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Full text of "Dictionnaire de locutions proverbiales"

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L.-M.-E.   GRAN'DJEAN 


DICTIONNAIRE 


DE 


LOCUTIONS 


PROVERBIALES 


Oovraoe  ootJlic  m  les  soins  de  la  Moolcipalilé  de  la  Ville  de  Tooloii  (Var) 


TOME    SECOND 


TOULON 

IMPRIMERIE     RÉGIONALE 

Romain  LIAUTAUD  &  C" 

^6,   Boulf'i'crd  de   Strasbourg,    5-6 
•  ••      — 
■1899 


^ 


DICTIONNAIRE 


DE 


LOGUTIOiNS    PROVERBIALES 


IMPRIMERIE  REGIONALE  Romain  LIAUTAUD  el  C' 

56,  Boulevard  de  Strasbourg,  56 


/. 


L.-M.-E.  GRANDJEAN 


DICTIONNAIRE 


DE 


LOCUTIONS 


PROVERBIALES 


Oovrage  publié  par  les  soins  de  la  Monicipalité  de  la  Ville  de  Toolon  (Var) 


TOME    SECOND 


TOULON 

IMPRIMERIE     RÉGIONAIiE 

Romain  LIAUTAUD  &  O" 

)6,    Boulevard   de   Strasbourg,    56 

1899 


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ERRATA 


Page  i()7,    4'-  ligne.  —  Lire 

—  270,    2«  ligne.  —  Lire 

—  323,  20«  ligne.  —  Lire 

—  349,    G''  ligne.  —  Lire 

—  ^71,  39'-  iigne.  —  Lire 

—  382,    l't' ligne.  —  Lire 

—  400,    ^'^  ligne.  —  Lire 

—  497,  35'=  ligne.  —  Lire 
~  497,  SG"-'  ligne.  —  Lire 

—  527,    7"  ligne.  —  Lire 

—  5GL  il''  ligne.  —  Lire 


(la  haut  (le  leur,  au  lieu  de  w. 
prête,  au  lieu  de  prête, 
repas,  au  lieu  de  repos, 
par,  au  lieu  de  pour, 
possessions,  au  lieu  de  possession. 
Novare,  au  lieu  de  Navarre, 
tomber,  au  lieu  de  tomlter. 
diijnitaire,  au  lieu  de  dignité, 
patriarche,  au  lieu  de  jjalriarcliat. 
clitellas,  au  lieu  de  citellas. 
tentés,  au  lieu  de  tentées. 


DICTIONNAIRE  DE  LOCUTIONS 


M 


Macabre  (danse)  :  aiiciomiement  danse  mncnlré. 

Variante  du  nom  propre  Machahée.  peut-être  le  nom  d'un 
[leintre. 

Suite  d'images  que  l'on  peignait,  au  Moyen-Age,  sur  les  murs  des 
églises  et  des  cimetières.  Elles  représentaient  la  Mort  entraînant  à 
sa  suite  des  personnages  de  toutes  les  "conditions. 

Macaire  (Robert),  origine  littéraire. 

Filou  sinistre,  escroc. 

Héros  de  YÂuberye  des  Adrets,  qui  fut  joué  avec  grand  succès 
par  Frédéric  Lemaître,  vers  1830.  et  vulgarisé  par  Daumier  dans 
une  suite  de  caricatures  :  Les  cent  et  un  Robert  Macaire. 

Wacaronique  (stylej  ;  de  l'italien  macaroniro,  dérivé  plaisant 
de  niucaronl. 

Poésie  Iturlesque  écrite  en  mots  vulgaires  latinisés.  (Voy.  Jntin 
de  cuisine.) 

Exemples  :  Morto  insecto,  poudre  insecticide  :  dito,  ce  ([ui  a  été 
dit  ;  in  fjlobo,  en  masse,  sans  examiner  les  détails. 

IVlacédoine,  nom  géograplil(iue. 

—  Mets  composé  de  ditTérents  légumes. 

Par  assimilation,  ouvrage  où  plusieurs  genres  sont  mêlés  sans 
ordre. 

Vient  peut-être  de  ce  cpie  l'empire  de  Macédoine,  ou  d'Alexandre, 
était  formé  de  nombreux  morceaux. 

Machiavélisme,  origine  bistorique. 

Doctrine  détestable  du  Florentin  Macliiavel,  qui  justifie  le  succès 
obtenu  par  les  moyens  les  plus  coupables.  Elle  se  trouve  dévelop[)ée 


2  MAI) 

dans  le  rrhire,  qui  cnsoinno  aux  tyrans  les  moyens  de  rriissir, 
même  au  mépris  de  la  justice  et  de  l'Iiumanilé. 

—  Maclùacélhtne  est  devenu  synonyme  de  rum'  cl  ({'(isincc.  et 
les  lliéories  du  Prince  ont  été  fort  discutées.  Il  présente  tout  un 
système  violent,  mais  vrai,  allant  droit  au  hiit,  sans  se  soucier  des 
moyens,  mais  au  bout  durpiel  le  prince  acquiert  la  jïloire  et  le  peuple 
le  l»ien-ètre. 

Pour  ju.uci-  saiuemeul  un  livre,  il  l'aul  se  reporter  à  l'époque  où  il 
a  été  écrit  :  c'est  ce  que  n'ont  pas  fait  la  plupart  des  contemporains, 
et  les  ennemis  poslhumes  de  Macliiavel. 

La  postérité  a  lini  par  rendre  justice  à  cet  écrivain  iionnéte  et 
convaincu,  à  ce  firand  homme  d'État  ;  mais  le  nom  de  machîavé- 
lisme,  donné  à  son  système,  par  ses  détracteurs,  a  pris  place  dans 
tous  les  dictionnaires  avec  le  sens  odieux  de  politique  déloyale, 
d'art  de  relouer  despotiquement. 

Mâchicoulis  ou  mû'checoulis ,  origine  inconnue. 

Galerie  saillante  et  ajourée  des  anciennes  fortifications,  d'où  l'on 
jetait  sur  les  assaillants  des  projectiles  et  des  liquides  bouillants. 

Littré  donne  l'étymologie  inarhicoUamentuw,  VicWow  déverser 
des  liquides  chauds  ;  ce  qui  explique  coulis,  en  laissant  inexpliquée 
la  première  partie  du  mot. 

Mâchoire,  dérivé  de  mdclicr:  latin  masticcn^e. 
Jouer  de  la  mâchoire  :  manaer. 

(Di(lon)  (lil  son  licnrdidtc 
I^uis  on  joua  de  la  luâclioiiv. 

(ScAiiRON,    Virgile  travesti.) 

—  Mâcher  à  vide  :  n'avoir  rien  â  manger. 

Madelonnettes.  Filles  de  Madeleine,  3Iagdalena. 
Religieuses  instituées  au  xiv^  siècle,  dont  les  maisons  servaient 
de  refuge  aux  péclieresses. 

Mademoiselle,  ma  et  demoiselle. 
,  On  donnait,  avant  la  Révolution,  le  nom  de  demoiselle,  aux 
femmes  de  la  bourgeoisie,  mariées  ou  non.  Cet  usage  s'est  conservé 
en  Provence,  où  les  femmes  de  la  classe  ouvrière  sont  appelées 
w /.se,  qui  est  l'équivalent  provençal  de  mademoiselle,  hç  XWyq  Ao, 
7nadame  n'appartenait  qu'aux  femmes  de  la  classe  noble. 

Encore  aujourd'hui,  dans  l'usage,  on  distingue  fe?mne  et  dame. 

\\  a  été  publié  â  La  Haye,  en  1712,  in-8",  un  hvret  intitulé  :  Satire 
contre  les  femmes  Ijoargeoises  qui  se  font  appeler  madame. 


MÂG  3 

lYladras,  étymologie  historique. 

Im)iiI;ii-(1s  (le  coton  f;iliri(|iirs  priiniliveuieiit  ,'i  .M;ulr;is,  et  dont  la 
cliaiiie  élail  en  soie. 

(^oilViiiT  lui'iiirr  d'iiii  de  ces  loidards. 

IVîadré,  ancien  français  iiKulro:  oriiiine  uernianicine. 
Mdndi'i'  est  le  nom  languedocien  du  renard. 

Un  ronartt,  jiMuic  encor,  (|iu)i(iue  des  plus  niailrôs. 

(L\    FoNTAINF.) 

Madrigal,  d"ori,uine  italienne,  madv'ujale. 
Ihit'l  le  lait  venir  des  habitants  des  Martignes  en  Provence,  très 
\ersés  dans  la  gaie  science,  an  Moyen-Age. 
Le  madrigal,  au  dire  de  Boileau  (.4;'^  poétique), 
Respire  la  (loiiecur,  la  tendresse  et  raiiioiir. 

La  concision  et  la  grâce  en  sont  les  principaux  mérites  :  la  fadeur 
en  est  le  défaut  ordinaire. 

(lu  peut  citer  comme  modèle  les  vers  suivants  de  Lemierre,  c(ui 
accoiupaguaient  l'envoi  d'un  éxenlail  : 

Dans  le  temps  des  chaleurs  extrêmes. 
Heureux  d'amuser  vos  loisirs, 
.le  saur.'ii  [irès  de  vous  ap|)eler  les  zéphyrs  : 
Les  amours  y  viendront  d'eux-mêmes. 

(Voy.  ('venlail,  ces  vers  avec  quelques  variantes.) 

IVIage,  ou  mieux  maje  ;  du  provençal  uidjé:  anciennement 
inajer,  qui  est  le  latin  major. 

Ou  disait  autrefois  la  «  place  mage  »  jtour  la  place  principale,  la 
grande  place. 

Il  y  avait  à  Carcassoune  le  «  juge  mage  ». 

La  Châtre  a  sa  «  place  Mage!  ».  comme  Madrid  la  «  place  Major  ». 

...Et  tomba  c{Mnme  une  grenouille  sur  le  ventre,  en  la  place 
Mage  de  la  dicte  ville.  (Rabelais,  11,  %).) 

lYlagie,  du  grec  marjeùi,  par  le  latin  niayta. 

La  magie  noire,  celle  ([ui  su[)pose  rinler\eution  du  diable.  La 
magie  blanche  ne  l'ait  intervenir  que  l'adresse. 

—  La  d  ici  nation  s'a[)pelle  de  dill'érenls  noms,  selon  les  moyens 
qu'elle  emploie  : 

Les  Ainispices  inspectent  les  entrailles  des  victimes. 

La  Biblio/nancie  se  fait  par  le  sort  d'un  passage  de  la  Bible. 

La  Céroniuncie.  par  l'inspection  de  la  cire  fondue  vei'sée  dans 
l'eau  chaude. 


4  MAH 

]/,{  Chiromanrln,  ]»;ir  rins|)f'cti()n  dos  li^iios  de  1;i  iii;iiii. 
La  Nécromancie,  par  révocation  des  iiioris. 
XJOrnithoscopie,  par  le  vol  des  oiseaux. 
]JUranosropip,  par  riiispection  du  ciel. 
IJf/roscopie,  par  rins[ie(iioii  des  urines. 

Magnan,  de  incKjmts  nens,  «irand  fileur  :  on  plnUM  du  participe 
du  vérité  roman  wjr/r/w'Vdévorer,  noui  |»ro\('n(al  du  ver  à  soie. 
D'où  inaijnnnevie. 

Magnificat,  origine  latine  et  religieuse. 

C'est  le  premier  mot  du  cantique  d'actions  de  grâces  de  la  Vierge, 
dans  rÉvangile. 

Dans  ce  cantique,  qui  se  chante  à  la  lin  des  vêpres,  la  Vierge, 
répondant  aux  iélicitations  de  sa  cousine  Elisabeth,  remercie  Dieu 
de  l'avoir  choisie  pour  être  la  mère  du  Sauveur. 

Magnifier  s'est  dit  pour  louer. 

Nous  avons  encore  magnifique. 

—  Il  ne  faut  pas  chanter  Magnifu-at  à  Matines  :  se  glorifier  avant 
le  temps. 

—  Corriger  le  Magnificat  :  corriger  à  tort  et  à  travers. 

lYlagot  :  1*'  gros  singe,  imago  Jiominis.  (Huet.) 

Peut-être. /;/ 0/70(7,  nom  bibhque(?),  owmacctis,  acteur  bouffon, 
qui  jouait  les  rôles  de  niais  (?). 

2"  Tas  d'argent,  trésor  caché. 

On  disait  autrefois  mugot.  11  semble  s'être  modifié  sous  l'influence 
de  magaut,  poche,  bourse. 

—  Il  est  difficile  d'admettre  qu'il  soit  une  altération  de  imago. 
qui  serait  une  allusion  aux  effigies  ou  têtes  qui  figurent  sur  les 
monnaies  trouvées. 

Mahomet  ferme  les  yeux  !  disent  les  mahométaus  quand  ils 
boivent  du  vin,  qui  leur  est  interdit  par  le  Coran. 

—  Dieu  envoya  sur  la  terre  deux  anges,  Arot  et  Marot,  pour 
enseigner  aux  liommes  à  s'abstenir  de  toute  sorte  d'excès.  Mais  ils 
s'enivrèrent,  dans  la  compagnie  d'une  belle  femme,  qui  apprit 
d'eux,  pendant  leur  ivresse,  le  moyeu  de  monter  au  ciel.  Elle  en 
usa  aussitôt,  et  Dieu  la  changea  en  l'étoile  du  matin,  qu'on  nomme 
Lucifer  ou  Aurore.  Les  deux  anges  furent  punis,  et  Dieu  interdit 
aux  hommes  l'usage  du  vin.  (Voy.  vérité.) 

—  Le  Commissaire  des  subsistances  de  la  Marine,  à  Toulon,  a 
remplacé,  en  18G0,  les  ouvriers  liltres  du  magasin  des  liquides,  qui 


MAI  S 

s'enivraient  journellement,  par  des  galériens  arajjes,  qui  observent 
ri,L!Oiireusenient  la  défense  du  Coran. 

lYlai,  du  latin  inniiun,  de  3Iaia  (mère  de  Mercure)  ;  ou  de 
majores,  mai  étant  consacré  à  la  vieillesse,  comme  juin  à  la  jeu- 
nesse. 

Cest  floréal  dans  le  calendrier  républicain. 

—  Mariage  de  mai  :  union  formée  sous  de  mauvais  ausjjices. 

Au  mes  de  mai 
Si  mariilc  que  leis  aïs. 

(Pi-ovcrbc  pi'OVfiu;al.) 

Dans  l'ouest  de  la  France,  le  mois  de  mai  passe  pour  être  défa- 
>orahle  aux  mariages;  on  croit  qu'il  leur  porte  mallieur,  comme 
s'il  n'était  composé  que  de  vendredis. 

Ce  préjugé  vient  des  Romains,  qui  célébraient  en  nuii  des  céré- 
monies funèbres  en  l'bonneur  de  Rémus. 

Nec  vidud'  ta'dis  eailon  nec  virr/inis  apla 

Tempnra  ;  quœ  nupsit,  non  diulurna  fuit. 
Hac  quoqiie  de  causa  (si  te  proverbia  tanyunt), 

Mense  ni(das  Maio  nubere  vulgus  ait. 

(OviDK,  Fastes.) 

Maigre,  du  laliu  macrum. 

—  Maigre  comme  une  arête,  ...un  coucou,  ...un  eccc  homo,  ...un 
échalas,  ...un  bareng,  ...une  baridcUe. 

—  Maigi'eur  ostéologique  (E.  Sue)  ;  maigreur  diapliane  (T.  Gau- 
tier) ;  monofjramrni  dii  (Cicéron)  :  des  ombres  de  dieux  (des  dieux 
dont  les  contours  seuls  sont  dessinés). 

—  Femme  maigre.  La  célèbre  danseuse  Gaimard  était  très 
maigre  ;  sa  bonne  amie  Sopbie  Arnould  l'avait  surnommée  «  Sque- 
lette des  Grâces  ». 

lYlaille,  du  latin  nietalliani,  dérivé  de  melallum. 

C'est  une  autre  forme  de  médaille. 

Ancienne  petite  monnaie  de  cuivre,  valant  un  demi-denier.  Elle 
était  cari'ée  et,  selon  quelques-uns,  devait  son  nom  à  sa  ressemblance 
avec  une  maille  de  filet  {macula). 

Selon  d'autres,  maille  remonterait  à  malleolus,  petit  marteau, 
à  cause  de  l'ancien  procédé  usité  [lour  frapper  les  monnaies. 

—  N'avoir  ni  sou  ni  maille  :  être  très  [)auvre,  n'avoir  rien. 

La  maille  étant  carrée,  le  sou  rond,  l'expression  signilie:  n'avoir 
de  monnaie  d'aucune  sorte. 

—  Avoir  maille  à  partir  avec  quelqu'un  :  un  dilTérend. 

Vu  sa  valeur  infinie,  la  maille  était  indivisible  :  aussi  deux  i)er- 


6  MAI 

sonnos  fjiii  en  ;iviiionl  iino  ;i  p.-ii-lir  '|i;irl;i!Jor"^.  |i()ii\;ii(!iil  se  (|iici'<'ll('r 
élcnicllciiu'iit.  le  i);irl;i^<'  (''Uiiil  iiiiiiossililc 

\'.\  I  nii  \()iis  \(iil  sans  cesse  ;i\ (tir  niaillr  a  partii-. 

(.M)i.iKriK,  Étourdi.) 

—  Un  |)inc(Viii;iill(' :  un  ;i\;ir('.  un  'jri|»|i('-?oii.  (jiii  rerliorchc  les 
pelits  profils. 

lYlaillechort,  nom  crinvcnlcnrs,  de  Mailloi  vA  (Ihovlbir,  (Icnx 
ouvriers  do  Lyon,  qui  ont  inventé  cet  ailiîige  très  dur.  noniiné 
aussi  nrçjenian.  Sa  coniposilinn  est  :  cuivre  oo,  nickel  ^o.  zinc  17. 
)o«'  3,  étain  2. 

lYlain,  du  latin  /tif/niun.  Provençal  iiiaii. 

De  là  :  maintenir,  nianclie,  manier,  manille,  nianixelle. 

Synonymes  :  Les  quatre  doigts  et  le  pouce  ;  le  peigne  des  Alle- 
mands (Rabelais)  :  la  fourchette  du  père  Adam  ;  les  cinq  sardines  : 
la  girollée  à  cinq  feuilles. 

—  Main-levée.  Acte  qui  lève  rempèclienient  d'une  saisie,  du  ne 
opposition,  d'une  inscription. 

—  Main-morte  (biens  de).  Se  dit  des  biens  appartenant  aux 
établissements,  aux  communautés...  qui,  n'étant  pas  soumis  aux 
droits  de  mutation  après  décès,  sont  astreints  à  une  taxe  annuelle 
au  profit  du  Trésor. 

—  On  dit  d'un  homme  qui  a  les  extrémités  grossièrement  confor- 
mées, qu'il'a  les  abatis  canailles  (trivial)  ;  par  opposition  à  mains 
effilées,  aristocratiques. 

—  Mains  sales  :  gantées  de  crasse. 

—  Avoir  une  main  de  fer  :  traiter  durement  ses  inférieurs. 

On  citait  chez  Laffitte  le  mot  de  Napoléon,  que,  pour  gouverner  les 
Français,  il  faut  avoir  des  mains  de  fer  gantées  de  velours.  «  C'est 
vrai,  dit  quelqu'un,  nuiis  il  oubliait  souvent  ses  gants.  » 

—  Demander  la  main  de...-  ;  accorder  sa  main... 

Cette  locution  très  ancienne  nous  vient  des  bords  du  Gange.  La 
jonction  des  mains  a  toujours  été  le  signe  de  la  consécration  du 
mariage. 

—  Je  m'en  lave  les  mains.  (Mathieu  XXYII.  24.)  Je  n'en  suis  point 
responsable. 

Chez  les  anciens,  celui  qui  voulait  prouxer  son  innocence  d  une 
faute  dont  on  l'accusait,  se  lavait  les  mains  devant  témoins.  C'est 
ce  que  lit  Ponce-Pilate.  quand  le  peuple  le  contra i.ianit  à  condamner 
Jésus-Christ. 


MAI  7 

On  dit  aussi  dans  U»  même  sens  :  a\nir  los  mains  noitos  d'une 
chose. 

—  Autrefois,  on  ne  se  uietlail  pas  à  table  sans  se  laveries  mains  : 
des  tromi)ettes  sounaicnl  1  lieiirt'  du  diner:  cela  s'appelait  corner 
l'eau.  (VoY.  lacer.) 

Sur  ce  point  on  se  lavo,  et  clianin  à  son  rang 
Se  irlet  dans  mu'  eliaise  ou  s'assied  sur  un  banc. 

(Ki;(;.Mi;ii,  Sfll.  X.) 

—  .l'eu  iiKMlcais  ma  main  au  IVii  :  j'en  suis  cei'taiu. 

...Kt  les  pauvres  sots,  quand  en  quelque  compa.unie  parlent 
d'elles,  jurent  qu'ils  nu'ttraient  leur  doigt  au  feu  sans  brusler,  pour 
soutenir  qu'elles  sont  femmes  de  bien.  {Heptaméron,  Nouv.  XX.) 

—  .le  n'eu  mettrais  pas  la  main  au  feu:  je  n'en  voudrais  pas 
jurer. 

Je  n'en  vouldroys  pas  tenir  ung  fer  cliauld.  (Hal)elais.) 

,\Jinsion  à  l'ancienne  coutume  du  Moyen-Age,  qui  soumettait  les 

accusés  aux  épreuves  de  l'eau  bouillante  ou  du  feu  ai-dent.    On 

pensait  que  l'innocent  serait  préservé  par  Dieu. 
La   science   moderne   a  prouvé   que  l'on  pouvait   iuqjunément 

plonger  la  main  dans  l'eau  ou  l'huile  bouillante  et  nu^me  dans  des 

mélauv  en  fusion,  apivs  l'avoir  préalablement  enduite  d'eau,  d'alcool, 

d'éther... 

—  Jeux  de  mains,  jeux  de  vilains.  Ce  proverbe  doit  remonter  à  la 
[''éodalité,  où  les  jeux  des  nobles  étaient  les  tournois,  les  chasses, 
les  exercices  miUtaires  :  tandis  que  ceux  des  serfs  consistaient  dans 
l'adresse  de  la  main  et  les  exercices  corporels. 

11  n'y  a  plus  de  vilains,  mais  il  y  a  encore  des  villageois  qui  ont 
conservé  l'habitude  de  plaisanter  en  se  donnant  des  tape.'i,  ce  qui 
amène  souvent  des  disputes  et  des  coups  sérieux. 

Et  dirent  là  une  grand  tétanie 

De  plaisants  mots  et  jeux  sans  vilainie. 

(.Marot.) 

—  La  bonne  main.  La  main  a  été  l'étalon  primitif  du  calcul  duo- 
décimal, parce  que,  déployée,  elle  présente  les  douze  phalanges  des 
quatre  doigts  articulés  à  sa  paunu».  D'où  la  locution  :  compter  sur 
ses  doigts. 

Dans  le  commerce,  on  Unit  par  faire  remise  du  treizième,  qui  est 
l'appoint  du  quarteron,  représenté  par  le  pouce,  ce  qu'on  donne 
par  dessus  le  marché.  D'oi'i  l'expression  :  il  n'y  en  a  pas  treize  à  la 
douzaine,  en  parlant  d'une  chose  de  prix. 


8  MAI 

On  ;ii)|)('lle  rel  iis,'i,uï'  I;i  ho/me  ma  in.  puni'  (|in'  I;i  iii.iiii  >  est 
tout  enliôro. 

J3ans  le  langage  du  pt'niilc.  le  jkhkc  siLiiiilic  toujours  un  sim  rnit. 
une  anumcntation  :  Il  en  a  liiv  Irois  ccnls  francs...  ot  le  ponce 
Y  nielU'c  les  (piatrc  doigts...  cl  le  poiico.  rV'sl-à-dire  la  nuiin 
entière.  (C  Nodier,  //>i;/itis/////ir.) 

—  On  appelle  ;iiissi  bonne  tn<iin  nnr  uraliliralion  (Idiiiirc  à  un 
inférieur. 

On  dit  également  :  donner  des  gants. 

—  Poignée  de  main,  (l'est  un  signe  d'amitié  et  de  honno  intelli- 
gence. 

Deux  mains  jointes,  en  blason,  signifient  bonne  foi. 

—  De  marchand  à  marchand,  il  n'y  a  que  la  main  :  c'est-à-dire 
entre  gens  de  bonne  foi,  il  suffit  de  se  toucher  dans  la  main  pour 
engager  sa  parole. 

—  L'usage  de  se  serrer  la  main  en  se  rencontrant,  est  une  impor- 
tation anglaise,  qui  date  de  1793. 

La  Hochefoucauld-Doudcauville  raconte  dans  ses  Mémoires 
qu'ayant  émigré  à  Londres,  il  y  rencontra  un  ami,  qu'il  voulut  em- 
brasser selon  l'usage.  «  Que  faites-vous,  mon  cher,  s'écria  celui-ci  ; 
vous  allez  scandaliser  tout  Londres!  On  ne  s'embrasse  phis,  on  se 
serre  la  main.  »  Et  joignant  l'exemple  au  précepte,  il  me  prit  la 
main,  qu'il  me  serra  à  me  faire  crier,  et  me  secoua  le  bras  à  me  le 
démettre. 

—  Une  main  froide  me  gène:  une  main  humide  me  répugne: 
une  main  saccadée  m'irrite  ;  une  main  qui  me  prend  par  le  bout  des 
doigts  me  fait  peur  ;  mais  une  main  souple  et  cliaude.  qui  presse  la 
mienne  du  contact  de  sa  paume,  m'inspire  une  conliauce  et  une 
sympathie  subites.  (G.  Sand.) 

—  Revers  de  main  :  soufflet. 

Pour  châtier  son  insolence  extrême. 
Il  faut  que  je  lui  donne  un  revers  de  ma  main. 

(Jlol.lÉIiE.) 

—  Les  mains  me  démangent  !  Purjnl  pnirlunt.  (Plante.) 

—  Une  main  lave  l'autre,  et  les  deux  mains  lavent  le  visage. 
Mantfs  maninn  lavât.  (Pétrone.) 

Maintenant,  adverbe;  demain  et  tenant  (proposition  absolue). 

—  On  disait  autrefois  :  à  cette  heure. 

Cette  locution,  atTectionnée  et  abrégée  par  Montaigne,  valait 
mieux  que  maintenant  qui  la  remplacée. 


MAI  0 

—  Le  pied  romphice  quelquefois  l;i  niaiu,  daus  les  locutions 
adverbiales  : 

De  pied  ferme:  an  pied  levé. 
Ou  a  dit  aussi  :  en  un  tenant. 

Trois  fois  nie  nasiiie  cil  im  loïKiiit. 

iliomnn  de  la  Rose.) 

—  Eu  provençal,  ou  emploie  adês. 

Maison,  du  latin  mansionem,  de  inrnipro,  rester. 

Du  mrme  radical  \icuiu'nl  :  masure,  manoii'.  manant. 

Synonynn:;s:  un  Louvre  (une  belle  maison):  Villa  (maison  de 
campagne)  ;  Arcbe  de  Xoé  (.urande  et  très  liabitée):  lionfiounière 
(jolie);  Baraque,  bicoque,  cassine  (maison  peu  confoi-table,  uuil 
tenue). 

J'ai  là-bas  une  petite  cassine,  au  bout  de  votre  grand  pré,  qui  est 
sur  la  rivière.  {Moyen  de  parvenir.) 

Bouge  :  habitation  dont  les  murs  sont  faits  dun  mortier  mclé 
de  paille  hachée,  qu'on  appelle  7>/.sy'. 

Taudis  :  petit  logement  malpropre. 

Petites-maisons  :  hôpital  des  fous. 

Maître,  du  latin  macjhtrum,  de  magls  ter. 

Pasquier  dit  que  le  titre  de  maître  qu'on  donne  aux  ofliciers 
ministériels,  vient  de  ce  que,  à  la  fin  de  leurs  études,  lorsque  les 
écoliers  de  l'Université  recevaient  le  bonnet  de  docteur,  c'était  pour 
montrer  qu'ils  avaient  acquis  toute  liberté,  et  n'étaient  plus  sujets  à 
la  verge  des  supérieurs  ;  de  même  que  les  Romains  donnaient  le 
bonnet  (de  liberté)  aux  esclaves  qu'ils  atfranchissaient. 

^  Petits-tnaUres.  Jeunes  fats  de  toutes  les  époques  :  la  (leur  des 
pois  des  désœuvrés  du  grand  monde.  Espèce  neutre  :  ni  hommes, 
ni  femmes,,  ni  auvergnats. 

Le  prince  de  Condé  avait  une  sorte  de  cour,  qui,  réunie  à  celles 
du  prince  de  Conti  et  du  duc  de  Longueville,  forma  contre  le 
cardinal Mazarin  le  parti  qu'on  appela  «  des  Petits-maîtres  »,  parce 
qu'ils  voulaient  renverser  le  ministre  et  s'emparer  du  gouvernement. 
(Voltaire.) 

Ce  nom  est  resté  aux  jeunes  fats,  et  s'est  même  étendu  jusqu'aux 
femmes  capricieuses  et  vaines,  qu'on  appelle  «  petites-maîtresses  ». 

—  Il  est  curieux  d'examiner  la  succession  des  noms  exprimant  la 
même  idée  depuis  plusieurs  siècles. 

Du  temps  de  la  Chevalerie,  il  y  avait  les  preu-x.  Leur  règne  a 
duré  aussi  longtemps  que  l'honneur  a  dominé  en  France. 


■10  MAI 

Sons  FiMiirois  I''"",  on  voit  hi?,)niif/i/pfs  :  les  ra/'/iruia  el  les  ni/'r/nons 
sous  Cliarlos  IX  ot  Honri  III. 

Sons  Louis  XIII.  ils  s';i|i|i<'lleiit  /ip/ifs-mof/res  :  l:i  Fronde  iinciito 
pour  les  désigner,  le  nom  i\' imporlaiils. 

Le  règne  de  Louis  XIV  amène  {^smarquis,  si  moqués  par  Molière, 
et  qui  furent  remplar(''S  par  les  rour/isf/ns. 

La  Régence  eul  les  roués:  Louis  XV,  les  f/ois  du  hrl  tnr: 
Louis  XVI,  les  freluquets. 

La  Révolution  créa  les  incroi/dhh's.  les  tnxscadins.  la  Jeunesse 
dorée. 

Le  Consulat  vit  les  mcrreilleux  :  l'Empire,  les  ftishionubles  :  la 
Restauration,  les  daudi/s,  les  élégatits,  les  fjnndins. 

Nous  avons  (18()0)  \v^  petits  crevés. 

Les  lions  ont  fort  luultiplié,  et  nous  avons  aussi  des  lionnes 
depuis  que  Musset  a  dit  : 

C'csl  ma  iiiailressi",  ma  lioiiiio... 

Les  deux  sexes  se  font  fort  remarquer  par  la  reclierclie  de  leur 
toilette,  et  la  singidai'ité,  pour  ne  pas  dire  le  sans-gène,  de  leurs 
liahitudes.  Les  lions  et  les  gandins  sont  donc  les  descendants  des 
preux!  Vous  en  seriez-vous  douté  ? 

La  passion  toute  féminine  des  petits-maîtres  pour  les  parfums  et 
les  pommades  explique  les  noms  de  marjolet,  de  mirliflor.  de 
nuKjuet,  de  miiseadin.  de  narcisse,  qu'on  leur  applique. 

De  là  aussi  l'acception  de  vaniteux  donné  au  moi  puant. 

—  Maître  d'études  :  pion,  chien  de  cour. 

—  Maître-Jacques  :  domestique  de  campagne  propre  à  tout  faire. 
Tripoteur  d'atîaires. 

~  Jurer  sur  la  parole  du  maître  : 

...Jurare  in  verba  in(i(/islri. 

(Horace.) 

—  Le  commencement  du  talent  est  le  respect  des  maîtres. 

—  Cliarhonnier  est  maître  chez  lui.  (Voy.  charbonnier.) 

—  Tel  maître,  tel  valet.  Diynus  domino  servus.  (Plante.) 

Maîtresse,  dérivé  de  niait re. 

Amante,  ainsi  dite  de  l'empire  quelle  exerce  sur  celui  qui  laime. 

Liberlas  qunniain  nnlli  juni  rcslal  oiiinnli, 
XhIIus  liber  rrit,  -s/  (jiils  (imarc  volet. 

(l'iiUl'KUCE.) 

Maîtrise,  dérivé  de  maiire. 


MAL  II 

Qiinlilé  dp  niaîtro  dnns  los  jmcienncs  corporations  de  nu'-liors.  On 
no  rolitonait  que  i)ar  un  concours.  Les  maîtres  veillaient,  dans 
chaque  corporation,  à  lexécution  des  règlements,  jugeaient  les 
dilVérends.  etc. 

—  Maîtrises  et  jurandes.  Lr  iiiailre,  ou  ,uarde,  était  un  ol'licier 
cliarué  de  réprimer  les  a  luis  (|ni  se  commettaient  dans  les  corpora- 
tions de  marchands:  le  juré  exerçait  le  même  office  à  l'égard  des 
cor|mralions  d'ouN  riers. 

lYlajesté,  du  latin  iiuijcsidlcm.  de  //iaJoi\ 

Sancli-isima  ilicitidrum 

Majcilds... 

(.IiiVKNAL,  Satire  I,  lli.) 

—  Gondemar,  roi  des  Visigoths,  qui  régnait  en  Espagne,  vers 
(310,  est  le  plus  ancien  souverain  qui  ait  pris  le  nom  de  Majesté. 

Il  a  été  donné  aux  rois  de  France  par  ordonnance  de  Henri  II, 
du  ()  mai  lo48.  Auparavant,  le  titre  usité  était  Altesse,  Excellence. 

lYlajolique,  ou  mnioluiue.  de  inajoUca,  pour  mnjovica,  de 
Majortiuc. 

Faïence  imitée  de  celle  qu'on  lahriiiuait  à  Majorque,  d'après  les 
procédés  arabes.  Elle  est  à  fond  uniforme  d'un  émail  stannifère 
hlanc.  dur,  opaque,  sur  lequel  sont  peints  des  sujets. 

IVIajor  de  table  d'hôte.  Espèce  de  chevalier  d'industrie,  se  don- 
nant des  allures  militaires,  portant  un  grade,  des  titres,  des 
décorations  qui  ne  lui  ont  jamais  appartenu.  (L.  Larchey.) 

Majorât,  du  latin  majornlum:  de  major,  aîné. 

Titre  inaliénable  de  propriété  immobilière,  attaché  à  la  posses- 
sion d"un  titre  de  noblesse,  et  qui  passe  avec  lui  à  l'héritier  mâle 
du  titulaire. 

Mal,  du  latin  inaluni  et  maie. 

Mahim  signifie  aussi  pomme  :  c'est  de  la  pomme  qu'est  venu  le 
malheur  du  genre  humain. 

En  provençal  tnau.,  qui  se  retrouve  dans  :  maudit,  Jiiauvietle 
{malam,  avem),  oiseau  malfaisant  ;  maussade. 

Maf  se  dit  quelquefois  i)Our  maladie  :  mal  caduc  :  tomber  du 
haut  mal  (nom  ancien  de  l'épilepsie).  Rabelais  {Prol.  lir.  II)  l'appelle 
mau  de  terre,  parce  qu'il  jette  à  terre. 

—  Mal  de  tète  veut  dormir  ou  paître.  Ce  proverbe,  inventé  sans 
doute  par  un  gourmand,  ne  doit  être  accepté  que  sous  réserve  ; 


12  MAL 

("ir  si  r.il)Slin('iico  poiil  qiiolfiiicfois  ciiiiser  le  rii;il  do  tcHo,  il  iirrive 
plus  souvent  qu'il  est  dû  ;'i  des  e-inharnis  piistrifjues,  et.  d;ins  ce 
(•;is,  la  diète  est  le  seul  remède  eflicace. 

—  Mal  d'aulrui  ne  nous  touche  qu'à  demi.  —  Ou  n'est  i)as 
insensible  au  niallieur  de  ses  amis,  mais  le  jnal  qui  nous  an-iveà 
nous-mêmes,  nous  aiïecte  bien  davantage. 

—  Le  mal  est  i)resqi)e  loujours  suivi  de  son  correctif  :  c'est  ainsi 
que  la  fatuité  ius[)ire  la  risée  ;  limpudeuce.  le  mépris  :  l'audace,  le 
dégoût;  le  charlatanisme,  la  défiance  et  l'incrédulité. 

Malade,  du  grec  malnhos,  mou(?):  ou  bien  pbi!(it  de  uinle 
(iplLim,  mal  disposé  :  jadis  malajife. 

0  es  maliiptes,  o  allre  prc  ta  les. 

{Piii'-mp  de  liotcK.) 

(Ou  il  est  malade,  ou  un  autre  le  tient  prisonnier.) 
Provençal  nialaout. 


Pcr  son  joi  pot  iniihiid:  (jitrrir. 

(Par  sa  grâce  elle  peut  guérir  les  malades.) 

Per  (jtierir  innicuilia  de  peccal. 


(Le  comte  L'F.  l'orntiis.) 


[Vices  et  Vertus,  f"  79.) 


(Pour  guérii'  la  maladie  du  péché.) 

—  Bien  malade  qui  en  meurt.  Quelqu'un  dit  à  une  paysanne,  qu'il 
n'avait  pas  vue  depuis  longtemps  :  «  Ali  !  mon  Dieu,  ma  l)onn6 
femme  !  je  vous  croyais  morte.  —  C'est  ma  sœur  qui  est  morte, 
répondit-elle  ;  mais  c'est  moi  qui  ai  été  la  plus  malade.  » 

Maladie,  dérivé  du  précédent. 

—  Les  maladies  viennent  à  cheval  et  s'en  retournent  à  pied. 
Les  maladies  sont,  en  elîet,  très  lentes  à  guérir  ;  mais  on  est 

souvent  prévenu  de  leur  arrivée  par  des  symptômes  qui  permettent 
de  les  combattre  et  de  les  écarter.  Il  en  est  de  même  de  nos 
alïections  morales,  auxquelles  notre  raison  doit  résister,  pour  les 
empêcher  de  nous  subjuguer. 

Princijjiis  nlislti  :  scro  mcdieina  paratur, 
(jnn  main  ]icr  lonijiis  invalnere  7noras. 

(Oviiii:.) 

(Combattez  les  premières  atteintes  :  il  est  trop  tard  de  remédier 
au  mal,  quand  il  s'est  fortifié  longtemps.) 
Facilius  cadinitis  quam  resurcjunus. 
La  vie  n'a  qu'une  porte,  et  la  mort  en  a  mille. 


MAL  13 

Malgré,  mot  ('oni|»os(''  do  f/ra/m/i.  piV'.  Provoiu;;il  fjfaf.  (Kinidar 
(plaire). 

iMluivniit  à  :  do  iiiiiiivais  .uiv. 

On  a  dit  aussi  maufjré,  qui  se  retrouNe  dans  DKiiujvi'cr. 

C'est  Estrade,  qui  s'est  fait  connestaiile  du  roy  Fraiiçovs  uiau.trré 
lui.  (D'Aubiané.) 

—  iMdiKjrchieu,  pour  :  malgré  Dieu.  Kn  provençal  tnfUKjvahuou. 
On  disait  aussi,  dans  le  sens  opposé  :  <iu  (jr il  Dieu,  c'est-à-dire  à 

la  volonlé  de  Dieu  ! 

Malheur,  du  latin  malam  horam  (f).  Ou  plutôt  de  mal  et  heirr 
{niujuriinn)  :  anciennement  etir,  opposé  à  bonheur. 

—  Le  malheur  produit  sur  l'âme  le  même  elîet  que  le  feu  sur 
l'encens,  dont  on  ne  connaîtrait  pas  le  parfum,  si  la  llamme  ne  le 
dégageait. 

La  myrrhe  ne  coule  que  par  les  incisions  faites  à  l'arhre  qui  la 
produit. 

Du  raisin  éc-rasé  sous  le  pressoir,  jaillit  la  liqueur  qui  réjouit  le 
cteur  de  l'homme. 

La  pluie,  qui  attriste  la  nature,  féconde  la  terre  et  fait  naître  les 
fleurs  et  les  fruits. 

—  A  quelque  chose  malheur  est  bon. 

Les  livres  saints  ont  appelé  le  malheur  «  un  trésor  de  miséri- 
corde céleste  »,  parce  qu'il  ramène  l'homme  à  la  vertu  :  Misère 
humaine  à  Dieu  ramène. 

Heureux  ceux  qui  pleurent.  (Mathieu,  Y,  4.) 

Res  sacra  miser.  (Sénèque.) 

Le  malheur,  loin  de  dégrader  l'homme,  l'élève,  s'il  n'est  pas  un 
lâche.  (Silvio  Pellico.) 

Dans  le  malheur,  l'âme  égarée  se  retire  en  elle-même,  s'assied 
toute  pensive,  et  admet  en  silence  la  salubrité  des  réflexions. 
(Sterne.) 

Pour  un  liomme  énergique,  les  grandes  douleurs  et  les  grandes 
joies  sont  comme  de  hautes  montagnes,  d'où  il  découvre  le  cours 
de  la  vie.  (J.-P.  Richter.) 

La  coupe  de  la  vie  serait  douce  jusqu'à  la  fadeur,  s'il  n'y  tombait 
quelques  larmes  amères.  (Pythagore.) 

Ces  idées,  en  apparence  paradoxales,  sur  le  malheur,  ont  été 
empruntées  par  le  Christ  à  la  morale  de  l'antiquité.  Les  dieux 
indulgents  du  paganisme  étaient  les  dieux  de  l'homme  heureux  : 
pas  un  pli  sur  leur  front,  pas  une  ride  de  tristesse  sur  leur  physio- 


Vt  MAL 

iiomif.  ()i',(Oiix  qui  soiilTiciil  nciiIciiI  (|ii('  Inirs  di(MJ\  S(iiiHV('iit  usée 
eux:  loi  est  le  secret  du  (li\iii  |);ir;i(l(t\('  (le  rKvanf{ile  :  «Heureux 
roux  qui  ]ilouroiit  !  «  M;iis  los  liiMuds  nioriilisle.s  païous  avniont 
préparé  los  voies  du  (llii-ist  bien  avaut  sa  venue.  Socralo,  Pvtlia^oro. 
IMaton,  avaient  déjà  disposé  le  clianip  qui  devait  recevoir  la  houno 
soinence  ;  et  Viraile  avait  mis  dans  la  houclic  de  Didon  ce  \oi's,  (pii 
est  devenu  la  devise  des  âmes  S(;nsililes  : 

lldud  ù/iuird  tmili,  uilseris  succurrere  lUsrn. 

[Knriih.  11.  IVV.) 

MylliC'iirciisc,  j'iipijris  il  |il;iiii(ln'  le  luylliiMir. 

(Cil.Iii  hi.l  ' 

Delillc  a  reproduit  littéralement  dans  sa  traduction  : 
Je  connais  lo  malliour,  cl  j'y  sais  compatir. 

Ali  !  qui  vorsa  des  pleurs  treuililc  d'en  voir  couler, 
lit,  plus  on  a  souffert,  mieuv  on  sait  consoler. 

(Du  BKl.i.nv.) 

A  raconter  ses  maux  souvent  on  les  soulage. 

(Cohnkii.i.k',  Pohjeiifip.  I,  3.) 

Charles  Nodier  a  dit  :  «  Les  mallieiireiix  aiment  mieux  »  :  et 
Déranger  :  «  Le  plaisir  rend  l'âme  si  honne  !  » 

Ce  n'est  pas  le  plaisir  qni  rend  l'âme  bonne,  comme  font  dit. 
après  Béranger,  les  dévots  de  la  matière  ;  ce  qui  rend  lame  honne, 
c'est  la  douleur.  On  est  hon,  il  est  vrai,  tant  qu'on  est  sous  le 
charme  d'une  joie  nouvelle:  mais  l'hahitude  du  honheur  n'est  pas 
l'école  de  la  charité.  Le  malheur,  au  contraire,  rend  hon  et  compa- 
tissant, développe  la  vertu  et  rintelligeuce. 

Vexât io  dat  intolJectum.  (Isaïe,  XXVIII,  19.) 

Inijeniam  mnld  ■so'pe  movent. 

(OVIDR.) 

Mathêmata,  path(}mata.  (Les  malheurs  sont  des  leçons.) 

—  Presque  toutes  les  hiographies  des  grands  artistes  commencent 
par  ces  mots  :  «  Né  de  parents  pauvres...  »  La  gène  et  les  priva- 
tions semhlent  nécessaires  pour  féconder  le  génie. 

C'était  du  moins  l'avis  de  Charles  IX,  qui  disait  :  «  Les  artistes 
ressemhlent  aux  chevaux,  qui  deviennent  mous  dans  la  trop  grande 
ahondance  :  il  faut  les  nourrir,  mais  non  les  engraisser.  » 

Poussin  dit  à  un  gentilhomme  qui  lui  montrait  un  tableau  de  sa 
composition  :  «  Il  ne  vous  manque.  Monseigneur,  pour  devenir  un 
grand  artiste,  qu'un  peu  de  pauvreté.  » 

J'eus  le  malheur  pour  maître,  il  ma  beaucoup  appris. 

(Traduit  de  CoNFfcirs.) 


MAL  1') 

—  Les  K.iiyplioiis  ont  rc'itrésenté  Mercure  (la  raison)  arracliani 
les  nerfs  à  Typhon  (le  mal),  pour  en  faire  les  cordes  de  sa  lyic 
divine. 

—  Les  iniif()i'niistt!S  de  Konie  ont  pris  pour  eniblèine  un  fei'  Itatln 
par  un  inartcaii.  siii'  une  enclnnie,  avec  ces  mots  : 

...hll  iliiiit  rnliirrii  furinnm 

pour  signifier  que  le  malheur  fortifie  Tàme,  la  façonne. 

—  Le  malheur  rend  hon,  dit  rÉcriture;  mais  la  misère  mène 
souvent  à  l'incoiidiiite. 

—  l'n  malheur  ne  vient  jamais  seul. 

l'n  iiialhiiir  loiijiMii's  Iniiin'  un  iiiallieui"  après  soi. 

(Piisox,  (luxtnve.\ 

Aliiid  ex  (ilio  maliuii. 

('l'KriFNCK.) 

—  C'est  un  petit  malheur  :  je  ne  le  regrette  pas  heaiicoup. 
Malheur  d'autrui  ue  déplait  rpi'à  demi. 

Malheureux,  dérivé  du  précédent. 
Malheureux  comme  les  pierres. 

Mes  maux  suffiraient  à  faire  plusieurs  miséral)les  ;  comme  mou 
malheur  est  sans  remède,  ma  douleur  est  sans  consolations. 

—  La  consolation  des  malheureux,  est  d'avoir  des  seml)Ial)les. 
Le  coeur  humain  est  ainsi  fait,  qu'il  se  réjouit  parfois  moins  d'un 

honheur  qui  lui  arrive,  que  de  l'infortune  qui  frappe  le  voisin.  Cette 
triste  vérité  porte  à  croire  que  l'espèce  humaine  w  été  appelée  ainsi 
par  antiphrase.  11  est  plus  consolant  de  penser  que  c'est  par  un 
sentiment  instinctif  que  nous  applaudissons  au  malheur,  comme 
ser\ant  de  haume  apjdiqué  par  la  Providence  sur  les  plaies  de 
l'orgueil  humain. 

Quand  La  Rochefoucauld  dit  •:  «  Nous  avons  tous  assez  de  force 
pour  supporter  les  maux  d'autrui  «^  il  paraît  supposer,  en  pessi- 
miste qu'il  est,  que  dans  ce  sentiment  il  y  a  d'abord  le  retour  sur 
soi-même,  et  aussi  l'attrait  d'une  curiosité  malsaine... 

Lenis  est  consolatio  ex  miseriis  aliorum.  (Cicéron.) 

—  Je  suis  le  plus  malheureux  des  hommes  !  Locution  hyperbo- 
lique, si  l'on  veut  bien  regarder  au-dessous  de  soi. 

—  Pour  se  consoler  de  tout  ce  qu'on  soutTre,  il  faut  songer  à  tout 
ce  qu'on  ne  soulïre  pas.  (Clairon.) 

—  Toutes  les  fois  que  j'éprouve  le  besoin  de  me  plaindre,  je 
pense  à  la  dure  existence  des  cochers  d'omnibus,  dont  la  journée, 


IC.  MAL 

passée  cnlrc  r'n'\  cX  lerro,  diirt^  (h;  s<',[)l  lifiiiT'S  ;'i  iiiiiiiiit,  ...cA  j<} 
l'ciifoiico  ma  [ilainto. 

IVIalitorne,  du  laliii  //i////'  fonu/fm/i. 

Mal  luiinié,  Jiial  l'ail,  mal  Itàli. 

Horace  a  dit,  en  parlant  de  vers  mal  laits  : 

Kl  imilr  lornntos  inciuli  raldurc  rersiis. 

Scarron  se  sert  de  mnlplaisant  dans  le  sens  de  malHornp  : 

11  no  kit  jamais  créature 

De  plus  malplaisante  tournure. 

C'est  le  plus  jirand  malitornc  et  le  plus  sot  dadais.  (Molière.) 

lYlalle,  du  l»as-Iatin  mahi  :  .uermaniqiic  mahaJa. 
Synonymes  :  mademoiselle  Manette  (Vidocq),  jeu  de  mots  sur 
malle  et  manne  (corbeille)  ;  Savoyarde. 

.     lYlalo  (Saint-). 

Il  a  été  à  Saint-Malo,  les  chiens  lui  ont  mangé  les  mollets. 

Vers  le  xi«  siècle  (?)  les  habitants  de  Saint-Servan,  exposés  aux 
attaques  des  pirates,  se  réfugièrent  dans  l'île  d'Aaron,  et  y  fon- 
dèrent une  ville,  qu'ils  nommèrent  Saint-Malo,  du  nom  de  leur 
évèque.  Pour  éviter  d'être  surpris  la  nuit,  ils  lâchaient  autour  des 
remparts  une  troupe  do  chiens,  qui  dévoraient  les  étrangers. 

Albert  le  Grand,  dominicain,  dit  :  «  La  garde  de  Saint-Malo  était 
commise  toute  la  nuit  à  la  fidélité  de  certains  dogues,  qui  faisaient 
bonne  et  sure  patrouille.  » 

Chateaubriand   {Mémoires,  tome  I),  dit  :   «  Ces   chiens   furent 

condamnés  à  la  peine  capitale,  pour  avoir  eu  le  malheur  de  manger 

inconsidérément  les  jambes  à  un  gentilhomme,  ce  qui  donna  lieu  à 

la  chanson  : 

Bon  voyage,  monsieur  Dumollel... 

On  se  moque  de  tout.  » 

—  Le  couplet  final  du  vaudeville  de  Désaugiers  :  le  Départ  pour 

SatiU-iMalo.  joué  en  1809,  au  théâtre  des  Variétés,  par  Brunet,  est 

resté  très  populaire  : 

Bon  voyage, 

Monsieur  Duniollet, 

A  Saint-Malo,  déiianiuez  sans  naufrage  ; 

Bon  voyage, 

Monsieur  Duniollet, 

Et  revenez  si  le  pays  vous  plaît. 

Ce  Dumollet  est,  dans  la  pièce  de  Désaugiers,  une  sorte  de 
Pourceaugnac,  de  prétendant  niais,  que  l'on  éconduit  après  force 


MAN  17 

iii\stili(;ilioiis.  Ca'  type  urolesqno.  njouté  à  l;i  ,u;ilcrie  des  Jocrisse 
cl  dos  (];id('l-H()iiss('l.  (Mil  le  plus  ,ur;iiid  succès  ;'i  ct'tto  ôpoipie. 

—  Ce  (pioliliel  siippliipie.  ou  plaisantant,  aux  personnes  dépour- 
vues do  inollols:  uiais  il  nosi  plus  auère  en  usape,  aujourd'hui 
(pion  110  porto  plus  do  ciilollos  coiirtos.  et  (pie  U'  port  du  pantalon 
(lissiuiulo  lo  |ihis  ou  moins  (rouihoupoiut  do  la  janihe. 

lYlalotru,  du  lalin  /iki/p  ins/nir/us.  (Ménage.)  Ou  |)liil()t  do  ma/ 
et  de  asfrc.  coniine  rin(li((iient  l'ancienne  forme  t/ialas(ru,  et  le 
proven('al  fnalas(re,uè  sous  nnc  mauvaise  étoile.  (F.  Génin.) 

Asfria-,  en  provençal,  signifie  qui  a  les  astres  favorables. 

A  l'origine,  malotru  n'emporte  rpie  l'idée  de  mallieui'eux  digne 

do  compassion  ;  mais,  d(''s  le  xiv  siècle,  il  est  pris  comme  injure, 

par  suite  de  la  tendance  déplorable  que  nous  avons  à  passer  de  la 

jiilié  au  mépris. 

Collo-ci  lit  un  choiv  ((u'oii  n'aïu'ail  jamais  cru, 

So  trouvant  à  la  lin  loni  aise  et  tout  Ihmivouso 

De  renconlrci'  un  malotru. 

(La   F(l^rAl^•E,  la  Fille.) 

lYlaltôte,  du  latin  harhare  mala  tolla.  maudite  taille.  D'où 
uialtàlicr. 

lYlamamouchi^  mot  forgé  plaisamment  par  Molière,  dans  le 
Boarijcois  f/enfi//ioi/uiie.  Ce  mot  n'appartient  à  aucune  langue: 
)nais  on  s'en  est  servi  depuis  pour  désigner  un'  homme  bizarrement 
accoutré. 

Mamelle,  du  latin  aiainillam.  Diminutif  do  mammam  :  d'où 
maman  {'.),  l'omau  papa. 

A'nlha  nutra  hcstia  lia  popai^  cf  P'C!/-'',  •^'''^  liomfi  fil  éléphanl. 
[Elucida ri  de  las  proprielas,  f°  oO.) 

Nulle  autre  béte  n'a  les  mamelles  à  la  poitrine,  sinon  homme  et 
éléphant. 

Manant,  du  latin  manenlem,  qui  demeure.  Anciennement 
manent.  domicilié,  riche  (?). 

Le  sens  premier  s'est  altéré,  et  le  mot  en  est  venu  à  signifier  un 
campagnard,  un  vilain,  un  homme  grossier. 

Au  mémo  radical  se  rattachent:  manoir,  ménage,  mesnie,  mesnil. 

De  (letil  l'a  mis  au  grant, 
El  (ic  povri;  l'a  lait  manant. 

(Roman  de  In  Rose,  vers  2,858.) 

Même  mésaventure  est  arrivée  à  paij.uui  et  à  rilain,  qui  signi- 
fiaient habitant  du  pays  ou  de  la  métairie. 


48  M  AN 

lYlanceau,  dérivé  du  Mîins.  nom  ,t:éo,Lrr;ii)liiqii('. 

Tu  M.iiiccMii  vjiiit  un  Xor-ni;in(l  cl  demi,  (^elle  locution,  qui 
ressenddc  ;i  une  siiliro,  s'est  éluhlie  sur  ce  que  les  monnaies  du 
Miiine  valaienl  mollit''  plus  (|ut'  c(;iles  de  Normandie. 

Manche,  lalin  numirain.  de  mnnus.  main. 
1"  Partie  du  V(Menient  (jui  enveloppe  le  bras. 
2°  Partie  d'un  iuslrumml  par  laqueli(!  on  le  saisit  (piaud  rm  veut 
s'en  servir.  S'apptdie  luunpc,  quand  il  s'ai^it  d'une  lance. 

—  Au  temps  où  l'on  se  mouchait  sur  sa  inanciie...,  c'est-à-dire 
au  temps  jadis,  quand  on  était  très  simple. 

Il  paraît  qu'on  portait  autrefois  un  mouchoir  sur  la  manche,  pour 
se  moucher  ou  pour  s'essuyer  le  visa.ae. 

La  pièce  du  costume  ecclésiastique  qu'on  appelle  audarimn,  ou 
manipulum ,  mappuhi,  en  français  fanon,  manipule,  en  est  une 
preuve.  C'était  un  linge  que  les  prêtres  (à  l'autel)  portaient  pour 
essuyer  les  larmes  qu'ils  versent  pendant  la  consécration,  en  pen- 
sant aux  péchés  du  peuple.  Ils  récitent,  en  revêtant  cet  ornement, 
la  prière  suivante  :  Merear,  Domine,  portave  manipulum  fletiis 
et  do  loris. 

—  Se  faire  tirer  la  manche  :  se  faire  prier. 

Les  Latins  disaient  :  scindere  pœnulam.  Déchirer  le  manteau, 
c'est-à-dire  retenir  quelqu'un  par  son  manteau. 

Horum  vix  eijo  attiyi  pœnulam.  (Gicéron.)  Je  les  ai  à  peine 
engagés  à  rester. 

—  Jeter  le  manche  après  la  cognée  :  désespérer  trop  vite, 
abandonner  une  a  Claire.  (Rabelais.  Prol.  liv.  IV.) 

Manchot,  vieux  français  manc,  du  lalin  mancum. 
Il  n'est  pas  manchot  :  il  a  de  l'adresse,  de  la  force. 
Non  manci  fuere  milites.  (Tite-Live,  VIII,  31.) 

Mandarin,  du  portugais  mandar.  corruption  du  sanscrit  man- 
trim,  conseiller. 

Nom  des  lettrés  de  la  Chine,  parmi  lesquels  sont  choisis  les 
employés  de  l'État.  Ce  sont  les  fonctionnaires  de  l'ordre  administratif 
et  judiciaire.  Ils  forment  dix-liuit  classes  et  sont  plus  de  cent  mille. 

J.-J.  Rousseau  dit  :  «  S'il  suffisait,  pour  devenir  le  riche  héritier 
d'un  homme  qu'on  n'aurait  jamais  vu,  dont  on  n'aurait  jamais 
entendu  parler,  et  qui  habiterait  le  fin  fond  de  la  Chine,  de  presser 
sur  un  bouton  pour  le  faire  mourir,  ...qui  de  nous  presserait  sur  ce 
bouton  ?  )) 


MAN  19 

Mangeoire,  dérivé  do  t/iaiif/er. 

Toiinifr  le  cul  ,'i  I;i  iii;iii,ueoirc  :  refuser  les  moyens  de  gagner 
s;i  vie. 

In  cluirhiliin.  ;'i  In  foire,  annonçait  (pi'il  faisait  voir  un  cheval  qui 
a\;iit  la  tète  où  les  autres  avaient  la  quene.  C'était  un  cheval  qu'il 
iivait  attaché  à  la  mangeoire  par  la  queue. 

Manger,  anciennement  manyier.  du  latin  manducore. 

Synonymes  :  jouer  de  la  mâchoire,  boulier,  boustifailler  (trivial), 
gobichonner,  branler  le  menton  :  cotonner  le  moule  de  son  pour- 
point (Rabelais)  :  s'en  donner  jusqu'à  la  garde,  faire  bombance, 
faii'e  ripaille. 

—  Oli  !  lu  seras  ainsi  tenu  pour  un  {loltron. 

—  Suit.  poiirMi  (|ni'  toujours  je  liranlc  le  mouton. 

|M<ilih;k,    Di'fiit,  v,  1.) 

—  Manger  avidement,  boutVer,  bâfrer,  bauffrer  :  Après  les  pre- 
mières baiilTreures.  (Rabelais.) 

.Manger  comme  un  ogre. 

—  Manger  peu  :  du  hout  des  dents.  Dente  supcrho  (Horace)  : 
d'une  dent  dédaigneuse,  pour  peindre  le  dédain  avec  lequel  le  rat 
de  ville  goûtait  au  repas  du  rat  des  champs. 

—  Manger  comme  un  oiseau,  l/oiseau  ne  mange  qu'un  grain  à 
la  fois  ;  mais  ces  giains  se  succèdent  sans  interruption  toute  la 
journée.  Tout  en  mangeant  peu  à  la  fois,  les  oiseaux  consomment 
plus  que  les  mammifères. 

—  Le  public  se  rue  sur  les  buliets  avec  un  empressement  qui 
ra|)pelle  les  navrants  épisodes  du  naufrage  de  la  3Iéduse. 

(lu la  p/ui'cs  qufDii  (jhKJlnx  porbnli  :  l'intempérance  tue  plus 
de  gens  que  l'épée. 

—  Depuis  Milon  de  Crotone.  qui  assommait  un  l)œuf  d'un  coup 
de  poing  et  le  mangeait  tout  entier,  il  n'y  a  point  eu  peut-être  de 
plus  gros  mangeur  qu'un  Saxon,  qui  dévorait  tout  ce  qu'on  lui 
présentait  :  un  mouton,  un  veau,  un  cocbon,  deux  boisseaux  de 
cerises  avec  leurs  noyaux,  etc.  Il  vint  à  bout,  un  jour,  d'avaler  une 
éci'itoire.  les  plumes,  l'encre  et  le  sable.  Des  témoins  ont  afllrmé  le 
fait  devant  le  Sénat  de  Wirtemberg. 

L'histoire  de  cet  ogre  a  été  publiée,  au  xviif-  siècle,  sous  ce  titre  : 
De  pobjpJuKjo  Wirteinberfjen>ii  disserlatlo. 

—  Les  Grecs  et  les  Romains  ne  mangeaient  qu'une  fois  par 
jour  ;  ne  faisaient  qu'un  grand  repas. 

Les  Gotbs  ont  introduit  l'usage  de  deux  repas. 


20  MAN 

—  Tout  It'  iiioiidc  iiiiuij:»'.  riioiiiiiic  d'cspi-il  seul  s;iil  iiKiii.ucr. 
(Brillât-Savarin.) 

—  Il  faut  nian.tinr'  poiii"  Nivrc  cl  non  |ias  \i\it'  |ii»iir  niaiijrer. 
(Molière,  Aroî-c,  III,  rj.) 

C'est  la  lonniilt'  ('■cononiiiiiic,  et  liygiéniqiie  des  Latins  :  fj/r  ni 
vivas,  ne  vivas  ut  erlas,  (Mionréo  en  abrétié  sons  cette  forme  : 
E.  V.  V.  N.  V.  V.  E.,  et  qu'Harpagon  trouve  si  Itelle  qu'il  la  vent 
faire  graver  en  lettres  d'or  sur  la  clieminée  de  sa  salle  à  manger. 

—  Bourdaloue  disait  à  son  médecin  qu'il  ne  faisait  qu'un  repas 
par  jour.  «  Ne  le  dites  pas,  reprit  le  docteur,  vous  nous  ôteriez 
toutes  nos  pratiques.  « 

Vivilur  pnrvo  bene. 

(UORACF.) 

(On  vit  l)ien  de  peu.) 

...Me  pascimt  olicœ. 
Me  cichorea,  lecesque  malvœ. 

(HonACE,  Odes,  I,  31.) 

(Des  olives,  de  la  cliicorée,  des  herlies  tendres,  voilà  ma  nour- 
riture.) 

—  Qui  veut  vivre  sain,  dîne  peu  et  soupe  moins. 

—  Les  Touaregs,  habitants  du  Gtiat  (désert  du  Sahara),  géants 
très  robustes,  ne  mangent  ordinairement  que  de  deux  jours  l'un. 

—  Manger  à  la  même  écuelle.  Dans  les  festins  du  Moyen-Age, 
chaque  homme  se  trouvait  placé  à  côté  d'une  dame.  Un  seul  couvert 
était  destiné  à  chaque  couple  :  verre,  assiette,  tout  était  commun. 
Cela  s'appelait  «  manger  à  la  même  écuelle  ». 

Et  si  n'y  eut  celuy  qui  n'eust  dame  à  son  escuelle.  (Roman  du 
xiii<'  siècle.) 

Ainsi  aura  chascun  une  mienne  niepce  à  son  escuelle  à  souper. 
{Percef'orest,  vol.  I,  cli.  144.)  Pour  ce  jour,  j'ay  à  ce  manger  mangé 
à  son  escuelle.  (Ch.  suivant.) 

—  Manger  en  commun  est  une  grande  cause  d'intimité.  C'est  la 
satisfaction  en  commun  d'un  besoin  matériel  :  et,  quand  on  y 
cherclie  un  sens  plus  élevée  c'est  une  communion.  (Xo}'.  ami  de 
table.) 

—  Manger  à  plusieurs  râteliers  :  tirer  profit  de  plusieurs  emplois. 
Il  y  a  des  gens  qui,  moins  embarrassés  que  l'àne  de  Buridan, 
mangent  à  deux  ràtehers,  et  s'en  trouvent  bien. 

—  Manger  son  blé  en  herbe  :  dépenser  d'avance  son  revenu. 
Achetant  cher,  vendant  à  bon  marché,  et  mangeant  son  blé  en 

herbe.  (Molière,  Arat^e,  H,  1.) 


MAN  21 

Molièro  a  oinpnintô  ce  passage  à  Rabelais  fliv.  III,  2). 
Les  Latins  ilisaieiit  •.Boniini  suinn  rona)fiuere{Vè[Yowç:.)  Ebibere 
rem  (Horace.)  Decorare  pecunia/n  (Cicéroii.) 

Do  grand  train,  —  sur  l'eslrain  (la  paille). 
.•\  trraïKk'  ciiisiiK',  —  pauvreté  voisine. 

Trou  trop  soineut  ouvei't  sous  le  nez,  fait  porter  souliers 
décJiirés. 

On  apprend  plut(U  à  nianuer  son  i)ain  qu'à  le  gagner.  (Proverl)e 
russe.) 

—  ÂNoir  mangé  son  pain  blanc  le  premier:  avoir  été  plus 
benreux  qu'on  ne  l'est. 

—  Gbapon  de  buit  mois,  manger  de  roi. 

—  Il  me  mange  dans  la  main  :  il  est  trop  familier. 

—  La  vie  est  attelée  à  deux  mauvais  cbevaux  :  le  Ijoire  et  le 
manger. 

—  Manger  s'emploie  aussi  poui'  mar((uer  le  désir,  l'affection  : 
manger  de  caresses,  manger  des  yeux. 

On  dit  aussi  :  jolie  à  croquer. 

Mangeur,  dérivé  du  précédent. 

(irand  mangeur  :  glouton,  goinfre,  gouliafre,  grandgosier,  ogre. 
Autrefois  :  fripe-lipe. 

D'un  grand  mangeur  on  dit  qu'il  a  toujours  dix  aunes  de  boyaux 
vides. 

Il  a  la  maladie  du  renard,  qui  mange  une  poule  et  un  canard. 
Il  avalerait  la  marmite  des  cordeliers. 

Manichéisme,  mot  bistorique,  doctrine  de  Manès. 
Hérésie  du  m*'  siècle,   qui  admettait  deux  principes  opposés  : 
celui  du  bien  et  celui  du  mal  ;  la  lumière  et  les  ténèbres. 

Manie,  du  grec  mania,  folie,  égarement  d'esprit  :  d'où  maniaque. 
Synonymes  :  dada,  marotte,  tic,  toquade. 
En  grec,  mainesthai  sianifie  être  en  fureur. 

—  Une  manie  occupe  comme  une  passion,  et  n'en  a  pas  les  tour- 
ments. 

Manière,  du  latin  maniim. 

Le  vieux  français  avait  l'adjectif  manier,  qui  a  la  main  babile. 
A  donné  l'adjectif  maniéré,  plein  de  manières,  d'affectation. 
Être  maniéré,  faire  des  grâces,  poser.  Se  dit  d'une  personne  qui 


22  M  AN 

force  son  tiilciil,  (•oiiiiue  rfiiic  de  l;i   lahlc  <>r.  r;iHf(i;iiiiiii  est   In 
caricature  du  naturel. 

Manigance,  du  l;iliii  nuinira.  inaiiclic  (IJicz).  La  iii;iiicli<'  est 
très  utile  aii\  faiseurs  de  tours. 

Quelques-uns  le  font  venir  de ///y//(.7o///--o,  nwKjnignouner,  fardi-r  : 
de  maii(/(>,  uiarcliaud  d'esclaves,  ayant  riuihitude  de  les  farder,  di' 
dissimuler  leurs  défauts. 

IntriLiiie,  tromperie. 

Le  nui  là  ne  se  doute  pas  de  la  inaniuance.  (Molière,  Gcorijcs 
Dandin.) 

lYlanique,  du  latin  mnniram,  mitaine. 

Morceau  de  cuir  dont  les  cordonniers  se  iiarnissenl  la  |)aiune  de 
la  main  poui'  ne  pas  se  blesser. 
Parler  uiani([ue.  Parler  de  ce  qui  concerne  sa  profession. 

Tractant  fal)rilia  faliri. 

(HoilACE.) 

(Chacun  parle  de  son  métier.) 

Manne,  de  l'hébreu  nuin. 

Manna  dans  l'Évangile  :  Manducaverunt  patres  vestri  manna. 

Nourriture  que  Dieu  donna  aux  Israélites  dans  le  désert,  [)endant 
quarante  ans.  C'était  un  petit  grain  blanc  et  arrondi,  qui  tombait 
tous  les  matins,  excepté  le  jour  du  sabbat.  i^Exode  XYI,  4  : 
Psamnes  LXXVII,  15.) 

—  La  manne  est  une  substance  mielleuse,  qui  se  produit  encore 
au  Sinaï,  et  que  les  moines  mangent.  Selon  Bertholet,  elle  serait 
due  à  la  piqûre  d'un  insecte  sur  les  feuilles  du  tamaris  mannif'era. 
L'analyse,  faite  par  Bertholet,  a  donné  :  oo  de  sucre  de  canne, 
25  de  sucre  interverti,  20  de  dextrine. 

—  La  manne  céleste  :  la  parole  de  Dieu  (terme  mystique). 

Manquer,  du  latin  m  an  eu  m,  manchot. 

Se  dit  absolument,  dans  le  sens  de  :  faire  faillite. 

Dans  les  autres  cas,  manquer  est  toujours  accompagné  d'un 
complément. 

Bilboquet.  Bref,  Cabochard  est  en  déconliture  :  il  a  manqué.  — 
Atala.  De  combien  manque-t-il  ?  —  Bilbooikt.  Il  manque  de  tout... 
et  le  reste  est  pour  les  créanciers.  {Les  Saltiinbanques.  11,  4.) 

Mansarde,  nom  historique. 

Mansard,  célèbre  architecte  du  xvii«  siècle,  introduisit  ce  senre 


MAN  23 

do  roniltles.  invoiilé  on  Il.ilio.  C'osI  au  Louvre  que  cette  innovation 
fut  nppliquôo  pour  la  prcuiirro  l'ois  par  P.  Lesf'ol. 

Manteau,  du  latin  nuinti'Unm. 

Isidore  de  Sô\illo  dit  :  Mnulollmn  ll'u^jianl  rocdut,  qnod  manus 
tcfjcbdt  tanhun,  es/  cniin  brccis  (unirhis. 
C'était  le  nom  de  la  niante  coui'te  des  Kspaunols. 

Marliii  aiira  mou  grand  manteau 
Oui'  mautc  à  eau  j\'tymo!ogi.sais. 

(S.VHIIAZIX  ?) 

—  Manteau  d'Ai-le(piin.  Draperie  davant-scène,  qui  masque  les 
bords  du  rideau  de  rlKupie  côté  du  théâtre. 

C'est  par  cette  draperie  (pie,  dans  la  comédie  italienne,  Arlequin, 
personnage  principal,  entrait  et  sortait. 

—  Le  manteau  de  l'erreur,  de  la  religion,  de  la  vertu,  de  l'ano- 
nyme, etc. 

Se  couvrir  du  manteau  de  la  vertu  :  cacher  ses  vices  sous  l'appa- 
rence de  la  vertu.  La  même  image  se'troiive  dans  pallier  ses  fautes 
(palliuî/i,  manteau). 

C'est  s'e.xcuser  humhlement,  se  couvrir  du  masque  de  l'humilité, 
comme  font  les  hypocrites. 

Mea  me  lirlute  involvo. 

(IloUACE.) 

(Je  m'enveloppe  de  ma  vertu.) 

Que  l'imposteur  sait  IMen,  de  traîtresse  manière, 
Se  faire  un  beau  manteau  de  tout  ce  qu'on  révère  ! 

(MoLifciiE,   l'art u/fe.) 

Se  draper  dans  le  manteau  de  la  gloire  ou  dans  les  haillons  du 
vice.  (G.  de  Nerval.) 

—  Le  manteau  d'Aiitisthène.  —  Antistliène  était  un  philosophe 
cynique,  qui,  pour  se  distinguer,  portait  un  manteau  troué.  Socrate 
lui  dit  :  «  U  Antistliène,  j'aperçois  ton  orgueil  à  travers  les  trous 
de  ton  manteau.  » 

L'école  cynique  porte  aujourd'hui  le  nom  de  «  Bohême  ».  A  côté 
de  ces  fanfarons  de  la  guenille,  il  y  a  aussi  les  vaniteux,  à  qui  l'on 
pourrait  dire  :  «  Sous  les  plis  de  ton  riche  manteau,  j'aperçois... 
que  tu  n'as  pas...  d'habits.  » 

—  Le  manteau  de  Joseph.  —  Ou  emploie  cette  locution  dans  un 
sens  satirique,  pour  se  moquer  du  chaste  Joseph. 

Un  dit  même  que  la  Putiphar  devait  être  une  femme  hargneuse, 


24  MAQ 

Uirdéc  oi  sur  lo  roloiii' ;  quo,  s'il  on  aviiit  éUi  ;iiilrciiieiil,  le  jeune 
Joseph  se  perdiiit...  et  sauvait  son  manteau. 

—  I.e  nianlOMU  d'Klie  faisait  des  miracles... 

l'Uie  fut  enhué  au  ciel  sur  un  char  lire  par  des  che\an\  d*;  feu. 
à  la  vue  de  son  disciple  Elisée,  à  (pii  il  laissa  son  manteau  pour 
gape  du  don  de  pro[)liéties  et  de  miracles. 

M.  Villemaiu  a  dil,  en  parlant  de  Rernardin  de  Saiul-Pierrc  : 
«  C'était  une  espèce  d'Elisée,  (pii  aNail  reçu  le  manteau  de  .leau- 
Jaccpies.  » 

Maquereau,  du  latin  nuiruldni.  tache. 

1"  Poisson  tacheté. 

2'  Au  llgiiré  et  très  lihrement  :  entremetteur,  proxénète,  soute- 
neur, Monsieur  Alphonse,  Desgrieux  de  has  étage,  Mercure  galant. 

A  son  féminin  maquerelle. 

Dans  ce  sens  ligure,  le  mol  semble  venir  du  llamand  nxdkeUuir. 
de  mockciK  trallquer. 

Maquignon,  anciennement  maquillon.  A  la  même  oriuine  que 
maquereau  (?). 

Se  rapproche  de  maquUlnye,  à  cause  des  ruses  employées  par 
les  maquignons  pour  dissimuler  les  défauts  des  chevaux  qu'ils 
mettent  en  vente. 

Maquillage,  de  fnacuia?n(^.),  tache. 

Peut-être  faut-il  chercher  l'étymologie  à  la  même  source  que 
pour  maquignon  ? 

—  Se  maquiller,  c'est  se  farder  avec  force  carmin,  hlanc  de 
perle  ou  poudre  de  riz  :  se  faire  des  grains  de  beauté  avec  une 
épingle  rougie  au  feu  ;  s'agrandir  démesurément  les  yeux  avec  du 
Itouchon  brûlé  ;  se  carminer  les  lèvres  avec  du  rouge  liquide. 

Four  rt'parer  dos  ans  rirréparable  outrage. 

(Racine.) 

De  cette  manière,  on  arrive  à  faire  illusion  aux  hommes  peu 

clairvoyants. 

On  trouve  dans  Gaultier  de  Coincy.  poète  du  xiii"  siècle,  les  vers 

suivants  : 

Telle  se  faiçt  nioull  remanier 
Par  senblanchir,  par  se  farder, 
Que  plus  est  laide  et  plus  est  lilesme 
(Jue  péchiez  mortelz  en  caresme. 

Maquis.  Nom  donné,  en  Corse  et  en  Italie,  aux  petits  bois,  ou 
plutôt  aux  Ueux  incultes  couverts  d'arbrisseaux^  tels  que  myrtes, 


MAR  2o 

arlioiisiers.  lauriers,  etc..  qui  formont  des  fourrés  oi'i  l'on  se  cache 
aisément. 

Map.  Désinence  fantaisiste,  née  vers  18'i0,  (lu'on  ajoiiiait  à  la  lin 
(l'un  mot.  (Ml  l;i  sulistituaul  à  la  dernière  syllabe  :  épicier,  épiceniar. 

lYlarabout,  de  l'arahe  marabath,  lié  à  Dieu,  l'rétre  musulman. 
S'emploie  aussi  pour  désigner  un  homme  très  laid,  ou  une  cafe- 
tière à  £tros  ventre. 

Maraud,  ori.iiine  \\\iiç\:\A\\\^.  Maraudeur,  pour  marnais  nUlcur  ? 

Ména.ue  le  dériNe  de  riiéiu-<'u  nuiroud.  ,uueu\(?). 

D"a|)rès  Génin.  il  viendrait  plul(U  de  maroulh'.  rustre,  manant, 
(pii  n'est  lion  à  rien  qu'à  manier  la  marre,  sorte  de  houe  [)Our 
hécher. 

Vous  êtes  un  sot,  un  maraud,  un  cocpiin.  (Molière,  Avare.) 

Mais  l'origine  de  maroujh'  n'est  pas  plus  connue  que  celle  de 
maraud. 

Marc,  de  l'allemand  mark,  qui  a  donné  aussi  marche. 
.Monnaie  de  compte,  qui  a  varié  selon  les  époques. 
C'était  à  l'origine  un  poids  de  huit  onces,  la  demi-livre  ancienne 
de  Paris. 

Marcellus.  (Tu  Marcel/us  eris.)  Commencement  d'un  vers  de 
Virgile,  qui  a  servi  d'occasion  à  un  tableau  d'Ingres. 

Auguste  se  plaisait  à  se  faire  réciter  par  Virgile  lui-même  des 
morceaux  de  Y  Enéide.  Le  peintre  a  représenté  l'impression  pro- 
duite sur  ce  prince  et  sur  Octavie,  par  l'éloge  du  jeune  Marcellus. 
Octavie  s'évanouit,  dit-on,  à  ce  passage,  et,  voulant  marquer  au 
poète  sa  reconnaissance,  elle  lui  fil  compter  dix  grands  sesterces 
par  vers  :  environ  o2.000  francs. 

Marchand,  du  latin  mercatiun.  marché. 

D'autres  le  dérivent  du  bas-latin  merc«û?«re;  quelques-uns  vont 
jusqu'à  y  voir  une  transforiliation  de  marcheur  pour  mereatorem . 

Au  radical  mei'c,  se  rattachent  :  mercantile,  mercenaire,  mer- 
cerie, commerce. 

Il  se  rapporte  aussi  à  Mercurius,  Mercure,  dieu  du  commerce 
(et  du  vol).  On  représentait  ce  dieu  avec  des  ailes,  une  bourse  à  la 
main,  pour  indiquer  que  la  fortune  est  la  récompense  de  l'activité. 
Le  caducée,  qu'il  tient  dans  l'autre  main,  est  le  symbole  de  la  paix 
et  de  la  prospérité  :  le  bâton  marque  le  pouvoir  ;  les  deux  serpents, 
la  prudence  :  les  ailes,  la  diligence  ;  l'olivier,  emblème  de  la  paix, 


2fi  MAR 

s'onroulo  autour  du  caducée  avec  les  scr|)(;nls.  pour  luoulrer  (jue, 
si  la  ruse  est  rembléme  du  roniiuerce,  la  paix  le  fait  prospérer. 

Oe  Mercure  vient  aussi  tiicrrurlaJc,  lixaliou  oflicielle  du  jirix 
des  denrées  sur  les-  uiai-cliés. 

L'acception  marrhcur.  (pii  représciilc  l'idée  dacti\ilé.  a  |»résidé 
à  la  création  des  noius  des  piaucipaics  fonctions  couiuiercialos. 
Ainsi  de  inènie  {\\wW  marrlunitl  uiarclie  (le  vrai  iiiarcliand  primitif 
a  été  colporteur)  :  ['a;/çn/  d'alTaires  mène  les  choses  avec  activité  ; 
le  néfjoriant  (ncr  otlum)  ne  pi'cnd  pas  de  repos  :  le  traficant 
va  acheter  une  marchandise  pour  la  transporter  au  loin. 

—  Néfjoce  et  trafic  prennent  également  un  sens  péjoratif. 

Le  nom  de  courtier,  provençal  courratier,  est  fait  d'un  fi'équen- 
tatif,  (pii  siiiuille  une  agitation  perpétuelle. 

Le  nom  de  courtaut  de  boutique,  que  nos  pères  donnaient  au 
modeste  commis  de  magasin,  pourrait  bien  avoir  la  même  origine. 

A  courlaut  vieilli  a  succédé  (jnlopin,  puis  trottin,  saute-ruis- 
seau, qui  ont  une  signification  analogue. 

Commis  vient  aussi  de  cbmmittei'e,  envoyer  ou  préposer. 

—  De  marchand  à  marchand,  il  n'y  a  que  la  main. 
La  bonne  foi  doit  suffire  dans  le  commerce. 

Chasser  les  marchands  du  temple.  (xMathieu,  XXI,  12  ;  Luc,  XIX, 
45;  Jean.  Il,  lo.) 

Marchander.  Hésiter.  Jadis  bafjuifjner,  barguigner. 

Marchandise,  dérivé  de  marchand. 
Vanter  sa  marchandise  :  faire  l'article. 
Marchandise  d'occasion  ou  de  basard  :  bric  à  brac. 
Marchandise  démodée  :  rossignol. 
Marchandise  de  mauvaise  qualité  :  camelote. 
Marchandises  en  magasin  :  stock. 

Marche,  du  latin  marchia,  frontière  d'un  pays. 
Pays  frontière,  c'est-à-dire  situé  à  une  journée  de  marche  d'un 
autre  pays. 

Un  lionrat  baron  qu'era  do  la  marca  de  Proensa. 

(Po.N*  DE   CaPDEUIL.) 

.  (Un  baron  distingué,  qui  était  de  la  marche  de  Provence.) 

En  roman,  marcar,  confiner,  démarcation. 

Las  terras  del  roi  de  Fransa  que  marcaron  ab  las  terras  d'en 
Richart.  (Bertrand  de  Born.)  Les  terres  du  roi  de  France  qui 
confinaient  avec  celles  de  Richard.  (Voy.  marquis.) 


MAR  27 

Marché,  l.ilin  movratuni. 

Ht'iiiiioii  (le  mardiaiids  et  de  iii;nrliandises.  Acliat. 

—  Il  n'y  a  que  les  lions  marcliés  qui  ruinent. 

On  n'a  jamais  Iton  marrlié  d'une  mauvaise  nianiiandise.  C"est,-;i- 
dire  ^\\\\^\\  pair  tonjotics  trop  cher  ce  qui  est  mau\ais  ou  ce  dont 
on  u"a  pas  besoin. 

—  Par  dessus  le  manlié.  (Vo\ .  la  bonne  main.) 

Un  paysan  achète  une  prosse  montre  en  argent,  et,  avant  de 
conclure,  en  aperccvani  une  petite,  en  or,  il  dit  à  riiorloger  :  «  Vous 
me  donnerez  i)ien  celle-là  i)ar  dessus  le  marclié.  » 

Marcher,  du  latin  nicrcari,  les  marchands  étant  obligés  d'aller 
et  de  venir  pour  leui'  commerce. 

D'après  Diez,  ce  serait  passer  d'une  marche  à  une  autre. 

Rabelais  dit  démarcher  :  s'en  aller,  partir,  mot  fait  comme 
l'ancien  verbe  départir. 

Démarcher  ne  se  dit  plus,  mais  se  retrouve  dans  démarche. 

Synonymes:  aller  à  pied,  ...pedibus  cum  Jambis,  ...se  servir  de 
la  voiture  de  M.  Soulier,  ...piler  du  poivre  (route,  en  argot,  se  dit 
poirrière). 

Marcher  en  frottant  les  jambes  :  l)attre  le  briquet. 

Marcher  de  travers  :  aller  de  guingoi. 

Marcher  droit  :  faire  son  devoir. 

—  Le  poète  Pope  était  bossu  et  avait  les  jambes  torses.  Le  roi 
d'Angleterre  dit  un  jour,  en  le  voyant  à  la  cour  :  «  Je  voudrais  bien 
savoir  à  quoi  nous  sert  ce  petit  homme  qui  marche  tout  de  travers.  » 
Le  poète  répliqua  :  «  A  vous  faire  marcher  droit.  » 

Marcotte,  serait  plus  exactement  écrit  margotte.  de  l'italien 
margoita,  du  latin  tnergore,  plonger. 

Branche  tenant  encore  à  la  plante  mère  et  qui,  recourbée  et  mise 
en  terre,  y  pousse  des  racines,  et  qu'on  sépare  du  tronc  quand  elle 
a  une  végétation  suffisante.  Le  marcottage  doit  toujours  précéder 
de  quelques  jours  l'ascension  de  la  sève  dans  les  végétaux. 

Mardi-Gras. 

Synonymes  :  Carêmentrant,  le  dieu  des  andouilles  (Rabelais). 

Maréchal,  vieux  français  mare.^caf,  bas-latin  marescalcus. 

Celui  qui  soigne  les  chevaux. 

Le  maréchal  de  France  était,  à  l'origine,  chargé,  avec  le  conné- 
table, ou  comte  de  l'étable,  d'entretenir  en  bon  état  les  che\aux 
du  roi. 


28  MAR 

M;iré(li;)l  de  Friincc.  iiiîiiï;rliiil  de  niinp,  iii;ir(''cli;il  des  lo;:is, 
signiliaieiit  iii!in|(ieiii'  de  <;iiii|),  de  lofrenients;  c'est-à-dire  que  ces 
gens  mesuraieiil  remplacement  et  l'espace  de  terniiii  ijne  devaient 
occnpor  le  camp  ou  le  logement  des  troupes. 

Maréchaussée,  de  niaréchfnin,  forme  ancienne  de  maréchal 
(\n\  se  Iroine  <li(>z  Villehardouin,  et  encore  aujourd'hui  dans  le 
j)atois  de  certaines  provinces. 

—  Ancienne  juridiction  des  maréchaux  de  France. 

—  Corps  de  gens  à  cheval,  très  ancien  en  France,  qui  servait  à 
maintenir  la  sûreté  pui)lique.  et  qu'on  a  remplacé,  en  1793,  par  la 
gendarmeries 

lYlarée,  d'un  adjectif  itiarcus:  du  latin  mure,  mer. 

Mouvement  alternatif  et  quotidien  des  eaux  de  la  mer,  qui  cou- 
vrent et  ahandonnent  successivement  le  rivage. 

C'est  l'ensemble  des  phénomènes  connus  sous  le  nom  de  flux  et 
de  reflux. 

—  On  appelle  aussi  marée  le  poisson  de  mer.  D'où  l'expression  : 
arriver  comme  iiiarée  en  carême,  fort  à  propos. 

Margot,  diminutif  de  Marguerite. 
Surnom  populaire  de  la  pie  ou  agasse. 

Marguillier,  du  latin  mafrlcularlum  :  celui  qui  tient  le  registre 
des  pauvres.  Autrefois  marinier. 

Marguillier  serait  donc  la  corruption  (non,  mais  la  forme  popu- 
laire) de  matrlculler,  fabricien  gardien  des  registres  matricules 
dans  les  églises.  C'étaient,  avant  1792,  des  fonctions  importantes, 
parce  que,  depuis  1539  (sous  François  I^r),  ils  inscrivaient  les 
naissances  des  enfants  catholiques  apportés  au  baptême. 

La  loi  du  20  septembre  1792  coulia  aux  maires  la  tenue  des 
registres  de  l'Etat-Civil.  (Voy.) 

Mariage,  de  marltatlcum,  dérivé. de  marltum,  mari. 

Dans  la  mythologie  /igmen,  usité  en  poésie. 

On  le  représentait  sous  les  traits  d'un  beau  jeune  homme  cou- 
ronné de  marjolaine. 

Synonymes:  duel  à  coups  de  canif;  conjungo:  amour  permis  (style 
des  Précieuses)  :  savonnette  à  vilain,  quand  il  s'agit  de  l'union  d'un 
roturier  avec  une  tille  nolde:  un  livre  ennuyeux  avec  une  belle 
préface. 

—  Les  Romains  désignaient  le  mariage  légitime  sous  le  nom  de 


MAH  29 

ronJiKjiuin,  jnslii'  nupliif.  Los  ciilnnls  issus  de  co  mariage  s'appe- 
laient .//^s7/  libori  :  tandis  (pio  les  enfants  du  conculiinat  étaient  dits 
Uhcri  na/ura/es.  Auguste  avait  été  forcé  de  donner  au  concnbinat 
un  lilie  légal.  Quant  aux  enfants  nés  d'une  union  défendue  jtar  la 
loi,  ils  s'appelaient  }}of/ii  ou  spiii'/t. 

La  femme  qui  avait  des  rapports  avec  un  iionime  marié  s'appelait 
pellex  (peau).  Il  y  avait,  en  dehors  de  ces  deux  états,  la  courtisane, 
la  louve,  mise  sous  la  protection  de  la  Vénus  vulgaire. 

—  Aujoiird'liui,  les  mariages  sans  légalité  s'appellent:  mariage 
de  Jean  des  Vignes.  ...en  détrempe,  ...sous  la  cheminée. 

On  dit  aussi  :  marié  au  xiii"  arrondissement:  parce  qu'avant 
l'annexion  des  banlieues,  en  18G0,  Paris  ne  contenait  qne  douze 
arrondissements  ou  mairies. 

C'est  un  moiifip,  le  monde  prospère 

Des  époux  sans  épouse  et  des  enfants  sans  père, 
Où  l'estime  s'égare,  où  s'égare  l'amour  : 
Et  si  grand,  si  nombreux,  qu'il  faudra  (piehiiie  jour, 
Comme  ont  fait  les  Humains  pour  le  concubinage. 
Annexer  forcément  ce  faubourg  au  ménage. 

(I'aii.i.krox,  les  Faux  Mcnngox,  1868.) 

—  Il  y  a  encore  la  variété  de  mariage  appelée  morfianatujne 
(Voy.)  de  la  main  gauclie,  ou  incognito,  contracté  par  un  prince 
avec  une  personne  de  rang  inférieur,  à  laquelle  il  donne  son  nom, 
mais  qu'il  ne  reconnaît  pas  officiellement  comme  sa  femme.  Dans  ce 
mariage,  le  mari  donne  la  main  gauche  à  sa  femme,  au  lieu  de  la 
droite.  Les  enfants  ipii  en  naissent  ne  jouissent  pas  de  tous  les 
droits  de  la  légitimité. 

Moryanalique  vient  de  l'allemand  nK^njengahe,  don  du  matin, 
présent  fait  à  la  femme  le  matin  qui  suit  le  jour  des  noces. 

—  Les  lois  civiles  fixent  l'époque  du  mariage  : 

En  France,  à  17  ans  pour  les  hommes,  lo  ans  pour  les  femmes. 
En  Autriche,  20  et  16. 
La  loi  Romaine,  lo  et  13. 
Lycurgue,  37  et  17. 
Platon,  30  et  20. 

—  On  a  vu  des  rois  épouser  des  bergères. 

Caribert.  dit  l'abbé  Velly,  répudia  sa  femme  légitime  pour  épouser 
Theudégilde,  fille  d'un  berger. 

Louis  XIY  épousa  M^e  de  Maintenon,  qui  se  plaignait  un  jour  de 
n'être  pas  heureuse.  «  C'en  est  trop  pour  une  pauvre  femme  dont 
la  vie  est  déjà  pleine  d'amertume.  Je  ne  peux  plus  vivre  delà  sorte, 


:iO  MAR 

et  j'iiiiiic  mieux  luoiiiir  tout  ;i  riiciiic!  — Mourir!  Madîiiiic,  i't''|)!irtil 
d'AiiliiuiK''.  d'un  ;iir  |(I;iis;iiit  cl  iiicrrdnir.  niicllc  f;irit;iisi(!  \oiiS|(reii(l 
donc  de  mourir?  Vous  avez  donc  iiromesse  d'épouser  Dieu  le  l'ère 
en  troisièmes  noces  ?  » 

—  Mnriape  d'argent  :  celui  qui  se  fait  dans  des  Mies  d  intérêt. 

Un  mariage  daiyent  on  de  raison,  opposé  àinaiMaged'iiicliiiation, 
est  lin  mariage  sans  raison,  jjarce  qu'il  se  fait  sans  amour  :  c'est  un 
crime  contre  le  hon  sens...;  mais  c'est  dn  pain  sur  la  plauflie. 

Oui  se  marie  par  amour, 

A  bonnes  nuits  et  mauvais  jours. 

Qui  se  marie  par  argent, 

A  jour  et  nuit  le  cœur  dolent. 

Celui  (pii  prend  la  vieille  fenmie. 
Aime  mieux  l'argent  (pie  la  dame. 

Fol  et  hors  de  sens. 
Qui  prend  femme  pour  son  argent. 

Un  homme  qui  avait  épousé  une  femme  très  laide,  mais  fort  riche, 
disait  pour  excuser  son  choix  :  «  Je  l'ai  prise  au  poids,  non  à  la 
façon.  » 

La  fortune  est  un  fard  qui  eml)ellit  les  plus  laides. 

Une  demoiselle  disait  en  regardant  la  riche  corheille  que  lui 
envoyait  son  vieux  fiancé  :  «  Je  préfère  le  présent  au  futur.  » 

Quant  aux  mariages  d'inchnation,  il  y  a  le  proverhe: 

Amours  qui  commencent  par  anneaux , 
Finissent  par  couteaux. 

—  Dans  le  mariage,  la  femme  doit  apporter  le  déjeuner,  et  le 
mari  le  dîner.  C'est-à-dire  que  les  conditions  et  les  fortunes  doivent 
être  équivalentes,  truand  les  époux  n'ont  rien  ni  l'un  ni  l'autre, 
on  dit  :  «  C'est  la  faim  qui  épouse  la  soif.  » 

—  Le  fond  des  choses,  dans  le  mariage,  c'est  la  crémaillère,  et, 
à  hieii  prendre,  c'est  même  à  cela  que  se  réduit  cette  admirahle 
institution. 

—  Dans  le  mariage,  l'homme  doit  acquérir,  la  femme  doit  con- 
server. (Aristote.) 

Ce  précepte  est  pratiqué  à  rehours  dans  la  haute  société  de  Paris, 
où  l'on  peut  dire  que  le  mariage  est  une  raison  sociale  où  le  mari 
représente  la  recette,  et  la  femme  la  dépense. 

Marier,  du  latin  mnrltare,  de  mnritum,  mari. 

—  Se  marier:  en  finir  avec  la  vie  de  garçon  ;  prononcer  le  grand 
oui:  faire  une  fin. 


MAR  :u 

On  dit  :  ôtaltlii'  s;i  lillo.(]'ost  l;i  Ir.uliiclioiulii  latin  Collocdro lUiani 
tilii'til.  (Téronce.) 
Marie-toi  dans  ta  nie  si  tu  veux,  dans  ta  maison  si  tn  pcnx. 

(jui  \a  Inin  se  marier. 
Sera  trompé  ou  veut  trouiper. 
Iluiiimi'  (le  passajito, 
N'attnipr  feiimie  sage. 

Les  amants  peuvent  s'aimer  avant  de  se  connaître:  les  époux 
doivent  se  connaître  avant  de  s'aimer. 

Aller  à  la  ^{uerre  ou  se  marier, 
Ne  doit  se  conseiller. 

Mariez-vous,  vous  ferez  bien  :  ne  vous  mariez  pas,  vous  ferez 
mieux. 

Les  jeunes  .aens  ne  doivent  pas  se  nuirier  encore,  et  les  vieillards 
ne  le  doivent  jamais.  (Diogène.  ) 

—  Qui  non  litlgat,  cœlebs  est.  C'est  le  célibataire  qui  n'a  point 
de  disputes.  (Gem.  Varus). 

(^e  proverbe  est  cité  par  saint  Jén'ime.  Ainsi,  il  est  décidé  par 
l'autorité  même  d'un  Père  de  l'Église  que  la  femme  apporte  le 
trouble  dans  la  uiaison  ;  mais,  dit  Montaigne,  il  est  pbis  facile 
d'accuser  un  sexe  que  d'excuser  l'autre. 

—  La  Genèse  a  dit  :  «  Il  n'est  pas  bon  que  l'bomme  soit  seul, 
donnons-lui  une  compagne  à  sou  image.  » 

—  Qui  se  marie  à  la  bâte,  se  repent  à  loisir. 

Le  mariage  est.  en  etîet,  un  acte  si  important,  qu'il  demande  de 
grandes  réflexions  avant  de  prendre  une  résolution  définitive. 
Un  vieux  proverbe  dit:  «  Aujourdbui  mari,  demain  marri.  » 
Melius  est  nubere  quani  iiri.  (Saint  Paul,  I,  Cor.,  YII,  9.)  Mieux 
vaut  se  marier  que  brûler. 

Marin,  du  latin  marinum,  de  7nare  (mer). 

Le  mauvais  marin  est  un  marin  d'eau  douce  ;  le  bon  marin  est 
un  loup  de  mer  :  ce  qui  sous-entend  parfois  un  bomme  i)rutal  et 
grossier. 

—  Les  loups  de  mer  ont  fait  leur  temps.  Les  marins  ne  jurent 
plus  par  mille  sabords,  et  le  jour  où  l'étiquette  sera  bannie  de  tous 
les  salons,  elle  se  retrouvera  à  bord  des  navires  de  guerre.  (E.  Al)Out, 
Le  buste.) 

—  Femme  de  marin,  femme  de  cbagrin. 

Marine,  même  origine. 


32  MAR 

—  L'Aiiic  (le,  l'liiiiii;iiiit(''  ;i  bien  Ljc;iii(li  (l('|iiiis  rcxpéditioii  des 
Aruoniiiilcs  jiis(iir;'i  ccthMlc  (llirisloplic  (^)loiiil):  et  do  l'Arche  de' 
No6  jiisiiiriiii  (ircdl  Easlurn,  il  y  ;i  un  pi'ojirrs  iiiiiiieiise. 

Après  les  informes  essais  de  constructions  navales  parles  sauvages 
creusant  des  troncs  d'arhres,  viennent  successivement:  la  galère 
ou  trirème  ;  les  ualions  do  Saint-Louis:  les  caraques;  les  caravelles 
deChristO[»]ieColoml)  :  les  vaisseaux  de  Louis XIY.  peints  par  Vanloo, 
sculptés  par  Puuet,  et  commandés  par  les  Jean-liart,  les  Duquosne, 
etc.  ;  les  bàtimonls  à  vapeur,  pa(piol)ots,  cuirassés,  etc. 

Il  y  a  aussi  les  navires  desinictcurs  :  hi-i'ilnls,  liomhardes,  machines 
infernales,  etc. 

Les  navires  d'apparat,  de  plaisance.  La  .calère  sur  laquelle  Cléo- 
pàtre  alla  rejoindre  Antoine  ;  les  mystérieuses  jonques  lleuries  des 
villas  chinoises;  les  yachts  anglais  :  les  gondoles  de  Venise. 

Citons  encore  les  bateaux  amphibies  hollandais,  nmnis  de  voiles 
et  de  roues  pour  la  locomotion  terrestre. 

Le  tvideiil  de  Neptune  est  le  sceptre  du  monde. 

(Lkmiriihe.) 

La  domination  des  mers  fait  la  force  et  la  prospérité  des  nations. 
Les  États  qui  ont  obtenu  de  grands  succès  par  leur  marine  avaient 
un  port  de  mer  pour  capitale.  On  peut  citer  comme  exemples  dans 
l'antiquité  :  Tyr,  Carthage,  Athènes,  Alexandrie,  Marseille  :  dans 
les  temps  plus  rapprochés  :  Venise,  Gênes,  Amsterdam,  Londres. 

Marionnette,  diminutif  de  A/aî'ion.  venant  de  Marie. 
(juelques-uus  y  voient  la  forme  mariole,  anciennement  petite 
figure  de  la  Vierge. 

—  Il  y  avait  à  Venise  une  célèbre  procession,  où  l'on  finit  par 
substituer  des  poupées  de  bois  aux  nobles  Vénitiennes  qui,  à  l'origine, 
faisaient  sous  le  nom  de  Marie,  l'ornement  de  cette  solennité. 

—  Horace  appelle  les  marionnettes  :  alienis  nervis  mobile 
ligniun. 

—  Jean  Brioché,  vers  le  milieu  du  xvii'^  siècle,  a  introduit  en 
France  les  marionnettes.  Son  tils  les  perfectionna. 

—  On  appelle  inarionnette  ou  pantin,  un  homme  sans  volonté, 
sans  énergie,  qu'on  fait  mouvoir  comme  on  veut. 

Marivaudage,  de  Mariraux,  écrivain  du  xviir  siècle. 
On  devrait  plutôt  dire  marivaaxage  (?). 

Désigne  la  manière  et  le  style  précieux,  la  recherche  afïectée  de 
l'expression,  la  subtilité  du  sentiment. 


MAR  33 

—  (In  ;i  dit  de  .M;iri\iiii\  :  (  Il  conuMit  les  petits  sentiers  ((iii 
mènent  au  cœur,  mais  il  iuiiore  la  lii-ande  route.  » 

On  a  dit  aussi  qu'il  s'amusait  à  peser  des  œufs  de  mouches  dans 
des  Itaianres  de  toile  d'araiuuée. 

Piflarjoiet,  de  marjoldine  (?),  ou  plut(U  de  maviolet. 

Une  des  nonilirciises  \ai'iétés  du  petit-uiailre  :  nu  petit  homme 
qui  lait  le  galant. 

Rabelais  emploie  mavioh't. 

L'ori.tiine  marjolaine  aurait  en  sa  faveur  le  i'a|)proclienient  de 
niiKjuet  et  de  narcisse. 

Marmite,  étymolouie  ti-ès  iucertaiue.  Peut-être  marnior  :  les 
anciennes  marmites  étaient  de  marbre. 

La  marmite  des  Invalides...  que  tous  les  provinciaux  vont  voir,  à 
cause  de  ses  dimensions  ,ui,iiautes(iues. 

Cette  marmite  a  hérité  de  la  célébrité  de  celle  des  Cordeliers  de 
Paris,  qui  était  en  grande  réputation,  de  même  qu'un  gril  monté 
sur  quatre  roues  ;  aussi  disait-on  d'un  gros  mangeur  :  «  Il  avalerait 
la  marmite  des  Cordeliers.  » 

Marmot,  marmaille,  marmouset. 

Petit  garçon. 

De  Laurière  le  dérive  du  vieux  français  merme,  très  petit,  myr- 
midon.  D'autres  le  tirent  de  marmot,  singe;  ou  encore  du  grec 
mormô,  épouvantait,  figure  grotesque.  Enlin  Géuin  y  voit  le  mas- 
cidin  de  mar'motte. 

I^aut-il  tiLiun  iiiariuouset,  qu'un  maudit  étourneau... 

(MoLIÈRK.) 

—  Croquer  le  marmot  :  attendre  longtemps. 

On  dit  aussi  maronner,  pour  maugréer  ou  marmonner . 
Marmonnant  de  la  langue  :  mon,  mon,  mou,  von,  von,  comme 
un  marmot.  (Rabelais,  IV,  lo.) 

Marmotter,  onomatopée. 

Reniuea'  les  lèvres,  munuurer  des  mots  indistinctement. 

Uue  marniottoz-\oiis  là,  petite  imperlineule  ? 

(Mol.lKliK.) 

Marotte,  pour  mariotte,  ou  pour  mérotte,  petite  mère,  petite 
poupée. 

Espèce  de  sceptre  surmonté  dune  tète  de  folie,  avec  des  grelots, 
qui  est  l'attribut  de  la  folie  et  de  Momus. 

3 


34  MA  h 

—  Los  fous  (le  cdiir  iiorl.iicnl  l;i  iiuirolU-,  l*;ii- .siiilf.  on  ;i  ;ijjpr'lé 
marolto  touto  iiiiinic,  loiilc  ;iHcrli()ii  (l(''réjiié(3. 

CliMciiii  ;i  s;i  m.'irollc.  son  (l;i(l;i. 

Si/i/s  ci/if/itr  (ill rihnl IIS  l'sl  crnir.  (il.'iloii.) 

--  Tons  les  fous  ne  portent  p;is  lu  inîirott(!. 

Marque,  on  rnau:he,  de  r.-illeniiind  uuirck. 

D'où  :  inarue,  marécluil,  marqnis;  niarclie  d'Aucône. 

Marqne  snr  l'épaule:  armes  de  Gascogne.  (Rabelais.) 

iVlarquis,  jadis  mnrrhU  :  de  marche,  frontière. 

V\\  marijnis  était  un  oflicicr  préposé  à  la  garde  d'une  marche,  ou 
frontière  d'un  État,  pour  la  défendre  et  la  protéger,  en  chasser  les 
ennemis.  D'où:  lettres  de  marque,  ou  droit  accordé  de  passer  la 
frontière  d'un  autre  Etat  et  d'y  exercer  la  piraterie. 

—  Les  anciens  appelaient  le  commandant  d'un  pays  frontière 
nomardm,  du  grec  nomofi,  division,  arche,  pouvoir. 

—  On  appelle  marquise  (auvent),  nne  couverture  protectrice, 
sorte  d'ahri  pour  garantir  les  marches  d'un  perron,  le  seuil  de  la 
porte. 

—  Dans  les  mots  marquant,  (jens  de  marque,  le  sens  est 
détourné  et  exprime  l'idée  de  noblesse,  de  haute  dignité,  qui  était 
attachée  au  titre  de  marquis. 

Marronnier,  origine  incertaine. 

—  Le  marronnier  du  20  mars.  Le  20  mars,  Napoléon  rentra  à 
Paris,  venant  de  l'ile  d'Elbe,  et  le  marronnier  des  Tuileries  fleurit, 
comme  pour  exprimer  sa  sympathie  aux  Castagniers.  On  fit  cette 
remarque,  parce  qu'à  cette  époque,  les  bonapartistes  étaient  dési- 
gnés à  Marseille  sous  le  nom  de  castagniers  (châtaigniers),  par 
allusion  à  la  Corse,  patrie  de  Napoléon,  où  le  châtaignier  croît  en 
abondance. 

—  Le  marronnier  du  20  mars  donne  de  rombre  aux  pi-onieueurs. 
et  de  l'ombrage  au  Gouvernement  (1851). 

Mars,  origine  mythologique. 

Mois  consacré  au  dieu  Mars  parRomulus. 

Mars  arrive  comme  un  lion,  et  s'en  va  comme  un  mouton. 

Mars  jette  la  bar-que  en  terre,  et  dit  que  ce  n'est  pas  lui.  (Pro- 
verbe provençal). Gest-à-dire  que  pendant l'équinoxe de  printemps, 
un  calme  subit  succède  souvent  à  une  grande  tempête. 

Marteau,  anciennement  marfel,  du  diminutif  inusité  m«/Ve//////^, 
du  latin  mar/ulum. 


MAS  35 

—  M<n'U'l  s'est  ilil  ;i\aiit  iiKirlc.iii.  coiiiiih'  'A^/Ve/ avant  cliùleaii. 
(lii  le  retrouve  dans  iiKirlch'r.  nxirlohujc. 

—  (]liai'los-.Mart('l.  iiiaiiv  du  palais,  père  de  IV'pin-lo-Brcf,  aïeul 
de  Cliarleiiiauiie.  icciil  son  sniMioni  à  canse  de  sa  \aleni',  (jni  écrasa 
les  SaiTa/.ins  cuninie  a\ec  nn  inarlean.  el  les  chassa  de  France. 

—  A\()ir  niarlel  en  tète  :  nn  ,urand  sonci. 

Mais  j'ai  iiiarli'l  en  liMi-,  ri  Idiil  aiili-c  laiirail. 

(H.MnKiiocui:,  Cri.tjiin.) 

M'a  donné  martel  in  lesle.  (D'Aiihiuné.  Fa'no^lr.) 

Mienlv  \ault  eslre  niai'leaii  (prenclunie.  (Uahelais.) 

.Mienx  \aiit  élre  haltan!  ([ue  lialtii  :  être  dn  C(Hé  du  nianclio. 

Martin  (Lété  de  la  Saint-).  La  fête  se  trouve  le  M  novembre. 

—  1!  y  a  plus  d'un  âne  à  la  foire  qui  s'appelle  Martin.  Dicton 
trivial,  par  liMpiel  on  s'evciise  dune  errenr  produite  par  une  sin)i- 
litnde  de  noms. 

IVIartingaie,  oriuine  incertaine. 

.loner  à  la  martiniiale  :  doubler  sa  mise,  dans  resjioir  de  re.eaoner 
ce  qu"on  vient  de  perdre. 

Martyr,  du  oroc  marfui\  témoin. 

Celui  qui  endure  la  mort  ou  les  supplices  pour  rendre  témoignage 
de  la  vérité. 

Le  martyr  est  la  victime:  le  martyre /wr/;V/y;v'('//yo  est  le  supplice. 
Mavh'oy  est  le  lieu  du  supplice. 

—  Il  faut  deux  personnes  pour  faire  un  martyr  :  une  victime  et 
nn  bonri-eaii. 

—  Souffrir  le  uiartyre,  comme  un  martyr  :  soullrir  beaucoup. 

Je  ci'ois  volontiers  les  histoires  dont  les  témoins  se  font  égorger. 
(Pascal.  Pensées.) 

—  Le  mot  inarlijre  exprime  une  soulfrance  subie  pour  une  cause 
juste.  L'errenr  peut  avoir  ses  victimes,  quelquefois  très  dignes  de 
pitié  ;  la  vérité  seule  a  ses  martyrs.  C'est  ce  que  les  Pères  de  l'Église 
ont  exprimé  pai'  ces  mots  :  Causa,  non  pœna,  facit  martijriuni. 

Les  idées  végètent  de  sang  humain.  Les  révolutions  descendent 
des  échafauds  :  toutes  les  religions  se  dixiniseut  par  le  martyre. 
(Lamartine.) 

—  Être  du  commun  des  martyrs  :  n'avoir  rien  de  remarquable. 
Cette  locution  est  prise  de  l'office  de  l'Église  :  De  ronunuul  mar- 

Ujrinn,  office  général  des  martyrs. 

ftlas,  l'adical  niansion,.  demeurer. 


36  MAS 

l"ji  l;iii.L!ii('(l(i(icii  si,L!iiili('  /iia/soN. 

Au  iiK'iiic  i"i(lic;il  se  i';i|i|iorl('iil  :  iiiiiisoii.  iii;isiin'.  iik'-imI. 

Mascaret,  ('lyiiioloj'ic  doiitiMisc 

U('llii\  viulciit  (le  la  mer  dans  la  (laroinic  cl.  \i:w  rxiciisioii.  dans 
reniltoncliurc,  des  autres  j'ivirres. 

Quel(iut'S-uiis  y  voient  le  nom  de  Saint-Macaii'e  (I),  ainicUalion  de 
la  localité  où  l'enioiitent  les  eaux  de  la  Gironde  à  neuf  lieues  de  son 
enihouchure. 

iVlasque,  ilalien   tiun^rhcrd,  i\\\\  reproduit   l'ai'alKr  nKisrlituuii . 
houiïon. 
D'où  :  mascarade,  mascarille. 

—  Va\  provençal  mascd  siiiiiilie  sorcière,  que  Diez  tire  de  masti- 
care,  màclier,  paire  cjue  les  sorcières  passent  pour  man.iier  les 
petits  entants,  comme  le  Manduciis  des  Latins. 

De  celte  acception  de  sorcière,  masque  en  est  venu  à  celle  de 
faux  visage,  destiné  à  faire  peur.  On  pourrait  peut-être  le  rapporter 
au  provençal  mascarar,  noircir,  màchurer,  barbouiller  le  visage. 

—  Emmascar,  en  provençal,  est  synonyme  d'envoûter. 
L'envoûtement  est  une  praticjue  de  sorcellerie  qui  s'accomplit  en 

fabricpiant  une  ligurine  de  la  personne  contre  laquelle  on  veut 
tourner  le  malétice,  et  en  soumettant  cette  figurine  à  des  conjura- 
tions. On  plante  des  épingles  à  l'endroit  du  cœur  ou  en  d'autres 
parties  du  corps,  en  articulant  des  imprécations. 
Quant  à  envoûter,  il  vient  du  latin  vultum,  visage,  effigie. 

—  Rabelais  appelle  le  masque  un  cachelet  (1, 13),  pour  cache-laid, 
les  femmes  laides  s'en  servant  volontiers. 

—  Jeter  le  masque,  personam  deponere  (Gicéron)  :  se  montrer 

dans  ses  vraies  dispositions,  à  visage  découvert. 

Le  masque  tombe,  riioiiime  reste, 
Et  le  héros  s'évanoiiil. 

I.I.-H.    ROLSSKAC.) 

...Eripilnr  pcrsona,  manel  res. 

(Fa"crkck,  UI.  57.) 

—  Mercutius  dit,  en  entrant  au  bal  des  Gapulets  :  «  Masque  sur 
masque.  » 

Masse,  du  latin  massam,  monceau,  amas. 
U'où  :  massif,  a.îiasser. 
Masse  informe  et  grossière  : 

...Ttiidis  inilificst(iqi(e  moles. 

(Ovide.) 


.MAT  'M 

Matamore,  oriuino  lilléraire.  De  resp;i,iinol  inatamorDs. 

F.iiif.iron.  faux  lirave. 

PcrsonnauP  de  la  coméilie  espauiiole,  qui  l'ait  le  uraïul  pourfen- 
deur de  .Maures  (de  f/infar,  tuer,  ipie  l'ou  reli'OU\e  dans  inniiidor.) 

C'est  le  pendant  de  X'HorrihilirrlhUf'ax  des  Allemands  :  du 
SjKtrriili)  milanais  :  du  capitaine  Fracasse». 

Tous  desccndenl  du  Pi/rtioiioliiniccs  de  Piaule,  le  soldai  fan- 
faron. 

IVIatassin,  de  l'espa.iinol  inntaclùn. 
Aul reluis  danseur  hoiilVon. 

Mater,  du  persan  mat,  mort. 

Soumettre  à  la  discipline.  Expression  empruntée  au  jeu  d'échecs. 
011  le  roi  est  mat  quand  il  ne  peut  plus  bouger  sans  être  pris. 

Mathieu  (Fesse-)  :  avare,  usurier. 

('elle  locution  semble  venir  de  fe^t ('-Mathieu  (21  septembre), 
parce  que  saint  Mathieu  avait  été  publicain  et  est  fêté  par  les 
usuriers. 

—  En  1700.  lors  de  la  suppression  des  titres  de  nohlesse,  Mathieu 
de  Montmorency  parla  en  faveur  du  décret.  Les  nobles,  mécontents 
de  son  apostasie,  lui  décernèrent  l'épithéte  injurieuse  de  «  Fesse- 
Mathieu  ». 

Mathusalem,  nom  bibliipie. 

Pati'iarclie,  aieid  de  Xoé.  lils  d'Fuoch.  Il  eut  un  lils  à  l'âge  de 
187  ans,  et  deux  hlles  à  782  ans.  Il  mourut  en  1344  avant  Jésus- 
Christ,  à  l'âge  de  9G9  ans.  {Genèse,  Y,  21.) 

D'où  l'expression  :  vieux  coiume  Mathusalem.  Le  peuple  dit  : 
Mathieu  salé. 

Matin,  du  latin  matiiliinim  {tcmpns). 

On  dit  :  demain  au  matin,  et  demain  matin.  La  première  manière 
est  plus  correcte,  uiais  l'usage  a  l'ait  prévaloir  la  seconde. 

—  Matineux  se  dit  de  celui  qui  a  rha!)itude  de  se  lever  matin  : 
matinal  de  celui  qui  s'est  levé  matin. 

