Ces méchanlz gens 

 JACQUES S43 
ardirent au pays de Beauvoisis et environ Corbie et Amiens, 
et Montdidier, plus de soixante bonneg maisons et de forts 
chasteaux... Tout en telle maniëre si faites gens faisoient au 
pays de Brie et de Pertois..., et se maiuteuoient entre ParLs 
et Iioyon, et eutre Paris et Soissons, et entre Soissons et 
Hen ( Haro ) en Vermandois, et par toute la terre de Coucy. 
L/ éloient les grands violeurs et mallaiteurs ; et exillièrent 
(ravagèrent), qui entre la terre de Cuncy, qui eutre le 
comté de Valois, qui en l'évèché de Laon, de Soissons et 
de ;oyon, plus de cent cbàteaux et bonnes maisons de 
chevaliers et éenyers; et tuoient et roboient (volaient) 
quanque (tout ce que) ils trouvoient, • 
Les gentilshommes des pays ainsi mis à feu et à sang 
par les Jacques ( nom sous lequel on désignait les insurgés, 
et d'ou vint celui de jacquerie ) demanderent l'assistance 
de leurs amis de Flandre, du Hainaut et du Brabant, et ne 
tardèrent pas ì se venger par de sanglantes représailles. 
« Si aemblèrent les gentilshommes etrangers et ceux du 
pays qui les menoient, continue Froissart. Si commencèrent 
aussi à tuer et à découper ces méchants gens, saus pitié 
et sans merci, et les pendoient parlois aux arbres où ils 
les trouvoient, llëmement, le roi de Navarre (Charles le 
lIauvais) en mit un jour à fin plus de trois mille, assez 
près de Clermont en Beauvoigis. Mais ils etoient jà tant 
multipliés que si ils fussent tous ensemble, ils eussent bien 
ét cent mille horames. » 
Le plus grand massacre des Jacques eut lieu le 9 juin, 
à Meaux, où plus de 9,000 d'entre eux s'etaient reunis pour 
exercer leur fureur sur les nobles dames et damoiselles ré- 
rugiCs dans la ville au nombre de 300 environ. Le comte 
de Foix et le captal de Bu«-h, accourus, avec 40 lances, 
au secours de ces pauvres fcnffues, se ruèrent sur ¢.s i- 
lains, noirs et petits, et b'ès-mal afinC, en ruèrent plus 
de 7,000, chassèrent le reste bots des murs, et rentr/rent 
dans la ville, qu'ils livr6rent aux flammes, ainsi que la 
plus grande partie de ses llabitants, pour avoir ouvert leurs 
portes aux révoltés. « Depuis cette déconfiture, qui fut 
faite / Meaux, dit Froissart, ne se rassemblèrent-ils nulle 
part; car le jeune sire de Coucy, qui s'appeloit messire 
Eguerrand, avoit grand' foison de gentilshommes avec lui. 
qui les mettoient à fiu partout où ils le trouvoient, sans 
pitié et sans merci. » 
Cette insurrection des paysans de Pile de France ne dura 
pas plus de six semaiues. Dans une lutte engagée entre de 
pauvres carqpagnards, à demi nus, sans armes, pougsés 
par un besoin aveugle de vengeance, et des guerriers ha- 
bitués aux combats, couverLs de bonnes armures et agis- 
sant de concert, les premiers ne pomaient manquer de 
succomber. Paul Tmv. 
JACQUES. L'Évangile fait mention de trois person- 
nages de ce nom : Jacques le M#jeur, Jacque le .lineur, 
et Jacques frère germain de Jésus-Christ. 
Jacqnes le Majeur était le fils de Zebédée et de Salomé, 
ff'ère de l'évangéliste saint J e a u, et avant d'avoir été 
appelé à l'apostolat il exerçait la profession de pcheur 
(Matth., IV, ?t). Lui et son frère reçurent le surnom de 
Boaaerges ( Marc, III, 17 ), soit à cause de l'ardeur de 
leur z61e pour la cause de Jéus, soit pour ce qui e.t rap- 
portWdans saint Luc (IX, 51-52). Jacques le Majeur, in- 
time ami de Jésus-Christ, fut souvent témoin de ses mi- 
racles. Quand Jésns-Christ eut quitté la terre, il habita le 
plus souvent Jérusalen comme ap6tre. Héro de Agrippa 
lui infligea la mort des martrs. La tradition veut que ce 
soit lui qui ait pr¢ché le christianisme en Espagne : aussi 
est-il regardé comme iepatron de ce pays. Sa fète se célèbre 
le 25 juilleL 
Jacques le Mineur était fils d'Mphée ou de Clíophas et 
de 5Iarie, su'ur de la bière de Jésns-Christ. Il fit aussi 
partie des ap 6 tf es, et comme chefdela communauté de Jé- 
rusalem jouit d'une grande considération. Dan le synode 
des ap6tres sa voix était prépondérante (Ala6t., Xii, 17 ; XV, 
21). On dit qu'il ne quitta jamais Jérusalem. Selon l'Eitre 



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aux Gallates (l, rg), il portait le titre de frre du Seigneur. 
biais cette expression ne doit point ëtre prise  la lettre, 
et seulement dans le sens de « parent du Seigneur ,,. Saint 
Marc (XV, 0) l'appelle le Petit, c'est-/-dire le jeune, et les 
écrivains ecclésiastiques le Juste,  cause de sa foi et de son 
active charité. Suivant Josèphe, il subit la mort des martyrs, 
lapidé pat ordre d u g,'and-prgtre Ananias. L'Église catholique 
célèbre sa fgte le 1 r mai. 
Saint llatthieu (XIlt, 55)et saint Marc (Vt, 3)font men- 
tion d'un Jacques frère germain de Jésus, mais que les 
écrivains ecclésiastiques, en soutenant l'union de la Vierge 
l',tarte avec le Saint-Esprit, ne désignent que comme le 
beau-frère de Jèsus. D'après le récit d'Urique, on soutint 
autrefois, et jusque dans les temps modernes, que cet Jacques 
n'avait jamais existé, et n'avait été qu'une seule et mgme 
personne que Jacques le Majeur ou que Jacques le Mineur. 
E tous cas, Jacques ne fi,t point un des apfitres, et dut par 
conséquent ëtre un personnage autre que les deux ap0tres 
saints Jacques. Beaucoup de savants (entre autres Grotius, 
Richard Simon, Herden, «le Wette, Credner, etc.) lourde lui 
le chef de la commune chrétienne de Jérusalcm, et disent 
qu'il y jouissait d'une grande considéralion,  cause de sa 
Justice. On manque de toute espèce de renseiements sur 
sa vie et sa destinée. 
On attribue l'Ëpitre de saint Jacques qui se trouve 
dans le P;ouveau Testament à l'un des trois personnages 
dont il .vient d'ètre fait mention. Ceux qui regardaient Jac. 
ques, le frère germain de Jésus-Christ, comme en ayant 
étél'auteur, nelaisaient point que de révoquer en doute l'au- 
torité apostolique de cette Èpitre. Iais CIé,nent d'Alexandrie 
ayant démontre que ce saint Jacques n'Alait nuire que Jacques 
le blineur, IËpltre fui désormais tenue pour une œuvre éma- 
riant des apOtres. Cependant de nouveaux doutes s'é|evèrent 
encore à l'époque de la réformation, et erent pour princi- 
paux interprëtes Erasme, Lulber et les cenhtriateurs de 
Magdebourg, parce qu'on prétendait voir dans cette Épltre 
des contradictions avec la doctrine de saint Paul. Plus tard 
on parvint h faire disparaitce la prêtendue contradiction, 
et Jacques le llineur fut définilivement considèré comme 
l'auteur de l'Ëpitre. On ne pourra cependant jamais préciser 
d'une manière certaine quel est celui des Jacques à qui il 
faut l'attribue,-. L'Ëpitre en question est adressée aux chré- 
tiens d'Asie, qui, malgré la misèredans laquelle ils vivaient, 
étaient fort estimés à cause de leurs opinions chrétiennes. 
11 ne règne pas un ordre bien rigoureux dans l'encha|nement 
de pensees de cette Ëpître ; mais il est impossible d'en révo- 
quer en doute l'intégrité soit dans les détails, soit dans l'en- 
semble. On ne saurait d'ailleurs dire avec certituue en quel 
lieu et en quel temps elle fitt écrite. 
J&CQUÈ. Cinq rois d'Ëcosse ont porté ce nom, sans 
compter les deux qui régnèrent en mgme temps sur l'An- 
gleterre et l'lrlande sous le titre de rois de la Grande-Bre- 
Cagne. 
JACQUES I r, né en 1393, était fils de Robert III, et fut 
redevable de Iïnstruction qui le distingua de ses contempo- 
tains à une longue captivité en Angleterre. En 1405, son 
père, pour le soustraire aux embroches de son oncle, le duc 
d'Albany, qui visait à la couronne, l'en, oa en France. llais 
le vaisseau qui I'y portait fut jeté par la tempéré sur la cote 
d'Angleterre ; et Henri IV, quoiqu'il vint alors de conclure 
une trgve avec l'Ecosse, trouva bon de garder le jeune prince 
comrae otage, en garantie du maintien de la paix. A la mort 
de Robert I11, qui succomba h la douleur de s'lre vu enlever 
son lils, les Eossais proclamèrent bien Jacques comme roi ; 
t,tais le duc d'Albany, devenu régent du royaume, apporta 
autant de n('g|igence à obtenir la mise en liberté du jeune 
prince, qu'en mit Murdac, lils d'Albany, à qui il succéda en 
1.120. Jacques subit d'abord une détention très-rigom'euse 
dans divers chteaux forts. Cependant ltenri IX, " lui donna 
de bons maitrcs, et Jacques nfit à prolit les loisirs de sa cap- 
CivilA pour cultiver et développer les dons heureux qu'il 
leaai! de la na'ure. Lors des conquètes de ilenri V, Jacq,es 

JACQUES 
dut l'accompagner en France, à l'effet de dissuader de 
les Écossais de faire alliance avec les Français ; mais 
Ecossais refusèrent d'obéir à leur roi, parce qu'ils ne le 
considéraient pas comme agissant librement. Il n'est rien 
moins que prouvé que Jacques se soit, dans le mgme but 
rendu de sa personne en £cosse. A la mort de Henri V, les 
Anglais consentirent enfin à rendre au roi sa liberté, dans la 
pensée qu'une fois sur le tr6ne il pourrait leur ëtre utile. 
Seulement, les Ecossais durent s'engager à leur payer 
,o0 liv. st.; rançon déguisée sous le titre de rem- 
boursement de frais d'entretien et d'éducation. Jacques put 
alors rentrer en Écosse (mai 1426), mais trouva ses États 
en proie à la plus complète anarchie, le peuple tombé à 
peu près dans la barbarie, et la puissance royale réduite à 
l'ombre de ce qu'elle était autrefois. Les régents avaient 
dissipé le trésor de l'Êtat, distribué les domaines de la 
couronne à leurs amis et à leurs créatures, et permis à la 
noblesse de se livrer à tous les excès. Les gentilshommes 
parcouraient le pays avec des bandes armées, guerroyaient 
les uns contre les autres et rançonnaient à l'envi les bour- 
geois et les paysans. Le roi débuta par réiutégrer au do- 
maine de la couronne les domaines qui en avaient été dis- 
traits, et brisa les associations exislant entre les seigneurs 
contre la couronne et la paix publique. Il demanda en- 
suite à 51urdac et à ses partisans un compte sévère de 
leur gestion, et fit exécuter les coupables conformément 
attx arrëts prononcés par le parle.ment. Par une série de 
réformes itelligentes, Jacques s'efforça d'arracher le peuple 
 l'Cac de barbarie où il était plongé et de favoriser la mise 
en culture du sol. On crëa des espèces de colonies agri- 
coles, et on seconda puissamment l'essor du commerce et 
de l'industrie, surtout en attirant dans le pays des artisans 
étrangers. En augmeutant les priviléges des bourgeois dans 
le parlement, en établissant une milice permanente, en fon- 
dant diverses écoles, il eut surtout en vue de tirer la bour- 
geoisie de l'état d'infériorité dans lequel elle'gémissait 
et de la mettre en état de faire contre-poids  une noblesse 
arrogante et factieuse. Grtce  une administration plus 
ferme et plus sevère de la justice, trois mille bandit« qui 
infestaient le pas furent pendus, roués ou mis en croix 
pendant le règne de Jacqttes 1 «. L'alliance etroite que 
ce prince contracta avec la France, et surtout les fian- 
çailles de sa lille Marguerite avec le dauphin, qui fut depuis 
Louis XI, l'entrainèrent,  partir de 136 dans une suite 
de démèlés avec l'Anglcterre. Tandis que Jacques I « se 
trouvait sur les frontières, où il était venu mettre le siégé 
devant la ville de Roxburgl,, la noblesse mécontente prolit 
de cette circonstance pour conspirer contre la vie du roi; 
et ce fut son propre oncle, le duc d'Athol, qui se mit a la 
téte du complot. Quand il en fut instruit, il congedta son 
armée, et se cacha avec sa femme dans un couvent de domi- 
nicains, situé à peu de distance, pour de cet asile, réputé sa- 
cre et inviolable, suivre des yeux la tournure que prendrait 
la conspiration et agir en conséquence. Mais un de ses servi- 
teurs rendit h- ses ennemis le secret de sa retraite. Dans 
la nuit du 0 février 1637, Robert Graham envahit le cou- 
vent à la tëte d'une troupe de bandits, et  assassina le mal- 
heureux monarqt,e. 
Jacques I «' avait èpousé la belle Arme Beaulort, fille dt, 
duc de Somerset et petite-fille du duc Lancastre, dont il 
avait fait la connaissance pendant qu'il était prisonnier dans 
le chateau de \Vindsor; et il a raconté l'histoire de ses 
amours dans un poëme intéressant, intitulé Thé King"s 
Qhuair. Son fils Jacques II, alors asWde sept ans, lui succOda 
sur le trOne. S'il ne fut pas l'inventeur de la mélodie na- 
tionale de la basse Ècosse, on ne saurait du moins contester 
qu'il perfectionna la musique d'église des Eco«sais. Ses 
poésies, composées les unes en anglais, les aut,'cs en la- 
tin, et où il fait preuve d'imagination et d',lan poétique, ont 
été puhliées par Tytter ( The poetical Bemails oJ kin9 
Ja»tes; Edimbourg, 1783. 
JACQUES Il, fils du précédent, naquit en 1.13.1, épousa 



JACQIJES 
Marie de Gueldr-e, et fut tué en t60 en assiégeant loxburgb 
contre les Anglais. 
JACQUES I11, fils du précédent, né en t53, poursuivit 
l'oeuvre de ses prédécesseurs, l'abaissement de la noblesse; 
mais dominé par d'indices favoris, il vit la révolte, dirigée 
par son propre frère, menacer son tr6ne. Une première fois 
il conjura l'orage; mais il retomba bient0t dans les memes 
fautes, et un nouveau soulèvement, plus formidable, éclata 
contre lui. 11 marcha contre les rebelles, et les joiguit à Ban- 
nockburn; mais au début mne de l'action il s'enfuit du 
champ de bataille et se réfugia dans un moulin, où il fut poi- 
gnardWpar un ioconnu qui avait pénétré auprès de lui en 
se donnant pour un prèlre qui lui apportait les sacrements 
( 
JACQUES IV, fils du précédent, né en 1 73. C'était, au 
témoignage de Bobertson, un prince brave et généreux. 
Allié de la France, il lit guerre à Henri Vil et à Henri VIII 
d'Angleterre, et périt  la bataille de Fioddeufield, en t513. 
JACQUES V, fils du précédent, né en 1511. Roi ferme 
et vaillant, il défendit ses peuples contre l'oppression des 
grands, et rëtablit si bien la sécurité qu'on disait proverbiale- 
ment sous son règne : A prdsent les buissons ,jardent les 
troupeauz. Trs-attacl,é  l'alliance française, il mourut, en 
1542, de douleur de voir ses troupes baril,es par les Anglais. 
Son petit-fils, Jacgues VI, réunit sa couronne à celle 
d'Angleterre et d'lrlande, et porta alors le titre de Jac- 
ques 1 er ( voile'- l'article suivant). 
JACQUES. Deux princes de la maison de Stuart ont 
régné sous ce nom sur la Grande-Bretagne en mgme temps 
que sur l'Écosse. Nous y joindrons le prince qui prit le 
titre de Jacqtcs III, mais que l'ldstoire ne connaît que sous 
le nom de Jacques Sttart ou le Proetendant. 
JACQUES 1 er, roi de la Grande-Bretagne et d'lrlande 
{1603-1625), et Jacqztes VI, comme roi d'Écosse à partir 
de 1567, fils de la reine llarie Stuartetde Henri Darn- 
ley, naquit à Edimbourg, le 19 juin 15(;6. Aussit6t après sa 
naissance, il fut confié aux soins du comte de Marr, parce 
que sa mère, brouillée avec son époux, avait donn6 son 
cœur au comte Bothwell. Après l'abdication forcëe de Marie 
( 24 juillet 1567 ), on le couronna roi d'Ëcosse. Pendant que 
le royaume, administr par d'ambitieux régents, opprimé 
par une orgueilleuse noblesse et exposé aux attaques de la 
l:rance et de l'Angleterre, penchait vers sa ruine, Jacques 
passait son enfance à Stirling, faisant, sous la direction de 
son précepteur, Buchanan, de grands pro.s dan» es 
humanitgs, et surtout, snivant la coutume d'alors, dans 
la théologie. Il parait avoir conçu de bonne heure les idées 
exagérées qu'il s'était faites de la nalure et des droits de 
l'mttorité royale, ainsi que de la puissance qu'il croyait tenir 
de Dieu; idées devenues encore autrement rafales à ses suc- 
cesseurs qu'à Ini-meme. A peine Jacques lut-il sorti de l'en- 
fance, que les partis s'emparèrent tour à tour de bti / la 
suite de conspirations et de révoltes incessantes : aussi 
ne fit-il guère que changer d'oppresseurs. Lorsque la vie 
de sa malheureuse mère, qu'il n'aimait d'ailleurs pas, et à la 
captivité de laquelle il était jusque là resté fort indifférent, 
fut menacëe par la reine d'Angleterre, il fit d'abord mine 
de vouloir déclarer la guerre à Êlisabeth, invoquant l'assis. 
tattce de la lrance, du Danemark et mème celle de l'Es- 
pagne, biais l'insuffisance de ses ressources, l'espoir qu'il 
avait de snccéder h la couronne d'Angleterre, la conduite 
Itypocrite d'ilisabeth, et enfin une pension de .5,000 livres 
sterling que depuis longtemps celle-ci lui payait à titre d'allië, 
le déterminèrent non-seulement b. étouffer les ressentiment 
que devait provoquer en lui la mort si tragique de Marie 
Stuart, mais encore  faire cause commune avec Êlisahetb 
contre l'F«pagne, en 1588. 
Aprb« ëtre parvenir à triomplter des obstacles ntis . cette 
alliance par la reine d'Anglelerre, Jacques épousa, en 1589, 
Arme, fille du roi de Danemark. Sa pClantcrie, la Iiblessc 
et l'indolence de son caractère, enlretinrent en ['cosse des 
Iroubles perpéhds. 
DICT. nE I., CO.VFœe . -- T. XI. 

545, 
A la mort d'Êfisahelb (t603), il fut appelé  lui succéder' 
sur le trône d'Angleterre, en sa qualité de plns proche héritier 
m'le de la couronne; sa grand'mère Marguerite tait en effet 
la fille d'llenri Vil. Le but de ses constants efforts, dans' 
lesquels son ministre C e c il l'avait particulièrement secondé; 
était atteint; les Anglais, fatigués d'ètre gouvernes par des 
femmes, se lélicitaient d'avoir maintenant  leur tëte un 
prince dans toute la force de l'Age. Mais par son despotisme. 
par la faiblesse de son caractère et par son afftion pour 
d'odieux favoris, Jacques ne tarda pas b mcontenter tous le 
partis. Sa haine pour toute idée libérale lui fit persécuter 
les presbytériens, dans les principes desquels il avait pour- 
tant été élevé; et «les considérations politiques le délermi- 
nèrent à épouser les intérêts de l'Église épiscopale. Ce revi- 
rement dans ses idées fut suivi d'une imprndente persécu- 
tion contre les catholiques, pour qui jusque là il s'ëtit 
montré très-favorahlement disposC disant qu'entre l'angli- 
canisme et le catholicisme il n. voyait d'autre dilférence 
qu'une tesse moins bien chantée, et provoqua la fameuse 
conspiration des poudres, oenvre des jés,ites. A cette 
occasion, Jacques exposa au parlement, dans un etnphalique 
discours, ses idée« sttr la prérogative royale. Cette assem- 
blée ayant rejeté l'union qu'il lui proposait d'opérer entre 
l'Angleterre et l'Ecosse, il résolut, à l'exemple de ses devan- 
clefs, de régner en roi absolu ( voile-- Gat,xne-Ba£TXçm£ ). 
il ajotrna arbitrairement la convocation du parlement, à 
qui il fut désormais interdit de délibérer sur les affaire» 
énérales de l'État, et dont le tf le se trouva r,6tuit au vote 
de l'imp6t; il octroya arbitrairement des droits électoraux, 
intervint dans les élections, établit des taxes illégales, et 
punit «le la prison et de la confiscation de leurs biens les 
citoyens qui se refitsaient à les acquitter ainsi que les jug, 
qui leur donnaient raison. Le parlement s'en vengea en 
montrant de plus en plas récalcitrant à l'endroit de sub- 
sides; tactique qui embarrasse d'autant plus le roi que 
prodigalit,:s lui avaient fait contracter des dettes énorme.. 
Cette situation oe prolongea pendant tout le règne de Jac- 
ques, et, compliquée encore par la politique intolérante 
qne le ponvoir adopta en matière de re|igon, amena entre 
le tr6ne et le peuple une scission profonde, qui, sous le 
règne suivant, devait aboutir à une révointion. 
Dans ses relations avec les puissances etrangères, Jac- 
ques 1 « manqua ègalement d'nergie, et n'eut égard ni aux 
intérêts véritables de son peuple ni aux ménagements que 
réclamaient ses convictions protestantes. C'est ainsi qu'en 
1605 il ne consentir pas sans peine à s'unir  la France 
pour secourir les Pays-Bas ; mais dès l'année suivante il 
L6sait alliance avec i'Epagne, et après la conclusion de la 
frère entre l'Epagne et les Pays-Bas, il fiança mème son 
fils, le prince de Galles, à Arme, fille du roi Philippe I!1. 
La mort inopinée du jeune prince, arrivée le 16 novembre 
1612, empgclta seule la réalisation de ce mariage, anssi mal 
vu en Eosse qu'en Angleterre. Une réconciliation presque 
complète eut lien cependant entre le roi et son peuple en 
lfit3, par suite du mariage d'ilisabeth, fille atnée de Jac- 
qttes 1 «, avec un prince protestant d'Allemagne, devenu 
plus tard l'électeur palatin lrëdéric V; mais son gendre ayant 
accepté la couronne de Bohgme, que les mécontents de ce 
pays lui offrirent en 1619, le roi d'Angleterre lui refusa tout 
app,i, parceque, disait-il, il ne voulait point pactiser avec la 
révolte; et cette conduite, qui fit perdre à Fréderic sa cou- 
ronne, vaint/t Jacques les mépris de l'Enrope prutestante 
et les railleries des puissances catbolJq,tes elles-mèmes. 
Pour préserver l'Cecteur d'une ruine complète, on négocia. 
une no,tvelle alliance avec la cour de Madrid. biais le parle- 
ment et Bu c kingha m vinrent / la traverse de ce projet, 
et forcèrent Jacques à se liguer avec la France contre la 
maison d'Atttriclte. Toqtefois, le versatile monarque mourut 
{ 8 avril 1625 ) avant que les Itostilités eussent commencé. 
Malgré leurs dissensions intestines, l'Aneterre et i'l- 
cosse firent pendant ce.règne, long et pacifique, d'immense 
progrès, aussi bien pour ce qtti est du commerce et de l'i- 



546 
tstrie que pour ce qui est «lu perfectionnement des insti- 
lutions politiques. Les colonies londees dans l'Amérique du 
• ord reçmeat une organisation définitive et stable. 1| 
eut que P If I and e dont la situation devint encore plus dé- 
plorable / la suite des idées de réforme, bonnes au fond, 
mais mal appliquées, que Jacques y voulut faire prévaloir. 
Son fils, Charles I e', lui succéda sur le tr0ne. On a de 
Jacques I er plusieurs écrits que l'évgque Montacuti a pu- 
bliés sous le titre de Opera (Londres, 1619), et qui font 
bien connaitre le caractère et les idées de ce monarque. !1 
s'y établit le champion des droits de souveraineté absolue 
que Dieu a départis aux princes, et s'élève contre l'usage du 
tabac, quïl regardecomme une abomination. Admettant la pus. 
sibilité des sorti/éges et l'existence des mauvais es pr i ts, 
il y recherche aussi pourquoi le diable aime de préférence à 
avoir des relations aec les vieiges femmes. Consultez i- 
chols, The Progressions, lrocess|ons and festivities 
iin 9 James I (3 vol.; Londres, 1829 ); D'lsracli, lnquirg in 
t/te literary and political character of James I ( 1816 ). 
JACQUE Il, second lils de Charles ! er, naquit le 4 
octobre 1633. Après la prise d'York par l'armëe parlemen- 
taire (2 juin 1666), il fut mis sous la garde du duc de 
Nortbumherland et empïisonnê avec ses frères et sœurs dan» 
le palais de Saint-,lames, à Londres, d'où cependant il s'é- 
chappa en 18.11 lui fut alor donnê de pouvoir, à travers 
bien des prils, se retirer auprès de sa sœur ,Marie, femme 
de Guillaume 1I, princed'Orange; et il est à présumer que ce 
fut seulement après la mort de son père qu'il rejoignit en 
France sa mëre, Heuriette, fille de Henri IV. En 165, dé- 
pourvu de toute ressource, il lut réduit à s'engager comme 
s-olontaire sous les drapeanx de Tureune ; puis, à la con- 
clusion de la paix de H355, il lui fallut quitter la France. 
Alors, rassemblant autour de lui, dans l'intérét de samai»on, 
des presclits anglais et irlandais, il combattit, eu qualité de 
lieutenant géneral au service d'Espagne, soin les ordres de 
CurialA et de don Juan, jusqu'à la fin de 1659, contre son 
mi Turenne, et acquit dans ces carupagnes une grande 
perience de la guerre, quoiqu'on ne puisse citer de lui au- 
cune action d'ceint. Après la restauration de la maison de 
Sluart, il fut nommé par son frère, Charles I1, grand- 
amiral, avec le commandement supërieur de la marine bri- 
tannique, dont il po la puissance à un haut point de 
splendeur. Président d'une compaffaie africaine, il fut, en 
t65, l'instigateur d'une guerre coutre tes Hollandais, et 
remporta, le 3 juin, aux environs de Lowestoffe, une vic- 
toire complete sur leur flotte, commandée par l'amiral Op- 
data. A la mort de sa femme, Arme, filledu chancelier Hyde, 
depuis comte de Clare ndon, il embrassa publiquement, 
en juin t0";1, à Pinstigation des jésuites, la religion ca- 
tholique,  laquelle depuis son séjour en France il appar- 
tenait di secte:lement. La reprise des hostilités entre la Hob 
lande et l'Angleterre lui fournit, eu I g72, l'occasion de faire 
luire, par de nouvelles victoires, le méconteutment g.néral 
produit par son Cllangement de religion, lalliant la nulle 
britannique à l'escadre frnaioe sm,s les ordres de d'Es- 
tfCs, il lis-ra, le 8 mai, à K u y te r, sur les c61es de Sonih- 
woldbay, une sanglante bataille, dans laquelle les deux 
partis s'attribuèreut réciproquement la victoire. Mais par 
suite du vote du clèbre billdu t e s t, il renonça à son com- 
n,andement, et se demit, i l'exemple des autres cztholiqnes, 
de toutes fonctions publiques. Le nariage qu'il contracta, 
en septembre de la méme anuée, avec la princesse catho- 
lique de Modène, tarie d'Este, soulea tout anssit6t de vio- 
lentes clameurs. La profonde émotion cansée dans le pa)s 
par la l,rdteudue conspiration catholique de 1679, le força 
«le .ce retirer i BPJxelles. Ce fut pendant cet exil olontaie 
q,fune proposition btnelle fui faite à la Cllambre des cum- 
in,ries pour l'exclure du tronc; mais la chambre d Iords 
et le roi n'hésitèrent pas à la repousser. Après la dissolu- 
tire, du parlement, qu'il rënssit t faire prononcer par son 
frere, il revint a Londres eu 1681. Il lut alors envoyé de 
nouveau comme gouvexneur en Ecosse, où il traita avec la 

JACQUES 
plus grande cruauté les presbytériens révoltés. A son retour, 
eu mars t68, il prit sur l'esprit de son faible frère un tel 
ascendant, que ce dernier, en dépit des prescriptions de 
l'acte du test, le lit entrer dans Iœe conseil privé et lui aban- 
donna la directiou de presque toutes les affaires. 
Objet de défiance pour les protestants, il monta sur le 
tr0ne le 6 février 1685, à la mort de Charles II, et donna alors, 
il est vrai, dans le sein de son conseil, l'assurance formelle 
de respecter les lihertés de la nation ; dêclaration qui ne 
l'empcha point de prendre tout anssitét les mesures propres 
 transformer la libre Angleterre en monarchie absolue 
et à rendre à l'Église catholique son ancienne puissance. 
Le duc de l1onmouth, fils naturel de Charles II, et l'idole 
du peuple, que Jacques avait exilé dans les Paf-Bas, 
chercha à profiter du mécontentement général pour s'em- 
parer du tr6ne. Il déharqua, le 11 juin 1685, sur la c6te 
d'Angleterre avec une centaine d'hommes, et en peu temps 
cette petite troupe se trouva portée au chiffre de plus de 
2,000 comhattants. Mais défait le 20 du mme mois par le 
comte Feversham, il périt sur l'échafaud avec les plus 
compromis d'entre ses adhérents. Enhardi par ce succès, 
Jacques envoya h Borne une ambassade, dite d'obédience, 
sol|iciter du pape la rentrée et l'admission de l'Angleterre et 
de l'Ëcosse dans le giron de l'Église catholique. Aprè avoir 
intimidé le parlement par ses menaces, il fit attribuer, en 
1686, à la couronne le pouvoir de dispenser en certains cas 
du serment prescrit par l'acte du test, et s'en servit atts- 
sitét pour mettre les catholiques en possession de toutes les 
grandes charges et diguités pofitiques. Dans le cours de ceP, e 
mme année, il établit nue haute commission qui cila de- 
vant elle, sans autres formes de procès, tous les eeclias- 
tiques mal sus à la cour; puis il fit jeter en prison sept 
évêques coupables d'avoir protesté contre la création de 
cette j»ridiction exceptionnelle. Enfin, en 1687, il osa 
faire publier, en F.cosse d'abord, et ensuite en Angleterre, 
un édit de tolerance génerale, qui suspendait t'acte du test 
et toutes les lois rendues précêdemment contre lesnon-con- 
formistes. Comme on savait qu'a la mort de Jacques II 
ses deux lilles, Marie et Arme, princesses élevées dans les 
doctrines protestantes, seraient appelëes au trône, à défaut 
d'IlCirier mille, le peuple prenait patience. 3lais en 1688, 
à la grande joie des prètres, des courtisans et des papistes, 
le .«-,,it se répandit que la reine, aprës quatorze ans de 
stêrilité, était enceinte. La terreur que cette nouvelle ré- 
pandit parmi les protestants leur fit soupçonner qu'une 
grande fraude politiq,e allait se commettre, et que cette 
grossesse était simulée ; supposition jnstifiee jusqu'à un 
certain point par le soin que prenait la cour d'éloigner 
de la reine toutes les personnes étrangères au service de sa 
maison. Le t0 juin ti381 ou annouça enfin au peuple que 
la reine venait d'accoucher d'un prince ; mais personne ne 
voulut croire à la réalité de cet accouchement, et l'opinion 
à peu près générale fut qu'il }, avait eu supposition d'enfant. 
Alors les chefs inlluents du parti populaire tonrnêrent leurs 
regards vers le prince d'Orange, et concertèrent avec lui le 
plan d'une descente en Angleterre. Qttand Jacques entendit 
parler de ces préparatits d'invsion faits par son gendre, 
il en éprouva une telle frayeur, qu'en septembre 1688 il 
révoqua soudainemitlt toutes les ordonnances qui l'avaient 
rendu odieux à la nation. Les catholiques furent remplacés 
à tous les degrés de l'administration par des protestants, 
et une commission de douze juges fut mgme chargée de pro- 
cëder à nne enquête sur h légitimité du prince son fils. 
Le prince dOrange debarqua en Angteterro au mois de 
novembre t(;88. Quand le roi se vit abandonné de tout le 
monde, sans pouvoir même compter sur sa flotte ni sur sqn 
armëe, il s'cnfilit en France, le 23 décemhre 1688, avec sa 
famille. Louis XIV l'accueillir en roi, et lui nssigna poqr 
résidence le cltteau de Saint-Germain. Le 22 janvier 1689 
I le parlement prononça la di.chéance de .la¢ques 11, et 
ri-il la couronne an prince d'Orange, sous le nom de G u i i- 
la u m e I 1 I. De France, Jacques Il cntretint longtemps 



JACQUES -- 
une active correspondance avec ses partisans ( voye'. Jxco- 
ngTr), et, avec leur appui, il fit plusieurs tentatives inutiles 
pour reconquérir le tr6ne qu'il avait perdu. Il mourut à 
Saint-Germain, le 16 septembre 1701. 
JACQUES III, dit le rtendant, fils du précédeut, 
connu au.i sous le nom de chevalier de Saint-Georges, 
naquit lel0juin 1688.A la mort deson père, en 1701, il fut 
officiellement reconnu roi d'Angleterre par la France, l'Es- 
pagne, le pape, les dues de Modène et de Parme, tandis 
que le parlement le déclarait coupable du crime de haute 
trahison et l'excluait ì toujours du tr6ne de la Grande-Bre- 
tagne. Dans le principe, Louis XIV n'avait rien voulu faire 
pour Jacques III; mais les larmes versées par llarie d'Este 
dans la chambre de 11 de Maintenon le ramenèrent à 
d'autres sentiments, contre le VœU mtme de ses ministres. 
De re moment il se set'vit de lui comme d'un épuvantail 
contre la puissance britannique, et lui accorda les bonne,rs 
royanx, ainsi que la mtme pension qu'à son père. La réu- 
nion de l'lcosse avec l'Angleterre, projetée depuis ravéne- 
ment au tr6ne de la reine Arme, souleva une rësistance 
prolongée, et augmenta l'influence et le nombre des jaco- 
biles. Louis XIV chercha ì profiter de cette dispo«ition des 
e_prits, que d'habiles ngociations et des soulèvemeuts par- 
tiels tinreat toujours en éveil; et en mars 1708 une flotte 
française de trente-deux vaisseaux de ligne, aux ordres de 
Forbin, ayant à bord une armée et le Prétendant, quitta le 
port de Dunkerque pour aller débarquer en Ecosse. Mais 
le gouvernement anglais, qui avait eu vent de ce qui se pré- 
parait contre lui, avait mis en mer une forte escadre sous le 
commandement de l'amiral Byng, et celui-ci força Forbin 
 renter en France sans avoir pu accomplir sa mission. 
En nme temps, le parlement offrait pour la tte du Prë- 
tendant une prime d'abord de 50,000, et plus tard de 
100,000, livres sterling. Jacques, abattu, découragé, pour 
le moment du moins, fit la campagne de Flandre sous 
Villars, et combat[il avec distinction jusqu'à la conclusion 
de la paix d'Utrecbt, en 1713. Par ce traité, la France 
fut obligée de reconnaltre la succession protestante au tr6ne 
de la Grande-Bretagne, et par conséquent de renvoyer de 
France le Pretendant. Jusque là la reine Arme avait cepen- 
dant entretenu avec son frère une correspondance secrète, 
et elle avait meme promis d'abdiquer en sa faveur s'il 
voulait renoncer à la religion catholique. Les hommes les 
plus éminents de sa cour, tels que Godolphin et iMa ri bu- 
ru u g h, favorisaient ce projet et entretenaient à cet effet des 
relatious occultes avec Jacques. Mais Arme mourut en 
sans laisser de document authentique qui confirmàt cette 
pensée. A sa mort, de nombreux jacobites se soulevèrent 
en Aneterre et en Eosse contre le gouvernement de Geor- 
ges I ', surtout lorsque te partit to fut dédaigné et mme 
persécuté par ce prince. 
Dans l'automne de 1715, on comptait sous les armes, 
en Écosse, de 15 à 20,000 jacobites, aux ordres du comte 
de blarr, attendant avec anxité que le Prétendant vint y 
tenter une descente. Jacques, encore bien que le régent de 
France, le duc d'Orléans, lui eflt refusé toute epèce de se- 
cours, n'en dbarqua pas moins le 2 janvier 1716, presque 
ns suite, ì Peterhead, dans le comté de Buchan, et s'y 
vit saluer roi par les insurgés. Quoique l'un de ses premiers 
actes e0t été de convoquer le parlement, acte de souveraine 
puissance s'il en est, il n'osa cependant pas se laisser cou- 
ronner  parce qu'il manquait totalement de rolutiou et 
de fermeté. La position critique oi il se trouvait le rduisit 
bient6t au désespoir; aucune puissance étrangère ne se dé- 
clarait en sa faveur, et il tait à craindre que la prime of- 
terre pour sa te ne finit par tenter quelque meurtrier. E 
cons6quence, le 15 février, Jacqaes quitta l'Écosse poar s'en 
revenir en France avec une poignée de serviteurs lideles. 
bandonné et ¢onspné alors de tout le monde, il chercha 
un re[uge aupr du pape, qui le rcçut d'ahord à Avignon, 
ensuite à Ruine mëme, ud il rlmonora et le traila en roi. 
Pendant ce temp.% les jacol, iles conspiraient toujors ci se 

JACQUIN 547 
ligvaient méme avec Charles XII, roi de Suède ; mais le 
cabinet de Londres eut connaissance de toutes ces menées. 
L'Espagne, brouillée avec l'Angleterre, y aecéda aussi; et 
sur l'invitation du ministre Alberoni, Jacques arriva le 
mars 1719 à Madrid, oÙ la cour lui fit une magnifique ré- 
coption. Quelque temps auparavant, une nouvelle flotte de 
dix vaisseaux, parfaitement quipée et ayant ì bord 30,000 
hommes de dbarquement, avait djì mis ì la voile pour 
les c6tes d'Angleterre. Le Prétendant put encore une fois se 
croire ì la veille de recouvrer la couronne de ses pères; mais 
cette flotte fut assaillie par une temptte en vue du cap 
Finistère, et oblige de regagner le port de Cadix. Ce contre- 
temps refroidit le zèle de la ceur de Madrid, et le Prétendant, 
abandonné de tous, quitta l'Espagne au mois d'autel, et s'en 
vint débarquer de nouveau le 25 à Livourne. En septembre, 
l'espoir d'une grosse dot lui fit épouser la fille de Jacques 
Sobiesky et de la palatine Hedwige-Elisabcth. Ma-mifique- 
ment renté par le pape et par ses partisans, mais toujours 
attentivement surveillé pat i'Angleterre, il vcut depuis lors 
ì Ruine, oi l'anéantissement total de ses espérances lui fit 
contracter des habitudes de débauche qui amenèrent une 
séparation de corps entre sa femme et lui. 
Diverses tentatives de soulèvement curent encore lien de 
la part des jacobites, sans que le Prétendant y prit part. Ce 
ne fut qu'en 1727, à la mort de Georges I , qu'il se décida 
ì tenter encore une fois la fortune. Avec la permission et le 
secours du pape, il se reudità Gnes, d'où il comptait s'em- 
barquer pour l'Angleterre; mais il ne tarda pas à compren- 
dre toute l'imprudence de cette entreprise et à y renoncer. 
Une autre fois encore, en 1740, le cardinal Fleury voulut se 
serir contre l'Angleterre de la famille des StuarL, et lui 
fit faire des ouvertures à ce suet. Jacques, trop vieux et 
trop découragé pour se mettre à la tëte d'une expédition, se 
substitua, en 1744, son fils Charles-Édouard, muni à 
cet eifet de ses pleins pouvoirs. Les avantages que rempor'a 
d'abord le jeune aventurier, qui débarqua en Ecosse dans 
i'ëté de 175, furent annihilés, le 27 avril 176, par la dé. 
faite de Culloden. Jacques passa le rete de ses jours à 
Albano, par suite de difficultés survenues entre lui et la 
cour de lome sur des questions diëtiquette. Il y mourut le 
I er ]anvier 1765. 
JACQUES i , empereur d'Haïti. Voile-. 
JACQUES, rois d'Aragon, Voye'. 
JACQUES (Le Cousin). Voye'- BEFFUOY UE ]EIG.'3ïf. 
JACQUES (Les). Voyez JACQUEBIE. 
JACQUES (Iattre}, un des prétendus fondateurs du 
compagnonnage. 
JACQUES (Maltre), type éternel de ces gens qui prO- 
tendent savoir également tout faire, qui se disent propres à 
tous les emplois; laquais complaisants et pleins de souplesse, 
dont le talent est de savoir pretement changer de costume 
ou de livrée. Mo[ière, dans son Avare, introduit de la ma- 
nière la plus comique dans la maison d'Harpagon un Moître 
Jacques, qui est une espèce de factotum. Ce personnage se- 
condaire contribue merveilleusement à faire ressortir les 
nuances du caractère principal, et fait de ce tableau domes- 
tique un des morceaux les plus précieux de la pièce. M. de 
Cormenin en a fait un savant de village, qni enseigne 
toutes sortes de bonnes choses ì ses compatriotes. Combien 
avons-nous eu de MaRres Jacques depuis ! 
JACQUES BOXHO.LME. Voyez 
JACQUES COEUP. Voyez Cou. 
JACQUIN (NCOLAS-JOSn, baron u), botaniste cé- 
lèbre, apppartenait ì une ancienne famille du Brabant, et 
naquit à Lcydc, en 177. Il fit ses Cudes à Anvers, Louvain. 
Leyde et Paris, et choisit enfin Vienne pour séjour. Quand, à 
la sollicitation de Van Swieten, l'empereur François 1  
fonda, en 1753, le jardin impérial de Schoenbrunn, on ré«olut 
d'envoyer plusieurs botaniste$ dans les pays lointains à l'effet 
d'y recueillir une collcction de plantes exotiques; Jacquin 
lut chargé d'aller en Amérique. Il parcourut, de 1755 ì 1759, 
plusieurs :les des Inilc uccidenlales et une bonne partie des 
69. 



tes de la Eolombie moderne, et les envois qu'il explia 
au jardin botanique de Vienne en firent le plus riche de cette 
-époq,te. En 1763 il fut nommé conseiller des mines et pro- 
4esseur de chimie et de minëraloge, puis, en 1768, profes- 
seur de chimie et de botanique ì l'université de Vienne. Il 
nourut dans cette ville, en,1817. 
Jacquin occupe un rang élevé parmi les botanistes de 
son siècle; car, sans parler des services qu'il rendit au jar- 
Ih botanique de Vienne, il se distingna comme professeur et comme écrivaln. Il a doté l'Allemagne de magnifiques 
.ouvrages, non moins prëcieux qu'utiles, tels que la Flora 
Austriaca (5 vol.; Vienne, 1773-78, avec 500 gravures sur 
cuivre ); et le Strpium Americanarum Hstoria (Vienne, 
-1763-80, avec 264, planches coloriëes ). On lui doit en outre 
un grand nombre de manuscrits et de traités. 
Son fils, Joseph-Franço, baron D JACQ, nort en 
1835, conseiller d'État et professeur de chimie ì l'université 
de Vienne, est l'auteur d'un ouvrage qui a rendu de son 
emps les plus grands services; nous voulons parler de son 
Traitd de Chimie 9dndrale et médicale ( vol. ; Vienne, 
179 ; nouvelle (-'dition, 1810). Il a écrit en outre différents 
ouvrages de botanique. 
JACQUO'['OT (M'e). Foye'- JAQvoro. 
J:kCULATO|IE (Oraison) du latin jaculari, lancer, 
àardcr. On doune ce nom ì des prières courtes et ferventes 
adresses à Dieu du fond du cur, mme sans que la bouche 
prononce de paroles. 
J«kDE C'est un feldspath mal défini. Quelquefois 
on donne le nom de jade à de l'al b i t e compacte et plus 
on moins pure. Mais le plus souvent il s'applique  une 
! a h r a d o r i t e souillée par de la diatlage. 
Le jade ndphretique des anciens minéralogi«tes, qui avait 
reçu son nom de la propriété que l'on attribuait aux amu- 
lettes qui en étaient faits de preserver de la colique ní- 
çhrétique, n'est pas un jade; c'est un silicate d'alumine et 
de machCte. 
JAENç province d, royaqme d'Andalousie, et jadis 
-.:yaume maure indépendant, traversée au nord par la Sier- 
ra-Morena, à l'est par la montagne de Cazorla, au sud par 
,/a Sierra-levada, richement arrosée-par le Guadalquiv, 
le t;uadalimar et divers autres cours d'eau, compte sur une 
• uperficie de 16 myriamètres carrés, une population de 
307000 habitants, et forme l'une des plus belles courtCs 
de la péninsule pyrénéenne. Conquise par les Maures quand 
ls envahirent l'Espagne, cette province resla roamne 
eaaure indépendant jusqu'en 123, époque oU Ferdinand III 
la repritsur les infidèles etl'incorpora au royaume de Castille. 
.AEN, chef-lieu de la province, est une ville de 18,500 
mes, dans une riche contrée, avec une belle cathédrale. 
En fait d'autrs localités remarquables, on peut encore 
er A n d u) a r, Linares, où se trouvent des mines de plomb 
argentifère, le village de .Navas de Tolo=a, ¢é[èbre par la vic- 
entre qu'AIphonse VII y remporta en 11 sur les Arabes, et 
»b en 1812 les Français furent battus par les Espagnols; les 
défilé. de B a y l e n et les colonies de la S i e r r a-M o r e n a. 
JAFFA ou JOPPÊ, ville de Syrie, située sur la Mëdi- 
rranée, ì 8 kilom, de 3érusalem, ì 6 de Gaza et à 88 
<le Saint-Jean-d'Acre. On fait remonter son orine ì la plus 
laute antiquité. Un passage de Josué prouve qu'elle exis- 
tait 1,500 ans. av. J.-C. Ce serait ì Japho, nom primitif 
de Jaffa, que Ioé serait entré dans l'arche, et qu'il aurait 
,ensuite reçu la sépulture. C'est par 3afin que Salomon tirait 
de Tyr les bois nécessaires ì la construction du temple. 
Elle devint très-florissante sous la domination des 3nifs, 
qui l'appelaient Joppd, nom qui signifie belle et agréable. 
Plusieurs auteurs assurent que l'aventure de Persée et 
d'Andromède se passa non loin de ses murs. La légende chré- 
tienne n'a pas moins choisi Joppé pour son théâtre que la 
fable paienne. C'est dans cette ville que s'embarqna le pro- 
Ihète-Jonas fuyant la face du Seigneur; et saint-Pierre, 
qui  e,t a vision du drap tombë du ciel remplis d'animaux 
de tons geares, y ressuscita Tabithe. 

JA6ELLON 
La longue existence de Jaffa fut marquée par des sffiéges 
nomhren et par la domination mccessive de diverses nations. 
Les Égyptieus, les Assyriens et d'autres peuples s'en redl. 
rent maltres ì cinq reprises différentoe. Judas Machabéela 
livra aux flammes. Cesllus la.détruisit, et Vespasien la rava- 
gea. Lorsque les Sarrasins envahirent la Syrie ,..alfa devint 
leur conquëte. ^u commencement «lu douzième siëcle, les 
croisés leur enlevèrent cette villeet son territoire, et en firent 
un comté. Tour à tour prise par Satadin, reprise par Ri- 
chard Coeur-de-Lion, prise de nouveau par les Sarrasins, 
et reprise encore par les Francs, Jafla était au pouvoir de 
Ganthier de Brienne, comte de Japhe, lorsque saint Louis 
aborda pour la première fois en Terre Sainte. Mais les sei- 
gneurs francs ne lardèrent pas à se voir arracher cette ville 
et le reste de la Palestine par les st0taus d'Égypte. Elle 
tomba enfin entre les mains des Turcs. 
Dans la dernière moitié du dix-huitième siècle, Jaffa eut 
à s.bir trois siéges désastreux : les deux premier, durant 
les guerres acharnées de Daher et d'Aiy-Be.v, et le troisième 
en 1799. Dans celui-ci, les Français, commandés par le 
génral Bonaparte, s'étant rendus maltres de la place, après 
une longue résistance, en passèrent la garnison au fil de 
l'épée. Comme par une sorte de représailles pour cet hor- 
rible carnage la peste se mit  moissonner cruellement les 
vainqueurs. Ce fut alors que, pour relever les esprits» abat- 
tus par l'effroi de la contaon, l'immortel général se rendit 
dans le lieu où l'on avait réuni le plus grand nombre de 
pesti[érés et les visita les uns après |es antres, fait que G r o s 
a retracé dans un tableau célebre. 
.affa est bti en amphithéâtre; les rues en sont étroites 
et malpropres; on  voit plusieurs mosquées et trois cou- 
vents chrétiens. C'est le port des pèlerins qui se rendent 
à.érusalem ; leur passage annuel est,une source avantageuse 
de reenus pour la ville. Méhémet-Ali s'en ílait rendu 
mai[re en 1832 ; mais en tSt0 les Turcs, sec.ondés par des 
troupes anglaises et autrichiennes, la lui reprirent. Le com- 
merce y est, du reste, peu considérable. 
La population de Jaffa s'élève ì près de 6,000 
parmi lesquels on compte 5O0 catholkiues, 6 ou 7O0 grues 
schismatiques et 1,000 arméniens. Les jardins qui cou- 
rent les environs offrent le coup d'oeil le plus enchan- 
teur; les palmiers, les orangers, les grenadiers, les citron- 
uiers, les limoniers, les cedrats, les oliviers, .v (.talent le 
luxe de leur végétation, et fournissent en abondance des 
fruits déiicieux aux habitants de cette belle contrée. 
Paul Tn-. 
JAFFA (Gv-rEa lV D BRIE_NNE, comte D). Foye'- 
Br.IESNE (Maison de). 
JAGELLON ou .AG.ELLO, fils d'Olgerd, petit-fils de 
Ged i mi n, deiDt en 1381, aprèMa mnrt de son père, grand- 
duc de Lill,uanie. Il se maintint dans cette dignit contre 
son oncle Kjeystut, qu'il fit égorger après l'avoir lait pri- 
sonnier, et contre le vaillant fils de celui-ci, Witold, avec 
lequel toutefois il se rconcilia. En 1386, après sa conver- 
sion au christianisme et son mariage aec la reine lled- 
wige, il monta sur le tr6ne de Pologne sous le nom de 
Wladislas lI. Ses luttes continuelles a-ec l'ordre Teuto- 
n i q u e, eu Prusse et ses efforts pour maintenir l'union de 
la Lithuanie et de la Pologne sont les faits dominants de 
son règne, qui dura quarante-huit ans. 11 vainquit tes che- 
valiers tcutoniques ì la grande bataille de Tannenberg, en 
110, qui n'eut pas, il est vrai, immédiatement de grands 
résultats pour la Pologne, mais de laquelle data néanmoins 
la décadence de l'Ordre. L'union de la Pologne avec la 
Lithuanie, gouvernée par des ducs particuliers, De f,t guëre 
que nominale ; et le duc de Lithuanie, Swidriga}lo, finit par 
enager une lutte ouverte oentre la Pologne. 3agellon, en 
fondant l'évèché de ,Vilna, chercha  hter les progrës de 
la rel'.on" catholique en Lithnanie. Toujours soupçonné 
le clergé de pencher vers les doctrines de J. Huss, il fut 
forcé d'appeler, en 1432, les Imssites à son secours contre 
les chevaliers de l'ordre Teutonique, qui dévastaient la 



JAGELLON 
Pomérlie. Ent00, pour remplacer une cole, alors singu- 
lièrement déchue, crée par Casimir le Grand, il fonda l'u- 
niversité de C r a c o v i e, qui porte encore aujourd'hui son 
nom. Il mourut en tz31,  Grodek, près de Lemberg, et 
fut enseveli  Cracovie. Son fils, Wladislas Itl, qu'il avait 
eu d'llisabeth, sa quatrième femme, lui succéda sur le 
tr6ne. 
JAGELLONS (Les). C'est le nom d'une dynastie qui a 
rgné en Pologne et en Lithuanie, en BobCe et en Hon- 
grie. Elle descendait de Jagel Io n. La Po logne a eu, de 
1386 à 1572, sept rois de la maison des Jagellons, formant 
quatre générations. Jagellon lui-mime eut pour successeurs 
directs ses fils Wladislas Ill et Casimir IV, puis les trois 
fils de ce dernier, Jean-Alher Alexandre et Sigismond ! er ; 
enfin le fils de Sigismond, Sigismond-Auguste, avec lequel 
s'éteignit en Pologne la ligne masculine des Jagellons. Le 
dernier rejeton de cette ligne fiJt, en Pologne, la sœur de 
S i g i s m o nd- A u g u s te, la reine Arme, qui épousa lîtienne 
Batbori, et mourutsans enfants. Siismond lit, fils de 
Jean, roi de Suède, etde Catherine, sœur de Sigismond- 
Augn.qe, devint la tige d'une ligne féminine de la maison 
des Jagellons, qui monta, en 1587, sur le tr6ne de Pologne, 
et continua à l'occuper sous les fils de ce prince, Wla- 
dislas IV et Jean-Casimir, jusqu'en 1668. 
Deux Jagellons régnèrent en Hongrie; Wladislas, qui 
gouverna en mme temps la Pologne et la Bohéme, et 
mourut à Varna, et son fils Louis It, qld périt sur le champ 
de bataille de Mohacz. Au reste, les Jagellons s'étaient 
alliés à plusieurs maisons régnantes allemandes, telles que 
celles de Brandebonrg, de Saxe et de Brunswick. 
JAGGENAUTH. Voye DJAçXaA. 
JAGU,R. Le jaguar ou tigre d'Am¢rique (felis 
onça, Lin. ) est après le tigre et le lion le plus grand qua- 
drupëde du genre chat. D'Azara et Buffon nous ont laissé, 
d'après Sonnini, des descriptions qui ne laissent rien à désirer 
sur la physionomie et les habitudes du jagaar. La beauté de 
son pelage est remarquab',e. D'un fauve vif en dessus, il est 
marbré  la tète, au cou et le long des flanes, de taches noires 
et irrégulières, notablement plus grandes aux jambes; de 
l'épaule à la queue, qui t longue de 0  60 à 0' 65, s'étend 
une bande noire, divisée en deux au-dessusde la croupe; la 
poitrine est traversée par une autre bande, noire égale- 
ment, mais plus étroite; le resle du corps est blanc, semé 
de tache noires, le plus souvent inégales, et disposées 
sans symétrie. Depuis le hout du museau jusqu'à la nais- 
sance de la queue, sa longueur est de t' 30 environ ; sa 
hauteur ne dépase pas 0  80. 
Lejaguar se trouve au Brésil, au Paragnay, à la Guyane, 
au Mexique, et dans toutes les contrées mëridionales de 
l'Amérique. La divergence d'opinions des voyageurs sur 
les habitudes du jaguar vient de ce qu'ils l'ont observé 
dans des circonstances differentes. Ainsi, les uns en ont 
fait un animal timide et indolent : cenx-là l'ont observé 
quand il ëtait rassasié; les autres, au contraire, nous le re- 
présentent alerte, intrépide, et doué d'une force musculaire 
prodigieuse : ceux-ci ont dit vrai. Quoique le jaguar pré- 
fère user de surprise pour s'emparer de sa proie, il se rue 
aussi sans crainte sur des animaux trois fois plus gros que 
lui, et il fait une guerre aclmrnée aux chevaux, aux gé- 
uisses, aux boeu[s, aux taureaux. Il s'élance au cou te sa 
victnue, et, lui posant une patte de devant sur l'occipul, 
de l'autre, saisissant le museau, il la lève, lui brise la 
nuque et l'entralne avec tcilité dans les forts. Son alité 
et extrème pour monter sur les arbres ; mais il est en re- 
vanche très-peu léger quand il faut se retourner ou courir. 
Il nage avec habileté, donne aussi la chasse aux poissons, 
fréquente les endroits marécageux et les grandes forts ; 
n&nmoins, on le voit de préférence non loin des grandes 
rivières. La femelle du jaguar met bas deux petits; dès 
lu'ils peuvent marcher, ils suivent la mère, qui les dèlend 
avec intrépidité, sans jamais calculer le péril. Le jaguar est 
féroce, indomlflahlœe : plas d'une fois le chasseur asez 

-- JAIS 549 
hardi pour aller le traquer dans ses broussailles a expié 
cruellement sa témérité. 
JAHDE  petit fleuve allemand, qui se jette dans la mer 
du bl o rd, découpée  son embouchure en une vaste baie du 
mthne nom, et qui appartenait au grand-duc d'Oldenbourg, 
quand, en t854, il en céda une partie  la Prusse pour 
y former un grand établissement de marine militaire. Cette 
baie de la Jahde est située  peu près  égale distance des 
emboucbures de l'Elbe et de l'Ems, qu'elle permet de sur- 
veiller. Elle est navigable en tout temps et pour les vais- 
seaux de toute grandeur. Le port prussien doit ttre établi 
prës de Heppens, où l'on trouve 3t pieds d'eau dans les pire 
basses murCs. Dans la baie proprementdite, qui a une snper 
ficie d'environ quatre lieues carrées le canal de la Jabde s 
partage en plusieurs bras separés par des bancs de sable 
solides. Au reste, cette baie, dans laqaelle aucune rivière de 
quelque importance ne se jette, est entourée de digues ar- 
tificielles, et n'a par conséquent d'autre courant que celui 
qui est produit par le flux et le reflex. L'eau salée de la 
baie ne gèle jamais pendant la marée, et ce n'est que sur les 
bas-fonds les plus élevés qu'il se |orme une couche «le glace 
en hiver. L'entrée de la baie peut ttre entièrement dominée 
par des batteries élevées sur les points extrmes de la c6te ; 
ce qui lui donne une certaine importance stratéque. 
A l'époque du blocus continental, des vaisseaux anglais 
etèrent souvent l'ancre dans la Jahde. Lorsque l'empire 
napoléonien s'Cendit jusqu'à la Baltique, une commission, 
présidée par les amiraux de Winter et Verhuel, fut chargëe 
par ordre de l'empereur d'examiner les c6tes de la mer du 
biord ; elle trouva la baie de la Jahde particulièrement propre 
ì l'établissement d'un port militaire forifié. L'exécution 
en était dejà commencée par la construction de redoutes 
près de IIeppens et d'Eckwarden, et par l'excavation d'un 
canal qui devait relier l'embouchure de l'Ems à la Jahde ; 
la guerre de lussie et la chute de biapoléon arrèterent la 
realisation de ce plan. A la pointe sud de la baie se trouve 
la petite ville de Varel, qui possède divers établisments 
offrant des ressources importantes pour un port militaire. 
Depuis les remaniements de I  t 5, la Prusse devait regretter 
de n'avoir aucun établissement maritime sur la mer du Nord, 
dont elle est séparée par le Hanovre. Ses relations étedues 
avec les Etats-Unis devaient encore accroltre son désir de 
se créer une station maritime sur cette mer. Pensant n'avmr 
rien à espérer du bon vouloir du Hanovre, elle s'adressa 
au grand-duché d'OIdenhourg, qui possédait la Jabde, et 
au mois de }anvier 1854 le gou*eruement d'Oldenbourg 
céda au gouvernement prussien un territoire sur les bords 
de la Jahde pour y établir un port mililaire. Pour éviter 
toutes les difficulls qu'auraient pu susciter les ports hano- 
vriens, le gouvernement prussien déclara dès le principe 
que le port sur la Jabde serait purement militaire, et non 
commercial. Au mois de novembre le prince Adalbert de 
Prusse prit solennellement possession au nom de la Prusse 
du territoire situé des deux ctés de l'entrée da golfe de la 
Jahde. Le gouvernement hanovrien fit alors une protestation, 
s'appuyant sur ce que, par suite de conventions iéodales, la 
principauté d'Oldcnhourg n'avait pas le droit de céder des 
territoires à des puissances étrangères pour y élever des 
fortifications; mais la Prusse prétendit, de son c6té, que 
toutes les obligations résultant de conventions de ce genre 
ont cessé d'avoir leur elfet par suite de la suppression de 
l'Epire d'Allemagne et en vertu de l'article 34 de l'acte de 
la Confédération du Bhin. Les choses n'allèrent pas pins loin, 
et bient6t mème le Hanovre s'enteudit avec la Prusse pour 
permettre sur son territoire l'ctablissement "d'un chemin 
de fer unissant la Jabde aux frontières prussiennes. 
JAIS ou JAYET, variété de lignite piciforme. Le jais 
est d'un noir luisant, foncé, séide, pur, compacte, cassant, 
mais non friable ; il pèse t,6, s'ëlectrisi dilficilement par 
le frottement, etalors répand une odeur charbonneuse; il 
est susceptible de brtler avec flamme sans couler ni se 
boursoufler. Il ne se rencontre pas par couches mais par 



50 JAI 
mase de 20 à 25 kilogrammes. Il en existe en France, dans 
qtlques houillères de la Proveoe, à inte-Colombe, à 
Peyra età La Bde, prs de Quilia ; e pae, da la 
Gioe, l'Aro et I tues. Le jayet que l'on retirait 
de ces provi au mifieu du dix-huitième siècle it en 
rputin, parce qu'il était p et doux au travail. O en 
trouve également en Allemae, en eterre et en Prusoe. 
Ds ce royme, il se rencontre dans les mm looelioEs 
que le succin : agssi lui a-t-on donné nom d'ambre noir. 
Son giment est le plus souvent à 12 mêtres de profon- 
deur en iron. 
C'est  Sainte-Cdombe, dans le dpartement de l'Anale, 
que sont les fabriqu de bijoux en jais les plus considé- 
tables de la Franoe-  fabriques occupaient dans le siècle 
dernier jusqu'a mille ouvers, et l'ébliemenl avait pour 
250,000 frcs de bijoux en jayet répandus dans le oemmerce 
chaque n; ms aujourd'hui cela est bien cbangé, et ces 
fabriques sont réduites à un ét de aullit presque complet, 
comprativement à ce qu'elles ient autrefois. 
Le jayet se ille à faceRes, comme la pierre chez les 
lapidai. On commenoe par le dégrossir, ps on le perce 
et on le polit sur une mee borizonle en gré, con 
tan»ment mouill : comme cette meule est très-dure, 
ja)'et se polit rapidemement. On peut lui donner la forme 
que l'on sent, suivant qu'on a l'inkntion d'en lre des 
pendants d'oreille, des collier% des gatur de ro, etc. 
Quand les fabriques de Snte-Colombe éient dans leur 
t,de prospérité, un bon ouvrier ébaucbait par jour 
t,0 à 3,000 grains, suivant leur grosseur; celui qui degait 
les peer faisait de 3  6,000 trous, et le polisseur falot 
t0,500 faoeRes dans sa journée. 
La nation chez laquelle les ornemen en jayet ont eu 
pl de vogue est la nation espagnole, i en faisait un 
grand commerce avec s colonie. C. Fwo¢. 
JAKOUTZK. Voye IAkOUTSK. 
JALAP. Le jap est de toutes les plns exotiques 
une de celles dont l'origine et la nature ont été le plus long- 
temps douteuses. En effet une foule de botist ditingu 
croyaient, d'après Tournefort, que c'éit une bel le- d e - 
n ni t; ms Linné plaça lejalap dans le gee coavolwl 
Le jalaç est oaire du Mexique et des enrons de 
Xapa, d'où lui est venu son nom. Le premier auteur q 
ait .fait connaitre  racine est Gççard  a u h i n, qui 
voit dcte comme la race d'une one, en raison de 
quelque roemblanoe qui exis entre elles. n 1777, 
fom, d'açr les as,ians de Thiei de ]enonve, 
dcclara que lejalap éit un Ieron, dont la ruine pouvait 
attendre jusqu'au poids de trente kilraes; mais 
1. Guibourt a plus r combattu foement oe oçinion, 
en décrant que jmis in racine de alap du commerce 
n'avait dépé une lie. Enfin, en t27, le docteur Red,nan 
xe, de t'iversi de Pensvie, d'une çrt, et M. 
duois, pharmacien lrançais an Mexiqe, cultivèrent le vrai 
jalaç. Le  d'argent d'un indiçène le forç à "vendre 
a M. danois une race de jalap q n'était pa etire- 
mt déchée, çrécantion que 1 bitan avait soin 
de poendre, ds I crainte de se voir enlever une des ur- 
 de leur fortune. M. Ledanois mit la.radne en terre et eut 
le bonheur de la voir prospérer. En I30, le docteur 
n publiait la defiçtinn du ai al«ç, et M. Lanois 
en envoyait des cbtillons à M. de Humboldt, qui les te- 
St  Dfon. Malheureusement ils étient trop altères 
pour pouvoir les reconnaitre, mais au rem" de M. Ledanois 
oWut se convaincre, par l'exaoEen de s écbtilons, 
qu'il avait doeuvert le vrai jalap officine. 
Cette plan, digne par les MexioEç us le nom de 
topati, a la cine tubercule, arrondie, remplie d'nn 
suc lactnt et rinx ; elle t noirâtre à i'exoEfieur et 
hlanchàtre à l'infieur; quelqu ricules paent de 
pae inférieure, et du ntre de sa pflie supérieure, 
Çui   peu allong, s'Cèvent ordinairement une saule 

JALES 
tige et quelquefois deux on trois. Les tiges sont rondes et 
lisses ; les feuilles sont cordiformes, entières, aiguês, et for- 
tement ChanerCs  la base. Les pédoncu|es portent ordi- 
nairement une fleur dont la corolle est rose tendre« les éta- 
mines et le pistil sont très-longs et sortent du tube de la 
corolle. Les semences sont lisses, irrégulièrement sphéri- 
ques et d'un brun noirâtre. La racine du jalap est la seule 
partie de la plante employée; elle est ordinairement mar- 
quéede fortes incisions, faites dans le but de faciliter s« 
dessiccation ; son odeur est nauséabonde, sa saveur cre et 
strangulante. 
Lejalap ne peut se cultiver que dans les contrées chau- 
des ou dans les serres. C'est en semant la graine, puis trans- 
plantan! dans des pots la plante qui en résnlte, qu'on par- 
vient  l'Cever. La terre doit Atre lègère, sablonneuseetpeu 
riche. Il faut l'arroser fort peu, parce que la racine, étant 
charnue, pourrit facilement. 
Les brasseurs et les distillateurs anglais employaient au- 
trefois la racine de jalap en raison de ses propriétes fermen- 
tescibles. Le jalap est un purgatif très-énergique ; il est 
precieux pour le peuple, à cau de son prix per élevé. 
On en fait un extrait, une teinture alcoolique et une rsine, 
qui et le principe purgatif de la racine à l'Cut de pureté. 
C. FAViOT. 
JALÈS (Camp de). Jalès ou Jalle-. est un bourg avec 
château de t'ancien Languedoc, aujour,I'hni dans le sud de 
l'Ardëche, entce les Yans et Barjac. Le manoir, qui est 
maintenant en ruine, alCendait d'une commanderie de Malte. 
Un grand événement s'y passa en aoOt 1790, et les histo- 
riens de la révotution n'out eu garde de le pa2.ser sous i- 
lence. 
La fWd é r a t i o u de Paris avait produit nn immense écio 
dans tous les departements. L'Ardèche s'etait brillamment 
associé h cette grande maniIestation patriotique. L'abbé 
de La Bastide et quelques mécontents ourdirent une cons- 
piration, afin de faire tourner au profit de la contre-révolu- 
tion la reunion lederative de Jalès. Là, dans le camp de la 
fedération, formé le 18 ao0t, se trouvaient réunis plus de 
20,000 gardes nationaux, dit le proces-verbal adopté le len- 
demain, et ensuite imprimé h Orange. Ce fut là que, après 
le départ des patriotes sans dëfiance, La Bastide, courant 
de ran en rang, l'Çpée d'une main et le crucifix de l'autre, 
comme un nouveau Pierre l'Ermite, essaya d'enrOler les 
croisés du Vivarais pour aller arracher des prisons de [Vl- 
mes quelques eatholiques fanatiques arrtés les armes à la 
main dans un soulèvement contre les protestants. Des mo- 
tions se succédèrent, des arrtés séditieux furent pris, et 
rien ne semblait négligé pour s'assurer le succès : malheu- 
reusement pour les coniurés, i] ne leur manqoait que la sym- 
pathie des populations : elles se montrèrent réfractaires à 
leurs inspirations ; et l'administration du département ar- 
rta cet essor par une age proclamation. Un décret du 7 
septembre 1790, accompagné d'une proclamation du roi 
date du 12, approuva « les dispositions de la proclamation 
du directoire de l'Ardëche, qui s'oppose  l'exécution de 
i'arrt pris dans le chtean de ,lalès, par les officiers qui 
se sont quatifiés d'Cat-major d'une soi-disant armée fédé- 
rative ; » declara « la délibération de l'asembiée tenue après 
le depart des gardes nationales fédrées, inconstitutionnelle, 
nulle et attentatoire aux lois, » et ordonna « an tribunal de 
Villeneuve-de-Berg dïnformer contre les auteurs et intiga* 
teurs et de taire leur procès selon les ordounances ,,. Cpen* 
dant, les factieux continuaient leurs intrigues, et adressaient 
le 26 septembre de fallacie,ses correspondances pour sou- 
lever les masses contre les protestants et les patriotes. En 
lévrier 1791, ils avaient repris toute leur audace. C'est 
ce dont le député Saint-Martin entretint l'assembiée le 3 
Le rassemblement de ,lalès avait été dissous; mais l'an- 
née suivante sgs meneurs or#anisèrent une armée, qui en 
juillet 1792 fut mise en .déroute; on emporta de vive force 
et on livra aux flammes les chateanx de Banne, de Jal; os 



JALE -- JAMAïQUE 

passa au fil de l'épée le curé de Bar)ac, le comte du Sail- 
lant, et quelques autres chefs ; on saisit des papiers impor- 
tants, qui établirent la preuve que les frères de Louis XVI 
correspondaient de Coblentz avec les révoltés, et avaient 
donné des pouvoirs au comte de Cnnway et à du Saillant. 
Le titre d'un libelle de 30 pages in-8 °, imprimé vers la fin 
d'octobre 1790, suffit à démasquer leurs intentions, il est 
intitulé : Manifeste et protestation de 50,000 Français 
fidèles, armés dans le Vivarais pour la cause de la re- 
ligion et de la monarchie, contre les usurpations de l'As- 
semblge se disant nationale. » Trois ans après, cet appel 
liberticide était entendu par les chefs des armées catholiques 
et royales de la VendC. Louis vu Bos. 
JALON ou PIQUÊT. En termes d'arpentage, on ap- 
pelle ainsi des btons tfC-droits, ordinairement ferrés et 
pointns à l'une de leurs extrémités, et qui servent pour 
prendre des alignements. Quelquefois ce sont de simples 
tringles en fer. Leur longueur est généralement d'un mètre. 
Ils supportent au besoin une carte ou un morceau de pa- 
pier que l'on nomme Vo!lant. Pour tracer une ligne droite 
sur le terrain, on commence par placer des jalons aux deux 
points extrémes de la ligne à former, puis mettant l'oeil der- 
rière l'un de ces jalons, et regardant dans la direction de 
l'autre, on en fait planter de distance en distance, ordinal- 
rement tous les trente ou quarante mètres, de manière qu'ils 
se conlondent tous avec le premier, leq«el doit couvrir et 
cacher tous les autres. On fait encore placer des jalons à 
tous les points d'une figure que l'on veut reconnaltre sur 
le terrain. L. LouvE. 
JALOUSIE (en grec ),o;, d'où l'on a lait en italien 
9elosia), sentiment qui pervertit le plus la nature de 
l'homme, car il le pousse  to«s les genres d«excès et de 
crimes, et ne lui accorde en retour que de bien rares dé- 
dommagements. Bien de plus mobile que la jalousie Iors- 
qu'elte tient à l'essence du caractëre; elle change si souvent 
d'objet qu'elle ne laisse ni trdve ri repos; elle renferme 
donc en elte-mme son propre cfitiment. La fortune, la 
naissance, les avantages du génie, loin de sauvet «z cette 
terrible maladie morale, la portent, au contraire, à son plus 
haut degré d'exaltation morale : car avec elle le plus ne 
préserve pas du moins. La jalousie s'attache, se cramponne 
à des détails, de sorte qu'avec tous les éléments du bon- 
heur le plus étendu, on devient tout à fait à plaindre. On 
a vu des hommes dont le nom remplissait le monde suc- 
comber dans ce genre à des tourments pour ainsi dire en- 
fant]us, et vouloir primer dans des choses qui, par leur 
futilité mème, les aura]eut rendus ridicules, 3, eussent-ils 
excellé. Les princes poëtes ou musiciens sont des rivaux fort 
a craindre : armés du pouvoir, leur jalousie ne cannait pas 
de pardon. En général, elle s'agrandit suivant le nombre de 
ceux qui vous regardent. Les acteurs, qui sont chaque jour 
en contact avec le public, dessëchent de alousie; ils jouis- 
sent avec plus de dëlices des sifl]ets qui attristent leors ca- 
marades que des applaudissements qu'ils provoquent eux- 
mêmes ; leur existence s'use dans une multitude de cabales 
et d'intrigues qui 0tent souventtoute dignité h leur carac- 
tère; enfin, la jalousie est de tous les sentiments le plus vil 
et le plus bas, parce qu'il a sa source dans une personnalité 
continuellement irritee. 
Il faut convenir nnmoins qu'un peu de jalousie entre 
inévitablement dans l'a mour, qu'on adCni un ëgoïsme à 
deux; mais c'est Iorsqu'll se montre très-vif et qu'il est en- 
core  son début. 11 arrive cependant tous les jours dans le 
mariage qu'un homme, après avoir cessé d'aimer et s'ètre 
épris ailleurs, conserve à l'égard de sa femme une jalousie 
inquiète et sm-veillante : ce n'est là qu'un remords de la 
vanité oui craint d'ëtre prise à son propre piége. 
SLX'r-PtosPrJ. 
La jalousie en amour est la disposition ombrageuse 
d'une personne qui aime, et qui craint que l'objet aimé ne 
fasse part .de son cœur, de ses sentiments et de tout ce 
qu'elle-prétend lui devoir tre réservé, 'alarme de es 

551 
moindres démarches, voit dan ses actions les plus indiffé- 
rentes des indices certains du malheur qu'elle redoute 
vit en soupçons, et fait vivre un autre dans la contra]nie et 
dans le tourment. Cette passion cruelle et petite marque la 
défiance de son propre mérite et un aveu de la supériorité 
d'un rival, et hàte communément le mal qu'elle appréheude. 
Peu d'hommes et peu de femmes sont exempts de la jalousie; 
les amants délicats craignent de l'avouer, et les épnn. en 
rouissent. C'est surtout la folie des vieillards, qui avouent 
leur insulfisance ,et celle des habitants des climats chauds, 
qui connaissent le tempérament ardent de leurs femmes. 
Dtnro. 
JALOUS[E sorte de treillis en bois ou eu fer, au tra- 
vers duquel ou peut voir sans être vu; espèce de contre- 
vent formé «le planchettes minces assemhlées parallèlement, 
qu'on remonte et qu'on baisse à volonté au moyen d'un 
cordon et de paul]es, et qui servent à se garantir de l'ac- 
tion trop vive du soleil ou de la lumière. 
JALTA. Vo/e: I 
JAMAÏQUE (La), l'une des Grandes Antilles, 
situëe par 18 ° de latitude septentrionale et 6O ° de longitude 
occidentale, au sud de Cuba, d'une superficie totale 
de 189 myriamètres carrés, est au.si bien par la richesse 
de ses produits que par sa æitualion géographique la 
importante des possessions britanniques dans les lndes 
occideutales, et s'appelait originairement ym9é ou 
Janhica. Découverte par Christophe Colomb en Iftg- lors 
de son second voyage, un décret royal lui imposa, en 151¢t, 
le nom de lsla de Santiago. Diégo, fils de Colomb, en fut 
le premier gouverneur. Sous la domination espagnole, la 
population indigène fut traitée avec une cruauh extrème et 
presque anntie. En 1655, sous le f, ouveruement de Crom- 
-ell, les Anglais s'en rendirent maltres, et lui donnèrent le 
nom de Jarnaica. Sa population augmenta ds lors, parce que 
beancou p de royalistes et de planteurs de la Barbade vinrent 
s'y etablir, lIais un effroyable tremblement de terre arrivé 
en 1692, et qui bouleversa complétement la surface de l']le, 
]oint à la peste qui survint à la suite de cette catastrophe, 
diminuèrent de nouveau la population. Ou l'évalue aujour- 
d'hui - 400,000 individus, dont un dixiéme a peine de race 
blanche. A l'époque de l'Cana]pat]on des esclaves 
on y comptait 310,070 esclaves. Depuis ce moment jusqu'au 
commencement de l'année 1850, nn y avait introduit de 
Sierra-Leone et des Indes orientales t,st9 travailleurs 
libres. 
Elle est traversée, dans la direction de l'ouest à l'est, par 
des montagnes primitives et boisCs, les Montagnes Bleues, 
qui en occupent toute la partie orientale ci y atteignent une 
altitude de ,300 mètres, tandis que les ramifient]ans qu'elles 
envoient dans les autres parties de i'lle sont moins élevées. 
La crête de la montagne est si aiguë, qu'en certains en- 
droits elle a à peine 6 mètres de lar{eur. Les arbres les 
plus hautes sont entantAes de plateaux qui dégénèrent en 
savannes. Les tains sont de l'aspect le plus sa«avage, 
les pentes extrêmement escarpées et parfois couvertes de 
forèts maguifiques. Les railC sont Craites, et les plaines 
n'occupent guère que la ingtième partie de la surface 
totale. Un grand nombre de cours d'eau descendant des 
montagnes les arrosent, et des sources minrales existent 
sur divers points. La c6te, généralement abrupte, présente 
sur un développement total de 67 myriamétres seine grands 
ports lort sOrset trente baiesou rades avec un bon fond d'an. 
crage. Le climat, très-chaud pendant le jour, est humide 
et frais pendant la nuit. La température moyenne de l'AlL est de 21°] Béaumur, et celle ,le l'hiver de 19 °. Les plaines 
sont malsaines; mais dans les montages l'air est très-sup. 
portable. A une élévation de 800 metres, les fièwes n'ont 
jamais sévi. 
Le ol, dont il n'y a guëre que 5 m)xiamëtres ¢arrés de 
mis en culture, est d'une fertilité extrdme et produit toutes 
les plantes trop]cales, telles que le café, le cacao, l'indigo, 
le coton. La culture du sucre et la fabrication du rb um 



( le fameux rhum de lamaiçue ) sont d'importants objets 
d'industrie, et après le cafë constituent les principaux pro- 
duits de l'fie. A la suite de l'émancipation des esclaves, la 
culture avait sensiblement diminué; mais el!e revient peu à 
peu à son ancien niveau. Aujourd'hui l'exportation des cafés 
pour la Grande-Bretagne n'est guère que de 3 millions de 
kilogrammes par an ; autrefois elle etait beaucoup plus con- 
sidérable. C'est dans ces derniers temps seulement que la 
culture du café a été l'objet d'une reprise sensible; et elle 
est dirigée avec tant de soins qu'aujourd'hui à Londres 
commeà Paris ce ne sont plus les ,nokas, mais les jamaJques 
de choix qui passent pour les premières sortes. L'exporta- 
tiondes sucres pour la Grande-Bretagne, qui dans ces derniers 
temps avait sensiblement diminué par suite de l'abaissement 
des tarifs et de l'extension que la culture de la canne a 
prise dans les Grandes Indus, est également er, voie de pro- 
grès depuis 1845, et s'élève en moyenne ì 600,000 qtintaux 
par an. L'exportation du rhum est d'environ 1,500,000 gal- 
lons. La valeur déclarée des importations venant de l'Angle- 
terre est évaluée à 26 millions de francs. Outre les produils 
coloniaux dont nous avons parlé, la Jamaïque possëde en- 
core comme élementsde prospérité de belles et riches forêts, 
dont l'acajou e,t l'essence dominante, et d'excellents paru- 
rages. Le cannellier, qu'on y a introduit de la CIdne, y réussit 
aussi parfaitement. 
La Jamaque est administrée par un gouverneur, et pos- 
sède un parlement, dont la chambre haute se compose de 
douze membres à la nomination de la couronne, et la chambre 
basse de quarante-cinq représentauts élus. Elle a pour chef- 
lieu Santiago de la l'ega ou Spantsh-Town, siCe dt] 
gouverneur, avec 6,000 habitants, qui font un peu de com- 
merce. Kingstown, où l'on compte 36,000 habitants, est 
une ville autremellt importante et pourvue d'un bon port. 
Enfin, il faut aussi mentionner Port-toyal, avec un bon 
port et 15,000 habitants, presque enliérement détruile 
Ch 1692 par un tremblement de terre. 
On consid'e comme une d6pendance de la Jamaïque les 
iles Ca9mans, groupe de basses lies de corail situées à l'ouest, 
dont la plus ande, dite le Grand Cayman, est seule ha- 
bilée. Sa population se compose de deseandants des anciens 
boucan iers anglais, tous excellents marins et surtout 
lns pilotes. 
JAMBAGE (Droit de . Vo9e PLmArl«'. 
JAIBE. On appelle ainsi la partie des membres inf- 
rieurs qui s'étend depuis le genou jusqu'au pied. Chez 
l'homme on y trouve deux os, le ri bia et le ron ë. La 
partie saillante des muscles dans la partie postérieure de la 
jambe, le mollet, est parficulièreà l'espèce humaine, et l'une 
des preuv que l'homme a Cê destinë par son Créateur à se 
tenir debout. Elle manque en effet complétement chez l'o- 
rang-outang ; et, dussent les nêgrophiles en bondir d'indi- 
gnation, force nous est d'ajouter qu'une jambe bien taire est 
chose en général d'une rareté extrne parmi les nìvres. Si 
l'on remarque chez l'homme en général une si grande a- 
ri,té, en ce qui est de la forme le la jambe, il ne faut pas 
publier que le climat, les habitudes, les vttements, etc., 
cvtribuent singuliérement  la modifier, il est évident, 
par exemple, que I travaux des diverses prolessiun con- 
tribuent beaucoup au développement et à la forme de la 
jambe. Chez les menuisier et les tourneurs, on remarque 
que la jambe est en général beaucoup plus forte que chez 
les atres gens de métier. Lestailleurs diflërent h cet égard 
essentiellement des cordonniers, .3 cause de la posture qu'ils 
affectent dans leur travail, les ambes croisées l'une sur 
l'autre. On remarque en général que chez les danseurs la 
jambe est in partie du corps qui satislait le plus compléte- 
ment aux rëgles du beau admises par l'art. Chez les per- 
sonnes babituëes  monter souvent à cheval, elle finit au 
contraire par 'arquer de la manière la plus disgracieuse, 
i.t le mollet, sos la pression de la botte et du flanc du che- 
al, ond et disputait pe à pe». 
o 11 nt.v1 pas rare de 'oir des iamb» oi le mollet c.t placé 

JAMAïQUE -- JAMBLIQUE 
beaucoup trop haut, ce qui produit à l'oeil l'effet le plus 
disgracieux. Les individus placés dans ces conditions sonl 
généralement robustes et capables de soutenir les plus 
grandes fatigues; tandis que d'autres individus, chez le- 
quels le mollet se trouve placé  mi-jambe, sont faibles et 
ont h poitrine étroite. Il est assez fréquent aussi de voir des 
hommes de petite stature avec des rouliers extrémement 
forts. Ce défaut de proportion produit un elfet désagréable 
à l'oeil, et témoigue plutSt d'une déviation des snes nutritifs 
que de la force pb},siquede l'individu. Le contraste opposé 
' se remarque non moins souvent chez des individus d'une 
i haute stature, à larges épaules, à muscles vigoureux, et dont 
i les jambes sont tellement fluettes, qu'il semble qu'elles soient 
insuffisantes pour soutenir le poids de leur corps. Les moi- 
! lets flasques indiquent une constitution mauvaise ou Cer- 
. vée ; quand ils sont durs et fermes, ils prouvent au con- 
 traire la force et la santé. C'est uit bon signe chez les vieil- 
lards qtland la partie inferieure de la jambe est sèche et 
ténue, car inrsq,l'elle enfle, la gangrène est à redouter. 
, JA.'tlBES DE VENAISON. Voye-'-DXL. 
JAMBES DE IFORCE grosses pièces de bois au 
nombrede deux, qui, pusCs sur les extrémils de la poutre 
du dernier étage d'un btiment, vont se joindre dans le 
poinçon pour former le comble. 
JAMB.IER, nom de deux muscles de la jambe, l'un 
antdreur, et l'autre postérieur. Le jambier antérieur a pour 
fonction de.tirer le pied en haut. 
JAMBIEBE. Vo9e, 
On donne aussi ce nom à une sorte de tige de bottes en 
cuir qui emboite le mollet et soutient la iambe. Les zouaves 
et les chasseurs de la garde impériale portent une jambière 
entre la guerre et le pantalon. 
JAMBLIQUE ph'losophe néo-platonicien, né à Chai- 
cis, en Celésyrie, vecut à la fin du troisième siècle, et au 
commencement du quatrième, sous Constantin. Il eut pour 
maltre en philosophie d'abord Anatolius, puis P o r p h y re : 
c'en e[ assez pour comprendre son attachement aux néo- 
plaoniciens ; il y joignait des idées de la secte de Pythagore, 
des 'T. ptiens et des Chaldéens. Le débit de Jambfique et 
le charme de ses ieçons allaient si loin, que l'empereur Ju- 
lien a dit de lui qu'il ne devait être rangë aprës Platon que 
par rapport au temps, et non par rapport à la cience. Ces 
avantages et la clarté de son exposition philosopbique lui 
attirérent un grand nombre d'élèves, qui mangeaient ì sa 
table. Jamblique était fort sobre et fort pieux; on le vén- 
rail beaucoup, et l'on allait jusqu'à le croi.-e auteur de plu- 
sieurs miracles, il souffrait qu'on dit de lui qu'un jour la 
force de sa prière l'avait enlevé  dix coudées de terre ; 
que son corps et ses vètements avaient changë de couleur; 
quïl commandait à des esprits; que, sous la forme de jeunes 
garçon% il ëvoquait les dëmons, en les faisant sortir dedeux 
sources. 
Il habitait probablement Chalci», sa pairie; mais on et 
quan est-il mort? C'est ce qui n'est dit nulle part : on 
suppose néanmoins que ce pourrùt être  Alexandrin. Toute- 
lois, si l'un ne veut pas assigner "3 sa ie une trop longue 
durée, il faut acettre qu'il cessa de phlosopher dè le 
commencement u règne de Constanfin, et que par consé- 
quent il y e,t deux Jambfique. 
La plupart des écrits de ce phiiosop|,e ont péri par l'lu- 
jure du lemps ; mais nous possédons encore, t * une vie de 
Pythagore pleine de confusion, et sans crilique ni chrono- 
lubie. Ces ont des lamheaux d'AllOnins de Tyane, de 
icomaque, de Dcéarque, d'Hëraclie, de Diogène, etc. 
Cette biographie a èt publiée du çivant de Jambfique. 
2  Explications pythariciennes, 2  livre : ce sont des me - 
moires sur lthagure qui font suite au premier ouvrage. 
° Quelqueso,,vrages relafifs aux mathématiques, dont i'nn 
a le mérite de nous avoir conservé des tragments de Philo- 
laits, de ,'onlim,s et d'Archtas. On lui attribue au un 
livre qui a por sujet lesmystres dg.pte, oil il et aussi 
pa,-ié des Cha|déens et des Assrien; mai. on a des r'soa 



JAMBLIQUE 
de crolre que ce livre n'est pas de lui. Il n'existe pas d'édi- 
tion complte des œuvres de Jamblique : elles ont été im- 
primíes séparérnent et h uiverses époques. • 
Constantin fit mourir Sopatre, disciple de Jarnblique ; on 
a prétendu aussi qu'il s'était adressé  ce philosophe pour le 
colsulter stsr le moyen d'expier le meurtre de son fils. D'au- 
tre prétendent qu'il y a eu deux Jarnblique : le second 
rait né à Apamée, et c'est / b,i que Julien, son grand 
admirateur, aurait écrit. Le premier serait mort sous Cons- 
tantin, le second sous Valens, et chacun aurait ets un 
paire pour disciple. P. nE GoLnnv. 
JMIBON. On a beaucoup rnédit du jambon; il n'en est 
pas moins vrai, de l'aveu des praticiens les plus exercés, que 
parfumé et salé  point, c'est la cl,arcuOrie la plus saine 
dont on puisse faire usage. Mais c'est en mme temps une 
notsrriture chaude, stimulante, et qui ne convient par con- 
quent qu'aux estomacs robustes. Au reste, les légumes 
doux, Iterbacés, tempërent avanlageusement les propriétés 
irritantes de cet aliment. Les jarnbons les plus estirnés sont 
(eux de Bayonne, qui viennent du Bearn et surtout d'Or- 
tltez, puis ceux de Mayence, de Portugal et de Westphalie. 
Quoique la chair de porc se prête mieux aux salaisons, 
qu'elle soit plus grasse et d'une saveur plus d(.licate ou plus 
appétissante, on fait aussi des jambons de mouton, et c'est 
souvent une grande ressource : la campagne, où l'on est ests- 
barrassë pour conserver la chair des moulons tués. 
JAMBONS ( Foire aux ). Vogez 
JAMBOS ou JAMBOSIER, arbre fiitier de la famille 
des myrtacées, orinaire des Indes orientales, et qui croit 
dans diverses régions. Ses fruits, qui varient de couleurs se- 
lon les variétés de cet arbre, sont rouges ou blancs, et mil- 
tissent depuis la fin de l'Cé jusqu'en novembre; ils sont 
très-rafralchissants. Les habitants du Malabar ont une 
grande vénération pour cet arbre, parce quSils sont dans la 
croyance que leur dieu Vishnou est né sous son ombrage. 
JAMES (GEoaçes PAYNE RAINSFORD ), ëcrivain an- 
glais, né en t 80 t,/ Londres, débuta dans la carriëre des lettres 
par une série de nouvelles quïl donua à la Literar/und 
ciel//, laquelle les fit paraltre plus tard sous le titre de Strin9 
o/Pearls ( 2 vol. ). Puis, enconragé par Washington Irving 
et "Valter Scott, il publia rapidement toute une suite de 
romans : The Beauty of Arles ; Richelieu, a tale of France 
( t9); Darnl ; Delorrne ( 1830); Philipp..u9uste; 
Henr!l Maerton (I), et sa continuation, John Mars- 
ton Hall ( 194 ) ; Marie de Bozrgo9ne The Gips!l, a talc; 
One in a Thousand ( 185); Attila (l.); The Robber 
(1838); The Huyuet ; Charles Tlrrel (1839) ; Corse 
de Leon, or the brigand (1), et Morle 9 Eraste[n , or 
the tenants of the heart (18-2). Tons ces romans furent 
aussi bien accueillis que son poëme The ruined Citg, son 
Eook oJ the Passions, et son ouvrage On the educational 
Institutions of Germau!l ( 1835 ), qui traite «les établisse- 
ments d'éducation en Belgique, dans les pays de assau, de 
Bade, de Wurtemberg et de Bavière. 
Comme historien, il ne s'est montré ni moins Iécond ni 
moins habile. Son premier essai eu ce genre fut TheHs- 
tor!l oJ Chivalr 9 (1830); vinrent ensuite The Mernoirs 
qf Great Comrnanders (1832) ; The Histor!l of Gharle- 
mague (183); The Histor 9 of the Lire of Edward the 
Black Prince { 1836); Memoirs of celebrated lVonten 
( 1837 ); Lires offorei9n Statesmen, suite d'essais biogra- 
pidques fournis à la G!lclopedia de Lardner ; The Lire and 
Tintes q! LouLs XIV (4 vol., t838); Jamcs l'ernon's Let- 
ters,.from 1696 fo 1708 (3 vol., 181), et .t Histor!l 
the Li.fe qt  Richard Cœur de Lion, I,'in 9 q! England (4 vol. 
1842- ! 849 ). Après avoir encore publié une serte de romans, 
par exemple Arabella tuart (18-3), Arrah 1Veil (1845), 
Rztssell { 187 ), Heideler9 et Jott2 Jone's Tales (1849), 
conles pour les enfants tirés de l'histot,  d'Angleterre, re- 
marquant que le puhlicauglais commençat il èlre bla. en 
fait de rotuan% il al'a .'établir de l'autre c6té de l'Atl:mlique, 
 ffew-York, oit il s'et mi h ref.dre de idus huile de ru- 
DtG'I'. It LA GNVEg.$.  T. X[. 

JAN 
rnans et des contes. C'est ainsi qu'il ? a fait paraltre : Ams 
and Obslacls ( 1851 ), Pequinillo ( 1852 ), etA Lire of Vi- 
cissitudes (1852), qui sont cependant moins connus en 
Europe qtte ses antres ouvrages. 
James est doué d'un don d'invention peu ordinaire, et 
excelle aussi bien/ brouiller qu'h dbrouiller le nœud de 
ses intrigues. S'il n'avait par gaspillé son incontestable ta- 
lent, il oceuperait sans aucun doute dans la liftCature an- 
glaise un rang plus élevé que celui que force eut/ la critique 
de lui assigner. Son dernier roman a pour titre .4çnes Sorel 
(Londre, 1853). 
JAMESON ou JAMESONE (GEonGES), le Van Dyck 
écossais, né en 1586, ì Aberdeen, se forma sous Rubens a 
Anvers, et fut le meilleur peintre qu'et jusque alors produit 
l'Écosse, où l'art ne pouvait guère prosperer, les presb:yté- 
riens ayant expuls de leurs temples la peinture aussi hien 
que la musique. C'est surtout comme peintre de portraits 
que Jarneson s'est fait un nom ; on a pourtant aussi de lui 
quelques tableaux d'histoire et des paysages. Ses meilleures 
toiles sont de l'époque qui suivit l'an 1630, et appartiennent 
/ de riches familles écossaises. II exécuta, pour la ville 
d'Ëdirnbonrg, les porlraits des différents rois d'Êcosse. 
Cet artisle peignit d'abord sur bois, puis sur toile fine, 
dont il couvrait le fond d'un ton de couleur particulier pour 
faire ressortir les ombres. Son coloris est vif et clair. 
JAMESON (AItA MURPHY, rnistress), née ì Dublin, 
le 19 mai 1797, se consacrade bonne heure à l'éducation. Le 
premier ouvrage par lequel elle ait appelé sur elle l'arien- 
tion publique tut son jourual écrit pendant un voyage en 
traite, publié d'abord sous le voile de l'anonyme, et ayant 
pour titre : Diary of an lnvalid. Après son mariage avec 
I',bort Jarneson, elle fit paraitre : Loves ofthe Poets (1829) 
hCaracteristics of Wornen, moral, poetical and histo- 
rical ( 1833); 31ernoirs of celebrated female Sovereiyns 
(1835) ; et Visits and sketches al home and abrond 
( vol, 1834), o0 elle trouva le moyen de faire entrer son 
excellent Diar!l of an Ennu!lœee. qui avait déjà Ce imprimé 
précédemment. Ses Characteristics of the fenale C harac- 
ters of Shakespeare, ouvrage pour lequel elle a dessin 
elle-mme la plupart des avures dont on fa illustre, sont 
vanl6s avec raison par Allan Cuningham, dans ses 
quisses de la Ltttérature anylaise moderne, comme prou- 
vaut la finesse de tact de l'auteur et sa parfaite connais- 
sance des myslìres de son sexe. Outre la France et l'ltalie, 
elle visita l'Allemagne à pbtsieurs reprises. C'est à Weimar, 
à Vienne et  Dresde qu'elle fit le plus long jour; et «le 
s'y lin avec Gœthe et sa spirituelle belle-bile, avec M. 
Mctternich, avec la princesse Amélie de Saxe, et une foule 
d'autres célëbrités contemporaines. 
La nomination de son mari, en 183, ì des fonctions ju- 
diciaires dans le haut Canada, lui fournit aussi Foccasiou 
d'étudier l'Amérique. On peut considérer comme le rultat 
de ses observations dan les deux hémisphères, les ouvrages 
qu'ellea puhliés sous letitt'ede Winter-studiesandsommer- 
valables in Canada (1838); et de A Handbook fo thepu- 
blic Galleries of Art (18t). Son Companion to the most 
celebrated private Galleries q Art in Enyland ( 184 ).a 
fait connaitre au public nne partie des trezors artistiques 
enfouis dans les galeries de l'aristocratie anglaise; tandis que 
certaines qnestion sociales sont ëlucidées dans ses Mcmoirs 
and Essags, illustrative qt  Art, literature and social 
morals (t86), où, à l'exemple de Georges Sand, elle 
prdche l'émancipalio de la femme. On trouve beaucoup 
de renseignements intéressants dans les livres qu'elle a pu- 
hliés snus les titres de : Sacred and legendarl Art or 
legnds qf. lhe saints and martgrs (152), Legends of 
the mouastic orders, as t'epreseuted in the fine arts 
( 1s52 ), Sisters of Charity, etc. (1855). Dans ces trois der- 
niers ouvrages, l'auteur parait rcpudier cornpléternent les 
tendances socialistes q,'elle avait manifestees quelqu 
année« auparavant. 
JAN'. Voye' TI:iCTi:'*C. 
7O 



5.4 
JANE GREY. Vo;,e'- gnAv (Jane). 
JANET, t'ove-- CLOUET. 
dANICULE (Mont). le= o et Jcs. 
JANIN Ju), notoe célèbre feuilletoniste, est 
Il 11 dêcebre 80,  Saint-Étienne. Apr avoir com- 
men ses Cudes avec son pë, il passa du oeilCe de L ou 
au cMIége de Louis-le-Grand,  Paris, et  sa sofie du coi- 
Iége il prit quelque inriptious à l'coe de droit. Mais il 
comprit alors qu'il y avait en lui IMIolfe de mieux qu'un 
avoué, mme qu'un huître, et ne rda int  s'enréler 
ans la petite phalange de jeunes écfivains qui rédigient 
en 1825 un journal e thétr appelé Le Fparo. La vee 
et la piquante originalité de son stle, qui a fait école 
depuis, mais dans lequel i[ est resté inimitable, le firent 
bien ite remarquer. Anti, vers la fin de 1827, I propfié- 
taires de  Q,otidienne le chargèrent-ils du compte-rendu 
des théAtres ans ce journal, où il signa ses articles de s 
initiales : J. J., dont chacun dans le public eut bientét 
clef. et le nom du jeune critique se tuva alors dans tou 
les bouch. Sous la plume du jeune critique, le feuilleton 
de L« Qtoidieme prit en efçet une imporuce qu'il n'a- 
vait jamais eue, et les autres feuilletotes, malgre qu'ils 
eu eussent, furent conaints de compter aec le nouveau 
-enu, et de discuter s appréciations en matir dMrt et 
de litterature, oer c'était un iconoclte et un révolutionnaire 
litteraioe qui commençait à les gner fort. L'avénement de 
M. de Poligac au pouvoir, eu 129, les plans de contre-ré- 
volutiou hautement annons alors par les organ du parti 
ro'aliste etreme, déterminèrent Jules Janin  abandonner la 
rédaction de  olidie»ine, pour ne pas s'asoecier, mme 
indirectement,  un systèmede politiquequi dlarait ladurée 
de la chatterie 18l incompatible avec la sreté de la mo- 
narchie. Apr a, oir rege penant qtelques mois le feuil- 
len du Messaoer des Chambres, notre jeune écrivain fut 
appelé par B e r t i n l'aihW poendre dans le Journal des 
D bu t s le sceptre de la critique thtrle, laissé vacant par 
la retraite de Duticquct. Il v a de cela aujourd'lmi vingt- 
cinq ans, et epttis lors l'infatigable écrivain est constam- 
ment reste sur I brèche, défendant les principes du 
got. venant en aide au leut inconnu ou reContra, fai- 
sant bonne ustice d réputations usurpées, aimé du public 
de choix auquel il s'adresse, hono, timé par tous les 
artistes, dont il et l'oracle, et qui peuvent bien quelquefois 
avoir à se l,lainre e ses rigueurs, mais qui jamaL ne mirent 
en doute sa bonne foi et sa loyauté. Avoir fait du Journal 
des Débuts sou journal, parler chaque semaine  la foule, 
lui impor ses opinions, s s)mpathies et ses antipa. 
thies, parfois aussi ses paradoxes ; être CourC bMmé, 
loué, attaqué, applaudi de toutes pa, et au besoin 
calomnié par la médiocrité jalouse, ma Mler toujours 
droit son chemin, distribuer avec une religieuse impartialite 
la louange et le blAme, voilh Poeuvre hebdomadaire, voila la 
• ie de Jiu depuis viu<q ans. Dans les temps de là- 
cherWoh uo vivons, on aime d'ailleurs  signaler l'hono- 
rable fidélité que IMcfivain a gardée pour de vieilles amtiés. 
Il n'a point insulté au vaincra; il n'a jamais non plus 
mendi les [aveurs de César ; et autrement indépendant que 
tels et tels, qui, apr avoir joué sous le gouvernement 
parlementaire un certMn réle en polique, acceptent aujour- 
d'hui «téiquement l'art et I faveurs d'un pouvoir qu'ils 
détestent tout bas, il est demeuré, an milieu de nos iuc- 
sant volutions, écrivain, rien qu'écrivaM. Asi n'a-t-il 
jamais etWmembre d'aucune commission et ne reit-il du 
h'é«or public aucune pëoe e traitement. Un personne 
influent tuva mauvais dernièrement que le critiqte prit 
la libedé ande de ne pas faire chorus avec la tourbe es 
teuiUetontes ociel», qui chantaient sur tous I tons 
le ineomparahles perfectMns d'une comddienne placée sous 
la ptection du s,sdit personnage. Des memces indireetes 
furent faites au critique, à qui on recommanda dMtre plus 
rse3-é  l'avenir. J. Janin ne tint aucun compte de cet 
as officieux, et dclsra noblement qt'il était prèt  quilter 

JAIN -- JAI/ISSAIRES 
le sol français s'il ne lui était plus permis de juger des ques- 
tions d'art librement, impartialement et en dehors de toute 
considérations personnelles ou politiques, comme il l'avait 
toujours fait depuis un quart de siècle. 
On a de Jules Jauin : L'due mort et la.temme guillotine 
(189-9); La Corifessiori ( |,,0); Barnae (tsar); Contes 
[antastiques (1632); Contes nouveaux ( 1833 ); Contes 
et nouvelles littraires (1835); /.,e Clemin de traverse 
 IS35); Un Cceurpour dense amours ( 1847 }; Vovape en 
Italie (1837); Les Catacombe$ (1839); Un lziver  Paris 
(1842) ; L'ËtoeàParis (1843); Lal'ormaàte { ! 8t13); Vovape 
de Paris à la mer (ISt7); La religieuse de Toulouse ( i so). 
Ses plus remarqnables feuilletons àu gourna des Débats 
ont été pnbliés récemment, sous le titre de Histoire de la 
Littoerature dramatique. 
J,kNINA I,LNNINA on IOANNI2iA, aujourd'hui eya- 
let particulier, comprenant toute la partie méridionale de- 
l'Al b an i e, ou l'ancienne Êpire, et aussi depuis peu la Thes- 
salie. C'clair autrelois un pays oU l'on ne connaissait d'an- 
tre droit que celui du plus fort. On s'y faisait la guerre de 
ville à ville, de village h illage; on n'y reconnaissait guère 
le sultan qu'en sa qualite de che! spirituel des croyants; et 
on n'y obéissait  un petit nombre de pachas, qui pour la 
»lupart avaient su rendre leurs charges béréditaires dans 
leurs familles, qu'autant que, par les forces dont ils dispo- 
saient ou encore par l'énergie de leur caractère, ils étaient 
en Alut de faire respecter leur autorité. A li-P ac ha de Ja- 
nina, ayant recours tantét à la ruse, tantét  la force, réussit 
/ faire un tout compacte de tous les grands et petits terri- 
toires compusant cette contrée ; aussi peut-on dire que le 
premieril la soumit réellement a la Porte, et qu'en brisant la 
puissance d'une foule de chefs helliqueux, il la prépara 
l'introduction de l'organisation nnuvelle qui y est aujour- 
d'hui en vigueur. 
La capitale du pays, son centre politique et commercial, 
Janina, est située aux environs de l'emplacement qu'occu- 
pair jadis l'oracle àe Dodone, dans nne longue vallée tout 
entourée de montagnes, dites le plateau de Janina, haut de 
b00 mëtres au-dessus du niveau de la mer,  l'extrémité 
méridionale du lac «le Janina, qui a 20 kilomëtres de long, 
mais dontil n'est pas fait mention dans les auteurs anciens, 
qui peut-erre n'avait pas alors la même étendue qu'attjour- 
d:hui, et qui, indêpendamment d'un. grand nombre d'af- 
fluents venant de la montagne de Mitzekéli t le Tomarus 
des anciens), qui le borne  l'est, et du mont Saint-Georges 
à l'ouest, reçoit encore les eaux de quelques aftlnents sou- 
terrains, eaux qui s'Couleur de même par des voies souter- 
raines (katabothra). Janina, que protège une citadelle, 
est le siCe du gouverneur général, et compte né,000 
bitants, grecs pour la plupart, placés sous l'autorité spi- 
rituelle d'un archevéque, et qui font encore un important 
commerce. On compte danscette ville seize mosquées et huit 
églises grecques. Elle pssëde deux écales grecques, jadis 
en grande réputation et auxquelles sont attachées des bi- 
bliothèques. C'est au neuvième siècle seulement qu'il est 
mention dans l'histoire de Janina comme dépendant de l'cm. 
pire de B)zance. A partir du onzième siècle elle appoetint 
successivement aux ?;ormands, aux Bzantins, aux Catalans 
et aux Triballes ou Serbes. Plus tard elle lut gouvernée 
par ses propres despotats, qui alCendaient tantôt de Cons- 
tantiuople, tantét des comtes de CéphaJouie, et qui en 
141 se placèrent sous la suzeraineté des Tnr. Au siècle 
dernier et dans les premières années de celui-ci, Janina lut 
le principal centre de la nouvelle civilisation grecque. Lors 
du bombardement de cette ville, en 1820, par Ali-Pacha, 
e|le souffrir considérablement. 
JANISSXIRES. Cette milice turque, instituée en 
par le sultan Orkhan, qui la composa dejetmes prisonniers 
chrétiens contraints d'embrasser l'islamisme, ne fut COmplé. 
lement orgauisée que vers 1360 par le sultan Amurath 1 
qui lui accorda divers privilége-% et eu porta l'effectif 
12,000 bommes. 11 ordonna qu'elle se rectaterait parmi les- 



JANISSAIIiES 
prisonniers chrétiens, entre lesquels on choisirait h cet effet 
un homme sur cinq, et la fit bénir par la saint derviche Hadji- 
Bektascl,, qui lui donna aussi lenom de denitscheri, c'est- 
à-dire nouveaux soldaLs; et les haut« honnetsen feutre blanc 
desquels pendait une espèce de manche, que portait cette 
milice, rappelaient la consécration d'un de ses chefs par le 
derviche, qui à cet effet lui avait imposé sur la tète la 
manche de son vètement de feutre blanc. Le nombre des 
janissaires ne tarda pointà beaucoup augmenter, parce qu'on 
prenait régulièrement'à cet effet la dixiéme partie de tous 
les enfants de cltretiens de la Turquie d'Europe. Mais leurs 
nombreux priviléges produisirent avec le temps ce résultat, 
qu'une foule de jeunesTnrcs se firent admettre dans ce corps ; 
en conséquence, on ecssa alors de le recruter parmi les pri- 
sonniers de guerre, et vers la fin du dix-septième siècle 
on cessa également de lever à cet effet la dixiëme partie 
des enfants de ehrtiens. En outre, on accorda à uue foule de 
musulmans de toutes classes, et mème à des chrétiens, la 
i»ermission de se faire inscrire, en payant une certaiue 
somme, sur les eontréles de ce corps privilégié; moyen- 
riant quoi, tout en ne recevant pas de solde, ils jouissaient 
de franchises précienses, telles que l'exemption héréditaire 
de tout impét, le droit de résidence fixe sur un point dé. 
terrainWde l'empire, celui d'y exercer toutes espëces de mè- 
tiers; en outre, ils n'étaient astreints au service militaire 
qu'en ca« de guerre, chose du. reste fort rare. 
Il existait dune deux espèces de jonissoires, ceux qui 
taient réguliérement organisés et casernés à Constantinople 
et autres grandes villes de l'empire, et dont l'elfectif, 
après avoir atteint le chiffre de 60,000 hommes au temps 
où l'institution était dans tout son lustre, avait fini par ne 
plus ètre que de 25,000; et les janissaires irréguliers ap- 
pelés domoclfs, au nombre de 3 à 00,00o, et dispersés dans 
toute les villes de l'empire. Ceux-ci étaient divisés en ortos, 
c'est-à-diro en bordes, dont chacune avait sa caserne par- 
tieulière, dite odo, au nombre de 80, porté plus tard it 
et entre lesquelles existaient de nombreuses différences 
tant pour les priviléges que pour l'effectif, les emblëme% etc. 
Chaque orta avait sa caisse particuliëre, dans laquelle on 
versait le.produit des biens laissés par les janissaires morts 
sans avoir étë mariC, et qui servait des pensions aux inva- 
lides ;elle était commandée par six officiers, parmi lesquels 
le marre cuisinier n'ëtait pas celui qui jouissait de moins de 
considération. A la tète de toutes les ortas était placé, en qua- 
litWde commandant supérieur, I' a g a, avec un iejo-be, 
comme commandant en second. Le pouvoir exere par le 
premier sur ses subordonnés était presque ilimité; la 
crainte des révoltes i'empchait seule d'en pousser trop loin 
l'abus. Il avait en effet droit de vie et de mort, et était la 
source de toutes les grâces. 
Tous les ans les janissaires recevaient nn vétement de 
• drap grossier, et en temps de paix une solde, qui, sauf les 
officiers, variait suivant leur ge de I à 0 as1res par jour, 
mais s'Cevait bien davantage en temps de guerre. On leu, 
distribuait en outre chaque jour de fortes rations d riz, 
de pain et de viande, et ils mangeaient à une table com- 
mune. En général ils étaient parfaitement entretenus, mais 
tottjours prêts à se réolter quand on ne pourvoyait pas 
d'une manière suffisante à lenrs besoins. En temps de paix ils 
remplissaient les fonctions de sergent de ville, et à cet ef- 
fet ils étaient munis d'un long baron. A la guerre, ils por- 
taient un long et lourd fusil, un petit sabre, un coutelas et 
un pistolet à la ceinture. Ils ne servaient qu'à pied, foc'matent 
ordinairement la réserve de l'armée turque, et furent pen- 
dant longtemps ¢élèhres à cause de l'aveugle intrépidité 
avec laquelle ils se ruaient sur l'ennemi ; mais comm ils 
étaient étrangers à toute espèce de tactique, ce qu'il y avait 
d'impétneux et de sauvage dans lenr premier cltoc ne 
pouvait tre dangereux que pont nn ennemi aussi peu avancé 
qu;eux-mmes dans la connaissance des lois de la tactique. 
C'était pour eux une affaire de point d'honneur que de ne 
pas perdre l.rs marmites de campagne, instruments qui 

jouent un grand r61e dans leur histoire. G'est de me que, 
comme signe militaire, ils portaient teur cuiller de bois 
renfermée dans un fourreau qui dattachait à leur bonnet. 
Eufin, c'est paroi les janissaires qu'on recrutait la garde 
particulière du sultan. Plusieurs ortas 6talent af tertres à des 
services spéciaux, dans les places fortes les plus importan- 
tes, ou encore sur la flotte. 
Lesjanissaires étaient autrefois astreints à la discipline la 
plus sévère ; mais quand les monarques turcs dégénérés ne 
furent plus que des princes croupissant dans l'oisiveté du 
sérail, les janissaires à leur tour en vinrent à ne plus tre 
que la plus turbulente, la plus indisciplinée et la moins mi- 
litaire des soldatesques, instrument toujours  la disposition 
de la révolte. Aussi leur histoire, saut quelques brillants faits 
d'armes, n'est-elle qu'une suite de révoltes, d'assassi,mts de 
sultans, de vizirs, d'agas, etc., et :d'affreuses atrocités de 
tous gantes; à tel point qu'il avaient fini par ëtre bien plus 
redoutables an sultan que quelque ennemi extérieur que ce 
pot ètre. Les tentatives faites a différentes reprises par des 
sultans, soit pour les reformer, soit pour les dissoudre, ou 
n'avaient point eu les résultats qu'on 'en était promis, ou 
avaient completement échoué et provoqué, a, contraire, de 
sanautes révolutionsdans l'intérieur du sérail. Le sultan 
Mal,moud fut le premier qui renssit h les exterminer. 
Les janissaires avaient vu sans trop murmurer s'opérer la 
réfonne de l'armée turque réorganisée à l'européenne sous 
le nom de ni--am-d)edid ; depuis queiqttes mois, chacune de 
leurs ortas fournissait méme des detacbements pour ètre exer- 
eés aux manœuvres européennes par des officiers ég)prient. 
Les progrës de ces troupes furent assez remarquables pour 
queMal,moud désiràt s'assurer da leur degré d'in»tr/lction, et 
il fit annoncer qu'il passerait une grande revue sur la place 
de l'Atméidan, le ri juin 1826. Les manœuvres avaient 
déjà commencé, lorsque quelque-t,us des plus mutins 
parmi les janissaires se plaiguirentinsolemment de ce genre 
d'exercice, inaccoutumé parmi les troupes musulmanes. C 
fut le signal de la révolte. Assistés de la populace, les ja- 
nissaires se répandirent la nuit dans les rtes, et y com- 
mireut les plus grands désordres. Quelques b6tels occupes 
par les administrations furent pillés et incendi. Rassembles, 
le lendemain, sur la place de l'Atméidan, ils y renverse- 
znt leurs ma,'mites, ce qt,i ignifiait chez eux d'ordinaire 
qu'ils renonçaient à la nourriture que leur fournissait le 
sultan, et ils exigërent qu'on leur livràt les tëtes des princi- 
paux fonctionnaires de la Porte. Mahmoud, qui avait prévu 
ce mouvement séditieux, s'était prémuni contre le» suites 
de la révolte. Il avait su gagner de longue main les officiers 
les plus influents, et avait Ce puissamment secondé par on 
conseil dans toutes les dispositions préparatoires. Dans la 
matinée du rb le désordre était à son comble; a0,000 
hommes se trouvaient déjà réunis sur la place, lorsque le 
sultan fit déployer l'étendard du prophète (sandjuc-clz- 
riff), que le muphti planta sur la mosquée d'Acltmet; et 
cette vue les masses populaires vinrent avec le plus sit en- 
thousiasme se mettre à la disposition du successeur de 
Maltomet. 
L'ancien aga des janissaires, H,sséin-Pacha, à la tëte des 
topchis ( canonniers ), des houmbaradchia ( bombardeurs ) 
et des bostandis (surveillants des jardins impériaux), de- 
meurés fidèles au sultan et fanatisés par les prédication; 
des oulémas, ainsique par la vue de l'étendard du prophete, 
marcha contre les révoltés, que le mupl|ti avait anathema- 
risC. Cernés sur la p!ace de l'Atméidan, dont ils avaient 
fait leur place d'armes, ils y furent itupito?ablement mih'ail- 
lés. On mit ensuite le f aux casernes dans lesquelles s',.- 
talent refugiés ceux qm avaient pu ëchapper au massacre 
de la place de l'Atméidan ; et plus de 8,000 janissaires 
périrent au milieu des flammes. Le reste fut égorgé partiei- 
lement daus les rues de la capitale. 
Un décret à la date du 17 juin déclara quececorps Cait 
d,mais dissous, et frappa mème d'anathème le nom dejanis- 
. saire. Des commissions militaires furent tablies pour 
70 



.556 
et faire pser par les armes ceux qui avaient pu échapper aux 
terribles exécutions du t5 et du 16 uin, et toutes les tenta- 
lires uitCleures faites par les janissaires pour rele-er la tête 
furent immédiatement étouffées dans le sang. Aussi, au 
mois de septembre 1826, Cuinait-on à 15;000 le nombre des 
janissaire qui avaient péri égorgés, et à 20,000 ceux qui 
avaient été bannis à la suite de. cet é¢énemenl. Dans tes 
provinces de l'empire la dissolution du corps de janissaires 
provoqua sur divers points des Inertes analogues. Es-Séid- 
bIohamel-Essad, bistoriograpbe du sultan, a publié l'histoire 
de la destruction des janissaires ; ouvrage dont 11. Caussin 
de Perceval a publi une traducliou Irançaise (Paris, 1833). 
J.N-MA.,'EX  tic de la mer Glaciale du ord, ainsi 
noramëe d'après le navigateur hollandais qui la découvrit en 
t611, située entre l'islaudeet le Spitzberg, est la terre 
d'origine volcanique la plus septenlrionale qu'on ¢onnais¢e. 
Son point culmina,t est le Mont aux Ours, haut de 2150 
nJèlres, dont on peut voir le c6ne couvert de neiges éter- 
nelles, et lrës-certainement inacce.ible, projetAr de la flamme 
et de la flunée. Les parois en sorti terCues dïmmenses gla- 
ciers, qu'on prendrait pour des cataracles que le Iroid est 
parvenu à rendre immobiles. Le volcan d'Esk, decouvert 
ci visilé par Scoresby en 117, est à ,ne altitude de 500 
mëlres. En |S|S il eut nne nouvelle éruption. 
JANOT JANOTIS?,IE. Janot, ou Jeano diminulif 
dù Jea«, etait dcj/ dans la langue usuelle le nom qui ser- 
vait a designer une tuBCuitWniaise, qqand Voltaire, dans 
son Jeanot et Colin, en lit le personnale principal d'un 
de ses contes ingénieux. Plus tard, un autur des petits 
th.tres du boulevard, eu le descendant plus bas encore, 
Ceva Janot h une vogue inoute, il devint l'un de nos plu» 
bizarres engoument.. Le Janot de D o r v i g n y, loué par le 
farceur en renom h cetteépoque, Volange, ne reussit à rassasier 
la curiosité parisienne qu'après plus de 200 repre«entations. 
On en donnait deux par jour poursatisfaire l'aiditéet placer 
I'a ffluence des spectateurs. L'auteur, qui ne s'Cait guëre douté 
de ce succés fou, a'ait d'aaoce vendu sa pièce pour une tres- 
faible somme ; le directeur du thtre, enrichi par ce chef- 
d'teuvre imprc-u, poussa la généroite jusqu'h le gratifier 
d'un supplement .... «le 600 francs : il devait en avoir gagné 
environ trois cent mille. A la même époque ou jouait dans 
le désert, au Théàtre-Français, la reprise de la lome sauvée 
de Yoltaire. Janot avait trion,phé de Cicéron. Du reste, il 
est juste de dire que cette parade n'était pas sans une cer- 
taine portee satirique, qui sans doute avait échappé à la 
censure de l'ancien ré[ime : Janot était te representant 
de ce bon peuple qui, toujours battu, payait toujours 
l'amende. Jouë, comme l'ouvrage de Beaumarcbais, peu 
avant la révolution, il etait, lui, le Figaro de la basse 
classe. Ce qui contribua aussi a [aire de Janot un type bouf- 
f,m, ce qui le fait encore citer comme tel, c'est cette but- 
le.que interversion de mots, cette singuliére disposilion de 
phrases dont l'avait doté son auteur : « En fait de couteaux, [ 
c'est mou père qui en avait un beau, devant Dieu m,it son 
ame! pendu à sa ceinlnre. » Voilà on des exemples de ce 
laage qui fit invasion dans la société, comme précédem- 
ment le calembour et que l'on nomma le j«notisme. Le 
mot nous est resta pour exprimer ce genre de Iocution. ] 
vicieuses, que, Dieu merci! l'on n'affiche plu% mais qui 
peut échapper . la distraction de tout le monde, et mè,ne [ 
d'un homme d'esprit. Otmv. 
JANSENIUS, JANSÉNISblE. !1 y eut deux Jauseniu.% 
ayant tous deux le prénom de Corneille ou Cornelins : l'un 
etait évèque de Gand, et laissa des commentaires estimes  
sur diffêrents livres de Écriture; l'autre fut évëque d'Ypres, 
c'est cehai dont nous avons à nous occuper. Le nom de [ 
l'un et de l'antre était Jansen, qu'ils changërent en Janse- 
n,us selon la métlaode qu'avaient les doctenrs de ce temps-  
la de donner à leur nomune terminaison latine. Cornelius [ 
Jansenins, Arg.que d'Ypre.«, naquit en 1585, près de Léer- ] 
data, en Hollande. Il fit ses premières g.tudes au collége 
des juites d'Utrecht, son cours de philosophie/ Louvain, 

JANISSAIES  JA[NSEIIUS 
et acbeva sa théologie à Paris. Les docteurs de Louvaio, 
hritiera de la doctrine de Ba i n s, donnèrent à Jansonius 
les premiers principes des erreurs qu'il développa dans ses 
écrira, et  relations à Paris avec Duvergier de llau- 
ranne, abbé de Saint-Cyran, achevèrent de" l'Carer. Ce 
dernier l'appela à Bayenne, son pays natal, pour le placer à 
la téte d'un collége qu'il y avait fond6. L, ils se mirent à 
étudier ensemble saint Augustin, moins pour y trouver la 
vérité que pour y chercher des passages favorables à leurs 
opinions. De retour à Louvain, Jansenius obtint Il bonnet 
de docteur en 1617, la direction du coll/e de Sainte-Pul- 
chérie en 1619, une chaire d'Êcriture sainte en 1630, enfin 
l'évêcbé d'¥pres en 163G. Deux ans après, la peste, 
ravageait son lroupeau, PaLteignit lui-reCe, et l'entera de 
ce monde. 
Ce prélat avait écrit divers ouvrages, entre antres des 
Commentaires sur le Pentateuque, ouvrage plein d'érn- 
dition. Mais le livre qui fit le plus de bruit fut i'Augusti- 
nus, fruit de vingt ans de travail, que l'auteur prétendait 
offrir comme la doctrine de saint Augustin sur les différents 
états de la nature humaine, soit avant, soit après le pêchë. 
Ce n'était en réalité qu'un fatalisme d,guisé, renouvelé de 
erreurs de Bains et de Calvin sur la m'ce et le libre ar- 
bitre. Selon Jansenius, fl n'y a plus de libre arbitre pour 
l'homme depuis le péché. Il a fait place à une double 
lectation, l'une terrestre,qui nous entralne au mal; l'autre 
celeste, nous porte à la vertu. La volonté de l'homme, inerte 
par elle-mme, suit nécessairement l'impulsion de l'une ou 
l'autre de ces délectatiens. Le penchant terrestre, on la 
concupiscence, est*il le plus fort, le mal se fait irrésisti- 
blement; est-ce au contraire le penchant cAle.ste, ou la 
charité qui l'emporte, le bien s'opère de toute nécessité. 
Tout lesystème de Jan»enius est contenu dans cette pro- 
position, traduire littéralement de son livre: Yous faion 
ndcessairement ce qui nous plail[ le plus. 
Jansenins avait quelque pressentiment de l'opposition 
que rencontrerait son livre. « Je ne puis me persuader, 
écrivait-il à Saint-Cyran, que mon ouvrage soit jamais 
prouvé de ceux qui en seront les juges.  Aussi n'avait-i} 
pu se déterminer à le rendre public, et avait-il été plus 
d'une fois tenta de l'envoyer à Borne pour le soumettre au 
juementdu pape. Dans l'ouvrage même, il appelle ce ju- 
gement, se déclarant prt à rétracter ce que le saint-sie.,¢e 
condamnera. A son lit de mort, il renouvela cette déclara- 
tion dans une lettre qu'il adressa au pape Urbain Viii : 
« Je sais, dit-ff, qu'il est difficile de faire des changemenL¢ 
dans mon livre ; si cependant le saint-siAge juge a propo¢. 
d'en faire, je suis fils obéissant de I'Êise, dans laquelle j'ai 
toujours vécn, et à laquellej'obéirai iusqu'au lit de mort. 
Cette lettre ne parvint pas au pape; elle fut supprimée par 
les exécuteurs testamentaires de ['auteqr, et n'a eté decou- 
verte que soixante ans aprés, lors de la réduction d'Ypres 
par le prince de C, ondé. 
L'Augttstinus, publié par les soins de L. Fromend et de 
H. Calenus, excita de violentes contestations en Flandre. 
11 fut condamné, en 164,1, par une bulle d'Urbain VIii (In 
eminenti), comme renouvelant les erreurs déjà condam- 
nées de Bains. Cette première censure ne fit que déplacer 
le théàtre des disputes: l'Augustinu.ç trouva des partisan» 
en France; la Surbonne fit examiner le livre, et en rt'duisit 
toute la substance à cinq propositions que les évëques de 
France díférérent au salut-siCe. Le oici : « i  Quelque 
commandements de Dieu sont impossibles aux homm 
justes qui veulent les accomplir, et qui s'efforcent de le 
faire selon les forces qu'ils ont, et ils n'ont pas la grgce qui 
les leur rendrait possibles. 2 ° Dans l'ëtat de haltère tombée 
on ne rsiste jamais à la grace intérieure. 3 ° Dans l'Cut 
de na[ure tombée, pour mériter ou démériter, il nest pa 
nécessaire que l'homme ait une liberté exempte de néces- 
sité; une liberté sans contrainte lui suffit.  Les semi-pA_ 
lagiens admettaient la nécessité d'une gràce prévenante 
pour toutes |e. bonnes œuvres, méme pour le commence. 



IAISE IUS 
ment de la foi ; et ils étaient hérétiques en ce qu'ils vou- 
laient que cette graoe f0t telle que la volonté de l'homme 
pot y résister ou s'y soumettre. 5  C'est tre semi-pélagien 
que de dire que Jésus-Ctwist est mort et a répandu son 
sang pour tous les hommes. » 
L'examen de ces propositions fut confié. à une oemmis- 
sion ¢omposée de cinq cardinaux et de treize théologien.. 
Pendantdeux ans que dura ce travail, les défenseurs de l'Au. 
9ustinus curent tout le rem ps d'Cre entendus. Mais, malgré 
leurs efforts, les cinq propositions furent anathématisées, en 
1653, par une bulle d'lntlocent X (Cure occasione). Cette 
bulle, acceptée par la majorité des évques de France, sans 
réclamation de la part des autres, devenait une règle de foi, 
de l'avis de tous les catholiques. Pour l'éluder, les dVfen- 
seurs de Jausenms trouvèrent un subterfuge quïls n'avaient 
pas imané avant la condamnation; ils prétendirent : 
l ° que les cinq propositions avaient été Iégitimement con- 
damnées; qu'elles étaient vraiment hérétiques dans le sens 
qu'elles offraient naturellement, lequel sens était calviniste; 
mais qu'elles étaient suseeptibles d'une interprétation or- 
thodoxe, qui contenait le véritable sens de Jansenios; 2 ° que 
Jansenins n'était pas compris; que les propositions Il'a- 
vaient pas été lidèlement extraites de son livre ; que les 
passages qui pouvaient s'y rapporter n'avaient mdlement le 
sens qu'on voulait y attacher, et que par conséquent la 
condamnation des propositions n'entratnait pas celle de 
l'Augustints. Cette distinction, à laquelle personne ne s'at- 
tendait, rendit nécessaire un second examen de l'ouvrage. 
On fit de longs et nombreux extraits du livre, qu'on aocola 
à chacune des propositions pour montrer non-seuleme=t 
i'identité de la doctrine, mais aussi la similitude des expres- 
sious. En t66, une constitution d'AlexandreVI! (Ad sa- 
train) condamna la doctrine de Jausenius et les cinq pro- 
positions dans le sens qu'y avait attaché cet auteur. 
Alors les docteurs jausénistes nièrent l'autorité qui les 
condamnait. Selon eux, l'Église, infaillible pour fixer le 
dogme, ne l'était pins pour juger les faits. On avait bien pu 
décider que les cinq propositions étaient contraires -h la foi, 
mais prétendre qu'elles se troavaient dans le livre de Jan- 
senius on qu'elles contenaient la doctrine de cet évque, 
c'était un excès de pouvoir; et à une telle décision il n'y 
avait à répondre que par un silence respectueux. Les ère- 
ques fran¢ais combattirent ce nouveau subterfiJge; il rédi- 
gèrent un formulaire qui devait tre signé par tous les ec- 
clésiastiques de leurs diocèses. Ce formulaire n'était que la 
condamnation pure et simple des cinq propositions de Jan- 
senius, telle qu'elle avail été formulée par le saint-siCe. 
Une constitution d'Alexandre Vil, en 1665 (Reiminis), 
ordonna la signature du formulaire, et Louis XIV menaça 
de saisir les revenus de quiconqoe refuserait de signer. Nul 
ne pouvait tre promu aux ordres ou pourvu d'un bénéfice 
qu'il n'e0t préalablement donné cette preuve de somnis- 
sion à l'Église. Ces mesures de rigueur mirent la di'ision 
dans le camp jauséniste : les plus rigides, tels qu'A r n a u d 
et les solitaires de Port- Royal, prétendirent qu'on ne 
pouvait sans parjure signer le formulaire. D'autres, plus 
modérés, consentaient ì signer avec re.striction, prétendant 
_se. borner à une soumission purement extérieure, et se re- 
trancher dans le silence respectueux. De ce nombre furent 
les évques d'Angers, de Beanvais, d'Amieus et d'Mais. La 
mort d'Alexandre VII prévint le procès qu'on se préparait 
. leur faire. Une apparente soumission de ces évèques leur 
rendit son successeur plus favorable, et leur obtint une sorte 
de paix dont le parti voulut se prévaloir : on prétendit que 
le saint-siége approuvait le silence respectueux, ce qui amena, 
en 1705, une nouvelle constitution de Clément XI { Vineam 
Domini), qui renouvelait totm les anathèmes et condamnait 
formellement cette doctrine du silence respectueux. 
Port-Royal n'était plus; les Arnaud, les Pi icole, dont 
les noms avaient lait la principale force du jansénisme, 
élment morts; le jansénisme, forcé dans ses derniers retran- 
ehements, semblait devoir tomber de iui-mme; un livre 

-- JANSSENS 557 
qui paraissait ne respirer que la piêt vint lui rendre une 
nouvelle vie. Le père Q u e s n e 1, pretre de l'Oratoire, ami et 
successeur d'Arnaud dans la direction du parti, reproduisit 
les erreurs de Jansenius dans divers ouvrages, spécialement 
dans ses Réllexions morales sur le lVouveau Teatament. 
Les éloges donnés à ce livre par certaines personnes le ren- 
dirent snspect; les jésuites en signaltrent les erreurs, et le 
évéques de France en demandèrent la condamnation an 
saint-siCe. Cent et une propositions extraites de cet ou- 
vrage furent solennellement anathématisées en 1713, par 
une bulle de Clement XI ( Unigenilus ). L'autoritë de 
Louis XIV artCa d'abord toute r6clamation; mais la mort 
de ce prince, en 1715, ralluma les querelles. LaSorbonne 
se déclara contre la bulle, et rétracta_lacceptation qu'elle en 
avait faite l'année precédente; le parlement, qui avait em- 
brassé le jansénisme comme moyen d'opposition, réclama 
contre la bulle, qu'il avait été forcé d'enregistrer; des évë- 
ques, des facultes de tbéologie, des communautés religieu- 
ses, appelèrent de la bulle au futur concile général. Aprës 
quatre ans d'obstination, la Sorboune et le parlement cédè- 
rent, et la bulle lut emegistrëe en 1719. Cette acceptation 
n'apaisa pas la discorde; mais ce que ni la raison ni l'auto- 
rite n'avaient pu obtenir, le ridicule l'opéra : on vit le par- 
lement faire une guerre sémiense aux évtques et au clergé 
pour les forcer/t donner les sacrements aux hrétiques; les 
seelaires voulurent appeler les miracles au secours de leur 
doctrine. Cette prétention ne leur réussit pas  les scandaleu- 
ses indëcences du cimelkre Saint-Médard ( voye« CO.WL- 
SO,,AhaS ) firent, comme Pavait dit un ma:trat, du loto. 
beau du diacre Pdris le tombeau dtt )anscnisme. La 
secte ne s'en releva pas; ses débris se perd:.rnt dans la tour- 
mente révolutionuaire. A peine peut-on citer la petite église 
schismatique que des jaasenistes élablirent h Utrccht a !a 
fro du siècle dernier, et les efforts tentés au commence- 
ment de celui-ci pour ressusciter une doctrine morte. 
L'abbc C. I]ANDEILLE. 
On sait que, malgré la séparation séculairequi existe 
entre les catholiques romaius et les jausénistes, ceux-ci se 
considèrent toujours comme appartenant à l'Église catboli-- 
que. C'est ainsi qu'après avoir et sacrés, les évques jan- 
sénistes nommés dans certains pays s'empressent d'crire 
au pape pour lui témuigner leur fidèlité, soumission et 
obéi»sance. Le pape, de son c6té, ne manque jamais de 
répondre par une bulle d'excommunication dans laquelle il 
est dit qu'il ne suffit pas de respecter en paroles l'autoritë 
de l'Ëglise catholique et du saint-siëge, tandis qu'on la 
méprise et la repousse en fait. Un andthème de ce genre 
fut prononcé par Léon XII sur bi. Van Santen, archer*que 
janséniste d'Utrcel,t. Le mëme fait s'est reproduit en 
/t l'égard de M. He}kamp, sacré évèque janseniste de Dc- 
venter. Pour se conformer à l'ancien usage, il écrivit a 
Rame, et, comme d'habitude aussi, le pape Pie IX l'ex- 
commonia, ainsi que tous ceux qui avaient coopéré d'une 
maniëre quelconque à son élection. 
JANSO (FORBIN). Voile: Fon-J,wsor. 
JANSSE[S (Atmxuxt), cdèbre peintre d'histoire fla- 
mand, Iht, dit-on, contemporain de Rubens, et serait né 
en 1560,°à Amsterdam. Léger et passionné, il se rendit tout 
/a fait malheureux par son mariage avec une jeune fille avide 
de plaisirs et l,rodigue d'argent, de sorte qu'il finit par s'n-. 
ser dans le chagrin et dans la misëre. On ignore l'année de 
sa mort. Beaucoup d'églises de Flandre possèdent des ta- 
bleaux de cet artiste. Les plus ¢élèbres sont le Christ au 
tombeau, et la Madone à l'Enfani dans l'église des Car- 
melites d'Anvers. Les galeries de Munich, de Vienne, de 
Dresde et de Berlin possèdent aussi de ses tableaux. Rival 
de Rubens et animé contre lui d'une haine sans bornes, 
il lui adressa, dit-on, un cartel que Rubens, alors au faite 
de sa renommée, refusa d'aeceptor. Janssens était san 
doute un dessinaleur habile et un excellent eoloxiste mais 
h af tA de Rubeus il ne peut occuper dans l'higtoiro 
l'art qu'une position subordonnfi¢. 



.5fi8 JASSENS 
JAN5SE'.NS (Coit.L,S), né vraisemblablement en Flandre, 
se fit  Londres ou . sterdam (il mourut dans 
ernière ville, en 1665 ), la réputation d' excellent peintre 
de portrails et d'liistoire. 
JASSES (Xc-HooÉ), nWŒE Bruxell, en 
mort dans la mme ville, an 139, se fit estimer cotonne 
peintre d'histoire. 
JASZOON (Lxçcs). l'oe= Cosm. 
JATE piëoe de bois coure qui fait partie de la 
circonh:rence d'une roue de oiture (voge: 
JA'US antique diviuitë des Romaius, q vraisem- 
blablement est d'origine pélasgique. L Pelaes admetient 
l'existence de deux diviuités principales, par lesquelles ils 
personnifiaient la nature et sa féoendation, et qu'ils reprë- 
senlaient tan,ét comme deux tre distinc, du sexe mascu- 
lin et fi.minin, et tantôt comme ne faisanl qu'un seul et meme 
,-'tre. L aborigènes de PI,aile ou Latins empruntèrent aux 
Pélasges cette divinité, représentée tot à la fois comme 
double et unie, et lui donnèrent le nom de Jan. Ils l'ado- 
raient comme le dieu des dieux, comme le ma,tre sove- 
rain de l'année et de loute destée Immae, comme le du- 
minutera" de la guerre et de la paix. On le représentait 
avec un sceptre dans la main droite et une clef dans la 
main gauche, et assis sur un trône éblouissant. On lui 
donnad aussi deux visage, l'un jeune et l'antre vieux, 
l'un regardant devant, l'autre regardant derrière; sym- 
,»oie qui, suivant quelqo autcs se rapporterait à la 
sesse de Janus qui voit le passé et l'avenir, tandis que 
çuivant d'autres il indiquerai, le rdo des saisom et 
années, ou encore les quatre points carnux, car on l'a 
trouvé quelquefois représté avec qualre visages ; d'a«tres 
veulent y voir une allusion h s fonctiom de gardien en 
cfief des es du ciel, que lui prête Ovide. 
Plu,arque explique oettc forme d'une double tëte qu'un a 
donnee  Janus en disant que ce ftt Janus, qui de OEhessalie 
introduisit l'aiculture data le Latium, et que c'est pour 
cela qu'un de ses visages est toumé du cté de la Gr et 
l'autre du coté du Latium. 
Suivant une autre tradition, Janus aurait été avec l'autre 
divinité supérieure du Latium, Sa,urne, confondu en un 
seul et mme personnage, dont ou aurait fait l'un des plus 
ancien rois des La,iris, qui aurait enseigné l'agriculre 
ses sujets, leur aurait donné de bonnes lois et aurait in- 
troduit parmi eux les uages du culte; enfin, qui aurait bien 
accueilli Sa, urne, expulsé du tium par s enfant, et 
qui aurait paflagé son tréne av lui. Son règne aurait ëté 
l'ge d'or de l'ltalie. 
Janus présidait h tout les en et  tours les issues. 
D'après lui on appelait toute espèce de porte janua, et 
lout passée vofit et non fermé, Janus. il bit le dieu du 
jour et de çannée, et ce fut d'après lui que le premier mois 
,lel'année fut appeléjanuarius, dont nous avons failjanvier. 
Le premier jour de chaque année, et lapremiìre heure 
de chaque iour lui étaient comaerés; et ds toutes 
les grandes solenn crificatoires, c'était toujours par 
lui qu'on comnoit. Romulus lui éleva le temple lèbre 
que, d'après l'ordre de ffuma, on ouvrait au début de chaque 
guerre, qui reslait ouvert tanl qu'elle durait, et qu'on ne 
fermait que lorsqe la paix était rétablie dans toutes .les 
¢onoeées soumises  Ruine; ce qui n'arriva que tis fis 
dans l'espace de sept oen ans; à savoir sous ffuma lui- 
mme, apr« la première erre ironique, et sous Auguste. 
JANVIEll premier mois de l'année. Sa dénomina- 
tion rappelle encore que les Bomains l'avaient oensacré au 
dieu J a n u s, à qui ils offraient d sacrifices le « et le 8. 
Cependant le t *, comme tous les autres premiers du mois, 
etait encore us la protection de Junon. Janvier avait bien 
d'autre fëtes : te 9, les A gonales;le !1, les Carmen - 
tu I e s; le 17, les Jeux Palalins ; le l, la fte de Semailles; 
le 37, conacré à Castor et Poil«x ; le 9, les Equiri ; 
0,  Pacalcs ; le 3t, ddié aux dienx Pénale. 

-- JAPHET 
Le 1 « janvier les Romaius se souhaitaient une fieoreuse 
année; les amis s'enoaient des présents, origine de nos 
étrennes. Les artins, pour bien commencer l'anee, 
avaient soin d'ébaucher leur ouvrage. Suivant Ovide, le dieu 
Jaaus le leur avait prescrit en ces termes = 
Ternpora eommisi nascentia rebns agendi, 
Tottts ab auspicio, ne foret annm iners. 
Cette idée, dit Jaucourt, était bien plus raisonnable que 
celle des anciens cbrétiens, qui jelnaient le premier de jan- 
vier pour se distinguer des Bomaias, parce que ceux-ci se 
régalaient le soir en l'ltouneur de Janus. 
Si les cbrétiens nejelnent plus aujourd'hui le 1 « jamier, 
ils célèbrent la Circoncision. Le f,, les moins fervents ne sont 
pas les moins empressés à fdter les _Rois, car ici l'abstinence 
n'est pas ordonnée. 
J.:YIER. 1793 {Journée du 1). Voile'- Louis XVI. 
JANVIER. (Saint) gouvernait l'Égise de Ravenne en 
qualité d'evèque sous Dioclétien et Maximien. Lors de la 
persécution ordonnée par ces empereurs contre les clm'étiens, 
il fid conduit à ,Sole pour y tre interrogé par Timothée : 
préfet de la Campanie. Le gouverneur, comprenant qu'il 
lui serait impossible de l'engager à renoncer au christia- 
nisme et à sacrifier aux idole% le soumit aux plus cruelles 
epreuves. Mais il en sortit victorieux, et continua à an- 
noncer Jésus crucifié. _Rien ne put ébranler sa constance, 
ni les fournaises ardentes, ni les chevalets, ni les ,criailles 
de fer, ni les btes féroces auxquelles il fut jeté en proie, 
aux yeux d'une foule immense appelée -h cet horrible spec- 
tacle. Calme au milieu des sup[,lices, il confessa hardi- 
ment sa foi, et exhorta ses compagnons i persévé:er dans 
leur glorieux & moignaye. Enfin, il en, la t/te tranchée avec 
Festus, diacre de sou égise; Didier, lecteur ; Sosie, diacre de 
Misène; Procule, diacre de Pouzzole, et deux laïques, Eut-- 
ci,ès et Aruti,s. L'Eglise célèbre la fète de tous ces mart}.rs le 
19 septembre. Le corps de saint Janvier, enlevé secrëtement 
par les fidèles, lht transporté d'abord à Bénévent, puis à 
laples, où l'on conserve religieusement, dans une chapelle 
particulière, sa OEte et deux fioles de son sang, qu'une 
pieuse matrone recueilli,, dit-on, a, moment où il coulait 
sous la fiache. Les Napolitains prétendent que ce sang, tout 
dtr, tu,,, eaillë, devient liquide dès qu'on l'approchz de 
la tète du saint, miracle qui se renomelle chaque année, 
le premier dimanche de mai. Saint Janvier est le patron 
du royaume de aples, et son culte est devenu célèb,'e dans 
toute l'ltalic. On raconte, en outre, une foule de prodiges 
opérés par so intercession. On prétend, entre autres, qu'il 
arrèla subitement une éruption du Vésuve, si effrayante 
qu'elle menaçait les pays environnants d'une ruine eomplte. 
Creatur miraculum, sit flrma rides ! 
J/t,,NVIEI (Ordre de Saint-), iustituë en t78 par 
le roi des Deux-Siciles, Charles, devenu plus tard le roi 
d'Epagne Cliarles Ill. Les insignes en sont une croix d'or 
"h huit pointes pommerCs, angine de fleurs de Ils, émaillée 
de blanc, portant au centre l'image de saint Janvier, et 
sur le revers une mêdaille émailléed'azur avec un livre d'or au 
centre, chargé de deux bure,tes de gueules et accompagné de 
deux palines de sinople; le rnbatrest bleu céleste. Aboli à 
Naples en 1806, cet ordre a été rétabli en 1814, lors de la 
restawation des Bourbous. 
JAPET fils d'Ucanus et de la Terre, frère de Sa- 
,urne, de l'Océan et d'Hypérion, épousa Clymène, et fut 
le përe d'Atlas, de 51énétius, de Prométhée et d'É- 
piméthée; le beau-père de Pandore, le grand-père d¢ 
Deucalion, et l'aïeul d'Hellen. Sa descendance a été 
appelée les lapétides, et son fils Prométhée laper[ genus. 
Japet était, selon quelques-uns, un roi de Thessalie, auteur 
de la race hellénique ou grecque. Suivant d'autres, qui 
semblent le confondre avec J ap b et, il a,rait été Père du 
genre Iounain. 
JAPIIIùT, troisième fil de Noé, né environ cent ans 
avar.t le deluge. Sa piCWfiliale lui atlira les bénédiclious 



JAPHET 
de son père, qui s'Acrin dans un enthousiasme prophétique : 
« Que la postérité de Japbet s'étende et occupe de grands 
pays ; qu'il ait part à vos bénédictions, Seigneur! » Ce 
VœU fut ralisë, puisque les descendants de Japhet ont 
p«uplé l'Erope et une grande partie de l'Asie. Il eut sept fils : 
Corner, Magog, Madai, Javan, Thubal, Mosed et Thiras. 
Suivant une opinion assez commune, Corner serait père 
des Cimmériens ou Cimbres ; ltagog des Scythes, ou plut6t 
des Goths ou des Gères ; Madai, des Mèdes Owl, selon d'an- 
tres, des MueCouions ; Javan, des louions ou Crocs; Thiras, 
des peuples de la Thrace; Thubal et Mosoch, des nations 
qui habitent la Cappadoee et le Pont. Japhet est donc uni- 
versellement regardé commela souche des nations occi- 
dentales. J.-C. CHASSAGOL. 
JAPON c'est-à-dire emp're de l'est ou du levant, 
nom dériv/: de deux mots chinois, Dji-pen, que les Japonais 
prononcent tIip6n ou Hifon, et les Portugais Djapen, et 
sous lequel on comprend un groupe d'ries et d'îlots au 
nombre total de 3511, à ce que disent les indigènes, situé 
dans la mer du Japon, mer orageuse entre toutes, remplie de 
remous et de bas-fonds, et présentant un inextricable la- 
byrinthe de détroits, de rochers et d'écueils qui en rendent 
la navigation extrmement dangereuse. Ce groupe, compris 
entre le 28°-49 ° de latitude septentrionale et le 146o-170 ° 
de longitude orientale, est entouré à l'ouest par le Tong-haï 
(mer de l'est) de la Chine, par le détroit de Corée, la mer 
«lu Japon et le détroit de Tatarie, à l'est par le grand Océau; 
et on évalue sa superficie totale de 8 à 10,0o0 myriam/:tres 
carrés. Les lies et les écueils sont pour la plus grande partie 
d'origine volcanique; les plus grandes sont couvertes de 
hantes montagnes, dont quelques-unes utilement boisées et 
les autres admirablement cultivées de la base au sommet, 
atteignant sur certains points la limite des neiges éternelles 
et présentant sur d'autres points des. volcans considéra- 
bles : aussi les éruptions volcaniques et les tremblements 
de terre sont-ils fréquents au Japon. Par suite, le sol y est 
assez souvent maigre et rocailleux ; mais l'infatigable indus- 
trie «]es habitants a su partout le couvrir de la plus riche 
végétation, et convertir leurs tins arides en jardins magni- 
fiques ; beaucoup des plus petites ne se composent même 
que d'écueils provenant de revolutions volcaniques et pré- 
sentant la configuration la plus tourmentée. En raison des 
hautes montagnes dont nous venons de parler, et de la situa- 
tion de ces ries ì l'est de l'ancien continent, le climaten est 
plus rude qu'on ne serait porté à le penser d'après leur h- 
titude, notamment au nord-est, par exemple a Jeso et dans 
les ries Kouriles. Dans les hivers, tojous accompaés de 
rédoutables temltes, le froid devient parfois excessif; et 
il y a souvent plusieurs pouces de neige méme dans l'ile de 
ipon. Cette saison n'est douce que dans les lies situées le 
plus au sud ; en revanche l'étWest partout beau et chaud. 
Les chaleurs seraient même intolërables si les brises de la 
mer n'y rafratehissaient pas à to, t instant l'atmosphère. 
En raison de leur configuration irrégulière et tourmentëe, 
les lies Japonaises offrent un grand nombre de baies et de 
golfes; et si elles n'ont en général que de petits cours d'eau, 
par compensation on y rencontre des lacs d'une certaine im- 
portance. La terre, quoique la pi/as grande partie n'en soit 
que d'une médiocre fertilité, fécondée, nous l'avons dit, 
par le travail opiniâtre de ses habitants et par les lertili- 
sautes pluies de l'CC donne en abondance tous les produits 
végtaux particuliers à la zone tempérée. Les plus impor- 
tants sont le riz, le biC les fèves, dont le suc est employé en 
guise de beurre pour la préparation de la soja, le thé, 
d'une qualité inférieure, toutefois, à celui de la Chine, le 
coton, la soie, le camphre, les fruits de toutes espèces, le 
bambou, le ratifier, en général tous les végétaux du nord 
de la Chine et du midi de l'Europe, et dans les ries situées 
le plus près du sud quelques plantes tropica!es. Le règne 
animal n'offre point un grand nombre d'espèces. Sauf une 
énorme .quantité de rats et de souris, de chiens et de chats, 
on n'y rencontre,que peu de chèvres, de porcs, de chevaux 

 JAPON 9 
petits de taille, et de gros bétail, mais plutSt des buflIes, du 
gibier de toutes espèces, des ours, des loups, des singes, des 
oiseaux de tous genres, des vers à soie, des abei|les, des 
fourrais, des sauterelles et une immense quantité de poissons 
particuliers  ces eaux, notamment des bu|ornes, ainsi que 
des perles et des coraux. Le rogne minéral fournit beaucoup 
d'Ol" et du cuivre de première qualité, ainsi que presque 
tous les autres reCux ; des diamants, du soufre, du sel, de 
la houille, etc. 
Ie nombre des habitants est évalué à 30 millions environ. 
Sauf un petit nombre d'Aïnos et de Mandchous dans les 
t|es du nord, la population se.compose de Japonais propre- 
ment dits, peuple issu du mélange des Ainos avec la race 
mongole. 
Les Japonais, l'une des nations les plus civillsées de l'Asie, 
sont intefiigents et polis, bienveillants et d'un caractère plu, 
noble que les Chinois, d'ailleurs extrémement propres, la- 
borieux et industrieux. Il y a peu de pauvres parmi eux. 
point de mendiants, point d'ivrognes. La pauvreté, quand 
elle existe, n'est une cause ni de blae ni de mépris, ni sur- 
tout d'abandon, ils préfèrent de beaucoup les honneurs e . 
la considération aux richesses, et aimeront mieux mille foi 
ëtre blessés dans leurs intérêts que dans leur Serte. Leur. 
femmes, dont ils n'épousent d'ordinaire qu'une seule, jouis- 
sent aussi de bien plus de liberté qui chez aucune autre 
nation de l'Asie. Elles ne contribuent pas peu à l'extrême pro- 
prété qui règne méme dans [es habitations les plus humhles. 
II n'y eu a pas de si pauvres où l'on ne puisse prendre un 
bain tous les jours. Mais les Japonais sont voluptueux, 
indicatifs et adonnés à beaucoup de vices contre nature. 
Ils parlent une langue complétement difiérente de toile des 
Chinois et de celle des Mandchous et «]es habitants de la 
Corée, leurs v'oisins, ayant un grand nombre de mots com- 
muns avec la langue des Ainos, et qui forme deux idiomes. 
Le plus ancien, le plus pur, appelé aussi langue )amato, 
est la langue des savants ; mais tout le monde la com- 
prend, et elle est surtout employée pour la haute litte- 
rature, pour l'histoire, la poésie, et à la cour du souverain 
spirituel. Elle se divise en deux dialectes (le naïden et le 
9heden ), dont l'un est employé pour les ouvrages religieux 
et l'autre pour les ouvrages profanes. L'idiome moderne, 
ou langue vulgaire, en diffère beaucoup, est fortement mé- 
langé de mots chinois, mais est pics harmonieux que le 
chinois. Les savants japonais n'emploient aussi quelquefoi 
que le chinois, notamment pour des ouvrages relatifs à la 
morale. Ils ont pour leur langue trois espèces d'écriture chi- 
noise, qu'ils reçurent jadis avec la civilisation de l'Epire 
du Milieu comme écriture d'images ou d'idées, et qu'il 
transformèrent ensuite peu à peu en écritures phonétiques. 
Ces trois espèces d'écriture, qui s'écrivent de haut en bas, 
sont lejïrokana pour les ouvrages composés en langue vul- 
gaire, le katakana pour les commentaires et autres ouvrages 
du même genre, et les caractères chinois proprement dits, 
n'ayant qu'une valeur phonêtigue et emplo$és comme signes 
pbonetiques pour la haute littcrature. Ils connaissent depuis 
le treizième siècle l'imprimerie, qu'ils pratiquent au moyen 
de idanches en bois sur lesquelles les lettres sont gravées. 
D'ailleurs, comme les Chinois, ils se servent de pinoeaux 
pour écrire. Consultez Klaproth, 3l(rnoire sur l'introduc- 
tion des caractbres chinoi au Japon (Paris, 1829). Abel 
Rémusat a donné, d'après cel|e de Rodriguez, la meilleure 
Grammaire Japonaise que nous aons (Paris, 1825); le 
meilleur Dictionnaire Anglo-Japonais et Japono-Anais est 
celui de Medburst (Batavia, 1830) ; et il existe aussi un 
Dictionnaire Chinoi. et Japonais par Sieboid (Leyde, tStl ). 
Les missionnaires avaient fait imprimer au Japon plusieur 
dictionnaires; mais ils sont aujourd'hui d'une rareté extrême 
en Europe. 
Ies Japonais se sont élevés dans les sciences et dans les 
arts au-dessus de tous les autres Asiatiques; mais par suite 
de leur isolement ils sont demeurés au mëme degré infé- 
rieur de civilisation. Il» sont aussi pour la plus grande 



560 
partie des notions humaines les élves des Chinois, nolam- 
ment pour les beaux-arts, la chronoloe, l'astrologie el la. 
nédecine, encore bien que leurs relations avec les Euro- 
péens aient pu leur donner des idées plus justes en beaucolsp 
de matières. Les sciences qu'ils ont cultivées avec le plusd'ar- 
deur sont l'histoire et la géographie, ensuite l'astronomie, 
la botanique et la médecine, quoiqu'ils n'aient,/ bien dire, 
-sur cette dernière que des idées fort grossières. La poësie, 
la musique et la peinlure, art dans lequel ils surpassent 
de beaucoup les Chinois, occupent un rdng dislingué parmi 
teurs plaisirs, lls ont aussi dans les grandes villes des repré- 
sentations thé.Iralas avec accompagnement de musique, 
dans lesquelles des femmes mêmes ont des r01es. Autant 
qu'on en peut juger, il y a peu d'art dans leurs drames, 
tanIOt héroiques, el tanI6t gais, qui n'admenttentjamais 
que deux personnes à la fois sui" la scène. En revanche, les 
danses, les pantomimes s'exécutent avec infiniment d'en- 
semble et de magnificence. De belles décoralions agrandis- 
sent et varient la scène, lls ne manquent point non plus 
d'écoles. Il existe Jedd o une espèce d'université, et h la 
cour du Da i ri une academie, chargée de la rédaction des 
annales de l'empire et de «:e',le de l'almanach impérial. Les 
Japonais sont d'ailleurs dësiren. de s'inruire, et non point 
infatuës de leurs connaissances comme Ips Chinois. Beaucoup 
de savants japonais s'occupent de la littërature hollandaie, 
lisent, écrivent et parlent hollandais, comprennent l'anglais et 
m/me le français ; d'aulres dressent des cartes géographiqne 
à l'instar dccelles qui sont en usage en Europe. Bien qu'ayaut 
fermé depuis bienl0t douze cents ans leurs ports aux aml- 
tres nations, les Japonais sont parfaitement au courant dece 
qui se passe davis le reste de l'imiver.. Les Hollandais les four- 
pissent régulièremenl de journaux, de revues, de livres, etc., 
que l'os fait étudier dans un établissement assez semblable 
/ nuire Ëcole des Jeunes de iam_lues, et par laquclle le 
gotsvernemcnt e.t Instruit de tous !es grands faits de l'his- 
toire conlemporaine. L'un des personnages charaés, en t 853, 
par le It'oubo de traiter avec le commodore americain Perry, 
lui dclnanda ce qu'il pensait du système Ericsson pour 
la navigation à vapeur. Parmi les ouvrages de la lilteraturc 
japonaise qui sont connus en Europe, figmsre au premier 
rang l'Encylopëdie chinoise et japonaise dont la table des 
matières nous a été donnée par Remnsat dans le onzième 
volume de ses 'olice ci Extraits. Hoffmann a donnè 
aussi un lrès-richecatalogue d'ouvrages japonais dans le Ca- 
talorjus l«brorum et manuscriptorum Japonicorum, elc., 
de Siebold (Leyde, 1845). Pfitzmayer a lraduit en alle- 
inand un roman Japonais, Les six Paravents reprdsentat 
le passd (Vienne, 187 ). L'année commence chez les Ja- 
ponais dans les premiers jours de janvier ou dans la pre- 
mière quinzaine de février. Ils comptent par années lu- 
nattes, et comblent la différence entre l'année lunaire et 
l'année solaire par l'addilion d'un lreizième mois interca- 
laire. 
Il existe trois religions au Japon. La plus ancienne et de 
laquelle les autres sont d«rivées, est la religion lnto ou 
sin-siou, qui a pour hase !'adoralion des esprits qui pré- 
sident à toutes les choses visibles et invisibles, auxquels 
on a donné en chinoi le nom de Si, on ca japonai celui de 
lçam (deux mots qui veulent dire esprit). Celui de ce es- 
prits qui est l'objet de plus de vénération est la déesse Ten- 
6o-dm-in, c'esl-à-dire grand espril de la lumière célesle 
son temple principal, appelé 3'aï-Kou ou Dai-fin-Kou, 
conslruit au quatrième siècle de notre cXrc, et silu6 dans 
la province dqzé. Vient ensnite le dieu Tajo-Keo-da-sin, 
considéré comme l'ordonnateur du ciel et «le la terre, et 
comme l'e, prit protecteur dn Da/ri, dont le principal temple, 
appelé Gëou, est silué également dans la province d'Izé, 
:,or la montagne Nouki-no-ke-jama. Le troisième est le 
dieu «le la guerre et dll destin, h-" frère de la déesse dont 
ous venon «le parler, qui sous le nOlfl deFatsman-no. 
dai-sin, rend des oracles, et dont h, temple, situé/ Ousa, 
fill conslnlit en l'an 573 de J.-C. f.c chef «le celle religion 

.tAPON 
est le Dani, ou chef suprSme spirituel de cet empire in- 
sulaire de IMst. 
L'Ame des Daïris, ainsi que celle des antres hommes, es! 
immortelle, car les sintos admettent une existence après 
mort. Toutes les ames sont jugées par des juges célestes 
oelles des hommes vertueux entrent dans le Talta-ama-Aa- 
tvara, ou le plateau élevë du ciel, où elles deviennent/mini 
ou gënies bienfaisants » tandis que celles des mécbants par- 
tent pour l'enfer, 2Ve-no.kouni, ou le royaume de» ratines. 
Pour honorer ici-bas les Itami, on teur ëlève des m!/a, on 
temples de différentes grandeurs, construits en bois. Au 
milieu est placé le symbole de la divinité, consistant en 
bandes de papier attachées  des btons de bois de l'arbre 
lînohi ( thuva japonica ). Ces symboles, nommés 9ofeï , 
,e trouvent dans toutes les maisons japonaises, oi on les 
conserve dans de petits mi[/a. A chaqne coté de ces cha- 
pelles sont placés des pots h fleurs avec des branchas vertes 
de l'arbre sa/m/i (clevera lmpferiana), sottvent aqssi 
de myrte ml de sapin ; puis deux lampes, une tasse de thé 
et plusieurs vases remplis de sal'i ou vin japonais. C'est 
devant ces cltapelles que les Japonais adressent le matin 
et le soir leurs prières aux kamis. Les mfja ou temples, 
quoiqu'en eux-mmes fort simples, forment souvent, avec 
les habitations des prètres et autres maisons, des édilices 
très-vastes et très-étendus, attxquels donnent entrée des 
portails magnifiques, nommés tori-i ou lieux destinés aux 
oiseaux. Devant tous les temples sont plates les deux chiens 
ama-inou, et devant celui de la dëesse Ten-sio-daïsin, 
ses deux compagnons, qui étaient avec elle pendant sa 
marche de Fiouga à Idzoumo. On adresse journellement 
ou à de certaines epoquas des prières et des sacrifices au 
fondateur de Pempire, aux bons empereurs et aux antres 
personnages qui ont bien mérité de la patrie, et dont les 
• ames sont devenues I¢ami. On célèbre aussi leurs fëtes, ap- 
pelCs matsouri. Cependant aucun homme ne petit s'a- 
dresser directement à la Ten-sio-daï-sin : il doit lui faire 
parvenir ses prières par l'entremise des Siou-go-'.in un di- 
 inités tutélaires ou protectrices. A cette classe appartien- 
nent tous les autres kamis; et comme souvent des animaux 
servent aux kamis, il y en a aussi qu'on révère comme 
divinités protectrices, principalement le renard (inari). 
Cet animal est en général fort honoré par les Japonais, qui 
le consultent dans toutes les affaires épineuses. Les sacri- 
lices qu'on offre aux kamis, principalement au commence- 
ment et / la fin de chaque mois, se composent de divers 
comestibles, comme riz, gteaux, poissons, œufs, etc. Il 
n'est pas défendu aux sectateurs de Sinto de tuer des ètres 
vivants. Leurs prétres laissent croltre leurs cheveux comme 
les laïques, et peuvent se marier. On enterre les morts dans 
une biëre qui a la forme d'une miya. Anciennement, an 
décès des grands, on enterrait avec eux un certain nombre 
de letlrs serviteurs et amis. Dans les temps postëriettrs, ces 
personnes s'ouwaient le ventre à cette occasion. Cet usage 
tut défendu en l'an 3 de J.-C. ; mais il s'était encore con- 
servé iusqu'au temps de Taiko, vers la lin du seizième siëcie. 
Cependant, on remplaçait aussi les hommes vivants par 
des statues en terre glaise, qu'on trouve encore souvent 
aujoard'hui dans in terre. 
La seconde religion en vigueur au Japon est le houd- 
dhisme, qui y fut introduit de la Coréeen 552, et qli est 
auioird'hui professé par la grande maioritë des habitants. 
Cette religion fit des progrès si rapides au Japon, qu'il en 
est réulté pour la masse du peuple une espèce de fltsion 
d, culte sinto avec le bouddllisme, de telle sorte que les 
tlicux sinto sont adorés dans les temples bouddhas, et réci- 
proquement les dieux bouddha dans les temple .intos. 
Les savants se gardent en effet de s'exptiquer sur les dit- 
ferences exislant entre les deux reli#ons ; on n'aime 
trop au Japon écrite sur la religion Oll en pal'ter. Lin de. 
temples honddltas les phlS célèhres est celui de M la 
I.a troisième religion répandne au Japon 
S«outo ou Si:a, émanation ou imitation des doctrines pld- 



JAPO 
lesophiques de {2 o n lu c i u s, qui furent transplantées de la 
Cldne an Japon. 
Le gouvernement est despotique au suprême degré, et 
le pays est partagé en un grand nombre «le fiefs, pour la 
plupart héréditaires. D'après les appareuces, le soi-disant 
empereur spirituel ou D«iri, qui réside  Miako et des- 
centi, à ce qu'on prétend, du premier conquérant du pays, 
in-mou, exercerait la souveraine puissance. Mais il y a 
déjà longtemps que sa puissance n'e.t qu'apparente; et cet 
empereur, désigné tantdt sous le nom de Mikado, tanlt 
sous celui «le Daïri, ou mieux D«ïri-sm«, ce qui veut 
dire « maitre du palais intérieur, » car il est défendu de 
prononcer son nom véritable tant qu'il est en xie, n'est 
plus que le chef spirituel de l'Ëtat et complétement sous la 
dépendance du chef temporel, le Seo9orn ou Kobo, dunt 
la politiqueest parvenue à le depouiller peu à peu de toute sa 
puissance terrestre. Dans ce but on en a fait une espèce de 
divinité, qui reste separce du peuple par l'étiquette la plus 
rigoureuse. Pour l'Carter du trône, on lui Ceva des autels, 
n l'emprisonna dans les respects et les adorations de la 
foule, qui voit en lui le descendant de la dées Ten-sio- 
di-sin, et qui lui donne la qualification de Ten-sin ou 
Is du ciel. Il ne peut jamais se montrer au peuple. Sauf 
les gens de sa cour, composée de prëtres et de femmes, et 
les fonctionnaires commis à cet elfet par le chef temporel, 
personne n'a accès auprès de lui. Une fois seulement dans 
/'annêe, il passe daus une galerie dont le plancher est - jour, 
«le telle Ihçon qu'on ne peut lui voir que la plante des pieds. 
Quand il se«t un peu respirer le grand air dans son palais 
colossal et pal faitelnent futilité, ou il est su¢veillé par un 
lonctionnaire commisi cet effet par le koubo, à un signal 
donné tous ceux qui s'y trouvent doivent s'étoigner, avant 
que ses porteurs le soulèvent sur leurs épaules, car jamais 
les pieds du Miado, c'est-à-dire du vénérable, ne doivent 
fouler la terre. Il vit et meurt dans ce palai, au miliou des 
adorations et des génuflexions, des honneurs et des gran- 
deurs, jcuissant de riches revenus, qu'il augmente encore 
par la vente de titres honnrifiques, qui est un de ses privi- 
lëges, niais ne jouissant pas d'une ombre d'influence, exilé 
dans les cieux et respirant constamment l'ivresse d'un encens 
flatteur et trompeur. Les ordonnances du koubo sont 
bliíes au nom du Dairi, qu'on a Pair de consulter dans 
toutes les affaires importantes. La race du Dri ne s'éteint 
,;amais. S'il n'a point d'enfants, le ciel lui en envoie un, 
-'est-à-dire qu'il trouve sous un arbre de son palais un en- 
ant clmisi d'ordinaire entre les plus grandes familles de l'em- 
pire, et qui aux ]eux de la foule représente toujours le des- 
cendant direct du glorieux $i-mo. Il a trois ministres, et 
peut épouser neuf fois neuf lemmes; ses vëtements ne peu- 
vent être confectionnés que par des vierges, et on lui sert 
t,ujours à manger sur de la saisselle neuve, qui est brisee 
ussit6t après qu'il s'en est servi. 
Le chef temporel, appelé le koubo, le Seogoun ou Djo. 
boun, c'est-à-dire général en chef, qui réside à Jeddo, mais 
qui se transporte de temps à autre a Miako pour y rendre de 
dërisoires honneurs au Mikadoou Da/ri, est le véritable son- 
serain du Japon, bien que pour la forme il cède le pre- 
mier rang au Da,ri et qu'il reçoive de lui des titres d'honneur 
en écl,ange desquels il lui fa,t de riches présents. Quand le 
koubo meurt sans laisser d'béritier, on choisit son succes- 
seur dans lune des trois familles qui descendent par des 
lignes collatérales du fondateur de la d.nastie actuelle. 
Après lui viennent les Data jus ou princes feudataires 
différents A'oMs nn provinces. C'étaient autrefois des sou- 
verains presque complélement indépendants, ne relevant 
de l'empereur que par de minimes obligations léodales; 
aujourd'hui,sauf deux, qui ont réussi à conserver leurs 
anciens droitg, ils ne soin plus que les représentants, que 
les délégués du knnbo, que celui-ci peut déposer, exileret 
même punir de mort quand bon lui semble, mais qui dans 
leurs provinces respectives, investis des droits les plus ar- 
bitraires et le« plus despoti,lues, président à fous les 
OIC?T. n.'- I. COXVES. -- T. Xl. 

56t 
tails de l'administration. Huit administrations centroles on 
minisoEres expédient les affaires générales. Toutes les charge« 
sont héréditaires. Le loubo exerce le despotisme le plus illi- 
mité. Le cultivateur est tenu de payer comme imp)t souvent 
la moitié et mme les deux tiers de son champ; les sei- 
gneurs et les princes investis de commandements de province 
doivent laisser leur famille en otage à Jeddo, et tous les 
grands feudataires faireactede présence h la cour à des épo- 
ques déterminees. Les Ioissont d'une sévéritéextrême, et on 
les exécute sans acception de personne, chacun étaot oblige 
d'ëtre le surveillant et le gardien de son voisin, et restant 1 
garant de la conduite de ce qui l'entoure. A la cour deJeddo 
on remarque deux fonctionnaires revtus d'un titre qui, tra- 
duit  la lettre, signifie regardent en chef. Chargés de la 
police, ils ont sous leurs ordres un grand nombre d'agenls 
ayant pour mission de veiller à ce que nul n'enfreigne les lois, 
et de dénoncer tout proevaricateur, ft-ce l'empereur. lais 
il en est vraisemblablement au Japon comme dans les mo- 
narcbies constitutionnelles, où le souverain ne peut jamais 
mal taire. La plupart des crimes emportent la peine capitale 
ou celle de la deportation/ lile Xatschio, où, a l'occasion, 
l'on en, oie les plus grands personnages. Pour les crimes 
graves, tonte la famille du coupable, quelquefois mëme 
tous les habitants de la rue ou du village où il demeurait, 
sont enveloppés dans son châtiment. Tous les militaires et 
tous les fonctionnaires du koubo quand ils ont commis un 
crime, ou un alCit, doivent s'ouvrir le xente au premier 
ordre qui leur en est donnê. Une telle mcrt n'a rien de dc- 
sohonorant, et les fils n'en heritent pas moins des titres et 
des dinites de leur père. Aussi les fils des grands person- 
nages s'exercent-ils pendant des années dans l'art de s'èxen- 
trcr avecgrce et avec habiletc. 
II existe au Japon huit classes, mais sans qu'elles forment 
de castes : les damjos ou princes, la noblesse, qui est eu 
possession de presque toutes les grandes charges civile et 
militaires; les prëtres, les guerriers, les marchands, clas 
très-nombreuse, maisqui n'r.st point honoree ; les artisans et 
artistes, les paysans, les ouvriers, les pcheurs, le ,ari.-. 
et les esclaves. L'usage immodérée du thé p'lit heaucoul:- 
les femmes. Pour rendre un peu d'eclat à leur teint, celles qu 
sont mariC se mettent du rouge, et elle s'imaginel-'. 
ajouter a legs attraits en s'arrachant les sourcils et en se 
teignant les dents en noir d'ébène. Les maris, très-cha- 
touilleux a l'endroit de la Cllatete de leurs moitiés, sou- 
moins scrupuleux en ce qui les concerne personnellemer, t, 
et s'initent souvent entre eux h de folles parties dans 
maisons de plaisir, situées ordiuairement près des temple 
et hal3itées par des beautés vénales, les 13 i I, u n i s. 
Les revenus du koubo consistent partie en imp6ts en 
nature, provenant des cinq provinces dite. imperiales eu 
domaines, et de quelques villes administrées directement 
par lui, et partie en tributs acquittés par les princes feud 
la!res. Les forces militaires du kobo se composent ,e 
loo,oo0 hommes d'infanterie et de 2o,o0o cavaliers ; les uns 
et les autres ont une armure flexible, qui leur recouxre le 
corps et les membres, comme les armures curopéennes du 
mu)en age. Chacun porte gravé sur so dos l'enseigne de 
son règiment, et quelquelois la liglwe d'une coix, proba- 
blement en souvenir du massacre dcs chrtiens qui a ina- 
guré l'avénement de la dynastie I, oubo actuelle. Les sohlat. 
sont armés d'arc% de poignards etde sabres, et parlois aussi 
de fusils, et tratnent avec eux de lourd canons; mais 
saent moins bien s'en ser'ir que les Chinois. En temps de 
guerre cette armée s'augmente des contingents Iburnis Far 
les feudataires et montant à 3o8,000 hommes d'infanterie 
et 33,000 cavaliers. A la gerre, les Japonais font preuve 
de courage et de bravoure ; mais juqu'a présent lr pays 
a plutfit été défendu par sa position géo'aphique q:e par 
l'bahileté militaire des babitant, restes à cet éard bie 
i»fcscurs aux Clsinois eux-m:mes. 
L'agriculture est très-florissante au Jap.an . . sol parfate- 
ment cullivC là nélne oi il est d'une n,t..,re moins favorl-e.. 



Dans 1me contrée que ne ravage point la guerre, et que la 
salubrité du climat protège contre les épidémies, la popula- 
tion va toujours eroissant. La terre n'y suffirait pas  ses 
besoins, si le travail le plus persévérant ne multipliait pas 
ses produits. Patient, infatigable, le cultivateur ne pouvant 
ajouter au sol par l'étendue, l'Alève dans les airs au moyen 
de terrasses, et fait pour ainsi diresa moisson dans les nues. 
Le pays est entreconpé en tous sens par d'excellentes routes, 
sur lesquelles ou trouve de distance en distance des au- 
berges; et les maisons, quoique construites simplement et, 
a cause des tremblements de terre, rien qu'en bambous et 
en terre, rarement à deux étages, sont partout propres et 
jolies. Quant aux maisons, aux palais des riel,es, on y voit 
des pièces fort élégantes, lambrissées tout à l'entour de 
planches pelures et durCs, ce qui leur donne un merveil- 
leux éclat et surprend agréablement la vue. Il y a toujours 
an plafond un tableau de quelque excellent peintre, et sur 
le plancher des vases remplis de plantes odorantes. Les mu- 
railles sont garnies de bottes veruies, de porcelaine pour 
le thé, de sabres pendus en divers endroits, et qui en fout les 
plus beaux ornemen{s. Les toits ont jusqu'à 3",50 de saillie, 
h partir de l'entablement, et, pour abriter con{re la pluie, 
une galerie règne tout le long du bàtiment et s'ouvre sur de 
heau.x jardins. 
L'industrie, notamment l'exploitation des mines et la pré- 
paration des mtaux, sont aussi dans l'Atut le plus floris- 
sant. On y fabrique en toute perfection les étoffes les plus 
fines et les plus belles en soie et en coton, les porcelaines, 
les objets en laque, le papier, pour la fabrication duqJ,el on 
emploie l'Cotte d'un arbre dit arbre à papier, les articles 
en acier et en cuivre, comme sabres et armes du même 
genre, dont l'exportation est cependant d«fendue aujour-" 
d'l,ui sous les peines les ph,s sévères, de mème que celle 
des livres, surtout de ceux qui contiennent des rensei-,ne- 
ments sur le pays, des cartes géographiques et des espèces 
monnayées. Des restrictions ont même été al,portees dans 
ces deruières années ì l'exportation du cuivre, qui ne peut 
pas dépasser un maximum donné. Avant l'arrivée des Eu- 
ropéens dans les Indes, les Japonais avaient des flottes nom- 
breuses, et se livraient à un commerce et à nne nav-ation 
Ibrt etendus, d'un cté jusqmm'au Bengale, et de l'amtre 
jusqu'au Kamtscba{ka et par delà le detroit de Behriug. 
Mais depuis 1585 leur pays a cessé d'entretenir des vais- 
seaux de guerre; et en 1638, comme l'on commençait à 
redouter l'influence des étrangers, on interdit tout com- 
merce avec eux ; de telle sorte que les Japonais eux-mëmes 
que le hasard avait éloign#.s de leur pu)s, lorsqu'iis y re- 
vinrent, furent l'objet de la surveillance la plus sévïre. Bon 
nombre même ne furent pas admis du tout, ou bien furent 
jetés en prison, ffangasaki est le seul port qu'il soit 
permis aux Chinois et aux Coréens de fréquenter cfiaque 
année avec dix jonques, et aux Hollandais avec trois b- 
timents expídiés de Batavia pour y faire le comnmerce au 
milieu de restrictions et d'entraves de toutes espèces. Les 
principaux articles que les Hollandais importent au Japon 
sont : t ° parmi les matières brutes, denrées on produits 
naturels, le benjoin, le bleu de Prusse, l'ambre, l'l,uile de 
cajeput, le corail rouge, le quinq,ina, le chocolat, l'huile 
de coco, le sulfate de soude, les noix de galle, les |iqueul-S, 
les amandes, l'huile d'olive, l'opium, le safran, la téré- 
benthine de Venise, les nids comestibles d'oiseaux ; 2 o parmi 
les obiets fabriqués, tes cuirs dorés du Maroc et de la Perse, 
les passementeries, les papiers de tenture, les gravures et 
lithographies, les ouvrages en plaqué, la ausse bijou{erie, 
les objets en t01e et en fer-blanc, les armes à feu, la cou- 
tellerie, les instruments de chirurgie et d'optique, la ver- 
rcrie, etc. L'exportation consiste en cuivre atfiné, en cam- 
pllre, étoffes de soie, meubles en laques, porcelaine, 
1.arasols, et autres objets recberchés avec empressement en 
Europe. Lensemble de ces transactions ne dépasse pourtant 
pas aujm,rd'hui trois millions de francs par an; le cl,ifl're en 
était jadis bien autrement élevé. Tout le commerce du 

5APON 
Japon est d'ailleurs nn commerce intérieur, de mme que 
sa navigation se borne a, cabotage, mais tous deux sont 
extrëmement florissants et favorisés par le gouvernement au 
moyen d'institutions de tous geures; c'est ainsi qu'il se pu- 
blie des gazettes commerciales avec l'indication des prix 
courants, qu'il se tient une Ioule de luttes, etc. 
L'empire du Japon se partage en Japon proprement dit, 
et en dpendances; le premier contient environ 5,200 my- 
riamètres carrés de superficie, avec 3O millions d'habitants, 
et est divisé en huit do, c'est-à-dire cbemins, ou grandes 
contrées, et en soixante-lmit/zok.fs ou provinces, et outre 
une foule de petites iles, se compose des trois grandes lles 
principals : 
Aïp6n ou IVifin, et aussi IJippon, c'est-à-dire terre du 
soleil, d'une superficie d'environ 3,500 myriamètrescarres, 
parcourue dans sa longueur par uue chalne de hautes mon- 
tagnes, dont les sommets atteignent en plusieurs points la 
limite des neiges éternelles, qui la partagent en deux parties 
inégales, et où se trouvent situées les deux villes de Mialio 
et de Jeddo ; 
/'iouJÇu ou Sakokf, c'est-'-dire les neul contrées ou 
pays de l'ouest, de 90 myriamëtres carrés, avec la ville de 
'angasaki ; 
Et Sikok[ ou Sikok, c'est-à-dire les quatre contrées, de 
50 mriamétres carrés. 
Les ddpendances du Japon se composent de l'fie de Jeso, 
traversée par de hautes et pres montagnes, et presentant 
vec les Kouriles japonaises une superlicie d'environ 
2,000 myriamètres carrés, et une très-minime population; et 
de la partie mêridionale de P tic de Karafto ou Sa#halin, 
(le 1,500 myriamëtres carres, habitée par des Aï n o s et par 
quelques Mandchous. Jadis elles comprenaient aussi les 
lies Bon i n, habitees de nos jours par des ruions européens 
et autres. 
L'histoire ancienne du Japon, qui a pour base les annales 
du pays, n'est qu'un tissu de fables, et on y fait durer pen- 
dant des nombres d'auuées qui pourraient effrayer l'imai- 
nation les diverses dynasties de dieux dont il y est ques- 
lion, etc. Cette histoire a été introd,,ite de la Chine au 
Japon avec la civilisation. Consultez Titsingh, Annale 
des empereurs du Japon (publiées par Klaprotb; Paris, 
134 ); le mme, Memo[res sur la dynastie rœegnante des 
Djogouns (publiés par Abel llemusat ; Paris, S20 ). La 
seule chose qu'il y ait de certaine, c'est que les Aïnos fu- 
rent les premiers habilauts du Japon, qu'il y arriva de lxés- 
bonne heure des colonies chinoises, qui y apportërent avec 
etles la civilisation et l'industrie de la Chine, |esquelles, 
en raison des relations touiours plus fréquentes avec la 
Chine, se répandirent de plus en plus dans tout le pays, et 
finirent par lui donner une pl,sionomie toute chinoise. 
L'llistoire avérée et certaine du Japon, à en luger du moins 
par l'opinion mème des annalistes japonais, ne commence 
qu'à Sm-mou, le fondateur de l'empire du Japon, qui, vrai- 
semblablemcut d'origine chinoise, fut déclaré vers t'au 660 
de notre ëre souverain de l'empire insulaire, ax ec la quali- 
fication de Tenu ou maitre cêleste. C'est le fiéros national 
des Japonais, qui le font descendre des dieux, de méme 
qu'ils considèrent leurs Daris comme une confinuation de 
sa d.nastie et comme ses descendants. L'histoire de cette 
dynastie n'est d'ailleurs que celle des diverses guerres sou- 
tenues contre les Chinois, les Coréens et les Mongoles, qui 
au treizième siècle tentèrent ì différentes reprises de con- 
quérir le Japon. Elle donne aussi des renseignements sur la 
fondation des diverses institutions au moyen desquelles la 
dynastie civilisa le pays, ou bien elle rapporte les inces- 
santes querelles de succession auxquelles, à l'instar de toutes 
les autres dynasties asiatiques, cèfle-ci fut en proie. Il y est 
aussi beaucoup question des guerres intestines que se firent 
entre eux les divers grands feudataires. Une époque décisive 
est celle o6 eut lieu l'établissement de gouverneurs, qui, par 
suite de l'Ct de confusion et d'anarchie où se trouvaient 
la d)nastie et le pays, finirent par devenir à peu près i 



lAPON 
dépendants, et qui, en raison de la faiblesse toujours plus 
.ande des souverains, empiétèrent toujours davantage sur 
leur autorité. Rois fainéants, les souverains de cette dynastie, 
qu'on prtend exister maintenant depuis vingt-cinq siècles, 
avaient fini par s'endormir dans leur nullité, abandonnant 
.toute initiative, et par suite la réalité du pouvoir, à des es- 
pèces de maltes du palais ou de chefs mililaires. Il continua 
longtemps d'en Atre ainsi, iusqu'à ce que l'un de ces naires 
du palais, soldat de fortune appeiéJoritomo, s'emparant fran- 
chement du pouvoir suprème, se fut fait proclamer, en 1192, 
.oubo ou djogoun, et en cette qualité eut pris en main les 
rnes de l'Êtat, en ayant grand soin d'ailleurs de conserver 
la fiction du daïri. Les djogouns ses successeurs ne lardè- 
rent point ì consolider et ì étendre de plus en plus leur 
puissance; il en résuita entre eux, les souverains de fait, et les 
daïri, les souverains de nom, une longue lutte lutCleure, 
lar suite de laquelle leur autorité devint tellement prédomi- 
nante au quatorziéme siècle, qu'ils finirent par dëposer et 
instituer les daïri suivant leur bon plaisir. A. partir de ce 
moment on peut les considérer comme ayant êté les véri- 
tables souverains du pays, et pour les distinguer des Dairi 
on leur donne la qualification d'empereur temporel. Mais 
alors des querelles de succession éclatèrent également dans 
ta d3nastie des dlo9ouns, i laquelle en succéda une autre 
dès 133, renversée à son tour en 1585 par la révolution 
• :lui entera aux Dairis les derniers débris de leur puissance 
lemporelle, un homme de basse extraction, appelé Fide- 
Jos, s'étant fait alors proclamer djogoun, après s'Cre 
emparé de toute la puissance temporelle et s'ëtre fait dé- 
cerner le titre de tailo-sama, qui veut dire maltre absolu. 
Son successeur, Jdjd-Jaou ou Gon9hin, rendit en 1617 la 
puissance souveraine béréditaire dans sa famille, et devint 
ainsi le fondateur de la dynastie koubo actuelle, laquelle 
est parvenue à restreindre complëtement la puissance, jadis 
si grande, des princes Ieudataires et à les réduire  l'crut de 
imples vassaux. 
En ce qui touche les relations du Japon avec les peuples 
c¢identaux, il n'est pas démontré que les anciens l'aient 
connu. Les Arabes furent les premiers qui en eurcnt con- 
naissance. Eu Erope on en entendit pour la première fois 
larler à la fin du quinzième siècle par 51arco-Polo, qli le 
nomme avec raison Zipangou ou Jipanlour, c'est-à-dire 
,empire de l'est. C'est en Cfiine que Marco-Polo avait obtenu 
ses renseignements sur l'empire du Japon ; c'est par la 
OEëme source aussi que les écrivaius persans, et notam- 
ment Raschid-ed-din, avaient acquis les notions très-dëLail- 
lées consignées ì ce sujet dans leurs ouvrages. E 1542 trois 
/Atiments portugais faisant le commerce de la Clfine furent 
jetés par la tempête sur la e6te du Japon, et y nouèrent ans- 
sit6t des ,elations conimerciales; après quoi le jësuite 
F r an ço i s X av le r, qui futcanenisé plus tard, y vint peAcher 
le christianisme. Quoique les prêtres du pays combattissent 
de toute leur influence la propagation de la foi en Jésus- 
Christ, elle y fit bient0t de rapides progrès, protégée qu'elle 
était par les grands feudataires de l'ouest,/ cause des pro- 
fits importants dont le commerce avec les chrëtiens était 
devenu pour eux la source. Ils envoyèrent même deux am- 
bassades au pape, à Ruine. Mais la dynastie de djogouns 
qui s'établit à la suite dela révolutioude 1,585 était hostile 
aux Portugais et aux missionnaires, qui lui semblaient éga- 
lement dangereux, attendu qu'en embrassant la religion 
chrétienne les Japonais reconnaissaient l'autorité supréme du 
pape. D'ailleurs, la conduite des Portugais au Japon fut 
aussi imprévoyante qu'insolente. Humbles et modestes d'a- 
Jord, vdtusde bure comme saint FrançoisXavier, leurs mis- 
sionnaires ne se.montrèrent plus qu'en maguifiques fivrées, 
et pretendirent.avoir le pas sur les conseillers d'État et sur 
es ministres du lobo eux-mêmes. Ils essuyèrent mme de 
'emparer de l'empire au moyen de conspiration. ourdies 
rmi les indigènes convertis au christianisme; auci linirent- 
i1. par se faire chasser, en 163"/, en mème temps que tous 
'es Japonais qui avaient embrassé le clu'istianisme përisient  

563 
victimes d'un massacre général, et qu'on interdisait d&ormais 
l'accès des ports de l'empire ì tous les navires étrangers, ì 
l'exception de ceux des Chinois et des Hollandais, qui pour 
cela durent se soumettre aux plus humiliantes conditions. 
Admis dès 16 t 6 à faire le commerce au Japon, les Hollandais 
obtinrent l'exception faite en leur faveur comme récompense 
de l'appui qu'ils avaient prêté pour expulser leurs rivaux, 
et aussi parce qu'ils assurèrent être d'une antre re]igio» qve 
les jésuites et les Portugais. En 163, pourtant, il ne leur 
fut plus permis de séiourner que dans l'lle de Desima (voye: 
&.NC&S&KI ), d'où  leur fut défendu de sortir sans avoir été 
préalablement visités par des inspecteurs spéciaux. Au 
commencement du dix-septième s.le les Anglais avaient 
bien fondé un établissement à Ferando, et avaient obtenu 
de grands avantages commerciaux; mais cette petite co- 
lonie ne tarda point à décliner et  périr. Des efforts tentés 
par les Espagnols, dans le mme but et à peu près vers 
la méme époque, en 1611, ne furent pas plus heureux. Un 
vaisseau à trois ponts, la Madrede Dios, qu'ils avaient en- 
voyé à Nangasaki avec des négociateurs qui affectèrent des 
airs de conquérants, fut incendié dans la rade par les Japo- 
nais. Dès 1792 les Japonais témoignèrent d'une répulsion 
profonde pour les Russes, en refusant absolument d'entrer 
avec eux en relations commerciales; et toutes les tentatives 
failes dans ce but depuis lors, par exemple en 1804, cbouë- 
rent également. Les Japonais redoutent en effet de voir 
les Russes venir quelque jour du Kamlschatka et d'Oclm[zk 
tenter la conqutte de leurs lies. Cousultez Koempler, Htoire 
du Japon (1777) ; Thunberg, Voyage au Japon (Stockholm, 
1790)  Hendrik Doeff, He'rrineringen uit 3apan (Harlem, 
1833 ; Meylan, Geschiedundig over:igt van den Handel 
der Europeen op Japan (Batavia, 1833); van Overmeer Fi- 
scher, BOdragen tut de kennis van hel j apanisch rok ( Am- 
sterdam, 183-); les diffërents Mémoires publiés par les So- 
ciétés Asiatiques de Paris, de Londres et de Batavia; Édouard 
Frayssinet, Le Yapon, hLtoire et descripion, etc. ( Paris, 
1853) ; et surtout les important ouvrages de S i e b o I d, entre 
autres Aïppon ; Archives du Japon et de ses d(pendances, 
ouvrage degrand luxe, orné de cartes etde portraits (Leyde, 
1832-1853). 
La paix de Nanking ( voile= Cm.e), qui eut pour résulta 
d'ouvrir en partie l'Empire du .Milieu au commerce europden, 
ladCouverte des gisement aurifères de la Californie, et les 
nombreuse expéditions ŒEaritimes parties de l'ouest de I'A - 
reCique pour se rendre sur les cles orientales de l'Asie, et 
foreCs ainsi de passer à plus ou moins de distance du Japon, 
ont cependant depuis chaué les rapports du Japon avec le 
reste du monde; et il est désormais impossible que cet 
empire insulaire demeure complétement isolé du reste de 
i'humanité. Dans ces quinze dernières années les gouver- 
nements anais, français et américain avaient toujou, 
tenté en pure perte d'obtenir au Japon des points de relcho 
et d'Cabile des rapports de commerce avec cet empire; leurs 
pléuipotentiaires s'oetaient toujours vu honteusement re- 
pousser et quelquefois meme traiter en pirates. Les efforts 
faits par le gouvernement hollandais lui-reCe, ì l'effet de 
concilier les intérèts en prësence, avaient galement échoué. 
Le gouvernement américain ne selalssa pourtant pas doecou- 
rager par l'insuccès des démarches précédentes. En 1851, 
alléguant la nécessité de rapatrier quelques matelots nau- 
fragés, il envoyait au Japon une petite expédition commandée 
par le commodore Biddle, et chargée en outre de demander la 
conclusion d'un traité qui permit aux batiments américain. 
d'établir sur certains points du littoral japonais des dép6ts 
de charbon, de s'y ravitailler, etc. La réponse se faisant trop 
attendre, les États-Unis résolurent, en 1853, d'armer pour le 
Japon une soi-disant expédition pacifi9e aux ordres du 
commodore Perry, iaplus formidable qui et enere navigu 
dans ces parages, car elle se composait de huit btiments 
de haut bord, dont un vaisseau de ligne, trois frégates  
vapeur et quatrecorvettes, ])ortant ensemble 209 bouches  
feu et 3 ì t,,000 hommes de troupes de débarquement. Il 
71. 



4 JAPOI  
tait difficile que la cour de Jeddo ne comprit pas la valeur 
et la portée des argument que le commodore Perry était 
chargé de faire valoir auprès d'elle. La nègociation ne laissa 
pourtant pas que d'entralner de longs delais, plus d'une 
année, avant que de pouvoir Cre menèe  terme. Enfin, le 
3t mars 1854 ( 7 e année de Kagel, 3 e mois, 3e jour) inter- 
vint entre le commodore Perry, arabassadeur spécial des 
Êtats-Unis au Japon, et Hayaskidaï-garka-no-Kani, Ido, 
prince de Izé, Suna Isawa, prince de Mina Saki, et Adono, 
membre de la commission des revenus, commissaires spé- 
ciaux déléguès par l'auguste souverain du Japon, un traité 
en 12 articles qui accordait aux Américains l'entrée des ports 
de Simoda, ville d'un millier de feux, dans la principaute 
de Jasu, tic deiphon, etde Chakodad, dans la principauté de 
Matsmai, !le de Jesso, pour s'y pourvoir de bois, eau, char- 
bon, provision_% et tous autres articles dont ils auront besoin. 
Les navires américains que la tempéte fera échouer sur les 
c6tes da Japon  trouveront toute espèce d'assistance de 
la part des autorités japonaises. Les naufragès seront, à la 
diligence desdites autorités, conduits par navires japonais à 
Simoda ou à Chakodad. Tons articles qui auront pu tre 
sanvés du naufrage seront exactement rendus aux naufragés. 
Les Américains seront libres dans Simoda et Chakodad, et 
pourront étendre leurs excursions hors de ces deux villes jus- 
qu-5 une distance d'environ I0 kilomètres. Enfin, dans cha- 
cun des deux ports ouverts aux Américains, le gouvernement 
de l'Union aura le droit d'eotretenir des consuls chargés de 
représenter lesintéréts de leurs nationaux dans leurs rapports 
avec les autorités locales. 
Ce traité lut immédiatement mis à exécution, et mainte- 
nant les rapports des État..Unis avec le Japon deviennent de 
plus en plus IréquenL« et imporlants. Simodaest sans doute 
destiné à recevoir le dép6t de charbon nécessaire à la grande 
ligne de stearers que les Américains révent dejà d'établir 
très-prochainement entre la Californie et la Cldne ; de mème 
que c'est sans doute à Chakodad que leurs baleiniers iront 
se ravitailler. 
Il est impossible que l'exemple donné par les Etats-Unis 
ne soit point imité au premier jour par le« Anglais et le 
Français, qui très-certainement obtiendront les mêmes avan- 
tages. Il est donc exact de dire que le Japonest aujourd'hui 
ouvert aux Européens, et avant peu sans doute on con- 
halera mieux encore ce peuple si curieux. Le Ja0on ne lar- 
dera point d Atre un but d'ecursion pour ce infatigables 
touristes anglais et américains, à qui la terre commençait à 
manquer. ,, Comment n'étudierai[-on pas, nous dit M. Frais- 
sinet, cette société forcément stationnaire, où depuis deux 
mille ans l'emploi des heures, le temps du travail et celui 
du repos, les occupations et les amusements, les cérémo- 
nie% les visites, les invitations, la coupe des vetemens et 
le plan des maisons suivent ns déviation la mème règle 
iusque dans les moindres alCits; où un architecte, un tail- 
m«ur, un cuisinier des temps anciens, n'aurait, s'il revenait 
à la vie aujourd'hui, qu'à reprendre ses instruments et qu'à 
se remettre à l'oeuvre comme après une nuit de sommeil? 
Nation dont l'activilé, circonscrite et reloulëe sur elle-racine, 
tournant toujours dans un cercle de coutumes et d'usages 
dont il lui est défendu de sortir, se consume à lustrer, à 
polir,  finir inoe«samment son minutieux ouvrage, et nous 
donne un spectacle unique dans l'univers : ce|ni d'un Etat 
qui comme le soleil, auquel il se compare, toujours mou- 
• ant et toujours immobile, semble avoir fait un pacte avec 
|'éternitè. » 
Il est difficile d'admettre qu'il en soit ainsi bien long- 
temps encore. Parmi les cadeaux offerts à la cour de Jcddo 
au nom des Êta, ts-Uuis par le commodore Perry, figurait 
un appareil de tèlégraphe électrique, et un petit modële de 
chemin de fer. Le commodore avait apporté avec lui la quan- 
tité de rails nécessaire pour étahlir un parcours d'environ 
400 mètrc de forme circulaire, une locomotive et un wa- 
gon. L'admiration des Japonais àla vue de la locomotive 
fondant l'air sur les rails avec un vitesoe de 60 kilomètres 

JAQUIER 
ne fut pas moins vive que celle qu'ils prouèrent en voyan| 
fonctionner le télégraphe électrique avec des c.,titans indi- 
cateurs où les signes ètaient Cries en caractères japonais, 
au moyen de quoi se reproduisait avec une rapidité merveil- 
leuse la réponse à toutes les questions qu'il leur plaisait de 
faire passer. D'autres Asiatiques n'eussent vu I' que des effets 
magiques; les Japonais sont une race trop intelligente et 
trop civilisée pour qu'une pareille idée pot leur venir. 
Soyez donc sors que vous ne larderez point  apprendre 
que le Japon, lui aussi, a ses chemins de fer en pleine exploi- 
tation ; et ce qui ne sera pas le c6té le moins merveilleux de 
cette révolution, c'est que les chemins fer du Japon auront 
été créés sans compagnies privilégiées, et surtout sans agi6. 
luge sur les actions pour enrichir les seigneurs de la cour 
de Jeddo. A cet égard nous ne craignons pas qu'ou accuse 
notre imagination d'aller trop vite en besogne, lorsque no,s 
nous rappelons qu' l'arrivée des premiers aventnriers por- 
tugais an Japon, il y a maintenant de cela plus de trois 
siëcles, les Japonais connaissaient déjà la poudre, mais igno- 
raient le parti qu'on en pouvait tirer comme moyen d'at- 
taque et de d,.lense h la guerre, et n'avaient jamais vu 
d'arme à feu. Pinto, l'un des Portugais naufragés sur leurs 
rivages, avait une arquebuse, qi fit l'admiration de tous ceux 
à qui il fut donné de la voir. Il la prëta, et à son départ les 
Japonais en avaient djà fabriqué cinç cents toutes pareilles. 
Deux ans après il en existait trois cent mille... 
JAPON (Terre du), nom impropre donné primitive- 
ment au cachou. 
JAPYGES peuple antique de l'ItaIie, qui appartenait 
à la race des l'lasges. Son territoire, appelé Japygie, 
forme aujourd'hui la partie méridionale de la Terre d'O- 
trante. 
JAQUE. Voye . Cor n 
JAQUEMART. Voge.'- JACQUEABT. 
JAQUERIE. Vogez 
JAQUETTE, sorte d'habillement quidescend ]usqu'a,t 
genoux ou plus bas, et qui était autrefois à l'usage des 
paysans et du peuple. On donne encore ce nom  la robe 
que portent les petits enfants. 
JAQUIER, nom donné " diverses espèces du genre ar- 
tocarpu$, de la famille des urticées. Ce sont de grands arbres, 
indigènes sous la zone équaloriale. L'espèce qui a donne 
son nom à ce groupe est le jauer à Jeuilles entières 
( ortocorpus integroEolio, L. ), le tjoca des habitants de 
Malabar, vulgairement appelé jaque ou jack, indigène de 
l'Indu. Son fruit, oblong, |aunatre, atteint de 30 à0 cen- 
timètres de ' 
»n e sur un diamètre de 16 à 30 cenlimètres, 
et pèse de  à 40 lilogrammes. Certaines variétés de ce 
fit sont comestibles, ainsi que les raines réniforme 
et de la grosseur d'une musoede, que l'on compare aux 
chataignes. Exposé à l'air, le bois de cet arbre finit par 
prendre la couleur de Pacsjou, et on Pemploie dans 
l'ébénisterie. ?,lais l'espèce la plus importante du genre est 
l'arbre à pain ou rraer( artocarpus incisa, L. }, dont 
la hauteur atteint de 13 à 17 ètres. Le tronc de cet arbre 
est très-gros; ses branches, nombreuses, horizontales, ri'as 
gles, forment une tte très-ample et touffue; les lenilles 
ont de 6 centimères h i mètre de long, sur 30 à b0 
centimètres de large. Le fruit de l'arbre h pain, jaune ver- 
datte h l'extérieur, et blanc en dedans, est plus ou moins 
gros suivant les variétés; mais son diamètre excède rare- 
ment  ! centimètres. Avant la maturité, sa chair est blan- 
che, ferme et un peu farineuse. C'est dans cet état qu'on 
le mange, soit cuit au four en guise de pain, soit bouiili ou 
accommodé de diverses maniëres. Il a une saveur com- 
parable à celle du pain de farine de blê avec un 16ger go0t 
d'artichaut. Lorsqu'il est arrivé à maturité, ce fruit devient 
pulpeux, d'une saveur douceâtre; il est alors malsain et 
purgatif. Les amandes que contient ce fruit sont du vo- 
htme des chà!aignes, et servent aussi al'aliment. L'arbre 
à pain croit spon!anément aux Moluques, aux lies de la 
Sonde et aux archipets de la Polynsie, et fournit une 



nourriture aussi saine qu'agréable aux habitants de ces 
¢ontrées. Une variété, originaire de Taiti, et très-répandue 
aux Antilles et dans d'autres canifCs de l'AraCique équa- 
toriale, a ses fruits dëpourvus d'amandes. On assure que 
deux ou trois de ces arbres remarquables suffisent pour 
donner la nourriture d'un homme durant toute l'année. 
L. LOVVET. 
JAQUOTOT (Mnle IImE-¥CTOeE), célèbre comme 
peintre sur poroelaine, naquit  Paris, le 15 janvier 1772. 
La manufacture de Sèvres lui dut un grand nombre de pein- 
tures du premier ordre, entre autres un service de desse,'t 
donné par tapoléon à l'empereur Alexandre après la 
paix de Tilsitt. En tS0 M e Jaquotot exposa des po- 
traits et des campes qui lui valurent une médaille d'or, 
la première qui ait été accordêe au genre qu'elle cultivait. 
Ce genre, très-difficile quand on veut atteindre à une 
certaine hauteur, offre l'avantage de donner à ses produc- 
tions une durée presque sans limites. Mais cette durée 
mème deviendrait un fardeau pour des productions mcdio- 
cres ou des chefs-d'oeuvre mal rendus. C'est ce que comprit 
fort bien 51 « Jaquotot, et, n'epar,nant rien peur son tra- 
vail, elle se mit à reproduire les chefs-d'oeuvre de nos 
musées, qui lui devront peut-être une immortalltë nouvelle. 
Douée d'une véritable "me d'artiste, elle ne se borna pas à 
copier les tableaux qu'elle voyait ; elle s'étudia à leur ren- 
dre leurs qualités primitives, consultant les gravures et les 
copies qui en avaient été faites, et restaurant avec in- 
telligence les parties maltraitées et effacées, sans rien chan- 
ger aux originaux. Raphael fut son maitre de prédilectio ; 
elle reproduisit d'après lui la lelle Jardinitrc, qui lui 
valut les compliments de Louis XVIII, la Vierge à la 
chaise, la Vierge aux poissons, la grande Sainte Famille, 
qui lui demanda trois ans de travail, et encore, en 
elle exposa la Vierye au voile. Elle peignit aussi La lclle 
Ferronnière, d'après Léonard de Vinci ; La Maitresse du 
Titien ; Arme de loulen, d'après Holbein ; Arme de Clèo 
res, d'après Van Dyck ; l'Atala et la Danaœe de Girodet ; la 
Psych et une Corinne de Gérard; ainsi qu'un grand 
nombre de portraits, parmi lesquels nous citerons Cori- 
sart, d'après Gérard, Frédéric le Grand, d'après Vanloo, le 
duc de Wellington, lady Darnley, la comtesse de V,-orontzel', 
la duchesse de Berry, la comtesse de Larges. Quelques- 
uns de ces portraits sont faits d'après nature, et l'artiste 
sut prouver ainsi qu'elle se dévouait en consacrant son 
pinceau à la reproduction des grands matres, llais lors- 
qu'elle interprétait un peintre, clmcun de ses ouvrages était 
empreint du caractère même du maltre qu'elle reprodui- 
sait. L'extrème suavité de la couleur, la finesse et la pré- 
cision du modelé, la pureté du dessin, l'heureuse har- 
monie de ses productions la placèrent au premier rang 
parmi les artistes de son genre. En 1828, son beau taleoE 
fut récompensé par le titre de premier peintre du roi sur 
porcelaine, titre que la révolution de Juillet devait bien- 
tt rendre illusoire. Dans un voyage qu'elle fit encore en 
Italie, elle copia la samle Ccile de Baphael, et le portrait 
de ce grand peintre que l'on voit à Florence. Elle est 
morte subitement, à Toulonse, le 27 avril 1855. bl e Ja- 
quotot était bonne musicienne  en ce genre, on lui doit 
quelques compositions agréables. L. Lo'T. 
JARDIN. C'est un terrain ordinairement enclos et des- 
tinë à des cultures spëciales pour lesquelles la charrue et 
les animaux de labourage ne sont pas employés : ainsi, 
l'art du jardinier est plus simple, à quelques égards, 
que celui de l'agriculteur.; il ne comprend point la con- 
naissance des macbines agricoles, ni la partie de l'écono- 
mie rurale qui concerne les animaux dont le travail se- 
conde celui de l'homme. Mais cette simplification apparente 
est compensée par un si grand nombre de dctails dont le 
ardinier doit ètre instruit, que l'êtude complète de l'agri- 
culture ne.peut tre plus longue que celle de l'horticulture, 
considérée aussi dans tofles ses attributions. En effet, 
pour diriger ajardi n botrnçue» il faut joindre au 

savoir du botaniste celui du cultivateur : s'il n'est ques- 
tion que d'un jardin ruitier, l'instruction botanique dont 
on pourra se contenter sera plus limitée ; mais d'autres 
connaissances, un autre apprentissage seront nécessaires. 
Le jardin potager est moins exigeant, si on ne lui de- 
mande point des productions exotiques ou hors de saison; 
le jardin fleuriste a toules les pretentions d'une culture 
de luxe, et pour lui procurer tout ce qo'il ambitionne, il 
ne faut pas moins de savoir et d'habiicte que pour le 
jardin fruitier, recommandé par la beauté, l'abondance 
et la variété. Quant aux jardins qsi tiennent h un palais 
à un grand édifice public, à une demeure somptueuse, 
soit de ville, soit de campagne, l'architecture les a compris 
dans sou domaine pour en diriger le plan et la distribution 
générale, présider aux ornements, donner quelques pré- 
cep|es relatifs aux plantations, etc. On ne peut lui refuser 
un droit d'inspection sur tous ces objets, car ils sont des- 
tinés à former un ensemble avec l'édifice auquel ils sont sub- 
ordonnes ; mais le goOt qui peut apprécier les convenances 
de cet ordre, saisir les rapports entre des objets si dis- 
parates, n'est pas une faculte acquise par l'enseignement. 
Tout ce que l'on peut faire pour la guider et lui épargner 
de mauvais choix, c'est de lui olfiir quelques résultats 
d'observations bien constatCs, quelques modèles genéra- 
lement approuvs. 
Afin d'êviter que les amours-propres nationaux n'inter- 
vinssent dans les débats entre les partisaus des jardins [ran- 
ça ou anglais, on est convenu de dësigner les premiers 
par le nom de jardins ornës, et les seconds par celui de 
jardins paysagistes, quoique ces dénominations fussent 
presque toujours inexactes; la plupart des jardins ornes 
n'avalent pour embelilssements que des vases ou des statues 
de mauvais gant et de pitoyable exécution ; et dans les 
jardins dits paysagistes, on entassait dans un petit espace 
des rochers artificiels, des ruines où tout rêvélait une cons- 
truction récente, des ruisseaux à sec, et, ce qui deplaisait 
encorgplus, des allees étroites et sinuenses, oi la prome- 
nade fati-mait au lieu de distraire. On a remarque depuis 
lngtemps qu'une marche un peu rapide dans une allée 
large et droite, sous des arbres de mème espëce, plantes 
à des dstances égaies, était favorable à la pensée, et se- 
condait pdssamment les mëditations solitaires, aussi bien 
que les discussions sur des matières importantes entre des 
hommes capables de s'éclairer mutuellement : eu faveur 
de cette utile propriété des allées rectilignes, qu'on en 
laisse au moins une dans tout jardin de quelque étendue ; 
les sentiers tortueux à travers des bosquets variés, et les 
imitations telles quelles d'objets et de sites pittoresques, 
seront laissés à ceux qui n'ont pour but que de revenir de 
la promenade avec une tète et un cœur également vides. 
Faut-il donc proscrire sans retour les iardins qui n'ont que la 
prétention d'tre paysagistes, et revenir à ceux dont les 
Tuileries, le Luxembourg, etc., nous offrent des modèles 
les plus vantés ? Non certes ; en usant avec intelligence 
des ressources que l'bor|iculture possède aujourd'hui, le cita- 
din trouve une décoration très-convenable pour le jardin 
de ses enttres, et l'beureux propriëtaire d'une habitation 
rurale ou d'un jardin de quelque étendue dans une ville 
peut y réunir des végétaux propres à l'embellissement de 
chaque saison, mëme sans trop favoriser l'agréable aux 
dépens de l'utile. 
Le nombre des plantes indigènes ou natnralisées qui 
méritent une place dans les jardins s'est accru au point 
qu'on éprouve aujourd'hui les embarras du choix, et qu'il 
serait impossible de placer ici la liste des arbres, arbus- 
tes, e{c. qui semblent le plus dignes de préfereuce lorsqu'on 
ne peut disposer que d'un terrain peu spacieux. La Quin- 
tinie, l'un de nos auteurs classiques en fait de jardinage, 
a consacré plusieurs pages à discuter les droits de préséance 
entre les poires, et de son temps on ne connaissait pas la 
moitié des varietés de ce fruit que l'on cultive actuelle- 
ment : des recherches analogues sur les plantes d'ornement 



.eraient beaucoup plus embarrassantes, interminables, à 
cause de la multitude de celles qui s'offriraient à la fois 
avec des titres  peu près égaux. Surtout, que les ordon- 
nateurs de jardins paysagistes, anglais ou chinois, n'en- 
treprennent point de changer la figure du terrain, d'élever 
des nontagnes de deux ou trois toiles de hauteur, de 
créer des vallées en plaine; qu'ils s'absticnnent de ces con- 
structions mesquines, puCites, que la manie d'imiter nos 
,oisins d'outre-mer a beaucoup trop multipliées citez nous. 
On a déjà vu que l'un des sens du mot jardina,e est 
l'équivaler«t de celui d'horticulture. Le mme mot dé. 
signe aussi les produits du potager. L'art d'exploiter les 
forts s'est emparé du mot jardiner pour exprimer une 
manière d'opérer, qui est effectivement celle des jardiniers 
en circonstances semblables : on coupe les arbres mal 
venus, quelques-uus de ceux qui sont trop sertC, et ceux 
qui, étant arrivés à la maturité de leur espèce, c'est-à- 
dire ayant acquis les dimensions dont on peut tirer le parti 
le plus avantageux, doivent laite place à de jeunes succes- 
seurs. Ce sont principalement les forèts de pins et de sapins 
que l'on soumet à oe mode d'exploitation, quoique toutes 
les rurales puissent l'adinetlre. FEanv. 
On ne peut guère, pour l'histoire des jardins, du jardinage 
ou de l'horticulture, remonter avec quelque certitude au 
delà de l'époque des Romains. Les jardins des 1t e s p e ri d e s 
et ceux de Cal.vpso ne sont que des tables. On voit cepen- 
dant par l'Odyssde que les Grecs possédaient déjh i cette 
(,poque des jardins fruitiers, regulièrement planlés, comme 
il appert visiblement de la description des jardins d'AIci- 
nofJs et de Laerte. Les célébres jardins suspend,«s de Se- 
miramis, à B a b y lune, semblent n'avoir été que des ter- 
ra.sses plantCs et arrosées artificiellement. Parmi les autres 
jardins fameux dans la haute antiquité, il faut aussi citer le 
iardin de Chanon en Médie, qui lut encore isité par Alexan- 
,Ire le Grand, les jardins situés sur les rives de l'Oronte 
.n Ssrie, qui ont étWdécrits par Strabon, et les jardins de 
CIéoptre. ous ne possédons que bien peu de renseigne- 
ments sur l'art du jardinage chez les Grecs. Sauf quelques 
données éparses ça et i, il ne nous est parvenu que deux 
des«riptions de leurs jardins. Celle du jardin de Phryn«, 
lhétaire (an 36 av. J.-C.), et celle du jardin puhlic 
d'Athènes, créé par Cimon. C'est seulement chez les Ro- 
maius que nous commençons à avoir des idées un peu plus 
arrêtCs sur ce qu'ëtaient les jardins de l'antiquité. Au lemps 
rie la republique les popriétés rurales n'étaient que desdo- 
maines agricoles. Tire-Lire fait mention des jardins de Tar- 
quia ; Lucullus possëdait  Bayes un parc magnifique. Ma- 
tius, sous le règne d'Auguste, introduisit le premier l'usage 
de tailler les arbres. Pline le jeune { an 62 ap. J.-C. ) 
nous donne les renseignements les plus précis sur les jar- 
«lins de son temps en nous déerivanl ceux de ses deux villas, 
appelées Laurenlium et Tuscum. On y voit que les jar- 
,lius romains serirent de modle aux jardins reçu|Jets créés 
I,]us tard par les Français ; ce qui se trouve encore confirmé 
par les peintures mm'ales qu'on voit à Pompéi. Il se peut, 
!«,utefois, que les jardins de ffCon, d'Aérien et des empe- 
 eurs qui régnèrent après eux se soient plus rapprochés de 
:a représentation des paysages naturels. La décadence de 
ïhovliculture coincida en traite avec la décadence de l'em- 
pire, et elle semble n'avoir fleuri de nouveau qu'à partir 
,'la treizième siècle. Boccaoe décrit déjà des jardins qui res- 
»emblent fort à des parcs. Sous les Médicis, le go0t pour les 
grands et beaux jardins devint de nouveau très-répandu. 
l.es maniliques jardins de Bobo|i au palais Pitt (I 59), 
Tivoli, Borghèse, AIdobrandini et lsola-Bella ( 1675 ) témoi- 
gneut encore auo-rd'|tui des préceptes qu'on suivait antre- 
bis en italie pour l'arrangement des Jarmns. 
E Allemagne, il  passa beaucoup de temps avant que 
Fart du jardinage fit quclqu progrès. On dit bien que 
Charlemagne possédait «le superbes jardius à Ingelheim et à 
Aix-.la-Chapel!e; st la célèhre tradition du jardin d'AIbert 
le Gand (12i9J indique qu'on connaissait déih à celle 

A1ADIN 
époque les serres-cbaudes; mais l'art et le goret des jardin 
semblent ne s'tre dëveloppés que beaucoup plus tard. Le 
plus ancien ouvrage connu sur l'horticulture allemande est 
le poCe llortulu* du moine Strabon, de Constance, qui 
décrit un jardin fleuriste. Ce n'est ensuite que dans les poé- 
sies de Hans Sachs qu'on trouve quelques dtaiis sur 
jardins allemands. Les jardins de F u g ser, de WaUenstein, 
ceu de Hellbrunn près Salzbourg, sont d'ailleurs clëbres. 
L'art de dessiner les jardins fut, en France et en Angle- 
terre, une importation de l'Italie, et se borna d'abord à de 
grossières imitations. François 1 «" cra les parcs de Bou- 
Iogne, de Saint-Germain et de Fontainebleau. Le cardinal 
Wolsey et Êlisabeth favorisèrent en Angleterre la crealion 
de parcs immenses. Mais la direction qu'on suivait alors 
dans la disposition des jardins était tellement contraire. à 
la nature que Baron de Verulam l'attaqua (1620) dans un 
écrit ad toc. Sous le règne de Henri IV, le célèbre jardi- 
nier Claude Mollet créa les jardins des Tuileries, du Luxera- 
bourg et de Saint-Cloud. biais c'était toujours la tradition 
romaine et le style italien qui dominaient dans l'horticulture 
européenne. Ce fut seulement en 1680 queut lieu dans cet 
art une révolution operée par la plantation des jardins de 
Versailles, où l'architecte Le N  tre créa pour la première 
fois un style plus indépendant, qu'on appela dès lors celui des 
jardins français. Des plantations régulières d'arbres, des 
plans obliques au lieu des terrasses italiennes, une innom- 
brable quantité d'ornements architectoniques, des ouvrages 
hydrauliques, des hales et des arbres bizarrement taillés, des 
statues et des orangeries, formèrent le caractère propre de 
ces jardins, qui ne lardèrent pas à tre imités partout en 
Europe. En Hollande, la corruption du go0t en vint à ce 
point, qu'on finit par n'avoir pius que desjardinsde pierreset 
de coquillages, garais de gros vases contenant des fleurs en 
porcelaine. Les plus célëbres jardins français, en Alleraagne, 
étaient ceux de Schoenbrunn prës de Vienne, du Parc et de 
Sans-Souci près de Berlin, de Sch'etingen près de 5an- 
heim, de Herrenhausen près de Hanovre, de Nmpbenbourg 
et de SchleissheiŒE prè de Munich, de Ludwishurg et de la 
Favorite près de Stuttgard. 
Au commencement du dix.huitième siècle, uneréaction vio- 
lente s'opéra en Angleterre contre le style des jardins fran- 
çais. Wise, lord Batburst, Pope et Addison l'avaient déjà 
attaqué..Mais le vêritable créateur du nouvel art des jardins 
fut le peintre William Kent, qui, par la création des magni- 
tiques parcs de Caritonhouse, de Claremont, d'Essex et de 
llousham ( 1725-1730 ), donna une direction tout autre 
l'art des jardins, pour lequel on adopta alors le principe de 
la peinture de paysage, sans avoir égard le moins du 
monde aux règles observees jusque alors. Toutefois, ce fut 
le jardinier Bron (1750) qui le premier perfectiouna le 
système de Kent; en dessinant le parc de B|enheim, il fit un 
chef-d'oeuvro de l'art de l'imitation, et lixa le caractère des 
jardins dits anglais. Vinrent après lui les professeurs de 
jardinage : Shenstone, ,lason, Repton, Wbateley, Aiison 
et Hiipin ( tT6-t790 ), et leur« antagonistes  Horace Wal- 
pole (1780) et Uvedale Prise. Ces derniers s'efforcèrent de 
bannir des jardins les btiments bizarres avec des scènes 
dites romantiques. 'En AIlemagne les jardins anglais se pro- 
pagèrent encore bien plus rapidement que les jardins fran- 
çais. Wilhelmshoehe près de Cassel, Harbke près de Helm- 
stadt, Woerlilz près de Dessau, Charlottenburg près de 
Bedin, Schoenhoven en Bohéme, etc., furent les premiëre 
et les idus grandes créations ca ce genre. Toutefois, la plu- 
part des imitations témoignaient dëjh d'une corrnption du 
go01; et vingt années après le besoin d'un rformateur se 
faisait déjà sentir. Ce r61e flt rempli par Hirschfeldt, pro- 
fessera" d'esthéqque et de pl»ilosophie à Kiel, dont les excel. 
lents écrits (1773-t78) ouvrirent des voies nouvelles à la 
pratique de i'at des jardins. En France, le go0t anglais 
introduit à partir de 73, d«.généra hieutOt en go0t chinois. 
Girardin, Mol st .!.-J. Rous«eau combattirent cette direc- 
tion, tant eu Ih,.:orie qu'eu pratfque, par ]acréatioa des jar- 



JARDIN m 
dins d'Ermeuonville. C'est vers cette époque que Delille 
eumposa son poëme didactique Les Yardins. 
tlalgré tant d'efforts et de si excellents modèles, l'art des 
jardins ne parvint, véritablement à être quelque chose de 
libre et d'élevé qu'après qu'il eut encore subi une nouvelle 
et profonde réforme. Cette fois ce fut rAIlemae qui en 
donna le signal, et le réformateur nouveau fut L. Sekeli 
( né en 177, à Weiburg, dans le duché de assau, et anobli 
plus tard ). 11 fut le fondateur du nouveau goal en matière 
de jardins, qui remplace les imitations de l'art par des 
effets naturels. Parmi les créations les plus considérables 
exCulAes par Sckell de 1780 à 1820, les plus célëbres sont 
le jardin anglais à liunicb, que le comte lumfort avait com- 
mencé, S¢hoenbusch près d'AsoEfeaburg, Birkenau sur la 
Bergstrasse, llonbijou dans le Palatinat, etc. Le prince 
Puckler-Muskau, qu'on peut à bon droit compter au nombre 
des plus grands jardiniers des temps modernes, produisit 
encore en ce genre des créations plus grandioses et plus 
importantes. Ses magnifiques jardins . Muskau età Branitz, 
ainsi que ses livres, sont la meilleure école à laquelle puisse 
étudier celui qui veut pratiquer l'art des jardins. Après lui, 
il faut citer A. de Hake à Hanovre, ,Veyhe à Dusseldorf, 
Lenné à Berlin, Siebeck à Leipzig, etc., pour l'introduction 
d'embeliissements pittoresques bien entendus, pour l'art de 
composer un tout harmonieux et de grouper avec grgce. En 
Angleterre, où les 1Measure-9rounds (parcs à fleurs ) ont 
réalisé la nouvelle direction imprimée a l'art des jardins, 
ceux qui, après Henri Repton, se sont le pins distingués 
par leurs heureuses création», sont blash et Paxton, le cons- 
tructeur du Palais de cristal. En France on cite Thouln, 
Hardy, Viart, Lalos, etc. On peut dire en génëral que ré- 
poque actuelle est restée bien en arrière de l'époqne précé- 
dente pour les créations de jardins grandioses, et s'est plutdt 
occupée de l'horticulture propremeut dite, c'est-à-dire du 
jardinage immédlatement pratique et utile. 
Ce genre de culture, qui très-certainement avant la créa- 
tion de l'agriculture proprement dite constitua la principale 
ressource alimentaire des hommes, fut surtout pratique au 
moyen-Me par les Hollandais, qui rintrodulsireut en Angle- 
terre, oit cependant la fondation de la premiêre sociétë d'hor- 
ticulture ne date que de 1805. Dès 1809 la Caledonian hor- 
ticultural $ocietg se Iondait en Ecosse, tandis qu'en France 
la Société d'Horticulture, très-richement dooEe d'ailleurs, 
ne fut créée qu'en 1827. En Allemae on peut citer comme 
la plus ancienne société d'horticulturela Societ é Pomologique 
fondée en 1803 à Altenburg. Chaque pays et même chaque 
grande ville possède aujourd'hui sa société d'horticulture, et 
leurs expositions annuelles de fleurs conibuent beauroul 
à l'amélioration des méthodes de jardinage ainsi qu'au per- 
fectionnement des diverses espèces de fruits. La littérature 
horticole est déjà d'une richesse extrême; on peut cependant, 
daas l'innombrable quantité d'ouvrages dont elle se com- 
pose, signaler plus particuliêrement les suivants : Bacon de 
Verulam, Fssag on Gardens (Londres, t 620) ; Temple, Upon 
the Gardens of Epicurees (Londres, 1;85 ); Shenstone, Un- 
connected Thougts on landscape-gardening (Londres, 
176) ; blasson, An Essay o Desg irt Gardeing (Londres, 
1768); Whateley, Observations on modern Gardening (Lon- 
dres, 1770);Cbambers, Dissertations on oriental Gardenin9 
( 1772 ) ; Price, Essais on the Fictureque in gardenin 9 
( 1780 ) ; Hirschfeld, Anrnerkungen 2ber Landheuser und 
Garlenkunst ( Leipzig, 1773 ); Le mème, Theorie der Gar. 
tenkunst (5 vol., Leipzig, 1775-1780) ;-Morel, .l'Art de 
distribuer les Jardin suivant l'usage des Chinois ( Pa- 
ris, 1757); le même, Thoriedes Jardins, etc. (Paris, 
1776 ); Girardin, De la Composition des Paysages ( Pads, 
177 ); Siiva, Arte de Giardini inglisi (Florence, 1703 ); 
Scieli, Beitrage zur bildenden Gartenkunst ( llunich, 
1818 ); Pindemonte, Su i GiardDti inglisi (Rome, 1817); 
le prince Pockler-Muskau, Andeutungenïtber Landschafts- 
9oertnerei { Stuttgard, 1834); Hake, Uêber hoehere Garten- 
Iunst (slade, 182); Downing, Treatise on the Theory 

JARDINIERE 567 
and Pratice of Landscape-Gardenin 9 (4  édit.; Londres, 
1849), etc., etc. 
JABDINAG E, art de cultiver les j a r d i n s, travail que 
l'on fait aux jardins. 
JABDIN DES PLANTES, longtemps appelé Jardin 
du lloi, la plus belle promenade publique de Paris à notre 
avis. Elle comprend le vaste emplacement borné par les 
rues Cuvier, Geofltoy-Saint-Hilaire, Buffon et le quai d'Aus- 
tertitz, et fait partie du Muséum d'Histoire atu- 
rel le, cet établissement sans pareil dans le monde entier. 
Le Jardin des Plantes se divise en haut et bas jardin. 
Le premier était jadis un monticule surmonté d'un moulin 
ì vent, et qu'on nommait la butte Copeau, d'od vint le 
nom de rue Copeau, porté il y a peu temps encore par 
la rue Lacépëde, siluée dans le voisinage. Cette butte, 
plantee d'arbres verts et découpée en spirale, s'appelle main- 
tenant les Labyrinthes. Au sommet du Grand-Labyrinthe, 
sur le flanc duquel le fameux cèdre du Liban, planté par 
Daubenton, étend l'ombre de ses branches gigantesques, 
est un élégant patilion, entièrement fait en cuivre et d'où 
l'on jouit d'une vue très-étendue. on loin de là se trou- 
vent ces belles s erres chaudes qui n'etonnent plus nos 
)eux depuis qu'ils ont vu les prodiges récemment réalisés 
par l'emploi architectural de la fonte et du verre. De longues 
aliées de marronuiers coupent le jardin botanique, divisé en de 
nombreux carrés, contenant la plus riche collection de plantes 
alimentaires, médicinales, et de pur agrément qu'il y ait en 
Europe. biais la plus grande curiosité du Jardin des plantes, 
ce qui lui a valu son universelle popularite, c'est sa mé- 
nagerie, installée dans un magnifique jardin anOais. 
Une belle grille en fer forgé borde le Jardin des Planle 
tout le long de la rue de Buffon et du quai d'Austerlitz ; 
une terrasse ombragee et les btiments de la galerie zoo- 
logique le terminent du cdt de la rue Geoflroy-Saint-Hilaire; 
des maisons affectées au logement du nombreux personnel 
de l'établissement forment enfin sa limite du cdté de la rue 
Cuvier. 
Le fondateur du Jardin des Plantes, c'est Louis XIII, on, 
pour mieux dire, c'est Bicbelien, et l'homme qui en forma le 
projet est Guy de L a B r o s s e. Le surintendant des finances 
Bullion eut également une paioE importante  cette création. 
Protégë par plusieurs ministres, cet établissement acquit 
une faveur qu'il perdit bientdt, et qu'il reprit par le zèle de 
Valot et de Façon, qui repeuplèrent ce jardin d'un grand 
nombre de plantes rapportCs de leurs voyages par Fagon 
lui-reCe, Tournefort et le père Plumier. 
La sm'intendance de ce jardin passa successivement à 
diverses personnes, parmi lesquelles on voit figurer Col- 
bert en 1671. A partir de Chirac, cet établissement n'eut 
plus que des intendants. En 1739 Louis XV y nomma l'illustre 
Buffon, sous les auspices duquel cet établissement s'C 
leva bientdt à un haut point de splendeur et d'utilité. Les 
Thouin, les de Jussieu, les Lemonier, y apportèrent aussi 
le tribut de leur science et de leur soin. Bernardi n de 
S a i n t-Pi e r r e fut le dernier intendant du Jardin des Plantes. 
La révolution, loin de nuire au Jardin des Plantes, con- 
courut à son agrandissement. Il reçut alors une extension 
considérable, grgce au conventionnel Lalanai. Enfin, sa 
prospérité n'avait jamais été telle qu'elle le devint après 
1830. Le Jardin des Plantes, qui n'avait que six hectares en 
160, que 1, en 1789, et en comptait déià 27 en 1820, en a 
plus de 35 aujourd'hui, et chaque annëe aioute aux amélio- 
rations et a,x embellissements. W.-.. Drcgrrr. 
JADINIER. C'est celm dont le métier est de tra- 
vailler aux jardins, ou qui cultive un jardin pour en vendre 
les produits. 11 y a des jardiniérs fleuristes, pépiniéristes, 
maralchers, etç. 
JABDINIERE meuble d'ornement qui supporte une 
caisse dans la quelle on met des fleurs. On fait des jar- 
dinières en grume, en bois plaqué, etc. 
En termes de cuisine on nomme jardinière nn mets com- 
po de différents sortes de légumes, principalement de 



56s JARDINIÈRE 
navets et de carottes: on le sert surtout comme entremets. 
En termes de couture, une jardinière est une petite bro- 
derie de fil, étroite et légère, faite an bord d'une mancbotte 
de chemise ou de quelque vgtement semblable. 
Dans quelques endroits on donne le nom de jardinière 
b la courtilière. 
JAIDINS BOTA'IQUES établissements dans les- 
quels on cultive des plantes de toutes les parties du monde 
et de tous les climats. Leur but est de servir aux progrès 
de la science et  l'instruction ; mais quelquefois aussi ce 
sont de purs objets de luxe, entretenus  grands frais par 
des amateurs. Quand un jardin botanique a une destina- 
tion scientifique, il faut qu'on y cultive le plus grand nombre 
possible de plantes des familles les plus différentes. Pour 
cela il laut avoir des terres de diversesespèces. Il est aussi 
nécessaire que le directeur d'un jardin botanique soit en 
correspondance continuelle non-seulement avec les pre- 
miers jardiniers de l'Europe, mais avec les botanistes de 
toutes les parties du monde; et il vaut mieux encore en- 
voer au loin des voyageurs faire des collections. 
Au commencement du quatorzième siècle, llatthieu Sil- 
vaticus établit à Salerne le premier jardin botanique pro- 
prement dit. La Re.publique de Venise ne tarda pas à imiter 
tel exemple. En t33 elle lit établir un jardin médicinal 
public, et en fit peindre les plantes par Amadei. Le duc 
AIfonse d'Este crëa un magnfique établissement de ce 
genre à Ferrare; les jardins botaniques de Padoue, de Pise 
et de Pavie furent fondés peu après, le premier en 1533. Le 
jardin botanique de l'université de Leyde date de 1577, et 
les premiers jardins botaniques qu'aient eus l'Angleterre et 
l'Allemagne, de tri20 à lfiJ0. Paris eut un jardin bota- 
niqueen 1591 ; Houel établit, vers l'an 1600, cebd des apothi- 
caires de cette méme ville; celui de Montpellier, établi par le 
médecin Richer de Belleval, date de l'an 1598. Les deux 
pins fameux jardins botaniques sont sans contredit ceux 
de Suède et de Paris (voile5 JAv.t nos PcA.,,oEes). Le cë- 
lèbre botaniste »uédois OlaOs Bffdbeck fut le père et le fon- 
dateur de celui d'Upsal ; il y fit des démonstrations, et on 
accourut de toutes parts pour l'entendre. Le roi de Suède 
CImrles-Gnstave a)ant noblement encouragé ces e.,sais, 
ce jardin s'agrandit iusensiblement, et devint bientt un lieu 
de délices et de science sous la direcbon du grand Linn,_ , 
dont il vit naltre le système. Ces jardins ne sont devenus rêel- 
lement importants que depuis le développement du com- 
merce etranger, c'est-ì-dire depuis le milieu du dix-huitième 
siècle, et depuis la création de la botanique scientifique. 
Aujourd'hui il n'y a pas une grande ville qui ne possëde 
un jardin botanique; on en trou'e jusque dans les colonies, 
par exemple au Cap, à Maurice, / Ceylan, à 5ladras, Sé- 
rampore, Calcutta, Batavia, Sidney, comme à Sant-Jago, 
Bio-Janeiro, La Havane, Pidladelphie, ffew-York, etc. 
JAI:tD|.S PUBLICS. Ils sont de deux sortes : d'abord 
ceux qui sont outerts le jour, à tous, sans aucune rétribn- 
tion, ou le citadin ient chercher le semblant de la cam- 
pagne et un air plus pur que celui de la ville, où la premiëre 
enfance essaye ses premiers pas, sou« les yeux d'une mère, 
nu bien sous la tutelle moins attentive de la bonne, qui y 
trouve toujours tant de pags parmi les murChaux en herbe; 
où l'Coller, enfin, vient oublier l'Cule et les retenues et les 
lensumsavec les barres, les billes et leballon. Il y a aussi 
ceux où l'on n'entre qu'en payant, propriétés pÆivées de spé- 
cnlateursqui y ont rëunidiIférentsgenres de divertissements, 
jeux, bals, spectacles, concert.c. Les premiers sont indis- 
pensables/ la salubrité d'une grande ville et à la récréation 
<le ses IalJitants. Tels sont à Paris : les jardins des Tuile- 
ries, duLuxembourg, du Palais-Royal, le Jardin 
d es P |autos, la Place Royale; à Londres : Hyde-Park, Re- 
gent's Park, etc. Les squaresdecette dernière capitale ne 
sont pas, à proprement parler, des jardins publies. Quant 
auxconds, l'accroissement énorme de 'aleur qu'ont pris les 
tcrrains à Paris en a considérablement réduit le nombre. T i- 
• oli, M;,rl:euf Beanjon, Idatie, Paphos, le Jardin Turc, 

-- JARNAC 
n'existent pins. Les bals d'été, 1Mabi Ile, le ChMeau des 
[Fleurs, la C h a u m i è r e, en ont sau,é quelques-uns de la des- 
[ truction, mais qu'il« sont petits, quand orties compare à cet 
. qui les ont précédés ! 
I JARDINS SUSPENDUS. Les jardins snspendns de 
Babylone ou de $émiramis furent mis par les anciens au 
rang des sept merveilles du monde. On ne saurait 
au juste en donner la description ; voici cependant comment 
de Jaucourt les imagine d'après les auteurs anciens - « Ils 
étaient aoutenus en l'air, dit-il, par un nombre prodieux 
de colonne.« de pierre, sur lesquelles posait un assemblage 
immense de poutres de bois de palmier; le tout supportait 
un grand poids d'excellente terre rapportée, dans laquelle 
on aait planté plusieurs sortes d'arbres, de fruits et de 
légttmes. Les arrosements se faisaient par des pompes on 
canaux dont l'eau venait d'endroits plus élevés., 
JAIGON  mot d'une étymologie incertaine, qu'on 
écrivait anciennement 9ergon , que Ménage fait venir de 
barbaricus, que d'autres tireur de groecum, que d'autres 
enlin dérivent de jars, mlle de l'oie. Quoi qu'il en soit, c¢ 
nom s'applique à tout langage inintelligible, corrompu, fac- 
tice, particulier ì certaines personnes, ce qui le différencie 
du patois, lequel a des règles et est propre à tous les 
gens du mème pays. Le jargon diffère aussi de l'argot, 
en ce que celui-ci est toujours une langue de convention, 
tandis que le jargon peut varier d'homme à homme et em- 
prunter à chacun un certain caractère d'originalité. On 
emploie encore le nom de jargon pour désigner une lan- 
gue qu'on ne comprend pas, pour qualifier un langage 
obscur, au-dessus de la portée des intelligences ordinaires. 
Condiliac a dit avec raison que o la langue de la philo- 
sophie n'a été qu'un jargon pendant des siècles ,,. On peut 
aussi traiter de jargon ces nomenclatures scientifiques qui, 
sans égard pour les noms communs et vulgaires, multiplient 
ì l'infini leurs termes barbares à force d'être savants. Le 
Père Bouhours et lloliëre se sont servisde c mot pour ca- 
ractériser la recherche, la prétention, la sin-,m'ité dans le 
langage, le vide des pensées dans le style. Le langage des 
précienses ëtait un véritable jar9on, comme le dit lIartine 
dans Les Femmes savantes. Poétiquement, on nommejar- 
port le ramage de oiseaux, le langage des animaux, qui 
échappe à notre intelligence si superbe. L. Lota--r. 
J&PNAC chef-lieu de canton du dëpartement de la 
Ch atonie, sur la rive droite de la Charcute, que l'on y 
passe sur un pont suspendu, avec 2,510 habitants et une 
église consistoriale calviniste. On .v fait une abondante ré- 
colte de vins rouges, un grand commerce d'eaux-de-vie dites 
de Cognac. C'est entre cette ville et les illages de Bassac et 
de Triac que fut livrée la célèbre bataille gagnée par le 
duc d'Anjou (vo9e-- l'article suivant). Une pyramide qua- 
drangulaire avait été élevée sur le territoire de Bassac,  
l'endroit où le prince de Condé avait reçu le coup mortel; 
ce monument, détruit en t793, a ëté rétabli. Le ville de 
Jarnac devait donner son nom à tme branche de la maison 
de Chabot. 
JAF, XAC (Bataille de). Le I mars ! 5fi9, l'armée ca- 
tholique, sous les ordres du duc d'Anjou, s'empara de Chà- 
teauneuf-sur-Charente, et passa cette rivière après avoir 
rétabli le pont pendant la nuit. C o I i gn y, qui commandait 
les protestants, ne pouvait opposer que des forces bien tufC 
fleures, plusieurs de ses capitaines ne l'aant pas rallié à 
temps. 
Cependant l'aile qu'il commandait enfonça les lignes 
ennemies; mais il ne fut pas sonteun par son avant-garde 
et sa cavalerie. Lanone lut fait prisonnier, et Cond éayant 
cliaré avec trop d'impétuosité, fut accablé sous le nombre, 
renversé de cheval, et tué d'un coup de pistolet par llonte- 
quiou, capitaine de gardes suisses. Sa mort dëcida de la 
journée. Quelques mois après les protestants étaient encore 
battus à M on tcontou r. 
J.F,AC (Gin n CHABOT, sirens), gentilhomme de I 
chamb-e du roi sous l:rançois 1 « et sous Henri II, nest connu 



JARNAC 
¢pe par son fameux duel avec François nE 
sieur nE LA HATAIGNAIB. La US de ce duel est 
cueu pour tre rapporoEe. Ou avait et dans la chambre 
du roi un rit contenant l'impration et la malédiction 
pronou contre Bubeu. C'éit une allusiou aux amours 
de Henri II et deDiane de Poitiers, qui avait étla 
mtrse de sou père. Le roi eu avait fait l'applioetiou à 
Jaac, qui, disait-il, it l'amant de  belle-mère, et lai- 
it figure à la cour avec l'argent qu'il eu recevait. Jarnac, 
ss partre voir d'où l'impulatiou éit venue, l'avait 
reue comme calomnieuse. La CbAlaieraie, qui p- 
sait pour la meilleure lame du royaume, s'en dlara l'au- 
ur, pour laite  cour au roi, dont il était djà l'un des 
favoris. Jaac dut lui demander réparation. Henri II au- 
fi le combat. L lices furent ouvertes le 10 juillet, 
dès six heures du matin, à Saint-Germain-en-Laye. Le roi 
y assi avec toute sa oeur; le duc d'Aumale avait acoepté 
loffioe de parrain de La Cbtaieraie; Charles Gouffier de 
Boissy éoEit paain de Jarnac. On fit le choix des armes 
avec tous les files de l'ancienne chevalerie. L¢rsque enlin 
l'un d hfrauh d'arm pronon le cri : « Laiz aller 
1 bons combatoEnh, » ils s'élancèrent l'un sur l'autre et 
portèrent plusieurs coups d'ép; tout à coup La Cbtai- 
eraie tomba, bles au jarret d'une manière inattendue, 
d'où est venu le terme proverbial recevoir n coup de 
Jarnac. Le vainqueur ne voulut point achever son ennemi 
ainsi renversé; il lui criait : « Rende-moi mon honneur  » 
,, Pu il diit au roi : « Sire, prenez-le, je vous le donn » 
La Châtaigneraie ne voulut pas se rene, et le roi bési 
Ionemps avant de l'acoepter en don. 
Cependant le vaincu fut empor du champ de baille ; 
Jarnac fut embr6 par le roi, q I dit : « Vous avez 
comban en Car et parlé en istote. » La Chlaigneraie, 
désespéré, arracha les bdag de  blessure, et  laissa 
mouOr. A. 
JARICOTTO. Voyez Co. 
JAROSLAV. yez IAnOSLF. 
JAROSSE. Voye: Gnn. 
JARRE  nom que l'on donne en chapellerie aux 
ils Ion, du et luisants, qui ne sont propres ni au feu- 
trie ni h la teinture, et qu'il faut aacher avec des pinc. 
JAE soe de ve en terre ver, à deux anses, 
dont le entoe t Io gré, et qui se paiculièrement à 
refermer de l'eau dans I vahux, de l'huile, etc. 
La jae servait autrefo de mesure pour I huiles. 
JARRE ÉLECTRIQUE. ;çez BOUTEILLE RE 
JARRET. Chez l'hoe, c't la paffie postéfieure 
du genou ; chez le cheval, c'est l'intervalle compris, dans 
le membre postérieur, entre la jambe et l'os du oenon. 
Cette region correspond, dans oe dernier oes, au tarse des 
atomis. On estime un cheval qui a I jarrets larges, 
pla, n cbaus. S'ils balcent ou se déjeUent en 
dans ou en delmrs, on dit que le cheval a l jarrets 
s. Celui dont I jarret, trop serr, se lient et s'en- 
Ueprennent aux moindresdentes, t dit clos du derrière 
ou jarret. Elin, on nommejarrets coudds ceux q»i, nate- 
rellement tp flcbis, poent le,non tr en avant et sous 
l'animal. Par analo4e, on donne oe nom à la mme partie 
du corps chez d'autr adpèd : arret de.veau, de 
bf, etc. 
JARRETIÈRE ( Ore de la ), Order f the Garter, 
le premier d ordres de chevalerie qu'il y ait en Angleterre, 
fut fond par leroi douard Iii. Malgr tout les in- 
vtigations des bistoriens anglais, bucoup d'obscurité 
rgne sur n origine. Un jour, raconte-t-on, que ce mo- 
narque assisoEit à un bal avec  maltresse, la comtse de 
Salisbury, cette derniêre perdit en dansant sa jarrdière gau- 
che, qui oEit de couleur bleue. Le roi voulut aussitft la rele- 
ver, et en laisant ce mouvement toucba involontairement la 
robe de la belle comtesse, qu'il exposa ainsi aux 
ploeS de i'sistanoe. Pour r¢par sa faule, Édouard 
s'cria: llnni soil qui mal 9 pense  lit en m6me 
DICI'. D[ I.A 1.0% LITS. -- ]'. 

-- JASEUI 
temps le serment de mettre ce ruban ellemenf en honneur. 
que I railleu eux-mmes le rechercheraient avec le pl 
vif emproemenL En sui de quoi le roi, en 133, fond 
l'ordre de la Jaetiere. 
uivant une autre version, la fondation de l'ordre de 
Jaetière dateit de 13ç, e aurai eu lieu après la victoire 
remrtée par douard lli à Crcy, où un ruban bleu 
arboré au bout d'oçe lançe aurait servi de sial 
engager Faction, et où le mot d'ordre audit OE le 
vali saint Georges. 
Mais les slatuts de l'ordre portent qu'il fut fondé en 
en l'honneur de Dieu, de la sainte Vierge et de saint Geor- 
ges, mart}r. 11 n'y a que des princ souveras ou des An- 
glais de la plus haute naissance qui puissent en ëtre mem- 
bres. Le nombre des chevalie,  compris le roi, chef de 
l'ordre, t de vingt-six, non compris les pfinc du san 
les membres trangers. Il se tient tous le¢ ans,tic 2fi aril 
un chapitre du tr-oble ordre de la Jarretière dans 
chapelle du chàteau de Windr. Outre I viu-cinq cheva- 
liers proprement dits, le roi en nomme encore  ingt-six au- 
tres, dits chevaliers pautwes, chois d'ordinaire parmi 
d'anciens titulaires de charges de cour, qui, trop vieux ur 
pouvoir dérmais rendre des rvic mililair, reçoivent 
une pension de 300 liv. st., moyennanl laquelle Hs sont lenus 
de prier aux lieu et plaoe d vin-cinq chevaliers tilulaires. 
La réception d nouveaux chevaliers se fait avec une grando 
pompe, et un heraut d'armes est chargé d'aller remeRre les 
insignes de l'ordre a«tx princ étrangers, lorsque ceux-ci ne 
uvent point asster en pernne h la rémonie de leur ré- 
ception. Les membr étrange de l'ordre de la Jarreèr 
sont aujourd'hui : l'empereur d Français, les rois de Prusoe 
de Saxe, de Hanowe, de Wuemberg et de Belque, 
le duc de Brunswick, le duc deSaxMeiningen, le duc do 
SaxCobourg-Gotha, et le pHnoe de Linang. La déoerao 
conste en un ruban bleu foncé et moiré qui s'atlache 
doeus du genou gauche av une boucle d'or, et porte 
la devise : Honni soit qui mal ç pense  Un autre lae 
ruban, de mëme couleur, se poe de l'épaule gauche  
hanche droite; et à oe ruban t suspendu un écussooE 
d'or, o de diamants, du chevalier iut Georges repré- 
sent dans l'action du combat, de la devi et de la jar- 
retiìoe. Enfin, les chevalie rtent à gauche sur la poi- 
trine e étoile à Irait pointes, contenant la croix ronge 
de saint Georges, la jarretière et la devise. Le oestum 
olficid de l'ordre se compose d'un vtement de dessus bleu 
foncé, en soie, d'un manteau de velours rouge brod coe 
or, d'une tue noire surmonlée d'une ple blche, et 
d'une cbaine d'or qu' ajouoE Hen VUI. 
JARS. lgez On. 
JASER. lçe: C«c. 
JASEB.XXD. Voçe« Co » I.s. 
JASEUR, genre d'oiseux tour à tour rappo par le 
ornitholistes à la lamille des corbux et  eais, aux 
merles et au ou des cotingas, auquel ils semblent de- 
voir appartenir. On lui a donné le nom latin de bombçci- 
vora, parce qu'on a cru qu'il se noussait principalement 
de lépidoptères noctues, et l'on ne connait pas assez 
mœurs pour affirmer q»e le nom dejeur lui a te donn 
en raon de son oequetae, c'est-à-dire de la particularité 
de n chant, qui parait ne se manifester que pendant 
la ison des amour, lorse c oiseaux sont r,'us 
troupe. L caractères de ce genre sont : Bec dit, bombé 
en dus et en dessous ; andibnle supérieure faiblement 
courbée vers son extrémité, terminée par une dent très- 
marquée; narin basales ovoïdes, percé de pa en pa, 
ouve par devant, oecbées par les petit plum du front 
ou nne; pieds trs-cou; d trois doi antérieurs, c 
bfi da milieu et l'interne libres, l'extec soudé à la ba; 
ailes médir ; queue oerrée, oemposée de douze penn; 
la première et la oende rémig les plus longue% ou la 
première un peu plus coud que la deuxiëme. 
Ce genre renferme h'ois ep0ces, dont une d'Ero 



d'Asie, la oeconde du Japon, et la troi«ièmc d'.,mérique. 
La première, qu'on nomme ausi 9randja.eur, ja.cur de 
BohC'me et jaseur d'Europe ( bomb9cilla 9arrula, Vieiil. ), 
se montre plus h'quemment  l'est et à l'ouest qu'au nord 
cio l'Europe. Cet oiu a etWvu x environs d'Abbeville, 
de Falai, de en, et M. Fiorent Prévost, qui tudie avec 
assiduité I mœurs des oiseux, a eu l'osion de tuer 
quatoe jeurs dans une oeule chasse aux environs de 
Paris. Son appation ou son passée en nombre  peu con- 
idírable dans un endroit donn est rardé comme un fait 
«rie de i'atntion des ornithologistes. Ils ne se montrent 
qu petit nombre ds les pays du nord de l'Europe, et 
des époqu indtermines. Les jaurs sont des oiseux 
timide; ils se oechent ns l buissons les plus épais, et 
descendent rarement  rre; leur vol est de oete durée. 
L. Laax. 
JASIKOF. Voyez IIOF. 
JASIIN. Le nomde jmin a  donné  une foe 
de plant appaenant  des familles différentes, et dont 
1 racoEr distincfifs ne resublent aucuneoEent aux 
i,lant de la [ami des j as m i n ée s, qui ulcs doivent 
porr le nom de jasmin. 
Le jasmin, arbrisau  rameux droit, disposés en 
buin ou grimpant sur les corps qui les avoinent, porte 
ordinairement des feuilles alternes ou opposées, simples ou 
compos, et d fleurs qui, placoes de mauièr différentes, 
»ita l'extremité des rameaux, suit dans l'aislle des feuilles, 
,rot une eu suave e un aspect agréable. Voici I ca- 
t,:ctres distinctils d prcal ari¢tes : le calice 
persistant, à cinq dent; la corolle t monopéle,  limbe 
pt partage en cinq divisions; elle porte deux ètamines ren- 
ermees dans le tube de la corolle, et un ovaire sopérieur 
arrondi, surmout d'un style simple et {ermin par un stigmate 
hifide; le ri-uit est une baie  deux loges monospermes. Il 
y a environ nue trentaine d'espèces de jasmin, dont la 
plupart exigent la oeroe chaude ou l'orangerie : oe sont les 
xarietés dont l'odeur est la plus suave. 
Parmi les espèc principales, on rmarque le jmin 
blanc commun (jasminum officinale, L.) : c'est le p 
rpan«lu de tous; il [ait l'ornement de nos jardins, poe la 
bcaut de sa lieur, et par le parfum qu'elle exhale; s jeu- 
nes rameaux s'Cèvent en rpentant autour de la vige 
ou de I'raner, et ses feuilles, toujours vertes, 
vouloir les abriter des rigueurs de l'hiver. Ce jasmin, 
. se multiplie que par marcottes et par boutures, t, 
clôt-on, originaire de i cfte de Ialabar, d'où « I'a importe 
en Europe, oi il s'est acclimate. Il rieur tre-bien eu [eine 
ten, mais il faut avoir le soin de l'exposer au midi, pres 
d'une muraille ou d'un treillage. 
Le jmmb des A çor Oasminum a=ricum, L.), qui se re- 
produit comme leprecédent, a des rameux qui peuvent s'C 
lever à la hauteur de six k sept mètres ; s fleurs commen- 
cent à paraitre en automne, et sont très-petites On remarque 
encore le jmmin jaune, originaire des contrées méridio- 
hales de la France, dont les fleurs inodores ont une couleur 
jaune qui a servi  distinguer la plante; le jasmin d'Italie 
(jasmin um bu toile, L. ), qui se rapprhe beaucoup du pré- 
cédent par sa lieur inodore  mais blanche; le 
ç ttlle (jasmin um odorattssimum, L. ), ainsi nommé de son 
odeur, suave et fort areable : c't le plus orant de tous 
les jasmins; il est originaire de l'lnde, toujours vert, 
fleurit au milieu de l'etc. Cette rafiotWne ut  conserver 
qu'en serre chaude. Enfin, une des espèc I plus impor- 
tante, t le jmin à 9randes fleurs ou jasmin d'Espa- 
9ne (jmDum 9randiflor«m L.), assez semblable au 
imin commun, dont il dif[ère cependant par s fleurs, 
rougtr en dehors et blanch en dans. Son eur t 
des plus suaves : aussi sert-il à préparer l'huile dite de 
rein ; il est très-abondant en Amérique; on le cultive éale- 
ent en Italie et dans la Provence, où l'on en extrait le 
principe aromatique, qui forme la baoe d'une bulle qui 
rt prcilement ds la parfumerie. On a essayé de 

JASEUR -- JASMINÉES 
l'employer en trictions dans quelques cas de ma[adie ; mais 
en y a presque entièrement renoueC s prep.,'iétés étant 
au moins douteuses. C. F_vneT. 
JASMIN (JAcQuEs), coiffeur-poëte provençal, naquit en 
1797, dans les conditons les plus humhles de la société. 
Son père Cait nn pauvre tailleur. Privé d'appui et de for- 
tune, Jasmin est l'enfant de la nature, et ne doit rien, ou 
presque rien, h ]'éducation. Admis dans son enfance à figurer 
parmi les élèves d'un séminaire, il en fut éloigné bient0t, 
ainsi q«'il nous l'apprend, par les espiègleries de son ge !... 
Il n'échappa donc aux premières épreuves de la misère qu'en 
cherchant dans les occupations de la classe ouvrière le 
moyen de se suffire et d'asurer son sort à venir. Il se fit 
apprenti coiffeur, et c'est en dérobant au sommeil quelques 
heures, toujours trop courtes, que l'enfant dn peuple na- 
quit par degrés " la vie intellectuelle. A:ors, dit-il lui-mme, 
ses peines parurent se calmer. Jasmin cédait au besoin d'ap- 
prendre aec entralnement. Florian parait l'avoir particu- 
lièrement impressionné. 
C'est le chant doux et snave Me cal nouri qui for- 
me à proprcment parler le début quelque peu saillant de Jas- 
min. Cette gracieuse composition remonte h 185. L'œuvre 
qui marque comme le point de départ de  céléhrité dans I'A- 
gennais, Le Charivari, est d'une facture supërieure, et cette 
composition dénote une entente des principes de l'art qui jus- 
tifie le bon accueil fait à ces débuts du poëte. A partir de cette 
époque le trouvère méridional grandit sans doute; il se ré- 
vle plus magnifique, plns complet à mesure qu'apparais- 
sent les Papillottes (contenant Mes Souvenirs), L'Aretgle , 
Françonnette, l'Ode à la Charitd» Marthe, Les Deux 
Jumeaux; mais le poëte, l'homme sup.rieurement doué, 
était visiblement en germe dans cette réminiscenee du Lu- 
trin qui nous montre l'Hgmen et le Célibat entrant si 
comiquement en lutte d'inlluence et de primauté. Il faut 
lire Jasmin dans sa langue, dans ce patois provençal qui 
s'en va, si l'on veut saisir une foule de nuances de style, de 
sentiment et d'harmonie que notre lrançais aligné, si sobre 
d'eflipses, trop dépourvu par cela mème de vie et de con- 
|:;ur, ne parviendra jamais A rendre. Il faut surtout se dé- 
fier .es trad«cteurs, car ils ne réussissent pas toujours à 
dont.er, nou. ne dirons pas le sens exact du poête, maisle 
sens rai de i'écrivain. 
La vente de ses publications fit enfin jouir Jasmin d'une 
honnête aisance; elle ne lui fit pas cependant abandonner 
sa modeste profession, qui lui est d'autant plus chère, qu'en 
homme d'esprit, ii comprend que le contraste de son talent 
et de son métier contribue à donner du piquant  ses vers : 
« Je suis toujours sot, dit-il, de faire la barbe fi mes con- 
frères les poetes, d'une manière ou de l'autre. » Appelé 
à Bordeaux, à Tuulouse, il y a lu ses poésies dans de gran- 
des assemblces ; il y a été couronné, il a triomphé comme 
les chantre de la Grèce. C'est parmi les populations si 
impressionables du midi un barde populaire et national, un 
artiste ingenieux d« la langueet de la versification, un dis-me 
successeur de Goudouli et deDespourrins. Appelé 
plus tard A Paris par nos critiques et nos Mécenes, invité 
dans nos plus brillants salons, il est reparti comblé d'hon- 
neurs aprës avoir assisté A un grand banquet que lui avaient 
offert tous les coiffeurs de Paris, après avoir dlné avec 
le roi Louis-Philippe A Neuilly, pour aller reprendre à Agen 
son rasoir, sou peigne et ses ciseaux, et recevnir bientôt 
de son hOte la décoration de la Légion d'Honneur. 
JASMIN DE VIPGINIE. I'ove-- 
JASMINÉES famille d plantes dicotylédones, roc- 
hopCaies,  corolle insérée sous l'ovaire, qui et simple, 
quelquefois ícbancré au sommet, à deux loges, renfermant 
chacune deux ovules supendus ; le style est simple, ter- 
minê par un stigmate le plus souvent bifide; le fruit est 
tantôt une capsule analogue à celle des acantbées, tantot 
une baie ou un drupe à une on deux loges, renfermant une 
h quatre graines ; l'embryon est droit, plan, presque tou- 
jours entouré par un périsperme charnu ; la radicule est 



JASMINÉES 
ordinairement supérieure. Le calice et la corolle sont tubu- 
Iés; leur limbe est divisé en Iobes égau x, au centre desquels 
se trouvent deux étamines insérëes au tube de la corolle. 
Les fleurs dans les plantes de cette famille sont disposCs eu 
corymbe ou eu pauicule, et ordinairement opposées, ainsi 
que les feuilles. Les particularités qu'offre cette famille 
sont de présenter des plantes quelquefois sans corolle; 
d'autres Ioi, au contraire, on y voit des fleurs à corolle pres- 
que pelypétale, comme dans quelques fiêues. On rencontre 
aussi trois étamines au lieu de deux, mais cela arrive ra- 
rement. Les plantes de cette thmille sont ligneuses, arbres 
ou arbrisseaux ; les tiges sont souvent sarmenteuses et grim. 
pantes. Robert rlrnwn en a fait deux faut files, nommées olei- 
nees et jasmines; Ventenat appelle lilacdes les oleinées 
de Robert Brnwn ; mais la différence sur laquelle se fondent 
ces deux botantstes pour en faire deux familles distinctes 
n'est pas assez grande pour admettre cette séparation : il 
vaut mieux eu former deux tribus que deux familles. Dans 
les jasminees se trouvent les genres syringa, frazinas, 
olea , jasminum. C. FAVnOT. 
JASMUXD, partie septentrionale de l'ile de R ugen. 
JASON un des plus fameux personnages des temps 
hérolques, ëtait fils d'Es o u, roi d'lolchos eu Thessalie, et 
d'Alcimède. Elevé par le centaure Gbirou, il assista fort 
jeune encore à la fameuse chasse du sanglier de ça i y d o n. 
Son père Èsou ayant abdiqué avant que Jason e0t atteint 
l'lge viril, Pélias, oncle de Jason, se saisit du pouvoir 
comme tuteur de sou neveu. Voici, d'après la tradition com- 
mune, dans quelles circonstances eut lieu i'expedition de 
Jason à la Colchide : Pi.lins lit un jour inviter tous ses pa- 
rents, et dans le nombre par conséquent Jason, à un grand 
sacrifice qu'il voulait célebrer en Fhouueur de Neptuue. En 
se rendant à Iolchos, Jason arriva au bord d'un fleuve ap- 
pele Eénus ou Énipéus, ou encore Amidanrns, et y trouva 
Juuon, déguisée en vieille femme, qui le pria de la trans- 
porter sur l'autre rive. Jasou conseutit à lui rendre ce bon 
office, mais perdit à cette occasion une de ses saudales, restëe 
engagée dans la vase. Jasou arriva ainsi un pied chaussé 
et l'autre nu  la oeuf de son oncle, qui à cette vue entra 
dans une grande colère, parce que l'oracle lui avait prëdit que 
celui-là lui enièverait le tr6ne et la vie qui arriverait dé- 
cfiaussé à son sacrifice. Dissimulant cependant de son 
mieux, Pélias demanda à Jason ce qu'il ferait d'un individu 
que l'oracle lui aurait désigné comme devant ëtre son meur- 
trier. A quoi, soufflé par Junon, Jason repondit quïl l'en- 
verrait en Colchide pour rapporter la toison d'or. Pelias 
donna donc aussit6t cette mission à Jason. 
Suivant une autre version, Péfias avait détr6né son frère 
Éson et l'avait tuC Parvenu à I'ge viril, Jason consuita 
racle sur la manière dont il devait s'y prendre pour rentrer 
en possession de son héritage légitime; et l'oracle lui or- 
donna alors de se rendre  Iolcbos, à la cour de Pélias, dé- 
guisé en Magnésien, avec une peau de Iéopard sur les épaules 
et armé de deux lances. C'est ce que fit aussi Jason ; mais 
il n'arriva citez Pélias qu'avec une seule de ses sandales, 
ayant perdu l'autre de la manière que nous avons dit plus 
haut. Pèlias, qui ne le connaissait pas, lui ayant demandé 
qui il était, Jason lui répondit hardiment qu'il était le fils 
d'Êson, se fit ensuite conduire ì la demeure de son père, et 
y célébra cinq jours durant, avec ses parents Pfiérès, ffélée, 
Admète, Amythron, Acaste et Melampe, le jour heureux qui 
leur permettait enfin de le revoir. Il s'en alla ensuite trouver 
Pélias, et le somma d'avoir h hd rendre son tr6ne. Pélias ré- 
pondit qu'il ne demandait pas mieux, mais qu'il fallait que 
Jason commençAt par rapporter en Thessafie la toison d'or. 
Dans l'expëdition qu'il entreprit à cet effet (voye.'. Aao- 
scves), Jason eut à Lemnos deux fils d'Hypsipyle. Secondé 
par M é d é e, il atleignit heureusement le but de son voyage; 
puis, après l'avoir éponsée et avoir erré pendant ionemps 
dans diverses contrées, il revint aux lieux qui l'avaient vu 
naltre. Jason vengea alors la mort de son père et celle de 
on frère en tuant Pélias. Toutefois, il lui lut impossible de 

-- JASSY 57t 
récuprer le tr6ue d'Iolchos. Il lui fallut l'abandonner a 
Acaste, fils de Pdias, et se réfugier à Corintfie avec s,,n 
épouse. Ils y vécurent tous deux pendant dix ans dan« in 
plus complète felicité, jusqu'à ce que Jason, fatigué deMc- 
dée, s'éprit de Glauc, et, suivant d'autres, de Créuse 
fille de Créon, roi de Corintfie, qu'il epousa après avoir chassé 
loin de lui Médée et les enfants qu'il avait eus d'elle. Mais 
Medée se vengea cruellement de sa rivale ; et quand Jason 
voulut tirer vengeance de ses forfaits, elle s'enfuit sur un 
char tralne par des dragons, et se rélugia à Mhènes, aupr6 
du roi Egée, après avoir tué les enfants qu'elle avait eus de 
Jason, Merméros et Pheritos. Aprës quoi Jason se tuade 
désespoir. Suivant d'autres, il mena dès lors une vie tonjeur 
errante; et un jour que, accablé de fatigue, il s'était endornd 
sur le bord de la mer, à l'ombre du mme navire qui l'avai 
autrefois conduit en Colchide, il perit écrasé par la chut,. 
d'une poutre. D'autres rapportent encore qu'il se réconcili., 
plus tard avec Medée, qu'il s'en retourna avec elle en 
Coicbide, et qu'à la mort de son beau-père il lui succeda 
sur le trne. 
JASPE. Le jaspe est une substance siliceuse, d'un- 
infusibifité et d'une opacité parfaites. Sa texture est cure- 
pacte, sa cassure concbolde; il fait feu sous le choc du 
briquet, et ne se trouve jamais cristallisé dans la nature. 
Le jaspe appartient à la nombreuse famille des q u a r tz, 
et peut se diviser en quatre sections principales : t ° le 
jaspe l»'oprernent dt ; 2 ° le jaspe 9yptien ; 3 ° le jaspe 
porcelaine ; 4 ° le jaspe schisteux. Dans ces qaatre section s 
se trouvent une multitude infinie de varierC, ayant toutc 
des nuances diffèrentes, qui se rapprochnt plus ou moins 
du vert et dit rouge, qui sont lesdeux couleurs propres au 
jaspe. De toutes les substances reinCaies, c'est une de celle 
qui pr,.sentent le plus de variations dans leur couleur ; tantot 
ou le dirait eutourë par un ruban versicolore, taut6t il est fa- 
ché de sang; quelquefois il parait formé de cercles conceu- 
triques qui lui donnent l'aspect de l'agate, avec laquelle 
est souvent mélan,.-e. Les varietés de jaspe les plus belles 
et les plus rares sont : lejnsperouge, dit oriental, et lejaspe 
noir, qui se trouve en Sicile. Les Iocafites où l'on trous« 
cette substance sont : t'Orient, i'lnde, la Sicile, le Tyrol et 
PMiemagne; mais les jaspes de l'Grient sont les plus esti- 
més. Quant aux gisements de cette roche siliceuse, c'est au 
milieu des terrains d'alluvion, parmi les silex, tantèt en 
fragmeuts isolés, quelquefois eu couches plus ou moin 
épaisses, et formant de petites collines. On l'a rencontrée 
egalemeut, eu petites masses, dans les reAmes roches qui 
servent de gaugue aux agates, dans le Palatinat, en Ecos- 
se, etc. Ele existe abondamment dans les terrains primitifs, 
et les miuéralogistes pensent qu'elle a été formée par unî 
infiltration de silice, à travers des couches d'arle ferru- 
gineuse. Le jaspe est formé de silice en grande quantit-L 
90 pour 100 environ, d'un peu d'alumine, de chaux et 
ïer; if est susceptible de poli, mais il e loin d'égaler l'a- 
gate, dont il se rapprocfie un peu. Le jaspe porcelaine, dont 
nous avons parlé plus haut, ne devrait pas ëtre considere 
comme un jaspe, puisque ce n'est autre chose qu'nne agglo- 
mération de scl,istes argileux, calcinés à la Ioue par 
l'embrasement et la combustion lente de certaines I,ouillères, 
et qui out acquis assez de dureté pour gtre travaillès comme 
le jaspe, et devenir, sous la main du lapidaire, socles, vases, 
coffrets, etc. C. Fvno-t. 
JASSY ou JASCH, capitale de la Moldavie, b6tie .. 
le versant du Kopo, montagne dénudée, qui s'abaisse en 
pente douce jnsqu'aux rives d'une rivière marécageuse ap- 
pelée Bachloui, dans une contrée désolée, bien que vue de 
loin elle semble assez pittoresquement situee. Elle est la re- 
sidence de l'hospodar et le siége du métropolitain grec, 
ainsi que des princ.:pale s autorités de la province. Ville ou- 
verte et fort étendue, mais mal construite, elle renlerme 
environ 70,000 habitants, dont plus de 0,000 Juif, 3,00 Bofiémiens, et aussi beaucoup de Grecs, d'Arméniens et d'Al- 
lemands. La populatlon fait nn commerce assez important, 
7"2. 



£72 
et qui ne pourra que preudre de» developpement encore 
• llus consi]érables par la créatoa ci'un port -ur le P ru lb. 
.qui n'en est qu'à quelques heures de di»u¢, par I'la- 
lissement d'une voie de communication avec G al ac z et 
par suite avec la merffoire. Un légraphe électrique la relie 
ujourd'hni h Czernowi{z. L'archilectnre de Jassy est irré- 
dièoe et tooteoricutale. A milieu hm chaos de misrables 
bulles et de maisons de bois accumulée dans des rues tor- 
ueuses, troiles, non pavées la plupart du mps, et rem- 
lie» d'immondices, quelqu palais de boyard se font re- 
mquec par le luxe tout oriental de leurs construction. 
• Sur plus de 70 glises grecques et de 19 oeuvenls que rcn- 
fermeJay, on remarque surlout la ca{hédrale, dont la cons- 
truc{ion est encore {oute rnle, l'ancienne église des Trois- 
"Snts et l'éli«e ducouveutde Saint-Spiridion, dont dépend 
ussi un vaste h0pilal, où l'on çoi{ le malades de roules 
alins et de ou{es religions. U faut encore menlionner le 
ouvean palais des ]lspodars et la Cour des Princes, 
leur ancienne résidenoe, oenumée par un rand inoendie 
n 1783, mais reconslruite posterieuremenl, et qui depuis 
8 contient tous les ministèoes, les tribunaux, l'admi- 
islralion lotie, ainsi que l'asmbl6e des états. 
3a«s a té la ictime de vast incendies en t87 et eu 
Sii. Suivanl une inscription, elle aurait ëlé fondée au temps 
de la donalion romaine, sous le nom de Jassiorum muni- 
cipium ; mais elle esl s raisemblablement d'origine plus rb- 
cente. Elle n'obtinl le tiloe de ville qu'au quatorziëme siècle, 
«tson nom lui vient des Jasses ou ! a z }' g e s, Turcs immigrés 
au onziëme sigle avec les Koumans. On n'y lrouve point 
de monumenls anciens; et oe fid Alexandre Lapouscban 
i, en lbg, fit de cette lle la résideuce des princes de 
Moldavie, lesquels avaient jusque alors habilé Suczawa. Le 
uvent ou la citadelle de Tzilaznie, situ,  en face de la  ille, 
sur une bautetr, égit aulrefois une place fole. L'histoire 
iliire ne fait pas mention de siéges dont cetle  ille ait 
OE I'«»bjel ; elle apporle seulement qu'elle fut rédui en 
cendres en 1538 par le suln Sofiman, ci en 1686 par Jean 
Sobiesi, et qu'une balaille de trois jours se livra en 1659 
cor les ives du Baddoui; baille dans laquelle les Tarares, 
1 Kosacks et les Polonais défirent les Valaques et les 
Szeklers. Jassy fui en oulre occupée d évacuée à diverses 
reprises par les Russes, et au dix-lmitième siëcle par les 
Aulricbiens. Le  janvier 1792 la paix y fut signee entre la 
usfieet la Pode Oltomanc. Pendaut la guerre  laqudle 
it fin, en 1812, la paix de Bcbarest, Jassy demeura long- 
temps occupee par les Russes, qui l'occupèrent de nouveau 
fl 1828, lors de la guerre qui 6clalaalors entre les deux puis- 
«onces; et ils ne l'évacuèrent qu'en 1$3. Jassy uflit 
ucoup de l'insurrtion grecque qui ) éclala en 1821, 
us les ordres dYpsilanti, et par suile de laquelle les ja- 
issaires n'en firent plus qu'un monceau de ruines,le 10 
avril t822. En 1853 les Russes occupèrent ass. quïis quit- 
tèrent l'annee suivante. Depui% celle ville a reçu une gar- 
nison autrichienne, en attendant la solution de la question 
.d'Orienl. 
JAUBET (PaE-Av[e-EICs-PonE, chevalie0, 
é ch seplembre 1779, à Aix en Provenoe, oh n père Cait 
avooet au parlent, p[esseur de persan au Collége de 
rance et de iurc  l'Eoele spéciale des Langues oentales 
ivante% mort  Pari% eu ]ourler 18, a laissé un nom 
comme savant et comme professeur. Devenu rapidement 
l'un des lèves dist[nuës de S y [ v es t re d e S a c y, il avait 
té dign, en ç98, pour une des places de jeune de 
langues A Cous{antinolde, et altendait h Toulon n ordre 
e depar{, lorsqu'il fut adjoint, g de dis-huit ans seule- 
ent, h l'expédition d'Eyp{e, comme un des quatre iuter- 
rètes a{taclws  l'armée avec Venture, interprète en chef. 
$ cnaradcs atout sui'i les énéraux divisionnaires, et 
l'inlerprè{e en chef ehnt venu à tomr malade, aul»ert se 
ouva ainsi seul auprès de Bonaparte pendant la mpae 
e 1799. Le eune savant devint son premier ecrélaire- 
nlerèlc, et, en oet qualité, traduisit ses célèbres pro- 

JASSY -- 3AUCOUIT 
clamations, toute la correspondauce avec les chefs du papys, 
tous les discours, tontes les réponses du gnéra| eu chef, 
il r.digea les trail " conclus par la république avec les peu- 
ples du Liban, le» capilulations des places conquis%, et se 
trouva, pendant la durée du séjour de Bonaparle en Egypte, 
de service permanent aupt'ès de sa personne. La douceur 
et l'aménité du caractère de Jaubert ne l'avaient pas rendu 
moins agréable  Bonaparte que ses connaissances ne le lui 
avaient rendu utile, et il fut du petit nombre de ceux qui re- 
vi=,rent en France avec lui. 
'ommé successivement, en 1800 et 1801, secrètaire-in- 
terprèle «lu gouvernement et professeur de turc, il repartit 
en 1802 pour l'Orient avec le colonel Sèbastiani. En 
ts0, pendant l'ambassade du général Brune, il fut envoyë 
à Constantinople pour la néociation relative  la reconnnis. 
sance de apoléon comme empereur par la Porte Ottomane. 
Bevenu après un plein succès, il reçut, au commencement 
de l'année suivante, une mission en Perse, afin d'y négocier 
un trailé avec le chah. Ce fut dan le trajet de Constan- 
tinople  Tehéran qu'arr:té près de Ba.azid par le pacha 
de cette ville, depouillé des riches présents qu'il portait 
au cbah, il fut jeté au fond d'une citerne desséchée, où il 
resta prisonnier plus de quatre mois avec un fid/:le ser- 
• itenr ; et il n'échappa h la mort que par celle du pacha et 
de son fils, qui avaient donné l'ordre formel de le faire pé- 
rir. Il lut alors délivrè, les prseuLs lui lutent rendus, et il 
put parvenir, après mille dangers, d'abord auprès d'Abb.s- 
l',hrza, héritier prémptif du Ir6ne de Perse, ensuite an- 
près de Felh-Ali-Chah, par qui il fid reçu avec la plus 
grande distinction et qui l'bonot;a de plusieurs entretiens 
sans interprète. S'étant ensuite rendu, en t07, après force 
vicissitudes,  Varsovie, oh était alors apolëon, il sewit 
d'inlerprète  l'ambassadeur persan qui fut reçu par lem- 
pereur en audience solennelle. Au mois d'avril 1815, Jau- 
bert fui reuvoyé à Constantinople comme chargé d'affair 
de France ; mais le second retour des Bourbous l'obliea hen- 
rot de revenir à Paris, oi il resta sans emploijusqu'en 1818. 
Alors, s'étant associé avec Ternan x et ayant conclu 
ensemble un traite aec le gouvernement français, il fit en 
Orient un nouveau vo)age dont le but Cait de rechercher 
la race des chèvres tbibétaines  duvet de cachemire. Sur 
près de treize cents chèvres qu'il acheta, il put en ramener 
en France environ quatre seuls. Depuis, il se liera aux 
travaux de l'enseignement du tut, du persan et d l'arabe. 
Après avoir poblié en 121 son Voilage en AfinCie et en 
Perse pendant les années 1805 et 1806, il donna succes- 
si ement sa Grammaire turque, son Voytage d'Orembour9 
 louhara, et une suite de Notices sur d'importants ou- 
vrages orientaux ; enfin, il enrichit la science de sa traduction 
Si estimée de la Gographie d'Edri'-l. Jaubert excellait 
dans la lecture des caractères compliqués d'ortements et 
de ligatures eu usage dans l'écriture des chancelleries d'O- 
rieut, el rien n'égalait son obligeance à fournir la transcription 
et la traduction des diplomes et autres pièces ainsi écrites. 
Les iatigues sans nombre et les secousses violentes qu'il avait 
supporlées, en ébranlant sa forte constilution, l'avaient usé 
avaut le temps, et lui donuaient ['apparence d'un homme 
beaucoup plus gé qu'il ne l'Cit réellement. Sa fille a épousé 
IM. D u fa u re. Le gouvernement de Louis-Philippe l'avail 
appelé en 18t| aux honneurs de la pairie et lui avait con- 
ferWle-titre de conseiller d'État. Le chafi de Perse lui avait 
accordé la décoraliou du Soleil. En 1830 l'Académie des lns- 
criplions et Belles-Lettres l'avait èlu  la place de Barbië du 
Bocage. 
JAUCOUT (Famille de). Cette faucille, aprës aoi 
joué un r61e assez important dans l'bisloire particulière du 
duché de Bourgogne, dont elle est originaire, s'était partagëe 
en huit branches, qui toutes servirent leur pays avec distinc- 
tion. De nos jours, deux hommes de ce nom ont surtout m- 
rité d'tre remarques entre ceux qui avaient le droit de 1 
porter. 
JAUCOUBT ( Lous, chevalier ne), naquit à Paris» le 27 



JAUCOUBT -- JAUGEAGE 
septembre 1704, mourut en 1779. Ce qui fera vivre long- 
temps sa mémoire, c'est la part achve qu'it prit à la rédaction 
de la grande E n c }' e I o p é d in de l)'Alem berl et de D iderot, 
dont il a fait un grand nombre d'articles. Le jeune de Jau- 
court, élevé à Genève, perfectionna, par des voyages d'ins- 
truction en Allemagne, en Hollande et en Aneterre, les 
études solides et substantielles qu'il avait faites au che{-lieu 
du prctestantisme, religion professée par la branche de sa 
famille à laquelle il appartenait. La connaissance intime qu'il 
avait acquise des langues et des littératures des principales 
nations de l'Erope lui lut d'un grand secours dans les vastes 
travau de linguistique et d'analyse qu'il entreprit en dehors 
de sa collaboration assidw'.  l'Enctclopëdie de ses illustres 
amis. Sans doute, dans l'érudition ql'il y déploie il y a sou- 
vent plus que de la mémoire; mais si les critiques du dix- 
huitième siècle le lui reprochèrent avec aigreur, il ne laut 
pas oublier que cétait bien moins le laborieux et savant 
compilateur qu'on attaquait en lui, que l'un des plus ardents 
propagateurs de l'idée de progrës et de liberté dont la grande 
encyclopédie était au siècle dernier h la fois l'expression et 
l'instrument. V,.rs la lin de sa vie, il se retira à Compiègne, 
o0 il expira sul»itemenl, le 3 février 1779. 
JAUCOU/T (.nxAl.-FnAço»s, marqllis ), neveu du 
prieCent, naquit à Pari.% le 1  novembre 1757. Volontaire 
a seize an», sous le prince de Condé, colonel, en 1789, du 
régiment de Condé-dragons, député en 1797 a l'Assemblée 
législative par le département de Seine-et-Marne, il )' siégea 
au c6té droit, et s'y lit remarquer par la lermete et la cons- 
tance de sou opposilion aux doctrines de la démagoe. Em- 
prisonné a la suite de la journée du 10 aofit, il eut le bon- 
lieur d'Cre rendu  la liberté, par l'intervention de Manuel, 
agissant a l'incitation de M' de Stael, la veille mme des 
massacres de septeml)re. Il put alors s'éloigner du sol natal 
eu compagnie de Talleyrand, comme attaché  la mL-sion 
Irançaise a Londres. Après la mort de Louts XVI, il reçut 
du gouvernement anglais, comme tous les autres membres 
de la légation, ses passeports, et rentra en France, mais 
pour s'en éloigner bient(t de nouveau et aller se fixer en 
Suisse, sur les bords du lac de Bienne. Après le 18 bru- 
ma/re, il rentra dans sa patrie, recommandé par son ami 
ïalleyrand au premier consul, qui le lit nommer membre 
du Tribunat : aussi lui voua-t-il, en Change, un zèle ardent 
et sans bornes, qui ne se démentit qu'en 1814, ou peut-ëtre 
mme en 1813, c'est-à-dlre lorsque la fortune parut se dé- 
clarer ouvertement eontrei'homme du destin, qui pourtant 
l'avait fait sénateur, mais qui avait eu le tort iitpardonnable 
de lui refuser a sénatorerie de Florence, à laquelle était 
jointe une dotation de 30,000 francs de rente. Le marquis 
prit alors une part active a toutes les intrigues dont l'h6- 
tel Talleyrand devint le centre; la récompense de ce nou- 
•-eau déVOlment ne se lit pas attendre : en avril 814 il 
ëlait nomme membre du gouvernement provisoire établi à 
Paris h la suite de l'entrée des ailiés. On sait le r61e jouë 
pal" ce gouvernement provisoire ; on comprend dès lors la- 
cilement que Jaucourt ait été nommé membre de la chambre 
des pairs créée par la charte de Louis XVIII. Pendant que 
Talleyrand allait repréoenter la France au congrès de Vienne, 
Jaucourt exerça l'intërim du ministère des affaires etran- 
gères; puis il hdcompris, pendant les Cent Jours, au nombre 
des cinq individus que Tapoléon mit bots la loi. Heureu- 
sement qu'd n'avait pas attendu la rentrée de l'empereur 
 Paris pour sëloigner de France : il avait aceompagné 
Louis XVIll à Gand. A la seconde restauration, il obtint 
e ministère «le la marine, qu'il ne garda pas Ionglemps, 
parce que le refus du cabinet dont il faisait partie de con- 
sentir a la cession de Landau anlena la formation du mi- 
niti're Iichelieu. Depuis lors membre du conseil privé, il 
ohserva il ;a cilamhre des pairs la mme tact/que que Talley- 
rand, et salua comme lui la rëvolulion de J uillet de ses accla- 
mall,u. La rëvulution de Février le condamna à la retraite. 
Il ..' relira dans son domaine de Presles, près de Tournans 
I Seine-et Marne)» oi il mourut, le 5 février 1852» non sans 

avoir salué de son vote, quelques semaines auparavant, le 
nouveau gvernement qui venait de s'introniser en France. 
JAUGEAGE (de jaculun, javelot, barreau pointu), 
opération par laqudle on s'assure de la quantité de liquide 
qu e contient un vase, tel qu'un t o n n e a u, :.sans le dépoter. 
La géométrie enseigne des moyens fort simples pour éa- 
luer la capacié d'un tonneau; mais les c.dculs que cett 
opération exige sont on peu lons, car d'abord il faut trouver 
le diamètre mo}'eu de la pièce, ce qui ne prêsenterait au- 
cune difliculté si les tonneaux étaient des cylindres régu- 
liers : on sait qu'ils sont plus gros vers le milieu qu'aux 
extrémités. Pour trouver leur diamëb'e moyen, la méthode 
la plus ordinaire consiste à prendre le diamëtre de l'un des 
Ibnds compris entre àeux douves opposées : on mesure en- 
suite le diamètre intérieur du bouçe ou du milieu de la 
pièce; après quoi on ajoute lç deux résultats, et la moitié 
de la somme exprime la longueur du diamètre moyen. D'au- 
tres conseillent de prendre, au moyen d'un cordon, la cir- 
conférence du tonnea, mesurçe sur la zone qui est à égale 
distance de la bonde et de l'intérieur de l'un des tbnds. Le 
diamètre de cette :ir«'onference est a peu près #.gai au dia- 
m,'.tre moyen. Le cordon dont on fait usage dans cette opé- 
ration est un ruban presque inextensible, divis en parties 
égaies, telles que des millimètres. Lorsqu'on connait la 
hauteur dl tonneau, ce qui est toujours facile, on calcule 
la surface du cercle, dont la circonfdrence est celle du dia- 
mètre moyen et l'on multiplie le résultat par la hauteur. 
On abrége de beaucoup toutes ces opérations au moyen 
d'instruments appelés jauges; il y en a de cieux sortes, la 
jauge brLse et la jauge à crochet. La prendere de ces 
jauges est ainsi appelée parce qu'elle se compose de plusieurs 
moïceaux de fer carres qui s'ajustent les uns au bout des 
autres, et qui se démontent fi volontê, alin que l'instrument 
soit plus facile à transporter_ Toutes les pièces étant a.sem- 
biCs forment une canne d'environ 12 decimetres de long. 
Voici les divisions qu'on a pratiquées sur la totalité de sa 
longueur. Sur l'une des faces on a tracé les divisions du 
mètre ; la face opposée porte une échelle dont les divisions 
vont graduellement en décroissant depuis le n ° 2 jusqu'au 
n ° 100, qui se trouve au-dessous d'un bouton qui sert de 
pomme à la canne. Cette Céelle est construite sur les di- 
mensions que la loi a déterminées pour les [utaille_ cons- 
truites suivant le système reAtrique, et combinée de telle 
sorte q»e la longueur de la pince, le diamëtre de son bouge 
et celui de l'un de ses fonds soient touiours entre eux comme 
Içs nombres 21, 18, 16. 
• La jauge à crochet est, comme la prêcèdente, Iormée 
d'une verge de fer carrée. Elle porte trois échelles : sur l'une 
de ses faces sont gravées les divisions du mètre, sur une 
autre l'échelle des diaètres, sur une trosiè»e face I'- 
chelle des bautem's. L'échelle des diametres est contruile 
sur le principe du carré de I'h y p o tn u se. Les cylindr 
de mme hauleur étant entre ex comme les carré. des dia- 
mètres de leurs bases, il est évident qu'un ,=ylindre qui 
aurait l'hypoténuse pour diamëtre serait équivalent en 
vohme àdeux autres cylindres, dont lesdiam,-tres seraient 
les c6tës qui comprennent l'angle droit. Pour 6)rmer l'é- 
chelle des diamètres, on a calculë une série de c. lindres de 
mème hauteur, dont les bases croissent en surlacecomme 
lesnolobres 1, ?, 3, ,.... t0. Le phls petit de ces c)lindres, 
que l'on a pris pour unité, et dont le diamìtre, Cai à la 
hauteur, est de 0n',185312, ainsi que la loi I'a fixe, dqmvaut 
en volume à cinq decimètres cubes ; et s'il état creux,  
capacité serait de cinq litres. Pour calcule le second cylindl'e, 
dont le volume soit le double du prícédent, on a supposé 
un triangle rectangle isocèle, dont les ctés ont 0 ", 18531  : 
il est évident que le volume du cylindre, constrait sur 
l'hypoténuse de ce triangle., est le double de celui ,hmt le 
diamètre est de 0n,185312. On a trouvé le cylindre n ' : 
en calculant l'bypoténuse d'un triangle rectangle, dont les 
c6tés, qui comprennent Iàugle droit, sont égaux aux lia. 
mètres n ° 1 ci n ° 2 ; car le cylindre qui a cette bypotenuse 



574 
pour diamèlre équivaut à la somme des deux précédents. On 
a trouvé lu cylindre n ° 4 en calculant i'hypoténuse d'un 
triangle dont l'angle droit est compris entra des c.tés égaux 
aux diamètres des c.lindres n ° t ct n ° 3, et ainsi de suite; 
tous ces cylindres ayant la même han{eur, leurs volumes, ou 
mieux, leurs capacites sont : n  1, b litres; n ° 2, 10 litres ; 
n°3, 15 litres; etc. On a formé i'échelle des iongueurs des 
futailles en multipliant la quantité 0m,185312, qui exprime 
les hauteurs des cy|iudres de i'échelle des diamétres. Les 
divisions de cette échelle sont subdivisées en dix parties 
egales, valant chacune 0=,0t$53t 1. Les divisions des trois 
échelles partent d'une même ligne transversale, tracíe vers 
l'extremite inférieure de la jauge. Pour s'viter la peine de 
porter avec soi une règle de fer, on fait uage de rubans qui 
se roulent dans de petites boites circulaire, et qui sont di- 
visés suisant le mme s.stìme que les jauges ordinaires. 
L'usage dela jauge à crochet est facile. En effet, dès 
qu'on a le diamètre moyen d'un tonneau, l'échelle des dia- 
mètres donne sa capacité relativement d sa longueur, que 
l'on mesure avec l'échelle des hauteurs. TEssnaE. 
On donne aussi le nom de jaugeage aux opérations à 
l'aide desquelles on évalue le produit constant ou variable 
«les cours d'eau (voile"- Ëcott..x t laqs). On a in- 
vent dans ce but de nombreux appareils qui laissent gé- 
néralement beaucoup à désirer pour la précision d résultat. 
Lejaugeage d'un navire a pour but de determiner exac- 
tement son t o n n a g e. 
J AUNE. I'oge'- 
JAUNE (Fièvre). Voile: FtË'r. 
JAUNE (Fleuve). l'oge-- HoG-UO. 
JAUNE (Mur). On appelle ainsi nn grand golfe de l'o- 
¢,an P a c i ri q u e, situé sur la cote orientale de la Chine, 
entre la pt'esqu'tle de Corée, la province chitxoise de Chan- 
t,mug, le Petchi-li, et la presquïle man,lchoue-chinoise de 
Liao-Toung, qd y fait unu milite trës-avaucée. Dans la 
pariie méridionale de ce golfe se trouve un groupe de dix- 
huit lies jusqu'à ce jour peu connues. La Chine possède 
quelques bons port sur la mer Jaune, notamment Ten- 
Tchëou ci Lay*Tchéou. C'est sur les bords de la mer Jaune 
que vient abmAir la grande muraille de la Chine, construite 
pour artCer les invasions tatares. 
JAUNISSE. Vove: ICT. 
JAUI{EGUI Y AGUILA.B (JuA »r.), poëte et pein- 
tre espagnol, naquit, en 1570, h Séville, et vivait vers 1697 
: iome, ot cette année-là il fit paraitre sa traduction de 
l'.imnfa du Tasse. Il est vraisemblable qu'il y ëtait venu 
se perfectionner dans l'art de la peinture, o/a il se fit bien- 
tut un nom. A son retour en Espagne, il fut nommé écuyer 
«le la reine Isabelle, première femme de Philippe IV; et 
contraint par la de résider désormais à la cour, il y passa le 
reste de sa vie, et monrut en 1641. Sa traduction de L'Arninta 
«lu Tasse  publiée avec ses Bimas, à Séville, en 16t8), est- 
re»tée un des modèles les plus parfaits dn genre, et l'em- 
porte de beancoup sur son imitation de la Pharsale de Lu- 
vain (Madrid, 1684); car, après avoir d'abord suivi le« 
iuodèles classiques italiens, il a dans ce dernier travail sa- 
rifié au gongorisme. On lui attribue, en outre, un 
poème ori#nai plus considérablu encore, intilnlé Orfeo 
(Madrid, 1624), bien qu'on le trouve presque toujours im- 
primé parmi les œUVres de don Augustin de Salazar y Torrês. 
Jauregui était plutét nn versificateur qu'un poêle. Tous ses 
ouvrages ont été réimprimés dans la Collection de Fer- 
naudez (tomes VI-ViII, Madrid, 1789 et 15f9). Comme 
peintre, i| appartient à Pécule florentine ; et ses portraits, 
parmi lesquels se trouvait celui de Cervantès, étaient, dit-on, 
particnlièrement estimés. 
JArA la plus belle des lies de la Sonde et l'une des 
plus riches contrées de laterre, situ par 103 ° 20' et lt2 ° 
30" de longitude orientale, et 5° 52' et W 46' de latitude 
méridionale, est séparée de Soumatra à l'ouest par le dé- 
troit de la Sonhe, et de Ball ou la Petite-Java à l'est par 
le détroit de Bali, et présenle une superficie de 1628 my- 

JACGEAGE -- JAVA 
riamëtres carrés, ou de 1"/15, en y comprenant les petites 
lies qui l'avoisinent. Le climat, rès-chaud dans les basses 
régions, plus lempéré dans cdles qui sont élevées, est sain, 
à l'exception de la vaste eontrée, généralement plate, qui 
s'Atend sur la cée septentrionale, o/a de nmnbreux marais 
exhalent de mortelles émanatious, et de la valiée de Goueva 
Oupo$ (vallée empoisonnée), non loin de Battur, o/ il ne 
peut exister ni vëgétaux ni animaux. En plateau étroit, 
composé de petites plaines, qui pour la féconditë du soi et 
la perfection de la cnlture rivalisent avec les railAes du nord, 
et se prolongeantdans toute la longueur de File, dans la di- 
rection de l'ouest à l'est, occupe la partie mridionale de 
Java, dont les cétes escarpées n'ont là rien qui les protège 
contre les fureurs de l'deCn Indien. Sur ce vaste plateau 
s'Cèvent une foule de voicans, dont la hauteur varie en- 
tre t,560 et 4,000 mètres, mais qui paraissent tous indépen- 
dants les uns des autres, et dont le plus grand nombre, fort 
anciens déj, sont couverts d'Coisses plantatious. Plus des 
quatre einquièmes de i'ile sont situés au-dessus d'un immense 
foyer souterrain, constamment en activitê et manifestant 
presque partont son action par les plus effroyables érup- 
tions voicaniques en tous gcnres. Aussi ne sont-ce que ru- 
cites pyro.x.,ygéniques qui apparaissent partout, notamment 
des tracbytes et des dolCites, et qui comtituent la plus 
grande partie du .,dt solide et de la montagne. Quelques-uns 
des volcans sont déjà éteints, mais ou en compte encore 
trente et un en activité. Certains d'entre eux n'exhalent que 
de la fumée, d'autres vomissent d'épaisses vapeurs sulfu- 
reuses. On en cite un dont le cratère rejette des torrents 
d'eau bouillante, e't plusieurs qui ont eu récemment de vio- 
lentes éruptions. Mais on n'en saurait pourtant comparer 
aucune à celle de 1772, qui, après avoir projeté pendant 
quelque temps une masse norme de flammes, s'afïaissa tout 
d coup, engloutissant avec elle dans i'ablme une surface de 
sol du 30 à 60 kilomètres avec les quarante villages ou 
hameaux et les 2,957 habitants qui s' trouvaient. La roche 
volcanique, dans sa dissolntion en humns, acquiert une 
fécondité des plus extraordinaires, et est la cause de l'in- 
comparable luxe de végétation qui distingue Java entre 
toutes les autres contrées de l'hémisph:re oriental. Cette tic 
est donc d'une fertilité extrême et riche en produits de tontes 
les zones; car, gr,ce à ses diveres régions climatëriques, 
les plantes des tropiques y réussissent aussi bien que celles 
de la zéne tempérée. 
3ara pogsède une population de près de tu millions d'ha- 
bitants. On  compte beaucoup d'émigrés chinois, dont le 
mélange avec des Javanaises a prodait la race métisse par- 
liculière désignée sous le nom de pernar; de Maures, 
de Boug#s, de Malais, d'Arabes et d-Européem, Hollandais 
pour la plupart, et on donne le nom de lipplapps aux 
enfants qu'ils ont avec des Javanaises. Les Javanais pro- 
prement dits, qui forment la grandemajorité de la popuLa- 
tion, sont de race malaise, bien conformís, jaunes de peau, 
doux, polis, intelligents, mais aussi vindicatifs que super- 
stitieux. Ils se divisent en plusieurs classes» et aiment les 
spectacles, les combatsd'animaux¢ la musique et la danse. 
ils font commencer leur ère de |'arriv,'M d'Adl-Saka, qui 
introduisit parmi eux l'usage de l'alphabet, l'an 73 de J.-C. 
Ils possèdent aussi une iiltérature dont la richesse relative 
est assez grande. Les principales langues en uge ì Java 
"sont le javanais, la langue du Détroit de la Sonde et les lan- 
gues europennes, sans compter la |angue kawi, qui est la 
langue sacrée des Javanais ( voye-- .',lLmrs [ Langues et 
LiftCatures ]). 
Le javanais se compose de trois dialectes, ou plutôt de 
trois formes de langage, dont deux ont une nomenclature 
tout à fait à part, mais qui ne constituent dans leur 
semble qu'un seul et même idiome. L'usage de ces trois 
formes de langage, qui reiennent à mus moment dans les 
ouvrages" de iittératuri et dans la conversation, est déter- 
miné par la supériorité, i'égalité on lïnfériorité de rang 
social ou d'-Age dans laquelle sa trouve placée la Iersone 



JAV 
qui parle vis-à-vis celle qu'elle interpelle. Ainsi, en s'adres- 
sant h un souverain. à un grand ou h un vieillard, on 
emploie le horno, on haut ]avariais, qui exprime la dfé- 
rence et le respect. C'est aussi le tangage que les poëtes 
dramatiques et les romanciers mettent dans la bouche des 
dieux et des personnages surnaturels, qui intervienneut si 
fréquemment dans leurs récits. Er.tre égau, c'est le 
mahdjo, ou langage intermédiaire, dont on fait usage. En 
parlant à un Immme intérieur, on se sert du yoho, ou dia- 
lecte pOlmlaire. Cette distinction de langages, qui se repro- 
duit, mais à un bien moindre degré, chez d'antres peuples 
de l'Orient, est maintenue à Java pat une étiquette rigou- 
reusement observée. 
L'islamisme est depuis le quatorzième siècle la religion 
dominante; la religion chrétienne y est tolérée, et il existe 
encore h Java beaucoup d'idolâtres. Par suite du dévelop- 
pement extréme qu'a prise la culture du sol sous l'influence 
du système d'administration adopté à l'égard de ce pays 
par les Hollandais, qui imposent l'obligation du travail aux 
populations placées sous leur obéissance, le rendement de 
la terre est vraiment prodigieux. Les principaux produits 
sont le café, le sucre, le riz, l'indigo et le thé. Cette der- 
nière plante est cultivée à Java par les nombreu, colons 
chinois qui sont venus s'y établir, et qui suivent/ cet effet 
la méthode pratiquée en Chine, mais sans pouvoir parvenir 
à produire un thC d'aussi lionne qualite qu'en Chine. Le sol 
«le Java donne encore une foule de plantes rares et utiles, 
notamment des ëpices et des plantes tinctoriales, de mème que 
diverses espèces de plantes vénéneuses, et particulièrement 
l'arbre qu'on appelle oupas. On y trouve également les es- 
pëces animales particulières aux lies d'Asie placées sous les 
tropiques, ainsi que les fameux nids d'oiseaux comestibles; 
et dans les montagnes, de l'or, du cuivre et du sel. il n'y a 
guère que le tiers de l'lié qui obéisse encore à des princes 
ou chefs indigènes indépendants, mais fêudataires des Hol- 
landais, qui possèdent tout le reste du territoire, et dont le 
gouverneur général réside à Batavia. 
La partie de Java appartenant aux Hollandais est divisêe 
en t7 provinces ,dontla plusimportante est celle de Bata-ia, 
qui a pour chef-lieu la ville du mème nom ; elle conlient plus 
de 7 millions d'habitants, répartis sur un territoire d'envi- 
ron 1,,00 myriamètres carrés. L'administration hollandaise 
semble des plus oppreives au, Anglais, qui regrettent de 
ne plus ëtre chargés de laite le bonheur des populations 
javanaises et qui oublient peut-être un peu trop facilement la 
manière dont eux-mëmes gouvernent et administrent l'Hin- 
dustan. En réalité, les Hollandais ont trouvé le régime 
fëodal en pleine vigueur à Java, et ils n'ont fait quc se 
suhstituer aux anciens suzerains. Le système quïls ont adopté 
moerite d'ëtre connu. D'après les anciens usages de l'ile, le 
sujet doit au seigneur le cinquième de sa récolte, ou, pour 
employer l'expression consacrée, le cinquième grain de riz. 
Le gouvernement hollandais se substitue au seigneur, et 
en principe il s'attribue ce mme droit ; mais il l'applique 
de différentes manières. Tant6t il exige que le paysan lui 
pa)e la valeur du cinquiëme de sa récolte de riz ; tant5t il 
lui enjoint de consacrer la cinquième partie de son champ 
à faire venir du café, de l'indigo ou autres produits qu'il 
achète h un prix convenu ; tantSt il lui prend le cinquième 
de son temps pour l'employer à des cultures particulières, 
telles c.'ve celles dn thé, du tabac, du nopal. 11 y a des pro- 
v-inces ,)ù la population est affranchie de tout imp6t ierri- 
torial,  la condition de livrer dans les magasius de l'ad- 
ministration une certaine quantité de produits qui lui sont 
payés à un prix extrmement bas, mais bien autrement 
avantageux cependant que celle qu'elle en tirait autrefois 
lorsqu'elle était exploitée par des accapareurs chinois et 
arabes qui avaient lini par ne lui payer que 2 florins (4 if. 25) 
la quantiié de café pour laquelle l'administration hollan- 
daise lui paye aujourd'hui 19. florins. Ces combinaisons 
d'imp6t territorial sont habiles. Les Hollandais ont trouvé 
une te¢rc lertile, et des populations indolentes qu'ils ont 

réussi à pousser à la culture, à discipliner sous la loi du 
iravail. Ils ont voulu s'effacer, autant que possible, aux 
yeux du peuple conquis; évitant les relations directes, ils 
emploient pour iutermédiaires les chefsindigènes ou 4euis. 
Ceux-ci, chargés de percevoir l'ampSt, prélèvent des emo. 
luments considérables, et sont ainsi dévoués à un systëme 
dont ils retirent de grands avantages. Profitant d'institutions 
qui n'ctaient point de leur fait, les maltres de lïle les ont 
appiopriées aux exigences de la pruspérite coloniale ; d'an- 
tiques habitudes avaient d'avance façonné l'habitant au res- 
pect de l'auioriié supérieure, au régime des cultures forcées 
et des corvées. L'administration se trouve ainsi posséder des 
qnanlités considérables de produits coloniaux; elle les 
lin're, à prix convenu, aux agents de la Socitœe de ¢om- 
erce nderladase. Cette societé, Iondée en 1824, sous 
les auspices du roi des Pays-Ba., possédait un capital de 
vingt-sept millions de florins, qui s'élève aujourdhui h prës 
de 100 millions, et qui .se divise en actions de 1,000 florins. 
Le roi avança 20 millions de florius, et il garantat au 
actionnaires un minimum d'intérèt de quatre et demi pour 
cent. Il serait trop long de vouloir détaille ici le sj-st,2nle 
d'orgnisation de cette compagnie, et Ils  icissitudes qu'elle 
a traversées. Les dividendes ont fiequemment été fixés «le 
t0 h 18 pour 100 par an, preuve incontestable de prospé- 
rite : le prix des actions a plus que doublé. Obligation est 
imposée à la compagnie d'employer exclusivement dans ses 
opêrations des navires construits eu Hoilande, et de donner 
pour ses envois aux Indes toute prference aux produits 
des fabriques balayes; les retours, répartis entre les prin- 
cipaux ports des Pays-Bas, dans une proportion fixée a 
l'avance, sont livrés/ des ventes publiques. Les navires 
employés cl,aque annëe par la compagnie à ce commerce 
représênlent plus de 300,000 tonneaux ,le jaugeage. En 1852, 
année qui présentait un délicit uotahle sur la précëdente, 
l'importation s'était Cevée h 40,29?.,69r ff. ( 80,585,38 f. ), 
et l'exportation h 58,8-$6,896 ff. ( 117,693,172 ff.) ; ce qui 
forme un mouvement commercial total de 99,139,590 ff. 
(198,279,379 ff.). Pendant la méme année il était entré 
dans les ports deJava et de Madura 2,016 navires, jaugeant 
206,607 tonnaux; et il en était sorti 2,0 t2, jaugeant 143,263 
tonnaux. Ce qui prouve bien que l'administration hollandaise 
est intelligente et Immaine, c'est qu'aec 14,000 Européens 
au plus elle maintient sous ses lois une population de plus 
de 10 millions dàmes, que toutes les relations s'accordent 
à nous représenter comme brave et intelligente. 
Ausud riel'fie, on voit bien encore deux soi-disant princes 
indèpendants: le prétendu empereur de Mataram ou Sous- 
sounam, qui rëside à Sonrakarta, et le sullan qui règne/ 
Djokdjokarta, mais placés tous deux dans la dépendance 
du gouvernement hollandais. L'un et l'autre desceudcut 
des anciens empereurs de Mataram, et ils gouvernent fi 
peu près deux millions d'hommes, llexiste encore dans lïle 
de Madura (43 myriam, carrés de superiicie), située à 5 ki- 
lomètres au nord de Java deux sultans dépendants égale- 
ment des Hollandais. 
Java reçut, à une époque extrémement reculée, sa civilisa- 
tion de l'lnde, en mEme temps que la religiun de Brahma s'y 
introduisait. Des débris de temples, d'idoles et de tombeaux, 
qu'oî rencontre surtout dans la partie de ïfle régie par les 
princes indépendants, de mEme que les chants depontoos 
ou poetes des Javanais, qui se sont conservés par la tradition 
orale, témoignent de cette antique civilisation. Divers em- 
pires indigènes avaient déj/ fleuri a Java, puis avaient 
fini par n'en plus former qu'un seul, appelé Madjapahit, 
quand, en 106, les Arabes abordèrent dans l'lié, y introdui- 
sirent l'islamisme et fondèrent les empires de Bantam et de 
Mataram, que des partages et d'autres circonstances par- 
tagèrent et modifièrent à diverses reprises, de telle sorte 
qu'a la fin du seizième siëcle on y comptait quatre empires : 
Mataram, Djakatra, Batan et Cheribo. Vers 1579 
les Portugais arrivèrent à Java, et s'y établirent; mais dë 
159 ils en fttreat expulsés par les Hollandais» qui y form- 



576 JAVA 
rent également des tablissements et parvinrent aussi  en 
chasser les Anglais, qui étaient venus sur leurs brisées et 
avaient essayé d'y créer une colonie. A partir «le ce mo- 
ment l'l,istoire de Java n'est plus que le tablea,, des progrès 
incessants de la puissance l,ollandaise dans l'lle. Par leurs 
guerrescontinuelles contre les indigènes, les Hollandais réus- 
sirent à subjuguer ou  anéantir l'un aprës l'autre les divers 
empires qui s'y trouvaient, et finirent par ne plus y avoir 
que des vassaux. En 181t les Anglais s'emparèrent de 
ara, où l'administration aussi active qu'intelligente de sir 
Stamford Raffles indroduisit de grandes améliorations ; et 
cette colonie était dans l'élat le plus florissant quand ils 
la restituèrent, en 1816, aux Hollandais. Pendant longtemps 
ceux-ci, par suite de l'impéritie des gouverne,,rs qu'ils y 
envoyèrent, arrètèrent l'essor de la prosp(.rité qu'y avaient 
fait naitre les Anglais ; mais l'administration éclairée des 
gouverneursVanderCapellen et JanVan rien Bosch, par 
les encouragements qu'elle donna à l'agricultore et par 
d'autres mesures encore, porta la prospérité de cette colonie 
au plus l,aut degré de splendeur. Toutefois, il fallut encore 
beaucoup de temps et d'efforts pour que les Hollandais se 
trouvassent de nouveau paisibles possesseurs de l'ile et pour 
qu'ils eusscnt contraint les indigènes à reconnaitre leur souve- 
raineté. Ils curent à lutter contre de nombreuses insurrec- 
tions, dont la plus dangereuse fi]t celle de Diépo iegoro, vers 
1825 ; et aujourd'hui mme le mécontentement secret des 
populations, au sein desq,Jelles existe toujours le sentiment 
de la nationalité, fait encore de temps à autre explosion. 
Consultez Raffles, History of Java (2 vol. Londres, 1817 ; 
nouvelle édition, 1830 ) ; Roorda van Eijssinga, Jets over 
nederlands India (4 vol.; Kampen, |836-1850); Itier, 
Voilage  Java ( Paris, t853 ), et les Memoires de la Socitë 
des ciences et des Arts de latavia, qui orment aujour- 
d'hui 25 volumes. 
JA'¢ELINE  espèce de demi-pique en usage chez les 
anciens. Ele avait près de deux mètres de longueur, et son 
fer etait à trois faces, terrainWen pointe. On s'en servait à 
pied et à cheval. Les Arabes emploient encore cette sorte 
de lance; mais ils en ont allongé le manche et le fer. 
JAVELLE. En agriculture, on donne ce nom à plu- 
sieurs poignées de blé coupé, qui demeurent couchées sur le 
sillon jusqu'à ce qu'on en fasse des gerbes ( voçez i',Iosso). 
On appelle aussi javelle de petits faisceaux de sarment 
que l'on brùle ordinairement. 
Le mème nom a été appliqué à un courant d'eau entre 
une Ile et une rivière ; de là vint la dénomination de moulin 
de3avelle donnée à quelques établissements de Grenelle sur 
les bords de la Seine. C'est là que fut inventée et fabriquée 
d'abord l'eau chargée de chlore qui sert au blanchissage 
et qui a gardé le nom d' e a u d e J a v e I I e. 
JAVELOT (du latin jaculum ), e»pèce de dard, dont 
se servaient les anciens, et particulièrement les vélites ou 
troupes Iégères des Romains. Il avait pour l'ordinaire un 
mètre de long. La pointe était si amenuisée, dit Polybe, 
qu'au premier coup elle se faussait ; ce qui empchait les 
ennemis de la renvoyer. Plus court que la j a v e Il n e, le 
javelot se lançait sans le secours de l'arc et par la seule 
lorce tin bras. 
Chez les Grecs l'envoi du javelot contre un but était un 
des jeux du Pentathle. 
JAYELOT (Erétologie), nom d'une espèce de ser- 
pent du genre ryx, ainsi appelé à cause de sa forme dé- 
IlC. Les éryx sont des serpents innocents, qui vivent dÏn- 
sectes et de très-petits animaux. Ils habitent des lieux secs 
et arides, et se cachent dans le sable sans s'y enfoncer 
profondément. L. LxvErr. 
JAXARTES. Voile-'. IAXATES. 
JAY (Axmre), un des fondateurs dn journal Le Con s- 
 t I u t i o n n e l, naquit près de Guitre (Gironde), !e _90 oc- 
tobre 1770. Il étudia d'abord chez les oratoriens de Niort, 
pnis au grand collége de Toulouse; il fit son droit ensuite, fut 
recu avocat, et exerca momentanément ,tes fonctions admi- 

-- JAYET 
nistratives dans le district de Libourne. Vers 1795, il ada en 
Amérique, mit sept années à parcourir le Nouveau Monde, 
revint en France en 1802, et reprit sa profession d'avocat. 
Un ancien oratorien, qui avait étWson maitre, le fameux 
Fou c fi é, lui proposa de lui confier l'éducation de ses trois 
fils. Jay, voyant là me excellente occasion de venir  Paris 
où il trouverait à satisfaire ses goOts littéraires, accepta, et 
accourut immédiatement prendre possession de son emploi. 
Lors de la disgrâce du duc d'Otrante, Jay le suivit en lllyrie 
et revint en France avec lui, lorsque le mécontentement de 
l'empereur se fi]t calmé et que le ministre suspect eut ob- 
tenu permission de résider ì Aix en Provence. Jay le quitta 
alors pour se rapprocher de sa famille. C'e»t vers ce temps 
qu'il publia son Tableau historique du dix-huitiëme siècle, 
qui remporta le prix proposé par la classe de Littérature 
française de l'institut en 1810; deux ans après, son ,loge 
de Montoigne lui valut un accessit du mme corps saant; 
puis il fut ehargd, par le duc de Bovigo, de la traduction 
raisonnée des journaux anglais, laquelle était mise tous les 
malins sous les yeux de l'empereur, et enfin il fut choisi 
pour diriger le Journal de Paris. il fit paraitre aussi des 
essais de littérature et d'histoire sous le titre de Le Gla- 
neur, et professa l'histoire fi l'Athéne. 
En tSlS, nommé membre de la chambre des représen- 
tants des Cent Jours, fl eut l'occasion de rendre plusieurs 
services à des royalistes alors menacís de proscription; mais 
il se signala principalement par sa conduite libérale et cou- 
rageuse dans cette assemblée, par les VœUX qu'il formula 
pour l'établissement d'institutions fixes et conformes aux 
maximes de liberté, par l'insistance avec laquelle il réclama 
des modifications ì l'acte additionnel et enfin par la 
mission difficile dont il fut chargé, lui cinquiëme, auprès 
des soldats français campés sous les murs de Paris, mission 
qui avait pour but de les dissuader de combattre et de les 
engager à souffrir que l'a-mée coalisée entràt dans Paris. 
Peu de temps aprës, il publia son Histoire du Cardinal de 
lichelieu. Comme on grand seigneur de ce nom était alors 
premier ministre en France, quelques critiques soupçonnè- 
rent Jay d'avoir eu l'intention de lui faire sa cour. Mais il 
prouva que ce livre était fait bien avant qu'on pent qu'un 
Richelieu pùt btre ministre en France. Jay fut aussi un des 
fondateurs rédacteurs de La Mtnerve : nous avons dit qu'il 
fut un des fondateurs, copropriétaires et rédacteurs du Cons- 
titutionnel, journal qui ne brilla jamais d'un plus vif éclat 
que dans les qui-ze premières années de sa creation, c'est- 
à-dire tant que ceux qui en avaient imaginé le plan et entre- 
pris ïexécution le firent serir à former l'opiuion publique 
en France. Jay fut un des derniers à abandonner cette feuille. 
Sa notice bioaphique sur les frères F a u c h e r, inscrite dan 
la Nouvelle liograhie des Contemporains , lui attira une 
condamnation ì un mois de prison en 1823. Cette persé- 
cution nous valut deux écrits assez spiritnels. Les Ermite 
en prison et Les Ermites en liberté, faits sous les ver- 
roux conjointement avec Jouy. Jay a de plus fait en 
commun avec Jouy le Salon d'Horace Vernet ( 1822 ). Jan/ 
havailla à toutes les Eiographies qui lutent publiées de son 
temps. Il ¢omposa en outre des brocbures politiques, des 
Considèrations et des 'otices en nombre infini ; il écrivit 
des Voyages, des Souvenirs, des Éloges, Cits les œuvres 
de 3IM «» de Lafayette et D u f r é n o y, mit tout enfin 
profit, hommes et choses, pour se faire un nom littéraire; 
et en 1832 l'Académie française le choisit pour remplacer 
dans son sein l'abbé duc de Montesquiou. Il a laissé la ré- 
putation d'un homme de lettres laborieux, instruit, cons- 
ciencieux, d'un citoyen plein de courage et de patriotisme. 
Déjà mème il jouissait de cette réputation dans la retraite 
où il passa les dernières annécs de sa vie, quand la mort 
vint le frapper, le 9 aTil 185, dansson domaine de Chaber- 
ville, près de Gultre, lieu de sa naissance. Sa fille a 
li. Dufrénoy, directeur de l'École des ]Mines. 
Charles 
JAYET. Voye=. J.t.IS. 