—  Matin  s'est  présenté  aussi  sous  la  forme  main  (manc). 

—  Tels  rit  au  inaia,  iiiii  le  soir  pleure  ; 
Et  tels  est  au  soir  courroueiés 

Qui  le  niaiu  est  joians  et  liés. 

—  -Merci,  sire,  dist  le  vilain  : 

Tel  rit  au  main  qui  le  soir  plore... 

—  Je  suis  vostre  homme  et  soir  et  main. 


38  MAT 

Main  ('\isl('  riicdrc  (l;iiis  ilciiidin.  (|iii  est  pour  fli'  nidfiii.  cl  (hiiis 
Icinlrmiiin  (coiTiiiilioii  de  riiiiciiMiiir  liiriiic  l' cndiniuiiu).  ;iiissi 
ridiciilo  f|iio,  scr.iil  Icxprcssioii  le  Uijtvojiox. 

Cctlo  t;iii(r  (le  i"(''(lii|)lic;ili()ii  de  r;ii'liclt'  n'est  |i;is  l;i  S(;iil('  (|ui 
oxislo  d;iiis  l;i  hinuiic  l'i';mç;iis<'.  Ainsi,  le  mol  lu'rvc,  v<Mi;inf  de 
hcdcra.  a  d'aitord  élé  /i/'crrc,  l'Iiiorrc.  Inscnsihiciiioiil  on  sonda 
l'ailiclc  an  sniislanlif.  en  sn|i|ii'inianl  17/,:  jinis,  d<'\ant  le  mol  ainsi 
modilié,  on  plaça  de  noiiNcan  larlirlo.  I^os  l*n»\rncaii\  disent 
Vhierri,  poni"  le  liei're. 

—  Se  lever  matin  :  se  lev(>r  dès  jxih-on  minet.  (Voy/^ 
Se  lever  à  l'anlhe  des  monsclics.  (Ha hélais,  IV,  î).) 
Au  desjucher  (Rabelais,  III,  !^),  c'est-à-dire  lorsque   la   \olaille 
descend  de  la  perche  on  elle  s'était  juchée  pendant   la  unit,  on 
jurlioir.  antrefois  jue. 

Cliîiiilons  Noi'l  tnnt  an  ^eir  (|ir;in  (|fsjiici|. 

i.Mmioi.  Bdlliiilo  dit  jour  de  Norl.\ 

Déjurher  s'est  dit  aussi  du  départ  des  troupes  pendant  la  unit. 

IViâtin,  autrefois  inastin.  Italien  iiiasiuio:  du  l)as-lalin  iiKisnnin. 
nuuson,  ferme. 
Chien  de  garde,  gros  chien,  chien  de  berger. 
Oui  a  bon  voisin,  a  bon  mâtin. 

Matines,  du  latin  matuiinas  ijioras). 

Première  partie  de  l'office,  qui  se  disait  après  minuit,  à  la  pre- 
mière heure  de  la  journée.  On  les  dit  de  grand  matin,  quelquefois 
(dans  les  couvents),  à  minuit,  ou  même  la  veille.  On  les  appelle 
alors  nocturneft  ou  r///«Ms\  Elles  ont  été  introduites  dans  la  liturgie 
par  saint  Ambroise.  (Voy.  lieures.') 

On  se  rappelle  les  vers  de  Boileau  : 

Les  cloL'liOs,  dans  ios  airs,  (K'  leurs  voix  aruviilim-s. 
Appelaient  à  grand  bruit  les  cliaiilrrs  à  nialines. 

—  On  a  appelé  «  Matines  Françaises  »  la  Sainl-Bartliélemy,  le 
massacre  des  protestants,  qui  commença  à  l'heure  des  matines, 
par  opposition  aux  Yèpres  Siciliennes. 

Matois,  origine  incertaine.  Quehpies-uns  le  tirent  de  nuite.  nom 

d'une  place  de  Paris,  où  s'assemltlaient  les  liions,  appelés  alors 

«  enfants  de  la  mate  ». 

Entants  (|ui  sont  de  la  uiaîe 
Savent  jouer  de  la  {lattc 

.le  suis  un  lin  matois.  (Molière,  Georrjes  Daiidi/}.') 


MAX  39 

lYlatrimonium,  innt  latin,  qui  sijinilic  maruif/f. 

Miii'li|iii'  ;iiili-(',  suiis  espoir  de  mnlrimuiiiiiiii, 
/^lll■;lit  (iiimtI  l'oi-cilli'  ;i  l;i  Icnhilimi. 

(.Xiol.lKllK,    ljl'-J)it,    11,    \,\ 

Matrone,  du  l;iliii  ma/ro/K/m.  (laine. 

1*^11  jiiris|)ni(li'nc('  modrnic  de  iiuMlcriiK^  lépale,  juatroue  sionilje 
sauv-fcmmc. 

Vigiles  de  nialronos  :  examen  (pie  loni  siihir  les  sa.ues-feinnies, 
[lar  ordre  de  la  jiislice.  à  une  l'einino  on  à  nne  1111e. 

lYSaures,  du  latin  niaiiros  (do  eoulenr  foncc(^). 
Xoiii  (jiie  les  Homains  donnaient  anx  habitants  de  la  Mauritanie, 
pays  de  r.Vfriqiie  du  Nord,  qui  comprenait  le  Maroc  et  Aluer. 
!)e  là  :  architecture  moresque. 

iViausolée,  du  nom  de  Mausole,  roi  de  Carie,  mort  en  3o3.  Son 
(!'[)0use  Arlémise  lui  lit  (Hever  un  tombeau  tellement  magnitique, 
(pTil  passa  pour  une  des  sept  merveilles  du  monde,  et  que  3jau- 
so/c'c  (^st  de\enii  synonyme  de  riche  tomheau. 

IVlaussade,  mot  composé  de  maa,  pour  mal,  et  de  sade,  vieille 
l'orme  venant  de  sapulmii.  qui  a  du  goût. 
Signilie  donc  peu  agréable. 
Des  plus  génies  et  des  plus  sades.  (Rabelais,  Prol.  II.) 

Mauvais,  anciennement  ma/cais,  origine  incertaine. 
En  tout  pays  il  y  a  une  lieue  de  mauvais  chemins.  C'est-à-dire  : 
en  toute  chose  il  y  a  des  difficultés. 

Maxime,  latin  maximam  (sentent ia m). 

Maxime,  sentence,  aphorisme ,  apophtegme  :  tous  ces  mots 
s"em|iloient  pour  désigner  une  pensée,  un  précepte  exprimé  avec 
bri('\eté,  concision  et  netteté.  iSéanmoins,  le  mot  maxime  s'emploie 
plus  ordinaireuient  pour  désigner  une  règle  de  morale  pratique  ; 
le  mot  sentence  s'emploie  dans  le  même  sens  ;  aphoi'isme  est 
propre  aux  langues  scientillques  ;  quant  à  apopfite(jme,  il  désigne 
une  sentence  attribuée  à  quelque  personnage  célèbre. 

—  Une  maxime  est  une  proposition  générale,  qui  contient  une 
vérité  p  l'a  tique. 

Qiiiiiquiil  [ti-u'cipie-Sj  eslo  brci:is. 

(IIoKACK,  Art  pocliqiie,  335.) 

(Les  uuiximes  doivent  être  courtes.) 
Maximum,  mot  latin  :  superlatif,  très  grand. 


40  MI'C 

Valeur  la  plus  tiraudc!  f(ti('  [iiiissc  allfindiv  un  olijcl. 
Les  mathématiciens  eniploieiii  Ir  pluiicl  iiifi.riina. 

iVlayeux. 

En  1(S;}(),  MaycMx.  illiisln"'  |)ar  le  crayon  do  Traviès,  élait  un  type 
de  bossu  lilicrlin,  vaniteux,  spiritnel.  so  taruiiant  aussi  de  l)ra\oure 
cl  do  patriotisme.  Mayeux  olilinl  une  iii-aiide  noliiio  de  ridicule. 

IVlazette,  étyniolouie  incertaine. 

Petit  on  mauvais  cheval,  qui  n'obéit  ni  au  fouet  ni  à  l'éperon. 

Depuis  Imit  jours  ontiers,  avec  nos  longues  traites, 
Nous  sommes  à  pifjuer  nos  cliiennes  (Je  mazetles. 

(Moi.lKliE.) 

—  Au  tlgnré,  mazette  désiane  :  une  personne  sans  force,  sans 
énergie;  un  joueur  inlial)ile. 

Mea  culpa,  expression  latine  :  par  ma  faute. 
Faire  son  mon  eulpa  :  reconnaître  ses  torts. 
Faire  son  mea  culpa  sur  la  poitrine  d'un  autre  :  accuser  les  aulre> 
d'une  faute  dont  on  est  soi-même  coupalde. 

Méandre,  nom  historique.  Rivière  de  l'Asie-Mineure.  très 
sinueuse. 

—  Au  figuré,  chose  remplie  de  détours,  de  difficultés. 
Dialecticœ  menndri.  (A.  Gelle).  Les  su1)tilités  de  la  dialectique. 

—  Plutarque,  dans  son  livre  Des  Rivières,  dit  que  le  Méandre 
s'appelait  autrefois  Anulxiinôn,  c'est-à-dire  qiii  retourne  sur  ses 
pas. 

Le  nom  de  Méandre  lui  vint  du  lils  de  Gercapbus  et  d'Anaxibie. 
Les  anciens  croyaient  qu'on  trouvait  toutes  les  lettres  de  ral[)haliei 
grec  dans  les  sinuosités  que  l'orme  le  Méandre  pour  se  rendre  dans 
l'Archipel. 

C'est  ainsi  que  le  Yar,  latin  Varus.  courbé,  doit  son  nom  à  son 
cours  oblique  et  serpentant  ;  et  la  Seine,  au  celte  ^<?^/<rt«,  serpent 
On  voit  sur  les  anciennes  monnaies  de  Paris  un  serpent,  emblème 
de  la  Seine,  qui  entourait  l'ancienne  Lutèce. 

—  Dans  les  arts,  on  appelle  méandres,  des  ornements  suivant 
une  ligne  qui  revient  plusieurs  fois  sur  elle-même. 

lYlécène,  latin  Mecœnas,  nom  d'homme. 

Mécène,  ministre  et  favori  d'Auguste,  s'est  immortalisé  par  la 
protection  qu'il  accorda  aux  gens  de  lettres.  Il  protégea  surtout 
Virgile,  et,  avant  de  mourir,  écrivit  à  Auguste  pour  lui  i-ecom- 


MEC  41 

mnndor  Tloi'.iciv    Vii'iiilc    lui    dôdia    ses   Gi'-orîi'Kiuon.    ol.    Iloriu-c 
plusieurs  Oïli's. 

Lu  Mi'C('iii'  nisriiiriil  pciil  faire  dos  Virj^'ili's. 

Aujourd'hui,  il  u'y  ;i  plus  de  Mécènes  :  iu;iis  il  n'y  a  pas  heaiiciiiiii 
d'Horaces  et  de  Viiyiles. 

Méchant,   ancien    français    inesclK'dnl    (rcussissiuil    mal),   de 
minus  rtitlcnlcm.  —  .Méchéance:  calamité. 
Autrefois,  on  employait  dhiI,  maie  : 

Suit  l"a(l\rntiin'  Ikhiiu'  ou  malo, 
liirc,  pliir,  (Ml  (•(iiii'nuiv  mi  yale  (joie). 

(Al, AIN   ClIMlIlKl;.) 

JA/Z.dans  ce  sens,  est  resté  dans  les  composés  :  malheur,  malade, 
malheureux,  malechauce,  uialepeste. 
En  provençal,  mari,  marias.  D'où  le  vieux  mot  marisson. 
Il  cùl  de  marisson  pli'iirr  roninip  une  vache. 

(RÈG^iF.n,  Satire  III.) 

—  Méchant  comme  la  ,uale,  ...comme  la  orèle,  ...comme  un  âne 
rouge. 

—  Sur  mille  hommes,  il  n'y  en  a  pas  un  de  hon.  (Ecclésiasle.) 

Riiri  ({niijpe  boni  :  numéro  vix  sunl  lotidcm  (juni 
T/iclinrnm  porta-,  rcl  ilicilis  ostia  Nili. 

(JrVK.NAI.,    Xm.    L'O.I 

(IjCs  gens  de  hien  sont  rares  :  à  peine  en  pourrait-on  com[)ter 
autant  que  Thèbes  a  de  portes,  ou  le  Nil  d'embouchures.) 

—  De  même  que  l'or  est  plus  rare  que  le  ter  :  qu'il  y  a  plus  de 
chardons  que  de  roses  ;  plus  de  vermine  que  de  bétail  ;  de  même 
les  méchants  sont  plus  nombreux  que  les  bons.  (Scharayl.) 

Le  l)oniieiir  des  méchants  comme  un  torrent  s"écoulo. 

(R.vcixt;,  Athalie.) 

Les  méchants  sont  buveurs  d'eau.  La  chanson  ajoute  :  «  C'est 
bien  prouvé  depuis  le  déluge.  » 

Escbine,  pour  accuser  Démosthène  de  méchanceté,  lui  reprocha 
d'être  buveur  d'eau. 

La  méchanceté  se  troiiNc  plus  sou\ent  a\ec  la  sottise  qu'avec 
l'esprit.  (Duclos.) 

J'aime  mieux  les  méchants  que  les  imbéciles,  parce  qu'ils  se 
reposent. 

lYlèche,  origine  incertaine.  On  a  proposé  micca,  venant  de 
mixKs.  morve. 


42  .Mi:i) 

—  Clioz  los  ancioiis,  qui  poétisiiiciit  (oui.  I;i  iii;ili(''i'o  iikmiio,  les 
vases  en  potorio  élaienl  fails  à  l'iiiiilatioii  de  l;i  foiiiio  liiiinaiiie  et 
des  (linérontes  parties  du  corps. 

Les  anses  étaient  les  oreilles  :  (piel([iies-nnes  poêlaient  des 
anneaux,  qni  Jignraient  des  pendeknpies.  Certains  vases  n'avaient 
pas  d'anses,  ce  qui  jnslilie  la  lociilion  :  sourd  comme  un  [lot. 
L'orifice  du  vas(^  ét;iil  la  honclie,  dont  les  lèvres  sont  les  bords  :  le 
buveur  et  son  vei're  s'end)rassent  mutuellement.  Le  vase  avait  un 
col,  un  ventre  ou  i)anse.  La  lampe  avait  son  nez.  et  lorscpi'elle  était 
à  deux  becs,  on  les  com[)arail  mu\  narines  :  le  mot  latin  nast/ftvia, 
\ase  à  trois  nez.  s'appli{piail  à  roMioclié.  dont  l'oi-ilice  a  la  forme 
d'une  feuille  de  trèlle.  La  mèche,  mixta,  d'une  lampe,  par  suite  de 
ranalouie,  constituait  la  mucpunise  de  ce  vase,  et  nous  disons 
«  moucher  une  chandelle  >». 

lYlédaille,  du    latin    ini'lnlhnn,   mêlai,    par   riutermédiaire    de 
l'italien  incdatjlia.  (Mènui  mot  que  maille.) 
Synonyme  :  la  monnaie  de  la  gloire. 

—  Chaque  médaille  a  son  revers:  11  n'y  a  pas  de  viande  sans  os. 
pas  de  rose  sans  épines. 

Ce  proverbe-calembour  fait  allusion  à  la  double  signilication  du 
mot  revers,  et  signifie  que  tout  événement  heureux  a  son  mauvais 
côté.  C'est  exact,  car  il  n'y  a  pas  au  monde  de  perfection  absolue, 
ni  de  bonheur  parfait. 

—  Médaillon  :  collret  aux  sou\enirs,  tii'e-lire  du  cœur. 

IVIIédard,  nom  de  saint. 

S'il  pleiil  lo  jour  de  saini  MétlarU  (x  juim. 
Il  pknit  (|uaraiilc  j()ur.s  plus  tard. 

Saint  Médard,  prédestiné  par  son  nom,  qui  rappelle  le  verbe 
latin  madère  (mouiller),  reçut  en  partage  les  orages  et  la  grande- 
maitrise  des  déluges.  Le  Moyen-Age  l'appelait  marjister  dilu.ru. 

Il  est  probable  que  le  proverbe  remonte  plus  haut  que  l'étabbsse- 
ment  du  calendrier  grégorien,  qui  l'a  dépossédé  de  sa  prérogative. 
On  a  avancé  de  douze  jours  les  fêtes  de  tous  les  saints  :  avant  cette 
époque,  la  Saint-Médard  correspondait  au  solstice  d'été  (20  juin). 
Il  est  donc  probable  que  le  proverl)e  s'appliquait  plutôt  au  solstice 
qu'à  la  Saint-Médard.  Saint  Gervais,  au  contraire,  monta  à  la  place 
de  saint  Médard  (19  juin),  et  hérita  de  son  influence.  (Voy.  ."mainte 
Liice.) 

—  Le  !«''  mai  17i27,  fut  enterré  dans  l'église  de  Saint-Médard  le 


M  Kl)  43 

diacre  Paris,  (pii  acipiil  une  nMioiiiinéo  itoslliiimc  |»ar  los  prcHondiis 
niiracles  (iiii  s'accomjilissaienl  sur  sou  loiulieaii.  Louis  XV,  [loiir 
iiiellro  fin  aux  scandales  causés  par  les  Conru/sioiuiairr.s,  lit 
feiiuer  le  ciiutMit're  :  ce  qui  donna  lieu  au  distique  connu  : 

De  |i;ii-  II'  l{(>i.  (léfcnso  ;i  Dieu 
l)i'  l;iiiv  iiiii';icl(^  en  ce  licii. 

l/éplise  Saiul-Médard.  située  rue  .MoulVetard,  a  été  dé.ua.fjée  en 
1801).  des  constructions  qui  ['entouraient.  Elle  possède  un  tableau 
de  sainte  Geneviève  par  Watleau. 

Médecin,  du  latin  meiliciiunn  :  de  //ict/'r/.  d"oii  aussi  reuiède  : 
d(^  uu'uie  (pie  curare,  avoir  soin,  a  donné  curé,  médecin  de  rànie. 

—  Synonymes  :  carabin,  vieux  nom  des  garçons  barbiers,  au 
temps  où  les  barbiers  ex.erçaient  la  cbirurgie  et  se  servaient  de  la 
seringue,  comparée  ironitpiemeut  à  une  carai)ine. 

On  a  appelé  aussi  les  apoliiicaires  les  carabiniers  de  la  Faculté. 
{Théâtre  de  Glierardi,  t.  YI.  ) 

Suppôt  de  saint  C('tme  :  mauvais  médecin. 

Marcliand  de  mort  subite  :  médecin  des  cbèvres  :  docteur  en 
soupe  salée. 


Fi  (If  la  pille  nuMli'ciiie 

Oui  l'iiomrao  en  la  mort  acheiiiiiie  ! 


Les  médecins  et  les  marécliaiu 
Tuent  les  liommes  et  les  chevaux. 

.Médecins  de  Valence, 
Longue  robe,  courte  science. 


...K.) 


Médecin,  guéris-toi  toi-même.  (Saint  Luc,  IV,  23.) 

.Médecin,  tu  fourmilles  d'ulcères. 

L'eau,  l'exercice,  la  diète  sont  trois  grands  médecins. 

La  médecine  guérit  quelquefois,  soulage  souvent,  console  tou- 
jours. 

Médecine  est  une  l'arce  à  trois  personnages  :  le  malade,  la 
maladie  et  le  médecin.  (Rabelais.) 

Osiris  a  inventé  la  médecine  en  Egypte  :  Esculape  n'a  lait  que  la 
perfectionner. 

Caton  le  Censeur  cliassa  de  Rome  et  de  l'Italie  tous  les  médecins. 

Rœrbave  disait  :  «  Tenez-vous  la  tète  fraîcbe,  les  pieds  cliauds, 
le  ventre  libre,  et  moquez-vous  des  médecins.  » 

L'École  de  Salerne  recommande  trois  grands  médecins  :  res[irit 
gai  et  tranquille,  l'exercice  modéré,  la  diète. 


44  .Mi:iJ 

—  K(iil;i|>li(;  de  iiiédcciii  : 

...llir  ]irr  i/iirin   loi  jncufiT  jticel. 

I';ii-  sa  liiiiili',  j)ai-  sa  sulislancc, 
\a'  lail  dàiii'sse  a  n'fail  ma  sanir  ; 
Kt  je  (lois  plus,  en  ci-llc  circniislancf, 

Aii\  àiii'S  (|ir;i  la  Kaciillr. 

Médiocrité,  du  l;iliii  incdiocfis  (mriliiix.  inilicii). 
L;i  iii(''di(»cril(''  csl  l;i  reine  du  monde. 
L;i  iiiédioci'ilé  est  le  ti'ésor  dt'S  sa.ucs.  (N'olt.'iii-e.) 
On  doit  désirer  nne  heureuse  niédioci-ilé.  (|ui  soil  ;iu-dessiis  du 
mépris,  et  ;iu-dessous  de  l'envie.  (S;nnl-K\reniond.) 

...0  iiU'diocrili'  ! 
MÎTc  lies  lidiis  ('S|)rils,  compa^'iii'  du  repos. 

(La   I'.imaim:,  YM,  6.) 

Aitirmii   t(iiis<jnr  iiirrliorrihilrni   ililii/il. 

(UoiiAiK,  Car/Il.,  U,  10.) 

La  médiocrilé  dans  les  arts  est  lembarcadère  de  la  prétention. 
(Burlesque.) 

Très  médiocre  :  minée,  de  peu  de  valeur.  On  dit  de  même,  fami- 
lièrement :  il  n'y  en  a  pas  épais. 

Médire,  du  latin  /ninus  diccre  (mes,  dire). 
Synonymes  :  casser  du  sucre,  débiner,  éreinter. 

Médisant,  jadis  tnalc  bouche. 

Et  ce  (pio  faire  en  secret  on  in-rlcnd. 
En  plein  marché  maie  itouelic  l'entend. 

iMahot.) 

—  L'écoutant  fait  le  médisant.  Le  premier  a  le  diable  dans 
l'oreille,  et  le  second  l'a  sur  la  langue,  a  dit  saint  Bernard. 

On  devrait  pendre  le  médisant  par  la  langue,  et  l'écoutant  par 

les  oreilles. 

Ne  seroient  nulz  mesdisans 
S'it  n'estoit  des  escoutans. 

Celui  qui  souffle  le  feu  s'expose  à  ce  que  les  étincelles  lui  sautent 

au  visage. 

Je  dis  du  liien  partout  de  toi. 

Tu  dis  du  mat  partout  de  moi  : 

Quet  mallieur  est  le  nôtre  ! 

On  ne  croit  fun  ni  fautre. 

La  médisance  est  la  francliise  des  méchants. 
Méduse,  nom  mythologique. 


\ii;l  43 

—  (y^st  la  h'Ic  lie  .Mi'iliist'  :  (iii  ohjct  t'IlVayaiit. 

—  Môdiisc.  la  plus  crlrhrr  des  Ooi'.uoncs,  était,  dans  sa  jeuiiosse, 
lin  iiiodt'le  de  i)eaiit('  :  sa  cluncliire  était  adiiiirahlc  .MIiumnc. 
jalouse  de  sa  heanté,  {■Jiaiiiiea  ses  cheveux  en  serpents,  et  donna  à 
SCS  yeu.v  la  propriété  de  pétriller  ceuv  qu'elle  regardait.  Persée, 
pour  délivrer  la  terre  de  ce  Iléaii  d'un  nouveau  uenre,  lui  coiiiia  la 
tète,  et  s'en  servit  depuis  pour  |)étriliei'  ses  ennemis. 

(Voy.  maïujer  c(uiinit'  un  naufragé  de  la  Méduse.) 

lYleeting,  oi-iiiine  anglaise,  participe  présent  du  verhe  lo  iiicd , 
se  renconti'er. 

Réunion  [lopiilaire. 

Méfiance,  siibslantif  \ei-hal  de  iné/lev:  racine /?r/e.s\ 

l>a  iiiéliancc  est  l'excès  de  la  déllance,  et  se  prend  en  mauvaise 

l)art.  La  déliance  est  souvent  coiirmandée  par  les  circonstances:  la 

métiance  est  presque  toujours  un  défaut. 
On  liait  méliant.  ou  de\i('iil  déliant. 

1!  élciil  exjiériiiieiilé. 
Et  savait  que  la  nu'fiaiico 
Ksi  xwbvi'  de  la  sùrcti'. 

(I.A   Fo.NTAI.NK,   l'(ihli;>:,   m,    IS.) 

Mégère,  oi-iuine  mytliolo.uiqiie. 

Nom  d'une  des  Furies.  Elle  avait  pour  im'ssion  de  tourmenter  les 
méchants  après  leur  mort. 

—  Au  li.uuré  :  inécliante  femme. 

Meilleur,  du  iatiii  incliorctn.  compai'alif  irrégulier  de  bonus, 
lion. 
Correspond  à  l'adverbe  iiiimix. 

Mélancolique,  du  "rec  //n'/tis,  noir,  f/iofr,  bile,  liiiinciir. 
Synonymes  :  rêveur,  una.acux,  vaporeux. 

—  Les  mélancoliques  sont  les  \oloiitaires  de  la  tristesse. 

Mélodrame,  du  grec  //ic/os,  chant,  draina,  drame. 

Autrefois,  sorte  de  drame  où  la  musique  instrumentale  annonçait 
l'entrée  ou  la  sortie  des  personnages  importants.  Aujourd'hui,  .sorte 
de  tragédie  populaire,  où  la  musique  ne  ligure  pas. 

—  On  pourrait  croire  que  nie/os  est  pour  mêlas,  et  expliquer 
«  drame  noir  »  ;  car  ces  pièces  sont  d'ordinaire  remplies  d'intrigues 
ténébreuses,  de  meurtres,  capables  de  causer  dos  émotions  vio- 
lentes. 


46  MEN 

Melon,  (lu  l);is-l;iliii  iiichnicm,  liiriiic  s«'iis. 

Au  lif,Miré  :  inilK''cil('. 

Dnns  Xlluulc  (11,  t'M)),  Tli<'isilt'  apjM'Ilc,  1rs  (irecs  inchms 
(|h''|)(>ii(;s).  l'^l  Tcrdilicn  a  dit  :  Pcj)()neni  cordh  loto  luthcre :  A\uir 
un  melon  ;'i  la  place  du  rœur. 

On  eni|)loie  cornichon  dans  le  même  sens. 

McJo  sif  forinosiis.  Irjirosii.^.  /■ofundus  el  pondcrosiia.  (Maxime 
oastronoiiii(iii('.) 

lYlélusine  (l'aire  des  rris  de). 

Mi'hisinc  (»st  pour  nicre  lucine  (nia/er  Jji</iia),  déesse  des 
accoiicliciiK'iils. 

A  moins  quon  ne  le  tire  de  Méliisine.  mauicienne  ou  fée  des 
contes  celtiques  (nie/n.s,  chant,  femme  qui  (liante). 

Cette  fée  est  célèbre  dans  nos  romans  de  chevalerie.  Par  son 
mariape  avec  Raymondin,  comte  de  Poitou,  elle  devint  la  tige  des 
Lusignan.  Jean  d'Arras  a  écrit  son  histoire,  au  xiv"  siècle.  Elle 
revenait  annoncer  par  de  grands  cris,  sur  les  ruines  du  château  de 
Lusignan,  la  mort  des  rois  de  France. 

Une  comtesse  de  Lusignan,  du  nom  de  Mélnsine,  avait  une  sirène 
sur  son  sceau. 

IVlême,  anciennement  mesme,  me'isjne  :  Aw  latin  metipshnum. 
Autrefois  on  employait  l'adverbe  mémement,  qui  se  trouve  dans 
les  commandements  de  l'Église. 
Mèmement.  il  pillait  les  églises.  (Biblioth.  Bleue,  Rohcr/  le  Diabh.) 

Mémoire,  du  latin  memoriam. 

Mémoire  de  lièvre  :  qui  se  perd  en  courant. 

Une  bonne  mémoire  est  d'ordinaire  le  signe  d'un  mauvais  juge- 
ment. (Montaigne,  I,  9.) 

Tout  le  monde  se  plaint  de  sa  mémoire,  et  personne  ne  se  plaint 
de  son  jugement.  (La  Rocliefoucauld.) 

Il  y  a  des  gens  qui  apprennent  sans  retenii*  :  c'est  la  digestion 
mécanique  du  canard  de  Yaucanson. 

—  Mémoire  d'apothicaire.  (Voy.  allonger  les  S.) 

Ménage,  du  bas-latin  masna(ic/tni,  maison. 
Il  y  a  lirouille  dans  le  ménage  :  le  torchon  brûle. 

—  De  là  ménager,  user  comme  dans  un  bon  ménage. 
Ménager  la  chèvre  et  le  chou.  (Voy.  chèvre.) 

Q\\\  vont  voyjiucr  loin,  moiia.u'o  sa  monture. 

(Racine.  Plaic/fiirs.  I,  1.) 


MEN  47 

lYlendiant,  \ci'li;il  de  mmdifr. 
Autrefois:  IriKiiid.  cjiiiiiaiul.  ht'lilrc. 

—  Les  (iiKitre  iiieiidiaiils  :  dessert  composé  de  quatre  sortes  de 
fruits  sers  :  noisettes,  ainandes,  limies,  raisins. 

Les  quatre  oi'dres  de  moines  mendianis  étaient  les  Cai'ines,  les 
Dominicains,  les  Franciscains  et  les  Aii.uiistins.  Ils  vivaient  d'an- 
nxines  qu'ils  (|nétaient  de  porte  en  poi'te,  et  ne  pouvaient  posséder 
aucune  rente.  llsa\aienl  aussi  pris  le  nom  des  ([uatre  ordres  de 
Bélîtres. 

Les  Capncins,  KécoUels,  Miniuies,  sont  aussi  des  ordres  uiendiants, 
mais  de  création  plus  moderne. 

Les  Derviches  et  les  Fakirs  sont  des  religieux  maliométans  qui 
font  aussi  vceu  de  pauvreté. 

A  un  huis  deux  mendiants.  (Proverhe  espagnol.) 

—  Les  mendiants  italiens  vous  accaltlentdetitres  en  vous  tendant 
la  uiain  :  Votre  Excellence,  mon  Prince!... 

Mendier,  liu  latin  moiulicdrc  (de  inenda,  faute?). 
Autrefois  :  co(juiner,  Irucher. 

—  Mendier  de  l'encens,  des  louanges,  des  applaudissements. 

—  Homère,  Le  Tasse,  Bélisaire  ont  mendié  leur  pain. 

...Crottù  jiis(iu'à  fécliine. 
Va  nu'iulicr  son  pain  de  cuisine  en  cuisine. 

(Boir.EAu.) 

lYîener,  du  latin  manu  arjcre.  conduire  avec  la  main  :  ou  liien 
plut('it  du  latiii  [topulaire  m/'/iare. 

La  main  mène,  r(eil  guide,  la  tète  conduit. 

On  conduit  une  voiture,  on  guide  un  voyageur,  on  mène  un 
enfant,  une  dame. 

C\'<[  lin  iiiimnie,  entre  mius,  à  mener  par  le  nez. 

(.Moi.iù;i;.   TarlulTv.) 

Ménestrel,  ou  nx'ncsirii'r.  du  latin  minislerialem,  homme  au 
service  d'un  autre. 

Poète  qui  composait  des  mélodies  et  les  chantait  de  château  eu 
château. 

Ou  appelle  encore  inéiiriricrs,  les  joueurs  de  violon  <pii  fout 
danser  dans  les  villages. 

Ménil,  anciennement  incsnll,  à  rapprocher  de  mesnle. 
Désignait  une  petite  maison  d'habitation  avec  terre  attenante. 
C'est  un  diminutif,  du  latin  barbare  f/iansioni/em. 


48  MEN 

On  lii  (l;ins  lo  lioman  de  liciuirl  : 

La  l)()iiiir  (l'iiiiiK-  ilii  tiicsiiil 
A  (iii\('i't  l'Iiiiis  (le  siiM  coiirlil. 

Pitr  Cdiioixln'  Il  (/ru,  fiml  idir  ilaim  liir  iiicsuil. 

—  Mrsnic.  //i/'siii/.  si.uiii(i;ii('iil  ;iiissi  l.i  fîiiiiillc.  cl  (jiitîlqdofois 
r;i,ii-.uIoiii(''r;ilioii  des  li;iltil;iiits  d'un  vilhi.uc. 

Il  en  est  vonii  Ix'iuicoiip  de  noms  de  lieux  on  de  personnes: 
Dinnesnil,  Ménilinontiint.  I;i  l'ue  Mironiesnil,  etc.  (Voy.  ar/rf/i/ùi.) 

IVIenippée  (Siitire).  du  nom  du  [)liiloso[ilie  Ménipoe,  (jni  étidl  Irrs 
niordanl. 
Satire  mêlée  de  prose  et  de  vers. 

Ménisque,  mot  <j:rGc  (uiénis/ios,  croissant). 

Plaques  surmontées  de  pointes,  que  l'on  ir.ettait  sur  la  tète  des 
statues  des  dieux  alin  d'empêcher  les  oiseaux  de  s'y  reposer.  C'est 
de  là  que  ^iennent  les  auréoles  qn'ou  rei)résente  autour  de  la  tète 
des  saints. 

Menotte,  diminntif  tendre  et  familier  de  main. 

Donne  ta  menotte,  que  je  la  baise.  (Molière,  Geoï'fjes  /Jandin.) 

Mensonge,  substantif  masculin,  autrefois  féminin. 
Sylvius  le  tire  de  mentis  soin  ni  a  m,  songe  de  l'esprit. 
Le  provençal  messongea  le  rapprocherait  de  mes,  ([ui  signilie 
erreur.  D'où  :  songe,  mensonge. 
Les  étymologistes  sont  fort  embarrassés  à  cause  de  la  désinence. 

—  Synonymes  :  bourde,  canard,  colle,  craque,  couleur,  frime, 
gausse. 

Cette  lille,  qui  le  voyait  tant  beau  et  bien  parlant,  crut  sa  men- 
songe. (^Heptaméron,  nouv.  18.) 

—  En  provençal  ^nessongea,  en  italien  mensongia,  sont  féminins. 

—  Mensonge  pieux  :  fait  dans  une  intention  charitalde. 

—  Le  mensonge  est  l'ingrédient  le  plus  nécessaire  au  maintien 
des  relations  sociales. 

Menteur,  substantif  de  mentir  :  du  latin  mentiri. 
Synonymes:  blagueur,  craquetier,  hâbleur. 
«  Mon   beau-père,  vous  êtes  un  vieux  blagueur  »,  dit   Robert 
Macaire  au  baron  de  Worms-Spire. 

—  Menteur,  voleur  :  le  mensonge  est  un  vol  en  parole,  comme  le 
vol  est  un  mensonge  en  action. 

—  Menteur  comme  un  arracheur  de  dents.  Les  dentistes  sont 


MEN  49 

oldipés  de  iiiciilir  [loiir  drleniiiiior  loiirs  clients  ;'i  subir  une  opé- 
r.ilion  (lonloureuse;  mais  leurs  mensonges,  comme  ceux  des  médecins, 
sont  excusaltles  par  leur  intention.  Le  proverbe  s'applique  plutôt  à 
ceux  (pii  mentent  à  leur  [)i'olit  t't  au  détriment  des  autres. 

On  dit  aussi  :  menteur  comme  un  chasseur,  ...comme  une  épitaplie, 
...comme  un  laquais. 

—  Menteur  dliiver.  —  Aussi  bien  peut-on  mentir  en  liberté  de 
conscience  deux  fois  par  an  ;  l'une  en  été,  disant  :  «  Je  n'ai  pas 
soif»  :  l'autre  en  hiver,  disant  :  «  Je  n'ai  pas  froid  ».  {Motjen  de 
parvenir,  ch.  41.) 

—  A  menteur,  menteur  et  demi. 

—  J'ai  vu,  (lit-il,  un  cliou  plus  liTanil  ([u'une  maison. 

—  Et  moi,  (lit  laulre,  un  pot  aussi  ^vznA  ({u'uno  ét;liso. 
Le  premier  se  mo(iuant,  l'autre  reprit  :  —  Tout  doux. 

On  le  fit  pour  cuire  vos  choux. 

(La  Fo>tai>e.  IX,  1.) 

l'n  liomuie  prétendait  voir  une  mouche  au  haut  d'un  clocher. 
«  Je  n'ai  pas  la  vue  aussi  bonne  que  vous,  lui  répondit-on  :  mais  j'ai 
l'ouïe  excellente,  si  je  ne  vois  pas  votre  mouche,  je  l'entends  mar- 
clier.  » 

Mendacem  oportet  essemetnorctn.  (Apulée.)Iliaut  qu'un  menteur 
ait  de  la  mémoire. 

—  Un  menteur  n'est  pas  écouté,  même  quand  il  dit  la  vérité. 
(Aristote.) 

Mendad  homlni  ne  verinn  quldem  dicenti  credere  solemus. 
(Cicéron,  <le  Dlcinat.,  14().) 

Mentir,  du  latin  nienliri,  de  mens,  esprit,  imagination,  parce 
que  mentir  c'est  imaginer.  (Littré.) 
A  beau  mentir  qui  vient  de  loin.  (Il  ne  craint  pas  d'être  démenti.) 
Longs  voyages,  longs  mensonges. 

Mentor,  origine  httéraire. 

Personnage  de  YOdi/ssée,  auquel  Fénelon  a  donné,  dans  son 
Telemaque.  un  rôle  considérable.  C'était  le  plus  fidèle  ami  d'Ulysse, 
qui  lui  UN  ait  confié  le  soin  de  sa  maison,  sous  les  ordres  de  Laërte. 

Minerve  prit  souvent  ses  traits  pour  instruire  Télémaque.  {Odys- 
sée, IL  224.) 

—  Au  figuré  :  homme  sage  et  de  bon  conseil. 

Menu-vair...  Fourrure  recherchée  au  Moyen-Age  et  réservée 

à  la  noblesse. 


50  MEH 

Appelée  ;iiij()iir(l'liiii  «  iiclil-'jris  ■ . 

Les  paiiloiilles  de  rcrrc  de  (Iciidrilloii  m  t''l;iiciit  f.'iites. 

Mépris,  (le  minus  preliuni,  iiioiiidi'e  estime. 
Le  mépris  est  la  rallonj-e  du  Code  pénal. 

Vous  avez  beau  entasser  injure  sur  injure,  vous  irarriNcrc/  jamais 
à  la  hauteur  de  mon  mépris,  ((iiiizol.)  (Du  dédain  '.). 
Mi'prhé  a  pour  synonyme  conspué  :  couvert  de  (rachats. 

lYler,  du  latin  mare;  provençal  mar ;  celtique  mor,  d'où  :  Armor, 
Armorique. 

—  La  mer  est  à  tous  et  à  personne,  parce  qu'elle  a  sui-  la  tei-re 
un  immense  avantage;  c'est  d'échapper  par  son  indivisihihté  au 
fractionnement  de  la  propriété  individuelle.  Elle  ne  peut  recevoir 
de  divisions  tracées,  de  fossés,  de  barrières  :  elle  est  sans  frontières 
et  presque  sans  limites,  s'ensemence  d'elle-même  et  produit  sans 
culture. 

Mare  natura  omnihus  patet,  (Ulpien.) 

—  Le  golfe  Persique  a  été  appelé  «  mer  Bleue  »,  nom  qui  convien- 
drait si  bien  à  la  Méditerranée. 

La  mer  de  Marmara  est  la  «  mer  de  Marbre  »  (aux  îles  blanches). 
La  mer  Noire,  ou  Pont-Euxin,  à  cause  de  ses  épais  brouillards  et 
de  ses  fréquents  naufrages. 
La  mer  Vermeille  se  trouve  entre  le  Mexique  et  la  Californie. 

—  Mer  de  sable.  «  La  mer  aréneuse  »  (Rabelais,  V,  27).  Ce  sont 
les  déserts  de  l'Arabie  Pélrée,  entre  l'Egypte  et  la  Palestine.  Comme 
en  mer,  on  ne  peut  y  voyager  sans  boussole,  et  les  tourbillons  de 
sable  menacent  les  voyageurs  tout  autant  que  les  vagues  de  la  mer. 

—  La  brise  marine.  Le  voisinage  de  la  mer  rend  la  température 
plus  égale,  en  diminuant  le  froid  en  hiver  et  la  chaleur  en  été, 
parce  que  l'eau  est  mauvais  conducteur  de  la  chaleur. 

La  brise  marine  se  fait  surtout  sentir  vers  le  soir,  parce  que  la 
terre  s'échaulïant  plus  que  l'eau,  attire  l'air  de  la  mer,  qui  se  trouve 
plus  frais.  Il  est  aussi  plus  pur,  et  dégagé  des  miasmes  du  sol  haliité, 
et  rend  la  promenade  sur  le  rivage  très  salutaire. 

L'inverse  a  lieu  pendant  la  nuit,  où,  la  terre  se  refroidissant,  la 
brise  va  de  celle-ci  à  la  mer,  qui  est  alors  plus'  chaude. 

—  La  mer  occupe  à  peu  près  les  trois  quarts  de  la  surface  du 
globe.  En  outre,  les  parties  submergées  sont  plus  creuses  que  les 
parties  sèches,  îles  ou  continents,  ne  sont  saillantes. 

On  peut  avoir  une  idée  de  la  profondeur  de  la  mer  du  Nord,  en 


MKft  51 

Son,uo;iiil  qu'il  siitTir;iit  d'\  jcicr  une  des  pyrainiilcs  d'Épypte  pour 
y  l'aire  un  «'ciieil.  On  peiil  de  iiiénie  prendre  une  idée  de  la  profon- 
deur de  l'ocraii  l'aciliipie.  en  Songeant  (lue  le somiuet  du  Mont-Blanc 
y  lonnerait  un  ilol.  Mais,  landis  (pie  sur  les  continents  les  hauteurs 
éiiales  à  celles  du  .Monl-lilanc  sont  de  rares  exceptions,  dans  l'océan 
Pacifique  les  profondeurs  de  cette  nature  sont  plutôt  la  règle. 

l.aplace.  d'après  de  liantes  considérations  matliématiques,  avait 
cru  pouvoir  aflirnu'i-  qiu'  les  profondeurs  de  la  mer,  sur  notre 
planète,  étaient  comparables  à  la  hauteur  des  montagnes,  et  les 
prévisions  de  la  science  ont  été  réalisées  lorsqu'on  s'est  occupé  de 
sonder  la  mer  pour  l'immersion  des  cftbles  électriques  vers  1830. 

—  La  uier  est  le  seul  spectacle  qui  soit  toujours  varié  et  toujours 
le  même. 

—  C'est  la  mer  à  hoire  :  une  chose  très  difficile  à  faire. 

Si  jappiviiais  flu'IuTU,  les  sciences,  l'iiistoire ? 
Tout  cela,  c'est  la  mer  à  boire. 

(La  Fo.ntaim:,  VUl,  25.) 

—  Ésope  disait  qu'il  boirait  la  mer,  si  l'on  parvenait  à  détourner 
tous  les  fleuves  qui  s'y  jettent. 

~  Si  tu  veux  apprendre  à  prier,  va  sur  la  mer.  —  La  peur  rend 
dévot,  et  les  dangers  perpétuels  de  la  mer  tiennent,  pour  ainsi  dire, 
la  piété  en  haleine. 

—  Mal  de  mer.  (Voy.  nausée.) 

Merci,  du  latin  inercede?n,  récompense,  grâce,  faveur. 
Merres,  comme  merx,  se  rattache  à  mereri,  mériter. 
Du  sens  de  faveur,  prix,  merci  en  est  venu  à  l'idée  de  rachat, 
rançon,  pardon;  d'où  reconnaissance. 

—  Au  Moyen-Age,  le  vaincu  était  à  la  "merci  du  vainqueur,  c'est- 
à-dire  qu'il  était  réduit  à  se  racheter. 

A^oir  merci  du  vaincu,  c'était  recevoir  le  prix  de  son  rachat.  D'où 
l'expression  :  Qui  crie  merci,  aura  pardon. 

—  Les  frères  de  la  Merci,  encore  à  la  lin  du  xvin"  siècle,  rache- 
taient les  chrétiens  captifs  des  infidèles. 

—  Se  libérer,  c'est  de  même  racheter  sa  liberté  en  payant:  et 
paijer  (provençal  pagar),  vient  de  pacare,  apaiser. 

Le  latin  quietm  a  fait  (juilte  (tranquille). 

—  Merci  était  féminin,  il  est  devenu  masculin  (dans  le  sens  de 
témoignage  de  gratitude),  à  cause  de  la  locution  «  grand  merci  », 
où  l'on  prit  grand  [)0ur  le  masculin.  En  provençal  gramaci. 


«2  MF.n 

Mercier,  du  l;iliii  popiilnirt;  nn'rridriinn.  de  nitn-.r.  iii;ii'cli;iii- 
dise. 

IV/(  1(1  i/icrs  j)tis  fjifi'  no  /v//.  Vend  l;i  iii;ir(li;iiidisr  plus  (|ii'('ll(' 
no  vaut. 

Nonrjun  non  conijn'iird  phix  /as  tnerres  de  lor.  Nid  irMclirtcra 
plus  leurs  iiiarcliandises.  (Trailiidion  de  YA/iora/ij/jsf,  rli.  18.) 

En  l'oman  nicrcddaria,  niai'cliaiidiso  ;  incrcadier.  niarcliand  : 
mcrcat,  jnarcher  ;  mercandejar,  marchander. 

—  On  appelait  les  merciers  porte-paniers.  D'où  le  proverbe  : 
A  petit  mercier  petit  panier. 

—  Dans  le  Berry,  on  appelle  mercelot  un  petit  mercier  ambu- 
lant, porte-balle,  dont  le  commerce  est  peu  important,  un  colpor- 
teur. Il  y  a  aussi  le  berloJier  ou  bretelller,  qui  traîne  sa  petite 
voiture  avec  une  bretelle. 

—  Avant  1789.  Paris  avait  six  corps  ou  communautés  de  mar- 
chands. Les  merciers  formaient  le  troisième  corps.  Cette  corporation 
se  divisait  en  vingt  classes,  et  embrassait  une  infinité  d'arti(des  de 
fabrication  diverse,  tels  que  les  draps,  les  toiles,  pelleteries,  la 
chaudronnerie,  les  tableaux,  etc. 

IVlercure,  du  latin  iMercurius,  dieu  des  marchands  et  des 
voleurs.  (Voy.  marchand.) 

Mercuriale,  dérivé  du  précédent. 

On  appelait  mercuriale  une  assemblée  du  Parlement,  qui  se 
tenait  le  premier  mercredi  après  la  Saint-Martin  et  après  Pâques, 
pour  réformer  les  abus  de  l'administration  judiciaire.  On  y  faisait 
des  discours  pour  rappeler  aux  magistrats  les  devoirs  de  leur 
profession.  Comme  c'étaient  parfois  des  remontrances  sévères,  on 
■  étendit  le  sens  du  mot  à  toute  espèce  de  réprimande. 

Aujourd'hui  on  appelle  mercuriale  (a  mercium  cura)  la  fixation 
officielle  du  prix  du  blé  dans  les  marchés  publics. 

Merde,  latin  merdam. 
Terme  grossier,  ordurier. 
Synonyme  :  le  mot  de  Cambronne. 

Raltelais  l'a  souvent  employé.  Les  gens  grossiers  s'en  servent, 
comme  Cambronne,  pour  marquer  un  refus. 

—  Le  Temps,  du  16  août  1872,  donne  la  relation  officielle  d'un 
procès  de  cour  d'assises  où  l'accusé  s'est  obstiné  à  ne  répondre  que 
par  ce  mot  aux  questions  du  président. 

—  M.  Vatout  avait  l'amabilité  un  peu  Cambronne  -.  la  chanson 


MER  53 

qu'il  pivlcrail  ô\;\\{  colli»  ([ii'il  ii\;iit  écrite  sur  le  iiiairo  d'Eu.  (Com- 
tesse de  Bass:invilU>.  186G.) 

Mère,  du  latin  utnircm.  Provençal  maire. 

A  la  mémo  racine  se  l'apportent  :  mamelle,  maman,  marraine. 

Une  mère  est  la  seule  peisonne  dont  on  puisse  être  sûr  d'être 
aimé. 

Le  cœur  d'une  uit-rc  est  un  aliime  au  fond  duquel  on  trouve 
toujours  le  pai'don. 

Les  blessures  des  mères  n'ont  pas  de  cicatrices. 

La  mort  d'une  mère  est  le  premier  cliaiirin  qu'on  pleure  sans  elle. 

Mérite,  du  latin  mcrituni.  Provençal  niérit. 

Le  mérite  excite  l'envie  :  on  jette  des  pierres  à  l'arhre  chargé  de 
fruits. 

La  personne  dont  on  médit  le  [dus  est  quelquefois  la  meilleure, 
de  même  que  souvent  le  fruit  le  plus  exquis  d'un  arbre  est  cellii 
que  le  l)ec  des  oiseaux  a  le  plus  impitoyal)lement  déchiré.  (Swift.) 

L'envie  et  la  cabale  ne  peuvent  rien  contre  le  vrai  mérite.  On 
peut  éteiiuli'e  une  chandelle,  mais  non  le  soleil.  (Weiser.) 

Mériter,  dérivé  de  mérite,  gagner,  acquérir. 
Emeritus  miles.  Soldat  qui  a  obtenu  son  congé. 
Synonymes  :  il  l'a  bien  mérité  ;  il  ne  l'a  pas  volé  ;  c'est  pain 
bénit. 

Merlan.  Ce  nom  trivial  donné  aux  perruquiers  date  du  .wii^ 
siècle.  Jusqu'à  1800,  on  mettait  de  la  poudre  sur  les  cheveux  :  les 
coiffeurs  en  étaient  littéralement  couverts,  et  ressemblaient  à  des 
merlans  que  l'on  a  roulés  dans  la  farine  pour  les  frire. 

...Les  perruquiers  qu'on  appelle  merlans  parce  qu'ils  sont  blancs. 
(Journal  de  Berlin,  18o2.) 

Merle,  du  latin  merulam.  oiseau  noir. 

Le  merle  est,  en  effet,  d'un  beau  noir;  mais  les  merles  blancs  ne 
sont  pas  aussi  rares  que  pourrait  le  faire  supposer  le  dicton  popu- 
laire :  «  Si  tu  fais  cela,  je  te  donnerai  un  merle  blanc  »,  en  parlant 
d'une  chose  qui  parait  impossible. 

Les  Latins  disaient  :  Alhu  aris,  une  l'ai'eté,  pour  désigner  une 
Lucrèce,  une  Pénélope,  tout  ce  qui  est  difficile  à  rencontrer. 

—  On  sait  maintenant  qu'il  y  a  des  merles  blancs  en  Auvergne  et 
en  Savoie  :  tout  comme  on  trouve  des  cygnes  noirs. 

—  C'est  un  dénicheur  de  merles  :  un  fin  merle  :  un  homme  rusé. 


—  A  d'niilres,  dénirlieiirs  de  merles  !  Cest-;'i-dire  :  vous  n«;  incn 
rontoroz  pas. 

Un  jeune  vilUijiCois  se  confessa  à  son  cnrc  d'avoir  rompu  la  liaie 
du  voisin  pour  reconnaître  un  nid  de  merles  :  «  —  Et  les  avez-vous 
pris?  —  Non,  ils  étaient  trop  pelils  :  mais  samedi  soir,  j'irai  les 
prendre  poni-  les  fricasser  le  lendemain.  «  Le  <iiré  les  dénicha  le 
samedi  malin.  Le  paysan,  rpd  s'en  doiila.  se  promit  d'être  pins 
discret  à  l'avenir.  [/anné<'.  sni\ante  il  reloiii-na  à  confesse:  «  — Mon 
père,  dit-il,  je  m'accuse  d'aimer  n\u\  jenne  lille,  et  je  vais  la  voir 
quand  tout  le  monde  dort.  —  Quel  à,ue  a-t-elle  ? —  Qnin/.e  ans. 
—  Belle?  —  La  plus  jolie  du  villa.tie.  —  Et  dans  quelle  maison 
demeure-t-elle  ?  —  A  d'antres,  dénicheur  de  merles,  répliqua  le 
manant  :  on  ne  m'attrape  pas  deux  fois.  »  —  A  curé  finaud,  paysan 
madré. 

Merluche,  dn  latin  mai'is  lifcius,  hrochet  de  mer  (ou  du  même 
radical  que  merle). 

On  l'a  appelée  aussi,  dans  l'antiquité,  nne  de  mer. 

Les  Hollandais  out  nommé  une  sorte  de  morue  très  desséchée 
slock-fich  (poisson-hois),  à  cause  de  sa  dureté,  ou  parce  qu'on  la 
ramollit  à  coups  de  Ijàton  avant  de  la  mantier. 

IVlerveille,  dn  latin  mirabilia,  devenu  ynirU)ilia. 

—  C'est  la  huitième  merveille  du  monde  I  c'est-à-dire  chose  digne 
de  figurer  à  côté  des  sept  merveilles  des  anciens. 

Les  sept  merveilles  étaient  :  les  Pyramides:  les  .lardins  suspendus 
de  Babyloue;  le  Tombeau  de  Mausole  :  le  Temple  de  Diane  à 
Éphèse  ;  la  Statue  de  Jupiter  Olympien,  de  Phidias  ;  le  Colosse  de 
Rhodes  ;  le  Phare  d'Alexandrie. 

IVIés,  du  latin  minits,  moins  ;  me.  devant  une  consonne. 
Préfixe  de  valeur  diminutive,  devenu  péjoratif  :  méuarde,  méses- 
timer, mésuser,  mépriser. 

•.    iVIess,  uiot  anglais,  emprunté  lui-même  au  français  inefs. 
Réunion  d'individus  mangeant  ensemble. 
Dîner  des  officiers.  (La  popote  est  celui  des  sous-officiers.) 
Le  glossaire  de  Ducange  donne  :  Prendre  Metc,  manger  ensemble 

pendant  les  travaux  de  la  moisson.  (De  l'an  1447.) 

lYlessaline,  nom  historique. 

C'est  une  Messaline  :  une  femme  dél)auciiée. 

Messaline,  célèbre  par  ses  débauches,  était  issue  de  la   nolile 


MKS  o5 

f;iiiiill('  dos  M('ss;il;i.  Kllc  épousa  Claude,  souilla  la  (•oiiclic-  iiui)ériale, 
l't  alla  jusipi'à  (''[xuisci'  publiquement,  du  \i\anl  de  sou  luari,  le 
jouue  Siliiis.  I^lle  a  eu  le  triste  prix  i  lé  et!  de  laisser  sou  uoui  pour 
désieuer  loulc  feuiiue  livrée  à  la  déhauclie  et  au\  déiwrdeuieuts  des 
passions. 

lYlesse,  de  riiél)reu  missah,  oiïrande. 

Ou  le  lait  louiiuiiuément  venir  de  /nensa.  Mais  il  vient  plut(U  du 
latin  ecclésiastique  missa,  action  de  congédier. 

—  La  formule  :  ifr.  //tissa  est  était  primitivement  :  ite,  me/isa 
csi,  à  cause  des  agapes  que  les  premiers  chrétiens  taisaient  dans 
les  églises  après  le  service  divin. 

Mi'/isas  f'arii'hri/\t  co/n//ii(/ies,  et  perarla  sinaxi  post  sacra- 
//ie/ifo/'/(//i  cn/iu/i/i/iio/ie//i,  i/iiha/it  roiHHcium.  (J.  Chrysostome, 
Ho)/iélie.  27.) 

—  De  //lissa  ad  /ne/isa//i.  Proverbe  claustral,  pour  dire  que  les 
moines  passent  de  l'église  au  réfectoire. 

—  Chez  les  Grecs,  à  la  lin  de  la  cérémonie,  le  prêtre  disait: 
«  Oue  le  peuple  se  retire.  » 

—  Chez  les  Romains,  un  crieur  [)ublic  [)rononçait  le  mot  ex  te//iple, 
qui  est  Tabréviation  de  exire  e  templo  (?),  et  qui,  dans  la  langue 
avait  pris  la  signification  adver]»iale  :  sur  le  champ,  aussitôt  {ex 
tez/ipulo). 

—  M.  de  Chevalet  dit  que  //lissa,  en  bas-latin,  a  été  dit  pour 
7/iissio,  permission  de  se  retirer,  congé.  D'après  lui,  la  formule 
qui  termine  l'office  divin  signifierait  :  «  Allez,  c'est  permis  »  ;  ce 
sei-ait  par  ignorance  de  la  signification  de  ce  mot  7)iissa  que  l'office 
a  pris  le  nom  de  messe,  et  que  l'on  a  traduit  dans  les  paroissiens  : 
«  Allez- vous-en,  la  messe  est  dite.  » 

—  Messe  basse  :  dite  par  un  seul  prêtre,  sans  accompagnement 
de  chant. 

Messe  noire  :  messe  des  morts. 

Messe  rouge  :  celle  que  l'on  célèbre  lorsqu'une  cour  de  justice  est 
installée  pour  la  première  fois  dans  ses  fonctions. 
Messe  sèche  :  sans  communion. 

—  Messe  de  chasseur,  de  saint  Hubert  :  dite  à  la  hâte. 

—  Messe  paresseuse  (Moye/i  de  p<i/'ae/ii7\.  ch.  80).  On  appelait 
ainsi  la  messe  qui  se  disait  entre  onze  heures  et  midi. 

11  y  avait  à  Notre-Dame  un  autel,  distingué,  dans  les  anciens 
titres,  sous  le  nom  de  alta/'e  pi<j/-oru//i,  autel  des  paresseux,  où  se 
disait  la  dernière  messe  de  la  journée. 


m  MET 

—  Messe  de  commères  :  de  relevnilles,  dans  le  Berry. 

—  Cliiimpfort  raconte  que  le  cardinal  Maury,  éUint  jeune  et  du 
peuple,  disait  des  messes  à  G  sous.  Un  curé  les  avait  eues  à  20,  les 
avait  cédées  à  un  aumônier  pour  12,  et  l'ahhé  Maury  les  avait  eues 
de  «eliii-ci  à  (J. 

Mesure,  du  latin  inenaiiram  :  d'où  aussi  :  diincusion. 

—  Les  inesures  romaines,  dont  on  s'est  ser\i  iuscpTcn  1840, 
étaient  empruntées  aux  diverses  parties  du  corps  humain  :  le  [)ied, 
le  palme,  le  doi,ct,  le  pas.  la  coudée,  la  brasse,  etc. 

—  Les  mesures  de  lon.aiieur,  chez  les  Romains,  sont  exprimées 
dans  les  cinq  vers  suivants  : 

Qiialtuor  ex  granis  dii/iliis  coinpnnUur  uniis  ; 

K-sl  iinalcr  in  jjahiio  liifiUus  ;  qualer  in  pedc  pabnu-'s  ; 

Qhin(iue  pedes  pasmiin  fnciunl,  passas  qunque  cenlunt 

Vi(/inli  (juinque  stadium  dant ;  <it  miliare 

Orlo  dahant  stadia;  (lioc  ?)  diiplicritum  dot  Ubi  leucam. 

Ce  qui  signitie  que  le  doigt  se  partageait  en  quatre  grains,  (pie  le 
palme  était  de  quatre  doigts,  le  pied  de  quatre  palmes,  et  que  cinq 
pieds  formaient  le  pas.  Le  stade  était  de  125  pas  :  huit  stades  for- 
maient le  mille,  et  deux  milles  la  lieue. 

Le  mille  était  exprimé  par  inil/e  passus,  ou  M.  P.,  ou  niiUtire 
(sous-entendu  saxum),  ou  miliarius  (sous-entendu  lapis). 

—  C'est  pour  étabhr  un  type  unique  et  universel  de  mesures  que 
l'on  a  pris  pour  point  de  départ  les  dimensions  de  la  Terre. 

Meta,  mot  grec  devenu  préfixe  et  marquant  succession,  change- 
ment, transformation. 

Métaphore,  mot  grec  ;/?c/ff7>Ao/Y^  transposition  :  de  meta  et 
de  phéro. 

Figure  de  grammaire,  qui  consiste  à  transporter  le  sens  d'un 
objet  à  un  autre,  par  suite  d'une  comparaison.  Ordinairement  elle 
a  pour  but  de  donner  au  discours  plus  de  vivacité  et  de  brièveté  : 
c'est  un  lion,  se  dit  pour  :  il  est  courageux  comme  un  lion. 

Le  langage  primitif  n'exprime  que  des  sensations.  Comme  les 
mots  sont  moins  nombreux  que  les  idées,  il  a  fallu,  pour  exprimer 
toutes  les  formes  de  la  pensée,  se  servir  dolijets  matériels  dési- 
gnant des  idées  abstraites. 

Tous  les  mots  abstraits  ont  commencé  par  désigner  un  objet 
tangible,  un  acte  matériel,  une  qualité  physique  :  ainsi  les  diffé- 
rentes opérations  de  l'esprit  qui  concernent  la  pensée  sont  toutes 
exprimées  par  des  mots  indiquant  un  acte  matériel. 


MET  57 

Dans  le  mot  réfléchir^  l'esprit  est  comparé  à  mie  surface  plane 
et  polie  où  les  objets  se  rélltHenl  comme  dans  un  miroir,  et  l'image 
qui  en  résulte  est  la  l'éllexion  morale. 

Penser,  du  latin  jtensare,  nous  montre  l'esprit  pesant  les  objets 
comme  dans  une  balance. 

Délibérer,  répondre,  dérivent  aussi  de  l'idée  de  poids  et  de 
l.ialance. 

Décider,  c'est  tranclu'r.  couper  un  nœud,  une  difliculté. 

Apprenilre,  c'est  saisir  une  idée,  l'appréhender  au  col,  s'en 
emparer. 

Distinguer,  c'est  teindre  de  diverses  nuances  :  comme  désigner 
les  choses,  c'est  les  dessiner. 

De  même  enseigner,  montrer  par  signes. 

Voilà  pourquoi  la  personnitlcation  est  chose  si  commune  dans  le 
langage  ;  voilà  pourquoi  l'on  dit  :  la  croupe,  les  flancs,  les  gorges, 
le  pied  d'une  montagne;  les  entrailles  de  la  terre;  les  bras,  les 
bouches  d'un  fleuve  ;  le  sein  des  flots. 

Jésus-Christ  a  été  appelé  VAgneaif,  parce  qu'il  avait  toute  la 
douceur  d'un  agneau. 

lYlétaphysique,  du  grec  tneta  et  phgsica. 

Science  qui  a  pour  objet  l'étude  de  l'âme,  des  facultés  de  l'enten- 
dement humain,  des  idées.  C'est  ce  qui  dépasse  les  choses  de  la 
nature  ou  physiques. 

La  métaphysique  est  le  roman  de  l'esprit.  (Voltaire.) 

IVlétathèse,  du  grec  métathésis,  déplacement. 
C'est  la  transposition  d'une  lettre  dans  un  mot. 
Ainsi,  de  l'allemand  Hunover,  nous  avons  fait  Hanovre  ;  berbis 
est  deveuu  brebis,  et  beurrage,  breuvage. 

IVlétayer,  du  bas-latin  medietarium,  de  ?7iedietatem,  moitié. 
Fermier  qui  garde  pour  lui  la  moitié  de  la  récolte  et  donne  l'autre 
moitié  au  propriétaire. 

Métempsycose,  du  grec  métempsychosis,  de  niéta,  change- 
ment, et  de  empsgchoùn,  animer. 

Transmigration  des  âmes  d'un  corps  dans  un  autre.  Cette 
doctrine  est  une  ébauche  imparfaite  de  celle  de  l'immortalité  de 
l'âme. 

Lucrèce  appelle  cette  croyance  un  officieux  mensonge,  qui  délivre 
des  frayeurs  de  la  mort,  et  rassure  l'esprit,  qui  espère  revivre 
dans  un  autre  corps. 


58  mi<:t 

l*\lli;i.L!()r(' iiv.'iil  pris  rcWt'  opinion  dos  aiicii'iis  hiMliiii.iiics  :  clk' 
existe  encore  dans  l'Inde  et  en  Chine. 

—  Les  Eoypiiens  nietl;iient  dans  les  tombeaux  nn  scarabée, 
parce  que  le  scarabée  meurt  et  renaît  trois  fois  comme  la  chenille, 
et  qu'ils  pensaient  (|ue  J)ieu  ne  peut  pas  faire  moins  pour  l'Iiomme 
qu'il  ne  fait  poui-  rinsede. 

lYlétier,  du  lalin  ininislcriiim.  métier.  ^a;:iie,-pain. 

—  (ihacun  son  métier  <'t  les  vaches  seront  bien  .!i<''irdées.-(Voy. 
rnche..) 

Tout  va  bien,  lorsque  l'on  ne  l'ait  que  ce  que  l'on  doit  et  que  l'on 
sait  faire. 

Prover])e  Irivial,  mais  (rès  vrai,  à  une  époque  où  lout  le  monde 
se  croit  propre  à  tout,  excepté  à  i^arder  les  vaches. 

Aijc  qnnd  agifi. 

(Tkhknck.) 

(Occupez-vous  de  votre  métier.) 

In  propria  pelle  quicsrcre. 

(Rester  dans  sa  spécialité.) 

iVe,  sutor.  nlfra  crepidnm.  Pline  {Uisl.  nat.,  lioj  cite  cet  ancien 
proverbe  attribué  à  Apelle. 

Celui  qui  est  tout  entier  à  son  métier,  devient  un  prodige.,  s'il  a 
du  génie  ;  s'il  n'en  a  [)as,  il  est  impossible  qu'il  ne  s'élève  lias 
au-dessus  de  la  médiocrité.  Heureuse  la  société  où  chacun  serait  à 
sa  chose,  et  ne  serait  qu'à  sa  chose  !  (Diderot.) 

Ne  fît-on  que  des  épingles,  il  faut  être  enthousiaste  de  son  état 
pour  y  exceller. 

Qunm  scit  quisque  libens  ccnscbo  crcrceat  arlem. 

(Hou  ACE.) 

(Je  suis  d'avis  que  chacun  exerce  le  métier  qu'il  connaît.) 

Navila  de  venlis,  de  tauris  narrât  arator  ;   . 
Enuinerat  miles  ruinera,  pasior  ores. 

(PUOPERCK,  I,  43.) 

Quand  Hippocrate  escrit,  il  n'escrit  pas  de  musique.  (Montaigne.) 

—  Maître  André,  perruquier  de  Voltaire,  qui  n'avait  pas  inventé 
la  poudre,  s'avisa  de  faire  une  tragédie  en  cinq  actes  :  fe  Tremble- 
ment de  terre  de  Lisbonne  (^1736,  in-8°).  11  la  dédia  à  l'illustre  et 
célèbre  poète,  M.  de  Voltaire,  qu'il  appelle  «  Monsieur  et  cher 
confrère  ».  Voltaire,  qu'il  avait  consulté,  s'était  borné  à  lui 
répondre  :  «  Maître  André,  faites  des  perruques.  » 


MKT  o9 

—  En  1818.  on  nomma  sous-piTtVt  ;'i  ('laiiiccy  un  incnnisier 
parfaitement  incapable  romnic  adininisiralciir.  I)ii|iin  aiiir.  à  ipii 
les  lialiitants  adressaient  leurs  plaintes,  leur  répondit  avec  un 
sonrire  ironique  :  o  Votre  anioiii-propre  est  fi'oissé  d'avoii'  un 
sous-préfet  inennisicr.  Je  le  comprends  :  vous  eussiez  préféi-é  un 
éiiénisle  :  mais,  les  ébénistes,  on  les  aarde  pour  les  préfectures.  « 

—  [*res(pie  tous  les  métiers  eviaent  une  vertu,  une  qualité  parti- 
culière :  le  soldat  doit  être  brave:  le  diplomate,  mystérieux:  le 
médecin,  .urave  :  le  prêtre,  ciiasle:  le  notaire,  probe... 

—  Faire  métier  dune  chose  :  la  faire  babituellcment. 

(Ju'im  Imiiiiièto  lidiuiae  une  fuis  en  sa  \  ie 
Fasse  un  sonnet,  une  odv,  une  élégie, 

Je  le  crois  liion  : 
Mais  iine  lun  ail  la  tète  hien  rassise. 
Quand  on  en  fait  métier  et  niarciiandise, 

.le  n'en  crois  rien. 

—  il  faut  avoir  tué  père  et  mère,  poui'  faire  un  |)areil  métier.  ?e 
dit  d'un  métier  très  pénible. 

On  dit  aussi  :  il  n'y  a  pas  de  sot  métier  ;  mais  les  métiers  on  l'on 
sue  sont  moins  aimables  que  ceux  où  l'on  ne  sue  pas. 

—  On  reprochait  à  d'Argenson  de  n'employer,  comme  agents  do 
police,  que  des  fripons  et  des  coquins  :  «  TrouAez-moi,  dit-il.  des 
honnêtes  gens,  qui  veuillent  faire  ce  métier-là.  >' 

—  Chaque  profession  aune  maladie  particulière  :  riiomme  trouve 
une  cause  de  mort  dans  le  travail  qui  le  fait  vivre.  (Legouvé.) 

Il  faut  gagner  sa  vie,  dût-on  en  mourir  !  Chaque  minute  de 
travail  m'enlève  une  heure  de  vie,  disait  un  ouvrier  en  mercure. 

—  Il  n'y  a  si  petit  métier  qui  ne  nourrisse  son  homme. 
Sua  cuùjue  ars  pi'o  viatico  est.  (Proverbe  latin.) 

—  Un  nis  à  qui  son  père  n'avait  pas  fait  apprendre  un  métier, 
était  dispensé,  par  la  loi  de  Selon,  de  le  nourrir  dans  sa  vieillesse. 

—  Le  Coran  recommande  à  tous,  même  aux  fils  des  rois, 
d'apprendre  un  métier  et  dy  travailler  quehpies  heures  chaque 
jour  :  «  Prends  un  rabot  ;  c'est  une  arme  qui  te  fera  combattre 
cette  maladie  de  l'âme,  cet  aflreux  poison  de  la  vie  qu'on  appelle 
l'ennui.  » 

—  11  y  a  des  métiers  si  modestes,  si  infimes,  (pi'ils  ne  i)eu\ent 
s'exercer,  même  exceptionnellement,  que  dans  des  \illes  comme 
Paris. 

Tels  sont  ceux  de  :  fabiicauts  de  devises  pour  confiseurs,  ...de 


60  MEU 

pr-iinellcs  poiiryoïix  crevés,  ...de  trous  pour  écuraoires,  ...de  verres 
noircis  pour  les  éclipses.  Il  y  ;i  forcément  du  cliômajre. 

—  Quand  le  raniasseur  de  bouts  de  cigares  a  K^Koé  vingt  sous 
par  jour  à  son  métier,  il  s'estime  heureux;  mieux  vaut  être  agent 
de  change. 

—  Il  n'y  a  pas  de  sot  métier,  il  n'y  a  cpie  de  sottes  gens. 

La  seconde  partie  de  ce  proverbe  est  une  leçon  un  peu  vive  à 
l'adresse  de  ceux  qui  oublient,  dans  leur  dédaigneuse  vanité,  que  le 
travail  ennoblit  toul,  et  qu'en  présence  du  devoir,  il  n'y  a  ni  grand 
ni  petit  métier,  mais  qu'il  y  a  [loiir  tous  un  égal  mérite  à  remplir 
sa  lâche. 

Métis,  du  bitin  mixlitlua  (pour  mîxliis,  mêlé). 
Se  dit  (le  riiomme  et  des  animaux  issus  de  deux  races. 
Se  dit  aussi,  par  analogie,  des  végétaux  nés  de  deux  espèces 
différentes. 

—  En  espagnol,  meiico  désigne  l'enfant  né  d'un  Espagnol  et 
d'une  Américaine,  ou  d'une  Américaine  et  d'un  Européen. 

Créole  s'emploie  de  même. 
(Yoy.  mulet,  hybride.) 

Métonymie,  mot  grec  :  changement  de  nom. 

Cette  tîgure  emploie  la  cause  pour  l'effet,  et  vice  versa,  le  signe 
pour  la  chose  signifiée  ;  le  contenant  pour  le  contenu  :  la  partie 
pour  le  tout,  etc. 

Dans  ce  vers  de  Boileau  : 

Faire  trembler  Mempliis  et  pâlir  le  Croissant, 

il  y  a  deux  métonymies.  Mempbis  est  pris  pour  les  Égyptiens  et  le 
Croissant  pour  les  Musulmans. 

lYlètre,  du  grec  métron,  mesure. 

La  dix  millionnième  partie  du  quart  du  méridien  terrestre, 
compris  entre  le  pôle  et  l'équateur  :  l'équivalent  de  3  pieds  11  lignes 
296  millièmes. 

iVIétromanle,  de  métroji.  mesure,  mania,  folie. 
La  manie  des  vers.  Mot  créé  par  Piron  pour  servir  de  titre  à  sa 
comédie  en  cinq  actes,  représentée  le  10  janvier  1738. 

Meunier,  ancien  français  molinier  :  latin  molinarium  ;  pro- 
vençal molinier,  mounier. 
En  argot,  on  appelle  les  meuniers  gripis.  Ce  mot  est  synonyme 


MÏI)  '    61 

(lo  \()l('iii'.  f,ts  iiKMiniers  jcissaiciil  [tour  IVipons.  Comme  les  proru- 
l'ciirs  et  aiilrcs  .ueiis  de  loi,  (IIMUi  ;i|i|»t'l,iil  (ji-djiiyndns. 

Fidèle  comme  un  meunier,  dit  iroMi(iiiement  Oiidiu  dans  ses 
Cil rioa  ités  f'ni n  <^a  ises . 

Rabelais  (111,  2)  les  ranpe  paiini  les  gens  soumis  à  Mercure. 

La  chose  la  jdus  hardie  du  monde,  (-"esl  la  ciiemise  dun  meusnier, 
...parce  (pi'elie  prt.Mul  tous  les  joiii-s  un  larron  au  collet.  {Tnbdrin.) 

—  En  aruot.  le  diable  est  appelé  bonl/nnjev,  soit  parce  que  le 
diable  met  au  four  de  l'enfer,  soit  i)lut('»t  parce  que,  au  Moyen-Aoe, 
le  boulaniier  était,  coinnu^  le  meuniei',  4'épulé  voUïur,  fripon  lielTé. 

—  Devenir  d'évèque  meunier,  ou  d'évêque  aumônier. 

Les  Latins  disaient  :  ah  cqiiis  ad  asino.t  :  passer  des  chevaux 
aux  ânes.  C'est  passer  d'une  condition  élevée  à  une  condition 
intime. 

Proverhi'S  analogues  :  Aujourd'hui  chevalier^  demain  vacher. 
Aujourd'hui  en  chère,  demain  en  bière.  Cent  ans  bannière,  cent 
ans  civière. 

Épiphane,  évèque  de  Nevers,  en  1547,  s'enfuit  à  Genève  avec 
une  femme  dont  il  était  épris,  quitta  rÉglise,  et  se  fit  meunier  pour 
vivre. 

L'abbé  Torme,  archevêque  de  Bourges,  ayant  renoncé  à  l'état 
ecclésiastique,  en  1764,  s'est  marié  et  a  fait  valoir  un  moulin. 
{Chronique  de  l'Œil-de-Bœuf.) 

Meurtrières,  de  meurtrir  :  origine  germanique. 

Feules  praliijuées  dans  l'épaisseur  des  murs  des  fortifications, 
pour  tirer  sur  l'ennemi. 

On  les  appelait  autrefois  barbacanes,  petit  canal,  à  cause  de  leur 
ressemblaïu'c  avec  les  ventouses  que  l'on  fait  dans  les  murs  pour 
récoulement  des  eaux. 

Mezzetin,  personnage  boulVou  de  l'inti'igant,  dans  l'ancienne 
comédie  italienne. 

Miauler,  onomatopée  qui  exprime  le  cri  du  chat,  ou  miaou. 

Micmac,  de  l'allemand  mischmasch,  de  mischen,  mêler. 
Intrigue  secrète  et  embrouillée,  dans  le  but  de  nuire.     » 

Midas,  nom  mythologique. 

—  Midas,  roi  de  Phrygie,  avait  obtenu  de  Bacchus  de  changer 
en  or  tout  ce  qu'il  toucherait.  Les  mets  qu'il  portait  à  sa  bouche  se 
changeant  aussi  en  or,  il  pria  le  dieu  de  lui  retirer  ce  funeste  don. 


Vd  MIE 

Le  dieu  lui  ordoniiii  iilor^'  de  se  Iciitirici"  d;iiis  le  P;iftolo,  (jiii  depuis 
r()iil;i  dii  s.ihle  d'or'. 

—  Les  oreilles  de  Midas.  (^e  iiicnie  priiict;,  choisi  coiiiiiic  jiiL''e 
dans  un  dél)at  enlre  Apollon  et  le  dieu  Fan,  adjnuea  soIlcuMMit  le 
prix  de  la  iuiisi(pie  au  dernier.  Apollon  l'en  punit  en  ralliihlanl 
d'oreilles  d'àuc 

Celte  faille  a  donné  lieu  au  proverbe.  (|ni  s'appliipie  à  la  sotte 
présomption  des  ignorants  (pii  iuoentce  (piils  ne  comprennent  pas. 

IVlidl,  niedius  et  dies,  le  milieu  du  jour.  So/e  iiydio. 

Va\  provençal  miejorn.  On  disait  autrefois  mi'ili. 

Ilui  au  matin  estions  en  nos  maisons,  aisés  et  manants,  et  à  niédi 
en  suivant,  sommes  conrnie  gens  en  exil,  quérant  noti'e  pain. 
{Journal  d'un  bourfjeols  de  Pains.) 

—  Midi  vrai.  Comme  le  soleil  parcourt  les  360  degrés  de  la  sphère 
en  des  temps  inégaux,  selon  les  saisons,  le  midi  vrai,  qui  est 
l'instant  précis  où  le  soleil  passe  an  méridien  d'un  lieu,  retarde  sur 
le  midi  moyen  de  14'  32"  le  11  février,  et  avance  de  16'  18"  le 
3  novembre. 

Le  soleil  est  d'accord  avec  l'heure  moyenne  des  liorloges  à  quatre 
époques  de  l'année  :  lo  avril,  13  juin,  i^^  septembre  et  23  décembre. 
(Voy.  chercher  midi  à  quatorze  heures.) 

IVliel,  du  latin  mel,  grec  inélL 

De  là  aussi  :  mélisse,  mélasse,  Malte  (abondante  en  miel). 

—  Le  miel  est  appelé  par  Virgile  :  Cœleste  donum. 
Pythagore  en  faisait  sa  nourriture. 

Pline  dit  qu'un  certain  Yedius  Pollion  était  arrivé  à  l'âge  de  pins 
de  cent  ans,  sans  infirmité,  en  se  nouri'issant  de  miel  et  se  frottant 
d'huile  :  Intiis  nielle,  extra  oleo. 

—  Le  mont  Hymette,  près  d'Athènes,  était  très  célèbre  à  cause 
de  l'excellent  miel  qu'on  y  recueillait. 

De  là  son  nom,  Hymelton,  en  grec,  signifiant  miel. 
Horace  (\\,  2,  lo)  se  moque  d'un  homme  délicat  qui  refuserait  de 
l)oire  du  vin  de  Falerne  s'il  n'était  adouci  par  le  miel  de  l'Hymette. 

Nid  Hymeltia  mella  Falerno 
Ne  biberis  diluta. 

—  Un  peu.  de  fiel  gâte  beaucoup  de  miel.  On  est  plus  sensiljle  à 
la  moindre  critique  qu'à  des  louanges  exagérées  :  un  sifflet  fait  plus 
de  mal  que  cent  bravos  ne  causent  de  plaisir. 

—  Bouche  de  miel,  cceur  de  liel.  On  se  méfie  des  gens  aux  paroles 


MU.  (wi 

doucoreiist'S  :  les  .illiii't'S  |i;ilt'liiit'S  sciiiMciil  miiiiiuicim-  iiii  ciir.iclrrc 
pcriido  :  ;iii  ris(|iii'  de  se  Iroiiipcr.  il  est  [(nidciil  de  sr  tcinr  en 
ttardo  cdiiliv  ces  iiiipiinMiccs, 

iVIien,  lien,  sien  :  MiiciciiiU'  loriiif  pour  nio/i.  /o/i.  so/i. 

IVlieux,  ;iii('i(Miii(Mii('iil  //lic/s:  du  liiliii  //if/ii/s. 

IVlièvre,  (tri^iiic  iiicerlaiiic. 

Adjectif  des  doux  .ueiires,  qui,  daiuvs  rAcadéiuie,  signilio  uu 
enfant  vif,  éveillé,  reinuanl.  uu  peu  malicieux. 

—  Dans  le  Malade  imaginaire,  Diafoirus  parlant  de  sou  (ils,  dit 
qu"il  n"a  jamais  été  uuèvre  ni  éveillé. 

Les  oufans  iiui  sdiit  mièvres 
Ne  gaignenl  juis  les  lièvres. 

—  Par  un  malentendu  inexplicable,  et  malgré  l'autorité  des 
auteurs,  et  de  rAcadénde,  on  emploie  aujourd'hui  ce  mot  dans  le 
sens  de  :  faible,  malingre,  délicat. 

lYlignard,  migiion,  niignot  :  vieil  allemand  minnia,  amour. 

Miynard  signifie  joli,  gentil.  D'où  les  dérivés  :  mignardise, 
menin(j).  mioclie(0- 

--  Le  grand-père  du  peintre  Mignard  s'appelait  More.  Henri  lY  le 
voyant  entouré  de  ses  six  enfants,  tous  officiers,  bien  faits,  dit  : 
«  Ce  ne  sont  pas  là  des  Mores  ;  ce  sont  des  Mignards.  »  La  famille 
prit  ce  nom. 

iYligraine,  du  e:rec  hêmikTania. 

Doideiir  qui    u'alïecte  cpie  la  moitié  de  la  tète. 

Rabelais  emploie  Iléniicraine  (iV,  37). 

Milieu,  du  latin  médium  lornm,  le  centre. 

—  Il  n'y  a  pas  de  milieu  :  il  faut  choisir  entre  deux  partis. 

Etre  [)lacé  entre  le  oui  ou  le  non.  Aon  est  tertium,  disaient 
les  Latins. 

—  Prendre  le  juste  milieu,  le  moyen  terme.  Le  juste  milieu  n'est 
ni  blanc  ni  noir,  il  est  gris. 

Le  juste  milieu,  en  politique,  est  un  système  négatif  et  sans 
caractère  décidé.  Cela  rappelle  l'homme  placé  entre  deux  selles  ;  et 
la  pensée  de  i*ascal  disant  qu'il  n'admire  point  un  homme  qui 
possède  une  vertu  dans  toute  sa  perfection,  s'il  ne  possède  eu 
même   temps,   au    même    degré,    la   vertu   o'pposée,   tel    qu'était 


64  MIN 

Ëpaminondas,  r[iii  avait  l'oxlrriiio  valoiir  joiiilf  ;'i  rcxliviiio  lionlé. 
Autrement,  ce  n'est  i»as  iiionlor,  mais  descendre. 

Kst  modns  in  rébus  ;  sunl  ccrli  ilcnitjuc  fines, 
ijitos  ullrii  ci  truque  tiequit  consislere  rectuin. 

(lloKAci;,  Sut.  1,  106.) 

Les  choses  ont  une  mesure  exacte,  chacune  a  des  limites  précises 
au-delà  et  en  deçà  desquelles  la  perfection  ne  saurait  exister, 
/n  îurdio  i^ir/its.  La  vertu  est  dans  la  modération. 

Mrtus  est  médium  vitiorum. 

(nuiiACK.  Épitrex  I.  18,  9.) 

Dans  une  étroite  couche,  le  sage  au  milieu  se  couche. 

—  Le  juste  milieu  en  politique  n'existe  pas.  La  vérité  est  que 
2  et  2  font  4  ;  l'erreur  dit  2  et  2  font  8  ;  arrive  le  parti  du  jn;ite 
milieu,  qui,  pour  concilier  les  deux  partis,  dit  2  et  2  font  G. 
(Lafayette.) 

Militaire  (vieux).  Synonymes  :  culotte  de  peau,  ou  encore  dur 

à  eu i  1-e. 

lYliltiade.  Les  trophées  de  Miltiade  l'empêchent  de  dormir.  Se 
dit  d'une  personne  jalouse  du  succès  d'un  rival. 

C'est  une  allusion  au  mot  de  Thémistocle,  qui  était  jaloux  de  la 
gloire  que  Miltiade  avait  acquise  par  ses  victoires. 

Mine,  honne  mine  (figure  colorée),  de  minium  {V). 

Diez  le  dérive  de  minnre,  comme  geste  de  f/erere:  ce  serait  la 
contenance,  l'allure. 

La  mine  est  l'air  qui  résulte  de  la  conformation  du  corps  et  du 
visage. 

Minois,  son  dérivé,  s'emploie  en  honne  part. 

—  On  dit  famihèrement,  de  quelqu'un  qui  a  mauvaise  mine,  qu'il 
est  minable. 

Il  ne  faut  pas  juger  des  gens  sur  la  mine. 

C'est  peut-être  que  je  paie  l'intérêt  de  ma  mauvaise  mine.  (Molière, 
Critique.) 

—  Faire  honne  mine  à  mauvais  jeu.  (Rahelais.)  C'est  faire  contre 
mauvaise  fortune  hon  cœur. 

Minimes,  du  latin  ntinimum,  le  plus  petit. 

Nom  d'un  ordre  religieux  fondé  au  xv«  siècle.  Les  minimes  portent 
un  costume  somhre,  hrun  marron,  qui  a  donné  le  nom  de  «  couleur 
minime  ». 

Ils  furent  appelés  «  Bonshommes  »,  parce  que  Louis  XI  appelait 


MIU  05 

'>  lionliniiimc  "  ItMir  tniKliilciir  l'"r;mc()is   de   l*;iiilo.   Lciii-   nom    de 
miitliiK's  csl  lin  litre  (rimniilili'. 

Les  jésuites,  moins  moclestes.se  loni  appo.loj'  «  révérends  père?  i. 

—  Vax  Provence,  les  femmes  |)iens(^s.  ;'i  la  suite  d'un  vœu  lait 
pendant  nue  maladie,  portent  le  minimt'  (/on  iniiiiine),  costume 
lait  détoll'e  de  cette  couleui'. 

—  L'usage  de  vouer  les  enfants  au  bleu  remonte  à  la  môme 
ori.uine. 

—  Le  nom  de  Billetles,  donné  à  un  autre  ordre  religieux,  et 
venant  du  vieux  mot  hille,  bllie,  chose  vile,  est  l'ait  dans  le  même 
esprit  d'humilité  (pie  celui  de  niitninea. 

iVlinistre,  du  latin  tnkiifilrnrn. 

Les  minislres  ont  été  appelés  à  l'origine  «  clercs  du  secret  », 
d'où  le  nom  de  «  secrétaires  d'État  ». 

—  On  cite  un  mot  cruel  et  malpi'opre  du  duc  de  Yilleroy  : 
«  11  faut  tenir  le  pot  de  chambre  aux  ministres  tant  qu'ils  sont  en 
place,  et  le  leur  \ersei-  sur  la  tète  quand  ils  sont  disgraciés.  » 

Minuit,  du  latin  médium  noc/is,  le  milieu  de  la  nuit. 
Synonyme  :  l'heure  du  crime. 

—  L'usage  a  lait  minuit  masculin,  quand  il  devrait  être  féminin, 
d'abord  parce  que  nuit  est  féminin,  ensuite  parce  que  l'article  qui 
précède  mi  est  féminin  dans  la  mi-carème,  la  mi-août,  quoique 
c(i7'(hne  et  août  soient  masculins. 

IVlinute,  du  latin  miniiUtm,  divisée. 

Les  minutes  sont  la  monnaie  du  tenq^s,  qui,  selon  les  Américains, 
est  de  l'argent. 

IVlinutie,  dérivé  de  minuiia,  chose  très  peu  importante. 

De  minimis  non  rurat  prœtor.  Le  préteur  ne  s'occupe  pas  des 
minuties. 

Aquild  non  rupil  muscas.  L'aigle  ne  prend  pas  les  mouches, 

Synonymes  :  s'occuper  de  minuties  ;  chercher  la  petite  bête. 

En  art,  en  littérature,  chercher  la  petite  bête,  c'est  se  donner 
beaucoiqi  de  nuil  pour  ce  qui  n'en  vaut  pas  la  peine. 

lYlioche,  de  mica,  mie,  terme  familier. 

On  peut  le  rapprocher  de  tnion,  avec  idée  de  mignon,  mignard. 

Miracle,  du  latin  miî'acu/um  (mot  savant). 
Prodige,  chose  étrange,  surprenante,  dont  la  cause  est  inconnue, 
et  théologiquement,  surnaturelle. 


66  MIR 

—  Jrsiisdlirisl  lil  son  pi'ciiiicc  iiiiiMclc  ;iii\  iiocos  do  C;m;i. 

—  I^;i  iMolIc,  (l;iiis  son  (ioimiic  des  Ajiùirrs.  dil  : 

\a'  iiiih'I  |i;irlc  ;iii  sourd  r'iiiiiin'  dr  l'iiilrmlrc. 

Yoil;'!  deux  iiiii-.iclcs  hieii  exprimés  diiiis  iiu  sci'S. 

—  K;iiro  des  mir-acles  :  se  siiiiialei'  dans  son  art. 

—  On  appelait  «  Cour  dos  Miracles  »  nn  quartier  de  Paris  où 
s'assemblaient  les  mendiants  et  les  gneiix  pour  passer  la  nuit  à 
faire  bonne  chère.  Le  miracle  était  que,  rentrés  le  soir  à  la  bauge, 
ces  estropiés,  ces  piètres,  ces  malingreux,  sal)Ouleux,  coquillards, 
tous  ces  mourants  étaient  soudain  rendus  à  la  santé.  Après  avoir 
mendié  tout  le  jour,  ils  quittaient  leurs  emplâtres,  leurs  béquilles, 
et  autres  engins  d'infirmités  simulées. 

Le  dernier  de  cos  refuges  à  truands  a  disparu  sons  la  pioche  en 
1799,  à  la  place  où  se  trouve  le  passage  du  Caire. 

IVIirliflore,  origine  inconmie.  Autrefois  mirU/ïor. 
Petit-maitre.  Peut-être  faut-il  y  voir  une  altération  de  mille  fleurs, 
parfumé  d'eau  des  mille  Heurs  ? 

Mirliton,  origine  inroi>nue. 

Cette  caricature  de  la  musique  instrumentale,  à  notre  époque  où 
la  poésie  n'est  plus  dans  les  mœurs,  couvre  de  sa  popularité  dés 
vers  rimes  en  spirale,  et  donne  un  refuge  aux  derniers  alexan- 
drins (?). 

iVlirobolant,  semble  tiré  plaisamment  de  myrnbolan,  pour 
m\irohalnn,  sorte  de  gland  de  la  famille  des  myrobolaiiées. 

Ce  gland  donnait  une  huile  d'où  les  anciens  tiraient  un  onguent 
très  estimé.  (Pline,  XIL  21  :  Horace.  OfMs\) 

Rabelais  appelle  niiroholan  un  fruit  des  Indes,  halanus  ungnen- 
larius,  aromatique,  astringent... 

—  C'est  le  nom  d'un  médecin  dans  la  comédie  d'Hauteroche, 
Crls))ui  médecin . 

Ici,  il  semblerait  composé  de  mire,  médecin  en  vieux  français,  et 
du  latin  bolus,  pilule. 

Quelques-uns  ont  voulu  le  rapprocher  de  merveilleux,  mirabilis, 
et  le  font  remonter  à  la  même  origine  que  mirabelle. 

—  Mirifique  s'emploie  dans  le  même  sens. 

Rabelais  en  a  souvent  fait  usage  :  mais  il  ne  s'emploie  plus  qu'^n 
style  liui'lesque. 

lYliroir,  de  mirari,  contempler.  Provençal  mirador. 


MIS  67 

Sviioiiyiiit'  :  iiiircliiid.  |i;ii-  une  .illiisioii  iiiMliLiiic  ;i  celui  qui  s'y 
\oi!. 

Les  Pi'écit'iiscs  (se.  5)  loiil  ;i|>|iolé  le  coiistMller  des  Gi-àces  : 
«  Venez  me  tendre  iei  dedans  le  conseiller  des  grâces.  « 

licls  conseillers  ah  i/ninz' n'ittiiillas 
Aportel  lioin  docan  cnscu... 
A(iiiis  pnc  quix  vol  ncoiih-iir. 

(I- tamenca,  380.) 

(Un  apporta  de\anl  cliaciin  lieaiix  miroirs  avec  grands  vantaux... 

là  se  peut  accoutrer  qui  veut.") 

Le  miroir  est  Icj  troisirme  (oil  de  la  femme.  (Cap""  Cook.) 

La  femme  qui  s'entend  dire  constamment  qu'elle  est  jolie,  trouve 

plaisir  ;'i  regariier  dans  un  miroii"  les  traits  sur  lesquels  elle  voit 

tous  les  yeux  s'arrêter. 

Fins  (Ir  Ih'iiUiI,  iniraU  d'ataor. 

(AuN.  iiK  .Markuii..) 

(Fleur  de  heaiité,  miroir  d'amour.) 

Iris,  cil  ce  luii'dir  loiijuiirs 
Vous  pouvez  \oii-  l'uljjet  (juc  jaime  : 
Je  voudrais  bien  toujours  de  luèmo 
Y  \oir  i'oljjet  de  xos  amours. 

(Insi'ri|itiiiii  siii'  un  miroir.) 

—  Omnibus  omnui.  —  Nonce  le  ijisuiii.  (Devises  écrites  sur  des 
miroirs.) 

—  Les  premiers  miroirs  furent  rapportés  de  Sidon  à  la  lin  de  la 
(piatriiMiie  croisade.  Venise  s'empara  de  la  découverte,  la  perfec- 
tionna et  en  lit  longtemps  l'objet  d'un  commerce  lucratif. 

Colhert  en  introduisit  la  fabrication  en  France  vers  lG(î(). 

lYlisérable,  latin  miserahUeni. 

Synonymes  :  gueux  comme  un  rat  d'église  (qui  n'a  rien  à 
manger)  :  nnnable;  penaillon  (Rabelais,  IV,  24)  ;  peineux,  besogneux. 

Les  Romains  avaient  nomnu';  Ffinon/'us  le  vent  favorable (?). 

Rafale,  ruiné  par  le  vent  de  la  mauvaise  fortune. 

Cette  épitliète  est  souvent  donnée  à  celui  qui  est  inalbeureux  par 
sa  faute,  par  les  crimes  qu'il  a  commis. 

IVIisèpe,  du  latin  niheriam. 

La  misère  est  lille  de  la  paresse,  et  sœur  de  la  médiocrité.  Gouime 
la  faim,  elle  est  mauvaise  conseillère,  et  souvent  devient  l'entre- 
metteuse de  la  prostitution  et  de  la  débauche. 

La  misère  mène  quelquefois  à  l'incondiiite  :  l'inconduite  mène 
plus  sou\ent  à  la  uiisère. 


68  MIS 

La  iiiisrrc  csl  une.  (•oiis(''(|ii('iir('  de  la  naliirc  liiiniaiiic -.  la  cliai'iK'' 
est  d'insliliitioii  (li\iii<'.  iDiipanloiiii.  iiiai-s  \H7'.\.) 

Misrrc  i^lall(lais(^  Miscrriinus  :  riiillirlc  aj(»iil<''('  an  nom  do 
(]|iallcrl(»n  snr  son  (oiiilicaM.  à  Wcsiiniiistcr. 

L'élégance  llélric  de  la  niisrrc  en  liahils  noii's:  les  haillons  de 
ro|)Mlence  ;  l'associaiion  liidensc  dn  Inxc  cl  de  la  inisrre... 

—  AJisi'/r,  dans  l(^  laniiauc  du  marin,  a  |)lnl(')l  la  siiiniliralioii  d(; 
fatigue  excessive,  de  péril  prolongé,  (jmc  celle  de  pénurie  et  de 
déniiemont. 

Miserere,  mol  lalin  :  Ayez  pilié. 

C'est  le  début  du  psaume  oO,  le  qualrième  des  psanmes  de  la 
pénilence.  David  le  composa  après  que  le  prophète  Nathan  hii  eut 
reproché  le  criuie  qu'il  avait  commis  avec  Bethsabée. 

—  Il  eu  a  eu  depuis  tniserere  jusqu'à  vUulon'.W  a  été  hieu  battu. 
(Rabelais.  III,  13.) 

Les  uioiues  se  donuaicut  mutuellement  la  discipline  par  esprit  de 
pénitence,  et  pendant  cette  flagellation,  on  chantait  le  psaume 
3Iiscrere.  La  flagellation  la  plus  longue  durait  du  premier  mot. 
misci^ere.  jusqu'an  dernier,  qui  est  i-ilu/os-. 

Miséricorde,  du  latin  miscricordiam,  cœur  compatissant. 
Étymologie  burlesque  :  miscrc  et  corde. 

C'est  un  manteau  de  miséricorde,  d'autant  que  la  misère  y  est 
évidente,  et  la  corde  pareillement.  [Les  Jeux  de  l Inconnu,  1645.) 
J\Iisericordia  rilhun  est.  (Sénèque,  De  la  Clémence.) 

Mistral,  anciennement  maisiral.  forme  provençale  de  vinfji^- 
tral. 
Le  maistral...  silller  à  travers  les  antennes.  (Rabelais.  lY,  18.) 
Vent  du  nord-ouest.  Le  balai  du  ciel. 

—  Maître  vent.  C'est  ainsi  que  Rabelais  (lY,  44)  appelle  le  gros 
fessier  de  Guélot,  «  d'où  le  vent  punais  sortait  comme  d'une  magis- 
trale éolipyle  » . 

—  Ce  vent  prend  naissance  au  mont  Yentoux,  c'est-à-dire  venteux; 
Les  Grecs  l'appelaient  A-erA^/os  ;  les  Latins  circius  :  dans  quelques 

localités  du  Midi,  on  l'appelle  encore  cers. 

Selon  Strabon,  le  mistral,  surtout  dans  la  Cran  d'Arles,  campus 
lapideus,  renversait  souvent  le  cheval  et  le  cavalier  :  equum  et 
ascensorem  dejicit.  ~  Aulu-Gelle  dit  qu'il  renversait  les  hommes 
et  les  chars.  Il  produit  encore  aujourd'hui  les  mêmes  effets,  et  il  a 
plus  d'une  fois  renversé  des  trains  de  chemin  de  fer  sur  la  voie  ! 


.MOI)  69 

l/tMii|it'i-('iii-  AiiLiiislo  lui  avilit  rimé  des  teniplos  à  Aiios  et.  à 
A\iLiiinii.  |M»iii'  apaiser  sdii  (•niirroiiv  :  mais  les  pi'iri'es  et  l'encens 
des  liiiiiiains  n'y  en!  rien  fait  :  il  continue  à  sévir  et  a  niéiMté  d'être 
mis  par  nos  pèi-es  an  ran.n'  des  Iléaux  de  la  Provence.  Il  faut 
con\('nii-  c('|MMi(lanl  t\\\v  son  aciion  n'est  i)as  toujours  niiisiliie  : 
s'il  l'eiiMM'se  les  clieininées,  s'il  enlève  quelques  cliapeau.v,  s'il 
commet  des  indiscrétions  à  l'éuai-d  des  dames,  en  re\aiiclie,  ce 
liniirru  hicnfaisanl  l'ail  soum'uI  la  liesoune  des  balayeurs  nninicipaux 
el  emporlc  hicn  îles  niiasnies... 

Mitonner,  de  fn/'/i.s,  dou\(0,  ou  de  mie? 

—  Miioii  se  dit,  dans  certaines  provinces,  de  morceaux  de  pain 
taillés  épais  pour  la  soupe  :  soupe  aux  mitons. 

—  Un  potage  mitonné  doit  rester  lonutenqis  à  cuii-e  à  petit  fcui. 

—  L'on.aiient  miton-milaine,  (pii  ne  fait  ni  bien  ni  mal,  serait 
alors  un  cataplasmi^  de  mie  de  pain. 

—  Au  ligure,  milonner  uni'  alTaii'(\  c'est  en  préparer  le  succès 
de  longue  main. 

lYlitraille,  pour  inildillc.  diiiiinnlif  du  \ieu\  français  miie^ 
menue  nionnaic. 

Se  dit  encore,  dans  le  lau,uau(^  familiei',  de  la  monnaie  de  cuivre. 

La  tiiUc  ou  mifdillc,  monnaie  llanuinde  valant  quatre  oboles,  fut 
supprimée  par  édit  de  Philip[)e  VI,  en  1332.  Un  amas  de  ces  petites 
pièces  s'appelait  mllrnilla:  et  l'on  a  transporté  le  uoni  à  la 
feri'aillc  formant  la  charge  des  canons. 

lYlitron,  dérivé  de  mitre  :  grec  mllra. 

Gai'çon  boidanger.  La  coilTurc  des  garçons  i)0ulangers  était  un 
bonnet  blanc  ressemidant  à  une  mitre. 

IVîode,  (lu  lalin  tnnihnn.  manière  d'être. 

Est  du  mascidin  (M1  philosophie,  eu  granuuaire,  dans  les  arts: 
du  féminin  ([uaiid  il  désigne  la  fantaisie  du  jour. 

—  Au  même  l'adical  se  rapi)ortent  :  modèle,  module,  moule, 
mod(''ralion,  modestie,  moderne,  commode,  accommoder. 

11  l'sl  mil'  (IlT'SSC  iiicoiisl.'iiilc,  iiicDiiinioiJi', 
Hizai'i'c  dans  ses  t;oùls,  Idlle  ru  ses  oriiemeiils, 
uni  parait,  luit,  rcvii'iit  et  iiail  dans  tous  les  tonips  : 
l'rol  ■•(■  (jlail  son  ik'tc,  et  son  nom  est  la.  mode. 

(  Vol.TAlIlh.) 

—  La  mode  est  un  imp(»t  (pie  l'industrie  du  pauvre  met  sur  la 
vanité  du  riche. 


70  M»  >I 

Lo  vrleinenl  s'csl  liicii  iicrl'cclioiim'-.  (li'piiis  l;i  feuille  de  \i'jiie  (h> 
nos  premiers  p.ireiils. 

—  Ce  qui  est  (fe  mode  est  destiné  ;'i  s;itisf;dre  ;iii\  cnin-ices  de  l;i 
mode.  Ce  qui  est  rÀ  la  mode  est  eu  faveur  acluelleuienl.  L'auteur 
qui  clierche  les  idées  de  luode.  luaufjue  d(î  sérieux  et  de  solidité: 
celui  dont  les  ouvrages  sont  à  la  mode,  peut  avoir  un  mérite  réel. 

—  Mode  annoiire  un  succès  de  iioùl  et  de  caprice;  rof/ne  m\ 
succès  d'estime  et  de  préférence.  La  fantaisie  fait  la  mode,  l'opiuion 
fait  la  vomie.  Vm^  actrice  est  à  la  uiode.  un  écrivain  est  en  \o,iiue. 

Modeler,  de  modèle  :  italien  //lodello,  dérivé  de  modulas  ;  hien 
plutôt  que  de  medullatn,  moelle,  quoique  le  Provençal  appelle 
moudèle  la  mie  de  pain,  matière  plastique,  pouvant  se  mouler. 

Modeste,  dérivé  de  tnodus  :  (\m  est  modéré. 

Modestie,  de  modesilam. 

La  modestie  est  le  lantiage  le  plus  captieux  de  la  vanité. 

La  modestie  est  une  vertu  d'hypociile. 

Sias  humili.s  c  non  vils. 

(Vie  (le  saint  Honorât.) 

(Sois  modeste,  non  vil.) 

La  fausse  modestie  est  le  dernier  ral'lluement  de  la  vanité.  (La 

Bruyère.) 

L'excès  de  modestie  est  un  excès  d'orgueil. 

(Chémeu,  Nathan.) 

La  modestie  est  à  la  vertu  ce  qu'un  voile  est  à  la  beauté  :  elle  en 
fait  ressortir  l'éclat.  (Petit-Senn.) 

Une  enveloppe  de  modestie  couvre  nos  erreurs,  et  garantit  nos 
talents  de  l'envie:  comme  une  blouse  cache  nos  méchants  habits  et' 
protège  les  bons. 

Mœurs,  du  latin  mores,  même  sens. 

Le  temps  moralement  nécessaire,  c'est-à-dire  habituellement, 
raisonnablement. 

Les  mœurs  sont  un  colher  de  perles  :  ('»tez  le  nœud,  tout  défile. 
(Restif  de  la  Bretonne.) 

Moi,  du  latin  me  {me  est  la  fornie  sourde,  moi  est  la  forme 
accentuée). 

La  piété  chrétienne  anéantit  le  moi  humain  ;  la  charité  chrétienne 
le  cache  et  le  supprime.  (Pascal,  Pensées.) 

Le  moi  est  haïssable.  (Pascal.) 


.M<il  71 

L"Kt;it.  (•"est  moi.  (Louis  XIV.) 

IliiiiU'  n'est  plus  dans  Uonu',  elle  es!  tonte  oiï  je  suis. 

Comme  moi  {s/'ci/f  cf  /los).  \...  (jiii.  sfcut  el.  nos.  cioclie  d'un 
(imI.  (Lo  GamotMis.  i 

Moine, du  e'i'cc  ///o///o.s-.  seul  :  de  }/ionos.  D'où  le  hiliii  /ikhu/c/u/s. 
l'i'ONtMiral  nioiif/c.  catalan  inonjc 

Co  mot.  (jiii  désignait  d'aliord  les  solitaires,  s'applique  au\ 
l'énohites.  (pii  mènent  la  vie  en  commun  dans  les  couvents,  mais 
séparés  du  monde. 

Les  solitaires  s'appellent  anachorètes  (du  urec  anarliôrco.) 

—  Faute  d'un  moine  l'ahliaye  ne  mainpie  pas.  (Voy.  (ihhai/c.) 

—  L'Iialiit  ne  lait  pas  le  moine.  (Voy.  Inibit.) 

Le  moine  el  la  liégiiine 
Sont  pires  (|a"ils  n'en  ont  la  mine. 

—  Le  moine,  c'est  un  personna,e-e  sans  jière  et  sans  enfants,  sans 
passé  et  sans  a\enii'.  loul  entier  an  [irésenl  el  à  ses  joies  maté- 
rielles :  (jui  ne  peut  loucher  à  la  femmes  qu'i'.n  la  souillant,  el 
accomplir  la  loi  de  la  nature  (pi'eu  violant  la  loi  d(;  la  famille  et  de 
la  société  ;  mélanue  d'i.unorance.  d'astuce,  de  cruauté,  de  lihertinaiic, 
d'oisiveté  crasse,  de  piété  stupide,  dont  le  capuchon  est  plus  fort 
(jue  lijen  des  coiii'onnes.  (Xisard,  Recia;  des  Deux-Mondes,  1835; 
reproduit  dans  Érasme,  p.  oi.) 

Le  moine...  ne  lahoure,  comme  le  paisant  ;  ne  liuarde  le  pays, 
comme  l'homme  de  guerre  ;  ne  guarit  les  malades,  comme  le 
médecin  :  ne  presche  ne  endocti"ine  le  monde,  comme  le  hon 
docteur  é\augéli([ue  el  pédagogue:  ne  [)orte  les  commoditez  et 
choses  nécessaires  à  la  Répul)li(iiie,  comme  le  marchand  ;  c'est  la 
cause  ponrquoy  de  tous  sont  huez  et  ahhorrez.  (lia hélais,  I,  40.) 

Les  moines  non  sunt  cnstrati  :  on  leur  donne  le  nom  de  pères. 

et  ils  font  en   sorte  (pie   leur  nom    soit  hien  appliqué.   (Érasme, 

(',olloi[ues.) 

Tout  paiiout  pères  on  les  nomme. 
Kl  de  faicl,  plusieurs  fois  advient 
Que  ce  nom  très  bien  leur  convient. 

(C.    .Ma.;ui.) 

Héi'anger  a  reproduit  cette  plaisanterie  dans  son  Roi  li  Yvelot  : 

Ses  sujets  a\aienl  cent  raisons 
De  le  nonuner  leur  père. 

Hahelais  appelle  les  moines  perpéiaous.^  en  tant  que  leurs 
confréi'ies  sont  perpétuelles. 


72  MOI 

(Ion;  (l'Imid.  in  (jiKî  ncino  iKisrilnr  ncr  inoriliiv,  ;i  dil  IMiiKî 
(V,  17)  (le.  ccrliiiiis  |»(M'|)(''Iii()ii.s  on  onnilrs,  ;i|i|)<'l(''S  lOssiMiiciis.  (jiii 
lialiilaieul  dans  les  (1i'<('i-(<  de  la  J'alcsliiic  (]"»'sl  ce  (jircnlciid 
lia  hélais. 

—  Moine  Itoiirrii  :  [tréleiidii  laiiUniie,  dont  ou  clVrayail  les 
enfants.  On  siiijposail  que  c'était  une  ànie  en  peine,  qui  [larcoiirait 
les  clicmins  et  maltraitait  les  passants.  On  le  représentait  errant  à 
travers  les  \illes  pendant  rAvenI,  coiiinic  l'iiidlipie  le  passage  de 
Uégnier  {Salira  XIV)  : 

Mais  après  en  clicrcliaiil  axdir  ;iiil;iiil  ('(iiini 
Qu'aux  Avcnls  de  Noi'l  l'ail  le  nio\ne  bourru. 

—  Bailler  le  moine.  Vieux  proveri)e  cité  par  Rabelais  (I,  4o). 
Signiliait  porter  giiignon,  malheur.  En  elïet,  selon  l'opinion  du 
xve  siècle,  la  rencontre  d'un  moine  était  regardée  comme  un  mau- 
vais présage. 

On  disait  aussi  : 
(  Pour  faire  nette  la  maison. 

N'y  îaut  ni  moine  ni  pigeon. 

—  Au  moine  la  hesace  !  . 

Mes  beaux  pères  religi(>ux. 

Vous  dînez  pour  un  grammerci  fgrand  merci)  : 

0  gens  iieureux  !  ô  demi-dieux  ! 

l'ieusl  à  Dieu  que  je  leisse  ainsy  ! 

(iiiioiiKAr.) 

Moineau.  On  en  donne  plusieurs  étymologies.  La  plus  vraisem- 
blable est  moisne/,  pour  moisonel,  de  muscionellum,  proprement 
oiseau-mouche,  petit  oiseau. 

Ménage  le  dérive  de  moine,  à  cause  de  la  couleur  de  son  plu- 
mage, qui  est  grise,  comme  le  costume  de  plusieurs  ordres  religieux. 
On  dit  :  couleur  solitaire. 

Celuy  est  nommé  moimeau,  parce  qu'il  semble  porter  un  froc  de 
la  couleur  des  enfumés.  (Bolon.) 

—  Tirer  sa  poudre  aux  moineaux  :  perdre  sa  peine. 

Cette  locution  vient  du  nom  des  moineaux  ou  moyneaulx,  sorte 
de  guérites  en  fer,  qui,  sous  Louis  XI,  servaient  d'abri  aux  soldats 
contre  les  attaques  des  ennemis,  et  contre  lesquelles  ou  tirait 
inutilement,  sans  atteindre  ceux  qui  s'y  cachaient. 

Mois,  du  latin  mensis  ;  provençal  mes  ;  italien  ?nese.  Du  sanscrit 
tnasa,  de  mas  lune,  idée  de  mesurer.  Ce  radical  se  retrouve  dani 
trimestre,  semestre. 


MON  73 

—  Les  mois,  chez  les  [{oiiiains,  étaient  di\isés  en  (rois  parties  : 
les  ealeiules.  les  noues  et  les  ides. 

Les  calendes  étaient  le  |)reniier  de  cliaiine  mois,  (jni  connnençail 
avec  la  nonvelle  Inné  :  elles  étaient  annoncées  au  peuple  par  le 
pontife,  an  monuMit  du  le\er  de  lastre. 

Les  noues  étaient  le  nenviènie  jour  a\anl  les  ides,  et  celles-ci 
tomltaient  le  13  on  le  lo  du  mois,  d"un  nom  étrusque  qui  signifie 
partage. 

—  Les  dates  d'événenuMits  importants  sont  souvent  citées  [tour 
révénement  lui-même  :  le  10  août,  le  1)  tliermidoi'. 

Moitié,  du  latin  tnc/ieia/c/n  :  pro\ençal  ntilaf. 

—  Employé  pour  épouse.  Les  ralihins  disent  que  le  mol  liéhreu 
que  nous  traduisons  par  côle  (Genèse.  II.  21)  siuiiilie  rôle,  et  (pie 
Dieu  forma  Eve  d'uu  des  côtés  d'Adam;  que  le  premier  homme 
était  rtn</;'05'y  ne.  c'est-à-dire  réunissait  les  deux  sexes.  Dieu  n'auiait 
fait  que  séparer  en  d(Mix  le  corps  d"Adam,  d'où  le  mol  sexe  (sexu.-:) 
de  seeare,  diviser,  partager. 

—  Platon  (i?«n<7«e05  dit  aussi  que  les  premiers  honunes  na(iiiirent 
douhles,  et  que  la  force  dont  ils  étaient  doués  par  la  duj)/ici(é  de 
leurs  membres  les  rendit  insolents  envers  les  dieux.  Jupiter,  pour 
punir  leur  audace,  partagea  en  deux  ces  androgynes,  et  depuis,  ces 
deux  moitiés  ont  conservé  une  forte  passion  pour  se  réunir  :  c'est 
l'altracliou  des  sexes. 

Môle,  du  latin  moles,  masse,  d'un  grand  poids. 
D'où  aussi  :  mola,  meule^  molaire,  dent  qui  sert  à  hi-oyer  les 
aliments  comme  une  meule.  Molécule,  petite  masse  de  matière. 

Mollet,  de  moles,  masse  charnue  :  s'il  ne  vient  pas  plut(M  de 
mol.  adjectif:  latin  moUem. 

Moment,  du  latin  momentum,  mouvement. 

Un  simple  mouvement,  un  pas  du  temps. 

Faire  une  chose  à  moments  perdus...,  ou  gagnés. 

Momerie,  du  ui-ec  //lomos.  \no(\\nmr:  d'où  lUomus,  dmi  de  la 
folie. 

Ou  plutôt  du  vieux  français  momer,  d'origine  germaui(pu',  (pii 
signifiait  se  déguiser;  d'où  momon.  employé  par  Molière. 

Monaco,  décime,  mauvais  sou  fra|i[)é  dans  la  principauté  de  ce 
nom. 


74  MON 

La  FiMiicc  fui  iiKiiidrcdr  (('lie  iiioiifKiic  sons  le  rt'iiTic  d'IIonoi'é  V, 
mort  en  ISU.  l'ii  drci'ct  en  inlcidit  I;i  cinnlHlioii  à  cette  époque; 
et,  le  9  noveiiihre  ISC),';.  [);ii'  nue  coiivciiliijii  ■.wvc  la  Fraiire.  le 
prince  de  Monaco  s'obliuea  ;'i  ne  lra[>p('r  désormais  ses  monnaies 
(pi'(m  France. 

Monde,  du  lalin  //h/ik/i/s.  |iiir.  hrilhinl. 

Hesié  avec  sa  siunilicalioii  |irt'niiére  dans  orjre  mond?  et  dans 
('monder,  ainsi  (jiie  dans  le  iiéyalil'  immonde. 

(Jiii  \('iil  s;i  (•(iiiscicncf  iiiondr, 
Il  ildiht  l'iur  II'  iiKuidr  iniiiioïKic. 

Par  suite,  tont  ce  cpu;  nous  apercevons  de  corps  (brillants)  dans 
l'espace. 

—  Aller  au  bout  du  monde  :  très  loin. 