JAYME 
JAI'ME ou JACQUES. Deux rois de ce nom ont régné 
sur l'Aragon. 
JAYME I er, fils de don Pèdre II, n'avait que six ans 
quand son përe fut tué, en 1213, ì la bataille du Muret. Il 
était entre les mains de Simen de Monffort, ì qui don Pëdre 
l'avait confié l'année précédente, alors que les deux princes 
avaient arrtlé les fiançailles de l'infant d'Aragon avec la 
lille de Simen de blentfort. Cédant aux ordres du pape 
Innocenl III, Simon rendit aux Aragonais Jayme, qui, après 
une minorité orageuse, saisit le sceptre d'une main ferme. 
Ses conquêtes sur les Arabes, auxquels il enleva les lies Ba- 
lCrcs(t229-1235) et le royaume de Valence (t239), lui 
valurent le surnom de Conqu¢rant. Il donna à ses nou- 
çeaux sujets, puis aux Aragonais et aux Catalans, une dou- 
ble l#gislation, appropriée ì leurs mœurs respectives, et re- 
marquable par l'adoucissement des dispositions pénales. Par 
un traité fait en 1258 avec la France, Jayme, en abandon- 
nant de raines prétentions sur quelques districts du Lan- 
guedoc, vit saint Loui s renoncer ì tous ses droits de suz 
raineté, sur la Catalogne, le Roussillon, la Cerdagne et le 
comté de Monlpellier. Un si beau règne lut troublé par des 
querelles sanglantes entre les fils de Jayme, h qui de son 
vivant il avait eu l'imp[udence de partager ses proxinces, et 
qui pour se disputer son héritage n'attendirent pas sa mort. 
Jaymel¢cessa de vivre en 1276, après un règne de soixante- 
trois ans. 
JAYME Il, son petit-fils, fut d'abord roi de Sicile ì la 
mort de D. Pèdre, en 1285, puis roi d'Aragon après son frère 
alné, Alfonse Il, en 1291. Il ne put garder les deux cou- 
tonnes, et pour se maintenir en Aragon il fut obligé de 
renoncer ì la Sicile. Il s'en dêdommagea par la conquête 
de la Sardaigne sur les Pisans, en 1396. Sous son règne, les 
cortès, assemblées ì Tarragone, décrétèrent, le t décembre 
t3tg, l'union perpétuelle en corps d'Ëtat des royaumes d'A- 
ragon, de Valence et de Majorque, puis de la principauté 
de la Catalone. Il mourut en 327. Son règne b]t pour l'A- 
ragon une époque de paix et de bonheur : il fut surnommé 
le Justicier. Charles Dr Rozom. 
JAZET ( Jo, l-P|EImE-bl trd£ ), graveur, naquit h Paris, 
le 31 j,millet 1788. Fils d'un homme tout devoué ì son 
pays, et qui périt en le servant, bl. Jazet, recueilli jeune 
encore par son oncle, le peintre Debucourt, fut élevé tout 
à la fois dans le cuite de la patrie et celui des beaux-arts. 
Debucourt, peintre expérimenté, était aussi un habile gra- 
veur. Il avait compris le premier tout ce que pouvait offrir 
de ressources un genre de gravure alors à peine usité en 
France, la gravure ì l'açua-tinta, et s'était voué tout entier 
au perfectionnement de ce procédé; aussi dirige.a-t-il son fils 
adoptif dans la voie qu'il avait ouverte. Bient6t l'Cève y 
dépassa le maltre. Une gravure, encore aujourd'hui célè- 
bre, le Bivouac du 9ënéral Moncey, d'après Vernet, révéla 
 tous ceux qui s'occupaient d'art, et le talent du jeune 
graveur et les ressources du procédé qu'il employait. Mal- 
gré les résultats intéressants obtenus par Debucourt, 
l'aqua-tinta était encore généralement regardée comme 
propre seulement à reproduire des paysages, des panoramas 
ou des pochades d'artiste. En la combinant habilement 
avec l'eau-forte, le burin et la manirenoire, M. Jazet en 
faisait un art nouveau, au molen duquel paysages et figures, 
animaux et personnages, petits sujets e genre ou grands 
tableaux d'histoire, tout pouvait ëtre rendu avec un Cai 
succès. Dès ce moment bL Jazet, placé par son talent au 
niveau des artistes les plus célèbres, put choisir parmi leurs 
œuvres celles qu'il lui plaisait de reproduire. David, Gros, 
Carie et Horace Ycrnet, Delaroche, Grenier, Lawrence, 
Cogniet, Stenben, Biard, etc., etc., se virent successivement 
renallre sous cette main habile et infatigable. 
Talent souple et varié, M. Jazet s'est pliA à tous les 
styles, il a abordé tous les sujets, biais ce que son burin 
se complait surtout à reproduire, ce sont les glorieux épiso- 
des de la France républicaine et impériale. Le Serment du 
Jeu de Paume, :a'-areth, Idna, Wag"ram, la Barrière 
i I  T -  " I' [:e[NI''I l I T" XI" 

-- JEAN 
Clichy, le Bctoar de lile d'Elbe, et mdle aulr de ce» 
grands faits, honne,,r de notre histoire, tels sont ses suje 
de prédileclion. Si l'on a dit de Béraner et de Vrnel qu'il 
étaient l'un le ptG l'autre le peintre du peuple, 
peul dire de Jazet qu'il en est le çraveur; r c'est gr@oe 
lui que le peuple peul s'entourer de cŒE glorieux souvenir% 
ses véHtabl lilres de noblesse. M. Jazet a foé da 
deux fils, MM. Eugène et Alexandre Jazet, deux élèves qui 
utiendront alignement le nom de leur père. 
A[fr. 
JAZ1GES. Voe« Imita. 
JEAN (Botanique). Voye Ajonc. 
JEAN (Saint), parent et oentemporain de Jésus de 
ffazareth, était le fils du prêtre juif Zachari«, et reçut 
surnom de Baptiste à m du baptême quïl donnait 
les bords du Jourdain. Il naquit vraisemblablement ve l'an 
749 de la fondation de ome (5 av. J.-C.), à Jutta, dan 
la tribu 0e Juda. Les livres sMn ne nous apprennent rien 
de sa vie durant oes premières anns ; nous savons sec- 
lement qu'il se retira de trnne heur au dése, et qu'il 
y vivait dans la plus amtre pénitenoe. Il avait un vtement 
de poil de chameau, une ceiutuoe de cuir autour des 
et il ne se nouait que de sauterelles et de miel uve. 
Après s'ètre préparé, par ces rudes exercioes, au ministër 
qui lui avait etWdtiné, il int, dans la quinzième année du 
règne de Tibère ( an 9 de J.-C. ), sur les bords du Jourdain, 
aux environs de Jédcho, prêchant la pénitence, baptisant 
ceux qui se présentaient à lui, et annonont que les temps 
étaieut accomplis, que le Messie avait paru, et qu lui- 
même eit envo pour lui ur préparer les voies. J é s u s- 
e hri st se prëenta  son tour pour recevoir son baptême, 
et le fils de Zacharie fit de vains effo pour le lui refiser. 
Le sénat de Jérusalem lui députa des prêtres et d lévite» 
pour savoir s'il ait le Msie, ou fie, ou un prophète. 
Il répondit sans d6tour qu'il n'éit ni prophète ni lie, " 
ni le Msie. Mais le lendemain, ayant vu Jésus-Chdst 
venir à lui, il s'écfia, suivant ce que rapporte saint Jean 
l'Évangt:liste, en prsenoe de la foule qui l'environnait : 
« Yoilà l'Aeau de Dieu, vilh celui qui pofle les péch6 
du monde, » ajoutant qu'il n'aait reçu d'autre mission 
que celle d'ètre son précurseur. Cependant le peuple 
précipitait sur s pas, et accourait en foule se soumettre 
h la cérémonie du baptème. Les grands eux-mmes, frappés 
de son genre de vie extraordinaire et de son éloquenc 
sauvage, IMcoutaient avec plaisir. De ce nombre ét Hé- 
rode-Antipas, tétrarque de Galile. Jean-Ba#ist ayant Cê 
appelé  sa cour ne put voir ce prinoe ileestueux sa lui 
reprocher son crime : « Il ne t'est pas peis, li dit-il avec 
fermeté, d'avoir la femme de ton frère pendant qu'il vt 
encore. ,, Cette audace révol Hémde, qui envoya son im- 
flun nseur en prison : et plus rd,  la oellicition d 
Salom, fille d'Hériade, la complice de n inoeste, 
peut-être bien m par des oensiderations politiques, il or- 
donna de trancher la t à Jn-Baptiste, q se trouvait 
dans I prisons depuis enron deux ans. Ce mayre arriva 
lors de la célébration de la fète ì laquelle les Juifs donnent 
le nom de Macs,  pen pr un an avt la mort de 
Jéus-Christ, et les disciples du Précurseur en ayant été aver- 
tis allèrent prendre son cor et l'enterrèrent près d 
railles de la ville de Sanmrie, appelée pour lors Séste, 
dans le sépulcre où etaient depuis longtemps les corps de 
prophètes sée et Aias. 
Ce récit ne oeocorde par de us poM av celui d 
l'hiaoden Josèphe; et il est perds d'in[oer d« quelques 
allusions oentenues dan ! autres angil que Jn- 
Baptiste n« s'Eeva s complétement à l'id pure du 
sic. C qui autoris à ! croire, c't qu'ap sa mo, 
ses disoipl oentinuènt h former un secte particulière, 
qui plus tard adopta ! dtrines des gnosfiques et 
existe encor aujourd'hui en Orient, sous le nom de chre- 
tiens de saint Jean ou de Saboeens. Sauf quelqu sect du 
moyeu age, I'£glchrt4ienneatoujour» professfi une 
73 



.578 
ration toute particulière pour Jean-Baptiste ; et comme 
de tout temps il tut en Angleterre le patron des différentes 
corporations d'ouvriers employés à la construction des 
¢dilices, les fr ancs-maçons le tiennent encore de nos 
jours en grande estime, et la Saint-Jean (24 juin ) est la 
p|us grande fte qu'ils cél/brent. L'Église ¢atholique a 
rangé en outre au nombre de ses tètes le 21 ao0t, jour 
anniversaire de la decollation de saint Jean-Baptiste. 
JEAN (Saint), l'un des quatre evangelistes, était 
fils de Zéhédée, pauvre pcheur «lu lac de Galilée, et de 
Sa'.otué ; il naquit à Bctsaide. ApréS avoir d'abord suivi 
l'l'.umhle profession de son père, on croit qu'il devint 
ensuite Pun des disciples de saint Jean-Baptiste; mais pins 
tard, de mdme que son frère Jacques le Majeur, il 
e rattacha de la manière la plus intime à Jésus-Clirist, 
qui temoigna toujours la plus ive tendresse et la confiance 
la plus grande à ce disciple: il le rendit témoin de la plu- 
part de ses miracles, de sa transliguration, et se fit ac- 
compagner par lui au jardin des Olives. Jean fut le seul 
des disciples qui suivit le Sauveur j«lsqu'au pied de lacroix 
« Jésus ayant donc vu sa mère ( Évang. selon saint Jean, 
eh. xm, v. 26 et 7 ), et près d'elle le tiiseiple qu'il aimait 
( saint Jean ), dit à sa mère : « Femme, voilà votre fils. 
Puis il dtt au disciple : « Voilh ore mère. » Et depuis 
cette heure-là le diiple la recueillir clez lui. » Jean fut 
aussi le premier/t reconnattre le Christ apres sa résurrec- 
tion : il  mit star-le-champ ì prêclter l'Evangile, assista 
en St au concile de Jerusalem, et retourna propager la 
foi jlsqu'au milieu des Parthes, d'où ii revint  lixer à 
Éphèse, dontil fut le premier evque. Sous le règne de 
Dmnitieu, il fut exilé dans Prie de Patmos; mais ;erva 
fit cesser son exil, et il lui fut permis de s'en revenir 
Ephbe, ou il mourut avec le calme et la satiMaction du 
juste, à I'ge de quatre-vingt-quatorzeans, vers l'an 101 de 
J.-C., sous le règne de Trajau. L'Église catholique célèbre sa 
mëmoire le 27 dec«mbre. On le represente souvent tenanl 
main un calice du fond duquel s¥1ëve un serpent. 
L'Eangile de saint Jean a |tour but de représenter Jéus 
comme le Fil» de Dieu et le Sauveurdu moude, dans l'acception 
la plus sublime de ces mots, et sa venue sur la terre comme 
ayant assuré te salut du genre humain tout entier. Ce 
point de vue d'instl-uction dogmatique explique comment 
on ne trouve point dans saint Jean une histoire complète 
de Jesus, non idus qu'une exposition sstëmatique de sa 
doctrine, mais seulement unchoix de récits s'accordant axec 
le but que l'auteur a en vue. Il procède par ordre chro. 
noioique, et s'adres surtout aux paiens convertis au chris- 
tianisme, qui habitent Lors de la Palestine. C'est vers la lin 
du premier siècle qu'il écrivit son Évangile, à Éphèse, sui- 
vant les uns, et dans l'fie de Patmos, solvant les autres; 
à cet egard on n'a point de certitude historique. Ce qui 
parait incontestable, dn moins, c'est que ce fut en Asie 
blineure. Malgré les .doutes qui se sont produits autrefois 
et dans les temps modernes contre son authenticité, il a 
constamment été admis, encore Lien que certaines de ses 
parties puissent avoir etWretouches plus tard. 
11 existe en outre dans le Nouveau Testament, sous le 
nom de saint Jean i'Évangéliste, trois Épitres comptées 
au nombre des Cilles canonques; et tout porte ì croire 
qu'elles sont bien réellement de lui. Toute|dis, elles ne sont 
pas demeurées exemptes d'interpolations ; mais les doutes 
qu'on a voulu élever sur l'authenticitë de leur origine ne 
sont appuyés sur aucun argument qui supporte l'examen. 
La pretoière de ces épltres, adressée surtout aux païens de. 
venus chrétiens, a pour but d'exhorter les lecteurs  suivre 
les -oies de la sanctification et de la charité fraternelle; 
elle les met aussi en garde contre les hértiques et les séduc- 
teurs, notamment contre les d o c è t e s. Cette épttre a donc 
une certaine tendanoe ì la polémique. La seconde est nne 
eltre particulière, adressée par saint Jean à une femme 
chrctienne du nom de Kyria. L'Èvangéliste se rejouit de voir 
cette femme persévérer avec ses enfants dal les pures 

JEAN 
doch'ines de l'Êvangile; il l'exhorte à suivre tontonrs les 
voies de la charité, la met en garde contre les hrètiques 
et exprime I»espoir de la voir bient6t. La troisième épttre • 
enfin, est une lettre particulière, écrite à un. certain Caius. 
Saint Jean le loue de sa vie vertueuse, de son esprit de 
cIlarité; mais il s'exprime aussi avec amertume au sujet d'un 
certain Dintréphas. 11 est de toute impossibilité de préciser 
l'époque où ces trois pitres furent écrites. 
Mais on peut croire que saint Jean n'est point i'auleur 
de t'Apocalypse, ouvrage décrivant, sous la forme 
prophétique et symbolique, l'avenir et l'accomplissement du 
règne de Dieu, et qui très-probablement fut composé avant 
la destruction de Jérusalem. D'après les recherches faites 
par les savants modernes, l'Apocalypse, de nme que la 
seconde des épllres de saint Jean, serait Poeure d'un 
presbytère d'Êphèe, appelé aussi Jean, ami et successeur 
del'aptre, ou «l'un Juif chrétien, tout autre que i'Évan- 
géliste, mais qui le composa sous le nom de saint Jean. 
JEAN CHBYSOSTO.ME ( Saint ), père de l'Elise, l'un 
de ses plus illustres docteurs, et sans contrelit le plus 
céihre des orateurs chretiens, naquit à Antioche, en 34. 
Secundns, son përe, etait gëneral de cavalerie, et mourut 
jeune. Sa mère, veuve/t vingt ans, ne voulut point se re- 
marier, et ne songea qu'a élever pieusemeut sa petite 
famille. Ses vertus lui méritèrent des éloges même de la 
part des paiens. Jean étudia la pliilosophie sous Andra- 
gathins et Peloquence sous Libaniu s. Son genie com- 
mençait dès lorsajeter de vives étincelles. Je l'aurais choisi 
pour no»t successeur, disait le vieux rhdteur grec, st les 
chrdtiens ne rous l'eussent point enlevœe. Plusieurs cau- 
s plaidées à vingoE ans avec un brillant succès, ses talents 
bien connus lui permettaient d'aspirer aux premières 
dinitës de l'empire, car l'éloquence ouvrait encore alors 
la route des honneurs ; mais la lecture assidue de i'Ëcri- 
tu,e Sainte lui inspira des peasé plus austères. Bientôt 
on ne |ni vit plus d'autre habit qu'une mêchante tunique 
deco,,leur grise. Un jeùne de tous les jours, un court 
sou,meii sur la planche, de longues éludes, de longues 
veilles, de longues prièrea, telle fut dès lors sa vie, mai- 
gre les raiileries de ses amiz et de ses premiers admirateurs. 
Après trois ans ainsi passés dans le palais de Mélèce,ii 
est ordonné lecteur par le vieux pontife, qui aime tendre- 
ment son jeune ascète. Il se lie d'une ëtroite amitié avec 
un jeune saiqt, Basile, et convertit à la vie ascétique 
Théodore de 51opsueste et 51axime, soe deux autres 
amis. Les évèques de la province s'assemblent pour l'élever 
avec Basile à Vepiscopat; mais il prend la fuite, se cache, 
rëussit par un pieux artifice à faire sacrer son ami, com- 
pose à  in-six ans, comme une apologie de sa conduite, 
son admirable Traitd du Sacerdoce, et se réfugie cbea les 
anachorètes des montagnes, dans le voisinage d'Atltioche. On 
trouve dans ses œuvres une touchante pointure de leurs 
mœurs. Cependant leur vie si pure ne suffit p& à sa fer- 
,eur ; il s'enfonce dans la solitude, et passe deux ans dans 
une caverne profonde, sans se coucher. Une maladie le force 
à revenir  Antioche, en 38t. Ilest ordonné diacre pat saint 
Mélèce, et prêtre par saint Flavien, son successeur. Vicaire 
du prélat à quarante-trois ans, et cbargé par lu' d'annoncer 
la parole de Dieu au peuple, [onction qui jusque là n'avait 
jamais été conliée à un simple prëtre, il fait des prodiges de 
zle et d'doquence. Plusieurs discours par semaine n'ëpui- 
sent pointsa fécondité; souvent fl parle plusieurs fois en un 
jour. Les fidèles, les Juifs, les paiens, les héretiques, l'ë- 
coutent avec une égale admiration. Une violente sedifion 
éclate à Antioche : les statues de T h é o d o s e et de sa famille 
sont renversée» : muni d'un discours concertë avec Chrysos- 
tome, saint F iav ien accourt à Constantinople, et le pon- 
tife septuagénaire arrache à l'empereur les larmes et le 
pardon, tandis que l'infatigable orateur s'efforce de con. 
oler le peuple, qui s'abandonne au désespoir. 
En 397, le faible Arcad lus monle sur le tréne; Nec- 
taire meurt; Jean est enlevé par le comte d'Orient, Conduit 



JEAN 
 Constantinople, et sacré en 398, par Théophile, patriar- 
rhe d'Alexandrie. Son premier soin est de réformer la 
maison épiscopale et les mœurs du clergé ; il distribue son 
patrimoine aux pauvres, fonde plusieurs h6pitaux, et mérite 
le glorieux surnom d'aurn6nier. Olympiade, Salvine, Po- 
cule et Pontavie, ilhlstres veuves, se consacrent sous sa 
conduite au service des pauvres et des malades. Des évques 
sont envoys par lui chez les Scythes, chez les Goths, dans 
la Perse et la Palestine. Par une brillante improvisation, il 
sauve le ministre Eut rope de la lureur du peuple etdes 
oldats. Son éloquence arrache au supplice deux illustres 
seigneurs,et triomphe encore du rebelle Garous, qui conent 
à s'éloigner de Constantinopte avec ses Goths. Cependant, les 
vexations de Pimpëratrice, que désapprouvait lesaint arche- 
vêque, la jalousie de Théophite et la liblesse de l'empereur 
amèuent le conciliabule du ChCe à Chalcédoine. Chry- 
sostome, injustement accusé, refuse de comparaltre, parce 
qu'on a violWà son égard les règles des saints canons. Qua- 
rante évéques s'assemblent pour lui à Constautinopte ; mais 
l'intrigue triomphe, et la sentence de déposition est siguée 
par l'empereur. Le saint évque pouvait remuer l'empire 
en sa faveur ; mais il va secrètement trouver l'officier 
chargé de le conduire en Bithynie, et ècllappe ainsi à la 
surveillance du peuple, qui depuis trois jours jure de le dé- 
fendre, et I'a pris sous sa garde. La voix de SerCien, év- 
que de Gbales, qui cherche à flétrir la mémoire de l'illustre 
exilé, se perd au milieu des clameurs. Un tremblement de 
terre qui a lieu pendant la nuit effraye l'empereur et l'im- 
péralrice : Arcadins révoqne l'ordre d'exil, et Eu d o x i e 
écrit eile-mème à saint Chrysestome pour l'inviter à reve- 
nir : tout le peuple accourt avec des flambeaux pour le 
cevoir. 5lais I'inauguration d'une statue d'argent à l'effigie 
de la princesse, des jeux célébrés à cette occasion et di- 
rigés par tin manicl|éen, des superstitions païennes indi- 
crètemeut renouvelée.% en provoquant le zle du saint, amè- 
nent bient6t de nouveaux nuages. 
Le père Monffaucon a prouvé que Sucrate et Sozo- 
mèn e ont faussement attribué à saint Jean Chrysostomc 
le discours contre l'imp6ratrice commençant par ces mots : 
Herodiade est encore furieuse. Les prélats dévoués à 
la cour sont encore une fois convoqués, et les quarante 
évques qui soutiennent le saint archevêque ne peuvent le 
sauver d'une nouvelle condamnation. Le samedi saint, une 
!roupe de soldats envoys contre lui profanent et ensan- 
glantent son église. Il demande un concile; Innocent I ' et 
|'empereur Honorins le demandent avec lai; te pape annule 
[out ce qui a etWfait; mais Arcadius, ohséde par Tbéo- 
phile, Sévérieu et leurs complices, ne veut se rendre à au- 
cune raison. L'ordre de partir pour l'exil est de nouveau 
intimé à Chr.vsostome dans la cathèdrale ; il le reçoit, et 
part secrètement pour tire conduit à [icée en Bithynie, 
Bient6t après, un violent incendie, qui dévore à la fois 
Sainte-Sopbie et le palais du sénat, ou përissent les admi- 
rables slatuesdes .Muses, est imputé aux amis de Chrysos- 
tome, qui ont à souffrir la prison, la torture et l'exil. Ces 
accidents et la mort d'Eudoxie, arrivée quelques mois après, 
et les ravages des Isanriens et des Huns, sont regardés par 
Palla de comme aulant d'effets incontestables de la ven- 
geance celeste. Cependant, malgré ces malbenrs, malgré les 
|emontrances de saint Nil, les i,nstances d'Honorius et le 
refus du souverain pontife de communiquer avec Théophite, 
Arcadius, toujours trompé, fit monter Arace sur le siége 
de Constantinople, et donne ses ordres pour que l'évlue 
légitime soit elëgué dans les déserts du mont Taurus. 
Soixante-dix jours de marche et de fièvre durant les grandes 
chaleurs de l'étë, un ciel et un sol hr01aut, la brutalité des 
gardes, des nuits sans lit ét sans sommeil, lasoif et la faim, 
sans pouvoir lasser sa patience, ont altéré la santé du vieux 
pontife : sa poitrine est douloureusement affectée. Enfin, 
le 16 juillet 405, il arrive au dernier terme de son exil, 1ixL par Eudoxie. Il et reçu avec respect par les habitants de 
Cueuse, et bieut6t il envoie de la des missionnaires dans 

579 
la Perse et la Phénicie, Obligé de e retirer au chateau 
rabisse, sur le mont Taurus, pour échapper aux incursions 
des Isauriens, il retourne peu après à Cucuse, où il reçoit 
un nouveau fescrit impérial, qui le confine à Pilhiause, sur 
les bords du Pont-Euxin, jusquaux extrémits de l'empire. 
Les deux officiers chargés de le conduire savent qu'ils au- 
ront de l'avancement si à force de mauvais traiteroent il 
peut expirer entre leurs mains. Le saint vieillard, avec sa 
tête chauve et nue, eoe obligë de marcher à pied, exposé 
tant6t aux ardeur.s, du soleil d'Asie, taut6t alx subites et 
froides ondées de I luinoxe. Bieut6t ses forces sont Ci- 
sses. Arrivé à Comane, dans le Pont, on veut le forcer à 
marcher encore; mais la nature sy refuse, et on est obligé 
I de le rapporter dans l'oratoire de saint Basilisque, où il 
I expire peu de temps apr, le 14 septembre 407.. 
] Un concour prodige «le fidèles et d'anachorètes se fit 
I voir à ses funérailles. Trente ans plus lard, ses restes, su- 
] tennellemeut transférés à Constantinopte, et reçus avec une 
]ograude piCWpar Théodose le jeune et sa sœur Pulchérie, 
[ qui dëploraient les erreurs et les folies de la vieille cour, 
[ furent pieusement transportes à Borne, et deposés au Va- 
l tican, sous l'autel qui porte le nom du saint. 
] Saint Jean-CIirysostome était peti de taille. L'étude, jointe 
] aux anstërités de sa jeunesse, avait de bonne heure amaigri 
 sa figure. La charité et la douceur étaient ses principales 
I verus. Le pape Célestin, saint Augustin el saint Isidore de 
[ Pïlusele regardaient comme le plus grand docteur del'Èglise. 
Pallade, Êrasme, Ménard, Godefroy Hermant et Tillemont 
ont écrit la vie de saint Jean Chry. sostome. Le nom de Chry- 
sostome (Bouche d'or, fait de deux mots grecs, 
or, 't az6W,, bouche), qui ne lui a étWdonné qu'après sa 
mort (mais peu après, car on le trouve déjà dans Cassiodore, 
saint Ephrem et Théodoret), est devenu depuis 1-00 ans 
celui de l'éloquence. Par i'elegance et la purele du si)'le, par 
la clarté, l'ordre et l'élévation des peusées, ce Père s'est 
placé au premier rang des écrivains de la Grëce, Toujours 
original, lors nêmequ'il parait imiter, telle est la flexibiliic 
de son talent que dans les sujets les plus analogues jamais 
il ne se copie [ui-mme. On admire surtout sa brillante imagi- 
nation, sa dialectique pressante, sa connaissancedes passions, 
l'onction de sa parole et son inépuisahle fëcondité. Il resem- 
hte tout à la fois/|Démosthène et/ Cice ron. Au nerf 
de l'orateur grec il joint l'abondance, le nombre et l'harmo- 
nieuse phraséologie du consul romain. L'ahbé Auger n'a 
pas craint de dire qu'il est l'Homère des orateurs. On ne 
conçoit pas comment dans une vie si agitée il a pu trouver 
assez de temps pour composer tant d'ouvrages. [ons avons 
ecore de lui plus de 700 homélies, 20 [ivres sur divers su- 
jets, 3 grands traités, 28 discours, 21 pan('gyriqucs, nne 
re«altitude de 'leltres, 2 exhortations à Théodoro,  caé- 
chèses (il parait qu'il en avait composé un grand nombre), 
un commenlaire sur l'Épitre aux Galates, et une synopse «le 
l'Ancien Testament. Les plus estimes de ses ouvrdges sont 
It 58 homélies sur les Psaumes, son Traité du Sacerdoce, 
ses 32 humCies sur l'Epltre aux Boraains, ses 7 panégyri- 
ques de saint Paul, et les 9O homélies qui forment le coin 
mentaire sur saint Ilatthieu. Saint "£homas d'Aquin, qui ne 
possédait de ce dernier ouvrage qu'une version ancienne, 
difiu et souvent peu exacte, disait qu'il ne la donnerait 
pas pour toute la ville de Paris. Les meilleures éditions ,le 
saint Jean Cbryso»tome sont celles de Fronton du Duc, et 
celle du P. Montfaucon, qui n'a d'autre avantage sur la 
première que d'tre beaucoup plus complëte. 
L'abbé J. 
JEAN CHRYSOIPHOAS (Saint), autrement dit saint 
Jean Damascène ou de Damas, parce qu'il était de cette 
ville, appelé aussi par les Sarrasins 3lansur ou 
se rendit céièbre, au Imitième siècle, par ses lumières et par 
le zte avec lequel il soutint la eanse des images contre 
emperenrs Léon l'Isaurieu et Constantin Copronyme, Son 
père, quoique chrétien, occupait un rang distingué à la cour 
des successeurs d'Mi, qui régnaient en $rie; le talents 



.80 
les vertus du fils lui gagnèrent également la confiance des 
khalifes, qui lui contièrtnt le gouvernement de la ville de 
Damas. ZWen 676, il occupait ce poste en 726, lorsque l'em- 
pereur Léon fit paraltre ses édits contre le culte des images. 
Dans quelques discours qu'il publia en réponse à ces édit 
du#tout,ques, .ean ne craignit pas de dire qu'en matière de 
foi il n'y avait d'autre autorité que celle de PËglise. On 
prétend que l'empereur, irrité de cette réponse hardie, ne 
r«ngit pas dedescendre  l'intrigue pour en perdre Fauteur. 
ous ne rapporterons pas avec Jean de Jérusalem, qui vi- 
vait au milieu du dixième siecle, les suites de ces manoeu- 
vres : Jean de Damas, accusé de trahison et disgracië, son 
poing coupë et miraculensement remis, et autres événe- 
suents qui l'auraient déterminé « se retirer du monde. Mais 
il est plus naturel de penser que sa piCWet la difficulté de 
• ivre saintement au milieu d'une cour inlidèle lui inspirè- 
rent la rsolutionl de fuir les hommes et de chercher Dieu 
dans la solitude. Il se retira donc dans la laure de Saint-Sabas, 
près de Jérusalem. Yersé dans la plupart des connaissances 
humaines, il avait consenti  oublier tout ce qu'il avait pu 
savoir, pour échapper . la vanité qu'inspire la science ; un 
ordre de ses supérieurs lui fit reprendre la plume pour sen- 
ger l'Église des attaques de l'bérésie. Il combattit tour à tour 
les iconoelastes s les maaichéens, les nestoriens, les =,*o- 
r.oph}'sites, les monothelites, etc. ; alCunira le ridicule des 
superstitions mahométanes, et e.xposa les principes de la 
foi orlhodoxe dans plusieurs traites, qui, joints a ses livres 
de controverse, forment un cours complet de théologie. 
Cette partie de ses ouvrages se distingue surtout par la force 
et la clarté des raisonnements. Dans un li*re sur la dia- 
lectique, il appliq*ta  la théologie les rles de la philosophie 
d'Aristote, qu'il dégagea en grande partie de l'obscurite 
dont elle était enveloppée : cet ouvrage l'a fait regarder 
comme le père de la scolastique parmi les Grees. Des 
«ommentaires sur saint Paul, des homélies, des bymnes, des 
odes, etc., forment le reste de ses œuvres. Quelques écrits 
indignes de lui i,,i ont ets faussement attribués. 
Des critiques ont reprocl,é à saiat Jean Damaseëne plu- 
sieurs citalions de faits apocrs-phes ; mais, selon Baronins, 
,:e sont des erreurs commises de bonne loi, qu'on ne peut 
imputer qu'à l'inlidelitë de sa memoire et à la di|liculte qui 
existait alors de remonter aux sources autheutiques. Saint 
Jean Damascène mourut en ";30. Sa maxime favorite trait 
que le bien méme n'est 19as b«en, s'il n'est bienfait. 
L'abbc C. Bx,o-vttt. 
• IEA/ DE /IATHA (Saint), né en 100, àFaueon, 
en Provence, reçut le bonnet de docteur  Paris s ou il 
avait étudié avec succès. 11 entra ensuite dans les ordres, 
et de concert avec un pieux ermite, nommé Félix de n'a- 
lois, il fonda l'ordre des T ri n i t a i r e s pour le rachat des 
captits. Puis il fit un voyage aux cétes Uarbaresques s d'ou 
il ramena cent ring captifs. 11 mourut peu de temps après, 
 Ruine, le 22 déeembre 161/h 
JEA- DE DIEU (Saint), né en 195, à llonte-Major- 
¢l.Novo» petite ville de Portugal d'une famille pauvre, 
fut d'abord soldat,et mena une »le licencieuse, lise lit 
ensuite domestique. Un sermon de Jean d' A v i I a le toucha 
tellement, qu'il resolut de consacrer le reste de sa vie au 
service des malades; son ardeur surmont tous les obstacles, 
et il fut le fondateur de l'ordre de la {3 h a r i t é. L'archevêque 
de Grenade le soutint dans toutes ses bonnes œuvres, et lui 
donna le surnom de Jean de Dieu, à cause de sa piété. 11 
mourut le 8 mai 1550, le corps épuisé par les ansterités. 
Il hst eanonisé par Alexandre VIII, en 11;90. 
JEAN/DÉ LA CROIX (Saint), naquit en t542, à Onte- 
refus dans la ,'ieille-Castille, entra dans l'ordre des Carmes 
 l'e de vngt et un ans, et fut ordonné prëtre à  ingt- 
cinq. 11 concourut a la réforme de son ordres accomplie par 
sainte Th é r è se s et fut lui-reCe l'instituteur des {3 a r m e s 
dhaussés. Il mourut en 1591. 11 a écrit des livres de dé- 
otion m.stique, dont la plupart ont été traduits en Irançais. 
Son suznom lui venait de la nudité de sa cellule  meublée 

EAN 
• eulement d'une croix de jonc et d'un lit de plannhes. 
JE.X'. L'Eglise a eu vingt-trois souverains pontifes de 
ce nom. Qudques-uns ont été regardés comme antipapes. 
JEAN I er, surnommé Gatelin, était fils d'un Toscan 
nommé Constantins, et suc¢Ada à llormisdas. Son intronisa. 
tion eut lieu en 523. Le roi d'Italie Thé odori c l'envoya à 
Constantinople à la tte d'une ambassade, pour fléchir l'em- 
pereur Justin, qui venait d'ordonner la persécution des 
ariens. Il profita de son séjour dans cette capitale de l'O- 
rient pour établir sa suprématie sur le patriarcbe en s'as- 
seyant sur un tr)ne dans la basilique. On n'est pas d'accord 
sur le résultat de ses négociations. Quelques historiens lui 
attribuent la gloire d'avoir fléchi l'empereur par ses larmes. 
D'autres, parmi lesquels se trouve Baronius, le panég)'riste 
du saint-siCe, affirment an contraire qu'il trompa les espé- 
rances de Théodoric en confirmant Justiu dans son proiet 
d'extermination. Ce qui le prou*, cest qu'/ son retour en 
Italie, le roi le fit jeter dans une prison, où il termina ses 
jourss le 27 mai 526. Il a été canonisé. 
JEAN II, surnommë Mercure, sucsCa à Uonilace II, 
le 2 janvier 53. Les uns disent qu'il dut son surnom à 
son éloquence, les autres . l'acquisition qu'il lit du saint- 
siëge à beaux deniers comptants. Il était fils du F, omain 
Projectns, et prêtre du titre de Saint-CICent. Son premier 
acte fut la coiadamnation d'Anthémius, patriarche de Cons- 
tantinople, convaincu d'arianisme. Son second lut l'ana- 
tfiëme lancé, / l'instigation de Justinien, empereur d'O- 
rient, contre les acemrtes, moines de Scythie, ainsi nom- 
més de ce qu'ils ne dormaient pas, et qu'ils priaient jour et 
nuit ; mais ils partageaient quelques erreurs des uestoriens, 
et lents prères ne les sauvèrent point de la colëre du pape. 
La condamnation de Contumeliosus, évSque de Biez, et 
le deraier acte de ce pape, qui mourut en 535. 
JEAN III, fds du comte Anastase, succéda/ Pélage Y*, 
en 560. L'histoire ne cite que deux faits de ce pontificat de 
treize ans, l'achëvement de l'église de Saint-Philippe et 
Saint-Jacques et la restauration de deux évoques des Gau- 
les, qu'un concile de Lyon avait dëposés comme assassins 
et adultères, et qu'un second concile tenu à Chlons apr 
la mort de ce pape renferma pour la vie dans un monastcre. 
Jean 111 mourut en 
JEA,N IV, é1,, en aollt e-10, h la place de Severin, aprè. 
cinq mois de vacance, ëtait né en Dalmatie du scolasliq,te 
Venance. L'édit de l'empereur Héraclius, connu sous le nom 
d'Ecbtèse, lequel consacrait la doctrine des monothéfites, 
admettant qu'il } avait dans Jésus-Christ nne seule opération 
et une seule volontë, causait alors une grande perturbation 
dans l'Ëglise. Jean IV n'hésita point à la condamner, et 
réussit h faire brlller l'Echtèse par le petit-fils d'Héraclius. 
Ce pape signala son zèle apostolique par le Iréquent envoi 
de se_ trésors en Dalmatie et dans l'Istrie, pour racheter 
les captils des mains des pirates; il mourut en 6ttl, après un 
pontilicat de dix-huit mois. 
JEAN V, fils de C)riaque, et né dans la province d'An- 
floche, était diacre et légat, sous le pape Agathon. Uu 
vote unanime le porta sur le siége de saint Pierre, après 
la mort de Benoit II; mais il ne réna quedans son lit, où 
il mourut au bout d'une année, en 686, laissant 1,900 sous 
d'or au c|eé et aux monastères. 
JEAN a'l, Grec de nation, fut Cu en 701, pour succéder 
à Serge I «. Son pontificat de deux ans trois mois et douze 
jours n'est guère connu que par l'absolution de saint V(il- 
frid, que l'arcltevëque de Canterbury avait accusé devant 
un concile. Jean V[ ie torça de retourner en Anglcterre. Le 
territoire de Ruine ravagé par le Lombard Gilulfe, duc de 
Bénévent, ne fut détivré des troupes de ce barbare que par 
les riches présents du pontile, qui mourut le t0 janvier.705. 
JEAN nIl, autre Grec, lui sueeëda. Son përe se nommait 
Platun. Justinien 11 lui envoya les actes du concile in trullo 
avec deux évèques cbargés de lui demander son approba- 
tion : il le. reuvola sans rien déeider. Quelques historiens 
alfirment qu'Aribert, roi des l.mbard, lui lit don du pa- 



JEAN 
trimoine des Alpes Cottiennes; Platine réçoque en doute 
ette donation. La restauration de quelques éllses complète 
l'histoire de ce pape, rnort en 
JEAN VIII fut Cu et consacré le 14 dcembre 872, à 
la place d'Adrien Il; il était archidiacre et Romain de nais- 
sance. Son pontificat fut remarquable par le courounement 
de trois empereurs, Charles le Chauve, à Borne, en 875; 
Louis le Bègue, à Tro:yes, le 7 septembre 878; et Charles 
le Gros, à Borne, en 88t. Ce pape présida ou convoqua onze 
¢onciles. Dans le premier, tenu à Bavenne, en 874, il essaya 
en vain de terminer le différend du doge de Venise Ursus 
avec Pierre, patriarcle de Grade, à l'occasion de l'eu- 
nuque Dorninique, Alu éveque deTorcelle, contre la défense 
des canons. Le second, tenu ì Pavie, en 876, fut appelé 
anssi parlement-, parce qu'on y fit des règlements pour l'é- 
lection des empereurs, et qu'il fut présidé par Charles le 
Chauve. Dans le troisième, celui de Ponlion, en France, 
qui fut présidé par le rnrne souverain, deux Iégats de Rorne 
firent vainernent reconnaitre Ansagise, archevêque de Sens, 
comme primat des Gaules et de la Germanie par l'autorité 
du saint-siCe et de l'empereur lui-mme; H i n c m a r de 
Reirns et plusieurs autres 6viues proteslèrent contre cette 
usurpation. Le quatriëme concile fut tenu à Itome en 877. 
Jean VIII voulait y terminer l'affaire de l'ëvèque Dotal. 
nique ; mais les prélats de la Venétie refusèrent dy para|tre, 
et le pape se borna à confirmer et justifier l'élection de 
Charles le Chauve, auquel son neveu Carloman disputait 
l'Italle. Dans le cinquième, ouvert ì lIavenne le 22 juillet 
77, furent votés plusieurs canons relatifs à la discipline de 
l'Église, dont les désordres appelaient une prompte réforme. 
A cette époque, l'Italie était troublée par les incursions 
«les Sarrasins; le pape ne cessait d'implorer les secours des 
puisnces chr¢tiennes. Les ravages de ces étrangers s'ten- 
riant dans la Sabine et la banlieue de lome, Charles le Chauve 
s'avança jusqu'à Verceil, pour les combattre; mais l'arrivée 
de Carloman sur ses derrières lui causa une telle frayeur, 
qu'il oublia le but de son voage, et le pape fut réduit à 
payer ou à promettre de payer un tribut annuel de vin- 
cinq mille rnar¢s d'argent aux pirates. Sa laiblesie encou- 
ragea les séditions : Lambert de Spolette et AIbert, fils du 
comte Bonlface, entrèrent dans le parti de Carloman, s'em- 
parèrent de lapersonne du pontife, et, se riant de ses ana- 
thìrnes, proclamèrent leur nouveau maitre dans P, ome. 
Jean se saura de lenrs mains, vint chercher un refuge en 
France, et tint son sixième concile à Troes ; on  renou- 
vela l'excornrnunication du comte Larnbert, et de grands 
priviléges y furent accordés aux éçiues au préludice des 
puissances temporel]es, en présence de Louis le Bègue. 
Rentré dans Borne, le pape  t[nt son septième concile, 
le 5 mars 879, et reçnt dans le giron de l'Eglise le prince 
et les peuples de Servie et de Dalmafie, qui s'étaient déta- 
chés de l'obédience du saint-siCe. Dan» le huitiëme, tenu 
également ì Borne, le 15 octobre de la rnme année, lut 
dëposé Anspert, archevêque de Milan, qui avait refusé 
de eomparattre à deux conciles où il avait été cite. Un 
dixième |ut ouvert à Gonstantinople par le patriarche Pho- 
tius, au mois de novembre. Trois cent quatre-vingts vë- 
ques s'y rendirent, et le pape y envoya le cardinal Pierre, 
sur l'invitation de l'empereur Basile. 
Jean VIII avait consenti au rétablissement de Photius, 
dont ses deux prédécesseurs avaient prononcé la dëposifion : 
il espérait obtenir par ecite condescendance des secours de 
l'empire d'Orient contre les Sarrasins, et la Ilotte de Basile 
remporta en effet une grande victoire sur ces pirates. Mais 
elle n'arrta point leurs ravages. PImtius éluda de répondre 
sur l'affaire des évéques de Bulgarie, qu'il disputait au saint- 
siCe, et le légat de Jean eut la douleur d'entendre con- 
damner la rnémoire des papes Nioelas I « et Adrien Il. Le 
onziëme et dernier concile s'ouvrit à Borne, le 24 septembre 
$8t, et se termina par la dposition de Romain, arche- 
vëque de Ravenne. qui s'était permis de sacrer un évque 
l:aenza sans l'autorisation du pape. 

58I 
L'évé.que F o r rn o s e eut de grav,s déml avec Jean Y I I 
dont la faiblesse et les déréglernents dégradaient la chaire 
de saint Pierre. Cette querelle lui surcut. II était mort 
le t dembre 88, empoisonné et asomm, elon les 
Annales de Fulde, en punition de se infamies, qui sont a 
peine dissimulées par le cardinal Baronius. On a de lui 320 
lettres sur différentes questions de discipline, et surtou 
sur les affaires ternporelles de l'Italie. 
JEAN IX taJt fils de Rarnpalde et natif deTibur. Une cabale 
portait le prttre Sergius. Celle de Jean triompha; et il suc- 
céda en 900 à Théodore Il. Son premier,in fut d'&sembler 
nn concile pour rétablir la rnmoire du pape F o r rn os e, qne 
ses prdécesseurs avaient flétrie. Platine l'accuse ì ce sujet 
de n'avoir fait que rveiller des séditions teintes; mais Ba- 
ronius le loue de cet acte de justice. C'est sous son pontificat 
que fut rigée la métropole d'Oviedo, en Espagne, et consa- 
crée l'église de Saint-Jacques de Cornpostelle. On lui prête 
nnn maxime qui loi fait encore plus d'honneur. Hervé, ar- 
devue de leirns, se plaignant à lui de c que les Nor- 
mands convertis retournaient au paganisme -- « l',amenez-les 
par la douceur et par la raison, rpondit Jean IX, et non 
par la force des armes. » Il mourut en 905, après cinq ans 
de rèe. 
JÈAN X était né ì lorne, d'un nornrné Sergius. Clerc 
de Ravenne, Cu ì l'évëché de Bologne, puis ì l'archevhé 
de Ravenne, il fut nommé pape à la place de Landon, l'an 
912, par les intrigues de sa rnaltresse Théodora. Son 
premier acte fut celui d'un sotdat : il marcha en personne 
contre les Sarrasins, et les défit sur le Garillan, avec l'aide 
des princes de Capoue et de l'empereur Bérenger; il termina 
en.uite un schisme qui s'tait élevé entre les Églises d'Orient 
et d'Occident, relafivement aux troisièrnes et quatriëmes 
noces. Mais ses crimes causèrent enfin sa perte : Gui, mar- 
quis de Toscane, tait rnaltre de Borne, et l'impudique M 
rozia, sa femme, ne pouvait souffrir le crcdit de sa die 
sœur T|,éodora. Elle fit saisir le pape par ses satellites, et 
eter dans une prison, od elle l'étouffa, dil-on, entre deux 
oreillers. 
JEAN XI, fils naturel de cette rnéme Marozia et du pape 
Serge III, monta, cinq ans après, sur le trfne de saint 
Pierre, h la ptace d'Étienne VIII. Il se nommait d'abord 
Octavien, et régna sous le bon plaisir de son inlme rnëre. 
Mais le roi Hugues, nouvel poux de cette mégère, aant 
donné un soufflet à un autre de ses btards, le comte AI- 
béric, celui-ci souleva le peuple, chassa son beau-përe, se 
rendit maltre de Borne, et enferrna sa mère et son frère, 
le pape Jean XI  dans le château Saint-Ange, où il mourut, 
en 93. 
JEAN XII le surpassa en scélératesse. C'Cait encore un 
Octavien, né de l'inceste de Marozia avec son propre 
Albédc. Les uns lui donnent douze ans, les autres dix-huit, 
au morneut de son installation. Aucun pape n'a plus que 
lui déshonoré le pontificat par toutes sortes de vices et de 
dcbauches. C'est en 956 que cet enfant dépraçé devint le 
successeur d'Agapet lI. L'empereur Othon étant accouru en 
Italiœe, à sa prière et à celle d'autres prélats, pour délivrer 
le pays de la trannie de Bérener et de son lils Adalbert, 
les seigneurs et le clergé, forts de sa pésence, déporent 
ces deux souverains, et couronnèrent Othon, qui fut reçu 
à Borne aux acclamations du peuple : il confirma les dona- 
tions de Pepin et de Charlemagne, et rétablit le patrimoine 
de saint Pierre. Mais Jean XII ne tarda point ì le payer 
d'ingratitude, en se coalisant contre lui avec les princes 
rnrnes dont il avait proçoque la déposition. Othon assié- 
geait alors Montefeltro, où Bérengcr s'était réfigié. Au 
bruit de cette rcvolte, il revient sur la capitale, met en 
fuite le pape 963, et convoque un concile pour lc juger. 
Les accusateurs ne manquèrent point. Ses crhnes horribles, 
ses adultëres» ses sacriléges furent révélcs et attest par 
les clercs et le peuple. Sommé de comparaltre pour se tic- 
rendre, il ne répondit que par une menace d'excommunic- 
lion, et l'empcrcur le déposa. Léon 'II! Eut mis à sa 



582 
plu, e. Mais le pape décbu a, ait emporté les trésors du Va- 
ti¢an ; il savait la haine que k Italiens portaient aux Alle- 
mands, et l'empereur eut bienfft à réprimer une violente 
séd, tion de ces mmes Bomains qui l'avaient remercié aussi 
de leur délivrance. Le châtiment fut terrible, et n'en fut 
pas plus efficace. A peine eut-il conduit son armée dans l'Oto- 
brie, que le peuple, excité par les maitresses de Jean XII 
cbassa le pape Lé'on, et remit le fils de Marozia sur le saint- 
siCe, en 96. Jean signala  retour par d'effroables sup- 
pfices : il força les mrnes prélats qui l'avaient déposé 
dé-ader son compétiteur, à condamner tous ses adhérents. 
Mais un mari qui le surprit nne nuit dans les bras de sa 
femme déliwa Borne et l'Eglise de ce misérable, que Baro- 
nius lui-mëme a appelé un coinCieu, et que Platiue a 
justement déclaré le plus scélérat des hommes. 
JEN Xlll suceéda, en 965,  ce méme Léon 'lll que 
l'empereur Otbon avait rétabli sur son siCe. 11 était Bu. 
main, fils d'un évque, nommé Jean comme lui, évque 
de tarui, et sa vie fut irréprocbable comme ses m.urs. 
Cependant l'anarchie était dans Borne et n'5 respectait rien. 
Une sedilion suscitée par Bofrède, comte de Campanie, 
forç«a le nouveau pape de se réfi,gier à Capone. Mais ce 
comte a3anl vté tllë par un ami de Je tu Xlll, et l'empereur 
a.vant ,opasé les Alpes  la tte d'une armée, le pontife 
fut rétabli sur son iég_e. C'est  la voix de ses Iats qt,e 
les Polonais se convertirent au chrLtianisrne. Les Hongrois 
suivirent cet exemple en l'an 9ç3, et deux reines, AdCaide 
de Hongrie et Dambrawca de Bohéme, furent les priori- 
faux instruments de cette double conversion. En reconnais- 
nce des services de l'empereur, Jean Xlll Cendit les pri- 
vilCes de l'archerAque de Magdebourg, et en fit un primat 
de Germanie. il couronna le jeune Othon, que son père 
avait fait venir à Borne pour cette eérémonie, et envoya 
des Iégats i Constantinole pour appuyer l'ambassade impé- 
riale qui était ailé negocier un mariage entre les deux fa- 
milles. Mais l'empereur Nicbphore, irritë contre la cour de 
Borne, mallraita ces Iégats, et voulut que son patriarche 
Polyêucte fit un acte de souverainete spirituelle en Italie, 
en erigeant Otrante eu arcbevchc, pour puni," le pape de 
l'avoir appele empereur de Grees. Jean XIII ne vit point 
la fin de cette dispute, il mourut le 6 eptembre 972, après 
un ponttficat de sept ans. Baronius lui Mtribe l'invention 
du baplëme des cloclt es, que d'autres font remonter plus 
haut. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il baptisa la grande 
cloche «le Saint-Jean-de-Latran. 
JEAN XIV snceeda, en 984, à Benoit VIl. Il se nommait 
Pterre, était éVlUe de Pavie, et avait Ce nommé chancelier 
,l'ltalie Iar l'empereur Otbon Il. 11 eùt mieux lait de sen 
tenir a ces emplois; car son pontificat fut constammer, t 
traversé par les intrigues et les violentes de I'antipape 
niface Vil, qui l'enferma dans le chMeau Saint-Ange, 
après huit mois de règne et quatre mois de uffrances, il 
mourut, «le |aire et de misère. 
JEAN XV succéda, le 9.5 avril 986, à ce mème Boni- 
face  l l, qui avait dëtrOné le prëcedeut. Un autre Jean avait 
été Cu avant lui ; mais comme il était mort avant d'ètre 
sacrë, l'histoire ne Pu point compté parmi 1 papes. 
Jean XV était lils d'un prétre romain nommé Ln. Le tsran 
Crescentius régnait Mors dans Borne, et le nouveau pape 
s'était retiré dans une place de Toseane pour ëchapper à sa 
haine ; mais la crainte des Allemands irrita le despote, et 
Jean XV se rendit aux VœUX du peuple, qui le rappelait 
dans sa capitale. Une seule affaire remplit son pontificat de 
dix années. C'est celle d'Arnoul, frère naturel du duc 
Charles de Lorraine, légitime héritier du dernier carlovin- 
rien, qu'Hugues Capet avait eu l'imprudence de nommer 
au siCe métropolitain de Beims. Arnoui traldt l'usurpateur 
pottr son frère, et Hugues, sollicitant sa déposition en cour 
de Borne, eommen.ca par nommer àsa place le laineux Ger- 
bert, qui devait plus tard arriver à la tiare sous le nom de 
Sylvestre ll. Jean XV, prévenu par les amis du d,le de 
Lorraine, ne voulut pu« n,ente recevoir le. envovés de lhl- 

JEAN 
rues Capet. Mais celm-ci fit prononcer sa déposition par un 
concile français, qui procéda en mme temps à l'intronisa- 
tion de Gerbert. Le pape cassa toutes les opérations de ce 
concile, et excommuuia les prélats qui l'avaient tenu. Ger- 
bert, de son cOté, soutint par ses écrits les libertés de 
l'Église g a I I i c a n e, et le roi Hugues renous, ela ses tenta- 
tives auprës du saint-siCe. Jean XV persista dans ses ana- 
tbèmes : il enoTa même un légat en France pour présider 
nn nouveau concile. Cette asrnblée s'ouvrit à Mouson, 
le 2 juin 996. L'éloquent plaido}'er de Gerbert  fut mal 
soutenu par Hugues Capet, qui avait trop boin de la cour 
de liome pour la mécontenter, et l'archerCue Arnoul fut 
rétabli par l'autorit d,I saint-sioEe. Ce débat ne finit point 
là, mais Jean XV n'en vit point la solution, car il mourut 
dans cette mme annëe. Le père Maimbourg a Ioué ses çertus, 
son savoir et son courage ; mais le biographe de Saint- 
Abbon, plus rapproché des ëvénements, l'accuse d'avoir 
été disposé  tout vendre. He5degger ajoute qu'il pillait l'É- 
glise pour enrichir sa famille, et lui attribue la fatale inven- 
tion du népotisme. On ignore si c'est à lui ou à Adrien III 
qu'est due la première ca n o n i s a t i o n de saints. 
JEAN XVI se nommait Philagathe. C'était un CalabroJs, 
në à Rossane. il avait été nourri par charité à la cour d'O- 
thon il, qui lui avait donné Pévéché de Plaisance, et l'avait 
envo'ye à Constantinople demander la fille de icéphore en 
mariage, levenu à lome, en 997, après la déposition de 
Grégoire V, par le tsran Crescentius, il acheta le saint- 
siége de cet oppresseur de l'ltalie. Son règne fut de peu de 
durée. Othon III ramena Grégoire à Ilome : le peuple se 
saisit de Jeao XVI, lui arracha les yeux, le nez, et pré- 
cipita son cadavre du cbàtcan de Saint-Ange dans le Tibre. 
Les ëcrivain ortho]oxes le considèrent comme antijape, 
et l'abbé de Yallemont Pa ru'yWde la nomenclature; mais 
les historieus de Frar, ce et d'Allemagne ont persisté  
comprendre. 
JEAN XVil. C'était tan nommé Sices, pasan selon Pla- 
tine, geutilhomrne suivant le pre Pu#, qui succeda, en 
1oo3, à Sylvestre II. C'et tout ce que l'histoire raconte de 
son pontilicat de cinq mois. 
JEAN XVIII fut son successeur immëdiat. Il était 
main, et se nommait Fasan. Sacré le 19 mars 100, il n'est 
connu que par l'Cection de |'évché de Barnbe, à la sol- 
licitation de l'empereur Henri. Ce pape réna cinq ans, dans 
la mollse et l'oisivet : il mourut le 18 juillet 1006. 
JEAN XIX, créature des comtes de Serai et de Tosca- 
nelle, sureCa à son frère Beau! t V ! Il, en 1024. Les uns 
disent qu'il était laïque avant son exaltation, les antres en 
f»nt un évque de Porto. Les clameurs de toute l'Ëglise 
d'Occident l'empêchèrent seules dè son début de vendre 
au patriarcl,e de ConstantL,ople le titre d'évtq,m universel 
d'Orient. Il couronna l'empereur Conrad à Ruine, le 26 
mars 102î, en présence de Canut, roi d'Angleterre et de 
Bodolphe, roi de BourgoLme, et six ans après ce méme 
Conrad le rétablit par la fort, des armes sur son siCe, 
d'ou une sédition l'avait renversé, biais il ne jouit pas long- 
temps de son triomphe; il monrut le 8 novembre 1033, 
après neuf ans et trois mois de pontificat. 
.EAN XX ne devrait pas avoir plus que Plfilagathe le 
droit d'ëtre cornpté parmi les pontifes de ce nom. L'infame 
B e n o ! t I X, chassé de Borne pour ses crimes, lui rendit la 
tiare pour l'opposer à un autre.antipape, qui avait pris le 
nom de S y I v e s t r e 111; et ce méme BenoR, usant recon- 
quis par le glaive le palais de Latran, les trois papes ou 
antipapes se partagèrent les églises de Ruine et le« revenus 
du saint-sie. Ce monstre à trois tëtes, ce triforme 
bium, comme l'appelait nn poète ermite de ces temps d'a- 
narchie, dura jusqu'à l'avénernent de G r é g oi r e V I, entre 
les mains duquel les triurnvirs poutificanx dposèrent leur 
tiare. Jean XX alla 6air ses jours dans Pobscurité. 
JBAN XXI sueceua au pape Adrien V, le 13 septembre 
12.'6. Il se rommait Pierre-Julien. Lisbonne, sa patrie, 
l'avait appelé le clerc ui'emel, à cause «le son vaste sa- 



EAN 
voir, et il était cardinal évque de Tusculum quand il fut 
honoré des suffrages du conclave. 11 reçut le 7 octobre 
suivant la foi et l'hommage de Charles, roi de Sicile. L'année 
suivante il rétablit l'harmonie entre le roi de France, Phi- 
lippe le Hardi, et Aifonse, roi de Castille, pour qu'ils pus- 
sent tourner leurs communs elforts vers la Terre Sainte. 
Ses iégats parcoururent dans ce but l'Ailemagne, la Hon- 
grie et l'empire d'Orient. Mais un bàtiment qu'il faisait élever 
à Viterbe s'étant écroul sur sa tëte, il mourut six jours 
après cet accident, le 16 mai 1277, laissant la réputation d'un 
grand médecin, mais d'un pontife peu propre au gouverne- 
ment de l'Église. Platine assure que le véritable pape était 
le cardinal Jean-GeCan des Ursins, qui lui succéda sou le 
ltom de [icolas III. 
JEAN XXil (JAc.Qtws »'OSSA), né à Cahors, en 1244, suc- 
¢éda, le 7 ao6t 1316, à Clément V, après une vacance de deux 
années. La cour pontificale résidait alors à Avignon, et les 
cardinaux s'étaient assemblés plusieurs fois san, pouvoir 
s'accorder, quand le omte de Poitiers, frère de Louis X de 
France et régent du royaume, les enferma dans un couvent de 
Lyon, en leur déclarant qu'ils n'en sortiraient point avant 
d'avoir fait un pape. Quarante jours après, Jacques d'Ossa ou 
d'Ense fut Alu, et prit le nom de Jean, quoique ce nom eOt 
tant de fois porté nalheur au saint-siCe. C'ëtait un fils de 
savetier, qu'avait élevé par charité Pierre Ferrier, archerCue 
d'Arles. Son reCile lui avait d'abord valu i'êvéché de FfCus, 
et il avait succëdë  son protecteur comme chancelier du 
roi de ffaples, Robert. Ce roi le fit nommer successivement 
évëque d'Avignon, cardinal et évëque de Porto, d'où il fut 
promu à la papauté, à l'ge de soixante-dix ans, après avoir 
jure au cardinal Napoléon des Ursins de rétablir le saint- 
siíge à Borne. Mais ce fut la première chose qu'il oublia. 11 
débuta au contraire par ériger en France un grand nombre 
d'évchés, et par adresser aux rois de France et d'Angleterre 
des admonitions qui n'avaient d'autre but que d'établir sa 
.uprêmatie. Le schisme des frères mineurs et la secte des 
bguins ou fra t ri cei les furent condamnês par ses bulles 
dis 15 mars et du 3o decembre 13i7. 
Cependant, la guerre des guel[es et des gibelins devait 
lui susciter de plus grands embarras. Chef des gueifes, il 
excommunie leurs rivaux, déclara vacant le trfne tropC 
riel, que se disputaient Louis de Bavière et Frédëric d'Au- 
triche, et s'attribua le gouvernement de l'Empire. L'em. 
pereur Louis, vainqueur de son rival, profita de l'absence 
du pape pour travailler les peuples derltalie, qui fut livrée 
à l'auarchie la plus épouvantable. Les deux souverains ne 
combattaient cependant que de la plume. Le pontife lançait 
des mouitoires contre Louis de Bavière, et l'empereur y 
répondait par des protestations et des demandes de sursis. 
Jean XXII se lasse de tant de délais. Il prononça la dépo- 
sition de Louis, et rexcommunication des Visconti, ses ad- 
hérents, qui n'en tinrent aucun compte. Deux docteurs, 
blarsile de Padoue et Jean de Gand, mirent leur éioquenco 
aux gages de l'empereur ; ils furent excommuniës à leur 
tour. Louis en appela au futur concile, et s'avança jusqu'à 
Ruine, après avoir pris la couronne de fer à Milan, où, de 
l'avis de plusieurs prélats gibelins, il avait déclaré le prêtre 
Jean, prétendu pape, convaincu d'héresie sur seize articles. 
Jean fit enfin préciser une croisade contre l'empereur, et 
Lmlis de Bavière publie la déposition du pape dans une 
assemblée tenue au milieu de la place de Saint-Pierre. Ce 
fut en vain que le jeune Jacques Colonne osa protester 
contre cette déposition, en lisant au peuple romain la bulle 
d'excomnunication lancée pa" le ponlife ; l'empereur fit 
poursuivre le téméraire, qui heureusement ne se lals.a 
point atteindre• et fit élire pape Pierre de Corbiëre, qui prit 
le nom de Nicolas V. 
Celui-ci debuta suivant l'usage par l'ecommunication 
du pape Jean, qui le lui rendit avec usure. Les gueifës ne 
lardèrent pas à rentrer dan Borne sou la conduite dis 
gat Jean des Ursins. Ii en chassërent Pierre de Corbière, 
et signalèrent leur vic{oire pat" le mas.acre des ,ibelins et 

583 
la profanation de leurs tombeanx. L'empereur emmen son 
pape à Pise; mais  peine eut-il repris le chemin de rM- 
lemagne, que Pierre de Corbière, abaudonné de ses amis, 
et traqué par ceux de Jean XXll, n'eut d'antre ressource 
que la clémence de ce pontife. Il vint s'humilier aux pieds 
de son heureux rival, qui l'adroit au baiser de paix ; mais 
la réconciliation de Louis de Bavière était plus difficile, 
et ce di«cord ne finit point de son vivant. Au milieu de 
tous ces embarras, le pape s'occupait de la conversion des 
Arméniens et des Tatars; mais, tout en poursuivant les hé- 
rétiques et les idol'tres, il fut lui-mme traité d'herétique 
par ses propres partisans à l'occasion de la vision héati- 
tique : il avait prétendu que les àmes des bienheureux ne 
devaient voir Dieu face à face qu'au jour du jugement der- 
nier; et cette nouveauté» prchée trois fois par lui du haut 
de la chaire pontificale, scandalise le monde chrétien. Un 
prédicateur anglais ayant tonné contre cette hérésie, le pape 
Jean envenime la querelle en faisant jeter le moine en pri- 
son. Le roi de France, Philippe de ialois, alla ]usqu'à 
menacer le pontife de le faire brOier vif s'il ne se rétractait 
pas, ,.t celui-ci, poussé à bout, après trois ans de disputes 
et de scandale, déclara en présence de vingt cardinaux qu'il 
abjurait sa proposition. Il mourut le 4 decembre 133,, à 
I'ge de quatre- ingt-dix ans. On vante sa fermeté inébran- 
lahle, son savoir et sa piCC Mais son ambition fut immo- 
dérée comme son aari«e, et c'est lui qui ajouta une troi- 
sième couronne à la ri are, pour marquer la supérioritë des 
papes sur les rois. li publie les C i é m e n t i n e s et composa 
les E x t r a v a g a n t e s, auxquelles se rattache le Cor/s du 
Droit canonique. 
JEAN XXIil (BA«uAz. COSSA)était un Napolitain. 
11 feignit de ne pas vouloir de la papauté, que Louis Il, roi 
de Naples, sollicitait pour lui, après la mort d'A le x an- 
d re V ; nais, s'il faut en croire quelques historiens, il se 
revètit iui-mème du manteau de saint Pierre, que les car- 
dinaux lui présentaient pour en couvrir le plus digne. On 
ajoute qu'étant à peine archidiacre de Boiogne, et se mettant 
en route pour Ruine, sous Boniface IX, il dit à ses amis 
qu'il allait au pontificat. Sa jeunesse n'avait pas été fort 
pure : nWgentilhomme, il avait commencé par la piraterie 
et la debauche, et à peine dans les diguités ecclésiastiques, 
s'y était signalé par la cupidité la plus scandaleuse. Boni- 
lace IX l'avait renvoyé à lologne, pour le parer de ses 
naitresses; il y arriva en conquéran,/ la tëtc d'une armée 
qui défit celle du duc de Milan, Jean Galéas. Mettre du 
pays, il le dévora par ses exactions, brave les ordes d'In- 
nocent Vil et les anathèmes de Grégoire XII, suscita à ce 
dernier des embarras sans nombre. Plus calme sous Aiexan- 
dte ¥, il lui succéda le 17 mai 1410. Pierre de Luna, connu 
sous le nom de B e n o I t X l I I, vivait encore, et l'Espagne, 
rÊcosse et l'Armagnac persistaient à le reconnaitre. Gré- 
goire Xil végélait aussi dans quelques faibles parties de i'Al- 
lemagne et de la haute Italie. Le nouveau pape, protégé par 
l'empereur Sigismond, et maitre dis Vatican, fut reconnu par 
la France, malé son empressement à luidemander des sub- 
sides. Cette prétention réveilla toutes les susceptibilités de 
l'Êglise gallicane; l'université protesta, et, tout en accordant 
un laibi secours, le parlement défendit ses priviléges contre 
les légats du saint-siCe. 
Sur ces entrefaites, Louis d'Anjou, défenseurdu nouveau 
pontife, battait, sur les bords du Gariilan, le 19 mai 1411, 
l'armée de Ladislas, son comp«tieur au tr6ne de Xaples • 
et protecteur de Grégoire XII. Jean appnya cette victoire 
de ses anathèmes, et prëcha une croisade contre le vaincu. 
Mais Loui d'Ajou ne sut point profiter de ses avantages, 
et Ladislas, vainqueur à son tour, força le pape à le re- 
connaitre, en abandonnant de son c6é le parti de Grégoire. 
Ladislas se fit nëme payer cent mille ducaL cette condes- 
cendance, et ses troupes, dispersions autour de Ruine, n'en 
contrarièrent pas moin !'ara-ivre des prélats au concile con- 
voqué par Ic pape Jean. il fit plus, en l-il3, informé qua 
l'avarice et ics extorsions de ce pontife l'avaient ruin6 dans 



.J 0 - 
l'esprit ds lomain% il surpril a pitale dan I uil u 
7 u  juin. «a 111 ril la ui la ome  ri 
à la barre pacit de son ennemi, se relira dans Bologne, 
et soIIicioE les secourt de Sismond. Cet empereur prolita 
,le s craintes pour lui aacher la convlion du fameux 
concile de Constan ce, après lui avoir reprocbé en face 
les soendales dont il a[fligeait l'Êglise. Ce n'est qu'après de 
longues hsitations qu'il se décida à s'y rendre pour y voir 
condamner et executer le celèbre réformateur Jn H u s s; 
mais lui-mme y futjou et y devint dupe de ses propr 
intrigues. On dressa contre lui une liste d'accution qui, 
selon Thodoric de iem, n crétaire, contenait tous les 
pécbés morte avec un nombre inlcuIable d'abominations. 
Son ération ne lit que rerder le jugement. CilWà compa- 
raltre, suspendu, arr6t, traité d'instueux, d'adultère, de 
suborneur, d'empoisonneur, il fut enfin déposé, comme ses 
deux compétiteurs, et euferm dans la pson d'Heidelber. 
Il en sortit quatre ans apr,.s, après avoir racheté sa lirt 
30,oe0 écus d'or; et vint h Borne s'humilier aux pieds du 
nouveau pape Martin V, qui le crea oerdinal ëvèque de 
Erascati et doe« du sacre collge. Il mourut celle mëme 
année, de chagrin ou de poison, à Floren. 
¥1ET, de l'Acadëmie Franalse. 
JEAN empereur» d'Orient. 19e: Omar (Empire d'), 
COMNËNE, LASCMtlSs PALËoLUE¢ K,NTAKUZÈNE» PIC. 
JEAN. La France compte deux rois de ce nom. 
JEAN 1 , fils poslhume de Louis X, ne vécut que cinq 
iours. Comme il ne resit de Louis X qu'une lille en bas 
àge, la couronne psa aux mains de P h il ip p e V I¢ Long, 
ncle paternel de cette jeune prinsse, en sertu d'un arrêt 
du parlement. 
JEN 11, dit Jean le Eon, succda  P h ilip pe de Va- 
ois, son père. I fit sacre à Boiras, le 26 seplembre 1350. 
 pape, dès qu'il fut info du changement de règne, 
envoya d'Avignon des paroles de paix aux deux souverains 
de France et d'Angle[err. Eles eurent quoeque indue»ce 
sur Édouard. ce qui fut cause peut-ètre que la trëve fut 
prorogee jusqn' trois ans. Celle Irve n'inlerrompit ce- 
pendant pas les hostililés dans tontes les parties de la 
France. 
Le premier ac[e de Jean le on, installé sur le r6ne, fut 
un acte de cruauté et de tyrannie, quel'on peut considerer 
comme le principe de tous ses malheurs. Le comte d'Eu, 
connctable de France, dit prisonnier sur parole d'douard. 
Il y avait contre lui quelques soupçons assez vagu : on 
disait qu'il élait moins le prisonnier que Uami du monarque 
anglais, et que son retour à Paris éit peut-être un acte 
d'espionnage. Mais le plus grand grief contre lui 6tait la 
place qu'il occupait. Depuis lonemps Jean voulait faire 
son connéble de Charles d'Espague, dit La Cerda, son 
ad d'enfanoe. Le oemte d'Eu fut arrêté au s»rlk de l'h6tei 
de Nle, oh habitait le roi. On n'éit pas assez sfir de la 
complsance de la oeuf d pairs ; on s'affranchit m6me des 
apparences de la justice, et en prénoe du duc de Bour- 
goe, des com d'Armaac et de Mont[ort, dans 1 
appaements même de l'b6tel de Nesle, le comte d'Eu fut 
dëpité. Charl d'Espace immdiatement apr fut in- 
vesti de la diité de connle. 
La trêve conclue entre I deux uafions expirait au mois 
d'août 1351. Elle fut renonvelée; mais Eouard la re«pec 
peu, et pendant que le roi Jn cél6brait à Saint-Ouen l'insti- 
tution des chevaliers de l'Etoile, la trahison de Guillaume 
de Beaucourroi ouvrir au monarque ais la ville et le chà- 
u de Guin. rse le roi de Fnoe envoya des déput 
ì Edouard pour se plaindre de ce manque de parole, l'Anglais 
lui fit oet c6Iëbre plantee, peu die d'un prince qui 
cherchait  oblenait le renom deloyau : il répondit aux 
dépu» français que I trtves éent marchandes.. La si- 
tuation dëplorable où la Franoe tait réduite alors for le 
roi à différoe lavengnce de cet affront. Une famée affreuse 
dévorait le oeuf de la Franc. Les bras, presque tous employés 
 poer le fer, ne teut plus de sillons. Dans I cam- 

JEAN 
pagnes, c'était l'écorce des arbres dont on senoorrissait ; 
Paris, le seplier de biWse payait huit livres parisis. Dans plu- 
sieurs provinces, ou avait été obligé de renoncer h l'imp6t. 
Le roi Jean ouvrit pour la France une nouvelle source 
de malheurs en donnant sa fille Jeanne à C h a r le s, roi de 
I/avarre. Ce prince fit aussit6t assassiner le connétable de 
La Cerda. Jean dans cette circonstance n'écouta ni son 
ressentimenl ni la justice. Il s'abandonna d'abord  une 
douleur excessive: pendant quatre jours il ne voulut voir 
personne ; ensuite, son courroux parut s'amollir, il céda 
aux intercessions des reines Jeanne et Blanche. Charles re- 
vint à Paris, et, par l'organe du cardinal de Boulogne, le 
roi hfi accorda un pardon revëtu de quelques formalRés de 
justice, biais ce pardon n'empècha pas les bostilités d'éclater 
à quelque leups de I/ et Charles le 1lauvais de s'allier aux 
Anglais. Jean s'en vengea en le fallut prisonnier par tra- 
histm. 
Cependant les conditions qu'Edouard offrait pour la 
paix n'étaient pas acceptables sans désbonneur. Aussit6t 
cieux armées de deux c6tés différents menacèrent la France 
l'une, conduite par le prince de Galles, ravageait l'Auvergne 
et le Limousin avec une fureur impitoyable; l'autre» ayant 
pour chef Édouard lui-mème, dcbarquz  Calais. Le roi 
Jean, à la tLe aussi de forces imposantes, avança jusqu'/ 
SainI-Omer ; I/, il envoya délier Ëdouard, soit corps à corps, 
dans un combat singeLicr, soit forces contre Iorce. Édouard 
n'accepLa pas ce déli ; il repassa bient6t en Angleterre. 
En l'annee 1375 s'assemblèrent, pour délibérer sur le» 
mesures à prendre, les é t a t s g é n é r a u x. Les ressources 
«le la cour étaient entièrement épuisées. Le 2 decembre 
l'assemblée se réunit dans la grande salle du parlement. 
L'archcsèque «le louen fit l'ouverture des états, et patin 
au nom d roi, qui demanda par cet organe de l'argent 
pour faire la guerre. Jean de Craon pour le clergé, le duc 
d'Athi.nes pour la noblesse, et ltienne I arce I, prcv6t des 
marcfiaud de Paris, répondirent qu'ils ¢taient to ap. 
pareillës de vivre et de mourir avec le ro9, et de mettre 
corps et avoir a son service. Après plusieurs jours de dé- 
libération commune, il fut décidé qu'on opposerait aux An- 
glais une armee de trente mille hommes d'armes (environ 
quatre-vin-dix mille hommes) réunis aux communes du 
royaume ; qu'on rélablirait la gabell e sur le sel et un impôt 
de huit deniers pour livre de roules choses vendues. La 
cour ne se soumit qu'à regret à cet imptl; en outre, le 
parlement ayant désignë quelques-uns de ses membres pour 
sa levée et sa répartition, le roi se trouvait privé de la dis- 
position des fonds de la guerre, blais la n6cessitë faisait 
une loi de se soumettre à tout ce qu'il pouvait y avoir 
d'esprit démocratique dans celle disposilion. Cette ordon- 
nance, rendue aprës la déliberation des etats généraux, 
contenait beaucoup d'articles de sécurité publique, que nou 
passerons sous silence. L'exécution en fut plus difficile qu'on 
ne l'avait pensé : l'imp6t ne se percevait pas. A Arras le 
peuple se révolla, et le maréchal d'Andreghem, étant entré 
dans la ville les armes à la main, lit pendre vingt des plus 
mutins. Les états se rassemblèrent de nouveau, au moi 
de mars, et ne remédièrent que faiblement à cette penude 
extrême. 
Jean n'avait pas prévu quels nouveaux aliments l'arresta- 
tion de Charles le lanvais allait donner à la guerre civile. 
Philippe de Navarre et Godefroy d'Harconrt saluërent Edouard 
roi de France, et déclarèrent tenir de lui leurs duchés et 
leurs provinces. Ce fut alors que le duc de Lancastre, com- 
binant ses forces avec celles de Plfilippe de Navarre, assiégea 
et prit la ville de Verneuil et pénétra par là dans le Perche. 
D'un autre c6té, le prince de Galles portait dans toute la 
la France méridionale l'épouvante de son cheval noir et de 
son armure noire. Mais le mi avait donné rendez-vous à 
toute la noblesse sur les limites de la Touraine et du BIAsois. 
Le la septemble 1356, les deux armées de France et d'An- 
gleterre se rencontrèrent près de Poitiers, dans ce pays 
de vignes, de hales et de bois tailfis, qu'on nomme 



ertuis, triste pays, que le plus pur sang de la I:ranoe 
arrosa si largement. Le roi }' fut fait prisonnier. 
Quand la funeste nouvelle de la journée de Poitiers eut 
retenti dans toute la France, ce fut partout un cri de cons- 
ternation et d'effçoi. Le crédit de la noblesse, vaincue sur 
les deux champs de bataille de Créc}' et de Poitiers, allait 
en s'aifaiblissant. Ce fut dans ces circonstances que le dau- 
phin Cliarles, gé seldemcnt de dix-nellf ans, prit comme 
par contrainte en mains les rénes de l'Etat. Son père l'avait 
ommé, peu de temps auparavant, lieutenant général du 
royaume. Il arriva h Paris, et au mois d'octobre il con- 
voqua les états généraux, qui confirmèrent ce titre et lui 
remirent l'autorité, mais avec de certaines restrictions. On 
exigea des garanties de ce prince, et les états, oi le roi de 
Navarre avait plusieurs partisans, demandèrent le renvoi 
de quelques oliïciers du roi iean et du Dauphin, accusés 
d'avoir mal conseillé la cour. L'évéqte de Laon, dit Le coq, 
demanda la liberté du roi de Navarre. Mais le conseil prive, 
qui sentait tous les périls de l'antorite royale, refusa ces de- 
mandes et fit dissoudre les état.J. 
Le parlement en se retirant n'avait noté aucun subside : 
le dauphin s'adressa inutilement à Marcel, que son omni- 
potence sur le tiers état rendait un homme très-puissant 
et très-redoutable. Ne pouvant rien en tirer, il envoya plu- 
sieurs des gens de son conseil pour engager les principales 
villes du royaume h subvenir aux dépenses de l'État. Il 
partit Iui-mëme pour Ictz, laissant à Paris son jeune frère, 
le duc d'Anjou, qu'il nomma son lieutenant. Ce voyage 
n'était qu'un prétexte. 11 chargea son frère de rendre une 
ordonnance de refonte et d'altération des monnaies, maniëre 
¢ertaine et honteuse d'avoir de l'argent. Il n'osa pas rester 
à Paris pour attendre l'effet de son ordonnance. Le reC 
contentement fut général. Marcel,  la tëte des principaux 
habitant.% n'eut pas de peine  faire suspendre l'execution 
de l'ordonnance. A son retour à Paris, le dauphin fut ac- 
cueilli par les présages les plus lunestes. Il convoqua une 
assemblée auprès de l'église de Saint.Germain-l'Auxerrois. 
Marcel s'y rendit, et déclara au nom du tiers qu'il ne se 
soumettrait jamais  l'ordonnance sur l'altération des mon- 
naies. L'ordonnance fut révoquée et les états gêneraux 
rappelés. Une fois rétablie, cette assemblée profita habile- 
ment de son triomphe ; elle s'attribua à elle-mélne le pou- 
voir de se rassembler quand bon lui semblerait; elle coin- 
posa, avec trente-six de ses membres, un conseil qui dut 
l»ourvoir  l'adm,nistration et au gouvernement; elle fit dis- 
soudre la cour des comptes et les deux premières cham- 
bres du parlement ; et enfin cette assemblée souveraine 
ordonna que chacun de ses membres aurait une garde de 
six hommes d'armes, qui devait proteger à main armée son 
inviolabilité. C'était la première lois que la volonté natio- 
nale se déclarait avec cette force et cette conviction. Le 
danphin fut obligé de passer par toutes ces conditions, et 
à cette époque il n'y avait réellement à Paris qu'un pou- 
voir de lhit, les états généraux, et un souverain, Marcel, le 
larëv6t des marchands. 
Après plusieurs négociations, le roi d'Angleterre consen- 
tit h signer une trêve de deux ans. Le prince de Galles, 
son fils, venait lui amener son auguste prisonnier. Le roi 
Edouard, avec toute sa noblesse, le maire, les principaux ha- 
bitants de Londres, vinrent recevoir aux portes celui anquel 
on avait peu de temps auparavant refusé le titre mme 
«le roi de France : maintenant devant ce captif Ëdouard 
faisait incliner toute sa laoblesse : le prince de Galles mar- 
chait à cté de la haquenée blanche du roi Jeu», les rues 
ctaient pavoises, tout respirait un caractère noble et géné- 
reux, tant aux )eux d'un er, nemi loyal le mallieur est sacré 
La trêve, cependant, n'avait pas fait partout mettre bas 
les armes. Charles de Blois, depuis son retour eu France, 
continuait à se défendre contre le duc de Lancastre. La ville 
de'Rennes, que ce dernier assiégeait depuis six mois, 
lait enfin succomber après une belle résistance. Ce fut dans 
!a delivrance de cette place que le chevalier D uguescli n 
DICTo DE LA CtNVEI:S. -- '. 

$85 
commença cette réputation si pure et s» glo'ieue qui fit 
de son nom l'un des plus héroiques peut-êtredes temps mo- 
dernes. -- " 
Les événements prenaient dans Paris une teinte de plus 
en plus sombre. Le dauphin manda au Louvre Marcel, Le 
Coq et leurs partisans, et là il leur déclara que leur insu- 
bordination le lassait; qu' lui seul l'autorité revenait «le 
droit. Mais la délivrance «le Charles le Mauvais par Jean «le 
Péquigny, qui retira ce prince du chateau d'Arleux en Puil- 
leul, on il était détenu depuis plus d'un an, vint redonner 
de la vie h tous les factieux, dont il était l'ame. Charles de 
Navarre n'hésita pas à venir h Paris, od il lut accueilli avec 
cet enthousiasme banal, trihut presque obligé que le peuple 
paye alternativement à tous les grand mallleurs et à toutes 
les positions élevées. Dès lors le daupliin se retranclla dans 
une inaction, ou forcée ou systématique. Marcel et ses par- 
tisans arboraient et faisaient adopter partout des chaperons 
mi-partis de drap rouge et vert : l'unierité fut le seul corps 
constitué qui résista et qui refusade les porter. Le dauphin 
essayait de lutter avec ce rival si dangereux ; il fit un di«COllrS 
aux Parisiens, où il leur déclara qu'il voulait vivre et mourir 
avec eux. Plusieurs assistants turent émus de voir i'héritier 
de iacouronne venir se justifier devant eux. Martel sentit 
qu'il était urgent de combattre cette influence. L'echevin 
Consa¢ fit l'apologie de la conduite de Martel ; et ce peuple, 
inconstant et versatile, lui accorda les mëmes éloges qu'il 
venait de donner au dauphin, et tout le monde dëclaraqu'il 
avait raison. Les factieux ne s'en tinrent pas i. Ils firelt 
assassiner le trésorierdu dauphin Begnaud d'Acy et l'avocat 
général, ainsi que les maréchaux de Champagne et de 
Normandie, dans l'enceinte du Louvre, aux pieds mème dl 
dauphin. Le dauphin donna son approbation a tous ces actes 
de vengeance et de cruauté, qui lui enlevaient a chaque fois 
un serwiteur fidèle et devoué. 
Le reste du ro)anme commençait à s'ébranler sous ce tré- 
mis»ement qui lui arrivait de la capitale. Les 9randes 
c o ra ] a 9 n i e s faisaient trembler les villes, et massacraient 
les voyageurs sur les routes. Sur ces entrefaites, Charles, dau- 
phin de France, ayant atteint sa vingt et unième année, fut 
investi du titre, mais non de l'autoritéde régent de France : 
c'était toujours Le Coq, evêque de Laon, qui était le chef 
suplême de son conseil. Les états de Champagne devaient 
se reunir a Provins ; Charles résolut d'y assister et de fuir 
de cette grande prison de Paris. Il trouva ces mastrats 
parfaitement disposés pour lui, et il se rendit  Meanx avec 
un peu plus de courage et d'espoir dans le oeur. Dans ces 
circon»tances, Martel commit la faute d'appeler a Paris 
des Anglais et des Navarrais, qui trailërent cette capitale 
comme une ville conquise, et la mirent en quelque sorte 
au pillage. Il s'empara du Louvre, qui était hors de l'en- 
ceinte de la ville, et organisa tout puur la résistance. Toute 
la noblesse avait cmigré de Paris, et s'etait re[ugiee auprès 
du régent. Un fléau d'un autre genre, la j a c q u er i e, v ir.t 
se joindre à tant de manx. L'histoire ne sait où se reposer 
dans cette sinistre epoque :e!le a partout les pieds dansle 
sang. 
5larcel résolut d'appeler ouvertement le roi de _Navarre à 
Paris, et de lui en courier la défense. D'un autre c6të, le 
régent, à la tte de 12,000 hommes, vint occuper les vil- 
lages de Vincennes, de Cllarenton et de Coflans. Il ne 
restait plus qu'une rerource à Martel, se faire un appui 
manifeste du roide Navarre et le proclamer. Dans la nuit 
du 31 juillet au t r aoOt t358, h une heure du matin, 
Marcel, aec quelques-uns de ses gens, s'empare sans brnit 
de la garde de la porte Saint-Antoine, par laquelle le Na. 
varrais devait ëtre introduit. Mais il est assassiné par Jean 
Maillard, et la xvolution qu'il méditait se fait en faveur 
di, régent. 
Le retour du régent était désiré et attendu. En remettent 
les pieds dans sa ville de Paris, il promit une almistie com- 
plète et l'ollbli du passé. Comme il se rendait a i'h6tel de 
ville au milieu de la haie du peuple, un bourEeois s'avança 



6 
tout prs de lui, et lui dit avec hauteur et dédain :« Pardieu, 
sire, si j'en russe cru, vous n'y seriez j-.3 eutr. , Le ré- 
gent, arrêtant les seigneurs de sa suite, qui voulaient punir 
l'insolence de ce bourgeois, se couteuta de répondre : 
 Dites-le, beau sire, ou ne vous croira pas. • Cependant, 
le roi de avarre, voyant qu'il n'avait plus rieu à faire 
aec les Parisiens, traita ouvertement avec Édouard, se 
fortilia à Mehm, et envoya délier le régent. Le connétable 
de Fienneet le comte de Saint-Pal tenaient la campagne 
pour le régent, lls firent lever aux Navarrais le siCe d'A- 
nlieus; déja le roi de avarre s'etait emparé d'Auxerre, et 
menaçait d'affamer Paris. Melon, une de ses places les plus 
fortes, était assiégée par le reut et le chevalier Dngues- 
clin, qui y prodigua son héroïsme. Tout  coup, toutes les 
prétentions de Charles le Mauvais tombërent devant des 
espërances d'arrangemeut qu'il provoqua. 
Mais Jean, que lacaptivité commeuçait à ennuyer, résolut 
d'y metlre un terme, et négocia un traité avec Edouard. 
Ce traitC porté en France, fiat rejeté par le régent et son 
conseil. Le roi d'.aqgleterre exigeait pour rauçon tout l'o,aet 
de la Frauce, et plusieurs des provinces ceutrales. Le lU- 
pie fut assemblé : de toutes parts on s'ícria que mieux va- 
lait combattre les Anglais à extermination. A la tëte d'une 
armée de cent mille hommes, Edouard déharqua en France. 
Il était suivi par des fourgous qui apportaient des vivres 
pour l'armée dans ce pays affamë. La pensée dÉdouard se 
tourna d'abord vers Beims, oh se sacraient les roisde 
France. Un long siége n'eut d'autre résultat que d'ebranlr 
le fortifications. L'armée anglaise descendit ensuite dans la 
lourg%gne, et, par le _Nivernais, regagna Paris. Le rëgent 
avait resolu de ne plbs compromettre le salut de la monar- 
chie dans une bataille, ldouard trouvait tout dispo pour 
la defense et r[eu pour l'attaque. Il alCasta les environs de 
Paris, mais son armee ne pouvait plus tenir dans ce pays 
déjà affamé; il seloigua peu a peu de cette capitale. Ce fut 
alors que pour la premiere fois Edouard parut disposé -A 
enteu0re d'autres conditions moins rigoureuses pour la 
France. Le duc de Lancastreuëpargna rien pour le décider, 
et ce fut alors que l'on signa le déplorable traité de B r é- 
tigny. 
Quand tous les arrangements furent pris, quand le traité 
fut solenneltemeut jure des deux ctés, le roi de France fit 
sa rentrée à Paris. Charles de Iavarre aussi vint apporter 
sa parodie de serment. Il jura d'être bon fils et sujet Io.al. 
Le roi ratifia tout ce que le dauphin avait fait comme ré- 
gent. Tot semblait revenir un peu plus à l'ordre; mais la 
solde de la rançon du roi était la prëoccnpation commune. 
Le pape antoria un impbt de deux dëcimes sur le clergé. 
La noblesse, le tiers, furent grandement mis coutribution. 
blaistoutes ces ressources furent insignifiantes, ou ne pou- 
vait plus trouver d'or dans le sein appauvri de la France. 
Ce fut alors qu'un pretexte d'humanité vint au coors de 
la politique. Bannie de France, il y avait une nation qui re- 
gorgeait d'or, et qui trouvait partout en échange la boute et 
les humiliations. On lui ouvrit les frontiëré de la France. 
Chaque chef de famille juivedevait payer en cuitant douze 
florins d'or de FIorence, et six florins par an pour permis 
de sejour. Comme indemnité, on leur permit l'u«ure, et on 
crut faire acte d'humanité en leur défendant d'exiger an 
delà de qua'e deniers pour livre par semaine. Un interët 
aussi exorbitant est la mesure de la misêre où se trouvait 
le ro)aume de France. Le roi, du reste, exécuta Ioyalement 
le traité partout o il le put. Il lui en cot3ta de détacher 
villeparville, et province par province, toute la part que 
l'Anglais s'étast tare : il y eut bon nombre de citoyens qui 
protestèrent contre cette violence, et qui déclarërent qu'ils 
voulaient rester Français. Le roi Jean fut inflexible. Du 
consentement du dauphin et de Cehli du prince de Galles, 
un article tut ray6 du traité de Brétigny : ce fist celui qui dé- 
clarait que le roi d'Angleterre renonçait au titre de roi de 
lrance, et que Jean, de son c6tê, n'aurait plus la suzeraineté 
des provinces cédíes. UUC politique dont ou n'exldique pas 

JEAN 
les raisons, en effant cet arlicle, laissa subsister un foyer 
permanent de discordes et de plus une humiliation cons* 
tante pour les rois deFrance, qui n'étaient pas seuls à pren- 
dre un litre qui n'appartenait qu'à eux. 
Eu l'année 1362, vers les fëtes de. Pques, Philippe de 
Bourres, duc de Bourgogne, mourut avant sa quinzieme 
année, sans laisser d'héritier mle. La couronne de France 
réclama cet apanage, qui lui revenait de droit, et cette mort 
fut un bonheur pour elle dans un moment ou les membre 
épars de la France étaient dispersés. Le roi visita et prit 
possession de cette belle province. On sait que depuis il la 
céda à Philippe le Hardi, et ouvri! ain.i une suite de guer- 
res funestes entre les puissants dues de Bourgogne et le 
roi de France. 
Dévoré d'ennui, Jean partit pour Avignon sous le plus 
frivole prétexte. Il jura an pape qu'il vouiait aecomplir le vœu 
de Philippe de Vatois de se croiser. Le pape accueillir avec 
enthousiasme cette proposition. On fixa le jour de 
cutiou à deux anuées. Les événemeots firent avorter ce 
projet, qui et été la ruine du royaume. Pendant ce temps, 
nu de ses fils donné en otage, le comte d'Anjou, rompit 
sou ban et revint en France. Dans ce moment, où, au 
midi de la France, le captal de Buch, lieutenant du roi de 
IXavare, s'avançait a la tête d'une armée imposanle, oi au 
nord-ouest la guerre de partisans dëvastait et ruinait la 
lretagne, où le centre du royaume saiguait eucore des ré- 
centes blessures qne lui avaient faites les compagnies, puis 
la jacquerie, Jean préféra à cette vie d'un monarque die 
de défendre et de porter sa couronne, la vie oisive et vo- 
lupt«ense d'un prisounier royal fêté et honoré, et que l'in- 
fortune et la Ioyaut faisaient regarder comme un grand 
homme. Pour la dernière fois, il quitta le sol de la France, 
ayant investi le dauphin de la lieutenance géuérale du 
royaume, et son tils Philippe du titre et de la possession 
du duché de Bourgogne. Il ahorda avec une partie de sa 
cour à Douvres, et alla à Elthem, oU Êdouard l'attendait. 
Là ce fureut des magnificences royales et des fètes splen- 
dides. L'h6tel de Savoie à Londres ëtait la résidence habi- 
tuelle de Jean. Il passait son temps, dit Froissart, liernent 
et amoureusem.ent. Ou parle d'une comtesse de Salibury 
dont il partageait les favenrs avec le roi d'Angleterre, et 
d'une barque secrète qui pendant la nuit le conduisait 
mystériensement le long de la Tamise, de l'h6tel de Savoie 
au palais de Wcstminter. Cette captivité si fêtée ne fut pas 
de longue durée pour Jean. Le 8 avril 136t, dans la qua- 
rante-cinquième année de son ge, le roi de France mourut. 
Édouard pleura dans cet illustre prisonnier un ami que les 
derniers temps lui avaient tait apprêcier. Quatre mille tor- 
ches éclairèrent le cercueil dans l'ége de Saint-Paul ; le 
corp fut ensuite deposé sur un vaisseau, qui reportait à la 
France les os qui lai appartenaient. Il fut accordé à Jean 
d'aller dormir à c6té de ses aieux dans la hasilique de Saint- 
Denis. Ce prince eOt peut-être dé un homme remarqua- 
ble, s'il n'eùt pas été écrasé sous ce titre imposant de roi. 
Dans tous les cas, quand on mêdite sur la vie de Jean, ou 
qu'on rêve sur son tombeau, ou se demande pourquoi le 
sculpteur qui a tracé son épitaphe ne s'est pas contenté 
d'inscrire sur la pierre tumulaire cette belle maxime, qu'on 
lni attribue : « Quand la bonne foi, la justice, seraient ban- 
mes du cœur de l'homme, elle devrait se retrouver dans 
celui des rois. » LClLI:TrELLE, de i'Acadëmie Franeaise. 
JEN  roi d'Angleterre ( 1 t99-1216 ). Ce priuce eçut 
des cbroniqueurs le surnom de Jehan sans Terre, parce 
qu'à la mort de son père, Henri Il, Jean n'ëtait investi 
d'aucun grand fief, tandis que ses trois rères alnés, Henri 
Bichard et Geoffroi, avaient porté les titres de dues de lor- 
mandie, de Guienne et de Bretagne. Jean, né à Oxford en 
1166, était cependant le bien-aimé du roi Henri, qui i 
avait destiné la souveraineté de l'friande, récemment con- 
quine, et s'était efforcé de lui assurer la main de l'héritière 
de Savoie et de PiCont; mai. Jean paya d'ingratitude laf- 
fection de son père, et s'associa secrètement aux ¢ompiots- 



JEAN 
de soc frères. Ce fut le coup de la mort pour le pauvre rot 
Henri : quand il apprit que son dernier-nC son enfant de 
prédilecfion, s'était uni contre lui au rebelle R i c h a r d et 
au roi de France Phil i ppe-,uguste. Il s'Crin qu'il n'avait 
plus de souci de lui-intime ni d-u onde, et mourut en mau- 
dissant ses fils. Ce fut sous de tels auspices que commença 
la carrière de Jean, le pire de toute cette sinistre race des 
PI antagenets, à laquelle la tradition populaire assignait 
une origine diabolique, et qui ne démentait pas la tradition 
lar sa conduite. 
Richard, qui mfrita le nom de COeLr de Lfon, par sa 
férocité autant que par son courage, suéeCa au malheu- 
reux Henri, et récompensa la complicité de Jean par le don 
des comtés de Mortain et de Glocester; mais Jean ne fut 
pas plus fidèle à son frère qu'à son père. ll était resté en 
Occident pendant la croisade de Richard et de Pbilil,pe-Au- 
guste ; à la nouvelle de la captivité de Richard en Autriche, 
Jean, espérant que cette captivité serait Afemelle, se ligua 
avec Philippe, lui rendit secrètement homma pour la 
couronne d'Angleterre, et lui facilita l'invasion de la Norman- 
die; puis, Richard ayant reparu, contre l'attente de Jean, 
celui-ci racheta sa perfidie par une autre, plus noire encore, 
et les ttes de 300 gens d'armes français, égorgés en trahi- 
son, furent le gage de la réconciliation des deux frères (119, ). 
Richard ayant té tué au siCe de Chaslus, en 1199, en dé- 
signant, dit-on, Jean pour son sucee»seur, par un testament 
dont l'authenticité a etWcontestée, Jean se mit en posses- 
sion du royaume d'Angleterre, et des duchés de Normandie 
et d'Aquitaine, au détriment de son neveu Arthus ou Artbur, 
duc de Bretagne, né du troisiëme fils de Henri Il (3ean 
n'était que le quatrième). L'Anjou, le Maine et la Touraine 
prirent le parti d'Arthus, enfant de douze ans, que soutint 
Pldlippe-Auguste ; mais le roi de France songeait phL a ses 
intérts qn'h ceux de son protégé: et la mère et les partisans 
d u petit prince, ne croyant point à la sincéritë de Philippe, 
-renoncèrent, au nom d'Artbus, a des prélentions trop diffi- 
ciles à soutenir. Arthus se reconuut mme le vassal de Jean 
pour le duché de Bretagne, et promit de se contenter de 
cette seigneurie, qu'il tenait de sa mère. 
Jean s'ëtait aussi réconcilié avec le roi de France, et son 
règne paraissait devoir tre paisible, lorsque ses passions 
lui suscitèrent de nonveaux ennemis. 11 enleva au com[e 
de la Marche sa fiancée, Isabelle d'Angoulme, quviqu'il 
• fit Ini-mme marié, et il répudia, sans aucun motif Iêgitime, 
la reine sa femme pour épouser Isabelle. Le comte de la 
Marche, membre de la puissante maison de Lusignan, sou- 
leva le Poiton, le Limousin, etc., contre Jean, et demanda 
justice au roi de France, suzerain du roi anglais, pour les 
provinces du continent. Philippe, fidèle à sa politique ac- 
coutureC, saisit l'occasion de susciter de nouveaux embar- 
ras au roi d'Angleterre, réveilla la question redoutable 
des droits d'Arthus, et cita 3eau devant la cour des pairs 
pour y débattre à la lois l'bëritage des Plantagenets et la 
plainte du comte de la Marche. Jean ne comparut pas, 
quoiq«'il sçy ftt engagë; alors Philippe assaillit la Norman- 
die, investit Arthus des covtés d'.S, njon et de Poitou, lui 
flança sa fille Marie, et l'envoya joindre le comle de la 
5I«rche et les iusurgës poitevins. Mais le jeune Arthus et les 
Lusignan, comme ils assiégeaient le donjon de 5tirabeau 
eu Poitou, furent surpris nne nuit par le roi Jean à la lëte 
de forces supérieures; Arthus et ses alliés tombèrcnt au pou- 
voir- de leur ennemi, et le jeune prince captif fut enfermé 
au château de Falaise, puis à la tour de louen. Dans la 
nuit du jeudi saint de l'année suivante (103), le roi Jean, 
accompagné d'tin seul écuyer, vint secrètement à la tour 
par la rix-ière dans nn batelet, se fit amener Artllus, puis 
ga-,na le large avec con esquif : on ne revit jamais le jeme 
prince. Sfivan une autre version, Jean aurait poignardé 
Artlm. dans la lour mme de Bon,en. 
QuOi qu'il ch soit, .e meurtre d'Attires fut un acte aussi 
in:cnsé qu'infme, ci ce Iàche asas[nat reçut hientft son 
alai e : l'horreur universelle qu'il inspira fitt plus funeste 

587 
à Jean que ne l'e0t été 'a vie de son neveu: une insurrectiou 
presque génërale éclat: ,ians les provinces françaises soumises 
aux Plantagenets, sau en Normandie; la mère du malheu- 
reux Arths et les états de Bretagne requirent justice du roi 
PI,illppe, qui cita Jean derechef par-devant la cour des pairs, 
mais cette fois pour cause de meurtre et de fëlonie; et Phi- 
lippe, à la tète de ses forces et de celle de la Bretagne et 
des provinces insurgées; se précipita de nouvean sur la 
Normandie, que ne devait plus quitter sa victorieuse ban- 
nière. Tandis que villes et chteaux forts tombaient succes- 
sivement devant les armes de Phillippe, le misérable Jean 
pasit oes journées à banq-ueter à l'abri des murs de 
louen avec sa reine Isabelle, sans se soucier des braves 
gens qui mouraient pour lui sous l'épée française; et quand 
les hommes d'armes de France approchèrent lrop près du 
chef-lieu de Normandie, Jean se jeta dans un vaisseau, et 
s'en alla en Angleterre, abandonnant lcuen et tout ce qui 
lui restait sur le continent de Gaule, sanx ax oir lentWle tort 
des armes dans une seule bataille. Il essaya d'apaiser Phi- 
lippe en offrant, moyennant sauf-conduit de comparaitre 
en justice par-devant ses pairs, les gran,.- :arons de France; 
mais Philippe refusa le sauf-conduit, dêclarant que le titre 
de roi ne sauverait pas Jean s'il était condamné : la cour 
des pairs condamna Jean par contumace à la mort et à la 
confiscation de tous fiefs, comme coupable de meurtre par 
trahison. La conliscation ëtait dêjh presque coxqdétement 
opérée par les armes de Philippe. 
Jean, sortant enfin de sa torpeur, vint débarquer ì La Ro- 
cbelle avec d'assez grandes forces, et parvint  ramener 
sous .son sceptre les populations mobiles et remuantes de 
l'Aquitaine (1206); Philippe, cédant aux instances des 
I«gats du pape, renonça à d«pouiller complétement son en- 
nemi, et lui accorda une trëve de deux ans, durant laquelle 
tous les anciens domaines des Plantagenets au nor,l de la 
Loire restèrent au pouvoir de la France, ainsi que le Poi- 
fou. Mais Jean, ì propos d'une question d'investiture, 
source ordinaire des querelles des rois et des papes, ne 
tarda pas à se brouiller avec le pontife romain, dont la pro- 
tection lui avait vain de conserver la Guienne : Jean s'Cant 
oppo avec violence à l'installation d'un archevêque de 
Canterbnry, us l'influence de la cour de Rome, le pape 
Innocent III mit en interdit le ro.vanme d'Angieterre, 
puis excommunia le roi (1209). Jean riposta aux foudres 
papales par les ceusures les plus acerbes contre le clergé 
anglais, qui s'était conformé à l'interdit lancé par le .souve- 
rain pontife; en méme temps, au lieu de chercher ì obte- 
nir contre le clergé l'appui de la noblesse et du peuple, 
Jean écrasait toutes les classes de citoyens d'imp6ts insup- 
portables, interdisait sux gentilsbommes la chasse au vol, 
le plus cher de leurs droits ; s'entourait d'otages arraches 
comme gages de fidélité à toutes les familles nobles, et 
s'attirait le mépris et l'exécration de tous par la dépravation 
de ses mœurs et par des actes d'une odieuse barbarie. "In- 
nocent III, voyant que le monarque anglais redoublait d'em- 
portement au lieu de venir à résipiscence, et s'était saisi de 
tous les biens du dergé, après avoir contraint la plupart des 
évques h se sauver sur le continent, Innocent III dëclara 
les sujets du roi Jean dëliës de leurs serments de féaute, et 
offrit la couronne d'Angleterre à Philippe-Auguste, qui ré- 
pondit  cette offre en réunissant une formidable armëe sur 
les ctes de Normandie. Toute l'arrogance du roi Jean tomba 
devant le danger : après avoir, an dire du chroniqueur Mat- 
thieu Pris, sollicité en vain le secours du miramolin 
(Emir-al-ltoumenim) Mohammed-el-Nafser, chef des nm- 
sulmans d'Espagne et d'Mrique, auquel il offrit secrètement 
d'embrasser l'islamisme, le Iche monarque se mit ì la dis- 
crétion du légat du pape, jura dïndemniser le clergé des 
pertes qu'il lui avait fait souffrir, et se rcconnut vassal et 
homme lige du saint-siCe de Borne, pour lui et ses suc- 
cesseurs an trfne d'Angleterre et d'lrlande, s'engageant à 
,.m lribut annuel de 1,000 mates en signe de vassalité (1213)- 
Le légat» satisfait d'un si g:and triomphe, sinifla au 



5,8 
l'lJilippe de ne point attaquer l'homme lige d la sainte 
iise romaine = Philippe, très-irrité de la dfection de la 
cour de Borne, n'eut peut-Cre pas tenu compte des ijonc- 
tions du légat si les nombreux batiments de transport qu'il 
avait rassemblés n'eussent été sur ces entrefaites surpris 
et brOlés par une flotte anglaise. 
Jean, réconcilié avec le pape, prit l'offensive à son tour 
«.»ntre le roi de France, et, se coalisant avec l'empereur 
«»thon, le comte de Flandre, Ferrand, et les grands barons 
«[es Pays-Bas, de Lorraine et du Rhin, il exigea de nouveaux 
»acrilices de ses sujets, vint débarquer  La Bochelle, et enlra 
ch Poilou pendant que ses alliés atlaquaient le nord de la 
France. Othon perdit la grande bataille de B o u v i n e s conlre 
! hilippe, et Jean s'enfuit bonteusement sans combat de- 
,an! le prince Louis, fils du roi de France. La patience des 
Anglais était h bout : les barons, las de subir les exactions 
et les caprices d'un si mëprisable tyran, se coalisérent, à 
I-instigation d'un prelat patriote, Langton, arclieëque de 
Canterbury, entrainèrent la ville de Londres dans leur parti, 
et forcèrent Jean  signer aee eux un pacte renouvele, 
disaient-ils, d'un acte plus ancien, souscrit jadis par 
fleuri 1* (1215). Ce fut la fameuse grande charte, 
i,renfier germe de la conslitution anglaise, et première 
aranlie des divers ordres de la nation contre le despotisme 
ro.al. Jean, tout en prètant le serment imposë par ses suc 
iet, meditait déj le paqure : il se fit degager de sa parole 
par le pape, qui, en qualité de suzerain de l'Angleterre, 
pociama la 9ronde chm'te illicile et inique; puis le roi 
appela a son aide tous les routiers et les soldats mercenaires 
«lu continent, en leur promettant les biens des rebelles. 
A la t,:.te de ces liordes de bandits, Jean porta le fer et le 
li:u dun bout  l'autre de son royaume, traitant en pays 
ennemi presque toutes les terres qui ne taisaicnt point pro- 
t[e du dmaine ro}al. 
Jean paya cher sa perfidie et ses freurs : les barons, 
exaspcís, le déclarèrent decbu du trône, qu'ils defi:rêrent 
an prince Louis, lits de Philippe-Auguste. Louis, de l'aveu 
de son père, accepta la couronne d'Angleterre, et, braant 
les excommunications du légat du pape, qui son tenait cbau- 
dement la cause de Jean, il descendit  Douvres avec une 
belle armèe françai»e; Londres lui ouvrir ses portes, et 
Jean fut abandonné non-seulement de la noble»se et du 
peuple, mais d'une partie de ses rouliers mercenakes. 
tendant la concorde ne fat pas de longue durée entre la 
chevalerie française de Louis et les barons anglais. Louis 
manifestait envers ses compatriotes une prédilection impo- 
litique et offensante puur ses nouveaux sujets; les partisans 
du ro. Jean repandirent le bruit que Louis projetaitd'exter- 
miner en traliison les barons d'Angletere pour donner 
teurs Liens aux gens de la France; cette absurdité s'accè- 
dira, gràce aux imprudences de Louis ; un certain nombre 
de grands seigneurs se retournèrent du c6té du roi Jean, 
et ce prince se retroova au bout de quelques mois en état 
de di»puter la couronne à son rival. Avait-il puisé dans la 
necessitë l'énergie nécessaire pour bien nser de ses der- 
niëres ressources .9 C'est ce dont il est permis de douter ; 
quoi qu'il en soit, Jean ne fut pas mis à Pëpreuve : un jour 
qu'il longeait lamer avec ses troupes, surpris par la haute 
marée, il perdit son bagage, son trésor et ses ornements 
rnyaux, entralnés dans les flots. Cette perte lui causa une 
•ive douleur. Malade de chagrin et de fatigue, il aggrava 
son mal par son intempérance, et mourut trois jours après, 
au chàteau de INewark, le 19 octobre 121G, laissant le renom 
d'un des plus ineptes tyrans et des plus m(.chants hommes 
qui eussent jamais existé. Jean, qui fouilla si longtemps 
l°Angleterre, .fouille aujourd'hui l'enfer méme : tefle 
fut l'oraison funèbre que lui firent ses contemporains. 
Henri 
JEAdit deLuxernbourg, roi de Bohème, fils alné du 
comte fleuri Ill de Luxembourg, qui devint plus tard roi 
d'Allemagne, et de Marguerite de Brabant, n6 vers |295, 
lrRa de. ,,Jtus et aussi des défants de son përe, prince 

brave, loyal, mais souvent impolitique et toujours incon. 
tant. A l'ge de quinze ans, Jean épousa Élisabeth, fille de 
Wenceslas IV, roi de BobCe, dernier rejeton maie des 
Przemyslides, et obtint avec elle, en 13Il, non sans oppo- 
sition de la part de la maison de Habsbourg, la couronne 
royale de Bohème. Dans les troubles auxquels, après la 
mort de son père, donna lieu une double élection à l'Empire, 
il sodéclara pour Louis de Bavière, et le suivit dans les com- 
bats chaque lois que le feu toujours renaissant de la révolte 
ne nécessita pas sa prèsence en Bobëme. C'est ainsi qu'il 
l'accompagna en 115 en Italie, et revint  Pragueo après 
avoir visité les cours d'Avignon et de Paris et le Luxera- 
bourg. Cette mëme annèe 1322, il prit une grande part à 
la victoire de Muhldorf; il combattit aussi, en 12, pour 
le roi de France en Lorraine, etsoutint ce mëme prince, en 
132, dans sa intte contre les Fiamands ; pis a milieu de 
l'hiver 139, il courut au secours des chevaliers de l'ordre 
Teutonique en Prusse : il y perdit un. oeil, et cette méme 
année encore il retourna en France, où le roi Philippe IV le 
le nomma gouverneur de Gaseugne. Son étroite alliance avec 
la France était le résultat du mariage de son fils, qui fut 
depuis l'empereur Charles IV, avec Blanche de Valois. Pen- 
dant ses courses aventureuses, Jean laissait sa femme  
Prague pour rassembler l'argent qu'il gaspillait à Pétranger. 
Cependant il réussit encore à aandir ses États en 1327, 
par l'acquisition du duché de Breslau, faite en vertu d'un 
traité conclu avec le duc IIenri, qui n'avait pas d'enfants. 
En 1330, s'Cant mis à courir les aventures dans i'ltalie, 
décbirée alors par ,les dissensions intestines, l'empereur 
Louis le soupçonna d'aspirer/ la couronne impériale; mai 
Jean s'entendit avec lui en 1332, et, après avoir tié de 
Prague de nouvelles sommes d'argent, se rendit à Paris et à 
Avignon» où il épousa en secondes noces ièatrix de Bourbon. 
En 130 il perdil, des suiles d'un rhumatisme, l'oeil qui lui 
restait encore; accident qui le fit surnommer aussi Jear 
l'.4veugle, mais qui ne l'empcba pas de continuer à mener 
toujours la méme existence vagabonde et guerroyante, j«s- 
qu'un moment où il trouva enlin un trépas dine de sa vie,. 
à la meurtrière bataille de C récy, en 13ç. 
JE._N. La Pologne compte trois rois de en nom. 
JEN 1  ALBERT, deuxième fils de Ca sire i r I V, né 
en 1459, succéda à son père, en 1492. Ami des lettres et des 
arts, il eut un règne assez pai»ible, et mourut en 1501. 
JEAN II CASIMIB, né le 1 mars 1109, deuxième fil» 
du roi Sigismond III et de sa deuxième femme, l'archidu- 
chesse Constance d'Auhiche, reçut, comme le premier en- 
fant issu de ce mariage, l'édncalion la plus soignée. San 
tenir compte des machinations de sa mère, qui voulait lui 
assurer la succession au trône de son père, il proposa lui- 
méme à la diète, après la mort de Sigismond, en 1632, so 
frère consanguin Wladislas pour roi, et reçut en apanage 
des domaines eonsidérahles lorsque celui-ci fut monté sur le 
tr6ne. Après avoir eu maintes aventures dans ses voyages 
en Hollande, en Allemagne, en France et en Italie, il se fit 
admettre, en 160,  Ruine, dans l'ordre des Jësuites, et 
hient6t après nommer cardinal-prétre par Innocent X ; mais 
dës Fannée 166 il vivait de nouveau en Pologne comme 
Inique. Après la mort de son frère consanguin, arrivée 1¢ 20- 
novembre 1645, il fut Cu "pour lui succéder sur le tr6ne de 
Pologne. Son rue fut une lutte incessante contre la Bnsskx 
et la Suède et contre les troubles et les conspirations de 
l'tutCieur. La paix d'Otiva, conclue le 3 mai 1600, et aux 
termes de laquelle la Pologne perdit l'fie d'oEsel, l'Estho- 
nie et la Litbuanie presque tout entière, mit fin à la guerre 
contre la Suède, et celle contre la Bussio fut termine par 
la paix d'Andrussow (14 ianvier t667),auxtermes de laquelle 
.lean-Casimir dut céder au czar la Bussie Blanche et la Bussie 
Bouge, avec PUkraine jusqu'au Dniepr. Les troubles qui 
agitaient la Pologne le décidèrent à abdiquer la COuronne 
le leu septembre 1668. L'année suivante, on le contraign[ 
 se retirer en France, où Louis XIV lui accorda plusieur 
abbayes. 11 mourut à Nevers, le 16 décembre 1(;7, et fut 



JEA 
enseveli dans l'église Saint-Germain-des-Prés  Paris; mais 
en 1676 on transporta son corps à Cracovie, où on lui leva 
un magnifique monument. Il n'eut pas d'enfants de son ma- 
riage avec Marie-Louise de Gonzagne, veuve de son frêre 
,Vladislas, et avec lui .s'éteignit la maison des J a g e I I o n s. 
JEAN III SOBIESKI, un des plus grands capitaines ci 
hommes de guerre du dix-septième siècle, né en 1624, et 
suivant d'autres en 1629, fut élevé avec le plus grand soin, 
ainsi que son frère lffarc SonmsJ, par son père, Jacques 
SomEssa, castellan de Cracovie, homme non moins distin- 
glé par ses vertus quepar son courage militaire. L'éducation 
-.les deux frères terminée, leur père les lit voyager. Ils avaient 
visitê la France, l'Angleterre, l'Italie et i'Allemagne, et se 
trouvaient en Turquin, lorsque, en 16t8, la mort de leur 
përe les rappela dans leur patrie. Les Polonais venaient 
d'ëtre battus par les Russes, à la bataille de Pilawiecz; 
les deux frères voulurent anssit6t venger la défaite de leurs 
compatriotes. Marc Sobieski périt dans un engagement li- 
vré sur les rives du Bog; quant à Jean, son courage extra- 
ordinaire et sa bravoure le rendirent bienl6t l'objet de l'ad- 
miration de sa nation, en mème temps que l'effroi des Ta- 
tars et des Cosaques. Créé grand-maréchal de la couronne 
en t66b, il devint en 1667 grand-général de la couronne et 
w6iwode de Cracovie, et lorsque, le I I novembre 1773, il 
eut gagaA la bataille de Choczim contre les Turcs, qui 
perdirent 28,000 lJommes, il fut, le 21 mai 1676, Cu à l'una- 
nimité roi de Pologne. En 1676 il se fit couronner solen- 
ne[lement,  Cracovie, avec son épouse, Marie-Casimire- 
Louise, fille du marquis Lagrange d'Arquien, et veuve du 
wotwode Jean Zamoïski. Les actes nltérieurs de son règne 
sont autant d'éclatants témoignages de la noblesse et de la 
générosité de son caractère. Lorsqu'en 1683 les Turcs 
vent assiéger Vienne, Jean Sobieski accourut à la tte de 
20,000 Polonais, et saura la ville impériale par la victoire 
qu'il remporta sur les assiégeants, le 12 septembre 1683 ; 
enlre autres trophées de cette victoire figurait le fameux 
étendard de 51ahomet, dont le vainqueur fit hommage au 
pape. A son entrée à Vienne, il fut reçu par les habitants 
avec un enthousiasme qu'il serait impossible de décrire. Ils 
se pressaient autour de lui pour embrasser ses genoux, tou- 
cher ses habits, son cheval, et ils l'appelaient tout haut leur 
sauveur et leur libérateur. Un prédicateur deVicune, faisant 
un sermon sur cette victoire, prit pour texte ces paroles : 
« Il )- avait un homme envoyé de Dieu, et cet homme s'ap- 
o pelait Jean. » 
La fortune favorisa moins les guerres qu'il entreprit en- 
suite contre les Turcs. Une attaque d'apoplexie mit lin à sa 
glorieuse vie, le 17 luin Iç96, et il ne fut pas plus t6t descendu 
au tombeau que la haine et l'envie s'acharnèrent / flétrir 
sa mémoire. Jean Sobieski eut sans doute des alCaut% mais 
ils ne sauraient faire ouhlier ses vertus. Il aimait les sciences, 
parlait plusieurs langues, et ne se faiit pas moins aimer par 
la douceur de son caractère que par les agréments de sa 
con versalion. Ses trois fils, Jacques, Constantin et Alexand re, 
ne laissèrent pas de descendance mle, et ne se montrèrent 
point dignes d'un tel père. Sa veuve aussi manqua aux de- 
voirs que lui iml»nsait un tel nom. Consultez Leltres du roi 
de Pologne Jean Sobiesk à la reine 211arie-Casimire, 
pendant la campagne de Vienne ( traduiles en français 
par l'later, et publiees par M. de Salrandy  Paris, 156), 
et llistoire de Pologne avant et sous le roi Jean SobiesAi, 
par M. de Salvandy (3 vol.; Paris, 
• IEAN  rois de Suède et de Danemark. Voyez 
JE,AN. On compte six rois de Portugal de ce num. 
JEAN ler, roi de Portugal et des Algarves (1383-1t33), 
sm'nommé le Père de la Palrie; fils naturel, de Pierre le 
Sévëre, naquit le I1 avril 1350. Il était grand-maRre de 
l'ordre d'Avis lorsque les Portugais l'appelèrent au tr6ne, 
après la mort de son frère Ferdinand ( 183 ). Le roi de Cas- 
tille, qui lui disputa le trône, fut vaincu par lui h la fa- 
zueuse Ilaille d' AIj u b a.r o t ta { 1385). A la uite de 

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succès, Jean partit pour i'Afrique, à la léte d'une nombreuse 
armée, et s'empara de Ceuta et de quelques autres places. 
Relevé seulement en 1387 de ses VœUX monastiques par le 
pape Urbain VI, il épousa alors la princesse Philippe, fille 
du duc de Lancastre et SœUr de Henri IV, roi d'Angleterre, 
et mourut le I aoùt 1t33. 
JEN II, roi de Porttlgai et des Algarves, né en 1-15, suc-- 
céda h son père Alfonse V, en 1 81. A peine monté sur le tr6ne, 
il eut h lutter contre les nobles de son royaume, et réprima 
leur faction. Ferdinand, duc de Bragance, et d'autres chefs 
furent déeapités. Ses sueebs éclatants sur les Castillans, la 
prise d'Azzile et de Tanger lui valurent le surnom de Grand, 
et son inflexible sévérité pour Pexécution des lois celui de 
Parfait. Il mourut le 25 octobre 195. 
JEAN III, roi de Porl«gai et des Algarves, né le 6 juin 
1502, mourut le 2 avril 1557. L'exemple des autres monar- 
ques contemporains, qui ne s'occupaient que des guerres 
intestines contre les hérétiques et de controverses religieuses, 
resta sans influence. Il donna tous ses soins à maintenir 
paix dans ses États, à conserver, à agrandir ses conquëtes 
dans les Indes, ì encourager les découvertes, et à propager 
dans ses nouveaux États la foi chrétienne. Ce fut sous son 
règne que les Portugais découvrirent le Japon, en 15-i2.1| 
mourut le 2 avril 1557. 
JEAN IV, roi de Portugal etdes Algarves, né le 18 mars 
160tf, était lils de Théodore de Portugal, duc de Bragance. 
Les rois d'Espagne étaient alors maltres du Portugal depuis 
1589. Le duc de Bragance avait été traité à peu près en prison- 
nier pendant les règnes de Philippe Il, PIdlippe III et Phi- 
lippe IV, tandis que des administrateurs espagnols traitaient 
les Portugais en peuple conquis. Enfin, une vaste conspira- 
tion formée et dirigée avec autant d'habilete que de bon- 
,mr par Pinto, secrétaire du duc de Bragance, délivra le 
.Purtugal du joug de l'étranger, et le duc de Bragance fui 
couroné roi en 1640. Jean IV aimait les arts, et surtout 
.la musique, qu'il cultivait avec quelque succès. Il dormail 
peu, s'habillait et vivait avec une simplicité bourgeoise. Il 
eut h soutenir contre les Espagnols une ru,In guerre, qui se 
termina par la prise de Salatierra, en 16-3, et par la vic- 
toire de Badajoz, en 16. 11 ne fut pas moins Ileureux dans 
la lutte qu'il souÙnt contre les Hollandais au Brésil, en 169 
et 165t. Il mourut à Lisbonne, le 6 novembre 166. 
JEAN V, roi de Portugal et des AIgarves, né en 1689, 
suceëda à Pierre iI, en 1707. Il prit parti contre Louis XIV 
dans la guerre de la succession. Ses efforts pour le succès 
de la cause de ses alliés ne furent pas heureux. Le traité 
d'Utrecht, conclu en 1713, ayant rendu la paix à l'Eu- 
rope, Jean V donna tous ses soins aux progrès du commerce 
et des lettres dans ses Etats. Il mourut en 1750, gé de 
soixante et un ans. Ce fut sous son règne que le cdèbre 
marquis de Pombal commença sa carrière politique. 
JEN VI ( 51xnm-Josepn-Lous ), roi de Portugal et des 
Algarves et empereur du Brësil, né le 13 mai 1767, était 
petit-fils du roi Joseph I er, et filsde la reine Marie et de l'in- 
fant dura Pedro, qui comme roi porta le nom de Pierre III 
et mourut en t7.6. Élevé par des moines, Jean reçut une 
éducation fort incomplète, et tomba de bonne heure dans une 
sombre mélancolie. En 1790 il épousa l'inlante Charlotte. 
Joachime, fille de Charles IV, roi d'Espagne. Par suite de 
la démence de sa mère, il prit, le 10 février 1792, comme prince 
du Brésil, les rènes du gouvernement ; le 15 juillet 1799, 
se fit déclarer régent, titre qu'il Changea à la mort de sa mère, 
arrivée le 20 mars 1816, contre celui de roi. Par suite de la 
vieille alliance existant entre le Portugl et t'Angleterre, 
Jean VI, en sa qualité de régeot, reponssa les ouvertures 
de la Convention, et accéda, en 1793, à la première coali- 
tion contre la France. Peu de temps aparavant il avait déjà 
envoyé au gouvernement espagnol un corps de troupes 
auxiliaires pater la délense des Prénées. biais quand, par la 
paix de Bile, en 1795, l'Epagne se fut alliée à la France, 
il se vit exposé sausdé[ense aux hostilités de cette puissance, 
et réduit à se placer sous la protection de l'/ngleterre. 



naparte «orça la cour de Madrid d'attaqner vignureusement I verte avec ses sujets, àout rmérita la haine  le mépris. 
le Portugal, /ui, parle traité de Badajoz {ç janvier 1801), JEA H, filsdeFerdiuandl ,ditleJu.ste, roidAragnn, de- 
dut céder àr'Espagne Olivenza et  la France une partie int roi de lavarre en 1625, par son mariage avec Blanche, 
de la Guyane. Après la paix de Xilsitt, iXapoiéon ayant fille et héritière de Charles ILI, et d'Argon après la mort de 

exigé de Jean Vl qu'il ferrait aux Aurais tous les ports de 
son ro3aurae, qu'il fit arréter tous les Anglais qui s'y trou- 
vaient, et saisir leurs biens, Jean n'exCura que la première 
deces deux injonctions; alors, le 11 novembre 1807, 
poléon déclara dans le 31oniteur « que la maison de Bru- 
« gance aait cessé de régner ; • et immediateraent après 
une armée Irançaioe et espagnole entra en Portugai. Jean VI, 
après avoir établi, le 26 novembre 1807, une juute de gou- 

son frère Affonse le Magnanime, en 158. :Jean se remaria 
en 1464, à Jeanne Heuriquez, fille de Frédéric, arairal de 
Castille. Ce raariage fut l'origine d'une longue guerre qu'il 
soutint contre don Carlos, prince de Viane, son fils, 
né de son preraier mariage. Les Cataixns, après la mort de 
ce prince, reprirent les armes contre Jean 11, pour soutenir 
les droits de sa lilie a|née, Branche, hérRière de don Carios; 
et ce fut pour fournir aux dépenses de cette guerre que ce 

xernement, s'embarqua le lendemain aec sa famille pour prince eraprunta à Louis X[, roi de France, une somme de 
le Brësil, qu'il ne tarda point  ériger en royaume. De o- [ 300,000 écus d'or, et qu'il engagea, pour garantie du rem- 
Janeiro il annnla, le 1er mai 180s,tous les traitésconclus boursement, ses comtés de Roussillou et de Cerdagne.Jean If 
iusquealors avec l'Espague et avec la France, et s'attacha eut de Jeanne Henriqnez Ferdinand le Catholique. 
idus étroitement que jamais à l'Angleterre, qui, énergique- Il mourut le 19 janvier 1479, à lge de qua[xe-vingt- 

ment secondée par la bravoure de l'armèe portugaise et par 
l'enthousiasme de la nation, reconquit pour lui ses ttats 
d'Europe. Dès lors celle puisnce, représentée dans le ca- 
binet de Lisboune par le maréchal Beresford, excrça une/n- 
fluence decisive sur l'administration du pas ; et il oentinua 
d'en être ainsi jusqu'à ce que, à la suite de la révolulion de 
180, lescortès portugaises établirent un nouveausstème 
polit/que. En 1821 JeanVI revint en Portugal, tandis que 
son fils aihA, dura Pedro restait au Brë»il. L'assemblée 
nationale du Brésil ayant, le I er aoOt 1822, dêclarë ce pays 
Eat independant et sépare du Portugal, dura Pedro fut pro- 
clamé empereur du Brésil le 1 octobre 1822 ; mais ce ne fut 
qu'en 185 que Jean VI reconnut l'indep¢udance de cette 
ancienne colonie. 
E Portugal, Jean VI ayant uré, le 1er octobre 1822, la 
nouvelle constitution libërale, on sit aussit6t commencer 
les machination des anticonstitutiounels contre le nouvel 
ordre de cboses. Elles étaient principa]eraent dirigées par 
la reine, avec laquelle Jean VI avait toujours vécu en dé- 
saccord, et par son ids dura 5I i g u ni; et elles amenèrent à 
la fin les troubles les plus graves. Le faible roi bannit d'a- 
bord sa femme et son fils ; mais ensuite il révoqua la cons- 
titution qu'il avaitjuré de maintenir, en s'engageant à en 
octroyer tme nouvelle  ses sujets; puis à quelque temps de 
li il rappela d'exil la reine Charlotte et dura Mignel, ce qui 
ne fit qu'ençenimer la lutte entre les constitutionnels et les 
absolatistes. Une insurrection préparée par la reine et son 
fils, en 1824, dans le but avoué de le dçtrèner et d'exter- 
miner les iibëraux, fut dbjouée h temps, grâce à la fermeté 
que déploya dans cet instant critique le ministre de France, 
1. tlde de Neuville. Cédant à |'influence anglaise, Jean ¥I 
instilua, le 6 mars t86, pour le cas où il vicndrait  mourir, 
sa ff|le Marie-Isabelle régente de Po.,ugai, jusq-u'a ce q'ae 
l'hëritier legitime put prendre iui-mme la direction des af- 
faires, et quatre jours après il descendait au tombeau. Son 
fils dom Pedro se considéra comme le seul héritier lïgitime 
du trène de Portugai; mai il y reouça en faveur de sa fille 
Maria da Giora. 
Outre trois fris, dura Arttunio (mort en tS0t), donedro 
et dura Miguel , Jean VI eut quatre filles : Mari¢-T]zœrèe, 
ée en 179, marie d'abord à l'infant d'Epagne don Pedro 
(mort en 181g), puis reraariée eu 1838avecl'ialant don 
Carlos; Isabelle, morte eu 1818, la seconde femme de 
Yerdinand Vil ; Isabelle-Marie, née en 181,  qui à la 
uort de son père exerça la régence pendant deux années 
(de 1826 à 18'8); et Arme-Marie de Jsus, née en 1806, 
mariée depuis 1827 avec le marquis dr Loulê. 
JEAN. Plusieurs princes de ce nom ont régné sur le» 
différents royaumes qui constituent l'Espagne. 
JEAN 1 «, roi d'Aragon, avait suc¢.édé son père, Pierre IV, 
en 1385; il raourut en 1395, à l'àge de quarante-quatre ans. Son 
règne ne fut que de huit ans, mais l'un des plus déplorable» 
qu'ait subis l'Aragon. Ce beau pays lut constarament tour- 
ruentA par le plus désastreux des flëaux, la guerre civile. 
Le roi Jean en effet fut conlinuelleraent en hoslilité ou. 

deux an. 
JEAN I er, roi de Castille et de Léon, fils et successeur 
de Henri lI, et surnuramé Père de lapatrie, né le 28 anOt 
1358, mourut le 9 octobre 1390 : il régna onze ans et quel- 
ques mois, aprës avoir fait sans sucr la guerre au 
tugal pour en assurer la couronne à son fils. 
JÈAN lI, roi deCastille etde Leon, n le 6 mars 1605. mort 
le 20 juillet 145., dans la quarante-huitième annëe de 
règne. Le long rëgne de ce prince ne fut qu'une guerre con- 
. tinuelle avec les rois d'3d'agon et de avarre et contre les 
Maures deGrenade. I. principaux seigneurs de sou royaume 
se révoltèrent contre son iavori Alvaro de Luna, qui lut 
décapité, en 1153..lean II fut le père de la fameuse isa- 
belle, qui épousa Ferdinand le Catholique. 
Quant aux Jean rois de Navarre, le premier est le 
mème que JE I " le Posthume, roi de France; le denxiëme 
est le même que J,s Ii, roi d'.agon; et le troisième n'est 
autre que Jvs d'Albret. 
JEA D'ALBRET, roi de avarre. Vo/e= ALnr. 
JEA DE BRIEN.NOE. Voe: Bs ( blaisou de). 
JEAN, duc de Bourgogne, dit Jean sans Peur, naquit 
à Dijon, en 137L II porta d'abord le titre de comte de 
ers. Lorsque la noblesse française, répondant fi l'appel du 
roi de Hongrie Sigismoud, se croisa une derniëre fois pour 
arrêter les progrès des Turcs, le jeune héritier du ducbé de 
Bourgogne,se mit  la tëte de cette brave et brillante armée 
féodale qui devait pdrir à Nicopolis sous les coups de Fin- 
lanteric ottomane. Jean et vin-cinq des plus riches sei- 
gneurs furent épargnés par le farouche Bajaz et;  purent 
se racheter au prix de 200,000 ducats d'or. 
En 0 Jean sans Peur (car il portait déjà ce surnora, 
que lui avait valu son intrépidité ) suc¢.éda h sou père, Phi- 
lippe le Hardi. 
1/avait reçu en «lot de Marguerite de Bavière, sa ferame, 
en 1385, les comtes de Haioauh de Hollande et de Zélande. 
il inaugura son règne par de brillants succès militaires, 
força les Anglais à lever le siCe de L'Écluse, et leur enleva 
Gravelines. Mais heritier de la haine que sou père avait 
vouee au duc d'Orléans, il le fit lchement assassiner à 
Paris. 
Cet assassinat, qui n'était peut.tre que la vengeance d'un 
affront fait h l'honneur de la duchesse de Bourgogne, fut 
le prélude des plus effrayants dsordres et le signal de cette 
longue lutte des Armagnacs etdes Bourguignons. 
Le duc Jean avait osé se préseater dans la charabre fit- 
nëbre oi, était exposé le corps du duc d'Orléaus; il avait 
porté un des coins du pole lorsqu'il fut mis en terre, biais 
le prév6t de Paris, Tignonville, découvrit l'affreu vérité, 
et vintdénoncer le meurtrier au sein mime du conseil ro$al, 
oit il siégeait. Jean sans Peur se hàta aussit6t de quitter 
Paris, suivi de D'Ocquetonville, gentilliomme normand, qui 
avait frappé son ennemi, et des complices de celui-ci. Après une 
course de trente-cinq heures, il arriva dansses Etats du nord. 
, Dans sa Faite il avait été virement poursuivi par des gens at- 
t tachë à la raaison d'Orléans. Ceux-cil'eussen t meme atteint s,il 



JEAN 
n'et arrêtWleurcourse en rompant le pont de Saint-Maxence. 
Arrivé b Bapaume à une heure, il avait ordonné qu'à l'a- 
venir, à perpétuité, et chaque jour à pareille heure, on son- 
nerait l'angélus dans cette ,ille ; et il 6t une fondation reli- 
gieuse en mémoire de sa délivrance. 11 assigna pour lieu de 
refuge à D'Ocquetonville et à ses compagnons le château de 
Lens, défendu par une forte garnison. Il ne s'Cait arrêté 
que quelques instants à Bapaume, et s'tait dirigé sur Arras 
et Lille. Là, dans un conseil des principaux seigneurs de sa 
cour, il prit la rsolution d'avouer hautement le meurtre du 
duc d'Orléans. 
Bient6t, dans la harangue prononc6e en son nom à l'as- 
semblée des etats de Flandre, le feu duc d'Orléans fut 
signalé comme un tyran dont la justice et la relion avaient 
fait au duc Jean un devoir de délivrer la France. Il de- 
manda et obtint des états un prompt secours d'hommes et 
d'argent. Le gunvernemeut de France ne se crut pas assez 
fort pour soutenir la latte. Jean sans Peur s'était avancé 
jusqu'à Arnicas. On lui envoya proposer la paix et l'oubli 
du passé, s'il voulait livrer les assassins; il refusa. Enfin, 
après dix jours de conférences, des lettres d'abolition furent 
accordées : il se présenta devant le conseil. Le moine Jen 
Petit lit son apologie; il osa soutenir que le duc avait fat 
une action agréable à Dieu, utile à la France, en faisant 
périr un tyran, et que le roi devait le récompenser « g 
l'exemple des rémunerations qui furent faites à monseigneur 
saint Michel, pont avoir tu le diable, et au vaillant homme 
Phinées, qui perçu Zambri ». 
Le coupable fut absous parce qu'il était le plus fort ; il 
marcha immédiatement au secours de Jean de Bavière, 
prince-évëque de Lié.ge, son beau-frère, que les Liêgeois 
tenaient assi«gé dans ?,laéstricht. Il les vainquit; 20,000 Lié- 
geois restèrent sur le champ de bataille, llais la dnches 
d'Orléans, profitant de son abçence, l'avait fait déclarer 
ennemi de l'Êtat. Aussit6t il revient à Paris, et la cour à son 
approche se retire à Tours. Q,elques jours après, la mort 
de la duchesse d'Orléans rapproche encore tant de rivalités 
et de halètes, iIais une nouvelle ligue des princes se forme 
encore contre lui. l',laltre de la capitale du royaume, il y 
convoq,Je les états généraux et veut s'emparer de la per- 
sonne du roi. Cette tentative choue, et par un reviremeut 
soudain il est obligé de se samer en Flandre. 
La cour n'accepte méme pas ses offres de défendre l'État 
contre les Anglais, et pourtant leduc de Bourgogne a perdu 
ses deux frères à la funeste journée d'Azincourt; il ne 
songe qu'à les venger. 
Par ses ordres, une armée nombreuse s'est réunie à Ch- 
tilloa : elle devait rallier l'armée du roi et marcher contre les 
Anglais : mais la laction d'Odéans craignait avant tout les 
succès du prince bourguignon : un ordre du conseil du roi 
suspendit la marche de cette armée. Jean sans Peur ne peut 
supporter cet affront. Il brùlait d'aller combattre les Anglais, 
il va s'unir à eux ; il part pour Calais, et y signe cet infàme 
traité de tt6 • qui fut suivi de traitës plus inf'mes encore. 
Le premier resta d'abord enveloppé du voile du mSstère. 
Jen sans Peur devait dissimuler sa dcfection pour con- 
server son influence et son pouvoir, et se mënager les 
moyens d'ouvrir à l'arm6e anglaise les portes de la capitale. 
Perrinet Leclerc les livre à Guy de Presles et à Vil- 
liers «le l'lle-Adam, qui se rendent marres de la ville en 
son nom. 
L'entrée des troupes de Jean sans Peur fut le signal des 
plus terribles massacres dirigés par le fameux Caboche ; 
après quoi le due se rendit à Saint-Eustache, oi fut chante 
un Te Deum solennel. Il donna ensuite une poignée de main 
à Capelache, bourreau de Paris, qui lui rendit ton- 
d««n cette zaarqae d'Jfection : ces lmmmes de sang et 
de boue lui taient nécessaireg, mais fl ne tarda pas à 
briser lui-mëme ces dangereux instruments. 
Jean sans Peur et la reine I s abc au, qui s'était rappro- 
chée de lui, marchaient réunis sons la méme bannière, sans 
plan dcterminé, sans autre but que d'assouvir leur commun 

591 
ressentiment. Mais le duc de Bourgogne s'aperçut bient6t 
qu'en se jetant dans les bras de l'Anglais il s'était donné un 
marre, et non un allié; il se souvint qu'il était Français. Une 
première entrevue eut lieu entre lui et le danphin à Poiss-le- 
Fort près r¢Ielun, en juillet 1419. Le duc de Bourgogne lui 
avait balsA la main, et le dauphin l'avait embrassé. Un se- 
cond rendez-vous fut indiqué à ?,lontereau pour le 26 aoit. 
Le dauphin y tait arriv le jour convenu; il avait fixé sa 
résidence dans la ville. Le duc de Bourgogne ne sortit de 
Paris que le 10 septembre; l'entrevue devait se faire sur 
le pont. 
Le château avait été mis h la disposition du duc de Bour- 
gogne, chaque extrémité du pont devait avoir une garde 
différente ; l'entr6e du c6té du cbteau était gardée par des 
soldats de Jean sans Peur; celle du c6té dela ville par des 
hommes du dauphin. Chaque prince ne devait ttre accom- 
pagne, que de dix gentilshommes. Le due• avant de partir 
de Paris, y avait laissé une Iorte garnison sous les ordres 
de Saint-Paul et de l'lle-Adam ; ilavait fait conduire à Tro)es 
le roi Charles 3"1, la reine l.beau et la princesse ltargue- 
rite. Il fit prévenir le dauphin de son arrivée au chàteau 
de .tontereau = les gardes furent placées comme on était 
conveuu, et les deux princes arriv6rent chacun de leur 
c6té avec dix gentilshommes ; le dauphin êtait accompagne 
de Tannegui-Duchtel, de Louvet, des sires de Barbasan, 
de Courvillon, du vicomte de Narbonne et de six autressei- 
gneurs. Au moment o/ le duc de Bourgogne se levait pour 
;)artir, ses confidents avaient insiste pour le retenir. ,, Al- 
lons! leur répondit-il, il faut marcher oi il plaira à Dieu de 
nous conduire; je ne veux point qu'on me reproche que 
la paix ait été rompue par ma làcheté. » Il se dirigea vers 
le pont avec les sites de ilassorat, Saint-Georges, Thou- 
Iongeou, .lontaigu, N,»ailles et cinq autres olticiers de 
sa raaison. Une double barrière fermait l'espace reste 
libre au milieu du pont. Dès que les deux princes furent 
en prësence, le duc se mit a genoux et dit : « Monseigneur, 
e suis venu  votre commandement ; vous savez la dé- 
solation de ce royaume, votre domaine à venir, et quant  
moi, je suis prêt et appareillé d'y exposer les crps et les 
biens de moi et de mes vassaux, alliés et sujets. » Le dau- 
phin se découvrit, le remercia, et le fit relever. « Beau 
cousin, lui-dil-il, vous savez que par le traité de paix 
naguère fait/ Melon ( lors de l'entrevue de Poissy-le-Fort), 
entre nous, ftmes d'accord, que au-dedans d'un mois, 
nous nous assemblerions en quelque lieu pour traiter de» 
bcsongnes (aifaires) du rosaume et pour trouver manière 
de résister aux Anglais, anciens ennemis du royaume, 
et jurastes et promistes, et fut elu ce lieu o/ nous sommes 
venus au jour diligemment, et nous avons attend, quinze 
jours entiers ; si vous prie que nous advision.% ainsi que 
non l'avons 1 juré et promis, si nous trouvons moyen de 
ré.-ister aux Anglais. » 
Le duc répondit qu'on ne pouvait rien adviser ou laite 
sinon en la présence da roi son père, et qu'il fallait qu'il 
y vint. Et ledit seigneur ( le dauphin ) très-doulcement lui 
dit « qu'il iroit vers monseigner son père quand bon lui 
sembleroit, et non mie à la volontë du duc de Bourgogne, 
et qfil sçavoit bien que ce qu'il feroient tous deux, le 
roi en seroit content. Et , eut aacunes paroles, et s'appro- 
cha ledit de ltouailles dudit duc, qui ruogissoit, et dit : 
Monseigneur, quiconque le veuille voir, vous vindrez à 
présent à votre père ; en lui cuidant mettre la main sur lui, 
et de l'autre rira son épée comme à moitié. Et lors ledit 
messire Tannegui-Duchtel prit monseigneur le daupllin 
entre ses bras et bots de l'huis de l'entn du parc (euceinte 
réservée au milieu du pont), et y en eut qui frappërent sur 
le duc de Bourgoe et sur ledit ouailles, et allerent tou 
deux de s le " trépassement. » (ltist. de Charle I'I, Juvnai 
des Ursins. ) 
Des dix seigneurs qui a,aient accompagné Joen sans Peur, 
oailles seul avait eu le courage de ledéfendre. Le corps du 
duc «le Bourgoe, que des valels avaient d,:pouille. étai 



699 
resté sur le pont; il ne fut enlevé qu'à minuit et dposé 
dans un moulin, et le lendemain à l'hOpital de Montereau, 
o/ il fut mis dans la bière des pauvres et inhumé dans 
l'église paroissiale avec son jupon, ses houssen et sa 
burette. L'année suivante, son fils Philippe le fit transporter 
a Dijon et inhumer à la Clmrtreuse, dans un magnifique 
tombeau. La duchesse sa veuve lit distribuer aux pauvres 
.3,000 livres, attendu que le duc n'avait pu pourvoir  ce 
legs parson testament. On accusa de cet assassinat ladame 
de Giac, maltresse du duc défunt, et Phifippe Jossequin, fa- 
vori de ce prince : tous deux avaient élé, dit-on, corrompus 
par l'or des Armagnacs. Jean sans Peur encouragea l'a- 
griculture, le commerce et l'instruction. Il s'était composé 
une bibliothëque et avait acheté 2OO cus d'or un bréviaire 
romain, très-notable êl bien enluminé, 400 écus d'or 
Jacques Raponde un grand livre du roman de Lancelot du 
Lac du saint Graal, du roi Arthur de Bretagne, avec plu- 
sieurs belles histoires, couvert de drap de soie et garni de 
deux gros anneaux d'argent doré et ciselé. Il avait fait pré- 
sent de tu0 écus à Christine de Pisan pour deux livres 
qu'elle lui dedia, et il dura, en t405, une niéce pauvre qu'elle 
avait. DCFEY ( de l'Yonne). 
JEAN, ducs de Bretagne. Voyez 
JEAN, comtes d'Armagnac. Voyez, ArAc.xc (Mai- 
son d' ). 
JEN, comte de Montfort. Voe: 
JEN LEPARRICIDE, appelé aussi JrAt 
fut l'assassin de son oncle, l'emperetr Albert l . Son 
lëre, fils, comme Albert, de Rodolpi,ê de ttabsbourg, 
avait hérité a sa mort des domaines hcrcditaires d'Atlrich¢, 
du comte de Kybourg, qui avait été particulierement assigne 
comme douaire a sa mere Agès; et du chef de celle-ci, 
fille d'un roi de Bohèrue, il aait recueilli, aprës la mort 
de Wenceslas, des droits fondés de succession collatérale 
au tr0ne de Bohème. Jean,.quand il eut atteint sa main,ilC 
réclama à plusieurs reprises cet heritage; mais Albêrt, 
malgrë l'intercession de plusieurs évgques, refusa méme de 
lui rendre K)bourg, son heritage maternel, de la possession 
duquel il avait fini par se contenter. Jean,exaspéré, resolut 
alors de se enger, et forma contre la ,le de son oncle une 
¢:onjuralion avec des chevaliers de la haute Souabe, Walter 
d'Eschenbach, Rodulphe de Paire, Rodolphe de Warl, 
Conrad de Tegernfeld, Wailer de Castelen, etc., qui tous 
avaient également à se plaindre de ce prince. Le 1 * mai 
1305, tandis qu'Albert traversait la Reuss pour se rendre 
a Brugg, prës de Windisch, les conjurés se jetèrent sur h,i, 
et l'egorgerent avant que le reste de ses gens e0t pu le re- 
joindre, non loin de l'antique ;ïndonissa, et sur le sol 
mème de ses domaines bërcditaires. Les conjm'cs prirent 
ensuite la fuite chacun de leur c6té ; Jean, déguise en 
moine, se saura en ltalie, oi il chercha lon[,,temps h vivre 
dans i'ohscurte. Selon les uns, il aurait Ale plus tard solli- 
citer h Avignon, et il aurait obtenu son pardon du pape CIA- 
ment V ; aprbs quoi, il serait mort moine de l'ordre des Au- 
gustins, à Pise. Selon d'autres, il aurait vécu avec le cos- 
tume de moine, sans gtre reconnu, dans son domaine 
héréditaire d'Eigen ; et ce ne serait qu'à sa mort, arrivée 
n 13G, qu'on aurait appris qu'il n'trait autre que le mai- 
heureux duc de Souabe. Peu aprìsson avénement au tréne, 
l'empereur H e n r i V 11 rait les meurtriers de son prédéces- 
seur au ban de l'Epire. Mais Elisabeth, lemme de la vic- 
time, et sa fille Agnès, reine douairiëre de Hongrie, avaient 
déja tiré vengeance des conjurés et méme de leurs parents, 
toutes les fois qu'elles avaient pu s'emparer de leurs per- 
onnes. Leurs cbateaux avaient Ce détruits, et plus de 
mille innocents, hommes, femmes et enfants, avaient 
përi, la plupart de la main du bourreau. Paire se cacha 
longtemps à B;Iie, et disparut ensuite pour toujours; Walter 
d'Eschenbach servit trente-cinq ans comme be,'ger dans 
le pays de -,rtemberg; Rodolphe de la Wart, qui s'était 
enfui dans la haute gourgoe auprès du comte Dietpold 
de glamoat, fut livrë par celui-ci, trainWà la queue., d'un 

JEAN 
cheval, et cloé vivant sur la roue, où il mourut au bout 
de trois jours et de trois nuits des plus affreuses douleurs, 
pendant Içquels sa fidèle ëpouse ne le quitta pas d'un ins- 
tant. La reine Agnès fonda sur le terrain où le meurtre 
avait été commis un couvent d'hommes et un couvent de 
femmes, appelé Koenigsfelden, qui fut doté de biens con- 
sidírables, et dont le maitre-autal fut placé à l'endroit 
méme où l'empereur était mort. 
JEAN D'AUTRICHE. Voyez, J n'Ac,'moue {Don). 
JEAN ( ][].çpTiSTE-JOSEPn-FABiE/q-SÉnASTiEN ), archiduc 
d'Autriche, général de cavalerie et directeur général du 
génie et des Iortifications, ne le 20 janvier 1782, est le 
sixième fils de l'empereur Léopold II et de l'infante Marie- 
Louise, fille de Charles III, roi d'Espagne. Il dut son insu 
truction à lui-mëme plus qu'à ses ma|tres. Son go0t pour - 
l'art de la guerre s'éveilla de bonne heure, et il en fit une 
étude approfondie, ainsi que de l'histoire et des sciences na- 
turelles. En 1797 et 1799 il avait xainement exprimé le désir 
d'assister aux campagnes de son frère l'archiduc C h a r I e s ; 
ce ne fut que lorsqu'cn 1800 ce prince eut quitté l'armée 
et que son successeur, Kray, eutessuyé des dt.faites réitt:- 
rées, qu'il obtint à la place de celui-ci le commandement en 
chef de l'armée battue. Mais le 3 décembre 1800 les lia- 
biles manoeuv res exCulCs par 51 o r e a u pendant qu'il tom- 
bait avec abondance une neige très-fine lui firent perdt-e 
la bataille de I4 o h e n Il n d en, maisré toute sa 15ravoure 
personnelle ; et une seconde affaire, qui eut lieu prSs de 
Salzbourg, ne put arrgter son victorieux adversaire. Aprës 
la paix de Luneville, l'archiduc Jean fit nommé directeur 
général du corps du génie et des fortifications, et direc- 
teur de Pacadémie des ingénieurs ì Yieune et de celle des 
cadets à Wienerisch-Neustadt. Dès le mos de septembre 
1500 il avait parcouru le T)TOI, étudiant avec soin les 
taoens d'assurer la défense de celle pro ince et de 
voriser ses progrës matériels; aussi eu 1805, peu de temps 
avant que la guerre éclat't, il y accourul pour activer l'ar- 
mement des populations; et il commanda ensuite le corps 
d'arrose qui battit les Bavarois au Pa. de Strnb, et défendit 
la Scharnitz avec ln courage héroïque, bien quïnutile. 
Lorsque Napoléou raarcha sur Vienne, l'archiduc Jean 
conçut le plan hardi de se jeter sur les derrières de l'en- 
nemi; mais le revers éprouvé par la brigade Szenass l'em- 
pécha de le mettre à exécution. Il dut donc se borner à 
opérer, en Carinlhie, sa jonction avec l'archiduc Charles, 
pour sauver avec lui Vienne et la monarchie; mais la ba- 
taille d'Austerlitz et la paix qui la uivit dejouèrent Ca- 
lement ce projet. 
A partir de cette époque il choisit pour objet de ses 
Codes les Alpes Noriques, ainsi que les Alpe. de Salzbourg, 
de Styrie et de Carinthie ; et, accompaé de naturalistes, 
d'antiquaires, de dessinateurs et de peintres, il parcourut 
ce pa)'s dans tous les sens, pour en éclaircir le plus coin- 
piCement possible l'histoire, les antiquités et l'Cut actuel, 
tant sous le rapport de l'ethnograpbiê, que sous celui de 
l'économie politique et de l'économie rurale. Avec Hue- 
ra a y r sous ses ordres, il dirigea les préparatifs de la glo- 
rieuse insurrection du T y r o i, et lorsque la g,têrre de 1809 
clata, il fut chargé du commandement de i'armée de l'Au- 
triche intérieure, destinée à observer l'Italie et le Tyrol. 
Successivement vainqueur à Venzone et à Pordenone, 
battit prës de Sacile le vice-roi Eugène, et ëtait djh par- 
venu jusqu'à l'Adige, lorsque les désastres de l'armée autri- 
chienne à Landshut, à Eckmuhl et à Ralisbonne le forcèrent 
de battre en retraite. Il livra encore sur le Piave une bac 
taille, dont l'issue lui fut, il est vrai, défavorable, mais qui 
n'eut pas de grands résultats pour l'ennemi, et ce ne fut que 
le combat de Tarvis qui put le contraindre à continuer sa 
traite. Le plan qu'il avait conçu pour rouvrir les communi- 
cations avec le Tyrol, délivrer l'Autriche intérieure et divi- 
ser par une marche sur Vienne les forces de Napoléon, fut 
déjooé Le 1.1 juin il perdit la bataille de Raab, contre le 
prince En.ène; désastre causé en grande partie par la faible 



JEAN 
¢d.ance opposée par I'i 
emi, et qui l'empècha d'opérer sa jonction avec l'archiduc 
Charles. Il est vraisemblable que si ce mouvement avait pu 
ëtre exécuté, la bataille de XV a g r a m aurait eu une tout 
autre issue. L'archiduc Jean ne prit point part aux guerres 
de 1813 et de 1814 ; seulement, en 1815 il dirigea le siAge 
d'Huningue, qu'il rasa après l'avoir forcé de capituler. 
A partir de ce moment il resta toujours éloigné des af- 
faires publiques; et l'ombrageuse politique de 5I. de Met- 
te r n ic h l'efapècha mème de visiter de nollveau le Tyrol, 
province pour laquelle il avait tonjonrs témoigné une affec- 
tion particulière. Betiré ; Groetz, qui lui est redevable de 
nombreux embellissements, il ? consacrait ses loisirs à l'C 
rude des sciences, prètant aussi avec empressement son 
appui à toutes les entreprises utiles; et ce n'était guère 
lu'à ce propos que le gros du public entendait encore parler 
de lui de temps à autre. Bien ne prouve d'ailleurs l'authen- 
ticité de ce mot qu'on lui prJte : « Plus d'Autriche, pins àe 
Prusse ; qu'il n'y ait plus qu'une Allemagne ! » et qu'il aurait, 
dit-on, prononcé dans une circonstance oificielle. Ce qu'il 
? a de certain, c'est que l'intérët tout particulier qu'il pre- 
mit aux progrès des sciences et de l'industrie, l'isolement 
politique dans lequel il vivait et les souvenirs de la guerre 
de 1809 avaient popularisé son nom bien au delà des Iron- 
ti:res de la Styrie. 
Lorsque, à la suite de la commotion «le 188, la diète 
germanique lut dissoute et remplacée par une puissance 
centrale provisoire créée par l'assemblée nationale « dans 
la confiance que les divers gouvernements de l'AIIcmâgne y 
donneraient leur assentiment, » les regards de la grande 
majorité des Allemands se dirigèrent sur l'archiduc Jean, 
qui le 29 juin 188 fut effectivement Alu vicaire de l'Em- 
lire d'Allemagne par le parlement. Après avoir déclaré à 
la grande députation qui lut chargée d'aller lui apprendre sa 
nomination, qu'il acceptait ces fonctions, il se rendit à Franc- 
fort au milieu des acclamations de l'Allemagne, à l'effet de 
prendre possession de sa charge dans l'église Saint-Palfl. 
-« Ici-bas, dit-il/ cette occasion, il ne faut pas faire les 
choses à demi; il faut savoir se dévouer complctement à la 
mission qu'on a reçue, et qui est d'assurer le bonfieur de la 
nation allemande. ,, Depuis la chute de Ietternich, il était 
d'ailleurs sorti de Iïsulement à peu près forcé dans lequel 
il avait jusque alors vécu. Après sa Ktite à I.nspruck, l'empe- 
reur Ferdinand l'avait nommé son lieutenant général, lui 
avait ¢onfié le oin d'arranger les affaires de la Hongrie et 
de la Croatie, et l'avait en outre chargé de présider à l'ou- 
verture de la diète constitutionnelle à Vienne (22 juillet). 
5Iais, comme il l'avait dit à Francfort, l'archiduc se consacra 
-exclusivement au devoir de ses fonctions de vicaire de l'Em- 
pire, qu'il exer.ca constitutionnellement ( voye-- 
aprës avoir constitué un ministère de l'Epire. La direction 
que prirent les délibérations relatives à la constitution fut 
loin, il est vrai, de répondre à ses idées et à ses VœUX ; et plus 
la discussion approcha de son terme, plus il se montra le 
défenseur énergique des intérts de l'Autdche. Après l'acfii'- 
çemetlt de la constitution de l'Empire, en date du 28 mars 
1S-19, et lorsque le roi de Prusse eut ët6 du empereur 
d'AIlemagne, il manifesta d'abord l'intention de résigner 
ses pouvoirs; mais les conseils de ceux qu'on al»pelait alors 
les grands conseillers allemands l'y firent provisoirement 
renoncer. Il ne pouvait guère avoir à cœur de mettre à 
xécution la constitution de l'Empire ; aussi dès la fin d'avril 
cette question avait-elle amené une scission entre lui et ses 
ministres. Le vicaire de l'Empire ayant refusé d'accepter le 
programme que lui présenta le cabinet Gagern, les mi- 
nistres donnèrent leur démission ; et c'est par suite que se 
forma la combinaison Groevell, Jochmus, Detmold et llerck, 
devenue en réal/tC 6 la mort de Groeveil, un comité autri- 
chien. L'archiduc combattit alors la prétention de la Prusse 
de le maintenir dans les fonctions de vicaire de l'Empire ; et 
il ne resta plus à Francfort que comme le représentant et 
le dëfenseul" «les inlérèts autrichiens. Ce fut seulement à 
nier. ne  co.vs. 

JEAN-DE-JERUSALEM $93 
l'epira[on de Iïntérim qui mit formellement fin  ses 
fonctions, qu'il les résigua le 20 décembre 1849. II qnitta 
alors Francfort, et s'en retourna en Styrie. Depui% l'archiduc 
habiGroetz, aussi étranger h la lilique qu'il l'it autre- 
fs. En 1827 il a épousé morganatiquement 1 fille d'un 
simple marre de s, e Anna PIochel (ne le 6 janvier 
18o4), qui a été créée plus tard oemtesoe de Meran et 
ronne de Brandhof, et dont il a un fils, François (né le 
11 mars 1839), qui depuis 185 porte le titre de comte 
de 51eran. 
JEAN (NÉeOCÈE-Mm-JosPH), roi de S a x e au- 
jourd'hui téguan, l'un des prinoes I plus Claires et les 
plus instruiB de notre époque, succéda  son frère F réd 
rie-Auguste, mort d'un accident, le 9 ao0t t85. NWle 
12 dembre 1801, un voyage qu'il fit en Italie, en 182 I, ne 
oentribua pas peu à fortifier le got tout particulier qu'il 
s'était toujours senti pour la liftCature ilienne. La tra- 
duction envers qu'il a publiée de la Dwina Commedia d; 
Danle, avec des oemmenire» critiques et historiques (3 
vol., Leipzig, 1839-1899 ), OEmoigne de l'tude approfondie 
qu'il en a faite, blarié depuis 1822 avec la princesse Amelie- 
Auguste, fille du roi de Bavière blaximilien, et sœur de la 
reine de Saxe, il en a eu trois princes et six princesses, dont 
l'alnëe, Ëlisabeth, née en 1830, avait pousé en 1850 
duc de Gnes, frère du roi de Sardaigne, et en est devenue 
xeuve en 1855. 
J EAN (Chrétiens de Saint). lçe: CHRËTIENS DE SAINT 
JEAN. 
JEAn-BAPTISTE. l'oge: Jt' (Said), page 57. 
JEA BAT. l'oge: B. 
JEAN BOCilOLD. I%9e: JE. ve LE,ve. 
JEAN BBUCtl. ; oge= DVlmQVS. 
JE. CHRYSORRliOAS. ;'ove: J« Chr)r- 
thons, ge 579. 
JEA CHBYSOSTOME (Saint). I%e: J. Chry- 
mstome, page 
JEANDAMASCÈXE. l'ovez JA Chr?sorrhoas, 
page s79. 
JEA DE BOLOGNE. I%9e: Boocxe (Jean de). 
JEAN DE BRUGE. Voçc: Evc (Jan Van). 
JEN DE BRUGE (DAxJORIS, dit). 
ABAISS, [oe I et, page 516. 
JEAN DE CALC.R. I%e: C.ic. 
JE&N DE DAMAS. l'oe: Jets Chr)sorrhoa, 
page 579. 
JEAN-DEJÉUS&LEM(Ordre de Saint-). Dès 
l'an 108 des marchands d'Amalfi fondèrent h Jerusalem 
une église, à laquelle éit annexe un monastère, qui s'accrut 
bientét d'un hépilal et d'une chapelle placée sous l'invooe- 
tin de int Jn. C't à cette circonstance que les eli- 
gieux qui faiient vœu de soigner et de seoeurir les ma- 
lades et les psuv pèlerins durent leur dênommalion de 
Frères hopitalier ou Fr&es de Saint-Jean de Jtrusa- 
lem. Sous le gouveement de leur premier che, Gérad 
de Tonque ils restent du pape Pasoel Il une constitution 
particulière; et Gefroy de Bouillon, ainsi que 
crois, leur donnèoent bientét de granOes çossessioas en 
fonds de t¢ffe. Le second chef de l'ordre, Raymon du Pn)', 
le tranforma au commencement du douzième siècle; et en 
ajoutant aux voe des religieux l'engagement de oembaltre 
les infidèles, il en fit un urdre oeligieux et milliaire, qu'il 
divisa en trois cluses : les chevaliers, chargés de 
les infidèles; les cha pelaius, chargës àu serx ioe d au Icls : 
et les frèr Igis ou servant, chargés de soigner les mala.oe 
et de oervir de guides aux pèlerins. L'ordre ainsi ,ns- 
titué s'éndit toujours de plus en plus, acquit dans p- 
que tous les pays de la chrtienté de grand ter et bean. 
up d'influenoe, en mme temps que I pas i .ccr- 
datent de nombreux priviléges. Il en résulta que oet .rdre, 
aprës avoir pendant quelque temps strictement obv6 
rgle et combattu bravement I infidèles, finit par dég6- 
nércr ; ses membres tombèrcnt dans l'orgueil et la luxure, 



&94 
se flren force mauvaises querelles avec les T cm p I i er s et 
le clergé d'Orieut, et coutribuèreut puissamment ainsi/ fahe 
perdre aux brétiens la Palestine. 
Après la prise de Jérusalem par Sala,tin { ! 187 ), l'ordre 
transporta sa résidence h Ptolemaïs ; et cette ville ëlant 
tombée cent ans plus tard au pouvoir des inlidèles, les che- 
valiers allerent s'établir dans l'ile de Cbypre, dont le roi leur 
fit à cet effet cessiou de la ville de Limeno. Mais ils n' 
demeurèrent pas plus de dix-huit ans, et conqirent eu 1300 
File de lhodes, où ils établirent désormais Iv chef-lieu de 
leur ordre ; c'est pourquoi on les designa alors sons le nom 
«le chevaliers de Bhodes. Ils entent/i y soutenir les luttes 
le plus acharnées contre les Turcs ; et l'histoire a consacré 
le souvenir de la valeureuse défense qu'ils opposërent sous 
les ordres du grand-maltre Pierre d'Aubusson aux Osmanlis 
commandés par Mahomet Il, qui vint assieger la ville «le 
i h o«1 e s en 1480,  la tëte d'une immense armée. Mais les 
atb,lues des Tre'us se renouvelèrent et devinrent de pins 
pins tréqueutes; et alors, laissés sans secours par le reste de 
lEurope, ils se vireut contraints, le 2 octobre t52oE, sous 
le gouvernement de leur grand-matira Phililpe de ;illiers 
de Plie-Adora, et malgré la rcsistance la plus opiuiàtre, 
d'abandouuer Bhodes à Soliman. 
Les chevaliers errèrent alors de cdté et d'autre jusqu'au 
moment ad, en | 530, l'empereur Charles-Quiut leur eut cori- 
cide eu t, ute proprio'tWet a titre d fiefrelevaut de l'Epire, 
les lies de Malte, de Gozzo et de Comino, h la coudition «le 
faire constammeut la guerre aux Turcs et aux pirates, et 
de restituer ces lies au royaume de 3Taples quand l'ordre 
aurait r«.ussi à reprendre l/hu,les au infidèles. C'est de la 
q;.«'ils pdreut désormais la dénomination de chevaliers du 
Malle. Sous Jean de Lavalette, devenu leur grand-maitre a 
partir de 1537, qui constroisit la ille et la forteresse de 
Lavalelte, et mourul en 1568, ils repoussèrent en 1565 une 
redoulable expedition entreprise contre eux par Soliman II ; 
• ;ls continuèrent ensuite avec tant de vigueur et de résolu- 
tien leurs guerres marithnes contre les Turcs, pendant le 
cçurs desquelles d'aiiteurs ils faillirent maintes fois succom- 
ber, qu'ils maintinrent leur institution jusqu'a l'epoque de 
la rêvolution française. De cet e'venemeut date la perte de 
let«r iudependance. Dëjà, à l'époque de la Bëformation, ils 
s'et,lent vu enlever les immenses domaines tIu'iis passe- 
datent en Au#eterre, daus les Pay»-Bas, en Danemark, eu 
urvége et en S:lëde. A ce moment autant leur en arriva en 
Bonapartê, lors de son expédition d'Égypte, les ayant 
at[aqués, leur grand-maitre H o m p e s c h  à la suite d'une 
capitulation, ou plutCt d'une trahison insigne, évacua l'tic 
sous combat. E 1800 les Allglais s'emparèrent de File de 
Malte ; et quoique la paix d'Arnicas eut stipulé qu'ils la 
ren,lraient aux chevaliers de i'orde, ils l'ont toujours con- 
servee depuis. Hompesch abdiqua alors son tire et ses 
p,mv«irs, et les membres de l'ordre élurent pour grand- 
maitre, le 16 decembre 1798, l'empereur de Russie Paul 
M:ds cette élection souleva que vive opposition, à cause de 
la difference de leligion du nouveau gand-maitre ; le pape 
rélusa de la valider, et l'alertent palatin de Bavière, Maxi- 
milieu-Joseph, pour éviter toute dillmult avec la lussie, sup- 
primo purement et simplement dans ses Ètats l'ordre, don 
il ré,nit les possessions au domaine public ; exemple q,d 
fut imité dau. la plus grande partie des pays où l'ordre pos- 
aCoit encore des propriétés, notamment, en ttO e fS! 
çu l'russ, o/ on le remplaça, en llœe, par l'ordre prussien 
d Sint-Jean de J¢rusalem, simple dècoration a l'usage 
de In haute noblesse. 
Le derniers débris des possessions de l'ordre consistaient 
alors dans le grand-prieurWde Bohéme, et dans les deux 
grand-I»rieurës «le P, us.ie. Après la mort de Paul W, le pape 
omma ou confirma succeivement plusieurs italiens e» 
qualite de g, rands-maltres de l'ordre, qui, après avoir 
$1alte, ètait venn  lixer à Catane eu Sicile. Après la clmtc 
du apoléon, l'ordre essa)a d'eftctuer aussi sa reslaura- 

.JEAIN-DE-]EIUSALEM- JEAJI DE PAlaIS 

tion ; mais tous ses efforts furent inutiles. En 1826 le pape" 
countit à ce que le siCe en f0t transféré  Ferrure ; et dans, 
ces derniers temps, en voyant opérer le rétablissement des. 
abbayes et commanderies de l'ordre dans le royaume lom- 
bardo-w:nitien, on a pu en inférer que des destinCs plus 
propices lui étaient rëservées avant peu en ltalie, dans 
I'I talie aulrichienne tout au moins. 
Le costume des chevaliers consistait en temps de paix 
en un lou manteau noir orné d'une croix'blanche à huit 
pointes, dite croia de blnlte, et qui se plaçait sur le coté 
gauche de la poitrine; en temps de guerre, en un uni|orme 
ronge avec une croix lisse sur la poitrine et sur le dos. 
L'ordre ne alCendait du pape qu'en matières ecclësiastiques, 
et au temporel il était investi d'une complèle souverainetë. 
L'ordre se divisait en huit langues : t* Provenue, 2 ° Au- 
vergue, 3 ° France, to ltalie, 5 ° Aragon, 6 ° Angleterre, 
7  Allemague, 8 ° Castille. La tangue de Provenee fut classée 
au premier rang, en memoire de Gérard, fondateur de 
l'ordre. La langued'Angleterre fut supprimée à l'epoqoe du 
.chisme d'Henri VIl[. Chaque langue se subdivisait en grands 
prieures, en bai[liages eonventuels, et [e prieurés en com- 
manderies. Les chevaliers nobles étaient oeuls admissible 
aux premières charges de l'ordre ; les cheval!ets de la lan- 
gue d'Allemagne devaient faire preuve de seize quartiers de 
noblesse : chaque langue avait un droit spécial et exclusif à 
l'une des grandes dinités. 
JEAN DE LEYDE, dont le véritabte nom était Jean 
Bocet.sor% ou Bocota, ou encore BOCKnOLT, était le fils d'on 
magistrat municipal de La Haye, et naquit à Leyde vers t5 t 0. 
Après avoir pendant longtemps couru le monde comme 
garçon tailleur, il revint s'établir de son état dans sa ville 
natale, biais joyeux compagnon, il aimait bien mieux les 
plaisirs que les travaux de sa profession ; aussi dans tes 
associations poétiqoes du temps le voyait-on figurer et comme 
pacte et comme acteur, favorisWqu'il était, à cet égard, par 
un exférieur agréable, par uneéloquence naturelle et par une 
imagination aussi ardente que vive. S'étant épris des doctrittes 
des anabaptistes, il deviut uu de leurs prophète am- 
bulants les pins fanatiques et les plus influents. C'est ainsi 
qu'en 1533 il arriva à Munster avec Jean Matthys, qu'il 
seconda avec aulant de zèle que de succës dans son œuvre 
de conversion anabaptiste; et  la mort de Matthys, arri- 
vée en t534, il lui sureCa. Jean de Leyde renversa alors 
l'antique constitution de Munster, organisa cette ville en 
royaume de Sion, y institua des juges et y mit en vigueur 
une législation ayant pour base l'interprétation thëocratiqnç - 
de l'Ancien Testament. E se faisant proclamer roi de Sion, 
il mit le comble à cette œuvre de vertige et daventures, oit 
le fanati.me religieux et tu démence étaient combiués de la 
manière la phls êtrange avec une sensualité grossière, avec 
le goùt des jouissances et la o'uaulé. Jean de Leyde, qtli se 
déclara lui-mème le roi d'élection du monde dor=t il est 
question dans l'Apocalypse, introduisit la pluralité des 
(atomes, se iivra à tous les excès de la débauche au milieu 
d'un luxe royal, versa des flots de sang tout eu se proclamant 
bien haut Point du Seigneur, et fit de la ville de Muuster le 
thétre de désordres qui n'Caient possibles qu'en raison du 
bizarre mélange du fanatisme religieux le plus sauvage a ce 
la sensualité la plus grossière. Après diverses attaques inu[i- 
lement teurC, la ville de Mu nster (ni reprise par sou évêque. 
Le tailleur-roi fut alors fait prisonnier avec les autre. 
boute-feu ses complices. Le 23 janvier 1536, tou. fnredt 
mis à mort et subirent les plus horribles supplices. Le 
cadavre de Jean de Leyde fut en outre suspendu dans une 
cage de fer at sommet d'une des plus hautes tours de la ville. 
Les derniers instants de sa vie nous le font voir anéanti, 
et avouant humblement ses fautes, dans |'epoir d'ohlenir 
ainsi sa grSce. 
JEAN DE MEUNG. l'oye MEu. 
JEAN DE PABIS, celëbre dominlcai,, docieur et 
professeur en !héologie à Paris, et grand prédicateur, sou- 
tint le roi Philippe le Bel contre le lape Boni- 



JEAN DE PARIS -- JEANNE 595 
t'a c e VII I, dans son traité De regia Potestage et papali. [ demênt de l'armée impériale; quand la campagne suivante 
Plus tard, ayant avancé en chaire quelques propositions s'ouvrir, sa santé était déj/t fort affaiblie, et il mourut le 12 
erroné.es sur le dogme de la présence réelle, il fut déféré septembre 169t,àTublngue. 

ì Guillaume, és'tque de Paris, qui lui interdit la prédication 
et l'euseignement. Il en appela au pape de cette décision, et 
se rendit à Borne pour se disculper; mais il y mourut peu 
de temps après son arrivée, en t304. 
JEAN DE TIOYES, greffier de l'h6tel de ville de 
Paris, au quinzième siècle. On ne sait rien de sa vie; lnais 
il a longtemps passé pour l'auteur de l'histoire de Louis XI 
connue sous le unm de Chronique scandaleuse. L'abbê 
Lebeu[ a prouvé que ce livre n'était qu'une copie presque 
textuelle des Grandes Chroniques de ¢rance ou des Chro- 
niques 
JEAN DU PLAN DE CABPIN. Voyez 
PIN. 
JEAN-GEORGES. Quatre électeurs de Saxe ont 
porte ces noms réunis. 
JEAN-GEOiGES I er, électeur de Saxe (16tt-t656), fils 
de l'Cecteur Clu'istian I er, et de Sophie, princesse de Branden- 
bourg, né le 5 mars t585, succéda le 23 juin 1611 / son 
frère Ehristian IL Son règne occupa une grande partie de 
la guerre de trente ans, pendant laquelle il joua un rhle 
assez équiv6qne, s'attachant bien plus à obtenir l'agrandis- 
sement de sa maison qu'à assurer le triomphe de sa foi reli- 
gieuse. Après avoir flotté indécis pendant quelques années 
entre les deux intérhts en présence, il finit par s'allier, en t 631, 
a Gustave-Adolplie; mais, abandonnant bient6t la cause 
des Suédois et des protestants, il se jeta dans les bras de 
l'empereur moyennant la restitution de certaines parties de 
trritoire. Jean-Georges ne gagna pas grand' chose à sa ver- 
satilité politique, car les Su6dois et les Fran.cais ravagèrent 
alors ses Etats, devenus le théitre des opérations militaires ; 
et les lul»eriaux ne les ménagërent guére davantage. Le traitë 
de XVestpllalie lui assura la possession de la Lusace, des 
évëchés de bleissen, de Mersebourg et de l;aumbourg, ainsi 
que celle de l'a[cheveché de blagdebourg, pendant tout le 
temps de la vie de l'administrateur AuLste, i la mooE du- 
quel il devait faire retour au Brandebourg. Après le réta- 
b|L-sement de la paix en Allemagne, l'Cecteur s'occupa de 
guérir les plates faites par la guerre à ses Etats. Il mourut 
en 1656, laissant quatre enfants, dont les trois plus jeunes 
devinrent la souche de trois lignes collatérales de la maison 
de Saxe, à savoir: Sa.ce- WeissenfeLs, 8ae-Mersebour9 et 
Saxe-Zeil,-. 
JEA..N-GEOBGES Il, électeur de Saxe (1656-1680), fils 
et successeur du précédent, naquit en 1613 et s'effurça, en 
se rattachant aux intérêts et à la cause de l'empereur, de rë- 
parer la brëche qu'avaient taire/ ses États heréditaires les 
etablissements indépendants créés à ses frères cadets par son 
père, qui, dans son testament, avait érigé en principautt: 
souveraines les apanages créés en leur faveur. Quoique 
fort peu belliqueux par tempérament, il ne laissa point que 
de soutenir l'empereur dans ses guerres contre la France. Il 
mourut le 22 anùt t6B0. 
JEAN-GEORGES III, électeur de Saxe (1680-1691), fils 
et successeur du prëcédent, né en 16A7, commanda, dès 1673, 
le contingent de troupes saxonnes fourni par son père ì 
l'empereur contre les Français. En vertu du traité qui le liait 
/ l'empereur, il accourut/t son secours, h la tëte de 20,000 
hmmes, quand les Turcs s'en vintent assiéger Vienne 
en 1683, et ne contribua pas peu à la victoire de Jean So- 
bieski, dont le résultat fut la délivrance de cette capitale. 
L'année suivante, il conclut personnellement avec la répu- 
blique de Venise un traitë par lequel il s'engageait à mettre 
à sa disposition pendant trois ans 3,000 Saxons pour aller 
combattreles Turcsen Morée; et en t686 il secourut I empe- 
-eur avec un corps d'armée qui contribua ìla reprise de Bude 
sur les Turcs par les Impériaux. Jean-Georges III se mourra 
constamment l'adversaire de la politique de Louis XIV en 
Allemagne; en 1688 il tut le premier prince allemand à 
prendre les armes contre lui. En 1690 il prit le comman- 

JEAN-GEORGES IV, électeur de Saxe (t691-t694), fils 
et successeur du préoédent, né en 1668, mort de la petite 
vrole en 1694, n'a laissé dans l'histoire de la Saxe d'autre 
trace que le souvenir de ses scandaleuses amours avec 
une demoiselle de bleitschutz, qu'il créa comtesse de Bochlitz 
et combla de richesses, mais qu'il eut la douleur de perdre 
en 1694, de la méme maladie/ laquelle il succomba lui-reAme 
moins d'un mois plus tard. 
JEAN-JEAN. Chaque langue a ses noms sacrifiés, 
auxquels l'usage a donné, sans qu'on en devine le motif, 
un sens défavorable ou ridicule. Tel est celui de Jean, au- 
quel s'adapte toujours quelque fcheuse acception, it que 
l'ou appelleun Jean, sans nulleaddition de mots, un époux 
trompé, soit que les termes de JeanoEéte, Jean-Farine, 
ou d'autres plus outrageants encore, servent ì signaler un 
sot, un I'che, etc. Jean-Jean a ete sous la Beslauration 
la deignation, moins incivile, et seaflement legèrement rail- 
leuse, du jeune conscrit arrivant de son village. Avaa,t que 
les joyeux auteurs des Bonnes d'enfan nous l'eussent 
montré sur la scène des Variétés, qui ne l'avait pas remar- 
qué dans nos jardins publics, tournant une baguette dans sa 
main pour se donner une contenance, et faisant si niaisement 
sa cour h la payse, souvent beaucoup plus madrée que lui? 
C'est I/ que les Molière des boulevards saisirent cette haire 
physiounmie, pour laquelle ils créèrent le nom expressi! de 
Jean-Jean, que C h a r i e t adteva de populariser par ses 
ingéldeuses caricatures. Remarquons ici, en passanl, les pro- 
grèsde lacivilisation.Jadis cetapprentigénéral îtait nommé 
hrutalement un blanc-bec. 
Au surplus, ce n'est pas chez notre nation, si disposée à 
I»rendre les gotts et l'esprit militaires, que le jeune soldat 
rete longtemps un Jean-Jean :quelques mois su{hsent 
pour qu'il perde tous ses titres à ce nom, qu'il repasse, 
avec les corvées du dernier venu, au con,cit de la levée 
suivante ; car dïjà ci-devant ingénu, son unilorme l'a entiè- 
remeut métamorphosé..S'il a vu le feu, il est peut-Cre de- 
venu un héros ; s'il n'a etWformë que par les garnisous, sa 
timiditéa été remplacée par la jactaneedu mïtier, et Charlet 
va laite de lui un nouveau portrait sous le nom de Jean 
C h a u v i n. Les bon nes seules pent-ètre, ou par innocence, 
ou par une cause contraire, regrettent encore de ne plus 
Irouver dans ce voltigeur à conquêtes et/ moustaches leur 
covstaut et imberbe Jean-Jean. Oauv. 
JEA.'-LE-BLANC. l'o/e-- Oackr. • 
JENNE (Papesse). Personne ne croit plus à ce conte, 
que les écrivains protestants ont exploité pendant deux 
siècles pour tourner la papatlté en ridicule. Quand des 
hommescomme Bayle et Voltaire, qui ont tant et si souvent 
attaqué et baffouë la cour de Borne, déclarent et prouvent 
que l'histoire de la papesse Jeanne est une fable, il ne peut 
exister que dans les tavernes anglaises d'anttpapiste assez 
déterminé pour y croire. Ce conte ne reste plus que pour 
démontrer avec quelle facilité se forment les croyances 
pnlaires ; et lorsqu'on cherclle le fondement de celle-ci, on 
a besoin de se rappeler la triste époque d'ignorance, de 
barbarie et d'immoralité où elle a pris naissance, pour con- 
ce.voir ce miracle de la crédnlté humaine. Il est vraisem- . 
blable que ce tut pendant le grand schisme d'Occidenl, après 
une trop longue série de papes indigne.s, que les ennemis 
de la cour de Borne accréditërent cette fable; mais, ce qu'il 
y eut de plus îtrange, c'est qu'ils l'appuyèrent sur le Iémoi- 
gnage des auteurs les plus Ihvorables au saint-stCe. Ainsi, 
ì l'aide de copistes suborns ou malveillants, et d'mterca- 
lattons frauduleuses, ils firent dire au bibliotliécaire Anastase, 
llistorien contemporain de la prétendue papesse, qu'entre 
Léon IV et Benolt III, une femme occupa la chaire de 
tint Pierre; il existait un manuscrit plus authentique, 
Je .larianus Scotus, qui écrivait en 1050. Ce moine pa:a:l 
Four un gai/il Ilomme et le meilleur aunaiiste de son temps 
75. 



&96 
On lui fit répéter, deux cents ans après Anatase, qu'une 
femme du nm de Jeanne avait succdé au pape Léo n I V, 
et règné deux ans cinq mois [et quatre jours, sous le nom 
de J e a n V I I I. Or, il était dilfici|e de placer un tel pon- 
tificat dans un pareil intervalle, car la date de la mort de 
Léon IV est bien constatëe par les chronolog[stes : elle est 
fixée au 17 juillet 55, et la mort de Benott ayant eu lieu 
le 10 mars 858, il ne reste entre ces deux événements qu'un 
espace de deux ans huit mois et vingt-trois jours : comment 
 faire entrer le pontificat de Beuoit III, qui dur«deux ans 
et demi, et celui de la papesse Jeanne, auquel on assigne 
une durée à peu près égale ? 
On ne s'en tint pas à ces témoignages : on fit dire au 
moine de Gemhlonrs Sigebert, qui écrivait en lit3, que 
cette papesse s'appelait L'Anglos, et qu'elle était née 
bla:ence. Martin le Polonais, savant chroniqueur du trei- 
zième siècle, fut censé aoir écrit à son tour que la 
peçse était accouchée en pleine procession, entre l'églisede 
Saint-CICent et le ColasC, et qu'en detesation de ce crime 
la procession ne passait plus par celle rue. Vint après Théo- 
dort« de [iem, secrétaire de plusieurs papes, écrivain fort 
médisant, qui, par malice on par crédulit ë, ajouta, en t4t, 
qu'une statue avait é'.é érigée en mémoire de cet accident; 
la chaise percée sur laquelle on faisait asseoir, dit-on, le 
nouveau pape pour qu'nn diacre pt reconnaltfe son sexe, 
fut mentionnée pour la première fuis, vers la fin du quin- 
zième siècle, par l'historien Platine, dont Ginguené a Ioué 
leç lumières et la ver«cilC Mais cela prouve seulement que 
«-erre fable avait acquis à cette époque n n lel degré de créance, 
que les esprits les plus Ci«iris et les plus dévouesà la cour 
,!e Ruine n'osaient pas méme en douter. Enlin, tous ces 
,!étails, successivement inventés ou accumules, toutes ces 
! ièc de rapport, comme dit le proteslant Blondel, furent 
assembées en un corps d'histoire par un certain Jean 
çrespin, qui, en 1548, s'était rélugiéà Genève. «Jean VIII 
dil-il, lequel prit le nom de L'Anglos , à cause d'un certain 
ngois, moine de Fulde, quant à son office a etWpape, et 
q,ant à son sexe était femme. C'ëtait une Allemande de 
,layence, nommée Gilbele, qui sons la conduite du moine 
un amant, et sous des habitsd'homme, ail« étndier à Atbènes. 
',près la mort du moine, elle revint à Ruine. Son éloquence 
,.t son savoir lui firent lant d'amis et tnt de partisans qu'elle 
l]t élue pape après la mort de Léon IV, en 8, et qu'elle 
I,rit le nom de Jean VIII. Louis II, lils de l'empereur Lothaire, 
vint pren,lre la codronne de ses mains. La frande ne fut 
reconnue qn'eu l'an 857, et Jeanne mourut cette mme an- 
née de snite d'nn accident qui la surprit en pleine pro- 
cession, car les ateurs racontent qu'elle se trouvait alors 
dan une sittatio intéressante. 1 et facile de comprendre 
quel parti les Crin«iris protestants ont tir de «cite histoire, 
«le mème que de la fameuse chaise percée du pape. 
Il n'y a I de sérienx que la stalue mentionnée et vue par 
Théodoric de Niera, ainsi que la cfiaise percée. Cette chaise 
a existe. Le pape nonvellement Alu y était solennellemeut 
assis ; et le père ,iabillon en a donn', une raison symbolique : 
on place, dit-il, le pape sur cette chaise pour lui rappeler 
le néant de sa grandeur, en lui appliquant ces paroles du 
psaume 112 : Suscitans a terra inopem et de stercore 
erigen pauperen, etc. Les auteurs de l'Enc!/clopgdie 
trouvent cette explication vraisemblable : ils ne sont pas 
difficiles; nous aimons mieux nous rejeter sur les bizarrcries 
du moyen ge, quia créé la lète des fou», celle de I'.ne, 
la procession du chameau à Béziers, et aulres btes fëriées 
sur toute Petendue du monde catholique. Quant à la si«tue 
vue par Théodoric de Niera, nous dirons que c'est possible, 
mais que le secrétaire de Jean XXIII vivait près de six 
siëcles après la prétendue pap«se; et tout prouve que dans 
le quinzième la cour de lome avait pris son parti sur celle 
historiette. I%us en avons trouvé un tëmoignage irrécosable 
dans un poëme de Martin Franc, auteur normand, qui était, 
en 1_39, secrétaire du du«de Savoie, Amédée VIII, au mo- 
ent ou ce prince accep2a la tiare et le nom de Félix V 

qui restait secrétaire de ce pape, et qui le fut plus tard de 
fficolas V. Dans son poême intitulé Le Champion de 
Dames, un personnage appelé Malebouche, grand ennemi 
des femmes, leur fait un crime de cette papesso, qui osa, 
dit-il, vestirchasubleet chanter ntese. Que fait son inter- 
Iocuteur Franc-Vouloir, qui n'est autre que le poêle lui- 
méme ? ie-t-il la papesse? flou. Il convient de son exis- 
tence, lui secrétaire d'on papo; il dit seulement que si elle 
a causé de grands maux, elle a fait aussi de grands biens 
par la sagesse de ses règlements et de ses ordonnances, et 
qu'après tout il y a eu beaucoup de papes qui ne valaieu£ 
pas mieux. Ces règlements si sages sont une invention du 
poëte; et c'est peut-être pour lui répondre à lui et à la 
crédulité publique, qu'Eneas Sylvius, avant d'ètre élevé 
sur la chaire de saint Pierre, attaqua cette fab|e, dont les 
ennemis de Ruine commençaient à se servir pour la dé- 
hiver. 
Wic|ef et Jean Huss avaient donné le signal de ces 
investigations, et Luther allait paraitre. Le désavoeu d'- 
neas Sylvius ne tua pas la papesse, car Platine, qui écrit 
quarante ans après, parle le premier de la chaise percée : 
le témoignage d'un pape n'est pas d'ailleurs plus dëcisi[ 
sur cette question que celui des cardinaux Baronius et 
Bellarmin, et de tant d'antres défenseurs de l'Église ro- 
maine. Mais Jean Tourmaer, l'un des premiers disciples 
de Luther, plus connu sous le nom d'Aventin; mais 
proie-plants Charnier, DumÇulin, Bochard, Basnage et Da- 
nid Blondel, ont reconnu et proclamé la fansseté de cette 
hisloire scandaleuse. Bayle a démontré, par des temoigna- 
ges et des argunent sns réplique, que les passages d'A- 
nasiase, de .'Xlarianns SCotus, de $igebert et autres, sont 
des intercalations évideutes, et que les manuscrits primi- 
tifs ne les reulermaieut pas. Voltaire, qui touche  tout 
dans ces sortes de questions, ne nomme une seule fois la 
papesse Jeanne que pour en nier l'histoire, et pour rap- 
peler qu'on gratifia de ce sobriquet le pape Jean VIII pour 
punir ce pontife de sa faiblesse à l'ëgard du patriarche pboo 
tins. C'est Baronius qui a donné le premier cette interprë- 
talion; Avenlin l'attribue de son c6té au pape Jean IX. 
parce que ce pape était une créature de sa concubine Theo- 
dora. Onuphre Panvini pense que les mauvais plaisants 
désignèrent sous ce titre Jeanne Rainière, la maitresse 
favorite du pape Jean XII, parce qu'elle avait une grande 
influence dans les affaires ecelésiastiques de son temps. 
serait aussi long de rapporler toutes les origines qu'ont don. 
nées à ce conte |es avocats de la cour de lome que la nomen- 
clature des éerivains protestants dont la plume s'est exercëv 
sur un pareil sujet. Cetle controverse a rempli des volu- 
mes. e nous moquons pas de nos ieux, nous perdons 
aujourd'hui plus de papier sur des questions qui n'ont p 
plu d'importance. V£NEr, de ! Acadëmia 
JEANNE LA FOLLE (en espagnol la Loca). fille de 
FC d i n and et d'[sa be Ile, mariée en t96,  Philippe, 
archiduc d'Autricbe, et mère de Ch arl es- Qu int : elle 
perdit son époux en 1506. La douleur que lui cansa celle 
mort lui 6tu l'usage de la raisen. On lut obligé de la tenir 
enfermée, et sens une surveillance conlinnelle. Elle mourut 
à Torvesiilas, en 1555, gée de soixante-quinze ans. La 
reine lsahelle était morte en 150. Son époux, le roi Ferdi- 
hand, craignant d'Atre obligé de quitter le tréne de Caslille, 
s'efforçait de retarder le retour de son gendre et de sa fille, 
alors en Flandre. Il n'avait conservé le gonvernemeut 
la Castille qu'en sa qualité de tuteur de son petit-fils, 
Charles. 5lais il survécut peu de temps à la reine Isabelle, 
et les cortès normèreut alors pour gouverneurs Adrien d'U- 
trecbt, doyen de Louvam, précepteur de Iïnfant Charles, 
et le cardinal Cisueros. La mort de l'archiduc, la démence 
de Jeanne, causèrent des trouhles funestes dans le Espa- 
gnes ; les nobles et le peuple n'obéissaient qu'à regret  un 
moine et h un cardinal. Telle lut la onse e celle longue 
guerre civile dite des cornu ncro. Les cortè Voulurent 
reconquérir leurs ancieus droits et rétablir l'ancien ssttm 



JEANNE 
électoral. Elles auraient rénssl si les nobles se fussent réunis 
au peuple ; mais la dissidence des deux partis porta un coup 
funeste à cette institution. La démence de Jeanne la Folie 
dev:nt une véritable calamité publique. Son règne ne fut 
qu'une longue et déplorable anardde. 
DUFEV (de I'Yonne). 
JEANNE. Iaples a en deux reines de ce nom. 
JEANNE I r, reine de [aples et comtesse de Provence, 
fille de Charles, duc de Calabre, et de Marie de Valois, 
était née en 1326. Son aïeul Bobert lui donna pour mari le 
prince André de Hongrie, issu d'une brancl,e collatérale de 
sa famille; mais l'incompafibilité d'humeur, qui ne tarda pas 
 se déclarer entre les jeunes Coux, présagea les malfieurs 
qui devaient asombrir et ensanglanter cette union. Jeanne 
aimait les arts, elle s'entourait de poëtes, elle donnait des 
ftes brillantes; tandis qu'André, d'un caractère austère, ne 
pouvait vivre que dansla solitude. Jeanne sitccda à son aïeul 
en t3-3. L'éloignement que les deux époux manifestaieut 
l'un pour l'autre ne permettait pas d'eslrer un rejeton de 
sang royal; aussi la branche de Hongrie avait le projet de 
marier Louis, frère d'André, à blatte, sœur de Jeanne. Ce 
plan renversait les espérances des princes de Tarente et de 
Duras, autres branches collatérales de la maison d'Anjou. 
L'un d'eux, Charles de Duras, qui aimait passionnément la 
princesse larie, destinée au roi de Hongrie, l'enleva et l'é- 
pousa. Philippine la Catanoise, femme née dans une condi- 
tion obscure, et qui tenait auprès de la reine le premier rang, 
décida Jeanne à se déclarer seule maltresse du royaume. 
Jeanne interdit à André de se mler du gouvernement; tiJus 
les actes lutent expédiés au nom seul de la reine, les em- 
plois distribués suivant ses ordres : elle seule rëgnait. Mais 
ce n'était pas assez pour les parti3ans de la reine, qui crai- 
gnaient de oir le souverain pontife se prononcer en faveur 
d'André. Le 18 septembre 13/t5, ce malheureux prince périt 
sous les coups d'une troupe d'asassins. La pensre et l'ordre 
de ce crime furent attribués ì Jeanne; ;nais on ne put 
qu'alléguer contre elle de vagues soupçons. Toutelois, son 
imprudente Iégëreté et la faveur dont les meurtriers du roi 
continuèrent à jouir auprès d'elle accréditërent les rumeurs 
de Iïndignation publique. 
Le roi de Hongrie, L o u i s, frère d'André, faisait retentir 
de ses plaintes toutes les cours de l'Europe, et le pape CIC 
ment ¥1 fulmina, le premier janvier t3tô, une bulle dont les 
expressions sombres et graves ressu.citërent contre les as- 
sassin d'André l'ancienne formule romaine de l'interdiction 
de l'eau et du feu. Il commit, en outre, le grand-justicier du 
royaume pour instruire le procès de la reine, menacée de 
tous c6tés dans son pouvoir et mme dans sa vie. Assicgée 
dans son parais par ses propres sujets, qui lui demandaient 
les coupables, elle est forcée de livrer aux bourreaux ses pi us 
chers amis. Mais le roi de Hongrie n'était pas encore satis- 
fait. Jeanne, voulant se donner l'appui d'un ëpoux, s'unit 
à Louis de Tarente, son cousin. Le mariage lut célëbrë le 
œee0 aoùt 
Louis de Hongrie, après avoir annoncé qu'il enveloppe- 
rait dans une mdme ruine Jeanne et les princes de sa 
famille, parut sur les frontières de Iaples, déployant un 
drapeau noir sur le fond duquel se détachait, ruisse- 
lante de sang, l'image de la tte d'André. Toutes les villes lui 
ouvraient leurs portes; la reine, épouvantée, s'emharqua 
le 15 janvier 1345, et fit voile vers la Provence. Les sei. 
gneurs de ce pays, qui s'entendaient secrètement avec Louis 
de Hongrie, la retinrent prisonnière au château Arnaud, 
forteresse de la ville d'Aix. Pendant ce temps les princes 
d'Anjou avaient fait leur soumission au roi de Hongrie, 
se flattat de le désarmer en lui ameuant le jeune Charles, 
fils de Jeanne et d'André. Louis, dissimulant sa vengeance, 
les adroit à sa table : le pain et le vin de l'hospitalité sera. 
blutent scellerune réconciliation inattendue. Aprèsle repas, 
le roi monta à cheval, et dit au duc de Duras : ,, lIenez-moi 
à l'endroit oit l'on a fait étrangler mon frère. -- Hëlas ! ré- 
pondit le duc, je n'y étais pas. » Le roi les conduit tons 

597 
alors au lieu on le meurh'e s'était accompli ; arrlvé à la 
galerie où André avait péri, Louis montra  Charles d, 
Duras une lettre de sa main qui prouvait qu'il avait eu 
connaissance de la conspiration, et le fit mettre à mort par 
un de ses gardes. 
Jeanne venait de recouvrer sa liberté, gré, ce aux soiiici- 
rations du pape; elle se rendit à Avignon, où Louis son 
époux vint la trouver. Elle comparut devant une cour de 
cardinaux pour èlye jugée : ceux-ci proclamèrent son inno- 
cence. C'est alors qu'elle vend if Avignon à C I é m e n t V I, 
pour la somme de quatre-vingt mille florins d'or. Puis elle 
s'embarqua pour Iaples, que Louis de Hongrie, fuyant la 
peste noire, avait évacuée, et où elle fut reçzze au bruit des 
acclamations, llais son compètiteur reparut presque aus- 
sit6t, et rentra dans la capitale, qu'une formidable émeute 
l'obligea encore de quitter. Enfin, le pape parvint à décider 
Louis de Hongrie et Louis de Tarente à, signer une trêve 
jusqu'au ! « avril 1351 ; les cardinaux délégués pour juger 
la reine déclarèrent que sa haine pour son premier épou, 
ne provenait que d'un maléficejeté sur elle. Jeanne et Louis 
revinrent h Naples. Le roi de Hongrie retourna dans se 
Etats, après avoir établi des garnisons dans les places dont 
il s'ëtait emparé. 
Deux nouveaux ennemis se levèrent contre la reine. 
Louis de Duras, jaloux de la faveur dont jouissaient rt,- 
bert et Philippe de Tarente, vint attaquer le royanme de 
Iaples, et Charles IV, empereur d'Allemagne, faisant re- 
vivre d'anciens droits, le cmnté de Provence. 
Louis de Tarente étant mort, en 1632, sans laisser d'enfant 
mle, sa femme prit un troisième époux, Jacques d'Aragon, 
comte de Roussillon etde Cerdagne; et veuve une troisième 
fois, elle épousa un condottiere, Othon, duc de Brunswick, 
issu de la noble famille d'Est. Cette union irrita Charles de 
Duras, le seul prince du sang qui ftt demeuré  ivant, auquel 
Jeanne avait fait épouser Marguerite, fille de sa sœur, et 
qu'elle avait dcclaré son béritier. ullement rassuré par 
les cinquante ans de Jeanne, il vo-ait dans la fralcheur de 
cette princesse des indices d'une l"écondib- dont son ambi- 
tion craignait les résultats. Urbain VI, nouvellement promu 
h la chaire pontificale, favorisait ces projets de Charles, et 
quand la reine reconnut comme chef de l'Égise son con- 
current CI,.ment Vil, il l'excommunia, et offrit la cou- 
ronne de Naples h Charles de Duras. La reine, menacee de 
tous c6tés, pour se ménager l'appui de la France, nomme 
Louis, duc d'Anjou, frère de Charles V, son béritier, par 
son testament du 23 juin 1380. ffaples, apprenant cetle 
dernière disposition de la reine, fait entendre des murmu- 
res, et se prépare h la révolte; Charles, voulant profiter 
de l'heureuse disposition des espz'its, se rend dans cette 
ville, en donnant h peine à Jeanne le temps de se renfer- 
mer au château .Neuf. Lb, elle attendait ses galères pro- 
vençales pour fuir en France. Mais Charles, qui craignait 
qu'une si belle proie ne lui échappàt, tient la reine étroite- 
ment bloquée. Othon, mari de la reine, était dëcouragé, et 
restait à Averse dans une fatale inaction. 11 tenta un coup 
désespéré ; mais dans le combat qu'il livra  Charles, il lu 
fait prisonnier. La reine se mit au pouvoir de son ennemi. 
Le lendemain, Louis 6'Anjou et les galères provençales arri- 
vèrent : ce secours fut la perte de Jeanne. Charles de Duras 
la fit etouffer entre deux matela% ail château de Muso, dans la 
Basilicate. Sa mort arriva le 22 mai 1382, après cinquante- 
sept ans d'ge et trente-sept ans de règne. Louis I. 
JEANNE lI, reinede Naples, naquit en 1371. Elle était fil 
de Charles de Duras, et succéda en llt à Ladislas, sort 
frère. Princesse sans mœurs et livrée à un favori, PaB- 
tiolfo Alopo, elle épousa Jacques de Bourbon, comte de la 
Marche, qui la fit enfermer en mlue temps qu'il livrait son 
amant au bourreau. Mais les Napolitains delivrèrent Jeanue, 
et son mari devint son prisonnier à son tour. Le papo 
llartin V obtint la liberté du roi, qui se fit cordeiiet. 
Jeanue se donna alors un nouveau favori, Caraccioli, 
qu'elle combla d'honneurs et de richesses et qu'e!e ht mettre 



59S 
à mort quelques années apr/:s. Cependant le fameux con- 
doltiere Jacques Sforza menaçait le terne de Jeanne, auquel 
il avait suscité un prétendant dans la personne de Louis Il[ 
d'Anjou. La reine, en qute d'un défenseur, adopta Alfonse V, 
roi d'Aragon, qui tout d'abord remporla quelques soccrs 
sur son compétiteur ; mais soudain il tourne ses armés con- 
re celle qui l'avait appele, et Jeanne révoque au profit de 
Louis d'Anjou l'adoptmn qu'elle avait consentie. Slorza passe 
aussitrt sous ses drapeaux, et Aifouse est contraint à la re- 
traite. Jeanne mourut en 1435, après avoir d.signé pour son 
successeur Bené d'Anjou, qu'elle avait adopté à la mort de 
son frère. 
IEA,,E DE BOURGOGSE, reine de France, pouse 
de Philippe le Long. Elle était fi|led'Othon IV, comte 
palatin de Bourgne et ourut en 1325, à. Boye en Pi- 
cardie, après avir fond6  Paris le col|ége de Bourgogne. 
Jeanne fut accusée d'adultère, en 1313, et condamnée a un 
emprisonnement perpétuel dans le château de Dourdan. 
5lais son époux la reprit au bout d'un an. Plusieurs écri- 
valus modernes onh accusé cette princesse de désordres g- 
néralement imputés à la mémoire de Jeanne de .Navarre, 
femme de Phdippe le Bel. 
II ne laut pas la confondre avec Jeanne de Bourgogne, 
première femme de Philippe VI de Valois et fille de 
bert Il, duc de Bourgogne, morte en 1368. 
JE.a,.,'%F DE FRANCE, duchesse de Berri, fille de 
L o u i s X 1 et de Charlotte de Savoie, n,:e en 146,, g.pousa 
e. 1476 Louis d'Orlëans, son cousin germain, qui rêa 
depuis sous le nom de Louis XII. Ce mariage étonna 
toute h cour. La plupart des hitoriens en attribuent le 
motif à la haine de Lo,fi Xl contre la maison d'Origans. 
La princesse Jeanne ëtait d'une constitution dëbile, bes- 
sue et de petite taille. Loui« XI ne laissait pas ignorer ce 
qui l'avait surtout détermine. Il écrivait au comte de Data- 
martin, « que les époux n'a.raient pas beaucoup d'em- 
barras à. nourrir les enfants qui narraient de leur union ; 
mats que cependant elle aurait lieu, quelque chose qu'on 
,'n p0t dire. ,, 11 le proposa à. larie de Clèves, veuve de feu 
Charles d'Orléans. Cette proposition était un ordre : ,, le 
contredire, dit l'historien Saint-Gelais de 5Iontlieu, ou lui 
faire des remontrances, n'était pas un parti star, u l'homme 
que c'état. ,, La princesse n'avait que douze ans, le duc 
d'Origans quatorze ;il etait bien fait et fort aimable ; le mariage 
fut cdlébré en 176. 11 avait été conclu dès le 28 octobre 
1673. Cet hi»torien assure encore que le jour des noces 
le duc d'Orléans protesta, « méme e préence d'aucuns des 
familiers, qu'il n'entendoit ni ne vouloit donner aucun con- 
sentement / ce mariage ». II obéit cependant, et ne mani- 
nifesta aucune repugnance marquéetant quevécutLouis XI ; 
il n'y allait pas moins que de sa vie. Le roi avait placé au- 
près du jeune époux des surveillants, des espions. Cepen- 
dant, le duc ne pouvait pas toujours dissimuler son éloi- 
gnement pour sa femme. Il s'oublia un jour, jusqu'à, faire 
de cette princesse, en présence du roi, un ëloge ironique, 
jusqu'a vanter sa beauté, la noble et imposante rëgularité de 
 taille. Louis XI s'etait contenté de lui répondre qu'il ne 
disait pas tout : « Vous oubliez, ajouta-t-il, de direque la 
princesse est non-seulement vertueuse et sage, mais fille 
,l'une mère dont la sagessé n'a jamais ¢té soupçonnée. 
Cette reponse ëtait une épigramme contre la duchesse douab 
riëre d'Orléaus, que toute la cour savait tre mariee en se- 
cret avec Babodange, son maitre d'hrtel, lequel avait été 
son amant, avant mme le décès du leu duc d'Orléans. 
2EEeanne aimait son époux, mais e;le ne se faisait pas illu- 
sion sur i'in,lifference, de ce prince; elle prévoyait que dès 
qu'il pourrait a#r librement, il saisirait la première occa- 
.-on de rompre son mariage. Le prince en effet s'était con- 
traint pat" peur sousle règne de Louis XIet pendant la ré- 
;:ence de la dame de Beaujeu; Jeanne savait que dè. les 
i.remi.es annëes du rëgne de Charles VIII des proposilious 
de mariage avaient ëté faites  la princesse Arme «le Bec- 
fugue; maiselIc n'cil Inlal,.fcsla nul:nue plainlc, c',le 

JEKN'E 
remplit pas moins tous ses devoirs d'épouse, et pendant la 
captivité du duc, après la balaille de Saint-Anbin, elle ol- 
licita et obtint sa liberté du roi Charles VIII. Mais après la 
mort de ce monarque, auquel il sucoéda, le duc d'Orléans 
s'occupa sérieusement des moyens de rompre son mariage, 
et de donner sa main à. la princesse de Bretagne, qu'il ai- 
mait depuis longtemps. Il proposa ce divorce dans son 
seil. Il alléguait pour motif : 1 ° qu'il n'y avait pas eu con- 
seulement libre de sa part; ,o qu'il n'avait cedWqu'à. la 
crainte et à la violence; 3 ° qu'il y avait parent entre lui 
et la princesse Jeanne, et une alliance spirituelle avec 
Louis XI, qui tait son parrain ; t,o enfin que le mariago 
n'aait jamais OE conommé. Il obtint du pape Alexan- 
dre VI des commissaires. Ferdinand, ésCue de Setta, légat 
du pape en France, Philippe de Luxembourg, évéque du 
.Xlans, et Louis d'Amboise, /vlue d'MbT, lurext chargés 
de décider cette affaire. 11 n'y avait de motif grave que le 
dfaut de consommation; les autres moyens ne pouvaient 
soutenir l'Apreuve d'un sérieux examen. Jeanne répondit 
aux commissaires qu'elle ignorait lors de son mariage la 
parenté spirituelle de Louis XI avec le duc, et qu'elle avait 
contrach de bonne foi, qu'elle n'avait éprouvé aucune 
lence, qu'elle respectait assez la mémoire ,le son père lmur 
penser qu'il n'avait pris que des voie« lgitimes, et quant 
au dernier motif, le dfaut de consommation, que l'fion- 
n¢tet6 ne lui permettait pas de s'expliquer nettement, mais 
que sa cousci,.nce l'empchait d'en demeurer d'accord. Le 
mariage n'en fut pas moins déclaré nul Le pape accorda une 
dispense au roi pour épouser Arme de Bretage, veuve de 
Charles VIII. Jeanne garda le silence. Louis XII lui donna 
pour son entretien le duché de Berri, is domaines de Chil- 
tillon-sur-Indre, Chteaaneuf-sur-Loire, de Pontoise, et mie 
pension de IOE,O00 écus. Elle seretira à. Bourres, et  fonda 
le couvent des religieuses de l'Annonciation. Elle fit venir 
cet effet dix jeunes filles de Tours, auxquelles elle donna pour 
directeur et r, on fesseur le cordelier zNicolas Gilbert, qui chan- 
gea son nom en celui de Gabriel de PAve Maria. « Jeanne de 
France, dit Brantrme, fille du roi Louis XI, fut bien spirituelle, 
mais si bonne qu'après sa mort on la tenoit comme sainte 
et quagi faisant des miracles, à cause de la sainteté de la 
vie qu'elle mena après que le roi Louis XII son mari l'eut 
répudiée et qu'elle se fit retirée à Bourres. » Elle lit pro- 
fession le jour de la Pcntecrte, en 150g, et mourut dans la 
nuit du 4 au 5 février 1505. DUFE¥ (de l",orme ). 
JEAN.E comtessë de Flandre et de Hainaut, fille 
athée de ce Ba n d o u i n, comte de Flandre, premier chef de 
l'empire latin fond h Constantinople en 1204, qui, fait pri- 
sonnier par les Bulgares, à. la bataille d'Andrinople (1505), 
disparut sans qu'on ait pu savoir ce qu'il ëtait devenu, suc- 
céda à. son pêre en Europe, comme comtesse de Flandre et 
de Hainaut. Le comte de .Namur, son tuteur, l'chiera aus- 
sitrt et la fit conduire à. Paris, ou Philippe-Auguste la retint 
environ six ans. IIla maria, en 1211, à. Ferrand ou Ferdi- 
hand, prince de Portugal, qui fntpourtant assez ingrat pour 
prendre part à la bataille de Bouvines contre Philippe-Au- 
guste. Il y fut fait prisonnier. Jeanne, ambitieuse etinfidèle, 
n'offrit de son mari qu'une rançon insuffisante. Louis VIII, 
qui maiutint la comtesse en Flandre, lui rendit le ervice, 
dit M. Michelet, de 9arder on mari prionnier à la Tour 
du Lout're. ,, Cette Jeanne, continue le méme historien, etait 
fille de Baudouin, le premier empereur latin de Constan- 
tinople, qu'on croyait tué par les Bulgares. Un jour le voilà. 
qui reparaR en Flandre. Sa fille refuse de le reconnaitre ; 
mais le peuple l'accueille, et elle est obtigée de fuir prës de 
Louis VIII, qui la ramène avec une armée. Le vieillard ne 
pouvait répondre h certaines questions ; et vingt ans d'une 
dure captivitë pouvaient bleu avoir altrré sa mémoire. Il 
passa pour inposteur, et la comtesse le fit périr. Tout le 
peuple la regarda comne parricide. » Pour quelques au- 
teuts, ce Baudouin, qui reparut en 15, n'était qu'un er- 
mite, nommé Bernard Rains. Fatigués d'un joug que les 
exactians et les caprices de leur souveraine rendaient lourd, 



JEANNE 
les Flamands s'empressèrent de croire à la résurrection de 
Baudouin. J ea n d'Angleterre, intéresé h l'admettre pour 
acquérir nn allié contre la France, se déclara non moins 
promptement convaincu, et promit ses seconrs.-Malheuren- 
sement Louis VIII, dont la politique avait besoin de la con- 
viction contraire, parce qu'une femme discréditée lui con- 
venait mieux qu'un guerrier célèbre à la t6te d'un des grands 
fiefs du royaume, se sentit incontinent aussi l'opinion utile 
à sa situation. Cité par-devant le roi et ses barons, dans 
Péronne, le prétendant y fut jugé un impudeur. On ne viola 
pas toutefois le sauf-conduit sur la foi duquel il était venu ; 
mais à peine sorti de France, il fut appréhendé par les agents 
de Jeanne, qui l'envoya presque aussitbt à la potence. A son 
avénement, la reine Blanebe, mère de saint Louis, rendit 
la liberté au comte Ferrand, qui était resté douze ans captif. 
Il mourut en 1233. Trois ans après, Jeanne, maié ses dé- 
réglements, trouva un second époux en Thomas de Savoie 
oncle de Marguerite, femme de dnt Louis. Jeanne cossu 
de vivre en 124. Sa double unionet beaucoup de faiblesses 
ne lui avaient pas donné de postérité. M a r g u e r i t e, dite de 
ConstantinÇple, sa mur cadette, lui succéda. La vie de cette 
femme ne fut pas marquée d'évé,ements moins bizarres. 
L. Lovz-'r. 
-JEANNE, dnehesse de Bretagne. Voulez 
tome Iil, page 659. 
JEANNE, comtesse de Montfort. Voyez MO.TFO et 
Bit ETAGIE. 
JEANNE D'ALBBET, reine de Navarre, mère de 
H en ri 1 V, née à Paris, le 7 janvier t528, mourut  Paris, 
le lU juin 1572. A l'exemple de sa mère, Jeanne d'Albret 
fut habile, spirituelle, éloquente, belle sans art, émule 
et bienfaitrioe des savants et des poëtes, biais les qua- 
lités qui, dans la destinee paisible de Marguerite de 
,' a I ni s, 'étaient converties en gràces douces et seduisautes, 
prirent au milieu des orages dont la vie de sa fille fut agi- 
tée m carnetCe de foroe et d'élévation qui a fait de cette 
deruiere Pgale des plus grands hommes. Dès l'àe de onze 
ans, malgré ses refus et ceux de sa mère, l'autorité vio- 
lente de François 1 "r donna sa main au duc de Clëves. On 
ne cite ce lien, borné dès lors à une cërémonie extérieure, 
et bient6t rompu légalement, que parce qu'il servit de pré- 
texte aux ligueurs pour soutenir soit la nullite du mariage 
que Jeanne d'Albret contracta ensuite avec Antoine de Bout. 
bon, soit la btardise de Henri IV, qui en était issu. On 
remarqua, lors de ce mariage avec le duc de Clëves, que 
le roi avait tellement chargé sa victime d'or et de diamants, 
qu'elle succomba sons le poids de ce luxe barbare, et que 
le connëtable se vit, en murmurant, obligé de la porler 
dans.ses bras à l'aul. 
Son peuple, son Imls et son Dieu se partagèrent les affec- 
tions de Jeanne d'dret. Comme reine, elle gonvea av 
sagesse etdouceur ; encouragca l'aiculture, les bonnes Cu. 
des et les bonnes mœurs; conserva et agrandit les ëtablis. 
sements de Marguerite, et laissa dans le Bëarn une me- 
moire encore adorée. C'est en chantant une chanson bear- 
naise qu'elle donna le jour  Heurt IV ; c'est par une édu- 
cation màle et populaire qu'elle l'arma contre le sort ; c'est 
par un choix d'instituteurs habiles, entre lesquels elle fut 
toujours elle-mème le premier et le plus vilant, qu'elle le 
prépara au trOne. Comme cloEétienne, elle fut l'honneur et 
l'aprui du culte évangélique. Les leçons de sa mère, l'in- 
ustice du saint-siCe envers sa maison, et le scandale des 
mœurs ecclesiatiques, l'avaient poussëe vers la doctrine des 
réformés. Elle contribua également b. la propager par l'au- 
torité de ses vertus et par les prodnetions de sa plmne, 
que distinguaient une logique entralnante et une concision 
nerveuse; elle se montra dans sa croyance, comme dans 
tous les actes de sa vie, sincère, constante et magnanime. 
Ses chagrins les plus vifs furent l'ouvrage de l'epoux 
qu'elle avait choisi par tendresse, et que l'histoire a flétri 
de ses mépris. Antoine de Bourbon, léger, crédule, indé- 
ci» voluptueux, incapable de tenir son rang à la cour de 

59» 
France, y demeura opprimé par les Guise, et exposé an 
poignard dont le dbile François Il avait promis de le frap- 
per; il finit par se vendre à ses ennemis, et sacrifia sa religion 
et sa femme à l'appât des plus gressières séductions, telles 
que la prineipauté de Sardaigne, la main de la trop célèbr 
Marie Stuart, la perspective des couronnes d'Ëcosse et d'An- 
gleterre. Catherine de Médicis, qui haïssait Jeanne d'Al- 
bret, comme le ¢ice doit hair la vertu, joignit à ces Iolle. 
illusions les pratiques de son art : on sait qu'elle dressait 
elle-mme à l'espionnage et à l'impudicité un essaim d 
filles d'honneur, destiné  la défaite de ses ennemis. L'in- 
grat Antoine prëparait son divorce, Iorsqui fut blessé au 
s,.'ége de Rouen, et termina des jours avilis, entre les bras 
de la concubine ( Du Rouet de La Béraudière ) tirée pour 
lui du sérail de Catherine. 
Jeanne,l'Albret vit alors se conjurer contre elle les plus ter- 
ribles adversaires, l'Espagne, la cour de Borne et la France. 
Philippe II connut l'horrible dessein de la faire enlever et 
périr avec son fils; déjà son or avait payé et dispose le 
artisans de ce crime. La reine de ffavarre dut son salut 
la noble pitié d'Élisabetb de France, troisième femme de 
Philippe, qui put la provenir à temps de cet infernal com- 
plot, et tromper l'espoir de l'i,quisition, qui attedit sa 
double proie la torche  la main. De son cté, le pape 
Pie IV excommnnia la reine de lavarre, la ddclara dchu 
du trône, et l'assiT,ua par un monitoire à comparaitre en 
personne devant lui, afin que son procès lui ïùt fait par le 
saint-olfice, biais, sans se déconcerter, elle dénonça à tous 
les souverains de l'Europe cet attentat emprunte des siècles 
les plus barbares. Sa vigueur et son éloquence ohlinrent 
un plein succès, et l'animadversion géntrale éteignit dans 
la main du pontife des foudres qui n'étaieut plus de saison. 
llais Catherine de ,Medicis, qui raclait a un esprit faible 
et brouillon un cux faux et sanguinaire, retombait touloms 
par ses propres ruses dans la guerre civile, et s'en conso- 
lait en dirigeant ses vengeances contre Jeanne d'Albret. 
Le féroce Montluc fut surtout chargé d'environner de 
piéges cette malheureuse veuve, et se flattant de la saisir 
vivante, il s'éeriait dejà d'une voix cynique, et en vrai sol- 
dat de Médicis : Je veux connaitre s'i /it ussi 
avoir affaire vee une eine u'avec les autres 
Jeanne d'Albret, pousée à bout, conduit enfin son lils au 
camp des opprimes, et montre tout ce que peuvent le cou- 
rage d'une more, l'exaltation de la piété, et les mouvements 
d'une àme forte et généreuse. Après la défaite de Jaruac 
la mort du prince de Condé et la blessure de Coliguy, 
c'est elle qui harangue et rallie l'afinC, qui devient i'me 
du parti, reprend ses États envahis nn instant, uégocie avec 
les cours, anime les guerriers, et veille sur Henri IV. Son 
héroïsme et ses talents réduisent ses ennemis à faire la paix, 
mais la paix talle qu'on peut l'atteudre de la politique des, 
mëcbants. 
La fourberie prit la place de la violence : Jeanne d'Al- 
bret fut appelée a la cour de France, et ou lui offrit pour son 
fllsla plus belle de filles de llenri II ; elle résista long- 
temps, et quand elle céda, ce ne fut point par conviction, 
mais par condescendance pour des amis aveuglés, qui con- 
mençaient à calomnier sa prudence. Sa mort suivie de près 
son arrivée. Selon le bruit général, elle fut enFoisonnee 
par des gants que lui fournit un Italien, parfumeur de la. 
reine ; et, deux mois après, l'affreuse catastrophe de la 
Saint-Barthélemy ne justifm que trop ces soupçoas, 
en découvrant l'intérèt que les ordonnateurs de ce mas- 
sacre avaient eu à fermer par un crimedes yeux trop clair- 
voyants. Au reste, quoique cet empoisunnement soit plu 
vraisemblable que démontré, on risque peu de l'ajouter 
aux forfaits avérés de Catherine de Medios. 
La reine de ffavarr¢ a laissé des souvenirs glorieux pour 
son sxe, et que n'a pu effacer lïngratitude de bons Xii!. 
Ce monarque, oubliant trop qu'il était fils de Henri IV, 
hta de supprimer les belles ordonnances que Jeanne d'Al- 
bret avait données au léarn et le fameux collCge d'Or 



lbez, fondé aussi par elle, et qu-on avait, à iuste titre, sur- 
emmé la nouvelle Athènes. 
• LEONTE'I, de l'Académie Fraoc.aise. 
JEANNE D'ABC. Il n'y a rien à comparer, ni chez 
[es anciens, ni chez les modernes, ni dans la fable, ni dans 
|'ldtoire, à la pucelle d'Orléans. Donnez à la muse épique 
le choix de l'invention la plus touchante et la plus merveil- 
leuse, interrogez les traditions les plus imposantes que les 
,lges d'héruisme et de vertu aient laissées dans la mémoire 
des Immmes, vous ne trouverez rien qui approcl,e de la 
imple, de l'authentique vérité de ce phénomène dn q,dnzième 
iècle. La France,à 12 suite du règne le plus malheureux 
dont les annales de la monarchie fassent mention jusq,'alors, 
nvabie par ses ennemis, à peine soutenue sur le penchant 
de sa ruine par la vaillance de quelques preux, n'oppose 
plus à la force' d ses destinëes qu'une vaine résistance. 
Paris est eccnpé par le duc de Bedfort, régent pour un roi 
anglais. L'infrtun Charles Vil, errant de ville en ville, 
sans esperance et bient6t sans ro.vaume, cède à l'inforlune 
çui l'opprime. Près de cfiercbev un asile dans une cour 
trangère, il jette un dernier regard, un regard de desespoir 
sur cette belle France, qui ne lui offre de toutes parts que d'af- 
ïrcux décltirements et un petit nombre de braves mourant 
sans vengeance sur les ruines des villes incendiées quïls ont 
défendues. A peine quelques places arrêtent encore les pro- 
+;ès de l'ennemi. A peine une vieille prophétie, qui annonce 
.u'nne jeune fille, venue des environs du Bo-Cbenu, alC 
livrera le royaume, soutient encore la confiance des esprits 
faibles. Tant va périr, quand cette jeune fille parait. C'est une 
paysanne de seize  dix-sept ans, d'une taille noble et élevée, 
d'nne physionomie douce, mais fière, d'un caractère re- 
marquable par u,t mélange de candeur et de force, de 
¢e.tie et d'antorite; d'nue conduite, enfin, qui lait l'admi- 
ration de tontes les personnes qui l'ont connue. Les mères 
ne dcsirent point de fille plus parfaite, les hommes n'ambi- 
ti,nnent pas le OEur d'une femme pins digue d'ètre aimée 
mais dès l'enfance elle a renoncé au bonheur d'6tre épouse 
et mère. Appelee  une vie d'hérmsme et de sacrifices par 
la voix mme des anges, elle a vont sa virginité/t Dieu à 
ie de treize ans. 
On ne sait rien a,tre chose de ce temps*l/, sinon qu'elle 
naquit vers 1,10, h Donrmy, illage relevant du roi 
de France, sur les marches de la Lorraine et de la Cham- 
pagne (Vosges), où la guerre et les partis qui divisaient le 
ruaume, aaient de tout temps laisse des traces profondes; 
que son père se mommait Jacques d'Arc, et sa mère Isabelle 
Ronwe; qu'ils avaient cinq enfants, vivaient du produit d'un 
champ et de quelques bestiaux; qu'elle menait enfin une 
vie toute pastorale dans le hameau qui I'a vue naitre, con- 
difisant les troupeaux de son père, ou s'occupant à coudre 
et à filer le chanvre et la laine. Seulement, h certains jours 
de ft3te, on la vo}ait prosternée, h l'ermitage de Bermont, 
,levant la sainte image de la Vierge, ou bien elle se réunis- 
ait aux jeunes filles de son ge, pour chanter et danser 
.ous l'Arbre des Fes, qui existait encore en 1628. C'était 
un hélre magnifique oiJ, pendant toute la belle saison, 
les bcrgeres allaient suspendre les chapeaux de fleurs et les 
-uirlandes qu'elles avaient Iressées dans la prairie ; mais 
Jeanne d'Arc les réservait pour la chapelle de Donrémy. 
On dit aussi qu'elle dansait peu, mais qu'elle chantait aec 
un charme inexprimable, probablement des 10-mnes et des 
canliques a la louange des saints. Quand les habitauts de 
son village fièrent interrogés quelques années aprés sur ces 
diflêrentes Ctreoustances, ils affirmèrent presque tous que 
quand elle était petite et qu'elle gardait les brebis, on avait 
vu souvent les oiseaux des bois etdes champs venir man- 
er son pain dans son giron, comme s'ils fussent privds. 
Tee est la puisnce que Dieu suscite tout à coup pour 
lever le siCe d'Orléans, faire sacrer le roi dans une ville 
occupée par les Anglais, et réduire leurs armées, si long- 
remis triomphantes, à abandonner à la France. Les rebuts 
[éitérés qu'elle essuie d'abord ne fatiguent point son cou- 

JEANNE -- JEANNE D'ARC 
rage. Elle insiste avec ardeur parce qu'elle sait qu'elle a 
peu de temps pour accomplir se desseins, et qu'elle ne 
doit pas voir le succès tout eutier de ses travaux et de ses 
promesses; mais elle ne se révolte point contre les refus, 
parce que les refus sont du nombre des difficnlts qui lui 
ont été annoncées. Enfin, ses instances l'emportent sur les 
objections de l'incrédulité ; elle part, et cette villageoise, 
transformée en guerrier, devient, dès ses premiers pas dans 
cette nouvelle carrière, le parfait modële du chevalier chré- 
tien; intrépide, infatigable, sobre, pieuse, modeste, habile 
à dompter les conrsiers, et versée dans tuutes les parties de 
la science des armes comme un vieux capitaine, il n'y a 
rien dans sa vie qui ne révèle une hante inspiration, et 
qui ne porte le sceau d'une autorité divine. Les élémen fs eux. 
mgmes paraissent lui obéir. 
Obligée de parcourir, pour se rendre auprts de Charles, 
une route de 15o lieues, coupée de rizières profondes, 
dans la plus mauvaise saison de l'année, et au milieu d'un 
pays couvert par les troupes ennemies, elle fournit cette 
 course périlleuse en onze jours, sans accident et presque 
san. obstacles. Conduite dans l'appartement du roi, elle 
le distingue du premier coup d'oeil parmi les grands de sa 
cour, quoiqu'il ne diffère d'eux par aucun attribut particu- 
lier ; elle se lait reconnaitre de lui à un signe ou à une confi- 
dence qui ne laisse point de doute à Charles sur sa mission. 
Depuis lors tous ses jours sont marqus par les plus brillants 
faits d'armes. Objet d'amour, d'espérance, de vénération 
pour les peuple., de terreur pour l'armée anglaise, elle 
combat près de Dunois, de Saintrailles, de La Hire, et 
c'e«t elle qui remporte partout la palme de la valeur. L'éten- 
dard de Jeanne d'Arc, ainsi qu'elle Pa dit elle-reCe, flotte 
toujours où est le danger; mais, avare de sang, elle con- 
duit les soldalz dans la mlée, brise deant eux l'effort de 
l'ennemi, et ne tue jamais. Tout au plus, comme elle le 
disait encore devant ses juges, avec cette naiveté suldates- 
que dont il n'e.t pas permis d'altérer les expressinn, elle 
se faisait jour au travers des Anglais en les happant de la 
tëte de sa hache d'armes, ou du plat de sa fameuse épée, 
qui tait 19ropre & donner de bonnes btffes et de bons 
torchons. En peu de mois, toutes ses prëdictions s'accom- 
plissent. Blessée à la defense d'Orlíans d'une flèche qui 
lui traverse l'épaule o elle l'arrache de ses mains, relourn 
quelques minutes apr au mil.ieu des eombatlants, achève 
la déroute des Anglais, et alCivre ces remailles qu'elle avait 
promis de sauver. 
Charles doit ètre sacré à Reims; elle lui ouvre un chemin 
vers cette ville, et les places forles qui se trouvent sur son 
passage se rendent sans se défendre..A compter de ce 
moment, la puissance des Anglais, ébranlée, chancelante, 
prte à s'écrouler, n'est plus digue d'intéresser a sa dmte une 
puissance plus qu'humaine. La mission héroique de Jeanne 
d'Arc est finie; il ne lui reste pins qu'à la couronner par le 
martyre. Après quelques nouveaux prodiges de valeur,elle 
tombe dans les mains de ses implacables ennemis, et monte, 
le 31 mai 143t, au bt'tcher avec la rsignatinn d'nne sainte. 
On assure qu'à l'instant o( les flammes qui l'entouraient 
etouflérent le nom de Jésus dans sa bouche innocente, une 
colombe s'Ceva du brocher aux yeux épouvantés des Anglais, 
et prit son vol vers le ciel. Telle fut du moins l'illusion 
du remords pour les misérables qui l'avaieut condamuée. 
Ajoutons un seul trait à cette esquisse imparfaite : c'est 
qu'elle ne doit rien à l'imanatinn, et que l'histoire la 
moins ornée ne serait pas plus sobre d'embellissements 
tiques que ce sommaire rapide, extrait des dépositious de 
cent quarante-quatre témoins oculaires. 
On avouera qu'il ne manque rien à ce récit de tout ce qni 
recommande une grande renommée àla postérité. !1 a l'intê- 
rt de la vertu, celui de la gloire et celui du malheur, qui 
pour certaines ,'trucs tendres est le plus imposant de tous. 
Comment se fait-il doue que le nom de la PuCelle réveille 
si peu de souvenirs dans la foule des Français. 
n'y réveille que des souvenirs indignes d'elle C'est" -qu'un q" 



JEANNE D'ARC 
lte, i'honnenr as la nation par son génie, l'opprobre de 
la nation par l'usage qu'il en a fait trop souvent, hésita, 
eune encore, entre deux sujets d'épopée, Jeanue d'Arc, 
et Henri IV, et qu'il eut le malheur peut-être de choisir 
le second, placé dans un ordre d'inspirations moins mer- 
veilleuses, dans un siècle moins chevaleresque, moins poé- 
tique, moins religieux, dans un système de mœurs moins 
convenable à la muse épique, et ne pouvant dès lors fournir 
que la matière d'une Iistoiœee élégante et pompeuse. La haine 
du christianisme, qui dévorait son cœur, le dirigea proba- 
blement dans ce choix mal entendu. Ses passions le trom- 
pèrent au préjudice de sa gloire. De l'héroïne de Douremy, 
de cet auge d'innocence et de grAce, qui a cofité des lar- 
mes à ses bourreanx et que l'histoire ni nommera jamais 
ians respect; qui a répandu tant de sang po,r la patrie; 
qui lui a couquis tant de drapeaux et redonné tnt de vil- 
les ...... ; de cette pauvre jeune file qui avait alCierla 
France, et que les Anglais ont br01ée à dix-huit ans, Ch a- 
pelain a fait l'héroïne d'un poëme sans chaleur et sans 
vie; Voltaire, le principal personnage d'un roman de 
prostitution, d'un roman dont l'exécution inimitable a peut- 
tre douné un rival à l'Arioste, mais qui souille notre liftC 
rature d'une tache inelfaçable. Les ëtrangers Schiller et 
Sou t hey ont été plus heureux. Les monuments, peu dignes 
d'elle, élevés à Bouen et à Orléans pouvaient faire dire que 
les beaux-arts ne l'avaient pas mieux traitée que la poésie, 
jusqu'au moment oit une princesse, fille du roi Louis-Phi- 
lippe, M a rie d'Orléans, moissonnée toute jeune, sut enfin 
la première deviner et rendre la physionomie la plus poé- 
tique de notre histoire. 
Des lettres de noblesse pour sa famille, l'exemption de la 
taille pour le village natal : voilà tout ce que Charles 
avait fait en laveur de l'héroïne morte pour sa cause. Seu- 
lement, en 1455, sur la requiers de sa mère et de ses frères, 
il fit procéder à la révision de son procès et à la rhabili- 
tation de sa mémoire. 
Charles Novtea, os l'Académie Française. 
En i 855 une statue équestre, due an ciseau de M. Foyatier, 
a encore été érigée à la mémoire de Jeanne d'Arc sur l'une 
des places d'Orléans. Nous emprunterons à l'éloquent pa- 
négyrique prononcé à cette occasion par l'évque d'Orléaus 
un passage qui complêtera admirablement le travail de notre 
défunt collaborateur; c'est le tableau des derniers temps de 
la ie de l'héroine française : 
« Nous marchons vers P, ouen. La sagesse humaine, 
dit I. Dupanloup, qui avait d'abord outraeusement re- 
poussé la parole iuspirée de Jeanne et ne l'avait suivie qu'a- 
vec héeitation quand elle appelait aux combats, refusait 
maintenant de la laisser partir, quoique Jeanne elle-mëme 
déclar'At sa mission terrainC. Cédant aux ordres du roi, à 
tort ou à raison, elle consentir donc à rester et suivit l'ar- 
mée. lais ce fut avec grande tristesse... On vit toujours en 
elle la mme bonté de cœur, la mème vaillance indomp- 
table, mais ce n'était plus la mme joie! Les fossés de Paris 
la virent encore, quoique blessée, garder sa bannière haute 
sous une grële de boulets, de flèches et de pierres, et rester 
seule  l'assaut jusqu'au soir. Elle criait aux assiégés : 
« ]endez la ville au roi de France ! » Mais la joie n'y était 
plus. Elle laissait mëme parfois échapper de profonds sou- 
pirs de son cœur et les douloureux pressentiments de sa fin 
prochaine... C'est ainsi qu'au témoignage du duc d'Alerçon 
elle aait dit au roi lui-mme : ,, Je ne durerai qu'un an, ou 
, guère davantage; c'est pourquoi voyez à bien employer 
«, cette année. » 
« A Saint-Dents, après avoir suspendu devant l'autel une 
riche épée qu'elle avait vaillamment arrachée des mains d'un 
chevalier anglais, vers la porte Saint-Honoré, à Paris, Jeanne 
demanda cncm'e à quitter l'armée pour se rendre de là dans 
sa vallée natale : elle-mëme I'a déclaré devant ses juges. 
« Mes saintes me disaient que je ne devais pas aller plus 
« loin que Saint-Dents : le vouhis aussi le faire, mais les 
o seigneurs ne me le permirent pas. » 

« Elle n'avait jamais demandé à Dieu que deux choses : 
la délivrance du royaume et le sahit de son ame. Dans ces 
derniers temps encore, et pressentant sa fin, elle disait sou- 
vent au bon frère Pasquerel, son confesseur : « Si je dois 
« bientét mourir, dites de ma part au roi, notre maltre, 
« qu'il lui plaise faire hMir des chapdles où on prie le Set- 
« gneur pour le salut des mes de ceux qui seront morts en. 
« défendant son royaume. » 
« Enfin, le secret de Dieu se déclara : ses saintes lui direng 
« qu'avant la Salut-Jean elle tomberait aux mains de ses. 
« ennemis; qu'elle ne devait point s'en effrayer, mais au. 
« contraire accepter avec reconnaissance cette croix de la 
« main de Dieu, qui lui donnerait aussi la force de la porteg 
« jusqu'au bout ! ,, Du reste, ses saintes ne lui dirent ni le 
jour ui l'heure; elles lui recommandèrent seulement 
bien patiente et résignée... 
« C'était encore, comme l'année précédente, le beau mois 
de mai, où les fleurs renaisseut, et où tout s'autres dans la 
nature et se réjo»it; mais cette fois Jeanne ne marchait plus 
comme vers Oriéaus d',n pas joyeux. L'épine blanche de 
l'amère douleur était l'uuique fleur que le mois de mai de 
l'année 143o dot lui apporter... 
« E ce mme mois, le 23 mai, après avoir jusqu'au der- 
nier moment, toujours secourable a,x assiégés, souten 
l'attaque par des prodiges de valeur, et protégé la retraite 
de tous les siens, demeurant seule en arrière d'eux et en 
face de l'ennemi, tout à coup les cloches de Compiègne don- 
nèrent l'alarme, le pont-levis se releva derrière elle, et elle 
tombait aux mains des Anglais[ et on la tralnait de prison 
en prison jusqu'à Rouen [ Et toutes les portes des villes de 
France demeuraient ferreCs derrière elle! et nul n'en sorti 
pour la défendre, et nnl ne sut mourir pour elle!... 
« Je l'avoue, parmi les iniquités de la terre, je n'en sais 
pas qui blessent plus profondément mon me que les iniqui- 
tés de la justice. 5Iais quand j'y rencontre un prëtre, quand 
,n évque y préside, l'atteinte est si cruelle que mon mo 
fléchit. Oh [ c'est alors qu'il faut élever sa pensée plus haut. 
Les iniquités sont de la terre! il faut donc s'y faire; mais 
il faut savoir aussi que quand les indignités doivent dépasser 
toute mesure,quand l'injustice et la bassesse humaine dot 
vent aller au comhle, Catphe et Judas n'y manquent jamais ! 
Ils ne manquèrent pas ici. E bien ,je m'en réjouis; rien n 
manquera donc à la grandeur de cette pauvre fille. 
« Oui, elle est grande, parce qu'elle souffre ! elle est grande, 
parce qu'elle meurt pour son pays, pour la vérit et pou 
la justice[ elle est gran,le, parce qu'elle n'y rencontre que 
le délaissement, l'ingratitude, le mensonge, l'atroce cahim- 
nie, le mal pour le bien! elle est grande, non pas seu- 
lement parce qu'elle a eu un évëque pour meurtrier, des 
juges pour bourreaux, non pas seulement parce qu'elle a 
été vendue le pris d'un roi, parce que c'est au nom d'un 
d'Angleterre qu'elle est tuée, et sous le regard impassible 
d'un roi de France[ en sorte q,e tout serait royal dans sa 
mort, si tout n'y était pas abominable... Ele est grande 
parce que c'est une puissante nation qui la tue, une puis- 
sante nation qui l'abandonne !... 
« Efin, quand je vois Dieu lui-mëme délaisser en appa- 
rence et abandonner ici-bas la vertu à de tels traitements, 
c'est alors que je m'élève au-dessus de tout jusqu'à Dieu 
hii-mëme, et que, hii demandant raison, j'atteins la certi- 
tude immortelle d'une vie meilleure et d'une gloircqui ne 
sera plus seulement celle des champs de bataille et des 
triomphateurs de la terre, mais celle des glorieux btchers, 
des vierges héroïques et des martyrs !... 
« Jeanne d'Arc l'avait compris sans le bien defiuir. Mai 
est-ce qu'à vingt ans on a dëéni l'injustice des hommes et 
la grande justice de Dieu? Est-ce qu' vingt ans, dans ce 
premier épanouissement d'une "megénéreuse, est-ce qu'on 
s'attend  rencontrer sur la terre le mal pour le bien, la haine 
pour l'amour? Elle senlait bien toutefois que ses deux saintes, 
toutes deux vierges et martyres, ne lui avaient pas promis 
une autre couronne que la leur. Aussi elle ne leur avait 



;02 J EAIIE D'ARC 
mandé que le salut de snme et de laconduire en paradis. 
« Et dans tout le cours de cet affreux procès, n'est-ce 
pas ce qu'elle nous fait entendre dans l'accent inspiré de 
ses mles réponses ? 51e sentons-nous pas I, présentes et 
comme personnifi.es en elle, avec une niveté, une grftce, 
une force incomparahles, la vérité, la justice, la sagesse, j'o- 
serai le dire, une souplesse et comme une habileté céleste, 
en mëme temps que la grandeur et la majesté de celui qui 
juge les justiees mèmes ? « Oh: s'Crie-t-elle, j'en appelle  
« Dieu, le grand juge des grands forts et injustices qu'on me 
- faict ! Ah! vous écrivez ce qui est contre moi, et vous n'é- 
c crivez pas ce qui est pour moi ! Évque, évque, dit- 
,« elle deux fois a son juge, c'est par vous que je meurs ! » 
« Puis elle lui pardonne; mais pour moi je suis bien aise 
qu'elleait fait sentir  son cœur, s'il lui en restait, la pointe 
dt glaive de la justice. « Vous vous mettez, lui dit-elle, 
,, en grand danger... Et je vous en avertis, afin que si 51otre 
« Seigneur vous en châtie, j'aye fait mon devoir de vous 
« le dire... », L'avertissement fut inutile ; il mourut bientét 
comme il avait vécu. 
« Et lorsqu'on de.endait jusqu'aux plus odieuses ques- 
tions, lorsqu'on lui demandait lfichement : « Dieu hall-il les 
« Anglais ? -- De l'amour ou de la fiaine de Dieu pour les 
« Anglais, répondi[-elle, je n'en sais rien ; mais je sais qu'ils 
« seront tous chassés de France avant peu d'années, excepté 
« ceux qui  mourront, et que Dieu accordera définitivement 
« la victoire aux Français ! ,, 
«, Comment Dieu ous a-t-il choisie ? -- S'il m'a choisie, 
« et non une autre, c'est qu'il lui a plu rechasser les en- 
« nemis du royaume par une simple fille. 5i'etait la grce de 
,, Dieu, je ne saurais que devenir, biais j'aimerais mieux 
,, mourir que de renier ce que Dieu m'a fait faire. » 
« Et lorsqu'on lui tait cette basse et insidieuse question : 
« Savez-vous si vous êtes en état de gr/Ice? -- Si je ne suis pas 
« en état de grâce, répondit-elle, Dieu daignem'y mettre ; ij'y 
« suis, qu'il veuille m'y conserver ; car je serais la plus mal- 
« hereuse des crtures, et j'aimerais mieux mourir si je me 
« savais hors de grfice et de l'amour de mon Créateur. » 
« Et lorsque enfin ou demande à cette douce et vaillante 
créaure, qui ne savait porter que sa bannière en avant au 
milieu des combats, et ne se servait jamais de son épée afin 
de ne tuer personne, si son espérance de victoire était ton- 
dée sur sa bannière ou sur elle-même : « Ele était fondée 
• uniquement sur Dieu, répond-dle. -- biais alors pour- 
,, quoi votre bannière lut-elle portée devant celle des autres 
« chefs dans l'église de Reims, le jour du couronnement? » 
Jeanne les regarda : « Afi! elle avait été à la peine, il était 
« bien juste qu'e|le [ùt aussi ì Phonneur . » 
« Quand la tempëte eut CicrC quand le leu eut été mis 
au bùcher, quand la foudre fut tombée sur la victime, quand 
son dernier regard fut venu, à travers les flammes, se re- 
poser et mourir sur la croix de 3ésuChrist qu'elle avait de- 
mandé à une main charitable de lui montrer toujours de 
loin, quand ses oreilles entent entendu les dernières paroles 
du bon prétre qui ne quittait pas le b0cher, quand enfin le 
dernier cri de ce cœur et le dernier mouvement de ces 
lèvres expirantes curent dit trois fois le nom de l'éternei 
amour : Jsus[ Jésus! Jésus! alors, comme au Calvaire, 
tous le bourreaux pleurèrent. » 
JEANNE llACIIETTE se mit à la téte des femmes 
de B eanv ai s et défendit vaillamment celle ville, assiégée 
en la,72 par C h a ries le Téméraire» duc de Bourgogne. Elle 
monta sur la muraille, arracha un étendard des mains d'nn 
Bourguignon, précipita le soldat au bas de l'édelle, et porta 
son trophée à l'église des Jacohins, où il resta déposé. On 
trouve la gravure de ce drapeau dans la collection des cos- 
tumes de Villemin. 
Le surnom de Hachette vient sans doute de la petite hache 
d'armes dont elle e servit dans cet exploit. On |'a jusqu'à 
nos jours dégignée sous cette seule dénomination, et peu 
s'en est fallu que le véri{able nom de l'héroïne ne parvint 
pas jusqu'à nous. Louis X[, dans e lettroe patentes d'Ara- 

-- JEAN SECO1ND 
boise, i473, accorde aux femmes de Beauvais, dont le con- 
rage a miraculeusement sauvé cette cité importante, le droit 
d'avoir le pas sur les hommes à la procession et  ]'offranac, 
le i0 juillet, jour de sainte Agadrème, patronne de la ville, 
mais il ne cite aucune femme en particulier. Cette proces- 
sion a encore lieu tous les ans avec le méme cérémonial : 
les dames de Beauvais n'y attachent pas moins d'importance 
que n'eu attacfie iebeau sexe de Bruxelles  célébrer la 
des Dames, en commémoration de la fidélité de leurs acules 
à leurs maris revenus de la Palestime. D'autres lettres pa- 
lentes, dardes d'Alençon le 9 ao0t, mme an'née it'/3, peu 
de mois après celles d'Amboise, ne contiennent pas davan- 
lage le nom de Jeanne Hachette, que n'a rapporté aucun 
antenr contemporain. Philippe de Comines l'appelle Jeanne 
Fuquet, et Pierre 5atthieu, dans son LJstoire de Louis XI, 
la nomme Jeanne Fourquet. Les auteurs de l'Art de 
rifler les dates, et Antoine Loysel, dans l'Histoire du 
Beauvoisis, lui donnent le nom de Jeanne Laié. C'est 
l'opinion le plus génra4ement adoptée. On ajoute que 
Jeanne Lainé épousa Colin Pilion, dont les descendants 
forent par cette raison exempts de la taille, espce d'impbt 
foncier qui pesait exclusivement sur la roture. Vollaire a 
eu tort de regarder l'anoblissement de Jeanne Hachette et 
de sa famille comme uneJalble récompense pour une femme 
« qui est, ajoute-t-il, peut-être supérieure à celle qui fit 
lever le siCe d'Orléans i elle combattit tout aussi bien, et 
ne se vanta ni d'êlre pucelle d d'Cre inspirée. ,, Il est 
certain que la levée du siCe de Beauvais fut un évbnemerrt 
de haute importance : elle arrêta dans sa course Charles le 
Tbméraire, et I'empêcha de faire du duché de Bourgogne 
un poissant royaume. Une statue en bronze a été élevée à 
eanne Hachette à Beauvais. Btt'ro. 
JEAIXIN (Peme), le prdsdent, naquit à Autun, en 
1540. Son père était échevin, et excerçait l'état de tanneur. 
Il s'éleva par son saoir et sa drnitnre. Un prince lui de- 
manda un jour de qui il était fils ; il rpondit : De nes 
vertus. Un homme riche, qui voulait en faire son gendre, 
lui demanda où était son bien? Dans ma tte et dans ma 
phzme, répondit-il. Lors de la Saint-Barthélem)', il se re- 
fusa h exécuter les ordres sanguinaires de la cour, et dit : 
Quand le prince commande en colère, il faut lui obër... 
lentement. Député par t'ordre du tiers de Dijon aux états 
de BIois, il s'acquitta de sa mission honorablement. Ligueur 
ardent, il ne fut jamais cruel, et contint souvent le duc de 
biayenne. Il rejeta les dons de la cour de Madrid quand il it 
que les Guises voulaient enlever la couronne au roi de 
France. Henri III le nomma président au parlement de Bour- 
gogne. Henri IV comprit toute la portée d'esprit de cette 
Iorte tte. Il nomma Jeanuin premier président du mme par- 
lement, h la condition qu'il se démettrait immédiatement 
de ses fonctions et resterait attacbé à sa personne. Jeannin 
partagea avec Suii la confiance du bon roi : il en était 
digne, malgré la jalousie du surintendant. Envoyé en mission 
en Hollande, il conclut un traité avec les Provinees-Unies 
en 11509. A son retour, il reçut du monarque de nombreuses 
marques d'estime. Henri le présenta  la reine en disant : 
« Voyez-vous ce bonhomme ? Si Dieu dispose de moi, re- 
posez-vous sur sa fidélité. » Le Béarnais voulait qu'il 
on bistorio,raphe. Jeannin n'éerivit que la prëfaee de ce 
règne si intéressant, qu'interrompit le couteau de Ravaillac. 
Aprës ka mort de Henri IV, Jeannin tut le conseiller de 
5larie de Médieis, qui le sacrifia à la Galigaï, la maríchale 
d'Ancre. Mais il reprit son service de surintendant des 
finance% qu'il continua jusqu'à sa mort, arrivée, suivant les 
uns, ì Paris, selon d'autres, à sa terre de Montjeu, près 
d'Autun, le 31 octobre 16oE2. Jules 
JEAN-PAUL. Vove-- 
JEAN SANS PEUR. Voçe-- Jx, oc de Bourgogne. 
JEAN SANS TEIIE. Voje= Je., roi d'Angleterre. 
JEN SCOT ÉRIGÈNE Voye-- 
JEAN SECOND, poëte latin moderne, naquit ì La 
llaye, le t0 aovmhre 1511. Son lPère IIieolas l:'-verard, 



JEAN SECOND 
président du conseil suprëme de Hollande, connu par 
d'estimables écrits de jurisprudence, lui fit donner, ainsi 
qu'à ses autres entants, une éducation analogue  sa posi- 
tion sociale. L'etude des langues anciennes fut bient0t un 
jeu pour le prochain élève du célèbre légiste Alciat, sous 
lequel il vint faire son droit à Bourges. Un cœur jeune, 
tendre, porté h l'amour, tout embaumé des parfums de 
l'antiquité qu'avaient exhalés Ovide, Virgile, Catulle, Tf- 
bulle et Properce; une maitresse adorée, qu'il appelle Julie, 
firent soudain un poëte d'un élève du grave jurisconsulte. 
Toutefois, il ne laissa pas que de couvrir sa tête poétique 
du bonnet de docteur, qu'il reçut en t533. Que de grâces, 
que d'abandon, que d'éloquence amoureuse cacha cette 
lourde toque, sous laquelle ne tardèrent pas à éclore dix- 
neuf Baisers (Basia}, qu'il envoya, quoique écrits en latin, à 
sa Julie. Il eut le sort de Properce; comme lui il avait eu sa 
Cyntbie ; foraine lui, il perdit, à ce qu'il parait, cette inspi- 
ratrice de son génie, encore à la lieur de l'ge et de la 
beaut6. Ajoutez à ces Baisers, I plus parlaite de ses œu- 
vres, trois livres d'Élégies, un livre dÉpigrammes, un livre 
de Pièces lyriqoes, deux livres d'Épitres, un livre de Pièces 
funèbres (Fanera), et un livre de Sylves ou mélanges, et 
vous aurez tout ce que laissa couler cette, plume poétique 
et féconde. 
D'abord secrétaire intime de l'évgque de Tolède, puis 
curieux de visiter |'Afrique, qui devait lui gtre si funeste, 
il suivit, en 1534, Charles-Quint dans son expédition contre 
Tunis; ce prince tenait le poëte en haute estime. Les sa- 
bles où fut Carthage altérèrent visiblement la sant d'un 
ieune homme dëlicat, devoré d'ailleurs d'amour, de gnie, 
et d'ambition peut-gtre, auquel eusseut mieux convenu 
Tibur et l'Auto. Il retourna dans sa patrie, o/ les sources 
de la vie se tarirent tout à fait en l,ii, à Tournai, le 2ri 
septembre 1536. Il n'avait encore que vingt-cinq ans. 
Ses poésies érotiques,d'un latin moderne très-pur, sont 
pleines de feu, de suavité et de mollesse : il y a en elles 
du Tibulle, du Properce et du Cat,dle fondus ensemble, 
abstraction faite des impudeurs trop fréquente du dernier. 
Jean Second a droit sans contredit de figurer au premier 
rang des puCes de son époque. Les poésies de se.s frères 
Marius, Grudius, Marulle, et de sa sœur, la religieuse 
Isabelle, ne sont point non plus sans inertie. Cinq ans après 
la mort de Jean Second, ses œuvres furent recueillles et 
pUbliées à Utrecbt. En Is21, Boscba en donna une édition 
fort recherchée, à Leyde, en 2 heaux vol. in-s", avec des 
commenlaires. Dotal, qui se mgfait aux amours de tout le 
monde, se nigla aussi aux Eaisers de Jean Second ; mais 
il fallait à Julie, l'amante du poëte, des lèvres plus fran- 
ches, moins prétentienses. Tf ssot, notre collborateur, 
les a traduits avec plus de bonheur. DBno,. 
JEAN ZISCA. Voyez Z;sc. 
JEDDO ou YÉDO, résidence du loubo ou empereur 
temporel du J a po n, située dans la province de Mousasi, 
par 35 ° 32' de latitude septentrionale, sur la cte orientale 
de Nipon, au fond d'un golfe très-poissonneux et à l'em- 
bou,.liure du Todagawa, est une ville de 14 myriamètres 
de circuit, contenant, dit-on, 280,000 maisons et environ 
I,00,000 babitant% dont plus de 4,000 sont aveugles. Elle 
n'a ni murs ni remparts, et est coupée d'un grand nombre 
de canaux à parapets élevés, et plantés d'arbres. Parmi la 
foule de ponts qu'on y compte, il en est un construit tout 
Ch bois de cëdre et orné de balnstrades magnifiquement 
scilptées, à partir duquel se comptent les distances de toutes 
les localités de l'empire. Les rues, garnies le plus ordinai- 
rement de maisons peu élevées, se coupent presque toutes à 
angles droits. Le principal édifice est le palais du Ifoubo 
o,i siugoan, au centre de la ville, sur une éminence entou- 
rée de fossés et de remparts, et qui a trois myriamètres de 
circuit. Il est divisé en trois parties principales : la pre- 
mière, habitée par les descendants et parents mules du loubo; 
la seconde, par les grands feudataires de l'empire, qui vien- 
nent y résider to,s les ans pcndaut six mois, ci dont les 

-- JEFFREY 60S 
familles y habitent continuellement pour servir de Bage de 
leur fidélité ; la troisiëme, enfin, que domine une haute tour 
carrée, emblème de la puissance souveraine, par le Koubo 
et sa famille. Il y a aussi dans les autres quartiers de la 
ville un grand nombre de vastes palais, appartenant/ des 
grands seigneurs japonais, et des temples magnifiques à l'u- 
sage de chacune des trois rellons reconnues dans l'empire. 
Jeddo possëde aussi une imprimerie, où l'on a imprimé, 
entre autres, la grande Encycloplie japonaise et chinoise, 
eu 80 volumes. 
JEFFERSON (Toa.), le troisiëme prsideut des 
Etats-Unis de I'Amérique du Nord ( tSOt809 ), nWle 2 avril 
1743, à Shadwell, en Virginie, d'nne famille riche, put d'a- 
bord suivre ses go0ts, qui l'entratnaieut vers l'Arude des 
mathématiques, des sciences naturelles et mgme de la pein- 
turs. Ce ne fut qu'à partir de 1767 qu'il se livra à l'etude 
de la jurisprudence, et il acquit bient6t au barreau une ré- 
putation grande et méritée. Appelé de bonne heure à faire 
partie de l'assemblée coloniale de la Virginie, il y fit dès 
cette époque une tentative en faveur de l'cmancipation 
des esclaves; et quand plus tard la résistance des colonie 
contre la politique tyrannique de la mère-patrie commen.ca 
à se manifester, il s'associa de cœur et d'tme à ce mouve- 
ment. Eu en 1775 membre du congrës, il y fut le digne col- 
lègue d'Adams, de Franklin, de Sherman et de Liing- 
ston dans le comité célèbre inslitué au sein de cette asem- 
bise. L'immortelle déclaration d'indépendance et l'oeuvre 
de Jefferson, et, à la suite d'une ive discusion, fut adoptée 
avec très-peu de modifications par le congrë, dans sa séance 
du 4 juillet 1776. Au mois d'octobre de la mgme année il 
fut appelé à faire partie de la Iéslature particulière de la 
Virgule, et prit part  la révision de la constitution de cet 
Eat, h la redaction première de laquelle il avait été procéde 
avec trop de précipitation. E t77 on le nomma gouver- 
ne,rde la Virginie; et en 1783, lors de l'ambassade en- 
voyée en France par les États-Unis, il accompagna Adams 
et Franklin. Après avoir résidé pendant plusieurs années à 
la cour de Versailles, en qualité de ministre plénipotentiaire, 
il revint dans sa patrie occuper, sous Washington, la place 
de secrétaire d'Etat. En t97 la reconnaissance et l'estime 
de ses concitoyens le portèrent à de plus baules fonctions : 
il fut i4,1 vice-président de l'Union, et plus tard, en fs01, 
appelé à la présidence, en remplacement de John Adams. 
Réelu en 1805, il fut huit ans à la tète de l'administration, 
et y serait resté plus longtemps si, à l'expiration de ses 
pouvoirs, il n'eOt point repoussé la proposition de les lui 
continuer; proposition dans laquelle il voyait une violation 
i de la constitution de son pays. Sur son refus formel, on lui 
donna pour successeur Ma d i s o n. 
Jefferson, pendant sa présidence, déploa le plus grand 
zèle pour répandre la civilisation parmi les Indiens. E ren- 
trant dans la vie privée, il consacra toute son activité à la 
fondation de l'université de Charlotteville, qu'il eut la satis- 
faction de voir créer et dont il fut le premier recteur. Retire 
dans son domaine de Monticello, il finit par tomber dans de 
tek embarras d'argent, que la législature dela Virginie, pour 
lui venir en aide, l'autorisa à mettre ses terres en loterie. Il 
mourut le  juillet 1826, le.mgme jour qu'Adams, cinquante 
ans après la mémorable déclaration de l'indépendance de 
sa patrie. On a de lui des Notes on Virginia, qui ont été 
traduites en français par lIorellet, une Notice sur des osse- 
ments gigantesques trouvés à l'etat fossile en Virginie, un 
lanaal of parliamentar/practic, des Mémoires sur les 
dispositions intellectuelles des nègres, sur des événements 
de la guerre de l'Indépendance, etc. Ses Mémoires et sa 
Correspondanceont été publiés à Londres en 1829 et for- 
ment 5 volume. Une staluecolossale en bronze par Powers, 
fondue à Munich, lui a été érigée à Ricbmond ('irginie). 
JEFFERYS. Vob, e'- Jrrn[vs. 
3EFFREY (Ftt,xcs, lord ), critique anglaiq influent, 
né en 1773, à Èdimhourg, était le fils d'un savant j,triscono 
salle, et, après avoir é/:,lié le droit à Glasoev età Oxford 



¢,4 JEFFREY -- 
buta iui-mme, en 179, au barreau d'lcosse, tout en s'oc- 
pant de travaux litoEraires, par suite desquels il se trouva 
|lé d'amitié avec Walter Scott, Sydney Smith, Brougham 
et quelques autres jeunes gens de talent et d'avenir. Il fut 
,l'un des fondateurs de i'EdinbuPgh teview, dont il prit 
la direction en t803; et il la garda jusqu'en t829. On sait 
4]ue ce recueil a défendu et propagé avec autant de succès 
que de talent les idées llbérales du siëcle, et qu'il n'a pas 
seulement exercé une influence considérable sur la littéra- 
ture conlemporaine, mais encore, comme organe des whigs, 
ur la politique de l'Angleterre. La direction habile et pru- 
¢lente que lui donna Jeffrey n'y contribua pas peu, bien que 
la rigueur de ses appréciations critiques lui ait altiré de 
ombreux désagréments. Ainsi, en 1806, il lui fallut se battre 
en duel avec Thomas M o ore; et lord Byron, dans son célè- 
• re pamphlet English Bards and $cotlish Reviewers, le fla- 
gella rudement. Tous deux n'en devinrent pas moins plus 
rd ses amis inlimes, et son autorité en matières de foot fut 
toujours universellement reconnue. En 1821, l'université 
de Glasgow l'Cut pour recteur; et à l'arrivée des whigs aux 
affaires, en t830, il fut appelé aux fonctions d'avocat de la 
couronne en Ecosse. En méme temps il devint membre du 
earlement, où d'allleu il se fit peu remarquer. Enfin, en 
1834, il fi;t élevé aux fonctions de juge à la Court of Sessiot, 
lesquelles donnent droit au titre personnel de lord, qu'il 
¢onservajusqu'ì sa mort, arrivée en 1850, dans un domaine 
<luïl possédait aux environs dËdimbourg. On a recueilli en 
4. volumes (2  édit., Londres, 1853)les articles publiés 
¢ar lui dans l'Edinburgh Reriew. 
JEFFIEYSouJEFFEBYS {SirGeonçrs), Iord-chance- 
Iierd'Angleterre, dut l'éiAration de sa fortune politique au 
zèle exalté avec lequel il concourut  la reaction royaliste 
et_catliolique qui signala les règnes de C h a r I e s I I et de 
J arques I 1, et à la fécondité des ressources qu'il déplo:ya 
dans l'intérèt de la cause papiste, dont le second de ces 
règnes fut le triompbe et l'apogée. Jeffre?s débta en 1666 
omme avocat, aux assises de Kington, et suivit, non sans 
fuceès, le barreau, jusqu'à ce qu'un aiderman de ses pa- 
rents le lit pourvoir de la charge de recorder (greffier) au 
iége de Londres. Ce fut lui qui, en cette qualite, It la sen- 
tence capitale/ l'avocat catliolique Langfiorne, l'une des der- 
ères victimes des impostures si cflfbres de Titus Oates. 
Le rfle passif que Jeffreys remplit en cette circonstance 
n'empècha point qu'il ne devint bientôt l'objet des faveurs 
de la cour. Il reçut en 1680 le titre de clievalier, et fut dé- 
corWl'anuée suivante de celui de baronet. Yers la mème 
poque, le duc d'York, depuis Jacques II, anquel il était 
personnellement dévoué, le nomma son sollicitor ( avocat- 
avoué). On sait que le parlement, désappointé de l'issue 
qu'avait eue le bill destiné à exclure du trfne le frère du 
roi, poursuivit avec acharnement les abhorrers, nom qu'on 
donnait aux partisans de la cour. Jeffreys,-déjà signale 
parmi les plus fougueux absolutlstes, ne pouvait écbapper 
.a l'altention du parlement : une adresse spèciale demanda 
au roi Cliarles de le priver de ses fonctions de recordcr ; 
mais il eut la prudence de calmer par une prompte démis- 
sion lïrritatiou des communes. 
La cour ne tardapoint à l'en ddommager en le nommant 
premier juge de la cour du Banc du Roi; [ourlions dans 
l'exercice desquelles il rendit d'importants services à la 
,cause de l'absolutisme. Ce tut dans le memorable procës 
d'Algernon Sidney qu'il s'essa)a  l'exercice de ce nouvel 
• mploi. Ort le vit avec surprise, modérant l'impetuosité na- 
turelle à son caractère, interroger l'accusé avec politesse 
.t impartia|itè. Son résumé adressë au jury présenta les 
nèmes dispositions ; mais quand il en vint à l'explication 
.de la loi, il deploya une subtilité cruelle, et lit découler la 
.¢ulpabilité de Sidney d'un série de sopfiismes qui, díbités 
avec l'imperturbable volubilitê qui lui était propre, soulevè- 
rent l'indignation de toutes les àmes justes et fionnètes. On 
,doit reconnaitre cependant qu'en dehors des matières poli- 
4qnes Jeflreys se montrait gèn--:ralement ami sine.ère de la 

JEFFBEYS 
justice; qu'il savait sévir avec une équitable fermeté conlre 
les abus et faire respecter les droits des citoyens. On peut 
citer comme exemple la sévérité avec laquelle fl rép'ima 
trafic illicite que se permettaient le maire et les aldermen 
de Bristol et d'autres grandes villes, des individus condam- 
nés  la déportation, et qu'ils faisaient veudre  leur profit 
dans les plantations américaines; ainsi que les manœuvres 
criminelles que ces officiers employaient pour augmenter 
leur prot le nombre des déportés, allant jnsqu' menacer 
de la peine de mort tout pauvre qui avait commis quelque 
léger délit, afin que ce malheureux sollicitt comme une 
graee d'ètre condamnë  la déportation, c'est-h-dire vendu 
aux planteurs des colonies. L'amnistie qui suivit la révolu- 
tion de 1688 sauva seule les coupables des justes rigueurs 
de la loi. Ce fut Jelfreys qui, après avoir été, en 1678, l'un 
des avocats du roi empioyés à faire valoir le témoignage de 
Tllus Oates contre les papistes, fit le rapportdu procès par 
suite duquel ce fameux i.mposteur subit une détention per- 
prtuelle. 
En 1685, peu de temps après l'avénement de Jacques Il, 
Georges Jeffreys fut élevé aux honneurs de la pairie, et fit 
partie de la haute cour ou chambre ardente chargée de 
rechercher et de punir les complices de la rébdlion du duc 
de Monmouth. Cette mission fut appelée la Campagne 
de Jeffreys, à cause des pouvoirs mifitair qui lui avilnt 
élë conférês pour la remplir avec plus d'efficacité. Le pre- 
mier procës dont la haute cour eut ì s'occuper fut celui de 
lady Alicia Lisle, veuve d'un des juges de Clmrles l , qui 
était accusée d'avoir donné asile à des proscrits. Quelques 
jurés ayant paru douter que cette dame connt3t leur qualité 
de rebelles, Jeffreys gnurmanda avec humeur l'expression 
de ce doute, et emporta la condamnation. 11 fit brOler vive 
une dame anabaptiste du nom de Gaunt, renommée par son 
inépuisable charité, coupable également d'avoir donné 
l'bospitalité ì des proscrits. Des hi»toriens ont évalué à prê 
de six cents le nombre des personnes que Jeffre)'s fit périr 
dans cette odieuse expédition, dont plusieurs circonstance» 
semblent avoir inspirê les scènes les plus atroces de notre 
révolution. La méme sentence comprit quelquefois jusqu'à 
trente victimes, et Jeffre)s ajoutait sou''ent par de bru'.ales 
injures à l'odieux de la condanmation. Le trouble des bour- 
reaux donna souvent lieu à d'affrcnses reCrises, qui pa- 
raissaient au grand juge de légers inconvénients au prix 
d'une bonne et prompte justice. On assure que Jacques, 
dont la nature était loin d'Cre sanguinaire, rëprouva fian- 
tement une partie de ces violences. Et pourtant, tel était 
le besoin que ce monarque avait de lïnstigateur de tant 
de cruautés, qu'il Ceva bientft après Jeffreys fi la dignité 
de lord- chancelier d'.Salgleterre. Jeffreys fut/ peine pourvu 
de cette eminente fonction, qu'il ouvrir l'avis de g'établir 
l'ancien tribunal ecclsiastique connu sous le nom de 
haute comision, qui avait été aboli en 1640 par un acte 
du parlement. Cette proposition, à la réussite de laquelle son 
inlportance politique était particulièrement intéressée, fut 
adoptée, et Jell'reés obtint la présidence de ce tribunal. 
Lors de la revolution de 1688, Jeffreys se déguisa pour 
échapper à l'animadversion populaire, qu'il n'avait que 
trop provoquée; mais, reconnu au moment où il attendait 
dans une taverne l'occasion de s'embarquer sur la Tamise, 
il fut conduit à la Tour de Londres, où les lords du conseil 
le firent écrouer. Le chai'in qu'il eprouva, joint à des 
actes d'intethpérance, auxquels ilCait fort sujet, avancèrent 
sa mort, arrivée quelques mois aprës, le 18 avril 1689. 
Avec des talents réels et un fonds incontestable d'amour 
pour la justice, Jeffreys a laissé une mémoire abfiorrée. Son 
nom, inséparable de ceux des Laubardemont et des 
F o u q u i e r-T i n v i I I e, rappelle tout ce qu'a d'odieux et 
de méprisable l'exercice du pouvoir judiciaire lorsque, au 
lieu de cfiercher fi contenir dans de justes bornes les pa 
sions politique, il s'abaisse à les suivre dans leurs déré- 
glements et leurs excès. L'équitable histoire envoloppe ca 
elfet «l.,us  u commun auatte.me les séides des bons et 



EFFIEYS 
mauvais gouvernements ( car les bons gouvernements out 
aussi leurs séides), et ses leçous nous enseignent que la 
voie la plus propre à dégrader la causo la plus légitime, 
Oust d'employer pour la servir des moyens réprouvés par la 
rnorale et l'humanité. A. BOVLLtE. 
JEHg3I DE TBOYES. Voyez. JE nE Teow.s. 
JÉHOVAH estlenom ineffable de Dieu citez les Hébreux. 
Composé de quatre voyelles dans la langue d'lsrael, c'est 
une combinaison des lettres du verbe haïah (il a été), dont 
le sens est : Celui qui fut, est, et sera. ç nom mystérieux 
lut révélé à ltloise par celui qui mit dans la bouche du pre- 
mier homme le premier idiome, avec la merveilleuse puis- 
sance d'exprimer les idêes les plus abstraites. Les patriarches, 
Adam lui-mme, ignoraient ce nom jusque alors connu des 
seuls séraphins; s'il se trouve qudquefois dans la Genèse, 
c'est par anticipation que Ifoïso, son auteur, le fait en- 
trer dans son récit. Telle est l'opinion des pins savants 
rabbias, et les Pères de l'Église sont sur ce point d'accord 
avec eux. L'époque où ce mot tout céleste prit place dans 
l'idiome hébraïque est clairement indiquée dans ce passage de 
l'Exode : « Lorsque je dirai aux enfants d'lsrael, répondit 
Moïse : Le Dieu de vos pères m'envoie vers vous ; s'ils me 
demandent votre nom, que leur répondrai-je ? Je suis, dit 
le Seigneur, celui 9ni est. » Nos poëtes l'ont rendu par 
l'adjectif-substantif I'ternel, traduction incomplète, dont 
Malachie, le petit prophète, semble toutefois avoir fait le 
commentaire, quand, dans un de ses versets Dieu dit : 
« ltloi, je ne change point. » bloé, Abraham, lsaac et 
Jacoh ne connaissaient le Créateur que sous les noms de 
8ttaddaï (celui qui se suffit à lui-mme), d'Elohim (les 
dieux), pluriel collectif par lequel l'idiome hébraïque peint 
un objet unique, mais immense. 
Lamaniëre d'énoucer le nom du dieu des Juifs, qu'ils ne 
prononçaient jamais, si ce n'est une fois l'année par la bou- 
che du grand prêtre dans le Salut-des-Saints, est très va- 
riable depuis Jésus-Christ. Composé de lrois voyelles et d'une 
voyelle dipthongue, ce mot en franeais s'écrirait ainsi : 
itoutL C'est lui que l'on voit en caractères hbraïques 
tracés dans ces triangles, symboles de la Trinité, dont l'ar- 
chitecture sacrée a orné nos autels et les frontispices de nos 
temples. Les juifs d'aujourd'hui s'abstiennent toujours de 
prononcer ce nom redoutable, qui, transmis par la voix, dit 
saint Clément d'Alexandrie, pouvait frapper un homme de 
mort. Saint Jéréme, dns sa Vulgate, craint d'écrire mme 
e nom de Jéhovah ; il lui substitue celui d'Adonaï, selon 
l'usage des Juifs d'alors. 
Les prophètes et les psalmistes revètirent Jéhovall d'un 
corps, de vtemeuts, ou l'enveloppèrent mystérieusement 
dans une nuée, pour rendre Dieu palpable à ces/lines abru- 
ties par le culte des idoles et des hauts lieux. David lui 
donne un tréne, une droite puissante, un visage éblouis- 
sant; il met un nuage obscur sous ses pieds ; il l'assied sur 
les ailes des chérubius ; dans le désert, blotse transforme 
Jéhovah en une colonne tour h tour ténébreuse et lumineuse; 
Isaïe lui donne une robe immense, dont le bas remplit tout 
le temple; Job le place au centre d'un tourbillon, du milieu 
duquel tonne sa voix redoutable. « Les yeux du Seigneur 
sont attacbés sur les justes, et ses oreilles sont ouvertes ì 
leurs prières, » dit le psalmiste. Toutes matérielles que 
semblent ces images, elles onten elles quelque chose de m) s- 
tique et de surnaturel; ce je ne sais quoi enfin que Pire- 
mortel Phidias ne put jamais inspirer à son colossal Jupiter 
tonnant. 
JÉItU fils de Josaphat, était un des généraux du roi 
d'Israel Joram, que le prophëte Ëlisée fit oindre roi d'Israel 
par un de ses disciples. Le dixième par ordre de dates, il 
commença une dynastie nouvelle, la cinquiéme, et r égna 
de l'an 8$tt à l'an 856 avant J.-C. Tout aussitét après qu'il 
eut reçu l'onction sacrée, il fut proclamé roi par l'afinAe, 
accourut à Jisréel où le roi Joram attendait la gnérison des 
Ilessnres qu'/I aval! reçes à la guerre, le {ua ainsi que le 
roi rie Juda Ochozias qui se trouvait aussi Iì et monta snr 

JELLACHICH 
le h'6ne. Il extermina ensuite jusqu'au dernier homme toute 
la [amille d'Achab, qui était devenue odieuse à l'ordre des 
prophètes, détruisit le temple de Baal à Samarie et fit cruel- 
lement égorger tous les pretres. Les Sriens de Damas, met- 
tant à profit la faiblesse d'Israel, privé maintenant des 
cours efficaces de Juda, enlevèrent à Jéhu tout le territoire 
de son ro?anme, situé " l'est du Jourdain. Jebu morut 
Sama.rie, après avoir régné vingt-huit ans. 
JE..HU- ( Compagnies de). Voyez CoaxCmES VE Juv. 
JEIPOUI ou DJEIPOUR, principauté radiepoute 
ayant pour chef-lieu la ville du mime nom, et située dans 
les provinces de l'Hindostan appelées Adjémir et Agra. Le 
sol en est partout sablonneux et fortement imprégn6 de sel, 
qu'on en extrait et qui fait l'objet d'un commerce d'expor- 
tation considérable. On y récolte d'ailleurs du froment, 
du tabac et du coton de la meilleure qualité, ainsi que la 
plupart des produits particuliers à l'Indu. La population se 
compose en partie de Badjepoutes et en partie d'indigènes, 
qui étaient déjà fixés dans ces lieux avant l'immigration 
des brahmanes. Le radja n'est que le souverain nominal du 
pas, et l'autorité réelle se trouve entre les mains du rési- 
dent anglais. La vilte de Jeïpour est la plus réguliére de 
l'Indu, et l'on prétend qu'elle ne fut fondée que sous le rogne 
de lfohammed.Chah, d'après les plans fournis par un af- 
chiiez.te italien. C'esl Ambar qu'on regardait autrefois comme 
la capitale de la principauté de Jeïpour. Au siècle dernier 
la ville de Jetpour était l'un des grands centres de la science 
des Hindous. On y trouve un nombre prodigieux de pigeons, 
qui sont tellement apprivoisés qu'on a de la peine a se 
barrasser d'eux. Ces oiseaux, de mme que les puons, sont 
réputés sacrés dans tous le Radjashin. 
JÉJUUM, On donne ce nom latin, qui signifie ide 
ou tt.eun, à la seconde portion de l'intestin g r ë le, celle 
qui se continue d'une part avec le duodénum, ou pre- 
mière portion de cet intestin, et de l'autre avec l'ilCn, ou 
la troisième portion. Le jéjunum .se montrant toujours vide 
dans les cadavres, on a déduit de ce fait qu'il est le principal 
siCe de l'absorption du c h y I e, et que les matières alimen- 
taires, mlées avec la bile et le suc pancréatique dans le 
duodénum, le parcourent avec plus de vitesse pour ar- 
river' l'ilCn, où on le» trouve frequemment accumuiées. 
L. 
JEH. Ce nom a été dnnué par luisch à une espèce de 
serpent du Brésil recouvert d'un enduit si gluant que les 
animaux qui le touchent adhèrent fortemeot à sa peau, et 
que l'homme qui voudrait le saisir ne pourrait eusui,'e s'en 
detacher. Ce prétendu serpent très-visqueux parait n'ètre 
autre chose qu'une cécilie, qui, comme on le sait actuelle- 
ment, est passée de l'ordre des ophidiens dans celui des 
amphibiens ou balraciens. L. 
JELL&CI|ICH DE BUZEI (Jospu, comte vE), géné- 
ral auh-ichien et ban de Croatie, est né le 16 octobre 1801, h 
Peterwardein. L'empereur, voulant récompenser les sers/- 
ces militaires de son père, retiré du service avec le grade de 
général, lui donna une place à i'acaddrnie thërdsienne, où le 
jeune homme, doué d'une intelligence précoce, se distingua 
en peu de temps parmi ses condigciples. A dix-huit ans, il 
entra comme sous-lieutenant dans un régiment de dragons. 
Infatigable au travail comme au plaisir, le dernier au bal, 
mais le premier à la manœuvre, d'ailleurs poëte à l'àme 
ardente, Jellachich se fit aimer par ses compagnons, qu'il do- 
minail. C'est à cette époque qu'il publia son Garnison'slied 
(Chanson de garnison), piquante satire du vieux système 
militaire, qui obtint un grand succès. 
ommè après 1830 capitaine-lieutenant d'un des régi- 
ments-frontières de huians, major d'infanterie au commen- 
cement de 1837, lieutenant.colonel, puis colonel en 
Jellachich acquit une grande popularitë en Croatie par la 
manière dont en maintes circonstances il réprima les dé- 
prédations commises sur le territoire de cette prosince 
par des brigands bosniaques. La rvohlion de 188 vint 
favoriser son ambition, et dès lors il prit une part ira- 



¢0« JELLACHICH 
portante aux vénements qm agitèrent I'utriehe. Les Hon- 
grois, tout en réclamant pour eux l'indépendance et en 
se proclamant les défenseurs de la liberté, n'avaient rien 
stipulé pour les races slaves de la Croatie et de la Dalmatie. 
Craiant avec raison de leur part une oppression d'autant 
plus lourde qu'elle serait sans contrepoids, les Croules en- 
voyèrent une députation à Vienne, déclarer qu'ils étaient 
prêts à donner leur sang et leurs biens pour la défense de 
l'lutCrilWde l'empire. Jellachich seul leur parut l'homme 
des circonstances; ils le demandërent pour ban, et l'empe- 
reur, en lui accordant ce titre, y joie-mit bientét de nouvelles 
faveurs, car il le nomma coup sur coup conseiller, proprié- 
taire de deux régiments et génerai commandant en chel les 
districts du bannat, de Waradin et de Caristadt. 
xNombreuses étaient les difficultés qui attendaient le nou- 
veau ban : d'abord les Croules n'étaient pas tellement unis 
que l'on ne plt craindre des divisions excitées par des chefs 
jaloux; en outre, l'nn des ministres de l'empereur était 
Hongrois, et il était probable qu'il empioierait son influence 
à renverser un ban que ses connaissances militaires devaient 
rendre redoutable à ses compatriotes. Jeilachich triom- 
pha, mais non sans peine, de tant d'obstacles. Il alla sans 
armes trouver les Coules mécontents et réunis, leur expliqua 
ses projets, et fut reporte par eux en triomphe. Sommé 
I,ar le ministère de rendre compte de sa conduite, il vint 
a Vienne à la tte d'une escorte nombreuse, reflsa de s'ex- 
pliquer en presence du ministre honois, et obtint une au- 
Jien«e publique de l'empereur, avec qui l'on redoutait qu'il 
u'eùt une entres ne secrète. Il purin modestement de ce qu'il 
avait fait, déclara qu'une population aussi importanle que 
les Slaves ne pouvait Cre sacrifice aux intérèts d'une poi- 
gnée de Hongrois, et ajouta qu'il venait resserrer plus 
etroitement que jamais les liens qui unissaient la Croatie  
l'empire, dont le salut n'était qu'à ce prix. Son discours, 
persuasif et Coque.rit, eut un su-_ës complet : i'emperem" 
fat emu, des applaudissements éclatërent, et l'archiduc 
Jean vint serrer Jellachich dans ses bras. On convint 
que le ban garderait son autorité, mais que l'dit qui l'en 
dépouillait ne serait pas encore rapportë. Le soir, la popu- 
lafiou de Vienne se pressait sous ses fenêtres; il prononça 
une nouvelle harangue, et la termina par ces moLs, qui 
furent couverts d'applaudissements : • Je veux, mes Irëres, 
une Autricbe grande, forte, pu!ssantc, libre et indivisible. 
n, ïve notre belle patrie! Vive PAIiemagne! » Comptant sur 
les promesses de la cour, Jellachich se tint prët à com- 
raencer les hostilités conlre les Hongrois; il parconrut la 
Croatie et les autres provinces slaves de l'empire, recueil- 
lant partout de nombreuses preuves de patriotique sym- 
pathie. 
Cependant, les Hoogrois ne s'avouaient pas encore vain- 
cus ; ils entourèrent de nouveau le faible Ferdinand, et 
I'it qui enlevait au ban ses pouvoirs parut dans les jour- 
naux. ilais la cour avait négligé de remplir une des for- 
malités nëcessairs à la validité del'acte. Jellachich refusa 
donc d'obéir, et continua de se poser en défenseur des 
Slaves et de l'empire menacé. Les diètes protestèrent en sa 
livreur avec une imposante unanimité, en mëme temps que 
Iïnertie caicu[ee des troupes impériales plaçait les Hongrois 
e. présence des plus graves péri|s. Enfin, le 6 septembre 
188, un nouvel édit de l'empereur, que ne pré¢édait aucun 
préambule explicatil, rendit à Jeilachicb ses digmtés et 
ses fonctions, « en récompense de ses patriofiques ser- 
vic ». 
On conna|t les événements qui suivirent, l'irritation crois- 
saute des ltongrois, la faiblesse de leur vice-roi, l'archiduc 
Élienn% et enfin les troubles de Vienne, qui obligèrent l'em- 
perenr de se réfuer à Olmutz. Jeilachich s'empressa de 
mettre à sa disposition les troupes qu'il as-ait levëes, et dont 
la discipline était remarquable. Combinant ses opérations 
avec Windisch-Grœetz, il marcha sur Vienne, repoussa la 
diversion tcntée par les Hngrois dans i'inlerèt du parti ré- 
«lutionnaire, et, enlouré de .es »anteaux rouges , fit son 

 JEM.IAPES 
entrée dans cette capitale le 2 novembre. Depuis lors, Jel- 
lachich, derenu le bras droit de l'empereur, et qui a singu- 
lièrement contribuë à la soumission de la Hongrie, Jouit 
d'une faveur que tant de services rendus à la couronne pa- 
raissent devoir protéger contre toutes les intrigu de cour. 
A l'occasion de son mariage, l'empereur François-Joseph 
lui a donné le titre de comte. 
Brave et chevaleresque, aimé des soldat% qui dans leurs 
marches répètent ses cluant-g patriotiqucs, Jeilachid a puisé 
au contact des civilisations occidentales des connaissances 
qui, loin d'avoir étouffé en lui l'originalité de l'esprit, eu 
ont aidé le dçveloppemeut. Il connait l'Europe avec ses 
passions, sa puissance de civilisation, et porte à la France 
une affection sincère. A. 
JE3,131APES (Bataille de). La ournée de Valm. 
avait sauvé la Champagne et la capitale de lïovasion de 
Prussiens et des veugeances de l'Amigration, biais la Flandre 
restait en proie aux armées de l'Autriche  et Du m o'uriez 
n'avait rempli que la moitié de sa tche. Albert de Saxe- 
Teschen, encouragé par la coopération dei'armée prussienne, 
avait quitté les retranchements de Mous et jeté des divisions 
impëriales sur divers points de la frontiêre de France. Il 
avait forcé le camp de Maulde, attaqué, bombardé la ville 
de L i 11 e, et porté la désolation dans ses remparls. Be- 
poussé par/'intrépidité de la garnison et des habitants, il 
allait se venger sur Valenciennes, quand Dumouriez, iibé- 
rateur de la Champae, fit annoncer son retour par sou 
lieutenant Beurnonville. 
A l'approche de cette avant-garde, Albert et ses Autri. 
chie.as se replièrent "-ers leur» retranchements de lons; 
et Dumouriez, qui meditait depuis lonemps la ennquéte 
de la Belgique, pénetra à son tour sur ce riche territoire. 
Cent mille Français étaient rassemblës sous son com- 
mandement ; il les divisa en quatre corps. Vin mille, for- 
ruant son extrème gauche, marchèrent sous les ordres de 
Labourdonnaye contre les divisions du génëral autrichien 
comte de Latour, qui dëfendait les approches de Tourr,ay. 
Un pareil nombre se porta sur la Sambre avec le géaéral 
Valence, pour fermer les routes de 'amur au corps de 
Clairfa3t. D'Harville, à la tte de douze raille autres, dé- 
boucha par Maubeuge, et quarante mille, commandes par 
Dumouriez lui-mme, franchirent la ligne de Qnieain, 
précédés par trois bataillons de Belges, impatients de alA- 
livrer leur patrie. Leur premier pas fut marqué par un échec. 
Quinze cents hussards autrichiens les chargèrent dans les 
environs de Boussu, et les mirent en désordre. Ma;.s Dumou- 
riez lit soutenir ces Belges par deux de ses divisions. Les 
villages de Boussu et de Thu|in furent emportés à la baion- 
nette; la fort de Sars lut franchie, et Dumouriez parut 
le 5 novembre 1792 devant les positions formidables de 
Jemmapes. 
Le duc de Saxe n'avait rien négligé pour les fortifier. Trois 
lignes de redoutes, disposées en amphithetre, étaient défen- 
dues par cent bouches à feu et par vingt-huit mille Autri- 
chiens. La gauche de ces lignes s'appuyait au village de 
Cuemes, à un quart de lieue de la place de 3Ions, dont i'ar- 
lillerie défendait cet étroit passage ; et leur droite, repliée 
en éq,erre, environnait de ses retranchement la colline et 
le 'illage de Jemmapes. La gauche de l'armée française était 
commandée par le général Ferrand, la droite par Data- 
pierre, le centre par Dumouriez et par le jeune duc de 
Chartres, qui fut depois Lo u is-P h i i i p p e, roi des Fran- 
çais. Le 6 novembre, dës huit heures du matin, la bataille 
commence par de nombreuses décharges d'artillerie; mais 
l'impatience de nos divisions demande un assaut gnèral, et 
Dumouriez donne enfin/'ordre d'une attaque plus vive. Le 
vieux Ferrand et l'aile gauche s'avancent par la chausée de 
Valenciennes, enlèvent le village de Quarégnon sous le feu 
des canons ennemis, et se dirigent sur la colline de 
mapes, que nos brigades débordent, llais le feu des Autri- 
chiens devient si terrible, que Ferrand, dont le cheval vient 
d'ëtre tué, sent la nécessité de changer la direction de_. 



JEMMAPES -- JE NE SAIS QUOI 
eolonnes. I! se jette sur sa gauche, marchant à pied, mal 
son grand ge, à travers des prairies marécaeuses, et, s'a- 
percevant bientôt que ses canons ne peuvent le suivre, que 
tes brigades Rosiére et Blottefière ont pris un autre chemin, 
il reste un moment dans une irrësolution qui peut tout 
comprometlro. 
Dumouriez, dont le coup d'oeil embrassait toutes les opé- 
rations de son arm6e, reconnaï le danger de cette hésitation, 
et vient soutenir son lieutenant. BestWseul au comwande- 
ment du centre, le duc de Chartres enlevait pendant ce temps 
la première ligne des redo»tes ennemies, que protégeait le 
bois de Flanu, tandis que Beurnonvitte, à la tète de l'avaut- 
çarde, s'avançait par la route de Frameries sur la c,llini 
«le Cuesmes. Le colonel belge Stéphan avait assailli et re- 
/oussé la première ligne des Impëriaux. Mais le feu des 
coudes redoutes ayant arrêtWnn instant la marche de cette 
colonne, le comte de Haddick avait profité de ce momeut 
de surprise pour jeter sa cavalerie sur ses flancs. Beuruon- 
ville s'ëlança pour la soutenir. Il chargea lui-racine lesesca- 
cirons de Haddick, et, emporté par son courage, il eùt péri 
¢u soldat dans cette sanglante mlée, si le lieutenant La- 
lretèche n'eut fondu sur cette nuée de cavaliers qui en- 
vetoppaieut son genéral, et ne l'eOt ramend ain et sauf, 
apres avoir tué sept eunemis et reçu quarante blessu- 
res. 
Dampierre a vu le daugers de l'avant-garde, que six ba- 
taillons hongrois se disposent encore ì envelopper. Il forme 
ces colonnes sous le feu de la mitraille, et conduit l'aile 
droite aux retrancbements de Cuesmes. Dampierre précède 
de trente pas les grenadiers qui le mivent. Un seul vtéran 
est auprès de lui, et ce vieillard prononce eu pleurant le 
nom de son fils. Dampierre l'iuterroge : « lVion fils, répond 
Jolibois, a déserté ses drapeaux, et je viens réparer son 
houneur et le mien. » Dampierre lui promet une sous-lieu- 
tenance et marche à la coloune autrichienne; il la renverse, 
la pousse sur la seconde ligne des redoutes, et les enlève à 
la baïonnette. Dumouriez est partout ; il reparalt au centre, 
et veut décider la victoire par uu dernier effort. ,, Soldats, 
dit-il, voilà les hauteurs de Jemmapes, et voilà l'ennemi. » 
Il entonue a ces mots |'hymue des Marseillais, s'avance à la 
tte des colonnes, les lance dans la plaire, et vole à l'aile 
droite. La précipitation de cette attaque a mis du désord 
dans les bataillons du ceutre ; les escadrons autrichiens s'eu 
aperçoivent et rompent la ligne ; un domestique la rétablit 
le jeune Baptiste Renard, valet de Dnmouriez ,rallie nos ba- 
taillons et les ramène à l'eunemi. Mais le leu de ses batteries 
redouble. Le général Drouet est blessé à mort, et le dcou- 
ragemeut se repand et se propage dans nos colonnes. Le duc 
de Chartres se jette alors dans cette mèléeconluse, il rassure 
tous ces corps ébranlés et rompus, les salue du nom de ba- 
taillon de Jemmapes, et les lance une seconde lois contre les 
retranchements. Les génêraux Stéteuhoffen et Desforts, les 
deux Frvelle, les colonels Nordmann et Fouruier y mon- 
tent avec le prince, et forcent les Autrichiens ì les aban- 
donner. Ferrand a laissé ses canons en arrière, et, n'ayant 
avec lui que six bataillons, il pénètre en me temps dans 
le village de Jemmapes. Beurnonville et Dampierre éprou- 
vaient seuls de la résistance. L'artillerie de la place, le feu 
des redoutes, les charge de la cavalerie ennemie leur pré- 
sentaient de obstacle terribles; mai« Dumouriez était venu 
animer leur courage. Un bataillon de volontaires parisiens 
arrête les escadrons d'Albert de Saxe par sa froide intr- 
pidité. Quatre colonnes refovmées par Dampierre, Beurnon- 
ville, Kilmaine et Dumouriez fondent simultanément snr 
l'ennemi. Ses derniers retranchements sont emportés, les 
Hongrois qui les défendent sont pass au fil de l'épée; le 
baron de Keim y lrit/ leur tëte, et la journée de Jemma- 
pes ajoute une seconde victoire à nos tastes rdvolutionnaires. 
Iions, Tournay, Gand, Br,ges et Bruxelles nous ouvrent 
leurs portes : les Belge. proclament leur indépendance, 
se jetteut dans les bras de leurs libérateurs, et Dumourie 
eu comble de la joie, commande enfin dans ces contres, 

601 
dont la couqngte était le but constaut de ses méditations. 
VIE,N'e-I', de l'Ac.dëmie Fran.caisi. 
JE NE S:klS QUOi. Il y a quelquefois dans les per- 
sonnes ou les choses un charme invisible, une gr;Ice ha. 
tutelle, qu'on n'a pu définir et qu'on a tg forcé d'appeler 
e e sais quoi. Il me semble que c'est uu effet principale- 
ment fondé sur la surprise..Nous sommes touchés dece qu'une 
personne nous plait plus qu'elle ne nous a paru d'abord de- 
voir nous plaire; et nous sommes agréablement surpris de ce 
qu'elle a su vaincre des défauts que nos yeux nous montrent 
et que le cœur ne voit plus : voilà pourquoi les femmes lai- 
des ont souvent des gr;Ices, et qu'il est rare que les belles 
en aient ; car une belle personne fait ordinairement le cou- 
traire de ce que nous avons attendu : elle parvieut nous ì 
paraltre moins aimable, Après nous avoir surpris en bien, 
elle nous surprend en mal; mais l'impression du bien est 
ancienne, celle du mal nouvelle : aussi les belles personnes 
font-elles rarement les grandes passions, presque toujours 
réservées à celles qui ont des gràces, c'est-à-dire des agré- 
ments que nous n'attendions point et que nous n'avions pas 
sujet d'attendre. Les grandes parures ont rarement de la 
grâce, et souvent l'habillemeut des bergères en a. 
admirons la ma|estg des draperies de Paul Yérnnèse ; mais 
nous sommes touchës de la simplicité de Raphael et de la 
pureté «lu Corrige. Paul Vgronse promet beaucoup, et paye 
ce quïl promet. Raphael et le Corrége prometteur peu et 
payent beaucoup, et cela nous plalt davantage. 
Les grâces se trnnvent plus ordinairement dans l'esprit 
que dans le visage, car un beau visage parait d'abord, et ne 
cache presque rien ; mais l'esprit ne se montre que peu ì 
peu, que quand il veut et autant qu'il veut ; fl peut se ca- 
cher pour paraltre, et donner cette espce de surprise qui 
fait des grgces. Les gr/ces se trouvent moins dans les traits 
du visage que dans les manières ; car les manières naisseut 
à chaque instant, et peuvent ì tous les moment créer 
des suqrises; en un mot, une femme ue peut guère ëtre 
belle que d'une façou, mais elle est jolie de cent mille. L'a 
loi des deux sexes a établi, parmi les nations poli¢es et 
sauvages, que les hommes demanderaieut et que ! fera. 
mes ne feraient qu'accorder; de là il arrive que les grâces 
sont pins particulièrement attachés aux femmes. Comme 
elles ont tout ì défendre, elles ont tout à cacher ; la moindre 
parole, le moindre este, tout ce qui sans choquer le pre- 
mier devoir se montre en elles, tout ce qui e met en li- 
berté devient nne gr,ce; et telle e.t la gesse de la nature 
que ce qui ne serait rien sans |a loi de la pudeur devieut 
d'un prix infini depuis cette heureuse loi qui fait le bonheur 
de l'uuivers. 
Comme la gbne et l'affectaUon ne sauraient nous surpreu- 
dre, les grâces ne se trouvent ni dans les manières ggnées, 
ni dans les manières affectées, mais dans une certaine li- 
berté on facilité qui est eutre les deux extrëmitgs, et l'ame 
est agrgablemeut surprise de voir quel'on a gvité ces deux 
ícueils. Il semblerait que les mauières naturelles devraient 
gtre les plus aisées; ce sont celles qui le sont le moins, 
car l'gducation, qui nous ggne, nous fait toujours perdre du 
naturel : or, nous sommes charmés de le voir revenir. Rien 
ne nous pla|t tant dans une parure que Iorsqu'elle est dans 
cette négligence ou mme dans ce ddsordre qui nous cache 
tous les soius que la propreté n'a pas exigés et que la seule 
vanité aurait fait prendre ; et l'on n'a jamais de grAce dans 
l'esprit que lorsque ce qu'on dit parait trouvé et non pas 
recherché. LOrle vous dites de« choses qui vo out 
vous pouvez bien faire voir que vous avez de l'esprit, et 
non pas des grâces dans l'esprit. Pour le faire voir, il faut 
que oos ne le voyiez pas vous-mme, et que les autres, 
I  qui d'ailleurs quelque cfiose de naïf et de simple en vous 
ne promettait rien, soient doucement surpris de s'en aper- 
cevo:r. Aussi les grficcs ne s'acquiCent point; pour en avoir, 
il faut tre naif. Mais comment peut-on travailler à 
naïf? 
Une des plus bcllesfictions d'liomère, c'est celle e 



608 
ceinture qui donnait à Vénus l'art de plaire. Rien n'est plus 
propre  faire sentir cette magie et ce pouvoir des grâces, 
qui semblent ètre données à une personne par un pouvoir 
invisible, et qui sont distinguëes de la beauté mème. Or, 
cette ceinture ne pouvait ètre donnée qu'à Vnus; elle ne 
pouvait convenir à la beauté majestueuse de Junon, car sa 
majsté demande une certaine gravite, c'est-à-dire une con- 
U'ainte opposée à l'incCuité des grâces; elle ne pouvait 
,:onvenir à la beauté fière de Pu]las, car la fierté est opposée 
à la douceur des grSces, et d'ailleurs peut souvent ëtre soup- 
çonnée d'affectation, llo.v-rsçuJEv. 
JENNEB ( ÊoocAr ), célèbre  jamais par la décou- 
"cette et Papptication de la vaccine, naquit le 17 mai 17z9, 
à Berkeley, dans le comté de Glocester, étudia d'abord chez 
un chirurgien de Sudbury, près de Bristol, et se rendit 
suite à Londres pour y continuer ses Cudes; il ne tarda 
pas à y faire la connaissance de J. Hunier, auquel il dut 
d'etre choisi pour classer les objets d'histoire naturelle re- 
cueillis dans le premier voyage de Cook autour du monde. 
Il s'etablit ensuite comme chirurgien dans sa 'ille natale, 
où, tout en s'occupant de sa clientèle, devenue promptement 
constdrabi¢, il s'adonna avec le plus grand zèle à l'etude 
de l'histoire naturelle. Frappé déjà depuis longtemps de ce 
que lui avait dit une paysanne au sujet de la force préser- 
vative que pouvaient avir contre la petite vérole les bou- 
tons qui, dans les épizcoties si fréquentes dans son pa's, 
e déclaraient au pis des vaches, il donna suite aux obser- 
vations qu'il fut ainsi conduit à faire depuis l'année t775 ; 
et grAce  une persévérance soutenue, il en vint, en 1788, 
a ne plus douter de l'ellicacité du cow-po$ contre la petite 
vérole. Une épizootie qui se déclara à cette époque lui four- 
nit l'occasion de mettre en pratique sa découverte. Le 14 
mai t;96 il inocula x un jeune garçon, appelé James Pbipps, 
un bouton pris h la main d'une ff]le de ferme, Sara _N'elmes, 
et il eut la ]oie de vir que la petite verole inoculee plus 
tard  ce jeune garçon resta sans ellet sur lui. On refusa 
d'accueillir et d'imprimer dans les Philoophical Transac- 
tions un mémoire qu'il écrivit à ce sujet; et il publia alors 
sa découverte dans un écrit intitulé : lnquiry nto the 
causes and effects of the variolev vaccinoe (Londres, 1798). 
La plus grande faveur accue6lit cette admirable découverte, 
qui se propagea promptement en Europe et en AraAtique. 
Jenner fut salué comme le bienfaiteur de l'bumanité ; mais 
aussi il ne manqua ni de detracteurs ni d'envieux. Il reçut 
en 1802 10,000, et en 1807 20,000 liv. sied., comme récom- 
pense nationale; en ts05, il avait obtenu le droit de cité dans 
la ille de Londres. Pour propager cette nouvelle décou- 
verte, ses amis fondèrent le Royal Jennerian Societg, 
dont lui-mème fut président, et qui recul plus tard une au- 
tre direction. Il passa ses dernires années tant6t à Chel- 
tenham, dont il ëtait maire, tant6t h Berkeley, où il mou- 
rut, le 26 janvier 1823. 
Tandis que Jenner se faisait, par sa découverte et par la 
petsévërance avec laquelle il en poursuivait le développe- 
ment, un nnm immortel dans l'histoire du monde, il mé- 
ritait et laissait dans son entourage, par son active humanité, 
d'aussi beaux souvenirs. Les loisirs que lui procurèrent ses 
beaux travaux scientifiques, il les passa dans la solitude 
ou les consacra aux beanx-a, principalement à la mu- 
sique et à la poésie. Il nous faut encore citer parmi les écrils 
dans lesquels il consigma ses dernires observations sur 
l'objet de ses principales études : Further Observations on 
the wrioloe vaccioe or cow-ox ( Londres, 1799) ; Con= 
tinuation oJ /nets and observations of the cow-ox 
(Londres, 1800); On the varieties and modifications et 
the vaccine pustule occasional by an heretic state 
lhe kin (Cheltenham, 1819 ) ; et On the influence of ar- 
Dflcial eruptions in certain diseuses» etc. (Londres, 
t822 ). 
JEI|TÉ juge et énérai d'armée en Israel, fils de 
Galaad et d'une courtisane, fut expulsé de la maiso pater- 
neBe par ses frères consanuins, et s'en aIla alors dans le 

JE INE SAIS QUOI -- JÉRÉMIE 
pays de Tob, de l'autre cbté du Jourdain, o0 il ne tarda 
point à se faire un Brand renom comme chef d'une bande de 
brigands. Aussi ses compatriotes de Galaad se trouvant en 
guerre contre leurs voisins les Ammonites, l'appelèrent-.ils 
à leur secours et le placèrent-ils à la tète de leur armee. 
Mais avant de se metlreen campagne Jephté fit VœU, dans 
le cas od Dieu lui accorderait la victoire, de lui sacrifier la 
première personne qu'il rencontrerait b son retour. Or ce 
sa fille unique; et suivant quelques-uns, il la sacrifia véri- 
tablement. D'autres prétendent que les termes employés 
ce propos par l'Êcriture veulent dire seulement qu'il la con- 
sacra à une virginité perpétudle dans le temple. Après avoir 
délivré le peuple d'Israel de ses ennemis extérieurs, Jephté 
le o.uver.na pendant six ans. 
JEBEMIE l'un des grands prophèoEs, dont les pro- 
phéties et les lamentations sont contenuerdans le canon 
de l'Ancien Testament, donne lui-mme sa biographie dans 
ce premier verset de son livre : « Prophétie de Jérémie, fils 
d'Helcias, l'un des prètres qui demeuraient  Hanathot, 
dans la terre de Benjamin. ,, Il naquit l'an 630 avant J.4., 
et eut, encore presque enfant, une vision où lui apparut 
le Seigneur, qui le choisit pour son voyant, la treizième 
annëe du rëgne de Josia, époque à laquelle il commença 
.A prophétiser dans Hanathot. Persécuté ensuite par ses cern- 
patriotes, il se rendit à Jèrusalem, oi b ne perdant jamais de 
vue la déplorable situation off se trouvait l'Êtat, aussi bien 
sous le rapport politique que sous le rapport reliçeux, il 
demeura inébranlablement fidèle à sa mission de voyant. Ce 
prophète, qui eut pour secrétaire le petit prophète Bu r uch, 
qu'admirait tant notre bon La Fontaine, prophetisa prin- 
cipalement sous le règne de Sédecias, en ces temps malfieu- 
reux où Nabuchodonosor avait mis le siège devant Jéru- 
salera. Il avait reçu de Dieu le don des larmes : il les fait 
ruisseler des yeux ; il décbire l'Ame de ses gémissements; il 
remue les entrailles par ses cris ; il navre le cœur de pitié et 
de douleur. Sédécias, irrité alors des terribles prévisions d¢ 
l'homme de Dieu, qui le jetait comme d'avance aux puis° 
sautes mains du roi d'Assyrie, « le fit enfermer dans le 
vestibule de la prison qui était dans la maison du roi de 
Juda :  telle est la relation textuelle du voyant. La prise 
et la destruction de Jérusalem par [Nabuchodonosor 
curent pour résultat de mettre un terme à la captivité du 
prophète, et le vainqueur lui permit de continuer  résider 
a lizpa en Judée. Iais pins tard Jérémie, pour se sous- 
traire à l'oppression du gouverneur institué par xXabuchodo- 
nosor, se retira en Égypte avec bon nombre de Juifs qui 
oetaient restés comme lui en Judée. C'est là qu'il mourut, 
dans un ge extrèmement avancé, l'an 70 av. J.-C. La 
tradition postérieure place son tombeau au Caire. D'après le 
récit de saint JérOme et celui de Tertullien, il serait mort 
lapidé. D'autres veulent qu'il soit revenu en Judee pleurer 
encore et mourir sur les décombres de la cité de Daid, 
alors l'objet sans forme, sans bruit et sans voix de ses pre- 
mières et ineffables douleurs. 
On peut comparer .iérémie à Simonide, poële grec, si 
habile, dit-on, à remuer les cœurs, et dont les anciens fai- 
saient tant d'estime. Bien que de race sacerdotale, le 1ils 
inspiré d'Helcias, fut toujours odieux aux prêtres, à cause dg 
la sincérité de sa langue. Le fond de ses lugubres prédiclions, 
c'est la ruine prochaine de la cité de Da id, du temple, du 
trOne de Juda, et l'extermination des Juifs. La lamentahle 
voix du prophète portait le deuil dans Jérusalem, h laquelle 
elle ne prédisait que meurtre, pillage, dévastation, solitude, 
captif'ilW: aussi la masse de la nation juive le dtestait ; 
elle l'accusa même de tralfison. La protection et la uve. 
garde dont abucbodonosor, sur les ruines fumantes de Jé- 
rusalem, couvrir le prophète, confirmèrent dans cette opi- 
nion les malheureux Juifs. 
Dans son livre, il n'y a que la moitié qui soit rhythmée 
et poétique; le milieu est historique. 5Iais, dans les derniers 
chapitres, l'organe de ce voyant emprunte souvent de tre- 
quents clats de tonnerre h la harpe d'l sa ï e. On lui attribue 



JÉ[É]E 
l'admirable psaume cxxxvn, Stper flztrnina Eabylonis. 
Des cinq parties qui composent le livre de Jerémie (Sepher 
Irmeiahu), chacune est divisée en vingt-deux strophes ou 
périodes, marquées en téte des vingt-deux lettres de l'al- 
phabet hebraïque, Aleph, Eeth, Ghimel, Daleth... En- 
core aujourd'hui les Syriens, les Arabes et les Persans ont 
conservé cet usage seulement dans les sujets sentencieux et 
déconsus, pour faciliter la mémoire. Généralement ces 
périodes sont tortuCs en vers, bien que les massorètes 
(nom hébreu, qui signifie ddpositaires de la tradition) 
aient refusé d'accentuer poétiquement le livre de Jérëmie, 
ainsi que le Cantique des Cantilues , qu'ils relèguent dans 
la prose -- les Juifs sont de leur avis. 
Les Lamentations de Jérémie sont composées de cinq 
chapitres, les Prophdties de cinquante-deux. Les Lamenta- 
tions n'ont point été écrites à l'occasion de in mort de Josias, 
roi de Juda, comme quelques-uns le croient : le votant en 
fit une particulière sur la perte de ce saint roi, qu'une 
noble blessure reçue dans une bataille euleva à la Judee, 
mais elle n'est point parvenue jusqu'a nous : des pleurcuses, 
aux sons des ll0tes, en exhalaient d'une voix fente et plain- 
tire les lugubres périodes sur le corps inanimé de ce prince. 
C'est à tort que le Dalmate saint J éréme, éleve aux 
écoles de Borne, accuse de grossiereté le style des Lamen- 
tations; apprenti de trente-cinq ans d'née qu'il était dans 
l'idiome difficile des Juifs, il a peut-Cre voulu exprimer le 
décousu, l'abandon, la négligence apparente dans les mots, 
les phrases et les périodes du fils d'Helcias : alors il aurait 
signalé ainsi ce laisser-aller, cette incorrection, caractères 
auxquels on reconnalt bien vite la véritable douleur. 
De froids et sceptiques railleurs ont essayé de ridiculiser 
le sublime fils d'Helcias en forgeant le mot jrmiades pour 
:Icsigner les plaintes froides, ridicules et souvent intëressées 
qu'on entend souvent proférer par certaines personnes d'une 
intelligence et d'une instruction également bornées. Le spec- 
tacle terrible des vastes empires, des grandes cités, des 
peuples pdssants eflacës de la terre, et l'instabilité des 
ci|oses humaines, dont chacune des nations du globe est me- 
nacée, sont des sujets trop. graves et trop solennels, ce nous 
semble, pour qu'il puisse Cre de bon'got de les tourner en 
raillerie. Les Bomains, si crueis pourtant, eurent plus de res- 
pect pour la majesté dn malheur : une de leurs médaiiles, 
frappée après la ruine de Jérusalem par Titus, par un tou- 
chant souvenir représente cette cité déplorable sous la figure 
d'une femme abandonnée dans une solitude et pleurant sous 
un pImier. DE.r e-BAr, o. 
J ERICIlO  jadis une des villes les plus florissantes de 
la Palestine, à 8 k"Jomètres à l'ouest du Jourdain à 2 li- 
lomètres au nord-esz de Jérusalem, et séparée de cette cité 
par une contrée déserte et rocbeuse, touchait , l'ouest  
de hantes montagnes calcaires, et était située au centre d'une 
contrée bien arrosée, fertile en palmiers, en roses, en baume 
et en miel. Du cété du nord-est, elle était la clef du pays; 
aussi fut-elle la première qu'attaquërent les Israélites lors de 
la conquète de la terre de Canaan, sous Josue. Aprës sept 
tours de siége, elle fut prise et rasée. Elle fut de nouveau 
menacée au temps des Juges. Plus tard, le roi Acbab la 
fortifia. Il parait aussi qu'elle fut dans la suite le centre d'une 
école de prophètes. Hérode le Grand, qui en fit sa résidence 
et y mourut, l'embellit. Sous Yespasien elle fut encore une 
fois detruite, puis on la rebâtit sous Adrien. Au temps des 
croisades, elle eut à subir de nouvelles dévastation% et fut 
enfin compltement détruite. Un misérable village, licha, a 
pris a place. 
JEP, ICHO (Rose de), nom vulgaire de ranaMatica 
hieroch«ntica, de Linné, unique esptce du genre anas- 
tien, de la famille des crucitdres. C'est une plante grim- 
pante, dont la fleur, d'un parfum exquis, a une forme ad- 
mirable, et qui, lon la légende, sortit de terre dans le 
désert à rcndroit q,e la Vierge Marie to»cha du pied dans 
sa fuite. Elle fut prohablement transplant0e de Palestine en 
Europe au temps des croisades. 

-- JÉROME 09 
JÉOBOAM. Il y a eu deux rois d'Israel de ce non). 
JÉROBOAM I « (971 à 956 av. J.-C. ) était fils de 
bath, de la tribu d'Éphraim ; et dës le règne de Salomon, 
dont il était l'un des serviteurs, Ahin, un des prophètes qui 
étaient à la tte des mécontents, le désigna comme celui qui 
devait ètre un jour le chef des dix tribns ; aussi dut-il se ré- 
fugier en Égypte. Mais après la mort de Salon)on, Roboam, 
au lieu de safi»faire aux justes réclamation» des populations, 
ayant menacé de les opprin)er encore davantage, les dix 
tribus se séparèrent de lui, et Alutent Jéroboam pour roi, 
l'an 975 av. J -C. Jéroboam fortifia Sichem et Pnouel, et 
établit sa résidence dans la première de ces villes; mais plus 
tard il la transféra à Thirsa. Craignant de voir le peuple 
revenir à Roboan), ,Téroboam interdit les pèlerinages au 
temple de Jérusalem, qui était le grand centre de réunion des 
tribus, sous prétexte qu'ils étaient onereux pour le peuple; 
et il Ceva à Dan et/ Bcthel des sanctuaires particuliers, en 
ayant soin de faire exposer un veau d'or dans chacun de 
ces deux endroits. Les prétres et les lévites legitimes s'étant 
retirés dans le pays de Juda, Jéroboan) les ren)plaça dans 
le ser ice divin par des prétres choisis dans le peuple; acte 
hardi, qu'il accomplit malgré les sombres avertissements et 
les menaces des voyants. Il mourut en 
JEIïOBOAM II (825 à 78-I av. J.-C.), était fils et suc- 
cesseur de Joas ou Jehoas. Heureux dans ses guerres contre 
les Syriens, il agrandit le royaume d'Israel, et l'Aleva à un 
haut degré de prospérité. Mais comme il se rendit coupable 
du méme péché que Jëroboam 1 ¢«, les oyants Oe et Amo. 
lui prédirent que le royaume d'Israel serait détruit par les 
Assvriens. 
JÉIME (Saint). Hiero)zlrnus Sophrotius Euse- 
bius, naquit en 33t, ou, suivant d'autres, en 32, àStridon, 
sur les confins de la Daimatie et de la Pannonie. Eusèbe, 
son père, habitant riche et considéré de cette ville, ne tarda 
pas à remarquer en lui cette aptit,de précoce, ces disposi- 
tions sup¢.'rieures, qui devaient servir comme de prolego- 
reCes à l'apparition d'un des génies les plus admirables de 
rEglise. Ruine avait conservé le sceptre des sciences et des 
arts ; aussi est-ce là, sous le grammairien Donat, le méme 
auquel nous devons des comn)entaires estimés sur Virgile et 
Térence, que Jér0me aih se perfectionner dans retude des 
beiles-leltres. Certes à cette époque rien en lui ne lais- 
sait pressentir le docteur austère, ranacborëte exténué de 
masCations, dont la haute piëté devait provoquer un iour 
la vénération du monde chretien. Comme la plupart des 
natures excentriqnes, la sienne était impétuense, mobile; et 
Rome, avec le prestige encore debout de ses fétes mytholo- 
giques et toute la poésie de ses souvenirs, Bon)e, la sédui- 
sante pawnne, eut hient0t mis à nu tout ce que couvait de 
passions ce cœur de jeune hon)me, si énergique dans sa 
brute virginité; mais rheure vint enfin du triomphe de la 
vërité sur l'erreur. 
JérOme se sentit épris d'une vive sympathie pour la reli- 
gion du Christ, et les catacombes ainsi que les ton)beaux 
des martyrs servirent de premier aliment à sa piCé. Des 
voyages dans les Gaules et dans les contrées du Rhin le 
mirent en rapport avec plusieurs docteurs de l'Église chré- 
tienne, et de retour à Ruine vers 36O il y embrassa le chris- 
tianisme. Aprës un assez long séjour à Aquiiée, il aila en 
373 à Antioche de Syrie, où se décida sa vocation pour la 
vie ascétique, et il s'enfonça dans le désert de la Syrie. Là, 
dans cette br«lante solitude, isolé de tout gtre vivant, le 
corps déchiré par la discipline et la haire, au milieu de jours 
sans repos et de nuits sans sommeil, ab|mWdans les larmes, 
les je0nes, les prières, il se préparait à q,itter sa dépouille 
mortelle; mais le ciel n'avait pas j»gé son expiation suffi- 
sante, quelque terrible qu'elle 1ét. Respecté par les lions 
du alAsert, le pieux anachorète dut quatre ans après céder 
aux hainenses persdoutions de quelques moines qui venaient 
l'interrompre au milieu des exercices de sa pénitancc, en le 
traitant de sahcilien et d'hérétiqne. 
11 se rcn,lit alors h Jérnsalcm, puis à Antio.he o oi il fut 
77 



levé au sacerdoce par Paulin, évêque de cette ville. Le 
desir de se lier avec saint Grcgoire de Nazianze l'ayant aussi 
appelé, vers 3SI, à Constantinople, il y séjourna q,,elque 
temps, et revint ì Borne en qvalité de secrétaire du pape 
Damase. De nouvelles persécutions l'y attendaient. Les co,- 
ersious ilh,stres, opérées par la puissance de sa parole ameu- 
terent contre lui la tourbe des mPdiocrités jalouses. Ac- 
cusé de liaisons criminelles avec quelq*mes dames romaines 
qu'il instruisait danslessaintesËcritures, parmi Iquelles on 
cite notamment Marcella et Paula, qu'ont rendues célèbres 
leurs spirituelles lettres thëoloques, Jéréme, aprës avoir 
confondu ses calomniateurs, se refugia, en 386, à Bethléem, 
oin l'accompagna Paula, qui consacra sa fortune a construire 
dans cette ville un monastère, off il mourut, le 30 septem- 
bre ,20. 
Saint Jéréme éerivit le premier contre Pélage, et terrassa 
Vigilance et Jo,'inien; il eut tu outre quelques démêlés 
aec saint Augustin, et combattit, au sujet des origPnistes, 
Jean de Jcr,lsalm et Buffm, autrefois son ami i,time. Dans 
cette quere|le et dans plusieurs autres, on lui reproche 
d'avoir traité ses adversaires avec emportement et hauteur : 
a cela nous répondrons qu'il était homme avant dëtre 
saint, et que d'ailleurs un excès de temperament ne lut 
jamais une erreur de conscience. Aucun père de l'Eglise 
n'égala saint Jerén.e dans la connaissance de l'hébreu et du 
chaldéen, ni pour la variete de l'érudition. Son style pur, 
ciCant, quelquefois fipre et brutal, est toujours étincelant 
de verve, et souvent de beautés sublimes. 0uant a la vigueur 
de sa dialectique, les luttes nombreuses qu'il eut à soutenir 
contre les bere»iarques de son siècle sot là pour en témoi- 
gner. 
Ses principaux ouvrages sont une version latine de l'Ecri- 
Cure sur le texte hébreu, declarée authentique sous le nom 
de l'ulga te; des traités polémiques contre Helvi,lius, 
Vigilance, Jovinien, Pélae, R ullin et les partisans d'Off- 
gène ; des lettres contenant la vie de plusieurs solitaires ; des 
rëflexions murales et des disent,tons critiques sur la Bible. 
De toutes les e&tion» quon a faites de ces diverses oeuvres, 
la meilleure et la plus complëte est celle que dura Marianay, 
benídictin de la Congrégation de Saint-_Maur, a publiee 
en 5 olutoes in-loi., depuis 1693 In,qu'en 1706. 
Charles Dt;POlV_. 
JÉB.(î)ME DE PBAGUE, le fidèle compagnon de Jean 
Huss, qu'il surpassait encore en sa,oir et en eloquence, 
mais doué de moins de m,deration et de prudence, desceu- 
riait de la famille de Faul, lisch, et naquit à Prague. Après 
avoir successivement ctudié aux universite- de sa ville na- 
tale, de Paris, de Cologne, d'Oxfurd et de Heidelberg, il 
ht reçu en t399 maitre es arL et bachelier en théologie. La 
renommée de son savoir était si grande, qu'en 1410 le roi 
Ladislas Il de Pologne le consulta sur Forganisation/t donner 
h l'université de Cracovie, et que le roi de IIongrie Sigismond 
e fit prcber devant lui a Ofen. Les doctrines de Wiclel, quïl 
embrassa alors, lui vab,rent de la part del'université de 
,ienne une courle detention, a laquelle l'intervention de l'u- 
niversité de Prague mit un terme. Jer6me prit part ensuile 
avec une ardeur extrème à la lutte engagée a Prague par son 
ami Huss contre les abus existants dans l'Église et l'immo- 
ralité du clergé. Mais il alla trop loin, éidemment, en Iou- 
lant publiquement aux pieds les reliques de,; saints, en faisant 
jeter en prison et mëme no}er dans la Moldau les moines 
qui ne pensaient pas comme lui. En 1411 il brtla publi- 
quement la huile qui ordonnait la croisade contre le roi La- 
dislas de Naples et de Hongrie, ainsi que les indulgences 
émanant du pape. Quand H«s lut arrèté/t Constance, Jè- 
t6me ac¢ourut le defendre. Mais entame il ne recevait pas 
de répote atis|aisante au sujet d'un sauf-conduit que de 
h= ltite ville dUberlinden fi a'ait tait demander au con- 
cile, ;.1 se disposait à s'en retourner  Prague, lorsque, au 
,nois d'avril 1,15. avant m(me l'expiration du éclat fixé 
par le concile, le duc de Snlzbach le fit arr¢:ter charger de 
chalnes et conduire à Constant.c. Emprisonn dans cette 

JÉROME -- JÉIOME BONAPAITE ville et soumis  un interrogatoire, cet homme au caracte 
si emporté faiblit; ì la vue du supplice de son martre, 
il  rétracte, et souscrit aux déeisions des père ( 3 sep- 
tembre ! 4 ! 5). Malgré cet acte humiliatrt, il est reconduit en pri- 
son. etbien que G e r s 0 n intervienne pour qu'on tiennela pro- 
raee solennelle qui lui a étWfaite de le remettre en libertb, 
aprës trois cent quarante jours de cachot, il se oit encore 
une fois tra|në devant le conrile. A la sPanee solennelle du 
6 mai 1416, il déclare que la crainte dt bcher I'a fait tomber 
daus un grand crime, cebfi de rétracter sa doctrine, mais 
qu'il est bien résolu maintenant de professer jnsqu' la mort 
les doctrines de Jean Huss et de ,VicleL ForeWde s'expli- 
quer sur les erreurs qu'on lui reproche, il répond à tout 
la même liberté d'esprit que s'il se ft agi d'une simple dis- 
cussion scolastique san« conquence. Il combat ses adver- 
sairos a,ec l'arme de lironie, et plus d'une fois, dans une 
circonstance aussi grave, il tait rire aux dëpens de ses eu- 
nemis. C'est en chantant des cantiques et en récitant l'acte 
de confession apostolique que. le a0 mai 1416, Jér6me 
monta sur le bficher aux mE'mes lieux où, onze mois aupa- 
ravant, son anti avait subi son jugement. Dans l'espoir d'a- 
néantir ainsi à jamais sa mémoire, on jeta ses cendres 
dans le Rhin. Le courage avec lequel il mourut avait moins 
de simplicite que la résignation de Jean H,tss : « II tenait 
quelque chose de la parade des anciens slomiens, ,, dit 
Schoell dans son Histoire oderne. Parmi les mots de 
rome de Prague qu'on a couservés, il en est un devenu 
fameux. Placé sur le bficher et attaché au poteau, il vit un 
paysan qui, dans son zèle religieux, apportait du bois pour 
augmenter le feu : • O sainte simplicité, s'ecria-t-il, c'est pé- 
cher mille fois que de te tromper! » Un écrivain dont le tè- 
moignage ne saurait gtre suspect, le Florentin Pogge, qu.i 
fut quarante ans secrétaire de la cour de Ruine, a dit : 
« J'ai etA temoin oculaire de cette tragédie, et feu ai vu 
tous les actes. Je ne sais si c'est l'obstination ou l'incrédulité 
qui le faisait agir, mais vous eussiez cru voir la mort de 
quelqu'un des philosophes de l'antiquité. Mucius Scevola mit 
la main sur le brasier, Sucrate prit le poison avec moins 
de courage et d'intrépidité. ,, 
JËl(î)MEBO.X&PAIATEç prince français, le plus 
)eune des Irères de N a p pi é o n, né a Ajaccio, le t 5 décembre 
t4, nuira dans la marine aprës avoir fait ses Arudes 
Juilly. Lieutenant de fregate en 1801, il reçut le comman- 
dement de la corvette L'Epervier, et partit, sous les ordres 
du général Leclerc, son beau-frre, pour l'exp6dition de 
Saint-Domingue. Au mois de mars de l'année suivante, il 
revint en France, porteur des dépêches qui annonçaient l'heu- 
reux débarquement de l'at'mée expéditionnaire et la prise 
ducap Français. Apr un court sejour à Brest, il appareilla 
pour la Martinique, off il apprit la reprise des hostililés avec 
i'Angleterre, et fut chargé Mots d'aller croiser sur le littoral 
des Etats-Unis pour $ donner la chasse attx Imltiments de 
commerce anglais. Pendant une relâche à New-York, le 
jeune et brillant officier lut accueilli et fgté partout aec em- 
pressement, tant dans cette ville qu'à Philadelphie et à Bal- 
timore, off il eut occasion de rencontrer dans le monde miss 
Paterson, lille d'un riche planteur des environs de la der- 
nière de ces villes, qui réunissait une beauté mer*eilleuse 
a de remarquables talents. Une passion mutuelle enflamma 
bientOt les deux jeunes gens. Le marquis de Casa-lrugo, 
envoyé d'Espagne aux Etals-Unis, se chargea de demander 
pour notre lieutenant de frégate, géé alors de dix-neuf ans 
au plus, la maiu de la belle Americaine. Le congul de France 
à Baltimore signa au contrat ; et ce fut le premier évêque 
catholiquo qu'il y ait eu aux Eats-Unis, l'abbé Caroll, çlui 
celébra la ceremonie nuptiale, donnée aux deux fipoux le 
-i dêcembre ! 803. 
Après avoir residê pendant plus d'un an aux Eats-Unis, 
Jér6me Bonaparte, qui espérait toujours faire reconnaltre 
son mariage par son frère, le pnier cons,,I, passdep,tis 
pe,t empcret,r des Français et roi d'ltalle, e dëcida a partir 
pour FEurope ; et ai, printcm de 1805 il s'embarqua avec 



JEROME BONAPARTE  JÉRUSALEM 
sa jeune femme sur le navire amëricain Erin. Ayant relché 
à Lisbonne au mois de mai, Jéréme partit aussilOt en poste 
pour Paris, afin de se jusfifier auprës de son frère. lais à 
la première nouvelle qu'il avait reç,Je de ce mariage, Na- 
polëon, se prévalant de l'état de minorité de son frère, 
avait fait casser une union radicalement nulle, puisqu'elle 
avait été contractée sans autorisation préalable; et les sup- 
plications de JérOme, qui adorait sa femme, ne purent ja- 
mais fléchir l'empereur. De Lisbonne l'Erin avait fait voile 
pour Amsterdam, où le jeune époux promeltait de venir 
chercher sa femme dès qu'il aurait fait sa paix avec son 
frère alné. Mais quand ce navire arriva au Texel, .I e Jé- 
rOme Bonaparte y apprit que les ordres les plus scvères, 
venus directement de Paris, s'opposaient a ce qu'on la 
aisst mettre le pied surle continent. L'Erin d,tt appareil- 
ler immédiatement et se rendre en Angleterre avec son in- 
téressaute voyageuse, qui s'élablit a Camberwell, près 
de Londres; et un mois après, le 7 juillet 1805, elle y donna 
le jour à un fils, Jeréme apoleon Bonaparte, dont le 
fils, Jéréme, né en 183, après avoir renoncé en 1853  sa 
qualite de citoyen amérioain, a été nomme à un emploi de 
sous-lieutenant alors vacant dans un des regiments de notre 
armée. 
Jér0me Bonaparte, qui longtemps après que cette union 
eut été brisée, mdissait encore l'implacable politique de 
son frère, rencontra apolëon à Gènes; il y fut cbargé 
d'aller réclamer du dey d'Alger deux cent cinquante Génois 
qu'il retenait en esclavage. Un succè complet couronna cette 
mission. Promu à cette époque capitaine de vaisseau, il 
n'attendit pas longtemps le grade de contre-amiral ; mai» il 
cessa bientôt den remplir les fonctions, pour aller com- 
mander un corps de Bavarois et de V-urtembergeois, à la 
tte duquel fl envaldt la $ilésie. Le 14 mars 1807 il passait 
général de division. 
Après la conclusion du traité de paix de Tilsilt, il épousa 
la fille da roi de Wurtemberg, et a cette occasion son frère 
lui constitua en dot le royaume de Weslphalie, de créalion 
récente. Jer6me a marqué son règne dans ce pays par la 
fondalion de plusieurs elablissements utiles, dont il puisa 
l'idèe en France. Il lit tout le bien que pouvait faire nn roi 
condamné  n'êlre jamais qu'un prélet couronné. Lors de la 
campagne de Russie, 5apolon lui confia le commandement 
d'une division ; mais le jeune sous erain, qui possédait plulét 
la bravoure du soldat que les talents et surlout la pru- 
dence nécessaires  un genéral, se laissa mallseureusement 
surprendre à Smolensk. Cet échec subit au debut de la 
campagne irrita virement contre lui apoléon, qui lui enleva 
aussitét sou commandement et le renvoya à Cassel. En 1813, 
quand se Iorma la coalition européenne, Jéréme se vit, lui 
aussi, dans la necessité d'évacuer l'Allemage. Heureu- 
sement, la perte de ses grandeurs ne lui co0ta pas l'amour 
de sa femme ni même l'affection du roi son beau-père. 
En 1814 les deux époux se réfugièrent eu Wurtemberg, 
qu'ils quittèrent bientét pour aller s'établir en Italie, à 
Trieste. L'événement du 20 mars les ramena en France, et 
Jér6me prit alors place ì la chambre des pairs en qualité 
de prince français. Quand apolèon partit pour sa glorieuse 
campagne, il l'emmena avec lui à l'armée, et lui confia un 
commandement important. Jér6me cette lois se munira 
digne d'un tel choix, en combattant avec courage jusqu'au 
dernier moment. Après le grand désastre de Waterioo, il 
alla rejoindre a femme, qui l'attendait dans le Wurtemberg; 
et en 1816 son beau-pèe, en lui donuaut dans son 
royaume un magnifique chtteau pour habitation, lui conféra 
le titre de prince de Mont/re't. 
Il est devenu veuf en 1835 desa femme la princesse Ca- 
therine de Wurtemberg, de laquelle il a eu deux enfants : 
Mathilde-Loelitia.Wilhelmine, ée le 17 mai 1820, marie 
en 181 au comte Anatole Demidoff; lapoléon-Joseph- 
Charles-Paul, né le 9 septembre 1822, aujourd'hui prince 
français et général de division. 
Le grince -Jéréme Bonaparte négociait avec le gouverne- 

611 
ment de l'élu des barricades sa réintégration dans ses droits 
de citoyen français quand la révolution de 
tre ì néant les arrts de proscription portés en 1815 contre 
la famille de Napoléon. L'un des premiers acles de Louis- 
l apolíon, son neveu, en arrivant h la prësidence de la ré- 
publique, fut de le nommer maréchal de France, puis gou- 
verneur des Invalides. 11 remplissait encore ces fonctions 
lors du coup d'Eatdu 2 décembre 1851,  la suile du- 
quel il fut appelê à la présidence du séuat. Mais il ne 
garda pas longtemps cette dignité, incompatible avec le tilre 
de prince français, que la constitution de l'empire lui a 
rendt. 
JÉBONYMITES. Voye'- 
JERBOLD (Doc«s), humoriste et dramalurge anglais, 
est né en 1805, à Sheerness,près de Rochester. Son père 
était directeur de la troupe de comédiens qui exploitait cette 
ville; aussi fut-il dès son berceau initi,. à Iout ce qui se 
rapporte à la scène. Une vocation déterminée pour la vie 
du marin lui fit d'abord prendre du service en qualite 
de nidshiprnan à bord d'un vaisseau de ligne; mai re- 
venu bientl de ses illusions premières, il renonça h cetle 
carrière, et s'en vint a Londres avec le ferme dessein de s'y 
faire une pus;tion comme écrivain. Ses premiers essais pas- 
sèrent inaperçus; et il eut longtemps à lutter contre le be- 
soin, sans perdre pour cela courage. Efin, son drame 
The lent Day, tableau de la vie ordinaire tracé de main 
de maltre, lui valut les faveursde la I,»uie; et dès lors il 
fut l'un des auteurs en possession de fournir aux grands 
et petits tlié',ttres de Londres leurs pies larmoyanles ou 
comiques. Lors de la fondation du journal satirique Punch, 
Jerrold prit une part des plus actives a sa rédaction ; et il ne 
contribua pas peu au succès de celle feuille, dont bientOt le 
tirage attcignit 70,000 exemplaires. C'est dans le Punch 
que furent publiées d'abord ses Candle Lectures et sa Story 
ofa Feather. 11 fut en outre chargé de la rédaction de l'II- 
lustrated Maga'-ine, oo il publia ses Chromcles qf Clover- 
nook, l'un de ses meilleurs ouvrages. Après la mort de ce 
journal, il en fonda un à lui, sous le titre de Douglas Jer- 
rold's shilling Mana-.ine, dans lequel il lit paraitre, entre 
autres, la nouvelle intitulee : Saint Giles'sand saint James's. 
Les journaux curent également les prémisses de ses Men 
of Character( 3 vol., 1838 ci des Punch's Letters tu 
son. Cela ne l'empècbait pas de continuer à écrire en mme 
temps pour le thcàtre ; et parnfi ses pièces, Ioules accueillies 
avec le plus grand succès, on peut citer comme ayant une 
valeur reelle celles qui sont intitulées : Time Wor Won- 
ders ; The Bubble of the day ; et tetired Jrom business 
(t851. Depuis 1852 il est devenu le rédacteur en chef d'un 
• journal politique, le Lloyd's WeeMy London ,Yewspaper. 
Jerrold, toutes les fois qu'il le peut, vienl généreusement en 
aide ì ceux de ses collegues qui sont ries sous une moins 
heureuse Cotie ; et il a pris une part des plus actives à la 
tondation de la Literary Guild, leurre de Bu I er et de 
Dickens. 
JEBSEY. Voye: ILES onMAnEs. 
JÉIUSA.LE  la célèbre capitale des rois de Judée, 
et en celle qualité le grand centre d'unite politique de la 
nation juive, de même que par son lemple elle ctail le centre 
de son unilé religieuse, n'et plus aujourd'hui qu'une ville 
aussi mal qu irréulièrement construite sur les ruines de son 
ancienne magnificence. Jadis dépendance du pachalik de 
Damas, elle est devenue elle-mème depuis 180 la residence 
d'un pacha, et compte une population d'emiron 2,000 ha- 
bitants, dont plus de la moitiê sont mahométans, 7,500 ap- 
parliennent à la reliou chrétienne, et 3,500 pofcssent le 
judaïsme. Les Mahom,.tans ne la tiennent pas en moindre 
vénération que les juifs et les chrétiens. Les Turcs lui don- 
nent le nom de Kodsi-Schrif, et les Arabes celui d'El- 
Kods, qui veut dire Fa Sainle. Elle est située sur une hau- 
teur encaissée à l'est, au sud et ì l'ouest par de profondes 
valises, et entourée de belles murailles garnies de tours. A 
77. 



riutereiur, avec ses res étroiles, le plus souvent sales et 
iuloetes, dont un petit nombre seulement sont pavëes, avec 
ses maisons pour la pupaft basses et irrëgulières, surmon- 
tées de toits plats et parfois de coupole, elle offre en gé- 
néral un aspect aussi misérable qu'attristaut. En revanche, 
une foule de précieux souvenirs s'y rattachent, rappelés 
tantôt par des lieux, tant6t par des édifices imposants, que 
les pèlerins ne manquent jamais d'aller visiter. Sur l'em- 
placement du clèbre tesuple de Salomon, reconstruit par 
Séroubabel après l'exil de Babylone, puis partiellement 
modifié et agrandi par Hérode le Grand, s'élève la mag, mi- 
tique mosquée du khalife Omar, désignée d'ordinaire avec 
oes alentours sous le nom d'Et Haram, et dont l'lutCieur, 
orné avec une magnilicence extréme, renferme la pierre 
noire qui servi/, dit-on, d'oreiller  Jacob, et d'escabeau 
blahomet pour monter au ciel. L'église du Saint-SWpul- 
ere, qui renferme aussileGolgothaouCalv a i r e, construite 
dans les premières années du qualrième siècle par H c I ë n e, 
mère de Constantin le Grand, dctruite de fond en comble 
au commencement du onziëme siècle par le l, halife égyptien 
llakm, reconslruite sous le règne de son successeur, ra- 
xagée par l'incendie en t$0$, reconstruite alors encore une 
fois, mais dans un plus mauvais style, renferme les lieu« 
sanctifiés par la Passion de Jésus-Christ, ordinaire- 
ment désiguoes sous le nom de lietx saiuts. Ce n'est que la 
veille de Pàques que l'accès de l'église du Saint-Sépulcre est 
gratuit; dans tout le reste de l'année, on n'y entre qu'en 
acquittant une redevance assez élevee. Le» Francs sont 
propriétaires de I'6glise du Saint-Sauveur, dans le couvent 
des I-'rauciscains, oi. les Européens chrétiens de toutes con- 
fessions trouvent un accueil hospitalier. Le grand couvent 
grec sert de demeure ì la presque totalité des prêtres grecs ; 
et outre l'église de cé couvent, les Grecs ont encore treize 
autres èglises à Jérusalem. C'est lb aussi que réside depuis 
1845 le chef aclueI del']glise gecque, le patriarche de Jé- 
rusalem, «lui auparavant habitait Contantinople. Un cou- 
vent armenien, construit sur la monlagne de Sion, passe 
pour le plus riche qu'il y ait en Orient ; un autre couvent 
arménien, celui qui est sihé près de la prison de Jésus- 
Christ, occupe, dit-on, remplacement mème de la maison 
de Caq,he. Les cbrétiens copies, ab'.-siniens et s}'riaques ont 
aussi «les couvents et des lieux de réunion, non loin de l'é- 
glise du Saint-Sèpulcre. Un chemin riche en souvenirs, 
lon d'environ 1,000 mèlres, et dit Chemin de la Crabe, ou 
encore Via dolorosa, conduit de la Porte Saint-Êtie,ne, 
l'est, au Calvaire. La ville a sept porles, dont l'une reste 
[oojours murèe, parce que, suivant une ancienne tradition 
musulmane, c'est par la que les cheCiens feront un jour 
leur entrée triomphale dans .1érusalem. La ville ne manque 
pas d'eau, bien que toutes les sources, telles que Siloab, la 
fontaine de Marie, etc., soient aujourd'hui situées en dehors 
de son enceinle. A l'intérieur on trouse quelques bains, 
rëtang des Patriarches (étang d'HisMas) et de l'eau de 
source dans rEI Haram ; il existe en otre dans les cours des 
maisons un grand nombre de citernes oi] l'on recueille l'eau 
des pluies. La principale ressource de la grande majorité des 
habitants consis[e dans la veule de reliques, d'amuletles, 
de crucifix, de cbapelets, oic., etc., à l'usage des pèlerins. 
Lors de l'etrée des lsraélites dans la terre de Canaan, 
sous les ordres de Josué, s'ets l'an 1500 av. Jésus-Christ 
cette ville s'appelait Jdbus; et ses l,abitanls, les 
grâce ì la forleresse qu'ils avaient construite sur la monta- 
gne de Sion, s'en maintinrent en possession jusqu'au mo- 
ment où David s'en rendit maître et ' transféra sa rési- 
dence qui jusque alorsavait èté à Hébro. Il lui donna le nom 
de ville de David. La construction du temple par Salomon 
en fit la ville de Dieu, la v('ritable J¢rusalêm, c'est-à-dire 
la demeure de la paix. Salomon l'agrandit beaucoup en cons- 
truisant son temple sur le Moria, montagne située à l'est 
de Sion, dont la s,'pare le T#ropoeon ( c'est-ì-dire VaIle des 
Faiseurs de fromages); en outre, il l'embellit en «'y btissant 
nn palais, et la fortifia. Quoique son systëme de fféfense e0t 

JÉBUSALEM 
encore été étendu par quelques rois postCieurs, tels que 
Usias, Jotbam, Hiskias et Manassé, elle ne put jamais r$- 
sister aux attaques dont elle fut l'obj-et. En l'an .588 avant 
J.-C., ff a b u c Il o d o n o s o r la prit d'assaut et la detruisit; 
mais au retour de l'exil, à partir de l'an 536 avant J.-C., 
elle se releva de ses ruines. Par la suite, elle fut succes- 
sivement prise, en l'an 30 avant J.-C. par le roi d'- 
gypte Ptolémée Lagus ; en l'an 161  par le Syrien Antiochus 
Épipbane ; en l'an 64, par Ponpée, et enfin détruite par 
Titus, en l'an 70 de l'ëre chrétienne. C'est seulement à partir 
de cette époque qu'on trouve dans l'historien juif .Iosèphe 
des renseignements exacts sur l'emplacement qu'elle oc- 
cupait et sur ses édifices. ltie sur quatre montagnes, 
Sion, Acra, Moria et Bésetba ; elle se composait de la ville 
haute, avec la citadelle de Sion; de la ville basse, au nord 
de Sion et de Moria, sur le mont Acra; et de laville neuve, 
située encore plu au nord. A l'angle nord-ouest du mont 
Moria, où était situé le temple, Jean Hyrcan avait construit 
une citadelle appelee Baris, qu'Hérude embellit et fortifia 
encore davantage, et dont en l'honneur de Marc-An[oine il 
changea le nom en cehd d'Ato[a. De cette citadelle on 
arriait au temple par des eutr(_'es particulières ; ses angles 
étaient flanqués de tours, et elle était continuellement oc- 
cupée par une arison romaine. En tait d'édifices remar- 
quables, il faut encore citer le superbe palais de marbre 
d'Herode, qui était situé an nord de la xille I,aute et en- 
touré d'une muraille de trente coudees d'élévation. A l'angle 
oriental de la xiIIe I,aute on trouvait la vasle place Xystus, 
entourëe de portiques et communiquant avec le temple par un 
pont. Des jardins, des maisons de campagne, des ëtangs et 
des cimetières occupaient les environs immédiats de Jéru- 
salera, dont, versl'an 133 de notre ère, l'empereur Adrien fit 
une ville Ioote pmenne. Il prétendit en anéanlir jusqu'au nom 
méme, en elablissant aux lieux où elle s'Cevait naguère une 
colonie romaine avec un temple consacré ì Jupiler, dans 
lequel il était défendu aux Juifs de pénétrer, sous peine de 
mort. Au commencement du quatrième siècle, Constantin le 
Grand et sa mère Hél'ne refirent de Jérusalem une ville 
cl,relienne; et la tra,]ition veut qu'une éruption de feu 
souterrain ait empécl,é plus tard l'empereur J u I i e n d'y ré- 
tablir le temple des Juifs. Jérusalem demeura alors sous la 
souveraineté des empereurs de Byzance, jusqu'au moment 
où le roi de Perse Co.roès II s'en rendit maltre (an de notre 
ère 61z). Quatorze années plus tard, en 628, la ville 
encore restituée, il est vrai, à l'empereur Héraclius ; mais 
dës 637 les Arabes, commandes par leur khalife Omar, 
s'en emparaient ; et de leurs mains elle passa en 1077, sous 
la domination des Turcomans. 
Mus par un soutinrent de cupiditë, les Turcomans auto- 
risèrent, il est vrai, les pèlerinages aux lieux saints. Mais 
révolté par les avanies de tous ge=res qu'on lui faisait sup- 
porter, l'esprit relieux provoqua bient6t le mouvement des 
croisades, qui eut pourrésultat :a création d'un rottaume 
chr#tiet de Jcrualêm. Lors de la première croisade, Go- 
defroid de Bouillon ayant pris d'aaut Jérusalem, le 15 
juillet 1099, en fut le premier proclamé roi (titre qu'il ne 
porta cependant jamais ); et il fit de cette ille la capitale et 
le centre d'un nouveau royaume, qui à l'origine ne compre- 
nait que les anciennes provinces israëlites de Judëe, de 
Samarie, et de Galilëe, mais qui ì l'époque de sa plus gande 
prospérité, vers le milieu du douzième siècle, était borné à 
l'ouest par la Méditerranée, au nord par le comté de Tripoli, 
à l'est par le pays de Damas et par le désert de Syrie, et 
au sud par l'Arable pétrée. Indépendamment de ces territoi- 
res immédiats, il comprenait encore quelques pays cbrétiens 
xoisins, placés à son égard dans des rapports de vasselage 
nolamment la principauté d'Antioche, le comté de T ri- 
p o I i et le comté d'Ë desse. 
Godeiroid de Bouillon e,t pour.successeur son plus jeune 
frère » Baudouin l « ( t t00-t I t$ ), qui agrandit considéra- 
blement ses États et prit le premier le ri(re de roi de Jé- 
rusalem. audouin Il, cousin du précédent, et qui lui suc- 



JÉRUSALEM 
¢éda ( 1118.1131 ), trouva de puissa»ts appuis, au milieu des 
luttes acarnéesqu'il eut à soutenir contre les Sarrasins, dans 
l'ordre des Templiers et dans celui des chevaliers de Saint- 
Jean de Jérusalem, qui jetèrent l'un et l'autre un viféclat 
sous son règne. Le gendre et successeur de Baudouin II, le 
comte Foulques d'Anjou (tt3t-tt42), réussit à maintenir 
dansla dépendance de sacouronne les États feudataires, qui 
dej aspiraiint  s'en alfrancidr. Son fils aine Baudouin tll 
(|t43-It62) parvint au mème résultat, rencontra dans 
son beau-père, Pempereur grec Manuel, un allié puissat 
pour combattre ses ennemis, tant extélieurs qu'intérieurs, 
et consofida son royaume en complétant, d'après le modèle 
de Etats européens, l'organisation que lui avait donnée le 
fondateur de la monarchie. Iiéanmoins, la décadence du 
royaume de Jérusalem commença déj sous le règne de son 
frère, qui fut aussi son successeur, Amaury l "r, morten 1173. 
L'usurpateur Gui de L u s i g n a n, prince faible, qui ne put 
résister  l'énergique sultan S a I ad i n, conduisit la monar- 
d,ie sur le bord de Pablme. Saladht prit d'assaut Jerusale=n, 
en t 180, et rasa ses murailles. En t tgo, le roi Gui Changea 
encore assez  temps sa vacillante couronne conlre celle 
du royaume de Chypre, que luteCa Richard Cœur de Lion; 
et celui-ci ccda le royaume de Jérusalem, reduit d ne plus 
être qu'un royaume nominal, dont toutes les possessions se 
bornaient à la ville de Tyr, à Henri de Cbantpagne, qua- 
trième époux d'£1isabeth, fille du roi Amaury tel Mais ni 
/enri, qui mourut en 1196, ni ses successeurs Amaury II 
de Cbypre et Jean de Brie n n e, ne réussirent  récuperer 
les territoires conquis par les infidèles. Par son mariage avec 
Iolande, fille de ce dernier, mariage que la maison royale 
de Chypre fit tout pour contrarier, l'empereur Fréderic 11 
acquit des pretentions  la couronne de Jerusalem; etlors 
de la quatrième croisade, qui eut lieu en 19.29, il réu»sit ef- 
fectivement  s'emparer de la ville sainte ; mais les infi- 
dèles la reprirent en 1244, et depuis lors ils l'ont toujours 
conservée. Le dernier débris des possessions européennes 
en Palestine, P t o t í m a i s, tomha au pouvoir des Sarrasins 
en 1292. Cependant, ì partir de Fréderic Il, les empereurs 
d'Allemagne et les dues de Lorraine n'en continuërent pas 
moins, en raison de leurs prétendus droits d'l,írídité à 
prendre le titre de rois de J¢rusalem. Il en fut de mème 
des rois de Sardaigne, comme bíritiers de Gui de Lusignan. 
Tout rêcemment encore l'empereur d'Autriclte, en sa qualitë 
de représentant de la maison de Lorraine, a ajouté cette 
qualification ì l'interminable kyrielle de ses titres. 
En 1382 les mameluucks circassiens enlevèrent Jérusalem 
aux Sarrasins. En t517 le sultan turc Sélim ]er en fit la 
conquête; et c'est le fils et successeur de ce prince, Soli- 
man 1|, qui, en 153, entoura la ville de la muraille qui 
subsiste encore aujourd'hui. Jerusalem demeura alors au 
pouvoir de la Porte jnsqu'en 1833, époque /, de mème 
que la Syrie, elle tomba au pouvoir de Méhímet-Aii, pacha 
d'Epte. Celui-ci la conserva jusqn'en 1840; mais alors 
les trois grandes puissances, i'Angleterre, lAutriche et la 
Bussie la replacèrent sous i'autorité du sultan. En 1841 
l'Angleterre, en cela d'accord avec la Prusse, érigea un évè- 
ché protestant à Jérusalem, dont le premier titulaire, dé- 
signé par elle, fut l'Anglais Michel Salomon Alex(zndre; le 
second érCue, qui a été dësigné par la Prusse, fut Samuel 
Gobat, titulaire actuel. Consultez Chateaubriand, ltinoe- 
r(zire de P(zris à Jdrusalern; Lamartine, Vug(zge en 
Orient; Williams, The Holy City (Londres, 189); Wilson, 
The Lands of the Bible (1847). 
III y a des lieux sur la terre qui semblent avoir leurs 
destinées : comme certains honunes, ils semblent marquds 
du sceau d'une glorieuse fatalité. Ce sont lessites où se sont 
accomplies quelques-unes des grandes pllases de rhuma- 
nité. Le drame inaugure la scène, el quand les merveilleux 
personnages ont disparu, l'imagination, qui cherche long- 
temps leur trace ou leur ombre, s'attache aux lieux qu'ils 
ont habités, les visite, les décrit,les raconte, quelquelois les 
consacre, et ramène sans cesse la pensée des générations 

613 
sur tout ce qui reste des plus grandes choses humaines après 
quelques siècles; un monticule, comme à Truie; un débris 
de temple, comme à Athènes; un tombeau, comme à Jé- 
rusalem. Mais s'il est donné à la poésie et à l'histoir d'il- 
lustrer un site, il n'est donné qu'a la religion de le sancti- 
fier. Quelque curieux de la gloire ou des arts s'embarque de 
temps en temps pour aller mesurer le temple vide de Thésée, 
les gigautesques ruines de Palmyre, ou conjecturer le palais 
de Priam et le tombeau d'Acbille, sur les collines de Per- 
gaine,  la lueur des feux des bergers de l'lda. Dïnnom- 
brables caravanes de pèlering traversent chaque printemps 
les flots de la mer de Syrie, ou les déserts de l'Asie Mi- 
neure, pour venir s'agenouiller un instant dans la poussière 
de Jérusalem et emporter un morceau de cette terre ou de 
ce rocher dont leur foi religieuse a fait l'autel du genre hu- 
main régënèré. Le nom mème de Jérusalem n'est pas pro- 
noueWpar eux comme un nom u]gaire. Quelque chose de 
pieux et de tendre pénètre leur accent quand ils le nomment; 
ils inclinent la tëte à ce nom : on sent que ce mot est plein 
pour eux des souvenirs, de retentissentents, de mystères. 
On comprend que Jérusalem est en quelque sorte la pa- 
trie commuue de leurs mes. Ils le prononcent comme on 
prononce dans l'exil le nom de la patrie. Pour ceux mme 
h qui la foi manque, Jérusalem est encore une foi de leur 
imagination : leur mère leur en a tant parlé[ ils ont tant 
entendu éclater le nom sonore de Sioh dans les bymnes de 
leur culte natal, sous les routes de leurs cathédrales, au 
fracas des cloches, aux fumêes ondoyantes de l'encens, que 
cette ille s'élève toujours radieuse dan leur memoire 
d'hommes laits I 
Sort du sc des déserts, brillante de clarté. 
On n'échappe pas par lacritiquela plus froide, à ce prestige 
des souveuirs de la jeunesse : involontairement on attache 
de la pensée et de la gloire  ce site; car la gloire n'est autre 
chose qu'un nom souvent répéte. Ce double sentiment m'y 
a conduit moi-mme. On a besoin de voir avec les yenx ce 
qu'on s'est si souvent dépeint avec l'imagination,  peu près 
comme les enfantg qui veulent gravir la montagne pour 
atteindre de la main le firmament et les étoiles, qui leur 
setrblent, d'en bas, toucher aux rochers de la cime : pour 
le voyageur comme pour i'eulant, l'illusion s'évanouit en 
approchant. 
Jérusalem, ou vision de paix, tut fondée par Melcbisé- 
dech, pontife et roi de Salera, contemporain d'Abraham. 
Elle s'élève sur le peuchant occidental d'un plaleau qui cou- 
ronne le groupe des montagnes de Judee. lefuge d'un 
peuple faible et pauvre, forteresse contre ses persécuteurs, 
rien dans son site n'indiquait la capitale future d'une nation. 
.Nul fleuve ne l'arrose, nulle grande vallée n'y debouche, 
aucune mer voisine ne lu/offre les ressources du commerce: 
on y arrive par d'étroits sentiers creusés sur les flancs de 
rochers inaceessibles; son sol est rare et ingrat, son été 
brOlant, et ses hivers rigoureux ; A peine quelques sources 
d'eau fratche suiutent de distance en distance entre les ru- 
chers. Cependant Dasid ne crut avoir conquis une patrie à 
son peuple qu'après l'avoir enlevee de force aux Jébuséens, 
ran du monde 298% 10.17 ans avant J.-C. Elle devint le 
siëge de ce petit enpire, dont les fastes mystérieux sont de- 
venus les fastes du monde. Salure on y bàtit ce temple 
qui contint longtemps seul au monde la majestueuse unité 
de Jéhova. Prise et reprise par les rois de Perse et d'lypte, 
par les Bomains, elle vit souvent son peuple traînéen cap- 
tivité; elle vit tomber et se relever son temple, monceau 
de ruines; sun peuple y revenait tojours chercher la il- 
berté de son culte, et attendre les promesses de Jéhova. 
Après le Christ, Titus attaqua Jérusalem aux environs 
de la fète de P3ques, qui avait attiré la population presque 
entière de la Judée dans ses murs. Après quatre mois de 
siége et un peuple immense immolé, T/tus, le plus doux 
des hommes, accomplit la prophetique menace du Christ 
allant au supplice. Il ne laissa-pas pierre sur-pierre dan 



14 
cité de Salomon. Adrien profana tous les lieux saints que le 
culte des premiers chrétiens cherchait et vénéralt sous ces 
ruines. Jupiter, Venus, Adonis, curent leurs statues olficielles 
sur le Calvaire et à Bethleem ; mais ces dienx des vain- 
queurs étaient morts, quoique debout; et de la crèche de 
13«thleem, et du tombeau inconnu d'un supplicié, la religion 
nouvelle, avec la force invincible du verbe divin et d'une 
morale réparatrice, grandissait sous leurs pieds, et devait 
bient6t chasser des temples de Borne elle-mme tous ces 
f«nt6mes de la Divinité, ellacés par des symboles pins purs. 
L,»rsqne Coustantin eut embragsë le christianisme, la ville 
hébraique disparut devant tme ville toute chrétienne ; cha- 
que scëne du drame de la réAemption fut attestee par un 
monument et par un autel : Jérusalem ne fut plus que le 
vestibule du sacré tombeau. 
Jérusalem subit encore plusieur fois les colères des sac- 
cageurs du monde. Adricn, pour disperser les Juiïs, non 
content de profaner la ville, fit vendre le peuple à l'encan, 
a diflerenles foires, au prix des chevaux. Par une amère 
ironie des vainqueurs ou par une amere ironie de la fortune, 
ces foires d'hommes se tenaient dans le vallon de Membré, 
lieu veneré des Héhreux, o0 Abraham ovot plontœe ses 
/entes et reçu les anges. On appelait ces Ioires les foires 
du Tlrœebenthe, du nom d'un arbre séculaire qu'on y 
voyait encore du temps de saint Jérome, et que la tradi- 
tion faisait remonter aux premiers ]ours de la creation. 
L'empereur fit frapper une mclaille pour cterniser cette 
honte, que ce peuple barbare et contempteux de i'humauite 
prenait pour de la gloire. 
Un phenomëne historique, inouï dans les fastes du monde, 
fut le mouvement qui entraina les peuples et les rois d'Oc- 
cident vers ce rocher stérile de la Palestine pour reconquë- 
rir un tombeau : ce fut le plus grand effort materiel du chris. 
tianisme : il reprit Jérasalem, mais il ne put la garder. 
Les rois, depuis Godefroid de Bouillon, ne rtgnerent qte 
quatre-vingt-huit ans sur ces ruines. Saladin, roi de Syrie 
et d'Égypte, les chassa en ! 17 ; depuis cette époque l'is- 
lamisme triompha sur ce berceau du christianisme. Mais 
l'islamisme iui-mème, pénetre de la sainteté de la morale 
évaugelique, ne profana point le tombeau de celui qu'il con- 
sidere comme le grand prophete et comme i'envoyé de 
Dieu; les chretieus continuerent à honorer et a visiter les 
lieux sain/s, sou la toioerance des musulmans. Les pèle- 
rinages ne souffrireut point d'intercupt, on ni d'obstacles; 
seulement les possesseurs du tombeau du Christ lirent pa.er 
un bger tribut h ses adulateurs. Les dmses sont encore 
ainsi aujourd'hui. Quand lbrahim-Pacha devint marre de 
la Judee, cet imp6t sur les chretiens fut mème supprimë : 
le conquérant égyptien rougit de recevoir da pauvre pèlerin 
d'Occident, qui a traversé la terre et la mer pour baiser le 
rocher sacré, le denier de sa loi; il ne voulut pas imposer 
la foi ni taxer la prJëre. 
Les descriptions du tombeau du Christ sont partout. C'est 
une petite coupole en[ermée dans une grande, et dans in- 
quelle un lragment de rocher recouvert de plaques de mar- 
bre blanc indique h la véneration da voyageur la place vraie 
c,u vraisemblable du sépulcre. Celui qui adore le Christ en 
sort ecrasé du ffystère et aneanti de contemplation et de 
reconnaissance; celui qui comprend seulement le chris- 
tianisme en sort écrase aussi de la toute-puissance d',,ne 
idoee qui a renouvelé le monde, qui a vecu dix-huit cents 
ans, et qui semble porter encore en elle la vie nmrale de 
plus d'une nation et de plus d'un siècle. Ce tombeau, de quel- 
que point de vue qu'on le considère, est la borne qui sépare 
deux mondes intellectuels : faut-il s'elonner que des armees 
se le soient disputé, que le croyant le venère, et que le 
philosophe le respecte ? 
L'aspect de Jérusalem, au sommet de la colline des Oli- 
viers, est tcompeur comme l'aspect de toutes les villes de 
l'Orient. Posée sur un plateau légèrement incliné, comme 
sur une base éle66, entourée de boutes murailles en gros 
hlocs qui soutenaient le terrasse_s du temple d Salures, n, 

ÊUSALEM 
flanquée de ses tours crénelée, qui s'élèvent de cent pas en 
cent pas an-dessus de ses murs, avec ses piscines, ses portes 
hantes et voletCs, ses minarets, qui se perdent comme 
des vëgétations pétrifiees dans le bleu profond de son ciel ; 
étalant aux eux ses terrasses dè maisons où les femmes et 
les enfants sont assis sous des lentes de couleur, faisant py- 
ramider devant vous la triple mosquée d'Omar, qui couvre 
h peu prs l'espace jadis occupé par le rempli de Salomon. 
C'est une splendide apparition de la cité de Jéhova. La 
iumiere limpide et reverbérée de son atmosphëre l'inonde 
comme d'une gloire cëleste ; on dirait d'nne ville pleine en- 
core di son peuple, et ce n'est qu'un éclatant tombeau, ie 
portes sont silencieuses, les routes désertes, les rues rides, 
les voix mortes; le juif en hailions se tralne humblemeat 
entre le ruusuiman qui le meprise et le chretien qui l'iusulte. 
Attaché cependant,par la racine de sa foi à ce sol si ingrat 
pour lui, ce peuple, tant honni, est le plus vivant exemple 
d'un patriotisme invincible qui i'humanité ait jamais offert. 
Il va errer par toute la terre, mais ses regards sont tou- 
jours tournés vers Sion ; il revient mourir dans ses mors, 
et il meurt content s'il peut penser qu'un peu de terre d'A- 
braham recouvrira ses os. Je rencontrais à chaque instant 
des ieiilards condu;ts par leurs enfants, montes sur des 
mules ou sur des -,lnes, paraissant acablés par la maladie 
et par les années; et quand je |er derandais : Où allez- 
vous? d'eu venez-vous'/Nous venons, me disaient-ils, de 
Venie, de Varsovie, de Vienne, de Turin, et nous allons 
mourir  Jerusalem ou à Saphad, pour que nos ussement 
reposent auprès de ceux de nos pères; car il n'y a plus de 
patrie pour nous que sous la terre, et celle-la du moins 
les mosnimaus et les cbretiens ne nous la disputent pas. 
L'intérieur de Jt-rusalem est triste, muet et morne. 
bi. de Chàteaubriand I'a admirablement décrit avec toute la 
mélancolie et la solennite de son génie : lui seul, après les 
proph/tes, a eu des mots pour exprimer cette inexprimable 
desolation des lieux. La population indigène, mélange de 
Juifs, d'Arabes, de Turcs, d'Egyptiens, st pauvre et inac- 
Ci+e; tout semble dormir dans cette +ille de la mort. Le 
pèlerins seuls, arrivant et partant sans cesse., marchent 
dans les rues sombres et dans les bazars infects ; mais ils 
marchent recueillis et le Iront baissé, sans bruit, sans pa- 
role, comme des hommes remplis de la pensée qui les 
amène, et foulant ce sol des miracles avec le silence et le 
respect quon apporte dans un sanctuaire. C'est la ville du 
monde d'ou s'éiëve le moins de rumeurs; c'est comme un 
vaste temple : il n'en sort que des soupirs et des prieres. 
Soureut, en me promenant le soir autour de ses murailles, 
je me demandais s'il y avait encore là un pe,ple, et j'en- 
tendais tout h coup le sourd bourdonnement des offices de 
la nuit qui résonnait gravement dans l'air, s'échappant 
des routes des églises ou des cous-ent des moies grecs, 
entremëié du son .-le la cloche des monasteres et du chant 
des prëtres iatins. L'éternel soupir du Calvaire semble sortir 
de celle terre ou tomba le sang du Juste. Son ìme, en 
s'exhalant ,fans le sein de zoo père céleste, a laisse dans 
ces lieux comme un éternel écho de la prière. Aux lieux oit 
prophétisërent les voyants, ou chanta Dasid, où pria le 
Christ, on n'eprouve qu'un besoin, qu'une pensée : con- 
templer, adorer et prier. 
Le pasage qui entoure Jérusalem est un cadre so- 
lennel et grave, comme les pensées que cette sille suscite 
en vous. Du sommet de la citadelle de Sion, où est le tom- 
beau du poêle ¢oi, l'oeil descend d'abord sur la sombre et 
ardue vallée de Josaphat : au tond de ce raxin, un peu sur 
la droite, quelques bouqueLs d'arbustes, un peu moins gris 
que le reste, secouent la poussiêre de leurs feuilles sur le 
filet d'eau qui s'ëchappe de la Iontaine de Siioë; en [aoe, est 
une noire mitraille de rochers à pic ; quelques grottes creu- 
sées dans ce roc vif furent autrefois des tombeaux, et sont 
aujourd'hui les demeures de quelques misérables familles 
arabes. En suivant la pente de cette vallée, qui roule en 
s'ëlargisant, le regard passe entre les cOne. multiplies des 



JÉUSALEM 
montagnes sombres et nues de Jéricbo et de Saint-Sabas. Au 
delà, à un horizon de sept ou huit lieues, vous voyez res- 
plendir la mer Morte, éclatante et lourde comme du plomb 
nouvellement fondu : elle est encadrée enfin elle-mme par 
la chaine bleue des montagues d'Arable, que ne passa pas 
Moise. Tout est silence, immobilité, désert, dans ce paysage : 
rien n'y distrait la pensée; le voyageur n' entend que le 
bruit de ses pas; aucun nuage mme n'y traverse le ciel. 
Les grands aigles des pics décharnés de la Judée y tour- 
noient seuls sur votre tte, et font courir par moments l'om- 
bre de leurs ailes grises sur le flanc rapide des coteaux ; 
de loin en loin, vous apercevez un figuier aride que le vent 
a poudré de sable, et qui semble pétrifié dans le roc, quel- 
ques chacals au poil fauve, qui se glis.ent entre les monti- 
cules de pierres roulantes en poussant de lamentables huile- 
ments; vous rencontrez de distance en distance une pauvre 
femme montée sur un Une et portant sur ses bras des en- 
fants décharnés et br01és du soleil, quelque berger arabe 
gardant ses chèvres noires au pied des collines pierreuses, 
ou quelque bedouiu de 3érémie ou de 3Ariche sur la jument 
du désert, marchant au pas, sa Iong,m lance élevée dans 
sa main droite comme une toise, et semblant arpenter ce.s 
ruines, comme le génie de la destruction. Voila tout ce qui 
couvre maintenant les voies pleines du peuple de Sion. 
Telle est cependant la ville dont le nom est dans toutes 
les bouches, dont l'histoire est dans tous les esprits, dont 
les poésies sacrées se chantent à toutegles heures de la nuit 
et du jour, dans toutes les langues du monde. Voilà les 
collines dont les croisés emportaient la terre sur leurs na- 
vires pour en recouvrir le sol des cathédrales qu'ils Cevaient 
dans leur patrie. Ce n'est ni l'importance des événements 
historiques, ni la féconditë du sol, ni la beauté de la na- 
ture, qui attirent sur ce point du globeles regards du genre 
humain ; mais c'est sur ces collines que brilla l'Clair au 
milieu des ténèbres du monde ancien, c'est sur ce sol que 
le Christ imprima la trace de ses pieds, c'estdans ces murs 
qu'il donna son sang à Dieu pour l'humanité, et qu'il s'é- 
cria, danssa prophétique certitude du triomphe de sa doc- 
trine : « J'ai vaincu le monde. ,, Le lieu de cette grande vic- 
toire de l'unitWde Dieu sur le polythéisme, de la lraternité 
sur l'esclavage, de la charité sur i'égoisme, devait rester 
à jamais présent et cher aux générations. De là cette éter- 
nelle célébrite de Jérusalem. Un de ses pins obscurs enfants, 
celui dont elle ne savait mme pas le nom, celui qui s'appe- 
lait lui-mme le rebut du monde, meurt sur une croix in- 
fme dans un de ses faubourgs; et c'est à lui qu'elle doit son 
nom, sa mémoire, son immortalité. 
L.MAP, TINE, de l'Acadëmie Française. ] 
J.IUSALEM (Assises de). l'oye: AsstsEs nEJËus,tLF.at. 
JERUSALEM (Ordre de Saint-Jean-de-). Voçe-- 
DE-JauSAtL (Ordre de Saint-). 
JÉSABEL. Voyez JznEt. 
JES! ( SamL ), l'un des graveurs les plus célèbres de 
notre siècle, naquit à Milan, vers t789, et fut l'Cève de 
L o n g h i. Son premier grand ouvrage fut Le Renvoi d'Agar, 
d'après le tableau du Guerchin qui se trouve dans la Brera, 
à llilan. Vinrent bientOt aprës un Saint Jean et un Saint 
Étienne, d'après les toiles de fra Bartolommeo existant 
dans la cathédrale de Lucques. Mais Jesi s'appliqua alors 
avec tant de soin à l'étudede Raphael, qu'il est a bon droit 
rangé parmi les meilleurs interprëtes de ce marre. II publia 
d'abord (1834) son portrait du pape Lëon X, avec ceux des 
deux cardinaux Rossi e! Giulio de' Medici, de la galerie Pitti. 
Cette planche, exécutée dans des dimensions peu communes, 
ocpa cinq années de sa vie. Le dessin .eul en était 
un chef-d'oeuvre et étonnait par la reproduction fidèle du 
caractère des tètes. En lS.l., Jesi se rendit fi Paris avec sa 
Idanche, pour en diriger l'impression. A cette occasion l'in- 
dèlicatesse d'un marchand d'obiets d'art de Liége faillit 
lui co0tcr la vie. Dans l'espoir d'avoir ainsi la planche à meil- 
leur marché, ce misérable brocanteur s'arrangea de façon 
à la maculer; et à cette vue notre artise, au dse.poir et 

 3ÉSUITES 615 
I dans une attaque passagère d'aliénation mentale, essaya 
de se briser la tète contre tune table de marbre. On le guérit 
par bonheur, et à Paris justice complète fat rendue à son 
œuvre, qui le place au premier rang parmi les graveurs. Il 
fut alors nommé membre correspondant de l'Institut  classe 
des Beaux-Arts) et reçut la alCotation de la Legiond'FIonneur. 
En 18t6 il entreprit de graver une fresque représentant une 
cène, qu'on venait de découvrir dans l'église San-Onofrio à 
Florence, et au sujet de laquelle s'etait établie une vive dis- 
cussion, demeurée indécise d'ailleurs, sur la question de 
savoir s'il fallait ou non attribuer ce tableau à Raphael. Le 
de.sin en lut achevé en 189, et, par suite de la predilec- 
tion que le graveur avait toujours professée pour ce grand 
maltre, qu'il tenait pour le xéritable auteur de la fresque, 
ce travail présente à un haut degré les caractères qui con- 
viennent aux dessins de lqapbael. Tout en s'occupant de la 
partie technique de cette planche, il pubIia sa Iïerge à la 
l'igne, l'une des productious les plus acieuses et les plus 
remarquables de la gravure moderne. Jesi mourut à FIo- 
rence, le 17 ianvier 1853, avant d'avoir pu terminer la 
grande planche dont nous venons de parier. La suretWdu 
burin et la correction du dessin sont les principales quali- 
tés de ce maltre. 
JESO out JESSO. Voyez J,tpol. 
JESSE ou JESE, ynonyme de chevane, espèce de pois- 
son du genre able, elabli par G. Cuvier dans le grand genre 
cyprin de Linné. C'st le cyprinus jeses de Bloek. Cet able, 
qui est plus grand que toutes les autres espèces du mème 
genre, pèse jusqu'a cinq kilogrammes. !1 nage très-virement 
dans les eaux des fleuves rapides de l'Europe, et particuliè- 
rement dans le Dan,ube. Sa chair est molle et d'un assez bon 
goùt. La fécondité de la femelle est très-grande. Elle pro- 
du:t, dans les mois de mars et d'avril, jusqu'à 92,720 œUfS. 
L. LAuns.xT. 
JÉSUITES COMPAGNIE ou SOCIÉTË DE JÉSL'S. 
C'est la dénomination qu'a prise un ordre religieux qui, 
sans exercer de fonctions dans l'eglise, sans qu'aucun de ses 
membres soit jamais revalu d'une des hautes dignités ecclé- 
siastiques, a su par son adroite politique parvenir rapide- 
ment à un degré de puissance qui en fait un des plus remar- 
quab:es phénomènes de l'histoire. C'est bien moins, d'ail- 
leurs, au fondateur mme de l'ordre, à I g n a c e d e L o y o I a, 
q,t'on doit attribuer la grandeur et la puissance auxquelles 
il est arrivé, qu'à l'habiletè consommée de ses successeurs. 
Le 16 ao,t t534, dans la chapelle de la Vierge de l'église 
de Montmartre, Loyola, alors étudiant de l'université de 
Paris, faisait avec Pierre Lefèvre, ori#aaire de la Savoie, 
François Xavier, originaire de la Navarre, Jacques Lainez, 
Alphonse Salmeron et ,Ni«olas Bobadilh, trois Espagnols, 
gens d'esprit d'ailleurs, et lodriguez, gentilliomme portu- 
Dais, tous les six ses condisciples à l'université, le voe,t 
solennel de se consacrer à la conversion des infidèles et 
d'entreprendre le pèlerinaga de Jérusalem. La guerre contre 
les Turcs les ayant empchés de se rendre en Pale.-tine, 
les sept associés s'éparpiilèrent dans les universités de 
la haute Italie, à l'effet d') faire des recrues à leur projet. 
Lo.vola se rendit de sa personne, en compagnie avec Lefèvre 
et Lainez, à lome, où, en 1539, il lui fut donné de pouvoir 
réaliser le projet qu'il avait conçu de créer un nouvel ordre 
organisé d'une manière toute particulière et différant cern- 
piCement des ordres religieux déjà existants. Conlormément 
à une vision, il lui donna le nom de Socitoe de Jsus, et ses 
membres, dont les premiers furent les individus que nous 
avons nommés plus haut, aux VœUX ordinaires de pa,» 
vreté, de chasteté et d'obéissance aveugle et perpétuelle h 
leurs chefs, durent encore en ajouter un quatrième : celui 
de se rendre sans bésitation ni rémunération en quelque lieu 
que le pape les enverrait comme missionnaires, et de con- 
sacrer toutes leurs forces ainsi que toutes leurs ressources 
à l'accomplissement des missions que le souverain pontile 
leur confierait. Les novices, indéoendammnt des autres 
exercices de pieté en usage, devai,at #are épronv en accom- 



6f6 
plissant les plus humbles fonctions auprès des malades dans 
les hépitaux, l'exemple de Xaier faisant, au besoin, un point 
d'honneur aux membres de cette espèce de chevalerie ec- 
clésiastique de sucer les ulcères les p|us dégoUtants. Une bu|le 
spéciale du pape Paul III, en date du 27 septembre 154o, 
approuva l'ordre, dont les membres, dans une assemblée 
tenue l'année suivante, élurent son fondateur pour leur 
premier 9dnral. Mais l'intelligence d'Ignare de Loyola n'é- 
tait point à la hauteur d'un tel r61e; et ses projets informes, 
modifiés et amendés pour la plupart par Lainez, furent e« 
réalité mis à exécflion par ce dernier et ses savants amis. 
A l'exemple de Paul III, Jules II[ accorda aussi à ces clercs 
réguliers des privileges tels que n'en avait encore jamais 
posséd une corporation quelconque, soit dans l'Église, soit 
dans l'Ètat. 11 voulut qu'ils jouissent de tous les droits des 
ordres mendiants et des prètres seculiers, et qu'ils fussent 
exempts, eux et leurs biens, de toute juridiction, surveillance 
ou imposition, tant épiscopale que temporelle, de telle sorle 
qu'ils n'eussent à reconnaltre d'autres maltres sur la terre 
• que leurs sup'rieurs et le pape. En outre, ds devaient étre 
en état d'exercer les fonctions sacerdotales de tous sentes 
auprès des hommes de toutes les classes, avoir les pouvoirs 
nécessaires pour absoudre de tous péchés et peines ecclé- 
siastiques, pour transformer en obligations de faire de bonnes 
œuvres les vœux formés par des laJcs, pour acqaërir en 
tous lieux des ëglises et des biens sans autorisation uite- 
rieure du saint-siége, pour créer des maisons de l'ordre lé 
oi ils lejugeraient convenable, enfin pour se dispenser eux- 
mmes suivant les circonstances de l'observation des heures 
canoniales, du jeune, de l'abstinence des a|iments interdits, 
et mme de la lecture du bréiaire. En outre, heur general 
était investi d'une aulorité illimitée sur tous les membres 
de l'ordre, du droit de les envoyer en mission là ou il le 
jugeait opportun, de les placer partout en qualité de pro- 
fesseurs de théologie, enfin de leur décerner des digaités 
académiques équivalant à celles des umversités. 
Le principe fondamental de la constitution de la Société 
de Jesus, c'est que ses membres cherchent à se méler au- 
tant que possible au nmnde et à sesoeuvres, tout en demeu. 
tant intérieurement réunis comme ordre. En conséquence, 
ils sont divisés en cinq classes ou degrés: les novices, les 
coadjuteurs temporels, les oecoliers approuvs , les coad- 
juteurs Slirituels et les pro/ès des quatre VŒUX. 
Les novices, recrutés parmi les hommes et les jeunes 
gens les plus instruits et annonçant le plus de talents, sans 
acception de naissance ou de toute autre circonstance ex- 
térieure, et éprouvés par un séjour de deux années pas- 
sées dans des maisons de noviciat au milieu d'actes de re- 
noncement à soi-reAme et d'obeissance, ne sont point encore 
compris parmi les membres de la sociéte proprement dite. 
Les plus humbles parmi eux sont les collaborateurs, qui ne 
font pas de VœUX conventuels, et peuvent par conséquent 
ètre renvoyés. Leur position dans l'ordre est tant6t celle de 
subordonnés et d'aides ou assistants des membres des de- 
grés suprieurs, tantét celle de simples affiliés. C'est ce 
qu'on appelle aussi les jdsuites de robe courte. Des hommes 
lu monde appartenant aux classes les plus élevées, des fonc- 
lionnaires publics surtout et autres personnages influents, 
curent quelquefois l'honneur d'ètre admis dans cette .classe; 
c'est ce qui arriva, par exemple, à Louis XIV lui-reAme 
dans sa vieillesse, sous le règne de la l',laintenon. 
Les coadjuteurs temporels sont des laïques qui ne pro- 
noncent quedes VœUX simples. On les emp|oie généralement 
à des travaux manuels; ils ne font qu'une année de noviciat, 
et ne peuvent exercer d'office public qu'au bout de deux ans. 
Un degré plus elevé est celui des écoliers pprouves, qui 
sont versés dans la connaissance des sciences et des lettres, 
font des VœUX secrets et doivent se vouer plus spécialement 
à l'éducation et à |'instruction de la eunesse. On les em- 
ploie comme professeurs, prédicateurs, recteurs et institu- 
teurs, comme gouverneurs et directeurs de consciences dans 
les familles, et comme assistants pour les missions. 

JESUITES 
viennent ensulle les coadjuteurs spirituels, dont les 
vœux sont publics; le supérieur les reçoit au nom du général, 
mais leurs vœux sont également réputés simples à l'égard 
de la Compagnie, qui en dispense ceux qu'elle congédie. 
Le degré supérieur se compose des profès. On ne les 
choisit que parmi les membres de l'ordre qui ont le plus 
d'expérience du monde et qui ont douné d'irréfragbles preu- 
ves de prudence, d'habileté, d'énergie et de dévouement 
sans bornes pour l'ordre, et que dès lors on juge dignes 
d'ètre initiés à tous les secrets de la Société. Quand ils sont 
admis profès, à leur VœU de chasteté, de pauvreté et d'o- 
béissance ils ajoutent celui d'entier devouemeut aux ordres 
du pape, eu s'obligeant h accepter toutes les missions qu'on " 
pourra leur donner. Quand ils ne vivent point en commun 
dans les maisons professes, on les emploie comme mission- 
noires chez les idolatres et les hérëtiques, comme regents 
dans les colonies les plus Iointaines, comme conlesseurs 
des princes et comme résidents de leur ordre dans les lieux 
où il ne possède point de collége; et dans ce cas ils sont 
affranchis de l'obligation de se livrer à l'éducation de la 
leunesse. Il n'y a que les pro/ès qui prennent part h l'é- 
lection du général de l'ordre, lequel doit lui-méme avoir élé 
profès, et il choisit parmi eux les assistants, les provinciaux, 
les superieurs et les terreurs. 
Le 9end, ral est nommé à vie, réside à Ruine, et exerce 
un pouvoir absolu, illimité. Les membres de l'ordre lui 
doivent une obéissance aveugle et passive : il a le pouvoir de 
faire de nouvelles règles et de dispenser des anciennes ; il 
reçoit dans l'ordre et en chasse qui il veut; il nomme h tou- 
tes les charges, hors celles d'assistant et d'admonileur; 
distribue les emplois et convoque les assemblees de l'ordre, 
qu'il preside et oi sa voix compte pour deux. Ses minis- 
tres ou assiManls, entretiennent groupés autour de lui des 
correspondances suivies avec tous les provinciaux du globe. 
Les supérieurs écrivent une fis |a semaine à leur pro, incial, 
et les provinciaux tous les mois au général. Efin, tous les 
membres ont la liberté de lui exposer leurs besoins et leurs 
griefs sans aucun intermediaire. Par cette correspondance 
particulière, le géneral des jésuites est le monarque le mieux 
instruit de ce qui se passe daus ses Ets. Ses sujets, en 
outre, fréquentent partout non-seulement le peuple, mais 
les ministres, les grands, les princes, les rois; et il se trouve 
ainsi dominer de Rome toes les monarchies de la terre. 
Obligé de s'absenter ou malade, il confëre l'intérim à un 
vicaire génél. Seulement, si l'ge ou la maladie le rendent 
incapable de gouverner, c'est la Compagnie qui, mo)-ennant 
sanction du pape, pourvoit au vacariat génëral, avec pou- 
voir absolu et droit de succession. Le général doit aussi 
avant sa mort nommer un vicaire général. A son défaut, le 
droit d'en élire un appartient aux profès qui se trouvent alors 
à Rome. Les fonctions de ce ,traire consistent h convoquer 
une assemblée generale pour l'élection du générai et à SOU. 
verrier pendant la vacance. Son autorite est limitée; il ne 
peut introduire de nouvelles règles, de nouvelles cérémo- 
nies, ni changer celles qu'il trouve établies; et ses pouvoirs 
expirent à la nomination du général. 
Les assistants composent le conseil secret du 9dndral i ils 
portent le nom des Éats ou ils ont vu le jour, et comme lui 
sont choisis par toute la Compaguie assemblée. S'il menait 
une vie scandaleuse, ou s'fl dissipait les revenus de l'ordre 
ils pourraient convoquer une assemblée générale pour dë- 
poser le 9nral. Outre ces assi.-tants, il y a près de lui un 
olficier préposé par la compagnie pour l'avertir en secret de 
ce qu'il remarque d'irrégulier dans sa conduite. Ce con- 
sellier s'appelle admonileur. Malgré ce contre-poids, il 
a point de chef plus abso|u, plus respectA, ni qui redoute 
moins d'ttre déposé que le 9noeral des jésuites. 
Les provinciu sont les gouverneurs des provinces de 
l'ordre. Ils nomment provisoirement les oice-provinciau.:, 
les supërieurs de maisons professes et de no, totals, et les 
terreurs de colléges dans leurs pro,Jures. Ils choisissent 
encore les maltres des novices  les procureurs» les tainis- 



JÉSUITES 
tres, les préfeLs spirituels, ceux des études, ceux de la 
santé, les prédicateurs, les confesseurs,les consultenrs, 
les admoniteurs, les supérieurs, les régents des cofléges, 
les professeurs et les premiers officiers des universités, 
excepté les recteurs et les cbanceliers ; mais tous leurs choix 
doivent gtre soumis à la sanclion du général. Ils peuvent ad- 
aettre au noviciat les sujets en qui ils trouvent les qnalites 
requises, et renvoyer ceux qui sont djà dans le premier et le 
second noviciat, à moins que le général ne les ait approuvés 
ou qu'ils n'aient apporté de grands avantages à la Com- 
pagnie, lls ne peuvent qu'en cas d'urgente nécessilé expul- 
ser les coliers a]prouvoes ou les coadjuteurs non formés, 
sans son autorisation préalable, et n'ont nul pouvoir pour 
renvoyer les prof et les coadjuteurs formes, sptrtuels 
ou temporels : au général seul appartient ce droit. Ils 
ont quatre assistants, dont un fait toujours l'office d'admo- 
miteur. Ces liommes, placés par le genéral aupr des pro- 
• inciaux, l'informent exactement de leur conduite. 
Les commissaires et les vsiteurs sont des officiers ex- 
traordinaires envoyés par le général pour inspecter les mai- 
sons el colléges de l'ordre, écouter les plaintes et réformer 
les abus. 
Chaque province, chaque maison professe, chaque col- 
lé,e, chaque noviciat, a son procureur particulier. Il y a en 
outre à Ruine un procureur géneral, chargé de toutes les af- 
faires de la Compagnie. lls perçoivent les revenus et les au- 
m0nes, régissent le temporel, et soutiennent les procès inteu- 
tés à la Compagnîe, qu'il leur est ordonné de terminer, autant 
que possible,  l'amiable.et sans intervention des tribunaux. 
Outre ces hauts ofticiers, on en compte bon nombre de 
subalternes : des examinateurs, prëposés pour éprouver les 
néophytes; des novices chargés d'un second examen; des 
ministres qui soulagent les supérieurs; des sous-ministres 
pour la cuisine, le refectoire, le dortoir, la cave; des con- 
sulteurs, qui aident les supérieurs de leurs conseils ; des ad- 
moniteurs, qui les avertissent; des préfets spirituel% qui pré- 
sident aux actes de dévotion ; des sacristains, des-infirmiers, 
des portiers, des maitres de la garde-robe, des aclieteurs, 
des depensiers, des cuisiniers, des éveilleurs, des visiteurs 
de chambres, etc., etc., tous fonctionnaires dont les titres 
désignent assez le genre d'occupations. 
A la mort de son fondateur, la Compagnie de Jsus comp- 
tait dejà t,000 membres, répartis en douze provinces, dont 
la première était le Portugal, où Xavier et Rodrignez étaient 
venus s'établir dès 150. Les développements pris par la 
Compas, mie dans les États d'Italie et en Espagne ne furent 
pas moins rapid; dans ce dernier pays, l'exemple et la 
¢oopératim des seigneurs, et notamment d'un grand d'Es- 
pagne fort influent, T. Borgia, duc de Gandia, y contribua 
beaucoup. L'ordre se répandit aussi avec une promptitude 
extrème dans l'Allemagne catholique, notamment en Au- 
triche et en Bavière, dans les universités de Vienne, de 
Prague et d'lngolstadt, où il acquit un ascendant dont il 
resta en possession pendant plus de deux siècles. Aux yeux 
des princes catholiques comme ì ceux des papes, les prin- 
cipes rigoureusement hiérarchiques de l'ordre, son acti- 
vité enthousiaste et infatigable, et ses nombreuses conversions 
paraissaient le moyen le pins efficace à employer contre les 
progrès toujours croissants du protestantisme. Aux yeux des 
masses, les jésuites ne lardèrent point à tre les représen- 
tants du nouvel esprit des temps; esprit avec lequel sym- 
pathisaient ceux-là mgme qui abhorraient le monachisme. 
Avec leurs manières polies, gaies et sociables, les jésuites 
devaient réussir auprès de ceux qui trouvaient les francis- 
cains trop grossiers et trop communs, les dominicains trop 
sévères et t«op Iristes, comme moralistes et comme inquisi. 
teurs. On ne pouvait point leur reprocher de perdre leur 
temps à marmotter machinalement des prières ; leurs exer- 
cices de piété n'étaient pas longs, ils avaient grand soin d'ail- 
leur de ne pas paraitre s'enorgueillir d'avoir inventé une nou- 
veUe méthode de sanctification ; par leur costume ils ne diï- 
féraient en rien des prêtres séculiers, et leurs, règlements 
meT. n£ LA co,vr.ns.  T. 

les autorisaient mme à l'Changer contre le vtement or- 
dinaire des pays dans lesquels ils résidaient. 11 leur était 
en outre prescrit d'apporter une douceur et une modéra- 
tion extrmes dans l'exercice de leur activité politique et spiri- 
tuelle, de chercher à gagner les hommes en montrant de 
la condescendance par leurs faiblesses particulières, de bien 
se garder de laisser apercevoir chez eux la moindre pas- 
sion ; de tenir secrets leurs projets ainsi que les moyens qu'ils 
emploieraient pour les faire réussir, et, avec beaucoup de 
froideur et de réserve apparentes, d'ètre infatigables à pour- 
suivre l'exécution et la réussite de ce qui serait de uature 
à provoquer de la résistance si on le livrait h la publicité. 
La Compagnie fut redevable de ces habiles règles de con- 
duile pour toutes les circonstances de la vie aux principes 
posés par son second général, le père Lainez, esprit pro- 
fondément politique, qui sut modifier ce qu'il y avait encore 
de dur et de monacal dans les règles imposées à l'ordre par 
son fondateur, règles qu'il rendit plus conformes à l'esprit 
du temps et au but que la Compagnie se proposait. A l'origine 
ce but n'avait été autre que de défendre la monarchie spi- 
rituelle universelle du pape contre les attaques du protes- 
tautisme, tout aussi bien que contre celles des princes ou 
des évques. Sous prétexte de n'avoir en vue que la reli- 
gion et les honneurs à rendre h Dieu (de lt leur devise : 
Ad nojorem Dei 91oriam ) , ils travaillaient constamment 
dans ce but ; et à cet effet ils cherchaient à s'emparer de la 
direction des esprits, en fondant des écoles pour la jeunesse 
et enprgchant et confessant les adultes. A la mort de Lainez, 
arrivée en 15»5, cetteàirection et la vigueur d'eprit qu'elle 
nécessita avaient déjà si profondément pénStré dans la vie 
intérieure de l'ordre, que l'exemple de la dévotion minu- 
tieuse et monacale à laquelle s'adonna son successeur Fran- 
çois Borgia n'y changea rien, et que les exhortations 
aàressées par les papes Paul IV et Pie ¥ à divers ordres 
religieux, d'avoir / revenir à l'observance des heures ca- 
noniales, demeurèrent non advenues en ce qui estdes 
jésuites. Les papes et le généraux suivants affranchi- 
rent en effet l'ordre de toutes les gnes imposées aux au- 
tres corporations monastiques; et par les résultats ob- 
tenus on ne tarda pas à comprendre ce qu'il y avait eu de 
prévoyante sagesse et d'habile politique dans les règles don- 
nées à la Compagnie par Lainez. Les missions entreprises 
hors d'Europe par l'ordre entent un succès vraiment pro- 
digieux, notamment dans les lnàes portugaises, où, de 1561 
à 1551, François Xavier et les collaborateurs qu'on lui 
envoya convertirent au christianisme plusieurs centaines 
de mille individus, à Goa, à Travancore, en Cochinchine, 
à Malakka, à Ceylan, et mCme au Japon. D'autres jesuites 
ne contribuèrent pas moins au Brésil et au Paragnay à ci- 
viliser et à subjuguer les indigènes. L'Afrique seule se 
mourra rebelle à leurs efforts ; les jesuites n'eu abordèrent 
mème point la cote occidentale; et/ l'est ils se irent chas- 
sés par les c o p t e s et trait¢s par les Ab.xssiniens comme 
coupables du crime de haute trahison. En revanche, ils 
prirent rapidement un ascendant extrème en Europe, et 
réussirent h completement anéantir les traces laissées par la 
réformation dans quelques pays catholiques. Ils firent en 
grand, et pour les hautes classes, ce que les bar nab ite s, 
les somasques, les pères de la doctrine chrétienne et ceux 
de l'Oratoire, et enfin les piaristes n'avaient com- 
mentWqu'en petit pour l'amélioration de« écoles  l'usage 
des classes tufCientes de la société. Claudius Aquaviva, de 
la famille de« ducs à'Atri, leur quatrième Sérierai ( 1581- 
1615), fut le créateur de leur pédagoque; son ouvrage 
intitulé Ratio et institutio Studiorum .çocietatis Jes con- 
tient tout le plan d'enseignement suivi dans leur. colléges. 
Malgré l'insuccès des efforts qu'ils avaient tentís h di- 
verses reprises pour s'établir en Angleterre et dans les 
États protestants du nord de l'Allemagne, le nombre des 
membres de l'ordre s'élevait déjà en 1618 à 13,112; ils 
étaientalors r$partis en 32 provinces. En 16,0, sous le génc- 
ralat de ¥itelleschi, liers de la prospérité inouïe de leur 
78 



18 
ompagni, ils en ¢étébrèxent avec une grande pompe le ju- 
bilé sculaire. 
Ilais les joies de cette fte ne demeurèrent pas sans om- 
bre. En dépit du succès extraordinaire que la Compagnie de 
Jésus avait eu dans les cours de mme que dans le peu- 
ple, le clerg et les savants demeurés trangers à cette su- 
ciété 'avaient pas lardé à dcouvrir !es germes dangereux 
cpellerecelait dans son sein. Par ses priviléges elle blessait 
les droits des universités, des évques et des curés; et sa 
conduite mondaine provoquait des plaintes etdes attaques 
passionn6es de la part des anciens ordres monastiques, 
dont l'envie et la jalousie n'étaient pas moins excit6es par 
ses empiétements sur leur domaine que par les.succès qu'elle 
obtenait partout. Enfin, en intervenant dans les affaires de 
la politique, les membres de la Compagnie finirent par pro- 
qiuer les alCances et les raneunes des fonctionnaires pu- 
ics et des magistrats. C'est ainsi que le Portugal avait déjà 
pu ressentir les suites fimestes de leurs intrigues sous les 
rois Jean 11I et Sébastien, dont ils avaient étè les institu- 
teurs ; intrigues qui,  la mort du dernier de ces souverains, 
avaient beaucoltp contribué à faire passer ce royaume sous 
la domination de l'Espagne. 
Les jésuites ont ioué en France un r61e trop important 
pour ne pas nous imposer l'obligation de présenter ici un 
résumé spécial des développements que leur ordre prit suc- 
cesivement parmi nous. 
Dès l'an 154o lgnace de Loyola avait envoyé quelques- 
uns de ses novices étudier ì Paris. Ils demeurèrent d'a- 
bord au collége des Trésorers, puis dans cdui des Lom- 
bards; mais la guerre s'Atant allumée entre Charles-Quint 
et François 1 er, ces novices, la plupart Espagnols ou Ita- 
liens, furent contraints de sortir du royaume. La paix de 
1544 leur rouvrir les portes de notre pays. Guillaume Du- 
prat, èvque de Clermont, en accueillir un certain nombre 
à Billom et à 51auriac; puis il en Iogea quelques-uns/ Paris, 
dans son b6tel de Clermont, rue de la Harpe, et finit par 
leur léger 36,000 écus. Ils ne furent d'abord à Pari que 
de modestes Collera, jusqu'à ce qu'en 155o, sur la recom- 
mandation du pape, ils obtinrent, par l'entremise du car- 
dinal de Lorraine, des lettres patentes de Henri 11 qui les 
autorisèrent/ bàtir, mais/ Paris seulement, et du produit 
de leurs aum6ne% une maison et un collége selon leur rëgle. 
Ces lettres a)ant etWprésentCs au parlement, les gens du roi 
eux-mèmes s'opposèrent "/t leur enregistrement, et plèrent 
la cour de faire des remontrances au prince. E 152, nou- 
velles lettres du mbme roi, portant ilérative jussion d'enté- 
riner les premières. L'affaire traîna plus de deux ans. En- 
fin, le parlement rendit, le 3 ao0t 1554, un arrèt portant 
qn'avant de passer outre, les lettres du roi et les bulles de 
pape «eraient soumisus à ['é,que «le Paris et au doyen du 
la Faculté de théologie. Tous deux se prononcèrent contre 
les jésuites. Brouet, leur supérieur, envoya copie de cette 
deeision à Ignace, qui les exhorta h souffrir patiemment. 
L'évèque de Paris Euslache du Bellai leur interdit alors 
toutes fonctions; mais eux, pour se soustraire à sa juridic- 
tion, se retirèrent dans le quartier Saint-Germain des Prés, 
sous la protection du prieur de cette abbaye. 
Les ièsultes de Paris, repoussés par le parlement, par 
• vque, par la Faculté de tbéologie, renouvelèrent leur de- 
marclles à l'avènement de François II. Les Guises, qui les 
protégeaient, portèrent leur requête au conseil privé du 
roi, déclarant, pour lever les obsacles, qu'ils renonçaient 
à tout oe qu'il y avait dans leurs privilcges de pr@ldiciable 
à l'autorité, des vq«les, des eurés, des colleges, des uni- 
versités, et de contraire soit aux liberts de l'Elise galli- 
eane, soit aux traits passés ente le vois .et les papas. Le 
conseil ayant examiné l'affaire, le roi, par lettres du dernier 
octobre 1560, ordonna au parlement de vérifier sans dëlai 
les lettres patentes et d'homologuer les bulles obtenues par 
les pères de la Compagnie de Jésus. L'évque «le Paris y 
ajouta six articles, portant en somme quïls premlraient un 
antre nom; qu'ils ne pourraient toucher à le,lrs constilt 

JÉSUITES 
tions; qu'ils seraient soumis aux évques; qu'ils ne pour- 
raient enseigner publiquement les saintes Éeritures sans tire 
reçus par les fanults de théologie, les universités et les 
évoques, etc. Le 18 novembre, les lettres patentes et les 
bulles a,ant té présentes au parlement, elles ' furent en- 
restrées, mais avec la clause formelle que si dans la suite 
on y trouvait quelque chase de dommageable ou de préju- 
diciable aux droits du roi et aux privitéges ecclésiastiques, 
il y serait pourvu. 
Trois semaines après, François II mourut, et Charles IX, 
son frère, lui suceéda. Les jsuites trouvrent auprès de ce 
jeune prince et de sa mère la mme protection qu'anprès de 
son prédécesseur. Aussi les vit-on présenter bientOt nouvelle 
requête au parlement pour dtre reçus et appronvés comme 
religieux, ou tout au moinsen forme de co!lége. Le parlement, 
jugeant que cette demande regardait le pouvoir ecléiasti- 
que, les renvoya à l'assemblée générale de l'Église gallicaoe 
convoquée à Poiss,. Lainez, qui avait ét promu au gné- 
ralat des jésuites à la mort d'Ignace, s'y présenta comme 
leur soutien ; et cette assemblée les adroit, non point comme 
corps relioeux, mais comme socidté, comme coliége; leur 
enjoignant de prendre un autre nom que celui de Joesuites, 
d'obéir aux évoques, de se soumettre aux universités, de 
renoncer ì leurs priviléges pour rentrer dans le droit com- 
mUll, sons peine de voir l'autorisation révoquée immédia- 
lement. Les jésuites, a,ant fait enregistrer cet acte au par- 
lement, quittèrent l'll6tel de Clermont et vinrent s'établir 
dans une maison de la rue Saint-Jacques, appel la cour 
de Langres, qu'ils achetèrent de deniers que leur avait 
lgués leur protecteur Guillaume Duprat. Ils firent / ce 
btiment de grandes réparations, et inscrivirent au fronton : 
Collegium Societatis humions Jeu. 
lIais ils ne pouvaient enseigner publiquement sans l'auto- 
risation de l'université; le recteur Julien de Saint-Germain 
leur accorda des lettres de scolarité. Ils les tinrent secrètes 
quelque temps, et ne les firent connaitre que le jour de 
Saint-Remi t56t), en ouvrant publiquement leurs elasf,. 
L'université, qui n'avait pas té consultée, defendit aux jé- 
suites de continuer leurs laçons ju»qu'd ce qu'ils se fussent 
pourvus d'un auh'e titre. Ceux-ci prièrent alors l'université 
de les recevoir au nombre de ses enfant, promettant sou- 
mission entière à ses lois. Les facultés, après s'tre réunies 
plusieurs fois, résolurent de ne rien determiner avant de sa- 
voir qui ils taient. Ils furent donc cités, le 18 lêvrier 156, 
ì comparattre aux I|athurins, devant le recteur et es deie- 
gué de l'université. Là, sur la question qui leur fut faite 
s'ils étaient séculiers, ou réguliers, ou moines, ils soutin- 
rent que l'assemblée n'avait pas le droit de la leur poser, et 
qu'ils étaient en France, en vertu d'un arrêt du parlement, 
tales quales. 
Déboutes par l'université, ils eurent recours au parle- 
ment. Charles Dumoulin fut le conseil de l'université, Pierre 
Versoris plaida pour les jésuites. Ceuxoci, pour priver 
l'université de ses meilleurs avocats, consultèrent, en outre 
lIontholon, Chocart, Chauvelin et Cfiippart; de sorte qu'il 
ne lui resta pour défenseur qu'Etienne Pasquier, fort 
jeune alors, mais homme d'un esprit supérieur. Après de bril- 
lantes plaidoiries de part et dautre, l'avocat gënéral Dn- 
mesnil conclut au rejet de la sequte présentée par les 
jésuites. Ils virent bien que le danger était grand, et ex- 
pédièrent l'un des leurs, Possevin, ì Ba'onne, en se trou- 
vaient Charles IX et sa mère. Le parlement renvo,a les 
parties à huitaine; le proe) fut assoupi, et les jsuites con- 
tinuèrent ì enseigner publiquement. 
Antoine Arnaud affirme que la maison des jèsuites fut 
l'in frime repaire oiJ les égorgeurs de la Saint-Barthélemy 
tinrent leurs conciliabules. 
Sous Henri III, nous trouvons deux jsuites fort avant 
dans les bonnes grâces de ce roi : en,talent Edmond Auget, 
-son confesseur, et Claude-Matlhieu, provincial de Paris. 
Dans le fort de la ligue, te comité directeur, composé d'a- 
bord «le cinq membres, puis de dix, siégea longtemps dan. la 



JÉSUITES 
ouvellemaim)u desjésuiCes rue Saint-.,ntoiue. Lorsque, aprè 
l'assaiuatde Henri III, Henri IV, proclamé roi de France 
par son armée, fut devenu mallre de laris, la querelle, 
longtemps assoupie entre le parlement et l'université d'une 
part et les jésuites de l'antre, se réveilla. L'université 
rendit un décret dont la conclusion était qu'il fallait citer 
les jésuites en justice, comme fauteursde huit ou dix com- 
ploL tramés contre la vie du roi, et obtenir qu'ils fussent tous 
chassés sans exception. La cause fut violemment plaidée 
/es 12, 13 et 16 juillet 1594; etpourtaat le prooes resta en 
suspens. 
Un nouveau complot appela bient6t ai[leurs l'attention 
publique : le roi, revenant de Picardie, lut alteint an milieu 
de ses courtisan% dans l'b6tel de Gabrielle d'Estrées, d'un 
coup de couteau qui l'atteignit à la mAchoirc supérienre, 
lui fendit la lèvre et lui rompit une dent. L'assassin était 
Jean C b A t e I, fris d'un drapier de Paris; il avait étudié chez 
les jsuites sous le père Guéret. Le parlement donna in- 
continent l'ordre d'arréter tons les jésuites, et le soir méme, 
 dix henres, leurs colléges furent investis. On trouva dans 
leurs archives un écrit du përe Guignard, l'un d'eux, prè- 
chant la séditiou. Guéret, Guignard et les autres jésuites 
furent conduits au For-I'Éviue, où Jean Ch3tel avait été 
écroué ainsi que son père. Par son arrët du 29 décembre 
t59i, le parlement condamna Chatel à tre rompu vif, et 
ordonna que tous les jésuites, comme ennemis du roi et de 
l'État, videraient Paris et autres lieux dans trois, jours, et 
le royaume sous quinzaine après, sous pein d'tre punis 
comme coupables du crime de lèse-majest6. Le parlement 
¢ondanma en outre Guignard ì tre pendu et son corps 
rêduit en cendres, Guéret au bannissemeut perpétuel, et le 
père de Jean Chtel à neuf ans d'exil. Il fut ordnnné aussi 
que sa maison serait rasée, et qu'à sa place s'éiëverait une 
pyramide. Ce fui vers la mme époque que les jésnite furent 
bannis de l'Angleterre et de la Flandre, comme a¢cusés-d'a- 
voir conspiré contre Élisabeth et les deux princ¢s-d'Orange. 
La surprise est grande en voyant quelques- anné après 
Henri IV, dans le but de se ménager ainsi les bonnes grâces 
du pape, consentir ì ceque les jésuites rentrent en Franc, e. 
Sully et De Thon s'y oppesërent virement, mais le conseil 
opina pour leur réablissement par gard pour le pape. 
On leur affecta seulement certaines villes, eu leur interdi- 
sant de recevoir des- frères étrangers, avec dëfeuse de re- 
cueillir aucun héritage et confesser ni précher sans la per- 
mission de l'éviue diocésain. 
Ce conditions avaient êoE débattues avec le pape, qui 
les avait ratifiée»; mais le enéral Aqmviva refusait sa sanc- 
tion. Moins scrupuleux, ses frères rentçaient en France de 
toutes parts. Le parlement adressa an roi de très-humhles 
remontrances; mais les jésmtes obtinrent, par l'entremise 
du père Cotton, de nouvelles lettres dejussion, en date du 
2 janvier t604, pour que le parlement et ì enregistrer l'C 
dit de leur rappel; et le parlement, n'osant plus reculer, 
s'exécuta. La pyramide êlevée sur les ruines de la maison 
de Jean Chatel était couverte d'inscriptions contre les jésui- 
tes; ils en demandèrent la demolition : le roi y consentir; le 
parlement s' refusa ; on passa outre, et la pyramide fut 
abattue. L'interdiction d'instruire la jeunesse, sous laquelle 
ils continuaient de demeurer, fut levée en 109, malgré la 
vive opposition de l'université. 
C'est ì ce moment que Henri IV sueeomba sons le poi- 
gnard, de I avail lac. On accusa tout aussitôt les jé.suites 
d'avoir été les instigateors de oe meurtre ; mais c'est là une 
accusation dont rien n'a démontré la érité. 
la mort tra,ique de Henri IV ralluma la haine du parle- 
ment conlre les jésuites, et le porta à condamner età brO- 
ler tous les livres dans lesquels ils dposaient leurs dectri- 
nos. Le premier atteint fut celui de ,fariana, accusé de 
renfermer des ma.imes régicides. On condamna et on br01a 
encore, les œuvres de Beilarmin, de Becan et de Suarez, 
comme contenant le mdme venin, Cela n'empcba pas, tot- 
tefois, la, reine Marie de lë.lici de leur accorder, le 20 

619 
août 1610, des lettres patente par lesquelles il leur 
permis de faire des leçons publiques, non-seulement en thëo- 
logie, mais en toutes sortes de sciences et exercices, an col- 
lége de Clermont ; et le parlement, en dépit de l'opposition 
de l'université, enregstra ces lettres patentes. on contours 
de cette victoire, lesjésuites voulurent, eu 1618, ëtreagrégés 
 l'université, et un arrët du conseil leur accorda encore 
cette faveur. Cependant la condamnation de plusieurs de 
leurs livres, obtenue par le parlement, changea bient6t les 
dispositions de la cour à leurégard, et détermiua Louis XIII 
à rétablir, en 1631, l'université dans tous ses droits. Ce 
monarque, puurtant, Iégua ses dépouilles mortelles aux jé- 
suites, comme Henri IV leur avait légpé son cœur. 
Sous Louis XIV, le père HSreau fut accus d'enseigner 
publiquement qu'il est loisible de ddposer les rois. L'uni- 
versité le dénonça à la reine mère, qui défendit au parle- 
ment «le faire droit ì cette reclnte, et evoqua l'affaire. Le 3 
mai 16 le roi rendit un arrët qui faisait très-expresses 
inldbitious aux jésuites de traiter publiquement de pareilles 
proposition; ordonnait de plus que le père Héreaudemeure- 
rait en arrêt à la maison du collége de Clermont jusqu' 
ce qu'autremeut sa majesté en et ordonné. 
Qu.lque nombreuses que fussent les plaintes portCs cha- 
que jour contre les jésuites, on s'apercevait que leur in- 
flnense allait en augmentant. Il fallait un génie puissant pour 
l'arrëter : Pasca I parut. ÊIoquent et sublime avant lossuet, 
ayant, selon la belle pensée d'un écrivain, jeté une ancre 
dans le ciel, une autre dans les enfers, il frappa des traits 
les plus piquants, les plus acérés, le plus inattendus, cette 
Compagnie si célèbre par la force de la raison et la finesse 
de Pesprit. L'apparition des premières Provinciales fut un 
grand événement. Les curés de Paris s'assemblèrent, et de- 
mandèrent la condamnation des maximes des jesuites si Pas- 
cal avait fidëlement cité leurs écrits, ou sa mise en accu- 
sation s'il avait dénaturé le texte des casui.tes. Les jésuites 
mirent tout en œuvre pour arrêter cet élan. lIais les évques 
étaient tout occupésde l'affaire du cardinal de letz; on se 
s@ara sans avoir avoir rien décidé, et les jésuites triom- 
phants publièrent une Apologie de leurs casuistes, que le 
p Alexaudre Vil condamna formellement. 
Les jésuites, malé le succès des Lettres provinciales, 
demer&-ent tout.puis-ants sons le règne de Louis XIi. C'est 
ainsi que ce monarque choisissait pour son confesseur un 
de leurs clefs, le père La C[l aise. A sa mort, un autre jé- 
suite, le père L e T e I I i e r, obtenait sa confiance, et, comme 
son prédécesseur, il exerçait une grande influence sur l'es- 
prit du monarque. 
Ici se ralentit la lutte si Iouae et si animée entre r'uni- 
ver.i et le parlement d'une part et les jësuites de l'autre; 
mais elle se continua entre eu,¢ et les jansénistes, et l'hia- 
toire a gardé le souvenir des indignes lureurs dont P o r t 
loyal fit victime. 
Nous avons conduit l'histoire de l'Oràre des 5é.uites en 
France jusqu'à la fin du dix-septième siècle; ici il nous faut' 
revenir sur nos pas pour dire quelques mots sur le r4e qu'ils 
jouèrent pendant ce mme siècle dans le reste de l'Eu- 
rope. 
Ils n'avaient pas moins bien réussi en Allemague que 
parmi nous, et ils y furent tout-puissants sous les r%ues des 
empereurs Ferdinand I1 et III, dont ils possédërent tonte 
la confiance. A l'ëpoque de la guerre de trente ans, ils firent 
prouve d'une adresse de conduite sans pareille. Ils furent 
l'ame de la Liga, qui ne faisait rien sans les avoir préala- 
blement consultés; aussi leur fut-il pessihle de se faire at- 
tribuer, en ! 69, par la dièle del'Empire, les domaines ealevés 
précedemment soit à l'Eglise catholique, soit aux ordres mo- 
nastiques; et l'on conçoit facilement qu'il dut y avoir-là pour 
eux la source d'un immense accroissement de richesses 
et partant d'influence. Ce fut le i%re Lanormain, l'un des 
membres de la Compauie de Jésus et confesseur de l'em- 
pereur, qui decida la chule de Wallenstein; ce ¢ lui 
aussi qui réussit à maintenir la Bavière dans l'allianoe do 
78. 



620 
i'Autriche. En Eçpagne et en Portugal, dans les petites cours 
d'llalie, ils étaient devenus les confesseurs ordinaires non 
pas seulement des souverains, mais encore de leurs con- 
seillers et conrtisans : c'est assez dire qu'ils étaient parvenus 
 y exercer sur la marche de toutes les affaires politiques la 
plus décisive inlluence. 
Le dix-huitième siècle devait tre un temps de rudes 
épreuves et de désolation pour la Compagnie, dont divers 
procès scandaleux ameutèrent de nouveau les adversaires, 
en mne temps qu'ils réveillèrent des haines qui n'Calent 
qu'assonpies et qui firent alors explosion avec une nouvelle 
fureur. L'affaire du père Girard et de sa pénitente Made- 
leine Cadière mourra les jesuites abusant de leur ministère 
de directeurs deconscieuces pour satisfaireleur luhricite.L'af- 
faire du përe Lavalette les présenta à l'Cut de marchands et, 
qui pis est, de marchands banqueroutiers. Ce père Lavalette, 
stlperJeur génerai de. jésuites aux ries du Veut, faisait dans 
ce pays de brillantes affaires commerciales, au mépris des 
canons ecclesiastiques. Une faillite vint couper court à sa 
fortune. Ses créauciers réclamaient plus d'un millon. On 
assigna devant les consuls de Marseille non-seulement le 
père Lavalette, mais encore le père Sacy, procureur gënéral 
des mission-ç. Les lésuites pretendirent ne pouvoir Cre con- 
sid,.res comme solidaires d'un des leurs, et en appelèrent 
au parlement de Paris. De Saiul-Fargeau porta la parole 
au nom des gens du roi; Gerbier plaida pour les créanciexs, 
et obtint la condamnation des jésuites. 
Dans le cours de ce procès, deux mémoires avaient été 
publiés, l'un pour les jésuites, l'autre pour la partie ad- 
verse; l'un et l'autre discutaient avec trop d'éclat les cons 
titutions de la société pour qu'à cette occasion un membre 
du parlement, l'abbé Chauvelin, crier pouvoir se dispenser 
,le ptt'senter quelques observations. Ce magistrat conclut 
a l'examen de l'institut etde sa doctrine : sur qltoi, ar- 
rêt du mme jour, t7 avril 1761, qui enjoint aux jésuites 
de remettre dans trois jours au grelfe un exemplake de 
leurs constltutions. Les superieurs des trois maisons de 
Paris se soumettent a cet ordre. Un message de Louis XV de- 
mande con,munication des statuts; le parlement n'y consen 
qu'aprìs s'en Cre procuré un second exemplaire.Cependant, il 
nomme des commissaires et poursttit son examen. Après 
de longs dëbats, trois arrêts sont rendus contre les jésuites : 
l'un fJ'appa leurs doctrines régicid,-, l'autre ordonne la 
destruction de leurs livres, le troiiè»e leur interdit ton . 
enseignement public. Le conseil des ministres,  cette 
nouvelle, s'assemble, et promul['.ue des lettres patentes 
enjoignant au parlement de surseoir pendant un an à l'exé- 
cution des arrêts prononcés. Oppositiun du parlement. Le 
monarque persiste dans son opinion. Enfin, on se rappro- 
che, et la surséance est limitée au t er avril ; on était alors 
en septembre. Un proet d'edit de réformation de l'ordre tut 
alors envoye au gen_ral Ricci à Ruine, qui fit cette ré- 
ponse fameuse : Sitôt ut sut, aut on sot. Enfin, le 
parlement reprit le cours de ses debats pendant les mois 
de mai, juin et jiillet. Arriva la fameuse séance du 6 aolt 
tîfi2, ou la cour, toutes les chambre» assemblées, a l'u- 
nanimite, et aprës une defibdration de seize heures, rendit 
un arrgt solennel et délinttif. On y trouve rapportée la lon- 
gue liste des jésuites aceusés d'avoir professé des maximes 
corcompues, et celle ,tes gënéraux et supfieurs qui les 
auraient encouragées. Cet arrgt, moins se%ëro que celui du 
règne de Henri IV, ordonne la dissolution de la Societé et 
la iermeture de  maisons; mais il ne seuil point contre 
les membre pris individuellement, il ne les bannit pas, il 
leur accorde même des pensions viagères sur les biens de 
la Compagnie, et les admet attx fonctions «le l'université, 
du clergé, de la magistrat Ire, de l'administration, moyen- 
nant un serment dont il spécifie la teneur. Presque tous les 
parlemenLs du royaume s'associèrent . la mesure prise par 
cch,i de Paris. Un édit du roi, de novemhre t76t, sanc- 
/ionna tout,., ces procédures. 
En Espagne, te jésuite« furent accu d'avoir ëté les 

JÊSUITES 
fanteurs d'nn attentat médité ¢otre la famille royale, et 
le 2 avril 1767 le monarque promulgna une pragmatique 
sanction, ayant force de loi, qui les exilait àperpétuité du 
royaume et ordonnait la confiscation de leurs biens. Cet 
édit ralluma le zële du parlement de Paris, qui.le 9 mai 
suivant rendit nn nouvel arret, expulsant de la France 
sous quinzaine tous les jésuites qui n'auraient pas prgté 
serment. Ils avaient été chassés dès 1ç59 du Portugal, 
on les accusait aussi d'avoir chercl,é  faire assassiner le roi. 
Cette accusation, bas6e sur une tentative de meurtre dont le 
roi Joseph avait failli ttre victime, en t75t, fut soutenue avec 
une grande passion par le marquis de Pombal, qui réussit 
à démontrer à peu près leur participation à cet attentat. 
.Les jésuites se firent ainsi successivement chasser de toute 
l'Europe. Le pape CIëment Xtll les soutenait seul. Il allait 
céder aux sollicitations de tous les monarques, quand il mou- 
rut. Sou successeur Clément X IV promulgua enfin, le 
21 juillet 1773, la bulle solennelle Dominus ac Redemptor 
noster, qui prononçait l'abolition de la Société de Jésns 
dans tous les royaumes de la chrétienté. 
A ce moment la Compagnie comptait 24 maisons professes, 
669 collèges, 176 séminaires, 61 noviciats, 335 résidences et 
273 missions, tant chez les idolatres que dans les pays pro- 
testants, et se composait en tout de 22,589 membres, 
dont moitié ayant reçu l'ordre de la prgtrise. Seuls, Fré- 
déric 11, roi de Prusse, et Catherine II, impératricede 
Russie, protégèrent les jésuites dans leur malheur, les gar- 
dant dans leurs Eats sous un nom simulé, et avec un cos- 
t,me un peu différent. 
Pie YI, successeur de Clément XIV, se montra mieux 
disposé en faveur de la Compagnie de Jésns, qui, en dépit 
de toutes les mesures prises par l'autorité séculière etait Iin 
d'étre anéantie. Les ex-jsuites étaient restés dans leurs 
provinces respectives comme simples pretres, la plupart 
du temps entourés d'une grande considération personnelle 
et remplissant d'importardes fonctions, soit dans l'Eglise, soit 
dans l'enseignement. En 1780 on en comptait environ 9,000 
en dehors de l'ltalie ; et il est vraisemblable que tous con- 
tinuaient à correspondre en secret avec leurs anciens chefs. 
On les a accusés d'avoir ëté pour quelqtte chose dans les 
menées des r o s e c r o i x d'abord, et ensuite dans celles des 
i 11 u m i n é s. Un essai qu'ils tentèrent, en 17t7, pour se re- 
constituer sous la dénomination de Vicentins échoua. Quant 
aux Pêres de la Foi, ordre religieux que, sous la protection 
de l'archiduchesse Mariane, Paccauari, Tyrolien fanatique et 
ancien soldat du pape, composa pour la plus grande partie 
avec des ex-jésuites et que, assiste par le pape, il mit en ac- 
tivité à Ruine avec une règle modifiée comme nouvelle $ocidtë 
de Jdsus, ils ne furent jamais reconnus par les supérieurs 
occultes des vëritables jësuites comme l'equivatent de leur 
Compagnie; et partout, en Italie comme en France, on les 
plaça sous la surveillance speciale de la police. L'abl de 
Broglie, qui alla fonder un collége des Përes de la Foi à 
Londres, faillit y mourir de faim; et son enlxeprise aboutit 
à une hanqueroute. 
La protection dont Pie VII entoura les jésuites fitt plus 
efficace. II confirma enfin, en 1 $0t, l'existence de leur Com- 
pagnie dans la Petite-R,tssie et et Lithuanie, oit, sous la 
direction du vicaire général Daniel Gruber, elle continua de 
subsister, limitée dans son activitê aux fonctions sacerdotales 
et à celles de l'enseignement. A la chute de Napoléon, quand 
le saint-père, longtemps prisonnier en lïrance, eut revu ses 
Eats, il signala son entrée à Ruine par le rétablissement des 
jésuites. La bulle Sollicitudo ommum, en date du 7 ao0t 
lSl.l, antorisa leur association en Russie, à aples et dans 
toute la chrétienté. Dës le 11 novembre de la m6me année 
ils faisaient solennellement la réouverture de leur noviciat 
Ruine. En t82-i ils v. rentraient en possession du Collegium 
romam«m; et leur nombre s'accrut tellement dans cette 
1 ville, qu'en 1529 il leur fallut se bàtir un en dehors 
couvent 
de son enceinte. Lent" général, le pre Fortis, taut mort 
I cette annéc-I., l'influence du cardinal sectélaire d'État 



JSUITES 
bani alCermina l'élection du père Roothaan, né à Amster- 
dam, que la Cmnpagnie appels à le remplacer. 
Voyons quel était pendant ce temps-là dans le reste de 
l'Europe le sort des jésuites : 
Le I « janvier tSt6 l'empereur Mexandre les expulsait 
de/lussie; et Jea Vl de Portugal signifia au pape que son 
intention était de maintenir l'arrèt qui les avait chassés de 
son royaume. Tandis que Ferdinand Vil d'Espagne s'empres- 
sait de les rétablir dans ses États, l'empereur d'Autricbe leur 
refusait l'accès des siens; mais le PiCont leur ouvrit ses 
portes, et autant en firent Naples et Modène. En France, 
humbles missionnaires, ils se répandent d'abord dans les 
départements pour y prêcher l'Évangile. La foule accourt à 
à leur voix. Quelques ecclésiastiques, quelques administra- 
teurs, s'opposent seuls, mais en vain, à leurs projets ; quel- 
ques plumes éloquentes essayeur de les combattre. Des dé. 
sordres éclatent sur plusieurs points ; le service divin est 
interrompu dans plusieurs églises ; des bommes plus ou 
moins coupables sont arrêtC. Des provinces, les mission- 
naires rentrent dans Paris. Bient6t ils créent de nouveaux éta- 
blissements à Montmorillon, à Pot/lors, à Vannes, à Bor- 
deaux, à Toulouse, à Besançon, à Saint-Acheul, à Mont- 
/ouge, à Arcs, à Forcalquier, à Soissous. Les jésuites exis- 
taient de fait en France, et y comptaient déja plus de 600 
élèves, sans que leur nom eut encore été officiellement pro- 
noueC La révolution de Juillet vint apporter on temps d'arrêt 
au développement de leur ordre ; mais le gouvernement de 
Louis-Philippe ne se trouva pas plus t6t consolidé qu'ils 
reprirent leur œuvre avec plus d'ardeur que jamais; et nous 
n'apprendrons rien à personne en ajoutant que par tes 
ëgards affectueux qu'il leur témoigne, le pouvoir actuel sem- 
ble avoir en vue de leur 6ter tout motif de regretter le bon 
temps de la Restauration. 
En Belgique, où la revolution de septembre 1830 fut en 
grande partie leur œuvre, les jésoiles se sont de plus en 
plus répandus. Depuis la séparation effectuée entre cet État 
et le royaume des Pass-Bas, il leur a été possible de fonder 
à Malines, dès 183-, une université dont tout le person- 
nel enseignant se compose de membres de leur ordre; et 
c'est pour faire contre-poids à cette institution que, dans 
la mme année, s'ouvrir à Broxeiles une université libre. 
En Angleterre, où ils ont tait beaucoup parler d'eux dans 
ces derniers temps, ils possèdent depuis les premières an- 
nées de ce siècle, à Stonyhurst, près de Preston, dans le 
Laneasldre, et ì Hodderbou»e, des coiléges de leur ordre. 
Depuis 1825 ils ont fondé en lrlande, pays essentiellement 
catholique, divers maisons et eolléges. 
Aux l;'.tats-Unis de l'Amérique du Nord, ils ont on éta- 
blissement d'instruction publique à Georgestown, et leur 
nombre y augmente de jour en jour. Dans les États de 
l'Amérique du Sud, les révolutions politiques onten pour suite 
de les faire persécuter et chasser à peu près partout. 
Dès 1818 la Suisse avait vu le canton de Fribourg rétablir 
un ancien eollége que la Compagnie y avait aulrifois possédé. 
Plus tard, les jésuites roussirent aussi à s'établir dans le 
canton de Schwytz et surtout dans celui de Lueerne ( au- 
tomne 18), o/ leur apparition provoqoa au sein de la Con- 
fédération helvétique une crise décisive. Les expéditions de 
volontaires entreprises contre eux et.contre le gouvernement 
de Lueerne, qu'ils dominaient, éebonèrent à la vérité; mais 
il en résulta que l'irritation des esprits devint de plus en 
plus vive et plus générale contre eux en Suisse; et la création 
du Sonderb'und, leur œuvre, provoqua enfin un mouve- 
ment qui mit fin  leur pouvoir dans ce pas. La destruc- 
tion du Sonderbund ( 1847 ) eut pour corollaire l'expul- 
sion de la Compatie du sol suisse, quoique son influence 
soit toojoors restée toute-p,dssante dans les cantons eatho- 
liques, et surtout dans le canton de Fribourg. 
Avant tSt8, les iésuites étaient tolérés eu Bavière sons 
le nom de Roedemptoristes, et ils avaient êgalement réussi 
à fonder, sous le méme nom, un grand nombre de maisons 
d'éducation en Autricbe. Dans les autres Étais aUemands, ils 
A 

-- JÊSUS ;t 
n'étaient point officiellement tolrés, et leurs menées secrètes 
ont dO ne pas peu contribuer aux troubles et aux emharra 
religieux dont certains d'entre ces États ont été le thétre. 
La tempête politiqne de 1848 fut un temps de rudes 
épreuves pour la Compagnie de Jésus. Le pape Pie IX, sans 
prononcer /ormellement la dissolution de l'ordre, se vit 
fore de le chasser de Rome,et autant en advint dans le reste 
de l'Italie, de mme qu'en Aotriehe; mais les Jésuites y sont 
bien vite revenus à la suite de la réaelion politique. La 
prostration morale qui a été lerésultat de l'avortement com- 
plet des espéranees provoquées par le mouvement révolu- 
tionnaire leur a été des plus favorables, et leur a fait rega- 
gner en influence tout ce qu'ils avaient perdu. 
Le père Roothaan, général elu en 1839, étant mort le 8 mai 
1853, gé de soixante-huit ans, la Compagnie proeéda h son 
remplacement dès le 2 juillet suivant, et Cot le père Berckx, 
provincial de la province d'Autriehe et belge de nation. 
Sur 31 votant, il avait réuni 27 sotfrsges. 
Dans la présente année 1855 l'ordre comptait en tout 5,512 
membres, ainsi répartis : Italie, Sicile, Sardaigme : 1,515 ; 
France, 1,697 ; Belgique, 463; Espagne, 361 ; Allemagne, 
177 ; Angleterre, Amerique et autres contrces, 1,294. Depuis 
son orione l'ordre des jésoites n'a encore eu que vingt-deux 
généraux, y compris le général actuel, le përe Berekx. Ces 
vingt-deux généraux sont : lgnaee de Loyola, espagnol, mort 
en 15b9; Jacques Lainez, espagnol, mort en 1558 ; François 
de Borgia, espagnol, mort en t572; Everard Mercurian, 
belge, mort eu 1580; Claude Aqoavia, napolitain, mort 
en 161b; Mutius Vitellesehi, romain, mort en 1643; Vin- 
cent Caraffa, nspolitain, mort en 1649; François Piccolo- 
mini, florentin, mort en t651 ; Alexandre Gotifredo, ro- 
main, mort en 1652; Goswin Nitkel, allemand, mort 
en 1064 ; Jean-Paul Oliva, génois, mort en 1681 ; Charles 
de Noelle, belge, mort eu 1686; Thyrse Gonzalè% espagnol, 
mort en 1705; Michel-Ange Tamburini, de Modène, mort 
en 1730; François Retz, de Bohème, mort en t750; Ignace 
Visconti, milanais, mort en 1755 ; Louis Centurioni, gé- 
nois, mort en 1757; Laurent Ricei, florentin, mort 
eu 1775 ; Thaddëe Brozozowski, polonais, élu en 1805, 
mort en 1820; Louis Fortis, de Vérone, mort en 1829 ; 
Jean Roothaan, d'Amsterdam, mort en 1853 ; Pierre Berckx, 
belge, l.lu le  juillet 1853. 
JÉSUS mot hebreu répondant ì ceux de secours, sau- 
veur, rddernpleur. C'était chez les Juifs un nom d'homme 
assez.fréquent au commencement de l'ère chrétienne. 
JESUS DE NAZARETH, comme le fondateur du ch ri s- 
t i a n i s m e, et comme l'idem de la perfection humaine d'a- 
prës l'image de Dieu, est déjd le plus remarquable, le plus su- 
blime et le plus vénérable des mortels, abstraction faite de la 
dignité quilui est attribuée comme C h r i st. Indépendamment 
de quelques passages peu importants d'ailleurs, qu'on trouve 
à son sujet dans les historiens latins, Tacite, Suétone et Pline, 
ainsi que d'un très-honorable témoignage rendu sur lui par 
l'historien juif Josèphe, les sources historiques ì consulter 
pour sa biographie sont surtout les quatre Evangiles. 
Les parents de Jésus (voye'. GÉ.Loçm n Jvs-Cmusr), 
Jo s e p h, cl,arpentier de son état, et .',I a rie, tous deux de 
de la race de Dadd, étaient pauwes et habitaient Nazareth ; 
de là son nom de Jèsus de l'a:areth. Marie mit au monde 
son fils, qu'elle conçut par l'opCation du Saint-Esprit, ì 
Bethléem, où elle s'(,tait rendue avec son mari pour se faire 
taxer. Sa naissance fut annoncée par des ages ì des ber- 
gers dans les champs. Ils viro'eut saluer la venue du Messie, 
et le troovèrent dans une crèche. On ne saurait déterminer 
avec une certitude historique complète l'année et le jour 
où cet événement s'accomplit. D'ordinaire on suppute l'an- 
née de la naissance de Jéus d'après le règne de l'empereur 
Auguste. Comme celui-ci, suivant l'opinion généralement 
admise, mourut quatorze ans après la venue du Christ, et 
qu'il régna en tout quarante-quatre ans, on fait dater la nais- 
sance de Jé.sus de la trentième année du règne de ce prince. 
Le calcul basé sut. la fondation de Ruine (an 750 av. J.-CJ 



622 
est beaucoup moins satisfaisant. Autre[ois on fixait le 6 de 
laurier (féte de l'lp»phaie) comme le jour où cette nais- 
sauce avait e,z lieu; mais  partir du quatriëme siècle on la 
reporta au 25 décembre (fête de 3oel). Huit jours après 
tre venu an monde, Jésus subit la circoncision et reçut son 
nom. Ensuite, quand les jours de purification voulus par la 
loi furent (coules, Ilarie l'emmena h Jerusalem pour le 
présenter dans le temple au Seigneur et offrir h Dieu le sa- 
crifice qui lui était d0. C'est  que Siméon prit l'enfant Jésos 
dans ses bras et le reeounut pour le Sauveur du monde. 
Tandis qu'il séjournait encore  Bethléem, des sages y 
arrivèrent d'Orient pour l'adorer. Une étoile les y avait con- 
duits. A ce moment déjà de graves dangers menacèrent la 
vie de Jesns. Le roi Hírode, redoutant que le Messie qui 
venait de naitre lui enlever son tr6ne, avait chargé les sages 
de lui faire savoir s'ils avaient découvert le nouveau roi. 
Avertis par un songe, les parents de J6sus s'enfuirent avec 
leur enfant en Epte, et Hérode ne recevant point des sages 
les renseignements qnïl en attendait, fit massacrer tous les 
enfants de Bethléem gés de moins de deux ans. Après la mort 
d'Herode, les fugitifs revinrent d'Egypte  Nazareth. Le r6cit 
de saint Luc, suivant lequel l'enfaht, alors/igé de douze ans, 
séjourna pendant quelque temps dans le temple de Jérusa- 
lem, ou il avait accompagné ses parents pour cél¢brer la 
fëte de Pques, témoigne de ses remarquables dispositions 
et de ses sentiments profondCent religieux. On a fait bien 
des suppositions sur la maniè'e dont il avait pu acquérir chez 
un peuple ignoraut, et " une époque de ténèbrs, la science 
par laquelle il s'élevait au-desso de tous les autres hommes ; 
mais elles n'expliquent point le fait en lui mme. Aussi bien, 
en peut à cet égard se contenter du témoignage de Jésu, 
qui nous apprend lui-mme que ses facultés intellectuelles, 
sa force et sa doctrine lui venaient de Dieu, et il imporle 
beaucoup plus assurément de savoir quels furent ses actes ici 
bas. Ses parents, l'ayant cherché aprës l'avoir 6garé en s'en 
revenant  Nazareth, le trouvèrent dans le temple au milieu 
des docteurs, qu'il frappait de surprise par sa sagesse. On 
manque de toute espèce de renseignements historiques sur le 
temps qui s'écoula entre la douzième et la trenti/:me annëe 
de sa vie. On a chercbé  remplir de diverses façous celle pé- 
riode de Pexistence de Jésus. Tant6t on veut qu'il soit ailWen 
Egypte et qu'il s'y soit formé parmi les Esseniens ; tantôt 
on le fait dans le mêmç but vivre chez les BI a z a ré e n s, ou 
encore parmiles Sadducens. Tout ce que nous apprend 
à cet égard la Bible, c'est que son apparition publique com- 
mença à l'époque où, sur les bords du Jourdain, J e an bap- 
tisait et anuonçait la venue prochaine du r6gne de Dieu 
en exhortant les hommes à faire pénitence. Saint Luc rap- 
porte que Jésus tait alors dans sa trentième année. Saint Jean 
l'CangCiste disant que Jésus vint à trois reprises célebrer 
la fte de Pques à Jérualem, on en a couclu que la vie 
pblique du Christ n'avait duré que trois années. Ces pré- 
somptions s'appuient sur ce fait, que .b'us vint à Jérusalem 
a l'occasion de chaque fte de P/iques, et que saint Jean a 
rendu compte de chacun de ces voage. lais ce sont là des 
suppositions manquant de certitude, et on peut admettre 
que la vie publique de Jésos dra bien au-delfi de trois an. 
nées. Jesus, lui aLsi, se fit baplir sur les bords du 
Jourdain par saint Jean-Baptiste. A cette occasion Jean, con- 
sidérant une colombe venue du ciel planer sur Jésus comme 
le smhole de l'Esprit de Dieu qui desceudait sur lui, le re- 
connut et le désigna pour le Messie prédit par le» pro- 
phètes. Jésus en avait la persuasion intime, de mme qu'il 
était convaincu que c'était lui qui fouderait le royau me de Dieu. 
Cette conviction u'ëtait rien moins que du lanatisme; ce 
n'étaient point en elfet des sentiments obcurs et confus qui le 
dominaient, mais des périsCs claires et lucides. Loin de mé- 
priser la parole écrite de la révélation, il l'honorait. Il ne 
cherchait pas à s'entourer de l'apparence extérieure de la 
piété, et blàmait, au contraire, une semblable conduite. [I ne 
.',e faisait point une morale à son usage particulier, et ne re- 
coin'ait pa non [hts  la xiolen¢e pour atteindre on bol. Il 

Ésus 
ne courait pas davantage au-devant «lu martyre et 
nullement iesensible  la douleur physique, comme c'est 
s ch les enthonsiast. Jésus éit tou le oene, et 
agissait en conquenoe. On ne salit non pl l'ur 
n'avoir é qu'un imposte. Une telle impufion mi dé- 
mentie par la poté  par la nobsse de son rare, 
par le respect profond que lui moiaient 1 at, 
par la foi enfire qu'i avaient eu lui, par son oempl 
doEtírement, par  oeance da la proon de 
Dieu, par on rcnouoement ablu  tou p de 
sance politique et de souveraeté ter. Lorsque apr 
avoir reçu le baptême, il so relira da la solitude pour 
pparer  sun grand oeuvre, il y fut, il est vrai, 
par la teutatrice peée de proer dans un but politi 
l'altcn d'un Messie où éit  nation; mais il la repo 
aussit6t loin de lui et pour toujours. 't comme bb 
eeignant et oemme Msie venant Uexhorr séeut 
h s'occuper de son amélioraUon more, qu' sepren 
peuple, en anuonnt qu'il ouvrait l poaes du royaumede 
Dieu fi tous ceux qui se sanctifient vélement; d que 
lui-mme il  soumeait encore àtou I prcdpfions de 
l la loi mosaique, qu'il gérist I mal moralement et 
physiquement, et qu'il allait de oE et d'aue en fsant 
le bien. Ses mirl, nomment s gusons spontans 
l de malade, étaient des bienfas; ils appointent Pattenfion 
du peuple r lui, et donnèrent h pser qu'il dit oel q 
avait été prëdit. Son oracre et sa vie ent purs et 
tache.  lëmoignail d'un si parfait amour  Dieu et de 
l hommes, que nous adorons à n droit  I l'idl 
camé de Phomme moral et que nous lenons n emple 
comme une règle de conduite obituaire pour to 
chréfiens. Qut au royaume de Dieu qu'il voulait routier, 
il s'agissait d'une nouvelle communanoE de vie relieuse 
pour affiver  la véble et pure adoration de Dieu,. la 
vérible veu et h la religieuse prance d' e. 
nelle. Ceffe «ommuuauté de vie rdigieuse, il ne rouit point 
qu'efle reposer sur une conainte exieuoe; elle ne devait 
consister que ds la foi et n'aoir d'autres sign  re- 
connnoe e le bapltme et la commuon. 
Peu de temps après qu'il t oemmencé sa ion, 
Jesus adroit près de lui qudqu disples vivat da sou 
inite, et dont le nombre fut bit porté à do. Plus 
ta on leur donna le nom d' ap6 t res. C't aussi 
épue qu'il assis avec sa mëre et ses dipl au 
de Ca ha. Il se rendit av eux et avec s frëres (Ju, 
Joh, Simou  Jude [saint Mthieu, XII[, ; iut 
51arc, VI, 3 ], et il est aui que»fion de SœUrS de J) à 
Caphaaum, pub, apr y avoir fait uu cou séjour,  
lem pour la fête de Pàqu. Boeup aent foi  lui, 
et le pharisien Nioedème vint le visiter de nuit po s'eu- 
tre[enir avec lui. Il séjoua alo pent quelq toeps 
en Judée ; ms il s'en revint en Gaiilee, d l homm 
dont il y devint i'obj curent appelé l'attention d phari- 
siens. Son chemin le oeuduisait par Samarie.  route il eut 
avoe une Samtaine un enefien, par suite duel non-s. 
lement oelle-ci t en lui, mais enoeoe buoeup de 
riins prirent parti pour lui. De retour en Gal, J 
se rendit de nouvu  Ca; oedaut, il s6joua-le plus 
souveut à Capharnaum, où il enseigner  où il a¢oemplis. 
it des micles, ai qu' Nare Ms fl t s'i" 
de oette ville. C'oet tandis qu'il uroet la Gée, qu'il 
trave le lac Généeth ,.afin de proer n oere 
l'autre rive, et qu'il envoya dans le cor des pouux 
démons qui obseut dx pod d'entre 1 
nieus. De lb il s'en ret à Caplmrnaum, travaillant I et 
dans 1 environs h la fondation et à la profion du 
aume de Dieu, soit par  entrefis, it p de plus 
longs discours, ou bien par d comparahons owp, 
ou enco par des miracle. C't wembIae.vece 
temps-là que Jíss prouonça son sarmon  la mon 
qui roule sur d enseignements moraux,  où il a donné 
aux bomm ns Uorai don.a véritable 



JESUS -- JET ])'EAU 
mule que doit revëtir la prière. A l'occasion du nouveau 
séjour qu'il alh faire alors à Jérusalem pour la clbra- 
tion de la fête de Pques, la haine que lui avaient vouée les 
pharisiens s'exprima déja d'troc manière si grave, qu'il 
ne |arda point à s'éloiguer de cette ville. Après avoir ac, 
compli en route le miracle de nourrir cinq mille individus 
avec cinq pains et deux poissons; avoir prié sur la mon- 
laine et ëlre retourné auprès de ses disciples, il envoya 
ceux-ci à Jérusalem clébrer la féte des Tabernacles, et les 
y saivit. Alors encore il put voir combien les pharisiens le 
détestaient et étaient dcidés à le persé«ter. C'est pourquoi, 
quittant la Judée, il se rendit vers les frontières de Tyr et 
de Sidon. C'est à cette occasion qu'il secourut une ferarae 
cananéenne, qu'il guérit nn sourd-muet et nnnrrit encore 
une fois quatre mille personnes avec sept pares. C'est alors 
aussi qu'eut lieu ce qu'on appelle la transfiguration de Jésus, 
à laquelle prirent part Pierre, Jacques et Jean. 
Cependant les temps de sa Passion approchaient. Con- 
vaincu qu'il périrait victime de ses ennemis, il porta le 
nombre de ses disciples à soixante-dix, et se rendit ensuite à 
Jérusalem pour la fète de Pques; mais il en repartit bientét, 
a cause du earactëre de gravitê que prenaient les persécu- 
tions dirigées contre lui, et se rendit à Peroea, où il ressus- 
cita Lazare. Puis il alla à Jéricho, o/i il logea chez Zachée; 
de là encore à Bethanie, et il rentra enlin à Jerusalem, 
il fut accueilli aux cris d'llosannah ! par le peuple, auquel il 
devait donner en ensenements sa Passion, sa mort et sa 
resurrection. Le soir mème, il s'en retourna à Béthanie, 
mais pour s'en revenir bientôt encore à Jérusalem, où il 
maudit le uier stérile, chassa les acheteurs et les vendeurs 
du temple (saint Marc, II, 15 et suiv.), enseigna par para- 
boles dans le temple, et prédit le sort de Jérusalem. Il s'en 
revint alors de nouveau à Béthane, oim Marthe lui lava les 
pieds. U séjourna ensuite sur le Gethsemane. C'est pendant 
ce tempe-la que J udas offrit de vendre Jésus moyennant 
trente deniers. Jésus voulant céibrer avec ses disciples la 
Iète de Pques, revint à Jérnsalem, lava les pieds de ses 
disciples, patin de la trahison dont il était menacé, institua 
la sainte comxnunion dans la cèn e, se rendit au mont des 
Olives, y pria pour lu/et ses disciples, et revint dans les 
jardins de Gethsemane. C'est là qu'il fut recherché et trahi 
par Judas et ceux qui accompagmaient le traRre. Pierre 
voulut, il est vrai, degendre so marre, et abatlit mème une 
oreille à Malchus. Mais Jésus lui reprocha cet acte de vio- 
lence, guérit Malchns, et se livra ensuite a ses ennemis. 
Ceux-ci le conduisirent d'abord à Idannas, puis/ Caiphe, 
laccablèrent d'insultes et le condamnèrent comme blas- 
phémateur, pour s'ëtre comme Christ déclare le fils de Dieu. 
Pendant que Pierre le reniait, alors que Judas, bourrelé 
par les remords de sa conscience, se pendait, Jesus était 
conduit devant P ilate, puis devant IlCode, et rameaé 
devat le premier. Pilate voulait le faire mettre en liberté ; 
mais le respect humain l'en empècha, et le contraignit 
rendre contre lui une sentence de mort, que le peuple 
ameuté lui dit'tu. En butte aux railler/es et aux outrages de 
toutesespèces, Jésos devait tre mis en croix. Trop faible pour 
porter lui-mme sa croix jusqu'au lieu du supplice, ce fut 
Simon de Cyrènn qui dut le remplacer. La mise en croix 
eut lieu un vendredi, sur le Golgotha. Le corps tenait à nne 
chrille fixée dans la croix; les pieds n'étaient que tiés, et 
non pas traversés par un clou; et au-dessns de la croix, 
pilate, pour narguer les Juil, avait fait placer les initiales 
L N. P,. [. (Jésus de azareti, roi des Juffs). On crucitia 
en même temps que Jésns deux barrons. Les expressions qu'il 
lit entendre sur la crmx, priant pour ses ennemis, prenant 
soin des sims et plein de confiance en Dieu, confirment 
ses hautes qualites divines. On les a recueillies sous la dé- 
nomination de « Les sept dernières paroles de Jésus. = Eles 
sont continues dans ces phrages : « Mon Përe, pardonnez- 
«leur; car ils ne sasent ce qu'ils font: » « F.n verité, je te le 
• dis, aujourd'hm même tu seras avec moi dans le paradis ! 
• Mère, vici votre fils! » Et à Jean : « Voici tu mere' » 

« Mon Dieu, mon Dieu ! pourquoi m'avez- rous abandonné ! » 
« J'ai soif! » « Le sacrifice est accompli! » « Mon Pere, je 
vous recolumaud iuon esprit ! » 
Jésus mourut à la neuvième heure, c'est-à-dire à trois 
heures aprts midi. Sa mort fut accompagaêe de phéno-- 
mènes extraordiuaires, qui arrachèrent au commandaut de 
la garde placée sur le lieu du supplice la declaration que 
Jésus était bien veritablement le $1s de Dieu. Pour ëtre plus 
sors de sa mort, ses bourreaux lui percèrent le flanc droit 
avec une lance, et de la blessure il découia d, sang et de 
l'eau. J o s e p h d'A r i m a t liie ensevelit ensuite le cadavre. 
Mais les ennemis de Jésus élablirent nne garde auprès de 
son tombeau, parce qu'ils redoutaient qu'on enlevat son 
corps pour en attribuer la disparition à uue résurrection. 
Il n'en ressuscita pas moins, se munira à ses disciples, 
resta encore quarante jours parmi eux, continua à les ins- 
truire, les bénit, puis monta aux cieux,c'est-à-dire qu'il 
disparut tout a coup à leurs yeux. Mais ses disciples trouvè- 
rent dans l'eff,sion du Saint-Esprit un nouveau courage pour 
continuer son œuvre, annoncer résolùment I',".vançle au mi- 
lieu de tous les périls et de toutes les persécutions, et sacrifier 
avec ioie leur vie, afin de témoiguer de leur fidelité à Jësus. 
Pour ce qui est de la figure de Jésos, à l'ëgard de la- 
quelle on ne trouve pas le moindre détail dans les ouvrages 
bibliq.ues, voye:. Cumsr ( Iraages du ). 
JESUS (Compagnie ou Société de). l'oye JEscs. 
JÉSUS (Compagnies de) ou DE JËHU. Foye-- CopA- 
JÉSUS-CHIIST. Voye: JÉSES de Nazareth. 
JÉSUS-'CHIIST ( Imitation de). Voye-- b,rrxxms n 
Jg:svs-Cnn|sr. 
JÉSUS SIRACIDE. |-o/e-- 
JET. Ce mot représente l'action de jeter, de lancer avec 
force une chose quelconque. Les peintres entendent par le 
jet d'une draperie la façon plus ou moins heureuse, plus ou 
moins naturelle dont sont rendus les mouvements, les plis, 
les accidents d'une draperie. Les fondenrs appellent jet 
l'a6on d'introduire un métal en fusion dans le raoule dont 
il doit prendre la forme; une pièce fondue d'un seul jet 
est celle dont toutes les parties ont été fondues siraultane- 
ment dans un seul moule : ils donnent également ce nom 
de jet aux ouvertures rnénagees dans differentes parties du 
moule afin d'introduire et de distribuer le métal d'une ma- 
n/ère égale. Jet d'eau se dit principaleraeut de l'crut qui 
s'elace d'une fontaine jaillissante, du centre d'un bassin, et 
qui s'elëve à une hauteur plus ou moins considérable. Les 
agronoraes appellent jet d'abeJlles le nouvel essaim que 
produisent et expuiseni les insectes industrieux d'un ruche. 
E botanique, on appelle jets les bourgeons, les scions que 
poussent les arbrg, les vnes 
Au figuré, dans le langage de la liftCature et des arts, on 
appelle composition d'un seul jet celle qui a été faite avec 
rapidite, sans qu'on y revint à plusieurs fois, et on nomme 
prenier jet ce qui n'est encore qu'ebauche, les idées que, 
dans un moment d'ingpiration, on a eu h/te de jeter sur 
le papier, quelque informes qu'elles fussent, quitte  les cor- 
riger et à lesmodilier plus tard. 
Une circonstance de force majeure, dans laquelle les ma- 
rins d'un bàtiment jettent à la raer les marchandises de leur 
navire pour l'alléger, a fait donner à cette action le nom 
de jet de rnarchandLses : le Code de Commerce exige qu'il 
y ait ddiberation préalable quand il y a jet de rnarcAan- 
dises dans une tempête ou dans une chasse donnée par un 
bàti.ment ennmd. 
JET D'EAU. Pour que l'eau puisse jallir en sortan 
d'un tuyan, il faut qu'elle provienne d'un réservoir supe- 
rieur. Celle condition remplie, on reeunnalt que l'eau qui s« 
présente à l'orilice du tuyau eaoE en effet animée d'une vitesse 
d'autant plus grande que ses molécules tombent de plus 
haut. Il semblerait même au premier abord que le jet dilt 
s'elever à la mème hauteur que le niveau du réservoir ; cepen- 
dant, plusiours causes empéchent qu'il en soit ainsi. D'abord 



le frottement de Feau contre les parois du tuyau, ensuite la 
résistance de l'air, enfin le poids des gouttes qui retombent 
sur celles qui s'Cèvent, sont autant d'obstacles qui s'oppo- 
sent à l'entier effet de la force ascensionnelle du jet. Mariotte 
a constaté qu'asec un ajutage d'une ouverture d'au moins 
23 ou 27 millimètres, un jet d'eau fourni par on réservoir dont 
la hauteur est t m, St, s'élève h 1% 2.. On sait, par expé- 
rience, que la différence entre les bauteur du réservoir et du 
jet est sensiblement proportionnelle à cette dernière hauteur. 
A égalité de vitesse acquise, l'eau s'élève d'autant plus 
haut que l'ouverture de l'ojutage est plus grande, parce que 
le frottement se trouve relativement moins considérable. 
Mais il faut que les tuyaux de conduitesoient assez gros pour 
lournir l'eau en quantité suffisante. Ainsi, pour un ajutage 
de o,ot35 de diamètre, et un réservoir de 16m,892 de 
hauteur, le diamétre du tuyau de conduite doit tre de 
0m,088 environ. Cette donnée suffit pour calculer le clin- 
mètre quedevra as-oir le tuyan de conduite dans toute autre 
circonstance, car pour que deux jets d'eau s'Cèvent à leur 
plus grande hauteur respective, il laut que les carrés des 
diamètres des tuyaux de conduite soient entre eux en raison 
composée des carrés des diamètres des ajutages et des ra- 
cines des hauteurs des réservoirs. 
JET D*E*U (Zoologie), uom vulgaire donné par 
quelques auteurs aux ascidies ou t z n ici e r s, parce que 
lorsqu'on les comprime elles lancent l'eau renfermée dans 
leur sac branchiai. Ou pourrait appeler ainsi tous le 
lusques et les rayonnés qui présentent le mème phénomène. 
C'est ì tort qu'on a cru que l'eau ainsi lancée était quelque- 
fois irritante et produisait des puqules et dautres éruptions 
sur les p.arties du corps qu'elle frappe. L. LAUF, E,T. 
JETEE, terme d'architecture dont on se sert pour 
désigner le mur d'un quai ou d'une digue que Port lait à 
l'entrée des ports, dans le but d'en empécfier l'encombre- 
ment par les galets et les sables. Les jetCs sont ordinaire- 
ment faites dans les ports de ner, où elles ont également 
pour but de faciliter le halage des navires contrariés par les 
vents dans leur entrée ou dans leur sortie du port. L'utilité 
de ces murs ne se borne pas encore là : ainsi, ils servent à 
rendre le lit d'une rivière plus profond en resserrant ses li- 
mite», et facilitent par conséquent la navigation ; ils s'oppo- 
seul également aux inondations et servent encore de com- 
munication entre les forts destinés à déferdre l'entrée d'un 
pot de mer. Dans les ports, ou l'utilité des jetées est in- 
contestable, on les construit sur deux lignes parallèles, entre 
lesquelles se trouve la voie du port ; le mode de construc- 
lion en est 'ariable : tautèt on se contente de jeter à la 
mer une quantité considérable de pierres, de rochers et au- 
tres matériaux propres à combler l'espace o l'on veut élever 
la jetée ; d'autres fois on  enfonce d'énormes pieux destinés 
à soutenir des constrnctions en pierres et en ciment. On 
peut en avoir une idée par ce que l'on voit faire pour la 
construction des plies d'un pont ou d'un quai. L'Aneterre 
abonde en constructions de ce genre; en France, les prin- 
cipales jetCs sont celles de Dunkerque, Calais et Cherbourg. 
La construction d'une jetée est un des travaux maritimes 
les plus difficiles à bien exéc,ter, avec toutes les condi- 
tions de durée et de soliditë nécessaires. . C. Fxvno¢. 
JETOn. Les jetons sont plus anciens peut-Cre que 
l'aritlmétique, si l'on veut considérer comme tels les coquil- 
lages qui servaient aux calculs et aux échanges des peuples 
primitifs. Suivant Hérodote, les Égyptiens, outre leur ma- 
nière de compter avec des caractères, employaient de» pe- 
tites piirres, plates, polies, arrondies et d'une mëme cou- 
leur. Les Romains s'en servirent longtemps aussi ; ils les 
appelaient calculi. Lorsque le luxe s'introduisit à Ruine, 
on commença à employer des calculs d'ivoire. Au reste, 
beaucoup d'expressious luisant allusion à l'addition ou à la 
soustraction des jetons dans les comptes prouvent que chez 
eux la manière de compter ainsi était très-ordinaire. 
C'était la première arithmétique qu'on apprenait aux en- 
fants, de quelque condition qu'ils fussent, Des.jetons faits 

JET D'EAU  JEU 
avec des petites pierres blanches ou noiroe servaient à mar- 
quer les jours fastes et néfastes. Une autre espèce de jetons 
servait aux suffrages dans les assembles du peuple et du 
sénat. Cicron nous apprend qu'ils étaient de bois mince, 
polis et frottds d« cire. 
Ce n'est guère qu'en France qu'on peut trouver l'origine 
des véritahles jetonsd'or, d'argent ou d'autre métal. Encore 
n'y remonte-t-elle pas au delà dnquatorzièmesiëcle. On lap- 
pela d'abord 9elloirs, 9Jets, 9 ets et 9iclons. Les rois en fai- 
saient fabriquer des bourses pour ëtre distribuées aux officiers 
de leurs maisons charges des états de dépense, aux vérifica- 
teurs de ces états et aux personnes qui avaient le maniement 
des deniers publics. Ces jetons portaient diverses légendes 
comme : Pour les cornples ; Pour les finances ; Pour l'cu. 
rie de la reine; Por l'extraordinaire de la 9uerre ; Pro 
camera cornputorum ]renioe; Entede'- bie et loyale- 
nenl aux contples; Garde=,vou de nêscornpter; Qui bie 
ettera, son compte trouvera, on simplement les noms des 
officiers qui s'en servaient. Plus tard on frappa sur leur re- 
vers l'effigie du prince. 
Les villes, les compagnies et les seigneurs en firent aussi 
labriquer à leur nom et a l'usage de leurs officiers. 
En 170t la munificence royale accorda à l'Académie des 
jetons d'argent, qui se distribuaient chque jour d'assemblée 
aux membres présents. Cet usage ne tarda pas a se répan- 
dre ; il subsiste encore aujourd'hui. 
JE termedérivé des mèmes racines que celles de joie, 
jouissance et jeunesse, concours de choses ordinairement 
associees. De tous les étres animés, l'homme éprouve le 
plus le désir d'exercer sa sensibilité, de déployer dans des 
exercices ou des luttes ses facultés physiques et murales. 
Les jeunes animaux se plaisent entre eux à mesurer leur 
agihté ou leur vigueur, particuhèremeat les plus vifs, comme 
les clfiens, les chats, les chevaux, les singes, etc., se dis- 
putent la gloire de se surpasser en force et en adresse. 
Toutes les nations connaissent différents jeux, soit du corps, 
soit de l'esprit, ou cherchent des recréations dans les 
chances du hasard. Ce goOt devient méme si vif chez les 
personnes inoccupées, qu'il se transforme en besoin, et 
devient une nécessit6 contre le tourment de Fennui. Par 
toute la terre l'homme, mécontent de l'uniformité de sa vie 
ou d'un sort insipide, cherche, par des secousses, une occu- 
pation à son actisité surabondante ; dans l'enfance surtout, 
les jeux entrent nécessairement dans la trame de l'ex/stence 
pour repartir en tous sens l'activité vitale. Sans ces exer- 
cices des membres, ou cette espëce de gymnastique inspirée 
par la nature, les forces ne se distribueraient pas également, 
les fonctions digestives languiraient ; malheur à l'enfant 
trop assidu, trop pensif, qui ne prend point assez de di- 
vertissement . c'est oe qui arrive aux individus rachitiques, 
qui périssent, jeunes encore, dans l'atrophie. 
Les ahciens, avant la dëcouserte de la poudre à canon, 
a)ant plus besoin de vigueur et d'agilitë dans leurs guerres 
que les modernes, prisaient beaucoup ces qualités; de la 
leur éducation gymnastique, ces combats d'athlëtes et de 
gladiate urs, jeux violents, que ne dédaignaient pasles hommes 
lesplus illustres, los anciens paladins et chevaliers aimaient 
également à briller dans un carrousel ou un tournoi aux 
yeux de leurs dames, en maniant avec adresse la flambege 
ou la lance; mais ces témoignages devigueur sont abandon- 
nés aujourd'hui aux forts de halle ou aux sauteurs et his- 
trions. Cependant, les Anglais estiment encorel'art de boxer; 
les Espagnols rechercfient la force et l'audace dans les 
combats de taureaux ; la chase enfin, les armes et la danse 
sont testC d'agréables récréations pour la jeunesse. 
blous n'approuvons pas que, dans les exercices corporels, 
on veuille écarter des enfants et adolescents toute blessure, 
toute contusion, toute douleur : il suffit d'éloigner les dan- 
gers des chutes, des ruptures, des dislocations, ou des 
hëmorrhagies; nais il convient d'endurcir Porganisme à 
la peine et au mal, de rompre dès l'enfance à la faligue b 
la faim, à la chaleur et àla troidure, des tem,éraraents qui 



JEU 
• e demandent qu'à essa.er leur nergie. C'est trop de I- 
cheté et de mollesse que d'attendrir de jeunes hommes entre 
le giron de leur nourrice, alors qu'il faut se préparer à la 
dure milice de la vie. Combien out regretté qu'on leur eOt 
tant épargné de souffrances, lorsque les tempètes des ré- 
volutions, les hasards de la guerre et des voyages, les ont 
jetés dans l'infortune, sur des plages étrangëres! Pourquoi 
ne pas tourner ces jeux «le l'enfance en robustes exercices 
pour Pavenir, puisqu'eile les supporte avec joie? 
Les plus détestables des jeux sont ceux de hasard, ou 
de chances de perte, et cependant les plus usités parmi 
lous les peuples, parce qu'ils intéressent beaucoup la cupi- 
dité sans offenser l'amour-propre : ce sont aussi les plus 
lunestes, par leurs résultats sur la santé comme sur la 
lune. 
On ne s'étonnera point sans doute de ne pas nous voir 
alClu)er ici la faconde des moralistes et tracer l'énergique 
tableau de ces joueurs attendant avec impatience autour 
d'un tapis vert leur sort dune carte ou d'un dé. Les vieilles 
douairiëres, dpitées contrele siëcle qui les délaisse, viennent 
s'asseoir à un biribi, à un reversi, à un vhist, dans des 
brelans, aec ces antiques chevaliers de lansquenet dont 
lïndustrie n'a plus pour fonds de cuisine que de savoir 
..................... par un peu d'artifice 
Dun sorl injurieux corriger la mahce. 
Combien de ces Beverleys, p;les, échevels, la poitrine dë- 
ehirée de rage, sortent au milieu de la nu,t de ces antres 
inlernaux o/ l'aveugle dieu du hasard vient de leur enlever 
le pain de leurs enfants, les derniers baillons de leurs 
femmes, qui les attendent dans la misère et le désespoir! Ils 
rentrent, et l'aspect de ces infortunés et le remords sanglant 
de leur conscience redoublant leur fureur, souvent u« sui- 
cide fatal termine le drame de cette eff«o]able passion. 
Cependant, par un attrait inconcevable, la grande majorité 
du genre lumaain se montre avide des émotions que lui 
.ca-sent le gain ou la perte; on s'y acharne avec une telle 
ardeur, que mme les ancieus Germains, au rapport de Ta- 
cite, jouaient jusq«'h leur liberté et leur vie. Les dettes les 
plus onéreuses $ deviennent les engagements les plus sacrés. 
l{egnard a dit dans le Joueur : 
11 faut opter des deux, elre dupe ou fripou. 
Tous ces jeux dr hasard n'attirent rien de boa. 
J'aime ces jeux galants oU l'esprit se dëploie : 
C'est, mousieur, par exemple, un joli jeu que l'Oie. 
La santé d'un joueur de profession n'est pas m/eux assurée 
que sa fortune. Le voilh qui s'assied h son latal banquet 
pour assouvir iasoii de l'or qui s'est allumée en lui. A peine 
les cartes ou les dés sont-ils remués que la crainte, l'espé. 
rance, circulent dans toutes les poitrioes aser la cupiddé, 
le dépit, la fureur. Tàtez ,e pouls des joueurs, il est if, 
inégal, fébrile;  peine s'ils songent aux premiers besoins de 
la vie : ils passent leurs nuits sans sommeil, et c'est dans ce 
dësordre que toutes les fonctions s'intervertissent ; t'estomac, 
les viscères abdominaux, languissent durant ces longues 
séances, le défaut d'exercice fait tout tomber dans l'atonie. 
La plupart de ces martyrs de leur passion devienuent Il- 
rides, outre que le branle continu de ces ëmotions décon- 
certe singuliërement l'harmonie nécessaire a la santé. Le 
joueur éprouve vingt crève-coeur concentres par soirée, au 
milieu des querelles et des disputes ou des occasions de 
friponnerie. Qudle humeur si douce qui ne 'aigrisse ! quel 
calme apparent qui ne soit empoisonné! Wa-t-on pas su 
dans ces rages étouffé.es, aprës une perte, le sang jaillir 
.avec force du nez ! Qu'on juge des tiraillements affreux 
qu'éprouve ce cupide avare auquel un coup imprévu arrache 
son or, si précieusement amassé, si l'on peut s'empcher 
de rire de sa laide grimace ! comme les procès, les jeux oc- 
casionnent de lunettes maladies, par les chagrins et les 
rempotes que leurs pertes suscitent sans cesse! 
Excepté la ruine du temps, toujours irrëparable, on ne 
-aurait bl;mer disezses sortes de récréations. Il en faut pour 

dissiper nos préoccupations soucieuses, nos peines secrètes, 
il y a des distractions nécessaires; il en est surtout d'utiles 
et d'instructives, telles que les jeux scéniques, les repre- 
sentations du théatre comique ou tragique; lorsque des es- 
prits de plus bas lage prdèrent des tours de bateleurs ou 
des farces burlesques il est une loule de jeux de ociété 
qi aiguisent agrablement Iïntelligence, éveillent la saga- 
cité. C'est surtout après le repas, après des maladies, des 
chagrins cruels, que la musique et des jeux délassants exci- 
tent une douce hilarité, de salutaires efforts pour rétablir la 
santé. Tous les jeux de société n'ont peut-être pas cette 
valeur, et tout le monde ne prend pas en bonne part le 
nom de jeux innocents qui leur est donné. 
Les jeux de combinaisons, d'Cher.s, de dames, les casse- 
tte, etc., et autres plus ou moins matbématiques, dépen- 
dant plus ou moins du travail de t'intelligence, fatiguent 
sans doute, par la conteotion d'esprit qu'ils exigent, mais 
gratifient l'amour-propre de jouissances ou l'intéressent. 
Mnntaigne les trouvait ineptes, en ce qu'ils ne sont pas assez 
jeux. Tous sont silencieux, pensifs, et ont été inventés 
dans les pays chauds, mi les hommes sont habit-és /a une 
vie cootemplative et sédentaire. Si l'on ne doit pas recom- 
mander ces jeux comme des récrations, ne saurait-on en 
trouver l'utile application? Voyez ce jeune évaporé, qui, 
courant sans objet çà et là, dissipe sa vie : pourquoi ne 
tenterait-on pas de le fixer par ce mosen? Qu'il s'Crenne 
par amour-propre du jeu d'Chers, il faudra bien qu'il y 
concentre sa éflexion. Aussi les mathématiciens, les esprit» 
studieux, se passionnent-ils quelquefois pour ce genre de 
rcration, d'autant plus qu'il semble donner une preuve de 
sagacité et de force de combinaison intellectuelle. Tout au 
moins, ces jeux ont la propriété d'accroltte l'effort de l'at- 
tention. 
Le moyen de se défendre du pril des jeux consiste à 
écarter l'oisiveté. Quiconque sait s'empétrer d'occupations 
graves ou prolondes ruera bient0t cet ennui contre lequel 
on invoquait le secours des jeux : Meliu.s non inctpient 
quam desinent. Il est pls difficile de s'en abstenir lors- 
qu'on les a pratiques que de ne pas les apprendre. Qui a joué 
jouera, comme le vin rappelle le buveur. Tel est le violent 
despotisme des habitudes sur les dispositions du système 
nerveux  la priodicité. Le seul triomphe est dans la fuite, 
lorsque l'on est à peu près assuré de sa défaite dans le 
combat. J.-J. Vm£r. 
JEU (Droit). C'est une convention par laquelle les par- 
lies s'engagent à donner h celle d'entre elles qui gagnera 
une comme ou un objet dëtermin. Ce contrat est alëatoire ; 
car la perte ou le gain, indépendants du pouvoir de cha- 
cune des parties, sont tout à fait incertains, et l'evénement 
prévu, placé dans l'avenir, repose sur des chances plus ou 
moins probables. 
Les lois romaines défendaient de Jouer de l'argent, et 
non-seulement elles refusaient to,2te action pour ce qui avait 
té gagué au jeu, mais elles accordaient au perdant le droit 
de réclamer ce qu'il avait ç,ffé pour le prix du jeu. Elles 
n'exceptaient de la dfense que les jeux qui avaient pour 
objet l'exercice du corps et étaient utiles pour la guerre. 
Justinien, tout en confirmant ces lois, ordonna que peur 
les jeux qui étaient permis on ne pourrait jouer plus d'nn 
écu d'or par partie ; il voulut encore que dans le cas 
le perdant aurait négligé de réclamer la somme qu'il aurait 
perdue aux jeux deleudus, les officiers municipaux pussent 
en poursuivre la rpétition pour l'appliquer à des ouvrages 
publics concernant l'utilité ou la décoration de la ville. 
Les prescriptions des lois romaines ont été souvent rappe- 
lees et renouvelées, sauf certaines modifications, par les or- 
donnances des rois de France : ainsi, Charlemagne, dans 
ses capitulaires, délendit les jeux de hasard, à peine d'tre 
privé de la communion des fidèles. Charles IV, Chah» V, 
Charles VIII, Charles IX. Louis XIII, et Louis XVI se sont 
aussi oecups d'arrêter la passion du leu. ffon-seulement 
ils prohibèrent les jeux de hasard, mais encore tous 
79 



dont les chances sont inégales, et qui présenten des avan- I qd tient constammen a banque a de chances en sa faveur, 
rages certains à l'une des parties au préjudice des autres, et ils jouèrent contre tout venant ce que celui-ci consentait 
Des amendes sévères furent prononces » tant contre les à risquer. Le Palais-Royal devint le centre de cette indus- 

joueurs que contre les banquiers. 
Toutes ces dt,positions ont été à peu près reproàuites 
partant notre Code Civil actuel que par notre Code Pénal. 
,Notre loi civile n'accorde ancnne action pour nne àette de 
jeu; mais, à la différence de lois romaines, elle àéclare 
que le perdant ne peut répter ce qu'il a volontairement 
payé, à moins qu'il n'y ait eu de la part du gagnant dois 
supercherie ou escroquerie. Elle est revenue, toutefois, à la 
distinction etablie par la léslation romaine ; aussi aàmet- 
elle une action en faveur des jeux propres à exercer au fait 
des armes, comme les courses à pied ou  cheval, les 
courses en chariot, le jeu àe paume et autres jeux de 
mme nature, qui tiennent à l'adresse et à l'exercice du 
corps : seulement les tribunaux ont le droit àe rejeter la 
demande quand la somme leur parait excessive. 
Quant aux mineurs, soit qu'ils aient souscrit une obliga- 
tion pour dette de jeu, soit qu'ils aient payé volontairement, 
ils trouvent dan leur minorib mme, comme la femme 
mariee dans la puissance maritale, une garantie contre les 
engagements qu'ils ne peuvent valableucut contracter. 
Le Code Civil a trac6 les rles que les juges doivent suivre 
pour tes obli;atiuns contractées au jeu; le Code Pénal con- 
tient des àispo.itions répressives du jeu. Ainsi, les peines 
d'un emprisonnement de deux à x mois et d'une amende de 
100 à 6,000 ff. sont prenonsCs, soit contre ceux qui 
auront tenu une maison de jeu de ha.tard et y auront admis 
le public, soit contre ceux qui auront établi des jeux de 
hasard dans les rues, chemins et places puldics; la loi 
prononce en outre la confiscation de tous les appareils em- 
ployés au sers ice des jeux, des fonds, elfets, lots ou den- 
rées exposés ou proposés aux loueurs. E.  Cno.. 
JU (Maisons de). Les tripots furent longtemps en 
France et ailleurs des lieux que ne Iréquentaieut que les 
grands seigneurs et les chevaliers d'industrie, et ous ce rap- 
port lessalons de Versailles n'étaient pas eux-mêmes exetapt 
de tout mélange. Qu'on se rappelle les aveux du brillant 
chevalier de G r a m m o n t. Comme aujourd'lmi, ces tripots 
riaient d'ordinaire tenus par des femmes ur le retour et 
d'un passé éq«ivnque, dès lors n'ayant guëre ledrmt d'$tre 
difficiles en fait de presentation et d'admission dans leurs 
salons. L'usage était de laisser  la fin, de la soirée, sous 
les flambeaux placés d chaque table de jeu quelques pièces 
d'argent ou d'or suivant la compagnie qui s'y réunissait; 
et cette contribution vol.oataire paée par les joueur- dé- 
Irayait en .énéral fort grassement la personne qui leur ac- 
cordait l'bospitalitë. Vers la fin du règne de Louis XV et 
sous celui de Louis XX'I, quelques-uns de ces tripols pri- 
vilégiés acquirent une certaine célébrité; et, par exemple, 
le salon de la belle madame de Sainte-Amaranthe, dont Sar- 
tines avait épousé la fille, n'était guère autre chose qu'une 
maison de jeu, dont elle faisait d'ailleurs les honneurs avec 
beaucoup de tact et de dignité. Le duc d'Orléans s'y pré- 
senta un soir, v6tu  l'anglaise et en bottes à retroussis, 
au lieu d'y venir ave¢ le frac, les bas de soie et les souliers 
 boucles de rigueur. Madame de Saiate-Amaranthe ne lui 
luira pas le temps de venir la saluer; elle quitta brusque- 
ment la moelleuse bergère qu'elle occupait près de la cbe- 
minée, et s'élançant  la rencontre du prince, elle lui dt 
sè:hement, et comme elle eut pu faire à un jeune sou- 
lieutenant, • 5Ionseigneur, on ne vient pas en bottes chez 
moi !  Le duc d'Orlêans comprit la leçon, ne se le fit pas 
diredeux !ets, et s'éloigna sans dire mot, pour revenir une 
àemi-ieure prës en tenue i!'réprochable et son cordon bleu 
sous son frac. 
Quand vint 89, la bourgeoisie "voulut se donner les ëmo- 
tions qui avaient en quelque sorte été jusque alors le privi- 
Iëge de l'aristocratie, et des maisons de jeu fi son uage 
s'organisërrnt de ton, cOtës... BientOt les industriels fon- 
da!eues de ces tabli.sen»cnl_-: comprirent combien celui 

trie nouvelle, qui rayonna bient0t jusqu'aux extrémités de 
la grande ville, e qui s'établit également dans la plupart. 
des villes de province de quelque importance. Sous le Di- 
rectoire, le mal prit des proportions vraiment effrayantes, 
et l'un des premiers soins du gouvernement consulaire fut 
de réglementer l'exploilation d'une des passions les plus 
générales et les plus funestes de l'humanité. Le nombre àes 
maisons de jeu fut en conséquence réduit à neuf, et les entre- 
preneurs fisrent astreints à payer à l'antarité une redevance 
qui figura bieot6t pour des sommes importantes dans le 
budget de la police secrète. 
Les frères Perrin, àe Lyon, les premiers qui prirent régu- 
lièrement  ferme les jeux de la ville de Paris, se retirèrent 
avec une fortune colossale, vers 1810 et ils curent pour 
successeur Boursault-Malherbe, qui, pour en obtenir 
l'entreprise, consentir à la ville un bail bien autremet 
avantageux. L'occupation de Paris en 1814 eten 1815 valut 
à la ferme des jeux de Paris un surcroit énorme de recettes, 
et le fameux B I c c h er, entre autres, ne perdit pas moins 
«le t,500.000 francs au seul n ° 14 du Palais-Royal. Le 
marechal puisait avec trop d'abandon dans notre trésor pu- 
blic pour ne pas facilement réparer une telle brèche faite 
à sa fmune. 
En t8tT, le bail de B,mrsauit expira, et pour la première 
fois il fut mis en adj udieation publique. Les frères Chalabre 
les comtes de Chalabre, des gentilshonmes  seize quartiers, 
ma foi: l'obtinrent au prix de cinq millions, qu'ils s'enga- 
gërent a erser annueliement dans les caisses de la ville 
de Paris; et leur exploitalion ne fut pas moins heureuse que 
celles ,Je leurs préd.cesseurs. Le dernier fermier fut un 
nommé Benazet, qui y gagna aussi une fortune immense, 
et qui est encore fermier des jeux à Baden, outre Rhin. 
L'histoire des maisons de jeu de Paris ne peut 
écrite que par le bordereau ; nous nous garderons donc bien 
d'empiéter sur s droits en racontant tous les crimes pro- 
voques par cette execable institution. La conscience pu- 
blique en fit enfin ]ustice, et en 1836 la cliambre des députés 
décida que 1,, bail du sieur Beuaet ne serait pas renouvelé- 
à l'époque de n expiration. Ce fut le 31 àecembre 1837, 
à minuit, que le t'cio de la loi arrta la bille iatale de la 
roulette, et brisa les r:teaux des ignob|es croupiers. Dix 
minutes encore auparavant, les tables traient surcharges 
de monceaux d'or et de billets de banque, et le croupier, au 
moment de laucer la bille ou d'agiter les dés, criait de sa 
voix fatale : Le jeu est/ait: rien ne w plus! On comptait 
alors pt maisons de jeu  Paris : quatre étaient situëes au 
Palais-Roya|, où elles portaient les numêros  jamais 
meux de 36, 11,3, 127 et 5; une surle boulevart, au coin 
de la rue Favart ; et deux autres, rue àe Richelieu. Ces deux 
deruières étaient connues l'une sous le nom de Frascati 
et l'autre sous celui de Cercle des étrangers. Les femmes 
étaient admises  Frascti : inutile de dire quelle espèce 
de femmes ce pouvait être. Au Cercle des ítrangers, on 
n'était admis que sur présentation réelle; et ce tripot res- 
tait exclusivement aff«cté  la bonne compagnie et notam- 
ment ax Ctran.gers de distinction. Les honneurs en étaient 
faits par le marquis de Cussy, lonemps préfet du palais de 
l'empereur. 
Che des clauses du cahier des darges de la ferme im- 
posait h l'adjudicataire l'obligation de n'admettre dans ses 
dif[érents tripots que des personnes prsentdes. C'était là 
une condition inexécutable, mais qu'on insérait dans le bail 
à l'instar de ces clauses de nullité que les Polonais mettent 
toujours par précaution dans leurs actes de mariage pour 
se réserver, à défaut du divorce interdit par la loi catholique, 
la facilité de les faire casser quand bon leur semble, ce 
qui fait que le diable n'y perd jamais rien. Si la police 
avait tenu rigoureusemeut la main à l'observation de cette 
clause, la terme des icux »'efit pas pl exister huit urs 



JEU -- 
aussi, pour endormir la vigilane du préfet de police, le 
fermier avait-il habitude de faire ce-qui s'tait constam- 
«ncnt pratiqué sous l'Empire, c'est- h- dire de s'arranger 
de telle façon que M. le préfet trouver chaque matin un 
rouleau de 50 napoléons sur sa cheminée sans se douter 
le moins du monde d'o0 pouvait lui tomber cette manne 
dorée, mais sans eprouver non plus la moindre curiosité 
de le savoir. Pendant tout son règne, Louis XVIII trouva 
également tous les malins, an même endroit de son ap- 
partement que M. le prëlet de police, un m.stérienx rou- 
leau de pareille valeur ; et l'histoire scandaleuse des petits 
appartements ne manque pas d'apprendre a qui vondra bien 
le savoir l'usage qu'en faisait ce monarque. 
Les maisons de jeu ont-elles disparu parce que la loi I'a 
erdonné ? Quoi qu'on en puisse dire, nous n'lésiterons pas 
à répondre aflirmativemeut. Sans doute il y a et il y aura tou- 
jours des maisons de bouillotte  Paris, smStout dans le 
quai'lier Bréda ; sans doute les cercles ne sont qae des 
maisons de jeu, et on y peut perdre tout autant d'argent 
que dans les anciennes maisons de roulette, de hiribi ou 
de trente et quarante. Cela est incontestable ; mais comme 
on n'arrachera jamais les passions du cœur de l'homme, 
le Iégislatenr a fait tout ce qu'il devait, tout ce qu'il pou- 
vait faire, en supprimant d'une part la loterie, et de 
l'autre en interdisant les maisons où le premier venu était 
admis, sans aucune Iormafité, a jouer l'argent qui trop sou- 
vent ne lui appartenait pas. Les tripots tenns par la ferme 
ouvraient à midi et ne fermaient qu'a minuit! Le commis 
envoyé en recette était trop souvent tente d'y entrer, dans 
Pespoir de doubler en quelques instants a son profit la 
somme qu'il était ailA toucher pour son patron, et quatre- 
vingt-dix-neuf fois sur cent en sortait désbonoré. En vain 
pendant quinze ans la presse réclama pour que l'ouverture 
des maisons de jeu f0t du moins recul jusqu'h la nuit, 
c'est-à-dire jusqu'au moment ou les affaires s'interrompent, 
de telle sorte que le commis, le clerc, ne fussent plus 
posés h des teutations qui ont envoyë pent-ëtre deux mille 
individus au bagne et porté mème nombre de malheureux 
h se br01er la cervelle. Jamais le gouvernement ne consentit 
à faire droit à ces si justes réclamations ; et c'est la certes 
un des crimes sociaux qu'on est en droit de reprncher an 
gouvernement monarchique. 
Comme la France, l'Angleterre a ordonné la suppression 
des maisons de jeu. Le bill ordonnant la fermeture des 
naisons et des endroits publics on l'on joue, o/ l'on parle, 
a eu force de loi a partir du 1 e décembre 1853. Nëanmoins, 
une enquête ouverte  Londres au ljanvier 185, apprit 
qu'il existait dix-huit tripots dans le V/est-End ouverts 
toute la nuit aux joueurs des quartiers aristecratiques. Ces 
étabfissemeuts étaient mÇntés avec beaucoup d'elégance; 
on y servait pratis des soupers splendides et les vins les 
plus fins. Les portes étaient bardes de Ir, de manière 
qu'on pot détruire les instruments de jeu tandis que la 
police cherchait à pénétrer dans la ,naison. Chacun de ces 
tripots avait dix employés, banquiers, croupiers, grooms, 
garçons et boets. Ceux-ci étaient divisés en deux ca- 
tégories. Les premiers recevaient un salaire, et devaient 
cnstamment ëtre à la table de jeu ; les autres étaient des 
hommes habiles, ayant appris  manier les des avec un 
art extrême, et recevaient un ÇuŒEtum sur tout ce qu'ils 
gagnaient pour la maison. On comptait que deux cents per- 
sonnesvivaient  Londres de ce honteux métier. 
En Allernagne, les maisons de jeu existent librement 
sur toutes nos frontières. Au mois de décembre 1854 la 
Prusse proposa h la diète fédérale de prononcer l'abolition 
«les maisons de jeu dans tous les États de la confëdération ; 
mais cette proposition rencontrera sans doute de grandes 
difficullés. San-Francisco, à l'autre bout du umnde, a pourtant 
vu fermer en 1855 ses salonsde jeu. 
JE DE MOTS, e;pèce d'equivoque dont la finesse 
fait le prix, et qu'on peut délinir une pointe d'esprit fondée 
sur i'enploi de deux umls qui s'accordent pour le son, 

JEUDI 
mais qui diff'ernt pour le sens. L jeux de mot lzouvaieat 
leur place autrefois dans les devises des oifi.  
uvent, Ioqu'ils  dli,  plaoer ds la conv- 
ion, les lette, les épigramm, les madriga, I im- 
promptus et autres tit pièc de cte ncture ; ms 
on les blAmerait aec raira dans les or d'un genre 
élevé. Il t cin que ce mauva go0t a pu et 
éclips plusieurs reposes dans divers pays. On le voit sn 
arat aux épnes où l'amour de la frivolité et de la 
plainterie l'empoete sur l'amour du beau et du i. 
mme modèle du genre on ci le jeu de mo que Vol- 
ire fait ns une piè adr à Desuches : 
Vous qui rites  Cri¢ux, 
Il ne fiendit qu'à vo de Iètre. 
On dit aussi e Ttuffe ayant éoE interdit p ordre de 
l'antooE, l'acur chargé d'nor le fait au public le fit 
par ce jeu de m ant : « M. le prident ne veut 
qu'on le joue. » s XV demannt un jour a M. de Bière 
qu'il fit un calembour sur  rsoe, celui-ci ini rndit 
par ce jeu de mots spi6el : « Sioe, je ne  pu,  
un roi n'est p un sujet. » Nous urrio mfiplier  
citions ; nous nous bornerons h rappeler le jeu de mo 
que fit Mron dans son oraison Ièbre d'Henelte 
France, reine d'Anglete, pour montoer l'abus qu'on 
en peut faire : « Le grand, l'invincible, le maanime 
Lou, à qui l'antiquité efit donné mille crs...., se trouve 
sans cœur h ce spectacle. » Maintenant que I't 
plus qne jamais I mes, I faisrs de jeux de mo ne 
sont pas rares : cei jouaux en int ¢hue jou 
lenr contingent; tous I soi I tbetres de vaodevill en 
lait oeuter h pldns bords, a permission de la censoee 
touteis; iL [orment le fond d lazzis du saltimbanqne, et 
ils trnent me quelquefois sur des scèn plus ve ; 
cerins hommes poliliqu haut plaoes oe sont a remarquer 
r des jeux de mots, lanc ec antant d'pt que de 
linge. L. Lo. 
JEU DE PAIE (Serment du). Le 20 juin I89, 
lorque les dput du tiers ét se présentèrent à la salle 
de réunions des etats gnéraux, ils trouvèrent les 
closes et d gard françaises dont la consigne et de ne 
laser ener peonne. Quelque tumulte écla : on veut 
forcer le passée; mais nn député indique un autre lieu de 
rcuion, le jeu de pume de la rue Saint-François; tous s'y 
rendent aussitôt, le nple s'y précipite, les sold der- 
tent leurs oeoern pour appor du secours. Les murs 
la salle du jeu de paume nt nns et liumides ; il ne sy trouve 
mëme pas de si, et les représenn deure debouL 
Ba i I I y lit le nt oelèbre pro par Mounier, appnyd 
par Chalier, defcndu par Baae, et l'am bl répè avec 
lui : • ous juns de r Assemblee ionale j' 
 q«oe la constit«fion françoe it proclam. » Un ul 
depute, Marn dAuch,  refu an serment ; Camus  si- 
gnale à la oelère pblique: « Que son oppition soit insc, 
dit illy avec calme, elle rendra témoignage de la libé 
dcs opinions. » Le lendemain I depu d deux ords 
privilégiës se rallient a oenx du fiers état, et la C o n s t i t u a n t e 
pour»uit le cours de  travaux. Le seent du jeu de 
,ne a inspiréa David un de spI bux blux. 
JEUDI du latin jovedi ou es Jov, jour de Jupir. 
C't le cinquième jour de la s em a i n e : l'lioe l'ap.pel 
la cinqnième frie. Lejeudi t un jour excessivement choyé 
par les éoeliers, aux travaux desqueb il ent apporter une 
trêve; c't ur eux un sond dimanche, moins la messe 
et I off». Le}eud 9r et e)ei de la -carême 
nt spécialement concr aux sarnal du oernaval. 
Proverbialement, on dit à une onue qui veut réali- 
une chose qui semble imssible, qu'elle le fera la semaine 
des troisjeudis Astromiqnement parlant, la semaine d 
ois)eudis «rrait arriver a !'ard de deux hommes qui 
feraiept le tour du nmnde, l'un en allant par l'orient l'autre 
par l'uccidenl, ci qui en rcncontreraicut, a milieu de 
79. 



68 
course, un troisième, qui n'aurait pas bovgé : tous trois 
pourraient compter un jeudi en trois jours différents. Ce 
serait I nanmoins, il faut l'avouer, une théorie que les 
calculs rendent vraie, mais à laquelle ne manque pas l'im- 
possibilité du proverbe. 
JEUDI SAINT. Voyez SEMAINE SAINTE. 
JEÛNE. Hygiéniquement le mot jetne (en latin 
]tnun) signifie a b s t i n e n c e de nourriture; mais en tbéo- 
logle cette expression, bien que représentant la mme 
idée, désigne plut6t l'abstinence, commandée par la reli- 
gion, de certaine nourriture, à certaines heures. Si nous 
recherctons l'origine de cette pratique, nous trouverons 
qu'elle se perd dans la nuit de l'antiquité. Elle est en effet 
très-naturelle: l'affliction est tellement exclusive que ceux 
qui s'y livreot n'ont d'ordinaire pas mme la pensée de 
rparer leurs forces au moyen des aliments, et se livrent 
à une complète abstinence : les hommes auront donc cru 
donner à la Divinité nue marque sincère d'atlliction et de 
rortification en lui adrsant letÆs prières en ett de 
jcùne. Cette explication seule peut faire comprendre la 
Sueur apportée par tous les peuples à l'observation de cette 
coutume et son universalitç. Chinois, Indiens, l'hëniciens, 
Ëgyptiens, Israélites, Grues, Bomains, toutes les nations 
de l'antiquité honorient les dieux par des jeneso Les 
Egptiens, par exemple, ]eùnaient solenuellement en l'hon- 
neur d'lsis, et fiient toujoors précédev leurs cdfices 
des jcdnes dans le but de purifier ceux qi devaient y assis- 
r ; chez les Grues, qui [eg aaient emprunté beaucoup de 
pratiques liturgiques, l'observation des mystèr d'lesis, 
oelle des Tbesopovies, ètaient récédes de jeues exces- 
sivement séères, surtout por I iemmes, qi devaient pas- 
ser ue journée enère snspreudre h moindre nourriture : 
un je0ne de dix jours it iposé à ux qui voulaient se 
faire initier aox mystèrç de Cybèle, et les autr divinitës 
çaiennes exige«ient égalemeut un jedne, souvent continu, de 
la part de leu rtr ou prëtrs, et des mortels fervents 
qui venaient I consulter ou se urifier de quelque manière 
qte ce ft. A ome il y aait de eOn publics institués 
en l'honneur de Crs et se renouvelant de cinq en cinq 
Les uifs observaient d temps de la captivité, et ob- 
turent encore, quatre grands jedn en émoire des - 
lamitës qu'ils ont eu à endurer; les anniversaires auxquels 
on les clèbve sont : 1  le 10 du dixième mois, jour oh 
Nabuchodonosor siég Jérusalem por la premiège fois; 
2  le 9 du quatrième ois, jour de la prise de la ville ; 3  le 
10 du cinquième ois, jour oh Nab«zrdan brla ville et 
ple;  le 3 du septiêe oi% jour o Gudalia fut tué, 
o qui entraina la dispersion et l'expulsion du peuple de 
Dieu du pays et i'chëvement de sa destction. I I y avait en 
otre çor les scrupeux obateurs de la loi deux jehnes 
r oeaine, indépendament de ceux d vigiles et non relies 
lun. On connaR la sévérité qui présidait à ces abstinences : 
elles duraient depuis avant le coucher du soleil jusqu'au 
lendemain, lorsque 1 é[iles apparaissaient à l'horizon, et 
Fou ne angit que le soir du pain trepé dans l'ea etdu 
sel pour nt asssonnent ; quelquefois, cendant, on 
 joiait qtelques ues et des erbes aères. 
Otre les rles paicubères tablies ar chaque peuple 
relativement à l'usage dont nous nous entretenons ici, règl 
qe d volues entiers suffiraient difficilement  contenir, 
ils ont tos eu de grands jeunes solennels dan le momeu 
delitésçubHquesoudemalbeusàconjmer et éloigner 
de leur patte:  n'est qu'un pogrès de l'épicurisme et 
de i'indifférence qu'on doit attribuer le relâchement arrivé 
¢h le nations modernes dans oet uage antique et so- 
lennel. Contentons-uo de dire que le monde du dix-neu- 
vième iè¢le compte, lui aussi, leeOne au nombre de ses 
pratiques religieuses l plus effluve.  catholidse a 
le cmëme, jene de quarante jours, oonn en comé- 
moration es jrs d'abstinence asss par Jsus-Christ 
dan le dés't. Les QuhTcmps, les Vigile, sont égale- 

JEUDI  JEUNE ALLEMAGNE 
ment des jours de jeOne pour les fidèles ; enfiu, le endredi 
et le samedi, d'apr ce commandement de l'Èglise  
Vendredi chair ne maneras 
Ni le samedi mëmement, 
peuvent également Cre considérés comme des jours de 
je0ne. 
Les mahometans ont aussi des |ours o ils doivent 
vivre dans l'abstinence : ceux qui observent scrupuleuse- 
ment les lois du prophète ne voudraient pas mème respirer 
dans ces jours les odeurs d'un parfum; à leurs yeux les 
odeurs font cesser l'Cut de jedne : aussi ont-ils bien soin, 
en faisant leurs ablutions il en se baignant, de ne point 
plonger leur tte dans l'eau, de peur d'en avaler quelques 
sorsCs : les femmes ne se baignent point du tout ce jour-là. 
Les religions de Fo et de Bouddl)a et celles qui sont parti- 
culi/res à chaque nation ou peuplade de l'Asie, de PAfrique 
et de l'AraCique, commandent toutes la pratique du jedne 
dans des circonstances alCerrainCs ; et leurs sectateors 
l'observent avec une fidélité dont on retrouverait fort peu 
d'exenples chez nous. 
JEUNE ALLEMAGNE. Dans les années qui suivi- 
rent immédiatement la révolution de Juillet, cette déno- 
rnination de Jeune Allemayne ètait l'équivalent de celles 
de Jeune France, Jeune Italie, Je«ne Pologe, Je«ne 
Suisse, etc., et, comme elles, servait ì dèsigner une des 
ramifications de ce qu'on appelait la Jeune Europe, asso- 
ciation politique dont les tendances étaient essentiellement 
révolutionnaires. Toutefois, ce qui a dotalCt celle-ci une im- 
portance plus grande, c'est qu'en s'en servant dans les pro- 
cédures instruites cotre les individus accusés d'avoir pris 
part aux menées de cette espèce de société secrète, le pou. 
voir lui donna por ainsi dire une consécration officielle. 
Par Jeune Allemagne ou entend aui designer une dt. 
rection purement litteraire des intelligences qui se mani- 
festa de l'autre c6lé du Rhin à l'epoque d'agitation provo- 
quée par cette mgme révolution de Juillet, et qui s'attaquait 
/t tout ce qui dans la vie sociale, dans l'art ou daus la science 
lui paraissait vieilli et faisant obstacle /t une rénovation 
de la littérahwe et des arts. La polémique soulevée par 
ces questions se poursuisit à l'aide de brochures, de re- 
cueils përiodiques, de poëmes politico-lriques, de romans 
ì tendances rénovatrices, enfin à l'aide de la critique. 
Les principaux représentants de ce mouvement des esprits 
sont H e i n e, G u t z k o w, Laube, Mundt et Winberg. Le 
temps a prouvé combien peu de sympathie existait d'ailleurs 
entre les écrivains que nous venons de nommer, encore 
bien que dans leurs tendances générales ils semblasseot avoi 
un but commun et marcher d'accord. Ce n'étaient pas po- 
sitivement des écrivains politiques, pas davantage des poules 
ou des critiques conplets; mais ils excellaient à dissimuler 
leurs tendances politiq«es sous un voile poétique. Un ca- 
ractère qui leur est commun à tous, c'est de ne pas s'en 
lre uniquement tenus à la politique pure et simple, mais 
d' avoir encore rattaché des idées plus ou moins claires et 
dëfinies sur la nécessit d'une réforme radicale des rapports 
sociaux actuels, émettant au sujet du mariage, de Péman- 
cipation de la femme et ce qu'ils qualifiaient d'èmancipa- 
tion de la chair, des principes aujourd'hui plus ou moins 
oubliés ou méprisé.s, mais au fond desquels il n'y avait 
peut-ètre pas tant de mai qu'on en a dit. Eu outre, ils ex- 
posaient et développaient les idées cbrétienaes  la manière 
de Hégel, n'attachant pas nne grande importance à influer 
directement sur les masses, ainsi que le dèmontre leur style 
riche en images, plein de finesse, de délicatesse et d'élé- 
gance, que pouvaient seules convenablement apprécier les 
hautes classes de la société. C'était là le caractère commun 
de leur manière; mais pour ci qui est du talent, de la tenue 
et des idées, il existait entre eux des dilférences aussi pro- 
fondes que trancbèes. On ne saurait nier qu'ils n'allassent 
souvent beaucoup trop loin dans leurs assertions ; mais dans 
le cercle oh ils agirent ils ne laissèrent pas que «te «le- 



JEUNE ALLEMAGNE 
trure beaucoup de préjugés, gràce à la manière incisive 
et spirituelle dont ils attaquaient cerlaines questions; et 
on doit reconnaltre que leurs ellorts ont beaucoup contri- 
bué à donner au style allemand une qualité qui lui avait 
jusque alors manqué, l'élégance. 
JEUNE ANGLETEBRE. C'est la dénomination sous 
laquelle on désigne en Angleterre, et par antiphrase seule- 
ment, une petite coterie fort agissante, fort remuante du vieux 
parti t o r y, dont elle aspire à devenir la tSte et le bras. Mais 
bien loin d'avoir rien de commun avec l'esprit qui domi- 
nait dans les aociations politiques socrètes ou les coteries 
connues sous les noms de Jeune Allemagne, Jeune Eu. 
tope, Jeune llalie, etc., la JeuneAngleterre ne so propose 
rien moins que de ramener ses concitoyens pervertis et 
égarés par les lumières, par le progrès, à cinq ou six siècles 
en arrière, afin de recommencer le bon temps de la vieille 
Angleterre, où, à en croire les romanciers et les chroni- 
queues, régnaient dans toutes les classes de la société une 
abondance et un bien.tre tels, que le paupérisme, cette 
plaie latale à laquelle l'Angleterre succombera infaillible- 
ment quelque jour assez prochain, y était completement 
ncoflnu. 
Assurément cette tactique de faire ainsi appel aux sou- 
venirs assez vagues d'une époque où la vie matérielle des 
masses est représentée comme ayant été beaucoup plus 
confortable, beaucoup meilleure, que ne l'est de nos jours 
celle de la petite bourgeoisie elle-même, ne laisse pas que 
d'ëtre assez adroite. C'est preudre l'Anglais par son faible 
que de lui promettre du roastbeef et de l'ale à discrëtion 
le jour où les idées de la Jeune Angleterre prévaudront 
et o/1 ses hommes politiques dirigeront les allaites. Mal- 
heureusement pour cetle très-petite coterie tory, il y a un 
obstacle dirimant h ce qu'elle fasse jamais de bien nombreux 
prosëlytes; c'est que ses idées sont la négation plus ou 
moins directe du principe protestant, et ne vont par con- 
séquent à rien moins qu'a renverser l'Église as b 9 law es- 
tablished (établie par la loi) avec tout le système politique 
dont elle est la base. Il est assez curienx toutefois que ce 
soit h Oxford et/t Cambridge, dans ces deux citadelles de 
i'anglicanisme, que les doctrines révolulionnaires et pres- 
que catholi9ues de la Jeune Angleterre aient trouvé le 
plus de sympathie et d'écho. On remarque en effet depuis 
quelque temps dans une certaine partie du clergé anglican 
une tendance à s'approprier une foule de formes, de règles 
et d'idées qui indiqueraient une disposition socrète à se ré- 
concilier quelque jour avec Borne. Si jamais le successeur 
de saint Pierre venait à se prononcer d'une manière favo- 
rable sur la question tant débattue du mariage des prètres, 
il semble dès  présent certain que 1' "glise anglicane n'hé- 
siterait pas à le reconnaitre pour son chef spirituel, tant 
en ce moment elle reconnalt la nécessité du principe d'au- 
torité qu'elle combattait avec acharnement il y a trois sië- 
cles. La Jeune Angleterre compte des adeptes dans toutes 
les classes de la société anglaise, et bi. D' 1 s r a ci i est son 
représentant et son champion dans la chambre des com- 
munes. 
JEUNE FRANCE. nous ne serions plus nous-mèmes 
si un ridicule pouvait poindre quelque part sans que nous 
ne nous empressassions pas de nous en affubler. Il y a 
quinze ansl il était trop souvent question dans les journaux 
des mystérieuses associations politiques désignées sous les 
noms de Jeune Allemagne, Jeune Europe, Jeune ira« 
lie, etc., et de leurs secrètes menées tendant a renouveler 
la tare de ces diverses contrées, pour que l'idée ne vint pas 
chez nous à quelques imbéciles de singer les novateurs, les 
ap6tres de ¢avenir, qui faisaient tant parler d'enx de l'autre 
c6té du Rhin et des Alpes. La petite littérature et les 
artistes iscompris fournirent surtout de nombreux adhérents 
à cette idée, que les adeptes se mirent aussit6t à propager 
de leur mie,Jx. La Jeune France, sans former précisément 
une association secrète, se contenta d'tre une Compagnie 
d'assurances mutuelles sur la 91oire, dont les membres 

 JEUNE PREMIER 69 
affichèrent le plus souverain mépris pour ce qui était de la 
littérature et de l'art d'hier, en mme temps que la prétention 
d'inaugurer une ère nouvelle dans le domaine de l'intelli- 
gence. Le rom an ri sm e le plus exagéré fut le levier qu'elle 
crut propre  lui aider  soulever le monde, et elle en em- 
brassa les doctrines avec un fanatisme dont heureusement 
le ridicule eut bient6t fait jnstice. Ces messieurs ne voyaient 
le beau et le bien que dans le moyen ge, et ils s'efforçaient 
de nous y ramener par leurs oeuvres, consacrées toutes à 
la glorification des siècles que le commerce s'était habitué 
à considérer comme une époque d'ignorance et de misère. 
C'est alors qu'on nous prouva clairement que la décadence 
de l'art et de la littérature en France datent du siècle de 
Louis XIV, qu'il nous fallait brOler ou briser toutes les pro- 
ductions abtardies qu'on nous avait appris à regarder comme 
la gloire de notre pays, eten revenir à la langue, aux mœurs, 
aux arts et à la littérature du seizième siècle. Toutes ces 
impertinences étaient débitées avec tant d'aplomb dans.les 
revues et les journaux à la mode, nos dilIérentes scène 
avaient mis tant d'empressement a monter les diverses piè- 
ces écrites dans les idées de l'ëcole nouvelle, que la vogue 
s'attacha un instant  ses doctrines. 
JENE ITALIE (Giovine ltalii). La tentative faite 
sans succès en 1831 et 1832 pour soulever l'llalie centrale 
avait conduit beaucoup de réfugiés italiens en Suite, oh 
blazzi n i forma entre eux une société socrëte, qui bient6t 
se répandit en Italie. Le journal paraissant à Borne sous le 
titre del'otizie del Gioro parlait dès la fin de t632 du plan 
d'une association dite nationale pour l'affranchissement de 
l'Italie, et citait des fragments d'une correspondance secrète. 
dont le but était de propager les idées républicaines et d'or- 
ganiser dans toute la Peninsule des troupes de guerillas. 
Bientbt après on dccouvrit en PiCont une conspiration, 
qui fut suivie d'attestations et d'exécutions nombreuses. A 
la même epoque on venait d'ëtre mis  Naples sur les traces 
d'une conspiration militaire. E octobre 1832, à Rhodez, 
au dép6t des rêfugiés italiens, deux d'entre eux, Emiliani 
et Sturiati, furent assassinés par leurs compatriotes. Bient6t 
le bruit se répandit que ces meurtres n'avaient été commis 
que par suite d'arrëts de mort prononcés par la Jeune 
ltale, blazzini protesta contre cette imputalion dans L« 
iovme ltalia, journal qu'il publiait à Genève, et l'ins- 
truction judiciaire à laquelle ces meurtres donnèrent lieu 
n'apprit rien sur la part qu'avaient pu y prendre soit la Gio- 
vine Itaha, soit Mazzini. Ce dernier etait alors membre de 
la Charbonnerie démocratique, dont le centre était  
Paris, et  cette époque la Jeune ltalie parait mème n'a- 
voir eté qu'une af/iliation de cette société secrète. Cepen- 
dant, las de l'inactivité et du despotisme neutralisateur 
du comité directeur de Paris, Mszzini se décida, en 1833, 
à détacher la Jeune ltalie de la Charbonnerie de- 
nocratique. Elle dëploya dès lors la plus grande activité, 
et tenta une expédition contre la Savoie, en mtme temps 
qu'elle tcha de s'étendre dans la haute Italie, d'y propager 
des écrits révolutiannaires et de gagner les troupes. Les 
événements de 18/t7 et t88 ont surabondamment démontré 
que l'action de cette société n'avait pas un seul instant été 
interrompue; et, après les dénégations formelles de se» 
membres au sujet des accusatious dont ils étaient l'objet 
de la part des défensers du principe d'autorité, on les a vus 
alors venir à l'envi déclarer que, onvaincus de la sainteté 
du but de leur entreprise, ils n'avaient point hésité dans le 
temps à se parjurer, et que toujours ils avaient conspiré 
pour amener les bouleversements politiques dont ils etaient 
heureux et fiers de pouvoir revendiquer l'initiative. 
JEUNE PREMIER JEUNE PREMIÈRE. L'emploi 
de jeune premier est le principal dans les r61es d'amoureux. 
C'est de tous les genres de r61es celui qui exige chez Par- 
liste dramatique le plus de qualités réunies : un beau visage, 
une tournure élégante, de la jeunesse, du timbre dans la 
voix, de la tenue, de la distinction, de la grlce, et tout cela 
n'esl pas trop encore ! C'est le seul oia l'on no peut tirer 



0 
parti d'un défaut physique, cette ressource des comeiens 
mal partagé; de dame Nature. Et pourtant, en dépit de 
toutes ces perfectiona qu'il faut atteindre, l'emploi de 
jeune premier n'apparalt encore qn'au second plan; eu 
toutes circonstances il est sacrifié aux premiers r)les; qne 
dis-le? il l'est souvent aux valets et aux soubrettes. Com- 
bien Scapin fait plir Léandre, etqne Dorine eflace .lariane ! 
L'amour méme, le thëme invariable de ces iufortunës, ils 
n'en sauraient parcourir la ganme tout etiëre: la grande 
passion leur est interdite; ils doivent se tenir à perpétuité 
daus la région tempérée du seutimeut. Se figure-t-on Oreste 
jeune premier, ou bien encore cette terrible figure de don 
Jnau ! 
.N'allez pas conclure, cependant, à l'insignifia«ce cons- 
tante de cet emploi. Sile jeunes premiers et jeunes pre- 
mières du vaudeville moderne et des pièces de M. Scribe 
sont d'line, fadeur parfaite, l'ancien répertoire offre dan 
ce genre mille r61es charmants. De grands artiste s'T sont 
illustres, Armand, Fleury, Menjaud, Firmin, M' Mars, 
Aujourd'hui ces brillant acteurs ne sont plus et ceu, 
qui leur ont succédé ne les ont pas remplacé. Ils s'atta- 
cient bien plus h|a coupe de l'habit, au noeud de la cravate, 
à la finesse de linge, qu' rêtude si d.flicile de leur art; ils 
demandent leurs séductions et leurs succè a leur tailleur 
plut6t qu'à leur talent. Un autre travers qui et encoe 
commun a ces messieurs et à ces dames, c'est que ni les 
uns ni les autres ne peuxent se résoudre à vieillir et à 
changer de rbes. La ride fait grimacer le front, la dent 
absente creuse la joue, le ventre arrive, les cheveux s'eu 
vont, n'importe, ils restent jeunes preniers çuand méme, 
elles demeurent jeunes premièresjor ever, si bien qn'a 
Paris ils sont une douzaine d'amoureux obtiués et 
reuses incorrigibles dont les ges additionnés formeraient 
l'agrçmble totl de six à sept cents al. W.-A. Lcarr. 
JENES DE LANGUES, EFA.TS DE L_,NGUE5. 
Ces deux locutions, traduites littíraiement du turc 
oçhlani ou dil.oçhlan, oent de véritables idiotismes, qui 
ne présentent aucune idée à l'esprit. Elle servent à desiguer 
des jeunes gens q,ee l'on iuslruit aux frais de l'État dans 
les langues orientales. 
Une école des jeunes de langues existe àParis, au 
lycée Louis-le-Grand. Les premier jemes de lauuo fnreut 
instruits, aux frais de la chambre de commerce de 31ar- 
se.;lle, au couvent des Capucins de Constantinople, pour r- 
vir de drogmans dans les ecbelles du Levant et en Bar- 
barie, en vertu d'u arrét du conseil du roi, du 18 no- 
vembre 16G9. Aujourd'hui le nomtre des jeune de langues 
a considérablement diminué; il n'est plus que de douze, 
tant a Constntinople qu'a Paris. Cela tient peut-être 
progrès de la civilisation en Orient, qui ont rendu notre 
idiome familier aux diplomates musulmans, et peut-ëtre aussi 
à la transmission heréditaire de ces emplois, chose t,eu 
compatible avec !'esprit des temps modernes. 
JEUNES DETENUS. Vape: 
JEUNESSE vient de )uventus et dérive de juvare, 
aider, comme peut-etre aui la jovialité, la juin, si na- 
turelle à cet "ge hetireux, q»i Iut, dit-on, rapanage im- 
mortel de Jupiter et de dieux. La jeunesse et l'époque de 
la croissance, de l'épanouisoement de facultés : elle suc- 
cède à Uadolcscence, qui conduit jnqu'a la parfaite 
puberté, vers qniuze  oeize ans, ou josqn'h ce que le corps 
ait obtenu son dé.veloppement en hauteur. Ensuite, l'orga- 
nisatiou se deploie dan toute sa fleur . cet ge brillant et 
beureuxqn'on a justement comparé au printemps, an m0tin 
de la vie, comme la floraison de vegétaux. Toutefois, vers 
J'g de trente ans, l'homme passe h la virilité, époque 
de l'eutiè erfection, qttoiqne le corps puise encore ul- 
tèetrremen obtenir un accroissement en grosseur, mais 
qui n'ajoute rien a ses forces. Après l'adolescence, la sta- 
ture, sans s'èlever en l,auteur, prend plus de vigueur dans 
les membres; ils se moulenl dans leur beaute et leur force 
urigiuelles. Tons les acte. de l'or{anisation s'ex,curent dans 

IEUIE PREMIEI  JEUX 
leur plénitude avec une vivacité, une ënergie mereil|etSeso 
L'alacrité, la sa, la joie, échn da les lonis, 
rayonnent soe I sages. 
La jeun t aii l'ivrse de la vie; tout ce qui ré- 
chauffe, comme le u, les bsnces gibles, rajeit 
de mme pour  moment. Ton les fultéss'or 
expansion de ssibBé, c'est p cet dilafion tale 
que h ieuo se montoe ambitieuse de tons I genr de 
conqn  de reno, portée à I'emulation, d'auhnt 
pi prémptueuse que I'iuexpérienoe et l'exaltion d 
for pousnt au acs I plus hasardeux ; I crim au- 
dacieux lui appaennent plus qu'a tout autoe e.  effet, 
le jee homme, ut volonire, ennemi de  diima- 
tion et du mene, est extrême dans le mal oemme dans 
le bien ; impatient du fr, il ne supporte p le sacfice 
d'hnmiliaUon de con amour-propre; toujours il préfère 
passio au I Icnt e UinoErt et  gloire au lucre. In- 
pable, dans  noble nur, d oacnaflons de la 
fourbee, iorant l'adversité, il rche da sa mpl. 
Biche du long avenir qtti dooe uoes  espér, il 
digue sa foune. Plein de lui-mëme, il croit tout voir, et, 
faute d'un jugement ez prouvé, prend facilement le tou 
trancnt et aratif, Unir insotemment avaneux, 
vaut s adverres. S'il se po avec Co et par impétuo- 
si à des iolencs, rsonne n't plus essib[e à la 
piCC ou ne s'in,russe plus ardemment à la justioe. 
s amiti nt-ell cbaleureuses et promptes; nées des 
simpl rappo de l'e, e[i sentreUeuneut par [ reCes 
go0 et l me plaisirs, phztbt que pour un oemerce 
d'ité, qui est tojours la dernière de s reflions. 
Il suit de cte dente seibi[i que la jeunesse oe p[one 
adement dans ut les jouissances et les onxe d'au- 
tant pins délicieuses q'elles saut nouxell. Ma bzent6t 
cet fièvre dévorante s'Cuise, car la o[enoe d sauna- 
tions s'oppose à leur durée; de là nt l'inconstazce. 
Pour la jnes, la fat;gon, la guerre, la re m, 
de,ennui des aux ifiair, d'files oeverion, que la nature 
inspire à cet e d'in»ouciance, de folt plairs, oeguises 
de pations et de fficul{és, piq,zants saunement% 
viv délices que n'ont jamais éprouvées ces tres indolents 
toujours berces dans tes langueurs des v«,Iuptés. La jenn 
est aussi l'epoque des beaux-a, la plus sensible aux char- 
m de l'élequence et de la psie : heureuse 
préparer  son ge mtZr des jooissan solides et dura- 
bles; si, écenoaut sa santé et sa e, elle cousee n 
sang floride et chaud ur s«pporler av xiguenr 
 de la vieillse, pour maintenir sou me toujo ferme 
et marasme au mifieu d es de l'exience. 
J.-J. V. 
JESE DOBÉE DE FRÊRON. Après la clmte 
de Robespierre, Freron et la faction t0niste p- 
rt le nom de thermidoriens, quittërent la Monte, et 
allèrent s'asseoir au té droit. , rèu, aui ardent, 
si naire que dans son premier pari, dent l'ap6t 
de la réaction, et pour»uivit avec un çrnel achatent 
anciens mi«. n lui voant faioe la motiou de 
tel de ilie et le club des Jacobin% on reoenuait 
nul de Toulon mt et de Marscille sace. 
pubiia de nou eau son Orateur du Pple a. une alc 
frésie d'expreions, quoique dans de priip 
ren,  oe mit  la tëte d'uue oupe de jeunes gens qui, 
sous te nom de j«unse darde de Frron, derent en 
elqoe sorte I faubouriens de la contre-revolution. 
babi élan% oeiffes en denettes, el la tte poufC, 
cette milioe nouvelle insulit et msacrait I pa{riot au 
chant du vel du peuple, mme peu de toeps at- 
rat I anciens as de Fréron, parés de çiguoble r- 
macule, accomplisicnt leurs épouvanble» aina[s 
au chant de L« Marseillaise. 
JEUX,  de s{acles qui avaent nne gande 
imance dans la vie publique dGreoE et des Romains. 
La rt'ligion les consacra de butine battre. Il 



.IEUX -- JEUX FLORAUX 
qui ne fussent dédiés à quelque divinité. On les commençait 
toujours en les solennisant par des sacrifices et antres céré- 
montes religieuses. 
Les jeux publies des Grecs se divisaient en deux espèces : 
les uns étaient 99mnques, les autres scniçues. Les jeux 
gymniques comprenaient tous les exercices du corps, la 
course h pied, à cheval, en char, la lutte, le saut, le javelot, 
le disque, le pugilat, en nn mot le pentathle; les jeux 
scéni9es consistaient en pièces de théAtre, t r a g é d i e s ou 
comédies, en pièces de poésie on de chant. Dans tous 
ces jeux il y avait des juges pour décider de la victoire. 
Les juges étaient debout pour distribuer le prix des jeux 
gymniqnes; ils étaient assis pour décerner les couronnes des 
[eux scéniqnes. Les principaux jeux des Grees étaient les 
jeux olmpiques, les jeux pthiques, les jeux né- 
m d e n s et les jeux i s t h m i q u e s. Ces jeux solennels etaient 
célébrés avec éclat, et ils altiraient de très-loin une multi- 
tude de spectateurs et de combattants. On n'y donnait pour_ 
tant en récompense qu'une simple couronne d'herbe : d'o- 
livier sauvage aux jeux olympiques, de laurier auK jeux 
pythiques, d'ache verte aux jeux néméens, et d'ache sèche 
aux jeux isti,miques. Les Grecs apprenaient ainsi à lutter 
seulement pour l'honneur ; aucun étranger n'était admis à 
co,tcourir à ces jeux. Une naissance obscure on douteuse 
était un obstacle qui fermait également l'entrée de la car- 
rière aux prétendants. 11 y avait qnantité d'antres jeux 
passagers qu'on célébrait dans la Grèce, par exemple aux 
funérailles. Les prix etaient souvent des armures, des vases, 
des coupes d'or, des esclaves, etc. 
Les jeux romains ne sont pas moins fameux que ceux 
des Grees, et ils furent portes d un point incro?able de gran- 
deur et de magnificence. On les distingua par le lien o6 ils 
ëtaient cétébrés ou par la qualité du dieu h qui on les avait 
dédiés. Les premiers étaient compris sous te nmn de jeux 
circenses et de jeux scdniques, parce que les uns étaient 
célébrés dans le cirque, et les autres sur la scëne. A l'é- 
gard des jeux cousacrës aux dieux, on les divisait enjeux 
sacrés, en jeux votifi, parce quïls se faisaient pour de- 
mander quelque grgce aux dienx; en jeuxnèbres, et en 
jeux divertissants. Les rois reglèrent les jeux h Ruine tant 
que dura la royauté ; sous la rëpublique, les consuls et les 
prétenrs présidèrent aux jeux circenses, apollinaires et 
séculares. Les ediles piébeiens curent la direction des jeux 
plébéiens; le préteur on les ëdiles cnrnles, celle des jeux 
dédiés à Cerès, à Apolion, à Jupiter, à Cybèle, et anx antres 
dieux, sous le titre de jeux m¢galesiens. Dans ce nombre 
de spectacles publics, il y en aait que l'on appelait spe- 
cialement jeux romams, et que l'on divisait en 9rantls et 
en trës-grands : ces derniers duraient quatre jours. Les 
Romains célébraient des jeux non-seulement en l'honnenr 
des divinités qui habitaient le ciel, niais mème en l'honneur 
des celles qui rrgnaient dans les enlers, et les jeux instilues 
pour honorer les dienx infelanx etaient connus sons les 
noms de taurilia, compitalia, et terentin ludi. Les 
jeux scéniques consistaient en tragédies, comedies, satires, 
qu'on representait sut" le théAtre en l'honneur de Bacchus, 
«le Vënus, d'Apollon. Pour rendre ces divertissements plus 
agréables, on les faisait précéder de danses de corde, de 
scènes de voltige; puis on introduisit sur la scène les mimes 
et les pantomimes. Les jeux sceuiques n'avaient pas d'é- 
poque marquee, non plus que ceux que les consuls et les 
empereurs donnaient au peuple pour gagner sa bienveillance, 
et qu'on célébrait dans un a m p h i t h é A t r e environné de 
loges et de balcons : ils se composaient de combats d'hommes 
ou d'animaux. Ces jeux étaient appelés agonales, et quand 
on courait dans le cirque, dquestres ou curules. Les pre- 
miers étaient consacrés à Mars et à Diane, les autres à lep. 
tunnel an Soleil. On peut encore y ajouter les n a u m ac h les. 
Les jeux séculaires se célébraient de cent ans en cent ans. 
Il y avait en outre les jeux actiaques, augustau.z et 
pointons, qu'on célébrait en l'honneur d'Auguste; les 
rwroniens, fondés en l'honneur de ;éron; puis les jeux 

,3t 
en l'honneur de Commode, d'Adrien, d'Antinoiis, et de tant 
d'autres. 
Lorsque les Romains devinrent martres du monde, ils 
accordèrent des jeux à la plupart des villes qui en deman- 
dèrent. Au sortir de charge, les édiles donnaient toujours des 
jeux publics au peuple romain. Ce fut entre Lucnllus, 
Scanrns, Lentulus, Horteusius, C. Anlonius et Murna ì qui- 
porterait le plus loin la magnificence. L'un avait fait couvrir 
le ciel des thé'3tres de voiles azurCs, l'autre aait fait couvrir 
l'amphitfié'3tre de tulles de cuivre durCs. Mais César 
[ surpassa tous dans les ieux funëbres qu'il fit célébrer ì la 
mémoire de son père. Non content de donner les vases et 
toute la fourniture de théâtre en argent, il fit paver l'a- 
rène entière de lames d'argent. « Cet excès de dépense, dit 
Jauconrt, ëtait proportionné à son excës d'ambition ; les 
édiles qui l'avaient prec6dé n'aspiraient qu'au consulat, et 
I César aspirait à l'empire. ,, 
[ Les honneurs et les récompenses q,e les Grers accor- 
daient aux at h I è tes qui avaient triomphé de leur:, adver- 
saires étaient véritablement extraordinaires : on leur elevait 
des statues, ils étaient nonrris aux frais du public. A Laccde- 
renne, ils avaient le priviiége de combattre h c61e du rois. 
Un certain Exenète d'Agrigente ayant ëté couronné aux jetLX 
olympiques, trois cents chars, atteins chacun de deux che- 
vaux blancs, allèrent à sa rencontre, pour lui témoigner 
combien les Agrigentins étaient fiers de le compter au nom- 
bre de leurs compatriotes. Ciccron dit quelq,ie part que les 
Grecs faiient plus de cas des couronnes olympiques que 
les Romains des honneurs du triomphe. Souvent l'alibiAte 
couronné entrait dans sa ville natale par une brtche que 
l'on pratiquait exprès. Aux yeux des Grecs, les vainquem 
dans les jeux publics avaient quelque chose de surimmain ; 
il y a plus, on vit des vainqueurs nourrir pendant le reste 
de leur vie et sans leur rien faire taire les chevaux aux- 
quels ils devaient leur triomphe. De riches particuliers, des 
princes, etc., envoyaient des conducteurs habiles et des che- 
vaux bien dressésdisputer les prix de la course des chars, et 
ils se croyaient très-honorés lorsque leurs altelages avaient 
remporté la victoire. Enfin, il y avait des illes et des rois 
qui gagnaient h prix d'argent les xainqueurs fameux afiu 
qu'ils dèclarassent qu'ils étaient cironeus de la iile ou de 
la republique qui les payait ; d'autres intriguaient pour ga- 
gner un athlète redoutable, et le déc;.der par des presents 
à ne pas user de tous ses avantages contre tel ou tel adver- 
saire. Il est vrai de dire que ces fraudes etaient sévèrement 
punies par la fits4igation et les amendes, quand les juges 
qui présidaient aux jeux en avaient connaissance. 
TssnrŒ. ] 
JEUX DE L. N.kTUBE. l'ove-. Ntr.r. 
JEUX D'ESPIiTo Cette expression a deux acceptions. 
Elle s'entend de certains petits jeux qui demandent quelque 
facilite, queiqne agrément d'esprit; et ans:i de cerlaines 
productions de l'esprit qui n'os;t aucune solidité (vo!tez 
AMUSEEN'£$ DE L'£SPmT). 
JEUX D'ORGUE. VoUlez 
JEUX FLORAUX (chez les anciens). Vogc: Fu- 
rx {Jeux). 
JEUX FLOR.UX (Académie des), institution litté- 
raire la plus ancienne, et l'une des pins celêbres de l'Europe, 
dont l'origine remonte au commencement du quatorzième 
siècle, ëpoqne où elle fut fondëe à Toulouse, sons le nom 
de Coll«ge du 9ai Sçavoir. L'histoire de cette institution 
destinée dès le principe à perpétuer le gofit et le talent de 
la poCic, offre trois périodes distinctes : la première em- 
brasse les temps antérieurs / Ciemence 1  a u r e, et com- 
prend depuis i'année 1323 jusqu'h la fin du qninzième siècle 
alors commence la seconde période, marquée par les libé- 
ralités de cette femme illustre, dont la munificence ranima 
les conoeurs poétiqnes de la 9aie science et en assnra la 
durée par ses deruières dispositions; enfin, cette iustitution, 
qui bientôt apr/ la mort de Clémence Isaure avait pris le 
nom de Jetx Floraux, fut érigée en aedéoeie par Leis XIV 



32 
et ce noveau régime, qui est encore suivi, fome la 
troisième période. 
Les plus anciens monumen du Colldqe du 9ai Sçavoir 
sont deux manuscrits en langue romane, coulenant des 
traioEs sur les règles de la versification, sur la grammaire 
t sur les figures de rhètorique, le tout précédé d'un pré- 
liminaire historique, dont l'objet est «le faire connaltre en 
quel temps,  quelle occasion, et par quels moyens celle 
poélique fut composée, et enfin publiee eu 1356. Parmi les 
pièces que renferment ces manuscrits se trouve uue lettre 
circulaire en vers, datée de 1323, et qui servit de programme 
au premier concours ouvert par le collëge de la gaie science ; 
en voici la traduction abrégée : « La très-gaie compagnie 
des sept poëtes de Toulouse, aux honorables seigneurs, 
amis et compagnons qui possèdent la science d'où nuit la 
joie, le plaisir, le bon sens, le mérite et la politesse, salut 
et • le joyeuse. -- Nos désirs les plus ardents sont de nous 
rjouir en récitant nos chats poCiques... Puisque vous avez 
le savoir en partage, el que ous possédez l'art de la gaie 
science, enez nous faire connallre vos talents.., nous sepl, 
qui avons succëdë au corps des poëtes qui soni passés {les 
Iroubadours), nous avons à notre disposilion un jardin 
merveilleux et beau, où nous allous tous les dimanches lire 
des ouvrages nouveaux, et en nous communiquant nos lu- 
ndi'res muluelles, nous en corrigeons les defants. Pour ac- 
célérer les progrès de la science, nous vous annonçons 
que le premier jour de mai prochain nous nous assemble- 
rons dans ce charmant verger. Pden n'égalera notre joie si 
vous vous y rendez aussi. Ceux qui nous remeltrout des 
nuvrages seront favorablement accueillis, et Fauteur du 
meilleur poeme recevra en signe d'honneur une violette 
d'or tiu. nous vous lirous, de notre cété, des pièces de 
poésie que nous soumettrons  votre critique ; cr nous nous 
faisons gloire de nous rendre à la raison.., nous vous re- 
quérons de venir au jour assign, si bien fournis de vers har- 
monieux et de bon sens que le siècle en devienne plus gai .... 
et que le mcrite soit justement honoré. -- Ces lettres ont 
etWdonnées au faubourg des Augustines, dans notre verger, 
au pied d'un laurier, le mardi après la fëte de la Toussaint, 
l'an de l'incarnation 1323. » 
Cette imitation eut tout le succès dsirable. Au jour in- 
diqué, le |ci mai 132,des poules arrivèrent de tous cétes, 
et se rendirent au concours ouvert dans le jardin de la 
gaie science. Le manuscrit qui nous a conservé la mémoire 
de cette solennité liftCaire nous a transmis le nom des 
sept troubadours qui les y aaient appelés, ainsi que celui 
du pocte de Castelnaudary, Armand Vidal, auquel ils 
décernèrent publiquement la iolette d'or. Les capitouls, qui 
assistaieut h ce triomphe, en furent dans un tel enchante- 
ment que le conseil de ville décida que dorënavant, d'aqui 
en avant, ce nubie prix, qui excitait une si grande ému- 
lation, serait payé du revenu de la ville. Ces concours se 
uccédèrent d'année en année; ils devinrent bienU)t si nom- 
breux que, pour ne pas décourager les concurrents, on se 
crut obligé d'instituer deux autres prix, i'églantine et le souci 
d'argent. Ces deux nouvelles fleurs se dcernaient déjà en 
1355, comme le témoigne la lettre par laquelle furent pu- 
bliës les statuts des jeux ou luis à'arnors : le souci était 
donné ì la meilleure danse, et l'églantine était le prix du 
sirvenle ou de la lastourelle. Enfin, outre ces trois prix 
ordinaires, on donnait aussi quelquefois nn œillet d'argent 
pour encourager les premiers essais des poëtes. 
Les statuts publiés en 1355 comprennent les devoirs des 
membres de la compagnie du gai savoir appelés mainte- 
neufs, les conditions du concours et la r6ception des nou- 
• eaux membres. On remarque dans rënumération des règles 
qui doivent guider les juges dans l'appréciation des pièces, 
que le h|atus avec la mme voyelle sont de plus grandes 
fautes qu'avee des voyelles diffërentes. Quant auxeoneurrents, 
on voit que les juifs, les Sarrazins, les blaspfiémateurs, les 
excommuniés, les hommes de mauvaise vie, étaient exclus 
du Corlcos. 

JEUX FLORAUX 
g Ce fut en t6 que les sept mainteneurs publièrent la 
poétique du gai savor, rëdigée par le docte Molinier, l'un 
d'eux, ouvrage précieux, que l'Académie des Jeux Floraux 
s'est  la fin décidée à faire imprimer. 
Vers cette époque, une menace de guerre avec les Anglais, 
alos maltres de h Guienne, et la crainte d'un siCe por- 
tèrent les capitouls à détruire le fauborg des Auguslines, 
pour mieu assurer la défense de la ville. Les mainteneurs 
trouvèrent un asile dans le Capitole. Mais dès lors ils se 
bornèrent à des assemblées annuelles dans les trois pre- 
miers jours du mois de mai, pendant lesquelles ils déeer- 
naicnt les prix, qlli consistaient toujours en trois fleurs, dont 
la matière, suivant un mamlement de 140t, fournie par les 
capitouls sur le trésor de la ville, coùtait 6 liv. 16, 3 «,. Un 
florin, qu'on achetait pour les durer, cul, tait t 1., la |açon 
3, ce qui portait la dépense à une somme totale de 10 I. 
16 • 3 dru. Néanmoins, ces fëtes eurent longtemps un grand 
clat, et leur renommée était telle, qu'en 1388, Jean, roi 
d'Aragon, envoya au roi de France, Charles Vi, des am- 
bassadeurs pour obtenir la permission de faire venir  sa 
cour des poules du Languedoc, afin d'établir dans ses ltats 
des jeux semblables aux leurs, avec promesse de leur dé- 
partir des prix et des récompenses également dignes de leur 
mérite et de la munificence royale. 
Cet état de choses se maintint jusqu'en 1484 ; maisà partir 
de cette époque la fète des fleurs fit suspendue, soit à 
cause de la peste qui se manifesta dans la ville vers la fin 
de cette année, soit par suite des troubles qui dans les 
années suivantes y excitèrent une sorte de guerre civile. 
Quoi qu'il en soit, ce fut peu de temps après que Clémence 
Isaure rétablit cette fëte et distribua elle-reCe et h ses dé- 
pens des fleurs qu'on appela nouvelles, parce qu'elles rem- 
plaçaient celles que les eapitouls avaient cessé de fournir. 
Cette institution, faite de son vivant, eonfirmée par ses 
dispositions testamentaires, et consolidée par une riche 
donation, fit regarder cette femme eélëbre comme la [on- 
datrice du Colldge de la 9aie Science, qualification qui 
Agara plus tard le savant Catei, et lui fit chercher dans le 
treiziëme siècle la naissance et la famille de Clemenee; et 
comme fl n'en trouvait aucune trace à celle époque, il en 
conclut qu'elle n'avait jamais existé. De la l'origine de tous 
les doutes qu'on a tour a tour élevés sur l'existence de cette 
illustre dame. 
Cette seconde période, qui embrasse une durée de deux 
cents ans, fut heureuse et brillante. Toutefois, quelques excës 
finirent par s'introduire dans la répartition de la dotation 
de Clémence lsaure, et il paraltrait que vers la lin du dix- 
septiême siëde la plus grande partie de cette dotation se 
dépensait en festins et en présenls, prodigués aux convives 
invités aux soleuuités du mois de mai. Vers cette époque, 
l'auteur du Voyaqe à Siam, Laloubère, membre de l'Acadé- 
mie Française et de celle des Inscriptions et Belles-Lettres, 
ayant visité sa ville natale, y fut tellement révolté de voir 
que la fëte des fleurs était dégnërée en une sorte d'orgie, 
qu'il dressa un projet de requête à Louis XIV et obtint de 
ce monarque des lettres patentes portant éïectiondes Jeux 
Floraux en academie. Par ces lettres, donnes h Fontaine- 
bleau, au moisde septembre 169t, et enregistres au pare- 
ment de Toulouse, le 8 janvier 1695, le nombre do main- 
teneurs fut poré h 55 ; il est aujourd'hui de tO, y compris 
le chancelier. Le budget de cette académie fut fixé à l,t00 
livres, qui devaient Cre employs, savoir : 300 liv. aux 
frais courants des assemblé.es ordinaires, et 1,100 liv. à 
l'achat de quatre fleurs : « Et seront lesdites fleurs une 
amarante d'or, que nous instituons pour premier prix ; 
une violette, une eqlantine et un souci d'argent, qui sont 
les prix ordinaires. ,, L'uue delles, l'eglantine, fut réservée 
au meilleur ouvrage en prose ; mais en 1745 l'Académie 
décida que cette fleur se?ait aussi en or, et que celui qui 
l'aurait remportée trois fois obtiendrait des lettres de maitre 
ès Jeux Floraux. 
Depuis qu'elle a été Cigue en société académique» cette 



JEX FLOILUX -- JOAB 
eompagniœe fait imprimer tous les ans te recueil de ses con- 
cours et de ses travaux : le premier de ces recueils date 
de 1696 ; on en a la suite, année par année, jusqu'en 1790, 
sans autre interruption que pour 1700 à 1703. A partirde 
1806, époque d« son rétablissement, l'Académie a également 
continué cette publication. En parcourant cette collection, 
on voit au nombre des auteurs couronnés l'abbé Abeille, 
l'abbé Asselin, le poCe Le Bol, La Monnoye, le prési- 
dent Hénault, Favart, l'abbé Poule, ,larmontel, La Harpe, 
Barthe, Chamfort; et de nos jours, Millevoie, Tréneuil, 
D'Avrigni, Chênedoilé, Soumet, , ictorin Fabre, Ardant de 
Limoges, ,toilevant, etc., etc. 
La séance annuelle du :3 mai, qu'on appelle encore la Fte 
des Fleurs, se tient avec un grand appareil. Toute la ville 
prend part  la solennité. Dès le matin les fleurs d'or et 
d'argent sont exposees sur le maltre autel de l'église parois- 
siale de la Daurade; la statue de Clémence lsanre est ornée 
de guirlandes de roses ; Pentrée du Capitule est décorée de 
festons de verdure; la cour et J'escalier qui conduisent à la 
9alerie des fflustres sont également jonché» de [feuilles et 
de fleurs. A trois heures après midi, on ouvre au public 
cette galerie, qui précède la salle des séances. Au moment 
indiqué, le corps des Jeux Floraux [fait son enlrée au bruit 
retentissant des fanfares, ayant à la tte le nodcrateur, 
et prend place autour d'une table en fer à cheval. La séance 
s'oure par l'Coge obligé de CIëmence Isaure, prononcé par 
un mainteneur ou par un maitre. Après l'eioge d'Isaure, les 
commissaires des Jeux Floraux, musique en tte et suivis 
d'une escorte militaire, vont chercher les fleurs exposées 
depuis le matin sur le maltre autel de l'église de la Dan- 
rade; ils les reçoivent des mains du curé, qui leur [fait une 
allocution analogue à cette pieuse cérémonie, et les rappor- 
tent ensuite en grande pompe, pour être distl'ibuées solen- 
nellement aux auteurs couronnés, dont les ouvrages sont 
lus par tes iauréats eu-mêmes ou par ua des mainteneur 
ou des maltres. 
Les maltres représentent aujourd'hui les anciens docteurs 
en 9aie science; leur nombre n'est poiut fixé. Pour parve- 
nir à ce grade, il faut avoir remporté bois fleurs, parmi 
lesquelles doit être le prix de l'ode. Toutefois, l'Académie 
des Jeux ¥1oraux est en droit et dans l'usage d'accorder des 
lettres de maitres à des littérateurs célèbres, quoiqu'ils 
n'aient pris part à aucun de ses concours. 
JEUX OSQUES. Vo/e= AxcL (Fables). 
JEUX PABTIS poëmes dialogués ordinairement en- 
tremèlés de musique à deux parlies, que cmnposaient les 
trouvères et les troubadours, et qui élaient représentés dans 
les manoirs aux jours de fëte. Au mombre de ces coin- 
positions, nous citerons Robin et Marion, A'ucassin et 
Aicolette, scènes cfiampêtres di{nes de Théocrite ; Le Pur- 
9atoire de saint Patrice, Le Discours de Paradis, tableau 
curieux des cours d'amour, etc. 
JÉZABEL JÉSABEL ou IZEBEL, fille d'Ethbaai, roi 
des Sidoniens, épouse d'A c ha b, roi d'lsrael, et mère d'A- 
t h a I i e, et célèbre surtout par les crimes et les excès aux- 
quels elle entralna le roi son mari. Bient6t la terre des Hé- 
breux vit s'élever des temples en l'honneur de Baal ; des 
bosquets impudiques les environnèrent ; toutes les divinités 
pfiéniciennes eurent leurs autels dans la terre de promis- 
sion, et l'on n'ignorait pas à quelles in[famies la reine se li- 
vrait en leur honnenr. eufcent cinquante prêtres, dont cinq 
cent cinquante vonés au culte de Baai et quatre cent des- 
tinés  celui des dienx de Sidon, étaient ou nunrris à sa 
table, ou entretenus à ses [frais. Quand elle crut le culte 
nouveau assez solidement établi, elle voulut détruire l'an- 
tique relion d'lsrael : aux promesse les plus magnifiques 
succ#dèrent les menaces les phls terrible% et à celles-ci de 
sanglantes persécutions. Elle ordonna qu'on fit périr tous les 
prophètes, et il eusselt tous succombé si Abdias, intendant 
de la maison d'Acllab, n'en avait adroitcment soustrait lin 
gr:md nombre à sa filreur : cent furent par bd caclléS et 
nourris de pain et ,|'ca, ,lan une caverne. 

633 
File trempa dans le meurtre de N a b o t h, et le propllète 
Élie prédit que dans le champ u«urpé à cet homme de bien 
le corps de Jézabel, déchiré par les chiens, demeurerait 
sans sépulture. Une sécheresse de longue durée dévora les 
productions de la terre. Frappe dans ses lens par une 
puissance superieure, le peuple irrile fit entendre sa voix 
menaçante : le prince en fut épouvanté, et, la pensée du 
Seigneur s'emparant alors de son esprit, il fit rappeler les 
prophètes, que naguère il avait proscrits. Élie ordonne, et 
anssitt les nuages s'Cèvent dans les airs; une pluie abon- 
dante rend/ la terre sa ferlilité, et, comme défiés par lui, 
les prêtres de Baal invoquent en vain la puissance de leur 
dieu; ils sont tous immolés sur les bords du torrent. 
C'en était [fait d'Elle, contre lequel la nouvelle de l'exter- 
mination des prêtres des idoles avait excité toute la colère 
de la reine, si l'homme de Dieu n'avait fui dans le désert, 
où la Providence le secourut par un miracle, et d'oU elle 
J'envoya sacrer J é h u roi d'lsrael. Celui-ci, après avoir mis 
ì mot Joram et Ochosias, [faisait son entrëe solennelle à 
Jezrahel, Iorsqu'il aperçut aux fenëtres du palais la reine 
Jézabel, qui, malgré son age avancé, comptant encore faire 
impression sur le peuple par le pondoir de ses charmes, 
avait revêtu ses plus riches parures et couvert son visage 
de [fard. Des menaces contre Jehu étaient ì peine sorties 
de sa bouche que, par l'ordre de ce prince, les eunuqnes 
qui se tenaient auprès d'elle précipilèrent sous les pieds 
des chevaux cette princesse, dont le sang souil[a les murs 
du palais, et dont les restes, devorés en partie par les chiens, 
suivant la prophétie d'E|ie, ne purent pas même recevoir les 
honneurs d'un tombeau. Ainsi périt, en 3t22 du monde, 
cette [femme impie, amhitieuse, emportée, sanguinaire, 
dine d'avoir étë l'épouse d'Achab. L'al»bWJ. Dcecessls. 
JOABfils de Servia, sœur de David, se joignit à ce 
prince avec ses frères cadets, Abisai et Azsael, Iorsqu'il [fut 
obligé de se éfogier dans la caverne d'Odollam. Maitre de 
la milice, c'est-à dire général en chef de i'armée de Juda, 
il se distingua par sa Valeur dans le combat livré, près de 
Gabaon, à Abn er, qui y tua de sa propre nain Azael, 
acharné à sa ponrsuile. Joab en consera un vi[f ressenti- 
ment; et lorsque Daid eut reç'u Abner, Jab le fait rap- 
peler et bd plonge son épée dans le cœur. (-'et assassinat 
irrita David contre Joab. Cependant, le titre de général en 
che[f des afinC d'Israel ayant été promis à celui qui le pre- 
mier escaladerait les nmrailles de Jérusalem, Joab parut 
le premier sur les mur», et obtint ce commandement. 
Ce fut avec ce titre qu'il combatfit et dfit les Ammonites, 
qu'il assiea et prit la ville de Babbalh, devant laquelle il 
fit adroitement périr le brave U r i e, pour obéir à des or- 
dres injustes qu'il avait été jugé chgne de coraprendre et 
d'exécuter. Quelque éclatants que [fussent ses services, rien 
ne pouvait vaincre la iuste méfiance ou plutôt le triste 
presntment de David. Aussi quand, aprè le meurtre 
de son frre Amnon, Absalon, ré[fugié chez Tho[mai., 
son aieui, demandait à rentrer en gr'ce, ce ne [fut que 
par un stratagème que Joab parvint à obtenir son pardon et 
à le ramener aux pieds de son përe. Bientôt Absalon se 
révolte de nouveau. Dès qu'il apprit la fuite de son roi, 
Joab rassembla des troupes nombreuses, les réunit aux 
siennes, et contribua puissamment à le [faire rentrer en pos- 
session de son royaume. Mais, toujours emporté, .soit par un 
zèle aveugle, soit pour un motif moins louable, il mécon- 
nut les ordres positil's du monarque, et courut, armé de 
sept javelots, dès qu'on lui annonça comment le traitre 
Cait arrêté dans sa course, et le premier donna l'exemple 
de l'insubordination eu le frappant, pour le laisser ensuite 
achever pdr ses officiers. La douleur et l'indignalion de Dan 
vid, quand il apprit la mot de son fils, ne purent jamais 
s'effacer au point de lui laisser oublie la faute cruelle de son 
,énral. il voulut confier à Anasa le commandement d'une 
expédition ; mais cehli-ci [fut, Comme Abner, Iàchement 
assassinoe; puis le meurtrier fit défiler les troupes devant son 
cadavre, se nt leur tête, et les.conduisit au combat. 
0 



Quand le parti naisnt WAdontas eut détaché de S a I o - 
mon quelques-nns de ces hommes lonjours dispo  sui- 
vre le drapu de la rélte, Jo  ¢ parmi I tns- 
fues, et oeuru[ ainsi à sa çefle. Adoas fut  effet is b 
rt par ordre de Soiomn ; le grand-prt Abiathar du b 
s caraclère cerde d' seulemt 
mais Joab, poursuivi par Banaïas, perdit la vie,  299l 
du monde, au pi de l'a pr duquel 
vain trouver un asile. Par oensidération   naissoe 
et sa parutWat' David, n corps fut inhumé d sa 
maison du desert. L'bë DVLS. 
JOACHAZ roi d'lsrael, fils de Jéhu, siala le com- 
mencement de sn ne par n impiété ; mais aant 
va,su par Hazael, roi de Syrie, fl s'humilia, ci fut auvé 
de sa ne. 
Un autre Jocs.tz, roi de Juda, fil« de 3oas, s'empa 
du tr6ne, au pjudic  n fre aine, J o a c h 
Nao, roi d'Égypte, replaÇa le prince Iégiti su¢ le r0ne, 
que l'usurpateur Joachaz avait occupé trois mois. 
JO&CHIM  fils  Josias, s'appelait d'abord iacim, 
et devint roi de Judo  çan 609 aant J.-C., grâce h l'in- 
veion du roi d'Éte ffécbao. Devenu tributaire d 
Chaldéens dans la huitième année de son règne, fl chercha 
peu de temps avant sa mo, arrivée en l'an 599, ì recon- 
qnér son indépendance. Cette levée de boucliers amena 
l'trillion de Ju par une armée chaldéue. Mais Joechim 
ne vécut point jnsqu' la prise de J.é r u sa I e m, et sa mort 
réalisa les prédictions de J e ré m i e. 
JOACHI! (Saint), père de la ierge Manu, est ho- 
nor comme un saint par l'Eglise. 
JOAClll[» dit de Flora ou le Prophète, nW Célico, 
près de Cozenza, vo)agea en Terre Sainte. De retour en Ca- 
labre, il prit l'habit de Citeanx dans le monastçre de Co- 
razzo, dont il lut prieur et abbé. Joacbim quitta son abbaye 
axec la permission du pape Lute Iii, ves 1184, et alla de- 
meurer  FIora, ou il fonda une abye, qui devint plus tard 
très-lèbre. Il donna à un and nombre de mon«têres 
des constitutions approuvées par le pape Celestin III, et 
leur fit embrasser fa refoçme de la règte de CIteaux. L'abbé 
Joachim mourut en 1202, gé de soixaute-doze ans, lais- 
sant, entre autres ouvrages, des Commentaires sur Isae 
sur Jcr«mie et sur l'Apocalypse, et des Prophtes  les 
Papes. Voici comment il expquait la Trinite, suivant 
l'abb Pluqnet : il reconnaissait que le Père, le Fils et le 
Saint-Esprit raillent un seul tre, non rce qu'ils exis- 
tent dans une substance commune; mais parce qu'staieut 
unis d consentement et de oIonté aussi ítroitement que 
s'ils n'enssent bt qu'tm seul ètre, comme on oet que plu- 
sieu hommes font un seul peuple. 
JOACIIIMITE [%e ML. 
JOACtiil MUBAT. Ige 
JO&D ou JOI.DA, gçaud-prê[re des Juifs, époux de 
Josabeth, sœur d'Ochosias, qui saura J o a du maacre 
des enfants de oe prince, oonne lr Atbalie. Il rémit 
Joes sur le tr6ne, et mourut à l'e de cent-trente s. Il 
lut enteffë dans le tombu des rois. 
JO. ! LLEBIE JOM LLIER. Le oaillier est le fahricav,, 
le marchand de joau, oemme le b ij o u t i e r est le fabri- 
cant, le marchand de bijoux. On donne donc plus paflicolière- 
ment le non de)oaillier h celui qui s'ooee de monter 
pierres prcieuses taillées par le I ap ida i re en les dieu- 
saut sur des ornements en métal. Pour le dialnant 
tl e l'argent; pour toutes les pierres de couleur, c'est 
Cor. On pratique x soes de montres : le monte à 
ur, et le onge plein. Le premier  surlout en usage 
 le diamant, pour les objets composís, fuis que les 
par ; on se oe du sond pour les ob simpl e[ 
pour les pierr de cooleur. Les objets compos prennent 
la forme de guirlandes, de bouquets, elc. Chaque paie 
se fait séparément, pois on les réunit ensuite. L'opération 
par laquelle la pierre e»t fixëe au mural s'appelle sertissage. 

JOANNY 
Pour les bagues, les iderres sont fixées dans un 
que l'on soude ensuite  l'ameau. 
JOAN ($c). Voye» Fous  Cocu. 
JOANES (V,cwre), peintre espagnol distingué, 
e 1523, mort en t$79, étudia vraisemblablement d'après 
Raphael, et fonda ensuite une école particuliëre à Valence, 
où il travailla beaucoup pour les églises de la localité. Il ne 
peignait que des sujets religieux, et communiait toojours 
dit-on, avant de commencer un nouveau tableau. Tons 
ses ouvrages ont une expression de calme, de simplicité et 
de naïveté qui n'exclue ni la grâce, ni la correction, ni la 
frappante expression. Sa direction fut tout h fait celle des 
Flamande qui sétaient formésb l'Cude de l'art en Italie, 
par exemple celle d'Orley, qui fut l'un des Cèves de Ra- 
phael, quoique l'on remarque chez lui ,_: peu de l'influence 
des maniérisies florcutins. Iou coloris est eu général un peu 
lourd. 
Son fils, Juan-Vicente JoAs, fut peintre également, 
mais ne l'/'gala point en alent. 
JOANNY (J*lnssnn BB[SE-BABRE, df ), acteur 
estimé de la CoinCic-Française, et dont la réputation s'était 
faite h l'Odéon, était né h Dijon, le je juillet 1775, d'un 
père employé aux domaines, qui le fit admettre, à l'tgede 
huit ans, dans les pages de la musique de Louis XVI ; mais 
au bout de trois ans d'efforts et de travail on reconnnt la 
faiblesse de ses dispositions pour la muque, et on lui fit 
quitter les pages pour le placer dans l'aielier du peinire Vin- 
cent. A dix-sept ans les é'énements politiques l'enlevaient 
au arts pour le jeter sous les drapeaux. Après avoir fait 
plusieurs campaçtes comme volontaire, et avoir reçu deux 
blessures, dont l'une nécessita l'amputation de deux doigts 
de la main gauche, il quitta le service, et enlra dans la 
paisible carrière de l'enregistrement comme modeste sur- 
numéraire. Mais un beau ionr il déserie son bureau pour 
s'élancer dans la carrière thétrale, et quitte le nom de ses 
pres pour celui de Joann9. Il s'essaye d'abord sur les 
tbé$res de société, et s'y fait bient6t une svrte de renom- 
mée, qui le prbpare aux brillants sucoèsqu'il obtient en pro- 
rince. En la07 il sollicile un ordre de debut pour le 
Théatre-Français, et y parait lour à tour dans les grands 
r61es du répertoire heique de Taima et de Lafont. Il y 
a un succès d'estime; mais un concurrent lui ayant stWpré- 
Iéré, il recommence sa vie d'acteur nomade,/t Bouen, à Bor- 
deaux,  Liile, h Lyon, ì Marseille. Quand une ordonnance 
royale crée, en 1818, un second Titéàre-Français à l'O- 
díon, Joanny se trouve aurellemeni appelé ì faire partie 
de la troupe nouvelle pour y rcmplir les grands r6les tra- 
giques. Il y crée, dans les tëpres Sicilennes de Casimir 
Delavigne, le r61e de Procida, auquel il donne nne expres- 
sion énergique et p«ssiounee qui est restée dans la mémoire 
des contemporains, et y fait preuve d'un talent hors ligne 
dans la manière dont il y compose les r61es de Cbiipéric 
dans Fràëgonde et lrunehaut, et de SaiSi dans la pièce 
de ce IIOffl. 
A la mort de Talma, Joanuy reste le seul comédien à 
qui il est permis de penser, non pour le remplacer, mais 
pour tenir l'emploi du Bos¢ius français; et les Comédiens- 
Français s'empressent de lui ouvr les pories du vnacle de 
la rue de Bichelieu. Quinze ans durant, Joanny s'y montre 
acteur consciencioux et zelé, tenant tous les grands r61es 
du vieux répertoire : Acomat, Mithridate, Burrlms, le vieil 
Horace, Mabomet, Auguste, don Diìgue, tous les oepe- 
teurs, tous les rois, tous les cousprateurs qui, à défaut de 
Talma, reviennent par droit d'héritage ì son succulent. Il 
atiache en outre son nom à quelques r61es qu'il crée dans le 
rbpertoire moderne; et les contemporains couservoeont long- 
temps le souvenir de la manière orinale et piquante dont 
il rendait le Quaker de Chatterton, le duc de Guise de 
Henri III, Gomès de Silva d'Hernani, James Tyrrel des 
E.fants à'Édouard, et tant d'autres. 
Joann quitta le ihétre en tSt, et avec sa pension de 
sociétaire alla s'ëiablir au Bourg-la-Bcine, lout près de Paris, 



JOANNY 
o6 sa maison devint le rendez-vous de la bonne compagnie 
du village. Le curé allait presque tous les oirs faire la partie 
de whist de l'ancien comedien ordinaire du roi; et il eut 
marne la satisfaction de bénir das son église un mariage 
qui datait de prës de quarante ans, mais que, par suite de 
sa vie atée, Joanny avait toujours oublie de faire enre- 
gistrer par. bi. |e maire et valider par l'Église. Il avait a|ors 
soixante-onze ans. Il mour,t en 1s49, entouré de l'estime 
de tous ceux qui le connaissaient. 
JOAS, le plus jeune des enfants d' Oc h o si as, roi de 
Jda, devait Cre enveloppé dans le massacre si froide- 
ment ordonné par A t h ail e, à la mort de ce monarque. Par 
bonheur, Josabeth, sœur d'Ochosias et épouse du grand- 
prêtre Joïada, instruite du projet qu'on méditait, parvint, 
au moment où les satellites de la princesse portaient sans 
crainte des coups assurés, à enlever et à déposer dans le 
temple le petit Joas, à peine gé d'un an. Pendant six an- 
nées elle veilla, de concert avec Joiada, à l'éducation de 
cet enfant. Quand il eut atteint sa septième année, le pon- 
tife, jugeant le moment favorable, assembla les prëtres, 
leur révéla ce qu'il avait fait, et ì Piustant mme le jeune 
roi, sacré par lui, fut salué des plus vives acclamations. 
Joas fut d'abord docile aux conseils du grand-prëtre, à qui 
il devait la couronne et la vie. Mais la mort de Joïada per- 
mit aux cortisans d'exercer sur lui leur funeste influence, 
t bientét on -it les autels des idoles s'élever de nouveau, 
leurs statues se dresser sur les hauts lieux, les bocages 
en honneur, et le temple de Jehova indignement abandonné. 
Le fils de Joïada, Zacharie, son successeur dans le pontificat, 
voyant toutes ses remontrances inutiles, se rendit dans le 
temple, fit au peup|e assemblé un effrayant tableau des 
-uites inévitables de l'incrédulité générale. 11 parlait encore 
quand, par ordre du roi, il fut publiquement mis ì mort. 
Ce crime ne devait pas re»ter long-temps impuni : Hazael, 
r, fi de Syrie, pénètre dans Jérnsalem ì la té.te d'une poignée 
de soldats, immole |es principaux habitants, pille le temple, 
et ne regagne s Etats que chargé de butin. Le penple passe 
alors des manœuvres sourdes ì une sédition violente, et 
deux des officiers du palais, pénétrant dans les appartements 
de Joas, l'assassinent dan son lit, où le retient une af- 
freuse maladie, en 3169 du monde. Ses restes furent ense- 
velis dans la ville de David, mais non parmi ceux de ses 
anoetres, l'horreur que causa l'infection du cadavre ayant 
empché qu'on ne le mit dans le tombeau des rois de Juda. 
Il avait régné qmrante ans sur Juda. Amasias, un de ses 
fils, lui succéda. 
JOAS 11, filsde Joacbas, et 1 « roi d'lsraei, régna seize 
années, mourut en l'an 318: du monde, et défit trois fois 
Bénadab, roi de Syrie, suivant la prédiction d'É.iisée. Bientét 
Amasias, fier d'une victoire qu'il avait remportée sur les 
lduméens, osa défier Joas. La bataille eut lieu ì Bethsa- 
mès, dans la tribu de Juda ; au premier choc, les troupes 
d'Amasias plièrent et prirent la fuite; lui.marne tomba entre 
les mains de Joas, qui entra triomphant ì Jérulem, le 
faisant conduire desnul on chax, après que, pour hfi frayer 
un passage, il eut forcé les habitants à abattre quatro cents 
coudées de leurs murailles, depuis la porte d'Ephraïm us- 
qu'à celle de l'Angle. Il dépouilla le temple de l'or, de 
l'argent, des vases précieux et de toutes les richees qu'il 
y trouva, s'empara àes trésors de Joram e enmena des 
otages à Samarie- 
Un autre Jobs, cbefdela lamille d'Eri, fort honoré par 
les habitanL d'Éphra, était père de Gédéo n. Par complai- 
sance il aait connti à devenir comme le dépositaire et 
le prétre de l'idole de Baa|. Quand, pendant la nuit, Gédéon 
eut mutilé et abattu cette statue, le peuple aceourut 
rieux, demandant / Joas de lui livrer le coupable pour le 
mettreàmorL A cette exigence cruelle, il répondit : « Pour- 
quoi vous faire les vengeurs de Baal? Ce dira ne pent-il se 
défendre et se venger iui-mëme? S'il veut punir le témé- 
raire qui a renversé son autel, a4-ii donc besoin de vous 
appeler à son se¢om's ? Laissez à ce die le soin de ses in. 

 JOB 
térts : s'il est tout-puissant, la vie de son ennemi est en- 
tre ses mains, et sa vengeance l'atteindra avant la lin du 
jo,r. » C, es sages observations apaisèrent le peuple, qui 
se retira sang insister. L'abbé J. 
JOATHA  roi de Juda, fils d'Osias, exerça les fonc- 
tions de la royanté lorsque son père fut frappé de la lèpre, 
et lui succéda en "15'2. Il fit fleurir le cuite, barrit les 
mouites et les 8yriens, et fortifia Jérusalem. Il mourut 
en 737. 
JOB  patriarche illustre par ses immenses possessions, 
sa prospérité, ses insignes malbeurs, sa patience, sa rési- 
gnation, ses vertus, son amour et sa enfiance en Dieu. Il 
demeurait en la terre de Hçz, dang l'ldumée orientale, sur 
les frontières de l'Arabie. Les sentiments sont très-partagés 
sur le temps où il a vécu ; mais il parait probable qu'il 
fut contemporain de Moïse. Juif de nation et de cœur, son 
nom en hébreu signifie celui qui pleure. On lit à la fin des 
exemplaires grces et arabes de son poëme, et dans l'an- 
cienne Vulgate latine, ces mots sur sa vie : « !i epoosa une 
femme arabe ; il réa dans l'ldmée sous le nom de Jolab ; 
le nom de sa ville était Jelhem. Pour lui, il était fils de 
gara, des degcendants d'Eau et de Bozra, en sorte qu'il 
était le cinquième depuis Abraham. ,, Quant i ses richesses, 
voici le dénombrement qui en est fait dans le 3 ¢ versot du 
chapitre i  de son livre : « Il possédaR 7,000 moulons, 
?,,0oo chameaux, 500 paires de boeuf et 500 nesses. !i 
avait de plus un très-grand nombre de domestiques ; il était 
grand et illustre parmi les Orienlaux. » 
Plusieurs modernes ont nié l'existence de ce personnage 
biblique; ils ont regardé son histoire comme une allégorie, 
une fable, où tout le génie poétique de l'Orient s'est ma- 
gnifiquement développé : alors un Juif iduméen l'aurait 
écrite dans son idiome malWde locutions arabes et de chal- 
daismes. Plus ridicu|ement encore ou attribue cette œuvre 
à Moise : ce ne saurait tre le style de ce scribe de Dieu ; 
pur hébreu, il n'a pu l'avoir ainsi altéré pendant son exil 
dans la terre de Madian, off l'on prétend qu'il écrivit ce 
poeme dramatique ou allégorie sacrée. Pophi.tes, apétres, 
Pèes de l'égli:e, jni[s et ehrétiens, pour la plupart sont 
convaincus de l'existence du patriarche iduméen sous le 
nom de Job, qui aurait traduit, disent.ils, en magniéque 
poésie son histoire après ses malheurs. Toutefois, le 
livre de Job, original, singulier par le fond et la tortue, 
est absolument en dehors de l'histoire des lraélites : regardé 
comme inspiré et par les jnifs et par I chrétiens, il s'est 
fait place au milieu des annales de la Judée, alors province 
de Jéhovah, sous le sceptre des rois de Juda. Synagogue 
et conciles l'ont mis au rang des livres canouiques. C'est 
un véritable drame à la fois thmilier et sublime : ses per- 
onnages sont Dieu, Satan (i'adversaire), Job, sa femme, 
trois taux amis, Èliphaz de Thman, Baldab de Suh, So- 
phar de Nuamath, un arbitre, Eiihu, et trois serviteurs ou 
messagers. L'action de ce drame, une, simple, est Job 
livré en épreuve au démon par la volonté de Dieu : c'est le 
commencement: il en rulte d'ineffables malheurs qui fon- 
dent sur ce juste, la perle de ses biens, sept filles et trois 
fils éerasés sous les ruines de leur maison, une lèpre hor- 
rible, qui le couvre de la tare aux pieds; un fumier dé- 
goûtant, senl fit qui lui ree ; ajoutez ì ces indicibles don- 
leurs les reproches amers d'une éponse irritée et le eruels 
dédains de ses [aus amis : voilà le milieu, dont le dénone- 
ment est l'ami de Dieu et des homme arraché aux perse. 
curions de atan, et sur la tte duquel le Seigneur donble 
les richesses, Ire félicités terrestres et les années. 
Ainsi ont été presque aeoemplies par un patriarcle, nu 
roi pasteur dan l'ldumée, les lois du drame gre voulues 
par Aristote. Quantau style de cette composition orientaie 
il a tantét la lamiliarité de la conversation, tamét nue 
blimité dont l'analogue ne se trouve nulle part chez le» 
écrivains sacres, blélancolie, cris de dmdeur, admirabls 
précepes, imag,s si levées qu'elles semblent avoir eu pour 
source la bouche rabane de Jéhoeab ou i Iêwes des  
$o. 



636 
tel est le caractère de ce poëme, écrit en vers ou lignes li- 
bres, c'est-a-dire tantft très-courts, tantft trës-longs, tan- 
tft moyens. Ses périodes régulières, ses parallelismes non 
éludiés, l'absence des concetti bébraiques, figures favo- 
rites des écrivains sacrés juifs, aprës la captivité., semblent 
nous confirmer de plus en plus dans noire opinion sur la 
haute antiquitë de ce beau poeme, qui lait l'adrairation des 
hommes iettrés et des poëtes de toutes les nations. Quant 
aux croyances et au principal fondcment de la religion 
chrétienne, le livre de Job est de plus un monument antique 
sur ce point de la pliilosophie des Orientaux. La spiritualité 
et Pimmortalité de I",xme sont visiblement spécifiées dans ce 
verset: « Il est écrit que le sou/fie (l',me) du Tout-Pois. 
saut donne l'intelligence. » Quelle vive peinture de la ré- 
surrection dans cet autre verset! « Je sais que mon Bédemp- 
teur est vivant, et que je ressusciterai de la terre au dernier 
jour; que je serai de nouveau revêtu de ma depouillv mor- 
telle, et que je verrai mon Dieu dans ma chair. » Il existe, 
dit-on, dans la Tracliouile, vers les sources du Jourdain, 
une pyrandde que les pèlerins assurent tte le tombeau de 
Job. 
JOBBEPS. Voyez Bocas, tome III, p. 60. 
JOBITES. Voyez Eoees. 
JOCASTE. Voye: 
JOCKEY mot anais, passé aujourd'hui dans la plupart 
des langues de l'Europe, et qui au propre désigne le valet 
d'i'curie cfiargé de monter et de faire courir les oeevaux dans 
les cou rses, métier ou, si l'ou veut, art qui a ses règles, 
et dans lequel on ne parvient point à exceller sans en avoir 
probablement fait une étude longue et toute spéciale. 
On donne aussi le nom de juchera aux Slortm 9 9en- 
tlemen qui, des nombreuses branches dont se compose le 
s1ort, cette science du monde fashionable, cultivent 
de préference les courses des clievaox, et qui souvent ne 
dédaignent pas de figurer eux-mmes dans ces luttes bippi- 
ques, où ils montent tantft leurs propres chevaux, tantft ceux 
de leurs amis. Horsejocle est une qualification répon- 
dant  celle de maquignon en français, et désigne citez 
celui fi qui on l'applique des habitudes de fraude et de trom- 
perie. Efin, le verbe tu )ocle9 est synonyme de note 
erbe surfaire. 
JOCIEY-CLUB, mot à mot club des jocleys. C'est 
la àenomination sous laquelle est connue en Angleterre, 
depuis plus d'un siècle, une réuoion d'amateurs de chevau 
qui a spëcialement pour but i'aaélioralion de l'espèce che* 
valine. Les membres le» plus distingués de l'aristocratie 
anglaise tiennent fi lionneur d'tre affiliés ì ce club, qui 
ne se recrute pas indistinctement de tous ceux qui aspi- 
rent ì s'y faire admettre. Le titre de membre du Jockey- 
Club équivaut donc presque à des lettres de noblesse, et 
s'acquiett en tous cas beaucoup plus diftidlemeat. C'est 
aux courses de chevaux, pour lesquelles le peuple anglais, 
depuis les sommités jusqu'aux degrés infimes de l'échelle 
sociale, montre un goùt approcliant de la passion, que les 
membres du Jo¢key-Club ont occasion de réclamer les 
priviléges attachés " cette quatité; c'est là qu'ils brillent 
de tout le luxe que peut projeter sur eux une institution 
fondée tout autant dans un but d'utilité réelle que dans 
des vues de vanité, vice qui se fourre partout, principale- 
ment en Angleterre. 
A diverses époques, de satires violentes contre les mem- 
bres de l'aristocratie anglaise ont été publiees sous le titre 
de Eogralhie des Membres du JocAe-Club; en 1796, 
Charles Pigott publia mme, sous le titre de The Female 
Joclfeg-Club, une scandaleuse chronique, dans laquelAe les 
plus grandes dames de l'Angleterre étaient représentées com- 
me pouvant à tous Carda aller de pair et faire compagnie 
avec les courtisanes les plus éfiontfes. A force de vouloir 
trop prouver, de pareils libelles ne prouvent rien, si ce 
n'est l'impudence de l'écrivain et la lcheté des pères, des 
ffres et des maria qui laissent impunément insulter de la 
orte leurs filles, leurs sœurs et leurs le|rimes. 

JOBJODELE 

Comme nous ne manquons point ì Paris de gens qui 
chcrchent b singer en tout les mœurs anglaises, nous po- 
sédons aussi depuis une trentaine d'années un Jocke-Club, 
qui se recrute parmi les hahitués du bois de Boulogne. 
Notre Jocley-Club, situé au coin du boulevard Montmartre 
et de la rue Grange-Batelière, est l'un de nos cercles les 
plus distingués, et tout y est organisé avec le luxe le plus 
confortable. Aussi la cotisation annuelle de cliacun de ses 
membres ne s'elèveot-clle pas fi moins de 500 fr. On ne 
saurait nier que cette association n'ait contribué, par ses 
courses sur la pelouse de Chantilby, à la Croix de Berny et 
 l'Hippodrome de Lon{champs, à l'amélioration de la race 
chevaline en France. 
JOCEO. Voyez CumPxrz. 
JOCONDI (Frère). VoyezGIocono. 
JOCP, JSSE. Ouvrez ceux de nos dictionnaires français 
qui front pas dédaigné d'enregistrer les termes du langage 
populaire, ils vous diront qu'un Jocrisse est « un bendt, 
qui se laisse gouverner, et qui s'occupe des plus petits soins 
du menace »,. Un dicton vulgaire et très-connu nous apprend 
mme à quel genre de soins peut descendre sa complai- 
sance et où il nène les poules dans l'occasion. Un auteur 
qui brilla sur nos petits théatres a donné de nos jours à ce 
nom une arception un peu différente; il en a fait le type de 
la gaucherie, confiante, ha,ve, d'une btise si franche, qu'elle 
désarme par l'ecès de sa bonne foi ceux mme à qui elle 
a pu nuire. Dorvigny, père de J a n o t, fut aussi celui de cette 
nombreuse famille des Jocrisse, qui resta longtemps pour le 
thé'.Xtre des Variétés ce qu'ëtait pour une scène plus noble 
cette 
Bace d'A£,ammenon, qui ne fioit jamais. 
On peut ajouter que l'une n'a pas excité moins de gaieté 
que l'autre n'a fait verser de pleurs. Cest surtout dans le 
Désespoir de .I, crisse que les maladresses du principal 
personnage, rendues plus comiques encore par le jeu si na- 
turel de B r u n e t, curent une vote prodigieuse. Aujourd'h ui 
Jocrisse, après avoir succ/lé à l'Arlequin balourd, a dis- 
paru du thétre avec son acteur, à sn tour. D'autres benêt% 
d'autres imbéciles sont venus sous de nouveaux noms I'y 
remplacer. Sic transit 9lutin... des niais. Toute[ois, le nom 
de Jocrisse a gardé sa renommée proverbiale, 
Et l'honneur de rester dans la race future 
Pour la plus lonrde bèt¢ une cruette injure. 
JODE( Pra ne), l'ancien, graveur célèbre, ne h An- 
vers, en 1570, était fi Is et élève du graveur G(rard de Jo»Æ (né 
en 1521, mort en 159! ), et se perfectionna plus tard dans 
son art dans Fatelier de H. Golzius et en Italie. A son re- 
tour dans sa patrie, en 1601, il exécuta un grand nombre de 
planches liistoriques, entre autres Le Jugement dernier, 
d'après 3. Cousin, composé de douze feuilles et Pune des 
plus grandes gravures que l'on connaisse. 
Son fils, Pierre de Jone, dit le jeune, né en t606, 
et comme lui graveur, le.surpassa sous le rapport de la lé- 
gèreté de touche, mais s'est montré lori inégal dans ses 
noml|reux ouvrages. Son petit-fils, Arnolà de onv., né en 
t 536, ne s'Ceva pas, comme graveur, au-dessus de la m- 
àiocrilé. 
JODELLE ('ne..e), sieur du Lymodin, né en 1532, 
mort en t573, écrivait ds t 59. Ce fut lune des sept Coiles 
de la piCade dont lonsard était l'astre principal, l'un 
des poëtes qui abandonnèrent avec lui le genre gaulois pour 
s'adonner ì l'imitation de la littérature classique grecque 
et latine. ,lodelle le premier appliqua ce système à la poésie 
dramatique : il lui fallut un certain courage pour lutter tout 
 coup non moins contre une 'vieille habitude que contre 
les scrupules qui ne loiCaient alors les reprbsentations scé- 
niques qu'autant qu'elAes rappelaient des actions de l'Ancien 
ou du Nouveau Testament. Aussi cette innovation íleva- 
t- elle contre Jodelle et ses amis la critique des rien x amateurs 
gaulois, et la colère des dévots, qui faillirent faire brOlc 



JODELLE -- 
les novateurs. Il n'en poursuivit pas moins son but; com- 
posa, avec des prologues et des choeurs, Cldopdlre captive, 
Didon se sacrifiant, tragédies; l'Eugène ou La Rencontre, 
comédies. Cette derniëre n'a point été imprimée, ce qui a 
fait penser à quelques biographes que l'Eugène et La Ren- 
contre ne faisaient qu'une seule et méme pièce; mais Etienne 
Pasquier nous apprend dans ses Recherches que La Rencon- 
tre portait ce titre « parce que au gros de la meslange touts 
les personnages s'estoient trouvés pesle mesle casuelement 
dedans une maison, fuseau qui lust fort bleu démeslé par la 
closture du jeu ,,. Or, cette comédie et la Cl#optre furent 
représentées devaut le roi Heurt 11, en 1552, à Paris, dans 
l'h6tel de leims. Pasquicr rapporte les détai|s de cette ré- 
présentation, comme y ayant assisté avec son ami le savaut 
Turnèbe ; l'analyse rapide qu'il donne de La Rencontre ne 
saurait s'appliquer à l'Eugène qui nous resle. Les acteurs 
principaux de celte représeutatlon étaient : Jodelle, Remy 
Belleau et Jean de la Péruse, qui plus tard suivirent l'exemple 
«le Jodelle, en composant l'un La Reconnue, comédie, l'autre 
la tragédie de M«dœee. Il est h remarquer que Jodelle, en 
s'inspirant de l'exemple des auciens, composait cependant 
ses ouvrages, tandisque ses imitateurs, au nomhre desquels 
il faut compter Lall, se contentaient de traduire des pièces 
du thé$tre latin. 
Jodelle recueillit gloire et profit de sa tragédie de Cldo- 
p6tre, jouée une seconde fois an collége de Boncourt, et 
pour laquelle il reçut de Henri II une gratification de cinq 
cent écus; il fut moins heureux à la représentation de Di- 
don. A son taleut d'crivain Jodelle réunissait des connais- 
sauces en architecture, en peinture et méme en mécanique, 
dout il voulut se faire honneur tout à la fois. Il se coustruisit 
douc un théAtre provisoire, peignit ou ordonna les décora- 
lions, établit des machines : ces divers travaux l'empêchèrent 
de porter aux répétitions de sa tragédie toute l'attentiou dé- 
sirable; ses amis les acteurs ne surent point leurs r01es ; des 
entrées manquèrent, et, pour ajouter au mécontentement 
du puldic assemblé, l'ouvrier cfiargé par Jodelle de peindre 
un rocher sur lequel Didon devait se sacrifier fit avancer, à 
grand renfort de poulies, un énorme clocher, sur lequel il 
n'y avait pas moyen d'exécuter le dénouement! Soit que ce 
malheur, dont ses envieux profitèrent, lui fit perdre les fa- 
veurs de la cour, soit plutOt que la gravité des événement. 
politiques qui surinrent donner un autre cours aux es- 
prits, il tomba dans la misère et le découragement ; jaloux 
de la réputation de Ronsard, il osa jouter avec lui en 
cfiantant la contre-partie de quelques odes de son rival, 
qui s'en vengea en faisant en vingt endroits l'éloge de Jo- 
delle. I| n'a que trop vérifié la pré|iction d'Ètienne Pas- 
quier : « Je me doute qu'il ne demourcra que la mémoire 
de son nom en l'air comme de ses poésies, » ce que le cri- 
tque attribuait à l'ignorance des lettres antiques. Ses oeU- 
vres ont été incomplétement réunies après sa mort en un 
fort beau vol. in-4 °, imprimé par Mamert Palisson, en 1574. 
Il en existe une autre édition, in-12, de 1597. 
VIOLLET-LEoDUC. 
JOEL (Ichthynlo9ie). Voyez Csxssov. 
JOELç fils de Péthuel, prophète hébreux, le second 
de ceux qui sont contenus dans le canon de l'Ancien Tes- 
tament sons la dénomination des Douze Petits Propfiètes, 
prophétisait dans le royaume de Juda, et parait avoir été 
contemporain d'Amos. On manque de toute espèce de ren- 
seignements sur sa vie. Dans son livre il décrit la désolation 
et les ravages causés dans le pays par les sauterelles, ex- 
horte virement les Hebreux à taire pénitence, prédit la glo- 
rifieation du peuple juif par Dieu, et exprime l'espoir qu'il 
anéantira ses ennemis. Pecommandant à ses compatrioles 
de se tenir prëts pour la lutte, il leur conseille de se faire 
des épées avec les socs de leurs charrues et des lances avec 
leurs faux. 
JOHAN.EA U (lto[), un des hommes les plus érudit 
de ce temps, né à Contres, près de BIois, le 1  octobre 
t770, mort h Pari.% en juillet 1851 • fut d'abord professeur 

JOHANNOT 637 
au collége de Blois, puis conservateur de la bibliothèque de 
cette ville, où il fonda un jardin botanique, dont il fut nomln 
demonstrateur. Admis à l'École Normale, il continua quelque 
temps encore de se dévouer au ministère de rinstruction. 
En 1797 il se lia avec l'illustre Lato,zr d'Auvergue, qui lui 
léua sa bibliothèque peu de temps avant sa mort. En 1805 
il fonda, de concert avec le savant préfet de l'Oise M. de 
Chambry, et avec M. Man,ourit, après en avoir seul conçu 
le projet et dressé le plan, rAcademie Celtique, qui le 
choisit pour secrétaire perpétuel et dont il a publié les 
moires avec dévouement pendant plusieurs annees. En 81 
il devint censeur impérial, place qu'il perdit en 181-I. Plus 
tard il fut nommé conservteur des monuments d'art des 
résidences royales, place modeste qu'il occupa durant tout 
le règne de Louis-Philippe, mais que lui retira le gouverne- 
ment du 2 février 188. 
Outre sa Glnssotnmie, ouvrage resté inedit, etqui est une 
méthode pratique de traduction des langues par leur dé- 
compositiou et leur analyse, sans étude préalable de leur 
grammaire respective, Johanneau a composé une multi- 
tude d'ouvrages, dont le plus graud nombre sout testés ma- 
nuscrits; nous citerous seulement : Mdlan9es d'origines 
dtymolo9iques et de questions 9rammaticales (Paris, 
1818) ; Les Fastes de Montreuil-les-Péches, épitre en 
vers; 3"ouvel Examen du Dictionnaire de rAcademie 
Française (lu-8 °) ; 3"ote sur les cinq livres d'Histoire du 
Tacite de Pancouce ( in-8 ° , 18-5 ) ; Œuvres de Rabe- 
lais, édition variort«m, augmeatée des pièces inedites, 
des songes drlatiques de Pantagruel, ouvage posthmne, 
avec l'explication en regard ; des remarques de Le Duchat, 
de Bernier, de Le Motteu, de l'abbê de Marsy, de Voltaire, 
de Guinguené, etc.; et d'un nouveau Comlnentaire histo- 
riqueet philologique iParis, 1823 1826 ; 9 vol. in-8 °) ; Novoe 
Lucubrationes , in novam scriptor. Latinor. Eibliothe- 
cam..., in Jul. Cwsar., Cornel. Vepot., et Justm. (in-8 , 
1830) ; Traduction en vers de l'Anti9one de Sothocle , 
avec des choeursl)riques (in-8 °, 181t) ; Lettres sur la 
Gdographie numism«tique (in-8 °, 18f9 . 
JOIIAXXISBERG ou BISCHOFSBERG, beau château 
bli sur une montagne du Rheingau, dans le duche de Nas- 
sau, situé au-dessus de ludesheim, diagonalement en face 
de Bingen, doit sa célébrité à l'excellent vin du R h i n que 
produit la terre rougeâtre de la montagne et aux eatrevues 
diplomatiques qui ont eu lieu plus d'une fois dans cette 
residence aristocratique. Le ch.teau, bti de 1722 à 1732, sur 
les ruines d'un ancien couvent de bénédictins, appartenait 
jadis, avec ses dépendances, à l'évché de Fulde.-Il fut 
attribué, en 1807, à titre de dotation, par Napoiéon, au 
marèchal Kellermann, duc de Valmy, et en 1816 donné 
en fief par l'empereur François II au prince de M etter- 
nich. Ce n'et guère anssique de cetteépoque que les vin« 
de Johannisberg acquirent une grande célébrite. On raconte 
que MM. de Rothsehild frères cherchant un moyen honnéte 
de faire agréer un tot de vin au premier et tout-puissant 
ministre d'Autriche, imaginèrent de lui acheter à forfait et 
de lui payer d'avance tonte la récolte des vins du Johan- 
nisberg pendant quinze années  raison de 5 ou 6 florins la 
bouteille ; tandis que c'est à grand'peine si auparavant ces 
•ins trouvaient preneurs à 1 florin. On ne pouvait évi- 
demment pa)-er si cher que d'excellent vin; et MM. de 
Rothschild, ajoute-t-on, trouvërent bient6t  rètrocéder leur 
marcbé avec 15 et 20 pour ; 0o de bénéfice. 
Les revenus de la terre de Johanuisberg s'élèvent auiour- 
d'hui à 80,000 florins. 
JOflANNITES. Voyez CHP, ÉlrlENS DE S.lr-r-J£'. 
JOli ANXITES (Ordre des). Voye JEAX-UE-JE;=SSJEs 
(Ordre de Saiut-). 
JOli ANNOT ( C[LLE$-H.ENiI-ALFIED), .qu'une mort 
prmaturée enleva à la peinture, était né en 1800, à Offen- 
bach, dans le graud-duché de Hesse, d'une famille française 
réfugiée en Allemagne après la révocation de l'Cit de Nan- 
tes. Il s'essaya d'abord dans la gravure, et l'on a V,L de sa 



a8 JOHANNOT 
main d'assez bonnes planches, par exemple les Enfants 
leràus dans les bois. Comme peintre, son succès date du 
salon de 1831, où il exposa une scène tirée de Cinq-Mars 
et Le h'aufrage de don Juan. Une certaine délicatesse de 
dessin, une coloration dégante recommandaient ces pre- 
miers ouvrages. La duchesse d'Orldans annonçant la vic- 
toire d'1tastebeck et l'Enlree de Mademoiselle à Or- 
lans {1533)conlirmèrent la véputation d'Alfred Johan- 
nul. Le premier de ces tableaux faisait partir de la galerie 
historique du Palais-Bo)al, qui a presque complétement péri 
au 2, féçrier tdtB. Le second, composition spirituelle et 
charmante, a Ionglen;ps figure au musée du Luxembourg. 
C'est le chef-d'oeuvre d'Alfrcd Johannot. Il faut ajouter à ces 
inoEressantes productions : François I" et Charles-Quint 
(1834); le Courrier Verner; Henri II et Calherine de 
MdicL (135); Le duc de Guise à la bataille de Dreux 
et 3Iar Stuart quitlanl l'Êcosse (rb36). La Bataille de 
Bratlelen, qu'Alfred Johannot peignit peu après pour les 
galeries de Versaiiles, fut son d.exniet" tableau, et ne fut ex- 
posée qn'après sa mort, arrivee le 7 dficembre 1837. Ver- 
sailles possëde aussi de lui les Funérailles des victimes 
«le l'atte;;t«t de Fieschi et la Baladle de Rosbeck. Des- 
sinateur spirituel, il a fait un nmbre considérable de vi- 
gnettes pour les litions de Waler Scott, de Byron et de 
Couper. Si sa mort n'eàt etc si prompte, AIfred Johannot 
aurait pu donner plus et mieux qu'il n*a donné. Très-adroit, 
très-rapide dans l'exécution, il ëtait plein de négligence, 
mais au,si de coquetterie. Le coloris de ses tableaux 
,l'un cl;armesingulier. On trouvera une notice de J. Janin sur 
ce regrettable artiste dans l'Art en province en fS37 
(tome III, p. 8,). 
JOHANNOT ( T.x ), frère et élève du précédent, 
naquit comme lui  Oflenbach, le 9 novembre tl03. Après 
s'Cre e_ssayé dans la axure, il exposa au salon de lb31 
Uzt soldat burant à la porte d'une h6tellerie et des scènes 
cmpruutes ì 3,a|ter Scott, entre autres Minna et Brenda, 
les deux helies I,éro,les du Pirate. 5lais dans la peinture 
Tony Johannot fut toujours moins heureux que son frère. 
Ses meilleurs tableaux, La Chanson de Douglu ( t835 ), La 
Seste (fs41), Andrœeet Valentine (1844), ont paru man- 
quer de finesse et d- legèreté. La Bataille de 
(musée de Versailles) est une composition sans valeur, et 
laus ses Petits Bracom;iers (18.$8)et sa Scène de 
luge (tgb$) on ne peut gure louer que les facile» me- 
rites d'une exécution pittoresque. C'est que le talent de Tony 
Jobannot n'clair pas la : il ne tarda pas lui-mème à le re- 
connaitre, et lorsque, i| y a dix ans, la mode vint d'illustrer 
les livres, Johannot fut biet6t l'un des plus habiles parmi 
noe faiseur de vignettes. Depuis lors n crayon n'a pas 
eu un jour de repos : .lanon Lescat; Moliëre; |l'e'rlher; 
le VO!lagesentlmcntal ;J,e Vicairede Wakefield, le Voage 
où 1 vous plaira, servirent tour à tour de prétextes à mille 
croquis improvisés et souvent remplis de sentiment et de 
grâce. En 1814 il grava à l'eau forte, d'après ses propres 
dessins, les i|lustrations de Werther; et c'est peut-Cre là 
son chef-d'oeuvre. Le style des vignettes de Tony Johannot 
n'est assurément ni sérieux ni correct; mais il est empreint 
d'une poésie séduisante et douce. Plus tard, Tony Johan- 
hot a tentë dans un domaine qui n'est pas le sien une ex- 
cursion malheureuse. Dans l'illustration de Jœr6me Pater- 
rot, il s'est essa'é à faire de la caricature; mais il n'a 
nullement ré.ussi. 5Iieux éclair sur ses instincts rëels et 
sur les véritables conditions de son talent, Tony Johannot 
venait d'abandonner ces folles exagérations ; il revenait à 
la gr:,ce, au sentiment, à la gentillesse; il achevait les ni- 
guettes de l'édition des romans de George Sand, lorsqu'une 
attaque d'apoplexie l'emporta en quelques heures, le t aoat 
1852. Paul 
JOHN BULL liftCalcinent Jean Taureau. C'est, 
eommetout le monde sait, l'expression s?mholique qui carac- 
terisela nation anglaise. Elle indique à la fois la violenc et 
In brusquerie des mouvement% l'indomllable obstination et 

 JOHNSON 
l'indépendance sauvage dont re peuple ne s'oit jamais alA- 
parti, mme en acceptant le oug de la hiérarchie féodale et 
de l'aristocratie héréditaire, la roidem" qu'il apporte dans 
les relations ordinaires de la vie sociale, n inaplitudeà 
se plier aux exigences du monde et surtout à s'accommodor 
aux mœurs et aux usages des pays étrangers. L'Angleterre, 
fidèle au passé, toujours domin6e par les souvenirs du 
moyen age, n'a pas pu bannir de la langue familiëre cette dé- 
signation allégorique, tandis que nous, Français, au dix- 
neuvième siècle, nous comprenons  peine le sobriquet de 
Jean Bonhomme, si justement appliqué aux paisibles ma- 
hauts et bourgeois de nos cités. On cl,ercherait vainement 
dans les annales de l'antiquité païenne des exemples de cette 
personnification d'un peuple par ;;n seul mot, de cette indi- 
vidualisation d'une masse repréentée par un Atre. Lalouve 
de Bomu|us ne représentait pas Rame; la chouette de Ii- 
nerve ne représentait pas Athènes. En ltalie, tontes les 
Iocalites ont créé un personnage comique, devenu type des 
ridicules et des défauts d'une race spëciale : l'Arlequin et 
le Pal;talon ne sont pas autre chose, et l'on doit chercher 
dans le génie mème des peuplades envahisantes la source 
première de cet emploi populaire de l'allegorie. Le John 
Bullison e-st aujourd'fiui l'exagération de l'humeur et du ¢a- 
ractere angkùs : on ne le découvre guère qu'/ la campagnol 
parmi les fermiers et eomen. Plfilarète ChAsSes. 
On pz'étend que c'est S wift qui le premier employa ce 
sobriquet de John Bull pour designer ses compatriotes. 
D'autres disent qu'il a pour origine un pamphlet contre les 
whi.'s écrit par John A r b u t h n o t ; d'autres encore l'iden- 
tifient avec le roast-beef, le rti de pré,lilection de nos 
voisins. 
JOH. BULL, musicien. Vo/e-- 
JO|ISON ( Br.sss.x ), pins ordinairement désigné 
sous le nom de Ben Johnson, celëhre poète dramatique an- 
glais, contemporain et ami de Shakespeare, ne le 11 
uin t574, à VCestminster, lut élevé à l'Cale du même nom, 
et par suite de la contrainte exercée sur son esprit par sa 
mère, remariée en secondes noces, embrassa d'abord la 
profession de maçon, q,i était celle de son beau-père; mais il 
ne tarda point à en Cre tellement déguLté q'il s'engages 
et s'en ails faire la campagne de Flandre. Revenu en Angle- 
tere à I'ge de vingt ans, il se rendit h l'université de Cam- 
hrid3e, dont, faute de ressources suffisants, il ne lui fut 
pas possible de suivre longtemps les cours; puis il débuta 
sur le thc'tre/ Londres. Mis en prison pour avoir tue un 
homme en del, il se fit auteur dramatique lorsquïl recou- 
rra sa liberté, et composa, entre autres, !es deux ingénieuses 
comédies intitulées Everg man in hs humour (1596), et 
£ver/ nan out of hL humour (1599). Vers cette opaque 
Shakespeare avait dèjà écrit quelques-uns de es meilleurs 
ouvrages. Johnson ne chercha point fi l'imiter. Il se contenta 
de peindre d'une manière piquante et souvent acerbe les 
mm's et les habitudes de sa nation. Le public applaudit à 
ses efforts; la reine Élisabeth elle-mème le combla de fa- 
vents, et il écrivit pour elle Cintha's Revels, que suivit 
Poetaster, production qui l'entralna-dans ufle violente guerre 
de plume contre Docker et iIarston» qui s'y rincent pour of- 
fensés. ,Iohnson fut membre du Mermaid Club, fondé par 
Raleigh, et dont firent partie Shakspeare ainsi que Beau- 
m o n t e t F I e t c h e r. Aprês, l'avénement de Jacques I " au 
tr6ne, ses talents poAtiques furent souvent utilisés pour con- 
tribuer à l'Cisl des fétes données à la cour de ce prince; 
ce fut là l'origine de ses pièces de circonstance connues sous 
le nom e Mas/ (masques). Independamment de quelques 
tragédies, telles que Sejanu et Catiling, il composa, 
partir de 1 t;05, quelques-unes de ses meilleures œuvres comi- 
ques, par exemple $'olpane, Epicoene et The Alch/mist. En 
1619 Jacques 1 « lenomma poëte lauréat, aux appointements 
de 100 mates, ports plus tard à t00 lin. st. par Charles I ,. 
Néanmoins, les dernières années de sa vies'écoulèrent dans 
la misère et les maladies. Son génie s'en ressentit, et ne se 
réveilla plus qu'une eule fois» pour composer fhe 



JOtLNSON 
S/tTer, paslorale demeurée inachevée. Il mourut le 
16 aoat 1637 ; on voit son tombeau dans l'abbaye de West- 
I 
minster. 
JOllNSON ( Sam.), l'un des tittérateurs les plus dis- 
tingues de l'Angleterre, lut en mème temps remarquable 
par l'originalité de son caractère. Il naquit le 18 septembre 
1709, à Lichlield, dans le comte de Stafford. Son père était 
libraire. Elevé dans une famille attachée à la cause dc 
Stuart, et où régnaient aec force les idées religieuses, 
Samnel Johnson pousa le torsme jusqu'au jacobitiimi, et 
la dévotion jusqu'à la bigoterie. La plus grande partie de 
sa vie s'écoula d'ailleurs dans la pauvrete. Grâce aux bonnes 
et fortesCudes préparatoires qu'il lui avait etWdonné de faire, 
au collége de sa ille natale d'abord, puis à celui de Stour- 
bridge, il fut choisi à l'e de dix-neuf ans pour accompa- 
gner le fils d'un homme opulent à l'université d'Oxford, 
dont il put ainsi suivie les cours pendant deux années. 
tombe dans le besoin quand il eut perdu cette position, et 
demeuré sans aucunes ressources après la mort de son père 
( 173t ), il entra comme rendre d'éludes à l'ecole de Market- 
Ensworth (Leicestir). Il ne garda pas longtemps cette place, 
et s'en alla à Manchester, ou il pubtia une traduction de 
Voyoges en Abyssinie de Lobo ; travail qui ne lui vaiut que 
,5 liv. st. d'honoraires. Enfin, en 1735, arrivé à l',e de 
vingt-huit ans, dans l'espoir d'amèliorer ainsi son sort, fl 
épausa une vieille veuve, qui lui apporta en dot une somme 
de 00 tiv. st., avec laquelle il fonda une pension de jeunes 
gens à Birndngham. N'a)ant pu jamais réunir au delà de 
trois é]/ves, il se rendit, deux ans plus tard, àLondres avec 
Garrick, qui était l'un de es trois uniques pensionnaires, 
emportant dans ses bagages une tragédie encore inacbcv«, 
Ireae, sur laquelle il fondait de grandes esperances, et ou 
se trouvent en effet quelques beatLx vers, mais qu'il ne put 
lainais parvenir à faire jouer. Il fut d'abord employé par un 
journal politique à rendre copte des nces du parlement. 
Elles n'niaient point alors publiques, et il lui fallait rédiger 
son compte-rendu ur des notes trè-huparfaites, commu- 
niquées par les huissiers de la chambre; mais il savait donner 
de la vie à ces documents recueillis sans intelligence, et 
de l'éloquence à des orateur qui s'etonnaient d'avoir si bien 
parlé. En méme temps il donnait des articles politiques sur 
les questions et les événements du moment au Gentlemefs 
Maga.ine, lubliait des notices biographiqoes, et, de t743 à 
1745, son Compte-rendu d seauces du ent de Ldliput, 
satire ingeniiuse des detibérations du parlement écrite au 
point de vue tory. Aprës son poeme intitulé Londo 
qui est une imitation de la 3  satire de JusCul, dans la- 
quelle il flagellait les  ices et les ridicules de son siècle, il 
6t para[tre The Lire oJ Bchard Savaçe ( tT ), ouvrage 
qui aunon.c, ait un bon prosateur et un observateur rempli 
de finesse et d'espriti Ses Mtcellaneous Observations on 
lhe tragedy of Macbelh (74b) furent moins bien ac 
cueillioE A cette époque, presse par le besoin, il écrivit en 
outre des préfaces, de brochures ; et la verve mordante 
qui les dictait attira de plus en plus sur lui l'attention du 
public. En t747 on lui proposa de publier un dictionnaire 
de la langue anglaise. Il mit sept années à terminer cet ou- 
vrage, qui bonori ion auteur et l.Jmgleterre. C'est peut-ëtre 
le plus vigoureux travail qui soit sorti d'une tëte bumaine. 
Il et curieux de comparer ce livre avec le Dictionnaire 
de l'Acadoemie Française. Le Dictior, naire anglais a un ca- 
chet d'individualité qui donne au livre un intérèt d'ensemble 
qui semblerait de-oir fdire defaut à un exiqne; on sent 
dans cbaque definition un espdt puissant et toujours le 
même. Le dictionnaire français, disert, exact, ingéniiux, 
tanque de celle orinalitè qui lait le principal mérite des 
ns livres, mais à laquelle dans un pareil travail on dé- 
se«perait d'atteindre : « Il appartient à un Anglais, dit 
;olmson avec orgueil, de faire seul et en sept ans ce que 
n'ont pu accomplir des génërations d'académiciens fran.c, ais 
en deux siècles. » T«,ut en se livrant à ce travail opiniàtre, 
que lui fut pa}-é 1,53 [iv. st., il pub[la en outre lê Bantler 

-- JOIE 630 
(B(deur), journal dans le genre des publication« que le 
Spectateur d'Addisn avait mis à la mode (t70-1752), et 
The Vanit!/o.fhuman Wshes, imitation de la I0" satire 
de Juvénal. 
Ses travaux liftCaites ne le sauvaient pa« de cette pau- 
vretWcontre laquelle il avait lutté dès son enfance. La mi- 
sère lui fut une compagne sévère, dont on oit, à la rudesse 
de sa pensée, à l'amertume de ses sailhe% qo'il s'inspira 
trop souvent- En 1759 sa nère moorut, et manquant d'ar- 
gent pour paer les frais de sa maladie et son cercueil, il 
ilenferma, et écrivit llaselas, ou le prince d'Ahysime, 
roman où tous les dé»appointements du Cœur et de la pen- 
sée sont soigueusement recuellis et ana]ysés. Mais ce quïl 
faut admirer, c'est la sérénité de talent qui domine cette 
œuvre douloureuse et le charme orienl',d qu'elle respire. Le 
Candide de Voltaire parut la m.me année. Le but de CaTt- 
dide est le mme que celui de Russe/as, le néant des e- 
pérancesbumaines. On sait que Candide ?« le truit d'une 
boutade du patriarche de Fernc et d'une blessure de son 
amour-propre ; aussi est-il plus amer contre la Providence 
que Johnson, qui avait écrit sur la tombe de sa mre. 
Cependant, la mauvaise fortune de Jhnson se ralentit. 
Sous le règne de Georges III, lord Bute, premier ministre, 
lui fit accorder une pension de 300 liv. st., qui le reconcilia 
avec la politique ministérielle. Dans sa reconnaissance, il 
prit la plmne pour la défe ndre contre les Amedcains méeun- 
teurs, et écrivit ses pampidets The./alse Alarm (1770), et 
Taxation no tyranny (1775). En 1762 il fit para[tre son 
édition de Sha£speore. On ,ait  quels commentateurs 
Shatpezre a etë en proie; lainais le gënie n'a etc la victime 
de critiques plus etrots. L'édition de Johnson n'est guère 
preferablc aux autres, mais les préfaces qu'il ajoute à cha- 
que pièce sont trës-rcmarquables. Sa prélace generale et 
un chef-d t»uvre. Sa peusee est toujours forte, eleve, et 
son slyle, quoiqu'un peu contraint et forgé sur l'enclume de 
l'anliquite, platt par son étrangeté mème et sa pompe. ['n 
voae qu'il eut occasion de taire en Brosse et aux H¢bri- 
des, en 1773, lui fournit le sujet de son livre intitulé Jour- 
ney to the Westert sles qf $cotland (1775) ; et les doutes 
qu'il y Cit sur l'authcnlicite des poesies d'Ossian l'entrai- 
acreut dan une polémique vi«)lenlc contre M ac ph ets o n. 
E 17,"7 des libraires publièrent une collection des poé!es 
anglais. Johnson écri it le,]rs bio,raphies. En Angleterre 
plus qu'en _France, on s'est occupe de la vie des personna- 
ges littdraires. On  recueille aec soin les documents, les 
traditions de/amille. En France, on néglige tous ces details ; 
on ne peut éçrire qu'une demi-page sur La _Fonlaine et La 
Bru)ère. Les Vies des Poêtcs anglais les plu emnents 
de Johnson sont toutes admirees, quoique l'esprit de parti 
s' trahisse trop souvent et le rende injuste. C'est ainsi 
qu'il s'est montre partial dans sa Iïe de Millon. Il axait 
soixante-dix ans quand il écrivit cet omrage. Il n') avait 
alors peut-Cre aucun auteur vivant que sa critique n'eùt 
blessé, aucune réputation d'auleur qui n'eut etWatteinte 
par ses sarcasmes, aucune admiration pour les publlcation 
du jour que n'eùt Iietrie sa caustique humeur; bien des 
écrivains aaient a lui demander compte de leurs livres, 
que sa censure avait proscrits ; mais ce critique redoute, 
ce Slla littéraire, n'abdiqua pas; son ombre est encore la 
gardienne du goOt en Anglcterre, off Port craint toujours 
que quelque épiramme ne sorte de sa tombe. 
Joimson mourut de chagrin, malade, le 15 dëcembre 1784, 
à Lundres. Il tut enterré à Westminster, pres de Garrick, qui 
avait été son elève, et qui était toujours resté son ami. 
Ernest DESLOZEAEL 
JOIE, émotion de l'àme causée par le plais i r ou par 
la possession de quelque bien. « La joie, dit Locke, est un 
plaisir que l'line go0te Iorsqu'elle considère la possession 
d'un bien présent ou à venir comme assuree. » Elle differe 
de la gaieté. On plalt, on amuse, on divertit les autres par 
sa gaieté ; on pme de joie, on erse des larne de joie, et 
rien nct -i doux que de pleurer ainsi. 