Si  la  terre  avait  un  bout,  elle  ne  serait  pas  ronde.  (Voy.  terre.) 
Les  anciens,  qui   ignoraient  la  spbéricité  de  la  terre,  croyaient 

que  Delphes  était  au  centre  du  monde,  dont  elle  était  nommée  pour 

cette  raison  le  nombril  {umb/J/cns). 
Le  poète  Claudien  a  raconté  la  fable  de  deux  aigles  lâchés  par 

Jupiter  de   rOrieut    et  de   l'Occident,  et  qui   se  rencontrèrent  à 

Delphes. 

—  Les  premiers  chrétiens  croyaient  que  le  milieu  de  la  terre 
était  la  montagne  du  Calvaire. 

—  Lamothe  leYayer  parle  d'un  anachorète  qui  se  vantait  d'èlre 
allé  jusqu'au  bout  du  monde,  et  qui,  arrivé  aux  extrêmes  limites, 
avait  été  obligé  de  se  courber,  à  cause  de  la  réunion  du  ciel  et  de  la 
terre. 

—  Hegnard,  dans  un  de  ses  voyages,  pénétra  jusqu'à  la  mer 
Glaciale,  et  ne  sarrèta  qu'où  la  terre  lui  manqua.  Il  grava  sur  un 
rocher  cette  inscription  : 

Gnllia  non  genujl,  vidit  nox  Africa,  (tandem 
Hnusimus,  Europanique  oculi>t  luslr(n'imu>i  oiiincm  ; 
Ciisihus  cl  variis  acti  tcrraque  mariquc. 
Hic  tandem  sletimus,  nohis  uhi  defttil  orbis. 

—  Le  docteur  Kaue,  dans  un  voyage  à  la  recherche  de  Franklin, 
de  mai  18oo  à  août  1855,  est  parvenu  au  82^30"  de  latitude,  par 
76"  de  longitude,  au  point  nommé  Grinnel.  le  plus  rapproché  du 
pôle  oit  Fou  fût  encore  arrivé.  Le  mercure  demeura  à  1  état  solide 
pendant  plus  de  trois  mois,  et  eu  noveuil»re  le  wisky  gelait. 


MON  7o 

—  liO  tour  (lu  iikiihIc.  ([iii  nutrofois  exi.uonil  Iruis  mis  ,111  moins, 
se  f;ii(  aiiidiirdliui  tMi  moins  de  trois  mois. 

De  Paris  ;i  Ni'w-Vork ^1  joiii-s. 

DeNew-Vork  m  Siiii-Fniiiciscn  (railway).  7  — 

De  San-Francisco  à  Yolvoama  (^ bateau). .  ^I  — 

De  Yokoaina  à  IIoiiji-Kong'  (hateau) C»  — 

De  Hoii.u-Kon.û-  à  Calcutta  (i)ateau) 12  — 

De  Calcutta  à  Bombay  (railway) '-\  — 

De  Bombay  au  Caire l't  — 

Du  Caire  à  Paris G  — 

80  jours. 

—  La  fin  du  monde.  Il  est  certain  que  le  monde  finira  un  jour, 
sous  peine  d'értr/or  en  rannrd  la  menace  du  jugement  dci-uicr 
laite  par  les  proplirtcs. 

—  La  moitié  du  monde  l'il  de  l'autre  moitié.  (Sévigné.) 

I.a  muilii'  des  liiunaiiis  ril  aiiv  (i'iicns  de  l'aiilro. 

(Dkstolches.) 

La  société  est  partagée  en  deux  classes,  les  tondeurs  et  les 
tondus.  (Talleyrand.) 

—  Dans  la  société,  on  distingue  le  petit  monde,  le  demi-monde. 
et  le  monde  et  demi,  ou  grand  monde,  qui  s'appelle  aussi  le  beau 
monde. 

—  Se  retirer  du  monde.  (Voy.  ermite.) 

Vous  n'êtes  point  du  monde  ;  c'est  pour  cela  que  le  monde  vous 
liait.  Non  estis  de  miindo,  ideo  udit  ro.v  mandas.  (Éca/if/i/e  de 
saint  Jean,  XY,  19.) 

Dès  que  l'on  fuit  li'  inonde,  il  nous  l'iiil  à  son  tour. 

(La  Chacsske.) 

H  y  a  des  gens  qui  se  retirent  du  monde,  et  d'autres  dont  le 
monde  se  retire. 

Monnaie,  du  latin  monela  :  provençal  nioneda. 

Celle  qui  avertit;  surnom  de  Jiinon.  C'était  dans  son  temple 
qu'on  fabriquait  la  monnaie. 

Les  monnaies  sont  de  véritables  monamenfs.  d'après  lesquels 
nous  jugeons  des  arts  et  de  l'état  social  des  peuples  éloignés  de 
nous  par  le  temps  ou  par  l'espace. 

—  Synonymes  :  acUetoir,  monaco,  momieron  (argot). 


70  MON 

—  Dnns  les  pfciiiici-s  Iciiips,  (|ii;iii(l  l.'i  iiioiiniiic  ii'cxisliiil  jcis.  on 
pesait  le  iii(''l;il.  i|iii  v[;\\\  liii-iiK'iiic  une  iii;ircli;iii(lisc. 

Aliraliam  [icsail  lOO  sicics  d'aiyonl  aii\  lils  de  llrili.  auxquels  il 
vtMiail  (racliclci-  une  pièce  de  lorro. 

Les  Cliinois  ont  conservé  celle  Iradilion.  e(  piilenl  avec  des 
linpols  posés  en  présence  d<^  l'aclieleiir.  coNiiiie  celui-ci  pèse  la 
marchandise  (pi'il  livre  en  éclianuc. 

De  là  est  resté  à  certaines  monnaies,  dans  les  pays  civilisés,  le 
nom  de  poida  auti'efois  et  encore  aujoni'd'lini  en  usage.  Le  talent, 
dans  la  Grèce  ancienne  ;  r«.s-,  chez  les  Romains;  Vipound,  chez  les 
Anglais:  la  lirre,  en  France,  désignaient  à  la  fois  des  poids  et  des 
monnaies  ;  celles-ci  pesaient,  en  effet,  nn  talent,  un  as,  une  livre. 

—  La  monnaie  est  une  matière  ayant  une  marque  légale,  qui  lui 
assigne  une  valeur  relative,  et  qui  sert  jiour  les  échanges  com- 
merciaux. 

—  Toute  marchandise  est  une  monnaie,  et  toute  monnaie  est. 
une  marchandise. 

Cette  formule,  créée  par  Turgot,  n'est  vraie  que  si  on  considère 
le  métal  dont  la  monnaie  est  faite  ;  mais,  sous  la  forme  de  monnaie 
servant  d'intermédiaire  à  l'écliange,  elle  a  des  caractères  particu- 
liers qui  la  distinguent  essentiellement  des  autres  marchandises. 

Ainsi,  si  le  fer  est  rare,  ceux  qui  en  ont  hesoin  souffrent,  mais 
cette  rareté  n'agit  (jue  sur  le  prix  du  fer  :  tandis  que,  si  la  monnaie 
est  rare,  le  prix  de  toutes  choses  s'en  ressent. 

—  Le  crédit,  en  multipliant  le  billet  de  banque,  ou  «  monnaie 
fiduciaire  »,  provoque  les  crises  financières,  si  fréquentes  à  notre 
époque,  car  dans  ce  cas,  la  fortune  publique  ne  s'accroît  que  ficti- 
vement, et  donne  à  certains  produits  uiu?  valeur  exagérée  et 
arbitraii'e,  tandis  que  la  monnaie  est  une  marchandise  tarifée  par 
la  loi,  et  d'une  valeur  in\ariable  ayant  seule  le  pouvoir  d'éteindre 
toute  dette. 

—  Fausse  monnaie  :  en  argot  morn/f/Ie.  qui  signifie  soufllet  sur 
la  joue,  c'est-à-dire  soufllet  appliqué  au  roi,  dont  le  [)ortrait  ligure 
sur  les  monnaies. 

—  Battre  monnaie.  Autrefois  les  pièces  de  monnaie  se  faisaient  à 
la  juain.  On  façonnait  une  à  une.  avec  le  marteau  et  la  lime,  des 
rondelles  que  l'on  plaçait  entre  deux  coins  gravés  en  creux;  et  le 
coup  de  marteau  qui  déterminait  la  double  empreinte,  était  l'acte 
qui  a  consacré  l'expression,  battre  moumiie. 

—  En  1(52;),  un  artiste  français   du   nom  de  Briot,  inventa  le 


MON  77 

|t,il;in(ii'r.  don!  on  sort  iiiijoiirdliiii.  cl  ([iio  l;i  Kimiko  no  voulut  pas 
,Hl(»|ilt'r  (l'aliiiril.  mais  ([iii  fui  accueilli  en  An.iilctçri'c,  on  il  remplaça 
If  iHdnnayaLîc  à  la  main. 

—  l'n  linuol  (lOr  d  lin  million  osl  conveiii  dans  les  Indcls  des 
monnaies  (18()())  en  conpiiivs  de  : 

Pièces  de  100  Iraïu-s 5.000  francs. 

»  50      »     10.000       )) 

).  20      »     740.000      » 

).  10       »     190.000       ). 

,>  5       ).     *. ...       55.000       » 

—  Monnaies  divei'ses  :  blanc,  hondjoii,  cent,  croix,  denier,  liard, 
maille,  monnei'on.  ohole.  para,  patar,  piastre,  pislole,  sesterce, 
sterlin.  son.  si\-hlancs.  lésion.  Ilialer,  etc.,  etc. 

Monopole,  dn  grec  monos,  seul,  pôlciii,  vendre. 
Tralic  exclusif,  fait  en  vertu  d'un  privilège. 

—  Le  gouvernement,  en  France,  se  réserve  certains  monopoles, 
tels  que  ceux  du  tabac,  de  la  poudre,  des  cartes  à  jouer. 

Monotone,  du  grec  inonos,  seul,  /onos,  son. 

Oui  est  toujours  sur  le  même  ton  ;  par  suite,  ennnyeux. 

—  Heureux  celui  qui  peut  parcourir  tous  les  tons  de  celte  belle 
musique,  doul  aucune  note  ne  reste  silencieuse  sous  sou  arcbet  ! 
((t.  Sand.  Ah/o  le  rhneiir.) 

Monseigneur  (Pince-),  fausse  clef. 

Pince  à  ertraclion  du  voleur. 

On  disait  autrefois  daufe  (Monseigneur  le  Dauphin),  parce  que 
la  pince  a  l'extrémité  fourcliue  comme  la  queue  du  dauphin. 

Monseigneur  est  un  jeu  de  mots,  parce  que  toutes  les  portes 
s'ouvrent  devant  Monseigneur. 

Monsieur  est  une  simplification  ou  contraction  du  précédent  : 
mon.  seigneur,  de  aeniore/n,  plus  âgé,  à  qui  on  doit  le  respect. 
Au  xvir'  siècle,  on  faisait  parfois  sonner  la  Jinale  : 

Le  ronard  sVn  saisit,  et  dit  :  «  Mon  hoii  luonsiour, 
Apitrenez  que  tout  flaltenr...  » 

(La  Foxtaink.) 

—  Monsieur,  tilre  doniu''  au  frère  du  roi.  Il  paraît  manquer  de 
distinction,  pnisipie  tout  le  monde  le  porte.  Cependant,  quand  on 
parle  au  frère  du  roi,  on  l'appelle  Monseigneur. 

Le  poète  Diicis,  eu  lui  dédiant  une  tragédie,  termine  son  épître 


78  AULX 

pnr  rcttc   fnnitiilo  l)i/;ir'ro  :  «  .Iti  suis,  MnnsoiQticiir,  de  Monsieur  le 
(rrs  hiiiiililo  cl  ohôissMiit  serviteur,  x 

—  Les  cours  (1(;  justice  \ous  lr;iiteiil  de  .s/V'?^;';  certains  majris- 
Iratsse  permettent  Texpi-ession  dédaiuneuse  :  le  nommé  X... 

—  L'usage  de  répéter  Monsieur  siii'  l'adresse  des  lettres  est  une 
marque  de  1res  urandt-  déférence  :  il  semble  porler  au  superlatif  le 
sentiment  du  res[»ecl. 

Au  Moyen-Age,  on  répétait  volontiers  le  mot  scifjnpnr.  [loiir  faire 
plus  d'honneur  à  la  personne. 

Scinijn'en  Monid,  non  rrc  i/iie  larzn  ijairc 
Qu'en  ccirtil  en  lirtiinon,  mon  seigneur. 

(  l..llllllfrli    DK    lioNANKI,.! 

(Seigneur  seigneur  Monal,  je  ne  crois  pas  rpiil  tarde  guère  que 
je  ne  voie  le  seigneur  Raimond,  mon  seigneur.) 

En  roman,  senlier  s'abrégeait  en  en.  On  se  servait  aussi  de  la 
foriiiule  de  politesse  Mosseujnen  :  Monseigneur,  seigneur. 

—  Monsieur,  madame,  sont  remplacés,  en  Italie,  par  les  articles 
le,  la  :  le  Tasse,  la  Mali  bran. 

Cet  article,  parfaitement  honorable  en  Italie,  s'ajoute  au  nom  des 
plus  grandes  dames  comme  une  distinction  qui  n'est  due  qu'à  elles. 

En  France,  au  contraire,  quand  nous  disions  la  Gaimard,  la 
Clairon,  c'était  plutôt  avec  une  moue  de  dédain  involontaire,  par 
suite  de  la  réprobation  morale  que  l'opinion  publique  inllioeait 
autrefois  aux  comédiennes. 

Monstre,  du  latin  monstrum,  de  inonstrare. 
Quod  moneat  voluntatem  deorum.  (Festus.) 

lYl  ont-de-pi  été. 

Synonymes  :  le  clou,  le  plan,  ma  tante  (argotj. 

Le  r'/oM,  parce  qu'on  suppose  que  les  elïets  engagés  y  sont  pendus 
au  clou. 

On  mettra  tout  au  plan,  plutiH  que  de  refuser  un  cataplasme  au 
pauvre  chéri.  (L.  Reybaud.) 

Ma  tante  est  dit  par  rapprochement  de  mon  oncle,  qui' désigne 
un  usurier,  un  prêteur  sur  gages. 

—  L'institution  des  monts-de-piété  date  du  xv^  siècle.  Ce  fut  un 
moine  récollet,  Rarnabé  de  Terni,  qui  organisa  le  premier,  à 
Pérouse,  en  1462.  L'œuvre  devait  être  avant  tout  charitable,  et 
c'est  à  cette  idée  qu'est  dû  le  nom  de  mouX-de-piéfé. 

Le  premier  fut  établi  à  Paris  sous  Louis  XYl,  et  ouvert   le 


.M(  )n  71) 

28  (l(M^cinl)ro  1777.  ;iii  M.ir.iis.  nie  P,ir;i(lis,  ni'i  il  est  iMicnro  Miijoiir- 
d'Iiiii. 

Montagne,  (h''ri\i''  de  nnnil  :  latin  K'io/ifn/i .  qui.  il'iiprés 
Corssen,  .^^c  raltaclit'  ;'i  la  raciiu'  ui/'/i.  de  cniinere. 

\a\  iiKinlai^iif  CM  travail  riil'anlc  iiiii'  souris. 

(Boil.KAC.) 

C'est  une  li-adiictioii  d'IIoi'ace  {Art  poétique.  39)  : 

l'iirhirirnl  iiiontr,<i.  iKtso'liir  rldirnliis    tnit'i. 

Monter,  dérivé  de  /no/il,  romiue  a/nonf. 

Monte?'  représente  l'idée  d'élévation  :  pour  l'idée  inverse  on  dit 
totn/ier,  (jiii  siuiiitie  une  cliule  brusque,  et  qui  exprime  moins  liien 
que  (léralev,  la  perle  d'une  position  élevée,  qui  se  fait  par  un 
abaissement  progressif. 

On  peut  s'ai'rèter  quand  on  monte,  jamais  quand  on  desrend. 
(Napoléon.') 

Montjoie  Saint-Denis!  Cri  de  guerre  sous  la  première  race, 
parce  qu'après  la  victoire,  on  entassait  uii  monceau  de  terre  en 
fonne  de  pyramide,  qu'on  appelait  mont  (de)  joie. 

S'il  ne  vient  pas  plutôt  de  monge,  moine,  qui  aurait  doum; 
«  Monjoie  Saint-Denis  »,  c'est-à-dire  abbaye  de  Saint-Denis,  devise 
de  Vorillamme,  et  cri  de  guerre  des  Français. 

Montmartre,  de  Montem  Martis,  ou  Martijrum. 

Quartier  de  Paris,  sur  une  bauteur.  où  il  y  aurait  eu  un  temple 
de  Mars  :  où.  sel  )u  d'autres,  saint  Denis  et  ses  compagnons  soiif- 
fi'ii-ent  le  martyre,  en  260. 

—  Académicien  de  Montmartre  :  un  àne. 

Un  mauvais  poète  avait  acbelé  une  maison  à  Montmartre  : 
«  Ali  !  dit  Piron.  il  retourne  au  pays.  » 

—  On  disait  autrefois  d'un  ignorant  qu'il  avait  étudié  à  l'académie 
d'Asnières,  à  cause,  sans  doute,  de  la  ressemblance  de  ce  nom 
avec  àne. 

Monument,  du  latin  monutnentiun,  qui  sert  à  avertir. 

Les  moninneuts  des  ai1s  sont  la  véritable  écriture  des  peuples, 
et  donnent  l'idée  la  plus  exacte  de  leur  civilisation. 

Cicéron  disait  d'Atliènes,  qui  était  remplie  de  monuments  anciens, 
qu'à  cbaque  pas  ipi'on  y  faisait,  on  marcliait  sur  un  souvenir. 

Moquer,  du  grec  mô/càn,  ou  de  mokos,  dont  les  Romains  firent 
morosus,  acteur  comique,  satirique  et  bouffon  ;  à  moins  qu'il  ne 


80  MOU 

soit    lo    (Idiililcl    (le    uioiiclii'i-.    Ii;is-I.iliii    nnirtirc.    coiniiic    on    dit 
oiicoro  :  iiioiiclicr  <[iicI(|imiii. 

—  J(5  111(^1  iiio(|ii('  :  j<!  suis  (lu  n\L:iiiiMiI  de  (>li;iiii|);i!ii)('. 
Je  m'en  l);i(s  Td'il. 

Je  m'en  soucie  coiiiino  un  [)oissoii  (l'niic  iioninif. 

—  Je  me  moque  de  ca,  coiiiiiie  du  Canada.  Celle  Incnlion  remonte 
sans  doute  an  temps  de  Lonis  XIV,  oii  Ton  déportait  certains 
conpaliles  au  Canada. 

Mercier  {Taldenu  de  Paris,  cli.  ^lo)  dit  que  Louis  XIV  ordonna 
qu'on  ent  à  sévir  contre  les  membres  de  la  Com]iaunie  des  œu\res 
fortes,  et  menaça  de  les  envoyer  au  Caïuida. 

—  Je  m'en  moque  comme  de  Colin-Tampon  (Voy.),  ...comme 
de  l'an  qnarante. 

Au  commencement  du  xi^  siècle,  on  croyait  que  la  fin  du  monde 
devait  arriver  la  quarantième  année  de  ce  siècle.  Le  peuple  était 
dans  la  consternation  et  se  convertissait  en  foule;  mais  lorsque 
l'an  qnarante  fut  passé,  on  s'en  moqua. 

—  La  pelle  se  moque  du  fourgon.  {Fourgon  signifie  le  crochet  de 
fer  destiné  à  attiser  le  feu.) 

Le  piètre  (pied-bot)  se  moque  du  boiteux. 

Se  moque  cpii  cloque  :  un  vicieux  ril  d'an  autre.  (Rabelais.) 

Morale,  du  latin  moralem  (de  mores)  qui  a  rapport  aux  mœurs. 

—  Lord  Russel,  succédant  à  lord  Palmerston  (noveuil)re  I8G0), 
dit  au  l)anquet  du  lord-maire  :  «  L'application  des  principes  est 
toujours  une  question  de  circonstance,  de  temps  et  d'opportunité.  » 

Cette  phrase  est  l'expression  de  la  politique  louche  de  l'Angle- 
terre, et  une  paraphrase  de  l'opinion  professée  un  jour  par 
M,  Nisard  sur  la  grande  et  la  petite  morale. 

—  Faire  de  la  morale  :  emberquiner.  Allusion  aux  ouvrages 
moraux  de  Berquin. 

lYlorbidezza,  mot  italien  ;  de  morbiis,  maladie. 
A  passé  du  sens  de  maladie  à  celui  de  grâce  molle. . . 
Se  dit,   dans  les  arts,  de  l'expression  douce,  molle,   délicate, 
presque  maladive,  des  physionomies. 

lYIopdre,  du  latin  mordere.  Radical  sanscrit  mord,  broyer. 

D'où:  mors,  morA-^-v:  morceau,  morsel  lus  :  mordicus  (avec  les 

dents,  avec  ténacité)  :  remords. 

...Jiivéïial  lie  sa  mordante  pliiino 
Faisait  couler  îles  flots  de  fiel  et  d'amertume. 

(BOILEAC.) 


MOR  81 

Morganatique  diinriatie).  do  ralloninnd  morgrngnhe,  don  du 
iiintiii.  |irt''S('iit  (lu  mari  à  sa  l'cmino,  au  Jondeinaiii  des  iiores. 

C'est  iiuc  loi'uic  |iarliculiri-t'.  el  uou  auficipée,  du  présent  iU' 
noces,  do  la  corboillo  do  niaria.ue.  (juol(|uofois  ce  présent  était 
considérahlo.  ot  so  composait  d'un  certain  nonil)re  de  \illos  et  de 
domaiiios. 

Un  ap[)olait  aussi  ce  don  osr/e,  de  osrubniK  l)aiser,  parce  qu'il 
était  toujours  accompagné  d'un  haiser. 

—  Le  mariaiio  mor.uanatique,  secret  et  mystérieux,  ce  mariage 
do  la  main  gaucho  ([)arco  que  ré|)ou\  présente  la  main  gauche),  a 
lion  entre  un  prince  ot  une  [)ersoniui  de  condition  inférieure,  entre 
un  noble  et  une  roturière,  à  condition  que  les  enfants  n'auront  ni 
le  titre  ni  certains  biens  paternels. 

La  triste  hypocrisie  du  mariage  morganatique  est  assez  fréquente 
en  Allemagne,  pour  préserver  les  jeunes  altesses  des  petits  États 
d'entraînements  de  ccour  irréparables.  Qu'il  s'agisse  d'une  étoile  de 
théâtre  ou  d'une  honnoto  hllo  do  bonne  maison,  elle  ne  ptMit  porter 
pul)liquement  le  nom  de  son  époux  ;  les  enfants  ne  sont  point 
ofliciellement  reconnus.  Il  arrive  souvent  que  le  mari  est  arraché 
au  foyer  do  son  choix,  i)our  épouser  une  princesse  que  lui  imposent 
dos  ordres  su[)érieurs.  {Revue  des  Deux-3Iondes,  1876.) 

Morgue,  origine  douteuse,  peut-être  du  languedocien  mor(ja. 
museau.  , 

Contenance  Hère,  hautaine,  d'un  fonctionnaire  :  sid'Iisance  d'un 
vaniteux. 

—  Morguer.  dit  Lamarre  {Traite  de  police),  signifie  regarder 
tixemont. 

—  Cyrano  de  Bergerac  {Histoire  cùmique  des  États...  du  Soleil), 
dit  :  «  Je  demeurai  dans  la  morgue  jusqu'au  soir,  où  chaque 
guichetier,  l'un  après  l'autre,  par  une  exacte  dissection  des  parties 
de  mon  visage,  venait  tirer  mon  tal)leau  sur  la  toile  de  sa  mémoire.  » 

Ce  passage  de  Cyrano  indique  que  la  morgue  était  un  lieu  do 
dépôt  dans  les  prisons,  où  les  agents  de  police  venaient  prendre  le 
signalement  des  détenus  ou  constater  leur  identité. 

—  La  Morgue  est  aujourd'hui  un  lieu  où  l'on  expose  publiquement 
les  morts  inconnus,  afin  qu'on  puisse  les  reconnaître. 

Le  gamin  de  Paris,  qui  va  à  la  Morgue  comme  à  un  spectacle, 
appelle  les  corps  exposés  des  artistes.  Lorsque,  par  hasard,  la 
salle  d'exposition  est  vide,  il  dit  qu'il  y  a  relâche. 


82  MOU   • 

IVIorniffle,  du  \i('.iix  fr;in(;;iis  cl  arg(jt  )/i(jnios\  hoiiclic  sniifllct 
siif  l;i  joiie,  on  |)liiU)l  sur  l;i  l)nii('lic.  (Voy.  monnaie.) 

Morphée,  (in  f^rcc  murplu-.  iipparence,  à  cause  des  formes  si 
variées  des  songes. 

—  Ktre  dans  les  bras  de  Morpliée  :  dormir. 

Morpliéo,  lils  du  Sommeil  et  de  la  Nuit,  était  lui-même  le  dieu  du 
sommeil  et  des  songes,  le  seul  qui  annonce  la  vérité.  Il  était,  dit 
Ovide  {Mclam.  Il),  très  lialtile  à  prendre  la  démarche,  le  visage, 
l'air  et  le  son  de  voix  de  ceux  quil  voulait  représenter  ;  d'où  lui 
serait  venu  son  nom. 

lYlorra,  jeu  où  deux  Italiens,  en  face  l'un  de  l'autre,  passent 
souvent  la  journée,  ouvrant  et  fermant  la  main,  et  criant  le  nombre 
de  doigts  ouverts  ou  fermés. 

Mors,  du  latin  morsus,  morsure,  parce  que  le  cheval  le  mord. 

—  Prendre  le  mors  aux  dents  :  s'emporter. 

Mort,  nom  et  participe,  morlem  et  mortuum. 
1°  Divinité  infernale,  fille  de  la  Nuit,  qui  la  conçut,  sans  le  secours 
d'aucun  autre  dieu. 
2"  Sort,  destin  ;  la  iln  de  relïet  chimique.  (Gavarni.) 

—  Synonymes  :  la  camarde,  la  dernière  heure. 

La  camarde,  celle  qur  est  sans  nez.  Cette  expression,  d'un 
réalisme  elîrayant. peint  dun  trait  énergique  la  sensation  d'horreur 
que  l'on  éprouve  à  la  vue  d'un  squelette,  qui  personnilie  la  mort, 
et  l'aspect  iiideux  que  l'absence  de  nez  donne  à  sa  face. 

C'est  par  la  même  raison  que  la  mort  a  été  appelée  carline,  à 
cause  de  l'absence  apparente  de  nez  chez  les  chiens  carlins.  (Cf. 
Fr.  Michel.) 

—  A  mort  (locution  adA^erbiale)  :  beaucoup,  considérablement. 

Il  travaille  à  mort  :  jusqu'à  extinction  de  chaleur  vitale  :  la^que 
ad  mortem. 

—  Cela  vient  trois  jours  avant  la  mort  :  se  dit  à  quelqu'un  qui 
s'eft'raie  d'une  légère  indisposition. 

—  Il  y  a  remède  à  tout,  excepté  à  la  mort.  —  On  considère  la 
mort  comme  le  plus  grand  des  maux  parce  qu'il  est  sans  remède, 
et  l'on  dit,  pour  exprimer  le  grand  déplaisir  que  quelqu'un  a  d'une 
chose  :  c'est  sa  mort. 

Hoc  instar  mortis  pulat.  (Cicéron.) 


M(»K  83 

—  L;i  vie  est  iiii  mal...  iloiil  on  iiioiiil. 

Dans  kiiil  berceau  k"'1'"1''  "'i'"  tombe. 

(V.  Huco.) 

—  .MiHiiircst  lin  mal  :  s'il  \]\'\\  élail  [las  ainsi,  les  dieux  mour- 
raient. (Sa|»li().) 

On  n'a  poiiil  ikhii-  la  iiku'I  de  (lis|ienso  de  Rome. 

(Moi.iKUK,  Elourili,  H,  5.) 

C'est  la  ti'adnclion  diiii  verset  de  \' Imitation  do  Jé^iU^-ChriKt  : 
Xi'hio  itnin'lrare  potesl  à  Tapa  hulla.in  niinquam  mnriondi. 

('/est  lin  arrêt  du  ciel,  il  faut  (jue  riiomme  meure. 

Tel  est  son  parta^^e.  et  son  sort  ;. 

Illen  n'est  |)lus  certain  ({ue  la  mort, 
El  riiMi  plus  incertain  ({uc  cette  dernière  heure. 

(L'cil)!»''  Tksti-.) 

La  MorI  a  des  ri^jueurs  à  nulle  autre  pareilles; 

On  a  beau  la  prier, 
T.a  cruelle  ([u'elle  est  se  bouche  les  oreilles, 

Et  nous  laisse  crier. 

Le  pauvre  en  sa  cabane  où  le  chaume  le  couvre 

Est  sujet  à  ses  lois  ; 
Et  la  garde  qui  veille  aux  barrières  du  Louvre 

N'en  défend  point  nos  rois. 

(.\[M.iir;iini;,  Stances  à  IJnjjfirricr  ;  Imilalion  d'HoFiAOK.) 

Piillida  murs  œqno  -puisât  pedc  pciaperuin  tubenias 
HcfjmiKjue  turres. 

(IIouACR,  Odeg,  I,  IV,  13.) 

La  pâle  luort  heurte  d'un  pied  égal  les  tours  des  riches  et  la 
cahaue  du  pauvre. 

—  A  cliaque  porc  vient  sa  Saint-Martin.  (C'est  l'époque  on  on 
les  tue.) 

—  La  population  du  jilohe  est  d'environ  un  milliard  d'habitants. 
11  en  meurt  un  par  seconde. 

Ainsi,  à  chaque  minute  de  notre  existence,  de  nos  sourires,  de 
nos  joies,  soixante  lioinines  expirent,  soixante  familles  gémissent  et 
pleurent.  La  vie  est  une  perte  permanente.  Cette  chaîne  de  deuils 
et  de  funérailles  (pii  nous  entortille,  ne  se  hrise  point,  elle  s'allonge, 
nous  en  formons  uous-nuMues  un  anneau.  ((^Iiah'auhriand,  J/é''y/<o//r.«, 
tome  II.) 

La  vie  nous  tue  tous  les  jours  un  peu  ;  ne  l'aidons  pas  à  nous 
achever  plus  vite.  On  dirait  cependant  que  les  hommes  ont  peur  de 
ne  pas  mourir,  à  voir  tout  ce  qu'ils  iuNentent  pour  se  tuer.  (Th. 
Gautier.) 


84  MOR 

—  Ln  poino  do  mort,  c'ost  le  tnnno.'iu  dos  Dnnaï.dcs.  avec  rette 
dinV'ronco  ([lie  l'oaii  est  remplacée  par  le  sann-.  (L.  Blanc.) 

I.a  K"fll<»liii<'  tranche  la  tète,  elle  ne  Iranclie  pas  la  question. 
(G.  Sand.) 

—  Il  ne  faut  pas  compter  sur  les  souliers  d'un  mort. 

Tous  les  biens  à  venir  me  semblent  autant  de  cIkiiisoiis.  Il  n'est 
rien  tel  que  ce  qu'on  lient,  el  Idn  cdiirt  grand  risque  de  s'abuser, 
lorsque  l'on  compte  sur  le  bien  (luiiii  autre  vous  garde.  La  mort 
ii"a  pas  toujours  les  oreilles  ouvertes  aux  vœux  et  aux  prières  de 
Messieurs  les  héritiers;  et  l'on  a  lé  temps  d'avoir  les  dents  longues, 
lorsqu'on  attend  pour  vivre  le  trépas  de  quelqu'un.  (Molière. 
Médecin,  II,  2.) 

—  Je  donnerais  ma  vie  pour  deux  sous...  .le  voudrais  être  mort. 
—  Vous  n'êtes  pas  dégoûté,  répond  A.  Karr. 

—  Le  mort  n'a  pas  d'amis,  le  malade  n'en  a  qu'un  demi. 
C'est-à-dire  on  oublie  vite  les  morts  ;  et  lorsqu'un  malade  soufîre 

beaucoup,  on  dit  :  il  vaudrait  mieux  qu'il  fût  mort. 

—  Lorsqu'un  homme  tombe  malade,  les  siens  se  lamentent  les 
huit  premiers  jours  ;  les  huit  suivants  ils  s'habituent  à  l'idée  de  sa 
mort,  calculent  ses  suites  et  spéculent  sur  elle  ;  ensuite  ils  disent  : 
les  veilles  nous  tuent,  il  serait  plus  heureux  pour  tout  le  monde 
que  cela  finît.  (A.  de  Vigny.) 

Hourrab  !  les  morts  vont  vite.  (Bûrger,  Ballades.) 

Il  est  cruel  de  penser  avec  quelle  facilité  l'homme  est  oublié, 

qu'il  repose  dans  une  ui-ne  ou  sous  une  pyramide.  (.I.-P.  Richter.) 
La  pierre  garde  la  méiuoire  plus  longtemps  que  le  cœur  ;  c'est 

pour  cela  qu'on  grave  un  nom  sur  un  sépulcre.  (Lamartine.) 

—  Le  mort  saisit  le  vif,  c'est-à-dire  l'héritier  légal  remplace  celui 
qui  meurt,  dans  tous  ses  droits  à  la  propriété. 

IVIopte-saison.  Pour  les  médecins,  c'est  la  saison  où  l'on  ne 
meurt  pas. 

On  pourrait  en  dire  autant  des  porteurs  de  morts  {corbeaux  en 
argot,  parce  qu'ils  vivent  de  la  mort,  et  qu'ils  suivent  les  corbil- 
lards, comme  les  corbeaux  recherchent  les  cadavres.) 

On  les  appelle  aussi  croque-morts,  par  une  double  allusion  à  leur 
costume  noir  et  aux  cadavres  qui  les  font  vivre. 

Mortier,  du  latin  mortarium. 
Le  mortier  à  bâtir  se  pilait. 


MOT  85 

—  LacoilTiiro  d«^s  présidents  du  |i;irl('iinMi(  ;i\;iit  l;i  forint'  diiii 
iiiorlitM"  d"a[)Otliic;iii'e  ;  d'où  itrésidcnt  ;"i  mortier. 

Cette  tO(|ue,  symhole  de  la  justice  souveraine,  était  une  sorte  de 
couronne  pour  les  rois  de  France  de  la  première  race,  et  même  des 
suivantes.  Saint  Louis  est  représenté  avec  un  mortier  sur  les 
vitraux  de  la  Sainte  (Chapelle. 

Les  i-ois  de  France  douiièi-cnt  le  iiiuriicr  au\  jn.iics  ([uand  ils  leui' 
abaudounérenf  leur  palais  poni'  v  (''(.ililir  le  temple  de  la  Justice. 

l^Voy.  Palfiix  <l(>  jtislicc.') 

IVIot,  du  lias-latiu  uniilion.  de  mnilirr.  murmurer. 

—  Les  mots  sont  les  instruments,  le  moyen  de  la  manifestation 
de  nos  pensées.  Ce  sont  des  si.unes  de  convention,  qui  ne  siunilient 
rien  par  eux-mêmes,  et  varient  dans  chaque  langue  pour  exprimer 
la  même  idée:  ce  qui  prouve  que  les  langues  sont  d'invention 
humaine. 

—  C'est  la  multi[)licité  des  idées  (pii  a  [irodiiit  la  mulli[ilicité  des 
mots  dans  les  langues.  (L'ahhé  Girard.) 

Les  mots  ont  plus  de  contour  que  les  idées.  Toutes  les  idées  se 
mêlent  par  les  bords:  les  mots,  non:  un  certain  côté  dilTus  de 
l'àme  leur  échappe  toujours.  L'expression  a  des  frontières,  la 
pensée  n'en  a  pas.  (V.  Hugo,  l' flovunc  qui  ril.) 

—  Les  mots  sont  des  images  :  d'où  insujnarc,  enseigner, 
ap[treudre  \yAY  des  signes.  Aussi  les  mots  agissent  sur  l'esprit 
comme  certaines  images.  Il  y  en  a  qui  nous  émeuvent,  il  y  en  a 
qui  nous  afiligent.  qui  nous  saisissent  ou  (pii  nous  élèvent;  certains 
mots  répugnent  et  dégoûtent. 

Les  mots,  comme  les  peuples,,  ont  leur  origine,  leur  progrès, 
leurs  perfectionnements,  leurs  transformations,  qui  se  lient  à 
l'histoii'e  des  peuples. 

Horace  a  dit  que  les  mots  sont  comme  la  monnaie,  <[ui  n'a  cours 
que  quand  elle  est  marquée  au  coin  du  public.  Comme  la  monnaie, 
ils  sont  créés,  vivent  un  certain  temps,  vieillissent  et  meurent. 

Il  faut  user  avec  réserve  des  mots  qui  ne  font  que  de  naître  et 
de  ceux  qui  ont  vieilli  :  il  en  est  comme  des  fruits,  qui  ne  valent 
rien  trop  verts,  ni  trop  mûrs. 

—  Le  mot  est  de  la  langue  ;  le  terme  est  du  sujet  ;  l'expression 
est  de  la  pensée.  La  pureté  du  langage  dépend  des  mots  :  sa  préci- 
sion dépend  des  tei'uies  ;  son  élégance  dépend  des  expressions. 

—  On  dit  :  la  science  des  mots,  et  le  don  de  la  parole. 

-  Les  mots  grecs  et  latins  introduits  dans  la  langue  par  les 


86  .Mf)T 

savants  pour  les  hcsoins  do  la  scicnco,  sont  pou  inlolli'.'ililos  au 
vulgaire.  (|ui  se  sert  i)lus  volimlicrs  dts  mois  crrôs  p;ir  imMiiplioro 
ou  par  onomatopée. 

Ces  mots,  véritahlemeni  ôlran.uors  à  la  langue,  (pji  ser\eul  eu 
français  dans  les  sciences  et  les  arts,  pour  représenter  des  idées 
que  la  langue  populaire  serait  impuissante  à  exprimer,  ne  s'y  sont 
pas  assimilés,  ne  servent  qu'à  expi'imei-  une  idée  isolée:  Wf,  sont 
frappés  de  stérilité,  ne  produisent  pas  de  rejetons.  Ils  composonl  la 
langue  savante,  mais  sont  incompris  du  peuple. 

Nous  avons  même  remplacé  des  expressions  excollcntes.  (jiii  nous 
appartenaient  en  propre,  par  d'autres  qui  n'ont  de  mérite  que  leur 
forme  extraordinaire.  Ainsi,  à  clievaurhcv.  on  a  substitué  monter 
à  cheval,  puis  cavalcader  (?)  et  cavalaide. 

Mais  monter  à  cheval  est  un  art,  pour  lequel  on  a  emprunté  au 
latin  équUntion.  Après  l'idée  d'art,  il  y  a  l'idée  de  science  :  la 
science  du  cheval  a  pris  son  nom  au  grec,  c'est  la  science  hippi(pie. 
Enfin,  on  arriva  ainsi,  en  souvenir  des  traditions  héroïques  de  la 
Grèce,  à  dire  que  les  sportmen  français  s'élancent  sur  la  piste  d'un 
hippodrome. 

-  L'étude  de  l'antiquité  a  aussi  doté  le  français  dune  foule  de 
néologismes,  tirés  du  grec  et  du  latin  pour  donner  de  nouvelles 
nuances  de  la  pensée  ;  mais  ces  uu)ts,  tout  savants^  sont  toujours 
restés  en  dehors  du  langage  usuel,  populaire. 

Tels  sont  :  cécité,  à  côté  d'aveuglement  ;  virilité,  puérilité,  servi- 
lité, en  regard  de  force,  enfance,  esclavage,  etc. 

MOTS   PRIS    ABSOLUMKNT  : 

Alcoran,  mot  arabe  :  le  livre  par  excellence. 

Anciens  (les)  :  les  Grecs  et  les  Romains. 

Art  (le  grand)  :  la  recherche  de  la  composition  de  l'or. 

Bible  (la),  mot  grec  :  le  livre  par  excellence. 

Blé  :  la  graine,  la  semence  par  excellence. 

Boire,  c'est-à-dire  être  adonné  à  l'ivrognerie. 

Bouilli  (le),  c'est-à-dire  le  bœuf  bouilli. 

Dame  (Notre)  :  la  dame  par  excellence,  la  Sainte-Vierge. 

Écriture  (1')  :  les  livres  saints,  la  Bible. 

Fabricant  (un),  de  fabrum  :  l'ouM'ier  en  fer,  par  suite  l'ouvrier. 

JFaculté  (la)  :  le  corps  médical. 

Froment,  de  frnmentum  :  le  produit  par  excellence. 

Gabelle  :  le  triltut. 


MOT 


87 


Globe,  c'est-fi-dirc  le  doho  torrestre. 

Lnhourer,  laborave  :  travailler. 

Laiidaniiin,  pour  Inudnndum  (!)  :  remède  digne  déloges 

Lieux,  pour  latrines. 

Mètre,  gi'ec  f/ielron  :  la  mesure  par  excellence. 

Nécessités  (les)  :  le  liesoin  d'aller  à  la  selle. 

Nourrir,  pour  allaiter. 

Orgue  :  le  roi  des  instruments. 

Parties  (les)  :  sous-entendu  sexuelles. 

Péninsule  (la)  :  sous-entendu  Ibérique  :  IKspagne. 

Pli.  pour  lettre  [iliée,  caclietée. 

Provence,  c'est-à-dire  la  province  par  excellence. 

Seigneur  (le),  i)our  Dieu,  le  maitre  des  maîtres. 

Sexe  (le)  :  le  sexe  le  plus  beau. 

Simples  :  Heurs  simples. 

Via  mie.  cire/tda  :  les  vivres,  puis  la  cbair. 


MOIS  i:tua.\(;i:hs  adoptics  i'au  la  langik  fua.ncaise 


Alt  lioc  vl  ;ii)  iiiic.  hilin. 
Ab  intestat,  latin. 
Ab  irato,  latin. 
Abrupto  (ex),  latin. 
Acarus,  latin. 
Accessit,  latin. 
Acliéron,  grec. 
Adagio,  italien. 
Ad  boc,  latin. 
Ad  liominem,  latin. 
Ad  bonores,  latin. 
Ad  libitum,  latin. 
Ad  patres,  latin. 
Ad  rem,  latin. 
Agenda,  latin. 
Agnus  dei,  latin. 
Album,  latin. 
Alcool,  arabe. 
Alcoran,  arabe. 
Algua/Jl.  arabe. 
Alibi,  latin. 
Allegro,  italien. 


Alléluia,  bébreu. 
Al|ilia  et  oméga,  grec. 
Alto,  italien. 
Amen,  bébreu. 
Amoroso,  italien. 
Andante.  italien. 
Angélus,  latin. 
Antbrax,  grec. 
A.  parte,  latin. 
Auto-da-fé,  espagnol. 
Ave  Maria,  latin. 
Belvédère,  italien. 
Bis,  latin. 
Bravo,  italien. 
Budget,  anglais. 
Calera  (et),  latin. 
Campos,  latin. 
Carbonaro,  italien. 
Casus  beUi,  latin. 
Catbedra  (ex),  latin, 
Cborus,  latin. 
Cicérone,  italien. 


MOT 


Clown,  niijilais. 

Club,  anglais. 

Codex,  latin. 

Cœcnni,  latin. 

Coma,  groc. 

Comniodo  et  incoininodo  (de),  Litii: 

Concerto,  italien. 

Confiteor.  latin. 

Coram  populo,  latin. 

Crédit,  latin. 

Crescendo,  latin. 

Critérium,  grec. 

Cubitus,  latin. 

Currente  calamo,  latin. 

Cutter,  anglais. 

Ua  capo,  italien. 

Débet,  latin. 

Décorum,  latin. 

Déficit,  latin. 

Deliquium,  latin. 

Delta,  gr(5C. 

Desiderata,  latin. 

Détritus,  latin. 

Dictum,  latin. 

Dilettante,  italien. 

Distinguo,  latin. 

Dito,  italien. 

Divan,  arabe. 

Dolce,  italien. 

Domino,  latin. 

Duo,  latin. 

Duodénum,  latin. 

Duplicata,  latin. 

Ecce  liomo,  latin. 

Eflendi,  turc. 

Electron,  grec. 

Embargo,  espagnol. 

Emir,  arabe. 

Épiploon,  grec. 

Epitome,  grec. 


i'j'rata.  latin. 
lOxcal.  latin. 
K\-pro(esso,  latin. 
Extra-mnros,  latin. 
Extremis  (in),  latin. 
Ex-voto,  latin. 
Faciès,  latin. 
Fac-siniile,  latin. 
Factum,  latin. 
Farniente,  italien. 
Fatum,  latin. 
Fiat  lux,  latin. 
Finito,  italien. 

Florès,  latin. 

Folio,  latin. 

Forte-piano,  italien. 

Fortiori  (à),  latin. 
'  Forum,  latin. 

Franco,  latin. 

Frater,  latin. 

Gaster,  grec. 

Gaudeamus,  latin. 

Gloria,  latin. 

Gluten,  latin. 

Goddam,  anglais. 

Gratis,  latin. 

Groog,  anglais. 

Grosso-modo,  latin  macaronique. 

Haltitus,  latin. 

Halte,  allemand. 

Harem,  arabe. 

Hic.  latin. 

Hidalgo,  espagnol. 

Hourra,  russe. 

Humérus,  latin. 

Humour,  anglais. 

Humus,  latin. 

Ibidem,  latin. 

Idem,  latin. 

Illico,  latin. 


MOT 


89 


ImliroLilio,  il.ilit'ii. 
Iniproiuplu.  I;itiii. 
Iiicojiiiito.  iliilii'H. 
lu  pâte,  latin. 
Index,  latin. 
Inloi'JMi.  l;itin. 
Introït.  I;ilin. 
Iota,  ixvev. 
]|)S0  facto,  latin. 
Inito  (ah),  laliii. 
Ilt'in.  latin. 
Jcjnnnin.  latin. 
Jubé,  latin. 
Junte,  espagnol. 
Jury,  anglais. 
Kcapsake,  anglais. 
Kiosque,  turc. 
Kirscli-wasser,  allemand. 
Largo,  italien. 
Latere  (à),  latin. 
Lavabo,  latin. 
Lazzarone,  italien. 
Lazzi,  italien. 
Libéra,  latin. 
Loch,  anglais. 
Lord,  anglais. 
Lupanar,  latin. 
Macaroni,  italien. 
Maestro,  it'dien. 
Magnificat,  latin. 
Mandat,  latin. 
Matador,  espagnol. 
Maximum,  latin. 
Mea  culpa,  latin. 
Medianoche,  italien. 
Médium,  latin. 
Mémento,  latin. 
Mémorandum,  latin. 
Mérinos,  espagnol. 
Mezzo-termine,  italien. 


Milord,  anglais. 
Minaret,  arabe. 
Minimum,  latin. 
Miserere.  latin. 
Morbidezza.  it.ilicn. 
Mordicus,  latin. 
Motus,  latin. 
Muséum,  latin. 
Naturalihus  (in\  latin. 
Nec  i)lus  ultra,  latin. 
Nescio  vos,  latin. 
Noli  me  tangere,  latin. 
Nota  hene,  latin. 
Numéro,  latin. 
Occiput,  latin. 
Octavo  {\n),  latin. 
Odéon.  grec. 
Olim,  latin. 
Oméga,  grec. 
Omnibus,  latin. 
Optime,  latin. 
Oratorio,  italien. 
Oremus,  latin. 
Pace  (in),  latin. 
Palladium,  latin. 
Palma  cbristi.  lalin. 
Parti  bus  (in),  latin. 
Partner,  anglais. 
Pater,  latin. 
Pathos,  grec. 
Pédale,  italien. 
Pédum.  latin. 
Pensum,  latin. 
Petto  (in),  italien. 
Picador,  espagnol. 
Placenta,  latin. 
Placet,  latin. 
Poco,  italien. 
Populeum,  latin. 
Populo  (coram).  lalin. 


00 


MOT 


Posteriori  (;V),  hilin. 
Post-scripliiiii,  l;itin. 
Prosto,  liitin. 
Primo,  lai  in. 
Princeps  (édition),  l;iliti. 
Priori  (à),  latin. 
Prorcssns,  la  lin. 
Prol'osso  (ex  s  la  lin. 
Prorata,  latin. 
Prospocins.  ialin. 
Piil',  an.i^lais. 
Punch,  aniilais. 
Quaker,  an.uiais. 
Quarto  (in  ^,  latin. 
Quartz,  allemand. 
Quasi,  latin. 
Quasimodo.  latin. 
Quatuor,  latin. 
Quia,  latin. 
Quiliiis.  latin. 
Quidam,  latin. 
Quiproquo,  latin. 
Quoniam  bonus,  latin. 
Rabl)in,  hébreu. 
Uacahoiit,  arahe. 
Hadius,  latin. 
Rail,  anglais. 
Haout  ou  rout,  anglais.  ' 
Raphé,  grec. 
Rasibds,  latin. 
Ratatia,  indien. 
Razzia,  arabe. 
Rébus,  latin.. 
Récépissé,  latin. 
Recta,  latin. 
Recto,  latin. 
Rectum,  latin. 
Rem  (ad),  latin. 
Réméré,  latin. 
Requiem,  latin. 


nicliis.  Ialin. 

liosoliii.  ilalicn. 

Sacrum.  Ialin. 

Salani.  Ii(''br('u. 

Salve,  latin. 

Schérif,  anglais. 

Schlagiie.  allemand. 

Scorbut,  hollandais. 

Secundum,  latin. 

Sépia,  grec-lalin. 

Sérum,  latin. 

Sic,  latin. 

Sigisbé,  italien. 

Silex,  latin. 

Sinciput,  latin. 

Sine  qua  non.  Ialin. 

Siphon,  grec. 

Slop,  anglais. 
Sofa,  turc. 
Solo,  italien. 
Sopor,  latin. 
Soprano,  italien. 
Spath,  allemand. 
Spéculum,  latin. 
Spécimen,  latin. 
Sperma  céti,  latin. 
Sphincter,  grec. 
Spleen,  anglais. 
Statu  quo,  latin. 
Steamboat,  anglais. 
Stentor,  grec. 
Sternum,  grec-lati-n. 
Stimulus,  latin. 
Subito,  latin. 
Tacet,  latin. 
Talisman,  arabe. 
Tampon,  celtique. 
Tarif,  arabe. 
Te  deum.  latin. 
Ténor,  italien. 


MOT 


Tél;inns,  urec 

Yade  mecinn.  lalin. 

Thorax,  tirec. 

Valse,  allemand. 

Tihia.  latin. 

Varietur  (ne),  lalin. 

Tullf.  lalin. 

Vai'iorum,  latin. 

Tory,  anulais. 

Verso,  latin. 

TosI  (toasi).  aiiiilais. 

Veto,  latin. 

Transit,  lalin. 

Vice-versa.  lalin. 

Tirnia.  mvc 

Villa,  latin. 

Trii).  ilalitMi. 

Virago,  lalin. 

Ti'iiniixir.  lalin. 

Visa,  visu  (de),  lalin. 

Tronihonc.  ila 

lien. 

Vivat,  latin. 

Tu  aiiloiii.  lalin. 

Volubilis,  latin. 

Tuinnlus.  lalin 

Wagon,  anglais. 

Tunnel,  an.iilai 

s. 

Waux  hall,  anglais. 

Tnlli  ({nanti,  il 

la  lien. 

Wist.  anglais. 

UUiniatunu  lat 

in. 

Yack,  anglais. 

ITtra,  latin. 

Zéro,  arabe. 

Ut,  latin. 

Zinc,  allemand. 

MOTS 

HKnOUlJLl':; 

s  (onomatopées)  : 

Haha. 

Dodo. 

Micmac. 

Bélté. 

Drelin-drelin.                Nanan. 

Bonbon. 

Fanfan. 

Papa. 

Bric-à-lirac. 

Flic-llac. 

Passe-passe. 

Caca. 

Flonllon. 

Pioiipiou. 

Cache-cache. 

Froufrou. 

Pipi. 

Cahin-caha. 

Gniangnian.                 Pompon. 

Clopin-clopant 

Gogo. 

Tata. 

Conci-conci. 

Joujou. 

Tobu-bohu. 

Crin-crin. 

Lolo. 

Tonton. 

Dada. 

Maman. 

Zigzag. 

Dare-dare. 

Mélimélo. 

Etc.,  etc. 

MOTS    COMPOSÉS  : 

Adieu. 

à  Dieu. 

Cependant,      pendant  ce. 

Avenir. 

à  \enir. 

Chafouin,         chat  fouine. 

Aujourdlini. 

(voy.). 

Culbute,          bute  cul. 

Ah()ara\anl. 

(trois  mots). 

Depuis.             (deux  mots) 

Bienheureux. 

bien  heureux. 

Désormais,      (voy.). 

Bonlieni-, 

lion  heur  (voy.). 

Embonpoint,   (trois  motsV 

92  MOT 

Empois.  en  poix.  Mndainr.  ma  flaiiic. 

Kniin.  en  lin.  .Maiiilciiaiil.  la  main  h-nant. 

Fainéant,  l'ail  n(''aiil.  Midiiclic.  n'\  lomlic. 

Fiuneterro,  fiimrc  de  terre.  IMaInnd,  plal  tond. 

flonnis,  hors  mis.  IMiih'il,  pins  lot. 

.histai]coi'[)S,  (trois  mots).  Oiiiproquo,  (ti'ois  mots  latins). 

Lendemain,  le  en  demain.  Toujours,  tons  jours. 

Licou,  lie  cou.  Traquenard,  traque  renard. 

Lustucru,  Teusses-lu  cru  (!j.  Verjus,  vert  jus. 

—  lion  mot  :  lai-iliole,  plaisanterie. 

Régnier  a  dit  d'un  satirique  (|iril   perdrait  un  ami   [dutot  qu'un 
l)on  mot. 
Horace  avait  dit  a^anl  lui  : 

...iliiiinnodi)  ri.sioi) 
Excniint  sUii,  non  hic  ciiiqinnii  pdirrl  iiinico. 

—  Diseur  de  bous  mots  :  uiauvais  caractère.  (Pascal.) 

X...,  avant  de  lancer  un  lion  mot  dans  le  monde,  le  répète  à 
quelques  amis.  Il  appelle  cela  «  essayer  son  feu  d'artitlce  ». 

—  (iros  mot  :  expression  peu  parlementaire,  injure,  mot  incon- 
venant, énormité. 

Des  choses  qu'on  ne  saurait  répéter  devant  vous,  mademoiselle. 
—  C'est  donc  bien  raide,  répUqua  l'ingénue.  (Figcn^o.  cité  par 
L.  Larchey.) 

Celte  locution  est  très  ancienne,  et  dans  une  cbarte  de  Pbilippe- 
le-Bel  (1299),  on  lit  :  Si  quis  alicui  verha  contiuneliosa  et  (jrossn 
dixarit... 

—  Les  ignorants,  dans  leurs  disputes,  échangent  les  mots  les 
plus  violents  de  leur  vocabulaire  et  éprouvent  une  grande  satisfac- 
tion à  renchérir  dans  leurs  expressions,  à  l'imitation  des  héros 
d'Homère. 

Mais,  si  l'un  d'eux  se  sert  d'un  mot  peu  usité,  que  l'autre  ne 
comprenne  pas,  la  dispute  dégénère  en  rixe  sanglante.  C'est  ainsi 
que,  dans  sa  dispute  avec  Paillasse,  Arlequin  traité  de  bélître,  de 
pendard,  de  sac  à  rin,  restait  indilVéreul  et  ne  se  mil  en  colère 
que  lorsqu'il  s'entendit  appeler  <7(^'o^;Y//>//e.' Cela  lui  parut  le  plus 
cruel  des  outrages. 

—  Le  dictionnaire  de  l'Académie,  pour  expiimer  qu'un  mot  est 
bas  et  tri\ial,  dit  qu'il  est  populaire.  Ainsi,  dire  à  quelqu'un  ([u'il 
est  un  cochon,  un  gros  cochon,  est  une  expression  populaire.  Il 


MOT  m 

ii'ost   ni   poli    ni  jiislc  de   llrtrir  .linsi   un  îKljcclil'  (Irrixi''  du    mot 
piMipIr... 

Il  on  csl  (le  iiH'inc  (le /V///////r/'.  (pic  r.\c;i(l(''inio  rend  s\non\nio 
de  (ji'ossier.  Ainsi,  ollo  (piniilic  do /V/y/////r/-e.v  les  cxprossions  salope, 
tanpe,  uonr.uaiuline.  ci'élin.  ci'apnle.  (  rassenx.  etc.  Quelles  sont  les 
lainilli'S  (on  les  amitiés)  on  les  auteurs  du  dictionnaire  (mt  constaté 
ces  fanuliarités  '.  C'est  sans  doute  dans  celles  dont  ils  |)aflent  à  la 
lettre  V.  on  l'on  se  sert,  pour  désianer  une  l'einnie  ((ui  a  trop  d'em- 
lionpoint.  de  l'expression  [(nnHivre  :  c'est  une  "rosse  vache  ! 

—  (îrands  mots. 

Aiiipiillds  pI  scsiiuipcdaliu  rcrlxi. 

(UoicAiM-:.) 

Racine,  dans  les  Plaideurs,  rappelle  le  précepte  d'Horace  d'éviter 
les  grands  mots.  Petit-Jean  s'exprime  ainsi  : 

Ils  inr  l'diil  dii'i'  ;iiissi  dos  mots  Idii^s  (J'uiic  toise, 
]>o  yraiids  nidls.  (|iii  tiendraient  dici  jiis(|;u'à  Pontoisc. 

Si/pe/-co(/He/ii/ne/ir/cuj\  superlatif  burlesque,  forpé  par  Rabelais, 
et  imité  par  ïli.  Gautier  dans  (léllcoquendeuseinent,  pour  déli- 
cieusement. 

—  Mots  invariables  :  ceux  qui  ne  changent  point  déforme. 
C'est:  l'adverbe,  la  préposition,  la  conjonction,  l'interjection. 

—  Mots  qu'on  peut  lire  à  rel)Ours  :  Aoyon^  Léon,  Noël,  ressasser. 

—  Pi'eiulre  ({uel([u'un  au  mot. 

.le  vous  attraperais  bien,  si  je  vous  prenais  an  mot,  dit  nue  jeune 
fdie  à  nu  vieillai"d  qui  la  cajolait. 

—  Uni  entend  bien  les  mots,  compreiul  bien  les  choses.  (Yarrou.) 
La  plupart  des  erreurs  et  des  discussions  viennent  de  ce  que  l'on 

ne  s'entend  pas  sur  les  mots.  (Locke.) 

—  Entendre  à  demi-mot.  (Voy.  entendre.) 

—  Se  donner  le  mot  :  s'entendre,  se  concerter. 

Ils  se  sont  tous  donné  le  mot  pour  être  blonds.  (Burlesque.) 

Motet,  de  l'italien  niolello,  diminutif  de  mollo,  mol. 

Sorte  de  petite  composition  musicale  très  courte;  de  nnMue  que 
le  sonnet  est  une  petite  poésie,  un  chant  de  peu  d'étendue. 

Presque  tons  les  mots  de  noli-e  lauaue  musicale  sont  enqu'iintésà 
l'italien. 

lYlotif,  du  laliii  moi i tus,  propre  à  mouvoir. 
Signifie  au  proi)re  :  qui  a  la  propriété  de  mouvoir,  et  a  pris  le 
sens  de  :  qui  fait  agir. 


1>4  MOU 

—  Nos  jugements,  lorsqu'ils  sont  jtrononcés  ii\Hc  (cj-tinKlc,  ont 
ponr  motif  révidence  :  qiuiiid  ils  ne  sont  (jmc  des  conjertnres,  des 
{irésomptions,  ils  ont  pour  motif  la  proluihilité. 

—  L'amour,  le  plaisir,  lintérèt,  le  devoir,  sont lesinoltilesde  nos 
actions. 

Reclierclier  (une  femme)  pour  le  i)on  motif:  pour  le  mariage. 

lYlotus!  sorte  d'interjertion  pour  imjtoser  silence. 
Est  probablement  une  altération  de  niuiiis.  muet. 
Il  se  dit  pour  cliiit  !  comme  st  dans  Térence. 
Motus!  il  ne  faut  pas  dire  que  vous  m'avez  vii   sortir  de  là! 
i^Molière,  (leonjes  Dandin,  I,  2.) 

...Encore  un  coup,  motus. 
Rouelle  eousuf  ! 

(La  Fontaine,  Conifx,  IV,  10.) 

Mou,  anciennement  moJ  :  du  latin  mollis. 
Synonyme  :  andouille  :  homme  sans  énergie. 

Mouchard,  dérivé  de  mouche,  avec  le  suffixe  péjoratif  ard. 

—  Au  dire  de  Mézeray.  l'inquisiteur  Déraocliarès  (I06O)  se  nom- 
mait de  Mouchy,  du  nom  d'un  village  de  Picardie,  et  ses  espions 
s'appelaient  mouchards. 

Mais  on  trouvère  verbe  moucher,  pour  épier,  dans  la  Légende 
de  Pierre  Faifeu  (1532). 

Mouche  s'employait  aussi  pour  désigner  des  espions  qui  marchaient 
devant  le  guet,  comme  éclaireurs,  pour  signaler  les  voleurs. 

L'avocat  Barbier,  dans  son  journal  (17o2),  dit  :  «  On  a  doublé  le 
guet,  et  on  a  même  répandu  des  mouches,  déguisés  en  habits  bruns.  » 

Ménage  prétend  que  les  espions  sont  appelés  mouchards,  parce 
qu'ils  s'introduisent  partout  comme  les  mouches,  et  que  de  là  vient 
la  locution  :  fine  moucbe. 

Mouche,  du  latin  musca. 

—  Fine  mouche:  personne  rusée. 

Plus  fin  que  maistre  Mouche.  (Rabelais,  II.  16.) 

—  En  italien,  mucceria  est  le  jeu  des  gobelets,  et  inaëstro  muccio 
est  un  maître  gonin,  un  menteur,  un  filou. 

Coquillard  a  dit,  au  Monologue  des  Perruques  : 

.  Il  jouera  niieulx  (|ue  maistre  Mouche, 
Qui  me  prendra  en  désarroy. 

—  On  a  aussi  appelé  wo?/(7?c.?,  les  espions  de  l'Inquisition  d'Espa- 
gne, qui  se  glissaient  partout  comme  des  mouches,  même  dans  les 


MOU  ilo 

cacliots,  pour  li-nhir  les  iKiiivrcs  |ii'is(iiiiii('i-s  .-issc/.  simples   iioiii-  ii.' 
se  point  iik'ticM'  d'eux. 

—  Prendre  l;i  niouclio  :  se  fficlier. 

On  (lit  (le  nK'iiie  :  (jiielie  nioiiclie  vons  iii(jiie  ^ 

Omis  lu  cidrs  roluhra"  ? 

(l'iAiri;.) 

(Onelles  coulenvres  vois-tir() 

Les  Iliiliens  disent  :  La  mnscd  ri  saf/o  (//  na.so. 

Ou  ne  sait  bien  suuvenl  (|iu'lli'  iikiiicIh'  le  |iii|iii'. 

(Boir.KAi-,  Satirr  IX.) 

(îros-Ri'iK',  (lis-iiKii  (lum-  (iiielle  un  niche  to  pique? 

(.Moi.iKitK,  Dé/iil.) 

On  dit  dnns  le  iiu'nie  sens:  prendre  nn  lininie.  C'est  une  des 
nombreuses  acceptions  dans  lesquelles  s'emploie  le  verlie  prendre. 

—  .La  première  mouche  qui  le  piquera  sera  un  taon. 

—  On  prend  plus  de  mouches  avec  une  cuillerée  de  mic^l  qu'avec 
un  tonneau  de  Niiiaiiiiv. 

Moucher,  provençal  inourar,  latin  tniiecare,  dcuivé  de  hiucuh, 
morve. 
Par  assimilation  :  moucher  une  chandelle. 

—  Le  verbe  moucher  est  employé  substantivement  par  Saint- 
Simon  :  !■  Le  fréquent  moucher  qu'on  entend  dans  la  salle,  lorsque 
le  public  est  éjuu  par  une  scène  pittoresque.  » 

—  Moucher  quelqu'un  :  le  réprimander. 

Je  te  moucbei-ni  de  la  h(dle  manit're.  vieux  roupilleur.  (Plante.) 

—  Au  temps  (ju'on  se  mouchait  sur  sa  manche.  (Soy.  niais.) 

Se  moucher  sur  sa  manche  est  un  [leu  plus  malpropre  que  se 
moucher  dans  un  mouchoir.  Montai.une  parle  d'un  .uentilhomme  qui 
se  mouchait  avec  les  doigts,  sous  prétexte  de  délicatesse,  alléguant 
qu'il  était  malpropre  de  porter  dans  sa  poche... 

—  Il  ne  se  mouche  pas  du  pied,  ...du  coude:  il  agit  gnindement. 
Il  ne  fait  pas  comme  ceux  qui,  s'étant  mouchés  avec  les  doigts,  fout 
disparaître  la  trace  avec  le  pied. 

Cuhitn  se  emungere.  (Ad  Herennlum.) 

Certes,  Monsieur  Tartuffe,  à  liicn  prendre  la  cliose. 
N'est  pas  un  houiiue,  non,  ipii  se  nioucfie  du  pied. 

(Mni.iKiiK.) 

—  Les  Latins  appelaient  un  homme  lin  :  Homo  pinancUp  naris, 
c'est-à-dire,  homme  au  nez  bien  mouché.  Ils  disaient  aussi  :  Homo 
nasatus,  qui  a  du  nez. 


96  MOU 

iïlouchoir,  (lt''ri\t''  de  nioKcher.  avor  le  siit(i\t'  iiislniiiifiil;il. 
Syiioiiyincs:  ;is|iir;iiil  de  ii.irinc  ((•.ilciiihdiii-).  (|ii;ili-('-c()iiis. 

—  J(Ucr  1(;  iiioiiclioii'.  Va\  Tiiinjiiic  cl  en  l'ci'sc.  le  iciiiic  lioiiiiiic 
qui  va  se  marier  nnoic  à  sa  liaiicéc  un  aiiiu^'aii,  une  pircf  de  mon- 
naie et  un  niouclidir  lu-odt''. 

C'est  sans  donic  |)ar  suite  de.  cet.  usaue  que  le  sidtan.  dans  son 
liarcni,  jette  le  nioiiclioir  à  celle  de  ses  femmes  ([u'il  vent  lioiioi'er 
de  ses  laveurs. 

—  Le  don  d'un  mouclioii- clait  une  gracieuseté  die/,  les  empereurs 
romains. 

Ipsunujue  prunum  donasse  oraria  populo  romano  r/iii/ji/s 
uforentur  in  Jarorem.  (Vopiscus,  Aurélien.) 

Moue,  liermaniqiie  f/iouw,  lèvre  inférieure  avancée  ;  plut(')t  que 
du  jurec  inuaô,  serrer  les  lèvres:  ou  du  celtique  moua,  se  fficlier. 
En  vieux  fi-ançais  :  museau. 

Moule,  du  latin  modulus. 

—  Fait  au  moule  :  bien  fait. 

On  disait  aussi:  fait  de  cire,  c'est-à-dire  comme  une  liou.uie  faite 
'dans  un  moule.  (Cf.  fait  au  toiu\) 

—  Ancienne  mesure  pour  le  l)ois,  valant  une  demi-corde. 
En  provençal  mouloun,  petit  tas. 

Moulin,  de  moUnus,  dérivé  barbare  de  viola,  meule. 

—  Les  moulins  remontent  à  la  plus  liante  antiquité.  Moïse  et 
Homère  en  font  mention.  Les  meules  étaient  mises  en  mouvement 
par  des  esclaves  ou  des  animaux. 

—  Faire  venir  l'eau  à  son  moulin  :  se  procurer  des  profits. 

Ce  dicton  se  prend  en  mauvaise  part,  et  se  dit  des  gens  assez  peu 
délicats  dans  les  moyens  qu'ils  emploient  pour  réussir. 

—  Le  mot  émolument  vient  de  emolere,  moudre,  et  a  désigné  le 
profit  qu'un  meunier  lire  de  son  moulin. 

—  Se  battre  contre  des  moulins  à  vent  :  se  créer  des  cbimères  à 
combattre.  Locution  tirée  du  ronuin  de  Cervantes,  où  Don  Quicliotfe 
se  bat  contre  des  mouUns  à  vent  qu'il  prend  pour  des  géants. 

Mourir,  du  bas-latin  morire. 

Presque  tous  les  mots  et  les  péripbrases  dont  ou  se  sert  pour 
remplacer  le  mot  mourir,  expriment  l'idée  de  s'en  aller,  de  sortir 
de  la  vie.  Interire.  aller  parmi  les  morts. 

Aller  ad  patres  (voy.)  :  aller  dans  l'autre  monde. 


MOU  i)7 

Aller  aii\  sonilnvs  hords  (d'oi'i  sotnhrer,  nllei'  diins  l;i  nuit  (Her- 
nclk')  :  lUms  le  rov;iiiiii('  dcsoiuhros. 

l'^lro  ;'i  l'iirtichMlc  l;i  iiiorl  :  près  de  iiioiii'ir.  11  est  ;i  r;ii1icl(>  cl 
dernier  moment  de  son  décès.  (Il;iliel;iis.) 

Décéder,  de  dercih'rc  :  se  retirei"  de  l;i  vie. 

Délnnl,  de  f/cfnnc/ifs  :  (\n\  s'est  acquitté  (de  la  vie). 

Descendre  la  ,uarde. 

Dire  bonsoir  à  la  compaiiuie. 

Ensevelir,  de  sepelire,  entourer  d'une  haie. 

Enterrer-,  inluinier:  mettre  en  terre. 

S'éteindre,  se  dit  par  métonymie,  comme  on  a  dit  autrefois  tuer 
le  feu,  tuer  la  chandelle. 

Faire  le  i^rand  voyage. 

Ktre  llajuhé. 

Graisser  ses  bottes  :  se  préparer  à  partir,  en  recevant  les  saintes 
huiles,  comme  un  voyaiieni-  qui  va  faire  nu  erand  voyage. 

N'avoir  plus  mal  aux  dents. 

Manger  les  pissenlits  par  la  racine. 

Passer,  être  passé  ;  passer  l'arme  à  gauche,  de  ce  que,  dans  les 
convois  funèbres,  les  soldats  du  cortège  passent  l'arme  sous  le  bras 
gauche. 

Périr,  aller  jusqu'au  bout  (de  la  vie);  fait  comme  (repasser,  aller 
au-delà,  faire  le  grand  pas;  d'oii  péril. 

Rendre  l'âme,  l'esprit,  le  dernier  soupir. 

Succomber. 

Tourner  l'œil  :  J'aime  mieux  tourner  la  salade  que  tourner  l'œil. 
{Tin(a?narre.) 

■  —  Mourir  de  sa  belle  mort,  se  dit  par  opposition  à  mourir  de 
mort  violente  ou  prématurée,  car  la  mort  est  toujours  déplaisante. 

Mourir  comme  un  chien  :  misérablement. 

Mourir  de  rire  (voy.). 

Mourir  en  fraude:  insolvable. 

Mourir  de  faim,  ou  plutôt  vivre  en  ayant  faim,  se  dit  de  ceux  qui 
ont  plus  d'appétit  que  de  pain. 

—  Caml)ronne  se  fâchait  tout  rouge  quand  on  lui  rappelait  son 
mot  (?)  de  Waterloo  :  «  La  garde  meurt  et  ne  se  rend  pas  !  »  — 
C'est  d'anlani  [iliis  bcte,  disait-il.  que  je  ne  suis  pas  mort,  et  que  je 
me  suis  rendu. 

—  Nous  n'en  mourrons  pas  !  —  «  Écoutons  la  sonate,  nousl'obli- 


98  MOU 

gérons  et  nous  n'en  mourrons  p;is  ;  ...et  s'il  f;iiil  inoiicir,   ...IKiilise 
lionore  la  mémoire  des  martyrs  !  « 

—  On  ne  sait  qui  meurt  ni  fini  vit.  Cela  se  dit  |)Oiir  justifier  les 
pi'écîiutions  que  Ton  prend  pour  assurer  J'exécMlion  dt;  certains 
engagements,  éviter  les  mécomptes  qui  pourraient  ai'i-iver  par  suite 
du  hasard  ou  de  la  déloyauté  humaine,  et  se  placer  sous  la  protec- 
tion de  la  loi  et  de  la  justice. 

Mousquetaire,  dérivé  de  mousquet,  arme  inventée  par  les 
Moscovites:  ou,  bien  plutôt  du  vieux  français  moschele.  de  viusca, 
mouche,  nom  formé  comme  couleuvrine,  bélier,  etc. 

—  Mousquetaire  à  genoux  :  apothicaire. 

Mousquetaire  à  genoux,  c'est  ce  que  le  vulgaire 
En  langage  commun  appelle  apothicaire, 

(BOURSACI.T.) 

Feu  mon  grand-père  était  apothicaire  à  genoux.  (Poisson.) 

Mousse,  de  l'espagnol  mozo,  jeune  garçon  ;  en  provençal  moussi. 

Génin  le  fait  venir  de  mouche,  parce  que  les  mousses  voltigent 
dans  les  cordages  comme  des  mouches  !  D'après  lui,  mousse  de 
marine  viendrait  de  musca,  et  mousse,  végétal,  de  inuscus.  Ce 
dernier  semble  venir  de  l'allemand  jnoos. 

Mousseline;  ce  nom  d'étoffe  x'xQwi  Aq  Mossoul,  ville  de  Méso- 
potamie. 

Ce  n'est  qu'au  commencement  du  xix*^  siècle  que  les  mousselines 
se  sont  fabriquées  on  France,  à  Tarare  et  à  Saint-Quentin. 

—  0  sainte  Mousseline,  vierge  de  la  toilette  !  sauve,  sauve  nos 
jeunes  tilles^  qui  se  noient  dans  des  flots  de  dentelles,  ...et  dans  des 
rivières  de  diamants  !  (Sardou,  FainiUe  Benbtion.) 

Moutard,  de  l'ancien  proverbe:  Les  enfants  vont  à  la  moutarde: 
pour  dire  qu'on  les  envoie  faire  les  petites  commissions  du  ménage. 
Vient  plutôt  de  mustus,  jeune,  avec  le  suffixe  péjoratif  ard. 

Quelques-uns  y  ont  vu  une  allusion  à  la  malpropreté  des  petits 
enfants.  C'est  par  la  même  raison  qu'on  les  nomme  mei'dous  en 
Provence,  et  que  dans  le  Berry  on  appelle  une  toute  petite  fdle  : 
chici'otte. 

Moutarde,  jadis  moustarde,  qui  se  dit  encore  en  provençal  :  du 
latin  musfum,  moût.  Quelques-uns  l'exphquent  par  multum  ardet, 
qui  brfde  beaucoup  !  ou  par  moult  me  tarde,  devise  et  cri  de 
Philippe  le  Hardi,  duc  de  Bourgogne,  ajoutée  aux  armoiries  de  la 


MOU  99 

\ille  de  Dijon,  qui  lui  ;iv;iit  «Mi\oyé,  en  1388,  un  secours  de  cent 
hommes  d'armes. 

l'n  in.înusrrit  do  In  liililiotlièqiie  de  Saint-Germain-des-Prcs,  parle 
(le  l:i  niotilarde  de  Dijon  coninie  élant  déjà  renommée  au  temps  de 
Philippe  le  Bel  (l^28o-i;il4). 

Celte  élymolo.iiie,  donnée  par  \c  Mercure  de  France  (mars  1734), 
n'est  qu'un  jeu  de  mots  rapi)orté  par  Tabourot,  danssesZÎ/^rtn"?f;*e5 
en  1581.  (jiielques  auteurs  ont  eu  tort  de  la  prendre  au  sérieux. 

—  La  moutarde  lui  monte  au  nez  :  il  s'impatiente. 

Par  Castor  !  quand  il  se  nourrirait  de  moutarde,  il  n'aurait  pas 
l'esprit  plus  colère.  (Plante.) 

—  C'est  de  la  moutarde  après  diner  :  une  chose  qui  vient  trop 
tard. 

Ce  dicton  s'applique  à  une  précaution  tardive,  à  un  secours  qui 
arrive  quand  on  n'en  a  plus  besoin. 

Il  se  dit  aussi  de  ceux  qui  ne  savent  rien  prévoir  et  qui,  par 
exemple,  appellent  le  médecin  après  la  mort  du  malade. 

Ouand  le  cheval  est  sorti,  le  fou  l'ermc  l'écurie. 

—  S'amuser  à  la  moutarde  :  être  lent.  Jeu  de  mots  sur  moult 
tarde. 

—  Sucrer  la  moutarde  :  adoucir  un  refus. 

Moutardier,  dérivé  du  précédent. 

—  Il  se  croit  le  premier  moutardier  du  pape  :  il  se  donne  beau- 
l'oup  d'importance. 

Le  pape  Clément  Yil  aimait  passionnément  la  moutarde,  etPérius 
Valériois,  qui  nous  apprend  ce  détail,  dit  que  le  désir  de  préparer 
la  moiit.irde  la  meilleure  avait  développé  chez  ses  cuisiniers  une 
émulation  terrilile. 

D'autres  attribuent  cet  amour  de  la  moutarde  à  Jean  XXII,  pape 
d'Avignon.  L'histoire  ne  dit  [)as  si  elle  lui  montait  tpielquefois  au 
nez. 

Mouton,  vieux  français  inolton,  l)as-latin  multa,  bélier  châtré. 

—  Les  moutons  de  Panurge  :  serviim  pecus.  La  multitude  est 
moutonnière.;  c'est-à-dire  que  chacun  fait  comme  les  autres. 

Les  moutons  s'attroupent,  les  Uous  s'isolent. 

...Comme  vous  sçavez  estre  du  mouton  le  naturel,  tousjours 
suivre  le  premier,  quelque  part  qu'il  aille.  Aussi  le  dit  Aristotc  (liv. 
1»,  Hist.  aniinalium)  estre  le  plus  sot  et  inepte  animal  du  monde. 
(Rabelais,  IV,  8.)  (Voy.  Champenois.) 


100  MOY 

—  L"liistoire  des  iiinnlons  de  hindon.iidt,  <|iic  P.iniir^c  t;iit  noyer, 
est  cmprMintéc  |t;ii"  |{;ilt('l;iis  ;i  Merlin  Cocc'iic  (Th.  Folengo),  qni  le 
raroule  d;inss;i  (ItMixirnic  Mararoiirc. 

Cuiiiiik;  iiii  iiiiiiiloii  i|ui  \;i  di'ssiis  la  fni  iraiilnii. 

(I.A  l'..>fAiNK,  n,  10.) 

An  nièmc  cluipllrc  S  du  livi'o  IV,  Hnliclais  emploie  l'expression 
niouionniùri',  dont  on  se  sei't  encore  pour  désigner  ccnx  (pji,  comme 
de  vrais  moutons,  sont  incapables  de  se  déterminer  à  rien  par  eux- 
mêmes. 

Ces  gens  qui  sont,  au  dire  de  Juvénal  : 

Verveciun  in  jxilrid,  cra-ssoque  sub  aère  nali. 

—  La  foule  n'est  pas  intelligente,  elle  manque  dinitiative,  elle 
conserve  les  préjugés  et  les  eml)aume  :  elle  obéit  aveuglément  à  la 
peur  de  ne  pas  faire  comme  tout  le  monde. 

—  Revenons  à  nos  moutons  (Rabelais,  I,  1,  III,  33),  c'est-à-dire 
trêve  de  digressions^  allons  au  fait. 

Retournons  à  nos  moutons, 
0  grande  Reine,  et  racontons... 

(ScAiiRox,  Virgile  travesti.) 

Dans  la  Ffnxe  de  Patelin  (w"  siècle),  un  marchand  plaidant 
contre  son  berger  qui  lui  a  mangé  des  moutons,  s'égare  souvent  à 
parler  du  drap  que  lui  a  volé  Patelin,  l'avocat  du  berger.  Le  juge 
qui  ne  comprend  rien  à  ce  coq-à-fâne,  lui  crie  plusieurs  fois  :  «  Re- 
venons à  nos  moutons  !  » 

Mouvement,  dérivé  de  mouvoir,  latin  movcre. 

On  est  étonné  de  voir  réunis  les  mots  imprimer  un  inouvemenf, 
pour  dire  donner  une  impulsion.  Imprimer  signifie  presser  sur,  et 
contient  l'idée  d'immobilité  forcée,  tandis  que  impulsion  a  la  même 
idée  qMQ. mouvement.  Il  est  donc  impossible  de  s'expliquer  cette 
alliance  de  mots.    , 

...Tout  raarclie  animé. 
D'un  mouvement  commun  par  moi-même  imprimé. 

(C.  Delavi(;xe.) 

Nota.  —  L'expression  s'expliquera,  si  l'on  veut  se  rendre  compte 
que  imjjrimer  signifie  d'abord  presser  sur.  C'est  donc  communiquer 
le  mouvement  par  pression. 

—  Le  mouvement  perpétuel  ne  pourrait  exister  que  si  la  matière 
était  douée  dun  pouvoir  créateur,  ce  qui  est  contredit  par  la  raison. 

lYloyen-Age.  Période  qui  sépare  l'antiquité  et  les  temps  modernes. 


MUL  101 

On  s'accorde  à  la  faire,  coiniiieiicer  à  la  cliule  de  l'Empire  d'Occident 
(476],  et  Unir  à  la  pi'ise  de  Gonslantinople  par  les  Tares  (1433). 
C'est  l'époque  de  la  Féodalité. 

IVluet,  ancien  français  inut.  du  latin  //ii/fits  :  d'oi'i  mutisme. 

Et  tous  iiiiatrc  soiin  nuits. 

(Jasmin,  La  Semaine  d'un  fils.) 

.\  moi  seul  no  soyez  pas  muéle. 
Fillette  jolie,  aimalile  tunièle. 

—  .Muet  comiiie  un  poisson,  ...comme  une  carpe. 

Les  cai'pes  sont  loquaces  en  comparaison  de  ce  député. 
Muet  comme  la  rancune.  (G.  Sand,  Anton  la.) 
Muet  comme  la  tomhe,  ...comme  une  statue. 
Stalua  tacilurnlor.  (Horace,  Ep.  II,  2,  v.  33.) 

—  Les  Chartreux,  les  Trappistes,  font  vœu  de  mutisme. 

Les  disciples  de  Pytliagore  observaient  le  silence  pendant  cinq 
ans. 

lYluette,  féminin  du  précédent. 

—  Voilà  justement  ce  qui  fait  que  votre  lille  est  muette.  (Molière, 
Médecin,  III,  6.)  Et  plus  bas  :  «  Et  qui  est  ce  sot-là,  qui  ne  veut  pas 
(jue  sa  femme  soit  muette  ?  Plût  à  Dieu  que  la  mienne  eût  cette 
maladie  !  .le  me  .uarderais  bien  de  la  vouloir  guérir.  « 

lYluguet,  \ieux  français  mnsfjuet,  latin  niuscatus^  nnisqué. 

On  a  dit  noix  mus-guette,  pour  noix  muscade.  (Cf.  muscadin.) 

Petit-maitre  galant  qui  se  parfume  d'odeurs  musquées.  C'est  le 
nom  de  la  tleur  même,  transporté  à  ceux  qui  s'en  parfument. 

On  lit,  au  ch.  {)2  du  Moyen  de  parvenir,  niarjolet  pour  muguet. 

On  dit  aussi  narcisse. 

Rivarol  disait,  à  propos  de  la  nomination  de  Gbamfort  à  l'Académie  : 
"  C'est  une  branche  de  muguet  gretïée  sur  des  pavots.  » 

IVlule,  féminin  de  )nul,  devenu  ;y/;//^/.- Latin  rnula. 

D'où  mulâtre,  né  d'un  blanc  et  d'une  négresse,  comme  le  mulet 
d'un  cheval  et  d'une  ânesse,  et  rice-versa.  Le  mulet  est  stérile. 
(Voy.  Itijt)ri(te.) 

—  Mule,  chaussure.  (La  mule  du  pape);  de  tnuUeas,  chaussure 
de  luxe,  que  les  Romains  avaient  empruntée  aux  rois  d'Albe.  Le 
mulleus  était  en  peau  rouge,  recouvert  de  broderies  d'or,  de 
perles  et  de  pierres  précieuses.  Les  semelles  mêmes  en  étaient 
quelquefois  d'or. 


102  Ml'U 

Aurélicn  défendit  aux  liumiiics  cette  chaussure,  dont  il  réserva 
l'usage  à  lui  et  à  ses  successeurs,  et  aux  dames. 

Transmis  par  les  IU)mains  an  Bas-lMiipirc  il  passa  des  empereurs 
aux  papes. 

IVIup,  dn  latin  uiiiruH:  prec  molva,  (pii  partage  (?). 

—  Il  n'y  a  que  les  sots  qui  écrivent  leur  nom  sur  les  murs. 

Nomina  slultornm  sempnr  parielibus  ad.sunl. 

F'rançois  I^,  qui  écrivit  sur  une  vitre  du  château  de  Chanibord  la 
fameuse  devise  : 

Soin  eut  foiniiic  ^;ll■ie, 
Mal  liahil  ((iii  s\   fie. 

écrivit  aussi  son  nom  sur  une  cloche  de  Rennes,  «  sur  la  plomberie  de 
laquelle,  si  haute  qu'homme  de  nostre  aage  n'y  pourroit  atteindre, 
celuy  grand  de  corps  et  de  nom  roy  François,  y  escrivit  d'ung 
poinçon,  l'an  1522,  ce  mot  François,  qui  y  est  encore».  (Coules 
d'Eutrapel,  XIX.) 

—  Les  murs  ont  des  oreilles.  On  appelait  «  oreille  de  Denis  »  une 
prison  que  ce  tyran  avait  fait  construire  d'après  des  principes 
d'acoustique  tels  que,  d'un  appartement  de  son  palais,  il  pouvait 
entendre  tout  ce  que  disaient  les  prisonniers. 

—  La  surveillance  mystérieuse  et  jalouse  du  Conseil  des  Dix,  à 
Venise,  avait  fait  pratiquer  dans  les  murs  et  les  plafonds  des 
appartements  du  Doge  des  trous  invisibles,  par  où  ils  pourraient 
entendre  et  épier  à  toute  lieure  du  jour  ce  qui  s'y  passait. 

—  Un  grand  nombre  de  passages  de  la  Bible  sont  écrits  sur  les 
murs  de  Fabbaye  de  la  Trappe  ;  ce  qui  a  fait  dire  que,  «  dans  cette 
maison,  les  murs  parlent,  et  les  hommes  ne  disent  mot  ». 

—  On  dit  aussi  :  Sœpe  sepes  habent  aures.  Souvent  les  haies 
ont  des  oreilles.  (Rabelais,  Prol.  du  hvre  III.) 

—  Les  anciens  avaient  des  esclaves  appelés  ôtakoustés.  ou 
espions  (qui  prête  l'oreille).  Tel  est,  aux  Tuileries,  le  personnage 
accroupi,  jardinier  esclave  qui,  aiguisant  sa  serpe,,  parait  écouter 
attentivement  les  complots  que  font  deux  sénateurs  derrière  une 
haie.  On  le  connaît  sous  le  nom  de  Yémouleur. 

Les  romanciers  modernes  ont  usé  souvent  du  moyen  de  démas- 
quer les  traîtres,  qui  consiste  à  faire  écouler  ce  qu'ils  disent. 

—  Où  mur  y  a,  y  a  force  murmur.  (Rabelais,  I,  o2.) 

Ce  jeu  de  mots  en  rappelle  un  autre  :  Jeannot  uuirmure  de  ce 
que  les  enfants  montent  sur  les  murs,  pour  cueillir  des  mûres  qui 
ne  sont  pas  mûres. 


MUS  mi 

—  Kii  1781).  les  leniiiers  géiiénuix:,  pour  cinpèclicr  la  contre- 
haiide  qui  se  taisait  au  dôlriiucnt  des  octrois  de  Paris,  obtinrent 
de  M.  de  Galonné,  minislrc  de  Louis  XVI,  de  construire  le  mur 
d'enceinte  de  Paris. 

On  lit  le  vers  sui\ant.  pour  exprimer  le  mécontentement  public: 

Le  mur  murant  i'aris  rciitl  Paris  nuiriiiiiraiil. 

Et  ce  quatrain  : 

Pdur  aiiyrnenti'i'  son  niunérairc 
Et  rcHivcir  notre  liorizon, 
l.a  fcrmo  a  jufjé  nécessaire 
De  niellre  Paris  en  jirison. 

Murmurer,  du  latin  munnurdre. 

Lu  \icu\  soldat  doit  souffrir  et  se  taire 
Sans  murmurer. 

(SCUICE.) 

lYiusard,  du  vcrl)e  muser. 

Paresseux  qui  s'arrête  en  cbemin,  au  lieu  d'aller  à  son  travail. 

De  là  :  s'amuser. 

Muscade,  du  proven(;al  muscada..  latin  muscala. 

La  noix  muscade  est  produite  par  un  arbre  originaire  des  îles 
Moluques.  Elle  était  très  employée  en  cuisine,  dés  iriSG,  pour 
assaisonner  les  ragoûts. 

Il  paraît  qu'elle  était  moins  en  faveur  du  temps  de  Boileau, 
juiisqu'il  dit  {Satire  III)  : 

Aimez-vous  la  muscade  ?  on  en  a  mis  partout. 

Le  muscadier,  naturalisé  en  1772,  à  l'île  Bourbon,  est  aussi 
cultivé  à  Cayenne. 

Muscadin,  nom  donné,  en  1793,  aux, jeunes  gens  eiréminés  et 
musqués. 

On  appelle  muscadin  une  sucrerie  parfumée  d'un  peu  de  musc, 
et  Pellissou  rapporte  qu'on  mit  en  question  à  l'Académie  s'il  fallait 
dire  muscadin  ou  muscardin.  On  décida  en  faveur  de  muscadin, 
et  Voiture  lit,  par  raillerie,  le  distique  suivant  : 

C'est  au  temps  des  vieux  palardins 
Que  l'on  disait  les  muscardins. 

Muse,  du  grec  mousa,  par  le  latin  musa. 
Synonymes  :  les  neuf  sœurs,  les  doctes  pucelles,  les  filles  de 
Mnémosyne  (déesse  de  la  mémoire). 


104  MUS 

Ces  neuf  sœurs  se  nomment  : 

C;iHio|i('.,  (|ui  ;i  une  belle  voi\:  niiisn  de  l;i  i»0('si('  iiéroïquo. 

Clio,  (jui  réiehi-c  (Kléon):  muse  de  l'Iiistoire. 

Érato,  de  éroa,  amour;  muse  de  la  poésie  amoureuse. 

Euterpe,  réjouissanle  ;  muse  de  la  musique. 

Melpomt'ue,  qui  cliaiite;  muse  de  la  Irapédie. 

Polyinnie,  qui  chante  ijeaucoui)  ;  muse  de  riiymne  suhlime. 

Terpsichore,  (jui  aime  la  danse;  muse  de  la  danse. 

Tlialie,  (lui  lleurit  ;  muse  de  la  comédie. 

Uranie,  la  céleste  ;  muse  de  rastronomic. 

—  Musa  pede.iitvis  :  vers  qui  ressemiilc,  à  de  la  prose,  tamilicr. 
(Horace.) 

La  muse  qui  n'enfourche  pas  Pégase. 

—  Courtiser  les  muses:  Canere  .nhi  el  ninsis  (Cicéron).  Mépriser 
le  jugement  des  sots. 

Musée,  du  grec  mouseion. 

Synonyme  :  nmsée  de  mauvais  tableaux  :  croutéum  i 

—  Du  ive  au  X''  siècle,  époque  de  croyance  religieuse,  l'art  fut 
dans  les  temples  ;  du  xi^  au  xviir,  il  passa  dans  les  palais  ;  mainte- 
nant il  est  dans  les  musées,  oii  il  offre  une  nomenclature  froide  et 
un  assemblage  cpii  fatigue  l'examen,  mais  aussi  un  avantage 
immense,  relath^ement  à  la  comparaison  et  à  la  publicité.  La 
publicité  facilite  l'étude  et  fait  progresser  l'art,  et  la  comparaison 
est  la  base  de  l'archéologie.  C'est  ainsi  qu'à  l'examen  de  tous  les 
blocs  de  granit  et  des  inscriptions  arrachées  à  l'Egypte  par  Bona- 
parte, Cbampollion  put  décbitïrer  l'énigme  qui  désespérait  depuis 
longtemps  les  savants,  et  le  sphinx  s'avoua  vaincu. 

—  Les  musées  datent  du  xix''  siècle,  car  l'Encyclopédie,  imprimée 
en  1779,  au  mot  musée,  cite  celui  d'Alexandrie  comme  un  lieu  de 
réunion  pour  les  savants,  amis  de  Ptolémée,  et  non  comme  une 
collection  d'objets  d'art. 

Mercier  (Tableau  de  Paris,  1783,  ch.  531),  en  parle  d'une 
manière  vague,  comme  d'établissements  nouveaux  ayant  beaucoup 
de  peine  à  réussir. . . 

Après  le  10  août  1792,  lorsque  la  Monarchie  fut  renversée,  tous 
les  tableaux,  statues,  bronzes  et  objets  précieux,  qui  ornaient 
Versailles  et  les  Tuileries,  furent  transportés  dans  la  grande 
galerie  du  Louvre.  Telle  fut  l'origine  du  musée  actuel. 

—  Le  premier  musée  fut  ouvert  en  France,  sous  le  nom  de 


MUS  lOo 

Musée  tk's  Moiiiimonts  Irniir.iis,  le  24  sppteiiil)i'e  1704:16  Musée 
des  Antiques,  en  18(Ki  :  le  Musée  du  Luxemliour,"-,  le  24  iivi-il  1818  : 
le  Musée  d'Auiioul.'iue.  le  24  jnilltM  1824:  le  Musée  éuyittien.  le  4  no- 
Nt'iulii'e  IS27. 

Musicien,  lioir»'  couiuic  un  uiiisicieu.  (Voy.  Ilùlcr,  l(iri(jol .) 
La  eoi'neniuse  ne  dit  mot,  si  elle  n"a  le  ventre  iilciu. 

—  Musicien,  clianlcur  Iciliile  :  \ii'(uose. 

Musique,  du  uitc  inousiLi-.  par  le  latin  inKsica. 

Moiisilcox,  dési.Liuait  tout  ce  (jui  concei'ne  les  muses,  les  hcaux- 
arts. 

Les  Précieuses  apiidaient  la  musique  :  le  paradis  des  oreilles. 

C'est  la  langue  dans  laquelle  on  écrit  les  sons. 

La  musique  est  l'art  d'émouvoir  par  la  comhinaison  des  sons. 
(Fétis.) 

La  musique,  le  plus  immatériel  des  arts,  traduit  les  sensations 
par  les  sentiments  les  plus  élevés  de  l'âme. 

La  mélodie  est  à  l'harmonie  ce  (pie  la  Heur  des  champs  est  à  la 
tleur  cultivée. 

Les  roulades  sont  à  la  musique  ce  que  les  pirouettes  sont  à  la 
danse. 

—  L'Italie  a  produit  la  grande  école  mélodique  et  vocale  :  l'Alle- 
magne la  grande  école  harmonique  et  symphonique. 

—  Musique  mauvaise  :  symphonie  en  zut. 

—  On  a  abusé  de  tout  temps  de  la  musique  :  dans  l'antiquité, 
elle  servit  à  bâtir  les  murs  de  Tiièhes  et  à  renverser  ceux  de 
Jéricho. 

—  Paris,  surnommé  PinnopolU.  est  la  ville  du  monde  où  l'on 
aime  le  moins  la  musique,  et  où  l'on  en  fait  le  plus.  Tous  les  pianos 
qui  y  sévissent,  tous  ces  musiciens  ambulants  avec  des  harpes,  des 
clai'inettes.  des  violons,  qui,  entre  leurs  mains,  sont  un  prétexte 
plutôt  qu'un  instrument,  passent  leui"s  journées  sous  vos  fenêtres  à 
moudre  des  airs  faux,  à  massacrer  vos  oreilles  avec  de  la  musique 
qui  n'est  ni  de  Bach  ni  d'Olïenliach,  ont  conduit  bien  des  gens  au 
dé.'iespoir.  On  cite  des  personnes  (pii  en  sont  mortes!...  On  n'a  pas 
le  droit  de  tuer  ces  tortionnistes...  Ou  desrait  les  mettre  au  violon. 

Si  je  régnais  îui  jour  eu  niaih'o. 
De  l'aris  jusqu'à  LaïuliTiieau, 
Vite  au  violon  je  ferais  nietlie 
Ceux  (jui  se  mettent  au  piano. 

Paris,  en  1807,  a  été  saturé  de  musique.  Les  orpliéouistes  de 


106  MYR 

loulc  riMirnpc,  les  |ii;iii()S  de  ri'lxposilioli.  cl  iiirine  les  canons, 
l'ont  inondé  d'li;irnioiiie.  Los  Parisiens  n'en  sont  pas  morts,  mais... 

—  Lonis  XVIII  disait  do  la  musique  :  '.  Je  ne  la  crains  pas.  « 
Théophile  Gantier  l'appelle  «  le  phis  désagréable  et  le  plus  cher 

de  tous  les  hruits  »  :  il  appelle  «  ouragans  de  musique  »,  ces  concerts 
monstres  d'invention  moderne  où  l'on  réunit  jusqu'à  deux  ou  trois 
mille  instrumentistes. 

—  Après  la  guillotine,  le  piano  est  l'instrument  le  plus  redoutable, 
et  encore,  le  supplice  de  la  guillotine  dure  moins  longtemps.  Je  ne 
serai  heureux  que  le  jour  où  je  verrai  le  dernier  harpiste  pendu  à 
la  dernière  corde  de  sa  harpe  ! 

C'est  ainsi  que  Voltaire,  dérangé  de  ses  études  par  le  bruit  des 
cloches,  écrivit  à  10  ans  ce  vers  contré  les  sonneurs  : 

Persécuteurs  du  ^n'ure  luunain 
Qui  sonnez  sans  miséricorde, 
Oue  n'avez-vous  au  cou  la  corde 
Que  vous  tenez  dans  votre  main  ! 

—  Vous  êtes  malade?...  Je  vais  essayer  de  vous  guérir  par  le 
procédé  du  roi  David...  —  Et  elle  se  mit  au  piano. 

Mutin,  anciennement  meulin,  déri\é  de  meute,  latin  inota. 
On  trouve  aussi  anciennement  la  forme  hufin.  Louis  le  Hutin. 

Mutuel,  du  latin  )nulualls,  pour  mut  uns,  de  meus  tuus.  C'est 
\Bjus  suum  cuique  iribuere.  C'est-à-dire  :  fais  à  autrui  ce  que  tu 
voudrais  qu'on  te  fit  ?  Application  de  la  justice  absolue. 

Myopie,  du  grec  myôps,  de  mijein,  fermer,  cligner. 
Quelques-uns    le    dérivent    de   myia,   mouche,   parce  que  les 
mouches  ont  l'œil  saillant  (?). 

—  La  myopie  et  la  presbytie  sont  en  rapport  avec  le  télescope  et 
le  microscope. 

Myrmidon,  nom  historique  ou  mytliologique. 

La  peste  ayant  ravagé  l'île  d'Égin^,  Éaque,  fils  de  Jupiter  et  roi 
de  cette  île,  obtint  de  son  père  que  les  fourmis  fussent  changées  en 
hommes  et  donna  à  ses  nouveaux  sujets  le  nom  de  myrmidons 
(myrmexj. 

—  Individu  de  peu  de  force. 

C'est  bien  à  vous,  petit  ver  de  terre,  petit  myrmidon  que  vous 
êtes.  (Molière,  Festin  de  Pierre.) 

Myrobolan.  (Yoy.  mirobolan.) 


MYS  107 

IVlystère,  (lu  urcc  mi/sférion.  piirlt;  Inliii  /iii/s/i'rii(m,,  de  iiii/cin, 
sciTiT.  ffniit'r.  leiiir  secret. 

On  croit  ;iii\  iii\stt''res  cl  ;iii\  iiiir;icles.  d'nprcs  ce  [)rinci[)C  : 
Credo,  ([n'ui  fihnurdiiiii . 

Mystifier,  ct)iii[)usé  de//<'ret  d'un  r.-idical  incertiiiii  (wiii'- sicclej. 
Ahiiser  qiieliiuini  en  se  moquant  de  sa  crédulité. 
Synonymes  :  faire  poser  ;  —  servir  de  dupe  :  poser. 
Mystilicalcur  :  fiiuiisle. 

—  Mustilier,  niystilier,  mots  nouveaux  parmi  nous,  el  (pi'on  ne 
saurait  e\[tliquer  que  par  des  exemples.  (Mercier,  Tableau,  uli.  1(14.) 

Ou  en  doit  la  création  au  caractère  du  petit  Poinsinet,  qui,  après 
a\oir  fait  des  opéras-comicpies,  se  noya  par  accident  dans  le 
l'iuadalipiivir.  Yersilicateur,  bel  esprit,  mais  d'une  crédulité 
incroyable,  il  avait  des  saillies  heureuses,  épi.ûrammaliques.  et  la 
simplicité  de  son  caractère  était  sans  bornes. 

On  raconte  qu'on  lui  proposa  d'acheter  la  charge  d'écran  chez  le 
roi,  et  que,  pendant  quinze  jours,  il  accoutuma  ses  jambes  à  soutenir 
l'ardeur  d'un  [)rasier.  On  lui  oITrit  aussi  un  jour  la  place  de  gouver- 
neur du  roi  de  Prusse  :  puis  on  lui  assura  qu'il  serait  nommé 
membre  de  l'Académie  de  Saint-Pélersbourg,  quand  il  aurait  appris 
le  russe.  11  crut  étudier  cette  langue,  et  se  trouva  avoir  appris 
pendant  six  mois...  le  bas-breton. 

—  L'année  1760,  dit  Grimm,  nous  complotâmes  avec  Diderot, 
l'auteur  du  roman  de  la  Religieuse,  Qi  deux  ou  trois  bandits  de  cette 
trempe,  de  nos  amis,  de  rappeler  à  Paris  le  bon  et  vertueux  marquis 
de  Croisemare.  ancien  officier,  qui  avait  aliandonné  depuis  doux  ans 
la  société  pour  habiter  ses  propriétés  de  Caen...  Ils  lui  inspirèrent 
une  si  vive  amitié  pour  cette  religieuse  persécutée,  riiénuiit'  du 
rouum,  cet  intérêt  devint  si  vif,  qu'ils  furent  forcés,  au  bout  de  six 
mois  d'une  correspondance  des  plus  actives,  de  la  faire  mourir,  et 
de  terminer  ainsi  brusqueiiiciil  un  roman  (pii  avait  pour  liut  de 
rauuMier  le  sensible  marquis  au  milieu  d'eux,  en  lui  otïrant  une 
occasion  de  secourir  la  vei'tu  malbeureuse  et  de  faire  une  bonne 
action  de  plus.  (Voy.  Diderot,  édition  1821.  tome  Yll.) 

—  Deux  amis  de  Hacan,  ayant  appris  qu'il  avait  un  rendez-vous 
chez  M"'^  de  Gournay,  récemment  arrivée  de  Gascogne,  se  présen- 
tèrent tour  à  tour  sous  son  nom  chez  elle;  de  sorte  que,  lorsque  le 
véritable  Racan  arriva,  M"'=  de  Gournay  le  prit  pour  un  importun 
et  le  lit  jeter  à  la  porte. 


108  NAR 

Celte  anecdote  ;i  fourni  ,'i  Hoisfolicrt  le  siiji^t  de  sa  comédie  des 
7Vo/.s'  Or  on  te. 

—  Dans  nne  pièce  de  !•■'•  rron  (Don  Japliet  d'Arménie),  il  y  a 
nne  siUiation  très  comiqne.  Les  personnaues  qui  entourent  Don 
Japliet  lui  font  croire  qu'il  est  sourd,  en  ouvrant  la  houclie  sans 
proférer  nne  parole. 

Mythologie,  du  .urec  mi/z/ios,  tiihic,  loyos.,  science. 

Les  dieux  du  paganisme  ont  dispai-u  avec  le  développement  du 
christianisme:  mais  les  lictions  de  la  mytiiolouie  ne  périront  jamais, 
il  y  aura  toiiioiirs  des  niéf/ères  et  des  /la/'jj/'es  dans  la  lanjiue,  parce 
qu'il  s'en  trouvera  dans  le  beau  sexe:  des  A^a/v/.v.ve.s-,  des  Adonis, 
des  Sdtyres  [)armi  les  hommes  ;  des  Protées  dans  la  politique:  des 
oracles  dans  la  médecine,  etc. 


N 


Nabot,  origine  inconnue.  Peut-être  napus  (?),  navet. 

Nager,  du  latin  narif/nre,  doublet  naviguer. 

—  Na.uer  comme  un  poisson,  ...comme  un  chien  de  plomb. 

—  La  locution  :  être  tout  en  nage  (tout  en  sueur),  est  une  corrup- 
tion pour  :  tout  en  âge  (eau). 

Naguère,  adverbe,  ponr  (il)  n'a  guère,  il  y  a  peu  de  temps. 
Synonymes  :  orains  (Rabelais),  tout  à  l'heure. 

l^uis  orains  (ju'il  vient  de  la  foire. 

[Farce  de  Patelin.) 

Naïades,  du  grec  nains,  naein,  couler. 
Divinités  païennes  qui  présidaient  aux  eaux  douces. 

Naïf,  du  latin  nativus,  doublet  natif. 

La  naïveté  est  sœur  de  l'innocence,  et  cousine  de  la  bêtise. 

Naître,  du  bas-latin  nascere,  dont  la  forme  complète  est  gnascere, 
idée  de  engendrer. 

—  Synonymes  :  être  né,  bien  né  :  noide. 

Plutarque  a  dit  :  «  La  vanité  entend  par  là  né  de  parents  nobles  : 
et  la  raison,  né  de  parents  honnêtes.  » 

Narcisse,  latin  narcissus,  grec  narkissos.   Peut-être  y  a-t-il  la 


NAT  109 

111(^1110  l'Mciiic  que  (\;\n9.  tKircofit/in'  (ii/n'/,o(h.  (nircc  (|ii('  |"(»(l('iir  de 
ci'llc  |il,iiilt'  fiiLioiirdit  If  ccrM'aii. 

—  On  ;i|»|(rll('  ii.ii'cisst'  iiii  lu'lil-iii.iilrc  (''|)i'is  de  liii-iiirine. 

—  Nai'cissc.  jciiiio  honiiiié  doiir  d'imo  ui-.ind»'  IksiiiU'.  doiil  il  rtait 
si  inf;iliM''.  (|iril  int-prisa  rainoiir  de  la  iiMiiplic  l'>(li(».  (|iii  st-clia  de 
douleur  à  caiisr  de  cette  inseiisihililé. 

Ayant  vu  dans  une  fontaine  sa  propre  iinaue,  il  en  devint  é})er- 
dument  amoureux,  la  prenant  i»our  une  nymphe  des  eaux,  et, 
désespéré  de  ne  pouvoir  s'unir  à  elle,  il  se  donna  la  mort,  et  son 
sang  produisit  la  Heur  qui  porte  son  nom. 

Narguer,  \iendrait.  dit-on,  de  nasarder,  donner  une  nasarde, 
se  moquer  de  quelqu'un  à  son  nez.  (Voy.  le  suivant.) 

Narquois,  de  nav(juer  {narlrare)^  ou  de  l'argot. 

Esprit  rusé,  qui  trompe  les  autres,  se  moque  d'eux  à  leur  nez. 

—  On  appelait  jadis  drilles  et  narquois,  des  membres  de  l'an- 
cienne famille  des  gueux  et  des  ti'uands.  Ils  s'étaient  fait  une  langue 
qu'ils  appelaient  l'argot,  le  jargon  des  gueux,  ou  simplement  le 
jargon. 

Naseau,  dérivé  diminutif  de  nec,  latin  nasus. 

—  Fendeur  de  nazeaux:  bravache.  [Moyen  de  parvenir .  ç}\.  60.) 
Les  quarante-cinq  gentilshonniies   attachés  à    la    personne  de 

Henri  III.  et  (pii  n'étaient  pour  ainsi  dire  que  des  assassins  à  gages, 
furent  désignés  sous  le  nom  de  fendeurs  de  naseaux.  (Voy.  pour- 
fendeur.) 

Nasse,  du  latin  nassa. 

Panier  d'osier  conique,  où  le  poisson  entre  sans  en  pouvoir  sortir. 

C'est  aussi  un  lilet  à  prendre  les  oiseaux. 

—  Être  dans  la  nasse  est,  par  suite,  une  locution  analogue  à  : 
tomber  dans  le  piège,  dans  le  panneau,  dans  les  lilets... 

Les  Italiens  disent  :  Lascinre  in  Nasso,  laisser  à  Naxos,  c'est-à- 
dire  abandonner  quelqu'un  dans  l'embarras,  comme  Thésée  aban- 
donna Ariane  dans  l'île  de  Naxos.  (Génin.) 

—  Les  trois  nasses  où  tout  le  monde  tombe  sont  le  jeu,  les  femmes 
et  le  vin.  (Dictionnaire  de  Trévoux.) 

Nation,  du  latin  natio,  correspond  à  nasci,  naître. 

Graiule  famille,  distincte  des  autres  agglomérations  humaines. 

—  Collège  des  Ouatre-Nations  :  le  Palais  Ma/.arin,  où  se  réunit 
aujoiird'lini  l'Insliliit  de  France. 


110  NAT 

Le  cardinal  Mazarin  légua  en  lOGl,  2.000.000  de  livres  et  52.000 
livres  de  rente,  pour  fonder  un  colhVe  destiné  aux  (ils  des  ^culils- 
liuiiiiues  et  des  hour.ucois  de  Piunerol,  d'Alsare,  de  Flandre  et  de 
Uoussillon,  quatre  provinces  nouvellenienl  conquises. 

D'où  le  nom  donné,  eu  Kîdo.  ;i  l'étahlissenienl,  dû  à  rarcliitecte 
du  roi,  Louis  La\eau. 

Naturalibus  (in),  expression  latine  :  ;'i  létal  de  nature,  r"est-;'i- 

diro  nu. 

V(iii(liais-lii  \{)\v  imm  iiiailn-  in  nulnnilibus  ? 

(Kki.naki),  Joueur,  I,  2.) 

Nature,  du  latin  nafiwa. 

La  force  qui  engendre  :  l'ensemble  de  toutes  les  choses  créées. 

On  a  dit  aussi  neiure. 

Neture  rit  comme  il  samblc 

Quand  hic  et  hœc  joignent  ensemble. 

—  Le  mot  nature,  qui  chez  nous  désigne  l'ensemble  des  êtres 
créés,  signifiait  cbez  les  Romains  la  naissance  des  êtres.  Tel  est  le 
sens  du  titre  du  poème  de  Lucrèce  :  De  Natura  rerum. 

Cbez  les  Grecs,  le  mot  p/it/sis  remonte  plus  baut  que  la  naissance, 
il  signiOe  génération.  Ainsi  le  raisonnement  conduit  du  dogmatisme 
à  lempirisrae,  et  de  l'idée  de  génération  et  de  naissance,  passe  à 
celle  d'existence. 

—  Nourriture  passe  nature  :  l'éducation  corrige  le  naturel. 

Qu'apprend  poulain  en  denture, 
Le  veut  tenir  tant  comme  il  dure. 

—  Socrate  disait  qu'il  s'était  corrigé  d'une  nature  vicieuse  par  la 
pbilosopbic  et  l'éducation. 

Naturel,  du  latin  nnluralis,  déUvré  de  naturn. 

Qui  est  conforme  à  la  nature. 

Dans  certain  langage,  ou  le  remplace  par  nalure  :  une  ci'itelette 
nature,  un  tableau  nature:  comme  si  ce  barbarisme  devait  rencbérir, 
pour  exprimer  que  ce  tableau  exprime  la  nature  même. 

—  Le  surnaturel,  ou  plutôt  le  contrenaturel,  est  la  violation 
manifeste  d'une  loi  établie  par  le  Créateur. 

—  On  appelle,  substantivement,  naturel  ou  indigène,  celui  qui 
est  né  dans  un  pays. 

—  On  dit  improprement  naturaliser.  Mieux  vaudrait  dire  : 
donner  le  droit  de  cité,  de  bourgeoisie. 

—  Enfant  naturel,  d'après  les  Romains,  qui  appelaient  liberi 


NAV  111 

nahirales  los  onl';iiits  iirs  du  (•(uiciil(iii,it.  |i;ii'op[)(>siti()ii  ;iii\  t'iilnnls 
Iruitiiiics,  lu's  sons  le  réi^iiiH'  lt\u;il. 

C.liassi'Z  le  iialtu'cl,  il  rc\icii(  au  j^alop. 

(Dksioit.iiks.  (iloripu.r.) 
Xdtuiinii  e.iitfUns  fuira,  luiiifit  iixiiuc  rmirrct. 

(IIni:\,.K    ki.ilrl'    \,    liv.   1.) 

L'oiiilire  dt's  hoilciix  csl  tortue.  (Ali.) 

Dans   sa  peau  mourra   le   renard,    l'u/pcs  /li/uiii.   non    niorea 
mutât...  (Suétone.) 
Grattez  le  Russe,  vous  trouverez  le  Cosaque. 

Jamais  clicval  ni  iiuriiant  lioinnie 
N"aiiU'ii(ia  pour  aller  à  Rome. 

(Voy.  Rome.) 

Qui  fol  naquit,  jamais  ne  .uiiarit. 

Qui  a  bu  lioira. 

L'épine  en  naissant  vient  la  pointe  en  avant. 

Qao  scmel  est  imbula  recens,  sercahit  udorcm 
Testa  diu. 

(Horace.  £[,.  1,  II,  70.) 

La  caque  sent  toujours  le  hareng. 

Si  liarong  put  (pue),  c'est  sa  nature  ; 
S'il  fleure  bon,  c'est  adventure. 

Naufrage,  du  latin  nnufrciQUim,  navls.  franyo  (hris  de  navire). 

Faire  naufraoe  au  port. 

NaDujare  in  porta  (Térence)  :  être  en  sûreté. 

Ex  nau /'}'(/ f/io  taljula. 

—  Mancer-comme  un  échappé  du  naufrage  de  la  3Iédut>e. 

En  1825,  la  Méditée,  conduisant  au  Sénégal  un  gouverneur  et 
des  employés  de  l'admiiiistration,  se  i)risa  sur  des  rochers,  par 
suite  de  l'incapacité  du  commandant.  Cent  quarante-cinq  malheu- 
reux furent  al)andonnés  sur  un  radeau,  on  ils  restèrent  douze  jours 
sans  aliments.  Le  hrick  XAi^yua  recueillit  quinze  survivants. 

Géricault  a  représenté  le  moment  où  le  hrick  est  aperçu.  Savigny,     - 
un  des  naufragés,  est  debout  adossé  au  mât:  Corréard  lui  indique  à 
l'horizon  l'espérance  que  la  Providence  leur  envoie. 

Nausée,  du  grec  nausia.  de  nauS;  navire. 

L'elTort  que  l'on  fait  pour  vomir,  et  qui  rappelle  le  mal  de  mer. 

Navet,  anciennement  navenii  ;  provençal  naceoii. 
Lui  estoit  grand  contentement  attiser  son  feu,  faire  cuire  des 
naveaux  aux  cendres.  (Noël  du  Fail,  Pro;jo,ç  rustù/ites.) 


112  NEC 

—  On  (lit,  (Ml  lanfi'.'i.uc  h;is  :  «  Des  niivfts  !  »  C'est  imc  r(''|)onse 
ironique  et  néffiitive.  On  l;i  tr()iiv(!  (hiiis  le  Ci/nihaliim  inniiili;  de 
15.  des  l'(''i'iers  :  "  Oui  (l;"i,  des  niivets  !  " 

Naviguer,  du  latin  narùjare,  de  nnris  :  ^i-ei-  /laiis. 