60 
Il peut mëme arriver que cette passion soit si grande, si 
inespérée, qu'elle aille jusqu' détruire la machine : la joie 
a étouff quelques personnes. L'histoire grecque parle d'un 
Poficrate, de Chilon, de Sophocle, de Diagoras, de Philip- 
pidès et de Pun des Denis de Sicile qui moururent de joie. 
L'histoire romaine assure la méme chose du consul Manios 
Juventius Thalna, et de deux femme de Ruine qui ne pu- 
rent soutenir le ravissement que leur causa la présence de 
leur fils après la déroute arrivée au lac Tra«imène. L'his- 
toire de France nomme la dame de Châteaubriant, que l'excës 
de joie fit expirer tout d'un coup, en voyant son mari de 
retour du voyage de saint Louis. Mais, sans nous arréter d 
des faits si singoliers et peot-ètre douteux en partie, il y a 
dans les Actes des Ap6tres un trait pins simple qui peint au 
naturel le vrai caractère d'une joie subite et impetueuse. 
Saint Pierre a3ant été tiré miraculeusement de la prison, 
vint chez llarie, mère de Jean, oit les fidèles etaient assem- 
blés en prières; quand il eut frappé à la porte, une fille 
nommce Rhode, ayant reconnu sa voix, au lieu de lui ou- 
vrir, courut vers les fidèles avec des cris d'allégresse, pour 
leur dire que saint Pierre était à la porte. 
Si la gaieté est on beau don de la nature, la joie a quel- 
que chose de céleste. Sou pas cette joie artificielle et forcée 
qi n'est que du fard sur le visage; non pas cette joie molle 
et fol31re dont les sens seuls sont affectée, et qui dure si 
peu; mais cette joie de raison, pure, égale, qui ravit l'me 
sans la troubler; cette joie douce qui a sa racine dans le 
cœur; enfin, cette joie délectable qui a sa source dans la 
vertu et qui est la compagne fidèle des mœurs innocentes ; 
nous ne la connaissons plus aujourd'hui, nous y avons 
sstitué un vernis qui s'écale, un taux-brilla de plaisir, 
et beaucoup de corruption. Ch r ne JXUCOCBT. 
JOIGNY, chef-lieu d'arrrondissement, dans le départe- 
ment de I'Y o n n e, su r la rive droite de l'Yonne, avec 6,455 
habitants, des tribunaux de première instance et de com- 
merce, un collége, une récolte d'excellents vins rouges/'ms 
des crus de la C6le.SainI-Jacqoes, des Tuées, de Yergemar- 
tin, de bligraine, de Souvilliers, du Calvaire. Elle possède 
une typographie, une fabrique de capsules fnlminantes, des 
tannetàes, tuileries, btiqueteries, etc. Ou y fait un grand 
commerce de buis, de xin et de charbon. C'est une station 
du chemin de fer de Pari à L)on. 
Joigny s'élève en amphithéàlre sur la pente d'un coteau. 
11 est généralement mal btti et mal percé, mais cependant 
agréable. On y voit de belles casernes et trois églises golhi- 
ques; la votte de celle de Saint-Jean passe pour un chef- 
d'œuvre d'architecture. On y passe l'Yonne sur un beau 
pont. 
C'est une ville fort ancienne. On attribue sa fondation 
 Flavius Jovinos, général de la cavalerie romaine dans 
les Gaules. Dès le premier siëcle, elle eut des comtes parti- 
culiers. 
JOIXT JOISTURE ( en latin junctura, de jun9ere, 
joindre, assembler, unir, lier). Dans les ads mécaniques, 
on appelle généralementjoint ou jointure l'endroit où deux 
corps très-rapprochès s'unissent. En architecture, lesjoinls 
sont ces intervalles plus ou moins sensibles qui sépa- 
rent une pierre d'une pierre, une brique d'une brique, et 
qui, selon la qualité diverse, la ténaeité, la fermeté des 
matières, sont remplis d'une couche plus ou moins épaisse 
de mortier de pl3tre, de bitome, etc. C'est dans ce sens 
d'espace existant entre deux choses qu'on dit : Trouver 
le joint d'une affaire, pour exprimer la meilleure manière 
de la prendre. En anatomie on donne vulgairement le nom 
de jointure aux endroits du corps ou les os «ont joints en- 
semble pour l'exéeution de diffërents mouvements. Ce sont 
proprement des a r t i c u ! a t lu n s. 
Enfin, en termes de manCe, juin lute, synonyme de jointe 
ou Iituron, se dit de la jambe comprise entre le boulet 
et la couronne. 
JOIXVILLE chefAieu de canton dans le dëparlement 
de la Haote-.Iar n e, sur la rive gauche de la .larne, aveu 

JOIE  JOI'VILLE 
3,505 habitanf., un collége, une importante fabrication de. 
bonneterie de laine serge, drogoels, tiretaine, on commerce 
de cire. On y trouve des tanneries, des chamoiseries, et les 
environs produisent une récolte assez abondante de vins. 
C'est une station du chemin de let de Bleme à Gray. 
Joinville doit son nom et son origine  Jovinus, général des 
afinC romaines, qui y fit btir une tour en 369. Quelques 
habitations s'Alevèrent bient6t après, et sous la protection de 
cette tour fortifiée, un château lut construit sur la haoleur, 
à une époque qui n'est pas bien d,.terminée. La baronnie 
de Joinville appartint plus tard h l'historien de saint Louis. 
La ville, qui s'clair formée au pied de la raonlagne et sur le 
bord de la blarne, fut prise par Charles-Quint, qui la bn31a. 
Elle fut restantC, ainsi que le chtteau, par François ! , 
en faveur de Claude de Lorraine, duc de Guise, et érigée 
en principauté par Henri Il, en 1558. Cette seigneurie 
avait pass depuis à la famille d'Orh4.ans. Le chîteao fut 
dëmoli en 1790. On voit encore dans le faubourg la mai- 
son de paisance des dues de Guise. 
JOINVILLE (Jxs, sire ), sénéchal de Champagne, 
était is.o d'une ancienne famille. Elevé au service du comte 
OEhibault, le premier de nos trouvères, il apprit à sa cour 
le biau langaige , en mme temps Cl'il y remplissait les 
devoirs de sa charge, et tranchoir du couteau devant le 
comte. La croisade de 129 lui reCira l'amitié intime et 
familière de Loui s I X, dont il écrivit l'histoire, à la priëre 
de la reine Jeanne de avarre, afin que ce tableau de piCL et de valeur frit on modèle au jeune Louis, arrière-petit- 
fils du saint roi. 
Un siècle ètait révoln depuis que "V i I I eh a r d o u i n avait 
éerit la mémorable expédition qui fit tomber Constantinople 
aux mains des Latins ; et cependant,  sa lecture, il semble 
qu'une moins courte dislance separe ces deux historiens. 
La langue de Joinville atteste on progrës nolable dans l'es- 
prit de la nation : sa phrase a plus d'élégance et surlmtt 
de clarté ; les constroctious latines y sont plus rares ; son 
allm-e est plus française ; sa marche, moins abandounëe au 
caprice, est plus soumise aux règles ; l'orlhographe, mieux 
calque sur l'élymologie, rapproche davantage les mots de 
la figure qu'ils ont aujourd'hui ; enfin, il y a plus loin de 
Villehardouin à Joinville que de Joinville à Brant6me, qui 
tenait la plume sous les fils d'Henri 1I. Mais Villehardooin 
ne veut qo'enregistrer des laits militaires, et ne laisse pas 
entrer dans l'intoerieor de ses personnages ; Joinviile, au con- 
traire, n'oublie aucun Irait qui peut servir ì la ressemblance 
de son tableau, et semble encore s'y poser sur l'escabeau 
off saint Louis le faisait asseoir à ses pieds, soit pour lui 
dire : Sëneschal, quelle chose est DieuP -- Sire, ce est 
si bonne chose, que meilleure ne peut eslre ; réponse d'une 
nai'velé sublime; soit poordemander ce qu'il aimerait mieux: 
avoir la lèpre ou faire on péché mortel ; et Joinville, qui 
onques ne Il menti, répond qu'il aimerait mieux en avoir 
fait trente que eslre mesiaus. Mais son royal ami le corrige 
en lui rappelant que le péché est la hideuse lèpre de l'àme, 
et ajoute : Lavez-vous les pieds aux pauvres le jeudi saint ? 
• Sire, dit Joinville, en malheur, les pie-- àe ces vilains 
ne laverai-je.  Vraiment, fist le roi, ce fit mal dit; car 
vous ne devez avoir en desdain9 ce que Dieu fist 13pur 
nostre enseignement. ,, Cependant Joinville accomplit avec 
soin lesobservauees religieuses contenues au serment de che- 
valerie. S'il doit l'exemple du courage h ses chevaliers dans 
la guerre, il sait qu'il doit cdoi des bonnes mœurs dans la 
paix. « blon lit estoit fait en mon paveillon, dit-il, en tel 
manière que nul ne pooit entrer ens que il ne me veist 
gésir eu mon lit, et ce fesoie-ie pour osier toutes meserëan- 
ces de femmes. » Son courage est ingénu, sans ostentation 
de jaclanee; il en a tellement la conscience qu'il ne cherche 
pas à dégoiser les transes qui accompagnent la mort, quand 
elle vient sans l'ivresse des combats. Comme historien, il 
n'orner point les causes dans le récit des effets; il recueille 
des observatious sur Phi.toire, les opinions, les mœurs, le 
céremonial des penple.s : ici il décrit un fossile, là il dis- 



$OINVILLE 
tingue les nuances entre des mots synonymes : ainsi, le 
raisonnement réglait déjà l'usage de la langue. 
« ,loinville, à qui l'abbé de Cheminon avait donné la croix, 
mit sa terre en gage, indemnisa ses vassaux des torts qu'ils 
avaient pu éprouver de luiomème ou de ses officiers, entra 
dans la voie de Dieu par des pèlerinages aux corps saints 
des chapelles voisines, et s'embarqua avec neuf chevaliers, 
ses feudataires, au nombre desquels étaient deux bannerets. 
Au débarquement sur la plage égsptieune, il conduisait 
l'avant-garde. Chaque nuit, au canal d'Acbmoun, où l'armée 
se consuma en stCiles elforts pour jeter une digue, il gar- 
dait les chats-faux, espèce de tours en bois destinées à 
protéger les travailleurs, et que l'ennemi attaqua bientdt 
avec le feu grégeois. Ensuite Joinville marcha avec cette 
avant-garde, que la tëmérité du comte d'Artois entralna 
dans la Massoure. Plus tard la galère qu'il monte est 
abordée par une galère du soudan ; et tandis que les infi- 
dèles se ruent sur ses gens, il se lait hisser sur le tillac 
du navire égyptien, où, mis à genoux et jeté deux fois 
sur le dos pour mourir, il ne doit la vie qu'aux efforts 
d'on renégat allemand, qui lui fait un rempart de son corps, 
en s'Criant que Joinville est cousin da roi franc. Quand 
les mamelucks révoltés curent massacré leur soudan, Join- 
ville courut de nouveau danger de mort. Mais le chef des 
révoltés maintint le traité que sa victime avait consenti avec 
le roi Louis; pourtant il s'en fallait «le trente mille livres que 
le premier payement sur la rançon ne Itt complet. Join- 
ville offrit d'aller prendre cette somme au tré.or des Tem- 
pliers, et il se dispo.ait  briser le coffre  coups de hache, 
i le grand-rnaltre n'e0t pliWla rigueur de sa règle devant 
la nécessité des circonstances, la captivité d'un roi et le 
salut d'une armée. 
A Saint-Jean d'Acre, quand l'épidémie eut cessé ses 
ravages, les croisés se réunirent en conseil de guerre. Join- 
ville fut d'avis de se maintenir dans la Syrie chrétienne, 
afin de couvrir les villes que menaçait l'infidèle, et le roi 
suivit ce conseil. Pendant le sëjour de Louis en Syrie, 
Joinville, à la tte de cinquante chevaliers, fit partie de 
sa maison militake. On peut s'imaginer avec quel bonheur 
il revit ensuite son domaine, lui qui, parlant de son départ, 
disait avec l'accent de la nature : Je ne voulus onques re- 
tourner mes ye2 vers Joinville, lource que le cuer ne 
me attendrisist du biau chastel que je lessoie et de 
mes detT en.fans. 11 s'occupa de cicatriser les ploies de son 
absence, car les officiers des rois de France et de Navarre 
en avaient abusé pour fouler ses vassaux, et c'est le pré- 
texte dont il excusa so rehls de s'engager dans une se- 
conde croisade (12{7), où il ne pressentait que des info- 
tunes. En ci fer, Louis était d'une telle faiblesse que Joinville 
fut obligé de le porter dans ses bras, depuis l'h6tel du 
comte d'Au,erre jusqu'à l'abbaye des cordeliers, oi] il prit 
congé du roi. 
11 passa le reste de sa carrière dans l'uniformité d'une 
vie calme,  la cour de Thibant Il,roi de Navarre et 
de Champagne, tandis qu'il était reçu par Louis IX avec 
une bienveillance qui excita souvent la jalousie des courti- 
sans. Thibant mit  profit cette laveur d sénéchal, qu'il 
chargea de négocier son mariage avec Isabelle de France, et le 
récompensa du succès en lui cédant ses droits sur le village 
de Germay. Pendant l'expédition de Philippe III en Aragon 
(1283, Joinville exerça le gouvernement de Champagne. 
Sous Pllilippe le Bel, nous le voyons ou répondre aux 
comissaires cbargés ,es enq,ètes pour la canonisation 
de Louis IX, ou entrer dans une ligue de seigneurs coa- 
lisés pour résister  l'établissement d'nn imp6t sur la pro- 
rince. Enfin, appelé par Louis X, sous i'étendard royal, 
pour une expêdition contre les Flamands, il revètit la cui- 
rasse à I'ge où la portait Nestor, car il ne devait pas avoir 
moins de quatre-vin-douze ans. Les époques de sa nais- 
sance et de sa mort ne sont pas bien précisées; mais il 
parait que ce fut vers les années 1220 et 1318. 
Le sénéchal avait la taille élevée, le corps robuste et la 
nlCT. I)E LA COIVEIS. -- T. ll. 

641 
téte d'un volume exlraordinaire. Il avait été deu foia 
marié : d'abord avec ,ix de Grandpré, dont les enfant 
mles s'éteiguireut sans postérité maline; ensi 
Alix de isnel, et cette union pçoduiit deux bnch. 
La odette, reprénte par Jn de JoinviHe, grand-n- 
ntable de Sicile, s'blit au roae de apl; l'autre, 
continuée en Champe par Ancel ou Anoeau, finit dan 
son fils Hen qui eut deux fill de son union avec blanc 
de Luxemurg. L'atnée, mariée à Ferry de Loaine, fnt 
la quatrième aïeule de François, duc de Guioe, en la per- 
nne duel Henri Il érig (1559) la baronnie de Joinçill« 
en princiuté. 
Une première édition de ce naïf hisn fut mise au 
jour à Poitiers, en 1547, par Antoine-Pierre  ieux, et 
dédiée à François i*; mais comme l'Miteur en avait 
trouvé le style vieux et rude, il eut la malheureu id 
de lui donner I formes de son époque, et d'ajouter aux 
éçénements qui lui parasaient in,replet. Claude Mes- 
nard donna une nouvelle édition lement in  ( Anges, 
I17), o6 le texte t oestauré en plusieurs endroi à l'de 
de quelque pièces ofiginale«. En I8,  nge publia 
son édition savan, rimprimée dans la Collection univer. 
selle d Mèmoires partliers relatfs b histotre de 
France. Mais, après de ains effo ur découir un 
texte oginal, Du Cange s'était vu ruit à prendre, 
dans Bieux, et là dans Memard, ce qui lui semblait poer 
le oechet du langage queJoinville avait dO rire et parler. 
Enfin un mancrit contemporain, stlppo sinon pur, du 
moins tr-peu alté, et qui tons oute avait psé des 
comtes de Flandre aux mains du prince de Saxe, fut ache 
r la Bibliothèque royale, et confié  Iïmpreson sous la 
surveillance de Caperonier (Paris, in-folio, 17I). 
Hippolyte FAVCnL 
JOINVILLE ( Fçot«- F£m- Pmuee- Loms- 
5m 'ORLEANS, poe v£), nWà ffeuilly-sur-Seine, 
14 aoOt lt, est le troisième des fils de l'ex- roi d Fran- 
ois Louis-Philippe. Une révolution, provoquée pat 
les lautes accumuté de son père, a exilé oe jeune 
d'une pat qu'il avait toujou bien servie, et ds laquelle 
son nom restera longtemps enco entonr d'une ceine 
auréole de popularité jtement anioe par d manir 
franch et loyales et par quelques actes qui prouvaient 
qu'avant d'ètre pce M. de Joinvillevoulaittre Francs. 
De bonne heure sa famille le destina à la marine. Il en- 
trait dans la politique de LouiPhilippe de plaoer a la 
de chacune des andes divisions de notre foroe miliaire 
l'un d prinoes s enfant. M. d'Orléans et M. de 
mn u rs appartenaient déjh h l'armée de terre ; M. de Join. 
ville dut faire l'apprentisge du pénible métier de marin 
encore bien qu'une ave infirmité naturelle, une surdité 
des plus pnones, le rendit ut-tre moins propre à 
service qu'à tout autre. Dès 1834 on l'envoya faire, comme 
élève de première classe, con apprentissage de la mer da 
une promenade *e Madère et I Açores. En 1836 il pa 
lieutenant de vaisseau, et à rd de la fgate Plphi9énie 
parquet les ct de la Gce, de la Karamanie et de la 
Syrie. En novembre 1837 il fut en*oé dans les me du 
Brésil, et il ne revenait e France qu'an ut d'nne année 
d'ahoence. Il y avait h peine un mois qu'il ëtait de retour 
en Frauce, lorsque nos relations avec le M e xiq u e prent 
un caractère tel que le gouvernement dut  dider à en- 
voyer une division navale dans les ux de la Véra-C ru z, 
 l'effet d'exiger et d'obtenir les fisfactions du à l'hon. 
neuf de notre pavillon. Le commandement en fut nfié 
l'amiral Bau d in, qui eut sous s ordres le pce de Joli- 
ville, promu au ade de oepitaine de vaisseau, et qui dans 
oette expédition, commanda la frégate la Croeole.  sie 
et la pri Saint-Jn d'Ulloa fournioent au jeune prince 
l'occasion de se distinguer par sa froide intrépidi. Au 
mois de juin 139 il alla rejoindre, dans le *ant, à bord 
du vaissu le Jupiter, l'adre de l'amiral Lalande, dont 
il ,enoet fi'tre nommé chef d'état-ma)or; ers la fin de 
mme été il lut appelé au oemmandement de la frat 



;4 JOINVILLE 
Belle-Poule,  bord de |aquelle, |'nnée suivante, il fit une 
campagne  jamais cëlèbre. Le gouvernement de Louis- 
Philippe, qui avait déjà précédemtnent rétabli la statue de 
l'empereur sur la colonne d'airaln de la place Vendme, ve- 
nait de décider que les cendres du grand homme seraient, 
conformément  ses derniëres volontés, rendues à cette France 
qu'il avait tant aimde. Le gouvernement anglais donna 
son acqniescement  cet acte de tardive rSparation, et ce 
fut à 51. le prince de Joinville qu'ichut la glorieuse mission 
de le réaliser. 
L'année suivante, M. de Joinville fut nommé au comman- 
dement de la station de Terre-euve. En 1842, il épousa 
la princesse Januaria, ur de l'empereur du Brésil au- 
jourd'hui régnant, et qui lui apporta en mariage une fortune 
immense. Ce mariage n'interrompit point les services si ac- 
fils et si nombreux de M. de Joinville; et il prit part à tou- 
tes les cxpédifions maritimes de quelque importance qui 
signalèrent la fin du règne. Quand éclata la révolution de 
févrie.r, il se trouvait avec sa femme à Alger, où il avait 
accompagné son frère le duc d'Aumale, appelWau comman- 
dement général de l'AIgé¢e : c'était, dit-on, un exil véri- 
table, qu'il s'était atti¢ de la part du roi son père à cause 
de la rude franchise avec laquelle il blé, mail l'opini,treté de 
caractère qui portait le roi à refuser satisfaction aux moin- 
dres réformes politiques réclamées si hautement par l'opinion; 
réformes qui ,.si elles avaient été opérées en temps ntile, 
eussent infailhblement consolidé l'établissement de Juillet 
et assuré la paisible {ransmission, dans la maisun d'Orléans, 
rle la couronne de l'aieul au petit-fils. 
A la nouvelle des événements dont Paris était le thétre 
et qui contaient à sa famille un trône et une patrie, l'at- 
titude de M. de Joinville fut aussi digne que patriotique. 
On lui s»t gré de ne point avoir cherché à user de sa popu- 
larité dans l'armée et dans la flotte, pour pro{ester contre 
la surprise de février; et à diverses reprises l'opinion pu- 
blique reconnaissante s'intéressa pour solliciter en sa faveur 
une exception à la loi rendue contre les autres membres 
de la famille d'Orléans, exception qui lui eut permis de 
rentrer en France pour y vivre en simple citoyen. Il était 
ds'lors tout naturel que les faiseurs du parti de la fu si on 
cherclmssent  exploiter cette disposition des esprits en po- 
sant longleraps d'avance sa candidature à la présidence de 
la république, pour l'élection à laquelle la nation eut encore 
une fois été appelée en mai 1852, si le coup d'État du 
 déce mbre 1851 n'était pas venu faire évanouir toutes 
tes espérancesd'une restauration bourbonienne. 
JOLIBA ou DJOLIBA. Voçe-- 
JOMARD (En - FrçOlS), célèb¢ archéologue, 
membre de l'Aca 'démie des Inscriptions et Belles-Lettres, 
est né à Versailles, le 20 novembre 1777. Admis l'un des 
premiers à l'École Polytechnique, lors de la fondation de 
cette institution en 1795, il fit patrie en 1798 de l'expédition 
d'Egypte. Quoique cbargé de travaux topographiques 
aussi importants que difficiles, il trouva encoreassez de temps 
pour dessiner et décrire des monuments antiques de cette 
contrée. Ievenn en France en 1802, il lut envoyé en 
vière pour y diriger des travau. topoaphiques entrepris 
le long des frontièresde Bohème, dans le bant Palatinat. 
L'année suivante on le rappela à Paris pont y prendre 
part  la rédaction de la Description de l'Egypte. En t818 
l'Institut l'adroit dans son sein, et depuis lors on trouve 
son nom attacbé à toutes les g¢ndes publications dont I'A- 
frique a été l'objet, par exemple, au Voyage à l'oasis de 
Thèbes de C ail I i a u d, aux Voyages de Beaufort et de 
Pac||o,à ' • - , 
i lt;slotre de I gypte par Mann (Paris, 1823), 
au Dictionnaire Wolof de Dard ; tous ouvrages qu'il a 
enrichis de notices et d'observations. C'est encore lui qui a 
publié le Voyage à Poasis de Syouah (Paris, t823)d'a- 
près les matëriaux ¢cueillis par Drovetti, ainsi que le 
Vo},age de René Caillée. En t839, ]I. de Salvandy, alors 
ministre de l'insha;ction p,;hlique, le nomma conservateur 
du dépar{ement de< carie< et plans «le la llihl:thèaue ro-a;, 

-- JOMINI 
 laquelt il était attaché depui t89. '. lui seul, M. Jo- 
mard a rédigé six volumes de la grande Description de 
l'Ê99pte, et parmi les dissertions dont il a enrichi 
ouvrage, fl faut suout mentionner la deripti d 
pogdes de Thèb et son explication du sysme métriq 
d Egypfiens. s an ouvrag I plus impornLç 
sont : tices sur [ signes umértques des 
Egr/pttens ( P', 1816-1819 ), Parallèle entre les ati- 
9uids de l'Inde et del'Égype ( t8i9); Sur les raprts 
de Ehiopie avec l'Égypte (t 822 ); Aperçu d nnuvell 
ddcouves dans l'Aique centrale ( t82g ) ; Sur la m- 
munication du i9er avec le il (1825); emar9ues 
sur les doecouvtes fait dans l'Afrique (1827). Phi- 
lanthrope actif et éclairé, M. Jomard a pris nne pa impor- 
tan{e à l'introduction de l'enoeignement muel en France 
et à la création d'un grand nombre d'assiations ut ou 
savantes. Il a aussi été le diroeteur de l'école spéciale à 
l'usage des jees Eyptiens, que le pacha d'É, 
met-Mi, entretint pendant Ionmps à Par. 
JOMELLI (ffoeo), célêbre composi{eur italien, né en 
1714, à telli, dans le royaume de ffaples, compoead'abo 
la musique de quelqu balle, et aborda ensile av bien 
autrement de su l'opa bua. Sa première patitioe en 
ce genre, l'Erre amoroso ( 1737 ), fut accueilli avec u 
grande faveur, et n opera serra Odoardo (17 ent en- 
core plus de sus. La mme année il vint se fixer à Borne, 
où il dploya dès lors comme compositenr une fonté p 
commune. Parmi les oras qn'il  fit repréoent, no 
citerons Astiçnat[e, l figia, et Cajo-Mario. Ver oe 
vivoet h Borne un jeune Portugais, TeffadeHas, q menaçait 
de devenir l'heureux val de Jomelli. D pas oe formè- 
rent pour l'un et pom l'autre; et au carnav de 1747, Jo- 
melli lut réellement vaincu par son adversaire, dont l'opéra 
fit fureur, tandis que le sien tomba à plat. Le pa du Por- 
tugais triompht fit frapper une médaille commémorative; 
mais on trouva un jour dans le Tibre le cors du mheureux 
comsileur percé de coups de poiard. 
Jomelli, aoeusé tout au moinsde complicité dans la pe- 
tration de ce meurtre, se rendit en 178, av le ti[re 
de maltre de chapelle du duc de Wurtemberg, à Stuta. 
Il tait revenu habiter Pltalie, en 1765, quand le roi de 
Portul, Jean V, l'ini inutilement à ve à sa cour. 
Son ora Achille in Sciro n'ayant eu ancun snecès » parce 
que son séjour en Allemagne avait eu pour résult de par 
trop germaniser  maniëre, il oe rendit à flapie, où son 
s)ie ne fut pas mieux ofité, et où il mourut, le 28 aoOt 
1774. Peu de temps avt  mo, il compo encore un 
admirable 31erere. Parmi  autl' moreaux de musie 
d'egle on vante particulièrement un Benedicts,  
quiem et une Pas»ton. La musique de Jomell[ a du ite 
us plusieurs rappor{s ; ce compositeur t supéeur à 
tous ses oentemporains pour ce q est del'instrumentation, de 
mme que par l'art de nuancer plus vrement l'expreion. 
JOMI! ( HEsI, baron), lieutenant gënéral au r- 
vice de Russie, précédemment énéral franis né le 6 m 
1779, à Payerne, dans le pas de Vaud, servir d'rd 
dans un des régimen suisses an service de rance, 
après la castrophe du 10 aoOt 1792 embrassa la 
commeoeiale. La révolofion dont la Suisse fut le the 
le rappela tans sa patrie, où il fut nommé fieutenant-oelonel 
de la milice et secretaire général des af[oer de la guee. 
Aant perdu cette place, il entra, en 1803, sur la recom- 
mandalion de  e y, dont il avait fait connance à l'oc- 
casion de ses fonctions, dans une moen de commeroe 
de Pas, sans négliger pour cela les étud théoriques qu'il 
avait commencées sur la ctique. C't ainsi que dès 
il oemmençait la publication de son Traité des 9randes 
Opdra[ions milite[res (OE* édition ; Paris, 1809 ]. La mëme 
année, il obtenait dans l'armée françai»e le grade de chel 
de bataillon, et devenait aide de camp de ffey ; en 1805 
il passa colonel ; et il fit en quali{ de chef de l'éta{-maor 
de  les mpagn de 1806 et 1807 en l'russe et en 



JOMINI 
Pologne, qui lui valurent le titre de baron. En 180S 
suivit encore 51e en Espagne; mais le marécfial ayant 
appris que son chef d'état-major s'attribuait tous les suc- 
cès du corps d'armée placé sots son commandement, il 
le fit metlre en disponibilité l'année suivante. En consé- 
quence, Jomini demanda son congé en 1St0, et il était sur 
le point d'entrer comme général major au service de lus- 
sic, lorsque 51apoléon le promut au grade de général de 
brigade. 
lommé ensuite historiographe de l'empereur, il reçut au 
commencement de la campagne de 1812 la mission d'é- 
c'rire l'histoire de la grande armée ; toutefois, il fut utilisé 
d'une autre manière dans le cours mme de cette guerre. 
D'abord gouverneur de Wilna, puis de Smolensk, il dé- 
ploya la plus grande activité lors de la retraite. Après la 
bataille de Lu[zen, il rentra dans l'état-major du maréchal 
.Ney, et conh-ibua beaucoup à la victoire de B a u tz e n. Ney 
le proposa en conscquence pour le grade de général de di- 
vision ; mais 51apoléon le mit en non-activite, en punition 
de prétendues négligences dans le service. Aigri par ce trai- 
tement immérité, peu aimé du reste, à cause de ses ma- 
nières assez rudes, Jomini, après l'armistice de PIœeswitz, 
quitta secrètement les drapeaux français, et passa du c[é 
des alliés. Pour cette désertion, un conseil de guerre fran- 
çais le condamna -fi mort ; mais l'empereur Alexandre le 
nomma lieutenant général, et se l'a[tacfia comme aide de 
camp. Jomini ne prit pourtant pas une part active ì la 
guerre contre la France; il garda méme, ce que 51apoléon 
recounut plus tard, le silence sur le plan d'opérations, 
qu'il connaissait. En 18t5 il accompagna l'empereur 
Atexandre ì Paris, et reçut de Louis XVIII la croix de 
Saint-Louis. Par la suite il fut chargé de compléter l'Cu- 
cation militaire du grand«duc 5Iicolas, et resta premier 
aide de camp de ce prince quand il fut monté sur le trSne. 
Il l'aceompagna en cette qualité en is28 dans la cam- 
pagne de Turquie, et con[riboa beaucoup ì la prise (le 
çarna. C'estaussi en grande partie ì lui qu'est due la fon- 
dation de la nouvelle académie militaire de Saint-Pé[ers- 
bourg. 
Pour se justifier des attaques violentes que lui valut sou- 
vent sa défection, il a publié la Correspondance entre le 9 ë- 
ndral Sarrazin et le 9ndral Jornini et sur la compagne de 
18t3 ( Paris, 1815 ), la Correspondance du 9dndral Jorni 
avec le baron Mouner (Paris, 1821 ), et la Lettre d 
adral Jornni à M. Capef9ue ( Paris, 1841 ). Il s'est lait 
en outre, parmi les écrivains modernes qui ont traité de 
l'art militaire, un nom distingué par les Olvrages suivants 
Histoire critique et militaire des campagnes de la 
volution (5 vol., Paris, t$06; : édition, avec la colla- 
boration du colonel Koch, 15 vol., Paris, 1819-1824); 
lïe politique et militaire de iVapoldon , racontde par 
»drne au t ibuna! de Cdsar, d'Alexandre et de Fréddric 
(  vol., Paris, 1827 ); Tableau analylique des principales 
combinaisons de la 9uerre et de leurs rapports avec 
la politique des ltats (Pétersbourg, 1830 ; 5  édit., Paris, 
1837). Agé aujourd'hui de soixante-seize ans, le général 
Jomiui a obtenu de l'empereur Alexandre Il l'autorisation 
de résider .à Bruxelles. 
JONAS, fils d'Amathi, le cinquième des petits prophè- 
tes, né à Ge[fi-Opher, dans la tribu de Zabulon, plus de 
800 ans avant J.-C., était antérieur ì Osée, le premier des 
petits pruphètes dans l'ordre de la Bible, car, selon le on- 
zième livre des lois, il annonça que le royaume d'Israel 
recouvrerait ses anciennes limites, ce qui arriva en effet 
sous Joroboam II. Les crimes des 5Iiuivites ayant crié ven- 
geance, la voix du Seigneur se fit entendre à Jonas, et lui 
ordonna d'aller annoncer à cette ville et à Phul, son roi, 
qu'elle allait tre détruite en punition de ses impiétés. Le 
prophète hésita d'abord, épouvanté par la seule pensée 
«l'une telle mission, puis il implora pour les coupable in- 
dulgence et pardon: « car, disait-il, la miséricorde sera 
accordée quand une bouche aura fait entendre la menace, 

-- JONAS 4 
et il vaut mieux moufle que de prophétiser des meason- 
ges. » La voix du ciel réitérant ses ordres, il crut enfin se 
-ustraire par la fuite à l'obligation qui lui était imposée, 
abandonna la terre-sainte, qu'il habitait, et s'embarqaa 
pour Tharsis. A peine a-t-on perdu le rivage de vue qu'un 
vent impétueux soulève les flots, avant-coureur d'une épou- 
vantable tempête, au bruit de laquelle il s'endort profondé- 
ment au fond de la cale. A l'agitation causée par les pre- 
miers effets de la tempéte su«cède sur le pont la plus vive 
anxiété, quand on voit sa violence augmenter sans cesse. 
Bient6t des soupçons naissent, et on se decide h jeter le sort 
pour connaitre celui que le ciel irrité poursuit ainsi, afin 
I de le sacrifier au salut de tous. Jonas, éveillé parses compa- 
gnons, et aussit6t désigné par la voix du sort, confesse qu'il 
est Hébreu, qu'il adore le Dieu créateur du ciel et de la 
terre, et assure qu'un moment où on le jettera à la mer, la 
I tempête cessera. Malgré cette assurance, en dépit du sort, 
quoique l'orage n'ait rien perdu de son impétuosité, les 
matelots, saisis d'admiration, refuseqt de se prëter à son 
désir. De nouveaux efforts sont tentés pour aborder h une 
este voisine, et c'est seulement après avoir épuisé toutes 
les ressources qu'on se décide, non sans regret, à l'aban- 
donner aux flots. 
Il a à peine disparu q.e le calme le plus parfait suceède au 
bouleversement des vagues et aux éclats du tonnerre. Par 
une multitude de miracles qu'il est plus facile de raconter 
que d'expliquer naturellement, un énorme poisson dorure 
le propfiète sans lui faire aucun mal, et pour le préserver 
du naufrage, le conserve trois jours et trois nuits dans ses 
entrailles sans le consumer ni l'étouifer : il lui sert de vais- 
seau pour le conduire au port. C'est de ce noir cachot que 
s'élève vers Dieu le magnifique cantique conservé dans le 
livre de ses propbé[ies. Bejeté sur la plage par le monstre 
qui I'a sauvé, saisi de nouveau par l'esprit pruphctique, 
impérieusement pressé d'annoncer à Ninive que dans qua- 
rante jours elle sera détruite, il marche enfin vers cette 
ville, ëloignée de sept lieues selon Diodore de Stalle, et qui 
n'en avait pas moins de vingt-cinq de tour, et parcourt suc- 
cessivement tous les quartiers, se montrant sur toutes les 
places publiques, criant partout d'une voix éclatante : En- 
core quarate jours, et l'inive sera dtruite. Cette sim- 
ple menace, profèrée par un inconnu, fait plus d'impres- 
sion sur les habitants que les merveilles et les prodiges -- 
ton% à l'exemple du roi et d'après ses ordres, se condam- 
nent au j etne, se revè[ent de sacs, se couvent de cendres; 
tous, jusqu'aux animaux, sont soumis ì une pénitence si 
rigoureuse que le Seigneur. satisfait de talt de témoignages 
de repentir, révoque son arrét, et jure que Ninive péni- 
tene et repentie sera préservée des maux prédits à Ninive 
criminelle. 
Jonas, doué d'un de ces caractères inflexibles qui ne se 
laissent pas toucher par les larmes, voyant qu'aprìs les qua- 
rante jours écoules sa prédiction n'est point accomplie, ne 
peut retenir ses murmures : il demande ì Dieu de le retiror 
de ce monde, puisque dès ce moment, sa mission n'ayant 
plus an«un caractère durCité, il devient inutile h son ser- 
vice. Dieu daigne lui faire comprendre combien ses repro. 
ches sont injustes. Un arbre sert d'abri au prophète contre 
les rayons du soleil; mais ses feuilles, desséchées, ne les 
interceptent plus depuis quelques jours. Pendant la nuit un 
nouveau feuillage, frais et touffu .. remplace l'ancien ; plis 
le lendemain, un ver ayant piqué la racine, tout sèche de 
nouveau, et l'ardeur du soleil incommode encore I'honnne 
de Dieu, qui demande la mort de nouveau, déplorant la 
perte de l'ombrage qui le garantissait de la chaleur. « Eh 
quoi ! lui dit alors le Seigneur, tu murmures de la perte d'un 
arbre que tu n'as pas planté, qui ne t'a cotté aucune peine, 
qu'une nuit a vu naitre, qu'une nuit a vu mourir, et tu au- 
rais voulu que je ne pardonnasse pas à ee[te grande ville, 
dont les habitants, revenus à l'innocence, sont l'ouvrage de 
mes mains et implorent ma bonté ?  Ces seuls mots ré- 
veillent Jonas comme d'un profond sommeil : il s'humili 



644 
devant Dieu, avoue sa I«ute, revient en Israel, y rend 
publics le repentir de Ninive et la miséricorde du Seigneur, 
et regarde comtae un juste châtiment de sa conduite le spec- 
lacle des péchés de son peuple et la connaissance qui lui 
egt.donnée des malheurs qui doivent b«ent6t l'accabler. 
JONATHAN. Voyer, 
JONATHAN ou plut6t FRËRE JONAT[IAN, sobriquet 
devenu la personnification du peuple américain, comme John 
Btll est calle «lu peuple anglais. Quelques personnes le font 
driver d'un certain Jonathan Trorabull, gouverneur du 
Eonnecticut à l'époque de la guerre de l'indépendance, et qu'on 
désignait familièrœement de la sorte; mais il parait que ce sont 
les Anglais qui s'en servirent les premiers, vraisemblablement 
parce que c'était là un nom de baptême extremement com- 
mun dans la puritaine [ouvelle-Angleterre, o l'on affec- 
tionnait de préferenca les noms empruntés à l'Ancien Testa- 
ment. Frère Jonathan est un gaillard rusé, actif, éveillé, 
quelque peu vantard, ne manquant ni d'humour ni de bonté 
de caractère, ayant de commun avec John lull l'amour 
de la liberté, l'indépendance de caractère et l'orgueil de la 
nationalité, mais aussi bavard que l'autre est généralement 
tacilurne, d'ailleurs sachant bien mieux que lui se plier aux 
opinions et aux manières d'aulrui. 
JONATIIAS ou JOENATIIAN, fils de Saiil, roi d'Israel, 
te rendit célèbre par sa valeur, et surtout par l'amitié cons- 
tantequi l'unissait à Da id, rival de son père. Il eut la gloire 
de battre deux fois les Pbilistins; mais ayaut enfreint un 
ordre de son père par lequel il ëtait dfend», sons peine 
de mort, de manger avant le coucher d« soleil, il se xit, 
malgré l'importante victoire qu'il venait de remporter, 
nacé d'tre immole par Saul. Cependant, tout le crime da 
jeune prince, d'après le texte de l'l%riture, con»i-,tait a 
avoir magé un peu de miel au bout de sa baguette, Ch 
poursuivant les Phifistins. llem-eusement, le peuple, touché 
de l'éclat de ses services, i'arracha des mains de sou père, 
et lui sauva la vie. Quelque temps aprés, la guerre s'étant 
rallumée enhe tes fiel»feux et les Philistins, Saul et Joua- 
tbas assirent leur camp sur le mont Gelboé; mais ils y fm-ent 
forcés, et leurs troupes tailles en pices. Jonatlas fut tué 
dans cette action, l'an t0b5 avant J.-C. En apprcnaut cette 
nouelle, David, qui avait tant de fois éprouvé le génére«x 
déouement du jeune prince, composa un cantique funCbre 
en son hounei«r. CIIA,MPAGIAC. 
JON?kTIIAS, nommé Apphus, fil» de 51aththias et 
frre de J ud a s ,I a c h a bée, lut Pun des plus habiles gé- 
ncraux des J ni fs. Il força Uacddfie, mmandant des trunpes 
syrienne, à accepter la paix, I' t0t «vaut J.-C. Son al- 
liance fut rechercbée pr Alexandre ala, prétendant au 
r6ne de Syrie, qui Iui courCu la souveraine sacrificature. 
Ite laveur se maintil quelque temps so Démétrius, 
sucseur de Bala, auqud il fut dun grand secour pour 
soumettre Anticbe, qui s'ëtait rvoltee; mais ce çrinoe ne 
le récompensa de ce s«rvi que par la plus noire ingratitude. 
Plus rd, Diodote Tryphou, vulaat enlever la couron»e 
au jeune Antioclms, fils de ala, relut d'aLurd de se dé- 
OEire de Joaathas. Il l'attira traitreuscment à Ptolmaïde, 
le fit charger e chalnes, et, aprés lui avoir extorqué une 
tombe cundërabe pour sa rançon, eut la rfidie d'or- 
donner sa mort. C'éit l'an I4 avant J.-C. Simon, fi-rc 
de Jonathas, ii succa dans la grande sacrificature. 
JONC. Le genre jms, tel ŒE'it est au]or'hui ébli 
pari les bonis, a pour ractères essentiels : un 
li à six sépales, ovales, llés, écaieux, gaux, 
rsisn; une corolle nulle; d émin au nombre de 
mx éles au ca, et opposées à s divisions; un ovaire 
snpère, surmout d'un stte mmple" terrainWpar tros" stigmates 
fififormes et velus. Ainsi dfis, I oncs sont d plant 
her à reines flbreuses, à feuilles cfindriq et un 
u compé, naissant ntot au collet de la rine» et 
nt6t garnissant I tiges ell-mm, I fleurs sont 

JOIAS -- JOtNCTION 
néralement petites • rougeàtres, terminales ou latdrales 
disposCs tant0t en corymbe, tant6t en particule; leurs Iruits 
sont des capsules uniloeulaires, polyspermes, s'ouvrant en 
trois vulves, et renfermant des graines nombreuses, ovoïdes. 
Réparties sous toutes les zones et à des hauteurs variables, 
alpines sous i'équateur, préférant les plaines et les mon- 
tagnes sous les zones tempérées, les diverses espëces du 
genre ]uncus habitent particulièrement les lieux marécageux 
de l'Europe, des deux AraCiques et de la louveile.Hol- 
lande ; quelques-unes n'abandonnent jamais ie- bords de 
la mer et des grands lacs : d'autres ne peuvent vivre, se 
reproduire et se déveiopper dans toute leur puissance qu'à 
c6té des glaciers des Alpes, et des éternelles neiges du p61e 
barCl; d'autres• enfin, espèoe cosmopolites, se rencon- 
trent dans tous les pas, dans toutes les régio«s, sous 
toutes les iatitudes; mais ces espèces sont rares, car des 
soixante-dix-neuf espèces de joncs aujourd'hui catalouées, 
trois seuleraent pessédent ce caracre d'ubiquité. 
De toutes ces espèces aucune n'est cultivée dans nos jar- 
dins, soit comme plante utile, soit comme plante d'agré- 
ment; nous citerons seulement, cumme étant plus généra- 
lement connues : t  te jonc raarilime, plante à tiges hautes 
de 0% 30, raides, lisses, cylindriques, terrainCs par une 
pointe acérée : cette espèce croit sur les bords de la Méditer- 
ranée et de l'Océan ; 2 ° le jonc #pars, plante à leuiiles cylin- 
driques, pointues, droites et resserrées conh'e la tige : il est 
commun dans les lieux humides, les fosses aquatiques, les 
marais ; 3 ° jonc des jardiniers, qsti se distingue de l'espéce 
précédente par ses tiges profondément striees, glauques, 
grêles, liliformes, teuaces ; tto le jonc urliculd, dont la tige 
)'lindrique, Saute de 0 , 30 ,est garnie de deuxa trois feuiUes 
compria»s, articulées, pointues ; 5  enfin, le jonc Jlotlant, 
qui croit dans les étang., les fossés et les flaques d'eau 
marécageuse, et dont les tiges sont grêles et flottantes quand 
elles croissent dans l'eau, grëles et rampantes quand elles 
vient à lette. 
Les tiges flexibles du jonc des jardiniers sont employí« 
comme liens, st)il pt)t)t- palisser les arbres, soit pour tta- 
cl*er les plantes a leu*s tuteurs. Quelques autres espèces 
servent à faire de petits ouvrages de vannerie. Enfin on fait 
des mècl*ex de  eilleuses avec la moelle de quelques espèces. 
Les anciens bolanistes et bon nombre de modernes ont 
désigné sous le non« de joncs des l,lanles qui n'appartien- 
nent ni au genre uacus ni à la famille des joncdes. 
Ainsi, Pline nommait)uncus odoratus le sdénanthe; An- 
notus appelait juncus acullana un souchet; DalChamp 
désignait sous le nom de juncus clavatus un cirpe; i¢ 
jonc africain de Murisun est une fougère ; le onc des lndes, 
dont on fait des c armes, est un rata ng, uie., etc. 
B£LFI ELn-L t Fi-'.VlLE. 
JO,XCÉS ou JOXCACEES, famille de plantes qui ap- 
partiennent h la classe des végétaux munocotyiédones à gaine 
périspermée et à lieur périanthée. Ces piaules, qui n'ont 
aucune propriété médicale, ont des leuiiles graninodes, dont 
o« se sert pour la labricaliun des nattes. L. LxtnT. 
JONC FLEUIi. Voye-'-BUTOU£. 
JONCIIETS ou HONCHETS, petits btons de bois ou 
dïvoire fort menus, dont quelques-uns so«t sculptéseu roi, 
reine, etc., que l'on jette confusément les uns sur les autres 
pour jo«er à qui en retirera le plus avec un crochet, sans 
en lait-e rem«er d'autres que celui qu'un citerche à degager. 
JONC MARIN. Voyer A,o,c. 
JONC ODOP, ANT. Voyer, Cx'r 
JONCTION (du latinjun9ere, jultclio ). Ce mot repré- 
sente l'idëe d'un rapprochement tellement intime de deux 
ou plusieurs choses, qu'elles se touchent, se tienuent, et 
semblent queiquelois ne faire qu'un seul tout : au figuré 
joindre signifie unir, allier, et parlais aussi atteindre, al- 
traper, se rdunir à. C'est dans ce sens que l'on dit : Les 
deux .afinCs, les deux flottes firent, opérèrent leur 
tmn. 
Dans le langage du droit, joindre signifie unir : ainsi» la 



JONCTION 
]onction d'instances est l'action de joindre deux instances 
¢onnexes, une demande incidente ì une demande principale, 
pour ttre statué sur les deux par un seul et méme juge- 
lnent. La jonction est toujours ordonnée en jugement, et 
l'arlic.le 1034 du Code de Procédure civile a réglé la lutine 
particuliëre des assignations ì donner en vertu des arrta 
de jonction. 
JOliES (DAvis). Voyez DAvm JuiF.s. 
JONES ( Sir INJco), architecte anglais et peintre de d- 
cotations, né a Londres, en 1572, rfivéla, n'étant encore 
qu'apprenti menuisier, un talent si évident pour la peinture 
et pour l'architecture, que le comte de Peinbroke le lit 
instruire dans ces deux arts, et l'emmena ensuite avec lui 
en France, en Flandre, en Allemagne et en Italie. Jones 
séjourna longtemps à Venise, étudia ì Vicence les chefs- 
d'oeuvre de Palladio, et se lit bient6t, par ses travaux, une 
rëputation telle, que Christian IV, roi de Danemark, l'ap- 
pela à Copenhague avec le titre d'architecte de sa cour. 
l'lus tard, il suivit en Êcossela sœur de ce prince, la femme 
de Jacques VI, dont il devint aussi l'architecte. Aprës avoir 
visité encore une fois l'ltalie, il fut nolumé par Jacques VI, 
devenu alors roi d'Angleterrc sous le nom de Jacques I er , 
urintendant des bàtiinents royaux. Son attachement à 
Charles 1 « le fit mettre en prison; il en sortit en faisant 
le sacrilice de la plus grande parlie de sa fortune et en 
payant une amende de 400 liv. st. Il mourut peu de jours 
après le supphce de Charles 1 er, le 2 juillet 1651. 
Coinine créateur de l'architecture anglaise, on l'a sur- 
nominé le Vitruve anglais. Ses constructions les plus ilu- 
portantes sont la salle des Banquets ad palais de Whitehall, 
l'b6pital de G re e n w i c h, le périt)le de l'église Saint- Paul, 
l'ancienne Bourse de L«n,lres, le Cllteau da c.»inte de Pem- 
broke à Wilton, dans le Wiltlfire, et le palais d'Alnber- 
bury, dans le mme comté. Dans son style, il imite Palla- 
dio, tout en reproduisant la igoureuse rudesse qui distin- 
gue les successeurs septentrionattx de l'Cule italienne et rap- 
pelle souventles Ineilleures époques de la Benaissance. Une 
collection de ses dessins a ét donnée par Will. Kent ( Lon- 
dres, 1727 ; 2  édition, avec texte explicatif en anglais et 
eu français, 2 vol., Londres 1770 }. 
JONES ( Jon,-P,. ), célèbre homme de mer et fonda- 
teur de la marine des Etats-Unis de l'Aluérique du Nord, 
était fils d'un jardinier, et naquit le 6 juillet 177, à Arbi- 
land, en Eosse. A l'ge de douze ans, il fut Inis en appren- 
tissage citez uu marchand de WIlitehaven, dan le Cum- 
berland, qui faisait un coinmerce actif avec l'Amérique; 
et dës l'année suivante il exëcuta par ordre d son Inaitre 
un voyage aux colonies américaines. Son apprentissage ter- 
Ininé, il entreprit la traite; mais indigné bient6t de cet odieux 
trafic, il résolut de s'en [evenir en Écosse. Le capitaine 
du btiment sur lequel il faisait la traversée étant mort 
en chemin, Jones prit ses fonction% et s'en acquitta si bien 
qu'a son arrivée le propriétaire du navire le choisit pour 
subr6cargue. Dës tors il se voua tout à fait à la carri/re 
Inaritime, et en 1775, lorsque Cata la g,erre de l'lndepeu- 
dance, il olllit ses services au congrës, qui les accepta. 
biommé d'abord at commandement du brick L'Alfred 
avec le grade de lieutenant, puis à celui dt vaisseau La Pro. 
t'ince avec le grade de capitaine, il ne tarda point à tre 
investi du cominandement en cl,efde la petite fl,lte des in- 
surgës, et à commeucer contee le mille vaisseaux de la 
Grande-Bretagne ces coinbatsdtéroïques auxquels il est 
difficile de rien comparer en audacieux exploits et en riche 
butin. En mai 1777, il fitt envoyé en France pour y pren- 
dre un commandement plus important. Comme la cour de 
Versailles semblait hésiter/ déclarer la guerre à l'Angleterre, 
il entreprit pour son coinpte, avec un petit brick de 18 ca- 
nons, une croisière sur les c6tes septentrionale« de laGrande- 
Bretagne. Parti de Brest le 10 avril 1778, il debarque à Whi- 
tehaven, y incendie plusieurs vaisseaux, encloue des ca- 
nons, et s'empare du ch'tcau du comte «le Selkirk, dontson 
père était le jardinier. La cointesse, qui s'y trouvait seule, 

 JONES 
dut livrer mes objeta les plus précieux; mais ils lui fureIt 
rendus preue auss[t6t, accompagnes d'une lettre fort ro- 
manesque. L'expédition se termina par l'enlèvement du 
sloop anglais Le Drake, sur la cote d'lrlande. 
En aott 1779, Jones obtint le commandement d'un grand 
navire, Le Bon, homme Richard, de 40 canon», et tut en- 
suite noininë coinmodore d'une escadre composée de b- 
timents français et américains réunis. Une première attaque, 
dirigée contre Liverpool, choua. Pourtant Jones frappa de 
terreur toute la cote anglaise, et prit, le  septembre, ì 
l'abordage, aprës un coinbat terrible de quatre heures, le 
vaisseau britannique Le Srapis, qui était bien supérieur 
iv sien. Il revint à Brest avec 800 prisonniers de guerre et 
un riche butin. On l'acueillit avec la plus grande distinc- 
tion ì Versailles, coinme ensuite à Philadelphie, où il re- 
tourna l'année suivante. Il passa le reste du temps que dura 
la guerre sur la IIotte h-an.caise, avec Passentiment du con- 
grès,  cause de sa parfaite connaissance des eaux d'Amé- 
tique. Après la paix, il cl,ercl,a, avec John Ledard, ì 
fonder un cominerce de pellcteries entre la cote nord-ouest 
d'Amérique et la Cliine; mais cette entreprise ne réussit 
point. Puis, sur l'invitation de l'imperatrice Catherine, 
entra au service de Bussie avec le grade de contre-amiral, et 
contribua efficacement, en 1788, à la sictoire remportée 
sur la IIotte turque; mais la jalousie de Potemkin et du 
prince de Nassau le décida/ qnitter le service de la Russie 
dès l'année suivante. Aprës avoir sans succès olfert son ex- 
périence et son bras à l'Autriche, lise retira fort Inecon- 
tent à Paris, où il mourut presque oublié, le 18 juillet 1792. 
L'Assemblée législative honora ses funérailles en y envoyant 
une députation. Il est difficile de considdrer comme authen- 
tiques les Moettoires qui ont paru sous son noin (Paris, 
1798, 2 vol. ; Ëdimbourg, 1830 ). Sa biographie a Ce écrite 
par Sherburne (Washington, 1826 ). Sa vie aventureuse a 
6té traitée sous forme de roman par Couper, dans Le Pilote 
(t824) ; par AIlan Cunningbain, dans Paul Jones ( 3 vol.; 
Londres, 1828), et par Alex. Duinas, dans leCapitaiae 
l'nul ( Paris, 1838 ). 
JONES (Sir WtLLta), OElèbre orientaliste, ne le 
septeinbre 1746, h Londres, se consacra à l'etude des iangu.s 
et des littératures orientales tout en la faisant marcher de 
front avec celle des langues italienne, espagnole et p«rtu- 
guise. A I'.,lge de dix-neuf ans il devint précepteur du jeune 
comte Spencer ; deux ans plus tard il se Init/ apprendre le 
chinois. En 1770 il résolut de suivre la carrière du barreau, 
et en conséquence il commença l'Cude du droit, sans re- 
noncer pour cela à ses travaux str la littérature orientale. 
Devenu avocat, il se fit en peu de temps une lucrative clien- 
tèle; mais ce ne fut pas sans peine qu'il parvint ì ob- 
tenir une place dans l'adiniuistration anglaise de l'lnde, 
parce que le pouvoir se défiait dot libéralisme des ses opi- 
nions; et ce ne fut que sous le mini tëre Shelburne, en 1783, 
qu'il lut nommé grand uge à Calcutta, et décoré à cette 
occasion du titre de baronet. Dans l'lnde, il consacra 
touoEs les heures de loisir que lui laissaient ses fonctions 
à des recherches sur l'Ct politiqne et littéraire de cette 
contrée; il fonda, en 78, la Societé Asiatique de Calcutta; 
il étudia aussi la langue sanscrite, Iosqu'il se fut convaincu 
qu'el!e étail un moyeu indispensable pour arriver à la con- 
,aissance de l'histoire ancienne de l'lnde. Toute sa vie fut 
re,nplie «te la grande pensée de Inettre l'Orient et l'Occident 
en rapports plus intintes, de coinm,miquer à l'Europe civi- 
lisée les trésors littéraires de l'Orient, et, tout en rappelant 
aux Orientaux leur propre littérature, de les rendre acces- 
sibles aux cominunications et aux progrès de l'Europe. 11 
mourut à Calcutta, le 27 avril 1794. La Co,npagnie des Indes 
orientales lui fit élever une statue  Calcutta. Parmi ses sa- 
vanL travaux nous citerons en première ligne sa Grammar 
of the Persian Language ( 1771 ; 9  édit., 1809, in-°); ses 
Pueseos Asiat. Commentarii (1776}; son édition et sa traduc- 
tion de la Moaallat, or seven Arabian pueras ( t 783 }; ses 
traductiuns de Medschu et Leila d'après Halefi 



64G 
cutta, t788 ) ; de la $ocone de Kalidasa ( tç$9. : e" d 
la-LgiMation de Men ( 1794 ); enfin, ses nombreux Mé- 
moir s Phisire, l'archoloe et la littératooe de Plnde 
et del'Ae, ér ds PAsiatic Miscellany, et dans les 
Asiatic Rearches. 
JONGLEU (en  du moyen ge jouxter, en 
poçaI joglar, oçlad, en vix franisjglre ou 
91). On aplait ainsi chez les Provenux et chez 
i Francs du nord les acs de profion,  la difïé- 
u d poët struits et polis par le our des urs, 
¢'est--dire des troubadours et des trouvères, dans 
le sens rtoeint de s mo. C derniers.avaient, pour 
la plup, d jongleur» à leur seice, pour représenter 
leurs poêm, c't--oere pour I chaner en s'compa- 
ant d'un instituent; car I poë{es des oeurs chanaient 
bien quelquefo eux.ratines leurs œuvres, mais ils rar- 
datent comme indigne eux de s'accompagr en mtme 
temps d'un instrument. L rois aussi, I grands et I 
petits dt entrenaient  leur cour des acteurs de ce 
genre, q s'ils Catent en mme tem poës eux-mmes 
s'appelaient, par rappo  kur sition de serviteurs at- 
ch comme ais h une cour, mnestrels dans le 
nord de la France, et minstrels en Angleerre. Enfin, il  
avait encore des jÇngleurs qui n'appar[enaient à vcun 
matre , des chanteurs errans, qui ne figuraien{ pas seule- 
oeent dans les cours et dans les cheaux, devant la socié[é 
noble, mais anti dans les marchés et dans les tavernes, au 
milieu du peuple, els que les laboureurs, c'eVà-dire ! 
taours, I chanteurs ambulan d lavecs de village, 
membres in de cette trope de chantews et de mu- 
siciens. 
Les ongIeurs, outre leur métier primitif d'acteurs, exer- 
ient encore lui de contem, de declamateurs de poCes 
simplement pads; souxent mme ils étaient de pi dan- 
seurs de corde, moteurs et [aiseurs de tours, menaient 
avec eux des femm associées à leur t et d animaux 
drs, donnaient mme en genéral d représenation 
mnasfioe-mimiqu, des scènes comiques mêl d'alter- 
ious, de jeux d'esprit, d'alléo éuigmatiues reprë- 
sen avec un certain art amatique (jongleras ou 
rotes); s s'emploaien[ comme messers d'amour et 
enremetteurs. Par I et par leurs propres moeurs, presque 
toujours dérlées, il» se firent plus d'une fois excommunier 
par I'lise et bannir des Èla oh ils oe trouvaient, et tom- 
bèrent si s dans I'time publique, que le nom de jongleur 
de, nf snonyme de baleur, de menteur, de tromur, 
ndis que dans les ancieus temps on I avait bonorés, 
combl de rich préoens, souvent mme investis de do- 
mn. Pourtant, I cours conservërent Ionemps d 
bandes de jougleurs spéciale, placées habituellement sous 
la surveillanoe d'un »'oi des mënestrels, œeereceur ou mtre 
de chapelle ; et dans les xiil, les acteurs forèrent une 
oration particuliëre ( corpora[mn d ménétriers ), qui 
ëtait e par d ordounanoes. 
Auiourd'hui l'ou eond simplement par jonglrs I 
maitr en tous I exercic d'adoe corporelle et les équi- 
libdss. Les anciens d¢à, »oamment les Bomains, con- 
naiaient s hommes aux mille tours, qu'i aplaient en 
gënéral prestgiatores, c'est-à-dire hommes  merveilles. 
On connaissait particulièrement les lanoeurs de coutux 
(ventilatooes) e les joueurs de balle et lanoeurs de ules 
(pilarii) qui s'agiaient dans un mouvement perpetuel. L 
maitr de oet a se formaient par uue tradition immémo- 
riale dans l'lnde ultérieure et dans Pie antérieure, entoe 
le Gange et l'Oron. Dans c pays, où le wrps oe prtte 
avec nt de souploe aux flexions les plus diflices, I 
Ians tiqu, exerdoes d'une expiation fanatique, avaient 
fait employer Wav ces u d'ree à pier le pa, 
à prérer ou à deviner l'avenir. Ainsi naquirent da  
ntrs les jonledes des Schanes, que l'on a retrouvées 
chez vlusieuræ peuplad de l'Amérique du No. Elevs au 
g d'un art par l'Hindou sensuel et ami du jeu, oe ionglc- 

JONES -- ,IOIAM 
ries devinrent un métier qui s'exerce encore aujourd'h,.fl 
a ec la dernière perfection en Chine, sur les ct¢s de Co- 
romandei et dans les deux presqu'tle des deux cotés chi 
Gauge. Dans les temps modernes, notre Europe a eu sou- 
vent occasion de se convaincre de l'extrême habileté de ces 
Hind«us  la vue des jongleurs venus d'Angleterre, de l'bi- 
gArie et de l'Afrique. 
JONQUE. En Chine, ce pays de l'immobilité, la cons- 
truction navale, qui a lait de si grands progrès en Europe, 
est encore telle que I'a vue au treizième sitcle Marco Paolo, à 
peu près telle qu'elle ado ttre aux siècles homériques. Pour se 
faire une idée des grands navires chinois, appellís jon- 
ques, il suffit presque de ressusciter par l'ima#nation 
le vaissoao que montait Ulysse dans ses traversées. Leur 
carène#Me et lourde ne peut s'accommoder que d'une mer 
douce, d'un vent maniable ; le moindre grain leur et dan- 
gereux ; il  a péril dës qtm la vague vient briser contre 
leurs flancs. Becourbée à l'avant et à Varriëre, informe et 
sans grâce, carrée à la poupe et à la proue, la jonque tient 
presque autant du coffre que du vaisseau ; elle a trois mts, 
mais trois mSts rudes, mal polis, portant  peine deux 
voiles rectangulaires eutCs l'une sur l'autre : ces voiles sont 
pour la phpart des nattes réunies par bandes, et se ramas- 
sant en plis alternatifs, comme ceux d'un Cantail ; quel- 
ques-unes seulement, les plus hautes et les plus Ié.gères, 
sont en coton ; la vergue ou antenne est un bambou; toutes 
les manœuvres, d'ailleurs, sont maladroitement disposes. 
Vraiment la jonque semble n'être qu'une grossière raillerie 
de l'art des constrnctions navales. Ses ancres mme provo- 
quent le sourire ; trois morceaux d'un bois dur les compo- 
sent : l'un sert de verge ou tige : c'est le plus grand; les 
deux autres, adaptés à entaille à l'une de ses extrémités, et 
faisant avec lui un angle de 30 degrës environ, sont les 
becs de l'ancre : une forte cheville les réunit. La jonque de 
guerre n'a que quelques mauvais canons; mais en revanche 
ses mts et se flèches font flotter dans l'air mille pavillons, 
bannières, bandernles, girouettes, les uns bariolés, les 
tre éclatants et pourpres, tous bizarrement taillës. Il n'est 
pas nécessaire de faire observer qu'il périt beaucoup de 
[onque dans les mers de la Chine : les typhons, coups de 
vent violents qui souvent bouleversent les cotes de Japon 
et du Celeste Empire, les engloutissent en grand nombre. 
Théogène Pce, cpitaine de vaisseau. 
JO.QUILLE. l'ove: iClSS. 
JO.XSO.-" (B.). l'ove-- Jonso, (Benjamin). 
JONZAC. Vove - 
JoPPÊ. Voe: JArrA. 
JOILM roi d'Israel, était fils d'Achah et frère d'O- 
chosias, auquel il succéda. Il enleva les statues que son père 
avait étevée à Baal et aux rois de Juda et d'Edom, pour 
porter la guerre chez les Moabites, qui, gràce aux mi- 
racles obtenus par lïnterventinn d'Êlisée, forent entière- 
ment alCaits et dispersés par les Israèlites. Joram eut 
aussi à soutenir une guerre contre les Sriens, qui assié- 
gërent Samarie et la réduisirent à la derniëre extrémitë. 
Des femmes  mangèrent leurs en{ants. Samarie fut cepen- 
dant sanvée, grfice  Ëlisée : les Sriens, dsis d'une ter- 
reur pauique, abandonnèrent leur camp avec tout ce qu'il 
contenait, et s'efoirent en dsordre dans teur pas. Blessé 
par les Sriens, quelque temps après, au siége de Ramotb de 
Galaad, Joram, que les miracles dont il avait été témoin 
n'avaient pu ramener au vrai culte, se retira à Jezrahel pour 
y faire soigner .ca blessure. Mais une conjuration,  la ttte 
de laquelle se trouvait Jéhu, ëclata contre lui ; il prenait la 
fuite, quand le cher de la révolte lui lança une flèche qui 
lui traversa le cœur. Il avait rgné onze ans. 
JORAM, roi de Juda, fils de .I o s a p h a t, I ui succéda, à l'ge 
de trente-deux ans, et régna huit ans sur Jrusalem. Il épousa 
Athalie, et ses cruautés lui aliénèrent tous les esprits; ses 
frères et la plupart des seigneurs du royaume furent mis 
mort par ses ordres. Lasés de sa t-raunie, les Iduméens 
et les peuple de Lobua se révoitèrents et s'affranchirent 



JOIAM -- 
pour toujours de la domination des Juifs. Ses États fnreut 
vers la mme époque mis à feu et à sang, par les Arabes 
et les Perses. En proie à une horrible maladie, il succomba 
à des convulsions affreuses, qui faisaient de son existence 
une torture continuelle. 
JORDAENS (JACQUES), peintre flamand, naquit à An. 
vers, en mai t59t. Il fut d'abord élève d'Adam van Oort, 
dont il épousa la fille, et passa ensuite dans l'école de R u- 
b en s! son mariage remlcha de visiter rttalie; il en té- 
moigna un vif regret toute sa vie. Rubens sut apprécier le 
mrite de son élève; il s'en fit un ami, et lui donna des avis 
si utiles, que Jordaeus, eu imitant la manière de son unu- 
veau maltre, en devint plus parfait. Rubens lui fit faire 
quelques ouvrages, entre autres une suite de cartons en 
détrempe, destinés au roi d'Espagne, qui devait les faire 
exécuter en tapisserie. 
La réputation de Jordaeus croissait de jour en jour ; le 
roi de Suède lui commanda douze grands tableaux repré- 
sentant la Passion de Jsns-Christ. Ëmilie de Salin, 
veuve du prince Frédérie-Henri de Nassan, lui fit peindre 
les actions mémorables du prince son époux, en plusieurs 
tableaux, aussi ingénieux par les ailégories qu'expressifs 
par la couleur et rbarmonie. Il faut pourtant convenir que 
ses aliégories ne sont ni aussi fines ni aussi spirituelles 
que celles de Ruhens, son maltre ; mais il I'a quelquefois 
surpassé dans la grande harmonie des couleurs et la per- 
fection du clair-obscur : on peut dire avec raison que le 
coloris des chairs de Jordaens a la suavilé et le vdoulé 
d'une lche; c'est ce que l'on remarque dans les tëtes du 
tableau du 1oi boit, qui est au ltusée du Leurre, ainsi que 
dans celui des Vendeurs chasses du Temple, de la même 
galerie. On cite encore de cet artiste une Fuile en Ëgyple, 
où aiut Joseph éclaire la scène avec la lanterne qu'il 
tient à la main, et encore celui du Satyre qui voit sozoEfler 
le chaud et le froid : ces ouvrages sont regardés comme 
des chefs-d'oeuvre. 
Le genre d'éducation qu'avait reçu Jordaeus, les habi- 
tudes des hommes de son pays,.et leur penchant naturel pour 
le genre burlesque, l'ont fait tomber souvent dans une aber- 
ration de gent et de couveuanee qui déparent ses plus belles 
toiles. Le Jugement dernier, du lIusée, par exemple, 
est un amas confus de figures nues des deux sexes, pinsCs 
sans ordre, dans des attitudes peu alCentes, el d'un dessin 
si négligé, qu'elles repoussent le spectateur au lieu de l'at- 
tirer. Dans ce cadre, ce n'est que confusion, et l'oeil ne 
trouve pas ur seul groupe intéressant où il puisse s'arrëter. 
Un autre tabIeau préférable à celui-ci, et dans lequel il y a 
aussi des éeats de gntt, se trouve dans l'abbaye de Saint- 
Martin, à Torrnay. Il représente l'évêque de Todi ( Tuber- 
tutu ) avant son élection au siCe de saint Pierre, qui eut 
lieu le 5 juillet 60, après la mort du pape Théodore : le 
saint prélat, figuré dans une attitude simple, mais noble, 
chasse le dmon du corps d'un poss¢M. La composition 
énergique de ce tableau est riclie, large, et digne de son 
sujet, mais seulement dans quelques parties. On admire le 
personnage de saint lIartin. Sa pose a de l'expression dans 
son ensemble; son visage respectable et sa, longue barbe 
blanche inspirent la vénération; la chape, d un tissu d'or, 
qui le couvre, largement drapée, produit un effet extraor- 
dinaire. S'il y a de la confusion dans la disposition du sujet, 
elle est dans le groupe du poss&lé et des hommes qui le 
soutiennent. Tout cela est bien ; mais où le mauvais gnat 
de Jordaeus reparalt, c'est dans le personnage de distinction, 
habillé de velours à la manière flamande, qu'il,a placé dans 
le fond du tableau, sur un balcon couvert d un tapis de 
Turquie, d'où il observe l'action de saint Martin ; et aussi 
dans deux vilains valets et un perroquet, qi se détacbent 
sur une fenêtre de la tribune du martre de la maison. Malgr6 
toutes ces incohérenees, ce tableau sera toujours un chef- 
d'œuvre de l'art; il a été parfaitement gravé par Pierre de 
Jod e. En défmitive, les erreurs dont Jacques Jordaens s'est 
géuéralemcnt rendu coupable dans ses productions n'em- 

JORDAN 647 
pcbent pas de recliercher ses tableaux, qui se vendent un 
grand prix. Ce peintre cièbre amassa une grande fortune, 
et mourut à .*,avers, le 18 octobre 1678, à l'lge de quatre- 
vingt-quatre ans. Ch « A]exandre ltom. 
JORDAN (Cs.), une des untahilités parlementair 
dela France, naquit à Lyon, le il jauvier 177t.son père était 
négociant dans cette ville, et beau-frère de Claude Perrier, 
chez qui se tint la fameuse assemblée de Vi zil le. Jordan, 
qui était alors gé de dix-huit ans,  assista. Il venait d'a- 
cliever, au collége de Saint-lrénée, ses études, commencées 
chez les Oratoriens. Il vint à Paris en 1790,  suivit les 
séanees de |'Assemblée constituante, et, comme elle, se berça 
de l'idée que les réformes projetCs pourraient tre opérées 
pacifiqnement. Cependant il ne les approuvait pas toutes : 
ses principes religieux, par exemple, lui faisaient repousser 
celles qui s'appliqnaient à l'Eglise. A Lyon, en t791, et à 
Paris l'année suivante, il publiail, en collaboration avec Dé- 
gérande, une Lettre à M. Lamourette, se disant VéClue 
de Rhdne-et-Loire, puis, à lui seul, l'Histoire de la con- 
version d'une dame de Paris ; et enfin La Loi et la 
ligion venges, petits livres dans lesquels l'Église consti- 
tutionnelle est vivement critiquée. Mais ce raie de poiémiste 
littérairc, Jordan lut bieutat forcé de l'Changer coutre celui 
de soldat. La lIontagne venait de triompher dans la Con- 
vention. Lyon se souleva, et osa déclarer la guerre à la ter- 
rible assemblée. Il fut un des promoteurs, un des soutiens 
de celle insurrection, et combattit h la journée du 29 mai. 
Après la réduction de cette ville, il se réfugia en Suisse, 
et qelques mois après en Angleterre, od il se lin avec Ma- 
louer, Lally-Toilendai et Cazals, et connut particulièrement 
Fox, lord Erskine et lord Holland. L'étude qu'il y fit de la 
constitution anglaise eut quelque influence sur ses opinions 
politiques, et fut cause, dit-on, qu'il les réforma. 
11 rent,a en France en 1796, pour y recueillir le dernier 
soupir de sa mère. Les électeurs de Lyon, lors du renou- 
vellement du second cinquième du Conseil des Cinq Cents, 
le choisirent pour les représenter à cette assemblée. Le 29 
prairial an v, il eut l'occasion, comme rapporteur d'une com- 
mission cliargée d'examiner les lois sur la pelicedes cuites, 
d'exposer se. idées sur cette matière. Il propose, au nom de 
ses collégues, de rendre a toutes les opinions relieuses la 
liberté de reprendre leur enseignement et de pratiquer leur 
culte. Il voulait une Ioiéranee absolue pour tous les tulles, 
sans prolection spéciale ni salaire pour aucun, et l'annula- 
tion de la loi qui supprimait l'usage des cloches. Ce rapporI, 
qui fut mai accueilli, n'eut pour résultat que de faire gratifier 
l'auteur du sohriquetde Jordan-Cloche. Déjà le Directoire. 
avait trouvé mauvais que Jordan eut pris la défense de 
Lyon contre certaines insinuations des Directeurs qui ten- 
daient/x faire considérer cette ville comme un foyer de dé- 
serdres et de conspirations; le 18 fructidor hérita du 
ressentiment du Directoire, et proscr.ivit Jordan. Il en fut 
apparemment peu ému, puisqu'il fallut l'arracher de son 
lit pour le contraindre à fuir et  se cacher. 
Du fond de sa retraite, il écrivil une Adresse à ses com- 
rnettants, puis passa en Suisse, où il publia une protesta- 
tion contre le 18 [ructidor, qui fut traduite en plusieurs lan- 
gues et colportée dans toute l'Europe, il quitla bient6t la 
Suisse, où il n'était plus en sfireté, pour aller en Souabe et 
à Tnbingue. A Weimar, il vit les écrivains les plus cëièbres 
de l'Allemagne, Goethe, Sehiller, etc., et :y tudia avec ar- 
deur la langue et la liltérature allemandes. Ses Éludes sur 
Klopslock attestent l'Cendue de ses connaissances dans 
l'une et l'autre. Il revint en France en 1800, liabita quel- 
que temps la maison de 11  de Staël, à Saint-Ouen, et re- 
tourna ensuite à Lyon. Bonaparte y présidait alors la con- 
sulte cisalpine où s'agitait la question des desfinëesde l'Italie. 
Il estimait assez Jordan pour désirer de le gagner à la cause 
du gouvernementconsulaire : il lui fit des propositions dans 
ce sens. Jordan put en tre flatté, mais files déclina. Son 
opposition se manifesta bient6t dans un écrit intitulé : Vrai 
sens du vote national sur le consulat à vie, où on re- 



64g JORDAN -- 
greffe de le voir attribuer à des manœuvres de polioe les 
suffrages favorables au premier consul. Cet crit etait ano- 
nyme. Un bi. Ducbesne • qui en avait livré le manuscrit à 
l'imprimeur• lut arrêtC Jordan n'hésita pas alors à s'en 
avouer l'auteur et à en informer directement le premier 
consul. Il fit plus• il vint h Paris, se mettre h la disposi- 
tion de l'au«art«C laquelle, soit dédain, soit ménagement 
calculé, le laissaen repos. Il renonça alors à la politique• et 
se livra tout entier a la li,térature et à la philosophie, jus- 
qu'au moment oh la catastrophe de l,t, le ramena sur la 
scène de la politique. 
Envoyé  Dijon par les Lyonnais pour solliciter de l'em- 
pereur d'Au«riche un allégement aux charges de la guerre 
et accessoirement, mais en secret, le rétablissement des 
Bourbons, il repartait, un mois après, pour aller déposer 
aux pieds de Louis XV[I[ les hommages de sa ville natale, 
et le roi lui ocfroyait/ cette occasion des lettres de no- 
blesse. II resta nnmoins étranger aux affaires pendant tout 
le temps de la première restauration. Il était avec blonsieur, 
Iorsqu'en 1815, Napoléon marcha sur Lyon, et fut le der- 
nier à se séparer du prince. Dorant les cent-jours, il expia 
ce dévouement par quelques persécutions de la part du peu- 
ple. Enfin, la seconde resta«ration lui ouvrit la carrière des 
distinctions, des honneurs et des places. !1 débuta par Cre 
nommé président du collíge élecforal de VAin, puis député 
de ce département en 1816. Pendant la session de cette 
année et celles de «St7 et tgtS, il appuis constamment le 
ministère, soit qu'il propos,t des lois libérales, soit qu'il 
en demandt de restrictives de la presse périodique ou de 
la liberté individuelle. Mais en 1818, un regime de terreur 
blanche pesant sur la ville de Lyon, Jordan le dénonça/ la 
tribune, signala les excèsdescou« prévtales, et ne craignit 
pas d'attribuer les mouvements séditieux qui s'étaient ma- 
nifestés dans le Bh6ne aux provocations des royalistes 
déçus dans leurs e»pèrances réactionnaires par la fameuse 
ordonnance du 5 seplembre. Le discours qu'il prononça à 
celle occasion lui valut l'bonneurd'tre Cu député  Lyon, 
en mme temps qu'il obtenait pour la seconde lois les suf- 
frages des électeurs de l'Aih- 
En 1820, le minislère, qui exploitait l'assassinat du duc 
de Berr3', demandant à la fois la suppression de la liberté de 
la presse, de la liberlé individuelle et le renversement du 
sysfìme électoral fondé en 1817. Jordan, nommé membre 
de la commission chargée d'examiner le projet de la loi de cen- 
sure, refusa de se joindre à la majorité qui l'approuvait, 
monta àla tribune pour exposer les motifs de sa dissidence, y 
alCoila avec énergie les faufes, les pro]ets criminels du mi- 
nistère, etse frouvafout d'un coup placé par ce discours, 
qui était un véritable manifeste, à la tte de l'opposition. 
Le 5 juin, quelques députés de la gauche ayant été insultés 
dans des rassemblements tumultueux qui s'étaient formés 
autour de l'assemblée, il dénonça ce scandaleà la tribune, 
osa accuser de partialité la force armée• et réclama du mi- 
nistëre des mesures pour assurer l'indépendance et l'invio- 
labilité des membres de la chambre. Et lorsque, plus tard, 
la justice fut saisie de la connaissance de ces dsordres, il 
déposa comme témoin devant elle, non sans accuser la fac- 
tion qui avait brisWla loi électorale de tSt7 de tout le mai 
qui avait été commis. Il fut alors exclu du conseil d'État; 
mais par pudeur, on lui laissa le titre de conseiller hono- 
raire, ltalheureusement pour lui il n'avait pas an service de 
son énergie morale une de ces oenstitutions vigoureuses 
qui protègent la santé contre les eIfets ruineux des agitations 
de l'ame. Au commencement de 182 !, il était fatigué, épuisé, 
hors d'éfat de oentinuer la lutte, et il mourait au milieu 
de sa famille et de ses amis, le t9 mai de la mme année. 
i comme orateur, ni comme personnage politique, Camille 
Jordan ne fut un homme supérieur, mais il mérite d'dtre 
classé parmi les plus honorables caractères qu'on ait vus 
figurer depuis cinqante ans dans nos assemblées líslatives. 
Charles lhsn. 
JORDAN ( Boon ), l'un des peintres de genre les 

JOSAPHAT 
plus remarquables de notre époque, est né à Berlin, et 
commença vers 1828 l'Cude de son art, dans sa ville uatale 
sous l'excellente direction de Wach, qui lui fit faire des 
tableaux de sainteté et des copies du mme genre d'après 
les grands maltres. Pins tard, aprës s'tre pénétré des 
principes de la grande école de Dusseidorf, il se livra à la 
peinture de genre, sans pourtant $' beaucoup réussir d'a- 
bord. biais sa santé ayant exigé qu'il aller prendre les bains 
de mer à tleligoland, ses facultés poCiques se develop- 
pèreut au milieu de la nature et de la population toute 
particulière de cette fie. Admirablemeut secondé par la 
solidité de ses Cudes premières et par un rare talent de 
fine observation, il devint le peintre par excellence des 
plages d'Heligoland, comme aussi des mœurs de ses ma- 
rins et de ses p$cbeara. La première toile qu'il composa en 
ce genre fut la Demande en mm'iage à lteligoland 
{ 1833); tableau devenu depuis si populaire en Allemagne. 
L'artiste, d'ailleurs, ne s'en est pas tenu dans ses la. 
bleaux aux sujets gais ou plaisants de la vie du pilote 
et da pcheur; il l'a représentée sous toutes ses faces, 
avec ses épisodes les plus attristants, de méme qu'ave¢ 
ses scènes calmes et naives. Nous citerons, entre antres, 
Les Bottes oubliëes ; La Mort du Pilote, toile de l'effet le 
plus saisissant ; L'Examen du Pilote, véritable petit chef- 
d'œuvre, dont on trouvera un dessin dans l'Album des 
Artistes allemands de Buddens ; les Joies paternelles ; 
Les heureux Vieillards ; le l'attfrage, etc. Jordan est 
membre titulaire de l'Académie des Beaux-Arts de Bedin. 
JORDANÈ.s. Voye-- 
JORNANDIàS ou JOBDANËs était secrétaire des 
rois goths en Italie, et vécut sous l'empereur Jusfinien. Il 
était Goth de nation. (YesP à tort que dans le dictionnaire 
de MotCi on le dit évque de Bavenne : à la vérité, il s'C 
tait lait moine, mais rien n'autorise à le regarder comme 
un des dignitaires de l'Église. On dit aussi qu'il était fils da 
Coalmuth, Alain de nation. L'un de ses ouvrages est intitulé : 
De Gothorum origine et rebus 9estis. On a des raisons de 
croire que ce livre fut écrit vers 552 : on croit que ce n'est 
qu'un abrégé de l'histoire des Golbs par Cassiodore. L'abbé 
de 5taupertuis en a donné une traduction. Important pour 
le sujet, l'ouvrage est rédigé en un latin barbare. Jornandës 
y dit qu'il écriit neu[ ans après que la peste eut désolé 
l'empire: or, cette calamité arriva en 53, après le consulat 
de Basile. On accuse notre historien d'avoir été partial, pour 
sa nation, reproche qu'il semble avoir prévu lui-mme, 
puisqu'il dit à la fin du livre que c'est pour mieux taire 
sentir la honte du vainqueur : 5"e tantum ad eorum 
laudem, quantum ad ejus laudem qui vwit. L'histoire 
des Goths a été imprimée pour la première fois en 1515; 
elle se trouve d'ailleurs dans la collection de bluratori: 
Scriptores Rerum Italicarum, ainsi qu'un autre ouvrage 
de Jornandìs, intitulé : De 'egnorum et temporum suc. 
cessione, qui s'arrête à la mtme époque, et qui est entacbé 
des ratines défauts. Trithëme l'appelle improprement De 
9eslis Romanornm, car Jornandè« y parle aussi des 
des Assyriens et des Perses : dans ce livre, il a transcrit 
Florus, comme dans l'autre il avait copié Cassiodore; il a 
paru séparément en t6t7, in-8 °. P. n GoLs,. 
JOSAPHAT quatrième roi de Juda, avait trente-cinq 
ans à son avénement au tr6ne, à la mort d'Asa, son përe, au- 
quel il succéda. La main divine le délivra miraculeusement 
deses adversaires, les Ammonites, les Moabites et les Arabes 
il remporta sur eux une grande victoire dans la vallée située 
entre le torrent de Cédron, le jardin des Olives et Jérusalem, 
vallée qui depuis porta le nom de Josaphat. Beaucoup 
de commentateurs ont pensé, d'après deux passages de 
Joel, que le jugement dernier doit y avoir lieu ; mais pour 
détruire cette erreur il suffit de savoir que le nom de Josa- 
phat est formé des deux mots hbreux Jhovah (Dieu 
et sehaphat (juger), qui signifient jugement de Dieu. Ce 
prince commit la faute de donner pour épouse à son fils J o- 
rare Athalie, fille d'Achab, et de s'allier à ce roi d'lsrael 



JOSAPHAT 
dans la campagne désastreuse qu'il entreprit contre les 
Syri¢ns, campagne où il perdit la vie. Le roi de Judo n'é- 
ohappa/ la mort que par un miracle. Il s'efforça durant son 
règne de donner plu d'extension au commerce de ses États, 
et équipa une flotte qui fit voile vers Ophir ; aais une tem- 
pête furieuse engloutit les navires qui la composaient, et il 
ne voulut Ioint hasarder de nouvelles tentatives. Il mourut 
après un règne de vingt-cinq ans. 
JOSEFINOS. Voye.-- ArnA,ces^os. 
JOSEPH fils de J acoh et de Bachel, fut vetdu par 
ses Irêres, jaloux de l'affection toute particulière que leur 
pèt.e avait pour lui, à des ltadianites, marcltands d'esclaves, 
qui le revendirent à Putipltar, l'«in des principaux fonction- 
nuit'es publics de l'Égypte. La pudique résistance qu'il op- 
posa aulx provocations adultères de la femme de Putiphar 
fut cause qu'on le jeta en prison ; mais la consolante expli- 
cation d'un songe qu'il donna à un écltanson dit roi, dé- 
tenu comme lui, lui ouvrit la carrière de la fortune. En 
effet, cet écltanson étant rentré en gràce auprès de son marre, 
il se souvint, / Poccasion d'un rêve qu'eut Pharaon, de 
Pexplicaleur de songes qu'il avait eu pour compagnon de 
captivité. Joseplt, mandé à la cour, expliqua le songe dn roi 
des sept vaches grasses et des sept enclins maigres d'une 
manière qui témoignait d'autant de présence d'esprit que 
de connaissance parfaite du pays, en disant que cela voulait 
dire qu'à sept annees d'abondance l'l:'gypte verrait succéder 
sept annécs de stérilité; et en même temps il proposa des 
mesures si judicieuçes pour preserver le peuple de la fa- 
mine, que Pharaon lui en confia l'exéculion. En reconnai.- 
sance da service qu'il avait ainsi rendu à l'Egypte, le roi 
lui décerna le titre de Soteeeur d monde et le nomma 
son premier ministre. Mari à Asnath, fille du grand-prIre 
d'Heliopolis, qui lui donna deux fils, -Manassès et Éphramt, 
devenu l'Itomme le plus puissant de l'Égypte après le roi, 
et possédant l'aluour des populations, Joseplt appela aussi 
sa famille en Egpte, et lui concéda le territoire de Gosen ; 
en reconnaissance de quoi Jacob accorda à ses deux fils les 
mëmes droits qu'à. ses autres frères. 
L'histoire de la vie de Joseph est incontestablement l'une 
des phts interessantes parties des livres mosaïques; aussi Jo- 
.eph est-il lin sujet que les artistes aiment surtout/ trailer. 
JOSEPII l'êpoux de Marie et le père nourricier de 
Jesus, est désignédans saint Matthieu comme le fils de 
Jacob. Suivant la donuee ordinaire, il exerçait la profession 
de charpentier et de menuisier. Les Juifs, qui s'obslinent 
nier la mission du Christ, font dê Joseph un soldat, des œU- 
vres duquel sa fiancée serait devenue enceinte. Quelques 
chrétiens disent que c'est à Pìge de quatre-vingts ans et 
dbjb père de sept enfants qu'il avait eus de SalureC que Jo- 
seph épousa Marie. Il est probable, au reste, qu'il Cait dejà 
mort avant que commençt la mission divine de Jésus. On 
trouve sur loi les hgendes les plus merveilleuses dans 
l'HLstorio Josephi fobri lignarii, ouvrage apocr)'pbe écrit 
en Arabe. 
JOSEPH D'AIII.MTHIE, c'est-à-dire de Ramohoïm," 
dans la tribu de Benlamin, était membre du Sanhédrin de 
Jerusalem, et parait avoir été en secret favorable à la cause 
de Jesus, puisqu'il l'honora après sa mort, et qu'après 
avoir embaumé son corps, il le fit déposer dans le tombeau 
ceusé dans son jardin. La légende a très-arbitrairement 
désigné la situation de ce jardin etpar suite celle du saint sé- 
pulcre : aussi serait-il bien dilficile de l'indiquer aujour- 
d'hui d'une manière certaine. Suivant la tradition, Joseph 
d'Arimati|ie auraitété l'un des 70 disciples et serait ailWan- 
noncer l'Évangile en Angleterre ( voyez 
JOSEPH ( Fa.sços LECLERC »v TRF2,IBLAY, dit le 
Père), fameux par son crédit et son influence auprès du car- 
dinai de R i c h e I i e n, dont il fut jusqu'à la mort le confident 
intime, était né  Paris, en 1577, et mourut en 1638, 
clteau qui appartenait alors à son protecleur. D'abord 
homme d'épée, il servir avec quelque distinction dans sa 
imièrejeunesse; mais à vingt-deux ans, en 1599, il renonça 
nlCT. D£ LA CNtEK,. -- T. XI. 

 JOSEPH 649 
/ la carrière des armes pour entrer en religion et se faire af- 
filier à l'ordre des capucins. En y entrant, il prit le nom 
«le Père Joseph, sous lequel il est demeuré célèbre dans 
l'histoire. Ses suprieurs l'employèrent, dans le diverses 
provincesde France, à des missions qui lui fournirent l'occa- 
sion de se distinguer commecontroversiste et comme pré- 
dicateur; les scs qu'il  obtint justifièrent son avance- 
ment rapide dans son ordre, ana premiers emplois duquel 
il an tordu pas à parvenir. Un chef d'ordre, au dix-septième 
siècle, était un homme avec lequel comptaient les person- 
nages les plus importants de l'Église et de l'ltat. C'est ce 
qui explique les rapports qu'il ne tordu pas . avoir avc le 
tout-puissant ministre du faible Louis XIII. le cardinal de 
licbelieu, qui, appréciant le parti qu'il pouvait tirer d'un 
tel llomme, lui confia les négoci«tions les plus importantes. 
Confident du cardinal, le père Joseph lut gnéralement re- 
gardWcomme lïnstigateur principal des sanglantes mesures 
à l'aide desquelles licllelieu parvint/ abattre la féodalité 
en France et a fonder sur ses dhris le pouvoir despotique 
de la ro)auté. Quand, à la suite d'une intrigue, le cardinal 
fut momentanément exilé par son maltre à Avignon, il 
laissa à la cour un ami actif dans le père Joseph, qui par 
ses activs dmarches réussit bientOt h le luire rappeler. 
Après un II service, lichclieu ne devait plus rien avoir à 
refuser à son conlident, dont le crédit devint sans bornes. Il 
bd douna uneplace au conseil d'Ëtat, o/a on le chargea des 
affaires les plus épineuses ; il voulut même faire de lui un 
cardinal. A cet effet, il pressa virement la cour de lome de 
lui donner pour collègue l'homme qui savait tous les secrets 
de sa politique, et le pape, qui aait plus d'un motil pour 
ne point dëoblige Biclelieu,  consentit ; mais le père 
seph mourut asant d'avoir reçu ses bulles et son cl,apeau. 
Richelieu, pendant sa maladie, l'avait entouré de ses soins 
personnels. « J'ai perdu mon bras droit! » s'écria-t-ii en 
apprenant sa mort. Il ordonna qu'on lui rendit des honneurs 
out princiers, et qu'on portat son corps en carrosse h six 
chevaux au Capucins «le la rue Saint-Honoré, o/a il blt in- 
humé en face du maRre-autel, / coté du frëre Ange de 
Joyeuse. Ce fut le père Bon. carme déthaussé, qui pror, onça 
l'oraison funèbre en prence des princes, des dues et des 
memhres du parlement. 
JOSEPil. L'Ailemague a eu deux empereurs de ce nom. 
JOSEPH 1 œer, fils aihWde L eu p o I d |er, ne à Vienne, le 26 
juiu 1678, devint dès IGS9 roi de Hongrie et en 1690 roi des 
llomains. Élevé par son gouverneur le prince de Salin dans 
un esprit complétement affrancld de l'influence monacale, 
Iïutimité dans laquelle il recul ensuite avec le Irince Eu- 
gène l'amena h partager ses idées libérales en politique, en 
philosophie et en religion ; aussi son premier acte, en arrivant 
au tr6ne, fut-il de limiter l'influence des jésuites. En même 
temps qu'il les éloignait de sa cour, il accordait aux protestants 
de la Bohème et de la Hongrie des loueurs que ses ancëtres 
leur avaient toujours refusées. Il continua avec autant d'ar- 
deur que d'energie la guerre de la succession d'Es- 
p ag n e, que son frère avait commencée contre la France; et 
grâce aux s ictoires d'E u g è n e et de 3I a r i b o r o u g h il réussit, 
a expulser peu à peu les Français de I'llalie et des Pays-Bas, 
et à réduire Louis XIV à une situation.si critique que ce 
prince dut à diserses reprises solliciter la paix. Joseph F 
pour conserver toute sa liberté d'action pendant la lutte, se 
réconcilia, sous la médiation de l'Angleterre, avec le roi 
de Suède Charles XII, qui en 1706, dans sa marche de 
Pologne sur la Saxe, avait traversé la Silésie .sans son au- 
torisation préalable ; et, aux termes d£ traité qu'il con- 
clut avec lui en 1"107, il accorda aux protestants de celle pro- 
rince le libre exercice de leur culte en mème temps qu'il 
leur luisait restituer Il0 églises que les jésuites leur avaient 
précédemment enlevées. Le pape, qui penchait visiblement 
pour la France, fut contraint par lui de reconnailre son 
frère Charles en qualité «le roi d'Espagne. Il mit au ban 
l'Epire, en 1706, les électeurs de Bavière et de Cuiogne, 
et en 1708 le duc de Mantoue, pour s'ëtre alliés avec 
82 



50 
louis XIV, ennemi de l'Empire ; il s'empara de l'électorat 
de Bavière, nou sans avoir eu  triompher d'une énergique 
résistance opposée par la population armée, que commun- 
dateur Meindl et Plingauser, et eu morcela tout anssitft le 
erritoire. !1 russit également  comprimer la révolte de la 
I-loustic, qui, à l'instigation de la France, avait recommencé 
du vivant mème de son père. Il prouva sa sollicitude pour 
l'Empire en fixant la rêsidence de la dièle impériale  
]atisbonne, en dounant uue vie nouvelle à la chambre im- 
périale, dont les discordessurvenues cuire les princes de 
l'Empire paralysaient l'activité, et eu rêtablissaut dans ses 
droits de ville libre imperiale Donauwoerth, médiatisée par 
la Bavière à l'epoque de la guerre de ironie ans. Ses ]tats 
lui lutent redevables de l'insfitution d'une bauque impêrialc 
et de la création de l'Académie des Sciences et des Beaux- 
Arls de Vienne. En outre, il coustruisit le chAteau de Scfioen- 
bru un, et il cfiercha à soulager la classe des paysans en 
apportant de uombreuses mo, lilications au servage. Joseph I er 
fut un prince instruit et sage, tolêrant, quoique sincfrement 
attache aux dogmes et aux pratiques de l'Ëglise catholique, 
bon et aimable, en dépit de sa gravité quelque peu rude et 
de sa prédilection pour le cérémonial le plus sévè-e, de 
mëme que pour le faste. Il aimait aussi la chasse passiouné- 
ment. Il mourut en 1711, de la petite vérole, et eut pour 
successeur sur le trfne impérial son frère Charles VI. 
JOSEPl111, filsde François l«et de M arie-T h érèse, 
naquit le 13 mars tTil, à une époque où sa mère se trou- 
sait dans une position tellement critique, qu'elle craigna;t 
qu'il ne lui rester plus une seule ,cille pour y faire ses cou- 
ches. Elevé avec soin sous la direction du priuce 13atth)anni 
et du secrétaire d'État 1artenstein, le jeune prince an- 
nonça de bonne heure un esprit vil et gai, une intelliuce 
rapide et une heureuse mémoire, mais eu même temps une 
certaine opiuiàtrete tenant du caprice, et de la repugr, anee 
 rester lonemps en repos de même qu'a apprendre par 
cœur. Quoique depassé  tous égards par son frère Leopold, 
il ne laissa point que de faire d'assez rapt,les proprès dans 
les laugues. 11 s'occuf, a aussi beaucoup de géomelrie et de 
tactique, mais plus particulièrement encore de musique. 
Joseph, •ivant constamment au milieu d'hommes remarqua- 
bles, était passe de l'enlhuce à l'adolescence quand éclata 
la guerre de sept ans. Marie-Thérèse eut un instant lïdee 
d'y faire prendre part  son fils; mais elle renonça hientft 
à ce projet, pour ne point le déranger de ses Cudes. En 1760 
il éponsa l'excellente princesse Marie-Louise de Patine, qu'il 
aimait tendrement, mais qu'il eut la douleur de perdre dès 
1763, aprës qu'elle luieut donné une fille, qui ne tarda point 
à rejoindie sa mère dans la tombe. Sa seconde femme, la 
princesse Josèphe de Baviere, mourut également peu de 
temps après ou mariage. Après la paix d'ltubertsbourg, et 
jusqu'a un certain point par suite de cet évënement, Joseph 
fut clu roi de/%nmins, et à la mor de son père ( 18 aoOt 
1765) il devint le chef de l'Empire de l'Allemagne. En 
mëme temps  lqarie-Thérèse le d«'clara r9e»t de ses Etats 
autrichiens, nais en ayant soin de s'en réserver expressé- 
ment le gouvernement ; ce qu'elle abandonna à son fils, ce 
fut la grande-maîtrise de tous les ordres de chevalerie, l'ad- 
ministoeation supérieure de l'armée et la directiou réelle de 
tout ce qui avait trait h la guerre. Secondé dans ces fonctions 
par le comte de Lascy, et prenant pour modèle Frédé- 
ri c II, le jeune empereur opéra aussitft de nombreuses et 
utiles réformes dans l'armée antrichienue. ('est ainsi qu'il 
améliora seusiblement le sort du simple soldat, et qu'il ins- 
titua des iuspections géuérales annuelles. Il fit généreusement 
br01er 22 millions de florius en obligations d'Etat qu'il avait 
trouvés dans la succession de son përe, et voulut que les 
domaines que celui-ci avait achetês comme simple particu- 
lier tissent retour au domaine de l'État. En mme temps il 
donnait le premier  sa cour l'exemple de la simplicité dans 
les habitudes de la vie et dans les vëtements, mettait ob- 
stacle au trafic des emplois et des dignits, et rétablissait eu 
vigueur le principe de donner, pour la eollatiou des lune- 

JOSEPH 
tions publiques, la préférence aux natiuanx urles Cran 
sers. Par ses ordres les jeux ¢ hasard iurent prohibés, la 
police fut orgaui»ee, la torture abohe, en mme te.reps qu'on 
modérait la Iégislatiou en vigueur contre les individus in- 
culpés de sorcellerie, qu'on lacilitait les mariages h l'effet 
de rparer les ravages causês parmi les populations par la 
guerre, et qu'on négociait avec la uoblesse des adoucisse- 
ments h apporter au système des corvées. Soit que la part 
d'inuence que lui abandonnait sa reCe ne suffit point à son 
activité, soit pour se mieux préparer ainsi h sou rfle de sou- 
verain, il entreprit plusieurs ,coyages, exéeutés salis le 
moindre luxe, comme un simple particulier, et le plus sou- 
vent sous le nom de eornte de', Flcestein. C'est de la 
sorte qu'il parcourut successivement et eu détail la Hougrie, 
la lohëme, la Moravie, Pltalie, la Frac:e, la Hollande; et 
il profita d'une de ces tournées pour vsiter Frédric le Grand 
dans son camp près de IS/eisse, le 5 noir 1768 : visite que 
celui-ci lui rendit l'année suivante au camp de lIœerih- 
l'eustadt..oseph gagnait tous les cœurs par sa simplicilé et 
sa bonté; il en fut ainsi notamment lors du voage qu'il t 
en 1776 dans les Pays-Bas, et lors de son séjour de sis 
semaines h Paris, en 1777. 
Dans ses efforts pour agrandir ses États, il lut plus heu- 
reux lors du premier partage de la Poloe (1772 qu'il ne 
l'avait été h l'époque de la guerre de la succession de la- 
• ière ; l'Aatriche y gagna sans droits aucuus la Gallicie, la 
Lodomérie et le comté de Zipg : en tout, un accroissement 
de territoire de près de 1,000 myriamèlres carrés avec trois 
millions d'habilants. Par un autre acte de violence, il con- 
6squa ( 1783 et 1784} tous les territoires des évêchés de 
Passau et de Salzbourg situés en Autriche. Aigri contre la 
Prusse, qui l'avait empêché de s'emparer de la Eavière, il 
profita, en 1780, d'uu voyage fait dans une grande partie de 
l'Europe pour aller visiter l'tropCutrice Cathefine Il à 
hilef sur le Dniepr. Par le charme de son esprit et parson 
habileté, il parvint h détacher cette princesse et son tout- 
puissant favori Potemkin de l'alliance de la Prusse, pont 
leur en faire contracter une avec l'Autriche ; et en pro- 
mettant à l'impératriec de lussie son concours pour expulser 
leg Turcs de l'Europe, il obtint son conseutement  ce qu'il 
s'emparat de l'Italie et de la Bavière aussitft que l'occasion 
s'en présenterait. 
La mort de  mère, arrivée en 1751, l'ayant mis en com- 
plète possession de ses Etats béréditaires, loseph II pro- 
céda aussitft aux grandes réformes qu'il projetait depuis 
Ionemps, et qu'il n'avait d différer qu'h son vil regret. 
Admirateur secret de Frédéric II, guidé par la philosophie 
de son siècle et par les ouvrages des Français sur le gouver- 
nemeut des hommes et sur l'économie politique, il voulut, 
 l'in'star de FfCCie, gouverner ses États sans aucun con- 
trfle et y provoquer uue vie nouvelle ç.r de larges réformes, 
tant civiles et administratives que religienses. Pour reine- 
dier aux incouvénieuts sans nombre résultant de leur divi- 
sion extrème, qui s'opposait h ce qu'ils reçussent uue lëgis- 
latiou uniforme, il fit pour la première fois des domaines 
de la maison d'Autriche un tout politique, partagé en treize 
 cercles de gouvernement, qu'il s'eflbr.ca d'amalgamer le plus 
complétemeut possible en y iutroduisant les mêmes institu- 
tions, la mëme administration, la méme lane et les mèmes 
usages. Il ordonna que la base de l'impft fut désormais la 
contributiou foucière, calculée d'après la valeur des produils 
de la terre, insista virement pour obteuir la renonciation 
de la noblesse au servage, inlroduisit la complète liberlé du 
trausit intérieur dans les diverses parties allemandes et 
hèmes de la monarchie autrichienne, et h partir de 173 
fit travailler h la rlactiou de nouveaux codes, or l'on pro- 
clamait l'CalitWde tous devant la loi, où l'on substituait 
la peine de mort les travaux forcé, la marque et Pempri- 
sonnement, biais ce fut surtout h diminuer la puissance du 
clergé que lendirent ses efforts. 
.oseph I! ne voyait pas seulemeut dans l'Cut où se h'ou- 
 rait alors PEglise un obstacle h toute libecé de la science 



JOSEPH 
etde la foi, de mëme qu'h tout essai de réforme que pourraient ' 
tenter les princes etles États, mais, comme Kaunitz, il 
abhorrait en outre le clergé, qui trop souvent en effet avait 
abusé de l'esprit religieux de sa mère. Il commença donc 
par se rendre indépendant de la puissance des papes, en 
décidant que toute bulle pontificale, pour ëtre valable dans 
ses États, devait au préalable avoir été revêtue de son ap- 
probation, et il ordonna notamment de supprimer de tous 
les rituels les bulles Unigenitus et In coena Domini. Ensuite, 
dans l'espace de huit jours, il supprima 800 couvents, ré- 
duisit le nombre des religieux de63,000 à 27,000, et replaça les 
anciens ordres monastiques sons la juridiction des .vèques, 
auxquels il remit aussi le soin de décider en matières de 
dispenses pour mariages tous les cas réservés jusqu'alors au 
pape. En mme temps, le 15 octobre 1781, il rendait son 
célèbre edit de tÇlœrance, qui accordait aux protestants et aux 
grecs non unis la liberté de leur cuite, refusée aux seuls 
distes. Il améliora aussi la condition des juifs, et intro- 
duisit dans les églises catholiques les psaumes allemands de 
l'ex-jésuite Dents. Par nne entrevue personnelle avec l'em- 
pereur, le pape Pie VI espéra réussir à arr«.ter la marche 
rapide que l'esprit de réforme prenait en Autfiche, et vint 
en personne à Vienne aux fètes de Pques de l'année 1782. 
Le père commun des fidèles fut sans doute accueilli dans 
cette capitale aec toutes les marques de respect et de d- 
ference qui lui étaient dus; mais ses représentations furent 
inutiles, et sa seule consolation fut de s'ttre convaincu de 
ses propres yeux qu'il s'en fallait de beaucoup que les po- 
pulations autrichiennes [ussent encore assez mùres pour les 
réformes opérées par leur souverain. 
En même temps Joseph Il s'occupait avec soin des 
térts du commerce et de l'industrie. Il créait de nouvelles 
fabriques, encourageait l'esprit d'entreprise par des avances 
de çonds et par des récompenses, supprimait les monopoles, 
erigeait Fiume en port franc, établissait nu port nouveau a 
Carlopago en Dalmatie, et assuraità ses sujets la libre navi- 
gation du Danube jusqu'àla mer. Il n'accordait pas une pro- 
tection moins éclairée aux sciences et aux lettres, en Iondant 
des prix en leur laveur. En outre, il créait des bibliothèques, 
des établissements de bienfaisance, et une foule d'écoles 
tant dans les villes que dans les campagnes ; il fondait l'uni- 
versité de Lemberg, l'école de medécine et de chirnrgie mili- 
taires de Vienne, et modérait le système de restriction et de 
contrainte imposé à la presse en faisant passer la censure 
«les livres des mains des prètres dans celles de fouctionnai- 
res laïques, autorisés à laisser un peu plus de liberté h l'ex- 
pression de la pensée. Cependant, ce zèle si sincère et si 
actif pour le bien de ses peuples fut meconnu et bien loin 
d'ètre secondé. C'est ainsi que l'amélioration de l'organisa- 
tion judiciaire de l'empire, projetée dès l'année 1766, et 
qui n'exigea pas moins de neuf années de travaux (de 1767 
à 1776), rencontra dans la pratique tant de difficultés que cette 
grande et utile mesure resta comme non avenue. En Hongrie, 
ces réformes avaient eu pour suite une redoutable révolte 
des Vlaques, révolte dont on ne put venir h bout qu'en 
pendant leurs chefs ltoriab et Kloska et 10 autres individus 
plus ou moins compromis dans cette levée de boucliers. Le 
plan, parfaitement judicieux d'ailleurs, qu'avait conçu l'em- 
pereur pour arrondir ses États en échangeant les Pays-Bas 
contre la Bavière, échoua par suite de la résistance qu'y 
apporta FfCCie II, lequel oanisa h cet effet, en 1785, ce 
qu'on appella la ligue des princes. Joseph Il, en revanche, 
fut plus heureux, en 1782, dans ses effortscontre les Hollan- 
dais, à l'effet d'obtenir la suppression du traité des Barrières. 
Sans doute en cette circonstance sa conduite ne fut 
exempte ni de violence ni d'arbitraire ; mais en somme il 
réussit à fairedémantelerles fortificatious de toutes lesplaces 
élevëes contre les Pays-Bas. La discussion qu'il engagea 
aussi, en 1785, avec la ltollande au sujet de l'ouverture de 
la navigation de l'Ecaut lui valut un idemnité de neuf mil- 
lions de Ilorins et la cession de quelques parcelles de ter- 
ritoire. 

6.1 
A peu de temps de là, aux termes du traité qu'il venait 
de conclure avec la Russie, il déciara la guerre à la Tur- 
quie, le 10 fevrier 1788. Les premières opérations en furent 
heureuses, mais la suite de la campagne e répondit point a 
ses débuts. Surprise h Lugos (2O septembre 1788), son 
armee lut forcée de battre en retraite. Les maladies et les 
combats l'avaient diminuée de 70,000 hommes. Au mois de 
décembre de cette mme année Joseph Il rentrait h Vienne, 
malade et douloureusement affecté par ces revers. Que si, 
dans la campagne de l'année suivante, Loudon et le prince 
Josias de Saxe-Cobourg, en s'emparant de Belgrade et eu 
remportant les victoires de Fockschany et de llartinestie, 
rétablirent l'honneur des armes autrichiennes, l'empereur 
eut encore à subir de rudes épreuves d'un nuire c6te. 
Desaflectionnés par les nombreuses alteintes portCs à 
leurs priviléges et h leurs franchises, les habitants des Pays- 
Bas, sous la_direction de l'avocat Van der .N o o t, du chanoine 
van Enpen et de l'officier Van der 31ersch, proclamèrent 
leur indépendance, et expulsèrent les troupes tropCinies de 
tontes leurs provinces. Le Luxembourg seul continua dê 
rester sous la domination de l'empereur. Les ltongrois pa- 
raissaient h la veille d'imiter l'exemple des Flaraands; et des 
troubles graves,provoqnés surtout par le cierge et la noblesse, 
profondcment irrités des réformes opérees par l'empereur, 
éclalerent sur divers points de la Bohème et du frol. C'est 
dans ces critiques cirustances que Jo:eph Il, en janvier 
1790, se vit rduit à dedarer nulles et non avenues les ré- 
tormes operées par lui jusque alors en Hongrie; et de ses 
nombreux édits reformateurs, le seul qui demeura en i- 
gneur fut I'dit de tolerance. Des pareilles déclatations 
lutent adressees en outre aux populations des Pays-Bu% de 
la Bohémeet du Trol. Les Belges n'en persistëreut pas moins 
dans leur révolte, et les Hongrois tcmoignérent de la joie la 
plus irrévérencieuse en apprenant les concessions qu'ils 
avaient arracbées à l'empereur. 
Le chagrin d'avoir vu méconnaitre ses bienfaisantes int,:n- 
tions et les humiliantes epreuves par lesquelles il venait 
de passer accelérèrent la lin de l'empereur, malade depuis 
longtemps. 11 mourutle 20 fevrier 1790. Joseph 11 étaitun 
bel homme, de taille moyenne, d'un tempérdment très-vil 
au front eleë, aux yeux bleus et expressifs. Animé des 
intentions les plus nobles et les plus pures, son unique tort 
fit d'avoir oulu proceder à ses reformes-aec trop de pre- 
cipilation; de s'ètre attaqué aussi impitoablement aux 
coustitutious et aux priileges particuliers des diverses na- 
tions soutnises à ses lois, qu'aux droits.et aux franchises 
«les individus ; enfin, d'avoir voulu introduire lout à coup 
dans ses Elats des institutions, meilleures sans doule, mais 
pour lesquelles ses peuples n'étaient point encore mfirs. 
Son inlatigable actiite, la noble simplicite de ses manières, 
sa rigoureuse économie, la bonlëet l'aménilé de son carac- 
lre, qui lui faisaient indistinctementaccueillir tous ceux de 
ses sujets qui sollicitaient de lui une audience, qui le por- 
taient a secourir toutes les infortnnes qu'on lui signalaitt 
et la cmscieuce scrupuleuse qu'il apportait dans l'exercice 
de teus ses devoirs de souverain, faisaient de lui le modèle 
d'un prince accompli. Il eut pour successeur sur le trône 
d'Aulricbe son frère Leopold Il. E 1807 son neveu Fran- 
çois Il lui lit Cimer à Vienne une statue en bronze, œuvre 
du sculpteur Za«ner, et sur le piédestal de laquelle on lit 
cette tourie mais frappante iuscriptioa : Josepho Secmdo, 
qui salut publicoe v«it on diu, scc totus. Un de ses 
courtisaus, un aristocrate, comme on dirait aujourd'hui, 
émettait un iour devant lui le VœU de voir les magistrats mu- 
nicipaux de Vienne rendre un artère qui interdirait à la plèbe 
la promenade du Prater, ce rendez-vous favori de la popu- 
lation de la capitale des Eat. autricltiens, pour la réserver 
uniquemeut à l'usage des gens co»me il faut. • ..lors, dit 
l'empereur, s'il me fallait ne me promener qu'avec mes 
egaux, vous me condamneriez donc à errer pendant le 
restant de mes jours au milie| des tombeaux de mes an. 
c6tres I • 



652 
JOSEPH ou 3OSEPtI-EMM.NUEL, roi de P o rt u g I. 
fils de Jean V, auquel il succéda en 1750, était né en 
Prince indolent, sceptique et voluptueux, il n'e.t d'a.te 
méri que de choisi un ministre habile, à qui il confia toute 
t'autorité, Sébat;e Cavlho, depuis arquis de P o m b a 
L principaux évnements de n règne sont le tremble- 
ment de terrcq.i engloutit les deu tiers de Li sbonn e, la 
conspiration de 18 contre h vie dç roi vgée dans 
g de h famille entière de Tavora, rexpuion d je- 
s u i te s et la confiscation de leurs biens, qui en fut la suile, 
I'dit qui abolissait to.te distinction ente les anciens et les 
uouveaux chrétiens, enfin la guets avec l'Espgne en 1761. 
Joseph mourut le  février 1777. Il avait le goflt des sciences 
et des le[Ires, et en favorisa les progr. Avec l'aide de son 
grand ministre il accomplit la régénration intellectuelle du 
Pougal. 
JOSEPll BON.PABTE  frère aln de Na po IWon, 
nè ì Ajaccio, en 178, et destinë au barreau par sa famille, 
commen ses Cuttes de droit ì l'université de Pise. En 
1793 il suivil ses fières à MarseiIle, oh il ne tarda pas à 
épouser M "« Marie-Julie C ! a r y, fille d'un riche négociant 
de cette lle. crit du conventionnel Salicetli, dont il 
ful quelque lemps le sectaire, lui fit obtenir à cette époque 
e place de oemmisire des guerres à l'armée d'ltalie, et 
ois ans apr, en 1796, il fut, comwe son frère L u c i e n, 
dép,te au Conseil des Cinq Cen par le d'partement de Lia- 
mone. L'ambassade de l'arme puis lle de Borne furent 
la mme année confiées à son zèle. Dates cette dernière ville, 
il sut tenir au pape un langage si digne et si persuif à la 
lois, qu'il réussit à faire prévaloir aups de bfi l'influce 
de la France s,r celle des autres puissances de l'Europe. 
Mais ces resullaLg diplmatiqu déplurent aux cardinaux 
du saint-père, qui animérent si bien contre l'ambassadeur 
lrançais l'esprit national et fanatique de la populace romaine, 
qu'un jour des flots de furieux se précipitèrent, la menace 
a la bot]clic, sur le palais de l'ambassade. Dans ce moment 
critique, Joseph garda pouanl tout son courage et toute 
sa prèsence d'esprit : accompagn du général fi'anis D u- 
p h o, il se presenla sans armes bardiment en présence des 
agitateurs. Dvphot tomba victime de la fureur populaire 
quant à Joseph, ¢chappé comme par miracle au danger qui le 
menaçait, il s'empressa de quitter Borne secrèlement pooe 
revenir à Paris. Le gouvernement français s'Cui juslement 
h la nouvelle de cette violalion inlme du doit des gens; 
importait à uotre honneur, a notre dignité, de venger l'in- 
fortun Duphol, e la guerre lul déclarée au pape. os 
troupes soumirent sans peine ses Êta, et la honte d'une 
invasion fut le châtiment de ce crime. 
Joph, rentrë au conseil les Cinq Cents, s'occupa avec 
Lucien des préparatifs du 18 brumaire. Une place au 
Conseil d'Êlat fut le prix de son zélé. Dans le commencement 
du consulat, il lut agsi cfiarg,  de conclure un traité de 
paix et de commerce avec les ministr plénipotentiaires 
es Êlas-Unis d'AraCique. est à lui que furent confiées 
les missions diplomatiques les plus brillants et les plus bo- 
norables; oer tes deux traitég de paix que la France conclut 
en 180, e premier avec l'Allemagne, le second avec l'An- 
gleterre, portent sa signature. Il oeçut s,coessivement la 
croix de grand-officier de la Lbgion d'Honneur el les 
de membre du sénat, de prince impérial, etenfin de and- 
6lecteur de l'empire. Mal toutes les hautes dignités dont 
il fut revêtu, il conserva toujours la mme simplicité. 
poléon, qui fondait alors une cour, et i faisait régner dans 
son palais impérial l'étiquette la plus sèvère, vit aec dé- 
plaisir oette splicité; il la lui rcprocha souvent, mais 
en çain : Joseph ne voulul jamais renoncer à s habi- 
tude. 
Quand le roi de Naples eut trahi s #evoirs et ses pro- 
messes enve nous, Naléon mit Joseph à la tte de l'ex- 
pëdifion q,i devait chatier ce parjure, et lui donna pour 
lieutenanh les maréchau x M a s s ë n a et G o u v i o n - S a i n t- 
C y r. L'expédilion fi heureuse, et, sans grande effusion 

JOSEFIt -- JOSEPH BOIAPARTE 
de sang, l'armée (rançaise entra dans [aples, le 5 janvier 
18015. Papoléon, par un décret, donna à JoseplJ sa con. 
qute, en le plaçant sur le tronc des deux Siciles. La popula- 
tion napol.;taine salua le nouveau roi avec de vives démons- 
trations d'allégresse, et Joseph prit à cœur de justifier la 
joie publiq,]e par son adminislration paternelle. !1 choisit 
pour son ministre des finances le conseiller d'État B Oe d e- 
r er, qui naturalisa dans ce royaume le système d'adminis- 
tration suivi en France; mais si la bourgeoisie napoliL'dne 
adopta franchement ce monarque étranger, il n'en fut pas 
ainsi de la noblesse, qui manifestait tout haut son peu de 
sympathie pour Joseph, bl;tmait tous les actes de son gou- 
vernement, et se plaignait surtout avec vivacitè de l'insou- 
ciante confiance avec laquelle il abandonnait à ses ministre 
le soin des affaires publiques. Les répugnances de cette aris- 
tocratie s'aigrissaient tous les jours, quaud llapoléon, en 
1808, mit entre les mains «le son frère Je sceptre de l'Es- 
pagne. Cette nouvelle couronne le grandissait encore 
doule ; mais il fallait que la fortune de la guerre l'affermlt 
«ur sa tte, et pour cela il fallait vaincre et soumettre ces 
Espagnols, si obstinément jaloux de leur indépendance, 
qui résistèrent si Ionglemps aa courage de nos soldats. Jo- 
seph à son avénement était plein de bonnes intentions; 
mais, il faut le d!re, il ne possédait pas cette prodigieuse 
activité ni cette énergie dambition qui s'alliaient dans l'em- 
pereur à l'audace et au génie; sa justice, sa popularité, ne 
purent I,i conquérir les cœurs de ses nouveaux sujets, et 
les secours que leur résistance opini;ttre obtinl de l'Angle- 
terre rendirent encore plus difficile la position de Joseph. 
Deux fois il fi,t forcé de déserter sa capitale, et enfin, 
quand la guerre de Bussie mit biapoleon dans la nécessité de 
rappeler presque toutes ses tropes d'Espagne, lorsque les 
Français, repoussés à la fois par les indigènes ( gueriJJas ) et 
par l'armée de Wellinon, durent céder à la supériorité 
du nombre, Josepl,, abandonnant son tronc, rentra sur 
notre territoire à la fin de 1813, et alla l,abiter sa terre de 
Morterontaine. biapoléou lui confia la lieutenance générale de 
l'empire, et le commandement sppérieur de la garde na- 
tionale de Paris; mais la tële de l'ex-roi d'Espagne n'était 
pas assez forte, assez lerme, pour ces terribles circons- 
tances. Peu confiant dans la forhme de son frère, il suivit 
l'exemple de l'impératrice ,et se retira à BIois, en laissant 
au duc de I:;aguse le commandement de Paris. Quand Na 
poléon, découraé, abdiqtm pour la premiëre fois, Joseph 
alla en Suisse, oi] il acheta la terre de PranT, in, dans le 
pays de Vaud, qu'il I,abita jusqu'au 20 mars. 
A. Gc¥ u'AGue. 
bIapoléon une fois de retour à Paris, Josepl, se h;tta d'y 
revenir, et son rière le créa alors prince français, en mme 
temps qu'il le nommait pair de France et connétable de 
l'empire. Après le désastrede Waterloo, Joseph accompagna 
son frère ì Bochefort, où tous deux projetaient de s'embar- 
q,er su]" des navires dilférents pour les Êtats-Unis. A rlle 
d'Aix, où il it Hapoléon pour le dernière fois, il lui offrit 
le bfitiment qui avait Ce nolisé pour son compte ; et ce ne 
fut que lorsque le général Bertrand lui eut aflirmé itérafi'e- 
mcntque l'intention de l'empereur était de se confier à la 
loyauté et à Pbouneur de la nation anglaise, qu'il se dëcida 
à faire voile pour l'Amérique. Il arriva au mois de septembre 
à New-York avec une suite nombreuse, et acfieta aussitét un 
domaine près de Trenton dans le New-Jersey. Possesseur d'une 
fortune s'ëlevant encore à plus de 5oo,oo0 francs de rente, 
Joseph Bonaparte I,abita ensuite, sous le nom de Comte de 
Surrtlliers, la terre de Point-Breeze, près de Bordentown, 
sur les bords de la Delaware, dans l'État de biew-Jersey, pré- 
cédemment occupée par le général 1! o rean. Il s'y occupa 
surtout d'ariculture et de sciences, devint le bienfaiteur 
actif et zélé de tous les indigents de la contrée. Dans une 
adresse en date du 18 septembre t830, envoyée de New-York 
à la ci, ambre des députés de France, il protesta contre ré- 
Iévation au tronc d'un prince de la maison de Bourbon 
en faveur de son neveu leduc de lleichstadt, dont, en 1815, 



JOSEPH ]ONAPAPTE -- JOSEPHE 
après l'abc|cation de Napoléon, la chambre des reprsen- 
tants avait solennellement reconnu les droits sous le nom 
de IVapolon IL Ala fin de t$32, lecomte de Survilliers 
quitta l'Amriqne pour se rendre à Londres, et résida alors 
pendant quelque temps en Angleterre. Au mois de mai tS l, 
il alla  GSnes, où il eut une entrevue avec ses deux frères 
L o u i s et J ë r  m e; et plus tard, il se rendit à Florence, 
qn'il continua d'fiabiler jusqu'à sa mort, ar'ivée en 18 . 
avait eu deux filles : i'alnée, Zénaïde, née/ Paris, en 1802, 
morte  Naples, en ao0t 1854, avait épousé son cousin ger- 
main, le prince Charles de Canino, fils alué de Lmden 
Bonaparte ; la cadette, Charlotte, morte en t 839, avait 
pousé b]apoléon-Louis, fils ainé de Louis Bonaparte, mort 
en 1831. On a attribu au roi Joseph le roman intitulé Moyna 
( Paris, 1799 ; nouv. édition, 1814 ). Consultez Ducasse, 
moires et Correspondance publique et militaire du roi 
Joseph .( l0 vol. ; Paris, 1853-1854 ). 
JOSEPilE (F.xvs), historien juif, né  Jérusalem, 
l'an 37 après J.-C., teuait par son père Matatldas  la famille 
des premiers sacrificateurs de sa nation, et par sa mère à 
l'illustre sang des Macbabées. Saus qu'on sache s'il ponssa 
fort loin sa carrière, il est certain qu'il vécut au moins sous 
neuf empereurs, depuis Caligula, durant le règne duquel 
il vint au monde, jusqu' Domitien, qui le combla de fa. 
veurs, ainsi que J'nsèpbe le raconte lui-mme dans sa propre 
biographie. Il reçut une éducation savante, et s'attacha 
la secte des pharisieus, la eule qui chez les Juifs el pari 
au gouvernement. A vin-six ans, il fit le voyage de Ruine ; 
de relour dans sa patrie, il trouva les Juifs sur le point de 
se révolter contre les procuraturs impériaux. Trois partis 
principaux existaient à Jérusalem : les amis de la famille 
d'Hérode et des Romains ; le parti modéré, qui s'efforçait 
de les combattre, mais seulement pour obtenir des condi- 
tions avantageuses ; les "--élateurs ou exaltés, qui voulaieut, 
contre l'empire, une guerre d'extermination. Dans le con- 
seil général d'insurrection qui s'ouvrir au sein de cette 
métropole, le parti modéré obtiut l'avantage, et fit uommer 
pour guuverneur civil de Jérusalem lê grand-ponlile Ananns. 
L'historien Josèphe obtint le commandement de la haute 
et.basse Galilée. Ce fut en cette qualité qu'il eut ì combattre 
une partie des troupes que l'empereur léron avait eu- 
voyées en Palestine sous Vespasien, le milleur de ses capi- 
taines. Enfermé dans Jotapat avec une garnison valeureuse, 
il résista quarante-cinq jours à tous les effort d'uu corps 
de Romaius commandé par Titus en personne. La garnisou 
s'ensevelit sous les ruines de la place. 
Josphe, devenu captif de Vespasien, lui prlit sa gran- 
deur future, et J.-G. Vossius observe ì ce sujet que notre 
historien, qni, comme tout le peuple juif, attendait à cette 
dpoque le Messie, était peut-être de bonne foi en appliquant 
au sucoessenr présumé de lgéron les prophéties annonçant 
le Sauveur. Quoi qu'il en soit, il s'insinua bieut6t dans la 
faveur de Yespasien et de son fils, ce qui excita contre lui 
l'indignation de ses compatriotes. Ainsi s'expliquent les sou- 
venirs peu honorables que, malgré ses talents de militaire 
et d'écrivain, il a laissés parmi ceux de sa relion, qui morne 
aujourd'hui ne le lui ont point pardonné. On en voit la 
preuve dans le savant ouvrage de 1l. Salvador sur les Ins- 
titutions de Moïse. « La renommée, toujours prompte ì ré- 
pandre les mauvaises nouvelles, dit Josèphe lui-mme, avec 
une étrange franchise, porta aussit61 à Jérnsalem le mal- 
heur de Jotapat. On assurait que Josèphe était muet en com- 
battant. Toute la ville en était si affligée qu'un s'imposa peu- 
dant trente jours un deuil extraordinaire. Mais dès qu'on 
sut comment les choses s'élaient passées, qu'il é[ait tombé 
vivaut au pouvoir des Romains, et que leur général, Ioiu 
de le traiter en captif, hd rendait des honneurs, cet amour 
extréme se convertit en une fiaine violente; on lui prodigna 
le noms de Iàche, de traltre, et un cri universel répéta les 
trapeCtions contre lui. , 
Au reste, si les modernes ont accusé Josèphe d'avoir servi 
les Komains contre sa pairie, ils ne l'ont lait que sur des 

653 
documents fournis par lui-mme. « Après la prise de Jérn- 
salera, dit-il dans sa vie, ,'espasien me traita très-bonora. 
blement, et j'épousai par son ordre une des captives ...... 
Tilus m'envoya ensuite, avec Cerealis et mille chevaux, 
/ Tbécua, pour voir si ce lieu serait propre  y établir un 
camp... Lorsque T"tus eut arrangé les affaires de la Judée, 
et que le pays fut tranquille, il remplaça les terres que j'a- 
vais autour de Jérnsalem par d'autres, siluées en «les lieux 
éloignés ; et quand il retourna à lome, il me fit l'honneur 
de me recevoir sur son vaisseau. X'espasien continua ì me 
traiter de la maniëre la plus favorable ; il me fit loger dans 
le palais qu'il habitat! avant d'tre arriv  l'empire, il me 
donna le tilre de cilo)en romain, il m'accorda une pension, 
et ne cessa jamais de me combler de bienfaits, ce qui m'a 
attiré une grande haiue de la part des hommes de ma na- 
tion. » Qucl r61e encore lui avait-on vu jouer au siege de 
Jérnsalem, où il avait accompagné Titns ? D'après l'ordre de 
ce jeuue prince, il se plaçait sur une hauteur voisine des 
remparts, et de la il haranguait ses concitoyens pour les 
engager à se reudre. Il nous apprend encore les bienfaits 
qu'il reçut de Domitien, devenu empereur : « Il a affranchi, 
dit-il, toutes les terres que je possède dans la Judée, et 
l'impératrice Domitia a toujours pris plaisir à m'obliger. 
Comme historieu, Josèphe a laissé quatre ouvrages. Le 
plus intéressant est son Histoire de la Destruction de J- 
rusalem, livre d'abord rédigé en hebreu, et Iraduit en grec 
par }'auteur lui-mme pour le présenter  Vespasien. Cette 
production, qui eut un grand succès ì Ruine, et valut à 
Josèphe l'ére¢.tiou d'une statue, est un chef-d'oeuvre de 
narration. L'inlér6t y croit de scène en scène jusqu'au dê- 
nouement, qu'on attend asec effroi comme celui d'une tra- 
gédie. Quelque confiance que semble mériter »n historien 
témoin oculaire et mème acteur oe ce qu'il raconte, M. Sal- 
vador pense qu'il faut lire le livre de Josèphe « avec une 
grande défiauce pour ce qui regarde les "-élateurs, qu'il 
s'efforce de reudre d'autant plus odieux que leurs princi- 
paux chefs s'étaieut déclarés ses ennemis personnels. » C'est 
encore pour les Romains que Josèphe composa, en vingt li- 
vres, et seulement en grec, les Antiguitds Judaiques, his- 
toire complète des J«ifs depuis la création du moude jus- 
qu'à la douzième annee du règue de éron, ouvrage qui a 
l'avantage de remplir une lacune de quatre siècles enlre les 
derniers livres de l'Ancien Testament et ceux du ouveau. 
Le but, éminemment patriotique, de Josëphe était de faire 
connaltre sa natiou aux Grecs et aux Romaius et dedétruire 
le mépris qu'ils avaient pour elle. Il se sert indifferemment 
des livres de l'Ancien Tesament et des traditions des Juifs, 
et les combine avec une liberté faite pour déplaire également 
aux croyants du judaïsme et ì ceux du christianisme. Aussi 
r%,reite t-on souvent dans cet ouvrage, si précieux d'ail- 
leurs, le naturel, la noble simplicité, le patbéfique, qui feu. 
dent si atta)ante la lectur du Peutateuque Taut6t il ajoute 
foi aux miracles, tant6t il les dépouille du merveilleux, et 
passe, dit 51. Salvador, par oscillations de la plus haute 
lhilosophie à la IMUS excessive crddultd. Eusèbe et quel- 
ques écrivains du christianisme naissant ont prodigué leurs 
ëloges aux Antiquitgs Judaigues, parce qu'on y trouve 
un passage assez favorable  la nouvelle religion du ChrisL 
Henri de Valois, Huet, Vossius, elc., out défendu ce pas- 
sage, dont saint Justin, Tertullien, saint Jean Chrysns- 
tome, etc., nese sont pas prëvalus dans leurs lisputes avec 
les Juifs. Il est généralement reconnu aujom-d'hni que ce 
passage a été inséré après coup, par une de ces fraudes 
pieuses dont on s'est trop souveut servi en laveur d'une 
reliun qai dédaigne ces misérable secours. 
Les autres écrits de Josèphe sout : I ° sa Vie de Flavius 
Josèjhe, écrite par lui-mme, et complélant son histoire 
de la Guerre de Jadée; 2 ° i'Antiqaitd du peuple J,i., 
contre Appion : C'est une apologie des Antiquités Judai- 
9ues, offraut ì l'érudition une source de précienses recher- 
ches. On lui attribue sur les Machabées un livre, dont l'au- 
thenticité est contetée, et de plus un fragrae»t Sur la 



Cause de l'unit'er». Tous ces ouvrages ont étWtraduils en 
latin par Buftin d'Aquile ou plutét par Cassiodooe : il 
en a des ver»tons dans toutes les langues modernes. Plu- 
sieurs savan allemands ont édité et commenté cet auur, 
entre autres Sigisnd Haveoeamp ; en Franoe, nous po 
sdons sur lui deps 181 un travail d'éiégte critique de 
M. Philarèe Chal. Charl Du ROZOlR. 
JOSÉPHI (Mm-Jon-Rose TCHER DE 
PAGEBIE), impératrice des Franis, première femme de 
apol on, naquit le 24 juin 1763, h la Madinique, où son 
père remplissait I £onctions de piine de port. Sa fa- 
mille [ait orinaire du Blaisois; sa mère, qui refusa d'a- 
•oic sa part dans ses grande inespées, ne mourut 
qu'en Is07. Joséphine de tu Pade, bien que n'ayant reçu 
que rducation, fo insuffinte, en nse dans les colonies, 
Lrila de bonne heure par les grâces de l'esprit autant que 
par les qualités du ur. Elle vint en Fran h l'ge de quinze 
ans, et ípousa, le 13 Jécemhre 1779, le vicomte Atexandre 
de Ueauharnais, major en scoend d'un régiment d'inlan- 
tett. Les fis  cet uion, sez peu heureuse d'allient% 
furent Eugène, c[é pus ard prince, et en dernier lieu 
duc de Leucbtenrg, et H o r t e  5 e, qi pousa le roi de 
llollande Louis Bonaparte, et fut la mère de Naléon IlL 
La revolution oempta d'ard le vioemte de Buharnais 
parmi ses artins. Ou le vit se céunir au tiers éoEt et vo. 
[er pendant toute la dur de la Constituante avec lamajorité 
de cette assembée. Cette circonstnoe eplique les liains 
que pins tard Josípbine œenserva avec certains hommes 
influcnts du parti rcvolutionnaire. Le mouvement depassa 
•-ite le icomte de Beaubarnais après avoir combattu avec 
conrae comme gèuéral, il mourut sur l'échafaud, le 23 
let 1794. 
La position de Joséphine etait aussi des plus déplorables : 
ctée dans la pén d C«rmes, par suite des démarches 
qu'elle avait faites pour oh{evir la mise ch liberlé de son 
mati, elle allait ere traduire devant le redouble tribun 
rcvo[u{ionnaire, e[ I deu enlants que lui avait laissés 
mari etaient réduits  une dctresse si pressante, qu'Eugëne 
Bcauharnais, qui devait tre  our  ice-roi d'ltalie, entra 
comme appren chez un menuisier. La journée du 9 ther- 
midor saura la vie à Joséphine. Pendant sa détention, elle 
avait fait la connaissance de M me Cabarrns, devenue 
plus rd la femme de Tallien et ensuite priuoessede 
Chima. L'intervention de celle-ci auprès de Tallien va- 
let h tous ses oe-detenus leur mise en liberté. M me de 
Beaulmrnais eut ainsi occasion de faire la connaissance 
de son libérater, qui lui fit rendre œux d biens de 
mari que l'Et n'avait point enoereen,lu% et qui devint dës 
lors son ami et n protecteur. C'est dans les lons de B a r- 
ras que Bonaparte, gnéral encore obscur et inoennu, ren- 
contra M  de Beauhaais et conçut pour elle la passion 
plus vive, ainsi qu'en tëmoigncnt les lettres arden[es que, 
séparé ffeile par la guerre, il trouvait encore le temps de 
crite. Bonaparte demanda la main de la belle veuve, ée de 
six années plus que lui, et l'obtint. La crémonie ci'ile eut 
lieu le 9 mars [796; mais 1 ípou ne reçurent, t-on, tu 
bénédicon de l'Eg[ise ur leur union qu'en 1804, trois 
jours avant le couronnement. Elle leur fut donnée, ajoute- 
t-on,  la demande du pape, par le cardinal F e s c h. Douze 
jours apr son mariage, naparte fut nomé gnral en 
chef de l'armée dBalie, et Jnséphine n'eut plus d lors qu'h 
parter sa foune. 11 quitta Paris iv 22 mars 1796, et au 
milieu de s prodigieux triomphes fl oublia si peu sa femme, 
qu'il fallut e sou aide de camp 5unot la lui amener ì 
tilan, au ois de juin t?97. Elle jouit des appaudissemen 
aoeos paout au vainqueur de rltalie et des distinctions 
dontde Directoioe'salua n retour dans la oepile. na- 
parte entoept bientôt la conquête d'ypte, et une nou- 
velle séparation s'euivit pour les deux époux. JusChil, que 
ron eut beaucoupde ine à empcher de suivre son mari, 
s'étalit alors h la Malmain : elle eut auoeup h souffrir de 
la pa d'un rès-proche parent de n mari ; on s'occva 

.tOSEPtlE -- .IOSÉPHINE 
en outre de la calomnier avo¢ une activité si infatigable 
qu'on jeta dans l'esprit du jeune triomphateur les soupçons 
les plus déplorables. Bref, il débarqua en France avec 
dessein arrêt6 d'un divorce. Mais Joséphine n'eut qu'à re- 
voir le marre de la France (car il régnait déjà sur elle 
par ropinion) pour reprendre son ancien empire. Après 
le 18 brumaire, elle alla d'abord s'étab[ir avec lui au Luxem- 
bourget bient6t après aux Tuileries. 
Le gouvernement consulaire fut fondé. De cette époque 
date pour Josépbine une nouvelle existence. Toutes les 
qualités qui jusque là l'avaient rendue si chère dans la vie 
privée reç'oivent une extension nouvelle : dle peut accom- 
plir tout le bien qu'elle médite. Le premier consul, et plus 
tard l'empereur, cherchait " opérer une fusion dans les in- 
térts comme dans les opinions : c'était à son profit particu- 
lier que le chef de 1'6".rat travaillait. Sa femme, elle, ne son- 
geait qu'h répandre des bienfaits, h sécber des larmes, 
soulager des misères : elle appelait non-seulement auprès 
d'elle ses vieux amis pour les approcher du maitre d'ou alC 
coulaient alors toutes les [aveurs; elle plaidait mème en- 
core la cause de tous ceux qui souffraient : il sultisait 
ses yeux d'ètre dans le malheur pour avoir des droits. Elle 
fit rayer de la liste fatale une foule d'émigrés, qui rentrèrent 
dans la possession des biens que la révolution n'avait pas 
eu le temps de faire vendre; ne leur restait-il plus rien, 
elle obtenait des places ou en faisait créer pour eux. Cette 
bienfaisance si admirable ne se concentrait pas dans une 
seule classe, elle s'étendait/i toutes. Mais ce qui relève les 
dons et les inculque dans la mémoire, c'est la délicatesse ; 
elle  montrait chez Joséphine comme une sorte d'in,tinct 
continuel ; les riches, les pauvres, les grands, les petits, 
en ressentaient lïnfluence. Cette délicatesse était d'autant 
plus ravissante qu'elle avait sa source dans une bonté iual- 
térable, .Mais c'est surtout à l'égard de Xapoléon qu'elle 
lit preuve d'un dévouement qui ne se alAmentir jamais. Ce 
dévouement, Bonaparta savait le sentir ; et elle en profita 
plus d'une fois pour prévenir ou tenter de prëvenir de gran- 
des catastropbes : elle essaya de sauver la vie du ducd'En - 
g h i e n, elle obtint la grâce de MM. de Polignac. Sans c.esse 
occupée à deviner les volontés, les dèsirs de Napoiéon, 
elle s'in«pirait une activioE qui répondait à la sienne : 
cursions, voyages lointains, entrepris à toute heure de 
jour et de nuit, jamais elle ne se fit attendre une m/hure. 
C'etait entrer dans une des convenances les plus difficiles 
de sa position, h un ge oh les femmes commencent à subir 
la nécessité d'une vie sédentaire. 
« La bonté, a dit M. de Beausset, dans ses Mémoires, 
n'était pas le seul trait dominant de son caractère; dans 
l'occasion, ce caractère devenait ferme et élevé. • Elle en 
donna une preuve incontestable dans une des circonstances 
les plus crueiles de sa vie : Le second mariage de Josphine 
demeura sterile, et,Sapoléon perdit on neveu, fils de L o u is 
Bonaparte, qui avait êponsé Hurleuse, fille de Joséphine. 
• Xapoléon regardait cet enfant comme l'héritier de toutes 
ses grandeurs : cëtait lui qui devait perpetuer la dynaslie 
impériale. L'empereur reconnut alors la noecessité d'un di- 
vorce : cette mesure coOta beaucoup à son ¢wur. II attendit, 
hésita, avant d'adopter un parti definitif. L'inflexibilité de 
la pensée politique l'emporla enfin : il fallait qu'il enlever 
la couronne de la tte où lui-même l'a ait mise; après asoir 
fait Joséphine impératrice, lui seul allait lu/ ravir cette 
place pour la donner fi une autre. Nulle femme ne pourrait 
se résigner sans lutte et sans combat h une pareille infor- 
tune; elle était d'autant plus déchirante qu'aux regrets d'une 
si éclatante prospçrité se joignait l'attachement de Pépouse. 
M. de Beausset a tracé le tableau le plus touchant de ces 
scènes d'intérieur, où Josephine appela tout à son secours, 
jusqu'à cette adresse qui, dans les crises les plus iolentes, 
n'abandonne jamais complétement le beau sexe. Le jeudi 
30 novembre 1809, ]'explication la plus vive eut lieu entre 
Josëphine et Bonaparte... L'impératrice poussa des cris tfC- 
violents et perdit connaissance. Napoiéon, entrouvrant une 



JOSÉPItI.E 
p:«le, t!,pola 51. de Be;ulSSet, pour qu'il port/lt Joséphine 
ch« ee, par un escalier iéfieur : mais il s'embarrassa 
son épée, et lut oblig de serrer Joséphine pour lui viter 
une clmte : « Vous me seez tp fort ,, lui dit-elle. Mais 
il'flut céder. « Elle descendit, ajoute M. de Beausset, du 
preer tronc du monde, mais elle n'en tomba pas. Elle 
avait à cette époque quarantsix ans. II était impossible de 
éder plus de oe da le maintien ; s yeux et son 
rtd 6talent enchanteurs ; sa taille 6it noble, souple et 
parfaite. Le goùt le plus pur et l'élégance la reux enten- 
due la luisaient paraitre plus jeune qu'elle ne l'eit en 
effet. ,, 
Le divorce pronon ( 16 dembre 1809 ), Joséphe sou- 
tint avec beaucoup de diité un coup si terrible : à nt 
dëmotions si viv suc nne douce rsignation. Après s'ê- 
tre d'ard oetirée au château de avarre, près d'Éweux, 
gardant, son litoe d'impératce et ento«srée d'un luxe tout 
pcier, elle reint habiler la 51almaison. Elle a'ait e au- 
para ant la joie de voir son ls épouser une princesoe de 
Bavière. Les revers les plus funestes atteignirent oependant 
apoléon, pour qui elle avait conrv6 l'attachement le plus 
enthousiaste; lui-mme aussi ¢essa de posseder le premier 
tréne du monde. La hau considération dont jouissait 
Jophine la protégea dans ces jours de déstres ; elle reçut 
h divers reprises la isile de l'empereur de Bussie et oeile 
du roi de Prusse. Sa sant commençait à décliner. A la 
suite d'une fte que, dans l'intétt de son fil Eugène, ee 
donna  Alexandre, elle fut saisie d'un mai de gorge qui 
l'enleva au bout de quelqujours, le 29 mai 1814. Son 
corps fut déposé dans l'église de B uel, oh un monument 
lui lut elevé. La reine Hurleuse repooe auprès d'elle. A ses 
exoellentes qualitës Joséphine joignait pohrnt qselques 
ierfectio. Ee cédait a un amour de dépe qui plus 
d'une fois muitiplia tous 1 Sentes d'embarras autour d'elle : 
on lui a reptocké encore cette légèreté de caractère, 
facilité d'impression qui au siècle dernier se remarquaient 
mme chez les le--es les plus eslimables. Mais c petiles 
taches ont dis au milieu de tant de doux souvenirs 
rest insinciblement liés à sa mémoioe. Consultez : £et- 
tres de poléon à Joséphinependant la première cam-. 
pagne à'ltalie, le Consula et l'Empire (Paris, 1827); 
£ettres de Joshine à poNon et  sa fille (1833); 
lada As rillon, Memoires sur la ie privée de ['impera. 
trace Jos(phine ( ol.; Paris, 18M).. SAT-PBOSP. 
JOSEPtlSTA DT  en tclèque Josefov ), appelée autre- 
fois Ple«s, ville Ibrte, située dans la oepiinerie de Koegin- 
hof, cercle de Gitschin, en Bohème, btie sur I'be et au 
confluent de l'Aupe et de la blet. On y compte 2,000 ha- 
bitants. La cidelle, oenstruite de 1781 h 1787, est l'une 
des plus important qu'il  ait en Autriche, mais n'a point 
encore subi de sie. Elle forme un long octogone bfionné, 
qui est réguèrement fortifié. L foss peuvent Otc remplis 
d'eau, el)a plus grande partie du terrain d'alentour est miné. 
JOSEPIN (Gsçsp CABI, dit ), ou hien encore 
il Cat'aliere d'Arpino, n h Ruine, en 1568, l'un des phss 
célébres peintr de son siècle, lut pendant quelque temps 
l'arbitre souverain et absolu de l'a à ome, et forma une 
nombreuse cole. II bllait par un and et incontestable 
talent, par une vise anation, par un colo chaud et 
saishnt, en même temps que par une habet6 manuelle 
extrême, biais il ne comprenait pa la pre simplicité de la 
propoion des formes et la noblesse du style. II fut sans 
ntrit le plus remarquable et le plus brillant des 
rist; aussi fut-ce surtout contre lui que s'efforrent de 
rr le Caravage, les Carracbe et leurs élève, dont 
les eflos finirent par complétement détruire n école. A 
l'éque du mariage de Henri IV et de Marie de blédicis, il 
'ut eené par le cardinal Aldobrandini en anoe, et il 
fut doer par le roi de l'ordre de Saint-Michel. Le Jopin 
mourut h ome, en 1660. Le mus du Louvre posde deux 
blux de lui, Diane et Actn, Adora et ve csss du 
Paradis terrestre. 

-- JOSUÉ 
JOSIIL' (Nmoxs, baron), le plus cdèbre et le plus 
fécond des romanciers honois, est ne le 8 septembre 1796, 
à Toïda, en Transylvanie. A l'ge de seize ans il avait déja 
terrainWses éludes juridiques. Entré alors au service, il 
parvint jusqu'au grade de capitaine, et au rétablissement 
de la paix il fut nommé chambellan de l'empereur. En 1818 
il renonça à la carrière militaire, et s'en revint en Hongrie, 
off, aprè avoir 6pousé une riche héritière, il se consacra 
à l'agricultm'e. 51embre de la memorable diëte qui se rcunit 
en Transylvanie en 183, la Iranchise de son opposition au 
gouvernement le fit tomber en digr,ice complte; et il ne 
fut plus appelé dès lors à faire partie de la diëte de Tran- 
sylvanie. De t835 à 180 il prit une part active à l'agitation 
hongroise. Dès 183t il aait demandé à la ltltérature de. 
distractions pour les luttes de la polilique et pour «les cha- 
gring domestiques. Ses premier» essais, lran9 et l'aslatok, 
publi en 1831, curent un succès tel quïl se senlit encou- 
ragé à persëvérer dans cette voie nouvelle ouverte h l'ac- 
tisité de son esprit;et apré avoir consacré plusieurs ann_es 
à l'étude de l'histoire nationale, ainsi qu'a celle des iit- 
tératures allemande, h'ançaise, italienne et espagnole, il se 
consacra exclusivement h la culture des lettres, surtout 
partir de 1810. De 1831 a 1818 il n'avait pa publié déjà moins 
de cinquante solumes de romans, independamment d'une 
foue d'articles donnes à des journaux et a des revues. On re- 
garde comme ses meilleurs romans Abqfi (3 
Zrinyi iz hi)ll6 (Le poëte Zrin]; ; lS3); A ulolso E«lory 
(Le dernier Batory ; 2  édit., 15i0); A Csehek Magyaror- 
s:agban (Les Bohèmes en Hongrie ; 2" édit., 18ib) et Josi- 
A'a lslt, ftn (Elienne Josika, 187). 
Membre de la table des magnats de llongrie en 18, 
il prit alors une part des plus actises h lalormalion du 
comité de défense nationale, dont il avail élé nomme mem- 
bre. Aprës la déelaration d'indépendance ( I -t as fil ! 519 ), il 
fut appelé t faire partie du tribunal des grhces, ingtitué 
Pesth. Le r61e qu'il asait joué dans les ëvenements de la 
révolution le força de prendre la fuile après la catastrophe 
de Villagos, et depuis 1850 il vit retire ,à Bruxelles, ou il 
continue "h se livrer à la culture des lettres. En IS51 il a ciA 
pendu en effigie t Pesth, aec Kosuth et trente-cinq autre_. 
Les meilleurs romans qu'il ait publi6s depuis lors ont 
pour titres : EgY magyar csalada forradalom alalt 
( Une Famille Hongroise a l'époque de la réolution (t • oi., 
Brunssvick, 1851) et 1.a famille Maiily, ouvrage ecril par 
lui en allemand. C'est  l'histoire de sa patrie qu'il a em- 
pruntWla plupart de ses sujets. Tous ses ouvrages ont Ce 
traduits en allemand- 
JOSQUIN DESPREZ ou DES PRÊS, en latin Jodocus 
Pratensis. l'oye: Dspni (Josquin). 
JOSSELIN l-lll comtes i'Eesse. Yoye= 
rAv ( Maisgn de). 
JOSUE, qui sureCa à Moise én qualité de chef des 
lsraélites, 6tait le fils de Nim, de la tribu dËphraïm. Ëlee 
par Morse, il se distingua de bonne Ileure en allant explorer 
d'avance la terre de Chanaan. Aussi M,dse, dans son expê- 
dition de Palestine. le designa-t-il, avant de mourir, pour lui 
succéder dans ses fonctions de guide et de chef du peuple. 
Une fois insesti de ce pouvoir, il conquit une grande partie 
du pays de Chanaan, qu'il partagea entre lestribus d'l_-rael. 
Etant venu mettre le siCe devant Jérieho, il lit faire à 
son armée, suivant le commandement de Dieu, sept fois 
Iour de la ville, les prêtres portant l'arche et sonnant de la 
trompette. Le septiëme jour les murailles de Jêricho tom- 
bèrent d'elles-mêmes, et la ille lut détruite par le vain- 
quear. Attaqué ensuite par Ado-lsedeck, roi de Jerusalexa, 
ligué avec plusiews rois du voisinage, Josuë fondit sur leur 
armée et la tailla en pièces. C'est pendant que ses adversaires 
s'enfu.aient par la voie de Bethoron, que Josué commanda au 
soleil de s'arrêter pendant douze lieures, pour avoir le temps 
d'exterminer !es ennemis du pe¢ple de Dieu ; et les saintes 
Ecrilures rapportent qu'en effet le soleil s'artCa à sa voix. 
Josue mourut A l'fige de cent dix ans, après avoir Sou- 



vern les Israélites pendant vingt-cinq ans. Le livre qui se 
trouve dans le canon de la B i b ! e, et qui porte son nom, 
ne parait pas plus tre de lui que de son temps, et ne fut 
sans doute composé qu'à l'époque de David. L Samari- 
/aius ont un livre de Josuoe (traduit en latin et en arabe 
par Juynboll; Leyde, 188), qui rapporte en forme de 
chronique les .vénements arriv depuis la mort de Moïse 
jusqu'au rgne de l'empereur romain Alexandre Sévère, et 
qui s'accorde jusqu'à un certain point aec tes délails du 
livre de l'Ancien Testament qui porle le mme nom. 
JOTACISME. Voge'- IOAOsE. 
JOUBAIBE. Cette plante, dont les propriétés médici- 
nales étaient autrefois fort vantces, a aujourd'hui perdu la 
plus grande partie de sa célébrité et n'est plus emploee 
que dans un petit nombre de maladies. Tout ce qui tenait 
à ce végéfal ëtait bizarre : ainsi, le nom que pro-talent ses 
xariétës, celui dejoubarbe mme, auquel on donnait une 
haute origine, puisqu'on le faisait descendre de Jupiter 
(Jovs barba, barbe de Jupilcr), tout semblait s'accorder 
avec les grandes vertus que l'on attribuait à cette plante; 
malheureusement, toute cette gloire s'est évanouie devant 
la science de nos'savants étmolo-istes et t'expérience de 
nos habiles praticiens. 
La joubarbe est un genre de plantes dicolylédones, de la 
famille des crassulées, offrant pour particularilés des feuilles 
tr.s-épaisses, des pélales nombreux, connés à leur base, des 
Camines en nombre double de celui des pétales, et six à 
dix-huit ovaires oblong, poinlus, disposés en rond, et 
donnant lieu à autant de capsules uniloculaires, s'ouvrant 
longitudinalement, et contenant plusieurs graines attachées 
sur un rang au bord de la suture. 
Le genre joubarbe comprend une rentaine d'espèces, 
dont quelques-unes sont indi/.nes à l'Europe, et les autres 
originaires des Canaries et du Cap de Bonne-Espérance. 
Parmi ces plantes, toujours vertes et vivaces, on remarq«e 
la joubarbe des toit (sempervivum tectorum, L. ), conn,e 
également sous le nom impropre d'artichaut sauvage, qui 
vient sur les loits, dans les rentes des rochers et des vieux 
murs. Sa feuille privee de son épiderme et appliquée sur 
les hémorrhoides en calme l'inflammation. On distingue 
encore la ioubarbe des Canaries (sempervicum Cana- 
rieuse), dont tes fleurs sont nomlueuses et disposCs en 
une gra|,pe p)ramidale. Celle plante craint Le froid, et a 
besoin de l'urangerie pendant l'hiver. Enfin, on remarque 
aussi la joubarbe brfzlante, nommee autrefois vermicu- 
laire brîlante ou pain d'oiseau : sont got piquant, chaud 
et brttlant, lui a fait dnner le nom de poivre des murailles : 
on t'a vantée jaàis comme u excellent caustique, d'un em- 
ploi très-avantageux pour la guërison des cancers ; mais au- 
jourd'hui on ne s'en sert jamais dans ces maladies, parce 
«lu'on en a reconnu l'inefficacioE. C. F,o. 
JOUBEIT (BAn-Cum), une des plus 
pures et des plus brillantes illustrations militaires de la ré- 
l,ubliquc, naquit à Pont-de-Vaux, le It avril 1769. Il 
«ifta des son enfance un pencl«ant irrésistible pour la vo- 
cation des armes. Maisson père, juge à Pont-de-Vaux, lui 
lit faire ses Cudes de ]roit. A ce mooEent la revolution 
¢clate. Joubert s'engage volont«irement, en 1791, et con- 
, ,iert rapidement tous les grades inferieurs. CharsC dans 
la campagne de 1793, de la défense d'une redoute sur le col 
de Tende, et n'aant avec lui que trente grenadiers, il op- 
poe une résislance héroque aux PiContais, et ne se rend 
qu'après avoir épuisé ses munilions. U ce resta pas long- 
temps prisonnier, et rentra bientt3t en France. 
tmmé adjudant général peu de temps aprës, il prëlude 
par une action d'éc!at h cette célëbre campagne, o/ les trois 
afinCs combinées d'Italie, deSambre et bleuse et du Bhin, 
devaient, d'après le plan Carnol, se réunir en Allemagne, et 
marcher sur Vienne. De nouveaux traits de courage, d'ac- 
tivilé el d'intelligence lui valurent bien vile le brevet de chef 
de brigade ( colonel ). C'est dansce nouveau grade quïl com- 
mença la campagne d'Italie, sous Bonapar!e, qui venait de 

$OSUÉ  $OUBERT 
remplacer $chérer. 11 prit une part active au eambat de 
Loano, et mrita d'tre nomm général de brigade sur le 
champ de bataille. A Montenotte, il fixa l'atlention de 
naparte, qui devina en lui l'homme d'action. A Mfllesimo 
il fit si bien que Bonaparte criVit au Direcloire : « L'intré- 
pide Joubert est tout à la fois un grenadier par son courage et 
un gaéral par ses talents et ses connaissances militaires, • 
Il se distingua encore au combat de Dego, au passage du 
Tanaro et à la bataille de Mondovi. L'armée française s'avan. 
çait sur Turin; Joubert se rendit maltre de l'imporlanle 
posifiou de Cherasco, d'oi Bonaparte data sa fameuse 
proclamation à l'armée d'Italie. La prise des forleresses de 
Coni, Ceva, Tortone et Alexandrie permettant a,]x armé.es 
françaises d'occuper les vaste plaines de la Lombardie,il 
pase le P0, et poursuit l'ennemi jusque sur Lodi; de là 
il arrive  blilan, cerne la forteresse et marche sur Vérone, 
dont s'empare l'armée fi-ançaise : Joubert a l'honneur d'y 
entrer le premier. Bonaparte ayant décidé que le siCe de 
btantoue aurait lieu, chargea le jeune général d'artAter 
l'armée ennemie, qui s'tait retirée dans le Tyrol. Le 28 
in il força le relranchcment du col de Compione, entrele 
lac de Garda et l'Adige. Quelques jours aprës, attaqué par 
le général autrichien Wumser, h la tte de 30,000 hommes, 
au défilé de Corona, on le voit, a'ec des forces bien inférioe- 
res, opposer pendant toute une journée une résislance 
dsespérée, laissant ainsi au gros de l'armée fr»nçaise le 
temps de se préparer aux manœuvres qu'exigeait la pré- 
sence d'«m ennemi nombreux. Joubert se trouva en outre 
Fano, à Locato ci à la bataille de Castiglione. Le Mila- 
nais étant devenu le thétre de la guerre ,lise distingua 
aux deux affaires de Compara et de Montebaldo, brillants 
surcès qui lui valurent le grade de f, ënèral de division. 
Alors s'ouvre la campagne de 1797. Son étonnante bra- 
voure et la rapidité de son coup d'oeil éclatèrent surtout à la 
bata:lle de Ilivoli. Le 20 mars il reçoit le commandement 
de trois divisions, avec l'ordre d'envahir le Tyrol, de 
battre l'ennemi, de le rejeter au delà d« Brenner, et de 
rejoindre ensuite l'armée à Spital. IL remplit heureusement 
cette mission. Joubert fut ensuite nommé génral en 
des Iorces françaises en Hollande, et s'y mourra favorable 
au parti populaire. 
Pendant que 13onaparte était en Égypte, l'Autriche et la 
Russie se prêparërent a reprend;e l'ltalie. Joubert y lut en- 
voyé, pour remplacer Brune. Son premie soin fut de reor. 
ganiser l'afinC. 11 aida ensuite les patriotes pi,'montais à 
renverser du tréne la maison de Savoie. Plus tard Joubert se 
porla s«r Livourne, ou il reçut un contre-ordre, qui frayer- 
sait toutes ses opérations. En mème temps deux envoyés 
du Directoire étant venus lui signifier les nouvelles inten- 
tions du go«vernement, Joubert, qui voyait tous ses plans 
renversés, donna sa dëmission. 
A la révolulion du 30 prairial, Barras ou Sieyès, on ne 
sait trop lequel, jeta les )-eux sur Joubert pour commander 
Paris. Il parait qo'une intrigue, tomentée par Sémonville, 
caché derriëre le directeur Sieyës, avait pour but de le 
mettre à la tëte d'un mouvement contre les jacobins. Quoi 
qu'il en soli, dès 1799 la république avait déjà perdu pres- 
que toute l'ltalie. Moreau allait essa)'er de rparer nos 
désastres, Iorsqu'il reçot avis de la nomination de Joubert. 
Celui-ci dit en parlant à sa jeune épouse : /'u me reverras 
mort ou t'ictorteur. En arrivant au camp, il tmoigna à 
Moreau la plus rspec2.aeuse durArenne, et le sopplia de t'aider 
dans ses efforts pour arrdler la marche de Souvarow. Mo- 
reau consentir à servir sous ses ordres. Les gêm',raux ano 
tdchiens Fray et Bellegarde venaient de s'emparer d'A- 
lexandrie et «le blantoue et avaient rejoint le gros des alliés, 
forts de 60,00G hommes. Joubert, à cette cheuse not- 
vc'.le, eut la sage pensce de rentrer dans l'Apennin, et de 
se tenir sur :a défensive, en attendant des secours. Malheu- 
reusement Soovamw se porta en avant, et prëvint la narche 
rtrograde de Jouber, qui passa les montagnes du Mont- 
feu'al avec 20,000 hommes, fit sa jonction avec l'arée de 



JOUBEB, T -- 
aples, et de là marcba sur Novi, avec l'intention «le alC 
bloquer Tortone et d'entrer dans les plaines du Piémont. A 
Novi, il rencontre Souvarow, et se dispose à livrer bataille. 
Cependant, de nouveaux avis sur les forces de l'ennemi 
l'ayant dissuadé de cette résolution, il remel au lendemain 
pour prendre un parli. Dès l'aube Souvarow attaque avec 
impétuosité l'aile gauche de l'armée française. Un premier 
succès pouvait avoir les plus f,clmuses conquences. Jou- 
bert accourt au galop, et ordonne d'attaquer les Autricbiens. 
Il rallie deux bataillons, se met h leur téte, commande une 
charge à la baïonnette. Au méme instant une balle le frappe 
au ¢0té gauche. Se sentant mortellement blessé : En avant, 
mes amis, s'Crie.t-il, marche'- toujours t. et tombant de 
cheval, il dit  son aide de camp : Prenez mon sabre et 
couvre'-mot. Ce furent ses dernières paroles : il expira,  
l'àge de trenteans, le 15 ao0t t799. Devenu premier consul, 
Bonaparte fit dëposer les restes mortels de Joubert près de 
Toulon, à l'ancien fort La Malgue, aujourd'hui fort Joubert. 
Son pays natal lui a érigé une statue. AIfred LEr-OYT. 
JOUE. Les joues sont les parties latérales de la face, qui 
• "elendent depuis les yeux et les tempes jusqu'en bas dit visage, 
entre le nez et l'oreille de chaque coté. Dans la jeunesse et 
l'Cat de santé les joues sont fralches et roses, au moins chez 
la race blanche; dans la vieillesse et la maladie, elles devien- 
nent creuses, et prennent des teintes jaunes ou mates. 
Quelques affections in'térieures s'y reflètent d'une manière 
carachirisée. Chez certains individus elles sont charnues et 
flasques ; chez d'autres elles sont maigres, sèches et ridées. 
Parfois aussi les pommettes les font sinulièrement saillir. 
Les émotions s'y peignent rapidemer, t; on les voit rougir et 
pMir dans les accès de joie ou de pudeur, de colère ou de 
douleur. 
JOUER LA VI LLE terme de compagnonnage (voge-- 
ce mol, lome vI, pae 170 ). 
JOUETS D'ENFANTS. Voyez BIMIELO'fEnlE. 
JOUER. Vogê-" JEu. 
JOUFFROY { Tmononr-Smot ), publiciste et pldlo- 
«opbe d octrin ai re, naquit le 7 juillet 179fi, aux Pontets, 
village des montagnes du Jura (Doubs). Après avoir com- 
mencé ses etudes classiques à Lons-le-Sanlnier, et les avoir 
terrainCs à Dijon, il entra en 1813 A PÊcole Normale, et sous 
la direction de M. Cousin se liva avec tant d'ardeur à l'é- 
!ude de la philosophie, qu'en 1817 Royer-Collard le crut 
apte à devenir maitre de confdrences à cette mme école 
et professeur agrégë de philosophie au collége Bourbon. La 
faiblesse de sa santé l'obtigea, en 1821, à renoncer à cette 
chaire, et l'Ecole Normale ayant été supprimée l'année sui- 
vante, il ouvrir chez lui des cours particuliers, que fié- 
queutèrent bient6t un nombre considérable d'auditeurs. 
En 182 il fonda, en société avec MM. Duhois et Danfiron, 
Le Globe, journal qui compta encore parmi ses rédac- 
teurs MM. Ducbàtel, Vitet, de Rëmusat, Sainte-Beuve, 
Ch. blaguin, etc., et exerça une imissante influence sut le 
développement de l'opinion libérale en France. En 1529 il 
fut appelé  suppléer M. Milon comme professeur de phi- 
losophie à la Faculté des lettres, et conserva cette placejus- 
qu'/près la révolution de Juillet, époque à laquelle il fut 
chargé de suppléer Royer-Collard comme professelw de 
l'histoire de la philosophie moderne. A la méme époque il 
obtint de nouveau une place de prolesseur de philosophie à 
l'Ecole Normale. En 1832 il remplaça Thurot au Collége de 
France, et en 1833 il fut nommé membre de l'Academie 
des Sciences morales et politiques. Cependant, une maladie 
qu'il avait espéré gnérir par un voyage en ltalie le força de 
nouveau, en 1837, à quitter la chaire de professeur au 
Collége de France. Quand M. Cousin devint ministre de 
l'instruction publique  il le nomma conseiller de l'univer- 
sité. Ëiu député par la ville de Pontarlier ( Doubs ), il entra 
à la chambre en 1831,   prit place parmi les doctrinaires, 
s%sseant de préférence à c6té de M. Guizot. Il mourut le 
1 er mars 1862. 
Parmi ses productions littéraires, ses Essais sut" la Phi- 
D/CT. nE LA CONVEnS.  T. XI. 

JOUISSANCE 
Iosophie dcossa|se, dont il avait ait une'étude spéciale, 
méritent d':.tre cités. On doit encore une mention honora- 
ble -/t ses tradu«tions des Esguisses de Philosophie morale 
de Dngald Stewart {Paris, l2O;  édition, lttt ), et 
des Œuvres de Reid ( fi vol. ; Paris, 1836 ), qu'il accompa- 
gna de précieuses introductions. Ses Mélanges philosophi- 
9ues (Paris, 1833 ; 2t édilion, 1838), dont la continualion 
parut après sa mort ( tsar), contiennent les articles les 
plus importants qu'il ait publiés dans Le Globe. Ses cours à 
la Sorbonne lui ont fourni la matière d'un Cours de Droit, 
taturel { 2 vol. ; Paris, 183-35). 
JOUG (du lafinjuqum, dérivant du grec v't;, qui a 
la méme significalion). Le joug est une pibxe de bois. 
avec laquelle on attelle deux boeufs h la charme ou aux 
voitures qu'on veut leur faire tirer : elle passe par-dessus 
leur front et leur cou, et emprisonne leurs cornes, qu'on 
lie à l'aide de laniëres de cuir. 
Les Romains et les anciens faisaient passer sous le jan9 
les ennemis qu'ils avaient vaincus : ce joug, bien différent 
de celui dont nous venons de parler, consistait en deu:. 
piques fichées en terre, dont une troisième, placée borizon- 
talement joignait les deux exlrémités supérieures : rien n'é- 
tait ignominieux pour des guerriers comme de passer sous. 
le joug, bien qu'ils fusnt ensuile renvoyés librement et 
trailés avec humanité. On connait assez la haine implacable 
que les Romains rouèrent aux Samnites et la vengeanc 
terrible qu'ils en tirèrent pour avoir fait paser leurs Ié- 
gions sous le ioug près de Caudium (voye-- FocncnEs 
mes). Ce n'était pas seulement dans les hasards de la 
guerre que les citoyens romains avaient à redouler de 
courber leur Iète sous le joug infamant : c'ëtait dans les 
iugemenls civils nne flétrissure des plus bonleuses. Celui 
qui était condamn à celle hnmiliation devait passer sous 
deux poleaux dressés, surmontés d'une espèce de linteau : 
ainsi, le joug judiciaire, comme le joug destiné aux guer- 
riers vaincus, était fait en forme de porte. 
Le mot joug a passé dans le langage flguré; il y est 
venu synonyme de ce qui gne, de ce qui est assujetlis- 
saut, de ce qui contraint la liberté, en un mot, de tout 
qui en[ra|ne une idée de servitude ou d'abaissement. 
JOUISSANCE. Envisagé sous le point de vue de la 
morale, le mo[jomr entraine l'idée d'une sali»faction inté- 
rieure puisëe dans la passion ou la connaissance de cer- 
taines choses ou de certains faits; quelquefois aussi il re- 
présenle seulement l'idée de possession, mais alors mgme 
cette idée emporte celle de satisfaction. Dans tous les cas 
les jouissances que l'homme peut se procurer étant innom- 
brables, il a joui de la ri« de toutes le, manières, c'est-a-dire 
qu'il a emploiA à l'user agréablement tous les moyens 
son esprit lui a suggérés ( voye5 D[tcm). L'art des iouis- 
sances a constitué ce que nous appelons l'dpicurdisme : les 
épicuriens se sont attaches fi les multiplier le plus possible. 
Et comme il n'est point de doctrine qui ait naturellement 
trouvé plus de défenseurs que celle qui érige le plaisir en 
divinité, le nombre de¢ libertins, des ivrognes, des avares, 
des gourmands, etc., q,d se sont ralliés à ce principe, a 
tous temps été considérable, et il le sera peut-gtre toujours. 
L'homme qui rechercl,e to,tes les jouissances de la vie 
ne pourrait qu'étre plaint, si d'ordinaire l'immoralité du 
matérialisme n'accompagnait la s en s u a I i t é, et si souvent 
il ne se procurait ces jouissances aux dépens et au détri- 
ment des autres hommes. Ce qui doil acheverde nous faire 
hair les hommes qui sacrifient mx iouissances, c'est qu'en 
général ils n'ont point de conscience: si, par exemple, nous 
examinons les hommes politiques appartenant à cette ca- 
tégorie, nous trouverons qu'ils n'hésitent pas h renier leur 
conviction la pins intime et à  mettre aux gages de qui 
veut les faire agir, quand leur fortune personnelle ne leur 
permet plus de satislaire les besoins qu'ils se sont crois : 
c'est ainsi que M i r a b e a u se vend à la cour dès que l'aplt 
des jouissances est en lui plus fort que celui de la re- 
nommée. 



58 JOUISSANCE 
Jouir, jouissance, désigne plus spécialement la volupté 
attachée "h l'acte de la procréation, chez l'homme et chez 
les animaux. 
JOUISSANCE (Droit). C'est le droit de retirer d'une 
ci,ose tout le profit qu'elle peut procurer, d'en recueillir les 
fruits, d'en percevoir les revenus. On le prend souvent comme 
snonme de lOossession, Iorsqu'oo dit, par exemple, 
qu'une personne a la possession etjouissa,ce de tel im- 
meuble. Le mot jouissa,ce exprime alors l'un des attributs 
de la propriété. Ce n'est pas à dire cependant qu'il en soit 
la conséquence oéeessaire, car il n'est pas rare dans notre 
droit de rencontrer une foule d'exemples dans lesquels la 
jouissance d'un objet ci la propriété de cet objet sont divisées, 
,.t se trouvent étabies sur deux personnes différentes. ous 
citeron notamment le cas d' u s u.f r t i t. E. ne CnAnr.oL. 
JOUISSANCE(Actions de). Voyez Acrm. (Com- 
merce). 
JOUQUE. Voyez COTTE nE IIAILLES. 
JOUR (du latin jubar, selon les uns ; suivant les au- 
tres, de dtes, diurnum, 9iorno, journée et jour), temps 
que la terre emploie , faire une révolution entiëre sur son 
axe. Pour le vulgaire, c'est la d,,rée d'une révolution en- 
tière du soleil autour de la terre. On distingue plu<leurs 
sortes de jours : le jour aMronorniqte, le jour no9en et le 
jour improprement nommé artificiel. 
Le joztr astronomique est mesuré par le temps que, dans 
son mouvement diurne ou apparent, le soleil emploie pour 
revenir au mfidien qu'il a quitté ; la longueur de ce jour 
est très-,ariable. Trois causes concourent à faire ,arier sa 
durée : le mouvement de la terre dans son orbite, l'ellipti- 
cioE de cette orbite, et enfin l'obliquité de I'é c I i p t iq u e 
sur le plan de l'equateur. Le voisinage des planète occa- 
sionne de petites perturbations sur le mouvement de la terre 
dans Pécllptique qui contribuent à la variation des jours dans 
le calcul des tables du temps vrai et du temp moyen 
les astronomes ont soin de tenir compte de ces petites causes. 
Pour que les jours astronomique no,s parussent avoir la 
mme durée, il faudrait que la terre parcomt chaque jour 
59 minutes 8 secondes ff de l'dcliptique. Les astronomes di- 
visent ces jours en 21 heures, qu'ils comptent sans inter- 
rnption depuis I j,squ'/ 24. 
Le jour moyen et celui q»e mesure le mouvement d'une 
horloge bien réglée. Tous les iours moyen sont éganx entre 
eux. Pour dëterminer le jour moyen, les astronomes ont 
divisé la durée Iotale de l'année en 365 j. 242 : chacun de 
ces jours est de 2 heures. Le jour moyen prend quelque- 
fois le nom de )out civd. 
Le jour sidcl'al est le temps qu'une étoile emploie pour 
revenir au mëridien d'où elle cM partie. Comme le mouve- 
ment de la terre sur son axe s'accomplit invariablement en 
temps égaux, et que cette plan/:Ie se trouv à une distance 
proditieuse des étoiles, il en résulte que le jour sidéral a 
constamment la mme durée, laquelle est de 23 heures 
minutes 4 secondes. 
Le jour dit artificiel eçt l'epaee de temps compris entre 
le lever et le coucher du soleil; la durée de ce jour est 
constamment de I heures pour les peuples qui ont la sphère 
droite ou qui I,abitent sous l'equateur. A partir de ce cercle 
son maximum va en augmentant proessivment s,,ivnt 
la latitude jusque sous les p01es, où ce maximum est de 
6 mois (voye-- O.mxr). Remarq,,ons que si l'on a égard 
aux aurores et aux crép uscul es, la durée du jour est 
d'autant plus longue que le lieu où l'on observe st plus 
éloign6 de l'équateur: la rétraction de la Iomiëre solaire 
dans l'atmosphëre terrestre, la position de l'hor'tzon du lieu 
relativement an plan de l'êquateur, sont les causes de cette 
augm.enati.n. 
Les Babyloniens commençaient leur jour au lever du 
rleil : celui des Atbéoiens clair compris entre deux cou- 
t,ets conséeutifs de cet astre, les Italiens modernes com- 
mencent aussi leurs jours au coucher du soleil; le jour 
des I:rançais, des Angla,s, etc., cotnmcncc et finit -à mi- 

 JOURDAIN 
nuit; le tour astronomique se compte d'un midi au suivant. 
Les insh-uments qui servent à mesurer le poids de l'at- 
mosphère, la tempévatm, l'Cat Iffgrométrique de l'air, etc., 
éprouvent pendant le jour des variations qui diffèrent des 
indications que ces instruments présentaient pendant la nuit. 
Les anhnaux, les végétaux, sonttrès-sensibles aux influences 
du jour; c'est pendant cette période de temps que les vé- 
gétaux absorbent ou sécrètent certaines matières, suivant 
leur nature et leur constitution. Qui ne sait que les malades 
éprouvent pendant le jour des crises bienfalsantes ou nui- 
sibles, auxquelles ils sont moins sujets pendant la nuit : en 
général, l'inteusité des maladies augmente aux approches 
de la nuit. 
Dans le calendrier républicain, dont les mois élaient de 
3o jours, on appelait compldmentaires les jours qu'il lai- 
lait ajouter h la lin de 1' a n n ée pour qu'elle eOt 365 ou 366 
jours. . 
JOUR ( Droit ). Voye5 VVE. 
JOURDAIN, appelé aujourd'hui par les habitants de 
la contree E1-Schdria ou Schrial-el-Kdbir, est le principal 
fleuve, de la Palestine, dont le lit forme à l'est de ce pa]/s 
la grande vallée longitudinale dite El-Ghor, commençant en 
partie du versant méridional de l'Anti-Liban et en partie du 
mont Hermon, se dirigeant le plus généralement du nord au 
sud a peu près parallèlement à la este de la mer Méditer- 
tanC, servant de limites à l'ouest h la terre de Canaan pro- 
prement dite, et se prolongeant jusqu'à l'extrémite septen- 
trionale de la mer Morte. Au-delh de ce point, il s'y rattache 
encore uneautre longue raffC, connue sous le nom de Wadi. 
Araba, qui commence à se relever bien au loin au sud 
jusqu'à la ligne de faite, pour s'abaisser ensuite brusque- 
ment vers la ,ner Rouge (golfe Arabique). C't tout ré- 
oemment seulement qu'on a obtenu des renseignements pré- 
cis tant sur les sources du Jourdain, qui sortent des versants 
sud de l'Ant-Liban et de l'Hermon, que sur le cours entier 
de ce fleuve. On compte trois sources principales du Jonr- 
dain -. à l'ouest, le Nahr-el-Hasbani, celle de toutes qui 
offre le  olume d'eau le plus considérable; h l'est, le Bani 
( Paneas, Coesarea Philippis), qui sort d'une grotte (Pa- 
neum) consacrée autrefois au dieu Pan, et recevant les 
eaux de la troisième des sources. L'historien Josèphe donne 
h celle derniëre le nom de Petit Jourdain. il a été demon- 
tfWdans ces derniers temps que ces ruisseanx, sources du 
Jourdain, se confondent dans les terrains man3cageux qui 
lutinent le rebord septentrional de l'EI-Hulch, avant de se 
jter dans ce lac. Au sorlir de I'£l-Hulch, le Jourdai,t, après 
un parcours de trois à quatre myriamCres, se jette dans le 
grand lac. de Tibériade ( Génzareth ). Celui-ci se trouve déjà 
situé bien au-dessous du niveau de la. lléditerranée. Le 
Jourdain a Ce parcouru ì deux reprises dans toute son 
étendue ì partir de cet endroit, d'abord en ao0t tSt,7, par 
consequent dans la saison des grandes chaleurs, par le lieu- 
tenant anglais Molyueux, puis par une expédition améri- 
caine aux ordres du lieutenant Lynch. Au mois d'avril 1848, 
à une ëlmque oi les eaux du fleuve avaient atteint leur 
l,oint extrème d'élévation, Mol)'neux eut à lutter sontre le 
peu de profondeur des eaux. Lynch trouva le fleuve trè»- 
enflé et très-rapide, décrivant un cours très-long au milieu 
d'innombrables sinuosités peu étendues (qui embrassent 
quelquefois dans l'espace d'une demi-heure tous les cttës 
de la boussole ). La navigation dura six jours, et cependant 
le trajet direct du lac Tibëfiade jusqu'à la mer Rouge n'est 
uère que de trente heures. Cette circonstance et la chute, 
d'ailleurs très-forte, du fleuve font comprendre comment la 
courbe que décrit son lit à son embouchure dans la mer 
Morte atteint une si grande profondeur, cette mer se trou- 
vaut (d'après les calculs de Lyoch ) à 1,3t6 pieds anglais 
au-dessous du niveau de la Mêditerranée. Lvnch trouva le 
lit du tleuve tant0t ctroit, tant0t large, ntt profond, 
tanttt plat, lare à so emboudmre dans la mer blorle 
180 yards et profond de 3 pieds. Un peu auparavant sa 
largeur était de 80 yards et sa profondeur de 7 pieds. Sauf 



le pont de Jacob, situé au-dessus de Génézareth, et sur le 
lequel passe la grande route conduisant de Damas aux 
cOtes de la mer, et aussi quelques ponts jetés sur tes diffé- 
routes sources au-dessus de l'EI-Hulch, le Jourdain n'a plus 
aujourd'hui un seul pont praticable dans tout son parcours 
à partir de Génézareth, mais des ruines de ponts sur quel- 
ques pointe. En revanche, on y trouve une foule de gués, 
dont plusieurs praticables méme par les plus grosses eaux. 
Il est souvent fait mentiou de ces gus dans l'Ancien Testa- 
ment, indépendamment du merveilleux passage des Israé- 
lires sous Josué. Consultez, outre les ouvrages spéciaux sur 
la Palestiue, Molyneux : Expedition fo the Jordan and the 
Dead sea, dans le tome t8 du Journal de la $ociét Go- 
eraphique de Londres (1848); Lyuch, A'arrative of the 
United-States epedition fo the river Yordan and the 
Dead sea (New-York, 3* édit. 1851 ). 
JOI_]II)AN (MAt-rm£v JOUVE), dit Coupe-tte, un 
des monstres les plus actifs «le la démagoe, uaquit vers 
1749, à Saint-Just, près du Puy-en-Velay. Il parait avoir 
exer' d'abord la profession de marécfial ferrant. Il se lit 
ensuite contrebandier, et subit en cette qualité,/ Valence, 
une condamnation  mort par contumace. FléhJgié à Paris 
ou/ Versailles, sous le nom de Petit, il ouvrir un cabaret, 
et tint cet établissement jusqu'au moment od il vint/ Avi- 
gnn fonder une petite maison deroulage, qui était en pleine 
activité lors des événements des 5 et 6 octobre. Il est donc 
certain qu'il n'a pu, ainsi qu'on l'a prétendu, 6gurercomme 
assassin dans ces deux terribles journée.% et il est douteux, 
quoiqu'il s'en soit vanté lui-mme, qu'il ait, le 14juillet 
1789, COUl la téte à De Launay, gouverneur de la Bastille, 
son ancien maitre. Nommé capitaine d'une compagnie de 
la garde nationale d'Avignon, après la journée du I0 juin 
1790, il entra dans le parti des anarchistes Duprat, Main- 
vielle et lovère; et lorsque l'assassinat d'Anselme et de La 
Villasse, A Vaison, par le parti papiste, eut soulevé les pa- 
triotes d'Avignon contre la ville de Carpentras, il fit partie 
de l'expédition, laquelle se composait, outre tous les handiL% 
tous les fanatiques du pays, de deux cents déserteurs du 
rëgiment de Soissonnais et des dragons de Penthièvre. 
Le chel Alu de cette expédition, qui prit Il nom dçarrnde 
de Vaucluse, était un nommé Patrix, avec lainvielie 
et lovère pour lieutenants. Mais comme, au lieu d'o- 
bëir à ses soldats, Patrix s'avisa de vouloir leur com- 
mander, on letrouva mauvais, et on le fusilla sous pré- 
texte de trahison. Après cette cxëcution, Jourdan, ne trou- 
vant personne autre que lui digne de marcher à leur tte, 
s'adjuea proprio motu le commandement. Les autres le 
laisseront laite, le regardaut comme tin instrument qu'ils 
manieraient à leurgré, et pensant bien l'envoyer rejoindre 
Patrix s'il lui prenait fantaisie de trancher du général en 
chef. Par bonheur pour lui, il était, militairement parlant, 
beaucou p moins capable et soucieux de commander à des 
soldats qu'à des brigands. Il fit donc parfaitement leur af- 
faire. Les bordes qu'il conduisait ayant inutilement bloque 
Carpentras, durent se retirer au bout d'un mois. Dans leur 
retraite, elles mirent à [en età sang et pillërent tout le coin- 
lat. Les réclamations de Carpentras, d'Avignon etdes loca- 
lités voisines, déterminèrent enfin l'Assemblée constituante 
à prendre un parti pour mettre fin à ces ahominations. Elle 
envoya trois commissaires, qui s'abouchèrent avec les dé- 
putés des villes interessées. Le résultat de leurs conférences 
fut la paix signée à Orange, le 14 juin 1791, sous la garantie 
des médiateurs «le la France, et le licenciement de l'armée 
de Jourdan. 
Celui-ci rentra à Avignon. Des difficulté s'étant alors 
élevées sur la solde de l'armde de Vaucluse, qui avait 
été fixée à quarante sous par jour, et que la municipalité 
d'Avignon refusait de payer, Jourdan s'empara, le 17 août, 
du palais des papes, et braqua ses canons sur la ville, pen- 
dmt que Duprat et Mainvielle forçaient l'h0tel de ville, 
enlevaient |es registres et faisaient arrèter quatre ortie:lors 
municipaux. C'ëtait le morne.al p,+ar le c,,um«aires de 

JOUIDAIN -- JOUBDAN ¢59 
la Constituante d'offrir courageusement leur intervention : 
loin de là, iL revinrent/ Paris ; un seul, Mulot, se retira à 
huit kilomètres d'Avignon. Durant leur abseuoe, et dans la 
nuit du 16 au t7 bre, Jourdan fit ouvrir I portes de la 
prison du palais où éit enlerme une foule de gens 
tout oendifions arrl la veille, et alo oemmenrent sous 
 eux, avec ses enuragements, I massacr di de 
la Glière, paroe que I davr éent jetés euite dans 
une tour appelée deoe nom. 
Cepdant Uemblée colituante vooEit la réunion du 
comt  la France. De nouvux commissaires furent en- 
toy: Jourdan lut arrèté. L'amnistie prouoncée par l'As- 
semblée Islali ve en mars 1792 i uva.  rtit de p- 
son, et se retira à Marile. L enrag de oette vie le 
ramenèrent eniompheh Avignon. Mal lui prit de retourner 
à Maræiile'ann suivante; il y fol arroE par le parti des 
fédéralistes, et jeoE dans une pdson, oU il demeura jusqu'à 
l'arriv de Canaux, qui réblit dans oette tle l'«utooE 
de a Convention. L'illustre Cpe-téte reCiait des dédom 
magements. L reprénn Rovère et Poulfier lui don- 
nèrent le commandement de la gendarmerie d dépa. 
ments de Yaudu et d Bouchedu-Rh6ne. En ronna- 
sance de oette haute faveur, Jourdan tailla de la bogne 
auxjueurs de la commission d'Orange, die émule du tri- 
bunal révolutionnre de Paris, et l'approsionna de sus- 
pects. Jourdan ëtant venu h Pa% fut présenté lennelle- 
ment aux Jacobins, et reçut l'accolade fraternelle avecun 
dipl6me de membre de cette ciété. Tant d'fleur et tant de 
gloirelui tournèrent la tte. il se crut une manière de 
tentatrévolutionnaire; il vivait publiquement av une 
[emme qu'il avait enlevée  sou ma. Un maire et de con- 
oeille municipaux ayant negligé de le luer, il les fit 
arrêter. D'autr n'aant pas vouli lui cer leurs clievau x, 
il fit faire leu sur ces audacieux objet-atours du droit 
de propriéoE. Comme l'accusateur public voulut foer 
contre l'auteur de c ex, Jomdan, indigné qu'on lui 
anquat h ce point, envoya l'accusateur public et on 
lier en prison. Dénon enfin par Mourru (de Vauclu), 
il fut arrêtWlui-mme, transf h Paris et livré au tribun 
rëvolutionnaire. A l'instigation de Bovère et de Poultier, 
Taitien eut In iacheté de te delendre dans 'sembe des Jaco- 
bins. 11 parut au tribunal avec un ënorme portrait de Marat 
sar la poitrine; ce qui ne l'emptcha pas d'être condamné 
et exécuté le 27 mai 1794. 
11 ne faut pas omettre de ire que Jourdan était toujours 
ivre, qu'il n'avait pas mme le temps de cul'er son vin, 
puisqu'i en avait toujours uu quaut la nuit à t de son 
lit; qu'il ne vait ni lire ni rire, qu'il signait  ordr 
d'arrestation avec une iffe, etquï raidit mème quel- 
quefois le le de sbire. Dépourvu de toute pèoe de vu 
politique, il n'eut jamais d'autre doein que la satisfaction 
de s ptu gçosie appéti,  coutentement de son 
satiable sensualioE. Charl Nv. 
J OUDAN (Je-Bsre, oemte), maréal de Franoe. 
NW Limog, le 29 aval t762, d'un pè chirurgien, il 
s'enr61a, eu 1778, dans te rment d'Auxerroi% lit a uerre 
d'AraCique, et rentra peu apr dans la vie civile, d'où 
vint le tirer la révolution. Capitaine de la rde nationale 
de Limoges en 1790, clief du deuxième bataillon des 
Ionir de la Hauta-Yienne en 1791, il marcha avec 
corps h I'mée du nord, et s'y disfingua si bien, que le 27 
mars 1793 il éit général de brigade, et le 30 juiet gé- 
riCai de division. Pla  la tte d'une division de I' 
sou  ordres de Houchard, il contbua puent au 
gain de la baille d'Hond scoote; et quand le oemité de 
ut public, suspeoEant Houchard, se dida à le priver 
de  sition, Jourdan fut appelé  le rempla dans te 
commandement de i'armedu nord et des Ardennes : il avait 
alors trente et un ans. Le jeu chef de l'armëe du no 
débu par la ille de Wattii, le t5 octobre. Après 
tte ictoire, Jouvd oe oendit h Pis pour confërer avec 
le coadté de salut imbibe; il se présenta à la tribune des 
$3. 



660 
Jacobins, et y protesta que le fer qu'il portait ne servirait 
jamais qu'à combattre les tyrans et b déf,.ndre les droits du 
peuple. Beveno au milieu de ses troupes, il ne leur imprima 
pas, après la prise de Toulou, l'élan q,e le cornité de salut 
public voulait donner à toutes nos armées ; et celui-ci, tout 
en rendant justice  ses bonnes intentions et / son patrio- 
tisme, ne le mit pas moins à la retraite. 
Un mois aprës, son commandement h,i fut cependant 
rendu, et il se trouva placé  la tte de l'armée de Sarnbre 
et Meuse. Le combat d',rlon et la prise de cette ville, celle 
de Char|eroi, la bataille de F I e u r u s, dont les résultats 
hrent si grands pour la répnblique, et qui sulfit à elle seule 
pour etablir la r[«tation nfilitaire de Jourdan; les combats 
de l'Ourthe, de l'Airvaille, de la RuC; la reprise de Lan- 
drecies, du Quesnoy, de Valenciennes, de Condé; la prise 
de Na,nur, de Juliers, de llaëstricht, de Luxernbourg, fit- 
rcnt pour le jeune énëral les fait« d'armes de cette belle 
.campagne. A la tin de t79 et au commencement de 1795 
il occupait la ligne du Rhin, depuis Coblentz jusqu'à CIèves. 
En septembre, il passa ce fleuve en préence de 9.0,000 
ennemis, dont la rësistance ne I'arrta point, et se porta 
entre 51ayence et Hocl,stoedt; rnai l'ina,-tion de Pichegru, 
qui trahissait dëjà, le Iorça a abandonner cette poilin, 
pendânt que Clairla)t recevait «les rcnlbrt conidcrahlcs. 
Après une comte campagne, un armistice laissa les deux 
arrnées dans leurs positions respectives : Jure-dan repassa 
le Rhin l'année suiva,,te, s'ernpara ,le Wnrtzbourg, de Dus. 
s¢ldorf, gagna la bataille d'AItenkirchen, et se porta vers 
làatisbonne. C'est ici que la fortune, qui lui avait constam- 
ment Ce propice, l'abandonna pour toujours. Attaq«é par 
le prince Charles, qui le ha, lit completement à Neurnarck, 
il dut se retirer, et estya encore, «lan sa retraite, des 
perles considérables. Il fut destitué, et ne repar, t que deux 
fois à la COte de nos troupes, ca 1799, à l'armée du Dannbe, 
et en 1812, près de Joseph, roi d'Fspagne, auquel 5apo- 
Iëon avait voulu qu'il prêtt l'appui de son expérience, l,b, 
il figura dans n grand d«str« militaire, la bataille de 
ViCtoria ('2! juin 1813), dont le mauvais uceès ne doit 
nullement lui 3tre attribué; car il ne pouvait que donner 
des conseils, qui malheureusement ne furent pas suivis; il 
avâit incarne d'avance annoncé les ,'evers qu'on Crouverai,. 
Eu 1797, au marnent ou sa destitulion lut prononcëe, 
Jourdan se vit nommer par son alAparlement membre «lu 
Coeil des Cinq Cents. La il s',.leva avec force ca faveur 
du maintien des institutions rélml»licaines , et siëea con»,ara. 
ment parmi les dé.mocrates les pus avancés : l'organisation 
militaire y fut principalet,ent l'oi@t de ses travaux; il juge 
que le nombre des gëuèrux de d:.i,ion et de brigade né- 
cessaire a nos arrnees, toutes nombreuses qu'elles ctaieut, 
ne «levait point dëpasser 80 pour les premiers et 150 pour 
les secouds; il denonça les malversations des lournisseurs mi- 
litaires, et approuva le Directoire lorsque les rnenées des 
royalistes dans les Conseils nécessitërent le coup d'État du 
18 f,'uctidor. L'anw.e suivante (1798), il fol appel,î deux 
lois  prësider le Conseil des Cinq Cents; il fit adopter la 
conscription militaire dont l'ErnpLredevait tirer tan,de profit. 
Peu de temps aprës il fut nornnrnë au commandement de Far- 
rnëe du Danube, eten acceplant il se dérnit de ses Ionction 
Iégislaties. A son retour, il fut rëélu " la legislature, et ne 
cessa pas d'y cornbaltre tout ce qui lui paraissait en désac- 
tord avec l'énergie de ses principes dérnocratiques. Président 
de la Société du Mdnëge, il porta, dans un banque,, un toast : 
« A la resta'rection des piques! Puissent-elles, dan, les mains 
du peuple, de,fuite tous ses ennemis.., 
On comprend qu'avec ces convictions Jourdan. qui s'C 
tait plu,O, Iit remarquer comme patriote que comme ambi. 
tieux, ne dut point grossir le env,Ce de gënéraux qui assis- 
lèvent Bouaparte au t b r u tu ai r e; il ht, au contraire, exdu 
du Corps iegislati[ par la seconde liste de proscription que 
dressa le pouvoir nouveau, et telCué mornentanérnent dans 
la Charente-lnfërieure. Il ne sortit de cet exil que pour ren- 
trer dans la ie privce. Quand Sapoléon empereur songea 

JOURDAN -- JOUR[NAL 
à entourer son rSne de maréchaux de France, il crul us 
pouvoir e dispenser de placer le nom de l'ancien chef de 
l'armée de Sambre et Mense au nombre de ceux qu'il vou- 
lait honorer de cette dignité. Il le nomma en antre séna- 
teur, conseiller d'Êtat et grand-aigle de la Légion d'Honneur. 
Cependant, il l'éloigna constamment de lui, et ne lui confia 
jamais que des missions où il fut abreuvé de dém'ts. 
Louis XVIII le créa comte. Dans les Cent Jours, on le revit 
accourir au Champ de Mai, et prendre part à ce grand tu- 
tCC de la défense du sol qui avait inspirë la plus glorieuse 
partie de sa carrière militaire. Sous la seconde Restauration, 
il fut appelé  présider le conseil de guerre qui devait juger 
le maréchal 51 e y : M o n ce  çenait d'AIre destitu et ar- 
r6té pour avoir refusé ce p»ste ; Jourdan n'hésita pas  sui- 
vre son exemple; la lettre qu'il écrivit à Louis XVIII pour 
motiver son refus le fil tornher dans la disgrfiee d'un gou- 
vernernent qui ne pouvait nëanrnoins s'ernpi!cher de le res- 
pecler. Gouverneur de la septièrne division rnilitaire ( 
Grenoblel en 1816, rappelé en 1819 à la pairie, dont il 
avait etWéliminé, il vit accornpli¢ la réçolution de Juillet 
sans abandonner une seule de ses convictions. Après avoi 
rernpli qudques jours les fonctions de ministre des affaires 
élrangères, il mourut, le 23 novembre 1833, à I'b6tel des 
Invalides, dont il (,tait gouverneur. 51apoléon GXLOS. 
JOUR DE L»AN nom que Fou donne au premier jour 
de I'a n n ée, et dont presque tous les peuples ont fait un jour 
de fête, carnetCisWsurtout par les offrande_ d 'étrennes. 
JOUR DES ROIS. Voyez 
JOUIL'A.L  JOURNALISIE. On trouve déjà les pre- 
miers germes du journal dans l'ancienne Rame, où les 
Acta dinrna ou Acta publica, espèces de comptes-rendus 
pu biles des delibérations lenuesdans le assernblées du peuple, 
rëpondaient j,,squ'a un certain point à nos journaux otficiels 
d'aujourd'hui. On y trouvait surtout les nouvelles relatives 
h la famille irnpériale, comme les naissances, les matis 
les soleunités fi,nèbres, les voyages, etc., puis les déerels 
impériaux, les décisions rendes par le sénat et les discours 
q,li y avaient été prononcés, les discussions des tribunaux 
le_ conçtructions nouvelles, etc. Venaient ensuite les nou- 
velles d'inVrEt privé, telles qu'annonce de naissances, de 
mariages, de divorces et de morts. Un décret de César or- 
donna que ces Acta paraltraient dorénavant lous les jours ; 
mesure prise d'autant plus à propos qee l'on venait de cesser 
la publication «les Annales maximi, ou Annales Ponti flcum» 
ainsi nomrnés parce que la rédaction en était conliée au Pon- 
D.fex maximus, et dont la colleclion première avait déjh 
péri lors du sac de Borne par les Gaulois. A partir de la 
seconde guerre punique, ce ne lut plus aux prEtres seuls 
qu'on donna mission de le rédiger ; d'autres hommes ins- 
truils furent aussi appelés alors à prendre part à ce travail ; 
un cite entre aulres Fabius Pic,or, Calpurnius Pison, Si- 
senna, elc. 11 ne comprenait d'ailleurs que les ëvënernents 
conlemporains les plus importants. Dans I« Acla diurna, 
au conlraire, on insérait les nouvelles dt, jour les plus or- 
dinaires, et iusqu'a de simples rumeurs plus ou moins fon- 
dees, comme par exemple celles d'une prétendue opposition 
qui se serait manifestëe dans le sénat contre telle ou telle 
mesure en voie de délibération, etc., etc. Faute de fragments 
authentiqnes, si mini,nes que ce soit, il est dillicile d'in- 
diquer d'une manière plus précise ce quïls conlenaient; et 
la rnème obscurité règne au sujet de leur rédaction. Aux 
temps «le la rëpubliqne, c'étaieu! les censeurs et les édiles 
qui avaient la surveillance des Tabuloe publicoe, et peut- 
tre faisaient-ils aussi rédiger ces Aeta d'après un plan donné 
par des scribes ou autres individus propres à un tel trax ail. 
Sous les empereurs il et raisemblable que ce soin incom- 
bait aux surintendants du trésor publie, qui, en raison de 
la nalure rnme de leurs fonctions, étaient entourés d'nn 
gr«nd nombre d'employés ubalternes. Quand l'écrit était 
acbevé, on l'exposait pendant un certain temps dans quelque 
lieu p,,blic, où chaom pouvait le lire ou encore le copie,-. 
11 est possible que des copistes proprernent dits et d'au,fco 



JOUBNAL 
individus eussent des abonaés, tant dans la ville qu'au de- 
bots, et qu'ils y copiassent tout ce qui était d'nn intért 
général. Ces Acta semblent avoir cessé d'tre pobliés quand 
Constantinople eut été érigée en capitale de l'empire, parce 
que dès lors ce fut ì des commissaires spéciaux qu'on confia 
le soin de faire connallre aux provinces les événements les 
plus importants. 
On ne saurait toniefois appliquer la dénomination de 
journal, dans le sens politique et littéraire qu'on attache 
aujourd'hui à ce mot, à ces publications périodique» des 
Bomains, non plus qu'à ceties qui ont lieu parmi quelques 
nations orientales modernes, comme chez les Chinois, les 
Japonais et les Persans. Le caractère lwopre du journal mo- 
derne, c'est d'avoir en vue pour son contenu une publicité 
facilement accessible à tous; pnblicité qui d'une part doit 
répodre à un besoin réel des nations et des individus, et 
qui de l'autre suppose des moyens d'exécution sans lesquels 
elle n'existerait pas. Ces mo«'ns d'exécution, la d,[couverte 
de l'imprimerie put seule les fournir; de mme que c'et! la 
réforme qui seule provoqua le besoin auquel il s'agissai! de 
donner désormais satisfaclion. On ne saurait donc faire 
dater l'histoire du journal et du journalisme que du seizième 
siècle. L'aclivité du journalisme se borna à l'origine à ce 
qui était de nature à le pins frapper les yeux, aux événe- 
ments les plus imposants qui survenaient dans la vie des 
Eats et des nations. Telles furent les publications connues 
sous le nom de Relations, et si commnnes aux seizième et 
dix-septièmesiècles. Elles précédèrent les feuilles périodiques, 
qui naquirent sucçessi,ement en mme temps que «les feuilles 
d'annonces et d'avis provoquées par d'autres besoins. La 
France fut le berceau du journalisme littéraire, qui de 
proche en proche se fonda aussi dan. les autres pays. A 
l'origine, expression unique et impopulaire de reruditiun du 
dix-septiëme siècle, et parqué dans une espèce de caste, 
non-seulement le journalisme ne tarda pas / devenir l'un 
des pins puissants leviers de la ci ilisation moderne, mais 
encore, par ses imnenses dëveloppements, il en arri va bientôt 
à exercer une dcisive influence sur la littérature moderne, 
à laquelle il imprima le cachet qui lui est propre, et eut 
le mérite d'introduire dans la vie sociale la science qui 
cessa d'tre le domaine de l'ëcole exclusivement. S'il nous 
fallait présenter ici nn aperçu mme sommaire du journa- 
lisme scientifique et littéraire dans les diverses conteCs de 
l'Europe, et mettre sous les yeux de nos lecteurs son bilan 
actuel, un tel travail, sans intérët pour le pins gran,I 
nombre, nous entralnerait beaucoup trop loin. ous nous 
bornerons donc à indiquer rapidement l'origine et les princi- 
paux déve'.oppements du journalisme lmlitiçlue en Italie, 
en Hollande, en Belgique, en Allemagne, dans la Suisse, 
en Iussie, en 3"nrquie, dans les royaume. seandina es, en 
Angleterre en Amérique, et enfin en France. 
C'est en llae, vers le milieu du seizième siècle et à 
Yenise, qu'on trouve les premières traces de journaux. Le 
gouvernement de la rcpublique, alors en guerle conlre 
le Turc, publiait de temps à autre quelques nouvelles ecri- 
tes ( ot-.ie scritte ) ur les évënements les plus impor- 
tants de la guerre, nouvelles dont les curieux pouvaient 
prendre lecture en certains endroits au prix d'une pièce 
de menue monnaie appelée 9a-.eta. C'est cette pièce de 
monnaie qui donna son nom anx papiers-nouvelles eu Ita- 
fie, et plus tard en France (Ga'-ette), en Espagne et en 
Angleterre. Une collection considérable de ces feuilles 
existe à la bibliothèque bIagliabeccld, à FIorence. Le soup. 
çonneux gouvernement de Venise était tellement contraire 
à la propagation des nouvelles politiques, que Ionemps 
encore après l'invention de l'imprimerie il ne tolèra que 
des journaux écrits. Mais une fois qu'il laissa publier des 
papiers-nouvelles imprimés, cette innovation se répandit 
b:,ent6t dans le reste de l'Erope. L'apparit:on de jour- 
naux dans diverses villes d'ltalie éveilla les défiances du 
sai»t-Siége. Le pape Grégoire Xlll (1572-1585) lanca mème 
vne bulle expresse contre les gazetiers, appelés alors 

661 
menant, et que, à l'aide d'un jeu de mots, il  désignait 
par l'épithèle de minantes ( menaçants ). Dans les temps 
modernes, en dépit de circonstances des plus alCavora- 
bles, le journalisme italien n'a pas laissé que de dévelop- 
per une remarquable activité. Elle se manifesta plutôt, il 
est vrai, dans le domaine des sciences et de la liftCature, 
q,e dans les gazettes proprement dite», publications peu 
estimées, soumises à mille reslrictions par la censure, ne 
donnant à leurs lecteurs que les pins sommaires renseigne- 
ments sur les événements, sans la moindre appréciation po- 
litique. Les gazette prvilégiées de Milan, de Yenise, de 
Turin, de Gnes, de Bologne, de Lucques, de FIorence, le 
Dario di lloma et la Ga'.etta di lpoli étaient encore 
les plus lues de toutes. A une époque d'agitations ci de dan- 
gers ( 1831 ), la Voce della Verità de Modène fit beaucoup 
de sensation par |'exag«,ratiot mme de ses principes ul- 
tra-monarchiques. En 1836 il se publiait en llalie 171 écrits 
périodiques; et en 1815 le nombre en était de 205. L'avè- 
nement de Pie IX au trSne pontifical changea tout à coup 
cet état de cho.es, et il se produisit alors un véritable 
d,,luge de leuilles politiques, dont quelques-unes rédigées 
avec beaucoup de talent et d'habileté, mai qui firent beau- 
coup de mal en «:parpillant les forces de l'opinion, en 
l'exa,rant, et eufin par les excès de lous genres auxquels 
elles se laissèrent entra|ner. On ne saurait rien comparer 
an fanatisme et h la grossireté des feuilles du parli révo- 
lutionnaire à Livourne, à FIorence, à Borne, et encore en 
185 à Gënes, où le mazzinisme clair parvenu à s'emparer 
dhme partie de la presse quotidieune. L'année 1849, avec 
ses tendances réactionnaires, mit presque partout un terme 
ì ce délire des intelligences; et il faut reconnaitre que, sauf 
peul-ëtre le Giorale di lWma, il y a eu partout après les 
salurnales de la libertc amélioration réelle dans le petit, 
nombre de feuilles qui ont été assez heureuses pour sur- 
vivre à la rction. Aujourd'hui elles satisfont beaucoup 
plus complétement qu'avant t8-8 ì ce que le public en at- 
tend, et elles le tiennent beaucoup mieux au couranl de ce qui 
se passe dans le monde. Les meilleures sont celles de Venise, 
de Milan, de Turin, de Gnes, de FIorence et de ffaples. 
En raison de la conslitutiun libre que la Sardaigue a eu le 
bonheur de couserver, un interët tout particulier s'attache à 
la presse de ce royaume, où en 1852 ou ne comptait pas 
moins de quarante-cinq journaux politiques, dont quatre 
écrit« en français. Le plus important de tous est le Parla- 
euto «le Tuvn, qui en t855 a changé ce titre coutre celui 
de Piemoute. Il faut encore ciler l'Opinioe, jourualmo- 
dér, le Di rtto, organe de la gauche, l'Armoma, avocat 
du parti clérical, I' Unioe de Bianchi-Giovini, et la populaire 
Ga-.etta del Popolo (7,000 abonnés). 
En "EsecE aussi les premiers journaux ne furent que des 
relations isolées (I?elatione) d'événements importants, 
relations paraissant / des époques indéterminées et prenant 
souvent, sur cette terre par excellence de la poésie, la forme 
de romances que les aveugles chantaient au coin des rues 
(romaces de cegos). Ce ne fut guère quevers le milieu du 
dix-huitième siècl que commença h paraltre "rëg«lièrement 
une gaette de cour, le Diario de Madrid. Mais dës la fin 
du règne de Charles 111 on comptait en Espagne de qua- 
rante à cinquante journaux, qui ne s'occupaient pas seule- 
ment de politique, mais encore de la propagalion de notions 
utiles, etqui inséraientdans lerscolonnes soit des disserta- 
tions scientifiques, soit des articles de crilique, de morale et 
de philosophie, par exemple le Teatro crtico universal et 
legs Cartas eruditas de Fe,joo, le Pensador de Claviio y 
Faardo, le Diario de los Literatos de E.çaa, le Sema- 
ario erudito, etc. 
Le journalisme espagnol prit autrement d'importance pen- 
dant et après la guerre de l'Indépendance (1808). Parmi 
les journaux du parti lihéral d'alos ot remarque d'abord 
le Diario de las Cortes, feuille d'une haute importance ; 
puis le Semaariopatriotico (Cadix. ! 8o8- ! 8 ! ! ) et l'A rorn 
mallor9ua (Palma, 1812-1813), à la rédaction desquels 



662 
prirent part des hommes lels que Q,intana, Anlillon, 
l]lanco-White, Tapia, Gallardo. Parmi les organes des ser- 
viles, il faut surtout citer le Procurador del liey, feuille à 
l'usage du peuple, rbigée avec autant d'énergie que d'es- 
prit. Après la restauration de t8t4, les hommes exilés d'Es- 
pagne coutinuërent à délendre leur cau  l'aide de quelques 
journaux publiés en langue nationale à l'Cranger : tel htt, par 
exemple, |'Espaolconstttucional, publiéàLoudresen 1815. 
Le parti absolutiste se servit aussi, il est vrai, de la presse 
comme moyeu d'action; cependant, dans le grand nombre 
de feuilles de cette couleur, on ne peut guère citerque 
laya de tu Marcha, fameuse entre toutes par ses. fureurs 
et ses violences. La révo|**tion de 1820 « 1823 qui rendit de 
nouvea** le parti libéral mattrede |'Espagne, en proclamant 
la liberté de la presse, donna naturellement à la pres pé- 
riodique des bases plus larges et plus s0res, en m6me temps 
qu'elle accrut infiniment sou influence. Parmi les 64 jour- 
naux politiques qu'on comptait en 1822, l'un des meilleurs 
était le Censor, qui s'ëtait posé franchement en organe du 
libéralisme napoléonien avec une certaine tendance h se rap- 
procher des doctrinaires français; d'unautre coté, la 
franche et spiriltelle gaieté nationale coulait à pleins bords 
dan le Zurriagoet dans les Cartas delporecito holgaran de 
bliano, feuilles audacieuses ent'e toutes. Q,and la contre- 
rcvolulion de 1823 força les bommes du parti libéral à aller 
«le nouveau demander un asile à l'Cranger, Paris et Lon- 
dres devinrent les deux grands ateliers de la presse espa- 
gnole réfugiée. C'est ainsi que parurent ì Londres les Ocios 
de Espafoles refugiados (I 8 3-t $26), feuille oit la iittératu re 
était a«ssi traitée d'une manière remarquable, ainsi que le 
Correo lierarto y poliico, et  Paris les Miscelanea 
pao.america»a (t26). Sauf un petit nombre de feuilles, la 
presse politiqte fut complétement supprimée en Espagnc en 
182; et après la Garera de Madrid, on nepeut guère citer 
que le Correo rnercantil de Cadi.x, le Mercurio, la 
de laona (1825), publice par blifiano, et à Saiut-Sébastien 
l'Estafeta, feuille absolutisle, qui plus tard fusionna aec la 
Garera de 13aona. La mort de Ferdinand Vil et l'adou- 
cissement qui s'ensuivit aussit6t dans le régime rigoureux 
auquel le journalisme était restë soumis jusque alors, puis le 
changement complet de syslème survenu en 1833, eurent 
naturellement pour résultat de donner des déveioppements 
considérables à la presse périodique, devenue libre eu 1833. 
A ce moment il ne surgir pas moins de ! 8 journaux politiques, 
 Madrid eulement. En 1836 il en paraissait 30, ns parler 
des 49 feuilles officiellea (Eolelines oficiales) à l'usage des 
provinces. Dans le nombre il faut surtou! accorder une 
mention à la Bevista espaola, fondre en 1831, devenue 
ptt, s tard, en t8.37, exc[usisement liftCaire, sous le nom de 
tevis[a europea, puis redevenue politique et iittraire 
l'année suivante et organe du parti modéré sous le titre de 
levista de Madrid ; le Correo nacional, journal d'une 
nuance du parti moderé, rédigé par Borreo, lequel publiait 
aussi un antre journal de la mme opinion, l'Espaol. Le 
'o re olvides du poëte Salas y Quiroga n'était d'abord 
qu'une feuille de littérature et d'art, mais qui aborda ensuite 
la politique en arborant le drapeau du jusle-milieu. Il faut 
encore citer à cette époque le Corresponsal, journal riche 
en renseiguemenls statistiques, et la Ga:eta de 3ladrid, 
Fortune ofliciel de tous les gouvernements passës, présenls 
et futurs. Dans les provinces on distinguait PEco de Ara- 
9on, publié à Saragosse; i'At«rora, le Ticmpo, à Cadix ; le 
Guadalhore, à Malaga ; i'A lh ambra, à Grevade, etc., etc. 
Un trait bien significatif du caractère national, c'estque poqr 
agir s0rement sur le peuple le gouvernement et les diffé- 
ents partis qui lui étaient hostiles eurent toujours recours 
des journaux satiriques, venant avec lesarmes du ridicu le au 
secours de leurs système polit!ques respeclifs. C est ainsi que 
les moderados fondèrent les journaux El Toobodo, E1 
Mundo, E1 Duende, E1 lVosotros ; mais ceux dese;altados 
es surpassèreut encore en licence, surtout après le ronun- 
tamento de se.plembre t840. Beaucoup de ces [c:il[es ne 

JOURNAL 
tardèrent point sans doule à disparal[re," mais furent 
aussit remp]acées par d'autres; et au to le journalisme 
espauol a toujours é en augmentant de puissance et de 
nonbre dans  dernires années. Ce fut un journal pure- 
ment religieux, E1 Catolco» qui obtint le plus grand nombre 
d'abonnés ( t4,000. En t844 il paraissait chaque malin 
Madrid t9 journaux, parmi lesquels trois, l'Eco, le Clamor 
publo et le Novelero, appartenaient au parti dis 
taos. L'Herldo, journal de In nuance modérée, Cait 
celui qui tirait le plus (7,000). Quand la nation se souleva en 
t84 contre Espartero, la presse de Madrid réunissait 65,000 
abonnés; puis, lecalme une fois retabli dans le pays, ses 
tirages réunis ne préotèreut plus qu'un total de 22,000 
exemplaires. La révolution de juillet 1854 a eu pour résultat 
de donner une vie nouvelle à la presse politique. A la fro 
de cette mme année il paraissait à Madrid 30 journaux de 
couleurs diverses ; et dans les premiers mois de t855 
nombre en augmenta encore. L' Eslaa et le C[amor pub/leu 
sont aujourd'hui [es plus importants de tous. 
L'histoire du journalisme en Poarvcs es[ tout à fait la 
mme qu'en Espagne. Jttqu'en 180 le journal y fut d'une 
complète nullité. La révolution hd donna alors une impor- 
tance qu'il perdit aussitôt que la contte-révolution eut 
triomphé, en t823. A partir de l'avénement de Maria da 
Gloria, en t834, le journalisme prit toujours plus de déve- 
loppement, mais sans se perfectionner et en se bornant uni- 
quement à servir les passions des partis. Les incessantes 
alternatives d'absolutisme et de licence révolutionnaire dans 
ce pays ont eu pour résultat d'y démoraliser compiétement 
la presse. Le journal officiel porte le titre de Diario du 
Governo. IL parassait en outre à Lisbonne en 1852 six 
journaux politique, et cinq à Oporo. 
Les journaix puhliés en HOLLkDE, furent dè« l'origine an 
nombre de. meilleurs qu'on possédt, parce qu'ils donnaient 
de première main les nouvelles arrivant par la voie de mer 
parce qu'il leur ëtait plus facile qu'/tous autres d'ètre aucou- 
rant des événements de la politique, et parce que sous le 
gouvernement républicain de ce pays la presse jouissait de 
plus de liberté que partout ailleurs. Presque tous les jour- 
naux y firent d'abord publiés en langue hollandaise, sous la 
dénomination commune de Courat, spécialisée par le nom 
de la ville o/ s'imprimait le journal. Ils donnaient peu d'arti- 
cles politiques, mais beaucoupd'avls au publient de nouvelles 
commerciales. Ce ne fui que plus tard que parurent ì Leydc 
et à La Haye des journaux rcdigés en langue fran.caise. Bien 
qu'en 18t5 la Hollande e0t recouvré l'exercice de la liberté 
de la presse, la nation n'en fit pa grand usage, tant que la 
lutte n'eut pas commencé entre les feuilles belges et les Iuilles 
hollandaises. Aujourd'hui, les journaux les plus répandus 
eu Hollandesont l'Allgemeene Handelblad d'Amsterdam, 
le Staa[s-Courant de La Haye, le Harlemsche-Courant de 
Harlem, le Journal de La Hage, journal officiel. Autrefoi% 
la Gazette de Leyde, propriété de la famille Lu:ac, était 
reardée comme le mieux rédigé et le rieux renseigué des 
journaux hollandais. Aux Grandes Indes la presse hollandaioe 
est représentée par le Javaasche-Courant, publié à Ba!avia 
et on estime aussi beaucoup la Tjàschrift voor zYeerland- 
sche Indien. 
Le premier journal qui ait été publié dans la partie sud 
des Pays-Bas qui forme aujourd'hui le royaume de 
ClQç, parut à Anvers eu 1605, sous le titre de ,Yicw¢ 
Tjdinçhe. C'était, à ce qu'il parait, une gazette des êv6- 
nements de la guerre, paraissant à des époques inàéterminêes 
et qui fut remplacée, d ce qu'on croit, par la Ga-.et[e van 
Antwerpen, laquelle ne disparut qu'en 1827. Sous la do- 
mination de l'Espagne et sous celle de l'Autriche, chaque 
ville de quelque importance avait sa gazette privildgi:e, pu- 
blication parfaitement pure de toute tendance politique ou 
sociale, et ne disant jamais que ce qu'on lui permettait de 
dire. Dans In nombre il faut citer le Courrier dritable 
des Pays-Bas, fondé en t 649, et qui, sauf uue unique inter. 
rtption de 17'6 à 179, continua de paraître jusq'e 1791 



JOURNAL 
le Journal de Lidge, qui aujourd'hui encore compte un 
grand nombre d'abonnés, et la Gazelle van Gend, fondée 
en 1667, et qui n'a pas discontinué de I,arattrc depuis lors. 
Sou la domination française, les villes de la Belgique avaient 
perd,t toute indépendance et taule initiative, et le plus grand 
notabre de leurs gazetles durent succomber sous la con- 
currence des nombreux Iornaux de département q'on 
lit paraltre rédigés à la française, Les journaux de cette 
époqu¢ dont les collections ont conservé ane certaine im- 
portance historique sont Le Cmnpilateur ( 1795-1,10 ); Le 
t'rai Brabançon (1790-1792), feuille à tendancescatholiques 
et autricl,iennes ; le Journal de la Socioetd des Amis de la 
Liberté et de l'Egalité, et Le Rdpblicain du Iorà, redigës 
tous deux dans l'esprit du répnblicanisme le plus exalté. 
Simple jourual de faits, L'Oracle se maintint de i 800 h ! 827. 
Bien que le gouvernement hollandais n'efit pas, à partir de 
1815, par trop gaé les allures du journalisme en Belque, 
la législation relative à la liberté de la presse était trop 
sévère et trop précise pour ne point donner lieu à d'assez 
nombreux procès. Parmi les journaux qui existèrent en 
Belgique de 1815  1830, c'est-à-dire pendant la réunion de 
la Belgique et de la Hollande, il faut citer, outre la 6azette 
des Pays-Bas, journal officiel, le Journal de la Belgique, 
fettill¢assezincolore, qui continue encore de paraltre; Le Nain 
jaune roefugid , journal de caricatures contre les Bourbous; 
Le Liboeral, produit de la tusion du Nain ]aune et du Sar- 
eillant eu 1816, et qui en 1821 se transforma eu Cor- 
fier des Pays.-Bas, feuille d'une opposition extrgmement 
acerbe. Après ce dernier, qui compta au nombre de ses ac- 
tionnaires ou de ses rédacteurs la plupart des fautcurs bien 
marquants de la révolution belge, il faut encore mentionner 
parmi les journaux d'opposition les plus importants.Le Cour- 
rier de la Meuse, Iondé en 1820, au point de ue catho- 
lique, trasféré à Bruxelles eu 1860, et publié aujourd'bui 
sous le nom de Journal de Bruxelles; le spirituel Mallhieg 
Loe, nsberg, rédigé par Deveau, Lebeau et Bogier, fondé en 
isoE4, transformé en 18OE8 en Politique, en I81t en Tri- 
hune, et qui depuis 1849 est devenn sous le dernier de ces 
titres l'organe du parti républicain; Le Catholique des Pays- 
Bas, devenu plus tard le Journal des Fla»dres ; le lournal 
d'Ant,ers, feuille catholique, existant depuis 1.81 I. Avant la 
révolution de 1530, ou citait parmi les journaux minis- 
tériels, à B,'oxelles, Le lVatwnal, publié par le fameux 
Libri de Bagnano, et à Gand, le Journal de (;and, qui 
a pris en 1831 le titre de 31essager de (;and, et est 
meuré jusqu'à ce journal fidèle " ses tendances orangistes. 
La révolution «lut nécessairement donner un essor immense 
•  la presse belge, déoermais affranchie de loute contrainte, 
et qui souvent, aujourd'hui peut-erre plus que jamais, 
confond trop la liberté avec la licence. Les journaux les plus 
répandu sont ceux qui ont un cachet tout [lançais; presque 
tous sont rédigés par des Français et puisent leurs rensei- 
gnements  des sources françaises. En 1830 le nombre des 
écrits périodiques de toutes couleurs paraissant en Belgique 
n'était encore que de 31 ; au commencement de 1845 il 
etait-.dejà de 02, comptant ensemble 61,608 abonnés. Il 
y en avait t$ qui paraissaient tous les jours, 12oE qui s'oc- 
cupaient de politique, t3î de rédigés en français et 52 en 
flamand. L'abolition complète du timbre sur les journaux 
et l'abaissement du pi'ix du port par la poste, en 184$, en 
ont encore singulièrement augmentë la circulation. Le plus 
important des journaux belges est aujourd'hui sans con- 
tredit l'lndëpendance (8 à 9,000 abonnés), qui a remplacé 
l'lnddpendan[, fondé en 1,31, longtemps journal quasi- 
officiel, malgré, son opposition assez tranchée. Viennent en- 
suite L'Obseicateur, journal du libéralisme le plus avancé; 
I,'Émancipalion, journal de la droite parlementaire, c'est- 
à-dire du parti catholique; le Journal de Bruzelles, snr- 
nommé la letite-Bgte, feuille de sacristie; La Hation, 
feuille démocratique; Le Tt«légraphe, adversaire du gouver- 
nement de Rapoléon Iii ; Le A'ord, fondé par la diplomatie 
usse ; er, fin Le Moniteur belge, journal officiel. Dans les 

665 
provinces, il faut ciler, outre le Joarnal de EtCe et Le 
3lessager de Gand , dej. nommés, le Jogrnal d',tuners, 
le Journal de Gand, le Journal de Verviers, L'Organe des 
Flandres L'Ami de l'ordre, à Piamur, DeStandaert, journal 
flamand, à Gand. 
En A.rçtr également les journaux cureur pour point 
de départ des feuilles volantes et des imprimes de faible 
étendue, intitulés le plus ordinairement Newe Zeilng, ré. 
digés en formes de lettres, et ornés quelquefois de gravures 
sur bois, ne portant que très-raçement I mention «le la date 
et celle du lieu où ils ont été imprimés. Il est possible que 
des publications de ce genre aient eu lieu dès le milieu du 
quatazième siècle; on en a la preuve en ce qui concerne 
l'Allemagne, pour les années 1457 à 14ri0, bien que l'exem- 
plaire le plus ancien qu'on connaisse encore, et qui se 
trouve dans la bibliothèque de l'université de Lipzig, porte 
seulement la date de 149¢t. Ces RelalioTs, comme on les 
appelait, indëpendamment des événements contemporains 
les plus importants, tels que la découverte de l'Amrique, 
les guerres contre le Turc, cellesdes Français et des Impé- 
riaux dans la haute Italie, etc., elc., traitent aussi d'affaires 
locales, comme des exécutions capitales, des inondations, 
des tremblements de terre, des histoires de sorcières, d'en- 
fants égorgés par des juils, de signes miraculeux. Ces com- 
munications étaient périodiquement données, d'un c6lg, par 
les almanachs et les oelen,lriers, qui depuis la fin du quin- 
zième siècle paraisient déja  peu près régulièrement tous 
les ans, et de l'autre par cequ'on appelait alorles Postreu- 
ter (courtiers), dont le plus ancien qu'on connaisse porte 
la date de 1590, qui étaient géneralement rédigés en vers 
et comprenaient les evénemenls de l'année écoulee. C',est 
aussi vers la mëme époque que parurent les premières 
relations périodiques dece genre, lorsque, en 1590, Conrad 
Laoterbach (né etx t53zt, mort en 159¢t , commença en 
sociélé avec le libraire de Franclort Paul Brachfeld la 
publication de ces Relaliones semeslrales, continuCs après 
sa mort par Sebastien Broenner, et qui paraissaient tous les 
six mois, de luire en foire, a Francfort, d'abord texte latin 
et allemand en regard. Quelques recueiis de ce geure, teh 
que le lelationum hstoricarum Penlaplus de Michel 
Eytzinger ( 1570 [t 1599, Francfort et Cologhe ), le Mercu- 
rius Gallo-Belgicus d'isselt ( 1558 à 1600 ), continué par 
divers jusqu'en 165/, etc., étaient plutfit des chroniqn 
historiques, des annuaires, que des gazettes proprement 
dites. Taudis que les imprimés en question étaient les 
prceurseurs de nos journaux d'aujourd'hui, d'autres besoins 
firent narre et circuler en Allemagne dans la seconde moi- 
tié du seizième siècle des gazettes manuscrites, que les 
frëres F u gger, ces négociants célëbres d'Augsbourg, dont 
les relations commerciales embrassaient alors toutes les 
parties du monde, faisaiont de temps à autre rédiger à l'u- 
sage de leurs nombreux correspondants. Une collection de 
gazettes de ce genre, embrassant l'intervalle de temps com- 
pris entreles années 1568 et |60-, et formant OES volumes, 
fut transportée  Vienne, en 1656, avec toute la bibliothëque 
Fugger. Sous le rapport du choix et de la diversité des ma- 
teriaux et des reuseiemeuts q,'elles contiennent (on 
trouve mfimejusqu'a des nouvelles littéraires), ces gazettes 
ou circulaires manuscrites, adressées par la maison Fugger 
à ses amis et correspondants, pour le classement et l'Cendue 
des nouvelles diffêrent peu des journaux d'aujourd'hui 
L'Aviso, « relation ou gazette de ce qui s'est passé dans 
l'Empire, en Epagne, en France, aux Indes orienlales et 
oceidentales, etc., ,, publié comme papier-nouvelle a partir 
de 161, non pas, il est vrai, à des intervalles lixes et 
guliers, mais par feuilles humCotC, était une publication 
h peu pr du méme genre. Toutefois la première gazette 
véritable qui ait etWpubliëe en Allemagne fut celle que le 
libraire Emmel de Francfort lit paraltre toutes les semaines, 
avec un numéro di»tinct chaque fois, h partis" de 1612. 
l'imitation de oe libraire, J. de Berghden, alors administra- 
teur des postes impériales, publia, à partir de l'an 1616, la 



4 JOUIIAL 
Gazette de la direction générale des postes de Francfort abonnés) ; la Nouvelle Gazette de Prusse (5,000 abonés) 

(Frank[urter Oberposlamtszeitag), qui continue encore  
paraitre aujourd'hui. Après Francfort, ce fut la ville de 
Fulda, qui la première posséda un journal. Dès IG19 il en 
paraissait un autre à Hildesheim. Peu à peu cette innova- 
tion gagna de proche en proche; et vers le milieu du dix- 
septième siécle Nuremberg, Cologne, Augsbourg, Batisbonne, 
Hanau, Hambourg, Bremen, Gotba, ARenbourg, Cobourg, 
Er[urt, Witte.nberg, Eisenberg, Leipzig, Ber|in, Halle, 
llagdebourg, Koenisberg, Clèves et quelques autres villes 
avaient dt»jà chacune leur journal ou gazette, publié d'ordi- 
naire avec le très-gracieux privilége du souverain local, et 
sous le courroie d'une censure prévenlie. L'un des plus 
anciens journau de l'Mlemagne actuellement exislants est 
Le Correspondant de llambonrg (Hamburgische Cor- 
respondent), qui date de 1714. L'Allgemeine Zeitun9 
( Gazette universelle d'Augsbourg ), fondée en t798 par le 
libraire COlla, ne larda point à éclipser tous les Journaux 
t»ubliésjusquealors, eta toujours conservé depuis la préémi- 
nence. Ce journal, qui a des correspondants particuliers 
( et bien rée[s ) dans tous les pays de l'Europe, sur les points 
les plus importants de l'Afrique, de l'Asie et de l'Arnérique, 
est souvenl employé par les differents gouvernements qui 
veulent donner de la publicité à cerlains docments officiels 
qu'il y aurait pour eux inconvénient à publier dans les 
journaux qui paraissent sur leur propre territoire. Pendant 
le temps de la domination française, les feuilles allemandes 
ne purent ètre que |'écho des journaux français; mais le 
joug de l'Cranger n'eut pas plus t0t été secoué, en, 813, qu'on 
vit narre en Allemagne un ce-tain nombre de journaux 
nouveaux. C'est ainsi qu'à l'invitation du général Wittgens- 
rem Kotzebue fonda sa Feuille populaire russo-alle- 
mande (Bussiches-Deusches l'o[ksblatt), tandis que 
Niebubrcreait son Correspondant prusien(Derpreuss«sche 
Correspondent), deux feuilles qui d'ailleurs ne survécureut 
guère aux circonstances qui les avaient fait naltre. Vers la 
mème époque, se fondait en Autriche. L'Observateur autri- 
chien (oEstreichische Beobachter), placë sous le patronage 
de M. de MeRernich, et rédigé par Pilat, banovrien converti 
an catholicisme. La Gazette d'Etat de Prusse ( Pressche 
Staats-.ei{tng) date de 1815. Le; événements de 1830 pro- 
voquèrent sur divers points de l'Allemagne la crëalion d'on 
certain nombre de feuilles d'opposition; mais ì partir de 
1832 des décisions de la dtCe germanique les supprimérent 
successivement. En 180 les gouvernements accordèrent ce- 
pendant un peu plus de latitude/ la presse, et avant la 
révolution de mars 1898 la Gazette de Brème, la Gazette de 
Cologne, la Gazette du Weser, la Gazette universelle de 
Leipzig, défendaient avec une remarquable vigueur la cause 
du progrès et de l'émancipation. Les événements de 188, 
comme on peut bien le penser, amenèrent une transfor- 
mation complète de la presse allemande. Une foule de nou- 
veaux journaux politiques se créèrent alors, mais le plus 
grand nombre succomba bient6t faute des ressource né- 
cessaires / de telles entreprises, ou encore par suite des 
lois nouvelles rendues  partir de 1849 sur l'exercice de la 
liberté de la presse. Si beaucoup des grands journa,x qui 
existaient avant t88 ont disparu depuis, en revancl,e il 
s'en est créé une foule d'autres par suite des besoins nou- 
veaux qu'une provoqués les progrès du commerce et de 
l'industrie, ainsi que la facilité plus grande des communi- 
catious, résultat des nombreux chemins de fer qui sillonnent 
le pays dans tous les sens. Au commencement de 1855 on 
évaluait h 1,600 le nombre des journaux politiques publiés 
tanten Mlemague qu'en Suisse et dans les provinces russ 
riveraiaes de la Baltiqu% où la langue allemande est en 
usage, sans compter prës de 900 journaux scientifiques et 
littéraires. Au commencement de la mème année, il se 
imbliait en Autriche 7 ournaux politiques. Les journaux 
les plus importants qui paraissent en ce moment en Prusse 
sont : la Gazette de Spener (7,600 abonnés) ; la Gazette pri- 
vilégiée de Berlin, appeée aussi Gazette de Yoss {, t,20o 

organe du parti rétrograde ; Le Temps (6,000 abonnés ) ; la 
Gazette nationale (5,600 abonnés). Les journaux publis 
en ,artère, en Wurtemberg, en Saxe, etc., n'ont qu'nne im- 
portance locale. 
La Svtssg est, toutes proportions gardées, le pays de i'Eu- 
ropeob l'on publie le plus de journaux. Au commencement 
de 185t on n'y comptait pas moins de 20 feuilles s'occu- 
pant de politique, de religion et «le lierArature, dont t52 rédi- 
gées en allemand, 6 en Irançais, 5 en italien et ! en la%de 
romane (dans le canton des Grisons). En 1855 ce cllilfre 
était de 3. Les plus inlportants de ces journaux sont : 
L'Alliance (Der Bund), publiée à Berne ; la Gazette de la 
Confédération (Eid9enossische Zeitung), à Zurich ; la Ga- 
zette d'Argovie ( Aargauer Zeitung) ; le Messager suisse 
(Schweit'-er Bote), rédigë à l'origine par Zschokke ; la Ga- 
zette de B.le et la Gazette. nationale suisse, publiées toutes 
deux/ Ble ; les Gazettes de Lucerne, d'Appenzel, etc. ; enfin, 
les journaux rédlg en langue française et publiés dans la 
Su:.sse française, tels que le Courrier st, isse, la Gn'.,etle de 
Lausanne , la Gazette de Fribourg, le 2Youvelliste Vau- 
dois, le Journal de Genève, organe du parti conservateur 
et la Revue de Genève, organe du parti radical. 
En BUSSl le journalisme, comme tant d'autres chose ; lut 
créé par Pierre le Grand, qui, pour teuir son peuple au cou- 
rant des événements de la guerre contre les Suédois, fit pa- 
rattre des journaux, d'abord ì Moscou, puis h Saint-Péters- 
bourg. La plus ancienne gazette russe, 6. la rédaction de la- 
quelle Pierre le Grand prit personnellement part, parut en 
1703, à Moseou. Elle a été réimprimée avec soin, à Saint- 
Pélersbourg, en 1855. La Gazette de Moscou ( Mosk, owsija 
Wjédomosli) ne tarda point à périr, mais pour renattre en 
1756. Il existe des annëes ou collections rëgulières de la Pe- 
terburgsija-IVjoedmosti depuis 171. Le premier journal 
lierCaire, Jeshemjesatschnyja Solschineni)a, fut publié 
en 1755, par l'académicien Mller. De 1791 à 1792, Karam- 
sine publia le journal de Moscou; et ì partir de 1802 le Cour- 
rier «le l'Europe, passé plus lard sous la direction de Schu- 
kowskji et de Kalscbenosskji, eto/a les questions politiques 
étaient traitées. Le Télégrapbe de Moscou (1825 / 1836) 
exerça une heureuse in fluence sur la titlérature russe. Disons 
bien »ire, du reste, qu'il ne saurait exister eu Bussie de jour- 
uaux politiques proprement dits, puisquïls ne paraissent 
que sous le bon plaisir du gouvernement, lequel ne permet 
de publier que ce qui lui parait utile ou tout au moins sans 
inconvénient, et que des lors le journalisme russe ne peut 
prësenter la plus légère nuance d'opposition. C'est seule- 
ment dans des circonstances aves et critiques, comme par 
exemple, lors de l'invasion française en 1812, lors de l'in- 
surrection de laPologne en 1830, et tout récemment en- 
core, en 1853, à l'occasion de la crise décisive survenue en 
Orient, qu'un peu plus de liberté est accorde au journalisme, 
à qui il est permis d'darr un peu le cercle de son action ; 
et les publicistes officiels développent alors pour défendre la 
politique du gouvernement un talent et une habileté incon- 
testables. Sous ce rapport on distingue surtout l'Abeille du 
Nord (Sjéwerna)a-Plschela), rédigée par . Gretsch et 
Th. Bulgarin, dont les feuilletons sont très-gofRés, et qui 
s'est fait un cercle de lecteurs fort étendu. La Peterbur9 s- 
ki]a- Wjdomosti, rdigée par A. Ortschkin, est célèbre 
par l'ampleur de son cadreet te g¢aud nombre de renseigne- 
ments qu'on y trouve; tandis que l'Invalide russe, placé 
sons la direction du prince Galytzin, est surtout consacré h 
des rapports et  des dissertations militaires. En [ait d'au- 
tres journaux russes importanL, on peut encore citer la 
Gazette Allemande de Saint-Pétersbourg, qui existe depuis 
1726, et dont les suppléments scientifiques et lierCntres lune 
bien connaltre la Bussie; la Gazette de la Marine ( Morsàoi 
Sbornik), qui publie sur les mouvements de la flotte russe 
les renseignements que le gouvernement a intért de com- 
muniquer au public; la Gazette de la Police; et le Journal 
de Sain[-Pétersbourg, rédigé en Irançais, organe offi¢,iel 



JOUI[gAL 
du gouvernement, qui y fait surtout parattre des articles à 
l'adresse de l'Cranger; le Kawkas de Tiflis,  cause de la 
foule de documents précieux qu'on y trouve relativement aux 
provineesdu Gaucase,  la Perse, etc. ; le Journal d'Odessa 
(pnblié en français et en allemand ); la Gazette de Riga 
ci l'Inlancl de Dorpat. En 1854 il se publiait dans toute l'é- 
tendue de l'empire russe 95 gazettes et 00 écrits périodiqaes, 
dont 67 gazettes et 68 écrits périodiques en russe, 15 gaz 
zettes et 10 crits périodiques en allemand; le reste en 
anglais, en français, en italien, en polonais, en letton, en 
grasien. A Saint-Pétersbourg seulement, il paraissait 9.6 
gazettes (y compris les feuilles d'annonces et de commerce ) 
et t2 écrits périodiques; à Moscou, 4 gazettes et 9 écrits 
périodiques, etc., etc. On ne devra pas tre surpris de nous 
voir ajouter que le journalisme liftCaire est arrivé en Russie 
 une tout autre importance que le journalisme politique ; il 
sert en effet d'arëne anx passions et aux partis, auxquels 
le champ des discussions politiques est sévèrement inter- 
dit, et qui s'en dædommagent en apportant encore plus d'ar- 
deur et atssi d'animosité dans les discussions littëraires. 
Le nombre des journax qui existaient en POLOçE avant 
1830 était de 37 ; il n'est plus aujourd'hui que de 15. Le 
plus lu de tous est la Gazeta-R:adowa, feuille officielle ; 
viennent après : le Dziennik Warszawski, la Ga'.ela-Co- 
dzienna, la Gazeta- Wars:awska et le lt'uryer.It'ars- 
OEawsi ; les autres feuilles sont ou des journaux d'éducation 
ou des journaux religieux. 
Le premier journal pabli, en Svo. fut l'Ordinarie Post- 
Tidende, qui parut régulirement de 1613 à 1680; vinrent 
ensuite : le Svensl Me'kurius (1675-1680), les Relationes 
curiose, journal écrit en latin, de 16S2 OE lTot, le Svensh. 
Postillon et quelques autres encore. Le premier journal ré- 
,ligé en fl-ançais fut la Gazelle française de Slocholm 
{ h partir de 1712), à laquelle suezCa, en 177, le Mercure 
«le Suède. Quoique le Slockholms-Poslen, fondê en 1778, se 
permit q,clquefois des appréciations politiques, la presse 
I olitiqne snédoise resta sans aucune influence sur l'opinion 
iusqu' l'époque of a la grande qFFerelle des classiques et des 
romantiques vint I,arlout raviver les h,rces de l'intelligence. 
L'Argus , fond6 en 180 par Jobannsen, et à |»arlir de 18 
I a Rigsda9s Tiden de, entreprise par C r u s e u s t o I p e et par 
i-i j er tu, le premier ecrivain qui ait dignement représealë 
la presse politiqne, exercèrent une influence réelle sur le 
dëveloppement politique intérieur de la Suède; et la seconde 
«le ces feuilles devint bieatOt l'organe «le l'opposition. Au 
moment oU se lermina la diète de 1828-1830 et od la presse 
:u,.doise prit un caractère franchement politique, qu'elle n'a. 
'.:it point encore eu ]usque alors, C uscnstolpe ent«eprit dans 
le sens royalisle le Fzederneslandet, tandis qu'en decem- 
bre 1830 Hjerta f, mdait 1"3flonbladel, feuille ra,lieale, de- 
meurée pendant longtemps le journal le plus influent de la 
Suède, qui acumptéjusqu"h 5,000abonnés, maisqui a cessé 
d,.puis favénement du roi Oscar de représenter l'opposition. 
Le Dngligt-Allahancl«, fon,lë en 1833, et qui depuis 1852 
t|orte le titre de S«ensku-Tidende, a également une circu- 
lation trs-étend,e et représente le parti réformiste modéré. 
La gazette officielle est la Post och Inrihes Tidningar , qui 
portait précédemment le titre ,le Sveri9esoStatstidnin 9. La 
Srenska.Minerva, fondée avant 1830, et la SvensAa-Biet, 
qFFi depuis 1839 occupait le premier rang parmi les journaux 
cunsersaleurs, étaient avant 148 des journau.,t ministéF-iels. 
La temp/te de 188 fit naltre en Suède unassez grand nom- 
brede leuilles ultra-radicale.g; mais elles ne tardërent point 
h disparaltre. Parmi les journaux de prosince on distingue 
celui de Gotbenbourg, le Goeteborgs Handels och Sjoefarls. 
Tidning, fondé en 182. En 1801 il ne se publiait en tout 
que 5 journaux en Suède; en 1821 leur nombreCait de 48, 
et en t850 (le 113. 
La presse poliîque en Dxr.se. demeura sans caractère 
't sans influence jusqu'en 1830. !1 ne paraissait à Copen- 
I,:g:e que deux gazetles, toutes FleFtX en vertu de priih;ge% 
c ,l.:i, outre les actes et les arts de I';mlorité, pul)[iaient quel- 
I|ICT. DE I.,A COINVIIIS. l 1_ XI. 

ques extrait« des feuilles érangères. Le plus ancien iournal da. 
nois est le Berlinse-Tidende, fondé en 1749, écrit / l'o- 
rigine en allemand, et qui, sauf les année« 1848 et 189, a 
tmjours é une feuille miuisterielle. Ce lut seulement eu 
1831 que l'opposition eut son organe dans le drelandet, 
qui a fini par devenir le représnt du scandinavisme, et 
qui atteignit l'apogée de sou sues en 188. Le hoeben- 
havns-Posten, fondé h la mme Cole et longmps or- 
gaue de l'opposition, mais psssë aujourd'hui dans les rangs 
du parti conservateur, t toujours un journal important. 
Le Fl9ve Posten, fondé çers 18, et le Dbladet nt 
des feuilles seeondaires. Le parti national danois a créé en 
189, pour lui rvir d'organe spécial, le Danevire. 
La plus ancienne leuflle publique de la Noasç, le Chris- 
tiania.lnlelligenlssedler, fut fon.léeen 1763. Les Adress- 
couloirs Eflerrelninger de rgen parurent en 1765 ; ci 
les Trondhyen Borgerlige Realsoles privile9irte Adress- 
couloirs Eferrelninger de Drontheim en 1767. Toutefois 
les journaux norvégiens n'curent point d'importance poli- 
tique avt 1833, époque où eommença la lutte des pas, 
celui des fonctionnaires publics et de l'intcltigenoe,  celui 
des paysans et de leurs iarts. Le Den Consitulionelle 
devint a partir de 1836 l'organe du premier, et en 187 il 
a fusionné avec le Torse-Rigs-Tdende, q»i existe depuis 
1815. Le Motgenblad , iournal fondé en 1819 devint l'or- 
gane du parti populaire. 11 faut aussi mentionner le Chris- 
tiania-Poslen, qui parait depuis mai 188. Parmi les jour- 
nattx de province a»jourd'hui exisnh, il n'en t p un 
seul qui da de plus loin que 1833, et la plupart ont à 
peine dix années d'exislenoe. 
Le premier journal qu'eut la TQçte fut une feuille que 
Verninhac, ensoyé de la république française près de Sff 
lira I11, fit imprimer h Péra, en 1795. Vers 1811 on y publia 
les bulletins de la grande armée. Toutefois, le vdritable 
fondateur da jo»rnahme en Turquie fut Alexandre Bloque, 
qui en 1825 créa à Smyrne un journal français, intilolé d'a- 
bord Le Spcclaleur de l'Orient, et plus lard Courrier de 
Smyrne, feuille qui de 1825 h 1828, pendant l'insurrection 
grecque, exerça une grande influence. Le mdme A. Blaqto 
lunda en 1831, h Constantinople, le Monil« Oltoman, le 
ourn oRiciel de la Po, dont il paraR aussi depuis 1832 
une traduction lurque intilulée Taquimi-Vaqdi, et dont à 
sa morl, an'ivée en 1836, la rédaclioa passa aux mains de 
Franceschi, mort lui-mème en 1811. Pendant ce iemps, à 
Smyrne, le Currier de Smyrne se anslormait en Jou»nal 
de smyrne. En 1838, Bargigli y fonda L'Echo de l'Orient, 
et tre peu plus lard Ewards L'Impartial de Smyrne. Des 
trois iournaox qui existërent pendant quelque temps simul- 
lanëment a Sm)rne, c'est le dernier qui seul continue toujours 
h s'y publier. Les deux autres ont ëté trasrëés à Cunstan- 
tinople, oé, réunis dcpuig1816, ils paraissent sous le titre de 
Journal de Conslantinople, cho de l'Orient. Il existe en 
outre h Conslanlinople un journal en lan»ue turque, fonde en 
183 par Cburdfitl, Djeridei-Havadis ; deux autres iournaax 
froncis, le Courrier de Conslantinople et le Commerce de 
Conslantinople, sans complet quelques autres feuill, rédi. 
gées en italien, en grec moderne et en arménien. Apr Cons- 
tantinople, la ville de l'Èmpire Ottoman qui poesède le plus 
de journaux est Smyrne, o0 on en comptait b en 185. 
La presoe périodique des Arméniens, qui sous ce rapport 
nt les plus aancs des peuples de l'Orient, a pris bien 
autrement de d/.veloppement que celle des Turcs. Il n'y a 
guère de ande ville de l'empire turc habitée par d Ar- 
méniens o0 ux-ei n'aient une feuille qui leur serve d'organe. 
De 1812 à 185 les blécbiristes ont suoesivement lait 
paraitre à Constantinople 3 feuille périodiqu. Ton- 
telois, le premier journal proprement dit que les Arméniens 
aient eu h nstanlinople a été le llajasdan ( 186-189 ), 
remplacé en 185 par le oiyan-Aghawni, et en 1853 par le 
Massis. Le Hairenhasser parait depuis 189 h icomédie. 
L'Araradian Arschaluis, qui parait depuis 1810  Smrne, 
est une feuille extrëmement répoedue parmi les Arméniens 



666 
Le journalisme, qui à l'époque de la rvolution de 1848 
avait pris en Horom£ de larges développements, y a té à 
peu près supprimé à la suite de la révolution. Il ne s'y pu- 
blie plus aujourd'hui que 2 journaux politiques : le 
àapesti Hirlap, Isazette olficielle du gouvernement, et le 
:Budapesti l'aplo. La presse littéraire, en revanche, ne laisse 
pas que d'T déployer une certaine activité; et le nombre 
de feuilles et de recneils uniquement consacr aux lettres, 
aux sciences et aux arts an commencement de 1855 était 
de 15. 
En Ga/:c£ le journal prit une grande part à la lutte pour 
l'indépendance nationale; mais l'obligation de verser un 
cautionnement, établie par la loi de 1833, lit disparattre toutes 
les feuilles existant à cette époque. Dës l'année suivante 
cependant, il se fondait des journaux en mesure de satislaire 
la loi, entre autres le 1àp, ou le Sauveur, écrit en fran- 
çais et en grec, et I'A0voE, journal d'opposition, qui conti- 
nuait encore à paraltre en 1855. E 181 on fonda le Moni- 
teur grec, journal français. E 1851 on comptait en Grbce 
51 journaux oncrits priodiqnes : Le Miroir grec, fondé 
en 1852 et redigé en français, et le lloEv£)A/vto% Ibndë 
en 1853 o passent pour les organes de l'int6ret russe ; tandis 
que le Spectateu," de l'Orient est un journal redigé dans 
le sens nalional par Renieris. 
UA_',çg'r£aae est de tons les pas de l'Europe celui où la 
presse a pris et conserve le plus dïmportance, bien que le 
journal y soit d'origine pics récente qu'en ltalie et en Aile- 
magne II se peut que sers la fin du seizième siècle quelques 
écrits fugilifs en forme de gazette aient clé publiés, soit 
par ordre du gouvernement, soit par des particuliers ; niais 
il a Ce prouvé que l'Enghsh Mercurw, qui se lrouve au 
Musum Britannique, et qui porte la date de 1588, est nue 
pice apocr.phe. An commencement du règne de Jac- 
ques t  parurent les 1ews Letters, on Igoueltes ix la main, 
contenant un aperçu des événements les plus récents dans 
le domaine de la politique, du commerce et meme de 
la litleralure, par lesquelles se fit eonnailre un certain Sat- 
Il,autel Bulter, et dont le manuscrit original, reproduit par des 
copisles, s'envoyait par la poste à des abonn,s. C'est sons 
la direction do mème individu que parut rëguliè,'ement, 
partir du 23 mai 162OE, Sous le titre de Tle certain IVews 
o.f the preseut Week, la première gâzelle hebdomadaire 
imprimée, s,ivie bient6t du Weeidy Courant et deplusieurs 
aubes. Les guerres nielles farorisèrent les développements 
du journalisme, parce que les divers partis curent recours 
à la press pour propager leurs opinions. C'est ainsi qu'on 
vit paraitre une foule de feuilles parlant quelquefois les 
titres le plus bizarres, comme The Seuls Dove, The Parlia- 
ment Kle ; The secret Owl ; Mcrcurius Acheronlicus, or 
2Vews front Hell; Mercurius Democritus ; Mercurius 
Mastyx, etc. Elles n'curent pour la plupart qu'un.e exis- 
tence éphe,oère, le long-parlement ayant jugé bient6t op- 
portun de les soumettre i la censure, qui sous le règne de 
Charles 11 lut d'une severité tours draconienne. En depit 
de ces enlraves, la presse periodique prit toujours plus de 
force et d'ex lension. En 1662 on fonda le Kingdom's lntelli- 
9encer, qui essaya de donner à ses communications le plus 
de varielé et d'independance possible, et dont le succès dé- 
termina en 1663 le censeur L'Estrange à publier l'lntell- 
9encer» ui en 1665 se transforma en gazette de cour, 
publiee b. Oxford, et qui continue encore i paraitre aujour- 
d'hui sous le titre de Landau Gazette. Il ne manqua pas 
non plus de journaux d'opposition, et dans le nombre on 
remarque suriner The |Veekly Packet o/advice from 
lome (1678-1683). L'Observator (1680) et l'lteraclius 
ridens (1681-168"2) délndirent le parti de la cour. En 
résumé, de 1661 à 1688 il se publia en Angleterre plus de 
70 journaux, dont le plus grand nombre mourureut an 
bout de q,elq,es numéros. Dans les quatre années qui 
suivirent la rëvolution de 1688, il n'en parut pas moins 
de 26 nuuveaux, entre a.ulres le Mercurius lieformatu.ç, 
lé&gé par $'cliv¢ood. Le plus grand nombre des journaux 

JOURNAL 
parurent et paraissent encore à Londres. C'est à Newcastle 
en 1639, que parut le premier journal de province. La pre- 
mière gazette qu'ait eue l'Êcosse fut le Mercurius laolti- 
tus, reproduction de la feuille damme nom publiée à 
Londres par un certain Marchmont Needham, l'amide Millon, 
et qui en 1653 s'imprimait dans le camp mme de Cromwell, à 
Leith. Jusqu'au règne de la reine Arme la plupart des journau x 
ne parurent qu'une fois la semaine, ou bien deux fois, conmae 
l'Orange Dtelligencer. C'est en 1709, quand les ictoires de 
blarlhorough firent naltre le besoin d',me plus rapide com- 
munication des nouvelles, que naquit à bien dire le premier 
journal, le Daily Courant, suivi bienl6t de plusieurs 
tres- Désormais les journaux ne s'efforcèrent pas seulement 
de l'emporter sur leurs devaneiers par des publications plus 
fréqnentes, ils prirent une position politique plus Cevée et 
commencèrent aussi à exercer une ii¢.luence plus pui- 
saute sur l'opinion publique. La liberté de la presse exis- 
tait bien en droit; mais en fait elle était soumise ix de nom- 
breuses restrictions et entraves, tant de la part du gouverne- 
ment que de c/elle du parlement. La taxe du timbre établie 
en 1712 fut un coup mortel portéà la prospérité des journaux ; 
elle tua bon nombre de feuilles, et, quoique supprimée pen- 
dant quelque lemps sous le règne de Georges I , on la r6- 
tablit en 1725. D'un demi-penny elle tir successivement 
portée ix 4 penne; et cet état de choses dura jusqu'en 1836, 
époque off par suite de la publication toujours croissante 
de journaux non timbres, on se sit forcé de la r6duire à un 
penny. La publication des dëlihrations du parlenent fi,t 
pendant longtemps interdile sous les peines les plus sé- 
,¢ères. Cependant, à partir de 1715, il parut un compte- 
rendu sommaire des plusimportantes séances dans le lloyer's 
Regisler, puis des anal),ses plus Cndues, plus complètes, 
dans le Landau Mayazine et dans le Gentleman's Ma- 
gazine, à la rédaction duquel 3ohnson, Gnthrie et Itaw- 
kesworth taien! atlaches comme reporters. Ce lut seulement 
sous le règne de Georges I11,  l'époque o0 le lVorth-Britun, 
rédigé par Wilkes, et les Letlres de duo i us, pnbliees de 
1767 à 1771 dans le Publie Advertiser, donnèrent à la pr.sse 
un plus puissant essor, qu'un éditeur entreprenant, appelé 
Almon, osa le premier publier completement les debats du 
parlement dans son journal, le Lonelon Evenm-Post : son 
succès encouragea d'autres à l'imiter. Les diteurs de jour- 
naux que le parlement lit arrèter entame eot,pables d'a'voir 
+iolé ses prixiléges lurent remis en liberté par décisions 
judiciaires; et le conflit se termina de telle façon, que le. 
journalistes purent continuer à imprimer le compte-rendu 
des séances du parlement, bien qn'aujourd'hui encore ils n'en 
aient pas l'autorisation olti¢ielle. Les dé*eloppemenls plus 
paisibles de la vie politique augmentèrent si rapidement la 
circulation des journaux, que le chiffre de leurs tirages réu- 
nis, qui en 1753 ëtait de 7,t11,757 feuilles par an, s'levait 
en 179-). ix 15,005,760. Le plus grand, le plus influent de 
tous les organes de la presse anglaise, The Times, parut 
pourla première fois en 1788, comme eontinuation du Daily- 
Universal Begister. C'est aussi vers la même poque que 
Peler Stnart fonda le premier journal d,i .soi,', The Slar. 
Depuis la révolution française Ici lournaux se sont ex- 
traordinairement multipliés dans la Grande-Bretagne ainsi 
qu'en lrlande. E Angleterre mëme il ne paraissait encore 
en 1782 que 58 journaux, dont la plupart méritaienl à peine 
ce nom. En 18'21 leur nombre était déj de 266; et dix ans 
plus tard il dépassait le ehifli'e de 300. D'aprSs ,in rapport 
officiel, publié en 1850 par ordre d'un entaitWde la ci:ambre 
des communes, le nombre des journaux et éerits per_;odi 
ques de la Grande-Bretagne, non compris les Magazines, les 
Beviews et les journaux à 1 peuny, était en totalitç de 62 
dont 133 paraissant à Londres et 20 daus les autres parties 
de l'Angleterre, 17 dans le Pas de Galles, 113 en Ëcosse 
et 110 en lrlande. Les journaux qnotidieus, qui toutefois ne 
paraissent point le dimanche, n'existent guère que dans la 
capitale, où l'on en comptait 3 en 1724, 13 en 179 et 16 
en 1851. Depuis cinq,ante ans ils uni énormment gagné 



JOUBIIAL 
pour oe ,lui est de l'Cendue du format et de la diversité des 
matières ; mais le chiffre de leurs tirages respectifs a plut6t 
dimleué qu'angmenté, attendu que tous les journaux qu'on 
a essaye de créer depuis n'ont pu se soutenir contre la 
concurrence du Times» à l'exception du Daily Yews et de 
quelques feuilles du soir. En 1854 voici quels étaient les 
tirages quotidiens des six principaux journaux de Londres 
publiés le matin : le Times, 51,0I humCes; le Mornin9 
Advertiser, 7,63 ; le Daily-Yews, ,75; le Morning He- 
raid, 3,700; le Morning Chronicle, 2,791; le Morning 
Post, 2,660 ; celui des principaux journaux dusoir, le Sun, le 
Globe et le Standard, était de 3,636 exemplaires pour le 
premier, 2,7t6 pour le second, et 1,322 pour le troisième. 
La prééminence du Times date surtout de ces dernières 
années. En tsS0 son tirage quotidien n'était encore que 
de 35,000 exemplaires, et pour le second semestre de 1854 
il avait atteint le chiffre de 50,95t, tandis que celui des cinq 
autres journaux du matin memionnés plus haut n'était en- 
semble que de 2t,3t7. 
Le plus ancien des journaux de Londres dont il vient 
d'ëtre question est le 31ornin 9 Chronicle, qui fut publié 
de 17,69 à t789 par le célèhreimprimeur Wood[all, et passa 
ensuite aux mains de Perry, homme qui a singuiièrement 
contribué aux progrès du journalisme anglais. Après avoir 
été pendant longtemps l'organe des whigs, cette feuille fut 
achetée par les peelites; mais depuis ce te époque, malgré le 
mérite incontestable de sa rédaction et l'arrivée de son parti 
aux affaires en 1853, elle a perdu une grande partie deses 
lecteurs. Sa circulation annuelle, qui était de plus de 3 mil- 
lions d'exemplaires en 1838, est réduite aujourd'hui au quart 
de ce cliiffre. Elle représente en politique les principes du 
parti conservateur libéral, le libreChange, et en matiëre de 
religion défend avec Gladstone et Sidney Herbert l'ecole 
sete. 
Le Marron 9 Post, fondé en 1772, passa en 1795 aux 
mains de Daniel Stuart; ce fut l'époque de ses plus brillants 
succès, et il compta alors au nombre de ses redaeteurs des 
hommes tels que blackintosh, Coleridge et Lamb. 
Plus tard il épousa la cause et les intérèts de l'ultra-torysme 
et devint le journal favori de l'aristocratie et du monde alC 
gant. Il consacre aux nouvelles des cercles fashiouables, 
ce qui se passe à la cour et dans les grandes familles, ou bien 
aux mouvements de pérégrination du personnel diplomatique, 
une partie de l'espace que les autrea famille» reservent pour 
la politique. 51algré ses principes tories et protectinnnistes, 
il a tout récemment défendu avec ardeur le systëme de po- 
litique extérieure de lord Palmerstor, et passe pour l'organe de 
cet homme d'Etat. Aussi fut-il parmi les journaux de Leu- 
dres le premier à se prononcer en laveur du coup d'Etat 
du 2 d Ce mbre 1851. Il est lu surtout dans les hautes clas- 
ses, et son ¢hiffi'e de vente reste à peu près stationnaire. 
Les deux autres journaux tories, le Mornin tlerald 
(fondé en 1780), et le Standard (fondé en t827), sont, au 
contraire, en voie de décadence marquée. Le premier, qui 
en 1837 tirait annuellement 1,925,000 feuilles, en était ré- 
duit en 1850 à t,139,000 ; et dans le mèmeespace le second 
du chiffre de 1,330,000 était tomhé à 92,000. 
Le Mornin 9 Advertiser, fondé en 1793, par une société 
de restaurateurs et de propriétaires d'h6tels garnis, a beau- 
coup grandi en importance depuis qu'il s'est posé en organe 
du parti radical le plus avancé. Sa circulation annuelle, qui 
en 1850 n'était encore que de 1,500,000 èxemplaires, s'Ce- 
vait en 185 à 2,500,000 exemplaires. 
Le Daily lYews fut fondé en tst5 par D i c k e n s et Dilke, 
avec le concours de l'Anti-CornlatLeayue; son but tait 
essentiellement mercantile. Il devait opérer dans la presse 
anglaise la m.me réforme que la presse à bon matchC re- 
présentée par Le Siècle et par La Presse, avait opérée dans 
le journalisme parisien. Chacun de ses humCes n'était vendu 
que trois pince, c'est-à-dre à bien meilleur marché que les 
autres journaux. Ce joual réussit au delà de loule 
rance, et ds sa seconde année son existence (.tait assurée; 

667 
de sorte qu'en en cédant la rédaction en chef, Dickens put 
réaliser un hénéfice considérable. Comptant sur la popu- 
larité acquise désormais à cette feuille, la nouvelle admi- 
nistration crut possihle d'en élever le prix au niveau des au- 
tres journaux quotidiens, et le porta à cinq pence. De ce 
jour date la diminution de son débit. Au lieu de ,500,688 
exemplaires qu'il avait tirés en 188, il n'en lira en 
que t,152,000, et depuis lors sa situation ne s'est pas araC 
lierAe. . . 
Parmi les autres journaux du matin qm paraissent à Leu- 
dres. il faut encore citer le Public Ledyer, créé en tT0, et 
le Commercial Daily List; et en fait de journaux du soir, 
l'Express, le Lloyd's List et le SMppin Gazelle, qui s'a- 
dressent surtout au commerce. Une gazette du soir, puhliée 
par l'administration du Times, l'Fvenin 9 Mail, ne parait 
que trois fois la semaine, et, comme le Saint-James's 
Chronicle, autre journal du soir ne paraissant que tous les 
deux jours, ne compte qu'un puhlic fort restreint. Aussi 
bien à Londres, comme à peu près partout, les journaux du 
soir comptent beaucoup moins de lecteurs que les journaux 
du matin. La gazette officielle, TheLondon Gaette, ne para|t 
que deux fois la semaine. 
En fait de journaux ,d_e province, dont le plus grand 
nombre ne paraissent qu une ou deux fois la semaine, les 
plus anciens sont le-Starnford Mercure, fondé en 
l'Ipswich Journal (1737), le Chester Courant (1733), la 
Birmin9ham Gazette ( 1741 ), le Bath Journal ( 172 ) et 
le Derby Mercur (1742). Les plus répandus sont le 
G'uardian et l'Examiner, tous deux publis à Manchester, 
et le Liverpool Journal. La polémique y tient peu de place; 
ils sont presque exclusivement consacrés aux intérètslocaux. 
Les plus anciens des journaux écossais aujourd'hui existants 
sont l'Edinburyh Ga=ette ( 1699 ) et l'Edinburyh Evenin 9 
Courant ( t705); et les plus lus, le Witness et le Glasyow 
Courier. Les plus anciens journaux irlandais sont The Bel- 
afast lVewsletter (t757) et le Limerck Chronicle : comme 
influence, la presse irlandaise est de beaucoup inférieure à la 
presse .anglaise et mème à la presse écossaise; toutefois, 
comme organes du parti ultramontain, le Tabler et le Free- 
man's Journal ont une importance particulière. 
La publication d'un journal en Angleterre entraine des 
frais énormes ; un grand journal du matin salarie d'abord un 
rédacteur en chel, dont les honoraires sont tout princiers. 
C'est lui qui représente la propriété, qui surveille toute 
l'entreprise, qui la diriee et qui dans les cas difficiles est 
chargé de prendre une détermination. C'est aussi lui qui 
rédige ou plut6t, car il est beaucoup trop occupé pour cela, 
qui fait ré.liger les articles de tête (leadi» 9 articles), ce 
que nous appellerons les premiers-Londres, qui en donne 
les sujets, qui les retouche au besoin, afin que la rédaction 
gnérale du journal reste toujours fidèle à sa couleur poli- 
tique. Il lui faut en outre salarier un redacteur en second, 
chargé de la rédaction proprement dite, ou, comme on dit en 
France, de la cuisine du journal, qui met en ordre les ar- 
ticles, indique quels sont ceux qu'on doit emprunter aux 
feuilles de province; un sous-rédacteur est placé sous ses or- 
dres. II y a en outre à payer un rédacteur spécialement 
chargë de tout ce qui a trait à la politique étrangère, et 
souvent aussi un autre rédacteur, chargé de toute I.a partie 
littéraire du journal ainsi que de ses comptes-rendus indus- 
triels. Vient ensuite le rédacteur de l'article CilJ, ou article 
consacré au cours des effets publics et des valeurs de toutes 
natures (etCs à la bourse, qui a son bureau spécial dans 
la Cité de Londres, d'où il envoie chaque soir son article an 
journal à la rédaction duquel il est attaché ; puis les nom- 
breux r e p o r t e r s, hommes instruits, jeunes Iégistes le plus 
souvent, dont la couche inférieure fournit les douze à seize 
sténographes à qui incumbe le soin de rendre compte des 
discussions du parlement, ou bien qu'on envoie en province 
recueillir les dëbats des procés célèbres, les dis(ours pro- 
noncés dans le« asemblècs publique% elc. Enfin, il " a encore 
les Fenny-a-liners (rédacteurs  t penny la ligne), gens 
8. 



668 
qui, sans reeevoir d'émoluments fixes, fournissent au jovrnai, 
, raison d'un peunl/la ligne, les accidents, les incendies 
dont Londres et ses enirons ont pu tre le the.Mre, ou bien 
encore les débats des cours tufCleures de justice, et notam- 
ment des tribunaux de police. Une des parties les pins con- 
teuses de la rédaction d'un journal anglais, c'est sa cor- 
respundance étrangère, partie qui a subi d'essentielles 
modifications dans ces derniers temps. Avant la révolutioa 
de Février, Paris, Madrid et Li»bunue (ces deux dernières 
villes, peut-être bien par suite d'habitudes prises du temps 
de [;apuléon), Catent les villes principales oh les journaux 
entretenaient des correspondants à poste fixe. Aujourd'hui 
ils sont obligés d'en avoir sur tous les points du monde 
se débattent des intérëts politiques de quelque importance, 
dans les deux AraCiques, aux Grandes-Iades et mme en 
Austraiie. Ces correspondants, qui recueillent jusqu'aux ru- 
meurs de bourseet mme jusqu'aux canards, doivent aussi 
rendre compte des événements dont ils sont témoins, les 
apprécier, expédier des dépgcbes telCraphiques, etc. Les 
rédacteurs mililaires furment encore une autre classe im- 
portante, surtout depuis la conflagration survenue en Orient. 
Pour contenir l'immense quantité de matériaux ainsi recueil- 
iis, il a fallu que les journaux anglais adoptassent des for- 
mats gigantesques. A c01e du Times, ci surtout en calculant 
ce qu'il y entre de matiëre, les journaux de Paris ont l'air 
de journaux imprimes à I.itlipot. L'extension que la presse 
anglaise a etWainsi amenée à prendre n'est pas,  beauco«p 
prës, en rapport avec les bénéfices réels qu'elle produit, le 
plus souvent absorbés et bien au del par les frais généraux. 
Le bon temps de la presse anglaise, ç'a été l'intervalle compris 
entre 18i5 et 1825. Que si le chiffre des tirages était alors 
inférieur à ce qu'il est aujourd'lmi, car les journaux les plus 
répandus tiraient alors à peine à 8,000 exemplaires et les 
journaux secondaires à 3,000, ils n'en donnaient pas moins 
à leurs propriétaires des profits bien plus cousidérables qu'à 
présent. Ainsi le Mornin9 Herald rapportait au del de 
6,000 liv. st.; le Times, entre  et 5,000; le St«r, ,000; 
le Courier, près de 8,000. En t820 le ,llormag Chronicle 
rapportait  Perry, son propriétaire, 10,000 liv. st. C'est le 
produit le plus élevë que journal ait jamais encore donné, 
a l'exception du Ternes. Les annonces sont la source la plus 
productive des bénëlices realisés par les journaux anglais, 
et elles l/ affluent avec tant d'abondance, qu'elles nécessi- 
tent de nombreux suppléments. Les ventes d'hameuble 
vont en rande partie au Times, et les annonces de libraiie 
au DailU iVews. Le Globe a la spécialité des annonces mdi- 
cales; et le Public Ledger vit de ses annonces marilimes et 
des ventes à l'enchère. 
Les journaux hebdomadaires jouent dans la presse an- 
glaise un r|e non moins importat qe les ournaux quo- 
tidiens. En t85 il se publiait ë, Londres seu'l.emerd 60 jour- 
nanx paraissant le samedi ci 26 paraissant soit le dimanche 
mëïne, soit d'autres jours de la semaine. Les plus impor- 
tants étaient i'ExomDer et le Leader, organes du parti 
radical ; le John Bull et le lrit«nnia, organes du parti 
tory; le Speclolor, l'Atlas, le Bell's weekl U Mesenger , 
le Weekly DLspotch, le Suidop Times et la Profs. Ces 
différents journau',: coùtaient, comme les journaux quotidiens, 
cinq ponce, ti,nbre compris, et quelques-uns d'entre eux 
ont des proportions encore plus gigantesqug« que le 
La réduction du droit de timbre, qui a eu lieu en 1ç55, a 
permis d'ailleurs aux journaux existants de réduire lem" prix 
«le molliC et a provoqué la création de journaux nouveaux 
dans beaucoup de grands centres de population où il n'exis- 
tait point encore d'oanes de l'opinion publique. Toute- 
fois, ce sont trois journaux hebdomadaires au rabais qui 
out la circulation la plus étendue, , savoir : |es /Vews of 
lhe World (tirage en 185, 109,to0 exemplaires par 
«emaine), le Llo9d's News Paper, publié depuis 182 par 
DouglasJcrrvld, et le Wee,-! U Times, fomlé en 147 (tirage 
en 151, 75,0- exemplaires). Le seul gland jot, rnal du di- 
manche qui, à l'instar du Times quotidien, ait vu son ri- 

JOURNAL 
rage s'accroltre démesurément dans ces dernières annë, 
a été le journal illostré Thé London illustratecl ¥ews, qui 
tire aujourd'lmi à prës de 150,000 numérns par semaine. !1 
faut encore mentionner le Punch, journal satirique, rédigé 
avec infiniment d'esprit et de talent  8,183 exemplaires par 
semaine), et le Diogenes, qui depuis 1852 lui fait concur. 
rence avec un remarq,able succès. 
Toutes les colonies anglaises ont leurs journaux spécim,x, 
et la presse a pris surtout d'importants développements 
dans les Grandes-Indes. En 1846 déjà il paraissait à Cal- 
cntta six journaux quotidiens, organisés absolument comme 
ceux de la mère patrie. On y co,nptail en outre trois jour- 
naox paraissant trois fois par semaine, et six journaux heb- 
domadaires. Toutes ces feuilles étaient rédigé, es en anglais. 
A Bombay if se publiait ,ngme dix journaux paraissant deux 
fois par mois. La plus ancienne de toutes ces feuilles est la 
Calcutta Gazette, fondée en 1784. $près elle il faut citer 
le Friend of lndia (1835), le Calcutta Asiatic Obser- 
ver, le Bog«l Repo,-ter, etc. A Bombay paraissent, entre 
autres, le Bombay Times, le Bombay Courier, l'Over- 
land Bomba U Timcs, î;œe lndian 1'ews, etc. ; à Madras, 
le Madras Spectator, la Madras Gazette, le Madras Alhe- 
noeum, etc. Parmi les plus importants journaux pvbliës en 
langue anglaise dans les provinces de l'Inde, il faut mentionner 
la Delhu Gazelle, les Murshedabad ,'fews de Behrampure, 
le Curachee Advertiser de Sindh, le Colombo trftes, pu- 
blié à Cellan, le Singapore Chrorzicle, et le Singapore fl ce 
Press, paraissant à Singapore, le Malacca Observer, le 
Maulmain Chrwzicle, etc. Le nombre et l'importance des 
journaux pobliés en langue indigène, d'après le modèle des 
feuilles anglaises, vont toujours croissant. Ils sont redigés 
soit par des Européens, soit par des indigènes instruits, ou 
encore parties missionnaires, et, tout en s'occupant de poli- 
tique, ont des tendances religicuses. En 1850 il se publiait 26 
feuilles en langue hindoustani, dont 7 paraissaient à Agra, 
8 à Dehly, 5 à Bcnarès, 2 à Merut, et t dans chacune des 
villes de Lahore, Bareilly, Simla et lndore. En 18 le nom- 
bre des ieuilles rédigées en Ifindoustani allait de 55 à 
Les plus anciennes feuilles indigènes sont les journaux ré- 
digés en bengali. Le premier journal fondé et rligé par 
un indigëne fut le umatschar Tschaadria ( 182 ), qui 
parut longtemps sous la direction de Bhabunitschara Baner- 
dji. Il existe aussi des journaux rédigës en gouzerate, en 
mahratte, en tamoulique et en singbalais. Il s'est formé 
le, rient aux Grandes-lndes une presse littéraire à l'insta,- de 
la p,esse littéraire anglo-indienne; nous nous reservons d'en 
parler a l'article REVUES. 
En Cnts', il parait  Canton le Canton legister, fondé en 
1828, etle Chinese leposilory, fondé en 1833 par des mis- 
sionnaires américains; et depuis une dixaine d'années seule- 
ment, The HongÀon 9 Register, The Friend of Ch«na et le 
China Mail; enfin, a Sbanghai, le 3"orll China Herald. 
En AcsmtLm, le journalisme a pris aussi les développe- 
ments les plus rapides, encore bien que la pluparl des jour- 
naux qui yont parujusqu' ce jour n'aient eu qu'une existence 
éphémère. En 185 il se publiait djì dans les différentes co- 
lunies de l'Australie plus de 30 journaux, la plupart heb- 
domadaires. On en comptait 8 à Sidney, dont t quotidien ; 
3 à Melbourue, dont I quotidien, le Melbourne Argus; 1  Gée- 
long; 6 a Adé|/ide (Australie méridionale); deux à Swan- 
River, et t3 à la Terre de Van-Diëmen. Les journaux les 
plus importants de la Iiouvelle-Galles du Sud sont le 
Sidneu Mornin9 Herald et le Sidneu Monilor. Dans la 
seule ville d'AdCaide on comptait en 185t douze imprime- 
ries, d'oh sortaient 13 journaux, dont t t en anglais et 
en allemand, la Deutsche Zeitun9 et la Sadaustra- 
lisch Ze;tun 9. Depuis lors de nouveaux journaut ont 
surgi dans tous les districts aurifères, par exemple le 
Ballarat Times et le 2loulff .tlexander M«il. A l'occasion 
de l'augmentation de ses prix d'abunuemcnt par suite 
l'accroissement considérable donné,/ partir de janvier 1855 
à son format, le Melbourne Argus publiait quelques délaiis 



JOURNAL 
intéressants sur son budget. Les frais de cette publication 
étaient de 300 liv. st. (7,500 ff.) par jour, ou 93,900 tir. st. 
(2,347,500 ff.) par an, à raison de 313 numéros pour 
l'aune. (On sait que I jooruaux quotidiens anglais s'abs- 
tiennent de paraltre le dimanche. ) Les principales dépenses 
se répartissaient ainsi : papier, 30,000 liv. st. ; compost- 
tion, 27,000 liv. st.; tiraqe, 12,000 liv. st.; port, 5,000 
liv. st. ; redaclion, 10,000 liv. st. (soit 250,000 fr.) par 
année. A la terre de Van-DtCan on comptait déjà en 135 
10 iournaux paraissant a Hobarttown, et 2 ì Launceslon; 
entre autres la feuille officielle, Hobarltown Gazette, et le 
Colonial Times, fondé en 1517. A la Nouvelle Zélande, tout 
de suite après la création de la colonie, en 1839, il paraissait 
déjà 2 journaux : la JVew-Zealand Ga-.elle et le JVew-Zea- 
land Adverliser ; en ts,St on en publiait 6. Aux lies Sand- 
wich, ì Honolodou, il se publie phlsieurs journaux, entre 
autres The Polynesian (fon,lé en 18,33) et The Friand. 
La première gazette qu'aient eue les ËTXTS-Us de l'Amé- 
rique du Nord fut fondée en 1704, par le maltre de poste 
Campbell, sous le titre de The Boslon Kews Lutter, et con- 
tinua «le paraiti'e jusqu' l'évacuation «le Boston par les trou- 
pus anglaises, en 1776. Le mallre d« poste qui snccéda  
Campbell publia,  partir dg 1 décembre 1719, la Boston 
Ga-.etle, qui fut d'abord imprimée par J. Franklin, puis par 
Koreland. Ce dernier en ayant perdu ïimpre.sion, fonda  
ses frais le Journal of 'eEngland, qui quinze ans plus 
tard se ré,mit à la Ga--etle, et continua aloe. de paraltre jus- 
qu'en 1752, sous le titre de Boslon Ga--.elle and Wce,ç-ly 
Regisler. Pendant ce temps-là J. Franklin avait commencé, 
le 17 auOt 1721, le troisième journal qu'ait eu Boston, le 
,'ew-Enqland Courant, qui subsita jusqu'en 1727, et 
dont les meilleurs articles furent redigês par le fiëre de l'd- 
diteur, Benjamin F r a n kl i n. Vers t 731, Gridley COmlneuça 
la publication du Weekly Rehearsal, passé l'année suivante 
aux mains de Fleur, iequel fit paraltre ce journal pendant 
treize ans sous le titre de Boston Evemn9 Post. Outre le 
Weekly Advertiser de Koreland (1752-175t*), il y avait en- 
core à Boston deux autres journaux : le Weekly Postboy 
( 173- 175 ) et l'Independant Adverliser (l 7-18-1750 ). 
En 1750 il ne se publiait encore dans les diverses colo- 
nies anglaises de l'Amérique du Nord que ueO journaux. 
A Philadelpbie paraissaient l'Americaa Weekly Mercurp, 
fondé en 1719, la Pensylvanian Gazette, acbetéeen 1729 
par Franklin, qui }a rédigea pendant lrente années, et 
2 autres journaux, dont I en allemand. A New-York exis- 
taient 4 journaux, entre autres la New-York Gacettc, 
fondée en 1728 ;  Charlestown, la lïr9inia Ga--elte, depuis 
1736, et 2 autres depuis 1731 et 1734. La Ga-.ette d'An- 
napolis datait de 1728, et celle de Bbode-Iland de 1732. 
Le plus ancien de ces différents iournanx avait paru d'a- 
bord en une seule feuille, tantôt in-folio, tanbSt in.t,". Ce lut 
seulement à partir de 1718 que le A'ews Letler donna tous 
les quinze jours une feuille entière. Le chiffre de se abon- 
nés n'allait guère au delà de 300. Mais bientôt le nombre des 
journaux s'acerut comme le]r format. E 775 on en comp- 
tait dejà 3.. Immédiatement après la révolution, les journaux 
bebdomadaires de Pbiladelpbie et de New-York devinrent 
quotidiens. En 18,00 on ne comptait pourtant encore aux 
Etats-Unis que 150 journaux; en 1810 le chiffre s'en 
Cevait déjhh 359 ; il était de 8,51 en 18,28,, de 1,250 en 1834, 
de 2,717 en 1851, et de plus de 3,000 au commencement de 
18,55. Rien qu'à New-York il se publiait 82 feuilles poli!iqu .es. 
C'est au nord de l'Union que la pre.se déploie le plus d'ac- 
tivité. Sur les 2,8,00 journaux environ qui paraissaient en 
1851, 350 étaient quotidiens, 150 paraissaient de deux jours 
l'un, et environ 2,000 une seule fois par semaine. Leurstirages 
réunis.étaient de cinq tni//ioas d'exemplaires, et ils im- 
primaient chaque année plus de t2,600,000 numéros. 
Si le journalisme anglais l'emporte pour l'importance dés 
publications et pour l'influencesur le journalisme du reste de 
J'Europe, il est demeuré bien en arrière de la presse des États- 
Unis. Il n'y a pas de pays au monde o/ les journaux soient aussi 

universellement répandus et exercent une aussi puissante le. 
fluence sur l'esprit public. Une ville de 2,000/mes, qui en 
Angleterre ne pourrait avoir de journal, aux Etats-Unis en 
possède un paraissant tous les jours. Des villes de 20,000 
habitants, qui en Angleterre se oentenlent d'un journal bis- 
hebdomadaire, ou mme hebdomadaire, en ont trois ou quatre 
quotidiens. Un élablissement colonial ne se crée pas plus t6t 
dans les régions de l'ouest les plus Iointaines qu'il s'y fonde 
un journal, quelquefois mme plusieurs journaux. Ce «lui 
rend possible l'existence simullane d'un si grand nombre 
de journaux, c'est d'abord le vif intért que chacun aux 
États-Unis pren,I à la chose publique, ensuile l'etlr«Xme bon 
matchW(un journal quotidien de premier taire revient 
au plus à40 If. par an; beaucoup ne co0tent qne 30 ff., et 
quelques-uns mme 15 ff. seulement, et ils n'en sont pas 
plus mal faits pour cela), Iïmmense quantité d'annonces 
qu'ils contiennent, et l'absence de toute espèce d'impôt. Ces 
3,000 soupapes de s0reté, ménaée au trop plein «les pas- 
sinus populaire% contribuent admirablement  en empècber 
toute violente explosion. Sansdoule la presse américaine man- 
que souvent de convenance, el son toit est en g'néral gros- 
sier et brutal; mais :,l y a d'bonorables exceptions, surtout 
dans les journaux de création récente, pour la plupart ré- 
digés par des hommes instruits et bien élevés. 
Les journaux de l'Uninu les plus considerés et les plus ac- 
créditïs sont : la Philadelphia Gazette, l'une des plus an- 
ciennes feuilles de la Pensylvanie ; le Daily .4dverliser, d'AI- 
bany ( Êlat de New-York ); la Tribune, feuille à lendances so- 
cialistes, fondée en t - I  New-York, t le New- York Herald, 
l'un des journaux democratiques les plus influents : le New- 
Yol, commercial Adrerliser ; le Louisrille Joarnal ( Ken- 
tucky) ; le North A merican, de Pbiladelphe; le Gloe, de 
Wasbinon ; le Courier anel EnTuirer , et le Joarnal of 
Commerce, de New-York ; l'Enquirer, de Richmon«] ; le Cou- 
fier et le Picayune, de la Nouvelle OrlPans; le Repnblican, 
de Saint-Louis. Il parait dPjì en Califoruie plusieurs jour- 
naux important% tels que le San-Francisco Heralçl, le 
Commercial, les Pacitic News, l'Alfa California, et un 
journal allemand, Iali.fornia Staats-Zeitun 9. Les chiftres 
suivants, empruntés aux oeuls ]ournaux de Pbiladelphie, 
dovneront une idée de la circulation  laquelle s')ni parvenus 
divers journaux am»ricains. En 1851 le Pttblic Ledger tirait 
chaque jour à -fS,000, le Dollar .¥ews Paper et le Scotl'$ 
Weekly Paper,  -0,000 chaque semaine ; le Saturday 
Evenin 9 Post, à t,2,000, et I'A merican Courier  35,000, 
aussi par semaine. De intime qtte tous les partis poliliques 
et relieux, roules les nationalités sont repré,enlées par 
la pre«e. En 1.52 le nombre des journaux allemands pu- 
bliés dang les dif[érenls Ëtats de l'Union était de 152, dont 
t,7 en Peuylvanie, . dans l'Etat d'Ohio, 23 dans l'Êtat de 
New-York, 12 dans l'État de Missouri, 9 dans l'Êtat de 
Maryland, 8 dan le Wiseonsin. 11 existe en outre plusieurs 
journaux français (entre autres le Courrier des États. Unis, 
pobli; à New-Yo rk depnis 1828), italiens, espagnols, portugais 
et bongrois. Depuis le mois de mars 18,54, les Chinois établis 
en Californie ont une gazette ebinoise intitulée : Kin-schan- 
dschin-sin-lu (Gazette des .'qines d'Or); en 1855 il en & 
paru une seconde, en anglais et en chinois, le Tung.ngai. 
San- i,k ou The Oriental_ Les Indiens eux-mèmes commen- 
cent à avoir leurs propres journaux : Cest ainsi que depuis 
1828, paraltà New-Èchota le Cherokee Phoenix, publié parun 
Cbéroki, partie en anglais et parlie en chéroki. Les mission- 
naires ont encore fondé d'autres feuilles ì l'usage des In- 
diens,: par exemple celle qui depuis 18,52 parait à Saint- 
Paul, aaus l'État de Wisconsin,  l'usage des Dacotas. Aux 
Êtats-Unis, les seetes les plus bizarres demandent à la presse 
leurs moyens d'action et de propagation. Nous ne mention- 
nerons à ce propos que les M o r m o n s, qui n'ont pas seule- 
ment fondé qnelques jonrnaux dans leur colonie d'Utah, 
mais qui en possèdent encore en Europe, par exemple à 
Liverpool, dans le pays de Galles, à Hambourg, à Copen- 
hague, et mëme dans notre Paris. Les croyants aux t a b l e s 



670 
t o u r n a n t es publient le Spiritual Telegrah et le Spi- 
rit Messenger; eufin, le Vegetarian Me$ener sert d'r- 
gane  l'asscialin fe pur réde l'alimenhtin bu- 
mairie uquement aux taux. 
Dans I'AQu Eswço et au B, la prse pé- 
riodique, quoique oemétement au serre des ptis, ne 
lais point que d'ètre ¢galement en vvie de prvgr. Il pa- 
rait un d nombre de ivuruaux au Mexique; mai« 
seuls qui vffrent un rt gér nt la Garera de Mexico 
et la Gaceta de Va-Cru. Le Museo Mejicanv, fondé en 
9, publie souvent deremarquabtes artiçl. L'actif 
nterce dont l'isthme de Panama est le oene y a prvwqué 
la création de deux jvuaux rg en gls, le Pana- 
che Star ( SbO) et le Panama Herald (tSar . Quatre 
jvurnanx paraisoent dupes 184 dans l'Ét de Yucan. La 
Ga=eta de icaragua est le journal le plus impont qui 
e publie dans l'Amérique centrale. On peut en dire autant 
des journaux officiels qui s'impriment sur les differents 
points de l'AraCique du Sud, à Caraoes, à Bogo, à 
çuayaquil, à Lima, à Vaiparai, à Sanfiago et à Buenos- 
Ays. Au Brésil, tvut i grandes vill vnt un journal, 
t souvent même deux ; mais le grand ctre de la presse 
potique est toujvurs h Rio:Janeiro. Des atre jvurnaux 
qui s'y publient, les plus importants sont le Journal de 
Cmerc, qui existe depu 1825, et le Journal de Ro. Dans 
les Ind ooeiden, i[ parait un grand nombre de our- 
naux anglais, franis, espagnols et boHanis. 
En 1852 il se publiait 27 journaux au Cap de Eonne-Es- 
pérance, h ['exUcmité meridionae de l'Afrique, dent le tiers 
environ redigés en lane hvllandaise. Mais le seul qui 
à proprement parier, oe qu'en dvit appeler un jvuai, c'ét 
le Cape Town Mail. 
Pour complter cette revue du joualisme dans les quatre 
p«ies du monde, il ne nous reste pi qu'à fre l'histoire 
du jornal et du jvurnalisme dans noe pvpre ys; 
c'est à dessein que nous avons vmdu terminer par là cet 
article. 
En Fc, l'hiMvire du jouaHsme remvnle au Mercure 
françois ( 26  olumes; Pas 1605- t 6 5 ), imitation de l'Eu- 
9lish ,llercury, qui se raltache en premier lien à la Chro. 
ologie septe»mire,  hs[oire de la ix entre les fois 
de France et d'Espagne de 1598  160, de Paima Calet 
( Paris, 1 05 ) ; puis à une continuativn de la Chronologie 
wvennaire de 159  t59S (3 -oL; Paris, 1599), mais 
sans former un journal, dans la véritableacoeption de ce mot, 
et qui n'est guère qu'une compilation historique. La pre- 
mière çeule hebdomadre propremeut di lut fondue par 
le mecin Théophr Benaudot (né à Londr, en 1598, 
• qi d'une par[, au moyen du Bureau d'Adrses qu' avait 
[onde, et de t'autre par tu coffespondance etendue que met- 
tait h sa disposition le géncalogiste d'Hozier, avait occion 
dpprendre de bonne source oe q arrivait de nouveau dans 
le monde pvfitique. D'ard il se bornait à donner lecture 
d nouvel nsi rccueillies par lui fi ceux de s clien que 
la maladie tenait ali ; et le plaisir tout particulier qu'une 
fouie de gens, mme bien parents, prenaient à ces surfs 
de convertions lui inspira la pséc de faire imprimer ses 
neuveiles. Le premier nerv de sa G:ette (tel fut ienvm 
qu'il donna h  feuille) parut le 30 m& 1631. Le suoeès ra- 
pide de tte entreprioe, à laquelle Bichefieu pt un vif in- 
térêt, dermina Beudot, dès la publioetion de n sixiè 
humera, à se pourvoir d'un privile du roi. En dépit de 
mille atqu et des entrav e lui imsait la censure 
(dont la vritéprvvvqua par contre la publication de nvm- 
breus 'ouvelles à la main, jourux manuscrits), 
continua de rëdiger  feuille ]usqo'h a mort, arrivée en 
153. Sa Gazette passa alors aux mains de son fils, lsaaç 
Renaudot, et à la mort de celui-ci(1679), dans 
d'Ensbe Renaudot, mort en 1729. Outre la Gette deRe- 
naudo[, qui  pam4ir de 1762 parut deux fois la semaine en 
mëme temps qu'elle adroit des avis au public ci, à partir de 
1765» d uvell de u, mais ui ne demt quotidienne 

JOURNAL 
que vers la fin du dix-huitième siëcle, naquit bient6t la 
Gazette burlesque, journal en vers, que le poëte Jean Loret 
(mort en 1665) publia d'abord écrit à la main, mais qui 
fut imprimé à partir du 4 mai 165o, et qui est d'un intérêt 
tout particulier pour la chronique candaleuse de Paris 
à cette époque. Après ces deux feuilles vint le ltlercure 
9niant, recueil politique et littéraire, entrepris en 1672, par 
Donacan de Vizé (mort en 1710); après une interruption 
de peu de durée, il reparut rëgulièrement à partir de 1679, 
prit en 1717 le titre de Mercure de France, eut une cer- 
taine importance à l'époque de la révolution, et raonrut 
finitivemeot en 1815, quoique des efforts aient à diverses 
reprises été tentés sous la Restauration pour le ressusciter. 
Le second journal quotidien qui ait paru en Frange fut le 
Journal de Paris, Iondé en 1777, et qui se maintint jus- 
qu'en t825. Là se bornèrent tous les progrès du journalisme 
français jusqo'h larévolution, cri'on ne pourrait guère citer 
en lait de publications periodiques tenant de la nature 
du journal que les Annales politiques et littéraires de 
Liuguet et quelques antres recueils mensuels, tels que 
l'Esprit des Journaux et l'Esprit des Gazettes, le 
Journal du Lycde de Londres de Brissot-Warwille, 
le Joulmal historique et politique du Genevois Mallet- 
Dupan, le Journal eccldsiastique de l'abbé Barruel, la 
Sentinelle du Peuplede Mondeève et Volney, le Journal 
9enCai de l'Europe de Lebrnn et Smith, et Le Hdrault 
de la l'ation. 
Ce fut seulement à partir de l'aurore de la révolution que 
le journalisme prit uue importance réelle, et dès lors ses 
déveioppements furent rapides. Quand Mirabeau eut com- 
mencë son Courrier de Provence (2 mai 1789} par ses 
Lettres à mes commettants, cette publication provoqua 
tout aussit6t un véritable déluge de feuilles nouvelles. On 
estime que de 1789 à 1800 il ne s'en créa pas moins de 
750. Sauf un très-petit nombre d'exceptions, les feuilles pu- 
bliées alors paraissaient dans le format in-8  et infime in-2. 
La plupart n'curent qu'une existence éphémère ; d'antres 
furent supprimêes par des décisions de la commune, et plus 
tard par des ordonnauces du Directoire. Tous les partis en- 
tent leurs organes, les royalistes aussi bien que les républi- 
cains et les jacobins. Les journaux qui reflètent le mieux 
les luttes terribles de cette sanglante époque sont la Ehro- 
uiTuede Paris, rédigée par Condorcet, Noël, etc. (do 2 aoat 
1789 au 21 septembre 1792 ), L'Orateur du Peuple, publié 
par Fréron sous le nom de Martel (t790-1795), le Journal 
du Soir de Brune, Le Père Duchesne d'Hébert, les Sabat$ 
Jacobites de Marchand ( 179 t- t 792 ), mais surtout L'Ami 
d.u Peuple de llarat (12 septembre t79-2 septembre 
1792 ), le Journal de la ldpubliquefrançaise (du 25 sep- 
tembre 1792 au 9 mars 1795) et Le Publiciste de la 
blique française de Jacques Roux (da tt mars au 1 juil- 
let 1793). L'organedu clubdes Jacobins fut le Journal de 
la Montagne, rédigé par Thomas Bousseau, erg. (du 
juin t793 au 28 brumaire an m). Le Bulletin des Amis de 
la Vœeritd représentait le parti de la Gironde; sous la direc- 
tion de Mailet du Pan, le Mercure de France prit onu teinte 
constitutionnelle analogue à celle des journaux anglais, que 
conserva le Mercure britan nique, publié par le mëme écrivain 
à Londres, de 1798 à 1800. Parmi les journaux royalistes il 
faut spécialement mentionner L'Ami du Roi, publié d'abord 
par Boyau et Montjoie (depuis le t e juin 1790), puis par 
les frèresBoyou (à partirdu 1  septembre 1790 jusqu'au 
mai 1792), et eu mme temps par bIontjoie (da let septembre 
1790 au 10 ao0t t 792 }. Indépendammentde feuilles politiques 
d'un caractere grave et sërieux, publiées quelquefois pourtant 
sous les titres les plus piquants et les plus risqués ,- il parut 
aussi nu certain nombre de journaux satiriques, dont le plu» 
important fut sans conteste Les Actes des Apdtres, auquel 
travaillèrent Peltier, Mirabeau l'alné, Ghampcenetz, Sui- 
ieau,etc. (de t789  1792}. L'an I er de la liberté il paru 
tSo nouveaux journaux, et lit0 en l'an 2. En t?.91 on n'en 
"coptait plus en tout que 95, que 60 en 1792 que 50 en 



JOUIhAL 
'793, 0en t794, 35 en 1795, et 32 en 1796. En 1797 leur 
nombre remontaà 95, mais en 1798 il n'en existait plus 
que 17. 
Nous n'apprendrons à personne que sous le Consulat et 
l'Empire la presse fut soumise au régime le plus rigou- 
reux. L'un des premiers actes de Bonaparte devenu consul 
fut son arrttë du 17 janvier 18o0, qui supprimait tous les 
journaux alors existants, à l'exception des treize dont les 
titres suivent : le Moniteur universel, le Journal des Dr- 
bats, le Journal de Paris, Le Bien informd, Le Publiciste, 
L'Ami des Lois, La Clef du Cabinet des Souverains, Le 
Citoyen français, la Gazette de France, le Journal des 
Hommes libres, le Journal du Soir, le Journal des Ddfeu- 
seurs de la Patrie, etla Ddcade philosophique. De ces diffé- 
vents journaux le Mon i t eu retle Journal des Ddbats étaient 
les seuls qui datassent du commencement de la révolution ; 
la Gazette de France et le Journal de Paris, les seuls qui 
l'eussent précédte; et l'Empire une fois proclamé, ils consti- 
tuèrent ì eux quatre, avec I Petites Affiches ( fondíes en 
1612), tout le journalisme parisien. Le Journal des D d b a t s 
changea alors son titre contre celui de Journal de l'Empire, 
qu'il eonserva jusqu'à l'entrée des alliés à Paris en 1814. 
La Restauration maintint en vigueur la censure rigou- 
reuse sur les journaux quotidiens, qu'elle trouva établie par 
l'Epire; mais pendant quelque temps les éerits périodtques 
n'y furent pas soumis ; et c'est ainsi que dès 1814 Le A'ain 
Jaune put lui faire une rade guerre. Pendant quelques an- 
nées aussi elle laissa chacun libre de publier un journal, en 
se conformant à la législation spéciale qui régissait la presse, 
c'est-à-dire en envoyant chaque soir l'epreuve de la feuille 
qui devait paraître le lendemain matin, à la censure, qui 
en effaçait tout ce qui lui déplaisait. C'est ainsi que se 
créèrent successivement à partir de t814 La Quotidienne, 
feuille rédigée par Michaud aine , dans les inlért de l'abso- 
lutisme et du parti clérical; L'Ami du Roi et de la Religion ; 
L'Oriflamme ; Le C o n s t i t t t i o n n e l; L'A ristarqne ; le 
Journal du Commerce; Le Courrier Francais ; Lê Dra- 
peau Blanc; La Renonm_e ; Le Censeur E«-opéen ; L'E- 
toile; e Pilote, etc. ; eten farde recueils pȍrio,]iques : les 
Lettres Normandes; La Minerve; les Tablettes Histori- 
ques; La France Chrdtienne ; Le Conservateur; les Ta- 
blettes tniverselles, etc. Vers la fin de 1819 le gouverne- 
ment royal s'était cru assez fort pour pouvoir se passer de la 
censure préalable, et on avait vu surgir alors le plus grand 
nombre des journaux et des reeueils dont nous venons de 
citer les titres. Mais l'assassinat du malheureux due de 
Berry (13 février 18'20) par Louvel servir de prétexte au 
parti rétrograde et absolutiste pour revenir sur cette con- 
cession et replacer les journaux et écrits périodiques sous 
le régime rigoureux dont ils ne s'étaieut trouvés débarras- 
sés que pendant quelques mois seulement. On fit plus. La 
loi nouvelle, tout en respectant les droits acquis au moment 
oi elle paraissait, déclara qu' l'avenir l'autorisation préa- 
lable du gouvernement serait nécessaire pour Ionder toute 
espèce de journal ou de recueil périodique s'occupant de 
matières politiques et paraissant plus d'une fois par mois. 
C'était eonslituer, comme sous l'Empire, la presse politique, 
le journal, ":, l'Cai de monopole; c'était aussi donner une 
g,'ande valeur commerciale aux journaux alors exislanls. 
Malgré tout le savoir-faire de la censure, œux des journaux 
qui étaient voués à la délense des idées eonstitutionuelles 
conservaient toujours un cerlain cachet d'opposition qui 
leur assurait de nombreux lecteurs. C'étaient Le Constitu- 
tionnel, Le 6'mtrrier Francais , le Journal du Commerce 
et £e Pilote, que son éditeur, Cassano, rendit plus tard à la 
police. Quant à la politique gouvernementale, elle était dé- 
fendue avec des nuances diverses de royalisme et de dévoue- 
ment à l'idée religieuse par le Moniteur, journal officiel, 
par le Journal des Débats, La Quotidienne, Le Drapeau 
Blaru:, la Ga-.elle de France, L'Éloile, L'Ami du Roi 
et de la Religion, le Journal de Paris. En 1825 fut fondé 
par Darmaing nn journal quotidien d'un genre tout nou- 

671 
! 
veau, la a:ette des ribunau, qui pour paraitre n'eut. 
pas boin de olliciter d'autorisation préalable, attendu 
qu'ëtranger ì la politiqueet à ses discussions, il se bornait 
aux debats judiciaires et ne s'occupait que de ce qui se di- 
sait au palais. On sait combien grand et rapide fut le succès 
de la Ga'.elte des Tribunaux; elle en fut surtout redevable 
ì ses comptes-rendus spirituels, mais rien moins qu'exacts, 
des audiences du tribunal de police correctionnelle. 
L'arrivée de M. de Martignae aux affaires, en 1827, inau- 
gura uue ère nouvelle pour la presse, qui profita d'un chan- 
gement notable qu'on fit alors subir aux prix du port et du 
timbre (portés de 5 centimes à 10) pour élever de 72 fr. 
à 80 fr. par an ses prix d'abonnement et agrandir son format, 
afin de pouvoir, ì l'instar des journaux anglais, ouvrir 
ses colonnes ,à l'annonce payée et trouver dans ce nouvel 
élément de recettes une compensation ì l'accroissement 
surveuu dans ses fi'ais généraux. Présidée par des hommes 
qui voulaient que la charte tfR enfin une vérité, l'adminis- 
tration nouvelle supprima la censure; et désormais chacun 
put fonder un jourual en versant au trésor, sous le nom du 
g¢.'rant responsable, un cautionnement de 200,000 fr. à Paris, 
maL.- proportionnellement moindre dans les départements, sui- 
vant l'importane des villes; cautionnement rendu obliga- 
to!re vonr tous les journaux quotidiens alors existauts, pour 
ceux.là mëme qui s'occupaient exclusivement de critique 
thé'trale et littéraire. Des sept ou huit journaux de cette 
es»èce qui se publiaient h ce moment à Paris, il n'y en eut 
que deux. Le Corsaire et Le Figaro, qui purent satisfaire à 
l'obligation du cautionnement. Ils acquirent ainsi le droit de 
faire de la politiqueà leur manière, et devinrent d'ntiles auxi- 
liaires pour les journaux de l'opposition. Le Temps, La Tri- 
bune et Le A'atioual lurent d'ailleurs, avec le Journal de 
Paris, mort en 185, mais qu'on essaya de ressusciter eu I 
et avec L'Universel, organe du mioistére Polignac, les seules 
entrepri.es nouvelles qui surgirent alors. Le premier de 
ces journaux parut en octobre 1829, quelques mois après 
La Tribune, feuille rédigée par les deux frères F a b r e, qui 
d,'jà alfectait des tendances ouvertemeut républicaines ; et le 
à,rnier, le 1  janvier 1830. 
La révolution de Juillet ne modifia sensiblement la situa- 
tion laite  la presse par la Restauration qu'en abaissant de 
moitié le cautionnement des journaux; plu tard aussi elle crut 
rendre, si non impossible, du moins beaucoup plus diffi- 
cile, la fiction da gérant responsable, en exigeant que le 
cautionnement fut representé non plus par une somme 
vers,-e en espèces au trésor, mais par nne inscription de 
rente-% dont le tiers devait ètre la propriété personnelle du 
gérant et était déclaré insaisissable par des tiers, nonob- 
stant toute contre-lettre ou acte de mème nature qui pourrait 
avoir pour but de prouver que le titre de rente inscrit au 
nom de ce gerant lait en realilc  la propriété d'un autre. D'ail- 
leurs, la bourgeoisie victorieuse, qui avail maintenant en 
mains le gouvernement du pa)s, était par instinct beaucoup 
trop frian,le de monopoles et de priviléges industriels et com- 
merciaux pour ne pas respecler ce qu'elle considérait comme 
les droils acquis et imprescriptibles du journalisme. Main- 
tenir l'exercice du droit électoral à l'Arat de privilège et la 
presse  l'état de monopole eonstitua donc toute sa poli- 
tique. L'eploitation de l'opinion publique était en elfet 
devenue bien vite une grande et froctueuse industrie. C'est 
grâce  la presse que la bourgeoisie avait réussi à avoir la 
haute main dans les affaires; son erreur fut de croire que le 
iournal continuerait toujours à n'ëtre que le commode ins- 
trument dont elle se servirait pour satisfaire ses petites et 
vaniteuses ambitions ou bien ses basses cnpidités, et qu'il 
s'estimerait toujours aussi heureux qu'honoré d'ëtre à ses 
gages. Quand rie reconnut qu'elle s'tait trompée, qu'elle 
s'ctait donné un maitre, il était déjà trop lard. A en juger 
sur les apparenees, on pouvait ereore penser que la nation 
française était régie par nn gouvernement dit parlementaire 
et exclusivement recruté dans le sein de la bourgeoisie; gou- 
vernement composé d'un roi irresponsable, avec des minis- 



672 
tres responsables, et de deux assemblSes législatives se faisant 
¢qutuellement contre-poids; tandis qu'en réalilé, et sans 
mme s'en douter, elle n'obéissait plus depuis longtemps 
qu'à une douzaine de journaux imprimés à Paris et en pos- 
session de hd fournir toutes faites, tout arrétées, ses opinions 
sur les hommes et les cho.xes. Un quatriéme pouvoir s'était 
ainsi constitué dans l'État, sans que la bourgeoisie y eOt 
pris garde; et c'est ce quatrième pouvoir qui maintenant 
l'emporlait sur tous les autres. 
Dan une pareille situation, il était naturel qu'un lieu de 
rester ce qu'il devrait toujours Cre, c'est-à-dire rien autre 
chose que l'expression des Vœux et des besoins d'un cer- 
tain nombre dïndiidualités, se groupant autour de quel- 
ques écrivalns qui ont su leur inspirer de l'estime, de la con- 
fiance el de la sympathie, le journalisme, de plus en plus 
envahi par le mercantilisme et dbshonoré par la vénalité, 
ft le plu. souvent devenu un levier puissant aux mains d'une 
poignée d'ambitieux et d'intrigant.'On peut.dire de cette 
période de l'histoire du journalisme qlfel]e fut le rb_gne des 
faiseurs. Sous les doigls de ces gens-là, les questions 
étrangéres comme les questions intérieures devinrent la 
source d'immenses profits secrets. Ils se rendirent corps et 
me aux ministres en exercice, aux ministres en expecta- 
tive, aux divers prétendant, aux puissances étrangéres, 
aux banquiers, a« gros in,lutriels, aux candidats à la dé- 
putation, bref à qui voulut le aclieter. Il et de notoriété 
que pendant huit ou dix an la lu_sie fit d,fendre par un 
ournal de Paris fort en renom, mo:/cnnaut une subvention 
de 5,000 fr. par mois, les interdis généraux de sa politique, 
alliance russe, comme o11 disait ; il n'y eut pa jusqu'a 
ce sauzuinaire R o s a s, l'odieux dictateur de la lél,ublique 
Argentine, qui ne tint presque aussi longemps / sa sohle 
une feuille jouissant d'une grande publicité. Les tracés de 
chemins de fer; les maires de poste exigeant une indcmnit." 
de l'Etat; le sucre indigène declarant quc c'en Cad fait de 
la France si on ne lui conservait pas ses primes de fabrica- 
tion ; les planteurs des colonies réclamant le monopole ,i,, 
marché de la métropole et combattant d'avance, par pré- 
caution, l'abolition de l'esclaage; une foule d'autres int- 
rèts prieC, plus sordides et plus éoites les uns qve les 
autres, subvenlionnèrent alors grassement tous ceux de. 
OEganes de/'opiio qui consentirent à se faire leurs axo- 
cats devant le pays lyal, c'est-à-dire en présence des 
cbambre¢. Après cela, on ne devra pas ètre surpris q,e la va- 
leur vénale d',me g(.rance de joucnal en erCit, rapportat 
ostensiblemea! entre 3 et ,000 le. d'appointements, f01 de 
500,000 ff. au minimvm. 
Il n'y e0t eu que demi-mal dan ce/te scandaleuse ex- 
ploitation du journal, si en dehors de tous ces ignobles tri- 
potages ne s'éaient point agitees des passions non moins 
egoïstes, quoiqu'elles portassent le masque d'un ardent pa- 
triotisme n'ayant d'autre but que la gloire ci la gran,!eur du 
pas. Qe si en effet le pouvoir, avant comme après 130, 
fut la,jours reactionnaire ci de mauvaise foi dans l'interpré- 
tation à donner à la conslitulion, il faut convenir aussi que 
de ttS à t, la partie la plus active, la plus remuante 
de la presse, fut constamment en état de flagrante conspi- 
ration, et qu'elle n'eut jamais d'autre but que le renverse- 
ment Uuu ordre de choses établi aus doute plus ou moins 
artificiellemenl, ph,s ou moins légalement, mais existant 
tout au moins à l'état de fait accepté par l'immense majnrité, 
fort peu soucieuse au fond de savoir qui gouverne, con- 
damnée qu'elle est à porter toujours le bt. Ce qu'on voulait 
a,¢ant tout, c'était s'emparer du pouxoir : chaque parti se 
réservant, après le triomphe, de doter le pays de la foc-me 
de gouvernement qui flattait leplus ses passions partic,liëres. 
& droite comme à gauche, il y avait la-dessus accord tacite, 
et personne ne s'inquiétait le moins du monde de savoir ce 
que le coup une lois fait en pourrait penser et dire Jea 
Eonhomme, habitué de longue main à accepter tous les 
martres qui s'imposent à lui, et toujours résigné à payer les 
frais de leurs folies ou de leurs inepties. 

JOURNAL 
Les intrigant en tous genres avaient bien vile compris 
après 1830 tout le parti qu'on pouvait tirer de la presse; 
aussi vil.on surgir successivement, sons le règne de Louis 
Philippe, un grand nombre d'entreprises ayant pour bot 
de procurer à leurs fondateurs une part quelconque dans 
les profits directs ou indirects de l'exploitation de l'opinion. 
Mais le monopole constitué en faveur des journaux de Paris 
par la plus imprévoyante des Iégislations tac fut réellement 
quelque peu ébranlé que le jour oi], à l'aide de puissants ca- 
pitaux, se fonda la presse dite au rabais, le journal à 0 ff. 
au lien de S0. Il y eut là une espèce de révolution, un dé- 
placemenl inattendu de l'axe des influences; toutefois, 
le succès mme de ces spéculations héroïques tentées 
par des casse-cou, q,i ne risquaient personnellement rien, 
rendit encore autremenl difficile l'admission de nouveaux 
lus au nombre des heureux privilégiés. Désormais, pour 
créer un journal il fallul disposer d'au moins un million ; 
et L'Impartial, Le Monde, Le Capitale, La/Va/ion, Le Pa- 
risien, L'Esprit ptblic, etc., apprirent à leurs depens qu'un 
tel capital était souvent insuffisant. Une feuille créée, en i.86, 
exprès pour tuer La Presse de 5L E. Girardin, L'Epo- 
9ne, dévora à ce jeu-là deux millions, pour fermer hon- 
teusement boutique au bout de quinze mois d'existence. 
Après le 2- février, la liberté absolue, on pourrait mme 
dire la licence de la presse, fut posée en principe; et il y 
eut alors une véritable inondation de journaux de toutes les 
formes, de loules les coulers, mais le plus généralement 
à tendances violentes et socialistes. Dans l'espace de trois 
mois on n'en vil pas naitre moins de quatre cents, ci les 
dernières venues de ces leuilles répandaient autour d'elles 
comme une odelr de sang qui soulevail le cœur. La plupart, 
b,tons-nous de le dire, publièrent à grand'peine trois ol, 
qlatre humAras, puis moururent d'inanition et de mépris 
public. Les collections complètes de tous ces hideux pam- 
phlets (car ils n'avaient de commun avec les journaux 
proprement dits que cette qualification, dont ils se tar- 
guaient mensongìrement dans leurs sous-titres) ne laissent 
pas que d'avoir aujourd'hui un certain prix. 
Les terribles journées de juin firent comprendre aux 
hommes placés à la tte des affaires la nécessité de mettre un 
terme à cci effroyable dtbordemeut de toutes les mau- 
vaises passions et de rassurer enfin la société effra'ée. 
3lais les mesures prises contte la presse ulb'a-révolutionnaire 
curent precisément pour résultat de raffermir le monopole 
de celle vieille presse à laquelle la France avait dO succes- 
sivement deux révolution; monopole qu'avait singulière. 
ment compromis la suppre»sion du timbre, consequence 
nahlrelle de |a révolulion de Fevrier. On sait que l'Assem- 
blée nationale s'ilnagina sauve.- le pa)s en rétablissant le 
cautio,nemenl, ainsi qu'en continuant aux seuls journaux 
pourvu d'un cautio.nnemenl la jouissance du privilége postal 
en vertu duquel l'Etat se charge de transporter et de dis- 
tribltel ur tous les points de la France tes produits de cette 
industrie à trente .fois meilleur marché que la correspon- 
dance privée des simples ciloyens. Les meneurs crurent 
aussi devoir profiter de l'occasion pont rétablir le timbre. 
C'était fort inutilement souffleter la république sur la joue 
de la liberté de la presse, tandis que la seule mesure à 
prendre à cet égard eOt etWde faire tout bonnement rentrer 
dans le droit commun ceux des journaux qui, voulant Cre 
e,I mme telnps feuilles d'annonces et d'avis, de vérilables 
affiches à la main, se trouveraient dès lors passibles 
d'un droit de timbre proportionnel, aux termes d'une légis- 
lation qui date de plus de soixante ans, et que le fisc ap- 
plique tous les jours au commerce et aux simples particuliers 
avec une svérité toute draconienne. L'obligation de la signa- 
ture des articles, dont on se promettait merveilles, n'aboutit 
qu'à transformer en manières de notabilités d'obscures mé- 
oeocrités. Quoi qu'il en soit, le rétablissement du cautionne. 
ment et du timbre tua Le Peuple Coistituant, de l'ahb6 de 
La Mennais; Le Beprdsentan t du Peuple, du citoyen p r o u d - 
bon; Lt Voix du Pettple, du citoyen Félix Pyat» ainsi 



JOURNAL 
que diverses autres leuilles démocratiques rédigées avec plus 
de talent que d'argent en isse; et un arrèté du chef du pou- 
voir exécutil, investi de la dictature par l'Assemblée natio- 
nale» fit dparattre £a Vo des Clubs; Le Père Ducesne ; 
La Mère Duchesne ; Le Petit-Fils du Père Dachesne ; La 
Commune de Paris; Le Lampion ; L'Aimable Faubourien; 
Le Journal, de la Canaille; La Guil-lotine; Le Pil-ori; 
L'accusateur Public; Le Tribunal lévolutionnaire ; Le 
Sanguinaire... Nousenpassons, et des meilleurs peut-être... 
Bien que par ces titres seuls on voit qu'il était grand temps 
que le pouvoir sauvt la société en sachant se mettre au- 
dessus des lois, insultëes et iolées impunément tous les jours 
par les factions. Combien d'ailleurs n'est-il pas  regretter que, 
mieux conseillé, le général Cavaignac, en décentralisant la 
presse, n'ait pas alors annulé ce pouvoir, le plus souvent 
usurpé par l'intrigue, et que, en le localisant, en le dépouil- 
lant de ses monstrueux priviléges, il n'ait pas réduit le jour- 
nalisme  n'erre plus un quatrième pouvoir dans i'Ëtat, mais 
tout bonnemeut un commerce, que chacun ft libre d'exercer 
en se conformant aux lois ; un commerce alimentant de nou- 
velles politiques vu d'appréciations littêraires les populations 
d'une circonscription déteruinée, exploitant la curiositë pu- 
hiique sans plus de priviléges que vingt industries, tout aussi 
intéressantes, qui ont pour but de donner satisfaction h d'au- 
tres besoins tout aussi reels,et qui prospèrent parfaitement 
sans qu'on ait jamais songé  leur accorder le monopole de 
l'exploitation du pays tout entier, non plus que le transport 
ì peu I»rès gratuit de leurs produits. La iibertë et les écrivains 
avaient tout à y gagner; tandis que, faute d'avoir su  ce mo- 
ment prendre une énergique initiative, c'était encore  re- 
commencer sis mois plus tard. 
La situation n'était donc pas moins critique ni moins me- 
naçante quand le coup d'Ètat du  d écembre 85 mit fin 
à l'existence de La Dmocratie Pacifique, du citoyen C o n - 
s id é r a n t ; de L'Eveement, du vicom[e Victor H u g o, an- 
cien pair de France; de La Iépublique, du citoyen Laurent 
(de l'Ardècbe); de La liëfor»e; du _National et de quelques 
autres feuilles de la république rouge, publiées tant à Paris 
que dans les départements, et suppléant le pius souvent à 
l'absence d'abonnís par l'esaltation et la violence de leur 
langage. Quant auxjouruaux decette faction quipossédaient 
véritahlement une productive clientële (acqu!se d'ailleurs 
en défendant naguère de tout autres doctrines ), ils imi- 
tèrent prudemment l'esemple qui leur en fut donné par 
les feuilles aux gages des divers partis monarchiques ligués 
contre la contiuuation des pouvoirs prísidenfiels de Louis 
.Napoléon ; et remettant  des temps meilleurs la réalisalion 
de leurs espérances, ils acceptèrent avec une stoïque rési- 
gnation le régime nouveau transitoirement imposé aux jour- 
naux par un pouvoir qui la veille encore comptait la plupat 
d'entre eu au nombre de ses ennemis les plus acharnés. Il 
y aurait d'ailleurs plus d'un inconvénient à indiquer ici 
quelles nuances d'opposition, quelles espërances de res- 
tauration ou de révolution ils continuent de représenter. 
La législation actuelle qui régit les journaux a eu pour ré- 
sultat de favoriser la création d'une foule de feuilles qui 
s'abstiennent de traiter des matières politiques et d'écono- 
mie sociale, et se contentent d'exploiter i'intírèt plus ou 
moins vif que dans les grands centres de population on 
prend nus ci|oses du théàtre et au mondequi en vit. Quel- 
ques-unes de ces feuilles apportent dans cette industrie une 
liberté qui dégénère en licence et sont parvenues à un chiffre 
de circulation trds-élevé. Ce n'est point ici le lieu d'exa- 
miner jusqu'/ quel point la morale publique est intéressée h 
ce que la loi intervienne pour arreter dans ses écarts cette 
petite presse. Trop souvent, en effet, on voit aujourd'hui 
des journaux litNraires ne s'occuper que de ce qui se passe 
dans certaines conches de la société parisienne, oh les règles 
de la morale la plus simple sont conspuées. Les feuilles aux- 
quelles nous faisons alinsion contribuent évidemment pour 
beaucoup aux progrès de cette démoralisation des masses 
que chacun signale comme le malheur de notre époque. 
wc'r. vl ».A CO.Vt:CS. -- "r. xt.  - 

Partisans de la liberté de la presse, nous ne la con(ondons 
point avec la licence; et nous prenons autant souci de ce que 
rclame la morale que de ce qu'eige la séotrité publique. 
Nous voudrions par conséquent voir rendre au journalisme, 
qnel qu'il soit, toute sa liberté d'action, sauf  répondre 
de ses faits et de ses actes, et tre placé sous l'empire d'une 
législation, non pas préventive, mais répressive. D'aillenrs, 
qu'n ne l'onblie pas, la mesure qui rendrait au ionrnalisme 
toute sa liberté d'action serait plus qu'une faute, si elle n'a- 
var pas pour corollaire l'abolition du système de privilége et de monopole qui juqu'a présent en avait fait aux main» 
des partis un si redoutable engin de révolution. 
Aujourd'hui moins que jamais, d'ailleurs, le privilége postal  
constitué en faveur des jonrnaux ne se justifie par aucun 
intérèt public; et si on se place au point de vue du prin- 
cipe de l'égalité de tous devant la loi, qui est la base de toute 
notre organisation sociale et politique, on reconnalt aussit6t 
qu'il en est la plus choquante violation. Par la force mëme 
des choses, les feuille de Paris sont les seules qui peuvent 
profiter de l'article de la loi qui fixe quatre centimes le prix 
du transport d'un journal hors du departement oU il s'im- 
prime alors que pour le mme service une lettre pesant 
le mme poids pa)-e un franc cinquante centimes. Ce 
privilége, en réalité exclusif, dont ont toujours été investis 
les journaux de Paris est un insurmontable obstacle aux 
développements vraiment utiles que les journaux de dépar- 
tement seraient appelés  prendre à une époque où la té- 
Iégrapbie électrique a complëtement cbangé dans tous les 
pays les conditions d'existence du journal. Sans doute le 
jour où cet odieux privilége serait aboli, il n'y aurait plus 
guère de journaux quotidiens tirant h 5O ou 60,00O exem- 
plaires; mais la liberté n'a aucun intért  ce que les deux 
pages d'annonces d'un journal rapportent  ses propriétaires 
 ou 600,000 tf. de rente. En revanche, elle a tout  gagner, 
comme aussi la propagation des iddes utiles, à ce qu'il existe 
dans tous les centres de population des feuilles quotidiennes 
qui renseignent aussi promptement et complétement que pos- 
sible les citoyens sur tout ce qui les intéresoe. Sous ce rap- 
port, il est de tonte justice de reconnaitre que, en dépit de 
la décourageante concurrence des journaux privilégiés de 
Paris, la plupart des feuilles de deparlement s'acquittent 
aujourd'hui de leur mission d'une manière très-remar- 
quable, qu'elles ne sont pas seulement bien mieux im- 
primíes que les feuilles de Paris (-- qui à cet égard en- 
core abusent de leur monopole d'une f«lçon scandaleuse e 
envoient à leurs abonués de province des exemplaires/ peu 
pr illisibles d'une feuille remplie aux trois quarts par des 
annonces, qui trop souvent n'ont d'autre but que de hvo- 
riser les plus frauduleuses speculations ), mais encore 
beaucoup plus complètes, pius variées, que leurs rivales 
la capitale. Ajoutons une dernière considírat;on, qui ne laisge 
pas que de militer puissamment en laveur de la localisation 
du iournafisme, c'est que cette industrie, qui anjourd'bnt 
donne à peine du travail à quelques centaines d'individus, e,'r 
occuperait cent fois davantage si elle etait décentralisée, si 
elle cessait d'ètre un monopole. 
JOUIUAL (Droit). Dès le principe les gouvernements 
se réservèrent sur les journaux le droit d'une c enstire 
rigom-euse. Au dix-septième siècle nous voyons Colbeet- 
suspendre le Journal, des 5acants, qui reflsait de se sou- 
mettre  la censure ecclésiastique. Cet état de choses dura 
jusqu'à la chute de l'ancien régime. 
La révolntion, pour ètre conséquente avec elle-méme, ne 
pouvait faire antrement que de proclamer la liberté entiëre 
des journaux. Mais le Directoire en usa avec eux tout comme 
autrefois la monarchie absolue, et un arrêtWdes cousais du 17 
niv6se an vin, « considérant qu'une partie des journaux qui 
s'impriment dans le départemeut de la Seine sont des ins- 
truments dans les mains des ennemis de la république, » 
limita à treize le nombre des journaux politiques. L'empire 
diminua encore Pinlluence du journalisme. Bëduites  se 
faire les échos du Moniteur officiel, les gazettes se reje- 



74 
lèrent sur la liltérature ; le te u i I le l o n naquit, et l'opposi- 
lion liltéraire fut encore quelquefois punie par la confisca- 
tion. De 18t à Is19 la libre publication des jourr, aux fut 
cntravée par la censure, qui fut abolie de nouveau à cette 
époque, puis rétablie six mois après et remplacée en 1827 par 
des lois sévères et de forts cautionnements. Aprës les jour- 
riCs de Juillet la presse se trnuva à peu près libre, malgré 
la loi du 8 avril |g31 et en dépit des fameuses lois de sep- 
t e m b r e 1835. Les barricades de Février firent encore une 
fois recouvrer aux journaux toute leur liberlé; mais les 
Journées de juin amenèrent la suppression arbitraire d'un 
certain nombre d'enlre eux, et bient0t on rétablit le timbre 
et le cautionnement. A la suite du coup d'État du 2 décembre 
intervint la législation actuellement en vigueur. En voici le 
tableau dans tous ses détalls • empruntés tant au décret du 
17 février 1852 qu'aux dispositions des précédentes lois 
qu'il n'a pas abrogées. 
Aucun journal traitant de matières politiques ou d'éco. 
no mie sociale, et paraissant soit régufièrement et à jour fixe, 
suit par livraison et irrégulièrement, ne peut ètre créé et pu- 
blié sans l'autorisation préalable du gouvernement. Cette 
autorisation ne peut tre accordée qu'a un Français majeur 
jouissant de ses droits civils et politiques. L'autorisation du 
g,uvernement est pareillement nécessaire à raison de tous 
clmngement. opérés dans le personnel des gérants, rédacteurs 
en chef, propriétaires ou administrateurs d'un journal. 
Les journaux politiques, ou d'économie sociale publiés à 
l'étranger ne peuvent circuler en France qu'en vertu d'une 
autorisation du gouvernement. Les introducteurs ou distri- 
buteurs d'un journal étranger dont la circulation n'a pas etc 
autorisée sont punis d'un emprisonnement d'un mois à un 
an et d'une amende de 100 ri'unes à 5#00 francs. 
Les propriétaires de tout journal traitant de matières 
politiques ou d'économie sociale sont tenus avant sa publi- 
cation de erser au trésor un cautionnement. Toute 
publication de journal sans autorisation préalable ou sans 
cautionnement est punie d'une amende de 100 à 2,00o francs 
pour chaque numéro ou livraison publiée en contraven- 
tion et d'un emprisonnement d'un mois à deux ans. Celui 
qui a publié le journal et l'imprimeur sont solidairement 
responsables. Le journal en outre cesse de paraltre. 
Les journaux politiques ou d'économie sociale sont sou. 
mis à un droit de timbre de six centimes par feuille de 
72 centimètres carres et ail-dessous dans les départements 
de la Seine et de Seine-et-Oise, et de trois centimespartoul 
ailleurs. 
Pour chaque fraction en sus de 10 décimètres carrés et 
au-dessous, il est perçu un centime et demi dans les dé- 
parlements de la Seiae et de Seine-et-Oise, et un centime 
partout ailleurs. 
Chaque contravention est punie, indépendamment de la 
restitution des droits frustrés, d'une amende de cinquante 
rancs par feuille ou fraction de feuille non timbrée. Elle est 
de t00 francs en cas de récidive. 
Les journaux ne peuvent donner d'autre compte-rendu 
des séances du corps lcgislatif que la reproduction du procès- 
verbal officiel 
Toute contravention sur ce point est punie d'une amende 
de t,000 à 5,000 francs. Il leur est interdit de rendre compte 
des séances du sénat autrement que par la reproduction des 
articles iusérés au journal officiel. 
II leur est interdit de rendre compte des procès pour dé- 
lits de presse, sous peine d'nne amende de 50  1,000 francs; 
ils ne peuveut qu'annoncer la poursuite et publier le juge- 
ment. Dans toutes les affaires civiles, cerrectionnelles ou cri- 
minelles, les cours et tribunaux peuvent interdit le compte- 
rendu du Procës ; mais cette interdiction ne peut pas s'ap- 
pliquer au jugement. 11 leur est défendu de poblier les acte» 
d'accusation et aucun acte de procédure criminelle avant 
qu'ils aient été lus en audience publique, sous peine d'une 
amende de loo à ,000 francs. En cas de récidive comm/se 
dans l'année, l'amende peut ètre portëe au double et le cou- 

JOURNAL 
pable condamné  un emprisonnement de dix jours à six 
mois. Il leur est interdit de rendre compte des procès pour 
outrages ou injures et des procës de diffamation où la preuve 
des laits diffamatoires n'est pas admise par la loi. Ils peu- 
veut seulement annoncer la plainte, sur la demande du plai- 
gnant; mais ils peuvent, dans tous les cas, publier le ju- 
gement. Il leur est interdit de publier les noms des jurés, 
excepté dans le compte-rendu de l'audience où le jury a été 
constitué ; de rendre compte des délibérations intérienres 
soit des jurés, soit des cours et tribunaux, à peine d'une 
amende de 200 francs à 3•000 francs. En cas de récidive 
commise dans l'année, la peine peut tre portée au double. 
Les éditeurs de tout journal sont tenus d'y insérer dans 
les trois jours de la réception la réponse de tonte personne 
nommée et désignée dans le journal. L'insertion est gratuite 
lorsque la réponse ne dépasse pas le double de la longueur 
de l'article qui l'aura provoquée ; dans le cas contraire, 
prix d'insertion est dU pour le surplus seulement. 
Les gérants sont tenus d'insérer en téte du journal, et 
gratuitement, les document« officiels, relations authentiquis, 
renseignements, réponses et rectifications qui leur sont adres- 
sés par un dépositaire de l'autorité publique, à peine d'une 
amende de 5O francs à t,000 francs; on peut en outre pro- 
noncer la suspension du journal pendant quinze jours au plus. 
Si la publ:.cation d'un journal frappé de suppression ou de 
su.pension administrative ou judiciaire est continuée sous 
le mme titre ou sous un titre déguisé, les auteurs, gérants 
ou imprilneurs sont cendainnés d'un mois à deux ans d'em- 
prisounement et solidairement ì une amende de 500 fr. 
 à 3,000 fr. par chaque numéro publié en contravention. 
La publication de tout article traitant de matiëres politi- 
ques ou d'économie sociale et émanant d'nn individu con- 
damné à une peine afflictive et infamante, ma infamante 
seulement, est interdite. Les éditeurs gérants ou imprimeurs 
ayant concouru à cette publication sont condamnés à une 
amende de t,000 à 5,000 francs. 
Les dclits commis par la voie de la presse et toutes 
contraventions sont poursuivis devant les tribnnaux de police 
correctionnelle. Dans les trois jours de tout jugement ou 
arrêt dcfinitif de contravention de presse, le gérant doit ac- 
quitter le montant des condamnations encourues par lui ou 
dont il est responsable. 
Une condamnation pour crime commis par la voie de la 
presse, deux cendamnations pour contraventions ou délits, 
commis dans l'espace de deux années, entratnent de plein 
droit la suppression du journal dont les gérants ont été con- 
damnés. Aprës une condanmation prononcée pour contra- 
vention on délit de presse, le gouvernement ala faculté pen- 
dant les deux mois qui suivent de prononcer soit la su»peu. 
sion temporaire, soit la suppression du journal. Un journal 
peut ê.tre suspendu par décision ministérielle, alors même 
qu'il n'a été l'objet d'aucune condamnation, mais après deux 
avertissements motivés et pendant un temps qui ne peut 
céder deux mois. Enfin, il peut Cre supprimé, soit après une 
suspension judiciaire ou administrative, soit par mesure de 
sfiretë générale, mais par un décret spécial de l'empereur. 
Le prix du port des journaux bots des limites du dépar- 
tement dans lequel ils sont publiés est de quatre centimes 
et de deux centimes toutes les fois qu'ils sont destinés pour 
ltutCieur du département où ils ont été publiés. 
Les journaux, comme tous autres imprimds, sont soumis 
à la formalité du d é p 0 t. 
JOURAL livre de commerce sur lequel les négociants 
portent, jour par jour et par ordre de dates, toutes leurs 
opérations. A chaque opération, on passe sur ce livre un 
article dont le dëbut présente le débiteur et le créditeur;  la 
suite de cette énonciation, on écrit le plus briévement pos- 
sible toutes les circonstances de l'opCation, et l'on porte au 
bout de la ligne le montant de la somme, dont on déite le 
dëbiteur ou dont on crédite le créditeur. 
Le journal est tan des trois livres, et le plus imPora,t, 
dont la tenue, auxtermes de l'arlicle $ du Code de Co "'" 



JOURNAL 
oet obligatoire pour tout commerçant. Régtièrement tenu, 
il peut faire preuve en justice contre les autres commer- 
çants; il su/fit de son absence ou de son irrégularité pour 
constituer, selon les cas, le commerçant eu état de ban- 
queroute simple et mtme frauduieuse. Le code exi en 
outre que le journal mentionne chaque mois les sommes 
employées par le commerçant à la dépense de sa maison. 
Charles LEMOIIIER. 
JOURNALIER. On appelle journaliers ou çens de 
rarnee les hommes de travail qui se louent à la journée. 
Les billets ou promesses qui sont souscrits par eux doivent 
porter, outre leur signature, un bon un un approuv coule- 
aant en toutes lettres la somme ou la qualité de la chose pro- 
mise. La loi répute vol domestique celui qui est commis par 
un journalier dans l'habitation ou il travaille habituellement. 
JOURS (Grands): Voye'. GRANDS JOURS. 
JOURS DE GILCE. Voyez GsAcE, tome X, p. 4t6. 
JOURS FA.STE. S  JOURS I'qÉFASTES. Voyez Fss. 
JOURS FERIES. Voyez, Fral (Jours). 
JOURS GRAS, Voyez 
JOUSSOUF, général au service de la France, naquit, 
dit-on, à l'lin d'Elbe, en t807, et fut pris par des corsaires 
tunisiens en se rendant à Florence, pour y Cre placé dans 
une maison d'éducation. Suivant une autre version, il serait 
né en 1810, dans le midi de la France; et, . peine gé de 
cinq ans, il aurait été enlevé sur les cotes de Provence par 
des pirates de Tortis. Ce qui est certain, c'est qu'il ne con- 
nuit pas ses parents et qu'il fut emmené à Tortis, où 
rare beauté alCermina le bey à l'acheter. Ce prince le lit 
élever en musulman, au milieu des femmes de son barem, 
et en fit bient6t son favori. Placé dans les gardes du corps 
du bey, il eut une intrigue amoureuse avec Kaboura, fille 
de son protecteur, et cette intrigue ayant été découverte, il 
fut obligé de fuir, en t830, sur un brick français, qui le 
débarqua à Mgr, où il entra au service de la France. Il 
s'y distingua tellement, qu'il fut bient6t nommé capitaine 
dans le corps de cavaliers indigènes appelés spahs, qu'on 
venait d'organiser. Dans cet emploi, il rendit de grands ser- 
vices, tant par son courage et sou habileté que par sa con- 
naissance des mœurs Igériennes et par son influence sur les 
indigènes, otamment à la prise deIIon e, en 1832. En 1838, 
dans l'expédition contre Tlemcen, il bat'lit complétemeut 
Abd-el-Kader, et fut nommé en récompense bey de Cons- 
tantine; mais il ne put entrer en possession de cette nou- 
velle dignité, parce que l'expédition contre cette ville en no- 
vembre t836 n'eut pas de succès. En 1837 il vint à Paris, 
où sa beauté mle, autant que sa gràce et son habileté comme 
cavalier, attira tous les regards. De retour à AIger à la fin 
de l'anuée, il obtint à Otan le commandement d'un deta- 
cbement de spahis. Plus tard on lui coufia le commande- 
ment des chasseurs d'A[rique. Peu de temps après il fut 
nommé colonel d'un rémeut de cavalerie légère, et fiuit 
par oblenir le commandement de tonte la cavalerie irrégu- 
lière. Il fit la plupart des campagnes qui signalerent l'admi- 
nistration de géueral Bugeand, et contribua beaucoup à La 
soomissiou du pays. Le général Bugesud, qui avait pour 
lui une estime toute particulière, le fit passer géuérai hors 
rang après la bataillo d'Isly. Revenu à Paris dans les premiers 
jours de 845, il embrassa le christianisme, et épousa une 
demoiselle Weyer, nièce de feu le général Guilleminot. 
En t857, il fit l'expédition de Laghouat; sa position dans 
/'armée avait été régularisée après le coup d'État. Il prit rang 
 l'etat-majx général, bits à la disposition du général 
en chef de i'armée d'Orient, en t85, il devait commander 
des bachi-bozouks au service de la France ; mais on re- 
nunça à cette combinaison, et le général Joussouf retourna 
en Algerie, où il prit le commandement de la division d'Alger 
au commencement de 1855. On a de lui uu ouvrage loti- 
tu/W: De la Guerre d'Afrique (AIger, lSS0}, êcrit aussi 
intéresnt et substantiel qu'instructif, parce que l'auteur a 
en occasion de faire en AIgérie toutes les espèces de guerres. 
JOUTE, Une joute était pruprement le combat à la lance 

JOUVENET 
de seul t sed, au temps de la chevalerie. Plus tard on 
Cendit la signification de ce mot/ d'autres combats. La 
joute se distinguait da t o u r n o i s en ce que celui-ci avait 
lieaentre plusieurs chevaliers combattant en troupe. Quoique 
les joutes se fisseut ordinairement dans les tournois aprés les 
combats de tous les champions, il y en avait cependant qui 
se faisaient seules, indépendamment d'aucun tournoi; on 
les nommait joutes à tous venants , 9randes et plénières. 
Celui qui paraissait pour la première fois aux joutes remet- 
tait son heaume ou casque au héraut, à moins qu'il ne l'eflt 
déjà donné dans le tournoi. 
Les dames étaient i'me des joutes, et les chevaliers n'en 
terminaient aucune sans en faire nue dernière à leur honneur, 
qu'ils nommaient la lance des dames. 
Les joutes passèrent en France des Espagnols, qui prirent des 
Maures cet exercice et l'appelèrent juego de canas, le jeu 
de cannes, parce que, dans lecommencement de la première 
institution dans leur pays, ils lançaient en tournoyant des 
cannes les unes contre les autres et se couvraient de leur 
bouclier pour en parer le coup. Le jeu du djérid des 
a quelques rapports avec les.joutes chevaleresques. 
Le mot de joute vient peut-être de juetà, à cause que les 
ou{eurs se joignent de près pour se battre. D'autres le deri- 
vent dejusta, qui est le nom donué à cet exercice dans la 
basse iatinité. Ch er nE 
La jo¢te sur l'eau est an exercice d'adresse, dans lequel 
deux jouteurs montes dans des embarcations cherchent 
se fairetomber l'un l'autre dans l'eau en se poussant au moyen 
de longues lances de bois au moment où leurs bateaux s'ap- 
prochent. 
JOUVENCE (Fontaine de). Qui d'entre nous n'a pa 
entendu parler de cette merveilleuse fontaine de Jouvence, 
redonnant la jeunesse, la beauté, la fraicheur, à ceux qui 
les ont perdues, e dont les eaux puissances effaçaient les 
rides avec la même rapidite que la vague efface les carac- 
tères tracés sur le sable? Quelle femoEe déjà pressée par 
I'ge n'a soupiré après ce délicieux réve de tous les charmes 
qui ne sont plus, de toutes les roses qfi se sont fanées, 
et n'a, machinalement peut-Atre, cherché sur la carie géo- 
graphique le nom de Jouvence, le lien fortuné où devait se 
trouver cette précietse fontaine, dont tout vestige est 
perdu. Hélas ! la merveilleuse fontaine est restée une enigme, 
comme la pierre philosophale pour les alchimistcs, s'il en 
existe encore. ous trouvons pourtant dans le roman 
d'Huon de BordeaoE que cette fontaine est située dans un 
pays désert. « Elle venait, dit-il, du il et du paradisterrestre, 
et avait une telle vertu, que si un homme malade en buvait 
et s'en lavait les main, il [ait aussil6t sain et guëri ; et s'il 
était ieux et décrépit, il revenait à I'ge de trente ans 
et une femme était aussi [ralche qu'une vierge. » Par mal* 
heur, comme le dit La Fontaine : 
Grand dommage est que ceci soit sornettes. 
Filles connais, qui ne sont pas j.eunettes, 
A qui cette eau de Jouvence viendrait 
Bien à propos. 
Certains esprits forts prétendent que le mot Jouvence vient 
du latin juventus, et qu'il signifie tout bonnementjeun esse. 
Ce sont les romans de chevalerie qui l'ont mis à la triode. 
JOUVENEL DES UILSINS. Voye'-Juw=L 
UIL«s. 
JOUVENET  farail]e de peintres qtl'On croit de souche 
italienne. 
JOUVT ([gOEL), peintre de Rouen, fut le grand-père 
du fameux Jean Jouvenet. Il donna des leçons de peinture 
au P o u s si n, et c'est à peu prés lb tout ce qu'on sait de lui. 
Il eut trois fils, nommés Jean, 2Voêl et Laurest. Jean 
épousa Françoise Yoult, et en eut l'auteur de La P¢chc rai- 
racoleuse. A en juger par ses élèves, on peut croire que 
ffoêl Jouvenet ne manquait ni de go0t ni de talent. 
JOUVE-ET (Jg,), peintre français, naquit à Rouen, 
le 1 ao0t 1647. D'abord élève de son père, peintre fort 
estim6 dans cette ville, il vint . Paris pour se fortifier 



çT JOUVENET 
dans se étude ; bientôt son génie se développa, et fit con- 
ualtre un talent nouveau, en dehors des routines adraises 
dans l'Cale de Charles Le Brun, dont il fut l'Cève. En 
673, il peiguit Imur l'église de Iotre-Dame la Guërison 
dz Paralytique. En 1675, pour sa réception  l'Académie j 
Jouvenet présenta Esther devant Assurus, le plus cor- 
rect peut-Cre de tous les tableaux qu'il a peints. On a 
comparé es tableaux de l'abbaye Saint.Martin-des-Champs 
t sa Descente de Croix, qu'il fit pour l'église des Cape- 
tins, aux chefs-d'oeuvre du Tintoret ; mais ceux qui ont 
lait cette comparaison n'avaient pas sous les yeux ces belles 
productions. Pourtant, il faut le dire, malgré leurs imper- 
fections, les tableanx de Jouvenet brillent par le faste impo- 
sant de la composition, par des effets grandement conçus, par 
une exécution facile et igoureuse. On peut considérer en 
eifet / pche miraculeuse comme un miracle de com- 
position et de coloris. Jouvenet, homme d'esprit e d'un 
grand caractère, avait à peindre pour l'église Saint-Martin- 
des-Champsquatre tableaux d'une grande dimension, de 
/a vie de saint Eeno[t. Les robes noires que portaient les 
religieux de cet ordre ne lui plaisaient pas  peindre : il ima- 
gina de remplacer les sujets qu'on lui avait donnés par la 
urrection de La'-are, le Repas du Pharsten, Les 
Yendeurs chassés da Temple et La Péche miraculeu.e. 
.lunvenet, pour peindre ce dernier tableau, entreprit le 
royale de Dieppe, afin d'examiner les manœuvres des 
pcheurs, de dessiner d'aprës nature les filets et les barques, 
ci il fit aussi des étude peintes d'après les diverses espèces 
«le poissons et de coquillages, qu'il a rendus avec une 
.upériorit surprenante. Lorsqu'il liera les tableaux, les re- 
ligieux, surpris de ne point voir les sujets qu'ils avaient de- 
n:andés, les refusèrent. Après une lutte assez inconvenante 
«ntre les pères bénédictins, Jouvenet soutint qu'il laissait 
 la postCite quatre chefs-d'oeuvre, et ajouta que d'ail- 
leurs les sujets qu'il avait tirés de l'Évangile, où e trou- 
• aient peint s J«sus-Christ et les Ap6tres, alaient bien ceux 
¢]e la vie de saint Benolt, qui ne lui olfraient à peindre 
<Ie des sacs à charbon. Il se retira, et le rgi ordonna 
,,ue les tableaux fussent plac dans la nef de Péiise. 
Le tableau de L'Extrême-Onction est un des plus sa- 
ement conçus, et du coloris le pus fin et le plu» hamo- 
li,ux qui soient jamais sortis de ses pinceaux..fourchet 
[.init tes pem]entifs des Inv;dide.% on il représenta les 
," u:e Apdtres et les va9oelistes. Pendant la restaura- 
l.,n du vieux château de Versailles, qui se fit de 1660 à 
les0, Jouvenet y travailla avec son maltre Ch. Le Brun. 
lI peignit ensuite un salon au château de Marl.v, qui fut 
,imiré de Louis XIV. On citait eucore de lui les plafonds 
c l'btel de Pouanges. Enfin, on sait que Jouvenct, 
devenu paralytique, s'habitua à peindre de la main gauche. 
Dans cet ëtat dïnfirmité, il peignit sur toile, à Paris, le 
plafoud de la seconde chambre des enquêtes du parlement 
,le ouen ; et ce qn'il y a d'extraordinaire, c'est qne l'on 
:y retrouve la mme hardiesse dans le faire et la mme 
<-haleur de coloris que dans ses tablea«x peints de la main 
drvite. Pendant qu'on plaçait  Ftouen le plafond de Jou- 
• enet, il peignit le tableau dit le Magiflcat, l'un des plus 
beaux ornements du chœur de Notre-Dame de Paris. Ce 
norceau, d'nne composition riche, est d'un coloris har- 
tnonieux. Ce peintrecelëbre mourut à Paris, en 1717,  
l'ge de soixante.treize ans, avant que ce tableau, son 
¢]ernier ouvrage, 10t mis en place. 
Ch « Alexandre LE,coin. 
JOUX (Fort de), principale place forte de France du 
<td de la Suisse, a longtemps servi de prison d'Êtat, dans 
laquelle furent dtenus plus ou moins de temps F o u q u e t, 
li ra beau, Toussaint Lou er tu r e, le générat Dupant, 
| marquis de liviêre, etc. Le chleau de Joux est situé  
4 kilomètres de Pontarlier, dans le département du Doubs. 
USti sur nn mamelon isolé d'environ 20o mètres d'ë- 
l[a'«:on, au pied duquel coule le Doubs, il se o, mpose 
e trois enceint entuurëes de larges fnssés, avec pont- 

-- ,IOUY 
levis. Il ue ressemble plus guère à l'ancien château de 
sites de 3aux. On y a élevé des btiments ueufs, et les an- 
ciens ont été modifiés pour devenir des magasins, des 
arsenaux ou des casernes; cependant, on y trouve encore 
quelques traces de l'architecture du moyen ge. 
JOUY ( Vicron-JosPu ËTIENE, dit ) naquit en 1769, 
 Jouy ( Seine-e-Oise), village qu'habitait son pre et dont 
il prit par la suite le nom. Les Muses ne présidèrent pas  
sa naissance, mais fl eut ponr parrain le dieu Mars, lequel 
eut soin qu'on entonrt son enfance de tambours, de sabres 
de bois, de trompettes de fer-blauc, et qui dès l'e de 
treize ans en fit un ons-lieutenant à la suite dans les trou. 
pes cotoniales de la Guane. Au bout d'nne année environ 
d'apprentissage militaire, il revint en France achever ses 
études, puis il passa aux Indes orientales, avec le régiment 
de Luxembourg, d'abord, et ensuite en qnaiité d'officier 
d¥tat-major attaché au gouvernement de Chandernagor. 
Il était de retour en France  la fin de 1790. L'homme de 
lettres ne se déclarant point encore dans Jouy, il fit la 
première campagne de la révolution avec le grade de capi. 
laine, et deviot adjudant général après la prise de lurnes. 
Le tribunal révolutionnaire condamna par contumace le jenne 
officier à la peine de mort. Jouy passa en Suisse, ne ren- 
tra en France qu'après le 9 thermidor, et reprit du service 
comme chef d'état-major de l'armée sous Paris, commandée 
par le général Menou. Le  prairial il contribua à la répres- 
sion des terroristes ordonnée par la Convention ; mais au 
t3 vendémiaire il fut arrêtWet destitué. Au bout de quinze 
jours, on lui rendit la liberté et on l'envoya commander 
la place de Lille. Il ne tarda pas h se faire remettre sous 
les verrous. On prétendait qu'il avait eu des liaisons poli- 
tiques avec lord Malmesbury, et qu'il intriguait avec le ca- 
binet anglais. Il y allait de sa tète si cela eut été vrai. Il 
eut sans doute les moyens de prouver son innocence; car 
il fut relaxé après une courte détention. Il n'en dëposa pas 
moins le harnais, sollicita et obtint sa retraite en 1797, pour 
cause de blessures et à raison de ses services. Il fut mis 
alors à la tte des bureaux de la préfecture de la Dyle par 
51. de Pontécodant, préfet de ce departement. Celui-ci ayant 
étë nommé sénateur, Jouy dit adieuaux emplois civils» et  
liera eclusivement à la litterature. Mors conmença la série 
de ses innombrables ouvrages, dont le premier est La Paix 
et l'Amour, divertissement à l'occasion de la paix de 179. 
l.e plus remarqués l'urent La 'estale (1807), opéra qui 
dut la pins grande partie de sa gloire et de son succés  la 
musique de S p o n t i n i,  la parodie trës-spiltuelle qui en 
fut faite, etau prix qui lui futdécerné par l'Institut, comme 
au meilleur poëme lyrique qui e0t Ce mis au théâtre ; 
Fernand Carte.', (I09), avec Esménard et Spontini; Les 
Eayadères (181), musique de Catel; L'Ermite de la 
Ch«ussde-d'Antin (1812), études |ailes snr les mœurs de 
son temps, qui parurent d'abord séparëment, dansle Mercure, 
qu'il réunit ensuite en un corps de livre, et qui furent tra- 
duites dans les principales langues de l'Europe; Tippoo 
Saeb, tragédie jouee au ThéAtre-Français (1813); Les 
Abencérages, opëra en trois actes (1813) ; L'Ermite en pro- 
vince ( 1818 et ann. suiv.), ouvrage, dit un biographe qui 
parait fort bien renseigné snr ce qui regarde 3ouy, trs- 
inférieur au précédent, parce que « au tort grave de se 
répéter sans cesse et de déclamer à chaque page, l'auteug 
Joint le tort, bien plus grave encore, de commettre les er- 
reurs les plus grossiëres en histoire et en géographie. I| oe 
rait, au reste, difficile qu'il en f0t autrement, car personne 
n'ignore que M. de Jouy a pris  tche de décrire les pro- 
• inces de la France et les mœurs de ses habitants sans sortil 
de son cabinet. Aussi le peu de conscience qu'il a mis dans 
ce travail et l'audace avec laquelle il s'est moqué de ses 
lecteurs lui ont-ils attiré de tous ctés de violentes critiques. 
al.agis lesquelles son amour-propre a étë fort peu ménagé » ." 
ylla, tragédie faite, on peut le dire, en collaboration ave 
Talma ; Les Ermites en prison ( S23 ), et Les Erraites en 
liberte ( 1 2s ), conjointement avec J ay; MOie ( 1827 ), 



OUY m 
oéra en quatre actes, avec Balochi; et Guillaume 7ell 
(1829), avec. Bis : la musique de ilossinine contribua 
pa peu " oe double sucS. 
Tels sont les ouages qui ont pla un moment Jouy au 
premier rang parmi I homm de lettr connus so le 
nom de llttératrs de l'empire, lls firent à la fois sa for- 
tune et sa rputation, tours deux éphmères, à la ruine 
dquelles il assise, rdué dans le caaonicat de la biblio- 
thèque du Louvre, où il avait éoE apllé en mars 1832 par 
le roi Louis-Philip. Là il se nlait des vicissitud et 
des vanités de oe monde, en considérant combien d'auteurs 
dont les oeuvrerCotent I rayons de oette bibliothèque, 
l'avaient prdé da le s6jour de l'oubh, o0 il éhit ailWles 
rejoindre. 11 mourut en oeptembre 18ç, au chtu de Sainb 
Germain en Laye. 
Jouy avait un oerin talent de style joint à une qualité 
oboervateur qui donne une idée asoez avantageuse de la 
sagacité de son pfit et de la j,st de n coup d'oeil. 
On i'a oemparé, dans quelques-uns des poraits q,'il a tra- 
cs, à Addison et à Steele; c'est un peu le surfaire, mais 
entre eux il y a oependantd analogies. 11 a de la finesoe, 
mais sans profondeur, l] manquait d'instction en bien d 
parties, et oependant ne doutait de pque rien. 11 ne res- 
ierade lui que le souvenir du bruit qu'il a fait un moment, 
qui fut trg-disproporlionn6 avec son reCte, mais qu'on 
fexplique par le silence dans Iuel était alors envelie la 
litt6rature die de oe nom, et par le trouble que oeusait 
encore rang les esprits des écrivains d'élite le retentissement 
des révolutions politiq,es. Charl s,. 
Jouy avaitCWreçu à l'Académie Franoie en  815, comme 
succseur de Parny. C'est dans une réunion de oe corps 
illustre qu'il lui arriva un jour de dire que notre mot fran- 
is açréable vient du LXT* açre«bilis. Ce barbarisme fit 
une incroyable fortune, et populafisa le nom du oeupable 
parmi des g6nrations trop nouvelles à la vie pour avoir 
iamais entendu parler de l'Ermite de la Chaussde d'An- 
tin. 
JOVE {Px,), historien, nWà C6me, en 183, fit d'a- 
bord mecin, puis élevé an sie épiopM de ooera. Mais 
oes mœurs n'avaient rien d'eoelitique,  sa conscienoe 
ne valait pas mieux que oes mœurs. C'est de lui qu'et ce 
mot impudent : « J'ai deux plumes, l'une d'or, l'autre de 
fer, pour traiter les pfin suivant I faseurs ou les dis- 
c e jen reçois. » Il mourut à Florene. en 1552, con- 
sellier de C6me de Micis, apr avoir élé pensionné par 
rançois 1  et Chles-QuinL On a de lui une stoire 
en quarante-cinq livres, qui commence à l'a 169 et qui 
finit en 157. Mais il s trouve une lacune considérable, 
depuis le dix-neuème jusqu'au vin-quatfième livre in- 
clusivemenL L'abondaoe et la ariéoE des malières font lire 
cte histoire av plaisir; mais elle manque de fidélité. 11 
egt encore l'auteur de différentes Vi des personnaçes 
illustre. Il s'es églemet occupé d'histoire naturelle. 
JOVELLANOS ou plut6t JOVE-LLANOS (Don GAa 
MeLcmoa ne), lëbre homme d'tat et écrivain espagnol, 
nWen 1746, h Gijon, dans I Asturi, avait d'abord ët« » , 
comme oed, destiné à l'ét eoelébiastique ; mais plug rd 
 étudia le droit, et lut nommé asoesseur au tribunal cri- 
minel de la cour suprtme de Séville. C'est dans oette ville 
qu'il fit paraRre sa comédie El delincuente honrado, o 
il montrait l'étoffe d'nn poête de talent ; il écrivit ensuite 
Pelayo, tragédie dans le goat classique franis, reprén. 
Iée à bladrid en 1790; il Uaduisit aussi le premier livre du 
Paris pdu de Milton, et donna, sous le nom de Jo- 
vino,.s Ocios ]uveailes, poèm lyfiqu et satiriques. 
ommé en 1778 aseur de la haute ur criminelle de 
Martial, puis, en 1780, membre du conseil de l'ordre de 
CalaUava, la plus haute autorité administrative des ordr 
relieux et militair, il rasoembla, dans I toué d'in 
ction 'il eut h faioe, les oErianx de l'exoellent mémoire 
adr, par dcision de la Socité d Amis de la Patrie, au 
noeil suprême ae'Castille, sur la nésioE d'intduire une 

JOVIEN 677 
nouvelle législation agricole, Informe sobre la le9 agraria. 
Lié d'amitié avec C a b a r r us, il partagea sa disgrâce, et 
fut éloigné en t790 de la résidence royale. On déguisa son 
exd en une mission ayant pour but de surveiller la réforme 
des Cudes dans la maison de l'ordre de Calatrava à Sala- 
manque ci l'exploitation des mines de charbon dans les 
Asturies. En 179 il obtint enfin la place de titulaige au 
grand conseil de Castille,  laquelle il avait droit depuis 
longues années; en 1797, G odoy, qui avait intért à favo- 
riser, en apparence du moins, les partisans des réformes, 
le nomma ambassadenr à Saint-Pétersbourg, et sur son refus, 
ministre de grâce et justice. Mais bient6t la faveur du tout- 
puissant ministre se changea en une haine si acharnée, 
qu'elle alla, dit-on, jusqa'à essayer de le faire empoisonner. 
Godoy l'exila de nouveau, en t798, à Gijon, d'où il le fit 
conduire, en 1801, à la Chartreuse de Valdemuza, dans l'ile 
de Majorque, puis tranférer, en 1802, dansla prison d'État 
de Beilver. C'est là que Jovellanos écrivit, entre autre 
ouvrages devenus cëlèbres, des lettres poétiqnes sur la vie 
dans la retraite (Sobre la rida retirada), et sur la vanité 
des désirs et des effortsdes hommes (Sobre Ios vanos deseos  
estudios de los hombre ), lettres àses amis Carlos Gonzalez 
de Posada et Cean Bermudez. Enfin, en 1808, par suite de 
la révolte d'Aranjuez et de l'entrée des Français en Espagne, 
il Int rendu à la liberté, et put se retirer dans sa ville ha- 
hale. lon-seuiement il résista alors aux offres brillantes de 
Joseph Bonaparte, mais encore il tir un des membres 
les plies actifs de la jlmte entrale qui dirigea la lutte contre 
l'usurpation française. Cette junte s'tant dispersée en 18t0, 
ce fid Jovellanos qui parvint à réunir encore le nombre de 
membres nécessaire pour pouvoir Iégalement constituer une 
régence et ordonner la convocation dg cor tè.« estraordinaires. 
Après cette démarche, qui sauva sa patrie, Jovellanos, 
dans les mains de qui avaient pass tors les trësors envoyés 
d'Amérique, fut réduit à emprunter de l'argent à son do- 
mestiqne pour pouvoir s'en retourner chez lui. L'ingralitude 
et la persécution firent l'unique rcompense de son dévoue- 
ment à la patrie et de son désintéresement. Retiré h Muros, 
il y rédigea, potlr la défense de ses collégues de la junte centrale 
son fameux Mdmoire & me collègue (La Corogne, 1511). 
Lorsque les Français évacuèrent les Asturies, il revint, en 
tStt, à Gijon, of il fut reçu en triomphe. Mais la nou- 
velle occupation de la province par les Français, qui eut 
lieu bient6t après, le contraignit encore une fois à la fuite. 
Il motlrut d'une hydropisie de poitrine, le 2"/novembre ! 8 t 1. 
Consultez Cean Rermu,tez, Memorias para la Vida de o- 
vellanos (Madrid, 1814). Don Bamon Maria de Cafiedo a 
donné une édition de ses œuvres complètes (7 vol., Ma- 
drid, 1832; 8vol., Barcelone, 1829). 
JOVIEX successeur de l'empereur Julien, dans la 
personne duquel venait de s'Ceindre la maison de Cons- 
tance Chlore, était né dans la Mésie, l'an 330 de notre ëre. 
Fils de Varonien, et capilainedes gardes, il fut proclamé par 
l'armée le 7 juin 363, et prit les noms de Flavius Claudis 
ovians. Les lomains, entourés d'ennemis, étaient dans 
la situation la plus dilficile. De hanle taille, d'une figure 
prévenante et affable, mais chrétien zél par-dessus tout, 
il exigea qe tons ses soldats doptassent sur-le-champ son 
«rte, cequi fut exécuté par acclamation. Aussit6t il ordonne 
la retraite. La marche est sonvent interrompue par des 
combats, car Sapor II poursuit l'afinC. Après une action 
hardie au bord du Tigre, le roi de Perse, étonné de l'intré- 
pidité avec laquelle des nageurs ont passé le fleuve et mas. 
sacré ses postes, offre la paix; cependant, il tralne les 
nëgociations en longueur, si bien qu'il affame les lomains : 
les instances de qlelques Iches forcent Jovien à accepter 
de honteuses conditions, telles que la cession de cinq pro- 
rinces au delà du Tigre. La marche de son armée n'en tir 
pas moins pénible et désastreuse. Elle arriva enfin  li- 
sibe. Les vivres étaient d'une telle cherté qu'un boisseau 
de farine se rendait dix pièces d'or dans les derniers temps 
de la retraite, lisibe fit aussit6t abandonnée aux Perses» 



68 JOVIE 
à la grande douleur des habitants, qui s'en virent 
par Jovien lui-mme, d'après l'engagement qu'il en avait 
pris. Aprè; avoir donné à ses troupes quelqees jours de re- 
p,)», il it pour Antioche en passant par Édesse.  s'oc- 
cupa ensuite de réblir la paix entre les paiens et les chr 
tiens, et rappela d'exil tous les évques bais, que Julien 
n'avait pas remis en posson de leur siége : avec lui 
christianisme mon sur le tr0ne pour n'en plus descendre. 
li ordonna aux gouveeurs d provinoes de favoriser I 
a«sembldes d ridaient l'instruction des peuple, défendit, 
sous peine de mort, de ravir les ierges contactes  Dieu, 
de I séduire, on de les lliciter en mariage, et oe montra 
sans pitié pour les ariens. Pendant que i'AfHque élait ra- 
vagée par les bar, l'empeur, ne Rant aucune 
nouvelle d'Occident, ct devoir s'en rapprocher. Une 
dition avait éclaté dans la Gaule, o l'on soutenait que Julien 
vivait encore, et que Jovien n'était qffun rebelle. Le 1 
janvier il ¢élébra  Ancre son entrée au con«ulat, et prit 
pour collège son fils çaronien, encore enfant. Themistius 
l'orateur, que Constance avait pla dans lesénat de Consn- 
tope, int prononcer devant gempereur un discours que 
nous avons encore : on faisait ì Consfantinople de pr¢pa- 
ratifs pour le recevoir, et l'on espérait go0ter un Ion repos 
sons son rèe. Il padit d'Ancre par un froid si vif qu'il 
prit plusieurs solda en route : à Dadasre, petite ville 
de la Galatie, sur les frontières de la Bithynie, il fut trouve 
mort dans son lit, dans la nuit du 16 au 1 rentier 36 : 
leu I un% il fut asphxié par "odeur du charbon qu'on 
avait allume pour sécher les mhrs de sa chamboe ; oelon 
d'autres, il meurt d'apoplexie; enfin, on a prétendu qu'il 
aait été empoionnd par ses ardes. Son corps fut porté 
Constantinople, dans l'élLe des Saints-Apôtre% sépulture 
ordinaire des empereurs depuis Constanfin. Il n'avait reinL qu'un an, et l'empire ne fut guëre pour lui que le commen- 
cement d'une déroute. Sa femme, qui venait à  rencontre 
avc toute la pompe ipériale, ne le vt jamais rêtu de 
sa dgnit. P.  GoL. 
JOVINIEN moe main, s'leva, en 38, avec beau- 
coup de force contre le luxe, toujours croissant dans l'É- 
glise, des ornements extrieurs, et reCira pour ce fait d'ètre 
cité comme un des poemiers avortes de la simplicité 
glique. Une ieHre de saint Ambroie et plusieu écrits de 
int Jér0me nous apprennent qu'il combattit le me=te du 
jeune et de la ie asoetique si que le ¢élibat des prètr. 
Il défendit encore d'autres thèses tranes, celle, par exemple, 
que les hommes renérés par le baptëme ne sauraient Cre 
de nouveau entralnés au ped=é. L'éêque de ome, Sirb'u% 
et après lui saint Ambroioe, en condamnant ses doctines 
paralysèrent le succès de oes tentatives de réforme. 
JOYAU. Voçe: Bou. 
J OYE USE ( Maison de ). Elle se glo¢fiait de descendre 
des anciens oeienrs de Chteauneuf-Randon, dans le 
bas Languedoc, ou Gévaudan, an diocèse de Men«le, et 
raidit remonter sa ('néalogie au onzième siècle. C'est en 
faveur de Louis lI, fait prinnier, le 1 " julet t3, à la 
bataille de Crevant-sur-Yonne, que la baronnie de Joyeuse 
fut érige en icomté. 
JOYESE (Gvv£, comte v ) de,rit maréchal de 
Frêne en 1582, après avoir fait la erre contre les prot- 
hn. Il mourut en 1592. 
JOYEUSE (As ), son fils, naquit en 156i. Il était 
l'araWde cinq frèr qui lui durent leur fortune. Elevé à 
cour de Henri HI, il ne ha pas à pager aec le duc 
d'Éperon la faveur de ce prhce. Conu d'abord sous le 
nom de Fervag, fl fit oes premières aes au sie de 
La Père,  1580, et la bravoure dont il fit puve en cette 
ocoesion fouit au roi le prétexte des mpens extraor- 
dinaires dont il le combla. Créé duc et pair, avec le droit 
de préséance sur les autr seigneurs, exoepté œux du sang 
royal, nommé gouverneur de plusieurs provinc, amiral 
de Frêne, enrichi par d dons excessifs, Joyeuse it enoere 
 foune shccroltre par l'allice qu'il contra avec Mat- 

JOYEUSE 
guerite de Lorraine, sœur de la reine. Ses noces, dont le 
roi fit les frais, furent célébrées avec un faste et une ma- 
gnificence sans exemple. « La dépense y fut faite si grande, 
dit un auteur contemporain, y compris les mascarades, 
combats à pied et à cheval, jonstes, tournois, musique, 
danses d'hommes et femmes, et chevaux, présenls, et li- 
vrées, que le bruit estoit que le roy n'en seroit quitte pour 
1,200,000 écus. » Depuis l'époque de son mariage, ca 1582, 
jusqu'à celle de sa mort, en t587, Indue de Joyeuse futen butte 
à la haine du peuple', indigné des prodigalités de Henri III 
envers son mignon bien aimé, et à la jalousie des grands, 
envieux de la faveur dont il jouissait. Pour tcher de se réha- 
biliter, Joyeuse prit le commandement de l'armée qui devait 
marcher contre tes huguenots et leur chef, le roi de avarre. 
Les deux armées se rencontrèrent dans les plaines de Cou- 
tras; le duc de Joyeuse y perdit la bataille, et fitt blessé 
morteilement. Henri réclama son corps, et lui fit faire des 
funérailles magnifiques, dans l'église des Auguslins de Paris. 
JOYEUSE ( FaçOlS DE), frère puîné du précédent, né 
en 1562, cardinal et successivement archevêque de Far- 
bonne, de Tnulouse et de Rouen, fut un des auteurs de i'ab- 
juration de llenri IV, auquel il rendit ensuite le service de 
rompre son premier mariage. President de l'assembb;e du 
clergé en t60, il fut nommé l'année suivante légat du 
pape en France h l'occasion du baplème du dauphin. Il 
sacra Marie de Médicis et Louis XIII, présida les états de 
f61, et mourut.", Avignon, en 1615. 
JOYEUSE ( H,a DE ), comte du Eouchage, frère des 
deux précédents, célèbre sous le nom depère Ange, naquit 
ì Toulouse, en t563. II eut dès sa jeunesse le dessein 
d'embrasser i'etat ecclésiastique, mais la volonté de son 
père et de sa famille contrarièrent ce projet. Il entra alors 
dans la carrière des armes, et épousa Calhe;ine de La Va- 
lette, sœur du duc d'Epernon. Devenu veu!, après peu 
d'années de maria-e, le comte du Bouchage put suivre li- 
brement sa première vocation, et I,rononça ses VœUX de 
capucin, le  décembre 1587. Après la journée des B arri- 
cades, il sortit de sa retraite, et se rendit à Chartres, à 
la tële d'une procession de ligueurs, pour engager Henri III 
à revenir dans la capitale. Suivant d'Aubigué, il fit ce 
voyage pieds nus, couronné dëpines, charge d'une lourde 
croix de bois, accompagné de deux religieux qui le fusti- 
geaient, et chantat avec toute la troepe le Miserere. Ayant 
etWenoyé en Gascogne, pendant les troubles de la Ligue, 
le frère Ange se trouva à Tonlouse à i'époque de la mort 
d'un autre de ses fi-ères, Scipion sE Jo'vs, tué en com- 
battant contre les huguenots. Le peuple et la noblesse du 
.pays le prièrent alors de prendre le commandement des 
troupes, et le pape l'ayant releve de ses VŒUX, il céda aux 
instances qui lui furent faites. 11 continua longtemps la 
guerre contre Henri IV, et ne se sentait à ce pince qu'a- 
près  conversion. II fut ensuite nommé maréchalde France, 
grand-mailre de la garde-robe et gouverneur du Languedoc, 
puis abandonna de nouveau ses emplois pour rentrer dans 
le cloître. On rapporte que se trouvant un iour à un balcon 
avec Henri IV, ce dernier lui dit : « bien cousin, ces 
gens-là qui nous regardent disent de moi que je suis un 
hugueunt converti, et vous un capucin reui, » et que cette 
plaisanterie le dëcida à reprendre l'habit de son ordre. A 
dater de cette époque il pratiqua sa rèle dans son ans- 
térité, et se |ivra à la prédication avec un grand sucoEs. 
« Il Coit difficile, dit un écrivain contemporain, que cet 
homme si mortifié, couvert d'un pauvre habit, ceint d'une 
crde et les pieds nus, qu'on avoir veu si enjoué avec les 
dames, si redoutable à la téte des afinCs, si propre dans 
ses habits et dans son équipage, n'eut pas inspiré la pëni- 
renne. » Le père Ange mourut à Rivoli, en I608, au retour 
d'un vo'age à lome, qu'il avait entrepris, pieds nus, pen- 
dant l'hiver. C'est de lui que Voltaire a dit : 
Y/cieux, pénitent, courthan, solitaire. 
Il prit, quitta, reprit la ce3rase etla hah'e. 
F. 



..... JSE -- JUAN I)'AUTRICHE 
JOYEUSE (J£«w-Aa_..l, marquis rE), comte de C, rand- 
rd, maréchal de France, got erneur de Metz, Toul et Ver- 
dan, était membre de la méme famille et fils à'Anloine- 
François sE JoEus. Il commandait l'aile gauche i la 
bataille de Terwinde, où il fat blessé, et mourut à Paris, 
en 1713, sans laisser «le postérité. 
JOYEUSE E-'TRËE (en flamand, blgde inkomst). 
Tel etait le nom que l'on donnait aux importants privi- 
éges des états du Brabant (y compris Anvers) et du Lira- 
bourg-, dont les dues devaient jurer le maintien avant leur 
enlrëe dans leur résidence. L'article le plus précieux était 
celui qui déliait les sujets de toute obligation d'obéissance 
dès que le duc voulait tenter de détruire un eul de ces pri- 
viidges. 
JO,'EUSE ENTRÉE (Droit de). Voye. Exs 
!,o XLES. 
JOYEUX ékVÉNF_.MENT (Droit de). On nommait 
ainsi i'imp6t qu'on levait en France  l'avënement de chaque 
souverain ; c'dtait le contraire de ce qui se pratiquait dans 
la Romœe impëriale, où les empereurs payaient leur bienvenue 
lar des largesses connues sous le nom de donativum et 
de congiarium. En France, sous la monarchie ancienne, 
o6 le privilége était la règle, et le droit l'exception, il était 
d'usage qtte le roi en montant sur le tr6ne conlirmM les pri- 
viléges des villes, communautés, corporations, les immunités, 
en un mot, de tous genres; et en Change de cette faveur 
on payait les droits de jogeu.r avénement. Quoique ces dons 
fussent dans l'oàgine volontaires de leur nature, le roi n'en 
prenait pas moins de sévères mesures po,r qu'on payM 
exactement ce tribut, l'un des plus vexatoires de tous ceux 
qui existaient avant 1789. En effet, cet imp6t n'étant pas 
&tabli iégalemeot, c'est--dire avec l'enregistrement du par- 
lement, la perception en était très-longue et très-traŒEsière; 
il tait encore odieux en ce qu'il faisait paer une deuxième 
ou troisième fois ce qui avait déja etWpaé. 
Un des autres privilcges des joyeux avdnements Cait le 
droit qu'avaient les rois de pouvoir créer un mailre jllré dans 
chaque métier et dans toutes les villes du royaume, nouveau 
moyen de baltre monnaie. 
Un des premiers jogettx at'dernenls que l'on rencontre 
dans Fhistoire est celui de Cliarles VIII ( 18, }, fixé à 300,000 
livres. Louis .XII, le père du peuple, renonça à ced«oit; c'est 
le seul qui jusqu'/t Louis XVI munira ce désintdressement. 
A l'avénement de Louis XV, le duc d'Orlëans, régent de 
France, n'exigea pas cet imp6t ; mais huit ans après ( 173 ), 
dès qu'il fut majeur, Louis dit le Bien Aimé n'e,,t garde 
d'oublier cette iructueuse prérogative : i'imp6t tut fixé à 
millions ; il en rapporta 1 à la compagnie qui le prit h ferme. 
La perception ne dura pas moins de cinquante-et-un ans, 
et il n'y avait que six mois que le paement était entiërement 
acltevë lorsque Louis XV mourut. Louis XVI, renonçant 
ce droit, abolit pour toujours cet imp6t inique. 
Un grand nombre d'évgques a aient aussi leur joyeux avd- 
h,ment; ils levaient au moment de leur sacre ou de leur 
¢oasëcration des dons forces sur tous ceux qui étaient sou- 
mis "h leur juridiction; 
egi$ ad exernplum totu$ componitttr orbi. 
A. FEILLE'r. 
JU.- (Don}, peronnagedramatique. Voge: Dos 
JUAN D'AUTRICHE (Don), fils naturel de l'em- 
pet.eur C h a r I e s- Q u i n t, naquit  Ratisbonne, suivant 
le j,suite Strada, le 24 février tMS. Le nom de sa mère a 
été si bien gardé, qu'on en est réduit aux conjectures, quoi- 
que Barbe de BIomherg, belle patricienne de Batisbonne, 
passe gttnéralement pour lui avoir donné le jour. D'autres 
veulent q,tïl ait été le fils d'une comtesse ou d'une boulan- 
gëre de Bruxelles ; quelques écrivains ont mgme ëté jus- 
qu'a signaler ce prince comme le fruit d'un inceste commis 
9ar l'empereur avec sa soe,tr Marie de Hongrie, assertion 
trop grave pour élre accueillie san preuves. Chades-Quint 
ne le recon.qul point durant son rbgne, el le confia aux soins 

679 
de don Louis Quixada, seigneur de Villa-Garcia, son maltte 
d'h6teL Celui-ci l'emmena en Espagne, et l'Ceva en sim- 
ple gentilhomme. L'empereur, après son abdication, cnfia 
le secret à son fils Philippe Il, qui résolut de le révéler 
à loute sa cour. Dans cette intention, il ordonna nne 'ande 
chasse aux environs de Valladolid, et s'y rendit avec la 
plus haute noblesse. Quixada, qui eut l'air de se trouver là 
forluitement, présenta son élève au roi. Philippe demanda 
à don Juan qui il tirait, et s'il connaissait son père. Le 
jeune homme a)ant rougi à cette question, le roi lui dit : 
« Nous n'avons, vous et moi, qu'un mgme père, l'invin- 
cible empereur Charles, monarque des Espagnes. »  ces 
mots, il l'embrassa et l'appela son irère, à la grande sur- 
prise et aux applaudissements de lous ceux qui tiraient pré- 
sents. 
Don Juan était bien fait, d'une figure noble et martiale. 
Il plut si Iort au roi, que, reonçant au proiet de lui faire 
embrasser l'Cut ecclésiastique, ce prince lui permit de 
courir la carribre des armes. Eu t570, le Maures de Gre- 
nade s'etant soulevé.s, don Juan les |orça d'abandonner 
pour jamais la presqu'lle lbCque. Le succès de cefle expé- 
dition r6pandit sa renommée dans toute l'Europe, et fut 
cause qu'on le choisit pour commander la flotte que les 
princes chrétieus destioaieut à combattre les Turcs. La 
bataille de Lépa nte, gagnée le 7 octobre tsar, le couvrir 
d'vue gloire no,tvelle, qui porta ombrage au soupçonne,tx 
Philippe. Don Juan, après avoir pris Tnnis et d'autres pla- 
ces sur la c6te d'Afrique, fut rappelé pour défendre le Mila- 
nais, attaqué par les Français. Il repassa en Espagne en | 576, 
et fut envoyé presque anssit6t, avec le titre de gouverneur 
gén_ral, dans les provinces des Pays-Bas, ail l'insurrection 
faisait chaque jour des procès. Il traversa la France in- 
cognito, et, après une entrevue avec le duc de Guise à 
Joinville il arriva à Luxembourg le  novembre 176, le 
mgme jour que les Espagnols saccageaient Anvers. 
Il état impossible de se prësenter h un peuple mécon- 
tent sous de plus favorables auspices. A proprement parler, 
le Luxembourg seul était complétement soumis. Dix ans de 
guerre civile avaient rel6ché ou rompu ailleurs tous les 
liens de i'ob¢issance. Don Joan procdda par les voies de la 
conciliation ; il fit sortir des Païs-Bas les régiments e-pa- 
gnols, et accepta les conditions que lui présentèrent les 
états. L'oeditperpéluel, sigae: Marche-en-Famëne, le 12 fé- 
vrier 1577, ne put toutefois déterminer le prince d'Orange 
à entrer dans la pacification. Ce pro|and politique désirait 
une rupture ; elle eut lieu pl,,s t6t qu'd ne l'espérait. Don 
Juan, voyant que son autorité était parement nominale, 
que chaotn s'ingérait de le gouverner, et q,,'d n'avaft aucun 
moyen de coaclion ni de défense, songea/ s'emparer de 
quelque forteresse, d'où il donnerait des ordres, et où sa 
personne serait en serrerC Étant xenu à Namur, sous pré- 
texte d')' recevoir la reine Marguerite de 5avarre, qui allail 
aux eaux de Spa, il s'empara du ch',ttean de cette ville, et 
écrivit au magistrat qu'il avail été rdduit à prendre cette 
mesure extréme par la raison que, malgré ses efforls pour 
rétablir l'ordre, il ne retirait pas de ses sacrifices tout le 
Irait qu'il er, attendait ; que notamment l'on n'avait pas ob- 
servé les deux points principaux de l'Cit perpéuel, savoir 
la conservation de la religion catholique et le respect dfi au 
t-ai; que mgme un complot avait été lutinA contre  propre 
vie. Les accusations, les apolgies, les letres interceptées 
publiées  cette époque, forment une masse 6norme de 
pamphlets, que l'historien n'a pas le droit de d(Maigner. 
Avant d'en appeler aux armes, on se fit une guerre de 
plume et de chicane. 
Dans l'intervalle, des troupe espagnoles et allemandes 
rentraient clandestinement dans le pa.v_. Le prince d'Orange, 
invité à se rendre à Bruxell, sentit que h, moment d'agir 
était arrivé. Le 2 oclobre 1577 il lu! éh, par les étais de 
Brabant ruward de let,r province, esp:ce de p,olectorat et 
de régence confi:r& dans les circonstances extraordinaires. 
Par crainte de In lyrannie, on se tit à d:aolir les places 



680 
fores, à peu prs comme on démolit la Bastille, au milieu 
des cérémonies et des réjouissances, et l'on continua de 
négocier avec don Juan, quoique ceux qui conduisaient les 
les affaires fussent déterminés à repousser tout arrangement 
définitiL Excédé de ces pourparlers, don Juan sentait son 
épée bréler h son c6Ié. Alexandre Farnèse, son neveu, vint 
se ranger sous ses ordres avec un corps considérable. Il 
n'y avait pas un an que l'oedit ]aer]aoetuel avait été consenti, 
et déjà il n'en était plus question. Les hostiités commeu- 
cèreni, non pas sans que les états négligeassent de déclarer 
le prince aggresseur ; car il fallait ttre en règle. Le 3! dé- 
cembre !577, un rude combat fut livré près de Gemblonx. 
La victoire resta au frère de Philippe; il nien jouit pas 
longtemps: attaqué du pourpre, il décéda le t « octobre 
157,, dans son camp retranché de Iamur, et dans la 
trente-troisième année de son ge. On a cru que sa fin avait 
té avancée par la jalousie du roi; mais cette opinion i 
faut le dire, n'a aucun londement. Philippe perdait plus 
que personne/ la mort de ce prince magnanime, général 
consommé, adoré du soldat, et qui faisait alors triompher 
la cause quïl ëtait chargé de défendre. 
La vie dedon Juan a été écrite en espagnol par D. Lau- 
rent van dur Hammen (Madrid, 1627 
français, d'une manière assez exacte, mais d'un syle ridi- 
cule, par Bruslé de Mont-Plein-Champ ( Amsterdam, 1690) ; 
d'un style brillant, mais d'une manière romanesque, par 
M. Alexis Dumesnil (Paris, 1827). Don Juan est le hcros 
d'en drame de 
JUAN DAUTRICHE (Don), né en 1629, fils de 
Philippe IV, roi d'Espagne, et d'une actrice nommée 
Cderona, remarquable par de brillantes facultés intel- 
lect,elle.% fut appelé eu 167 à prendre le commandement 
en chef de l'armée e.pagnole en Italie, et lit rentrer dans le 
devoir les I'apolitaius révoltés. De 1652 
tenir tète aux Français, qui faisaient de nombreuses irruptions 
ser le territoire espagnol, et en t656 ii lut chargé de la 
direction de la guerre soutenue contre eux par l'Espagne 
dans lus Pays-Bas. Heureux d'abord» il it la fortune aban- 
donner ses drape.aux quand T u r e n n e eut été envoyé contre 
lui, et perdit, le 14juin 1658,1a bataille des Dunes. Une autre 
cam pagne, brillamment commencée en Portngal, se teanina 
de mme, en !660, par une défaite. Les intrigues du con- 
fesseur de la reine curent pour résultat de le faire exiler à 
Cousuegra ; mais ce prêtre ayant à son tour Cé banni de la 
cour, don J.an fut nommé vice-roi d'Aragon. Plus tard, 
Charles II le rappela à sa cour, et le nomma son ministre. 
1|.mourut en t679. 
JUANEZ. Vo/ez Joas. 
JUAN FERNANDEZ (lies), groupe de deux lies 
situées dans l'ouCn Pacifique, à 700 kilomètres environ de 
la c6te de Chili, dont elles dpendent. Elles portent le nom 
du navigateur espagnol qui les a découvertes. Leur sol est 
très-montueux ; les quelques habitants qui s'y trouvent se 
livrent principalement à la pche. C'est dans l'une de ces lies, 
celle de Mas Tierra, que séjonrna durant plusieurs années le 
matelot écossais Klexandre S e l k i r k, dont l'histoire a inspiré 
à Danicl de Foê son chef-d'oenvre, lobinson Crusoé. 
L'a,tre des ries Juan Fernandez se nomme Mas a Fuera. 
JUBA, roi de Numidie, fils d'Hiempl II, petit-neveu 
de IMassinissa, se rangea du cété de Po m pée, dans sa 
lutte contre César. Le lieutenant de César, Q. Curion, 
fut anéanti, l'an gavant J.-C, avecdeux légions qu'il avait fait 
passer en Afrique, par Juba et le Pompéien Attius Varus. 
Après la ha!aille de Pbarsale, les partisans de Pompée 
vinrent, sous la conduite de blétellus Scipion, se ranger 
autour delui ; il suceomba avec eu sous les armes de César, 
l'an 46 avant ,l.-C., à la bataille de Thapsus, à la suite de 
laquelle il se donna la mort. 
Son fils, Jm Il, fut élevé à Ruine. Augu.gte, qui le maria 
k la jeune Cléopatre, fille du triumvir Antoine et de Cléo- 
ptre, reine d'Ëgpte, lui donua à gouverner une partie 
du royaumde son p/re, qui était devenu province romaine, 

JUAN D'AUTIICI-IE -- JUBILÉ 
avec les possessions de Bocchus, prince de Mauritanie. Princs 
ëclairé et savant, il cultiva Phiitoire et les science natu- 
relles, et Pline l'ancien nous a conservé quelques morceaux 
de géographie et d'histoire qui lont regretter la perte de ses 
écrits. 
JUBATE. Voye, BALEINE. 
JUBÉ, nom que l'on donne à l'ambon des élises, et 
qui vient, dit-on, de ce que le diacre, le sous-diacre ou le 
lecteur, avant de commencer ce qu'il devait y chanter ou 
réciter, demandant au célébrait sa béndiction en lui adres- 
sant ces paroles : Jbe, Domine, benedicere. 
JUBILÉ. « Vous sanctifierez la cinquantiëme année, 
dit le Pentateuque. et vous annoncerez la liberté à tous 
parce que c'est le jbil. En cette année tout homme ren- 
trera dans le bien qu'il possédait, et chacun retournera à 
sa première famille. » Pour emptcher que tout le territoire 
ne devlnt la proie de quelques familles, le législateur juif 
avait pris les plus sages précautions : les terres et les fermes 
nécessaires à une famille étaient déclarées inaliénables, et 
on n'en pouvait sortir lorsqu'elles avaient été assignées. Seu- 
lement le possesseur avait le droit de les engager pour un 
temps; mais à l'époque fixée il en reprenait la jouissance, 
en acquittant l'emprunt qu'il avait fait. S'il se trouvait in- 
solvable de cinquante ans en cinquante ans, le jubilé rendait 
à la famille tous ses droits anciens. 
C'est à l'exemple de cette institution qu'a étë établi le 
jubiloe célébré par l'Église romaine. L'histoire ecclésiastique 
nous appren4 qe les papes avaient dès les premiers siècles 
accordé des i n d u I g e n c e s à ceux qui visitaient les tutu- 
beaux des apétres, ou faisaient quelques bonnes œuvres 
déterminées. Boniface VIII fut le premier qui donna h cette 
faveur la forme dans laquelle nous la voyons encore. Eu 
1300 fut célëbré avec la plus graude pompe le premierju- 
biloe chrêtien, quoique la cérémonie ne portt pas encore 
ce nom, et le pontife décIara par une constitution que la 
mme indulgence se gagnerait ton les siècles, llais dès 
l'année t Chôment Vl, louché des calamités de l'Église, 
[ de l'invasion des infidèles, des guerres parmi les chrétiens, 
et considérant la brièveté de la vie des hommes, ordonna 
qu'elle reviendrait tous les cinquante ans, et fut le premier 
qui lui donna le nom debloe, par allusion  l'année juhiÆ 
taire des Juils. L'an 1389, Urbain V abrégea encore ce terme, 
êt le mit à trente-trois aunn en l'lionneur des trente-trois an- 
nées de la vie de Jésus-Christ. biais Nicolas V le reznit à 
cinquante, en t9. En I70, Paul Il le fixa à vin-cinq 
ans ; et enfin Sixte IV, l'an t73, confirma cette derniëre 
réduction, qui subsiste encore. Outre ce grand uhiIé, les 
papes en accordent d'autres h leur election, et dans des oc- 
casions importantes. 
Pour gagner les indulgence» attachées au jubil, il fallait 
autrefois faire le voyage de lome ; et cette capitale 
monde ne pouvait suffire à la foule des pieux pëlerins qui 
venaient visiter les tombeaux des bienheureux apétres. 
Pour faire participer un plus -and nombre de fidëles à 
cette grâce extraordinaire, les papes substituèrent d'autres 
pratiques religieuses et des œuvres de charité à ce vo)age, 
souvent impossible pour la plupart des cl,'étiens. 
Voici comment se lait à Ruine l'ouverture de jubilé : La 
veille de Ioël de l'année sainte étant arrivée, le pape, ac- 
compagné de tous le« cardinaux et d'une foule immense, 
se rend processionnellement, en grande pompe, de la cha- 
pelle du palais apostolique à l'ëglise de Saint-Pierre, don| 
toutes les portes sont ferreCs. L'une d'elles est murée, et 
ne s'ouvre que l'année du jubilé. Dès que le pape y est ar- 
rivé, et après une courte prière, il frappe par trois fois la 
porte murée avec m marteau d'argent, en récitant des pa- 
roles approprigs à la cérémonie. Après le pape, le grand. 
pénitencier et les deux autres pénitenciers frappent au " 
.de la m.me m.aniëre; le dernier coup est/ neine d .... ss 
 uratle .qm ferme la porte sainte est renVeïsée ïë:..q_ue 
- . . • uun 
q,u, o.n..en enlève les alCris, et que les pémtenc, ers r 
u nab, ts sacerdotaux, lavent la pode avec de 
_ _. eile , 



« uBILÊ, -- JUDAISME 
le iape etourne à son siCe, et eontinne les prières, cette 
, érélnoule achevée, il prend une croix, et, la tenant en ses 
mains, se met à genoux pour entonner le Te Deum ; il en- 
tre ensuite dans l'église par la porte sainte. Après avoir 
prié quelque temps devant i'«mlel, il se rend au tr6ne qui 
hli a élé préparé, et les v'pres sont chantes avec toute la 
lompe et toute la majesté qu'on ne retrouve que dans 
l'église romaine. En mème temps le pape envoie trois car- 
dinaux-légats pour ouvrir avec les mëmes cérémonies les 
portes saintes de Saint-Paul, de Saint-Jean-de-Latran et de 
Sainte-Xla rie-Majeure. J.-G. CnssGoc. 
JUDA  quatrième fils de Jacob et de Lin, né l'an 1755 
avant Jésus-Christ. Lorsque ses frères voulurent luer Joseph, 
ce fut lui qui leur conseilla de s'en défaire en le vendant. 
Il épousa la fille d'un Cananéen, nommé Sué, et en eut trois 
fils, Iber, Onan et Séla. Il eut aussi de T h a m a r, femme de 
l'alné de ses fils, dont il joçfit sans la connaltre, Pbares et 
ara. L'Êcriture rapporte qu'en bénissan ses enfanls, Jacob 
dit à Juda : « Le sceptre ne sortira point de Juda, ni le Ié- 
gislateur de sa pestéflté jusqu'à la venue de celui qui doit 
être envoyé et à qui les peuples obeiront. » Juda mourut 
l'an 1635 avant J.-C. 
J U DA (Tribu et Royaume de). La tribu de Juda est issue 
de ce fils de Jacob. Elle fut de loules la plus nombreuse et 
la plus puissante; au sortir d'lgypte déjà, elle était eom- 
posée de 7t,600 hommes capables de porter les armes. 
Cette tribu occupait toute la partie méridionale de la Pales- 
line. La royaulé passa de la tribu de Benjamin, dont riait 
S a d I, dans celle de Juda, d'où sorlit D a v id et les rois ses 
.successeurs. 
Après la séparation des dix tribus, celles de Juda et de 
Benjamin, testCs attachées à la maison de David, formè- 
rent le royaume de Juda, rival de celui d'lsraei, et qui lui 
survécut (oye-. HnuEux). Le royaume de Juda se recons- 
titua mémeaprès le retour de la captivilé de Rabylone, et les 
deux tribus ne formèrent plus qu'un seul peuple. C'est du 
nom de Juda qu'on a formé celui de Juifs. 
JUDA HAKKADOSH, c'est-à-dire le Saint, rabbin eé- 
lëbre, naquit l'an 120 de notre ère, à Tsippuri, ville située 
sur l'une des montagnes de la Galiiée, el mourut en 19. On 
le regarde genéralement comme l'auteur de la Mi s ch n a, 
première partie du Talmud, code du droit civil et canonique 
des Juifs, à la rédaclion duquel il eonsacra trente années. 
Il le eompesa dans la persuasion que sa nation dispersée 
oublierait les rites, et s'éloignerait de la religion et de la 
jurisprudence de ses ancêtres, si on les confiait uniquement 
à la mémoire. Avant lui, les divers professeurs expliquaient 
¢apricieusement la tradition, tant6t suivant la capacité des 
étudiants, tant6t selon que le demandaient les circonstances. 
Juda en lit une espèce de système ou de c.ours, qu'on suivit 
exactement depuis dans toutes les écoles. Juda, grâce à cet 
ouvrage, dont les Jui/s apprécièrent toute l'utilité, devint 
le chef de sa nalion, et exer.ea sur elle une si grande auto- 
ritC que quelques-uns de ses disciples ayant osé le quitter 
pour aller fonder un établissement à Lydde, curent tous 
nu mauvais regard, Cest-à-dire moururent tous d'un ehC- 
liment exelnplaire. SireCn, fils de Lachis, ayant osé sou- 
tenir que le prince devait Cre fouetld lorsgu'il pchait, 
Juda envoya de ses officiers pour l'arrëter, et il lui eut 
sans doute fait chèrement expier sa hardiesse, s'il ne s'était 
las dérobé à sa vengeance par une prompte luire. Les juifs, 
qui s'enorgueillissent encore- de la gloire de Juda, lui don- 
nent, comme nous l'avons dit, lenom de saint, et même 
de saint des saints, à eau de la pureté de sa vie. Si 
pourtant il fallait en citer ici les preuves que nous en don- 
nent ses panégyristes, cela pourrait passer pour une plaisan- 
terie. Juda, qui avait fini par se metlre au-dessus des lois et par 
exercer sur ses concitolens une autorité absolue, eonserva 
son orgueil jusqu'/t sa mort. Quand il la sentit venir, il pres- 
crivit qu'on port't son corps en grande pompe, et qu'on 
pleurtt dans roules les grandes villes par o0 passerait le 
tortège funèbre, qui ne devait pas h'averser les petites. Les 

docteurs juifs racontent que la Judée tout culière aceourut 
à ces obsèques solennelles, que, par un miracle exprès, 
le jour fut prolongé et la nuit retardêe jnsqu'a ce que cha- 
cun ftt de retour dans sa maison et ett eu le temps d'al- 
bmer une chandelle pour le sabbat. La fille de la Voix, 
ajoutenl-ils, se fit entendre, et prnnonça que tous ceux qui 
avaient suivi la pompe funèbre seraient sa,vés, à l'ecep- 
tion d'un seul, qui se tua de dësespoir. 
JUDAÏSME. On coma'end sous cette dénomination la 
croyance, les lois et les idées religieuses des J u ifs. Les 
prophètes qui parurent au retour de l'exil de Babylone ne 
prèehèrent point le rétablissement de l'État mosalque et de 
l'indépendance politique de la nafion juive, mais la fidélité 
envers Dieu et l'empire de la vraie doctrine sur le monde 
comme devant ëtre le résultat d'une sanctification religieuse. 
Quand il n'y eut plus de prophètes, et lorsque le respect 
canonique des saintes Eeritures eut été peu à peu fondé par 
Esdras et ses successeurs, dans le courant du deuxième siècle 
de l'etc chrétienne, il se produisit nécessairement une re- 
marquable différence à l'égard, de l'ancien hebraisme, aui 
bien dans les idées religieuses qui se developpèrent dês lors 
que dans la pratique; différence provenant de l'antagonisme 
existant entre la situation où se trouvaient maintenant les 
Juifs et les exigences de la lettre de l'ancienne loi. D'un 
aub-e coté, la connaissance des mœurs et des écflts des 
Perses et des Grees donna aux esprits une plus grande 
activité, et amena dans les anciennes institutions des mo- 
difications introduites par des autorités plus jeunes, colnme 
résultat nécessaire des circonstances nouvelles; en mème 
temps que la t:yrannie des Romains, les vices des paiens et 
de coutinuelles persécutions faisaient dominer certaines 
opinions et certaines pratiques nouvelles. çes innovations 
devaient produire des divisions et des luttes (voyez 
sxs et SUDCC£.S ), et par conséquent ne tardërent point 
à revëtir une forme précise. /.nsensiblement, d'antiques Ira- 
ditions et des interprctations plus modernes (voyez 
cn ), d'anciennes institutions et de nouvelle» idbes rem- 
placèrent la lettre mosalque ainsi que la doctrine hébraïque, 
et devinrent a parhr du troisième siècle des parties complé- 
mentaires du judaïsme, qui, indépendamment de la loi éerite, 
reconnut alors une loi orale. aguère encore il avait trouvé 
accès parmi quelques princes et quelques ramilles de païens 
maintenant il se trouva supplanté soit par le chrisfiauisme, 
soit par des doctrines précises; et la vie judaique devint 
alors plus inaccessible aux idees qui se répandaient de toutes 
parls. Le mahométisme a cependant conservé beaucoup 
d'éléments judaiques. La base donnée du troisième au cin- 
quième siècle au judaisme par le Talmud s'est maintenue 
chez la grande majorité des juifs, malgré l'opposition des 
c a rai tes et de quelques autres sectes bient6t diparues ; 
et du sixième au dixième siècle elle se répandit de la Pa- 
iestine et de la Babylonie, et plus tard encore de l'Italie, 
dans toutes les courtCs Ilabitées par des juifs, à l'exception 
peut-ëtre de la Chine et de l'Inde. Commentée dt.jà philoso- 
phiquement par P bi lu n, puis, à partir du neuvième siècle, 
fortifiée par la critique, et maintenue jusque dans ces der- 
niers temps par des docteurs de la loi et par des philo- 
sophes, tels que llaimonides et .Mendelsohn, le 
procès ne lui a pas plus fait défaut que les luttes inté- 
fleures ; voyez C,OE, Juive [Litterature] et SwxGoçue). 
Toutefois, il faut dans le judaisme distinguer d'abord la 
partie dogmatique, ou le rapport de Dieu avec rbomme; 
puis la partie historique et symbolique, ou l'alliance de Dieu 
avec Israel, ainsi que les actions religieuses et les institu- 
tions qui en découlent; enfin, sa partie morale et sa partie 
sociale et juridique. Les éléments dogmaliques, provenus du 
monothéisme le plus sévère, y ont reçu les formes les plus di- 
verses; de m0.me que l'Cude des sources religieuses y a sui- 
vi souvent les directions les plus opposées, et que les doetri- 
ries rdatives au 5Iessie, -a l'àme et au monde des esprits y ont 
subi d'essentielles modifieafinns. On y rencontre aussi, surtout 
dans les œuvres des époques les plus reculees, des idéet 



fs2 JUDAISME -- 
Irès-divergentes sur le monde et la vie, sur la science et sur 
l'importance de certaines pratiques. Une foule innombrable 
d'opinions sont tombées dans l'oubli le plus complet, des 
cérémonies sont devenues bots d'usage, des doctrines ont 
ét,- vaodifiées ou ont cessé d'ëtre admises. L'éducation, l'C 
Iode, le culte ont dU eux-mvaes subir l'influence de ces 
développements; les lois sur le droit juif ont été en grande 
partie abolira dans beaucoup d'États, et les lois sociales 
changées. Aussi la véritable pratique dans le judaïsme est- 
elle souvent aujourd'hui étrangère, quelquefois mme con- 
traire à la lettre, et pour la bien connaltre faut-il tre profon- 
dement initié aux doctrines judaiques, à leurs déueloppe- 
ments et à leurs transformations. Le judaisme a toujours été 
l'objet de nombreuses accusations; de là en partie les lois 
barbares instiluées contre les juifs. La persécution déote et 
fanatique des juifs ainsi que les luttes d'opinions existant 
parmi les jnifs eux-vavaes ont eu d'ailleurs pour résultat de 
favoriser le perfectionnement du judaisme, surtout en 
France, où une appréciation calme et exempte de préjugés 
a demontré que ceux qui professent le judaïsme ne sont à 
aucun égard tufCieurs aux autres citoyens, et que leur foi 
religieuse ne met aucun obstacle à l'accomplissement de 
letrs deo.i.rs, soit comme hommes, soit comme citoyens. 
JUDAITES. l'oye: Cxï_s. 
JUDAS ISCARIOTE  ainsi appelé de sa ville natale, 
Arioth., dans la tribu de Juda, était le iils de Simon et l'un 
de» douze A prives. Dans les voyages de Jdsus, c'était lui 
qui Cait«barsWde tenir lacaisse; vaissiondont, au rapport de 
saint Jean, il ne s'acquitta pas ans commettre mainte infi- 
délités. C'est aussi lui qui rendit Jés u s pour 30 sekel (envi- 
ron 75 ff.) au sanhédrin juif. On a chercbé à expliquer 
ci'tre trahison infàme en disant qu'ambitieux des richesses 
ci des grandeur de ce bas monde, il «tait impatient de voir 
J,'us se manifester comme Messie. Cet espoir fut en tout 
cas reçu, et Judas sependit de désespoir. L'argent qu'il avait 
reçu lut employé à acheter un champ qui. servir de sépul- 
turc aux élrangrs. 
JUD..S MACil.$BÉE c'est-à-dire le 3larIeau, 
héros juit, sorti de la race des Asmonëens, et qui dirigea, 
à la mo t de son père, le prrtre Mattathias, la goerre d'in- 
dependance que sa nation soutint contre le roi de S)-rie, 
Antiochus Epiplmnes,t ses successeurs. L'an 166 avant 
J.-C, il dcfit dans plusieurs batailles les géneraux syriens 
Gorgias, Lysias et icanor, et il était sur le point de con- 
clure une alliance avec les Romains, quand une armée sy- 
rienne supérieureà la sienne le força d'accepter un nouveau 
combat data lequel il perdit la vie, 160 ans avant J.-C. Les 
deux livres des 3Iac h a b 6es, qui font partie de l'Ancien- 
Testament, renferment une double version de ses faits et 
geste mililaire% très-différente en beaucoup de points. 
JUDAS TllADDÉE ou LEBIE. l'oye: Jonc (Saint). 
JUDE (Saint), aussi nommé JUDAS THADDIE ou 
LEBB_E, un des douze Aprtres, était probablement fils 
d'AIphee et frère de J a c q u es le i',Iineur. La tradition ee- 
clésiastiqne de l'Occident le fait précher en Perse et y souf- 
tir le martyre; mais celle de l'Orient le fait voyager dans 
l'Arable, la Syrie et la Palesline, et mourir t Édesse. Sui- 
vaut d'autres versions, il aurait plus tard 'isité encore l'As- 
syrie et terrainWses jours en Phénicie. L'Citre qui porte 
on nom, et qu'on trouve dans le canon de la Bible, ne pa- 
rait pas ètre de lui ; car on y lit plus d'un passage faisant 
allusion à la condition des chrétiens et aux prédicalions des 
Ap61res, à une bpoque de beaucoup poslerieure, leur vaort. 
C'est un autre Thaddée, suivant la version d'un des Septante, 
que .lsus aurait envoyé à Abgar, souverain d'Édesse. 
• JUDÉE. Voyez 
JUDÊÈ ( Arbre de ). Voye. G.t,F (Eotanique). 
JUDÊE (Baumede). l'oycz GtLU ( Baume de). 
JUDICA ( Dimanche du ), nom que l'on donnequelque- 
fuis au dimanche de la Passion, parce que t'intr6it de la messe 
commence ce jour-là par les mots Jtldica te» Domine, 
(Psaume XLII, 

JUDICIAIRE 
JUDICATUM SOLVi (Caution). Voyez C.xvzlo.. 
tome 1V, pnge 713. 
JUDICIAIRE (Genre), celui des trois sentes d'élo- 
quence qui a particulièrement pour vaission d'accuser ou 
de défendre, de faire absoudre ou de faire condamner. 
JUDICIAIRE (Pouvoir). C'est l'autorité à qui, dans 
un système gcnéral de gouvernement, t rcservé le 
droit de rendre la j u s tf c e. La séparation du po«voir ju- 
diciaire des pouvoirs législatifet exécu tif est une né- 
eessité sociale. Le pouvoir judiciaire émane du souverain, 
prince ou nation; quelquefois il prend sa source dans I'é I ec- 
t i o n, quelqttefois il esl investi de I' i n a va o v i b i I i t ê, comme 
d'une garantie d'indépendante (voye: Jcnmtm [Orga- 
nisation]). Le pouvoir judiciaire, adit Henrion de Pansey, 
coin prend deux éléments, la j u r i d i c t i o n et le comman- 
dement, qui a lui-vaCe pour sanction I' ex dcu t i o n. 
JUDICIAIRE (Organisation). C'est la loi du 20 avril 
1810 qui, respeetée et maintenue dans la plupart de ses 
dispositions, sert encore aujourd'hui de base et de règle à 
notre organisation judiciaire. 
11 faut distinguer d'abord les tribunaux judiciaires pro- 
prement dits et les tribunaux administratifs. 
A la lte de la hiérarchie judiciaire on trou'e la personne 
du souverain. « La justice se rend au nom de l'empereur, 
dit l'article 7 de la constitution. Au-dessus de toules les 
cours et de tous les Iribunaux domine la cour de ca s sa- 
I i o n, cbargée de surveiller l'application des lois ; ivamédiale- 
ment au-dessous d'elle, les cours impëriales ou cours d' a p- 
pel, qui forment le second degré de juridiction par rap- 
port aux tribunaux de commerce et d'arrondissevarnt. Ces 
derniers, qu'on appelle encore t ri b u n a n x d e p r e m i è re 
instance, jugent les appels desjustices d e paix, der- 
nier degré de la biérarchie des tribunaux civils. La méme 
hiérarchie et les vaëvaes tribunaux se retrouvent en ma- 
tiëre criminelle. La surveillance qu'elle exerce sur l'ap- 
plication des lois civiles, la cour de cassation l'Cend à 
l'observation des lois criminelles. Les cours d' a s s i s e s se 
recrutent parmi les cours impériales et les tribunaux de 
première iuslance, pour connailre des cri vaes, avec ad- 
jonclion de j u r é s. C'est aussi la cour impériale qui juge 
en matière de police correctionnelle les appels des tribunaux 
du département où elle siCe ; dans les autres départements 
du ressort, ces appels sont jugés par le tribunal du chef- 
lieu de chaque département. Les matiéres de p o I i c e e o r- 
r e c t in n n e II e et les appels des tribunaux de police sont 
jugés par les lribunaux d'arrondissement. Enfin, les vaatiëres 
de simple p o Il ce sont jugées selon les règles déterminées 
par la loi, tanlrt par le juge de paix, tanlrt par le vaaire. 
Quant aux tribunaux de en nana erce et aux conseils de 
prud'h omva es, leur nombre, le;:r répartition et leurs 
altributions sont détervainés par divers décrets spé- 
«taux. 
Auprësde chaque cour ou tribunal, à l'exception des jus- 
tf«es de paix et des tribunaux de comvaerce, se trouve pla- 
tC, à chaque de.é de la hiérarchie judiciaire, sons lenom 
général de m i n i s t è r e p u b li c, une mastrature dont 
les membres, nommés et révocables par l'empereur, ont 
pour mission de surveiller, vaaintenir et requérir en son 
nom l'exécution des lois, de poursuivre d'office celle exé- 
cution dans les dispositions qui intéressent l'ordre publie, 
le gouvernevaent, le domaine de l'ltaf, les droits du mo- 
narque et¢eux des personnes incapables de se dé[endre elles- 
mêmes, tetlcs que les mineurs, les femmes, les absents, etc. 
Une institution nouvelle, l'as si sta u c e j u d i c i ai r e, est 
venue completer l'organisatiou de la justice, qui a subi d'ail- 
leurs des modifications plus ou moins profondes par la 
eréalion et l'abolition successives de juridietions et de tribu- 
nanx d'ex ceplion. 
Les Iribunaux administratifs sont la cour des e o m p t e s 
le conseil «l'Etat, et les conseils de préfee t .... " 
Avant 1789, l'ordre judiciaire, formé au milieu de I;îa" 
chie féodale et des luttes de l'Elise et du pouvoir séculier, 



JUDICIAIRE -- JUGE 
ortait l'empreinte des vicissitudes de son origine. La jus- 
tire séculière était divisée en justice royale et justice sei- 
gneuriale. La juridiction royale se r.partissait entre des 
autorités diverses et nombreuses : on la divisait en justice 
ordinaire, compren an t les p r é v 6 t s royaux, les b a i I I i s 
ou sénéchaux, les prési d taux, les conseils supérieurs, les 
parlements, leconseil des parties; eten justice ex- 
traordinaire, dont les subdivisions, tant au civil qu'au cri- 
minel, étaient plus multipliées encore : c'étaient les juges 
consulaires, les amirautés, les mat trisesetjur andes, 
les eaux et forëts, la cour des aides, la requête des 
b6tels, etc. Quant à la juridiction seigneuriale, elle se divi- 
sait el haute, noyenne, et basse justice. 
Un pareil etat de choses, qui avat fait de la justice le 
patrimoine du magistrat qui la rendait, et qui se composait 
de tant de juridictions exceptionnelles, mal réparties, sans 
règles fixes de compétence, et avec de ombreux priviléges 
d'attributions, ne pouvait subsister avec l'esprit nouveau de 
la révolution. 
C'est encore l'Assemblée constituante qui, dans la fa- 
meuse nuit du t aott 1789, supprimant les justices sei- 
gneuriales et ecclésiastiques, entraines dans la ruine com- 
mune des institutions feodales, eut la gloire de porter la re- 
forme dans notre organisation judiciaire. Un an phs tard, 
la mme assemblée établit et developpa, par le dëcret du 24 
aott 1790, un système entièrement neuf, et fonde sur la 
division territoriale qu'elle venait de tracer. Cette loi, dont 
les principes gduéraux et plusieurs dispositions particulières 
sont encore en vigueur, ne s'était occul,ée que de la justice 
civile et de la création de deux tribunaux exceptionnels, 
les tribunaux de commerce et les jutices de paix ; la juri- 
diction ordinaire appartenait à des tribunaux de district com- 
posés de cinq ou de sixjugs Cus par le peuple, aussi bien 
que les juges de paix. Ces tribunaux jugèrent les appels des 
justices de paix, et de plus fimrent réciproquement juges 
d'appel les uns à l'égard «les autres. La justice criminelle 
s'administra par des tribunaux de police municipale, formés 
,lu corps municipal ; par de tibunaux de police correction- 
nellc, rompons des juges de paix et de teurs assesseurs (dé- 
cret du 29 juillet 1791 ); enfiu, par des tribunaux criminels 
,le dpartement ( décret du 0 janvier 1791 ). Dës la mme 
époque fut introduite et consacrée l'instituti,,n du jury cri- 
minel (décret ,lu 16 septembre 1791 ). Au-dessus de ces 
diverses juridictions, l'Assemblée constituante plaça une 
cour de cassation, dont l'institution, avec celle des juges 
de paix et des juges de commerce, a traversé intacte les 
emp6tes de la révolution. 
La constitution de 1793 avait substitué aux tribunaux de 
district des arbtrespubli¢s, jugeant en dernier ressort; celle 
du 5 fructidor an m rétablil le systéme de la Constituante, 
en remplaçant les tribunaux de district par des tribunaux 
d'arrondissement. Quant à la justice criminelle, il serait 
/roi» long et trop douloureux de suivre les bouleversements 
violents et continuels que lui firent subir les passions révo- 
lutionnaires; il suffira de dire que, aprës plusieurs lois tran- 
sitoires, le Code de bmaire an Iv reconstitua les tribu- 
naux de police municipale et correctionnelle et les tribunaux 
criminels de département. Dés les premiers jours du con- 
sulat, la loi du 27 vent6se an vin ( 18 mars 1800 ) maintint 
les tribunaux de commerce et les justices des paix, créa un 
tribunal de première instance par arrondissement, 6tabli 
vingt-neuf tribunaux d'appel et un tribunal criminel par dé- 
partemeot. Les tribunaux «le première intance connurent 
également des matières civiles et des matières de police cor- 
rectionnelle. Le Code d'Instruction criminelle remplac.a, huit 
ans plus tard (7 novembre lS0.S ), les tribunaux criminels 
de département par les cours d'assises, dont il régla la 
mation eu mme temps qu'il réorgania les autres tribnnaux 
,le répression. Efin, la loi du 20 aoit 1810 dësigna les tri. 
bunaux d'aploel, qu'un sénatus-consulte du 28 Iloréal au x] 
avait déj, décores du fitre «le cours d'appel, par le nom 
-le cours nnpcriolcs. C'est, comme nous l'avons déjà dit, 

cette loi qui est le fondement de l'organisation Judiciaire en 
France. Charles 
JUDITH. Le livre de l'Ancien Testament qui porte son 
nom la fait lilled'un certain Merad, et veuve de Manassès 
de Béthulie. Suivant ce récit, elle saura sa ville natale sur 
le point d'ëtre prise par Holopherne, g6néral de Nabuchodo- 
nosor; et oici comment elle s'y prit : elle revêtir ses plus 
beaux atours, pénétra ainsi dans le oemp ennemi, et par sa 
beau et s agaoeries chaa Holopllee, à qui elle trancha 
la tête au moment oh, appesanti par l'ivresse, il s'abau- 
donnait au sommeil. E mme temps les assiégés 
rent une sortie, et mirent en dëroute l'arrose qui se trouvait 
sans chef. Judih, ajoute le récit, vecut encore longtemps 
h Betbulie, entourée de beaucoup de respect et de onsidé- 
ration, et mourut h 1'6ge de cent-cinq ans. Com Josëe, 
dans son Hisioire du peuple Juif, ne fait poiut mention de 
oet événement, et que le livre en question conien ,l'aillur» 
beaucoup d'invraimblances et d'erreurs géograpbies, les 
protestant ont relégué cette histoire au nombre des légendes. 
Les peinres ont uvent pris pour sujet l'action de Judith. 
JUGE. C'est un magistrat préposé par l'autorile pu- 
hlique pour rendre la justice aux particuliers. Quelquefois le 
nom de juge est employé pour dé»ier, pour personnifier 
la justice des tribunaux elle-m,.me : ainsi, on dit que telle 
chose doit tre d«cidee par le juge. Dans un sens plus res- 
treint, le mot juge ne s'applique qu'aux juges de pai 
et aux membres des tribunaux de premibre instance. Les 
magistrats des cours ro)-ales et de la cour de oessation pren- 
nent le nom de conseillers. 
Les juges se divisent, par rapport à I'lcndue de leurs 
pouvoirs, en juges ordinaires, qui connaissent indistincte- 
ment de toutes les matières qui n'ont point te athibues à 
d'autres juge% et extraordinaires o exceptionel% qui ne con- 
naissent que de certaines matières qui ont Ce diskaies par 
la loi de la juridiction ordinaire; par rappo aux mafiëres 
dont ils conuaissent, en juges civils, criminels, correction- 
nclset depolice; par rappo h leurs grades, en juges de 
mière instance et juges d'appel. On connait encore leuge 
c o m m  ss a  r e, le juge d'instruction, chargé dans chaque 
tribunal de premioe insaace de faire I' i n s t r u c t i o n 
affaire» criminelles ; le juge suppléant, qui remplace le juge 
en cas d'empêchemenk sans axoir lui-mëme de fonctions ha- 
bituelles; le juge rpporteur, chargé de faire au tribunal 
un rapport sur une affaire qui lui est confiée. Les juges 
naturels d'une personne sont ceux que la loi lui donne. 
Les juges sont nommés et institues par l'empereur; 
l'exception de ceux des Ifibunaux de commerce, la loi leur 
assure l'inamovibilite, qui est pour eux leur tilre de 
sécutite et pourles justiciables une garantie dïndépendancc. 
[Les juges paix ne pas 
de 
sont 
inamovibes. 
. Les juges sont responblesen cas de for fa i tu re, etdans 
tous les cas pour lesquds la loi ouvre contre eux la p r i s e 
' à p art i e, qui est la voie offerte aux justiciables pour le 
 atlaquer. Les présidents des tribunaux et de cours ont 
aussi le droit d'avertir ceux des membres de leurs compa- 
gnies qui comprometent la digni de leur caractëre. Si cet 
avertisment res[e sans effet, le juge est soumis ì l'une 
des peines de discipline détermindes par la loi, el qui sont 
appliquées, suivant Ic circonstanoes, soit par les tribunaux 
auxquels le juge inculpé appartient, soit pro- la cour de 
cassation. Ce[te action disciplinaire ne s'applique pas néan- 
moins aux crimes ou dlis dont les juges pourraient se 
rendre coupables. 
Parmi les fonctions dont l'homme peut être chargé, il 
n'en est pas de plus grande, de plus solennelle que celle de 
rendre la justice à ses semblables. Organe de la loi, c'est 
au juge qu'est confié l'honneur et la fortune des cioyens; 
c'est à lui que, tour h tour, la veuve et l'ohclin viennent 
zlemander prutectiou ; c'est lui qui vene l'innence et 
trit le crime. Devant lui s'abaissent les grands de la terre, 
et le pauvre, sous le niveau de la justioe, deient I'al du 
riche le phms paissanL  ]ue a donc de» devoirs immese 
6. 



84 
à remplir; et, Iorsqu'il en a bien compris la sainteté et l'é- 
tendue1 quels respects ne reCite-t-il pas? Mais ils sont rares 
ceux qui sont pénélrés de toute la gravité de leurs devoirs. 
Si nous en croyons les antiques traditions de la magistrature 
française, celui qui rendait la justice se dévouait tout en- 
fier ì ses nobles fonctions ; son minist/re était pour lui 
comme un sacerdoce et la science des lois occupait tous 
ses instants, il serait difficile de trouver de nos jours cette 
abnégation absolue dl» juge; la politiql,e et ses passions 
ont pénétré iusque dans le sanctuaire de la justice, et avec 
elle slest manifesté cet esprit de mouvement et d'atation 
«p»i fait que personne ne veut rester là o/1 il est, et que 
chacun aspire tu«jours h devenir autre chose. 
E. DE CHABBOL. 
JUGE (Grand-). Voje= GnANI-Jvc. 
JUGED'AItMES DE FBANCE. Celle charge f«t 
é',ablie par Charles VIII, en ltOS, sons le titre de maré- 
chai d'armes, et reslaurée par Louis XIII dans les premiëres 
années de son rège, ì la demande de la noblesse. Le juge 
d'armes établissait et certifiait la véracit des titres de no- 
Liesse, et jugeait tous les différends qui s'étevaient ì l'oc- 
casion des armoiries ; mais ses décision n'étaient pas sans 
appel, et pouvaient être attaquées au tribunal des matC 
chaux de France. 
JUGE DE PAIX JUSTICE E PAIX. Le juge de 
paix est un magistrat spécialement établi pour maintenir la 
paix parmi les citoyens, soit en décidant sommaircment, 
sans frais et sans le ministère des avoués, les contestations 
de peu d'importance, soit en essayant de com'ilier les par- 
ties qui sont sui" le point de comparaltre devant les tribu- 
naux civils ( voyez Cosc»la«ms ) ; soit en les invitant, au 
cas de non-conciliation, " se faire juger par des arbitres. 
Ils sont en o«»tre appelés  la présidence des lribunaux de 
shnple p o I i c e, et cbargés des fonctions d'officiers de p o- 
I i c e j u d i c i a i r e. Diverses lois leur ont aussi donné diffé- 
rentes attributions dans des matières non contentieuses 
( VO./t °-- COISEILS I)E FAIILLE, SCELLÉS [ Apposition »le], etc.) 
La France doit I'(tablissement des jutices de paix, créa- 
tion empruntée ì l'Angle»erre, à la IIollande et à d'anciens 
usages, h l'Assembl6e constituante, qui voulut, lit-on dans 
le rapport de Tbouret, « placer à la proximite de tous les 
justiciables de chaque canton un magistrat populaire, dont 
le tribunal lut l'autel de la concorde et qui prononçait x ire 
et sans frais sur les choses de convention tr/s-simple, et 
sur celles de faits qui ne peuvent être bien appréciés que 
par l'homme des champs, qui vérifie les faits sur les lieux 
mmes et qui trn»ve dans son expërience des règles de dé- 
cision plus sOres que la science des formes et des lois n'en 
peut fournir aux tribunaux. C'est un père au milieu de ses 
enfants ; il dit un mot, et les injustices se rëparent, les di- 
x isions s'éteignent, les plaintes cessent; ses soins »uns»anis 
assurent le bonheur de tous.  
Cette institution, malgré les services incontestables qu'elle 
a rendus en ce qui concerne la bonne adminislration de la 
:ustice, n'a pas néanmoins rpondu complêtement aux 
belles esp¢zrances qu'en avait conc.ues l'Assemblée consti- 
tuante. 
Les jnstices de paix furent instituées par la loi du 2- ao,l 
1790 relative h l'organisation judiciaire. Aux termes de cette 
loi, le juge «le paix ne pouvait juger seul; il [allait qu'il f0t 
assisté de de«x prud'bommes ou assesseurs. Cet ordre de 
choses fut cbangé par la loi du 29 vent6se an x, qui donna 
deux suppléanls ì chaque juge de paix pour le remplacer 
en cas d maladie, d'absence, etc. Le droit de choisir le 
juge de pmx, primitivement donnê aux citoyens de chaque 
canton, let ëduit par le sênatuconulte du IG thermidor 
an x à cel«i «le présenter deux candidals ì l'empereur, qui 
choisissait celui dŒE deux qui lui paraissait le plus dig, ne. 
Depui la charte de ISI, t'élection n'entre plu pour rien 
dan» la nominafion des j«ges d paix ; elle appartient au 
souverain, q«i nomme également les suppléants. Un greffier 
et nn Imisser sont attaches à chaque justice da paix. Le 

JUGE  3UGE DE PAIX 
nombrc des justicei de paix aëté fixé par la loi du 28 plu- 
vi6se an ix ì 3,600 au plus et 3,000 au moins. Le principe 
c'est qn'il doit y avoir un juge de paix par canton. 
Les juges de paix sont des jnges extraordinaires, dont 
la juridiction est exceptionnelle, c'est-ì-dire q»,'elle n'em- 
brasse que les matières qui lui sont spécialement affectées 
par la loi. Mais quand la matière est de la compêtence de 
juges de paix, tout juge de paix peut en connaltre si les 
parties la lui déf/rent volontairement. D'ailleurs le pouvoir 
du juge de paix expire ds qu'il a endu son jugement; et 
s'il s'éleve des dilficultés sur l'exécution, elles doivent être 
portCs devant les tribunaux ordinaires. Il n'y a point d'ou- 
verture h cassation contre les jugements des juges de paix, 
si ce n'est pour cause d'incompétence on d'excës de 
po uvoir. « 11 est sage, a dit llenrinn de Pansey, de fermer 
la voie de l'appel et celle de la cassalion dans celle multi- 
tude de petites affaires que le juges de paix sont autorisés 
h j»ger en dernier ressort, et qui n'ont guère lieu que dans 
les deruiëres classes de la société, et entre des hommes dont 
l'obstination, comme cela arrive presque toujours, est égale 
h Pignorance. Dans toutes les diflicultés de cette espèce, l'in- 
térêt de l'allaire est si mince, que, quelque injuste que l'on 
veuille supposer la sentence, le emde serait toujours plu» 
filcheux que le mal. ,, 
Quant a'la compétence même des juges de paix, elle a été 
fixee avec détails et précision par la loi du 25 mai 1838. 
Ils connaissent de toutes actions purement personnelles ou 
mobiliëres, en dernier ressort jusqu'a la valeur de I00 b'ancs, 
et  charge d'appel, jusqu'a la valeur de 200 francs. Ils. 
prononcent sans appel jusqu'h la valeur de 100 francs, et à 
charge d'appel jusqu'au taux de la compétence en dernier 
ressort des tribunaux de première instance; sur les contesta- 
tions entre les bteliers, aubergistes ou logeurs et les voya- 
geurs ou locataires en garni pour dépenses d'btellerie et 
perte ou avarie d'effets déposés dans l'auberge ou dans 
l'btel ; entre les xoyageurs et les voituricrs ou bateliers, 
pour retards, frais de route et pertes ou avaries d'effets aco 
compagnant les voyageurs ; entre les voyageurs et les car- 
rossiers ou autres ouvriers pour fournitures, salaires et 
réparations faites aux voitures de voyage. Ils connaissent 
sans appel jusqu'h la valeur de I00 francs, et h charge 
d'appel,  quelque valeur que la demande puisse s'élever, 
des actions en payement de loyers ou fermages, de congés, 
des demandes en résiliation de baux fondees sur le seul dé- 
faut de payement des loyers ou fermages ; des expulsions de 
lieux et des demandes en validit de saisie-gagerie : le tout 
lorsque les locations verbales ou par écrit n'excèdent pas 
annuellement 400 lrancs (loi du 9. mai tS55). Si le pr-:x 
principal du bail consiste en denrées ou prestations en na- 
ture appréciables d'aprës les mercuriales, l'évaluation est 
faite sur celle du jour de l'échéance lorsqu'il s'agit du paye- 
ment des fermages. Dans les autres cas elle a lieu suivant 
les mercuriales du mois qui a précédé la demande. Si le 
prix du bail n'est pas appréciable d'après les mercuriales, ou 
s'il s'agit de baux à coloris partiaires, le juge de paix déter- 
mine sa compétence en prenant pour base du revenu de la 
propriélé le principal de la contribution fonciëre de l'année 
courante multiplië par 5. Les juges de paix connaissent 
sans appel jusqu'a la valeur de I00 francs, et  charge 
d'appel jusqu'au tanx de la compétence en dernier ressort 
des tribunaux de première instance, des indemnités re»la- 
reCs par le locataire ou fermier pour non-jouissance pro- 
venant du lait du propriétaire, lorsque le droit 'à nne in- 
demnitê n'est pas contestë; des dégradations et pertes; 
néanmuins ils ne connaissent des pertes causées par incendie 
on par inondation que jusqu', concurrence de 100 francs 
sans appel, et 200 francs à »bruge d'appet. Ils connaissent 
ëgalement sans appel jusqu'à la valeur de «0 rancs, et 
, charge d'appel, à quelque valeur que m demande puise 
s'élever. ,les actions pour dommages fait. aux Champs, 
l'r«its et récolte, soit par l'homme, soit par les animaux, 
et de celles relative à l'Caçage des arbres ou haies et au 



JUGE DE PAIX 
curage soit des fossés, soit des canaux servant à l'irrigation 
des propriétés ou au mouvement des usines, lorsque les 
droits de propriété ou de servitude ne sout pas contestés; 
des réparations locatives des maisons ou fermes mises par 
la loi  la charge du locataire; des contestations rehtives 
aux engagements respectifs des gens de travail au |out, au 
mois, à l'année, et de ceux qui les emploient; des matres 
et des domestiques ou gens de service à gages; des maltres 
et de leurs ouvriers ou apprentis, sans néanmoins qu'il soit 
dérogé aux lois et règlements relatifs h la juridiction des 
p r u d' h o m m e s; des contestations relatives au payement 
des nourrices, sauf ce qui est prescrit par/es lois et règle- 
ments d'administration publique ; des actions civiles pour 
diffamation verbale et pour injures publiques ou non publi- 
ques, verbales ou par écrit, autrement que par la voie de 
la presse; des mêmes actions pour rixes et voies de fait : le 
tout lorsque les parties ne se sont pas pourvues par la voie 
criminelle. Ils connaissent encore,  charge d'appel, des 
entreprises commises dans l'année sur les cours d'eau ser- 
vant à l'irrigation des propriétés et au mouvement des 
usines et moulins, sans préjudice des attributions de l'auto- 
rité administrative dans les cas déterminés par les lois et les 
rglements; des denonciations de nouvel œuvre, coin- 
plaintes, actions en rintégrande et autres actions pos- 
sessoices fondées sur des faitségalemenl commis dans l'année; 
des actions en bornage et de celles relatises h la distance 
prescrite par la loi, les règlements particuliers et l'usage de» 
lieux pour les plantations d'arbres ou de hales, lorsque la 
propriëté ou les titres qui l'établissent ne sont pas con- 
testés; des actions relatives aux eonstructions de puits, de 
fosses d'aisance, de cheminée, de forge, de iour, de fourneau, 
d'étable, aux dép6ts de sel ou amas de matière corrosise qui 
peuvent nuire aux voisins lorsque la propriété ou la mi- 
toyenneté du mur ne sont pas contestées ; des demandes 
en pension alimentaire n'excédant pas 150 francs par an, 
et seulement lorsqu'elles sont rotinCs par les enlants vis-a- 
vis de leurs père et mëre et autres ascendants, et récipro- 
quement; les gendres et belles-filles vis-à-vis de leurs beau- 
père et belle mère et réciproquement. 
Les juges de paix connaissent, en outre, de toutes les 
demandes reconventionnelles, ou en compensation, qui par 
leur aalure ou par leur valeur sont dans les limites de leur 
compétence, alors mème que ces demandes réunies à la 
demande principale s'élèveraient au-dessus de 200 frane. Ils 
connaissent, ì quelque somme qu'elles puissent monter, des 
demandes reconventionnelles en dommages-tutCêts [ondëes 
exclusivement sur la demande principale elle-même. 
Les juges de paix, comme tous autres magistrats, peu- 
vent Cre récusés; mais les cause de récusation sont 
bien plus restreintes pour eux. 
ous avons parlé aillenrs de la cil ation devant le juge 
de paix. Dans tous les causes, saui les cas d'urgence et 
ceux o6 le défendeur est domicilié hors du canton ou des 
cantons de la même ville, le juge'le paix doit, aux termes 
de la loi du 2 mai 185, avant la citation rbguliëre en justice, 
appeler sans frais les parties devant lui pour essayer de les 
concilier. Cet avertissement préalable est rédigé et délivré 
par le eflîer qui l'expédie par la poste en percevant du 
demandeur une rétribution de 25 centimes, tant pour les frais 
dïmpression que pour l'affranchissement. Le juge de paix 
dit qui doit supporter cette dépense dans le cas de conci- 
liation. 
Les juges de paix doivent indiquer au moins deux au- 
diences par semaine ; ils peuvent juger tous les jours, mème 
les dimanches et fétes, le matin et l'après-midi. Ils peuvent 
donner audience chez eux en tenant les portes ouvertes. 
Au jour fixé les parties comparaissent en personne ou par 
leurs fondés de pouvoirs, sans qu'elles puissent faire signi- 
fier aucune défense. Elles sont tenues de s'expliquer avec 
rodéralioa devant le juge, et degarder en foul le respect qui 
est dU à la justice; si elles y manquent, le juge les y rap- 
pelle d'abord par un avertissement; en cas de récidive elles 

 JUGEMEgT 685 
peuvent être condamnées à une amende, qui ne peut pas 
céder dix francs. Dans le cas d'insulte ou irrévérence grae 
envers le juge, il dree procès-verbal, et peut condamner 
 un emprisonnement de trois jours au plus. Les parties 
sont entendues contradictoirement ; la cause doit être jugée 
sur-le-champ ou ì la premiëre audience; le juge, s'il le croit 
nécessaire, peut se faire remettre les pièces. Lorsqu'une de 
parties déclare s'inscrire en faux, dénie l'écriture ou de- 
clare ne pas la reconnaltre, le juge lui eu donne acte, pa- 
raphe la pièce et renvoie la cause devant les juges qui doi- 
vent en connaitre. Dans les cas off un i nterocutoire a 
été ordonné, la cause doit être jugée définitivement au 
tard dans le délai de quatre mois du jour du jugement in- 
terlocutoire. 
Aprës ce délai, Iïnstance est périmée de droit; si elle 
rest par la faute du juge, il est passible de dommages- 
intérêts. 
Quant aux voies par lesquelles on peut se pourvoir contr,: 
les jugements des juges de paix, si le jltg.ment est par 
defaut, la partie condamnée peut  former o p post t ion 
par un exploit portant a.signation " ses a,lversalres pour le 
premier jour d'audience, dans les trois jours de la siifica- 
tion qui lui en a éle faite. 
L' appel des jugements des juges de paix n'est recevable 
ni avant les trois jours qui suivent cehli de la prononciation 
des jugements,  moins qu'il n'y ait lieu à exëcution provi- 
soire, ni aprës le trente jours qui suivent la signification 
ì 1"6gard des personnes domiciliëes dans le canton. Ce ddlai 
est augmenté comme celui des ajournements  l'égard des 
personnes domiciliée« hors du canton. 
JUGED'INSTBUCTION. C'est le juge qui dans 
chaque tribunal de première in»tance est chargé d'mstruire 
les af[aires criminelle.. Les juges d'instruction sont choisis 
par l'empereur pour trois ans, parmi les juges et juges sup- 
pléants des tribunaux civils. Ils peuvent garder ces fonc- 
tion plus longtemps et consetwer séance au jugem,nt 
affaires civiles suivant le rang de leur rêception. Quant aux 
fonctions de police judiciaire, ils sont sous la surveillance 
du procureur général impérial. Ils ne peuvent laite aucun 
acte d'instruction et de poursuite sans avoir comnmnique 
la procédure au procureur impérial, hors le cas de fla- 
grant dëlit, o ils peuvent agir sans son assistance. ]ls 
peuvent également, s'il ' a lieu, délivrer des mandats 
d'amener, mème des mandats de dep6t, sans que 
ces mandats aient besoin des conclusions du procureur im- 
périal. Il n'en est pas de mème Iorsqu'ils veulent accordtr 
la liberté.provisoire. 
JUGEE ( Choe ). I'ye= Cuos 
JUGEMENT (Philosophie), faculté intellectuelle qui 
aperçoit la convenance ou la disconvenance existant entre 
une ou plusieurs iddes, compare leurs rapports ríels, et sait 
discerner, au milieu d'eux, les apparences de la vérite. 
qu'un mastrat infère et impassible sur son tribunal, l'es- 
prit cherche  démêler le droit (jus) et la justice, de ce 
qui est/aux ou inique : ainsi, la justice et le j,gement equi 
table sont ordinairement réunis ou dérivent de la mème 
source. Lejugemenl est difficile Qui ne croirait cependant 
que c'est la chose du mon,le la plus aisée, a xoir chaque 
jour ce ton affirmatif, ces désistons sans appel dans la so- 
ciCC tranchant d'un mot les questions les plus ardues ou 
les plus épinl.uses? Or, comme on ne peut décider avec 
parfaite connaissance de cause de la pure vérité qu'en dé- 
mêlant exactement toutes les idees qui se rapportent au 
problème à résoudre, qu'en les examinant, les mesurant 
scrupuleusement, en pesant les témoignages contradictoires, 
en appréciant la valeur de chaque raison, la solidité des 
expériences, la probabilité des opinions opposées, après une 
information attentive pour n'en oublier ou nv, liger aucune, 
en se dépouillant de toute influence des affeclions, de toute 
cause d'erreur de la part de nos sens on de nos piCu- 
gés, etc., il et manifeste que le jugement doit gtre lent a 
se prononcer et d'autant plus difficile  s'établir que l'on 



686 
a plus d'expërience et d'idées nombreuses à comparer. Il 
suit de là que cette promptitude de jugement dont on se 
fait gloire comme d'un mérite résulte soit d'un examen 
insuffisant, soit d'un d«faut de eonnaisnce. Les jeunes gens 
qui commencent ì étudier, toute personne bornée à son 
petit horizon d'idëes, s'imaginent aisément avoir fait le 
tour du monde et tout connaitre ; ils prononcent ì la Iëgère. 
En voyant le dole,:l'héilation, la lenteur qu'apportent 
des Ilommes d'un 'ge mtr, d'une haute expérience ou d'une 
prudence consommée, sur des sujets les moins compliqués 
en apparence, qui ne les croirait beaucoup plus ignorants 
et plus incapables que ces esprits si téméraires dans leurs 
decisions hfitives? A quoi sert d'être membre de i'Académie 
des Sciences si l'on ne sait pas rendre sur-le-champ raison 
de tout? disait un jeune officier du génie au célèbre D u li a- 
raei du lonceau : « Cela sert, répondit ce dernier, h ne 
point debiter de sollises. ,, 
Chacun, du reste, se flatte d'avoir beaucoup de juge- 
menl, parce qte c'est la plus importante faclflte de Pesprit 
et la plus noble; mais c'est aussi celle que blesse le plus 
toute ¢on|radiction. Douter du jugement de quelqu'un, 
c'est en Ihire, pour ainsi dire, un imbécile, incapable d'as- 
sembler deux idées. On avoue sans peine qu'on manue de 
mémoire, on se sacritie mème sur le defaut d'imag.ination 
pour laisser supposer qu'on hrillc d'aulant par sa rai=on et 
sa judiciaire. Aussi cllacun est-il si content de la ,ienne, 
qu'on croit n'avoir aucune leçon à recevoir de personne sur 
ce point, qu'on en aurait plut6t ì revendre " tout le 
mon,Je; et cependant, quoi de plus rare que le sens com- 
mun ? En somne, la haute superiorité que le juge'ment at- 
tribue  l'espèce humaine au-dessus de toutes les rases d'a- 
nimaux est telle, que nous devons à cette facilite seulele 
rang d'ètre intelli.-'ent. Sans doute les animaux les plus 
parfait, le simien, l'eh.phant, acquerant plus ou moins d'i- 
,lecs simples ou «le sensations des objets materie.ls, par- 
viennent a lutiner des jugements primilifs qui ne s'exercent 
gruère que sur la comparaison des sujets présent-:. Ces ju- 
gements simples appartiennent aussi à l'enfance ; et comme 
il n'embrassent d'ordinaire qu'un pelit nombre d'objets 
peu complexes, ils sont assez exacts et assez solides. Ce- 
pendant, s'il s'agit de jugements  porter entre des idées 
complexes ou abstrailes, on entre dans le domaine d rai- 
sonnelnents rompusC, qui peusent élendre indfiniment 
la capacite intellectuelle de l'homme : alors le jugement de- 
rient la laculté princière ou roegulatrice, si l'on considère 
que la p!upart de nos actions, surlout les plus libres, les 
plus volontaires, résultent de cette noble rasaitC E effet, 
l'idiot, Ilors d'clat d'associer deux idees et d'en tirer une 
conclusion, reste indecis, sans molifd'air, il ne sait, ne 
peut rien souloir. Dans sa stupide inertie, il sit accroupi, 
tandis que plus l'homme juge ou décide, plus il devient 
capable de vouloir et d'agir selon son lihre açbitre. La 
jeunesse est rapide dans ses determinations, uvent trop 
precipitées : la vieillesse, au contraire, loujonrs timide ,i 
,Iëcder, ne s'aenture q,'a'ec une extrëme circonspection, 
bien justifiée par la diliculté de porter des j,gemenis fndés 
sur Iotde certitude. 
ous ne recherchons pas ici toutes les causes gapaloles de 
vicier.nos plgements .; nousdirons seulement quïls s'opèrent 
ou par iduction ou par s911o9isme. L'induction se tire 
d'une simple comparaison entre p|usieurs idées présentes 
simultanémeut  l'esprit. Le syllogisme, plus compliqué et 
resultant d'une s,rie de raisonnements, exige une longue 
dalne 6'auments et de consëquences, alin d'en abstraire 
«les rapports très-complexes. La meilleure maniëre de ruiner 
les jugements erronnés ,'en montrant combien ils sont boi- 
teux ou chanee|ants, c'est de les pousser ì leurs dernières 
consëquences, et de les réduire/z l'absurde. L'esprit juste 
contient en Ini-mme  règle et son compas = rectum enim 
est sui jnde.r et oblirlui. Cetteso,te de probation n'est 
pas la moins efficace. 
A doefaut de raisons pour se décider, lhomme pre.ëre 

JUGEMENT 
de croire : aant épousé une lois les opinions de son tiède 
ou de son pays, il suppose que l'honneur de son jugement 
y est intéressë. Très-peu d'hommesingent donc réellement, 
parce que l'habitude de croire sans preuves, ou mme 
contre toute preuve, ce bandeau dont on couvre les )eux 
de la foi comme ceux de la justice, tout empche l'esprit 
de prendre son libre essor: il est si commode de recevoir 
ses jugemenls tout formulés d'avance. Nous n'aimons pas 
 vivre dans le doute et i'inceffioEitude. On prefére embrasser 
aven enthousiasme des systèmes, défendre des hypothèses 
de toute la terreur qu'on apporterait h la vérité. Baron a 
recherché les diffcrentes idoles qui éduisent notre intel- 
ligence, auxquelles nous rendons trop souvent un culte 
d'infidélité. Ainsi, les in tértts, les passi uns, i'igno- 
r a n c e, les p r é j u g é s du siëcle, ceux de notre position 
sociale, ou des Ilabitudes, de notre éducation, les s o phi 
m e s et supercheries des mot, les raisonnemeuts cap- 
tieux, les propenions mème de notre tempérament, tout 
peut fa usser nos débiles cervelles si nous ne prenons pas 
nos precautions. Chacun, comme Narcisse, se mire sans 
cesse en son propre egpçit. Oh! qu'il {autde In sens, au 
milieu du tourbillon qui nous ballotte, au milieu des in- 
fluences qui nous entrainentl Cette même pipette que les 
sens apportent a no|re entendement, comme l'exprime 
Montaigne, ils la reçoivent a leur tour; notre me parfois 
s'en revanche de mème ; ils mentent et se trompent  l'envi. 
Toutes ces considérations prouvent l'incertitude des juge- 
ments humains sans dnute, mais ne doivent pas nous dé- 
courager au point de les condamner en masse au tribunal de 
la raison ; car elle-mème alors se suiciderait. J.-J. 
Dans le langage techniqe de la logique moderne, on 
appelle apodictiques les jugements qui, non-seulement ex- 
priment oudoivent exprimer une vërite, mais qui, de plus 
excluent ou doivent exclure la possihilité d'un doute rai- 
sonnable. Habituellement, et avec raison, l'on donne les 
vdrit«s mathcmatiques comme exemples de jugements 
opodctiques. On dislingue ces jngetnents : en premier 
lieu, des jugemenls d'assertton; en second lieu, des ju- 
gements problemaliques. Les jugements d'assertion sont 
affiematifs, avec la résere toutefois d'un doute raisonnable : 
de ce genre sont tous ie. jugements historiques. Les juge- 
ments problématiques sont le doute lui-mme dans sa forme 
logique. En général, la distinction des jugements sous ce ap- 
port rentre dans la torme des jugements. Le caractère dis- 
tinctif des jugements, sous ce mgme rapport, est appelé 
leur modalité dans certaines îcoles, notamment dans celle 
de Kant. 
JUGE.iEtX'T (Droit). (:'est une décision étonnée de 
i'autorite judiciaire, sur nue contestation ou sur une de- 
mande qui lui est soumise. On donne plus specialement 
le nom-de jugement aux décisions des tribunaux ilfferieurs 
c'est-ì-diredesjuges de paix,destribunanx de 
miëre instance et de commerce. On donne encore 
le nom dejugoEents aux decisions des tribunaux mili- 
taires et maritimes, etdes con sei|s fie discipline 
de la garde nalionale. 
[ Un jugement est le dernier acted'un débat judiciaire; il 
le résume toutentier : aussi, aux termes des lois ,il n'est 
complet qu'al, x conditions suivantes : 1  d'dnoncer i¢ noms 
', et qualités des parties; 2o de poser avec précision les ques- 
tions de fait et de droit qui constituent le procès ; 3 ° de 
faire connaitre les faits censtaté's par l'instruction et les mo- 
rt fs qui ont déte,-miné le jugement ; 4 o d'exprimer le dt s- 
p o si t i f du jugement, Cest-à-dire l'injonction que fait le 
mastrat. Les contraventions à ces règles entrainent la 
nullité des jugements: le législateur n'a ouh rien laisser à 
l'arbitraire dans une chose aussi importante ; il ;t imlms é 
au juge l'obligation de faire connaitre aux parties star qtlels 
motif» et sur quel« faits sa décision est ondee. 'est I une 
première garantie de honne justice ; car, forcé de dire Pour- 
qzzoi il fait pencher la balance de tel c51é ll;ztOt que de 
tel astre, le magistrat se recueille dav,'mLage dans sa 



J utrENT -- JUGEMENT DERNIER 
et l'on est sr qu'il bésitera a p, çclamer iemment une in- 
justice, dans l'embarras où il se trouverait de la motiver. 
Mais ce n'est pas là la seule garantie que le législateur ait stipu- 
Iée dans lïntérët général : tn jugement eçt une sorte de con- 
trat entre le juge et le public : sa décision oblige an méme 
titre que la loi dont elle émane. Et de méme que les lois 
n'obligent qu'aulant qu'elles sont promulguées, de mme 
les jngements n'obligeut aussi qu'autant qu'ils ont été rendus 
publiq»ement. D'un autre coté, les jugementç ne sont va- 
lables qu'autant qu'ils ont éiWrendus pardes tribunaux régu- 
liërement composgs, pour le nombre de juges ,compëtents, 
et à la pluralité des voix. 
Pour assurer l'exécution de toutes ces formalités, la loi 
 enjoiut aux membres du ministère public de se faire re- 
prësenter tous les mois les minutes des jugements. Ils doi- 
vent aussi vérifier si les prescdptions du législateur n'ont pas 
été  iolées ou reConnues et déférer h la censure de la cour 
suprgme ceux qui leur sembleraient entachés de nullité. 
Les deci»ions de la justice ont en o,tre différents effets, 
suivant qu'elles sont rendues en la présence ou en l'absence 
de l'une des parties intéressées. De là uue premiëre dis- 
tinction entre les jugements contradictoires et les juge- 
ments par défaut. En matiëre criminelle, la présence 
matérielle du prévenu ou de l'accusé est absolument néces- 
saire pour reudre le jugement coutradictoire, et son ab- 
sence, à quelque moment du procès qu'elle ait lieu, rend 
le jugement par ddfaut ou par contu»ace, deux expres- 
sions analogues, appliquées la pren6ère aux tribunaux cor- 
rectiounels, la seconde aux cours d'assises. Devant les 
justices de paix, où les parties sont tenues de comparaitre 
en personne, ou du moins de se faire representer par des 
fondés de pouvoirs spéciaux, le ju_gement ne sera contra- 
dictoire qu'autant qu'elles auront été entendues contradic- 
Ioirement. Ifais dexant les autres tribunaux civils, uu 
jugement est contradictoire toutes les fois que le_ parties sont 
représentées par des avoués, et que ces aoués ont pris 
dans l'intérèt de leur client des conclusions. Les jugements 
se divisent encore en deux catégories, telles que : 1 ° les 
j;gemeuts qui ordonnent un avant faire droit ; 2 ° les j,- 
gemeuts définitifs. Les premiers se divisent eux-mmes 
eu truis classes, savoir : les jugements provisoires, les juge- 
men tspreparatoircs, et lejugement i n t e r l o c u t o i r e i. 
Les jugements procisoires sont ceux par lesquels les 
juges oant que la coustestation pourra ëtre longtemps à 
se dëcider, et que sa durée pourrait produire de graves 
inconvénients, y obviennent eu ordonnant ce qu'exigent les 
circonstances. Ainsi, par exemple, lorsque des contestations 
s'élëvent entre plusieurs héritiers à propos d'une succession 
qi vient de s'ouvrir, le tribunal ordonne que sans préju- 
dice aux droits des parties, il sera procédé à la reconnais- 
sance, à la levée es scellés, et par suite à l'inventaire. Le 
procës pourrait dire long à juger, et duraut ce temps les 
choses mises sous le scellé pourraient dépérir. Ainsi en- 
core, dans certains cas eu attendant la décisiou d'un pro- 
cès les juges accordent par provision ì une partie une 
pension alimentaire. 
Les jugements préparatoires sont rendus pour l'instruc- 
tion d'une cause et tendeur à mettre le procès en état de 
receveir le jugement définitif. Ainsi, on doit regarder 
comme tels ceux qui ordonnent une mise en cause, un 
rapport d'experts, une comparution de parties, une des- 
ceute de juges, un interrogatoire sur faits et articles. Cs 
iugement- en effet ne statuent rien sur la question fouda- 
mentale du procès, il. prescrivent des mesures dans le but 
de faire découv«ir la vérité, et ne peuveut ètre fi'appés 
d'appel qu'avec le jugement dëfinitif. 
Lesj,gements définitifs sont ceux qui terminent la con- 
estafion, soit en adoptant les prétentions des parties, soit 
en les modifiant, soit en les rejetant. Ils sont rendusen pre- 
mier ressort lorsque la voie del'appel estouverte contre eux ; 
ils sont en dernier ressort lorsqu'il ne peuvent ètre attaqué. 
que devant la cour de cassalion. 

687 
Quant à l'ex é c u t i o n des jugements, en principe général, 
un jugement ne peut ttre exécuté s'il n'a été préalablement 
signifié "h la partie condamnée. La significatiou a pour but 
de le faire connatre à cette partie et de la mettre à mdme 
de l'exCurer volontairement, ou, à défaut d'acquiescement, 
d'autoriser celui qui I'a obtenu "h le faire exëcuter par les 
voies légales. ul jugement ne peut ttre mis ì exécution 
s'il ne porte le mme intitulé que les lois, et s'il n'est ter- 
miné par un mandement aux officiers de justice. 
E. DE CIIAInOL. 
JUGEM-ENTDE DIEU. On appelait ainsi au moyet 
,e,e les Creuves judiciaires imaginées pour tenter la jus- 
tice du ciel. Que Dieu protège l'innocence, c'est une idée 
consolante; mais c'est une témérité de penser qu'on verra sans 
cesse .n miracle en sa faveur, la faiblesse triompher de la 
force, les ëlëments changer de uature, les organes de 
l'homme refuser au coupable leurs fonctions accoutumées, 
et la mort du parjure venger dans l'année les reliques du 
saint attestées pour un meusonge. C'est ainsi que la jus- 
lice de ces temps était uu jeu de hasard, qui se joua sou- 
vent avec des dés pipés, et qui laissa dans le peuple une 
impression si profonde qu'il en est resté dans son langage 
des locutions fréquemment usitées : Se battre par procu- 
reur...; 9e ce vin me servede poison, o, 9ue ce 
de para m'étrangle , si je n'ai pas dit la veritd...;)'en met- 
trais au feu ta tain. Eufin, saint Louis nous ramena 
la justice des peuples civilisés, et remplaça ces coups de 
la fortune, de la subtilité ou de la force brutale, avec la 
preuve par témoins, par écrit, par acte authentique et la 
discussion des droits en plaidoiries contradictoires. 
L'orine de cette coutume superstitieuse a t:.te attribuée 
aux peuples du Nord ; elle remonte néanmoins  une plus 
battre antiquité. On la trouve chez les II,.breux et dans le 
phts ancien des livres. Ces eaux amères dont le breuvage in- 
nocent o, funeste j,stifiait la chaste ëpo,se ou dcmasquait 
la femme adultère, qu'ctait-ce videmmeut, sinon un ju9e- 
nent de Di»u? Ailleurs, un guerrier a porté les armes 
contre sa patrie : on p,nit son cadavre, qui n'aura point 
de sépulture; mais une main inconnue lui rend ces derniers 
honneurs sans gtre aperçue, et l'infractiou de la delense 
est imputée au garde méme de ces restes condamnes. Il 
affirme son innocence, et se dit prgt à laprouver, soit qu'il 
faille porter dans ses nains un fer rougi au feu, 
tarcher au travers d'un brasier, olt jurer par Dieu. 
Voilà bien l'épreuve du feu, du fer chaud et du serment : 
on se croit au moyen ge; et cependant le poëte qui fait 
parler cesoldat grec est Sophocle, dans son Anti9one, cinq 
siëcles avant J.-C. Hippolyte FAccuc. 
JUGEEXT DEPNIER. Par ces mots on désigne 
ordinairement la fin du monde, qui coïncidera avec la r é- 
s u r r ect ion universelle des morts et leur comparution 
devant le tribunal de Dieu, comme il est dit au Symbole 
des Ap6tres. Alors, suivant les opinions de l'Êglise, Jesus- 
Christ reparaitra sur la terre, et séparant les bons des 
mécbants, emmènera les uns dans le ciel, et enverra les 
autres au leu éternel. Quoique déjà les ancieus propbèles 
eussent parlé, mais ligurëment, il est vrai, d'une resurrec- 
ti«,n des morts et d'un jugement universel qui aurait lieu à 
l'arrivée du Messie, ce n'est qu'aux temps de Jésus-Christ 
q,e l'idée juive apparait plus arrêtée sur ces points. On 
pensait que le Messie commencerait par ressusciter les jus- 
tes et qu'il vivrait pendant mille ans avec eux, ainsi qu'a- 
vec les justes alors vivants et avec ceux qui dans l'intervalle 
se convertiraient ì Jéhovah, dans le royaume terrestre du 
l!essie. A la fin de cette période, une nouvelle et terriblo 
lutte contre Satan devait éclater, mais pour se terminer 
par le triomphe du Messie; et c'est alors que devait avoir 
lieu la résurrection universelle des morts et le jugement 
dernier des peuples, afin que commençt avec un nouveau 
ciel et nue nouvelle terre le r ègne éternel de Dieu. Taut6t 
Jésus-Cbrist a expressëment confirmé lui-reAme ces idées 
juives, en n'expliquant cette résurrection des morts que 



par sa puissance de ranimer moralement les hommes'. 
tant6t, parlant de sa venue future et du changement qui 
en résultera pour le monde, il semble n'avoir voulu que 
nous présenter symboliquement le triomphe de sa saiute 
cause. Les ap6fres, au contraire, notamment saint Paul et 
l'auteur de l'Apocalypse, ainsi que toute l'Ëglise primitive, 
ont admis poitivement le retour de Jêus-Christ. 
JUGEMENT DES MORTS. C'était un usage chez 
les Eg)ptiens de faire comparaltre les morts devant des 
juges pour apprécier leur vie avant de leur accorder la sé- 
pulture. La famille du défunt avertissait les juges, les amis 
et les parents, du jour des funérailles. Les juges, au nom- 
bre de plus de quaraute, choisis parmi les pairs du defunt, 
siégeaient en demi-cercle auprës d'un lac situé dans le home 
habité par celui qui venait de mourir. On plaçait le corps 
dans une barque, dont le pilote s'appelait en langue égyp- 
tienne charnu, ce qui a donné lieu à la fable de Caron 
chez les Grecs. Ce batelier avait droit à quelque argent 
pour son service; de là l'usage de placer nne piëce de 
mounaie sous la langue du mort. Avant d'admettre le 
cercueil dans la barque, on recevait les accusations que 
chacun pouvait porter contre le défunt. Les juges prouon- 
ç'aient ensuite : si les accusations leur paraissaient fou- 
dées, le mort n'était point honoré de la sépulture ; si elles 
etaient reconnues injustes, leur auteur était sévèrement 
puui. Quand il n'y avait point eu d'accusateur, ou quand 
il avait été confondu, les parents déposaient le deuil et 
louaient les ertus du mort. Le cadavre était porté eusuite 
dans la sépulture de sa famille, si la famille en avait une ; 
autrement, on le plaçait dans sa demeure, debout contre 
la muraille. Quant à ceux contre lesquels l'accusation avait 
élé admise, ou qui laissaient des dettes, on les enterrait 
,chez eux. Quelquefois les enfants de leurs enfants réha- 
bilitaient leur memoire en payant leurs dettes, et leur faisaient 
reudre les honneurs qui leur avaient été refusés. Plusieurs 
mouuments sont couverts de représentations faisant allu- 
sion h ce jugement des morls, qui se pratiquait mme à 
l'égard des rois. En outre de ce jugemeut solennel, les 
Egyptiens croyaient  un jugemeut rendu au dela de cette 
vie, par Osiri s, lequel decidait du sort de l'me selou les 
bonnes ou mauvaises actions du défunt. Les Grecs embel- 
lirent encore ces traditions. Ils établirent aux enfers trois 
juges chargés d'apprécier les actions des hommes après leur 
mort et de leur attribuer la place qu'elle« leur méritaient 
daus les Champs Ëlysées ou dans le Tartare. Les Ro- 
mains couservèreut le mythe grec, et les chrétiens font 
paraltre deux fois leurs morts devant le souverain juge: eu 
sortant de la vie, l'me parait devant Dieu pour subk un 
iugement particulier, qui sera renouvelë, au jour de la ré- 
surrection, contre l'ame et le corps réunis, devant tous les 
hommes assemblés au j u g e m e n t d e r n i e r. 
L. LOEVET. 
JUGES.C'est ainsi quela Bible désigne les quiuze chefs 
israelites qui, à partir de la mort de Josué jusqu'à Sa- 
muel, furent/ la téte de la nation tout entiëre ou de cer- 
taines tribus. Jusqu'à ti et à Samuel ce furent générale- 
ment des guerriers distingués par quelque action d'clat, 
qui s'offraient spontanément ou bien qui étaieut Cus pour 
aller repousser et chMier les Philistius, les Cananites, les 
Madianites et autres tribus hostiles. L'ennemi une fois vaincu, 
ils abdiquaient leur dignité ; cepeudant, certains d'entre eux 
la conservèrent jusq,fà leur mort. Il n'y eut que Délora, Eli 
et Samuel qui exercèrent les fonctions de juge proprement 
dites. On ne saurait préciser la durée de la période des ,luges; 
ce qui parait certain, c'est qu'elle fut au moins de trois 
cents ans. 
On a donné le nom de Livre des uçes à la partie de l'An- 
cien Testament ou les exploits des Juges sont racontés par 
fragments seulement, il est vrai, et, sauf ce qui concerne 
'li et Samuel, çà et là d'une manière qui touche  la Iéo 
gende, mais au total cependant d'un rand ton de véracité. 
Ce llvre a pour but de démontrer l'accompliement des 

JUGEMENT DERNIER -- JUGULAIRES 
menaces de Dieu. Il se divise en deux parties principales : 
la premiëre, contenant les chapitres t / fO, raconte i'his- 
oire des Juges depuis Atamei jusqu'à Samson, mais sur- 
tout cell de Barak, de Déb o ra, de Gédéo u, de Je ph tri 
et de Sain s o n ; la deuxième, contenant les chapitres 17 t 
21, montre comment i'idoiàtrie s'établit parmi les gens de 
la tribu de Dan, et raconte l'extermination presque com- 
plète de la {ribu de Benjamin. La simplicité de l'exposition 
et la pureté de la langue sont les qualités qui distinguent 
le Livre des Jtges; mais les différences essentielles de style 
et d'exposition ixistant entre la primiëri et la coude par- 
tie prouvent qu'elles ne peuvent avoir eu le mème aulenr. 
Sauf les derniers chapitres, on pourrait par induction dire 
que ce livre dutCre composé peu de temps avant i'epoque 
de David. L' 'glise primitive ne considérait le livre de R u t h 
que comme une annexe du Livre des Juges. 
JUGES DES ENFERS. On donne ce nom, dans la 
mythologie des Grees et des Romains, aux trois personnages, 
1! i n o s, E aq u e et R h a d a m a n t e, qui étaient chargés de 
juer les ames des hommes/ leur arrivée aux en fers. 
JUGES ECCLÉSIASTIQUES. Vo?/e-. ECCLStS- 
to.ce (Juridiction). 
JUGES GARDES ou GARDES DES MONNAIES. 
Voyez G^n. 
JUGGURNAUT. Voye-. 
JUGULAIRES (Veines), gros vaisseaux sanguins 
du co u, qui s'étendent depuis latëte jusqu'à la poitrine, 
et qui rapporteur de la tete au cœur, à l'etat veinetx, à peo 
prës tout le sang artériel qu'y r6pand le cœur au moyen 
des c a r o t i d e s. Elles sout comme reines, et pour le re- 
tour du sang, ce que sont les artères carotides pour son 
départ et son arrivée. Il existe une veine jugulaire de cha- 
que c6té du cou. Elles ont à la tète deux origine¢ distinc- 
tes, deux embranchements ayant des noms différents. L'un 
provient de l'intérieur da crâne: c'est la jugulaire interne. 
qui rapporte le sang du cerveau et de ses membranes, et 
qui a son unique source dans les sinu de la dur-mère 
aboutissant à ce qu'on nomme le trou déchiré postérieur. 
L'autre, la jugulaire externe ou .faciale, se charge et 
s'emplit du sang veineux de la face et de l'extérieur du 
crane, de la gorge et du laryux. Les deux embranchements 
s'unissent ensuite pour ne former qu'un tronc. Puis de 
chaque c6té du cou, à peu de distance du larynx et de la 
trachée-artère, chacune des reines jugulaires avoisine, 
à droite et à gauche, l'artère carotide, qui bai, et le nen 
pneumo-gastrique, qui porte au cœur, aux poumons et à 
l'estomac, leur principe essentiel d'animation. L'une et 
l'autre versent le sang.brun qui les remplit dans une grosse 
veine qui le transmct an cœur, qui lui-reCe l'enverra aux 
mumous, ayant mission de le rougir et de le régéuérer. 
Comme ces reines sont fort évidentes, principalement 
chez les personnes maigres et les vieillards, elles sont aussi 
uliles que le battement des artères, et quelquefois davan- 
lage, pour apprécier l'Arat du cœur et des poumons. Dès 
que la circulation du sang et la respiration s'embarrassent, 
les jugulaires présentent une sorte de battement qui a reçu 
le nom de pouls veineux, et qui, h l'inverse du pouls ar- 
tCel, est beaucoup plus visible que tangible. Ce pouls 
veineux provient du battement de l'oreillette droite du 
cœur, apparemment surchargée de sang par quelque em- 
péchement respiratoire. C'est un symptgme fort remarqua- 
ble chez les asthmatiques, ainsi que quelques épanchemenls 
de poitrine, dans certaines affections du cœur et des gros 
vaisseaux, de mème qu'aux approches de la mort. Une 
quinle de toux proiougée produit un effet pareil. 
Sans les reines iugulaires, une cerlain nombre d'effels 
signifieatifs resteraient ignorés ; au moins ces effets se- 
raient-ils sans certitude, réduit qu'on serait à en conjecturer 
l'existence. C'est ainsi qu'on les voit se gonfler dans les ef- 
fort de toutes espëces, pendant la toux et le vomissement, 
dans les accès de rire et quand on crie. Dans l'action mgmo 
de ramasser un objet à terre ou de pousser nn corps rgsis- 



JUGULAIRES 
tant, les effëts sont analogues. Le gonflement des reines 
jugulaires instruit de respëce de danger qn'ont de pareiis 
actes : il est la preuve qu'alors le sang reflue ou au moins 
stagne vers le cerveau, d'où il peut résulter des congeslions, 
des étourdissements, des coups de sang, et même t'apo- 
plexie. Mais si un effort d'expiration suffit pour gonller les 
reines jugulaires, J'action d'inspirer, et surtol»t le soupir, 
les désemplit et les efface jusqu'au point de creuser en sil- 
lon l'endroit de la peau qui leur correspond et les couvre. 
Et si l'une d'elles vient h ètre ouverte, soit par une saignée, 
soit involontairement dans le cours d'une opération, de raie 
peut s'y introduire pendant l'inspiration, se mêler au sang 
et se rendre avec lui dans le cœur, qui presque aussit6t 
cesse de battre et pour toujours. C'est dans la juste appré- 
hension de tels malheurs qu'on pratique si rarement aujour- 
d'hui des saignées jugulaires. Il est prudent d'éviter toute 
compression de ces reines, si importantes/t cause de leurs 
aboutissants. Il est des systèmes de cravates qui produisent 
en partie le« ellets de la pendaison. D r Isidore Berlines. 
JUGURTllA, petit-Iris de Massiniss a et neveu de 
llicipsa, roi de Numidie, fut élevé avec les enfants de ce 
dernier, bien qu'il fùt né d'une concubine. Dt.s sa prtnière 
jeunesse, il se lit remarquer par sa force et sa beaute, et 
se concilia l'affection générale, llicipsa craignit qu'il ne 
l'emport't sur ses enfants, et conçut la pensée de le faire 
perir; n,ais il renonça bient6t h ce projet, et résolut de l'é- 
ioigner. Il l'envoya donc à Scipion, à la tète d'une armée, 
pour le seconder dans la guerre qu'il laisail alors  Nu- 
mance. L' Jugnrtha se distmgua, et a son reloue le roi ra- 
dopla, et voulut qu'il regnàt avec ses fils Adherbal et 
Hiempsal. 
Malgrë les promesses qa'il avait failes à 51icipsa mourant, 
il fit tuer Hiempsal, et s'cmpara de toute la part qui reve- 
nait à Adl,erbal, se dcclarant seul souverain de tonte la 
[Xnmidie. Le prince chassé recourut aux Romains. Il vint 
lui-même se plaindre au sénat. Jugurtl,a gag,la les commis- 
saires. Ils déclarèrent que le meurtre avait été le rés,,Itat 
de la Icgitime drfense, et attcibuèrent à son auteur les plus 
ricl,es provinces, au detrimênt d'Adl,erbal. A«,ssit6t Ju- 
gurtha les enval,it, et son adversaire s'enfuit dans Cirtba 
(aujourd'hui Constantine), où il fut asiegé ap.s avoir 
pêrdu une bataille. Quand il se fut remlu par ca,it«lation, il 
lut impiloyablement égorgé. Le per,pie romain, indigné, de- 
mandait vengeance, et le sénat declara la guerre. Jugurtha 
oulut encore conjurer l'orage à force d'argent, mais ses am- 
bassadeurs ne furent point reç«,s : on leur ordonna de sortir 
de l'ltalie sous dix jours. Le commandement ful donn / 
Calpurnius Pison, hahile général, dont tes talent étaient 
obscurcis par une basse cupidité. Il commênça par prendre 
beauco»p de places, puis il se laissa seduire, ci, de concert 
avec Scaurus, enlit la paix / Jugurtha. Quand on sut à 
Ruine les indignes ment;es de Calpurnius, le peuple sïrrita; 
il éconta les éloquenles harap.gues de Mcmmns. On man,la 
J,gurlha pour venir subir le jugement de son crime. ¢- 
pendant, il parvint h gagner un hibun, qui. de concert avec 
lui, lui imposa silence au moment oh il allait prononcer sa 
delense, en sorte que l'assemblée se sépara sans avoir rien 
lait. A Ruine même, Jng«rtl,a avait fait luer Massiva, fils 
dê G«lussa et neveu de Micipsa, parce que le peuple parais- 
sait disposé à lui donner la N,midie. Aussit6/on lui ordonna 
de quitter Romê, où il était sous la garantie d'un sauf-con- 
duit. 
La guerre recommença, sous les ordres du consul Pus/u- 
mius Atbinus. L'année se passa sans actions mrmorables; 
mais dès que le consul fi»t parti, les Romai,|, commandès 
par son frère, essuyërent une grande défaite, et ranuée 
passa sous le joug. Le sénat annula les conventions con- 
dues avec l'ennemi, et lit parlir Mèteilus, qui ballil com- 
pllemenl Jugurlha. Celui-ci, après avoir négocié, changea 
de pensée, et rélut de tenter de nouveau Je sort des armes. 
I)ans cette n,,uvelle campagne, il sut manœuvrer si habile- 
menl que Mêlellus ne Irai terminer la guerre. 5I a r i u s se 
meT. ,r cA ONVS.  T. x. 

-- JUIF ERBA[T 689 
fit envoyer h sa place. Cependant Méteilus remporta en- 
core une nouvelle victoire, et Jugurtha, qui avait failli lui 
être livré par la trahison de Bomilcar, appela à son secours 
les Gétules et le roi de Mauritanie Bocch us. Sur ces en- 
trefaites, Marius était arrivé en Alriqne. D'abord il prit 
Capsa et un fort appelé 31ulucfia ; mais à l'approche de 
Jugurlba et de Bocchus, il voulut se retirer vers la c61e. 
Subitement attaqué, il fut ohligé de se relrancher sur une 
montagne, où il demeura cerné de Ious c6tés. Pendant 
que les barbares se livraient à la joie, lqarius fondit sur 
eux et les mit en pleine déroute. Qualre mois après, 
gurtl,a et Bocchus essayèrent une nouvelle attaq,e; mais 
ils furent si vigoureusement reçus que presque roule leur 
armée périt : elle était d'eus iron 90,000 Immmes. Bocchus, 
roi de blauritanie, fil la paix, et sut attirer Jnrtha à sa 
cour pour le lisrer à Sytla, qui le fit charger de chalnes et 
conduire à Cirtha, où elait Marins. Ainsi finit la guerre, 
et la Numidie devint prosince romaine. Jugm'lha orna 
le triomphe du vainqueur, fut Irè.-mallraitc par la popu- 
lace, et mourut de faim dans un cachot au bout de six 
j,mrs, ou bien il y fut mis à mort immédiatement après la 
solennité. Ses deux fils furent retenus prisonniers à Ve- 
flot«ce. P. nE GOLnÉy. 
JI'iF ERRANT. Le juif errant fait le fonds d'une 
legende merveitleuse consacrée depuis plusieurs siècles. Ce 
curieux personnage a, dit-on, Ioujours cinq sous dans sa 
poche. Ce malheureux ne peut mourir ; vainernenl, pour 
obtenir une tin h ses indicibles fatigues, implore-t-il les 
abimes de la mer, les goulfres de la lette, le fer des batailles, 
l'arlillerie deg fortg et deg flottes, la hache du bourreau. 
Un arrèt d'en baul dt.rend sa vie cont«e tous ces ffCux de 
Plmmanilé et contre le dard de la mort. Il naquil dang la 
Iribu de Neptdali à Jërusalem, l'an 399, sept h h,,it ans 
avant Jdsus-Christ. Il se nommait Abbassudrts ou .thas- 
vrus; son père Cait cbarpentiec. A huit ans, déjà petit 
mauvais s«,jet, il serait, aec l'vielle d'Orienl, de guide 
aux roig mages, allant à Betl,léem adorer le no«veau-nA des 
nations. Il avail fait avec eux d'asaune la condition 
serait bien roegalé en route. Arrive a Bethleem, il y vit 
dang une créche, nn enfant qui venait de narre, et re- 
conm,t / coté le charpentier Joseph, co,npagnon de son 
père. A son retour à Jer«,salem, il raconta tout ce dont il. 
avait été temoin, le miracle de l'doile marcbantê, la pompes 
les riches babils de ce«x qu'elle p«écèdail, les prescrit... 
inêglimables, l'or, t'encens et la m.rrhê, que Irois roi:; 
d'Oricnl, deux blancs, l'autre noir, avaient dpoȎs dan.; 
une misérable :t,ble, aux pied. d'un enfant de pauvres, que 
sa mère, ple«ne de joie, venait de mêltre au monde. Cetfv 
nouvelle arriva jusqu'aux oreilles d'Hérode : il lit compa- 
rative «levant lui le jeune Abl,assuérus, qui la lui confirma. 
Le nom «le roi des Juifs, donne/ un enfant au Lerceau, 
effra)a le tetrarque sm|pçonneux ; et la d,.claration nais e du 
petit charpentier, q«i en eut plus tard une si xive repen- 
tance, fut i,nmediate»»'nt suivie du massacre des i nno- 
ce n tu. Abbassuérns se mil  suture, q«,ci ]ues annees après.. 
les prédications de saint Jean.Baptiste, et fini n|eme h'moin 
de son martyre. Mais voici sente les abominables actions 
de l'insensible et impie Abbasguérus, ce J«if sans pitic. 
« J'ai vu, dit-il lui-reAme dan nne de ses I,isloires, Jesus- 
CI,,it, sur une nesse, entrer triomphant dns J:rualem ; 
j'ai connu le Iraite Jndas, et j'ai trasailh., en qualilc de 
charpenlier, a la croix sur laquelle fut attaché le Sauveur 
d«, monde. Lorsq,,e leg gardes le conduisaient au calvaire, 
portant hfi-mbm, cette croix, ils me supplièrent, comme ils 
passaienl devant mon atelier, de I'y Jaisr reposer un mo- 
ment; et moi, mille fois plus barbare qu'eux, je retusai, et 
accompaai mon refus d'abomiuables injures : alors j'en- 
tendis ,«ne voix q«i me «lit : « Va Ioi-mème, et marche sans 
te reposer; parcour tu«le la terre sans t'arrèler ni le tixer 
nulle part, jusqà ce q«e je re-ienne. ,, Je me senis alors 
frappe de Dieu : dës le lendemain de la mort du Sauveur, 
accomplissant ma sentence je partis, et ie commençai 
b7 



69O 
voyages, l'an 33 de la naissance de 3Cus-Christ, en iaqua- 
tante et unième année de =non ge. ]talheurenx que je suis! 
j'attends pour me reposer la fro de monde. » 
lous n'avons pas besoin de dire qu'il n'est questi d'Ab- 
bassuérus dans aucun Ëvangile, pas nme dans ceux qui 
out été dédar(.s apocryphes. D'aprè les recherches de 
1I. llagnia, la première version relative au Juif errant se 
trouverait dans l'tfstoire d'A9le/erre «le bla{thieu Paris, 
moine de Saint-Albans, au treizième siècle. Il l'appelle 
Catopl=ilus, et en lait le portier de t'once Pilate. A partir de 
l'année 1547 on l'appelle Ahasvérus, et des gens de qualité 
allirment l'avoir rencontré. Sa légende se réimprime de tous 
clés. Elle se formule dans une complainte que le peuple 
cha==le encore. Schubart lira un heureux parti de cette lé- 
t.,,le dans une ballade. M. Edgard Quinet y a trouvé le sujet 
d'=:a drame mystico-philusopl=ique, et M. Egène Sue le sujet 
d'vu roman populaire; 5151. Scribe et de Saint-Georges en 
ont l'ait un opéra dont 5I. HalEvy a composé la musique. 
L. Lonw. 
JU|FS. C'est le nom que depuis l'exil de Bahylone on 
adonnéaux Hébreux ou Israélites. Il est dérivé de 
Jchm«d (J,da), dont ils sont les descendants, ce,x des 
dix tribus ayant été cxilés avant la destruction du premier 
tctuple. Toutefois, le mot jtif a reçu pendant longtemps 
u:c acception si avilis»aele, appliquée mème/ ceux qui ne 
professent pas la rdigion juive, que les sectateurs de Moïse 
o:lt cru de nos jours devoir reprendre leur nom biblique 
d'Isralites, et les chrëtiens, qui ne croient pas devoir 
perpétuer l'humiliation de ceux qui sont leurs alues dans 
ule rclgion mouoth6iste, out approuvé ce changement, 
dollt la France a eu l'initiatisc. 
La captivité de Baba-loue «lut avoir pour elfet de-répandre 
dansd'autles conlrées les aiues idees sur la Divinité, qtli 
juçque 1« parai.sent n'avoir etc te partage que du peuple 
i:.t-adlite. Toolefois, sa nouvelle situation ne lui fut pas trop 
ptaible, à part l'exil, peine doulouretsc seulement pom" la 
ni.riCation qui en avait été victime. Déj;, du temps de 
Nalmchodonosor, des jeunes gens des lamilles les plus 
distiaguoees parmi les lsraéliles etaient élevés dans le paia 
du roi, et prepares h remplir des fonctions importantes dang 
|'État et h la cour. Lorsque le roya,me de Babaloue tomba 
comme celui des lèdes, sous la ptdssance des Perses, la 
position des lsra/.'lites n'empira pa.. Fo,tune, inlluence 
education, agréntenls de la vie, tout leur ft=t accessible, 
moyennant l'aptitude et le zële nécessaires, moyennant 
sm'lout le patriotisme. Leur position fut meilleure que celle 
de le=trs descendanls qui habitent aujou-d'lmi l'Allemagne 
et l'Irai;e. Le cltangement de dynastie dans le royaume 
babylonien leu=' [ournit l'occasion de demander leur retour 
en Palestine. Cyrus n'avait aucun inlérèt à s'y opposer. 
Depuis b3t avant J.-C., des lsraélitea revinrent par milliers 
dans leur patrie,  dillërentes époques, avec l'autorisation 
des rois de Perse. Ce retour enlin, généralement octroyé 
par Csrus, avait surtout été désiré par la classe sacerdo- 
tale, qui recouvrait ainsi son influence, et par la classe 
pauvre, qui n'ayant rien à perdre h Babylone, pouf'ait 
espérer de tout gagner en Palesline. Elin, ce retour fut 
accepté avec enthousiasme par quelques familles puissantes, 
parmi lesqudles l'amour de la patrie etait resté vivant. 
Aussi ce lutent des prélres, des lévites, des famille de 
Benjamin et de 3uda qui composèrent, sons la conduite 
de Zérubabel, la majorité de ceux qui revinrent en Pales- 
tine. Sous le règne de Darhts Hstapes, ils obtinrent t'au- 
torisation de reconstruire le temple, qui fut rebut; de 521 
 516 ; les villes désertes se repeuplèrent ; le mosaïsme se 
rtablit, et par les soins de lëbémie» 3ërusalem fut, en 444, 
entourée d'une muraille. Néhémie réédifia Jérusalem, assista 
le peuple pauvre contre les injustes exadions des riches, 
mit en honneur, s'il ne rédigea pas, les lois contre Pusure 
qu'on lit dans le Pentaleuque, et rendit l'observation du 
sabbat plus rigoureuse. Les Israè'ites de la Palestine vé- 

JUIF [NT  JUIFS 
curent ainsi heureux sous l'administration sacerdotale et ! 
gouvernement «les Perres, julu'aux conquëtes d'Alexandre 
(33t) ; ils entent un grai-poti[e, av¢¢ un sénat «esanciens 
qui composèrent le Sa i h éd rie, institution attribuée 
 Moise, mais dont l'bisoire no prle pas avant l'exil. On 
peut oemparer l'existence des Juifs d'alors (il r peut 
cette époque re question de l°État juif) à celle des G r e c s 
modernes avant la ¢é,oition de t,2t : comme ces der- 
niers avaient sous le rapport spirituel un représentant 
dans le patriarche qui résidsit à Con.tanlinople, les lsraé- 
lires de mème avaient un chef reconnu par l'a,torité supé- 
rieure, qui leur garantissait leur existence religieuse. C'est 
alors que se déveioppa réeilement la constitution mosaiqe; 
monarchique par l'hérédité du grand-ponti|e, qui était le 
chef suprême; aristocratique par le sanl,édrin, qui se com- 
plétait lui-reCe parmi les docteurs les plus sages et les 
plus instruits ; démocratique enfin, par l'Cai;té de tous 
devant la loi. Le dernier patriarche fut Gara|teL Le pa- 
triarcal de Palestine dura jusqu'au commmencement du 
cinquième siècle av. J.-C. 
biais le moment approchait où l'empire des Perses allait 
s'Crouler. A lexandre, après avoir soit mis les nations voisi- 
ne de la ltacëdoine, s,bjugue PAsie ,Mineure, ecïase Du- 
r;us .ous les murs d'Issus, s'empare de Tyr et se dirige 
sr Jérusalem. Les I.raélites, qu'il avait sommés de lui 
fournir des vivres pendant qu'il assiégeait Tyr, ayant refusé 
de lui obéir, il marcha contre eux polir les cbàtier. Jaddus 
alors grand-prê.tre, vint au-deva, t d. lui. A  ue, le vain- 
queur de tant de nations se laissa ffCbit, il enlra avec lui 
dans Jérnsalem, offrit dans le temple un sacrifice  Dieu, 
et exempta les lsraélites du tribut de chaque septième 
riC, attemlu la loi qui leur défendait d'ênsetnencer les terroe 
et de moissonner pendant l'annee sabbatiq,e. A la mort d'A- 
lexandre, la Judée est adj,gée, avec la Syrie et la Phéni- 
uie,  Laomédon. Ptotémée Soler, aant défait ce prince 
tenta de soumettre les Juifs; mais seuls il refusèrent de violer 
le serment qu'ils avaient prEté à Laomédon. PIolémée 
siégea Jérusalem, et sachant bien que les Juifs n'osera;eut 
se défendre un jour de sabbat, il elle;sit ge jour pour un 
assa,t général. Ainsi, la superstition livra la ville. II s'en 
rendit maltre, et conquit par suite la Judée entiëi'e, d'o/: 
il emmena plus de cent mille captils. Le traitement plein de 
douceur dont il usa à leur égard en attira un grand nombre 
en Egypte, et principalement  Alexandrie. 
La Judëe passe sous la domination d'Antigone. Sous ce 
prince, comme sous Séleucus, et dep,is sous Ptolémée, en 
qui commence la race des Lagides, Jerusal.em jouit d'une 
paix profonde, biais les rois syriens, à qui ecl=ut ensuite la 
Judée, non-seulement minèrent les IsraéIites par des tributs 
excessifs, mais les persécutèrent encore po,r leur religion. 
Antiochus Eiphanes fit élever au milieu du temple la statue 
de Jupiter olyipien, défendit la circoncision, ordonna de 
sacrifier des porcs, dévasta le pays, et fit mourir plusieurs 
de ceux qui étaient restés fidèles à la loi. Mais après de nom- 
breux martyrs, la Judëe trouva des défenseurs. Un pt'tre 
de llodin, nommé Jtlathatias, ayant courageusement résisté 
l'ordre de sacrifier aux idoIes, et mme tué, dans cette 
occasion, un officier syrien, se vit contraint de fuir avec 
ses li|s ; quelques autres hommes intrëpides le suivirent sur 
des montagnes désertes. Attaqué par l'ar,née d'Antiochus, 
il est vainqueur, et sa victoire grossit sa troupe, il fait abju- 
rer aux siens le scrupule superstitieux qui empchait les 
Israélites de se défendre le jour du sabbat, et par sa valeur 
plusieurs villes sont affranchies du joug srien. J u «I as 5[ a- 
c h a b é e, son fils, rassemble ceux qui sont demeurés fidèles 
à la loi de Dieu, bat les Syrieus, entre vainqueur à Jérusa- 
lem, et rétablit en t65 le cultedivin. Après sa mort (161 
ses frères, J o n a t h a s et Simon, continuent son oeuvre, 
et poursuivent la délivrance de la patrie; le roi est forcé de 
faire la paix. Jean Hyrcan, fils de Simon, roi et grand-prêtre. 
Cend sa domination en Samarie et dans i'ldumée. Mai 
sous le règne de ses petits-fils. Hyrcan et AristobuIe, le 



JU[FS 
pas perdit son ildpendanee. Pompée, appe]é comme 
arbitre entre les deux frères, qui se disputaient le tr6ne, 
¢nquit Jëruaiem l'an 63, et fit de la Judée une province 
romaine. Crassus llla en 5 les tréso¢s du temple. Antigone, 
fils d'Aristobule, qui avait été emmené en captivité, recou- 
rra le tntae, l'an 42, avec le secours des Parties..',lais Hé- 
rode, fils d'Antipaler, surnommé le Grand, sonlenu par 
les Romains, prit en 37 Jrualem, fit mourir Atigone et 
Hyrcan, le dernier rejeton mie des blacha,ées. Quoiqul 
e0t relevé le lemple, il n'en fut pas moins bai comme 
tranger et  cause de ses crnautës. Archélafis, son fils 
et son suc¢emeur, fut détrné, l'au $ apçès J.-C., par An- 
gine, et la Jtuiée se vit icrporée à la Syrie; elle eut 
pour gouvemeIJr Gonius, cevalter romain, qui prit le 
titre de procraeur de la Je. 
Claude avaR donné à tous legs Juifs de l'empire romain le 
droit,le ciioyen. Mai l'arbitraire de Bomains, qui abusaient 
de la victoire ave d'autant plt de violence qu'elle leur 
aat plus entré, la haine des partis opposés, le 
sioes iteies et i'apathie des Jui(s et des Grues firent 
croRre la misère et le raècontentement, qui éclatërent par 
une révolte contre les Bomins. Cette lutte opiniâtre finit à 
la prise de Jusalem par Titns ; la ruine du temple, le mas- 
sacre et la captivité de plusieurs milliers d'lsraélites en 
furdut la suite. L'an 70 aprës J.-C. le Juifs se virent dis- 
persC. Protégés çar Berna (7), ils furent traités avec ri- 
gueur, en 105, par Trajan. Diverses tentalives curent lieu 
pour seuouer e joug romain ; elles finirent par des exécn- 
tioes en masses; des ordonnances crelles vlnrent abattre 
lJnifs et Immilicr le judaime. Autonin le Pieux rttvoqua 
ces ordounances; Rais lorsqu'en 350 le christianisme monta 
sur le tr6ne avec Constantin, des édits de l'empire et des 
actes des conciles viarent empirer le sort des malhesrreux 
Israélites. Vers cette époque, on trouve déjà des Juifs en 
Illyrie, en Espagne, à Minorqe, dans les Gaules, en Eel- 
gique, dans la arbounaise, dans la CeRiqne ou la Lyor- 
naine, et dans quelques villes du IM/n. Ils se livraient par- 
tout h l'agricnltu re, au cormerce, à lïnd-nqrie, poss,'daient 
des terres, exerçaient des emplois, servaient dans l'armëe, 
et as-aient leur juridiction particulière. En 418 le service 
mifiaire leur fut bderdit, et dans le oonrs du cinquième 
siècle ils furent de plus en pins asservis. En ltalie, en Si- 
cile et en Sardaigne ils vécurent heureux ; dans l'empire 
byzantin, Ils f,rent opprimés. En France, ils ne se virent 
pas trop maltraité_s dru'art le cinquième siècle; mais avec 
le sixième sièc!e commencent pour eux des vexations de 
toutes natu res, et mme d'horribles persécutions ; il " en avait 
alors dans la Proveuce, dans le DauphinC dans la Bresse, 
dans le duché de Bourgogne et dans la Franche-Comté. 
Les Juifs et les cbrétiens étaient tellement liés alors, qu'il 
n'était pas rare de voir un Juif épouger nue chrétienne, et 
pareillement un chrétien se marier avec une juive. On at- 
tachait une grande importance à la conversion des Juifs, et 
l'autoritë souveraine secon,lait les efforts des eeclésiastiques 
qui se faisaient un devoir de l'entreprendre. On baptisait 
mme les Juifs par force ; souvent on les bannissait pour 
avoir refusé le baptème. 
Dans le royaume des Parthes, et depuis 226 dans l'em- 
pire persan, lem- sort, à quelques persécutions isolées près, 
fut pins supportable. Les Israëlites de la Palestine, qui, en 
610, prirent Jérusalem, avec le secours de la Perse, rêvè- 
rent i'indépendance de leur patrie, mais ris furent hnmiliës 
par l'empereur Héraclius. L'islamisme, répandu successi- 
vemenl, en 07, dans l'Asie occidentale, la Perse, I'É- 
gyple, l'Afrique, l'E«pagne et la Sicile, inllua sur la posi- 
tion des lsraëliles de ces courtAes : à l'exception des persé- 
cutions isolées dont ils furent victimes en Mauritanie l'an 
70, et en Egypte l'an 1010, ils vécurent tranquilles sous 
les khalifes et les princes arabes; ils s'accrureut en Espagne 
sous les Maures, et leur culture intellectuelle alla en aug- 
mentant depuis le lnritième siècle. Ils y devinrent meme 
conseilltrs des rois. Les orages partiels qtfi fondirent r 

eux à Grenade, en 1063, et à Cordone, eu 1157, lureul gé- 
riCalcinent desconséquences d'événements politiques. Dès le 
neuviëme siècle il y eut des communautés jaives an Cuire, 
à Fez et à llaroc; au enzième siècle leur nombre diminua 
à Babylene et s'accmt en Palestine. Ils furent en honneur 
citez les khans mongols. Mais combien leur sort fut tristo 
dans l'Europe chrétenne, en Occident, et surtout dans les 
pays fëodaux, h oà régnait le droit du plus fort et où s'exer- 
çat la puissance sacerdotale! 
Par des sacrifices ci'argent, ils rendaient qnelqnelois leur 
condition supportable en Italie, et 3s curent des temps 
heureux h laples. En 1261 et t«35 éclatèrent n6anmoin 
contre etr des persécutions dans 1hsieurs villes d'ltalie. 
Les papes les prenaient presque toujours sous leur protec- 
tion. Depuis le treizième siècle ils furent assujetlis/ porter 
des marques distinctives, et depuis le quinzième siëcle/ hahi- 
terdes quartiers separés tghett . Le; Juifs de la Sice, qui 
possëdaient des biens fonciers et une constitution comm 
régulière, ne  vivent pas tonrmentés par les Arabes et les 
.'ormands, et furent ménagés par l'empereur Fr,déric 
Plu tard ils lutent assujettis -h d'accablanles contributiong 
et/ l'hnmiliante ohligation de porter sur letrrs vèlemcnt» 
¢me marque distinctive. Après de valus elforts tent6s de- 
puis 1428 pour le convertir, ils furent, en 1693, expulség 
de l'fie, au nombre de 100,000, sur l'ordre de Ferdinand 
le Cathoqque. Ils se dirigèrent vers le royaume de .aples. 
En France, heureux dans le huitième siècle et le neu- 
vième siècle, s,rtout à Paris, h Lyon, en Languedoc et 
dans la Provence, ils possédèrent des terres, et leurs af- 
laires furent administrées par un rnagister Jtdoeor«m. 
Mais flg firent pers6«ulës par le clergé sous les faiblc Car- 
Iovingiens. Pour justifier les cruauts et les exécutions 
sanglantes dont il devinrent victimes depuis le onzOme 
siècle jusqu'au nilieu du quatorziëme siècle, on invcma 
des contes absurdes, des pr.f.matious d'hoglies, des em- 
poisonnements de puits, des crucifiements d'enfants clr- 
tiens. Tour à tour chassés et rappel6s an prix de sommes 
immense% ils obtinrent enfin un gardien ou juge ; mais en 
1395 ils lutent banni pour toujours du midi de la France. 
E «,lcterre il y eut des lsraelites dès le neuvième 
siècle. En 1189, le jour du couronnement de Bichard 
Caur de lion, éclata contre eux un tumulte sanglant. 
Sons Henri Ill ils souffrirent une foule d'injustices, malgré 
la liberté qu'ils croyaient avoir acquise de Jean sans Terre 
au prix de 6.000 mures d'aent. On lent prit leurs biens et 
leur synagogue. En I270 on les priva du droit de posséder 
des terres ; on les chaa enfin en t... 0, après af'oir cherch6 
à les converlir. Ils se rendirent en France et en Allemag-ne. 
Dans l'EmNre ils étaient la propriété des empereurs, qui 
les rendaient et les cédaient. Il y en avait au huitième siècle 
dans les villes rhénanes; dang le dixième, en Saxe et en 
Bohème ; dans le onz'.'ème, en Souabe, dan la Franconie et 
à Vienne ; dans le douzième, il y en avait dans le Brande- 
bourg et dans la Saxe ; s étaient imposës de diverses ma- 
niëres, Ris en gage, donnés et chassés par les gouverne- 
ments. Les croisades leur furent rafales. Sur les pas des 
croisés marchaient pour les malheureux descendants de 
Jacob la terreur et l'extermination. Vers le quatorzième 
siècle il n'y eut plus, à l'exception de l'Atriche, d'lsré- 
lires en Allemagne. I1 furent massacrés et br01és par mil- 
fiers ; plusieurs se précipitèrent dan les flammes des syna- 
gogues embrasëes. 
En Suisse il y eut des Juifs dès le treizième siècle, et 
dès le quatorzième ils y furent persécutes. 
En Pologne et dans la L'thuanie ils jouirent non-seule- 
ment de la protection du pouvoir, mais ils curent infime 
'depuis le quatorzième siècle des droits réels. 
Favorisës par Casimir 1II, les Juifs se multipli/.rent en 
Pologne dès cette époque par les nombreuses émigrations 
de la Suisse et de l'Allemagne. 
Il y eu eut en R :tssie dans le dixième et dans le ClUatooEièm 
siëcle; mais plus tard s en furent expulsés. 
87. 



2 
La Hongre eut des Juifs depuis le onzième siècle ; mais 
lans le quatorzième et le quinzième siècle, des persécutions 
clatèrent contre eux. 
E Espagne, les Juifs restèrent jusqu'à la moitié du qua- 
lorzième siècle assez paisiblement en possession de privi- 
]éges importants» qu'ils étaient parven1s à y obtenir à la suite 
de l'invasion de l'islamisme, qui avait été pour eux une 
poque d'émancipafion. Ils étaient chez les chrétiens, ainsi 
que les Maures, banquiers, foudenrs, ciseleurs, marchands 
armateurs, ingénieurs, architectes. Dans la partie chrétienne 
de la Péninsule on en br,lait bien quelques-uns, de temps 
 autre, en qualité de magiciens et de nécromanciens, mais 
on avait recours à eux, h cause de ce génie industriel et 
commercial qui en tous lieux est le propre des descendants 
d'Israel. Dans les seuls domaines de Castille, comprenant 
|es royaumes de 5tutoie, de Léon et d'Andalousie, on en 
• compta jusqu'h plus de 850,000, qui payaient aux chapitres 
.et aux prélats la somme énorme dg 25,45500 dieros. 
tais à la longue rappaurissement de la noblesse, rsul- 
tut de son orgueilluse oisiveté, l'influence toujours plus 
. grande du clergé, et des habi{udes usuraircs reprocbées aux 
.Juifs, provoquèrent contre eux ranimadversion publique, 
-<lui se traduisit bient6t en oppressions et en persécutions. 
Peu à peu on leur enlcva te droit de résider là no bon leur 
_mblait ; on diminua leurs privilées et on accrue les im- 
pôts auxquels ils étaient assujettis. Dans le royamne d'Ara- 
on, à la suite d'une grande sécheresse, on les expulsa 
Acs villes. En 1391 et 139, à la suite d'Ceules dirigees 
conh'e eux à Séville, à Cordoue, ì Tolède, à Valence, en 
Calalogne et à Majorque, on les ëgorgea par milliers. II 
'écbal,pèrent  ce massacre qu'en adoptant le christianisme 
ou bien en se rèfugiant en Afrique. Au quinzième siècle, l'in- 
<luisition d'Epagne mit la persécution contre eux/ l'ordre du 
jour. A parhr de 1480 on les brOla par milliers, et en 1492 
• n linit par les expulser complétement. Des 300,000 qui 
'étaient rcfigiés en Portlgal, dans la Provenoe et en Ita- 
Jie, il ne resta, au bout de huit ans, qu'une faible et mi- 
xable partie. Tolérs en Espagne depuis 1837, les Juifs y 
ont aujourd'hui en petit nombre, si tat est mme qu'il y en 
.ait qui aicut Ce lentes de profiter de cet adoucissement de la 
législation à leur égard. 
En Portugal, off on les rencontre dès le onzième siècle, 
• .Is étaient r«partis en sept districts, et vivaient sous l'autorité 
religieuse d'un grand-rabbin. En 1429 on leur imposa un 
v.lement particulier. En I92 on y acceillit pour huit mois, 
ontre un impôt de 8 liards d'or par tëte, 80,000 Juils es- 
[,agnols, que les alo-da-[e de l'Espagne avaient chassés. 
Au bout de ces huit mois, le pauvres acceptèrent le bap- 
ne et les riches quittèrent le pays. En 1495 le roi Emma- 
:nue! ordonna l'expulsion du Portugal de tous les Juifs ; on 
enleva aux plus pauvres tous leurs enfants gés de moins 
dequatorze ans, et on les embarqua pour les tles des Ser- 
I,en{s. En 1506 on égorgea à Lisbonne plus de 2,000 Juifs 
nouveau-convertis. Les persécutions contre les Juifs, de- 
neurés en secret fidèles à la foi de leurs pères, durèrent sans 
interruption dans la péninsule Pyrénéenne jusqu'à ce que la 
dfense d'émigrer eut été levée, en 1629 ; et beaucoup plus 
tard encore on continuait à en faire des nutn-d:fe, par 
-exemple en 1655. Ce ne fié qu'en 1773 qu'on abolit les dis- 
tinctions établies entre les anciens et les nouveaux chrétiens. 
&ujourd'hui mme le Portugal ne leur accorde pas de droits 
i,;,t, eto ne rencontre guère dans ce pays que des Juils 
allemands. 
C'est de la sorte qu'au commencement du seizième siècle 
l'Europe occidentale n'eut presque plus de Juifs. Mais on 
en rencotrait encore en Allemagne, en Italie en Pologne, 
dans Pempire turc et dans les Ètats africain. Leur nombre 
n'était pas très-considérable dans les États asiatiques : en 
Arable, où il existe encore aujourd'hui ; dans rHodjaz, des 
:uifs indépendants, à la Ilecque, des Juifs noirs, et dans 
"¢Sennaar, desjuifs blan« ; en Perse, où ils vivent dans l'op- 
pression et l'ignorance; dans l'Afgbanistan, où ils trafiquent 

JUIFS 
depuis Kaboul jusquen Cbine; dans r[nde, où il est déj 
fait mention d'eux  Granganor dës l'an 500 de l'ëre chré- 
tienne; en Cochinchine, où vraisemblablement il pénétrè- 
rent  la suite des Portugais, où ils cultivent le sol et se 
livrent au commerce ; dans la Boukarie, où ils jouissent de 
la liberté civile et exploitent de nombreuses manufactures 
de soieries et d'articles de quincaillerie; en Tatarie, en Chine, 
en Abyssinie, ou, établis depuis plusieurs siëcles, ils conser- 
vèrent leur indépendance usqu'en 60; dans le Soudau et 
le Loango. 
Au nord de l'Afrique, notamment  Alger, à Tlemcen, 
Oran, h T«touan, à Tunis, etc., il y eut un grand nombre de 
Jui[s qui, à la suite des événements dont le Portuga| et 
l'Espagne lutent le thétre en 1391 et 19, xinrent se réfu- 
gier ci s'ètablir auprès de leurs frères, qui depuis longtemps 
y formaient des communes. En 15ta on leur assigna à Fez 
un qtmrlier spécial dans la ville neuve ; et ils y jouirent ainsi 
qu'à Tafilelt de nombreux priviléges, notamment sous le 
rëgne de ?,Iuley-Arcbey, vers le milieu du dix-septième 
siècle. A Marne, où la population juive est administrée par 
un chéik avec deux députés des villes, les Juifs, qui 
livrent plus particulièrement au commerce, arrivent très- 
souxent aux emplois publies les plus élevés. A Alger ils 
ivaienl sous la plus avilissaute des oppressions, dont la 
conqnète de ce pays par la France, en 1830, les a affranchis. 
Leur position etait bien autrement tolérable en Turquie, 
o0 leur nombre s'est successivement augmenté d'une Ioule 
de réfugiés venus de toutes les contrées de l'Europe, et oi 
depuis le milieu du quinzième siècle ils n'ont eu / souf- 
frir de temps à autre que de quelques concussions de pa- 
chas, de quelques insolences de janissaires, notamment en 
en ?dorée. En Palestine, oin sont venus s'établir un grand 
nombre de Juifs polonais, ils sont tr.malheureux. L'É- 
gipte parait vouloir leur tendre une main secourable; ceux 
de "empir.e ottomau ont d'ailleurs les mèmes droits civils 
que les habitants du pays. 
La Renaissance et la Réforme ont exercé une influence 
salutaire sur les Israélites de l'Europe chrétienne. Toutefois, 
ce n'a été que vers la tin du dix-huitième siècle qu'ils ont 
obtenu la jouissance des droits civils dans les divers pays 
dont elle se conpose. Pendant tont le cours du seizième et 
du dix-septième siècle, l'inqtfisition et les papes ne cessèrent 
point de tourmenter les Juifs en ltalie. A partir de 158 il 
se tint à Rome des serinons destinés à convertir les Juifs 
et auxquels ceux-ci étaient tenus d'assister. Jusqu'en 1570 
ils furent souvent bannis de diverses villes, notamment de 
,'aples, en-151. Leur condition fut meilleure à Venise, à 
Pise, à Padoue, à FIorenee, et depuis 1,600 1 Livourne, 
ils ont encore aujourd'hui de bonnes écoles. Dans beaucoup 
d'autres villes ils doivent résider dans des 9hell ; et à 
dne on leur a enlevé en 1831 les franchises qui leur avaient 
étë accordCs en 181-1. Il existe de nombreuses communes 
juives en Dalmatie, de mme qu'en Lombardie, où ils jouis- 
sent des droits civils. 
Le pays qni s'est montré le plus libéral envers eux, et 
qui a le plus amplement rëparé les injustices exereées contre 
leurs ancètres, c'est notre France, ce pays qui en tout 
marche à la tte de la civilisation. Dës lb5l) des .]uifs por- 
tugais et espagnols furent admis  Bayonne et à Bordeaux. 
Ceux de l'Alsace et de la Lorraine gagnèrent beaucoup à la 
réunion de ces provinces à la France. Depuis 1784 l'im- 
ptSt par tte fut aboli à leur égard, sur la proposition du 
vertueux M al e sh e rb e s, et en 1791, sur la proposition 
de l'.abbé G r é goi r e, ils furent admis à l'égalité des droits 
par l'Assemblée constituante. En 1807 une assemblèe de 
notables et un sanhédrin furent convoqués à Paris pour 
fixer leurs lois organiqnes. Le décrot du 17 mars lS08 ne 
futque temporaire. La darte de 1814, celle de s30, et 
enfin la loi de 1831 sur le traitement des rabbins, ont suc- 
cessivement fixé et complété i'émancipation des lsraélites. 
Le mme principe d'équité a prévalu en Belgique depuis 
dernière révolution. 



JUIFS 
En Hollonde, affranchie depuis peu seulement de la tyran- 
nie espagnole, les Juifs espagnols et portugais trouvrent dès 
1603 asile et protection ; et le foyer de liberté, de richesse 
et de savoir que ce pays entretenat et fomentait alors, n'eut 
p&« d'éléments plus actifs. Les Juifs espagnols et por- 
tugais y furent aussi libres que les Juifs allemands; toutefois, 
en ne les adroit point ì faire partie de la ho»rgeoisie. Ce 
n'est que deptis 1796 qu'ils y possèdent le titre et les droits 
de citoyens, que la constitution de 1814 leur a confirmés. 
E Angleterrc, oil ils furent de nouveau admi en It%, 
ils vivent heureux et tranquilles: en 1830 et I s33 il leur a été 
permisde faire partie des corporations mtnicipales et du bar- 
tenu. Le lord maire de Londres éft dans la préente année 
1855 est un lsraélite. Mais le bill de leur entière émancipation 
politique, reproduit presqu'à chaque session du parlement 
et toujours adopté à une majorité considérable par la cham- 
bre basse, a constamment échoué jusqu'à ce jour à la cham- 
bre haute, où dominent avec le haut clergé anglican l'intolé- 
rance et la bigoterie. 
En Danemark, où ils ont été admis au commencement 
4lu dix-septième siëele, ils possèdent des franchises depuis 
t738, et presque le droit de citoyen depuis tSl. 
Il n'y a d'lsraélites en «ède que depuis 1776, à Stock- 
Itolm et dans trois autres villes, où on leur accorde indivi- 
duellement le droit de citoyen à titre de distinction. La 
zYorvè9 e persiste à leur interdire l'entrée de son sol. Dans la 
llssic proprement dite, dont les portes leur avaient été 
rouvertes par Pierre I «, lesJuifs taienl arrivés à îormer une 
pupulation de 35,000 àmes, lorsque Êlisabeth les epul.a, eu 
1743. Admis de nouveau par Catherine II, ils obtinrent de 
nombreuses franchisesdel'empereur Alexaudre, mais sevireut 
de nouveau cbassés par l'empereur Nicolas. Ils ne peuvent 
aujourd'lmi résider qu'en Courlande, en Crimée, à Odessa, 
prës du Caucase et dans les pays qui autrefois faisaient par- 
tie de la Pologne. C'est là qu'on trouve encore des c a r a ï t e s. 
Dans la Pologne proprement dite, o/l ils occupent des 
xilles et des villages entiers, ils out trouvé protection au- 
pr du gouvernement, quoiqils aient eu beaucoup a seul* 
ri-if de la noblesse et de la classe peu bclairée du peuple, 
notamment eu 16b.9, dans l'Ukraine, et en t651 dans la Li- 
lltuanie. Dans la dernière revolutiou polonaise, plusieurs 
[araCires combattirent bravement pour la cause de la liberte. 
Les préjugés des représeutants de la nation empchèreut 
nëanmoins alors de proclamer l'égalité des droits en leur fa- 
veur. En 1844 ce furent probablement des considérations 
politiques qui déterminèrent le gouveruement russe à prendre 
des mesures sévères contre les Juils polonais, et à leur dé- 
endre d'habiter les provinces occidentales de ce royaume. 
Leur situalion est beaucoup moins précaire dans le grand- 
duché de Poseu et dans la Gallicie autrichienne. 
Il y a aussi beaucoup de Juifs en Hongrie, oil ils contri- 
buèrent vaillamment, en 1685, à la défense d'Ofen. Ils y 
jouissent d'immunités importantes et de la protection de la 
noblesse. On en rencontre beaucoup aussi en Transylvanie. 
La Sisse ne toiCa pendant Iouglemps de« lsraelités qu'à 
Endingen et à Langenau ; mais depuis peu plusieurs cantons 
se sont montrés plus humains. 
Aux Ëtats-Um de l'Am6rique du Nord, la loi les avait 
assimilés dès 1"/78 ì tous les autres citoyens pour la jouis- 
sances des droits civils et politiques. 
L'Allemagne nitre encore malheureusement le spectacle 
le plus varié et en mëme temps te plus triste de la position 
des lsraélites! Exclus de tout, restreints mme dans le 
commerce, régis par des lois dures et humiliantes, c'est 
pourtant au prix de ces lois qu'ils out souvent acheté, 
sous les d6nominations les plus méprisantes, une précaire 
existence. Successivement chassés, rançonnés, persécutés eu 
Bavière, aans le Palatinat, dans le Brandebourg, ì Franc- 
fort-sur-le-Mein, à Worms, etc., de faibles protections ve. 
riaient de temps à autre les réconcilier avec un sol qu'ils ne 
pouvaient, qu'ils ne peuvent encore appeler patrie. Les- 
sing, bleudelsohu et Dohm ont depuis 1778 plaidé leur 

cause. Par suite de l'Cit de toltrance de Joseph 1|, en 178'2, 
quelques Ëtats se sont relâches de leur rigueur envers eux. 
L'abolition de l'Empire d'Allemagne leur a éoE favorab!e. 
Mais depuis 181ff plusieurs Etats allemands ont rétrorad 
sous le rapport de la toiCance, au mépris des protocoles 
du conés de Vienne, qui avaient prononcé le manheu 
des droits des Israélites. A Hambourg, à Francfort et dans 
plusieurs autres villes, de menaçants tumultes populaires 
sont venus souvent les effrayer. En Prus, ils ont été ex 
dus de l'enseignement, des conseils municipaux et du 
jury; dans les provinces rhénaneç, en 18., on leur a 
mme interdit la réforme de leur culte ; et depuis 183 on_ 
a introduit «les prédications pour les convertir. Malgré cette 
réaction si déplorable, un meilleur eprit se fait jeu r, cern me on 
peut s'en apercevoir par les débats léslatiîs du grand-ducb6 
de Bade, de la Bavière, du Wurtemberg, etc. Dans ce der- 
nier pays et dans la Hesse-Ëlectorale, les [araCies ont 
le droit de citoyen. 
lous terminerons ce long martyrologe des Juifs depuis la 
destruction du second temple par les Romains jusqu'à nue 
jours, en rappelant ici les éloquentes paroles prenentCs en 
t85 au sein du parlement par .L d'lsraeli ì l'occasion d'une 
motion relative à l'émancipation politique des israélites an- 
glais: « J'ai toujours pris, a-t-il dit, la dtfense des Julfs, parce 
que, lon moi, la race juive est la îamille envers laquelle 
la famille humaine a le plus d'obligations. Quand j'entend 
dire que l'admission des Juifs détruirait le caractère chre- 
tien de cette assemblée, je dis que c'est parce que vou 
êtes une assemblée chrétienne que vous leur devez une place 
au milieu de vous. Quand je considère tout ce que nous leur 
devons; que c'est par leur histoire, leur poésie, leur 
lois que nous avons été instruits, consolés, organisés, quan,I 
je songe à d'autres considérations d'un caractère plus sac 
que je n'aborderai pas ic, je dëclae que, comme chrétien, 
je ne puis repousser les réclamations d'une race à laquelle 
les chrétiens doivent tant... Il y a encore une autre raison 
pour laquelle je souhaite que les droits des Juifs soient re- 
couuus en Angleterre : c'est que tous les pays dans lesquels 
ils ont été percutés ont eux-mèmes été frappés dans leur 
puissance et dans leur énergie ; et c'est à mes yeux un signe 
visible de la protection que Dieu accorde à ce peuple. 
Voyez i'Espagne, le Portugal, l'Italie... Quant à l'Angle- 
terre, les Juifs n'ont certainement pas ì se plaindre des pro- 
grés qu'y fait l'opinion à leur égard. D'ailleurs, c'est une 
race qui peut attendre ; c'est une race qui, quand mme 
on ne reconnaitrait pas aujourd'hui ses droits, ne dispa- 
raltra pas demain. C'est un peuple ancien, un peuple fa- 
meux, tn peuple durable, un peuple qui en genéral finit 
par en venir à ses fins. Certainement j'espère que les par- 
lements dureront éternellement; mais je ne puis pas ou- 
blier non plus que les Juifs ont vu passer les rois assyriens, 
les pharaons d'l%'pte, les césars romains et les khalifes 
arabes, et je ne suis pas pressé de faire pour eux  iolence à 
l'opinion publique. » 
On évalue aujourd'hui le nombre total des populations 
juives à environ 3,600,000 àmes, dont t38,000 en Asie, 
500,000 en Attique et 30,000 en Amérique. La Pologne 
est le pays d l'Europe o/ elles sont le plus nombreuses ; 
leurchiffres'yélèveà plusde 1,700,000àmes, dont 1,100,000 
dans la Pologne russe, 385,000 dans le royaume actuel 
de Pologne, plus de 200,000 en Gallicie, 77,000 dans le 
grand-duchè de Posen, et 8,000 ì Cracovie. On estime le 
nombre des lsraélites en France ì 60,000 ; en Hollande, à 
53,000 ; en Belgique, à ,000 ; en Angleterre, à 30,000 ; en 
Danemark, à ct,000; en Suède, à 1,000; en Suisse, ì I, I oo ; en 
Hongrie et en Transylvanie, ì 20,000; en Bussie, à 60,000 ; 
en Turquie, ì 30%000; en Grèce et aux lies loniennes 
à 7,000; en I talie ì 7,000. Mais ces données ne sont qu'ap 
proximatives, et n'ont rien d'officiel. 
L'histoire des Juifs a été écrite par Josèphe, par Basnag% 
par Prideaux, et en dernier lieu par Jost. Parmi les ouvtage 
français qu'on peut aussi consoller »af cette matière • nous 



.o4 JUIFS 
tentionnerons : Les Juifs d'Occident, par Arthur Beugnot; 
Les Juiflt du moyen dge, par Depping ; et de reeneils 
périodiqttes, tel« que La Soulamith, L'Israëlite fran- 
fais, La Jdida, Le Juif, et/ Rgoenration, publiée par 
I. BIoeh à Strasbonrg. S. CAnr., traducteur de la Bible. 
JUIFS {.lterbe aux ). Vmje 
• I UIGNE (Fmnille de ). Juigné, aujourd'hui eommwae 
de Maine-et-Loioe, sur la rive gauche de la Luire, avec 
1,100 habilnts, est une ancienne seigneurie du .Mains, qui, 
réunie à la chhtellenie de Champagne, fut érigée en bare 
nie en 1615. Elle a donné son nom à une famille qui tire 
son incipai lustre d'avoir fourni i la lin du siècle der- 
nier an siëge de Paris un avchevtque don la mémoire est 
restée justement vénérée dans ce diocèse. 
Antne-Elœeonore-Ldon Lv_cc  J«, nE en 1728, 
à Paris, perdit à rge de six ans sou père, téau siCe de 
Guas[dla, et fut de bonne heure dostin à rÊglise. Après 
avoir fait ses études au coll$ge de Navarre, il entra au sé- 
aire Saint-Nicolas du Chardonnel, et y lit les orOres. 
D%bri grand-vcaire de révqne de Carcassnne, il fut 
nommé agent genéxal du clergé, fnctious qi conduimient 
ordinairement à l'épiscopat. En effet, aprè avoir refusL l'évèdé de Comminges, i accepta, en 1, celui de 
Ch',long. Dix-sept années lUS tard, il était appelé à l'ar- 
chevèché de Paris, vacant par la mort du oélèbre Chris- 
tophe deBeaumnt. 11 n'accepta, il lait le dire, qu'avec 
répngance cette haute position dans l'Ëlise de France, 
qui à cette époqne valat an titulaire plus de 600,000 francs 
de rente, car il n'était pas de ce prètre fini considèrent 
ne agmen|airm de revenu épiscopal comme un motif de 
changement conforme à l'esprit des canons. Le nouveau 
prélat employa en bonnes œuvres ses revenus excessif». 
Dans le rourenx hiver de lss, il épuisa en aumnes et 
en charites toutes s ressources, rendit sa vaisselle et 
engagea mème son patrimoine. En 1789, il fut nomme à 
l'Asemblée nationale avec ses deux frères, et siëg.-ea dans 
les rangs de la minorité qui esaya iuutilement d'olposer 
une dne au tord'eut de la r.volution, laquelle ne le lui 
pardonna pas. Le pieux archevêque, devenu dans son dio- 
cèse le bat d'une vive bostilité, le quitta avec l'agrément 
du roi, et pas à rétranger, afin d'y attendre le retour du 
calme et de l'ordre. Mais l'Assemblée constituante vota la 
constitution civile du clergé; et tout auss6t le schisme 
s'introduisit dans I'lise de France. Le siêe de Paris fut 
declaré vacant, et l'etection donna Go bel pour succes.etrr 
 Juigé. Cet-ci rentra en France auit6t que Bonaparte 
en eu ruvert les portes à I'migralion. Il avait acquiescé 
au concordat de 1801, et remis au souverain pontife la 
démission «le n .iëge, qni, ax termes du nouveau con- 
cordat, était oeufëré h l'abbé, depuis cardinal, de 
Le rte de sa vie s'écoula dans le sein de sa lamille, entre 
les pratiques de la charité la plus inépuisable et I conso- 
lations de rëtude. Il mourut a Paris, en 1811. 
Un de ses neveux, le marquis Jac9ues-Mrie-Analo[e 
) JutcÉ, avait etè appelé à la pairie par le roi Charles X. 
Il mourut en 15t5, à I'ge de cinq«mnte-sept ans. 
• lU i LLE, septiëe mois de |'a n n ée. Il a trente-et-un 
jours. 11 s'était d'abord nommé quintilis, parce qu'il était en 
aller le cinquième de l'année romuléenne. Il prit le nom de 
$ulius sous le consulat d'Auto'me, en mëmoire de Jules- 
César, nE le 12 de ce mois. 
Les Grues cëtébraient perlant le mois de j nillet des fête« en 
l'|onneur d'Apollon et d'Adonis. Chez les Romains, le 6 de 
ce mois était consacré i la fortune fém;.nh, e 
ration de la femme et de la mëre de Coriolan; le 
déesse ritut a ; le lt commençaient les Mercuriales, qui du- 
raient six jours ; le 3 se OEehrient les jeux de 
le 25, les Funérateset les A mbarval les. Les j¢ apoll i- 
naires, ceux du.cirque et les blinerxales se donnaient 
aussi en laitier. ,e mis était m la Frotection de JapPer. 
JUILLIT 1789 (Jure'nue d 1 ), jour de la ISe de la 
Basti l.le. 

JUILLET 
JUILLET t8o (Bêvetutiou de). La France en t836 
a donné au monde un rae et noble spectacle, celui d'une 
rêvoluion accomplie pour la défen ¢lea lois, opérée 
dbirement et comme par tre consentemeat unanime, pure 
de tout exeès, de toute violence., et vant d'dle-mme, le 
lendemain de son magique tgimnphe, œe reposer dansl'ordre 
légal. C'est à notre patrie qu'était réservé l'honneur d'un 
tel exoeple. 
Malgé la triste coïncidence qui rattachait le retour des 
Bourbons aux désastres de la France, le paTs, fatigué de 
combat et de pouvoh" absolu, avat, en 181, accueilli 
sans trop de répugnance des princes dont il avait oublië les 
antécédent% qui lui apportaient la paix et qui lui promet- 
talent la libortê. Avec des inspirations généreeses et fran- 
çaises, la Restauration pouvait encore,  toute force, 
se lah'e pardonner le malhe¢ de  origine : ele sembla 
prendre  tche de l'atgraver. Cependant, Louis XVIII, 
prince sinon plus français de oeuf, du mins pins éclairé 
que son parti, sentit le besoin de se modérer. Mais, par son 
principe et par ses antécédents, la monarchie restaurée 
êtait condamnée à ne pouvoir s'appuyer sur l'opinion na- 
tionale ; il lui fallut recourir à ce système de bascule, frèle 
reuurce des gouvernements impoputaires, qui ne les 
tient un moment que pour les précipiter plus sîrement 
ensuite, en nieCant tous les partis, en dëcouraeant toutes 
les coufiauces. Le snccès de la contre-révolution d'Espage 
parut un instant avoir affermi la Restauration. Des 
tions frauduleuses et violentées lui dounërent une immense 
majorité dans la chambre; la CUlture, de nouvean rétablie, 
fit taire l'opposition de la presse; un ministre habile, M. de 
Villèle, mania les finances avec dextërité. La Restauration 
prit conrage; ce fut sa perte. Dé«»fitée de ses infructueuses 
tenta°rives de conspiration, l'opinion libérale se disciplina 
es opposition constitutionnelle; dès lors elle eut pour 
plies ttrute la France. Le pouvoir, de son c6té, croyant n'a- 
voir plusà se contraindre, ne se fit pas lante de lui donner 
des armes, eu blessant de plus en plus le pas dans ses 
affections, en l'inqliétant de plus en plus dans ses interèts. 
Charles X euait de succéder/t Louis XVIII, et ce 
prince, qui expiait dans les laiblesses d'une aveugle devo- 
tion les Iéèret d'une ieunesse frivole, se livra entierement 
au clergé, delà trop pnissant sous son prédéoeeur. La 
France eut à subir le joug le plus humiliant pour un peuple 
qui n'a plus de vives croyances, le joug du sacerdoce et de 
la theocratie. Ce ne furent plus de tous c6és que missions, 
congrégations, processions, ponrsnites puer cause de re- 
lion. On parla sérieusement de rendre au clergé la tenue 
des actes de l'Cut civit et de lui décerner une indemnité 
pour ses biens vendus en 179. En attendant, on lui accorda 
la redoutableloi du sacril Ce. L'ordre dangereux des j é- 
s ni te s, clandestinement accueilli sous le règne précédeut, 
releva la tte, menaça d'envahir l'education publique, et 
s'empara de la couscàence du monarque. Au mme temps, 
un millia'd d'indemnite etait donné h rémigration pour prix 
de la guerre faite i la patrie; on toetait de ressusciter, au 
profit de l'aristocratie, le droit d'alnesse, et d'enchainer la 
presse par une loi que les feuilles o[fietes osèrent nommer 
loi de justice et d'amour. Ajoutez le scandale le moin 
snpporté en France, celui de la corruption et de la [ruade 
marchant le front levé; les Ce, tiens eccamotées, l'amortis- 
sement des ournaux préparê par doe maxcl houleux. Ce 
fut alors que des demi-résistances, plus siguificative. qu'êner- 
gique% commencèrent à se produire dans les corps jusque 
les pins dévmés : intelligible mais trop inutile aver'6sse- 
ment ! Ainsi la chambre des pairs rejeta ou du moins amenda 
essentiellement plusieurs lois qu'avait accueillies la chambre 
ective. Ainsi, la tan,rature, longtemps docile, commença 
de prottter, par de rares mais notables aeqttements» 
contre l'abu fait de sa complaisance. L'Acalémie elle-nême, 
restée jusque alot-s étrangère à la politique, se permit d'in: 
tervenir, par des représentaUoas, en faveur de la Pres. 
menacée. Au lieu de s'éclairer, le pouvoir s'obstina. Il ré- 



JUILLET 
pondit aux avertissements de la pairie par une large pro- 
motion de nouveaux pairs, aux arrts des magistrats par 
une insulte et par le rétablissement de la censure, aux sep- 
pliqnes de l'Académie par en sec refus de la recevoir. Bien 
n'éclairait l'aveugle monarque; une revue de la garde na- 
tionale ayant fait éclater des mîmstations peu favorables 
 son ministère, il ne vit là qu'un prétexte pour la dissoudre 
et pour supprimer une institution qui lui portait ombrage. 
Cepenè.ant, la chambre de ts2z, s'était usée avant le temps 
par sa ferveur contre-révo[lationnaire. Le ministère se crut 
en position d'affronter nu renouvellement qui lui eùt a 
suré plusieurs années d'existence. 11 comptait dominer en- 
core tes électio : il e trompa ; la eure d'imptpularité 
était comblée, et Uopinion constitutionnelle e trouva en 
imposante majorité dans la nouvelle chambre. Le ministère 
Villèle dut alors se retirer, et fut mème menacé d'accusa- 
tion. Un autre ministère se forma, sous la présidence de 
1I. de Martignac, esprit conciliant et doux. Mais quoique 
les membres qui le composèrent n'eussent donné peut-ètre 
que trop de gages à la Bestauration, la cour ne le vit qu'a- 
xec défiance; et toujours suspect, toujo,rs contrarié, 
ne put entrer que d'un pas douteux et chancelant dans la 
voie de réparation où l'appelaient les espérances du pays. 
Une loi favorable à la presse périodique, une autre contre 
les fraudes électorales, parurent au prince et à la comarilla 
des concessions dangereuses faites à l'esprit revolntionuaire. 
On se souleva aux Tuileries contre les faibles restrictions 
que le ministère tenta d'apporter aux empiélements du jé- 
suitisme; et lorsqu'il voulut essayer d'introduire oans le 
sstème municipal le principe de l'election, ce fut à des 
conditions telement aristocratiqnes que la chambre dut les 
repousser, prefërant encore un provisoire défectueux à la 
création d'une oligarchie départementale. 
A part cet ecbec, le ministère Martignac n'avait point ren- 
contre dans le cl,ambres d'bostilitë sérieuse. A défaut des 
actes, on lui tenait compte des intentions; on voyait en lui 
du moins un temps d'arrët dans la contre-revolution : une 
tortu majorite aait vote son budget. Aucune cause parle- 
mentaire n'avait donc préagé sa chute, et ce lut avec stu- 
l)eur qu'en l'absence des chambres la Fance lut dans le 
Moniteur l'avenement du minitëre Polignac. Le nm 
seul du chel de ce ministère révélait assez l'eprit qui Pa- 
»ait tortuC Des nominations andaciensement impopulaires, 
le mot fameux « Plus de concessions t » aclievërent de le 
caractériser; nul ne lut se méprendre sur les tendances 
d'un cabinet qui ne voyait que des cocessions, et des con- 
cessions qu'il ëtait temps d'arréter, dans le peu d'ameliora- 
tions qu'avait pu vëaliser on predeceseur. ChaCUl comprit 
que la Bestauration était incorrigible et que l'instant al» 
procbait d'une collision entre la royauté et le pays. 
Déjà, pré oyant le refus du budget, le ministere laissait 
percer l'intention de briser cet obstacle par des ordonnan- 
ces. Ses écrivains cherchaient à préparer l'opinion à ce 
coup d'Etat, qu'autoriserait, suivant env, l'article I de la 
cha14e constitutionnelle : c'était voir dans la charte la nëga- 
tion de la charte elle-mème. L'opposition leur répliquait par 
la grande maxime au,aise, le roi règne et, e ouverne 
las, et organisait à l'avance des associations pour le refus 
de tout imlt qu'on voudrait lever par ordonnance. On at- 
tendait surtout avec anxiété quelle attitude prendrait la 
chambre. L'elfet fut immense lorsque, dans son adresse 
d'installation, elle annonça positivement que le ministëre 
au devait point compter sur son concours. Le cbàteau 
s'irrita; la chambre lut dissoute, et la nation dut e pré- 
parer aux élections nouvelles dont allaient dépendre sa li- 
berté et son avenir. 
Les chambres devaient s'assembler le 3 aoOt 1830. Aux 
approches de juillet, la lutte électorale s'engagea; le 
nistère fut vaincu. Dès lors il ne reîait plus à la royanté 
qu'à changer de ministres ou qu'à frapper un coup d'Ett : 
elle choisit le coup d'Etat. Alger venait d'tre conquis, 
t ce succès avait enflé le cœur des absolutistes; ils croyaient 

695 
avoir étonné l'epositien, Cleui les masses, s'tre attaché 
l'armée. Ils ne voyaient pas que la question laiCiente niait 
trop grave, trop ortement egagée pour qu'une couqutte 
lui,laine y pot taire diterion. Le beau fait d'armes d'Mger 
passa presque inaperçu. Le choix seul du général avait été 
remarqué; c'était l'henmoe qui avait trahi nos drapeaux à 
Vaterloo. 
Enfin, Clmrles X a'bésite phs; il fulmine eus erdonnances 
trop fameuses. L'une snspend la liberté de la presse ; une 
autre dissout la chambre; une troisième efface I loi élec- 
torale, et la remplace par des dispositions arbitraires ; une 
dernière convolue la chambre, qui doit ainsi Cre élue sous 
la dictée du pouvoir. Le Moniteur d OE6 révèle ces mon 
trnosités à la capitale étonnée. A sa lecture, l'indignation 
est générale, la résolution de résister nnauime. Les jour- 
naux protestent et refusent de se soumettre : clmcun d'eux, 
dans l'attente d'une voie de fait, se poepare à la résistance 
légale. Des groupes se forment ; tout Paris s'agite. Le ch- 
tean se riait de cette fermentation. Il se rappelait avec 
quelle facilité, trois ans plus t6t, s'clair évanouie l'eteute 
de la rue Saint-Dents, et n'imanait pas que cette fois la 
force pot rencontrer plus d'obstacles. Le mardi 27, la po- 
lice envoie saisir les presses des journan refractares : 
partout ses agents sont obligés d'emploer la vio!ence. Le 
lVational a fermé ses portes, il faut les forcer. A l'impri- 
merie du Temps, M. B aud e proteste, la loi a la main, et 
arrete pendant sept heures les soldats de la police. Ces ef- 
fractions, qui se prolongent accompagnons de bruit et d'ap- 
pareil, remp|is«ent la citê de rumeur, provoquent des ras- 
semblements, irritent, exaltent le» esprits. Vers le soir, 
de nombreux attroupements se forment dans le quartier 
pop,leux du Palais-ltoyal, bravent la force armée qui veut 
les dissiper. On tire sur eux ; le sang coule, la guerre a 
commencé. 
Le 28, Paris est :nis en état de siCe : la capilale du 
monde civilisé se voit livrée aux exécutions militaires ; ses 
citoyens sont ravis à leurs juges naturels ; le commandement 
est remis ì M a r m o n t, au maréchal qui avait rendu Paris 
à l'Cranger en I$1. Mais dès le matin de cette ioornee 
l'insurrection êtait devenue genérale : le tocsin sonnait, cha- 
cun courait'aux armes ; les rues se liérissaient de barricades ; 
le drapeau tricolore, si longtemps voilé, flottait sur l'h6tel 
de ville et sur les tours de Notre-Dame. Marmont veut 
resserrer le foyer de l'insurrection en isolant Paris de ses 
• astes faubourgs. De la place de la Coucorde, oh son quar- 
tier general est placé, il lance deux ¢olounes, l'une le long 
des quais, l'autre le long des boulevards. Ces dispositions 
ne manquaient pas d'kabi|eté, mais la dtlficulte ou plut6t 
l'impossibilité d'etablir les communications les rendit sle- 
riles. Sur les boulevards, les troupes étaient arretees à cha- 
que pas par les arbres qu'on avait renversés sur leur route; 
s'engageaient-elles dans les rues, elles rencontraient d'in- 
nombrables barricades, et derriëre ces rêmparts improvi- 
sés, des tirailleurs qui décimaient leurs rang, tandis qne 
des toits, des fenëtres, des terrasses pleuraient sur elle, 
les coups de fusil et les projectiles. SOrs de trouver partout 
sympathie, retraite et appui, les citoyens se portaient par- 
tout avec ardeur et sécurité; les soldats, au contraire, n'a- 
vançaient qu'avec déliance. La colonne de droite s'empara 
néanmoins de l'h6tel de ville ; la colonne de gauche, après 
avoir à grande peine balayé les boulevards, int pour la 
rallier, en descendant la v;.eille rue du Temple; mais elle 
ne put [ranchir les barricades et dut rebrousser chemin. Le 
poste de l'h¢tel de ville, alors, se trouvant isolé, n'osa garder 
sa position, et se retira, favorisWpar la nuit, aux premiers 
coups du tocsin de Saint-Sulpice qui annonçaient la reprise 
des hostilités. 
Les troupes, dans la jonrnée du 28, n'avaient pas été bat- 
tues; presque partout, au contraire, le champ de bataille leur 
était reste. Mai leur découragement, leur tatigue étaient 
extrmes. Elles voyaient l'unanimité de la population, l'é- 
ner--n de la résistance ; il leur avait fallu combattre sans 



696 
fesse, sur tous les points, sous un soleil brlaut, sans vi- 
vres, san fourrages, sans repos. Beaucoup répugnaient à 
tirer sur le peuple, et pour une cause injuste, et pour des- 
princes qui n'étaient pas situés. Chez les Parisiens. au con- 
traire, l'ardeur et la confiance étaient doubies. Ils avaient 
éprouvé leurs forces, bravé la fusillade et le canon. Assiégés 
par des troupes réulières et par un maréchal, ils avaient 
résisté, et résister en ce cas, c'est vaincre. Désormais les 
réles allaient changer : les assiégés allaient prendre l'of- 
fensive ; les assiégeants allaient Cre forcés de se défendre. 
Toute la nuit, des tirailleurs inquiétèrent les troupes cam- 
pCs sur la place de la Concorde et dans les Champs- 
Ëlysées. 
Le lendemain, 29 juillet, la bataille recommence au point 
du jour. Les faubourgs dbloquds courent aux armes; les 
corps-de-garde sont envahis, les pannouceaux aux armes 
royales brisC; le musée d'artillerie fournit des moyensde 
combat. La banlieue, peuple d'anciens soldats, descend et 
s'empare, après une vive résislance, de la caserne de Ba- 
bylone. Celle de la Pépinière est prise presque sans coup 
férir; celle de l'Ave-laria rend ses armes au peuple; celle 
de la rue de Tomnon, occupée par la gendarmerie, est 
forcée. Les réments de ligne fralernisenl avec les citoyens 
et lirent leurs cartouches en l'air. Le peuple s'arme des 
fusil qu'il vient de conquerir ; les lèves de l'Eole Polylech- 
nique, inslruits à la tactique militaire, accourent se metlrc 
à sa Iète. On se porte sur le Loutre, que défendaient les 
Suisses: il es emporb,, et le pavillon tricolore flolte sur 
ses colonnes. Ou court aux Tuileries; le Pont-Royal est 
franchi sous le feu des Suisses et sous les eux des gardes 
du corps sorlis en vain de leur caserne voisine. Bienld 
l'elcndard Iricolore brille aussi sur les Tuileries. A deux 
I,cue% la journée élait finie, Paris éacué, et l'armée 
to)ale, réduite aux régiments de la garde» se retirait sur 
Sevses et Saint-Cloud. 
Dan ces grandes journées, le peuple de Paris joua le 
principal foie, et sa conduite fut admirable. Pri é de chefs, 
il i,nplovisa lui-méme sa resistance avec une intelligence 
exlraordinaire; privé d'adzfinistrateurs, il fit lui«nme la 
police la plus sévère. ul vol ne fut commis, nulle vklime 
frappée hors du champ de balaille; quelques malheureux 
qui o|durent leuler des soush'actions furent immédiale- 
ment lusillés. Le chàteau pris, des factionnaires eillèrent 
aux portes pour empdcher le pillage. Pendant la bataille, les 
combaltanls les plus pauvres n'acceplaient des cilo) ens au- 
cun présenl; ils refusaient jusqu'au inqCou leur offrait, 
craignant que l'ivresse ne les conduisit au desordre. :Dans 
ces )ourndes, disaient-ils, on ne boit que de l'abondance. 
Durant les j,urs qui s,fivirent, o.n voyait la Banque, le 
Trdsor gardes par des sentinelles en vesle et en haillons. De» 
malfaileurs échappés de leurs prisons durent y rentrer 
volonlairetoent, tant l'ordre social se trot,va prompt,qnenl 
a,mré, et jamais Paris ne fut plus tranquille, plus sauf de 
dcsordres en tous genres que dans ces trois semaines passées 
sans force publique et presque sans gouvernement. Cette 
sublime attilude d'un peuple insurgé et ictorieux esl sans 
exmple dans l'hisloire. 
"fan.lis «p,e le combal durait, quelques dtpulés présents 
g Pari 't'tant tennis cl,ez l'un d'eux, avaient dpnle au 
ch'3teast Laffitle, Gérard et Lobau, pour t'cher d'ar- 
téter l'effusion du sang par le retrait ,les ordonnances et 
le renvoi du ministcre, ll n'avaient pu rien obtenir. Le 
gau soir, Laffille vit arriver chez hti MM. de Morte- 
m a r t et d'A rg o u t, porleurs d'ordonnances nouvelles, qui 
rapportaient les premières, ri»roquaient le ministêre Po- 
iignac, appelaient aux affaires clrangères, à la guerre, aux 
finances, t.l. de llorlemart, Gérard ci Casimir Périer ; 
ils apportaient en outre un blanc-seing de Charles X pour 
souscrire aux auts-es conditions qu'on voudrait exiger. Le 
lendemain, le« négociateurs furent introduits dans la réu- 
nion des dèputés, il est trop tre'd, fils la réponse qu'ils 
reçurent. I,e jour mèmc Charles X évacua Saint-Cio»d, et 

J UILLET 
se retira sur versailles, qui lui ferma ses portes. Il se ren- 
dit à Trianon, et la nuit suivante il se dirigea sur Rare- 
houiller. Ce lut de là que, le  août, il envoya au duc d'Or. 
iéans, nommé lieutenaut général du royaume, son abdi- 
cation, celle «lu duc d'Angoulme, son fils, en faveur du 
jeune ilenri, iils de la duchesse de Berry. Encore à la tète 
d'une force assez imposante, il paraissait ne pas vouloir 
quitter Rambouillet que son petit-fils n'efit été proclamé roi. 
A cetle nouvelle, Paris se lève, se porte en masse de 0  
3o,o00 hommes sur Rambouillet. De grands malheurs pou- 
valent arriver. Sr de ses troupes, Charles et pu combat- 
tre avec avantage, en rase campagne, celte multitude, 
plus brave qu'expérimentée ; mais il n'osait plus compter 
sur elles. 1!. Odilon Barrot pénélra jusqu'b lui, et lui 
montrant rinulililé de la résistance, sut le résoudre à s'é- 
loigner. Charles, entouré de sa famille et d'un reste de sa 
garde, prit à petites journœes la route de Cherbourg, avec 
cinq commissaires chargés de veiller à sa sfireto. Il espé- 
rait sans doute, en gagnant du temps, trouver de l'appui 
dans l'armée, dans la Yen&e, dont le rapprochait son 
itinéraire. Des'nière illusion, qui lui fui bient0t enlevée: 
Sur sa route il ne rencontra que rindiff,.rence on «les ma- 
nifestations hosliles : la Yœend#e ne bougea point = i'armée 
d'Afrique fit sa soumission, et laissa partir son génoeral : le 
commandant ,lu camp de Saint-Orner voulut se porler sur 
Paris; il se présenta devant Amiens, dont il trouva les 
portes ferreCs, se détourna vers la ormandie, appril en 
route la déchcance de Clmrlœes X, et se soumi! également. 
A anles, le sang coula, et les patriotes furent vainqsleurs ; 
partout ailleurs la révolulion fut accueillie avec un œenlhou- 
siasme uuanime. Ainsi tomba en trois jours cette dynastie 
qui n'aval! su ni rien oublier ni rien apprendre; qui 
deux fois avait consenli h r¢.gner de par les baïonnettes 
etrangères; qui dans quinze années de règne n'avait pu 
jeter la plus faible racine sur le sol Irançais : elle tomba sans 
resitance, sans déchirement, comme ces cbairs gangre- 
nées que sépare le doigt de l'opCaseur. 
Le magnilique drame des trois journées appelait un dé- 
noOment, l'éreclion d'un gouvernement nouveau. Plu- 
sieurs combinaisons pouvaient s'offrir. Le jeune Henri V? 
C'clair encore la iégilimilé, c'est-à-dire la négation du droit 
national ; c'était encoro la race dont le cltef venait de dé- 
chirer la charte et d'ensanglanter Paris; c'était encore le 
drapeau de l'emigration et de l'ancien régime. i i'educa- 
tion ni l'entoutrage du jeune prince n'étaient propres à ras- 
surer la révolution; et puis, comment recevoir Henri ¥ 
sans sa famille, et commenl ramener sa famille dan Paris 
indigné? -- Le lils de apoléon? Il Cait absent; il dé- 
pendait de l'Aulriche ; son caractêre n'clair point connu ; le 
dernièresannéesdu régime impérialn'avaieut pas laissé de fa- 
 orables souvenirs ; c'était d'ailleurs se précipiter dans l'al- 
liatlce autrichienne, si peu convenable à la France. -- La 
rèpublique? Elle avait un parti dans Paris, surtout parmi 
la jeunesse des écoles ; mais ce parti, plus ardenl que nom- 
breux, complail peu d'C,os en province. La r«publique ne 
pouvait rallier une assez puissante unanimité pour imposer 
 l'Erope ci défendre la r6volulion. On se delnandail si 
elle pouvait d'ailleurs subsister dans un pa)-s de mouv- 
ment et d'élnulation comme la Frauce ; et puis, la nonar- 
chie conslitulionnelle n'offrail-ellc pa tous les avantzges de 
la république aee plus de stabililc? A ces gl'aes considé- 
rations se joignait la r:pugnance in:;linctive de Ious les 
hommes d'un certain ge pour le nom de république, qtè 
leur rappelait, à lori ou h raison, les excès de la terl'eur, 
l'anarchie du Direeloire. 
La monarchie représentative avec le due d'Orléans pa- 
raissait aux patriole» éelairés la co,nbinaison la phls heu- 
reuse. Le due d'Orlëans avait l'immense avanlge d'ètre 
illgitinle, et pourtant sa position était assez élev«;e pour 
servir de point «le ralliement. Son père avait donné à la 
révolulion des gages de la nais,re la moins équivo 
Lui-méme s'était distingué sous le draoeau tricolorffUe,; 



I 
il 

J U ILLET 
avait noblement porté l'infortune, et n'avait jamais paru 
dans es rangs de nos ennemis. Pendant la Restauration, il 
.tait resté étranger à ses fautes. On connaissait la simplicité 
de ses gotts, la régularité de ses mœurs, ses vertus do- 
mestiques, son esprit éclairé, l'éducation toute nationale 
qu'il faisait donner à ses enfants. Sa nombreuse famille 
olfrait des gages de durée précieux pour une dynastie nais- 
eante. Une seule objection pouvait lui ètre adressée : il te- 
nait par le sang ì la famille décbue. Mais trop de conve- 
nances racl|etaient cet unique inconvénient, et, quoique 
ourbon, c'est enlui que la révolution crut devoirplacer ses 
espérances. Déjà, dans la soirée du 30, ce prince, accom- 
pagné seulement de deux personnes, avait quitté Neuiily 
et s'était rendu à pied au Palais-Royal. Dès le lendemain il 
est proclamé, par les deputés présents à Paris, lieutenant 
général du royaume; il se rend à leur tète, ì l'h6tel de 
ville, où l'accueille le général Lafayetle, appelé déja au 
commandement général des gardes nationales de France. 
Ce grand citoyen, d'accord avec les conseils de M. Odilon 
Barrot, venait de refuser la présidence de la républi,lue , 
qu'un parti lui avait offerte, et son concours dé.gintéresse 
fut d'un grand secours, aussi bien que l'influence de Laf- 
fitte, pour l'établissement de la royauté nouvelle. Une 
commissinn municipale s'ëtait formde, composée de Laf- 
Iitle, Casimir Périer, Lobau, deSchonen, A udry de 
P u y ra v e a u et M a u g u i n ; elle avait rendu d'imporlanls 
oervices dans ces jours dilficiles. Le 1 « autel elle viut ré- 
sig,er se pouvoirs entre les mains du lieutenant général. 
Des commissaires furent dcsignes pour exercer provisoire- 
ment les différents minislëres. Le 3 anal le prince vint faire 
l'ouverture de la session des chambres. 
Désormais le denotment était prévu de tous : la force 
des choses lavait préparé plus encore que la volonle des 
hommes; il ne s'agissait pl,s que de la maniëre de l'anle- 
ner. Les tins voulaient que la chambre des députés avant 
de laire un roi donnlt une cons:tihltion à la France, au 
lieu d'une charte que son origine, ses imperfections, des 
violations nombreuses avaient Ira discréditer; d'autres, al- 
lant plus loin, auraient désiré qu'une chambre spéciale fùt 
appelée ì la double et haule mission de faire une constitu. 
tion et de fonder un tr6ne. Cela san doute e0t été pré- 
fërahle. Le gouvernement qui devait réumer et clore une 
grande révolulion populaire ne pouvail èlre inauguré d'une 
Inanière trop majestueuse et trop solennelle. Mais on crai- 
gnit les perturbatious que pouvaient amener et l'infl,,euce 
étrangère et l'effervescence rëpublicaine : on voulut les 
gagner de sitesse. Une rdvision rapide de la charte parut 
suflisenle pour en faire disparallre les défauls les plus gra- 
xes. Tel fut l'objet de la proposition présenlée par 31. Bé- 
tard le 6 aoOt. Une séance fut donnée pour consommer 
cette révision, qui en des temps calmes efit été peut-èlre 
plus complète et plus intelligente, mais qui telle qu'elle 
¢tait suflisait pour faire de la France la plus libre des na- 
tions civilisées. Enfin, le 9 ao0t le priuce lieutenant gé- 
riCai, nommé roi sous le tilrc de Louis-Philippe I ', 
vint prendre possession du tr6ne et jurer l'observation du 
pacte constitutionnel. Saint-AIbin Benveee, 
• Prciident de chambre . la cour impériale de Paris. 
JUILLET 1,0 ( Traitë du 15). A la mort du sultan 
lahmoud, la victoire de Nezib mettait l'Empire Othoman 
 la merci d'lbrahim-Pacba. Blent6t le capitan-pacha li- 
vrait la flotte turque " Mchémet-Ali. Anssil6t l'Europe in- 
tervint. L'Auglelerre offrit à la France de forcer le Dar- 
danelles si la lutte entre le sultan et le pacha amenait les 
I',usses  Constantinople. La France artCa Ibrablm prèt à 
franchir le Taurus, et une note collective des cinq grandes 
puissances fut remise le 27 juillet 1839 au divan, pour 
:'assurer du désir commun ì toutes de maintenir l'inté- 
grité de-I'Empire Othoman. L'Autriche et la Prusse mar- 
ebèreut d'accord avec la France et l'Angleterre; la Russie 
rœefusa d'abord de prendre part aux conférences, qui de- 
latent se tenir A Vienne, dans le but de généraliser le pro- 

tectorat enropéen à l'égard de la Turqme. Le 6 aoft .l. de 
Lesselrode disait dans une dépcle : « L'empereur ne déses- 
père nullement du salllt de la Porte, pourvu que les pois- 
sances de l'Europe saclent respecter son repos, et que par 
une agitation intempestive elles ne finissent pas par l'ebran- 
ler, tout en voulant la raffermir. ,, Cependant lord Palmers- 
ton ne pouvait voirde stabilité dans le statu quo. Pensant 
bien qu'a la première occasion Ibrahim fondraitsur Cons- 
tantinople et y appellerait les Russes, il chercha ì faire 
rendre la Syrie au sultan. D'abord il proposa ì la France 
d'arracher de force la flotte turque des mains de Mébémet- 
Ail. La France s'y refisa. Dès lors le mauvais vouloir 
de l'Angleterre contre le vice-roi lut manifeste. La France 
demandait pour le pacha d'Ëgypte l'hérédité de l'Égypte et 
de la Syrie ; i'Angleterre n'y voulut point souscrire. L'Au- 
triche déclara se ranger de l'avis de celle des deux puissances 
qui accorderait le plus de territoire au sultan. La Prusse 
adopta le sentiment del'Autriche. Enfin, au mois de septem- 
bre, la lussie envoya fi Londres 5I. de Brunow, chargé de 
faire ses propositions. Cette puissance adh.rait àtous les ar- 
rangemenls territoriaux qu'il plairait ì l'Angleierred'adopter, 
et demandait qu'en cas de reprise des ho»tilités on la lais- 
sAi, au nom des cinq cours, couvrir Con«taniinople avec 
une arme.e, landis que les flotles anglaise et française blo- 
queraient la Syrie. Ces propositions ne furent point accueil- 
lies ; elles réalisaient justement ce que l'Angleterre voulait 
éviter à tout.prix, la protection russe. M. de Brunow quitla 
Londres, et y revint en janvier 1840, avec des proposiiion 
nouvelles. Ele différaient des premières en ce qu'elles 
accordai.nl/ la France et  l'Angleterre la lacult d'intro- 
duire chacune trois aisseasx dans une partie limitée de 
la mer de 3larmara, pendant q,,e les lrollpes russes occupe- 
raient Con.tant.inople. 
Les uégociatious en restèrent là. La France poussait le 
sultan ì tlaiter directement avec le vice-roi. Celui-ci, au 
mois de juin, offrit spnntanément au sultan de restituer la 
flotte turque, mais il ne lui lut pas fait de répone. Sur une 
insinuation de 3IM. de Bulow et de Neuman, representarts 
de la Pru.«se et de l'Autriche ì la conference de Londre«, 
le cabinet français, concevant l'espoir d'obtenir pour le 
vice-roi la possession viagère de la Syrie jointe  la posses- 
sion héréditaire de l'Egypte, envoya ì Alexandrie un agent 
chargé de dt»poser Mébémet-Ali à cet arrangement. En 
mème temps une insurrection éclata dans la Montagne. 
Lord Palmerston, craigaa.qt que la Erance n'arriver à un 
arrangement direct entre le sultan et le pacba, et croyant 
voir dans l'insurrection du Liban un point d'appui qui dis- 
penserait de l'intervention russe, se dêcida ì brusquer le 
dénot3ment en écartant la France. Depuis longtemps 
l'ambassadeur fi'ançai à Londres, M. Guizot, avertissait 
son go,vernement que des arrangements étaient ur le point 
de se conclure entre les grandes puissances relativement 
ì la question d'Orient; mais ì Paris on ne pouvait pas 
croire que lord Palmerston jouerait si facilement l'alliance 
anglo-française, qui depuis tS30 maintenait la paix euro- 
péenne. Cependant le 17 juillet lord Palmerston appelle 
au Foreign-Oflice l'ambassadeur de France, et lui apprend 
qu',n traité est signé depuis l'avant-veille entre les quatre 
puissances pour l'arrangement de la questio turco-égp- 
tienne. 
Ce traité renfermait cinq articles. Dans le préambule, 
on déclarait que le sultan avait eu recours fi LL. 3IM. la 
reine d'Angleterre, l'emperenr d'Autriche, le roi de Prusse 
et l'empereur de lnse, pour réclamer leur appui et leur 
assistance au milieu des difficultës dans lesquelles il se 
trouvait placé par suite de la conduite Imslile de 31éhé- 
met-Mi, pacba d'Egyple, difficultés qui menaçaient de 
porter atteinte à l'lutCrilWde l'Empire Othoman et à l'in- 
dépendance du tr6ne du sultan. Lesdites majestés, da|s 
l'inldrét de l'afferrnissement de la paix de l'Europe, 
et désirant prvenir l'effusion du saug qu'occasionnerait 
la continuation des hostilités qui avaient éclaté en Svrie 



698 
entre les autorités du pacla et les slljeL du grand-seigneur, 
aait rolu de oeuclure e elles la convanfi qui 
t : i ° L pai conaut s'éut enndu sur 
conditions de l'arrangement que le suln devait aer 
lébémet-Ali, conditions qui  trouvaie scifls dans 
un acte sal, ell s'engagit h ar de ous leurs 
effos ur déteiner Méhét-Ali   nfoer à cet 
anment, chacune  rrvant de opérer à oe bt 
lon I moyens d'action dont ePe uvait diser. 2" Si 
le cha dg)pte refusait d'lhrer au suit arranmem, 
lpai contraant feignaient à prendred 
conoeH entre elles afin de mettre oet aangemcnt en 
ex'ution. En atteant, I fore navales de l'Angle{er et 
de l'Autchedans la Mitean devaient immédiatement 
couper te mmunioetion par mer entoe lypte et 
Sye, et donner, au nom de l'alfian, tou l'appui et tonte 
l'asisn en leor pondoir  œux 
nanifesterait leur fidélit et leur obéinoe 6 leur sou- 
verain.  Si Moehémet-Ali, au lieu de  umeflre, di- 
rigit ses fo ve Cstannople, I paHie conlc- 
tant, sur la rquisiUon qui en rait laite par le soln, 
convenaient de  rendre à l'inHtion de 
de uoir  la défense de an, trône au oen d'une c- 
paon conceHée en mmun, dans le but de mettre les 
deux déoits du Bosphore et d Dardanelles, 
capitale de l'Empire OHoman, à l'abri de tou aion. 
 était en oue conenu que I for ainsi employ 
oe retireraient suia('mcnt sur i'ax-is u ian, et renoe- 
raient respectivement dans la mer oioe et la Méditean. 
4 * Il était epresnent entendu que cette coopération ne 
serai considerée q,e me une mesure exceptionnelle, 
ne drogeant en eu à l'ancienne rëgle de FEmpire Ohoman 
par laqeile il a été de tout temps d,fenu au timets 
de g,eroe des poissan éangr d'enlrer dans les dé- 
troits des Dardaneil et du osphore. Le s,ltan déclarait 
 ferme résolulion e maintenir cel règle  l'avenir, et 
chacune des quatre p,isanc s'eageait  «ter do- 
rénaça celle ctermnation d sultan. Par lb l'Anglelee 
arra,ait à la Russie l'abrogation du ameux {raitWd'Unkir- 
Skélesi.  La convtion devait erre ratifioe dans I deux 
mois. 
Les oenditons q,e le ilan éit dans lïntention d'ac- 
corder a, vice-roi consistaient en ceci: Padministraton 
du pachalik d Ëple pour lui et 
drecte ; et  commandement sa e durant de la foH 
res de Saint-Jesn'Acre, avec le tie de uacha d'Acre 
ci l'administration de la parue mérione de la S-d. Tou- 
foL«, ur jouir de ces crnier. avans, I pacha devait 
accepter dans les «fix jou qui snivraiem la notficaUon qui 
ui en serait faile parle suln, etdonue aussitôt à 
1»roe de teroe et de mer l'dre de qUer l'Arabie et 
villes intes qui y nt siluées, l'fie de Candie, le district 
d'Adna, et toutes I parti de l'empire qui ne nt pas 
comprises dans le pachal d'Acre. Si dans le délai fixé 
Mehemet-Ali n'avait p apé le subit aanent, 
I, sultan reliait son offre, et s'il coa«enit à lui lsr 
htairement i'ple, c'ét à in condition qu'il aoeep- 
lait  n nouvu dloe de dix jours. Pas le tee 
de  jour% le ultan s'ait lib de suivre telle marche 
OEeeure e se imérêt» et i nses de ses ailiés pour- 
raient lui suggérer. Le tribut annuel à payer au sultan par 
léhet-Aii serait proportionne au plns ou moins de ter- 
Hire dont oe dernier obrait l'administon. 11 devait 
diatement remdt la floue hrqne avec ts  i- 
pages  aements, n er en pte I n 
de son lretien ndant le temps q'elle et*i rl dans 
loe  de l'pte. Tous I traites et tou s ls de 
lpire Othoman s'appliqueit à l'pte; is te pacha, 
en payant rulièent in but meonné, pouit 
poeçoir, au nom et me d du suln, I tax et 
;repli% san{  pouvoir aux dns d'adiston ci- 
vile et miliioe dit province. Enfin, 

JUILLET 
terre et de mer que pourrait entretenir le pacha 
luisant partie des forces de l'Empire Othoman, seraient toq- 
jours considéríes comme entretenues pour le service de- 
l'l.tat. Par un protocole rseré,  fut stipulé qu'on pro- 
céderait immdiatement à l'eécutlon de ce traite, sans at- 
tendre l'Change des ratifications. 
En m/me temps que les ministres plénipoenliaires 
gnaient ces conventions, ils adressaient un ntemorandum 
 l'ambassadeur frane, ais pour lui expliquer comment il se 
faisait qu'il n'avait pas été appelé à prendre part à cet acte 
célëbre. On y disait que la France ayant fait d,pendre sa 
coopération avec les autres puissances de conditions que 
ces puissances ont regardC comme incompatibles avec 
la maintiin de l'intégrité de l'Empire Othoman et de la 
tranquillité luture de l'Europe, il ne rtait plus aux qnatre 
¢onrs que cette alternative, ou abandonner aux chance de 
l'avenirles grandes affaires qu'elles s'étaient engagées à ar- 
ranger, et manifester ainsi leur impuissance et exposer la 
paix européenne à des dangers toujours croissants, ou bien se 
décider à marcher sans la coopération de la France, et amener 
an moyen de leurs effort runis une lution des com- 
plications dans le Levant. PlusCs dans cette situation et 
prolondément conçaincues de la nécessité pressante d'ne 
prompte décision, les quatre cours avaient rtardé comme 
un devoir de se prononcer pour la dernière de ces deux al- 
ternatives. Le memorondum froissait en exprimant l'es- 
poir que la séparation de la France. des quatre autres puis- 
ances serait de courte durée et que la France copérerait au 
moins moralement au but que se proposait la conférence, 
en enageant le vice-roi à accepter les conditions que le 
sultan devait lui proposer. 
Le 2 juillet, M. G u izot répondit, par une contre-note, 
que la France ne croyait pas ln pour le sultan d'arracher 
 .'q«.hëme--ili par la force des armes les portions de 
l'Empire Turc qu'B occupait, car on tendr«it ainsi  donner 
au grand-seigneur ce qu'ilne po,rrait ni administrer ni con- 
serrer. On affaiblirait, sans profit pour le suzerain, un 
vassal qui pourrait aider pniamment à la défense commune 
de l'empire. S'appuyer s,r l'inurrection du Liban ne pa- 
raissait pas un moyen bien avouable  notre avabassadeur. 
« On vent rétablir un peu d'ordre dans l'empire, diit-il, et 
on y fomente des insurrections! On ajoute de nouveaux 
désordres  ce dérdre déjà général que tontes les puis- 
sauces déplorent dans l'intért de la paix. Et ces ppnla- 
tions, réusicait-on à les soumettre à la Porte après les 
avoir soulevées contre le vice-roi? Enfin, allait-il en ter- 
minan',, la France ne peut pins être mue dsorrnais que par 
ce qz'elle doit à la paix et ce qu'elle se doit 
Quand la no,vellede ce traité entre les quatre puissances 
se répandit à Paris, ce fut comme un coup de fondre. On 
voyait à q,oi tenait cette alliance anglaise si rechercbee et 
rompue d'une manière si brusque. La France y avait tout 
sacrifié, et elle se trouvait tout à coup dans l'isolement. 
Elle put croire un instant à la ré.rrection d'nne coalition 
européenne contre ses institutions. Les diussions d, par- 
lement anglais calmèrent imparfaitement l'esprit public en 
.rance. Le gouvernement Ceva l'effectif de l'armée 
500,00o hommes, angmenta sa marine et décrira d'nr,gence 
l'érection desforti.fications de Paris. 
Cependant la flotte anglaise sétait mise immédiatement 
l'oeuvre. Le 16 ao0t le traité lut notifie  .'tléhémet-Aii par 
les consnis des quatre puissances alliées et par Riiaat-Bey. 
envoyé du grand-seigneur. Le vice-roi répondit quïl en- 
 errait sa rëponse au sultan; puis, apostrophant Ri iaat-Bey : 
« N'avez-vous pas honte, vous autres Stamboufins, lui 
dit-il, de permettre à des Crangera, à des chrêtieus, d'en- 
vahir vos provinces? Que peut gagner Pempire à chercher 
par d'aussi odieux moyens l'anéantissement du seul noyau 
de lorc; qui constitue sa nationalité? Qu'Allah mauoesse 
tons les ministres de la Porte assez aveugles pour ne pas 
voir qu'ils travaillent  la ruine de l'islam ! • D le 
commodore apier avait sommé les autorités egypUemte 



JUILLET 
d'évacuer la Syrie. Sur les conseils de la France, Méhémet- 
Ait se décida, au commencement de septembre, à accepter 
l'offre des quatre grandes puissances, en demandant seule- 
ment de plus b la Porte l'administration viagère de la Srie. 
ltais le divan se laissa aller à prononcer la déchéance du 
vice-roi. 
Le 17 septembre les ratifications du traité du 15 juillet 
furent écbangëes à Londres, et lors d'une nouvelle confé- 
rence, les envoyés des quatre cours alliées déclarètent que 
dans l'exécution des engagements résullant pour les puis- 
sances contraclantes de la convention susmentionnée, ces 
puissances ne chercheraient aucune augmentation de ter 
ritoire, aucune influence exclusive, aucun avantage com- 
nercial pour leurs sujets que les sujets de toute autre puis- 
sance ne pussent obtenir aussi. Avis de cette addition fut 
donné à l'ambassadeur de France, avec l'assurance que dans 
leurs déterminations les puissances n'avaient en vue aucun 
avantage particulier. Le 31 aoOt lord Palmerston avait 
fait, dans un nemorundum, l'historique des négociations. 
M. T h i e r s , répondit par line note du 5 octobre. Le 
ajouta un post-scriptum et une nouvelle note, o/ il s'expli- 
quait sur la déchéance du vice-roi, et semblait déclarer qu'il 
y aurait là pour la France un cas de guerre, poisqu'elle 
ne pourrait consentir à la dépossession de l'Egypte herédi- 
taire pour bléhémet-Ali. Néanmoins, le hattichérif de dé- 
cheance avait été signifié à Méhémet-A]i le 21 septembre. 
L'escadre frauçaise s'Cait retirée à Salalnine, de peur, 
comme on I'a dit depuis, que ses canons ne partissent tout 
seuls. 
Le Il septembre, après neuf jours «le bombardement, 
Beyrouth fut évacué par les Eyptiens. L'insurrection s'était 
étendue. Sidon ne résista pas, et Saint-Jean d'Acre ne put 
tenir plus de trois heures contre le feu de l'escadre de sige. 
L'Cit Béchi r avait abandonné le vice-roi et s'croit rendu 
aux alliës. Le commodore lapier s'apprëtait à comroencer 
le siCe d'Alexandrie, quand le vice-roi se dccida à accepler, 
le 27 novembre, l'ultimalum du commodre et à signer 
»ne couention pro,isoire par laquelle il s'engageait  éva- 
euer la Syrie et à restituer la flotle othomane dès que la 
résolution de la Porte de le maintenir dans le gouvernement 
de l'Eypte lui serait notifiee sous la garantie des puissan- 
ces noies par le traité. Cette convention devint la base des 
négociations qui suivirent, et le pacl,a ne s'occupa plus, 
dans sa soumission, que de faire diminuer le» charges qu'on 
voulait lui imposer. La haltichérif du 12 janvier 1861, par 
lequel le sultan reconnaissait son vassal comme gomerneur 
héréditaire de l'Égypte, mais en l'encl,alnant par une Ioule 
de restrictions à son pouvoir, mit lin à toutes les ditficultés 
oulevées par le traité du t juillet. Le vice-roi exécuta ses 
¢ngasements, et lbrabim accomplit sa retraite s,r le ter- 
luire égyptien. Les puissances usèrent alorsde leur inlluence 
auprès de la Porte pour obtenir en faveur du pacl,a des 
conditions moins rigoureuses, et celle-ci finit par céder à 
leurs instances. Le tïrman d'investiture du t  juin apporta 
aux rapports de vassalité et d'hérédité des adoucissements 
notables, qui furent acceptés par le vice-roi avec de grandes. 
4témonstrations de reconnaissance. Méhemet-Ali était con- 
firmé dans la possession de l'Eypte transmissible à sa des= 
tendance masculine, ainsi que dans le gouvernement de 
la lubie. La Porte se réservait la confirmation des officiers 
égyptiens des grades supérieurs/ celui de colonel, et le vice- 
roi s'obligeait/ se conformer aux lois gínërales de l'empire 
et à requérir l'autorisation du sultan pour tu,te augmenta- 
tion de ses forces de terre et de mer. Le tribut dut dire 
réglé par un firman spécial. 
Telles furent les conditions et les conséquences de ce fa- 
meux traitë du 15 juillet, qui faillit allumer une guen'e 
riCaie en Europe et qui eansa un certain refroidissement 
entre la France et l'Angleterre. Èvidemment la France s'etait 
lroropée sur la puissance de Mél,émet-Ali, .l,,'elle croyait 
capable de resister à d'autres f,,rces que celles qui furent 
employées contre lui en Syrie; sans doute l'Angleterre avait 

-- JUIN 
atteint son but en éloignant toute chance d'intervention de 
la Russie à Constantinople ; mais la France avait perdu de 
sa prépondérance dans un pays jadis place sous sa protec- 
tion spéciale, et qui était retourn malgr elle sous la 
minatiou du grand-turc. Pendant longtemps encore on en- 
tendit sortir du Liban de longues plainlês contre les cxac- 
tions des envoyés de la Porte. On s'était enfin aperçu en 
France que la Grande-Bretagne n'Cait pas tellement li6e 
nous qu'elle ne sacrifiM au besoin notre alliance. Le nfinis- 
tère de M. Thiers Cait tombé et avait ëté reroplacé, le 29 
octobre 1860, par celui de.MM. Soult et Guizot..M. Guizot 
proclanla la polilique de l'isolement et des intérèts, politique 
qui devait recevoir son application en Espagne et ruiner la 
France en la forçant à un armement considérable. Cependant 
on profita de la première occasion qui s'offrit de rentrer dans 
le concert européen, en signant le traité du 13 juillet 1641, 
par lequel toutes les puissances reconnurent de nouveau les 
droits de la Turquie sur les détroits du Bosphore et «les 
Dardanelles. L. Locvx. 
JUILL¥, coromune du département de Seine-et- 
Marne, dans une pelite vallée, près de Dammartin, avec 
520 habitants, et une célèbre institution de plein exercice, 
dirigée par une societë d'ecclcsiastiques. C:est un des plus 
anciens ëtablissements d'ëducation qui soit en France, puis- 
qu'il remonte ì plus de deux siècles. Le soliCe de Juilly 
fid fondé le 3 novembre 1638, par le P. de Con,hon, gênerai 
des O r a t o r i e n s, et reçue de Louis XI I l le titre d'Acude»tie 
royale. Il ne tarda pas ì acquérir une grande réputation, 
cause des solides ítudes auxquelles on ], conviait la jeunesse, 
et des principes de religion et de morale q,'on avait soin de 
lui inculquer. Une maison de retraite était jointe au col- 
loge, et d'illuslres penseurs, de grands savants, sortis «lu 
sein {le cetle congrcgation, y ont passé le,rs jours dans le 
receilletaent, la prière et I'etude. A la ré olution, les bà- 
' timents et le parc «le Juilly, qoi contient plus de trente or- 
ponts, furent rachetés par l'un des përes, aide de plusieurs 
ex-oratoriens. Peut-ëtresongeaient-ils alors h ressusciter leur 
ordre; mais ils ne purent que faire renaitre l'culot lierCaire 
: dont avait brillé jadis celte maison. 
[ Juilly possbxle aussi un pensionnat de demoiselles, composé 
en grande partie des sœurs des él/ves du collége et dirigé 
par les Dames de Saint-Louis. 
J UIN, sixi/,ne mois de I'a n né e. Il a trente jours. Son 
nom latin, junius, dérive de Junou; du moins Ovide le 
croit ainsi, car il fait direì cette dëesse : 
Junius a nostro nomine nomen habet. 
A Ruine le I er juin voyait célébrer quatre OEtes : la pre- 
mière a Mars, la seconde/l Carna, la troisième ì Junon, la 
qualrième /l la Tempgte. Le 7 les pëcheurs faisaient les 
'. jeux piscatoriens, au delà du Tibre; le 9 était consacré 
I h Vesta, le Il/l la Concorde, le 27 à JupiterStator, le 28 
aux dieux Lutes, le 29 ì Quittons, le 30 à Hercule et aux 
bluses. 
En Grèce, les jeux o I y m p i q u e s commençaient au mois 
de juin. Les grandes panatlsínées, qui avaient lieu 
tous les cinq ans, commençaient également le 28 de ce 
mois. 
JUIN 1792 (Journée du 0). Le renvoi du ministère 
girondin, présidé par Roland, et le vétoque Loui s XVI 
opposa au décret sur les prgtre.s et au projet d'un camp 
de 0,000 hommes sous Paris, soulevèrent les faubourgs. 
Un rassemblement de 20,000 hommes, oanisé par Santerre 
et le marquis de Saint-Huruge% se porta sur les Tuilerits, 
après avoir envoyé une dèputation/ l'Assemblée, et pénetra 
dans la résidence royale, dont ils brisèrent le portes ì coups 
de hache sans rencontrer de réistance : « Monsieur, » dit 
Legendre au roi, qui ì ce mot fit un mouvement de sur- 
prise ; ,. Oui, Monsieur, Coulez-nous: vous êtes fait pour 
huais écouter ; vous ëtes un perfide : vous nous avez toujours 
trompés, vous nous trompez encore, l,lais prenez garde ì 
vous : la mesureest à son comble, et le peuple est las de 



00 
wir votre jouet. » Puis il lut une pétition signifiant au mo- 
narque la volontédu people, et qui fut saluée par les cris de : 
A btts le vclo! Le rappel des minislres! La sanclion des 
decrets! Le roi dut mettre sur sa lte un bonnet rouge, et 
répondit : ,, Je [erai ce que la constitution et les dëcrets 
m'ordonnent de faire. » Sur les huit heures du soir, la foule 
se retira docile à la voix de P é t i o n, après avoir défilë dans 
les appartetuents de la reine, qui plaça également tin bonnet 
rouge sur la [te du dauphin. A dix heures le ch.teau et le 
jardin «.talent cotuplétetuent évacués. Ainsi bi:miliCe, la 
royauté ne pouvait durer Ionetups. La journée du 10 no ù t 
a«'heva de la renverser. 
JUiN 183'2 (Journées des 5 et t). Quand le général 
L ara a rq u e vint à m«»urir, le I « juin 1832, le minilère 
ou 13 tuars, vainqueur/ L)on et en Vendée des insurrections 
rrpublicaine et oyaliste, avait perdu son chef, Casimir Pé- 
I le r, enleë par l'epidcmie rëgnante. Les députés de l'op- 
po.::tion signaient le fameux compte-rendu à leurs com- 
mctlants, et de sa tuain mourante Lamarque avait pu at- 
tacher sou nom à cet acte célèbre. La popularité du général 
«lonnalt à sa mort une importance particulière. Les funé- 
railles «le Casimir Périer ax-aient fourni au gouvernement 
l'occasion d'tin den«mlbretuen t iuju rieux ; les partis contraires 
brillaient à leur tour de se cotupter. L'enterrement de La- 
marque allait leur en donner le moyen. Les legitituistes et 
les bouapartistes ne pouvaient que se rallier, pour l'instant, 
,a: r«.publicains. Ces derniers étaient alors divisés en plu- 
sicurs socirtes secrètes, sans cbels suprèmes, sans oeirec- 
li.n. Cependant, cotume une collision paraissait ituminente 
pour Is ubsèques de Lamarque, il fut décidé par les sec- 
t:ons qu'on se fiendrait prèt h tout evrnement, et que, sans 
provoquer de conflit, on ne recnlerait pas devant une prise 
d'artues. 
Le 5 juin était le jour choisi pour la cérclnonie lunèbrc 
qui devait précéder le depart du corps de Lanarque pour le 
deparlenent des Landes, oin il avait désiré ètre inhumé. 
Tout Paris fut de boune heure en mouvement; gardes na- 
tionaux eu unifortue, ouriers, artilleurs, étudiants, ancien 
soldats, refugiés de tous les pu)s, se rendirent en masse  
la maison mortuaire, située rue du faubourg Saint-ltonoré. 
lnstinctvement, on fortuait des pelotons, on cboisissait 
«les chefs, on se réunissait sous des bannières diveres. Le 
gouvernement, prévoyant une bataille, faisait occuper la 
place de la Concorde par quatre escad-ons de carabiuiers ; 
un escadron de dragons fut envoye a la halle aux vins; 
un autre couvrir, avec un bataillon du 3  h.ger, la place 
de l'btlel de ville; I 12 e léger attendait le convoi sur la 
place de la Bastille; il " avait des soldats dans la cour du 
Louvre ; la garde municipale était íchelonnce sur Ioute la 
li.ae qui »'étend de la prefecture de police au Pantbeon ; 
lin detachetuent de cette garde protegeait le Jardin des 
Plantes;enfin le  dragons se tenait dans la cour de la 
caserne des Célestins, prt à monter à cheval. Le reste des 
honpes était consigné dans les casernes, et les régiments 
dos env irons de Paris devaient se tenir prt à tuarcher sur 
la capitale. 
Le cortége se mit en raarcbe. Il devait parcourir tons le. 
boulevards, de la bladeleine au pont d'Austerlitz. Les coins 
àu drap mortuaire étaient tenus par le général Lafayette, 
le marecbal Clauzel, Lafiilte, et 5Iauguin. Des jeunes gens 
e mirent ì trainer le char funè.bre. A la hauteur de la rue 
de la Paix, le cortege est detourné de sa route et entrainL par quelques enthousiastes vers la place Yendme, pour 
faire le tour de la colonne. L'alarme gagne le pote de 
l'oral-major de la place de Paris, qui rentre précipitatument 
dans l'ilttel, dont les portes sont aussiltt fertuíes. Le duc 
de F itz-J a tu es a,ant paru le chapeau sur la tète au balcon 
du cercle de la rue de Grammont, des pierres firent voler 
en ¢clats les vitres de l'dablissement. L'agitation redoublait 
à chaque pas; des sergents de ville, placés de distance en 
«Il»tance, furent dësartuës et tualtraités. Les cerveaux s'exal- 
L«.eat : on criait l'tre la rpblifluel on chaulait des bym- 

JUIN 
ries réçolutionnaires ; on arrachait les tuteurs des jeunes ar- 
bres du boulevard pour s'en faire des artues, et les sabres 
des gardes nationaux servaient à couper les arbustes eux- 
tudmes pour le mme usage. Les jeunes élèves de l'Écola 
Polytechnique avaient été consignés ; soixante d'entre eux 
ayant forcé la consigne parurent tout à coup dans le cor- 
tége. 
Efin, le corps étant arrivé au pont d'Austerlitz, on fit 
halte. Une estrade avait Cé prparée pour les discours d'a- 
dieu. Le général Lafayette, le maréchal Clauzel, Mauguin 
et les généraux gtrangers Saldanba et Sercognani parlèrent 
successivetuent. Leurs discours étaient tristes, graves et 
solennels, comme il convenait ì la circonstance, biais en 
tub.tue temps mille bruits circulaient dans la foule. L'artil- 
lerie de la garde nationale faisait retentir l'air des cris de 
Vive la république ! Bientct, vers les cinq heures du soir, 
tin individu parait monté sur un cheval et tenant à la maizt 
un drapeau rouge surtuonté d'un bonnet phrygien. L'indigna- 
tion fut grande chez les uns. d'aulres applaudirent. Le gé- 
néral E x e I tu a n s, qui était dans le cortége, s'cria : « Pas 
de drapeau rouge ; nous ne voulons que le drapeau trico- 
lore, c'est celui de la gloire et de la liberté ! » Deux homme 
s'elaneèrent slr lui, er tant qu'il fallait le jeter dans le canal; 
mais le général, protégé par ceu-, qui l'entouraient, quitta 
la foule, ci rencontrant le géneral Flahaut, se rendit a,:ec lui 
aux Tuileries. La peur des jacobins rallia autour du roi bo 
nombre de partisans des institutions républieaines, aux- 
quelles on ne désespérait pas de ramener Louis-Philippe. 
Pendant que cette scëne se pas»ait, un escadron «le dr- 
gon% sur l'ordre du préfet de police G i s q u e t, sortait de la 
caserne des Cclestins et alCuchait sur le quai llurland, se 
dirigeant vers le pont d'Autellilz Arrivés à la hauleur du 
Grenier d'Abondance, ils s'arrêlèrent. Lafayette Cail monté 
dans un fiacre; des jeunes gens l'ayant reconnu, s'attelèrent 
à sa voiture, et oulurent le mener en triotupbe à l'bttel 
de  ille. L'escadron de dragon ouvrir ses rangs pour laisser 
passer le vieux genéral, et un instant après plusieurs coups 
tic fusil retentirent. Des pierres volèreut sur les soldats. 
Une barricade fut construite. Prévenu de ce qui se passait, 
le colonel des dragons sortit de la caserne des Célestins à 
la tete d'un second détacbement, et se dirigea vers la place 
de l'Arsenal pour aller rejoindre le premier détacbetuent par 
le boulevart Bourdon. Une décbarge accueillir les dragÇns à 
leur sortie de la caserne; ils prirent alors le galup, chargeant 
t.,ut le Ioog du boulevard Bourdon. Leur eotumandant, Che- 
let, y lut mortelletuent blessé. Arrives au pont du canal, ils 
h-ouvèrent une barricade, essuyèrent un feu meurtrier de 
l'Arsenal, du pavillon Sully et du Grenier d'Abondance, dot 
une partie servait d'ambulance aux cboleriques. Le colonel 
avait eu son cheval tué sous lui, le lieutenant-colonel était 
blessé, une balle atteignit le capitaine Briequeville. Le co- 
lonel fit reutrer sa troupe par les rues de la Cerisaie et du 
Petit-.Iusc. Les soldals de l'escorte avaient disparu. On cou- 
rait de lous ettés en criant At. armes! Au delh dit pont 
d'Austerlilz les jeunes gens détellent les chevaux de la 
voiture de poste qui doit etuporler la dépouille mortelle du 
général, et veulent mener ses restes au Panthëon. La garde 
tuunicipale à cheval placee aux en, irons du Jardin des 
Plantes est virement attaquee ; mais grtee au secours de 
deux escadrons de carabiniers, elle reste tuailresse du con- 
voi, qui peut enfin parlir pour sa destination dernière. 
llais Paris est d(jà en feu. Les républicains se répandent 
dans toutes le direclions, darmant les postes, briant 
les réverbères, construisant des barricades, crevant les cais- 
ses des tambours qui battent le rappel. Une fabrique d'ar- 
mes située près de l'abattoir Popincourt avait été envahie 
par les insurgés, qui y avaient trouvé 1,200 fusils. La mairie 
du 8 • arrondissement était en leur pouvoir. L'insurrection 
s'avan.cait tuena.cante jusqu'à la place des Yictoires. Cepen- 
dant la garde nationale s'assemblait en petit notuhre. Pour 
rendre la confiance aux soldats, on avait résolu de con- 
fondre leur ueP.on avec celle de la garde nationale. Le ma.- 



JUIN 
réchal l.obau, commandant des gardes nationales de la Seine, 
prit la direction de toutes les luttes militaires de Paris. Le 
roi, quittant Saint-CIoud, revint rapi0ement aux Tuileries. 
Une batterie d'artillerie vint s'établir au Carrousel. Deux 
escadrons de carabiniers prirent position à la porte Saint- 
Martin, et le général Schramm, avec quatre compagnies, 
'installa à l'entrée de la rue de CIéry. A six heures du soir, 
les dragons parvinrent ì se rendre maltres de la place des 
Yictoires ; et appuyé par quelques compagnies d'infanterie, 
un détachement de garde nationale, que commandail 51. De. 
les»ert, assura le départ des courtiers. Un commissaire de 
police avait été tu, place des Victoires, au moment où il 
se préparait à faire les sommations ordonnées par la loi. 
D'un autre coté, les insurges construisant une barricade près 
du Petit-Pont de i'hOteI-Dieu, et faisant battre en retraite 
vu déacbement degarde municipale, menaçaient ouverte- 
ment la prétcture de police. 
Cependant, aucun chef n'osait prendre la direction du 
mouvement. Lafayette seul s'offrit tout entier ; mais, ma- 
lade et soulh'ant, il manquait d'initiative. Les bureaux de 
La Tribuneet de La Quot.idiene furenl envahis ; ceux du 
A'atonal étaient protégés par les barricades. On s'y rémit. 
Cartel ne jugea pas le mouvement asz avancé. Ces hé- 
sitations changèrent la face des choses. Des mandait d'a- 
mener furent iancés contre MM. Cabet, Laboissière et 
Garnier Pagës. Les gardes nationaux de la banlieue se 
r,:pandaient dans Paris. 11. Thier» faisait dire aux dei,utés 
de se reunir en toute bte. Dans la nuit, le roi parcourut 
les bivouacs de la place du Carrousel, et s'efforça ci'inspi- 
rer de la confiance aux Iorces réunies près du chateau. 
Deux barricades coupaient larue Saint-Martin, l'une  la 
hauteur de la rue Maubuée, l'autre à la hauteur de la rue 
Saint.5.Ierry et/x quelques pas de la vieille églisede ce nom. 
Savamment construite et d'une grande élevation, celle-ci 
était percee de meurtriëres. Dans l'epaee compris entre ces 
deux rempa'ts, au coin de la rue Saint-3Ierry, et en face de 
la rue Aubr]/-le Boucher, deux cents insurges s'emparèrent 
d'une maison qui devait leur servir de quartier général, de 
citadelle et d'ambulance. Dans la soirée, une colonne de 
gardes nationaux faillit s'emparer par surprise de ce poste 
important ; mais elle lut repoussée. A deux heures et demie 
du matin, un detachement de ligne ne put que traverser 
ce dilficile passage, et plus tard la garde municipale, que 
les insurges laissèrent approcher  portée de pistolet, lut 
trois fois repoussée. A quelque distancede I/, uneautre troupe 
d'insurgés gardait une barricade construite à l'entrée du 
passa.ge du Saumon. Le maréchal Lobau avait ordonné aux 
soldats de fouiller ce quartier de manière à ce qu'il fut libre 
 la pointe ,lu jour. On s'y battit longtemps; mais/ quatre 
heures du matin toute résislance était devenue impossible. 
La barricade fut enlevëe. Les insurgés qui occupaient le poste 
du .Petit-Pont s'étaient laissé surprendre dans la nuit, et 
avaient ëtë égorgés par une colonne de gardes nationaux. 
Quelques républicains réunis à la rue l,lénilmontant, après 
asoir lait le coup de feu toute la nuit, durent battre en re- 
traite/ l'approche du jour. 
Le 6 juin, l'insurredion était donc concentrée à la place 
de la Bastille,/ l'entrée du faubourg Saint-Antoine, et dans 
les rues Saint-Martin, Saint-bierry, Aubry-le-Boucber, 
l'lanche-Mibray et des Arcis. Trois colonnes, sous les or- 
dres du général Scbramm emportèrent l'entrée du lanbourg 
Saint-Antoine. biais l'église Saint-llerry tenait solidement. 
Les bataillons qui avaient le malheur de s'engouffrer dans 
la rue Saint-Martin, étaient attendus de pied ferme jusqu'h 
portée de pistolet, et des décharges nourries éclaircissant 
leurs rangs les forçaient à la retraite, l'qéanmoins, les in- 
surgés ne pouvaient plus tenir longtemps. Cernés de toutes 
parts, ils tinrent bon malgré cela, et dans leur désespoir 
iurèrent de vendre chèrement leur v/e. Un décoré de iuillet, 
nommé Jeanne, commandait ces intrépides republicains. Un 
bataillon de liçe demanda  paqser, jurant de ne point faire 
usage de ses armes; Jeanne refusa, et la troupe dut re- 

701 
brousser chemin. Quelques instants après, la garde natio- 
nale de la banlieue d,_'boucha par le bas de la rue Saint- 
llartiu; reçue par un feu roulant, elle se retira horrihlement 
décimée. « Ainsi, dit un historien de cesjournées fameuses, 
an milieu de cette cité de plus d'un million d'habitants, à 
la face du soleil, on vit soixante citoyens défier un gouver- 
nement, tenir en échec une armée, parlementer, li ter ha- 
faille. , 
L'insurrection pouvait pourtant se ranimer. Il lallait en 
finir. A midi le roi smtit du chSteau des Tuileries, ac- 
compagné des ministres de la guerre, de l'lutCieur et du 
commerce. Il passa en revue les troupes réunies sur la place 
de la Concorde et dans les Champs-Élysées; de là il se 
rendit par les boulevards jusqu'a la Bastille, et, longeant 
les quais, rentra au palais par le Louvre. Payant ainsi de 
sa personne, Louis-Philippe montra partout un isge 
calme et souriant. Il adressait aux blessés des paroles de 
consolation, et encourageait de son exemple ceux qui pou- 
vaient paraitre découragés. A trois heures le roi êtait rentré, 
et une commission de dépulés de l'opposition, formée de 
/',13[. Arago, Laffitte et Odilon Barrot, paraissait de- 
vant lui. Ils lui dirent que la victoire qu'il allait remporter 
étant légale, ne devait pas ëtre cruelle ; que le désordre ve- 
nait du systéme politique suivi jusqu'a ce jor, qu'il y au- 
rait sagesse a en changer. Louis-Philippe revendiqua juste- 
ment ce systëme, et rejeta ur l'opposition les troubles qui 
se manifestaient. Les deputés se etirbrent donc sans avoir 
fait autre chose que prèter une nouvelle force au gouver- 
nement. 
Aprës la rentrée du roi, les attaques redoublërent autour 
de Saint-lerry. Pressés avec acharnement, cernC, redui!s 
de moitie, commençant h manquer de cartoucbes, les in- 
surgés déployèrent une énergie aussi courageuse qu'inuti;e. 
On ht avancer deux piëces de canon en avant de Sab:t- 
Nicolas-des-Champs pour faire tomber la barricade du nord. 
Une autre pièce, avançant par la rue Aubr.'-ie-Boucber, 
barrit la maison du coin de la rue Saint-lerry. Enlin, vers 
quatre heures, les barricades, attaquées parlout a la fois 
avec enthousiasme par la tro,pe et par la garde nationale, 
furent decidëment chierCs. Jeanne,  la Iète de quelques 
I,ommes, perça a la baionnette une premiëre ligne de sol- 
dats, et s'éehappa par la rue laubu6e. Quelques autres 
s'enferm/.rent dans la maison qu'ils occupa-ent, et  furent 
éci,arpés après une defense courageuse. Cette victoire, trop 
cbbrement achetée, ne fut pas exempte de cruaulés; mais 
le lendemain un calme prulond régnait dans la plupart 
des quartiers de Paris. 
Les ministres tirbrent parti de ce triomphe. Un mandat 
d'arrët fit lancé contre Cartel; plusieurs journanx fitre.t 
saisis. Les attestations fi,rent nombreuses. Une ordonnance 
du préfet de police G isqu et prescrivit aux médecins de 
dénoncer les individus qu'ils soigneraient de blessures; v:ais 
cette ordonnance ne imt tenir contre la réprobation publique 
et les protestations énergiques de médecins. Devant les de- 
putës ,le l'opposition, Louis-Philippe s'etait fait honneur 
de ses pojeit de modération ; cependant, h coté de trois 
ordonnanees qui prononçaient la dissoh,tion de l'École 
Polteel,nique, de l'École véterinaire d'Alfort et de l'artil- 
lerie de la garde nationale parisienne, le Moniteur publia 
une antre ordonnance qui mettdit la capitale en etat «le siCe. 
La cour royale se déclara d'abord incompétente pour tout 
ce qui touchait aux troubles des  et 6 juin. Les conseils 
de guerre¢ommeneèrent à Ionction,er; mais sur le pourvu, 
d'un jenne peintre, nommé Geoffroy, qu',n de ces conseil..; 
avait condamné à la peine de mort, la c*ur de cassation, 
sur la plaidoirie de M. O,iilon Barrot, déeida qu'a,tx termes de 
la charte, nul ne pouvant tre distrait de ses juges naturels, 
le conseil de guerre avait commis un excès de pouvoir en 
jugeant un citoyen qui n'appartenait pas / l'afinC. Ce fut 
par conséquent devant le jury que comparurent tous le ac- 
cusés de juin. Jeanne, arrêtWpar les soins de la police, 
parut devant la cour d'assises en mme temps que vinS-et- 



un autres prévenus. Seize furent acquittés; Jeanne fut con- 
damné à la déportation. Par des jugement sepatés, d'au- 
tres accuses furent condamnés à mort; mais le roi commua 
la peine. L'Cut de siCe lut levé au bout de quelque temps ; 
des décoralions furent distribuées avec profusion, et des 
dispositions plus sévères furent prises contre les étrangers 
refugiés en France. 
Les journees de juin 1832 coùlèrent, dit-on, à l'armée, 
55 morts et 20 bles«és ; à la garde nationale, t8 morts et 
104 blessés, et dans les rangs du peuple on comptait, à 
ce qu'on assure, 93 morts et 291 blessés. Ces journées, si 
menaçanles à leur origine pour la royaulé, avaient en fin 
de compte consolid la monarchie. Elles montrèrevt que le 
parti republicain avait de valeureux champions, mais point 
de chef capable d,, leur imprimer une direction et de leur 
rallier la nation. Les souvenirs de 93 faisaient encore peur 
à bon nombre. Les idées de paix commençaient à plaire à 
la bourgeoisie, qui y entrevoyait la reprise des affaires. Le 
peuple axait trop souffert pour voir dans une crise la fin de 
ses man.t. Louis-Philippe, pour une bu,me partie de la po- 
pulation, paraissait encore l'expression sincère du progrès 
dans tordre. L. LouvE'i'. 
JUIN 1848 (Journéesdes23, 24, 25 et6). Les ateliers 
 a t i o a ux, créé» aprë» la révo|ulion de F évrier 
, pour 
souslraiie les ouvrieri aux influences des théoriciens du 
Lu.xembourg et aux mauvais conseils de la faim, avaient 
iustement eu pour rêsultat à'arrter roule reprise du travail 
prisé, par la crainte que répandait cette armée de travail- 
leurs mécoutenls dun ch61i| salaire, à peine gagné pour- 
lant, et par cela mëme de les jeler dans les bras des re- 
• olotionnaires de bas étage, qui pouvaient les faire remuer 
à leur gré. Les véritables ouvriers gémissaient d'avoir à 
s'enr61er dans ces chanliers, où l'on s'occupait beaucoup 
plus de la theorie du travail que de sa pralique ; et cepen- 
dant le besoin les amenait tous, les uns après les autres, 
a grossir les rangs de cette sorte d'armée de |'émeute. Le 
gousernement ne savait que faire pour sortir de cet em- 
iarras. Quel,lnes-uns sïmaginaient avoir là une force en 
I:aver de lordre. On avait donné une organisation hiérar- 
chique/ ces ateliers, et tout fa/sait croire qu'en certains lieux 
on pensait tenir en échec par eux aussi bien les anarchistes 
que les rcaclionnaires. Le public ne pensait pas ainsi. Le 
mini_qredes finances avait refusé tout concours à l'industrie 
particuhëreen dehorsdes eu mptoirs ha tionaux, quine 
fonclionnaienl guère qe pour solder les comptes arriérés. 
On avait bien cru voir nne ressource dans le rachat des che- 
tains de fer; mais au lieu de prendre une mesure prompte 
et decisive, on avait encore attendu que la compagnie du 
chemin de fiîr de Paris à Lon vint se livrer comme à 
merci. Au lieu de faire travailler hardiment à ce chemin 
de fer, entralner de» terrassiers loin de Paris, employer le 
plus d'ouvriers possible à la confection des Iocomotives, 
à la pose des rails, on s'amusa à faire retourner la terre du 
Champ--de-.Iars et combler les carrières de Montmartre, 
avec la pelle et la bcouclte. 
Cependant depuis que l'Assemblée nalionale était réunie, 
elle n'avait cessé de se p,'éoccuper des dangers qu'offi'ait 
cette immense agglomération d'hommes qu'on ne savait pas 
utiliser, et la dissolution des ateliers nationaux, qui comp- 
taient pins de I0,000 iudi¢idus, avait été décidée en prin- 
cipe. Pour arriver/ ce résultat, la commission du pouvoir 
exécutil adopta, à la fin de mal, relativement aux ouvriers 
«les ateliers nationaux, les résolutions suivantes : Les céll- 
balafres de dix-lmit à vingt-cinq ans devaient s'engager dans 
l'armée; ceux qui avaient moins de six mois de résidence 
a Paris au 24 mai devaient relourner dans leur pays; des 
lisles d'ouvriers, dressées par profession, devaient Cre 
mises à la disposilion des patrons, pour qu'ils pussent 
choisir les ouvriers dont ils avaient besoin : tous ceux qui 
n'accepteraient pas devaient tre ra),és, ceux qui resteraient 
dang les aleliers nationaux devaient tre occupés à la t,che ; 
enfin, es brigades d'ouvriers devaient être dirigées dans les 

UIN 
alCarlements pour ètre-employées, anus ladirecton des in- 
génieurs des ponts et chaoss6es, à l'exéution des grands 
travaux puhlics. M. Emile Thomas, qui avait été charg par 
le gouvernement provisoire d'organiser les ateliers, ayant 
refusé de hire exécuter ces dispositions, fut brusquement 
destitué ; on l'envoya mme de force à Bordeaux, et l'As- 
semb|ée nationale adopta, le 30 mai, un décret qui sanc- 
tionnait les principales di«pesitions du projet de la con- 
mission du pouvoir exécutif. Le ministre des travaux 
publics ne se pressait pas pourtant d'apldiquer ce décret. 
léanmoins, le recensement eut lieu, et amena une faible 
suppression de journées, en révélant une partie des abus 
criants qui s'y étaient introduits. 
La nomination de Louis-apoléon Bonapar{e comme re- 
présentant du peuple devint le prétexte de rassemblements 
journaliers. Efin, un crédit de trois millions demandé pour 
les ateliers nationaux précipita la crise. M. de Falloux, rap- 
porteur du décret, proposa de déclarer qu'à l'avenir les 
crédiLgne seraient plus aoeords que par un million à la fois. 
MM. Dupin, Gohdchax, Léon Faucher, V. Hugo, parlèrent 
contre les ateliers nationaux. Le dernier qualifia les hommes 
qui les composaient de pr#toriens de l'emeute. La commis- 
sion du pouvoir exécutif se dícida donc à mettre son décret 
à exécution. Des ouvriers furent volontairement engagés 
pour la Sologne. Une première colonne partit ; mais rien 
n'était préparé: I«« ouvriers furent mal reçus, dit-on, par 
les paysang. D'un autre c6lé, des neneurs poussaient à 
Paris les ouvriers à ne pas se laisser faire la loi. Le 22 
juin des ouvriers allèrent chez M. Trélat, ministre des tra- 
vanx ptîblics, et chez l,l. Marie, membre de la commis- 
sion du pouvoir exécutif, demander le rappel du décret qui 
detrfisait les ateliers nationaux. Le soir, on se donna 
rendez-vous pour le lendemain au Panlhéon, et des bandes 
innombrables parcoururent les rues de Paris en chantant en 
cadence : ]Vous resteroJs! Du pain o du plomb! De 
sinistres journées allaient suivre. 
Le 23, au matin, des attroupements se formaient. Un 
omnibus est tout à coup renversé à la porte Saint-Dents, 
des voitures de toutes sortes y sont ajoutées; en un clin 
d'oeil une barricade est rafle. La garde nationale de la 
2 * légion arrive à la h/le ; des coups de feu sont tirés. Ce 
n'est plus qu'un cri alors, et de toutes parts on voit surgir 
des barricades. D'un c6té, l'insurrection se répand dan 
les faubourgs Saint-Dents, Saint-Martin, du Temple et 
Saint-Antoine, pour aller rejoindre le faubourg Saint-Mar- 
seau ; de l'aulre, elle s'étend dans l'intbrieur de Paris, par 
la rue du Temple et la rue Saint-Antoine, pour atteindre 
l'h6tel de ville et laite jonction avec la colonne qui, des- 
cendant par la rue Saint-Jacques, le Petit-Pont et le pont 
Saint-Michel, menaçait directemeet la préfeclure de police. 
Les mairies des 8" et 9 e arrondissement sont déjà aux 
mains des insurgés. A la place des Vosges un bataillon de 
la ligne est réduit a mettre bas les armes. Les insurgés avaient 
pensé qte la garde mobile, tirée pour ainsi dire de leur 
sein, ne ferait pa feu conlre eux. La troupe de ligne, mé- 
contente de l'oubli dans lequel on l'avait tenue depuis fé- 
vrier, semblait d'abord indi]érente à ce qui se passait. Le 
peu qu'il y en avait à Paris était d'ailleurs presque tout réuni 
aux abords de l'Assemblée nationale. 
Le général Carat guac, ministre de h guerre, ne sem- 
ble d'abord prendre aucune mesure décisive. Les troupes 
manquent, on en appelle de loin; la résistance s'orgarnise 
seulement autour de l'Assemblée. Enfin le général Cavaignac 
dirige les gënéraux les plus habiles sur les trois foyers de 
l'insurrection. Le général Bedeau devait opérer sur la rive 
gauche ; le général Dameme, se ralliant ix lui par la Cité, 
défendait l'h6tel de ville ; et le général Lamoricière devait 
dégager les boulevards. A midi ce dernier arrivait, e sui- 
vant le boulevard, à la porte Saint-Dents, au moment où 
la garde nationale était décidément maitresse des barricades. 
Il avait avec lui le 11 « léger, une batterie d'artillerie, deux 
bataillons de arde mobile et un escadron de lan¢iers, k un« 



JUIN 
heure le boulevard était déblayé jusqu' l'Ambigu. Vers 
deux heures un détachement de troupes de ligne et un ba- 
taillon de la 3 e légion reprenaient la caserne du faubourg 
Saint-Martin, envahie par les ins,,rgés. La garde nationale 
mobile s'avançait alor jusqu'à l'église Saint-Laurent après 
un combat meurtrier. Vers le mme temps un combat s'en- 
gageait dans le laubonrg Poissonnière, prs de la rue Belle- 
fonds. P, epoussés de lb ainsi que du faubourg Saint-Dents, 
les insurgds se retranchent dans le clos Saint-Lazare. IIai- 
tres des barrières de Paris depuis la barrière P, ochechouart 
jusqu'à la barrière du Maine, ils conoervent leur communica- 
tion régulière par les boulevards extérieurs. Le canal, dont 
ils Iourneut les ponts, les couvre d'un autre cfté, tout en les 
lais.ant libres de communiquer avec les points de Paris en- 
core occupés par eux. Pendant que ceci se passait, la garde 
nationale mobile avait dégag#, l'hflel de la Préfecture de 
police, et la rue Planche-Mibray était débarrassée de sa bar- 
ri¢ade. Les «»mmunications étaient rétablies entre tous les 
corps de l'armée, par l'hftel de ville, oU se tenait l'Cut.major 
général. 
L'insurreclion était dès lors circonscrite, et n'avait plus 
guère d'espoir de s'avancer, car il lui fallait vaincre l'armée 
qui se trouvait en face, sans espoir de parvenir h menacer 
ses derriëres, gardés par les renforts qui arrivaient inces- 
samment du dehors et par la garde nationale, que la génë- 
raie réunissait de toutes parts. Les insurgís ne perdirent 
pure'faut pas courage, et se préparèrent aussitft  une de- 
fense héruque, l'offensive leur étant impossible. Peut-être 
comptaient-ils encore sui" quelque défection ; les armes ne 
leur manquaient pas, et en quelques endroits les gardes na- 
tionaux étaient pour eux. Mais leurs chefs étaient en prison 
depuis l'affaire du 15 mai; ceux qui restaient n'etaient pas 
de taille à fiurer à la tête d'un mouvement qui n'avait ni 
drapeau ni cri de ralliement, et qui ne semblait produit que 
par la misïre et'l'ivrese de la poudre. On entendait à peine 
crier : lïcent les ateliers nation«ux ! Vive la républiq«e 
dnocrat«que et sociale! A bas Lamartine et Marie! 
pain oic la nort ! Du pain et dzt travail dans Paris ! 
Tout se faisait plu/fit en silence. Quoi qu'il en soit, la joui'- 
née fut chaude sui" la rive gauche. Une lutte aclarnée avait 
eu lieu dès le matin au pont Saint-Michel, au Petit-Pont, 
dans le quartier de l'lcole de 5Iédccine, dans le faubourg 
Saint-Jacques, et surtout au Panthéon, défendu par 1,500 
insm'gés. Les généraux Bedeau et Dameme agissaient si- 
multanëmcnt sur la place Cambrai et le pont Saint-.,lichel. 
La forte barricade de la place Cambrai, atlaquíe sous les 
ordres de François Arago, qui venail de faire évacuer celle 
de la rue Soufflet, et occupée un moment par la lroupe, 
avait été reprise par les iusurgés. Dans la soirée, le général 
Bedeau était parvenu, aprè les cmbats les plus opiniâtres, 
h dégager les quais Saint-Michel, du Petit-Pont, et les 
abords de la rue Saint-Jacques et de la rue de La Harpe; 
mais en enlevant ces deruières positions, ce brave officier 
avait reçu une halle dans la cuisse, et s'était vu forcé de 
céder le commandement au général Duvivier. Deux repré- 
sentants du peuple, M ,t. Bixio et Dornès, avaient été blessés 
dan,ereusement, l'un dans le quartier Saint-Jacques, l'autre 
dans le faubourg Saint-Martin. 
La nuit vint interrompre la fusillade, qu'avait à peine 
fait cesser une pluie torrentielle survemte vers quatre hem'es 
de relevée. Pendant toute la nuit la tocsin sonna  Saint. 
Severin, à Saiat-Gervais et à Sainl-Étienne-du-blont. Ce- 
pendant, le géuéral Duvivier refoulait l'insurrection de tons 
les points qu'elle occupait dans le quartier de l'hftel de 
ville. Dans les rues adjacente, depuis la rue Planche-Mi- 
bray jus(In'aux rnes Bambuteau et de la Tixeranderie, 
tait un rayon de feu, qu'il parvint à éteindre avec du canon. 
Il fallait alors songer à remonter la rue Saint-Antoine. 
Saint-Gervais avait ét fortifié par les insurgé% qui avaient 
percé les murs mitoyens des maisons d'alentom" pour se 
faire une sorte de chemi, couvert, par lequel ils pouvaient 
communiquer sas danger. Toute la journée fut employée 

à faire le siCe de cette nouvelle forleresse. A mesure que 
les barricades étaient calerCs par le canon, les insurges 
disparaissaient par les passages qu'ils s'étaient secrtement 
ménagés, et  chaque poste on retrouvait les insurgés plus 
nombreux, car ils ne faisaient presque pas de pertes, gràce 
 cette stratégie nouvelle. Cependant les balles et les bou- 
lets endommageaient les façades des maisons et les devan- 
tures des boutiques. 
Le 2 au matin l'Assemblée, en permanence depuis la veille, 
avait dccrété la mise en état de siíge de la ville de Paris, et 
délégué tous les pouvoirs dans les mains du général Cavai- 
gnae. Un décret portait que la république adoptait les veuves 
et les enfants de ceux qui soccomberaient pour sa défense. 
Bientft la commission du pouvoir exCatir déposait une d- 
mission collective. La circulation était interdite dans tou te 
les rues. Des piquera de gardes nationaux faiient le guet 
à tou les carrefours. Après un combat terrible  l'hftel- 
Dieu, on put songer  s'emparer de l'église Saint-Severin, 
quartier gnéral de l'insurrection. A la suite d'une vive fu- 
sillade, les insnrgés furent délogés des maisons qui lent face 
au Petit-Pont et au pont Saint-Michel ; ils se replièrent alors 
sur la place Maubert, qui fut bientft reconquise, et enfin 
la troupe de ligne et la garde nationale arriverent au Pan- 
théon, où les insurgés étaient retranchís. Là le canon devint 
nécessaire pour faire cesser le fes intense qui partait du 
péristyle et de la plate-forme du dfme. Des boulets brisent 
les belles portes de ce monument ; l'un d'eux va enlever la 
tête de la statue de l'Immortalit qui tr0nait au fond en 
attendant qu'on la rendit en bronze pour la placer au faite 
de l'ëdifice, et le Panthéon tombe au pouvoir de la troupe. 
Dans le mme temps, Sa:nt-Severin i.tait délivré. A la pri«e 
de la barrieade de la rue de l'Estrapade, le g«»néral Damesme, 
commandant de la garde nobile.. reçut une blessure grave, 
qui nécessita l'ampntahu de la cuisse. Le général Bréa 
prit son commandement. Les insurgé, repoussís dans le 
haut de la rue Saint-Victor, et hientft debu«qubs de ce 
poste, tinrent longtemps dans le faubourg SainI-Marceau. 
On avait pris successivement les barricades de la place 
Cambrai, de la rue des Grés, de la rue des llathurin. La 
rue Saint-Jacques était Idu'e. Aprïs la prise du Panthon 
des reconnaissances fisrent poussées jusqu'à la caserne de 
la rue Moulletard, qui fut reprise  la suite d'un rixe action. 
Tandis que ceci se passait sur la rive gauche, le génëral 
Lamoricière manœuvrait pour ganer, par les quartier au 
del du boulevard, le faubourg Saint-Antoine et la Bastille, 
oi il devait faire sa jonction axec le général Duixier, qui 
commandait l'attaque de la rue Saint-Antoine. Le .néral 
Cavaiac, placé entre ces deux gén_raux, d,'barrassait le 
quartier du Temple et le ltarais, pendant que le général 
Lamoricière arrivait  la Bastille, où il se trouva en face de 
formidables barricades. Dans le faubourg Saint-Antoine, 
quelques centaines de soldats enfermes dans la caserne 
de Beuilly, avaient glorieusement refusé de rendre leurs 
armes, et après avoir soutenu nn siége en règle, ils avaient 
étë délivrds par des secours venus de Vincennes qui leur 
avaient permis d'évacuer cette position. A l'extrémité de 
l'aile droite des insurges, des barricades adosses aux bar- 
rires Rocbechouart, Poissonnière et Saint-Dents, toutes 
protégées par des corps avancés postís dans les terrains 
de l'abattoir P, ochechouart, dans le clos Saint-Lazare et 
dans l'hospice de La P«boissiëre, en construction, tinrent 
toute la journée en échec les forces du général Lebrelon. 
Les gardes nationales des départements arrivaient en masse. 
Dan« une proclamation, le président de l'assemblée, M. Se- 
nard, et le général C-avaignac adjuraient les ouvriers de 
déposer les armes, et les prémunissaient contre le bruit qui 
se répandait qu'ils n'avaient pas de gce à espérer. En 
mme temps, le général ordonnait le désarmement de tout 
garde national qi ne prenait pas parti pour la république, 
il défendait les affiches traitant de matières politiques, et i,  
déclarait que tout individu travaillant à élever une barricade 
serait coidéré comme s'il était pris les armes à la main. 