—  x\a  via  lier  selon  le  vent,  ...selon  lèvent  et  les  Aoiles  :  iiL'ir  selon 
les  circonstances.  • 

Selon  II'  temps  (|iril  fait,  riuiiiiiiie  doit  naviguer. 

(Ri^xMER,  Satire  VI.) 

—  On  ailriime  aux  Phéniciens  l'invention  dn  commerce  et  de  la 
navigation  au  lon,i>-  cours. 

Ne,  du  latin  ne,  négation,  mol  (]ui  rend  une  proposition  ni^'.uative. 
Forme  alTaiblie  de  non:  demande  toujours  un  renforcement. 

Néanmoins,  formé  de  néant  et  de  /noins  :  en  rien  moins. 
Corresi»oiid  à  ne  pas  mn/jis. 

Nécessaire,  du  latin  necesnarius. 
Celui  qui  a  le  nécessaire  doit  être  satisfait. 

Quod  salis  est  cni  conl'ujit,  is  lùhil  innpliiis  optet. 

(HotiACE.) 

Mendlcllatem  nec  dii-ilias,  sed  necessaria.  {Provei'bes  XXX,  8.) 
Ni  l'indigence,  ni  l'opulence,  mais  le  nécessaire. 

Nécessité,  du  latin  necessifafemiÛG  nerf  are,  nouer,  attacher?). 
Ce  dont  on  ne  peut  se  passer,  ce  à  quoi  on  est  attaclié. 

—  Nécessité  n'a  pas  de  loi.  C'est  la  traduction  littérale  de  ces 
mots  de  saint  Augustin  :  Legem  non  habet  nécessitas.  [Soliloques, 
II,  2.) 

Nécessitas  omnetn  legem  frangit.  (Sénèque.  Controverses, 
IX.  44.)  La  nécessité  rompt  toutes  les  lois. 

Sd'va  nécessitas,  ...dira  nécessitas. 

(Horace.) 

La  nécessité  est  une  ai'iue  puissante  :  Ingens  telum  nécessitas. 

Besoin  fait  vieilles  trotter. 

Nunc  est  caldnm  m  ingère  et  frigidum  potare.  (^Pétroue,  Saty- 
ricon.) 

Facere  de  necessitate  virtuleni.  (Saint  Jér()me.)  Faire  de  néces- 
sité vertu,  c'est-à-dire  faire  de  bonne  grâce  une  chose  qui  déplait. 

11  faut  faire  de  nécessité  vertu.  Le  mot  vertu  ne  signifie  pas  ici 
simplement  une  résignation  passive,  mais  doit  être  pris  dans 
l'acception  que  lui  donnaient  les  anciens,  de  courage  héroïque,  de 


SIH\  113 

foiTO.  |iniir   fo<'Oii(|ii('rir  Irs   ;i\;iiil;i,!:os  (iiic  le   iii;illM'iir  iimis  ;i  l';iil 
|iri'tli't'. 

Neptar,  mol  liroc.  de  nr/ià.  liicr. 

Ce  serait  lo  liiviiva^io  ([iii  tiic  le  souvenir  des  choses  terrestres, 
le  hreiivoiie  d'oubli  et  d'iiiuuort;dit('^. 

Le  nectar  était  la  lioisson  des  dieiiv:  Tainliroisie  leur  nourriture. 

I.o  nectar  (|iic  l\tii  s^rl  ;iii  iiKiilrc  ilii  Idiiiicriv, 
...('/est  la  loiiaiiKc,  Iris. 

(La  I'iimmm:.) 

—  I.e  poète  Iliycus  prétend  que  l'amltroisic  était  neuf  l'ois  pins 
douce  (|iie  le  miel.  On  sc  demande  où  il  avait  pu  y  goûter,  pour 
éli"e  si  bien  renseigné. 

Néfaste^  de  ne  et  ffiri  (terme  d'antiquité  romaine). 

.lour  où  les  trilmuaux  étaient  fermés,  où  les  juges  ne  pronon- 
çaient pas  de  jugements,  ?ion  jini  dlccbani.  où  il  était  défendu  par 
la  religion  de  vaquer  aux  atVaires,  où  le  temps  était  consacré  aux 
sacrilices  et  aux  spectacles.  Jour  de  deuil  en  mémoire  d'un  malheur 
public  du  peuple  romain. 

Ver  l'as  et  nefas  (Tite-Live)  :  par  toutes  sortes  de  voies. 

///('  nrfaslns  eiil,  per  ijaem  tria  vcrlja  ailenlar. 
Fd'itus  erif,  pcr  qucin  leye  ticebit  uti. 

(OviDii,  Fastes.) 

Ces  trois  mots,  dont  parle  Ovide,  constituaient  la  formule  :  //o, 
ilico,  addlro  (je  donne,  j'ordonne,  j'adjuge),  que  prononçait  le 
préteur  dans  les  allaires  judiciaires,  avant  d'accorder  le  droit  de 
faire  des  poursuites,  de  désigner  un  tuteur  aux  mineurs,  d'adjuger 
le  fond  d'un  procès  à  l'une  des  parties. 

—  Les  jours  néfastes  étaient  consacrés  au  repos,  soit  pour 
célébrer  des  fêtes,  soit  pour  célébrer  un  deuil  national,  comme  la 
défaite  de  Cannes. 

—  Lorsque  Lucullus  s'apprêtait  à  attacpier  Tigrane,  on  lui  vint 
dire  que  c'était  à  pareil  jour  (jue  Cépion  avait  été  battu  par  les 
Cimbres  (()  octobre)  :  «  Eh  bien  !  dit-il,  je  rendrai  ce  jour  heureux 
pour  les  Romains.  » 

—  De  nos  jours, les  gens  superstitieux  attachent  au  vendredi  une 
intluence  funeste,  et  ne  voudraient  rien  entreprendre  ce  jour-là. 

Pour  les  Uusses,  le  jour  néfaste  est  le  lundi. 

Négociant,  de  néyoce,  latin  nec  otium  (sans  loisir). 
Nègre,  du  portugais  ne(jro,  latin  tùgcr  :  doublet  de  noir. 


fl4  NEM 

iN(Hii  (loiiiu''  ;iii\  peuples  de  l;i  ('(Me  occideiidile  (l'Al'i-i(iiie  p;ir  les 
l'orlii.u'.'iis  (pii  l;i  diMuin  rii'eiil.  el  non  du  Meuve  Niger. 

(]f.  J/oiwe  ( iiiaiiros^  S()iiil)r<'),  J-^lhioiticn  ffpii  senihle  lirùlé). 

--  SyiiniiviDcs  :  hoiilo  de  nei.ae  (p;ir  ;iiili[>lir;i>e).  comiite  on 
appelle  «  boule  de  son  «  une  li,uni-e  nuirqnée  de  Uiclies  de  ronsseur; 
rnid  lilnnclii  ;  honraeois  d'KlIiiopie. 

—  Traiter  quelqu'un  romnie  un  nègre  :  1res  durement. 

—  La  traite  des  nègres  est  un  coniiiierce  intei-lope,  qui  consiste 
à  vendre  les  nègres  conmie  esclaves  dans  les  colonies. 

Le  prix  moyen  d'un  nègre,  en  Amérique,  était,  en  ISoG,  de 
7.(I(K)  francs. 

Neige,  latin  nix,  nirem:  ancien  français  nolf:  provençal  néou. 

—  Blanc  comme  la  neige.  Le  nom  de  plusieurs  montagnes  très 
élevées  est  tiré  do  la  l)lancheur  des  neiges  dont  elles  sont  couvertes. 
Tels  sont  le  Mont-Blanc,  le  Caucase,  les  Alpes. 

—  Dut  nu-om  sicut  lanam.  (Dieu)  donne  la  neige  comme  la 
laine.  (Psaume  147,  16)  ;  à  cause  de  la  ressemblance  des  deux 
matières,  et  parce  que  la  neige  protège  en  hiver  les  végétaux  contre 
le  froid  et  la  gelée.  La  neige,  en  elïet,  à  cause  de  sa  blancheur, 
étant  peu  conductrice,  empêche  la  chaleur  de  la  terre  de  se  perdre 
dans  l'air  froid. 

La  neige  a  encore  la  propriété  bienfaisante  de  tempérer  la 
chaleur  excessive  de  certains  lieux,  en  refroidissant  les  vents  qui 
passent  sur  le  sommet  des  montagnes.  Elle  sert  aussi,  en  fondant 
pendant  l'été,  à  alimenter  les  rivières,  qui  inonderaient  les  vallées, 
si  la  même  quantité  d'eau  leur  arrivait  subitement  sous  forme  de 
phiie. 

—  Année  de  neige,  année  de  grains. 

—  Neige  partout,  arbres  glacés  :  la  terre  n'est  plus  qu'une 
meringue,  les  arbres  sont  en  sucre  candi.  (Amiral  Page,  Revue.) 

—  Faire  la  Itoule  de  neige.  —  La  boule  de  neige  est  le  symbole 
de  la  force  de  l'association.  Alexandre,  César,  Napoléon,  sont 
devenus  les  plus  grands  conquérants  parce  qu'ils  ont  aggloméré 
autour  d'eux  des  forces  considérables. 

La  lioule  de  n.eige.  à  force  de  grossir,  devient  avalanche. 

Némésis,  nom  mythologique  ;  du  grec  nemô.,  distribuer. 

Divinité  infernale,  lille  de  Jupiter  et  de  la  Nécessité.  C'était  la 
déesse  de  la  vengeance  :  elle  punissait  le  crime  et  récompensait 
la  vertu. 


XEfi  lir; 

Nemrod,  nom  liilili(iiic. 

IN'Iit-lils  (If  CIliiii.  cl  arrirrc  |M'lil  lils  do  Noé.  iisiir|i;i  le  piTiim'i' 
la  iiiiiss.'iiK'O  souvoraiiu',  à  1  aille  ilc  jeiinos  ^oiis  qu'il  avait  oiuliircis 
au  travail  par  le  rude  exercice  de  la  chasse  aux  li('(<s  IV'iorcs. 
(Genèse,  \.  S.) 

Nenni  (iKiniJ.  de  iien  pour  /ion  et  i/  :  ce  n'est  pas  cela. 

Opposé  à  ou/  :  hoc  illiid,  c'est  cela. 

Cet  aiherhe.  aujourd'hui  peu  usité,  est  resté  eu  proveucal. 

In  il(Mil\  ni'iiiu  ;i\i'('  un  doulv  Sdurirc 
K'^l  laiil  lioiiiii'sir... 

(('..  .Mauot.) 

l)il('S-\nllS  (Ml  (»ll   iicniii  ? 

(RiTF.riKiF,  Dit  (le  l' ErliiTif.) 

Néologisme,  du  erec  /ie().'<,  nouveau,  hxjos,  mol. 
Opjiosé  de  arclimsinf. 

—  Voltaire,  parlant  de  la  [laiivreté  de  la  langue  Irançaise,  et  de 
la  dillicullé  qu'on  avait  à  l'aire  adopter  des  mots  nouveaux,  dit  : 
«  j.a  langue  française  est  une  gueuse  lière  :  il  faut  lui  faire  l'auniône 
malgré  elle.  )>  {Me//ioires  de  l}ar,haunu)nt,  mai  1778.) 

Voltaire  a  dit  aussi  :  «  La  langue  française  est  une  pauvresse  qui 
fait  rauni('»ne  à  tout  le  monde.  » 

-  On  a  comparé  la  langue  française  à  une  mendiante  orgueil- 
leuse, à  qui  il  faut  faire  la  charité  malgré  elle  ;  si  orgueilleuse, 
|)onrrait-(ni  ajouter,  qu'elle  ne  \eut  l'ccevoir  que  des  pièces  d'or. 
^Pougens,  1821.> 

—  Horace  a  dit  : 

Liiuit  seni]icr(jnr  liccbil 
Sii/iuitiitii  jird'scntr  nnln  iiroduccrc  nomci}... 

11  est  permis, il  sera  toujours  [)oruiis  de  fahriquerun  mot  marqué 
au  coin  de  l'usage. 

—  Les  mots,  comme  les  fruits,  ne  valent  rien,  ni  trop  verts,  ni 
trop  mûrs. 

—  Néologismes  créés  depuis  le  xviiic  siècle  : 
Agglomération,   agitateur,   agrénuMiter,    alarmiste,    amatrice, 

apprêter,  atonie,  avachi,  avicide  (tueur  d'oiseaux). 

Baser,  bénéficier,  hienfaisance,  hlémir,  boutiquier,  hrfderie. 

Camaraderie,  caquetage,  causerie,  cautériser,  chaleureux  (?), 
conllagration,  critique,  cuirasser,  cupide. 

Démonétisation,  désenchanté,  désorganisé,  dill'usion,  dissem- 
blable, dramaturge. 


JIG  \i:u 

l'^U'iicor  (s'k  (''.tiiiliscr,  oiidolor-i,  ('iilr(',L;('iil.  ciiitlioiiic,  ('\|);ilri;itiun, 
('\|)l()r;il('iif.  cNlr.Klilidii,  (•\iilt(''i';iiic('. 

K;i(l;is?(',  iV'licilcr,  lliicliicr.  t'r;iiiris(''.  t'i'.irtidiiiicr.  fi't'.pionro. 

(■('iH'r.'ilissiiiic  (^).  .lii'MiKliosc. 

Ilaiiiciix.  Ii;iiiiiniiis('i'.  hàlil,  liiiiiii)risli(|ii('. 

iiii;i,u(''  (styi('),  iiiiiiiiiiriil.  iiiiiiioliiliscr.  iinprrssioiiiirr,  iiicoliôroiit, 
iiic()iisisl;iiir(%  iii(l('\iii;il)l(',  iiKMlit.  iiit''liicl;il)lt\  iiil';iis;iltl(',  iiifcrlilc'O. 
induenccr,  infranchissable,  inolïcnsif,  insaUihriti',  insoiilo,  instalilc 
insuccès,  invendu,  investi.uation.  irascibilité. 

Jalouser,  ju.miler. 

Loreltc. 

Machiavélisme,  marasme,  métrouianie.  rniridque.  moraliser. 

A'eigeux. 

Ûhligeance,  obscurantisme,  obtuse  (idée). 

Patauger,  paupérisme,  populariser,  ]u'ogrès,  prolétaire,  prosé- 
lytisme. 

Regrettable,  réorganisation,  responsaljilité,  romantique. 

Salarié,  sapide,  sensiblerie,  sinueux,  soporeux,  spoliateur,  stéréo- 
type, stipendier,  subversif,  surluimain. 

Tantaliser,  tari,  torpeur,  tragédien. 

rtiliser. 

Vagissement,  vociférer,  vomir  (des  injures),  voyou. 

—  Néologismes  anglais  : 

Ballast,  convict,  express,  festival,  rail,  railway  (d'où  dérailler), 
sport,  steeple-chase,  lender,  truc,  tunnel,  turf,  ^vagon,  ^\llist,  etc. 

Népotisme,  du  latin  ncpos,  nepolem,  neveu,  petit-llls. 

Ce  mot,  inventé  pour  désigner  la  faveur  excessive  que  certains 
papes  ont  témoignée  à  leurs  neveux,  a  été  appliqué  par  extension  à 
toute  faveur  peu  méritée  accordée  à  la  sollicitation. 

Nerf^  du  latin  nervus  ;  provençal  nerri. 
Les  ficelles  de  la  femme. 

—  Nerveux  comme  une' guitare.  .  ' 

Néron,  nom  historique. 

—  C'est  un  Néron.  Racine  a  bien  exprimé  l'idée  d'horreur 
contenue  dans  ce  mot,  quand  il  fait  dire  par  Agrippine  à  son  fils  : 

Et  ton  nom  paraîtra,  dans  la  race  fiitiiro, 
Aux  plus  cruels  tyrans  une  cruelle  injure. 

[/iri/iiniiicit.t.  V.  6.) 


NEIT  117 

Nescio  vos,  twiirossiun  latine  :  je  ne  vous  connais  pas.  C'est 
comme  si  l'on  disait  :  impossilile,  cela  ne  se  peut  pas. 

L'expression  est  em[)i"iintée  à  la  Hilile. 

Dixit  pat  ri  siio  ot  intlri  suw  :  iiescio  ras.  (Deulcrunoine, 
XXXIII,  9.) 

Amen  diro  rohis,  nc.srio  ros.  (Malliieii,  XXV,  12.) 

H  nie  dit  (|iril  \intlail  vous  parler  un  in.slaiit. 
iv  (lis  :  Xcscio  os. 

iScAinio.x.  Jaihlot,  II.   1.) 

niirli|iic  aiili'c,  dans  ri'spnil'  du  nialriiucninn, 
Aurait  ouvert  loiTille  à  la  trnlatiuii  : 
Mais  moi,  ncsch  vos  ! 

(Moi.iiriK,  iJrpil,  W.  \.\ 

.A>,sv'/o  ras.  dans  Piaule,  siuiiilie  aussi  :  je  ne  vous  connais  pas. 

Neuf,  du  latin  /lorc/n  :  provençal  noc. 

D'où  :  novemher,  novembre;  none,  noua:  nonanle.  (piatre- 
vini2t-(li\. 

Kntorn  l'ora  noua. 

(\'ie  (le  saint  Honorât.) 

(Vers  neuf  heures.) 

—  Neuf  iisl  le  pluséle\é  des  nombres  impairs  e\[)rimés  par  un 
seul  cliill're. 

—  Los  Muses  étaient  au  nuuihrc  de  neuf.  Le  ciii-islianisme  admet 
neuf  chœurs  d'an.ues,  et  recommande  les  'neuvaines,  pendant 
lesquelles  on  fait  certains  ados  do  piété  en  riionneur  de  la  Vierge 
ou  des  saints.  La  neuvaine  de  sainte  Geneviève  se  fait  à  Paris  du 
3  au  1^  jauNier. 

—  Te///' fournil  un  moyen  de  faire  la  preuve  de  la  multiplication. 

—  On  a  remarqué,  sans  pouvoir  en  expliquer  la  cause,  que  les 
iiivors  les  plus  rigoureux  sont  des  millésimes  en  neuf,  tels  que 
17(10.  011  l'Adriatique  gela  en  décembre.  1789,  1829,  1839,  18.j9, 
18G9... 

Neuf,  féminin  nrui-c.  du  latin  nori/.s... 

Haiiit  tout  ballant  neuf,  du  \ieux  mot  haf/f,  neuf?  (argot). 

Neutre,  du  hitin  /icufcr,  \H)\\y  ne  i/fcr.  ni  l'un  ni  l'autre. 

—  Le  genre  neutre,  (pii  n'est  ni  mâle  ni  femelle,  s'appelle  en 
sanscrit  klicu,  eunuque.  (Voy.  hermaphrodite.) 

In  neutrnm  partent  niocerl  (Cicéron),  être  indilVérenl  à  tout. 
La  neutralité  ne  fait  point  d'amis,  n'ôte  point  d'ennemis. 
Neutrahtas  necamicos i^arit,  nec  ifiindcos  lollit.  (Tite-Live.IX.) 


118  m:z 

Neveu,  ancien.  Ir;m(;;iis  sujet  nii's,    réuiiiie  iwceii,  de  nrjtos. 

IICjlOlCIII . 

Aït'.v  est  resté  (Inus  le  iï'ininin  itirro. 

—  Xe\eii  ;'i  i;i  mode  de  Bretagne  :  lils  d'iiii  cuiisin  ,L:enii;iiii  nu 
diiiie  cousine  tierniainc,  parce  que.  en  Bretagne,  les  cousins  lier- 
iiiains  élait'iil  appelés  «  oncles  ■■>  par  les  lils  de  leurs  cousins  .■zcrniaiiis. 

Nez,  (lu  latin  iiftsiis  :  provençal  nos.  D'où  naseaux,  nasillard. 
Partie  saillante  du  visage,  (jui  est  le  siège  de  Todoral. 
Les  écluses  du  cerveau,  pour  les  Précieuses. 

—  Le  nez  se  prend  quelquefois  pour  le  visage  :  se  rencontrer 
nez  à  nez. 

—  Hii'e  au  nez  de  quelqu'un,  faire  une  chose  à  son  nez,  à  sa 
barbe. . 

On  s'aime  à  son  nez.  on  se  marie  à  sa  bai'he.  (.1.  .lanin.) 
I)ispliru/l  nnsKs  :  son  nez  me  déplait,  c'est-à-dire  son  air,  sa 
personne. 

—  Mettre  son  nez  partout  :  faire  la  mouche  du  coche. 

—  Xez  rouge,  qui  a  coûté  cher  à  mettre  en  couleur  (trivial), 
parce  que  c'est  souvent  l'abus  du  vin  qui  lui  donne  cette  couleur. 

Dans  le  Moyen  de  parvenir. [ûvà]^.  21),  Denost  s'informe  à  un 
médecin  comliien  il  lui  demandera  pour  faire  disparaître  la  rougeur 
de  son  nez.  Le  médecin  lui  demande  200  écus  :  "  Vous  ne  sauriez, 
répond  Denost,  pour  si  peu,  d'autant  qu'il  m'en  a  coûté  plus  de 
mille  à  le  rendre  ainsi  de  haute  couleur.  » 

—  Avoir  bon  nez,  le  nez  lin.  du  nez  :  être  lin.  rusé. 

Homo  nnunchr  nmi.''- 

C'est-à-dire  homme  bien  mouché,  dont  les  narines  sont  libres 
pour  llairer. 

Xou  cuicuiiHjuc  ilaliijii  est  hulierc  nasitm. 

(Mai;ti.m,.   I.  -Vi.i 

(11  n'est  pas  donné  à  tout  le  monde  d'avoir  du  nez.) 

Cette  locution  est  la  conséquence  du  fait  physiologique  que  le  nez 
est  le  siège  de  l'odorat,  du  sens  qui  nous  fait  connaitre  la  nature  (?) 
des  choses. 

Aussi  narine  (naris)  vient-il.  selon  Festus,  de  narus  ou  (jnarus, 
qui  sait,  qui  connaît,  qui  sent  et  comprend  les  choses.  D'où  encore 
narro.  raconter,  ig narus,  ignorant. 

La  trompe  de  l'éléphant,  qui  tue  un  buflle  et  déracine  des  arbres, 
est  douée  d'une  sensibilité  si  exquise,  qu'elle  semble  le  siège  d'un 


,\EZ  110 

sons  qui  nmis  csl   iiK-oniiii.  il  sent   s;i    fi'iiit'llc  ;'i  qii.ilrc  Ii'cik's  de 
distance. 

—  Il  a  lion  nez,  se  dit  an  |iro|)i"e  du  cliien  de  .i^arde  ou  de  cliasse; 
an  liiiuré.  de  riioninie  de  .uoi'd  déiical. 

Les  linesses  de  resprit  sont  coniini'  une  essein'C  précieuse  que  le 
sot  laisse  é\aporei'.  Le  sot  n'a  pas  de  nez;  l'iLinoranl n'a  qu'un 
coryza  qui  peut  se  guérir  avec  des  soins,  tandis  que  la  sottise  est 
incuralilt'. 

—  Avoir  un  pied  de  nez  exprime  la  liontc  de  n'avoir  pas  réussi. 
On  dit  aussi   familièrement  :  faire  un  nez  ;  et  pour  exprimer  la 

niiMuc  idée,  jiar  antiphrase  :  être  camus,  s'être  cassé  le  nez. 

Il  en  eut  le  nez  si  long,  qu'il  fut  camus.  —  Mais  d'où  cuidez-vous 
que  cela  est  venu,  que  Ton  a  fait  signifier  la  même  chose  à  deux 
contraires?  (.Voi/f/i  de  jKirrcnii'.  v\\.  01.) 

Guy  Patin  plaida  au  Parlement  contre  Renaudot,  docteur  de 
Montpellier,  qui  voulait  exercer  à  Paris  sans  être  agrégé  au  corps 
des  nu''decins  de  cette  \ille.  Guy  Patin  gagna,  et  dit,  en  sortant,  à 
son  adversaire,  qui  aNait  un  nez  très  court  :  «  Vous  avez  gagné  en 
perdant.  —  Comment  ?  dit  Renaudot.  —  C'est  que  vous  étiez  cauius 
en  entrant  au  palais,  et  que  vous  en  sortez  avec  un  pied  de  nez.  » 

—  Faire  un  pied  de  nez.  C'est  placer  l'extrémité  du  pouce  sur  le 
bout  de  son  nez.  en  allongeant  la  main  en  avant. 

Et  (|iiaiiii  ils  sont  cncluiiiu's. 
Vous  le;u'  lailos  un  pied  de  nez. 

(ScAiiiai.N,  /'orsirs  biir/ps'/i/rs.) 

—  Gueux  de  nez  :  pauvre  de  nez,  camus. 

On  dit  aussi  ne:  en  moins,  par  jeu  de  mois  (nf'fininoinsj. 

—  Jamais  grand  nez  n'a  gâté  figure.  Les  grands  nez  sont  estimés 
chez  certains  peuples,  tandis  que  les  Maures,  les  Nègres,  les  Chinois, 
préfèrent  les  nez  camus. 

Sur  tous  les  nez  son  nez  a  ravantajj-e, 

Et  jamais  un  grand  nez  n'orna  mieux  un  xisago. 

(DlCSIlOL'l.lhliKS.) 

Son  nez,  liant  élevj.  semhle  faire  la  ni(ine 
A  Ovide  Nason,  à  Scipion  .X'asiiine. 

(liiJ.MIM;.! 

Il  a  quel(iue  chose  do  grand  dans  la  figure  :  c'est  son  nez. 
(Sévigné.) 

Salomon,  dans  le  Canlu/ue  des  Cantiques,  compare  le  nez  de 
son  épouse  à  la  tour  du  Liban. 

Dans  une  épigranime  de  YAntlioloyle,  ou  parle  d'un  nez  si  long 


120  NIA 

(|ii('  If  liiMs  n")  poiil  iillciiulrc  |iftiir  le  iiioikIht.  que  l'n-il  iiimi  voit 
pus  le  boni,  (jikî  ron'illc  ne  reiileiid  pus  éleniiier. 

—  Le  peuple  jippelle  jiif  \\\\  nez  éiioniie.  (le  iilrc.  poiiiiiie  de  pin 
qui  resseiiihle  ;'i  un  ne/,  hoiii-iiroiiiK''  d'iN  roune. 

Ljiiiln'  jour,  nie  Sniiil-Mjii'lin, 
Voilà  (|iiiiii  |il;iis;iiil  jriimin 
Me  (lit  en  riniil  ;iiiv  i-cl.ils  : 
(ycu(lel-ià,  <iiiel  iiil'  (in'il  n  ! 

((JLi.NAii),  1830.) 

—  Mener  quoiqu'un  par  le  nez.  Proverhe  <2Tec,  venu  de  l'usaire 
de  passer  un  anneau  dans  les  narines  des  buffles,  pour  les  conduire. 

—  Parler  du  nez,  nasiller,  nasonner.  Il  y  a  des  gens  si  bavards, 
que  si  on  leur  fermait  la  bouclie,  ils  parleraient  du  nez. 

—  La  moutarde  lui  monte  au  nez.  (Voy.  moutarde.) 

—  S'il  tombait  sur  le  dos,  il  se  casserait  le  nez.  (Voy.  fjnirjnon.) 

—  Tirer  les  vers  du  nez  à  quelqu'un  :  bù  faire  dire  la  verit(j. 

Ni,  ancien  fran(;ais  ne  :  du  latin  ner. 

Cette  forme  s'est  introduite  au  wr*  si(^'cle.  Au  \\\\'\  ne  n'est  plus 
nsilé.  Aujourd'hui,  on  ne  l'emploie  plus  que  par  iilaisanterie,  et  en 
répétant  la  phrase  <  ne  plus  ne  moins  »  du  MhUkJi-  imaginaire. 
(Liltré.) 

Ni  l'un  ni  l'autre  :  ni  cliair  ni  poisson  ;  ni  li.uue  ni  raisin  :  ni 
Guelfe  ni  Gibelin  :  ni  Gautier  ni  Garuuille.  (Voy.  neutre.) 

Niais,  d'un  type  nidax.  dérivé  de  nid  ut;,  nid. 

Synonymes  :  Niguedouille,  Nicodème,  Nicaise. 

On  employait  autrefois  niée,  du  latin  nescins. 

Niais  se  disait  particulièrement  du  jeune  faucon  pris  au  nid.  Ce 
mot  est  fait  comme  na'if,  correspondant  à  natif.  Il  s'opposait  à 
madré,  qui  était  le  faucon  arrivé  à  connaître  toutes  les  ruses  de  la 
volerie.  Madré  signifiait  au  propre  tacheté,  parce  que  le  faïu'ou 
adulte  est  marqué  de  taches  noires  sur  le  dos. 

Le  léopard  est  madré.  On  dit  aussi  :  savon  madré  ou  marlu'é. 
Par  mou  cliief,  tu  es  fol  et  nice. 

[Roman  de  la  Rose.) 

Tant  ne  fut  nico.  eiicor  ((ue  nice  fiil. 
Madame  Alix,  que  ci'  jeu  ne  lui  plnl. 

(I.A    l'iLMAIM..    I.'u/lles.) 

—  Faux  niais  :  faux  bonhomme. 

—  Niais  de  Sologne,  qui  prend  des  sous  pour  des  liards,  et  des 
draps  de  lit  pour  des  mouchoirs  de  poche.  0  oy-  So/or/ne.) 


—  Semez  de  la  graine  de  niais,  il  poussera  des  actionnaires.  {Len 
Cent  et  un  lîobert  Marairc.) 

Niche,  lin  \it'ii\  mot  ///y^'/'.  pour  n/fjaudcr  :  ihi  latin  iiii;/ari, 
jouer  au\  iioiv. 

Celte  étymolouie  est  peu  vraiseiniilaiilo.  A'ic/ic  est  une  autre 
fornu'  de  nif/itc  :  faire  la  iiicpie.  et  semldo  \enir  du  scandina\e 
iii/r/i.  malice,  méchanceté. 

Xous  lui  ferons  tant  de  pièces,  nous  lui  ferons  tant  de  niches  sur 
niches,  que  nous  ren\ errons  à  Limoges  M.  de  Fourceaugnac. 
(Molière.  I,  3.) 

—  Aiclie,  ferme  d'ai-chitecture.  vient  de  Fitalien  iiicchia,  enfon- 
cement en  forme  de  co(piille. 

Nicodème,  nom  dliomme,  d'origine  grecque.  Pris  dans  le  sens 
de  niais.  uiLîaud.  [)ar  analogie  phoni({ue  avec  ce  dernier  mot. 

Nicolet.  De  plus  en  plus  fort,  comme  chez  Nicolet.  Cette  locution 
était  la  de\ise  du  théâtre  fondé  en  1700,  houlevard  du  Temple,  par 
>'icolet,  où  l'on  montrait  des  marionnettes,  des  danseurs  de  corde, 
des  animaux  savants.  En  1772,  la  troupe  de  Nicolet,  appelée  à 
Choisy,  où  était  la  cour,  prit  le  titre  de  «  grands  danseurs  du  roi  ». 

Par  suite  de  la  loi  de  1791,  qui  proclamait  la  lijjcrté  des  théâtres, 
celui  de  Nicolet  prit,  le  22  septemhre  1792,  le  nom  de  Théâtre  de 
la  Caité,  qu'il  a  gardé  jus(pr;i  ce  jour,  en  dépit  des  glapissements 
du  mélodrame. 

Nicolet,  dit  Mercier  {Tableau,  cli.  loO),  a  gagné  50.000  livres  de 
rente:  et  le  mallieureiix  Taconnet.  qui  lui  a  fait  une  partie  de  sa 
fortune,  est  mort  à  la  Charité.  Nicolet  a  acheté  une  terre,  et  forcé 
son  pasteur,  qui  lui  refusait  l'eau  liénite,  à  lui  présenter  le  goupillon. 

Oudinot,  rival  de  Nicolet,  (}ui  fonda  l'Amhigu-Comique  (17G9-70), 
(jlilint  d'abord  beaucoup  de  succès  avec  des  marionnettes,  qui 
étaient  des  portraits  ressemblants  des  acteurs  de  l'Opéra-Comique. 

En  1771,  il  substitua  à  ses  marionnettes  ses  propres  enfants,  et 
écrivit  sur  le  rideau  de  son  théâtre  le  calembour  :  Sicut  infantes 
audi  nos. 

Nier,  du  latin  nrt/arc  :  anciennement  noier  et  nier. 
Ar-ot  :  ;iller  à  Nioi'l. 

Nihiliste.  Constitution  du  gouvernement  : 
Art.  i'i.  —  Il  n'y  a  plus  rien. 

Art.  i*.  —  Personne  n'est  chargé  de  l'exécution  de  la  présente 
ordonnance.  (N.  Roqueplan,  1848.) 


122  XIT 

Nil,  nom  géogriipliiqiio  :  du  l;itiii  A'i/its  :  tiroc  .\ei/os. 

—  Inconnu  comme  les  sources  du  Ml  :  A'i/us  incarlis  fonlihuH 
art  IIS.  CPIine.) 

...Sine  leste  creulns. 

|(  j  M   lill  N.i 

Les  sources  du  Ml,  inconnues  jusqu';'!  nos  joui'S.  oui  excité  \i\e- 
lucnl  I;i  curiosité  des  hommes  de  l'antiquité.  Camitysc  fit  de  «rrands 
sacrilices  poui-  celte  recliercliejMlM  prcuiién' ijuestion  (|u"Ale\;indrc 
adressM  ;i  l'oracle  de  Jupiter  Auiinon  fut  pour  savoir  oi'i  étaient  les 
sources  du  iVil. 

—  Les  anciens  disaient  d'une  chose  inipossilile  :  NUI  capul 
fjuwrere,  chercher  la  source  du  .Nil. 

—  Le  Bernain  a  enveloppé  d'un  voile  la  tête  du  Xil. 

—  En  I8oC),  le  pacha  d'Kuypte  contia  à  M.  de  Lantiire  la  mission 
de  remonter  le  Nil  jusqu'à  sa  source,  et  ordonna  les  préparatifs 
de  cette  expédition.  Des  savants  spéciaux  des  pays  les  plus  éclairés 

,  du  monde  devaient  en  faire  partie.  Malheureusement  elle  n'eut  pas 
lieu. 

—  Les  sources  du  Nil  ont  été  découvertes  en  18Gi. 

Nippes,  oriiiine  fort  douteuse.  Islandais  lineppei^). 
Hardes  de  peu  de  valeur. 

—  Je  me  mettrais  en  g;i!j:e,  on  un  liosoin  ui-;,'enl. 

—  Sur  cette  niiipc-là  vous  aiu'iez  peu  d'argent. 

(Hiii..N\iu>.  Joueur.  U.   li.l 

Nique  (voy.  niche),  du  danois  uijkkc,  maUce,  méchanceté;  ou 
de  l'allemand  nickcn,  faire  signe  de  la  léte. 

NM(iuait  de  la  tète  souvent. 

(G.   Chastklai.n,  citO  pir  LilUr.) 

Faire  la  nique  à  quelqu'un  :  s'en  moquer.  C'est,  au  propre, 
hausser  et  haisser  le  menton,  pour  narguer  quelqu'un. 

Les  mots  terminés  en  iquc 

l'^ont  au  médecin  la  niiiue.  • 

Nitouche  (sainte),  pour  n'y  touche. 

Qui  alTecte  un  air  sinq)le  et  hypocrite. 

Un  a  dit  aussi  milouche,  pour  mie  toitc/ie,  qui  n'a  pas  l'air  d'y 

toucher. 

Timide  en  son  aspect,  semblait  sainte  Nitouche. 

.    ■  (Rkcmer.) 

Les  Provençaux  disent  :  misé  pesqui  pas,  madame  presque  pas. 


NOB  123 

Niveau,  de  n/.i-,  n/ris,  noige,  uni  roiiuiK."  la  neiiic.  Ou  pliitiM  de 
lihrd,  lijdaiice  ;  d'où  lihel,  devenu  lucel. 

Nivelle. 

C'est  lo  cliii'ii  (le  Jean  de  Nivi'lli" 
Oui  sViifiiit  (|iian(l  on  rapiiellf. 

Jean  II  de  MoiilMKinMic) .  atlaclM'  à  la  cansi'  de  Lduis  XI.  somma 
5011  lils  Jean  de  M\elle,  de  venir  condiatlre  pour  le  roi  de  Fr'ance. 
Jean,  ci'aiLinant  (^l'on  ne  le  retint  iirisonnici'.  s"enïui(  au  lieu  d'ohéir 
à  son  père,  ce  (pii  lit  dire  :  «  Ce  chien  de  Jean  tle  Ni\elle...  » 

Une  Iraili'osso  voi.v  bk'ii  soiiVL'iit  vous  appelle. 

Ne  vous  pressez  donc  nullement. 
Ce  n'était  pas  un  sot,  non,  non,  et  croyez-nren, 

Que  le  cliien  de  Jean  de  Nivelle. 

(La  FoXTAi.xK,   II,  s.) 

Noble,  du  latin  nnbilis.  (pii  mérite  d'être  connu,  qui  a  un  nom, 
qui  appartient  à  une  classe  distint>uée  ou  privilégiée  dans  l'Etat, 
par  droit  de  naissance.  (Voy.  corlioii  ) 

Xolile  comiiie  le  roi  :  noble  à  3G  carats,  à  30  quartiers. 

Noblesse,  déri\é  du  précédent. 

La  Ré\oliition  avait  supprinu''  les  titres  de  noblesse  :  Napoléon 
les  rétablit. 

Après  la  destruction  de  la  féodalité  pai"  les  rois  de  France,  la 
noblesse  s'est  rasseml)lée  autour  du  tr(tne,  qu'elle  ne  pouvait  plus 
combattre,  et  qui  lavait  liuniiliée  ;  mais  les  nobles  ont  conservé 
leur  crédit,  leur  opulence  et  une  foule  de  privilèges  qui  ont  pesé 
sur  la  multitude  jusqu'à  ce  que  la  Révolution  de  1793  les  ait  fait 
rentrer  dans  le  droit.  (Mercier,  Tabledii,  cli.  t)49.) 

—  Les  titres  de  noblesse,  en  France,  sont  ceux  de  :  clievalier, 
baron,  vicomte,  comte^  marquis,  duc. 

Prince  désigne  les  membres  de  la  famille  régnante.  (Voy.  de  et 
titres.) 

En  Angleterre,  on  distingue  la  haute  noblesse,  nobililij,  qui  est 
celle  des  lords,  et  la  basse  noblesse,  (jcnfry,  celle  des  esquires  et 
baronnets. 

En  Espagne,  la  grande  noblesse  est  la  ijrandes.^e,  la  })elile 
noblesse,  celle  des  hidalgos. 

On  connaît  encore  les  tnaf/nafs  polonais  et  hongrois,  les  Ooi/ard.s 
russes,  etc. 

—  Comte  est  le  plus  ancien  titre  de  noblesse,  car.  28  ans  avant 
Jésus-Christ,  les  sénateurs  formant  le  conseil  d'Auguste  portaient 


124  NOB 

le  nom  tic  Ai((/iisfi  C'ofiii/rs.  (>)iisl;iiiliii  lit  de  ccl  oiiiplDi  nue 
dignité. 

Le  titre  do  rotule  fut  rniisoi'\é  clic/  les  Frnncs,  lorstjii'ils  siiccc- 
dci'cnt  ;'i  l;i  doiiiiiinliou  iuiiimIiic.  Les  comtés  claiciil  des  divisions 
du  territoire,  où  les  comtes  rendaient  la  justice.  Les  comtes  palatins 
étaient  cliarués  des  alTaires  du  palais. 

La  haute  dignité  du  titre  de  coiiile  s'aflirme  encore  de  nos  joiii-s. 
puisqu'il  est  toujonrs  donné  aux  prétendants  de  race  royale.  C'est 
ainsi  que  le  comte  de  Gliambord  et  le  comte  de  Paris  sont  les 
prétendants  des  deux  branches  des  Bourbons  en  France  (1870),  et 
que  jadis  les  comtes  de  Savoie,  de  Flandre,  de  Champagne,  étaient 
de  véritables  souverains. 

—  Le  titre  de  marquis  date  de  Ciiarlrmagnc.  Vi-rs  790.  les  fron- 
tières appelées  marches,  fui'ent  gardées  par  des  chefs  militaires 
appelés  margraves  (comtes  des  marclies),  d'où  est  dérivé  le  mot 
marquis,  créé  par  Louis  XU,  en  faveur  des  seigneurs  de  Trans, 
en  loOO. 

—  JJa/'on,  titre  d'origine  allemande,  sigiiilie  hrnre.  Il  date  du 
vr  siècle,  et  ne  prit  de  l'importance  qu'à  partir  du  xii'". 

—  Noblesse  nouvelle:  parvenus.  Homo  nocus. 

On  dit  d'un  parvenu  :  11  est  noble  comme  un  [lapilluii,  il  a  des 
chenilles  pour  ancêtres. 

—  Les  rois  de  France  guérissent  leurs  sujets  de  la  roture  à  peu 
près  comme  des  écrouelles,  à  condition  qu'il  eu  restera  des  traces. 
(Rivarol.) 

Il  n'est  orgueil  (jne  de  pauvre  enrichi. 

Vilain  enrichi  ne  connaît  ni  parent  ni  ami. 

—  La  civilisation  enrichit  certaines  familles  comme  la  culture 
perfectionne  certains  fruits,  et  fait  une  rose  d'un  églantier,  et  d'un 
chardon  un  artichaut. 

Dans  l'ordre  végétal,  la  rose  serait  une  marquise,  l'artichaut  un 
duc,  etc. 

Les  mots  mêmes  s'anoblissent  :  un  perruquier  se  nomme  aujour- 
d'hui coiffeur;  un  apothicaire,  pharmacien,  etc. 

—  Un  grand  arbre,  avec  les  mots  rirga  fui.  c'est  la  devise  d'un 
parvenu  .qui  n'oublie  pas  son  huml)lc  origine. 

—  Agathocle,  tyran  de  Syracuse,  était  lils  d'un  potier.  Il  faisait 
servir  sur  sa  table  des  vases  d'argile  parmi  des  vases  d'or,  et  disait  : 
«  Ces  vases  ont  été  faits  du  temps  que  j'étais  potier.  » 

' —  Rollin,  lils  d'un  coutelier,  étant  devenu  recteur  de  l'Académie, 


lie  roiiLîit  j;iiii;iis  de  son  oriuiiic.  Assislaiil  un  jour  ;'i  un  dinor  do 
(•('(•('UH)ni(\  et  s'rliinl  nixTcii  (|ut'  l;i  prrsduni'  (|ui  di'-coup.-iil  ;i\;iit 
un  iu;iu\;us  conU'tiu,  il  utlVil  le  sien,  on  disjinl  :  «  l'roncz  colni-ci. 
il  v;nit  inionx  :  ot  jo  nfv  ('(Hinnis.  jo  suis  lils  d(\  ninilro.  » 

—  Noitlosso  obligo  :  llonor  omia.  VÀW  ohliuc  ;'i  ne  pas  dôro.uor. 
Los  liôraiils  d'arnios  criait'iit  dans  los  loui  iidis  :  «  Souvonoz-vous 

ipir  \(»iis  (Mos  lils,  ot  no  foiiisiiic/,  point.  » 

Noce,  jiorfs  :  lalin  tiujiHa'.  do  iii/hcrf.  Noilor.  D'où  nnbili\  on 
âge  dolro  niariô.  Co/niuhiinii,  luaria.iio. 

A  Ronio.  los  jounos  lillos  ôtaiont  condnilos  clioz  lour  ôponx, 
couYcrtos  d'tin  voilo  i)our  proh'uor  leur  [ludciir. 

Alli'Z-\(iMS-en,  gens  de  la  iinco... 
est  nno  chanson  (pii  dato  du  mariapo  du  roi  Da.iioliort  avor  la  roine 
Hatlnldc(?). 

Et  chacun  lit  coinnio  aux  nocos  (^s'on  alla).  (Moijini  do  pavrcnir, 
chap.  4.').) 

Nocturne,  du  latin  nodupiius. 

Partie  de  l'oflice  divin  (pii  so  chante  la  nuit,  ot  dont  l'onsoinhle 
s'appollo  Matlnos.  (Voy.  heurca.) 

—  Ronianco,  à  denx  voix  ordinairement,  d"un  caractère  tendre 
et  langonrenx,  approchant  de  la  sérénade. 

Noël,  du  latin  natalis  :  provençal  nouvé  :  jour  de  naissance. 
Foie  de  la  nativité  de  Jésus-Christ,  ainsi  que  l'indique  son   nom. 
douhlet  de  nafn/. 

—  Le  jour  de  la  naissance  do  Jésus-Christ  est  incertain  ;  les 
évangélistes  ne  le  fixent  pas. 

Saint  Luc  dit  qu'il  avait  on\iron  .'^O  ans  quand  il  reçut  le  haptême 
do  Joau-Baplisto. 

Le  pape  Jules  I,  au  iv^'  siècle,  a  fixé  la  date  au  i^o  décemhre,  jour 
on  le  soleil  commence  son  cours,  de  même  que  Jésus-Christ  est 
venu  pour  éclairer  le  monde. 

—  En  Alloinagno,  Xool  est  la  foie  dos  petits  onlanls.  On  dresse 
dans  le  salon  l'arhre  du  Christ,  étincelant  de  lumière  et  couvert  de 
jouets  de  toute  sorte. 

En  Italie,  c'est  la  Béfana,  grande  poupée,  qui  est  censée 
descendre  par  la  cheminée,  à  l'heure  de  la  naissance  du  Christ, 
pour  distrihuor  récompenses  ou  punitions  aux  enfants. 

—  Noël,  en  provençal,  s'appelle  aussi  Galène,  prononciation 
modifiée  de  Ca/endœ  ou  Calendti,  fote. 


m  NOE 

l.;i  Iclv  (le  Noël  étant  fixée  au  25  décembre,  le  liiiitiéme  jour  des 
ciilfiidcs  de  jnnvior,  re  nom  de  calende  fut  appl'Kjné  dans  un  sens 
spécial,  et  [ujiir  ainsi  dire,  par  excellrnct'.  ;'i  la  WW.  nit'inc. 

A   calcixlds   In   xrliil  jor   ilr    \iuliil. 

(Chron iquf  (l'A ries.) 

(A  calendes,  le  saint  jour  do  Norl.) 

E  xi  s'dfenc  cnlorn  Xailnl, 
Coin  (ijicla  ciilcnildH  lui. 

(T.  Vit>Ai..) 

(Et  arriva  ainsi  au  jour  de  Noël,  qu'on  appelle  la  Calende.) 

—  On  appelait  aussi,  au  Moyen-Age.  calonda  maia,  une  chanson 
qu'on  chantait  au  mois  de  mai. 

CanUin  una  calenda  iiiidn, 
♦  Que  di.i  :  cella  domna  lien  nid 

Que  non  fni  lanf/ni  son  iimic  ! 

{Roman  de  t  Ifimaifd,  f-  5(5.) 

(Chantant  une  calende  de  mai  qui  dit  :  Vive  la  dame  qin  ne  fait 
pas  languir  son  ami  !) 

—  De  calende,  on  a  fait  en  provençal  cnlendnu,  le  petit  houx, 
arhre  de  N(iël  dont  on  décorait  la  tahie  du  festin. 

Calendau,  ca/ignau,  cac/wfuec,  est  aussi  le  nom  de  la  orosse 
huche  qu'on  allume  la  veille  au  soir,  après  qu'un  enfant  a  fait  trois 
libations  avec  du  vin,  en  disant  : 

Alhjrè,  Dion  non  dli'ijrè, 
Cacliofucc  vcn, 
Dioli  nous  fasse  la  (jraci  de  veire  l'an  que  ven. 
Se  sian  pas  mai,  que  fout/ucn  pds  men. 

La  bûche  de  Noël  est  un  reste  de  l'usage  antique  qui  consistait  à 
allumer  le  feu  nouveau  au  solstice  d'hiver,  renouvellement  de 
l'année. 

—  Faire  Noël,  en  Provence,  signifie  faire  un  grand  repas. 

(Irc  far  Pasca  o  Nadal 
Quand  son  XX  dans  son  oslal. 

(lierli'.ind  dk  i.a  Toi:ii.) 

(11  croit  faire  Pâques  ou  Noël,  quand  ils  sont  vingt  dans  son  lu'itel.) 
Pâques  et  Noël  sont  donc  deux  grandes  fêtes  «  mangeoires  ». 

—  On  cliante  tant  Noël  qu'il  vient.  Autrefois,  longtemps  avant 
Noël,  on  chantait  dans  les  églises  des  cantiques  appelés  A^oè'ls,  et 
relatifs  à  la  naissance  de  Jésus-Christ.  Au  Moyen-Age,  le  mot  A'oid 
devint  le  cri  de  joie  des  Français,  et  le  signal  des  réjouissances. 


On  le  l'('|)rl;iit  llon-Sciilciiiciil  ,i  r(''|Mii|iic  de  l;i  X;iti\ilr.   lii;iis  Clicorc 
d:\u<.  toutes  les  fé tes  popiihiires. 

—  L'iisn.uo  (les  trois  messes  <lu  jour  de  X()("'l  est  nciiii  do  Home. 
On  enteiidinl  l;i  première  i\  Saiiite-Mni-ie-Mnieiiro,  ;'i  iniiiiiil  :  la 
deiixioiiie  ;'i  Saiiil-Alliaunse.  au  point  du  jiuir.  cl  la  troisième  à 
Saint-lMori'c.  dans  la  matinée. 

Nœud,  du  laliii  nodns:  provençal  iiohk. 

—  Kilcr  son  nœud  :  s'en  aller.  Eu  uiarino.  la  liiiue  de  Locli  est 
iiarnie  de  nœuds,  de  47  en  47  pieds.  iuler\alle  qui  est  la  1 10''  [tartie 
du  tiers  de  la  lieue  marine,  de  sorte  (ju"en  déxidant  la  corde 
iKMidaul  Ironie  secondes,  ou  compic  qiu:'  le  vaisseau  l'ail  aiilaul  de  * 
lieues  à  l'Iieurc.  ([ih>  Ton  a  lilé  de  nieuds  en  cette  deiui-miniite. 
(Yoy.  (jordirn.) 

Noir,  du  latin  niyi'v  :  provençal  n('(jr('. 

D'où  iioircii',  dénifirer,  nègre  (par  le  portugais). 

—  Noir  comme  un  corbeau,  ...comme  une  taupe  :  très  noir. 

—  11  fait  noii'  comme  dans  un  four,  ...à  se  crever  l'ceil  en  voulant 
faire  le  signe  de  la  croix. 

—  Le  noir,  qui  est  la  couleur  du.  deuil,  rappelle  l'idée  lugubre  de 
la  nuit  éternelle,  exprime  la  tristesse  et  la  douleur. 

Noircir,  déi'ivé  du  précédent. 

—  On  n'est  noirci  que  i)ar  le  cliarbon  :  On  n'est  sali  que  par  la 
lioue. 

—  Le  bltinc  o.nI  la  coideur  de  l'innocence  et  de  la  loyauté,  comme 
le  noir  est  celle  de  la  méclianceté  et  de  la  trahison. 

—  Ame  noire,  projets  ténébreux. 

—  Dénigrer,  noircir  quelqu'un  :  Aiyi'r  esl  (Horace),  c'est  un 
méchant. 

Nifjra  sonntia  (Til)ulle).  songes  sinistres. 
Alirni  uifiununn    i)iurere  :  imprimer  à  (pu^hpi'un   une   note 
d'infann'e,  comme  au  fer  rouge. 

Noise,  du  latin  noxhi,  méfait,  querelle. 
Charles  IX  a  écrit  à  Ronsard  : 

Kt  crois,  si  \\\  ne  viens  nii' Iroiucr  à  Aiiiiiolso, 
(jiM'iiti'c  nous  ;iil\  ii'iuira  une  hicii  .m'aiitic  iioiso. 

Noix,  du  latin  nux  :  provençal  V^orf'. 

De  là,  en  latin,  nurjcp,  l+agatcUes,  jeux  d'enfants. 

A  Rome,  les   nouveaux  époux  jetaient  des   noix  aux   enfants^ 


128  NOM 

pour  cxpriiiior  qu'ils   iciioiiriiiciil    ;iii\  jeux   |iii(''rils.  (Cf.    Vir.trile. 
K<jl()<jun,  (S.) 

On  le  rappi'oclic  de  nofh/s,  iuimkL  pai'ro  que  a'  friiil  n-ssciiiblc  ;'i 
iin.nœud  (?);  cl  de /«o(?(?/'e  (?),  miins  parce  que  roiiihrt^  du  noyer 
est  inalfaisatile. 

—  S'est  dit  autrefois  noue:  le  clianiieiueiil  de  oue  en  oie  se 
retrouve  dans  nombre  de  mots.  I.a  fornu^  ixnie  est  restée  dans 
)t(ni(jal .  et  dans  le  provençal  noufjuier.  pour  noyer. 

Unira  niir  proilnsl,  norri  tillern,  trrtin  mors  r.s'l. 

ll'Vol.-  ,1,-  Sill.TIlr.) 

(Une  noiv  est  bonne,  deux  sont  nuisibh'S,  trois  c'est  la  mort.) 

—  A  la  Sainte-Madeleine,  les  noiK  sont  pleines.  (2:2  juillet.) 
A  la  Saint-Laurent,  on  regarde  dedans.  (10  août.) 

—  Gîte  à  la  noix.  Amas  de  graisse  qui  se  forme  sous  l'aile  de  la 
volaille  lorsqu'elle  est  grasse,  et  à  certaine  partie  de  l'épaule  des 
animaux  de  bouclierie.  C'est  ce  que  Pline  appelle  narleus  pinfjul- 
fudinis. 

Nom,  du  latin  nomen,  pour  gnomen,  qui  se  retrouve  dans 
rognonien,  et  que  Festus  lire  de  noscimen  (a  noscendo)  :  ce  qui 
sert  à  connaître. 

—  Avoir  un  nom:  être  connu,  célèbre.  (Voy.  inimorl alité.) 

Il  est  aisé  d'avoir  un  nom, 
La  chose  ;i  gi"uul"|i('iiie  peut-on. 

(l'mvt'i-lie  e.s;)agnol.  vvi<"  siècle.) 

—  Ça  n'a  pas  de  nom  :  c'est  extraordinaire,  inouï. 

«  Eh  liien  !  sorcières  mystérieuses,  noirs  fantômes  de  l'heure  de 
minuit,  que  faites-vous  là  ?  —  Une  chose  qui  n'a  pas  de  nom.  » 
(Shakspeare,  Macbeth,  IV,  1.) 

—  Les  habitants  des  hôpitaux  et  des  prisons  sont  désignés  par 
des  numéros.  En  fait  de  noms,  ces  administrations  ne  connaissent 
quelles  noms  denoml)re. 

—  Il  est  arrivé  que  des  ofliciers  de  l'État-Givil  se  refusaient  à 
inscrire  des  noms  inusités  donnés  par  les  parents  à  leurs  enfants 
nouveau-nés,  sous  prétexte  que  ces  noms  ne  se  trouvaient  pas  dans 
le  calendrier.  Les  prétentions  des  maires,  en  pareil  cas,  ne  semblent 
pas  fondées,  parce  que  tous  les  noms  ne  figurent  pas  au  calendrier 
et  que  les  saints  eux-mêmes,  qui  sont  au  nombre  de  plus  de  40.000, 
ne  sauraient  être  contenus  tous  dans  les  3G5  jours  de  l'année. 

Ce  n'est  pas  la  loi,  c'est  l'usage  qui  restreint  les  noms  à  la  liste  du 
calendrier:  il  eu  résulte  un  défaut  de  variété  qui  nuit  à  la  distinc- 


NOM  129 

tioii  des  hi(li\iiliis  t'I  tend  |i;irl'uis  à  clL-m'ici'  on   (iiichiiic  sorte  des 
noms  i)ro[ires  en  ikuiis  coiiiiiiiiiis. 

Ainsi  le  nom  de  M;ii-iiis  est  donné,  à  Marseille,  à  |)res(iue  tons  les 
jiairons:  à  l'appel  de  ce  nom,  tons  les  liahilants  mfdes  ré[iondent 
comme  nn  seid  homme.  Ile  joli  nom,  dont  Tanam-ammeest  ai/ii  sur. 
dérive  de  ceini  de  la  i)atronne  des  marins,  Marie,  on  se  tronve  le 
mol  (limer:  mais  on  conviendra  ([n'il  y  a  trop  de  Maries  et  de 
Marins. 

L"lialiitnde  a  de  même  nudli[ilié  les  Pierres,  les  Jacques,  etc. 

Les  noms,  qni  doivent  désigner  les  individus,  les  distinguer, 
devraient  être  aussi  nombreux  que  ces  individus  eu.x-niènies. 

Nous  avons  adopté  depuis  lon,ulenq)S  un  cci'tain  nomlire  de  noms 
tirés  du  prec,  et  (jui  doivent  à  leur  origine  un  son  doux  et  Jiiélodienx. 
Pourquoi  ne  nudtiplierait-on  pas  ces  emprunts,  comme  Eulalie, 
Kuplirasie,  qui  i)arle  bien:  Eugène,  bien  né  ;  Stéplianie,  couronnée  : 
Adèle,  cachée,  modeste? 

—  Dans  les  premiers  siècles  de  l'ère  chrétienne,  'le  nom  de 
baptême  était  seul  en  usage.  Vers  le  ww  siècle,  on  commença  à  y 
joindre,  pour  les  personnages  illustres,  quelques  épitbétes  qui  les 
désignaient  spécialement  :  Charles  Martel,  Louis  le  Débonnaire, 
Pépin  le  Bref,  etc.  Plus  tard,  les  seigneurs  féodaux  ajoutèrent  à  leur 
nom  de  baptême  ceUd  de  leur  terre. 

Vers  le  xiii«  siècle,  le  surnom  devint  général  dans  toutes  les 
/  classes.  De  personnel  qu'il  était  d'al)ord,  il  iinit  par  s'appliquer  à 
toute  la  fanùlle,  passa  du  père  au  Mis  et  se  perpétua  dans  les  géné- 
rations suivantes. 

Les  surnoms  ont  des  origines  très  diverses;  on  peut  di\iser  ces 
noms  de  famille  en  cinq  grandes  catégories  : 

l"'  Ceux  d'industriels:  Ghaussier,  Pelletier,  Taillandier,  etc. 

2°  Ceux  de  classes  agricoles  :  De  la  Fontaine,  Delavigne,  Des- 
cbamps,  Dumas,  Dupré,  Dupuy. 

3*"  Ceux  des  fonctions  civiles  :  Bailly,  Maire,  Prév('>t. 

4°  Ceux  qui  désignent  une  qualité  physique  ou  morale  :  Leblanc, 
Le  Canins^  Ledoux,  Legrand,  Leroux. 

ri"  Les  noms  de  baptême:  Gervais,  Lucas,  Martin. 

Mais  l'immense  variété  des  noms  propres,  s'expli([uc  par  des 
analogies  avec  : 

L'âge  :  Laine,  Lejeune,  Levicnx,  Vieil,  Vieillard. 

L'amitié  :  Aimé,  Amant,  Benticogllo,  Lamy. 

Les  anges  :  Chérubin,  multitude  des  sciences  :  Gabriel,  la  force 


i:)0  xo.M 

(le  Dieu  ;  Michel,  l;i  piiissnnce  de  Dini  :  I{;i|ili;i("l.  lesecoiirsdclJicii  : 
Séra()liin,  eiiilir;iseineiil  (r.'mioiir. 

Les  îinimiiiix  :  (^;ilirul,  Cijciioii.  Lmsiic,  Lasniei'.  Li'ImimiI'.  Lcveaii. 
IJon,  Loiivel,  Liiliiii  (jeiiii»;  loup),  Moiilon. 

Les  armes:  L'ahhé  de  ll-^pée,  Sahraii. 

Les  arts  et  métiers:  Barbier,  Bouclier.  Boiilaiiiici-.  Hoyer,  Chan- 
delier Chai'pcnlicr,  (lordoiinier,  (^oin'doiiaii,  Coutelier,  Coiiliirier, 
Fahre,  Faiire,  Favre,  Fé\re,  Foulon,  Fournier,  Lefehvre  (de  fabci\ 
forgeron),  Lefèvre,  Maçon  ou  Masson,  Mercier,  Pélissier,  Sueur 
[aulor,  cordonnier),  Tisserand,  Tisseui",  Tissier  ou  Teissier,  Van- 
nier, etc.  —  Fal)re  le  conventionnel  avait  ajouté  à  son  nom  celui 
d'Églantine,  iiarce  (ju"il  avait  obtenu  une  églantine  aux  jeux  Floraux. 
Cette  famille  a  pour  devise:  .1  Fahi^o  Fabrl  (arma)  fahricunlur  : 
Les  armes  de  Fabre  sont  forgées  par  Fabre  ;  parce  qu'un  de  ses 
ancêtres,  qui  était  forgeron,  avait  obtenu  des  lettres  de  noblesse  au 
siège  de  Carcassonne  par  les  Espagnols. 

Les  astres  :  Astruc,  né  sous  un  astre  favorai>le  (voy.  malotru), 
L'Étoile,  Soleil. 

Le  bois  :  Chapuis  (autrefois  charpentier,  de  cJiapulser,  travailler 
au  charronnage,  dégrossir  le  bois  ;  provençal  chapar),  Dubreuil 
(pour  Dubois,  car,  dans  le  centre  de  la  France,  breuil  signifie  petit 
])ois  ;  italien  bror/llo,  d'où  de  Broglie),  Faye,  Fayet,  Lafaye  (de  faye, 
nom  du  hêtre  ;  provençal  fau),  La  Goudraye  (heu  planté  de  cou- 
driers), Sully.  —  Joiguez-y  Boquet,  Boquillon,  Bosc.  Bosquet:  Oubois, 
Dubos,  Houssaye  (lieu  planté  de  houx),  etc. 

Le  caractère  :  Allègre,  Bonhomme,  Hilaire,  Joyant  (joyeux),  Le 
Doux,  Malfilàtre  (mauvais  beau-fils),  Marivaux  (pour  Mal-y-vaut  : 
c'est  un  nom  fait  à  l'inverse  de  Gendebien  ou  de  Bonhomme), 
Maupertuis  (mauvais  trou),  Mauvoisin,  Sauvage. 

La  complexion  :  Fort,  Gros,  Maigre.  Mole  (pour  moulé  ?),  Séné- 
quier  (gaucher),  Yigouroux  ou  Vigoureux. 

La  couleur  :  Amaury  (noir  ?),  Blanc,  Blancard  et  Blanchard, 
Blanchet,  Leblond,  Lerouge^  Leroux,  Levert,  Moreau  ou  Morel  (noirj, 
Rousseau,  Roussel. 

Les  dignités"  :  Archer  et  Larcher  ou  Larchey,  Aul)er  (haut 
baron?),  Baron,  Bedeau,  Cardinal,  Cliampion,  Chapelain,  Chapelle, 
Chaptal  (chef,  capitaine),  Châtelain,  Ghevaher,  Clerc,  Duc,  Dussei- 
gneur,  Labbé,  Leclerc,  Lecomte,  Lécuyer,  Lemoyne,  Le  Prieur, 
Leprince,  Leroy,  Lévèque,  Monge  (moine).  Prieur,  Bornée,  Romieu 
(pèlerin  qui  va  à  Rome),  Seigneur. 


XUM  131 

Les  éléments  :  Ik'llt'l'oiil.  Homicfoiit,  ncsfonlaincs,  l)(!sm;ircs,  Des- 
marots,  Foii((ii«5  (foii),  Kroidcfoiil  ou  Fonfréde,  Lacliaiulcloiit  (devenu 
La  (^lianx  de  Fond),  Lafon,  Lafoiit,  Lafoiilaiiie.  Larivirro. 

La  laniille  :  Commère,  Coiisint',  Fille.  Fillenl,  Frère,  Lclils,  Le- 
gendre,  Neveu,  Parent,  Père 

Les  Meurs  :  Marguerite,  Uosc. 

La  force  :  Briseharre,  lirisl'erl,  Cassegrain,  Lefort. 

Les  forets  :  Forestier,  Sylvain,  Sylva ndre,  Sylvestre. 

La  forme:  Beaucorps,  Beaulils,  Heausirc  Belliomme,  Boiteux, 
Calvet,  Lebeau,  Lehel,  Lel»orgne,  Lecorps.  Vilain. 

Les  fruits:  Melon,  Meslier (néflier),  Olive, Olivier,  Orange,  Poirier, 
Pommier. 

Les  habits:  Bonnet,  Chaperon,  Collet,  Soulier. 

L'habitation  :  Cal)anel,  Gastel,  Château,  Desmaisons,  Desmazures, 
Duchateau,  Dumas,  ïïausmann,  Lafenètre,  Laporte. 

Les  instruments  :  Arbalète,  Bâton,  Bourdon,  Canon,  Lachaise, 
Martel,  Mortier. 

Les  légum'es  :  (cbez  les  Romains)  Cé[)ion,  Cicéron,  Fabius,  Len- 
lulus.  Pison. 

Les  mois:  Avril,  Février,  Janvier,  Mars. 

Les  nations,  provinces  :  Allemand,  Angevin,  Anglais,  Berryer, 
Breton.  Bourgogne.  Bourguignon,  Champagne,  Comtois,  Danois, 
Flamand,  Fi-ançais,  Lenormand,  Lombard,  Picard,  Toulon,  Toulouse. 

Les  oiseaux:  Agasse,  Ayasse,  Chapon,  Corneille,  Faucon,  Geai  ou 
Jay,  Lacaille,  Laigle,  Lecoq,  Merle,  Pinson,  Poule,  Rossignol. 

Les  pâturages:  Berger,  Pasteur,  Pastoret,  Pastoureau. 

Les  pierres  :  Despériers.  Lapierre,  Peirol. 

Les  plantes  :  Buisson,  Delorme,  Desnoyers,  Duchesne,  Dufrêne, 
Dupin,  Foret,  Fougère,  Froment,  La  Saussaye,  Xoyer,  Pommier, 
Rosier,  Saussier. 

Les  poissons  :  Baleiiu>,  (Chabot,  l)aii[»liin,  Languille. 

Les  ponts  :  Duponchel,  Dupont,  Poucet,  et  un  grand  nomiire  de 
noms  de  localités  :  Pont-Audemer,  Pont-l'Évéque. 

Les  repas:  Maupas  (mauvais  repas),  Maurepas. 

Les  rochers:  Larocbefoucauld,  Laroque,  Rochas,  Roche,  Roche- 
fort,  Roque,  Roquebrune,  Roquette,  Roquevaire. 

La  stature:  Legrand,  Lenain,  Lepetit. 

La  ser\itude:  Gobert,  Gombert,  Jobard,  Jol)erJ[,  Jouiiert.  —  Les 
Italiens  disent  Gloherti.  Ce  nom  vient  du  bas-latin  ./o/^a</o,  esclave 
appliqué  à  la  culture  du  sol,  comme  Albert  signitie  esclave  atïran- 


J32  NOM 

clii.  (Diicn  11,^0^  Colliln-iii :  L.  LmtcIk^v.  Didlonnairo  des  noms 
d'/toitinies.) 

La  terre  :  La  Coiidainiiie  (en  i-oiiiaii  cIkiuiii,  piv  sciuiieiii'ial), 
Des  Essarls  (de  essart,  terre  défrichée). 

Les  vallons  :  Heaiivalloii,  Honneval,  Devaiix,  l)ii\al,  i!iilr('\aii\, 
Lavallette,  Lavallée.  Lavallièi'e,  Vallon,  Yanclnsr. 

La  vertu  :  Chrétien,  Clément,  Gentil,  llanii,   Lesa.ue,   Levuillanl. 

Tj'S  villes:  IJoulo.une,  Ciiartres,  Paris,.  Tonlon. 

Au  Moyen-Aiie  le  mol  ri//rt,  Icrme,  maison  des  champs,  se  joi- 
gnait souvent  an  nom  du  propriétaire  pour  désigner  un  lieu  hahilé. 
D'où  le  grand  nombre  de  noms  terminés  on  lul/c,  et  aussi  en  cour!, 
(pii  avait  à  [xmi  pCv'S  h?  même;  sens. 

Les  noms  latins  terminés  en  r/;<;/,s',  tels  que  Cypi'ianiis,  Claiidi;inu>. 
(pii  ont  une  voyelle  avant  celte  désinence,  donnent  icn  en  français: 
Cyprien,  Claudien.  S'ils  ont  une  consonne,  ils  gardent  un.  L'usage 
a  beaucoup  varié  à  cet  égard. 

,  En  Italie,  on  met  l'article  le,  la,  de\aiit  les  noms  projjres  des 
personnes  célèbres  :  le  Tasse,  le  Dante,  lAriosle,  le  Titien  ;  la 
Grisi,  etc. 

En  Russie,  on  ne  dit  guère  Monsieur  et  Madame.  En  parlant  à 
quelqu'un,  on  l'appelle  par  son  nom  de  baptême  suivi  du  nom  de 
son  père,  en  ajoutant  wltcli  pour  les  hommes,  icna  pour  les  femmes. 
Ainsi  Anastasie  Petrowna,  pour  A.  tille  de  Pierre  ;  loitch  s'applique 
à  un  noble;;  of  ou  ef  l\  un  roturier.  Alexis  Alexiewitch,  ou  Alexis 
Alexief:  le  premier  est  no1)le,  le  second  est  roturier.  (Cf.  P.  Mérimée.) 

Les  noms  anglais  terminés  en  son,  sont  composés  du  nom  de 
famille  et  du  mot  son,  qui  signifie  (ils.  Thomson,  Janson,  Jackson  : 
lils  de  Thomas,  de  Jean,  de  Jacques. 

Les  noms  bretons  commencent  en  ker:  les  noms  angevins  finissent 
en  ière  ;  les  normands  en  ville  ;  les  gascons  en  ac  ;  les  noms  des 
langues  du  Midi  se  terminent  surtout  par  des  voyelles,  /  ou  o. 

—  Plus  une  chose  est  commune  dans  un  pays,  plus  on  y  invente 
de  noms  pour  la  désigner.  Ainsi  les  Arabes  ont  prèâ  de  trois  cents 
noms  pour  désigner  le  lion. 

SURNOMS  DONNÉS  A  DES  HOMMES  OU  A  DES  FEMMES  : 

Achille  :  le  Bouillant.  Aristide  :  le  Juste. 
Alexandre  :  le  Grand.  Arislote  :   le  Prince  des  philo- 
André del  Sarto  (sans  erreur).  sophes. 
Antonin  :  le  Pieux.  Attila  :  le  Fléau  de  Dieu. 


NOM  IXi 

Bnltiiiol  :  lo  [iliis  savant  des  plai-  Iluniriv  :  rilliistro  avcuoie. 
saiils  et  It'  |tliis  plaisant  dos  llii.ûo  :  le  .liivénal  français. 
sa\ants.  .1.  .lanin  :  lo  Pa.«anini  do  la  proso. 

Balzac  :  lo  Grand  rpislulior.  Jésuites  (le  généi-al  (h'^)  :  J'a|K' 

Bai'i'as  :  lo  Pourri.  noir. 

Bayai'd  :  loChevalior  sans  pcui'...  .losopli  :  lo  l^i(]i([ue. 

Boaufort  :  le  Boi  dos  liallos.  Julien  :  TAposlat. 

Bôranwr  :  rAnacréon  moderne.  Lalayettc  :   le   Héros   des   deux 

Bernis  :  Bahol  la  Bouquetière.  mondes. 

Bossuet  :  l'Ai.ulo  de  M(\iuk.  Lamartine  :  rAmaiif  d'Elvire. 

Bouelicr  :  lo  Peintre  do  la  chair.  Laurent  :  lo  Ma.uniliquo. 

(^alianel  :  le  Souverain  poncif.  Littré  :  lo  Pontife  de  ralliéismo. 

(]alliorine  II  :  la  Sémiramis  du         (Youillot.) 

Xord.  Louis  IX  :  le  Saint. 

(-ah  in  :  lo  Pa[»o  do  Genève.  Louis  XII  :  lo  Pore  du  peuple. 

Charlotte    Corday  :    l'Anuo    do  Louis  XIV  :  le  Boi  soleil. 

Tassassinal.  Louis  XVI  :  le  Boi  martyr. 

Cliangarnier  :  lo  uéuéral  Borua-  Luciou  :  le  Voltaire  dcrantiquilé. 

mott(\  Lucrèce  :  la  Ciiaste. 

Grillon  :  lo  Bi'a\o.  Maric-Antoinetlo:  rAiilrichienno. 

David  :  lo  Boi  proplioto.  Masséna  :  lEnfanl  chéri    do  la 

Dolel.  :  le  Libre  penseur.  vicloii'o. 

Dupanloup  :  le  Fougueux  prélat.  Messaline  :  l'Impudique. 

Don  Quichotte  :  lo  Chevalier  de  Moïse  :  le  Législateur  des  Hé- 
la triste  ligure.  breux. 

Lsope  :  rKsclave  phrygien.  Montaigne  :  lo  Sceptique. 

Fénolon  :  le  Cygne  do  (Cambrai.  Musset  (Alfred)  :  M""  Byron. 

Froissa rd  :  l'Hérodote  du  Moyen-  /  le  Grand. 

Ane.  ^.      , ,       ,   !  rOore  de  Corse. 

n       }         1    T     ■<  Aapoloon  1"^  ,,   .       .         ,    , 
Ganelon  :  le  I  l'ailro.  ^  j  Bohespiei-rea  che- 

.    le  moderne  Cincin-  (       val. 

Garibaldi  nalus.  i    lo  Pdit. 

riléroïque  ganache.  Napoléon  111'  Badinguol. 
Gay(l)cl()hine):  la  dixième  muse.  •  /  rilommedoSodan. 

F.  de  Guise  :  le  Balafré.  Napoléon  (lo  in-inco)  :  Plon-Plon. 

Henri  V  :  TEnfant  du  miracle.  Nestor  :  lo  Sage. 

Henri  IV  :.  lo  Gi-and.  Ney  :  le  Brave  des  braves. 

Henri  VIII  :  lo  Néron  moderne.  O'Connell  :  rAgilaleur. 

llippocrale  :  le  Père  de  la  mé-  Ollivier  (Emile)  :  Cœur  léger, 

decine.  Pascal  :  l'Aigle  de  Port-Boval. 


13i 


NOM 


Périclrs  :  l'Olynipicn. 
.Pedro  (Doni)  :  lo  .liistirior. 

Philippe  le  Bel  :   le  Faux  iiioii- 
iiiiyoïir. 

Pliilipl)e    de    Champagne  :    le 
Peintre  janséniste. 

le  Prisonnier  du  Vatican. 

Pic  IX     Pater  (lo/oi'osus.  (Veiiil- 
'      lot.) 
i  le  Cygne  de  rAcadémie. 

Platon]  le  Divin. 

(  l'Aheille  athénienne. 

Plutarquo  :  la  Commère  de  l'an- 
tiqnilé. 

Poussin   :  le  Peintre  des  gens 
d'esprit. 

Prnd'hon  :  le  Corrége  français. 

Rahelais  :  l'Homère  honlfon. 

Racine  :  le  Tendre. 

Raphaël  :  le  Divin. 

Raspail  :  le  Conspirateur  en  re- 
traite. 

René  d'Anjou  :  le  Ron. 

Rétif  de  la  Rretonne  :  le  Jean- 
Jacques  des  halles. 

Ricord  :  le  Marivaux  de  la  mé- 
decine. 

Rohespierre  :  l'incorruptihle. 

Rossini  :  le  Cygne  de  Pesaro. 

Rothschild  :  le  Roi  de  la  finance. 

Rufini  :  le  Premier  des  ténors. 

Saint  Panl  :   l'Apôtre  des  gen- 
tils. 


Saint    Pierre  :    le    Prince    des 
apôtres. 

Scot  (Jean)  :  le  Docteui-  suhtil. 

Stacl  (.M""^  dej  :  la  Bacchante  de 
la  Révolution. 

Suzanne  :  la  Chaste. 

Tacite  :  le  Platon  de  l'histoire. 

Thérèse  P"   :   la   Sapho  catho- 
lique. 

l  Fontriquet(Soult.l8io.) 

Thiers  |  le  Lihérateur  du  lerri- 
1      toire  (1871). 

Thomas    d'A(piin    :     l'Ange    de 
l'École. 

Titus  :  les  Délices  du  genre  hu- 
main. 

Trajan  :  Optimus  (très  hon). 

Tudor  (Marie)  :  la  Sanglante. 

Ulysse  :  le  Prudent. 

Vadé  :  le  Démosthènes  de  l'en- 
gueulement. 

Yaugelas  :  le  Législateur  du  heau 
langage. 

Vénus  de  Milo  :  Notre-Dame  de 
heauté. 

Yicat  :  l'Attila  des  punaises. 

Victor-Emmanuel  :  le  Roi  galant 

homme. 
Virgile  :  le  Cygne  deMantoue. 

Voltaire  :  le  Patriarche  de  Fer- 

Wellington  :   le  Vainqueur  des 
vainqueurs. 


NOMS   EMBLEMATIQUES  : 

Artémise  {h  reine)  :  Fidélité  dans  Démosthènes  :  Éloquence. 

le  veuvage.  Eve  :  Curiosité. 

Cicéron  :  Éloquence.  Hercule  :  Force. 

Crésus  :  Richesse.  Joh  :  Patience  ou  pauvreté. 

Curtius:  Dévouement  patriotique,  Joseph  :  Chasteté. 


NOM  135 

Lotli  :  Iiiresle.  (lr|>li(''o  :  la  Miisiqnf. 

.Matliiisalciii  :  la  Loii-irvité.  Pfiiulorc  :  la  Ciii'iosité. 

Messalinc  :  l'Iinpiitlii'ilé.  lV'ii('lop(;  :  la  Fitlélilé  conjugale. 

Moisc  :  la  Loi.  Saloinon  :  la  Sagesse. 

Xéi'on  :  la  Cruauté.  Sauisou  :  la  Forx'c. 
Nestor:  la  Longévité  et  la  Sagesse.    Sardanapale  :  la  Débauche. 

Oresic  (•!  Pyladc  :  l'Aïuilié.  Soci-alo  :  la  Sagesse. 

KI'niIKiKS    AJOl -ll-KS    AIX    NOMS    DK    PAYS,    DE    VILLKS,    ETC.   : 

Acliéi'on  :  l'Avai'o. 

Allemagne  :  le  Saint-Euipire. 

Angleterre  :  le  Royaume-l'iii,  la  Vieille  Angleterre  {OUI  Emjland), 
la  Perfide  Alliion. 

Arles  :  la  Reine  des  Gaules.  (Ausone,  iv-  siècle.) 

l^i'est  :  le  Pot  de  clianil)re  de  la  P^rance. 

Bretagne  :  la  Vieille  Armoriqiie. 

Bruxelles  :  le  Refugiuni  peccatorum  de  l'Europe. 

Cayenne  :  Coquinville. 

Cuba  :  la  Perle  des  Antilles. 

Cliine  :  le  Céleste-Empire,  TEmpire  du  Milieu,  le  Royaume  des 
Fleurs. 

Domingue  (Saint-)  :  la  Reine  des  Antilles. 

Espagne  :  la  Péninsule  (ibérique). 

France  :  la  Fille  aînée  de  l'Église. 

Genève  :  la  Rome  protestante. 

Irlande  :  la  Pologne  anglaise  (18G7),  la  Verte  Érin. 

Italie  :  la  Péninsule  (italique). 

Madère  :  la  Fleur  de  l'Océan. 

Marseille  :  la  Cité  phocéenne,  la  Reine  de  la  Méditerranée. 

Mer  :  le  sein  d"Anq)hitrite. 

Mer  Bleue  :  le  golfe  Persique  a  été  appelé  ainsi,  d'un  nom  qui 
conviendrait  si  bien  à  la  Méditerranée,  et  qui  lui  a  été  donné 
sans  doute  parce  que  pera  signilie  bleu. 

Mer  Noire  :  l'ancien  Pont-Euxin  a  reçu  ce  nom  à  cause  des 
brouillai'ds  qui  rol)Scurcissent  en  hiver,  ou  plutôt  à  cause  des 
fréquents  naufrages  produits  par  ses  tempêtes. 

Mer  Rouge  :  le  golfe  Arabique  est  appelé  ainsi,  à  cause  de  ses 
bancs  de  corail. 

Mer  Vermeille  :  se  trouve  entre  le  Mexique  et  la  Californie. 

Naples  :  l'Antique  Parthénope. 


m  NOM 

l'iilcriiic  :  l"lI(Miroiiso. 

PiiiMs  :  la  NoiiNcllc  Atliriio?,  la  Moderne  lialiyloiie.  la  (^aiiilajc  du 
monde  cÎNilisr. 

l'oloune  :  la  France  dn  iS'oi'd. 

Rome  :  la  Ville  des  Césars,  la  Ville  élernclle.  la  Ville  aux  se[il 
collines,  le  Palrimoinc  de  saint  Pierre,  la  Capilale  de  llnloléi-ancc. 
la  Niobé  des  Nations  (Byron),  la  Vieille  Dame  (Garibaldi). 

Russie  :  la  Sainte. 

Salamanque  :  la  Mère  des  Vertus,  des  Sciences  et  des  Arts. 

Sicile  :  le  Grenier  de  Rome. 

Taïti  :  la  Nouvelle  Gythère. 

Touraine  :  le  Jardin  de  la  France.  (Rabelais.  II,  0.) 

Venise  :  la  Reine,  la  Sirène  de  l'Adriatique,  la  Réinibliquc  séré- 
nissime. 

KlMTHlVi'ES    ET    SOBRIQUETS    DE   PEUPLES  : 

AUemaiuls  :  LilTre-lofres  (Rabelais),  Tètes  carrées. 
'  Américains  du  Nord  :  Yankees  :  du  Sud  :  Frère  Jonatban. 

Anglais  :  John  Bull  (Jean  Bœuf). 

Bourguignons  salés  (voy.). 

Français  :  Jacques  Bdnlioinme,  nom  des  paysans  avant  la  Révo- 
lution :  Monsieur  Prudhomme,  le  Ijonrgeois  du  xix''  siècle  :  Frencb- 
Uog,  cbien  de  Français,  disent  les  Anglais. 

Irlandais  :  Paddy,  Paddyes. 

Lorrain  :  Vilain,  Traitre  à  Dieu  et  à  son  prochain. 

Londres  (babitants  de)  :  Cockney. 

Parisiens  :  Badauds  de  Paris.  Rabelais  dit  :  Crottés  de  Paris. 

Romains  :  le  Peuple-Roi. 

PSEUDONYMES,    NOMS    DE    CUERRE,    S0P.RIQUETS  : 

Pendant  longtemps,  les  gens  de  lettres,  comme  les  acieurs. 
cbangeaient  leur  nom  en  paraissant  devant  le  public. 

On  employait  de  même  des  noms  supposés  pour  désigner  les 
dames  qu'on  célébrait  en  vers  :  Iris,  Amaryllis,  Cbloris,  etc. 

De  même,  au  tbéâtre,  dans  la  crainte  de  rencontrer  par  basard 
le  nom  d'une  personne  ([ui  aurait  pu  s'en  formaliser,  on  employait 
une  douzaine  de  noms,  toujours  les  inèmes.  Les  amoureux  s'appe- 
laient :  Valère,  Éraste.  Clitandre:  les  pères  :  Orgon.  Géronte  :  les 
amoureuse*  :  Isabelle,  Léonore,  Ébse  ;  les  valets  :  Frontin,  Masca- 
rille,  Lallècbe,  etc.:  les  soubrettes  :  Nérine,  Lisette. 

Les  Grecs  et  les  Latins  composaient  les  noms  des  personnages. 


.\().M  i:!7 

MoliiTo  h'S  a  imiU's  (mi  ap^jclanl  un  apolliicairc  Piiruoii,  un 
nirclcciii  Toiiirs  (saignoiir)  ou  Dosfoiiandrès  (tueur  d'hoiunios). 

riauto  appi'lle  un  pai-asitt'  Arlotro.uue  (ron.uo-paiu),  un  vieillard 
(:iiiriu»''S  (i'raclu)ll(Mir).  une  aiiiouroiiso  (llycèrc  (douce),  un  parasite 
(liiallion  (uiàciioii-c).  un  anHiiirciix:  l'ain|)hilc. 

Manie,  acteur  d(>  la  lV)i-le-Saint-Marlin.  se  lit  apiielcr  Vaunoy. 

Auiié  signait  0.  G.  :  Déadé.  I).  A.  1). 

Boniface  s'appela  Saintine.  du  village  ou  il  fut  éle\é. 

Crucli  (Einnia)  pi'it  le  nom  de  Coi'a  l'earl. 

Kroniage  devint  M.  Laui'encin. 

Pasquin  prit  le  i)sendonynie  de  Valéry. 

Rapenouille  se  III  ap[>eler  Lal'on. 

Ross  (Uosalie)  s'appela  M"""'  Despréaux,  etc.  (Voy.  dUeilly, 
iJidionnali'f'  des  Pseudonyinrs,  18()7.) 

—  Le  maréchal  d'Ancre  avait  changé  son  nom  deConcimi  (fumier), 
en  celui  de  Concini  (ha([uet...  d'ancrc^f) 

Un  médecin  de  François  ["''.  qui  s'apjielait  Sans-Malice,  traduisit 
son  nom  en  grec,  et  en  lit  Akakia. 

Le  W  Canard,  jésuite,  latinisa  le  sien  en  1'.  Anat. 

Le  P.  Gonière  devint  le  P.  ('onjire. 

Platon  se  nommait  Aristoclès;  son  sui-nom  lui  ^int  de  sa  largeur 
d'épaules  et  de  sa  force  physique. 

—  Le  nom  de  (jiierre  est  le'  nom  d'emprunt  que  prenaient  les 
soldats  en  s'enn'tlant.  Dans  la  comédie  de  la  Feimiie  Capitaine, 

on  lit  : 

11  s'est  l'ail  iiinii  [)afi'aiii  \\o\\v  m'appelei'  I.a  llosc 

—  Le  sobriquet  est  une  épithète  satirique  ou  Iturlesque,  qui 
s'ajoute  au  nom.  en  rappelant  quelque  défaut  physique  ou  moral  de 
rindi\idu. 

Chez  les  Romains,  le  surnom  ou  sohriquet  était  [)ersonnel  et  se 
transmettait  rarement.  Il  servait  aussi  à  désigner  les  individus 
d'une  même  famille.  Ainsi  chez  les  Claudius,  il  y  avait  Claudius 
Ciecus,  Claudius  Pulcher;  chez  les  Scipions,  Scipio  Africaiius  et 
Scipio  Nasica. 

Dans  les  temps  modernes,  les  sohriquets  et  surnoms  ont  été  peu 
usités  chez  les  peuples  du  Nord,  et  furent  mis  en  usage  d'ahord  |)ar 
les  Grecs  et  les  Italiens.  Ils  sont  dus  à  la  llatteiie,  ou  à  la  malignité 
qui  en  est  très  prodigue. 

Il  est  peu  de  personnes,  dans  certaines  classes,  qui  échappent  ;'i 
ce  haptème  hurlesque. 


138  NOM 

Le  mot  sohriijuci  Nient,  dil-nii,  du  liiliii  siihruUciiliin),  on  de 
l'espagnol  sobra,  snr  (qni  s';ippliqiie  sur  le  nom). 

Louis  XV  ajjpeliiil  iMniilirroinont  sos  filles  des  noms  sni\;inls  :  l;i 
(grasse  Victoire,  Coclic;  So[diie.  Griiille;  Louise,  CliilTe  ;  (piant  à 
Adélaïde,  qui  s'appelait  elle-même,  dans  nur  lettre,  madame 
Torchon,  elle  avait  été  surnommée  Loque. 

Il  parait  (pu*  ces  solu'iquets  par  tro[)  lias  étaient  à  la  mode  à  la 
cour,  car  M""'  de  Pompadonr  appelait  le  duc  de  Clianiues  «  mon 
cochon  »  ;  M"""  d'Amhlemont,  mon  torchon,  etc. 

—  Kn  France,  l'esprit  national  a  déni.iiré  ou  i'idi(  idisé  ceitains 
peui)les  en  leur  attribuant  tel  défaut,  tel  vice.  Ainsi  : 

Un  Grec  est  celui  qui  triche  au  jeu;  un  Suisse,  un  portier:  un 
Arabe,  un  Juif  est  un  usurier:  un  Bohémien,  un  va.uabôud  ;  un 
Romain,  un  applaudisseur  à  gages;  un  Polonais,  nn  ivrogne;  un 
Savoyarii,  un  homme  grossier;  un  Anglais  est  un  créancier;  un 
Chinois,  un  homme  laid  ou  bizarre  ;  un  Gascon,  un  menteur. 

NOMS    BIZARRES    ET    RIDICULES,    CHANdEMEIVT    DE   NOM  : 

On  a  vu  que  tous  les  noms  propres  qui  signifient  une  qualité, 
une  manière  d'être,  un  état,  ne  sont  que  des  soliriquets  consacrés 
par  l'usage. 

Il  en  résulte  parfois  de  grandes  hizarreries.  Vous  vous  appelez 
Lehrun,  quoique  vwis  soyez  blond,  parce  qu'un  de  vos  ancêtres  était 
brun.  Tel  se  nomme  Vaillant,  qu'un  lièvre  ferait  fuir.  On  peut  s'appeler 
Prosper,  Félix,  Fortuné,  et  être  le  plus  malheureux  des  hommes. 

De  même  on  serait  dans  l'erreur,  si  l'on  écrivait  à  Liège  pour 
avoir  des  bouchons,  à  Pau  pour  avoir  des  gants,  à  Mantes  pour 
avoir  des  pastilles. 

M.  Bul'fin  a  i)ul)lié  (juillet  18G7)  un  dictionnaire  des  familles  qui, 
de  180G  à  18G7,  ont  obtenu  de  la  Chancellerie  l'autorisation  de 
changer  de  nom.  Voici  quelques-uns  de  ces  noms  abandonnés  : 

Beljambe,  Bellegueule,  Braillard,  Caca,  Cantaloup,  Chameau.  Fau- 
chier,  Vachier,  Cochon,  Fromage,  Guignon,  Mioche,  Lamort^  Pipelet, 
Roquet  ;  sans  parler  de  Louvel  et  de  Papavoine. 

Louis  XI  autorisa  (1474)  son  valet  de  chambre  0.  Le  Mauvais  à 
prendre  le  nom  d'Olivier  le  Daim. 

Le  hasard  produit  parfois  des  jeux  de  mots  de  mauvais  goût,  et 
des  noms  «  horrificques  seulement  oyant  leur  son»,  dont  parle 
Rabelais  au  prologue  du  livre  IV. 

Nomina  sunt  ipso  pcnc  (reinciuhi  sono. 


NOM  i;)9 

En  iiovoniliro  18G8.  la  Chanrcllorio  a  autorisé  un  diacro  nommé 
Merda,  à  allont^er  son  nom  on  Mérida. 

Le  gendarme  qui  fracassa  d'un  coup  de  pistolet  la  mâchoire  à 
Roltospierre.  s'appelait  aussi  Merda  :  à  cette  époque  de  raccoiii-cis- 
sements,  il  raccourcit  son  nom  en  Méda. 

lii  nommé  Merde  sollicita  la  permission  d'intervertir  les  syllahes 
de  son  nom.  Le  Chancelier  ne  l'autorisa  qu'à  prendro  la  particule. 

Racine,  Roileaii,  Corneille,  on!  illustré  des  noms  assez  ridicules. 

—  On  a  de  tout  temps  altéré  les  noms  de  famille.  [)ar  intérêt  ou 
par  Nanité.  Molière  s'est  moqué  de  cette  manie  : 

Qni'I  aliiis  (le  (iiiittcr  le  vrai  nom  de  sos  pères, 

l'oiir  en  vouloir  prendre  un  hàli  sur  des  cliimères! 

De  la  piu]iarl  des  f,'eiis  c'est  la  démangeaison  ; 

Et,  sans  \o\\s  eml)rasser  dans  la  comparaison. 

Je  sais  un  pajsan  (pTon  a|)pelait  (Iros-I^ierre, 

Qui,  n'ayant  [lour  Idut  liien  (luun  seul  (piartier  de  terre, 

Y  fit  tout  à  l'enlour  faire  un  fossé  lK)ur])eu\, 

El  de  Monsieur  de  i'Isle  on  prit  le  nom  pompeux. 

{Ecole  des  Femmes.) 

—  La  \anilé  a  aussi  contriliué  à  changer  le  nom  de  certaines 
professions.  Les  portiers  sont  devenus  des  concierges  ;  les  apothi- 
caires, des  pharmaciens  ;  les  liquoristes,  des  distillateurs  ;  les  per- 
ruquiers, des  coill'eurs  et  des  artistes  capillaires.  Quand  ils  sont  à  la 
retraite,  ils  font  imprimer  sur  leur  carte  :  X...,  coilTeur  honoraire. 

—  Il  y  a  des  noms  prédestinés  ;  le  nom  semhle  avoir  une  influence 
incontestahle  sur  la  destinée  de  celui  qui  le  porte.  Un  général,  eût-il 
tout  le  génie  de  Napoléon,  ne  sera  jamais  maréchal,  s'il  s'appelle 
Ferrand. 

Cependant  Lelièvre  défendit  héroïquement  Mazagran,  et  l'on  ne 
manque  pas  de  dire  que  c'était  un  «  fameux  lapin  ». 

Tout  le  monde  s'est  extasié  sur  le  caprice  du  sort  qui  a  nommé 
Gàtechair  un  célèhre  maître  d'armes:  Lahure,  un  charcutier. 

—  Dans  un  déhat  à  la  Chamhre,  sur  les  liquides,  en  1859,  c'est 
M.  Pissard  qui  a  pi'is  la  parole. 

M'""  l^oitrine  fut  imurrice  du  premier  enfant  de  Marie-Antoinette. 

M.  Léonidas  est  mort  le  13  janvier  1868,  passage  des  Thermopyles, 
à  Montrouge. 

M.  Pierrot,  proviseur  du  lycée  Louis-le-Grand,  est  mort  le  Mardi- 
Gras. 

En  avril  1869,  dans  le  xx^  arrondissement,  M.  Cerf  épouse 
M"e  Biche  ...Corne  de  cerf,  ventre  de  biche  ! 


140  XOM 

A  Toulon  (jionl  18()0).  W'"  Sclialciii'.  l'iio  de  ril('»|)il;il.  î>.  ;i  (''|iou?(; 
M.  Fr;iis. 

Dans  lii  nirino  \illo,  par  son  inariaiir  à  M.  Fille,  M"'-  Danio  est 
devcniio  M'"«  Fille.  Leur  tille  a  é|innsé  .M.  .Mère,  et  la  fille  de  ce 
dernier  niénapc,  M"''  Mère,  est  morte  instilntricc  à  Toulon,  en  1872. 

M.  Legras  épouse  M"'"  AUard  (janvier  1870). 

M.  Ventre  ('ponse  M"'-  Ti'ipe. 

Kn  mai  187i,  M.  (]ucu  épouse  M"''  Bcanpet  :  M.  Lnmorl.  .M"'=Cimc- 
tièi-e. 

—  M.  de  (jnnoul.  ministre  de  riusti'uclion  puldirpie  (1874).  Ce 
nom.  sou^  eut  interverti,  par  de  mauvais  plaisants,  sij^iiilie  en  réalité, 
montagne  allongée  en  forme  de  coin  {cuncu.s  7?ions).  M.  de  Costoii 
lui  a  consacré  quelques  lignes  de  son  très  curieux  livre  sur  VOr/^/ne 
des  noms  propres.  Voici  ce  passage: 

«  Le  nom  actuel  de  la  famille  de  Cumont,  connu  depuis  longtemps, 
sous  celui  de  Montcuq  (emprunté  à  un  liourg  du  Lot.  cité  i)Our  la 
beauté  des  collines  qui  renlourent.  et  dont  le  nom,  J/ons  rufjnus 
ou  cnne/fs.  en  latin,  veut  dire  :  montagne  faite  en  forme  de  coin, 
longue  coUine).  n'a  été  obtenu  qu'en  intervertissant  l'ordre  des 
syllabes.  Il  n'a  rien  d'inconvenant  à  l'oreille,  grâce  à  celte  méla- 
morpliose;  mais  les  dames  qui  babitent  le  bourg  en  question,  sont 
obligées  d'employer  des  péripbrases  souvent  embarrassantes,  quand 
elles  parlent  des  cbarmes  de  leur  résidence.  »  (Larcliey,  Diction- 
naire des  noms.) 

—  M.  de  Forbin-Janson,  plaisantant  Boileau  sur  son  nom,  disait 
qu'il  vaudrait  mieux  s'appeler  Boivin.  «  Lt  vous,  Monseigneur,  dit 
Boileau,  quel  nom  avez-vous  cboisi  l  Janson  !  J'aimerais  mieux 
m'appeler  Jean  farine.  » 

—  Un  domestique,  au  moment  d'annoncer  M.  Cucbeval  dans  un 
salon,  se  retourna  en  bésitant,  et  lui  dit  :  «  Mais,  Monsieur,  il  y  a 
des  dames.  » 

—  Alexandre  Dumas,  pour  se  débarrasser  des  imporlunités  des 
époux  Bombelle,  écrivit  sur  leur  album  ces  vers  vengeurs  : 

i\iiu'(inni  (Idiic  ces  gens-là  .s";u)pel]ent-ils  Boiiihellc  ? 
l.e  ai;iri  iirst  pas  bon,  la  femme  ifesl  pas  belle! 

—  Le  nom  de  Verdi,  l'auteur  du  Trouvère,  est  formé  des  initiales 
de  Victor  Emmanuel,  Boi  d'Italie.  Devise  de  l'unité  italienne,  et  qui 
a  ser\i  de  cri  national  à  l'époque  do  la  révolution  d'Italie. 

—  Jides  Simon,  député  de  Paris  en  18G0,  s'appelait  Suisse.  Il  a 
depuis  longtemps  renoncé  à  ce  nom  de  famille.  Voici  dans  quelles 


XOM  141 

(iiTonslance?.  Il  venait  déliv  nommé  snppléanl  de  V.  Consin,  au 
Colk\ue  lie  France  :  «  Mon  ami.  lui  dit  Consin,  je  vous  ai  fait  inscrire 
sous  le  nom  de  .Iules  Simon,  tout  coni't.  laisse/  donc  de  c(Ué  cet 
alïreux  nom  de  Suisse.  Kst-ce  qu'on  s'appelle  Suisse,  quand  on  vent 
arri\er  à  (iiieliiiie  chose  ?  » 

—  Xa|)oléon  avait  iu)mim''  Bigot  ministre  des  cultes  ;  La  unes, 
colonel  des  (irisons;  Gardanne,  ,yoiiverneur  des  pa.aes  ;  (lochon. 
préfet  des  Deu\-Nèthes;  .lean  Hon,  préfet  de  Ma yeuce.  Le  général 
Mouton  était  dans  les  cliamliellans  ! 

—  Henoisl  est  l'anagramme  de  Incn  sot  :  il  a  fait  benrl. 
Claude  a  fait  les  diminutifs  ridii'ules  (lodiche,  (iodiclion. 
La  malignité  a  criblé  .Icdii  d'épilliétes  satiriques. 

On  a  fait  de  Thomas  le  synonyme  do  pot  de  chambre,  et  irqqio- 
crate  est  l'anagramme  de  jiot  à  c... 

—  Le  changement  de  nom  est  très  gênant,  en  ce  qu'il  dérange 
des  habitudes  reçues  depuis  longtemps. 

Ainsi  le  changement  de  nom  des  rues  est  funeste  aux  relations 
commerciales,  aux  intérêts  des  négociants  qui  y  sont  étahlis. 

—  L'usage  existe  aussi  en  France  et  en  Angleterre,  qu'un  litre 
conféré  abolit  le  nom  de  celui  qui  le  reçoit,  pour  le  remplacer  par 
celui  qui  est  attaché  au  titre  nouveau. 

En  août  187().  d'Israëli  ayant  été  créé  pair  d'Angleterre,  prit  le 
nom  de  Lord  Beaconslield.  Il  en  est  de  même  de  certains  générauv 
du  Premier  Enqjire,  dont  on  a  de  la  peine  à  retrouver  le  nom  de 
l'amille  sous  les  titres  de  Duc  de  Padoue,  de  Yicence,  de  prince 
d'Essling,  de  V\"agram,  etc.  (Voy.  soldat  heureux.) 

NOMS    DIMINUTIFS  : 

Anne  a  donné  Annette,  et,  par  addition  de  n,  Xanette,  Nanon. 
Antoine  fait  Toine,  Tony;  Antoinette,  Toinette,  Toinon. 
Robert,  dont  le  diminutif  est  Hohertot,  a  faitBerthe,  Bertliaut(?). 

—  Les  Anglais  aiment  à  contracter  les  noms  de  baptême:  ainsi 
Robert  est  devenu  Bol)  ;  Alexandre,  Sandy. 

NOMS  PROPRES  DEVENUS  COMMUNS  APPELLATIFS  : 

Noms  d' hommes.  —  Académie,  de  Académus  :  Amphitryon, 
de  l'époux  d'Alcmêne;  Août,  d'Auguste;  ArcliaUfil  d'),  nom  d'inven- 
teur ;  Aristarquc.  Barème,  Batiste,  Benêt,  Brioche,  Cadogan,  Calepin, 
Casimir,  Colin,  Cretonc,  Dédale,  Elzévir,  Escobar,  Espiègle,  Fon- 
tange,  Gobehus,  Guillemet,  Guillotine,  Herschell,  Histrion,  Hortensia, 


142  NOM 

Isabelle,  .liiillet,  Ladre,  Lanihiii,  l.iaid,  Louis,  Loveiare,  Maradam, 
Machiavélisiiio,  Madeleine,  Maillard,  Mansarde,  Marionnette,  Mari- 
vaudage, Mansolée.  Mentor,  Miiiotaure,  Mont,u;ol(ière,  Napoléon, 
l'asquinade.  Patelin,  (jninqtiet,  liodoniont.  Séide,  Sillionette,  Simonie, 
Sorljonne.  SIenlor,  Stras,  Tonliiic  Tiirliipiii,  Vernir,  Zoïle. 

jYo//)s  de  paijti.  —  An.uora,  \ille  d'Asie. Mineni-e  ;  Ardoise f/l/v/ ('se 
en  Islande)  ;  Hrette,  épée  faite,  en  lirelaaiie  ;  (lalicot,  étoile  faite  à 
Calicnt  ;  Camaldules,  champ  donné  pai-  Maldule  (?);  Campanile,  de 
Campanie:  Carmélite,  du  mont  Carinel:  Colchique;  Emeri  (d'un  cap 
d(;  l'ile  de  Naxos)  ;  Kspa.unolette,  Guinée,  Iiidiuo,  Laconique,  Levan- 
tin, Maroquin,  Ripaille. 

A'o/ns  <le  peiijden. —  Assassin,  nom  d'un  peuple  de  Syrie:  Basque; 
Bavaroise  ;  Brigand  (des  Bri;/nn/cs.  peui)les  d'Hihernie)  ;  Cravate 
(de  Croate)  ;  Galoche  (de  galltca,  chaussure  gauloise)  ;  Morion 
(casque  tuoi^e)  ;  Vandale. 

Noms  de  tu/ /es,  lieux,  etc.  —  Atellane,  comédie  qui  prit  nais- 
sance à  Atella  ;  Babiller  (de  Babel)  :  Baïonnette,  Bergamotte, 
Berline,  Bougie  ;  Brugnon,  prune  de  Brignoles  :  Cachemire,  Chalcé- 
doine,  Cerise  (de  Cérnsonte,  en  Asie  Mineure)  ;  Cognac,  Colophane, 
Cordonnier  (de  Cordoue)  ;  Damas,  Échalotte  {(}LAscaIonJ;  Faïence, 
Florin,  Futaine  {ûeFus/ad,  l'ancienne  Memphis  ?)  :  (ia7.e(de6^«rr/): 
Gruyère,  London,  Magnétisme  (de  Magnésie);  Malines,  Moka,  Mous- 
quet, Mousseline  (de  Mossoul),  Nankin,  Parchemin  (de  Pergamé), 
Pistolet  (de  Pistoie).  Pouzzolane,  Solécisme  (de  Soles),  Sybarite  (de 
Si/bai-is),  Tournois  (de  Tours),  Tripoli. 

A'oms  d'Nes.  —  Canari  (des  Canaries),  Candi  (de  l'île  de  Candie), 
Craie  (de  Crète),  Cuivre  (de  Kupros,  Cypre).  Curaçao,  Phare  (île 
daP/iaros),  Tabac  (de  Tabago),  Topaze. 

Noms  d'animaux.  —  Aroude  (queue  d'),  queue  d'hirondelle; 
Camelotte,  étolïe  en  poil  de  chameau  ;  Chenet  (de  chien)  :  Édredon 
(de  Eider)  :  Hobereau,  oiseau  de  proie  ;  Sépia  {sèche),  etc. 

Nomade,  du  grec  nomades,  peuples  pasteui's. 

Nombre,  du  latin  numerus:  grec  ne?no.  partager. 
—  Euclide  définit  le  nombre  un  assemblage  de  plusieurs  unités. 
Les  nombres  cardinaux  sont  :  un,  deux,  dix,  cent... 
Les  nombres  ordinaux  :  premier  (unième),  second  (deuxième), 
troisième,  centième... 
Les  nombres  collectifs:  huitaine,  dizaine,  centaine... 


NON  143 

I.cs  iioiiild't's  rt''(lii|ilicatil's  :  doiililc,  triple,  qii;Klrii[)l<'... 
Les  iKiiiihi'es  distriliiilil's  :  un  ,'i  un,  dcnv  ;'i  doux... 

—  Le  ii()ii*il)ro  d'or  cxpi-init'  nue  année  de  cycle  (^l'ei'de  on  période 
de  dix-neid"  ans).  (]es  nomhres  élaienl  autrefois  écrits  en  lettres 
d'or  dans  les  calendriers. 

yinutero  ilcux  iinpdiv  gautif.t. 

(Vinr.ii.K,  FtjL,  Vni.) 

(Les  dieux  aiment  le  nonilire  impair.)  Allusion  à  la  croyance 
po|)idaire  des  anciens  sur  les  nombres  impairs. 

—  Dans  le  systèmes  de  Pytliauore,  Y  unité  représente;  la  divinité; 
(k'ii.r,  le  mainais  priuciix' :  /?'o/s  est  le  symbole  de  l'barmonie 
parfaite. 

Nombril,  du  latin  lonbllicus  :  par  soudure  de  l'article,  on  a  eu 
li))nbril,  puis  17  s'est  cbangé  en  n  (dissimilation). 

Cicati'ice  arrondie,  située  au  milieu  de  l'abdomen,  et  par  on  le 
cordon  ombilical  s'attachait  au  fcelus,  avant  la  naissance. 

—  Le  peintre  Santerre  a  représenté  Adam  et  Eve  sans  nombril, 
comme  ayant  été  créés  par  Dieu. 

Nominal,  de  nominalis. 

—  La  valeur  nominale  des  monnaies,  des  titres  industriels  ou 
commerciaux,  est  celle  qui  résulte  de  l'émission  primitive,  et  non 
de  leur  valeur  réelle,  inlrinséquc  et  immédiatement  réalisable. 

Non,  du  latin  non.  qui  est  peut-être  pour  ne  /tonio,  comme 
niilli/s  pour  ne  iiniis. 

—  Aon  est  l'élixir  du  despotisme  en  trois  lettres  (?), 
iXon  est  le  verrou  qu'une  bonnéte  tille  met  à  son  cœur... 

—  Les  mots  qui  servent  exclusivement  à  nier  sont  très  rares. 
Les  Latins  n'avaient  ([u'iine  néjiation  (simple),  tion,  qui  nous  est 

parvenue  sans  altération.  (Jui,  est  de  même  la  seule  aftirmation. 

—  lYon,  dans  la  langue  romane,  était  le  corrélatif  d'oc,  oui. 
Qui  sol  dire  oc,  or  r//r  non.  (ï.  d'Albest.)  Qui  a  coutume  de  dire 

oui,  maintenant  dit  non. 

Mais  la  négation  s'est  très  souvent  renforcée  pour  répondre  aux 
nomltreuses  exigences  de  la  langue. 

A'e.  forme  réduite,  se  renforce  souvent  au  moyen  de  :  aucun, 
guère,  jamais,  mie,  goutte,  pas,  personne,  point,  rien. 

lYon  (réduit  à  nen)  et  la  conjonction  négative  /;/,  ont  formé  nenni. 

Nul  vient  de  nullus,  pour  ne  nllua  (pas  un). 

—  La  négation  s'exprime  aussi,  au  moyen  des  [i;irlicules  a.  tirée 


144  NON 

(In  isvor.  f!  in.  \\i-vv  du  liiliii.  lAciiipIcs  :  ;i[);illii('.  ;i|);illii(jii('. 
jii(-i'i'l;iiii,  iii(';i|i;il)lr. 

///  cliMiiutï  S()ii\('iil  [);ir  ;issiiiiil;i(ioii  sîi  consonne  (1('\ mil  /.  ///./>.  /•  ; 
il!('l(i-('',  iinpossililc,  ininiobilf,  irrésislililc 

Il  lu  siippriiiii'  (i('\;iiil  ;/  :  i-,iinor;iiit,  i-.unoblc 

—  Lors(iii"()ii  MMil  ('\primrr  un  jiiLiciiK'nt.  ;iflinii;ilif  on  nc'vLS'ilif. 
on  se  sert  liiihiliH'liiMiienl  (rmic  coiiip.iiMisoM.  ;ilin  de'iloniicr  plus 
de  force  à  l'expression.  Ainsi  l'dn  dil  :  liirlic  coimMc  (^-ésns:  p;inM"C 
comme  Joh. 

Ces  compiiriiisons  sonl  snrlonl  nondircnscs  [lonc  t'\pi-iiner  la 
négation,  et,  dans  le  langage  éncrgiqne  et  lignré  du  peni)lt'.  l;i 
comi)araison  négative  trace  nne  image  })0ur  rendre  l'idée  [dns 
sensible,  et  en  qnehine  sorte  matérielle  :  Cela  ne  vant  pas  les 
qnatre  fers  d'nn  chien,  ...pas  un  son,  nn  liard  :  je  ne  reculerai  pas 
d'une  semelle,  d'une  ligne. 

Dans  ce  cas,  l'objet  est  présenté  coinme  inférienr  à  un  antre,  de 
très  peu  de  valeur,  auquel  on  le  compare. 

Les  Romains  ;  faisaient  aussi  usage  de  ces  façons  de  parler;  on 
les  rencontre  surtout  en  grand  nombre  chez  leurs  poètes  comiques, 
dont  le  style  reproduit  le  langage  populaire. 

Floccus,  un  flocon  de  laine  :  pisus,  un  pois  :  cireux,  la  pellicule 
qui  sépare  les  grains  de  la  grenade  (de  là  :  chique,  chiqnet)  :  je 
n'en  donnerais  pas  une  chique  :  plmna,  plnme  ;  as,  sou  :  iriobo/us. 
triobole;  trioboli  Jiomo  (Planter  un  homme  de  rien  ;  /tiluni,  petit 
point  noir  de  la  fève  (d'où  niliilum,  niliil,  rien). 

Nous  disons  :  une  vétille  (voy.),  de  y/^^a,  bandelette  :  un  brin  de 
fil  ;  rien  du  tout  :  rien  de  rien.  Mais  l'infîniment  petit,  le  minimiun 
des  minimorum,  c'est  encore  une  partie  du  tout. 

—  On  a  apprécié  une  valeur  négative  en  la  comparant  à  une 
ombre,  à  une  idée,  à  un  soupçon  de  chose. 

On  a  dit  :  Donnez-moi  un  soupçon  de  \in,  une  larme,  une  goutte, 
m\  tout  petit  peu. 

—  Dans  les  auteurs  du  Moyeu-Age,  les  termes  de  com[(araison 
sont  :  une  noix,  une  fève,  une  alizé  (fruit  de  l'alizier).  une  châ- 
taigne, un  gland,  un  pois,  une  pelure  do  pomme,  une  prune. 

On  dit  encore  :  Ce  n'est  pas  pour  des  prunes. 

Tolz  non  los  preze  nn  (/hind. 

(C/ironlque  d'Arlex.) 

(Je  ne  les  prise  tous  un  gland.) 


NON  lio 

Vn  lioiiton.  lin  doiiicr,  iino  niaillo,  iiiio  lioi-iiiclc  (pdilc  cofiiiillc), 
un  liloi'liii.  un  pas,  im  [»oiiil.  un  arain. 

Ceste-cy  n'est  inie  la  mienne  :  je  n'en  voiiK  L-rain.  (  Uahelais.) 

Los  rarhapterez-vous?  —  Grain.  (Id.) 

l'n  navet,  nn  zeste,  un  eoupeau  d'oignon. 

Aujourd'liiii.  nos  termes  de  comparaison  sont  dus  souvent  à  la 
fantaisie  on  au  \oraliulaii"e  de  l'argot. 

Nous  disons  faniilièrement.  pour  expliquer  la  négation  :  des 
lunels  1  des  nèllcs  !  du  llau  !  Hùtc  ! 

Les  gens  très  grossiers  euiploieut  le  mot  de  Gamhronno.  dont 
Rabelais  a  fait  un  frécpient  usage,  ainsi  que  de  bren. 

Nos  troupiers  ont  rapporté  d'Algérie  macach. 

—  .Xe  vient  de  /ter.  et  non  pas  de  non. 

A'e,  devant  une  voyelle,  prenait  la  forme  euphouiiiue  nen. 
(En  réalité,  nec  a  donné  ni:  ne  et  nen  sont  des  formes  alTaihlies 

de  non.) 

11  lira  ;i(l  jdic  t'ii  ce  iniiiitl. 

(MAlilK     HE    FliA.\i:K.) 

iVe  et  nen  étaient  aussi  conjonction,  dans  le  cas  où  nous 
employons  7ii,  et  où  les  Latins  employaient  nec. 

Ni'H  aiili'c  L-liiisc  kl'  vaille  lui  sont  lienier. 

((JKnAtlD  DE   VlANK.) 

—  .Xenni.  ni.  Ou  a  dit  neni/  (ou  nonUj,  composé  de  ?ien  et  de  //. 
comme  aï/  de  /toc  illud.  Xenil  de\int  nenni,  comme  oU  devint  oui. 

—  Au!  a  remplacé  le  vieux  mot  nulni. 

Sans  niilui  avoir  inercy.  (Rai)elais.  IV.  43.)  Pitié  de  personne. 

Et  se  nus  ne  mile  (Icniamle 
Comment  ge  voil  (jue  cilz  rommans 
Soit  appelez,  que  ge  commans, 
(",e  est  //  lidiniiiitn^  de  la  Rose, 
Où  larl  d'amors  est  tote  enclose. 

(li.    I)K    IjiHlil^.) 

{.Xu/  n'a  pas  remplacé  nu/iii  :  nu.'^  était  le  cas  sujet,  nul  le  cas 
direct,  nului  le  cas  indirect.  Coninie  autrui  pour  autre;  celui 
pour  cil.) 

—  Aucun  :  jadis  aùjues,  (luque,  alques  un. 

Lorsqu'il  n'est  pas  suivi  de  la  négation,  aucun  affirme,  comme 
/iliquis  eu  latin.  Aucuns  ont  dit  :  quelques-uns  ont  dit.  D'aucuns 
disent. 

—  Guère,  Jamais,  sont  aussi  des  mots  affirma  tifs  (voy.)  qui  ne 

10 


146  XOX 

peuvent  servir  ;'i  nier  (jh'cii  Ncrdi  (riiiit'  ii(''L',iti(iii  ('\|(i-iiii(''e  uu 
sous-cnlcndue. 

Il  ne  t;ir'der;i  ;iiit''i"(\  c'csl-à-dir-c  pys  Ikmiicoiii).  c  esl-ii-dirc  peu. 

Gurre  \U'\\\,  selon  J.-J.  Ani|)(''i'o,  du  ludcsquc  f/ar,  f/nro,  hf.'iu- 
coiip.  Il  ;iv;iit  j;idis  le  sens  de  hraiicfni/)  :  inijourd'IiNi  c'est  le 
contraires  (;'i  causcï  des  la  néualion  sous-cntciiduc). 

Le  sens  primitif  est  resté  dans  fpKdques  locutions  :  Il  a  disparu, 
sans  qu'on  sache  liuère  ce  qu'il  est  devenu. 

—  Nayiirre  est  pour  :  il  n'y  a  auère  de  temps,  ou  n'a  Lnière. 

Le  provençal  a  .uardé  le  sens  ancien  :  A"aï pas  gaïre  :  je  n'en  ai 
pas  beaucoui). 

—  Goutte,  mie  !  La  terme  de  comparaison  niinima  a  été  lonçr- 
temps  une  miette  de  pain.  Il  n'y  en  a  mie. 

Ouaiid  ()  fait,  mica  no  s'en  ro|K'iil. 

[forme  tic  IM.c.E.) 

(Quand  il  le  fait,  il  ne  s'en  repent  mie.) 

Il  est  tombé  en  désuétude,  et  on  y  a  substitué  pas  et  point. 

Mais  tous  ces  mots  ne  deviennent  négatifs  que  par  l'adjonction 
de  la  négation  ne,  la  seule  que  possède  notre  langue. 

Goutte  s'emploie  encore  dans  la  locution  :  Je  n'y  vois  goutte  ;  je 
n'entends  goutte  à  cette  atïaire. 

—  Pas,  point.  Pas  [passas)  a  dû  être  employé  pour  exprimer 
une  négation  avec  un  verbe  signifiant  mouvement. 

lYoH  pas  do'^  jors  ni  Ires. 

(P.   D'AuVEIiCNE.) 

(Xi  deux  jours  ni  trois.) 

On  a  pu  dire  :  N'approcbez  d'un  pas;  puis  n'approchez  pas(?) 
Comme  on  dit  :  Je  ne  comprends  mot  à  ce  qu'il  dit. 

Pas  a  fait  son  chemin,  et  de  sou  acception  restreinte  à  l'idée  de 
mouvement,  il  en  est  arrivé  à  servir  comme  explétif  d'une  manière 
générale  dans  toutes  les  propositions  négatives. 

Pas  remplace  quelquefois  néant  ;  pas  moins,  pour  néanmoins. 

On  me  l'a  défendu,  pas  moins  je  le  ferai. 

Quelquefois,  pour  donner  plus  de  force  à  un  refus,  à  une  déné- 
gation, on  met  non  pas,  que  non  pas. 

Feriez-vous  cela  ?  Non  pas  !  Irez-vous  chez  un  tel  ?  Oh  !  que  non 
pas  !  C'est-à-dire  :  Je  m'en  garderai  bien. 

—  Point  (de  punctuinj  est  la  trace  d'une  piqûre  ;  il  désigne 
l'étendue  la  plus  restreinte,  la  plus  petite  qu'il  soit  possible  de 


M  ).\  1 M 

concevoir:   une  partie  atomique  d'une  surface.  Il  en  est  venu  à 
servir  d'explétif,  comme  y>^/.s-,  pour  accompagner  la  négation  ?t<.'. 

—  Personne,  dn  latin  persona,  acteur  dramali(pM\  iiiasipu'.  a 
[iris  ensuite  la  signilication  de  homme,  iiKli\idu. 

Joint  à  la  négation  ne,  il  prend  la  valeur  du  lalin  lunno,  pour 
ne  honio.  En  provençal  <jes,  pour  yens;  :  et  deyun,  nec  unus. 

Ainsi  employé,  pei'soiinc  est  masculin,  tandis  qu'il  est  féminin 
dans  son  emploi  comme  substantif. 

On  dit  :  Votre  sœur  est  une  personne  très  heureuse  ;  mais  :  Per- 
sonne n'est  plus  heureux  (pie  votre  sœur. 

La  négation  est  souvent  sous-enteudue  avec  personne,  comme 
avec  la  plupart  de  ces  mots:  cela  se  produit  surtout  dans  les 
réponses.  Qui  demandez-vous?  Personne;  c'est-à-dire  :  .le  ne 
demande  personne. 

.l//*e  remplace  personne  d-.m?,  l'expression  :  Je  ne  vois  âme  qui  vive. 

—  Rien,  du  latin  rem,  chose. 

Aftirmatif  comme  pas,  point,  personne,  il  ne  devient  négatif 
qu'autant  qu'il  est  accompagné  de  ne. 

FoiU'(|Uoi  consonliez-VDUS  à  rien  prendre  de  lui  1 

(.Moi.iKRR,  TartufJ'e.) 

Ouelquefois  même  il  est  négatif  avec  ellipse  de  ne. 
La  nuit  à  bien  dormir  ol  le  jour  à  rien  îaire. 

(lîOILEAr.) 

J.  du  Bellay  avait  dit  avant  Boileaii  : 

Et  qui  souvent  à  rien  faire 
Sont  les  plus  embesognés. 

Et  Rabelais  (Y.  15):  Nous  ne  faisons  que  rêvasser,  que  rien  faire. 

Il  est  des  phrases  où  l'on  peut  remplacer  rien  par  chose  :  Il  n'est 
chose  que  je  ne  fasse  pour  vous  plaire.  Mais,  si  l'on  demande  à 
(piebpi'nn  ce  qu'il  fait,  et  qu'il  réponde  :  rien:  c'est  une  réponse 
elliptique,  qui  équivaut  à  :  je  ne  fais  rien. 

De  même  que  chose  est  employé,  dans  celle  locution,  au  sens 
négatif  (par  elli[ise),  on  emploie  quelquefois  rien  comme  négatif  : 

(]ar,  dans  le  siècle  où  nous  sommes. 
On  ne  donne  rien  pour  rien. 

(.Moi,;i'.iii:,  Ecole  de.'!  l'emmea.  H,  2  ) 

Je  ne  suis  pas  un  homme  à  vouloir  rien  pour  rien. 

[1(1..  IV,  4.) 

C'est-à-dire  :  on  ne  donne  pas  quelque  cbose  pour  nulle  chose  ; 
je  ne  suis  pas  homme  à  vouloir  quelque  chose  pour  nulle  chose. 


ri  8  IVOT 

Nonce,  du  hiliii  niatfins,  ("nvoyé. 

Aiiil);iss;i(l('iii'  du  pape  au  près  des  soiiNcniiiis,  pour  représenter 
la  [tiiissance  tein[iorelle  du  Sainl-Siè.ue;  les  léjials  à  hilare  sont 
eliarfiés  des  fondions  si)iriluelles  dans  les  pays  ratlioli([U('S. 

Nonchalant,  de  non,  cfilenleni,  ancien  \erl)C  rhaUtlr. 
(Icliii  (pii  n'a  souci  de  rien,  que  tout  laisse  froid. 

Nonne,  de  nonna,  lalin  du  Moyen-Age. 

Désignait  au  M(nen-A<ie  une  religieuse  d'un  âge  avancé. 

Terme  respectueux,  équivalant  à  grand'nière. 

Noria,  mot  espagnol,  tiré  de  l'arabe  na-ourat,  roue  hydrauli(|ue 
à  irrigation  ;  de  «a«r,  lancer,  faire  jaillir. 

Normand,  du  germanique  norlh  nuinn,  homme  du  Nord. 

—  Réconciliation  normande  :  peu  sincère. 

Répondre  en  Normand  :  sans  dire  ni  oui,  ni  non  ;  réponse  évasive. 

Parole  de  Normand.  Un  président  de  la  cour  de  Rouen  haranguait 
Henri  IV.  Il  resta  court.  Un  courtisan  dit  au  roi  :  «  Sire,  c'est  un 
Normand,  il  manque  de  parole.  » 

—  La  coutume  normande  accordait  un  délai  de  \ingt-quatre 
heures  pour  ratifier  ou  infirmer  une  convention,  ce  qui  s'cxpi'imait 
légalement  par  les  inots  :  avoir  son  dit  et  son  dédit.  C'est  là  peut- 
être  l'origine  de  la  réputation  de  duplicité  faite  aux  hahitants  d'une 
province  qui  n'est  pas  moins  honorable  que  les  autres. 

Nostalgie,  du  grec  nosfos.  retour,  a/(/os,  mal,  ennui. 

Mal  du  jiays,  névrose  cérébrale  qui  est  causée  par  un  violent 
désir  de  revoir  du  pays. 

La  nostalgie  n'atteint  généralement  que  les  habitants  de  pays 
ingrats.  Les  Lapons,  les  Groëulandais  quittent  peu  le  leur  ;  tandis 
qu'on  rencontre  partout  des  Anglais,  des  Français,  des  Italiens,  qui 
ont  quitté  leur  pays. 

—  La  nostalgie  de  la  boue.  (E.  Augier.) 

Notaire,  du  latin  notarius.  Provençal  notari. 

Synonyme  :  monsieur  mal  plaqué  (argot). 

Vient  des  notes  tironnieunes  qui  furent  longtemps  en  usage  pour 
écrire  les  minutes  des  actes  pul)lics.  Ces  notes  étaient  une  écriture 
abrégée,  sorte  de  sténographie  des  Romains,  inventée  par  Tiron, 
aiïranchi  de  Cicéron,  et  dont  la  clef  n'a  pas  été  retrouvée  par  les 
philologues. 


NOIT  149 

—  (ycsl  ("(Hiimo  si  le  ut'tlaire  y  Mv;ii(  p;issé  :  e'osi  clu^so  ;issiirée. 

—  Dnns  le  Moi/c/i  t/c  /irrrroiir  {r\\.  IW'iiii  iiimitIuiiuI.  voulant 
l'iro  aux  dé[)eiis  de  deux  notaires  qu'il  avait  fait  appeler,  dit  à  sa 
servante  de  passeï'  devant  eux  avce  des  pois,  parce  (]u'il  a\ait 
depuis  huiLileiups  en\ie  de  nian.iier  des  pois  passés  dexanl  notaire 

—  l'u  notaiiv  ayant  sur[u-is  sa  l'euiuu'  aver  un  amant,  (•elui-ri 
a\oua.  iH'  pouvant  niei'  un  fait  |)assé  devant  notaire. 

—  l/arucut  n"étal>lit  de  rinéiialité  chez  les  lioninies  ((ue  [)ar 
devant  iiotaii'e  (0- 

Nougat,  de  l'espaLinol  nogado. 
Gâteau  l'ait  do  noix  ou  d'amandes. 

—  Le  noyer  se  dit  en  pi'ovençal  iioiiynicr. 

Nourrir,  di[  latin  nulrire. 

('orps  liieu  nourri  vaut  mieux  (pu'  lioiirse  hien  rem[)lic. 
BourmiiLinons.  Ixnaiix  de  soie,  ventre  de  velours  (qui  préfèrent 
la  l)(Hine  chère  aux.  beaux  vêtements). 
\j\\  helle  caue  ne  nourrit  pas  l'oiseau. 

Nouveau,  du  lalin  /loivl/it.s.  diminutif  de  noms. 

Au  nouveau  tout  est  beau,  ou  :  tout  nouveau,  tout  beau.  C'est  le 
fjvnîa  nocilds  des  Latins. 

On  dit  aussi  :  Balai  neuf  balaie  bien,  dans  le  mémo  sous  que  : 
ferveur  de  novice. 

il  n'y  a  rien  de  nouveau  sous  le  soleil  :  il  n'y  a  (pie  des  recom- 
mencements. Toute  chose  a  été  faite  à  l'imitation  d'une  autre;  Dieu 
lui-même  a  fait  riiomme  à  son  image. 

Oroire  tout  découvrir  est  une  erreur  ijrofonde  : 
C\-st  prendre  IMiorizon  pour  les  bornes  du  monde. 

(Li;moim:.) 

Xulluin  e-sl  JKin  iliduin,  qnod  non  diclani  sil  j^rius. 

{Ti.RKycv..} 

(On  no  peut  rien  dire  qui  n'ait  été  dit  déjà.) 

Il  serait  plus  juste  de  dire  que  tout  est  pensé,  mais  que  tout  n'est 
pas  dit. 

La  cojubiuaisou  des  mots  est  infinie  ;  c'est  un  art  créateur  que 
relui  de  les  assortir,  de  les  embellir  l'un  par  l'autre,  de  donner 
ainsi  à  la  pensée  une  forme  nouvelle. 

L'art  consisterait  à  faire  pour  rintelligence  ce  que  Guvier  a  fait 
pour  l'histoire  naturelle  :  créer  la  paléontologie  des  idées  par  une 
étude  ap[)rofondie  des  monuments  littéraires. 


irio  xoY 

Nouveautés  (iiiin-cliaiid  ilej. 

—  Le.  palroii  s'appelle /o.sr^)// ;  les  roinmis  (appreiilis  au  pair) 
sont  les  his/ofs.  les  roi/ffions:  les  ronimis  ctalaj'isles  sont  des 
pe/i(/i(!'!  :  les  coinniis  [jriiicipaux  sont  les  r/icfs  do,  rrn/on. 

Va\  liloc,  les  coniniis.  s'appellciil  riiUrolx.  (le  nom  Iciii'  l'ii!  appli- 
qué à  la  suite  de  la  repi'ésentatiou  d'une  «dUKMJie  de  Scrihe  :  le 
C()mhal(l('!<  Moiilaf/ncs  (1817),  dont  le  pi'incipal  personnage  est 
appelé  ('alicol. 

—  La  niarcliandise  démodée  se  {\\[  fni(j<; :  ro^sifjnol  n'est  plus 
guère  en  usage.  Fn/t/c  qs[  une  ironie:  ear  ce  mot.  d'argol  signilie 
gain,  frnil  :  cl  il  l'aiil  ici  le  prendre  [tar  anti[)lirase.  Ce  sont  les 
frnges  qui  i-apportent  le  plus  de  f/iiclte  au\  commis,  car  la  gnelle 
est  une  prime  qui  leur  est  accordée  sur  la  vente  des  marchandises 
démodées  ou  déiraîcliies. 

Les  proposillons  sont  des  marchandises  étalées  à  l'extérieur, 
avec  prix  marqués  en  cliillres  usuels,  et  qui  entrent  pour  un  quart 
dans  les  alTaires  des  plus  grandes  maisons. 

—  Deux  sur  dix,  prononce  à  haute  voix,  signilie  :  tixez  vos  deux 
yeux  sur  les  dix  doigts  ;  c'est-à-dire  :  attention  à  une  cliente 
suspecte. 

—  Marchand  de  nouveautés  signifiait  autrefois  liltraire. 

Nouvelle,  adjectif  pris  suhstantivement  au  féminin. 
Synonymes  :   canard,    fausse    nouvelle  :   racontar,    nouvelle  de 
journaux. 

—  Pas  de  nouvelles,  bonnes  nouvelles.  C'est  un  proverlie  qu'on 
aime  à  citer  dans  l'incertitude  où  l'on 'se  trouve  parfois  sur  le  sort 
de  ceux  qu'on  aime.  Il  se  rattache  à  un  autre  dicton,  que  les  mau- 
vaises nouvelles  arri\ent  toujours  promptement. 

Noyer,  du  latin  nccatw  tuer:  provençal,  nefjar. 
Spécialeme^it  faire  mourir  dans  l'eau. 

Feil  nc<]<ir  son  nehul  Arias. 

(B.    DK    BollN.) 

(Fit  noyer  son  neveu  Art  us.) 

n  si.  iipfjo  en  alfja.  (Liv.  de  Sidrac.)  11  se  noie  en  eau. 

Je  ne  doute  pas  de  votre  adresse  :  mais  ce  sont  les  bons  nageurs 
qui  se  noient. 

Vous  n'êtes  pas  indulgent  pour  lui  :  il  vous  aime  tant,  qu'il  se 
jetterait  à  l'eau  pour  vous  sauver.  —  Que  voulez-vous?  Je  ne  me 
noie  jamais,  et  il  m'ennuie  toujours. 


ME  m 

—  St>  noyoi'  (l;iiis  \o  vin.  Ihnni'  oni'hrint  lia  jioriJiula  la  raco  e 
son  oiilcnddini'ii,  c  rs  ai/ss/  ronid  najal.  l/lioiiiiiic  enivré  a  perdu 
sa  raison  et  son  t'iiUMKk'incnl.  et  est  coninic  noyr.  (Viros  et 
Vertus.) 

—  So  noyer  :  sonilir/r.  Kxprossioii  empruntée;'!  la  Mytholnuie  (?): 
Aller  dans  la  nuit  éternelle,  dans  le  royannie  des  ombres. 

Nu,  du  latin  uiidus  :  provençal  ned.  D'où  dénndé,  dénué. 
Synonymes  :  dans  le  costume  adamique  ;  in  natuvnUhus,   décol- 
letée iiis(praii\  jalons  :  sans  feuille  devi.une:  vêtue  de  salin  naturel. 

Nuage,  déi'i\é  de  nue,  nutjes  :  d'oi'i  aussi  nunnre. 

—  Les  nnaues.  par  leurs  formes  diverses,  leur  mobilité,  les  lian- 
teurs  dilTérentes  auxquelles  ils  passent  dans  ratmosplière,  varient  à 
tout  instant  l'aspect  du  paysa.ue.  Ce  sont  des  Protées  dont  il  est 
diflicile  di'  déci'ii-e  les  métamoi'pboses. 

Les  savants  ont  essayé  néanmoins  déclasser  métbodiquementces 
va.uabondes  vajieurs,  et  de  donner  des  noms  aux  ditl'érents  états 
sous  lesquels  elles  se  présentent.  Ils  distinouent  les  cirrus,  nuages 
alTectant  la  fm-me  d'un  [tinceau  de  poils  onde  clieveux  crépus  (voy.)  ; 
les  cumulus  (voy.)  qui  ressemblent  à  des  montagnes  ;  les  stratus, 
bandes  liorizontales  qui  se  montrent  au  coucher  du  soleil;  les 
cirro-cumulus,  petits  nuages  arrondis,  appelés  aussi  moutonnés. 

En  mars  1873.  M.  Poov  a  proposé  à  l'Académie  des  Sciences  une 
nouvelle  classitication,  plus  intelligible  pour  le  public:  Nuage  lllé. 
ou  stratifié,  ou  pommelé  :  nuage  en  couches  ;  nuage  montagneux; 
nuage  p!u\ieux  ou  venteux. 

—  Les  gros  nuages  ne  s'élèvent  pas  au-dessus  de  2.500  uuMres, 
tandis  qiu3  les  cirrus  atteignent  des  altitudes  de  12.0t)0. 

Nue,  du  latin  nuljes. 

—  Tondier  des  nues  :  être  très  étonné. 

Je  suis  fout  éfiaiiliir,  et  je  lomlic  des  nues. 

(MuuiijtF,  Tar/ii/l'e.) 

—  11  est  tomhé  des  nues  :  personne  ne  le  connaît. 

(',(('1(1  mii.sas. 

(TinuM.x.l 

(Il  est  tond  lé  du  ciel.) 

—  On  a  fait  le  quatrain  suivant  au  sujet  de  la  navigation  aérienne  : 

Dans  les  cieux  il  est  glorieux 
D'ouvrir  des  routes  inconnues  : 
Il  est  l)eau  de  nionler  aux  deux, 
Mais  triste  de  loniber  des  nues. 


152  NUI 

—  Porlci'  ;iii\  mif'S  :  In  aslra  lollero.  {(avvtqw.) 

Ail  siiln-ii  fcnr. 

(V'im.ii.K.) 

Nuit,  (lu  l.iliii  noclcni,  de  nox. 

L;i  iXiiil,  lillr  (lu  (llinos,  iiirrc  de  l;i  l.iiiiiirfc  cl  du  Jour,  qu'elle  eut 
de  riù'èlie.  i'ille  eiiucndi'.i  seule  les  l*;ir(jues,  les  Soiiiics,  la  Discoi'de, 
la  Mort,  Mojiius  et  la  Kraude. 

—  On  écrivait  autrefois  iiulcl.  où  la  lettre  r  raitpelle  le  radical 
latin;  on  écrivjiit  de  même  Jiuicl,  faicl  :  mais  le  r  supprimé  dans 
ces  mots  est  resté  dans  leurs  dérivés  :  noctuime,  octave,  faction. 
C'est  un  exemple  des  caprices  de  la  langue  dans  l'ortliograplie  de 
certains  mots. 

(Il  y  a  ici  à  faire  la  distinction  entre  les  mots  savants,  calqués 
sur  le  latin,  et  les  mots  populaires,  dans  lesquels  certaines  lettres 
tombent  toujours.  Le  c  en  question  est  déjà  représenté  par  l'inter- 
vention de  XL) 

—  Les  Gaulois  et  les  Francs  comptaient  par  nuits,  et  non  par 
jours,  parce  que,  dit  César,  ils  se  prétendaient  nés  d'un  dieu  de  la 
nuit. 

Tacite  en  dit  autant  des  Germains  :  «  Ils  ne  comptent  pas  comme 
nous  par  jours,  mais  par  nuits.  » 

Il  reste  des  traces  de  cet  usage  antique  dans  certaines  campagnes, 
où  l'on  dit  anuit,  pour  aiijourd'liui.  (Mais  on  trouve  les  formes  ^/?r><Y 
et  enhuyt:  ce  qui  supposerait  en  huL  in  hoclie?) 

—  Pausanias  parle  d'une  statue  de  la  Nuit  qui  tenait  dans  ses 
bras  ses  deux  enfants  :  le  Sommeil  et  la  Mort. 

—  Nuit  blanclie  :  passée  sans  dormir. 

L'écuyer  qui  de\  ait  être  reçu  cbevalier,  veillait  la  nuit  qui  précé- 
dait sa  réception  auprès  de  ses  armes,  et  revêtu  de  blanc,  comme 
les  néophytes  de  l'Église.  Cette  nuit  s'appelait  la  veillée  des  armes 
et  aussi  nuit  blanche. 

Qu'uni'  nuit  parait  longue  à  la  dniilciu'  ([ui  \eiliL'  ! 

«  Les  insomnies  !  Vous  ne  \  ous  tigurez  pas  combien  est  longue  et 
triste  une  nuit  qu'un  malheureux  passe  tout  entière  sans  fermer 
l'u'il,  l'esprit  fixé  sur  une  situation  "affreuse  et  sur  un  avenir  sans 
espoir..»  (X.  de  Maistre,  Le  Lépreux.) 

—  La  nuit  tous  les  chats  sont  gris.  (Yoy.  entre  chien  et  loup.) 
La  nuit,  Hélène  n'a  aucun  avantage  sur  Hécube.  (H.  Estienue.) 

—  Il  ne  faut  pas  se  marier  seulement  pour  la  beauté  de  la  femme. 


(IHK  153 

IMiil.irquc  '  Ira  il  é  des  jjrccvjjfcs  (/n  .yari<i;/rj,  rncoiilc  (iiriiue 
Itellc  femme  que  Philippe  importunait  de  son  amour,  lui  dit  que  la 
hcaulé  qu'il  admirait  eu  clic  s"é\anouissait  la  uiiil  et  (pie.  les  llam- 
lieaux  éleints,  la  i)liis  lielle  femme  du  monde  ne  dill'éfail  pas  de  la 
[ilus  laide.  (Voy.  Conscif.) 

—  I.a  nuit  porle  conseil.  (Voy.  ro/tsf//.) 

Nymphe,  du  .erec  iiijniphr,  jeune  lilh^ 
l.)i\iuilé  des  eaux,  des  bois  ou  des  montagnes. 


0 

0!  (les)  de  Noël,  nom  pai-  lequel  on  désigne  les  antiennes  qui  se 
chantent  pendant  l'Avent.  [)arce  qu'elles  commencent  toutes  par 
l'exclamation  O!  O  Af/oiuiï,  etc. 

Les  lienoitz  sainctz  0  de  Noël.  (Rabelais,  IV,  lo.) 

AuliTfois,  pendant  la  neuvaine  qui  précède  Noël,  on  avait  coutume 
de  chanter  en  cha^ur  ces  antiennes.  On  exposait  aussi  aux  regards 
des  fidèles  un  grand  carton  sur  lequel  était  peint  un  (>  majuscule  en 
or  et  en  couleurs,  illustré  d'ornements. 

On  a  vu  dans  ces  0  de  Noël  remhlème  représcnlant  la  porte  par 
huiiH'lle  entra  dans  le  monde  le  (ils  de  Dieu  fait  homme.  C'est  plut(it 
remhlème  de  l'œuf  orphique,  de  l'œuf  dont  le  monde  est  sorti,  de 
l'oeuf  de  Léda,  de  l'œuf  qu'on  donnait  pour  étrennes  à  Noël,  à 
l'époque  où  cette  fête  était  le  comnuîucement  de  l'année,  et  qu'on 
ne  donne  à  Pâques  que  depuis  qu'on  a  daté  de  l'incarnation.  Tout  a 
commencé  ah  ovo,  selon  les  anciens.  (Johanneau.) 

—  Plus  rond  que  YO  de  Giotto.  (Voy.  rond.) 

Obédience,  de  obcdienlia  (ohcdire,  obéir). 

Soumission,  obéissance  que  les  religieux  doivent  à  leur  supérieur. 

—  Lettre  d'obédience  :  ordre  donné  à  un  religieux  ou  à  une  reli- 
gieuse d'exercer  l'enseignement. 

Obéir,  du  latin  obedire  (oh  audirei). 

—  Entendre,  c'est  obéir.  (Maxime  arabe.) 

—  Obéir  comme  un  soldat  prussien.  C'est  l'obéissance  passive, 
érigée  en  principe  i)ar  saint  Ignace,  dans  la  Conq)agnie  de  Jésus, 
dont  la  iormule  (isi  OOserj uiu/n  jjerinde  ac  cadaccr.  Soyez  obéissant 
comme  un  cadavre. 


m  OBO 

C'est  ;iiissi  l;i  dinisc  de  l;i  (liscipliiic  iiiilil;iirT  liicn  ciiIcikIiio. 

S;iiiil  l'aiil  ;iii  coiiliiiiic.  ;i  dil  :  0/jsc(/n/i///i  lysfriim  .sit  rafiono- 
bilc.  One  noIic  olK-issiiiuc  soit  siiliordoiinéc  ;'i  l;i  riiisoii. 

(hnnid  ini})cri(>  cl  ohsfujiiio  cotislcnit.  (Tiicito.)  Tout  consiste 
dans  le  conimandeiiient  et  dans  l'ohéissance. 

Il  faut  avoir  ol)éi  ])oiir  savoir  rominaiider.  (Solon.) 

Obélisque,  du  iiv^'v  ofjt'/t'.s/.os  (de  ohi-los,  ai.miille). 

L'ulȎlis(]iie  a  la  l'orme  d'une  pyramide,  mais  il  est  d'nne  seule 
Itièce.  tandis  (}ue  les  pyramides  sont  foi-mées  d'un  grand  nombre  de 
pieri'es  li(''es  par  le  mortier.  (Voy.  ptjrdiuUlc.] 

Obésité,  du  latin  obcsus  (du  ob  edere),  eml)on[)oint  du  à  un 
excès  do  nourriture. 

—  L'obésité  nuit  à  la  force,  en  aumuentant  le  poids  de  la  masse 
à  mouvoir,  sans  au.unienter  la  puissance  motrice.  Elle  nuit  à  la 
Ix^iuté.  en  détruisant  l'iiarmonie  des  proportions  bumaines.  attendu 
que  toutes  les  parties  ne  grossissent  pas  d'une  manière  égale.  Elle 
nuit  aussi  à  la  santé,  en  rendant  diflicilesles  exercicesgymnastiques. 

On  coml)at  l'obésité  par  la  sobriété,  l'exercice,  les  veilles,  les 
purgatifs,  les  sudorifiques. 

Objet,  du  latin  objectinu,  mis  devant  les  yeux. 
Tout  ce  qui  se  présente  à  la  vue. 

—  Dans  le  style  poétique,  on  a  souvent  appelé  la  femme  :  objet 
charmant  ;  l'objet  de  ma  flamme,  ...de  mes  vœux.  Mais  cette  expres- 
sion prétentieuse  est  tombée  depuis  dans  le  langage  trivial,  et  un 
homme  du  peuple  appelle  sa  bonne  amie  :  son  objet. 

Objurgation,  du  latin  objargare  [àc  Jiirgiufn.  querelle), 
llépriuuinde  \\\ù  ;  mouvement  oratoire  animé,  pour  adresser  des 
reproches  violents. 

Oblat,  du  latin  oblatus,  offert. 

Nom  donné  aux  enfants  otTerts  par  leurs  parents  au  service  des 
autels.  Cet  usage  est  très  ancien.  Suger,  abl)é  de  Saint-Denis,  avait 
été  élevé  dans  ce  monastère  comme  oblat. 

Un  donnait  aussi  ce  nom  aux  frères  lais,  aux  soldats  invalides, 
qui  étaient  nourris  dans  les  monastères  où  ils  étaient  chargés  des 
services  inférieurs. 

Obole,  du  grec  obolos,  petite  barre. 

Les  oboles  portaient  l'empreinte  d'un  obéhsque  ;  ou  plutôt  on  se 
servait  d'abord  de  petites  barres  d'airain,  en  guise  de  monnaie. 


ORS  loo 

Pclilo  inoiiiiaic  f[iii  ;i\;iil  l;i  iin'iiir  \;il(^itr  que  la  inaillc.  dciiii- 
deiiier. 

Poids  el  monnaie  des  Grei'S,  le  sixième  de  la  draclinio. 

Au  xvii«  sièclt'.  l'obole  n'était  plus  qu'une  monnaie  de  compte, 
conservant  sa  Nalciir  nominale  d'un  demi-denier.  (Voy.  maille, 
(jazclte.) 

\a\  itil.r.  autre  uu)unaie  de  compte,  était  encore  une  \aleur 
moindre  que  l'obole  (M  que  la  maille,  i)uisqu'elle  ne  valait  qu'un 
(piart  de  denier.  11  en  fallait  quarante-liuit  pour  faire  un  sou. 

—  L'obole  de  Hélisaire  :  l'obole  de  la  veuve. 

L'obole  devient  médaille  en  tombant  des  mains  d'une  nation. 
(Lamartine,  souscr'iptiou  nalionale  en  I808.) 

Obscène,  du  latin  oh,  cœnu/n.  bourbier  ;  de  mauvais  augure. 

Synonymes:  style  décolleté,  sans  feuillede  vigne  ;  les  immondices 
du  langage;  nmt  ordurier  ;  un  de  ces  mots  que  l'on  traduit,  dans 
la  langue  écrite,  par  des  initiales  et  des  points. 

A'uda  cerba.  (Pline.)  D'où  :  voiler,  gazer. 

Maculantia  verba  (Gellius)  :  mots  salissants. 

Buhorc  diijnd  rerlm. 

(Ovide.) 

Paroles  qui  font  l'ougii*. 

Lipse  dit  que  les  ouvrages  de  Pétrone  sont  ^^luvi  unpurifas  : 
pnra  à  cause  du  style,  ùnpiiritas  à  cause  des  obscénités. 

—  On  a  reprocbé  à  Suétone,  l'iiistorien  des  douze  Césars,  d'avoir 
été  aussi  libre  dans  ses  récits,  que  les  empereurs  dont  il  écrit 
l'iiistoire  l'avaient  été  dans  leurs  actions. 

—  X...,  après  une  conversation  obscène,  dit  :  «  Maintenant  lu'ù- 
loiis  du  sucre  !  » 

—  L'Académie  met  le  mot  cul  dans  son  Dictionnaire,  parce  qu'il 
est  français  ;  mais  il  n'est  pas  nécessaire  d'expliquer  ce  que  c'est 
que  «  baiser  le  cul  à  quelqu'un  »  ;  ni  le  sens  moral  de  ce  proverlte, 
«  qu'il  ne  faut  pas  péter  plus  haut  que  le  cul  ». 

N'est-ce  pas  le  cas  de  dire,  avec  la  comtesse  d'Escarbagnas  : 
«  Cela  s'explique  assez  de  soi.  »  Le  Dictionnaire  de  l'Académie  est 
trop  riche  de  ces  superlluités,  qui  sont  les  immondices  du  langage. 

—  L'ahbé  Terrasson  disait  du  Nouveau  (?)  Testament  du  P. 
Ouesnel  (édition  complète  en  4  vol.  in-8",  Paris,  '1695),  que  c'était 
un  bon  livre,  où  le  scandale  du  texte  était  conservé  dans  toute  sa 
pureté. 


—  On  ne  |)('iil  |);is  loiil  dire,  iii;iis  on  |m'iiI  loiil  î'crii'c  :  on  peut 
loiil  lire.  (III  110  pciil  tout  ("lUciidrc!.  (VA\.  V(}\ij2;(m?,.) 

—  Il  y  ;i  (k's  ,i;(Mis  (lui.  (i.iiis  une  Liiilerie  de  lalilo;iii\,  ne  soiciil 
qiio  les  niidilrs,  cl  (|iii.  d.uis  un  li\ro.  coiiroiil  ;iii\  jcissiijres 
oliscôncs,  (•oiiinic  un  porc  ;'i  l;i  l;ii|iit'.  (Th.  (j.inlicr.) 

Obstacle,  du  hiliii  ohsi/niilnni  (oh,  slai'c.  se  tenir  devanl). 

—  L'ubsUicIo  est,  l;i  pieirc  de  touche  de  la  vocation. 

(itisiiian  Ile  (•(iiiiinil  plus  (ruitslaclcs  : 
(i'csl  un  (lien  qui  ;^iii(le  ses  pas. 

(MortiAiNvii.i.K,  te  Pii'il  iln  Mouton.] 

Occasion,  du  laliii  ocras-io  (oh,  cndcrc,  tomber  devant). 
On  a  dit  aiilrcfois  odioison. 

L'occasion,  je  sais,  fait  soini'nt  li'  larron. 

(Kahhk  ii"F.r,r..\NTi.\K,  Inlriyiii'.) 

Aussi  doit-on  éviter  avec  soin  de  s'exposer  à  la  tentation  de  mal 
faire:  c'est  le  moyen  le  plus  sûr  de  se  préserver  du  danger;  car, 
si  l'occasion  fait  le  larron,  le  larron  fait  plus  souvent  naitre  l'occa- 
sion. 

—  Saisir  l'occasion  aux  cheveux  :  profiter  du  moment  favorable. 
...Sinon  il  n'y  a  plus  mèche,  dit-on  familièrement. 

Aiil  niinr,  aul  nu/if/iim/i  :  maintenant,  ou  jamais. 
C'est  une  occasion    qu'il  faut   prendre   aux  cheveux.  (Molière, 
Arore.) 

Ctipcrc  occiisioH'')n. 

(Pl.A.TK.) 

(Voy.  saisir  la  balle.) 

—  Les  anciens  représentaient  l'Occasion  sur  un  globe,  avec  des 
aUes  aux  pieds,  le  derrière  de  la  tète  chauve,  pour  indiquer  qu'il 
faut  la  saisir  quand  elle  se  présente  en  face,  et  ne  pas  la  laisser 
passer,  parce  qu'elle  fuit  rapidement,  et  que  sa  tête,  étant  dégarnie 
de  cheveux  par  derrière,  ne  laisse  aucun  moyen  de  la  ressaisir. 

Frontc  ctijjillala  c-tl,  sed  po.st  occasio  cdlrn. 

{('.Hé  dans  le  Moijen   de  prirvoiir.  rli.  70.) 

Car  l'occasion  lia  tous  ses  cheveux  au  front  :  quand  elle  oultre- 
passe,  vous  ne  la  pouvez  plus  révoquer  ;  elle  est  chaulve  par  le 
derrière  de  la  teste,  et  jamais  jilus  ne  retourne.  (Rabelais.  I.  38.) 

Occulte,  du  latin  nccultum  (ocailtare,  cacher). 
Sciences  occultes,  au  Moyen-Age  :  l'alchiinie,  la  magie,  l'évocation 
des  morts,  etc. 


ODE  lo7 

Octroi,  ilii  l.itiii  (iiKioriciirc  [auctordrc.  ;iiil(iris(M"),  siiltslaiilif 
M'rh;il. 

S'est  (lit  (le  tond'  coiiression  on  pi'i\il('uo  accordé  par  le  souverain. 
Le  roi  orti'ovail  (1(V>  lettres  de  Qràce.  Mii  I81'i.  Louis  XVIll  ortroya 
la  Charte. 

—  Aiijoui'd'liiii  :  droits  que  les  villes  sont  autorisées  à  percevoir. 
Ou  l'appela  ainsi,  parce  qu'il  était  perçu  en  vertu  d'une  concession 
octroyée  par  le  souverain,  pour  subvenir  aux  dépenses  locales. 

L'Etat  prélève  sur  cette  taxe  le  dixième  du  produit  net... 

C'est  nu  iiupôt  analogue  à  celui  que  les  Rouuiins  nommaient 
portoritiin.  droit  d'entrée  et  de  sortie  des  marchandises,  qui  est 
représenté  aussi  par  les  douanes. 

('"est  en  13o2  que  lurent  étaldisles  octrois  en  France  ;  Compièiine 
fut  la  première  ville  où  cet  impôt  fut  appliqué. 

—  Les  pi'inci[)aux  inconvénients  des  octrois  sont  : 

1°  La  répartition  sans  proportionnalité  des  fortunes  ; 

2"  La  diminidiou  de  la  production  par  la  diminution  de  la 
consommation  : 

3"  Les  frais  considérahles  de  perception  ; 

4"  Les  vexations  qui  résultent  du  mode  de  perception  ; 

5"  Enfin,  on  leur  reproche  d'être  <■<■  démoralisants  »,  parce  qu'ils 
sont  un  encouragement  à  la  fraude  ;  et  qu'il  [)eut  arriver  que  l'on 
considère  le  bénéfice  illégal  de  celle-ci  comme  une  défense  légitime 
des  droits  attaqués. 

Odalisque,  du  turc  odaiih.  de  oda.  cband)rc. 
Concubine,  lemine  du  sultan,  ou  attachée  au  service  de  la  femme 
ou  de  la  lille  du  sultan. 

Odeur*,  du  latin  odor. 

—  Les  corps  se  comportent  avec  les  odeurs,  comme  avec  la 
lumière  et  la  chaleur,  quant  à  leur  pouvoir  absorbant  et  rélléchis- 
sant. 

Si  l'on  met  deux  morceaux  de  drap,  l'un  noir  et  l'autre  blanc,  en 
contact  avec  un  corps  odoi'ant,  tel  que  le  camphre,  le  noir  s'im- 
prègne fortement  de  l'odeur,  tandis  que  le  blanc  n'en  absorbe 
presque  pas.  ou  du  moins  la  laisse  vite  échapper  par  le  rayonnement. 

Le  pouvoir  absorbant  des  couleurs  pour  les  odeurs  décroit  dans 
l'ordre  suivant  :  noir,  bleu,  vert,  rouge,  jaune,  blanc. 

—  Bonne  odeur:  copia  nnrium  (Horace). 
Les  Anglais  disent  :  nozega\),  gaitè  du  nez. 


138  OKI 

—  Il  n'est  piiscii  odeur  (le  s.iiiilclr  :  il  ii't'sl  |i;is  en  jiriinde  estime. 

Odyssée,  mot  .Lircr,  oi-iLiiiic  litlt''r;iire. 

Célèhrc  poriiic  oi'i  Homère  raconte  les  voyafics  très  acridontés 
d'Ulysse,  on  fJ(/i/ssc//s,  foi  dltliaqne,  errant  de  contrée  en  contrée, 
après  la  tiuerj'e  de  Troie.  |)oiir  reloni-ner  dans  sa  patrie. 

—  S'emploie  familièrement  pour  désigner  un  voyape  semé  d'aven- 
tures :  Raconte/.-moi  votre  odyss(''e. 

Œcuménique,  du  urec  o/7,oi/>nrnr\  la  tei're  liahitée. 
Se  dit  des  conciles  généraux:  ou  universels,  auxquels  sont  convo- 
'qués  tous  les  évéques  de  la  chrétienté. 

Œdipe,  nom  dliomme,  tiré  du  grec. 

Personnage  qui,  d'après  la  fable,  devina  l'énigme  du  Sphinx. 
D'où,  au  figuré  :  Il  faudrait  être  un  OEdipe,  pour  deviner  ce  que 
vous  voulez  dire. 

Œil,  du  latin  oculns,  anciennement  oll,  ueil.  Provençal  huelli. 
Fait  au  pluriel  œlU  (dans  les  mots  composés)  et  yeux. 
Le  singulier  a  aussi  la  forme  yeu  dans  le  Berry,  où  l'on  dit  yen 
pour  œil  :  Mon  yeu  me  fait  mal.  (Yoy.  aïeul  et  ciel.) 

—  Les  yeux  sont  le  miroir  de  l'àme. 

Le  miroir  est  le  troisième  œil  de  la  femme. 

—  Yeux  en  houles  de  loto  :  ronds  et  saillants. 

Bordés  d'anchois  :  aux  paupières  ronges  et  dépourvues  de  cils. 

Marécageux  :  larmoyants. 

Au  beurre  noir,  pochés.  Rabelais  emploie  cette  expression 
(liv.  IV,  c.  7)  :  «  Il  resta  tout  estourdy  et  meurtry.  un  œil  poché 
au  beurre  noir.  » 

—  Coup  d'œil.  Avoir  le  coup  d'œil  juste  ;  avoir  le  compas  dans 
l'œil. 

Michel-Ange  disait  qu'il  fallait  avoir  le  compas  dans  l'œil,  et  non 
dans  la  main. 

—  L'œil  du  maître.  (Yoy.  La  Fontaine,  lY.  M.) 
L'œil  du  fermier  vaut  fumier. 

—  Fermer  les  yeux  sur  les  fautes  de  quelqu'un.  Un  Romain  qui 
avait  Mécène  à  souper,  s'étant  aperçu  de  la  tendresse  de  sou  h<)te 
pour  sa  femme,  eut  la  complaisance  de  faire  semblant  de  dormir. 
Un  esclave  voulut  profiter  du  sommeil  de  son  maître  pour  boire  le 
vin  qui  était  sur  la  table  ;  mais  le  maître  lui  dit  :  «  Malheureux  !  ne 
vois-tu  pas  que  je  ne  dors  que  pour  Mécène  ?  » 


OEU  159 

—  Yeux  d'aigle,  d'émerillon,  d'argus,  de  lynx.  (Voy.) 

—  Ses  sourcils  sont  des  arcs  et  ses  coups  d'œil  des  llèclies  qui 
vous  percent  le  cceur.  (.Ma\inu'  arabe.  ) 

—  Aimer  quelqu'un  cuinuie  la  prunelle  de  ses  yeux. 

Aliquem  amure  oculitits. 

(Pl.AUTK.) 

Sdtic,  (>ntli.ssiinc  lioino. 

(l'i.AI.TE.) 

Plus  DCtilis  nifis  (iinarcm. 

(Catl-i.i.e,  XIV.) 

Ges/at  i/ht/n  in  orulis.  Est  illi  in  ociûis.  (Gicéron.) 

—  Les  beaux  yeux  de  ma  cassette.  (Molière.) 

Cette  demoiselle  a  de  fort  beaux  yeux,  mais  les  yeux  de  sa 
cassette  sont  encore  plus 'beaux  :  ou  lui  donne  deux  millions. 

—  Le  langage  des  yeux  :  In  oculis  aniniiis  habitat.  (Pline.) 
Dans  les  yeux  se  fait  l'alliance  de  la  matière  et  de  l'esprit.  Riva  roi 

en  écrivant  ces  mots,  se  rappelait  sans  doute  le  vers  de  la  Ilen- 

riade  : 

Lieux  où  finit  le  eorps  ot  commence  l'esprit. 

—  Faire  de  l'ceil  (argot)  :  orulis  venari. 

Quif  ciro.s  oculis  caprunt. 

(Pl.ArTR.) 

—  Se  mettre  le  doigt  dans  l'œil  :  se  tromper.  (Voy.  doigt.) 

—  Avoir  le  mauvais  œil:  porter  malbeur.  (Jettatui-a.) 

—  Voir  la  paille  dans  l'œd  de  son  voisin.  (Voy.  paille.) 

Œuf,  du  latin  ovinn  :  anciennement  nef. 

—  L'ceuf  de  Christopbe  Colomb.  Quelqu'un  cliercbait  à  rabaisser 
devant  Coloml)  la  découverte  du  Nouveau-Monde.  Colomb,  pi-enant 
un  œuf,  dit  que  sa  découverte  était,  en  effet,  très  simple,  et  qu'il 
bii  paraissait  plus  diflicile  de  faire  tenir  un  œ\\[  sur  sa  pointe. 
Cbaciiu  essaye,  sans  pouvoir  réussir.  Alors  Colomb  cassa  le  bout 
de  l'œuf,  et  le  fit  ainsi  tenir  droit.  «  Voilà,  dit-il  ensuite,  comment 
les  cboses  semblent  faciles  quand  elles  sont  faites.  » 

—  Dans  les  sciences,  il  n'y  a  rien  de  si  simple  que  ce  qui  a  été 
trouvé  liier,  mais  rien  de  si  difficile  que  ce  qui  sera  trouvé  demain. 
(Biot.) 

—  On  peut  faii'e  tenir  debout  sur  son  extrémité  la  plus  large  un 
œuf  frais,  après  l'avoir  secoué  pendant  dix  uiinutes. 

—  Vasari  attribue  l'anecdote  de  l'œuf  à  Filippo  Brunellescbi,  à 
l'occasion  des  plans  qu'il  avait  faits  pour  réunir  les  quatre  nefs  de 


S;iiil;i-.M;iri;i-(l('M''i()ri,  [);ir  iinc,  iiiimi'iisc  coupole  ocIo'joiimIc.  smiis 
employer  de  cli.irijentcs  de  vofiles. 

En  l'i-'^T.  il  lui  vivciiKMit  sollirilr  |i;ii'  les  consiils  et  les  iiilendiiiils 
(le  roiiiiiiiiiii(|iiei'  ses  pliiiis  (rexéciilioii  et  son  modèle.  Il  s'y  refiis;i. 
et  se  honiM  ;i  leur  pii'seiiler  un  iriif  (m  disîint  :  «  Celui  qui  le  fera 
tenir  dehont,  ser;i  diune  de  constrnire  l;i  coupole.  »  Rrunellesclii 
seul  ivsolul  le  iirohlème  :  après  quoi  cliacnn  se  récria  (piil  en 
aurait  l'ail  autant.  Filippo  leur  i-(''pli([Ma  en  riant  (pi'ils  saui'aient 
é.ualeinent  l'airt;  la  coupole,  s'il  leur  in(nitrait  son  niodèh;. 

—  OKul's  de  Pàipies.  Avant  (Charles  IX,  l'année  en  France  roni- 
mcneait  vers  Pâques,  à  léquinoxe  du  |iiMnli'uips  (!20  mars).  On 
donnait  à  celle  occasion  des  (eul's  coloriés,  parce  ([ue  Tceuf  est  le 
commencement  de  tonte  chose  (Cf.  ah  oro).  et  que  le  mois  de  mars, 
le  premier  de  l'année,  se  trouve  aussi  à  l'entrée  du  printemps, 
saison  on  tout  renaît  dans  la  nature  ;  de  même  que  Pâques  est  le 
symbole  d(5  notre  rénovation  morale  par  la  résurrection  de  Jésus- 
Christ. 

Kn  Russie,  le  20  mars,  on  donne  des  œufs  teints  sur  lesquels  on 
lit  :  «  Christ  est  ressuscité.  » 

—  On  attribue  aussi  l'usage  de  donner  des  œufs  de  Pâques  à  la 
défense  de  manger  des  œufs  pendant  la  Semaine-Sainte.  Il  en 
résultait  de  grandes  provisions,  qu'on  distribuait  à  profusion,  le 
jour  de  Pâques,  à  ses  parents,  à  ses  amis. 

—  Les  premiers  œufs  rouges  furent  vendus  à  Paris  sur  le  Pont- 
Neuf,  et  eurent  une  grande  vogue. 

Saint-Simon  dit  que,  la  veille  de  Pâques,  on  élevait  des  pyramides 
de  CCS  teufs  dans  le  cabinet  de  Louis  XIY,  qui  en  faisait  don  à  ses 
courtisans. 

—  Les  œufs  de  Pâques,  et  le  peu  de  valeur  de  ce  présent,  à  une 
époque  où  les  œufs  sont  très  abondants,  ont  sans  doute  donné  lieu 
au  proverbe  :  Donner  un  œuf  pour  avoir  un  bœuf  :  proverbe  qui 
s'applique  aux  gens  qui  ne  rendent  que  des  services  iatéressés. 

Œuvre,  du  latin  opéra. 

—  A  l'œuvre  on  reconnaît  l'ouvrier. 

Kv  ungue  leonem  :  à  la  grilïe  on  reconnait  le  lion. 

Ognon,  du  latin  nnionein.  L'Académie,  7'^  édition,  renvoie  â 
oifjnon. 

On  n'écrit  plus  oujnon,  quoique  l'Académie  dise  que  l'^  sert  à 
mouiller  le  g,  mais  ne  se  prononce  pas,  et  empêche  de  prononcer 


OGN  Ifil 

og-noii  :  iiiiiis  ccltt'  r;iisou  ifcst  piis  viilalile,  (^ir.  dans  /ror/iio/i  ot 
autres  mois  aiialoLiiies,  le  //  suivi  ilc  n  se  iiiouillc  sans  le  seroiirs 
de  li. 

(Faii(-il  écrii'e  aussi  poijnel'?) 

—  L'o,i>non  est  originaire  trivûvpte.  Les  Précieuses  ont  a[i|ielé  les 
o.iiuons  «  lesdien\  éuy[)tiens  ».  Al[)h.  Karra  ilit:  «  Les  lis,  les  lnli[)es, 
les  narcisses,  les  jacinllies  sont  des  ileurs  adoraldes,  qui  me  l'ont 
(•om[)ren(lre  l'adoration  des  IvLiVpliens  pour  les  ognons.  » 

On  voit  par  là  condiien  on  a  peu  connu  les  dieux  des  Egyptiens. 
La  science  nouNelle,  civée  par  Cliampollion,  a  pu  redresser  une 
foule  d'erreurs,  telle  cpu'  la  croyance  nu  culte  des  Égyptiens  pour 
les  ognons.  Celte  o[)inion  a  lui  venir  d'un  liiéroglyplic  mal  com|)ris, 
consistant  en  un  carré,  qui  exprime  lidéc  de  temple,  dans  le(piel 
est  un  poireau,  endilème  de  la  blancheur;  riiiéroglyplio  signiliant 
maison  lilanclie,  et  non  temide  du  poireau,  comme  l'ont  pensé  les 
Rouuuns. 

Les  Égyptiens  n'adoraient  [»as  davantage  les  animaux,  mais  bien 
les  dieux  représentés  avec  une  tète  et  mémo  un  corps  entier 
d'animal. 

—  Regretter  les  ognons  d'Egypte.  Allusion  aux  iïéhreux  qui, 
délivrés  de  la  servitude  d'Egypte,  se  plaignaient  à  Moïse  d'être 
privés  des  ognons  qu'ils  mangeaient  dans  ce  pays. 

—  Il  y  a  de  l'ognon  :  de  la  brouille. 

E.  xMarco  Saint-IIilaire,  dans  ses  Souvenirs  du  temps  de  /'Em- 
pire, raconte  que  la  maréchale  Lefèvre,  marquise  de  Dantzig, 
chanta,  dans  une  réunion  chez  l'impératrice  Joséphine,  une  chanson 
composée  par  un  de  ses  cochers,  auquel  elle  avait  donné  le  sobri- 
quet de  Poétrillon.  Elle  avait  pour  refrain  :  «  Il  y  a  de  l'ognon.  » 

En  voici  le  premier  couplet  : 

(In  ilit  (|uo  l'empGreiu'  d'Autriclie 
Qui  DC'sl  pas  blanc  d'  savon, 

11  y  a  de  l'ognon  ! 
A  vraiment  l'air  godiche, 
Di-puis  qu'  nous  1'  savonnons. 

Il  y  a  de  l'ognon  !... 

Ces  couplets,  tout  vulgaires  qu'ils  étaient,  firent  fureur  à  la  cour 
et  à  la  ville,  sans  doute  à  cause  de  leur  à-propos  et  du  caractère 
hien  connu  de  la  maréchale  à  qui  on  les  attribuait.  Ils  furent  bientôt 
chantés  dans  tout  Paris,  et  le  refrain  passa  en  dicton  populaire. 

Mais  il  existait  déjà,  au  temps  de  la  Ligue  ;  et  «  il  y  a  de  rognon  » 

11 


si,L!iiili;iil  :   il    y   ;i   du   t;i|t;ii;f'.  du   lii'iiIiiiiiï;  ;  roimno  le    |)roiive   une 
chanson  du  Iciiips,  (jiii  (itc  la  priorité  à  la  niaivclialo  Loiï-vro  : 

Que  plus  on  ne  brigue 
Être  (le  la  ]A%uc 
De  saillie  union  ; 
Car,  ne  leur  (léjilaise, 
Puisqiron  jiend  les  Seize, 
Il  V  a  de  rognon. 

{Sol ire  Mi-nip/ivr.  p.  381.) 

—  Pleurer  tous  ses  ognons  :  éproiiNoi-  nii  prand  cliafrrin. 
Radicl  disait,  à  bout  do  souHVances  :    «  Jai  (''i»liicli(''  tons  mes 

ognons.  » 

—  Se  placer  en  rang  d'ognons  :  |)aniii  des  gens  de  distinction 
(ou  phit(H  sur  une  iiièuio  ligne,  ou  dans  nue  assenihlée  où  l'on  n'est 
pas  invité).  Viendrait  d'Artus,  baron  d'Ognon,  maitre  des  céré- 
monies aux  Étals  de  Blois  (1570). 

Cette  locution  vient  sans  doute  de  l'babitude  de  réunir  les  ognons 
en  chapelets,  en  tenant  les  tiges  pour  en  former  des  rangées  qu'on 
appelle  en  Provence  des  rels  (i^estis,  corde). 

Bien  des  gens  se  mettent  en  rang  d'ognons,  qui  ne  valent  pas  une 
écbalotte. 

—  Marchand  d'ognons  se  connaît  en  ciboules.  (Voy.  connaître.) 

Ogre,  de  oçjour,  nom  du  peuple  dont  descendent  les  Hongrois  ; 
ou  du  danois  liungre  :  affamé,  vorace  ;  ou  du  latin  orcus  f 

—  Manger  comme  un  ogre  :  avidement. 

—  On  appelle  ogre.^,  dans  les  contes  des  fées,  des  hommes 
voraces  qui  mangent  les  petits  enfants. 

Cette  croyance  aux  ogres  semble  venir  de  la  terreur  qu'inspirait, 
au  Moyen-Age,  l'invasion  des  Hogres  ou  Ogours,  dont  la  cruauté  a. 
laissé  dans  les  souvenirs  populaires  la  tradition  d'anthropophagie 
qui  était  sans  doute  habituelle  à  ces  barbares,  et  dont  les  annales 
contemporaines  ne  parlent  qu'avec  horreur. 

Suivant  nos  crédules  aïeux,  l'ogre  est  une  espèce  de  géant,  sau- 
vage et  cruels  très  avide,  de  chair  humaine,  et  particulièrement  de 
la  chair  des  enfants. 

Oie,  latin  auca,  anciennement  oue,  qui  s'est  transformé  par  le 
changement  de  ou  en  oi,  qui  se  retrouve  dans  une  foule  de  mots. 
Exemple  :  noue,  noix. 

Cette  forme  oue  est  restée  dans  ouailles.  (Non  :  les  ouailles  ne 
sont  pas  les  oies,  mais  les  brebis  du  Seigneur.) 


(IIS  103 

—  Le  nom  l'i';in(;;iis  l^rdaïK/in'  (l;i  ri'iiio)  est  l;i  triuliictioii  dos 
mots  \)YO\(^\\i:[\\\\  pc  d'aura  (pieds  doie). 

—  Le  mâle  s'appelle y«r.ç  (qui  a  les  jambes  arquées),  parce  queii 
mar('liaiil.  il  porte  les  pieds  en  dedans. 

L'oie  sauvage  se  nomme  yanx,  qui  a  donné  peut-être  :  marclicr 
de  guingois? 

—  Les  oies  étaient  consacrées  à  Priape,  et  entretenues  dans  son 
temi)le.  Elles  ont  la  vue  l)oniH>,  l'ouïe  très  fine  et  une  vigilance 
ivmar(pialile.  Tout  hî  nu^nde  connaît  l'histoire  des  oies  du  (^apitoie, 
(jui  san\èrent  HonuNiu  tenifis  de  Manlius.  (Voy.  Plutarque,  Q/iesdons 
ronuiinos,  cii.  27.) 

—  Sainte-Beuve,  étant  sénateur,  écrivit,  dans  un  article  adressé 
au  Temps,  au  sujet  des  cours  créés  par  Duruy  à  la  Sorbonne  i)Our 
les  jeunes  lilles,  et  vivement  critiqués  par  l'épiscopat  :  «  ...Les 
évèqiies  ont  poussé  des  cris  comme  s'il  s'agissait  de  sauver  le 
Ca  pi  tôle.  » 

—  Bétc  comme  une  oie.  C'est  sans  doute  à  sa  démarche  gauche 
et  disgracieuse  que  cet  animal  doit  sa  réputation  iunnéritée  de 
stupidité. 

Si  vous  aviez  vécu  du  temps  des  Romains,  vous  auriez  sauvé  le 
Capitole... 

X...,  le  plus  fécond  des  romanciers,  gagne  heaucoup  d'argent, 
cpioi(iu'il  écrive  comme  une  oie.  Gela  se  comprend,  il  vit  de  sa 
plume. 

...Pauvre  oiseau  auquel  vous  avez  iniligé  à  la  fois  une  injure  et 
un  supplice,  en  méconnaissant  ses  instincts,  jusqu'à  en  faire  le  type 
de  la  stupidité,  et  en  le  torturant,  jusqu'à  ce  que,  malade  et  près  de 
mourii-,  il  livre  à  la  sensualité  de  nos  gourmets  ses  organes  endo- 
loris et  tuméllés  !  Art  cruel,  déjà  pratiqué  dans  l'antiquité.  Il  est 
d'invention  romaine,  car  Pline  raconte  qu'Apicius  avait  trouvé  le 
moyen  de  faire  grossir  le  foie  des  oies,  en  nourrissant  ces  oiseaux 
de  ligues  et  d'eau  miellée.  Est-ce  le  prix  que  les  Homains  devaient 
aux  libérateurs  du  Capilole  ?  (G.  Saint-Hilairc.) 

—  L'oie  fournit  encore  à  l'industrie  des  plumes,  un  duvet,  dont 
la  valeur  est  très  grande,  mais  (ju'il  faut  arracher  périodiquement 
à  l'animal  vivant. 

Oiseau,  du  latin  aucelliun,  diminutif  de  avis. 

—  Être  comme  l'oiseau  sur  la  In-anche,  c'est-à-dire  dans  une 
grande  incertitude. 

Manger  comme  un  oiseau  :  très  peu. 


m  ou 

Oisiveté,  lirr  df  o/sif.  liii-iiiriiic  ncihi  de  oiseux,  ollo^iia. 

—  Luisivcté  est  l;i  iiirrc  do  loiis  les  \ic('S  :  o/iosi  riliosi. 
Vax  ne  Inisiml  l'ioii,  on  ;i|i|ir('ii(l  ;i  in;il  l'.ni'c.  (diiloii  rAiicicii.) 
Oysiveté   osl  inèrc  de  Inxiiro,  ...et   qui    oiisicroyt   oysivelé   du 

monde,  liientost  périroyent  les  arts  de  Cupido.  (Kidjelîus,  III.  '.\\.) 

Oiin  si  loUdn,  pcrierr  C.iipidinis  nrte.i. 

^Ovl^]  ,  ItoTiu'-ilvx  d  amour.) 

Amour  est  la  passion  des  esperilz  otieux.  (Rabelais.) 
Il  vaut  mieux  travailler  sans  but  que  de  ne  l'icn  faire.  (Socrate.) 
La  paresse  n'est  pas  un  vice:  c'est  une  rouille  qui  détruit  toutes 
les  autres  vertus.  (Dupont  de  Nemours.) 

—  Lorsque  la  mère  du  Régent  mourut,  la  nudiuuilé  a\ait  lancé 
un  trait  sanglant,  en  proposant  d'écrire  sur  le  toml)eau  de  cette 
princesse:  «  Ci-git  l'oisiveté»,  c'est-à-dire  la  mère  de  tous  les  vices. 

—  Un  oisif  est  un  animal  qui  broute  le  temps. 

Oison,  diminutif  de  oie,  s  reproduit  le  c  de  auca. 

—  Oison  bridé  (auquel  on  a  passé  une  plume  par  les  narines 
pour  l'erapêclier  de  francliir  les  baies)  :  qui  a  rintelligence  courte. 

—  Rabelais  appelle  Bridoye  un  juge  de  son  temps  ;  de  même 
qu'il  appelle  Dindeuault  un  imbécile. 

Le  nom  de  Bridoison,  que  Beaumarcbais  a  illustré  dans  le  jy^/vV/*;^ 
de  Fif/aro.  a  été  emprunté  par  lui  à  Rabelais  (liv.  III,  cb.  4). 

Olibrius,  nom  propre. 

Olilu'ius,  gouverneur  des  Gaules,  qui,  selon  la  légende,  fit  mourir 
sainte  Reine,  vers  450  (?).  Il  figurait  dans  les  Mystères,  pour  y 
personnifier  le  fanfaron. 

—  Faire  l'olibrius  :  faire  le  mécliant. 

Faisons  rolil)rias,  rocciscuv  d'ianocenls. 

(MoLii'iiiE,  Élôitrdi,U\,  5.) 

Oligarchie,  du  grec  oUgoi,  en  petit  nombre,  arlxhé,  commande- 
ment. 

Forme  de  gouvernement  où  le  pouvoir  est  dévolu  à  un  petit  nombre 
de  personnes  ;  c'est  une  aristocratie  limitée  à  quelques  privilégiés. 

Tels  furent  à  Atbènes  les  Trente  Tyrans  ;  à  Rome,  lesDécemvirs  : 
les  Deux  Triumvirats  :  à  Venise,  le  Conseil  des  Dix, 

Olifant,  pour  éléphant,  ivoire,  cor  d'ivoire.  (Ancien.) 

Olivier,  dérivé  de  olive,  latin  olira  :  d'où  Ollioules,  village  où 
croît  l'olivier  (0  kil.  N.  de  Toulon). 


OLY  I6o 

—  l/(,»li\i(M' (If  la  paix:  Olira  ///ihel/is.  (Val.  Klacciis.) 
Siii\aiit  la  .Mylliolotiic.  Noptmio  ot  Minerve  (en  .urec  At/u'na),  se 

(lis|)iitaiit  l(>  droit  de  donner  nn  nom  à  la  ville  de  Cccrops,  Neplnne 
fi-appa  la  leiTcdo  son  liidciit.  el  lit  naître  le  cheval,  emblème  de  la 
uticri'o, 

.Minerve,  à  son  loin-.  II!  naiiro  l'olixier,  dont  les  fruits,  oiijt'l  (rnn 
connncrco  considi'ralilo  cnlrc  1rs  nations,  en  font  nn  sinne  de  paix. 

Le  don  de  .Miner\e  fui  prcMV'ré  par  les  aïeux  de  Périclés,  et  Minerve 
enl  la  i^joire  de  donnei'  son  nom  à  Athènes. 

—  Sophocle  dit  :  ..  L'oli\ier  [irodiiit  ici  (dans  l'Attiqne)  des  llenrs 
o[  des  fruits  en  ahondance.  (l'est  nn  arhre  planté  par  la  main  des 
Innnortels  :  janiais.  en  aucun  temps,  nnemain  étran.^èrc  ne  pourra 
rexlii'|ier  du  S(»l.  car  Jupiter  et  Minerve  veillent  sur  lui  d'un  (eil 
attentif.  » 

—  L'olivier  a  été  connu  des  peuples  les  plus  anciens.  Il  est  oii.ui- 
naire  de  la  Syrie  et  de  la  Perse. 

CuUi\é  en  Grèce,  il  fut  apporté  à  Marseille  par  les  Phocéens  ; 
mais  il  était  cultivé  en  Grèce  au  moins  2.000  ans  avant  l'ère  chré- 
tienne, car,  vers  l(SGo,  on  a  trouvé  dans  l'Ile  de  Santorin  des  cons- 
tructions de  l'âge  de  pierre,  ensevelies  comme  Pompéi,  sous  des 
cendres  volcaniques,  datant  au  moins  de  cette  époque  reculée,  et 
dont  les  toitnres  étaient  de  l)ois  d'olivier. 

—  Tonrnefort  dit  que  le  mont  Ararat,  qu'il  visita,  et  où  s'arrêta 
rai'clit>  de  Noé,  ne  poile  pas  d'oliviers,  et  qu'il  ne  sait  où  la  colomhe 
a  pu  en  aller  chercher  une  hranche. 

—  L'oli\ier  vit  plus  de  trois  cents  ans,  et  la  vallée  de  Gethsé- 
mani  (.lai'din  des  Olives),  où  fut  arrêté  Jésus-Christ,  est  remplie 
d'oli\iers  si  vieux  (pie  l'on  est  tenté  de  les  croire  conlenq^orains  du 
Sauveur. 

—  La  fête  des  Rameaux,  ou  Pâques  fleuries,  a  été  instituée  en 
mémoire  des  rameaux  d'olivier  qui  furent  jetés  sur  le  passage  de 
Notre-Seignenr,  le  Dieu  de  paix,  à  son  entrée  à  Jérusalem. 

—  L'olivier  a  été  tué.  en  grande  partie,  par  le  froid,  en  Provence 
pendant  les  hivers  de  1709  et  de  1820.     ■ 

OBympe,  du  grec  Ofijiiipos. 

Chaîne  de  montagnes  de  la  Grèce,  d'une  hauteur  d'environ  un 
mille  et  demi.  Les  anciens  croyaient  qu'elles  touchaient  le  ciel,  et 
imaginèrent  que  les  dieux  y  faisaient  leur  résidence  et  que  Jupiter 
y  tenait  sa  cour.  Aussi  ce  mot,  chez  les  poètes,  désigne-t-il  le  ciel 
lui-même. 


166  ON 

Olympiade,  du  l;ilin  oli/injiias,  lr;i(liiil  du  ,LTcr. 
I^lspnrodt;  (iii;itr<' lins  (jiii  sr|);ir';iit  I;icél(''l)r;iti(jn  dos  Jeux  oImii- 
piqiios,  clioz  los  (irors.  ;'i  Olyiiipio.  d;ms  rKlidc. 

Ombre,  du  l;iliii  tmihrd. 

—  Oiiiiiid  le  soleil  <'sl  coiicIh'',  toiito?  hostcs  soiit  ;'t  roinlii'c.  (Kabc- 
hus.) 

On  dit  de  inénio  :  \a\  niiil.  Ions  los  cliiils  sont  uris. 

—  Sniv.iiit  la  M>tliologic,  lo  corps  do  llioninio  après  sa  niorl 
était  j'ôdnit  en  rondi'os  ;  son  oinbro,  sunulfurinn,  umhi-d,  dosceii- 
daildans  les  Enfers,  soit  au  Tai'tar(;,  soit  aux  (Champs-Elysées. 

Oméga,  dornière  lettre  de  Talplialiet  grec  (o  lono-.  par  opposition 
à  omicron,  o  bref). 

—  L'alpha  et  l'oméga  :  le  conimoncemont  et  la  lin. 

\j  alpha  est  la  premiore  lettre  de  ce  monie  alphabet,  on  \'o/nrf/a 
occupe  lo  dernier  rang. 

Omelette,  étymologle  fort  incertaine,  peut-être  œufii  tnr/c's. 
On  lit  a-umeletle  dans  une  pièce  du  théâtre  italien,  de  1692. 

—  «  On  ne  peut  faire  une  omelette  sans  casser  des  œufs  »,  disait 
Bonaparte  à  un  religieux  du  Mont-Saint-Bernard,  qui  se  plaignait 
des  dégâts  que  faisait  son  armée  en  traversant  les  Alpes. 

Le  frère  cuisinier,  qui  se  trouvait  là,  reprit  :  «  C'est  vrai,  général, 
mais  à  quoi  bon  tant  d'omelettes  ?  » 

Omnibus,  mol  latin,  qui  signifie  pour  tous. 

—  Ce  mot  a  été  créé  pour  désigner  de  grandes  voitures  publiques 
de  transport  pour  les  voyageurs.  Il  en  a  circulé  à  Paris,  pour  la 
première  fois,  en  1828.  La  première  idée  en  est  due  â  Pascal,  et  l'on 
en  avait  fait  essai  en  1G72.  (Voy.  Revue  des  Deux-Mondes,  1809, 
art.  de  M.  du  Camp.) 

—  Le  véritable  omnibus  est  le  corbillard. 

On,  l'on,  du  latin  /lonio,  dont  l'accusatif  a  donné  /io>nnie. 

Vaugelas  remarque  que  ces  mots  sont  les  abré\iationsde/a:)A';//«p, 
V homme.  Dans  les  anciens  actes,  il  est  écrit  :  hom  ou  l'hom  fait 
savoir,  pour  o)i  ou  Von. 

Les  Italiens  disent  de  même  huom,  et  les  Allemands  man,  homme. 

—  Se  moquer  du  (ju'en  dira-t-on,  veut  dire  qu'on  ne  se  préoccupe 
pas  de  l'opinion  des  hommes,  du  public. 

—  L'on  est  un  chroniqueur  anonyme,  le  rédacteur  anonyme, 
le  rédacteur  en  chef  du  Scandale,  journal  raconté  à  vingt-quatre 
éditions  par  jour. 


ONG  107 

—  On  dit...  Cette  formule  liaïKile  est  I;i  ressource  des  sots  qui 
inv()(|iieiit  l'opinion  |)iilili(]ue  à  l'iippni  de  lenrs  niédis;inces.  Mais,  si 
on  (lit  est  nn  sot.  on  ponrrait  ajouter  oui  dire  est  un  idiot.  On 
accepte  li'op  \{)l()nliers  de  la  foule,  et  sans  examen,  tons  les  hrnits 
qui  courent  les  rues,  surtout  lorsqu'ils  louchent  au  scandale  et 
satisfont  notre  maliunilé  natuivlle.  (]iter  on  dit,  c'est  se  faire  le 
com[)lice  d'une  médisance  ou  d'une  calomnie. 

On,  onne,  suffixe  parfois  diminutif,-  qui  sert  à  dériver  un  grand 
nondir*;  de  suljslantifs.  11  vient  peut-être  du  grec  dion  (!)  qui  a  un 
emploi  analogue  dans  des  mots  comme  oikidion,  petite  maison, 
pijrnniidion,  petite  pyramide;  ou  encore  de  son  (?)  qui,  dans  les 
langues  du  Nord,  signilie  (ils.  petit. 

Ainsi,  nous  disons  :  chaton,  petit  chat;  ânon,  aiglon,  raton; 
coi'don.  petite  corde  :  cahanon  :  Saxon,  enfant  de  la  Saxe;  Louison, 
petite  Louise;  nourrisson,  le  petit  nourri  par  sa  mère;  polisson, 
enfant  des  rues;  patron-minet,  petit  chat;  poltron  oupoultron,  le 
petit  de  la  poultre.  ou  jument. 

Quelquefois  cette  désinence  est  augmentative,  comme  dans:  hihe- 
ron,  grand  hu\eur:  ballon,  grosse  halle. 

Once,  du  latin  unria. 

—  Ça  ne  pèse  pas  une  once  :  c'est  une  afïaire  peu  importante, 
facile. 

—  L'once  était  la  douzième  partie  de  l'as,  ou  livre  romaine.  C'était 
aussi  la  douzième  partie  du  pied  ;  d'où  l'on  appelait  les  grandes 
lettres  dans  les  inscriptions,  qui  avaient  un  pouce  de  haut,  «  lettres 
onciales  ». 

Ongle,  du  latin  ungnla  :  autrefois  féminin. 

—  Unis  comme  la  chair  et  l'ongle. 

Tôt  temps  .-serai  nb  liens  cum  cura  et  un^/ln. 

(A.  Damei..) 

(Je  serai  toujours  avec  elle  comme  la  chair  et  l'ongle.) 

Onguent,  du  latin  loujucnliini  (de  ungcrè,  oindre). 
Nom  générique  de  toutes  les  ponnnades  à  hase  de  graisse,  de  cire 
ou  d'huile,  qui  sont  employées  en  médecine. 

—  Les  Latins  a[)pelaieut  unguenta,  les  préparations  lialsamiqiies 
en  usage  dans  la  toilette.  Nous  avons  remplacé  ce  mot  [)ar  pommade 
qui  ne  le  vaut  pas. 

-Dans  les  petites  hoites,  les  bons  onguents.  Onguent ç:%{^vh  ici 


1G8  OIM: 

dans  \o,  sons  de  parfum,  essence.  Les  essenres.  en  ftlcl.  peuvent  se 
condenser  sous  un  tirs  petit  volume. 

On  fait  usage  do  ce  provcrhc,  comme  d'une  espace  de  comiiliiiicnl 
de  condoléance,  pour  les  personnes  qui  paraissent  s'afllÎLicr  de 
rexi.uiiité  de  leur  taille. 

Onomatopée,  du  .arec  onomn,  nom.  poit'ô.  je  fais. 

Tei-me  de  grauimaire.  Mot  dont  le  son  imite  l'action  on  l'ohjet 
représentés. 

Ce  mot,  qni  fait  les  antres,  ne  s'est  certainement  pas  fait  lui- 
même. 

«  L'onomatopée,  dit  Dumarsais,  est  une  ligure  par  laquelle  un 
mot  imite  le  son  naturel  de~  ce  qu'il  signifie.  » 

Elle  a  contrihué  pour  beaucoup  à  la  formation  des  mots.  Presque 
tous  les  noms  qui  désignent  les  cris  des  animaux,  et  les  animaux 
eux-mêmes,  sont  des  onomatopées.  Ainsi  :  cri-cri,  coucou,  ara,  et<-. 

—  Onomatopées  tirées  d'un  mijsirre  de  la  Nativité  : 

Un  coq  (d'une  voix  claire  et  l)rèYe)  :  C/irislus  natua  csf. 

Un  bœuf,  mugissant  :  IJbi. 

Un  agneau,  bêlant:  Beth-léem. 

Un  âne,  bravant:  la-tmis. 

—  Barbotter,  bombe,  boum,  cabot,  caquet,  cbucbofer,  claque, 
clinquant,  cliquetis,  crac,  crécelle,  croassement,  drelin-drelin,  fan- 
fare, frelon,  frire,  froufrou,  gargariser,  gazouiller,  glouglou,  banne- 
ton,  liennir,  boquet.  miauler,  pet,  rfde,  rataplan.  rincer,  roucoulei-, 
siffler,  tam-tam,  tic-tac,  tinter,  trictrac,  turlututu. 

Al  laba  lerribili  sonilu  tnrinUarn  rii.rit. 

(EN>-irs.) 

Opéra,  do  l'itaben  opéra  :  proprement  œurre. 

—  Inventé  par  les  Italiens,  l'opéra  fut  introduit  en  France,  en 
'164o,  par  Mazarin.  Le  premier  opéra  français  fut  fait  par  labbé 
Perrin,  et  la  musique  par  l'organiste  Lamliert.  Ces  deux  auteurs 
ol)tinrent,  en  1669,  un  privilège  qu'ils  cédèrent,  en  1672,  à  LuUy. 

Le  premier  ballet  introduit  dans  l'opéra  fut  le  Triomphe  de 
r Amour,  donné  à  Saint-Germain  (21  janvier  1681). 

Opérette.  L'opéra-boulTe  d'Olîenbacb  et  C''=  est  une  triste  créa- 
tion du  second  Empire,  qui  tire  son  entbousiasme  de  l'absialbe,  sa 
poétique  du  carrefour,  et  ses  effets  de  la  ^profanation  systématique 
de  toutes  les  admirations  lionnétes  de  Ibumanité.  Otlenbacb  a 
inventé  une  cbose  introuvable  jusqu'alors  pour  le  tbéâtre,  une  cbose 


OI»T  160 

répupiianlc  cl  Irivialo.  qui  esl  do  l'éunir  dans  iiiio  (l'ini-c  le  niainais 
Ion  au  uiauvnis  uoùl. 

Opiner,  du  latin  opinari,  donner  son  opinion,  iionsor. 
D'où  inopiné,  ce  à  quoi  on  no  s'attendait  pas. 

—  Opiner  du  i»onnet.  Dans  les  assenihlées,  on  ôtait  son  honnct 
v\\  silène  (rassonliinciit  :  c'est-à-diro  acquioscei"  sans  mot  dire. 

Opinion,  du  l;iliii  ojiiiuo.  iimnioro  do  i)enser. 

—  L'opinion  est  un  suIVra.ae  donné  dans  \\\\  coniMours  do  voix. 
L'a\is  est  nn  téinoicnapo  on  faveur  d'un  parli.  Le  sentiment  soiis- 
entend  la  sincérilé. 

On  peut  être  obligé  de  donner  son  avis  contre  son  sentiment,  et 
de  se  conformer  aux  opinions  du  grand  nombre. 

—  On  appelle  opiniàlrp,  celui  qui  tient  trop  ;'i  son  opinidii. 

«  C'est  votre  opinion  '.  —  Quand  je  dis  (piobjuo  chose,  c'est  toujours 
mon  opinion.  » 

—  11  on  est  des  o[)inions  comme  de  nos  montres:  pas  une  ne  va 
comme  les  autres,  et  tout  le  monde  se  rapporte  à  la  sienne.  (Pope.) 

—  Les  opinions  sont  libres.  On  no  doit  coml)attre  l'opinion  que 
l)ar  le  raisonnement  ;  on  ne  tire  })as  d(».  coups  de  fusil  aux  idées. 
(Rivarol.) 

Ou  dit  aussi  :  «  Toute  opinion  consciencieuse  est  respectable.  » 
Cotte  maxime  est  absurde,  parce  qu'elle  conduirait  à  absoudre  le 
voleur  qui  prend  tout  on  conscience,  et  l'assassin  qui  tue  d'après 
des  principes  dont  il  est  bien  convaincu  (?).  Faudra-t-il  aussi  respecter 
les  stupidités  de  la  bêtise  humaine  et  les  préjugés  do  la  routine,  qui 
sont  l'évangile  des  sots  et  des  fanatiques?  Abattons  bien  vite  ce 
paravent  trop  complaisant  de  la  conscience,  et  no  respectons  que  ce 
qui  est  lionnête  et  juste. 

—  Changer  d'opinion.  Synonymes:  changer  de  gamme,  de  note; 
déchanter,  chanter  la  palinodie;  tourner  casaque. 

Optimisme,  du  latin  op/inms,  le  mieux,  le  meilleur;  et  non  de 
opter. 

Doctrine  opposée  im  pessimisme. 

Ce  système  ne  voit,  dans  le  monde  moral  et  dans  le  monde  [ihy- 
si(pie,  qu'un  élément  de  l'ordre  universel,  et  afllrme,  avec  Leibnitz 
et  Malebrancbe,  que  tout  est  bien  par  rapport  à  tout.  II  s'appuie 
sur  ridée  de  la  sagesse  et  de  la  bonté  de  Dieu. 

—  Le  docteur  Pangloss  (Voltaire,  Candide)  est  une  belle  cari- 
cature de  l'optimisme. 


170  OR 

Or,  du  latin  nurum,  ;'i  rnpproclicr  d'ain-a,  éclat,  et  (Yaurora. 

Corps  simple,  jnélulliqiie,  d'une  couleur  jaune  et  brillante. 

11  a  été  appelé  le  «  Roi  des  métaux  «  par  les  alchimistes,  qui,  par 
suite,  avaient  appelé  «eau  régale»  un  mélange  liquide  dacide 
nitrique  et  d'acide  muriatique,  qui  est  le  dissohant  de  l'or. 

t)n  l'appelle  aussi  le  «  vil  métal  »,  parce  qu'il  corromi^t. 

—  On  demandait  à  un  roi  de  Sparte  pourquoi  les  Lacédémoniens 
n'avaient  pas  de  trésor  :  «  C'est,  dit-il.  aliu  de  ne  pas  corrompre 
ceux  qui  en  auraient  la  clef.  » 

—  L'or  et  la  vcitu  semblent  placés  dans  les  deux  côtés  d'une 
balance,  et  l'on  ne  peut  ajouter  au  poids  du  premier,  sans  que  l'autre 
devienne  aussiliH  plus  léger.  (Platon.) 

L'or,  semblable  au  soleil,  qui  fond  la  cire  et  durcit  la  boue,  déve- 
loppe les  grandes  âmes,  et  durcit  les  mauvais  cœurs.  (Rivarol.) 

—  En  argot,  on  appelle  l'or  orient,  jeu  de  mots  pour  or  riant, 
qui  plait  à  tous. 

Placer,  lieu  où  l'on  trouve  l'or  en  Californie,  signifie  aussi  plai- 
sant. 

—  On  trouve  dans  les  terrains  aurifères  des  morceaux  d'or  pur, 
qu'on  appelle  pépites  en  Californie,  et  niif/r/ets  en  Australie. 

En  1842,  on  a  extrait  des  monts  Ourals  une  pépite  pesant  35  kilog. 
Elle  est  conservée  au  Musée  de  Saint-Pétersbourg. 

En  1838,  on  a  trouvé  à  Ballarat  (Australie),  à  o4  mètres  de  pro- 
fondeur, un  nugget  de  70  kilog.  d'or  très  pur.  Il  fut  Ijaptisé  du  nom 
de  Welcome,  le  bien  venu,  et  vendu  202.000  francs. 

—  Or  de  Toulouse.  Avoir  de  l'or  de  Toulouse  était  une  locution 
proverbiale  chez  les  Gaulois  et  chez  les  Romains,  pour  signifier  une 
destinée  funeste.  On  suppose  que  le  général  Cépion,  qui  avait  pillé 
les  temples  de  Toulouse,  et  en  avait  tiré  une  grande  quantité  d'or, 
fut  battu  par  les  Cimbres,  et  perdit  son  armée  et  ses  trésors. 

Or  de  Tholose  —  duquel  parlent  Cicero,  de  Natura  décru  m, 
liv.  111:  Aulu-GeUius.  liv.  111:  Justin,  liv.  XXIl  :  Strabo,  liv.  IV  — 
pourta  mallieur  à  ceulx  qui  l'empourtèrent  :  sçavoir  Cépio,  consul 
romain  et  toute  son  armée,  qui  tous,  comme  sacrilèges,  périrent 
malheureusement.  (Rabelais.) 

—  On  disait  aussi  dans  l'antiquité,  duu  homme  voué  à  la  mau- 
vaise chance:  «  Il  a  le  cheval  de  Séjan  »  ;  parce  que  le  cheval  de 
Séjan  fut  funeste  à  son  maître  et  à  ceux  qui  le  possédèrent  après 
lui:  Dolabella,  Cassius.  Marc-Antoine.  (Aulu-Gelle,  III,  9.) 


OR  171 

—  Adorer  le  veau  d'or. 

...11  vil  111(11111110  liyporoiidri' 
Adoror  li^  nii'l;il  iinc  liii-iuèiiio  il  fit  fondre. 

(UdiLiAi:,  Satire  VIII.) 

—  Les  AnuM'icains  \o\an(  l'avidilô  des  ]"]tiro|i('('ns  pour  l'or, 
crovaieiil  (juc  ("(''lail  le  dieu  qu'ils  adoraioiiK  cl  lui  adressaient  des 
prières  [tour  (|u'il  lit  cesser  les  perséculioiis  doiil  ils  rlaicul  rdhjcl. 

—  Dans  rOiu'st  de  la  France,  [lar  une  nirlapliore  hardie,  on 
ap|)('lle  '<  reliiiion  sonnante  »  le  culte  que  tant  de  ,uens  p.rolessenl 
jiour  l'or. 

—  La  clef  d'or  ouvre  toutes  les  portes  ;  aussi  tons  les  elïorls  des 
hommes  tendent  à  se  procurer  ce  talisman,  (jui  conduit  à  tout, 
excepté  peut-être  au  honheur. 

Le  rameau  d'or  que  la  Sihylle  de  Cumes  lit  [trendre  à  Enée,  pour 
lui  ouvrir  la  route  des  Enfei's,  fut  aussi  le  talisman  qui  ouvrait  les 
lieux  les  plus  inaccessihles,  les  portes  les  mieux  closes.  Arrivé  au 
palais  de  Pluton,  Éuée  attacha  le  rameau  à  la  porte,  et  elle  s'ouvrit. 

—  La  soif  de  l'or. 

Aari  sacra  famcs. 

(Viiiiri.K.  Eiu'hJr,  III.  ."i".) 

La  soif  de  l'or  a  toujours  éleint  dans  les  hommes  tout  sentiment 
d'humanité.  (Rollin  ) 

L'avidité  de  Crassus  lui  lit  jtorter  la  guerre  chez  les  Parthes. 
Vaincu,  sa  tète  fut  portée  au  roi  Orodès,  qui  lui  fit  couler  de  l'or 
fondu  dans  la  hoiu-he,  en  disant  :  «  Rassasie-toi  de  ce  métal,  dont 
ton  cceur  a  été  insatiahle.  » 

Cette  passion  violente  a  été  combattue  de  tout  temps  par  les 
moralistes,  qui  ont  hlàmé  l'amour  des  richesses,  mais  n'out  pu 
convertir  personne. 

L'occasion  aidant,  ils  ont  prouvé  que  tous  leurs  i-aisonuemenls 
ne  les  avaient  pas  convaincus  eux-mêmes. 

—  On  demandait  à  Simonide  ce  qui  était  le  iilus  à  souhaiter, 
des  richesses  ou  de  lu  sagesse  :  «  Je  ne  sais,  dit-il,  mais  je  vois 
beaucoup  de  sages  venir  faire  la  cour  aux  riches.  » 

—  Tout  ce  qui  reluit  n'est  pas  or. 

Tout  iiVst  pas  or  ci'  i|iii  rcitiil. 
Ni  iariiir  ce  (|ui  Idaiieliil. 

—  La  boue  devient  brillante  quand  le  soleil  luit.  (Gcelhe,) 

—  Valoir  son  pesant  d'or.  Se  dit  d'une  chose  de  prix. 
Michelet  atti'ibiie    comme    origine  à  cette  expression,   l'usage 


172  on  A 

iincion  de  donnor  ;iii\  p;iroii(s  (l'iiii  lioiiiiiio  liir  le  imids  do  son 
(Mirps  en  or  on  on  ;ir,u(Mit  |ioiii'  los  dôdoniinn^or.  Un  lioiinno  do  conl 
kilogrannncs  v;ni(li;iil  ;'i  ce  loniiilo  1500.000  francs. 

—  L'or  os(  une  cliiinoro...  [lour  roux  qni  n'en  ont  |)as. 
L'or,  c'est  le  nerf  do  l'inlriixno.  (lioanniardiais,  Ikirhier.) 

Oracle,  du  lalin  ovtiriihnn  (doo/r/jv.  [»;ii-lor). 

—  l*arloi-  coninio  nw  oi'aclo  :  c'osl  nn  oracle.  C'est-à-dire  :  il  est 
infailliltlo. 

(\v\  oracle  est  i)lus  sia'  (|ii('  celui  de  Cali'lias. 

(Ii\<;i.\f,  liiliif/rnir,  \\\.  2.) 

—  Pliilanine  dit  qn'un  pâtre  noniinc  Goritas  déconvril  l'oracle 
do  Delphes,  en  voyant  ses  chèvres  agitées  pousser  des  cris  extraor- 
dinaires, quand  elles  approchaient  d'une  cavité  d'où  sortaient  des 
vapeurs.  Cet  oracle  fut  longtemps  le  plus  renommé.  Apollon  y  lit 
ses  réponses  en  vers  pendant  plusieiys  siècles  ;  mais,  comme  les 
mauvais  plaisants  riaient  des  vers  du  dieu  do  la  poésie,  il  répondit 
en  prose. 

—  L'oracle  de  Dodone.  au  dire  de  Suidas  et  d'Aristoto.  n'était 
qu'une  suite  de  hassins  de  cuivre  suspendus  en  cercle.  Leur  choc, 
provoqué  par  le  vent,  ou  par  l'artilice  des  prêtres,  produisait 
un  retentissement  cpouvantahle.  (Voy.  Fontenelle,  Histoire  des 
oimdes.) 

—  Rahclais  (III,  2'.}),  après  avoir  énuniéré  los  oracles  les  plus 
célèhres  de  l'antiquité,  ajoute  :  «  Mais  vous  sçavez  que  tous  sont 
devenuz  plus  mulz  que  poissons,  depuys  la  venue  de  celluy  roy 
servateur,  ouquel  ont  prins  fin  tous  oracles  et  toutes  prophéties, 
comme  advenant  la  lumière  du  cler  soleil,  disparent  tous  luttins, 
lamies,  lémures,  garoux,  farfadets  et  ténéhrious.  » 

—  La  marguerite  est  l'oracle  dos  amants.  «  La  jeune  lille  Tintor- 
roge  sur  les  secrets  de  l'avenir  :  sa  hlanche  main  elTeuille  \n\  à  un 
les  pétales  de  cette  frêle  et  tondre  (leur,  et  selon  que  le  charmant 
oracle  a  répondu,  un  Ijaisor  ou  une  larme  toml)e  sur  ses  dél)ris.  >» 
(M"*-'  Marie-Rose  Patout,  Fiantes  médicinales  des  environs  de 
Toulon.) 

Orange,  du  latin  aiiriun.  poininn  aurnntii  (?). 
Somlili'  plut(')t   tiré  de   l'aralie   narandj,  devenu  orange,  puis 
orange,  sous  rinlUieiu'O  do  or. 

—  L'oranger,  dont  la  llour  est  d'argent,  et  dont  le  fruit  est  d'or. 
Les  pommes  d'or  des  Hospérides. 


Typo  do  la  taiiiillt'  des  aiirciiliacrcs,  (jni  coinin'ciid  h'  cili'oiiiiicr, 
le  cédralicr.  le  liiiidiiicr.  le  hcriiamoUier,  oie 

L"oran,L^<'i'  cl  It^  (•ilroiink'r,  oriiiinaires  d'Afriqiio.  oui  rlr  trans- 
plantés on  Provonro  par  los  colonios  urocqucs. 

Hor('nl<\  siii\anl  la  Fable,  les  avait  apportés  en  Gi'ôco  du  jai-din 
dos  Hospéridos.  (pic  los  Géortiuiucs  placent  en  Afrique. 

—  An  xvii'-  siècle,  les  oranges  étaient  encore  rares  on  France, 
puisque  M"*^  de  Montpensier  dit  dans  ses  Mémoires  :  «  Monsieur 
vint  me  voir  et  me  donna  dos  oranges  de  Portugal.  » 

.M"""  do  Sévigné  écrit,  à  l'occasion  du  mariage  de  M"*'  de  t.ouvois, 
(pii  eut  lieu  le  ^'î  novembre  1079  :  «  On  a  fait  venir  le  printemps  : 
tout  était  plein  d'oi'angors  lleuris.  » 

—  Fan  de  Heur  d'orange.  Flein\  dans  cotte  expression,  vient  de 
fleurer,  qui  signiOc  répandre  une  biuine  odeur.  On  dit  :  cela  Meure 
bon  :  on  ne  dirait  pas  :  cela  Heure  mauvais. 

Fleur  d'orange  peut  s'expliquer  aussi  par  :  Heur  qui  i»roduit 
l'orange:  la  tleur  d'où  résulte  le  fruit.  (Voy.  fleur.) 

En  réalité,  orange  s'est  dit  autrefois  pour  oranger,  et  l'expres- 
sion équivaut  à  eau  de  fleur  d'oranger. 

—  Un  bouquet  de  flours  d'oranger  est  un  brevet  d'innocence 

s.  G.  D.  G. 

La  couronne  de  soucis  que  portent  los  jeunes  lilles  bulgares,  le 
jour  du  mariage,  est  un  symijole  plus  signilicatif  et  moins  trompeur 
que  le  bouquet  de  fleurs  d'oranger. 

—  Les  orangers  de  Versailles,  taillés  en  boule  sur  des  caisses 
carrées,  datent  du  temps  où  les  ifs  prenaient  la  forme  de  cigognes, 
oii  les  buis  devenaient  des  vases,  où  il  semblait  qu'à  l'exemple  du 
roi,  des  courtisans  et  des  dames,  tout,  jusqu'aux  arbres,  devait 
porter  perruque  et  panier. 

Orateur,  du  latin  orator  {orare,  parler). 

—  Lorateur  doit  instruire,  plaire,  toucber. 

—  0  Cicéron  !  Déraostliène  l'enlève  la  gloire  d'être  le  premier 
orateur,  et  tu  lui  êtes  celle  d'être  l'unique. 

—  Cicéron  compare  le  nond)re  des  orateurs  qui  sortirent  de 
l'école  du  célèbre  Isocrate,  à  celui  des  guerriers  (pii  sortirent  des 
flancs  du  cboval  de  Troie. 

—  On  plaça  sur  le  tombeau  d'Isocrate  une  Sirène. 

Oratoiref  de  omtorlus. 

—  L'ordre  de  l'Oratoire  était  une  congrégation  d'ecclésiastiques 


174  OUE 

qui  ne  f;iis;iio,iit  iKiiiil  do  v(r'ii\.  Fonde'' ;"i  Homo  jcir  IMiilippo  de  Néri, 
mort  eu  iriDrj. 
Le  cardimil  do  hônillo  IrUihlil  on  Fi-anco  en  1G12. 

Ordinaire,  qui  <'st  (l;ins  l'ordre,  liiiliilncl. 

—  Dinor  .ivoc  la  soupe  et  le  bœuf.  Dans  les  ^argotles  de  Paris, 
les  plats  pris  en  sus  do  l'ordinaire  sont  ai)[)elés  c.x7/y/.  (Voy.) 

Ordonner,  ordlnarc,  mettre  en  ordre. 

Donner  un  ordre,  couimander. 

Dans  le  langapc  familier,  on  dit  :  Madame  J'ordonne,  mot  très 
bien  fait,  et  (pii  exprime  bien  la  nuance  du  romuiandement  exercé 
avec  sottise  et  vanité,  à  tout  propos  et  bors  de  propos. 

Ordre,  du  latin  ordlnem  (de  ordo). 

—  TranquilHté.  Do  18G0  à  1861),  M.  Haussmann,  préfet  de  la 
Seine,  a  dépensé  deux  milliards  pour  les  embellissements  de  Paris. 
Les  crédits  de  la  Ville  avaient  été  dépassés  de  oOO  millions,  en 
février  1809,  lorsque  M.  Rouber  dit  à  la  Cbaml)ro  qu'  «  on  avait  pu 
ainsi  donner  du  travail  aux  ouvriers,  et  traverser  une  lonpiie 
période  sans  émeutes  ». 

Semblable  à  Caussidière,  M.  Haussmann  avait  fait  ainsi  de  l'ordre 
avec  du  désordre  :  ordre  dans  la  rue,  désordre  dans  les  finances. 

Le  préfet  de  police  Caussidière  a  eu  aussi  pour  imitateur,  en  1871, 
Cluseret,  généralissime  de  la  Commune,  qu'on  a  appelé  c<  l'organi- 
sateur de  la  désorganisation  ». 

—  Distinction,  décoration  militaire. 

^  Le  sacrement  qui  donne  un  caractère  sacré  aux  ecclésiastiques. 

La  collation  de  la  prêtrise  s'appelle  ordination. 

On  distingue  quatre  ordres  mineurs  et  trois  majeurs.  Les  mineurs 
sont  ceux  de  portier,  d'exorciste,  de  lecteur  et  d'acolyte.  Les 
majeurs  sont  :  le  diaconat,  le  sous-diaconat  et  la  prêtrise. 

Ordure,  dérivé  de.  l'ancien  adjectif  ovd  (/torridns,  et  non  de 
so)'didi/s). 

La  langue  a  conservé  ordure,  et  abandonné  ord,  que  remplace 
mal  le  mot  sale. 

—  Mots  orduriers.  (Voy.  obscène.) 

Oreille,  anciennement  aureille,  du  latin  auricula,  diminutif 
de  aiiris.  On  a  employé  aussi  ouyes,  ouïes. 

Confesser  vous  faut  des  ouyes. 
Des  yeux,  du  nez  et  de  la  bouclie. 

{Te:<tanient  de  Patelin.) 


X;itiiro  nie  si'inlilc  non  sans  cause  nous  avoir  fornié  aurcillcs 
ouvertes,  nv  opposant  porte  ni  clousture  aulcune,  coinnio  ha  faict 
aux  yeulx,  lanjzue  et  aiiltres  issues  du  eorps.  La  cause  je  cuyile 
estre  aflin  que  tous  jours,  toul(S  nuictz,  continuellement  puissions 
ouyr,  et  pai-  ouye  perpétiiellfincnt  ap[)rendre.  (Rabelais,  III,  10.) 

L'honune  devant  ouïr  pour  lui-même,  Toreille  a  été  placée  sur 
les  côtés  de  la  tète,  presque  cacliée  et  sans  ornement.  (G.  Sand.) 

—  Oreilles  chastes....  comme  celles  dont  parle  Rabelais  (IV,  43)  : 
'<  ...Les  sanctimoniales  (saintes  recluses)  qui  appellent  un  pet  virginal 
un  sonnet  »,  c'est-à-dire  un  petit  son. 

(i'est  peut-être  de  ces  décentes  nonnains  qu'on  a[)pelle  «  pet  de 
nonne  »  un  petit  beignet  de  la  grosseur  d'une  noix. 

—  Autant  \ous  en  pend  à  l'oreille,  ...ou  à  I'omI. 

Cette  locution  fait  allusion  au  dénomncnt  d'une  farce  intitulée  : 
Sœiu'  f'essue.  qui  est  le  sujet  du  Psaufier,  de  La  Fontaine. 

—  Avoir  l'oreille  basse  :  être  confus,  humilié. 

C'est  l'idée  inverse  qu'exprime  le  proverbe  :  Sac  plein  dresse 
l'oreille. 

Dcmitlo  anricitldt,  ni  iniijiur  mentis  asellus. 

(Uorac:k.) 

Serrant  la  queue  et  portant  bas  l'oreille. 

(La  Fontaixe.) 

Au  contraire,  on  dresse  l'oreille  quand  on  est  (ier  du  succès. 

—  Faire  les  enfants  par  l'oreille. 

Votre  simplicité,  ([lii  semble  sans  pareille, 
Demande  si  l'on  fait  les  enfants  par  l'oreille. 

(.Moi.iKRE,  Erole  rfp.s-  Femmes.  V,  4.) 

On  chantait  autrefois,  dans  une  prose  de  la  Vierge  : 

Gaude,  virgo  mater  C/iristi, 
Quce  per  aurem  concepisti. 

(Mînialnre  de  V Annonciation.) 

Sitôt  qu'eut  i)arlé  (labriel, 
La  Vierge  conçut  l'Kternel 
Par  une  divine  mer\eille. 
L'Archange  ainsi  l'avait  prédit. 
Et  de  là  peut-être  a-t-on  dit  : 
Faire  les  enfants  par  l'oreille. 

Rabelais  raconte  ainsi  connncnt  Gargamelle  lit  Gargantua  par 
l'oreille  :  «  ...Par  cest  inconvénient  furent  au-dessus  relaschés  les 
cotylédons  de  la  matrice,  par  lesquels  sursaulta  l'enfant,  et  entra 
en  la  veine  creuse,  et  gravant  par  le  diaphragme  jusqu'au  dessus 


17G  ORF 

(les  cspanlt'S,  oi'i  l.i  didc  veine  S(;  piirl  en  deux,  priiit  le  clieniiii  à 
^iiiiclie,  el  sortit  par  l'aureille  seiiestre...  « 

VA  [lins  lias  :  «  (]ar  je,  vous  dis  que  si  Dieu  voulait,  les  feiiiines 
auraient  doi'eseua\aul  leurs  enfants  par  l'aureille.  Bacchus  ne  fut-il 
pas  eii^cudiV'  [)ar  la  eiiysse  de  Jupiter  ^  Ro(pielailIad<^  nasqiiit-il  pas 
du  talon  do  sa  mère  '.  Crocpieiiiouclie,  de  la  pantoultle  de  sa  nour- 
rice? Minerve  nasquit-elle  pas  du  cerveau  par  Taureille  de  Jupiter? 
Adonis,  par  rescorce  d'un  arbre  de  niirrc?  Castor  et  Pollux.  de  la 
coque  d'un  (cuf  jioudu  par  Jxda  '.  » 

—  Je  vous  couperai  les  oreilles,  ...si... 

La  loi  salique  punissait  de  l'aniiMitalion  des  oreilles  tout  vilain 
qui  aurait  osé  approcher  d'une  l'einiue  uoltle  pour  la  caresser. 

—  L'oreille  est  le  clieuiin  du  cœur.  (Voltaire.)  (Voy.  flcurelles.) 

—  luCS  I^atins  appelaient  auvicu/arius  un  conseiller  intime. 
Nous  disons,  dans  un  sens  approcliant  :  avoir  l'oreille  de  quel- 
qu'un. 

C'est  à  cause  de  ces  rapports  intimes  avec  l'oreille,  que  le  petit 
doigt  a  été  appelé  auriculaire. 

—  L'oreiller,  sur  lequel  repose  l'oreille,  s'appelait  autrefois 
cnnaeiller,  uiot  qui  est  devenu  coussin  (?). 

On  dit  encore  :  consulter  l'oreiller  ;  la  uuit  porte  conseil. 

—  Il  vaut  mieux  en  croire  ses  yeux  que  ses  oreilles. 

Pluris  est  oculatu-s  lesiis  unus,  (jauni  aiirili  dcccm. 

(Plal-ik.) 

C'est-à-dire  :  mieux  vaut  un  témoin  oculaire  que  dix  témoins 
auriculaires. 

Ne  vous  en  rapportez  qu'à  vos  yeux,  et  ne  vous  liez  jamais  à  ce 
qu'on  vous  dira.  (M"""  Campan.) 

—  Se  faire  tirer  l'oreille  :  se  faire  beaucoup  prier. 

Chez  les  Romains,  lorsqu'un  homme  était  assigné  devant  le 
préteur,  et  qu'il  ne  comparaissait  pas,  l'oiïensé  avait  le  droit  de  l'y 
mener  en  le  saisissant  par  l'oreille. 

—  Avoir  la  puce  à  l'oreille.  (Voy.  puce.) 

Les  oreilles  ont  dû  vous  tinter.  (Voy.  tinter.) 
Dormir  sur  les  deux  oreilles.  (Voy.  dormir.) 
Les  murs  ont  des  oreilles.  (Voy.  7nur.) 

Orfèvre,  du  latin  auri  faber,  ouvrier  qui  façonne  l'or. 

—  L'orfèvre  fabrique  de  la  vaisselle,  des  vases,  des  flambeaux, 
des  couverts  d'or  ou  d'argent  ;  l'orfèvre-liijoutier  fabrique  et  vend 


OKG  177 

des  bijoux  :  rorfêvre-joaillior  voiul  des  di;im;inls.  des  perles,  des 
pierres  précieuses. 

Vous  êtes  orfèvre,  Moiisifui'  Josse... 

(Mi)i.iKici:,  Amour  médecin,  I,  1.) 

C'est-à-dire  :  vos  conseils  sont  intéressés. 

—  Le  contrôle  de  i^arnntie  pour  l'orfèvrerie  d'argent  coûte 
11  francs  le  kilogramme  ;  pour  celle  d'or,  200  à  205  francs. 

—  Largenterie  se  revend  au  poids  200  francs  le  kilogramme. 
L'or  des  bijoux  se  revend  2  francs  à  2  fi'.  25  le  gramme. 

Orgies,  du  latin  orgia.  tiré  du  grec  ta  orgia. 

Les  l'êtes  de  Bacclms,  appelées  aussi  Dionysiaques.  Elles  corres- 
pondaient aux  Bacchanales  des  Romains,  et  avaient  été  instituées 
en  souvenir  des  conquêtes  de  Bacclius  dans  l'Inde. 

On  y  faisait  des  processions  où  l'on  portait  le  phallus,  et  dans 
lesquelles  se  commettaient  toutes  sortes  de  débauches. 

Il  y  avait  aussi  à  Rome  les  orgies  de  Cybéle,  de  Cérès;  mais  à 
cause  des  excès  qui  s'y  commettaient,  le  Sénat  les  prohiba  en 
l'an  528. 

Orgue,  du  latin  or/janiun,  tiré  du  grec  organon,  instrument. 

—  Saint  Augustin  se  sert  du  mot  organa  pour  désigner  l'en- 
semble des  instruments  de  musique,  bien  que  l'instrument  appelé 
orgue  existât  déjà  à  cette  époque. 

—  Orgue  est  masculin  au  singulier,  et  féminin  au  pluriel  :  un  l)el 
orgue,  de  belles  orgues.  L'usage  le  veut  ainsi,  et  l'Académie 
elle-même  s'incline  sans  protester  contre  cette  irrégularité  ;  de 
sorte  qu'il  faut  dire  :  «  C'est  un  des  plus  belles  orgues  que  j'ai 
jamais  vu  »  (sic). 

—  En  757,  Pépin,  père  de  Charlemagne,  reçut  en  présent  le 
premier  orgue  qui  ait  paru  en  France.  Il  fallait  que  ce  fût  un  orgue 
de  Barbarie,  mu  par  une  manivelle,  car  il  n'y  avait  alors  personne 
en  France  qui  fût  capable  de  toucher  un  clavier. 

A  cette  époque,  on  prononçait  ogre;  ce  n'est  que  longtemps 
après  qu'on  dit  orgue  et  organon. 

—  Orgue  de  Barbarie.  Les  premiers  instruments  de  ce  genre 
furent  fabriqués  par  un  luthier  de  Modène,  nommé  Barberi.  On  les 
appelait  orgues  de  Barberi,  comme  on  dit  :  un  piano  d'Érard  ou  de 
Pleyel.  C'est  par  corruption  que  le  peuple  a  adopté  l'expression 
actuelle. 

—  Jouer  de  l'orgue  de  Barbarie  :  moudre  des  airs. 

i2 


178  OHM 

Orgueil,  du  lii'cc  onjaù.  (Mrc  gondé,  parce  (}iir  l'oririicil  est 
rcnllurG  du  C(Ciir  :  oti  de  ralleiiiand  iiryoli,  qui  est  supérieur. 

C'est  peut-être  yiissi  la  niènie  nri.Lnne  que  jiour  o/Y/?/r'r?).  inhc 
souore  et  plein  de  vent. 

—  L'oruueil  déjeune  avec  rabondance,  dîne  avec  la  paii\relé,  et 
soupe  avec  la  honte.  (Franklin.") 

Les  orgueilleux  ont  cela  de  lion  ipTils  se  cliargenl  Nolnnlaii-enieiit 
de  presque  toutes  les  corvées  sociales  et  se  contentent  d'une 
récompense  platoni(iue  :  des  croix  et  l'approbation  du  public. 

L'orgueil  est  la  maladie  du  génie  et  le  tic  de  la  médiocrité. 

L'orgueil  ainbilionne  la  gloire  ;  la  vanité  se  contente  de  la  gloriole. 

L'orgueil  ])erd  beaucoup  d'bonimes  :  la  vanité  beaucoup  de 
femmes.  (M.  G.) 

La  femme  se  sauve  quelquefois  par  l'orgueil,  elle  se  perd  toujours 
par  la  vanité.  (M.  G.) 

L'orgueil  de  l'or  est  aussi  ridicule  que  l'orgueil  des  haillons. 

—  On  dit  d'un  orgueilleux  :  c'est  une  statue  qui  cherche  son 
piédestal. 

—  Synonymes  :  avoir  de  l'orgueil:  faire  jabot  ;  se  pousser  du  col. 

Orient,  du  latin  orlens,  orientem,  qui  se  lève. 
Celui  des  quatre  points  cardinaux  où  le  soleil  se  lève. 

Oriflamme,  latin  auri  flamma. 

—  C'était  l'enseigne  militaire  de  saint  Denis,  patron  de  la  France 
et  premier  évêqne  de  Paris.  Le  roi  de  France  était  l'avoué  de 
l'abliayc,  et  son  .sigjiifer. 

L'orillamme  était  en  soie  rouge,  terminée  par  trois  pointes,  et 
attachée  à  une  lance  dorée  ;  d'où  son  nom. 

Oripeau,  de  aiwi  pe//is. 

Lame  de  cuivre  très  mince,  polie  et  brillante,  qui  a  l'apparence 
et  l'éclat  de  l'or.  (La  Crusca.) 

Orme,  du  latin  ulmus,  devenu  d'abord  olme. 

Attendez-moi  sous  l'orrae, 
Vous  m'attendrez  longtemps, 

dit  la  chanson.  En  d'autres  termes  :  je  ne  reviendrai  pas. 

Autrefois,  il  y  avait  ordinairement  sur  les  places,  devant  les 
éghses,  un  orme  sous  lequel  se  tenaient  les  assemblées,  où  se 
passaient  certains  actes  publics.  «  Attendez-moi  sous  l'orme  », 
disait-on  à  un  ennemi  qu'on  menaçait  de  le  citer  devant  le  bailli, 


OUT  179 

qui  rendait  l;i  justico  sous  I'oimuo   planté  devant  lo  umnoir  sei- 
gneurial. 

Attendre  quelqu'un  sous  l'oriue  si.uniliait  ne  pas  craindre  d'être 
attaque  par  lui  en  justice. 

—  ...Le  cardinal  Patriicci  les  attend  sous  l'orme  (les  juges  de 
l'Inquisition),  et  ils  n'oseront  l'attaquer.  (Sévigné.) 

Cette  locution  a  passé  depuis  au  sens  ironique  de  ne  pas  vouloir 
faire  ce  que  quelqu'un  demande,  ou  de  ne  pas  croire  à  une  affir- 
mation. 

C'est  la  comédie  de  Regnard  (1GÎ)4)  :  Altcndez-inoi  sous  l'orme, 
qui  a  popularisé  cette  locution.  La  scène  se  passe  sous  l'orme  d'un 
village,  où  Lisette  donne  à  Dorante  un  rendez-vous  auquel  elle  ne 
se  rend  pas,  et  où  le  clueur  cliante  à  plusieurs  reprises  : 

AUc'iulez-nioi  sous  l'orme. 
Vous  m'aUciuirc'Z  longtemps. 

—  Le  Dictionnaire  de  Trévoux  à  ce  mot  dit  :  «  Au  village,  on 
place  un  ormeau  devant  l'église  ;  d'où  sont  venues  ces  paroles  : 
danser  sous  l'orme...,  juges  de  dessous  l'orme,  qu'on  appelait  aussi 
juges  pédanés,  c'est-à-dire  sans  siège,  qui  rendaient  leurs  sentences 
debout  fstantes  in  pedlbus),  sous  un  orme  ;  de  là  le  proverbe  : 
Attendez-moi  sous  l'orme.  » 

...Chascun  vous  appelle 
Partout  rad\ocat  dessous  l'orme. 

(Patelin.) 

Et,  du  reste,  bonsoir,  attendez-moi  sous  l'orme. 

(Hai  itnocHE.) 

Il  y  a  aussi  une  pièce  du  tliéâtre  italien  :  Attendez-moi  sous 
l'orme. 

—  L'ambassadeur  turc  est  parti  pour  Gonstantinople,  où  il  doit 
attendre  l'impératrice.  Sur  les  rives  du  Bospbore,  y  a-t-il  des 
ormes?...  (18GU). 

Ornière,  de  orne:  anciennement  ourne ;  latin  ordinem. 
L'ornière  :  le  cbemin  de  la  routine. 

Orphée,  nom  mytiiologique. 

—  En  1848,  Lamartine,  pendant  une  grande  commotion  politique, 
renouvelait  le  prodige  attribué  à  Orphée,  charmant  par  sa  parole 
harmonieuse  les  tigres  et  les  lions  rassemblés  sous  le  balcon  de 
l'Hôtel  de  Ville. 

Orteil,  du  latin  articulum.  doublet  de  article. 


180  OSA 

Le  gros  doigl  du  pied  s'appelle  orteil,  le  gros  orteil  ;  autrefois 
orteil  se  disait  de  tous  les  doigts  du  pied.  En  provenral,  arleoiis, 
au  pluriel,  signillc  les  cinq  doigts  du  |»i<Ml.  Arfcou  rapix'lle  mieux 
qu'orteil  Trlvuiologie  laliue. 

Orthographe,  du  gi-ec  oriJiÔK,  droit,  r/rdiiho.  j'écris. 

—  Ortliograplic  phonograpliiqiie  ou  plioiiétiquo,  c'cst-à-dirc 
d'après  la  prononciation. 

Marie  voulait  qu'on  écrivît  :  érita<je.  boneur. 

f^'idée  de  rapprocher  l'écriture  de  la  prononciation  est  ration- 
nelle; mais  l'exécution  est  diflicile,  quand  on  pense  que  Voltaire 
arriva  difficilement  à  faire  substituer  Français  à  Fraiirois. 

Malgré  les  nombreuses  réformes  faites  depuis  Voltaire,  les 
étrangers  reprochent,  non  sans  raison,  à  la  langue  française  les 
difficultés  qu'elle  leur  présente  pour  l'orthographe,  la  prononciation 
et  les  homonymes  nomljreux  : 

Nous  portions  nos  portions. 

Les  poules  du  couvent  couvent. 

Mes  fils  ont  cassé  mes  fils. 

Il  est  de  l'Est. 

Peut-on  se  fier  à  cet  homme  si  fier  ? 

Nous  relations  ces  relations  intéressantes. 

Nous  acceptions  les  diverses  acceptions  de  ce  mot. 

Il  convient  qu'ils  convient  leurs  amis. 

Il  convient  qu'ils  obvient  à  cet  inconvénient,  etc. 

Orviétan,  italien  orr«W«no,  originaire  d'Orviéto. 

L'orviétan,  remède  empirique,  fut  apporté  à  Paris,  en  1647,  par 
Ilieronymo  Ferrante,  d'Orviéto,  qui  le  vendait  place  Dauphine, 
appelée  alors  cour  du  Palais,  La  thériaque  était  la  base  de  cette 
drogue,  qu'il  appelait  orviétan,  du  nom  de  son  pays. 

Le  mot  est  resté  dans  la  langue  pour  désigner  un  remède  sans 
valeur,  une  drogue  de  charlatan. 

Os,  du  latin  os,  ossis,  même  sens. 

—  Les  os  des  animaux  forment  un  cinquième  du  poids  total  du 
corps. 

—  Deux  chiens  pour  un  os  :  avoir  maille  à  partir. 

Sophie  Arnould  parodia  ce  proverbe,  en  l'appliquant  à  deux 
amants  de  M"e  Guimard,  actrice  célèbre  par  sa  maigreur. 

O  Salutaris,  nom  de  prière. 

—  L'usage  de  chanter  cette  hymne  à  l'élévation,  ne  date  que  du 


OUA  181 

rnmmoncomont  du  xvi«  si(^rle,  et  fut  ordonné  par  Louis  XII  après  la 
bataille  de  Uavenne.  Voici  le  verset  : 

0  Sdlntm-is  hosha, 
Qud'  cwli  panilis  ostium, 
Jh'lld  prémuni  hotitilin, 
]l(i  rohitr,  fer  nud-ilinni. 

Los  chantres  de  la  chapelle  royale  reniplaçaieiit  les  mots  fc?' 
auxilium,  par  scri-a  liliinn  (garde  les  lis). 

Osanores  ulciits  sans  or). 

Mot  lor.ué  par  le  dentiste  William  Roger  pour  désigner  les  fausses 
dents  qui  se  moulent  sur  la  gencive,  et  tiennent  par  l'ellct  de  la 
simple  succion,  sans  crochets  ni  ligatures. 