La nuit se passa tranquillement. La garde nationale 
hivouaquait à tous les coins des rues, et lon n'entendait 
d'anlre mouvement que ceint des patrouilles et d'autre 
bruit que le cri de : « Sentinelles, prenez garde à vous! » 
iui st répondait de rue en rue. Cette absence .de toute cir- 
culation, jointe à la fermeture des boutiques, donnait à la 
cité un air de stupeur, d'abandon et de désolation qui ne 
s'était jamais vu. Dans la matint'e do dimanche 25 le gé- 
néral Bréa fit desarmer toutes les maisons suspenses de la 
rue Mouffetard, et reprit poss«sion de la caserne de l'Our- 
cine. Après avoir confié la garde de la mairie du 12 • ar- 
rondissement h un bataillon de la garde mobile, il poussa 
jusqu'à la barrière Fonlainebleau. Une triste fin I'y atten- 
dait. Voulant parlementer, il se laissa entraîner au delà de 
la grille, suivi de son ai,le de camp. Là, on le garda 
comme otage, lui demandant l'ordre de mettre bas les ar- 
mes pour sa troupe. Le g_néral ne oulut pas se désho- 
noter par nn pareil acte. Deux mortelles heures se passè- 
rent en poorparlers. Quand enfin le colonel OEhomas donna 
l'ordre de marcher contre les insurgés, le général avait t,té 
massacré ainsi que son aide de camp dans le corps de garde 
de l'octroi. L'enlèvenent des barricades clevs sur ce point 
mit fin à la guerre .ociale .ur la rive gauche. Le corps du 
général et celui de son aide de camp furent ramenés et 
dt.posés au Panlfion. Sur la rive droite, le général Lebre- 
ton achevait de s'emparer du clos Saint-Lazare, ou le 
riCai Lafontaine était blessé ; les barrières Poissonnière et 
Saint-Dcniç, prises à revers et attaqnées de front, suc- 
«-ombaient enfin après une vive canonnade ; le faubourg 
du Temple était emporté. Les rues d'Angou[dme, 5ténil- 
montant, Saint-Sebastieu, offraient une vive resistance. 
Dans la mëme journée, le général Duvivier, b[e-gçé au 
pied dès le matin à l'attaque des environs de SaiJt-Ger- 
vais, avait été forcé de remettre le commandement au gé- 
néral Perrot. Celui-t,i avait continué la difiicde conquête 
de la rue Saia-Antoine, sous une fusillade incessante. 
Ch jour entier suffit à peine à ce trajet ; pourlant, dans 
la soiroee il parvint à la Ba.,tille, non sans avoir éprouvé 
des pertes sensibles. Le 4.0, - de ligne laissait sur le cl,amp 
de bataille 14 officiers, dont le colonel I'cgnault, qui ve- 
rrait dYtre éleve au rang de général de brigade. Dang l'in- 
tervalle, une attaque a lieu contre le faubourg Saint-An- 
toine, si babl[ement barrit,adC La canonnade dure long- 
temps. Plusieurs barricades accessoires sont chierCs. Ce 
succès cotte la vie au g,'néral .Nég ri e r, questeur de l'As- 
semblée. Là aussi sont blessés le lieutenant-colonel du 
génie d'Hauteville, aide de camp du général, et un autre 
représentant, St. Charbonnel. En vain le général Cavaignac 
a adressé aux Insurgés un ultimatum et leur a laissé un 
dernier délai pour se rendre, ils tiennent toujours, et le fau- 
bourg Saint-Antoine reste à conquérir. Les opérations de 
cette journée curent encore pour résultat de dlivrer les 
communes extérieures de Montmartre, La Chapelle, La 
Villette et Belleville, et de rétablir les communications di- 
rectes avec Saint-Dents. Deux tentatives de conciliation 
rent lieu dans cette journée du 25. La première avait élé 
faite par M.i. Larabit, Galy-Cazalat et Druet-Desvaux, qui 
apportaient le décret volWle matin mème par l'Asmblée et 
ouvrant un crédit de 3,000,000 pour secourir les travailleurs. 
Axrixés au faubourg Saint-Antoine, ils avaient franchi les 
barricades pour proclamer ce décret, et on les avait retenus 
prisonniers. La seconde tentative appartenait à M. A ffr e, 
archevêque de Paris, qui, autorisé par le général Cavai- 
gnac, voulut intervenir comme médiateur auprès des in- 
surgés du faubourg Saint-Antoine. Suivi de deux de ses 
rands-vicaires, M.L les abbés Jacquemet et Bavinet, le 
prélat se difigea vers une barricade. Par un malentendu à 
jamais déplorable, ou peut-ètre par un excès de zèle fatal, 
,'n ruulement de tambour se fait entendre Des deux c6tés 
un croit à une attaque, et anssit6t les armes font feu. L'ar- 
chevêque, debout sur la barricade, reçoit nne balle dans les 
r,:ins. Le prélat tombe du cOté des tsurgés, qui s'empres- 

JUIN 
sent de lui dourer des soins et de le porter chez le curé 
des Quinze-,ïngts. La blessure de ll. Affre était mortelle ; il 
succomba au bout de quarante-huit heures d'horribles souf- 
frances. Les trois représentants faits prisonniers ne fnrent 
dé[isrés que le lendemain. 
Le 26 le faubourg Saint-Antoine seul résistait encore ; la 
grande rue de ce faubourg présentait une suite de barrica- 
des très-rapprochées, et presque toutes étaient ì l'epreuve 
du canon, les unes étant en talus, les autres formant un 
angle rentrant. Les rues transs ersales étaient également bar- 
ricadées. Sur la barricade qui faisait face à la place de la 
Bastille flottait le drapeau rouge. D le matin quatre dé- 
Iêgnés, introduits par M. Larabit, s'étaient présentés au 
président de l'Assemblée nationale; ils disaient avoir 
égarés, et demandaient amnistie, mais on répondit qu'il fal- 
lait se soumettre d'abord. La lutte recommença donc ì dix 
heures après un dernier delai accordé. Une batterie d'artil- 
lerie avait t-tWélevée pendant la nuit sur la place de la Bas- 
tille. Cette batterie enlilait la rue du Faubourg-Saint-Antoine. 
Quelques obus ne lardèrent pas à incendier les premières 
maisons. L'ne mine creusée assez loin menaçait d'en faire 
.auler un certai nombre. En mëme temps, le général La- 
moricièrc, qui travaillait depuis longtemps à tourner la po- 
sition, canonnait le quartier Popincourt et descendait pour 
prendre le faubourg en liane. Les insurgés, éclaires sur les 
s,ites invitables de cette manœuvre, désespérant enfin de 
re«'evoir du secours, se rendirent sans condition, et les 
troupes purent occuper le quartier. 
Ainsi se termina cette lutte terrible, qui avait armé la 
m«itié de la population parisienne contre l'autre. Le pou- 
voir fit fermer les clubs reconnus dangereux; un certain 
nombre de journaux avancés furent suspendus. Un dècret 
insfilua une commis«ion d'enquéte pour rechercher les cau- 
ses de l'insurrection en élendant ses investigations sur l'at- 
tenlat du 15 mai. Enfin, il fut décidé que lout individu pris 
les armes h la main se.rail immédiatement l.ransporté dans 
nne de nos possessions d'outre-mer autre que l'AIgérie. Le 
mème jour, 26 juin, le général Cavaignac écrivit à l'As- 
sembh.e pour la prévenir qu'il ne tarderait l,as , lui remettre 
les pouvoirs qu'elle lui avait confiés, et en effet le 28 il 
dcposait verbalement sa démission à la tribune; l'Assemblee 
lui vota alors des remercimenls ainsi qu'/ la garde natio- 
nale, à l'afinC, h la garde nationale mobile, et décréta que 
le pouvoir exécutif serait exercé provisoirement par le gé- 
néral, avec le titre de président do conseil des mini.tres, 
chef du pouvoir exécutif. Elle lui confiait en même temps 
le hbre choix de ses collègues. 
31algré les proclamations du général, la victoire avait 
co0té trop cher pour rester pure de tout excès. Beaucoup 
de prisonniers furent massacrés sans pitié sur plusieurs 
points. On en avait entassé un grand nombre dans des ca- 
veaux aux Tuileries, à l'h6tel de ville, à l'Ëcole Mililaire, etc., 
oi ils curent à souffrir mille tortures. Enfin, on les évacza 
snr le forts. Des commissions militaires furent chargée. 
d'examiner les dossiers et de classer les inculpé.s, selon les 
preseiptions di décret, en trois catégories : ceux qui, 
implement égarés, pouvaient ëtre rendus à leurs affaires ; 
ceux qui, a)ant été pris les armes à la main, devaient ëtre 
soumis au régime de la transportation ; ceux enfin qui, re- 
pris de justice ou a)ant exercé un commandement dans 
l'insurrection, devaient passer devant les conseils de guerre. 
Plus de 1,000 personnes avaient été arrètées. Quelqnes 
milliers d'hommes furent soumis à la transportation, sans 
jugement ni interrogatoire, sur le simple examen des com- 
missions militaires; mais comme le lieu de déportation 
tait pas fixé, on les retint sur des pontons ou à Belle-tic 
en mer. Des gTCeS partielles finirent par réduire le nombre 
de ces malhenrenx à quelques centaines. Pr de 200 
cusés furent renvoyés devant les conseils de guerre, qui se 
signalèrent par la fréquente application de la peine des tra 
vaux fore.és, qu'on n'était pas habitné à voir infliger aux 
coadamnés politiques. Pour déconsidérer ces 



UIN 
en affecta rame de les accoupler à des criminels ordinaires. 
Les prévenus de Passassiuat du général Bréa lutent plus 
tard coudamués à mor, et trois furent exCutC. 
Les g«:.néraux Duvivier, Daraesme, de Bomgon, Fran- 
«ois succombèrent à leurs blessures, ainsi que les repré- 
sentantsDornès et Cl|arbonnei. Jamaisjournées insurrection- 
aelles ni grandes batailles rangCs n'avaient enlevé tant 
d'officiers supérieurs. Le deuil était dans tous les coeurs. 
On évaluait le nombre des insurgés morts/ a,000. La garde 
mobile seule avait eu prèsde 800 hommeshorsde combat. 
La troupe de ligne et la garde nationale pouvaientencoml» 
ter autant. Des oittres de morts arrivaient incessamment 
ux cimetières, où les cadavres s'inl,umaient sans cérémonie 
Ch s'amoncelant. Plus de 2,000,000 de oertouches avaient 
été distribuées à la troupe et aux gardes nationaux ; 3,OOO 
coups de canon avaient été tirés : aussi la ville peCen- 
tait-elle après ces journées un aspect désdé. Des pars de 
nur avaient été enlevés en plusieurs endroits ; des devan- 
tmês de boutiques étaient crihlees de halles, l'incendie avait 
fait des ravages en plusieurs points. Longtemps encore les 
IrooEpes bivouaquèrent dans les rues, où les pieds foulaient 
des hases de sang. 
Après la victoire, une sorte de réaction s'empara des 
esprits. Les ateliers nationaux dissous iurent remplacés 
par des secours à domicile. Les journaux démocratiques 
et bonapartistes furent suspendns, et bientét une loi relu- 
blit le cautionnement pour les écrits périodiqnes. Les s ¢ 
et ta c légions de la garde nationale de Paris et un gr11,I 
nombre de sections de la banlieue lutent désarmees; les 
armes furent relieCs à tous les citoyens qui ne faisaient pas 
un service actif. Uni loi fut présentée à l'Assemblée netio- 
unie contre les clubs. L'état de siAge se prolongea jusqu'aux 
ëlections de septembre. I1. Êmile de C, irardin tut arrèté et 
tenu quelques jours au secret. Le ministre anglais il Paris 
tint h honneur de disculper son gouvernement d'avoir trempë 
dans l'insurrection. L'enquête or, lonnee se termina par un 
rapport en forme de réquisitoire contre les liommes qui 
s'Calent chargés de diriger la révolution de Février. L'as. 
semblée fut amenèe ainsi à sacrifier encore quelques-uns 
de ses membres. Et pourtant personne n'a le mot de ce 
sanglant soul6vement. Les partis les plus opposés sans 
doute s'y étaient jetés avec empressement et  asaient fourni 
leur contingent, les ateliers nationaux y étaient entrés pour 
ne part avec leur organisation régulière; mais la misère 
' était pour beaucoup aussi. Qu'on se souvienne de i'acliar- 
taement des femmes, amenCs sur les barricades par leurs 
raaris avec leurs enfants, et l'on comprendra tout ce que 
ces familles alColCs asaient dù souffrir par suite d'un 
long ch6mage. L'ouvrier pouvait penser que la eliute des 
barricades lui enleverait le droit au travdil, qui était ecrit, 
à la vérité, dans le projet de constitution, mais que sa 
victoire seule lui semblait devoir consacrer. L'Assemblée 
et le gouvernement exigeaient toujours tne soumission 
sans condition. Qui sait pourtant ce qu'anrait produit quel- 
quegénéreuse mesure. Sauf le crédit de trois millions, offert 
omme un secours temporaire, aucun grand travail ne fut 
dëcrétë ! iéanmoins, la victoire de juin eut pour 
de rendre quelque confiance aux capitaux. L'industrie pri- 
• ée put enfin songer à créer quelques affaires. Les ques- 
tions sociales durent s'effacer pour l'instant, la société put 
se croire rassise; le gouvernement victorieux put se croire 
solide. L'élection du président le renversa peu de temps après. 
lar une répression violente, il s'était rendu antipathique aux 
raasses; il Cait encore trop r6volutionnaire pour la réaction. 
L. LOUVET. 
• 1' 189 (Journée du 13 ). L'aggression dirigée Contre 
la république romaine, au mépris de la volonté souveraine 
de l'Assemblée constituante, impliquait aux Teux d'une 
iartie de i'Assemblée nationale et da pa's la violation des 
articles 6 et 5 de la constitution..4, la séance du lundi 
11 juin 18,t9, M. Ledru-Roilin déclara que la Consti- 
tain serait d3fendi!e par tous les moyens possibles, mme 
VlCT. W ^ eo.xvr.r, . -- r. xL 

par les armes, et posa sur le bureau du président de l'As- 
semblée un aele d'accusation coutre le président de la 
république et les ministres. Mais cette iroposition fut re- 
poussée le lendemain à lamajorilé de 377 voix contre S, l'ex- 
trême gauclie s'étant abstenue de voter. 
Le 13 juin, au matin, les organes de la presse socialis.ê 
contenaient une proclamation signée par tao membres de la 
gaucl,e, dans laquelle la majorité était mise !tors la loi e 
dénoneée comme déchue de son mandat, pour s'Otre rendue 
complice de la violation de la constitution par son sole de 
la veille. De onze heures à midi un immense rassemble- 
ruent de 0,000 personnes au moins, parmi lesquelles on 
remarquait un assez grand nombre de gardes nationaux, se 
sur le boulevard Saint-Martin aux environs du Ch,- 
teau-d'Eau. Le rassemblement ne tarda pas b. s'organiser 
en tme colonne compacte, et se mit en marc!te vers la 3la- 
deleine aux cris de l'ie la constitution ! Arrivée à la !tan- 
teur de la rue de la Paix, vers une lieure, cette colonne 
fut cottpée par une charge de dragons, de gendarmes d'C 
lire et de cliassenrs à pied commandée par le SertCai C li a n - 
garn i e r en personne. La foule, repoussée du boulevard, se 
repandit dans les rues voisines en criant : Au armes ! Mais 
tout aassitét l'infanterie, se précipitant au pas de course pour 
emp¢clier les fuyards de se reformer, s'empara de toute la 
ligne des boulevards. De forts piquels étaient places aux 
angles de chaque rue, 13out empècher la construction de» 
barricades. Quelques pierres sont jetCs sur la troupe. On 
essa)e de faire des barricades avec des voitures, des chaises, 
des puyC; mais la rapidtté des mouvements de la troupe 
n'en laisse pas le temps. Dispersée sur les boulevards, la 
foule se jette dans les rues en criant : ïve la constitution : 
Aux armes ! La troupe s'arréte h la porte Saint-D,.nis. Des 
isolës sont désarmés. Quelques coups de 
feu sont tirés sans resultat de la petite rue Notre-Dame de 
Bonne-Nouvelle sur Vétat-major du général. 
Pendant ce temps-la, les représentanls de la 3lontsgne 
s'étaient assemblés rue du llasard-Riclielieu, au lieu or- 
dinaire de leur réunion ; l'artillerie de la garde nationale se 
trouvait dans le jardin du Palais-National. M. Ledru-Rollin 
et qtlelques autres représentants la passa en revue. On ap- 
prend que la colonne du boulevard est digpersée. On part 
our le Conservatoire des Arts et Mvtiers. Trois cents artil- 
leurs seulement suivent leur colonel, .M. Guinard. On se met 
en marche, aux cris de fïvc la republique romaine! lï'e 
la constitution! Vive la «Iontagnel Plusieurs rcpresen- 
tanls, blM. Ledru-Rollin, Boichot, Rallier, etc., marchent 
en truie; quelques individus se joignent à la colonne; mais 
aucun élan ne se manifeste dans la population. 
Le Conservatoire était gardé par un poste de quinze 
hommes, qui refusent de livrer leurs cartouclies, et se reti- 
rent dans une cour mlCleure, sans rendre leurs armes. 
5I. Ledrn-Rollin invite 5I. ,Po u i I le t, directeur de l'établisse- 
ment et .son collègue à l'Assemblée, à mettre h sa disposition 
une des salles du Conservatoire. Là on se forme en com- 
mission, on délibère; d'autres organisent tin sersice de 
sentinelles à l'intërieur et à i'extérieur. Trois barricades sont 
commencées, une quatrième s'élève dans la rue Saint- 
r, lartin. 
On comptait sur un soulèvement de la 6« légion, com- 
mandée par le colonel Forestier. Un représentant, l. Stt- 
cfiet (du Var), va avec un trompette artilleur le demander 
à la mairie; ils sont arrgtés. Un autre représentant clierchant, 
rue Saint-Dents, à entralner un poste de garde nationale, 
est également artAlC A trois heures nne proclamation est 
lancée : elle i,ode : ,, Au peuple, à la garde nationale, à 
l'arraée ! La constitution est violée ; le peuple se lève pour 
la dëfendre. La llontagne est en permanence. Aux armes! 
aux armes ! Vive la républiquel Vive la constitution  Au 
Conservatoire des Arts et Métiers, le 13 juin, à deux heures. 
Les représentants de la Montagne. » (Suivent les sigttalures, 
des absents comme des présents.).Cette proclamation ne peut 
pas mme Cre affichée; on en distribue à peine queiquel 



exemplaires. Cependant, une compagnie de la 6  I/,gion 
mrche sur la barricade de la rue Saint-.Martin, déboucnnt 
par te passage du Cheval-Roug. Les artitleurs qui doivent 
la dt.rendre lèvent la crosse en t'air; les gardes natio- 
naux les invitent à démolir leur barricade. Des coups de fusil 
partent; les artilleurs se replient sur la grille du Conserva- 
toire. Des coups de feu s'«.chaugent. Le bruit de ces décharges 
amènedu boulevard quatre compagniesdeligne. Alors les ar- 
ti||eurs seprécipitent dans le Cnervatoire, dont ils veulent 
refermer la grille; mais une compagnie y penèlre avec eux. 
La dt'route est complète, les insurges s'échappent par toutes 
les issues; à l'arrisée de la troupe dans la salle des Filatures, 
représentants et artilleurs se jettent dans le jardin par les 
tenëtre», par les toits. M. Ledru-Bollin ga,,ne le jardin par 
un vasislas. Quelques fuyards parsiennent dans la rue Vau- 
canson ; d'autres s'écl«appent par une porte donnant sur le 
marché SainI-Martin. Un petit nombre de barricades elevees 
dans les quartiers voisins sont ensuite enlevées sans tests- 
tance bien sériese; neanmoins, on compte quelques vic- 
times. La ville est occupée militairement. 
D'un autre c6te, I'.,ssemhlee tegi[atbe s'niait réunie. Sur 
la demande de M. Odilon Barrol, elle se declare en perma- 
nence; en même temps M. Dulaure demande l'e|a| de singe. 
Malgré les efforts de M. Lagrange, une commission présente, 
 cinq heures et demie, par lorgane de M. Gustave de 
Beaumont, un rapport concluant a fadoption. La mise en 
6tut de siCe est donc votee par 39 voix conlre 82. Le 
lendemain 14, la permanence durait encore. De nombreuses 
attestations avaient été faites. Des demandes en autorisation 
de poursuites forent présentees par M. Dutaure, et accordëes 
sans opposition contre les rep«-ésentauts compromis dans 
cette échauffouree, dont le deno,meot fut l'oeuvre de la 
h a n t e c o u r de X,'ersai|les. 
JUIVE (Littératnre ). L'originede lalitteraturejuiveest 
contemporaine de la transitionde Fbéhratsme au  u d ai s m e. 
Avec des racines hébrmques (voyez H£nïQces ILangue 
et litldratme]), ci employant le plus generalement la langue 
hébtqne pour instrument, elle adopta d'abord q«elque.- 
unes des idées rehenses des Perses, puis emprunts aux 
Grecs leur sagesse, aux Bomains leurs notions juridiques, 
de mème que plos tard attx Arabes leur poesie et leur phi- 
tosophie et  l'Europe ses sciences; mais elle «lut toujours 
ubordonner oes divers élëments aux croyances nationales. 
Constamment active depuis cette epoque, la litteratnre 
juive, qu'un appelle aussi, mais à tort, lireCature rabbi- 
nque, n'a pas laissé que de contribuer au développement 
de fesprit humain, bien que jamais elle n'ait etWPobjet 
d'encouragemenls exterieurs ; et dans les tresors, encore 
assïz mal appréciés, que cette acti ite est parvenue  amas- 
ser, se trouenl enroules tes ricbessesdetous les siëcles et 
une foule de productions de la nature la plus diverse. 
La sagesse nationale et étrangëre y est en voie de déve- 
I.,ppement continu; et on peut la partager en neuf périodes 
bien distinctes. 
La première période va jusqu'à l'an 163 av. J--C. Pré- 
parbe par Esdras, l'intelligence de la nation juive se rat- 
tacha de plus en plu fortement au contenu du P e n t a- 
t eu q u e ci des Prophètes. On composa diverses exposilions 
et complímenl» de l'histoire ancienne (rnidrasehim), 
ainsi que des tradnetios du grec; et on éerivit plusieurs 
des livres designés sous le nom d'Hagographes, qoe!ques 
.esaume, les Proverbes de Salomon, le K o h e | e t h, les livres 
de la Chronique, certaines parties d'Esdras et de Nëhémie, 
dEsther et de Daniel. Les productions de la grande S y n a- 
gogue appartiennent également  cette époque, vers la 
tin de laquelle ( 190 à 170 av. J.-C. ) quelques é¢rivains se 
produisirent aussi aveclenr personualité indépendante, par 
exemple Sirach et Aristobnle. Les docteurs étaientalors 
appelës so[erm, on sages; et l'araméen avait fini par de- 
venir le diaiecte populaire de la Palestine. 
La seconde përiode s'étend de l'an t43 av. J.-C. à l'en 
Il5 de notre ëre. Le midrasch on étude approfondie de 

JUIVE 
l'Ecriture Sainte fut divls6 en halacha et hagada : l'une 
comprenant l'application de la loi  des résnltts pratiques • 
l'autre l'ensemble des notions relieuses et historiques. 
Toutes deux, exposées et traitées à l'origine par des ges, 
créèrent insensiblement des monuments Cries. Ce dévelop- 
pement fut favorisêpar les explications publiques des Êcri- 
tures dans les écoles et les synagogues, par Iïndépcndance 
du sanhédrin, par la lutte des diff.rentes sertes et par les 
influence« de l'Acoin d'Alexandrin. C'est de celle époque 
que daent diverses traductions grecques et les plus 
ciennes tradnctions araméennes de l'Ecriture (voyez Ttr- 
cc ), tous les a poc ryphes bibliques, et les premiers Acries 
chrétiens. On composa aussi des prières, des expo«itions 
de la foi, des canliques et des recueils de proverbes. On re- 
marque alors le poëte (et non le prophète)Ezéchiel, 
l'auteur du premier livre des Machabées, Jason, J o s è p h e 
P h i I o n, Joanne et comme fondateors de la doctrine orale 
de la loi, H i ! I e I, Scbamai, Jochanan-ben-Saccai, les deux 
Gamaliel, Eliézer-ben-Hyrcan, Jo««a-ben-Chananja, lsmael 
et le célèbre Akiba. Le mot rabbi, qui signifie disciple 
de la sa'_'esse, devint alors le nom honorifique «les hommes 
vergés dang la connaissance de la loi. Indépendamment des 
médailles des Macbabées, on a conservë aussi de cette 
époque un certain nomhre dïnscriptions grecques et latines 
provenant de Joif. 
La troisiéme période se compose de l'intervalle compris 
entre tes années 135 et -175 de notre ère. L'enseignement 
de t'halacha et de |'hagada devint alor la grande préoc- 
cupation, notamment dans le école« qui,  partir de Hillel. 
fleurirent en Galilëe, en Syrie, à Rome, et depuis l'année 
219 en Babylonie ; les hommes les plus éminents furent 
ceux qui fondèrent la lischna et le Talmud par des 
leçous, deg collections et des déciqions de droit. Il faut 
considérer comme le dernier qui fasse autorité à cet égard 
Mar-ben-Asche (mort le 25 septembre 675) Plus tard on 
compoqa des commentaires et des complément de Sirach, 
des dissertations morales, des récits, des fables et des ou- 
vrages higtociqnes ; on accrue le nombre des prières, on 
acheva le Targum pour le Pentateuque et les Prophètes, et 
en l'an 310 Hil|el fixa le calendrier. 11 ne manqua pas non 
plus d'essais et d'efforts masoréthiqnes dans le domaine .de 
la médecine et de l'astronomie. La plupart des docteurs 
de la Pale«tine comprenaient le grec ; et la plus ande partie 
des livres apocryphes étaient connus des Juifs. Aprës la 
ruine des acad6mies de la Pa,estine, la Pere et surtout 
les écoles de Sura, de Pumbeditha et de lehardea, devin- 
rent les and« centres de la doctrine et de la science 
i«ives. Les jours de sabbat et les jours de fêle, on pronon- 
çait dan« les écoles ou le» chapelles des expositions instruc- 
tive édifiantes. Les docteurs de la loi étaient appelés 
haïra; ceux qui en exposaient les bases, sages, et ceux qui 
l'interprétaient, emora[m. On n'a conervé qu'un polit 
nombre de fragment de la littratnre des Gréco-Juifs de 
cette époque, par exemple d' Aquila et de Symmaqae. 
Avec cette époque se terminent les temps antiques de la 
tradition immédiate. 
La quatrième période va de l'an 75 h l'an "}60. Il 
avait déj/ longtemps alors que les Juits ne parlaient plus 11C 
brou el qu'ils se servaient de la languo de chacun des 
pays où ils se trouvaient. Le Talmud bahylonien fut ter- 
miné. Il ne s'est conserv qu'un très-petit nombre des ou- 
vrages compoés par les médecins juifs du septième siècle 
et par les premiers 9donim on chefs de l'Coin de Babylone 
(à partir de l'an 589). En revanche, la Masora se forma en 
Palestine (Tibériade), du sixième au huitième siècle; on in, 
troduisit divers accents et plusieurs voyelles. On ajouta 
divers livre de la Bible le targm de Palestiue ou de $é- 
rusalem, etc. ; outre les collections d'anciennes hagadas, 
par exemple Bereschith rabba, on composa aussi diverses 
explications indépen4antes, par exemple les Pesikta, les 
chapitres d'Ëliézer (vers l'an 700), etc. 
Dans la cinquiéme période (7O-lOiO)» les Arabes, en 



JUIVE 
sassimilant les ouvrages scientifiques de rlnde, de la Perse 
et de la Grèce, veiltèrent l'mulation des juif« d'Orient, 
larmilesquels se produisirent des médecins, des astronomes, 
des grammairiens, des commentateurs de l'Écriture, et des 
chroniqueurs. On composa aussi des haçadas religieuses et 
historiques, des ouvrages de morale et d commentaires 
du Talmud. Les plus anciens commentaires talmudiques 
sont contemporain« d'Anan (vers 750), le premier êcrivain 
qu'aient eu les caraïtes. Le plus ancien iormulaire de 
l)rières date de 880, et le premier dictionnaire talmudique 
de l'an 900 environ. Les plus célèbres çéonim de l'epoque 
l)ostérieure furent Saadia ( mort en 941 ), Scherira (mort 
en 998) et son fils Hai (mort en t03S). L'achèvement de 
la Masora etdu système de voyelles provint de la Pale«tine; 
on y composa les premiers midrashim, les tarçm hagio- 
graphiques et les premiers ouvrages de cosmogonie rbC- 
logique (cabale). Du neuvième au onzième siècle il y eut 
au Kaire et à Fez de célèbres docteur« et écrivain«. Il y eut 
aussi en Italie de savants rabbins à partir du huitième siècle ; 
Bari et Otrante étaient alors les grands centres de l'éru- 
dition juive. Salmon, Jeschua, vers 940, Jefet, vers 953, 
furent de célèbres docteur« carrare«. Après la ruine des aca- 
alCies de la Babylonie, ce fut l'Espagne qui devint le 
principal foyer de la littérature juive; l'Espagne, qui dès« le 
dixième siècle produisit des écrivains juif«, par exemple 
It[enachem-ben-Serek, lexieoaphe, Ha««an, astronome, 
enfin Chardaï, médecin et investigateur. Au dixième siècle, 
la science juive passa d'Italie à Mayence, en Lorraine et en 
lrance. C'est également de cette époque que datent les plus 
anciens manuscrit« hébraïques que l'on possède, et qui re- 
montent jusqu'au neuvième siècle, comme aussi la rime 
(huitième siècle) et la nouvelle presodie des vers hébrai- 
ques (dixième siècle ). 
La soeième pdrode ( 100-1201 ) est la plus brillante ép- 
que du moyen "ge juif. Indépendamment de la liftCature 
nationale, les juif« espagnols s'occupèrent de theologie, de 
mathématiques, de philosophie» de rhetorique et de médecine. 
On composa des sermon«, des )uvrages de morale et d'his- 
toire. On écrivit en arabe, en langue rabbinique, en hebreu, 
et la plupart des jurisconsulte« excellèrent aussi en d'autres 
genre«. ous nous bornerons à citer ici Samuel Halëvi 
( mort en 055) et Isaac Alfafi ( mort en 1103 ), docteur« de 
la loi ; le voyageu r Il e n j a m i n de Tudèle (   0), les potes 
Salomon Gabirol (1150) et Moses-ben-Era ( ! t20), les sa- 
vants et poêtes distingués Jebuda Halévi (mort en 1142) et 
Aben-Era (mort en 1168), et enfin le célèbre llai- 
m o n i d e s, dont la mort termine cette periode. L'acti vité 
des rabbins français fut plus nationale, et se restreignit 
en général dans les limites de l'halacha et de rhagadç. 
Au onzième siècle, Gerschom (1030) et son frère Macl,ir, 
qui est également auteur d'un dictionnaire talmudique, écri- 
virent des commentaires talmudiques et biblique« ; il en fut 
de mdme de Siméon-ben-Iac, de Josepb-tub-Elem, de 
Jel,uda Hacol,en, et du célèbre Salomon-ben-Isaac, sur- 
nommé 1 a s c b i. Au douzième siècle, indépendamment des 
commentaires« sur la Bible de Samuel-ben-Méir, de Meua 
,chem-ben-Salomon et de Mose de Pontoise, parurent 
d'imporlantes additions au Tahnud  Tosafot) par lsaac-ben- 
Asher, Jacob-ben-Mëir, dit Tare, Isaac-ben-Samuel et Sam- 
son-ben-Abraham. En Provence, pays qui rëunissait les ca- 
ractères littéraires de PE«pagne et de la France, oU existaient 
des écoles à Lunel, .Narbonne et [Ntmes, on rencontre des 
{almudistes, tels que Sérachja Halévi, Abraham-ben-David, 
Abraham-ben-lathan ; des hagadistes, tels que 1Moise Had- 
darsnan (  066 ); de grammairiens, comme Joseph et Moise 
Ki m c h i ; des traducteurs, comme Juda Tibbon ; des com- 
mentateurs, etc., etc. En AIlemagne, notamment ì Maence 
et à lati.bonne, dominait à la mème époque une grande 
érudition talmudique; alors brillèrent surtout SireCn, rau- 
leur du IlAzt, Joseph Kara, critique hiblique, Eliezer- 
hen-.Nathan et 13aruch-ben-lsaac, ainsi que Samuel le Pieux, 
«omme potcs relieux, et Petacbia ( IlS7 ] comme a,,teur 

707 
de description« de voyages. Les plus célëbres rabbin« italiens 
furent lathan-ben-Jehiel (mer'. en 1106), et Hillel-be.- 
Éljakim. On ne cite que peu de noms appartenant " la Grëce 
et à rAsie; cependant les caraites eurent un excellent écri- 
vain en Juda l-ladassi (filS). La plus grande partie des 
priëres pour les fétes avaient été achevées avant la vene 
de Maimonides. On a perdu d'ailleurs un grand nombre 
d'ouvrages importants composé« à répoque comprise entre 
l'année 71 et la lin de la sixième période. 
Dans la se_tème]ériode ( t201-I192 ), on remarque l'ac- 
tivité provoquée par les ouvrages de Maimonides et de son 
siècle, tant dans le domaine de la philosophie thëologique 
et critique que dans les travaux relatif« à la loi nationale. 
Avec des doctrine« religieuse« mystiques se produisirent en 
méme temps des querelles de doctrine« entre les talmudistes» 
les philosophe« et les cabalistes. Les hommes les plus re- 
marquable« se trouvaient alors en Espagne ; plus tard ce 
fut en Portugal, en Provence et en Italie. A l'Espagne ap- 
partinrent, dans le treizième siècle, le« poëtes Jélmda C h a- 
rizi, Abraham Halévi et Isaac Sabola; les traducteur« 
Samuel, .Moïse et Jacob Tibbun ; les astronomes et pbiloso- 
phes Isaac Latter, Juda Coben et Isaac-aben-Sid, l'auteur 
des tables alphon.ines; les docteurs de la loi M,'ir Ha- 
Iéi, Moïse-ben-'achman ou Nachmanides, et Salomon Ad- 
dereth : le naturaliste Gcrsbom-ben-Salomon ; les cabali»tes 
Todres-ben-Joseph, Joseph Gecatilia, Abraham Abelafia et 
Moise de Léon ; les moraliste« et tbeologiens Joua Gerundi, 
Schemtob Palquera et Bechai ; au quatorzième siècle, les 
astronomes Isaac lsraéli et Iaac AIchadev ; les pl,ilosophes 
Levi-ben-Gerson, Joseph Vakar et Moïse "¢idal; les doc- 
teur« de la loi Jomtob, .'Ni«sire, ¥idal, Isaac-ben-Schetso 
chetb ; le theologien Chasdai Krekas, Josua Schoaih, Schem-- 
rob Sprot, David Abudarbam, Joseph Ca«pi et David Cohen. 
Au quinzième siècle un mouvement de d,-cadence devint 
visible. On doit cependant encore mentionnerpendant cette 
époque Joseph Albo, Scbantob-ben-Jo.eph et Isaac Abnab, 
dc mdme qu'en Port,,gal Abraham Catalan. Des livres hé- 
braique« furent pour la première fois i,nprimés à Ixar en 
Aragon ( 1 85), h Zamora ( 1187 ), et à Lisbonnc ( 14.9 ). En 
Provence, Joseph Hasobi, Jedaja-ben-13onet, Calon)rnos et 
Mose-ben-Abral,am se firent une grande réputation et, mme 
poëtes et philosopl,es; David Kimchi et Profiat Duran, 
Ephodoeus, comme grammairiens ; .Menachem-ben-Salomo, 
Daxi«l Kimchi, Jérucbam, Iaac de Luttes, Abraham Fa- 
ri«sol, _Meir-ben-Siméon et Isaac lathan (1437). l'auteur 
des Concordance« I,ebraïques, comme docteurs de la loi et 
commentateurs. En Italie, les savants juifs s'occ«pèrent de 
traduction« d'ouvrages arabe« et latins ; c'est la que parurent 
les premiers ouvrages esthetiques proprement dils, par exem- 
ple ceux d'Emman,el-ben-Salomon, l'auteur des premiers 
sonnet«qui aient Cecomposé« en langue hébraïque, de31oïse 
de Bieti, de Messir Leon, etc. Il y eut aussi des docteurs 
de la loi, comme .Iésaia de Trahi et .Ioseph K,lon ; des phi- 
Iosophes, comme Hiilel-ben-Samuel, Juda-ben-Moses et 
Jochanan AIman; des cabalistes, comme Menachem Reca- 
"ate; des astronomes, comme Emanuel-ben-.Iacob; des 
grammairiens, comme .Ioseph Sark et Salomon Urhino ; et à 
Padoue, Eia del Medigo, de Candie (mort en 1-93 ), fit des 
cours publioe de philosophie. A partir de 1175 on imprima 
aussi en Italie des livres en langue hébraique. Tandis qu'on 
ne conualt de France à cette époque qu'un petit nombre 
dedocteurs de la loi, comme l'auteur du recueil des Tasafo» 
Moïse de Coucy, et Jecl,iel-ben-Joseph, ou bien de critiqces 
et de poêtes, comme 13erachia, l'Alleraagne produisit un grand 
nombre de conmentateurs de la loi, tels que Eliezer Halévi 
(12-i0), 51eir de Rotbenburg (1280), Mordechaf, Ashex, 
qui plus tard habita Tolëde, et son tils .}acob { 1339 ), et 
Isserlin (1150); en outre, le cabaliste Elazar de Worms, 
le théologien Menacbem Kara, et l'apologiste Lippmann de 
Mulhansen. En Grèce Mordechai Comtino (1470) se distingua 
comme astronome et commentateur; en Paletiae, Tanchum- 
heu-Joseph, vers 1260 par son Dictionnaire talmudique, et 
bg. 



708 
.Iacob Sikeli; en Afrique, Ahraham, fils de llaimonides, 
3uda Corsant et Siméon Duran ; et parmi les Caraites, Aaron- 
heu-Joseph (129), Aaron-ben-Élia {1366), et Élia Bes- 
chitzi ( mort en 1490 ). Le plus grand nombre des manuscrits 
hébreux qu'on possède datent de cette époque; mais une 
grande partie de la littérature |uive du moyen ge n'a point 
«ncore été imprimée ]usqu' ce jour, et se trouve enfouie 
 Rome, à Florence,/ Parme, à Turin, à Paris,  Oxlord, 
 Leyde, à Vienne et ì l',lunich. 
La huitième pdriode (1692-1725) est caractérisée par la 
dispersion des juifs expulses des conteCs occidentales et 
méridionales de l'Europe, ainsi que par la propagation des 
ouvrages de l'esprit, rendue IdUS facile par l'imprimerie, et 
dont le résultat fut de changer le tlld'Mre et le caractère de 
la liftCature juive. Tandis que la science des juifs espa- 
gllO]S i»lluait sur POrtent et sur l'essor pris en ltalie par les 
connaissances classiques, ailleurs le mysticisme, nourri pas 
la persécution, assombrissait les esprits, et les juifs polonais 
s'adonnaient  une minutieuse étude du Talmud, qui énervait 
sans proli leurs facultés iutellectuelles. De là cette masse de 
productions médiocres dont s'accrul-ent au dix-septième siècle 
la critique bibliq,e, la cabale et la dialectique talmudiqne, 
tandis qle la poésie, la grammaire et la science succoln- 
halent presque complétemeut. On s'occupa davantage «le 
l'interprétation homilëtique, de jurisprodénce pratique et 
d'enseignement populaire. En ltalie et en Orient (1492), en 
Allemagne et en Pologne (1550), de mme que plus tard en 
Hollande (16:0), il se fonda des école. et des imprimeries 
juives, par exemple  Smyrne, à Venise, à Livourne, à 
Amsterdam, ì Prague et à Cracovie; comme aussi il se pro- 
duisit alors un grand nombre d'auleurs qui écrivirent en 
hébreu, en rabbinique, eu latin, en espagnol, en portugais, 
en italien, en judaco-allemand, et parmi lesquels plusieurs 
firent preuve de grands talents et d'one vaste 6rudition. ffOlS 
devons nous borner ì mentionner ici: 1 ° de 149' "fi 150, 
le tlléologien et philosopl,e IsaacAbra banel et son fils 
éhuda, les philosophes lbraham Bibago et Saul Cohen, le 
mathématicien et commentateur Elia Misrachi, le tl,éologien 
et commentateur isaac Arama, l'interprbte I,agadique Jacob 
CIlabih, les docteurs de la loi Jacob Berab, Josepl,-ben-Leb, 
Daxid-ben-Simra, et Lévi Chabib, les grammairiens Abra- 
hum de Balmes, Eia Levita, et Salomon-ben-Melech, le 
masorète Jacob-ben-Chajim, le commentateur philoso- 
pl,iqne Obadia Sforno et les caraïtes Kabeb Afandopoulo et 
Juda Gibbor; 2 ° de 1560 h 1600, les bistoriens Samuel 
Usque et Joseph Cohen, l'l,istorien littéraire Gedalia Jaclda, 
le dramaturge Jél,uda Sommo, les poetes Salomon Usque, 
lsraeI.Nagara, le lexicographe et apologiste David de' Pomi, 
le cl,ronologiste et astronome Dasid Gans, le grammairien 
Samuel Arkevolte, l'antiquaire Samue| Porta|eone, le cho- 
rographe et moraliste Moïse Almosnino, le médecin Amatus, 
l'apologiste lsaac Troki, le philesophe tl,éologique Jëhuda 
5luscato, les cabalistes Isaac Luria et Mo[se Corduero, les 
commentateurs, sermonnaires et do«-.teurs de la loi Josèpe 
Karo, ltloise AIschech, Samuei de Medina, lIoise Israe, ç.,r- 
decllaï Jure, Salomon Luria, Loewe-ben-Bezalel, Ephraim 
Lentzchutz, le polygmphe Hendel Manoach, et le critique 
de textes llenachem Lonsano; 3 ° de 1600 à 1650, les doc- 
teurs de la loi Jomtob Heller, Chajim Benbenaste, Joseph 
Trahi, Jorl Sirks, les théologiens Jesaia Hurwilz et Abraham 
Cohen Herera, le cabaliste Chajim Vital, les critiques de textes 
Salomon orzi et Salomon Adent, Abraham-ben-Buben, 
les médecins Bodrigue de Castro et Abraham Zacut, lmma- 
nuel Adoab, le statisticien Simcfia Luzzato, l'antiquaire 
Jacob Jehenne L6o, le traducteur espagnol Saadia Asnekot, 
le poëte Abenatar, l'auteur d'une poétique, Jacob Roman, 
5oseph riel Medigo, le théologien Menassès-ben-Israel, l'his- 
torien littéraire David Conforte, le poCe et lexicographe 
Léo de llodène, et le camite Samuël; 4 ° de 1650  1700, le 
sermunnaire et apologiste Saul blortera, le po|émiste lsaac 
C, robio, le docteur de la loi Schahthaï, Cohen, Sarauel Edels, 
Airaham Able et lliskia Silva; en outre, Simcha-ben-Gerson, 

JUIVE  JUJUBIER 
Aron-ben-Samuel et Jacob Zahalon, $ p i n o za de Barrios, le. 
bibliographe Schabthffi-ben-Joseph, les lexicographes Ben- 
jamin Mussaphia et de Lara, le traducteur espagnol Jacob 
Cansino, l'apologiste Isaac Cardoso, Thomas de Pinédo., 
éditeur d'Étienne de Byzance, Josel ,Vitzenhausen, traduc- 
teur de l'Ancien Testament en judaico-allemand, le traduc- 
teur espagnol Jacob Abendana, le philosophe Moise Chefez 
Gerson Chetez, auteur d'un dictionnaire de rimes allemand, 
et le caraïte l1ordechaï-ben-Nisan, auteur d'une histoire liftC 
raire ; 5 ° de 1710 à 1755, les docteurs de la loi Jéhuda Ro- 
sauts, Êlia Cohen, David Frœenkel et Jonathan Eybeschiilz, 
l'apologiste et philosopheDavid Nieto, le bibliothécaire David 
Oppenlteimer, les médecins Abraham Cohen, Schabtaï Marini 
et Tobia Cohen, le grammairien Salomon Hanau, Jacob Em- 
den, le grammairien et apologisteJélluda Briel, bloïseChajim 
Luzzato, rénovateur de la poésie, Jechiel-Heilprin-ben-Salo- 
mon, Isaac Lampronte, auteur d'un dictioanaire des choses 
contenues dans le Talmud, Pereyra et le caralte Simcha Isaac. 
La neuviëme p¢riÇde va de 1755 jusqu'h nos jours. Se- 
condé par l'esprit du dix-huitième siëcle, [Ioise .M e n de f- 
s o b n ouvrir à ses coreligionnaires une ère nouvelle, où I'o 
vit se manifester quelque chose d'assez semblable à ce qui 
s'6tait déjà manifesté au onzième et au seizième siècle, et 
une énergie juvénile fraya des voies nouvelles à la liltérature 
nationale. Son caractère, son contenu, son expression et 
son stylese modifièrent profondément. On se mit à cultiver 
la poésie, les langues et la linguistique, la critique, la pë- 
dagogie, l'histoire et la liftCature juives. On traduisit les li- 
vres sacrés dans les langues européenne« et les ouvrages 
étrangers en langue bébraïque, en méme temps qu'nn grand 
nombre de juifs prenaient une part active à la s le scientifique 
et politique de l'Europe. Des ouvrages dans tous les domaines 
de la science et une continuelle polémique, généraleme 
en hébreu, en allemand ou en français, furent les r6sultats 
de progrès civils et intellecluels des juifs d'Europe, quoique 
dans le moeme temps on ait vu se développer dans la Pologne 
russe un nouveau mysticisme. Une foule d'anciens ouxrages 
juifs ont été impr;_més en traite et en Pologne. En témoignag 
de ce que nous venons de direde l'activité littéraire déploc 
partout dans ces derniers temps par les juils, nous rappel- 
lerons ici les noms de Michel Berr, de LéOll Halé.vy, de 
Loëve-Weimar, de Léon Gozlan, d'Alex. ,Veill, de M. Frank 
de l'Institut, de Salvador, auteur d'une histoire de la domi- 
nation romaine en Judée, de Saivator Rosa, auteur d'onu 
Vie de Jéslls, de S. Cahen, de Meyer d'Amsterdam, cé- 
lèbre jurisconsulte qui pour ses ouvrages s'est servi de notre 
langue, de Valantin, de Ben-David, de Mendez, de Munk, de 
Stominski, de Luzzato de Beggio, etc. Les aperçus sur la lit- 
tërature juive qu'on trouve dans les ouvrages de Bartolocci, 
de Wolfet de Rossi, ont surtout trait à la sixième et à la hui- 
tibme période dont nous avons indiqué les limites ci-dessus. 
JUJUBEç fruit du j ujubier. 
JUJUBIER genre de plantes dicotylédonées, appar- 
tenant à la pentandrie digyuie de Linnl et à la lamille des 
rhamnées. 
Les j,juhiers sont des arbrisseaux épineux, à feuilles al. 
ternes et simples, accompagnées, à leur base, de deux 
stipules persistants, qui se changent plus tard en épines 
dans l'aisselle des feuilles  cachent de petites fleurs com- 
plètes, polypétalés, régulières, dont le calice offre cinq 
divisions CiC en étoile, et la corolle cinq pétales, plus 
court« que les sépales du calice, et alternant avec eux; 
cinq Camines, opposées aux pétales, sont insérées autour 
d'un disque charnu, qui environne le pistil; l'ovaire, 
surmonté de deux styles, devient un drupe charnu relffec- 
ruant un noyau à deux loges monospermes. 
Des vin espèces que renferme le genre jujubier, non» 
ne citerons que deux : le jujubier commun et leju]ubier 
lotos. 
Le jujubier commun ( zi'-yphus vul9aris, Lam. ), vul- 
gairement épine du Christ, ëpine aux cerises, grand 
brisseau de 5 h 6 mètres d'élévation, offrant sur ses bran- 



JUJUBIEB 
cles de petits rameaux fililormes qu'il renouvelle tous les 
ans, est originaire de la Syrie, et fut introduit en Italie pour 
la première fois par Sextus Papirius (Pline, I. xv, c. 14). 
Aujourd'lmi, c'est un arbre indigëne des courtCs méri- 
dionales de l'Europe.Ses fruits, nommísjuj=bes, Iorsqu'ils 
sont frais, olfreut un parenchymeferme et sucré, mais d'une 
saveur fade; séchés au soleil et unis aux dattes, aux figues 
et aux raisins secs, ils forment les fruits bdchiques, dont les 
médecins conseillent l'usage dans les affections pulmonaires. 
Le jujubier lotus ( zizçphus lotus, Desf.) arbrisseau 
buissonneux, atteint raremeut deux mètres d'élevation, 
et croit à l'Cut sauvage sur les cétes de la Barbarie et 
surtout de la Cyrénaïque. Delécluse et J. Baul,in avaient 
déja soupçonnéque le véritable lotus des ancieus Iotophages 
était une piaule du genre zi:yph=s; mais c'est Destontaines 
qui, par ses savan recherches, consignées dans le Mé- 
moires de l'Acadêmie des Sciences ( 1788 ), a le premier 
mis ce fait hors de toute contestation. BELrmLv-Ler/'.vn. 
JULE, pièce de vers ou hymne que les anciens Grecs 
et, à leur imitation, les Romains chantaient pendant la 
moisson en l'honneur de Cérës et de Proserpine pour se les 
rendre favorables. Ce mot est dérivé du grec ,.; ou ¢- 
).¢ç, qui signifie 9erbe. On appelait aussi ces bymnes dmd- 
trules ou dëmdtrioles, c'est-a-dire ioles de Cdrès. On les 
nommait enfin calliules, selon Dvdime et Atl,ênée. 
JULE ou IULE (EntomologiC, genre d'insectes, de 
la classe des m y r i a p o d e s et de l'ordre des chilognatl,es. 
Leur corps est composé d'au moins quarante segments clin- 
driques, auxquels se rattachent des pieds trës-nombreux. 
Leurs yeux sont distincts. Les Jules, qui sont t,ès-communs 
dans toute» les parties du taonde, vivent dans les lieux 
obscurs et humides. 
JULEP. La dénomination deulep élait autrefois réser- 
vée à un sirop préparé avec trois parties d'eau distillée aro- 
matique, et deux parties de sucre; mais auourdbui on 
a appliqué ce nom à toute potion claire, transparente et 
agréable, composée de mème d'eau distillée et de sirop. On 
y fait entrer quelquefois des mucilages, des acides, des 
teintures, mais jamais de poudres ou de substances huileu- 
ses qqi puissent troubler sa transparence. Les propriétés 
médicinales des juleps dependent des vertus des substances 
qui les composent : ainsi, comme il peut entrer dans ces 
médicaments des sirops composés, ainsi que des ea,,x dis- 
tillées douces de propriétés très-diverses, il s'ensuit que le 
julep lui-mème tiendra des substances qui le constituent : 
par exemple, un julep dans lequel entrera du sirop d ia- 
code sera calmant; un autre dan«/eque| entrera du sirop 
d' é th er sera antispasmodique, etc. On ne peut donc, comme 
on le voit, assigner aux jnieps des propriétés méclicinales 
constantes. C. F,vno. 
JULES. Ruine n'a compté que trois papes de ce nom. 
JULES l "-r, que l'Èglise a mis au nombre de ses saints, 
était fils d'unRomain, nommé lustique. Simplediacre quand 
le peuple et le clergé l'élevèrent sur le saint siCe, le t S 
janvier 337, peu de mois avant la mort de Constantin, il 
succédait au pape llarc. L'hérésie d'Arius était alors dans 
toute sa force. Le nou»el empereur d'Orient, Constance, 
protegeait ouvertement celle secte. Saint A t h a n a s e, chassé 
de son siCe et déposé, s'était réfué à Rome, ainsi que les 
évèques de Constantinople, d'Andrinople, de Gaza et d'An- 
c/re, dépossédés par les ariens. Jules I er eut recoursà l'em- 
pereur Constant, qui était resté dans la communion de i- 
cée. Constant écrivit à son frère Constance, et un concile 
général fut convoqué à Sardique, ville d'lllyrie, pour mettre 
un terme aux désordres de la chrétienté. Cent soixante-dix 
évéques s'y rendirent de trente-cinq provinces. Le pape 
n'osa y paraltre. [I se horna à y envoyer trois Iégats; mais 
les ariens ayant bientét reconnu l'infériorité de leur nombre, 
seretirèrent  Philippolis enThrace, ce qui ne les empècha 
pas de donner à leur assemblée le titre de concile de Sur- 
clique. Les deux partis se chargèrent réciproquement d ana- 
thbmes et d'injures. Jules, qu'animait le désir de soumettre 

-- JULES 709 
 les évques d'Orient ì la juridiction du alnt-siége, souti.qt 
' le vritable coucile de Sardique et son président Osius de 
[ Cordouc : il écrivit au peuple et au clergé d'Alexandrie en 
I faveur de saint Athanase, que rappelait l'empereur iui- 
mème. Mais i'hérésie des ariens vécut plus longtemps que 
ce pontife, limourut au milieu?de ces débats, le 12avril 352. 
JUL'E$ Il ( JVLE, n L ROVÈRE) succeda à Pie III, 
dans la nuit du 30 octobre au 1  novembre 1503. Il était 
né près de Savone, d'une lamille ohscure. Neveu du pape 
Sixte IV, il avait été élevé par son oncle au cardinalat. 
Suivant Gu!cciardini, il avait si bien assuré son élection par 
ses brigues et ses promesses qu'il fit mentir le proverbe : 
« Qui entrepape au conclave en sort cardinal. » II paya, du 
reste, sa detle par une bulle qui, flétrissant à l'avenir ces 
élections simoniaque% frappait d'anathème, de nullité et 
de dgradation, tout pontife ou cardinal qui s'en rendrait 
coupable. Son caractère belliqueux se manifeste dès la 
secoude année de son pontificat. 11 redemande aux Véni- 
tiens plusieurs villes dont ils se sont empares, et qu'il pré° 
tend apparlenir au patrimoine de Saint-Pierre. Sur le refus 
i du sénat de Venise, il forme contre cette république une 
puissante ligue avec l'empereur 51 a x i m i I i e n, le roi de 
! France Lou is X I t, et trois ou quatre princes d'Italie. 
[ Venise s'effraye et demande gràce, mais ce n'est pointaux 
souverains qui doivent fournir des armées. Elle rend au 
pape quelquel-unes des places qu'il revendique, et Jniès II 
abandonue ses alfiës. Ce pontife guerrier porte ailleursles 
forces qu'il a rassemblées. Il est septnagenaire, et r,|ontre 
encore uue telle vigueur de jeunesse, que notre Guillaume 
Bude l'appelle un chel sangninaire de gladiateurs, et que 
l'historiographe Jean Le Maire le compare au and Tamo 
botrlan, sotdan des Tartres ( çamerlan ). Jules Il arrache 
la ville de Pérouse à la famille Baglioni et celle de Bolo-me 
aux Bentivoglio. 
LouisXll I'a vainement aidëdans cettedernière conquête; 
le pape l'en récompense en suscitant la révolte des Genois 
contre la Frauce, et en appelant l'empereur Maximilien en 
Itafie. Louis XII dissipa ces ombrages par sa mod,:ration ; 
mais l'armée impériale avançait toojours, et Jules II es 
était assez embarrassé pour ménager, à son tour, le roi de 
France. Venisecalma se inquiétudes en refissant le passage 
aux troupes de Maximilien ; et l'année suivante, en 1508, 
la république fut pa)ée de ce service par une nouvelle ina- 
titude de Jules 11. Cepape ne pouvait souffrir que les places 
de Ravenne, Cervia et autres, restassent au pouvoir des 
Vénitiens : inpuissant à les recouvrer avec ses seules forces, 
il réussit, par ses artilices, à renouer la ligue qu'il avait rom- 
pue. Elle fut signée a Cambrai, entre Maximilien, Louis XII, 
Ferdinand d'Aragon et le cardinal d'Amboise, légat du saiut- 
siége. Toutefois, Jules lI ne ratifia ce traité d'alliance qu'ao 
près avoir tenté vainement d'amener les Vénitiens ì uno 
restitution volontaire. Ses anathèmes commencèrent la 
guerre, et Yenise eut la bonhomie d'en appeler au lutur con- 
cile. Mais les foudres de Rome n'avaient lait peur qu'a une 
centaine de moines; et si les armes de la France et de l'Em- 
pire n'avaient secouru les armes spirituelles de Jules lI, le 
doge et le sénat ne se seraient point humiliés aux pieds de 
l'altier pontife. Celui-ci abandonna encore une fois ses al- 
iiés, qu'il redoutait plus que les Vínitiens : sous prétexte 
de la nominatiou aux évchés vacants, que se disputaient 
le pape et le roi de France, Jules cherchait partout des 
ennemis à Louis XII ; il pratiquait ì cet effet les Suisses et 
les Anglais. Mais la saisie du temporel des évèques du llilanais 
et la fermeté du roi de France lui imposèrent ; il sut enrorv 
profiter de cet acte d'humilité, qui lui rendait les bonnes 
grâces de son puissant ennemi, pour faire subir aux Véni- 
tiens les conditions les plus humiliantes, et expulser leurs 
gouverneurs des places revendiquées par le saint-siCe. 
Possédé du démon des batailles, Jules II attaque, en 1510» 
le duc de Ferrare, et lui enlève La Mirandole. Il récompense 
la fidélité de la maison d'Aragon en donnant à Ferdinand 
l'investiture de aples, au mépris des droits et des pro- 



710 JULES 
testations de Louis XII, dont il a dëjà oublié la complai- I place dt Paul I11. Il dé, buta par alCrutier le cardinalat en 

sance. 11 répond aux menaces de ce prince par une excom- 
munication dont Louis se moque, en convoquant un con- 
cile gallican dans la ville de Tours. Les évoques de France 
y examinent les prétentions de la cour de Borne et la 
conduite particulière du pontife. Louis XII se concerte avec 
l'empereur pour la convocation d'un concile général. Ma- 
riana assure positivemeut que 51aximi,ien avait envie de 
suce.der/ Jules Il sur le saint-sié=e. L'opiniàtre vieillard, 
abandonné par une partie de ses cardinaux, assiégé dans 
Bo.'ogne par le marecbal de Chaumo[t et par les Bentivoglio, 
ne fut sauvé que par la lenteur de ses ennemis  qui don- 
nèrent le temps a Fabrice Colonne de se jeter dans la place. 
Il échappe quelques jours après, par le pur effet du hasard, 
à une centaine d'hommes d'avines, avec lesquels le chevalier 
Ba y a rd se flattait de l'enlever. 
La crainte d'ètre déposé le suivit dans son refuge de 
]avenne. Le peuple de Bologne avait dès son départ 
renversé sa statue, et rouvert ses portes aux Bentiioglio. 
Ia convocation du concile SertCai etait affichéc dans tonte 
l'ltalie. La ville de Pise etait désignée, et le pape etait 
sommé d'y comparaitre. Jules Il ne trouva d'autre moyen 
pour conjurer l'orage que de convoquer Itfi-mëme un con- 
cile a Borne, dont il fixa l'ouverture au 19 avril 1512, quoi- 
que la bulle de convocation fut du 18 juillet 15ll. Il ex- 
communia en mme tenps les cardinaux Carvajal, Briçonnet 
et Borgia, qui étaient a la tète du concile de Pise: le roi 
d'Aragon et de aples prit les armes pour soutenir sa cause; 
les Yenitiens entrërent dans cette ligue, qui fut appelée 
sainte; mais la bataille de l:avenne, le plus puissant ar- 
gument du concile de Pise, efit reudu les Français maitres 
du saint-si,:ge et de l'ltaL;% si la mort de leur géural Gas- 
ton et lïohabilete de leurs autres cbeis ne leur osaient 
enleve tous les fiuits de cette victoire. Jules Il, qui avait 
failli mourir de peur, fut rassure par les ambassadeurs 
d'Epagne et de Venise. 11 mit le royaume de France en 
inlerdit, poussa le roi d'Angleerre Henri VIII à déclarer la 
guen-e / cette puissance, et, pour iavoriser l'ambition de 
son allie Fedinand, pronon.ca la dëposition du roi de a- 
varre, qui asat pris le parti de Louis XII. Ces bulles, 
dignes du donziëme sieele, n'auraient point chasse les 
Français de Bologne et de Milan, si une armée de 18,000 
Suisses n'croit senne les appu)er. Jules Il prolita de ce se- 
coors pour depouiller le duc de Ferrure, retablir les Sforce 
a Milan, et les Me&sis h Florence ; fomenter enfin la sé- 
dition qui enleva Gênes a Louis XII..',lais son ambition 
échoua contre la France elle-mème; et sa colore eclata 
contre ce meme Ferdiaand d'Aragon, qu'il avait tant ca- 
ressé, parce que le roi d'Espagne n'avait point marché avec 
les Anglais/ la conquète de la Guienne. Il avait cependant 
o»vert le concile de Larron, et après en asoir tire qlelques 
règlements pour la discipline de lEglise, il ne se serait plus 
de lui que pour appuyer ses entreprises et ses diatribes contre 
le roi de Frdnce. La mort iut heureusement y mettre un 
terme. Ce vieillard, maladif et tracassier, expira le 23 fvrier 
1513. On disait de lui qu'il avait jeté les clefs de saint 
Pierre dans le Tibre pour ne se ser, if que de l'épee de saint 
Paul. Ses enne,nis ajoutent qu'il aimait le vin et les femmes. 
I,ouis M.I et .',laximilien le traitaient d'ivrogne ; et Varillas 
raconte que pour avoir la voix des amis de Cesar Borgia, 
il lui fit accroire quïl était son père. Qlmi qu'il en it, sa 
mémoire ne peut ètre lavée de sa làche ingratitude envers 
la France, ou pendant le r,gne terrible des Borgia il avait 
trouvë un asile pour sa tdte. 
JULES 111 (JE-Mnm GIOCCHI)appartenait  une 
famille bourgeoise de bionte-Sansavino de Toscane, et c'est 
delà qu'il prit le nom de cardinal del 31ente, comme l'avait 
fait un de ses oncles sous le pontificat de Jules I1. iommé 
successivement archevêque de Siponte, auditeur de la 
chambre apostolique, légat de Bologne et gouverneur de 
Reine, il triompha de toutes les brigues du conclure  l'aide 
de la faction italienne, et ïut êlu le  février tg50, à la 

le conf.rant/, un laquais bouffon,/ un enfant de dix-sept 
ans, qu'il avait ramassé sur le pavé de Bologne; et quand 
le sacré soliCe osa le lui reprocher par la bouche du cardinal 
Carafla, il lui lit entendre que le sacré collége lui-méme 
l'avait tiré presque d'aussi bas pour en faire un pape i cette 
lacctie réduisit les cardinaux au silence. 
Le concile de Trente était ouvert depuis long temps ; les 
përes qui y siégeaient s'étaient divisés suivant qu'ils tenaient 
, pour Charles-Qnint ou pour Henri Il de France. Les par- 
tisans du second s'étant retirés / Bologne, et les Allemands 
[ persistant / rester / Trente, Charles-Quint sollicita le 
nouveau pontil'e d'y rétablir la totalité du concile, tandis que 
Henri Il le suppliait de le laisser en Italie. Mais le foyer 
du protestantisme était en Allemagne ; et le pape, ayant 
plus intérët / ménager l'empereur que le oi, satisfit aux 
eigences de Charles-Quint, en ordonnant la réunion des 
deux partis dans la ville de Trente, pour arriser à la paci- 
fication de l'Eglise. Les protestants, sommés d'y compa- 
raitre, y vinrent, le 7 janvier 1552 dans la personne des 
ambassadeurs de l'élecleur de Saxe; mais le pape sïndigna 
quïls voulussent discuter leurs dogme.s', et il defendil h ses 
Iégats de conferer avec des schismatiques. Les pères ne s'en- 
tendirent pas plus entre eux ; l'approche d'une armée de 
confedérés d'Allemagne les frappa d'une terreur si grande 
qu'ils se dispersèrent d'eux-mêmes, et les dernie,'s qui res- 
tèrent prononcëvent la suspension du concile, le 2.1 avril 
1, avec autorisation de Jules III. 
L'établissement de la Société de Jsus occupa longtemps 
ce pontife, qui lu/lut devoué dès l'origine. Il conlirma les 
bulles que Paul 111 avait accordees à I g n a ce d e L o v o I a, 
et prit les j é s u i t e s sous sa protection. Cette proection 
ne fut point assez puissante toutefois pour rësister aux ré- 
pugnances du parlement, de l'université et du clergé de 
France, et Jules III n'eut pas la joie de les voir etablisde 
sou sivant dans ce royaume. D'autres dissentimentg, au 
reste, le séparaient encore du saint-siége. Octas e Farnèse, 
ayant prié vainement le pape de protéger la sille de Patine 
contre Cfiarles-Quint, qui déjg s'était emparé de Plaisance, 
se tourna alors vers le roi ltenri II ; et une garnison iran. çaise 
s'étant introduite dans Parme, Jules III ordonna ì son 
légat de quitter la France sile roi ne consentait pas  rap- 
peler cette troupe. Henri répondit par un refus et par la 
déleuse expresse de porter aucun argent a Borne. Le pontife 
s'en vengea sur les Farnèse, et livra leurs villes a la discré- 
tion des forces impriales. I[ais le cardinal de Tournon, 
lui ayant rappelé à propos la séparation de l'Angleterre, et 
lui ayant fait craindre que la France f0t amenee à en faire 
autant, Jules fil pardonnant aux Famée, ordonna qtYon 
leur restitu/t la ville de Parme et quelques autres, en pro- 
mettant " Henri II de ne plus se mêler de sa querelle avec 
l'empereur d'Allemagne. Cette paix n'efit pas eu de suites 
si Jean Baptiste del Monte, neveu du pape, n'avait pas été 
tué, peu de jours après, à l'attaque de La Mirandole, ce 
jeune ambiteux, soutenu par Charles-Quint, ayant bien 
certainement continué la guirri malgré la defense de son 
Oncle. L'empereur avait, du reste, trop d'embarras en 
magne pour songer h l'ltaiie, et le pontife ue craignit pas 
de lui causer un nouveau chagrin en excommuniant son frère 
Ferdinand, dont les sic.aices avaient assassiné le cardinal lar- 
tinusius, eveque de Varadin. Maiscette sentence fut révoquée 
quelques mois aprës, h la sollicitation de Cfiarles-Q[fint 
lui-même, et la maison d'Autriche se trouva blanchie de ce 
crime par le même pouvoir qui l'avait d'abord condamnte. 
Un événement imprévu vint porter la joie dans la capi- 
tale de tu ch r6tienté: 11 a r i e, fille de Henri $" 111, était montée 
sur le tr6ne d'Angleterre; elle avait assuré Jules III de son 
obëissance filiale, et lui avait demandé le cardinal Peins 
pour trac'ailier avec elle h la soumission de son peuple. Bien- 
t6t le mariage de cette reine avec l'archiduc Philippe, fils 
de Cbarles-Quint, accrut les espérances du saint-siCe. Le 
pape investit ce nouveau roi du ro'aume de $ieile, dont 



JULES -- JULIE 
son ire s'était démis en sa faveur, et le cardinal Polus 
eut la gloire de réconcilier les Anglais avec la papauté. Mais 
celle joie lut de courte durée. L'ambassade d'un patriarche 
arménien et l'envoi de quelques ëvëques in parlibus clez 
les peuples d'Abyssiuie ajoutèrent aux consolations dont 
Jules 111 avait besoin pour supporter les désordres que cau- 
sait en ltalie la guerre de la France et de l'Epire. Le ma. 
riage de son neveu avec la fille du duc de Florence, Céme 
de l*,ledicis, compensa bieutét la fAcl«euse nouvelle qu'il 
reçnt de l"ouverture de la diète d'Angsbourg et de quelques 
propositions que Ferdinand y avait Ihites coutre les interèts 
du saint-singe. Il y répondit par une lmlle d'excommuni- 
cation contre les usurpateurs et detenteurs des biens de 
l'Église et des couvents; mais comme de puissants catho- 
liqnes avaient profite de la guerre civile pour s'enrichir de 
ces sortes de pillages, cette bulle était peu propre h pacifier 
l'Afiemagne. La mort sauva Jules III des nooveaux embar- 
ras qui dotaient en rèsnlter pour le saint-situe. U monrot 
le 23 mars 1555, à l'Age de soixante-sept ans. Fleury a Ioué 
la fermete de son caractère : ce n'est pas une veloEU quand 
elle est poussee à l'excb.s. Sou naturel lacètieux lui fit, d'un 
autre cote, bien des eunentis, et les principaux historions 
de son temps lui prétent plus de vices qu'il ne convient à 
=lu pape. VIEt.XE'r, de l'Académie Française. 
JULES L'AFRICAIN (Sexrus JuLcs ArlCUS), 
historien chrétien du troisiëme siècle, n  Nicopolis, en 
Palestiue (l'ancienne Emaus), écrivit une t'hronolo9ie 
pour prouver la haute antiquité des principaux dogmes du 
christianisme et la nouveaute relative des croyances poly- 
.lléiS.esl Elle etait divisée en 5ot livres et renfermait le 
taldeau de l'ltistoire universelle depuis Adam jusqu/, l'em- 
pereur l',lacrin. U n'en reste que des fragments citës par 
Eusëbe et quelques pères. Dans une de ses lettres il cm o} a 
une concordanc entre la version de saint Luc et celle de 
saint Iatlfieu sur lag'enealogie de Jésus-Cltrist; 
dans ul;e atttre adressée/ Origène, il examine au point de s un 
critique l'histoire de Suzanne, et se prononçe contre son au- 
thenticite. On ha attrilme en outre quelques fi-agmeuts d'un 
livre institulë Les Cesles et traitant de sciences et d'art mi- 
litaire. Jules l'AIricaiu fut protégé par l'emperem" H6liogabale. 
JULES BOMAIN dont le véritable nom etait GleLm 
PIPPI, naquit à Rolne, en 1/92. Ou ne sait rien sur sa fa- 
mille, mais ou doit croire qu'elle n'clair pas dans le besoin, 
puisque, dës son enfance, il reçut de l'instruction, et fit 
une étude particuli/:re des médailles et des antiquités. R a- 
p h a e I le lit sou Iataire, conjointement a ec l Fatlore, 
un autre de ses elèves. Doué d'un génie ardent et d'une 
imagination féconde, Jules surpassa bieutOt tons ses cou- 
disciples, et, n'ayant pas eu d'autre marre que Raphael, 
celui-ci ne tarda pas à utiliser sou talent pour l'aider dans 
l'exècution des travaux immeuses dont il était chai'gWau 
Vatican. Lors de la mort de ce grand peintre, en 1520, 
Jules, avec l'aide de François Penni, continua les travaux 
commencés par son maitre. 'En 1523, il fut chargé, par le 
pape Clemeut VII, de peindre, dans la salle de Eons- 
tantin, les graudes fresques dont lapfiael avait laissé les 
desSillS ; il lit celles qui reprësenteut !'allocution de Cous- 
tantin à son armée, lors de l'apparifiou du labarum, et la 
bataille dans laquelle Conatantin fut victorieux de l',laxence, 
sur les bords du Tibre. 
Jusqu'à cette époque, Jules Romain n'avait été considéré 
que comme le disciple habile d'un marre plus habile encore; 
ruais il lit voir alors qu'il pouvait se passer de guide, et 
s'il perdit un peu de la gràce que possédait Raphael à un 
si haut degrë, il ne cossu pas dëtre grand, noble, majestueux 
et profond dans ses compositions comme dans son style. Il 
peignit plusieurs madones pour divers couvents, ue Fta- 
gcllalmn de Jésus-Christ pour l'église de Saint-Praxìde. 
Sm clle[-d'truw-e est un 31art9re de saint lz:tienne, qu'il 
lit pour Matfiieu Ghiberti, dataire du pape. Placé d'abord 
à Gues, sur le maitre autel de l'église des mn|nos du mont 
Cliver, ce tableau filt donnë par la ville de Gënes au gouver- 

711 
nement français; repris en 181-, il se voit maintenant au 
musée de Turin, où il lait continuellement l'admiration des 
connaisseurs. 
La renommée de Jules Romain ayant pris un grand ac- 
croissement comme peintre et aussi comnle arclitecte, il fut 
appelé par Fredéric de Gonzague, alors marquis de 3Iantoue, 
et clargé par lui de l'exécution des grands travaux que ce 
prince avait pris la résolution de faire faire, pour l'embel- 
lissement et l'assainissement de la ville. Ces motifs devaient 
tre suffisants polir déterminer Jules à quiUer Borne. C'est 
donc  tort que Vasari a cherché h faire penser qu'une cause 
peu fionorable avait forcé notre artiste h sorlir «le la ville 
pour évite, la prison. Ce conte ridicule a ëtë depuis rap- 
portë par tous les biographes, nomme si le rail ne présentait 
aocon doute, et cependant il est bien loin d'ëtre prouvé. 
C'est à tort que l'on a pretendu, fantét que Jules Romain 
avait fait des figures obscènes, destinées h accompagner 
certains sonnets de I'Aréti n, taut6t que le poëte avait fait 
ces vers pour ètre placés au bas de hgures faites par le 
peintre son ami ; tantét, enfin, que ces postures avaient 
cié {gravées par Marc-Antoine, et qle le pape, n'osant sé- 
ir contre le poëte, dont on craignait la plume hardie, et 
ne pouvant atteindre le peintre, qui s'elalt enfui, aurait 
exercé sa vengeance sur le graveur, eu le mettant en pri- 
son pour aoir fait servir son burin à la reproduction de 
dessins licencieux. Toutes ces assertions manquent de pi'eu- 
vos, et axant de les répéter on aurait dU relléchir que si 
en effet il ett existé vingt gravures de cette nature, quel- 
qoes .-oins que l'on ett pu prendre alors pour d,.truire de 
telles estampes, il serait impossible qu'il n'en |ùt ecfiapp6 
quelques ëpreuves, qui se seraient retrouées depuis. Or, 
on ne trouve nulle part rien de ce genre qui puisse raisonna- 
blement ètre attribue ni à Jules Romain ni h M,rc-Antoiue. 
Un des travaux les plus importants que Julesait eu a faire 
est ce magnifique palais du T, à 3Iantoue, dont l'architecture 
et les peintures sont ëgalcment admirables. C'est la que, don- 
nant l'essor à son imagination, il crëa une foule de tableaux, 
dans lesquels on ne sait ce qui doit le plu» tonner, ou de 
la Iéconditë de son gënie, ou de la facilitë de son exëcution. 
Plus tard, il eut h peindre, dans le palais de 31aatoue, une 
galerie ou il repeseuta l'histoire de la guerre de Troie. Il 
lit aussi des tableaux, parmi lesquels on doit citer l'Adora- 
tton des beryers, qui, placée d'abord a la chapelle Saint- 
André de 5Iantoue, fut dansla sotte donnée par le duc à 
Charles I er , roi d'Angleterre, puis achetee, après sa mort, 
par le riche amateur Jabach; elle est maintenant dans la 
galerie «lu Louvre. Jules Romain eut au«si a construire un 
grand nombre d'edifices publics et particoliers, qui embelli- 
rent la ille de Mantoue et la rendirent mecounaissable. Le 
duc, admirateur des talents de ce cclèbre artiste, l'en re- 
compensa par des faveors et des bienfaits souvent renou- 
velës. Après la mort du duc Frédéric, en 150, Jules aga 
à Bologne, ou il donna le plan d'une nouvelle façade pour 
l'église de Saint-Petroue ; et lors de la mort d'Antoiue San- 
gallo, il aurait sans doute été nommë architecte de Rome, 
si sa santê ne se ftt derangëe  un tel point qu'il succomba 
peu de temps après, le le'novembre 1546, a I'ge de cin- 
quante-quatre ans. D:cns aiué. 
JULIANE-MAI:tlEç reine de Danemark, seconde 
femmedu roi Frédéric V (voJe-- EnaotJ-31,xnlla)). 
JULIANS HAAB l'établissement le plus important 
des Danois dans le Groenlaud. 
JULIE. L'histoire romaine compte plusieurs femmes cé- 
lèbres de ce nom. 
JULIE, fille unique dol'empereur Auguste etde saseconde 
femme Scribonia, naquit trente-neuf ans avant J.-C. Assi 
distinguée par sa beauté et son esprit que par ses grâces 
et son alfabilité, elle épousa, l'an 25 avant J.-C., le neveu 
d'Augtste, Iarcus Claudius Marcellus, et à sa mort, blar- 
cts Vipsauins Agrippa, à qui elle donna trois fils et deux 
filles. Sa belle-mère I.i'ie, qui la haisait depuis son ma- 
i-iage avec 31ar«ellu, et qui h vo}ait menacer les I;l'ojet 



7 ! 2 JU LIE -- 
qu'elle formait pour son fils Tibère, dcida Auguste, à la mort 
d'Agrippa, h la marier à Tibère, pour assurer  ce dernier 
l'espërance de lui succéder dans sa toute-puissance. Ce 
rince eut lieu en dépit de la résistance de Julie, et les époux 
vécurent ensemble jusqu'à l'an 2 a-ant J.-C., époque h laquelle 
Auguste annonça au sénat que sa fille s'ètait oubliée au point 
de prendre le Forum pour théAtre de ses débordements 
nocturnes. On l'accusait déj dans le public de faire cha- 
que matin attacher à la statue de blars autant dr couronnes 
qu'elle avait reçu d'amours dans la nuit. Auguste alors 
l'exila dans File déserte Pandatarie, aujourd'hui Ventotiènœe, 
près de laples. Plusieurs hommes distingués, désignés 
comme ses amours, subirent l'exil ou la mort. De Panda- 
tarte, o6 sa mère Scribonia l'aait accompagm'e, Julie fut 
plus tard conduite à Regium (Reggio), oi, tatssée pat" Ti- 
hère dans la détresse et le besoin, elle expira, l'an 14 ou 15 
de J.-C. 
JULIE, fille de César, qui l'unit  Po mpèe, retarda par 
ses vertus l'explosion de la jalousie de ces deux adver- 
saires, jusqu'h sa mort, arrivee l'an 53 avant J.-C. 
JULIE, fille de Titus, destinée h D oto itien, qui re- 
fusa de l'Causer, lui inspira plus tard une passion assez 
vive pour que son amant, devenu empereur, fit mourir 
sa femme, et Sabinus, époux de Julie, afin de se livrer avec 
elle, dans le palais impérial, aux plus houleux deborde- 
ments. Elle mourut l'an 80 après J.-C., victime d'un breu- 
vage qu'elle avait pris pour se faire avorter. 
JULIE-DOMNE, femme de l'empereur Septime Sévëre, 
née  Chasse, dans la Phénicie, d'un père prêtre du soleil. 
Sur le trfne elle suivit son penchant a la volupté, sans que 
son epoux ostt l'en reprendre. Après sa mort elle s'effor't 
inutilement de maintenir en bonne intelligence ses fils C a- 
racala et Géta. Elle n'y put parvenir, et Caracalla la 
blessa mme  la main lorsquïl assassina son frère dans 
ses bras. Elle dissimula le chagrin de cette perte pour gar- 
dex son influence; mais après la mort de son second fils, 
n'aant pu s'assurer i'empie, elle se laissa mourir de faim, 
l'an  17. 
JULIE (Zoologie). Ce nom a ét donné par Geoffroy à 
une espèce d'insecte qui est la plus rer,arquable du genre 
oeshne, de l'ordre des nSvroptères, tabli par Fahricius, 
aux dépens des libellules de LinnC et de Geofloy. La ulie, 
«.shna 9randis de Fahricius, est de couleur fauve, avec trois 
lignes vertes obliques de chaque cfté du thorax, et l'abdo- 
men tacheté de jaune verdâtre et de bleu. On la voit, dans 
les prairies et sur les bords des eaux, voler avec uue trës- 
grande rapidité et chasœer les mouches à la manière des hi- 
rondelles. L. 
JULIEN (FL,*.VlCS CLAtUlCS JCLIANUS), empereur ro- 
main, surnommé l'Apostat par les Cfirétiens, fils de Jules 
Constance, rière de Constantin le Grand, et de Basiline, fille 
du préfet Julien, naquitk Constantinople, le 6 novembre331. 
Julien avait  peine six ans lorsqu'il vit son père et plusieurs 
personnes de sa famille massacrés par les ordreç de sou 
oncle Constance Il. Son jeune frère Gallus et lui échappërent 
seuls aux assassins. Leur éducation fut confite  Eusèbe, 
évque de icomédie, qui leur donna pour gouverneur l'eu- 
nuque 5lardonius, homme distingué, qui ne faillit pas à celle 
the. Les deux enfants furent élevés dans la religion chré- 
tienne. On les fit mème entrer dans le clergé, afin de les 
6carter du trfne impérial, et ils remplirent les fonctions de 
lecteurs dans leur église. Cette éducation agit diversement 
sur les deux frères. Gallus demeura toujours attaché au 
christianisme. Julien, pltsgë, avait virement senti la persé- 
cution exercée contre sa famille, ainsi que l'Cut de con- 
trainte et de terreur dans lequel on avait maintenu sa jeunesse. 
Il chercha des consolations dans l'Cude des belles-lettres 
et de la philosophie; il s'y livra avec ardeur. Il avait 
vingt-quatre ans lorulu'il vint à Mbènes, où il suivit les 
leçons de diw.xs maltres et surtout celles du rhéteur llaxlme 
d'Epfièse. La philosophie des néoplatonicicns séduisit 
ton esprit ardent et sceptique  la lois ; «les prédicfions as- 

JULIEN 
trologiques, dont a haute raison ne sut pas se défendre, 
acfievèrent de le détourner du clJristianisme, eu lui mon- 
trant l'empire s'il rbtablissait le pol.théisme. Dès lors Julien 
n'eut plus qu'une pensée, reconstruire le passé; mais le 
temps n'ètait pas encore venu, il sut dissinmler. 
Sur ces entrefaites, le laroucfie Constance, n'ayant point 
d'britier, se détermina, d'après le conseil d'Eusébie, sa 
femme, à proclamer César ce Julien dont il avait égorge le 
père. Il lui donna mëme sa sœur Hélène en mariage, et le 
fit sur-le-champ passer dans les Gaules pour repousser les 
invasions des Ger[nains. D'éclatants succês couronnërent les 
efforts du nouveau César; les barbares furent battus en vingt 
rencontres et la guerre transportëe au dela du Rhin. Pen- 
dant l'ldver, Julien prenait ses quartiers d'fiiver dans sa 
chère Lutèce, qu'il se plut à embellir et oit il habitait le 
fameux palais des Thermes. Toute la Gaule, pendant les 
cinq ans qu'il y resta, bénit son administration et la dou- 
ceur de son gouvernement. 
Constance, jaloux de cette popularité, lui demande ses 
meilleures troupes pour son expédition contre les Perses; 
mais celles-ci se mutinent, et proclament Julien aoguste, au 
mois de mars 260. L'année suivante, Julien, qui n'a pu d- 
suriner l'empereur par ses protestations, marcfie à sa rencon - 
Ire. ll suit les bords du Danube, pdnëtre en Iilyrie, et s'arrCte 
pour assieger Aquil/e, lorsquïl apprend la mort de Constance. 
Alors il traverse la Thrace, arrive le I I décembre 361 à Cons- 
tantinople, oh il est proclame de nouveau. 
Aussit6t il prend le titre de grand-pontile, et dans un ma- 
nifeste adressé aux Athéniens annonce officiellement la res- 
tauration du culte ancien. Cette rvolution religieuse et poli- 
tique, que l'empereur méditait depuis dix ans, lui e0t-il etc 
donné de l'acomplir, s'il avait régné plus ionemps? Quoi. 
qu'il en soit, il fut un monarque accompli pendant le petit 
nombre de mois qu'il occupa le tr6ue. Il lit nne guerre im- 
piloable à tous les abus, au luxe et à la mollesse. Il ré- 
forma toute la maison imperiale, congédia les baigneurs, 
les barbiers, les cuisiniers, les euuuques, dont il n'avait plus 
besoin, puisqu'il n'avait plus de femme, et ne voulait pas se 
remarier. Les curiosi, sorte d'espions de palais, furent sup- 
primés, et ce retranchement de tant de charges inutiles 
tourna au profit du peuple, auquel on reluit le cinquiëme 
de tous les impfls. La libéralit( de Julien était sans bornes : 
« e refusons pas mëme à notre ennemi, disait-il, car ce 
n'est pas aux mœurs ni au caractère, c'est a l'homme que 
nous donnons. » L'histoire ne peut lui reprocher aucun 
acte de vengeance ou de cruauté, ll pardonna aux plus ardents 
de ses ennemis, et s'il persécuta le christiani.me, du moins 
ce ne lut pas avec les armes du fanatisme, le fer et le feu. 
Il se borna à révoquer les priviléges concéds aux chrtiens 
et à dépouiller les églises de leurs biens pour en faire des 
dotations militaires, « afin, disait-il, de ramener les fidèles à 
la pauvreté évangiique ,,. Pour la mme raison il leur de- 
rendit d'exercer les charges publiques, de plaider et d'en- 
seigner les belles-lettres. Jaloux de faire mentir la prédic- 
tion de J.-C., il entreprit de réunir les Juifs en corps de 
nation et de rebâtir le temple de Jérusalem. On sait le 
fameux miracle qui survint alors, s'il faut en croire Anmden 
.Marcellin et quelques Përes de l'Église, qui ont rapporté 
le fait d'après des autorités fort suspectes. 
Cependant Julien voulait venger l'empire romain des désas- 
tres que les Perses lui avaient fait éprouver depuis soixante 
ans. Ses premières armes furent heureu.es. Il prit plusieurs 
villes aux ennemis et s'avançajusqu'à Ctésiphon. Il fit pasr le 
Tigre  son armée au-dessous de cette ville; mais au bout 
de quelques jours, ne trouvant ni grains ni fourrages dans 
un pays incendié par l'ennemi lui-reCe, il fut contraint 
de battre en retraite. Supérieur dans tous les combats aux 
lieutenants de Sapor, roi de Perse, il approchait des fron 
tir'res romaines, lorsque, le 26 juin 363, il fut blessë mortel- 
lement. Julien parut regretter peu la vie; il employa ses 
derniers moments à s'entretenir de la noblesse des ,mes 
avec Maxime, et expira la nuit suivante,  trenle-deux ans. 



JULIEN 
' Il nous reste de lui plusieurs Discours, des Lettres, des .Sa- 
tires. La Satire des Csars est très-curieuse; rien n'est plus 
ingulier que ce jugement porté sur les rois du monde par 
l'un d'eux. Son Misopogon , satire contre les habitants d'An- 
tioche, qui s'etaient moqués de sa longue barbe et de sa sire- 
plioirWphilosophiqne, estun chef-d'oeuvre d'esprit et d'ironie. 
[Qu'est-ce que cet empereur Julien, si virement attaqué 
par les uns, si passionnément pr6né par les autres; que la 
religion réprouve comme nn misérable apostat, que la phi- 
Iosophie du dix-huitième siècle assimile à llarc-Aurèle ? 
Peu de guerriers ont eu plus de courage, peu de souverains 
ont porté une sollicitude plus active, plus éclairée dans les 
allaites du gouvernement. Quant au mérite iittéraire, qui est 
beaucoup moins requis dans un empereur, on sait qu'il en 
était assez pourvu pour briller en quelque rang que le ciel 
l'eut fait nattre. Julien ne fUt-il qu'un écrivain, passerait 
sans doute pour un des plus ingénieux de l'antiquité. Ce 
n'est pas cependant sous ce rapport qu'il a méri, d'Ctre 
appelé par Voltaire le second des hommes; et si on ne le 
considère que dans les qualités murales qui pourraient 
justifier un si bel éloge, on l'en trouvera bien indigne. Per- 
fide et intolérant, hypocrite et ambitieux, il n'avait que le 
masque du philosophe. C'est à son intolérance reCe, à 
sa haine effrënée conhe le christianisme, qu'il doit l'en- 
thousiasme dont il a été l'objet dans le siècle dernier. C'est 
une entreprise assez difficile que de déposséder Julien de 
cette réputation d'emprunt. ]l en jouit per droit de pres- 
cription, mème dans les Cudes classiques ; et des écrivains, 
d'ailleurs judicieux, n'ont pas hésité à composer l'histoire 
de son règne des éloges emphaliques d'Eunape, de Ma- 
merlin, de Libanius, qui n'etaient pas des historiens, mais 
des rheteurs stipendiés h la suite dela cour. ]l est tout 
simple que Julien ait ét flatté, il y aait de quoi ; mais ce 
sont là de singulières pièces officiel|es pour londer le juge- 
ment des siècles : si jamais notre histoire est écrite sur des 
documents «lu méme genre, la postérité sera bien instruite : 
Une des choses qu'on est convenu d'admirer dans Julien, 
c'est son éloignement pour la vie publique, sa répugnance 
pour la vie. Quand on lui appren I dans Athènes qu'il est 
associé à la puissance supréme, il pleure, il se désole, et 
soupire après les charmes de sa retraite, il regrette les om- 
brages de l'Académie et sa petite maison de Sucrate. Sa 
révolte dans Lutèce n'est pas plus volontaire que sa première 
adhésion au cfioix qui l'appelle sur les degrés du tr0ne. C'est 
avec contrainte, avec douleur, qu'il accepte le titre d'au- 
guste. Quand il est accusé, il proteste de son innocence 
à la face du ciel et de la terre. Il se plaint que Jpiter ait 
exigé de lui qu'il ceignit le bandeau impèrial ; et il est clair 
que Jupiter l'avait exigé en effet, nos philosophes n'en ont 
jamais douté. Il [ure enfin lar tous ses deux qu'il n'a 
point connaissance du complot trainWpar ses Iégions. 
Arrivé ì l'empire du monde, Julien, désespéré, se réfugie 
au fond de son palais pour y gémir en liberté sur le malheur 
attaché à la toute-puissance. Il renuncerait peut-ëtre à cet 
honneur dangereux, si le génie de l'empire ne lui apparaissait 
pour obtenir son appui : mais que répondre au génie de 
l'empire? Julien était le plus impudent des chadatans. Il 
aimait beaucoup la puissance, tout en ayant l'air de la dé- 
daigner; et il n'en disait du mal, suivant une heureuse ex- 
pression de Voltaire, que pour en dégoter les autres. 
Julien avait appris par expérience qu'on fait les révolutions 
avec des sophistes et des rhéteurs. Quand il occupa le rang 
suprême, il se crut obligé à les ménager; il en fit ses mi- 
nistres, ses favoris, ou plut0t ses admirateurs à titre d'office. 
Sa cour fut une sorte de lycée, oU de tous les talents un 
seul toutefois se perfectionna beaucoup, celui de flatter. 
L'histoire ne citera qu'un homme qui ait été aussi basse- 
ment, aussi outrageusement adulé en sa présence. Quand 
on bt les déclamations auxquelles il daigna préter une oreille 
complaisante, on ne sait ce qui l'emporte, de l'impassible 
vanité de César ou de l'opprobre de ses courtisans. 
 gouvernement investi de tant de gcnres de gloire ne 
• IT. Dt, LA. GO$I¢,S. I Tu 

JULIERS  I 
laissa cependant rien de durable. L'empereur faisait des 
vres, les gens de lettres faisaient des lois, et le paganisme 
avec le double auxiliaire de l'épée et de la plume de Julien, 
tombait pourne plus se releser. Il semble cependant que le 
christianisme ne pouvait se choisir un plus redoutable ad- 
versaire. Julien réunissait pour l'attaquer l'esprit, la mau- 
vaise foi,l'art de manier le ridicule, le pouvoir et peut- 
Cre le goal de proscrire, une valeur signalée par les plus 
beaux faits militaires, une ténacité invincible, un hon- 
heur invariable dans ses entreprises, des afinCs devouées 
jusqu'au fanatisme, des coneiflers qui passaient pour les 
derniers dépositaires de toutes les connaissances des temps 
anciens, des affidés comblés d'or, et qui étaient capables 
de tout pour de l'or : c'étaient bien des garants de sucoEs. 
Le triomphede la cause oppo«ée est au moins un miracle 
que Julien lui-mme ne contesterait pas. 
Charles Nomn, de l'Académie Francaise. ] 
JULIEN (Calendrier), ANNÉE JULIENE. Voyez C- 
LEX'I)I|ER et ANNÉE. 
JULIENNE(Botanique), genre de la ramifie des 
crucifres, établi par Tournefort et adopté par Linné et 
tous les auteurs modernes. Ce genre renferme plus de qua- 
rance espèces. La plus remarquable par la beauté et l'o- 
deur agréable de ses Ileurs est la )ubenne des dames (hes- 
pcris matronalis, L.). Ele croit naturellement le long des 
hales et des buissons de l'Europe méridionale et dans les 
lieux couverts. Elle est cullivée dans les jardin comme fleur 
d'ornement, sous les noms dejuliene, cassolette, beurrde, 
du»tas, etc. Elle produit plusieurs variétés à fleurs dubles, 
qui se multiplient par boutures, en septembre. La plus cu- 
rieuse de ces variétë. monstrueuses est celle connue sous le 
nom defolisflora, dans laquelle les petales, les étamines 
et le pistil sont transformés en leuilles d'un vert tendre. 
L. 
JÇLIENNE (Art culinaire). C'est le nom d'un potage 
fait avec plusieurs sortes d'herbes et de légume», notamment 
des carottes coupées mennes. Dans ces derniers temps on 
et parvenu ì conserver ces herbes hachées au mu)en de la 
dessiccalin, de manièreà faire des juliennes en tout temps. 
JULIENNE (PérioJc). l'oge: PIRIODE. 
J U LI EN N E DE M.-lt ON. l'ove'- Glor. n M_o_. 
JULIEBS, ancien duché dcpendant de la province du 
Rfiin, royaume de Prusse, situé sur la rive gauche du 
lhin, et comprenant dans sa plusgrande étendue 52 m)ria- 
mètres carrés avec près de 400,000 habitants. Il ne se coin- 
posa d'abord que du 9au de Juliers, administre par des 
comtes, qui dès le onzième siècle en étaient possesseurs 
bérditaires, et qui tors de la décadence du duché de la 
basse Lorraine, auquel ils Calent soumis, parvinrent ì ne 
plus relever que de l'Empire. Au nombre de ces comtes, on 
distingue particulièrement Guillaume V, qui, en 1336, fut 
confirmé dans ses droits de souveraineté immédiate par 
l'empereur Louis IV, et élevé à la dignité de margrave etde 
porte-sceptre impérial ; seulement, itdut partager cette der- 
nière charge avec les comtes de Brandebourg. En 1357 
Guillaume V reçut de l'empereur Charles IV le titre de duc. 
De ses fils, l'un, Grard, acquit par mariage le comté de 
Berg; l'autre, Guillaume VI, qui lui succéda à Juliers, Cil 
1362, acquit le comté de Gueldre. Ces pays furent réunis 
sousle due Adolphe, en 1420. Le dernier rejeton m'31e de 
Cetle branche princière, Guillaume VIII, laissa en 151t 
son ducbé ì sa fille 31arie, qui épousa Jean le Pacifique, 
ducde CIèves ; et les duchés de Juliers et de Berg se trou- 
vèrent ainsi réunis avec Clèves, quand, en 1521, ce der- 
nier parvint à la souveraineté. Lors de l'extinction de celle 
maison princière de Clèves, arrivée ì la mort de Jean-Guil- 
laume, le 25 mars 1609, éclata la querelle dite de la suc- 
cession de Juliers, laquelle ne se termina qu'en 1666, par un 
compromis conclu entre les prétendants; et le duché passa 
- la maison palatine de euboorg. Celle-ci, ì son tour, étant 
venue à s'éteindre, en 1762, Juliers, avec ses dépendances, 
passa encore ì une autre famille, pour Cre ensuite reuni  
9O 



714 3ULIEIS 
la Baviêre,  laquelle il demenra attaché in-lu'en fS01, 
la paix de Luuéville l'incorpora à la France et Ch fit le dépar- 
lement de la lor. Le congrèsde ïenne, eu 1815, adjugea 
. la Prusse le pays de Jnliers, sauf quelque parties, demeu- 
gées a Limbourg; et la majeure partie de ce ducfié, de 4 my- 
riamètres carrés environ, açec 40,000 habitants, se troupe au- 
jourd'hui comprise dans l'arrondissement d'Aix-la-Chapelle. 
La ville de JULeS, S, sur la Roër, de 3,000 habitants, est 
une place forte de troisitmeclasse. 
JULIUS, nom d'une race romaine, dont il est dej men- 
tion dans l'histoiri de Romulus, et dont le diiateur Cains 
Julius Cœesar faisait remonter l'origiue à Julius ou Asca- 
uius, fils d'ÉriC, et petit-fils de 'énus et d'Anchise. Parmi 
les fami||es appartenant à cette 9eus patricienne ,. les plus 
connues sont celles qui se distinguaient par les surnoms de 
Jlius et de Coesar. Plusieurs membres de la première 
furent, au commencement de la république, revetus des 
plus hautes fonctions publiques. On explique diçersement 
ce surnom de Coesar, que quelques auteurs prétendent être 
dérivé d'un mot carthaginois signifiant œelœepiant : c'est en 
tuant un de ces animaux qu'unJulius aurait valu  sa race 
ce nom, que le grand César a rendu immortel. 
Parmi les personnages historiques de cette race, il faut 
citer : Sexlus Julius C préteur l'an 208 av. J.-C., le 
premier qui ait porté ce surnom. Puis, avant le dic{a- 
leur Caius-Juliw C=sxn, qui, par adoption, fit entrer 
( an 44 av. J.-C. ) dans la famille Julienne son petit-neveu, 
Caius Octavius, appelé dès lots Caius lulius Coesar Oc- 
• .x iaus (voyez Aççsxa) ; Lucius-Julius Csa, consul 
en l'an 90 av. J.-C., qui combattit les Samnites avec le plus 
grand succ, el pour, prëvenir la dt.fection de tous les 
alliés, proposa la loi qui accordait le droit de cilWaux 
Italiens et aux Latins demeurés fidèles à la cause de Rome 
( Lex Juli de Civitate). Il périt en l'an 87, assassiné 
comme adversaire de Marius et de Cinna. Son frère, Caius 
Jlus Coesm" Sxaxo, qui aait été édile en l'an 90 et 
lait fait une réputation comme orateur et comme poëte tra- 
gique, eut le mme sort. 
JUIE.UX, JU$1ELE. En parlant des personnes, 
on ,lesgne par ce nom, qui est pris tantOt comme adjeclil, 
tanl6t comme substantif, les enfants nés d'une même cou- 
che : on dit desJ'ëres3umeaux, des soeurs.unelles, ou 
des jumeaux. Les enfantements, dans ces accouchements 
extraordinaires, sont communément doubles ; quelquefois 
ils sont triples; on a vu le nombre des jumeaux s'elever jus- 
qu'h quatre et même cinq. Mais detels cas sont très-rares, 
surlout quand les enfants naissent tous viables. En géneral, 
dans ces grossesses composées, le développement des foetus 
est moins considérable que dans les grossesses simples, et 
quand le nombre des jumeaux dépasse le nombre deux, la 
plupart d'entre eux sont des avorlons. 
Ces naissances simultanées semblent resserrer les doux 
liens de la traternité : on trouve ordiuairement entre les 
jumeaux un attacbemeut vif et durable, une grande con[or- 
rnitï de goOts et de sentrments; ils éprouvent aussi les mëmes 
maladies, et la durée de leur existence est souvent la mme. 
Une même similitude se rencontre au physique parmi ces 
frères ou ces sœurs; leur ressemblance est quelquefois lelle 
qu'on ne peut les distinguer sans avoir vécu intimement avec 
eux. Ces ress¢mblances exactes, qui occasiorment plusieurs 
méprises, ont été exploitées sur le thé'Mre de l'antiquite, elles 
scènes française et anglaise ont offert plusieurs rénovations 
des M énechmes. Outre l'anomalie relative ì leur nais-- 
sance, les jumeaux présentent assez souvent des cas de mons- 
truosités. Buffon a cité deux jumelles honoises attacl.es en- 
semble par la partie poetérieure du bassin, et qui ont vécn au 
delà de vingt ans. agucre on vit à Paris un double individu 
plus monstrueux encore, baptisé sofas le nom de Ritta Cfiris- 
tina, et depuis les frères Siamois nous ont offert desexemples 
de diverses singularité» qu'on renconlre parmi les iumeaux. 
On désigne aussi par le mme nom adjectif les produits des- 
tinés à continuer les espèces végétales, etc. : ainsi, des noix, 

JUMIÈGES 
des amandes, sout appelëes jumelles quand ces fruits sont 
doubles ou tripl dans leur enveloppe. En parlant des choses, 
on emploie fréquemment la mme expression : deux lits, par 
exemple, sont umeaux quand ils sont appariés ; deux mus- 
cles pairs concourant au mouvement de  jambe out reçu 
la mëme dénomination. Les artère, les ves .urnelleS, 
les nerfsjumeau: abanldssont on se pedent dans les mus- 
des jumeaux. D" Cxmom£n. 
J UMEAUX DE LA IÉOLE (Les). Vo 
( Gésar et Co.ustantin ). 
J UMELE. En termes de blason, ce mot se dit d'un 
sautoir, d'un chevron ou de toute pièe formée de deux 
jumelles. 
JUMELLE ( #art«).'Voye 
JUMELLES. Dans les arts mécaniues , oe mot s'en- 
ploie généralement pour désigner deux pièces de bois ou de 
mëlal qui sont semblables, et entrent dans la composition 
d'line mactine on d'un outil, comme les jumelles d'une 
presse, d'une tour, d'un étau. 
JUMELLES. VoUleZ 
J UMELLES ( Bloson ), se dit de deux petites fasc, 
bandes, barres, etc., parallèles, qui n'ont que le tiersde la 
largeur ordinaire. 
JUME.NT, ovale, femelle du cheval. 
JUMIEGES, le plus magnifique monastère de laN;or- 
mandie, abbaye cetèbre par la science de ses doctenrs et par 
le tlent de son grand fiistorien, G u i I I a n m e de Jumiéges, 
ainsi nommée, disent les uns, parce que les religieux 
missaienl tout le jour; ainsi nommée, disent les autres, du 
mot ycmma, pierre précieuse, car l'abba)e de Jumieges 
brillait de l'eclat du diamant parmi les monastères du monde 
cfirtien. 
Jumiéges est une presqu'ile, sur la Seine, entre louen 
et Caudebec. Saint Filibert en tut le premier fondateur. 
Filibert etait un des habitués de la cour de Dagobert, et il 
fit une amitié toute cbrétienne avec l'abbé de Saint-Ouen, 
deux belles mes également remplies de ces deux passions 
chrëtiennes, la chmitéet la solitude. Sur le rivage de la 
Seine, iilibert avait rencontré les ruines d'un chàteau ro- 
ndin, brùlé parles barbares; I il b'tit trois églises : l'unœe 
 la Vierge, l'autre à saint Denis, la troisième a int Ger- 
main et à saint PieuTe. Il dispsa des dortoirs pour soixante- 
dix religieux, qui i fit embrasser la règle deSaint»Benoit. 
Ces premiers religieux étaient des hommes presque divins : 
la prière, le travail, l'obéissance, la pauvretë, la prédication 
de l'Evanle, telle était l'oeuvre commune. Les peuples de 
la eustrie bénissaient ces nouveaux verres, qui leur don- 
naient l'exemple des vertus humbles et fortes. Bientdt l'ab- 
baye lut encouragée par son premier miracle. On Cait sous 
le rèe deClovis lier de sa femme Batilde; Ctovis ]I, 
en partant pour fire ses dévotions au tombeau de Jésns- 
Christ, confie  son fils la terre de France, que le jeune 
prince devait gouverner sons l'autorité de sa mère Batilde. 
Le roi parti, le wince écoute avec mépris les sages conseils 
de sa mère, et dans sa désobéissance il entralne son frère. 
Voilà la reine dépouillée par ses deux fils, et Dieu sait ce 
qui fùt advenu si, dans un songe, le roi Clvis il n'et pas 
été averti «les désordres de son royaume. AussitÇt le roi 
part, il arrive ; et lui, le maitre, il est reçu  main arm 
par ses deux lils révoltés. La lutte ne lut pas de longe 
durée : Clovis I1, vainqueur de la rébellion, condamne ses 
deux fils  être énervés; et en conséquence, il leur .fait 
cuire les jarrels. Ce terrible chMiment n'est pas mieux 
expliqué dans cette chronique. Ce qui est çti, c'est qe 
l'œenervement est un supplice du moyen ge : le supplicoe 
restait vivant, mais sans force, sans valeur, ombre mutile. 
Une lois mutilés, les deux enfants de. CIois ne sont 
pour lem" përe qu'un objet de sYmiïthie et de pitié ; o 
e0t dit,  les voir énervés et languissants, Le pde reflet d 
ces deux jeunes gens miguère encore pleins de force et d 
vie. Cltaque jour le roi contait sa peine k la reine : dA! 
danze, contme pourrons-nous voir toute notre vie et 



JUMIEGES 
ndurer la tribulation de nosenfants ? A la fin, la reine, 
se fiant aux décrets de la Providence, conseille à son mari 
de placer les énerves dans un bateau sur la rivière de Seine, 
et que Dieu saura bien oh les conduire. Ainsi fit le roi : 
les deux jeunes gens moutèrent dans la nef en préseuce du 
peuple assemblé, et pousses par l'onde obéissante, ils abor- 
dèrent  l'abbaye de Jumiéges, où ils lurent reçus par Fili- 
bert; la ils vécurent résignés, et ils moururent après une 
longue vie pas. dans la prière. Leur tombeau, retrouvé par 
un grand boubeur, est resté nn des ornements les plus curieux 
deces ruiues magnifiques. Quant à l'antl,enticité de ce récit, 
il n'y a qu',m seul mot qui serve: Miracle! Clovis II, roi 
faineant, n'eut pas, que nous sachions, d'autre fils q,le Cio- 
taire, Cbilderic et Thierry ; il mourut àgé de vingt-six ans 
à peine, sans avoir quitté son royaume et sans avoirénervd 
personne. Mais à qnoi bon se battre contre la légende? La 
légende est le roman de l'histoire, ette en est le poëme et le 
merveilleux ; on l'éooute avec admiration, on la repère avec 
enthousiasme; elle est la terreur des petits enfants, le drame 
du loyer domestique. 
Pas un roi de France qui n'ait protêgé l'abbaye de 
miéges. Le roi Pepin lait de l'abbé de Jumiéges son ambas- 
sadeur près des papes Ëtienne III et Paul t «. Louis le D- 
bonnaire, rot d'Aquitaine, avait ponr chapelain l'abbé de 
Jumiéges. En 84o, Hasting le Danois, le terrible tlaqing 
arrive avec sa bande jn.gqu'à l'embouch,re de la Sine ; il 
menaçait l'abbaye de Jumiéges. Les relifeux se délendent 
en braves gens ; ils sout massacrês sans prie. Sur ce rivage 
sont debarqués Rollou et ses compagnons ; mais l{ollon, 
frappé de respect, et prévo)'ant que st,r cette terre fertile 
serait placé son royaume à venir, respecta les ruines de 
l'abbase. Lorsque enfin les ;ormands de la Seine furent les 
maitres,le la zNeustrie, quand Charles le Simple « e,,t re- 
connu Rollon ma|tre de tout le territoire., à partir de la ri- 
vière d'Epte jusqu'à la mer, » le monastëre commença 
sortir de ses ruines. Le valeureux fils de llollou, Guillaume 
Longue Ëpe, un jour qu'il était à la chasse, rencontre, 
au carrefour de la forêt, un sanglier furieux, qui pousse droit 
au p,'ince : l'Apieu qne le duc Guillaume tient  la main se 
brise, Guillaume est perdu !... Mais, 6 miracle! le sanglier 
passe sans lui laite de mal. Alors Longue Epde, touché de 
ce miracle de la Providence, fait le VœU de relever l'antique 
abbaye, et le lendemain il envoie à cette placeses ouvriers 
les plus habiles. Après la mort de Guillaume Longue Epe, 
et dans la première jeunesse de Ricl,ard 1 *, d,lc de Aor- 
mandie, le roi de France, Louis d'Outre-mer, s'empara 
sans vergogne de tout ce qui tomba so,,s sa main ; il ne 
respecta mëme pas l'abbaye de Jumiéges, dont il prenait 
les pierres pour entourer la ville de Rouen d'uu rempart. 
3ïnt ensuite Richard Il, Richard le Bçn, le véritable bien- 
faiteur de J,,miéges : il se rendait à l'abbaye deux o,t trois 
lois chaque année. Un jour, à l'offrande, le puissant dt,c, 
qui donnait d'ordinaire un marc d'or ou d'argent, mit aux 
oblations un petit morceau d'écorce d'arbre : ce morceau 
d'écorce représentait le bois et le manoir de Vieuonois. 
Dans cette savante abbaye fut élevé Ëdouard le Con- 
fesseur. Les écoles de Jumiéges étaient dejà célèbres sous 
Guillaume le (.'enquérant ; ce fut à ce prince que l'historien 
Guillaume de Jumiégesdédia son histoire De Ducibus lVor- 
¢nannioe. Dans l'abbaye de Jumieges, au pied mëme du 
maître autel, le grand sénéchal d'Angleterre Harold avait 
renouvelé, au nom d'Edouard le Confesseur, la promesse 
que le roi Édouard avait taitede laisser au fils du duc 
bert le Magnifique le royaume de la Grande-Bretagne. Ce 
serment du roi Edouard, apporté par Barokl au duc Guil- 
laume Il, septième duc, qui allait tre bient6t Guillaume le 
Conquérant, ne devait pas tomber dans moe Ame oublieuse; 
aussi bien le duc Guillaume s'en empara-t-il au nom duroi 
Êdouard d'Angleterre. A louen mëme les abbés de Jumiéges 
possêdaient uoe des tours de la ville, la lourd'AI varëde. Ils 
Caient les propri4aire «lu Pont-de-l'Arcbe, et le roi Pldiippe. 
&uguste, qui la 'o,dait fortifier, fut forcé de racheter cette 

-- JU]IUS 715 
position importante. Ils avaientà Rouen la chapelle de Saint- 
Filibert; tout le poisson royal qui se pP.chait à Tour ille leur 
appartenait. Pour un esturgeon, il y eut bataille entre les 
virus de Quilleboufet les domestiques de l'abbaye d e J umiéges. 
Ce fut data l'abbaye de Jmniéges, au plus fort de ces 
guerres et de ces dissensions intestines, que le roi Charles V II 
s'en vint chercher quelques belles journees d'oisiveté et 
d'amour. Dans cette abbaye aux vastes b/timents, riche 
encore malgré le ravage des Anglais, le roi trouva tout le 
bien-être des plus opuleutes mains : des galerieg toutes 
préparées pour les princes; le luxe, la parure, la richesse 
éclataute des beaux-arts. Jamais la belle Agnès ne tir plus 
tendre et plus belle. Après la mort de la Dame de B¢autë, 
ses eutrailles filrent déposées dans un monument placé dans 
la chapelle de la Vierge, dans la grande égli»e de l'abbaye 
de Jumieges, o/ elle avait fait plusieurs fondatious. 
An moment de la révolution, qui est venue couvertir Jn- 
miCes en ruines et les vastes forèts d'alentour en tourbière, 
cette abbaye jouissait de 40,000 livres de rente, et son 
abbë commendataire presentait fi Ixente-huit cures. Mainte- 
uant la pêninsule ne présente à loeil que la tile uniformité 
d'une plaine marêcageuse, au milieu de laquelle on dé- 
cou,re un petit hourgde 1,600 habitants, qm conserve au 
monde le nom de Jumieges. Jules 
JUMIÉGES ( GtlLLAtME nE ). l'oye-- GtlLLe nE 
J.cs. 
JUNGLE ou DJI_NGLE, expre»sion emprunb.e au r61c 
des contributions publiques de Bengale, et pasee dans la 
langue indo-auglaise. On sen sert pour designer d'épais 
fourrés, composes de taillis, dejoncs et de hautes f, taies, 
tels qu'on eu rencontre frequemment aux Iudes orieuta]es, 
surtout au pied de l'Himalaa, sur le rebord du Taraï ou 
Tari.ani, large de 2 à 3 myriamétres, qui s'etend a l'ouest 
jusqu'au Jumina, l'un des aflluents ,lu Ganse. Le sol y forme 
unedépression marécageuse, couverte d'iltpdnétrables brous- 
sailles et dejoncs, d'herbes durées, de bambous, de bulssons 
de piaules grimpanles et rampantes de la nature de l'arbre et 
formaut des forèts tout eutières. Dans ces bass contrêes, 
rendez-vous des hyène% des lynx, des listes, des Iéopard.% 
des éléphauts, des saugliers, des anti lopeg à qualre cornes, de 
myriades de singes, de cerf% de serpeutg gigantequcs, etc., 
rêgne un air qui eugendre les fievres et les goitres. A la 
saison sèche, on br01e les hautes herbes pour en chasser 
les hëtes feroces et nourrir le btail avec les rejetons qui 
poussent anssitét des anciens plants. La flore et la faune des 
jungles ont quelque chose d'eminemment caracteristiquc; 
et comme la chaleur humide du sol y facilite le developpe- 
ment d'une foule de plantes et d'animaux particuliers aux 
plus chaudes rusions tropicales, iesjungtes forment une re- 
marquable coutinuation du monde tropical jnsqu'anx con- 
trées plus Iroldes des premières assises de l'Himalaya en 
dedans de la zone tempéré. 
JUNIUS. Deux familles romaines out porté ce om. 
C'est à la plus ancienne, qui était patricienne et non plé- 
bëienne, comme le dit a tort iebuhr, qu'appartenait le pre- 
mier consul qu'ait eu lome, Lucius Juniu.s Brutus; et 
elle s'éteignit avec ses fils Titns et Tiberins, qu'il envoya 
lui-méme à la mort. Les autres Junius qu'on rencoutre 
mentiounés dans l'histoire romaine appartenaient tous à la 
famille piébéienne, dont il est pour la première fois ques- 
tiou à propos de Lucims Junius Brutus. Outre Marcus 
Junius Bru tus, le meurtrier de Ccsar (que quelques au- 
teurs prétendent avoir appartenu à la famille patricienne de 
laquelle était membre le Iondateur de la république), il faut 
citer les frères De£imus et Marcu$ Junius Brutus, les pre- 
miers qui à l'occasion des funérailles de leur përe, Deci- 
mus Junius Brutus Scoeva, firent célébrer à Borne des 
jeux de gladiateurs ; Deciraus Junius Brutus, surnommé 
Gallzcus, pour avoir subjuué les habilauts de la Galice 
(Glloei), le premier Romain qui partint sur les rives de 
l'Ocçan en Lnsilauie, après avoir franchi le fleuve Létbé 
ou Oblwio, et qui eu 132 partagea les honueurs du triomphe 
90. 



avec Scipion le jeune, vainqueur de Lnmanee ; et Decimus 
]unius Bru[s ,ffbmus. La branche de la race Jnia, dis- 
tinguée par le surnom de .Sizns, apparait pour la pre- 
mière fois dans l'histoire, avec Marcus Junius Slanus, 
çríteur à l'«'poqne de la première guerre punique. Decimus 
Jnius Si/anus, consul en l'an ç2 av. J.-C. s beau-père 
de Marcus Jnnius Brutus, le meurtrier de César apparie- 
riait à cette branche. Il avait eponsé Serviiia, mère de Ju- 
uins Brutus, et veuve d'un premier mari. Sa liiie, Junia 
Tertia, mariée à Cassius Longinus, ami de Brutus, ne 
smurut que sous le règne de Tibère, l'an 2 de notre ère. 
JUNIUS (Lettres de). Ces lettres, un des monuments 
les plus remarquables de la littérature politique de l'Angle- 
terre, parurent sous le pseudonyme de Junius, dans le 
Public Adrertiscr, du 21 janvier 179 au 21 janvier 1771. 
On y attaquait sans ménagement les membres du cabinet et 
les autres hauts fonctionnaires de l'Etat, les tribunaux, le 
parlement et jusqu'au roi lui-mme, mais avec talent, avec 
6loquence et d'une manière qui annonçait chez l'écrivain 
une connaissance parfaite des hommes et des choses; et le 
pouvoir succomba dans un procès qu'il intenta à l'impri- 
meur ,,oodlall, en 1770, pour le faire d«'clarer coupable 
de pufilication de libelle. Une première édition en fut faite 
m 1772 ; en 1812 il en parut une autre édition, en 3 volumes, 
.composée de celles qui axaient déj/ parts, et d'autres qui 
n'avaient pas etWimprimées sous le nom de Juuius. Ce fut 
le fils de Woodfall, le premier éditeur, qui se servit des 
papiers de son père pour la compléter ; il ) joignit une peC 
-face et des remarques. L'ëdition la plus rëcente est celle 
qu'en a don«e ,,ade (2 vol., Londres, 1850), et il y a 
joint un aperçu des dilft:rentes suppositious qui ont été faites 
• sur l'origine de ces lettres. 
Les Anglais mSmes ne peuvent aujourd'hui comprendre 
que trës-diflicilement ces lettres sans commentaire. Ceux 
qui y sont le plus virement altaqués sont le duc de Geai- 
ton et les Iords Mansliehl, I lillsborough, North, liarrington, 
Chatam et Camden, ainsi que les chefs de l'opposition d'a- 
bots : ,,ilkes, Home Tool,e et autres; on n'y dit rien de 
Fox, de lord ltollanl, et «le quelques autres ; il n'y a que 
Delolme qui y soit loué. Du reste, en dëpit du cynisme re- 
publicain dont il y est fait parade, ces lettres sont tout/ lait 
• dans l'esprit constitutionnel ,lu ,ouvernement anglais. Aussi, 
loin «le s'interesser aax nombreux projets de reforme que 
chaque jour voyait Aclore, l'auteur se déclare formellement 
contre les hommes qui voudraient rëd«;ire l'existence du 
parlement à une annee; et plus tard, dans la grande ques- 
tion du soulèvement des colonies de l'Amerique du Nord, 
malgré le bl;me qu'il déverse à pleines mains sur les minis- 
"tres et leur système, il maintint qu'au parlement anglais 
seul appartenait le droit d'administrer et gouverner les co- 
lonies. Le style en est serré, uvent satirique, jamais 
obscur, toujours tort et ferme dans l'expression, sobre de 
mítaphores et d'ornements, et travaillí avec tant de soin, 
qu'on peut regarder l'auteur comme le premier prosateur de 
l'Angleterre. Il ne demanda à l'éditeur (qui parait n'avoir 
jamais su son nom ) et n'en obt|it pour tous honoraires que 
Irois exemplaires', dont l'un richement re.IlC 
Le public se perdit en suppositious sur la personne de 
l'auteur des Lettres de Junius. On les attribua au général 
Lee, à GIover, à Edmond Burke, au Genevois Delolme, au 
• duc de Portland, à lord Templeet à d'autres enco; mais l'é- 
lition qui en a paru en tst2 montre le néant de toutes ces 
suppoitions. Plus tard, on leur donna avec plus de vrai- 
emblance pour auteur sir Pbillipp Francis (ué en t740, 
-mort Ch 18t8}, ancien employé au ministère de la guerre, 
et devenu plus tard membre du conseil du gouvernement au 
llengale, oO il fut blessé, dans un duel contre le gouverneur 
énral Warrcn ll as t i n g s. Le caractère aigre et violent 
de cet bomme, le style de ses discours et de ses lettres, 
nt en effet de si nombreux rapports d'analogie avec le type 
¢aracléristique de Junius, que dans un article de l'Edin- 
vburh l?ev|ew ( 18t ) ltacaula déclarait ces indices suffi- 

JU[IUS -- JUON 
sants pour servir de base à une accusation civile on crimi- 
nelle contre Francis. Cependant de très-fortes objections ont 
aussi Ce faites contre cette supposition. Dans son livre in- 
titulé History of Junius and his Works (Londres, 1844), 
John Jacques désigne comme le véritable auteur des Let- 
tres de Junius lord Georges Sackville, connu par sa par- 
ticipalion à la guerre de sept ans, et corrobore de motifs 
assez concluants, cette Iffpotbèse, dejà émise avant lui. 
D'autres, au contraire, veulent que le veritable auteur ne soit 
autreque Home Took, parce qu'on pretend qu'à sa mort 
on trouva dans sa bibliothëque et le manuscrit original 
des lettres entièrement de son criture, et les trois exem- 
plaires en question, seuls honoraires que l'auteur ait jamais 
reçus pour son œuvre. Sir Daxid Brewster croyait avoir 
découvert le véritable anteur dans un certain Laughn Mac- 
lian, Irlando-Ecossais, qui fut Cu membre du parlement 
en 1768 dans le comté d'Arundel, puis nommé en 1773 com- 
missaire général des guerres, et qui périt en 1777, dans un 
naufrage, à son retour des grandes lndes. Cette opinion n'a 
pas fait fol'tune; et dans le livre qu'il a tout récemment 
publié sous le titre de Some facts as tu the autorship of 
the Letters o.f Junus (1850), sir Fortunatus Dwarris a 
apportd de nouveaux arguments à l'appui de l'opinion de 
ceux qui en attribuent la paternité à Philipp Francis. 
lIentionnons encore, à tilre de sinple curiosité, que dans 
son Junius and his Wors (1851), W. Cramp désigue 
comme l'auteur des Lettres le celèbre lord C b e st e r ri e I d, 
qui n'avait pas moins de soixante-quinze ans quand parut 
la première ; et que tout récemment le Quarterl 9 leview 
a voulu que ce lot lord Thumas Lyttleton, si fameux par 
• ses prodialites, qui termita par le suicide, en 1779, une 
vie passée dans les excès de tous les genres. 
On voit par tout ce que nous venous de «lire que le pro- 
blème est encore loin aujourd'hui d'ètre résolu, et que l'é- 
pigraphe latine donnée.anx Lettres de Junius se trouve par- 
faitement justifiée : Star nominis umbra. 
JUNO.ç appelée cfiez les Grecs ltérë: avec Jupiter 
la plus puissante divinité des Gre«.s et des lïomains, ëtait 
fille de Saturne (Cronos) et de lïhía, soeut de Jupiter et en 
mème temps son épouse. L',rcadie, Argos et Samos se van- 
talent de lui avoir donne le jour. Suivant Homère, Hérê 
fut élevée par l'Océan et Tethys, suivant d'autres par les 
Heures. Tous les dieux assistèrent à son mariage avec Ju- 
piter, qui eut lieu dans l'lle de Crete. Au rapport d'Homère, 
Jupiter l'ípousa sans l'aveu de ses parents; des poêtes 
postCieurs disent que ce fut la ruse qui la mit en son pou- 
voir, et que leur mariage eut pour théâtre l'ile de Samos. 
Après l'avoir aimée déjà depuis longtemps sans ètre payé de 
retour, Jupiter l'aperçuttun jour, comme elle se promenait 
separée de ses suivantes, et venait de s'asseoir. Aussit(t il 
envoya un orage pendant lequel il se précipita à s pieds 
sous la forme d'un coucou, tout ruisselant de pluie et trem- 
blant de froid. Hérè, compatissante, le recueillit dans son 
manteau, et alm Jupiter, reprenant sa véritable forme pour 
jouir de ses embrassements, lui promit le mariage; mais 
leur union ne fut point heureuse. L'orgueilleuse et jalouse 
Hírè ne pouvait s'accommoder des fréquentes infidélités de 
son époux, qui d'aillenrs la traitait avec nne dureté extrême. 
Un jour qu'il lui était arrivé de précipiter dans l'ile de Cos 
ltercule, le favori de son époux, Jupiter entra dans une telle 
colère, qu'il la pendit sur l'Olympe, avec les mains ilCs et 
les pieds allourdis par denx enclumes. Lors de la gnerre dœee 
Truie, comme elle avait endormi Jupiter afin de pouvoir pen- 
dant ce temps-là procurer la victoire aux Grecs, elle n'é- 
cbappa pas sans peine h la grle de coups qne, à son reveil, 
il voulut faire pleuvoir sur elle. 
Dans les poëmes les plus anciens, Hérè est représentée 
comme une déesse ennemie d'Hercule, qui dès sa naissanc 
lui voulut du mal, et qui plus tard le contraria dans toutes 
ses entreprises. Homère généralisa davantage cette idées, et 
il fit de Hér une déesse haineuse, apparaissant toujours 
quand il s'agit de faire avorter un deein. Hêr persécutait 



JUION 
en ouœee toutes les femmes qui obtenaient les faveurs de 
piter, par exemple Latone, Io, Séméié, Eropeet 
•  I c m è n e, de mgme que les enfants qu'il eut d'elles, comme 
Hercule et Bacclms. 11 n'y avait point jusqu'aux Thebains 
qu'elle ne balt, parce qu'Hercule Cait né au milieu d'eux ; 
et elle en voulait morcellement a Atfiamos et à sa famille, 
parce que c'était lui qui avait élevé Bacchus. Sa vengeance 
atteignait aussi tous ceux qui lui préféraient d'autres déesses. 
Elle avait.ce genre de beauté sublime et maiestueuse qui 
in»pire le respect. Lors de la guerre de Truie, elle fut la 
déesse protectrice des Grecs, en faveur de qm elle prit sou- 
vent patoE elle-même aux combats. Les enfants qu'elle donna 
à Jupiter furent Hébé, llithyie, llarset Vulcain; elle 
mit au monde ce dernier sans le concours de Jupiter, et 
pour le narguer d'avoir fait su«tir un jour Minerve de son 
cerveau. Suivant quelques auteurs, elle fut aussi la mère du 
monstre Typhon. 
Hêcg était adorée sur tous les points de la Grèce, mais 
plus particulièrement à Argos, au voisinage de laquelle se 
trouvait son fameux temple Heroeon, et/ Serons, lieu de 
sa naissance et de son mat iage ; aussi dans la multitude des 
surnoms qu'on i,d donnait voit-on figurer celui de 
Vénérable et pomant assez peu chaste matrone, Junon 
était la déesse du mariage; et c'est  ce titre que Borne lui 
avait roué «n culle particulier. Les monumeuts antiques 
nous la représenlent comme vierge, comme liancée et comme 
ëpouse, mais toujours sous les formes les plus nobles. Son 
visage montre les traits d'une éternelle jeunesse avec la 
maturitë de la beauté; il est doucement arrondi sans ètce trop 
plein, et commande le respect sans avoir «'ien de rude. Le 
t,-ont, entouré de cheveux qui sont arrêtes obliqueme»t en 
arrière, forme un triangle doucement arrondi ; les )eux, ar- 
rondis et ouverts, regardent droit en avant. La taille est Iio- 
rissante, complétement developpée et sans le moindre oie- 
faut. Le costume de la dëesse consiste en un chtton, qui ne 
découvre que le cou et les bras, et un himatiou, placë vers le 
milieu de la taille. Dans les statues de l'art arrivé a sa per- 
fection, le voile e«t généralement rejeté sur le derrière de 
la tgte, ou bien manque tout a fait. Le voile était en effet 
depuis les temps les plus reculés le principal attribut de 
Hérê. La statue colossale de Pol)ciëte, qui en tout cas ser- 
vit de modèle au plus grand nombre des images de cette 
déesse, était surmontee d'une espèce de couronne, appelée 
s tephanos, avec les figures en relief des Heures et des Gt,tces, 
et tenait d'une main une grenade et de l'autre un sceptre, 
 l'une des éxtrémitís duquel était perché un coucou. A 
Ruine, les premiers jours de chaque mois et le mois de 
j u i n tout entier I«i éent tousserC. 
ARome, selon les occasions ou l'on implorait son assis.. 
tance, on la nommait tegina, Malrona, Caprotina, Do- 
ndttca, ou Moneta; quand elle présidait au mariage, 
lui donnait le nom de Pronuba; pendant les douleurs de 
l'accouchement, on l'invoquait sous celui de Luclna, et 
dans ce dernier cas le pavot lui était consacré : comme 
Junon, c'était le dictame de Crète. On la rëvérait parti- 
culièrement dans l'fie de Serons, oh elle avait un temple 
superbe, que Cicéron reproche ì Verrës d'avoir pillé en 
revenant d'A»ie. Les fgtes instituées en l'honneur de cette 
déesse étaient appelées Junonies ; les femmes lui faisaient 
de fréquents sacrifices. 
JUO (Astronomie), l'_une des quatre petites pla- 
n è t e s auxquelles Hersehei donnait le nom d'astdroïdes. 
Découverte le I et septembre 1806 par H a r d in g, ì Lilien- 
thal, Junon a l'apparence d'une étoile de huitiëme grandeur. 
La.durée de sa rëvolution sidërale est de 1,59 jours 17 
heures 40 minutes. Sadistance solaire moyenne est ,67, celle 
de la Terre étant prise pour unité. L'excentricite de son 
orbite est considérable (0,56); son inclinaison est de 
13 ° 3"1T'. Schroeter attribue "/t Junon un diamëtre d'environ 
,8 kilometres. 
JUNOT. Voyez ABtASVè. 
JUNTE c'est--dice assemblée. Ainsi s'appelle en Es- 

JUPITER 
pagne toute assemblée Iéçslative ou administrative, qui 
se réunit d'elle-méme ou que Con convoque pour traiter 
d'intérèts politiques ou d'affaires publiq,les. Dans le moyen 
ge on donnait le nom de junte gngrale aux assemblees 
des représentant du peuple qui se réunissaient sans l'appel 
du monarque ; plus tard onappela ainsi les coroEs elles-mg- 
mes. Charles Il nomma line grande junte, composée d'hom- 
mes d'Etat, pour determiner la compétence de l'inquisition; 
c'est ainsi qu'on a dit les juntes 9dnérales de Burgos, 
de Carrion, «le Cuellar. Il y eut ensuite une jt, nte 
iterQle dt commerce et des mines, une autre de la régie 
des tabacs..Xapoléon 1 «" ressuseita l'ancienne signification 
de ce mot en convoquant, en 18o% a Bayonne, sous le 
titre de juntc, une assemblée de 150 représentants de la 
nation espagnole, par lesquels il fit adopter les bases de la 
constitution qu'il voulait imposer/ l'Epace. Lors de l'in- 
surrection des diverses pro, inces de ce royaume contre les 
envahisseurs étrangers, il se forma dans la plupart des, files 
desjuntes, qui finirent par s'absorber dans unejunte cen- 
trale de quarante-quatre membres, dirigeant la défense com- 
mune, ou qui du moins lui restèrent subordonnées. Dans les 
rêvolutions subséquente», qui se sont renouveiées tant de 
fois au oein de ce malheureux pays, on a vu surgir souvent 
encore des juntes prot'inciales ì la suite des pronuncia- 
miento. (:'est ce qui arrive non moins fréquemment dans 
les républiqtles américaines de souche espagnole. 
JI'XTES  Les), imprimeurs céiëbres. I'o/e5 Gtt.t. 
JUPITER, appei par les Grecs Zeus, fils de S a t u r n e 
ou Cronos (d'o0 le nom de Cronion ou «le Cron[des, sou 
lequel il est aussi designC et de Rbea, frère de Veste. 
de Cérès,de Junon, de Neptuneet dePluton, fut 
ì diverses époques differemment compris en Grece. Ds 
la plus haute antiquité, les Pelasges honorèrent en lui I, 
symbole de la natm'e, et son oracle était situé ì Dodone; 
aussi l'appelait-on le roi de Dodone ou encore des Pelasges. 
Dans le m.the orpheen, il est le symbole de la couche su- 
perieure de l'air, de i'étber ; en consequence on laisait de 
Herg ou Jun on, comme smbole de la couche inférieure 
de l'air, sa sœur et son epouse. Dans une conception plu 
elevée, il passait pour le père «les dieux et des homme, 
qualification qui lui est dejà donnée par Homère; mai 
il n'y avait la nullemeut i'idee d'un ètre suprëme et créa- 
teur du monde, idee qui ne se développa que plus tard. 
Comme Zeus HereWs, il était le protecteur du foyer 
domestique, de la famille et de la propriêté, quelquefois 
a«si d'unecertaineconlree et mèmed'une nation tout entiëre. 
En outre, c'est lui qui gouvernait et dirigeait les destinées 
Imrnaines; et il tenait à la main une balance avec laquelle 
il pesait le bien et le mai. On voyait dans son palais deux 
cornes; l'une contenant le mai, et l'autre le bien, et il les 
dispensait aux mortels ì son gré. Cepen,lanl, il semble que 
lui-mème il ait été soumis au Fatum (destin), étre inconnu, 
se cachant dans i'obscuritë. Jupiter etait le plus sage des 
dieux et des bommes ; Atbênè ou M i n er ve etait toujours 
assise ì ses c6tds. Il prenait ses résolutions sans consulter 
personne; et elles demeuraient impénétrables pour celui à qui 
il ne les révélait point. Il venait en aide aux mortels avec 
ses conseils; il écoutait les serments des hommes qui juraient 
par son nom ; et, comme Zeus HorA'ios, il tirait des par- 
jures la vengeance la plus terrible. Il abhorrait lïniustice et 
la cruauté. Zeus Hietesios punissait celui qui ne pardon- 
nait pas au coupable implorant son pardon (ttilietés I. Bon 
et généreux, il voulait que les hommes se montrassent tels 
les uns envers les autres; de lit son surnom de Zeus Xe- 
nies, protecteur des étrangers. Ces idées sur/,eus, qu'on 
trouve déjà dans Homère et les poëtes de son époque, 
quoique limité.es ì certaines localités, furent par la suite 
de plus en plus deveioppées, lorsque la culture phiioso- 
phique des Grecs proêssa. (:'est alors qu'on y rattacha la 
tradition historique. Suivant cette tradition, Zeus naquit et 
fut élevé dans Pile de Crëte, sur le mont Ida. Un oracle 
d'Uranus et de Gœea avait en effet conseilié  Bbéa de mettre 



718 
an monde sert fila sr cette montagne, acre qu'il ne f0t point 
dévoré par Cronos. D'autres traditions le faisaient nu|tre 
à lvlessëne, à OEhèbes, à Olenos en i.tolie, à Égée en Achaie, 
 Lyctos en Crète, ou encore sur le mont Lycée en Arca- 
die. Suivant Homère, il fut /:levé par Goea, qui pen- 
dant la nuit le cachait dans une caverne de la monlagne 
boisée Argoeus, où des colombes lui apportaient de l'ambroi= 
ste. Suivant une autre ver.ion, .sa mëre le confia aux Curètes, 
qui le firent soigner par les nymphes lda et Adrastée, et 
qui en enre-choquant sans cesse leurs boucliers faisaient 
un tel bruit que Cronos ne l'entendait point crier, et au 
lieu de lui, ce dieu avait avalé une pierre enduite de miel 
et roulée dans une peau de chèvre. D'après ne utre tradi- 
tion, il av:,it é|é élevë par les filles du roi de Crète 31eGs- 
sus, Amalthëe et Mélissa, qui le nourrirent du lait de la 
chèvre .malthée. Il grandit rapidement, et dës Fàge d'un an, 
il tait en etat de concourir à l'executinn d'un planconçu par 
sa mre coutre son père. La déesse de la Prudence lui four- 
nit un çomitif, qu'il présenta à Cronos ; et alors clui-ci vo- 
ndt tous ses enfants, qu'il avait j usque alors a alC, et mème 
la pierre qu'on lui aait it avaler en dernier lieu, et qu'en 
souvenir on dt.posa près de Pytho, au pied du Paruasse. Zeus 
delivra alors les fils aincs d'Uranus et de G;a, les Ceutimanes, 
qui étaient enchains dansle Tar tare, dont i'eutree était gardée 
par unCorme dragon, qu'il tua d'après le conseil de Goea. 
Arm par leur reconnaissance de la foudre, qui jusque alors 
était demeurée cachee dans les entrailles de la terre, il de- 
trna son père, Sattrne, qu'il mutila aec le mme coteau 
dnt celui-ci gelait seri aulrefois pour mutiler Uranus. 
.las les Titans ne furent point contours de ce changement 
de règne, et i| surgir alors une guerre de dix ans entre eu 
et les Cronides et les Centimanes. L'Olympe et l'Otbrys 
forent le théAtre de la lutte. Les Tilans comba|taient du haut 
de la p«emière de ces montagnes, et les nouveau dieux du 
haut de |a seconde. Ces derniers l'emportèrent enn, et les 
Titans furent précipits dans le Torture. 
Devenu ainsi en possession complete de la souveraineté, 
Zeus parlaca par la voie du sort l'empire de son prv avec 
ses frères. Il eut pour lot le ciel et la terre, Xeptune l'em- 
pire des mers, Pluton le monde souterrain. Mais d'hor- 
ribles monstres menacèrent encore les nouveaux denx de 
leur ruine. Irritee de ceque ses enf,uts, les Titans, demeu- 
rassent plongés dans les tènëbres d n Tartare, Gœes enfantWdes 
gants qui se révoltrent contre le» nouveaux dienx. Mais, 
eux aussi, ils furent vaincus avec le concours d'Hercule. 
De plus en plus courroucée, Ga enfanta avec le Torture 
Typhon, le p|us effroyable des monstres, que Jupiter 
ne vainquit point sans de granes dilâcultës. Les dienx 
lui dëfrèrent alors solennel|ement la souverainelé et le re- 
connurent pour leur roi. Comtal souverain de la terre, le 
genre humain était l'objet de sa sollicitude toute particulière; 
et il l'extermina complétement, quand il eut reconnu qu'il 
tait devenu corrompu et vicieux. Les Heures et Mercure 
étaient constamment à ses ordres; Ganymède lui servait 
d'échanson ainsi qu'aux autres dieu, après que lleé eut 
perdu cette chare. Son palais etait situé sur l'Of)tope. 
Thémis eka assise près de son tr6ne. 11 épousa Métis, la 
plus sage de tontes les déesses. Mais Uranus el Goea lui 
ayant prédit qu'ellemettrait au monde un enlant qui le dé- 
tr6nerait un jour, il ladévora pendant qu'elle étaitgrosse, 
et enlanta alors de son cerveau Minerve. Sa seconde epouse 
fut Thëmis, de laquelle il eut les Heures et les Parques; et 
sa trosième, .fanon. Il aima en outre la déesse Dionéo 
qui le rendit përe d'Aphrodite ou Yenus; puis MnCu- 
s)ne, de laquel|e il eut les neuf Muses, en pas.nt avec 
elle neufmi; Cérès, sa oear, qu'il rendit mère de 
Proserpine; Eurynome,lamère desGrces,Latone, 
mère d'Apollon et de Diane. Il eut pour ma/ tres»es .. 
parnd les mortelles, Danaé, mère de Pers«e; iiobé, 
la première mortelle qu'il ait aimée et de laquelle/I eut 
A r g u ; Mare, mère de M er c u r c, et se soeurs : Tawgète, 
de laquelle il eut LacCémon, et Eicetre, qui lui donna Dur- 

JUPITEB 
danus; Sémélé, mère de Bacchus; Europe, mèr de 
bl i n o s, de Sarpédon et de Bhadamanthe; C a I I i s t o, mère 
d'Arcas; In, mère d'Eaphos; Léda, mèred'Hélène et 
de Pollux; Egine, mère d'laqne; Antiope, mère 
d'Amphion et de Zethos; Clora, mèe d'Et)os; et enSn 
la bel|e A I c m è ne, mère d' H e r c u I e. On donne aussi aux 
nympbes le nom de filles de Zeus. Il avait des branles 
Dodone, , Olympie ( mais celui-ci cessa bientut), et dans 
la sainte grottedu mont Ida en Crète. Son plus remarquable 
temple en Grèe était celui d'Olympie. Il était en outre 
tout particulièrement honoré à Dodone en Épire, sur le mont 
KaGus en Srie, à .Nemée eu Ar.olide, sur l'Etna, au mont 
Athos et au mont Dictê, d'apres lesquels il portait autant 
de surnoms. Chez les lomains, Jupiter était surnommé 
Férétrius, parce qu'on lui apportait {ferebatur) le butin 
lait a la guerre. Statut, nom que lui donna P, omnlus, comme 
au dieu venu à son secours, quand son armee lu)ait devant 
les Sabins ; Elicius, parcequ'on le conjurait (ehciebatur) 
par des sacrifices ; Coptolinus, de la montagne du mme 
nom, où s'elevait le temple le plus magnifique qu'il cet à 
Ruine; lïali, comme protecteur des grandes routes; 
li, comme defenseur du Latium ; Hospitals, etc., etc. En 
l'invoquant par la prière, on lui donnait la qualification 
d'Oplimus ma.imu. D'ordinaire on lui offrait en sacrifice 
des taureaux. Le chène et le hëtre lui taient particulièrement 
consacres. Tous les cinq ans en Grène, au deuxième mois 
de l'annee, on cé|ébrait en son honneur les jeux ol)mpiques. 
Son attributordinaire etait la foudre, que tantut il tenait à la 
main et que ntOt il faisait porter par un aigle toujours 
place à ses cutês; ce qui est aussi quelquefois le cas pour 
Gan)mède. Il est en outre reconnaissable à une patère on 
coquille, au sceptre, on encore à la doesse de la victoire 
qu'il tient à la main. La couronne d'olivier sauvage difl'é- 
rcncie le Zcus d'bi)tapie du Zeus de Dodone, dont une 
couronne de chne entoure la tète. Le celèbre chef d'oeuvre 
de la Grène, la statue de Zeus O|ympien par Plddias, a, 
est srai, irrëmissiblement pêri pour nous; mais il est ex- 
trëmement probable que les principaux traits nous en ont 
été conservés au moyen des remarquables OEtes de Jupitex 
gravées sur une foule de pierres précienses. Quand il est 
representé as»fs sur son tr6ne, la partie inlé.'inre du corps 
est velue; mais on le représente le plus ordinairement debont 
et nu. Independamment des hymnes d'Homère et d'Orphée 
sur Jupiter, nos asons encore celles par lesquelles Calli- 
maque et Cléanthecélebraient sa gloire. Les anciens recon- 
t.aissaient d'ailleurs plusieurs Jupiter. Yarron ¢ compte 
jusqu'à 300. Cicéron en mentionne trois comme les plus 
considérables, notamment le lits de l'ither, de Coens et de 
Saturne, dans lequel se trouvait réuni tou ce que la tradi- 
tion rapportait desautres. Consuitez Emric David, Yupiter. 
recherches sur ce Dieu, sur son culle et sur le 
metls qui le reprentent (Pari, 1833). 
JUP|TEI (Atronomte), la plus volumineuse des 
p I a n ë t es connues jusqn' ce jour. So éclat, quoique très- 
vif, est moindre cependant que oelui de Vénus, p|anìl 
inférieure la plus voisine du Soleil après Mercure. Jnpiter 
est éloigné du Soleil de 80,000,000 de liues ; le disque de 
cet astre ne paraitrait donc à l'observateur placé snr 
planète avoir que le 27  de la surface qu'il nous pr,-ente 
en conséquence, la lumière el la cillent  conservent dans 
la mme porportion très-peu d'inleasilé ; les doiveat 
dtre 7 foks moindres que fmr notx¢ Tecre. Jupite 
peu pr 1 de nos mois à laite sa révolution autour da 
Soleil; on année est donc d'environ 4,532 I" 3 TM. Il ac- 
complit sa rotation diurne sur ua axe incliné de 66 
ur son orbile, dans l'espace de 9« SG . Ce globe s'écartaat 
pen de l'écliptique, ses saisons, rm tempérire, qoiqu 
glacée par rapport  celle de la Terre, si toutoEoi elle 'est 
point considérablement élevée par une chaleur cnrale 
d'autre phénomnes inconnus, ive9t .re pen variabes; 
et la nuit, qld , presqu  au jour, ple Inenr, dmx; 
plus long est de 5 heures seulement, doit  [arer 



3UPITER 
autrement que chez nousles occupations de ses. habitants, 
s'il y en existe. 
Nos astronomes ont acquis la certitude d, ce mouvement 
par l'observation des taches qui obscurcissent la surface de 
¢tte planète, malgré leur mobilité, leur variation et leur 
dilatation. Ce« taches ne semblent point inhérentes à cette 
pianète, comme celle de Mars; elles est ceintede deux zones, 
appelées de son nom bandes de JupiZer» qui sont paral- 
lèles à son équateur » et qui, si elles ne la touchent point 
n sont très-voisines. Elles ont un certain éclat et sont mo- 
biles ; on aperçoit mme beaucoup de ces macules, qui pren- 
nent capricieusement des formes obliques, larges ensuite, 
puis longues après. On suppose donc que Jupiter est enve- 
loppé d'une atmosphère profonde, h-appée d'une continuelle 
agitation par des vents sans cesse déchainés et furieux, par- 
tieullérement sous son équateur, et qui y voiturent des 
nuages épais et indissolubles. Iécessairement alors ce vaste 
globe serait creusé par des mers incommensurables, dont 
les vapeurs incessantes se formuleraient en une double et 
large ceinture des deux c6tés de sa ligne équinoxiale. 
On doit à Galilée la découverte, en 1610, des quatre 
s atel li te s ou lunes qui gravitent autour de cette vaste 
planète, petits corps l*mineux, eu égard à son volume, que 
l'attraction enchalne aux lois du mouvement de cette masse 
prodigieuse dans l'espace. Elle les occulte de son immense 
diamètre, quand elle se trouve entre eux et le Soleil. Ces 
quatre satellites, postés à différentes distances de Jupiter, 
sont aussi, à diflerentes périodes, ensevelis dans les teuèbres 
du long c6ne d'ombre que ce globe, d'une si grande opacité, 
projette; à leur émersion du c6ne d'or,bre, elles sorter, t 
a une longue distance du disque planetaire. La première 
lune de Jupiter est (.loignée de lui de 96,155 lieues : sa rota* 
tion sur son axe est de lJ I s h 2s m 35s; la deuxième une est 
éloignée de lui de 15,087 lieues : sa rtation est de 3 t 3 b 17 m 
53s;la troisième, de 2,I12 lieues : sa rotation est de 7i 3 h 
59 '= 35  ; la quatrième enfin, de 429,307 lieues : sa rotation 
est de t6] 18hsm7 s. 
Jupiter reste successivement une année entière dans l'un 
des douze sisnes du zodiaque, en le parcourant, puisqu'il 
dcrit ce cercle dans sa révolution autour du soleil. Les 
irrégularités des aphélies de ce globe sont causées par l'action 
attractive sur lui de Saturne, planète dans l'orbite de la- 
quelle il est enfermé. Jupiter, ainsi que la Terre, est sen- 
siblement aplati sur ses ples : ce phénomène est dù à la 
rotation diurne et  la force centrifuge ; et à raison de sa 
dimension et de la rapidité avec laquelle il tourne sur son 
axe, son aplatissement est d'un 13 me, tandis que celui de 
la Terre n'est que d'un 309% Bien que beaucoup plus gros 
que Venus, qui a ses phases comme la Lune, Jupiter n'en 
a pas pour nous, parce qu'elles s'effacent à mesure qu'une 
planète s'éloigne de l'astre solaire, et l'immense distance de 
Jupiter le met dans cette circonstance. Ses opposit/on re- 
viennent tous les 399 jours. Elles ont lieu chaque fois qu'il 
passe d'unsigne àun autre, ce qui en fait douze endouze an- 
nées, temps de sa révolution autour du cercle zodiacal et 
du Soleil. A clsacune d'elles, sa longitude augmente de 30 de- 
grés. Comme toutes les planètes, Jupiter tourne d'occident en 
orient; sa marche nous semble rétrograde; il passe au mé- 
ridien vers minuit. Les fréquentes éclipses de ses lunes ont 
donné nn moyen très-commode d'evaluer les longitudes 
géographiques. A raison de l'inégalilé de leurs révolutions, 
ces quatre lunes doivent prese.ater dans Jupiter un spec- 
tacle var/é et curie,x : car ces satellites peuvent se lever 
ou se coucher, ou passer ensemble au méridien, rangés 
les uns près et au-dessus des antres. Qui croirait, en con- 
templant à l'oe nu cette planète, l'ornement du clel, si 
calme, si brillante, dans le silence des nuits, qu'elle doit 
être en proie à d'horribles convulsions, et bou'eversée 
comme le chans ? C'est ce que préen!ent dans les for té- 
lescopes ses tristes et changeauts aspects. 
JURA grande chaine de monta-,nes, qui s'etend :', prèsde 
400 kilomètres depuis le canton de Schaffouse jusqu'à la Sa- 

 JURA 
voie. Cette cbalne a environ 80 kilomètres de largeur. D'un 
cté, elle apparalt en quelque sorte comme une ligne pa- 
rallèle aux Klpes; puis elle ondule, elle s'incline graduelle- 
ment, et ses derniers plateaux s'effacent peu à peu dans les 
plaines de la Bourgogne. Quelques-unes d ces sommités 
s'élancent jusqu'à 600 et 900 mètres an-dessus des autres. 
Les plus élevés sont : le Ddle, qui a 1680 mètres de hau- 
teur; le Mnntend'e, 1,681 ; le lteculot, 1»720. Le Jura forme 
une limite aturelle cntre la Suisse et la France. Le sol de 
ces montagnes est peu preductif. Du c6té de la Franche- 
ComoE, cependant, on  trouve d'assez belles furts de 
pins. Du c6t. de Saint-Claude, il produit une quantité de 
bois; mais la plus grande partie de ces montagnes est cou- 
verte de pturages, et de distance en distance on y aperçoit 
de vastes et beau chlets. Les hautes sommités du Jura sont 
oeuvertes de neige pendant la plus grande partie de l'année ; 
mais cette neige Iond chaque éoE, et ne lorme par consé- 
quent point de glaciers. L le botanlste a souvent récolté 
desplantes curieuses. Là lechasseurpoursuit le chat sauvage 
et l'ours brun, qui parfois, dan» les longs hivers, s'échappe 
de son antre, et, pressé par la faim, descend jusque dans les 
plaines. En pénétran! dans les montagnes du Jura, dans 
l'tutCieur des hameaux et des ch]ets, le voyageur trouvera 
des hommes an oeur simple, qui ont conservé les mœurs 
les croyances, le caractère des anciens temps. 
X. Mxnmn. 
Le Jura allemand, sihé entre le Bhin et le Main, long 
de 42 myriamètres, tient plutôt de la nature des platea0x, 
sans formation de chaines ni de railCs Iontudinales; en 
revanche il offre un grand nombre d'embranchement% qui 
le coupent à angles droits, et s'abaissent aussi dans la direc- 
tion du nord, tandis que son versant est abrupte au nord- 
ouest, et qu'au sud-est il subit une dépression plus douce 
et en forme de terrasses. Les brèches qu'y font le Danube 
et l'Altmuhl le partagent en trois groupes : 1  le Jura de 
in Forl-2Voire, siteWentre le lhin et la vallée du Danube, 
plateau d'environ 3 myriamètres d'etendue, se reliant h l'ouest 
/ la Forèt-Noire, mais en différant géornostiquement, dis- 
paraissant à l'est dans les hautes plaines de la Bavière ap- 
pelé I Klettgau, et ici ltegau; 2 ° le Jura de la Souube, 
entre le Danube et l'Aitmuhl, de 24 myriamètres de long 
3 ° le Jura de Franconie, entre l'Altmuhl et le Main, ne 
se dirigeant plus au nord, mais an nord-est, de 1 myria- 
metres de long sur 3 de large, atteignant presque partout 
à son point vertical une élévation absolue de 500 mètres, 
ne depassant ce qui l'environne que de quelque 50 mè- 
tres, n'olfrant dès lors le rdief d'une montagne que par 
la profondeur et l'escarpement de ses vallées, devenant 
insensiblement à l'est le plateau du haut Palatinat ou de 
laab, s'inclinant abruptement/ l'ouest vers les terrasses de 
la Franconie, remarquable d'ailleurs par ses cavernes, riches 
en stalactites et en amas d'os d'animaux, telles que celles 
de Gailenrenth et de Muggendod, siluées dans ce qu'on 
appelle la Suisse de Frauconie. 
JUR. (Département du). Formé d'une partie de la 
Franche-Comté, il doit son nom à la chalne de monta- 
gnes qui le traverse. Il est borné au nord par les dëparte- 
ments du Doubs, de la FIaue-Sa6ne et de la C6te-d'Or, au 
sud par celui de PAin et la Suisse, à l'est par la Suisse et 
le departement du Douhs, à l'ouest par ceux de Sa6ne-et- 
Loire et de la C6te-d'Or. 
Diisé en 4 arrondissements, 3 cantons et 58 com- 
munes, il compte 3t8,99 habitants; il envoie deux dépu.- 
tés au corps Iëgislatif, est compris dans la septième division 
militaire, l'académie et le ressort de la cour impériale de 
sançon ; il forme lediocèse de Saint-Claude, et compose 
treizième conservation des fordts. Il possè.te 7 col[éges, 
4 pensions, 580 éeoles primaires. 
Sa superficie estde f96,9'9 hectares,dont lg3,11  en ieeres 
labourables; 115,015 en bois; 79,009 en landes, pgtis, 
brnëres, etc.; 50,57 en prés; 1,027 en vignes; 2,39 
en vergers, ppinières e! iardins; 1,82 en propriétés bAtiss; 



20 
1,423 en tangs, abreuvoirs, mares, canaux d'irrigation ; 
33 en oseraie.s, aulnaies, saussaies; 29,780 en forêts, do- 
maines non productifs; 7,527 en rontes, chemins, places pu- 
bliques, rues, ec. ; 4.,09t en rivières, lacs, ruisseaux, etc. 
Il paye 1,341,302 francs d'imp6t tune,er. 
Situé en presque totalilé dans le bassin du Rh6ne, la 
Loue, l'Oignon, leDoubs, le Seisse, l'A,n et la Bienne l'ar- 
rosent. Le sol est riche; il produit du blê, du seigle, du 
cl,anvre, du lin. Les vins d'Arbois, de Poligny, de L'Étoile, 
«le Saiins ont q,elque rputation. Il s'y fait une élève consi- 
dérable de gros bétail, surtout dans les hautes valldes. L'ex- 
ploitation minérale est également très-importante: on y 
trouve de nombreuses satines, de belles carrières de marbre, 
d'albtre, du g)pse, des pierres meulières, du salpêtre, du 
scl,iste, de la terre à porcelaine et à poterie, de la tourbe, 
du fer, dont le travail constitue la branchela plus importante de 
l'induslrie manufacturière. Il se fait en outre un grand com- 
merce de bois, de fer, de fromage, d'horlogerie et d'ébéniste- 
rie. Cinq rontes impériales, OE6 routes départementale«, 5,009 
cl,emins vicinaux, et nn canal, celui du Bhneau Bhin, sil- 
lonnent ce département, dont le chef-lieu est Lons-te 
$ luthier. 
[ Les villes et endroils rcmarquables sont : D  l e, S a i n t- 
C l a u d e, S a !  n s, Poli9ny, chef-lieu d'arrondissement, 
avec 5,911 habilanls, un collége, une inspection forestière, 
une industrie assez aclive ; celle ville, que des incendies ter- 
ribles ont fort amoindrie, est le rendez-vous de tous les 
joyeux buveurs de la Franche-Comt« , ainsi qu'Arbois, qui 
n'en est distante que de 8 ltilomtres et où se trouve le 
tribunal de première instance..A-ozeray est une ville qui 
a apparlenn jadis à la maison d'Orange. On y arrive par 
une penle escarpée, et an bord du plateau sur lequel celle 
ville e,t btie on aperçoit les ruines d'un ch-,tteau : c'est 
tout ce qui reste de la domination de ses anciens mallres. 
Charapagnole est ensevelie au fond d'une gorge, et les 
montagnes qui l'enlourent sont couvertes de sapins. Mais 
les jets de lumière qui s'élancent dans les airs; le bruit 
des flols «le .la riière pressés par les écluses, et le choc des 
marteaux, la révèlent au voyageur avec ses forges et son 
indulrie. Bien des localités sont remarquables encore. Nous 
citerons entre autres la vallée où se trouve la source de 
PAin ,. celle dela source de l'lsère, les ruches de Sirod, et 
les ruches de Baume, l'nu des points de vue les plus Cran- 
ges qu'il soit possible de voir. Plusieurs harneaux appellent 
l'attention des voyageurs par leurs monuments d'antiquilé, 
par leurs souvenirs du moyen age. Les villages, les ha- 
meaux du Jura, ont un aspect riant. La maison du fermier, 
comme celle du riche proprietaire, est batie en pierres de 
taille, blanchie avec du pl-,ttre, et recouverte en ttùles ; un 
verger rempli d'arbres fruitiers l'entoure, une haie d'aubé- 
pine la protège; souvent une treille ou nn résean de feuilles 
de lierre la tapisse. A quelques pas de là est le champ de 
biWou la vigne, et la porte d'entrée de la demeure hospi- 
talière s'ouvre sur la grande route, comme pour offrir ,m 
asile aux voyageurs. Dans les monlagnes, le mode de cons- 
truction n'est plus le même : au lieu de la petite maison 
bourgeoise si bien blanchie, si nette, si rém)lière, voici le 
cbfilet avec son toit aux larges ailes, souvent chargé de 
neige, ses murailles très-basses, surmentées d'une construc- 
tion en bois, et sa grande cheminée, sous laquelle s'abrite 
toute la famille du laboureur. X. MArmot. ] 
JUBANDE (dejurare, jurer, à cause du serment que 
les jurés prètaient en entrant en foncJions). On appelait ainsi 
sous le régime des c or po ratio n %.Ou communautés d'arts 
et métiers, la charge des jurés on syndics, choisis parmi les 
matiras par leurs pairs, qui devaient veiller à l'exécution des 
règlements et à la conservation des intérêts commnns. A 
cet effet, les portes de chaque atelier leur étaient ouvertes 
à roule heure, et pour rendre la surveillante plus facile, 
elles ne devaient Cre ferreCs qu'au loquet, C'était encore 
h eux qu'était remise la fonction de décider sur le che.f- 
d'oeuvre qui conférait la maltrise et sur les prenves et con- 

ditiens d'admissibilité des nouveaux membres. II préi- 
daient les assemblées, mais n'exerçaient aucune espèce de 
juridiction, lls Caient Cus pour deux ans. 
JUPASSIQUE (Terrain), on ÊTAGE OOLITIlIQUE. 
Les géologues nomment ainsi une division du sol dimen- 
taire, qu'on a reconnue d'abord dans les montages dl Jura 
comme formation indépendante entre l'étage du lias et le ter- 
rain crétacé. On y distingue, en allant de haut en bas, les 
trois sous-étages suivants : ! ° l'oolithe supérieure, formee 
de nombreuses couches d'arçle blanc ou ]aun',ttre, ou en- 
core de calcaires divers : c'est à cette diversion qu'appar- 
tiennenl les pierres lithographiques de Solenbofen (Baviìre); 
2* l'oolithe moyenne, qui commence par un groupe composé 
d'abord de sable et de gr calcarifères, puis de plusieurs 
assises de calcaires, parfois magnésiens, le tout reposant 
sur de puissantes couches d'argile blee, à laquelle sont 
subordonués des lits de calcaire marneux et de schiste» bi- 
tumineux, de l'hydrate de fer globulaire (exploilé sur divers 
points de la France, à Chàtillon-sur-Seine, à Launoy, elc. ), 
de nodules de silex et de calcaire ferrugineux, elc.; 3" l'ou- 
lire in/ërieure, qui se compose principalement de calcaires 
jaun'lres, bruntres ou rougetres, chargés d'hydrate de 
fer, et reposant snr des sables calcarilères; suivant les Io- 
calités, on y trouve de la terre  foulon, du calcaire gros- 
sier, du grès magnésiŒeere, etc. ; c'est a l'oolitbe inferieure 
qu'appartient une partie des minerais de fer en grains qu'on 
exploite en France. 
Toutes ces divisions sont très-riches en débris organiques. 
On y trouve notamment beaucoup de coraux (formant 
quelquefois des bancs entiers)des astéries, des échinites, 
des mollusques univalves et bivalves ,-des belemnites, des 
ammonites, des crustacés, des poissons et des sauriens. Léo- 
pold de Buch a parfaitement traité et décrit dans son livre 
Le Jura en Allemagne (Berlin, t8,9) le dèveloppement et 
la propagation de la formation Jurassique en Allemagne. On 
la trouve comme seconde zone presque tout aulour du bassin 
du Rhin, en commençant par le c6té allemand de Bàle, 
se prolongeant dans toute la montagne de Souabe, au delà 
de ffoerdlingen et de Ratisbonne, presquejusqu'h Cobourg; 
pois de nouveau en Westplaalie, dans la forêt de Teuto- 
burg, dans les chaines du Weser et dans les premiers avant- 
coureurs dn Harz : on la trouve également dans la haute 
Silésie. Dans les Alpes elle est très-puissamment développée, 
mais de nature molle et Iortement adhérente aux plus an- 
ciennes couches. Les/ormations jurassiques sont aussi très- 
répandues en Italie, en France, en Angleterre et en Russie. 
En Virginie ( Amérique du tNord , elles contiennent de pois- 
sanles couchesde houille. 
JUBATS (jurati), nom que l'on donnait non-seulement 
à Bordeaux, mais dans une grande partie de la Guyenne, de la 
Gascogne et du Béarn, aux magistrats appelés par l'élec- 
tion populaire h exercer l'autorité municipale. Ce nom 
rappelait une ancienne inslitulion des premiers /tges de la 
nation française. Les jnrats exerçaient dans toute sa pléni- 
tude la police civile et judiciaire : les colléges, les acadé- 
mies, tout ce qui tenait au rgime inlérieur de la cité, 
étaieut dans leurs attributions. Ils étaient gouverneurs nés et 
gardaient les ciels des portes de la ville quand il y en avait. 
Le corps municipal entier s'appelait la jurade. Le'nombre 
de ses membres varia moins d'après la population que d'a- 
près les usages locaux. A Bordeaux, les jurais se recrutaient 
à nombre Agai parmi les nobles, les avocats, les marchands; 
OeIIX-Ci devaient renoncer à leur commerce, parce que leurs 
fonctions les anoblissaient. On les appelait9entilshommes 
de cloche, parce que des volées de cloche avaient salué leur 
élection. Leur nombre varia suivant les époques ; il n'était 
plus que de 6 en i789, après avoir monté jusqu'à 80. Les 
jurais de Baronne s'intitulaient les douze pairs de la ville. 
Le signe distinctif principaldesjurats dans le midi était un 
chaperon de deux couleurs. 
JUBÉ (dejurare, jurer, prêter serment). On nomme 
,uré celui qui n'ayant point de caractère public de magis- 



J UBÉ -- JURISCONSULTE 
trature, est appel momentanément devant un tribunal pour 
V rendre, sur certains faits, une déclaration d'après laquelle 
ls magistrats appliquent la loi. 
On appelait autrefois jurés, dans les ca r po ratio us, 
ceux qui avaient fait les serments requis pour la maltrise : 
un chirurgien juré, un écrivain juré ; et dans les corps d'ar- 
tisans, des hotnmes qui étaient préposés pour faire observer 
les statuts et règlements à ceux de leur métier. L'écolier 
j,«rë était celui qui avait fait ses éludes de pbilosopltie dans 
t'université et qui en avait le certificat, pour gtre ensuite 
reçu maltre s arts. 
JUIPdDICTIOtX. Ce mot est formé des deux mots la- 
tin%jus, droit, et dicere, «lire. Dans sa signification propre, 
il s'entend du pouvoir non pas seul.ément de juger, mais 
d'appliquer la loi aux cas particuliers, car il est des cas oi 
le magistrat exerce sa juridiction sans avoir aucun jugement 
 rendre. ,, La loi confère une juridiction, a dit Henrion de 
Panscy, toutes les lois qu'elle donne le droit d'appliquer 
les lois générales aux cas particuliers par des décisions dont 
elle règle la forme et qu'elle prend l'engagement de faire 
exécuter : ainsi l'action de la juridiction commence au mo- 
ment où le juge prend connaissance de l'affaire qui lui est 
soumise, et finit à l'instant où il a definitivement prononcé. 
Jurad«ctlon se dut aussi (lu ressort, de I étendue du li.u ou 
le juge exerce son pouvoir. Enfin, on entend encore par 
juridiction le tribunal o0 l'on rend la justice. 
On dit/aire acte de juridaction, quand le magistrat 
exerce son pouvoir. 
On appelle degrds de juridiction les différents tribumux 
devant lesquels on peut plaider successivement pour la 
meme affaire, et qui constituent dans leur ensemble la 
hiérarcltie judiciaire. 
Le caractère et l'objet de la juridiction sont complétement 
définis par les mots suivants : connailre, ordonner, jttgcr , 
punir, contraindre à l'exdcution, qui sont la traduction «le 
l'ancien adage romain, noria, vocatio, cognitio,)udiciunt , 
executio. 
Considérée sons un autre rapport, la jtaridiction se dé- 
termine par trois objets principaux, le territoire, les 
!res et les personnes. Le magistrat n'a de juridiction que 
oottr le territoire qui lui est assigné par le» lois. Hors de la, 
d n'et plus qu'un simple citoyen. Les matières sont la 
source d'une foule de sulMivisions de la juridiction : ainsi. 
on connalt la juridiction civile, criminelle, commerciale, 
administrative, militaire ; la juridiction contentieuse et la 
juridiction volontaire ou acieuse, la juridiction propre et 
la juridiction delc3uée, la iuridiction ordinaire tt la jqri- 
diction exception-elle, la juridiction prorogée, la juridiction 
en premier et en dernier ressort. Les personnes détermi- 
nent souvent la juridiction : ainsi, la qualité de négociant 
marchand ou banquier, entralne la juridiction commerciale ; 
la qualité de militaire sous les drapeaux entralne en général 
la juridiction des couseilsde guerre, etc. 
La juridiction contentieuse s'exerce toutes les lois que 
l'autorité compétente est appelée ì statuer sur des luiCets 
contradictoires, après des débats réels ou présumés tels par 
tu loi, et termine la contestation par un jugement. La ju- 
ridiction rolontaire, au contraire, s'exerce toutes les fois 
que le magistrat procède ou qu'B prononce sur mie demande 
qui n'est pas susceptilile de contradiction, toutes les fois, 
en un mot, que l'acte émané de lui n'intervient pas entre 
«les parties dont l'une poisse re contrainte d'y adhérer. 
E. nf. CaLtm:oL. 
JURIDICTIO. ECLÉSIASTIQUE. Voge-- Ec- 
CLI-"$1 tSTIçLE ( Juridiction ). 
JUItiEU (Ptan), célèbre ministre protestant, naquit 
a lh.r { Loir-et-Cher), le 2:t décembre 1637, et mourut à 
Rotterdam, le Il lant'ier 1713, après une vie remplie par 
d'immenc. travaux et d'interminables controverses. Après 
avoir fait ,le bonnes éludes à l'académie de Sa«»mur et ri- 
sité les université ,!« IIoll«tnde et d'Angleterre, il fiat cltoisi, 
à la mort ,le .n pbrc, I:Om" lui sucrêder dans le ministère 

DI[:'r. nE t. e-oNr$'I;S. -- T. XI. 

721 
pastoral, et eut pour guide le célèbre D u m o u I i n, sotl ourle. 
Après avoir exercé quelque tempa le ministëre, i'. devint 
successivement professeur d'hëbrcu à Sedan, et de lhéo- 
logie à Rotterdam. Il aécrit une foule d'ouvrages dont voici 
les principaux : t ° Traitœe de la Ddvolion ; 2 ° Apologie de la 
morale des réformes, en réponse  Arnauld ; 3 ° PrdserratLt 
contre le changement de religion, en réponse à Bossuet; 
4 ° Lettres sur/'llistoire «les Variations et les Avertisse- 
metats aux Protestants; 5 ° Traitd de la Puissance de 
l'Eglise ; 6 ° Vdritd de l'Église; 7 ° Histoire des Dogmes et 
des prati9ues de la Religion des JuoEs ; 8 ° Prgjugds légi. 
rimes contre le pupisme ; 9 ° Lettres pastorales... Tout le 
non,le s'accorde à louer le feu de son doquence ; mais 
coreligionnaires eux-mgmes lui ont reproché le trop de véhé- 
mence de son zèle, le trop d'abandon de sa polémique. Il 
se laissait entralner aux premières impressions, ce qui l'o- 
bligeait à revenir souvent sur ses pas et à tomber dans des 
contradictions que ses ennemis ne manquaient pas de re- 
lever avec grand bruit. Ses terribles adtersaires furent le 
eplique B a y I e et l'Alaquent évgque de Meaux. L'Histoire 
des luriations et les A verlissements aux Protffants lui 
causèrent d'amers chagrins. La révocation de l'Adit de Nan- 
tes acheva de I exa. pírer. Dans son livre sur I En«tdde 1 l- 
9lise, il avait tabli son fameux système des points londa- 
mentaux, sur lequel on a tant écrit depuis. Lamennais. 
dans son premier volume ,e l'Essai sur l'indçlfœerence eu 
mutin.re de religion, a repris cette grande question, et I'a 
traitée de la manière la plus complbte : sur ce point il n'v 
a zlus matière iz controverser. Le sstème des points fon- 
damentaux, de quelque manière qu'on l'envisage, condui- 
rait droit au scepticisme et h l'indilférence religieuse, rbC- 
rique et pratique. Du reste, ces discussions ont singulière- 
ment perdu de leur importance. C'est au pur déisme que 
doit s'arrgter la réforme : on ferait de valus efforts pour 
l'arrëter dans sa marche. Ltather et Calin dtaient loin de 
prévoir les cons.quences des principe« qu'ils posaient. 
J.-G. Cn&ss.«6tor. 
JUP,|SCOXSULTE. C'est celui qui est versé dans la 
science du droit, et fait profession de donner des conseils. 
« C'est, dit Henrion de Pansey, l'homme rare doué d'une 
ru«son furie, d'une sagacité peu commune, d'une ardeur 
inlatigable pour la méditation et l'Cude, qui, planant sur la 
sphëre deslois, en claire les points obscurs, et fait briller 
d'«an nouvel éclat les vérités connues; qui non-seulement 
aplanit les avenues de la science, mais en recule les bor- 
nes; qui indique aux Iégislateurs ce qu'ils ont à luire, et 
laisseà ceux qui voudront marcher sur ses trace» un Iii 
qui les conduira sOrement dans cette vaste et p6nible car- 
riëre. » 
Les anciens donnaient à leurs jurisconsultes le nom «le 
sage et de p',losophe, parce que la philosophie renferme 
les premiers principes des lois, et qu'elle a, comme la juris- 
pru,lcnce, l'amour et la pratique de la justice pour objet. 
A Rame les juriseonsultes étaient ì peu prìsce que sont 
chez nousles avocats consultants. Ils ne se confondaient 
pas avec les avocats plaidants ; leurs fonctions étaient toutes 
distinctes, et chacun sait l'immense autorité qu'ils curent 
sur le droit romain, et comment, par suite, leurs 
doctrines ont servi de base à toutes les Iégis|ations 
dvrnes. 
E France l'action des juriscousultes a été moins puis- 
sante; elle eut cependant aussi une grande influence. Nous 
pouvons aussi nous enorgueit tir h juste tilre de jurisconsultes 
dont la science et la haute raison ne le cèdent pasà ceux «le 
Borne. Eux aussi, comme leurs devanciers, ont eu l'lion- 
neuf de fonder par leurs écrits toute une législation nou. 
relie. Lorsqueles Coutumes furent rdigíes, on ch vit 
paraltre de savants commentaires, dont l'autorité devint 
immense dans les tribunaux. Quels noms aussi que ce«ix 
d'unC u j as, d'un Da mat, d'un Po tltier, d'un Dnmon- 
Il n: clé., etc. Lorsq«aïl s'agit de donner/ natte législation 
ut «rtère plus précis et plus riel, par la rthlaction de nos 
• 91 



?22 
codea, les jurisconsulfes curent encore une belle mission 
à remplir. La France en comptait alors de célbres par leur 
sienc; et le Code Civil, sorti de leurs vastes travaux, sera 
toujours le plus beau monument des temps modernes. 
51ais le r01e des jurisconsultes n'a pas cessé avec les mo- 
difications de nos lois. Quelque claires que soient les pres- 
criptions du léislateur, il ne peut jamais tout dire; il statue, 
mais il ne discute pas ; la loi est un résultat scientilique, 
mais elle ne peut pas tre un traité de tfiéorie. Or, à cté 
et an-dessus de la loi, il y a des principes en vertu desquels 
elle est. Elle n'a paspu prévoir ellc«nme toutes les consé- 
qnences, toute la portée de son action ; alors entre elle et 
les magistrat« chargés de l'appliquer vient se placer le juris- 
consulte, qui par ses travaux en explique le sens, en 
cherche resprit, et prépare ainsi les dëcisions de la justice. 
Nos codes en effet ont déjà donné lieu à de savants com- 
mentaires et " de profonds traités. Les jurisconsultes aux- 
quels ces ouvrages sont dus ont immddiafement pris place 
parmi les phls graves autorités de la science du droit. 
Aucune loi, aucun acte de l'autorité n'interdit de prendre 
la qualite de jurisconsulte, mais peu de personnes sont di- 
gnes de ce beau titre, car il suppose un caractère scienti- 
tique qui n'ai,partie..t pas à l'avocat ordinaire. 
E. nE Cu^nnoL. 
JUI, ISPRUDENCE. Ce terme se prend dans une do»ble 
acception : il s'entend d'abord de la science du droit, et dans 
ce sens il est synonyme de d r o i t. C'est à cette signification 
que se rapporte la detinition qu'en donnent les lois romaines : 
Divinarum arque hzmanarum rerum notitia, justi atque 
ijusti scientia (Conrtaissance des choses humaines et di- 
vines, science dujuste et de Finjuste. ) Sous ce point de vue, la 
iurlsprudence embrasserait donc tout ce qui concourt à former 
l'ensemble de I'£tat; c'est le droit dans sa plus haute ex- 
pression. Mais sous un autre rapport on entend de nos jours 
par jurisprudence runiformite non interrompue de plusieurs 
artCs sur des questions semblables : c'est en ce sens que 
l'on dit la jurisprudence des tribunau:v, la jurisprudetce 
est fixée sur tel ou tel point. Le législateur en effet ne 
pose que des principes géneraux, des rëles applicables aux 
espèces qui se rencontrent le plus uvent : il n'a pas l,U 
prévoir les variétés inlinies des interèts humains, car il n'est 
pas oesuiste; il procède par catégories larges et gënérales. 
Mais après lui vient le magistrat, dont la mission est de 
rechercher l'esprit des lois, d'en pénétrer les motifs pour 
conclure des cas prévus à ceux qui ne le sont pas. 
La jurisprudence est le complément de la loi, puisqu'elle 
étend et explique ses dispositions. « On ne peut pas plus se 
« passer de iurisprudence que de loi, » a dit de nos iours 
M. Portalis, et Baron, avant lui, disait : « La jurisprudence 
« est i'ancrede la loi, comme la loi est rancre de l'Eat. » 
Le soin de fixer et de maintenir in jurisprodence en France 
apparlient à lacent de cassation. E. sE CtOL. 
JURISTE. C'est celui qui écrit ou a écrit sur les ma- 
tiëres de droit ; cette expression a à peu près la mëme 
signifioetion que le mot jurisconsulte : peut-ètre a-t-elle un 
sens plus génërai, tandis que l'espression de jurisconsulte 
est restreinte ì ceux qui sont véritablement savants ; mais, 
en fait, la différence est peu sensible et fort peu essentielle. 
JURJUBA ou DJURDJURA, cfiaine de montagnes 
de rAIgerie, formant une division du petit A t I a s, auquel 
elle se rattache par le sud. C'est dans cette chaine que 
trouve le fameux défilé des B i ban s. Ee est peuplée par des 
[ribus kabyles agricoles très-industrieuses, et recèle dans 
ses flancs des mines de fer. Le Jurjura a etWen 1846 le 
lliéàtre de plusieurs combots acharnes contre les Kabyles 
de ces monta©-mes, qui furent enfin rëduits à l'obéissance par 
le maréchal Bugeaud. 
JURY. Le jury est la réuaion des jurés assemblés 
pour statuer sur une affaire. Cette qualification s'applique 
e?alement an corps général des jurés : ainsi l'on dit : l'ins- 
titution du jury. On a aussi donné cette dénomination à cer- 
taines commissions cbargées d'un examen particulier, telles 

JURISCONSULTE  JURY 
que le jury de l'exposition des produts d 
dustrie, le juryde l'exposit ion des beaux-af 
le ury d, expropriation, etc. 
Les jur dans l'origine n'étaient autre chose que les 
prud'hommes ou les pairs choisis pour prononcer sur une 
affaire dterminée. Au moyen ge, on trouve ces sortes de 
jugements établis en Allemagne, en France, en Angleterre 
et en ltalie. Ils disparurent peu à peu devant la féodalité, 
qu'ils contrariaient, et on ne les vit reparattre en Angleterre 
que dans la._g_rande Charte, et en France à la révolntion 
de 1789 ; mais ars le jurs'éleva à toute la hauteur d'nne 
institution sociale, et on la regarde comme l'une des plus 
fermes colonnes des libertés publiques. Aux Itats-Unis, ?ès 
le premier lotir de l'indépendance anéricaine, la liberté s est 
placée sous la garantie du jury, et quoique le plus jeune des 
trois pas, rAmërique est celui qui a donné au jury le plus de 
force, le plus d'Cendue et le plus d'autorité. La France ne 
parait que snr le troisiæme plan, et tandis qu'en Angleterre 
et aqx Ëtats-Unis les iurés décident presque toutes les af- 
faires civiles et criminelles, leur juridiction ne s'ctend c,l;ez 
nous que sur les matières du grand criminel. 
Le nry est à la fois une institution iudiciaire et politio, ue. 
Comme ilstitution judiciaire, on en a beaucoup conteste les 
avanlages : qve n'a-t-on pas dit et sur rincertitudedesjuge- 
melts des jurés, et sur les chances nombreusesd'erreurquïls 
peuvent commettre'/Cependant les garanlies qu'il présente 
sont grandes; si les décisionssont souvent contradictoire&, d'un 
autre c¢)t il n'est jamais intëressé à persister dans ses er- 
reurs, parcequ'il est irresponsable et que chaque jury par* 
ticulier reste indépendant et libre dans son action. Dans les 
tribunaux, au contraire, inamovibles et permanents, bi- 
rarchiquement organisé.s, les erreurs se perpétuent plus fa- 
cilement, et il de lent souvent très-difficile de modilier une. 
iurisprudence vicieuse. Avec un jury, une mauvaise légis- 
lation est impossible, parce qu'il est l'expression fidële des 
remets d'tre pays. Il faudra que dans un temps donné elle 
se corrige et se modifie. Les tribunaux ne produiront 
jamais de tels résdtats : accoutumés au re«pect absolu 
de la loi, ils en consacreront de plus en plus :es vices et 
les erreurs. 
ltlais si l'on envisage le jury comme institution poli'tique, 
on voit qu'il exerce une grande influence sur les destinées 
reCes de la société. En effet, la véritable sanction des lois 
politiques se trouve dans les lois penales : le jury, qui cons- 
tate et apprécie les actions que ces lois punissent, est donc 
en réalité le maitre de la sociëté. D'ailleurs, l'institution du 
jury, en appelant le peuple ou l'une des classes de la nation 
sur le singe du iuge, tend à faire pënëtrer dans I masses 
les mœurs judiciaires et le sentiment de la dignite humaine. 
L'on peut faire cette observation aux Etats-Unis, o le jury 
s'applique  presque tous les objets qui sont du res-off de 
la justice. Aussi nulle part l'esprit Iéï.iste n'existe-t-il 
plus profondement et plus gencraleme»t que dans ce pays. 
L'Angleterre regarde le jur comme la première de ses ins. 
titutions poliliques. En France, au contraire, le jury est 
trop peu répandu, les hommes ont de trop rares occasions 
d'en remplir les fonctions, pour que les effets que nous 
venons de signaler 3, soient bien sensibles. 
Le jury, dans notre organisation judiciaire, est l'image 
de l'équit : c'est hli qui determine ce qui est bien et ce qui 
est mai, c'est lui qui est chargé d'appliquer cette loi morale 
que chacun porte dans sa conscience et qui a éclairé tout 
homme à sa venue en ce monde. Toutes les questions de 
moralilë rentrent dans ses attributions ; celles de Iëgalité sont 
de la compétence exclusive du juge. Le jur alCate qe 
tel fait existe avec tels ou tels caractères; après lui vient 
le mastrat, qui détermine si ce fait rentre dans les dispo- 
sitions de la loi. Il existe donc une grande distinction entre 
les fonctions du juré et celles du magistrat. Le premier, 
étranger aux habihdes judiciaires et à la connaissance 
des lois, eut été incapable de rendre une décision remploie. 
Voil/ pourquoi l'on a borné ses attr;butions à une dëclara- 



JURY 
tion de fait. Le secolnl, de son cfit,:, précisémen! h cause 
«le ses habitudes judiciaires, est naturellement enclin h la 
rigue,r ; il se fait souvent une jurisprudence de sévérile 
qui ne tient pas assez compte des circonstances variables du 
mérite ou du démérite. On a donc borné son mimstère 
une ¢ompétence toute légale et scientifique. 
C'est l'Assemblée constituante qui jeta les bases de l'ins- 
titution du jury, par la loi du 16-29 septembre 1791 : elle ne 
l'appliqua qu'aux matières criminelles, et le divisa en deux 
classes, savoir : le jr 9 d'accsation, qui prononçait 
sur la mise en accusation, et leflr 9 dejugement , qui fixait 
définitivement la position de ceux que le premier jury avait 
renvo3és en état d'a:cusation. Lors de la rédaction du 
Code d'Instruction criminelle, en 1808, l'institution du jury 
fut de nouveatl mise en question ; on ne conserva que le 
jury de jugement, et les fonctions du jury d'accnsali,n 
furent distribuées à une chambre spéciale, créée à cet effet 
dans lc sein de chaque cour d 'appel. A la llc»tauration, 
le jury fut formellement consacré par la charte de 181t, 
et il resta dans son organisation tel que l'avait tait le Co:le 
d'instruction criminelle. Après !530, Iïnstilution subit de 
graves changements. D'abord, on appela aux tonctions de 
jurés un plus grand nombre de citoyens, ceux-l/ surtout 
dont la profession garantissait déjh la capacité. Les jures, 
autrefois désignés par les proefcts, furent lirés au sort 
l'audience des cours, d'après des listes génc,-ales que l'ad- 
ministration faisait dresser pour chaque année. Aoparavanl, 
lorsque le jury ne prononçait une conda,,mation qu'a une 
majorité de 7 voix conlre .5, la cour d'assis.'s était appelée 
à délib,.rer sur le fait. En 183, le iury fl,t investi du droit 
de prononcer dhne manière absolue, et pour remplacer une 
garantie délruite par une autre, on exigea pour la condaln- 
nation la majorité de 8 voix. C'croient lb des amelioralions 
véritables, que le pouvoir regretta bient6t d'avoir conc,.dées. 
En tS5, on retablit la simple majorite de 7 voix, mais 
sans exiger l'adjonclion «le la cour d'assises. Enfin, les procès 
politiques firent iutroduire dans les delibërations du jury le 
scrutin secret. 
La loi proclame le granà principe de l'indépendance et 
de l'irresponsabilité du jur; cliche lui demande pas COlUptc 
des mollis de sa decision, elle laisse sa conscience entiè- 
rement libre. 
La déclaration desjurésne se rapporte pas seulement ì un 
fait matériel ; leur mission est plus élevée et idus grande Un 
fait n'est bien ou mal que par l'agent qui en est l'auleur : 
c'est donc surtout la moralit,: de cet agent que le juré devra 
apprécier, car c'st là que se trouve la criminalité. Aussi 
la loi ne leur demande-t-elle pas seulement si tel individu 
a commis tel fait, mais s'il est cottpable de l'avoir commis, 
c'est-i-dire si en le commettant il a eu une intention mal- 
veillante, eu un mot s'il avait la conscience que ce q,'il 
faisait Cait mal. E. n 
En It;48, après la proclamation du suffrage universel, 
les o-positions relatives à la formation du jury n'croient 
plts en harmonie avec ce principe; le décret du 7 aut 
18.1s y apporta les modifications n,'cessaires. Cependant, ne 
pouvaient ètre jurés: 1  les citoyens ne sachant pas lire 
et écrire en français; ° les domestiques et serviteurs h gages. 
Les citoyens ivant d'un travail jo,lrnalicr, et qui justifiaient 
qu'ilsne pouvaient supporter les charges résultant des fonc- 
tions de juré, en pouvaient ëtre dispensés. Étaient incapables 
d'ètre jurés : 1  ceux à qui était enlevé l'exercice de tout 
ou partie des droits politiques ; ° les faillis non réhabilités; 
3 ° les interdits et les gens pourvus d'un conseil judiciaire 
o les gens en état d'accusation ou de contumace; 5 ° les 
individus condamnés soit à des peines afflictives ou infa- 
mantes, soit  des peines correctionnelles pour des faits 
qualifiés crimes par la loi» ou pour delit de vol, escroquerie, 
abus de confiance, usure, attentat aux moeurs, vagabon- 
dage ou mendicitë; 6 ° les individus condamnés  plus d'un 
an de prison  raison de tout autre délit. Les condaranations 
pour délits politiques n'entrainaient l'incapacil, qu'autant 

que les jugements l'avaient prononcée. Quant aux incom- 
patibibtes, les militaires en activité de service et les iusti- 
tuteurs communaux ne pouvaient plus ètre jurés. La liste 
générale du jury était permanente, et la confection en était 
confiée aux moires, sous la surveillance des conseils muni- 
cipaux. La liste annuelle était composée par une commission 
formée dans chaque canton du membre du conseil g,uéral 
et du juge de paix de ce canton, et de deux membres du 
conseil municipal de chaque commune du canton désignés 
spécialement par le conseil tout entier. Enfin, ne! ne pouvait 
dire contraint a remplir les fonctions de juré plus d'une fois 
en trois ans. Un decret du gouvernement provisoire avait 
élevé de 7 à 9 voix la majorité néc¢.saire à la cordmnation; 
un décret de l'Assemblée constituante du 18 octobre tsés 
réduisit la majorité à a voix. Le jury est regi aujourd'hui 
par la loi du 10 juin 1853. Nul maintenant ne peut remplir 
les Ionctious de juré s'il n'est Agé de trente ans accomplis, 
s'il ne jouit des droits politiques, civils et de famille. Aux in- 
capacités indiquées plus I,aut sont ajoutées les suivantes: 
les militaires condamnés au boulet et aux travaux publics ; 
les condamnés h ,n emprisonnement de trois ,unis an 
moins ; les condamnés h l'emprisonnement, quelle que soit 
sa durée, pour soustraction commise par des dëpositaires 
publics, outra à la mo,'ale puhlique et religietle, altaqn,' 
contre le principe de la propriété et les droits de la famille. 
pour inf,-action aux dispositions de la loi sur le recrutement 
de l'armée ; les horaires, grefliers et olficiers ministériels 
destitués; ceox q,ti ont 6té déclarés if, capables d'ètre ju- 
rés. en ve, tu de l'a,-ticle 396 ,lu Code d'Instruction critninelle 
et de l'article 4 du Code Pnal ; ceux qui sont sous man- 
dal darrêt ou de dep6t. Sont pareillement dëclarësinca- 
pables, mais pour cinq ans seulement, h dater de l'expira- 
tion de Im,r peine, les condamues h un emprisonnemcnt 
d'un mois a,, lnoins. 
Les fOltctions de jurés sont incompatibles avec celles de 
ministre, président du sénat, président d,l corps légis- 
latif, membre du conseil d'Ëtat, sous-secretairc d'État eu 
secretaire g'n.ral d'un lninistére, préfet et sous-préfet, 
conseiller de préfecture, jug, officier du ministëre public 
près le cours et les tribunaux de première in.tance, com- 
nfisaire de police, ministre d'un culte reconnu par l'Élat, 
militaire de l'armde «le terre ou de mer en aclivit,; de ser- 
vice et pourvu d'emploi, fonctionnaire ou préposé du ser- 
vice actif des douanes, des contributions indirectes, des 
forgls de l'Ètat et de la couronne et de l'adlninitralon des 
tclégraphes, instituteur primaire comnmnal. 
e peuvent toujours fitrejurés : les domestiques et servi- 
leurs h gages, ceux q,d ne savent pas lire et écrire en Iran- 
fais, ceux qui sont plac,;s dans un élablisscment public d'a- 
lidnés, en ve, tu de la loi du 30 juin 1838. 
Sont dispensés des fonctions de jurés: 1 ¢ les septuagé- 
nattes; 2" ceux qui out besoin pour vivre de leur tratail 
manuel et jour,alier. La liste anrmelle est compoée de 
deux mille jurés pour le dëpartement de la Seine; de cinq 
ccnls pour les alAparlements dont la population excëde trois 
cent mille habitants ; de quatre cents pour ceux dont la po- 
p,,lation est de deux h trois cent mille habitants ; de trois 
cents pour cetlx dont la population est tufCleure.', deux cent 
mille habitants. Le nombre des jurés pour la liste annuelle 
est repali, par arrèté du préfet pris en conseil de préfecture, 
par arrondissement et par canton, proportionnellement au 
tableau officiel de la population. L'arrèté de répartition est 
envoyé au juge de paix. 
Une commission composfie, dans chaque canton, du juge 
de paix, pkésident, et de tous tes maltes, dresse des listes 
preparatoires de la liste annuelle. Ces listes contiennent 
nn nombre de noms triple de celui fixé pour le contingent 
du canton par l'arrèté de répartition. Les commissions dres- 
sent les listes préparatoires et les envoient au prefet pour 
l'arroudissement chef-lieu du département, et au sous-prefet 
pour chacqn des antl.es arrondissements. Une commission, 
compusée d» préfel ott du us-préet, président, et de tous 
9t. 



les juges de paix de l'arrondissement, choisit sur les listes 
préparaivires le nombre de juré« nëcessaire pour |ormer 
les listes d'arrondissement. Une liste spéciale de juré sui»- 
pléants, pris parmi les jurés de la ville oi se tiennent les 
assi.es, est aussi formée chaque année, en dehors de la 
lisle annuelle du jury. 
Le préfet dresse immédiatement la liste annuelle du alC 
parlement, par ordre alphabétique, sur les listes d'arron- 
,li.sement. Il dresse également la liste spéciale des jurés sup- 
pléants. Ces listes ainsi rédigées sont, avant le 15 décembre, 
transmises au greffe de la cour ou «lu tribunal chargé de 
la tenue des asies. 
Sont ecusés, sur leur demande, I ° les sénaleurs et les 
membres du corps législatif, peudant la dnrëe des sessions 
seulement; 2 ° ceux qui ont rempli les fonctions de juré 
,endant l'année conrante et l'an»ée précédente. Dix jours 
«:u moins avant l'ouverture d assises, le premier président 
«le la cour impériale, ou le président du tribunal du chef- 
lieu judiciaire, dans les villes off il n'y a pas de cour d'ap- 
l,el, tire au sort, en audience publique» sur la liste an- 
mleIc, les noms des trente-six jurés qui forment la liste 
,le in session. Il tire en outre c[uatre jurés suppléants sur 
la liste spéciale. Si au jour indiqu par le jugenlent le 
nombre des jurés est rédtdt à moins de trente, par suile 
d'absence ou pour toute antre cause, ce nolbro est complclé 
par les jurés suppléants, suivant l'ordre de leur inscription 
en cas dinulfisance, par ds jures tires an sort, en audience 
publique, parmi les jurés in»crit star la liste spcciale, sub- 
sidiairement parmi les j,arés de la ville inscrits sur la liste 
.annuelle. Dans le cas prévu par l'adicle 90 du dcret du 
6 juillet 1810, le nombre des jurés titulaires est opqlété 
par un tirage an sort fait, en audience publique, parmi les 
jnrés de la ville inscrits sur la liste annuelle. L'amende de 
00 fr., prononcée par le deuxiëme paragraphe de l'art. 39G du 
Code d'tltrution criminelle, peut tre réduite par la cour 
00 ff., sans préjudice des autres dispositions decet article. 
La décision du j,ry, tant contre l'accuse que sur les cir- 
constances atténuanles, se forme h la majodté. La décla- 
ration du iury constate cette mjorit% .ans que le nombre 
de voix puisse y Cre exprime, le tout à peine de nullité. 
Dans le cas oh l'accusé est reconnu coupable, et si la cour 
et convaincue que le jurés, tout cil observnt les formes, 
se sont trompés an fond, elle dc|are quï| e:t sursis au 
jn6ement et renvoie l'allaite  la sc.,sion suivan{e, pour 
ëtre soumise à un nomeau jury, dont ne peut faire paltie 
aucun des jnrés qui ont pris part à la dclaration ammlée. 
iul n'a le droit de provoq«er cette mesure. La cour ne 
pont l'ordonner quc d'office, immediatement après que la 
declaration du jury a etë psononcce publiquement. 
la declaration du second jur), la cour ne peut ordonner un 
nooveau renvoi, mème quanA cette dclaation serait con- 
forme d la premiëre. 
En toute matière criminelle, méme en ca de rcidive, 
le president, après avoir posë les questions résultant de 
l'acte d'accusation et des debats, avertit le jury, à peine de 
nullité, que s'il pense, à la majorilé, q'il existe ce faveur 
d'un ou de plusieurs accusés reconnus coupables des oir- 
constances atténuantes, il doit en faire la déclaration en 
ces termes : A la mojoriloe , il y a des circonstances at- 
tnuaMes en faveur de l'accué. Ensuite le président 
remet les questions écrites aux jurés, dans la personne du 
chef du jury, il y joint l'acte d'accusation, les procs-ver- 
baux qui constatent les dclits, et les pices du procës 
autres que les déclarations écrites des témoins. 
Le président avertil le jury que tout ote doit avoir lieu 
au scrutin secret. Il fait retirer l'accusë de l'auditoire. 
Le che[ du jury depouille chaqm scrutin en présence 
des juré, qui peuvent vt:rilicr les bullclins. 11 coslale 
.tur-le.champ le résullat du vote en marge ou  la suite «le 
la que«tion résolue. La déclaration du jury en ce qui cun- 
cerne les circonstances artCuanCes n'est exprimée que si le 
résultat du crutin est affirmait[. 

JURY  JUSQUIAME 
Les questions de presse et d'autres affaires politiques ont 
en outre '.té enleves au jury. 
JUBY DE ItÉVISION. Voyez Co,stL n 
MENT. 
• I US. Dans le régime alimentaire, on fait parfois usage 
du jus des herbes et des fruits, st.parWdes parencbymes 
qui le contiennent; ces jus ont en général les propriétes 
coucentrées des substances qui les fournissent. On donne 
encore le nom de us de viande a une décoction ¢ucentrée 
de veau, de boeui, de mouton, etc., fotanant les fonds de 
cuisine dans les grandes maisons. Ces jus de viande, émi- 
nemment chauds et réparateurs, conviennent aux tempé 
raments et aux estomacs fatigués, qui ont besoin d'dtre res- 
taurés (voyez COULIS). Autrelois on oervait toujours  sec 
les viandes blanches r6ties; aujourd'hui, tous les plats de 
r6ti sont généralement passés avec un certain jus de bœuf 
que les cuisiniers actuels appliquent / toutes les iandes 
possibles, sans distinction. C'est un usage révolutionnaire, 
qui semble avoir prévalu sur la bonne coutume d'autrefois. 
Le marqu!s de Cllssy, célbre gastronome, racontait que se 
trouvant  diner chez un dignitaire de l'empire, le duc de 
blassa, celui-ci, pour faire honneur  son conviee, s'avisa 
de lui adresser un membre de volaille avec une abondance 
prodigieuse de jus. « Le duc de Massa, nout eau parvenu, me 
prenait stremeut pour un mangeur de son acabit, disait le 
marquis, d'un ton encore irrite; comprenez-vous qu'on ait 
pu m'envoyer à moi du jus de bœuf avec de la volaille 
r6tie ? Mais ce que vous ne sauriez vous figurer, c'est 
pouvautable quantité de ce jilS trouble, tcre et quasi noir ! 
J'avais envie de réclamer auprës de ce ministre de la jus- 
tice, en m'éCridnt : Summum jus , summa injuria !  
JUSAXT nom que donnent les marins au reflux de 
la mer ( l'oçe-. 3lAaï ). 
JUSQUI.Sk31E genre de plantes de la famille des so- 
lances, dont les principaux caractére.q sont : un calice ller - 
istant h cinq divisiuns, une corolle raonopétale a tube courl, 
portant h sa base cinq Cmines a lilaments inclinés ; l'ovaire 
est sp,'rieur, ovale-arrondi, surmontë d'un st)le filiforme, 
termiuë par un stigmate en téte; le fruit est une capsule 
ovale, silionnte de cl,aque c6të, a deux loges pol)spermes, 
s'o,trant en traters, par uu olmrcu-le semblable  uu cou- 
vercle. Les jusq,dames sont des plantes herbacées,  fleurs 
axiflaire., et h leu,lies alternes. 
La jusquiame noire ( #iy/oscgamus niger, L. ), on banne- 
banc, à feuilles dcoupées, d'un vert pEe, trës-grandes, sur- 
tout celles qui sont prës de la racine, a fleurs in,mes, avec des 
reines d'an pourpre foncé, croit abondamment dans les lieux 
incultes, sur le bord des chemius, etc. Lajus9uiame bine. 
che ( hy/oscgamus album, L. ),  lie velue,  feuilles ovales, 
pétiolées et eatieres à la partie supérieure de la plante, porte 
des Ileurs blanches sessiles, axillaires et en epis unilateraux. 
La jusquiame dorée ( hy/oscy/amus aureus ) est vivace, 
|leurs annes, mais dont le fond est d'un pourpre n:r ; les 
filels des ëtamines sont violets: ctte variete t cuiti, c 
les [ardins comme plante d'ornement, à cauoe de la beduté 
de sa flellr. 1| y en a encore deux espèces tr6s-reuommëes, 
ce sent: la jusquiame [hgsaloïdc et la ju,quiame datura, 
fr('quemment empIo)tes en Orient. 
Toutes les jasquiames jouissent de propriîtés narcotiques 
vénénenses plus ou moins prononces : c'est en vain que 
quelques praliciens ont pretendu que cette Idante, tres-dan- 
gereuse pont certains animaux, ne laisait aucun mal 
d'autres ; c'est i,obablement parce que la plante dont ils 
s'étaieut servi alait été cueillie avant son entier dévelotpe- 
ment, car Orfila a remarqué que la jusquiame récoltïe au 
printemps n'avait qu'une action très-faible sur l'ëconomie 
animale, comparée , l'action violente de ce mëme vëgétal 
rëcoltë h l'ëpoque de soit entier dcveloppement. Parmi les 
exemples que l'on peut citer d'accidents causés par la jus 
quiame, nous rappellerons celui arrivé le 25 mars If,.19 
bdnêdictins du couvent de Bhiuow, qui avaient mangé une 
salade dans laquelle leur jardinier aait mis par leegarde 



JUSQUIAME 
qt,elqt,es feuilles de j-squiame. Ils curent des verliges, un 
délire bizarre, une ardeur extréme de la bot,che et dt, gosier, 
et, ce qu'il y a de parti,filer, un affaiblissement considé- 
rable de la sue : ces accidents sont causés non-seulement 
par les feuilles, mais encore par les racines et les graines 
«le la plante, qui participent des propriétés des feuilles. 
Dans les cas d'empoisonne,,tent par la jusquiame, il faut 
exciter les vomissements il l'aide de l'CCique, puis ad- 
ministrer des boissons aciduiées, les limonades, et les la- 
ven, ents purgatifs ; la saignée est également utile, lorsque 
le sujet est d'un tempérament sanguin. Malgré ces propriétés 
vdnéneuses, la jusquiame est et, tployée avec sttccès par 
quelques médecins pour combattre certaines maladies : ainsi, 
on la don.ne contre la dyssentcrie, [es affections spasmodi- 
qt,es, q,,elque[ois méme dans l'épilepsie, la paralysie, etc. ; 
mais on doit toujom's l'administrer a faibles doses et avec 
précaution. 
Les Orientaux boivent avec plaisir l'infusion des graines 
«le la jusquiame phys«loide torrefiées : cette liqueur leur 
donne de la gaieté et les rend communicatifs. Il parat! en 
»utre que les graines de la jusquiame datura jouissent de 
propriétés narcotiques assez semblables h celles de l'opium, 
,-af les "Egypfiens en donnent à leurs enfants pour les faire 
dmmir. C. Fxvl, ox. 
JUSSIEU famille célëbre dans la science qui a pour 
objet l'Cude des plantes. 
JUSSIE (Ao».E vE), né à Lyon. le 8 juillet 168G, lit 
es Cuées médicales à l'Cule de Montpellier, et vint à 
Paris, recommandé./l Fagon, alors prentier médecin du roi, 
et, comme tel, intendant du Jardin des Plantes. T o u r n e- 
f o r t venait de mourir (109) ; et Anloine de Jussieu, en- 
core inconnu à la science, et  peine Agé de vingt-deux ans, lut 
j,tgé par Façon capable de succéder h Tournelort dans l'en- 
seignement de la bota n i q t, e. Il marcha avec ardeur dans 
cette carrière brillante ou erre devant lui, carriëre qui ne lui 
était pas noue'elle to,,te[ois, car, dans les sciences medicales 
il s'était plus spécialement occupé des sciences accessoires, 
de la botanique surtout, et dès l'année 171 t il fut elu à ut,e 
place acante à l'Académie des Sciences, dans la section de 
botanique. Ses nombreux voyages dans les proxince dc 
France, dans les lies d'llières, dans la  allée de Nice, dans 
les contrées montagneuses de I'Espagne, lui valurent nne 
riche collection de plantes, et lui perntirent d'enrtcldr h sot, 
tot,r les Meraores de l'Académie des Sciences de nombreux 
travaux, qu'il ne faut point perdre de vue dans l'histoire des 
progres des sciences naturelles en France. l'armi ceç tra- 
caux, qui presque tous ont pour but l'elucidation de qttel- 
ques points, alors peu connus, d'histoire naturelle, végëtale 
,m animale» il faut citer surtout un mémoire sur le_ traces 
de végétaux fossiles dans les bouillères de Saint-Etienne, 
puis quelqfies travaux curieux de zoologie, de phytologie 
et d'histoire narre'elle; des recherches sur les mines «le 
mcrct,re d'AImadtn, sur les petrifications animales, sur les 
cornes d'Ammon, etc., etc. La science doit encore à Antoine 
de Jussien un Discours sur les progrès de la bolan,que 
( in4 °, t781 )et un Appendxaux travaux de Tourne[ort ; elle 
lui doit colin la coordination, la rédaction et la i,ublicalion 
dt, grand ouvrage de Barrelier sur les plantes de France, 
d'Esiagne et d'ltalie. 
Frappé d'apuplexie, Antoine de Jussieu mourut le 22 
avril 1758. 
JUSSIEU (B.nrto nE), né à L3on, en 1699, élevé au 
grand collége des jésuites de cette ville, accompagna, en 
1716, son frère Autoine, chargé par le régent de recueillir 
pour les collections de Paris les plantes de l'Epsagne et dz, 
Portugal ; et en 172 il lut nmnmé sous-démonstrateur au 
jardin de botanique, à la place de Vaillant, que la mort 
venait d'enlever à la science. Ce fut dans ce modeste em- 
ploi de sons-démonstrateur que Bernard de Jussieu exerça 
sur l'histoire naturelle en général, et plus spécialement 
nr la pltytologie; une influence qui lait époque dans la 
cience, et qui ao¢i son nom, d'une maniëre si retour- 

 J USSIEU 7t. 
quable, au gran,i mouvemenl scien!ili,lue du dix-lmitim 
siècle. En effet, dans ses Cudes appro[ondies sur les carac- 
tëres similaires ou diffëreutiels des plantes, B. de Jussieu 
avait remarqué que, parmi ces carottèrent, les uns obte- 
naient une assez boute généralité pour pouvoir servir à 
l'établissement de quelques divisions [ondamentales dans le 
règne végétal ; et il aait reconnu, en outre, que c'étaient la 
germination des graines et la disposition relative des or- 
ganes floraux qui offraient les caractères les plus génërau-x 
et les plus invariables. Il adopta donc ces deux considé- 
rations entame bas de sa classification méthodique, et 
sans former de classes fies, il disposa sui,ant un méme 
plan une succession d'ordres et de ramilles, répondantaux 
di0rentes se, tions des autres classifications, mais qui, au 
lieu d'Cre, comme celles-ci, exclusivement basCs sur la 
présence d'un seul caractère arbitrairemeut choisi, repo- 
saient al, contraire sur la coexistence de plusieurs carac- 
tères imporlants ( ove: BoTA,Qn£). Appelé en 1758, 
par Louis XV, à réunir dans le jardin de Trianon toutes 
les plantes euitiv(s en France, et i y former uue école de 
botanique ,. B. de Jussieu trouva l'occasion, en dressant les 
catalogues de ce jardin, de réaliser par une application di- 
recte ses idt*s généralessur la classification des plantes. 
Les écrits de B. de Jussie,, sont peu nombreux; mais 
les quelques monographies que nous possédons de lui in- 
diqttent et une admirable sagacité et un rare talent d'obser- 
vation. Da,,s la deuxième édition de l'Histoire deslMantes 
qui cro,ssent aux environs de Paris, il ajouta au travail 
originel de Tcurnefort de nombreuses notes, et une assez 
grande quantité d'espèces nouvelles, qu'd aait rencon- 
tfCs dans ses fréquentes hcrborisations. En zoologie, ses 
recherches sur les pol)pe d'eau douce établirent dëtiniti- 
vement dans la science cette opinion émise par Pessonei 
et combatlue par Marsigli, que ces organisations atout- 
pires étaient réellement des animaux et nullement des 
celles ou des fleurs de quelques plantes matines Lu,on- 
nues; et tandis qu'il enlevait aiusi au r'/:gne 'egetal une 
classe tout entiëre d'tres, qui forment en quelque sorte 
un régne oscillant entre le règne végétal et le rb.éne animal, 
il ntodii,tit singuliërement les classécations reçues, en 
montrant que les cétacés étaienl, par leur organisation, de 
vévitables mammifères, et nullemenl des poissons. 
En 17ç5, B. de Jussieu lit venir près de lui son nexeu 
Laurent, auquel il confia désormais la direction absolue 
du Jardin des Plantes : la vie s'eteigmait lentement en lui; 
sa ue, alfaiblie, ne hi permettait plus ni recherches mi- 
croscopiques ni lectures assidues ; et bientét une surdité, 
qui alla sans cesse croissant, vint ajouter à son isolement, 
en le prie'ont de tout rapport intellectuel avec le monde 
extévio,r. Une première attaque d'apoplexie, dont il ne 
reint quïmparfaitement, le laissa singulierement affaibli 
I».s congé.tions sanguines et les épanchements se succé- 
dërent, et il succomba enfin a une derniere attaque, le 6 no- 
embre 177. 
lernard de Jussieu tait membre de l'AcnéCie des 
Sciencesde Paris ( 1 er autel tç25), des Acadëmies de Berlin, 
de Saint-Pétersbourg et d'Upsal ; de la Sociëté roale de 
Londres, de l'Institut de Bologne : tous ses contemporains 
le const»llaienl, et sa décisio fisait loi; tons le citent avec 
une sorte de vëneration, et le grand Linné lui-mëme poussa 
celle ënration presque jusqt,'au blasphème Iorsquïl 
I,ondit h une que»tion insoluble pour lui : Aut Deu, out 
13. de Jussieu. 
JUSSIEU {Jesen o[), frère des précédents, naqtit à 
Lon, en 170. Comme ses frères, il fut d'abord destiné à la 
carriére mdicale; niais il ne tarda pas  abandonner la pra- 
tique de la médecine pour se livrer sans restriction à l'C 
rude des sciences pures, llédecin instruit, savant botantste; 
ingénieur habile, il fut Cu, en 1735, pour aecpagner, 
comme botaniste, les astronomes que l'Academie envoyait 
avec La Condamine au Pérou; mais lorsque les travau 
dont la commission de l'Académie í.tait chargée furent 



726 
accomplis, Joseph de Jussieu ne put se résoudre h aban- 
donner e sol, si Iécond en découvertes scientifiques, avant 
d'avoir recueiill sa part de cette riche moisson; e! plus 
tard, Iorsqu'il voulut retourner en France, il lut retenu 
de force par les naturels du pays, qui avaient appris 
apprécier ses connaissances mdicales, et qui ne purent 
consentir ì le laisser s'eloiger d'eux. Pendant trente- 
cinq ans il habita le Nouveau-Monde, explorant en tous 
sens cette terre encore vierge, recueillant partout des ob- 
servations pré¢ieuses, et transmettaut de temps h autre 
à la France, par de rares occasions, les résullats de ses la- 
borieuses recherches. Mais Iout son travail fut vain. Ces 
collections, qu'il avait amassées à graud'peine, lui furent en- 
levées; ses notes et ses manucrii.s se perdirent ; la fortune 
que, comme médecin, il avait amassce au Pérou lui lut 
OrC; il devint sujet h de lrcquentsvertiges; sa mémoire 
s'effaça, c| il revint à Paris, en 1771, dans un état comldet 
d'enfance. De tous ses travaux de quarante années con- 
sacrées h la science, il ne reste plus que quelques manus- 
crits inCits sur l'histoire uaturelledu Pérou, quelques plantes 
rares dont il a enrichi nos Jardins (l'héliotrope, le cierge du 
Pèrou, etc. ), quelques recherches sur l'histoire naturelle et 
mcdicale du quinquina. Joseph de Jussieu mourut à Paris, 
le 11 avril 1779. Il avait été Cu membre de t'Académie 
au mois de mai 17.$3, et, par un singulier hasard, il lut 
trente-cinq ans membre de cette société savante sans avoir 
jamais mis les pieds dans l'enceinte où se tenaient ses 
séances. 
JUSSIEU (Ao.-Lac )), fils de Christophe 
Jsst, frère aihWdes trois précédents, naquit à Lyon, Ic 
12 avril 17/8. II venait d'achever ses Cudes classiques à 
Lyon, lorsque son oncle Bernard de Ju«sieu l'apla prcs 
de lui h Paris, en 17C5, pour le soutenir et le diriger dans 
ses étud ulterieur. Les quatre premiès anndes de son 
s(']our à Pa-is furent cousacrées h l'etude de la mddccine, 
dans laquelle la boniquc ne devait lutera'cuir que comme 
scieuoe aessoire; et cependant dès l'annèe 1770 Lanrent 
de Jussieu tut désigne par son oncle pour professer au Jar- 
din des Plant des leçons de botanique, que Lemounier, 
appelé h Versailles par ses fonctions de premier médecin du 
roi Louis XV, se trouvait dans la nècessilc d'interrompre. 
Le jeune demonstrateur était chargé d'expooer aux èlèves 
et de développer les caractè[es botaniques des plantes clas- 
ses dans le jardin d'apoès la methode de Tournefort 
engagé à l'improviste dans une carrière scienlifique qui jus- 
qu'alors lui Cit demeurée presque élrangre, il se voyait 
contraint de consacrer ses uils h apprendre ce qu'il passait 
ses jours h enseigner aux autres. Neamnoins, une place 
etant venue h vaquer en 1773 à l'Académie des Sciences, 
Laurent de Jossieu se présen comme candidat, et il ap- 
puya ses prétentions d'un mémoire Sur les remnculcs, 
qui se trouve oensigné dans I actes de tte Acadèmie. 
Ainsi que souvent il le racontait à son fils, ce furent les re- 
cherches auxquelles il se livra dans la rédaclion de ce 
moire qui firent de Laurent de Jussieu un botaniste; et 
c'est dans ce memoire que oe trouve dveloppé pour la pre- 
midre fuis le principe de la suboination des caractères les 
uns aux autres suivant leur valeur relati'e 
avait échappé fi Adanson, et qui avait été entrevu par Ber- 
nard de Jussien. 
Dès cette époque la rechehe d'une mèthode naturelle de 
classification phytologique ooEupa seule les travaux de Lau- 
vent de 3ussien; et en 177, Ioru'fl fut reconnu urgent 
de rtablir sur des bases plus larges le jardin botanique et 
de remplaoer par une classification nouvelle la classilication 
vieillie et insuffisan de Tomnefo, Laurent de Jussieu 
s'occupa de oeordonuer les pèoes végtal suivant une 
méthode nouvelle, dont il développa I bases dans un md- 
moire lu h l'Acadèmie d ien en 177, et in dans 
les recueils de cette socialC Cette nouvelle dissition 
fut .adoptée; la nomenclature de Linné remplao celle 
dg Tournefort » et la classification géndrale des plant 

JUSSIEU . 
du lardin fit établie telle qu'elle existe encore aujotwd'hui. 
Ce fit e 1789 que parut le Genera Planlarum .çecun- 
dura ordines aturales dipo.çita, ouvrage immense, des- 
tiné à faire dès sa première apparition une révolution 
complète en phytologie. Quelque incroyable que cette asser- 
tion puisse paraitre, il n'en est pas moins constant que 1 
Genera Plantarum fut écrit tout entier de mœmoire; les 
immenses matériaux de ce travail étaient coordonnés dans 
l'esprit du grand botaniste avec une méthode i parfaite, 
une lucidité si entière, qu'il lui fut poible de livrer à 
l'impression son immense travail page par page, et jamai 
en effet la rédaction manuscrite ne fut de deux feuilles en 
avant de l'impression typographique. 
Depuis 1789, Laurent de Jussieu publia, dans les A- 
aleç dt« Musëum, une suite considérable de mémoires, 
destinés pour la plupart à développer et à compléter son 
grand ouvrage, et à le tenir au niveau de la science, dont 
le domaine s'élargissait sans cesse, par les découvertes 
des botanistes et des voyageurs. Mais à mesure qne se» 
forces s'alfaissaient sous le poids des années, il voyait s'a- 
monceler au[our de lui une masse oeastamment croissante 
de matériaux nouveaux à classer, à coordonner, à critiquer, 
ju.qu'à ce qu'enfin il comprit qu'il était dépassé: la vueet 
l'orne lui manquèrent fi la fois. Son existence tout entière 
s'écoula dans le Jardin des Plantes et dans le cabinet de bo- 
tanique; ses travaux scientifiques eux-mmes faisaient leur 
fortune dans la science, et jamais il ne voulut appeler à la 
défense de ses doctrines les armes de la polemique. « Les 
doctrines scientifiques, disait-il, sont ou bonnes ou mau- 
vaises : dans le premier cas, elles n'ont pas besoin d'ëtre 
doefendues; dans le second, elles ne doivent pas l'ttre. » 
La seule discussion scientifique à laquelle il ait pris une 
part active est celle que soulevèrent en France les expé- 
riences de Delon sur le magnétisme animal. Commissaire 
de la Société de .édecine à l'époque de M e s m e r, if suivit 
avec exactitude toutes les séries d'expérien¢es qui furent 
alors tentées, et il se convainquit qu'au milieu de toutes les 
aberrations du système il existait réellement des pheno- 
mènes nervux extrmement curieux, et sur lesquels il 
était urgent d'appeler l'attention des physiolostes : le rap- 
port de Laurent de Jussieu souleva lesplus vives discussions, 
discussions d'autant plus antreC que, dans ce rapport, 
L. de Jussieu s'dtait placé en contradiction formelle avec 
l'opinion des autres comnfissaires. 
Laurent de Jussieu avait été appelé à remplacer Lemon- 
nier en 1770; il était docteur de la Faculté de Mêlecine de 
l'ais depuis 1772, membre de l'Académie des Sciences de- 
puis 177:, membre de la Sociétë royale de Médecine de- 
puis 1776, et dentonstrateur de botanique au Jardin du Roi 
depuis 1777. En 180 il fut nommé professeur de matière 
medicale à la Faculte de Paris, et en 808 il devint con- 
seiller ti|ulaie de l'université impériale. La Bestauralion lui 
enleva ces deux places. Il mourut le 17 septembre 1836. 
JUSS1EU (A)nt.u )), fils du précèdent, naquit h Paris, 
le 23 décembre 1797 : il commença sa carrière scientifique 
par des Cu les médicales, qu'il dirigea plus spécialemeat vers 
les sciences accessoires. Sa thèse inavgurale De euphor. 
biaccar» 9eneribt«.ç et viribu.ç ( 1824, in-," ) est bien 
plut6! botanique que médicale. Depuis oetteëpoque, Adrien 
de Jassiev publia une série de travaux spécialement con- 
sacrés à quelques groupes spéciaux de plantes, à quelques 
iiores particulières : parmi ces travaux nous citerons surtout 
ses mémoires Sur les vutacdes, Suv les méliacèes, Sur les 
plantes du Chili ; nous citerons encore la Flora IBrasili« 
meridionals, dans la rédaction de laquelle Adrieu de Jus- 
sieu fut collaborateur d'Auguste de Saint-Hilaire, qui avait 
amass les matériaux de ce beau travail dans un séjour 
de six années au Brésil. En 1826 Adrien de Jussieu fut 
nommé au 1usèum, à la place de son père, qui passa aux 
honoraires; et en 183t il fut reçu membre de l'Académie 
des Sciences. Il movrut le 29 juin t85:L 
flous ne parlerons pas de quelques autres membres de la 



JUSSIEU -- JUSTICE 
famille de Jussieu, qui n'ont en rien contribué à son illus- 
tration scientifique. L'nu, M. Aie:vis » Jss,£, fut nommé, 
en 1 $37, directeur de la police au département de l'intérieur; 
il avait précédemment été préfet de la Vienne. Un aqtre, 
M. Laurent » Jss,u, auteur de Simon de IVantua etde 
plusieurs ouvrages d'éducation, élu en 1839 dépnté du t0 e ar- 
rondissoment de Paris, était secrétaire général de la pré- 
lecture de la Seine sous Padministration de M. de Rambu- 
te, au. BELFIELn-LEFÈVnE. 
JUSSION. Voyer, COMM.VCWm. 
JUSSION (Lettres de). On désignait autre{ois sous ce 
tlom certains actes ministériels portant une injonction quel- 
conque plus ou moins arbitraire, et les lettres que les rois 
adressaient anx parlements pour leur enjoindre de procéder 
il l'enregistrement des édit qu'ils refusaient d'entériner. 
JUSTE ET INJUSTE (Notion du), locution peu 
exacte pldlosophiquemenl parlant. Sïl existe chez tous les 
peup|es, si l'on retrouve profondément empreint au cœur de 
l'homme le sentiment de la justice, cetle intqition suprème, 
qui fait que chacun a, dans la mesure de son entendement, 
conscience de ce qu'il doit aux autres et de ce qui lui est 
d0, n'est point ce qu'on peut appeler une notion. Ce qui 
est vrai, ce qui est incontestable, c'est que le sentiment 
du juste et de l'injuste est univeellement répandu : la so- 
ciété humaine en est imprígnëe, quelles que soient ses con- 
ditions d'existence. Sans doute, et c'est une remarque jls- 
tifiëe par l'observation des temps et des lieux, les perceptions 
du juste, comme celles du beau, ne sont point partout les 
mmes ; le jugement porté sur telou tel actede la vieprivëe 
diffère suivant le point de vqe auquel on est placé par les 
mœurs de son temps, de son pays ; mais tout le monde est 
d'aecord pour distribuer, classer les actions humaines, leur 
décerner l'Coge ou le bl/Ime, selon qu'elles respectent ou 
hlessent dans les autres les penchants que chacun voudrait 
voir respecter en sa personne, et qu'on est convenu de ne 
pas méconnaltre. Ainsi, quelque divergence qui existe dans 
le mode d'appréciation de chaque acte en particulier, la 
formule suivant laquelle il est lugé est la mëme parlout ; 
elle consacre en principe l'égalité, c'est-à-dire la réciprocité 
des droits, ce qqi ne permet pas d'envisager le droit indi- 
viduel, au sein des sociétés, séparément du devoir. L'homme 
n'existe donc qu'à la condition d'Cre juste, c'est-/-dire de 
ne pas faire à autrui ce qu'il ne voudrait pas qu'il lui 
fftt fait : telle est la loi de l'humanité, loi sans laquelle 
la socitté, l'homme méme, ne se peuvent concevoir. C'est 
ainsi, du reste, que cette créature privilégiée se trouve 
séparée par un immense intervalle de l'Cre qui, n'ayant que 
des instincts de conservation, de reproduction incessante, 
obéit / toutes les impulsions de l'appétit physique, et rap- 
porte invariablement tout à son individu. Mais l'homme, 
dans on noble essor, ne s'arréte méme pas/ ces inspirations 
«le justice étroite et presque "¢ulgaire. Le spectacle affligeant 
des douleurs de son semblable l'émeut et l'attache; il s'i- 
dentifie, par l'influence d'un sentiment fraternel, avec une 
douleurqui n'est pas la sienne: Homo sure, vil humani a 
mealienum puto, s'écrie-t-il, et on le voit ai, mëme instant 
secourir le pauvre et l'alfligé, les consoler avec amour, 
faire aux autres, en un mot, au nom de la ustice et de 
Phumanitë, ce qu'il voudrait qu'il lui fft fait !... 
Voilà à quelles remarquables hauteurs s'élève par le sen- 
timent du juste et de l'injuste la condition humaine ; voilb 
où elle tend invinciblement, invariablement. Et c'est là ce 
qui lait sa force, sa grandeur, car ce sont les devoirs qui 
ëlèvent l'homme. Cette remarquabletendance, pour Atre sou- 
vent méconnue dans la p[atique, n'en est pas moins cer- 
taine, manifesle, ainsi que l'exprime en termes d'une par- 
faite simplicité l'un des esprits les plus philosophiques que 
la sciencelu légiste ait éclairés : « Tous les hommes, dit 
Dorant, ont dans l'esprit les impressious de la vérité et de 
l'autorité de ces lois naturelles, 9u'ilnefautfaire tort à 
personne; Çuïl fitut rendre lz chacun ce qui lui appar- 
tient; qu'il.faut élre sincère dans les enqaqevwnts, fidèle 

727 
à e:vécuter ses promesses, et d'autres règles semblable 
de la justice et de l'dquitoe... Et quoique cette lumière de 
la raison, qui donne ces vues de la vérité / ceux méme 
qui en ignorent les premk-rs principes, ne règne pas en 
chacun de telle sorte qu'il en fasse la rëgle de sa conduite, 
elle rè9neen tous de telle manière que les plus injustes 
aiment assez, la justice pour condamner l'injustice des 
autres et pour la haïr.., • 
^insi, ce ne sont pas les ¢lartés, toutes d'intuition, par 
lesquelles se montre et se révèle le jusle et l'injuste, qui 
manquent ou qui sont obseurcie; mais bien la volontë 
d'ètre juste qui fait défaut. Aussi est-ce avec raison que le 
législateur antique fait résider la justice dans la volont 
ferme et constanle d'altribuer i chacun son droit. 
P. COQ-, avocat. 
JUSTE LlPSE. Voyez Lwsa (Jnsle). 
JUSTË-MILIEU. Aprè la révolution de juillet 1830, 
le roi Louis-Phi|ippe cru reconnaltre que la France ne 
conserverait les avantages qu'elle avait espérés d'un chan- 
gement de gnuvernement qu'autant que les gouvernants gar- 
deraient un juste-milieu entre les divers partis. On releva 
tout de suite le mot, et on s'en oer il depuis pour désigner 
tant6t en bonne, tant6t en mauvaise part, le système poli- 
tique du roi. En conséquence, la dynastie de Juillet, fidële 
au principe qui l'avait élevëe (les classes moyennes), et 
s'appu3ant sur l'opulente bourgeoisie, commença à gou- 
verner d'après oette maxime politique. Èlle se posa entre les 
partis extrémes, les royalistes purs et les répobii¢ains ; elle 
fit h chacun d'eux d'insignifiantes concessions, elle se ser;il 
de l'un contre l'autre, mais ne leur laissa aucune influence 
decisive sur la marche «lu gouvernement ; elle chercha bien 
plut6t à profiter de tous leurs mousements pour les affaiblir 
ou les soumettre. Les deux hommes qui furent appelés  
consolider et h mettre en pratique ce système hlrent Casimir 
Péri er et surtout M. Guizot. Mais sous le manteau du jusle- 
milieu Louis-Philippe alla beaucoup plus loin. Sa politique 
r6sista à toutes les doctrines politiques, à toutes les vues,.a 
roules les décisions des corps Iégislatifs,  toutes les person- 
nalités qui le menaçaient lui, la pensee immuable, comme 
on l'appelait, d'une attaque contre l'Etat, d'un changement, 
d'une réloœeme. De Ih le passage de tant de ininisteres au 
pouvoir; de lb l'abandon méme des doetrinaires, qui s'é- 
Ioignèrent un instant de la cour; de la la persistance repétee 
des ministres à garder leurs portefeuilles avec une minorite 
ou au moins une majorité douteuse dans la chambre des 
dépulés; de là tant de mesures incon.titutionnelles, comme, 
par exemple, les menaces faites aux députés fonctionnaires 
pour s'emparer des délibërations de la chambre. La politique 
extérieure reçut une sentblable direction. Louis-Philippe 
n'eut ni cabinet, ni principes politiques; mais aussi il ne fit 
rien de décisif ni de stable. Tous les ilforts, toutes les sym- 
patldes ne devaient lui servir qu'h affermir son tr6ne, le 
dernier mot de tout ce manCe. 
Gr,3ce h ces savantes combinaisons, la dynastie d'Orlns 
croyait avoir poussé en France de profondes racines, quand 
la révolution de Février vint lui apprendre combien elles 
étaient peu solides. C'est qu'en géneral une politique qui, en 
vne de l'affermissement d u pouvoir d  nastique, ne tend qu'h 
affaiblir et ruiner tous les principes «lu droit public dans 
le peuple et dans l'Êtat, ne peut Cre regardée comme un 
principe vrai, positif, fécond. Si cette conduite, justifiable 
pour un temps assez restreint, ne dvgénère pas eu une po- 
litique oppressive ou macbiavélique, il lui faudra toujours 
t6t ou tard faire place aux grands intérêts de la nation. 
JUSTICE. La justice a ëté définie par les anciens : la 
volonté ferme et constante de rendre a chacun ce qui lui 
est dù, lustilia est constans et perpelua voluntas jus 
suum cuiqte tribuere. Cieéron faisait consister les fon- 
dements de la j,stiee d'abord  ne nuire  personne non 
plus qu'/ soi-mme, et ensuite  se consacrer tout entier au 
bien public. Suivant Goldsmilh, la justice est une vertu 
morale qui fait qu'on rend à chacun ce qui lui appartient. 



,2 JUSTICE 
D'aprèsLaBruyère, c'est laconformilé à une souveraine vationsparlesquellesleprésidentduparlementBellièvr 

raison, et d'aprè Vauvenargues, c'est l'éq u i lWpratique. 
Dans la langue judiciaire, la justice et l'equité sont deux 
choses distinctes; la justice n'est plus que ce qui est con- 
forme à la loi. De là cette maxime : summumjus, summa 
njuria. 
L'im p a r t i a I i t é se rattache encore étroitement à la jus- 
tice. Enhn la c b a r i t é, qui procède du même principe, l'ac- 
quittement de la dette naturelle envers le prochain, la dé- 
pase dans ses effeLs. 
Une des questions les plus anciennement controversées 
est celle-ci .: y a-t-il une justice naturelle antérieure " toute 
loi positive? Carnéade disait oui ; Horace disait non. Grotius 
et Puffendorf, dans les temps modernes, se sont faits les 
champions de deux tbèses contraires : ce dernier soutient que 
des lois expresses sont nécessaires pour fonder les qualités 
murales des actions. Mais comment soutenir cette opinion 
quand on se reporte aux premiers ages du monde, alors que 
la force était la seule loi (voge'- 
Ce fut de tout temps un atlribut de la souveraineté 
d'ètre proclamée l'organe et l'interprète de la justice. Aussi 
dit-on : Toute justice émane du prince, toute justice ëmane 
du peuple, suivant que la constitution d'un État est mo- 
narchique ou républicaine. 
En tout cas, la justice eçt la base du bien-être général; 
pur couséquent le premier devoir d'un État envers les sujets, 
de même qu'elle est le premier devoir du citoyen à l'égard 
de ses concitoyens. Elle est surtout exigée du juge, de l'homme 
qui prononce sur le droit d'après les lois. 
La religion a fait de la justice une des vertus c a r d i n a I e s. 
L'antiquité l'avait personnifiée sons les noms de T h é m i s et 
d'As trée. 
Le terme de justice se prend aussi pour la pratique de 
cette vertu ; quelquefois il si-,nifie bori droit et raison ; 
en d'autres occasions il signifie le pouvoir de taire droit 
chacun ou l'administration de ce pouvoir. Quelquefois en- 
core la justice est prise pour les tribunaux qui sont chargés 
de la distribuer. Nous avons parlé ailleurs de la justice 
distributive ( voye-. DIsnmvTio. ). 
L'histoire de la justice, considérée en tant qu'attribut 
ou conséquence de l'autorité gouvernementale, ne serait pas 
autre chose que l'histoire interieure des nations. Son ad- 
ministration peut avoir lieu d'après tant de modes diffé- 
rents, revêtir tant de formes diverses ; tanl6l ttre l'apanage 
de magistrats électifs ou nommés par le souverain, qui dé- 
cident du droit ou du tait, tantbt être partagée entre ceux-ci 
et de simples citoyens, qui prononcent sur les cir-onstances 
spéciales des causes, après que la loi a été interpretée par 
les jurisconsultes. En de cerlains pays, le j u r y connnait de 
toutes sortes d'affaires civiles, criminelles, correctionnelles 
et commerciales ; ailleurs sa mission est bien plus bornée, et 
se restreint encore tous les jours. L'appel, en outre, a 
étë imané pour remédier à la faiblesse et aux erreurs des 
hommes; mais on est  se demander encore si le remède 
n'est pas pire que le mal,  voir les ënormes abus qu'a 
engendrés la multiplicité des j ur id i et i o ns. 
Chez la plupart des peuple» la charge de rendre la justice 
fut lon#emps l'apanage du cfiet militaire, dn préteur, du 
comte et du duc. On ne tarda pas  sentir, avec les progrès 
dela civilisation, la nëcessité d'une administration judiciaire 
indepcndante. La Magna-Chorta du roi Jean d'An- 
gleterre (t2t5) stipulait déjà que la cour supérieure (com- 
uia plocita) ne suivrait pas la cour du roi, mais qu'elle 
aurait une résidence fixe. Les diètes d'Allemagne exigèrent 
à diverses reprises les mêmes garanties des empereurs ; 
mais ce ne fut qu'en I95 qu'elles atteignirent ce but, par 
la création du tribunal delachambre impêriale. Les 
paies de France firent à plusieurs reprises d'energiques 
protestations contre la part personnelle prise par les rois de 
France aux procès criminels du duc de Bretagne (t,TS), 
du roi de avarre (1386), etc. ; et l'on a un bien remar- 
quable exemple dïnd,pcndauc e ju.:[ciaire dans les ohscr- 

blame l'intrusion personnelle de Louis XIli dans le procès 
du duc de La Valette. En France les commisions extraor- 
dinaires établies dans certains cas où l'on voulait tre as- 
suré d'avance d'une condamnation, de même que la 
chambre étoilée d'Angleterre, qui jugeait sans jurés, 
soulevërent un mécontentement général ; et tous les peuples 
reconnurent le besoin de tribunaux indépendants de la vo- 
lonté personnelle du souverain ou de ses ministres. Les 
diètes d'Allemagne, elles aussi, s'efforcèrent, à diverses re- 
prises, de mettre les trib,maux inférieurs de l'Empire/ l'abri 
de l'influence de l'empereur. Dans leurs capitulaires, les 
empereurs promirent de laisser/ la justice son libre conr% 
et l'on chercha autant que possible à garantir par les lois 
et les tribunaux de l'Empire l'indépendance des justices sei- 
gneuriales vis-a-vis du cabinet des princes. 
En Angleterre on porta remède à ces désordres par la pu- 
blicité des déliberations du parlement, le droit d'accusa- 
tion de la chambre des communes et la juridiction suprême 
de la chambre haute. En France les griefs contre les tri- 
bunaux étaient mallleureusement trop fondés pour que le 
pouvoir royal pot se dispenser d'intervenir ; et chez nous, 
à la différence des autres nations, l'instance de cabinet qui 
porta le nom de conseil priv du roi, veritable cour 
de justice, o6 l'on appelait des décisions des parlements et des 
autres degrés de juridiction, si divers et si multipliés, doit 
être considérée comme une institution éminemment utile 
dans ces époques de confusion et de chaos. 
JUSTICE (Déni de). l'oye'- D£.xl ira Jcsmr.. 
JUSTICE(Haute, mo)'enne et basse). La justice sei- 
gneuriale, qui naquit avec la féodalité, se divisaiten 
haute, mo9eme et bo,se justice. La haute juatice était celle 
d'un seigneur ayant le droit de faire condamner  une peine 
capitale, et de juger toutes les causes c/viles et criminelles, 
bots les ca s royaux ; l'appel des sentences était porté devant 
les ha i 11 fs rosaux et devant le parlera en t. Cette 2ustice 
n'appartenait qu'A celui dans la famille duquel elle était exer- 
cée de temps immemorial, ou à qui elle avait été concedee 
par le roi. La moyenne juçtice, dont au reste il y a peu 
d'exemples, avait droit de juger des actions de tutCe et des 
injures dont l'amende n'excédait pas 60 sols. La basseus- 
lice n'était en q,mlque sorte qu'une justice feodale pour 
le pa)ement des droits seigneuriaux ; elle connaisit des 
droits dus au seigneur, du dégAt cau par les animaux, et 
des injures dont l'amende ne pouvait excéder 7 sous 6 de- 
niers. 
Les subdivisions suivantes se remarqnaient aussi dans 
la justice seigneuriale : la )ustice censuelle, qui appartenait 
au seigneur censier, pour raison de cens ; la justice doma- 
niale, qui appartenait au seigneur du domaine, pour raison 
du domaine; la justice.foncière, appartenant au seigneur 
foncier, pour raison de cens; la justice manuelle (Cout. 
de Normandie), où le seigneur, pour être payé des arrè- 
rages de sa rente ou cllarge, prenait de sa main namps 
(nantissement) sur l'héritage, en la présence du sergent, au- 
quel il les délivrait pour ies discuter. 
J USTICE(Ministëre de la). Le ministère de la justice 
embrasse actuellement dans ses attributions l'organisation 
et la surveillance de l'ordre judiciaire et du notarial, la 
correspon0ance avec le» cours et tribunaux et les membres de 
leurs parqueB pour l'exécuÙon des lois etla surveillance qui 
leur est attribuée ; les rappurts A l'empereur sur les ma- 
tières de législation et de jusÙce, les conflits entre luridic- 
tions diverses, les recours en gràce, les commutations de 
peines, réllabilitalions, etc. L' I top r ira crie impériale 
dépend de ce ministère. 
L'origine du minisoEre de la justice remonte à la révolu- 
tion- !1 héritades attributions du c h a n c e i i e r d e France, 
et fut créé par l'Assemblée constituante (toi du 27 avril et 
27 mai t79t). Sousl'Empire le ministère de la justice porta 
le litre de grand-juge. La charge de garde des 
sc e au x ayant Ce rétablie par la Bestauration, elle fut attrt- 



 USTICE 
buée au ministre de la jIIMiCe» à qui elle est toujours restre 
depuis. 
JUSTICE DE PAIX. l'o/e-- Jc«E nE P.ux. 
JUSTICEMAIITIME.Voye--M.ntTtE$(Tribunaux). 
JUSTICE XIILITAI[E Voye'- 5|ILIV.,It (Justice). 
JUSTICIA ou JUSTIZA. Ainsi s'appelait autrefois le 
grand-juge des rois d' A ru 9 on. Dans les luttes que ce,,x-ci 
curent à soutenir contre les états de leur royaume, ce fonc- 
tionnaire acquit une importance de ph,s en plus grande ; 
et sous le rëgnc de Pierre IV, vers le ,nilic,, du quatorziëmc 
siècle, c'est à lui qu'on rotait la décision des difficultés peu- 
dantes entre le monarque et les états. A partir de ce mo- 
ment sa puissance devint prpondérantc ; il se trouva le 
protecteur naturel des libertës de tous, et en conséq,,ence 
put ètre choisi non-seulement parmi les barons, mais encore 
parmi les simples cl,evaliers. Les rois devaient prêter h 
genoux devant lui serment de fidélité aux lois d,, royau:ue ; 
et il fut investi du droit de leur demander compte de la 
u,anière dont ils le tenaient. Il jugeait toutes les difficultes 
dont on saisissait l'assemblée des états, et in;erprCtait les 
passages obscurs de la loi. Tous les j uges du royaume étaient 
ses subordounés : toute poursuitese trou var interrompue par 
un appel ì sa juridiction. En 1412 i| fut dcid que le roi 
n'avait pas le pouvoir de le déposer et qu'il n'était j usticiahle 
«p,e de l'assemblée des états. II y avait à Valence onjus- 
Iicia particulier, dont les attributions étaient bien moins 
importantes. Il était naturel que les rois d'Aragon xissent 
a'ec detiance l'existence d'un pareil pouvoir; de là le,,rs 
nombreuses tentatives pour le détruire. P h il i p p e I I fut 
le premier qoi y réussit complétement; il fit decapiter le 
dernier jsticio, qui aait nom De la Heiça. 
JUSTICIEPt  suruom donné "/l plusieurs princes sou- 
verains qui se sont fait remarquer par la sagesse ou la sé- 
vérité de leurs ordonnances ou par leur amour de la justice. 
Il nous suffira de citer Richard, d'abord comte d'Autun,puis 
duc de Bourgogne, à la fin du neuvième siècle; Louis IX, 
roi de France ; et Pierre 1 , roi de Portugal. 
Dans l'ancienne la,,gue féodale, on nommait justiciers 
les seigneu's q,,i exerçaient une juridiction, il y avait les 
hauts, les bas et les zno!tens j.sticiers; en style de cl,an- 
cellerie, on donnait ce nom à tous les magistrats de l'ordre 
judiciaire. 
On a aussi appel jsticiers t,ne secte d'hérétiques qui 
affectaient dans toutes leurs actions une parfaite éq,dté, le 
mépris des richesses et des honneurs et une p|,reté de 
mœurs surhumaine. Tels étaient les p h a r i s i e n s dans l'an- 
cienne loi, et les novat ien s, les d oaa ri stes, etc., sous 
la nouvelle. 
JUSTIFICATION (Théologie). C'est l'action et l'effet 
de la grâce pour rendre les hommes justes et dignes de 
la gloire éte,-nelle. Les catl,oliql,es et les roeformés so,t ex- 
trSmement partagés sur la doctrine de la justitication, lesdcr- 
niers la fondant sur la foi se,de, et les premiers sur les bonnes 
œuvres jointes à la foi. 
JUSTIFICATIOX JUSTIFIER (TJpographie). 
loye-. COMPOSITION. 
JUSTI-' ( Sai«t ), martyr, docteur de l'llise et apolo- 
giste de la religion chrétienne, naquit vers la fin du premier 
-iècle de J.-C., à Sichem ou Flavia _'cpois, sur le terri- 
toire de Samarie. Après avoir inutilement chcrché la vérité 
dans les di ets systèmes philosophiques, en drnier lieu dans 
celui de Platon, il embrassa le christianisme, à l'ge de 
trente ans, mais sans renoncer pour celà à porter le manteau 
des philosopbes. Il vint mme h Borne, od il ouvrit une 
école de philosophie chitienne. Afin de défendre sa foi 
nouvelle, il en adressa l'apologie à l'empereur Antonin le 
Pieux, et en composa une autre pour Marc-Aurèle; il pablia 
aussi un traité de la lonarchie de Dieu; mais, ayant, dans 
un de ses ouvrages, tourné en ridicule le philosophe cynique 
Crescentius, il périt sur l'échafaud, vers l'an de J.-C. 163. 
Le premier il avait essayé de concilier la philosophie avec 
le christianisme. Outre les deflx apoloies Inentionnes, on 
l;c'r, n t.s ço.vEls. -- z. 

-- JUSTIN : " .) 
trouve d;insses OE,|VI'es un Do[o[le a[pc [ejlt. 
mais on y a mpris  tort une Épffre a Dioguëte. 
JUSTI l«r empereur d'Orient, de 51s fi 527. 
enfant naquit en 450, dans une tolérable d;aumiëre des 
campagnes de Thraoe; son çère, pauvre journalier, trouvait 
h peine de quoi subsister sur cette terre qu'il arroit dr 
ses sueurs. L'fant, pous par on ne it quel instinct. 
ne put s'habituer à l'humble pauvreté dans laqudle vé- 
it  fan.ille. Un jour il quitte la maison pateelle, et 
dirige xers l'immense ville de Constantin : un bton noueux, 
un bissac contenant qudqu moreaux d'un pain groier, 
compont tout son avoir. Toutefois, la beauté de son 
sage, la majeurWde sa personne, éclatent h travers s hail- 
lon. Il  préoente pour s'em'ùler da la milice : on le re- 
çoit. Bient6t, l'empereur Ln 1 r, frappé de sa haute ille, 
de son allure décidee, le fait passer dans les gardes du pa- 
lais; et c'et pour Jusfin le premier degré vers le trône 
impérial. Procope nous apprend qu'il serit sous Jean 
Bossu, dan la guerre contre les lsa,;res, de 494 h 498, sous 
le rne d'Anase. Ayant étë mis en prison et condamné 
h mort pouc une faute grave, il dot la xie à un songe mer- 
veilleux. Jean le Bossu vit en rEve un I,omme d'une fi3ure 
et d'une taille majestueuse qui lui defendait de faire aucun 
mal à Just[n. L'empereur Anastase lui coulera la dignilé de 
sénateur, et le fit oepitaine de ses gardes. Il ooeupait tte 
place Io,'sque la mort du vieil Anastase, à l'àge de quatre- 
viak-huit an% le $ juillet 518, rendit le trne acant. 
L trois neveux du defunt, Pompée, Probus et II)pa, 
prétenda[ent  l'empire; mais la haine da peuple ou du 
nat leur lait toute chance. Le and-chambellan Armanoe, 
ne ponant  prrtendre, à cause de sa qualite d'eunuque, 
voulait y porter n ami Theocrite. Pour acl,eter I suf- 
fi'es, il donna des sommes considrabl à Justin, qui ne 
oe fit pas scrup,de de les distribuer en son nom ; et le 
demain mEme du dcoEs d'Au,rase, il fut proclamé empe- 
reur, lui qui, lon l'exprsion de Procope, avait deja 
pied dans la tonzbe : il Cait alors gé de soixante-huit 
an« ; il ne savait pas lire, et, malgré tous ses efforts, il n'a- 
vait jamais pu apprendre h écrire son nom ; on lui faisait 
signer ses actes au moyen d'une tablette oh étaient gravs 
à joui" les quatre premiéres lettr de son nom. Sa femme 
Cait de nation barbare et esclave; J,,stin l'avait achetée au- 
trefois pour en fre  oeno=hine, il l'epousa ensuite. Lors- 
qu'il ft élevé à l'empire, il lui fit quitter son nom de 
puur prendre c:lui de Flavia .lia Marcia 
mais elle ne put iamais changer ses manièr libr et coin 
un;n; elle Cait, d,; re»te, d' oeractère doux, qui n'eit 
pas dpourxu d'une cerine fermerC L premiers acs 
du gouvernement de Justin parurent inspirés par l'amo=,r 
de la justice : il examina les lois, confirma I unes, abolil 
les autres, accorda au peuple plusieurs immunités, retran- 
cha quelques imp. Zélé catholique, il se dclara pour 
oencile de Chalc$loine et rappela tous ceux qui avaient été 
exés pour la foi. Il Ecrivit au pape Hormisdas pour lui 
demander un. formul, qui fut siE dans uu synode 
tenu h Consntinople. Ainsi lutent momentanément réunies 
en 5t9 I'tise d'Orient et cetle d'Occident. 
Tout et ét6 pour le mieux si Justin s'en fùt tenu là; 
mais I catholiques, non conlents de la justioe, demandè- 
rent à grands cris qu'on persCuit ! ariens. C6dant a,; 
vœu d premiers, "Justh, par un édi!, priva les oeconds 
de leurs églis. Cette mesure attira aux oetholiqu d'l- 
taiie la rscution de Théodoric, roi des Ostrogoth% 
pfsait l'arianisme. Lo?al et bien intentionné, Justin était 
trop ignorant pour bien gouverner ; némoins  douoeur, 
son 6quité, lui avaient gé les cœurs. Son re est sur- 
to«t remarquable en oe qu'il préra oelui de J u s t i n i e n I ", 
son neveu. On peut mëme dire que depuis l'an 50, o 
Justinien se d6brassa, par un asssinat, de Yitalien, dont 
le crédit lui faist ombrage, le règne de Justin I er fut moing 
celui de l'oncle que u noEeu. C'etait Justinien qui poussait 
« la pcr»écution doe ariens; c'ëit lui qui, dans les 
92 



7a9 JUST1N 
du ¢ir¢ple, assurait le triomphe à la faction des bleus. 
Soutenue par l'hértier présomptifdn tr6ne, cette faction 
remplit pendant trois ans de meurtres, de violences et de 
rapines, la capitale de l'empire ; et il laut lire Procope, té- 
moin oculairE, pour avoir l'idée de ses excès. Justil ne fit 
rien pour réprimer le désordre. A la fin, le préfet de Cons- 
tantinople y mit ordre, mais fut diçgracié pour avoiç puni un 
coupable illustre. Justin s'était donné Jnstinien pour collëgue 
le t er avrl 527 : il raourut le 1 ®r ao0t suivant, à l'àge de 
soixante-dix-sept ans. Il léguait à son neveu, avec l'empire, 
les troubles du sanctuaire et du clrque, puis une guerre 
contre la Perse. Il avait accepté l'hommage des Laziqucs 
, peuples de l'Ibërie et de la Colchide), jusque là soumis à 
la supreraatie des Perses ; il avait refu d'adopter Chosroès, 
le troisième des fils du monarque persan Cabades : c't'tait plus 
qu'il n'en fallait pour mettre aux prises les deux empires. 
JUSTIN II sureCa à .on oncle J u st i n le n. II ëtait né en 
Illyrie. Son père s'appelait Dulctsimus ; a mere, Vigilan- 
tia, était sccurde l'empereur Jnstinien. Justin ëtait cu top a- 
lale, Iorsqu'à la mortde son oncle, il fut proclamé em- 
pereur, le t4 novembre 565. Il commença par remettre au 
peuple les imports arricrés, paja les dettes de son prëdëces- 
seur, et rappela les cvèques qu'il avait exilés pour la foi ; 
car Justinien, si zéle catholique d'abord, avait fini par 
tomber dans l'hérésie des incorruptibles. Ces premiers actes 
fiJrent inspirés i Jutin Il par son épouse Soplde, princesse 
de beaucoup d'esprit et de caractere, également capable de 
bien et de mal, selon les intíréts de son ambition. Ele en- 
gaea l'empereur à faire périr son COlSin Jnstiu, jeune 
pnce de grande espérance : le faible empereur se prèta à 
ce crime, puis se fit apporter la téte de son neveu, et la 
fonla aux pieds. On a dit avec raison que l'influence de 
Sophie sur Justin desint aussi funete aux affaires de l'État 
que l'avait élé celle de Théodora sur Justinien. Sophie fit 
perdre l'ltalie à Justin 11 en insultant l'eun»que N a rsë s 
qui seul pouvait dfendre celte province délivrée par lui. 
Pour s'en venger, il y rappela le Lombards, qu'il en avait 
chassés. Justin 11 s'attira la haine des Avares et des Perses. 
Le» Avares lui demandaient son alliance : il pondit qu'il 
meprisait leur haine et dédaignait leur amitit. Comme 
Jostin I «, il irrita le Perses, en prenant sous sa protection 
un peuple soumis au grand roi : c'étaient les Persarmé- 
niens, que Chosroës 1 er prétendait convertir h la religion 
de Zoroastre, et qui v«»ulaient demeurer fidèles au christia- 
nisme. 11 accepta l'alliance des Turcs contre les Perses, 
dans la vue d'etablir des relations de commerce avec la 
haute Asie. L'an 574, il tomba dans une noire frénésie. 
Sophie lui donna au moins un bon conseil en l'engageant à 
adpter pour son successeur le vertueux Tibêre Il, dont 
le règne glorieux fut trop court. Le 5 octob 578, le vieil 
empereur mourut, aprës un règne de douze ans dix mois 
et douze jours, laissant la réputation d'un prince faible, indu. 
lent et cruel. Charles D Buzoa. 
JUSTIN  historien romain, ou plut6t abréviateur de 
l'hi»torien Trogue-Porapée, est nommé dans un ancien ma- 
nuscrit de Florence M. Jtoianus JtMims, et dans d'autres 
M. Jçtinu Frotinus. On ne sait rien sur sa vie : on 
le croit genéralement conlemporain de Marc-Aurèle. En 
effet, la dédicace de son ourage, qui suit sa préface, est 
adressée à cet empereur : Quod ad te, imperator Antn- 
nine, on tare cognoscendi quam emend/znd,_, causa 
transmisi, etc. ; mais plusieurs critiques regardent ce pas- 
sage comme aant été ajoutd au texte par quelque copis[e 
ignorant, qui aurait conlondu cet écrivain avec Jnstin le 
martyr. En effet, ce père de l'Èglise a dëdié à Marc-Aurële 
son Apologie des Chrtiens. Sans discuter cette opinion, 
nous ne pouvons, en connaissance de cause, j uger que l'ou- 
vrage de Justin tel qu'il nous est parvenu. C'est un extrait 
en 44 livres de la grande histoire de Trogne Pompée, de- 
puis Forigme des empereurs jusqu'à Céar-Auguste : cet 
abrégé a pour titre : tlïstoriarum Philqpicarum et 
rnundi orign«m, et terr situs, ex Trogo Pomt¢io 

JUSTINIEN 
excerptarum libri XLIV, a ¥ino ad Coesarem Au9uslu m. 
Cet inlitulé, Histoire Philippique, annonce que le prin- 
cipal objet de Trogne-Pompée était l'histoire de Macédoine. 
Dans son extrait, Justin a choisi de p'éférence le fait et les 
passages qu'il jugeait les plus agréables ou les plus ins- 
tructifs ( omisis his, dit-il, qu nec voluptate jucunda, 
nec exemplo erant necessaria ). Il ne parait pas qu'il ait 
mis beaucoup de sagacité dans ses suppressions : par exemple, 
il néglige tous les précieux détails géographiqnes dont 
Trogne-Pompée avait rempli son ouvrage. 
On a souvent reproché à Jnstin d'avoir, par son abrégé, 
contribué à la perte de l'oeuvre du grand historien, à qui 
la Gaule et Marseille s'honorent d'avoir donné naissance. 
Il me semble plus logique de dire, avec La Mothe-Le-/ajer, 
que, sans avoir été la cause de la perte de cet ouvrage, 
nous lui aons obligation d'avoir « si heureusement réduit 
en petit le grand ouvrage de Trogue-Pompée ». L'abrégé de 
Justin comprend une période de deux mille cent cinquante- 
quatre ans, depuis Ninus, pretrfier roi des Assyriens, jus- 
qu'à l'an 748-de Borne. 
La chronologie n'est pas moins négligée par Justin que 
la géographie; il n'a point de critique ; ses réflexions sont 
sans porlée ; son style, simple, correct, souvent méme 
élégant, manque d'ënergie. Comme il parait n'avoir rien 
changé à l'ordre de l'auteur qu'il abrégeait, les critiques 
nous semble]t avoir été un peu trop loin en laisant porter 
sur Justin toutes leurs censures, et en réservant leur ad- 
miration pour Trogue-Pompée, qu'ils ne connaissent pas 
Charles Du Rozo. 
JUSTINIANI (Faraille). Voye--GIUSTINIANL 
JUSTINIEN, empereur d'Orient, a été surnommé le 
Grand, et/ ne considérer que les choses de son règne, 
l'homme à part, certes ce surnom n'est pas usurpé. Mais il 
lui et arrië ce qui arrive aux princesautour desquelç rayon- 
uentlesaclions d'une époque illusre. Une sorte de réac- 
tion pousse ce-tains esprits à rapetiser celui qui se rehausse 
de la grandeur de tous les autres, à obscurcir l'éclat de 
celui sur lequel rejaillit la gloire de t,ms. Cette réaction d 
l'égard de Justinien n'a [»as atlendu la çostêrité pour se 
faire sentir. L'historiographe mëme de ses guerres, le nar- 
raleur de ses contructions et de ses édifices, Procope, 
aprës avoir publié les huit premiers livres de son histoire, 
en quelque sorte officielle, en a réservé un neuvième, nommé 
le Livre des Anecdotes, ou l'HiMoire secrète, pour dé- 
voiler, en style de libelle, les vices e{ le crimes de l'empe- 
reur et de l'tropCutrice : « Afin, dit-il, que ceux qui exerce- 
rot plus tard le pouvoir supréme puissent se persuader par 
de [els exemples quelle exécration attend pour eux-mm 
Iclws forfaits!  Et le témoinage de Procope ne reste pas 
i.olé : celui des hisloriens contemporains ou voisins de 
celle époque, tels qu'Evagrius, Agathias, Jean Zonaras, 
vient s'y joindre et le corroborer. 
On dit communément que Justinien passa d'une cabane 
de l'III)rie sur le trOne de Constantinople ; mais ce passage 
ne fit pas brusque et sans transition. é en 482, à Tauri- 
sium, de Sabatius, son père, et de Eigleni=.a, sa mère, 
le jeune lTpra[da, car c'était ainsi qu'on le nommail en 
langue slave , futCeuWà Bédérina. Ce» deux villes étaient 
situëes sur lesconlinsde la Thrace et de l'IIlyrie, d'où les 
uns le disent Thrace et d'autres Illyrien. Adopté en quelque 
sorte par les soins de son oncle Ju sri n, il prit de lui le 
nom de Justinien, selon la désinence en usage pour ladC 
nomination des adoptés. Il passa quelque temps en Italie, 
aul,rè de T h é o d o r i c, auquel Justin, étant préfet de l'ar- 
mée romaine, l'avait donné en otage ; mais, aussitOt après 
l'élévation de ce dernier h l'empire, il fit renvoyé à Cons- 
tantinople. Là, successivement investi du magislériat, da 
consulat, du patriciat, du comitiat, du nob:.lissimat, il se 
vit enfin ëlever  l'espérance de la succession impériale. En 
effet, créé císar et associé à l'empire aux calende d'avril 
527, avec l'adhésion forcëe, selon Procope, et selon d'au- 
tres historieus sur la proposition utme du sénat, la mort de 



JUSTI.IEN 
Justln, survenue quatre mois après, le laissa seul en, re- 
reur d'Orient, aux calendes d'aoOt 527, ix i'Age de quarante- 
cinq ans, d'après Zonaras. 
Avec lui monta sur le trUne de Constantinople Théodora, 
qui en avait servi lecirque et orné le tbtre, qni en avait 
babilWle fameux portique de prostitution, l'Embolum, où 
elle fit plus tard, comme en signe d'expiation, élever le 
temple de Saint-Pantalou. Justinien, pour l'épouser, avait 
obtenu de son oncle Justin l'abrogation ,les antiques lois qui 
prohibaient les noces entre les individus de dignité sénato- 
rialeet les comédiennes, lul des sénateurs, nul des an- 
tistions, dit Procope ne ngea à s'y" opposer ; et ceux qui 
naguère avaient été les spectateurs de Tbéodora au théAtre 
du peuple se prosternaient maintenant, les mains suppliautes, 
devant elle, comme ses esclaves. 
Pour bien apprécier les actes du rëgne de Justinien, il faut 
se rappeler l'ëtat de l'empire et de la société au moment où 
il parvint au tronc. Les di.putes sur la religion et sur le 
cirque agitaient tous les e.prits. Ses lois et ses persécutions 
contre tous ceux qui n'étaienl pas cbrétiens orthodoxes, le 
massacre qu'il ordonna de tous les Joifs samaritains, qui 
s'étaient tvoltës dans la Paletine l'ardeur avec laquelle 
il embrassa le parti des b leu contre les vert s, ces tac. 
t i o n s rivales du c i rq u e, les rsultaL fcbenx qo'enlralna 
plus d'une fois cette prédilection, enfin la sdition terrible 
des verts, dont il faillit Cre la  ictime, sont des consequences 
de cette inlluence. 
Les guerres, les constructions architecturales et les lois 
forment les trois grandes catégories des actes de Justinien : 
les travaux ordonnés par lui surces trois points marchaient 
de front, sans que les uns suspen,tissent les autres. 
Avec Bél i sa i re, le premier des généraux de Justinien, 
reparurent des soldats, la discildine , le courage, l'audace 
et les triomphes. Les lnstituls et le Diete n'élaient pas 
encore promulgués, que le royaume des Yandales était 
renverse dans l'Attique, et cette conlrée, raltachëe de nou- 
veau comme préfecture à l'empire, se divisait en diocèses, 
en provinces, recevait un prelet, des recteurs, des prési- 
dents (an 533 ). Aussi Justinien, qui dans le titre de ses lois 
s'clair contenté jusque là des épilhètes vulgaires de Pis, 
Felix, semper A9stus, en publiant ses Instituts, sur- 
chargea-t-il son nom des surnoms de AlemanicÆ, Gothicu, 
Francicus, Germ«nicus, Alanics, Vandalicz, Afrca- 
nu, et de plusieurs autres encore, dont la plupart ne lui 
étaient pas dus. 
A l'Afiique succéda bientUt la $icfle, à la Sicile l'llalie, 
et enfin les Goths abandonnèrent Ruine elle-mème, dont 
les clefs forent, comme un gage dt suiCon, envoyèes à Cons- 
tanlinople. Mais, prises et reprises tour h tour pal" les 
barbares et par les armées de Justinien, les ille d'ltalie 
n'étaient pas encore définitivement reconquises. L'eunuque 
 arsès, qui remplaca Bélissaire, n'(.tait pas indigne de 
cet honneur : il acheva glorieusement l'ouvrage de son pré- 
décesseur. Livrant toute l'llafieà l'empire d'Orient, il reçut, 
sous le titre d'exarque, le eonnnandement de ces courtAes, 
et s'établit à Ravenne, qu'il choisit pour la capitale de son 
ecarchat. Quant au ieux Bélisaire, tomhé en disgrace, 
accusé «le complot, dépouillé de ses dignités et de ces hon- 
neurs, il fut réintégré, mais trop tard, et mourut l'année 
suivante. 
Les guerres de Justinien contre les Perds furent moins 
heureuses dans leurs résultats que celles d'Afiique et d'lta- 
lie. 11 acheta plosieursfois la paix de Khosrou,qui, une 
fois l'argent livré, recommençait presque incessamment ses 
attaques, et finit par rendre l'empire anm,ellement tribu- 
taire des Perses d'une somme de 500 livres d'or. Des tributs 
semblables furent consentis aux Hune, aux Avares, aux 
Sarrasins et / d'autres barbares, pour avoir leur paix ou 
leurs semices militaires. Quant aux travaux d'architecture 
de Justinien, ils ont fourni à Procope le sujet d'n ou- 
vrage spécial (De .diJCiiS). Il n'y avait, dit-on, presque 
pas une ville où il n'eut fait con-truite quelque magnilique 

751 
édifice, pas une province oil il n'e0t b,ti ou rpar quelqu 
ville, quelqne fort ou quelque cli$teau. C'est à lui qu'appar- 
tient la coustrnction de Sainte-Soph ie. Mais les magni- 
ficences et les prodigalités architecturales des princes s'a- 
chètent par l'argent et par la sueur des peuples. Justinien 
accabla l'empire d'impUts; il eut recours à toutes les ressour- 
ces de la puissance impériale sur l'État, sur les provinces, 
sur les villes, sur les particuliers; « et les masses d'or et 
d'argent accnmulées de toutes manières, disent les historiens, 
il les épuisa chaque jour, soit en tributs aux barbares, soit 
en édilices ,,. 
Les œuvres Iégislatives de Justiuien out plus contribu6 ix 
immortaliser son nom que ses guerres et ses édifices. Il 
porta la lumière dans le chaos législatif que fermaient les 
sources si diverses du droit romain, et publia successi- 
vement avec l'aide de différent« jurisconsultes, parmi les- 
quels on remarque surtout Tribonien, le Code, les Cin- 
quante Dcisions, le Digete ou Pandecte, les lnsti- 
tors, la nouvelle édition du Code, et enfin les différentes 
l'ovelles, dont la réonion forme ce qu'on nomme le Cor- 
pu s J u r i s de Jus!inien. Il réorganisa aussi l'enseignement 
du droit et l'institution des écoles. 
L'empereur mourut en 565, après un rëgne de trente-neuf 
ans, ag d'environ quatre-vingt-quatre ans. Montesquieu est 
bienloin de l'ëpargner : « Lamauvaise conduite de Justinien, 
dit-il, ses profusions, ses vexations, ses rapines, sa fureur 
de btir, de changer, de réformer, son inconstance dans 
ses desseins, un règne dur et faible, devenu incommode par 
une longue vieillesse, furent des malheurs réels, mêlés/ des 
succès inutiles et à une vaine gloire. » C'est ix peu près le 
résum« laconique des inculpations de Procope, d'Eagrius, 
d'Agathias et de Jean Zonaras contrelui. Crédule h la Ilatlerie, 
il se laissait dire par Tribonien, selon le témoignage d'un 
auteur contemporain, He.yclfius Mdesios, qu'il serait enlevé 
au ciel tout vivant: aussi, dans le langage oriental et 
hyperbolique d'un gs'and nombre de ses con.tltutions, nous 
voons les sujets aulorisés à inroqucr son termte; a 
houche e»t une bouche divine; ses lois sont de divins 
oracles, des sotoEfles dit'ins; avide dïmmortalité, il faisait 
imposer on nom à toute cliose, jo«quà la superbe colonne 
de Théodose le Grand, dont il faisait arracher la statue 
d'argent pour y substituer la sienne. On compte dix-heu! 
xilles sus" toute la surface de l'empire qui reçurent on n,'..s : 
la forteresse de Mysie, le port de Byzance, le palais im- 
perial, le diadème, la lettre J, ses livres de droit, les élu- 
diants des écoles, plus de douze magistratures, des corps de 
milice : tout cela s'appelait Justinianen. La même prodi- 
galité existait pour Théodora; et sans doute sur ce p«»int 
le servilismedes courtisans asiatiques venait en aide à l'or- 
gueil de l'empereur et de iïmpératrice. « Lorsque Justinien 
fid parvenu h l'empire, dit Jean Zonaras, il n'y eut pas un 
seul pouvoir, mais deux; car sa femme était non moins, 
mais peut-être plus puissante que lui. ,, En plus d'une oc- 
casion, il lui remit le sceptre qu'il aurait d0 porter lui-même, 
rendant des lois ix sa demande, la citant dans ses consti- 
tu tions comme son conseil dans le gouvernement; les titres, 
les triomphes, les inscriptions sur les monnments publics, 
mme le serment des fonctionnaires, étaient commnns a 
l'un comme ì l'autre. Du reste, Justinien se piquait d'être 
versé dan l'Cude de la philosophie, de la theologie, de» 
arts et es lois ; il décidait de son autorité des controverses 
tliéologiqnes, il traçait lui-mme le plan deses monument.% 
il revisait ses lois. Les juriseonsultes, surtout ceux de 
l'école historique, lui ont reproché amèrement d'avoir dans 
son corps de droit, mutilant sans re«pect les anciens auteurs, 
défiguré leurs opinions et celles des empereurs. Cependant 
il faut se rappeler que Justinien n'agissait pas en historien ; 
mais en législateur. La plupart des changements Iéslatifs 
qu'introduisit Justinien sont heureux : il ne s'agissait iflus 
de Ruine, d'institutions ariocratiquement réptblicaines, 
de droit rigonreux. É, carlant ce qui n'était alors lour l'O- 
ries:t que u[;tilités inutiles, il créa plusieurs s.xsl/mes plus 
92. 



.-t. 2 JUSTIN1EN 
naturels, partant plus simples, l, lus quilab!es ; il ne laissa 
],]IIS que quelqzzes traces de ce q,,'on appelait le droit strier, 
et dans une novelle il finit in,me par les effacer entière- 
tnent, en détr,isant ce qu'il , avait jadis de pins caracté- 
risliq,,e dans ce droit, la compo.ition rit-tic des familles ci 
les droits allacbés à celle composition. Il ramena celle 
parité essentielle du droil ci, il à l'observation de la parenlé 
nain,elle, des liens du sang. Sa Iégislalion sur les esclaves 
et sur les affrancl,is fut également douce et chrélienne ; sur 
les aclions et sur l'organisalion des juridiclions en matière 
civile, elle fut plus simple et plus appropriée au nouvel éla, 
,le la sontCé. Une chose qu'il est important de re[narquer, 
c'est q,e ce n'est pas le Corps de droit de Justinien qui a 
ëlé recueilli, compulsé et arrangé par les barbares dans 
leursélabliemenlse,,ropcens :cesont les é¢rits (les anciens 
]urisconsulles romains, les constitutions du code T!,éodosien ; 
c'est de là que lurent lirdes la Loi romaine des Visigolhs 
ci la Loi romaine des Bourguignons. Cependant les idée» 
01ïnno alion de Justinien furenl poussées Irop loin. Ce Code 
modifiant le Diesle et les Inslituts, ces Novelles modifiant 
le Code ci se dclruisanl cuire elles, ielèrcnt dans la Igisla- 
lion nne fluclualion Ioujm,rs fi,nesle, qui a servi de fonde- 
menl au reproche adressé  Ju,linien d'avoir participé au 
Irafic iuf',ime de Trihonien, dans la vente à prix d'or des 
jt,gements ci intime des lois. 
En somme, Justinien a dld un empereur guerroyanl, arcl,i- 
Iccte ci Iëgislalenr : de ses guerres, il n'est rien résiS; de 
son arcl,ile«lure, quelques monuments ; mais ses lois ont 
re le monde et forment encore la base des Iégislalions 
curopéPnnpSo J. OIlTOLAN, 
Professeur à la Facul.é de Droit de Pari.c. 
oICTEBBOECI (Balaille de). Voyez DwTz. 
JUTL.ND (en danois Jylland), province du Da- 
n e ma r k, h»rmant l'exlrémilé septenlrionale de la presque 
lin Citnbrique,bornée à l'ou.t par la mer dt Nord, au nord 
par le Skagcr-Rack,  l'est par le Calléga, et au std par le 
duché de Schleswig. E.le contient environ 31 mriamètres 
carrés, ci ési Iraversíe à son cenlre dans la direction de l'cl, 
par ,me suile de bas»es collines qui se prolongent  Iravcrs 
totale l'étendae de la p.ninsule et alteignenl eu Jttlland, au 
Himmslebcrg, une lévalion de 177 mèlres. Sa surface est 
onduleuse h l'ési, oit clic s'abaisse abrttl»tement en arrivant 
a la mer, et plate sur les nf les occidenlales et seplentrionales 
qu'cnlo«rent des dunes basses et des sables mouvante, et 
q«i s'inclinenl doucement vers la mer en ne formant qu'un 
i,elit nombre de ports. Le sol, assis sur une courbe de 
l,l'lre et de craie qui se prolonge jusqu'à la mer sur la céte 
,»rien,aie, qu'entre-coupcnl tin grand nombre de pittoresques 
cchancrures appelées fioerds, est extrëmement ferlile de ce 
c61é et couverl de belles forS,s; landis qu'au cenlre il 
contienl un grand nombre de marais et de landes, enlrc- 
melés parfois dëlenducs assez considérables de bonne lerre 
aralde, et qu' l'otmsl ainsi qu'au nord il est ntt et .qérile 
ci souffre heaucoup des sables mouvanl. L'extrémilí la 
i,lus sepl.nlrionale et la plus d.serle du Jutland, que ter- 
mine le cap de Sha9cn.«horn, et devenue eomplélement 
une lin par suite de la ruplure de l'islbme qu' l'ouest sé- 
parait de la mer dit Nord le Lymfiord, qui pénètre profon- 
dAment dans Iïnlérieur des terres. 
Le Julland possbde quelques petits cours d'eau, dont le 
pins important est le Guden, ci un assez grand nombre de lacs, 
donl quelques-uns fort beaux. Le climat est Iout pareil à 
celui du Danemark et du Schleswig ; et il en est de ttème 
des qualilés ph'siques du sol et de ses produils. La célé 
orienlale produit en àbomlance des céréales, du bétail et 
d cltevaux, qui conslilucnl les principaux objels d'cxpor- 
la,ton du pas. On ' Irouve partout d'excc'.lente tourbe, 
et sur les cé,es la pgche a une certaine i[nporlance. L'in- 
duslxie, sauf quelques fabriques de toiles ci de poteries, 
est i peu près nulle et limitée à la consommation intérieure. 
La poptd.alion se'[nmtle à 600,000 individus, qtfi,  l'ex- 
eeplion d'un pelil unn:bre ,le calons al'e:nand% sont de 

-- JUVÉNAL 
race danoise. Le pays est diisé en quatre baillias, nom- 
més d'après les villes d'Aalborg, de Viborg, d'Aarbuus 
etde Ripeu. Dans les temps antiques, le Jutland Cail, dit-on, 
habitA par les Cimbres, qtd dounèrent leur nom  la pé- 
ninsule tout entière; mais quand commencent lestemps his- 
toriques, on le trouve habitA par les Jures, peuplade scandi- 
nave, qui atait ses propres rois et qui prit part aux expé- 
dt,tons des Saxons en Angle,erre. Mliés des Saxons, les 
Jules snutinrent la guerre contre Charlemagne, et plus tard, 
sous le nom de fformands, ravagèrent souvent encore les 
coins de France et d'Allemagne, jusqu'à ce que, vers la fin, 
du neuvième siêcle, on au commencement du dixième,  la 
mort d'Halfdan, dernier roi du Ja[land, le roi de Dane- 
marl, Gor[n le vieux, s'empara de leur pa's, qui depuis 
lors a tn.tiours eonlinué de faire partie du Danemark. 
JUVEN,L ( Dc[vs nu Dccs Jt.ils JCVEALi. ), 
naquil à Aquinum, aujourd'hui Aqnino, dans l'AbrnTz, ou 
peut-être ne fut-il qu'orinaire de ,ette ville de l'ancien pays 
des Volsques. On ne ait rien de la fa[ni]le et de la vie de 
ce poële. Sur la foi de sa belle satire du Turbot, on le fait 
vivredu temps de Domilicn. Suivant toute apparence, ce 
ne fut que sous ce prince que son génie éclata dans toute sa 
Iorce. On a prétendu qu'il avait atteint la vieillesse quand il 
compoa ses satires. On peut révoquer en doute cette opi. 
nion. Juvénal parait avoir cultivé par de fortes études ses 
belles dispositions naturelles : malheureusement, il suivit les 
leçons des déclamateurs, qui de son temps étaient fort en 
vogue, et contracta dans leur com[nerce une exagération, 
nue enflure dont tien ne pnt le corriger. On ne saurait, 
du reste, révoquer en doute qu'il n'ait étudié avec soin les 
œuvres de Sénèque, de Lucain et de Tacite ; il a ton,crois 
avec ces trois écrivains des traits de ressemblance qui sem- 
blent en faire un homme de leur école. Pour l'honneur des 
lettres, on vomlrait que l'indignation de la vertu efit Ce sa 
muse : pourquoi faut.il qu'une épigramme de Martial, son a[ni, 
nous tex èle de iris,es secrets ? Ce moraliste si sévère, cet in- 
flexible censeur des crimes et des ices de son temps, ce re- 
doutable flan de tous les pervers, assiégeait les portes et les 
an,ici,ambres des palais, mendiait les faveurs des grands, et 
po,,rsuivait sans cesse les faveur de la Forlune. Jux énal était, 
enfin, le Sallusle de la salire, c'est-à-dire corrompu dans 
ses mœurs, et respirant dans ses écrits l'austérité d'un stoicien. 
S'il avait de l'ambition, il en dut erre assez puni par son 
exil en Ég.vple, disgrace dguisée sous les honneurs obsc«rs 
de quelque Iéon. Certains auteurs le font mourir dans coite 
terre de prodiges, qui ne le consolait pas de l'absence de 
Rome. Suivant de doctes spputations, il se serait éteint 
dans un fige très-avancé, soit en Epte, soit en traite, 
sous le règne d'Adrien. On doit regretter qu'Il n'ait pas laissé, 
comme Horace et Virgile, des traces de sa vie, et des no- 
tions précises sur lui-mëme dans ses écrits ; [nais  cet 
égard les souhaits sont superflus. Inspiré par le talent, et 
non par le cœur, Juvénal nous montre ce qui manquait au 
talent d'Horace, et ce que nous devrions trouver dans ses 
satire% l'amour ardent de la vérit, la peinture des n,oeur 
ro[naines, la I,aine de la t'rannie, et les élans d'une juste 
colère contre les oppresseurs. Il n'a point tente la poésie ly- 
rique, et il a bien fait. La nature de son talent répugnait  
un genre qui veut a,tant de souplesse que de verve, autant 
de grace et d'élégance que d'Ceva,ton. Nourri au milieu des 
c,is de l'Acoin, suivant l'expression de Boilean, il aurait [nèlé 
les déclamations du rl,éteur aux inspira,tons du poète, et 
ses odes ai,raient eu quelque chose du caractère des vers 
de Claudien, sublime quelquefois, mais le plus souvent mn 
no,oné et ennuyenx, comme un son grave et Iongte[nps 
répétë. La satire, surtout appliquée au peuple ro[nain tel 
qu'il était alors, lui convenait beaucoup mieux. Il fallait un 
Tacite à la satire : Juvénal le fut. 
Dès son début on reconnalt en lui le ton d'un ennemi 
des vices, que Ca,on le Censeur aurait embrassé. A peine 
a-t-il paru écouter un moment son impatience contre les 
poètes qui le poursuivent avec la lecturede leurs ouvrages, 



JUVÉ'AL -- JUXTA-POSITION 
qu'emporlé par son génie, il oublie bienttt ces valus sujets 
,le sa mauvaise humeur, pour s'ëlancer dans la carriëre ,le 
Lucile; il marque d'un trait br01ant l'eunuqe qui se marie, 
le barbier enrichi qui lutte de richesse avec le premiersde 
l'Efat, l'esclave d'Ëgypte couvert de la pourpre tyrienue, 
le délateur qui dépouille son patron après l'avoir dénoncé, 
l'inf]me qui acl,ëte des successeurs par des complaisances 
inf-mes, le proconsul exilé qui ruina des provinces et jouit 
de la colère des dieux au milieu des délices, et le Iche 
mari qui hérite des amants de sa femme. A cttë de tous 
ces vices, parait .Néron avec le jeune A«tomédon, qu'il a 
mis à la tte des cohortes pour avoir conduit dans nn char 
le maltre qui le.désl,onore. Il déroule ensuite le tableau I,i- 
de;ix ,les mœurs générales : ce tableaq augmente sans cesse 
de chaleur et d'énergie, jusqu'au moment où le poële semble 
s'arrSter ,levant les conséquences de la satire pour I'crivain 
génëreux qui a osé déclarer la guerre " la perversité de ses 
contemporains, et termine sa composition par ces traits 
que l'on chercherait vainement dans tout ltorace : toutes les 
fois que l'ardent Lucile, semblable à un ennemi qui a tiré 
son glaive, commence ì frémir de colëre, vous voyez rou- 
gir de honte l'homme dont la conscience est glacée par le 
remords d'une faute secrète. 
La satire contre les nobles, trop longue, quelquefois 
surchargée de détails fatigants, re-ferme pourtant des beau- 
tés qu'on ne trouve dans aucun autre poëtedu mme genre; 
elle a cela de remarquable qu'elle nous présente dans la 
Iome de Juvénal les mœurs de l'époque, encore assez voi- 
sine de nous, où les grands seigneurs se piquaient d'Cre 
histrions, cochers, et frëquentaient de fort mauvais lieux. 
Le portrait de Domitien manquait dans Tacile, Juvénal 
nous représente au naturel ce monstre, dans la satire du 
t»'bot, qui, mlant le ridicule à la terreur, nous fait fris- 
sonner pour les malheureuses victimes de la sinistre amitié 
d'ch brigand capricieux, avec qui on peut recevoir la mort 
pour avoir parlé de la pluie et du beau temps. Dans la sa- 
tire des voex, la proscription de Mariu, mendiant son pain 
sur les ruines de Carthage, la fin déplorable du grand An- 
uibal ; le drame de la mort de Prlam, sont des beautés su- 
blimes, que personne n'a encore surpassées. Une certaine 
pudeur avait empché Tacite de peindre avec toute la dif- 
fortuitWde sa nature, dans toute l'infamie de ses dëbauches, 
ce prodige de vices, que Juvénal ose nous montrer jusque 
dans le lupanar où la courtisane impériale demarde son 
salaire aux portefaix de P, ome. La satire contre les femmes 
romaines nous les fait connaitre comme S uétone nous 
révèle l'intérieur du palais, de la vie et du cœur des empe- 
teurs; mais si cette piëce étincelle souvent de beautés, elle 
a trois grands défauts : l'exagération, la monotonie qu'elle 
entraine, et surtout l'absence des belles oppositions que le 
portrait de la vertu personnifiée dans quelql]es femmes au- 
rait pu fournir au peintre. 
En gén.ral, et cette réflexion est fcheuse pour sa gloire, 
quand mdme nous ne posséderions pas sur lui des rensei- 
gnements défavorables, on pourrait encore douter que la 
muse de Juvénal, cette fougueuse émésis de la satire, ait 
eu le sentiment des bonnes mœurs et l'amour de la vertu. 
Inspiré par une 3me pure, le poëte aurait eu plus de pudeur : 
il aurait ignoré ou n'aurait pas voulu peindre certains mss- 
tères de la plus basse partie de la vie humaine, désl,onorée 
par des iches et des pe'ers; ou bien, s'il avait pu descen- 
lre jusque I, il et',t voulu se purifier au sortir de l'enfec de 
la corruption, et aurait pris plaisir à nous faire remonter 
aux champs Élysées pour y respirer le parfum de la vertu. 
Juvénal a eu beaucoup d'éditions dës le quinzième siècle, 
et plusieurs sont considérêes comme princeps. Parmi ses 
trad=ctions en français, on a beaucoup trop vanté celle «le 
i)ussaulx. Elle plalt, il est vrai, par un ton de candeur, 

33 
par un certaine facilité, par quelque dose «le naturel, qui 
lui donne l'ai," d'un écrit composë en français ; mais l'auteu 
détruit comme à dessein toute la poésie de Juvénal. Pour- 
lant, h cause de sa vigueur et de sa franchise de ton. Ju- 
vnal est singuIiërement accessible à la traduction, et sous 
ce rapport il offre beaucoup plus de facilitéqu'Horace. Le pre- 
mier I,omme de talent qui voudra repro«luire exactement, 
presque liltralement mme, Juvénal aec le tour de sa 
phraoe, son expression et sa couleur, aura cent fois moins 
de peine que I°excellent Dussaulx ne s'en est donné pour 
le franciser et l'arranger à sa manière; ,m succës véritable 
récompensera cette ulile tentative. 
P.-L.-F. TI:SOT, de l'Académie Franc.aise. 
JUVÉNAL DES UISINS (JeAn), naquit à Troyes, 
en Champagne, ers le n,ilieu du quatorzième siècle, et fut 
d'abord avocat au barreau de Paris. Ses talents et sa probité 
le firent di«tinuer de Charles ¥I, qui rëtablit pour lui la 
cl,ae de prévt des marchands. La hanse parisienne lui 
fi, t surtout redevable du maintien de la fibre navigation de 
la Seine, contre les prétentions féolales de certains sei,neurs 
riverains; et il encourut peu après la disgrAce du d,c de 
Bourgogne, pour avoir voulu s'opposer aux désordres qui 
signalèrent l'administration des oncles de Charles VI. 
En I.10 il fut nommé avocat genéral au parlement de Paris. 
c'trait l'époque off le schisme d'Occident alait l'Europe. 
J*,vénal des Ur.in soutint avec fermeté les prérogaties 
royales, et on peut le compter parmi les magistrats qui ont 
le plus contribué à fonder les libertés de l'Elise gallicane. 
Vers la mème époque, il donna un autre exemple de vigueur 
pins éclatant encore. Le duc de Lorraine avait été banni 
par arrêt du parlement pour avoir lait abattre les armes de 
France dans des terres de son obéissance. Ce prince, pro- 
tégé par le duc de Bourgogne, se présente ì la cour, au mé- 
pris de cette sentence. Juvénal exposa avec Ibrce au roi, 
en présence mme des deux princes, la nécessité ,le main- 
tenir l'arrêt du parlement : « Jean Juvénal ! s'Crie le duc de 
Bourgo'ne, ce n'est pas ainsi qu'on ait. -- Si, monseigneur, 
reprend avec fermeté la courageux magistrat, il fa»t faire 
ce que la cour ordonne ; ,, et il invite en mème tempstous 
ceux qui sont hons citoyens à se joindre à lui. Le duc de Lor- 
raine, demeuré .epl, est rëd*it à implorer la clémence du 
roi. Lorsque Paris se trouva au pouvoir des Cabochi eus, 
Juvenal, sortant lui-mëme de prison, conçut et exéc»ta l'au- 
dacieux projet de dellvrer le roi, la reine et le dauphin, 
caplif à Vincennes. 
Quand le dauphin Louis fi,t à la tdte des affaires, il le 
nomma son chancelier ; mais Juvénal aTant refusé de sceller 
des lettres qui contenaient des libéralités excessives de la 
part de ce prince, fut privé de son emploi, et cette illustre 
vie s'éleignit dans un inrat oubli. Juvénal des Ursins 
mourut en 1431, laissant deux fils. L'ainé fut successivement 
évèque de Beanvais, de Laon et archevêque de leims, et 
écrivit l'histoire de Charles VI, un «les monunents les plus 
curieux de nos annales; il mourut en t13. Le second 
chancelier de France sous Charles Yll, aprés avo,r fait la 
guerre contre les Anglais avec distinction. Il moi,rut en 1-72. 
A. BOULLÉ[:. 
JUOEXCUS (CAcs ¥vs Aa.',cs ), poëe latin et 
chreticn, ëtait prêtre en Epagne, et mourut en 33t. Outre 
une amplification poétiquede l'Ancien Testament, ou plut6t 
¢]es cinq livres de Moise ( publiée en 853, par le P. Pitra, 
bénédictin de l'abhaye de Solesme, chez 3f.M. Firmin Didot 
en hexamëlres, il écrivit dans le mme rhy{hme une his- 
toirede Jésus ( Hstoriu evangelica ), suivant saint Matthieu. 
JUXTA-POSITIO'. Ce mot, formé de la préposi- 
tion latine juxt« (auprès,, et employé en minéralogie 
pour exprimer l'accroissement des corps par l'apposition de 
matiëes nouvelles sur leurs surfaces extérieures. 



K 

I onzième,eztre de l'alphabet français, et la huitième des 
consonnes, nous vient originairement du kappa des Grec.s, 
qui représentait i'articulalion fore, donl la faible était 9, 
telle que nous la faisons senlir dans 9amelle, 9arenne, etc. 
Dans la langue latine, elle était représentée par la lettre c ; 
mais, suivant Salluste, elle fiJt inlroduile chez les Romains 
par un auleur uomméSalviu. Toulefois, on sait qu'elle n'y fit 
pas Iorlune, car on ne la renconlre dans aucun auleur ni dans 
aucup diclionnaire latin. Ce caraclere, jugé inutile dans la 
langue latine, est d'un usage fort rare dans la n6tre. Il pour- 
rait même touiours ëtre remplacé par le e ou par le q. 
On ne l'emploie guère que pour des mots tirés de langues 
étrangère.s. Le mot kyrielle est à peu près le seul com- 
mençant par cette lettre qui ait pris naissance et place dans 
notre langage familier ; encore a-t-il été formë abusiveulen! 
des mots Ayrie, eleison. Dans nos anciens auteurs, le 
était souvent employë au lien de qu : c'est Pasquier qui le 
fait observer dans ses lleeherches sur la France. 
La lettre K dans quelques anciens auteurs est un 
ractèrenuméral, qui signilie deu« cent cinquante. La mme 
lettre surmontée d'une barre horizontale désigne une valeur 
mille fois plus forte : ainsi  vaut deux cent cinquante 
nille. 
Pans la géographie, le K se trouve souvent dans les noms 
propres du nord de l'Europe et dans ceux de l'Asie, de 
i'Afrique et de l'Amérique. Cependant, quelques-uns de nos 
écrivains lui substituent le C, surtout devant les lettres a, 
o, u. Ainsi on écrit Cherson, au lieu «le Kherso», Cuire au 
lieu de Kare, cie. 
Comme abrévatiou le K signifiait chez les Romains Ktero, 
Ialende. Sur les monnaies françaises c'était le signe eao 
ractéristique de la ville de Bordeaux. En chimie, K désigne 
un équivalent ,le polassium ou kalium. CnlSIPAG.'C- 
IAAB,X  nom d'un édifice quadrandaire, haut de 11 
mètres et large de 9, qui se trouve dans la mosquée sainte 
h La Mec q u e. Suivant la Iradition mahométane la première 
Kaaba aurait élé construile par les anges eux-mêmes, sur 
le modèle du pavillon qui surmonte le !r6ne du Tout-Puis- 
sant ; et la seconde, par Adam, avec qui elle aurait été ea- 
levée dans les cieux, où elle se trouve aujourd'hui placée en 
ligue perpendiculaire au-dessus de la Kaaba actuelle. Seth en 
conslruisit une autre, en terre argileuse et en pierre, mais 
qui périt dans le dëluge : c'est pourquoi Abraham edifia 
la qualrième, où l'on peul encore voir la trace de ses pas, 
afin que le Dieu unique  fft adoré par les ctoyants. Cetle 
derniêre Kaaba fut reslaurëe ì diverses reprises, et en 
dernier lieu, en 1630, par le sultau Mustapha, de sorte qu'il 
ne resle plus aujourd'hui de.la Kaaba primitive qu'un pas de 
muraille, tenu en grande vénération. Dans l'angle sud de 
la Kaaba se trouveextérieurement scellée une pierre noire, 
haute de  mètres envirou, enchsséa daus de l'argent et 
applée Aadar-eI-Aswad, et qui, tovjours suivant la tradi- 
tion mahométane, aqrait été une des précieuses pierres du 
paradis que l'ange Gabriel aurait apporlée ì Abraham lorsque 
celui-ci s'occupait de construire la Kaaba. Cette pierre était 
d'une éclatanle blancheur ì l'origiue, de manière qu'il Cait 
de roule impossibililé d'en supporter l'éclat à la distance de 

quatre journées d. marche; mais elle gémit si longtemps e! 
versa des larmes si abondantes au sujet des péchés du 
genre humain, qu'h la longue elle devint opaque, et enfin 
absolument noire. Mahomet l'érigea en Kiblah, destinée à 
tenir lieu de Jérusalem ;c'est-à-dire qu'il voulut qu'à l'a- 
venir elle ft le but de toutes les prières des croants. Il 
ordonna qu'on y vint «h'ormais en pèlerinage, en même 
temps qu'à la Kaaba ; aussi les pëlerins ne la touchent-ils 
et ne la baisent-ils qu'avec tous les signes de la vénération la 
plus profonde. 
La Kaaba n'est ouverte que trois fois par an : la pre- 
miëre fois pour les hommes, la seconde pour les femmes 
la troisième afin de se laver et de se purifier. Extérieure- 
ment on la tapisse chaque année d'une nouvelle étoffe de 
soie noire, ur iaqudle sont broœeées en or des seutences tirs 
du Cornu. Tout autour de la Kaaba setrouvent les fontaines 
de Zem=em, où les pëlerins se purifient, ainsi que divers por- 
tiques off ils accomplissent leurs dëvotions. Le tout est en- 
touré d'un grand portique couvert et carré appelé Medfid- 
el-Haram, cest-à-dire rno9ude ainte. Les revenus de la 
Kaaba sont considerables, car elle possède dans divers 
pays et villes n grand nombre de terres, de maisous et 
de rentes fonciër.s. Tout près de lb on montre la source, 
gr;ce à laquelle Agar put étaucher la soli brt'iante doaî 
son fils était dévoré daus le désert. 
Avant m6me la veuue de Mahomet, la Kaaba était en 
grande vénération parmi les A.rabes païens ; et des guer- 
res acharnées éclatè.rent souvent pour sa possession parmi 
les tribus arabes voisines de La Mecque. Lors du pèle:triage 
que ?dabomet viut F faire, les 365 statues d'idoles qui l'¢- 
routaient servaient  indiquer les jours de l'année. 
14ABAL. l'o!/e-- KABOVL. 
liA BA LE. Voye'- CANULE. 
IABABDAII ou CABABDIE, contrée montagneuse, 
située u bas du versant nod du Caucase, habite 
en grande partie par des Circassiens et des Tarares, quar - 
.. rosent le Terek et ses affluents, et qu'on divise en grande 
et en petite Kabardah. Cette contrée, demeurée jusqu'/ ce 
jour libre et indépendante, et où les Russes ne possëdent 
pas encore un ponce de terrain, est séparée à l'ouest par 
la Soundia du territoire des Kistes ou Kistetis, restés Ca- 
lement indépendants; à l'est, par la Malka et le Terek, du 
pays des Tatares-Koubans et de In partie rsse u Caucase. 
La population de'la grande Kabardah est évah|ée à 2,000 
m, celle de la petite à 6,00O ; eny ajoutant i 6,01)0 .Ames 
envi|on des pays de Tschegem et de Balkary, qu'on y com- 
prend d'ordinaire, etle prë«ente un total de 36,000 hahitauts, 
dont l'Alève du bélail, la chasse, le brigandage, la guerre et 
le commerce des esclaves sont les principaux moyeus de 
subsistance. 
IAB.kSSOU. Voye: Txxo:. 
I{ABB.LE. Voyez 
KABELJAAUYVS ( Faction des). ;'ok'e« 
EABIRES. ;'oyez Cxnnr. 
E.IkBOUL ou K.BAL, ville dJjà connue des auciens 
sous le nom d'Ortospana ou de Kabura, et qu'Alexandre 
lc Gran.i, lors de son expédilion dans l'lnde en l'an 



KABOUL 
avant J_-C., appela I'ic«a, capitale du royaume d'A fgh a- 
ni s t a n, ou encore ( attendu que les chefs kbans des tribus 
afghanes respectent assez peu et mme pas du tout l'auto- 
rité de leur roi) capitale seulement du Kaboul|stan, c'est- 
à-dire de la partie nord-est et la plus importante de ce 
royaume, coutrée bornée au nord par i'Hindoukouh et le 
Kaféristan, à l'ouest par les Eimaks et les Hézarehs, tribus 
mongoles, qui habitent les déserts montagneux du Paro- 
pamisus (Guristan), et au sud par le Kandabar, le Pes- 
chawer et autres districts, aujourd'hui anglais, situés sur la 
rive droite de l'Indus. La ville de Kaboui est située h en- 
viron 2000 mètres au-dessus du niveau de la mer, dans un 
vallon triangulaire, sur les rives du Kahol, qui va se jeter 
à l'est dans l'Indus, et entourée de t,'ois cotés par des mon- 
tagnes n'offrant qu'un étroit passage, conduisant par la route 
de Ghasna au défilé de Kou,'de-Kaboul. Les montagnes do- 
minent complétement la ville, un étroit sentier !es separant 
seul du mur dont elle est entourée. Elles sont escarpées, ro- 
cheuses, pelëes, et traversées par une longue ligne de 
railles flanquées de tours, construites de distance en distance 
comme moyen de défense contre les Ghildjis, et intercep- 
tant tous les défilés vers l'ouest. Kaboul est entourée d'un 
rempart en terre, assez peu redoutable, malg,'é son ëlévation. 
A l'est de la ville, sur le sommet d'un rocher faisant saillie, 
s'élève le fort de Bala-Hissar ; et c'est sur le versant de cette 
hauteur que sont situés le palais du roi et les jardins 
en tort partie, ainsi qu'un grand bazar entom'é de fossés et 
de murailles, qui par lb se trouve sëparé de la ville. Au-dessus 
du fort, sur une bauteur qui le domine de mme que tous 
les alentours, s'élëve la citadelle, oU un il'ère de Dost-31o- 
baromed consttuisit un palais, auquel il donna le nom de 
Kulaht Fering|, c'est-h-dire de Chapeau Européen. Mais 
depuis 1863, époque où les Anglais s'emparèrent de Kaboul 
et la détruisirent en grande partie, tout cela n'est plus quo 
ruines. Il en est de mème du plus grand et du plus beau 
des bazars, situé au centre de la ville, et consistant en une 
vaste et large rue, bordée de maisons bien b:,ties, à deux 
ctageset surmontées de toits plats, qui a,trefois Caient peint% 
dorés. Cette longue rue est disisée en quatre bazars par 
des com's carrées et «ouvertes, avec des issues h droite et 
gauche conduisant aux bazars voisins, dont le plus grand, 
long d'environ 200 mètres, passait dans toute l'Asie pour un 
modèle d'architectm'e. Le reste de la ville se compose de 
ruelles tortaeuses, étroites et sales, avec de hautes maisons 
a tuits plats, dont il n'y a pas une seule qui soit b/Itie uni- 
quement en pierres, malgré l'abondance des mah.riaux qui 
se trouvent dans tous les ensirous. Kaboul comptait autre- 
lois de 60 à fs0.000 habitants, parmi lesquels un grand 
nombre d'ArmLniens et de j.iis. C'était une importante 
etape pour iescaravanes entre la Perse et l'Iode, et le centre 
d'un grand commerce, aujour,l'hui h peu près anéanti par 
suite de la cessation de toutes relations avec l'Iode. Les plaines 
extrëmement fertiles qui entourent Kaboul, produisent d'C 
normes quantités de céréales et de ressources alimentaires 
de tous genres, tandis que le reste du Kaboulistan, ou de 
l'Afghanistan, est stérile et hors d'état de nourrir une popu- 
lation nombreuse. 
IL-BOULISTAN. voye-- KAnoe. 
IIABYLES KABYLIE. Les Kabyles ou Berbères 
sont après les Arabes la race la plus nombreuse qu'on 
rencontre en Barbarie. Fixés surtout dans les parties les plus 
élevées des montages, et sur la céte d'AIgérie, on les ,'en- 
cont,'e depuis Tripoli jusqu'au bIaroc. C'est principalement 
dans cette dernière contrée qu'ils sont nomb,'eux, et la partie 
de l'Atlas qui s'y t,'ouve sauce leur appartient presque tout 
entière. Les Berbères, appelés à Tunis et à Aiger Kbaili, 
c'est--dire Kabyles (du mot arabe Kbila ou Gabqyl, c'est- 
à-dire tribu) mais an Maroc, où leur lane est demeurée 
plus pure de mélange étranger, notamment avec l'arabe, 
Amarzigh et SchiltouMz, sont sans aucun doute les des- 
cendants des hahitants primitifs du nord de i'Afrique, des Li- 
hyens, des Gétules, qui dès les temps les plus reculés se 

KABYLES 7 s5 
mélangèrent souvent, il est vrai, asec les envahisseurs, par 
exempte avec les derniers dëbris des Puniiet de Vandales, et 
changèrent alors de nom. C'est ainsi qu'au temps des lomains 
on les désignait sous les noms de 2Vu ru i d e s et «le Maurita- 
nions. Mais, en dëpit de tous ces mélanges, ils couservèrent 
toujours leur type originel. Appartenant à la race canca- 
sienne, ils sont en général de taille moyenne, maigres pour 
la plupart, mais cependant vigoureusement coustRués. Ils 
ont extrmement peu de barbe; leurs cheveux sont le plus 
souvent noirs, de mème que leurs yeux, vifs, perçants et  
l'expression fa,'ouche. Leur peau. brunie par l'ardeur du 
solei!, varie ent,'e le brun foncé et le jaune sale. La tëte est 
assez ronde, et, comme la figure, elle regoemble bien moins 
à la tète des peuples orientaux qu'à celle des pe.pies de 
l'Europe centrale. Leurs traits sont g,'ossiers, et portent le 
caractère d'une sauvage térocité. !1 se pe,t toutefois que 
des exceptions existent chez certaines tribus, par suite de 
leur mélange avec des étraugn,'s. 
Ce n'est que d'un t,'ès-petit nombre de h'ibus kabyles, 
habitant les part,es les plus inaccessibles des montagnes, 
qu'un peut dire qu'elles ont toujours conservé leur indepen- 
darne. Les Iomains les subj,guèrent compl,.tcment ; il en fut 
de ,me des Arabes, et plus tard aussi, jusqu'fi un certain 
point, des Turcs, comme le démontre eucore a«jourd'bui 
leur religion, l'islamisme. Seulement, toutes les fois que les 
nations qui les avaient asservies tombaient en alAcadence, 
l'amour de la liberté inné en elles, et que n'avait pu détruire 
une longue et paisible soumission, leur luisait bien vite re- 
conquérir leu," indëpendance. Le t,'ait distinctif du caractère 
des Kab.les, c'est une indomptable férocite, et un amour 
sauvage de la liber[C qui les porte h haï," tous les liens de 
la civilisation, et les rend incapables d'apprécier ou de sentir 
les joies et les plaisirs de la vie sociale eu aucun genre. Ce- 
pendant, dans l'Algérie, ils appartiennent à la pa'tie la pus 
laborieuse et la plus industrieuse de la population. Ils s'a- 
donnent h l'elëve du bétail et h la culture de terres, pos- 
s/:dent des demeures fixes et mme une certaine industrie, 
comme aussi l'esprit commercial est un des traits les plus 
saiilanls de leur caractère. Ils excellent notamment dans la 
préparation du fer (qu'ils tireur, comme le plomb, de mine» 
existant dans l'Atlas } pour instruments aratoires et surtout 
pour armes. Ils savent également fabrique," du salpqre et de 
la poudre, des tissus de laine, des nattes trssées, des us- 
tensiles en bois et en terre ; et dans la plupart des tribus on 
trouve des moulins à eau et des pressoirs h huile. Cependant, 
l'anarchie demeure/ peu près leu," état social habituel ; il ne 
règne point en effet parmi eux d'esprit d'a.gsuciation et de 
confëd, ëration politique; leurs chefs ou cheiks ne jouissent 
point parmi eux d'une grande conideration, et il u'y a que 
le sentiment commun de ianationalité, avec la haine profonde 
qu'il leur inspire pour l'étranger qui puisse les deter,niner h 
se réunir afin de pouvoir lutter avec succès contre leurs en- 
nemis. 
Ls Berbères ou Kabyles sont divisés en tribus, dirig,es 
par des kaids, librement blus, mais investis d'une très-iaible 
autorité. Le pouvoir suprême et mme permanent est exercé 
par la -.avia, assemblëe religieuse composée de marabout% 
et qui décide de toutes les questions en derniëre instance. 
La legislation a pour source la d)emna, assembi,.e génë- 
raie de chaque localité, oO tout homme possédant un fusil a 
droit de voter, quel que soit son ge. A la différence des 
Arabes, les Kabyles combattent presque tu.jours / pied. 
S'ils n'ont point leur extrême mobilité, ils n'en apportent 
dans la lutte que plus d'opini.tretë et d'acharnement. C'et 
dans l'empire de blaroc qu'ils sont le plus puissants et le plus 
nombreux; aussi ne sont-ils guère soumis que de nom -A 
l'empereur. En AIgérie, les Français étaient parvenus h coin- 
piCement subjuguer les Arabes-Bédouin% et h consolider 
leur domination après la soumission d'Abd-eI-Kader ; mais 
le territoire des Kabyles résistait toujours. Il leur a fallu en- 
core plusieurs campagnes pur en venir fi bout. 
Dans i'Afrique fi'ançaise on donne, dans un sens plus res. 



736 
treint, le nom de Kabylie à la partie orientale de la zone 
montagneuse de la c_te apparlenant à la province de C on s- 
tanti n e, occupée par les masses inaccessibles et les mon- 
tagnes coniques de la cbalne du Jurl u ra. On 3, distit,gue 
la Grande h'abglie, située en forme de triangle entre les 
caps de Delhys et de DjidjeoE d le Sétif, et la Pette h- 
bylie, bornée  l'est par la précédente et s'étewlant de 
Djidjelli à Philippeville. On  compte 80,000 hommes en 
êtat de porler les armes. Mais plus loin aussi, dans les 
monts Aurès, on trouve encore un autre ramu de la fa- 
mille Kab)le, qui s'est mme retiré aujourd'hui dans la par- 
tie centrale de la province de Constan[ine ou dans les plai- 
nes, et qui ne dilfère un peu destribus du nord que sons le 
rapport de la langue. On le désine sous la dcnominatiou de 
Shaouias ou Shoviah (bergers), et on n'évalue pas sa force 
h plus de 40.0o0 tët. 
ACllEIE. Voye= K.scuMm. 
ACllETII, KAKIIETH ou KAKTIE. 
I{ACBEAS. ;%9e: ALBINOS. 
KADI ou CADIIY, mot arabe, qui signifiejuçe ouu- 
;-isconsulle, et qui chez les peupl professant le maho- 
metisme est le titre qu'on donne à un juge inférieur, com- 
pris comme le mollah, ou grand-juge, parmi les membres 
du haut clerg, parce que toute la V'gilation a le Cornu pour 
baoe. Les kadis cumulent les diverses fonctions que rem- 
plissent cl,ez nous les commissaires et inspccleurs de 
police, les jucs de paix, les nolaires et les présidcnts de 
tribunaux civils et criminels. Ils vrifient les poids et me- 
sures de marchauds, la qualité des denrées, apposent les 
scellés sur les propriétés des dcdés, Igali»ent ou rddient 
les contrats de mariage ci tous les actes civils, remplissent, 
a dfaut d'un i m a m, les fonctions de ministre de la religion, 
décidcnt sat,s appel de toutes les affai, contcnlieus en 
matiç.res ciiles non-seule,ucnt des nmsuhnans, mais mme 
des jt,il% et des cl,r,4iens, juent et f, mt punir sans délai 
les délinquan en malière cri,ninelle et de lice. S'ils out 
leurs coudëes francl,es da,s l'interprétaliou du droit orien- 
tal, qui est conterai dans le Coran et dans les crits de s 
commeutatcurs, il usent également de la plus a,nplc li- 
beroE dans l'application des amendes et des peines cors- 
relies. Mais s'ils abusent de celle lalitude, il trouvent à 
leur tour t,n jue et un cen«eur dans le cacarous«h ou po. 
licbinel mosuh,,an, qt,i se cl,arge, coin me Pasqt,in  Rome, 
Ae dire a, pouvoir dï,lsolentes vérités. Les kadis no,,,ment 
eux-m,ues let,es aibs (substih,ts), qui fo,',uent le cin- 
quia,ne ordre de magistrats dans les b«urgs et les illages, 
et q,,i sont aussi divises en plusieurs classes. Les fonction 
des kadis, en raison de lem" diversit, de leur importance 
et de leu multiplicité, sont d'autel ph,s luc,ative qt,'ils 
ne sont jamais dans le s de subir les conséqoences du 
proverbe : où il n'y a 'ien lajusticeperd ses droils ; car 
leurs honoraires et les frais des procddures sont toujours 
payés en Turquie par le plaideur qui a gagn. 
11 y a aussi des kadis en AIg6rie. 
H. AUnFFOET. 
I{.EMPFER (ENGELBaECUT), célèbre voyageur, n6 eu 
251, a Lelngo, 6tait Iris d'un ministre lutl,ërien, tudia la 
laédecine à Koenigsberg, et fut nommé en 1689 secrélaire 
d'une ambassade envoyée en Peræ par le roi de Suëde. Deux 
;,us plus tard, il prit du servioe en qualité de cl,irurgien h 
bord d'une IIotte hollandaise qui croisait alors dans le golfe 
l'«rsiquc, et eut aingi ocoesion de visiter l'Arable, l'llindos- 
la,t, Java, Sumatra, le royal,me de Siam et le Japon. Il 
passa det,x annëes dans ce ys. A son retour en Europe, en 
1692, il devint dans sa ville natale le médoein du oemte de 
la Lippe, et mo,,rut le 2 novembre t716.11 est surtout connu 
par son Histo« 9 of Japon and Siam (2 vol. ; Lond,'es, 1727). 
On peut encore citer parnd s uuvrages son HiMoire et 
description du Japon (en anglais; 2 vol., 1727). Banks 
publia I Londres, 1791) ses Icones select« Plantarum quas 
nJaponia collegit, et Adelu»g un extrait de n Diarium 
tltner ad aulam Moscocilicam. Cependant la pl,,s g,'an 

KABYLES -- KAiMAKAN 
partie de ses inanuscrits, riches en observations d'un 
I,aute importance, so,,t demeurés inédits, et se trouvent au 
Moséum britannique. 
I{AFAL. Voyez, BXLbXIIEn. 
I{AFERISTAN. VOUlez HINDOUgOUH. 
KAFETAN. Voyez Cxrr. 
KAFFA ou FÉODOSIA (en tatar Ke.f/d), port franc et 
chef-lieu de cercle dans le gouvernement russe de la Tau- 
ride, sur la cte sud-est de la presqu'lle de Grimée, au fond 
d'un golfe de la mer [Noire et snr le versant d'une monta-me, 
est une belle ville, très-régulièrement construite, où l'on 
trouve uue église grecque et une église catholique, deux 
synagogues, deux mosquées, une direction de douanes et 
un étaUlissement de quaranlaine, nne blibliothèque publique, 
un musée renfermant les antiquités qu'on a pu recueillir 
dans les environs, on jardin botanique, tin collée, un 
thétre grec, quelques fabriques et de 7 à 8,000 habitants. 
Le pot est très-spacieux et profond, et à l'abri de tous les 
vents, à l'exception de ceux de l'est. La ville de Kaffa étit 
autrefois le centre du commerce que faisaient dans cette 
cntree le» Génois. On 3' vo3,ait le sel de la Crimée, les pei'- 
leteries d u ord, dont elle était alors l'un des grands marchés, 
les étoffes de soie et de coton fabriquëes en Perse, les 
denrées de l'Inde, qui 3' parveuaient uar Astrakan, et les mar- 
cbandise de l'Europe. Alors grande et superbe, elle comptait 
plus 100,000 'mes, et les habitants des ces régions, dans 
leur admiration, lui donnaient le nom de Krim-Stamboul 
ou la Constantinople de Crimée, épithète que sa décadence 
n'a pas pu faire tout à fait oublier. 
Le nom de Feodosia, que lui donnent les Russes, a été em- 
prunte par eux à la grande et cëièbre ville de commerce que 
le. Grecs anciens dcsigqaient sons le nom de Theodosia ou 
Thcudosia, colonie milctaine, qui entretenait les relations 
COlltmerciales les plus suivies avec Athènes, où elle expédiait 
des grains, des esclaves, du bois de construction, des peanl 
et du miel. Toutefois, la Tl,odosia des anciens n'occupait 
point l'emplacement actuel de Feodosia, et était située un 
peu plus loin/ l'ouest, I/ oi se trouve aujourd'hui le bourg 
d'Esli ou Slaral;rim ( Vieille Crimée). Cette Tbéodosia 
a)'ant etWdetroite vers le milieu du deuxième siècle de l'ère 
cl,rétienne, fut remplacde par l'ancienne Caph«, au voisi- 
nage de laquelle s'cleva, en 12OO, la nouvelle Capl,a ou la 
Caffa des Génois. Elle ne tarda point à devenir un grand et 
intportant centre d'acti ilWcomme,'ciale, et fut cntouree par 
eu de redoutables travaux de défense; mais le 
la trahison la fit tomber au pouvoir du sultan Mal,orner 11. 
En 1770 elle fut prise d'assaut par le général russe Dol- 
goroucki ; et en t77.1 le gouvernement rue la céda au M,an 
des Tatars, qui 3, établit sa résidence. Cependant, dès 1783 
ce M,an était contraint de la rétroceder avec tons ses États 
à la Rt,ssie, que la paix conclue à Jassy en 1792 en déclara 
délinitivement propriétaire. Depuis lors la décadence de 
cette ville, de:jà commencée sous la dominalion t,,rque, a tou- 
jours été croissant, quoiquesun port ait été dëclaré port franc. 
Dans ces derniers années elle s'était q,,elq,e peu relevée, 
mais sans pot, voir lutter contre K e r t s c h, qui Pavuisine ; et 
l'interruption de tout commerce maritime dont la guerre ac- 
tuelle a été la conséquence immédiate pot,r les provinces 
méridionales de la Russie n'aura pu que lui porter un coup 
fatal. 
On appelait autrefois Ddt«oit de Koffa ou de Feodosia 
le détroil par lequel la mer [Noire comm,,nique avec la mer 
d'Azof, le Bosphore cimmdrien des anciens, biais 
depuis longtemps on ne le dësigne ph, s que sous le nom de 
Détroit de Kcrtsch, à cause de cette ville, autrement po- 
puleuse et imporlante, qui st située st, r ses rives ou en- 
co,e Dètroil de ldniAalé, du nom de la [o..,'terese qui l'a- 
voisit,e. 
I{AFIL._ll. Voyez 
I{AïMA, I{AN KA1M blEKA[N, mol arabe, s)-nonytne de 
foncliunair¢ en général, qui est le tit,e spëcial de deux 
I,auts fonctionnaires tt,,'cs, le gouverne,,r de Constnti- 



KAÏMAKAN -- 
nople et le lieufenant du grand.v,zir, qui l'acccompae 
partont..afin de pouvoir, en casd'empchement, le remplacer. 
I{A|NAPDJI. Voye . K oucnov- K «ir.nJL 
I{AïOUI. Voyez DJINCUlZ-KH«NInEs. 
i{AiIE ou CAIRE, la capitale actuelle del'Égyple, en 
arabe Masr el Kohirah (la capitale victorieu ). Ce nom de 
Masr est un terme générique, qui a servi de leur temps à qua- 
lifier les capitales égyptiennes. Ainsi, Thèbes et Memphis 
le portèrent tour à tour, et quand le musulman Amrou, 
lieutenant d'Omar, eut créé Fostat (la fente), cette ville, 
improprement appelée le vieux Kaire, fut nomméedaos l'o- 
rigine, Masr-Fostat. La capitale actuelle est à l'orient de 
celle qu'Amrou fondasur la rive droite du Nil; elle se déroule 
au pied du mont Mokattam, à I kilomètre du fleuve, et 
sur sa rive gauche. Le sultan ayoubite Saladin, célèbre dans 
l'histoire de nos croisades, la peupla de monuments et la 
ceignit de murailles. Ce fut lui qui, en 1166. fit élever au pied 
du Mokattam la citadelle qui domine tout le Kaire. Celle 
citadelle a trois kilomètres de circonférence, et ou y 
meute par deux rampes taillées dans le roc. Là se trouvent 
une foule de monuments qu'y Cevèrent les souverainq de 
l'Ëgypte, et entre autres le divan des janissaires, le divan 
et le puits de Joseph (pr,nom de Salah-ed-Dyn). Le divan 
de Joseph est une vaste salle où les ayoubites rendaient 
la justice ; trente-deux colounes de granit en dëcorent l'en- 
ceinte. Le puits de Joseph, l'au ,les idus merveilleux de 
cette époque, sert à pourvoir d'eau la citadelle. Taillé dans 
le roc vif, sa profondeur est de 83 mëtres et sa circonférence 
de 20. Des boeufs, établis en dehors et dans un plan inté- 
rieur, Cèvent les eaux au moyen d'une double roue à pots. 
Le Kaire compte environ 30,000 maisons et 200,000 ha- 
bitants, dont 151,000 professant l'islamisme, 60,000 copies, 
,000 juifs 8,500 Francs et Grecs, et 4,500 coptes, Grecs et 
Arméniens réuuis à la communion romaine ; il a 53 quar- 
tiers, 71 portes, 300 mosquées, 45 maisons de bains, «les 
palais, des jardins, des gymnases publics et des bibliothè- 
ques. Méhémet-Ali y a créé plusieurs élablissemeuts  l'eu- 
ropéenne, entre autres des écoles pour la médecine et l'art 
militaire. 
De toutes les mosquées qui décorent la ville, les plus 
belles sans contredit étaient celles du sultan Hassan, et 
celle de EI-Azar ( des fleurs). Ornées à l'lutCieur de sen- 
teuces tirCs du Korau, sculplées et dotCs, elles étaient 
remarquables par la hardiesse de leurs coupoles et l'éléva- 
tion de leurs miuarets. Les minarets sont couronnés de ga- 
leries, et c'est de I/ qu'aux heures de la prière, les mouez- 
zins ou crieurs, rappellent aux pieux musulmans leurs de- 
voirs religieux. 
Quoique les rues du Kaire soient en génral ëtroiles et 
tortueuses, ou y trouve des places immenses, et avant 
toutes celle de l'Esbek.ih, dont la superficie est h peu près 
égale à l'lutCieur du Champ-de-Mars. Lors de la conqutte 
de l'Ëgypte par nos armées, c'était sur celle place que Bo- 
naparte avait établi son quartier général. Au mois de sep- 
tembre, quand la crie du Nil arrive à son plus haut pé- 
riode, cette place est inondée : on la traverse alors er 
barque. 
Les faubourgs du Kaire sont nombreux et bien peuplés. Les 
ports de Boulac et du vieux Kaire servent d'entrep6ts et 
de magasins aux marchandises. Douze cents olels, ou en- 
ceintes couvertes, sont affectés à cette deslination. C'est 
là que se concentrent les produits du Delta et de l'Europe, 
de la Nubie et du Sad. L'okel des Francs est le centre d'un 
beau mouvement commercial. 
Les environs du Kaire et surtout les bords du Nil offrent 
des sites ravissants. Le petit bourg de Gizeh, rësidence 
des anciens beys mamlouks, est une oasis délicieuse, ceinte 
de vergers et coupée de ruisseaux. L'Ile de Roudeh, située 
en face du vieux Kaire, est remarquable par son mêkyr$ 
ou nilomètre, qui sert à mesurer officiellement chaque 
année la hauteur de a crue du Iil. Aux environs du Kaire, 
et à 12 kilom, de distance, sur la rive droite du Nil, se 
DII'. nE LA COINVEns. -- T. XI. 

KALEIDOSCOPE 
groupent les célèbre« pyramide$ d'Égypte, créations colos- 
sales et mystërieuses. D'après les observations précises de 
l'astronome Nouet, le Kaire est situé par 30 ° 2' 21" de la- 
titude nord, et 28 ° 58' 30" de longitude est. Le climat y est 
peu variable ; l'Idver s'y fait à peine scnlir : les pluies y 
sont rares. La lempérature moyenne en-CWest de 22 °, 4 eu 
deg. centiades. La xille a près de 24,000 mètres decir- 
coniOrence. C'est l'un des grands centres de la science et de 
l'art arabes, le rendez-vous des nations et des races les 
plus diverses, et peut-Cre la ville la plus remarquable de 
tout l'Orient. Louis Rmoevn, de l'Institut. 
IAIRE (Révolte du). Le 20 mars 1800, une révolte 
dans la ville de Boulac éclata au moment où les Frauçais 
combattaient contre les Ottomans à H é I i o p o I i s. Les ha- 
bitants sortirent spontanément de leurs murs, munia 
d'armes qu'ils avaient cachées, et atlaquèrent avec fureur 
le fort Camin, qui n'axait qu'une poignée de braves. Le 
commandant fit canonner les assaillants qui, malgré leur 
nombre, furent bient6t dissipés. Cependant, de quelque c6té 
que les Français se presentassent pour entrer dans la xille, 
les habitants les recevaient à coups de fusil. Des beys et 
presque tous les chefs de l'ancien gouvernement entraient 
en même temps au Kaire, et venaient répandre parmi le 
peuple le faux bruit de l'entière destruction des Français. 
Le géuéral Kléber, partout xictorieux, instruit des mouve- 
ments séditieux qu'ils étaient parvenus à susciter, et vou- 
lant arréter à leur principe ces troubles naissants, envoya 
successivement les guéraux Lagrange et Friant pour recon- 
narre et contenir les rebelles. Les Français durent d'abord 
femporiser pour achever la conqutte du pays. Enfin, Bon- 
lac fut sommé de se rendre le 14 avril -- les habitants r 
pondrent qu'ils se défendraient j»squ'à la mort. Le lende- 
main, à la pointe du jour, Boulac fut cerné par le g.ncral 
Friant. Avant de livrer la ville au désordre d'une place 
prise d'assaut, on la hombarda  outrance pour essayer im 
médiatement aprè d'uue seconde sommation. Les habiLnts 
de Boulac répondirent par un feu très-vif, laucé de mai. 
sons et des créneaux des barricades qui fermaient toutes les 
ismes. Pour vaincre cette obstination, le canon battit en 
brèche, et la charge se fit entendre. La plupart des retrau- 
cbements furent emportés ì la fois et d'assaut : quelques- 
uns résistaient encore, et l'ennemi s', défendait axec la ptus 
grande opinialreté. On combattait de maison en maison. Les 
soldats français, ne voyant d'autre moyeu de les réduire 
que l'incendie, embrasent toutes celles qu'ils ne peuvent 
soumettre. Des cris de fureur et de dësespoir se font en- 
tendre de toutes parts. Le gënéral Irançais profite de cet 
etat de désolation pour offrir encore un pardon, qui est re- 
poussé ; le sang coule de nouveau, le sac recommence, et 
une grande partie de cette populeuse cité est livroee aux 
flammes. C'est au moment off elle n'offre presque plus qu'un 
monceau de cendres que les vaincus se décident enfin h ve- 
nir implorer les vainqueurs : les chefs, admis et présence 
du général Friant, lui Iont leur soumission. Au mème lus- 
tant les désordres sont arrètés, les hotilités ont cessé, le 
pardon est proclamé, et la seule puuitiou imposée ì leur 
révolte est une contributiou'de 12 millious, ì prew]re dans 
les coffres des riches négociants du Kaire et de Boulac. 
IAIS.XIIÇII. Voyez CsxvJ:. 
I-UIATOES. Voye= C^cxroL. 
ILXIEILAC ( Entomologie ). Voyez B«-rr. 
i:XIEL.XIS (Elhno9rophie). Voyez ALmSOS. 
IAEHETH ou KACHETH. Voyez 
IALAMAT.A. Voyez CALAMA'I'A. 
iAL..AVRYTA. Voyez CALAVnYTA. 
iALEIDOSCOPE (de x,,).6, beau; ùoç, forme 
«zo, je regarde), instrument fondé sur la théorie de la 
réflexion de la lumière. Dans le kalëidoscope, deux 
lames de verre couvertes d'un xernis unir à leur seconde 
surface forment ensemble uu angle d'envirou 5 degrés, et 
sont maintenues fixément dans cette position. Pour éviter 
toute reflexion inutile de lumière, qui dimi,merait l'effet 
93 



7aS KALÉIDOSCOPE 
cherché, les glaces sont renfermées dans un c) llndre opaque, 
notrci intérieurement. A l'nne des extrëmiles se trouve un 
obturateur percé à son centre d'une ouverture d'un petit 
diamètre servant d'oculaire ; /t l'autre, une capacite fermée 
/ l'intérieur par une lame de veITe transparente, et t l'ex- 
térieur par une lame de verte dépoli, destinée à répandre 
uniformement la lumière. Dans cette capacité, on place di- 
vers objets, comme de petits fragments de verres colorés, 
de petites feuilles de végétaux, de petits morceaux de den- 
telles, etc. Quand on place Pinstrument dans une direction 
presque horizontale, en tournant l'extroemité du coé de la 
lumière, et qu'on regarde par l'oculaire, quelques-uns des 
objets renfermés dans la capacité extrëme viennent peindre 
une image sur t'un des miroirs : cette image, retléchie sur 
le second, y peint une image semblable, qm vient à son 
tour produire une troisième sur le premier »erre, et ainsi 
de suite, de sorte que l'on aperçoit huit ou dix images du 
mème objet, qui représentent divers dessins ; comme la 
plus petite agitation de l'instrument déplace les objets ren- 
lermés dans la caisse vitrée, la multiplicité et la variété des 
dessins n'a pour ainsi dire aucune limite, mais aussi on 
nent/ peine espérer de reproduire l'un quelconque de ceux 
1,Je l'on a obtenus. 
On a cherché à modifier le kaleidoscope de manière ix lui 
donner la propriété de reproduire des images données, mais 
l'instrument a peu gagne sous le rapport de l'agrëment, et 
t.,erdu au contraire sous celui de la simplicité. 
H. GAULTIEn DE CLAUBUr. 
Le kaléidoscope, inventé en 18 t7 par PÉcossais Brewster, 
fit fureur à Paris : pendant Irois ou quatre ans, tout le 
monde avait son kal6idoscope; on en portait 
Cet engouement cessa pure'tant. Mais le kaleidoscope n'et 
pas simplement un jouet d'enlhnt : les dessinateurs en bro- 
deries, toles imprimées, en lbnt usage comme d'un pro- 
ducteur de figures modèles qu'ils peuvent varier h l'infini. 
TEss/.mtE. 
KALENDER. Voyez C.n. 
I{ALEVALA c'est-h-dire Pays de Kaleva, la Finlande. 
Tel est le titre de la grande epopée nationale des Finnois. Elle 
comprend un grand nnmbre de chants (runes), composés 
chacun de 2OO a 70O vers de huit ssllabes. Ces fruits, con- 
.ervés uniquement en Karélie pendant des siècles par la 
tradition orale du peuple linnois et de ses poëtes, avaient dt.jit 
I»aru pat" [ragements au siècle dernier et au conmtencement de 
celui-ci ; mais ils ne furent rétmis et complétement mis en 
ordre qu'en 183 par Ltennrot, qui leur donna le premier le 
titre géneralde Kalevala, et qui en a fait paraitrê, enltt9, 
tme seconde cdition, contenant 2#00 vers et 50 r/o/es. 
_Nous en avons une traduction française par M. Léouzon- 
Leduc. Cette épopée, riche en épisodes de la nature la plus 
diverse, a pure" sujet les guerres des habitants du pa.s de 
Kaleva et des Pohjolas, c'est-a-dire des Finnois et des La- 
IIALIDASAS, le plus distingué des poëtes de l'lude, 
ivait, dit-on, vers la[indu premier siècle de l'èrechrétienne, 
a la cour du roi Vikramàdija. Le plus remarquable de ses 
poëmes est son drame salooitala, qui le place au rang 
des plus grands potes de tous les temps. Il a etc traduit en 
anglais par Joues (Calcutta, i780) et publie en franç,xis, avec 
le texte sanscrit en regard, par Chézy. Indépendamment de 
ce chef-d'oeuvre, nous possedons encorede Kalidasas deux 
pièces de tbé',ttre : Viramorv$i, ouvrage riche en beautés 
pudiques, et une comédie d'intrigue MalaviAa et A9nimitra. 
Ses deux poëmes Ciques Raghou-vansa, histoire mythique 
des anciens souverains d'Ayodbya (publiée par Stenzler, 
Londres, 1838), et Koumahra-Sambahva (la Naissance du 
dieu de la guerre), malgretoutes leurs beautés de detail, sont 
au total fades et froids. Parmi ses poésies purement lyriques 
on distingue plus pat'ticu:ièrement Meglm-duta, c'est-à-dire 
le Mes«ager des nuages, plainte d'unamant éconduit, œuvre 
pleine de sensibilitë et de douces descriptions de la nahre 
(traduit librement en anglais, par Wilson, Calcutta, 

-- KALMOUCKS 
et Srin9ara-Tilaka. Ses Rilu-sanhara, e'est---dire les Sai- 
sons, sont une œuvre moins importante. 
KALIFE. I:oy KUALirI. 
KALISCli ou KALISZ, autrefois chef-lieu du gouver- 
nement de Pologne du méme nom, sur la Prosna, dans une 
vallée magnifique, l'une des plus belles villes du pays, siégc 
d'un evèché et.d'un tribun'al civil, compte environ 15,o0o ha- 
bitants, dont 2,500 juifs. On / trouve un ch/deau, un eol- 
légeet de nombreuses fabriques, surtout de drap et de cuir. 
La ville est d'une haule antiquité ; on soppose que c'est la 
Calisia, dans le pays des Su/ves, dont il est mention dans 
Ptolémée. Le roi de Pologne Micislas III, mort en 12o2 est 
cntcrré dans l'éise Saint-Paul de Kahscb. 
& la batailte livrée sous les murs de Kaliseh, le 13 fé- 
vrier 1813, entre les Français et les Russes, la brigade 
saxonne aux ordres du général Klengel fut obligée de mettre 
bas les armes. C'est aussi h Kalisch que quinze jours plus 
tard, le 28 lévrier 1813, fut signé le traité d'alliance entre la 
Russie et la Prusse contre Napoléon. En 1835 il s'y tint un 
brillant camp de manœuvres, composé de troupes russes et 
prussiennes. Un monument rappelle cette solennite mili- 
tai re. 
IIALIUM. Voyez 
KALI{BiENNER (F#a#.mc), l'un des pianistes les 
plus distingués de notre epoque, naquit a Berlin, en 1788, et 
se forma a Paris, sous la direction de Catel et de Louis 
Adam, dans la composition et l'exécution. Après avoir 
rempurlé en 1802 un grand prix au Conservatoire, il se 
rendit l'année suivante t Vienne, o/, sur la recommandation 
d'ltaydn, qui accueillir le jeune artiste en père, il reçut des 
leçons de contrepoint d'Albrechtsberger. Lié d'amitié avec 
Moscbeles et Hummel, il se proposa alors pour but de con- 
fond re dans son jeu les larges et grandioses principes del'école 
de CICenti avec la maniëre brillante, gracieuse et Ictère de 
l'Acule de Vienne. Il parcourut PAllemagne, en 1814, se 
rendit ensuite à Londres, oi son talent prit un développement 
remarquable et oi il se fit une grande réputation comme 
virtuose et comme professeur de #ann, en mème temps qu'il 
y acquit une grande fortune. En t824, il choisit Paris pour 
ré,idence, et y fonda, en société avec Pleyel, une grande fa- 
brique de pianos. Marië  la fille du général d'Estaing, Kalk- 
brenner menait une grande eistence h Paris. Sa maison, 
dont il faisait le honneurs avec un tact parfait, était le ren- 
dez-vous habituel des hommes les plus distingués dans les 
arts et la littérature. Il est mort, encore dans la force de 
l'àge, le lo juin 18ttg, t Paris. 
Comme compositeur, Kalkbrenner a beaucoup produit; 
et, malgré la difficulté peu commune de l'exécution de sa 
musique de piano, on remarque dans le nombre son con- 
certo en fa bdmol. Ses excellentes Etudes jouissent à bon 
droil d'une grande renotnmée. 
IALLIVODA (JzA,-Vcs.s), célèbre comme com- 
positeur et comme violon, est néà Prague, en 1800, et fut 
élevé au Conservatoire de cette ville. Dans un voyage ar- 
ti.tique qu'il fit en 1822, il rencontra h Munich un pro- 
tecteur généreux de l'art, le prince de Fnrstenberg, qui l'at- 
tacha A sa maison en qualité de maltre de chapelle ; fonc- 
tions qu'il a contitaué de remplir jusqu' ce jour, mais qui 
ne l'ont pourtant pas empéché d'entreprendre tin grand 
nnmbre de tournées artistiques. Son jeu est plutdt doux et 
agtëable que grandiose et brillant. On peut en dire autant 
de ses compositions. 11 jouit à bon droit d'une bien plus 
grande réputation comme compositeur de partitions d'or- 
chestre. Ses symphonies appartiennent aux plus belles pro- 
ductious de ce genre qui aient paru dans ces derniers temp. 
Ses ouvertures ont un caractère moins élevé. 
tALIAi, l'o/ez 
tALMOUCU ( Les ), ou, comme ils se nomment eux- 
mêmes, Derben-Eret nu Doerboen Oirat, c'est-à-dire les qua- 
tre lies, appclés aussi OEloetes ou Eleutes, etpar les Tarares 
K/zalimick, c'et-à-dire déserteurs, la plus nombreuse et 
la plus cél6bre des nations mongoles, soumise aujourd,hui 



KLMOUCKS 
encore pour la plus grande partie ì la souverainel,é de l'em- 
pereur dela Chine, ne laissent pasque d'ëtre trì»répandus en 
Russie depuis deux siècles et d'y occuper de vastes terri- 
toires. 
La première de ces quatre tribus principales, ou ouleu$, 
est elle des Choschotes, c'est-à-dire les guerriers, qui conti- 
nuent d'*h'e gouvernés par des princes de tarac, de Djinghis- 
Khan. Ils sont pour la plus grande partie placéssous la souverai- 
neté de la Chine, et habitent, au nombre d'environ 60,000 
tètes, les environs de Koko-Noor, ou du lac Bleu, qu'ils 
considèrent comme leur vtritable patrie. Une partie de cette 
tribu alla de bonne heure, dit-on, s'ëtablir sur les bords de 
l'lrtisch, mais se réunit ensuite avec la seconde grande tribu 
des Katmoucks, celle des Songares, et prit part à ses luttes 
coutre la Chine. Une autre partie de cette borde, quand il 
y eut excès de population dans la contrée, vint se fixer sur 
le territçire russv, o/ dès t759 et même, suivant quelques 
auteurs, dès 1675 on trçuve des Kalmoucks établis sur les 
bords du ¥olga, dans te ouvernement d'Astrakan. Cette h'ihu 
kalmoucke se soumit volontairement au scepl,re russe, et 
est aussi celle qui a fait preuve de plus d'attachemeut et de 
fidélité à la Russie. Elle se distingue par sa fl'anchise et par 
sa curiosité, par une certaine ivacité qui devient de l'irri- 
tabililé, par uu penchant marqué pour le vol et la vengeance ; 
mais au total on peut dire que ses bonnes qual,ités l'empor- 
tent sur ses mauvaises. Aujourd'hui encore et,le mène une 
vie errante et nomade, transportant  huttes en feutre tant6t 
dans un endroit et tantét dans un aul,re, s'enivrant olontiers 
avec du Ioumiss, sa boisson iavorite, fabriquée avec du lait 
de jument fermentC et excellant à manier l'arc, la flèche et 
la lance. 
Les Songares ou Dsongares Iorment la seconde des grandes 
tribus kalmouckes. C'était autrefuis de tout,es ces bordes la 
plus brave, laplus riche et la plus puissante; au dix-septième 
siècle et encore au commencement du dix-huitième elle 
dminait ur toutes les autres tribus; mais plus tard elle 
fut subjuguêe et presque completement exterminée par les 
Chinois. C'est d'eux que la ongarie ou Dsongarie tire 
nom. En 1755 ils vinrent en très-grand nomhre se placer sous 
I.'autorité du sceptre russe; mais dès 1770 la plus grande 
partie de ces émigrés revenaient dans leurs fuers, aimant 
eucore mieux Cre opprimés dans leur pays par les Chinois 
qu'à l,'étranger par des Russes. 
La troisième tribu principale se corapose des Derbètes, 
qui, réunis taot6t aux Songares, et tant6t aux Torgotes, in- 
rent de bonne boute s'établit" sur le sol russe, où ers la 
fin du dix-huitième siêcle on les rencontrait déià fréql:em- 
ment dans le gouvernement d'Astrakan, sur les bords du 
Yolga et dans l'Oural, tandis que dans ces derniers temps, 
par suite de Fextioctiun de la principal,e ligne de leurs princes 
héréditaires, ils ont abandonne les rives du Yolga pour celle 
de l'll,i et du Don, oi ils se sont associés aux Kosaoks du 
Don. 
La quatrième grande tribn des Kalmoucks se compose des 
Torgotes ou Toerga.outen, qui autrefois étaient unis aux 
Soogares, et qui finirent plus tard par former une borde 
particulière. On les appelle aussi Kalmoucks du Vol9a , 
parce que dés 1716, par conséquent avant toutes les autres 
tribus, ils abandonnérent leur patrie pour s'en faire une 
nouvell,e dans les plaines dll /'oIga. Mais, eux aussi, ils re- 
gagnêrentpour la plus grande partie leurs foyers, quand ils 
commencèrent h trouver le sceptre russe trop pesant. Depuis 
l'année 177t il n'existe plus qu'un très-petit nombre de Kal- 
moucks en Russie. Il n'y resta qu'unetribu peu importante, 
celle des Zoochor, sous le prince Dundukof, qui se soumit 
eomplétement à la souveraiueté de la Russie. Ce prince, 
fils du khan Duuduck-Ombo, et arrière-petit-fils du puissant 
khan Ajouka, se fit plus tard baptiser, et recul à cette oc- 
casion le nom de Dundukof, dont à sa mort son gendre 
Korsakof hédta, par ordre de l'empereur Mexandre V , et 
celui-ci prit alors le titre de prince Dunduo.t-Korml,-of. 
Les quatre dilferentes andes tribus kalmouckes, 

739 
moins ce qui en existe sur le territoire russe, lutinent 
semble de 50 à 60#00 tëtes, sans compter, il est vrai, 
Kalmoucks libres, baptisés et convertis att christianisme, 
dans le gouvernement de Simbirsk, sur les bords du Samara 
et sur ceux du Sok et du Tok ( ty,000 ttes), non plus que 
les Katmoucks d'Orenbourg, qui ont embrassé le mahomé- 
tisme, sut" le versant oriental de l'Oural et les rives de Plset, 
dont les Kirghiz ont fait ds prosélytes, ni enfin les Kal,- 
moucks isolés qui se trouvent à Saint-Pétersbonrg,  Ka- 
san, à Tobolsk, ì Irkutsk, etc., de sorte que l'on évalue 
aujourd'hui leur nombre total de 120  125,000 têtes. Dans 
ces derniers temps le gouvernement russe a fait beaucoup 
d'efforts pour civiliser les Kalmoucks demeurés encore ido- 
I,tres. Dès 1829 il fondait un institut kalmouck spécial, 
à l'effet d'y former et inMruire de bons interprbtes et de bon 
fonctionnaires pour les Kalmoucks ; àe mème divers ou kases 
ont diminué l'oppression que les prêtres exerçaient sur les 
Kalmoucks sectal,eurs de Bouddha. Les Kalmoucks ont une 
littérature, mais elle ne se compose guère que detraductions 
d'ouvrages hindous relatifs au bouddltisme ; et, Zwick a donné 
Donaueschingen, 1852) une grammaire de leur langue, 
qui appartient à la famille des langues mongoles et du grand 
AItaï. Consultez Hell, -Les Stoppes de la rner Caspienne 
(Pu6% 18-13 ). 
[ Aucune nation mongole ou rature ne présente dans son 
organisation des traits pins caractéristiques que ceux des 
Kalmoucks. Ils offrent le type le plus distinct de tous dans les 
rares humaines, ou le moins altéré dans son off#ne. D'jh 
les Huns qui suivirent Attila parurent aux nations du midi 
de l'Europe aussi effrayants par leur aspect hideux quepar 
lettr ferocité. « Ils étaient, dit Jornan,iès d'après Cassiodore 
courts de taille, mais larges de poitrino, avec une gro«se tte ; 
ils avaient de petits yeux noirs, étincelants, une barbe bien 
fore-nie, delarges pom mettes, on nezCuté, lin teint fauve ou 
tanné. A part de la teinte de la peau, toujours jaune, tannèe 
dans cette race, un Kal,mouck ressemble mins attx autres 
peuples qu'un nègre h un Européen. C'est surtott par les con- 
tours raboteux d'un crâne, large et Cal% que les Kalmoucks 
se distinguent dans leur conformation parl,iculire. Génra- 
lement ils sont plut6t petits qne grands, ou d'une stature 
au-dessous de la médiocre : d'ailleurs, bien con.titués, on 
n'en voit presque aucun de contrefait; toutefois, ils ont les 
membres inlérieurs minces et délibs, car ieur nourriture est 
peu abon,lante et ils sont fort sobres; on n'en reneontreguère 
a) ant un and embonpoint, except leurs 9hilomjs, ou prê- 
tres, oisifs. Les traits les plus caractéristiques des visages kal- 
moucks sont depetitsyeux noirs, placés obliquement, ou dont 
le grand angle deseend vers le nez ; ces 'eux sont peu ouverts, 
et leurs paupières paraissent *tre bride'es, charnues ; leurs 
sourcils, sombres, peu épais, forment un arc surbaissé : 
leur nez est toujours camus, petit, écras6 vers le front, 
dantis qne les os des pommettes sont énormément saillants, 
la prunel,le noire, enfoncée, la tte et le visage arrondis en 
boute; les lèvres sont grosses, cl=arnues, livides ; le menton 
est court; des dents blanche% bien rapgées, qui se con- 
servent jusque dans l'extrme vieillesse ; des oreilles va-tes, 
detachées de la tête; des cheveux noirs, lisses, plats et 
durs comme des cdns, signaient encore ces populations. 
On n'a jamais vu aucun Kalmouck blond, ni même châtain 
clair, pour les cheveux et la barbe : celle-ci, quoique asez 
épaisse, n'est pas très-étendue sur le c6tés du visage; 
les hommes se contentent de porter de petites moustaches 
avec un bouquet à la lèvre inférieure; les vieillards et les 
lamas, ou prêtres, conservent seuls toute leur barbe. Du 
reste, h l'imitation des autres musulmans et des Turcs, le 
Kalmoucks s'épilent tout le reste du corps. Le Kalmouck est 
le vrai type mongol et mandchou, le Hun primitif, le 
scythe naturel et indompté. Sa laideur méme est le titre de 
pureté ou de noblesse de sa race. Son teint basané sous 
un climat froid, la pr6cocité de sa pubert6, le faible flux 
menstruel des femmes, leur vieillesse prématarée, le peu 
d'ardeur amot:reuse des sexes chez ce» nomades tatares¢ 
93. 



740 
ont encore aulanl de traits distinctifs d'une race qui n'a 
jamaispu s'Cever à une haute civilisation, mme eu Chine, 
sur les fertiles terres de |'Asie méridionale. Cette race, jaune 
sous toutes les températllres, n'a point connu le régime de 
liberté; partout elle a conservé et établi, all contraire, le 
despotisme civil, l'esclavage intellectuel et religieux. 
On pourrait croire q,a'il n' a pas un seul vi.age d'une 
beauté passable parzni les femmes kalmouckes ; cependant, 
Pal|as et d'autres voyageurs ( peu difficiles sans doute en 
ces contrées) disent avoir vu des filles à visage rond, fort 
joli, et dont les traits étaient si réguliers, si beaux, qu'elles 
Irouveraient mëlne un grand nombre d'adorateurs dans 
Ioutesles villes de l'Europe. Le mélange du sang russe 
et lacer avec le sang ka|mouck produit de beaux enfants, 
tandis que ceux des Kallnouckset des l,landchoux restent 
bouffis, cacochymes et fort laids jusqu'à I';ge de dix ans. 
Comme les anciens Huns et les autres Mongols, les Kal- 
moucl.s se rasent les cheveux, à |'exception d'une petite 
toulfe au sinciput. 
Le langage de Kalmoucks est rauque et guttural ; on di- 
rait qu'ils menacent, ci leurs traits, hideux, prennent aisé- 
ment une expression |éroce. Toujours à c|leva|, Inne dès 
l'enfance, ilsout souvent les jambes et les cuisses calnbr(es, 
les pieds tournes en dt'dans; raremcn! ils se servent d'triers. 
Comme les anciens Scythes, dont ils sont évidemment les 
descendants, plu»leurs conservent encore un arc et des flè- 
ches, qu'ils lancent en |uyaut; toutcfuis, aujourd'[ui la 
plupart sont" armés de carbiues, de lances, d'un cimeterre 
recourbé et de pistolets. L'autique usage des certes de maille 
en fer et d'un casque d'acier en pointe, eostuine guerrier 
des anciens H,ns, se perd insen_,iblelneut : ce ne sont plus 
des dt.fenses conlre les armes à feu. Ils s'avancent «le nuit 
t.n bordes nmflades dans leurs expeditions, font la guerre 
de surprie à l'imlrovite, entw..nt le butin, luassat-rent l'en- 
nemi, et s'embarra.sent rarement de prisonniers de guerre. 
Outre le5 khans, ils ont des najones, chel. subaltt.raes, et 
des aia»gs, ou nobles hcr6ditaires, qui les gouvernent. 
Leur nourriture est la farine d'orge detrempee dans l'eau, 
le lait de Chalnelle ou de j«ment, et la chair de cheval a 
demi crue. Dans la larete des vivres au milieu des dserts, 
on a vu des guerriers kahnoucl, s ouvrir une veine du cou 
de leur cheval, et e restaurer de son sang tout chaud. 
La religion dt.s KalllOUCkS est celle de la plupart des au- 
tres Mongols, ou la doctrine de lïIouddha, quoique plusieurs 
de leurs hordes aieat embrasë aussi le nzallomt.tisme. Ce- 
pondant, leur cro.auce anlique est le |amasme, nu celle du 
dalai-lama du lïbet ; ils ont aussi conserve une dturgie et 
un culte analogue a celui des Ku'uchtus rnongo|s, avec des 
priëres, des sacrilices, une eau lutrdle, et que|ques autres 
pratiques qu'on a crues jadis uuc dëgneration du chris- 
tianisme. 5lais leurs diviuites nu ido|es presentemt esscn- 
liel.lemeut les plus évidents rapports aec la religion de 
Bouddha. Elle euseigr, e diverses incarnations ou nue sorte 
de métempsycose. Leurs ghilougs, ou prtre«, ne se permet- 
Cent pas raZ'me de tuer les poux qui les dçvorent. 
.L-J. X'rv. ] 
i&LOMÉR]DES. On dësi;ne sous ce nom les descen- 
dant d'un certain Kalomcros Comnène, de la branche 
de la famille Comnèzze qui vint s'etablir en Corse vers b fin 
du dix-septiëme siècle, avec trois mille Grees qui quitterent 
alorsle Magre, t'ancienne Laconie, pour se soustraire aux 
persëcutiuns et / la domination des Turcs, maitres du Pé- 
Ioponnèse, et chercher une autre patrie. Cette petite ce- 
|unie ne se fut pas plus tOC installée en Corse, que Constan- 
tin Comnëne, son chef, envoya son fils Klomero en 
sion à F|orence, afin d'y implorer la protection du grand-duc. 
Ce prince, charmë de l'esprit et des q«alités du jeune Grec, 
le garda auprès de lui. Kalomeros aurait alors• suivant l'u- 
sage du temps, italianisé son nom, qui serait devenu ainsi 
Buonaparte. Ses desceudants seraient revenus plus tard en 
Corse, et y auraient Iormé la branche «les lialomdride cor- 
ceou des Bonaparte. 

KALMOUCKS -- KAMA 
Cett généalogie ferait, comme on Ic voit, remonter l'o- 
rigine de la famille Bonaparte ?, celle des derniers empereurs 
grecs de Constantinople. biais elle ne soutient pas la critique. 
Quand le père de Napoiëon, pour le faire admettre ì l'Acule 
militaire de Brienne, dut fournir ses preuves de noblesse, il 
envo)a un dossier qui fut soumis alors  un examen sé- 
vère, etqui tut déposé depuis aux archives impériales. Ctiarles 
Buonaparte y tait remonter authentiquement sa généa|o- 
gie jusqu'à Francisco BuonaImrte, onzième ascendant de 
lapo|on, et qui vivait en Corse en 1567, c'est-b-dire plus 
de cent trente ans avant |'arrivée en Corse de la petite co- 
lonie grecque dont il est question au commencement de 
cet article, et par conséqent avant l'apparition des Kalo- 
érides issus de la famille Comnène. 
KALOUGA gouvernement de la Russie d'Europe cons- 
titué dès 1776, sous le regne de l'impératrice Catherine la 
Grande, et divisé aujourd'hui en onze cercles, comptait 
en tB6 une popolulaton de t,006,00 habitants, sur une 
superficie de 395 myriamêtres carrés, ce qui donnait une 
moyenne de l,;0 habitants par rnyriamètre carré, et 
permet dès lors de le classer parmi les gouvernements re- 
lativement les pins peuplés de l'empire russe. Il est entouré 
par les gouvernements de Moscou, de Smolensk, de Toute 
et d'Or«l : la grande activité commerciale et industrielle 
qui v rëgne y a developpé un haut degré de prosprité. On 
y compte en effet environ 200 manufactures, occupant 
près de 30,000 ouvriers. Les produits des difterentes ver- 
reries, fonderies de ff.r, manufactures de soieries, dëtoffes 
de laine et de coton, de draps et dcaux-de-vie de grains, 
sont d'une qualité remarquab|e. Le gouvernement de 
Kalo«ga, l'un des plus fertiles de tout l'empire, offre par- 
tout |'apect «le tu plus luxuriante v«gétation et d'un grande 
prosperité matériel|e. Son principal cours d'eau est |'Oka, 
dont Les pcherics ort de I'i,portance. Ses nombreuses 
forais abondent en gibier de toutes espèces. Les rossignols 
de Kalouga jouissent aussi d'une grande réputation, et on 
les paye des prix fort eleves dans les diverses grandes xi|les 
de l'empire. L'clerc du bëtail et l'éducation des abeilles y 
sont pratiquées sur une large cchel|e, et l'amélioration de 
la race chevaline a ét6 dans ces derniers temps l'objet des 
[»lus |ouables eflorts de la part de propriétaires de haras. 
La popu|atioa est presque exclusivement russe, et la reli- 
gion grecqtte est ausi celle qui 3r domine, car on u')" coupte 
guère que que|ques ceutaint.s de dissidents. 
Le ch0.f-lieu de ce gouvernement, Kocc., situé à l'em- 
bouchure de la Kalo«schka dans l'Oka, a une population 
d'environ 36,000 habitants, dont la principale indu»trie 
consiste dans la fabrication des bulles, des cuirs, des toiles 
à relies et du vitri«,|, dans le raffinage des sucres et dans 
un commerce co«id,.rable en bulles • fruits, grains  Ié- 
gumes et miel. Elle est le siege d'un évché grec; et on y 
trouve trente-six 6lises, une école forestière, un séminaire, 
une sociéte littérait'e, nn 'mnase, une maison d'ducation 
à l'usage dt.s enfants de pauvres genti|.-hommes, quatorze 
coles primaires, ainsi que divers tablissements de bien- 
faisauce. 
IL31.k  appelé aussi le Pclil Vlga, l'un des affluents 
les [.lus considcrables du Vo|ga, prend sa source, par 
le 50  degré «le latitude nord, dans les monts Oural, où 
il devient navigab|e pourdes barques d'un faible tirant 
d'eau, traverse, en dccïivartt de nombreuses sinuosit«s, 
les 7,ouvernements de Wjoelka et de Perm, forme ensuite 
pendant longtemps le limites entre les gouvernements des 
Wjoetka et d'Orenburg, et après un cours de t,t97 myria- 
mëtres, vient se jeterdans |c Vo|ça, par 55 deg«és de lati- 
tude nord, dans le gouvernement de Kasan, non loin des 
ruines de lïIolgary, eut.tonne capitale des Bulgares. Le Kama 
l'emporte sur la pltpart des grands fleuves de l'Europe 
occidentale sous le rapport de l'étendue de son parcours, 
de la largeur de son courant et du volume de ses eaux, ainsi 
que de sa navigabfl[te, qui commence à peu de distance 
,c sa source. Il a pour al'fluents principaux la Wjoetka, la 



KAMA -- KAMTSCHATKA 
Tschoussowaja et la Bjelaja, et traverse, surtout à partir des 
limites des gouvernements de Wjzetka et d'Orenburg, une 
coutre d'une remarquable fondité. De riches bourgs et 
villages, et une Ioule de grandes et petites villes, nommément 
Perm, Ochansk, Ossa, Kama, Sabiegalowo, Sarapoul, 
Tschistopol et Laïschef, situées sur ses rives, témoignent 
de son importance commerciale. 
I{AMBODGE ou KAMBOYE. Voye'. 
I{AMEXEZ ou KAMINIEG PODOLSK, chef-lieu du 
gouv enement de Podolie, s'est considérablement accrue de- 
puis qu'elle est placée sous le sceptre russe, et compte 
auiourd'hui environ té,000 habitants. On la divise en haute 
et basse ville. D'agréables promenades, pour la plupaît 
tablies sur l'emplacement des fortilications, rasëes depuis 
1812, entourent la ville. (3'est seulement dans la ville basse 
que se trouvent quelques belles rues garnies de maisons 
bien construites. La ville haute est étroite, tortueuse, et 
n'a rien qui annonce le cheblieu d'une province. Ka- 
menez est le siCe d'un ëvdque grec et d'un ëvque catho- 
lique, et autrefois il y résidait cgalement un évdque ar- 
mënien. Elle possëde un gymnase. Le commerce, qui se 
borne h peu près au détail, y est en grande partie entre les 
mains desjuils. La grande distance oh cette ville se trouve 
de Saint-Petersbourg et de Moscou et le manque de bonnes 
routes rendent dilliciles ses relations, qui se bornent à peu 
prës aux villes de la Russie nouvelle ou meridionale. Kame- 
nez était autrefois la principale forteresse de la Poiogne, et 
elle servait de refuge aux habitants de toute la coutree lors 
des invasions des Tarares ou des Kosacks. 
IiAMÉOTII mot bébreu, qui revient souvent dans la 
c a b a I e et qui signilie a m u I e t t e. 
IAMiCill  genre d'oiseaux de l'ordre des ëchassiers, 
qui ont quelques rapports de mœurs avec les gallinacées ; 
ce genre renferme deux espèces, qui, en outre de leurs ca- 
ractères communs, ont leurs ailes armées d'aiguillons ou 
Cetons, qui, dit-on, servent aux nrles d'armes oflensives 
pendant leurs luttes ou cmnbats entre eux à l'epoque de la 
saison des amours. De ces deux especes, l'une est le /,-a- 
mchi cornu (palamedea cornuta, Linne), et l'autre le 
çamchi chaia ( palamcdea chararia , Tcmuink). Les 
kamichis se nourrisseur de substances végétales et paissent, 
comme l'oie, l'herbe tendre. Ces oiseaux habitent le Bresil 
et la Guyane. La chair des jeunes kamichis, quoique noire, 
est bonne à manger. L. LAEIE.T. 
iAMIESCH petit port de la mer Xoire, situë en 
Cimee, à environ 10 kilométres au sud de Sebastopol, 
restera cëlébre dans l'histoire de la guerre dont l'Orient est 
en ce moment le théàtre, parce qu'il sers-il de point de dé- 
barquement et de mouillage, ainsi que de place d'armes,/t la 
flotte fcançaise qui prit part au siCe de S ë b as to p ol. La 
flotte anglaise s'etait etablie ì Balaclava. La baie de Ka- 
miesch, qui s'enfonce dans les terres presque parallëlement 
/ celle de Sebastopol, contint à certains moments plus de 
300 b'atintents de transport h la fois. Le mouillage des ba- 
teaut h vapeur était établi vers le milieu, et a l'entrde étaient 
ancrés les vaisseaux de guerre à voiles, tandis que les vaisseaux 
et les frégates à vapeur faisaient sentinelle en dehors, tout le 
long des c6tes et devant Sébastopol. Trois mois après le 
débarquement de l'armëe française sur ce point de la Crimée, 
l'aspect en était complétement changé. Une route en pierre 
de 20 kilomètres de longueur reliait le furt de Balaclava à 
celui de Kamiesch ; de toutes parts s'ëlevaient des cons- 
tructions nouvelles, et la ville avait pris une physionomie 
toute fi.ançaise. Ele a été entourée de fortiticatious. 
IIAMP. Voyez CAMI'EEDUINo 
iAMPIN. Voye CAMPEN. 
iA.ITSCHADALES ou ITELMEN, comme ils s'ap- 
pellent eux-mmes, c'est-à-dire les hab,tants. C'est le nom 
qu'on donne au pelit nmubre d'habitants du K a m t s c h a t k a 
et d'une partie des lies K o u r i ! e s, qui ont surécu aux luttes 
sanglantes contre les Russes, aux ravages de la petite vé- 
rala et h l'usage immodï6 de I'«au-d-vie. Ces populations, 

"/41 
qu'on valuait i y a uu siècle à près de lO0,O00 me 
présenlent à peine aujourd'hui un effectif de 0,000 mes. 
Ce sont de celles dout on peut dire qu'on les soumet par 
le sabre, qu'on les baptise dans le sang, qu'on retient 
constamment dans les liens de l'esclavage, et qui n'ont gagné 
à changer de marres que l'esprit de révolte, des maladies 
qui leur étaient jusque alors inconnues, et avec la religion 
nouvelle qu'on leur a imposée, ou des discordes religieuses 
ou de l'h.vpocrisie. AuJourd'hui encore la plupart des Kamt- 
scbadales penchent pour le culte de Schaman. Ils sont bons 
et hospitaliers, quoique presque constamment dans un état 
d'irritation ou de fiëvre. La chasse et la pche constituent 
leurs principales occupations, et en hiver ils se renferment 
dans leurs)rtes souterraines, oU habitent d'ordinaire cinq 
ou six familles. Ils se -etissent de peaux de renne, se 
nourrissent de gibier salé, de graisse de cbien marin, de 
pain d'écorce d'arbre, entretenant constamment de grands 
feux, s'égayant par des danses et des sortiléges, et ne se 
souciant guère de la neige, qui souvent couvre leur butte 
jusqu'au tuyau de la cbeminëe. Leurs babitations d'été sont 
soutenues en l'air par des poteaux de bois, et on n'y par- 
vient qu'en grimpànt. Les emmes seules s'occupent des 
soins du ménage et des travaux de culture, qui ont pour 
objet les p.,mmes de terre, les choux et les raves. Leur été 
qui est court, ruais brùlant, permet à l'orge et mme aux 
concombres de mfirir. 
Les Kamtschadales n'ont point d'animaux domestiques. 
Depuis 1820 on a bien introduit parmi eux quelques co- 
citons et quelques poules ; mais le chien, qui leur sert en 
hiver h trainer leurs traineaux, et qui en éle erre ç et là 
et doit pourvoir lui-mème à sa subsistance, est toujours 
leurs yeux l'animal par excellence. 
I;?.IïSCIlATIiA presqutle d'origine volcanique et 
traversée par de hautes montagnes, située a l'extremité nord- 
est de l'Asie, que les Kostcks somuirent et rendirent Iributaire 
de la couronne de Russie; ce qui amer.a de sanglantes luttes 
entre les populatiunsaborigènes, fort altachdes a leur indé- 
pemlance, les K a Lu t s c h a d a I e s, et les d ominateurs étran- 
gers. Son etendue est de 2,800 myriametres carrés, sa lon- 
gueur de 126 m)riamèh-es ; sa largeur moyenne de 35 
riamètres ; et elle est entource/ l'est par la mer du Kamts- 
chatka et une partie de la mer de Behring, a l'ouest par la 
met- d'Ocbotsk. Au sud elle se continue dans les lies Kou- 
files, qui à leur tour se rattachent au Japon et à la Corée 
de sorte qu'on peut admettre que la mer d'Ochotsk et 
mer du Japon étaient autrefois une terre qui tenait au con 
tinent asiatique avec les lies que nous venons de nommer. 
La presqu'tle est presque entirement couverte par une chai n¢ 
de montagnes connues sous le uom de Montagnes du 
Kamtschata. La céte orientale est entouïee d'mm double 
rangée de volcans en activitë, commençant non loin du 
Cap Lopatka, qui en forme l'extrémite sud, et se prolongeant 
presque jusqu'au 57 ° de latitude nord. Parmi les 21 cénes vol- 
caniques qu'on y cmnpte, l'Awatscha atteint une altitudo 
de 2,733 mëtres et le Klioutschi ou Kamtsclmtskaja-Scopa 
4,934 mttres. Beaucoup d'autres ont de 2,000 à 3,300 mètres, 
el d en est peu qui restent au-dessous deslimites des neiges 
éternelles, lesquelles ici varient entre 1,600 et 1,800 mètres. 
A peu prés vers son centre la p:ninsule e»t traverée par une 
troisiëme cbahte parallèle, qui se compose en grande partie 
de volcans éteints, et n'a en général que la hauteur moyenne 
des montagnes, bien qt:e ses sommets atteignent aussi ici la 
limite des neiges. Le c/té occidental de la presqu'lle est plus 
plat, et traversé seulement par une suite de coltines et de 
montagnes peu élevées. La sitation favorable du Kamts- 
chatka entre les possessions russes de l'Asie et de l'Amé- 
rique du ord y a provoqué la création d'un grand nombre 
d'ëtablissements et de colonies, parmi le.quels il faut citer 
les ports de Penschinsk, de Tigilsk, et de Bolscheretsk, sur 
la céte occidentale de la baie d'Awatscha, mais surtout 
celui de lihnei-Kamtschatsk ou Pelrolmwlosk, sur 
¢éte orientale de la niCe baie, principal carrelet de la 



742 KAMTSCFiATKJ 
socété de commerce russo-américaine, admirablement or- 
gantsWpar Krnsenstern. 
Petropawlosk, appelé aussi Peterpaulshafen on encore 
Awatscha, peut Cre considéré comme le chef-lieu du 
Kamtscbatska. On y ca,opte prb.s de 4,ooo babitants. Une 
attaque dirigée contre cette place en aoat 1854 par une es- 
cadre angio-lrançaise échoua, et le seul dommage qui en ré- 
suita pour les Iusses tut la perte de quelques batiments in- 
cendiés par les lmbes de l'enuemi; mais le 3o mai 1855 
des vaisseaux ailiés s'étant représentés devant cette ville, ils 
la ro,,vèrent compiéten,ent abandonnée. Le contre-amiral 
Bruce fit dtruire les batteries ainsi qu'un baleinier russe qui 
se trouvait dcsagréé dans le port. Consultez, indëpendamment 
des Voyages de Krusenstern, de Kotzebue, de Chamisso et 
d'Èrman, les Travels in Kamschota and Siberia de Dob- 
beii (2 vol. Londres, 1830 ). 
KAN. Vo#e-. 
KANARESI. t'oge'- Lxvtes:iEs ( Langues). 
IANAiiS (Cosx^s"rl,), natif de rile d'Ipsara, l'un 
des plus célëbres héros de la longue lutte soutenue par les 
Grecs pour reconquérir leur indépendance et connu surtout 
ca,rime audacieux et habile conducteur «le brtlots, avait fini 
par inspirer aux Turcs plus d'effroi que tous les ecueiis de 
rArcbipei. Simple cal,itaine d'un petit navire marchand au 
moment où_éclata l'insurrection des Grecs, il avait dès 1822 
rendu on nom européen par i'intrépidité avec laquelle, dans 
la nuit «lu 18 au 19 juin, il était parvenu à incendier une 
partie de la flotte turque dans les eaux du canal de Chios, 
et le 19 novembre dans la rade de Tenédos. E 1821 il 
hrtia en -ue de Samos une frégate, et au mois d'octohre de 
la ,nme année une corvette dans le port de Mityièue. 11 
scrvit ensuite, comme conducteur de brtiots et avec le grade 
de capitaine, sous les ordres de 3liaulis. En 1825 il conçut 
l'audacieux projet d'aller incendier dans le port m,xme d'A- 
lexandrie la flotte égyptienne, qui se dt-posait  prendre les 
troupes que Mehémet-Aii envoyait en MurC. Mais cette ten- 
tative, qui eut lieu le g ao0t, échoua, parce qu'un vent con- 
traire repoussa les brtlots iancés par Kanaris conlre la flotte 
égyptienne, de sorte qu'ils br01èrent en pleine mer sans faire 
aucun mai  l'ennemi. L'année suivante il fut chargé du 
commandement de la frégate l'Hellas, et en 127 il lut 
nommë rep,esentant d'lpsara à t'assemblée nationale grec- 
que. 
Après son arrivée en Grèce, Capa à'lstria nomma 
Kanaris comnandant de blonembasia, et il Ici confia ph,s 
lard le commandement d'une flotte de guerre. Fidèle par- 
tisan de Capa d'lstria, Kanaris, quand celui-ci eut péri vic- 
time d'un assassinat, se retira des affaires, et vint s'établir à 
S) fa ; ,nais plus tard il rentra au service d e sa patrie avec 
le grade de capitaine de vaisseau de première classe. De 1848 
/ 1849 il remplil les Ionctions de ministre de la marine, et 
fut prêsident du t-onseii. I:ledevenu ministre de la marine 
le 26 mai 184, il donna sa démission au mois de mai 1855. 
Rien dans l'extérieur humble et modeste de Kanaris n'an- 
nonce l'homme énergique qui s'est immortalisé par tant 
d'actions d'éclat. 
KAYD.kH-kR  khanat de i'A fghanis tan, borné au 
sud par le Bdoudschi»tan, à l'ouest par le désert de i'lran 
intérieur, an nord et / l'est par le Kaboulistan, n'est fertile 
que dans les railCs de sa moitié orientale, coutrée mon- 
tagaense, mais bien arrosée. Le plus grand nombre et les plus 
importants de ses cours d'eau, i'tliimend avec ses affluents, 
le Kaschrouà, i'Arghandab, le Tarnak et la Lora, tarissent 
i:lUand ils arrivent dans sa moitié occidentale, pays plat ,-au 
total extr0mement aride et sablonneux, et finissant par n'ètre 
pins qu'un désert. Indépendamment des habitants abori- 
gènes, tes Tadjiks, et des conquérants, les Afghans, on y trouve 
aussi des Beloutches et des Kissiibasches. Le Kandahar, au- 
trefois siégé principal des Durnis, continue tu,jours à former 
un royaume, plus ou moinsindépen,lant du Ka bd u i, et gou- 
verné par des princes in,|igbn«s depuis que les Anglais l'ont 
également évacué. 

 KAqGURO0 
La capitale, K.,uxnxn, à 42 myramètres an sud-ouest 
de Kaboul, est située daus nne plaine iertile et bien cul- 
tivée, entre l'Arghandab et le Tarnak, et compte environ 
60,000 ou, suivant d'autres, seulement 25,000 habitants. Sa 
fondation se perd dans la nuit des temps; mais c'est à tort 
que l'on y,veut voir I'.ilexandria in Arachosia, fondée par 
Aiexandre le Grand. qu'il iaudrait plut6t chercher dans le 
bourg d'Arghandab, sitté t0 myriamëttes plu»loin au nord- 
est. Dans le cours des siècles cette ville a êté plusieurs 
détruite et reconstruite, en dernier lieu par ladir-Chah, 
d'après un plan régulier et sur un emplacement autre que 
celui de l'ancienne Kandahar, mais dans son voisinage cepen- 
dant. A l'époque florissante de la dynastie des Dur'nL% elle 
leur servait de résidence, et était la capitale de tout rAfgha- 
nitan. Défendue par une muraille et deux chteaux lorts, 
elle est hàtie à l'orientale, et se compose de maisons en bri- 
ques. Les édilices les plus considérables qu'on y trouve sont 
le Tchasschou, bazar situë au cenlre de la ville, le palais 
du roi avec la mosquée qui en dépend, et le tombeau d'Ach- 
med-Chah. Les diverses populations du Kandahar ont cha- 
cune un quartier séparé dans la capitale, qui, située sur la 
principale route conduisant de l'In,le en Perse, était autre.- 
fois un grand centre d'activité manu facturih'e et commerciale. 
I-IAXG-Itl, empereur de la Chine, petit-fils de Choun- 
Tchi, fon, lateur de la dynastie des Tartares Mandchonx, 
né en 15, monta sur le trôneen 166t. Dèsles premiers jours 
de son régne, plusieurs lois funestes furent abolies, celle 
entre autres qui permettait d'élever les cunuques aux pre- 
mières charges derËtat. Son goal pour les sciences et les arts 
d'Europe lui fit ouvertement prot,.ger les jésuites, qui le re- 
présentent comme un des plus grands souverains de la Chine 
et le comparent  Louis XtV. Un ,.dit de tç2 autorisa 
même le fibre exercice de la religion chrétienne dans tout 
l'empire. Un grand travail géographiqe, accompli par les 
missionnaires, la levée de la carte de tous les pays soumis 
à sa domination, illustra le règne de Kang-Hi, savant phy- 
siden et poëte lui-mme. 11 a laisse nu grand nombre flou- 
vrage% et mowut en 1722. 
IA:GUROO on KAYGOUROU, genre de l'ordre des 
m ars u pin u x. L'extrème desaceord qui existe entre les 
membres anteriers et postérieur» des kanguroos terme I.e 
caractère le plus sai3ant de ces curieux indigëues de la 
ouvelle-Hollande. En effet, leur membre anterieur, chétif et 
peu remarquable par lui-reCe, compte cinq doigts, dont 
les deux latéraux, plus petits, sont .'.erminès par des ongles 
assez forts ; la paume de la m«in est nue, et la disposition 
relative du radius et du cubitus permet à rayant-bras d'exé- 
culer une rotation compléte ; le membre postérieur, au con- 
traite, extruw.ement développé, parait tridactyle; le doi 
etrme est aiong et • olumineux, mais les dimensions 
doigt median dépassent toute proportion, son os mtatar- 
sien et six [ois plus grand que le plus grand des os du 
métaearpe ; toutes ses phalanges sont démesurément allon- 
gée% et son ongle forme un veritable salt ; le doi interne 
est réellement formé de deux doigts uxta-posés et con- 
fondus jugqu'à l'ongle de maniëre à simuler  l'extrait un 
seul doigt terrainWpar un ongle double; la longueur de c 
double doigt est encore considérable, mais il est beaucoup 
plus grèle que les deux autres, le diamëtre de ses naetatar- 
siens étant douze fois moindre que oelui du metatarse mé- 
dian. Ce pied, monstrueux par lui-mème plus monstrueux 
encore Iorsqu'on le compare à la main du mme animal, 
distingue parfaitement les i, anguroos de tous les antres uni. 
maux à bourses; mais le devuioppement excessif de leur 
prolongement caudai fournit encore nn autre caractère dis- 
tinctif non moins important, car cet organe, qui chez la 
plupart des mammifères n'a qu'uue importance tr/s-seeon- 
datte, devient chez le« kangroos nn véritable appareil 
de locomotion et de sustentation, et constitue en quel- 
que sorte un troisiéme membre postérieur. Le nombre des 
vertëbres caudales varie de vingt  trente dans les differentes 
espèces du genre; toutes, les dernières seu:es 



KANGURO0 -- KANT 
cent volnmineuseset hérissées de longues, de larges apophy- 
ses, qui donnent attache à des muscles puissants. 
La tte des kanguroos est fine et allongée; leurs oreille» 
varient oensiderablement de forme et de grandeur dans les 
difftirentes espèces; leur appareil dentaire est surtout re- 
marquable par l'absence des ¢anines et par la disposition 
spéciale des incisives; enfin, quelques dilïérences impor- 
tantes se remarquent dans la disposition relative et la forme 
«les mtcbeliëres chez les différentes espèces, différences qui 
ont porté FfCéfie Cuvier h subdiviser le genre hangurus 
en deux sous-genres, adoptant pour le premier le nom de 
halmaturus, et pour le second celui de macropus. 
Le pelage des kanguroos se compese de deux espèces 
distinctes de poils, les poils soyeux et les poils laineux : les 
premiers se trouvent exclusivement aux membres, à la 
tte et ì la queue; les seconds couvrent tout le reste du 
corps; quelques rotes noires, roides, courtes, peu nom- 
breuses, sont parsemées Cri et là à la lèvre snpérieure, aux 
sourcils, sous les yeux, sous la gorge. 
Les kanguroos sont originaires «le la Nouvelle-Hollande 
et des lies environnantes; essentiellement lrugivores à l'Cut 
sauvage, ils se décident à manger tout ce qu'on leur offre, 
et boivent mëmne, dit-on, le vin et l'eau-de-vie qu'on leur 
donne (Quoy et Gaynard); ils habitent les bois, ët errent 
par bandes peu nombreuses, g'neralement cond,itcs par 
de vieux milles; .au repos, ils affectent une station com- 
plétement verticale, daus laquelle leu r éuorme queue et leurs 
longs metatarsiens lutinent un trépied solide, dont l'équilibre 
ne saurait ètre détruit par le faible poids des parties an- 
térieures du tronc; etfrayës et poursui Us, ils courent avec 
une rande agilité, et dans cette course rapide, appelant à 
leur secours et leurs qua tre membres et leur puissaute queue, 
qu'ils détendent comme un res.ort, ils franchissent quelque- 
fois d'un seul bond un espacede sept à dix mi:érés. Les kan- 
guroos sont en général d'un naturel paisible; mais parlbis ils 
se battent entre eux. 
Ainsi que chez tous les marsupiaux, la peau de l'abdomen 
e»t disposée chez les kanguroos de manicre à former au- 
tour des mutuelles une espèce de bourse dans laquelle les 
petits, expulsés de la matrice sous forme embryonnaire, 
grandissent et se dOeloppent, et dans laquelle ils se retirent 
encore pendant quelque temps toutes les f)is qu'un danger 
les menace, alors mème qu'ils sont assez forts pour palh'e 
l'herbe et pourvoir eux-mèmes à leur subsistance. 
Le genre kanguroo parait renfermer d'asoez nombreuses 
espëces, qui se distinguent par des caractères peu imp)r- 
tants, par des différences de taille surtout, et par des va- 
iétés de pelage; nous nous bornons à citer ici, comme e- 
pèses distinctes, et sur l'autorité de Geoffroy-Saint-Hilaire, 
le hanguroo fuligineux, le hanguroo à vnoustacles, le 
hanguroo à filandre, le han9uroo laineux, le han9uroo 
gris«roux; mais il n'est aucunement démontré pour nous 
que la plupart des ces espèces, dites distinctes, ne sont pas 
des variéts d'une seule et même espèce. 
BELFt LD-LEFËV,E. 
IANT (I,ISlANUEL), l'un des pins grands philosopbes 
de tous les siècles, naquit le 22 avril 1724, ì Koenigsberg, 
en Prusse : il était fils d'un sel:ter. Après avoir fait s pre- 
mières études a gymnase de sa ville natale, le Collegium 
l:riedercianum, il suivit les cours de l'université, où il 
étudia d'abord la thé)logie, qu'il abandonna bientOt pour 
les sciences naturelles, les mathématiques et la philosophie. 
Ses cours universitaires nne fois terrainC, il remplit pen- 
dant neuf ans l'emploi de précepteur particulier dans diverses 
fanilles, et puhlia à cette époque son premier ouvrage, 
Pensdes su»" la voeritable apprdciation des forces vivantes 
(177). E 1755 il prit ses degrés, et fit alors des cours 
publica à l'université sur la logique et la me[aphysique, la 
physique et les mathématiques. Après avoir inutilement con- 
couru à diverses reprises pour des chaires qui venaient h 
vaquer dans sa patrie, on lui offrit, en 1762, une chaire de 
i'Osie, qu'd refisa, parce qu'il se sentail hors d'état de Foc- 

super, et n'obtint qu'en 1770 la chaire de Ioçqne et de mè- 
taphysique, deux sciences qu'il continua de professer jusqu'h 
la fin de ses jours. Il avait doejà publié sur les sciences na- 
turelles, notamnent sur l'astronomie (Histoire et, thdore 
universelle du ciel [ 1755 ] ), sur la goapbie physique 
ou encore sur la philosophie (Seul moOf possible d'une 
dmonstration de l'existence de Dieu [ 1763 ]; Observa- 
tions sur le Sentiment du beau et dt sublime [176] ; 
17dves d'un Visionnaire, lucidts par les rres de la mé- 
taphysique [ 1766 ], etc., etc), un grand nombre de disser- 
tations et d'ouvrages qui avaient fait reconnaltre en li nn 
obser ateur aussi fin que spirituel en mme temps qu'un pen- 
seur profond et original. Totefoi% la série d'ouvrages par 
lesquels il a fait époque dans l'histoire de la philosophie 
ne date que de sa dissertation De Mundi sensibffs et intel- 
lgibilis Forma et Principiis (1770), par laquelle il 
inaugura son entrée en fonctions. Ceq en mme temps le 
programme de sa Critique de la Rai.con pure, qu'il ne pn- 
blia qu'onze années plus tard ( 1781 ). Dès lors ses grauds 
ouvrages pbilosophiques se suivirent rapidement. En 1783 
parurentles Prolégoménes de toute métaphysique future ; 
en 1785, la Crœealion de la Mt»taphysiquc des MœUrS; en 
1786, les Prhcipes mtaphysiques des Sciences naturelles; 
en 178, la Critique de la Raison pratique; en 1790, la 
Critique da Jugement; en 1793, la Religion dans les li- 
mites de la simple raison ; en 1791, les Principes mé- 
taphysiques de la Morale, et ceux de la Jurisprudence en 
1798 ; enfin, le dernier de oes ouvrages, L Anthropologie au 
point de vue pragmatique. 
Kant mouruth làge dequa're-vins ans, le 12 février 180. 
Il ne s'était jamais marié, et ne s'(tait jamais éloigné des 
environs de Koenigsberg. Sestravanx e l'empchaient point 
de prendre sa part des distractions du nonde. Il aimait les 
sociétés gaies et sans prétentions, et son commerce était 
aussi agréable que rechercbé. Ses OEurres complètes ont 
Ce maintes fois réimprimées. La plus rêcente édition en a 
paru à Leipzig, en 12 volumes (1838-1839.) 
[ Kant s'est surtout proposé de combattre le scepticisme 
et l'idéalisme ; mais s'il a pris ì parlie le sceptisme et l't. 
d,.alisme védtables, représen|és par H u m e et B e r k e I e y, 
il a mëconuu la cause de tous les deux et la nature du 
dernier. 
Premièremeni, il n'a pas vu la source de l'erreur respec- 
tive de ses deux adversaires; en second lieu, non moins 
superficiel qu'eux, il les a combattus avec des raisons 
aussi mauvaises que l'Calent les leurs. Il a cru que le scep- 
ticisme de Hume tenait fi l'absence d'idëes a priori, comme 
il parle, c'est-à«dire d'idées étrangères aux sens : ce qui 
serait vrai si par !/ il efit entendu les v«.ritables idées pre- 
mières ou générales. Mais ce n'est pas elles qu'il regrette 
dans Hume. Il s'est imaginé, d'un autre coté, que l'idéa- 
lisme de Berkeley, qui faisait tout venir de Dieu, mme 
les sensations, avait pour cause, au contraire, ces idées 
générales, et qu'elles étaient nècessairement exclusives 
de l'expérience. Ainsi placé entre deux erreurs, qu'il croyait 
sortir de deux causes opposées, qu'a fait Kant? 11 s'est 
escrimé, d'une part à r.duire les idées générales à de 
putés conceptions, et dès lors à n'ètre plus les principes 
consti[utifs et les ni,jet% mais les simples directions de l'es- 
prit, ne donnantà l'esprit pour objet qe les sensations ou 
représentations sensibles, qu'il nomme inttitions; dautre 
part, h établir que les sensations sans les conceptions de 
l'intelligence sont radicalement impuissantes à fournir la 
connaissance. A ses yeux, la connaissance comprend deux 
parties d'origine diftërente, et qui pourtant sont inséparables : 
les représentations sensibles et les conceptions. Néanmoins, 
si les conceptions particulières peuvent se apporter fi des 
représentations sensibles, les conceptions générales ne sau- 
raient le faire. Kant cependant ne rejelte pas les conceptions 
générales; il les emploie à établir l'unitWdans les concep- 
tions particulières, comme il emploie celles-ci ì unir les 
représentations. 11 suit de là que les conceptions particulires 



744 
ont un objet dans les représentations sensibles, et que les 
conceptions générales, qui n'y en trouvent pas, n'en ont 
absolument aucun. Avec de tels principes, comment va-t-il 
se dëbattre entre le scepticisme et l'idéalisme ? 
Aprës avoir fait tellement dépendre l'une de l'autre la 
part de l'inelligence et la part des sens dans la connais- 
sance, que la connaissance est impossible si on les sépare, 
Kant se croit en mesurede confondre à la fois Hume et Ber- 
keley, en donnant à l'un dans les conceptions a priori 
l'idéedu rapport de l'effet à la cause, et en prouvant à l'autre 
l'existence des objets extérionrs ou des corps, par l'impos- 
sihilité des conceptions sans cette existence. Mais qu'im- 
portent à Hume les conceptions a jriori ? qn'importe, par 
exemple, que la conception de causeet d'effet, et de leur 
rapport, émane de l'intelligence, si cetle conception est sans 
objet hors des représentations sensibles, hors de l'expérience ? 
Elle s'évanouit avec les représentations qui la faisaient vivre, 
laisse revenir les ténèbres sur le rapport de l'effet h la cause, 
et le doute subsister dans toute sa |orce. D'ailleurs, Hume ne 
nie point les conceptions a priori, puisquïl cherche l'idée 
de eau dans la naissance «le chaque pensée dans l'esprit, 
comme il la cherche dans la naissance de chaque phënomène 
dans l'univers. Qu'importe à Berkeley qo'il y ait des objets 
extérieurs, si ces objets n'existent point réellement hors de 
notre sensibilité et n'en sont que de purs phénomènes ? En 
un mot, Berkeley est idéaliste parce qu'il ne peut comprendre 
l'existence des corps en soi ; Hume est sceptique parce qu'il 
regardeimpossihle toute connaissance de la réalilédes corps, 
de la réalité de I'me, de la réafilé de Dieu. Or, que dit 
Kant? Justement que nous sommes dans cette impossibi- 
litWqui fonde et l'idéalisme de Berkeley et le sceptisme de 
Hmne. En effet, pnL'que tout ce qui écbappe aux sens est 
inaccessible à l'intelligence, il est manifeste que la substance 
de l'-,line, la substance de Dieu, la substance de corps, hfi 
échappant éternellement, sont pour l'intelligence comme si 
elles n'étaient pas. L'intelligence n'atteint rien de Dieu, 
puisque dans Dieu il n'y a rien de sensible : c'est pour elle 
une notion vide; elle ne saisit de I'meque le fait actuel de 
chaque pensée découvert par le sens intime, et des corps que 
les phénomènes. Et ce ne sont pas là des consíquences qu'il 
faille arracher au principe de Kant ; elles en sont tirCs par 
lui-mme, il s'évertue à les établir, il les propose et les vante 
comme de sublimesdécouverteg; il va iugqu'à douter si Dieu 
peut comprendre les cbosesintellect lies: Cest, dil-il, 
question de savoir s'il peut exister un entendement qu 
en soif capable ( ibid., 357). Voilà une merveilleuse refi- 
talion de Hume et de Berkeley! Il se pose pour combattre en 
eux le scepticisme et l'idéalisme ; et de cette impossibilité 
de rien comprendre jaillissent naturellement et à volonté 
ou le s¢epticisme, qui doute, ou l'idéalisme, qui nie, non pas 
seulement l'idéalisme partiel de Berkeley, qui no frappe que 
les corps, mais l'idéalisme absolu, qui tombe aussi sur l'àme 
et sur Dieu. 
Il faut voir Kant s'applaudir d'avoir abattu, foulé aux 
pieds les orgueilleuses prétentions de la raison à atteindre 
un monde supérieur aux sens, de l'avoir enfermée dans le 
cercle de l'expérience, comme dans un cachot de ploml, 
en lui coupant les ailes divines qui ravissaient Platon dans 
l'empire des idées éternelles, dans la région suprême et in- 
finie des réalités intellectuelles ou essences des choses! In- 
sensé ! vous voulez garrotter la raison avec les sens et Pat- 
tacher à la terre l et vous ne voyez pas que les cbatnes que 
vous jetez sur elle, elle les brisera toojours ! Vous ne voyez 
pas que cette indomptable ardeur qui la porte vers l'absolu, 
que vous ne savez connaitre, en alteste la réalitél vous 
prétendez lui signifier en martre l'impuissance d'arriver 
l'absolu, qu'elle rëve. En bien, dans sa fougueuse indigna- 
tion de se voir privée de cet absolu, d Dieu, qui estson 
besoin, vous la verrez, dans vos premiers disciples (Fi- 
chie) se déclarer elle-mme absolue, Dieu ! Vous voulez 
qu'elle ne puisse rien concevoir, ni à elle, ni h Dieu, ni 
l'univers : eh bien, dans vos disciples encore (Ficbte, 

KANT- KANTAKUZENE 
s c h e I I in g, H é g e I ), elle se croira capable non-seule- 
ment comprendre leur existence et la sienne, mais de les 
créer et de se créer avecenx. Que si elle ne peut supporter 
le poids immense de l'absolu, elle le placera hors d'elle 
mais ira s'engloutir en lui (Scbelling, Hegel), et roulera 
ainsi d'ablme en ahlme I Et voilà comment Kant a réussi à 
soustraire l'esprit aux idées éternelles, qui jusqu'à présent 
suivant lui l'avaient tenu capti| et délirant dans leur do- 
maine imaginaire, et à les conlraindre elles-mmes de venir 
se plier au joug de la réalité qu'on voit des yeux, qu'on 
saisit des mains, et d'abdiquer toute la part de l'existence 
que cette sensible réalité se refuse à leur sonscrire ; ou, 
pour parler son propre langage, comment il les a forcées 
de subir bumhlement la loi de notre faculté expérimontale 
de connaltre, au lieu de la lui imposer. Oui, nous l'avons 
dit ailleurs, et nous ne saurions trop le répéter 
joue avec les idées métaphysiques, nul ne peut leur dire : 
Vous viendrez jusque ici, et ne pserez pas outre. Souve- 
raines, inflexibles, ne connaissant delimitesqu'elles-mmes, 
elles brisent les barrières qu'on avait dressées contre elles, 
et se produisent, éclatent, dans leur plénitude, btalheur à 
qui les aborde pour innover, et qui ne peut embrasser leur 
étendue et mesurer leur puissance ! Elles le forceront à donner 
le spectacle des plus ddplorables écarts. 
flous n'avons jugé Kant que comme métaphysicien. Du 
reste, il avait un talent snpérieur et des connaissances rares 
dans presque tous les genres. Il parait mëme, par quelques 
opuscules qu'il nous a été impossible de nous procurer, qu'it 
a eu des vues nouvelles en astronomie et en physique. - Il 
affirme (dit de lui 5I. Schoen, dans l'Exposilion de son sys- 
tème, p. 3), d'aprë» les lois du calcul et celle de l'excen- 
tricité progressive des planètes, qu'il existe d'autres corps 
célestes au-delà de Saturne : Herschel le prouva, le 13 mars 
1781, à l'aide du télescope. On trouve dans cet ouvrage des 
conjectures remarquables sur la voie lactée, sur les phé- 
nomènes de Saturne, etc.; conjectures que le génie obser- 
vateur des astronomes a déjà commencé à confirmer. La 
Ihéorie des vents, le IraitWsur les volcans de la lune, l'lus- 
toire des tremblements de terre, ainsi que ses idées sur le 
mous ement et le repos des corps, fixèrent bientdt l'atten- 
tion des physiciens. ,, Comme moralisle, Iorsqu'il consi- 
dère le sublime et le beau dans les caractères des individus 
et des peuples, il a des pages dignes de nos premiers écri- 
valus. ]]OIDAS-DEMOULIN. 
IIANTAIUZÈNE  célèbre famille grecque, peut-dlre 
aussi ancienne que celle des Paléologues, mais dont il n'est 
fait mention dans l'histoire de Pempire byzantin qu'au qua- 
torziéme siècle. 
Jean K«rxgcz/,E, né ì Constanlinople au commence- 
ment du quatorzième siècle, rendit d'importants sersJces aux 
empereurs hyzantins Andronic II et III comme général 
d'armée et cormne capitaine. Andronic III voulut partager 
son tréne avec lui ; mais Kanlakuzène se contenta de pos- 
séder toute sa confiance. A la mort de ce prince (131), il 
devint le tuteur de son fils, l'empereur Jean Paléologne 
alors gé de neufans seulement, et régent de l'empire, qu'il 
administra parfaitement. Pour défendre l'empire aussi bien 
contre les attaques des Bulgares et des Turcs, que contre 
les incessantes intrigues de la mère du jeune empereur, 
qui plus tard épousa sa fille, il se mit lui-méme sur le tréne 
en 1341. Mais il  renonça en 1355 pour ésiter la bmerre 
civile, et embrassa alors la x'ie monacale. On croit qu'il 
morut vers 1380. C'est dans la solitude du cloitre qu'il 
écrivit, sous le nom de Christodulas, l'histoire de son temps 
( 1320-1357 ), ouvrage compris dans le Corpus Scriptorum 
Historioe By:antinœe. Ade préciens qualités du cœur, Kan- 
takuzène joignait de brillanles facultés intellccluelles et une 
vaste érudition. Outre cette histoire, on a de lui un com- 
mentaire sur la Morale d'Aristote, des erits contre les juifs 
et les mahométans, et une réfutation du Coran. 
Son fils, Mathias KAtcrvzea, qui après l'abdication de 
son père chercfia à se maintenir sur le tr6ne par la force des 



KANTAKUZÈNE -- KANTON 
armes contre l'empereur Jean Paléologue, consentir colin, 
sur s,s remontrances et après des alternatives de bonne et 
de mauvaise fortune, à renoncer  tontes ses prëtentions, 
en 1357. 
Sous la domination des Turcs les Kantakuzènes appar- 
tinrent aux familles fanariotes les plus distinguées de Cons- 
tantinople, et en cette qualité fournirent plusieurs bospodars 
à la Moldavie et ì la Valacbie. Plus tard, ils s'établirent 
en Russie; et au début de la lutte entreprise par les Grecs 
pour recous rer leur indëpendance, les frères Alexondre et 
Georges I£XTUZ/E, alors au service russe, y prirent 
nne part active. Georges accompah, na le prince Alexandre 
Ypsilanti en Moldavie, en mëme temps qu'Alexandre se 
rendait dans le Péloponnèse. Mais, mecontent bientét de la 
tournure qu'y prenaient les affaires, il netarda point h s'é- 
loigner du tbéàtre de la guerre. Les deux frères ont publié. 
leurs souvenirs personnels sur la r.volution grecque de 1825. 
IIAXTÉMI (D/.mTmcs), hospodar de la Moldavie, 
né en 1673, descendaitd'une famille greequeëtablie en Mol- 
daie. On cite peu de Grecs à qui la Porte ait Iémoigné 
plus de confiance; niais une modification qui eut lieu dans 
le Divan amena un cllangement complet dans sa position 
à l'egard du sallaç. Kantcmir entra alors eu ngociation 
avec Pierre le Grand, qui lui garantit la possession de la 
M olda vie, comme principauté héreditaire dans sa famille, 
sous la protection «le la Russie. La guerre n'ayant pas et6 
thvorable aux armes du czar, Kantemir suivit son nouveau 
protecteur en Russie, fut fait prince russe, conseiller intime, 
et tout,rut en 173, en Ukraine, ou il avait acquis des 
,propriétés. Il est auteur d'une Histoire de la Grandeur 
et de la Décadece de l'Empire Othoman, écrite en latin, 
et qui jouit encore d'une grande estime. 
Son fils Antiochus KA.TEUi, nd en 1709, à Constan- 
tinope, fut le principal moteur de la chute de la famille 
Dolgorouky, et obtint à L'ge «le vingt-trois ans l'ambassade 
de Bussie à Londres. II mourut en t7,4, en Halle, où 
l'avait appelé sa santé chancelante. Il a composé en langue 
russe quelques satires, qu'on lit encore. 
IIATON ou pluttt KOUAXG-'I'OXG, chef-ieu de la 
province chinoise du mme nom, à peu de distance de 
l'embouchure du Tcbou-Kiang, ou lliviëre des Perles, ap- 
pelé aussi Tiger , fleuve eonsiderable. Aux termes du traile 
de Naoking, c'est l'un de» ports et des granAs centres de 
«'ommerce en Cine, qui devraient être ouverts aujour, l'lmi 
aux Européens. Mais'les Chinois se sont soustraits a I'exe- 
turion de celle clause du traite, précisément en ce qui con- 
cerne K'mien, dont l'intérieur demeure toujours interdit aux 
étrangers. Cette ville est delendue par plusieurs folts et par 
une muraille garnie d'artillerie, dont le circuit est d'environ 
t5 kilom/:_tres. Toutefois il n'' a guère qu'on tiers de 
l'espace qu'elle renferme qui soit occupé par des habitations; 
le resle est couvert de jardins d'agrément et de viviers. 
Comme toutes les autres grandes villes de l'Empire du Milieu, 
elle est divisée par une marailleen deux parties principales, 
la ville chinoise et la ville tatare, independamment de plu- 
sieurs grands faubourgs. La plupart des maisons sont cons- 
truites en briques et n'ont qu'un étage; celles des mandarins 
et des riches marchands sont plus élevées et bien bMies. De 
tous cotés on aperçoit des temples et des pagodes, quelquefois 
très-ricbement ornés et décorés des images des divinités 
chinoises. 
Les rues de Kanton ressemblent à celles de Venise, et 
sont droites, longues, généralement très-étroites, parCs en 
pierres, propres et ornées de dislance en distance d'arcs de 
triomphe, c'est-à-dire de monuments consacrés à la glorill- 
cation de a vertu et des hauts faits. Les édifices publics sont 
plut(t remarquables par leurs vastes proportions que par 
leur magnificence. Le »oir, l'entrée de toutes les rues est 
fermée au moyen de barrières, en mme temps que les 
portes de la ville. Dans les rues principales, les boutiques 
se toucbent et sont garnie« des produits les plus précieux «le 
l'industrie clfinoise, notamment de porcelaines, de soieries 
IdlCT. DE, LA COASLii. -- T. XI. 

745 
et d'objets en laque. Les plus riches boutiques se trouvent 
dans les laulaourgs, à cause des Européens, h qui il est tou- 
jours interdit, comme nous l'avons déjà dit, de pénétrer 
dans la ille proprement dite. Ail-dessus de la porte d« 
chaque houtique se trouve un tableau disposé sur un portique 
soutenu par des eolonnes, peint d'nne couleur foncée, ou 
encore doré, et indiquant les marchandises qu'on y trouve 
à vendre, ainsi que le nom du marchand. Cette double 
rangée de petites colonnes forme une colonnade sans fin 
qui, avec la r!chesse, l'élégance et la diversité des produits 
exposés, offre le coup d'oeil le plus intéressant. Plusieurs rues 
ne sont remplies que de marchands ou d'artisans de la même 
espèce. Les maisons des Europe_eus forment dansle faubourg 
du sud, situé le long du Ileuve, un quartier à part, oU cha- 
cune des nations cotmnerçantes de l'Europe a sa factorerie. 
La population «le Kanton est, à ce qu'on prétend, de 
t,40,ooo Urnes. Ce qu'il y a de certain, c'est que Kanton 
est l'une des villes les plus gran,!es et les plus peuplées de 
la terre. Le manque de largeur des rues ne permet pas de 
s'y servir de voitures; tous les fardeaux s'y transportent 
par des portefaix au moyen de brancard en bambou qu'ils 
placent .,ur leurs épaules. Les plus riches babitants ont des 
litières. Il est extrmement rare d'apercevoir des femmes 
tarares ou chinoises dans les rues, et on n'en voit jamais de 
jeunes. Autrefois il tait mme délndu aux Earopeennes de 
venir de Macao à Kanlon. Aux al,proches de la ille, la 
riviëre est colverte d'innombrables embarcations et radeaux, 
formant un quartier p;rtieulier, divisé en lignes parallëles 
formant comme autant de rues et servant d'b'dbitations 
flottantes h la population pau re. Cest aussi là que se trou- 
vent ce qn'ot appelle les bateaux de fleurs, lupanars qui 
contiennent des mill!ers d'habitattes, l'lus de 100,000 indi- 
vidus vivent ainsi avec leurs familles, sans jamais mettre 
le pied sur terre, et tirant leurs moyens de sub.istance uni- 
quement de l'active navigation d-ni la ri ière et le théAtre. 
Kanton et toujours la place la [»lus importante qu'il y ait 
en Chine pour le commerce étranger, et malgré l'ouserture 
de quatre autres ports, le grand centre du commerce enro- 
peen, qui ne pouvait se faire autrefois que par l'intermédiaire 
des marchands h on 9s, niais qui est libre depuis le traité 
de pais inlersenu entre I'.ngleterre et la Chine. Les prin- 
cipaux articles d'exportation sont le tbë, lasoie, l'argent en 
barres, puis divers ar;.icles de droguerie, les vernis, la por- 
celaine, les objets en laque et les draps ; mais ces dernières 
marcbandises donnent lieu à des transactions bien moin 
importantes et moins nombreuses que les premiëtes. Les 
principaux articles dimpotoEation sont l'opium, qui ne s'in- 
troduit cependant qu'en contrebande, les produits naturels 
de l'Iode et ceux des manufactures de l'Europe, et en par- 
ticulier les cotonnades et les lainages. Ce commerce se 
trouve pour la plus grande partie entre les radios des Anglais; 
après eux sienncnt les Amériçains, puis les Hollandais. Le 
commerce des autres nations est sans importance. Les 
naxires europcens sont obliges de s'arrèter à Wornpoa, 
vaste et commode ancrage situé à 20 kilomètres au-dessous 
de Kauton, et d'y débarquer leurs cargaisons, au moyen 
d'embarcations Iégëres, qui les transporteur dans les facto- 
reries, d'o0 n les rapporte à bord de la mème manière. 
Entre Wampoa et Katton on rencontre trois bureaux de 
douanes, où les passagers et les cargaisons sont soumis à la 
visite la plus rigoureuse. 
Les environs de Kanton sont admirablement cultivës. 
Pendant les mois d'été la chaleur y est extrême ; mais l'hiver 
y est plus froid qu'on ne devrait s'y attendre dans une ville si- 
tuée sous te 23 ° de latitude septent(ionale. Comme dans toutes 
les grandes villes commerciales, la population de Kanton est 
corrompue et adonnee aux excès de tous genres. La mutinerie 
et les désordres de toutes espèces y sont h l'ordre du jour» 
de mème que la piraterie. La haine des habitants pour les 
étrangers, dont la concurrence diminue naturellement leurs 
profits commerciaux, est sans bornes ; aussi le gouvernement 
est-il obligé de continuer à tenir la ville proprem¢nt dioE 



746 
formée aux Européens. On y excute tous les ans plus de 
deux milles criminels, au rapport d'un Anglais qui a observé 
avec attention pendant plusieurs annees de suite le nombre 
des exécutions capitales. 
KAOLIN. On appelle ainsi une argi le d'une nature 
particulière, dont on se sert pour la fabrication de la por- 
celaine dite de Chine. Béaumur, qui en soumit à l'ana- 
lyse un échantillon rapporté de Chine, trouva qu'il éait in- 
fusible au feu. Il le regardait comme une espce de terre 
de la nature du tle. Mais Macquer, à la suite d'expérienecs 
postérieures, reconnut qu'il est plus probablement de na- 
ture argileuse, attendu qu'il forme une pte tenace, mélde 
avec l'autre ingrédient que les Chinois appellent petuns et 
qui n'a pas la mme tenacité. On sait aujourd'hui que le 
kaolin provient de la dêcomposition du fead spatb. Il con- 
tient toujours une partie du mica que renfermait la roche 
primitive. La kaolin de Saint-Yrieix, près Limoges, est 
compos de 56 parties de silice et 44 d'alumine. 
Le kaolin est une argile friable, maigre au toucher, fai- 
sant difficilement pte avec l'eau, infusible quand il est 
pur. Exclusivement employé à la fabrication des porcelaines, 
on le sépare du feldspath avec lequel il est mélangé quand 
il sort de la carrière, en le soumettant à un mode particu- 
lièr de lavage. 
IAPI-AGA. Voe-- 
IAPIDJ|. Voc-- 
EAPITANYS. Voye: Cv,xvs. 
KAPOU-AGA. Voyez 
HAPOUDJI. Voye Cem,x. 
IAPOUDAN-PACHA. loye-- CAI»IT*-PAcnA. 
IAPSALI. Voe'- Craço 
IAPTCIIAK ou KIPTCIIAÊ. C'est sous ce nom qu'au 
moyen àge on dsignait en Orient la vaste cotrée s'ten- 
dant au nord de la mer Caspienne, entre la Russie d'E]rope 
et celle d'Asie, et occupce par le« Cumans ou Polovtses. 
K«ptchl était d'ailleurs la dcnoinatio particulière d'une 
des nombreuses hordes qui erraient au ]nilieu de ces in,mcnses 
stcl,pes auxquelles leur nm finit par rester. Les Mngols 
ou Tarares y fondèrent, vers 1224, un khanat couru, dans 
Phitoili d'Orient sous le nm d'empire de Kaptchak ou 
de I florale d'Or, et aussi de la grmde llorde (du ruot 
mouol ord, qui signifie Icne, et par extension brande, 
rmoee). Cet cpire, cmembrè à la fin du quinzième siècle, 
donna naisuce aux khanats de K a san, d'Astrakan et de 
Crimée. 
ILIABAGH, la province la plus méridionale de l'- 
pire ruse, dans le ouvcrnement (autrefois khanat) de 
Gr,]sie, au sud du Kour, le Cyrns des anciens, et située 
sur les de rixe ei'Aras (Are), à l'est de la cr Ca- 
penne. Limitée à l'ouest par l'arrondissement d'Arménie, 
elle s'étend au sud jusqu'au 3S  de latitude, et par suite de 
sa position gogrpniquc, jouit d'un climat auquel n ne 
saurait rien comparer dans le reste de l'empire rusoe. La 
veétMion y est partout d'une admirable richse, et pr- 
que tos les fruits du midi y mOri»scnt por ainsi ire sans 
soins. Cette province possède en outre une race magnifique 
de chevaux pcrns, qu'on élève dans la steppe de Mogai. 
On y compte plus de I00,000 Imbitants, Turcomans et 
Aeniens ; et dans ces dernièrcs années cette population 
s'est encore augmentée d'un grand nombre de Grusiens et 
de Russes. Le chef-lieu de la province, jadis capitale du 
kanat, est Schc ou Schouchl ; Scbacti-Uoulak et 
Achouglan en sont les deu x autres grands oentres d'activité. 
C trois villes sont situées entre le Kour et l'Araxe. 
RARABEDE DOME. Voe 
HARABOULAIS monards qui habitent les d- 
fil du Cause, et qui juqu'a ce jour n'ont pu encore tre 
subjugués par I Russe. Suivant les rechcrchesdc Klaproth, 
ils apparennent à la grande tribu des Tiousehc% es In- 
gousches et  Tschcts«hcntz. 

KANTON  KABA-KATHAÏENS 
KARACHAITAKS (Les). Voye--C«vcs, tome IV, 
page 69o. 
IARADSCHITSCH. Voyez 
IAIAïSIIAKIS (Geonces), l'un des plus nobles ca- 
ractères de l'insurrection grecque, homme animé du pa- 
triotisme le plus pur, de la plus noble ambition, et qui resta 
toujours étranger aux égoistes manœuvres des partis. Ar- 
matole d'Agrapha, dans l'ouest de la Grèce, il s'efforça, en 
1823, avec Marc B otza ris, de défendre contre les Turcs 
Missolonghi, ce boulevard de l'indépendance de la Gn'èce. 
En 1824 il soutint le gouvernement national contre le 
parti militaire du Péloponèse. L'annéesuivante, il fut encore 
envoyé dans l'ouest de la Grèce, et malgré la résistance la 
plus híroique opposée par les Grecs sous les ordres de 
Valatinns, Travellas, Nikitas, etc., il lui fut impossible de 
sauver Missolonghi contre les Turcs et les ËgTptiens réunis. 
En mai t826 il combatlit ënergiquement et ouverlement 
à Nauplie le parti anglais, qui, avec Mauro kordatos à 
sa tte, voulait livrer la Grèce à l'Angleterre. Les patdo- 
tiques représentations de Karatskakis eurent pour résullat 
de faire décider qu'on rejetterait toute ouverture de negocia- 
tions avec la Porte qui n'auraient pas pour base la recon- 
naissance de l'indbpendance de la Grèce, et que jusque là 
on persisterait à soutenir la lutte. Tous ses efforts tendirent 
ensuite à faire declarer que ce serait à un Grec que l'on 
remettrait le soin de diriger les destinëës du pays ; aussi 
au congrès tenu à Trézène, en avril 1827, le comte Jean 
Ca p o d' 1 st r la fut-il elu président de la Grèce. Dès 1807 
Karai-kakis s'était trouvé en rapports intimes avec lui, alors 
qu'il etait encore attaché à l'administration des lies Io- 
niennes. Appeië au commandement supërieur de la Boumé- 
lie, où la guerre  borna  peu près au siCe de l'Acro- 
pole d'Atltènes, défendue par les Grecs aux ordres deGouras, 
Karaskakis lit tout pour empécher les troupes d' I b r a h i to- 
P ach a de s'emparer de cette place, après Missolonghi le 
deruier bouleva['d de l'independance nationale, et touva 
uue mort glorieuse dans un combat livré au commence- 
ment de mai I b7, sur la ronte conduisant du Piréeà Athènes, 
où en 1835 un monument a etWêlevé ì sa mémoire et 
à celle des autres cltefs morts comme lui pendant latutte. 
Un mois plu tard la garuison grecque de l'Acropole était 
réduite a c.gpituler. 
I{AIIAITES. loge= CAnAITES. 
KAIA-JUSSUF ou KAIA-JOSEPH. Voyez 
KONLU. 
EARAEALPACHS, peuplade turco-truchmène, qu'on 
rencontre eucore mdëpendante, mais dispersëe O et la dans 
les gorges du Caucase, tandis que dans son pas originel, 
le Territoire des Aaraolpacis, situé au 'oisigage du lac 
d'Aral et de l'embouchure du Sir-Daja, et comprenant 
deux olous ou hordes, elle est sous la dëpendance des 
Kirghis-Kaisacks, et soumise en partie aussi au sceptre russe. 
On en evalue le nombre à 300,0o0 dmes, et on dit qu'elle 
peut mettre en campagne 25,000 guerriers. Ces peuples 
sont ì moitié nomades, et  designent eux-mèmes sotas le 
nom de Kara-Kiptchaks, c'est-à-dre paMeur» aoirs; mais 
ils se livrent aussi ì l'agriculture et exercent quelques metiers, 
notamment cenx qui ont po.ur objet de travailler le fer et 
l'acier. Ils professent la religion malmmétane. Pour le spiri- 
tnel, ils reconnaissent comme chefs des chodschas, qui se 
disent succesaeurs directs de Mahomet. Quant au temporel, 
ils obéissent à des khans, qui payent tributanx Kirghis. 
]{AIA-I{AT[IAïES dynastie qui a régne dans le 
Kerman, ou Karamanie persienne, depuis l'an de l'hégire 
621 jusqu'en l'an '706. Elle doit son nom à la province de 
Kara-Kathaï, qui est au nord de la Chine, et d'où int son 
fondateur Barak.Ha9eb. Ce Tatare-mongoi fut envoé p. 
son souverain auprès de Mohammed, roi de Karizm, qui 
l'attacha à son service en lui confiant le poste d'hageb,oU 
maitre de la clmmbre. La haine d'un vizir l'ayant Iorcé de 
chercher un a.ile chez le lils du roi, qui gouvernait dans 
l'lndo.tau, Barak prit |a rou.e du Kerman aec ses serviteur» 



KARA-KATHAïEIS 
et ses femmes. Le gouvernera- de ce pays les aimait beau- 
coup, surtout quand elles étaient belles. Il voulut enlever 
celles de Barak ; mais celui-ci les habilla en Immmes, leur 
dnna mme des armes, et, a la tète de ses serviteurs et 
de son harem, il se défendit si bien contre ce gouverneur 
inhospitalier, qu'il lui enleva sa province, dont il fit plus 
tard un royaume pour sa famille. Il y régna onze ans, et 
mourut en paix avec les souverains qu'il en avait dpos- 
sédés, l'an de l'hégire 632 (t2). Ses successeurs furent 
Mcbark K uangeh , Gcthdebdin," ltégia9 e et Soiour-Gat- 
:nishe, qui prit le titre de sultan Gelalecldin, et Censa 
la fille d'un prince mongol, ce qui ne rempcha pas d'ètrc 
renversé du tr6ne par Kangiateu-Kan, un des héritiers de 
Gingis-Kan. D'autres historions prétendent que sa SœUr Pa- 
dicbab-Khathoun le fit mourir, pour régner  sa place, et 
l'on peut concilier les deux cersions en donnant  la fratri- 
cide le sultan mongol pour complice. Quoi qu'il en soit, elle 
ne jouit pas longtemps du fruit de son crime; la veuve du 
sultan assassiné et.sa lille Chah-Alem Kathoun la firent périr 
_son tour, la seconde ann,e de son règne. On vit ensuite ap- 
paraitre sur ce tr6ne sanglant Mohammed-Chah, fils 
singe, puis son cousin Chah-Gehan, fils de Soiour-Gat- 
mische. Malgré son nom de roi du monde, il est dépouillé 
des debris de ses Ëtats par le sultan Gazan-Kan, empereur 
des longols {t306), reste dans la ville de Chiraz comme 
simple particulier, et finit par en obtenir le gouvernement. 
Sa lille _lakhdoun-Chah Censa, grâce aux trésors de son 
père, le sultan Mobarzeddin, de la d'nastie des llodafè- 
riens. Mais la race des Kara-Kathaïens finit avec Chah-Geban, 
après quatre-vin-quatre ans de durée. 
,'IEIffET, de I'_-cadèmic Française. 
IL.RA-KOIXLU ou KARA-KOYUNLU, première dy- 
nastie des Turcomans qui s'emparèrent du territoire de 
Bagdad, vers l'an 80 de l'hégire (1q08)_ Ce nom veut dire 
Mouton noir, en opposition avec la dynastie du Mouton 
blanc, qui lui sucsAda. Le premier des Kara-Koinla se 
nommait Kara-Joseph ou lussu.f. Il était fils de Kara-Mo- 
hammed,  qui le sultan mongol Ahmed-Ilekhani avait confié 
le commandement de ses troupes. A la mort de Moham- 
med, son fils Jussnf fut confirmé dans cette charge, et s'en 
servit pour dépouiller son tanière. Tamerlan n'ayant point 
souffert cette usurpation, Kara-Jussuf, battu par les troupes 
de ce conquérant, alla chercher un refuge en Ëgpte, où son 
compétiteur Ahmed ne tarda pas à le rejoindre lui-même 
oemme fugitif. Iai/t la mort de Tamerlan, Kara-Jussuf s'é- 
chappa de la cour du sultan PImradge, rallia ses Turcomans, 
tua dans une bataille le fils et le petit-lils du conqucrant, 
prit sur leurs troupes la ville de Tauris, l'an 810 de l'fie- 
gire, enleva le Gourgistan au sultan Ahmed, qui s'clair aussi 
remis en campagne, le fit périr dans un combat (S13-1oeet0), 
et s'empara enfin de la Chaldée, de la Mésopetamie, de la 
glédie, d'une grande partie de l'Arménie et de la Gêorgie. 
,Sharokh, l'un des fils de Tamerlan, marcha contre lui pour 
venger son frère et son neveu; et Kara-,ussuf se disposait 
descendre des muntarnes de la Merle ou de l'Adcrbidjan, 
lorsque la mort vint le frapper dans son camp d'Aougian, 
près de Tauris, l'an 82.3. Ses troupes, indisciplinées, ne 
songeant qu' piller ses trésors, oublièrent méme de lui 
donner la sépulture. Kara-Juuf laissa six entants, dont 
l'aihWet le cinquiëme moururent avant leur père. 
scander-Ernir ou Mr-lskander, le second, débuta par 
le meurtre de son frëre AbOUSaid ; mais il fut puni dece crime 
par le sultan Sharokh, qui le défit dex fois en bataille 
rangée et donna son tréne et sa capitale de Tauris  sou 
frère C, etian-C/m/z, qui aidé des troupes de son puissant allie 
poursuivit Èscander à outrance et l'assiégea dans le cMtcau 
d'Alençak, où Chab-Obad, lils d'Escander, ennu.vé de la 
position de son père, l'assassina pour faire la paix avec son 
oncle, l'an de l'hégire 8 (1437). Gehan-Chah paya ses 
bienfaiteurs en leur enlevant des prosinces. 11 attaqua par- 
tout les descendants de Tamerlan, s'empara de la Géorgie, 
d'une partie de la Perse, du Kerrnan ou Caramanie per- 

-- KARAMAIDES 747 
aune, et défit, dans le Khorassan, l'an 861, le Timnride Mirta- 
Ibrahim. Deux de ses enfants s'étant révoltés contre lui, mi 
priva le premier de la vue, assiégea le second» Pirboudak, 
dans la ville de Bagdad. et se raccoramoda avec lui vers 
l'an 8139. La guerre qu'il entreprit ensuite contre Usum- 
Cassan, prince de la d)-nastie du Mouton blanc ( voye-- AC- 
COI.L) ne lui fut pas heureuse. Il fut surpris et tué dans 
une embuscade avec l'aihWde ses enfants, l'an de l'hégire 
Ilassan-Ali, troisiëme fils de Gehan-Cbah, leva une 
armée de 200,000 hommes pour venger son père et son 
frère, et voulut combattre, en passant, le sultan Abousat_ 
le Timuride, qui régnait dans le Kborassan; mais ses trou- 
pes, auxquelles il avait eu l'imprudence de paf'er par anti- 
cipation une année entibre, passërent à l'ennemi, qui leur 
offrit une nouvelle solde; et le malheureux Hassan-Ali, 
étant tombé dans les mains d'Usum-Casn, fut massacr¢ 
par les ordres de ce prince, qui éteignit en lui la dynastie 
du Mouton noir, l'an 873 (168), après soixante-trois ans 
de durée. "'IFNNET, de l'Académie Franc.aise. 
KAI/A-KORU$1 célèbre ville ruinée de l'Asie septen- 
trionale, dans la llongolie, tir fondée par le fils aihWde 
Djingbiz-Khan. Okta Koublaï et Argoun y reçurent les dé- 
putés de tous les souverains de l'Asie. D'Anville a cru re- 
trouver cette ville dans celle d'Ho/in, sur la risière qui porte 
ce nom. Fischer la place  Erdemi-Téfiao, sur rorkhon. 
KAI/&IAtIDES dynastie qui régna pendant près 
d'un siëcle dans les provinces méridionales de l'Asie Mi- 
neure, et qui fut fondée vers l'an 1300 avant J.-C. dans le 
mme temps qu'Othman ietait en Bithynie les fondement 
de l'Èmpire Othoman, par Karaman, issu, dit-on de Gaïatb- 
Èddyn Kai-Kobad, le plus grand des sultans sêldjoukides 
de Roum. L'lfisteire de ce Karaman et de ses premiers suc- 
ecsseurs est à peu près inconnue. Tout ce qu'on sait de lui, 
c'est que son nom est demeuré depuis/t la partie de l'Asie 
Mineure où se trouvaient autrefois la Cilicie, la Lycie, la 
L)caonie, la Pampbylie et la Pisidie (voye'. KAaAr« ), ainsi 
qu'aux princes de sa race. 
Hadji-Khalfah en compte six ; mais il ne cite qae les der- 
niers dans ses tablettes chronologiques. En 1386, l'un d'eux 
Ali-Beg, fut vaincu par Amurad ou Mourad I , près de 
Konieh. Quoiqu'il eut épousé la sœur de Bajazet 1 , les 
princes de l'Europe recherchèrent son alliance contre son 
beau-frère. II fit la guerre h ce sultan, et s'empara d'Au- 
cyre; mais il fut vaincu et fait prisonnier avec ses fils près 
d'Aadjai, en 1390. il fut mis à mort suivant les uns ; selon 
d'autres, il s'évada, se rendit aupr;.a de Tamerlan, fut un 
de ceux qui le dêterminèrent h envahir le États de Bajazet, 
et offrit de lui servir de guide. Quoi qu'il en soit, après la 
défaite et la mort de l'orgueilleux sultan, Mdhcmet-Be9, 
prince de Karamaafie, prit part aux guerres qui curent lieu 
entre les filq de ce prince. Voyant l'un d'eux, Mahomet 1 , 
occupé en Europe, il se jeta sur la Bithynie, battit le pacha 
de Brousse, et assiégea cette ville, dont il brfila les faubourgs 
en 1413; mais à l'approche de Mahomet, il alla se jeter h 
ses pieds, et obtint son pardon. Il se ré¢olta de nouveau en 
1415. Mahomqt le vainquit dans la Karamanie, et le fit pri- 
sonnier, mais, par égard pour un prince de son sang, lui 
rendit ses États, après avoir mis garnison dans quelques 
places. 
Plus heureux d'abord contre les sultans mamlouks d'Ê- 
gypte, dont le gouvernement était une sorte d'anarchie con- 
tinuelle, Karaman-Oglou reprit Tarseet plusieurs places de 
la Cilicie; mais, forcé de les restituer en 1417, il recom- 
mença la guerre, fut vaincu par le sultan Scheikh-Mah- 
moudy, en 1419, et perdit momentanément ses Êtats et 
Larendeh, sa capitale, qu'il recourra après la mort de ce 
prince. Profitant des troubles qu'excitaient dans l'Empire 
OIhoman les succès d'un faux Moustafa, prétendu fils de 
Bajazet, il assiëgea Antalia; mais il y fut tué, d'un coup de 
canon, en 1427. 
Resserrés dans leurs Êtats pr ceux de deux puissants 



74 $ KARAMANIDES 
voisins, le sullan des T,Irks e! celui des Mamlouks, les 
Éaramanides ne pouvaient s'agrandir ni se maintenir qu'en 
les menageant tour à tour, et en s'alliant avec les cheCiens; 
mais ce manCe ne leur russit pas longtemps. Ibrahim Beg, 
lils de Méhmet, se réolta contre Amurat Il, qui lui prit 
d'a«saut, en 135, Akschehr et Konieh. Il eut reoeurs à un 
nton, qui le ferait en grâce avec le sultan, et lui fit rendre 
ses Etats. Il reprit les armes en lil et ravagea l'Anatolie; 
mais à Uapprnche d'Amurat, sa sœur, qui avait épou 
Ibrahim, va le trouver, l'apaise par ses larmes, et obtient le 
pardon de son mari. Amurat a)-ant abdiqué en faveur de 
n fils, Mahomet Il, Ibrahim écrit au roi de Hongrie pour 
l'exciter h faire la guerre de concert av lui contre les 
Turcs. Mahomet Il marche contre sononcle, en 1451 ; mai 
occupe de s vastes projets contre Cons{an{iu@le, il lui 
accorde aisment la paix. Ibrahim meurt en 146, laissant 
six fils. Ihak, l'alne, s'empare du tr6ne. Pir-Ahmed, son 
rière, le lui dispute avec le sours de 51ahomet. lhak 
vaincu  rcfugie auprès d'Onzoun-Haç'an, roi de Pee, 
qui poend vainement sa d6fense. lais Mahomet tait trop 
habile pour laisser subsister plus longlemps un voisin qui. 
sans ètre redoutable, lui cul,sait de l'inqtfiëlude et cordra- 
riait  entreprises. En 1467 il mit lin  la dyntie des 
Kamman-Oglou (fils de Karaman), réunit leurs tats  son 
empire, el y établit pour vice-roi son propre fils 3Iouslafa. 
Pir-Ahmed, conduit prinnier  Constantinople, y mourut, 
en 1 i8. II. AumFFET. 
EA R.$MAXIE  é)'alet turc, situé au centre de l'Aie 
Mineure, preue compléten{ entour par le Tauru% l'Anti- 
Talus et les chain de montagnes qui s'y raltachent aux 
extrmes confins de l'Asie 5tineure et le traveroent mème en 
partie. Arros par divers aflluents du Kisildrmak (l'Bal9s 
des anciens) et traversé au nord lmr ce cours d'eau, il com- 
poen, l  peu de chose près le provinces connu des anciens 
sousles nomsde P  s i d i e, L  caon i e, Cataoniee{ C p - 
pu d oce. Il est limitë au nord par l'eyalet de Siwas, h l'est 
par celui de larasch, au s,d par celui d'Adana, et  l'ouest 
par celui d'Au,pli. Sa superficie est d'environ I,00 myria- 
mètres oerrés, et di%ëe en sept sandj,kats. Par suite du 
manque de forèts et de cours d'eau suffints, les plateaux 
supérieurs deoette conlrée nt arides et ont qelque chose 
de la physionomie des steppes. Ce n'est que pendant I mois 
humides de l'hiver, ou encore pendant ceux du printemps, 
qu'on ) tuve une végétion plus vigoureuse dont les ha- 
bi{ants profitent pour faire paltre leurs bestiaux. La cul- 
ture des crales et des fruits n'existe sur une large échelle 
que dans les vallees fetilisées par de nombreux cours d'eau. 
Le climat, très-chaud en été, ne laie p que d'tre assez 
froid en hiver, h cause de la grande élvation du sol. Les ha- 
bilants, dont le nombre s'élève h un million d'mes eni- 
ron, se compont en rande partie de Turcomans nomades. 
Aussi lëlève du btailest-elle la principale industriedu pays. 
Les villes sont habitCs par des Turcs des Grecs et des Ar- 
Inëfiiens. 
Ctte contrée tire so nom de la trib« turcogne alee 
Karaan ou K a r a n a n i d «, qtri y dominai t autrefois, et 
ui en 167 fut sbjuguée ar les Turcs. Les villes l çlus 
içoantes en sont nieh (l'Iconi um des anciens), 
sige du pacha, avec eviron 0,000 habints, et le plus 
grand de tous les couleurs mevlevite», qui a plus d'une 
lieue de circuit ; Larcnda ou Karaman. la vitle commerciale 
Kaisareh» la Cesarée des anciens, avec une lèbre le 
gree supéeure ; et efin Ashcer, cenre d'un grand com- 
merce de caravanes, et dont on évalue la olmlation à 0,000 
mes. 
On dsie aussi sous le nom de K, une province 
de la Perse apuele quelquefois Kernn, horn au nord 
par le grand déert é de Pintçrieur d'lran,  l'est par le 
elodschisi«u, au sud par la route d'Ormuz,  l'ouest par 
le provinces peines de ristan et de arsistan. On évale 
sa surfi«ie  enon ,000 myriambtres c«rrés : les an- 

-- KARAMSINE 
ciens l'appelaient Carraania. C'est une conlré extr&ne- 
ment aride, plate et n'offrant guère  l'oeil attristé qu'un dé- 
sert sans fin ; car on n'y trouve que de rares oasis. Les 
caractères particuliers du climat sont une chaleur et une sé- 
cheresse extrémes. La c6te bordée par une ceinture de 
rochers à pic, est l'une des contrees les plus malsaines de 
la terre, et la chaleur y est excessive. La population se 
compose en grande partie de Néo-Persans. On y trouve 
aussi quelques Guèbres, de« Kourdes nomades, des Lares sau- 
vages, et dans les rares villes et bourgades qu'on y compte, 
un petit nombre de Juifs et d'Arméniens. La ville la plus 
importante de la contrée est Kerman, dont la population 
s'élève  environ 0,000 mes, et où l'on tr-nve quelques 
manufactures d'armes et de tissus. Le pays de c6tes, appelé 
l',loçms., et où se trouve Abasi on Gomroum, port et 
place de commerce jadis d'une certaine importance, est 
siuguliërement déchu aujourd'hui, et n'est plus guère fré- 
quenté qu'en hiver, ì cause de l'insalubrité du climat; il 
appartient, sous la suzeraineté de la Perse, ì l'iman de 
Mascate. 
KAR.$-MOUSTAP|IA, grand-vizir du sultan M aho- 
m e t I V, lils d'un spahi, fut cicrWpar 3Iehmet K te p r i I i, 
et se rendit de bonne heure fameux par ses cruautés à l'- 
gard des chrëtiens. A la mort d'Achmet (7 novembre 1676), 
il fut nomme grand-vizir. En cette qualit il déclara la 
guerre/s la Russie (3 mars 1677); mais les opérations en 
furent si mal conduites, que la Porte se  it obligée d'accepter 
le Icheux armistice de ladzin, en date du I l février 16b7. 
Il int aussien aide aux Hongrois, révoltes conlre l'Autriche ; • 
et dans son administration intérieure, il se ditingua autant 
par son orgueil et son insolence, notamment vis-/- is des 
ambassadeurs etrangers, que par son insatiable avidité. L 
malheureuse issue de la guerre qu'il commença en 1682 
contre l'empereur Léopohl I « amena sa chute. Après avoir 
reconnu en qualite de roi de Hongrie Ttrkél y, le prin- 
cipal d'entre les rëvoltés hongrois, qui s'était engagé -A recon- 
naitre temr la couronne de H,mg,'ie ì titre de vassal da 
sullan, il envahit les Etats Autrichiens, en portant partout 
devant lui le fer et la flamme. Le l-I juillet 1683 il vint 
/ la tète d'une armée de 200,000 hommes, mettre le siCe 
devant Vienne, que le comte de Stahremberg détendait avec 
1%000 hommes seulement. La ville allait succomber, lors- 
que, le tŒEE septembre t683, arriva sous ses murs une armëe 
auxiliaire polonaise et allemande, qui barrit complétement 
l'ennemi. Kara-Moustapl,a fut reduit a se réluer avec les 
debris de son armée en Hongrie; en usant de laah, il fit 
d:capiter le vieil lbrahim-Padla, gouverneur d'Ofen, cou- 
pable d'avoir pris le premier la fuite  la bataille de Vienne, 
et dans son rapport au sultan il rejeta sur lui toute la res- 
ponsabitite du dësastre ëprouvé par les armes turques. Le 
grand seigneur, ajoutant loi au récit de son grand-vizir, 
le récompensa encore pour avoir du moins sauvé une partie 
de son armée. Mais quand, bient6t aprës, on apprit/ la cour 
du sultan que Kara-Moustapha s'était de nouveau !aissé battre, 
le 9 octob.re 1683,/ Parkany, et qu'il avait perdu la Iorteresse 
de Grn, ses ennemis l'emportèrent, et le g,'and-cl,ambel- 
lan du sultan, l'un des protégés de Kara-Moustapha, fut 
chargé d'aller lui trancher la tte. Ce f0mctionnaire arriva 
à Belgrade le 25 décembre 1683, un peu avant le coucher 
du soleil, et avant minuit les ordres du sultan étaient 
exécutés. Kara-Moustapha etait àgé de cinquante ans. Sans 
posséder aucune des qualités d'un général, son orgueil et sa 
cupidité le portèrent à entreprendre de gigantesques opéra- 
tions militaires; son amour du faste êgalait son orgueil. Dans 
son harem on ne comptait pas moins de 1,00 odalisques, 
autant d'esclaves du sexe fëminin et 700 eunuques noirs. Il 
avait plusieurs milliers de domestiques, de chevaux, de 
chiens, d'oiseaux de chasse, etc. 
EARAMSIE (Nioe,xï-MciLowm'rcn), le plus cé- 
lèbre historien qu'ait encore produit In Russie, naquit en 
t 766,  Bogoroeldza, dans le gouvernement de Simbirsk, 
et appartenail. une famille d'origine talar. Il mourut le la 



IAttAMSIIE m KAP, LSTADT 
mai 1826. Peu de temps auparavant, l'empereur licolas 
iniavait accordé un traitement honorifique de 50,000 roubles 
en papier, reversible sur la tète de sa veuve et d _ ses enfants. 
Karamsiue débuta dans la iittêrature par Le VO!logeur 
russe, ouvrage qui prouva qu'il possédait beauco,lp d'es- 
prit et qu'il cherchait un peu trop à le montrer ; quelques 
nouvelles, pour la plupart assez médiocres, accompagnèrent 
cette première publication. Ce n'était que de la sensiblerie 
iaise et prétentieuse dans le style de Florian, faibles esquis- 
ses, déuuées d'intérêt tant dans le fond que dans la forme. 
On lui a fait cependant, dirai-je i'bonneur ou le mauvais 
tour de les traduire en frauçais ? 11 en a étè de mëme de son 
roman historique intitulé Marpha ; dans cet essai quasi- 
épique, l'héroine novogorodienne est loin d'avoir trouvé 
un Fèueion et même un Kheraskaff, et l'on pourrait dire 
qu'en singeant le style homérique, l'auteur ne fait, semblable 
à i'écho, que reudre les derniers accents des grands marres. 
Arrivous donc à son principal titre iittéraire, qui est SOl, 
Histoire (le Russie (t. I-VIll ; Saint-Petersbourg, 18t6 ; 
2 « édit, 1818 ; t. IX, X et Xl, 1821 et t 824 ; t. XII, termin par 
Bludow, 1824; 5 e édition, 180-18-3). La difficulté de penêtrer 
dans les dépbts publics, qui furent tous ouverts à Karamsine, 
rendrait son ouvrage extrmement utile à la connaissance 
de l'histoire s'il avait pu laite des materiaux mis à sa dis- 
positiou un emploi digne du rie qui lui était assigné. Mais 
historiographe officiel à partir de 1803, et recevant un trai- 
tement de 2,000 roubles argent, il devait louer tout, et 
s'est montré scrupuleusement fidële h ce devoir : aussi le 
plus grand m,'rite de son œUVre est-il dans la révëlation 
de quelques faits inconnus avant lui, et surtout dans les 
noies nombreuses dont il enrichit son ouvrage. Quant  la 
véritè ilitorique, on est en droit «le lui reprocher d'avoir trop 
exalté des princes peu dignes d'loge, justifiè des atrocités, 
relativement, par exemple, au ertueux et infortuné Was- 
siiko, parlé de l'introduction du christianisme en Bus»le 
en sectaire prvenu plutbt qu'en judicieux critique; de n'a- 
voir pas dévoilé la cause et noté l'origine du servage dans 
sa patrie ; d'avoir sacrifié à des exigences sacerdotales en 
conservant au fils légitime de Fedor-lvanowitsch la quali- 
fication flétrissante de faux Dmitri, alors que la verité hli 
était parfaitement cOnmle; enfin, de n'avoir point assez vi- 
vement stigmatisé le plus exécrable de tous les monstres 
couronnés, Iwan-V, rassiliéwitscb-Crosné (le Terrible). Au 
reste, Karamsine termine son bistoire à i'époque même oi elle 
allait devenir éminemment intéressante, par les iiaisons po- 
litiques de la Russie avecl'occident de l'Europe. Que dirons- 
nous donc ici de i'bistoriographe officiel du cabinet de Saint- 
Pétersbourg? Que c'est un écrivain spirituel, mais peu fi,lële, 
sans critique, sans cbaleur, sans conscience iitteraire; 
car, en vantant sans pudeur le despotisme, son esprit n'en 
était pas moins empreint des idées modernes qui le fron- 
dent, et que dans son for intérieur il était disposé à exa- 
gérer. Au reste, sou travail n'embrasse guère quece qu'il est 
le moins nécessaire de savoir, et il n'a pas ose le prolonger 
jusqu'au dix.neuvième siècle, ce qui aurait placé l'auteur entre 
deux écueiis, c'est-à-dire la ruine de sa fortune, en peignant 
les choses telles qu'elles furent, ou son déshonneur aux 
'eux de tous, des Russes eu-mêmes, en y parlant conformé- 
ment aux vœux de l'autorité qu'il oervait. Cependant, l'im- 
portance actuelle du grand empire du Xord est telle qu'il 
est aussi cur;eux qu'utile de se faire une idée de ce qu'il 
fut à son berceau et durant sa longue et ignorante barbarie. 
L'on pourra donc lire avec fruit l'ouvrage de Karamsine, 
pourvu qu'on lui oppose d'autres écrits polonais, suédois 
ou allemands, et qu'on le lise parfois avec défiance, tou- 
.ours avec précaution. Au reste, s'il existe des histoires 
meilleures que ,la sienne, il n'y en eut jamais de mieux 
payées, car elle le fut par la vanitédu plus vaniteux de 
tou les gouvernements. Cte Armand D'ALLONV|LLE. 
IîAA-SOU, le evdnus des anciens, riviëre de i'Asie 
turque, qui se jette dans PEu pb rate, non loin de Mai- 
iattia. 

749 
HABAT. l'ove= C. 
KARÉLIE» nom que portait autrefois nne partie de la 
Fi n i a n d e, alors qu'elle appartenait encore à la Suède; 
mais cette puissance fut obligée de la céder à la Russie, 
des le règne de Pierre ieGrand, par la paix conclueen 179A 
à lystoedt, eu même temps que i'Ingermanie, i' "Esthonie et 
la Livonie. Cette contrée a donné son nom à l'une des prin- 
cipales tribus de la population finnoise, la tribu lx'arliennc 
dont on retrouve encore quelques traces non-seulement dans 
le bailliage de ,Viborg dela grande principautë de Finlande, 
mais aussi dans le gouvernement d'Olonez. 
! A l ! A ! établissement français situé dans la province 
de Tanjaour, sur la c6te du Coromandei, /t environ 100 ki- 
iomëtres au sud de P o n d i c il é r y. Son territoire, dont la 
superficie est de 16,184 hectares, se divise en quatre districts 
ou maganoms, renferment 108 aldcs. On évalue la popu- 
lation totale de ces quatre districts à 45,000 individus, dont 
une centai,m d'Européens tout au phls. La ville seule de 
Karikai contient 10,0o0 rimes. Les terres de cet établissement 
sont naturellement fertiles, et les debordements périodiques 
de six petits bras de la riviere Kavery, par lesquels elles sont 
arrosées, accroissent encore leur fecon,lité. On fabrique à 
Karikai et dans les aldees qui en d.pendent le même gnl'e 
d'ëtotIes qu'a Pondichéry. C'est de Karikai que i'lle de la 
Réunion tire la plus grande partie du riz nécessaire à sa 
consommation. On ne porte pas à moins de 2,500,000 ff. la 
valeur anmlelle des exportations de Karikai en produits dtl 
soi et des manufactures. L'importation s'y élève cbaque an- 
née à prb de o0,000 ff. 
ILIRIZM ou KHOVARESMIE, contréedu Turkestanoc- 
cidental, mèiée de strppes et de districts fertiles, arrosée 
par le Djihoun et situee au sud de la mer d'Arai, entre le 
khanat de Boukilara et la mer Caspienne. De l'an 99 a 1231, 
le Karizm forma une pr!ncipauté in,lependante, dont les 
princes envahirent la Perse et y mirent fin, en 1193, 1 la 
dynastie des Seldjoukides. Mais leur puissance fut hson tour 
détruite par D j in ghiz-K h an (l'an de i'ilegire 628). Au- 
jourd'ilui cette région est presque entièrement réunie au 
khauat de Khiva. 
HARLO,VITZ. l'ove: CALOVC2. 
HAItLSBAD. loye: CAasuv. 
HARLSHRONX. l'ove: CARLSCRONE. 
HARLSTAT ou CARLOSTADT, ville royate libre et 
place forte du comitat d'Agram, en Croatie, qui donne son 
nom a un cercle de.front;êtes d'une superficie de 93 my- 
riamètres carrés, comprenant les chefs-lieux de quatre ré- 
9}ments fro»tières, avec une population totale d'environ 
260,000 habitants. 
La , file de Karlstadt, batie à l'embouchure de h Karona 
et de la Dobra, dans la kuipa, compte environ 6,000 habi- 
tants, et est la résideuce d'un évèque grec non uni et de i'etat- 
major du rO9irnent frontière «le Szluin. On y trouve deux 
églises catholiques et un couent de franciscains, ainsi qu'un 
collége. Elle est la principale étape du commerce maritime 
de la Hongrie, et, au moyeu de trois routes construites à 
travers les Alpes croates, se trouve reliée aux ports hongrois 
de i'A«riatique. Il s'y lait un commerce fort actif, notam- 
meut en vins et en tabac. 
HARLSTADT dont le véritable nom etait Andre BO- 
nEISTEIN, est célèbre dans l'histoire de la rêformation par 
son fanatisme et par les persécutions qu'il lui attira. Né vrai- 
semblablement en 1483 a Karistadt en Franconie, il étudia 
tout ce qui s'enseignait de son temps dans les universités de 
l'Allemagne; puis il se rendit à Rome, ou il fit une étude 
toute particulière de la théologie, de la philosophie d'Aristote, 
du droit cauou et des langues anciennes. De retour en Ai- 
iemagne, il prit ses degrés à Wittemherg { 150 ), et devint 
bientt une des gloires de cette nouvelle université, eu mème 
temps qu'il se liait étroitement avec Luther, Reuchliu, Hutten 
et autres célèbres ilumanistes. Arclfidiacre, professeur de 
tbèoiogie, puis élu cinq fois, de 1St I à 1522, recteur de i';lo 
niversité de Wittemberg, il restajusqu'en t 5 t 6 l'un des chat 



750 
pions du dogmatisme eatbolico-romain. Mais les discussions 
q'il lui fallot soutenir contre Lulher i'amenërent à faire 
une étude approfondie des £critures ; et alor une modifi- 
ca'don complète s'opéra dans sa man/ère de voir. D'adversaire 
«le Luther, il devint l'un de ses plus cllauds partisans; aussi 
le pape le comprit-il nominativement, en 1520, dans sa 
bulle d'excommunication contre Luther et ses adberents. 
Partant de la conformité absolue, litterale, que toute la 
et toutes les dispositions eeclésiastiques de raient avoir avec 
le texte de l'Écriture, Karlstadt, en l'absence de Lutller, 
cblbra la messe en allemand, sup[xima les images, rejeta 
l'élévation et l'adoration de l'hostie, dont Lutber lui-même 
avait pourtant pris la defense, l'invoealion de« saints, la con- 
fesion auriculaire, administra la communion sous les deux 
espéces, et rejeta le baplme. Eu mêlne temps, il refusait de re- 
counaitre aucune différence hicrarcbiqne outre les clercs, 
réclamait la cl6ture hmediate de lous les lieux de diver- 
lissemeut, et aux termes de la Genèse {I, 3, 19) pretcn- 
dail que tons les hommes devaient gagner leLil pain/a la sueur 
de leur front, il en rèsulla que deux eclt etudianls aban- 
donnèrent les bancs de l'copie de la ville pour apprendre des 
metiers, exemple que Karlstadt suivit lui-même bient6t apte. 
Luther, qui estimait qu'il convenait d'avoir plus d'égards 
pour la tradition et l'Église, ferait aussit6t apr/:s son retour 
a,,ittemberg toutes choses sur l'ancien pied, et réduisit pen- 
dant deux années Karl[adt au silence. Mais, en 
celui-ci s'enfuit secrétement h Orlamunde, et après en avoir 
ait expulser le curé, y prêcha le mëmes doctriues. Bl'me 
à ce sujet par Luther, il passa ouvertemeut dans les rangs 
de ses adversaires. En consequence, et par suite de ses 
rapports avec les prophètes de Zwickau et le paysan in- 
surges de la Thuringe, il tut expulse de la Saxe ( 1524 ). C'est 
alors qnïl entama la fameuse discussion sur les acremenls, 
dans laquelle, contrairement à l'opinion de Lutber, il oia 
la présence réelle de Jésus-Cllrist dans la communion et 
ameua ainsi la lutte des theoioens suisses conte ce»x de 
V¢ittemberg. Soupçonné ensoitcd'avoir tl'elupé dans la guerre 
des paysans de Franconie, il erça Ionglemps en Alleme, 
et ufin, réduit à la drnière misère, il implora l'assistance 
de Luther lui-mèlue, qui lui procura un refuge à Segrenah, 
près de Wittemberg. Après y avoir passe environ trois annees 
uniquement occupe de commerce et d'agriculture, sou esprit 
iuquiet le porta à rompre ses eugagements pour publier de 
nouveau q»elques écrits polemiques et mme h altaquer Lu- 
ther ouvertcment. Redoutant les effets de la haine de Luther, 
il s'expatria, erra successivement dans divers pays, et finit 
par s'établir en Suisse, où la proteclionde Zwingle lui alut, 
ch 1/,, une place «le predicateur et de professeur de tbeo- 
logie à Bfile. C'est dans cette ville qu'il mourut, en 151. 
|L.P..I "illage de la haute Egypte, sor la rive droite 
du Nil, s»r Femplacemenl de l'ancienne T hèbes, où l'on 
trouve les ruines d'un temple de crtte ville clèbre. 
KAILXATiI, KARNARA ou KA['NATA, c'est--dire 
Terre noire. C't,le nom que portait altrefois une grande 
province de l'Iode méridionale, qui s'Cendait du 8 ° au 16 ° 
de latitude nord. Elle forme aujourd'ui les pa's d'Arkot, de 
Coimbatore, de Tanjara, de Tlitscldnapali, de Madura, et 
une grande partie du reste du royaume du Mysore, ainsi 
que d'autres districts oeuaus sous le nom de Dravi4a. 
Dans ces derniers temps on a donné le nom de Karnara 
h un pays de c6tes s'étendant au pied des Ghattes, et situé 
peu près entre 20 ° 30' et t5 ° de lat. nord ; mais ce n'est I/ 
qu'une corruption du mot Karnata. Les anciennes limites 
de cette province commençaient, au nord, au cireur ou 
cercle de Gantour, et s'étendaient jusqu'au cap Comorin. Ses 
principaux cours d'eau sont le Panar, le Polar, le Cavery 
et le Vaigarou, tous ayant leurs sources dans les plateaox 
des Ghattes.L'élévation de ces montagnes et leur vaste éten- 
due partagent le pays en deux parties, le haut et le bas 
Karatik, qui en raison des Ghattes qui les abritent contre 
le vent, ont deux saisons différentes. Au total, le Karnatik 
ef lin pays lertile • bien cultivé et riche en riz : Onor (/fa- 

KARLSTADT -- KARPATHES 
navar) et Mangaior, avanlageuement situées pour le com- 
merce lutCieur, étaient et sont encore des villes maritimes 
importantes. Il est peu de contrées dans l'Inde où l'on 
rencontre un aussi grand nombre de temples et autres édi- 
fices publics, parmi lesquels il faut citer les Ciriges cons- 
truits le long des routes poury recueillir les voyageurs et les 
pèlerins (les t,chowadi, dont les Anglais ont fait le mot 
chultri ). Ce sont des fondations remontant à une cpoque 
ïort reculée, et habitC par des brahmines qui fournisoent 
gratuitement aux vpyageurs à boire, à manger et un glte. 
Ce pa's, à l'origine habité par une population primitive 
appartenait  la race Tu[roule. La langue du Karnatik n'est 
à tout prendre qu'un simpledialictedu Tamoulc, qui a été 
très-modilie par les Hindous ariquiset par l'influence des brah- 
mures; quant à la littérature karnatike, elle se borne h des 
traductiins et à des imitations d u sanscrit. Les brahmanes, ar- 
rivés ici du nord-ouest, su bjnguèrent les naturels ou C h o n d, 
et dans le cours des siècles y fondérent plusieurs principau- 
tés. Mais vers le milieu du onziëme siècle, les Belala, puis- 
sante lamille de la race des Radjpoutes, y fondaient un grand 
riyaume. Q aand les mahometans pénetrrent, eux aussi, dans 
le Dckan, la domination des Eelula s'Cendit sur le Karmata 
et le Malabar, sur tout le Tamoul et une grande partie dr Ta- 
lingara. Les ruines de leur ancienne capitale, située à en irin 
1o myriamètres au nord-ouest de Scringapatam, témoignent 
encore aujourd'hui de la haute perfection que les arts et 
l'iudnsts le a aied atteinte dans cet Etat bindou. Vers la fin 
de l'apmee tTtT, un des lieutenants du Grand Mogol, que 
l'histoire ne dsigne ordinairement que par son titre de _ï- 
:ara al Moulk, c'est-à-dire appui de prince, leva l'ètendard 
de la révolte conlre l'empire de Delhy, et.fonda dans le De- 
kan une souveraiuete particuliere. Il donna le Karnatik avec 
Arkot, sa capitale, à l'an de ses amis et compagnons d'armes 
(1743),  titre de fief. Mais ce vassal du Nizam chercha 
à son tour à se rendre independaut. Il en resultat des révol- 
tes et des guerres nombreuses, auxquelles ne lardèrent point 
à prendre part deux nations européennes, dont la rivalite 
éclatait encore dans ces Iointaines contrées, les Anglais de 
Madras, et les Français de Poudichér'. La iaufille du aboh 
de Kamatik ou d'Arkot, ainsi qu'on l'appelait souvent, du 
nom de sa capitale, après diverses alternatives de succès et 
de revers, finit par tre depouiilee de tous ses Etats ( tSot ) 
par ordre du marquis de Wellesley, gouverneur général de 
l'lnde britannique. 
ILs, B.pATIiES ou KRAPAKS, chaire de montagne 
de l'Europe centrale, qui emironne la Hongrie et la Tran- 
sylvanie, en décrivant une courbe de plus de 1,2o0 kilomè- 
tres de developpement, dont la comexité est tournée ver. 
l'orient. Elle separe les deux contrèes dont il vient d'Cre 
question de In Gallicie et de la Turquie, et couvre |es plaines 
ou coulent la Tbeiss et le Danube. Une cbahae secondaire 
la réunit aux monts Balkans, dans la Turquie d'Eu- 
rope; mais il paraît qu' une époque reculée elle a 
coapée paL" ce fleuve, qai y coule h traver» un défilé connu 
sous le nom de Porte de fer (en turc, Demis.Kapou). On 
divise les Karpathes en orientales et occidental, es. C'est 
ces derniëres qu'appartiennent les monts Tatras, dont le 
massif constitue les Karpathes proprement dites, car la 
partie sud-est, qui couvre de ses nombreu.es ramilications 
toute la Transylvanie, état courue des anciens ous le nom 
d'Alpes Bastarniques ou Dacùlues. Les Karpathes, sans 
pouvoir ttre comparees aux Alpes, sont cependant, par leur 
élèvation, l'une des chaines les plus remarquables de l'E- 
rope. Leur hauteur générale peut être évaluée à 3,300 mè- 
tres. C'est dans les Karpathes orientales, et surtout au midi, 
que se trouvent les sommités principales. On donne à la 
Iuska-Poyana et au Szubul plus de 3,000 mètres. Dans les 
Karpathes occideutales, ll. Wahlenberg a rconnn que la 
limite des neiges perpetuelles se trouve à ,92 mètres, 78 
mtres plus bas que dans les Alpes de la Suisse. Celle 
partie de la chaire est dominée par le pic d'Eisthaler, qui 
lait partie du groupe des monts Lomnitz, et par le somme 



KAB.PATHES -- 
du Kriwan, qui ont 2,598 et 2,448 mètres. Le revers oriental 
des Karpathes est beaucoup plus esearp que celui qui re- 
garde le couchant. 
Le faite de ces montagnes est tantbt de formation primi- 
tive, tantét de grauwacke. Les ruches trachitiques et hasat- 
tiques y sont abondantes; mais il ne parait pas y exister de 
traces plus récentes d'éruptions volcaniques. De part et 
d'autre des flancs de tu chaine, en se rapprochant des plaines, 
le grès houiller domine de toutes parts. Les Karpathes sont 
riches en productions reinCaies. Il y a des mines d'or et 
d'argent à Kremnitz et  Schoemnitz, en Hongrie, et à lagy- 
.gg, en Transylvanie, une mine d'or que l'on regardait au- 
trefois comme la plus riche tic l'Erope. On y trouve aussi 
des mines de fer, dont le produit annuel est à peu près de 
700,000 quintaux; de cuivre, de plomb, de mercure; mais 
le sel surtout y existe en dépéts immenses. Les exploita- 
tions les plus célèbres sont celles de Bodmia en GaBicie, 
d'Eperies en Hongrie, d'Oknamarden Turquie. De grandes 
forts de pins, où le htre domine quelquefois, couvrent le 
flanc de ces montagnes jusqu'a une hauteur de 1-5 fi i,600 
mètres ; mais à mesure que l'on s'élève, les arbres devien- 
nent de plus en plus forez, les plantes disparaissent iosen- 
siblement jusqu'a 2,ooo mètres, et sont enfin remplacées par 
les lichens, seule végtation des ruches nues et escarpées qui 
s'élancent de tous cétés, souvent en forme pyramidale. Au 
pied de la daine s'rtendent quelques vignobles, d,nt les crus 
ont acquis de la clebrité. Tel est celui de Tokai, qui, 
malgré sa haute réputation, est cependant inférieur aux vins 
de blenès et de Tarczai, réservés pour la cour d'Autriche. 
Un assez grand nombre de passages et de routes traver- 
sent les Karpathes et facilitent les coromunications des ré- 
gions qui s'étendent à leur base. Les ris ières auxquellez ces 
montagnes donnent naissance servent le tribut de leurs 
eaux, soit dans la Vi.qule, au nord, soit dans le Danube. 
La Vistule et le Dniester sont les seuls fleuves qui y pren- 
nent leurs sources; la Theiss, la plus considerable des ri- 
vières qui arrosent les plaines de la Hongrie ; la laros, 
seule rivière un peu étendue de la Translvanie, le Pruth, 
qui tras'erse la Bukowine, le Sereth, qui sépare la Moldavie 
de la Valachie, lui doivent aussi leurorigine, 
Oscar Mc-C'Tnv. 
I{ABI (AL»nO.S£), romancier et humoriste contem- 
porain, est né à Munich, en 1808. Fils d'un pianiste assez 
distingué, il fut d'abord professeur suppléant de cinqui/:me 
au collége Bourbon; et dans cette position, peu enviée, il 
passa par toutes les maladies fittraires qui travaillaient 
alors notre epoque. Mediocrement poëte, M. Karr commeu«ia 
par faire des vers ; il par'dt mème que son premier roman, 
celui qui devait plus tard s'intituler Sous les Tilleuls, avait 
été conçu et écrit comme un poeme; des chapitres entiers 
ont en effet conservé leur forme primitive. Mais M. Karr 
s'aperçut bien vite que les vers coùtent beaucoup plus qu'ils 
ne rapportent; et il se résigna à ne faire que de la prose. Il 
entra au Fiparo, où il s'escrima d'abord dans la critique 
fittéraiœe, puis dans la politique, et devint mme un 
ment rédacteur en chef de ce journal. Une ambition plus 
haute le tenta ; il remania le poëme qu'il avait écrit dans sa 
jeunesse, et pubfia Sous les Tilleuls ( 1832 ). Ce roman lut 
très-remarqué. On y trouva une orte de sentimentalité al- 
lemande, qui alors était ouvelle et que venait rehausser 
par endroits l'originalité d'une implacable ironie. Quant 
la composition, ce livre est reste mauvais. Admis des lors 
dans la petite armée des romanciers qui envahissait toutes 
les avenues iittëraires, M. Karr publia successivement Une 
heure trop lard (1833), tt /iè:e {1834), Vendredi 
soir ( t835 ), recueil de nouvelles comme on en tait au col- 
Ié.ge, ptdes imitations de la manière des maitres à la mode. 
Pen après, il écrivit un roman qui, dans le monde où l'au- 
teur s'était lancé, eut un succès d'un genre tout particulier; 
c'est le Cherain leplus court (1836). Dans ce livre, très- 
personnel, il raconte, à ce qu'on assure, rl,istoire de son 
propre ,nariage, &ame inime, dont nous n'avons pa à son- 

KARR 75 t 
der le mstère, et qui fut jndiciairement dénoué par un 
procès dont les curieux trouveront le récit dans la Gazelle 
des Tribunauxd'avril 1837. La manie de bi. Karr a tou- 
jours été d'entretenir le public de ses affaires, de ses tra- 
vaux au port d'Etretat, de son ami Gatayes et de son chien 
F,-eysch0tz. Parmi les écrivaLn.s contemporaius, on en c,te 
peu d'aussi communicatifs. 
Sans rappeler ici Einerley, ltortense Geneviève, l'une 
de ses plus poCiques ceCllons, M. Karr a fait encore pa- 
raltre Clotilde (1839), Ara Rauchen ( 1842 ), Feu Bressier 
(1844), le Voyage autour de mon jardin ( 1845 ), Za/:a- 
nille Alain (t88), etc., etc. A diverses époques, le roman- 
cier s'est ressouvenu d'avoir été jollrnaliste. Ainsi, il ¢om- 
mença en novembre t839 la publicatio,, mensuelle de 'pe- 
tites brochures qui, sous le titre des G,épes, curent d'abord 
un succès assez retentissant, mais qui, cent fois interrom 
pues et reprises, dispar«rent enfin au tnilieu de l'indiffe- 
rence publique. Il avait pourtant dpensé dans les Guépes 
beauco,p d'esprit et so,vent beaucoup de raison. Mais une 
des choses qui discréditèrent ce recueil, fut l'abus immo- 
déré que t'auteur y fait de sa propre personnalité et lesans- 
façon avec lequel, peu ucieux de son lecteur, il reimprime 
 saliCe les mgmes anecdotes et les mgmes plaisanteries. 
Peu après la révnlution de Fevrier, son exemple fut suivi 
partie nombreux folliculaires, et lui-m6me, sous la dictature 
du général Caaignac, rentra dans la lice en publiant sous 
le titre le Journal une feuille qui devait Atre le journal 
par excellence, comme la Bible est le livre des livres. Mais 
cette feuille ne représentait rien que la/antaisie politique de 
lI. Alph. Karr, et elle ne vécut guère que deux mois. Le gè- 
riCai Cavaignac aspirant  la présidence de la repuhlique, 
M. Alph. Karr lança, en guise de brOlots, pamphlets su r pam- 
phlets contre le plus redoutable de ses competiteurs. Aujour- 
d'hui, il publie hebdomadairement dans le Siècle des bour- 
donneraents, qui font peu de bruit. De plus, il a publié un 
Dwlionnaire du pêcheur en issu, et en 1855 la Biblio. 
lhëque nouvelle a donné de lui des 1tisloires norraandes. 
Au résumé, il a ëcrit parluis des pages eharmantes; mais, 
bien que la liste de ses romans soit longe, il n'a jamais pu 
faire un livre, et jamais il n'en fera. 
Il y a une viu[ftaine d'années, on ne pouvait point taire 
un pas dans les rues de Paris sans ètre frappé par quel- 
qu'une des inscriptions suixantes écrites tout simplement 
la craie (les affiches peinles n'étaient pas encore inven- 
tees) : Alpbonse Karr (nage), Alphouse Karr (casse), 
Alpbonse Karr (rogne), AIphonse Karr (rosse), Alphouse 
Karr (touche), etc. Ces inscriptions, qui ;,e laissaient pas 
que de beaucuup intriguer les badauds, n'Calent probable- 
ment que le résultat de quelque charge d'atelier, infiniment 
trop prolongée, du genre de la fameuse signature Crdde. 
ville (voleur) qui garnissait égalemeut toutes les murailles 
de Paris et de la banlieue dans les dernibres années de la 
Restauration, et qu'on disait tre celle «l'un introuvable vo- 
leur enierite, à la recherche duquel les bons gendarmes 
étaient inutilement depuis plusieurs années. Toutefois, 
M. Alphonse Karr, qui a ses ennemis tout comme un au- 
tre, fùt alors aceusë par eux d'avoir directement recours 
lui-mème ì ce petit charlatanisme pour populariser son 
nom, qu'il ne se plaisait h illustrer d'un calembour qu'afin 
de le mieux faire entrer dans la tte des Parisiens. Nous 
venons de dire que M. Alphonse Karr a des ennemis; on 
n'en pourra pas douter quand nous ajouteron qu'en 
il fut frappé dans le dos d'un coup de poignard, au mo- 
ment où il rentrait chez lui. 11 eut la générosité de ne pas 
denoncer : la vindicte publique l'assassin, qui, à ce que l'on 
assure, n'etait autre qu'un de nos bas-bleus les plus en 
putation, bladame *"'*, ajoute-t-on, avait Voldu punir 
dans le sang de l'effronté critique le mal que celui-ci avait 
pris la liberté de dire de ses vers dans les Guépe.s.M. 
phonse Karr lut nommé chevalier de la Légion d'Honneur 
vers la fin du règne de Louis-Philippe, prince pour lequel 
il professait la mme admi-atiun qd'il devait avoir pour 



7S2 KAP, R -- 
général Cavaignac. une des «.on«équences de c.ltc faveur 
lui de permeltrc . l'auleur de Sous les lïlleul de rem- 
placer enfin par un ruban ronge une pelite médaille qui 
,ui avail ëté accordée douze ou quinze ans auparavant par le 
ministre de l'intérieur, pour aoir sauv  la nage un cui- 
rassier qui se noyait dans nous ne savons quel ruisseau, 
médaille qu'il portait bravement h sa boutonnière, appendue 
eu guise de croix à un imperceptible ruban tricolore. 
KARS  place forte et chef-lieu de paehalik de l'eyalet turc 
d'Erzeroum en Arménie, à 14 myriamètres au nord-est 
d'Erzeroum, sur les frontières de la Russie, et autrefois de 
la Perse. Cette ville, située sur un plateau élevé de 2,000 
mètres au-dessus du niveau de la mer, compte eniron 
10,000 habitants, Arméniens pour la plupart, et qui font 
un commerce des pbls actifs avec la Perse. Siége d'un 
echë arménien, elle et eélèbre aussi parmi les mahomé- 
tans comme lieu de pèlerinage, parce qu'on y lrouve les 
tombeaux de plusieurs saints mabometans et de nombreuses 
mosques. Au neuvième et au dixième siècle, cette ville fut 
la rsidence de diverses d naMies armeniennes ; au onzième, 
elle devint la proie de Sehljotlkides, et au treizième celle 
des Mongoles. Tamerlan la dètruisit de Iond en comble en 
1387. Souvent assiégée ci prise aux dix-septiême ci dix hld- 
tième siècles dans les guerres de la Torquie contre la Perse, 
Kars, et plus particulièrement sa citadelle, furent en 188 
le theatre d'une lutte terrible entre les Turcs et les Russes, 
qui finirent par emporter la ville d'assaul, par suite de quoi 
la citadelle dut capituler. Ên 1855, le géneral russe Mou- 
ra;ief est encore venu mettre le siCe devant Kars, et le 99 
septembre il eebouait dans un assaut lenlé contre cette  ille. 
KARSCIlIX (A,.t-Lotie), dont le nom veritable 
elail Karsch, ci qui s'esl fait uneglotre dtlrable dans la poésie 
Mlemande, naquit le 1 r décembre 1722, en Silésie. Après 
la mort de son pére, nomme Durbach, qui clair auber- 
giste de prolession, et qu'elle pcrdil a I';tge de sept ans, 
sa mère, que conlrariail singulièrement l'ardeur extrême 
qu'elle lémoignait pour lire ci écrire, la mit en service dans 
une maison o0 on lui fil gardir Ils vaches, mais où en re- 
sanche elle y lit la omnaissance d'un pelit berger qui lui 
procura ,les livres. C'est pendanl les lrois années qu'elle 
passa dans celle maison qu'e.le composa ses premières poé- 
.-les, fruit des lectures qu'elle put faire alors, ci qu'aujour- 
d'hui mème on ne peut pas, malgre leurs délauts, lire 
sans admiration. Après avoir encore servi pendant qudque 
temps comme bonne d'enfanls, elle époua a l'age de dx-sept 
ans, pour obéir h sa mère, un drapier de Sohwibus, appele 
tlirsekorn, homme querelleur et avare, aee lequel elle 
xecul pendant onze années, qui ne furent pour elle qu'uu 
long mari)re. Après avoir divorcé d'aec lui et ëtre restée 
un an sans secours ni appui, elle se remaria, dtl consen- 
tement de sa mère, avec le tailleur Karsch de Fraustadt. 
Cci homme, adonné à l'ivrognerie, dissipait au cabaret 
tout ce qu'il possédait et aussi ce qu'elle pouvait gaguer tre 
composant de petits poëmes de circon:tance. Après tre 
enue s'etabiir à Gress-Glogau aee son mari et en proie h 
la dernière mis&e, elle rencontra dans le baron de Koll- 
wilz un protecteur généreux, qui Iournit/ tous ses besoins 
ci qui plus tard la fit venir à Berlin. Accueillie dans 
les premiéres mai-ons de celle capitale, on y prenait plaisir 
à l'entendre improviser aee la plus étonnante facilite heu 
pas seulement des vers, mais des poëmes tout entiers. 
Sulzer pubfia une édition de ses Poêmes choisis ( Berlin, 
l'6t )» et lui fil gagner de la sorte 2,000 thalers. Les se- 
cours de quelques amis des lettres étaient insuffis|ants pour 
lui fournir les mo'ens de faire *ivre ses deux enlants et son 
frère, qu'elle avait pris à sa cfiarge. Frédéric lI,/ qui elle 
s'adressa à diverses reprises, ne lui temoigna que peu de 
s}'mpathie et ne lui accorda pas la pension qu'il lui avait 
promise. Mais son suceesieur, Frèdérie-Guillaume II, lui fit 
btir à Berlin une iolie petite maison où elle mourut, le 12 
octobre 1791. Son second mari la rendit mère de Caroline- 
Louise de Kleneke, qui a publié es poéies et sa vie ( Ber- 

KASAN 
lin, 179 ), et grand'-mère de la célèbre Helmina de C h   .. 
KAHT||L! ou KABTHALINIE. loge -. 
IiASA.'  mot tarare, qui signifie chaudron, et par ex- 
tension terre en forme de chaudron ou vallée. Il désignn 
dans son en le plus tendu une ¢ontrée composée de cinq 
anciens gouvernements tatares : Pensa, Simbirsk, Kasan, 
Wjœetka et Perm, appartenant autrefois à la Horde d'Or ou 
au kbanat de Kiptchak; qui fut conquis sur les Tarares, 
d'abord en 1457, par lwan Wassiljewitsch 1 er, et plus com- 
p|étement pendaut les années 155 et 1",55, par lwan XVas- 
siljewitsch Il, puis incorporé à la Bussie, sous le nom de 
royaume. Ce ne fut qu'en 1833, aprës que l'AcnéCie des 
Sciences de Saint-Pétersbourg eut offert un prix de 00 du- 
cats/l l'auteur de la meilleure histoire de Kasan et du kbanat 
de la Horde d'Or, qu'on entreprit une étude approlondie des 
sources historiques qui y ont trait, et qu'on s'occupa de sa- 
voir où était situé cet empire jadis si puissant et quelles en 
étaient autrefois les limites; point à la parfaite connais- 
sance duquel ou ne parvint qu'en 1836. 
A l'endroit où l'Achtouba se jette dans le Volga, dans le 
gouvernement de Saratow, prës de la ville Zarew, au mi- 
lieu d'utte immense plaine s'étendant au loin vers l'ouest 
et bordée par une vaste ceinture formée par les lacs salés 
de Jorka, Etton, Baskoutsch, etc., etc., s'Cèvent Iés ruines 
de Soraï, ancienne capitale de cet empire, qui s'Cendait 
autrefois bien au delà d'Astrakan, et qui du treizième au 
quinzième siècle ne fitt pas seulement l'effroi de la Bussie, 
mais encore celui de tout l'ouest de l'Europe. C'est là qu'à 
plus de 10 myriamétres de la capitale du gouvernement 
russe actuel de ce nom, se trouvent les ruines en question. 
En les d6couvraut, on fut surpris de la magmificence de 
leurs gigantesques colonnes, durCs pour la plupart, de leurs 
temples et de leurs palais, aiusi que de la regularité du tracL de cette ville colossale, qui pendant des siècles as ait disparu 
de la terre, et oi aujourd'ltui, au moyen de fouilles pratiqugs 
avec intelligence et du débla.ement des décombres, on est 
parvenu à découvrir l'emplacement de près de trois mille 
maisons. Pendaut le cours de ces travaux on a trouvé une 
riçbe collection d'armes et d'ustensiles propres aux anciens 
Mongols. Cette contrée offre le plus haut intért au point 
de vue historique et sous le rapport ethnographique. C'est 
ici en eifet, sur les rives du Volga, où, independamment 
d'immenses forëts vierges, une terre d'une rare fécondité 
et de riches pàlurages pouvaient présenter assez d'attraits 
pour des établisseraents fixes, que dès les temps les plus 
reculés nous voyons se succéder leur à leur des peuplades 
d'origines les plus diverses, comme les Petchén6guee, les 
Chazares, les Ouzes: les Boulgares, etc., etc. On ne sait 
rien de positif au sujet de la demeure lixe de ces peuples, 
ainsi qtte de leurs rapports intérieurs, ce qtd parait d'autant 
plus regrettable que l'ancienne capitale des Botllgares, dé- 
couverte il ' a peu d'années seulement, et qui était située 
aux environs de la ville de SI3ask, daus le gouvernement 
de Kasan, au confluent de la Kama et du Volga, et qui 
est auioordhui la station de Bolgary, offre aussi de re- 
marquables constructions, dont les ruines revèlent encore 
aujourd'hui l'antique magnificence. (Consultez /'ouvrage 
d'Er, lmann intitulè : Essai sur la connaissance inl(rieure 
de la Bussie [Riga et Dorpat, 1822], et celui et de Hammer- 
Purgstall, Histoire de la Horde d'Or dans le Kptchalf 
[ Vienne, t 840 ]). 
Maintenant eucore, on trouve dans le gouvernement de 
Kasan le mélange le plus complet des faces, car en 182 
on y comptait, outre 5,011,871 Grands et Petits-Russes, 
6lb,000 deseendants des peuplades latares, 815, 000 habi- 
tants dont l'origine se rattache à celle de la grande nation 
finnoise, et 12, 000 de race mongole, en tout par eonséqnent 
1,2,000 Finnois, Tarares et Mongoles. Les cuites n'y varient 
pas moins que les éléments de la population. Si l'on y 
compte 5,905,000 Greco-Russes ortbodoxes, on  trouve 
aussi 548,800 dissidents appartenant aux Églises catholique 
romaine et arménienne, protestante reformée et anglicane; 



KASAN -- 
et àépendaluluent de quelques israélites appartenant h la 
secte talluudique, 518,000 luahométans et reCe environ 
38,400 idolâtres, dont la plupart rendent Inoluluage à la 
doctrine du Dalai-Lama. 
Le gouverneluent de Kasan compte, sur une superficie 
d'environ 800 myrialuètres carrés, une population de 
1,340,000 habitant% parmi lesquels les différeaces de races 
et de religions luentioaaées ci-dessus sont encore plus Irap- 
pantes, parce qu'on les y rencontre réunies sur un espace 
moindre. Plus du quart des habitants appartiennent à une 
religion différente de celle qui est réputée orthodoxe, et la 
population russe proprement dite est de beaucoup inferi«ure 
à celle dont l'origine a pour point de départ les faces fin- 
noise et tarare. Ce gouverneluent est divisé en dou« cercles, 
dont le plus étendu et le plus peuple est celui de Kasan. 
KASA', chef-lien du gouvernement du luèlue nom, b'fiti 
sur la rive gauche du Voila, à peu de distance de l'embou- 
chure de la Kasanka dans ce Ileuve, et situ," en partie dans 
une plaine exposée aux inondations, et en partie sur une 
émi»ence assez escarpée. Cette ille est " 8 lurialuëtres 
de Moseou, et a 150 de Saint-Pderbourg; luais des diligences 
facilitent ses relations avec le cœur de l'clupire, surtout  
i'époque de la grande foire de [ijni-Nowogorod. Un service 
régulier de bateaux à vapeur existe aussi entre [ijni-.Nowo- 
gorord, Kasan et Astrakhan ; ils ne luettcnt que huit leurs à 
fiancbir les 200 luyriamètres eniron qui séparent la pre- 
mière de ces illes de la troisième. La position de Kasan 
sur le Yolgaeu a fait de tous telups le centre d'un commerce 
des plus actifs entre l'Orient et l'Occident. Ses manufactures 
de draps, de cuir et de savon jouissent d'une grande pros- 
périte, et les cuirs ainsi que les saons de Kasan sont vi- 
rement recherchés h la foire de [ini-Nowogorod. Cette 
'ville n'est pas moins celtbre colulue si,.ge d'un évè.ché russe 
et du haut clergé tatar. On y voit 66 églises et 8 luosquées. 
Elle possède des établisseluents scientifiques à bon droit 
,eelèbres, nolaluluent son observatoire, et son université, 
fundée en 1803. Le 3 aoùt 1815 un inceudie detrui.it une 
grantde partie de Kasan; un autre incendie, qui y eclata le 
2. aoOt 18 i, déora plus de i,300 maisons, sans compter 
l'hdtel du gouven..eur ainsi qu'une parfie des hatiments de 
l'université et 9 églises. Avant ce dèsastre il 5' eistait 
4,333 maisons, dont 217 fabriques, et 45,343 habitants, 
dont 15,000 Tarares luaboluelans demeurant dans les fau- 
bourgs, et 3 ou 40O Alleluands. En 1846 le chiffre de la popu- 
lation était encore de 41,300 "5mes ; mais la ville a eu depuis 
beaucoup à souffrir d'un nouvel incendie. 
Près de Kasan se trouve le couvent de Semiosernoi, qui 
possède une image de la sainte vierge Marie à laquelle on 
attribue de nolubreux luiracles, et que tous les ans, le 7 
juillet, on transporte processionnellement h Kasan, pour y 
Cre exposée, dans le kremlin, h l'adoration des fidèles. 
I-IASAUBAti. l'oye:, C^sBxn. 
I-i A SCH A.U clnef-lieu du comilat d'Abaouvjar en Hongrie, 
sur la rive droite de la IAernad, dans une belle vallee, tout 
entouree de vignobles, est l'une des Idus antiques cités de ce 
pays. La itle intérieure, ïortiùée autretbis, est a la ,erite 
petite, mais se distingue par ses rues droiles et propres et p,r 
un grand nombred'cdilices cousidërables. Ses trois Ihubourg% 
séparés de la ville intërieure par un large glacis, sont asez 
vastes. Jusqu'à la révoluliun de 18-8, Kasclnau fut la capitale 
• t par suite le siCe de la cour su périeure de justice de la haute 
Hongrie, de l'inspection générale des tcoles, du eoluman- 
dement luilitaire, de la direction des salines et de celle des 
postes. Dans la nouvelle division adluinistrative donnée à la 
Hongrie depuis 184t, elle et restée le clnef-lieu d'un di.-trict 
,civil et militaire. L'evècbé de Kascbau comprend les coluitats 
d'Abaouj'rar, de Saros et de Zemplin; elle possède un sé- 
minaire, un oeilCe, une acadéluie et un théatre. L'église 
Sainte-Elisabetll, sur la grande place, eonstndte en pierre 
de taille et de style gotllique, riche en vieux tableaux, 
l'une des plus belles et des idus anciennes églises de la 
Hngrie, est le plus reluarquable de ses edifices. Kasclnau 
nloE. DE LA CONYIRS,  T. 

KASCHMIR 753 
colupte une population d'environ 15,000 mes; elle est 
le ce.alre d'an comluerce fort actif, et possède d'iluportantes 
fabriques de poteries, de cuirs, de draps, de sucre de bette 
rave, de tabac, etc. ; c'est aussi la principale 6tape du com- 
merce entre la Gallicie et la Hongrie. Cette situation lui a 
donné aussi un grande iluportaace stratégique dans toutes 
les guerres dont la tlongrie a été le théatre, et surtoat h 
l'ëpoque de la guerre essentiellement révolutioanaire sou- 
tenue au dix-septiCe siècle par Rakoczy. Dans le cours de 
la dernière révolutiun, une bataille importante fut livrée le 
4 jan, ter 15-19 sous ses murs; et le ministre de la guerre 
hongrois Me«aros y tut battu par t'Autrichien Sctdick. 
IASCliMIR ou KACHEIRE, province des lades 
orientales, ïorluée par une longue vallee de I'H ilu a I a y a, 
ver l'extrémité nord-oue-q de celle montagne, par 3,  de 
latitude nord, et siluee a peu près entre 91 ° 30' et 93 ° 3" 
de longitude orientale. Elle est ertouree par des monta- 
gnes, ramificatioas de l'ilimalaya, entièreluent couvedes de 
ueige et qu'on ne peut tra, erer que par un petit nombre 
de passages très-difficiles. Son elvatiou luo'enne cM de 
350 mètres au-dessus du niveau dela mer. Le Djiloulu ou 
Befiat ( l'Hydaspes des anciens), qui la parcourt dans toute 
son étendue, forme à son centre le lac de Valar ou Yuller, et 
par un étroit passage d,.boucbe de la allée dans le terri- 
toire de Mouzaflcrabad. Cette province est renomluee par 
son climat doux et temperé, par sa fecondite, par son haut 
degré de culture et par sa ddicieuse position. C'est trës- 
certainement l'une des plus belles coutrees de l'univers, 
quoiquïl y ait beaucoup d'exag«ration dans les éloges 
qu'en Ibnt les ecrivains orientaux, qi ont l'habitude de 
l'appeler le Parads de l'lnde et le Jardin de l'elernel 
printemps. Sous le rapport de ses productious naturelles 
et de sa situation geographique, elle offre le mlues ca. 
ractères que les autres vallees de l'tl ima la)a. Sa su- 
perficie est d'en,trou 6 a 700 mriamètres carrés ; mais on 
n'y compte guère qu'un million d'habitants, d'origine Ifin- 
doue, quoiqu'ils se distinguent de cette race par la plus 
grande blancheur de leur teint et aussi par une ressemblance 
plus décidée avec le t)pe cau¢asien, par plus de beauté 
dans les traits, et par les plus beureu.-es facultés intellec- 
rutiles. Toutefois, il ' a encure hien de l'exaeration dans 
ce qu'on en raconte sous ces deux rapports, lls parlent 
une langue dérivée du sanscrit; et qu,lue bon nombre 
prolessent l'islaluislue, ils appartiennent pour la plupart 
au brabluanisme, qui a chez eux beaucoup de temples 
et de lieux sacrés, et pour qui le Kasclnmir est une terre 
sainte. Les habitants se livrent avec succès  l'agricul- 
ture, que lavorlse puisamnlent un e\cellent systëlue 
genrrai d'irrigation, k I'lève du betaii et pins pauticuliëre- 
tuent à celle d'une e.-pèce de e h ë v r e s "h bon droit celèbre 
par la finesse de son duct. Leur industrie a surtout pour 
objd la fab0cation des c il ,t I e s, dans laquelle ils exce;lent. 
La tradition, confirmée par les plus rëcentes observations 
géoloiques, veut que la province de Kaschmir n'ait été au- 
trefois qu'un iluluense lac, qu'on desséclla en coupant la 
luontgne appelee Boravel. Les luabometans attribut ce 
gigautesque travail au roi Saloluon, et les serniteurs de 
Bralmaa au béros Kaudrilnab. Autrefois c'était aussi dans 
la vallee de Kaselluir qu'on plaçait le paradis terrestre ainsi 
que le berceau de la race humaine, et plus particulièreluent 
de la race indo-gerluanique. 
Jusqu'au seiziëme siècle, le Kaschluir eut ses rois parti- 
culiers appartenant a la race indoue; mais en 1586 il fut 
conquis par le Grand-Mogol Akbar, qui le réunit h son em- 
pire, auquel il resta uni jusqu'cn 167, époque on les Mghans 
en firent la conquète. Plus tard Rundjit-Singh, le luaha- 
radja de Lalnore, le leur chiera, et le reunit au royaulue des 
Sil, lns. A la luort de Rundjit-Siugh (1839), le Kascbluir es- 
saya de recouvrer son indëpendance. Le luabaradja Dhoulip- 
Siagh a)aut été vaincu par les Anglais, ceux-ci eédèrent en 
toute proprieté, par un traité en date du Ii mars 1846, h 
GlluuDb-Sigb, élevé à la dignité de mabaradja, lent leter- 
P5 



4 
ritoire situé entre le Ravi et PIndus ainsi que le Kascbmir, 
b in charge par Ghoulab-Singh de leur payer un million 
de livres ste,-ling, et de se reconnattre vassal du gouverr, e- 
ment indo-britannique par i'nvoi d'un tribu a,muel consis- 
tant en un cheval, douze chèvres de Kaschmir et trois châles, 
et d'entretenir le nombre de troupes qui lui serait indiqué. 
Mais dès l'automne de cette mëme année une insurrection 
contre le nouveau souverain du pays éclatait dans le Kasch- 
mit, à l'instigation du vizir de Lahore ; insurrection com- 
mandée par le chéik lmam-ed-din, lequel, toutefois, fit sa 
soumission dès le 31 octobre 1846. Après l'incorporation 
du Pendjab à l'Empire lndo-Britanniquc (29 mars 18-t9), 
le Kaschmir et le Djamou restèrent sous la souveraineté 
àe Gouiab-Singh, qui tout récemment encore faisait rentrer 
chus le devoir les populations des montagnes du Pendjab. 
Ces différentes conquètes et les révolutions qui en furent 
naturellement la suite, mais surtout la domination barbare 
des Afghans, ont consid'rablement diminué la prospérité de 
cette contre, qui aux temps de la domination du Grand- 
Mogol comi.hit encore une population de deux millions 
d'àmes. La tyrannie des Afghans et plus tard celle des Sikhs 
ont eu surtout pour résultat de porter un coup mortel à 
lïndustrie des chles, qui n'est plus aujourd'hui que l'ombre 
de ce qu'elle était autrefois. 
La capitale du pays est Kscnm ou Serinagour, c'est- 
à-dire de»ezre d bonher. Suivant l'habitude des viil 
d'Orient, les rnes en sont Craites et garnies de maisons en 
bois. Elle est btic sur le Djihoum, genéralement fort sale, 
et, V l'exception de l'ancien palais du Grand-Mogol, elle 
n'offre point d'edifice remarquable. A en juger par i'éten,lue 
peu commune de son enceinte, elle devait ètre extrêmement 
penph'e a« temps de sa prospérité. En 1809, époque où 
elle ëtait dejà bien déchue, elle complait encore 1 0,00o ha- 
bitants; mais elle est aujourd'hui loin d'en avoir autant. 
Dan ses environs on soit le superbe parc de Scbahlimar, 
nclenne -ésidence d'été du Grand.M,gol. 
!! faut encore mentionner. î..low-.a [['erabad,_ chel- lieu de 
la - " 'e I ar les Afghans restés 
p ,rince du méme nom, natale 
dans le mème pavs, et résidence d'un prince algban. 
IATAF. l'oye--. 
ILITHARIE.B OURG. l'oye'. 
IIATHMA.DOU capitale du ro)aume de NWpau i, 
compte plus dg o0,000 habitants. Les rues en sont bien pa- 
vees, la,sacs et moins Craites que ne le sont en général 
ce.'.|e. e beaucoup d'autres villes de l'Asie, o/ le soleil pé- 
nètre à peine. Elles sont garnies de maisons à pignons, bis- 
toriés et bizarres, à devantures en bois sculpté, à balcons 
ornementC, et avec des toits qui surpiombent. Leurs esca- 
iiers, touiours disposés à i'extérieur, leurs tentres, petites 
et encadrées dans des mascarons et des enroulements de 
deux pieds de large, rappellent un peu l'architecture si 
pittoresque de uremberg, ou encore celle des villes de la 
Suisse au moyen age. Aussi bien le dpaui, comme la 
vallée de Kaschmir, a reçu des Aurais le surnom de Suisse 
de l'lfindostan. 
HATIB-TSCHÉLÉBi. 
IATS. l'oye-. Cxs (Jacob). 
IIATT (Le lieutenant), l'oye= FuLc Il, roi de 
lh-o.se, tome IX., page 779. 
IIATT-CH ERIF. fraye ". 
iIATTÊGAT. Foye-'. 
"IIATZBACII  rivière sujette à «les crues subites et 
dangereuses, par suite des nomhreux affluents dont elle re- 
çoit les eaux en passant à travers les nontagnes, et qui 
prend sa source près de Lieguitz, en Silésie, puis,a se jeter 
dans l'Oder, non loin de Parchwit. Le 26 aoOt t813, les 
coalisés gagnèrent sur ses rives une victoise qui ouvrir cette 
série de revers par suite desquels i'armée française fut ré- 
duile à repasser le Rhin pour défendre le sol de la patrie. 
Après la dénouciation de l'armistice conclu entre apo- 
Iéon et les alliés, qui expirait le 17 aoùt, B 1 U c h e r avait 
franchi la Kalzbach, et  l'issue d'une srie de combats 

KASCHMIR  KATZBACH 
d'avant-postes livrés le 19 et le 20, et tous couronnés de 
succès, il avait forcé les Français à se retirer derrière le 
Bol3er. A la nouvelle de ces échecs, [apolëon accourt en 
personne avec les corps d'armée de Ney, de Macdonald, 
de Lauriston et de Scbastiani, auxquels se joignent ceux 
de Marinant et de Mortier, ainsi que la garde impériale; 
l'ensemble présentait un effectif de 130,000 hommes. A peine 
est-il arrivé à Lawenberg, qu'il y elfectue le passage du 
Bober, ainsi qu'à Bunzlau, forçant Langeron et Sacken à 
se retirer derriëre Golberg et Haynau. Blucher, qui a reçu 
l'ordre d'éviter toute bataille rangée contre des forces su- 
périeures, est forcé de continuer le lendemain son mouse- 
ment de retraite jusqu'à Jauer, où il masse ses troupes 
dans une position défendue par des hauteurs et des ravins, 
en méme temps qu'il établit son quartier général dans cette 
petite ville. L'armée française a le sien à Goldbcrg sur la 
Katzbach. 
Satislait du résultat qu'il a obtenu, Napoléon, qui a reçu 
l'avis que la grande armée des alliés vient de quitter la 
Bobême pour marcher sur la capitale de la Saxe, repart 
dès le 23 dans l'après-midi pour Dresde, avec les murC 
chaux Ney et Bertl,ier, la garde impériale et les corps de 
Marinant et Mortier, en confiant à blacdonald le comman- 
dementdes forces qu'il laisse en Siiésie. Ces forces, campa- 
sées des 11 e, 3 e et " corps, dont les deux premiers 
sont commandé» par les généraux Soubam et Lauri»ton, 
,'ésentent un effectif de 80,000 hommes, à peu près Cai 
a celui de i'armée de B!icher, qui a sous ses ordres les ge- 
néraux Sacken, York et Langeron. Aussit6t que dans le 
camp des alliés on a la certitude que Ilapoléon est reparti 
po:" la Saxe, Blucher se résout à attaquer l'armée fran- 
çaise; et le 2 il ordonne un mouvement par suite duquel 
ses troupes s'avancent jusqu'aux rives de la Katzbach. biais 
presqu'en méme temps Macdonaid, qui, lui aussi, veut 
prendre l'oitensive, a donné aux siennes l'ordre de se porter 
en avant. Elles franchissent la Katzbach, rejettent devant 
elles l'a,¢ant-garde prussienne, et filant sur la rive droit 
de la Neiss, en ce moment débordée, marchent dans la 
direction d'Arechlelshl sur Jauer, tandis que Lauriston a 
l'ordre de s'a,ancer sur Seichau, Hennersdorf et Schœenau, 
et que Souham doit partir de Liegnitz pour converger sur 
le mème point (Jauer), en passant par Priukendorf et 
Neudorf. 
Le temps était détestable; une pluie battante obscurcissait 
l'atmosphère, grossissait à chaque instant les eaux de la 
rivière et rendait de plus en plus dilficiles I mousements 
des deux afinC, qui le 26, vers trois heures de l'après- 
midi, se rencontrèrent a l'improviste sur un plateau entre- 
coupé de petits monticules, situé entre Wahistadt et la 
Katzbach. Blucfier, sans hesiter, engage la bataille. La lutte 
fut terrible, et comme, par suite des torrents de pluie qui 
tombaient, les fisils ne pouvaient plus tirer, on se barrit à 
la baïonnette et au sabre. Bhicher, à la tete de sa cavalerie, 
s'était letWsur le 11  corps français a,¢ant qu'il et eu le 
temps de se mettre en ordre de bataille. En mème temps il 
ordonnait à son infanterie de marcher par bataillons en avant 
sous la protection de son artillerie. Après une lutte de 
vingt minutes, un carré de grenadiers français fut enfoncé 
par le bataillon de Brandebourg, qui perdit deux cents 
hommes ; deux autres bataillons français ne fardèrent pas 
à Crou,cet le même sort. Le centre de notre armée, oh se 
trouva;tMacdonald, se ,oit de la sorte enfoncé; et autant en 
advint peu de temps après ì Lauriston, qui s'etait tvp 
a,¢ancé sur l'aile gauche de l'armée alliée, et qui fut forcé 
de se replier par suite de l'arrvee des troupes prusiennes 
accourant le prendre en flanc et par derrière. La poursuite 
de l'ennemi rendit la ,¢ictoire des alliés complète : Ig troupes 
de Bhicher, animées par le succès, rejetèrent quelques nfil- 
iiers de Français dans la ;eiss et la Katzbach, dont les 
eaux a'¢aient démesurément grossi et od un gand nombre 
de fuyards trouvèrent la mort. On poursni,¢it les autres I'é 
pée dans les rcins sans leur laisser le lemps de se rllier. 



KATZBACH -- KAULBACH 
Le lendemain, i'armée françai fut battue ì Lieguitz, 
et le 28 au Wolfberg, près de Goldsberg et de Lawenberg. 
La division Putitod, forte de 8,000 bomutes, et qui, après 
aoir vainement tenté d'effectuer à Kirscbbetg le passage 
du Bober debord, avait d suivre la gancite de cette ri- 
vière, y fut attaquee par Langeron et presque anéantie. 
lutbod ne put rejoindre le corps de Maedonaid qu'avec 
700 hommes. Celui-ci effectua dans la nuit du 9 au 30, 
à Bunzlau, le passage du Bober, à la tète de 12,000 hommes 
au idus, et brtla le pont après lui ; ce qui empêcba l'ar- 
mée alliée de Pinqltieter davantage dans sa retraite. La 
perte des Français dans ces diverses rencontres s'eleva à 
5,000hommes tués, 18,000 biessés; 103 bouches à feu, 
œee aigles, 50 canons et tous les bagages de i'armée. La Si- 
lésie se trouva ainsi délivrée. Après nous avoir poursuiis 
jusqu'au 7 septembre, Bli)cher s'arrèta h GoE, rlitz, sur la 
rive droite de la Neiss, et y opbra sa jonction avec le corps 
autrichien de Bubna. Cette manoeuvre délivra également la 
Bohême, que nous menaeions ; et l'oniatowski, qui avait 
pénétré jusqu'à Beicbenberg, dut, te 17 septembre, se re- 
plier jusqCh la forte position de Stolpen. 
I{AUF'IA.X, (AsC#.Lm,), célëbre par ses brillants 
succès dans l'art «le la peinture, naquit en 1711 , h Coite, 
pays des Grisons. Guidée par les excellentes leçons de son 
père, peintre lui-rame, mais dont les thëories valaient 
nficttx que les ouvrages, elle acquit de bonne heure un goùt 
star, la science approfondie du coloris et celle du dessin. Elle 
se livra aussi a l'Cude des belles-lettres et de la musique : 
iibëralemet dotée par la nature, elle developpa ainsi tous 
les dons qu'elle en avait reçus. Lorsqu'elle eot atteint sa 
vingtième année, elle n'était pas moins remarquable par ses 
talents et par les graces de son esprit que par les charmes 
physiques de sa personne. Un instant, la carrière drama- 
tique faillit la ravir à la peinture. Des amis de son père, 
éduits par la rare prefection de son chant, lui présentaient 
le tbéAtre comme le moyen le plus prompt et le plus brillant 
de laite forlune. Angélica hésita : les émotions et les.succès 
clatants de la scène élaient bien tentants pour cette àme 
artiste ; ì la fin, cependant, la peinture i'emporta. Elle voulut 
elle-mëme retracer ses combats et son triomphe : dans un de 
ses tableaux, on la voit placée entre la Peinture et la Musi- 
que, adressant  cette dernière mu-e de tendres adieux. De ce 
moment en effet la peinture devint son occupation presque 
zxclusive. Après avoir parcout'u l'ltalie pour étudier les 
chefs-d'oeuvre des grands ma|tres, elle ceda aux instances 
de quelques seigneurs anglais qui la pressaient de venir en 
Angleterre, et arriva le 22 juin t 766 a Londres, où 11 e )- n o I d s 
l'accueillir, non comme une rivale, mais comme une glo- 
rieuse émule, dont il estimait le talent. Daus ce pays elle 
déploya une telle fecondité, qu'on porte /t G00 le nombre 
de ses ouvrages que le burin des adistes anglais se chargea 
de multiplier. Un superbe portrait de la ducim«se de 
Brunswick int ajouter encore h sa renommée. Rechrcbee 
vers ce temps-là pal" nn étranger, qtfi se disait Suédois et 
portait le nom de comte Frëderic de Horn, Angëlica Kauf- 
mann ne vit point de motif pour repousser une alliance 
qui devait lui assurer un rang distingué et lui donner pour 
poux un homme digne en apparence de toute son affec- 
tion : elle agrëa donc ses Yoeux. A peine le mariage fut-il 
consommè que le voile se dechira : elle aait épouse un an- 
cien 'alet attaché au service d'un seinenr du nom de 
Horn I On peut jttger de tout ce que cette ame noble et 
délicate eut à souffrir en songeant aux liens Cemets qui l'no 
hissaient à un tel misérable. Heureusement, elle réussit à 
faire annuler son mariage peu de temps après l'avoir con- 
tractë. Angélica chercha encore dans la peintur une di- 
version à ses cl,agrins, et le temps cicatrisa peu à peu sa 
t»lessnre. Sa réputation grandit, et ses travaux lui acquirent 
mème bieutt de la richesse. Eu 1781 elle épousa Antoine 
Zucchi, peintre vdnitien, renommé en Angleterre comme 
paysagiste. Les deux époux quittèrent Londres presque aus- 
sitôt après leur mariage, et se rendirt'nt a Venise. Angé- 

7$ 
iica  composa un beau tableau, represetaut Léonard de 
Vitci expirant dans les bras de François 1 
nise elle alla à Naples, puis elle revint à lîome, et s'y fixa 
définitivement. C'est dans cette ille qu'elle peiguit, pour 
Pempereur Joseph Il, deux autres tableaux non moins re- 
marquables, l'un représentant le Retour d'Arminius, vain- 
queur des .lëgons de Varus, l'autre la Pomve funèbre par 
laquelle Enëe honora la mort de Pallas. De nouveaux 
malheurs vinrent assaillir Angetica : elle perdit en 1795 
son poux, et peu de temps après sa fortune. De ces deux 
pertes, la premiëre lui lut la plus sensible. « L'indigenc 
ne m'epouvante pas, disait-elle, mais l'isolement me tue. Le 
temps ne p.ut en elfet détruire i'amertmne de ses regrets, 
et le 5 novembre 1807 elle expira, victime d'une maladie 
de langueur. Consultez Gberardo de Bossi Vita di 
Kaufmann, pittrice (Florence, 1810). Paul Tmv. 
IAUFUXGEX (Kcsz n), condottere allemand du 
quiuzième siècle, était né au manoir de Kaufungen, prè de 
l'enig. Après avoir ser i avec distinction dans la guerre des 
Hu.ites, il entra a la solde de in ville de Nuremberg dans la 
guerre qu'elle soutenait contre le margrave AIbert de Bran- 
debourg, il fit ce prince prisonnier, et en lira une grosse ran- 
çon, au lieu de le livrer au»: Xurembergeois. A peu de 
teml»s de là il se tait à la solde de l'electeur de Saxe, Fre- 
deric le Pacifique, et fait prisonnier  son tour dans une 
goerre i,rivèe que ce prince soutenait conlae son propre 
fret'e, il lui fallut aussi pour obtenir sa iibe,-té pa. er une grosse 
rauçou. L'electeu. relusa de lui tenir compte de cette perte, 
en alléguant qu'il n'ét,tit point son vassal, mais bien son 
mercenaire; qu'a ce titre il navait droit, qo'a la solde conne- 
nue, et qu'il de, ait subir les chances de sa profession. FfC 
alCic, au rétablissement de la paix, lui enleva mëme divers 
domaines qu'il lui avait assigues en Mi»aie pour lïndemniser 
des ravages exercës par l'ennemi sur ses terres de Thnringe. 
De là de vives reclamations de Kaufungen. Enfin, il lut con- 
venu entre lui et Pëlectenr quon s'en rappotterait a des 
arbitres. Mais le conàottere, sans attendre leur décision, ré- 
solut d'enlever les deux fils de l'eleeteur pour le contraindre 
de la sorte à en passer parses conditions. En consequence, 
après s'être entendtt avcc quelques gentilshommes de ses 
ami» et aoir suhorné un alet inferieur, il mit son projet à 
exccutton, etdans la nuit du 7 au 8 juillet 1455 enlea du 
cbàteau d'Altenburg les deux enlhnts de l'ëlecteur, avec les- 
quels il s'enfuit ers la frontière de Bohème. Mai, lb un char- 
bonnierarrêtaleraxisseur, qui,livrëaussitOt a l'Cecteur, eut 
latëtetranchée, le l-ijuillet, aFreiberg Lapartie romane»que 
de ce petit drame local est pleine de curieux detailsde mœurs. 
H.ULI3A.C|I (,ler), peintre de lacour,  Municll, 
l'un des plus remarquables arti.-tes de notre 6poque, est në 
le 15 octobre lB0-1, à Arolsen, dans la principaute de Wal- 
deck. A i'école de Du»seidorf, ou, à i'ge de dix-sept ans, 
il lui fut donne de pouvoir commencer ses études sous la 
direction de Corné I i us, il s'appropria les principes et 
la manière de son maitre, en mème temps qu'il annonçait 
dejà devoir suivre une direction tout a fait dilfërente. Le 
hasard lui fournit l'occasion de pouvoir s'y livrer sans con- 
trainte. Il avait peint pour la citapelle de la maison d'a- 
liénés quelques figures d'anges. Afin de l'en remercier, le 
médecin de l'établissement lui en lit voir tous les détails; 
et cette visite eut pour résultat de profondement graver 
dans son imagination des pitysionomies qu'il a reproduites 
plus tard dans son célbre tableau La Maison des Fous. 
Appelé à Municb par Cornelius, il exécuta dans le stylo 
seère et idéal de son maitr« six figures symboliques, parmi 
lesquelles nous citerons les Fleuves de la Baviere dans les 
pendentll's du ltofgarten, ainsi que le plalond de l'Odíon, 
représentant Apollon au milieu des Muses, et en mëme 
temps (1828 et 1829) il exScutait dans un style différent et 
tout à fait réel sa Maison des FozoE, toile qui fonda tut 
aussit6t la réputation de l'artiste. Malgré quelque sécheresse 
dans les contours, on fut frapp de l'intelligence avec la- 
quelle était représentée cette assemblée de malheureux 
95. 



ainsi que de laingularité vraie des attitudes, des physiono- 
mies et des traits des personnes. Dans ce tableau comme 
dans celui du Sac de Jérusalem par les omai».ç, l'artiste 
s'est motr réalis; mais, soit qu'il ait ensuile obéi à ses 
propresides, soit qu'il t subi i'infl uence de I'ecole h laqueli e 
il appartient, il ne tarda point à se livrer  n genre de com- 
positions symbolique, tenant mème parfois de l'énigme. A 
cet ordre de travaux se ralchent les seize pendentil em- 
pruntës h la fable de l'Amour et Psyché, qu'il exëcuta dans 
le pais du duc Max à Munich, taldeaux du style antique le 
pl sple et le plus sére, il concilia ces deux direc- 
tions si opposées dans quelques essais dont les sujets sont 
empruntes a l'histoire des Allemands ( t83o et 183t ), ainsi 
que dans les ndenliis qu'il composa pour le rut Louis, re- 
reCentant des scènes tirCs de EIopstock, de Goethe et de 
Wieland, et excutés tout au moins sur ses dessins. En 
mme temps qu'il se livrait à ce importants travaux, il 
ache¢ait (187) sa célëbre Bat«iHe des H«ns, composition 
ou il a reproduit la tradition grandiose d'coe lutte aux par- 
ies de Borne carre les esprits des Iuns et des Bomains 
tmbés sur le clamp de balail[e. On  oit s'élever du clap 
de bataille, tout couvert de cadavres, des Iéons de fan- 
témes qui continueut h oe combatlre dans les espaces 
rés. Le sujet était neuf, extraordinaire, magique et en quel- 
que sorte démouiaque. L'exécution en est pleine de carac- 
tère, de ivacité, de feu et de beaulë ; les detaiis en sorti 
d'une grande vérité individuelle, et si loin de tout ce qui 
est de pure convention, qu'il ne but poiut s'étonner si cetc 
grande et belle page a été tout aussitét sainée comme un 
des chel-d'oeuvre de l'art moderne. 
Kauibach, qui s'Cait délassé de ses graves travaux en se 
iivnt à une tude toute particufire d'Hogah, en a pro- 
IRe pour exécuter avec une grande originalil une suite de 
dessins pour Le Criminel de Schiller et pour le Faust de 
Goethe. Il s'est éalement occupé d'illustrer le clëbre ro- 
man de Retnecke Fuchs. On a assi de lui, vers la mme 
époque, un groupe admirable de Beouins. Dans l'hiver de 
1837 à 1838, il créa sa deuxième grande compo»ifion histo- 
rique, Le Sac de J¢rusalem par Ttus, dont il acheva l'es- 
quisse en 1838. Entourë de cadawes parmi les ruines du tem- 
ple, le grand-pretre se donne la mort sur l'autel, landis que 
le génér romain entre avec ses soldats. Partout mx décou- 
• re le meurtre et le pillage; pennt que sur le premier 
plan le Juif eant est poursui'i par des démons, et que 
les chrétiens s'éloignent accompagnés par des anges, on aper- 
çoit au fond, dans une auréole, les prophètes et les anges 
exterminateurs. Le roi de Bavière charg Kauibach d'exé- 
cuter à l'huile cette grandiose composition sur une toile 
de 18 pieds sur 0, qu'on peut voir aujourd'hui dans la pi- 
nacothèque de Munich. 
Chargé en 85 par le roi de Prusse d'orner de six grands 
biux les murs de l'escalier du musée de Berlin, Kaul- 
bach choisit pour sujet du premier la construction de la 
tour de Babe[, sur les drés de laquelle trône i'orguei[lenx 
roi emrod, tandis qu'a ses pieds s'opère la grande divi- 
sion du genre humain en nations et en peuples. Toujom» en- 
trainWpar le désir d'exposer non-seulement toutes les pa 
ries de son sujet, mais d'en donner «ne interprètatio 
scientifique et phiiosophique, ïauteur n'a pas reculA devant 
la nëcessRé d'introduire dans son dre une oentaine de 
figures, dont chacune est au moins la personnilioetion d'une 
relion, d'une ste, et mme des nombreus extravanoes 
que la superstition a fait invenr aux bmnmes. Cett multi- 
tude de snes isolées mais complètes, réunies ds un cadre 
énorm% où l'on ne peut parvenir à saisir i'unR6 du sujet 
principal qne par un effort très-pénible d'attention, produit 
sur i'esp un effet analogue h cehfi que fait épr over à notre 
vue l'horizon oentinu d'un porama. Le eoend b[eau 
reprte 1 monde gr; on y voit Horaire arrivant 0'Ionie 
-et apportant aux Gre leurs nouveaux dieux, taadis que 
sur la cte où la sibylle de Cumes vient de le faire débar- 
qucr ut la Gr ravie écoute ses poëmes dlvins. Le 

-- KALNITZ 
troisiëme n'est que la répétition du Sac de Jrusalem par 
Titus; le quatrième reproduit la Bataille des Huns, qui se 
trouve dans la galerie Baczynski ; le cinquième représentera 
l'arrivée de croisés h Jérusalem ; le sixième, enfin, la 
formation. Ces grandes toiles sont séparées par des cartons 
représentant dans leur partie supérieure les fires de I'É- 
gypte, de la Grëce, de l'ttalie et de l'Allemagne; dans leur 
partie inférieure, quatre Iégislateurs ou héros, Moïse, Solon 
Charlemagne, et l'empereur Frédéric Barberousse ; et cha- 
cune de ces figures est flanquée de mascarons où l'artiste 
a disposé une série symétrique de représentations, tant6t 
symboliques, tant6t réelles, relatives h l'lgypte, h l'Iode, 
la Perse, à la Grèce, h la Judée et ì Rame. 
De tous les peintres de l'Cale de Cornélius, Kaulbach egt 
incontestablement celui qui, indépendamment des sévères 
principes de style de ce grand artiste, possède la manière la 
plus vigoureuse et la plus riche. Mais si, comme son mailre, 
il aime à accumuler les idees dans ses compositions, on p-ut 
lui reprocher d'oublier partais la forme, parce qu'il se laisse 
trop entrainer dans le vague par ses constantes méditations 
ur les vérités et sur les grands faits de l'histoire. 
IAUNITZ ( Wr--NCr-SL«S-AsToL, prince n , comte ne 
1%zrr-.c, homme d'État, qli rendit les services les plus si- 
çnalés à la maison d'Autriche, naquit à Vienne, en 1711. 
Destiné à l'Arat ecclésiastique, comme le plus jeune de cinq 
frères, il fut dès I'ge de treize ans pourvu d'un canonicat 
à Munster. Mais devenu chef de sa famille, par suite de la 
mort de ses quatre ainés, il rentra dans le monde, fit ses 
Cudes Vienne, à Leipzig et à Leyde, voyagea ensuite dans 
les diserses parties de l'Europe, et en 1735 fut nommé 
par l'empereur Charles VI conseiller aulique de l'empire, 
et peu de temps après second commissaire impérial  la 
diète de liait.bonne. La mort de ce monarque ayant fait 
cesser ses fonctions, il se retira dans ses terres situées en 
lrloravie. An commencement du règne de Marie-Thérëse, 
un brillant avenir s'ouyrit desa.ni lui. 1 fut envoyé en 176t 
, ilome, auprès du pap" Benolt XIV, puis à FIorence. En 
172 il alla à Turin négocier entre l'Autriche et la Sardaigne 
le traité d'alliance defensive contre la maison de Bourbon, 
auquel accéda à la fin l'Angleterre; et en 171 il fut nommé 
ministre résident d'Autriche près le duc Charles de Lorraine, 
gouverneur général «les Pays-Bas autrichiens. Mais la du- 
chesse Marie-Arme, femme de ce prince, étant morte peu de 
temps aprës, Kaunitz le remplaça provisoirement dans le 
goavernement <es Pays-Bas autrichiens; et en fëwier 17-t5 
Marie.Tllérèse 1' ;ïccrédita en qualité de plénipotentiaire. 
Lorsqu'en fevrier 17-16 les troupes françaises s'emparèrent 
de Bruxeiles Kaunitz obtint pour les troupes autrichennes 
une capitulation en vertu de laquelle elles purent se retirer 
librement. Il alla alors s'établir  Anvers, puis, cette ville 
ayant aassi été forcée de se rendre, ì Aix-la-Cbapelle. L'af- 
faiblisment de sa santé le contraignit  solliciter un congé. 
Mais. -fi peine de retour h Vienne, on l'envoya au congrès 
d'Aix-la-Chapelle. ç'est de cette mission que date sa ré- 
pntation d'habile diplomate. 
Après la paix d'Aix-la -Chapelle, KaunioE fut nommé mi- 
nistre d'Êtat et de cabinet. Ambassadeur à Paris de 1750 à 
1752, il parvint à opérer la réconciliation de 'Autriche et de 
la France; et en I'/53 il fut appelé au poste de chancelier 
d'État, ou premier ministre, pour tous les Etats de la monar- 
chie autrichienne. En 1764 l'empereur François I e l'Ceva 
ì la dignité de prince du Saint-Empire. 
Tant que vécut Marie-Thérèse, Kaunitz ]ouit auprès d'eii 
d'une corfiance sans bornes ; mais lorsque l'empereur Jo- 
seph Il ré,ma seul, son crédit diminua visiblement, surtout 
à la suite de l'insuccès des négociationY ouvertes pour l'C 
change de la Bavière contre les Pays-Bas ; il fut presque nul 
sous le rêgne de Léopold. 
Kaunitz mourut le T/iuin 1794. C'était un esprit de 
mier ordre : à une profonde connaissance de la position poli- 
tique de l'Europe, à un zèle infatigable pour le service de 
ses souverains, il unissait la probitë la plus rigoureuse et 



KAUI'ITZ 
une discrétion qui |e rendait impénétrable. Pendant longtemps 
on le cousidéra comme l'oracle de la diplomatie, et il exerçait 
une telle influence sur la direction générale des affaires 
qu'on l'avait surnommé par plaisanterie le cocher de l'Eu- 
rope. Cependant, malgré toute sa tïues et toute .a supé- 
riorité, sa politique était quelquefois par trop subtile, et 
manquait son but. Il ne *o)ait que l'intérèt de la maison d'Au- 
triche, et oubliait trop que la politique d'un empereur d'Al- 
lemagne devait tre une politique allemande. II avait pour 
la Prusse la mème a,ersion que Marie-Thérèse, aversion 
fondée un peu sur des rancunes personnelles, provenant de ce 
que, en prenant possession de la Frise orientale, Frédëric II 
avait repoussé les prétention« qu'il Cevait comme hbritier 
de quelques domaines situés dans cette province ; quant aux 
affaires d'Allemagne, il les traitait par desmus jambes, en 
vrai diplomate de l'école française, jouant un jeu double et 
souvent ridicule, par exemple Iorsqu'd cherchait / s'ap- 
puyer surl'intérct religieux. C'est trës-certainement lui qui eut 
la première idee du partage de la Pologne. Il prit aussi une part 
des plus actives aux egsais de réforme religieuse de .Iosepb lI : 
à Reine, on en fit mme peser uniquement sur lui la res- 
ponsabilité; aussi ne l'y désignait-on jamais q,e sou le nom 
de il ministre eretico. Lors de son scieur ì Vienne, Pie VI, 
pour lui témoigner combien il l'avait en estime particulière, 
loi «tyaut présenté à baiser ner, pas le revers, mais la paume 
de sa main, Kaunitz refusa de se plier ì cette exigence de 
l'ëtiquette, et se conlenta de presser la main du souserain 
pontife à la bonne franquette, comme on dit vulgaire- 
rueur. Son amour-propre et sa vanite étaient extrëmes, et 
sa Iormule ordiuaire, quand il voulait louer quelqu'un sans ré- 
ser e, était : Mn Dieu, je n'aurais pas mieux çait moi -méme 
Il redoutait/l l'excès le grand air, et ne s'y exposait jamais. 
I portait constammeut les uns par-des.us les autres six vête- 
ments differeuts, dont l'épaisseur etait sa,ammen! ealculée 
d'après la température au milieu de laquelle il se trouvait. 
C'est uniquement de Paris qu'il faisait venir tous ses ohjets 
de toilette, son linge, ses habits, ses montres, ses meubles, 
ses équipages, etc. II parlait a*ec une grande facilité les lan- 
gues française, italienne, latine et anglaise, et se montrait 
le protecteur généreux de. sciences, des arts et des lettres. 
Autant il était cérémonieux et roi«le avec les hommes de son 
rang, autant il était affable et bienveillant avec ses lofCieurs. 
Un général autrichien du nom de Kauml: commandait 
un corps d'armée ì la bataille de F I e u r u s en 
I{A,VI ou KAVI. l'oye: I.tE.x.xEs (Langues) et 
IAZAN. l'ove:. 
HCItATIYAS. Voye-- CUT[XS. 
I{E,XN (Etos), après G a trick et Kemble le comë- 
dieu le plus distingué qu'ait eu l'Anglelerre, né en 17S7, 
Londres, était fils d'Aaron Kean, frère du fameux ventri- 
loque Moise Kean et de la fille de Georges Carey, qui a 
laissé nne certaine réputation comme poète. Cependant, il 
se prétendait issu d'un mariage de la main gauche conclu 
par le duc de Norfolk ( mort en 1815 ). Quoique petit et eon- 
trefait,il parut avec succëseomme figurant, dès l'age de cinq 
ans, sur le thétre de Drury-Lane. Plus tard il s'enfuit de 
cirez sa mère, puis s'engagea comme mousse h bord d'un 
bàtiment fdisant voile pour Madère. Quand cette nouvelle 
carrière cessa d'a,oir des charmes pour lui, il parvint/l rom- 
pre son engagemeut en simulant une surdité toujours crois* 
saute. Revenu à Londres, il fut engagé pour jouer le rle 
d'un singe à La foire de la Saint-Barthélemy, puis dans un 
tbéAtre de faubourg, où il s'acquitta avec bonheur du réle dz 
Rolla, dans le Pi:arro de Sheridan ; ensuiM sous le nom de 
Careg, il fit partie d'une troupe qui exploitait le York- 
sbire, et quoique gé seulement de treize ans, il s'y fit re- 
marquer dans les rles d'Hamlet et dans celui de Caton. 
En tS01, le docteur Drury le placa au collége d'Eton. Mais 
habitué ì la vie nomade et indépendante, il ne resta que 
trois ans dans celle cole, et courut ensuite les provinces 
comme comédien ambulant jusqu'en 1814, époque où il dé- 
hula dans le rlc de Sh)riock, sur la scène de Londre», avec 

-- KEFIL 7.,  
un immense succès. Les autres réles les plus brillants de 
son rped, oire étaient ceux de Richard III, d'Othello, de 
Macbeth et de Juge; en 1S2o et lSoE! il parcourut 
tique du Nord en y donnant des représeutations qui furent 
extrmement suivies. Il réussit moins dans une seconde 
tournée qu'il y entreprit, en 1s25; mais l'accueil qui lui fut 
fait en 182S à Paris, où pendant une saison d'CWune 
troupe anglaise donna des représentations que la mode prit 
immédiatement sous son patronage, porta sa réputation/l 
son apogée. Malheureusement il avait fini par s'adonner h 
l'ivrognerie, et il mourut le 1 mai 1833» à Richmond, dans 
toute la force de I"ge et du talent. En 1829 il avait joue 
pendant quelque temps à Covent-Garden, mais pour revenir 
bientôt après à DruryoLane. 
KEAN (Ct*.nLS), fils du précédent, s'est aussi fait un 
nom comme acteur. II joua d'abord sur le theMre d'Hay- 
Market, fit ensuite une tournée sur le continent, et en 1839 
s'en alla de l'autre cetWde l'Atlantique, o6 il obtint 
de gran,ls succès, surtout dans le rle de Master Walter, 
du Httnchback de Sheridan Kno'les. Revenu en Angleterre 
en lg.!, il y épousa la charmante actrice Ellen Trec, a*ec 
laquelle il visita de nouveau les Êtats-Unis, ainsi que 
Paris. Depuis lS50 il est directeur du Prince»s-Theatre,  
Londres. 
IÉARBAN-SEBAI. Voye: Cw«ws-SntL. 
I{ECSHÈMÉT, le ph]s grand bourg de la Hongrie, 
dans le comitat de Pesth, bti au milieu de la lande du 
mme nom, et, en raison de sa vaste ctendue, du dë,lale 
de ses ruelles, du peu ,Pëlevation de ses edifices publics, 
et «le ses maisons, isol,:es et dispersé.es au hasard, le type 
de la véritable bourga]e magsare. En fait d'édifices publics, 
les plu remarquables sont l'église catholique avec ses tours 
hautes et grêles, le collège reformé et le gmnase catho- 
lique. La population dépasse le chiffre de .1,000 ames ; elle 
est complétement de race mage'are, et, sauf quelques catho- 
liques et un petit nombre «le juifs, appartient tout entière 
ì la communion ré[ormée. Les habitants se livrent bien à la 
culture des céréales et de la vigne, autant du moins que le 
permet la nature sablonneuse de leurs terres, mais leurs 
principales ressources consistent dans l'elëve des moulons, 
des boeufs, des chevaux et de porcs; et les produits de cette 
industrie toute speciale s'ëcoulent avantageusement au 
mol-en de cinq grandes foires annuelles qui se tiennent /l 
Kecskemt. On tient des conteCs les plus Ioinlaines surtout 
 celle qui a lieu au mois «le juiu; elle dure quinze jours, 
et il s'), fait d'immenses affaires en bestiaux. Non moins 
industrieuse, la partie féminine de la population de Kees- 
kemet fait aussi avec Pesth, qui est à une distance de 70 
kilomètre% un commerce des plus actifs en provisions ali- 
mentaires. 
IàEEPSAIIE (que l'on prononce kpseck), est un terme 
réeemment emprunté ì la langue anglais; il désigner.es 
jolis ,olumes que recommandent, comme peCeuls du jour 
de l'an, la beauté de leurs gra,ures et l'exécution soignée 
de leur typographie, auxquelles se joint, au gré du donateur, 
le plus ou moins de luxe des reliures. Les deux mots dont 
on a composé celui de keepscfke indiquent que c'est un livre 
qu'il faut 9arder (keep) a,ec affection (soke). Le mot 
et la chose ont été importés citez nous il y a quelques an- 
nées. Quant/ la dernière, le fait est que nous la possédions 
déjà sous d'autres noms. C'est un de nos é¢rivais roman- 
tiques, Frédéric SeuilC qui publia en France le premier 
keepsake, sous ce nom britannique, naturalis depuis parmi 
nous. 
Le landscope (ues de paysages) est une variété du 
eepsae, également transportée chez nous de l'autre bord 
de la Manche, et qu'on y a assez bien accueillie, avec moins 
de faveur toutefois que dans la Grande-Bretagne, où le 
go0t et le séjour de la campagne font partie intrante 
des mœurs nationales. Otam. 
EE|IL ville située dans le cercle central du Rhin 
(grand-duch de Rade), au confluent de la Kinzig dans le 



758 
lhin, qu'on  taverse sur un [,ont conduisant  St:'asbour, 
situé à 2 kilomètres de là, était jadis une place forte im- 
poJnte, et compte encore aujourd'hui prës de l,g00 et 
méme 3,000 habitants, en y comprenant un bourg de mSme 
nom, qu'on peut considérer comme en étant le faubourg. 
Bàtie vers la fin du dix-septième siècle, par les Français, pour 
servir de point d'appui aux conqnStes que Louis XIV reCi- 
rait sur la rive droite du RIdn, la paix de Ryswick l'attribua 
en 1697 au margrave de Bade, sous la réserve, en faveur 
de l'empereur et de l'Empire, d'y entretenir garnison. Dé- 
mantelée vers le milieu du dix-buitiëme siècle, Kehl est 
devenue une ville manufacturière et commerçante d'une 
certaine importance. B e a u m a re h a i s y tablit une impri- 
merie, des presses de laquelle sortit «ne édition complète 
des œuvres de Voltaire, longtemps célèbre, et quelques au- 
tres ouvrages de lue. 
Khl depuis cette epoque a été assiégée à plugienrs re- 
prises, et notamment en 1796. Trois fois elle a été detruite 
par des incendies, et elle a successisement appartenu à 
l'Al]emagnc et h la France. En 1808 apoléon la compri dans 
le departement du Ba-«-Rhin; mais en 181/ la coalition la 
restitua au grand-d«cbé de Bade, et l'anw"e suivante ses for- 
tifications furent rasCs. Dans»ces derniers temps, elle a ac- 
quis une grande importance par son chemin de [er, qui se rat- 
tache au système des cbemins de fer badois. 
IETI| Goçs), ne en 1685, à Kinkardine, en 
Ëcosse, et ordinairement designA sons le nom de mylord .ll- 
rchal, parce que la dignité de grand-matChai du ro'aume 
d'Ecosse étant béréditaire dans sa famille, il ajoutait, 
comme chef de sa maison, cette qualification à son titre 
de lord de Kiukardine et d'Altree,  consacra trës-jeme 
encore à l'etat militaire, et serit dès l'année 171 sous les 
ordres de Marlborovgh avec le grade de premier bri;adier. 
A la mort de la reine Arme, il se déclara en faveur du pré- 
tcndaat, .'elfora de le f,ire proclamer roi à Londres, et 
«,btmt pour lui, e' 1715, l'appui de la France et de l'Es- 
pagne. Aprës la bataille de Preston, il tut mis hors la loi, 
-t condamné à mort par le parlement comme jacobite. Il 
erra alors pendant six mois «tans |es montagnes «le PÊcosse, 
parvint a s'ccbapper sur le continent, et alla servir le roi 
,l'Epa;me. Plus tard, il résida longtemps ì Ruine auprès 
,lu prct.ndant, qui l'emph»ya dans une foule de négociations, 
«lont par la séte il dctr«isit toutes traces en livrant au leu 
les diver.cs pi/:ces qui y avaient trait. Apr/s tre ailWencore 
J del«x reprises en Epagne, il revint se fixer a Berlin au- 
près de sou rière. Frédcric le Grand le nomma gouverneur 
de Neufchtel, et plus tard son ambassadeur à Madrid. 
llais» fatiuë «les agitations de la vie publiqae, il revint 
le nouveau à Berlin, o il continua de resider jusqu'au mo- 
ment oh, grâce aux bons offices du roi, il obtint du gou- 
vernement anglais la restitution de sec biens et dignités. Il 
ne fit toutefois qu'un court séjour en lcosse, reint encore 
en Prusse, et mourut prês de Potsdam, le 25 mai 1778. On 
consultera avec fruit i'Eloge de nylord MerChai, par 
D'Alembcrt (Berlin, 1779 ). 
KETH (Js), [eld-maréchal prussien, frère du pri- 
eCent, nWen 1696, à Freteressa, manoir de sa famille 
situé dans le comté de Kinkardine, était destiné fi la carriëre 
«le la magistrature ; mais il mit à profit les troubles jacobites 
qui éclatrent en lcosse en 1715 et 1716 pour s'engager 
comme protestant dans les troupes de Georges l . Victime 
«.le quelques passe-droits, à cause de ses opinions tories, il se 
jeta de dépit dans le parti du prétendant, et fut blessé à la 
bataille de Sberifmuir. Quand la causedu prétendant fut per- 
due sans ressources, James Keith, dont les terres avaient 
étë confisquées, e retira en France, où, sons la direction 
de Maupertuis, il se livra avec tant de succè à l'étude 
des matbématiques, que l'Académie des Sciences l'adroit au 
nombre de ses membres. Toujours dévoué ì la cause des 
Stuarts, il consentir à se rendre en Espagne po«r prendre 
part aux entreprises au,tacieuses mditées par A Iberoni 
en faveur du prétendant. Toutefois, il ne fi«t point d'a- 

KEHL  KEITH 
bord donné suite aux beiliq,en projets du tout-pdssaat 
cardinal, et Keith dut s'etimer heureux d'obtenir par la 
protection du duc de Leyria le commandennt d'un régi- 
ment éco.ais. Quand plus tard l'epédition projetée par 
Mberoni fut réalisée, et lorque la dis¢orde dt chds t'eut 
fait échouer, Keith fut réduit à errer pendant lonemps 
dans les montagnes de l'Écosse sous un déguisement. Ayant 
réui/ regagne" le continent, il alla successivement en Hol- 
lande, en France et en Italie, menant une vie assez avan- 
tureuse et atëe. Ce fut seulement en 17¢0 qu'il reparut à 
Madrid, ou tout d'abord on repoussa ses demandes d'emploi ; 
mais ensuite on y mit pour condition qu'il changent de 
religion. Il sollicita alors du service en Bussie, oi il se 
rendit en 1728 avec le grade de général-major et muni de 
lettres de recommandation du roi d'Espagne. Promu bient6t 
lieutenant gén«'-ral, il prit part à la guerrede Pologne de 1732, 
à la campagne qu'un corps auxiliaire russe vint en 1735 faire 
sur les bords du Bhin contre la France, puis sous les or- 
dres de Munnich, quoique commandant d'un corps d'armée, 
aux guerres de 17.6 et t737 contre les T,rcs..s l'assaut 
d'Oczakow, ce fut lui qui le premier passa par la brèche. De 
1741  17 il ,fit les campagnes de Suède, décida du gain 
de la bataille de Vilmantrand, et chassa les Suélois des iles 
d'Aland..près la paix d'Abo, l'impératrice le nomma son 
ambassadeur/ Stockholm, et h son retour/ Saint- Ptersbonrg 
il obtint le b,lton de fel,l-maréchal. Croyant avoir à se plain- 
dre du vice-chancelier Betuscheff, il sollicita son congé, 
qu'on ne lui accorda qu'à la condition de ne jamais servir 
contre la Russie. Keith se retira alors en Prusse, où Frë- 
dëric II s'estima heureux «le pouvoir accueillir un officier si 
distinuc. Il le nomma immediatement feld-maréchal à son 
service, et en 1759 gouverneur de Berlin. An début de la 
guerre de sept ans, Keilh envahit la basse Saxe à la téte d'un 
corps d'armée, et le roi de Prusse l'employa ensuite dans 
divcr néo¢iations diplomatiq«es, notamment en 1757 
avec le duc de Richelieu. Il assista aux affaires de Lowbsitz 
et de Rosbach, dirigea les opérations des siïges de Prague 
et d'OImtitz ; et quan,l force fut de lever le dernier, ce fut 
lui qui couvrir la remarqqable retraite de l'armée prus- 
sienne. Le rg octobre de la mme année, Ioque Lascv 
surprit le camp prussien à Hochl, irch, Keith tut atteint 
d'un boulet, et pêrit sur le champ de bataille mme. Les 
ennemis, qui l'avaient en grande estime, l'enterrèrent avec 
tous les honneurs de la guerre. C'éta,t un homme de 
grands talents, d'une bravoure à toute épreuve et d'un dë- 
sintressement complet. Son frère, mylord Marécbal, écrivait 
fi 31 « Geoffrin, fi Paris : « Savez-vous quel immense 
héritage m'a laissé mon Irëre ? Lui qui " la tSte d'une arm.œeee 
victorieuse avait mis la Bohème à contribution, il est mort 
ne possédant au monde que 70 ducats ! » Frédèric le Graad 
lui fit ériger une statue à Berlin. 
IEITH ( GEOnGEs-ELPmNSTO.E, icomte), célèbre 
marin anglais, né en 176, en[ra dans la marine à l'gede 
seize ans, en t762. Lieutenant en 1769, il passa commo- 
dure en 1772, et capitaine en 1775. Pendant la guerre d'A- 
mériquei de 1780à 1783, il s'empara d'un grand nombre de 
vaisseaux français et espagnols, et en 17S6 il fut envoyé à 
la chambre des communes par le comté de Stirling. En 
1793, ilprit part au sitge et à la prise de Toulon par les An- 
glais, comme commandant d'un vaisseau de ligne. ommé 
contre-amiral en 179, il s'empara en t795 de la colonie 
hollandaise «lu Cap, et de là fit voile pour la mer de i'Inde, 
où il prit Ceylan. Créé, en 1798, baron Keith de Stoue- 
ilaven, il captura dans la baie de Saldanba une escadre 
hollandaise composée de quatre vaisseaux de ligne, de 
trois fréates et de trois cornettes. Il sucsCa an comman- 
dement en chef dont avait été investi lord Saint-Vincent, 
dirigea en 1800 le blocus de GSnes et couvrir en 1801 
le d-barquement du général Abercromby en Égypte. C'est 
alors qu'il refusa de ratifier la convention d'EI-Arish con- 
clue avec les Français par son subordonné Sidney-Smith. 11 
fut ensuite chargé de surveiller les mouvements de la llu- 



KEITH  KELLERMANN 
ri:le française réunie à Boulogne. En t805 on le nomma 
amiral du pavillon blanc, et en 1814 il fut ceCvicomte. 
En sa qualité de commandant de la flotte «lu canal, ce 
fut  lui qu'échnt la mission d'escorter apoléon jusqu'à 
Sainte-Hélène. Il mourut le 10 mars 1823, à Tullialanllouse. 
KELLER (JES»BALTnAZ*), dont le nom restera tou- 
jours lié au souvenir des magnificences de Ver sali I e s, 
était né à Zurich, en 108. Il commença par 6tre orfèvre, 
t déjà il devenait Iabile dans cet art, !orsqu'il fut appelé 
à Paris par son ri'ère Jean-Jctcqes K£LLEr,, homme in- 
dustrieux qui était alors fondeur de canons. Les deux frë- 
res Keller ne lardèrent pas à s'associer : ils travaillèrent 
longtemps ensemble. Balthazar parait cependant s'Cre plus 
spécialement occupé de la fonte des statues, et des ou- 
vrages d'art. Lorsque Louis XIV entreprit la décoration 
des jardins de Versatile% c'est lui qui fut chargé de couler 
en bronze les figures les plus importantes : c'est ainsi qu'il 
a successivement fondu, d'après l'antique, l'Antinos, 
PApollon, le Bacchus et le Silène qui ornent le grand 
perron du chgteau. Les statues coachCs des fleuves et «les 
rivières qui décorent le parterre d'eau, sont aussi sorties des 
ateliers de Keller ; mais les oupes d'enfants qui entourent 
les bassins sont de Boger et d'Auhry. On doit encore à Kel- 
let les animaux de in fontaine de Diane et dit P,,int-du- 
3out, dont les modèles lui avaient Ate fournis par Raon, 
Vanclëve et Houzeau. A Paris, Keller avait fondu, sous 
la direction de Girardon, et d'un seul iet, la statue 
ëquestre de Louis XtV qu'on voyait à la Idace Vendème 
avant t792. Enfin, tout le monde a admiré dans le jardin 
des Tuileries Le Rmo¢leur (1688), et la Venus accrou- 
pie, œuvres de l'exéculion la plus savante et la plus parfaite. 
Balthazar Keller fut nommê, en !697, commissaire général 
des foules «le l'artillerie de France et inspecteur de l'arsenal. 
Il nlourut à Paris, en 1702. Le portrait de Keller a Cri peint, 
en 1693, par Rigaux et gravé par P. Drevet. On en comerve 
l'original au musée de Versaifles. lalgré les progrès de l'in- 
dustrie moderne, l'art français gardera piensement le sou- 
venir de cet m'liste, qui dans un temps où les procédés 
maténels ,le la fonte étaient mal connus a su obtenir des 
r«sultats dont la pureté est difficilement surpassee auiour- 
d'Irai. Paul 
RELLEBMXNN (F,,_,ços-CuseaE), duc 
VALMY, pair et marecbal de France, appartenait à une la- 
mille nobiliaire d'orine saxonne, qui, dans le seizième 
siècle, vint à s'Alabile à Strasbourg, alors ville impcriale 
libre. Son Ifisaïeul avait etWprésident de la chambre des 
Treize et prév6t des marchands de cette cite. Le maréchal 
.x naquit, le 9_8 mai 17,35. Après quelques Cuées prélimi- 
naires, il entra au service, en 1750, en qualité de cadet, 
dans le régiment «le Lowendahl, et trois ans après il passa 
enseigne au rëgimcnt de royal-Bavière. En 175{; il obtint 
nnc lieutenance dans les volontaires d'Alsace, et lit avec ce 
corps la guerre de sept ans. Sa brillante conduite et ses ta- 
lents militaires lui valurent, en 1758, le grade de capitaine 
dans un régiment de dragnns. Il se signala durant les cam- 
pagnes de t760 à 17fi% notamment a la I»ataille de Fried- 
becs. F_,ntin, en 1705 et 1"/06, Louis XV lui confia une mis- 
sion particulière en Pologne. Des troubles s'étant manifestés 
,lans ce pays, Kellermann fut cltargé, en 1771, d'oaniser 
la cavalerie qui ,levait faire partie des troupes envoyées 
dans le palatinat de Cracovie, sous les ordres du g,'néral 
¥iomesnil. Nommé lieutenant-colonel à son retour en 
France, il fut successivement prom;t au grade de colonel 
en tTS«, et à celui de maréchal de camp en 17ss. 
La révolution de 1789 allait lui ouvrir une carrière pins 
brillante. Chargé en 1790 et 1791 du commandement des 
alCarlements du Haut et du Bas-Rhin, il en mit toutes les 
places fortes en ëtat de défense. 11 avait reçu le cordon 
rouge en 1790 ; il fut promu au grade de gnéral de divi- 
sion en 1792, et reçut le commandement en chef des troupes 
du camp de ffeuldrch, sur la Sarre. 3ri,000 Autrichiens 
venaient de passer le Rhin près de Spire ; Kellermann n'avait 

759 
que 10,000 hommes à leur opposer : il parvint cepenoant, 
par d'llabiles manœuvres, à couvrir l'Alsace et à préserver 
cette frontière de toute invasion. Du commandement en 
chef de l'armée de la Sarre et du Rltin, il passa à celui du 
l'armée du centre, releva les lignes de Wissembourg, fit 
restaurer les places de Metz et de Thionvifle, et areAtu la 
marche des alliés, qui venaient de pénétrer dans la CI;ara- 
pagne, sous les ordres du due de Brunswick. Il n'avait 
que 22,000 hommes à opposer ì l'armée ennemie, |orto 
de 12t,000. Il trompa sa 'igilance, oeux-rit Chàlons-snr- 
Marne et Paris, et afla attendre son adversaire sur les 
hauteurs de Valm y, qu'il devait illustrer. 
blalgré le brillant succès de cette journée, le général fran- 
çais, qui a compris qu'il importe à sa sOreté de devancer 
l'ennemi sur les hauteurs de Dampierre et de Voilmont, ne 
laisse que deux heures de repos à ses troupes, se dirige 
vers ces mamelons, et y prend position. C'est en valu que 
les Prussiens chercl;ent à s'en emparer, ils sont repoussés et 
forcés de rentrer dans leurs retranchements. Cette habile 
manœuvre eut pour résultats, d'abord une suspension 
d'armes entre les deux armées, puis l'évacuation du ter- 
ritoire français. Après cette campagne, il reçut le com- 
mar, dement en chef de l'armée des Alpes, et s'occupa avec 
la plus grande activité de mettre cette partie de nos fron- 
tières en état de défense. Chargé en mme temps de la di- 
rection de son armée et du siege de L)on, il se transpor- 
tait avec rapdit« « d'un lieu à l'autre, et sa prescrite était 
toujours signalée par un succès. C'est ainsi que le 13 sep- 
tembre 1793, avec 8,000 hommes de troupes de ligne et 
de gardes nationales, il reprit l'offensive contre 35,OOO 
Austro-Sardes, les chas»a ,le leurs positions et leur lit 
éprouver ,les perte« considérables, ce qui ne l'emp6cha pas 
d'ètre, en 1793 et 1794, d,«noncé à la Convention. Sa perle 
nu'me eut été certaine sans la journée du 9 t h e r m i d o r. 
11 prit en 1795 le commandement des armées des Alpe. 
et d'Italie, et soutint pendant toute la campagne, avec 
47,000 combattants, les attaques mnltipliées de l'ar,uée en- 
nemie, qui en cotoptait 150,000 : obligé de se replier devant 
des forces aussi supdrienres, il livra quarante combats, dan; 
lesquels ses troupes curent presque touiours l'avantage, et il 
conserva sa position jusqu'a l'arriée de Schérer, à qui le 
goux, ecemeut venait de confier le commandement de l'armëe 
d'Italie. En 1796, Bonaparte ayant remplacé Schéver, Kel- 
lermann concourut aux succès du nouveau géneral, par la 
promptitude de ses manoeuvres. L'armée des Alpes ayant 
été réunie à celle de Bonaparte, il fitt nommé inspecteur 
général de la cavalerie de l'armée d'Angleterre, et alla 
Ifientèt remplir les mgm.:s fonctions à l'armée de Hollande. 
Il devint membre du sénat en 1800, grand-cordon et 
membre du conseil de la Léon d'Honneur en 1802, et 
maréchal d'empire en 1804. A cette date, l'empereur lui 
conféra la séuatorerie de Colmar. omme commandant en 
chef du troisième corps de régerve tabli sut' le lhin, en 
1805, et charsA dela ligue de dcfeuse entre Baie et Lan- 
dau, il s'acquitta de ces deux missions avec son zèle et son 
habileté ordinaires. L'empereur lui confia en lS06 et 180" 
le commandement eu chef de rarmée de reserve du Bhin, 
qui s'étendait depuis B'le ju«qu'h Nimègue. 11 fut en 
temps charge de protéger les Etats de la Confëdération du 
Pddn, et reçut pour récompense en dotation le fameux 
domaine de J ohanni s becs, qui aujourd'hui appartient à 
M. de Metternich. En 18O8 il eut le commandement de l'armée 
de réserve d'Eçpagne; en 1809, celui des camps d'obser- 
vation de l'Elbe et de la Mense inferieure. Lors de la guemc 
de Russie, il reprit le commandement en chef de l'armca 
de réserve du Rhin, qu'il conserva jusqu'h la fin de 1513 : 
il eut à cette époque celui de la deuxième et de la troisièmo 
division militaires. 
A la première restauration, le duc de X'almy fut nommé 
commissaire extraordinaire du roi dans la troisiëme division 
militaire, et reçut, avec le grand-cordon de Saint-Louis 
la dignité de pair de France. Iesté sans fonctions pendant 



7ço KELLERMANN 
Cent Jours, il reprit sa place  la chambre des pairs, où il 
• ota constamment en faveur de nos libertés publiques ; ce 
qui explique l'inaction dans laquelle on le Iv.ssa jusqu'b sa 
mort, arriéeà Paris le 12 septembre 1820. 
KELLEBMANN ( Fns,,çols-ETc..v. vv. ), marquis, puis 
duc » VALMY, fils du précedent, gcnérai de division, 
grand-croix de laLégion d'Honneur, naquit h Metz, en 1770. 
Il fit ses prcmiëres armes sous les )eux de son père et sui- 
vit Bonaparte dans son immortelle campagne d'ltalie. C'est 
lui qui décida la victoire de M ar en go, par une brillante 
charge de cavalerie. Nommé alors gënéral de division, il 
prit part à la victoire d'Austerlilz, et fi,t un des principaux 
lieutenants de Junot dans la campagne de Portugai. En 
lb13 il fut envoé en Allemagne, et se distingua a Bautzen, 
puis -h Nans et h Pro ins. A la première restauration, il 
Pat nommé chevalier de Saint-Louis et inspecleur général de 
cavalerie ; mais éle'é à la pairie par l'empereur dur,tut les 
Cent Jour, il en fut éliminé h la seconde restauration jus- 
qu'h la mort de son père, et resta en dispoaibilité jusqu'a la 
réolution de 1830. Dans le procès de Charles X, il fut un 
des cinq pairs qui voterent pour la peine de mort, ce qui 
ne i'empècha pas de rester sans emploi, comme auparavant» 
jusqu'a sa mort, arrivée le 2juin 183:,. 
[ KELLERMA.NN ( Fl_ço,s-Cmusoim:-EnoNn n£ ), duc 
un VALMY, lils du precédcnt, naquit a Paris, le 9 avril 1802, 
et remplit quelques fonctions diplomatiques en Orient et en 
Grène sous la Restauration. La révolution de 1830 le ramena 
en France. Le marechal .Maison le nomma chefdu cabinet du 
ministëre des affa,roE etrangeres. Envoyé en Suisse ommm 
premier serrerai re d'ara bassade, il y devint bient61 charge d'af- 
faires. Sa lidélite h la branche athée des Bimbons l'a)ant 
cependant emporté chez lui sur toute autre consideration, 
il donna sa dcmi_-sion le 5 rentier lb33, et se lit redaclcur 
du lienocateur. Les electeurs de Toulouse lui confièrent 
leur mandat h la mort du duc de Fitz-James. Toujours rcélu 
jusqu'en 18t5, epoqne à laquelle il céda la place à l'ahhe de 
Geno ude, il parla conhc l'abaissement de la France, sur 
les affaires d'Orient, atlaqua l'alliance anglaise, le droit de 
visite, etc. L'un desfletris par ses coilëgues pour sa isite au 
comte de Chambord h Belgra e-Square, il fut réelu h 
une plus forte majorite. En lb-10 il publia une brochure inti- 
tulee Qestion d'Orent ; quelque temps après il fit paraître 
une autre brochure, sous ce litre : Co«p d'oeil sr les rap- 
ports de la France arec l'Europe. En 1/9 il dounadans la 
Patrie un article sur les Moyens de combatte le socialisme; 
en 1851 il imprima Du noceau s9Mèmc de tarif sr le 
houifles et sur les stcrcs ; enfin, en 185-i, il fit paraitre une 
lt,stoire de la Campagne de 180o, d'aprës des llémoires de 
son pèro. L. LOC-eT. ] 
KEMBLE (CLeS), célèbre comédien anglais, qui n'eut 
pour rivaux que Ke an et ",| ac re ad ,né en t5, Preston, 
dans le comté de Lan¢astre, ëtait fils d'un comédien, et 
IfCe de la cdèbre mistress S i dd uns. Il obtint d'abord un 
emploi dans l'administration des postes; mais sa passion 
pour l'art dramatique le ddermina à monter sur les planches 
ca 1792, h SheflieM, pois sur le thetre de Drury-Lane. Plus 
tard il s'associa avec son beau-frère, et h sa mort prit la 
direction du thétre de Covent-Garden, qu'il administra d'une 
tourtière admirable. Une tournée qu'il entreprit, en 1826, 
en Allemagne et en France, eut pour réultat d'enrichir la 
scène anglaise de plusieurs operas qu'il traduisit de l'alle- 
mand. E 1832 il parcouut aec sa famille les Etats-Unis, 
et en 18/0 il renonça COmldetemeut h la scène. Il mourut 
en novembre 1851,.à Londres. Sa lemme, Maria.Theresa 
nu. Coma, était nec h Vienne, en 177,et la fille d'un musi- 
cien. D'abord fiëuraute, puis danseuse dans les ballets de No- 
verre, elle débuta plus tard/t Londres, et y obtint de grands 
succès sur les thétres de Drur)-Lane, de Covent-Garden et 
de tlay-Market. On a aussi d'elle deux comédies remarqua- 
bles par la finesse des aperçus : Thefirst Faults 1799) et 
The Day oflcr Che Weddin 9 (1808). Ellemourut en 1838. 
KEBLE (Fxc-A..x), fille du précédent, drbuta 

 KEfPELEN 
avec le plus grand suceés en 1829, dan. Rom#o et Ju- 
lieltc, et rëussit encore davantage en AraCique, où 
accompagna son père. En 1833, elle épousa un nommé 
Butler, d'avec lequel elle divorça plus tard, pour reparaltre 
sur le tltétre en 187. Depuis elle a fait avec succès à Londre 
et dans les provinces des cours publics sur Shakspeare. 
On a aussi d'elle deux tragédies qui ne sont pas sans mérite : 
Francis Che First (1862) et The Star of Seville (1832), 
ainsi qu'un Journal of a Residence in Che United.States 
(Londres, 183i). Sa sœur Adoelaïde (Me Sartoris) est 
premier sujet au Grand-OpCu de Londres, et ne cède en rien 
comme actrice.et cantatrice aux célébrités de i'Mlemagne et 
de l'Italie. 
KEMBLE (Jou.x-M[TCUeLL), fils de Charles Kemble, né 
-h Londres, en 1807, se consacra d'abord à i'étude de la 
jurisprudence, et s'est fait ensuite un nom honorable comme 
philologue et archéologue. Le premier fruit de ses travaux 
dans cette direction lut son édilion l'Anglo-Saxon puera 
ofBea wulf ( Lond res, 1832 ; 2  Cit., 1837 ). En 183i il fit h 
Cambridge son premier cours sur la littérature anglo-saxonne, 
qui a êté imprime dans sa First His Cor !t ofthe English Lan- 
9uage, or Anglo-Saxon period (Cambridge, 1834). Dans 
une brochure sur les Tables géuéalogiques des Saxons occi- 
dentaux (1836), écrite en allemand, il a démontré que la 
veritable histoire d'Angleterre ne commence à avoir quelque 
cerlitude qu'a partir de l'introduction du christianisme, et 
que jusque alors tous les noms pretendus historiques de la 
Bretague appartieanent h la tradition mytbol%,ique. Son 
Codex diplomaticus oevi Saxonici, où il a réuni toutes les 
sources historiques encore existautes aujourd'hui, a été 
imprime aux frais de i'Historical Society, dont il a été le 
fondateur. 11 est en outre rédacteur en chef de la Bri- 
tish andforeign Review, qui parait depuis 135 recueil 
l'aide duquel il a singuliëremeut réussi h ,uariser en 
gleterre la science et la littérature allemandes. 
KEMBLE (Jon»PmLV), l'un des plus célèbres comé- 
diens dont s'honore la scène anglaise, frère de mistress S i d- 
d on s, eti aine de Charles Kemble, naquit h Preston, en 1757. 
Destiné à i'ctat occlésiastique, il fit ses etudes à Douai, et 
ne les eut pas plus t6t achevées que, conlre la volonté de ses 
parents, il débuta sur la scène. Après avoir d'abord paru 
avec succès h Wolverhamptou, il joua suceessi,ement h 
blanchester, à Liverpooi et a York. En 1781, il aila h Du- 
blin, puis, en 1783, int h Loudres, où il obtint un enga- 
gement au theatre de Dur)-Lane, dont il fut nommé régis- 
seur dix ans après. Ayant éprou é de vivg contrarietés dans 
ces fonctions, il abandonna le theàtre de Drur$-Lane en 
1801, et lit pendant les années 1802 et 1803 une tournée 
artistique en France et en E«pagne. A son retour, il acheta 
une part dans la direction du thcàtre de Covent-Garden. Dans 
les r61es héroïques, tels que Hamlet, ?,f, tebeth, Corinlan, 
Beerley et Othello, il est resté sans rival. Il s'est ëgalement 
fait un nom comme ecrivain par quelques farces, comme 
The Projects, The Pannel, The Farm House, etc. Il eut 
i'héro, que bon sens de mettre tout entière au pilon une édi- 
tion de ses poésies deieunesse. En 1817 il quitta i'Angleterre, 
et mourut à Lausanne, le 6 février 1823. En 1833 sa statue 
a été placée dans l'abbaye de Westminster. 
IEMPELEN (Worcc ng), rival de Vaucanson et 
constructem- d'un automate joueur d'échecs, naquit le 3 
iauvier 173.1,  Presbourg, d'une famille noble de Hongrie, et 
annonça de bonne heure les phls remarquables dispositions 
pour la mécanique. Ses parents ne lui en firent pas moins 
embrasser la carrière administrative, et il mourut en 1801, 
avec le titre de conseiller aulique et de reféreudaire h la 
chancellerie hongroise. 
Son automate joueur d'échees, qu'il présenta pour la 
première fois, en 1769, à i'impératrice Marie-Thérëse, re- 
présentait un homme de grandeur naturelle, assis à une 
table de I mètre 16 de long sur 8 centimètres de large, et 
sur laquelle se trouvait un échiquier. Cet automate jouail 
contre les plus forts joueurs, et le plus souvent gagnait la 



J, r.l PELEN 
parhe. On supposa que l'inventeur, qui êtait toujours pré- 
sent/l la partie et asis près de la table, ou bien qui regar- 
dait dans une petite caselte posée sur une autre table placee 
à quelque distance, mais sans rapports isibles avec l'auto- 
mate, dirigeait lui-mme le jeu de sa macbine, ou encore 
qu'elle renfermait quelqu'un de caché; mais on ne put jamais 
parvenir/l le prou-er. Kempelen était toujours disposé, 
quand on le voulait, à démonter son automate et , en lais- 
ser examiner les différents compartiments ; mais la partie 
d'échecs une fois engagée, il s'y refusait. 
11 construisit d'ailleurs une autre machine, bien plus 
merveilleu encore, une achie parlante, consistan.  en 
une caisse carrée, en bois, de 5O centinmètres de large sur 
un mètre de long et pourvue d'un soufflet. Q,=and on ap- 
puyait sur ce soufflet et sur les clés correspondantes, la 
machine exprimait très-distiuctement «les s'llahcs et des 
mots,et imitait la voix d'un enfant de trois à quatre ans. 
Dutens prétend s'ëtre assuré de l'impossibilité de cacher daus 
l'lutCieur de celle derniêre machine un enfant de cet 
On a «le Kempelen une Disetatioz sur le nEcazime de 
la voix humaine, qui prouve teut au moins qu'il avait acquis 
une connaissance plus approfondie de ce sujet que la plupart 
des pbysiulogistes moderne. 
IEMPIS (Tnoxs , ) Vo9e'- Tno,s x 
IELS|.GTOX  bourg du comté de 3Iiddlessex en 
Angleterre, l'un des faubourgs de la ille de Londres, avec 
une population d'environ 15,000 mes (on ne compte pas 
moins de 120,000 habitants dans le district entier), un 
château royal (Kesington-house) et un beau parc d'en- 
viroo 3 kilomètres de circuit. Le duc de Sussex est le der- 
nier personnage qui ait habité ce chàteau, construit en bri- 
ques et d'une extrëme simplicité. Auparavant il servait de 
résidence/l la duchesse de Kent et a sa fille la princesse 
Victoria, aujourd'hui reine d'Angleterre. Dans l'origine il 
appartenait au lord chancelier Finch, crée plus tard comte 
de _Nottingbam. Le parc qui entoure le chtteau est à bon 
droit célebre, et fui planté sous la direction de la reine Ca- 
roline par Bridgeman, William Kent et Brown. Ouvert 
toute la journée au public, il devient le dimanche une pro- 
menade très-fréquentée par le beau monde. 
IIEXT le plus grand et le phs beau des comtes méri- 
dionaux de l'Angleterre, situé eulre Londres, la Tamise et 
le détroit du Pas-de-Calais, et formant l'extrémitc sud-est de 
l'lle, compte une population de 60,000 ames sur une su- 
perficie d'environ 50 my'iamètres carrés. Il est presque 
partout entrecoul de monticules, et sur ses cotes, que 
protègent quelques forts, on rencontre de grandes dunes 
et des bancs de sable ( Godwns }, derrière lesquels les na- 
vires peusent trouver un abri sùr. La Tamise, la Durent 
et la Meday sont les cours d'eau qui ParrosenL La qualit6 
et l'aspect du sol varient beaucoup. Sur les 996,6g0 acres que 
contient le curerA, il , en a 980,000 d'emldOéSà la culture 
des céréales, ou bien comme prairies et p/tis. A l'ouest on 
rencontre des re.s[es encore assez importants d'anciennes 
forêt.s, ainsi que de vastes marais, enlremélés de terrains 
secs et produisant d'excellent froment. Les environs de 
llaidstone etdeCanlerbury sontle jardin Iruitier de Londres. 
Le comté de Kent produi en outre d'immenses q»antités 
de houblon, notamment près de Bochester, oi l'on n'en 
rcolte pas moins de 6 à 7 millions de kilogrammes 
par an. Ses autres productions principales sont l'orge, les 
pois, les haricots, les légumes de tous genres, le bois de 
chêne, les bëtes h cornes, les moulons, la volaille, les pois- 
sons et les buitres, les lapins, les iièvres, les perdrix, les 
faisans et toute espëce de gibier, qui abonde surtout dans 
les vastes et magnifiques parcs d'Estwcll, de Knoll et de 
Cobham. Après le ruralWde Lincoln, le comté de Kent est 
celui qni produit les plus belles laines Iongue, et avec le 
comté, de Sussex il tut le berceau des manufactures de 
lainages en Angleterre. Par sa situation, si rapprochee d 
continent, dont il ne se trouve séparé h bourres que parune 
dt»tance de 3 nffriamètres 112, le ruralWde Kent a de tous 

KENTUCKY 7c  
temps etWconsidéré comme la clef de I'.ngleterre, et il joue 
un rle important dans ses annales depuis l'invasion du 
pays dœe Ga;zla par Jules César et la fondation du premier 
royaume a n g l o- s a x o n de Kent (Cantia ou Gant ware). 
Les hommes de Kent furent de tous tempe une race très- 
brave, pleine d'ardeur et de lo];até. La tisseranderie, la 
ditilhtion des eaux-de-vie, la pëche et notamment celle 
des huitres, enfin la fabrication de toutes esp;:ces d'usten- 
siles en bois, sont les principales industries de ces populations. 
Les chemins de fer de Douvres à Londres, à lam«gate, etc., 
et le canal de la Medway favorisent les mouvements du 
commerce. Ce comté a pour chef-I/eu Calerburç. 
Darfford sur la Tamise est une/mportante ville de fabriques; 
il en est de mme de Faversham. Deplford, Woolssich et 
Chatam ont des chantiers de eongtruction ; Tunbridge fabri- 
que des jouets d'enfants et de la bimbelotterie; Maidstone et 
bourres des papiers. Tunbridge-Wells est renommé pour 
ses bains. Il fat encore citer Asford, Sandwich, Hythe, 
Ilomney, Deal, Margate, lamsgate, Sheerness, Gravesend, 
lochester, Greenwich, ERham et Cranbrook, le premier 
établiement fondé en Angleterre par des ouvriers en 
draps émigrés de Flandre. 
Le comte de Il'eut, filsdu roi Édouard Ie,, conspira avec 
Isabelle, femme de son frère aihC Édouard II, pour di.tr6ner 
ce monarque, et il  réussit n1327. La reine etaut deven»e 
plus tard odieuse à la nation par la dissolution de ses mœurs 
et par ses cruautés, il entrepri! une contre-révolution au 
profit de ce frère qu'il avait dé[r6né, mais que dejà celle 
princesse avait fait assassiner  son insu. Fait prisonnier à 
cette occasion par Ruser Mort/mer, l'amant de la reine, il 
fut bient/R après exécut6. En 165 le titre de comte de Kent 
tut donnéà la famille Grec. 
IE.'T (Ëoc.ra), duc de), quatrième lil du roiGeorgeslII, 
entra de bonne heure dans l'armée. Mais il se trouva cons- 
tamment dans de grands embarras d'argent, et en 1816 les 
choses en vinrent à ce point q»le force lui fut de se réfugier 
sur le continenl, où il vécut de la façon la plus mode»te et 
la plus retirée. En 18t8, il éponsa Victoria, princee 
douairière de Linanges. Celle-ci accoucha le 2 nhai !819, an 
château de Kensington, d'une princesse qui rcçut le nom de 
baptême de sa mère, et qui n'e.t anre que la reine d'An- 
gleterre aujourd'hui égnante. Deluis son rariage, le par- 
avait augrenté l'apanage du duc de Kent, qui vécut 
alors, d'abord en Allemagne, à Amorbach, puis à Sidlnonth, 
dans le Devonshire, où il mourut,le 23 janvier 18 -0. Dans le 
parlemenl, le duc de Kent et son frère cadet, le duc de S us- 
sex, appartenaient au parti de l'opposition. 
KE.XT (WLLI s ), le crêateur du genre anglais en fait 
de jardins, nWen 1685, dans le comté d'Yok, était d'a- 
bord peintre en voitures. Des secours lui permirent plus 
tard d'entreprendre le voyage de Ruine, ou il se liera/ 
l'ctude de la peinture. Mais lord Burlington, remarquant le 
talent qu'il poss.dait pour embellir les jardins, le determina 
à se consacrer à l'architecture. Chargé de dessiner le plan 
de divers jardins, il s'éloigna completement da genre fran- 
çais, jusque alors seul en usage, obtin! par cette innovalion 
un succès prodigieux, et f»t ainsi le crbateur du jardin an- 
glais proprement dit. Parmi ses productions les plus remar- 
quables, nous citerons le Temple de Venus à Stose et le 
cb.teau du comte de Leicester à Hotbam, dans le Norfolk. 
Kent mourut à Budington, le 12 avril 1718. 
IETUCiY l'un des Éta ts -Un i s de l'AraAtique du 
qord, borné à l'est par la Virginie, au nord par i'Ohio sur 
une étendue de 95 myriamètres, par les États d'Ohio, d'in- 
diana et d'l}linois, et separë du llissouci, à l'ouest, par le 
51ississipi, au sud par le Tenessee. C'est en 1775 qu'il reçut 
ses premiers coloris blancs, et, après de longues discussions 
avec la Virginie, dont son territoire avait d6pendu ju«que 
alors, il fut admis en 179 au nombre des États composant 
l'Union. On 1 comptait alors er, viron .-5,0Do habitants, re- 
partis sur une surhce de 1,255 uoriamètres carres. En tS0 
le chiffre de sa population èlait de .82,05 :',mes, dont 9,600 
6 



 6 KEITUCKY 
hommes de couleur libres, et 210,951 eselaves. C'est une 
belle en, tfAe, que la nature a comblëe de s dons, généra- 
lement unie, et traversée seulement dans sa partie sud-est 
par les monts Cumberland, où le Kentueky, rivière navigable, 
prend sa source. Le Kentucky, le Cumherland, le Tene«see 
et le Big-Sand5, le Mississipi et l'Ohio y forment un riche 
système d'irrigation, utillsé aussi par le commerce comme 
voie de communication indépendamment de 73 mit,amëtres 
de lignes de chemins de fer. Les rives de l'Ohio forment un 
pays fertile, mais inondé chaque année et malsain. La partie 
centrale de l'Êtat, qu'on en appelle à bon droit le jardin, 
présente une surface onduleuse avec un sol d'une grande 
richesse et de maifiques forèts. Au sud-ouest on rencontre 
les Kentucgy-Borrens, contrée qui produit beaucoup de cé- 
réales et convirnt parfaitement à l'Alève du batail. Les prin- 
cipaux produits de l'agriculture sont le maïs et le tabac, 
dont on récolte des quantités plus eonsidetbles encore 
qu'en Virginie, b.s céréales de tous genres, le chanvre, les 
chevaux et le pores. Dans ces derniers ten, ps on s'est mis 
aussi à y cultiver la vigne et ì . éle'er des montons. En 
1850 ou y comptait déj 7/,77"/farrns, dont 3,471 avaient 
les vastes proportions de vérilables usines agricoles, et rap- 
portaient au delà de 500 dollars chacune. Le sol de la plus 
grande partie du Kentucky est calcaire; on y trouve pres- 
que autant de fer que dans le Missoury, et les houillères y 
»out inépuisables. On y rencontre aussi d'immenoes quanti- 
tés de salpétre;du sel et des eaux reinCaies. Il faut encore 
mentionner ses remarquables sources bitumineuses dans le 
cercle et sut-la rivière de Cumberland, son banc d'ossements de 
mammouths alCouvert dcs 17"/3 près du Big-Bare-Lick, et la 
cëlëbre caverne de Mammouth, siluée dans le cercle d'Edmon- 
ton, entre Louisville et Naville, cousi,h'rée après la cataracte 
,hi Niagara comme la cmiosité naturelle la plus remarquable 
«le toute l'Union. Elle se eompnse de nombreuses parlie% a 
dvjà Ce explorée sut'une étendue d'environ 15 kilomëtres, 
et n'en comprend pas moins de 50, à ce qu'on dit. 
La première constitution qu'ait euê le Kettucky datait de 
1790. Il s'en donna une seconde en 1799. Celle qui y est au- 
jourd'hui en x-igueur fut adopt_e le l I juin 1850. Un gon- 
verneur, aux appointements de ,500 dollars, exerce le pou- 
voir- exécutif; le pouvoir legislatif se compose d'un sénat de 
38 membres, elus comme le gouverneur pour quatre ans, et 
se renouvelant par moitié tous les deux an», et d'une chambre 
«le 100 représentants dus pont-deux ans. Tons les citoyens 
libres Ages de vinS-et-un ans sont Cecteurs, à l'exception 
des hommes de coulent-. La session legislative ne peut pas 
se prolonger au delà de soixante jours ; les ecdésiastiques et 
les fonctionnaires publics salariés ne sont point admisà en iaire 
partie, et ne sont pas non plus éligibles au congrès, où l'Etat 
envoie aujourd'hui 10 répresentants. Eu 181 la dette fondée 
«le l'Etat s'devait à 4,397,63"/dollars; l'instruction publique 
figurait au budget pour 1 ,-00,270 dollars. Les eolléges les 
plus en renom sont le Transylconia-Colleqe (université) de 
Lexinon, le soliCe de Saint-Joseph fi Bardstovn, le col- 
lege central à Dans-file, et l'institut militaire de l'ouest, créé 
seulement en 187 à Drennon-Spring. L'Ëtat est divisé en 
83 curerC, et a pour chef-lien Froncfort, avec 4,400 habi- 
tants. Les villes les plus importantes sont Lo n.i sri I I e et 
Leington. 
|IELER on KEPPLER(JEs_'}, le pins grand ash-onome 
que Dieu ait donné an monde, naquit à Magstatt, dans le 
duc.hWde Wurtemberg, le 7 décembre 157t. Son père, d'une 
• "ieille et noble famille qui s'clair appauvrie dans le mtier 
des armes, mourut expatrié, et le -leune Kepler, abandonné 
des siens, tut recueilli dans le couvent de Maulbrun, d'où 
il-se rendit h Tnbingue pour terminer ses etudes sons l'astro- 
nome.Moestling. En 1594 Kepler'hfl désigné pour remplacer 
Stadt dans la chaire de mathëmatiqnes à Gratz. 
Le premier ouvrage de Kepler fut son Prodroraux, seu Mys- 
teria Cosmoqrophica : dans ce lravail, Kepler parait avoir 
ëtë préoccnpé de l'idée que le système cosmique est une ma- 
nifestation figurativeet typique du dogme 4ela Trinité, t'une 

-- KEPLEI 
des personnes étant représentée par le soleil, immobilo aa 
centre du cosmo, ladeuxième par les étoiles fixes, distribuées 
à la périphérie, et la troisième par le système planétaire in- 
termédiaire et mobile entre le centre et la périphérie. Quant 
à la coordination du système planétaire lui-mme, Kepler 
pense que Dieu, en distribuant les planètes dans l'espace, 
a songé aux polyëdres régullers, qui ont pour essence détre 
in¢orruptibles et inscriptibles dans la sphère; et rien ne lui 
parait plus plausible que d'admettre que les intervalles exis- 
tant entre les six orbites planCattes ont été ¢opiés pal- le 
Créateur sur ces cinq figures régulières. Ces recherches sur 
la distribution relati e des orbites lalauétaires furent accueil- 
lies par Moestiing avec de grands éloges; mais Tycho- 
Br a h e y vit l'indication d'une mauvaise méthode scienti- 
fique, et il ¢onseilla à Kepler de laisser là ses explications 
bypothétiques, et de se borner à de simples calculs d'ob- 
servation. Heureusement pour la science, le conseil timide 
de Tycho échoua devant l'ardente foi de Kepler, et le jeune 
astronome, enthousiasme de sa premiëre découverte, se mit 
à rechercher de nouveaux rapports entre ces corps dont il 
venait de démontrer, croyait-il, la distribution harmonique 
dans l'espace. Il avait remarqué que les durées des révolu- 
tions planétaires n'étaient aucunement proportionnelles aux 
distances qui séparaient les planètes du Soleil, et aussit0t il 
se mit à rechercher nne Ilypothèse qui pot tenir compte de 
ce fait, qui blessait singulièrement ses idées de propoflion. 
Ailleurs (dans son Astronomie optique), Kepler établit 
que la diminution de la lumiëre est proportionnelle à la 
surface sphérique. Or, comme les surfaces sphériques sont 
proportionnelles aux carré-; de leurs raons, il suit qu la 
diminution de la lumiëre est proportionnelle au carré de la 
distance du point lumineux ; et entame, suivant Kepler, la 
lorce tractive du Soleil dëcroissait suivant'le mème rapport 
"que sa lumière, il suivait nécessairement « quela puissance 
attractive que le Soleil exerçait snr les corps planétaires était 
en raison inverse du earré de la distance de ces corps ». Si 
Kepler e¢t fait ce simple syl!o#sme, la grande loi qui porte 
le nom de N e w tu n e¢t éle déeouverte un demi-siècle plus 
tt; malheureusement, cette dèduction In, que échappa à 
sa sagacilé; et pendant vinS-deux ans il chercha sans re- 
1Ache le rapport harmonique qui existait (il en avait l'eu- 
fière conviction) entre les temps des révolutions planétaires 
et les distances des planètes au soleil ; et après vingt-deux 
ans de recherches qui effrayent l'imagination, il dëcouvrit 
que ce rapport existait en effet, et que lescarrs des temp. 
des rvolutions oelaient proportionnels av cubes des dis- 
tazee$. 
En 1609 Kepler pnbIia sa Physique cdleste (Astroornia 
nova, seu physfca coelestts tradta commentariis de mo. 
tibts stelloe Marlis, ex observationibus G.-V. Tycbonis- 
Brahe, 1609 ; in-fol.), œuvre unique dans l'histoire de la 
science, et dans laquelle Kepler, s'appuyant sur les obit- 
rations de Tycho-Brahe, annonce qnïl va renouveler la 
science astronomique tout entière. En effet, prenant pour 
base de son travail les obset'vations de Tycho, Kepler alC 
termine l'excentricité et l'aphélle de la planète Mars dans 
l'hypothèse, alors universellement admise, que les corps eé- 
lestes se meuvent dans des cercles parfaits ; il démotilre 
que l'excenlricitéet l'aphélle, ealculzs dans celle hypothìse, 
ne s'accordent aucunement avec l'observation; et il arrive 
à celle eftrayante nëgation de toute la science ecque : /es 
orbites plantaWes ne sont po[nt des cercles. Alors fl in- 
veule un moyen nouveau de calculer les distances succes- 
sives de Mars au Soleil ; il découvre que e2s distances crois- 
sent et decroissent successivement, et il en conclut que les 
orbites planétaires sont des ovales, des courbes semblables 
à celle que donnerait la section d'un œuf suivant son grand 
axe. Tous les efforts qu'il fit pourcarrer cette courbe irré- 
gullëre demeurèrent sans succès; il ne lmt jamais parvenir 
qu'à des approximations, mais ces approximations elles- 
mmes, appliquées à l'orbite de Mars, suffirent à lui dé- 
montrer que la courbe qu'il avait imaginée ne satisfaisait 



KEPLER 
pas aux observations: alors il se" vit Ior¢6 de recommencer 
h somme tout entière de ses recherches et de ses calculs, 
eU le désappointement qu'il éprouva à voir ainsi tous ses 
travaux se dissiper en fumée laitlit le rendre leu : diu nos 
distraxit, pene ad insanium. Toutelois, il se rotait de nou- 
veau à l'oeuvre : dix fois il lit et refit tous ses calculs, et 
enfin il déconvrit l'erreur qui avait violWtous ses résultats 
la courbe qui satisfaisait à toutes les exigences de obser. 
rations de Tycllo était une ellipse, et les orbites pland- 
taires n'.taient pas des cercles dont le Soleil occupait le 
centre, ruais des ellipses dont lesoleil occulait l'un des 
foyers. 
Une troisième et dernière loi restait encore à trouver 
en effet, Kepler avait élabli quo le Soleil oetait immobile au 
centre du cosmo ; que les étoiles fixes étaient immobiles 
sa périphérie ; que les planètes se mouvaient dans l'espace 
compris entre le centre et la péripltérie ; que les orbites 
qu'elles decritaient étaient des ellipses dont le Soleil occu- 
pait un foc/er; que les carrés des tenps qu'elles employaient 
à décrire ces ellipses étaient proportionnels aux cubes des 
grands axes de ces mornes ellipses : il restait à découvrir 
quelles Araient tes vitesses relatives de chaque ptan/'.te dans 
les différentes portions de son orbite, car l'observation lui 
avait démontré que cette vitesse n'était pas uniforme. Ici 
encore l'admirable sagacité de Kepler et son excellente 
tbode scientifique lui permirent de combler cette immense 
lacune par Pénonciation d'une loi qu'il furmula a priori, 
et dont il lui fut de long temps inpossible de trouver la 
démonstration : il affirma, dogmaliquement en quelque 
sorte, que le temps qu'une planœele employait à dcrire 
ne portion quelconque de son orbite clair toujours pro. 
portionnel à la surface de l'aire dcrite pendant ce 
te»ps /ar son royon vecteur ; et la decouxerte de cette 
grande Iormule fut si bien le rdsullat d'une opération syn- 
thetique, que Kepler s'en servir pendant de longues années 
sans pouvoir en tron,er Ca dëmon,tration matl,ématique, 
et que pour obtenir cette démonstration il lut forcé de po- 
ser les premières bases du calcul infinitësimal etde la 
géométrie des indiisibles. Et en effet, Descartes n'avait 
pas encore inventé l'application de l'algebre h la géomctrie; 
la quadrature de l'ellipse n'ëlait pas encore connue, et 
pour évaluer numériquement les aires décrites Kepler lut 
foroE d'envisager la surface de l'ellipse comme formée par 
la juxtaposition d'un nombre infini de raous triangulaires ; 
ce qui forme  comme l'on sait, le point de dcpart du cal- 
cul infinitésimal. 
Tels sont les principaux résullats auxquels est parvenu 
Kepler. Il alfirma le premier que la matière était essentiel- 
lement inerte ; que le mouvement rectiligne clair le seul 
naturel; que le mouvement c,zrviligue des planCes résultait 
d'une modification imprimre au mouvement rectiligne pri- 
mitif par la traction ognetique du Soleil; que la traction 
que les corps exerçaient l'un sur l'antre état proportionnelle 
 leurs masses respectives. Il soupçonna la gyration des 
«'toiles fixes, la rotation du Soleil sur son axe, et celle de 
Jupiter ; il donna une théorie complte des éclipses solaires, 
et fixa les conditions mathématiques de la l,,nette astrono- 
mique, çui n'tait pas encore ddcouverte ; il démoutra que 
les quatre planètes dcouvertes par G a Il I é e étaient des 
satellites de J.u p i t e r; il calcula l'epoque exacte du passage 
de t, lercure et de Yénus sur le disque du Soleil, et 
appela toute l'attention des astronomes sur ce phénomène 
rare, dont il signala les conséqurces ; il supposa l'existence 
d'une atmosphère solaire, à laquelle il attribua la faible 
lumière qui persiste encore dans les éclipses locales de cet 
astre; il donna une loi des rcfi'actions atmospfiériques, qu'il 
découvrit le premier; etc.; et ses découvetoEes eu optique, 
en plffsiquegénérale en géomctrie, ne sont ni moins nom- 
breuses ni moins importantes que ses découvertes astrono- 
miques. 
Kepler vécut dans la pénurie. En 1600, T)-cho-Brahe, 
forcé de quitier Uranienbourg, accepta l'asile qui lui avait 

KERATRY 763 
été offert en RobCe par Rodolphe II ; il appela près de lui 
Kepler, et lui fit allouer an modeste traitement comme ma- 
thématicien du roi : ce traitement formait ses seuls moyens 
d'existence, et la détresse du trésor public mettait chaque 
année cette existence en doute. Kepler mourut à Ratisbonne, 
le 15 novembre 1630, excédé de travail, de maladie etde 
misère : il était aitW Ratisbonne solliciter le payement de 
ses arrérages, et tu fatigue du vo-age lui fut fatale. Il fut 
enterré dans l'église de Saint-Pierre, et l'on iore encore 
si l'on posa une pierre sur sa tombe. ILLFIELD-LEFÈYP, E. 
IEP, ATRY (ACçS'rE-HtL,IUOt nE) naquit le OE8 oc- 
tobre 76:», h Rennes, d'une famille noble. Son père, qui 
maintes fois avait eu occasion de défendre les droits et les 
intérSts de sa province, se trouva tout naturellement alA- 
signé, par ses autécédeuts, au choix de son ordre pour pré- 
sider la noblesse aux CaCs de Bretagne, tors des Cerriens 
pour l'Assemblée nationale. Destiné à la carrière de la ma- 
gistrature et à hériter d'une charge au parlement de Bretagne, 
le jeune de Keratry, après axoir terrainWoes classes 
Quimper, étudia le droit dans sa ville natale, où il se lin 
avec Moreau, alors prëx6t de l'Acule de Rennes (1787). 
Quant Cata tu r6otution de lçgg, il en embrassa les idées 
avec une conviction réfléchie. Son përe étant venu h mourir 
sur ces entrefaites, il hérita d'une terre située dans le Fi- 
nistère, appartenant depuis plusieurs gënêrationg à sa fami]Je. 
De ce domaine, il adressa il i'Assemblée constituante un 
pétition en faveur du principe d'egalité dans le partage des 
suc.cessions. Peu apr, en 1790, il sint à Paris, où il se lia 
avec LogeurWet Bernardin de Saint-Pierre; il publia en 
1791, comme premier essai tiC|croire, un recueil de Contes 
et Id9lles ( in-12 }, dans le got deGessner, que La Ilarpe 
mentionna avec éloge. Quand » inc la terreur, il se vit d.signé 
aux xengeances du parti dominant, et lut incarcéré par. 
ordre de C a rr ter. Heureusement, quelques amis de collêge 
intervinrent pour obtenir sou elargissement ; mais les pros- 
cripteurs se ra,isireat bient6t, et, après le 1 janvier t793, 
il eut h subir une autre détention de quatre mois. Redame 
par les habitant de sa commune, qui se portèrent cauti,,n 
de son ciinte, il eut de nouveau le bonheur d'tre rendu a 
la liberté. 
A partir de ce moment, juqu'aux premières années de 
la Restauration, il vccut eloigne des affaires publiques, tout 
entier  la culture des lettres et de la philool, bie, payant 
d'ailleurs sa «lette  ses concitoyens en rot»plissant dans sa 
commune de modestes leurrions municipales. 
En |818 l'horizon de ses devoirs s'agrandit : il fui 
par le Fini.stère à la chambre des d,.putés, et vint  grossir 
les rangs des déïenseurs des libertés publiques. La presse 
militante le comptait drjh depuis longtemps au nombre de 
ses athltes; et quan,t, eu tOEOE, tes intrig«es miuistérielles 
parvinrent à l'Carter de la represeutation nationale, il 
continua, dans Le Courrierfranfaisç dont il avait êlé l'un 
des iondateurs, et dont ju_qu'en t830 il resta rue des rédac- 
teurs les plus assidus, la lutte eugagee entre le progrès et 
l'obscurantisme. Les elections de I b 271 ni rendirent le mandat 
électoral, qu'il avait si dignement rempli pendant quatre 
sessions. Dej, soupçonne un instant d'avoir trempé dans 
la conspiratiun de Sau;nur, il avait Alu/ cite, avec trois de 
ses collêgues de la chambre, dans un de réquisitoires du 
procureur gonArai de Poitiers, Mangio. Il rcclama dosant la 
justice et s'associa à Benjamin Constant pour publier un exposé 
de leur condpite. Dans Le Courrier français, ses attaques 
avaient été si vives, qu'elles le fireot traduire deux fois en 
cour" d'assises, où, grâce h l'adresse et à l'énergie de ses 
défenses, il fi,t deux fois acquitte. 
Dès lors et jusqu'à la révolution de 1830 le deputé breton 
continua de combattre avec succës, dans toute occasion, pour 
la cause du libéralisme. II xota avec les deux cen vingt-et- 
un l'adresse au roi Charles X, signa le 27 juillet la protesta- 
tion des députés de la gauche résidant à Paris contre les ordon- 
nances du 5, et prit une part active à tous les actes qui 
amenèrent l'c|ablissement du nouveau gouvernement. Aussi 
96. 



fu-il aple - faire partie on conseil d'Etat, dont il ne tarda 
pa. à devenir l'un des vice-présidents. Nommé pins tard 
membre de la chambre des pairs, il apporta dans cette as- 
sembiée la matnrilé de vnes, la sagesse d'opinions et l'amont 
éclairé dn bien pnbfic qui avaient été constamment les guides 
de sa condnite politique. Quand la surprise de février 1848 
vint si inopinément renverser un régime qn'on croyait 
pln. solidement 'tabli qu'il ne l'Cait, il se réserva de voir 
à l'oenvre les glorieux vainqneurs qui promettaient si intré- 
pidement de faire à tout jamais le bonheur de son pays, 
avant de les condamner sur la simple inspection de prin- 
cipes qn'ils inscrivaient sur leur drapean. IMais quand pa- 
rurent les fameuses circnlaires de M. Ledrn-Roilin, il tint 
 honneur de se séparer avec éclat d'un régime qni ne pot»- 
• ait gare que la triste contrefaçou des l,lus mauvais jonrs de 
notre première révolution. Il envoya donc à ce ministre sa 
dmission des fonctions de conseiller d'État, en protestant 
avec une patriotique et genérense indignation contre le 
régitne de terreur que Fou prétendait imposer an pays. 
Les suffrages de ses concitoyens le récompensèrent de 
o.tte noble conduite, aussit6t qn'expirèrent les ponvoirs de 
la Constituante de tStS : nalgré ses quatre-vingt-nu ans, il 
devint l'un des membres les plus actifs de l'assemblée 
i,"lativc issue deélecli,ms générales de 1s49. L'honneur 
ntgme de la prgsider comme doyen d'age an debnt de ses 
travaux, ini chul, et le discours qn'ii prononça alors fit 
une  ire impression, en mme temps qu'il smfleva les colères 
«les hommes du parti avancé. 11 siégeait encore an 2 dccem- 
bre, et dut alors rentrer dans la retraite. 
La liste des onvrages qu'il a publies depuis ses Contes et 
idglles serait trop iongne. Qnïl nous suffise de ciler : Le 
Voyage «le vingt-quatre heures ( lS00 ); Lusus et Cydippe 
( 1801, 2 vol. ) ; Mon habit nordor$ ( 1.02, 2 vol); ltulh 
et 3odmi (1811); De l'existence de Dieu et de l'mmor- 
taht( de l'drue( 1815 ); Inductions torales et 19hiloso- 
phiques (1817); Du Beau dans les arls d'imitation 
( I S22, 3 vol. ) ; Examen 19hilosophiqte de Kant (1823); 
L Guide de l'Artise et de l'Amateur ( 153 ) ; Le Dernier 
des Beaumanoir ( 18-$, t vol.); Frédoeric Styndall, ou 
l,z Fatale an»de ( 187, 5 vol.); Saphira (1836,  vol.) ; 
Une Fin de siècle ( t859, 2 vol. } ; M. de Keratry a été l'un 
des plus aclifs collaborateurs dn Dictionnaire de la Con- 
rCrs.¢t ion. 
IZÉRAUXOSCOPIE (du grec zoEvo:, foudre, zzo- 
=t,», je re:arde), divination par l'observation de la foudre. 
|E,.M.X. Voyez Koe,,sx. 
IiEBMÈs  genre dïnsectes hémiptèreg, de la lamille des 
gailinsectes. II different très-pen des coclteniiles. Le 
corps des femeiles est ldns aplati, et ses anneaux denteu- 
rent dislincts, mgme après la ponte. On connait differentes 
espèces de kermès vivant sur les myrtes, les orangers, les 
citronniers, les pêchers, les cou,lriers, etc. 5lais celle que 
l'on peut regarder comme type tin genre vient sur les |enilles 
(l,inenses et sur les tendres rejelons d'une petiteesl,èce de 
thêne vert ; c'est elle qne l'on nomme nigairenent coche- 
ille du chdne vert ( coccus ilicis , Linné ; lecanunt ili- 
cis, llliger). LorsqLe les femeiles sont jeunes, elles res- 
semblent assez anx cloportes, et pompent leur nourriture 
en enfonçant leur trompe dans i'écorce de l'arbre. A cette 
ëpoqte-la elles peuvent encore confit avec rapidité; mais 
lorsque Iïnseele a acqtfis son développement, il parait 
comme nue petite coque sphérique membraneuse, atlachée 
à l'arbrisseau : c'est i/ qu'il doit vivre jusqn'/ sa mort. 
On distingne dans la durée de la vie de cet ntile bémiplère 
trois époqLtes : pendant la première, qui a lien an com- 
mencement du printemps, il est d'nn très-bean rouge, 
presque entièrement envelopp d'une espèce de coton qui 
Iti sert de nid, et dont la nature, oeion Chaptai,se rapproche 
beanconp de celle du eaontcbone; la deuxième époque com- 
mence Iorsqne l'insecte a pris tont son développemenl, ci 
que le coton qni le eonvrait s'est étendn sur son corps, 
sous la forme d'nne poussière gritre : il semble alors tre 

KERATRY -- KEBMÈs MINÉRAL 
me simple coque re;nplie d'uns0c rongegtre; enfin, le 
Iermès arrive à son troisième état vers le milien ou à la fin 
du printemps de l'année snivante : on tronve alors sons 
son ventre près de denx mille petits grains ronds, qni 
sont les oeu|s, une fois plus petits que les semences de 
pavot; ils sont remplis d'une liquenr rouge ; vus an micros- 
cope, ils semblent parsemés de points brillants conleur 
d'or. Il y a des oenfs blançs et ronges d'oin sortent des petits 
d'nue conlenr semblable. Les habitants dn Langnedoc les 
nomment nères du kerms; il suffit de seconer ces oenfs 
ponr en faire sortir les petits, qni se dispersent snr l'ilex, 
et s'y fixent pins tard pont ètre sonmis aux mgmes lois qne 
ceint qti lent a donné le jour. 
La récolte dn I, ermès se fait avant le jonr, aux mois de 
mai et de juin. Ce sont ordinairement des femmes qni vont 
enlever l'insecte de dessns les branches avec la main. Il )- 
a le matin un moins rand nombre de petits d'eclos, et 
les piquants, ramollis par la rosée, ne font pas autant de 
mal. 
Le kermès fonrnit à la teinture une belle conlenr rouge, 
qne l'on a remplacée, il est vrai, par la cocbenille, mais 
non d'nue manière absolne ; car avec la cochenille on n'ub- 
tient pas ce reflet pourpre qne donne le kermès. 
lou. avons omis de dire que l'on arrête le dëveloppement 
des œufs en exposant le kermès à la vapenr de vinaigre. 
C. F^wo. 
IEBM ÈS MIÉB AL. La grande vogue qu'a obtenne 
ce medicament est aujourd'hni presque tombée dans i'on- 
bli. En effet, à l'époqne de sa deconverte, en 1714, on le 
regardait comme le remède à tous les manx, et cbacnn von- 
lait se traiter avec la poudre des chartreux, nom qni Ini 
venait d'nu frëre de cet ordre, nommé Simon, qui, di- 
sait-on, avait opéré avec hfi des cnres miracnleuses. En 
17'20, le gonvernement acheta le procédé de sa préparation 
d'un chirnrgien français nomme La Ligerie; mais Lemery 
apporta an procdé de ce chirnren nue modification qui 
rendmt beancoup plns facile la préparation de ce médica- 
ment; c'est encore aujourd'bni le mgme moyen que l'on 
emploie, parce qn'avec lui on obtient un très-beau prodnit. 
Pour cela, on fait bouillir I partie de snlfure d'antimoine 
avec 5 parties de carbonate de soude cri»tallisé dans 250 
parties d'ean pendant nne demi-heure ; on filtre et on laisse 
refroidir la liquenr dans des terrines convertes et préala- 
blement passées dang l'eau bouillante ; on lave ensnite à l'eau 
distillée le kermès qui s'est dt.posé, puis on le sèche dans 
une étnve à nue temp@atnre de 25 a 30 d%és. Le kermès 
ainsi préparè se prêsente sous forme d'une pondre d'nu ponr- 
pre foncé, d'un aspect brillant an soleil, d'une apparence 
cristalline, trës-veloutée et fort légère. Il fant avoir soin de 
la préserver de l'action des rayons Inmineux, qni lui don- 
nent bient6t une teinte blanche, et par conséquent altCeat 
la beanté de sa conlenr, qtd en fait le prix. 
Ce kermès a été analy par M. Henri fils, qui l'a tronvé 
formé de protosnlfure d'antimoine, de protoxyde d'antimoine, 
d'eau et d'nn pet» de sonde : cette petite qnantité de sonde 
a cependant soulevé une longne discnssion entre les chi- 
mistes ; car, d'après les théories qui avaient etWadmises 
d'abord, on n'avait pas parlê de ces traces de sonde, qni, 
après des analyses plns exactes, sont rennes compfiqner 
les résnltats et sonlever un problème qui n'est point encore 
résoln : nons n'enlrerons pas dans cette discnssion, quine 
nons tnènerait à rien ; nons nons contenterons de dire qne 
la plupart des chimistes regardent le kermès comme nn 
oxysulIure d'antimoine bydraté. Cette opinion, cependant, 
n'est point sans objection ; mais non« non« rangeons de 
l'avis dt» plns grand nombre jnsqn'h ce que de nouvelles 
théories viennent remplacer celles qui sont admises jusqn' 
présent. 
On peut obtenir également nn kermès identiqne avec 
le précédent, mais moins beau, en substitnant au carbo- 
nate de sonde le carbonate de potasse : les proportions et 
le procédé sont les mgmes. Le kermès oblenn par les alcalis 



KERMÈS MINÉRAL -- KEI,TSCH 
OEustique présente nne différence sensible quan,! on le com- 
pare aux précédenh; aussi ne le prOpage-t-on amais à t'aide 
de ce procédé. Quant au [ermès par la voie sèche, qui con- 
si»le h chauffer au rouge, dans un cuoet, du carbouale 
de potaoe et du sulhre d'antimoine, on ne l'emploie ja- 
ais en pharmacie, paroe que le produit qui en résulte est 
un kerms qui ne jouit pas des mêmes pprietés que les 
cdenls et h un mème dré. 
 kermê» est bea»oeup moins employé maintenant qu'au- 
h'efois, parce qu'on a reconnu que l'on avait trop g,'neralisé 
ses vertus médicinal. II est suout en usage comme e x - 
pecto ra rit. C. Fvo. 
E$1ESSEç des mots flamand» er et », fte de 
l'elise patronale, et, par extion, fète annuelle de la 
commune. Dans les pays wallons on nomme oes ftes d 
ca s s e. C'est en ces occasions que les ieilles mœurs de la 
l:landre se déploient encore dans toute leur nmet, et que 
des r¢préoentations bizaffes rapllent des m'es et des 
traditions dont le sens est aujourd'hui oublie. A Cabray, 
à Bruxelle% à Augets, à Aih, des géants figurent à la 
£ermes; à Ions, saint Geo y combat un énorme 
dragon. olre collaborateur de Beiffenberg est un des écri- 
ains qui ont jeté le plus de jour sur c ieux mystëres, 
dans ses volumineuse» et savante» introduclions à la chro- 
nique rimée de Ph. Monskës, du Chevalier a C9n2 et du 
roman de Gilles de 
Un tableau capil de David Téniers, que Port admire au 
Eouvre, représente une kermesse flamande. II iaut convenir 
que si la peinture a perdu quelque p, les mrs ont 
gagné et sont devenues moins grossière», mëme dans 
dernière» cluses de la sociëté. 
EBRY comtë formant l'existaitWsud-ouest de l'Ir- 
lande, ds la province de Munster, situé entre l'embou- 
chure du Sbannon, les coml de Limefick et de Cork et 
l'neAan Atlantique ; ses cétes sont profondément ëcbancrëes 
ar un nombre infini de baies, dont I plus cousiderables 
sot oelles de Kenmare, de Dingle et de Tralee, et entou- 
rées d'une foe d'llo, dont le plus impornt t celui de 
Yalentia. En y comprenant ces llo, le comlé de Ke 
contient 58 myriamètres rrës, dont plus de la moiti 
mongnes, en bois et en terres non suptibles de cullure. 
C'est une d contrees les plus mongnens de l'lrlande 
riche en beautés naturelS» de premier ordre, qui lui ont fait 
donner le surnom de Suisse d'lrlande. Ceci est surtout 
vrai de sa partie sud. Le Mangerton, au sud-ouest de l- 
larney, aloEint une altitude de 8oo mëtres, et on trouve sur 
n sommet un petit lac appelé le Bol de punch du Diable. 
Les Mgillicuddg"s Re occidentaux présentent au Car- 
tan Tual une hauteur de 1,066 mètres; c'est le point le 
plus élevé de toute l'lrlande. Apr le Sbannon les cou 
d'u I plus considérable» du comte sont le Cashen, le 
lang, le Boughan et la Lem. Cet dernière déverse dans 
la baie de Dingle les eaux du plus ravissant lac de l'If- 
lande, le Lough-Ki[larneç ou Lean, qui aec ses trois bas- 
sins couvre une surfaoe de quatre à cinq myriamètres cafés 
et contient un grand nombre de petiles iles. Le lac supé- 
rieur, au no-oaest du Mangerton, est entouré de mon- 
Ines trìs-elev&s, aux formes les plus tourmente, de 
fdfièves garnies  is épais et d'une oeinture de rochers 
de l'effet le plus grandiose. Dns le bassin du milieu, dit 
lac de Mucruss, oe Ironie la jofie petite ile de Dynisch, 
et la prqu'lle de Iuckruss fait dans le lac une vive saillie, 
au sommet de laquelle on douvre, entre des massif» de 
thnes et de tilleul», les ruines de l'abye gothique de 
Muck. Le lac inferieur, le plus grand et le plus 
de to, est k-profond. Ses riv oe oemposent hntt de 
hauteurs boisée», et hntt de mongnes oempldement nues. 
11 reçoit une chute d'u de 23 mètres d'ëlévation totale, 
pacagée en trois éges, l'O'Sullivan-Casce, et renferme 
beaucoup de tites lies, par exemple le goss-lsland, avec 
des mines de plomb et de cuiçre, et h elle et fertile 
d'lnnisfall, où l'on voit les rmnes d'un ancien couvent, et 

765 
où, par suile de la douceur ne Ja température et de la fré- 
quence des pluies, l'arbousier toujours vert s'Cève luu'à 
sept mètres de hauteur. Au nord de cette romantique réon 
de montagnes et de lacs, derrière la baie de Dingle, s'étend 
la plaine centrale du Kerry, à l'extrmilé de laqnefle on 
rencontre encore une région très-arcidentëe. Le sol y est 
d'une fécondilé remarquable, et produit surtout du fro- 
ment. Cependant l'agriculture y est encore fort arriérée; 
aussi l'êlève du bétail forme*t-elle avec ses divers produits 
la principale ressource des population«. Aujourd'hui encore 
elles n'ont en général pas à'au[re langue que l'ancienne 
langue er»e, et sont re»tées fermement altachées à leurs 
antiques coutume» de même qu'a leurs vieilles superstitinns. 
Dans les dix années de 180 h ! 850, leur chiffre a diminué de 
19 p. 100; il n'est plus maintenant que de 238,000 mes. 
Le chef-lieu du comté, Tralee, sur la baie du mëmenom, 
comple I0,000 habitants, qui font un colnmerce assez con- 
idérable d'hultres, de hareng» et de grains. Le bourg de 
Killarneg, sur les bords du lac du même nom, a 8,000 
Imbitants. On  trouve une e.ploitation de mines de plomb 
et le cb/teau de Boss. Il y a 5,0o0 habitants à Dingle , 
petit port sur la baie de ce nom. Au sud de |'entree de cette 
baie, on troqe File de l'alentia, séparée de l'lrlande par 
un étroit bras de mer, et avec un bon port, qu'un chemin 
de fer de 28 myriamèlres de long doit relier prochainement 
 Dublin. 
IETSCII. On désigne ainsi la partie orientale de la 
Crimée, qui, avec la presqu'lle de Tama n, située en face, 
et dépendant de la Caucasie, lorme le détroit de Kertsch 
ou de lénihale, appelé aussi detroit deKaf.fa ou de Fœeodo- 
sia, lequel sépare la mer .Noire de la mer d'Azo[. Outre les 
quatre antiques et célèbres villes de Kaffa, de Kertsch, 
de lénikalé et d'Arabat (Zenonis Chersoneus), on 
trouve à chaque pas des ruines qui rappellent l'époque ec- 
que et romaine, la domination si florissante des Venitiens 
et des Génois au moyen :tge, et enfin c.e[le des Tarares, qui 
avaient fondé là un kbanat. 
La ville de Kcrlsch, dont le territoire, avec celui de Ié- 
nilalé, qui l'avoisine, forme un gouvernement particulier 
d'un myriamètre carre de superlicie, avec une population 
d'environ 12,0oo mes, composée de Bu»ses, de Grec», d'I- 
taliens, d'Arméniens, de Tarares, de Tscherlesses, de Juif» 
et d'Allemands, s'appelait autrefois Panticapoeum, et etait 
alors la capitale du royaume du Bosphore cireraCien, fondé 
vers l'an 600 av. J.-C. par un certain Arcboeanax, et qui 
vers l'an 45O passa»nus la domination du Thrace Spartacus, 
dont la postCite  régna jusqu'a l'an t tS, ëpoque à laquelle 
M ithridate le Grand, dont les possessions dans le Pont 
louchaient au Bosphore cireraCien, le reçut des mains du 
dernier rejeton de la dynastie fondee par Spartacus. C'est à 
Panlicapxum queMithridate p,.rit, de la main d'un Gaulois, 
aprës avoir vainemeut tenté de s'empoisonner. Elle continua 
de demeurer la capitale du royaume de Pont jusqu'au rïgne 
de Justinien. Au temps du concile de .Nicee, elle de- 
vint le siîge d'un évcbé, et la résidence dun évèque des 
Goths; au neuviëme siècle elle fut érigee en archevèché. 
En 1333 ce de¢int un arcbevéchë latin, dont la juridiction 
s'ëtendait sur la Géorgie. Au quatorzième siëcle les Génois 
s'emparèrent de Panticapoeum ; et dès lors son nom se 
trouva successivement transformé dans les chroniques en 
eesco, Bu»pro, l'andico et Apronoente. Les Turcs s'en 
parèrent en t426, et lanommèrent Ghirtish, d'où est derivé 
le nom de Kertsch ou Kertsch, qu'elle a conervé après 
avoir étë prie par les Bu»ses, en t771. 
Kertscb est dans une situation magnifique. Elle possède 
un port va-te et sùr, qui a étë déclaré port franc en 
Toutefois, le commerce n'y était pas bien actif, quoique dans 
ces derniers temps sa population se f0t singulièrement ac- 
crue; on l'évaluait à 12,ooo àmes au début de la guerre d'O- 
rient. La pche et l'extraction du sel des lacs voisins y don- 
nent lieu à un important mu«mvement d'affaires. La culture 
des cpres et de la vigne, I'elëve du bétai, et plus lrticu- 



766 KETSCH -- 
!ièrement des chèvres et des mourons, :y ont lieu sur une 
trb-largeédidle. Denombreuses ruines de coionnades, qu'on 
rencontre aux environs de la ville, indiqueut peut-être l'en- 
droit où s'élevait jadis le palais de Mithridate, que rappellent 
encore letombeau de Mithridate ( la coUiue d'Or, Altun obo ), 
le siCe de Mithridate, le iardin de Mithridate, etc. On peut 
dire d'ailleurs qu'il n'y a pas dans toute la Crimée d'endroit 
oh l'on rencontre autant d'antiquités qu'à Kertsch. 11 n'est 
pas rare de trouver dans les murailles des plus modestes 
cbaumières de paysan de précieux débris de bas-reliefs, de 
coionnes et d'inscriptions antiques. 
La citadelle qui défend le port est célèbre par une an- 
tique cathédrale, dont on fait remonter la foudation à l'é- 
poque de la domination des Gcnois. Sur le sommet de la 
montague,"non loin de Icnikalé, s'élève un phare. La ville 
possède aussi un établissement de quarantaine, mais bien 
tufCieur, sous le rapport du grandiose et de la magnificence 
des constructions, à celui qui existe à Kaffa. 
Le 25 mai 18, la ilte de Kertsch tombait sans coup 
férir aux mains d'une epedition anglo-turco-française, 
commandée par le générat Brown, qui avait sous ses ordres 
œe,o00 Franç.,is, ,,0001 Turcs et ,000 Anglais. Les Busses 
s'étaient retirés en faisallt sauter les fortifications et leurs 
magasins. 
I{ESSEL (Jx.,i w:) i'alné, célèbre peintre de paysages, 
de fleurs et d'animaux, de l'Cule Iollaudaise, naquit à An- 
vers, ca 1696, fréquenta l'atelier de Téniers, et  partir de 
16g vcut en Epane, oh il mourut. 
KESSEL (J.s  's ) le jeune, lils ou plus vraisemblable- 
ment neveu du prëcdent, nê àAnvers, en 1;44, mort à 31a- 
drid, en tç0, fut 'un des plus remarquables.peintres de por- 
traits de son époque, et s'etait si complétement approprié la 
maniëre de Vau D y c k, qu'on con fond souver4 ses œuvres 
avec celles de ce graud peintre. Etant ailWs'etablir en E- 
pagne, il fut nomme eu 1686 par Charles II peintre de sa 
cour, et il y exëcuta entre autres, à diverses reprises, les 
portraits des deux épouses de ce prince, Marie-Louise d'Or- 
ieaus et Marie-Anne palatine. La collection du Leurre possède 
aujourd'hui de lui un remarquable portrait de cette priu- 
cesse, quaud elle fut devenue veuve. A eu juëer par cette 
toile, Vau Kessel le jeune s'clair approprié la morbidesse 
du coloris espagr, ol. On a aussi de lui quelque pages histo- 
riques ; c'est ainsi qu il y a de lui/ l'AIcazar de Madrid une 
l,Ltoire de Psycllé. 
IET[IIE genre de plantes de la famille des malvacs, 
ayant pour caractères : Périanthe polyphylle; cinq stigmates; 
capsules soudêes, polyspermes. 
La ietmtede jardins (hi3iscus Syriacvs, L., arbrisseau 
originaire de la Syrie, s'élève de 1,50 à 2,50. Ses lleurs, 
de même forme que celles de la rose trémiëre, sont selon 
les variétes, rouge simple, pourpre violet, ou encore blanches 
avec l'onglet d'un rouge vif, etc. 
La A:etmie rose de Chine (htbiscus rosa stnensis, L. ), 
arbrisseau de t à 2 m/:tres de hauteur, est une des plus belles 
espèces du genre. Ses andes fleurs, qui se succèdent 
pendant tout l'clé, doublent facilement par la culture. Élles 
sont d'un rouge if; on en a des varietés jaunes, blan- 
ches, etc. 
La kelmie »z«squée ( hibiscus abelmoschus, L.) est un 
arbrisseau de l'lnde, / fleurs de couleur soufre, / gorge 
brune. Ce seul ses graiqes qui sont connues dans le com- 
meroe sous le nom d' a m b r e t t e. 
La ketmie comestible ( htbicus esculentus, L. ) vulgai- 
remer, t 9ombaud ou 9probe, olfre un ri'uit mucilagineux, 
qui coupé par tram-hes, et prépare comme les petits pois, 
se mange en Syrie et aux Antilles. On commence à cultiver 
cette espèce dan» les del»artements du Var et de la Gironde. 
Ses fleurs sont d'un jaune ple soufi, sauf l'onglet des pé- 
raies, qui est pourpre. /otre collaborateur Yirey trouvait 
dans leurs graines torrtfiées uue stccédanëe du café, 
asant sur celui-ci l'avantage de n'affecter nullement les 
neffs. 