Osmazôme,  du  grec  osmc,  odeur,  soinos,  liouillon. 
Madère  azotée  qui  se  trouve  dans  la  viande  et  parfume  le  bouillon, 
dont  il  est  le  pnnci[te  nutritif. 

Ostracisme,  du  grec  ostrakismos  (de  ostrakon,  coquille). 

Sorlo  de  jugement  en  usage  chez  les  Athéniens,  ainsi  nomme 
parce  que  les  citoyens  donnaient  leur  sullVage  eu  écrivant  le  nom 
de  l'accusé  sur  une  coquille.  Le  jugement  condamnait  à  un  exil  de 
dix  ans,  qui  n'avait  rien  d'infanuint,  et  ne  s'appliquait  qu'aux 
citoyens  dont  la  popularité  portait  ombrage  à  la  démocratie.  Aristide, 
Thémistocle,  Alcibiadc,  Cimon,  Timothée,  Iphicrate,  Chabrias, 
furent  bannis  par  ostracisme.  (Voy.  lémoins.) 

Otage,  anciennenieut  ostagc  :  do  hôle  et  agere  (?). 
L'otage  est  l'hôte  considéré  comme  ennemi. 
Personne  remise  à  l'ennemi  comme  garantie  d'un  traité. 
(Semble  venir,  bien  plutôt,  de  obsidaticum,  dérivé  de  obscs, 
obsidis,  qui  eu  avait  le  sens  en  latin.) 

Ou,  conjonction  et  adverbe. 

Conjonction  :  du  latin  aut,  marque  ralternative,  la  disjonction. 

Adverl)e  de  lieu  :  du  latin  ubi,  prend  alors  l'accent  grave. 

Ouaiile,  [n)\\v  ouei/lr  :  du  latin  ovlruhi,  petite  brebis;  roman 
ovellia. 

Ne  s'emploie  plus  qu'au  (iguré,  et  au  pluriel,  en  langage  d'église, 
pour  désigner  les  fidèles,  par  opposition  au  pasteur. 

A  Ids  suas  orelhas  m'«  donat  per pastor.  (Guillaume de  Tudéla.) 
A  ses  ouailles  il  m'a  donné  pour  pasteur. 


182  OUB 

Ouaille  se  prononçait  oucille. 

Il  in'ii  liion  (lict  :  jo  coj^iiois  mes  ouailles. 
Kl  l'ili'S  m'oyent  cii  oii\r;ml  les  oreilles. 

(C.  Marot. 

Ouais,  onomatopée. 

Inferjerlion  do  surprise,  (rélonnement. 

Ouais!  voici  (pii  est  plaisant.  (Molii-re,  Malade  imaginaire.) 

Ouate,  du  \ieu\  mot  oue,  qui  s'est  dit  pour  oie  (?),  à  cause  du 
lin  duvet,  semblable  au  coton  en  rame,  qui  recouvre  les  oisons. 

—  On  dit  la  ouate,  quoiqu'il  n'y  ait  aucune  h  aspirée  ;  de  même 
on  dit  le  onzième.  L'Académie  autorise  à  dire  /'ouate;  mais  l'usage 
le  plus  répandu  est  de  ne  pas  l'aire  l'élision. 

Araiio  écrit  dans  l'éloge  de  Bailly  :  «  M'"«  Bailly  avait  substitué  à 
la  ouate  d'un  de  ses  vêtements,  le  produit  en  assignats  de  la  vente 
de  leur  maison  de  Gliaillot.  » 

Si  Boileau  a  dit  : 

Où  sur  l'ouato  molle  éclate  le  tabis, 
c'est  que  la  poésie  interdit  l'biatus,  et  que  l'élision  le  lui  évitait. 

Oublie,  du  latin  oheliœ. 

Petits  pains  coniques,  consacrés  à  Baccluis,  dont  les  Égyptiens 
avaient  fait  obélisques  par  antipbrase  (?). 

La  forme  ancienne  oublée,  suppose  plutôt  oblata,  otïerte. 

Gaufre  très  mince  en  forme  de  cornet. 

Oublie  est  dit  pour  hostie,  à  cause  de  la  ressemblance  avec  le 
pain  des  bosties.  (Furetière.) 

Cette  pâtisserie  était  connue  dès  le  xiii^  siècle,  et  Ion  criait  déjà 
dans  les  rues,  le  soir  après  souper  :  «  Voilà  le  plaisir,  Mesdames, 
voilà  le  plaisir  !  » 

Oublier,  du  latin  oblilare  (de  oblilus,  participe  de  oblivisci). 
Provençal  oblidar,  de  ob  et  d'un  radical  liv,  qui  se  rattacbe  à 
livor,  lividus,  pâle  : 

Licidas  obliviones. 

(Horace.) 

—  Synonyme  :  boire  l'eau  du  Létbé. 

—  Gomme  ma  grand'mère,  qui  tant  plus  disait  sa  patenostre,  et 
moins  la  savait;  si  enfin  qu'elle  la  dit  tant  et  tant  qu'elle  l'oublia. 
{Moyen  de  pa?' venir.) 

—  Ne  m'oubliez  pas.  Myosotis,  la  Heur  du  souvenez-vous. 
On  l'appelle  aussi  :  plus  je  vous  vois,  plus  je  vous  aime. 


OUI  183 

En  alloinancl  :  Vergiss  mein  nlcht. 

—  L"oul)li  n'est  qu'un  palimpseste;  qu'un  accident  survienne, 
tous  les  elïacenients  reviennent  dans  les  interlignes  de  la  mémoire 

('■Ioiuk'mv  (  V.  lliiuo.) 

Oubliettes,  dérivé  du  précédent. 

(^acliols  soiilerrains  où  l'on  enfermait  des  prisonniers  condamnés 
à  une  réclusion  p('i'i)étuelle,  et  sur  lesquels  s'appesantissait  un 
éternel  oiilili. 

Dans  les  coum'iiIs.  ou  les  a[)peiail  ///  jxtcc.  (Voy.) 

Oui,  ancieiiueiuent  oi'7;  du  latin  hoc  illad,  c'est  cela.  Adveritc 
alTiniialif. 

—  Au  Moyen-Age,  la  Franco  étail  partagée  en  langue  d'o/7  et  en 
langue  d'oc. 

La  langue  d'oc  comprenait  toute  la  France  méridionale,  au-delà 
de  la  Loire,  et  non,  comme  on  l'a  cru  la  seule  province  de  Lan- 
guedoc. On  lit,  en  (llet,  dans  Froissard  (ch.  Iy7):  «  LeducdeBerry 
eut  le  gouvernement  de  la  langue  d'oc,  et  le  duc  de  Bourgogne  celui 
de  la  langue  d'oïl.  » 

—  Le  signe  de  consentement,  au  xir-  et  au  xui'^  siècle,  était  uïl 
dans  la  langue  du  nord  de  la  France.  «  Oïl,  sire.  »  (Chanson  de 
lloldnd,  stance  oO.) 

Dans  le  Midi,  ou  disait  oc,  et  c'est  à  ce  mot  que  la  langue  des 
Troubadours  devait  son  nom  de  langue  d'oc. 
On  disait  aussi  ho  et  o  pour  o'il  et  oc. 

Qw  il  lie  .sel  iic  lio  ne  non. 

(RuTEnElF.) 

Ta:  coiz  se  Uni,  ne  diil,  ne  ho  ne  non. 

(C'/ianson  de  Ronecvaux.) 

Oïl  devint  ensuite  onil  et  oui. 

Volz-lu  [aire  iiioii  conseil  ?  —  Certes,  dame,  ouïl. 

{Iloinan  des  Sept  Saffcs.) 

—  Prononcer  le  graïul  oui  :  se  marier. 

—  Les  deux  mots  les  plus  courts  à  prononcer,  oui  et  non,  sont 
ceux  qui  demandent  le  jdus  d'examen. 

—  La  femme  vertueuse  dit  non  ;  la  passionnée,  oui  ;  la  capricieuse, 
oui  et  non  ;  la  coquette,  ni  oui  ni  non. 

—  Réponse  de  Normand  :  ni  oui  ni  non.  (Yoy.  Normand.) 

—  Oui-et-Non.  Bertrand  de  Born  donna  ce  sobriquet  à  Henri  II, 


184  OUR 

roi   d'Angleterre,   pour   cnrnrtérisf'r  In   |iolili([iie  versatile  de  ce 
monarque. 

En  oc  et  no  conais  (/ii'iin  ilnz  iiii  iilitiiilm. 

(Je  rccoiinnis  ([ue  le  seigneur  Oui-cl-.Nou  nie  ploiulK'  un  dé.) 

A'on  es  1)0,  lie  ço  que  rey.s  ftutreijfi. 
Quant  (t  di(j  d'or,  que  pucis  diijn  de  no. 

(li.     I)K    IJOIIX.) 

(Il  n'est  pas  l)on,  de  ce  qu'un  roi  Oftroio,  quand  il  a  dit  oui  qu'il 
dise  non  ensuite.) 

On  remarquera  aussi  dans  cette  phrase  dcB.  deBorn  rexplication 
de  la  locution  provençale  :  Fat)  pas  dire  <lc  oui. 
Ilippocratc  dit  oui,  t't  Galion  dit  non. 

(Yoy.  Ilippocratc.) 

Ourdir,  du  latin  ordiri,  commencer,  faire  une  trame. 

l^]st  peut-être  pour  Iiorder.  faire  une  clôture  :  hordel,  hardies 
signiliaient  claies  ou  clôture. 

Au  propre  :  disposer  les  fds  qui  doivent  former  la  chaîne  d'un 
tissu. 

Au  figuré  :  ourdir,  tramer  un  complot. 

Ours,  du  latin  ursus. 

—  Un  ours  mal  léché  :  un  brutal,  un  homme  peu  sociable. 

—  Isidore  dérive  ours  du  latin  orsus,  commencé,  ébauché,  parce 
qu'il  est  dill'orme  en  naissant,  et  que  sa  mère  semble  l'achever  en 
le  léchant,  comme  le  sculpteur  achève  sa  statue  par  de  légers  coups 
d'ébauchoir,  ce  qui  s'appelle,  en  style  d'atelier,  lécher  son  ouvrage. 

Aristote  et  Pline  disent  aussi  que  les  oursons  sont  très  mal  faits 
et  que  leur  mère  corrige  ce  défaut  de  forme  en  les  léchant. 

—  Comme  ung  ours  naissant,  n'ha  pieds,  ne  mains,  peau,  poil, 
ne  teste  ;  ce  n'est  qu'une  pièce  de  cliair  rude  et  informe.  L'ourse,  à 
force  de  leischer,  le  met  en  perfection  de  membres.  (Rabelais,  III,  42.) 

Toute  sa  personne  velue 
Représentait  un  ours,  mais  un  ours  mal  léché. 

{Li\  Fontaine,  Paysan.) 

—  L'ourse  léchait  chaque  instant  son  ourson.  (Mercure,  juin  1734.) 

—  Le  pavé  de  l'ours.  (La  Fontaine,  rOuj^s  et  V Amateur  des 
jardins.) 

11  faut  se  défier,  dans  le  monde,  de  ces  lourdauds  qui  ne  sauraient 
vous  obliger  sans  vous  marcher  sur  les  pieds. 

—  11  ne  faut  pas  vendre  la  peau  de  l'ours  avant  de  l'avoir  tué. 
(Yoy.  vendre.) 


OrV  183 

—  Vivre  roninic  un  ours:  comme  un  ermite,  un  misanthrope. 

—  Prenez  mon  oiii's.  Dans  l'Ours  ot  Jo  Pacha,  de  Scribe  (1820, 
se.  Yl),  Marescot  dit  :  «  1!  me  faiidrail  qnchiiie  poisson  extraordi- 
naire, ...vous  devez  avoir  cela.  »  Lagin,ueole  :  «Parbleu!  j'ai  votre 
atl'aire...  Prenez  mon  ours.  C'est  sou  état;  ...c'est  un  ours  marin.  » 

—  Ours,  pièce  de  lliéûtre  (pii  a  vieilli  dans  les  cartons.  Ces  pièces 
ne  se  jouent  qu'en  été  quand  les  tliéàtres  sont  déserts. 

Allusion  à  l'ours,  qui  dort  eu  hiver,  et  ne  se  montre  qu'en  été. 
(L.  Larchey.) 

Outrage,  de  iiltva,  outre,  avec  suffixe  arje. 

Outre,  préposition  :  du  laliu  nJlra. 

—  Ou  lit  dans  les  lois  de  (iiiillaiiiue  :  «  Nulz  ne  reçoit  liom  ultre 
III  nuitz.  ') 

De  là  viennent:  outrer,  outrance,  outrage,  outrecuidance  {outre 
et  cutdei',  anciennement  croire  :  s'en  croire  trop). 

Jeune  l)eaulé,  nuiis  \ro\)  ontrccnidOi' 

Des  présents  de  Vénus, 
Quand  tu  ^  erras  ta  peau  toute  ridée. 

(Hkine  0!-;  Xavaiuif..) 

Outrer,  dérivé  du  précédent. 

—  Etre  outré  des  mauvais  procédés  de  quelqu'un. 

—  Outré  de  colère  :  prêt  à  éclater  comme  une  outre  (!)  trop 
gonflée. 

C'est  une  expression  tirée  de  l'ancienne  escrime,  oi'i,  dans  les 
joutes  sérieuses^  c'était  à  qui  outrerait  son  adversaire,  le  i)ercerait 
d'outre  en  outre. 

Les  coml)ats  à  outrance  étaient  opposés,  dans  les  tournois,  aux 
luttes  courtoises,  où  l'on  joutait  avec  des  lances  émoiissées,  ou  gra- 
cieuses. Les  joutes  représentaient  les  combats  seul  à  seul.  Dans  les 
tournois,  le  combat  avait  lieu  par  groupe  de  deux  ou  plusieurs 
chevaliers,  en  nombre  égal  dans  les  deux  camps,  qui  figuraient  les 
escarmouches.  Les  combats  à  la  foule,  ou  mêlées,  étaient  comme  les 
essais,  les  représentations  des  batailles  générales. 

Ouvrage,  dérivé  de  œurrc  :  latin  opéra.  Provençal  o/tra/f/c. 
Terme   honnête  pour  désigner  le  travail  des  vidangeurs  et  la 
matière  extraite. 

—  Ouvrage  mal  fait  :  bousillage. 

Au  propre,  c'est  une  maçonnerie  de  bouse,  ou  paille  hachée,  et  de 
terre  détrempée  qu'on  appelle  7>/.ye. 


180  OVO 

Ovale,  (le  ore,  Inliii  ovum. 

Figure  ('iirvili;jiio  l'cprcsoiitrc  pur  l;i  section  pljnf  (riiii  n'iif  selon 
son  grand  axe,  et  qui  prend  le  nom  {Y ellipse,  lorsque  les  extrémités 
sont  égales  et  régulières. 

Ovo  (ab),  expression  latine:  depuis  Tœnf,  depuis  le  commen- 
cement. 

AVf  ijoiiiiin  hrlhun  Irojiituiin  ordilnr  ab  ovo. 

(IloltACK.) 

(Pour  i-aconter  la  guerre  de  Troie,  il  ne  remonte  p.is  à  l'œuf 
double  de  Léda.) 

Horace  veut  dire  qu'Homère  a  tiré  l'Iliade  de  la  colère  d'Achille, 
sans  remonter  jusqu'à  la  naissance  d'Hélène,  cause  de  la  guerre,  et 
qui,  suivant  la  Fable,  était  née  de  l'œuf  de  Léda. 

—  Les  anciens  considéraient  l'œuf  comme  le  principe  de  toutes 
choses;  ils  commençaient  leur  repas  par  des  œufs  et  le  finissaient 
par  des  fruits,  d'oii  l'expression  d'Horace  : 

Ab  ovo  iisquc  nd  maUi. 

—  Inlegrani  famem  ad  ovum  a/J'ero.  (Cicéron.) 
J'apporte  au  premier  service  un  vigoureux  appétit. 

—  Omne  vivum  ex  ovo  (Hervey).  Tout  être  vivant  vient  d'un 
œuf,  c'est-à-dire  d'un  germe  existant  avant  lui. 

D'autres  ont  modillé  l'aphorisme,  et  dit  :  Omne  vivum  ex  vico; 
tout  être  vivant  vient  d'un  être  vivant. 

D'autres  entîn  ont  admis  la  génération  spontanée  de  quelques 
êtres  animés. 

—  La  fécondité  de  certains  animaux  est  prodigieuse. 

La  femelle  de  l'esturgeon  contient  jusqu'à  huit  millions  d'œufs  : 
celle  du  muge,  treize  millions. 

La  carpe  est  appelée  en  latin  cijprinus,  de  C  y  pris  (Vénus),  à 
cause  de  sa  fécondité. 

Ces  animaux  pullulent  véritablement. 


PAC  187 


P.  L";iIiIm''  rcll('i;riii.  (iiii  diiiiiil  df  r.'iiilcl  cl  S()ii[>;iil  du  lli('';'ilro. 
Piiiivre  ahhé:  pauvre  aiileur  !  On  lit  sur  l'une  de  ses  pièces, 
Pc/opée,  tra.uédio,  une  épigraniine  dont  chaque  mot  commençait 
par  un  P. 

Pélopc'e,  pièce  pitOYal)le,  par  Pell(\iiriu,  iio.Me.  pauvre  prêtre 
provençal. 

Pace  (in),  expression  latine  :  en  paix. 

Prison  pour  les  moines  :  cachot  où  l'on  enfermait  pour  la  vie, 
les  relii^ieux  coupahles. 

Pacha,  de  l'arabe  P«  schach.  vice-roi  ;  ou  du  turc  hac/ut,  de 
basch,  tête,  chef. 
Gouverneur,  grand  dignitaire.  (Voy.  queue.) 

Pactole,  nom  géographique. 
Petite  rivière  de  Lydie,  qui  charriait  de  l'or. 
S'appelait  aussi  C/irysorr/ious,  mot  fait  comme  Ariège  (aur/f/fra), 
ou  comme  Uio  de  la  Plata,  rivière  de  l'Argent. 
Aujourd'hui  Bagoulet. 

—  Silius  Italiens  (IV.  2oi)  compare  le  Tage  au  Pactole,  parce 
qu'il  roulait  de  l'or  : 

Hic  cerlnnl.  Pactole,  tihi  Duriiisrjuc  Tdijnsqnc. 

—  Sorti  du  mont  ïmolus,  le  Pactole  passait  à  Sardes  et  tomliait 
dans  l'Hémus.  Son  nom  ancien  était  dû  à  un  sable  chargé  de 
paillettes  d'or  qu'il  charriait,  et  qui  avait  si  prodigieusement 
enrichi  Grésus!  D'après  la  Fable,  il  était  aurifère  depuis  que  Midas 
s'y  était  baigné. 

—  Posséder  le  Pactole  :  être  très  riche. 

On  emploie  aujourd'hui  avec  la  même  valeur  les  mots  :  Californie, 
Eldorado,  Pérou,  Opliir,  etc. 

—  L'Eldorado  est  un  pays  imaginaire  que  rEsi)agnol  Martinez 
prétend  avoir  découvert  dans  l'Amérique  Méridionale,  et  qu'il  avait 
nommé  ainsi  à  cause  de  l'immense  quantité  d'or  et  de  pierres 
précieuses  qu'il  disait  avoir  vue  dans  Manoa,  capitale  de  la  contrée. 

—  L'Écriture  fait  mention  d'un  pays  d'Ophii-,  où  les  flottes 
d'Hiram,  roi  de  Tvr,  et  celles  do  Salomon,  allaient  tous  les  trois 


188  PAI 

ans,  ot  d'où  elles  rnpporliiieiit  qnrmlitû  d'or.  Les  iiiterpn''les  de 
l'Iicriture,  ne  sachant  où  placer  ce  pays  d'Opliir,  l'ont  vainement 
cherciié  tour  à  tour  en  Asie,  en  Afrirpie,  en  Amérique.  Jospplie  dit 
qu'il  s'appelait  «  la  Terre  d'Or  ».  On  croit  que  c'est  la  Californie. 

Paganisme,  du  latin  paganus,  habitant  des  campagnes,  parce 
que  ce  fut  dans  les  campagnes  que  cette  religion  se  réfugia  après 
rétablissement  officiel  du  clirislianismo. 

Aujourd'hui  même,  certaines  traditions  et  superstitions  du  paga- 
nisme subsistent  dans  les  campagnes.  (Yoy.  paijsan.) 

On  l'appelle  aussi  panthéisme  {'i),  polythéisme,  idolâtrie. 

Page,  de  l'italien  paggio.  du  grec  paldion.  enfant. 
D'où  le  latin  p(edagogium  :  lieu  où  sont  élevés  les  enfants. 
Quelques-uns  le  tirent  de  pagani  (?),  jeunes  paysans  que  les 
seigneurs  prenaient  à  leur  service. 

—  Être  hors  de  page,  c'est-à-dire  n'être  plus  sous  la  dépendance 
d'autrui,  sous  la  surveillance  d'un  gouverneur,  comme  l'étaient  les 
pages.  Être  d'âge  à  se  diriger  soi-même. 

Au  temps  de  la  chevalerie,  les  fds  des  gentilshommes  étaient 
placés,  dès  l'âge  de  sept  ans,  auprès  d'un  haut  baron,  comme  pages, 
damoiseaux,  varlets.  A  quatorze  ans,  ils  étaient  hors  de  page  et 
devenaient  écuyers. 

—  Napoléon  avait  des  pages,  choisis  parmi  les  enfants  de  grande 
famille.  Il  leur  avait  donné  pour  gouverneur  le  général  Gardanne. 

—  Hardi  comme  un  page.  (Beaumarchais,  Figaro,  Y,  6.) 

Page  d'écriture  ;  du  latin  pagina. 

Quod  in  illis  rei'sus  panguntur  (Festus),  parce  que  les  lignes 
d'écriture  s'y  étalent,  y  sont  écrites. 

Pagne,  de  l'espagnol  7>«/jo,  latin  pannus,  pièce  d'étolïe. 
Morceau  d'étolïe  dont  les  sauvages  de  l'Afrique  se  couvrent  le 
milieu  du  corps,  de  la  ceinture  aux  genoux. 

—  Quelques-uns  citent  le  vieux  français  crépagne,  Christi 
pannus.  On  couvrait  d'un  lambeau  d'étolïe  la  nudité  des  suppliciés. 
Haillon  hideusement  pudique,  sorte  de  feuille  de  vigne  des  supplices 
antiques.  Jésus-Christ  sur  la  croix  n'avait  que  ce  lambeau. 

Paillard,  latin  palea. 
Au  propre  :  qui  couche  sur  la  paille. 

\)\X(iM\^Q Aè^iïiii  palliardus  :  Homo  nihili  et  in/lmœ  conditionis, 
homme  de  rien,  de  la  plus  basse  condition. 


PAI  189 

Au  liiiuré  :  débaiirhé,  luxurieux,  adounc  aux  fcuiiuos. 

Cela  vieut  sans  doute  de  l'ancien  usage  de  donner  un  anneau  de 
paille  aux  personnes  qui  avaient  compromis  l'iionuenr  de  leur 
famille,  et  que  Ton  forçait  à  se  marier. 

Peut-être  aussi  faut-il  le  rapporter  à  pa// lasse. 

Rabelais  (I.  21)  emploie  pa/Nfu'der  pour  se  rouler,  fainéanter  au 
lit.  Ailleurs  il  dit  que  <  paillardise  est  Toccupation  des  gens  non 
aultrement  occupés  ». 

Ce  petit  paillard  toujours  lastouuait  ses  gouvernantes.  (Rabelais, 
livre  I.) 

Paillasse,  niais,  bouribn  de  salliudianque.  qui  amuse  le  public; 
par  ses  naïvetés.  Il  doit  son  nom  à  son  costume,  qui  est  taillé  dans 
une  bousse  de  paillasse. 

On  l'appelle  aussi  p//re,  du  vieux  mot  pistre,  boulanger,  parce 
que  les  anciens  boutions  s'enlarinaient  le  visage,  comme  fait  encore 
Piei'rot. 

Paille,  du  latin  pa/ea  :  \)ro\ençà\  pa/ ha. 

—  Avoir  la  paille  et  le  Idé;  comme  la  toison  et  la  peau^  c'est-à- 
dire  garder  tout  pour  soi. 

—  Dans  l'Évangile,  la  paille  désigne  les  réprouvés.  Le  Seigneur 
a  dit  qu'il  séparerait  la  paille  du  froment,  et  qu'il  la  brûlerait. 

—  l'être  sur  la  paille,  c'est-à-dire  être  misera l)le. 

—  De  grand  train,  sur  l'estrain.  {Estrain  signifiait  autrefois 
paille  ;  latin  stramen.) 

—  On  voit  un:;  paille  dans  l'œil  de  son  voisin  ;  on  ne  voit  pas  une 
poutre  dans  le  sien  (Matliieu,  Yll,  23  ;  Luc,  YI,  41.) 

Ut  ociilus,  sic  anunus  se  non  videns,  alla  cernil.  (Gicéron,  I, 
Tusculnnes.) 

L'cimI,  qui  voit  tout,  ne  se  voit  pas  lui-même. 

Si  nous  n'avions  pas  tant  de  défauts,  nous  ne  prendrions  pas  tant 
de  plaisir  à  remarquer  ceux  des  autres. 

In  alio  pedlculum  vides,  in  te  ricinum  non  vides.  (Pétrone, 
Satiricon.)  Tii\o\?,\u\  pou  sur  ton  voisin,  et  tu  ne  vois  pas  un 
ricin  sur  toi.  (Le  ricin  est  un  insecte  qui  s'attaclie  aux  oreilles  des 
bœufs  et  des  chiens.) 

--  Rompre  la  paille  :  conclure  un  marché,  stipuler  quelque  chose. 

Cette  locution  vient  d'un  usage  ancien.  C'était  une  véritable 
quittance,  à  l'époque  où  l'écriture  était  peu  en  usage,  que  de 
présenter  un  des  brins  d'un  fétu  brisé.  Seul  il  pouvait  bien  s'adapter 
à  l'autre. 


190  PAI 

C'est  encore  le  |ii-iii{i|i('  iidoph'-  pour  les  registres  à  souclie,  dont 
on  détache  les  qiiitttinces  en  les  coupant  suivant  nne  ligne  sinueuse. 

—  C'est  ainsi  que,  par  l'étude  de  la  linguistique,  on  peut  dégager 
des  ombres  des  temps  obscurs  le  sens  de  certains  mots  et  de 
certains  usiiges  juridiques. 

Dans  le  D('])ll  (imourcux  (IV,  4),  Gros-Uéné  dit  à  Marinette  : 

l'niii'  (•(iii|icr  loiit  fliemiii  à  nous  rapatrier, 
Il  faut  rcjiiiprc  la  paille  :  une  i)ailli'  rompue 
Rend  entre  gens  d'honneur  une  affaire  conclue. 

IMiis  bas,  il  ajoute  : 

Romps,  voilà  le  moyen  de  ne  s'en  ]iliis  dédire. 

Eu  latin  sllpuln,  paille,  et  .s/ipii/are,  dont  on  a  fait  stipule?', 
signifiaient  aussi  :  l'aire  une  convention. 

Pecunia  slipulata  (Cicéron):  prix  convenu. 

Le  mot  stipulation  est  ainsi  expliqué  dans  la  loi  romaine  : 
«  Arracher  une  paille,  puis  la  jeter  sur  le  sol,  en  prononçant  ces 
paroles  :  Par  celte  paille,  j'abandonne  tout  droit.  L'acquéreur 
prendra  la  paille  et  la  conservera,  et  si  quelqu'un  conteste  son 
droit,  la  uième  paille  sera  présentée  en  justice  devant  témoins.  » 

—  En  922,  les  seigneurs  du  royaume,  pour  déclarer  à  Charles  le 
Simple  sa  déchéance,  à  cause  des  concessions  qu'il  avait  faites  à 
Raoul,  chef  des  Normands,  brisèrent  au  pied  du  trône  des  pailles 
qu'ils  tenaient  à  la  main. 

—  Sully  rapporte  dans  ses  Mémoires,  que  le  comte  de  Soissons 
lui  ayant  demandé  une  grâce,  le  menaça,  s'il  ne  l'obtenait,  de 
rompre  la  paille  avec  lui. 

—  Tirer  à  la  courte  paille,  consiste  à  décider  un  litige  en  s'en 
remettant  au  sort,  qui  fait  échoir  de  deux  pailles  la  plus  courte  à 
l'un  des  contestants. 

—  Pour  indiquer  qu'un  animal  est  à  vendre,  on  lui  attache 
encore  à  la  queue  un  bouchon  de  paille. 

—  Homme  de  paille  :  préte-nom,  homme  complètement  étranger 
aux  choses  dont  il  assume  la  responsabilité. 

Viendrait  de  pallot,  paysan,  qui  couche  sur  la  paille  (?). 

Pain,  du  latin  panis,  remonlaut  à  pasco ;  provençal  y^an. 
De  là  :  panade,  panier,  panetière,  apanage,  compagnon. 
En  argot,  larton  :  pour  les  amateurs  de  calemhours,  le  «  mot  de 
la  faim  »,  ou  la  «  pierre  à  aiguiser  les  couteaux  ». 

—  Pain  trompé  dans  du  vin  :  soupe  de  perroquet. 


PA(  191 

—  l*aiii  1(111.'-;  :  pain  jorko.  Ce  mol  dati'  de  IS^i.  année  où  le  sin.uc 
Jocko  enl  tant  de  succès  à  Paris. 

—  An  pain  el  à  l'ean.  Sixie-Qninl.  an  coniinenccMncnl  de  sa  car- 
rière, disait  a\('c  iiiic  hninililé  sinndèf  :  Pa/iis  et  (k/iki,  vlfn  hoaln . 
Devenn  pape,  il  imidilia  ainsi  la  [ilirase:  Af/ur/  cl  jxm/'s,  ri//t  rmiis. 
Kan  et  pain.  \ie  de  chien. 

—  A\oir  (In  pain  ([nand  un  n'a  jdns  de  dénis  :  devenii'  l'iche 
dans  sa  vieillesse. 

—  La  société  se  compose  de  ceux  qui  ont  pins  de  pain  que 
d'appétit,  et  de  cenx  qui  ont  plus  d'appétit  que  de  pain.  (Cliamfort.) 

—  ^"avoir  pas  de  pain.  Malherbe  écrivait  à  Racan  :  «  J'ai  le 
courage  du  philosophe  pour  les  choses  superllues  ;  pour  les  néces- 
saires, je  n'ai  autre  sentiment  que  d'un  crocheleur.  On  peut  se 
passer  de  conlitnres  ;  mais  du  pain,  il  faut  en  avoir  ou  mourir.  » 

—  Manger  son  pain  hlanc  le  premier  :  commencer  par  le 
hoidieur  ;  avoir  été  plus  heureux  qu'on  n'est. 

—  J)n  pain  et  des  spectacles.  (Yoy.  .^ipcctacles.) 

—  Pain  bénit.  La  distribution  du  pain  hénit  dans  les  églises  est 
un  souvenir  de  la  communion,  à  laquelle  tous  les  lidèlcs  prenaient 
part  dans  la  primitive  Kglise  :  d(>pnis.  IT-^glise  ne  donne  la  commu- 
nion qu'à  cenx  qui  s'y  sont  préparés. 

—  C'est  pain  ])énit  [)0ur  lui  :  c'est  bien  l'ait. 

Pair,  du  latin  />ar.  égal,  semblal)le. 
D'où  :  parage,  pareil. 

—  Les  pairs  étaient  autrefois  les  grands  vassaux. 

—  Depuis  J81o,  ce  nom  était  appliqué  aux  membres  de  la 
Chambre  haute,  dite  des  Pairs,  qui  avait  mission  de  veiller  à  la 
conservation  des  lois  fondamentales. 

—  Aller  de  pair  :  être  l'égal. 

—  Être  au  pair,  dans  une  maison  de  commerce,  c'est-à-dire  sans 
rien  gagner,  mais  aussi  sans  payer  de  prime  pour  son  appren- 
tissage. 

Paître,  du  Vàtïn  pascere,  nourrir.  Provençal  pa^lré. 
D'où  :  pâtre,  pasteur. 

—  Allez  vous  faire  paître!...  vous  faire  lanlaire  (voy.).  se  dit  à 
un  importun  dont  on  veut  se  débarrasser. 

Allez,  l)ix'liis,  vous  faire  pailre. 
Je  ne  suis  plus  votre  berger. 

Paix,  du  latin  pax,  de  pango,  ficher,  arrêter. 


102  P.U. 

Silii.'ilion  (^xciiipUî  do  Iroiililc  cl  d'ii^itation. 
On  a  la  paix  avec  les  aiilrcs,  la  tcaïKinillitc  avec  soi-inènie,  le 
calme  après  l'agilation. 

—  Qui  vit  en  paix,  dort  en  repos.  (Voy.) 

Si  vis  pacem,  para  belliDn.  (Gicéron.)  Celle  maxime  paradoxale 
est  moins  juslc  que  :  aS'^'  vis  pacem,  para  pacem. 

On  dit  aussi  :  se  garder  à  carreau  ;  pour  se  tenir  prêt  à  tout 
événement  {carreau  désif;iiait  aiili'olois  un  trait,  un  gros  [)rojectile 
de  guerre) . 

—  Les  hommes  (pii  ont  rêvé  la  paix  universelle,  et  se  sont 
elîoi'cés  de  la  faii'e  ivgner  en  luirope,  sont  Henri  IV,  Saint-Simon, 
l'abbé  de  Saint-Pierre,  Gobden. 

—  Le  25  décembre  1873,  à  un  banquet  offert  à  Paris,  à  M.  II. 
Richard,  par  les  amis  de  la  paix,  M.  Richard  prononça  un  discours 
où  il  dit  qu'aucune  idée  ne  réussit  sans  le  patronage  de  la  France, 
dont  l'inlluence  est  sans  égale,  et  dont  la  langue,  la  littérature  et 
les  lois  sont  universelles.  Il  ajoute  que  sa  proi»osition  n'est  pas  plus 
une  utopie  que  ne  l'était  la  proposition  de  l'abolition  de  l'esclavage 
et  celle  du  libre-échange,  qui  se  sont  réalisées.  Il  termine  en  disant 
que  ses  idées  rencontrent  partout  un  accueil  sympathique. 

Paladin,  forme  adoucie  de  palatin  :  latin  palalimis. 
Homme  do  palais,  homme  de  cour. 

Ce  nom  fut  donné  d'abord  aux  officiers  les  plus  notables  du  palais 
de  Charlemagne  :  Roland,  Ogier,  Olivier,  etc. 
Chevalier-errant  des  romans. 

Palais,  du  latin  palatium,  maison  des  Césars  sur  le  Palatin, 
la  plus  célèl)ro  des  sept  collines  et  la  plus  fameuse  par  ses  sou- 
venirs. 

Le  Palatin  était  le  véritable  berceau  de  Rome  :  Romulus  l'entoura 
du  premier  fossé.  Il  devait  sou  nom  à  une  colonie  de  Grecs  venus 
de  Pallantium,  ville  d'Arcadie,  sous  la  conduite  d'Évandre,  et  qui 
s'établirent  sur  cette  coHine,  soixante  ans  environ  avant  la  guerre 
de  Troie. 

Auguste  s'y  était  fait  construire  une  maison,  palatium,  dont  le 
nom  est  devenu  depuis  lors  une  appellation  générique. 

—  En  18G0,  Napoléon  III  a  acheté  les  Jardins  Farnèse,  situés  sur 
l'emplacement  du  palais  impérial,  et  y  a  fait  pratiquer  des  fouilles 
sous  la  direction  de  l'antiquaire  itahen  Pietro  Rosa,  qui  est  parvenu 
à  mettre  au  jour  les  fondations  de  l'antique  habitation  des  Césars. 


V\L  193 

Palais,  partie  siipérioiu'O  do  la  lioiiclie,  vient,  comme  pain, 
jxiiU'i',  du  lirec  paô. 

Non,  mais  lùeii  i>liit(U  de  /xilafinn.  comparé  à  une  ,urande  salle 
voûtée. 

Palais  de  Justice.  A  été  ainsi  nommé  parce  que  les  édilices 
où  se  rendait  la  justice  étaient  les  palais  des  rois  ou  des  maisons 
leur  appai'tenaut  :  ils  y  tenaient  eux-mêmes  leurs  plaids.  Depuis, 
ils  abandonnèrent  ces  maisons  aux  magistrats,  et  elles  conservèrent 
leur  ancien  nom  de  palais. 

(In  l'appelait  aussi  hasi/ica,  d'où  est  venu  le  nom  de  basoche. 

—  Le  caltinel  du  ministère  public  s'appelle  parquet,  mot  fait 
comme  celui  de  rouv  île  l'Échiquier,  en  Anuleterre,  à  cause  du 
pavage  en  écbiquier  de  cette  salle. 

De  même,  à  Rome,  la  cour  de  Rote,  dont  le  parquet,  fait  sous  le 
pape  Jean  XXII,  était  en  forme  de  roue  ou  de  dessin  circulaire. 

Palatine.  Sorte  de  fourrure  adoptée  par  les  femmes,  à  la  lin  du 
wii'-  siècle. 

Cette  mode  fut  introduite  par  Madame,  duchesse  d'Orléans,  tille 
de  l'électeur  palatin,  et  seconde  femme  de  Monsieur,  frère  de 
Louis  XI Y. 

Ce  vêtemeut,  encore  en  usage,  sert  à  couvrir  les  épaules  et  la 
poitrine. 

Pâle,  du  latin  ])allidus. 

Oui  a  l'air  d'avoir  oui»lié  de  se  faire  enterrer  (?). 

Palefroi,  anciennement  yjfl/tyV'o/r/;  bas-latin  parafredus. 

D'où  :  palefrenier,  anciennement  palefredier. 

Cheval  de  parade  sur  lequel  seigneurs  et  châtelaines  faisaient 
leurs  entrées  solennelles. 

Ce  mot  est  vieux,  et  ne  sert  plus  depuis  les  romans  de  Chevalerie. 

Nicod  le  dérive  de  /ja?'  le  frein,  parce  que,  dans  les  cérémonies, 
les  notables  s'honoraient  de  conduire  ces  chevaux  par  la  bride. 

—  Le  palefrenier  :  valet  qui  panse  les  chevaux. 

Ce  titre  était  autrefois  honorable,  et  a  été  remplacé  par  celui  de 
grand-écuyer. 

Le  connétable  était  aussi,  à  l'origine,  l'officier  gardien  des  écuries. 

Palindrome,  se  dit  d'un  vers  ou  d'une  ligne  de  prose  qui  se 
peut  lire  indistinctement,  de  gauche  à  droite  ou  de  droite  à  gauche, 
sans  que  la  forme  des  mots  soit  changée. 

13 


i94  PAL 

Palinodie,  du  niv'c  jkiIIu,  de  iioiivcîiii,  oih-,  cli.'iiit. 

Clmiit  (l.'iiis  l('(iiicl  lin  [lorlc  )-('li';icl('  ce  fjii'il  ;i  rli;iii((''  préccdem- 
meiil. 

Horace  ayant  oll't'iisr  la  iiirre  de  la  iciiiic  Tviidaris,  composa  en 
son  lioiiiiciir  une  cliaiiiiante  palinodie  : 

0  iiiiilrr  piilrlira  fiUa  pitic/irior. 

Anjourd'lnii,  le  mot  a  perdu  cette  acception  littéraire. 

Il  se  dit  de  tout  clianpement  brusque  dans  les  paroles  et  dans  la 
conduite.  Gliantcr  la  palinodie,  c'est  se  rétracter,  louer  sans  pudeur 
ce  qu'on  avait  déni.uré,  etc.  (Voy.  gamme.) 

Palladium,  mot  latin. 

Statue  de  l*aihis,  ou  Minerve,  que  Ton  conservait  dans  Troie,  et  à 
laquelle  les  destinées  de  la  ville  étaient  attachées.  Elle  était  tombée 
du  ciel  dans  le  temps  où  Ilus  fondait  Troie.  Ulysse  et  Diom(''de 
parvinrent  à  l'enlever. 

Pallier,  du  latin  paUiare.  couvrir  d'un  manteau,  cacber. 
C'est  le  contraire  de  révéler,  revelare,  démasquer,  enlever  le 
voile. 

—  Le  pallium,  manteau  grec,  était  un  vêtement  plus  étroit  que 
la  toge  romaine.  C'était  le  costume  des  anciens  pbilosopbos, 
qu'avaient  adopté  les  prêtres  cbrétiens^  et  dont  la  soutane  rappelle 
probaltlement  la  forme. 

—  Du  mot  pallium  vient  le  provençal  pâli,  dais  en  soie  sous 
lequel  ou  abrite  le  Saint-Sacrement. 

CnacHS  (ic  ho  minitel  de  pâli  bcn  ohral. 

[Fierahras,  v.  1270.) 

(Cbacun  eut  un  beau  manteau  de  soie  bien  travaillé.) 
Le  poêle,  drap  mortuaire,  qui  se  porte  devant  le  cercueil,  s'appe- 
lait autrefois  paile.  , 

l'iiis  l'a  lait  d'un  paile  couvrir. 

(Roman  de  la  Ilose.) 

—  Le  mot  prcle.rte,  excuse  pour  dissimuler  une  faute,  a  été  fait 
comme  pallier,  du  latin  prœtexta,  la  robe  prétexte  que  portaient  à 
Rome  les  enfants  de  qualité,  et  dont  les  grands  personnages  étaient 
vêtus  pendant  les  jeux  publics. 

Ad  prœtextum  mutatœ  uolantatis.  (Suétone.)  Pour  justifier  son 
infidélité. 

Palme,  du  latin  palma.  doublet  paume,,  main,  à  cause  de  la 


PAN  193 

forme  de  la  fouille  du  pnlniier,  dont  le  fruit  est  niipelé  (hifte,  autre- 
fois (laclc,  du  lirec  dactylos,  doigt,  parce  que  les  dattes  ressemhlent 
aux  doigts. 
Ancienne  mesure  romaine  :  étendue  de  la  main  ouverte. 

—  Les  pahues  du  mart\re.  ...de  la  victoire.  (Voy.  laurier.) 

Les  Romains  appelaient  pahnariuni,  le  prix  de  la  victoire,  et 
palinariiis,  celui  (pii  Tohlenait. 

I/omo  inHltaruin  pahitanu/i.  (Cicéron.)  Un  homme  couvert  de 
gloire,  de  lauriers. 

Paltoquet,  radical  paletot,  que  Ménage  dérive  de  palliolum  (?). 
On  ai^ieile  ainsi  un  homme  grossier,  sans  importance. 

—  Au  Moyen-Age,  le  paletot  était  une  casaque  à  coqueluchons, 
comme  le  manteau  de  certains  religieux.  Le  paletot  servait  aux  gens 
de  guerre  qui  furent  appelés  «  paltoquets  »,  à  cause  de  leur  costume. 

Les  soldats  romains  se  servaient  aussi  d'un  vêtement  que  Slrabon 
désigne  sous  le  nom  de  paltos. 
Notre  paletot  moderne  est  ce  que  les  Romains  appelaient  ey^Z/o^e. 

Pan,  du  grec  Pan,  dieu  champêtre  ;  et  aussi  de  Pas,  tout,  la 
nature  personniUée. 

—  Le  grand  Pan  est  mort  !  Cette  mort  du  grand  Pan  arrivée 
sous  Tibère,  à  laquelle  on  trouve  une  allusion  dans  Pantagruel, 
quelques-uns  l'ont  interprétée  de  la  mort  de  Jésus-Christ. 

Pandémonium,  du  grec  pas,  tout,  dai/non,  démon. 
Milton,  dans  le  Paradis  perdu,  appelle  ainsi  la  salle  du  Conseil 
des  démons. 
Lieu  de  désordre  et  de  bruit. 

Pandore,  nom  mythologique;  dnf^rec pan,  tout,  doron,  présent. 

—  La  boite  de  Pandore  :  présent  fatal. 

Selon  Hésiode,  Pandore  est  la  première  femme,  créée  par  Vulcain 
et  Jupiter.  Yulcain  la  conduisit  à  l'assemblée  des  dieux,  qui  tous  lui 
tirent  un  présent.  Pallas  lui  donna  la  sagesse;  Vénus,  la  beauté; 
Apollon,  la  science  et  l'art:  Mercure,  l'éloquence.  Jupiter,  pour  se 
venger  de  Prométhée,  qui  lui  avait  ravi  le  feu  du  Ciel  pour  animer 
l'homme,  donna  à  Pandore  une  boite  fermée  et  l'envoya  chez  Épi- 
méthée.  Celui-ci,  malgré  l'avis  de  Prométhée,  ouvrit  la  boite,  et  il 
en  sortit  tous  les  maux  qui  affligent  le  genre  humain.  Pandore  se 
hâta  de  la  refermer,  mais  elle  ne  put  y  retenir  que  l'Espérance, 
prête  à  s'envoler. 


m  PAN 

—  Los  voleurs  iippcUciil  «  boilc  ;'i  l'andurc  ».  l:i  nvc  iikiIIc  (loiir 
mouler  rcmprcinlc  dos  dofs. 

Panier,  du  hiliii  iiinniriinii.  corhcillr  à  |i;iiii. 

—  Ou  iippellc  «  |»;iiii('i'  jicrcc»  un  dissii»;iloMr',  |i;ir  foiui)nr;iison 
à  un  jjauior  s;ius  fond,  cpii  no  peut  ricu  gjii'dor. 

«  Panier  percé  »  se  dit  dans  le  uièuie  sons  que  «  sot  coiiiuic  nu 
panier  »,  c'est-à-dire  incapable  de  rien  retenir  de  ce  qiiou  lui 
apprend. 

—  Faire  danser  l'anse  du  panier  :  faire  son  beurre:  gratter. 

Le  petit  pain  d'un  sou  [lour  le  déjeuner  de  Monsieur,  ci  :  deux 
sous. 

—  Au  jour  de  l'an,  l'intendant  du  cardinal  Dubois  venait  rendre 
ses  devoirs  à  son  maître,  qui  lui  disait  :  «  Monsieur,  je  vous  donne 
ce  que  vous  m'avez  volé.  » 

—  Le  dessus  du  panier  :  c'est-à-dire  le  premier  cboix. 

M"°£'  de  Sévi.iiué  disait  des  fables  de  La  Fontaine,  qu'elle  compa- 
rait à  un  panier  de  cerises  :  «  On  veut  cboisir  les  plus  l)ellos,  et  on 
finit  par  vider  le  panier.  » 

On  dit  dans  le  Berry  d'une  personne  de  mauvaise  bumour  : 
«  Quelqu'un  lui  a  manaé  le  dessus  de  sa  soupe.  »  C'est  là  un  pro- 
verbe de  gourmand  bien  réllécbi,  car  la  partie  la  meilleure  d'une 
soupe  grasse  surnage  et  se  trouve  toujours  au-dessus.  Le  premier 
bouillon  de  la  marmite  est  comme  le  dessus  du  panier,  où  l'on 
place  les  plus  beaux  fruits. 

—  La  crinoline,  qui  a  commencé,  en  I800,  à  transformer  la 
femme  en  nne  tour  pyramidale,  a  déjà  existé  au  temps  de  François  I^r 
sous  le  nom  de  vertugadin,  et  à  la  cour  de  Louis  XIY,  sous  celui 
de  panier.  (Yoy.  tournure.) 

Panique.  Terreur  panique,  c'est-à-dire  sans  motif. 

C'est  le  nom  que  les  Grecs  donnaient  à  l'espèce  de  crainte  qui 
n'est  produite  par  aucun  danger  véritable. 

Cette  locution  vient  de  ce  que  Pan,  dieu  des  bergers,  venu  au 
secours  de  Jupiter  contre  les  Titans,  les  épouvanta  d'une  frayeur  si 
subite,  qu'ils  prirent  la  fuite. 

Polyenus  raconte  aussi  que  Pan,  l'un  des  capitaines  de  Bacchus, 
mit  en  fuite  ses  ennemis  par  un  grand  l)ruit  de  cris  et  de  trompettes, 
qu'il  fit  faire  à  ses  soldats,  dans  une  vallée  où  il  avait  observé  plu- 
sieurs écbos.  Cela  fit  croire  aux  ennemis  que  les  troupes  de  Pan 
étaient  très  nombreuses  et  les  mit  en  fuite. 


PAX  107 

De  l;'i  vient  l;i  fiihlo  qiio  lu  nyiii|)lie  Kclio  a  été  ainiéo  pai-  le  dieu 
Tan. 

I'aiisaiiia<  iiai'lc  aussi  de  lori'eiirs  imniqiics,  ce  qui  itrouvc  l'anli- 
qiiité  de  celle  lociilion. 

Panneau,  tliininiitil'  de  ixin  :  latin  pannus. 

—  Ddiiiier  dans  le  iianiitMii.  Panneau  est  un  tenue  de  cliasso  et 
dr'siaiio  une  (^spéco  de  lilet  [tour  |»i'endre  le  ciiùer,  et  surtout  les 
lajiins. 

—  Ttunl);'!-  dans  le  panneau.  Ici,  panneau,  est  pris  dans  le  sens 
de  écoutille  ouverte  sur  le  pont  du  navire,  pour  descendre  dans 
l'intérieur  (0-  H  se  dit  dans  le  sens  de  attraper,  prendre  dans  une 
trappe  ;  comme  tréhuclier,  tomber  dans  un  trou. 

Il  est  liomme  à  tomber  dans  tous  les  panneaux  qu'on  lui  présen- 
tera. (Molière.  Pourccaugnar,  I,  \.) 

Panorannaj,  du  lirec  pan,  et  orania,  vue. 

Grand  taltleau  circulaire  et  continu,  qui  est  vu  du  centre  de  la 
rotonde  où  il  est  i)lacé.  et  qui  produit  l'illusion  de  la  nature  elle- 
même. 

Le  pantu'ania  a  été  in\enlé  [lar  Breyzi.i!',  de  Dantzig,  en  1793.  Il  l'ut 
importé  en  AuLilelerre  par  le  peintre  écossais  Burker.  En  1800, 
Fulton  l'inti'oduisit  en  Fran.ce. 

—  Le  i)remier  panorama  l'ut  établi  à  Paris  près  le  passage  qu'on 
appelle  depuis  «  des  Panoramas  «.  d'où  il  a  été  transporté,  vers  18i0, 
dans  la  rotonde  des  Ciiamps-Élysées. 

—  Le  pauoi'ama  a  donné  lieu  à  diverses  inventions  analogues: 
cosmorama,  diorama,  etc. 

Panse,  du  latin  panier,  /nnidre/n,  ventre. 

Autrefois  on  disait:  panser,  nourrir,  donner  largement  à  manger. 

Il  prit  dedans  Paris  cent  beaux  jeunes  et  gualants  compaignons 
bien  délibérez,  et  cent  belles  garces  Picardes,  et  les  feit  bien  traicter 
et  bien  panser  pour  huict  jours.  (Rabelais.) 

Panser,  soignei'  nue  [daie,  est  le  même  mot  que  penser,  du 
latin  pensare,  s'occuper  de. 

,Te  le  pansai,  Dieu  le  guérit.  (A.  Paré.) 

Pantalon,  vêtement  ainsi  nommé  parce  qu'il  était  en  usage  cliez 
les  Vénitiens,  nommés  eux-mêmes  «  pantalons  »,  à  cause  de  saint 
Panlaleoue,  très  honoré  cliez  eux. 

—  Synonyme  :  Inexpressible  (pour  les  prudes  Anglaises). 


198  PAN 

—  Jiidis  chausse.  La  i»arlie  supérieure  du  vèleinenl  don  bas 
était  le  liaut-dc-cliausses  :  l'autre,  le  has-de-cliausscs,  et,  par  abré- 
viation, bas,  quand  on  porta  des  culottes. 

—  Le  saint  Panlaléon,  ancien  patron  des  Vénitiens,  avant  saint 
Marc,  avait  un  nom  grec  signifiant  tout  miséricordieux. 

Il  a  donné  son  nom  à  un  personnage  grotesque  de  la  comédie 
italienne,  qui  représentait  les  vieillards,  portait  nn  masque  à  barbe, 
une  espèce  de  robe  déjuge  et  une  culotte  longue,  dite  d'après  lui 
pantalon. 

Panl;don  est  vénitien,  comme  Arlequin  est  bergamesque,  et  le 
Docteur,  vénitien. 

On  appelle  pantalonnades,  des  farces  dans  lesquelles  parait  cet 
acteur.  C'est  ordinairement  un  marcliand  ou  un  bourgeois  de  Venise, 
bonbomme  ridicule,  amoureux  et  dupe:  type  des  Gérontesde  notre 
comédie,  et  qui  avait  lieaucoup  de  rapports  avec  les  vieillards  de 
Térence  et  de  Plante. 

Pantalon  était  né  sous  une  étoile  fâcbeuse  :  s'il  y  avait  un  soufllet 
dans  l'air,  c'était  pour  lui  :  sa  fille  était  séduite  parle  premier  venu  ; 
son  tUs  était  empaumé  par  une  égrillarde  debasard. 

—  On  lit  dans  le  Macjasin  Pittoresque  (1837,  p.  294)  :  «  Les 
prolétaires  de  la  Répul)lique  de  Venise,  à  la  fin  du  xvi^  siècle,  por- 
taient des  culottes  à  longues  jambes,  réputées  par  les  étrangers 
comme  une  des  plus  bizarres  cboses  qu'il  y  eût  au  monde.  Comme  les 
Vénitiens  étaient  désignés  en  Italie  par  le  sobriquet  de  Pantaloni, 
à  cause,  dit-on,  de  saint  Pantaloni,  leur  patron,  ce  nom  passa  à  leurs 
culottes.  » 

Pantin,  de  l'italien  fantoccio,  fantocbe,  poupée. 

Ce  sont  de  petites  figures  articulées,  en  carton,  représentant  des 
personnages  burlesques,  dont  on  fait  mouvoir  les  membres  avec  un 
fil.  Ils  furent  introduits  en  France  vers  1747,  et  firent  un  instant 
fureur.  Bouclier  en  peignit  lui-même  qui  se  vendaient  très  cber.  La 
ducbesse  de  Cbartres  en  paya  un  l.oOO  Uvres.  On  ne  pouvait  aller 
dans  une  maison  sans  en  trouver  de  pendus  à  toutes  les  cbeminées: 
on  fit  même  une  cbanson  sur  les  pantins  : 

Que  Paulin  serait  content, 
S'il  avait  lart  de  vous  plaire  ! 
Que  Paulin  serait  coulent, 
S'il  vous  jilaisait  eu  dansant  ! 

—  D'autres  tirent  ce  nom  des  habitants  de  Pantin,  près  Paris, 


PAP  100 

réputé?  lioiir  Iciii- lialiilctt'' ;"i  la  diiiiso.  rninnio  l'indique  une  vieille 

cliaiisoii  : 

(".'■ii\  ilf  l';iiitiii.  (If  Saiiit-OiiL'ii.  (le  Siiint-CloïKi 
Dausnil  bini  iiiinix  (|iie  tous  ceux  de  ciiez  iiuiis. 

—  D'autres  enrore  \  voient  un  rapport  avec  le  vieux  verbe  fran- 
çais /  (inicr,  étendre  :  ou  avec  le  latin  penditure,  être  suspendu. 

Pantomime,  du  ,urec  panta,  tout,  mimeomai,  j'imite. 
Art  de  rendi-e  les  sentiments  et  les  idées  d'une  scène  dramatique 
par  des  gestes,  sans  recourii'  à  la  parole. 

—  Nom  des  comédiens  (pii  l'eiu'ésenlaient,  à  Home,  des  pièces  de 
théâtre  sans  pai'ler. 

Sous  Auguste,  Batliylle  et  Pylade  établii'eiit  une  école  de  panto- 
mimes. 

Pantoufle,  origine  très  incertaine. 

Rabelais  dit  (liv.  I,  ch.  21)  :  «  Car  il  disoyt  que  les  mêles  et 
bornes  de  boyre  estoyenl  quand,  la  personne  beuvant,  le  liège  de 
ses  pantopides  eniloyt  en  haut  d'ungdemy  pied.  »  C'est-à-dire  qu'il 
fallait  que  le  vin  qui  sortait  des  pores  du  buveur  lit  gonller  le  liège 
qui  formait  les  semelles  de  ses  pantoufles. 

D'où  il  parait  que  Rabelais  faisait  venir  ce  mot  du  grec  pan, 
p/iel/os,  tout  liège  ;  et  que  de  son  temps,  les  semelles  des  pantoufles 
étaient  de  liège. 

—  Pantoiilles  de.  verre.  (Voy.  verre.) 

Paon,  du  \\\\\\\  pava,  paroneni  (onomatopée). 
D'où:  se  pavaner,  faire  la  roue,  comme  le  })aon,  qui  étale  sa 
queue,  pour  eu  faire  ressortir  les  belles  couleurs. 
Oiseau  galliuacé,  apporté  d'Asie.  (Voy.  Argus.) 

—  On  dit  :  fier,  orgueilleux  comme  un  paon.  Le  i)aon  est  le  sym- 
bole de  la  vanité.  Sa  queue,  dont  il  est  si  lier,  tombe  à  la  chute  des 
feuilles,  et  ne  repousse  qu'au  priiiteini)s.  Pendant  sa  mue,  il  se 
cache  de  honte. 

Papa,  terme  enfantin,  tiré  du  grec  (onomatopée)  ;  comme  mnman, 
en  provençal  marna. 

Lorsque  les  enfants  commencent  à  parler,  ils  ne  prononcent  que 
quelques  syllabes  des  mots  qu'on  leur  suggère,  et  les  répètent  sou- 
vent deux  fois. 

Le  mot  papa  est  fait  comme  maman,  bébé,  caca,  fanfan,  dodo,  etc. 

Pape,  du  grec  2)appas,  père. 


200  PAP 

On  le  dérive  aussi  de  la  première  syllabe  des  mois  y^ft/rv  y>(///'/7y/<, 
ou  de  la  première  lettre  des  quatre  mots  latins  Peints  aposlolus 
jjoleatalcm  arcipiena...  C'est  aller  cherclier  bien  loin. 

—  Autrefois  ce  nom  était  appliqué  aux  évè(iues.  En  1U7;3,  (jré- 
goire  Yll  l'aHecta  au  seul  évêque  de  Rome. 

—  On  donne  au  |)ape  les  lili-es  de  :  Sa  Sainleté.  le  Sainl-Père,  le 
Souverain-Pontife,  lEvèque  de  Home.  le  Successeur  de  Saint  Pierre. 

On  l'a  appelé  aussi  le  Grand  Vicaire  du  Ciel.  (Voltaire.) 

Palcv  f/o/o)'nsi(s  (Veuillot)  ;  le  Prisonnier  du  Vatican  (187IÎ). 

«  Sa  Sainteté  »  est  une  expression  oflicielle  d'une  llatlerie  exces- 
sive, qui  donnerait  à  penser  que  le  pape  est  déjà  dans  le  ciel. 

On  a  appelé,  en  18G9,  le  pape  le  Grand  Mendiant,  à  cause  du 
denier  de  saint  Pierre. 

T)rl  papa,  xdi  ([ue  (hini  liinpimon 

Pro  (Ici  piirdon  cl  jiattr  ilr  son  nrfjrn. 

(li.    Ii'.VlTAMAVON.) 

(Touchant  le  pape,  je  sais  qu'il  donnera  pardon  largement,  mais 
peu  de  son  a  ruent.) 
Âccipe,  sume,  cape,  sunt  verba  placenlin  popœ.  (Rabelais.) 

—  La  couronne  du  pape  s'appelle  tiare  en  français,  et  en  italien 
triregno.  Elle  est  à  triple  étage.  synil)orisant  les  trois  pouvoirs  du 
pape  :  1'^  chef  de  l'Église  ;  2''  évêque  de  Rome  ;  3"  souverain  tem- 
porel des  États  de  l'Église. 

La  couronne,  simple  d'abord,  fut  doublée  par  Roniface  VIII,  et 
triplée  par  Urbain  V,  en  1352. 

—  Le  terme  moyen  du  règne  des  papes  est  de  8  ans  ;  Saint  Pierre 
a  régné  2o  ans  ;  Pie  VII,  24  ans  :  Pie  IX  a  dépassé  aujourd'hui  (1870) 
sa  24''  année  depuis  son  exaltation.  Ce  sont  les  règnes  les  plus 
longs. 

—  Deux  cent  cinquante-trois  papes  ont  occupé  la  chaire  de 
Saint  Pierre  dans  l'espace  de  1.800  ans:  c'est  la  succession  de 
souverains  la  plus  longue  qui  ait  jamais  été. 

—  En  avril  130G,  Rertrand  de  Got  (de  Razas),  archevêque  de 
Rordeaux,  nommé  pape  par  l'influence  de  Phihppe  le  Rel,  établit  le 
Saint-Siège  à  Avignon. 

Ses  successeurs  y  demeurèrent  72  ans,  et  conservèrent  la  souve- 
raineté du  pays  jusqu'en  1768.  (Voy.  Avignon.) 

—  Les  papes  sont  sortis  trente-neuf  fois  de  Rome,  et  ils  y  sont 
toujours  rentrés. 

—  Grégoire  I'^''  est  en  quelque  sorte  le  premier  pape  qui  ait  réuni 


PAP  201 

le  pouvoir  temporel  au  spirituel,  et  crée  cette  tliéocralie  qui  fut  si 
puissante  jusqu'à  luuorenl  III,  et  qui  perdit  peu  à  peu  son  prestige. 

—  Dans  les  Ktals  de  ri;dise,  le  pape  règne  en  maitre  absolu, 
ayant  à  la  fois  le  ciel  et  la  terre,  les  clefs  de  Taulre  monde  et  de 
ceUii-ci,  pouvant  vous  damner  et  vous  faire  pendre,  tuer  voire  âme 
et  votre  corps  :  pouvoir  énorme,  le  plus  grand  ipii  lui  jamais... 
(Tli.  Gautier.) 

—  (Jui  enlre  pape  au  conclave,  en  sort  cardinal  :  le  sort  d'une 
élection  est  douteux.  (Voy.  conclave.) 

—  Les  partisans  exallés  du  pajjo  s'appell  Mil  ulli-amontains,  ou 
papistes,  possédés  du  iia[)e. 

Papegault,  nom  ancien  du  perroquet,  parce  qu'il  pape,  c'est-à- 
dire  mâche  les  branches  des  arbres,  du  gault. 

Ce  mot  est  fait  commc^.  pape/art/,  qui  mange  le  lard,  et  j)ape- 
figue,  nom  ancien  du  bec-tigue. 

On  a  dit  plus  tard  papetjal. 

Papelard,  A^  paper.  manger  avec  sensualité;  W\\\  pdp pitre. 
(Cf.  croiiuelanlon,  dans  Rabelais.) 

—  Pappare  tninutiim  (Perse)  :  paper  menu. 

—  Un  papelard  feint  ralisliiience  et  fait  gras  en  secret. 

Tel  l'ait  devant  le  papelart, 
(Jul  derrière  pape  le  lart. 

{Mirœlc  de  la    Vierr/c.) 

Papier,  du  latin  papyrins,  adjectif  dérivé  de  papyrus. 

Le  papyrus,  écorce  d'un  roseau  du  Ml,  servait  à  écrire,  comme 
le  liber,  ou  écorce,  qui  a  donné  livre. 

Le  mot  volume  vient  de  volvei^e,  rouler,  comme  rouleau,  do 
rotulus,  parce  que  les  anciens  roulaient  ces  diverses  écorces,  une 
fois  écrites. 

Les  Grecs  et  les  Romains  se  servirent  longtemps  du  papyrus,  et 
aussi  du  parchemin.  (Voy.) 

—  Le  papier  de  cliilTon  fut  inventé  au  xiF  siècle,  à  Râle. 
Les  premières  papeteries  s'établirent  en  France  vers  1312. 
L'invention  du  papier  à  la  mécanique  est  due  à  Robert,  (uivrier 

d'Essonne,  en  1798  ;  elle  ne  fut  exploitée  en  grand  qu'en  JSirj. 
Les  papiers  peints  ont  été  importés  de  Chine  vers  1750. 

—  Papier  ministre,  ou  tellière.  Papier  de  forme  et  de  qualité 
spéciales,  qui  sert  à  adresser  des  rapports  aux  ministres,  et  qui  fut 
fabriqué  par  ordre  du  ministre  Letellier. 


202  PAF' 

—  Papier  (\(\  soio,  nii  paiiicr  Josopli  :  du  nom  de  l'invcntoiir 
Joseph  Monl.uollicr. 

—  Papi(>r  Jésus.  (Vov.) 

—  Los  Précieuses  nul   appelé  le  papier  <'  riiilerpi'rle  iNiiel  du 

cœur  ». 

A  la  laiidi'iir  (iiii  brille  en  moi 
Sr  joint  lo  |)iiis  noir  (•araclérc  ; 
Il  n'est  rien  (iiir  je  ne  tolère  : 
.Mais  je  suis  inéelianl  (juand  je  bois. 

(lùiigrric.) 

—  Le  MX''  siècle  est  le  siècle  du  papier.  LXudier.) 

—  l'apiei's.  l/adiuiuislratioii  de  la  [lolice  n'accorde  que  diflicile- 
meul  des  uiédailles  autorisant  l'exercice  de  certaines  professions 
intei'lopes  de  la  rue,  telles  que  musiciens  et  chanteurs  ambulants, 
grimaciers,  chilTonniers,  etc.  Elle  exi^f'  du  requérant  plus  de 
garanties  ipie  pour  un  inspecteur  généi'al.  Il  faut  des  certilicats  de 
toutes  soi'les  :  de  bonnes  vie  et  mœurs,  de  bonne  conduite  :  des 
quittances  de  loyer,  et  enfin  des  papiers. 

Ce  mot  Aq  papiers  semble  bien  innocent  d'abord  :  mais  il  cache 
son  jeu;  il  est  terrible,  gros  de  menaces  et  de  diflicultés;  il  est 
inexplicable,  multiforme  ;  il  ne  veut  rien  dire,  il  signifie  tout.  Dans 
notre  civilisation,  un  homme  qui  n'a  pas  de  papiers  est  un  homme 
perdu. 

Qu'est-ce  que  des  papiers?  Personne  ne  l'a  jamais  su.  C'est  un  des 
termes  de  cette  terrible  langue  administrative  que  personne  ne 
parle  et  ne  comprend,  et  qui  s'écrit  sur  de  si  vilaines  petites  feuilles 
de  papier  entachées  du  timbre  qui  coûte  si  cher.  (Pr.  d'Anglemont, 
les  Chiffonniers.) 

—  Être  bien,  ou  inal,  dans  les  papiers  de  quelqu'un  ;  c'est-à-dire 
dans  son  esprit. 

—  Rayez  cela  de  vos  papiers  :  n'en  croyez  rien. 

Moi,  voire  ami  !  Rayez  cela  do  vos  papiers. 

(MoLitiiE,  Misanthrope.) 

—  Paperasses,  papier  à  ratures,  servant  pour  les  brouillons. 

Papillon,  du  \dX\n  papilio.  Autrefois  aussi  parpaillon,  qui  est 
resté  en  provençal. 

Gargantua  couroyt  voulentiers  après  les  parpaillons.  (Rabelais, 
cil.  XI.) 

—  L'inconstance  du  papillon  est  une  erreur  des  poètes,  que  les 
naturalistes  ont  rejetée  depuis  longtemps.  Le  papillon  prend  le  suc 
des  Heurs,  sans  eu  être  le  moins  du  monde  épris.  Il  s'en  nourrit,  mais 


PAR  203 

ne  les  courtise  pas  ;  en  volant  do  runo  à  raiilro.  il  xaiic  ses  mets. 
non  SOS  honiniajics.  C'est  un  coiivivo  délicat,  mais  (''esl  un  é[H)ii\ 
constant  et  lidèle  :  il  vole  toujoui's  à  cùlé  de  s;i  compagne,  et  ils 
meurent  ensemble  le  jour  de  leur  union. 

—  Chez  les  Japonais,  le  pai)iIlon  est  renililrmc  du  maria.uc. 

—  Fonrier  a  fait  de  Tinconstance  une  \ertii.  (pTil  ap[)ellc 
«  i),i|)ill()niie  ». 

—  l'n  [)elit  bas-relief  en  bronze  (Empire),  représente  une  vestale 
brûlant  un  papillon  sur  l'autel  de  bi  déesse.  Ingénieuse  allégorie, 
où  la  jeune  prétresse,  immolant  ce  symbole  de  l'inconstance, 
témoigne  de  sa  fidélité  à  Yesla. 

—  La  tourterelle,  dont  les  poètes  ont  fait  un  modèle  de  constance, 
de  fidélité  et  de  tendresse,  a  justement  tous  les  défauts  op[)osés  à 
ces  qualités.  (Voy.  tourterelle.) 

Béranger.  (pii  connaissait  sans  doute  la  réliabilitalion  du  [)ai)illon, 
fait  (lire  à  une  tourterelle  : 

Quoi!  les  paitilloiis  sont  constants! 
Et  c'est  nous  qu'on  prend  |ionr  modèles  ! 
Même  il  se  peut  qu'ils  soient  lidèles  : 
Le  papillon  vil  peu  d'instants. 

Pâque,  de  l'bébreu,  \)\\v  le  latin,  jia.sc/ia.  passage. 

Temps  où  les  Juifs  célébraient  le  passage  de  l'ange  exterminateur, 
qui  avait  é[)argné  leurs  premiers-nés,  en  Egypte:  ou  en  mémoire 
du  passage  de  la  mer  Rouge. 

—  Cbez  les  cbi'étiens,  Pàqiie.s  vient  du  latin  pascol^i),  nourrir, 
à  cause  de  l'agneau  pascal,  qui  s'immole  pour  nourrir  les  bommes. 
(Yoy.  cierge  pascal,  œufs  de  Pâques.) 

—  Pâques  est  lixé  par  le  concile  de  Nicée  (32o),  au  dimancbe  qui 
suit  la  pleine  lune  de  mars.  Cette  fête  mobile  se  trouve  toujours 
comprise  entre  le  22  mars  et  le  25  avril.  Elle  inaugure  le  printemps, 
et  concorde  avec  la  fête  de  la  nature.  Toutes  les  fêtes  mobiles  de 
l'Église  se  règlent  sur  Pâques. 

—  On  appelle  Pâques  jleuries  le  dinuinclie  des  Rameaux. 

Alressi  clianl  quan  l'irrr  es  rengutz, 
Cum  faz  l'estalz  ni  la  Pasca  (loria. 

(l\  Xw.u..) 

(Pareillement  je  cliante  (piand  l'biver  est  venu,  comme  je  faisais 
l'été  et  â  Pâques  lleuries.) 

Par,  parmi,  du  hlin  per,  per  medluni:  préposition. 


204  TAU 

Por/ni  &i'cr\\;\\\  en  dciiv  mois  cl  <i,uMili;iil  |i;ir  le  milieu,  comme 
emnil  iiii  milieu. 

y]// se  retrouve  dans  :  jui-iioi'il,  mi-carèiiie,  milieu,  midi. 

En  i)roven(;al,  on  dit  nii/f/n,  milieu,  qui  corresiiond  an  mol 
français  miloiji'ii. 

—  De  par  le  i"oi  <'sl  dit  iioni-  de  pai'l  le  l'iti.  (|ni  s'esl  employé 
anlrel'ois. 

Un  brief  d(^  pari  le  roi-,  et  qui  a  son  séel.  (Livide  drs  liois.) 

—  On  connail  l'inscription  plaisante  mise  sur  la  [)orte  du  cime- 
tière de  Sainl-Alédard  (rue  MoulTetard,  à  Paris),  fermée  à  cause  des 
convulsionnaires  du  diacre  Paris  : 

Do  par  le  roi,  dOIonsc  à  Dieu 
De  faire  miracle  en  ce  lieu. 

Parabole,  (\\x  iivw,  para  hoir,  conqiaraisoii. 
Dans  le  style  de  l'Écriture,  narration  dnn  fait  qui  renferme, 
sous  forme  allégorique,  une  vérité  morale.  ' 

Parade,  de  l'italien  parafas,  montre,  étalage. 

11  signilie,  en  espagnol,  le  lieu  de  balte  d'un  cbeval  de  manège. 

Ce  mot  s'introduisit  en  France,  dans  les  carrousels,  sous  Fran- 
çois l''. 

Une  ordonnance  de  Louis  XIV  (t2o  juillet  IGGo),  porte  que  les 
gardes  françaises  feront  parade.  (Colonel  Ambert.) 

Paradis,  du  clialdéen  pardrs.  verger:  en  ixrec paraf/cisos,  lieu 
de  délices.  Éden  signilie  volupté. 

—  On  dit  :  les  joies  du  paradis  ;  être  au  paradis. 

—  Dans  les  représentations  de  mystères  religieux,  au  Moyen-Age, 
la  scène  se  trouvait  coupée  en  trois  étages,  ou  plans  superposés  : 
l'enfer,  au  niveau  du  sol:  la  terre,  au  milieu  ;  le  paradis,  au-dessus, 
formant  la  partie  la  plus  élevée  de  la  décoration,  où  trônait  Dieu  le 
Père,  entouré  d'anges  et  de  saints. 

C'est  de  là,  sans  doute,  que  vient  le  nom  donné  aux  galeries, 
médiocrement  édenesques.  qui  se  trouvent  au  plus  baut  des  salles 
de  spectacles.  En  i-éalité,  ces  galeries  sont  un  véritable  €nfei\  par 
suite  de  la  cbaleur  sulïocante  et  des  exbalaisous  puantes  qui  y 
montent  du  parterre  et  des  galeries  inférieures. 

Ale.\andre  Dumas  lils  dit  un  jour  qu'on  employait  ce  terme  de 
paradis  à  cause  des  nomlireuses  pommes  qu'on  y  mange.  C'est 
peut-être  aussi  par  antitbèse,  parce  qu'on  y  fait  le  diable... 

—  Le  paradis  des  mabométaus  se  compose  de  sept  ciels,  qui  sont 


PAR  20o 

autant  de  paradis  oradués  :  le  premier,  d'argent  :  le  deuxième,  d'or: 
le  troisième,  de  pierres  précieuses;  le  quatrième,  d'émeraude;  le 
einquième,  de  cristal:  le  sixième,  de  couleur  de  feu;  le  septième  est 
un  jardin  délicieux,  tu'i  cnulent  des  rivières  de  vin.  de  lait,  d'huile 
et  de  miel,  et  où  les  ci-ovaiils.  entourés  do  liouris,  doivent  jouir  de 
la  félicité  éternelle.  (Voy.  ciel.) 

Paradoxe,  du  gvcc  para,  contre,  doxa,  opinion. 

Ce  qui  est  contraire  à  l'opinion  commune. 

Ciccron,  dans  ses  Paradoxes,  a  développé  certaines  théories 
célèlii-es,  fondées  sur  des  paradoxes. 

Le  paradoxe  de  la  veille  devient  la  vérité  du  londeniain.  Ainsi, 
dans  les  sciences,  certains  paradoxes  sont  devenus  des  vérités 
incontestables  :  la  sphéricité  et  la  rotai  ion  de  la  teiTe,  les  anti- 
podes, etc. 

Parage,  (lu  lias-lalin  paragiiun  {([q,  par),  noblesse  d'extraction. 
Gentilhomme  de  haut  parago  signifie  qui  descend  d'un  père  ou 
d'aïeux  illustres. 

Parangon,  anciennement  pora(/on  :  peut-être  de  l'italien 
paragone. 

Sans  parangon  :  sans  pareil. 

Paraphe,  contraction  de  paragraphe  :  du  grec  para,  grapJiein. 

Marque  ajoutée  à  la  signature,  pour  qu'il  soit  plus  difficile  de  la 
contrefaire. 

D'où  l'expression  :  signer  avec  paraphe,  ne  varielar. 

Vous  dictes  paraphe,  corrompans  la  diction,  laquelle  signifie  ung 
signe  ou  note  poussée  près  l'escripture.  (Rabelais,  liv.  II,  ch.  13.) 

Parapet,  de  l'italien  para  petto,  préserver  la  poitrine. 
Partie  supérieure  du  rempart,  destinée  à  couvrir  les  assiégés. 
Rabelais  (prologue  du  liv.  III)  écrit  parapecles. 
C'est  aussi  un  garde-fou. 

Parapluie,  mot  formé  commo,  2yarasol,  paratonnerre,  où  l'élé- 
menl  jiara  provient  de  l'italien,  à  l'imitation  de  iiarapet. 

Ami  cominode,  ami  nouveau, 
Oui,  contre  fordinairo  usai^e. 
Reste  à  l'écart  quand  il  lait  l)eau 
Et  se  montre  les  jours  (roraj':e. 

(Sr.iiiiti:.) 

—  Synonymes  :  pépin,  riffiard,  robinson. 


206  PAR 

//////^//v/ \i<'ii(li-;iil  i\v  /a  Pr///r  T/V/r,  de  Pic'ird,  joiiéo  ;'i  Paris 
en  1801,  où  riificiir  (jni  joii.'iil  le  r<")le  de  Kifll;ir(l  |i;ii'iil  en  scène 
avec  un  énoniKî  i);ii-;i[)luie. 

Robinaon  est  iuissi  un  soiiNciiir  de,  r.iciciif  (|iii  jouait  lioljinson 
dans  la  pircc  de  Pixérécourt  ninsi  inlitnléc. 

—  Le  parapluie  fei-jué,  emblènic  du  hourpeois  :  instrument  paci- 
fique, s'il  en  fut,  rappelle  trop  la  malheureuse  mère  qui,  ne  pouvant 
défendre,  avec  son  parapluie,  ses  enfants  contre  l'assassin  Papavoine, 
s'écrie  dans  la  complainte  : 

Il  cul  étr  plus  ni'i^cnt 

Oui'  riiislriimciit  fût  Irniiclwint. 

Parapluie  qui  fait  la  tulipe  (K.  Sue)  :  parapluie  retourné  par  le  vent. 

Parasite,  du  .urec  y>ft/Y/.v//o.v;  proprement  celui  qui  niancre  à 
côté  d'un  autre. 

—  Synonymes  :  croquelardon  (provençal  crocalard)^  écornilleur, 
coureur  de  franches  lippées,  fripe-sauce,  happe-lopin,  lèche-plat, 
pique-assiette. 

—  Apaticher  se  disait  autrefois  d'un  parasite,  qui  nian.«e  tou- 
jours chez  les  autres. 

Li  trovèiTS  do  maintenant 
Deliors  apaticlicnt  ti>iit  l'an. 

—  On  désignait  sous  ce  nom,  à  Athènes,  ceux  qui  étaient  nourris 
au  Prytanée,  ou  qui  prenaient  part  au  repas  du  sacrilice. 

Par  la  suite,  le  nom  de  parasite  fut  donné  ironiquement  à  ceux 
qui  sollicitaient  une  place  à  la  table  des  grands.  Sous  Auguste,  ils 
étaient  très  nombreux  à  Rome  ;  on  les  divisait  en  trois  classes  : 

Les  derisores,  qui  faisaient  rire  les  convives  par  leurs  facéties  et, 
pendant  le  repas,  débitaient  les  nouvelles  du  jour. 

Les  adulatores,  qui  avaient  recours  à  la  Uatterie  pour  se  faire 
inviter. 

Les  plagipatida',  ou  souffre-douleurs,  dont  on  se  faisait  un  jouet 
pendant  le  festin  :  on  leur  jetait  à  la  tète  les  pots  ou  des  noyaux 
d'olives  ;  ils  se  soumettaient  volontairement  à  toutes  les  avanies  et 
faisaient  gloire  de  leur  insensibilité. 

—  Les  Grecs  disaient  :  «  Le  parasite  vend  sa  liberté  pour  un 
morceau  de  pain.  » 

Diogène,  voyant  des  souris  qui  venaient  manger  les  miettes  de 
son  pain,  dit  en  riant  :  «  Qui  l'eût  cru?  Diogène  a  aussi  des  para- 
sites !  » 


PAR  207 

—  Pierre  de  Muiiliiiiiiir.  doiil  .Méiingc  a  érrit  la  vie,  et  qui  était 
professeur  de  grec  au  CoUè.iie  de  Frauce  (lo7()-l()'i-8),  fut  un  (•(Mèhre 
parasite.  On  lit  de  suu  nom  les  aiiaurauunes  :  Né  pour  nijimiiler, 
mine  pour  rauier. 

Très  spiriluel.  il  savait  payer  son  écot  en  hons  mots,  cl  disait  à 
ses  amphitryons  :  «  rouruissez  les  viandes  et  le  vin,  je  fouriiir;ii 
le  sel.  » 

Le  cliaucelier  Séuiiier  lit  uii  jour  répandre  sur  lui  un  plat  de 
ra.u'oùt.  .Moutuiaiir.  reuardaut  le  cliancelier  d'un  aii'  de  reproche, 
cita  le  mot  de  fjcérou  :  Sit/ii//in//i  Jus.  summa  injuria,  qui  faisait 
une  (loiihlc  allusion  au\  f(ni(ii(Uis  judiciaii'es  du  chancelier,  et  au 
mol  Jus.  qui  siuuilie  à  la  lois  sauce  et  justice. 

.Miinliuaiir  rlaiit  a  tai)lo  avec  cfrUiiiis  péilaiils, 
Qui  criait'iit  el  prèchaii'iil  trop  haut  sur  la  vciulaiijfo, 
Lui,  (pii  Ml'  siiiijj:(>  alors  (pià  ee  que  font  ses  (lcnt.s  : 
l'aiv  là:  l*ai\  la  I  ilil-il,  (iii  ne  sait  ce  (luoiimange. 

Paratonnerre.  Ce  uu)t  exprime  assez  hien  rohjet  désigné  ;  mais 
il  parait  siuiiulier  qu'il  ail  été  fait  sur  le  modèle  dç,  parapluie.  (Voy.) 

—  Inventé  par  Franklin,  en  1757. 

Le  double  i'()le  de  Franklin,  à  la  fois  politique  et  scientili(pH%  a 
été  justement  caractérisé  dans  ce  vers  : 

Eripuit  cœlo  fiilmeu,  sceptrumque  tyrnnnis. 

Ravit  la  foudre  au  ciel  et  leur  sceptre  aux  tyrans.  (Voy.  foudre.) 

—  Le  paratonnerre  protèjze  autour  de  lui  un  espace  d'environ  le 
double  de  sa  liauleur:  ainsi  un  l)àtiment  de  vingt  mètres  de  diamètre 
n'aurait  besoin  que  d'une  tige  de  cinq  mètres  de  haut. 

Paravent,  formé  de  />«/•«  et  de  vent. 

Ce  meuble,  composé  de  châssis  mobiles  recouverts  d'élolïe  ou  de 
papier,  nous  est  venu  de  la  Chine,  s'il  en  faut  croire  les  vers  de 
Lemierre  : 

Lo  niuhile  rL'Uiparl  iiii'hivcnta  le  Chinois, 
Près  de  nous,  pour  abri  déployé  sous  nos  toits, 
Interdisant  au  froid  raccès  de  nos  asiles, 
1^1  écarte  des  venls  les  alteiuti's  sulitiles. 

Parchemin,  vieux  français  7>t'/'tY/ ////«:  du  latin  percjaincnum, 
churla  per(ja)nena,  de  Perganu'. 

Peau  de  béte  préparée  pour  écrire.  Inventé  sous  Eumène,  roi  de 
Pergame,  quand  Ptolémée,  roi  d'Egypte,  avait  interdit  l'exportation 
du  papyrus. 

Pardonner,  du  Itas-latin  perdonare,  remettre  complètement. 


208  PAR 

—  11  sci'ii  l)<';iiic()ii|i  |i;ii(l(iiiii(''  ;'i  qui  ;iiii-;i  lif';iiiroii|)  iiiiiu''.  (Kvan- 
uUo.) 

L;i  vertu  ii.iidoiinc  an  iiK-cliaiit,  coimne  l'aritre  do  santal  |iai-fnnio 
la  liaclio  iiiènic  i\\\\  la  iVappé.  (Maxime  indionno.) 

Le  pardon  est  lin  placcnioiit  ascnluré.  mais  (|ni  peut  plus  tai'd 
rapporter  de  f;i'os  intér»'ts. 

Le  lâche  se  complaît  dans  la  haine,  comme  le  liravcdans  le  pardon. 

On  pardonne  tant  que  l'on  aime.  (La  Hoclieloucauld.) 

Pareil,  du  latin  ixiriculion,  diminulif  de /;«?',  é<ial  :  provençal 
jxirlr. 

Qui  est  de  même  qualité. 

—  Rendre  la  paix'ille. 

Pav  pari  rcferto. 

(TtRENCK,  Eunuque.) 

A  ])on  chat  hon  rat.  (Yoy.  lali<ni.) 

Parent,  du  latin  parens,  parent em,  de  pnrlo,  enfanter. 

Dans  le  latin  littéraire,  parentes  désionait  senlement  les  ascen- 
dants, le  père  et  la  mère.  Dans  le  latin  rustique,  il  désignait,  comme 
chez  nous,  non  seulement  les  ascendants,  mais  encore  les  collatéraux 
et  les  aUiés. 

—  Les  parents  sont  de  trois  classes  ou  degrés  : 

Ligne  directe:  1°  le  père,  la  mère,  les  aïeuls;  2°  les  enfants  et 
petits-enfants.  Ligne  collatérale  :  3'^  les  frères,  sœurs,  oncles,  cousins. 

—  Un  lion  ami  vaut  mieux  que  cent  parents. 

Le  sort  fait  les  parents,  le  choix  fait  les  amis. 

(Dti.ir.i.E.) 

—  Montaigne  dit  que  «  la  communauté  des  hiens,  les  partages, 
la  jalousie  des  intérêts,  détrempent  et  relâchent  la  soudure  fra- 
ternelle » . 

(Voy.  Ou  n'est  jamais  trahi  que  par  les  siens.) 

Parer,  du  latin  jjarare  :  provençal  ;ji«;Y/r. 

(Voy.  cossu,  liabit,  s'attifer.) 

Synonyme:  être  huppé,  pimpant,  se  pomponner. 

Paresse,  du  grec  parésis,  relâchement,  alïaissement. 
Malgré  la  similitude  de  forme,  cette  étymologie  est  fausse.   La 
vraie  est  le  latin  piijritia. 

—  Déesse  allégorique  des  anciens,  elle  était  tille  du  Sommeil  et 
de  la  Nuit.  Le  limaçon  et  la  tortue  lui  étaient  consacrés. 


PAR  209 

—  On  (lit  sainto  paresse,  pour  désigner  un  repos  nécessaire  et 
qui  ninduit  pas  au  mal. 

Les  Latins  disaient:  Ollum  cum  dignitate. 
Boileau  a  dit  des  chanoines  qu'ils 

S"ongraisscnt  d'une  longue  et  sainte  oisiveté. 

Après  une  existence  laborieuse,  l'homme  a  le  droit  de  se  recueillir 
dans  la  dignité  du  repos. 

—  La  paresse  chemine  si  lentement  que  la  pauvreté  ne  tarde  pas 
à  l'atteindre. 

—  Paresse,  de  pigritia,  a  l'ait  Vdrgoi pègre,  \o\e\ir,et  pégrène, 
faim.  Tout  commentaire  est  inutile,  n'est-ce  pas  ?  De  même  que 
l'oisiveté  est  mère  de  tous  les  vices,  ce  terme  d'argot  signilie  que  la 
misère  est  tille  de  la  paresse  et  sœur  du  vol. 

—  La  paresse  ouvre  la  porte  à  l'ennui,  à  la  misère  et  à  tous  les 
vices. 

Celui  qui  ne  veut  pas  travailler,  ne  mangera  pas.  (Saint  Paul.) 

0  paresseux,  la  pauvreté  fondra  sur  toi  comme  un  homme  qui 
marche  à  grands  pas,  et  l'indigence  comme  un  homme  armé. 
(Salomon.) 

Le  paresseux  pour  ne  point  faire  un  pas  en  fait  deux. 

La  paresse,  compagne  inséparable  de  l'ennui,  est  un  fardeau  bien 
plus  lourd  à  supporter  que  le  travail. 

Plus  est  negotii  in  otio  quam  in  negotio.  (Sénèque.) 

Les  paresseux  ont  plus  de  peine  que  ceux  qui  travaillent. 

Ne  rien  faire  produit  beaucoup  d'alîaires. 

...Ils  s'encouragent  à  ne  rien  faire,  et  bercent  mutuellement  le 
hamac  de  leur  paresse.  (Miirger.) 

Paresseux.  Les  synonymes  sont  innombrables  :  Clampin,  côtes 
en  long,  fainéant,  lazzarone,  musard,  las-d'aller  (Rabelais),  mar- 
motte. 

On  est  paresseux  par  défaut  d'énergie,  fainéant  par  défaut  d'action, 
indolent  par  défaut  de  sensibihté,  nonchalant  par  défaut  d'ardeur, 
négligent  par  défaut  de  soin. 

Le  paresseux  dit  :  On  n'est  bien  qu'assis,  et  très  bien  que  couché. 

Parfait,  du  latin  perfectus,  achevé. 

Le  jeune  homme  est  riche,  instruit,  charmant...  et  s'appelle 
Bernard  :  on  n'est  pas  parfait. 

Parfois,  adverbe,  comme  toutefois,  quelquefois. 

14 


2i0  PAU 

Lo  sul)stnnlif  fois  ;i\;iil,  j;idis  l;i  forme  veio,  f'i'iv,  foie. 
On  dit  encore  en  provençal  fés  ;  du  latin  vicetn. 
Dans  le  Liv?'e  des  Rois,  l'ablatif  vice  est  rendu  jmr  fric  :  A 
ceste  fciz. 

Paria,  du  taiiioiii  jx/fci/crs,  lioniiiic  hors  classe. 

Homme  de  la  dernière  caste  des  Indoiis  qui  suivent  la  loi  de 
Bralima.  Les  Parias  vivent  méprisés  et  subissent  une  foule  d'inter- 
dictions. Considérés  comme  impurs,  ils  sont  évités  par  les  autres 
castes,  qui  craindraient  de  se  souiller. 

—  Je  suis  Indien,  c'est-à-dire  un  -ver  de  terre  qui  se  tapit  dans 
l'herbe  ;  toute  main  l'évite  et  tout  pied  le  meurtrit.  (Galvan,  poète 
mexicain.) 

—  Dans  l'antiquité,  il  y  avait  lo  maître  et  l'esclave  ;  aux  colonies 
d'Amérique,  les  noirs  étaient  naguère  hors  de  l'humanité  :  au 
Moyen-Age,  il  y  avait  entre  le  juif  et  le  chrétien  d'elfroyables 
barrières,  des  abîmes  de  mépris  et  des  montagnes  d'orgueil  infran- 
chissables. 

Paris,  du  bas-latin  Parisius,  ville  des  Parisii. 
Synonymes  :  la  Grande  Ville,  la  Capitale  du  Monde  civihsé,  la 
Nouvelle  Athènes,  la  Moderne  Babylone,  la  Capitale  des  Péchés 

capitaux. 

Paris,  divine  capitale, 
Où  Ion  peut  à  toute  lieure,  à  tout  prix,  en  tout  lieu. 
Trouver  l'occasion  de  chiffonner  un  peu 

La  lunit}ue  de  la  morale. 

—  Paris  doit  son  nom  aux  Parisii,  peuple  celtique  ;  mais  son  nom 
primitif  était  Lutelia,  Lutèce,  que  Mercier  dérive  ironiquement  de 
/utum,  boue  ;  ville  de  boue. 

—  César  dit  qu'il  transféra  dans  la  ville  de  J.utetin  Parisiorum 
l'assemblée  générale  des  Gaules. 

Ptolémée  l'appelle  Lucotetia,  que  Noël  explique  par  la  blancheur 
de  ses  murs  ;  comme  il  dérive  Paris  d&Parrhesia,  liberté  de  parler 
(de  ses  habitants). 

Sont  dicts  Parrliisiens,  en  Grécisme,  c'est-à-dire  francs  à  parler. 
(Rabelais.) 

—  La  ville  de  Paris  a  un  vaisseau  dans  ses  armes,  avec  ces  mots  : 
Fluctuât,  nec  mergitur.  Le  vaisseau  rappelle  la  forme  de  son 
berceau,  l'île  étroite  de  la  Cité,  où  fut  Lutèce,  et  que  la  Seine 
entoure  de  ses  bras. 


PAR  2H 

Mnloré  son  vaisseau  et  sa  devise,  Paris  n"est  pas  port  de  mer,  et, 
inallieiireiisement.  ses  armes  ne  sont  pas  parlantes. 

—  Pai'is  est  le  paradis  des  femmes,  le  purgatoire  des  hommes, 
l'enfer  des  clievaux. 

—  Le  Parisien  est  llioninie  qui  sait  tout,  particulièrement  ce 
qu'il  n'a  point  appris.  «  Ils  savent  tout  par  le  perpétuel  ouï-dire  de 
la  vie  d'ex[)ansion  et  de  contact.  «  (G.  Sand.) 

Pour  le  Parisien,  la  province  n'existe  pas  :  tout  ce  qui  n'est  pas 
Paris,  c'est  la  campagne.  Le  Parisien  en  province  se  croit  exilé  cliez 
les  Scythes. 

C'est  un  Parisien  qui,  se  trouvant  sur  les  hords  de  la  Loire,  en 
admirait  la  largeur,  puis  ajoutait  :  «  Voilà  une  helle  rivière,  pour 
une  rivière  de  province  !  » 

Les  Parisiens  ressemblent  à  des  singes  dans  une  maison  de  fous. 
(Warburn,  ambassadeur  américain,  1871.) 

Le  vrai  Parisien  ne  pleure  pas,  il  pleurniche;  il  ne  rit  pas,  il 
ricane;  il  ne  plaisante  pas,  il  blague  ;  il  ne  danse  pas,  il  cancane; 
il  n'est  pas  amoureux,  il  est  lil»ertin. 

La  Parisienne  ne  mange  pas,  elle  grignotte  ;  elle  ne  parle  pas, 
elle  jahote  ;  elle  ne  marche  pas,  elle  trotte. 

—  Paris  ne  s'est  pas  fait  en  un  jour. 

Tanlw  mijli'i  crut  romanam  condere  rjentem. 

(Virgile.) 

La  grandeur  de  Paris  l'a  fait  surnommer  la  Grand'Ville,  le  Grand 
Village,  et  François  T''  disait  :  Luleiia  non  urbs,  sed  oi^bis. 

—  De  Lutèce  devenir  Paris,  quelle  plus  étonnante  transforma- 
tion ?  Avoir  été  fange  et  devenir  esprit  !  (V.  Hugo.) 

Supprimez  de  ce  monde  l'humanité  tout  entière,  et  ne  laissez 
subsister  que  Paris,  comme  une  autre  arche  de  Noé  ;  vous  n'auriez 
à  regretter  l'absence  d'aucun  des  échantillons  qui  composent  les 
variétés  naturelles  du  monde. 

Paris  est  pour  le  riche  un  pays  de  cocagne. 

(BoiLEAL.) 

Il  n'y  a  qu'un  Paris  en  ce  monde  et  le  Paradis  dans  l'autre. 

M™°  de  Staël,  à  Coppet,  regrettait  le  ruisseau  de  la  rue  du  Bac. 

Paris  commence  à  la  Ghaussée-d'Antin,  et  finit  au  Tliéàtre  des 
Variétés  :  le  reste  n'est  que  du  rempUssage.  (Méry.) 

Une  femme  disait  qu'elle  aimerait  mieux  être  enterrée  à  Saint- 
Sulpice,  que  de  vivre  en  province.  (Mercier,  Tableau  de  Paris.) 


2lâ  PAR 

Parler,  îinrioiincinoiil  jinrolcr.  du   l.iliii   jxirtiholfirc.  cl   non 
comme  rexpliquaienl  quclquos-iins,  ûc,  per  linymna  (K/crc. 
Pallas  se  lail,  Vénus  (inroli-. 

(Cilé  par  IloiiiiKr..) 

(',cllc  .IfClll   (Idlll  je  \()IIS   |)ar(>li'. 

(Roman  de  lu  Rose.) 

—  Anciennement  voisier. 

Famé  voisie  la  note  et  li  jor.  (Femme  parle  nuit  et  jour.) 

—  Synonymes:  canser,  c'est  s'entretenir  familièrement  de  choses 
graves  ou  frivoles,  d'aiïaires  ou  de  plaisirs  :  jaboter,  jaser,  jacasser, 
caqueter,  s'appliquent  toujours  à  des  conversations  futiles  et  insi- 
gnifiantes. 

—  Parler  gi-as.  (Voy.) 

Parler  ab  /loc  cl  ab  hac.  fVoy.  hoc.) 

Parler  d'or,  ...comme  saint  Jean  Bouche  d'Or,  ...comme  un  livre 
(voy.),  ...comme  un  perroquet,  ...comme  une  pie  (voy.),  ...comme 
un  oracle  (voy.). 

—  Parler  pour  ne  rien  dire.  Dans  la  conversation,  il  vaut  mieux 
ne  rien  dire  que  de  dire  des  riens. 

Les  Persans  ont  le  proverl)e  :  J"entends  le  bruit  de  la  meule, 
mais  ne  vois  pas  la  farine. 

—  Elle  fait  parler  d'elle.  Se  dit  d'une  femme  dont  la  conduite 
équivoque  donne  prise  à  la  médisance. 

Je  veux  croire  (ju'au  fond  il  ne  se  passe  rien. 
Mais  enfin  on  en  parle,  et  cela  n"cst  pas  bien. 

(Moi.iKnE.) 

In  fabulis  esse  (Suétone)  :  être  la  fable  du  quartier. 
La  femme  la  plus  veitueuse  est  celle  dont  on  parle  le  moins. 
(Thucydide.) 

—  Il  y  a  de  la  gloire  pour  un  homme  à  faire  parler  de  lui  ;  et  de 
la  honte  pour  une  femme  à  faire  parler  d'elle. 

—  Trop  gratter  cuit,  trop  parler  nuit,  ...et  trop  manger  fait  mal 
au  ventre. 

Pour  arriver  au  comble  de  la  sagesse,  il  ne  faut  ni  trop  dormir, 
ni  trop  manger,  ni  trop  parler.  (Maxime  arabe.) 

Quand  on  n'a  pas  assez  d'esprit  pour  parler,  il  faut  avoir  assez 
de  jugement  pour  se  taire. 

—  On  lit  sur  un  vitrail  de  l'hôtel  de  Jacques-Cœur,  à  Bourges, 

celte  devise  mystérieuse  : 

En  close  bouclie. 
N'entre  mouche. 


PAR  213 

—  Vous   parle/,   (rop.    vous   n'aurez   pas   ma   toile.    Flciiry   de 

BelliiiLaMi  l'acoiite  (pi"iiii  paysan  niais,  (-iiarjié  par  sa  mrrc  (Vallcr 

vendre  une  pi(''('e  de  toile,  ri  pi't''\enu  d'éviter  de  faire  marché  avec 

des  femmes  liaNardcs.  renvoya  tontes  celles  qui  se  présentèrent,  en 

leur  disant  :  «  Vous  pai'le/,  trop,  vous  n'aurez  pas  ma  toile  «  ;  et 

Huit  par  la  laisser  à  une  statue  de  la  Vierae,  placée  sur  la  roule,  et 

ipii  lie  parlait  pas. 

Oui  licaucoin)  iKirIc  cl  piMi  l'iilciiil  (l'Cduli'i, 
l^onr  iuic  à  la  foiro  se  vcinl. 

—  Un  homme  fait,  en  moyenne,  trois  heures  de  conversation 
par  jour.  .\u  taux  de  cent  mots  à  la  minute,  cela  fait  environ  cent 
I)a,iies  par  semaine. 

—  Parle  peu.  et  écoule  hoaucoup.  (I)émonax.) 

Tout  oiiyr,  tout  voir  ot  rien  dire, 
.Mt-rito  en  tout  temi).s  qu'on  fariniiro. 

(PvAliliLAlS.) 

Les  personnes  qui  savent  le  plus  sont  celles  qui  parlent  le  moins. 
Les  ruisseaux  hahilleul  Iteaucoiip,  parce  qu'ils  ont  peu  de  profon- 
deui-:  les  grands  lleuves  sont  silencieux. 

—  Descartes  gardait  ordinairement  le  silence  dans  les  réunions 
nombreuses.  Thomas  dit  de  lui  qu'  «  il  possédait  des  richesses  en 
lingots,  mais  non  en  monnaie  courante  ». 

La  Fontaine  avait  dans  le  inonde  un  air  timide  et  niais. 

Le  grand  Corneille  était  ennuyeux  dans  la  conversation,  et  ne 
parlait  pas  même  correctement  la  langue  qu'il  savait  si  bien  écrire. 

Rousseau  était  d'une  timidité  qui  l'empêchait  d'ouvrir  la  bouche 
dans  un  salon.  (Confessions,  liv.  1(1.) 

Montesquieu.  Fénelon,  Foutenelle,  Voltaire,  xM'"^  de  Staël  possé- 
daient, au  contraire,  le  talent  de  la  conversation  au  suprême  degré. 

—  Celui  (pii  parle  peu  se  fait  respecter  comme  un  homme  mysté- 
rieux, aimer  comme  un  homme  discret,  consulter  comme  un  honnne 
prudent. 

La  nature  nous  a  donné  deux  oreilles,  et  une  seule  Ijouche,  pour 
nous  appi'endre  que  nous  devons  plus  écouter  que  parler.  (Zenon.) 

Os'  umun,  natiira  dans  formavit  et  aures, 
il  plus  audircl  quant  loijuerelur  homo. 

(Catox  le  Censeur.) 

En  parlant  peu,  on  entend  davantage.  (Proverbe  russe.) 

Que  ta  bouche  soit  la  prison  de  ta  langue.  (Le  brahme  voyageur.] 

Il  faut  tourner  sept  fois  sa  langue  dans  sa  bouche  avant  de  parler. 


214  '      PAR 

Oui  no  s.'iit  pns  se  laire,  no  s;iit  pns  parler.  (PiUaciis.) 

l'Iiis  a  appris  (|iij  se  lail 
Mlle  (pii  parli'  et  haut  lirait. 

Oy,  voy  ot  te  tay,  si  tu  veux  vivre  on  paix.  (xiii«  siôde.) 

Ouïr,  \()ir,  si-  taire  de  tout, 
Fait  l'IiDiiiuic  l)i('n  venir  partdul. 

Oui  parle  sèmo,  qui  érotitc  récolte.  (Pytha.^ore.) 
La  parole  est  d'argent,  et  le  silence  est  d'or. 

11  est  1)011  (le  |)arler,  et  meilleur  de  se  taire. 

(La  Fo.ntaixk.) 

Le  fou  même  passe  pour  sage  quand  il  se  tait.  Stultus  qurxjue, 

si  tacucril,  sapiens  repiUalur.  (Salomon.) 

Un  sot  (lui  lie  dit  mot,  ne  se  distinj.;uf  pas 
D"un  sa^ant  qui  se  tait. 

(Moi.iKiiK,  Déj/it.) 

Aussi  dit-on  que  le  silence  est  l'esprit  des  sots. 

La  bouche  parle  de  l'abondance  du  cœur.  (Mathieu,  XIL  14.) 

Parole  ouïe  est  perdue, 

Si  elle  n'est  de  cœur  entendue. 

On  parle  volontiers  de  ce  qu'on  aime,  et  la  passion  rend  éloquent. 

La  langue  ne  doit  pas  parler 
Sans  congé  au  cœur  ilemander. 

Parodie,  du  grec  pai'a,  contre,  ôdé.  chant. 

Ouvrage  dans  lequel  on  traduit  en  comique  une  œuvre  sérieuse. 

Tel  est  le  Chapelain  décoiffé,  où  Boileau  et  Racine  ont  parodié 
quelques  scènes  du  Cid.  On  connaît  \ Enéide  travestie,  de  Scarron, 
YOvide  en  belle  liumeur. 

Les  pièces  de  théâtre  ont  été  souvent  parodiées.  Ainsi  Inès  de 
Castro  est  devenue  Agnès  de  Chaillot. 

Parole,  anciennement  7K/;"««/e,  du  X^ûw  j^araàola. 
La  parole  est  le  vêtement  de  la  pensée.  Selon  Talleyrand,  elle 
n'en  serait  que  le  déguisement. 
La  parole  est  l'interprète  de  l'âme. 
Parole  d'honneur  !  —  Cet  homme  n'a  qu'une  parole. 
Le  bœuf  s'attache  par  les  cornes,  et  l'homme  par  la  parole. 
Parole  lancée  ne  peut  être  rappelée. 

Nescit  vox  missa  recerti. 

(HuRACE,  Pisons.  318.) 

El  semel  emifsum  volât  irrevocabilc  verbum. 

(HouACK,  Ejiitrc  I,  18.) 


l'Ail  213 

—  Surveille  (a  parole  :  un  jour  elle  se  retournera  contre  toi. 
(Proverbe  italien.) 

Le  mot  qui  t'échappe  es!  Ion  maître  ;  celui  que  tu  reliens  est  ton 
esclave.  L'auteur  <X Adolphe  parle  de  mots  irrévocables,  qui,  une 
fois  prononcés,  ne  s'etlaceut  plus  du  souvenir,  et  détruisent  les 
liaisons  les  plus  fortes. 

Verba  volant,  srrlpta  marient.  (Voy.  écrits.) 

—  Il  ne  lui  manque  que  la  parole.  Se  dit  d'un  portrait  ressem- 
blant. 

-Miciiel-Ange  disait  en  présence  d'une  statue  de  saint  Marc  par 
Donatello  :  Marco,  perche  non  mi  parla  ? 

M*-'""  de  Beaumanoir  de  Lavardin,  évèque  du  Mans,  était  sujet  à 
rester  court  en  chaire.  M'""  de  SaT)lé,  voyant  son  portrait,  dit  : 
«  Mon  Dieu  !  qu'il  est  ressemblant  ;  on  dirait  qu'il  prêche.  » 

Spirantia  signa  (Virgile)  :  des  statues  animées. 

—  Les  paroles  n'ont  pas  d'odeur.  —  Un  mot  obscène  fait  sur 
l'esprit  la  même  impression  qu'une  odeur  fétide  sur  l'odorat. 
(Lamartine.) 

Les  paroles  sont  l'ombre  des  actions.  (Démocritc.) 

A  [)eu  parler,  l)ieu  iteso.uricr. 

Bien  dire  fait  rire,  bien  faire  fait  taire. 

Dict  sans  faict  à  Dieu  déplaist. 
Dict  faisant,  à  Dieu  plaisant. 

(BocvEi.LE,  xvic  siècle.) 

La  meilleure  leçon  est  celle  do  l'exemple.  (La  Harpe.) 

—  On  a  comparé  la  parole  à  une  arme,  et  la  discussion  à  un 
combat.  De  là  sont  venues  les  locutions  :  lutte  parlementaire  ; 
s'escrimer;  entrer  en  lice;  descendre  dans  l'arène;  baisser  pavil- 
lon ;  rendre  les  armes  ;  mettre  les  pouces  {manns  dare).  On  dit 
aussi  :  je  ne  vous  suivrai  pas  sur  ce  terrain. 

Spadassins  de  la  plume  (Saint-Amant)  ;  les  gladiateurs  du  beau 
dire,  —  de  la  république  des  lettres, 

Qui  sur  un  pré  de  papier  lilanc 
Versent  de  l'encre  au  lieu  de  sang. 

—  Dispute  de  mots  :  logomachie,  du  grec  lorjos,  et  machâ, 
combat. 

Flux  de  paroles.  (Voy.  flux.) 

Paroi i,  étymologie  incertaine. 

Ternie  de  jeu  :  le  double  de  la  mise  précédente.  Diffère  de  la 
martingale  en  ce  que  celle-ci  double  la  mise  jusqu'à  ce  que  le  joueur 


216  PAR 

ait  regagne  ce  qu'il  innil  [)erdii  :  tandis  qne  dans  le  paroli,  on  peut 
ne  la  doubler  qu'uni;  l'ois. 

Paronomase,  du  gvac  jxira,  à  coté  de,  onoma,  nom. 

Figure  (jui  consiste  à  suiistilucr  à  un  mot  un  autre  mol  qui  a  à 
peu  prcs  le  même  son. 

Ualtelais  a  usé  et  abusé  de  cette  ligure.  «  Appelez-vous  cccy 
liansailles?  Je  les  appelle  (iantailles  de  m. ..de.  » 

(Voy.  équivoque,  conlrepetlerie.) 

Paronyme,  des  mêmes  éléments  que  le  précédent. 
Mot  qui  a  des  rapports  avec  un  antre  par  son  étymologie,  ou 
seulement  par  sa  forme,  comme  imjms.^ih/e  et  impossible. 

Parpaillot,  origine  historique  ou  anecdolique. 

Le  surnom  de  «  parpaillots  »  fut  donné  aux  protestants,  de 
Jean-Pierre  de  Parpaille,  d'Orange,  l'un  des  chefs  calvinistes  déca- 
pités à  Avignon  en  lo62. 

Parques,  du  latin  jxircere,  épargner  (par  antiphrase),  ou  de 
parcus,  économe  (de  la  vie  humaine). 

—  Fatales  deœ  :  les  déesses  fatales,  les  divinités  infernales. 
Elles  étaient  au  nombre  de  trois  :  Clotho,  Lachésis  et  Atropos. 

Clotho,  la  plus  jeune,  présidait  au  moment  de  la   naissance  de 

l'homme,  et  tenait  la  quenouille;  Lachésis  filait  les  jours  et  les 

événements  de  la  vie  ;  Atropos,  l'aînée  des  sœurs,  coupait  de  ses 

ciseaux  le  fil  des  destinées  Immaines. 

C'est  là,  cher  Lamoignon,  que  mon  esprit  tranquille 
Met  à  prolit  les  jours  que  la  Parque  me  file. 

(BoiLEAu.  Epitrc  VI.) 

Les  Parques  filent  pour  les  gens  heureux,  des  jours  de  soie  et  d'or. 

Part,  du  latin  partem  ;  d'où  parti,  partie,  partir. 

—  A  part  soi.  On  devrait  dire  :  à  par  soi,  per  se,  et  non  ad 
partem.  (Aussi  ne  vient-il  pas  de  ad  partcfu,  mais  de  a  parte,  qui 
est  aussi  français.) 

—  Prendre  cpielqu'un  à  part.  On  disait  autrefois  à  quartier. 

J'ai  quelque  chose  à  vous  dire,  ajouta-t-elle,  en  la  tirant  un 
moment  à  quartier.  (Marivaux,  Vie  de  Marianne.) 
Encore  une  locution  dont  l'usage  s'est  perdu. 

Ita  verborum  velus  interil  a-tas. 

(UORACE.) 

(Ainsi  tombent  de  vétusté  les  mots  autrefois  florissants.) 


AR 


217 


—  La  pari  du  dialil(\  du  feu.  du  lion:  c'ost-à-dirc  du  plus  lorl. 
Allusion  à  une  fable  de  Phèdre,  iuiilée  par  La  Fontaine. 

—  On  écrit  souvent  :  «  Je  prends  une  [);ui  l>ien  vive  au  uMllicur 
qui  vient  de  vous  frapper...  '<  Une  part  peut  èlre  .-i-aude  ou  pelile; 
elle  in^  saui'ait  èlre  \ive. 

Partageux,  néoloL^isuie. 

Utopistes,  couinuinisles,  qui  croioiU  à  la  possihililé  du  partage 
égal  de  tous  les  i)ieus  entre  tous. 

Parti,  du  veriie  jinrlli':  anciennonTent  ^^■'«r/r/^e/':  latin  juir/iri. 

—  Changer  de  parti  :  tourner  casaque.  (Yoy.  opinion.) 


PARTIS  c-i:lki3Ui:s 


Anciens,  Modernes. 

Blancs,  Bleus. 

Bien,  Mal. 

Capnlets,  Montaigus. 

Christianisme.  Paganisme. 

Classiques,  Uomanliques. 

Conservateurs,  Radicaux. 

Droite,  Gauche. 

Foi,  Scepticisme. 

Frondeurs,  Mazarins. 

Gallicans,  Ultramontains. 


Gluckistes, 

Guelfes, 

Idéalistes, 

Jansénistes, 

Montagnards, 

Luthériens, 

Républicains, 

Rouges, 

Verts, 

Wigh, 


Piccinistes. 

Gibelins. 

Réalistes. 

Molinistes. 

Girondins. 

Papistes. 

Monarchistes. 

Blancs. 

Bleus  (au  cirque). 

Torv. 


Yorck  (rose  Manche),  Lancastro  (rose nm) 


Partibus  (in).  (Yoy.  évêque.) 

Participe,  du  latin  particeps  (parlem  caperel. 

Mot  (jui  tient  du  verbe  et  de  l'adjectif.  C'est  une  forme  [larlicu- 
lière,  un  mode  du  verbe,  qui  joue  dans  la  phrase  le  rc'ile  d'un 
adjectif. 

On  distingue  le  participe  présent  et  le  participe  passé  :  aimant, 
aimé. 

Particule,  du  latin  diminutif  pnrtîcu/a. 

Petit  mot,  ou  portion  de  mot,  qui  ne  s'emploie  pas  seul,  et 
destiné  à  moditier  le  sens  d'un  autre  mot. 

Telles  sont  les  syllabes  dis,  me,  dé,  dans  disjoindre,  nu'priser, 
déplaire  (préhxes)  ;  aille,  cule  ou  icule,  dans  rocaille,  monticule 
(suffixes). 

-—  Particule  nobiliaire,  préposition  ou  article  contracté  qui 
précède  un  nom  propre  :  de,  du,  des,  de  la. 


218  PAR 

Particulier,  du  l.'iiiii  jxirliculdvls. 

1"  Adj('rli\('iii('iil  :  s'(i|(|i()S('  ;'i  piihlic,  ;'i  onliiuiirc  ou  ii  coiiiiniin, 
dans  le  sens  dcoxlr.'iordiii.iiir,  lii/urrc 
2"  Siil)Sl!iiilivoiiienl  :  un  individu,  un  (luidiim. 

Partie,  dérivé  du  porticiitc  ûa  parli7%  im  féminin. 

—  P;ii(ic  carrée  :  partie  de  plaisir  où  se  trouvent  ivunis  deux 
jioninics  et  deux  femmes. 

Nous  l'erons  quelquel'ois  de  petites  parties  carrées.  (Le  Sage, 
Turca7'et.) 

Partir,  du  latin  partiri,  partager. 
Partii'  d'un  lieu,  c'est  s'en  séparer. 

Le  mot  est  resté  avec  son  premier  sens  dans  la  loculion  :  avoir 
maille  à  partir.  (Voy.  maille.) 

—  Synonymes  :  s'en  aller.  Et,  avec  idée  de  l'uite  :  liclier  son 
camp,  décamper,  prendre  la  poudre  d'escampette,  décarrer  (Grand- 
val),  enliler  la  venelle,  montrer  les  talons. 

Partir  sans  tambour  ni  trompette. 

Parure,  dérivé  de  parer,  latin  parare. 

El  toujours  la  parure  t'iiiliollit  la  beauté. 

{Marie,  oijéiii-romirjiie.) 

Iiulullur,  formosa  est  :  exuitur  f(>r)na  ipsa  est.  (Aristénète.) 
Vêtue,  elle  est  belle  ;  nue,  c'est  la  beauté  même. 

Pulchra  inniier  nvjhi  rril  fjurnii  iinrpnrala  pulclirior. 

(Plalik.) 

Parvenu,  participe  de  parrenir,  hûn  perrentre. 

Synonymes  :  vulgo  concepti;  un  aigle  né  dans  un  poulailler. 

Rabelais  (livre  I,  cli.  1)  dit  :  «  Plusieurs  sont  aujourd'buy  empe- 
reurs, roys,  ducs,  princes  et  papes,  en  la  terre,  lesquelz  sont 
descendus  de  quelques  porteurs  de  rogatons  et  de  coustrez  ;  comme 
au  rebours  plusieurs  sont  gueux  de  l'bostière  (h()pital),  soulTreteux 
et  misérables,  lesquelz  sont  descendus  de  sang  et  ligne  de  grands 
roys  et  empereurs.  » 

—  Il  n'est  orgueil  que  de  pauvre  enrichi. 

Vous  lie  savez  donc  pas  jusrprdû  \a  rarrogance 
D'un  bourgeois  cnnoî)li,  fier  de  son  opulence  "? 

(Destolxhf.s.) 

Vilain  enriclii 
Ne  connaît  parent  ni  ami. 

Quand  vient  la  gloire 
S'en  va  la  mémoire. 


PAS  219 

Parvis,  doublet  ûq  pnraf/is  :  ori.uinc  IiélinViquo  cl  liiltliiiiic. 

(Jiiclques-uiis  prétendent  le  tirer  a  parcls  educandis,  parce  (jne 
les  écoles  étaient  étaldies  auprès  des  églises. 

Place  devant  la  urande  porte  d'nne  église,  et  in-inciiialcnicnt 
d'une  cathédrale. 

Désigne  aussi,  dans  la  Bible,  l'espace  cpii  entoui-ait  le  labcrnacle, 
dans  le  temple  de  .lérusalem. 

Pas,  du  latin  /lassus,  mouvement  des  jambes. 
S'emploie  très  fré(iuemiuent,  comme  poinl,  (jouUc,  mie,  pour 
renforcer  la  négation. 

—  Pas  de  clerc  :  démarche  maladroite. 

—  Faux  pas  :  un  faux  pas  est  souvent  plus  dangereux  qu'une 
chute. 

—  Être  dans  un  mauvais  pas  :  sortir  d'un  mauvais  pas.  Expres- 
sions empruntées  à  l'ancienne  chevalerie. 

Pas  est  pour  passage,  passade,  et  le  pas  d'armes  consistait  à 
forcer  un  passage  fortilié  ou  gardé  par  l'ennemi  :  à  attaquer  un 
pont,  un  défilé  ;  à  franchir  une  rivière  ou  tout  autre  passage  étroit 
ou  diflicile,  qu'il  était  important  d'occuper. 

—  Il  n'y  a  que  le  premier  pas  qui  coule  :  le  plus  diflicile  est  de 
commencer. 

Dans  le  crimo  il  suffit  (ju'iuie  fois  (ni  drlmto  ; 
L'iie  chute  toujours  attire  une  autre  rlmic. 

—  S'il  n'est  pas  exact  de  dire  qu'il  n'y  a  que  le  i)remier  pas  qui 
coûte,  il  faut  convenir  que  c'est  celui  qui  coûte  le  plus. 

Le  cardinal  de  Polignac  racontait  à  M™^  du  DelTand  la  légende  de 
saint  Denis,  qui,  après  avoir  été  décapité  à  Montmartre  releva  sa 
tète,  la  porta  dans  ses  mains  en  la  baisant,  jusqu'au  lieu  où  l'on  a 
bâti  la  catbédrale  de  Saint-Denis.  Comme  l'Éminence  disait  que  la 
route  parcourue  par  le  saint  était  bien  longue,  la  dame  répondit  : 
«  Monseigneur,  il  n'y  a  que  le  premier  pas  qui  coûte.  « 

Pasquinade,  de  Pasquin,  nom  d'homme. 

Pasquin  était  le  nom  d'un  savetier  de  Rome,  connu  par  ses 
brocards.  On  donna  ce  nom,  par  extension,  à  une  statue  mutilée, 
en  marbre,  qui  est  au  coin  du  palais  des  Ursins,  et  à  laquelle  on 
attacbe  des  satires  et  des  plaisanteries.  Marforio,  autre  statue 
antique,  placée  en  face  de  Pasquin,  fait  les  questions  auxquelles 
Pasquin  répond.  Pasquin  et  Marforio  sont,  en  quelque  sorte,  les 
historiens  satiriques  de  la  papauté;  le  dialogue  dure  depuis  cinq 


220  PAS 

cents  ans.  PcikIiiiiI  la  miil.  iiiic  main  fiiflivo  rollo  sur  li' piôdcstal 
répi.uramnio  vcii<ioresso  (iiii  liiciiliil  circiih;  do  boiiclie  en  hoiiclio. 

Les  papos,  (lit  .Mercier,  ont  laissé  Pasquin  et  Marforio  jiarlcr  et 
se  répondre.  Des  railleries,  des  lardons  amusent  le  peiijile  et 
l'assoupissent.  Ne  >aMl-il  i)as  mieux  encore  que  la  satire  soit  dans 
la  bouche  de  la  statue,  ipic  de  rester  dans  le  cœur,  où  elle  fermente 
et  s'aigrit?  La  mauvaise  humeur  du  peuple  s'évapore  ainsi,  et 
jamais  les  hi-is  ne  se  lèvent,  quand  la  langue  a  pu  se  soulager 
pleinement. 

Le  nom  donné  à  la  statue  Nient  peut-être  de  Pasquin,  acteur 
de  la  comédie  italienne,  bel  esprit,  beau  parleur  et  menteur  on 
diable. 

Passer,  verbe  tiré  de  jxis. 

—  Passer  un  mauvais  moment,  ...un  mauvais  quart-d'heurc. 

—  Génin  (Varialions),  explique  les  locutions  diverses  où  se 
rencontre  le  verljo  passer  :  passer  le  temps  ;  passer  la  rivière  ; 
passer  pour  un  honnête  liomme  :  les  pièces  de  Lucques  et  de 
Monaco  ne  passent  pas  en  France.  Toutes  ces  locutions  ont  pour 
origine  le  mot  pas  :  pa'iser  y  est  synonyme  de  cheminer. 

Mais  dans  les  locutions  suivantes, /ja^.^^?' vient  du  VàWw  pal ior  : 
Je  passe  condamnation  ;  c'est-à-dire  je  soulTre  qu'on  me  condamne. 
Je  vous  passe  le  mot  ;  c'est-à-dire  je  vous  le  pardonne.  Il  passe  à 
son  enfant  tous  ses  caprices  :  il  souffre  tout  de  son  enfant.  Passer 
un  mauvais  moment  signifierait  donc  aussi  endurer  un  mauvais 
moment. 

Il  suffit  de  constater  que  passer,  d'abord  neutre,  devient  actif 
dans  le  sens  de  traverser,  faire  traverser,  puis  de  inscrire,  de 
laisser  aller,  d'accepter,  etc. 

Tout  passe,  tout  casse,  tout  lasse. 
Tout  Dorante  devient  Géronte. 

J'en  passe  et  des  meilleurs. 

(V.  Ui  GO.  ffernani,  UI.  4.) 

Passe-passe  (faire  des  tours  de).  Se  dit  des  tours  que  fout  les 
joueurs  de  gobelets,  les  prestidigitateurs. 
Raltelais  dit  (liv.  1,  chap.  2i)  :  trajectaires. 

Passion,  du   latin  passio,   du   participe  passas,    de  paf/or, 
soutïrir,  qui  a  donné  aussi  :  patir,  patient,  patience. 
Ce  mot,  qui  désigne  une  vive  atïection  de  l'âme,  a  conservé  sa 


PAT  221 

si,!ini(icMlioii  latine  de  soiitlVance  physique,  dans  la  lociilioii  :  souf- 
frir mort  et  passion  :  la  Passion  de  .lésns-Clirist. 

Venc,  pcr  noslre  salvnmcn, 
liccrbre  mort  e  passio. 

(P.    D'AlIVKnCNE.) 

(Il  vint  pour  notre  saint,  recevoir  niort  et  passion.) 

—  Une  passion  est  un  caiJrico  rpii  a  rencontré  des  obstacles. 
La  passion  passe  quand  rolijct  est  (létri. 

—  Le  pire  de  tons  les  vices  est  de  n'avoir  aucune  passion. 
Tonte  passion  est  éloqiu^ite  :  tout  homme  persuadé  persuade  ; 

pour   arracher  des   pleurs,   il    faut    pleurer;    l'enthousiasme   est 
conta.uieux.  (V.  Iliiuo.) 

Pastiche,  de  l'italien  /)nsfirrio,  mélange,  pot-pourri. 
OLinre  d'art  ou  de  littérature,  dont  la  manière  est  imitée  d'un 
autre  auteur. 

Patafiole,  terme  d'araot  populaire. 
Oue  le  liou  Dieu  ...le  dialtle  te  pataliole  ! 
De  l'italien  pata/lo.  abréviation  de  opilafio,  épitaplie. 
Cela  revient  à  dire  :  (pie  Dieu  fasse  ton  épitaphe,  que  le  diable 
t'emporte  ! 

Pataquès  (voy.  cuir).  Terme  po[)ulaire. 

Faute  de  langage  qui  consiste  à  faire  entendre  un  /  llnal  quand 
il  y  a  un  s,  et  réciproquement. 

Domergue  dit  qu'un  homme  se  trouvant  avec  deux  dames  peu 
lettrées,  aperçut  à  terre  un  éventail  : 

«  Cet  éventail  est-il  à  vous  ?  dit-il  à  l'une  d'elles.  —  Il  n'est  point 
z'à  moi.  —  Il  est  donc  à  vous  l  dit-il  eu  s'adressaut  à  l'autre.  —  Il 
n'est  pas  t'a  moi.  —  Alors,  s'il  n'est  point  z'à  vous,  s'il  n'est  pas 
t'a  vous,  je  ne  sais  pas  t'a  qu'est-ce.  » 

Le  mot  est  resté,  après  avoir  fait  beaucoup  rire.  Mais  l'étymologie 
est-elle  bien  sûre  ? 

Patapd,  nom  d'une  petite  monnaie  sous  Louis  XII.  Elle  valait 
trois  deniers,  et  a  subsisté  longtemps  dans  les  Flandres. 

Patati-patata,  onomatopée  qui  imite  le  bruit  fait  par  plusieurs 
forgerons  qui  frappent  ensemble  sur  l'enclurae. 

...Palatk  patdtncqnc  sonnnles 
Enclumas... 

(BF.i.LEAf,  Diclamen  mctrificum.) 

Patatras,  onomatopée. 


222  PAT 

h>xcl;iiii;i(ioii  iroiminc  (^ii  voyaiil  t()iiil)t'r  qii('lqii"iiii,  ou  on  pnrlant 
do  (|ii('l(iii('  clioso  (|iii  loiiihc. 

—  François  de  (loii/.a.Liiic,  duc  do  Nevcrs,  étant  tombé  de  dicval 
on  liaNorsanl  ]*ouilly,  nno  vioillo  l'oinme  lui  cria:  «  Patatras! 
Monsieur  de  Nevers.  »  lien  lui  si  l'ori  ii-rilé.  qu'il  (it  saccager  la 
vill(!  par  ses  soldats. 

Pataud,  dérivé  do  j)ct((e. 

Jeiino  chien  à  grosses  pattes,  et,  par  suite,  désigne  un  gros 
lioinmo  mal  l'ait,  un  lourdaud. 

Pâte,  du  latin  /xis/a,  isrec  pnslt^,  bouillie. 

—  Bonne,  [làto  d'homme  :  qin  manque  de  levain,  (^eliii  qu'on 
pourrait  ([ualilioi-  d'hoiiimo  apathique  avec  calembour. 

Ouiuaidt,  le  [)0(''te  du  xvii'^  siècb',  était  fils  d'un  boulanger,  et 
doué  d'un  caractère  doux  et  conq)laisant.  Furetière  y  fait  allusion, 
quand  il  dit  :  «  Quinault  est  la  meilleure  pâte  d'homme  que  je 
connaisse  ;  il  ne  lui  reste  aucun  venin  des  injures  qu'il  reçoit.  Il 
connaît  cinq  ou  six  cents  mots  de  la  langue,  qu'il  blute,  sasse  et 
ressasse,  et  qu'il  pétrit  du  mieux  qu'il  peut.  » 

Patelin,  mot  d'origine  littéraire. 

Homme  faux  et  mielleux,  comme  le  personnage  de  la  farce  qui 
porte  ce  nom  (xv^  siècle),  attribuée  à  Pierre  Blancbet. 

—  Patelin,  comme  le  \wo\enç?i\  jjaiefile,  patte  de  chat,  patte  de 
velours,  signilie  patte  douce  (loils). 

La  première  édition  de  la  Farce  de  Patelin  est  datée  de  Paris, 
Germain  Benant,  in-4°,  20  décembre  1490, 

Pierre  Blancbet  a  eu  la  même  gloire  que  Molière.  Si  Tartulîe  est 
devenu  un  nom  appellatif,  et  signiOe  hypocrite,  PateUn  signifie  un 
homme  qui  en  llatte  un  autre  pour  le  duper,  et  patelinage  est 
devenu  synonyme  de  jargon  doucereux.  «  Parlez-vous  Christian, 
mon  amy,  ou  langage  patheUnoys?  »  (Rabelais,  II,  9.) 

Il  en  est  de  même  de  Renard,  nom  donné  par  Pierre  de  Saint- 
Cloud  au  goupil,  dans  le  Roman  de  lîenart,  et  qui  est  devenu  en 
quelque  sorte,  synonyme  de  finesse  et  de  ruse. 

—  On  trouve  dans  patelin  une  formation  analogue  à  celle  de 
papelu,  patepelue,  nom  satirique  donné,  à  l'époque  de  la  Réforme, 
aux  papistes  hypocrites,  qui  ne  pratiquaient  pas  fÉvangile  pur 
comme  les  luthériens. 

Patenôtre.  Emprunté  du  début  de  l'oraison  dominicale,  Pater 

7X0  s  ter. 


l'AT  223 

—  Diiv  la  (laleiKUro  à  l'cMuers  (Rabelais)  :  dire  des  injures, 
prononcer  des  nialédietions. 

Patente,  du  lalin  ixticnicm. 

AbréNialion  de  lettres  palentcs,  c'csl-à-dire  ouverlcs. 

Patience,  dn  latin  pat  lent  ia.  de  pat  i,  endurer. 

—  La  [)atienee  est  Tart  despércr.  (Vauvenargues.) 

La    patience  est  le  remède  à   tous   les    maux.   Cairii^  dolori 
remedium  est  patientia. 
La  patience  est  la  vertu  des  mallieui-eux. 
La  patience  est  la  force  des  faibles.  (J.  Delacroix.) 

—  On  me  parle  de  la  patience,  qui  est,  dit-on,  le  remède  à  tous 
les  maux  ;  je  la  prends  comme  une  médecine  qui  ne  coûte  guère, 
mais  qui  ne  guérit  de  rien.  (Poussin,  Lettre  à  M.  de  Chanteloup.) 

—  Avec  du  temps  et  de  la  patience,  on  vient  à  bout  de  tout. 
(Voy.  temps.) 

—  Patience  passe  science. 

BulVon  a  dit  :  «  Le  génie  est  une  longue  patience.  »  La  patience 
est,  en  elVet,  ce  qui  cbez  Tliomme  ressemble  le  plus  au  procédé  que 
la  nature  emploie  dans  la  création.  C'est  une  manière  d'être  de 
l'infini. 

Patiens  quia  a'tei'nus,  a  dit  saint  Augustin  :  Dieu  est  patient 
parce  qu'il  est  éternel. 

—  La  patience  ne  donne  pas  le  génie  ;  mais  il  n'y  a  pas  de  génie 
sans  patience. 

Patine,  mot  d'origine  incertaine. 

Carbonate  vert  de  bronze,  qui  se  forme  sur  les  statues  et  les 
médailles  de  bronze  antiques  ;  sorte  de  rouille  verdâtre  du  cuivre 
et  du  bronze  :  vert  de  gris. 

Peut-être  du  hlin  patina,  plat,  parce  que  les  plats  antiques  ou 
patines,  quand  on  les  trouve,  sont  revêtus  de  ce  sel. 

Tempus  pictor,  dit  l'arcbéologie. 

Patiner,  dérivé  de-  patte. 

Manier  sans  ménagement,  manier  d'une  façon  désbonnête. 

Ah  !  doucement,  je  n'aime  pas  les  patineurs.  (Molière,  Georges 

Dandin.) 

Los  palineurs  soiil  ficiis  insufjportables 
.Même  aux  boaiilés  (|ui  sont  1res  patinablos. 

(ScAIlI'.OX.) 

Pâtir,  emprunté  du  lalin  pâli,  soullVir. 


224  PAT 

l']ii(liii'('i'  un  iii:il  cause  par  aiili'iii.  iJ'oii  jxtliras  (argot),  soull'rc 
douleur. 

On  \(iil  (|||('  (le  lulll  tf'nips 
Les  [iclils  (iiit  |);ili  des  sollises  (los  gi'ands. 

(La  Fontaine.) 
<Jitiil(jiiiil  ilcliraitl  rerjes  plecluntnr  Ackici. 

(HotlACE.) 

Patois,  de  palrius  (sermo),  langage  du  pays. 

Ce  mot  s'écrivait  patrois,  et  dans  les  adjectifs  en  oi.^,  tels  que 
François,  Anglois,  Chinois,  le  suffixe  est  analogue  aux  terminaisons 
latines  en  us,  tus,  osus,  u'/t.sis... 

Peut-être  aussi  de /V;/rt/v/.s-,  iialùtant  de  Padoue  :  parler  patois 
serait  pai-ler  conimc  à  Padoue.  (Voy.  vache  espagnole.) 

—  Le  mot  jxilois,  dit  Granier  de  Cassagnac  {Histoire  des  Ori- 
gines de  la  langue  française),  signifie  «  langue  locale  ».  Les  patois 
des  diverses  contrées  d'un  pays  sont  les  dialectes,  et  la  langue 
nationale  des  grands  États  n'est  qu'un  patois  privilégié,  qui  a  été 
adopté  par  l'État,  est  imposé  par  la  loi  et  enseigné  dans  les  écoles 
comme  langue  nationale,  pour  qu'elle  serve  de  lien  entre  toutes  les 
parties  d'une  grande  nation.  C'est  ce  qui  est  arrivé,  en  Italie,  au 
dialecte  de  Florence  ;  en  Allemagne,  au  dialecte  de  la  Souabe  ;  en 
Espagne,  à  celui  de  la  vieille  Castille  ;  en  Angleterre,  à  celui  des 
comtés  de  Kent  et  de  Midlcsex  ;  en  France,  au  dialecte  de  l'Ile  de 
France  et  de  Paris. 

Ces  patois  d'élection,  perfectionnés  par  les  savants  et  les  poètes, 
sont  devenus  des  langues  littéraires,  servant  d'interprètes  entre  la 
population,  dans  les  relations  officielles:  mais  ce  n'en  sont  pas  moins 
d'anciens  patois  parvenus  aux  honneurs  ;  tout  le  monde  les  parle, 
ou  du  moins  les  comprend,  et  les  habitants  des  campagnes  eux- 
mêmes  ont  deux  langues  :  l'une  est  la  langue  naturelle,  apprise  au 
berceau  ;  l'autre,  la  langue  artificielle,  apprise  à  l'école.  (Chap.  YII.) 

—  Alexandre  Dumas,  au  sujet  de  l'idiome  d'une  bourgade  des 
Alpes,  dit  :  «  L'abominable  patois  de  ce  pays  pourrait  passer  pour 
de  l'auvergnat  corrompu.  » 

Les  patois,  si  méprisés  dans  les  villes,  sont  regardés  comme  du 
français  qui  s'est  altéré  dans  la  bouche  du  peuple  des  provinces. 
C'est  tout  le  contraire,  et  les  patois  sont  les  héritiers  des  dialectes 
qui  se  parlaient  avant  le  xiv^  siècle,  dont  la  langue  française  s'est 
éloignée  de  plus  en  plus,  car  l'idiome  du  peuple  change  moins  que 
celui  des  classes  lettrées,  et  une  preuve  évidente  en  est  dans  la 
manière  dont  parlent  les  paysans  dans  les  comédies,  et  notamment 


PAT  22o 

(lins  riilliaiK-e  d'un  verbe  pluriel  avec  la  première  personne  du 
sin,uiilier  :  je  soninies.  j'allons.  je  disons...,  de  iiicnie  (pn;  la  siilisli- 
liition  de  Va  à  \'c\  de  la  diplitlionguc  ou  à  l'o,  lorsipiils  disent 
Piarre,  nuir/c,  pour  Plcrro.  merle,  et  chouse  pour  chose. 

C'est  pourtant  ainsi  qu'on  parlait  à  la  cour  de  Fi'aneois  l''%  le 
Père  des  Lettres,  et  voici  nu  fragment  de  la  correspondance  de  ce 
roi  à  M.  de  Montmorency  :  «  Le  cerf  nous  a  menés  jusqu'au  tartre 
de  Dumigny...  J' avons  espérance  qu'il  fera  beau  temps,  veu  ce  que 
disent  les  estoiles  (\\\(i  façons  eu  le  loysir  de  voir...  Perot  s'en  est 
fouy,  qui  ne  s'est  ousé  trouver  devant  moy.  » 

—  Tout  en  nous  moquant  de  ces  formes  surannées  du  langage 
chez  les  paysans,  nous  commettons  tous  les  jours  la  même  faute 
sans  nous  en  douter  (?),  avec  cette  dllférence  toutefois  que  nous 
mettons  le  verbe  au  singulier  (?)  avec  le  pronom  pluriel,  en  nous 
servant,  comme  les  rois  et  les  évèques,  de  nous  au  lieu  de  je  : 
«  Dans  cet  ouvrage  que  nous  offrons  au  public...  »  Ce  nous  préten- 
tieux est  plus  solennel,  mais  moins  modeste  et  moins  grammatical 
que  je. 

Patres  (ad),  locution  latine. 

—  Aller  ad  patres  :  aller  retrouver  ses  pères  ;  mourir.  (Yoy.) 

—  On  lit  dans  la  Genèse  (X\,  15)  :  Tu  auteni  ibis  ad  paires  : 
quant  à  toi,  tu  iras  vers  tes  pères. 

Et  (Juf/es,  II,  10)  :  Congrerjari  ad  patres  suos. 

Nous  aussitôt,  faisant  partout  florès. 

Sûrs  de  trou\er  déjà  le  boiihoiniiic  ad  palre^i. 

(Recnaiio.) 

Mais  j'ai  grand'peur,  francliement,  que  cela  ne  l'envoie  ad  patres. 
(Molière,  Médecin  mabjré  lui.) 

Patriarche,  du  latin  ecclésiastique  7:>«^/'mrcArt. 
Un  donne  ce  nom,  dans  la  Biljle,  aux  principaux  cliefs  de  famille 
avant  Moïse.  Les  plus  connus  sont  :  Adam,  Abraham,  Isaac,  Jacob... 

Autant  (lu'uu  patriarche  il  vous  faudrait  vieillir. 

(La  Fo.mai.ne.) 

Patricien,  dérive  du  latin  patricius,  patrice. 
Celui   qui  connaît  ses  pères.  Le  patriciat  était   une   noblesse 
instituée  par  Romulus. 
S'opposait  à  plébéien. 
Les  Espagnols  appellent  liidahjo   un  noble,  un   gentilhomme 

15 


ii2G  PAU 

C'est  la  contrnrlion  do  Jtijo  (l'ahjo,  fils  do  quoiqu'un.  rV?t-;'i-dir6 
légitime,  par  npposjlion  à  hûlard. 

C'est  aussi  roriiiiiM^  do  fjerniain,  celui  dont  le  pornio,  ou  l'oi'igine 
est  connue. 

Noble,  Jiobifi.s,  qui  môrile  d'«''tre  connu,  est  d'origine  analogue. 

Patrie,  du  latin  palrin,  sous-cnlcndu  Ini^ra  :  la  terre  paternelle. 
Los  anciens  poètes  latins  l'ont  souvont  appoléo  afma  parens, 
mère  bienfaisante. 

A  tous  les  cœurs  ])ien  nrs  ([iic  la  pytric  est  chère  ! 

(Voi.TAiiiK,  Tancrède.) 

Nescio  qua  natale  solum  dulcedine  ciinclos 
Ducit,  et  itnmemores  non  sinit  esse  sui. 

(OVII.K.) 

(Je  ne  sais  par  quel  cliarme  le  sol  natal  nous  attire  tous,  et  nous 
empêcbe  de  l'oublier.) 

Plus  je  vis  d'étrangers,  plus  j'aimai  ma  patrie. 

(Du  Bellay,  Siège  de  Calais.) 

Mourir  pour  la  patrie 
C'est  le  sort  le  plus  beaU;,  le  plus  digne  d'envie. 

Bulce  et  décorum  est  pro  patria  inori. 

(Horace.) 

Pro  patria  et  in  patria  mori  prœclarum.  (Gicéron,  Ad  Atti- 
eu  m.  YIII.) 

Patrouille,  de  patrouiller,  nnciemiement  patouiller,  dérivé  de 
patte,  agiter  les  pattes. 

Dans  mon  église  l'on  patrouille 
Si  l'on  ne  prend  bien  garde  à  soi  ; 
Et  le  crapaud  et  la  grenouille 
Coassent  l'office  avec  moi. 

(L'abbé  Saxlecq-e  au  Père-Lacbaise.) 

Patte,  mot  d'origine  incertaine. 

—  Faire  patte  de  velours.  (Yoy.) 
Graisser  la  patte.  (Voy.) 

—  Pigeon  pattu,  en  \^ro\ençs^^  pe'pel ut  (pied  pelu). 
La  Fontaine  a  employé  patte-pelu  :  doucereux. 

Paume,  du  \?A\\\  palma,  même  sens. 

Jeu  qui  consiste  à  cbasser  une  balle  avec  la  paume  de  la  main. 

—  Du  jeu  de  paume  viennent  un  grand  nombre  de  locutions  : 
Argent  sous  corde  :  au  jeu  de  paume,  le  prix  des  enjeux  se  met 


PAÛ  22r 

sous  une  corde  tendue  :ni  milieu  du  jeu.  et  ûiii-nie  de  filets  qui 
toucliont  le  sol. 

li;ill()ler  quelqu'un  :  se  jouer  de  lui.  le  herner. 

liricoler  :  siiisir  la  halle  qui  retoui-ne  après  avoir  louché  le  mur. 

Einpauuier  :  recevoir  une  halle  eu  plein  dans  la  paume  de  la 
main.  (Voy.) 

Fiiire  fau\-houd  :  au  liuuré.  manquer  de  [)arole. 

Friser  la  corde  :  lorsque  la  halle  touche  légèrement  la  corde,  en 
passant  par  dessus. 

Peloter  en  attendant  partie  :  au  propre,  jouer  à  la  paume,  pour 
s'exercer,  avant  que  la  partie  soit  engagée. 

Prendre  la  halle  au  hond,  ou  à  la  volée  :  saisir  le  moment  favo- 
rahle. 

Renvoyer  la  halle,  ou  l'éteuf  :  au  ligui'é,  répliquer  vivement. 
L'éleuf  est  la  halle  du  jeu  de  longue-paume. 

A  hou  joueur  la  halle  vient  :  les  habiles  réussissent. 

Pauvre,  du  latin  imuper,  pauperem:  d'où  aussi  paupérisme. 
Le  diminutif   pauvret  s'exprime    en   provençal    par  pecca'iré 
(pécheur),  digne  de  compassion. 

—  Synonymes  :  has-percé.  Lorsqu'on  portait  les  culottes  courtes, 
il  fallait  être  bien  pauvre  pour  ne  pouvoir  pas  faire  raccommoder 
ses  has  à  la  ravaudeuse. 

Panne  (trivial)  vient  de  pannus,  comme  pannosus,  déguenillé, 
mendiant. 

—  Le  pauvre  est  celui  qui  n'a  que  strictement  le  nécessaire  pour 
vivre  :  l'indigent,  celui  qui,  n'ayant  rien,  ni  aucune  industrie 
productive,  est  forcé  de  recourir  à  l'assistance  publique. 

—  Qui  donne  aux  pauvres,  prête  à  Dieu.  Qui  donne  pour  Dieu, 
donue  pour  deux.  C'est  pour  cela  qu'il  ne  faut  pas  confondre 
«  donner  aux  pauvres  »  avec  «  donner  pour  les  pauvres  ». 

—  Le  droit  des  pauvres  est  une  taxe  prélevée,  en  France,  au 
bénéfice  des  h()pitaux.  sur  la  recette  des  spectacles,  bals,  concerts, 
etc.,  etc. 

Louis  XIY,  en  1G!)9,  rendit  ce  droit  obligatoire.  Le  o  décembre 
1809,  il  fut  fixé  à  un  décime  par  franc,  eu  sus  du  prix  de  chaque 
billet  d'entrée. 

La  taxe  des  pauvres  est  un  impôt  établi  en  Angleterre  dès  1602, 
sous  le  règne  d'Elisabeth.  Cette  taxe  a  augmenté  considérablement 
le  nombre  des  pauvres  dans  ce  pays. 

—  bcpjuuper,  les  Anglais  ont  fait  paupérisme,  qui  est  la  pau- 


228  PAV 

vreté  en  ^réiiér;il.  Paiijjcrisnic  c&l  iiii  \il;iin  mot,  qui  désifiiie  la 
cinsse  tout  (Mitirrc  dos  pariîis  do  la  sociôt»'',  dos  dôsliôritôs  du 
hoiiliour,  ol  (jiii  sert  do  lili'o.  au  cliapitrc;  do  la  nouvello  science 
ôconniiiistc  ot  socialislo  où  Irs  (juoslions  de  la  misère  publique  sont 
traitées  par  des  philanthropes  qui  pourraient  s'appeler  paupé- 
7'is/es... 

Pauvreté,  du  latin  pnnpertas,  par  métathèsc. 
DÎNinité  all(''!i:()ri(pio,  Mlle  du  Lnxe  ot  de  la  Paresse,  et  sœur  de 
la  Faim. 

—  Pauvreté  n'est  pas  vice  :  c'est  bien  pis.  (Voltaire.) 

Ce  proverbe  est  ce  qui  reste  d'un  ancien  axiome  de  droit  cité 
dans  les  InstUules  de  Loisel  :  «  Pauvreté  n'est  pas  vice,  et  ne 
désanoblit  point.  » 

Il  y  avait  aussi  une  autre  maxime  de  droit  sur  le  même  sujet  : 
«  Pauvreté  n'est  pas  vice,  mais  en  grand'pauvreté  il  n'y  a  pas 
grand'loyauté.  »  (Loisel.) 

—  La  pauvreté  est  mauvaise  conseillère,  comme  la  faim. 

Malesuada  famés. 

(VmGii.K.) 

Qui  n'a  rien,  en  ce  maudit  âge. 
Est  tenu  pour  fol,  fût-il  sage. 

Pauvreté  empcscbe  les  bons  espritz  de  parvenir.  (B.  Palissy.) 

Pavaner  (se),  dérivé  de  patanc.  troriginc  inconnue. 
Étaler  son  orgueil  connue  le  paon  étale  sa  queue  (?). 

—  Rabelais  dit  penadcr  (I,  12)  d'un  clieval  qui  marche  fièrement 
comnie  un  paon.  Et  La  Fontaine  emploie  se  panada. 

—  La  pavane,  danse  équestre  des  Espagnols,  était  exécutée 
dans  les  carrousels  pour  la  clôture  des  jeux,  et  au  moment  de  la 
parade.  (Colonel  Ambcrt.) 

La  pavane  est  une  danse  de  caractère,  grave  et  noble,  dont  les 
mouvements  imitent  ceux  du  paon. 

Pavillon,  du  latin  papUionem. 

S'est  dit  d'abord  d'une  toute,  des  tentures  servant  d'abri. 

—  Drapeau,  dans  la  marine. 

—  Pavillon  blanc  (parlementaire),  pavillon  de  signal,  pour  avertir 
qu'on  demande  à  parlementer. 

Le  18  décembre  1784,  le  ballon  de  M.  do  Montgolfier  devait 


I>AY  220 

s'ôlovor  ;'i  I.von.  I/nsconsinn  no  put  avoir  lien,  parco  qu'il  tomba  do 
la  iKMuf  loiilc  l;i  joiiriirr.  M.  S...  adressa  ces  vers  aux  aéronautes  : 

V'ivvs  assir^ronnts  du  séjour  du  lonncriv, 

CaluU'Z  votre  colère  : 

i:ii  I  ne  \ oyez-vous  pas  (jue  .luiiiler  tremlilant 

Vous  demande  la  paix  par  son  pavillon  liJane  1 

—  Baisseï"  pa\illoii  :  s'a\onor  vaincu  ;  roudi'c  I(>s  armes. 

LKÙM'nl  sans  cdulredil  lueltre  bas  pavillon. 

(.M;ii,n' iii;,  Etourdi.) 

Vc.villiiin  sulDitiUnr. 

(Stack.) 

Fasccs  submiUcrc,  ...Jfanus  (/arc.  mettre  les  pouces. 
Tous  les  poètes  Itaissent  pavillon  devant  Homère  et  Virgile. 

—  Eu  terme  d'architecture,  hàliineiit  isolé,  ayant  une  toiture  à 
quatre  faces  ou  en  d()ine. 

Pavois,  du  latin  /x/r/'/n-i. 

Arme  (lèt'(Misiv(>  sous  latpielle  ou  s'ahrite,  bouclier. 

—  Vient  [)eul-ètre  plnt()t  de  Titalien  paresc.  de  Pavie,  où  se 
fabriquaient  ces  bouciiei's. 

Payer,  (\\\  latin  pùnivr.  apaiser  (ses  créancici's). 

Eu  acquittant  une  dette,  on  fait  laire  b^s  réclamations,  on  se 
soustrait  aux  poni'siiilcs.  on  est  tranquille  iquielus).  Ou  se  délie 
d'une  ser\ilii(lo  par  la  solvabilité  Iso/t-fre).  de  même  (pi'on  rachète 
son  indépendance  par  une  rançon  (redcinpllo). 

Au  contraire,  on  reste  l'esclave  du  créancier,  tant  qu'on  est 
obéré  (oha-rafiis.  d(>  (rs). 

—  Synonymes  :  jouer  de  la  poche,  jouer  du  pouce,  c'est  faire  le 
geste  si  bien  compris  de  tout  le  monde,  qui  consiste  à  glisser 
vivement  le  pouce  sur  le  i)ont  de  l'index. 

—  Payer  eu  chansons  (voy.),  ...en  monnaie  de  singe  (voy.) 
Payer  de  toupet,  c'est-à-dire  d'elïronterie. 

Payer  les  violons.  (Voy.) 

Payer  ric-à-ric,  ou  rubis  sur  l'ongle  :  très  exactement. 

—  Il  me  la  paiera  plus  cher  qu'au  marché  :  je  me  vengerai. 
Expression  synonyme  de  :  il  ne  renq3ortera  pas  en  Paradis. 

—  Ou  dit  :  la  paye  d'nn  soldat,  le  salaire  d'un  ouvrier,  les  gages 
d'un  domestique,  les  appointements  d'un  commis,  les  lionoraires 
d'un  avocat. 

—  Payer  de  sa  personne  :  s'exposer  hardiment. 

Solrere  in  œre  nul,  in  cute.  Payer  de  sa  bourse  ou  de  sa  peau. 


230  PAY 

La  loi  des  Dnii/o,  (aides,  à  Uonie.  livrait  le  (It'hilciir  insolvable  à 
la  merci  de  ses  créanciers  et  leur  donnait  le  droit  de  le  mettre  aux 
fers,  de  le  rrdnire  en  serviliidi^.  de  [iréicver  sur  son  corps  un 
morcean  de  cliaii'. 

I.a  loi  .Inlia  alléMiia  cette  lauuenr,  en  libérant  le  débiteur  qui 
faisait  à  ses  créanciers  l'abandon  complet  de  ses  biens. 

—  Le  moment  de  payer  :  le  quart-d'iienre  de  Rabelais.  (Voy.) 

—  Partir  î^ans  payer  :  emporter  le  cliat:  faire  nn  pouf:  faire  un 
trou  dans  la  Inné. 

Au  xvi"  siècle,  on  disait,  pour  s'en  aller:  faire  un  perluis  dans 
l'air,  faire  un  trou  dans  la  nuit. 

Pays,  anciennement  païeïs,  païs  :  du  latin  parjensem,  sous- 
entendii  agrum,  territoire  du  canton. 

—  L'Académie  confond  dans  la  même  acception  les  mots  pG\jii  et 
pairie  :  en  réalité,  le  mot  patrie  s'entend  du  lieu  de  naissance, 
considéré  au  point  de  vue  politique  et  moral,  tandis  que  7>fl'y5  a 
rapport  au  côté  matériel  et  plus  restreint  de  la  même  idée. 

Ma  patrie  est  la  France,  mon  pays  est  la  Provence. 

—  Le  mot  pairie  est  employé  dans  un  sens  politique  ;  pour 
les  intérêts  matériels,  on  se  sert  du  moi  pai/s. 

Le  pays  est  sillonné  de  chemins  de  fer  et  de  canaux,  qui  ont  donné 
l'essor  au  commerce,  en  contribuant  à  rendre  la  patrie  florissante. 

Guillaume  Tell  a  délivré  sa  patrie  du  joug  de  la  tyrannie. 

Un  provincial  quittant  Paris  pour  son  département  retourne  dans 
son  pays  sans  quitter  sa  patrie. 

—  Il  est  bien  de  son  pays  :  il  est  bien  naïf.  C'est  comme  si  l'on 
disait  :  il  n'a  jamais  perdu  de  vue  son  clocher. 

—  Nul  n'est  prophète  en  son  pays.  (Voy.  prophêle.) 

—  Pays  imaginaires  :  les  Champs-Elysées,  Cocagne,  Éden,  Eldo- 
rado, le  pays  de  Tendre. 

—  Pays,  féminin  paijse,  se  dit  aussi  dans  le  sens  de  compagnon, 
originaire  du  même  pays.  En  allemand  laïuhmann. 

Paysage,  de  pays  et  sagire,  savoir,  voir  iX). 
(En  réalité,  dérivé  àe  pays  avec  le  suffixe  âge.) 
Tableau  d'un  site  pittoresque. 
Synonyme  :  plat  d'épinards  (mauvais  paysage). 

—  Il  y  a  trois  époques  du  paysage,  en  France  :  l''  le  paysage 
épique,  de  Poussin  et  de  Claude  Lorrain  ;  2°  le  paysage  fantaisiste, 


Pi:  A  2;ji 

do  Watloaii  et  do  son  école  ;  '^'^  lo  paysage  réaliste,  créé  par 
J.  Veniet.  (II.  Uela houle.) 

L'école  classique  du  paysage  était  représentée,  en  i830,  par 
Bidault,  Hertin  et  Bourgeois,  qu'on  appelait  les  trois  B,  par  opposi- 
tion au\  (piatre  G  :  Gros,  Girodct,  Guérin  et  Gérard. 

Il  y  avait  aussi  Jolivard,  dit  Jolivert,  à  cause  de  la  couleur  de  ses 
paysages,  et  Watelet,  avec  son  éternel  moulin,  battant  de  sa  roue 
une  eau  savonneuse,  au  milieu  d'un  maigre  bouquet  d'arbres. 

Ils  s\mi  vont  dans  les  forêts 
Fair"  du  rliic  d'après  nature; 
Voyez  (jnelle  l)ai'l)('  ils  ont, 
I^es  peintres  de  liarhizon  ! 

Barliizon  est  un  hameau  de  la  foret  de  Fontainebleau,  où  s'est 
formée,  vers  1840,  une  colonie  de  paysagistes,  parmi  lesquels  Diaz, 
A.  Milet,  Dauhigny,  etc. 

A  la  vente  Patureau  (avril  18rj7),  un  paysage  d'IIobhema,  Le 
Moulin,  s'est  vendu  100.000  francs.  On  aurait  eu  pour  cette  somme 
tout  le  terrain  qu'il  représente. 

—  Quelle  vanité,  que  la  peinture  attire  l'admiration  par  la 
ressemblance  des  choses  dont  on  n'admire  pas  les  originaux  ! 
(Pascal,  Pensées.) 

—  Préault  disait  des  paysagistes  grands  fumeurs,  qui  produisent 
peu  :  «  Ils  fument  trop  de  pipes  d'après  nature.  » 

Paysan,  dérivé  de  pays. 
Habitant  de  la  campagne. 

—  l'agns  a  donné  aussi,  par  jxiganns,  le  mot  païen. 
Constantin  le  Jeune,  réformant  les  soldats  qui  n'embrassaient  pas 

le  christianisme,  les  réduisit  à  la  condition  de  villageois.  De  là  la 
dénomination  de  païens  appliquée  à  ceux  qui  professaient  le  culte 
des  idoles. 

Peau,  du  latin  pellls,  d'où  aussi  :  peler,  pelage. 
S'emploie  quelquefois  pour  la  personne  elle-même. 
On  dit  :  avoir  peur  pour  sa  peau,  défendre  sa  peau. 
Curare  cuteni,  cuticuUun.  (Horace;  Perse.)  Avoir  soin  de  sa 
petite  personne. 

—  Les  Romains  appelaient  une  femme  débaucliée  pellls  ou 
scortum,  peau,  cuir. 

—  Dans  sa  peau  mourra  le  renard  :  on  ne  peut  changer  do 
naturel. 


232  PEC 

A  iiioiiis  qu'oïl  no  récnrclie  vif,  il  moiirr;i   d.'ins  la  peau  d'un  lier 
insolent.  (Beaumarchais,  Figaro,  I,  4.) 
Avoir  la  peau  dure  :  un  lonipéramenl  de  fer. 

—  Changer  de  peau  :  cjian.uer  de  conduite.  Celle  locution  est 
empruntée  des  reptiles,  qui  changent  de  peau  cl  sont  devenus  l'em- 
blème  de  la  fraude.  (Voy.  stelUonnl.) 

Les  anciens  appelaient  le  loup-garou  versipe/l/s,  qui  change  de 
peau. 

Pêche,  du  htm  per s ica  ou  persicu m  Onalum). 
Fruit  du  pêcher,  venu  de  Perse. 
En  provençal  pességue. 

Péché,  du  latin  peccalum,  provençal  ^yeccft^. 
Transgression  de  la  loi  religieuse. 

Delictum  est  declinarc  a  bono  ;  peccalum  est  ciun  malum  {il. 
(Saint  Augustin.) 

—  Péché  mignon  :  celui  que  l'on  commet  volontiers. 

—  Péché  mortel.  «  C'est  un  péché  mortel  que  de  faire  l'amour, 
disait-on  à  une  lorette.  —  Si  cela  était,  répondit-elle,  il  y  a  longtemps 
que  je  serais  morte  !  » 

—  A  tout  péché  miséricorde  :  il  faut  être  toujours  indulgent. 
On  l'a  parodié  ainsi  :  A  tout  péché  misère  et  corde. 

—  Péché  caché  est  à  demi  pardonné.  Rien  n'est  plus  funeste  que 
cette  maxime  d'une  casuistique  étroite.  C'est  exactement  le  contraire 
qu'il  faudrait  dire  et  Grégoire  le  Grand,  l'un  des  hommes  les  plus 
illustres  du  catholicisme,  a  dit  :  «  Mieux  vaut  le  scandale  que  le 
mensonge.  » 

Le  pùcliù  que  l'on  caclio  est  demi  pardonné. 

(Rko.mer,  Satire  XUI.) 

Le  scandale  dn  monde  est  ce  (lui  f;iit  Toffense, 
Et  ce  n"est  pas  pécher  (pie  i)éclier  en  silence. 

(MoLiKrsF,  Tartuffe,  IV,  5.) 

—  La  décence  ne  consiste  pas  à  pratiquer  le  bien,  mais  à  cacher 
le  mal. 

—  Le  Juste  pèche  sept  fois  par  jour.  Cette  locution  vient  d'un 
passage  de  l'Écriture  uial  interprété  :  Septies  cadlt  Justiis.  — 
Seplles  est  pour  sœpe,  souvent.  (Trévoux.) 

—  Le  Juste  pèche  sept  fois  par  jour,  mais  ce  sont  des  péchés  de 
juste:  il  y  en  a  qu'il  ne  commet  jamais,  et  qu'il  ne  soupçonne  même 
pas.  (^G.  Sand.) 


PEl)  2:33 

Pêcher,  du  latin  ])i>irnri,  \)Yù\Q\\n\\  pcsca. 
Prcndi'c  (lu  itoissoii. 

—  Pèciief  (Ml  caii  Iroiililc.  (Voy.  froi/h/t\) 

Itnniillai'd  &M>.  la  vallùc, 
l'iH'litMir.  fais  la  jniirnéc; 
Uroiiillaril  siu-  lo  mont, 
Pèclieiir,  reste  à  la  maison. 

—  Poclio  iniraciiloiise.  (Saint  Jean.  Érarif/i/c,  XXI.) 

Pécore,  du  latin  y>«'o/Y/,  pluriel  neutre  pris  pour  un  sinpiilicr 
l'éiuinin. 

...La  ciiétivo  pécore 
S"en(la  si  jjien  qu'elle  crc\a. 

(L.\   FOMMNK.) 

Pécule,  du  latin  porulium.  dérivé  de  pecu.s,  comme  pcnniia, 
pai-cc  (pie  les  premières  monnaies  des  Romains  portaient  la  li.uiire 
d'iii!  Ixeuf.  d'un  mouton.  (Piutartpie,  Me  de  J'ahlicola.) 

Sous  Servius  Tullius,  si.\iéme  roi  de  Rome,  on  fraiipa  des  monnaies 
appelées  «  moutons  »  ou  «  Ixeufs  »,  qui  portaient  Timaue  de  ces 
animaux.  Y\\  bœuf  valait  15  moutons.  (Yertot.) 

D'où  le  proverbe  Bos  in  Ilnçiua.  pour  dire  que  quelqu'un  était 
payé  pour  se  taire. 

—  Rabelais  dit  (liv.  IV,  cli.  otî)  que  Démosthènes  vendit  clière- 
ment  son  silence  aux  Araicns,  en  ne  plaidant  pas  contre  eux, 
moyennant  finances,  sous  prétexte  qu'une  angine  ou  esquinancie 
venait  de  le  prendre  à  la  gorge.  Un  malin  prétendit  qu'il  avait  non 
pas  une  angine,  mais  une  argentanglnc,  argurankè . 

—  Pécule  désignait  l'argent  gagné  et  économisé  par  un  esclave; 
il  pouvait  l'employer  pour  son  utilité  personnelle  et  parfois  pour 
son  rachat. 

—  ])q  pécule,  nous  avons  fait  péculaf,  vol  des  deniers  publics 
commis  par  celui  qui  en  a  le  maniement,  l'administration.  (Voy. 
co/icu.ssion.) 

Pédant,  de  l'italien  pédante,  d'origine  incertaine. 
Celui  qui  fait  parade  de  savoir.  (Voy.  savant.) 

....Mji'z,  iM'Iilrc  (le  pi'dant. 

(.MoMtRli.) 

Pédauque  (la  Reine),  pedeni  aucw,  pied  d'oie. 

La  reine  Pédauque  est  la  statue  d'une  reine  de  France,  Berllie 
de  Bourgogne,  cousine  au  4«  degré  de  Robert,  roi  de  France,  qui 
ré[)ousa  en  99o,  malgré  la  défense  du  pape.  Il  la  répudia  depuis,  et 


234  im:i 

la  léjïondo  dit  que,  pciKhiiit  riiilci'dil.  licrtlic  ;iccoiirli;i  (]"iiii  lils  aux 
pieds  d'oie. 

11  est  souvent  (jiieslioii  d<'  celle  reine  Péd;iii(|ii('  d;ins  les  dictons 
et  dans  les  iiioniinients  du  Moyen-Age,  on  sa  slaliic  liL-iire  avec  un 
pied  d'oie,  nolaimncnt  à  Sainl-Bénif^nc-de-Dijon,  oi'i  h'  roi  Robert, 
fondateur  de  i'é.ulise,  se  trouve  placé  en  face  de  sa  fi'uiuic 

Peigne,  du  latin  pecline/n. 

Dédale,  dans  le  Dictionnaire  des  Précieuses. 

—  Le  peigne  des  Allemands  :  la  main. 

Se  pygnant  du  pygne  des  Allemains  :  c'estoyt  des  quatre  doigts  et 
du  poulce.  (Rabelais,  I,  21.) 

Rabelais  peut  avoir  eu  en  vue  de  railler  les  Allemands  sur  leur 
malpropreté,  ou  fait  un  jeu  de  mots  sur  la  main  qu'on  se  passe  dans 
les  cheveux,  et  l'ancienne  forme  Allemains  pour  Allemands.  C'est  ce 
qu'on  appelle  aussi  «  le  peigne  du  père  Adam  », 

Peigner,  du  latin  ])ecfina)'e,  anciennement  ^^/y/î^r. 

—  Il  y  a  des  endroits  de  ï Enéide  auxquels  l'auteur  eust  donné 
encore  quelque  tour  de  pigne,  s'il  en  eust  eu  le  loisir.  (Montaigne, 
Essais,  II,  10.) 

Ane  rascas  non  omet psndienar. 

(P.  Cardinal.) 

(Jamais  teigneux  n'aima  le  peigne.) 

—  Se  peigner  :  se  battre. 

Se  donner  une  peignée  :  se  prendre  aux  cheveux. 

Or  viens  cza,  que  je  te  donne  ung  tour  de  pigne.  (Rabelais.) 

Quand  il  s'agit  de  combattantes  :  se  crêper  le  chignon. 

—  En  1786,  deux  fils  de  fermiers  généraux,  C...  et  R...,  se  trou- 
vant au  parterre  de  l'Opéra,  au  milieu  de  la  foule,  l'un  d'eux,  R..., 
se  mit  à  crier:  «  Qui  donc  pousse  comme  cela?  C'est  sans  doute  un 
garçon  perruquier?  —  C'est  moi  qui  pousse,  répondit  C...,  donne- 
moi  ton  adresse,  et  demain  j'irai  te  donner  un  coup  de  peigne.  » 
Le  lendemain,  un  duel  eut  lieu  aux  Champs-Elysées,  où  C...  fut  tué. 

Peindre,  du  latin  pingere. 

Jamais,  s'il  me  veut  croire,  il  ne  se  fera  peindre. 

(La  Fontaine.) 

Peine,  du  latin  pœna  :  d'où  peiner,  pénible. 

—  Homme  de  peine.  Expression  douloureuse  d'une  vie  de  misères. 

—  La  peine  du  vilain  ne  compte  pour  rien. 

A  chaque  jour  suffit  sa  peine.  Proverbe  favori  de  Napoléon. 


Sitf/tcif  (fie/  nia/ida  sua.  (Saint-Mathieu.  YI,  24.) 
Les  ix'inos  (h>  la  \ie  sont  coninie  les  onihres  an  tablean,  elles 
servent  à  en  niienv  faire  apprécier  les  i)laisirs.  (De  Clincluinip.) 

Peintre,  dn  latin  populaire  pinclor,  déformation  de  ]>/r(or. 
Italien  pill<»\  qui  a  donné  pittoresque. 

—  Synonymes  :  poète  muet  {Dictionnaire  des  rrécieuses)  : 
l'oiisin  de  l'arc-en-ciel  (M.  Régnier):  rapin,  élève  peintre. 

—  Croûton  :  mauvais  peintre.  On  emploie  aussi  dans  ce  dernier 
sens  :  Raphaël  à  la  toise. 

—  Les  peintres  se  divisent  aujourd'hui  en  :  coloristes,  harmo- 
nistes, impressionnistes,  idéalistes,  réalistes.  11  y  a  même  depuis 
peu  la  coterie  des  intransigeants  (I80O). 

La  peinture  réaliste  a  la  prétention  de  faire  admirer  la  ressem- 
hlance  des  choses,  dont  on  n'admire  pas  la  réalité  :  quelle  vanité  ! 

—  Gueux  comme  un  peintre.  Les  pauvres  artistes  font  les  artistes 
pauvres  ;  les  grands  artistes  sont  des  alchimistes  qui  font  de  l'or 
avec  de  la  toile  ou  du  papier. 

Un  paysage  d'Hobhema  s'est  vendu  100.000  francs  (avril  1857). 
La  lille  d'Hérode,  du  Titien,  226.000  francs  rl82G). 
Les  grandes  Bacchanales  de  Poussin,  375.000  francs  (1805). 
La  vache  de  Potter  a  été  cédée  à  l'empereur  Nicolas,  en  1805,  par 
Joséphine,  au  prix  de  800.000  francs. 

Peinture,  du  latin  j)ictura,  modifié  comme  le  précédent. 
La  peinture  est  une  imitation  faite,  avec  hgnes  et  couleui's,  sur 
une  surface,  de  tout  ce  (jui  se  voit  sous  le  soleil.  (H.  Poussin.) 

—  Synonymes  de  mauvaise  peinture  :  croule,  épigramme  contre 
la  nature,  enseigne  de  cabaret,  peinturlurage.  Habileté  de  main  : 
patte.  Beaucoup  de  patte  et  de  chic,  mais  peu  de  dessin  !... 

—  Gros  disait:  «  La  peinture  était  une  langue;  ce  n'est  plus 
qu'un  patois.  »  S'il  vivait  aujourd'hui,  il  trouverait  que  ce  n'est  plus 
que  de  l'argot. 

Les  poètes  peignent  avec  la  parole  ;  les  peintres  parlent  avec  le 
pinceau.  (Carrache.) 

La  peinture  est  une  poésie  muette  ;  la  poésie  est  une  peinture 
parlante.  (Sisraondi.) 

La  peinture  a  sur  la  poésie  cet  avantage,  qu'on  la  lit  d'un  coup 
d'oeil  ;  elle  parle  comme  une  langue  muette,  intelligible  à  tous  ;  elle 
n'a  pas  besoin  de  traducteur.  (T.  Gautier.) 

La  première  condition  pour  obtenir  un  résultat  avantageux,  est 


236  PEK 

de,  hicn  espérer  jtonr  le  sujet...  i";ii  toujours  en  une  idét;  iissez  ;iv;in- 
lapcusc  non  de  ce  ([iic  je  fuis,  mais  de  ce  que  je  ferai.  (F^éop.  Hobcrl, 
Lettre  à  Madame  Marcolle.) 

—  Les  niélaphores  empruntées  à  la  peinture  sont  d  autant  plus 
nombreuses,  que  rohjet  de  ce  tropc  est  de  peindre  les  choses  avccla 
pensée;  mais  on  se  trompe  souvent  en  faisant  des  comparaisons  que 
l'art  ne  saurait  admettre.  Ainsi,  on  dit  «  un  crayon  »  pour  un  croquis, 
une  esquisse. 

—  Peindre  sous  des  couleurs  fausses,  sous  des  couleurs  hrillanles 
est  un  non  sens,  comme  si  Ton  disait  :  dessiner  .sous  un  crayon.  (Jn 
peint  avec  des  couleurs,  et  non  sous  des  couleurs.  On  doit  dire  :  voir, 
ou  peindre  sous  un  jour  favorable  ou  sous  un  faux  joui". 

Casimir  Delavigne  dit,  dans  une  couu''die  :  «  l'n  tablciiu  lidélcdoit 
tout  peindre,  le  bon  et  le  mauvais  côté.»  D'alinni  un  lalilcau  ne 
peint  pas  ;  ensuite,  il  ne  peut  pas  représenter  à  la  fois  le  bon  et  le 
mauvais  côté  des  clioses,  car  la  perspective  des  objets  s'y  oppose, 
etc.  La  piirasc  toute  simple:  «Un  tableau  doit  être  lidèle»,  dirait 
mieux  et  plus  juste. 

—  Peinture  à  Tbuile.  «  Le  peintre  Van  Eyck,  dit  Jean  de  Bruges, 
inventa  les  procédés  de  la  peinture  à  l'huile  (1370-I4y).  Il  confia 
son  secret  à  Antoine  de  Messine,  qui  le  tint  lonulemps  caché  :  mais 
Jean  Belin  se  désuisa  en  grand  seigneur,  et  étant  allé  chez  le  peintre 
sans  exciter  sa  méliance,  par\inl  à  le  lui  (iéroI>er  et  le  rendit  [tiiblic  » 

Péjoratif,  du  latin  pcjovarc,  rendre  pire,  néologisme  et  terme 
de  grammaire. 

Se  dit  de  certains  mots  dérivés  qui  se  prennent  en  mauvaise  part  : 
criailler  est  le  péjoratif  de  rrier. 

Les  suffixes  ard  et  aille  sont  péjoratifs. 

Pékin,  terme  d'argot  militaire. 

Adopté,  mais  non  inventé,  par  les  chauvins  de  l'Empire,  pour 
désigner  un  «  bourgeois». 

—  J.-J.  Ampère  suppose  que  ce  vocable  vient  de  ;jr/.yrt/t/i5,  païen, 
dans  le  même  sens  que  les  étudiants  allemands  appellent  un  bour- 
geois pli  i  lis/ in. 

F.  Génin  le  dérive  àe  j)er  qaem  (sous-entendu  omnia  farianf), 
d'après  une  ancienne  expression  employée  par  Henri  Estienne  :  faire 
le  per  quem,  c'est-à-dire  l'homme  d'importance,  le  fat,  l'imper- 
tinent. 

Si  cette  origine  du  mot  pékin  est  vraie,  il  n'aurait  pas  le  sens 


PKf.  237 

que  nous  y  atfMclions  :  il  aiirait  l'Iô  appliqué  à  Unis,  aux  hoiir.ijoois 
par  les  militaires,  à  une  é|)0(pie  où  le  Ituuriicois  n'était  rien. 

On  écrivait  alors  le  mot  ix'hin,  comme  le  nom  de  la  ville  chinoise, 
et,  par  suite,  on  substituait  V(il(iiiti(M'S  r(''|)ithète  de  c/ii/inis  à  celle 
de  pi'kin. 

—  Pour  d'autres,  ce  serait  une  modilicniion  de  phiue-chicn  ou 
pisse-chien,  injure  usitée  an  xiv-'  siècle. 

De  vieux  dialogues  des  règnes  de  Heui'i  III  et  de  Henri  IV, 
employaient  souvent  prqitin  wx  péhiii,  pour  désigner  les  adversaires 
de  la  religion.  (Ambert.) 

«  Nous  appelons  pékin,  dit  le  général  D...  à  M.  de  Talleyrand, 
tout  ce  qui  n'est  pas  militaire.  —  Ah  !  fort  bien  ;  comme  nous  appe- 
lons m  il  il  a  ire  tout  ce  qui  n'est  pas  civil.  » 

Peler,  dérivé  ih^  peau,  anciennement  y^tV,  du  latin  pellis. 

Oter  la  peau. 

Il  n'y  avait  que  quatre  pelés  et  un  tondu.  (Voy.  tondu.) 

Pèlerin,  du  latin  peregrinus,  voyageur.  En  roman  pélcgrin. 
De  là  aussi  péréiji'ination. 

Am  que  pnssaca  l'aida  Jet  V(tr  ni  prUcrjrin^. 

(  Vie  de  saint  Honorât.) 

(Avec  quoi  il  faisait  passer  l'eau  du  Yar  aux  pèlerins.) 

—  Synonymes  :  coquillard,  faux  pèlerin  de  la  Gourdes  Miracles  : 
qui  porte  des  coquilles  sur  le  collet  de  sa  robe  et  à  son  chapeau. 
Ces  coquilles,  en  forme  de  bénitier,  sont  appelées  pèlerines,  et  leur 
nom  s'est  associé  à  celui  des  pèlerins. 

Romieu  :  Son  plus  paubres  que  romieu.  (Raymond  deCastelnau.) 
Ils  sont  plus  pauvres  que  le  pèlerin. 

Ce  mot,  désignant  les  pèlerins  qui  allaient  à  Rome,  a  été  modifié 
par  Rabelais  (liv.  IV,  nouv.  prologue),  en  romipète  :  «  Petits  romi- 
pétes  vendans  le  leur,  empruntant  l'aultruy.  » 

On  créa  même  le  verbe  romipéter  :  «  Maudissant  l'heure  d'avoir 
fait  un  pet  à  Rome,  c'est-à-dire  d'être  romipété  et  estre  venu  de  si 
loing.  »  (Contes  d'Eutrapel.) 

—  C'est  un  fin  pèlerin  :  un  rusé  compère. 

Pélican,  du  latin  pelicanus  (du  grec  pélékus,  son  bec  ressem- 
blant à  une  liacl:e?). 

—  Le  pélican  se  perce  les  flancs  pour  nourrir  ses  enfants. 

On  représente  cet  oiseau  se  déchirant  les  flancs  avec  son  bec, 


238  PKL 

|)()iii'  l'.iifc  l»()in',  son  s;in^-  ;'i  sn  couvée.  C'est  sons  celle  forme  (jnil 
li,uiii'(5  (liiiis  les  Itlnsons,  oii  on  r;ii)[)elle  ï'ilic. 

W  est  (levenn  reinlilrine  de  r.'inioiir  palernel,  el  iiiAine  de  la  Pro- 
vidence divine. 

Dans  l'oratoire  du  cliàleau  de  La  Barre,  on  lil  ce  quatrain,  au  has 
de  la  représentation  du  pélican  : 

Je  suis  (ruiic  (livc  iialurr-, 
Car  (juand  je  vois  mourir  los  miens. 
Vie  leur  rends  par  ma  morsure  : 
Ainsi  fil  Jésus-Clirist  aux  siens. 

—  La  tradition  de  ce  dévouement  du  pélican  ne  se  trouve  ni 
dans  Aristote,  ni  dans  Pline  ;  mais  elle  apparaît  dans  le  monde 
romain  dès  les  premiers  siècles  de  notre  ère.  Elle  est  présentée  par 
les  Pères  de  l'Église  comme  l'emMême  de  la  Charité.  Saint  Jérôme 
et  saint  Augustin  assimilent  le  sacrifice  volontaire  du  pélican  à  celui 
du  Fils  de  Dieu.  Par  suite  il  devient  l'emblème  de  la  Rédemption, 
comme  le  phénix  celui  de  la  résurrection  de  la  chair  et  de  l'immor- 
talité. 

Cette  légende  est  assurément  d'un  assez  beau  caractère  pour  être 
conservée;  toutefois  il  faut  convenir  qu'il  s'agit,  comme  dans  celle 
du  phénix,  non  d'un  animal  véritable,  mais  d'un  être  purement 
imaginaire. 

En  elîet,  cet  oiseau  de  convention  est  peint  en  vert  et  en  jaune, 
tandis  que  le  pélican  véritable  est  blanc.  On  le  représente  avec  un 
bec  court  et  aigu,  tandis  que  celui  du  pélican  est  large  et  aplati. 
Il  en  est  de  même  de  toutes  les  autres  formes  du  corps,  qui 
ditïèrent  entièrement  dans  l'oiseau  naturel  et  dans  l'oiseau  de  la 
légende. 

Péiion.  Entasser  Pélion  sur  Ossa. 

Les  poètes  ont  imaginé  que  le  Pélion,  montagne  de  Thessalie, 
fut  mis  par  les  Géants  sur  le  mont  Ossa,  lorsqu'ils  voulurent 
escalader  le  ciel. 

Ter  siuil  conati  imponere  PcJio  Ossam, 

Sciiicet  Clique  Ossœ  frondosum  involvere  Olt/mpum. 

(Virgile,  Géorgiques,  1,281.) 

(Trois  fois  ils  tentèrent  d'entasser  Ossa  sur  PéUon,  de  rouler  sur 
Ossa  le  verdoyant  Olympe.) 

Pelle,  autrefois  jjalle,  qui  se  dit  encore  en  provençal.  Du  latin 
jjala.  Le  redoublement  de  /  est  arbitraire. 

—  La  pelle  se  moque  du  fourgon. 


L'iing  nppolloyt  iino  aiiltre  sa  i»alle,  elle  lo  nppelloyt  son  fourgon. 
(Raliolais,  ranldunicl.) 

Penaillon,  ilrriNr  de  pouiillc.  du  laliii  jfciuia  (i)  Da  \i\  dépe- 
iiailli'.  vêtu  de  liaillons. 
Ce  ])enaill(Mi  de  nioyne.  (Rabelais,  IV,  24.) 

Pénates,  du  laliu  pénales,  déi'ivé  ^l(d  pênes,  penilus. 

Divinités  domestiques  des  Romains. 

Les  dieux  Pénates  étaient  les  dieux  de  la  famille  que  Ton  adorait 
dans  l'intérieur  de  l'iiahitation,  dans  le  lieu  le  plus  retiré.  Cicéron 
(De  natura  deonuit)  dit  que  ce  mot  vient  fjnod  pênes  nos  nali 
sinf.  On  n'est  jamais  bien  tombé  d'accord  sur  leur  origine.  C'étaient 
les  dieux  tutélaires  de  Troie,  qu'Énée  emporta  après  la  prise  de 
cette  ville,  et  (jue  les  Romains  adoptèrent. 

C'est  à  tort  (pi'ou  les  a  confondus  avec  les  lares  et  les  génies. 
Les  Pénates  n'étaient  pas  des  dieux  d'une  classe  particulière  :  ils 
étaient,  au  contraire,  choisis  indilTéremment  parmi  les  dieux  du 
ciel  et  de  la  terre,  des  eaux  et  des  enfers.  C'étaient,  en  quelque 
sorte,  les  dieux  protecteurs  des  familles,  comme  sont  dans  le 
christianisme,  les  saints  patrons.  Leur  nom  leur  venait  de  ce  qu'ils 
étaient  placés  dans  le  lieu  le  plus  retiré  de  la  maison,  in  penifis- 
sinia  œdiiun  parle,  dans  ce  qu'on  appelait  penelralla. 

Les  dieux  Mânes  (de  manere,  demeurer)  étaient,  chez  les  Romains, 
les  âmes  des  morts  considérées  comme  divinités  infernales.  On 
distinguait  les  bons  et  les  mauvais.  Les  bons  étaient  les  Pénates  et 
les  Lares  ;  les  méchants,  les  Larves  et  les  Lémures. 

Penaud,  semble  dérivé  de  yx^'/ne,  et  n'être  qu'une  autre  forme 
de  péneux,  qui  est  en  peine. 
Borel  le  dérive  de  pes  nudus  :  pied  nud  ! 

—  Les  Provençaux  appellent  pénéquer  la  transition  de  la  veille 
au  sommeil,  lorsque  la  tète  alourdie  s'incline  sur  la  poitrine,  comme 
les  figues  trop  mûres  qui  pendent  vers  le  sol,  et  qu'ils  appellent 
l)énèques. 

Penchant,  participe  pris  substantivement  àa  pencher  :  du  latin 
pend  Ira  fc  dérixé  de  pendere. 

—  Chacun  se  laisse  aller  à  son  penchant.  (Voy.  plaisir.) 

Trahit  sua  ijitonque  ci)luptas\ 

(Vinr.ii.K,  Egloyue,  III,) 

Animo  obsequi  (Térence)  :  suivre  ses  goûts. 


240  PEN 

—  On  loiiilx;  loiijoiii'S  du  ('(Mo  où  l'on  pciiclic  (Giiizol);  c'esl-à-dire 
qu'il  faut  so  ni(''li(M'  do,  l'ciiU-aincmcrit  des  passions. 

Pendre,  pendu,  \:A\\\  i»'n(lcre. 

])('  là  aussi  pendai'd,  honiino  de  sac  et  do  oordo. 

—  Synonymes  :  évoque  dos  champs,  qui  donne  la  liôiiédiction 
avec  les  pieds.  (Rabelais.) 

Painii  les  autres  synonymes  de  pendu,  ou  de  être  pendu  :  être 
branché  ;  épouser  la  potence,  ou  la  veuve  (la  corde  s'appelait 
mariage)  ;  faire  le  guet  à  Montfaucon  ;  jouer  du  liaull»ois  ;  monter 
par  une  échelle  et  descendre  par  une  corde;  iiioiirir  on  l'air: 
regarder  par  une  fenêtre  de  chanvre. 

L'expression  «  évoque  des  champs,  donnant  la  bénédiction  avec 
les  pieds  »,  se  trouve  pour  la  première  fois  (?)  dans  la  Satire 
Ménippée,  et  ne  parait  pas  remonter  au-delà  du  xvf  siècle. 

Ci-git  mon  cousin  d'Avenas 
Qui  repose  quand  il  ne  vente  pas. 

(Epitaphe  d'un  pendu.) 

—  C'est  François  I*""  qui  substitua  le  supplice  de  la  corde  et  de 
l'estrapade  à  celui  de  la  liart.  Rabelais  l'appelle  pour  cela  Panta- 
gruel, qui  prend  à  la  gorge,  mot  tiré  du  grec  pantayruellon. 

—  Par  saint  Antoine  ad  auras,  tu  seras  une  foys  pendu  ;  et  toy, 
dit-il,  tu  seras  une  foys  enterré  ;  lequel  est  plus  honorable,  ou  l'air 
ou  la  terre?  (Rabelais,  II,  17.) 

Le  nom  de  saint  Antoine  ad  auras,  forgé  par  Rabelais,  est 
invoqué  ici  comme  pour  prédire  à  quelqu'un  qu'il  sera  pendu,  quia 
pendebit  ad  auras,  il  mourra  en  l'air.  Quant  à  la  comparaison 
avec  la  mort  en  terre,  c'est  un  souvenir  du  supplice  de  l'estrapade 
(voy.)  pratiqué  alors  contre  les  protestants. 

—  Se  pendre  : 

Lilleram  ex  se  lonfjam  facere. 

(Pl.Al'TK.) 

Faire  de  son  corps  une  lettre  longue;  faire  1"/. 

—  Allez  vous  faire  pendre  ! 

Abi  in  malam  crucem. 

(TtHEXCE.) 

...In  malam  pesten\.  (Cicéron.) 

—  Aussitôt  pris,  aussitôt  pendu.  Corripi  ac  suspendi.  (Cicéron.) 
Dès  le  règne  de  Charles  Y,  la  maréchaussée  avait  une  justice 

ambulante,  qui  cbevauchait  avec  les  gendarmes.  Lorsqu'un  coupable 


PKN  2V1 

était  saisi  siif  les  Liraiids  cliéiiiins,  les  inaii'istrats  se  conslitiiaioiit 
aussitôt  (Ml  triliiiiial  [loiir  le  juger,  ...et  le  faire  pendre. 

Sous  l'AssiMiiiilée  conslitiiautc  tITDl),  ou  voulait  reudre  la  justice 
(nnhnlatoire.  M.  Fruuuou  dit,  pour  combattre  ce  projet  :  «  Il  est 
des  décences  publiques  qu'il  tant  respecter...  La  justice  est  une 
seconde  Providence...  IVa[trt's  le  nouveau  système,  la  vie  des 
niaiiistrats  ne  serait  qu'un  pin-pélnel  postillonnage.  Les  grandes 
router  les  retiendraient  pbis  longtemps  que  les  grandes  causes,  et 
le  livre  des  postes  serait  plus  consullé  (pu^,  le  livre  des  lois.  »  (Yoy. 
aiyuilh'tle.) 

—  Le  peuple  semble  se  rappeler  encore  au  xix^  siècle  la  loi 
salique,  qui,  au  v\  défendait  sous  peine  de  pendaison  de  décrocher 
un  pendu  en  l'absence  des  magistrats. 

Oui  II'  |)L'iulu  clespcndra 
Dessus  sou  col  le  faix  clierra. 

(Le  Cha^tniement.) 

—  La  corde  pour  pendre  s'appelait  mariage,  cravate  de  Normand, 
cravate  de  chanvre. 

Cette  dernière  expression  était  en  usage  chez  les  Romains,  car 
on  lit  dans  le  Satiricon  de  Pétrone  (cliap.  I,  YI),  qu'au  tirage  d'une 
loterie  comique,  ce  que  nous  appelons  aujourd'hui  tombola,  le  sort 
ayant  amené  une  cravate  (?),  on  appela  une  corde  de  potence  : 
Cervical!  of'fla  collaris  ahlata  est{X). 

—  Avoir  de  la  corde  de  pendu  :  un  bonheur  constant. 

Pline  (Histoire  naturelle^  XXYIII)  dit  qu'»  à  Rome  le  peuple 
croyait  que  la  corde  qui  avait  servi  à  pendre  quelqu'un,  possédait 
des  vertus  merveilleuses  ». 

Pêne,  anciennement  pesne  et  i)esle.  du  latin  pessulas,  verrou. 
Pièce  de  fer  mobile  de  la  serrure,  que  la  clef  fait  entrer  ou  sortir, 
de  manière  à  ouvrir  ou  à  fermer  la  porte. 

Pénélope,  origine  poétique,  homérique. 

—  La  toile  de  Pénélope.  Penclojjes  felam  retexere  (Cicéron)  : 
refaire  la  toile  de  Pénélope. 

—  Pénélope,  fille  d'Icare,  pendant  la  longue  absence  de  son 
mari  Ulysse,  pour  se  soustraire  aux  poursuites  des  prétendants  à 
sa  main,  leur  promit  de  se  décider  en  faveur  de  l'un  d'eux  quand 
elle  aurait  achevé  un  voile  auquel  elle  travaillait,  et  qui  devait 
servir  aux  funérailles  du  vieux  Laërte.  Pour  éluder  sa  promesse, 
elle  défaisait  la  nuit  ce  qu'elle  avait  fait  le  jour.  L'ouvrage  dura 
ainsi  trois  ans. 

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242  ÏT.X 

Les  iV'Voliilioiis  ont  drlniil  les  îihiis,  il  s<M';iit  iihsiirdi;  de  IcS 
ivl.ililir  :  l'œuvre  de  l;i  civilisjilioii  n'est  pjis  la  loile  de  Pénélope. 

—  Le  nom  d(;  Pénélope  est  devenu  aussi  proverbial  pour  dési^mcr 
la  lidélité  conjugale.  Cependant  sa  vertu  est  loin  d'être  restée  sans 
atteinte.  On  dit  (pie  tous  les  princes  qui  prétendaient  à  sa  main 
eurent  part  à  ses  faveurs,  et  qu'ils  la  rendirent  mère  du  dieu  Pau, 
nommé  ainsi  du  mot  pan,  panlos,  qui,  en  grec,  signifie  tout. 

Pénis,  mol  latin.  Aussi  mcnlula:  en  sanscrit,  le  bâton  qu'on 
taisait  tournei-  dans  le  creux  d'un  morceau  de  bois,  pour  obtenir 
du  feu.  Ce  bâton  est  souvent  comparé  à  nn  pliallus. 

Pénitence,  du  latin  iKcniicntia. 

Un  des  sept  sacrements  de  l'Église  catbolique;  celui  par  lequel  le 
prêtre  remet  les  pécbés  à  ceux  qui  s'en  repentent  et  les  confessent 
au  tribunal  de  la  pénitence. 

Ce  sacrement  a  été  institué  par  Jésus-Clirist  lorsque,  après  sa 
résurrection,  il  dit  à  ses  apôtres  :  «  Les  pécbés  seront  remis  à  ceux 
à  qui  vous  les  aurez  remis.  »  (Jean,  XX.) 

Pénitent,  du  latin  pœnilentem. 
Celui  qui  a  regret  d'avoir  ofîensé  Dieu. 

—  On  appelle  «  pénitents  »  les  membres  de  certaines  confréries, 
qui  font  vœu  de  pratiquer  la  pénitence  publique,  en  allant  dans  les 
rues  couverts  d'un  sac  ou  babit  de  pénitent. 

Ces  confréries,  déjà  connues  en  1200,  en  Provence,  y  prirent  un 
grand  développement,  vers  1350,  sous  Charles  d'Anjou. 

—  Les  Hébreux  nommaient  «  cilices  »  les  babits  servant  à  faire 
pénitence  ;  mais  les  Septante  appellent  «  sacs  »  ces  mêmes  babits, 
parce  qu'ils  en  avaient  la  forme. 

Penser,  du  latin  penmre  :  doublet  de  peser. 
Peser,  apprécier  la  valeur  ou  le  poids  d'une  idée  avec  la  balance 
de  l'esprit  ;  comme  delUiérer,  du  latin  llbra,  balance. 

—  Penser  est  une  métapbore,  comme  les  autres  mots  dont  on  se 
sert  pour  exprimer  les  opérations  de  l'esprit  :  réfléchir,  méditer, 
agiter. 

Les  Romains  disaient  ro,7//rtr(?  (cum-o(/itareJ.  agiter  en  soi-même. 
Les  peuples  de  l'Océanie,  dans  leur  langage  primitif,  disent  :  parler 
dans  son  ventre  ;  et  les  Italiens  in  petto,  dans  sa  poitrine. 

—  Penser  et  dépenser,  se  taire  et  parler. 

Le  savant  pense  à  ses  théories  ;  le  négociant  songe  à  ses  affaires; 
l'amant  rêve  à  ses  amours. 


—  Ponsor,  c'est  vivre  :  rircre  es/  co// il  a  i'e  (Cicôvon,  Tasculaiies.) 
Les  tiraiides  pensées  vieiineiit  du  cœur.  (Vauveuaruues.) 

Pépie,  origine  incertaine. 

Maladie,  souvent  mortelle,  des  oiseaux,  et  surtout  des  uallinacés. 
Elle  consiste  en  une  pellicule  lilanclie  qui  entoure  la  langue,  et 
empêche  les  animaux  de  boire. 

—  Avoir  la  i)épie  :  avoir  soif. 

—  Quelques-uns  veulent  y  voir  le  même  radical  que  dans  [&  piot, 
auquel  Ralielais  lail  niainte  allusion. 

Pépite,  de  respagnoI;j(?/9//«,  même  mot  que  pépin. 
Petite  masse  d'or  natif,  sans  gangue,  qu'on  trouve  dans  les 
terrains  aurifères,  particulièrement  en  Australie  et  en  Californie. 

Pep,  préfixe  augmentatif,  marquant  souvent  l'idée  d'achèvement 
complet  ou  de  superlalLf. 

Se  traduit  en  français  par  les  préfixes  pe?'  on  par,  qui  servent  à 
composer  des  mots  tels  que  :  perfection,  perfide  (qui  sont  tout 
latins)  ;  parfait,  parcourir,  parjure. 

Percer,  du  latin  percœdo,  couper  au-delà  ;  ou,  Itien  plutôt,  de 
perlusiare,  qui  donna  ([\\\)or([  pc)'sie}\ 

—  Être  has  percé  :  n'avoir  pas  d'argent. 

Le  curé  Huchou  a  employé  cette  locution  l)ien  maladroitement 
dans  un  sermon  de  charité  prêché  à  Versailles,  en  présence  de 
M'"«  de  Maintenon  et  des  dames  de  la  cour  :  «  Je  sais  bien. 
Mesdames,  combien  vous  êtes  bas  percées  ;  mais  les  besoins  des 
pauvres  sont  si  grands.  » 

—  On  perce  Ijas  les  tonneaux  où  il  reste  un  peu  de  hquide. 

—  On  dit  aussi  panier  percé,  d'un  dissipateur. 

Perdre,  du  latin  perdere.  Provençal  T^erc^re. 

—  Perdre  la  tête,  l'esprit,  la  carte,  la  boussole,  la  tramontane  : 
toutes  expressions  qui  équivalent  à  perdre  la  raison. 

Perdre  jusqu'à  sa  chemise. 

...Laissez  faire,  ils  ne  sont  pas  au  Ijoiil  : 
J'y  vendrai  ma  clieniise,  et  je  veux  rien,  ou  tout. 

(Racixk,  Plaideurs.) 

Perdre  jusqu'à  son  dernier  sou. 

Ad  assetii  otnnia  perdere. 

(HoiîACE.) 

Il  perd  son  alléluia,  qui  à  cul  de  bœuf  la  chante. 

--  Être  perdu  :  se  trouver  dans  une  situation  très  dangereuse. 


Synoiiyino:  rlrt'  ll;iiiil)(''.  le  conli-iiii-»'  de  |];iiiili;iiil  cl  de  flambard. 
Allusion  i'i  la  (  iviii.ilioii  yW>  iiiocls  chez  les  anciens. 

Être  fricassé,  frit  :  «  l-.a  rijyne  fténérallo  dont  le  royaume  est 
menacé  si  Paris  est  fi-icassé.  »  (Second  courr'mr  français,  Paris, 
1G40.) 

Les  gueux  sont  frits,  je  vous  le  dis.  (La  Vie  de  saint  Clirislophe.) 

Etre  fumé,  cuit. 

Être  perdu  de  réputation.  «  C'est  une  femme  perdue  »,  se  dit  de 
celle  qui  s'égare  dans  des  chemins  semés  de  pierres  précieuses,  se 
noie  dans  des  Ilots  de  dentelles  ou  dans  des  rivières  de  diamants. 

Perdrix,  du  lalin  jierdix;  jierdicem. 

—  Aile  de  perdrix,  cuisse  de  bécasse  :  les  meilleurs  morceaux. 
Prenez  l'aile  de  la  perdrix,  ou  la  cuisse  d'une  nonnain.  (Rabelais, 

1,  29.) 

Père,  du  latin  paler. 

De  là  aussi  :  compère,  patron,  parrain. 

—  Il  ressemble  à  son  père  comme  deux  gouttes  d'eau. 

On  dit  aussi  :  C'est  son  père  tout  craché.  (Voy.  ressembler.) 

Grand'  honte  fait  à  sa  mère 
Qui  ne  ressemble  à  son  père. 

(xmrac  Siècle.) 

Tel  père,  tel  fils  :  bon  sang  ne  peut  mentir. 
Bon  cbien  chasse  de  race. 

Bien  pert  aun  tes  qites  U  pal  furent. 

(On  reconnaît  aux  tessons  ce  que  furent  les  pots.) 
Colubra  restem  non  parit.  (Pétrone).  La  couleuvre  n'engendre 
pas  une  corde. 
Les  Provençaux  disent  :  Le  figuier  ne  fait  pas  de  raisin. 

—  Le  père  est  celui  qui  est  le  mari.  Pater  est  quem  nuptiœ 
demonstrant.  Le  droit  romain  entendait  par  justœ  nuptiœ  le 
mariage  légitime,  conjugium,  par  opposition  au  concubinat,  qui 
avait  aussi  titre  légal  depuis  Auguste.  (Voy.  mariage.) 

Qui  que  saille  notre  jument,  le  poulain  est  nôtre. 

—  Fère,  mère,  se  disent,  par  une  sorte  de  courtoise  familiarité, 
dans  la  classe  ouvrière,  aux  liommes  et  aux  femmes  d'un  certain 
âge  :  père  Vincent,  mère  Michel. 

—  On  donne  le  nom  de  «  Pères  »  aux  moines  de  divers  ordres. 
Rabelais  nomme  un  religieux  «  beau-père  »,  peut-être  à  cause 

des  moines  caloyers,  beaux  religieux  (0- 


PEU  24o 

,  —  Pères  de  l'Église.  Le  petit  P.  André,  prédicateur  des  Petits- 
Aiiuiistins  de  Pnris,  compara  un  jour  les  Pères  de  l'Eulise  aux  quatre 
rois  du  jeu  de  caries  :  salut  Auûiistiu  au  roi  de  cœur, par  sa  grande 
charité:  saint  Anilu-oisc  au  l'oi  de  trèfle,  par  la  (leur  de  son 
élo(pience  :  saint  Jérôme  au  roi  de  pique,  par  son  style  mordant; 
saint  Grégoii-e  au  roi  de  carreau,  à  cause  du  peu  d'élévation  de  sa 
pensée. 

Période,  du  grec  jx-riodos,  par  le  latin  pcriodus. 
l'ue  période  est  la  révolution  complète  d'un  astre. 

—  Période  est  toujours  du  féminin,  excepté  quand  il  est  employé 
au  figuré,  pour  signifier  un  haut  degré  de  prospérité. 

Au  temps  d'Auguste,  reuijtire  était  au  plus  haut  période  de  sa 
grandeur. 

Péripétie,  du  grec  péripéléia. 

Événement  qui  change  inopinément  la  face  des  choses,  et  qui, 
dans  un  ouvrage  dramatique,  fait  passer  le  liéros  du  malheur  à  la 
prospérité,  de  la  prospérité  au  mallieur,  et  amène  le  dénouement. 

Périphrase,  du  grec  pàrlplirasis,  par  Fintermédiaire  du  latin. 

Figure  de  mots,  qui  consiste  à  remplacer  un  mot  par  un  tour  de 
phrase. 

Elle  contrihue,  eu  poésie,  à  l'ornement,  à  la  variété;  elle  sert  à 
remplacer  les  mots  peu  nohles  ou  trop  techniques,  par  des  expres- 
sions polies,  ou  des  circonlocutions  qui  permettent  de  faire  passer 
des  choses  déplaisantes  sans  hlesser  l'amour-propre,  comme  la 
sauce  fait  passer  le  poisson. 

«  Vous  avez  tort  »,  est  une  expression  blessante.  «  Vous  n'avez 
pas  raison  »  la  remplace  avantageusement.  (C'est  plutôt  un  euphé- 
misme.) 

Les  Précieuses  traduisaient  «  rire  «  par  «  perdre  son  sérieux  ». 

«  L'animal  qui  se  nourrit  de  gland  »  est  une  périphrase  transpa- 
rente. 

Perle,  du  latin  pirula,  petite  poire. 

—  Enliler  des  perles  :  faire  des  niaiseries. 

Trouver  des  perles  dans  un  fumier.  (Voy.)  Virgile  en  avait  trouvé 
dans  le  fumier  d'Ennius. 

Jeter  des  perles  aux  pourceaux;  donner  à  quelqu'un  des  choses 
qu'il  n'est  pas  capable  d'apprécier.  Allusion  au  mot  de  l'Évangile. 
(Mathieu,  VII,  G.) 

NoUte  mittere  niargaritas  ante  porcos,  ])Q\\T  ù\YQ,  qu'il  ne  faut 


246  PER 

pas  pnrlfr  devant  les   ipnoranls  de   choses   qu'ils   ne  sauraient 
coniprendre. 

Permettre,  du  latin  jx'riniUcrc. 

—  On  permet  une  chose,  quand  on  l'autorise  de  son  consente- 
ment; on  la  tolère,  lorsque,  pouvant  l'empêcher,  on  la  laisse  faire; 
on  la  soulïre,  quand  on  ne  peut  lenipêcher. 

Permutation,  du  latin  pertiwilarc 

—  La  permutation,  dans  le  calcul  des  combinaisons,  est  la 
manière  dont  plusieurs  choses  peuvent  être  disposées  entre  elles. 

Exemple  :  les  trois  lettres  ABC  sont  susceptibles  de  six 
permu  ta t  i o ns  d i fl ercn tes . 

—  Les  douze  apôtres  étant  en  discussion  pour  savoir  qui  serait 
le  premier,  Jésus  leur  dit  que  «  celui  qui  voudrait  être  le  premier 
serait  le  dernier  ».  Alors  il  s'éleva  entre  eux  une  telle  émnlation 
d'iiumilité,  qu'ils  se  mirent  successivement  à  se  céder  la  première 
place.  Ils  auraient  pu  ainsi  permuter  quatre  cent  soixante-dix-neuf 
millions  six  cents  t'ois,  avant  de  se  retrouver  dans  une  disposition 
absolument  semblable  à  l'une  des  précédentes.  (Voy.  coinhinaison.) 

—  Un  carillon  de  trois  cloches  donne  six  changements  ;  quatre 
cloches  en  donnent  vingt-quatre...  Étant  donné  un  carillon  de 
vingt-quatre  cloches,  il  faudrait  seize  mille  cinq  cent  soixante-quinze 
ans  pour  exécuter  toutes  les  combinaisons  possibles,  à  raison  de 
deux  coups  par  seconde. 

Péronnelle,  diminutif  de  Pcrronnc  :  autre  forme  de  Pelroniile. 
Autrefois  nom  propre  familier,  comme  Perrette,  et  devenu  appel- 
latif  comme  Catin  :  désigne  une  jeune  femme  sotte  et  bavarde. 

Taisez-vous,  pérun nette  ! 

(.Moi.[f:iiF.,  Femmes  savantes.) 

Pérorer,  du  latin  perorare  :  discourir. 

Mais  ta  jeune  Piitctiérie 
Pour  Vert- Vert  pérorera. 

Pérou,  contrée  de  l'Amérique  du  Sud,  très  riche  en  or  et  en 
argent. 

La  richesse  de  cette  contrée,  découverte  en  lo2o  par  don  Pizarre, 
a  donné  naissance  à  une  locution  proverbiale  très  usitée,  dans  le 
sens  de  rabaisser  une  chose.  Ce  n'est  pas  le  Pérou  :  c'est  bien  peu 
de  chose. 

Perpendiculaire,  du  latin  perpendicularia. 


PKR  247 

Une  ligne  porpomlinilairr  l'.ut  loiijoiii-s  deux  jindcs  droits  avec 
la  lieno  on  le  plan  (|U('lie  ivnconiro. 
rnt>  liiine  tv/V/m/t' est  celle  qui  passe  par  le  zénitli  du  lien  où 

l'on  est. 

La  iicrpi'iKlifiilairi'  se  piquo 
P'c'lfi'  plus  coiirk'  (iiU'  lubliipio. 

(Kc-iilf  l'olytfchniqiie.) 

Perpétrer,  de  fier  et  jxifrrn'c.  faire,  foninicllre. 
Ne  s'emploie  (jimmi  lennc  de  jiii'is[)i'udence  :  perpétrer  un  crime, 
un  foi'f.iit. 

Perron,  dérivé  de  pierre,  lalin  petra  :  roman  ])ciron. 

FélihiiMi   le   (ait  vonir  de  jiar  rond,  parce  que,  dit-il,  les  perrons 

ont  des  marches  arrondies. 

Petit  escalier  de  [)ierre  on  do  marhre  placé  à  la  [)orte  d'une 

iialiilaliiui. 

rejrons  ohntlz  c  hels  liuilirrs. 

(Vie  de  S'tiiit  /foiiorat.) 

(Perrons  ouvres  et  lieanx  tabliei's.) 

Au  iH'i'nui  de  la  sak' -la  roïno  (lescenl. 

(Bcrie  aies  r/rans  piéx,  3278.) 

Perroquet,  de  perrof,  pour  Pierre.  Ou  de  l'italien  parrorhetlo, 
diniiuutil'  de  parrocco,  curé. 

—  Parler  couiiut'  un  [)erroquet  :  répéter  ce  qu'on  a  entendu,  ou 
parler  sans  réllexion. 

—  Soupe  de  perro(piet  :  du  pain  trempé  dans  du  vin. 

Dans  le  Médecin  malgré  lui,  Sganarelle  ordonne  pour  remède  à 
Lucinde,  qui  passe  pour  muette,  quantité  de  pain  trempé  dans  du 
vin,  «  parce  que,  dit-il,  il  y  a  dans  le  pain  et  le  vin  mêlés  ensemble 
une  vertu  sympathique  qui  fait  parler.  Ne  voyez-vous  pas  bien 
qu'on  ne  donne  autre  chose  aux  perroquets,  et  qu'ils  apprennent  à 
parler  en  mangeant  de  cela  ?  »  (Acte  II,  scène  6.) 

Perruque,  origine  inconnue. 

Synonymes  :  gazon  (trivial)  ;  académicien,  rococo. 

Injure  prodiguée  par  les  roniantiqiu^s  éclievelés  de  1830,  qui 
avjiiciil  [tour  principaux  adversaires  les  membres  de  l'Académie, 
restés  lidéles  à  la  littérature  classique. 

Perruquier,  dérivé  du  précédent. 
Synonymes  :  coiffeur,  merlan,  pommadin,  tlgaro. 
Merlan  se  rapporte  aux  perruquiers  d'autrefois,  toujours  enfa- 
rinés comme  des  merlans  qu'on  va  frire. 


248  PKS 

—  Sur  l(is  neuf  liciircs,  on  voit  coin'ir  les  |»(M'riiq(ii('r?,  s;iiipoiidrés 
des  pieds  à  la  lèlo,  ce  qui  les  a  f;iit  apitclcr  «  merlans  »-,  tenant 
d'une  main  le  fer  à  loiip(;t,  et  de  l'auli-e  la  peii'iKpie.  (Mercier, 
Tableau  de  Paris,  cli.  îiliO.) 

—  En  180'),  il  n'y  avait  presque  [iliis  d'Iiomnies  qui  portassent 
encore  de  la  [>oudre,  les  femmes  y  avaient  renoncé  depuis  plus  de 
dix  ans. 

Pers,  peut-être  de  per.su.s,  pour  iiersicus  (?). 
Il  eut  un  ceinture  de  pers  et  vert,  parce  qu'il  avoyt  esté  pervers. 
(Rabelais.) 

Personne,  du  latin  jjersona,  masque  scénique,  puis  rôle, 
acteur,  personnage  de  comédie. 

De  là  est  venu  le  sens  d'être  qui  a  conscience  de  son  existence, 
qui  doit  répondre  de  ses  actes,  qui  a  une  individualité  propre. 

—  Personne,  qui  chez  les  Latins  était  substantif,  est  devenu 
souvent  chez  nous  pronom,  et  s'emploie  parfois  avec  la  valeur 
négative,  dans  les  réponses. 

Eu  provençal,  gés  (gens)  s'emploie  d'une  manière  analogue. 

Patz  forsada  nu  me  platz  ijes. 

(Beruard  de  la  Beuthe.) 

(Paix  forcée  ne  me  plaît  point.) 

Peser,  du  latin  pensare,  jadis  poiser. 

—  On  lit  sur  une  grosse  cloche  de  Rennes  celte  inscription  du 

xv^  siècle  : 

Je  suis  nommée  dame  Françoise, 
Qui  cinquante  mille  livres  poisc  : 
Et  si  de  tout  ne  me  croyez, 
Descendez-moy  et  me  poisez. 

—  On  connaît  les  vers  que  se  composa  Villon  après  la  sentence 
du  Châtelet,  qui  le  condamnait  à  la  pendaison  : 

Je  suis  François,  dont  ce  me  poise. 
Né  à  Paris  emprès  Pontoise  ; 
Or  d'une  corde  d'une  toise 
Saura  mon  col  que  mon  cul  poise. 

—  A  peser,  moi  de  forme  populaire,  Yé[)o\\^  penser,  mot  savant 
qui  a  laissé  le  sens  matériel  pour  prendre  le  sens  moral  :  penser, 
c'est  peser  les  idées. 

Pester,  de  peste,  latin  pestis. 

S'emporter  en  malédictions  contre  quelqu'un. 

Vient  sans  doute  de  linterjectiou  :  Peste  !  la  peste  soit  I... 


l'ET  "^i^ 

Pet,  (lu  latin  jK'ililitiii. 

Vent  (lui  sort  par  le  lias.  a\(M-  bruit. 

Swu)U\uiL'S  :  vents  intestinaux  :  vent  de  la  clicniise  (llahelais)  ; 
tlaluosilés;  pnennialose  :  lyniiiaiiile:  ventr(tse  (llahelais,  IV,  4'5)  ; 
inconuruit»!'. 

Tais  iirilz  i/uc  ■■ioii  de  cor  cos  scmblaran. 

il'.    DV.    .Mo.MAN.) 

(Tels  pets  (pi'ils  vous  sembleront  le  son  du  cor.) 

—  Recette  :  on  combat  les  vents  intestinaux  en  s'alislenant 
d'aliments  vég(îtau\  et  féculents;  en  prenant  des  infusions  chaudes 
de  m(!'lissc,  de  camomille  ou  d'anis. 

—  Pet  de  nonne.  «  Les  sanctimoniales  (pii  ap[)ellent  un  pet 
virginal  un  sonnet  »  (un  petit  son).  (Hahelais,  lY,  4)1) 

C'est  peut-être  de  ces  dt^'centes  nonnains  ({uest  venue  l'expres- 
sion :  pet  de  nonne,  pour  d(!'signer  un  petit  beignet  de  la  grosseur 
d'une  noix. 

On  ne  devait  pas  faire  des  pets  de  nonne  chez  les  nobles  nonnains 
de  Pette-sec,  que  l'on  suppose  être  l'abbaye  royale  de  Poissy. 
(Voy.  Hahelais,  IV,  4o.) 

Pétaud  (la  cour  du  roi). 

('.Iiai-nii  y  contredit,  ciiaciin  y  pai'li'  liant. 
Et  c'est  tout  justement  la  cour  du  roi  Pétaud. 

(.MoLiKRE,  Tartuffe,  I,  1.) 

C'est  la  maison  où  tout  le  monde  commande  et  où  personne 
n'obéit  :  le  contraire  de  la  congrégation  de  l'Oratoire,  dont  Bossuet 
disait  :  «  Cette  congrégation  où  personne  ne  commande,  et  où  tout 
le  monde  obéit.  » 

—  .Jadis  le  mot  roi  se  prenait  souvent  pour  le  chef  d'une  réunion  ; 
il  n'implicjuait  pas  l'idée  de  puissance  souveraine  que  nous  lui 
attribuons  aujourd'hui.  On  avait  des  rois  d'armes,  le  roi  des 
ribauds,  le  roi  de  la  fève. 

On  prétend  que  les  mendiants,  qui  formaient  une  sorte  de 
corporation  et  se  réunissaient  dans  la  Cour  des  Miracles,  avaient 
un  roi,  qu'on  nommait  en  latin  peto,  je  demande.  Comme  il  n'avait 
pas  une  autorité  bien  respectée,  on  appela  «  cour  du  roi  Pétaud  » 
un  lieu  où  tout  le  monde  commande. 

—  Froissard  appelle  pétamls,  du  latin  pes,  pndls,  comme  on 
disait  piétons,  les  anciens  routiers  et  les  grandes  compagnies 
licenciées  en  temps  de  paix,  et  qui  n'avaient  d'autre  ressource  que 
le  vol  et  le  meurtre. 


2o0  PET 

Pétaudière,  (Irrivr  fin  iinV-rdcnt. 
Assciiilth'c  coiifiisi^  ;  ét;il)lisseiin'iil  iii;il  dii'igé. 

Péter,  (Ic'rivé  de  pet. 

Synonymes  :  fjiiro  cliaiilcr  la  tourterelle.  Aristote  dit,  on  eiïet 
(Iliiilnlre  nahirclh;,  AninKni.r,  IX\  que  l;i  tniii-lcrclleptHe  souvent 
quand  elle  clianle. 

Prouter  (?). 

—  Péter  plus  liant  que  le  ml  :  avoir  des  iirétentions  au-dessus 

de  sa  condition. 

(Jloi'ii'iix  conimo  un  pet. 
Oui  ('liante  des  (ju'il  iiail. 

Mintjcrc  cum  liomins 
Eut  res  mnismnu  lumbis. 

(Krole  de  Salerne.) 

Bombns,  dit  le  Ménagluna.  signifie  pet,  dans  la  liasse  latinité. 
Bèze  Unit  son  Passavant  par  ces  mots  :  Et  ccce  untim  Ijombum 
pro  ist's  hœrellcts. 

—  Rabelais  (IV,  43)  dit  :  «  Ils  ne  pissent,  ils  ne  crachent  en 
ceste  isle  ;  en  récompense,  ils  vesnent,  ils  pèdent,  ils  rotent  copieu- 
sement. » 

Et  pins  bas  :  «  Ils  meurent  tous  liydropicques  tympanites  ;  et 
meurent  les  hommes  en  pédant,  les  femmes  en  vesnant.  » 

—  Suétone  (Claude,  32)  dit  que  «  cet  empereur  voulait  donner, 
par  un  édit,  la  liberté  de  péter  en  compagnie  ». 

Combien  de  fois  nostre  ventre,  par  le  refus  d'un  seul  pet,  nous 
mène  jusqu'aux  portes  d'une  mort  très  angoisseuse  !  et  pleust  à 
Dieu  que  l'empereur  Claude,  qui  nous  donna  la  liberté  de  péter 
partout,  nous  en  eust  aussi  donné  le  pouvoir.  (Montaigne,  I,  20.) 

...Celluy  honteux,  lequel,  pour  retenir  son  vent,  et  défaut  de 
péter  un  méchant  coup,  subitement  mourut,  en  la  présence  de 
Claudius,  empereur  romain.  (Rabelais,  IV,  17.) 

—  Campden  dit  que  «  tout  vassal  du  comte  de  SulTolk  devait 
faire,  le  jour  de  Noël,  devant  le  roi,  un  saut,  un  rot  et  un  pet  ». 

Péteux,  dérivé  du  précédent,  pour  péteur. 
Confus,  comme  celui  qui  a  fait  une  incongruité. 

—  S'en  aller  comme  un  péteux. 

Et  l'autre  on  fut  cliassé  comme  un  péteux  d'église. 

(Rkgmeu,  Satire  XIV.) 

Petit,  d'origine  incertaine,  peut-être  celtique. 

—  Petit  à  petit,  l'oiseau  fait  son  nid  :  pas  à  pas  on  va  loin. 


PET  251 

Miiillc  à  iiKiillo  se  f;iit  le  liiiiiborueon.  (Raltelais.) 

La  goutte  d"(Mii  ci-ciiso  la  itieiTO. 

Les  petits  ruisseaux  (ont  les  liraiules  rivirres. 

Un  peu,  répété  plusieurs  fois,  fait  lieaiicoup.  (Fi-aiiklin/) 

Ce  sont  les  pains  légers  qui  rendent  la  bourse  pesante,  car  les 
petits  gains  reviennent  souvent,  au  lieu  que  les  grands  arrivent 
rarement.  (Bacon.) 

A  petit  saint,  petite  olVrande. 

A  petit  ménage,  petit  potage. 

Dans  les  petites  boites,  les  bons  onguents,  ...et  dans  les  grandes 
les  excellents. 

Mdi/nus  Alcj-ander  corpore  parvus  eral. 

Plus  une  rbose  est  petite,  plus  elle  doit  être  précieuse.  Une 
cbaiiie  de  montagnes  peut  ne  se  composer  que  de  couclies  de  sel, 
de  houille  ou  de  craie  ;  mais  un  anneau  doit  resserrer  dans  sa 
monture  quelque  chose  de  plus  rare  que  l'argile.  C'est  ainsi  qu'on 
attribue  à  un  seul  homme  plus  de  vertu,  de  sagesse  et  de  génie 
qu'à  tout  un  peuple.  (J.-P.  liirhter.) 

Pt'lil  homme  abat  un  grand  rliéue. 

D'un  petit  gland  sourd  un  grand  chêne. 

On  ne  se  ligure  pas  la  })uissance  de  la  faiblesse,  cette  force  du 
ver  qui  ronge  un  ormeau  en  faisant  le  tour  de  l'écorce.  Les  tarets 
ont  mis  la  Hollande  ta  deux  doigts  de  sa  perte,  en  rongeant  les 
digues. 

Le  scorpion  est  tout  petit,  mais  tout  venin.  (Shakspeare.) 

Se  persuader  qu'un  petit  ennemi  ne  peut  nous  nuire,  c'est  croire 
qu'une  étincelle  ne  suffit  pas  pour  allumer  un  incendie. 

On  a  souvent  l)est)in  d'un  plus  petit  que  soi. 

(La  Fo.ntaink.) 

Ou  tost  ou  lard,  ou  près  ou  loin, 
A  ii  fort  (lu  faillie  Ijosoin. 

(xiiii:  Siècle.) 

Les  grands  protègent  ;  les  petits  ohligent. 

Franklin,  dans  le  Bonhomme  lilrhard,  dit  :  «  Parfois  petite 
négligence  accouche  d'un  grand  mal  :  faute  d'un  clou,  le  fer  du 
cheval  se  perd  ;  faute  de  fer,  on  perd  le  cheval  ;  et  faute  du  cheval, 
le  cavalier  lui-même  est  perdu,  parce  que  l'ennemi  l'atteint  et  le 
tue  ;  et  tout  cela  pour  avoir  négligé  de  faire  attention  à  un  clou  !  » 

—  Petit  entre  encore  dans  les  locutions  :  petit  à  petit,  gagne- 
petit. 


252  PEU 

Petites-Maisons,  liùpilal  fondé  à  Piiris,  oji  IW?. 

Ainsi  iioniNK'  piii-cc  (|iki  les  cours  (''tîiicnl  (Mitoiin'T's  de  |)etites 
maisons  basses,  qui  scrN.iiciil  de  i()^:('nient  à  pins  de  (inatrc  ccnls 
vieillards. 

Cet  hôpital  recevait  anssi  des  fons,  et  lexpression  «  pi'tites- 
maisons  »  devint  synonyme  d'hôpital  de  fons.  C'est  jionr  cela  ipu^ 
Boilcau  a  dit.  en  parlant  d'Alexandre  (Satire  VllI)  : 

lli'iirciiv,  si  (le  son  temps,  pour  cent  mille  raisons, 
La  Macédoine  eût  en  des  petites-maisons  ! 

Pétrifier,  dn  latin  pctra,  pierre,  et  dn  suflixe  ficare. 
Changer  en   pierre;  par  suite,   rendre  iniiuolnle   comme   une 
statue. 

—  La  tète  de  Méduse  pétriliait  ceux  cpù  la  re.uardaient.  (Voy. 
égide,) 

Pétrifié  sa  \eine  et  glacé  son  esprit. 

(Boii.tAu,  Satire  IX.) 

—  Niobé,  fdle  de  Tantale,  eut  pour  époux  Amphion,  roi  de 
Thébes,  et  donna  le  jour  à  quatorze  enfants,  sept  fils  et  sept  filles. 
Fière  de  sa  fécondité,  elle  méprisait  Latone,  qui  n'avait  que  deux 
enfants,  Apollon  et  Diane.  Latone  irritée,  chargea  ceux-ci  de  la 
venger;  ils  tuèrent  toute  la  progéniture  de  Niobé,  qui,  accablée  de 
douleur,  resta  pétrifiée  auprès  des  cadavres. 

...Les  poètes  figurent  cette  misérable  mère  Niobé,  ayant  perdu 
premièrement  sept  fils,  ensuite  sept  filles,  surchargée  de  pertes, 
avoir  été  enfin  transmuée  en  rocher.  (Montaigne,  Essais,  I,  2.) 

Diriijuitquc  inalis. 

(Ovide,  Mé/am.,  VI.) 

Pétrir,  du  latin  \}o\mh\re  jiisturire. 

Pétrousquin,  qui  a  signifié  badaud,  est  une  sorte  de  dérivé  de 
pierrot  (?).  Il  désigne  un  imbécile,  ou  un  homme  sans  valeur. 

Peu,  anciennement />o?<^  du  latin  paucum. 

—  Parmi  les  comparaisons  auxiliaires  imaginées  pour  multiplier 
la  forme  négative,  on  s'est  servi  du  mot  poil  :  Cela  ne  vaut  pas  un 
poil.  Ce  mot  s'écrivait  autrefois  pou,  peou,  peu,  et  c'est  cette 
dernière  forme  qui  est  restée  dans  la  langue  pour  exprimer  une 
quantité  très  petite.  Le  Provençal  dit  encore  péou,  un  poil,  et 
pou,  peu. 

Dans  l'argot  populaire,  on  emploie  fi  ferlin,  fraction  infinitésimale 
d'un  poil.  C'était  autrefois  une  petite  monnaie  valant  le  quart  du 
denier. 


pFXt  m 

î);ins  la  laiiLîiic  roniano.  \o  mot  peu  ii't'xistail  pas  (?),  et  avait 
pour  équivalent  jx'///. 

Salictz  pclil.  cai'  jiaiu-  avclz  appris. 

^li^:lllltA^•n  de  Pahis.) 

El  pour  moi,  j(^  comnionco  à  lo  croire  un  petit. 

(Moi.iKiii:,  AmpliitnjdH.) 

Oïl  a  quelqiiofoi;^  réuni  les  deux  mots.  (M  fait  la  locution  :  un  petit 
})eu,  e'est-à-dire  très  peu. 

On  dit  encore  :  nn  tant  soit  peu,  un  tantinet,  qui  répond  au 
tant  il  lu  in  des  Latins. 

—  Les  grammaii'iens  interdisent  à  tort  la  locution  un  petit  peu, 
parce  que,  disent-ils,  il  n'y  a  ni  petit  ni  grand  peu,  et  que  un  peu 
dit  tout.  (F.  Génin.) 

On  a  tort  également,  dit-il,  de  tirer  pieu  de  l'adverbe  latin 
paucum;  peu  vient  de  poil.  (Yoy.  pauc,  exemple  ci-dessus.) 

—  Les  Latins  employaient  ce  mot  :  Ex  Cappadocia  ne  plluni 
quideni.  dit  Cicéron.  Et  Caton  :  Aliquid  non  faccre  pili.  N'en  pas 
l'aire  plus  de  cas  que  d'un  poil. 

On  dit,  dans  le  langage  populaire  :  11  n'en  fait  pas  lourd,  pour  il 
fait  peu  de  besogne. 

—  Peu  de  biens,  peu  de  soucis. 

Il  en  est  du  bonheur  comme  des  montres  :  les  moins  compliquées 
sont  celles  qui  se  dérangent  le  moins.  (Chamfort.) 
Le  sage  se  contente  de  peu. 

Qui  vit  (le  peu,  connaît  l'indépendance. 

(Bëhms.) 

Les  vrais  besoins  sont  très  bornés  dans  les  enfants,  comme  dans 
les  bommes.  (J.-J.  Rousseau.) 

Que  faut-il  pour  Ijien  vivre  ?  A  peu  près  mille  écus  ; 
Qui  sait  borner  ses  goûts  n'a  pas  besoin  de  plus. 

(l'oNSAïui,  la  Bnurxc,  1,  o.) 

Qnnd  salis  est  eut  conlin<jil,  ni/iil  ainplius  oplet. 

(Horace.) 


Celui  qui  sait  jouir  de  peu  est  toujours  assez  riche.  (Démocrite.) 

Faaper  cnim  non  esl,  rcrum  eut  siippelit   usus. 

(HouACK,  Ejjilre  XU.) 

—  On  vit  si  peu  de  temps,  et  de  si  peu  de  chose. 


L:\  iiMiivrcIr  i|iii  n'.i  hcsoiii  de  ricii  csl  plii^  i-icli(;  (jiie  l'opiilence 
(jiii  ;i  hcsoiii  de  loiil. 

Qiinnd  lu  iia(|iiis,  lu  n'avais  rien, 
l'rciids  (loiK-  cil  j,'iv  Ion  [ii-tit  bien. 

Oui  a  (li's  |i(iis  cl  (lu  |iaiii  d'orge. 
Kl  du  lard  |)our  oindre  sa  gorge. 
Avec  ciii(|  sous,  cl  ne  doit  rien. 
Il  peut  liicn  dire  qu'il  est  bien. 

Peuple,  du  kiliu  ]>ojni/iis. 

Vox  jiopiili,  vox  Dei  :  la  \(ii\  du  peuple  est  la  voix  de  Dieu. 

C'est  une  pensée  d'Hésiode,  l'apportée  par  Aristote. 

—  En  masse,  le  peuple  est  roi  :  mais  en  détail,  c'est  un  pauvre 
sire. 

Horace  l'appelle  belliia  inulforian  capitum.  {Épitre  I,  1.) 

Quod  fcril  atque  furit,  sœvis-Hma  bellua  vidijus. 

Nos  gouvernements  modernes  ont  traduit  ces  comparaisons  gran- 
dioses par  l'hydre  des  révolutions  et  le  spectre  rouge,  qui  a  eu  un 
si  grand  succès  dans  le  style  de  M.  Prudhomme. 

Multœ  un  matins,  ilU  una  cervix.  (Gicéron,  Of/lc.  II,  7.) 

La  multitude  a  des  millions  de  mains  qui  se  dirigent  contre  une 
seule  tête. 

Multorum  odiis  nullœ  opes  possunt  resistere.  (Gicéron^  Offic. 
II,  7.) 

Nul  pouvoir  ne  peut  résister  à  la  liaine  pul)lique. 

—  Il  faut  faire  tout  pour  le  peuple,  et  rien  par  le  peuple.  (Mon- 
tesquieu.) 

En  1848,  on  disait  :  «  Tout  pour  le  peuple  ;  tout  par  le  peuple.  » 

Peup,  autrefois  7;»flo?/r,  du  XwWn  pavorem. 
Synonyuies  :  talïe,  vieux  mot.  Les  fesses  lui  fout  ///  taf.  (Oudin, 
1640).  Trac,  maladie  qui  donne  un  frisson  continu.  Ganer. 

—  Avoir  peur  de  son  ombre. 

La  peur  grossit  les  oltjets  :  on  s'exagère  ce  que  l'on  craint. 

Sans  peur  et  sans  reproche.  (Devise  de  Bayard.) 

Il  n'y  a  que  les  fous  qui  ne  connaissent  pas  la  peur.  Les  anciens 
preux,  qui  faisaient  si  bon  marché  de  leur  vie,  n'étaient  pas  sans 
peur,  comme  le  dit  le  blason  de  Bayard  ;  mais  ils  avaient  plus  peur 
de  la  honte  que  de  la  mort.  Leur  grand  courage  était  un  calcul,  qui 
leur  faisait  braver  un  mal  pour  en  éviter  un  autre  pire  à  leurs 
yeux,  la  perle  de  l'honneur. 


Heiivi'iHild  Cclliiii  disait  :  .  J'iuiioiv  de  quelle  couleur  est  la  pour.  » 

Jusliuii  cl  IniiifCiii  iiroiiosili  riruiii 
...Si  fnielits  illubalar  orbis, 
Iiiipiiriihuii  ferlenl  ruime. 

(HonACE,  Odes,  III,  .").) 

—  Un  Gascon  disait  :  ^  J'ai  l'air  si  martial  que,  quand  je  me  vois 
dans  la  glace,  je  me  fais  peur  à  JUdi-inrine.  » 

—  Ga reins  II,  roi  de  Navarre,  dit  le  Ti'einbleur,  était  pris  d'un 
treinlilenient  nerveux,  lorsqu'il  mettait  son  armure  pour  aller  au 
comlial.  Il  disait  à  ce  sujet  :  «  Mon  corps  tremble  des  périls  où  mon 
courage  va  le  porter.  » 

Peureux,  dérivé  de  peur. 

Syiion suies  :  capon,  couard,  polli'on. 

—  Les  heures  du  peureux  s'écoulent  comme  une  horloge  (?), 
toujours  en  craiiile  de  se  casser.  (Gœthe,  2"  Faust.) 

Phallus,  du  grec  yjAa/Zo.s-,  pieu.  (Pénis  llyneus,  reclus.] 
Lilhyphalle  était  l'attribut  de  Priape;les  anciens  le  représen- 
taient dans  les  jardins  et  le  portaient  dans  les  processions. 

De  là  vient  falot,  lanterne  (?j,  à  cause  de  la  chandelle  qui  y  est 
renfermée,  et  qui  est  comme  la  parodie  (?)  de  cette  effigie  païenne. 

Phare,  du  grec  jiharos,  nom  d'une  ile  voisine  d'Alexandrie,  où 
Ptolémée  Philadelphe  lit  élever  une  tour  surmontée  d'un  fanal. 
C'était  une  des  Sept  Merveilles  du  Monde. 

—  Étoile  du  marin  :  Maris  Stella. 

Pharisien  pour  p/iarise'en,  du  latin  éxsiBgéllqne  pharisœus. 
Membre  dune  secte  juive,  qui,  sous  l'apparence  d'une  grande 
sévérité  de  mœurs,  cachait  des  habitudes  dissolues. 

Pharmacien.  (Voy.  apothicaire.) 

Phébus,  du  latin  Pliœbus,  grec  Plioibos,  brillant. 
Surnom  du  soleil  cliez  les  poètes  grecs. 

—  Style  trop  figuré,  mais  moins  obscur  que  le  galimatias.  (Yoy.) 
Le  soleil  l'éclairé  parfois  ;  c'est  ce  qui  lui  a  peut-être  fait  donner 

le  nom  de  Phébus.  (Le  P.  Bonheurs.) 

Peut-être  l'origine  de  la  locution  est-elle  dans  le  livre  sur  la 
chasse,  de  Gaston  Phœbus,  comte  de  Foix,  intitulé  Mémoires  de 
Phœbus,  livre  ti'ès  ennuyeux  et  très  obscur. 

Phénix,  du  grec  phoinix,  rouge. 

Oiseau  fabuleux,  dont  les  Égyptiens  a\aient  fait  une  divinité.  Ils 


le  représ('iit;ii<'ii(  himikI  et  lier  coiiiiiic  un  iii^lc,  une  lioiiiipo  de 
pourpre  sur  la  lêl»!,  (I(!S  pliiiiies  coiilciii-  de  poiiinfc.  et  d'or-,  les 
yeux  élincclanls  comme  des  étoiles. 