KHALIFES 
Le genre ietmie renferme encore un grand nombre d'es- 
pèces cultivées dans nos jardins comme plantes dorne - 
ment. 
ILESV, village du comté de Surrey, à 6 kilomètres eni- 
ron de Londres, avec un ciseau royal et l'un des plus riches 
jardins botaniques du monde. Cet établissement a srtout 
pour bt de recevoir des plantes utiles nouvellement dé- 
couvertes ou rares, et d'en propager la culture dans les pro- 
rinces d'Angleterre d'abord, et ensuite dans d'autres con- 
trées. Sa splendeur ne date gl;ère d'ailleurs que de l'année 
t$tt2, époque oit un botaniste cëlèbre, sir ,-ilfiam H o o k e r, 
fut appelé a le diriger. L'emplacement qu'il occupe, qui sous 
Georges III n'était que de 5 acres de terre, était évalué en 
1851 à plus de 200 acres ; cette même anuee, l'herbier 
compreuait environ 150,000 espèces. On y rencontre les 
plantes les plus rares et les plus belles de toutes les par- 
ries de la terre, notamment de i'Amérique du ord et 
du Sud, de l'lr, de, du Tibet, de la Chine, du Japon et de 
i'Australie. Sa grande serrechaude n'a pas moins de t2t m* 
tres de Ing, et contient presque 1 acre de verre. On y trouve 
aussi uu grand nombre d'autres serres, telles qu'une serre 
à palmiers, etc, un arboretum, un museum, nn observatoire. 
La somme portée au budget de l'État pour subvention à ce 
bel etablissement est d'environ 7,000 iiv. st. ( 175,000 fr. ). 
L'entree en est gratuite et publique; en 150 le nombre 
des visilem-s avait été de 179,657; en 1841, il n'était encore 
quede 9,17tt. Ledirecteur, Villiam Hooker, a publié un très- 
utile Guide te the botaaic 9ares al Kew. 
IIEXllOLM petite ville du grand-duché de Finlande, 
itie dans une lle du Wuoxa, qui s'y jette dans le lac de La- 
dura. Elle est pourvue d'un ciutean bien fortifié, et qui, au 
temps oi la l=inlande appartenait  la Suède, était consideré 
comme l'un des boulevards du royaume contre les envahis- 
sement de la Iussie. 
HEYS. l'oçe: Foam. 
KEYSEI/ (NtcAJS D ), l'un des peintres d'histoire les 
plus distinguës de la Belgique, né en 1813, à Sandvliet, pro- 
rince d'Amers, élève de l'Académie des Beaux-Arts de cette 
ville, commença par ètre berger, et fut ensuite placé à 
l'£cole des Beaux-Artsd'Anvers par un protecteur genéreax 
qui avait remarqué les grandes dispositions de l'enfant 
pour les arts du dessin. Son premier ouvrage qui attira l'at- 
tention du monde artistique fut tin Christ sur la 
commandé pour l'eglise catholique de Manchester. 
pendant dans cette grande page, De Keyser s'était beau- 
coup trop attaché à la reproduction presque svile de 
la manière de ses deux modéles, Bubens et S'an Dyck. 
Il lit preuve de pire d'indépendance et s'Ceva jusqu' une 
hauteur de taleut vraiment prodieuse pour son tige dans 
sa Bataille àe Courtray/, grande page historique qui excila 
l'admirahon universelle  l'exposition qui eut lieu à Bruxel- 
les en 1836. On vit dès lors en lui un redoutable rivalde 
Wap pe rs, autre gloire nationale de la Belque. Sa répu- 
talion devint européenne quand parut sa Bataille de 
Worringen, termiuée eu 1839, qui orne aujourd'lmi le 
palais de la atiou h Bruxelles, et qu'on considère à bon 
droit comme le ci,er-d'oeuvre de l'école belge. Sa production 
récente la plus importante est une Sainte Ëlisabeth dis- 
tribumlt des aum¢nes, achelée par le roi Léopold. Le st)-Ie 
de De Keyser, comme celui des peintres de la mëme école, a 
surtout pour base l'etude des grands maitres de l'écoie hol- 
landaise. On ne saurait non plus y mécouuailri l'influence 
de la nouvelle école française, bien qu'il ait su se garder 
des excè.s, dans lesquels elle est tombée. 
I{llAllEDDIN. Voçe-- B.UUEIOUSE II. 
IltALIFES KHALIFAT. Les sucoEseurs de Maho- 
met pnnt le titre de I, halifes gomme souverains des vrais 
croyant en même temps que gmme |eurs chefs spirltnels. 
Les historiensdu moyen ge, qui écrivaient en latin, appe- 
|èrent en conséquence khalifat l'empire fondé par les Amhes, 
et qui peu de siècles après surpassait en étendue l'empire 
romain lui-mme. En sa qualité de prophéte de Dieu , 5la- 



KHALIFES 
homet s'était fait le chef spiritnel et temporel de son peuple. 
Comme il ne laissa point d'héritiers mles et qu'il négligea 
en mourant de décider quel devait tre son successet, r, sa 
mort amena de longues et sanglantes querelles, jusqu'à ce 
qu'enfin A ho u - De kv, son beau-père, l'emporta sur Ali, 
gendre et cousin du Prophète, à qui par conséquent il suc- 
céda en l'an 63? de notre ère. En cette qualité il prit le titre 
de Khalifet Besoul Allah, c'est-à-dire représentant du pro- 
phète de Dieu. Après avoir triompbé de ses ennemis inté- 
rieu.r% il entreprit aussit6t avec l'aide de Kaled, so général, 
de propager par le glaive les doctrines de l'islamisme chez 
ses voisins. Une immense afinC, appelée à la guerre sainte, 
pénétra alors en Syrie. Elle remporta d'abord une grande 
victoire, mais elle ft battue ensuite à diverses reprises par 
les Byzantins. Puis, ayant réussi à s'établir en St'rie, grace 
à la trahison, elle entreprit, sous la direction de Cbalid, le 
siCe de Damas; et après avoir successivement battu deux 
grandes armées envoyées au secours de la place par l'em- 
pereur de B'zance, Hëraclius,e||e s'en empara, en 633. 
En verlu dn testament d'Abou-Bckr, Omar, autre gendre 
du Prophète, fut le second khalife (633-643); età bieu dire, 
c'est lui qui fonda le khaiifat. Il confia le commandement 
des guerriers de l'islami:me, à Abou-Oubéid, homme beau- 
coup plus humain que Chalià, et qui aeheva, en 63S, la 
soumissiou de la S)rie. A m ro u, autre lieutenant d'Omar, 
ne lut pas moins heureux en Egypte, qu'il suhjogua coin- 
piCement de 638 à 660. En 636, Jérusalem ayant été obli- 
gée de demander à capituler, Omar s'y rendit en pernne, 
et regla lui-même les conditions de la capitulation qui ser- 
vit de modèle pour tous les traitës que les mallomët«.ns 
conclurent ensuite avec les chrétiens qu'ils a.ssujettissaient à 
leur puissance. C'est Omar qui construisit B a s s o r a (636) 
et K u fa, qui introduisit la chronologie de l'hé9[re et qui 
dota de biens fonds (u.akfs) les mosquées et les ëcoles. Il 
prit d'abord le titre de Enlir t't[ Momenin, c'est-à-dire 
princes des croc'anis, titte dont héritëreut tous les khalifes 
uivants, et que les Eropéens transformèreut eu Mira. 
Après l'assassinat d'Omar par un edave, un conseil de 
six hommes désignés par lui a son lit de mort, Cut pour 
troisième khalife {63-65tQ, encore une fois au dctriment 
d'Mi, Othman, autre cousin du Propfiète. Sous lui, l'empire 
des Arabes parvint rapidemeut h un incroyable degré de 
grandeur et de progpédté. En $6 ils iutrouisaient par la 
force des armes |'ilamisme en Pclse, et pénétraient éga- 
lement en Afrique, tout le long de la céte septentrionale, 
jusqu'à Ceuta. Mais Cbypre, prise en 6,7, leur échappa deu, 
ans plus tard. Les Byzantins, aidés par les populations in- 
dig/nes, réussirent aussi à reeonqueriç toute l'Egypte; et il 
fallut les plus grands efforts pour les en expulser de nou- 
veau. Ces éCllecS étaient le resoltat des fautes d'Othman, 
qui, bien moins habile et prudent qu'Omar, confiait le com- 
mandement des provinces non pas aux plus dignes, mais 
à des favoris. Le mécontentement dont il 6tait l'objet provo- 
qua une insnrrection, qui se termina par son assassinat. 
L'deetion d'Ali-Ben-Ali-Taleb, qui fut le quatrième kha- 
lile (65t-660), eut lieu àMédine, et fut l'oeuvre de la popu- 
brion de cette ville. Les Ch¢tes le considèrent comme 
le premier imam ou grand-prêtre Iégitime, et ils vénèrent lui 
et son fils Hassan presque autant que le Prophète. 
eut constamment à lutter contre des ennemis intérieuxs 
de sorte qu'il lui fut impossible de continuer les conqudtes 
de ses prédécesseurs. Aischa, la veuve du Propfite, lui fut 
particulièrement hostile; et son autodté suprême fut con- 
testée par Tellah, par Zobéir et surtout par Moawiiah, le 
puissant gouverneor de Syrie, qui l'accusaient d'avoir été 
l'instigateur secret de l'assassinat d'Otlunan. Ail réussit à les 
battre, el dans la mëlée Zobéir et Tellah perdirent mdme 
la vie ; mais i! lui fut impossih|e d'empêcher Moasvijab et 
• on ami Amrou de s'emparer de la Syrie, de l'Egypte et 
rnme d'une partie l'Arable. Il périt en 660, assassiné par 
un fanahque. Son lits, le bon ltassan, que les Chyïtescon- 

767 
strièrent comme Ic second imam ou grand-prëtre légitime 
ne æ sentit pasde force à défendre contre Moawijah le kha- 
|ifat dont il héritait, et abdiqua en 
Le nouveau khalife, Moawijah t  (66 t-680), tranféra, 
en 173, le ége eu hatifat de M«dine, oh, h l'exception 
d'Mi, avaient résidé tous les antres kbalifes,  Damas, chef- 
lieu de son ancien gouvernement. C'e avec lui que com- 
mence la d.nastie des OtoCacles. Apr avoir, tout au début 
de son règne, touffé une inurrectiou des Kared]ites et 
une révolte à Bassora, il songea à en finir avec l'empire 
byzantin. Son fils Jésid traversa P.ie Mineure sans presque 
rencontrer de résistance, puis, après avoir franchi l'Helles- 
pont, mit le siCe devant Con-tantinople ; mais en 669 il fut 
obligé de le lever. Son lieutenant O,béid fut plus heureux 
dans le Khorassan contre les Turcs. Après les avoir battus, 
il pénétra en 673 dans le T,rl, estan, et fit d'importantes 
conquêtes en Asie tineure. Si Moawijah F  aandit l'em- 
pire de« khalifes, il chercha aussi à l'organiser. A cet effet 
il rendit le khalifat héréditaire, et en 670 il fit reconnattre 
de son vivant même son lits Jésid en Syrie et dans l'lrak. 
Mais Jdsid ( 680-683 ) ne d«ploya pas l'habilête de son père; 
les villes saintes de La Mecque et de Mé,line, qui, tant que 
les kbali[es avaient résidé dans cette dernière, avaient 
exercé une influence prépondérante sur leur élection, refu- 
sèrent de le reconnaltre. Les méconlents se partagèrent 
entre Hasan et Abdallah, fils de Zobëir. Une révolte de 
habitant de l'[rak en faveur de Hassan, revolte à la tète 
de laquelle étaient placés Moslem et Hani, fut étouffée, et 
Hassan fut battu et tué. 
Jésid eutpour socceseur dans le khalifat son fils Moawi- 
jah Il (f83), qui peu de mois après abdiqua le pouxoi 
ou mourut. Pendant que l'Arable, Flrak et I'gyl,te mena- 
çaient de se eonstiher en empirez indépendants, l'Oméiade 
Merwan F  se faisait reconnaitrê à Damas, d'abord comme 
administrateur de l'empire, puis en qualité de khalife; et 
il se maintint, en dèpit de nombreuses rêvoltes, jusqu'au 
moment où il périt, assassiné par Chali,l, fils de Jésid, qu'il 
avait exclu de la succession de son père. D'ailleurs, il ne 
put empècher Abdallah-ben-Z«beir, de se poser en antil, ha- 
lile dans une partie de l'empire, notamment en Arable et 
en Perse. 
Sous Abdalntelel (65-705), fils de Merwan, Mokthar, 
qui leva l'étendard de la révolte contre leg deux khali[es, 
se posaen prophbte, se fit reconnaitre à Kufa, et fut vaincu 
en 3s6 par Abdallah; mais celui-ci n'en devint que-plus re. 
doulable à Abdalmelek. Pour pouvoir plos librement com- 
battre son adversaire, Abdalmelek conclut avec l'empereur 
Julini,m 1I un trait6 de pai,, en vrtu duquel il s'en- 
gagea à hli payer un tribut annuel de 50,000 pièces d'or. 
Ensuite il marcha contre Ahdallah, prit La Mecque, aprè» 
un assaut dans lequel Abdallah trouva la mort, et réunit 
ainsi de nouveau tous les mahometans sous l'auloritë d'un 
seul et moeme souverain. Cependant lïnsubordination de 
quelques-uns de ses gouvernears de province fut encore 
pour lui la cause de nombreux embarras. C'est le premier 
khalife qui ait fait battre monnaie. Sous Valid I er, son fil 
( 70-716 ), qui protëgea les sciences et les arts et favorisa 
plus particulièrelnent l'architecture, l'empire des ghalifes 
atteignit l'apogée de sa grandeur. C'est pendant son règme 
que les Arabes conqmrent en 707 le Turkestan, en 710 la 
Galatie, et en 71t l'Espagne. Son ri'ère et successeur, 
,çoliman (715-717), prince fainéant et crapuleux, mais 
tr/s-vanté par les orthodoxes, fit assiéger Constantinople par 
son frère Moslema:" mais ses deu Ilottes furent successive- 
ment anéanties par l'ennemi à l'aide du feu grégeois. Il fut 
plus heureux dans ses efforts pour soumettre la Géorgie. 
Omar I[, désigné par Soliman comme, son successeur 
(718-721), exeila le mécontentement des OtoCacles par ses 
sentiments de tolérance à I'° gard de Alides, attendu qu'il 
supprima la formule de malédiction iusque Mors en usage 
contre les partisans d'Mi, et fut assassiné. Jdsid !I, qni 
lui soccëda  ëgalement en vertu de Faste de dermère vo- 



788 
lonté de Soliman (721-723), adonné aux plaisirs et à tous 
les excès de la volupté, monrnt de douleur davoir perdu une 
de ses maltresoes, tandis que des révoltes continuelles affaiblis- 
salent de plns en plus l'empire des khalifes. Son frëre lies- 
cham (723-7-12), prince qui, quoique voluptnenx, pos- 
sédait les qualites ne¢essaires à un souverain, et qui, pen- 
ant que ses généraux battaient les Grecs en Asie Mineure 
et les Turcs dans FAste centrale, s'occnpait activement «le 
t'administration de son empire, eut à défendre son titre de 
khahre contre les entreprises de l'Alide Z,«id, petit-fils de 
Hassa. Celui-ci fut, il est vrai, vaincu et tué; mais Heschaln 
ne tarda pas à avoir à combattre de non moins redontables 
ennemis dans les Abassides, descendants d'A b ha s, oncle 
du prophète. Sous le règne de Hescham, les progrès des 
Arabes dans l'Occident furent arrètés par C h a r I e s Ma f- 
f e I, qui les barrit à Tnurs, en 732,et anéanlit leur armée à 
Iarbonne, en 736. Le xoluptueux l'aiid II (72-73) périt 
assassiné après un règne d'un an. Après les rbgnes éphemères 
de Jsid III et d'Ibrahim {744 ), Merwan II fut proclamé 
l,halife. La dynastie des OtoCacles finit avec lui en Asie. 
Les excès et Firréfiginn de ses derniers représentants les 
avaient rendus si odieux que l'esprit de révolte ne fit qu'aller 
en croissant. Les Abassi,les, plus heureux qne les Alids, 
réussirent dès lors sans difficulté à renverser une dynaçtie 
de plus en plus dégenérée. Dès l'an 720 environ, .Moham- 
ined, arriëre-petit-fils d'Ahba% avait élevé des prétention» au 
kbalifat, parce qu'ilrtait plus procfie descendant du Prophète 
que les Omeiades. Les populations du Khorassan  qui tou- 
jours s'étaient monrées bostiles aux Omeiades, se déclarè- 
rent en sa faveur, et arborèrent l't.endard noir des Abassides 
en opposition à l'et.ndard blanc des Omeiades. Son fils 
Ibrabim fut xiourensement sontenn par cette province ; 
mais fait prisonnier et plus tard mis à mort par .Merwan II, 
il légua dans snn cachot ses pretentinns au klmlifat à son 
frîre Aboul-Abbas, et le lomma son successeur. Celui-ci 
ayant été proclamé khalife en .Mésopotamie par les Hacbë- 
mites ( 752 ), son oncle Abdallah prit les armes contre .Mer- 
wan II, qui avait  ce moment précisément à comprimer 
nne redoutable insurrection en Perse. Badin en deux ren- 
contres, Mersan s'enfuit en Egypte, où il mourut peu 
après. Abdallafi chercha ensuite trailreusement à se dé- 
barrasser de tons les O m e i a d e s dans une conférence qui 
devait se terminer par le plus horrible des carnages. Deux 
d'entre eux seulement s'«.cbappèrent : Ahderrafiman, qui 
parvint à se rcfuiêr en É<pagne, ou il fonda le khalifat in- 
dépendant de Cordoue, ri nn aufie, qui se relira en Arable, 
ou il fut reconnu comme khal.ife et où ses descendants conti- 
nuèrent de regner jusqu'au seizième siècle. 
Le premier khalife de la nouvelle dynastie, Aboul-Abbs 
(75'2--753), qui réida à Anbar et plus tard à Haschemiah, 
dont il ut le fondate»r, bien qu'innocent du massacre qui 
lui assurait le trône, reçut le surnom de Saffah, c'est-h-dire le 
Sanguinaire. Son frère et successeur Abou-Djafar, surnommé 
al 31asor, c'est-à-dire le Victorieux (753-775), trouva 
tout anssittt des rivaux dans son propre oncle Abdallah, puis 
dans d'autres parent.ç et amis, et surtout dans le» Alides 
l4ohammed et lbrahim ; mais il eut le bonheur de les vaincre 
tous. Il s'attira également par son avarice un grand nombre 
d'ennemis, dont il eut le bonheur de triompher à force de 
ruse et d'habileté. Il dut son surnom à ses conquêtes en 
AfinCie, en Cilicie et en Cappadoce. Persécuteur implacable 
des cheCiens, il se montra en même temps le protecteur 
des arts et des sciences. En l'année 70.1 il fonda sur les rives 
du Tigris la ville de Bagdad, où en 768 il transféra le siCe 
du khalifat; et il mourut pendant un pëlerinage à La Mec- 
que, laissant tPimmens¢s trésors. Son fils et successeur AI- 
z$1ahdi (775-785), caraère pins noble et plus généreux, 
eut à lutter contre une révolte des poputations du Khoras- 
san asant à leur tète le prétendu propbëte Hakem. Al-Hadi, 
son petit-fils et successeur (78-786), eut à soutenir une 
lutte redoutable contre es Alides commandés par Hassan, 
arrière-petit-fils d'Mi, et mourut vraisemblablelaeut de mort 

KKALIFES 
violente. Conformement aux preseriptions de la loi d'hér- 
dité et d'après les dispositions arrètées par AI-.Mabdi lui- 
mme, ce ne fut point son fils qui lui succéda, mais son 
frère Haroun, à qui ses flatteurs déoernèrent le surnom de 
Al-laschid (c'est-h-dire le Juste), à cause de ses brillantes 
qualités, et qni est resté si clèbre dans l'histoire par la pro- 
tection éclairëe qu'il accorda aux sciences et aux arts. Il par- 
tagea son empire entre ses trois fils. Mohammed-aI-Amia 
(c'est-à-dire leFidêle) devait, en qualité de seul khalife, ré- 
gner sur l'Irak, l'Arable, la Syrie, l'Egypte et le reste de 
l'Affique; sous sa suzeraineté, AI-.Mamoun eut la Perse, le 
Turkestan, le Khorassan et tont l'Orient ; Motassem, l'_ie 
Mineure, l'Arménie et toutes I contrées limitrophes de la 
mer Noire. Les frères pulnés d'Amin devaient lui succéder 
dans le khalifat. 
31ohammed-al-Amin (809-8t3), adonné à toutes les vo- 
luptés, abandonna son autorité à son izir, qui, en haine 
d'AI-Mamoun, le dctermina à désigner son fils comme son 
successeur et à expulser .Motassenl de la partie de territoire 
qui lui appartenait. De la une guerre cruelle entre les 
deux frères. 3lais Taher, géneral d'AI-Mamoun, battit 
l'armée du kbalife, s'empara de 13agdad, et en 81 fit mettre 
Amin ì mort. Al-Mamoun (813-833) fut reconnu alors 
comme kbalife. Plus noble dans ses gots qu'AI-Amin, il 
protégé'en les arts et les sciences, mais comme lui aban- 
donna ì ses serviteurs l'administration de ses Eats et le 
commandement de ses afinCs. Le projet de transmettre le 
kbalifataux Alides, qu'il conçut pour complaire a son favori 
Ali-Riza, excita les puissants Abassides h se revolter contre 
lui. Ilsle dtclarèrent dcchu du trOne, et proclamèrent Ibra- 
Ifim en qualit«, de khalife. Cepen,laut, Ali-Biza étant venu à 
• aourir, A I-Mamoun a ant renoncé à ses projets, ils recon- 
nnrent de nouveau son autorite. Al-.Mamoun, qui s'écarta 
souvent des doctrines ortbodoxes de lïslami.me, régna tout 
à fait h la façon des despotes de l'Orient. La poësie sous 
son règne degénéra en pané-rique ; en revanche les sciences 
et l'erndition firent de grands progrès, grâce à l'appui qu'il 
leur accorda. Le grand empire de Arabes, divise en un 
nombre infini de gouvernements, et qui s'étendait sur deux 
continents, devenait de [,lus en plus difficile à etre gonverné 
par un seul homme. Deja sous, le règne d'Haroun-al-Ras- 
chid, en 800, les A g I a b i t e s avaient fondé un empire in- 
dépendant à Tunis; et les Edrissides avaient fait de 
meme a Fez. En 821 Taber, gouverneur du Khorassan, se 
rendit éga]ement indépendant, et devint le fondateur de la 
dynastie des Tahërides. Son exemple fut bient6t suivi par 
un and nombre d'autres gouverneurs de provinces. Al- 
Mamoun ne fut pas plus heureux dans sa lutte contre l'em- 
»ire bzantin. Deux expeditions qu'il diriea contre Cons- 
tantinnple échouèrent complétement. Il fit preuve de la plu 
grande tolérance à l'égard des nombreuses sectes religieuses 
qui existaient alors dans t'islamisme, sectes engagées cnti- 
nuellement dans de violentes querelles les unes avec les au- 
tres. Sons son règne les Arabes d'Attique opérèrent vers l'an 
830 la conqutte de la Sicile et de la Sardaigne, où ils se 
maintinrent pendant pr de deux siècles, jnsqu'a ce que 
l'une leur fut enlevée, en 1035, par les Normands, etl'autre, 
en 1051, par les Pisans. 
3lotassem, appelé d'abord Billahi, c'est-à-dire par la 
gràce de Dieu ( 823-842 ), troisième fils d'Haroun, construi- 
sit, à 8 myriamètres environ de Bagdad, Samira, où il trans- 
fëra sa résidence. Ce fut lui qui le premier prit à sa solde 
des mercenaires turcs dans ses expéditions contre les Grecs 
et contre les Persans révoltés. Les querelles relieuses se 
prolongèrent aussi sous son règne. Son fils et successeur, 
Alatil«-Billah ( 2-86), prince xotuptueux et CerfC 
prot'gea les baladins et les poëtes, et se rendit odieux par 
son despotisme. Une querelle qui s'Ceva au sujet de sa suc- 
cession cntre son frère Moutavakil et son fils Mothadi, fut 
décidee en faveur du moins digne, c'est-à-dire tin prenfier, 
par l'intervention de la garde turque des khalifes. Sous 
loutavakil-Eillah (8t6-861) la coutume s'etablit de plus 



KIIALIFES 
en plus de faire toute» les guerres avec des mercenaires 
turcs. Le seul fait  la louange de ce souverain q,J'on puisse 
citer, c'est que ce fut lqi qui fit faire la collection de la 
S u n n a. Grossier, voluptueux et cruel, il montrait une haine 
aveugle pour les Alides. Mountasir, son propre fils .. finit 
par conspirer contre lui avec les mercenaires turcs, et le 
fit égorger. Mais Mouutasir mourut à peu de temps de là. 
La milice turqqe Cut alors pour khalife Moustain-13illah 
$66), petit-fils du khalife lIotassem. Deux Alides prirent eu 
même temps q,,e Iqi le titre de khalite. L'un, à Koula, fut 
vaincu errais i mort; mais l'autre, ilassan Ben-Jésid, 
fonda dans le Tabëristan un empire indépendant, qui dura 
près d'un demi-siècle et dont les divisions intestines des 
mercenaires turcs amenèrent la destruction. E l'année 
866, l'un des partis Ceva sur le tr6ne Moutaz, fils cadet de 
lloutavakil, et força Mostain à abdiquer. Moutas-Billah 
(866-869) fit mettre à mort blostaïn, de même que sou 
propre Irère Mouviad. il conçut ensuite le projet de se d- 
barrasser des mercenaires turcs ; mais avant qu'il eut eu le 
lemps d'y rénssir, ceux-ci se révoltèrent pour reclamer leur 
solde arriérée, et I¢ contraignirent à abdiquer. Ils ëlevèrent 
sur le tr6ne (869) .Iouthadi-Billal,, fils du khalife Vathek ; 
puis ils l'en précipitèrent onze mois après, parce qu'il ou- 
lait les soumettre à une plus .t-ëre discipline. 
Sous le règne du troisième fils de .Ioutavakil, le volup- 
tueux $Ioutamid-Billah (860-892), qui fut ensuite proclamé 
kbalife, son habile Irère blouvaffak réussit enfin à mett,'e 
un terme à la prépondérance si pernicieuse des mercenai- 
res turcs. En 873, Moutamid transiCu de nouveau le siCe 
du khalifat de Samira à gagdad, oi il resta toujours depuis. 
La mème année une révolution dont le Khorassan fut le 
thétre eut pour résultat d'y substituer la d)nastie des So- 
farides à celle des TabArides; et plus tard cette dynastie 
nouvelle ajouta à sa domination le Tabristan et le Sedgi- 
tan. Le gouverneur d'Ég)pte et de Syrie, Acfimet-ben-Tou- 
loun, se déclara également indépendant dans ces contrCes 
en $77, et y fonda la dynastie des Toulounides. En 881 le 
brave Mouvalfak détruisit bien l'empire des gingliis à Kufa 
et à Bassora, dix aunëes après sa creatiou, mais il ne put 
point protéger le khalifat contre la decadence vers laquelle 
il tendait constamment de plus en plus. 
A Moutamid succda 1¢ fils de .louvaffak, Mouthahid-Bil- 
lah ($9-902}. Il favorisa les Alides, et eut h lutter énergi- 
quement contre les attaques des lyzantins et aussi coutre 
a secte nouvelle des Karmat[ies, qui surgir dans l'h'ak, et 
qu'il vainquit en l'an 899. Son fils, Mouktapbi Billah 
9u9) combattit asec succès les Karmathes, et fut encore 
pus heureux contre les Toulounidcs, car en 905 il lit rentrer 
I"Eg)pte et la Syrie sous son obéissance. Sous le règne 
de son frère Mouktadir-lillah (909-931), qui lui succéda 
h I'/ge de treize ans, l'empire des khalifes fut trouhl par 
des révoltes et par de sanglantes luttes ayant pour but le 
pouvoir souverain. Mouktadir, jouet de ses femmes et de 
ses serviteurs, fut à diverses reprises déposé et restauré, puis 
finalement assassiné. Ce fut sous »on règne qu'apparut en 
Afiique Iahadi-Obeidallah, qui en 9t0 renversa la dynastie 
des Aglabites ì Tuuis et fonda celle des Fatimides. Eu 
Perse la dynastie de 1 o u i d e s parvint à beaucoup de gran- 
deur et de puissance. Le Kborassan restait toujours indé- 
pendant, avec cette différeuce toutefois que les Samanides 
y remplacèrent la dynastie des Saffa'ides. Dans une partie 
de l'Arable ré,aient les Karmathes bérétiques, en Mësopo- 
En I« te tout recemment rentrée 
tamie les Hamadamites. "YP , ' 
sous l'obéissance des khalifes, I« gouverneur Akscbid se ren- 
dit indépendant, et fonda la dynastie des Akschidides. 
Kahir-Billab (931-934), troisième fils de Mouthadid, déjà 
plusieurs fois déposë du vivant de son frère, fut définiti- 
vement détr6në par les mercenaires turcs à sa solde, et mou- 
rut en 840. Son successeur Rhadi-Billah ( 93-i-91 ), fils de 
Mouktadir, crta le titre d'dmir-al-onirah, c'est-à-dire 
commandant des commandants, dignité à laquelle était joint 
l'.x.ercice d'une autorit illimité au nom da kha'.ife, et assez 

TC9 
semblable à celle des maires du palais des rois franks, 
disparut de plus en plus du premier plan. Le premier 
lut investi de cette dignité fut le Turc Rhaik ; bient6l aprè 
(939) le Turc Jakem la lui enleva par la force des armes, 
et rendit son autorité illimitée. Il ne laissa au k[ialif¢ que le 
nom et l'ombre de sa puissance temporelle, et usurpa m6me 
le droit «le r6gler l'ordre de succession au tr6ne. Rhaik ob- 
tint à titre d'inderanitë Kufa, Bassora et lrak-Arabi, qui 
formèrent un empire indépendant. Le successeur de Rhadi, 
Moutaki-Billa[i (941-944), autre fils de Mouktadiç, essaya 
vainement de recouvrer sa puissance souveraine en faisant 
assassiner Jakem ; les mercenaires turcs ne lardèrent pas 
le contraindre de conférer le titre d'emir à 'un de leurs 
compatriotes, appelé To-.oun, lequel réusit ì rendre cëtte 
charge héréditaire et indépendante, et qui en 94-i finit par 
déposer le khalife, auquel il fit crever les yeux. 
Tozoun rendit formellement l'empire h un :ertain S:hirzad; 
mais bient6t il passa entre le mains des priuces de la dynas- 
tie persane des Bouides, dont le nouveau khalile Mostali- 
lillah (945) avait invoque le secours contre la tyrannie 
de Schirzad. Ceux-ci renversèrent, il est vrai, Schirzad, 
mais ils deposèreut aussi le khalil'e, et rendireut bérditaire 
dans leur maison la dignité d'émir-al-omrah. Le premier Cit 
Bouide, Moez-ed-Daulat, le transmit h ses desceudants. Alors 
ce fut l'émiç qui rbgna à Bagdad, et non le khalife, mais 
seulement sur une très-minime ctendue de territoire ; car 
toutes les provinces tan peu élo:.gnées ne lardèrent pas à 
avoir leurs princes indépendants. 
Peu à peu les khalifes en vinrent à perdre iusqu'à la der- 
nière de leurs prérogatives, celle d'être compris dans les 
prières de tous les croyants et d'avoir des monnaies frap- 
pécs à leur nom. L'Ëg)pte tomba, vers l'an 970, au pou- 
voir des F at i ni i d e s, qui prirent egalemeut la qualification 
de kbalifes. C'est ainsi qu'il y eut trois khallles à la lois 
l'un à Bagdad,,Fadre au Kaire, et le troisième à Cordoue. 
Mais la puissance des Fatimides, comme celle des Abassides, 
disparut, éclipsée par la puissance de leurs vizirs ; et à Cor- 
doue, les OtoCacles avaient depuis longtemps perdu tout 
leur puissance, par suite du partage de l'Espagne eu une 
inlinitt de petits Etats, quand les AI-.Ioravides ache- 
ercut de les renverser. Le souverain du Turkestan, llkan- 
Khan fit la conquête du Kborassan, et renversa les Sama- 
nides ; mais fut a son tour renversé par Mamoud, prince de 
Gbasna, qui y fonda en 998 la domination des G b asné- 
v ides, laquelle toutefois, dès l'an 1038, fut vaincue à la- 
dad par les Seldjoukides, qui prirent le titre 
rait, se divisèrent en plusieurs dna.ties, et fondèrent d'une 
manière durable la domination des Turcs sur tous les mu- 
sulmaus. ,Iais comme les princes turcs qui se rendirent 
indepeudants dans d'autres provinces, ils reconnaissaient 
encore toujours les khalifes de Bagdad comme les souve- 
rains et les chels spiritueis de toqs les musul,nans, quoique 
leur aqto, ite temporelle ne s'Cendit guère au delh des mur» 
de Bagdad, oi ils cultivaient les arts et le» sciences en paix, 
ne jouissant d'ailleurs que d'une antorit,i excessivement li- 
mitee. Qqaud le khalife Fatimide Adbed invoqua le secou,-s 
d,, sultan d'Ëgypte Nour-ed-dincontre la t)rannie de son 
vizir, celui-ci envoya ( 1168 ) dang ce but au Kaire S al adi 
qui y fonda la dnastie des Ayoubites. Elle gouverua 
l'Egypte jusqu'en 120, époqueoù les mamelouks en firent 
la conquèle. Les sultans seldjot,kides d'lrak fitrent renver- 
sés en 119.$ par les Kbovaresmieus, et ce,ix-ci le furent 
leur tour par Djinghiz-Khan et les 5Iongo|-:. Bagdad 
aussi, ce dernier débris de la grandeur et de la puissance 
des khalifes, devint, en 1$8, sous le règne de 31otazem, 
khalife, la proie d'une horde de Mongols. Le neveu de 
tazem, mort assassiné, s'enfuit en Égypte, oh, sous h pro- 
tection des mamelouks, il continua à prendre le titre de 
khalife, qu'il transmit à ses descendant en même temps que 
la suprématie spirituelle sur les musulmans. Sur les ruines 
de la puissance des Arabes, des Seldjoukides et des .lon- 
gols le ,'-coman Osman, en sa qualité d'émir du sultan 
97 



"/70 KIIALIFES 
eldjoukide d'lconium, fonda l'empire des T«rcs othomaus 
(voyez, OTnozA [Empire]!. Quand, en 1517, les Turcs 
effectuèrent la conqn&te de I Égypte, le dernier des Khali[es 
nomiux de ce pays ft conduit à Constantinople, puis ra- 
mené en Égypte, où il mourut, en 1538. Depuis lors les 
sultans turcs prirent le titre de khalife, oemme le fait enoere 
aujourl'hm;le sultan de Constantinople, avec toules les pré- 
tentions h la suprématie spirituelle sur i musulmans qui 
s'y rattachent, prétentions qui ne sont guëre estimces valoir 
quelqtm chose que dans oes propres Éta, et que les Per- 
an loi ¢onteçtent positiçement. 
HIIASlSIN ou CIIAMSIS". Voye: 
IHAN s titre que prennent I uxerains mongols ou 
dares. Djinghiz-Khan le transmit d'abord aux princes de 
sa famille, et tous les che[s de bordes mongoles et tuues 
le prirent ensuite. Plu tard etcore, il devint en uage par- 
tout o0 régnaient de semblables dynasties, ou bien oil pë- 
n6traient des Mongols et des Tarare. C'est ainsi que de 
la Tatarie il passa en Perse, dans l'Afghanislau, l'Hindous- 
tan et la Turquie, oh le sultan l'ajoute encore aujourd'hui à 
ses nombrettx autres titres. Dans un grand nombre de 
tr de l'Asie centrale, la qualilioetion du Mmn se donne 
aujourd'hui à tout gouserneur, chef militaire ou seigneur 
puissant. 11 #y eut que les souverains mongq[s qui por- 
tërent letitre de hhahhan, c'egt-a-dire khan des khans, pris 
par Okta, fils de Djin#dz-Khan. Les princes mongols qui 
regnèrent en Perse prirent celui de illihal, c'est-à-dire 
grand khan. 
Khan se dit aussi d'nn lieu oh les c a ï a v a n e s se repoeent. 
IIIIANAT mot qui repond  l'idee de çrincipaute  de 
diite princibre. 
HARADJ ou KHARATCH. Voye 
.SI. Iye= Kxtst et Kmw. 
iIllABI{OFF, l'o9e:. CllABKOFF. 
IIllASS-BX[I. Voyez 
lil]AZ.S ou KIItES. Voye CnAsAES. 
HHETTRiS. lye Ca 
RIItR.i?,i. Voye: 
HHIVA I, Ilanat situd dan le Turkestan, et qui se 
compose principalement d'une oasis situee dans la plaine de 
de TontOn, dans la partie inferieure du cours de l'Amour, 
»ur la rie gauche duquel elle s'etend ans une longueur 
d'envin 35 m)riamëh,s, jusqu'à son embouchure dans 
lac d'Aral. Cette oasis est entourée au nord par l'Aral, et de 
t,,us les antr ctés per le grand désort de Tourn. Sa 
,Ferficie dpse à peine 70 myriamëtres carrés; et elle 
e»t enh,coupée par une 6mlede canaux dérivés de l'Amour, 
qui seuls la feilint et la rendent habitable, lndëpendam- 
ment de cette oasi% quelques autr cntrées situées au milieu 
«lu désert, qui en est si rapproché, et les hordes nomae qui 
le habitent dëpendent aussi du khanat de Khiwa. Le khan 
aaintient son roit de suzerainet6 tout asi bien sur 
peupla«l que sur les distriets de Merv et de Scheraks, si- 
tués ur la rive méridionale de PAmour. Le lerritoire sou- 
mis au khau e Khiwa s'étend ainsi depuis la mer Caspienne 
 l'ouest jusqu'au khanat de Bokhara à l'est, et depuis la 
steppe des rgis au nor6 iusqu'à la Perse au sud. En 
y comprenant les dbserts qri en composent la plus grande 
patte, sa soperficie peut èhe évalue h ,30 mriamëtres 
rrés. Le sol n'est lerfile que la où il a été possible de 
soumettre à un système d'irrigation, et produit alors en 
abondance d gré, de la soie, du coton, d sésame, du 
chanvre, des fruits et u  in. Le hord nomades des steppes 
ne #adonnent qu'a l'edtcation des bestiaux, ou encore 
l'elève des che,ux et des ¢bamux. L habitants, au 
nombre de 200,000 environ, se oemposent, en genémi de 
Tads, qu'on appelle I Srtea, et formant la partiesonmise 
et travailleuse de la population, tandis que les Usbecs en 
constituent l'aristocratie. On trouve en odre dans les villes 
des jui[s soumis à l'oppression la plus abiecte, et dans 
feppe, de Tnrçomen« et des Kirghis. Tous, à l'exoeption 

-- KIIIWX 
(?es juifs, professent le mahomg-tisme et -ont de zeiés sun- 
nites, par conséquent ennemis déclarés des Persans chyïte. 
Leur industrie est sans importance, et se home à quelqu 
tissus de soie et de coton. L'agriculture, dans les parties du 
khanat susceptib|es de culture, et Péiëve du hëtail, dansles 
steppes, constituent leur principale occupation. Le brigan- 
dage sur le terJitoire «le la Perse, et aussi au détriment des 
caravanes et des voyageurs qui traversent leur paris, 
forme pas une partie moins importante de l'industrie des 
grossiers dominateurs de Kl,iwa, les Usbecks, ainsi que des 
hordes lnrcomanes errant dans le dsert. AusSi le commerce 
des esc.laves se fait-il sur une large échelle à Khiwa, où 
l'on trone toujours une grande quantité d'esclaes origi- 
naires des contrées limitrophes : on y considère en effet 
comme esclaves tous ceux qu'on parvient à taire prisonniers. 
Le pass est gouverné par un khaa héréditaire, de la race 
des Usbecks. Celui qui règne en ce moment a nom Babad- 
Khan ; il a succédé à Son frëre Bahmann-Kouli-Khan, 
mort le 28 jander 1846. La cisilisation des habitants de 
Khiwa de mème que tout leur systéme politique et admi- 
nistratif sont de la plus infime esl)ëce; et les Tadjiks forment 
encore aujourd'hui la partie iapluséclairêeet la plusavancée 
de la population. On compte à Khiwa environ 75 villes ou 
bourgs, dont les plus considérables sont : la capitale 
avec une population de 2,000 rimes et un chteau fortifié ; 
et Our9end$ch, avec 5.000 habitants. 
Khiwa est la patrie des anciens CImmsmiens, qui jouent 
un rle dans lhistoire de la Per. Au moyen fige on le 
signait scies le nom de Kharism ou de Khowaresmie; et 
jusqu'au douziëme siècle il resta sots la dépendance des 
Turcs seldjoukides, qui le faisaient gouverner par des lieute- 
nants. L'un d'eux, It4s, se déclara indépendant et se pro- 
clama chah de Kharism. Ses sncce.seurs soutinrent de 
nombreuses guerres contre leurs voisins, et étendirentle»r 
domination juîqtflà Bokhara et Samarkand. Le plus célèbre 
d'entre eux fut Djela-ed*din-Mankberni, ami des lettres et 
des sciences et fondateur d'une nouvelle ère. Avec lui 
pendant finit la dynastie des chahs de kharism, car ce fut 
sous son ri'gne que le torrent dévasteur des Mongols, 
mand,.s par Djinghiz-Khan, porta ses raages mème dans le 
royaume de Kharism. Après une longue résistance, le chah 
fut vincu et tué ; et ses Ëtats, qui passèrent alors sous la 
domination mongole, furent horriblement dévastés. Ils curent 
encore le mme sooE en 13S7, poquc oit Timour en fit dé- 
tru:re la capitale, dont les habitants firent transferés à Sa- 
markand. Depuis lors cette contrée resta sous la domination 
mougole; mais à une epoque plus rapprochée de nous, elle 
passa successivement sous celle du kban de BoJ¢hara et sous 
celle desKirghis, poar revenir enfin sous l'autorité des Us- 
beck.% qui Iondèrent le nouvea khanat de Khiwa. 
En 1717 dëà, Pierre le Grand essaya de faire la conquéte 
de Khiwa ; mais cette entreprise échoua oempl'tement. 
Depuis lors les khans de Khiwa fnrent toujours au nombre 
des plus implacables ennemis de la Russie, et se livrèrent 
continuei|ement à des actes de brigandage contre les oa- 
geurs et les cara anes russes. Il se trouvait donc une ënorme 
quautité de prisonniers russes à Khiwa ; cette circonstance 
fournit, en 1839, au gouvernement russe un pretexte pour 
entreprendre contre Khiwa une expédition, qui partit au 
mois de novembre, sous le cmmnandement du géneral Pe- 
rowsky, et dont le but réel etait de faire contre-poids aux 
conquëtes des Anglais dans l'Af.hanistan par la prise de 
possession de ces courtCs. Mais l'expedition, qui suivit la 
route des steppes doe Kirghi% entre la mer Caspienne et le 
lac Aral, échoua contre les obstacles du terrain et du climat. 
Malgre les excellentes dispositions prises pour en assurer 
le succè«, les 0,000 hommes et les 10,000 chameaux dont 
elle su composait n'arri,èrent pas jusqu'à moiti route; et 
alors l'intensifWdu froid, les rafales de neige et le manque 
de nourriture ayant lait perdre la plus grande partie des 
hèles de somme, force fut à l'expédition de rebrousser che- 
rein. Il n'¥ eut qu'un petit nombre d'l,ommes qui ren- 



KHIWA -- 
trèrent à Orenbourg avec le général Perowsky. Plus tard, 
l'Angleterre s'entrerai| pour faire opérer amiablement l'ex- 
tradition des prisonniers russes. 
KHOBAD, KOBAD, CABADES ou CAVADES, roi de 
Perse, fils de Péroès, ayant porté une loi qui au|or|sait la 
communauté des femmes, et faisant usage de toules celles 
qui lui plaisaient, perdit son tréne, et fut enïermé dans une 
tour. Sa femme Pen délivra, en s'abandonnant à la passion 
du gouverneur, éperd0ment amoureux d'elle. Khobad s'C 
varia sous les habils de sa femme, fit crever les yeux à son 
frère, et acquit la couronne. Les Huns nepblalites lui four- 
nirent des secom's. Il déclara la guerre à l'empereur Anas- 
rase I e, ravagea l'Arménie et la Mésopotamie. La paix fut 
conclue quelque temps aprè.; mais la guerre recmnmença 
sous Justin et sous Justinien. Khobad lut moins heureux 
dans les derniers temps de sa vie. il mourut en 531. 
KtlOIAN. Voye: Cor. 
IIOBASSAN ou KHOBAÇAN. C'et le nom éné- 
rique sous lequel on désigne l'isthme susceptible de culture 
qui s'étend entre les steppes de la vallée de Tourfin et les dé- 
serts salés de l'intérieur du plateau de l'Irfin, depuis l'Al- 
ghanistan à l'est jusqu'aux provinces persanes d'Aterabad 
et de "faberistan à l'ouest. Le climat en est toujours très- 
chaud en été, et l'éleation du sol le rend assez froid en 
Idver. Le sol du reste n'en est fertile que là où il peut èlre 
arrosé à l'aide de canaux. A en juger par les traces qui en 
subsistent encore de nos jours, ce système dïrrigalion arti- 
ficielle doit avoir eu d'immenses proportions dans l'anti- 
quite et même encore au moyen fige ; mais par suite des 
troubles lutCieurs aqxquels cet[e contrée a toujours été en 
proie, son antique prospéritè n'a fait que décboir de plus 
en plu% et la culture du pays a constamment été depuis en 
diminuant. Lc Korassan ne forme plus un tout politique. 
La partie sud-ouest, qui en est aussi la plus petite, constitue, 
sous le nom de H ér a t, un empire particulier. La partie la 
plus grande, celle du nord-ouest, a encore conservé son 
nom primitif, sous lequel elle forme la proxince de Perse 
située le plus au nord-ouest, et comprenant une superficie 
d'environ ,00 myriamètres carrés. Les produits de cet[e 
province consi.,tent principalement en grains, huits deli- 
cieux, vins, plantes médicinales, soie, troupeaux consi- 
dérables de cbameaux, de chevaux et d'fines (qu'on truvc 
à J'état sauvage dan« le nord de la Perse), en sel et en pierres 
p¢écieuses. On y renconlre aussi q,elques mines d'or et 
-l'argent. Les habilants dont le nombre sélève à peine à nn 
mi|lion d'àmes, se composent en grande partie de "fadjik, 
qui sont la partie agricole et industrieuse de la populafi.n. 
On rencontre en outre dans le pays diverses peuplades 
nomades d'origine arabe, turque, kourde et afghane, qui y 
sont venues à la suite d'expéditions et de conquëte% et dont 
l'élève du bétail et surtout le brigandage constituent les 
principales ressources. Au total l'induslric des habitants est 
peu importante; ils ont cependant quelques manulactures 
d'ëtoffes assez considérables ; les fabriques les plus renom- 
reCs sont celles où on se livre à la fabrication des armes, 
et notamment des sabres. E revanche le commerce de ca- 
ravanes y est lrës-florissant, parce que cette con|rée est la 
route nalurelle du commerce de l'ouest vers l'Asie inté- 
rieure. Les villes |es plus importanles de la province sont 
Mesched, chef-lieu de toute la conlrée, avec environ 
30,000 habitants, et Bischapour. Celle-ci, située dans une 
belle contrée, bien cultivée, et l'une des plus anciennes 
villes de la Perse moderne, jadis résidence des Tahérides 
e| des Samanides, n'et plus aujourd'hui que l'ombre de sa 
splendeur p&ssée. Plus des deux tiers de ses maisons et de 
ses &lifices pqblics sont en ruines, et elle compte à peine 
5,000 habitanls. 
Le Kborassan se compose à proprement parler de la Mar- 
giane et de l'Aria, deux anciennes provinces perses du 
pays (les Parlhes, et forma par conséquent, dës l'époque la 
plus reculée, une partie de l'empire pere. Au troi.imc siècle 
avanl l'ëre chrclic,'me, sa particorienlae passa sous la sonve- 

KIACHTA 77 t 
ru|netWdes rois grecs de la Bactriane, à la clmte des- 
quels, et aussi à celle des Séleucides, elle redevint partie 
intégrante de l'empire perse, aussi bien sous le règne des 
Arsacides que sous celui des Sassanides. Par suite de la con- 
quète de la Perse par les khalifes, elle resta sous leurs lois 
jusqu'en $t, année où Tuber s'y rendit indépendant et 
fonda la dynastie des TabCides, renversée dès $73 par 
celle des Soflarides, laquelle à son tour fut remplacée par 
la dynastie des Sureau|des de la Transoxiane. Au commen- 
cement du onzième siècle, elle passa sons les lois des Ghaz- 
ueo|des ; mais dès J'an toa les Seldjoukides s'ëtablirent 
dans sa partie occidentale jusqu'à ce q,te, en l'an 1117, 
Sandjar, le dominateur seldjoukidc de toute la Perse, rcunit 
le Kborassan au reste de sa monarchie. Après lui, cette 
contree devint alternalivement la proie du schab de Khowa 
festoie et du sultan de Gour, dans leurs incessantes guerres 
ildestines, jusqu'à ce que Djinghiz-Kban, qui la ravagea par 
le fer et le feu, la fit passer sous la domination mongole. 
Sous ses successeurs, elle gagna, vers l'an 1336, une 
espèce d'indSpendance, sous les dynasties des Molouk-Kourts 
et des Sarbédarien.% qui en 1381 se soumirent à Tamerlan. 
Après la mort de ce dernier, elle devint le centre de Ja 
puissance de sun fils, scbalt-Rokh, pendant le règne long 
et bienfaisant duquel le Khorassan jouit d'un bien rare bon- 
heur. En 1607, le chef d'Ushecks, Schaibek-Kan, chassa le 
successeurs de Srbah-Rokh; mais après de lougues et 
sanglantes luttes, force lui fut de l'abandonner au scbah 
de Perse lsmaeI-Sopbi. Le Kborassan, redeveun partie inle- 
grante de la Perse, n'en a plusetésépare depuis, a l'exception 
de l'ilCat, qui, / partir de 1716, n'a cesse d'Atre nue 
pomme de discorde entre les Persans et les Afghans, et qt:i 
a lin| par tomber complétement au pouvoir de ces derniers. 
H IIOSP, OU ou CHOSROÈS I , dit le Grand, fils et st,c- 
cessent de Khobad, roi de Perse, monta sur le trône en 
11 remporta de gran ls avantages sur Bél i sa i r e, et term[, a 
enfin,en 553,une guerrequi durait depuis son avéaement, I' 
un traité de paix glorieux pour ses armes et bien bumiliaat 
pour Jus tin|en, qui lui OE, la plusieurs provinces et .e 
reconnu| son tributaire. Khosrou ne fut pas moins heureux 
contre les peuples de l'Asie : les Huns et les Turcs Ireut 
repoussés et l'lnde fut en partie soumise. J us t i n, succes- 
seur de Juslinien, ayant refuse le tribut, le roi de Perse 
reprit les armes, et lundi| sur Ja Mésopotamie et la Cappadoce; 
mais son armêe fut entièrement délaite par les troupes de 
l'empereur Tibère Il, et lui-même contraint de s'enluir. 11 
mourut dans cette mëme anëe 579. 
KHoSIOU II devint roi de Perse l'an 50, à la place 
son père liormisdas 111, que ses sujets avaieut jeté en pri- 
son, après lui avoir crevé les 5eux. D'abord il fut chassé 
lui-reCe, et alla demander asile à l'empereur blaurice, 
qui l'accueillir avec bonté et lui donna des secours au moyeu 
desquels il put ressaisir sa couronne. Après l'assassinat du 
Maurice par Phocas, Khosrou, sous prétexte de venger sa 
mort, pénétra dans l'empire avec une puissante armç.e en 
606, ravagea plusieurs provinces et battit les Romains h plu- 
sieurs reprises. Mais enlin la sictoirœe favorisa Héracliu% qui 
le contraignit à prendre la fuite; son lils Syro, se révolta 
contre lui, s'empara de sa personne et le lit mourir de faim, 
en 628. 
I|IOSROU MÉLII{. Voge'-Gn«s-xewnes. 
IHOTIXE. loge.'. Cnoczm. 
i{HOVAREMou KHOVABESMIE. l'oge'. Kxma: et 
Kmw. 
I|ACHTA  petite ville bien blie el défendue par un 
fort, située sm" les bords de la riière du mme nom et 
près des frontières de la Chine, dans le gouvernemenl russe 
d'Irkoutsk, ì 780 mètres au-dessus du niveau de la mer, 
dans une contrée désolée, stérile el pauvre en bois. Quoi- 
qu'elle ne se compose que d'environ cent-vin maisons et 
d'un millier habitants, Kiachta n'en est pas nmms le raml 
ceulre du commerce existant entre la Russie et la Chine, et 
qui de tous temp% mais plus particulièrement depuis qu'¢a 
97. 



7 72 KIACHTA 
1727 on y a établi une foire tenue chaque année en décem- 
bre, y attire un and nombre de caravanes, de mme qu'à 
Maimatschin, ville chinoise, qui n'en est guère éloignée que 
d'un tiers de kilomètre. Les fourrures, les cuirs, les feutres, 
les toiles, les lainages, les bestiaux, l'or et l'argent en bar- 
res, les articles de qnincaillerie, sont les produits que la 
lussie y Change contre le Ihé, la rhubarbe, le musc, la 
porcelaine, les soieries et les cotonnades de la Chine. En 
IA,3 le mouvement des Changes opérés entre Il deu. 
nations représeutait une valeur de plus de 40,000,000 ff. 
Kiachta se trouvant à G58 myriamètres de Pétersbourg, il 
faut ordinairement deu. années pour qu'une opération com- 
merciale engagée entre ces deux villes puisse se terminer. Il 
existe déjà depuis longtemps à Kiachta une Société biblique, 
s'occupant de propager le christiauisme parmi les Fopula- 
tions environnantes, qui pour la plupart sont encore ido- 
lâtres. 
I;IAFIII. t'oe= Gt_ocl. 
I|AJA-BEG uom que l'on donne quelquefois au 
k ai m ak an, ou lieutenaut «lu grand-vizir. 
HIBITIA. C'est le nom qu'on donne en Iussie ì une 
espèce de voiture différant du t#loega , dont l'usage est bien 
aulrement répandu, simple charrette sans aucune espèce 
d'abri, tan,lis que le kibitka et muni à l'arrière d'un calm- 
chon ou capote en tresse, qui garantit contre l'intempérie 
des saisons. Les plus hauts fonctionnaires publics, quawl 
ils voyagen!, ne se servent guère que de l'un ou de l'aure 
de ces modes de transport, qu'on appelle aussi troika, quaml 
il est MielWde trois chevaux. 
I{IBBIS. l'ove= Cuz. 
IIEF ou KIEW, en polonais K)q[, gouvernement 
formé en grande padie de débris de l'Ukraine polonaise ; il se 
eompom de douze cercles, et comprend une superficie d'en- 
viron G0 myriambtres carrbs. Il et borné au nord par le 
gouvernement de Mink, à l'est" par les gouvernements de 
Tscbernigof et de Poltawa, au midi par ceux de Cherson et 
de Podolie, et à l'ouest par la Vt>thuie. Avec les gouverne- 
ments de Tschernigof, «le PoHawa et de Kbarkof, il forme 
ce qu'on appelle la P e t  t e - R u s s i e, et est remarquable 
par son delicieux et maguifique climat, également exempt 
de tçop grandes ci,Meurs et «le trop grands froid, par la 
fertilitë de son sol, qui pe,d se passer d'engrais, et n'a be- 
soin que de repu% enfin par une richesse de 'égétation à la- 
quelle la plupart des autres p,'oices russes n'ont rien à 
comparer. Le sol esl une plaine end,alC, arrosée par le 
Dniepr et es affluents, et qui produit en abon,lance des 
blés de toute beauté, du cl,anvre du lin, du tabac, des 
l'ruils et des légumes excellenl, de magnifique bois de 
construclion, et abondant en riches pfiturages. Les fiabitants 
élèvenl aussi beaucoup de chevaux et «le porc. Etre autres 
oiseaux de passage, on  retconlre surtout le canard sau- 
vage de l'espèce dite musquée, appelée ici 9olka. Parmi 
les insectes particldiers à la coulrée, il faut citer la eocbe- 
nille de Pologne. L'éducation des abeilles s'y fait aussi sur 
une très-large écllelle. L'industrie et le commerce, autre- 
fois négligés, ont pris dans ces derniers temps de grands 
dëveloppements. On y troue en effet d'imporlante usines 
consacrëes à la fabrication des draps, des toiles, des savons, 
«le la faïence, et à la teinture des étoffes. La célèbre foire 
dite des Contrats, qui se tient au chef-lieu dit gouvernement 
et dure du 7 au 1 janvier, facilite les transactions commer- 
ciales. La population comprend t ,606,000 me, et se com- 
pose de Petits-Iusses (paysans), de l'olnnMs (gentilshom- 
mes), et de Grands-Russes (habitant des ri|les et gros 
hourgs). Dans les villes, et notamment à Kief, on trouve 
aussi beaucoup d'Allemands, de Grecs et d'Arméniens; 
quant au juifs, dont ce gouvernement ne compte pas moius 
de t3ç,000, ou en rencontre partoqt. On3 compte 190,000 
catboliques, et seulemeut un millier de protestauts. Tout le 
reste de la population prolesse la religion grecque, qui a un 
métropolitain fi Kief. 
Ktv, chef-lieu du gouvernement, ja,li 

 KIEI. 
résidence «les grands-princes de Iussie, et l'une des plus 
anciennes villes de la Iussie, Itie eu ampbithtre, sur les 
bords du Dniepr, avec ses magniliqms eouvents et égfises, 
avec les nombreuses coupoles durCs et argentCs qui les 
surmontent, présente l'aspect le plus imposant. Le chiffre 
de sa population s'élève à ,000 mes; elle possbde un 
grand nombre d'écoles, d'églises et de eouvents, mais ne 
laisse point pourtant d'tre bien déchue de ce qu'elle était 
•ers le milieu du onzième siècle. On  comptait alors prés 
de 400 églises, et elle était regardée comme la cité mère de 
tontes les villes de Russie. Les Talares et les Polonai» !a 
ruinërent de fond en comble. 
La ville actuelle se compose de trois villes ou parties bien 
di.tinctes, parmi lesquelles la ville de Petschersk, où se 
trouve la citadelle, les édifices publies et le clbre couent 
du méme nom, est la plus importante. Elle est balle sur le 
plateau escarpé d'une montagne calcaire, haute de 121 métres 
au-dessns du Dniepr. La seconde ville, autrefois résidence 
des grands-princes et aujourd'hui siCe du métropolitain, 
dont le palais est silué tout près de la magnifique église de 
Sainte-Sopbie, s'appelle, d'après cette église, Sophia, ou en- 
cercle rieuac Itïef, et, comme la citadelle proprement dite, 
est entourée d'un fort rempart et de plusieurs faubourgs. La 
troisième, appelée Podol, est située dans la plaine du 
Dniepr, et exposée à ses fréquentes inondations. Uu pont 
de baleau, Ioug de 1,194 mètre% y met en communication les 
deux rives du Ileuve. Cette ville basse, galement entourée 
de remparts, est la partie la plus considérable et la mieux 
btie de Kief. Les fruits confits et les pains d'épice de Kiel 
sont justement renommés, et se cousomment sur tous les 
points de l'empire. Parmi les établissements d'instructiou 
publique que possëde cette ville, nous devons mentionner 
l'universilé «le Saint-Wladimir, dont la crëation ne date que 
de 1833, le gymnase et une école lancastérienne. Les di- 
lices les plus remarquables sont, outre l'h0tel du gouverneur, 
la cathédrale, ptacee sous l'invocation de sainte Sophie, 
le fameux couvent de Petscbersk, avec ses catacombes, et 
o6 l'on voit le tt>mheau de Netor, le père de l'histoire «le 
Iiuie, enfin l'église Saiut-Georges, où sont déposés les 
restes mortels du célèbre hospodar de Valacbie, Yps- 
lanti. 
|{IEL ville bien baffe du ducbé de Holstein, sur un 
golfe de la mer Baltique, qui y forme l'un des ports les pMs 
beau, et les plus stars de l'Erope, et off les phts forts vais- 
seaux de ligne peuvent venir s'amarrer près des quais, 
comp|e une population de près de 14000 habitant% dont le 
commerce et la navigation sont les principales ressources. 
Ou y trouve aussi qu. rues fabriques de tabac, de sucre, 
et d'articles pour les vmsseaux. Sou commerce, iadis peu 
considérable, a pris nne tout autre importauce depuis qu'nn 
embranchement du chemin de fer de leudsbourg la relie a 
Hambourg. L'elablissement de bains de mer qu'ou y a crée 
en tSl y attire pendant la belle saison un grand nombre 
de visiteurs. Kiel est surtout cëlébre par sou université, 
fondée en 1ç55, par le duc Christian-AIbert de Holstein, et 
appel$e d'abord, eu l'honneur de ce prince, Christiana-Al- 
bertina. Le nombre de ses étudiants varie entre 00 et 
300. Elle possède une'bibliothèque de plus de 100,000 vo- 
lumes, un muséum d'histoire naturelle, lin ampbithéAtre d'a- 
natomie, un laboratoire de chimie, nn jardin botanique et 
un observatoire. Parmi les professeurs qui l'ont illustrée, il 
laut citer Feterbacb, Thibaut, Welcker, Falck, Pfaff, Dabl- 
mann et Iitter. Le système réactionnaire, qui a triomphë 
dans les ducbés de Scbleswig-Holstein en 1851» a porté d'ail- 
leurs un coup sensible h sa prospérité. 
Kiel est aussi depuis t831 le siCe de la cour d'aplel 
commme aux deux ducbés. Elle faisait jadis partie de l'a- 
panage de la maison de Gottorp, appelée au siècle dernier 
à monter sur le tr0ne de lussie; mais eu 177a elle fut 
écbangée contre le duché d'OIdenbourg et le comté de Del- 
menhorst, et passa alors avec son territoire sous l'autorité 
du roi de Danemarl« 



KIEL -- klLKENNY 
Cette ville est ¢Alèbre dans les annales modernes par les 
traités de paix négociés et conclus dans ses murs, le 
janvier tSt, entre le Danemark et la Grande-Bretagne, 
traités qui curent peur corollaires de traités conclus par 
le Danemark avec la ?russie, à Hanovre, le 8 février 181, 
et avec la Prusse à Berlin le 25 ao,'t suivant, et enfin les 
actes du congrès ¢]e Vienne en date des 4 et 7 ]uin lB,ri. 
Par la paix de Kiel le Danemark accída à la coalition 
de l'Em-ope contre Napoléon et plus tard à la CoolCération 
germanique, tandis que la Suède renonçait à tous les rap- 
ports qu'elle avait eus jusque alors avec l'Allemague. Le Da- 
nemark céda/i la Suède la Norvge, et ne conserva plus que 
le Groënland, les lies Faroë et l'Islande; en échange de la 
fforvège, la Suède lui abandonna sa part de la PureC 
tante et Pile de Rugen (cdée un peu plus tard à la Prusse, 
en echange du duché de Lauenbourg); enfin, elle s'engageait 
Alui pa-er une indemnité de 600,000 rigsdales de banque 
( 3,000,000 te. ). L'Angleterre re.titua au Danemark toutes 
ses colonies, mais garda cependant sa flotte et Iïle d'Hé- 
ligoland. Elle s'engaga en outre à lui payer un subside meu- 
suel de 33,333 tir. st. pour le corps «le 10,000 hommes 
qu'il s'engageait à mettre à la disposition de la coalition 
contre la France. La Suède ayant dt) recourir à la force 
des armes pour se metlre en possession de la bIorvëge, re- 
fusa de payer l'indemn[Ié de 600,000 rigsdales de banque 
stipulée par le traidu 14 janrier 1814 ; etce fut la Prusse 
qui, dans l'arrangement conclu pour l'ëchange de la Pomé- 
ranle et de R,igen contre le Lauenbourg, la prit à : charge. 
I{IEN-LONG ou plul6t KHIAN-LOUNG, empereur de 
la Chine, mort le 7 lévrier 1799, à I'Age de quatre-vingt- 
sept ans passés. C'est à ce monarque, qui cultivail les lettres, 
que Voltaire adressa, comme il l'avait [ait à Boileau et 
comme il le fit depuis à Horace, une de ses plus pldtosophi- 
ques épltres. 
Quatrième empereur de la dnastie des Tatars-Mand- 
chous, Kien-Long succída à son père Cbi-Soung (plus connu 
sous le nom de Young-Tcl,ing). E 1735 il monta sur le 
plus graml trône de l'univers, et l'occupa glorieusement. 
Comme son contemporain Frédëric le Grand, il avait été 
longtemps tenu loin des affaires; et pour occuper les 
loisirs prolongbs d'un esprit actif, il s'était livré à la cul- 
ture des lettres. Ce prince ne tarda pas non plus il se mon- 
trer digne de la couronne qu'il recevait à vingt-six ans, en 
signalant son avénement par desactes de clémence : il ren- 
dit la liberté et mëme leurs dignitís aux princes de la 
famille de Kang-Hi ( le Caml,i des missionnaires), que la 
politique de Chi-Soung avait cru devoir tenir en prison. Une 
guerre qu'en t'55 lui suscitèrentles OEIoetes, d'abord assez 
facbeuse, puis couronnée par le succès, mit en son pouvoir de 
vastes rouirCs, qu'il rendit tributaires de la Chine. En 
Kien.Long fit la guerre aux peuples d'Awa. Deux ans après, 
la gloire et la douceurdu règne de ce prince déterminèrent 
plusieurs populations voisines de ses Étais à solliciter le 
bonl,eur d'en [aire partie : cette pacifique conquête lui va- 
l,il 80,000 familles d'oEIoetes, de Pourouts et de Tourgts, 
qui vinrent, la plupart lasses de la domination moscovite, 
solliciler l'avantage de faire partie de l'empire. Ce qui est 
moins honorable pour la mémoire de Kien-Long, c'est la 
dé[aite, terminëe par de nombreux supplices, des Miao- 
Tseu, qui, I,ommes, femmes et enfants, firent la plus hé. 
roique et la pius mallmoreuse rësistance, obstinés qu'ils 
étaient à conserver une indépendance que semblaient si bien 
protéger leurs précipices, leurs montagltes, leur pauvre 
et leur énergique résolution. Il fallut céder et périr. C'est 
une tache pour la ,le de Kien-Long, qui ne l'effaça pas 
assurément par le poëme mandchou qu'il composa à cette 
occasion eonlre « ces rebelles brigands, que, par un favo- 
rable succès, ses armées avaient rapidement exterminés 
Apr un règne de soixante ans, aussi long par conséquent 
que celui de son aïeul Kang-Ili, il termina (le 8 [ëvrier 
I'96l par l'abdication line carrière peblique bonorée par 
de t=randes action% proque lot,les recommandables par des 

773 
travaux d'utilité généale, tels que le règlement du cours du 
fleuve Jaune, si redoutable dans ses ravages, et par la 
blication de plusieurs ouvrages, tant hisloriqnes que litté- 
faites, parmi lesquels le plus connu en Europe est le poème 
intitulé : Éloge de la ville de I;loukden. De Guignes en fit 
parallre, dans le cours de 1770, une traduction française 
assez peu fidèle, ouvrage de ce mème jésuite Amyot qui 
a fait passer dans noire langue deux des autres productions 
du monarque chinois, dont les œuvres ne composent pas 
moins de 24 volumes, sans compter une foule de vastes 
compilations, dont il dirigeait l'édition, devant produire 300 
ruines environ. 
Kien-Long ne survécut à son abdicalion que trois années, 
qui ne furent pas sans utilité, ni pour son fils, ni pour 
l'empire ci,louis. Il eut pour successeur son fils Kia-Kin, 
mort en 1520. Louis D Bots. 
tIIESV. Vove'- KIzr. 
IILD&BE ou KtLLDAIE, comté de la province de 
Leinster (friande), d'une superficie d'environ 20 myria- 
mètre carrés, dont un sixième en marais et en terrains non 
susceptibles «le cullure. La surface en'est lanlt onduleuse 
et -ontagneuse, et tantôt complètement plate; son sol, de 
nare argileuse, ne laisse pas au total que d'oelre très- 
treille, notammenl en céréales. Arrosé par le Barrow, le Liffay 
et la Boyne, on vanle à bon droit l'incomparable [rat«heur 
de sa verdure et la richesse de ses prairies. En 181 sa po- 
pulation était de ilg,480 habitants; en 1851 elle n'était 
plus que de 96,627, et aait par conséquent diminué de 
15 peur 100 eniron en dix ans. Elle a pour clmf-lieu le 
bourg d'Aih,j, sur le Grand-Canal et le Barrow, avec 4,000 
habilants et des manu[actures de lainages. 
KILDARE, ville de 2,000 grues au plus, située sur le che- 
rein de fer de Dublin à Limerick et à Carlow, dans la 
riche et verdoyante plaine de Curragh considérée comme 
le plus beau paturage qu'il y ait en Europe, est le siCe d'un 
évché catholique et d'un év$ché protestant. Il faut citer en 
outre les bourgs de/Vaas (3,800 -,Xmes ), ancienne résidence 
des rois de Leinster, et de Ma!/nooth, avec des manufactures 
d'elotf de laine et de coton, et un grand cuitCe catholique, 
fondé en 1796, par le parlement irlandais. Jusqu'en ,S45 
sa dotation annuelle avait ét de 9,000 |iv. st. ; mais celle 
annre-là le parlement adopta, après de longues et vives dis- 
clissions, un bill, dit Mavnooth-bill, qui l'augmenta con- 
sidérablement. On y compte I1 professeurs et 5o0 élèves, 
dont td,,s de la molliWboursiers. 
|{ILI{E'X'Y o,i KILLKENNY, comtd de la province de 
Leinstcr (Irlande }, de 27 n,yriamètres carrés de superficie. 
Montagneux au nord et à l'est, le sol en est généralement 
onduleux, et s'abaisse au sud en pente insensible vers la 
baie de Waterford, qui res, oit les eaux de la Suir,/t l'ex- 
trémité sud du comt, ainsi qt,e celles du Barrow, fleuve 
qui en forme à l'est les limites, et dans lequel vient se eter 
la Nore, après avoir Iraversé toute la plaine centrale du 
comté. Le climat en est lempéré, et le sol fertile, surtout dans 
les rouirCs arrosée.s par la Nore. On y cultive princ;pale- 
ment le [romenl, l'orge, l'avoine et les pommes de terre. 
L'indush-ie manufacturière se borne  la fabrication des 
tapis ci de la flanelle : autrefois on y exploitait aussi quel. 
ques mines de fer, de cuivre et de plomb, ainsi que les 
I,ouillères de Castleomer, les plus grandes qu'il y ait en Ir- 
lande. Mais voilà longtemps d«.j/l que cette exploilation a 
été abandonnëe et q,,e le commerce se borne à la vente des 
produits agricoles. La population, qui d'après le recense- 
ment de ,841 Cait de 1t3,319 habitants, n'était plus en 
185t que de ,39»93, et avait par con.quent subi une di- 
minution de 23 pour 100. 
Ce comté a pour chef-lieu Killenny, sur la Note, qui 
est uavigable, siAge d'un évëcl,é catholique et d'un évcl,é 
protestant, l'une des plus belles villes de i'lrlande. B.t.ie 
sur deux collines,elle a cunserv la plus grande partie de on 
antique ceinture de murailles Ilanquées de tours. Deux pont 
en pierre metlent en communicalion la ville anglaise { En- 



774 
gltsIdcwn ) avec le faubourg, ou la ville irlandaise ( lrisI:- 
town); et on y remarque quelques vastes édifices, par 
exemple sur l'une des deux collines le chateau de la famille 
d'Ormond, bti d'après les plans du chMeau de ,-indsor, 
entouré de murs de 13 mëtres d'élévation et renfermant la 
plus riche galerie de tableaux qu'il y ait en Irlande; et sur 
l'autre colline, la catbédrale protestante, lourd édifice de 
style gothique, avec le palais épiscopal qui l'avoisine, le col- 
lége fondé en 1682 par le duc d'Ormond, et dans lequel fu- 
rent élevés Swilt et d'autres hommes cèlèbres. La ville est 
généralement construite avec une pierre calcaire noirâtre 
( black marble ), tirée des carrières du voisinage, et qui sert 
aussi /t paver les rues. On y trouve 20,300 habitants, 
quelques fabriques de lainages, d'empois, des distilleries d'eau- 
de-vie de grain, desscieries de marbre, et il s'y tient chaque 
semaine un marche aux bestiaux. Kilkenny fut à diverses 
reprises le siëge du parlement irlandais, de mme que les 
constitutions arrétées dans celle ville sous le règne d'E- 
douard I!I furent Ionemps d'une grande importance pour 
l'lrlande. Les dues catholiques d'Ormond y tenaient une 
cour des plus brillantes, qui éclipsait de beaucoup celle 
des vice-rois anglais de Dublin ; et de nos jours encore bon 
nombre des plus grandes familles calhobques d'lrlande vien- 
nent passer l'CW Kilkeuny. 
iILLABNEY, l'oge'- KEnnv. 
iILOGBAMME KILOLITRE, KILOMÈTRE, KILO- 
STËIE(dugrecï.O.v;,mille). Voge-.Gn&tE, LmxE, 3liu , 
Sr, et It¢..n»Qe (Système). 
I{IMCH! (DAVn), l'un des plus clèbres savnts juils 
de moyen gée, était uA vraisemblablement vers la fin du 
douzième siècle, à ffarbonne, oit il passa aussi la plu» grande 
partie de sa ie. Il mourut en Provence, en 160. Son père, 
Joseph Kem, qui vivait à Narbonne vers 1160, et son 
frère Moïse KLLCU!, jouirent également d'une grande con- 
sidération anprès de leurs contemporains. Outre quelques 
ouvrages tbéologiques, ils avaient écrit des Commenlaires 
sur l'Ancien Testament, et Mone Kimchi une grammaire 
bébraïqueo qui a souvent été reimprimée sous le litre de 
Liber vi¢zrztm s¢mctoe lingtoe { Paris, 1520 ; Bgle, 153t ; 
Le,de, 1631 ; elc. ). Mais tous ces travaux furenl éclipsés par 
ceux de David Kimclni. Sa grammaire, intitulée Michlol, et 
mainles fois réimprimée (par exemple à Venise, en 1515, 
à Leyde, en 16t ), fit oublier toutes celles qui l'avaienl pré- 
cédée, el jusqu'au milieu dt dix-septième siècle elle servir de 
modèle à celles q'on composa après lui. On en peut dire 
aulaut de son livre de» racines de la langue lnébranque, le 
Sepher Schorasch[m (Naples, 1490 ; Venise, 1529, 1552, 
et plus souvent encore). Les premières grammaires et les 
premiers dictionnaires hébrgiques composés par des chré- 
tiens curent pour base les travaux de Kimclni. On a aussi 
de lui des commenlaires sur la plupart des livres de l'An- 
cien Testament; et on estime plus particulièrement son 
commentaire sur lsaïe. 
KIMMERll. Voye-- Cnmam,s. 
I.I.MII. l'oye5 GA.uQu (Langue). 
IINA, mot que l'on emploie quelquefois pour 
quina. 
KIlX BUIAN place fortifiée, h l'emboclmre du D n i é p e r 
dans la mer loire, défendant Ventrée de ce Ileuve sur la 
rive gmcbe, vis- à-vis d'OtchaKofL Le 1  octobre 1 55, les 
flottes allies, commandées par les amiraux Bruat et Lyons, 
se présentèrent devant cette forteresse, dëfeudue par le gé- 
néral Konowitscb. Qnalre mille cinq cents hommes, sous les 
ordres du gënëral Bazaine, furent débarqués le lendemain. 
Le 17 au matin les canonnières battaient le port en brèche. 
Les vaisseaux pureut se mettre en position, et le feu des 
Basses fui éteint. La garnison capitula et se rendit prison- 
nière. Il y avait t,500 hommes et 174 canons. Les Russes 
avaienl eu une trenlaine d'hommes tués et quatre-vingts 
blessés. 
EINCAP, DINE. l'oye5 
IING (Les). C'et le nom des cinq livres sacrés coin- 

KILKENNY  KINGSTON 
poses par Ce n lu c i u s, et que l'on considère comme le 
monument le plus reculWde la littérature chinoise, l'oye¢ 
Cmr£ (Littérature}, tome V, page 486. 
KING'S BENCH ou QUEE'S BENCH (Court off.. 
|'otJe: BA.ic 1|, BO! ou nE LA. BIImE (Cour du). 
On nomme encore Kng's Bench la grande prison située 
dans Southwark, et qui sert principalement aux détenus 
pour dettes. Les prisonniers du King"s Bench ont souvent 
toute leur famille auprès d'eux, donnent des bals et des 
concert.% et jouissent, entre les quatre murs de cette prison, 
d'une liberté complète. 
KING'S COUNTY c'est-à-dire Comtd du Roi, comté 
de la province de Leinster (lrlande), de $8 myriamètrescarrs 
de superficie, dont 9 à te en marais (situés plus particuliè- 
rement à l'est) et en montagnes (situées pouf la plupart au 
au sud ). Le sol en est d'nr, c grande fertilité sur certains 
points, mais au total convient cependant mieux à l'Cève 
«lu bétail qu'à l'agriculture. On y trouve beaucoup de pierre 
a chanx; la tourbe y remplace le bois,et on a trouvé de 
l'argent près d'Edeuderry. A l'ouest, son cours d'eau le plus 
important est le Shannon, qui reçoit les eaux de la grande 
et de la petite Brosna, ainsi que celles du Grand-Canal tra- 
xersant obliquement tout le comté. Le Barrow prend sa 
source à l'esl, et couleau sud. La population, qui en 184t 
elatt de 146,$57 individus, n'était plus en 1551 que de 
109,93t, et avait par conséquent subi une diminntion d'en- 
viron 23 pour Ioo. Le Km's Count a pour chef-lieu Phi- 
lipptoum ou hïn9stown, localité sans importance, situee 
sur le Grand-Canal, et ainsi appelée en l'honneur de Phi- 
lippe Il d'Espagne, époux de la reine Marie d'Angleterre, 
qui, en 557, érigea ce district en comté. 
KINGSLÈY (C«Aes), ministre de l'Eglise anglicane, 
qui s'est fait un nom honorable dans la liftCature an- 
glaise ¢outemporaine par ses écrits, où il traite les ques- 
tions sociales à l'ordre du jour. Le premier livre de 
lui qui produisit une ive sensation fut son Alton Lucide, 
taller and puer, an autobio9raphy (2. vol., 1850), 
sou la forme d'un rëcit attachant, il a tracé le tableau le 
plus énergique des abus et des vices de la sociét6modeme. 
Son second roman, Yeast, a problem (1851), a obtenu 
moins de succës, parce que lec6té pratique s'y perd dans des 
abstractions mystiques, mais n'en a pas moins des tendances 
philanthropiques extrgmement honorables. Il et aussi l'au- 
teur de The Saint's TragedtJ { 188) et de Phaeton, or 
loose thnugMs on lose Ihinkers (1852); et sons le titre 
de Twentv five l'illage Serinons (1852) il a publié des 
serinons prononcés devant ses ouailles. On a en outre de 
ici de remarquables pensée sur l'application du principe 
d'association aux populations agricoles ( Application vasso- 
cialit'e principles te agriculture; 1852). Comme chanoine 
de Middlebam et curé d'Eversle¥, Kingsley oecupe une po. 
sition distinguée dans la société anglaise; et comme prgtre, 
de mgme que comme êcrivain, toutes ses peusées sont di- 
riéC vers l'amélioration du sort des cla«ses nécessileuses, 
qu'il voudrait arracher h leur ignorance et à la m;.sère qui en 
est la suite. Mais comme à ce propos il ne ménage pas non 
plus l'orgueil et l'égotsme des classes élevées, il a naturel- 
lement été accusé de tendances socialistes, bien que ses 
idées n'aient rieu de commun avec ce qu'on eulend en France 
par socialisme. 
I-iNGSTON ou KINGSTOWN, dénomination commnne 
à plusieurs villes et localités situées dans les pays oecupés 
par la race anglo-saxonne, et qu'on rencontre plus parti- 
culièrement aux États-Unis de l'Amérique de P;ord, Oil les 
Kingston abondent dans le ewhampsbire, le Vermont, le 
Mazsachusetts, le lew-York, le Maryland, la Caroline du 
Nord et le Tennessee. 
KINGSTON, ville du Cauada, le poiut le plus florissant 
et le mieux fortifié, et autrefois le aller-lieu du Canada 
supérieur, située au nord du lac Ontario, à l'endroit of en 
sort le Saint-Laurent et où commence le canal du Ridean, 
 35 msriamèlres de Montréal, possède un bon port, bien 



ortifié, on 
taire. C'est le point central d'une active navigation à va- 
peur, en mme temps que d'un cabolage fort acti| et d'un 
grand commerce; et on y compte to,ooo habitants (en tI33 
la populalion n'était encore que de 4,200 àmes). Non loin 
de là, entre laoint.Frederic et Point-Henry, se trouve la 
IVav,.l-llay, le principal port de la marino militaire des 
gJais sur le lac Ontario. 
KIGSTO, le port et la ville commerciale les plus 
I 
portants de la J a m a ïq u e, sur la cote méridionale de cette 
Ile et dans la baie de Port-Boyal, à 2 mvriamétres à l'est du 
chef-lieu, Spanishtoton, s'éiAve en ampbitbëtre sur le versant 
d'une montagne. Les rues en sont droites, bordCs de belles 
maisons, bien construites, avec des arcades de chaque cété 
servant d'abri contre les rayons brélantsdu soleil et garnies 
de riches magasins, où abondent tous les produits de la nature 
et de l'industrie. La ville possède aussi plusieurs beaux Ct- 
lices, un grand nombre d'églises et de cbapelles à l'usage 
de toutes les religions, divers élablissements de bienfaisance, 
un tbétre, et 40,000 habitants, hommes de couleur pour 
la plupart. Le commerce des cafés, des rhums, des sucres et 
de bois précieux s'y fait sur la plus large écbelle. Le porl, 
assez vaste pour contenir mille navires, mais peu s0r, et 
défendu par deux forts et une foule de hatteries, entoure 
d'immenses magasins et terrainWau sud par l'etroit pro- 
montoire de Palisadoes, à l'extrémité duquel se trouvo 
Port-Royal, station des vaisseaux de gerte. Kingston fut 
fondé en 1693, à la suite d'un tremblement de terre qui 
détruisit Port-Royal ; mais ce n'est qu'en 1802 qu'elle a 
obtenu le rang de ville. Le séjour n'en est rien moins que 
salubre; la fièvre jaune y sévit frequemment ; et pendant la 
saison des pluies, elle est exposée aux inondations causées 
par le debordement des ruisseaux descendan t des montagnes. 
Les environs sont couverL de belles plantations et dële- 
gantes maisons de campagne ; à l'ouest le sol est bas et 
marécageux, à l'ouest s'élèvent les Long-Mountains. 
KLNGS'_rON, capitale de File de Saint-Vincent, t'nue de.; 
petites A n t i I I es, située sur la céte sud-ouest, possède 
une bonne rade et est le siège du gmerneur. 
KINGSTON- UPO-tI UL L. Voyez 
KIGSTON-UPO-THAMES, iile du comlé de Surrey 
(ngleterre), à 7 kilomètres au sud-ouest de Londres, sur 
la rive droile de la Tamise qu'on y passe sur un pont. On 
compte 5,600 habitants; et les debds d'antiquités, comme 
médailles, urnes, etc., qu'on y a trouves aulo,'isent  pen- 
ser que cetait autrefois une station romaine. Les rois anglo- 
saxons s'y firent souvent couronner. Sous Édouard Il et III 
elle envoyait des députés au parlement. A l'époque de la ré- 
volution elle témoigna d'un vit altacbement a la causede 
Charles l  ; et en 1643 le prince palatin Robert y remporta 
nne victoire signalée sur le comte d'Essex. 
KSGSION, en rlande, dans la baie de Dubfin, est le 
point de départ du chemin de fer atmosphérique. 
RINGSTON (ÉLSn CIlUDLEGH, duchesse n), 
Anglaise célèbre par ses aventures et ses excentricités, née 
en t20, perdit de bonne heure son père, colonel dans l'ar- 
mée etfut introduite forteune encore dans le grand monde 
par sa mère, femme qui aimait le plaisir, mais sans fortune. 
La protection du comte de Bath la fit nommer en t743 
dame d'atours de la princesse de Galles, poition dans la- 
quelle par sa beauté et son esprit elle eut bientét une toule 
d'adoraleurs. Elle donna la préférence au eune duc d'Ha- 
milton, et lui promit de l'épouser quand il serait de retour 
d'un voyage sur le continent ; mais le capitaine Hervey, de- 
venn comte de Bristol, ayant réussi, au moyen de lettres 
interceptees, à lui prouver l'infidélité du duc, elle se déter- 
tnina à l'épouser sertCment, le ter autel t74. Dës le len- 
demain de ses noces, llisabelb éprouva pour son mari une 
répulsion telle qu'elle se sépara de lui immédiatement, et le 
fruit de cetteunion malheureuse ne vécut que peu de temps. 
Pour se soustraire aux instances de sa reCe, de Hamilton, 
etd'autres adoraleurs, elle passa sur le continent. A Berlin, 

KINGSTON  KIIQUE 7;' 
arsenal et des chantiers pour la marine mili ' sa conx er.<alion spirituelle lui valut l'amitié du grand Fré- 

dëric, et elle n'eut pas moins de succès  la cour de Dresde. 
Revenue à Londres, Pattention générale dont elle était l'ob- 
jet lui rendit encore plus odieux le mariage qui enchalnait 
désormais sa destinée. En conséquence, pour en laite dis- 
paraitre la preuve, elle s'en alla un our trouver le curé de 
Lainston, et rëussit à arracher, sans qu'il s'en aperçt)t, le 
feuillet du registre de la paroisse o/l se trouvait inscrit son 
acte de mariage. Bientôt après elle apprend que son mari, 
devenu immensément riche, par suited'un héritage inespéré, 
est tombé morlellcmenl malade. Ele regrette alors de s'être 
trop pressée, et ne détermine pas sans peine le curé  réin- 
tégter le feuillet à la place qu'il doit occuper dans le registre. 
On conçoit combien elle dut lre virement desappointée 
qmnd, ì peu de temps de la, elle vit d'un cté le comte de 
Bristol revenir en parfaite santë, et de l'autre le richissime 
duc de Kingslon solliciter sa main. Bristol, «lui probablement 
n't'tait pas non plus fché d'ètre débarrassé de sa femme, 
con_«entitalors à un divorce amiable, qui fut prononcé par la 
cour ecclésiastique des Doctors entamons, mais sans qu'on 
prit soin d'observer toutes les formalités prescriles par la loi. 
Èfisabeth Cbudleigh, libre désormais, ou du moins se 
croyant telle, épousa donc, avec l'autorisation de l'arche- 
vêque de Cantorbéry, le duc de Kington. 5lais ce second 
mariage ne fut t, as plus heureux que le premier. Le duc, 
homme d'une constitution peu robuste, de mteurs douces 
et d'un caractère tranquille, mourut, en 773, des chagrins 
cuisants que lui causait la legèreté de conduite de sa lemme, 
à laquelle cependant il legua son immense Ibrtune. Plus 
que jamais Elisabelb se précipila alors dans le tourbillon 
des plaisirs, et ses prodialites, ses excentricib.s firent tant 
de scandale ì Londres qu'elle dut entreprendre un v,qage en 
Ilalie, ou par son luxe et son faste elle produi»it une itapres- 
sion des plus vives, et o/ le pape et ses cardinaux la traiteren! 
à l'Agai d'une reine. Un aveot.urier, qui se faisait passer pour 
le d uc d'AIbanie, réussit a toucher son cœur et allait I¥pouser, 
quand un procès en bigamie, que les heritiers naturels du 
duc de Kin,ston, lui inlenlérenl devant la chambre des Iords 
h l'effet de lui enlexer son riche béritage, vint l'arracher aux 
illusions de sa vie de dissipations. Quand elle revint a Londres, 
en 16, a l'effet de s'y defendre contre l'accusation dont elle 
était l'objet, elle y trouva l'opinion publique dd/ prévenue 
contre elle / un si haut degré, que les petiL theltres 
jouaient des pièoes satiriques dont elle etait PliCome. Des 
membres de la famille royale, des ministres suivirenl avec 
la plus vie curiosité les debats de ce procès, qui passionna 
toute l'aristocratie. Malgre l'habileté de ses défenseurs, la 
ducbesse de King.ton ht déclaree coupable do crime de 
bigamie ; mais en vertu d'un privilége inhérent  la pairie, 
il lui fit fait remise de la peine, qui et)t été appl quee a toute 
autre, et consistant dans l'apposition d'un let rouge sur la 
main droite. Par une bizarrerie qu'on a de la peine ì s'ex- 
pliquer, l'arrêt de la cour des pairs n'ayant point cassé le 
le-rament en mème temps que le mariage, les béritiers du 
duc de Kingston se trouvèrent sans droits pour lui contester 
l'héritage de leur auteur ; et ce lut bien inu.ilemnt qu'ils 
esayèreut encore d'une voie detournée pour le lui cnle'er. 
Les ttibnnaux repoussèrent l'action qu'ils lui intentérent 
alin dela faire déclarer prodigue et dissipatrice. 
Bedevenue maintenant comtesse de Bristol, Esabeth 
Chudleigh s'en alla voyager sur le continent;et en Russie, 
oU elle s'était rendue a bord d'un aisseau qu'elle avait 
fait construire exprès, l'tropCutrice Catherine lui fit l'ac- 
cueil le plus brillant. Son retour par la Pologne fut une 
vraie marche triomphale. Elle acheta ensuite le ch'Steau de 
Saint-Assise  près de Fontainebleau, o/l elle recul au mi- 
lic d'un luxe tout princier. C'est la qu'elle mourut, le 28 
aoot 17sa, après une courte maladie. Son testament, em- 
preint de toute la bizarrerie de son caractère, fut cassé au 
profit de. hëfitiers naturels da duc de Kingston. 
I.l IXE. Voye: 
KIIQUE (Acide). f'oe-- Q.-«qe (Acide;-. 



776 
IIOSQUE, mot emprunté par notre langue - celle 
de Turcs, et par notre architecture à celle de l'Orient. Les 
peuples des contrées oriintales, placés sou un ciel ar- 
dent, se livrent avec délices, durant les chaudes heures du 
iour, à ce repos que tes Espagnols et les Italien ont rais 
en honneur sous Ic nom de $ieMe. Mais, par un raffine- 
ment de mollesse et de luxe, tes Orientaux consacrent 
cet usage de pelils pavillons appelés iosque : là ils 
prennent le frais et se livrent à la conternplation de la nature 
et au dolce .far niente. Toutes les rnaisous de plaisance du 
Bosphore ont des kiosques places sur leurs terrasses on à 
l'exh'émité de leurs jardins. 
Depuis que le go0, chinois et irr«gnfier s'est introduit 
parmi nous, nos jardins sont orués de pavillous à couver- 
turcs recourbées/ la chinoise, ayanl des portes et des 
cbsis en entrelas, des ornemeuts imités des ornernenls 
chinois, et dont tout l'ameublement est destiné à rappeler 
un go0, étranger : ces pavillons forment de petits cabinets 
ou de petits salons, destinC, comme ceux qui leur ont 
servi de modèles, au repos et à la raéditation ; seulement, 
la rigueur de notre climat, en les rendant inuliles la ma- 
jeure partie de Fannée, a exigé que tïutérieur de ces petits 
bàtirnents de plaisance pùt demeurer ouvert ou clos à 
Ionté. C'est la ce que nous appelons des tdosques. Mais 
comme il est rare que nous consersians aux usages et aux 
choses que nous importons chez nous leur simplicit et leur 
destination primitives, le kiosque a dja comrnencé  sortir 
dq demi-jour des bosquets, et il s'est élanc dans les jar- 
dins publics les plus ruliers : on en trouve au jardin du 
Luxembourg et au Palais-Bu)al, badigeonnés d'an grand 
luxe de dorures, et servant de cabinets littéraires pour les 
IOUruaux, d'abris à des marcl,ands de loujo.x, etc., après 
avoir eu d'abord une destination toute différente et bien 
plus prosaïque. Le jardin des Tuileries a sous ses grands 
bosquets deux kiosques disisés par cases, et dont les pro- 
mencurs estiment l'usage. Pauvres Turcs, que dictez-vous 
i vous Ciez témoins de la profanati,n dont nous nous 
rendons copables envers la partie de sus palais ou de vos 
jardins que vous affectionnez le plus? 
i{IOUFIOU. Voile--- Jxœot. 
IIIOUXG-TSEOU. l'o/e-- Hi-r«. 
IHOUPERL! ou KIUPEBLI. Voulez 
IIPTC|iAIL Voe-- K_PTCnL 
111CIIER (Axn,xse), célèbre jésuite allemand, naquit 
à Geiss, près de Fulda, le 2 mai 1601. Après avoir terrainL de brillantes Cudes, il entra dans la société de Jésus, et 
ïut nommé professeur de rhëtorique au college de V(urtz- 
l»ourg en Franconie. Ce malheureux pays étant devenu le 
tbtre de la guerre, il se sit forcé de chercher un ,efge 
en France; il y choisit pour asile le coliëge des jésuites 
d'Avignan, dans lequel il occupa une chaire pendant deux 
ans. Il obtint ensuite une place de professeur h Vienne; mais 
sa réputation s'étant répandue jusqu'a Ruine, le pape l'ap- 
pela dans cette ,cille. 11 visita ensuite MaRe, la Sicile, le midi 
de l'ltalie. Au retour de ces divers vo)ages il se fixa pour 
toujours dans la capitale du monde chrctien, ou il proïcssa 
les mathërnatiques pendant huit ans. 11 mourut à Borne, le 
28 novembre 1380, laissant au soliCe romain des jésuites 
un riche cabinet de physique et d'objets rares de toutes es- 
pèces, qui faisaient regarder cette collection comme la plus 
intéressante de ce genre qu'il y et alor en Europe. 
Parmi ses ouvrages, qui sont presque tous écrits en la- 
tin, nous citerons : Ars magna lucis et zmbroe ; J'imitioe 
Gnoraonicœe catoptricz ; Obeti, eu.s oe99ptiacus ; 
oegptiaeus ; ller ezstaticm terrestre; Mundus szbter- 
canons; China ill«straa; Turris £abel; Mundus raagus; 
Magia catoptrica. 
Le përe Kircher est le premier qui ait chercbé h déchif- 
frer les hiéroglphes ég,yptiens; il a démontré la possibilité 
des effets du fameux miroir d'Archimède; il en construisit 
un Qui produisait une chaleur considérable. Kircher s'était 
b :aucoup ocotpë de catoptrique : on lui attribue l'invention 

KIOSQUE  KIRGHIS 
de la lanterne magique. La langue chinoise avait 
encore l'objet de ses travaux ; il avait eu l'idée d'un traité 
de pasigraphie, au moyen duquel tous les peuples auraient pu 
s'entendre. D'un autre cOté, les ouvrages du savant jésuite 
sou, trop nombreux pour qu'ils soient bien étaborés; aussi 
sont-ils remplis d'erreurs et de choses inutiles. TztssénnL 
I.! RCH[|OL2| ville de Livonie, btie sur la Dwina, est 
clèbre dans l'histoire, par la graude victoire qu'y rernporta, le 
27 septembre 1605, une potite armée polonaiseaux ordresdu 
hetman Chodkjewiez sur une armée de 16,000 Suédois com- 
mandbe par Charles IX, qui dut alors lever le siCe de Pdga. 
I{IRED. Vo9e'- CAm. 
I{IRGIiiS ou KIRGHIZ-KAISSAKI, Kosaks des Slep- 
pes. Tel est le nom d'une nation disséminëe depuis les froa- 
tières de la Chine etde la Russie jusque sur le terrioire de 
l'Europe, dont la langue est l'un des dialectes turcs les plus 
purs, mais dont la physionomie indique cependant l'origine 
roule mongole. Tandis queles Mongols appartiennent comme 
idolâtres au bouddhisme, les Kirghis professent l'islamisme, 
tout en le défigurant par uue foule de superstitions, par 
exemple leur croyance en l'infaillibilité de leurs boJys ou 
devin<, et en n'ayant qu'une idée très-con{use de ses 
,fines. Depuis un temps immémorial ils se divisent en grande, 
rio/eurle et petite borde, qui toutes étaient autrefois tri- 
bu.aires de la Chine ou du khanat de Khokand, dans le voi- 
sinage duquel la grande horde est plus particuliërernent 
fixée. Cette horde, qui est de beaucoup la plus puissante 
des trois, célëbro par sa bravoure, extrérnement redoutée des 
Russes, à catlse de ses continuelles irruptions sur leur terri- 
toire et de l'inaceessibilité des rnontagnes où elle se réfugie, 
se détacba presque tout entière en ,St9 de la domination 
chinoise, pour venir se placer sous celle de l'empereur de 
Russie. C'est aussi la seule qui ait réellernent accepté le joug 
russe. Les deux autres, la molenne, fixée entre le Sarasou 
et le Iemba, et la petite, entre le Iernba et l'Oural, quoique 
nominalernent sournises à la Russie depuis 1731, sont de- 
meurëcs 1 peu près indépendantes,et inquiètent constamrnent 
les Russes par leurs brigandages. Aussi les Russes ont-ils 
essaiWde se protéger contre leurs irruptions en Cevant 
une serte de forts sur Is rives «les fleuves servant de li- 
mites à leurs territoires respectifs, il n' a de réellernent sou- 
mise/ la Russie, comme la grande horde, que la partie de 
la petite horde qui, sous le nom de borde Lulejewi ou in- 
térieure, habite» entre l'Oural et le Volga, la cantrée désignée 
sous le norn de steppe des. Kalmozzcls. On estime que la 
mol/orme et la petite bordes ne forment ensemble que de 30 
/l 40,000 IiOites ou tontes; tandis que l'on évalue à plu- 
sieurs millions d'Arnes le nombre total de la nation kirghise, 
placée soit sous l'autorité de la Chine, soit sous celle de la 
Russie, soit encore sous celle du khan de Kbokand, ou bien 
restéc indépendante avec ses kbans ou sultans particuliers. 
Tous les Kirghis d'ailleurs sont nornades, et errent dans 
une immense steppe, dont l'Cendue n'est pas moindre de 
2x,000 mriamètres carrés (voe-- l'adicle ci-après). Les 
bëtcs  cornes, les mou,oas, les chevaux et les charneaux 
constituent leur nnique richesse. Ils sont naturellernent in- 
quiets, dissirnulés et enclins au vol. Depuis que les Russes 
ont conquis la Sibérie, oi ils habitaient d'abord les ries 
de l'lenisséi supérieur, ils n'ont point cess de guerroyer 
contre eux. Ils se partagent en nobles et en vilains (les os 
blancs et les os noirs). Parmi les nobles on distingue les 
les khans de bordes, chefs principaux, et les saissans ou 
airaa, chefs de tribus isnlées. 
HIRGlilS (Steppe des). On appelle, ainsi, dans l'ac- 
ception la plus large, t'immense territoire borné h l'ouest par 
le Volga, à l'est par l'Irtisch, au nord par le désert d'Obsch- 
tsehéi, par les versants sud des monts O,,ral et par le 
.Tobal, et au sud par l'Ala-Tau, le Sir-Daja, la mer d'Aral 
et la mer Caspienne, attendu qu'alors on considère la steple 
des Dsongares, la steppo de l'Irtisch et de Pisirn et la steppe 
des Katrnuucks comme en faisant partie. On est d'autant 
plus en droit de grouper c«s divers territoires sous une dê- 



KIRGHiS 1 
nomination eommnne que Te caractère de cette vaste surface 
de terrain est presque partout le mème, qu'il y règne cons- 
tamment la même monotonie, qu'on n'y rencontre pas plus 
d'élévation que de dépression quelque peu sensible du sol, 
qu'aucune grande forét ne vient y rompre l'uniformité du 
désert, qu'on n'y rencontre que des herbages alteignant la 
hauteur de l'homme, avec de larges fleurs, riches en sucs, 
et offrant aux habitants nomades deces eontrées une nour- 
allure facile pour les bestiaux. Les déhris de constructinns 
qu'on y renoentre ç et là, et qui ont ét décrits dans les 
ouvrages de Pallas, Mùlfler, de Bronewski et Lewschim, et tout 
récemment encore dans ceux de Klap.roth, de Goebel et de 
Chaykoff, appartiennent incontestablement  diverses épo- 
ques ; et il se peut que les unes proviennent de Mongols, tes 
autres de Dsongares et autres tribus kalmouckes qui habi- 
taient jadis ces courtCs. Ces ruines se rencontrent de plus 
en plus fréqnemment t me.cure qu'on approche du Volga, 
où l'on finit même par trouver la trace de rangCs entières 
de maisons au point où l'Achluba se jettedans le Volga. On 
est aotorisé à en conclure qu'à une ípoq,e dont on a perdu 
méme le souvenir il exista la une nation civilisée, qui diffé- 
rait complétement par ses mœurs et son intelligence de« 
hardes nomades qu'on y rencontre a.jourd'fiui. {3'est aussi 
dans ces derniers temps seulement qu'on est parvenu à alC 
montrer que là se trouvait autrefois le siége du poissant 
empire de K a p t c h a ck ou de la Horde d'Or (rave-'. K_sA, .), 
qui pendant deux siêcles fut l'effroi de la Russie. 
La partie de la steppe où ou rencontre le plus grand 
nombre de ces ruines, s'étendant entre POural et le Volga 
et du dêsert de l'Obschtschéi jusqu'à la mer Caspienne, 
trefois le pays originel de la Horde d'Or, est souvent alC 
signée ausst sous le nom de steppe des Kalmoucks, et quel- 
ques-uns ve,lent q,e les limiles s'en étendent à l'est jusqu'à 
l'Iemba. D'un antre c6té, on comprend aussi sous cette dë- 
nomination le territoire situé en deçà du Volga, et de la se 
prolongeant jusqu'au Don, qui s' rattache itnméàiatement; 
de sorte que le.« versants des hauteurs du Volga au nord, les 
railCs du Kouban et de la Kuma au sud, la mer d'Azof à 
l'ouest et la mer Caspienne à l'est, formeraient les limites de 
cette steppe, qui d'ailleurs est tout autant et peut-être même 
encore plus habitée que l'autre par des K l m o u c 
I-IRICUDBlt IGHT ou EAST-GALLOWA¥, comté du 
sud-ouest de l'{".cose, qui avec le comlé de Wigton, qui 
l'avoisine à l'ouest, forme le district de Galloway et compte 
40,310 habitants sur une surface de 28 myriamètres carrés, 
dont le quart seulement est susceptible d'ètre mis en culture. 
.Son sol est presque en entier couvert de montagnes et «le 
collines. Les chaines de monlagnes qu'on y trouve au nord, 
appelCs Kell's Ramje, sont complétement pelé«s et stériles. 
Elles contiennent un grand nombre de petits lacs, et leur 
point d'élévation extrème est de 830 mètres. Les cours 
d'eau le plus importants sont la Dee, le [ith ci la Croc. 
La partie la plus fertile de ce comté est, ad sud, la plaine 
qui longe la mer; et le climat y est aussi plus doux q.e 
dans la montagne. L'aiculture, obligée de lutler contre 
l'ingratitude du sol, n:en réussit pas moins à produire beau- 
coup de grains, de betteraves et de pommes de terre. En 
raison de la vaste étendue des pàturages, l'Cève du bétail 
y est bien autrement favorable. L'ancienne race de chevaux 
de Gallowas', jadis si célèbre, a presque compiétement dis- 
par., et est remplacée aujourd'hui par une racede petite taille, 
mais vigoureuse. On a abandonné l'exploitation des mines 
de plomb de [evtonstewart. 
Le chef-lieu de ce comté est Kirkcudbright, ville située 
au fond d'une baie, à l'embouchure de la Dee, avec un bon 
port, et ,780 habitants. 
KII-tSCH ou plut6t KIRSCHEN-WA$SEB. eau dece- 
r/ses,dénomination empruntée à la langue allemande, et,lui 
sert  désigner l'eau-de-vie extraite, par la distillation, des 
oedses sauvages. Ainsi que le rhum, le kirsch dut lulter 
contre les reCes présentions avantd'obtenir le même triom- 
phe. Aujourd'hui sa réputation est presque populaire : 

KISSELEFF 
ceci s'explrlue : le kirsch, honoré de l'estime de Eober 
Mu»aire, pouvait-il ne pas tre la liqueur h la mode dan un 
siècle où on veut des #.»notions à tout prix, off on ne parle que 
d'orgies œechevelées, de plaisirs corrosit's, dMere* voluptés, 
où des femmes, dites humanitaire,, sont vues courant le 
monde en veste et culotte, la cravache au poing et la pipe 
h la ho.che? A Paris surtout, le kirsch est à l'apogée de 
sa vogue. Il a détr6në le rfium, l'oau-de-vie, tootes les autres 
liqueurs, depuis le marasquin de Zara jnsqn' l'Elixir des 
braves : htons-nous d'ajouter que la suprématie lui était 
réellement due. A la force des spiritueux le kirsch unit un 
got agrëable, parfum, sans pareil ; il caresse delicieuse- 
ment la palais en mme temps qu'il réd»a.ffe le cœur et la 
tte. L'envie et la jalousie ont pu seules chercher à a¢cré- 
diter le bruit q,m ce breuvage parvenu n'avait pour base 
q»e l'acide cyanhydrique, c'est-A-dire l'un des poisons les 
plus violents qu'on connaisse. La preuve que c'est là une ca- 
lomnie gratuite, c'est que plus d'un liftCuteur de ma con- 
naissance et de la v6tre lui doit ses brillantes inspirations, le 
fashiunahle du café de Paris les belles heures de son existence, 
et l'habitaC passablement gueux, du café Sucrate l'oubli de 
ses malheurs et ses rares moments d'extase. La foret Noire 
est la patrie par excellence du kirschen-wasser. 
Charles Dt;roof. 
IISClll.XEF chef-lien de la Bessarabie, est en voie de 
prosperité touiours croissante depuis que cette province 
partient à la B.ssie, et compte déjà 45,000 habitants. Tra- 
versée par le Byk, un des aflluents du Dniester, qui y forme 
de nombreux détours, cette ville s'étend sur trois mameions. 
On y trouve un beau jardin impérial, trois superbes fon- 
taines jaillissantes entourées de bassins de marbre, un sé- 
minaire ecclésiastique grec, un gymnase, huit autres écoles, 
quatorze églises grecques, une belle s)nagogue et plus de 
de,x cents fabriques. La population, qui se compose de 
B,sses, de Kosak% de Polonais et de j,ifs, sans compter 
un certain nombrede Moldaves, de Grecs, de Bulgare% d'Armé- 
niens, de Bohemiens et d'étrangers, notamment d'Allemand. 
et d'Italiens, fait un commerce qui prend chaque jour de« 
proportions pl importantes; ce fi quoi contribuent acti- 
vement les nombreux juifs domiciliés dans cette ville. Ki.- 
chiner, qui il ) a vin-cinq ans ne ressemblait qu'à un grand 
village oriental, s'est tellement embellie qu'on peut aujour- 
d'hui la ranger parmi les villes d'Europe de second ordre. 
I{ISFALUDY (ALxasnae ne), poëte hantais, qui 
a exercé une grande influence sur le développement et le 
perfectionnement de la langue et de la littrature de ses 
compatrloles, né en 1777, d'une famille noble, propriétaire 
dans le sud-ouest de la Hongrie, passa sa jeunesse au ser- 
vice, loin «le sa patrie. Piu tard, il vécut dans sa terre 
de Sumegh, eu Hongrie, oh il mourut, le 30 octobre 
Par ses poésies lyriques et élégiaque.% qui font époque dans 
la littêrature hongroise, il enlhousiasma dans sa patrie tous 
les esprit généreux. 
Son frère Charles de Ktsrxtnr, n en 1790, mort à 
Peth, le ! 1 novembre 1830, n'est pas moins remarquable 
sous le même rapport. Il emprunts les sujets de ses drames 
nationaux aux temps primitifs de la Hongrie et à l'époque 
héroiqne de la tarte entre le paganisme et le christianisme 
puis entre celui-ci et l'islamisme des Mongols et des T,rcs, 
et enfin aux temps des guerres civiles intérieures, ils ont 
obtenu en Hongrie un immense succès; cependant, sous le 
rapport du style, la critique reproche, non sans raison, 
à cet écrivain de trop donner tantôt dans le néologisme, 
tant6t dans l'archaïsme. 
IISSEEFF (NCOLt! nE), ex-ministre piénipoten- 
tiaire de Russie à Paris, est né vers 1800, et entra de bonne 
heure dans la diplomatie. Après avoir rempli pendant plusie, fs 
années les fonctions de secrétaire de légation à Berlin, pui 
celles de conseiller d'atnbassade à Londres en t838t et à 
Paris en 1839, il resta dans celle dernière capitale en q,a- 
litWde cbargë d'affaires quand, en lB-il, une q.eslion d'Ci- 
quette amena e rappel de M. de Pahlen, titulaire de l'ara. 



778 KISSELEFF -- 
bassade. Cë oste, qui d'abord n'avait d'antre importance 
que comme simple poste d'observation, en acquit beaucoup 
vers la lin du règne de Louis-Philippe, époque où s'opéra 
entre les cabinets de Saint-P.tersbourg et des Tuilleries un 
rapprochement devenu bien visible lors des affaires de S,tisse 
par l'entente cordiale qt,e les deux puissances manifestë- 
rent sur cette q,estion, et suivi bientét après d'une acqui- 
sition de 5O millions de rente 5 pour 100 français faite pour 
le compte de l'empereur Nicolas. La révolnlion de Février 
changea complétementla situation de M. de Kisseleff, et le 
força de se borner à un réle purement passif, en attendant 
des ci,¢onstances meilleures, qui parurent venues quand 
Louis-apoléon eut été Cu p,'ésident de la républiq,e. En 
1851, l'empereur Nicolas, pour témoigner à M. de Kisseleff 
combien il élait satisfait de ses services, le créa ministre 
d'ÉtM, et lui donna le titre de ci,er de la légation de Paris. 
On «lit que M. de Kisselefl htt de tous les diplomates étran- 
gers accrédités dans cette capitale le premier qui instruisit 
son malt,e du coup d'Etat du  décembre lsSt. L'année 
d'aprè% le rétablissemvnt de l'empire ayant donné lieu h quel- 
que¢ difficullés cuire les deux gouvernements, M. de Kis- 
selef[ partit pour Saint-Pélersbourg afin d'y aller prendre 
le; instn,ctions nouvelles dont il avait besoin et se justifier 
de la conduite qu'il avait observée vis-h-vis du prince-pré- 
sident de la r¢publique. Ou est autorisé à croire qu'il y 
réussit complétement, puisqu'en janvier 1853 il présentait 
aux Tuileries se lettres de créance comme envo'd etraor- 
dinaire et mini_tre plénipotentiaire; et la guerre qui Ciais 
en Orient au commencement de l'année suivante mit ule 
fin à sa mission. 
KISSELEFF { PJ, omte n), frère aihWdu précéden{, 
général et ministre russe, est né en 17s8, d'une ancienne fa- 
mille de boyards. Aide de camp du prince Bagration et, 
1812 et de l'empereur Alexandre en 1813, colonel en 
major gé,éral et chef de l'Atan-major gênéral en 1817, il di- 
riges en celle qualilé les opérations de la campagne contre 
les Turcs en lSS, et fut nommé lieutenant génerai en 
eq mëme temps que commandant du 4  corps de cavalerie 
de r'serve, à la tgle duquel il bu/tin le pacha de PI,ilippopolis. 
Appelé à la fin de la guerre au gouvernement de la Moldavie, 
il reconstitaa l'a,tmiuitrallon de celle province épuisée, et 
mrita la reconnaissance des populations. En 1833 il.reçut 
le commandement du corps d'armée euvoyé au secours du 
sultan contre l'armée victorieuse du vice-roi d'Ëgypte. 
L'année suif'aune il fut nommé minish'e des domaines, et 
dans l'exercice de ces haules fonctions fit beaucoup de bien 
aux dix-huit millions de pa.'sam de la couronne coufiés à son 
administration. Il a épousé une comlese Sopbie Polocka. 
IIISSÉTIE on KISTIE, contrée située au milieu des 
montagnes du C a u c a se, ainsi appelée Ou nom de ses babi- 
tanls, les hïsles ou Kistin:es, peuplade formant l'un 
rameaux de la ,'are des Midschegir ou Tschitscbenses, qui 
habite le centre du Caucase. Les Kistinzes sont souvent 
pelës aussi Tschentschenses, de mme que ce nom de Kis. 
sélie est employé comme synonyme de Tscheschna. 
IISSIXGEN (Eaux miné,'ales de). Ces eaux, situ6es 
à huit myriamètres au nord de Wurtzbourg (Bavière), se 
rapprochent beaucoup des eaux mëres des salines. Elles 
so,t três-chargées de sel, comme il convient , des eaux 
qui ont séjourné dans des mines de sel gemme ou qui ont 
traversé des mines de cette espèce. Elles sont salées plutét 
reinAraies salines, ainsi que nous l'avons dit des eaux de 
Hombourg et de Naubeim. os eaux de Balaruc et de 
B o n r bu n n e, pourtant bien autrement efficaces, sont fades 
en comparaison de celles-là. Mais nos eaux de France sont 
tbermales, composdes de principes mieux proportionnés, et 
apparemment plus élaborées dans le sei de la terre, plus 
assimilables à nos humeurs et déjà en queiq,e sorte ani. 
malisées. Les eaux de Kissingen ont une température de 
, à fS degrés, selon la profondeur des conduits d'oh elles 
sonrdeut ; on dit même qu'une des cinq souroes marque 19 
degrís centigrades, mais le fait a besoin d'ètre véritié. On 

KLAGENFLItT 
y trouve des muriates ou hydrochiorures de soude et de po- 
tasse, de chaux et de magnésie, des bromures et des tu- 
dures, principes significatils et précieux ; des carbonales de 
différentes bases alcaline« des sulfates et phospbales de 
soude, etc. A s'en rapporter aux tableaux d'analyse que 
nous avons sous les yeux, les eaux de Kissingen contien- 
draient presque autant de sel que l'eau de mer, et cela 
n'est pa croyable. 
Les cinq sources portent les noms suivants : 1 ° Le RaAoc'.!l 
(ou Raggozzi), eau trè-purgati'e ; OEo le Pandur; 3 ° le  he- 
resienbrunnen ;  le Maxbrunnen ; 5 ° le Soolensprudel , 
qui est la moins froide des cinq; les deux dernières sources 
sont les plus gazeqses. Le !la99o----i jouit d'une assezgrande 
réputalion : c'est la source ,le prédilection des bypocondria- 
ques, des gens rei,lels et des gouttet, x. On y renconlre aussi 
des hé,no,'rhéidaire% des rl,umatisants, des scrofuleux, doe 
cldoroliques et qudques dartreux, et m,ne des phthi- 
siques. On voit des malades qui en boivent des cruches cri- 
nières, et qui en font ample provision chez eux pour toute 
l'année. Le fait est qu'elles s'cxportent sisCent. Le Pandur 
a des sertus analogues au Raggozzi : on boit à cette der- 
nière source, on se baigne a l'a, tlre. Le Maxbrunnetl sert 
de boissou, comme le Raggozzi ; mais l'eau en est plus 
agréable. La saveur en est piquante et aigrelette comme 
celle de l'eau de Seltz. On la couseille dans les affections 
gastriques, dans quelques ,naladies de l'appareil urinaire, 
et dans l'asthme humide. 'Elle a quelquefois roussi ca,tre les 
vomissemenls nerveux et dans les affections vermineuses 
ds enfants, qui en boivent sans répngnance. 11 en est de 
mme du Theresienbrunnen. Le Sooletsprudel s'emploie 
sous forme de bains, comme le Pandur. C/est la source qui 
convient le mieux aux Icmmes nerveuses. Quant à celles 
qui ont à .v recourir pour des maladies plus mysterieuses, 
il y a dans l'endroit une mais,m particulière, une sorte d'é- 
tablissement ad hec amplement pourvu de douci,es. 
Les frères Bolzano, fermiers des sources reinCaies 
ro)ales et des maisons de sanlé de Kissingen et de Bocklet, 
a.ioutent h leurs notices : « Dans notre maison de santé de 
Kissingen, on trouve, outre la salle à manger et la salle de 
danse, les chambres de conversation, la roulette, le pha- 
taon, etc., etc. » Excellenls Allemam]s, avec leurs P. S. et 
leurs et coelera, t Et oilà le peuple h qui l'on décerne de 
toutes mains la pahne de la natvete et de l'innocence ! Il est 
vrai qu'on peut, à la rigueur, objecter que les Irëres Bolzano 
ne sont pas allemands. A la bonne heure! bene Irovalo. 
D  lsidore Bouno,. 
IIISTES ou KISTI\ZES (Les). Voyc-- KIss.tE. 
I|UPERLI. Voyez KOEPRILI. 
I{[ZLAR-AG.. ou KISSLAR-AGA. Voye-- 
14L.StGEXFURT chef-lieu du duché de Carinthie et 
siAge du gouverneur impèriai, compte 13,000 habitants; il 
est situé dans une belle et riclte plaine, non loin des petits 
cours d'eau qu'on appelle le Glml et le Glan.[url, ainsi quv 
du lac de Klagenfurt ou de Woerth, qu'un canal met en 
communication avec la ille. Klagenfrt est peu animée, et 
forme un carré  peu près rrgnlier, aec des rues larges et 
droites. Aujourd'hui encoreeile est le siCe d'ne cour d'al» 
pel pour la Carinlbie et la Carniole, qui ne peut d'ailleurs 
tarder à ëtre réunie à celle de Styrie. On y trouve un gym- 
nase supérieur, avec une bibliothèque publique un séminaire. 
une école normale primaire, une école industrielle et un 
institut de sourds-muets. E fait de sociél$s utiles qu'elle 
possède, il faut citer la Societé d'Agriculture et d'Industrie, 
la Sociét6 Historique, qui publie chaque année se Mémoires 
et met à la disposition du public une riclse bibliothèque. 
Parmi les édifices publics, on doit une mention à la tour 
de l'église de Saint-Ède, liante de 96 mètres ; à l'h6tel de 
ville, édifice du quatorzième siècle, contenant les armoiries 
de la noblesse carintbicnne, et le palais épiscopal, où se 
trouve une riche galerie d'œuvres d'art et de minéralog. 
La belle place du marcl,é est ornée d'une statue équest:',  
en plomb de.l'empereur Léopo!d t ¢, et d'uue statue en pied 



kLAG ENFURT 
e ",Iarie-Thdrse. Parmi les grands élablissemevts indus- 
triels qu'elle possède, on remarque une aç.te labqne de 
crnse, la plus importante qu'il y ait en Autfiche, et la ma- 
nuhcture de draps des frères Moto. 
Klagenfu aant été laissée en dehors du rseau de che- 
mies de fer de l'Allemagne, son commerce de transit est 
anéanti, de mmo que son commerce d'exportation a sin- 
gulioement diminué. Mais on annonce la construction pro- 
chaine d'un embrandement qui la reliera au grand chemin 
de [er du sud. Ses fo:tir[cations, rasCs en 1809 pu« les 
troupes frangin, ont té transformées en promenades. 
LAPK& (Goçs), l'un des principaux chefs de lin- 
surrection hongroise, t nWle 7 avril 1820» h emeswar, o 
son père remplissait l fonctions de bourgmestoe. Entre en 
1838 coulée cadet dans le e r,»gimcnt d'arti[lee de cam- 
pae deux ans après il passa dans' le corps des bombar- 
diers, et étqdia alors avec ardeur les sciences mili[a;res. 
Nommé  184 soue-lieutenant dans le régiment hon- 
grois des gard du cos, il put ainsicontinuer à Vienne 
¢,tudes sur l'ad militaire. Après cinq an passds dans 
gardes, il fut, en [S7, nomme lieutenant-colond au 12  r- 
gimet de fronfières ; mais, ne pouvant se plier à la mono- 
tune uniformité de oe genre spëcial de service, il donna 
démis$ion. Il tait h la veille d'entreprendoe un grand voyage 
h l'Cranger, orsqne éc]ah la révolution de mars I8s; et 
il s'empressa aussitdt de se mettre à la disposition du 
uveement national. Envoyé d'abord en Trans)lvanie, 
pour y gagner les Szeklers à la use de la ]Iongrie, il 
bien[dt après employé dans le service actif et nommé cap[- 
laine an 6 « bataillon de ho n ve da, grade d.ms leql il fit 
avec di»tinction lacampagne d'été contre les Sebes. Promu 
au grade de major, on Venvoya h Komorn, puis h etc»bourg, 
diriger les travaux de dfençe entrepris sur ces deux points. 
A la fin de novembre il partait rejoindre, en qualitë de crie[ 
d'Cut-major, le corps d'armée qui opbrait dan le Banal, ous 
 ordres de Kis. C'et lui qui arrh toutes les dispos[lions 
qui prdèrent l'aRaque des position ennemies, dont le 
rsultat fit la prise d'Alibunar, de Kaflovacz et de Karl 
dorf, ainsi que la déroute de Serbes h la tète de pont de 
Tomasovacz. Le plan d'opérations suivi par l'armée bon- 
roise au commencement de la campagne de 1849, et qui 
plus tard eut de si brilhnls résult:ds, fui également l'oeuvre 
de Klapka. 
Apr la dehite essuyée le 4 jam ier près de K a s ch a u 
par Mesaro% ce fut au colonel Klapka qu'on confia son com- 
mandement; et il réussit alors non-seulement à garder le 
passage de la Tbeiss et à assurer ainsi la capitale improise 
par le gouvernement national à Debreczin, mms encore 
h [aire bal[re pour la premiëre fois les ieilles bandes autri- 
chiennes par le leunes honçeds, et à inspirer une non- 
relie oenfiance ì l'arm»e nalionale par les vidoires de Tar- 
czal, de Kioesstur, de Hidaknbm ly, etc. Klapka prit ensuite 
 à la bataille de trois j,»urs i-rée sous les mu de Ka- 
polna (6-S [évier), de mme qu'à la brillante campagne 
d'avril, pendant laquelle il fut chargé du commandement 
premier corps d'armée; et il se disfingua sur[net à la ba- 
bille d'Isassegh ( 6 avril), oh il décida du sort de la journée, 
d  l'Mfaire de Nasarlo ( 19 avril ), qu'il enleva d'aaut 
v Damjanies. A la bataille livrée le 26 avril au corps autri- 
chien venu ur assié%er Komorn, ce tut Klapa qui aêta le 
plan d'attaque, et pdant l'affaire il commanda l'ailegauche. 
Il oemit alors n commandement à Na-Sandor, pour aller 
plir provisoirement àDebreczin les fonctions de ministre 
de la erre, position dont il usa pour s'efforcer d'introduire 
plus d'unité dans les opérations et plus de discipline dans 
l'arm !1 conçu[ alo our la mpae d'été un plan 
que le oenseil de guerre adoph, mais que plus tard le mau- 
vais vouloir de GOe rgei empcha de mettre à exécution. 
Le siCge d'Of fut entreps ctre l'avis formel de K[apka. 
Quand après la pse de oet plaoe Goergei fut nommé mi- 
uis[oe de la erre, Klapka reçu[ le commanderont de la 
l'lace de Komorn. Il s'elfor alo de faire sser, en 

-- KLAPROTI1 

779 
parente tout au moins, la mé.iutelligence .nrvenne entre 
Ko.su th et Goergei, et de preveuir la rupture dclarée 
entreelx, dont la dvposi[ion de Gwrgei, prononcée le 2 juillet, 
devait étre la suite, puis fit tout pour que l'on revint sur 
cette me.ure. Dans les attaques du 16 et du'l juin, qu'il dé-- 
sapprouva, de mëme que dans les grandes batailles lit'rées 
le 2 et le 11 juillet ons les murs de Komorn, tous les hon- 
neurs de la journée furent pour Goergei et pour Klapka. 
G-rgei une lois parti pour rejoindre le gros de l'armé¢ 
dans les plaines de la Theiss, Klapka resta à Komorn comme 
commandant de la place, et stt par ses incessantes sorties 
tenir constamment en baleine Parmee assiéyeaule. Sou plus 
brillant fait d'armes fut la mrtie du 5 anti[, ou la plus grande 
partie des assiégeants per[vent sur le champ «le bataille ou 
e noyèrent dans le Danube, tandis que le reste Cait con- 
traint de s'enfuir eu désordre à Presbourg. Klapka fit un 
butin enorme en armes, argent, munitions et vivres, reprit 
possession d'une assez importante étonOne de terrain, et 
pousa mëme ses avan[-po«tes jUSqtc',. P, aab. Il se disposait 
a profiter de cette victoire pour envahir l'Au[riche et la Styrie, 
quand il fut informé de la tournure fàcfie,se qu'avaient prise 
les événemen[ sur les bords de la Theiss; et bient6t il ap- 
prit que Goe,-gei venait de mettre bas lem armes. Force lui 
fut donc de venir se renlermer dans Komorn. C'est  la 
fermeté avec laquel!e Klapka et le conseil de guerre repous- 
sèrent toute. propositions de soumis.-ion san» condition, 
que la garnison de Komorn fut rede+able de la capiL,flalion 
honorable que lui accorda le gouvernement autrichien. Elle fut 
signee le '7 septembre entre Klal,ka et le fe[d-mareehal H a y- 
nan, et la reddition de la place commena le3 octobre. Les 
condition de cette capitulation, bien q,te peu favorahle% as- 
suraient da moiu à la garnison la vie et la liher[é. Klapka 
quilta immediatement le territoire hongrois, et se rendit à 
Londres, puis de 1« il Goencs, villeq,fil habitait encoreau com- 
mencement de 1S5. Il a raconté la participation prise par 
lui il la lutte soutemm par la r«voluti,m hongroise, notam- 
ment pendanl l'CWde 1849, dans ses Memoires (Le;pzig, 
1850), l'une des meilleures sources à consulter sur le eé- 
nements dont la Honnie a cLé le lh.àLre dans les aunée 
184 et 1849. 
KLAPROTH (3I«RTIS-fENIII), célèbre chimiste et 
naturaliste, ne le I e« dccembre 173, ;x Wernigerod, fut d'a- 
bord pharmacien à Berlin. Et 1787 il fut rlu membre de 
l'Academie des Sciences de cette ville, section de clcimie; 
et bleu[Or après on le nomma professer de chimie au corps 
royal d'artillerie de campagne. Il mourut le I « jan ier 1517, 
à Berlin. membre dq conseil sup.rieur «le n[é. C'est à Ici 
qu'on e,t redevable de la découverte dt zirconium, du 
tellu re, du lit ane et de ['u r a ne; et il oe distingua par 
ses analy.,es, fort exactes pour rcpoqqe, de diverses eaux 
minra'.es. On a de lui un Essai sur la connaissance chi.. 
»ciqn«e des cor.os minran«zc (6 vol., Berlin, 1795-1$I5). Son 
Dclionnaire de Chimie, co,nposé en soc-é[e aec Wolff, 
a ieilfi. 
KLAPROTH { It.xa,-Jtts), orientaliste et voyageur, fils 
du précédent, né à Bec-lin, le I 1 octobre 1782, se con.acra 
de bonne heure a l'elude des lanzues orienlales, et notam- 
ment  celle du chinois. Après s'être fait connaltre par la 
publication du Maftasin Asialique ( Weimar, lS02), it lut 
uommé professeur-adjoint  l'renie des langues asiatiqut à 
Saint-Petersbourg. En I.s05, il accompagna le comte Golol- 
kin, envoyé à Pekin avec le titre d'ambassadeur ; mais à la 
fi-ontière de l'empire, force lui fut de rebrousser clcemin. A 
son retour, sur la proposition du comte Jean Potocki, il fut 
dèsigné par l'Académie de Saint-Petersbonrg pour aller 
continuer dans les provinces du Caucase ses recherches 
sur les peuples primi[iis de l'Asie. 11 rendit un compte 
détaillé de ce[le expédition dans nn ouvrage ielitulé : 
Voyage au Caucase et en Géor9ie, pendant les années 
1807 et 1808 { vol., Halle, 181-1. ; Cil. frança!se, revue 
et augmentée, Paris, 183 ). Ses Archives pour la langue, 
l'histoire et la littëroture asiatiques ( l vol. in-t °, Péters. 



'80 KLAPROTH 
Iourg, 1810) sont encore un monument des travaux aux- 
quels il se livra pendant le cours de ce voyage. E 181, 
par suile d'un grave abus de confiance comnfis au détri- 
ment du gouvernement russe, et dont les Mémoires de l'A- 
endCie des Sciences de Saint-Pétersbourg rendirentcompte 
dans les termes les plus sévères, il fut obligé de quitlcr le 
service russe, et se rendit en Italie. En 1815 il vint se fixer 
à paris, où le roi de Prusse lui conféra le tilre bonori- 
lique de professeur de langues orientales, en mmc temps 
qu'il le chargeait, dit-on, de transmeltre à la légation prus- 
sienne des renseignements précis sur les bom,ues et les cho- 
ses du moment. Il mourut à Paris, le 27 ao0t 1835, sans 
avoir eu le temps de mettre la dernière main à ses immenses 
travaux. On a de lui : Description 9dogralhique et his- 
torique du Caucase oriental ( Weimar, 1814); Voyage 
de Guldenstoedt en imirdtie (Berlin, t825), avec des 
notes et explications par lui; Description des provinces 
russes entre la mer Caspienne et la mer 'oire ( Berlin, 
181-t,); Catalogue des livres et rnanuscrits chinois et 
mandchoux de la bibliothèque royale de Berlin ( Paris, 
1822 ) ; Asia polyglotta ( Paris, 1823, aveeatlas, in-fol. ) : 
ouvrage dans lequel il demontre l'affinité d'orine des ha- 
lions asiatiques par l'affinité de leurs langues, et fixe l'é- 
poque où commence leur véritable histoire ; Tableaux his- 
toriques de l'Asie depuis la monarchie de Cyrus jusqu'à 
os jours ( t vol., Paris ); Mémoires relatoEs Izl'Asie ( Paris, 
1834) ; Collection d'antiquitds d9yptiennes ( Paris, 1829 ) ; 
Examen crilique des travaux de.feu Champollion sur 
les hi&oglyphes (Paris, 1832); et aussi l'important ou- 
vrage sur l'hisloire du Japon, ayant pour litre : Aperçu 
9dneral des trois royaumes, traduit de l'original japonais- 
chinois ( Paris, 1833 ), etc. 
|ILAS (Frère). Voyez Ftll (Sicolas de). 
ILAUSENIBURG (en hongrois Kolosvar, en valaque 
Klousl), capitale de la Trans y I van te, est située dans le 
comitat du mëme nom, au milieu d'une vallée romantique, 
sur les bords d'une petite riviere appelée S zamos, et comple 
4,000 habitants. Ele et enlourée de vieilles murailles, ci 
et diisée en vieille ville et ville neuve, indépendamment 
«le cinq faubourgs. Ou y voit une grande et belle place, 
quelques belles rues; et sa calhédrale, placée sous l'invoea- 
lion de saint Michel, est un magnifique monument de l'an- 
cienne architecture allemande. Indépendamment d'un lycée 
pourvu d'une bibliothèque publique, d'un sëminaire et 
,l'un couvent noble, de gymnasesel de séminaires catholiques 
et proteslants, cette ville possède un hospice pour les or- 
phelins, trois hfpitaux et plusieurs autres établissements de 
bienfaisance. La population, sauf un petit nombre d'Alle- 
mands etde Valaques, est complétement d'origine magyare, 
et a pour principale ressource le commerce, Klausenburg 
n'étant qu'à quelques mydamètres des frontiéres de la Hon- 
grie et de la Transylvanie; position qui co fait l'Cpe né- 
cessaire des relations commerciales cuire les deux pays. 
L'industrie  a pris aussi dans ces derniers temps d'asse 
notables développements. On vante surtout ses fahriques 
de porcelaine. 
Comme chef-lieu de la partie hongroise de la TransiI- 
vanie, Klausenburg filt à l'époque de la révolution de 18-18 
le grand centre du mouvement national, tandis que les 
f,»rce» autrichiennes restaient con¢entrées à Hermaunstadt, 
ville allemande et seconde capitale du pa)s. Au début de h 
révolution, le général Puclmer avait réussi à s'y maintemr 
avec les lmpCdaux ; mais le général Bem, qui s'en empara 
le 25 décembre 1848, s'y mainfint jusqu'à la fin de l'insur- 
rection hongroise, et en fit le grand dép6t de ses munitions 
et de ses remontes. 
De l'autre cfté de la rivière, sur les ruines d'un ancien 
chtteau romain, l'empereur Charles VI fit constrfire, en 
1721, une forteresse, aujourd'hui dans le plus complet état 
«le délabrement. Klausenburg est la Clauàiopolis des Ro- 
mains ; des fouilles pratiquées dans ses environs ont lait dé- 
couvrir un grand nombre de moedailles et d'uslcnsiles en 

 K LEBER 
bronze.provenant des temps de la domination romaine. 
IILEBEI (J--Ba-ns'ie) naquit  Strasbourg, 
mars 17M, d'un terrasàer du cardinal de Rohan. Dès ses pre- 
mières années il manifesta des dispositions si précoces qu'un 
curé de l'Alsace prit inlért à lui et lui donna les premiers 
éléments d'instruction. Klber s'appliqua ensuite aux scienc 
exactes, à l'architecture, et se rendit à Paris pour étudier 
sous le célèbre Chalgri n. De retour dans sa ville natale, après 
deux ans d'absence, il eut occasion de prendre parti pon 
deux gentilshommes bavarois dans une querelle ou le droit 
élait de leur cfté ; ceux-ci lui en témoignèrent de la recon- 
naissance, et lui proposèrent de les suivre à Municb, où ils 
le lireut entrer à l'école militaire. 11 en fut bientft nn de 
élèves les plus dislingués. Un jour le général autrichien de 
Kaunitz ayant eu l'occasion de jeler les yeux sur des plans 
et des dessins tracés par le jeune élève l'emmena à 
Vienne, et lui fit avoir une sous-lieutenance dans un régi- 
ment. Klëber y demeura huit ans, et fit nne campagne 
contre les Turcs; mais dégo0té de ne point obtenir l'a- 
vancement qu'il méritail, il donna sa démission, et revinl 
dans sa patrie. 
Il ¥ exerçait sa profession d'arclfiteete, et se trouvait de- 
pun.- air ans iuspecleur des monuments publics à Befort, 
quand la révolution éclata. Déjà il avait fait Itir le cl- 
teau de Granvillars, l'b@ital de Thann, l'hflel des cha- 
noinesses de 51assevaux, et l'on voil encore plusieurs des. 
sins de lui au musée de Strasbourg. A la vue de la palrie 
en danger, il s'engage comme grenadier dans le troisième 
bataillon de volonlaires de son départemeut S'es chels ne 
lardent pas à le distinguer : ,Timpfen le nomme adjudant- 
major, et bientft après Custine lui donne le grade d'ad- 
judantgénéral. Kléber se trouvait alors dans llayence, 
bloquë par les Prussiens : il signale mainles fois son intré- 
pidité, et exCule ces brillantes sorties de Biberach et d¢ 
5larienborn, qui annoncent ce qu'il sera un jour. On sali 
qu'aprè une heroïque défense, suivie d'une capitulation ho- 
norable, la garnison ,le llayence fut dirigée sur la ,'endée; 
niais les chefs avaient etWdécrélés d'arrestation, et Klébe 
était dCjà incarcéré, lorsque la Convention, mieux informée, 
proclama que chefs et soldats avaienl bien mérité de la 
patrie. Il reçut pour sa part le brevet de général de bri- 
gade. Placé à la tëte de l'avant-garde, il lutta avec 4,000 
hommes onlre 30,000 Vendéens qui l'entouraient de toute. 
parts : ceux-ci, mailres de nos cauon% n'avaient plus qu'un 
ravin h franchir pour nous couper toute retraite. Kléber 
appelle un officier dont il connalt la braxoure : « Prends 
une compagnie de grenadiers, lui dit-il; arrële l'ennemi 
devant ce ravin : tu te feras luer, et tu sauveras les cama- 
rades.--Oui, mon gCnéral, » répond l'officier avec une 
soumission sublime. Tous périrent ; mais ce devouemen! 
arrëla la marche des royalistes. 
Kléber contribua beaucoup au gain de la bataille de Cbolel, 
où l'on comhattit d'après les plans qu'il avait traeés ; tou- 
tefois, le génCral en chel n'ayant pas continué à les suivre, 
l'armée républicaine essuya au delà de la Loire des écbecs 
dont on fil tomber la responsabilité sur Kléber : il fut privé 
de son commandement, dont on investit M a r c e au ; mais 
celui-ci en serait toute l'autorité/ celui qui venait d'en ètre 
dépouillé, et dont il respectail les lumières, l'expérience et 
le courage. KIéber fit éprouver aux VendCus des éehecs mul. 
tipliés; il les pou.a entre la Loire et la Vilaine, et anéantit 
à la bataille deSavena leur armée, Iorte de 60,000 combat- 
tants ; 5 à o00 cavaliers seuls échappèrent à la morl. 
lit son entrée triomphale h lantes» où on lui offrit une 
couronne de lauriers. La Convention s'inquiétait des géné- 
raux vainqueurs : Kléber tut mis h l'ëeart; mais on ne 
pouvait se passer longtemps de ses services. 
Appelé en 1794 à l'armée du nord comme genéral de di- 
vision, il rejoignit, sous les murs de Charleroi, l'armée de 
Jonrdan, qui prit le nom d'armée de Samhre et 
déeida du gain d la bataille de FI e u ru s, battit le prince. 
d'Orauge au po,si de Marchiennes, força .Mous  Louvain, 



ltLEBER  
les pestes de la Monlagne de For, le camp retranché du 
mont Panicel, franchit la Roër, rejeta l'ennemi s,ar la droite 
du Rhin, et, revenant sur ses pas, assiégea Maëstricht, où il 
entra après onze jours de tranch6e ouverte et quarar, te-huit 
heures de bombardement. 
Cbarg6 en 1795 du commandement de l'aile gauche de 
l'armée de Jourdan, il dirige le brillant passage du Rhin à Dus- 
seldorf. Lorsque par les manœuvres de l'Autrichien Clairla)'t 
son corps d'armée dut se retirer, Kléber soutint la retraite avec 
cette habileté et ce sang-froid qui le caractérisaient dans les 
grandes occasions. L'année suivante, il force le passage de 
la Sieg, bat sur les hauteurs d'Altenkirken le corps d'armée 
du prince de Wurtemherg, le prince Charles à Ukrad, le gé- 
riCai Kray à Kaldieck, le général de Wartensleben à Fried- 
berg, et entre à Francfort après avoir opéré la réunion de 
l'armée de Sambre et Mense avec celle de Rhin-et Moselle. 
Ici s'artère le cours de ses exploits en Europe. Destitué par 
le Directoire, il vivait obscurément dans une campagne, od il 
s'occupait  écrire ses ldraoiÆes, quand, le traité de Campo- 
Formio permettant à la France d'utiliser ses forces inaclives, 
Bonaparte conçut le projet d'une expédition en Égypte. 
Le futur empereur cboisit Kléber pour un de ses généraux 
divisionnaires. Blessé à l'assaut d'Alexandrie, il reçut le 
commandement de cette ville et de toute la basse Êgpte ; 
mais il fut replacé en 1"]99 à la tè|e de sa division, qui 
formait l'avant-garde de l'expédition de Syrie, s'empara 
du fort d'EI-Ariscl, traversa le désert, entra dans Gaza, 
et emporta la ville et les forts de .laffa. Détaché de l'armée 
lors du siCe de Saint-Jean-al'Acre, il est chargé de s'op- 
poser avec sa division aux troupes des pacbas de taplouse 
et de Damas, accourus au secours de Dj e z z a r, soutient 
avec 2,000 hommes les efforts de t0,000 fantassins et de 
25,000 cavaliers, et contribue au succès de la bataille du 
Mont TI,abor, dont la plus grande gloire lui revient. De 
retour de Syrie, il prend une part active à la balaille d'A- 
buukir, et quand Bonaparte abandonne l'Épte, rognant 
vers la France pour saisir le pouvoir consulaire et la cou- 
ronne impériale, Kleber est appelé par lui à le remplacer 
dans le commandement de l'expédition. 
La situation de noire armée était dëplorable : décimée par 
les combats, par les fatigues, par les maladies, privée de 
toute communication et de toule nouvelle de la mère pa- 
trie, menacée par une armée de 80,000 T,arcs, qui s'avance 
avec 60 pièces de canon, il semble sinon impossible, du 
moins à'une lémoerité inome qu'elle puisse songer à con- 
serrer sa conquête. Kléber juge de son devoir d'entamer des 
négociations avec les Ottomans, par l'intermédiaire du coin- 
inodore Sydney.Smith, et de traiter de l'évacuation honora- 
be de l'Êpte. Le traité est signé à EI-Arsch. Les Français 
ont déjà remis plusieurs places ; les généraux anglais déclarent 
que. le traité n'a pas été ratifié par leur gouvernement. 
Il faut encore vaincre. En moins d'un mois l'armée turque 
est tsillée en pièces à Héliopolis, le Cah'e révolté est 
repris, et toute l'Égypte reconqui.e. 
Le 1 juin, suivi de l'architecte Protain, membre de l'Ins- 
titut d'f2gpte, il suivait la longue terrassa qui unissait sa 
demeure à celle du g,néral chel d'Ct-major Damas, avec 
qui il venait de déje0ner, quand un homme v#.t, à l'orien- 
tale s'avance vers lui, lui presse la main, et le perce d'un coup 
de poignard qui lui fait une blessure mortelle. Kléber, aper- 
cevant un de ses guides, n'a que le temps de caler : « A 
moi, guide: je suis assassiné! » et il tombe baigné dans 
son sang. Protain essaye de s'emprer de l'assassin ; mais 
n'ayant qu'une baguette à la main, il ne peut lutter contre 
lui, et tombe percé de six coups de poignard. Alors le mu- 
sulman revient sur sa première victime, lai porte trois 
nouveaux coups, et prend la uite. Cependant le guide que 
Kléber a appelé est accouru chez le général Damas, et tous 
les officiers qui s'y trouvent s'élancent au secours de leur gé- 
néral; il respirait encore, mais il rend bient6t le dernier 
soupir. A la nouvelle de l'attentat, nos soldats, furieux, par- 
courent les rues du Cuire en proférant les pl,ls horribles 

KLEIST ¢8 t 
menaces; la gnérale bat, les bataillons se rassemblent, de 
fortes patrouilles circulent de tous cétés en criant : Vert. 
9eance: Les habitants, consteroés, se barricadent dans leurs 
maisons, et attendent dans la consternation l'issue de cette 
scène terrible. Le quartier général est investi, pour eml- 
cher l'évasion du meurtrier, qui est arrêtWtrois bem'es après 
le crime, sous un nopal. Prolain, qui en a donné le signa- 
lement, le reconnalt sans peine, et le coutelas sanglant 
trouvé au mème lieu ne laisse plus de doute. L'assassin se 
nommait Souleyman-eI-Habbi ; il avait vingt-quatre ans, et 
n'a,'ait obéi qu' l'appel fait au fanatisme par le vizir battur 
à ltéliopolis. Poussé à ce crime par deux agas des janis- 
suites, il avait reç,a les encouragements des niCas de la 
grande mosquée, qui furent arrètés. Souleyman, condamné 
à tre empalé et à avoir le poing br/lé, et ses trois com- 
plices, à avoir la tte tranchée, sont exécutés le joua" marne 
du convoi de KIéer, en présence des troupes. L'assassin 
subit son effroyable supplice avec un courage'surhumain. 
La perte de Klé'ber fut grande par son armée, immense pour 
la France; il expira le jour méme oi Desaix tombait mot- 
tellement blessé . Marengo. Ses restes mortels lutent ra- 
menés en France et déposs à 51arseille, au cbleau d'If. 
En I 8 t 8, Louis XVI I I ordonna leur translation à Strasbourg 
où ils reposent dans un caveau construit au milieu de la 
place d'armes, sr lequel la ville natale du héros et la France 
entière ont fait élever une statue colossale en bronze, due 
au ciseau d'un sculpteur alsacien, Ph. Grass. Elle a été 
inaugurée le 1: juin tt0. Igapléon GxLos. 
ILÈIST (EwALn-CnIISTI.'I) naquit à Zéblin, en 
reCante, le 3 mars 17t5. 11 fit des Cudes sérieuses 
Dantzig, puis à Koenigsberg. Mais à l'Age de vingt-cinq ans 
il renonça à la carrière de jurisconsuRe, qu'il semblait d'a- 
bord vouloir embrasser, quitta son pays, et s'en alla prendre 
du service dans l'armée danoise. A l'avénement de Frédé- 
tic 11 au tr6ne, il revint en Prnsse, et fut présente au roi, qui 
le nomma lieutenant dans le régiment du prince Henri. En 
1757 il passa, avec un grade supédeur, dans un régiment 
qui était en garnison à Leipzig, et 1 il se lin assez Crot- 
lement avec deux poëtes ai,nés des Allemands, Weiss et 
Gellert. Kleist put s'" liwerà ses r.veslittéraires, qui ne l'a- 
vaient jamais abandoné dans sa carrière de soldat. Ses deux 
no,veaux amis l'encourageaient dans ses efforts et le gi- 
datent dans ses Cudes, Mais deux ans après il assistait à 
la sanglante m61ée de K u n e r s d o r f. Il y combattit vaillam- 
ment, et f«t laissé pour mort sur le champ de bataille. Le 
lendemain, cependant, un officier russe qui passait par ha- 
sard le trouva encore en ste, et, prenant pitié de lui, le fit 
transporter à Francfort-sur-l'Oder. Mais tout l'art des mé- 
decins ne put le sauver; 1 exl, i,-a le 2 aoàt 1759. 
En 1719 il avait publié un poëme intitulé Le Printemps. 
C'et là-dessus que se fonde sa réputation. Ce poëme ne fut 
d'abord tiré qu'à un très-petit nombre d'exemplaires, biais 
il obtint du succès; et il s'en ût en peu de temps plusieurs 
éditions. C'est une œuvre didactique, qui nous paraitrait au- 
jourd'hui un peu froide. Elle est remarquable cependant par 
la versification et par l'habileté avec laquelle le poêle a dé- 
peint certaines scènes de la nature. Kleist entretenait, comme 
nous Pavons vu, des relations intimes avec Gellert. Il était 
IlWaussi avec Uz et Ramier, et par ses afi'ections, par la 
portée de son talent, il mërite d'tre placé au nombre de 
ces bommes qui forment ce qu'on peut appeler l'école tran- 
sitoire entre la vieille litrature allemande et la jeune lif- 
tArature, immortalisée par Goethe et Schiller. 
Xavier 
I{LEIST ( rl.s ) est plus célèbre que le précédent; 
mais il doit une lartie de sa célëbrité à sa vie aventureuse, 
à sa mort tragique. 11 naquit à Francfor|-sur-l'Oder, le 
t0 octobre 777 entra au service ort jeune, et fit avec 
l'armée prussienne la carapate du Rhin. En 1799 il aban- 
donna, pour se livrer à l'Cude, la carrière militaire, et re- 
vint à lerlin. Dès cette époque il se manifeste en lui une 
mélancolie profonde, qui le domine, une inquiétude vague, 



782 KLEIST -- 
qufle poursuit partout. De lb mille id,'es contradictoires qui 
tour à tour le préoccupent, mille plans de travail et de 
voyagea qu'il abandonne ans«[tél qu'il les a conçus. 11 ob- 
tient une [,lace an ministëre, et peu de temps après il demande 
son congé, ient à Paris, etpnis traverse en courant uue par- 
rie dela France et de la Suisse. A peine de retour dansson pays, 
il se remet de nouveau en route, et recommence la ,nème 
excursion capricieuse, pr6cipitée, inquiète. Il finit cepen- 
dant par reprendre le el,emin de l'Allemagne, et se remet h 
travailler dans les ]ureanx du ministCe des finances. Pen- 
dant ce temps, la guerre avec la France avait éelaté avec 
plus de violence que jamais, et la bataille d'ldna an«antit 
tontes les espérances de la Prusse. Kleist fut de œux q:i 
• uivirent à Koenigsberg la royauté malheureuse, et à son 
sentiment Itabitttel ,le melaneolie vint se joindre la douleur 
«le voir se«compaCt[ores vaincus et son pays a«servi. 11 ne 
dissimnla ni son amère tristesse ni la haine ardente qu'il 
portait aux Français. On le regarda entame un tre dange- 
reux. On le conduisit en France. Il lui enfermé au fort 
,.te Joux, et de lb à Cbàlons, oU il recouvre sa liberte, sans 
avoir trop comment. 11 revint en Allemagne plus malheu- 
reux et plus découragè qte jamais, et cependant ri essayait 
de travailler. 11 Cr[vit alors deux de ses Iragèdies, une 
partie de ses contes; il tenta «le refaire fur un nouveau 
pl:m la tragédie de Robert Gui«tard, qu'il avait déjh com- 
mencée deux loi« ; et il f, mda h Dresde, avec Adam Muller, 
un journal intitulé Phdbs, qui n'eut pas grand succës. En 
1809 on annonça la guerre de l'Aulriche avec la France. 
Celle nouvelle réveilla toutes ses animo«ités nationales, ton3 
ses réves de gloire et de patriotisme. 11 voulut prend,e part 
t cele guerre, il vouh,t combattre contre les vainqueur 
de la Prusse, coutre les ennemis de l'Allemagne. 11 partit. 
Mais qand il arriva a Prague, la paix venait d'ètre con- 
«lue, et ce denotment imprevu le plongea dans un nouvel 
abattement. 11 rentra / Berlin asec une so,te de désespoir. 
L il fit la connaissance d'nne jeune femme, belle, spiri- 
tuelle, mai triste et malade, fous deux exaltërent récipro- 
quement leor douleur et après avoir vécu quelque temps 
dans les mystérieuses rèveries «l'un amour tout platonique, 
ils résolurent de mourir ensemble. Le 1 novembre 1511 
ils se rendirent auprës d'un lac situd h galoche de la route, 
enlre Potsdam et 13edin, et se ruèrent. 
Malgré so, existence vagabonde et les préoccupations 
con:inuelles que lui causait l'epèce de maladie morale h 
laquelle il clair en proie, Kleist a repentir,al laissé des con- 
les, des poCic« lyriqnes et sept piëces de lhéalre : £a Fa- 
raff le Schro[.fen.stein ; PenChes[leu; .lmlhilryon ; Calhe- 
rine de Hedb«onn ; Le prince de Hombour9 ; La RoCaille 
de Hermann et La Cruche cass¢e. La plus eelèbre de toutes 
est Catherme de Heilbronn. Kleist y a méle avec beau- 
eonp d'art des idées de somna,,bulisme. On joue encore 
cette pièce en Allemagne, et elle est toujours bien accueillie 
du public. £a Cruche cossue est une comédie vive et 
spiriluelle, qui donnait beaucoup à espérer de l'avenir poC 
tique de Kleisl. Parmi ses coules, Mchel Kholhaas a ob- 
tenu un grand succès. Ses poesies délacbées sont empreintes 
,l'un .enlimenl tendre et élégiaque, ,'evttu de douces images 
et habilement exprimë. Toutes ses œuvres, que Tieck a 
pieusement recueillie« après la mort de l'auteur, indiquent 
Irés-bien en certains endroits le céte mala,lif de Kleist; 
mais elles portent aussi le cacbet du vrai poëte. Il y a là 
une sève, une jeunesse d'id,.es, une [drue d'imagination 
peu communes. Le pauvre Kleist, si peu confiant en lui- 
mme, si incertain de son sort, si malheureux, avait h un 
haot degré lesqalités essentielles de l'art. X. 31Ar, me. 
ILEITA. Voyez Gxcs. 
ILEPllTES nom donné d'abord aux Armatoles, 
et dérivé do grec x),.r.x, je voie,/ cause de leurs excursions 
et de leurs pillag#s dans les terres basses du pays. On dislin- 
guait parmienx les Klepbte ci,ilisés, soumis, elles Klepbtes 
sauvages. Celle dernière dnomination dtait appliquée à 
ceux qui ne voulurent entrer en aucune négociation avec la 

KLIPPES 
Porle, et qui, retirés dans le gorges des montagnes, conti- 
nuèreuth vivre dans une entiere indépendance : plus tard 
on les appela les lilephtes par excellence, et le pays où 
ils s'assemblaient et où ils vivaient habituellement, Terre 
des Klephles, pour la distinguer de l'Armatolie, nom par 
lequel on désignait les district« assignês aux Armatoles. 
Ensttite les Armatoles'inrent se joindre aux Klepthes, et on 
les eonfondit tous sous le méme nom. 
IILIN petite ville du gouvernement de 5loscou, avec 
environ 3,000 I,abitants, est remarquable comme ayant Cé 
autrefois le domaine héréditaire de la famille Bomanof, 
de laquelle est issue la dynastie qui règne aujourd'hui en 
Russie. On voit encore, sur une petite hauteur qui domine 
la Sestra, les rtfines de cet antique et remarquable manoir. 
Klin est à en«trou 7 m. riamètres de Moscou, dont le voi- 
sinage exerce une grande influence sur son commerce. 
I[LIGSTEDT (CaAaLES-GCSrAWl, célëbre miniatu- 
ri«le, a dt' sa renommée bien moins h son talent qu'au genre 
de sujets qu'il a peints d'ordinaire. Sous la régenee, alors 
que l'art ignorait toute retenue, il lut l'un des plus fëtés 
parmi les pe[aires érotique«. é à Riga, en 1657, il avait 
d'abord Ce simp|e soldat dans l'armée du roi de Suède. A 
s ingt ans il vint en France : il continua d'y servir, et fit méme 
plusieurs campagnes, Iorsqu'à trente-trois ans il aban- 
donna la carvi/etc milliaire et se livra tout entier a la pein- 
ture, qu'il avait de tout temps aimée. Depuis cette époque 
j usqu'h sa mort, arrivée à Paris, le 26 février 1734, il ne cesse 
de travailler. Kling»tcdt, que Voltaire appelle Clinchelet, 
dans nnt. de ses poesies familières, a orné de miniatures un 
grand nombre de boites h pastilles ou à tabac. C'est lui que 
le dix-lmitième siècle, dans son enthousiasme facile, sur- 
nomma le llaphael des label[ère«, associant ainsi sans 
pttdeur le nom le plus pur de l'art à celui d'un homme dont 
l'oeuwe ne fi,t ni chasle ni méme correcle. 5lais la mode 
s'en etait më!ee : il fallait avoir des Klingstedt dans sa collec- 
tion. Le marquis de llarigny en avail plusieurs, entre autres 
une petite peinture, Le Jeu de la canin chaude, qui à sa 
mot se veadit un prix fou. Klingstedt a fait aussi des des- 
sius/ l'encre de Chine et quelques rares porlraits, entre an- 
Ires celui de la duchesse de Bouillon. Son pinceau était 
maladroit, ses Cèles ne sont pas toujours express[res, et 
son dessin, nous l'avons dit, n'est guère moins libre que sa 
pensée. Ainsi l'art sérieux n'a pas plus à se louer que la 
morale de ce qu'on appelle les chefs-d'oeuvre de Klingsledt. 
Il est encore quelques amateurs qui possèdent des rein[a- 
turcs du peintre de Biga; mais ils n'osent pas les monlrer 
au grand jour : productions singulière« eu vérité, Cranses 
peintures que eeEes qu'on ne peut admirer qu'à huis clos! 
P. M,Lr-'rz. 
I;.LIPPERS ou CLIPPEBS ( d'un mot anglais signifiant 
cmtpeur, rendent). C'est le nom qu'on a donné derni.ère- 
ment, aux Etats-Unis, à des l'atiments marchands d'une cons- 
truction particulière, qui les rend très-rapide« voiliers; il 
indique que ces navires fendenl plutét Veau qu'ils ne la 
traversent. Ils se distinguent par leur forme aigue et par la 
solidité de leur construction ; roules le« lignes qui frappent 
l'oeil sont des «ourbe. partaitement raccordCs. C'est h Balti- 
more qu'on conslruisil les premiers klippers ; mais il en sort 
aujourd'hui des chantiers de New-¥ork, de Boston, etc., de 
méme que de divers chantiers existant tant en Anglelerre 
qu'en France. Les Américains possèdent dejà une flotte tout 
entière nniq«emeut composée de klippers. Les intérêts du 
commerce qu'ils font avec la Chine exigeaient impérieuse- 
ment qu'ils y emploassent des b/|timents d'une marche 
supérieure. Les armateurs et les négociants proposèrent 
donc à Fenvi des primes pour les btimenls qui accompli- 
raient aveele plus de rapidité le trajet, aller et retour, d'un 
port de l'Union à nn port du Celesle Empire; il en résu]ta 
que chaque année de nouveaux perfectionnements furent 
ajoutés à la construction de ces.btiments de long cours, 
auxquels, aprës bien des essais, on a fini par donner la 
forme actuelle des klippers. Notons en pasant que cette 



KLIPPERS -- 
forme n'est autre que celle qu'on donnait du temps de 
la Rpublique et de l'Empire à nos corsaires. Le premier 
klipper construit à 13altimore fut fait sur le modèle du cor- 
saire français Le Brave des Braves, dont la coque a long- 
temps été conservée dans l'un des ports de l'Union comme un 
objet de curiosité. En 185t le kIipper The Oriental se rendit 
de llew-York à Canton en moins de 71 jo«Jrs ; le mme béti- 
ment ne mit que 98 jours pour se rendre de Wampoa h l'em- 
bouchure de la Tamise. Ce traiet fiJt effectué en 90 jours par 
leklipper The Witch ofthe Wave; un klipper anglais est ailL «le Londres à Melbourne ( Australie du Sud) en 76 jours ; 
le Flging-Cl«ud est ailA de llew-York en Cali[ornie en 87 
]ours ; le klippe¢ français France et Citi, sorti des ci, an- 
tiers du Havre, est ailA de Cherbourg/ Lima en 64 jours. 
C'est la traversée la plus rapide q«'on ait encore ohtenue; 
en tenant compte de toutes les differences, on voit que le 
F'ance et Chili I'a emporté de  jours sur le klipper amé- 
ricain. Les klippers, par un temps favorable, franchissent 
un espace de 17 milles marins h l'heure, rapidité à laquelle 
les plus puissants vapeurs n'ont pas encore pu parvenir. A 
la fin de 185: on lançait à Boston le plus grand klipper 
connu. C'est le quatre-mts Great Republic, jaugeant 
4,500 tonneaux. II mesure 3?5 pieds anglais de long, 53 pieds 
de large et 39 pieds de creux. Une machine/ vapeur mo- 
bfleest placée surin pont, afin d'accomplir les grosses ntanoeu- 
vres. 
KLOPSTOCE (Fe, InéI:tlc-GOTTLIEU ), l'un des plus 
grands poëles de l'AIlemague, naquit h Quedlimhourg, le 2 
juillet 1726. Il fut d'abord envoyé au gymnase de sa ville 
natale, puis il entra à l'Cule de Sehulpforle : c'est là qu'il 
fit ses premiers essais poCiques. Il éludiait avec ardeur les 
classiques anciens ; et quand il eut lu et relu Homère et 
Virgile, le désir lui vint de composer une popée allemande. 
Il avait d'abord songé à prendre pour le béros de son poëme 
l'empereur Henri surnommé l'Oiseleur, llais les idées re- 
ligieuses s'niant peu h peu empa,ées de son esprit, il tutuha 
ses regards d'un autre c6té, et enfin il en vint à concevoir 
le plan de La «lessiade. En 175 il entra à l'université 
d'léna, et se fit inscrire au nombre des élëves en tbéologie: 
cette étude ne rèpondit point à son attente. Au milieu des 
rveries ideales, des conceptions grandioses où l'entralnait 
le plan de son poëme, les leçons dogmatiques, les contro- 
verses reli:ieuses ne pouvaient que lui parattre étroites et 
avides. Il suivit don assez négligemment les cours univer- 
sitaires, et se devons avec ardeur h son œuvre poétique. 
llais il se sentait mal à l'aise à Iéna : il n'avait la pas un 
condisciple pour te seconder dans ses efforts, pas un ami 
pour le comprendre. Il quitta lëna, et vint/ Leipzig. Le pau. 
vve Klopstock ve recevait qu'une faible pension de son père; 
et il était oldig6 d'interrompre souvent ses ètudes poCi- 
ques pour [aire un calcul d'économie. Il occupait une cham- 
bre modeste avec son ami Schmidt, et vivait en dehors de 
toutes les habitudes un peu hruyantes des gtudiants ; mais 
il y avait autour de lui des hommes distinguës : Goertner, 
Schlegel, Gieseke, Zacbariœe, Rabener, Ebert, Gellert. KIop- 
stock se lia avec eux, et travailla avec une noble ardeur. 
Après avoir longtemps cl,ercbé une forme assortie " l'idée 
qu'il s'était faite de son poëme, après avoir d'abord voulu 
l'écrire en prose, il se décida pour le vers hexamètre, et 
publia dans le journal de Brme les trois premiers ehants de 
sa Messiade. Cette œuvre, dans laquelle le jeune poëte 
essayait de retracer le« miracles du christianisme, la vie et 
les souffrances du Rédempteur, cette œuvre I,ardie et en- 
thousiaste excita dès le jour oh elle fut annoncée une pro- 
fonde sensation. Bient6t le nom de Klopstock se répandit 
à travers toute l'Allemagne. Tous les poëtes s'émurent aux 
accents de cette voix si jeune et si "énergique; toutes les 
femmes pleurèrent au nom d'Abbadonah, cet ange rebdle, 
qui se souv,ent, en pleurant, des jours de joie qu'il a 
passés dans le ciel, et se tient auprès du tr6ne de Satan, le 
front penché ci le cœur repentant. Les Allemands Cevé- 
vent Klopstock au-dessus de lIilton. Ils le saluèrent comme 

KLOPSTOCK 
leur proplsëte : les tlsologiens seuls protestërent contre ces 
tëmoignages d'enthousiasme. Ils s'en tenaient à leurs dé- 
finitions, à leurs arg,ments scolastiques, et ne pouvaient 
souffrir qu'on essayàt de remplacer leurs formules par la 
poésie. Plusieurs critiques ne furent pas moins impito,/ables 
pour l'épope du IIessie. Klopstock avait bras é leurs prin- 
cipes. Il avait adopté une forme métrique, un sis'le nouveau, 
et les partisans de Gottscl, ed fidminèrent l'anathëme 
contre lui ; mais KIopstock avait pour lui la faveur du public 
et le suffrage de L e s s i n g. 
Cependant, cette gloire subite qu'il venait d'acquérir 
ne le rendait pas plus I,eureux. Peu de temps aprës la pu- 
blication de son poëme, ses amis quittèrent Leipzig ; et il se 
retro,va pauvre comme toujo,rs, et isolë plus que jamais. 
Il se rendit alors à Langensalza, et devint le précepteur des 
enfants de Weiss. Là il revit cette jeune fille qu'il connais- 
sait depuis longtemps, et qu'il avait cl,antée sous le nom 
de Fannç : c'Cait la sœur de son ami Sel,midi. Klopstock 
l'aimait de l'amour le plus exalté et le plus pur. Peu d'élë- 
gins «l'amour sont plus tus,chantes, plus passionnées 
celles qu'il a écrites pour elle. Fanw/ acceptait avec «,ne 
noble fierté ces hommages. Elle hoorait Klopgtock comme 
un homme d'un bea«, caractère, elle l'aimait peut-ëtre 
comme un frère; mais elle ne lui accorda jamais rien de 
)lus, et le malheureux poëte, I,ors d'elat de rester plus 
Ionemps dans un lieu où tu,te son exaltation allait sans 
cesse se briser contre une égalité d'me invariable, contre 
des paroles froidement affectueuses, se deci,la à aller voir soa 
ami B od m er, et en 175o il partit pour la Suisse. Ses ver» 
avaient été I«s en Suisse comme en Mlemagne : il fut reçu 
à Zuricri avec enthousiasme ; il visita plusieurs cantons, et 
parlout on allait au-devant de lui, on lui prodiguait les 
témoignages de respect et d'admiraiion. Ce fut I, au milieu 
de celle nature agreste et imposante, au milieu de ces 
hommes libres, qu'il sentit se raviver toutes ses idées de li- 
bertë et de patriotisme, qu'il rèva son chant de 11ermann 
et ses aulres cbants nationaux. 
Pendant ce temps, le comte de 13emstorf parlait de lui 
au roi de Danemark : un jour, il reçut Iïnvitation de se 
rendre à Copenhague, et le roi lui accordait «,ne pension 
annuelle de 400 tbalers (1,?00 ff.) pour l'aider à finir sa 
3lessade. Klopstock se rendit avec jo!e à cette invitation, 
et f,t reçu à Copenhague comme il l'avait été en Suisse; 
mais en passant à Hambourg il avait fait la connaissance 
d'une jet,ne fille enthousiaste des trois cbants de La Mes- 
siade. Elle s'appelait Méla Moller : c'est celle à laquelle il a 
donm; dns ses ver. le nom de Cidlt ; il l'aimait, et il sou{- 
riait de se sentir éloigné d'elle. Enfin, en 175t il revint 
Hambourg, et l'épousa. Ce fut la le plus beau jo'ar de sa 
vie; mais son bonheur ne dura pas Ionemps: quatre ans 
aprês il la conduisait au tombeau, elle et l'enfant qu'elle 
lai avait donné. 
Resté seul dans le monde, il ne tro, va de consolation 
que dans la poésie: il se plongea de nouveau dans ses 
pieuses méditations, et continua le poëme chrétien qu'il 
avait commenc. En 1775 le grand-duc de Bade t'appela 
sa cour, dans les termes les plus favorables. Il y alfa. 5lais 
le sjour de Cartsruhe ne lui plut pas. Il voulait revoir 
les lieux où il avait connu, oin il avait aimé et enterré sa 
t6ta. Il revint à Hambourg, et y resta. Quelques années 
après, sentant le besoin d'écbapper à son etat d'isolement, 
il épousa une femme déjà gée, 1I 1¢ de Wintbem, et le 
reste de sa vie fut consacré à l'Cude. Il acbeva sa .ffessiade, 
il écrivit sa Bataille de Hermann. La révolution Irauçaise 
venait d'éelater; elle s'annonçait avec des principes de 
droit moral et d'émaneipation qui sédnisirent plusieurs 
hommes de l'Allemagne. Klopstoek la cbanta, et ,-eçut un 
jour de Paris le titre de eiloyen Irançais. Bient6t celle révo- 
lution l'effraya par ses excès, et il la réprouva autant qu'il 
l'avait louée. Douze ans se passèrent ainsi, douze ans d'une 
vie de calme, de piCC de poésie. Klopstock etait déjà vieux 
et il avait conserv6 toute sa force physique, toute sa vigueur 



784 KLOPSTOCK 
d'esprit. Il travaillait de longues heures sans se reposer ; et 
l'hiver il s'en allait sur la glace patiner comme un jeune 
homme. Le 14 mars 1803 il s'endormait doucement, avec »n 
rayon de joie dans les $eu.x et des paroles de religion sur les 
lvres. Ses obsèques se firentavec une pompe inome. Toute 
la ville y assista, toutes les cloches des églises sonnërent. Son 
convoi ressemblait  celui d'un roi, et Klopstock était bien 
un grand roi de poésie. On a institué à Quedlimbourg et à 
.Qlbna une lte en son honneur. Elle se célébrera tous les cent 
ans: combien de poetes meurent à jamais oubliés dans cet 
espace de cent ans ! 
Les ouvrages de Klopstock sont : 1 ° sa Messiade, poême 
en vingt chants ; 2 ° un recueil d'Oà; 3 ° trois tragédies: 
La Mort d'Adam, Salomon, David ; 4 ° des chanis héroi- 
ques, qui ne sont à vrai dire ni des drames ni des dilby- 
rambes, et auxquels il donnait le titre de Bardiete : La 
tadle de Hermann, Hernmnn et les princes, La Mort de 
ltermann. Ces dernières œuvres n'ont pas eu un grand 
succès. On les a tronvs froides ; elles renferment pourtant 
de grandes beautés de style. Mais KIopstock est l'un des 
potes Ciques modernes les plus distingués et l'un des plus 
grands poetes lyriques qui aient jamais existe. Par sa Mes- 
.stade, il mérite d'èAre placé à ctMé de Millon ; par ses Odes, 
i| n'a rien a entier aux gloires de l'ardiquitë. Sa poésie est 
ferme, enthousiaste, energique et gracieu«e. Il a créé en AI- 
lemagne nn st)le poétique dans lequel il n'avait point ,le 
modèle, et dans lequel il n'a point eu encore de rivaux. 
C'est un des hommes qui ont le mieux approfondi les ri- 
chCses de la langue allemande ; et s'il ne s'était fait une 
si grande renommée comme poëte, il aurait pu en avoir 
une comme critique, par ses Fragments sur la langue et 
lapo#sie, par son livre intitulé R«publique des Lettres, 
et par ses Entretiens 9ramm«ticmtx. A toutes ces facultés 
puissantes, KIopstock joignait un caractère noble, généreux, 
indépendant. Pas un poete n'a mieux nis son existence en 
harmonie avec la pereté de ses œuvres ; pas un poëte n'excite 
 un plus haut degre dans l'Ame de celui qui le lit un 
liment d'amont et de veneration. X. 
iL/ELLER (Go-rrnrn), célèbre peintre de portraits, 
né en tg8,  Lubeck, et destiné d'ahord à l'Cat mi|traire, 
céda plus tard à sa vocation pour la peinture, qu'il étu- 
dia d'abord sous Bembrandt et en,_-uite sous Ferdinand Bol. 
Par la suite, il se rendit en Italie, où il stfivit l'atelier de 
Caro Maratti, et où il fit d'abord de la peinture historique. 
Mais ensuite il se livra exclusivement à la peinture de 
portraits, qui le mit en grande rèputation. Revenu en AI- 
lemagne, il habita successivement, à partir de t672, Nu- 
remberg, Munieh et llambourg. En 1674 il se rendit à 
Londres, où en 1680 Charles Il le nomma peintre de sa 
cour. E tf,8, il fit, sur l'invitation de Louis XIV, un 
voyage à Paris, où il exécuta le portrait du roi et ceux de 
tous les membres de la famille royale. Il jouit sous Jac- 
ques Il de la mëme faveur que sous Charles 1I, et il en 
ïut encore ainsi sous Guillaume III. Quoique partisan zé|é 
de la révolution qui aait placé le prince d'Orange sur le 
tr6ne, Kneller conserva toujours les meilleures relations 
avec les amis du roi exilé. L'empereur Joseph 1 « le nomma 
chevalier, et en 1715 le roi Georges 1  lui conf0:ra la 
dignité de b«ronet, sous le titre tic Whytton. Des ëcrivains 
contemporains lui reprochent d'avoir excédé à flatter ses 
ori#naux, et suppléé au défaut de ressemblance par une 
facilité et une graee extrmes d'exécution, par une noble 
simp|icitê et tme remarquable vigueur de coloris. En tout 
cas, les meilleurs «le ses portraiL sont ceux où il a cherché 
à imiter le faire de Van Dyek. Il mourut en t723, et suivant 
d'autres en t:6, laissant une fortune considérable. Apt'ès 
sa mort on lui Ceva a Westminster un monument surtoonté 
d'une inscription des plus Iouangeuses, composée, dit-on, 
du vivant tme de l'arlistei par Pope, qui pour ce travail 
obtint une gratification de 500 liv. sterl. 
|{,XEP||, dieu égyptien, dont il est souvent question 
dans lesauleurs grees, et qtti est auss appelé KnuphL% Chnu- 

KI'IAZ lE WI CZ 
bis, Chnuphis, Chmonis. On lit et on prononce ordinal- 
rement /Vum le groupe hiéroglyphique qni le représente ; 
mais le éritable son est plut6t Hnum ou Knum. Le 
groupe qui désigne dieu veut dire aussi source ou puits ; en 
copie, lwnbe. Cette prononciation pestérieure, dans laquelle 
le b lut substitué à l'm, est vraisemblablement l'origine d 
la forme grecque Chnubin, dont on fit ensuite Chnu- 
phis. 
On trouve déjb dans l'antiqe empire éplien le dieu 
Hnum comme dieu de la crue du til et de la bënédiction 
du Nil. Il était plus particuliërement adoré sur la frontière 
méridionale de l'Eg)pte, au point oU le fleuve entrait dans 
ce pays, notamment aux premières cataractes de S),ène et 
de Phil,-e, et aux secondes cataracles, prës de Wadi-Halfa 
et de Semnezs, où l'on avait reculé les Irontiëres de l'empire 
à l'époqne de la douziëme dynastie manéthonienne. 
Les symboles de ce dieu étaient une cruche à deux anses 
ci le bélier, qu'on adorait particulièremenl dans la Thébaïde : 
aussi le représente-t-on souïenl avec une tte de belier et 
portant sur sa tte une cruche à anses. Un de ses surnom 
ordinaires était Mailre de la dislribution des eaux. Ses 
deux compagnes sont ordinairement la déesse Amtké et la 
déesse Saté ( le rayon), la mème que Sothis, l'étoile de l'in- 
ondation du 1'il. 11 s'est conservé à Esneh un autre temple 
cëlëbre de Hnum, remontant à l'époque romaine. Comme 
dispensaleur des eaux du lil et de sa fécondante vertu, ce 
dieu tut de bonne heure identifié avec les divinités suprmes 
du pays, Ra (le dieu du soleil) et Ammon. Dans les sys- 
tèmes mytho-philosophiques de l'époque grecque, KnepL 
(donl Porphyre nous décritle portrait, absolument semblable 
à celui de Hnum qu'on trouve snr les monuments) apparall 
comme le dieu incréé, immortel (Plutarque) et comme 
demi-ourgos (Porphyre), de la bouche de qui le monde est 
sorti sous la Iorme d'un teur. Dans les représentations des 
ípoques poslérieures, il est sculpté tenant l'oet| devant 
soi sur un siége tournant. Suivant Sanchoniaton, Kneph au- 
rait étë aussi identifié avec l'A9athodoemon phénicien, sous 
la forme d'un serpenl. 
HXIAZIEVICZ (Cn«ts), célèbre gínéral polonais, 
né en 1762, htt élevé h Varsovie, et entra en t778 dans 
l'arlillerie. ,',lais ce ne fut que pendant la lutte soutenue en 
1792 contre la Russie par ses compatriotes qu'il eut occasion 
de déve|opper ses talents militaires. Quand, do]ze ans plus 
tard, Madalinski releva le drapeau de l'indépendance natio- 
nale, Kniaziewicz lut un des premiers/ se placer sous ses 
ordres. Il fut nommé colonel, deux mois plus tard gnëral, 
et prit en cette qualité une part glorieuse  la défen:e de 
Varsovie. A la bataille de Maciejovice, il commandait l'aile 
gauche, qui soutint la lutte jsqu'au dernier moment. Fait 
prisonnier, l ne fut remis en liberté qu'h l'avénement de 
Paul 1 «. Répondant à l'appel de D o m b r o w s k i, il réussit 
tromper la surveillance des autorités russes et autrichiennes, 
et vint trouver à Campo-Formio Bonaparte, qui lui confia 
tout aussit6t un commandement dans la nouvelle lgion po- 
Ionaise, avec laquelle il fit partie de l'expédition contre les 
États Romains. Il prit ensuite part à la campagne de Naples, 
et Championnet le chargea de porter à Paris les drape.aux 
enlevês  l'ennemi. Quand, par suitede la paix de Luníville, 
Bonaparte licencia les Iégions polonaises, Kniaziewicz se re- 
tira dans ses terres en Pologne, et s'y maria. En 1800 Alcxan- 
dre l'imita à formcrune Iéion polonaise; mais Kniaziewicz 
refusa cette mission, devinant bien que cette Iègion était 
destinée à servir contre la France. Quand, en lai2, l'armëe 
franc..aie eut franchi le Nimen, il rentra dan.,; sec rangs, et 
fut athchí à l'Cat-major du roi J é r 6 m e. Plus tard, appelc 
au commandement de la 18 e division du 5 « corps, composée 
de Polonais, il se distinm aux affaires de Smolensk et de la 
Moskowa. Le 26 novembre iapoléon lui confia le comman- 
dement supérieur de l'armée polonaise. Mais, par suite d'une 
blessure grave, force lui fut bient6t de se retirer en 
triche, oi sans nuire forme de procès on le déelara prison- 
nier tic gterre ds que le cabinet deVienne, resté neutre jus- 



KNIAZIEWICZ -- 
,'alors, se fol décid h faire cause commune avec la Prusse 
et la Russie. 
ApréS la paix de Paris, Kuiaziewicz, sur i'invitalion 
d'Alexandre, prit part aux travaux du comité de la guerre 
cbargé, sous la présidence du grand-duc Coustautin, de la 
création d'une nouvelle armée polonaise. Il exigeait avaut 
tout qu'un acte formel proclam:H l'existence politique de son 
.pa)s. Le cougrès de Vieuue ne s'étant puiut prononcé sur 
le sort de la l'ologne, Kuiaziewicz donua sa dêmission,  
|aquelle il joignit une prnleslalion énergique, eu date du 
".3 novembre 1St.t. 
La earriëre militaire de Kniaziewicz finit h ce momeuL 
La même année il vint s'élablir à D,-esde ; et lorsque éclata 
en 1826 la conspiration russo-polonaise, le gouvernement 
russe, virement inquiet au sujet des relatioos et des projets 
du gëuéral, exigea son extradition de la part du gouverne- 
ment saxon. Ceh,i-ci s'y refusa; mai.% par êgarcl pour le ca- 
binet de Saint-Pétersbourg, il fit faire au g6f,éral I,uit mois 
de détentiou h Koenigstein. Qoan..i éclala la revolutiou de 
novembre 1830, Kniaziewicz, lgé alors de près de soixante- 
dix ans, n'avait plus les forces physiques nécessaires pour 
servir sa patrie sur les champs de balaille ; mais il accepta 
une millon diplomatique prés le gouvernement français, et 
se rendit à Paris, où il eut la douleur de voir dçues les es- 
pérauces que l'ou avait p concevoir sur l'appui du cabinet 
des T,ilcries. Depuis cette époque, il continua de résider 
à Paris, où il mourut, au mois de mai 18. 
INIGHT, de l'anglo-saxon C,ly/, dérivé lui-mëme de 
l'allemaod knech (varier), veut dire er, anglais chevalier. 
La cfievalerie ne conslitne point en ^nglelerre une classe 
particulière de la noblesse béréditaire ; de mme que la petite 
noblesse, la 9entry ne s'y sépara jamais des Izommes libres 
de la naliou. La chevalerie s'y coustitua en partie sur la pos- 
session d'm,e propriété territoriale d'un cerlain revenu, va 
bien d'uu lier milliaire royal (night's fee), et en partie 
sur des nominations directemenl faites par le roi. On voit 
encore a,jomd'hui on exemple de la premiëre de ces ori- 
giues de la chevalerie dans la conslibllion du parlement, 
car les dépnlés des comlés, en tant que repéseutauts 
de la chevalerie ou des propriétaires aslreints au service 
militaire, sont Cus par les francs-lenanciers (freeholders) 
des ¢omtés, et prennent le titre de Inghts of the sbire. 
Sous le règne d'Élisabetl|, to,t propriétaire foncier jouis- ' 
saut d'un revenu annuel de 40 liv. sf. fut tenu de se faire 
octroyer personnellement fa dignité, de chevalier. E IG30, 
Charles I er essaya de remettre en vigueur ce statuli mais celte 
mesure, qui avait au fond un caractëre tout fiscal, car elle 
rappo,-ta  son trésor une somme de 100,000 fin. st., sou- 
leva de profonds ressentimeuts conlre sa personne. Le de- 
SWi.férieur et le plus ancien de la dignité personnelle de 
chevalier est celui de knighl bachelor (bas chevalier), 
que de nos jours encore le roi confère en appliquant sur 
l'épaule «le l'impétrant, genouillé devant ui, un coup du 
plat de son épée. Les ku9hts banuerets forment un degré 
sup.rieur de la chevalerie, que le toi ne peut conférer que 
sur le champ de bataille. Font aussi partie des hnghfs tons 
ceux qui ont obtenq l'un des deux ordres anglais. 
ILIPll&USEN, seigneurie naguëre encore souveraine 
et iudépondante, siluée dans te grand-duché d'OIdenboorg, 
et q«i compte, sur une superficie de 5 kilomëtres, une popu- 
lation de 3,000 habitants. Elle faisait au trefois partie du ma- 
- jorat des comtes d'Mdeubourg, et Chut, vers le milieu du 
dix-huitième siëc[e, / la ligle anglaise de la maison de 
. Bentinck., qui, après de longues et épinenses négociations, 
• a ¢nfm consenti h la vendre, en 1853, au grand-duc d'Olden- 
bourg, dans les États duquel se trouvait enclavé ce plus 
petit des États composant la confédération germanique. 
IOUT fouet composé de plusieurs lanières de cuir 
fortement entrelacëes, qui joua longtemps, comme instru- 
ment correctionnel, un graud r6le dans les mœurs russes. 
De nos jours on ne s'en sert ph|s que pour les crimiuels or- 
diuaires, tels que les incendiaires, les assassins et les sacri- 
r:CT, nE I,k COP;VERS.  T. XI. 

KNOW-NOTHING 785 
lg% ou aulre gibier de $ibrie. On n'applique poinl la peine 
du knout à nn soldat, lant qu'il appartient encore à l'armée; 
c'esl I d'aille«rs un supplice bien moins sanglant et dan- 
gereux ; quoi qu'on en dise, qu'inhmant aussi le nombre 
des coups de knout est-il loujours très-restreint ; et varie-t-il 
d'ordinaire entre trois et dix. Pour appliquer la peine du 
Impur. on cfioisit tmqonrs uu criminel, qui aime mie«x rem- 
plir ce ministère déshonorant que de s'e, aller travailler m,x 
mines eu Sibérie; et il ne sort momeutauémenl de prison que 
pour fonctionner comme bourreau, le knout en maiu. 
I{NO,VLES (Jxus.Snmnsn), le plus fécond et le plus 
aimé des écrivains dramatiques an.lais coutemporains, est 
né vers 1787,  Cork. Sous la direction de son përe, professeur 
d'loqueuce  l'Institution de Belfast, il se forma le gu0t 
par la leclure des meilleurs poëtes et prosateurs auglais 
et notamment par celle de Sbakspeare. Il abnrda de bonne 
heure la scène, avec ardeur et enthousiasme, mais sans 
vocaliou bien décidée; car le plus souvent le poëte l'empor- 
tait en hfi sur l'a,teur comique. Son succès a cependant 
toujours été grand à Londres, toutes les f,»is qoe dans une de 
ses piAces il s'est atlaché h tracer un caractëre. Comme poële, 
il se fit d'abord remarquer par quelques poésies lyriqoes, 
entre aulres par son Welsh Harper, poëme demeuré h bon 
droi[ popdaire, puis par son drame The Ggps  0813). Depuis 
lors il n'a plus guère écrit que pour le théàt,e. On a de lui 
les tragédies : Iïr9inius (1820); Caus Gracchus (1823); 
William Tell (183); Alfrecl lhe Great (1831); The 
Wrccher's Daugh[er (1837); John of Procida (tSO) ; The 
llose «,fArugon (18il); les comédies : The Beggur 0830); 
T/te Hunchback (1832) ; The Love Chasse(183) ; lI'omau's 
Il'il, or Iove's dis9uise (t838); O(d Maid (18-1); Trie 
Sêcretary (1843) ; les mélodrames : The Ir«fe ({333) ; The 
Daughter (1834) ; The Maid of Marieuborough (1838); etc. 
Il a réuni sous le titre de The Elocutionist, a colleelion 
of pieces in prose and verses, diffërentes esqoisses et nou- 
velles dispersée dans des revues. Son style est en général 
correct, son dialogue léger et facile, et il trace ses caraclères 
avec beaucop de justesse et de vérité. De toutes ses œu- 
vres dramatiques, celle qu'on eslime le plus est The Love 
Chase. En 1835 il entreprit une tournée aux États-Uni% et 
y donna des reprësentations dramatiques; mais à partir de 
  45 des motifs religieux, dit-ou, le determiuèren t  renou- 
cet complélement à la seAne. Le romau, genre dans lequel 
il s'est essayé depds, ne lui a que médiocrement réossi. Son 
Gêor9e Lovell (1847) obliut bien un certain succés ; mais 
l'édilion presque tout enliërede sou Forlescue ( 3 vol., 1848 ) 
resla chez l'éditeur. Eu 189 le gouvernement lui accorda 
une pension de 200 liv. st. en rcompense des services ren- 
dus par lui h l'art dramatique. Eu 182 des idées mystiques 
l'out, dil-on, déterminé h s'associer h une commonauté 
d'anabaptistes. 
1LOV-NOTIllXG (Les), c'esl-h-dire Je ne con- 
nais rien. Sous celle dénomination s'est formé depuis 
quelques anuées a,x Elalg-Unis un parti nouveau, repré- 
seutanl la rëaclion de l'opinion coutre la prépondérance, de 
plus en plus grande, qu'aequiert l'élémenl étrauger dau les 
dilférents Ëtats de l'Union. Les Américai,s de vieille race 
comn|encenl à s'apercevoir que le Ilot toujours montaul de 
I'migratiou, s'il a ceh d'olile qu'il déXriche et people 
insensiblemeut de vasles territoires, qui sans ce secours res- 
teraient encore pendant des siècles d'iucultes déserts, a 
par coutre l'inconvénient de détruire de plus e» phs l'ho- 
mogénéité politique du pays. Dêjh les Américains de race 
sont en minorité dans beaucoup d'ëlectioos. Dans lelle ville 
de 00,000 mes, il u'y a pas aujourd'hui moins de 60,000 
Irlandais et de 60,000 Allemands ; la législation et I'admio 
nistratiou, la diplomatie elle-mëme, comptent dans leurs 
raugs bon nombre d'individus qui il y .a quelques années 
habitaient encore l'Europe. On accuse ces nouveaux xenus 
de toutes les plates sociales dont ou signale déjh l'existence 
daus cette terre libre par excellence. Utiles quandql sagis- 
sait de b;ttir des villes, de peupler des solitudes, d'a,gmenter 
99 



786 
avant tout la force numérique, les émigrants ne viennent 
plus aux Etats-Unis que pour partager sans peine et sans 
danger les avantages acquis au prix de tant de privations 
et de sacrifices; et ils modifient chaque jour de plus ca plus 
le caractère national. C'est  eux, aux étrangers, que les 
Américains de ieille race attribuent l'énervement des .mes 
et la transformation évideute des mœurs, l'esprit de mercan- 
tilisme poussë  l'extrême et amenant  sa suite l'exagéra- 
tion de la spéculation en mme tenps que le triomphe du 
charlatanisme et du tlobert-Macairisme, dont le type est ce 
fameux Barnum, devenu riche à millions pour avoir su im- 
porter et effrontément exploiter aux Eats-Uais le h o a x et 
le p u ff, ces prodoits essentiellement britanniques. Les fil 
des vieux puritains de tu ffouvelle-Angleterre ne sont pas non 
plus sans s'apercevoir que l'invasion toujours croissante 
de l'elément catholique est encore une au[re des consé- 
queuces de l'migration ; et le protestantisme intoleranl en- 
trevoit déj là une rude concurrence à soutenir quelque jour. 
Le parti des Know.nothin9 est l'expression de ces biens 
inutiles récriminations ; ces gens-là regrettent l'inhabilelé 
rustique et l'ignorance de leurs pères ; ils croient n'avoir 
rien gagaW les échanger contre le savoir-faire et les raf- 
finemeuts de la corruption de l'Europe ; ils voudraient que 
l'Union pot reculer de soixante ans en arriëre et revenir au 
bon temps des Washiugtou, des Jefferson, etc.; mais ils ne 
réfléchissent pas que le temps a terriblement marché depuis 
lors, que tout d'ailleurs change fatalement ici-bas, méme 
les ntoeurs et les institutions politiques les plus solides, ils 
oublient que depuis 1783 les différents Etats de l'Union ont 
reçu plus de six millions d'ëmgrants appartenant aux difl-- 
rentes nations de l'Europe, et auxquels on pouvait bien don- 
ner le titre et les droits de citoyens amëicains dès qu'ils 
avaient touchë le sol de l'indépendance, mais qui devaieat, 
quoi qu'on prit faire pour les en dépouiller, conserver en- 
core pendant longtemps les idées: les prejugés et les vices 
particuliers / la vieille Europe, au grand risque de les ino- 
culer aux populations vierges parmi leSluelles ils venaient 
se fixer. Aussi bien paut-tre le grand crime des émiraats 
est-il d'accroitre de jour er jour les Iorces du parti abol- 
tonnte, tandis que les Kow-nothing ne dissimulent 
nullement leurs sympatbies pour le maintien de l'esclavage 
des nègres dans les États du Sud; et c'est là aussi, on le 
devine, que leur parti compte le plus d'adhérents. Pour met- 
tre une digue  l'invasion trangère , à la prëponderance 
de l'etranger, les Know.nothin 9 voudraieut n'admettre à 
l'avenir sinon  la jouissance des droits politiques, du moins 
 toute espèce de fonctions publiques dans l'Union, que les 
individus nés sur le sol américain, et rendre la naturalisa- 
tion un peu plus difficile qu'elle ne l'est aujourd'hui. Voici le 
proamme politique qu'ils ont publié en mai 1855,  la 
suite d'un grand meeting tenu  ffe-York : 1 ° Les AraCi. 
cains 9ouverneront l'Amériqoe ; 2 ° union entre les Ëtats 
de la confëdération américaine; 3 ° ni nord ni sud, ni ouest 
ni est ; ° la confëdération des États-Unis telle qu'elle est, 
une et indivisible; b ° aucune intervention sectionnelle dans 
la législation ou l'administration des lois amrricaines; 
6 ° hostilité aux prétentions du pape, dont les prêtres 
l'Église catholique sont ici, dans cette république arrosée 
et fe¢ondée par le san 9 protestant, les intermëdiaires; 7 o r- 
forze radicale des lois de naturaltsatios ; f,o institu- 
tions libres d'éducatio;t, pour toutes les e "lasses et pour 
toutes les sectes, avec la Bible, parole sacrëe de Dieu, lmur 
base universelle de l'instntction. 
i{NOX (Jonm), le réformateur écossais, né en 1505, 
Gilford, près Haddington, était professeur de théologie et de 
philosophie olastique h l'académie de Saint-Andi'ews 
avant 1530. L'etude de la Bible lui inspira dx idées plus 
libres en matière de religion, et les doctvines de Georges 
'.;shart, ainss que les prédications du moine Wilfiams contre 
la papauté, ne Ikent que I'y affermir. Quan, en- 15tf2, la 
frmation ¢,ommença à se rëpandre en gcnsse, Knox alfa 
préchcm" les nouvelles doctrines au sud du pu.es, et trouva 

KNOW-NOTH1NG -- KNOX 
dans le manoir de lord Douglas aide et protection coutre la 
persécution dont les idées nouvelles furent anssit6t l'objet 
de la part du pou»oir spirituel et du pouvoir temporel. 
Toute[bis, en 1597, il lui fallut chercher un reluge auprës 
des conjurés qui, après le meurtre de Beaton, tenaient le 
château de Saint-Andrews. C'est là que pour la première 
fois il administra la communion sous les deux espces; 
mais fait prisonniêr par les Français en mme temps que 
toute la garnison, il lut envoyé aux galères eu France. Rendu 
ì la liberté en 15/9, il devint prédicateur dans le comté de 
Berwick, en Angleterre, et même cl»apelain du roi ÉdouardVI. 
Quoiqu'il fut parvenu en Angleterre  faire renoncer  l'a- 
doration de l'hostie et au dogme de la t r a n s s u b s t a n t ia- 
t io u, il était si mécontent de voir qu'on y conrv.t encore 
d'autres usages de l'Église romaine, qu'en 1553 il refes 
l'offre d'un bénéfice. Lorsque la catholique Mari e monta 
sur le tr6ne, Knox s'efuit à Genëve, où il s'affelnlt dans 
ses sympathies pour le presbytériauisme. En novembre 1555 
il accepta bien la place de prédicateur des émigrés anglais 
réfimgiés  Fraucfort-sur-Mein ; mais il ne tarda point /t 
abandonner cette communauté, oh, ì son avis, l'on montrait 
trop de tolérance pour la liturgie anglicane. Dès 155- il 
était donc de retour à Genève, d'où il se rendit de nouveau 
en Ëcosse, dont il parcourut les divers comtés en i»rchant ; 
et il contribua activement ainsi à la propagation des doctl'ines 
de la réformation. Le haut clergé, alarmé des progrès de 
cette révolution morale, manda  Ëdimbourg celui qu'il en. 
considérait comme le principal fauteur; mais on n'osa point 
lui intenter un procès, et tout au contraire on le laissa prd- 
cher librement pendant plusieurs jours dans une maison 
particulière. Mécontent pourtant de la leutcur avec laquelle 
la réformation se répandait dans son pays, Knox accepta, 
dans Pété de 1556, les Ionctions de prëdicaleur auprës de la 
petite communauté anglaise établie à Genëve. 
Une fois loin de l'Écosse, les évtlues le citèrent de nou- 
veau devant eux, et le condamnèrent ì Stre br01é vif. 
Knox, quand il reçut  Genève la nouvelle de sa condam- 
nation, en appela au ri,tue concile; et alors, comme com- 
pensation  l'ëloignement oit il se trouvait de son pays, il 
adressa aux Ëglises et à la noblesse d'Écosse de nombreuses 
lettres, roulant tontes sur les nouvelles do¢lrines. En 1557 
le parti des prolestants écossais qui se forma sous le nom 
de Con grégatmn du Christ ledêtermiaa reveuirenlîcosse. 
Mais, découragé par son compagnon de voyage, il regagna 
bien vite Dieppe, puis Genève, où il se borna b des travaux 
théologiques. C'est à ce momentque, aidé par quelques amis, 
il composa la traduction anglaise de l'Écriture Sainte con- 
nue sous le nom de Bible de Geneve; c'est I/ aussi qu'il 
publia sa Lettre à la reine r$gente, dont le but était de 
réfuter les idées fausses répandues an sujet de la réforma- 
tion; son Appel à la noblesse et aux ëtals d'Ëcosse, et 
enfin, en 1558, son Premier coup de trompette contre le 
monstrueux 9ouvernement des.femmes, violent pampldet 
 l'adresse de la reine Marie d'Angleterre, qui ne lui attira 
pas seulement la haine de la régente d'Écosse et de sa fille, 
la reine Marie Stuart, mais plus tard encore telle de la 
reine d'Angleterre, Êlisabeth. Cédant, toutefois, aux ins- 
tances rëitérées de son parti, Knox se dida  revenir en 
Êcosse au moment où la régente venait de prendre la oéter- 
mination d'en eXlmlser tous les prédicateurs et fauteurs de la, 
nouvelle foi religieuse. Ainsi frappé de proriplJon, Knox 
déciara qu'on n'était point tenu à l'obéissance envers le 
souverain quand celui-ci ordonnait des ehnses injustes. 
Après un violent sermon qu'il prononça en mai i 59 à P¢fth, 
un prStre ne s'en étant pas moins mis en devoir de ¢élbrer 
la messe, il en résulta une insm'eetion populaire, qui se ré- 
pandit bient0t de proche en preche dans tout le pays. On 
détruisit les autels et les images des ca.tholiques, o rasa 
les eouvents, et on partage entre les pa,lvres les trésor 
de t'ancienne glioe. Knox, qu'on vin,lut rendre responsable 
de ces ex¢ës, essaya vainement de les arrtter; toute[nis, Il 
prit une part des pins actives i la guerre civile qui é¢latai 



KNOX 
alors entre les deux partis religienx. Tandiç que la régente 
implorait les secours de la France, il négociait vee l'An- 
gleterre pour que cette puissance intervlnt en lavent des 
protestants écossais. Il courait les provinces, prêchant 
partout où il passait ; et par son éloquence il ranitnait le 
courage des protestants, dont la position était devenue des 
plus ',critiques dans tes derniers mois de l'année 1559. 
Toutefois, après la pacilication de t 560, il eut la satisfaction 
de voir la réformation consolidée en Écosse, où l'Église pre 
bytérienne eut enfin droit de cité. Nommé alors prédicateur 
à Édimbourg, il y exerça par son éloquence franche et éner. 
gique une grande influence sur les esprits. 
En arrivant en Écosse en I{;6!, Marie Stuart usa autant 
d'adroites flatteries que de menaces directes pour gagner le 
redoutable Knox à sa cause; mais tous ses artifices échouè- 
rent contre l'pre sévërité du reformateur. Quoique dé- 
ployant un zèle bien moins farouche que ne l'ont prëtendu 
les partisans de la reine et Hume lui-mme, il ne laissait point 
que de s'exprimer en toute liberté du haut de sa chaire 
contre les tendances cathofiques de la reine et contre la légè- 
reté de sa conduite. Le rétablissement de la liturgie romaine 
à la cour l'ayant déterminé h publier un appel  la noblesse 
d'Ecosse, il fut pour ce fait accusé de haute trahison et tra- 
duit «levant la cour des pairs, qui prononça son acquittement. 
La manière dont il s'exprima au sujet du mariage de la 
reine avec Darnley lui attira de nouvelles persécutions. 
Quand Ma,-ie Stuart arriva en lbC6  dimbourg, Knox en 
sortit, et n'y rentra qu'après le détrOnement de la reine, ré-" 
volutiun à laquelle il ne contribna pas peu. La guerre civile 
<lu'al|man en tb?l le parti de la malheureuse reine eut pour 
.résultat de le dëpouillcr encore une fois de ses fonctions. 
Quand il rentra  Edimbourg en !576, au rétablissement de 
la paix, il était dejh souffrant. Après avoir pr$ché h propos 
«les massacres de la Saint-Bartl,elemy, événement qui avait 
produit sur lui une impression d'horreur et d'effroi, il tomba 
eriensement maiade et mourut à quelque temps de l 
e 24 novembre I72. 
Knox exerça plus d'influence par l'énergie de son carac- 
tè,'e et la vigueur de son intelligence que par l'etendue de 
:es connaissances. Sa conviction etait profonde, son élo- 
quence ardente et audacieuse, et son extérieur des plus 
imposants. Bien mienx que Luther, il sut exercer de Fin- 
llueace sur les afaires politiques de son pays. La rudesse 
et la dureté de ses manicres étaient le résultat de l'existence 
agitée qu'il avait menée, et elles ne contribuërent pas peu 
 la consolidation de son œuvre réformatrice. Il a écrit, 
entre antres ouvrag, une llistor v of the Beformation of 
lleligor« wthir« the realm o] Scotlar«d, qui parut après 
sa mort et qui a été maintes fois réimprfmée depuis. 
KiXUPHIS. Voye-- Ksvn. 
I{XUT ou CANUT, dit le Grid, comme roi de Da- 
emark Canut II et comme roi d'Angleterre Canut 1 , était 
!ils du roi SuCon ou Sven, à qui il succéda sur te tr0ne de 
Danemark en l'an t0t4, et plus tard sur le trône d'Angle- 
terre à la mort du roi ]thelred II. Il acheva la eonquéte 
de ce pays, commencée par son père, et inaugura son règne 
en dévastant toute la c(tc orientale deson nouveau royaume 
et en faisant no.er  Sandwich, après leur avoir préalable- 
ment fait couper le nez et les mains, les Anglais qui avaient 
été remis comme otages à son père. Il afla ensuite chercher 
en Danemark des renforts, avec lesquels il poursuivit son 
œuvre de dévastation et de destruction au sud de l'Angle- 
feue. Le ae Edmond iron,fde, c'est-A-dire C6te ne 
fer, troisième fils d'Ethelred, marcha A sa rencontre avec 
une armée ; et quoique toujours battu, par suite des trahisons 
de son beau-frère Edrich, il sut si bien se maintenir contre 
Cannt, que, fatigués de cette longue lutte, Anglais et Danois 
c..xigèrent qu'urrpartage du territoire e0t lieu entre les deux 
princes. Un traité solennel assura à Canut le nord et à Ethel- 
red le sud de l'Angleterre ; mais un mois après la conclusion 
«le cet accommodement deux chambellans d'Edmond, gagnés 
& prix d'or par F-lrich  l'assassinèrent. Toute I'A ngleterre passa 

 KOBI 
alors sous les lois de Canut, qui en présence de Fassemblée 
des états fit attester sous la foi du serment par de faux té- 
moins qu'Emond lui avait légué sa couronne au mépris des 
droits de ses enfants. Quand l'assemblée des états eut con- 
firmé cet arrangement, Canut envoya ces deux jeunes prin- 
ces au roi de Suède, qu'il chargea de les tuer. Mais celui-ci 
s'S, relusa, et les fit passer en Hongrie, où ils furent reçus de 
la manière la plus #néreuse. 
Si lnut en montant sur le trône avait débuté par de 
acte« de cruauté et des crimes, il se montra beaucoup plus 
humain.pendant le restant de son règne. Il punit les Anglais 
qui avaient trahi la cause de leur souverain, et envoya au 
supplice l'infIme Edrich. Puis quand, dans une asemblee 
des états, il eut remis en vigueur les lois d'Alfred le Grand - 
et établi la complète égalité de droits entre les Dauois et les 
Anglais, dont la loi protegea désormais indistinclement les 
personnes et les propriëtés, la haine qu'avait d'abord inspirée 
sa trannie se transforma en estime et en sympathie. Il corv 
solida tout  fait sa puissance en épousant Emma, veu,e 
d'Etl,elred. A deux reprises, il repassa sur le continent. La 
première fois, ce fut pour taire la guerre à la Suède, et la 
seconde pour conquérir la Norvëge. Devenu le prince le plus 
puissant de son temps, il comp,'it le neant des grandeurs 
d'ici-bas. Il construisit des églises et des couvents, et entre- 
prit un pëlerinae  Reine, où il obtint de grands priviléges 
pour les écols d'Angleterre. Sa dernière expédition fut di- 
rigée contre Maicolm, roi d'lcosse. Il mourut quatre ans 
plus lard, en 1136, A Sbaft.bury. Par son teolament il legua 
à l'alné de se fils, Sven, la Norvège ; au second, llarolM, 
l'Augleterre ; et au troisième, Hartha-Kut ( l:lardi-Canut, 
le Danemark. 
HO&LX nom vulgaire d'un mammifère didelphe que 
de Blainville a fait connaitre sous le nom de phascolarctos» 
qui ignifie ours à poche. Cet animal, qtd est dépourvu de 
queue etdont les membres de derrière ont, comme ceux des 
phalangers, un poche opposable et des dents semblables 
celles de ces animaux, ne doit pas tre confondu avec un 
autre mammifère décrit par Goldfuss, sous le noro de hepu- 
rus, parce que ce dernier, nonobstant sa ressemblance avec 
le koala ou ph«scolarctos, n'aurait pas comme lui le pouce 
«les membres de derrière opposable. Le koala habite la 
.Nouvelle-Hollande. L. LtaL . 
IOBI ou GOBI, en mongol Scharno, nom chinois du 
grand desert de Mongolie, qui, A l'instar du nom de la Sa- 
hara, désine un endroit manquant d'eau courante et de 
bois. La Kobi forme le milien désolé du grand plateau de 
l'intërienr «le l'Aie, qui s'étend depuis |e Belour-Tagh 
l'ouest, enlre h" Kaikoun ou Kouen-Lun au sud, et le Mouz- 
Tagh ou Tbian-Schan au nord, puis, aprè.ç la dépression 
subite de ce dernier d Barkoul, entre les cbalnes de mon- 
tagnes dt système de l'Altaï an nord et les montagnes du 
nord de la Chine au sud, jusqu'h la cha|ne de monta-nes 
du Kbingk«n-Oola, à l'est. Ce centre désolé d'un plateau dont 
les ersants sont susceptibles de culture, conslitue ,me es- 
pèce de bassin qui, de 1,200 mètres d'élévation qtfil a à 
son rebord, s'abaisse insensiblement jusqu'h ne plus ëtre 
dans son fond qu' 800 mètre« au-dessns dtt niveau de la 
mer, et qui vraisemblablement était jadis une vaste mer in- 
térieure, dont les derniers vestiges se retrouvent dan» les 
quelques lacs salés existant encore au centre. Le sol de ce 
bassin secompose, à son centre, de sable imprégnc de sel, 
ne croissent que des rosesux et des varechs. A mesure qu'on 
s'éloigne du centre pour s'approcher du bord, le sable dis- 
parait, et le sol n'est plus couvert que de galels et de 
bris de pierres, le plus ordinairement de porpll)re et de 
jaspe, entre lesquels ne poussent de loin en loin que quel- 
ques plantes de la nature des arbrisseaux, ou bien dMne 
terre argileuse, nue, impr6gnée aussi de sel, et où ne croisnt 
q,,e quelques basses herbes marines. La faune de la Kobl 
n'est pas moins pauvre que sa flore ; le Djiggetai, le 
meulon sauvage argali, des antilopes et des hamsters, Ici» 
sont les espèces animales les plus remarquables qu'on y rcn 



contre. Le cli,nat, d'une cl,aleur étouffante en été, est en I,iver 
du froid le plu rude. Aussi, la Kobi est-elle pour les I,ordes 
mongoles habitant les versants cultivables du plateau exac- 
tement ce que la Sahara est pour les Arabes bedouins. 
{'époque de la bonne saison, les I,ordes se rctirent dans les 
oasis sitnëes dans le dësert, sur les rives des fleuves et des 
ruisseaux qd deccndent des montagnes formant les parois 
du bassin, et qui finissent tous par se perdre dans les sa- 
bles du centre, ou encore dans quelques dépressions subies 
par le sol, qui alors devient marecaeux. C'est la que ces 
bordes font paitre leurs bestiaux. Dans la mauvaise saison 
elles Change;tf ces oasis contre d'antres pturages. 
IOBOUIG. VoJe-- Conocnc. 
IOCll ( çnn;sxo;,nr-Gu;LL,cur » ), historien et publi- 
ciste, ne le 9 mai t737, à Bouxwiller, en Alsace, obtint, en 
1780, la chaire de droit devenue vacante h l'universitc de Stras- 
bourg au décës de Schoepflin. Dpute/t Paris par les protes- 
tants de l'Atsace, en t89, il oblint de l'Assemblée consti* 
tuante l'assurance que les droits et les libertés retigieuses de 
ses coreligio««aires seraient garantis par la constitution 
qu'elle allait donner  la France, de intime qu'on respecterait 
les propriétés appartenant à leurs êgtis. Membre de l'As- 
semblée Iégislatve, il s'y distingua par sa constance à dé- 
fendre le bon droit et la justice; ce qui hfi valut une dé- 
tention de neuf mois, /, l'poque de la terreur. Membre du 
Tribunaten t 802, il fut nommérecteur del'a«adcmie de Stras- 
bourg en I8tO, et mourut en tt3. Parmi tes excetle«ts ou- 
vrages qu'on a de lui, nous mentionnerons plus spccialement 
son Tableau des lldvoliitions de t'Eiirope, deImis le 
versement de l'Enpire /{omain )usqu'Iz os )om's ( Lap- 
sanne, t771 ; nou'. ëdit., Paris, 1807 
ouvrage continué depuis par Schoell juqu'/ la reslanration 
lies Uourbons ; et son Abreçé de l'histore des traites de 
$ai depuis la paiz de Wtphalte 
votumes, le, 1797), ouvrage comptéte egatemcnt plus 
tard par Schoell et poussé jusqu'aux trailës de 1815. 
KOCH (Jes-Bxtts-FaoEtc), neveu du precdent et 
connu comme écrivain mititail'e, est nWen 1782, à ancy. 
Entre en 1800 dans la rde à cheval des conu.s, il passa 
bientbtaprès dns l'inlantrie. Dans la mpane d'E-pane, 
obtint te rade de pilaine en 1809, et passa chef de bataillon 
en 181 I. Envoy en Saxe en 1813, il fut aHaché au 3 « corps 
d'armèe, et eut ocoesion d'y oennaitre te général J o mini 
çui apprcia l'e«due de ses connaissan et dont il devint 
l'aide de p après la balaille de Lulzen. Apr la seconde 
rtauration, il se rendit a Saint-Péter»burg, o il secomla 
Joni dans la raction de n Histoire des Gu«rr de la 
Bvolution. Ce ne fut qu'en 18t7 qu'it parvint a se faire 
rntrer dans les cadres de l'armée ; et il lot nommé alors 
profeenr à PËcole d'Application. Mais on suspendit bient6t 
con eniement, comme stspect de tendancçs bonapais- 
tes. Après la rcvolution de Juiltet il pas lieulenant-oelonel, 
puis colonel en 183. I s't fait un nom comme ëcrivain 
miliireenUaduisant en francs I Princip de Strntgie 
de l'archiduc Charles (3 vol., Pas, 1817) et en pohant 
d 31dmoires pour svir à l'Histoire de la Campaçne 
de tSt6, oure des plus timés et qui it autorité. On 
a encore de lui un E«amen raisondde l'oiivrageintituld 
 Russie dans l'dsie tineure,  campaçnes du ma- 
rechal Pasewitsch en Æ828 et 1829 (Paris, 180). Il a 
aussi puhlié I Mdmoir de Msdna (4 vol., t49 ). 
I{OCH (Jospa-Aog), lèbre payiste, né en 
768» ft revable de son édution première à la prolec- 
tion de l'évque d'Auurg. Apr avoir séjoué quelque 
mps à Strasurg en 1792, et s'y lre un peu mlé aux 
agitations révolutioaires de l'épue, il p en Suisse, 
o il exécuta à l'aquarelle une foule de lles étud, et de 
là se oenoet en lie. Il arriva à Boee en nçier t795, et 
y fit bicnt6t un nom par ses rerquabl ef[or pour 
un la peinture du payge à le de l'histoire.  pre- 
mie Uavax furent des dsins bien exCules, de riches 
oupes rcfléc d'une mère heurse I scèn de 

KOBI  KOECHLIN 
la nature qui l'entouraient. Comme il connaissait assez ira. 
parfaitement les procédés techniques de la peinture, on pré- 
fëre en gënéral ses dessins  ses tableaux. Vers la fin de sa 
vie, il était devenu trop faible de santé pour pouvoir beau- 
coup travailler. Il mourut  Borne, le 12 janvier 1539 ; six 
mois auparavant, Fempereur d'Autriche lui avait accord 
|ne pension. 
I{OCI (CnILr-S'PL E), fils d'un banquier bol]andais, 
mort sur l'écbata{;d pendant la terre;te, est né à Passy 
prës Paris, en t  9, et avait été de,tinWà suivre la earrièro 
de son père; mais la démangeaison d'écrire, qui le tourmenta 
dès l':tge de dix-sept ans, lui révela sa véritable vocatiun, 
et à partir de ce moment il la suivit sans se laisser dcou- 
rager par les obstacles. Sur le refus des libraires de prendre 
 aucun prix son premier roman, L'Enfant de ma Femme 
( 1812, 2 vol. in-12), il dut le laite imprimer à ses frais; 
msaventure qu'prouva aussi plus tard M. EugèneSue. 
M. Paul de Kocl écrivit coup sur coup cinq mëlodrames 
pour les tl;éàtres du boulevard et quelques petits actes pour 
l'OpCa-Comique. lais c'est dans le roman consacre à la 
peinture des mœurs de la petite bourgeoisie de Paris qu'il 
devait rëussir et se faire un nom, à bon droit populaire. En 
effet, la grisette a trouvé en lui un peintre aussi ingénieux 
que fidèle. O;t voit qu'il s'est livré - cet égard à une étude 
approfondie des petits mystères de la vie parisienne. Son 
prit est souvent de si bon aloi, et il a toujours tant de gaietë, 
tact d'entrain dans ses revclations, qu'on lui pardonne la 
monotonie de sa phrase, toujo{trs coupre sur la mëme patron. 
D'ailleurs il n'alliche pa.«, comme certains romanciers mo- 
dernes, la prctention de fai;'e de l'art ; il s'attache avant 
tout  amuser, et le plus souvent il  réussit. Le; critiques 
9anis jaunes des reues et des feuilletons alfectent pour 
son talent un mëpris que M. Paul de Kock serait en droit 
de leur rendre a usure, s'il avait à apprecier la port«e de 
leurs sopori/iques dissertations. Qlte si a l'ctranger certain 
juges se sont trompés sur les prétentions vériables de 
?,I. Paul de Kock, et s'ils ont x-ouht à toute force voir en lui 
l'un des principaux reprêsetants de la littérature française 
contemporaine, il ne laut point le rendre responsable d'une 
méprise parfaitcmrnt pardonnable à Londre, à Vienne ou 
à Saiat-Pctersbourg, alteadu que les ouvrages de cet écri- 
 aih, en raison mëme de leur caractère, y obtiennent bien 
autrement de succês que des livres, moins attrayanls pour 
le fond et la forme, mais plus soli.lement pensés et plus 
habilement écrils. 
Nous ne donnerons pas ici la longue liste des romans de 
?,!. Paul de Kock, car elle resterait nécessairement incom- 
plèle. Contentons-nous de citer Georgctle, Gustare, .$Ion 
roisn i?agmond, Frère Jacqtes, M Dttpont, $ceurAnne, 
Le, 1,atière de Montfernteil, La Maison Blanche, La Fem- 
me, le z}lari et l'Aman , Le Touriotrou , L'Amant de la 
Lzne, etc., etc. E somne, il a été longtemps d'une fêcon, 
dité ëale au moins à celle de M. Alexa;tdre D u m a s. Cha- 
que mois, à cette époque, son inepuisable verve enfantait un 
volume [Sous avouerons d'aille;tes que nous sommes loin 
d'avoir lu tous les ouvrages de M. Paul de Kocl; nos obser- 
vations critiques ne peuveat donc s'appliquer qu'a ses prin- 
cipales productions. Par/ois il s'autorise de l'exemple de 
blolière pour appeler les choses assez crùment par leur nom. 
On lui a reproché d'avoir ëté irrévércncieux envers le pu- 
• bile en donnant pour titre à un de ses romans un qualieatff 
qui n'a plus cours dans la bonne compagnie. Or, c'est pré- 
cisément de tous ses mtvrages celui qui nous a donné la 
meilleure idée des talents de ce romancier. La {able en est 
dramatique et pleine d'intër/t ; le style en est aussi beaucoup 
plus clultié qu'il n'entre dans les habitudes de l'auteur. 
Son fils» Henri ne Koca, a fait jouer plusieurs ièces sur 
les thétres de Paris. 
I{OECHLIN (Famille). Le nom de Koechlin est à bon 
droit populaire en Alsace; il appartient à une famille de ma- 
nnfacturiers qui depuis longtemps occupent un rang distia- 
&ne dans l'industrie des toiles pointes. 



KOECHLIN 
Samuel KOECnLIN, né en 17|9, à Mulhouse, y établit en 
! 7t5, avec Jean-Henri Dvllfus et Jean-Jacques Schmaltzcr, 
la première manulacture d'indiennes connue. Il mourut en 
1771. 
?eau KOECULIN, l'a|né de ses fils, continua d'abord les 
travaux de son pre ; puis, de concert avec un de ses beaux- 
frères, il fonda dans sa ville natale une ecole supérieure de 
oemmerce, qu'il dirigea lui-mme. 
2Vicol(ls KOECIILIN, son fils, né en 17M, est le créateur de 
l'important établissement connu, depuis ! $02, sous son nom. 
Quand, en 1814, le allié.s envahirent le sol français, Nicolas 
Koechlin mit à la disposition de l'empereur divers membres 
de sa famille, et entra lui-mëme dans l'état-major du géné- 
rai Lefèvre. En IS15 il essaya mme d'organiser la guerre 
de partisans dans les Vosges. Élu député en 1826, il aila se 
placer à l'cxtrème gauche, et lit parlie de cette courageuse 
minorité des sept qui sous le ministère Villèle btta si 
vaillamment pour la défense des libertés publiques. Les élce- 
teurs lui renouvelèrent leur mandat aprës la révolution de 
Juillet; mais il y renonça en 1841, pour se livrer tout entier 
à la construction du chemin de fer de Strasbourg à B'àle, la 
première grande ligne de voie de fer qu'ait eue la France. 
Si la partoriginair¢nnent faite dans cette aflhire aux entrepre- 
neurs parut tout à fait Stre celle du lion et donna lieu à de 
nombreuses accusations, on ne peut nier que l'achèvement 
de cette entreprise n'ait eu du moins un bon résultat, celui 
d'exciter les capitaux à se lancer dans ces opérations. Fon- 
dateur du nouveau quartier de 51uihou«e, il lit don à la ville 
de l'rdifice principal de ce quartier, qui sert de local h la 
$ociét( Industrielle, à la chambre de commerceet h la Bourse. 
Ce grand industriel mourut à Mulhouse, le 15 juillet 1852. 
Jacques KOECnLN, frère et associé du précédent, a, 
comme lui, défendu avec courage son pays contre l'Cranger 
et ses libertés contre les tendonces de la Restauration. Après 
avoir ëté élu deux fois maire de Mulhouse, il vint, en 180, 
siéger à l'extrême gauche de la chambre des députés, et eut 
en 152 le courage de signaler à la France, par la voie de 
l'impression, les menées inf-,tmes qui avaient fait tomber 
dans un piCe le colonel Ca ru n et gravement compromis 
le repos de l'Alsace. Pour ce fait, déclaré calomnieux, il fut 
condamné  six mois de détention et 5,000 Ir. d'amende, 
qu'acquitta une souscription patriotique. Rëlu député pour 
ladernière fois en 1824, il se retira de la vie publique en 1826, 
et mourut à .Mulhouse, le 16 novembre 153. 
Andrd KoecnN, parent des précédents, ne en 1789, se 
mit en 1818 h la tte de la maison Dollfis-Mieg et compa- 
gnie. Sous son habile direclion, cette maison, qui embras- 
sait la filature, le tissage et l'impression des toiles peintes, 
continua  progresser ; et Iorsqu'il en sortit, sa furtune lui 
permit de fonder un nouvel établissement non moins consi- 
dërable, auquel il donna son nom, et qui s'occupe de la 
construction des machines, blaire de i',hdhouse en t830, il 
donna dans cette ville une grande imlmlsion à l'instruc- 
tion publique. Ëlu député de l'arrondissement d'AItkirch 
en 1832, il se rangea sous la bannière de Casimir Parier. 
Son premier mandat législatif linit à la dissolution de 1834 ; 
mais il rentra dans la chambre en 184|, comme député de 
l'arrondissementdeMulhouse.En 1846 il échouaà Mulhonse;. 
mais, plus heureux h AItkirch, il vint encore faire partie 
de cette majorité de satisfaits dont l'aveugle optimisme de- 
vait amener la chute du tr6ne de Louis-Philippe. 
EOEEOE (RERN,In-COI[ÉLIVS), l'un des plus re- 
marquables peintres de pysages de l'école hollandaise mo- 
derne, fils d'un peintre de marine, est né en 1803, b blid- 
delbourg, en Hollande. Une vocation décidée le porta vers 
la peinture du paysage, et pendant les trois années de séjonr 
qu'il fit à Amsterdam, les grands maitres que la Hollande 
a produits en ce genre lui servirent d'exemples et de modèles. 
Parmi les paysagistes hollandais vivants, ceux dont il s'ap- 
propria surtout la manière sont Schelflmut et Van-Oos. Ses 
toiles sont extrèmement recherchées. Le caractëre distinctif 
d e productionÇ, c'est l'extrême fidélité avec laquelle il 

-- KOEiNIG 
reproduit la nature, jointe ave une rare poésie de compoe 
sition. Si sous le premier de ces rapports il se montre le 
digne continuateur de la tradition des grands ma|tres de 
l'école hollandaise, il l'emporte sur eux en ce qui est de la 
plénitude et de la poësie de l'invention, comme aussi de 
l'originalité de l'exposition, qui reproduit avec la plus mer- 
veilleuse exactitude les moindres détails de la nature et leur 
prète un caractère artistique particulier. Cet artiste réside 
maintenant à Clèves, où on lui doit la création de l'Cule 
dedessin existant dans cette ville. En 18ttt, il a fait parattre 
à Amsterdam des Souvenirs et contrnunicaton$ d'n 
peintre de pa9sages , ouTage écrit en allemand. 
IOENIG (Fauc), inventeur de la presse m é- 
canique, naquit le |7 avril 1775, h Eisleben (Saxe prus- 
sienne), etentra à I'ge de quinze ans comme apprenti com- 
positeur et pressier dans l'officine de Breitkopf à Leipzig. 
Son apprentissage terminé, il employa la petile fortune que 
sa mère lui Iégua en mourant, pour Ibnder une librairie dans 
sa ville natale. Son commerce n'ayant point réusi, il alla 
travailler de son état successivement à Vienne, a Saint- 
Pétersbourg et à Londres oh il arriva en 1506. Connaissant 
tous le inconvénients de la presse h bras, Koenig avait 
toujours élë préoccupé de l'idée d'y remédier; et à cet effet 
il avait pendant longtemps étudié les mathématiques et la 
mécanique. Il n'avait donc pas tardWà essayer de construire 
une presse mécanique ; mais en Allemagne comme en Russie 
on tint son idée pour inexécutable, et il ne trouva nulle part 
d'appui pour la réaliser. Ce fit seulement à Londres, en 
1807, q«'i! parvint h traiter avec l'imprimeur Th. Bensley, 
qui consentir h faire toutes les avances de Ionds pour exé- 
cuter la machinée dont il avait tracé le plan et prendre 
les brevets nécessaires. Un peu plus tard, Richard Taylor 
et Georges Woodlall, imprimeurs à Londres, entrèrent 
é,alement dans l'association. On prit alors successivement 
divers brevets d'invention à l'effet de s'assurer l'exploita- 
tion exclusive du marchê anglais pendant un certain nombre 
d'années, et on construisit plusieurs machines. Le premier 
brevet, pris le 29 mars 18|0, est pour «ne presse imprimant 
au moyen de deux tables placés horizontalement comm 
dans la presse h bras. E avril 181! ou imprima avec une 
machine de cette epèce une feuille de l'Annual tlegis- 
er pour ISl0, incontestablement la premiëre partie d'un 
livre «lui eut encore ëté imprimée à l'aide d'une machine. Le 
second brevet, en date du 30 octobre 181 l, avait pour ob]et 
la presse simple à cylindre; le troisième brevet, en date du 23 
juillet 1813, mentionnait divers perfectionnements appartés 
à l'invention. Les résultats obtenu fi l'aide de la machine sim- 
ple à cylin[tre furent si satisfaisant% que J. Walter, proprio- 
taire du Tirnes, commanda aussit0t à la sociétt deux dou- 
bles machines, qu'il fit disposer avec une machine à vapeur 
dans Printing-House-Squ«re; et le 2.9 novembre 181. 
elles tirèrent pour la première fois le Tirnes. Un article 
placé ce jour-là en tëte d journal porta l'invention h la 
connaissance du pullic. On vit ensuite se succoeder rapide- 
ment divers perfectionnements importants, basés sur les 
principes décrits dans le quatrième brevet, en date du 
décembre 1514, relatif aux moyens d'obtenir d'un seul coup 
une ieuille tirée verso et recto. Une machine de ce genre 
fonctionnait dès le mois de fevrier 1816 dans les ate- 
liers de Bensle/et fils à Londres ; et le premier livre com- 
plétement tiré/t la mécanique fut la seconde édition de la 
trad nation anglai des Élërnen fs de Ph ysiologie de Blumen. 
bach, par Elliotsson. Des mésintelligences graves autre- 
nues entre Koenig et Bensley ainsi que ses aulres associés 
le déterminèrent plus tard à renoncer au bénéfice des brevets 
pris en Angleterre et à s'en revenir en Mlemagne avec son 
fidèle ami Bauer, qui l'avait activement secondé dans tous 
ses travaux. Ils s'associèrent alors tous deux de nouveau; 
et secondés par l'intelligent roi de Bavière blaximilien 1 , ils 
montèrent dans l'ancienne abbaye de prémontrés d'Oberzell, 
près de WuroEbourg, pour la constcuction des presses me. 
¢aniques, de mte que pour celle des machines à fabrique[ 



790 
le papier conlinu, une usine pourvue de tous les ateliers né- 
cessaires, tels que fonderie de fer, etc.; et bient6t il n' eut 
presque plus de grande ville en Allemagne à laquelle ils n'eus- 
• ent fourni une pres mécanique. K.nig mourut te 17 
janvier 1833 ; mais son associé Bauer n'en continua pas 
moins les opérations de la société, qui en 1853 avait déjà 
construit plus de 400 machines. 
KOENIGSBEPG en poloais Krolewiec, chef-lieu du 
cercle du mème nom dans la province de Prusse, la seconde 
capitaledu royaume, est située sur le Pregel, qu'on T asse 
sur sept ponts, à 7 kilomètres de l'embouclmre de ce fleuve 
dans le Frische-Haff, sur la lisière septentrionale de la 
Samlande. Elle se compose de trois quartiers distincts : la 
Iïeille-lïlle, le Loebenicht et le Kneipi.fe. En  com- 
prenant qualregrands faubourgs, elle a I kil. de circuit ; 
mais ce vaste espace comprend aussi un grand nombre de 
jardins, le grand étang du clrAteau avec ses charmants envi- 
Tons, et quelques champs. Fondre en 1256 et appelée Koenigs- 
ber9 en l'honneur du roi de Bohème Ottokar, elle porte le 
titrede eapilale, parce que de 157 à 1525 elle îut la rési- 
dense du grand-mailre «le l'ordre Teutonique, et plus tard 
celle des premier durs de Prusse. Elle possède vingt-et-une 
églises, dont une catholique, construile en 1616, une cha- 
pelle mennonite et une synagogue ; et on y compte 80,000 
habitants, dont 1,500 juits. On , voit peu de belles rues. La 
cathédrale, qui a 95 montres de long sur 30 de large, avec 
ne tour haute «le 62 mëlres et un superbe bnffet d'orgues, 
mérited'ètre visitée.On y voit les tombeau,/ des grands-mal- 
Ires de l'ordre Teutonique et des premiers dues de Prusse. 
L'uni'eilé de Koenigsberg, fondée en 1544, par le mar- 
grave AIbert I , duc de Prusse, comptait un siècle plus tard 
plus de 2,000 étudiants. C'est à peine si. atjourd'hui elle 
eu a 300. Elle eut pour premier recteur Sabinus, gendre de 
_Me I a n c h th o n ; parmi les professeurs qui l'ont illutrée, 
on cite Bessel, Burdach, Fichte, Herbart et Kant. La biblio- 
thèquc «le I'université contient au delà de t00,000 volumes. 
Quoique le Prgel ait ici de 20 à 23 mèlres rie prfondeur 
et puisse des lor porter des btiment«b, trois ponts, les nom- 
breux bas-fonds dont il est parsemé forcent les btiments 
d'un tonnage un peu tor il s'artCr à Pill«u, port et place 
loite peu cloign«e de son embouchure. Le commerce de 
Kenig.ber ctait attrefoi trè»-considérble, et ne laisse 
pas que d'avoir encore aujourd'hui de l'importan,'e..',lais 
a construction des uavire , a se.-tsiblement diminué. 
Quoique une décision de la ConttMration germaniqse ait 
;»act cette ville en dehors de l'Allemagne, se habitants 
-onl restes allemands de CœUr et d'esprit. Dans ces derniers 
tc'.nps tlïlmaenses travaux ont été e,trepris pour transfor- 
a:cr Koenigsberg en place forte de premicror, lre. 
OEN|GS.IIAP, K _Mm-o, comtesse n), mal- 
h-esse d" A u Sus te I I, roi de Pologne et électeur de Saxe, 
naqlit vraisemblablement  Stade, vers 1673. Son père était 
lils ainé du fcld-marcchal de koeigsmark, mort en 1653, 
et mourut lui-méme eu 1693, au siCe de Bonn, avec le grade 
«c gonCai au service de Hollande. Sa mère, femme distin- 
gues à tous égards, était fille tlu ctëbre feld-marecha| sté- 
,»is Wrngel. AurOre unit de bonne heure de grands charmes 
physiques a de rves facultés intellectuelles, perlectionnees 
encore par une éducation des plus soi3nées; et ayant eu dès 
son enfance occasion de vix're tour  tour  Stckholm,/t 
llambourg, à Hanovre, à Brunswick, etc., elle y apprit la 
vie du monde et les usages des cour. 
La subite disparition ( 1694 ) et la mort m)'stérieusc de son 
frère (vo9e'-l'article ci-après) furent le motif d'ur voage 
qu'elle entreprit à Dresde, et qui décida de sa destinée. 
Le jeune comte de KtI'nigsmark lais»ait en mourant une 
fortune assez considérable, dont hcritaient ses deux sœurs, 
l'une mariC, e au comte de Loewenhaupt et résidant à tiare- 
bourg, l'autre, Marie-Aurore, non mariée et demeurant, 
depuis la mor de leur mère, avec sa sœur aihC. Une partie 
de celte forhme ëlait enh-e les mains de banquict's de IIAm- 
bom',, qm iaisaicnt d diflicultt pour la rendre aux héri- 

KCENIG  KOENIGSMARK 
tières, tante par elles de pouvoir joridiquement prouver la 
mort de leur frère. 
Ce fut pour triompher de ces chicanea que la comtesse 
Aurore de KoeWigsmark, alors dans tout l'clat de la jeu- 
esse et de la heuté, s décida à entreprendre le voage 
de Dresde, à l'effet de solliciter les bons offices de l'électeur 
Frédéric-Auguste en faveur des sœurs d'un homme 
avait étéà sou service. L'électeur ne l'eut pas plus tt vue 
qu'il en devint éperduement épris, et Aurore, qui ne sut pas 
lui résister, devint mère en 1696, à Gosslar, d'un fils qui 
fut depuis le célèbre Maur icc, comte de Sa.ze. La pas- 
sion de t'électeur ne tarda pas à s'éteindre; mais il conserva 
toujours pour la femme qui en avait é{; momentanément 
l'objet des sentiments d'estime et d'amitié. Sa beauté, son 
esprit, ses grlces toutes féminines, unies à des connaissances 
très-variées en ce qui touche les arts et les sciences, auto- 
risèrent Vollairo à l'appeler la femme la plus cdlebrc dr 
deux siècles. Après de longs efforts ayant pour but d'obte- 
nir une honorable et paisible retraite dans le chapilre de 
Quedlimbourg, elle en fut nommée coadjutrice en janvier 
1698, puis abbesse deux ans plus tard. Mais elle avait trop 
de mobilité dans l'esprit pour se condamner au repos de 
cette tranquille existence. Elle aimait à voyager et à chan- 
ger de séjour. Aussi la vo),ait-on alternativement à Dresde, 
à Leipzig, à Breslau, à Hambourg, etc. Le plus cëlèbre de 
es voyages fut celui qu'elle entreprit en Courlande, au qar- 
lier général de Charles XII, en 170, avec une mission di- 
plomatique d'Auguste lI, à l'effet de déterminer ce prince à 
conclure la paix. La maréchale de G u é b r i a n t, elle aussi, 
avait été chargée au siècle précédent d'une négociation di- 
plomatiqne. La mission de la ¢omlesse de Koenigsmark est 
donc le second exemple d'un négociateur en jupons qne 
nous offre l'histoire de la diplomatie. Quoique l'opiniatre 
Chares X! t ett constamment refusé de recevoir la belle com- 
tesse, les inutiles propositions de paix auxquelles elle avait 
servi d'intermédiaire ne I'tssèrent pas qlse de grndir son 
imporlance et sa répulation. 
Après une existence sinulièrement agitée, la comtesse 
de Koeuigsmark finit ses jours dans un état voisin de la misère, 
mais emportant du moins l'espoir que son fils, récemment 
elu duc de Couriande, ne tarderalt pas à Cre admis au nom- 
bre des souverins de l'Eurpe. FAIs mourut des suites d'une 
douloureuse Iffdropisie, le 16 fvrier 1738, à Quedlimbonrg, 
où on peut encore voir aujourd'hui dans les caveaux du 
cloltre son corps, en quelque sorte momifié. Il faut singu- 
lièrement se défier des anecdotes qu'on trouve à son sujet 
dans La Saxe galante. Consultez Cramer, Mdmoires de la 
Comtesse Mrie-Aurore de Koenigsmart ( 2 vol., Quedlim- 
bourg, lf36 ). 
KOEN IGS_MAF, K (PltsLSlI,E-Cuts'toen, cotte n ), frère 
de la précëdente, a laissé un nom célèbre dans l'histoire, 
a cause de sa fin tragique, dénonement m)rstèrieux de tout 
un roman d'amour, qui vaut bien la peine d'ètre raconté. Né 
vers 1560, et colonel au ervicede Suède, le comte de Koe- 
nigsmark arriva à la cour de Hanovre vers 1692. 
Le prince électoral, qui fut plu tard roi d'Angleterre ous 
le nom de Gent ses I *, avait épousé Sophie-Dorothée, sa 
cousine germaine, et fille du duc de Celle. La princesse 
était belle, et les premières années de son mariage furent 
heureuses. Mais te sombre caractëre de Iëponx l'emporta 
bient6t sur l'amour, et le rendit jaloux à l'excès; et la prin- 
cerne ëlectorale tait la plus malheureuoe des femme_, quand 
Koenigsmark arriva à llanovre. Beau et bien tait, spirituel 
et empressé, il e tarda pas ì inspirer de l'ombrage au 
prince électoral, en mme temps que les plus tendres sen- 
timents à la princesse. Celle-ci était trop malheureuse pour 
ne point accueillir avec s}mpathie les marques d'attache- 
ment que hd donnait Koenigmark, et bienttt elle partagea 
assez la passion qu'elle lui avait inspirée pour consentir à 
l'exécution «tu romanesque projet qu'il avait conçu de |'en- 
h.ver et de la conduire en France, oi elle ea'd embrassé la 
religion catholip»e, afin d'y trouver toute protection. Mais 



KOENIGSMARK 
Georges I**' faisait épier nos deux amants; et quand il se 
crut s0r de son fait, il n'hésita pas à frapper les coupables. 
Sa vengeance lut atroce -- d'après son ordre, le comte fut 
assailli le soir par quatre individus, daus un corridor «lu 
château, au moment où il sortait secrètement de l'apparte- 
ment de la priucesse, avec laquelle il venait d'arrèter les 
dernières dispositions de leur fuite commune. Ces quatre 
bandits le poignardërent sur place, sans qu'il e0t eu le temps 
de tirer son épée et de se defendre. Suivant les uns, ils trai- 
nèrent ensuite son cadavre jusqu'a i'ëgout le plus proche, 
et l'y précipitèrent. Suivant d'autres, ils se seraient bornés 
à désarmer le comte et à le conduire par devers le prince 
électoral, qui aurait froidement ordonné de jeter son rival 
tout vivant dans un four chaud. Cette tragique aventm'e 
eut un immense retentissement; et dans les diverses 
,ours de l'Erope, la seconde des versions que nous veuons 
de rapporter lut celle qui obtint le plus généralement 
créance. Saint-Simon l'adopte comme vraie, et cite le fait 
comme acquis à l'histoire. Palmblad a publié la Corres- 
poudance du comte de Koeni9smarÀ et de la princesse 
Soph le- Dorothde de Celle ( Leipzig, ! 87 ), d'après u n ma- 
nuscrit conservé, dit-on, en Suède, dans les archives de la 
famille de Loewenhaupt, alliée à celle des Koenigsmark. 
IOENIGSTEIN la seule forteresse qu'il y ait dans le 
royaume de Saxe, non lbin des frontières de Bohème, bttie 
sur un rocher à pic, élevé de 533 mètres au-dessus du ni- 
vean de ['Elbe, qui couleà ses pieds, mais qu'il ne domine 
pas complétement, en raison de son extréme éiévalion. On 
ne parvient à sa porte extérieure que par une espèce «le 
chemin couvert. L'accès en est si escarpé, qu'il faut bisser 
les voitures pour les y faire arriver. Le plateau de ce rocher 
a environ deux kilomètres de circuil, et renterme, outre les 
bMiments de service, un puits de 200 mètres de profondeur, 
qui, avec deux citernes, fournit l'eau nécessaire à la garni- 
son. On y trouve aussi des jardins et un petit bois de sapins, 
oit est placé le magasin ì poudre de la lorteresse. En cas 
de besoin, il y aurait assez de terre arable pour produire les 
objets les plus indispensables ì la consommation de la gar- 
nison. Les approvisionnements de vivres qu'on y réunit 
sont déposés dans des magasins taiilés dans le roc et si par- 
faitement sec.% qu'ils s'y conservent pendant trois années. 
La construction de cette forteresse, qui sert aussi de prison 
d'État, fut commencée en 1589, sous le règne de l'Cecteur 
Chrétien W; mais elle ne fut complétement achevée qu'en 
1731. L'arsenal, las casemates, la chapelle et les caves reC 
firent d'tre vus. 
KOEPPdLls KIUPERLI ou KUPRULI, nom d'une 
famille de grands-vizirs ottomans. 
KOEPRILI (M#.U'-atT), grand-vizir s de l'an 1656 ì l'an 
1661, petit-fils d'un Albanais qui était venu s'établir en 
Asie Mineure, nhquit en 1585, a Koepri, d'où son surnom 
de li'oeprili. D'abord marmiton, puis cuisinier, Méhémet, 
vigoureux, adroit et spirituel, parvint peu à peu ì se 
faire nommer grand-écuyer du grand-vizir Kara-Musta- 
pha. Après avoir fait avec lui la campagne de Chypre, il 
fut nommê gouverneur de Damas, se distingua en cette 
qualité dans une guerre contre la Perse, et administra 
son gouvernesnent avec autant de justice que de douceur. 
routefois, il ne tarda pas ì re destitué, et vécut alors 
sans emploi  Koepri jusqu'au moment où le grand-vizir 
blébémet l'emmena avec lui ì Constantinople, et oti il fut 
recommandé t la sultane Valldé, toute-.puissante sur l'esprit 
de son fils, encore mineur, le sultan Mabomet IV, comme 
l'homme qui pouvaitsauver l'empire. Koeprili à ce moment 
était déja un vieillard de soixante-dix ans; et quoiqu'il ne 
st ni lire ni écrire, il accepta, le 1 septembre 1656, le 
sceau de l'empire comme grand-vizir, à la condition qu'on 
aurait en lui une confiance sans réserve. Après avoir mis 
un frein  l'esprit de persécution des orthodoxes ianatiques, 
chassé de teurs places et puni tous les fonctionnaires in- 
dignest et fait exécuter les auteurs de la dernière révolte, 
¢Miolaat  cette occasion la plus inexorable sévérité, il 

 KOERNER 791 
se mit en personne à la tte de l'armée et de la flotte, atta- 
qua les forces navaies de Venise, conquit Ténédos, blételin 
et Lemnos, envahit la Transylvanie et ètouffa des in«urrec- 
tions en Asie et en Egypte. 11 rétablit la discipline, bumi- 
lia les janissaires, couvrit les frontières de l'empire par de 
nouvelles places fortes, les Dardaneiles par de nouveaux 
ouvrages, et remplit le trier du grand-seigneur au moyen 
de conftseations et surtout en rétablissant l'ordre dans les 
finances. Il réussità reJever la considération de la Porte à i'e- 
tranger, et sut méme la defendreen negociant avec les envoyes 
de Louis XIV. Sa politique était habile et rusée, son caractère 
dur et rapace, sa conduite prudente et ferme, mais impi- 
toyable. !! mourut  Andrinople, le 31 octobre 1661. 
KOEPRILI (ActntZ'T), son fils, né en 1626, lui suceéda 
dans les fonctions de grand-vizir. !i avait èté élevé avec soin 
pour devenir oulema ; mais plus tard son père l'avait nommé 
gouverneur d'Erzeroum, puis de Damas ; et par une heu- 
reuse cxpédition contre les Druses, il s'était acquis la con- 
fiance du sultan. Savant, doux et juste, politique habile, 
enfin vainqueur dans les campagnes de Hongrie, de Crèle et 
de Poiogne, par la prise de Neuhœeusel, de Can d ie et de 
Kaminiec, ainsi que par les traités de paix de Vasvar, de 
Candie et de Zurafna, Achmet Koeprili administra, plus 
longtemps qu'aucun autre izir avant lui, l'empire, qu'il pa- 
cifia et agrandit. Toutefois, nne série de sanglanles exécu- 
tions souillèrent les premières années de son administration. 
!i perdit aussi la bataille de Saint-Gothard, livrée le 22 juillet 
166-I, contre Montecuculi, ainsi que celle de Choczim, li- 
vrée le 11 novembre 1673, contre J e a n ! l I Sobieski. Pendan t 
son administraliun, la littérature turque prit un remarquable 
essor. Il vint en aide aux poëtes et aux savants, et les 
sciences l'accompagnaient jusqtle dans les eamps. La bi- 
bliothèque publique qu'il Ionda tèmoigne encore aujourd'hui 
de son instruction. Il mourut en se rendant au camp d'An- 
drinople, le 30 octobre 1676, des suites d'une hydropisie, 
résultat de l'usage immodérë des boissons alcooliques. 
KOEPRIL! (MvSTAPtlA), frère du pr'eëdenl, fut nommé 
ltaimakan en 1689, lors de la révolution qui précipita du 
trÇnœe llohammed, et bienlt aprës, le 7 novembre 16S9, 
grand.vizir par Soliman III. Homme instruit, de mœurs et 
de principes sévères, et politique habile, il rétablit l'ordre  
l'lutCieur et la dignité dans les relations avec i'êtranger, 
quoiqu'il ne f0t pas capitaine. Il lrit le 19 aoOt 1691, a 
la bataille de Szalankamen. 
KOEPRILt ( Aaovmx-Znu-HussÉL ), cousin du précè- 
dent, fut nommé en 1697 grand-vizir, après la déroute que 
Mustapha I! essua à Zentha, et conclut, en 1699, la paix 
de Kariowitz. Généreux à l'ëgard des pauvres, protecteur 
des sciences et des lettres, il appela aux principales fonc- 
tions de l'État des hommes instruits et partageant ses idées. 
Sa politique était modérée et pacifique. Se sentant malade, 
et d'ailleurs contrarié par l'opposition laite à toutes ses me- 
sures par le muphtl, il donna sa démission le 5 octobre 170_'2, 
et mourut quelques jours après, dans sa maison de campagne. 
IOEIANEIA (Tugonott), que l'Allemagne a nommé son 
Tyrtde, naquit à Dresde, en 1791. Son père, qui exerçait les 
fonctions de conseiller à la cour d'appel et entretenait des 
relations suivies avec Goethe et Schiller, voulut tre le 
premier précepteur de son fils. Il êtait bien en état de le 
diriger dans ses Cudes. Le jeune Koerner manifesta de 
bonne heure des dispositions pronoucées pour la science et 
la poésie. !! entra d'abord t l'Eeole des blines de Freiberg, 
et conserva toujours un doux souvenir du temps "qu'il 
avait passé dans cet établissenmnt. En 1810 il aila .uivre 
les cours de l'université de Leipzig. C'est de là que datent 
ses premiëres poésies : poésies légère, inacbevées, qui ac- 
cusaient encore l'infiabileté de l'artiste et la préetpitation 
du travail, mais qui ne manquaient parlooE ni de grAce ni 
d'énergie. Peu " peu l'amour de la poésie l'emporta sur 
celui de la science. Koerner garda au fond du cœur une 
prédileetion particulière pour l'Cute de la minéralogie; mais 
il se sentait appel à suivre une autre route» et il voulut 



la suivre. Bienl0t, par une de ce errenrs dans leuelles 
nt uvent tom des homm de lt, il pensa qe 
pour devenir vraiment ëte, pour produWe des œuvres 
d'imaginafion, il éit fo inutile d'ster aux graves le- 
çns de s profesurs. 11 s'abdonna donc h tous ses 
a de ver, à toos ses pric. Il fit si bien qu'un bu 
Jour il lut obligé de quioEer l'université. Il se rira à Ber- 
lin, avec le repentir de  folies d'étudiant mais plus dé- 
cidë que jamais à poursuivre sa rrière littéraire. De Bedi 
il alla à Vienne. Là il fit représenter quelques pièoes, qui 
eurent du succès. Un des grands thtres chercha à se l'al- 
tacher, et il oeçut du gouvernement le titre de pte royal 
dramatique, titoe qu'en France nous ne conuaiss 
mais qui en Allemagne est tr-oecherch$. Le mps que 
Koerner passa à Vienne  la plus belle oque de sa vie. 
Il venait enfin de produire s uvres. Le public ravaii en- 
couragé. Il se sentit plein deforc et d'ardeur; et, après 
avoir joui axec ires de ses premiers su, il eu rëvait 
{Uautres plus grands encore. Enfin, il aimait, et il était prt 
 oe marier. La guerre cla{a, la guerre de 813. Koerner, en- 
trainWr son patriotisme, abandonna son thétre, sa fiane 
et vint se joindre, comme volontaire, aux cbasseu rs de Luow. 
Le colonel le pr pour aide de mp, et K«rner le su{vit avec 
ravoore dans toutes I mlées. C'est alor qu'il se révéla en 
lui une facult, de poésie lyrique dont il n'avait pa encore 
jusqoe I compris toute Pénere. Au milieu de oette vie 
aventureuse du «oldat, de ces batailles fcuente«, de ces 
agiotions continuel{es, nne grande pene le préoccupaR 
{oujou= il songeait a son pays Immilié, asser'i par une 
armée trangère. Il songeait aux douleurs de rAllemagne 
et a son a{fcncldssement, et il chantait pour obéir a 
rSves Uatfiotiq;;. 11 chantait pour encourager ses compa- 
gnons d'armes, pour les animer avant le combat, pour les 
consoler aprés une -faRe. Ses chants étaient aussit6t re- 
cueillis. Ils passaient de bataillon eu bataillon, de rêiment 
en rgiment, et éleclfisaient les epri{s. Mais celle v;e 
tique et si d,vouée ne deçait pas durer longtemps. Koerer 
voulait se disliaguerpar son coure comme par 
n'éit point de  hommes ui ardent de loin le cmbat, 
le c«lèboent à {oete pos à l'abri de toute crainte et de tout 
péril. Il écrivaR le sabre au c6té, au bruit du clairon, 
lueur dcs feux du bivouac, ni qand il q«itaR la lyre, 
<'Cait ur monter à cheval e{ s'élancer au-devat de l'en- 
nemi. A l'afiare de Ktzen, fl reçut une lessure grave, 
et peu s'en fallut alo qu'il ne tombt entre le main de 
l'ennemL Des payons le sauvèrent, et il trova un asile 
chez un de ces amis. A peine {ué de sa Lleuc, il aih 
rejo;ndre son riment a Toeplitz. Il y avait eu une trêve 
entre les Allemands et les Franis, ms efle venait d'ex- 
pifer. Koerner combal de nouveau, et le 23 aoOl 1813, 
ur la route qui oenduit de Schwefin h GadeLusch, il fut 
frappé d'une balle, et mourut sur le coup. Une heure avant 
le commencement du combat il avaR achevé et il avait 
lu à uelques-tms de ses comptons d'armes ce dialogue 
du Soldat et de l'Épe, qui est devenu si lèbre en Ailema- 
te : ,, Epée qui repos a mon te, porqooi tu la bril- 
hn{e me ufit-elle ainsi Tu me rard avec amour. 
Yoilà ce qui fait ma joie. Houah   Un bve cavalier 
me poe. Yoil urquoi je souris. Je dfends l'homme 
libre. Voi oe qui far ma joie. Hourrah  etc., etc. » 
Koerner fut enlerr au pied d'un chSue, comme un vieux 
Germain. Sa mort cau u grande in;presion de douleur 
dan« Ic riment auquel il apenit. Qoelqu jours après 
ses funérailles, un jeune officier ui l'avait boeucoup 
'ël au milieu d'une baille en s'Criant : ,, Eoerner, je 
e ss » et tomba oeuve de blessure. 
Les œuvres e Tb. Koerer ont eu de mbreuses 
ions. Plusieurs de s pièces de thétre, tell que L 
Garde de Y«i, oni, RosandG  Fne, se Jouent 
, =oere av succès en Allemae. On reflt aussi avec 
.'s élégies d'amour, s premiers vers dç junese. Mais 
geraer a eu le so de bien d poê% qui, aFr avoir 

 KOL.S, 
|ongtemps chercbé leur place, après s'tre essayés sieu- 
sement à diffren travaux, trouvent tout à coup, par une 
sore de rvlation imprévue, l'insment oubli qui sellait 
les attendre  la corde qu'ils devaient faioe viboer. Sa vé- 
rible gloire ne rese ni sur ses dmes ni sr ses co- 
mbles, mais sur ses trente-deux chan patriotiques, 
rueillis sous le titre de : Leier and Schwert (la Le et 
l'Ée). Ces chauts ont acquis oe qu'il y a de plus dicile 
à acquérir de aos jou, la poputafit6. s Allemands 
rpèteat enoere avec enthousiasme, et lëtranger ne i 
tend pas sans émotion. Xavier 
(OESI, l'oye Csoa. 
KOETII EN, pihle d dcl» d' A n h a I t-Koethen, 
dejolis environs, compte  peu ps 7,5oo habihnt% dont une 
oenhne de juifs. On y trouve un cl»Mu, deux dglises 
proteshnteset une dglise tholique, une syagogueç 
gymnaoe, une dcole industrielle, un sémnaire pédagogique, 
et diçe autres établissemenh d'instrncon publique ou de 
charité. Le couvent des frères de h Misércorde, fondd en 
1828, par leduc Ferdiuand,  étd suppmé en t832 et trans- 
formé en dcole gratuite. Station du chemin de fer de Leip- 
zig à Magdeurg, et de Bezlin au paysd'Anbalt, la ille de 
Koethen a beaucoup gaé dans ces derniers temps. 
OHARY, l'une des plus ches brailles de magna 
hongrois, #ut élevée u rang de prince en 181, et 
dans sa ligne masculine avec le prince Froços-Yoseph, 
nWle 7 ptbre t76, mo le 27 juin tS2. De son ma- 
riage avec la comtes»e Mare-Antoinettc de Waltenberg, 
laissait une fille unique, Atoietle, nec le 2 juillet 197 
qui dpousa, en 1816, le duc Ferdinad de 5axe-Cobourg, nL en t785, mort le 27 août t851, avec le grade de général de 
valede a servioe d'Autdche, et de qui elle a eu qua 
enfanh : Ferdiod, nd en 1816, aujourd'bu veu# de dona 
Mana, rene de Portug, et qui a ét rdgcnt du royaume 
ndant la minorite du roi n fils, dom Pedro ; At«Ouste, ad 
en t 8t8, néral-majorau servioe de Saxe, qu a dsd 
des filles de Lo-Philippe, la prinse Clémentnc ; ïc- 
toron, née en 1822, maée au duc deNemo urs; et 
pold, nd en ig31, ma}or au service atrichicn. 
IOilELET ou COHELETT, mot béboeu que nous 
duisons par Eccls#oste. 
KOll-l-OOR, c'est-àre tontape de 
nom d'tre gros diamant appaenant ajourd'htfi  h con- 
tonne d'Angleterre, qui le possède depui» la conquête de 
L a h o r e. Rundjet-Singb le portait habituellement au br 
gauche et quelque#os au pommea de l selle de son cheval. 
Tilié d'abord at poids de 166 r, il fira h l'expo- 
sition de Londres en tSSi ; mai il gardaR quelques nuages 
et s'il bdllaR au soleil, il parast sans écla qand 
mospbre ëtaR sombre. On le somR à une nouvelle taille, 
en ls52; et apzs un lvii de treuteut jonrs, l est 
devenu parfait, quoique mince, mais d'ne de étendue, 
pant encore t ra . On estime sa çaleur à 
livres sterling {,080,800 ff. ) L. Louve. 
O., ville du gouvernement d'Archanel, dans une 
contrde pre et sauvage, side lotit à l'exré nord de 
la ussie d'Europe, et après Wardo en Norvège la ville 
la plus septentonale de l'Erope, est sioEe entre la Kola 
et son aucnt la Tuloma, à peu de dishnce de son 
bouchure ds la mer Glaciale du oM, et pourvue d'un 
po sr et spacieux, le port Sainte-Cafl»ene. C'est le chef- 
lieu de l'ancienne Laponic rnssc, et pa ses 800 bab- 
tant on compte beaucoup de Laposs et quelques Fnnois, 
dont la pcbe de la bie, du moge et du cabillaud 
constitue l principale resurce. Un vaisseau anglais l'a 
brOlde en 185. 
On donne aussi le nom de Kola h toute la grande pres- 
qu'ile qu s'éiead entg h mer GiaciMe, la mer Blanche et 
golfe de Kandki, et dans la pae nord-oust de 
quelle se trouçe la ville dont nous çons de parler. Elle a 
35 myriamètrs delong de rouest à l'est, et 0 de large dn nocd 
n sd.  superficie est èvaluée h 1»00 mamètr 



KOLBAK 
IOLBAI. Voge» COLCU. 
• KOLBEIlG (Lande de). Voyc:, Fmmnr{. 
t;OLÉAH. Voyez COL«n. 
EOLETTIS {Joms), homme d'État grec, né en 1788, 
à Syrakos, petite ville aux environs de Janina, éhldia la 
médecine en ltalie, et revint exercer cet art dans son pays, 
après avoir été reçu docteur à l'universite de Bolognc. Mé- 
decin d'Ali-Pacha de Janina, il fai.ait partie de I' h ë t a i r t e, 
fondée par lhigas, et fut un des premiers h rëpondrc au 
cri de liberté qui se ltt entendre en 1521. L'insurrection 
n'ayant pas pu tenir en lpire, il se élugia la mme anuée 
en Ploponnèse, où il fit cause commune avec les hommes qui 
voulaient constituer un gouverneur central, en opposition au 
parti militaire. Député au congrès d'Epidaure, il signa, le I et 
janvier 1822, la déclaration d'indépendance de la Grèce. Il 
lut nommé alors ministre de l'tutCieur, et plus tard exarque 
d'Eubée, où il remporta une brillante victoire sur les Turcs 
à Karystios, et en 1824 membre du conseil exécutif. A par- 
tir de ce moment Kolettis, esprit supérieur, mais dévoré 
d'ambition, exerça sur les affaires de la Grèce une certaine 
prépondérance, dont il se .,ervit, d'accord avec Joannis 
Gouras, che| de louméliotes fort influent, pour combattre le 
parti oligarchique du Péloponnèse, h la t$te duquel se trou- 
var K o I ok o t con i. On a été jusqu'à l'accuser d'avoir lait 
assassiner Odysseus. Il ne tarda pas d'ailleurs à devenir l'un 
des principaux meneurs du parti français, surtout à partir de 
182,t et de 1S25, et à se poser en adversaire passionné de 
blaurocordatos, chefdu parti anglais. Dès lors l'antagonlsme 
de ces deux hommes politiques continua sans interruption. 
Vers la fin de 1826 et le commencement de t8'7, ce fut sur 
Koletlis et K a r a i s c a k i s q,e pe«a tout le poids de la direc- 
tion des opérations militaires dans l'est de la Grèce. Au 
prinlempsde 1827, il joua un réle deg plus actifs à l'assemhlee 
nationale de Trézène, où C a p o d' l s t ri a fui Cu président 
de la Grèce. Ce dernier appela Kolellis h faire partie du 
oeankelNnion, et le chargea en mëme temps de l'organi- 
sation des troupes irrégulières de la Roumëlie. Mais Koleltis 
ne servait les intérêts du président qu'aulanl quïl les jugeait 
identiques avec ceux de la Grèce; et dans les derniers temps 
de l'administration de Cape d'lstria, il fit mème partie de 
l'opposition comme sénateur. 
Après l'assassinat du président, Koleltis, nommé mem- 
bre du gouvernement provisoire avec Kolol, otroni, son 
ennemi mortel, et Augustin Cape dIstria, prit parti, vers la 
fin de 1831, pour l'opposition rouméliote, avec l'appui de 
laquelle il conlraignit, en avril 1832, Austin Cape d'Ishia 
à donner sa démission. Il fut appelé alors h taire partie 
de la commission mixte qui gouverna le pa,s jusqu'a l'ar- 
rivée de l'administration bavaroise. L'un des premiers  
acclamer le roi Olhon  il fut d'abord nommé par ce prince 
ministre de l'tutCieur et président du conseii puis ministre 
plénipotentiaire à Paris, en 1835. Les événements survenus 
en Grèce en 1844 I'y firent rappeler pour prendre le porte- 
feuille des affaires étrangères et la présidence du nouveau 
cabinet constitoé le 18 aot)t 186. C'est dans l'exercice de 
ces fonctions que.la mort vint le surprendre » en septembre 
1867. ËIève des doctrinaires en politique, Kolettis, pour se 
faire une majoritë dans la chambre des députés, n'hésitait 
point à employer la corruption ; et les déplorables résullals 
de son système se font encore sentir aujourd'hui. 
IOLLIN ou KOLIN, petite ville de Bohème, à environ 
5 myriamètres  l'est.de Prague, sur les bords de l'Eibe et 
sur la route de Vienne, compte près de 6,000 habitants et 
est géuéralement bien b'Atie. Elle est célèbre par la balaille 
qui s'y livra le 18 juin 1757. 
A la suite de la bataille de Prague, F r é d  r i c I i y avait 
bloqué le prince Charles de Lorraine, ainsi qu'une partie de 
i'armée autrichienne, et canonnait la ville avec 55 piéces 
de grosse artillerie. De son célé, D a u n avait reçu des ren- 
tbrts qui portaient l'elfectifde ses troupes à 60,000 hommes, 
e! manifestait l'intention d'occuper Pragne. Pour anéantir 
¢n¢r une ois l'espoir que les assiégés pouvaient fonder 

-- KOLLIN 
sur celle diversion, le roi de Prusse, après avoir 
1,000 hommes de l'armée d'investissement et les avoir 
rémis avec d'autres troupes au corps chargé, sous les ordr 
du duc de Bevern, d'observer Daun, marcha contre l'en- 
nemi avec son armée, forte à ce moment de 3,000 hommes. 
et le rencontra sur les hauteurs de Kollin, dans une positiog- 
suffisamment défemhm par des fondriëres, des ravias 
des plaines marécageuses. La droite de l'arméo autrichienne- 
s'appuyait sur Krczezor, la gauche sur Brzesan, et le corps 
du général adasdy, à l'extrémité de l'aile droite, était sè-- 
parWdu corps principal par un profond ravin, a proximilé- 
duqne! avaient pris position, dans un bois voisin, trois- 
ré%iments de cavalerie Iégëre saxonne, 1,000 cuirassiers au.- 
trichiets etqaelques faatassius. Le roi de Prusse avait marché 
sur la gauche en ordonnant au général Httlsen de rejeter- 
sur Krczezor l'aile droite des Autrichiens, qui avait fait urr 
mouvement en avant, tandis que le reste de ses troupes: 
continuerait à se porter sur la gauche et a attaquer l'ennemi, 
et que son aile droite, par un artifice de tactique bien connu 
et renouvelé des Grecs, souliendrait la gauche, non pas, 
directement, mais par un mouvement de retraite. Après un 
sanglant combat, le ënérai tlulsen parvinl enfin à s'établir- 
sur les haule«rs de Krczezor, à cha«ser les Avtrichiens de 
ce village et à s'emparer de la batterie qui s'y trouvait pla- 
cée. En intime temps, le général Zietien, h la tète de la 
cavalerie prussienne, attaquait celle du général l'iadasdy et 
la chassait assez loin pour l'empêcl|er de reparaitre de toute- 
la bataille. 
Déjà Daun, inquiet du résultat de la journée, en vo)'ant 
Hu[en se maintenir sur les hauteurs qu'il avait enlelees 
l'aile droite des Autrichiens, avait enso.é un aide de camp 
parcourir les fronts des diflêrcuts corps, avec ces mots ecrits 
au crayon : ,, La retraite est sur Souchdol, » quart I la [or-. 
tune changea tout à coup pour lui. Le géaéral Man,tein, 
l'aile droile prussienne, malgré des ordres formels, se laissa 
entralner a tenter contre une division de Croates une at- 
taque qui fit beaucoup «le mai  ses troupes, et alors le. 
prince Maurice de Dessau, entrainA par sa belliqueuse ar- 
deu,-, accourut à son secoul's, i':n,lanl cette Inèlee» 
cupa Iongtemp les troupes des deux gënéraux, les batail- 
lons placës h leur gauche continuèreut leur marche oblique. 
il en résulta que la ligne de bataille des Pru»siens se trouva 
derangée, et offrit un vide  un moraent oh elle ett dd agir 
avec to»tes ses Ibrces et par un mouvement parfaitement 
combiné contre l'ennemi qu'elle avait en lace. Le comman- 
dant du régiment du prince Charles de Saxe, genkendorf, 
venait de recevoir de Daun communication de l'ordre de 
retraite, et il avait gravi la hauteur voisine pour s'orienter. 
Remarquant alors la taule commise par les Prussiens, il 
s'Crin : « L'ennemi approcl,e : se retire qui voudra! les 
braves me suivront ! » Son régiment et tes autres régiments l 
saxons s'élancèrent /t sa suite, et le régiment autrichien de 
Saint-Juger vint rejoindre le reste de la cavalerie de Nadasdy. 
Enflarnmés d'ardeur, et dans l'espoir de venger la dêroute- 
qu'ils avaient essuyée douze ans auparavant, les Saxons 
précipitent sur les Prussiens en s'Criant : ,, Voici la revanche- 
de la bataille de S[riegau ! ,,, massacrent ou lent prisonniers- 
tout ce qu'ils rencontrent, et jetent bientOt une exlrbm 
confusion dans les rangs de l'ennemi. A leur tour les hn- 
périaux reprennent courage, et lent volte-lace. En vain les 
Prussiens se défendent avec une froide intrépidité ; en vain 
Frédéric tente avec sa cavalerie une septième attaque contre 
l'ennemi, quien a déjt rel,oussé six, force lui e.gt d'aban- 
donner le champ de bataille avant le coucher du soleil 
Ziethen et Hulsen couvrirent la retraite. Les pertes étaient 
grandes des deux réfC. Celles des Autrichiens s'Cevaient 
9,000 hommes. Les Prussiens avaient perdu 29 drapeanx, 
43 pièces de canon et 13,773 hommes tuC, blessés ou pri- 
i sonniers. Cette victoire des Autrichiens eut pour régultdt. 
la levée du siégé de Prague et révacuation de la Bohème- 
par les Prussiens. 
Frdéri¢ Il, jusque alors toujours victorieux» ne perdit pa 
100 



94 KOLLII -- 
seulement ce jour-là une bataille, mais encore son prestige 
d'invincibilité ; toute[ois, il se vengea de ces échees dans le 
courant de la mème année par les célèbres victoires de 
Rossbah et de Leuthen. 
, [OLOCHES ou KOLOSCHES. Voye"- 
IOLO[IOTRONI (TnoDoR), l'un des héros de la 
lutte soutenue par les Grecs pour leur indépendance, né le 
3 axril 1770, en plain air, an voisinage d'un bourg de la 
btessênie, en proie alors aux dévastations et aux massacres de 
la soldatesque turque, appartenait à l'une de ces familles 
grecques qui dans les gorges et les fondrières inaccessibles 
de leurs montagnes continuaient de père en fils à protester 
contre la conqub.te et l'usurpation du Croissant. Sou grand- 
père avait péri cruellement massacré par les Turcs. Au- 
tant en advint, en 1789, à sonpère, chef célèbre et redouté 
d'Armatoles. Dès qu'il fut en age de porter un mousquet, 
Théodore Kolokotroni déclara mie guerre à mort aux op- 
presseurs de son pays, et bient0t on le compta à son tour 
parmi les plus redoutables cbels de bandes d'Armatoles. 
De bonne heure il avait rb.vA l'affranchissement de la Grèce, 
qui ne cessa plus d'tre I« but de toutes ses pensées et de 
tous ses efforts. Obligé, en 1806, de se réfugier à Zante, il 
s'y lia avec la plupart des hommes qui devaient plus tard 
se faire un nom das la guerre de lïndépendance, tout en 
continuant toujours d'entretenir des relations suivies aec 
la Grèce. BieutOt il entra au service de la république des 
tles loniennes, et parvint jusqu'au grade de colonel. Initie 
dës 1817 au but et aux projets de l'hétairie, et prevenu 
en 1820 de la prochaine levée de boucliers d'Ypsilanti, il de- 
barqua dans la 51ama au commencement de mars 1821. 
Dès lors il fut avec Pietro Mauromichalis l'un des principaua 
chefs des insurgés, faisant preuve en toute occasion d'une 
inebranlable fermeté, d'une bravoure extrême, et d'une 
grande bahileté dans l'exécution des plus audacieux projets. 
Au printemps de 1823, le congrës d'Astros le nomma com- 
nandant en chel du Péloponnèse, et mme bientôt après 
'ice-président du conseil e,êcntiï. Mais la mésintelligence 
qui ne tarda point ì eclater entre lui et ses collègues, 
,Iaurocodats et legri ntamnent, amena au sein du pou- 
voir exéc,tiï les plus reettables conflits. Kolokotroni et 
ses pa«tisans curent le dessous dans cette lutte : on le re- 
tint mme prisonnier pendant quelq,es mois dans un cou- 
vent de File d'Hydra; mais au printemps de l'année sui- 
vante (1826), le sënat se vit ci,ans la nècessité delui rendre 
]alibert et de le placer à la tète des Peloponnésiens, qui 
avaient pris les armes pour repousser l'invasion d'Ibrabim- 
Pacha. Au total, ce qu'il tenta alors contre le chef de l'ar- 
mée íptienne se borna pourtant à fort peu de chose. Le 
reste de l'annëe t826 fi,t en effet rempli par une regrettable 
et sanglante lutte qui éclata entre Kolokotroni et Gçivas, le 
cbel des Ro,,nëliotes. En 1827, lors des élections pour la 
présidence, il vota en faveur de Capoed'Istria, dont l'un des 
remiers acte en prenant le pouvoir fut de le confirmer dans 
le commandenent du l'eloponnèse, ffommé membre du gou- 
v'ernement provisoire après l'assassinat de Capo-d'lstria, il 
• esta fidèle h la pensée politique dont celui-ci tait l'ex- 
pression, et dont AuÇustin Capo-d'Istria, son frère, devait 
tre le continuateur. Depuis lors il ne cessa donc de faire 
l'opposition la plus passionnëe an gouvernement établi 
en Grèce par les grandes puissances ; et par suite de sa 
complicite dans une conspiration djouée à temps, à la 
fin de t833, il fut condamné à mort, en avril 183; 
peine qui, en considération des services rendus par lui an 
pays, fut commqée en vingt années de dtention dans la 
forteresse de auplie. En montant sur le trône ( 1  juin 
1835), le roi Othon non-seulement lui en fit remise entiëre, 
mais encore lui rendit son grade de général dans l'armée, la 
grand'-croix de l'ordre du Sauveur et une place dans le 
conseil d'Êtat. Kolokotroni mourut à Athènes, le 4 février 
183. Son fils, Gennaio$ Kooaoxaom, est aussi gënéral, 
• t de plus aide «te camp du roi Othon. 
IOLOVPAT nom d'une riche et antique famille de 

KOMORN 
Bohgme. Sans parler des légendes, on retrouve des Kolo- 
wrat dans les événementa les plus reculés de l'histoire de 
Bobgme. Dans la guerre des hussites et dans d'autres cir- 
constances encore ils se montrèrent les zélés dêfenseurs de la 
liberté religieuse et de l'indépendance politique de leur pa- 
trie. Cette famille fut élevée en l'an 590 au rang des ba- 
vons de l'Empire. Des nombreuses lignes dont elle se com- 
posait aulrefois, il ne subsiste plus aujourd'hui que les deux 
lignes de Kolowrat-Krakowski et Kolourfat-Liebsleinsy. 
La première obtint le titre de comte de l'Empire en 1669, 
et la seconde en 1701. La premiëre de ces lignes se divise 
en trois branches : la branche alnée, celle de Brzeznitz, 
qui a pour chel le comte £ean-.Nomucène-Charles, né 
en 1795; la ligne moyenne, celle de Kadenin, qui a pour 
chef le comte Philippe, né en 1786; enfin, la branche ca- 
dette, celle de Teinitzl, qui a pour chef le comte Joseph- 
Ernest, né en 1795. La seconde ligne n'a aujourd'hui d'autre 
représëntnnt que le comte François-Antoine de Kolourrat- 
Liebslensky, né en 1773, et pendant lonemps collègue 
de M. de M e t t e r n i c h dans le cabinet autrichien, avec le 
titre de ministre d'Etat et de conférence. 
IOLY,VAN ville du gouvernement de Tomsk ( Sibé- 
rie ), sur les rives de l'Oh et de la Berda, dans une àpre et 
sauvage contrée de montagnes célèbres par la richesse de 
leurs mines d'argent, et qui se rattachent au système de l'Al- 
taï. On compte dans le voisinage de Kol)-wan six mines d'ar- 
gent, une mine de cuivre et une mine de fer, mais dont les 
produits ne peuvent arriver à Iékatérinemburg qu'en pas- 
sant par Tobolsk. La population de cette ville est d'environ 
1,500 habitants, qui tous travaillent aux mines ; aussi Koly- 
wan a-t-elle l'aspect le plus désert. 
IOMANS. Voye'- Cmrs. 
lO31OIN (en tlonois Komarom), comitat de Hon- 
grie, bornê au nord par ceux de Presbour, de tNeutra et de 
Bars, au sud par ce«x de Gr',tn et de Wei.senbourg, au sud 
par celui de Vessprim, et à l'ouest par ceux de Baah et de 
Presbourg, est divisé par le Danube en deux pa lies égales. 
Il contient 37 myriamètres carrés, et son sol est nu des 
plus pçoductifs de la ltongçie. L'fie de Sch'filt {en hongrois 
('atooe'-), formée par laríunion du Danube et de la Waag, 
passe  bon droit pour le grenier de l'archiduché d'Aulriche. 
Traversé par le Danube, par la Waag et par le Zsitva, le 
comitat de Komorn est, il est vrai, exposé à de frëqueutes 
inodatious ; mais, en revanche, c'est  son riche système 
d'irrigation qu'il est redevable de sa féconditê extrême, 
gr.ce a laquelle il produit to«tes les espèces de céréales en 
premières qualités et en enormes quant.tés, en mb.me temps 
que dil[ërents cours d'eau, le Danube surtout, et la grande 
route de Vienne à Pesth, qui passe par Komrn, y favo.- 
risent singulièrement les expéditious du commerce. Parrm 
les principaux produits du comitat de Komorn il faut encore 
mentionner le vin, qui se rolte dans tous les villages de 
l'arrondissement de Tata ; les célèbres vins de lessmely, 
entre a,tres, s'exportent au loin. Viennent ensuite de riches 
carrières de marbre, dont l'exploitation occupe plusieurs 
centaines d'ouvriers. La pche aussi est trës-productive, et 
donne lieu à une exportation considérable. On exporte en 
outre des grains, du bois, des bestiaux, des chevaux, de la 
laine, de la noix de galle, des vins et des marbres. Le com- 
meçce et l'industrie sont trè»actifs, et la construction des 
bateaux ainsi que la navigation constituent les principale« res- 
sources des populations riveraines du Danube etde la Waag. 
La population, forte au total de 150,000 m, est complí- 
lement d'origine magyare,  Iexception de 5,600 Sl»vaques, 
de 6,100 Mlemaud et de 65 Grecs. Sons le rapport des 
cuites elle se divise en 51,076 réformés, 5,5-3 luthCiens, 
165 grecs, 4,874 juifs; l'autre moitié, de beaucoup la plus 
considérable, professe la religion catholique. 
Ce comitat a pour chef-lien Koonr, ville libre impé- 
riale, située à l'extrémité de l'lle de Schiitt, non loin de l'em- 
bouchure du Danube etde la Waag, sur la rive gauche d 
Danube. Ses édifices publics les ph,s remarquables son| 



KOMORN 
l'immense église Saint-Andr'é, l'église Saint-Jean avec des 
tours d'une grande élëvation, Pëglise grecque avec sa flèche 
dorée, l'église des Franciscains, l'hOtel de ville. Mais la ville 
a beauc«up sot, ffert, d'abord d'un grand incendie en 1847, 
puis des suites du siCe qu'elle a dil soutenir en 1898 et 
1849; et elle est encore aujourd'hui ì peu près en ruines. 
On y compte environ 20,000 l,abitants, tous d'origine ma- 
gyare. Komorn est le centre d'un assez grand commerce et 
d'une industrie non moins solive, et possëde un collége 
tatbolique ainsi qu'nn collége réformé, une caisse d'épargne, 
une sociétéd'assurances pour la navigation, etc. 
A environ t,500 mëtres de la ville, au confisent de la 
"Waag dans le Dauube, s'élève la forteresse de Komorn, 
entourée d'ea de trois cètés, construite par Mathias Corvin, 
et restaurée depuis 1805 au prix de sommes immenses, 
dont les fortifications et les ouvrages avancés s'étendent sur 
les deux rives du fleuve sur une longueur de 5 kilomètres, 
et qui pour Cre défendue exige au moins fs,000 hommes 
et 400 bouches à feu. Elle se divise en vieille et nouvelle 
forteresse» séparées par la ville de Komorn, qui se trouve 
comprise dans le sstème des fortifications ; dans ses immen- 
ses retranchement« elle peut loger environ 30,000 l,ommes, 
plus t0,000 dans les casernes et autant dans les casemates, 
qui sont d'une solidité extrème. Celle place forte a de tous 
temps été regardée comme imprenable ; et la guerre de la 
rëvolution de Hongrie ne lui a pas fait perdre cette réputation. 
On se rappelle que, assiégée inutilement depuis le mois 
d'octobre 18f18 jusqu'au mois de septembre 1849 par les 
Autrichiens, elle ne tomba entre leurs mains qu'/ la suile 
d'une capitulalion. 
KONG-FOUISÉ. Voyez CO,XFUClUS. 
I{ONGSBEPG ville de Norvège, dans l'évècbé de 
Christiania, au milien d'une étroite vallée form¢c par le Lau- 
ven, et au pied du Jonsl¢nuden, haut de 933 mètres, siCe 
de la direction des mines de Norvège et de la Monnaie royale, 
possie un collége, une manufacture d'armes à _t'eu, une fa- 
brique de drap, des distilleries d'eau-de-vie, et compte 4,500 
habilants. Elle doit son origine aux mines d'argent qu'on  
découvrit en 1¢,3, dont l'exploitation avait fini par ètre 
abandonnée, mai« que l'on a reprise en 1815. En 1830 elles 
avaient produit 4,100 kilogr, d'argent fin ; en 1833 elles en 
donnèrent jusqu'à près de 22,t)0t); mais en t835 leur pro- 
duit n'avait plus été que de 10,000 kilogr. Les mines les 
plus riches sont situées sur la rive occidentale du Lauven, 
dans la chaine de Stor-Aasen, qui longe le fleuve dans la 
direction du sud au nord. On y trouve parfois des pépites 
d'un volume considérable; par exemple, en Ifi30, dans la 
mine appelée la Bndiction de Dieu, on en rencontra 
une pesant I0 kilog. ; en 1666, dans la mine de la Bonne- 
Espérance, on en rencontra une du poids de 253 kilogram- 
mes, et en I$3's, une de 360 kilogrammes. En t853, on dé- 
couvrit de nouvelles mines argentifères dans le voisinage de 
celles qui sont déjà exploilées et mème plusieurs gisements 
de quartz aurifère. 
I{ONIFH.. Voyez lcotvm 
I{OPitTES ou KOPTES. Voçez CoFfre. 
l{OlAïS Anx'rms), l'un des plus savants heflé- 
nistes des temps modernes, connu en France sous le nom 
de Coray, naquit le 27 avril 1748, h Smyrne, etse fivra dès 
sa premiëre jeunesse à l'étude des langues anciennes et mo- 
dernes. Mais pour complaire aux désirs de son père, qui 
était négociant, il alla passer les années 1772 à 1778/ Ams- 
terdam, où il eonsacra aux sciences tous les loisirs que 
lui laissaient ses occupations commerciales. De 1782 à 1788, 
il étudia la médecine à Montpellier; puis, quand il eut 
perdu ses parents, il vint se fixer à Paris, où par ses tra- 
vaux philologiques il ne contribua pas peu à donner une 
idée plus favorable des Grecs modernes et du travail «le ré- 
novation morale et intellectuelle qui s'opérait au sein «le cette 
nation si opprimée. Dès t 800 I'I nstitut couronnait son édifion 
de'ouvrae d'Hippocrate, intitulé llpl àptòv, -b-tòv, rOt.w.,. 
Ses éditions de Xénocrate et de Théopbrasle achevrci,l de Ic 

-- KOSAKS 795 
placer au premier rang «les philologues de son temp. Il donna 
ensuite mie traduction en grec moderne d,, traité de Beccaria 
Dei Delitt i e delle Pene (Paris, 1802 ; 2e Cit., t 89_3), qui pro- 
duisit surtoqt une vive sensation parmi ses COml,atriotes. 
A ce travail se rattache un mémoire quil lut en t803 / la 
Société des Observaleurs de l'Homme, et qui était intitulé : 
De l'tat actuel de la civilisation en Grèce. C'était pour 
la première lois qu'un tableau complet de la situation mo- 
rale et intellectuelle des Grees était offert au pubfic. De ! 805 
à 1827, Korais donna, sous le titre de Bt{o0z {D.v{x 
• in volumes d'anciens classiques grecs, avec notes et com- 
mentaires. Cette savante publication ne conlribua pas peu 
à ranimer parmi ses compatriotes I'tude des lettres antiques. 
En mme temps il s'efforçait d'arrêter la dëcadence et la 
corrnption du grec moderne, en le puriliant autant que pos- 
sible de tons éléments étrangers. Combaltu d'abord avec 
passion, son s,stème finit par l'emporter  et le résultat de 
ses nobles elforts fut de relever la langue grecque de l'etat 
d'abaissement ou elle était tombée. Trop gé pour pouvoir 
prendre parl, en 1821, à la lutte entreprise par ses concitoyens 
pour la régénêration politique de la patrie commune, il pays 
sa dellc à son pays en publiant divers écrits contenant des 
cuneils et des avis, et en attaquant aec une nergie toute 
j u ¥énile le système antinational de gon vernement et d'adminis- 
tration suivi par le président C a p o-d'I s t ri a. Il lui fournit le 
sujel de deux dialogues, publiés en 1830et 183 t sous le nom 
de llavzct; le deuxieme fut publiquement brlé, en 183, 
à Nauplie, par ord re d'Augustin Capo-d'Istria, en mme temps 
que les plus terribles imprécalions étaient proférées contre 
leur auteur. Korms mourut h Paris, le 6 avril 1833, lé- 
guant sa riche bibliolhb_que au Lycée qu'on avait alors le 
projet de fonder dan l'lle de China. 
i?,O RAN. I'oye'-Cor.. 
I{ORANAS ou KOIL,S. Voyez Hor'xox. 
iORDOFAN. Voyez CoanoF. 
IOITRYi. l'oyez COCn'L 
i{OSA I{S. On désigne sous cette denomination des 
p,,lations olfrant beaucoup d'analogie avec les Russes sous 
I rapport e la conformation physique, des mœurs et de 
langue, et se rattacl,ant également / celle nation par les 
liens de la religion. En Rus.ie on les appelle Kos«s. Ce mot 
Kosa/ étant d'origine turco-tatare (en turc il veut dire 
briçnd, et en tatare un guerrier libre et armé ì la légère), 
et les Kosaks eux-reCes se donnant cette appellation, on a 
prétendu e conclure que les Kosaks et les Tarares appar- 
tenaient à la mème race, ou qu'il y avait tout au moins 
enlre eux de grandes affinités. Il est toulefois inconteslable 
que ce sont tout bonnement les descendants des anciens 
Russes de ovogorod et de Kief, auxquels il se peut que 
soient venus s'associer plus tard une foule de vagabonds 
de roules faces, pour faire la guerre au peuple dominant» 
ou bien aux usurpateurs élrangers, par exemple aux Polo- 
nais et aux Tarares. Entourés de populations hostiles, il leur 
falJait ètre toujours prèts au combat ; et aujourd'l,ui encore 
le nom de Kosak implique l'idée d'un guerrier armé h la 
Iégére et toujours prèt/ l'attaque. 
Il existe deux tribus principale de Kosks; les Kosak 
Malorosses ou Petits-Russes, et I Kosaks du Don. C'est 
la première, la plus sauvage et la plus féroce, qu'appar- 
tiennent les Kosaks Zaporoèues, qui habitent aux environs 
des Poroèi ou cataractes du Dnigpr, de tous les Kosaks les 
plus pillards et les plus indisciplinés. L'autre grande tribu 
est celle des Kosaks du Don ; et les sleppes qu'elle habite 
forment une province particulière de la Russie méridionale, 
située au nord de la mer d'Azof et de la Caucam, et bornée 
d'autre part par le gouvernements d'Astrakan, «te Saratof, 
de Woronesch, de Charkof et d'lëkatérinoslaf. Elle contient 
une population de 7 t0,000 mes, répartie sur un espace d'en- 
viron 2,000 myriamtres carrés,et est divisée eu 119 
formant les sept distric[«d'Aksz% de Mius, du Don (deux), de 
la bledwediza, du Donetz et du Choper. Elle a pour che/- 
lieu l%wotscherkasA', ville situte pr/s de l'cndrmt o/ le 
I0O. 



"796 KOSAKS --" 
,'Don sdrt d'une longue chatne de montagnes, haute de 150 
"mètres, siCe du gouverneur, d'un évque et du comman- 
dant supérieur de l'armée kosake, l'alaman ou betman, avec 
une population de 20#00 mes, une belle cathédcale et plu- 
• ieurs autres églises, un soliCe, une école de cercle, un 
-commerce assez actif et deux grandes foires annuelles. 
C'est de cette oeconde grande tribu que descendent les 
Zosaks du ¥olga, les Kosaks Tschernomori, ceux de la mer 
• l'Azof, du "rerek, de l'Oural et de |a Sibrie. Le siCe des 
Kosaks Tscbernomori est lkaterinodar, sur le Kouban, et 
situé déjà dans la région des steppes proprement dite. Ceox 
.du Terek ont leurs quartiers "/t lk«trinoorod, Mosdok et 
Bibljar. Uralsk. sur l'Oural et le versant sud du désert 
d'Obschtschéi, est la principale demeure des Kosaks de l'Ou- 
-al; A=q/, Rostqfet .Yachitschetvon sont les siéges des 
Kosaks de la mer d'Azof. Cedex du Volga vivent dispersés 
dans les gouvernements d'Astrakan et de Saratof. Enfin, 
es Kosak de Sibérie se sonlètendus au lé, in jusqu'aux fixes 
de l'lrtisd et riel'Oh, et mme de la Léna. Le :ecetsement gé- 
-riCai operé en 1838 portait le chiffre Iotal ,tes Kosak«, leurs 
familles comprises, a 1,880,877 tétes. On voit par lfi com- 
bien est encore g.'-ande la force militaire que possède la 
ussie dans ces soctes de troupes, quoique, avertie par 
leurs révoltes, aflrefois si fi'équentes, et notammenl par 
.e dangereux sonli.vemt'nt qui ëclata parmi elles en 1773, 
sous les ordres de l'ougats¢hel, elle se soit attachee dans 
,_-,es derniers temps  modifier essenlidlement l'organisation 
utilitaire des Kosal, s, alin de la rendre moins dangereuse 
-our ci|e-reCe. 
|OSCIUIZ|O Tlrrcsz), le dernier général de la 
:Apublique de Pologne, l'un des plus nobles caractères des 
temps modernes, naquit en 1753, et suivant d'autres n 
743, à Siechnowice, dans la woiwodie de Brzese, et des- 
cendait d'une fandlle de Lithuanie, noble et ancienne, mais 
peu riche. Le prince Czartoryiski, temoin a l'ecole militaire 
• le Yarsoie de son travail et des remarquab|es dispositions 
• tu'il annonçait déj/, l'envoya à hec frais en France, off Kos- 
«içzko étudia l'art ,le la guerre à l'École Mditaire de Paris, 
-:t acquit une grande habileté dans le arts du dessin. A son 
oetor, il fut nommé à un emplo de capitaine. 3lais l'hu- 
-cnilialion qu'il éprouva en demandant vainement la main 
-.te la fille de l'opulent maréchal de Lithuanie, Sosnowski, 
pour laquelle il avait conçu la passion le plus 'ive, et qui 
«:pousa ensuite !e prince Joseph Lubomirski, le d-'termina à 
quitter de nouveau la Pologne. En 1777 il arriva à Paris, et 
e tordu point h partir avec la Ilotte française envoyée u 
»ténors des isurgés de l'Amérique du .Nord. Sous les murs 
,le Ness-York et à York!own, ou il fut blessé, il attira l'alten- 
ion de Wadfington, dont il devint bient6t l'ami. L'ordre 
de Cincinnatus récompensa la bravoure dont il avait fait 
preuve dans la guerre de l'indépendance; et il revint en 
Pologne en 1786 avec le grade de général de brigade. Il s'y 
eclara en faveur dela constitution du 3 mai 1791, qui 
avait pour but de mettre enfin un terme à l'inintelligent 
-despotisme d'une vinglaine de grandes familles, d'annuler 
l'AsalitWd'un seul contre tous, le fameux Iberum veto, et 
-l'»ar suite de detruire les conldérations et les diètes con- 
fcdérées. Ces changements, désirés par tout ce qu'il y avait 
d'amis sincères de leur pa$s et d'esprits droits, ne rencon- 
trèrent d'autre opposition que celle des agents moscovites. 
De lb cette lache dissidence, celle infme conspiration de 
Iargowicz en Ukraine, off dix-sept traltres se réunirent pour 
remerser la constilution ; s'inlitulant les représentants du 
pays, ils en!rèrent en Pologne à la suile des armées russes. Dé- 
cidée h défendre son œuvre, la diète investit le roi Staniilas 
d'une immense autorité ; et de toutes parts des bras se levè- 
rent. Promu alors dans Farmée nationale au grade de géuë- 
rai-major, Kosciuszko servir sous les ordres du prince 
Poniatow»ki. Dans la campague de 1792, il défendit pendant 
cinq jours, à Duhienka, avec .,c00 hommes seulement contre 
16,000 R,sse% un poste qu'il n'avait eu que vingt-qualre 
,Aeures pour fortilier, et se relira sans avoir énrouvé de',rande« 

KOSCIUSZKO 
pertes. Ce brillant fait d'armes ]'onda sa reputation militaire. 
Quand plus tard le roi Stanisl&s Pouiatowski se $oumit aux 
volontés de Ca t h e r i n e I I, Kosciuszko donna sa démission. 
On lui intima alors l'ordre de sortir de Pologae, et il s 
retira à Leipzig. C'est  ce.moment qu'nn décret de l'Assem- 
biC législative de France lui décerna .le titre de citoyen 
fran .cals. 
L'insurrection qui se préparait pour arracher la Pologne 
au joug de fer de la Russie rappela Kosciuszko ur les Iron- 
tières de son pays. Quand elle eut éclaté, il arriva  Cracovie 
le 23 mars 1774. Aussit6t il se mit h la [te du mouvement, 
et adressa aux Polonais une proclamation pour les insiter 
à rtablir la constitution de 179l. Un corps de 6,000 Russes 
ayant alors envahi le territoire polonais, Koscioszko n'hésita 
pointà marcher à sa rencontre rien qu'avec 4,000 hommes, 
dont le plus grand nombre n'étaient armés que de piques et 
de faux, sans une seule piëce de canon, et il barrit l'ennemi 
à Raclawin. Il se rendit ensuite à Varsovie, où il s'efforça 
de modérer la fureur dtt peuple contre tes prisotmiersrusses, 
er o/ en méme temps il organisa un gouvernement. Pendant 
plusieurs mois il reussit h résister avec 20,000 hommes de 
troupes régulières et 40,000 paysans mal armes  une arm6e 
prusso-ru.«e, forte de 150,000 hommes. II re[3oussa victo- 
riensement l'assaut lentWcontre Varsovie, et refusa les offres 
brillantes de Frédéric-Guillaume Il; mais il finit par suc- 
comber  la supériorité écrasante d'une armée trois fois plus 
nombreuse que celle dont il disposait. A la fatale bataille de 
Maciejowice (10 octobre t79), couvert de blessures, il 
tomba de cheval en s'Criant: ¥inis Polonize ! et disparut dans 
la melée, sous les pieds des chevaux des Russes. Il avait 
dëjà reçu dans la journée une balle dans la cuisse et cinq à 
six coups de baionnette sur les bras. Retrouvé le lendemain 
sur le champ de bataille par des officiers russes, comme il 
donnait encore quelques signes de vie, il fifl transporté aux 
ambtdances, et resta prisonnier de l'ennemi. Catherine le fit en- 
fertner avec .¢,es compagnons d'armes dans une prison d'Êtat; 
mais Paul I * leur rendit h tous la liherté, et donna même h 
Kosciuszkodes preuves de son estime personnelle. L'empe- 
reor lui offrit sa propre épée ; mais Koscittszko la refusa en 
disant : « Maintenant que je n'ai idus de patrie, je n'ai plus 
besoin d'épée! » et depuis lors effectiement jusqu'à sa 
mort il n'en porta plus jamais. L'empereur Paul lui fit don 
aussi de 1,500 paysans; dès qu'il eut franchi la fron- 
tière russe, non-seulement Kosciuszko refusa ce présent, 
mais encore, une fois arrivé à Londres oh il s'était rendu 
avec .Niemcewitz en passant par la France, il renvoya h l'em- 
pereur la somme d'argent que celui-ci avait lait mettre h sa 
disposition. En 1797 il passa aux Êtats-Unis, et chargé 
l'année suivante par le congrès d'une mission en France, il 
y reçut de tons les partis l'accueil le plus distingué. Ses eom 
patriotes de l'armée d'ltalielui envoyèrent alors le sabre de 
Jean Sobieski, retrouvé en 199 a Notre-Dame de Loreto. 
Quand, en 1806, Xapoléon conçut le projet de rétablir le 
royaume de Pologne, Koscinszko fut empclé de prendre 
part ì la lutte bien moins par son etat maladif que par la 
parole qu'il avait donnée à l'empereur Paul l « de ne ph,s 
porter les armes contre la Russie. Aux propositions qui lui 
firent faites au nom de Napoléon, il repondit qu'il ne pour- 
rait sersir en Pologne que lorsque ce pa's jouirait d'due 
constitution nationale etlibre et|orsqu'il aurait recouvré ses 
anciennes limites. Foucher insi_-tant pour qu'il se rendit en 
Pologne. « E bien, 1,6 dit-il, je dirai aux Polonais que je 
ne suis pas libre. ,, Il déclara aussi apocryphe et inventé par 
Napoléon un Appel aux Polonais qui parut sous son nom 
dans le Moniteur du 1 ce novembre 1806. 
Kosciuszko se retira alors dans un petit domaine qu'il 
avait acheté aux environs de Fontainebleau; et il y résida 
jusqu'en 1814, uniquement occupé de travaux aicoles. A 
l'époque du congrës de Vienne, il alla passer quelque temps 
dans cette capitale. Dès le 9 avril tSt, il avait adress fi l'em- 
pereur Alexandre une lettre dans laquelle il lui demandait 
une amnistie générale en faveur de tous les Polonais qui s« 



KOSCIUSZKO 
trouvaient à l'Cranger, et où il le pressait de se faire roi de 
Pologne et d'accorder à son pays une constitution libre cal- 
quée sur celle de PAngleterre. En t8 t 5 il alla voyager en ltalie 
avec lord Steart, et en tt6 il s'établit à Soleure. C'est de 
là qu'en avril tSt7 il publia une déclaration par laquelle il 
affranchissait les paysans deson domaine de Siecbnoice, en 
Pologne. 11 vivait d'ailleurs dans un petit cercle d'amis 
choisis et avec la plus grande simplicité. Une chute de che- 
val qu'il fit aux environs de Vevay fut la cause de sa mort, 
arrivée le iii octobre tSt7 ; demeuré fidèle à son premier 
attachement, il ne s'était jamais marié. Les ltats-Unis lui 
faisaient une pension, et il avait personnellement assez de 
fortune pour qu'à son décès orl trouvAt chez lui unesomme 
de t00,000 ff. en espèces. 
En 18t8 l'empereur A]exandre chargea le prince Jablo- 
nowski de transporter ì ses frais le corps de Kosciuszko de 
Soleure It Cracovie, où, par son ordre, il ruralCusWdans 
la cathédrale ci où un monument a été éleve à sa reC 
moire. 
IIOSLOFF ou EUPATOIIIA, la PomIeiololis des Io- 
mains, ville et port de la mer Noire, dans la presqu'ile de 
Crimée, à environ 8 myriamètres au r, ord de Sébastopol, 
l'un des premiers points de la cote dont se soit empare 
l'armée anglo-lrançaise commandée par le maréchal Saint- 
A r n a u d et lord Baglan, après qu'elle eut opCe sans obstacle 
.son dëbarquement, le 14 septembre t854, t Staroe-Ukrelein, 
village situé en'iron à 3 myriauètl-cs au sud-estée Kosloff 
et à 6 myriamëtres de Sébastopol. Au temps où la Crimée 
appartenait aux Génois, Eupatoria, appelée aujourd'hui 
loloff, était un de leurs principaux entrepOts ; et au début 
de la guerre d'Orient sa population s'Cevait encore It près de 
10,000 Ames. On y trou-e tin port de commerce, etroit mais 
star, précédé d'une rade abritée contre le vent du nord. 
IOSLO,VSHIJ ( Mmlm- lwowscn ), sculpteur 
russe distingué, fut élevé à l'Acad.mie de Saint-Pétersbourg, 
où plus tard il remplit les fonctions de professeur de sculp- 
ture. L'un de ses plus celëbres ouw'ages est la statue 
Iossale de Souwarof, Cevée dans |e Champ-de-Mars it Saint- 
Petersbourg. Elle représente le feld-marechal en costume 
de chevalier, tenant de la main droite une épée, tandis que 
de la gatclle il abrite derrière un bouclier la tiare pontificale 
ainsi que les courounes de aples et de Sardaigne. On cite 
encore de lui la statue colossale de Samson qui se trouve à 
Pcterhof, la statue de l'impératrice Calherine lI, sous les traits 
de Minerve, plusieurs statues de marbre dans l'Ermitage, et 
les bas-reliel:s qui ornent le palais de marbre sur la Néwa, 
représentant le retour de lëguhls h Carthage, e Camille le 
libérateur de Ruine. Koslowskij mourut ì Saint-Petersbourg, 
en 1803. 
KOSLOWSKIJ (OS$1P-kNTOIOWIT.¢n), l'un des plus gra- 
cieux compositeurs qu'ait produits la lussie, auteur de 
plusieurs mélodies à bon droit populaires, et de cbarmanles 
polonaises, s'est surtout fait un nom par la musique qu'il 
composa pour la tragédie de Fingal par Oserot, et par un re- 
quiem. Il descendait d'une lamil|e noble de la Ilussie-Blanrhe., 
et mourut it Saint-Pétersbourg, le 7 février 1831, avec le 
titre de conseiller d'Ètat et de directeur du Thétre impérial. 
I{OSSOVA (Bataille de). Voile= C;.ssovE. 
IOSSUTll ( Louis ), chef de la révolution hongroise, né 
le 16 septembre 1802, à Monok, comitat de Zemplin, d'une 
famille croate, noble, mais peu aisée, reçut sa première ëduca- 
tion au collége des Piaristes de Satoraljai-Ujhély, fréquenta 
ensuite les écoles évangéliques d'Epériés, et plus tard étudia 
avec succès le droit au collége protestant de Sarospatak. 
Après avoir obtenu le dipl6me d'avocat, il parvint, parson 
travail opiniâtre et par sont aient, à se faire, à partir de 1827, 
une lucrative clientèle dans son comitat natal ; de mme 
qu'il acquit une certaine influence comme orateur data les 
assemblées du comitat et médiateur entre la noblesse et le 
peuple, à l'époque des troubles causés par le choléra. C'est 
 ce moment que la comtesse douairière de Szapari le prit 
pour homme d'affaires ; mais certains désagréments qu'il 

-- KOSSUTH 797 
éprouva pour l'apnration de ses comp{es, qu'on prétendit 
ne pas ttre assez clairs, le forcëreut à renoncer à cefle po- 
sition et le dterminèreut mtme à aller, en tS"l, s'etblir à 
Pesth, ci] il parvint également à se faire une position au bar- 
reau. Cependant, dès 1832 il se rendait à Preourg comme 
mandataire d'un magnat absent de Hongrie et chargé de le 
représenter à la diète. En cette qualib, il était logé gratui- 
tement, prenait place au bas-c6të de l'assemblëe, avait le 
droit de porter la parole, mai. non celui de voter. Au début 
decette diète, il essaya une lois d'user de son droit de par- 
ler; mais son discours, pendant lequel il resta court à plu- 
sieurs reprises, ne produisit aucune impression ; et pendant 
les quatre années que dura encore la sessiou, il se résina à 
garder ch silence lu-udent. En revanche, à la recommandation 
de .NicolasWesselény, le parti libcrM lui confia la rédaction 
d'une Ga.'.ette de la Dibte, qui, copiée it 1oo exemldaires 
seulement, afin de pouvoir echapper a la censurepréventive, 
était envoyée dans les différents comitats par des haidzws. 
Cette gaz,tte, éctite axec esprit et patriotisme, fut la première 
publication qui porta /t la connaissance de la grande masse 
«lu public les délib,:rations et les discussions intérieures de 
la diète, et contribta énormement au développement de l'es- 
prit public en Hongrie. Koss«th y vantait, comme on peut 
bien le penser, les discours prononcés par les membres de 
l'opposition ; il excellait d'ailleurs h en présenter les plus 
 igoureux arguments dans un sl)le clair et ciCant, "Lt résumer 
des questions souvent obscures et confuses d'une manière 
qui les rendait comprebensibles à lotis,/ leur donner cons- 
tamment une couleur favorable it l'oppositiou, ne manquant 
non plus jamais, à l'instar des journaux libëraux de Paris, 
de tenir nole des applaudissements dont les discours avaient 
pu tre l'objet, ui d'indiquer l'iofluence qu'ils avaient pu 
e,.ercer sur les rotes. D'un autre coté, il avait grand soin 
aussi de ne publier jamais que les phls faibles arguments des 
discours dn parti conservateur, s'acquittant de cette tàcbe 
en termes secs, etantant que possible mettant bien virement 
en saillie le cote ridicule que pouvaient présenter les motion, 
des plus faibles orateurs de ce parti, et de rapporter la 
bru)'ante désapprobation qu'elles excitaient dans l'auditoire. 
On conçoit combien ce procédé habile devait nécessairement 
exercer dïntluence sur les comitats. L'opposition y grandi- 
sait et billait ainsi avec ses deputés aux 5eux de l'opinion  
aussi bon nombre de vaniteux deputés des comitats conser- 
vateu:s, blessés dans leur amour-propre, réu$.irent-ils à faire 
changer leurs mandats anterieurs, afin de pouvoir, à leur 
tour, lire leur cloge dans le journal de Kossuth. 
La diète une fois close, Kossuth entreprit à Pesth une 
feuille semblable, destinée à rendre compte des discussions 
des assemblées locales de comitats, q,,e lui transmettaieut 
des rapporteurs attachés à chacune de ces assembles, et 
qui, pour échapper aux mutilations de la censure, s'en- 
voyait lithograpl,iee. Le gouvernement finit cependant par 
comprendre le danger de ces publications, qu'il avait d'abord 
affecté de reCriser. Il defendit donc la publication de la Ga- 
zette; et Kossuth a)ant reliesWd'obéir, lui, Wesselény et 
quelques autres filrent arrttés, en 1837, et conduits à la 
prison d'Ofen. La table septemvirale déclara bien Kossutb 
coupable du crime de haute trahison, mais ne le condamna 
pourtant qu'à quatre années de détention. Or, dès 1840 
Kossuth et ses co-detenns ëtaient remis en liberté en vert,, 
de l'amnistie gënërale que l'opposilion dans la dite ar- 
racha au gouvernement, moyennant quoi celui-ci obtint 
les levées d'hommes et les impOts qnïl demandait. 
Le crédit et l'importance de Kossuth étaient arrivés à leur 
apogée, parce que l'opposition attribuait le mérite des con- 
cessions du pouvoir à la tactique qu'il avait indiquée et re- 
commandée. Il surtit de prison aux cris de joie de l'opposi- 
tion. Une souscription ouverte en faveur de sa familh: 
produisit 10,000 florins, et h,i-mme obtint un privilége de 
journal sous le nom dun libraire de Pestll. Le [er janvier 
1841, on annonça ail public que Kossuth serait le rédacteur 
en chef dn Pc*ti-Hirla2, et celte feuLle ne tarda point a 



»98 
compter 4,000 abonnés  12 florins par an. Les lionoraires 
de Kossnlli furent portés  12,000 liorins par an, ce qui lui 
permit de faire alors l'acquisitio d'un petit domaiue de 
30,000 florins dans le comitat de Grn. On ne saurait nier 
que daus I rédaction de son journal il déploya de vrais 
talents comme publiciste, ll avait surtout le soin d'insister 
sur l'iniquité polihque qui exemptait la noblesse de toute 
espèce dhmp(ts, dont on rejetait tout le poids sur la bout- 
geoisie et sur les paysaus. Or, plus es tendanze devenaient 
démocratiques, et par suite odieuses au vieux parti con- 
mervateur, voiremème  la fraclion modérée du parti libéral 
dans la noblesse, plus en revanche elles excitaient de sym- 
pathie dans les masses, et devenaient l'cvangile de la jeu- 
nesse. Des différends survenns entre Kussoth et le pro- 
palCaire du Pe5ti-Hirlap, qui se refusa à augmeuter les 
honoraires du rëdacteur en chef, bien que le journal f0t 
arrivé à compter plus de 7,000 abonnés, le déterminèrent ì 
abandonner, en 184, la rédaction de cette feuille. Il espérait 
obtenir pour hd-mème un privilége de journal, et dès lors 
recueillir seul les grands profits que son éditeur retirait de 
l'exploitation de son talent e[ de son credit sur l'opiuion 
publique. A cet effet, il se rendit  Vienne, o0, pour la 
première et la dernière lois de sa vie, il eut un entretien avec 
M. de Meternich. Celui-ci, qui se défiait de Kossuth, lui 
refusa le privilée qu'il sollicitait, mais lui fit entrevoir la 
possibilité d'obtenir une subvention s'il voulait ecrire dans 
le sens du gouvernement. Ce secours si précaire ne pouvait 
ëtre accepte par un homme habitué déjh, comme Kossuth, à 
mener grand train et turrissant tes plusamhitieux projets, 
mais qui, precisément parce qu'il manquait d'argent du mo- 
ment ou le journal, source de son influence, lui faisait dëfaut, 
eùt été, dit-on, assez disposé à transiger. 
Ainsi econduit, Kossuth comprit que c'en était tait de son 
importance politique, et qu'on aurait bient6t oublie le dé- 
fenseur des droits du peuple et le martyr de la libertê de la 
presse, s'il ne trouvait pas le moyen de rester toujours en 
scène et de continuer à occuper de lui l'opinion publique. 
ll se poa donc mointenant en rëformateur «lu commerce, en 
promoleur du crédit particulier, en protecteur de lïndustrie 
nationale, et à cet elTt il créa une sortCWcommerciale hon- 
groi au capital de 500,000 florins, représenle par mille 
aclious de 500 fiorins. On devine que les opêrations entre- 
prises par cette société furent toutes désastreuses, mais qu'en 
revanche son directeur-graut touchait de magnifiques émo- 
luments et gerait la propriété commune dans son intérét 
propre, qu'il avait i'hahileté de confoudre avec ceux du pays. 
E mme temps il suggérait ì un certain nombre de députés 
de la dièle l'idée de Ionder une sociétè de secours mutueis 
pour la Hongrie, societé dans la caisse de laquelle les as- 
socié s'engagèrent à verser 5 p. t00 de leurs revenus. Les 
seul frais que devait avoir  suppoder la société, c'étaient 
les émolumen de son directeur, fonctions auxquelles il se 
laissa nommer avec une abnégation dont furent dupes ceux- 
là seuls qui le voulurent bien. Devenu ainsi le directeur de 
deux importants établiements de crédit, Kossuth s'efforça 
de leur créer des succursales partout oh il lui fut possible 
d'en élablir. Mais les sociétés mères, comme les sociétés ri- 
lialee, ne rendirent jamais de services  la veritable industrie; 
seulement quelques avances lattes à propos  de pauvres ar- 
tisans permirent d'en trompetter partout les inoemmensu- 
tables avantages pour le pays. Administrées par des avocats, 
des écrivains ou des membres de la noblesse, ces sociétés, 
qui en fait de dividendes ne donnèrent lainais à leurs action- 
nattes que de la popularité, se transformërent bient6t en 
véritables asciations politiques u'ayant d'autre but que de 
pousser à l'agitation. 
En novembre 187 Kossuth recueillir enfin le Iruit de son 
habile conduite. Il fut nommé par le comitat de Pesth dé- 
putè à la diète, et dans cette assemblée il fit preuve d'une 
éloquence qu'on ne soui:onnait pas encore en lui, et qui 
le rendit bientôt le chef de l'opposition. Son proamme se 
berna d'abord  réclamer l' " 
affrancli,ssement des paysans, la 

KOSSUTH 
suppression des corvées et des dlmes, la participation de la 
bourgeoisie  tous les droits politiques, la prédominanoe 
politique de Pëlément national, et enfin la liberté de la 
presse; mais la révolution dont Paris fut le thdtre  la tin 
de février 1848 modifia trop profondément la situation pour 
ne pas l'enhardir à e.pérer et  exiger bien davantage en- 
core, notamment la séparation administrative et politique 
de la Hongrie d'avec l'Autriche, en mme temps que des ins- 
titutions constitutionnelles pour les l#:tats héréditaires autri* 
chiens. Un violent discours qu'il prononça dès le 3 mars 
dans le sein dela diète eut un immense retentk, sement en 
Hongrie. Le contre-coup que la révolution de Fëvrier eut 
quinze jours après  Vienne, et auquel le discours en ques- 
tion ne lut pas non plus étranger, mit le gouvernement im- 
périal à la discrétion des agitateurs hongrois. Une garde na- 
tionale s'improvisa comme par euchantement h Presbourg, 
sous prétexte de veiller an maintieu de l'ordre,  la scurité 
des personnes et des propriétés, tandis qu'en réalitè c'ctait 
là déj bue levée de houcfiers de la nationalité hon'oise. 
Dè le 15 mars, Kossuth, devenu plus que jamais le héros 
du jour, arrivait à Vienne ì la tëte d'une dëputation chargée 
de demander la création d'un ministère spécial pour la Hon- 
grie. Des gardes nalionaux dételèrent sa voiture et le pro- 
menèrent en triomphe dans les principaux quartiers de la 
capitale. Une garde d'honneur fut plac à son logement, 
et les étudiants de l'université lui firent offrir de marcher 
ur le château de l'empereur, i on ne lui accordait pas ce 
qu'il demandait. Terrifié par la révolution de Vienne, le 
gouvernement autrichien en passa par ce qu'on 'oulait. Un 
décret impérial, en date du 17 mars, créa un ministère spé- 
cial pour la Hongrie, ministère présidé par le comte B al- 
t b y à n i, et dans lequel Kossuth, le grand agitateur, était 
cbargé du portefeuille des finances. Celui-ci s'en revint en 
véritable triomphateur à Presbourg; et alors, obligé pen- 
dant les deux mois suivants de dëbrouiller avant tout le 
chaos administratif au milieu duquel il se trouvait jetC il 
se renferma dans les attributions de son ministère, sans 
em#éter sur celles de ses collégues. On se rappelle qu'une 
véritable Vendée autricliienne surgir alors du fond de la 
Honte méridionale coutre les faits qui venaient de s'ac- 
complir, et que les Serbes et les Croates s'insurgèrent pour 
la defense des droits de la maison de llahsbourg ave-, non 
moins d'enthousiasme qu'avaient pu faire les populations 
magares pour la conquëte de leur indépendance politique. 
Les révolutionnaires bougrois comprirent la nécsité d'é- 
craser cette protestation armée contre le nouvel ordre de 
clioses, sans lui donner le temps de prendre des propodions 
plus dangereuses encore. La majorité du ministère penchait 
cependant pour une politique et des mesures de conciliation. 
Kossuth, au contraire, exigea que les révoltés se soumis-- 
sent sur-le-champ et sans conditions, refusant de prëter l'o- 
reille aux moindres objections que pouvaient lui faire des 
hommes de sens et d'expérience. En mme temps il décla- 
rait dans l'Assemblée nationale, au nom de se collègues, 
que la llongrie accorderait à l'empereur tous les secours dont 
il croirait avoir besoin pour replacer l'Italie sous son obéis- 
sance, ì la condition que la cour prit franchement le parti 
des Hongrois contre les Croates. On n'a pas o»blié sans doute 
que le ministère autrichien déposa le ban J e I I a c h i c h ; mai 
Koutb, plein de défiance à l'endroit des çéritables intentions 
de la cour de Vienne, fit décréter par i'Assemblëe nationale 
la création immédiate d'une armée hongroise, mesure que 
es collëgues Batth}'hni et 5iezaros combattirent eux-mmes 
avec vigueur, et qui ne ponvait effectivement avoir d'autre 
but que de créer un moyen d'aclion à opposer à l'armée autri- 
chienne. C'était là l'idée secrète dont Kossuth avait tout 
d'abord poursuivi la réalisation, comme le prouvent de reste 
les nombreu_. émissions de billets de banque ordonnée par 
le mini«tre des finances, et A l'aide desqnelles, ds le mi- 
lieu de l'CA de tS48, il battait incessamment monnaie et s 
procurait les rexources nwessaires pour mettre la revo- 
lution hongroise en mesure de jeter le gant ì l'Autriche. 



KOSSUTfl 
Sans plus se soucier des ordres qu'on lui envoyait de 
'ienne que des menaces du ministère hongrois, Jellachich 
envahil le territoire hongrois. Le refus positil de l'empereur 
d'intervenir dans ce conflit plus efficacement qu'i| ne l'avait 
fait jusque alors amena la dissolution du cabinet. L'empe- 
reur refilsa de nommer les nous, eaux ministres qu'on lui 
proposa, et envoya, au contra/re, en Hongrie le feld-maréchal- 
lieutenant comte de Lamberg à l'effet d'y rétablir l'ordre avec 
*'aide des Croates. Lamberg qui s'Cait rendu à Pesth pour 
, faire contre-signer sa nomination et ses pouvoirs par le 
comte Batthyàni, p6rit assassiné dans un mouvement po» 
pulaire provoqué par les agitateurs magyares. Ces scènes 
sanglantas et la complète dissolution du cabinet qui en fut la 
suite portèrent Kossuth à la pr6sidence du comité de alA- 
renne nationale, et firent complétement préva]oir ses idées 
( rage:, HoNcmc). Comme chef de ce gouvernement révo- 
lutionnaire, il dép|oya daus les derniers mois une incroyab|e 
nergie et une incomparable activité pour organiser l'arme 
hongroise, armer la nation en masse, et pour enflammer le 
patriotisme et l'ardeur r6volutinnnaire au moyen d'inceso 
sauts voyages dans les différentes parties du pays ; voyages 
qui toujours donnaient lieu de sa part aux plus chaleureuses 
et aux plus patriotiques ailocutions. 
Quand l'armée autrichienne aux ordres de Winlischgroetz 
pnétra sur le sol hongrois et qu'il y eut nécessité, au com- 
mencement de l'année tSf9, de transférer l'Assemblée na- 
tionale de Pestb à Debreczin, Kossuth conbibua essentielle- 
ment par son activité et sa r6solution à donner  l'armée 
hongroise les proportions grandioses et l'attitude formidable 
grAce auxquelles la campagne du printemps s'ouvrir par 
une suite de brillants triomphes. Pour enlever au parti mo- 
dëré toute possibilité d'oprer une transaction, ce fut lui qui, 
le 14 avril 1849, vint M'improviste proposer à l'Assemblée 
nationale de proclamer l'indépendance de la Hongrie et la 
déposition de la maison de Habsbourg ; proposition convertie 
en loi dès le lendemain, 15. Iien que Kossulh laissAt pro- 
visoirement la question de la forme de gouvernement indU- 
aise, il se fit nommer chef de l'État, sous le titre de çouver- 
;erprovisoire d pa9s, et le 5 juin il faisait en cette qua- 
lité snn entrée solennelle dans Pesth, relombe au pouvoir 
des magyares. Il avait compté surune intervention des puis- 
sances occidentales en faveur de la Hongrie, et Pavait 
lait entrevoir dans la déclaration d'independance; mais 
ne tarda point h se voir trompé dans ses espérances, en 
même .emps que la révolution hongroise se trouvait rcd uite à 
la sit,xation la plus critique, d'un cote par la reorganisation 
de l'armée autrichienne, et de l'autre par l'intervention de la 
Iussie. Peu propre  calculer froidement les cbance en v- 
ritable homme politique, et nabsrellement enclin aux mesures 
extrmes, il voulut alors que la nation tout entiëre trouvàt 
dans sn désespoir les moyens de vaincre un ennemi deux 
lois plus fort qu'elle; à cet effet il lit prêcher une véritable 
eroisade,  laquelle ne manquèrent même ni les proces- 
nions so]enne|les, ui les jeunes, ni les pénitences propitia- 
lattes ordonnés par l'Eglise. Il faut le dire, d'ailleurs, peut- 
ètre bien la cause hongroise aurait-elle ess une lin, sinon 
moins rapide, dts moins moins fatale, si Kossuth avait su 
faire preuve de plus d'énergie et de force de volonté vis-à- 
vis des chefs militaires, notamment vis-a-vis de Goergei, 
et les cootraindre  lui obéir. Mais tout dans sa carrière po* 
litique démontre que s'il est dou à nn haut degré du cou- 
mage civil, le courage personnel lui fait complctemeut délaut. 
Tandis que Goergei, parvenu uniquement par la proteclion 
de Kussuth, se révoltait eu quelque sorte dès le mois de 
janvier tSt9 contre le po.sxoir exécutif, Kussuth, au lieu 
de contraindre le réfractaire à l'obéissance ou bien de le 
punir et de lui enlever son emploi, chercha h le gagner à ses 
intrëts propres. Après les démissions foreC arracbées à 
Dembinski, puis à Yelter, il lui fit même confier le 
commandement en chef de Parmée, et après la déclara- 
lion d'indépendance, le portefeuille de la guerre. Il est vrai 
que lorsque. Goergei, .persistant  ne suivre que son plaa 

799 
d'opérations particulier, différa de faire tette'er son armée 
vetsla Theissinférieure, Kossuth lui enleva, le 2 juillet, tout 
ses fonctions; mais il revint bientét sr cet acte de igueur, 
et laissa encore Goergei libre d'opter entre le ministère de 
la guerre et le commandement de l'armée. Goergei, demeuré 
le chef des forces hongroises, continuant toujours fi n'exécuter 
aucun des ordres qui lui étaient transmis et  suivre res 
plans, Kosauth tAcha d'obtenir de Be m qu*i! se chargent du 
commandement en chef, et accusa publiquement  Szegedin 
Goergei de trahir la cause nationale. 11 fit plus, il rëunit, 
pour marcher contre lui, un corps de 3,000 hommes, dont 
il se réservait le commandement; mais il n'osa jamais rien 
tenter de dcisif pour eulever au traltre les pouvoirs a l'aide 
desquels celui-ci rendait son pas. Après la délaite éprouvée 
le 9 actif à Témeswar par l'armée nationale, et les négocia- 
tions ouvertes avec Paskewitscfi pour offrir la couronne de 
Hoagrie à un priuce russe aant t repous.gées, Kossut 
désespéra du salut commun; et le 9 ao0t, à Arad, il remet- 
tait formellement tous les pouvoirs civils et militaires entre 
les mains de Goerei. Ce fut eu vain que Bem i'eucou- 
ragea  recommencer la lutte et à reprendre sa position : il 
n'avait plus maintenant d'autre pensée que celle de ga- 
gner la frontière turque, qu'il parvint effectivement a tou- 
cher le 17 aot avec quelques-uns de ses affides, et de se 
réfugier de là eu Angleterre. Reconnu par les autorités tur- 
ques, il fut retenu prisonnier, d'abord à Widdin, puis i 
Schumla. Quoique menacé alors d'ètre livré à l'Autriche, 
Kossuth refilsa noblement de changer de religion et d'em- 
brasser le mahométisme pour échapper à ce péril, lntern 
plus tard avec oes compagnons d'exil à Koutahia en Asie 
Mineure, il ne recourra sa liberté qu'en aoOt 1851, sur la 
pressante intervention des gouvernements anglais et ame- 
ricain. Un vaisseau de guerre américain vint le chercher  
Smyrne, et le 17 octobre il d«.barquait en Angleterre. Kos- 
suth y fut reçu au milieu des plus vives acclamations, et pa 
Fadresse avec laquelle il s'exprima Ch public tontes les foi 
qu'il en eut l'occasion, il réussit à rendre également popu- 
laires sa personne et la cause dont il était le représcnlant. 
Dès le mois de novembre de la même année il partait pour 
les Eats-Unis, où il développa une extrême actiite oratoire» 
excitant au plus haut degré par ses discours les sympathies 
publiques pour les malheurs de sa patrie, recueillant en o.h e 
des sommes considérables sous forme de dons volontaires et 
de souscriptions eu faveur des ttougrois, et prêchant partout 
dans Iïntérèt de la reolulion le principe de non-inter'ention. 
En juiu 1852, Kossutb revint a Londres. Quoique, lors de 
l'emeute qui é.clata à Milan le 6 ao0t 1853, il ait étë publié 
une proclamation adresée aux soldats hongrois servant en 
Italie et signée de son nom, il parait qu'il ne prit point direc- 
tement part  cette écbauffourée ; et il résulte d'un échange 
d'explications iuterveuues  ce sujet entre lui et Mazzini par 
la voie des journaux de Londres et de Turin, que si cette 
proclamation portait réellement sa signature, c'est qu'il l'avait 
donnée en blanc-seing, lors de son internement à Koulabia, 
pour le cas où les chefs du parti patriote crois-aient  l'uti- 
litWet à l'opportunité d'un mouvement insurrectionuel à 
tenter en Italie. Or, deux années s'étaient passees depuis lors ; 
les circonstances n'Calent plus les mêmes, et Kossuth dt/fb- 
rait maintenant complétement d'opinion avec les chefs du 
mouvement teurW Milan, non pas sur la question de prin- 
cipe, mais sur la question d'opportzznité. A quelque temps 
de la le gouvernement anglais eut des motifs pour le soup- 
çonner de faire à Londres des préparatifs militaires destines 
à un nouveau mouvement sur le continent. Une descente de 
police fut faite en avril 1853 chez nn nommé Hale, fabricant 
de lusCs et de raquettes incendiaires, et l'on y saisit effecti- 
vement des approvisionnements considérables en ar«es et 
nunitions de guerre; mais il fut impossible de prouver qu 
Kossuth y fut pour quelque chose. A cette occasion il se 
scnta d'avoir à sa disposition, non pas sur le sol anglais, 
mais à l'étranger, les mo)ens de recommencer la lutte conte 
l'Autriche quand il jugerait le moment venu. 



800 
En février 1850, sa femme, Thérëse, née Messleni, était 
parvenue à sorlir de Hongrie et à venir le rejoindre à Kou- 
tahia; et peu de temps aprës le gouvernement autrichien 
lui renvoya spontanément ses enfants, deux/ils et une fille. 
Ses deux sœurs, aprës une longue détention, furent bannies 
en 1852 des Etatsautrichiens, et trouvèrent l'accueil le plus 
sympathique h Bruxelles, d'où eues se rendirent aux Etats- 
Unis, en 1853. C'est aussi à Bruxelles que mourut sa mère, 
à la fin de l'année 1852. 
Kosuth est de taille moyenne, maigre er pale. Sa physio- 
nomie annonce une vive intelligence; malgré ce qu'il y a 
de visiblement chétif et valétudinaire dans  constitution, 
sa voix est aussi forte que retentissante. Avec M azzi n i et 
L ed r u-l o I lin il constitue aujourd'hui le triumvirat réolu- 
tiunnaire qui tient en éveil toutes les polices tin continent; 
et comme il a eu le bou esprit de se mnager à l'étraner, et 

KOSSUTH 
 l'abri de toutes confiscations, une fortune plus qu'indé- 
pendanfe, son nom est toujours une puissance aux yeu 
du vu|gaire ; cependant il s'en faut que dans l'émigration 
hongroise il y ait unanimité d'opinions sur son compte. 
Beaucoup de patriotes hongrois ne voient qu'une insolente 
et odieuse nsurpation dans le r61e de chef de la révolution 
qu'il persiste à vouloir jouer, ils disent que l'indécision 
dont il fit preuve au moment critique est pour beaucoup 
dans la catastrophe finale; que par sa conduite il ne justifia 
point la dictature qn'il s'êtait octroyée lui-mme, et qu'il y 
eut en»uite acte de haute trahison de sa part  abdiquer en 
favenr de Goergei, sans mme consu|ter la représentation 
nationale. Ces dissidents refusent de croire au droit divin 
des dictateurs, et prétendent leur /aire rendre un compte 
sévère de la façon dont ils usent ae leurs pouvoirs. 

F DU OXZIÈSIE VOLUX,U.