Le  phénix  était  remblème  du  Soleil  :  il  est  devenu,  dans  la 
symbolique  clirétifMine,  celui  du  Christ  et  de  la  Hésurreclion. 

—  L'histoire  du  phénix  n'est  pas  plus  authentique  que  celle  du 
pélican  ;  mais  elle  est  plus  ancienne,  et  a  passé  des  Éfivptiens  aux 
Grecs  et  aux  Romains,  pour  ai'river  jusqu'à  nous. 

Les  historiens  et  les  naturalistes  les  plus  graves  aflii-ment  son 
existence.  Tacite  (Annales,  YIII,  18)  dit  qu'on  vit  un  i)hénix  sous 
le  considat  de  Yilellius,  l'an  34  de  notre  ère.  On  en  vit  un  aussi 
sous  Sésostris,  et  on  le  vit  reparaître  sous  Amasis  II,  puis  sous 
Ptolémée. 

—  Suivant  la  tradition,  le  phénix  est  né  en  Arabie,  où  il  est 
consacré  au  soleil.  Il  vit  mille  ans;  il  est  unique  au  monde.  D'après 
d'autres,  il  renaît  tous  les  quatorze  cent  soixante  ans.  Au  Moyen-Age, 
on  le  représente  avec  des  ailes  de  saphirs,  de  perles  et  d'émeraudes. 

Quand  sa  vie  est  près  de  finir,  il  construit  dans  la  terre  natale 
un  nid  avec  de  l'écorce  de  cannelle  et  de  l'encens  :  et,  après  l'avoir 
inondé  d'un  principe  régénérateur  et  y  avoir  mis  le  feu,  il  meurt 
dessus.  De  ses  cendres  sort  un  ver,  qui  se  change  bientôt  en  un 
nouveau  phénix  qui,  devenu  grand,  enlève  ce  qui  reste  de  son 
prédécesseur,  et  le  brûle  sur  lautel  du  soleil. 

Cette  fable  égyptienne  fut  accueillie  par  les  Pères  de  l'Église,  qui 
en  tirèrent  de  belles  leçons.  Saint  Jérôme  en  a  fait  la  consolante 
image  de  l'immortalité,  comme  il  a  fait  du  pélican  le  symbole  de  la 
tendresse  paternelle.  Elle  est  très  ingénieuse,  mais  entièrement 
imaginaire,  et  contraire  à  toutes  les  lois  de  la  nature  ;  car  aucune 
espèce  du  règne  animal  ne  se  reproduit  par  un  seul  individu  : 
aucun  animal  ne  se  détruit  lui-même  ;  tous,  au  contraire,  obéissent 
à  la  loi  générale  de  l'instinct  de  la  conservation.  La  faculté  de  faire 
du  feu  n'existe  également  cbez  aucun  animal,  c'est  une  propriété 
de  l'homme,  aussi  bien  que  la  parole.  Enfui  aucun  oiseau  ne  vit 
raille  ans  ;  aucun  ne  se  reproduit  sous  la  forme  d'un  ver. 

On  ne  croit  donc  plus  à  l'existence  d'un  oiseau  si  merveilleux  ; 
mais  le  nom  de  phénix  continue  à  être  donné  aux  êtres  extraordi- 
naires, uniques,  en  quelque  sorte,  dans  leur  genre.  C'est  ainsi  que 
La  Fontaine  fait  dire  au  corbeau  : 

V^ous  êtes  le  phénix  des  hôtes  de  ces  bois. 

[Fal)/e.<,  I,  2.) 


Pin  257 

Hoiloriii  (lit  d'un  sonnet  sans  défont  : 

Kt  Cri  liciiiciiv  iilii'iiix  csl  encore  ii  trouver. 

{Art  poétique.) 

.Iciii  lliiss,  sur  le  lificlicr.  dit  ([n'oii  lu  niait  l'oie  (A?/.v  si.unifie  o/e 
en  allemand),  mais  qne.  cent  ans  après  sa  mort,  m\  eyunc  naîtrait 
de  ses  cendres,  qui  ferait  triom[)lier  les  vérités  pour  lesquelles  il 
mourait.  11  |i,irl;;il  de  Liillicr. 

—  On  appelle  le  palmier  dattier />Ar/';(Az;  r/^/r//////(V'«  .•  c'est  le 
phénix,  du  réune  vé.uétal. 

Phénomène,  du  isvrc  ji/i(/inof/t('iioii.  qm  apparaît  clairement. 

Ce  mot  qui,  dans  le  langage  vulgaire,  ne  s'entend  que  de  ce  qui 
est  très  rare,  extraordinaire,  s'applique,  dans  la  langue  scientilicpie, 
à  tous  les  faits  extéi'ieurs  qui  apparaissent;')  nos  sens  et  qui  peuvent 
se  ranger  sous  une  loi  commune.  Tels  sont  les  i)liénomènes  de 
l'électricité,  de  la  chaleur,  etc. 

Philanthropie,  du  grec  philos,  ami.  anf/iro/tos,  homme. 
Amour  de  llrnuanité. 

—  Ce  mot,  créé  au  siècle  dernier,  a  un  sens  plus  pratique  que 
charité  et  bienfaisance,  et  exprime  l'idée  de  l'amélioration  du 
sort  des  masses.  On  en  trouve  le  germe  dans  ce  vers  de  Térence, 
souvent  cité  : 

Homo  ■sain  :  kumani  a  nie  niliil  alienuin  pulo. 

—  On  doit  aux  philantliropes  l'abolition  de  la  traite  des  noirs,  la 
propagation  de  l'instruction  primaire,  les  salles  d'asile,  les  four- 
neaux économiques,  les  sociétés  de  secours  mutuels... 

Philémon  et  Baueis,  tous  deux  très  âgés,  donnèrent  l'hospi- 
talité à  Mercure  et  à  Jupiter,  déguisés  en  simples  mortels,  et  qui 
avaient  été  rebutés  par  les  autres  habitants  du  pays. 

Jupiter  submergea  tous  les  environs,  et  ne  préserva  que  leur 
cabane,  qui  fut  changée  en  un  temple,  dont  ces  époux  pieux  et 
Immains  devinrent  les  prêtres.  De  longs  jours  après,  ils  furent 
métamorphosés,  le  même  jour,  Philémon  en  chêne,  et  Baiicis  en 
tilleul.  (^Ovidc,  Métamorphoses.) 

Ils  personnifient  l'amour  conjugal  sans  nuages. 

Phiiippique,  dérivé  du  grec  philippikos. 

Satire,  discours  violent  contre  quelqu'un. 

C'est  le  titre  des  discours  de  Démoslhène  contre  le  roi  de  Macé- 

17 


iA^8  IMII 

doiiio,  IMiiliiipo.  Los  Oriiisnns  de  Ciréron  conlro  Aiitoiiio,  sont  nii^si 
désignées  sons  ro  nom. 

Philistin,  iHun  d'ww  iicnplc  \(iisin  dos  llôhriMix. 

So  dit  on  Alloni;iL!iio  pour  /joitrf/cois. 

«  —  A  |iro|)os,  (|irosl-co  qn'nii  Philistin  ?  —  Antrofois,  on  Gn'cc, 
il  s";ippol;iil  Uôolion  :  on  1(>  noniino  (]oknoy  on  Annleterre  ;  épicier 
et  Joseph  l^'iidhoninio  ;'i  Paris;  et  h'S  ôtndiants  d'AMonifi^no  lui  ont 
fonfôré  h'  nom  de  Philistin.  »  (Do  Nouvillo,  cité  par  L.  Larchey.) 

Philologie,  dn  grec  /t/ti/os,  /of/os. 

Étude  de  la  littératuro  an  point  de  vue  technique  et  de  la  firam- 
niaire  générale.  Analyse  du  langage. 

—  Un  philologue  est  un  littérateur  qui  n"ap])rofondit  rien. 
Ératosthène,   philologue   grec   sous    Ptolémée  Philadelpho,    fut 

nommé  Béta,  de  la  deuxième  lettre  de  l'alpha het  grec,  parce  que,  ne 
pouvant  aspirer  au  premier  rang  dans  aucun  genre,  il  était  arrivé 
au  second  dans  plusieurs. 

—  Zenon  appelait  pkilologiies  ceux  qui  recherchaient  les  lois 
grammaticales,  et  logophlles  ceux  qui  ne  visaient  qu'à  l'élégance 
du  langage. 

Philosophie,  du  grec  phUosophia.  étude  de  la  sagesse. 

Ensemhle  des  connaissances  relatives  à  Tàme,  à  l'intelligence. 

Un  pliilosophe  est  un  homme  qui  oppose  la  nature  à  la  loi,  la 
raison  à  l'usage,  la  conscience  à  l'opinion,  et  le  jugement  à  l'erreur. 

Aristote  et  les  anciens  appelaient  philosophie  ce  que  nous 
appelons  science,  et  surloiit  la  science  appliquée  à  la  physique  du 
giohe. 

—  Le  cours  de  philosophie  se  divise  en  :  lorju^ue,  morale,  phy- 
sique et  métaphysique. 

En  philosophie,  le  malérialisine  est  opposé  à  \ Idéalisme,  le 
sensualisme  au  splrilualisfne,  l'empirisme  au  ymtionallsme. 

Parmi  les  anciens,  Platon  représente  l'idéalisme,  et  Aristote  le 
matérialisme. 

Les  chefs  de  la  philosophie  moderne  sont  :  Descartes  (France), 
Locke  (Angleterre),  Leihnitz,  Kant  (Allemagne),  Spinoza  (Hollande). 

—  La  philosophie  apprend  à  faire  volontairement  ce  que  les 
autres  font  par  contrainte.  (Aristote.) 

La  philosophie  enseigne  à  se  contenter  de  peu,  à  vivre  lihre  et 
heureux.  (Gratès.) 
La  j/hilosophie,  pour  être  utile  et  pratique,  doit  être  une  action 


IMA  239 

et  une  riicrL;!!*.  L;i  sciciicr  doil  rire  un  cordi;!!  et  un  rlivir  préstMilr 
à  la  soil'  lit'  riiomnio  :  la  sagesse  doit  ('li'C  une  romniiinioii  sarrôe, 
t'i  ("est  le  sens  ([ii'il  faut  donner  à  ces  paroles  de  Jésiis-Clirist  : 

IMi'iiez,  ceci  est  nia  chair,  ceci  est  mon  sang.  »  Jonir  est  un  hnt 
clirlil:  la  liiMile  jonil.  F'enser,  voilà  le  triomphe  vrai  de  Tàme.  La 
pliil()S0(>iiie  a  |)oMr  molcnrs  deux:  forces  :  croire  et  aimer.  (V.  Hupo, 
/(';<  M/si'rnfj/cs.) 

Tonte  pliilosopliie  se  résnnie  dans  l'art  d'élargir  le  libre  arbitre 
an\  dépens  de  la  conscience. 

Phrase,  du  gi'ec  /iJirasis.  latinisé  :  p/nmo,  [lai'ler. 

Assemblage  de  mots  exprimant  une  idée,  formant  un  sens  complet. 
La  jilirase  la  pins  simple  se  compose  dune  proposition  nniqne  : 
sujet.  veri)e  et  attribut. 

Dans  la  pbi-ase:  «  Dieu  est  bon  »,  Dieu  est  le  sujet:  bon.  l'attri- 
but :  est.  le  verbe. 

Physique,  dn  grec  7^//'/.v//.r,  de.  j)/n/sis^  nature. 

—  Physiquement  parlant,  c'est-à-dire  [larlant  d'une  manière 
physique,  est  du  galimatias  bien  réussi. 

Piano,  mot  italien,  correspondant  au  français  ^)/r/;K  plain. 

—  Piano,  piano  :  tout  doucement,  pas  à  pas. 

Et  s";ip|)roclia  in;ircli;inl  pian-pian. 

(ScARROx,   Virr/ile  travesti.) 

Chi  ra  /lia no.  ra  san(K  (jui  \a  doucement,  va  sainement. 

—  Piano-forté,  ou  forlc-piano,  ou  simplement  piano,  niani- 
cordion.  Instrument  de  musique  inventé  par  Bartolomo  Cristofari, 
de  Padoue,  en  171 J.  On  l'aftpela  de  ce  nom,  qui  signifie  doucement 
et  fort,  parce  qu'il  doniie  tous  les  tons  et  forme  à  lui  seul  un  orchestre 
complet. 

Le  piano  est  pour  les  insti'umenls  à  cordes  ce  que  l'orgue  est 
pour  les  instruments  à  vent. 

Les  premiers  pianos  fabriqués  en  France  sont  dus  aux  frères 
Erard,  vers  1780.  En  ISoo,  il  se  vend  annuellement,  à  Paris,  plus 
de  2o.()()0  pianos. 

«  Le  piano,  dit  Ilalévy,  sur  lequel  tous  les  tons  de  réchelle 
musicale,  fi.xés  d'avance,  n'attendent  que  la  pression  d'une  main 
habile  pour  vilu'er  en  gerbes  d'accords  harmonieux,  ou  pour  éclater 
en  gammes  rapides,  serait  le  premier  des  instruments  si  l'orgue 
n'existait  pas.  » 

Le  piano.  In'tte  de  la  maison,  se  prête  aux  passe-temps  les  plus 


%0  PIE 

fi'ivoles  aussi  hicn  qn'jiux  éludes  les  plus  sérieuses.  Comme  il  recèle 
dans  son  sein  Ions  les  trésors  de  riiarmonie,  il  est  de  tous  les 
instruments  celui  qui  a  le  plus  contriliué  ;i  lépandtf^  le  .uoût  de  la 
musique  et  à  en  faciliter  l'élude. 

—  On  a  appelé  Pai-is  Pianopnlis,  parce  (|ii"oii  y  f;iil  hcaiicoup 
de  musique,  quoique  ce  soit  la  a  ille  où  on  aime  le  moins  la  musique. 

—  Mauvais  |)iauo  :  chaudi'on.  Allusion  aux  cjiaudronsde  Dodone. 

Picaillon,  synonyme  Ciaryenl.  Oi'i.uine  incertaine. 

Petite  monnaie  de  enivre,  piémontaise,  valant  deux  deniers. 

Picard,  vient,  au  dire  de  Bru/ou  de  la  Mailiiiiére.  du  caractère 
des  habitants  de  la  Picardie,  qui  se  piqncui,  ou  se  fâchent 
volontiers. 

On  a  supposé  aussi  que  les  Picards  auraient  tii'é  leur  nom  des 
piques  dont  ils  se  servaient  pour  combattre  :  mais  alors  on  aurait 
dû  les  appeler  7j/^?«/^r5.  Car  le  suffixe  ard  marque  une  habitude 
blâmable,  comme  dans  les  termes  injurieux  criard,  bavard,  paillard. 

Picard  est  plutôt  un  sobriquet  injurieux,  résultant  du  vice  de 
caractère,  et  non  de  la  manière  de  combattre  avec  des  piques, 
quoique  Lucain  ait  dit  (P/tar.sa/e,  I,  423)  : 

...Lour/isque  levés  Suessones  in  armis, 

preuve  unique  et  insuffisante,  pour  justifier  cette  origine. 

—  Prière  de  Picard  :  imprécations,  comme  peuvent  en  formuler 
des  gens  vindicatifs. 

Picaresque,  de  l'espagnol  picaro,  vaurien,  vagabond.  Ce  mot 
manque  au  Dictionnaire  de  l'Académie. 

Il  se  dit  des  romans,  des  pièces  de  théâtre  où  le  principal  person- 
nage est  un  picaro,  un  coquin. 

Picotin,  dérivé  de  l'ancien  français  7>/eo^  origine  incertaine. 
Petite  mesure  dont  on  se  sert  pour  l'avoine  qu'on  donne  aux 
chevaux. 

Pie,  du  latin  jjica,  en  provençal  inga. 

Oiseau  â  plumage  blanc  et  noir. 

De  là  :  cheval  pie,  blanc  avec  des  taclies  noires. 

—  Synonymes  :  la  pie  s'appelle  aussi  «^«cf;  en  itahen  ^«rra  ; 

margot. 

L'aigle,  reine  des  airs,  avec  Margot  la  pie. 

(La  Fontaine.) 

Perruche  de  savetier. 


PIE  2G1 

—  Jn?or  coninio  uno  pio.  ...roninio  une  pic  borgne. 
11  a  trouvé  la  pic  an  nid  :  (piclqiic  chose  de  rare. 

Voleur  comme  mie  i)ie.  IMiiie  ap[)clle  la  pie  moncdula  (a  surri- 
pic/u/is  jnonctisj. 

Menteur  comme  une  pie. 

Ain  mentez  coin  -l'eralz  ijnc/ta. 

[  r.   m:  ISi.iiTiiAND.) 

(Vous  meule/,  comme  si  vous  étiez  une  [)ie.) 

—  /*i('-;/ri('r/u\  [lie  prise  et  commune. 

Cet  oiseau  a  le  couraue  et  les  goûts  des  oiseaux  de  proie.  Il 
coml)at  avec  intréiiidité  des  oiseaux  beaucoup  plus  grands  et  plus 
forts.  C'est  par  allusion  à  celte  humeur  belliqueuse,  ([u"ou  appelle 
«  pie-griéche  »  une  femme  querelleuse,  acariâtre. 

En  provençal,  cet  oiseau  s'appelle  darnagas,  nom  qui  se  donne 
aussi  aux  personnes  d'un  caractère  désagréable. 

Fontenellc  a  dit  :  «  La  plupart  des  femmes  sont  des  faons  dans 
le  monde,  des  pies-griécbes  dans  l'intérieur,  des  colombes  dans  le 
tête-à-téte.  » 

Ainsi,  outre  sa  réputation  bien  étalilie  de  bavarde,  de  menteuse 
et  de  voleuse,  la  pie  a  encore  celle  de  querelleuse. 

C'est  à  elle  que  remontent  les  mots  agacer  et  grincheux. 

Pièce,  italien  j)e:ra.  Origine  incertaine. 

Nom  pris  dans  une  foule  d'acceptions  très  diverses,  particulière- 
ment comme  mesure  pour  les  vins  : 

La  pièce  ])ordelaise  vaut  201  litres  ;  la  màconnaise,  213  ;  celle  du 
Languedoc,  274  ;  celle  d'Auvergne,  2'J4. 

Pied,  du  latin  pes.  pedis:  en  provençal  ;^c. 
Au  même   radical   remontent  :  pédale,  pédestre,  peton,  piège, 
empêcher,  piéton,  piétiner,  expédier,  etc. 

—  Synonymes  d'aller  à  pied  :  marcher  ;  voyager  sur  la  baquenée 
des  cordeliers  :  monter  ses  chevaux  à  deux  semelles  ;  prendre  la 
voilure  de  saint  Crépin  :  [)rendre  la  poste  de  MM.  Talon  frères. 

—  Depuis  les  pieds  jusqu'à  la  tète. 

—  Partir  du  pied  droit  :  bien  commencer  une  chose. 

On  trouve  dans  Apulée  :  Slnislro  pede  proficisci,  partir  du  pied 
gauche. 

—  Trouver  chaussure  à  son  pied,  c'est-à-dire  une  bonne  position. 
Cicéron  dit  d'une  nuuiière  analogue  :  Catceos  )iiulare,  changer 

d'état. 


262  IMK 

On  d'il   iiiissi  d'iiiu'  clioso  qui  \;\  de  knit  |»oiiil  :  ccl;!  iiie  cliîiiisse, 
iiio  bnllc.  me  v;i  coiniiic  iiii  uiiiit. 
Vin^t  mille  francs  de  renies,  ça  me  hutle  !    . 

—  Pied  plat  :  homme  de  basse  naissance.  (]liez  les  Romains,  on 
appelait  jxi/m/jx'ffes.  pieds  ])alm<''S.  on  ]»ieds  plats,  les  bateleurs, 
mimes,  etc. 

Cette  dénominalion  dédaigneuse  a  été  donnée.  Sdiis  Louis  \1V. 
aux  ijens  de  peu,  (]iii  ne  p(»rlai(Mil  pas  des  talons  hauts  comme  la 
noblesse. 

—  Grand  pied  :  piédestal,  pied  à  dormir  debout. 

Elle  a  de  petits  pieds,  mais  les  Grands  souliers  lui  vont  bien. 

Grand  pied  se  dit  eu  bonne  part  et  marque  la  supérioi-ité.  taudis  rpie 
petit  pied,  comme  pied  plat,  est  dépréciatif  :  doi'i  jiirirr,  mesquin, 
autre  forme  Aç  pcdeaire. 

—  Être  sur  un  bon  pied,  ou  sur  un  arand  pied  dans  le  monde  : 
être  considéré,  jouer  un  rôle  important. 

On  dit  dans  nu  sens  analogue,  mais  au  propre  :  avoir  bon  pied. 
})on  œil. 

—  Il  retomlje  toujours  sur  ses  pieds. 

—  Marcher  sur  le  pied  à  quelqu'un  :  lui  faire  une  injure. 

—  GeolTroi  Planlagenet,  comte  d'Anjou,  pour  dissimuler  une 
difformité  au  pied,  imagina  de  porter  des  souliers  dits  à  la  poulaine, 
ou  à  la  Polonaise.  (Borel.) 

Les  souliers  d'un  prince  avaient  deux  pieds  et  demi  de  long  : 
ceux  d'un  baron,  deux  pieds;  ceux  d'un  simple  chevalier,  un  pied 
et  demi. 

Plus  tard,  sous  Louis  XIY,  la  noblesse  porta  des  talons  liauts, 
parce  que  le  roi  avait  besoin  de  cet  artifice  pour  hausser  sa  taille. 

—  Mettre  les  pieds  dans  le  plat  :  faire  une  inconvenance. 
Les  Provençaux  disent  :  marcher  dans  ce  qui  est  semé. 
Régnier  parle  de  gens  qui 

Pissent  au  liéiiiticr  afin  iin'on  piii'lc  d'eux. 

Les  anciens  disaient  :  In  Pythu  tcmplo  cncare  :  se  soulager 
dans  le  temple  d'Apollon. 

11  n'y  a  que  les  cochons  à  qui  on  permette  de  mettre  les  pieds 
dans  le  plat,  ...pourvu  qu'ils  soient  à  la  Sainte-Menehould. 

—  Un  pied  chaussé  et  l'autre  nu. 

Quand  Molière  lit  la  Princesse  d'Élide,  pour  les  fêtes  de  Ver- 
sailles, il  la  commença  en  vers  et,  faute  de  temps,  l'acheva  en 
prose.  On  dit  alors  que  la  Comédie  n'avait  eu  le  temps  de  prendre 


PIK  203 

qu'iiii  do  SOS  Iti-odoqnins  cl  étnil  voniic  donner  dos  marques  de  son 
ohéiss.iiico  un  pied  chaussé  el  Taiilro  nu. 

—  Va-nu-pieds:  vagabond,  mendiant.  Un  de  ceux  dont  La  Bruyrrc 
di(  qu"  <'  ils  n'ont  pas  môme  do  quoi  aller  à  pied  ». 

On  dit  do  (pioiqu'nn.  pour  marquer  son  extrome  misère,  qu'il  n'a 
pas  de  souliers. 

On  appelle  moines  déchaussés  (ou  déchaux)  certains  religieux 
(jui  \ont  [lieds  nus  dans  des  sandales. 

Pour  certaines  gens,  ceux  (pii  ne  portent  pas  do  gants  sont  des 
va-nu-pieds. 

—  En  1(î;î9.  les  liahilanls  do  la  Normandie  se  soulevèrent  contre 
un  édit  qui  déclarait  les  communes  solidaires  pour  le  paiement  des 
taxes.  Ils  inscrivirent  sur  une  bannière  le  nom  de  va-nu-pleds,  qui 
leur  était  donné  par  mépris,  et  qu'ils  adoptèrent  comme  un  cri  de 
déli  et  un  signal  de  vengeance. 

—  Puanteur  des  pieds  :  essence  de  chaussettes. 

—  Mettre  à  pied  :  mettre  en  non  activité  temporaire,  en  dispo- 
nibilité, par  mesure  disciplinaire. 

Pierre,  du  latin  peira. 

—  Synonyme  :  miche  de  saint  Etienne  (Rabelais),  parce  que  ce 
sailli  lui  lapidé.  Le  jour  de  Saint-Étienne,  en  Provence,  les  boulan- 
gers pétrissent  des  pains  qui  ont  la  forme  d'une  pierre. 

—  Pierre  philosophale.  Rabelais  (II,  34)  dit  que  ce  n'est  que  la 
manière  d'user  avec  intelligence  des  joies  et  des  plaisirs  de  la  vie. 
(Voy.  alchimie.) 

—  La  pierre  tombe  toujours  au  clapier.  (Proverbe  provençal.) 
L'argent  cherche  l'argent. 

—  Pierre  qui  roule  n'amasse  pas  de  mousse. 

Qui  est  bien,  ne  se  remue.  Douze  métiers,  treize  misères. 
De  gerbe  remuée,  chiot  le  grain. 

Les  Arabes  nomades  disent  au  contraire  :  «  Chien  qui  coiii-t 
trouve  sa  vie.  » 

—  Faire  d'une  pierre  deux  coups  :  tirer  d'une  chose  doulile  prolil. 

Apros  duos  uno  sallu  capere. 

(Pt.AtJTE.) 

De  i/na  fidelia  duos  parieles  deaWare.  (Quinte-Curce.) 
Blanchir  d'un  seul  pinceau  les  deux  cotés  delà  muraille.  (Proverbe 
obscène  des  latins.) 

—  Un  individu  qui  partageait  sa  vie  entre  l'amour  et  la  bonne 


264  PIK 

chère,  s'élMit  lo.ué  ii  rciilrcsol,  aii-dcssiis  de  l;i  cuisiiK;  d'un  nîstau- 
raleur  ol  nii-dcssoiis  de  l;i  cli;iml>ro  de  sa  Itelle.  Quand  il  voulait 
jouir  du  double  nvanla.ae  de  sa  position,  il  lançait  au  plafond  une 
pierre  qui  relonihail  sur  le  par([uet,  avertissant  ainsi  à  la  fois  la 
demoiselle  de  descendre  et  le  cuisinier  de  monter. 

—  Un  certain  Durand  devint  veuf.  11  éleva  à  sa  femme  un  heau 
mausolée,  avec  cette  inscri[)lion  :  «  Monsieur  Durand  à  Madame 
Durand.  »  Yeuf  pour  la  seconde  fois,  il  lit  clianj^er  Madame  en 
Mesdames.  C'était  bien  faire  d'une  pierre  deux  coups. 

—  Jeter  la  pierre  à  quelqu'un  ;  jeter  une  pierre  dans  le  jardin  de 
quelqu'un  :  1  atlaquer  dans  son  intérêt,  lui  faire  des  reproches. 

Lapides  loqiii  (Plaute)  :  dire  des  duretés. 
On  ne  jette  des  pierres  qu'à  l'arbre  chargé  de  fi-uits.  En  d'autres 
termes,  le  mérite  seul  excite  l'envie. 

Pierrier,  anciennement  perrier  ou  perrlùre. 
Canon  qui  se  chargeait  avec  un  boulet  de  pierre. 

Et  dressa  sur  une  porrière 
Qui  jeclal  devant  et  derrière 
...lels  cailloux... 

(Jean  de  .Mi;unc..1 

Pierrot,  en  italien  Pedro/ino,  fait,  dès  la  lin  du  xvf  siècle, 
partie  des  acteurs  du  théâtre  italien.  Son  costume  est  entièrement 
blanc,  son  visage  enfariné,  son  air  niais  et  ingénu. 

A  Florence,  on  l'applaudissait  sous  le  nom  de  Gian-Farina, 
Jean-Farine.  En  France,  on  l'enfarinait  aussi  : 

Le  front,  la  joue  et  la  narine 
Toute  couverte  de  farine. 

—  Gros-Guillaume,  dit  le  Barbouillé,  introduisit  le  personnage  de 
Pierrot  sur  la  scène  du  théâtre  de  Bourgogne.  Il  avait  exercé  la 
profession  de  boulanger,  avant  de  monter  sur  les  tréteaux. 

Pierrot,  le  niais  enfariné,  le  gobe-mouche  de  la  comédie  italienne, 
se  faisait  remarquer  par  sa  stupidité  et  sa  maladresse.  Quoique  très 
poltron,  il  conseillait  toujours  les  entreprises  les  plus  hardies,  et 
entraînait  dans  des  chutes  déplorables  son  vieux  maître,  qu'il  avait 
l'air  de  soutenir. 

Aux  premiers  temps  de  la  comédie  française,  il  portait  le  nom  de 
Mugnier  (meunier),  qui,  au  Moyen-Age,  était  entaché  d'une  très 
mauvaise  renommée,  car  on  disait  qu'on  était  toujours  sûr  de 
trouver  un  voleur  dans  la  chemise  d'un  meunier. 

—  L'uniforme  blanc  des  gardes- françaises  les  lit  appeler  pierrots 


l'IG  2Go 

par  le  peuple  de  Paris  :  et  les  .uaiiiins.  en  les  voyant  passer,  inii- 
taient  le  cri  du  moineau  :  plnu,  piou.  doii  le  sobriquet  qui  est 
resté  au\  fantassins. 

—  La  vo.uiie  de  Pierrot  lui  eonsacréc  par  la  fameuse  cliiinson  (pie 
tout  le  monde  ronnait  :  Au  clair  do  la  lune. 

Molière  a  appelé  Pierrot  un  paysan  de  son  Don  Juan. 
AVatteau  et  Lancret  Tout  illustré  dans  leurs  peintures. 
Dt'liureau,  né  à  Xeukolin.  prés  de  Prague,   a  rendu  rélébrc  le 
rôle  de  Pierrot,  de  18120  à  ISriO.  au  Théâtre  des  Funambules. 

Piété,  du  latin  pleins,  qui  a  donné  aussi  pillé. 

De  là  encore  les  mots  :  piteux,  pitoyable,  s'apitoyer^  et  aussi 
pitance,  parce  que  la  nourriture  des  moines  provenait  de  la  piété 
des  lldéles. 

On  a  fait  depuis  peu  (1871)  le  mot  piétisle,  pour  désigner  le 
parti  ullraniontain. 

—  La  piété  et  la  foi  sont  comme  deux  jalons  plantés  sur  le  chemin 
de  l'éternité.  (M.  G.) 

Pieuvre,  du  latin  pohjpus,  d'abord  pueuve,  pleure.  Poulpe, 
de  la  famille  des  mollusques  invertébrés,  comprenant  les  calmars, 
les  sé[)iaires,  les  céplialopodes,  que  les  Anglais  appellent  hlond- 
sucher.  suceur  de  sang.  (Yoy.  Y.  Hugo,  Trarallleurs  de  la  Mer.) 

Pigeon,  du  latin  pljfio,  piplonl.^. 

—  Plfjeon  n'a  pas  de  féminin.  M"''  de  Scudéry,  malgré  tout  son 
crédit  à  l'iu'jtel  de  Rambouillet,  ne  put  faire  adopter  plijeunne, 
qu'elle  proposait  à  la  place  de  colombe. 

—  Au  ligure,  dupe,  qui  se  laisse  dépouiller,  plumer  comme  un 
pigeon. 

Les  femmes  de  Paris  se  servent  du  fard  et  du  maquillage  pour 
attirer  les  pigeons  dans  le  colombier  de  Cypris. 

Pignon,  de  plnnlone/n,  dérivé  de  pinna,  créneau  de  murailles. 

Le  pignon  est  le  faite  d'une  maison  que  termine  l'inclinaison  de 
deux  toits  formant  triangle,  comme  un  fronton.  C'est  le  mur 
terminé  en  pointe  qui  soutenait  le  laitage  des  maisons  :  il  était 
souvent  orné  de  sculptures  et  d'enjolivements. 

Dans  les  anciennes  maisons  du  xv  siècle,  qu'on  voit  encore  en 
grand  nombre  dans  le  nord  de  l'Europe,  les  pignons  font  face  à  la 
rue.  D'où  la  locution  ancienne  :  avoir  pignon  sur  rue,  c'est-à-dire 
une  maison  à  soi.  (Yoy.  pinacle.) 


266  PIN 

Pile,  (lu  l.iliii  ])il«i.  (■oloiiiic. 

Côte  (rime  iiioiiii;ii('  opposi'"  ;'i  l;i  f.'irc.  (  Voy.  cvoix  (Hi  pile.) 

—  Pila^  dOi'i  est  venu  jixlolc,  scimH  iiii  nIciiv  iikiI  fr;iiic;iis  ;iy;iiil 
signiCié  navire. 

Macrobe  (Saturnales,  I)  dit  que  les  Romains  joiiMiciil  à  ce  que 
nous  appelons  pile  nu  face,  en  disant  :  Caput  aiU  nacis,  avec  une 
monnaie  faite  en  mémoire  de  Salnrne.  oi'i  l'on  voyait  d'un  côté  la 
lèle  de  .lanns,  et  de  l'aiiln'  le  iia\if('  sur  Icipicl  il  était  arrisé  en 
Italie. 

TittK  liinid  jKixtcrilris  jiuppiiii  lialnril  in  wre. 

(Ovil.E.) 

—  Doiiiiei"  une  [)i!e  ;  expression  tri\ial(':  i)atti'e  quelqu'un  comuie 
un  pilotis. 

Au  vieux  mot  l'raneais  j)i./e,  siiiiiiliant  pièce  de  Itois,  et  qui  se 
trouve  souvent  dans  .loinville,  se  rattachent  :  pilori,  piler,  pilotis. 

—  En  provençal,  jii/e,  picu're  d"évier,  percée  d'un  trou  par  où 
l'eau  s'écoule. 

Piller,  du  latin  populaire  piliare,  pour  ptlare. 
Siirnilie  au  propre  se  prendre  aux  clieveux. 
Se  dit  des  chiens  qui  se  jettent  sur  le  pi  hier. 

—  De  là  houspiUf'r{l). 

Pilule,  du  latin  pllula,  diminutif  de  j)il(i,  halle. 

—  Dorer  la  pilule,  comme  sucrer  la  uioutarde  ;  c'est  adoucir  un 
refus  par  des  paroles  lùenveillantes,  ou  faire  passer  sous  des  com- 
pliments quelque  chose  de  désagréable. 

Le  seigneur  Jupiter  sait  dorer  la  pilule. 

(MoLiÈREj  Amphitryon.) 

Ce  vers  est  devenu  proverbe  plutôt  par  sa  tournure  piquante  que 
par  l'idée  qu'il  renferme  ;  car  Rotrou  avait  dit  avant  Molière  : 

On  appelle  cela  lui  sucrer  le  breuvage. 

Pimbêche,  nom  donné  par  Racine  à  la  comtesse  des  P/ff«V/ewns,- 
il  est  resté  dans  la  langue  pour  désigner  une  femme  au  bec  pincé  (?), 
une  vieille  Précieuse  acariâtre. 

C'est  une  pimbêche  :  une  femme  qui  fait  des  embarras. 

Pimpant,  de  l'ancien  verbe  phnpcr,  pour  piper,  bien  plutôt 
que  de  pompe,  ou  même  de  bimbo,  qui  se  retrouverait  dans  bim- 
belotier^  bibelot. 

Pinacle,  du  latin  piiuiacuhnn. 


riP  267 

La  pnrtio  la  plus  élt?véo  du  Toniplo  do  Jériisalom. 

—  l'Avr  ;iii  pinacle  :  au  (■oiiiiilc  ilii  honliOMi".  de  la  [irospérilé. 

Le  Sénat  r»iiii;iiii  accordait  (piehpu'fois  aux  particuliei'S  la  faveur 
de  inellre  un  pinacle,  ou  comlilc  terminé  en  poinle  an  liant  de  sa 
maison. 

Pince-maille,  de  pinrrr  et  i/iaU/c.  (Voy.) 
Synonymes  :  i:rippe-son.  avare,  pingre. 

Lu  [liiico-inaille  avjiit  laiit  amasst-... 

;I,A  l''i).NTM.Nt,  L'Enfouixxeur.] 

Pincer,  .louer  à  je  te  pince  sans  rii-e.  on  chacun  pince  le  nez  ou 
le  menton  de  son  voisin  de  droite;  celui  rpii  rit  donne  un  gage.  Le 
piquant  de  ce  jeu  consiste  en  ce  cpie  deux  personnes  de  la  société 
se  sont  entendues  pour  se  noircir  les  doigts.  Ceux  dont  elles  noir- 
cissent ainsi  le  visage  prêtent  à  rire,  d'autant  plus  que  chacun  croit 
qu'on  rit  de  l'autre  (?). 

Pingre,  mot  (rorigine  inconnue  ou  incertaine. 

—  Un  appelait  jtingrcs,  au  Moyen-Age,  les  arêtes  de  poisson  et 
de  longues  é[»ingles.  Le  moi  pinrjre  désigne  aujourd'hui  nn  avare, 
un  usurier.  L'origine  de  cette  transformation  de  sens  serait  la 
croyance  que  les  .Juifs  crucifiaient  des  enfants  dans  la  nuit  du 
Vendredi-Saint,  et  les  toiluraient  en  leur  enfonçant  des  épingles 
dans  la  chair. 

Le  l*arlement  condamna  à  mort  plusieurs  Juifs  pour  le  crime  de 
piuf/res  ou  des  épingles.  Le  nom  de  pingres  resta  aux  .Juifs,  (pii 
avaient  dès  lors  le  monopole  de  la  hanque  et  de  l'usure. 

—  En  argot,  ce  mot  désigne  un  misera hle,  et  prend  l'acception 
de  sale,  déguenillé,  ce  qui  tiendrait  encore  à  la  sordide  avarice  des 
Juifs  qui,  malgré  leurs  richesses,  et  peut-être  pour  les  dissimuler, 
poi'taient  des  vêtements  sales  et  misérables. 

Piot,  semble  dérivé  du  grec  pie  in,  boire. 
Humer  le  piot.  (Rabelais.) 

Lui  voyant  de  fiiul  la  coi'\('ll('  écliaiiffée. 

(Rélnirr.) 

Pipe,  (lu  has-lalin  pipa,  pipeau,  chalumeau. 

A  ce  dernier  mot  correspond  le  caliiniel  des  Indiens. 

La  pipe  de  l'Arabe  s'appelle  chiboiuiuc  :  celle  du  Turc  nnrçjliilé. 

Piper,  du  latin  pipiare,  pip-irc,  glousser,  tromper. 
Dés  pipés  :  faussés. 


268  PIS 

—  Tt'i'Dif  (r;i\ico[t(olo;^i('  :  on  pi'ciKl  les  oisL';iii\  ;'i  la  pipée  en 
iiiiilaiil  Iccliaiit  des  petits  oiseaux,  ;>/,  />/. 

Pique-assiette,  parasite. 

Celui  (pii  apporte  cliez  les  autres  un  ap[uMit  loujoui's  roni[ilaisaiit. 

Pique-nique,  origine  inconnue. 

liepas  où  cliacun  i)aye  son  écot,  apporte  son  plat. 

Dîner  à  pique-nique,  c'est  faire  un  repas  dans  lequel  aucun  des 
convives  n'est  redevaJjle  à  son  voisin,  attendu  que  chacun  paie  le 
même  écot. 

—  F.  Gcnin  propose  l'étymologie  suivante  :  «  On  sait  ce  que  c'est 
qu'une  pique  entre  deux  personnes.  Le  Français  dit  faire  la  nUjxie 
dans  le  sens  de  se  moquer.  En  supposant  que  le  verbe  niquer 
existe  en  français,  on  aurait  pu  faire  la  phrase  suivante  :  Tu  me 
piques,  je  te  nique,  partant  quittes.  Eh  bien  !  c'est  justement  le 
sens  du  mot  pique-nique,  fait  comme  la  locution  :  A  bon  chat,  bon 
rat;  bien  attaqué,  bien  défondu.  » 

M.  Génin  fait  ensuite  remarquer  que  TAcadémie,  en  1835,  exige 
qu'on  dise  au  pluriel  des  pique-niques,  comme  des  cbasse-mouches. 
A-t-elle  cru  qu'il  s'agissait  de  piquer  des  niques  ?  Elle  ne  se  serait 
pas  rendu  compte  des  éléments  de  ce  mot. 

Piquer,  peut-être  d'origine  celtique  y>/r/,-,  pointe. 

—  Se  piquer  :  se  fàclier,  prendre  la  mouche.  (Voy.) 

—  Qui  s'y  frotte  s'y  pique.  La  paraphrase  de  ce  proverbe  est 
dans  YEcclésiaste  :  «  Celui  qui  creuse  un  fossé  y  tombera,  et  celui 
qui  traverse  une  clôture  sera  mordu  par  un  serpent.  » 

(Voy.  picard,  pique-nique,  pique-assiette.) 

Pirate,  du  latin  pirata. 

Voleur,  écumeur  de  mer,  corsaire  qui  n'a  aucune  lettre  de 
marque,  qui  court  les  mers  en  pleine  paix,  pour  voler  et  piller  les 
navires. 

—  La  Méditerranée,  infestée  par  la  piraterie  depuis  Tantiquité, 
en  a  été  délivrée,  en  1830,  par  les  Français,  qui  se  sont  emparés 
d'Alger. 

Au  xvii«  siècle,  les  flibustiers  américains  épouvantèrent  de  leurs 
ravages  la  mer  des  Antilles  et  les  colonies  espagnoles.  (Voy.  corsaire.) 

Pis,  du  latin  pccfus,  poitrine. 

Pris  autrefois  dans  le  sens  du  latin,  ne  désigne  plus  que  les 
mamelles  de  la  vache,  de  la  chèvre,  etc. 


PIT  269 

Pisé,  (le  r;iiicion  vorlte  piser,  battre. 

IVilr  luiini'c  (le  tciTo  ulaiso  qu'on  détrompe  et  qu'on  moule  en 
carreaux,  en  y  nidanl  de  la  paille  hachée.  Ou  la  laisse  sécher  pour 
en  faire  des  consli-iKiious  iMistiques. 

Pistole,  semble  déri\é.  ('(imme  p/sfo/cf,  de  Pistoic,  ville  d'Italie. 

—  (In  nomma  ju'sf o/cs-,  les  écus  d'Kspagne  et  d'Italie,  qui  étaient 
plus  [x'tits  que  ceux  de  France. 

La  pistole  d'Espaune  vaut  environ  20  francs.  On  emploie  quel- 
quefois ce  tenue,  comme  monnaie  de  compte,  valant  tO  fi-ancs. 

—  La  pistole  dans  les  prisons  pour  dettes,  est  le  logement  que 
les  détenus  obtiennent  en  payant. 

Pistolet. 

Synonymes:  pied  de  cochon  (allusion  de  forme). 
Crucifix  à  ressort  :  comme  le  crucifix,  il  se  montre  à  l'heure 
suprême. 

—  fleuri  Estienne  dit  qu'à  Pisloie,  petite  ville  à  une  journée  de 
Florence,  se  faisaient  de  petits  poignards  qui  furent  appelés  en 
France  pisloycrs,  pistoliers,  et  pislolets.  Quelque  temps  après 
étant  venue  l'invention  des  petites  arquebuses,  on  leur  transporta 
le  nom  de  ces  petits  poignards,  et  ce  pauvre  mot,  ayant  été  ainsi 
promené  longtemps,  à  la  fin  a  signifié  les  petits  écus  «  et  croy 
qu'encore  quelque  matin  les  petits  hommes  s'appelleront  pistolets 
et  les  petites  femmes  pistolettes  ». 

La  plaisanterie  de  la  fin  pourrait  passer  pour  une  prophétie  ;  on 
connaît  la  locution  populaire  :  Quel  singulier  pistolet  ! 

On  rit  avec  vous  et  tu  te  fâches  !  En  voilà  un  drôle  de  pistolet! 
(Gavarni.) 

Pitance,  du  latin  barbare  pilnncla,  parce  que  la  subsistance 
des  moines  provenait  de  la  pitié  publique. 

—  Désigne  les  aliments  autres  que  le  pain  et  le  vin. 

Pitié,  du  latin  piela^,  pietafem.  (Yoy.  piété.) 

—  La  pitié  que  nous  inspirent  les  maux  d'autrui  est  due  en 
grande  partie  à  la  crainte  que  nous  avons  de  les  éprouver 
nous-mêmes. 

La  pitié  est  sœur  du  dédain  ;  c'est  l'aumône  qu'on   fait  aux 
coupables  et  aux  faibles.  (G.  Sand.) 
Mon  Dieu  !  ayez  pitié  de  moi,  ...et  jetez  des  pierres  aux  autres. 

—  Il  vaut  mieux  faire  envie  que  pitié,  parce  que  les  hommes  ne 


270  PI.A 

foiil  .uiirrc  (le.  Iiicii  (jn';'!  ceux  (jiii  pciivoiil  le  Inir  rciulro  ;  fomnie 
(lil  le  provoi'hc  :  «  On  ne  prrir  (iir;iii\  lidic!^.  »  (l'est  surtout  ;'i  ses 
ninis  (jn'il  faut  cacher  sa  uiisère;  s'ils  ont  du  co'ur,  ils  soulVicut  de 
nos  clia.ui'ins  :  s'ils  n'eti  ont  pas,  nous  soulîi'ons  de  leur  égoisnic. 

i.c  soutinicut  (pie  lliomnic  supporte  le  plus  difficilement,  c'est  la 
pitié,  surtout  (juaud  il  la  mérite.  La  pitié  es!  un  mépris  dans  la 
tendresse,  ou  une  tendresse  qui  offense  et  qui  Mlïaildil  eucoi'e  notre 
faiblesse. 

■ —  De  la  pitié  au  nu''pris,  il  n'y  a  pas  plus  de  distance  qu'entre 
uuc  poire  molle  et  une  poire  pourrie.  (X.  de  Maistre.) 

Il  vaut  mieux  être  envié  qu'apitoyé. 

Il  n'y  a  que  les  mendiants  qui  vivent  de  ItMirs  plaies:  les  honnêtes 
gens  les  cachent. 

Il  faut  cacher  ses  misères  devant  les  forts.  (Sévigné.) 

Qui  chante  ses  misères  épouvante. 

L'homme  qui  soutïre  est  un  Iléau  !  c'est  un  sujet  de  tristesse*et 
de  dégoût  pour  les  autres  !  c'est  un  cadavre  qui  encombre  la  voie 
publique,  et  dont  les  passants  se  détournent  avec  etlroi.  (G.  Sand, 
A/ do.) 

Pitre,  origine  incertaine. 

Sorte  de  Paillasse  faisant  la  parade  sur  les  tréteaux,  et  engageant 
par  ses  lazzi  la  foule  à  entrer  dans  la  baraque  du  saltimbanque. 
(Voy.  Paillasse.) 

Au  ligure  :  bouffon  grossier. 

Pittoresque,  de  ritalion  p/tforesco,  relatif  à  la  peinture. 
S'entend  de  ce  qui  est  agréable  à  la  vue  et  peut  servir  de  sujet  à 
un  tableau. 

—  Par  extension,  on  a  appelé  pittoresques  des  publications 
dont  les  pages  sont  ornées  de  gravures  présentant  à  l'œil  l'image 
des  faits  racontés. 

Le  Magasin  pitloresquc,  recueil  le  plus  ancien  de  ce  genre,  date 
de  1832. 

—  Au  mot  pittoresque  a  succédé  le  mot  illustré. 

Place,  de  l'italien  pia::a,  du  latin  platea. 

Le  jour  de  la  Saint-Lamliort, 
Oui  quitte  sa  place  la  perd. 

Remettre  quelqu'un  à  sa  place. 
Assieds-toi  à  ta  place,  et  Ton  l'y  laissera. 


l'LA  271 

Plafond,  iiKil  roniposr,  jadis  iilal-fond. 

—  Dieu  (irs  [iLifoiids.  inspii'c-moi  !  seiiil)lcdirc  un  iioèlcélégiaquc, 
qui  parait  clit'nlit'r  en  l'aif  riuspiratioii. 

Plagiaire,  du  latin  iihKjiariiis  (qui  est  roupablo  de  drlournc- 
uu:>nt  d'csi-lavcsi. 

Les  Uouiaius  .-ippclaicut  /i/ai//t/i  /i,  cr\\\  (pii  l'jiisaicut  de  la  fraudo 
sur  le  cûiiiiut'ire  des  esclaves.  Ils  étaient  condauinés  au  fouet, 
ad  /)laf/as. 

Aujourd'hui,  ou  ;ipp('llt'  /)la;/iaire  celui  (jui  conqùlo  les  ouvrages 
des  autres,  qui  \(mu1  à  son  prolit  la  pensée  d'aulrui. 

On  (lit  que  l'ai)!)!'  Roiiudtc 
Prêche  le.s  sermons  (iaiilrui  ; 
Moi.  (|iu  sais  qu'il  les  achète. 
Je  soutiens  quils  sont  à  lui. 

Synonyme  :  déiuarciueur  de  linge. 

Plaider,  de  j)f{/i/f,  déi'ivé  de  placiliu/i,  volonté. 

—  Plaise  à  la  cour...  Un  plaidoyer  est  une  requête  à  la  cour  pour 
qu'il  lui  plaise  de...,  développée  par  l'avocat. 

Plaie,  du  latin  jildgn. 

—  Il  est  comme  le  chirurgien,  il  ne  demande  que  plaie  et  bosse  : 
il  recherche  son  prolit  dans  le  mal  d'autrui. 

Je  ne  demandai  plus  que  plaie  et  bosse.  (Le  Sage.) 

—  Dans  la  langue  romane,  pica  plag  était  un  terme  de  mépris 
pour  désigner  les  chercheurs  de  procès. 

Pieu  phifj  per  a  roc  ni. 

{Lei/t  r/'amors,  S»  147.) 

Piain-chant,  mot  com[)Osé  do  plain,  latin  planus,  et  de  chant, 
cafifas. 

Chant  uni,  égal,  simple,  pratiqué  dans  les  églises  catholiques,  et 
dans  lequel  toutes  les  voix  chantent  à  l'unisson. 

Plain  est  ici  le  même  que  dans  l'expression  fie  plain-pied,  qu'il 
ne  faut  pas  confondre  avec  plein  de  terre-plein. 

Plaindre,  du  latin  plangere. 

—  Se  plaindi'c  :  geindre,  marronner.  avoir  la  douleur  geignarde. 

—  Se  plaindre  que  la  mariée  est  ti'op  belle:  d'être  trop  heureux. 
Chacun  se  [ilaint  que  son  grenier  n'est  pas  plein. 

La  |)tainte  est  {lour  le  fat,  le  bruit  est  pour  le  sot  : 
L'honnête  houinie  trompé  s'éloigne  et  ne  dit  mot. 

(La  Noi.e.) 


272  PLA 

Plaire,  du  l.iliii  jilacaro. 

M;ircli;iiiilisi'  ijui  jil.iil  l'st  à  iiioilir  vciwliK'. 

(I.M.iiwh,  /(/   /'aiiiil/r  n.ilrftvrif/anle,  se.  XIV.) 

r)ii  îipprécic  ce  qui  est  utile  et  l)on,  on  ;i(lniire  re  qui  est  beau, 
mais  011  n'aime  que  ce  qui  plaît. 

Soyez  1)1111,  \()iis  |il;iircz. 

(OllK'iSKT.) 

On  ne  saurait  plaire  à  tout  le  monde,  ...à  moins  d'être  tarte  ou 
gâteau,  disait  Bion.  Nous  disons  aujourd'liui  :  à  moins  d'être  louis 
d'or.  C'est  encore  plus  vrai,  car  il  y  a  des  gens  qui  n'aiment  pas  la 
pâtisserie,  il  y  en  a  peu  pour  lesquels  l'or  n'ait  des  charmes 
irrésistibles. 

—  Eu  argot,  on  appelle  l'or  orient,  c'est-à-dire  or  riant. 

Cette  petite  en'rontée  m'avait  juré  qu'elle  était  [)liis  nette  qu'une 
perle  d'or  riant.  (Histoire  rotnique  de  Franc  ion.) 

—  Celui  à  (jui  personne  ne  plait  est  bien  plus  malheureux  que 
celui  qui  ne  plaît  à  personne. 

—  Plait-il  1  se  dit  à  ceux  à  qui  on  doit  le  respect  ;  aux  autres, 
on  dit  :  hein  ?  pour  faire  répéter  ce  qu'on  n'a  i)as  entendu. 

Plaisance,  dérivé  de  p/aisant,  lieu  plaisant. 
Nom  d'une  locahté  do  la  banlieue  de  Paris. 

Plaisant,  qui  divertit  en  faisant  rire. 

Par  la  saml)leu  !  messieurs,  je  ne  croyais  pas  être 
Si  plaisant  que  je  suis... 

(Moi.iftiiF.,  Misanthrnjie.) 

Plaisanterie  gauloise  :  c'est  l'atticisme  moderne,  l'esprit  piquant 
de  la  vieille  société  française. 

—  Plaisanterie  de  famille  :  grossière,  de  mauvais  goût. 

—  Plaisanterie  à  part.  Rivarol  disait  de  l'acteur  Dugazon,  qui 
chargeait  trop  ses  rôles  :  «  C'est  un  bon  acteur,  plaisanterie  à 
part.  » 

—  Porter  trop  loin  la  plaisanterie.  Le  président  :  «  Pourquoi 
avez-vous  pris  cette  pioche? —  C'était  par  pure  plaisanterie.  — Mais 
on  l'a  retrouvée  chez  vous,  à  cinq  kilomètres  de  distance  :  c'est 
porter  la  plaisanterie  trop  loin.  » 

Plaisir,  du  hiln  placere,  ancienne  forme  de  plaire;  en  roman 
placer  :  en  italien  piacere. 

—  Le  plaisir  n'est  que  l'éclair  de  la  sensation,  il  expire  avec 
elle  ;  le  bonheur  est  une  suite  de  plaisirs  ;  le  contentement  est  un 


l'LV  TiW 

liieii-iM  rc   iiit(''ii«Mir  :   la    joie  est   iiiit'  (Iriiioiislralioii  cxliTiciiri^  :  la 
salislai'l'nm  se  raii|i(>rl('  aii\  passidiis  :  la  \olii|)t(''  ativ  sens. 

—  Les  [)laisii"s  sont  la  coiisdlalioii  de  cciik  (|iii  ne  ronnaissoni  pas 
le  hoiiheiir.  (De  Laiiusdoi'f.) 

(ycsl  tic  nos  plaisirs  ipic  lums  \ieiiiitMil  nos  peines. 

l'util"  un  plaisir  iiiIIIl'  doiilctirs. 
Soit  cil  tH-  moiitli',  soll  ailleurs. 

(xvic  Siècle.) 

La  soltriék'  tlans  les  plaisirs  est  la  fontaine  de  Jouvence. 
11  est  plus  dilTicile  de  supporter  les  chagrins  que  de  s'abstenir 
des  plaisirs.  (Aristote,  El  h  unie.  111,  li2.) 
Les  ])laisirs  courent  aprt'^s  ceux  qui  les  fuient.  (Franklin.) 

—  Benlliain  dt'crit  la  série  des  plaisirs  et  des  peines  :  «  Plaisirs 
des  sens,  peines  de  la  maladie.  Plaisirs  de  la  nouveauté,  peines  de 
l'ennui.  Plaisirs  de  laniitié  et  de  l'amour,  de  la  renommée,  du 
pouvoir,  de  la  piété,  de  la  sympathie,  de  la  mémoire,  de  l'imagi- 
nation, etc.  )) 

—  Chacun  prend  son  plaisir  où  il  le  trouve  :  Alios  alùi  dclccUiiit. 
(Cicéron.) 

...Trnhil  sun  qncmque  rolupltts. 

(VH,,;n.K.) 

Le  plaisir  se  double  en  se  partageant. 

Le  vice  empoisonne  les  plaisirs,  la  modération  les  aiguise,  l'amitié 
les  multiplie. 

Plat,  du  latin  populaire  philluin. 
Dont  la  surface  est  unie. 

—  C'est  plat  :  c'est  héte,  sans  esprit. 

Style  plat  :  qui  n'a  rien  de  saillant,  de  relevé. 

—  Un  homme  très  gros  se  trouvait  un  jour  à  l'Opéra,  où  il  gênait 
ses  voisins.  L'un  d'eux  dit  tout  haut  :  «  Quand  on  est  fait  comme 
cela,  on  ne  devrait  pas  venir  ici.  »  Le  gros  homme  répondit  : 
«  Monsieui-,  il  n'est  pas  permis  à  tout  le  monde  d'être  plat.  » 

—  Sei'vir  un  plat  de  sa  fa(;on. 

Oui,  ji'  \ais  lui  s{'i'\ir  iiu  plat  tle  ma  façon. 

(.Moi.iKni;,  Etourdi.) 

Platonique,  du  latin  jtldlonicu^. 

—  Amour  platonique  :  amour  idéal,  séraphique,  chevaleresque, 
auquel  les  sens  sont  étrangers.  C'est  celui  auquel  fait  allusion  le 
proverbe:  Vivre  d'amour  et  d'eau  fraîche. 

Il  est  assez  rare  aiii()iirtriiiii,et  ne  se  manifeste  que  chez  certains 

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adolcscciils   iiail's  ;  il    ;i  |)ris  [loiii-  devise;:    rue  rliaiiiiiii'i'c  (,'t  son 
C(ri)i'. 

—  La  ])liilos()|)liio  de  IMidon.  siirnoiiiiiié  le  Divin,  (''tait  laspinilion 
vers  l'idéal  el  l'ainoiii-  d'un  dieu  créaleiir:  c'étail  l'opiiosé  de  la 
pliUosophie  d'Epiciire,  (jiii  no.  i-econnaissail  que  la  naliire  el  rainoiir 
des  choses  créées. 

Néanmoins  Platon,  dans  le  Jianqucl,  expose  une  lliéoi-ie  de 
l'amour  si  étrange,  au  point  de  vue  des  mœurs,  que  l'esprit  est 
épouvanté  de  voir  ériger  en  principe  une  corruption,  un  cynisme 
si  elïronté.  Si  l'on  faisait  aujourd'hui  un  procès  à  Platon  pour  son 
Dialo(jiie,  il  faudrait  le  juger  à  huis  clos. 

L'amour  s'accroît  par  les  ohstacles,  et  s'éteint  dans  les  voluptés. 
(Virey.) 

—  Ninon  de  Lenclos  disait  que  l'amour  ne  mourait  jamais  de 
besoin,  mais  d'indigestion. 

L'amour  commence  au  premier  regard,  et  finit  avec  le  premier 
baiser.  (Lola  Montés.) 

L'amour  ne  peut  se  passer  ni  d'idéal,  ni  de  possession  ;  le  premier 
le  pousse  invinciblement  à  la  seconde  ;  mais  celle-ci  obtenue,  l'idéal 
est  souillé  et  l'amour  expire. 

L"amoiir  est  toujours  à  la  recherche  de  l'inconnu. 

Le  grand  art  c'est  d'être  impénétrable  :  quand  le  masque  est 
tombé,  le  carnaval  cesse.  (A.  Houssaye.) 

Il  y  a  le  monde  antiplatonique  des  lorettes  et  des  cocotes. 

—  Année  platonique,  ou  périodique.  La  grande  année  des 
Platoniciens  est  une  révolution  de  trente-six  mille  ans,  après 
laquelle  ils  prétendent  que  les  planètes  et  les  étoiles  se  retrouvent 
dans  le  même  ordre  et  la  même  position. 

Plâtre,  du  grec  p/assô,  façonner. 
Battre  (pielqu'uu  comme  plâtre. 

Pléiade,  du  grec  Plélas.  Groupe  de  dix  étoiles  qui  se  trouve  dans 
la  constellation  du  Taureau. 

—  Les  Grecs  donnèrent  le  nom  de  «  Pléiade  »  à  une  réunion  de 
poètes  qui  vivaient  au  temps  de  Ptolémée  Philadelphe. 

Au  xvie  siècle,  à  limitation  des  Grecs,  Ronsard  forme  une 
Pléiade  française. 

Plein,  du  latin  plenu.^.  S'oppose  à  cide. 
Plein  comme  un  boudin,  ...comme  un  œuf. 

Plénière,  dérivé  de  plein. 


(loiir  |i!riiit'M'(' :  iii(liil,L!(Mic(>  |il(Mii(''i'(\  rt'mission  iilciiic  o(  oiitirre 
(le  toiilc^  les  [iciiit'S  d\\v<~  an  immIk''. 

Pléonasme,  du  Lircc  /i/conas/nos,  alKiiKlance. 

Le  pléoiiasiiic  csl  le  ('(iiilraii'c  de  rdliiiso. 

Vu  plt'onasiiic  en  a.uiiciillmr.  (•"est  d'ai-i'oser  pendant  la  pluie. 

.!('\ais  l'allt'i- cliciclicr  :  an  jdiir  daiiidiircriiui  ;  descendre  en  bas; 
s'entr'aidtM'  niiiliicilcnuMil  :  cire  forcé  nialgi'é  sui  :  prc\oir  d'avance... 
Tout  aillant  ih'  pléonasmes  1res  vicieux. 

Pleurer,  du  lalin  jilordre. 

Synonymes  :  Ncrser  (\<,'^  larmes,  des  loi'rents  de  larmes:  éplucher 
des  oi.unons. 

«  .l'ai  épluché  tous  mes  oii^nons  »>,  dit  M"«  Uacliel  au  moment  de 
mourir. 

—  Pleurer  comme  nne  naïade.  ...comme  une  fontaine.  ...comme 
une  vigne,  ...comme  uiu'  vache,  ...comme  un  veau. 

—  Jean  ipii  [ileni-e  et  .leaii  qui  rit  :  Heraclite  et  Démocrite. 

Car  ([u'iuie  fcrnau'  plciirc,  iiiic  autro  pleurera. 
Et  toutes  iileureruiil  laiil  ijifil  en  snrviciuira. 

(DKSTO-.rcUKS.) 

—  Il  ne  lui  reste  plus  que  les  yeux  pour  pleurer. 

—  Dans  une  maison  destinée  à  une  famille  de  onze  enfants, 
tout  en  bas,  rarcliitecte  a  désigné  sui'  le  i)lan,  une  chambre  sous 
le  nom  siunilicatif  àc plouroir. 

Pleutre,  origine  inconnue. 
Homme  méprisable. 

—  Le  pleutre  diiïère  du  bélifre  en  ce  qu'il  ne  mendie  pas:  mais 
il  a  les  sentiments  bas  du  uu'udiant.  mémo  dans  une  haute  fortune. 

Pleuvoir,  du  latin  populaire  pforerc,  pour  plucre. 
Synonymes:  Il  tombe  des  hallebardes:  il  pleut  à  ne  pas  mettre  un 
chien  à  la  [lorte. 

Unaiid  il  |ilcnl  a  la  Saiiil-dervais, 
Il  pleut  ipiai'anlo  jonrs  après  : 
S'il  pleut  le  j(»nr  de  Saint-.Médard, 
Il  plriil  ipiaranlc  jdurs  pins  lard. 

La  légende  de  saint  Médard  nous  apprend  qu'il  gardait  un  jour 
les  chevaux  de  sou  père,  riche  seigneur  de  Normandie,  et  qu'ayant 
aperçu  un  cavalier  désarçonné,  il  lui  donna  un  des  chevaux  qu'il 
avait  à  garder.  Sa  bonne  action  fut  récompensée  aussitôt,  car  il 
éclata  un  orage  effroyable,  (jui  trem[ia  jusqu'aux  os  tous  ceux  qui 


2%  VU) 

se  trouvaient  aux  cliaiiips.  Médard  fut  seul  préservé  par  un  aigle, 
qui  l'abrita  de  ses  ailes  immenses.  (Voy.  rosièj^e.) 

Saint  Gcrvais  (<'t  saint  Protais),  dont  la  fête  arrive  onze  jours 
après  ('(ille  de  saint  Médard.  partagent  avec  lui  la  direction  des 
calaracles  célestes.  L'Iiiiiiiidih''  de  saini  Ah'-dai'd  csl  la  |iliis  célélin;  : 
])ourtanl  il  serait  plus  l()gi(pie  d'accoi'der  la  pi'ééniinence  à  saint 
Gervais,  car  sa  fête  est  plus  voisine  de  l'équinoxe,  et  l'on  sait 
que  la  cause  de  ces  pluies  est  due  aux  vents  qui  commencent  à  cette 
époque  et  soufflent  d'ordinaire  une  quarantaine  de  jours. 

Saint  Médard,  dans  les  suiierstilions  clirélicnnes,  a  remplacé  les 
Hyades  du  paganisme. 

—  Année  pluvieuse,  année  frumenteusc. 

Quand  il  pleut  on  août, 
II  |ilcnt  miel  et  lion  moût. 

Pli,  sul)stantif  verbal  dç plier,  anciennement />/o/,  qui  se  retrouve 
dans  emploi. 

—  11  est  comme  le  camelot,  qui  a  pris  son  pli  :  il  a  pris  une 
mauvaise  babitude. 

Plier,  du  latin  plicare,  provençal  ^^/f^a/',  doublet  de  ployer. 

—  On  plie  un  vêtement,  on  ploie  une  barre  de  fer. 
Il  vaut  mieux  plier  que  rompre. 

Je  plie,  et  ne  romps  pas. 

(La  Fontaine.) 

Plomb,  du  latin  plumhus. 

—  A  cause  de  sa  grande  pesanteur  spécifique,  le  plomb  exprime 
l'idée  de  lourdeur  dans  les  expressions  suivantes  :  sommeil  de 
plomb  ;  nager  comme  un  cbien  de  plomb  ;  plonger,  proprement 
s'enfoncer  comme  le  plomb. 

—  Fil  à  ploml)  :  fil  muni  d'une  masse  de  plomb  à  son  extrémité, 
pour  obtenir  une  direction  verticale. 

—  \)ç plomb  viennent:  aplomb,  surplomber. 

Avoir  de  l'aplomb  :  rester  debout  sur  le  terrain  de  la  discussion. 
Surplomber:  être  bors  de  la  perpendiculaire  tracée  par  le  fil  à 
plomb. 

Plongeon,  dérivé  de  plonger,  latin  plumhicare. 
Au  figuré,  faire  le  plongeon  :  reculer  devant  le  danger. 
Dans  le  langago  trivial,  caner:  plonger  comme  un  canard. 
Qtù  fera  la  cane  de  vous  aultres?  (Rabelais  I,  42.) 

Ploutocratie,  néologisme  ;  du  grec  ploutos,  ricbesse. 


PLU  277 

Gonvcrnemont  oi'i  le  pouvoir  appiirlient  ;iux  riches. 
Arislorratio  d';ir,i:i.Mit. 

Pluie,  du  I.iliii  p/iiria. 

—  La  pluie  est  l'elTet  île  la  i)récipi(ation  des  vapeurs  contenues 
dans  ratniosphr'rc.  Il  y  a  /i/i/ir  ipiaud  elles  se  précipilent  à  l'état 
li(pii(le:  si  Teau  est  à  ['(''iat  NrsiciilciiX:  il  y  a  broiii/lard.  La  pluie 
qui  loiiilic  sans  que  lalinosplirrc  soit  nuageuse,  s'appelle  serein 
le  soir,  ro.sr'c  le  matin.  Les  (jiboitlées  sont  les  pluies  de  printemps, 
souda.ines  et  fréipientes,  souvent  mêlées  de  yrèle  et  de  neige.  Enlin, 
on  appelle  orage,  ondée,  averse,  une  grosse  pluie  de  peu  de  durée. 
(Voy.  (jirre,  grésil.) 

—  Synonymes  :  liouillon  de  chien  ;  ralalia  de  grenouille  ;  déluge. 

—  Les  hirondelles  rasent  la  terre  et  les  grenouilles  coassent 
plus  haut,  (piand  la  phiic  menace. 

On  dit  aussi  :  »  Sauto,  ci'apaud,  nous  aurons  de  l'eau.  » 

—  Petite  pluie  ahat  grand  vent. 

A  [JKii  (II'  pluie  cliiet  grans  vous. 

[Romiin  dp  Rcnart.) 

—  L'été,  la  pluie  ne  mouille  pas.  Cela  signifie  que  l'eau  qui 
tombe  dans  cette  saison  s'évapore  rapidement.  En  été,  la  force 
évaporatrice  de  la  température  est  cinq  à  six  fois  plus  grande  qu'en 
hiver  :  de  là  vient  le  rapide  dessèclienient  qui  succède  alors  aux 
plus  fortes  averses. 

Plume,  du  latin  pluma. 

—  Les  anciens,  pour  écrire,  se  servaient  de  roseaux  taillés,  ou 
de  cannes  :  d'où  canif  (?). 

Au  xo  siècle,  le  roseau  fit  place  à  la  plume  d'oie. 

Mauvaise  plume,  qui  ne  fait  honneur  ni  à  l'oie  qui  l'a  fournie  ni 
à  celui  qui  Fa  taillée. 

Vei's  IToO,  le  mécanicien  Arnoux  proposa  l'emploi  de  plumes 
métalliques,  dont  l'usage  ne  se  propagea  qu'au  commencement  du 
xix«  siècle. 

—  Chargé  d'argent  comme  un  crapaud  de  plumes. 

Plumer,  dérivé  da  plu/ne. 

—  Plumer  la  poule  sans  la  faire  crier.  (Voy.  éeorcher.) 

Faire  pondre  la  poule  aux  œufs  d'or  sans  l'éventrer.  (Mirabeau.) 
Les  lorettes  sont  des  anges  dont  les  ailes  sont  faites  de  plumes 
de  pigeons. 


278  POC 

Aiijoiiririiiii,   ce  soni  (!(■>  |)i.<jï'Oiis.  iioii  jiliis  des  coloiiilics.  qui 
Iniiiiciil  le  cluir  de  Vénus. 
Pliiiiiei-  lin  iiiLiOon.  (Voy.) 

Kolle  osl  (|Lii  son  ;im;iiil  ru-  ithimt- 
JiisijiK'S  ji  s;i  (lcri)i('ro  [iIiiiik'  : 
Car  ijiii  mieux  iilimicr  le  saura. 
C'est  collo  (]ui  meilleur  aura. 

Plumet,  \\Gi\l  de  plume. 

—  Mé/X'i"iy  se  trompe,  qunnd  il  dit  que  les  pliiinels  et  [t.iiKiclics 
ne  sont  en  usage  que  depuis  les  Croisades.  Virgile  re[)résente  le 
chef  des  Liguriens,  Cupavo,  avec  des  plumes  de  cygne  à  son  casque, 
quand  il  vient  au  secours  d'Enée  contre  ïurnus. 

...Piiucis  cnmitrilc  Cupavo, 
Ciijits  olnriniv  suryunt  de  icriicc  pennœ. 

{Enéide,  X.   ISfi.) 

Plupart  (la),  de  pJxs  et  jiarl. 

Terme  coUeiiil.  pour  la  [iliis  grande  part  :  il  s'éeri\ait  autrefois 
la  plus  par/. 

—  Pour  la  plupart  est  un  adverbe,  dont  on  ne  i)eut  retrancher 
pour. 

On  ne  doit  jias  dire  :  Ces  hommes  sont  instruits  la  plupart,  mais 
pour  la  plu|iart. 

Plus,  adverbe  latin,  passé  en  h'ançais  et  en  provençal. 

Ce  dernier  se  sert  aussi  de  mais,  usité  antrelois  en  français. 

Plus  i'csgurd,  inuis  la  vnj  abclhir. 

(Plus  je  la  regarde,  plus  je  la  vois  Inillcr.) 

Ils  chastient  leur  corps  qui  n'en  peut  mais.  (Amyot.  ) 

—  Plus  est  peut-être  (?)  l'abréviation  de  amplus. 

—  Devant  un  adjectif,  ^j/^^s- marque  le  comparatif  :  <  Plus  fraîche, 
plus  brillante  que  la  rose.  » 

Précédé  de  Tarticle  ou  de  Tadjectif  possessif,  il  marque  le  super- 
latif. 

—  Autrefois  on  ne  prononçait  pas  /  de  plus,  aujourd'hui  on  la 
prononce.  (Yaugelas,  licmarques.) 

C'est  par  un  reste  de  cet  usage  qu'on  dit  dans  le  peuple  :  «  Pus 
souvent  !  »  dans  le  sens  de  :  va-t'en  voir  s'ils  viennent. 

Poche,  origine  incertaine. 

F.  Génin  le  fait  venir  du  grec  du  Bas-Empire  pougéion. 

—  La  forme  d'une  poche  gonllée,  a  donné  naissance  au  nom  de 


POE  270 

porlio  nppliqiit'o  à  la  ciiilloi"  à  pot.  On  dit  aussi  œufs  pocliés  ou  à  la 
ciiilkM'.  pai'co  (pi'oii  les  apprête  avec  la  cuiller  à  pot.  Et  par  suite 
d'une  comparaison  :  (eil  poclié. 

Il  l'esla  tout  estourdy  cl  nieiirli'v.  iinu'  œil  poclié,  au  I)euiTe  noir. 
(Halieiais.) 

—  Synonvines:  ((enrde  liuancier;  profonde  (Vidocq);  fouillouse 
(Uahelais)  :  dé[iartein('iil  île  la  Creuse. 

V\  vous  aurez,  sravoz-voiis  (iiioy '? 
Force  il'auljerl  en  la  fouillouse. 

[Vie  de  saint  Christophe  ;  (irennlilc  I.TJO) 

—  Jouer  de  la  poche  :  payer.  Allusion  au  petit  violon  des  maîtres 
de  danse,  [\\)[hAc  jioc/wfft'. 

Pochon,  [làté  d'encre.  Terme  technique  à  l'usage  des  maîtres 
d'écriture.  (^Dictionnaire  de  Trévoux.) 

Poêle,  nom  masculin  :  du  latin  palluim. 

Voile  (pi'ou  tient  sur  la  tête  des  mariés  pendant  la  bénédiction 
nuptiale. 

L'usaue  d'élendi'e  ce  \oilesur  les  nouveaux  mariés  vient  [)roha- 
blement  de  la  cérémonie  qui  consistait,  dans  le  mariage  romain, 
à  faire  passer  les  nouveaux  époux  sous  le  joug  :  d'où  le  mot 
conjnfjuiin,  joug  commun. 

—  Drap  mortuaire.  (Sos.  pctUier.) 

Poêle,  nom  féminin  ;  du  latin  patella,  plat. 
Ustensile  de  fer  pour  faire  frire  les  aliments. 

—  Qui  tient  la  queue  de  la  poêle,  il  la  tourne  comme  il  veut. 

Poésie,  du  grec  poirsis,  par  le  latin  poésie-. 
Synonymes  :  la  gaie  science,  la  langue  des  dieux. 

—  Les  poètes  se  logent  sous  les  toits:  étant  en  communication 
journalière  avec  les  dieux,  il  leur  convient  de  faire  la  moitié  du 
chemin. 

L'héroïsme  d'un  peuple  crée  la  [loésie,  la  poésie  engendre  la 
civilisation  :  c'est  du  poème  d'Homère  C[u'est  sortie  la  Grèce 
civilisée:  c'est  un  livre  qui  a  converti  le  genre  humain  au  chris- 
tianisme. (J.-J.  Ampère.) 

Aujom-d'hui,  tous  les  chai-mants  esprits,  nés  au  commencement 
du  siècle,  iinissenl  ou  ont  disparu.  La  génération  nouvelle  est  tout 
à  fait  ignorante  de  cette  aimable  tradition,  cjui  menace  de  se  perdre. 
Faisons  du  moins  revivre  par  le  souvenir  ces  personna.lités,  alin 
qu'elles  n'emportent  pas  avec  elles  les  restes  d'une  poésie  qui  tend 


280  POI 

à  (lis|)nr;iîlro  tous  les  jours,  et.  si  on  vont  l;i  l);imiir  roiiiiiii'  iiiiililc 
évorliioiis-iioiis  (lu  moins  ;'i  i-ciidi'c  riiliic  un  pcn  |)0(''tiqiH'. 

I);ins    l;i    \\r   |)i';ili([ii(',    l;i    poi'^sic  do   ri(l('';il  ne  vient  (|n  ;ipi'(''S  la 
poésie  (le  la  réalilé. 

Poète,    du    t>rcc,  jtoii'lrs,   p;ii'   le   lalin    jiorl(/,  celni   (jui  fail,  le 
créateur,  le  trouveur. 

—  Synonymes:  favori  d'Apollon,  nourrisson  des  Muses,  rimailleur, 
poète  crotté. 

—  En  argot  :  j)oi(/rt%  al)ré\ialion  pour  :  a\aliMii'  de  [lois  uris. 

—  L'esprit  court  les  rues  :  c'est  i)our  cela  (pi'il  y  a  des  poètes 

crottés. 

Tandis  (|ne  Cullclct,  croltr-  jiisi|ir;i  Ircliino, 
S'en  va  clieirlifr  son  pain  ilc  cnisinc  en  cuisine. 

(lion.K.v,  Satire  I.) 

—  Un  bon  poète  n'est  pas  plus  utile  à  l'Klat  ([u'nn  lion  joueur  de 
quilles.  (Malherbe.) 

Il  n'y  a  pas  au  monde  d'être  plus  inutile  qu'un  mauvais  poète. 
(Blot.)" 

...Dans  lart  dangereux  de  rimer  el  d'écrire. 
Il  n'est  pas  de  degré  du  médiocre  au  pire. 

'Boii.KAL-,  .1/7  pocH'/ue.) 

Un  mauvais  poète  ne  mérite  aucune  indulgence.  Apollon  n'a-l-il 
pas  écorché  Marsyas  ? 

—  Parmi  les  grands  poètes  du  xix<^  siècle,  V.  Hugo  représente 
l'iiomme;  Lamartine,  la  femme  ;  A.  de  Musset,  le  jouvenceau. 

—  On  naît  poète,  on  devient  orateur.  A^ascunlur  poc/œ,  flunt 
oratores. 

—  L'esprit  du  savant  est  éclairé,  celui  du  poète  est  lumineux. 

Poids,  du  latin  pensum,  chose  pesée  ;  provençal  pés. 
Le  d  provient  de  la  méprise  de  certains  grannnairiens. 

—  Les  poids  et  mesures,  au  dire  de  Josè[)lie.  ont  été  inventés 
par  Gain. 

—  Faire  une  chose  avec  poids  et  mesure  :  Omnia  in  mensura, 
et  numéro  et  pondère.  {La  Sarjesse,  XI.  21.) 

Poignard,  dérivé  de  poing,  lalin  puynus. 

Au  dire  deGénin,  il  viendrait  de  pénard,  qui  désignait  une  épée 
courte  servant  aussi  à  couper  le  pain,  et  qui,  à  cause  de  ce  double 
usage,  devenait  une  arme  peu  dangereuse. 

Rabelais  (prologue  du  livre  111)  dit  :   «  Ghascun   exerçoyt   son 


POl  281 

pcnarcl.  »  Pdnard  s'ost  dil   pour  imc  vioille  épôo.  et  ;iussi  pùiir  un 
vieilhii'd  usé  ;  dans  ce  sens,  un  vieux  galant,  niu'  vieille  l;iiiie. 

Le  [leuple  a  altéré  la  l'ornic  et  le  sens  de  ce  mot  :  iin  \ieii\  pa/ia 
signilie  une  vieillerie  démodée  et  usée,  comme  on  en  trouve  dans 
les  greniers  et  dans  les  boutiques  des  brocanteurs. 

Poil,  du  laliii  /)ihis. 

—  Brave  à  trois  poils.  Sous  (Charles  iX.  on  désignait  ainsi  les 
spadassins,  cpii  portaient  une  longue  inoustaclic  terminée  de  chaque 
coté  par  quehpu^s  poils  très  cITdés,  et  un  bouquet  de  barbe  de  la 
même  forme,  au  menton.  La  mode  venait  d'Espagne. 

Ou  la  retrouve  dans  quelques  portraits  du  temps  de  Louis  XIIL 

Poing,  du  latin  pinjnus,  qui  a  donné  aussi  pugna  et  pugilat, 
répugner,  répugnance  ;  poignée,  ce  qu'on  peut  tenir  dans  la  main 
fermée. 

—  Montrer  le  poing  à  quelqu'un  :  le  menacer. 
Je  vais  faire  débarquer  mon  poing  sur  tes  côtes. 

Point,  du  latin  puncluin:  proprement,  trace  d'une  piqûre. 

—  Dans  les  anciennes  mesures,  le  point  valait  le  12e  (\q  \^  ligne. 

—  On  emploie  aussi  point  pour  moment  :  Il  fut  sur  le  point  de,.. 
Le  point  du  jour,  c'est-à-dire  quand  le  jour  perce. 

—  La  ponctualité  est  la  qualité  de  celui  qui  agit  à  point. 

—  Point  a  fourni  aussi  :  pointer,  appointements,  désappointé. 

—  Point,  état  de  santé,  a  donné  embonpoint. 

—  Bon  point.  Les  Bomains  donnaient  leur  suffrage  à  quelqu'un 
en  marquant  son  nom  d'un  point. 

(hnnc  Inlil  punclain. 

(HOKACE.) 

(Il  a  obtenu  tous  les  sulfrages.) 

—  On  prétend  que  c'est  Aristoi)liane  qui  a  inventé  les  points 
qui  indiquent  certains  repos. 

Les  Latins  en  mettaient  entre  chaque  mot,  comme  on  le  voit 
dans  certaines  inscriptions;  cela  revenait  à  n'en  pas  mettre  du 
tout.  Les  livres  hébreux  originaux  sont  écrits  sans  points  ni  virgu- 
les. Saint  Jérôme  y  introduisit  la  division  en  versets. 

La  ponctuation  actuelle  est  d'origine  moderne ,  et  date  du 
vue  siècle.  Elle  a  été  perfectionnée  peu  à  peu,  surtout  après  la 
découverte  de  l'imprimerie, pour  donner  plus  de  clarté  au  discours. 

—  Faute  d'un  point,  Martin  perdit  son  âne. 


282  POI 

M;ii'tiii.  pi'itMii-  (le  r.ililinyo  dWsclIo,  ;iv;ii(  f;iil  <ii-|i\(,'i"  siii'  la 
})()rle  (lu  coitvciil  celle  iiiscriiiiioii  : 

l'iirhi,  iKtlens  cslo  iinlli,  cliiuil'tris  honrslo. 

(Porte,   ne   sois  ouvert*'  ;'i   personiie,  n'Sle  fennec  ;i   riioiiiiéle 

IlOlIlllM?.) 

Poiic  celte  l'.'iiilc.  il  lui  dcsIiMu''.  et  son  successeur'  n'eul  (|u';'i 
clKiil'iel"  (le  place  un  sitiiie  de  ponctuation  poui'  rectilier  riusciiplioii  : 

Porln,  païens  nsto,  nidli  clauihiris  fionr-slu. 

(Porte,  sois  ouverte  à  tous,  ne  sois  fermée  pour  aucun  lionni'te 
homme.) 
Il  ajouta  : 

l'no  jii'O  puncln  candi  Marlinus  Ascllo. 

(^Pour  un  seul  point,  Martin  perdit  Asello,  —  son  âne.) 

—  Un  hoinnie  qui  avait  des  ennemis  consulta  l'oracle  pour  savoir 
s'il  devait  ai)andouner  son  pays.  11  lut  :  Domine,  s/cs  securns.  Mais 
apirès  avoir  couru  un  craïul  danuer.  il  s'aperçut,  eu  relisant  la 
réponse  de  l'oracle,  qu'il  aurait  dû  lire  :  Doini  ne  ste.s  securits. 

—  Un  poète  latin  composa  ce  vers  en  l'honneur  d'un  conspi- 
rateur : 

In  mcmoria  .seinpcr  cril. 

(Il  vivra  toujours  dans  la  mémoire  des  hommes.) 
Poursuivi  en  justice,  il  expliqua  ainsi  son  inscription  : 

In  me  maria  acmper  cril. 

(Il  y  aura  toujours  en  moi  de  la  folie.) 

—  Une  viraule  transposée  enfanta  la  secte  des  Manichéens. 

—  Le  général  Fairfax  écrivit  après  sa  signature,  sous  la  sentence 
de  mort  de  Charles  P"",  sans  aucune  ponctuation  :  SI  omnes  consen- 
tiunt  ego  non  dissenlio. 

Il  se  réservait,  si  les  événements  le  demandaient,  de  l'expliquer  : 
Si  omnes  conscntiunt,  ego  non  :  dissentio.  (Si  tous  approuvent, 
moi  non  :  je  suis  d'avis  contraire.) 

—  Un  négociant  de  Londres  ayant  engagé  un  célèhre  médecin 
d'Édimhourg  à  venir  opérer  l'accouchement  de  sa  femme,  le  docteur 
re('ut  ce  télégramme  :  «  Ne  venez  pas  trop  tard.  »  II  se  pressa  de 
partir,  et  trouva  la  femme  délivrée.  On  avait  écrit  :  «  Xe  venez  pas. 
Trop  tard.  » 

Pointe,  du  latin  piincta,  participe  de  yy/z/^yr^rc,  poindre. 
Au  figuré,  des  pointes  d'aiguille  :  des  suhlilités. 


l'OI  283 

—  Fairo  dos  poiiitos  :  dos  traits  d'esprit  piquants. 

—  Esprit  poiutillouK  :  (pii  er.ûotc  sur  les  moindres  choses.  l*eut 
s'opposer  à  es[n'it  oldiis  ou  épais. 

Poire,  du  ialin  populaire  itira.  |iour  jurum. 

—  Kutro  la  poiivol  le  Ironiaue  :  inli'v  pornUi .  pendant  le  dessert, 
quand  laijpôtit  est  satisi'ail,  que  le  viu  a  délié  les  langues  et  rend 
l;i  l'ouversaliou  uéuéraie. 

.(  Colle  ioculion.  dit  Diiplossis.  indi(pie  l'ospèee  d'inliuiilé  qui 
s'étaitlil  naluroilouiont  outre  les  convives,  à  la  suite  d"un  hou  dinor, 
au  dessert,  au  moment  où  Ton  apporlo  le  fromaiic  et  les  fiaiits. 
C'est  le  moment  dos  oonlidences  et  des  ronversations  tout  ami- 
cales. » 

—  Après  la  poire,  rhoinmo  veut  hoire. 

—  Garder  une  poire  pour  sa  soif  :  éparpner  quelque  chose  pour 
l'aNonir,  pour  jouir  plus  tard  du  «  l'iaiit  »  de  ses  économies. 

—  Après  le  hoau  temps  vionl  lo  mauvais,  et  pondant  l'été  il  faut 
se  hàtir  une  maison  })Our  être  à  Tahri  dos  rigueurs  de  l'hiver. 
(P.  Pérngin,  Vie  de  Vasori.) 

—  Se  contenter  de  peu  est  i)ien  :  retrancher  par  prévoyance 
quelque  chose  de  ce  peu,  est  mieux.  Celui  qui  prali(pH'  ce  proverhe 
est  sur  de  conserver  son  indépendance. 

M;il  siiiipo  (jui  huit  (lisiic 

Qui  au  soir  ne  laisse  levain, 
Ja  ne  fera  au  matin  lever  pasle. 

(K.VBFr.AlS.l 

—  Poires  de  hon-cli rétien.  (Voy.  bon.) 

Cette  expression  est  sans  doute  la  corru}itiou  de  *  i»onuos  poyros 
crusteménies  »,  dont  parle  Uahelais  (lil,  13)  ;  elle?  étaient  originaires 
de  Crustumenum,  ville  de  Toscane. 

C'est  à  propos  de  ces  poires  que  Virgile  a  dit  : 

('.ricilniniis  -sj/i-i-svc  piri-i. 

\r,,-r,riji,]lir.<,    11,   SS.I 

Poireau,  de  porre//i/>n,  diminutif  (W  porniin. 

—  Il  est  coinmo  les  poiroaiix,  la  P'Ii'  hlanrlio  el  la  (pu'iio  verte.  Se 
dit  d'un  \ioillard  \igouroux. 

Tu  me  l'eproches  mon  poil  gi-isonuant  et  ne  consydèros  jioint 
comment  il  est  de  la  nature  des  i)oiirreaulx,  esquels  nous  voyons 
la  teste  blaïu'he  et  la  ([uoue  verte,  droicte  et  vigoureuse.  (Uahelais, 
III,  28.) 


284  POI 

Pois,  (lu  l;iliii  pisiint.  du  nciMic  /)inso,  lifoycr,  prircc  qu'on 
manpc.'iil  les  pois  en  piii'iM'. 

—  Les  |M)is  cliiclies,  ou  pois  [loiiilus,  (''Uiicut  (•ons;in'(''S  ;"i  Vénus. 
En  vorlu  d'iino  croyjinco  rolitiicuse,  on  les  ni;ing(3ait  cuils  dans  l'oau 
salée.  (Pline,  XYIII^  12.) 

Cet  usage  s'est  pcrpélué  en  l'rovence  ;  on  les  mantre  aussi  cuits 
dans  l'eau  salée,  spécialement  le  dimanche  des  Hameaux,  alin  de 
se  préserver  des...  clous  ou  furoncles. 

—  Avaleur  de  pois  gris.  On  appelait  ainsi  jadis  un  homme  très 
vorace  ;  sans  doute  à  cause  des  pois  et  muscades  (pi'avalaient  les 
charlatans? 

Les  uvalk'z  luiil  ainsi  qiio  des  pois  j,'i-is. 

(.MoLii:iiE,  Etourdi,  IV.) 

(Voy.  donner  des  pois  pour  des  fèves.) 

Poison,  du  latin  potio,  rpii  a  donné  aussi  potion. 

En 'roman,  poijson  signifie  potion,  hreuvage. 

Les  anciens  auteurs  l'ont  employé  dans  le  même  sens  de  potion 
médicale,  enchantée,  philtre...  Aujourd'hui,  il  est  toujours  pris  dans 
le  sens  de  substance  cpii  donne  la  mort. 

On  trouve  polionatus  avec  le  sens  d'empoisonné?  (Suétone, 
Caliguhi.) 

—  Synonymes  :  bouillon  d'onze  heures  :  poudre  de  succession  ; 
toxique. 

—  Les  Grecs  croyaient  que  les  barbares  empoisonnaient  leurs 
flèches,  comme  font  certaines  peuplades  sauvages  :  d'où  toxique. 

—  Poison  a  été  longtemps  féminin  :  il  l'est  encore  dans  le  langage 
populaire,  dans  les  patois. 

Ils  veulent,  malgré  la  raison. 
Qu'on  dise  aujourd'hui  la  poison. 

(.Ménage,  Requête  des  Dictionnaires.) 

Poissarde,  de  poix,  qui  a  de  la  poix,  de  la  glu  aux  doigts. 
Martial  donne  le  mot  analogue  : 

Non  fuit  AnloUjci  tam  piccata  manu-s. 

(Epigrananes,  VUI,  o9.) 

Le  nom  de  poissard  est  donc  venu  de  poix,  poisser  :  c'est  sous 
Louis  XIY  que,  par  l'analogie  des  mots  poisson  et  poissard,  ce 
dernier  nom  fut  décerné  aux  marchands  de  marée.  Mais  les  haren- 
gères  n'acceptèrent  pas  ce  baptême  sans  protester  énergiquement  ; 
elles  prirent  le  nom  comme  une  injure  sanglante,  la  première 
image  présentée  par  le  mot  n'étant  pas  encore  assez  fruste. 


roi  28o 

Lis  mctiois  qui  font  usn.ao  do  la  poix  étaient  aussi  on  butto  à  dos 
plaisauloi-ios  dôdaiunousos.  Toi  ost  lo  nom  do  jx'fjol  donnô  ou 
ProYcncr  aux  cordonniers.  Telle  aussi  la  loculiini  :  (^ost  un  pégou- 
lier  (un  call'a!  )...  sauf  r(^sj)ect  ! 

Poisson,  du  latin  populaire  y^/.vr/o.  /u'sc/o/t/'t/i.  pour  y^/.sT /.>.•. 

—  L'intelliueuce  des  poissons  est  à  peu  |U'ôs  nulle  :  leur  vue  est 
très  l)onne,  mais  leur  voi'acilé  et  leur  fécondité  sont  prodigieuses. 

—  Poinaon  (l'/n-riL  Doihkm"  un  poisson  d'avril  à  quel(pi"un  :  lui 
donner  des  couimissious  ridicules,  le  pousser  à  des  courses,  à  des 
démarches  inutiles,  le  l'^''  avril,  pour  se  moquer  de  lui. 

Cet  usage  l'omonte  au  temps  où  Tannée  civile  commençait  au 
mois  d'aNcil.  (ui  pliil('(t  au  2o  mars. 

C'est  Charles  JX  qui  a  lixé  le  commencement  de  l'année  au 
l"^'"  janvier,  par  un  édit  publié  en  ITitilî.  Les  étrennes  ayant  été 
renvoyées  alors  au  1^''  janvier,  on  ne  lit  plus  au  l^""  avril  que  des 
félicitations  plaisantes  et  éqm'voques;  et,  comme  en  avril  le  soleil 
vient  de  quitter  le  signe  des  Poissons,  on  donna  à  ces  plaisanteries 
le  nom  de  «  poissons  d'avril  » . 

Fleury  de  Bellingen  fait  venir  «  poisson  d'avril  »  de  «  passion 
d'avril  »,  parce  que  la  Passion  a  eu  lieu  au  commencement  d'avril, 
et  que  les  courses  inutiles  que  l'on  fait  faire  ce  jour-là  aux  gens 
crédules,  sont  comparaldes  à  celles  qu'on  fit  faire  à  Jésus-Christ, 
d'Anne  à  Caïphe,  à  Pilate,  etc. 

D'autres  ont  vu  l'explication  de  ces  courses  dans  lo  sens  du  mot 
cici'il,  en  provençal  ahriou,  qui  a  fait  ahricar,  s'élancer  étourdi- 
ment  sur  une  chose  comme  le  poisson  sur  l'appât. 

Au  xv!*^  siècle,  on  entendait  par  «  poisson  d'avril  »  un  maquereau, 
parce  que  ce  poisson  est  excellent  à  manger  en  avril.  (Rabelais. 
V,  30.) 

Le  maquereau,  ainsi  nommé,  de  macula,  tache,  parce  qu'il  a  la 
peau  tachetée,  sert  à  désigner  un  entremetteur  de  mauvais  com- 
merce, à  cause  de  la  ressemblance  qui  existe  entre  la  bigarrure  de 
sa  peau  et  lo  vêtement  de  l'acteur  qui  jouait  le  rôle  de  proxénète 
dans  la  comédie  antique  ;  peut-être  aussi  à  cause  de  la  ressemblance 
de  iiuKiuereau  avec  mcrcureau,  petit  Mercure.  On  sait  quel  était 
le  rôle  de  ce  dieu. 

—  L'électeur  de  Cologne,  étant  à  Valenciennes,  annonça  qu'il 
prêcherait  le  1"'  avril.  La  foule  était  grande.  L'électeur  monta  en 
chaire,  lit  le  signe  de  la  croix,  et  cria  d'une  voix  de  tonnerre  : 
«  Poisson  d'avril  !  »  Et  il  descendit. 


28G  POI 

—  Un  Mdrliiinii,  \()iil;iiil  doiiiici'  un  poisson  (r;i\i-il  ;'i  ses  conipn- 
lriot(is,  leur  ;uinoiir;i  (|n  nue  énoniic  li.-ilciiic  Ncn.iil  de  s"(''clioMor  ;'i 
rentrée  du  poil,  l'diir  jiiLKjr  de  rellel  lio  sa  plaisanl(;rie,  il  se 
cacha  ;  niais,  \o\aiil  loiit  h;  monde  y  courir,  il  \  coiinil  Ini-inéine, 
pensant  que  ce  pouvait  être  ari'ivé. 

—  I.a  mec  de  (lénes  csl  sans  [loissons.  dit  lo  |iro\<'i-|i('.  (In  en 
[(oiiccait  dire  aiilaiil  de  toiilc  la  Méditerranéf!,  en  ajoiitaiil  ipie  le 
peu  de  poisson  qu'elle  contient  est  dt;  (pialilé  médiocre.  Kn  ,i!énéi"a], 
les  espèces  de  poissons  cor'res[)ondant  à  celles  de  l'Océan,  y  sont 
moins  délicates.  Le  muge,  on  imilet,  ne  vaut  rien  :  le  maquereau  et 
la  raie  sont  médiocres  :  cependant,  les  sardines  y  sont  exquises:  le 
rouget  est  peut-être  le  meilleur  de  tous  les  poissons  ;  le  loup  et  le 
sarran  sont  excellents.  Le  poisson  de  la  Méditerranée  ne  s'occupe 
que  d'être  bien  habillé  :  le  rouget  y  est  d'un  rouge  charmant.  Il  y  a 
des  poissons  verts  comme  des  grenouilles,  d'autres  bleus,  jaunes 
comme  de  l'or,  etc. 

—  Mauvais  poisson  :  étrangle-chat,  éti'angle-helle-mère. 

—  Jeune  chair  et  vieux  poisson.  La  chair  des  vieux  poissons  est 
la  meilleure. 

En  vérité,  mon  compère,  vous  faites  bien  mentir  le  proverbe, 
car,  n'étant  qu'un  jeune  brocliet,  vous  avez  la  fermeté  du  vieux 
esturgeon.  (Voiture.) 

—  Le  poisson  naît  dans  l'eau,  et  meurt  dans  l'huile. 


Si  les  mois,  ne  sont  erres, 
Li-  poisson  ne  mangez. 


(xvi''  siècle.) 


C'est-à-dire  qu'il  ne  faut  pas  manger  de  poisson  dans  les  mois 
dont  le  nom  ne  contient  pas  la  lettre  r  ;  c'est  l'époque  du  frai. 
—  Muet  comme  un  poisson. 

0  midis  quoque  pisdhus. 
Donaturii  ciicni,  si  liheat,  sonuin. 

(UuiiAci:,  Of/f*-,  IV,  3.) 

(0  Muse,  qui  donnerais,  si  tu  voulais,  même  aux  poissons  muets 
le  chant  du  cygne.) 

Tout  pai'le  eu  mon  ouvrage,  et  même  les  poissons. 

(La    FONTAINK.) 

La  Fontaine,  en  etïet,  a  donné  trois  fois  la  parole  aux  poissons 
dans  ses  fables. 

M.  Coste,  dans  la  séance  de  l'Académie  des  sciences  du  lo  février 
1838,  a  lu  un  rapport  sur  les  recherches  du  docteur  Dufossé,  de 


V()\.  287 

.M;ii'scill(\  (roi'i  il  ivsiillo  qirim  ui'.'iiitl  noiiilii'O  de  poissons  infilos 
Ijossrdciit  la  \(iix.  Ils  sont  pourvus  d'un  appareil  vocal,  inius  non 
tiultuial.  à  raid(>  du(piel  ils  pcuM'uI  se  manifeslor  leurs  désirs  à 
dislance.  Oininl  aux  l'euielles,  au  rebours  de  ce  qui  se  passe  dans 
notre  espèce,  elles  restent  coinplrtenient  muettes. 

Puis(pie  raiicicu  proverbe  se  ti'ouve  ainsi  démenti  par  décision 
de  rAcadiMiiic  des  sciences.  l'Académie  française  de\rail  douiici' 
un  léniinin  à  [loissoii.  pdur  [lerineltre  de  dire  :  muet  comme  une 
jjoissoiuic. 

Rabelais  (111.  '-2\]  dit.  eu  parlant  des  oracles  des  païens  :  «  Vous 
sçavc/,  (pie  tous  sont  devenuz  plus  mutz  que  poissons,  depuys  la 
venue  de  celluy  Roy  servateiir  auquel  ont  pris  lin  tous  oracles  et 
tontes  prophéties:  comme  advenanle  la  lumière  du  clair  soleil, 
disparaissent  tons  lutins...  » 

—  On  ne  sait  s'il  est  chair  ou  poisson  :  on  ne  peut  le  définir. 

Il  est  possible  que  ce  proverbe  ait  été  écrit  d'abord  en  latin,  et 
ait  signifié  :  s'il  man.ue  chair  ou  poisson  ? 

—  Les  gros  poissons  mangent  les  petits  :  le  fort  opprime  le  faible. 
Les  anciens  disaient:  vivre  en  poisson,  pour:  exercer  le  droit  du 

plus  fort. 
(Yoy.  la  sauce  fait  manger  le  poisson  ;  vaut  mieux  que  le  poisson.) 

Poivre,  anciennement  jjeivre,  du  latin  piper. 

—  De  toutes  les  épices,  le  poivre  a  de  tout  temps  été  la  plus 
répandue,  la  plus  employée  dans  les  cuisines.  Il  y  a  eu  même  une 
époque  où  toutes  les  épices  furent  désignées  sous  le  nom  de  poivre, 
et  les  épiciers  sous  le  nom  de  poivriers.  Le  prix  du  poivre  était 
très  élevé,  cl  il  en  était  résulté  l'ancien  proverhe  «  cher  comme 
poivre  »,  qui  se  dit  encore.  On  donnait  du  poivre  en  présent,  et 
c'était  un  moyen  employé  pour  se  rendre  ses  juges  favorables. 

PoiX;,  du  latin  pix,  grec  pissa,  provençal  pèrjue. 
Rabelais  se  sert  (^comme  le  provençal)  de  parasine,  pour  poix- 
résine. 

(Voy.  poissarde.) 

—  Lg  j)ico/i/K  petite  mesure  pour  l'avoine,  était  un  panier  d'osier 
enduit  de  poix  à  l'intérieur,  pour  empêcher  l'avoine  de  se  perdre. 

—  De  y^o/x  vient  aussi y^o//îco;î,  tonneau  de  vin,  et,  dans  l'origine, 
outre,  ÛG  piceu/n,  à  cause  de  la  poix  dont  l'outre  est  enduite.  On  a 
intercalé  un  n,  comme  dans  lanterne,  de  laterna. 

Poli,  du  verbe  polir,  latin  polire. 


288  l'dL 

On  ne  s;iiir;iil  h'  rallMclicr  ;iii  <i\vr  /lo/is,  cilr.  iifiii  plii;;  (iiT;! 
jio/iis,  iioiiiliroiix. 

—  Soyez  poli  :  Uhuidus  cs/o.  ((/itoii.) 

C(;  n'est  |);is  toni  d'cliT  [loli.  il  laiil  riicdi'c  (•In'  Iioiiim'Ic. 
11  faut  plus  (Vcîspril  poui-  cti'e  poli  (pic  pour  cli'e  honnête. 

Police,  (lu  prec  po/ifcia,  p;ii'  le  laliu  po/ifia,  ,uou\-erneinent. 

—  Synonyuuî  :  la  rousse  (aiyol). 

—  La  police  se  subdivise  en  :  1'^  police  politique,  qui  écarte  les 
divisions  et  les  complots;  2'^  police  de  sûreté,  qui  prévient  et 
découvre  les  attentats:  3"  police  administrative,  qui  pourvoit  au 
bien-être  des  citoyens. 

—  Le  service  de  la  police  parisienne  contre  les  voleurs  (l8Co) 
coûte  16  millions  aux  contribuables  :  à  ce  prix,  il  y  aurait  bénéfice 
à  se  laisser  voler. 

—  Un  piège  tendu  par  la  police  s'appelle  une  souricière. 

—  Police  d'assurances  vient  du  bas-latin  j)oleticum,  registre. 

Polichinetle,  de  l'italien  PulriaelUi  :  de  pu/linaceus,  jeune 
poulet,  à  cause  de  la  ressemblance  de  son  nez  avec  le  bec  d'un 
poulet. 

Dans  l'antiquité,  il  s'appelait  Maccus,  et  a  pris  naissance,  quelque 
deux  mille  ans  avant  Jésus-Christ,  dans  la  cité  osque  d'Atella,  entre 
Gapoue  et  la  mer.  On  prétend  même  qu'il  est  contemporain  des 
Pharaons,  et  ChampoUion  a  reconnu  sa  grotesque  figure  dans  les 
peintures  égyptiennes. 

—  Polichinelle  est  égoïste,  méchant  et  galant  :  il  ne  distingue  pas 
très  nettement  le  bien  d'autrui  du  sien. 

—  Le  secret  de  Polichinelle  :  ce  que  tout  le  monde  sait. 

Polisson,  ûe  polifi,  son,  enfant  des  villes. 

(Cette  étymologie  hétérogène  est  invraisemblable.  Le  mot  parait 
venir  de  l'argot  ;  à  moins  qu'on  ne  veuille  voir  un  rapport  entre 
polisson  ;  qui  est  à  polir,  et  nourrisson,  qui  est  à  nourrir.) 

On  donne  ce  nom  à  un  petit  garçon  qui  joue  dans  les  rues  ;  à  celui 
qui  dit  ou  fait  des  choses  grivoises. 

Polisson  était  un  membre  de  la  grande  famille  des  gueux. 

—  Le  Dictionnaire  du  Jargon  traduit  polisson  par  :  ceux  qui 
vont  presque  tout  nus.  Serait  synonyme  de  va-nu-pieds.  Vers  1071, 
le  mot  commence  à  signifier  dél)auché. 

Si  ses  manières  te  paraissent  polissonnes,  c'est  que  tu  ne  fré- 
quentes pas  le  grand  monde.  (TliMirc  de  Ghérardi.  t.  L  p.  351.) 


por.  2fi9 

Tono/.  iii;i(l,iin(\  je  suis  nolissoii  ;iii  sii[ir("'iiie  dci^ré.  (Tliéfilrt^ 
ilalion.) 

Politesse,  du  .uroc  />o//.s-,  ville;  comme  nrhanifc',  de  ;//-^,s'. 
Bonté  artiliciclle. 

—  La  politesse  est  une  envie  de  plaire  :  la  natui-e  la  donne,  mais 
l'éducation  l'auuinente.  (M™«  de  Lambert.) 

La  politesse  n'est  (jifune  forme  de  la  bonté,  de  la  ciiarité  et  de 
la  bienveillance,  et  une  imitation  de  l'amitié.  (A.  Karr.) 

La  politesse  ne  coûte  rien,  et  achète  tout. 

La  politesse  est  une  monnaie  qui  ue  coûte  rien,  et  rapporte 
beaucoup. 

La  politesse  est  une  courtisane,  qui  caresse  également  tous  ceux 
qui  vont  chez  elle. 

La  politesse  méprisante  et  dédaigneuse  des  grands  est  une  vertu 
artiiicieuse  qui  écarte  la  t'amiUarité. 

La  politesse  exquise  vient  du  cœur  et  d'un  grand  sentiment  de 
dignité  personnelle. 

Poltron,  du  latin  poUcx  h'uncus.  pouce  coupé,  parce  que  les 
lâches  parmi  les  soldats  romains  étaient  ainsi  désignés,  quand  ils 
s'étaient  mutilé  le  pouce,  afin  de  se  rendre  impropres  à  lancer  le 
javelot. 

A  notre  époque,  les  jeunes  conscrits  usent  quelquefois  d'un 
moyen  analogue,  en  se  mutilant  l'index  de  la  main  droite,  ce  qui 
les  rend  impropres  à  presser  la  détente  du  fusil.  Mais  la  jurispru- 
dence des  tribunaux  militaires  les  condamne  ordinairement  à  un 
an  de  prison,  qui  ne  se  confond  pas  avec  le  temps  du  service 
militaire,  qu'ils  accomplissent  dans  les  infirmiers,  les  pontonniers, 
etc.,  etc. 

—  Valentinien  avait  fait  une  loi  qui  juinissait  de  la  peine  du  feu 
ceux  qui  s'étaient  uiiitilé  le  pouce. 

—  Ce  mot  vient  plus  probablement  de  ïhiûlcn  jto/frone,  qui  se 
rapproche  du  vieux  mai  poulire,  poulain. 

Les  jeunes  poulains  sont  faciles  à  elïrayer. 

—  Synonymes  :  foireux,  autrefois  conchière. 

Vous  n'aurez  en  vostre  armée  que  des  foireux.  (Parabole  de 
Cicquot,  lo93.) 

—  Poltron  conime  un  lièvre,  ...comme  la  lune. 

Le  lâche  recule,  le  poltron  n'avance  pas.  Le  premier  ne  se  défend 

i9 


2(90  POM 

pas,  le  sororid  n'oso  attaquer.  Il  iio  faut  jtas  foiniiloi-  sur  la  résîs- 
taïu'o  d'un  làclio.  ni  sur  le  scroiirs  (riiii  jiollroii. 

Polytechnique  (l^colc).  du  .iircc  y^o/i-zx,  icrlim". 

—  L'école  Polyl('(liiii(|iio  est  destinée  à  former  des  élèves  irifré- 
nicurs  civils  et  iiiililaires,  et  des  ofdcicrs  de  qiicifjiics  services 
spéciaux.  Elle  lut  créée  parla  Convention,  le  28  s(,'|il(;iid)re  17i)4, 
sur  la  proposition  de  Mon^e  et  de  Fonrcroy. 

Elle  ne  recevait  d'al)ord  que  des  externes  ;  c'est  à  partir  de  1804 
qu'elle  a  été  internée. 

Les  élèves  de  l'école  se  signalèrent,  en  1814,  à  la  défense  de 
Paris,  et  à  la  Révolution  de  1830. 

Licenciée  par  Louis  XVIII,  elle  fut  rétablie  peu  de  temps  après. 

Polythéisme,  du  tirec  jxjIus,  t/iéos. 
Religion  qui  admet  la  pluralité  des  dieux. 

—  On  peut  distinguer  plusieurs  espèces  de  polythéisme  : 
L'idolâtrie,  ou  adoration  des  idoles,  qu'on  appelle  antliropomoi'- 

•phisme,  régna  en  Grèce  et  à  Rome  avant  l'établissement  du 
christianisme. 

Le  sabéisme  est  le  culte  des  astres  et  du  feu;  il  était  répandu 
surtout  en  Arabie  et  en  Clialdée. 

Le  fétichisme  est  Tadoration  de  tout  ce  qui  frappe  les  sens,  de 
tout  ce  à  quoi  on  attribue  quelque  puissance.  C'est  la  forme  de 
religion  la  plus  grossière,  celle  des  sauvages. 

—  S'oppose  à  monothéisme. 

Pommade,  de  l'itaUen  pomnla. 

Onguent  fait  jadis  de  pulpe  de  pomme  et  de  graisse. 

Pomme,  du  latin  po/na,  pris  i)Our  po/num.  Provençal  poume. 

—  Le  moi  pommn,  dont  le  sens  s"est  restreint  en  français,  était 
chez  les  Romains  le  nom  générique  de  tous  les  fruits,  à  pépins 
ou  à  noyaux,  comestibles. 

Pomone  était  la  déesse  des  vergers. 

—  Pomme  pourrie  gâte  la  compagnie.  (Voy.  fréquenter.') 

11  y  en  a  plus  que  de  pommes  en  Normandie  :  c'est  chose  com- 
mune. 

—  Pomme  de  discorde.  (Voy.  brandon.) 

Aux  noces  de  Tliétis,  la  Discorde,  pour  se  venger  de  n'avoir  pas 
été  conviée,  appai'ut  au  milieu  d'un  nuage,  et  jeta  dans  l'assemblée 
des  dieux  une  pomme  d'or,  avec  ces  mots  :  «  A  la  plus  belle.  » 


VOM  291 

Toutes  les  déesses  avaient  la  prétention  de  l'obtenir;  mais  Vénns. 
Minerve  et  JuiKtn  concoururent  seules,  et  Jupiter  les  envoya  sur  le 
mont  Ida  pour  y  être  jugées  par  le  berger  Paris.  Gliacune  d'elles 
lui  m  une  promesse  pour  obtenir  son  suffrage.  Junon  Itii  promit  le 
pouvoir  et  la  ricliesse  :  Minerve,  le  savoir  et  la  vertu:  Vénus,  la 
possession  de  la  plus  belle  femme.  Séduit  par  la  beauté  de  Vénus, 
et  plus  peut-être  encore  par  sa  promesse,  Paris  lui  donna  la  pomme. 

D'osprit  co(|nct  los  déesses  étaient, 
D"allcr  ainsi,  sans  eunnailre  un  jeune  homme. 
Lui  (lécoiurir  tout  ce  qu'elles  portaient, 
Kl  lui  montrer  le  c...  pour  une  pomme. 

(SArillAZlN.) 

—  Donner  la  pomme  :  accorder  le  i)rix. 

—  Il  faut  que  la  pomme  soit  un  fruit  maudit,  puisqu'elle  a  perdu 
nos  premiers  parents,  et  qu'elle  porte  le  nom  de  «  fruit  défendu  ». 
Elle  a  allumé  la  guerre  de  Troie,  et  son  nom  latin  vialum,  signifie 
en  même  temps  malbeur  et  cbâtiment. 

«  ...Moi,  amoureuse  de  ce  jeune  blondiu  !  S'il  n'y  avait  eu  que 
lui  et  moi  dans  le  Paradis  terrestre,  la  pomme  restait  sur  le 
l)ommier.  » 

—  Pomme  d'Adam.  Cartilage  en  saillie  du  larynx,  dans  la  partie 
antérieure  du  cou.  Une  tradition  niaise  croit  que  c'est  un  morceau 
du  fruit  défendu  qui  s'arrêta  en  cliemin. 

—  Pomme  de  terre  :  goujon  pêcbé  à  coups  de  piocbe  ;  orange  à 
codions  (Balzac). 

Ce  tubercule  fut  importé  d'Amérique  en  Eurojjf^.  vers  looO,  par 
les  Espagnols.  En  1580,  sous  le  règne  d'Elisabetb,  Walter  Raleigb 
l'introduisit  en  Angleterre,  où  elle  ne  fut  employée  comme  aliment 
qu'à  la  fin  du  xvii«  siècle. 

En  France,  son  usage  ne  se  propagea  que  cent  ans  plus  tai-d, 
à  la  lin  du  xviir  siècle,  par  les  soins  de  Turgot,  ministre  de 
Louis  XVI,  et  do  Parmentier.  C'est  par  la  persévérance  de  ce 
dernier,  qu'elle  fut  adoptée  comme  aliment.  Louis  XVI  orna  sa 
boutonnière  des  premières  fleurs  de  solanum  tuberosum.  A  la 
suite  de  la  première  récolte,  Parmentier  donna  un  grand  repas 
dont  la  pomme  de  .terre  fit  tous  les  frais. 

Pomper,  boire;  expression  triviale,  argot. 
Lupold,  avec  son  nez  à  pompette,  conclud  tous  ses  contes  par  vin. 
(Contes  d'Eutrapel,  cité  par  L.  Larcbey.) 

Pompon,  de  7)om/>e  (?),  ornement  fastueux  (?). 


29â  PON 

Avoir  In  pompon  :  In  snporioritr.  Lonition  om](nnit(V'  nii  Inripotrc^. 
mililiiiro. 

Poncif,  autrefois  poncif;,  dérivé  de  poncer,  \){)\\y  i\  \\\   pierre 
ponce. 
Peut-être  de  jjun;jcrc,  piquer  (?). 
Dessin  piqué  et  décalqué,  imitation  banale  et  sans  originalité. 

—  Le  poncif,  en  littérature,  est  un  vieil  attirail  de  phrases  toutes 
faites,  et  en  quelque  sorte  stéréotypées,  à  l'usage  de  certains 
journaux.  Telles  sont:  le  char  de  l'Etat;  l'horizon  politique; 
l'hydre  de  l'anarchie.  (Yoy.  s(y/c.) 

—  Faire  poncif,  en  peinture,  c'est  produire  une  œuvre  en 
décalquant  l'œuvre  d'un  autre. 

Pondre,  du  lalin  ponere,  sous-entendu  ova  :  mettre  bas  ses 
œufs. 

—  Pondre  sur  ses  œufs  :  accumuler  ses  revenus. 

Pont,  du  latin  pojis,  pontem. 

(Yoy.  le  pont  aux  ânes  :  la  foire  n'est  pas  sur  le  pont.) 

Pontoise  doit  son  nom  à  un  pont  sur  la  rivière  d'Oise.  Elle 
s'appelait  Brivisara,  selon  ï Itinéraire  d'Antonin  ;  de  iïr/ra,  pont, 
en  celtique,  et  de  Sara,  Oise. 

Brive-la-Gaillarde,  Bruges,  Cambridge,  désignent  aussi  des  lieux 
situés  au  bord  de  rivières  sur  lesquelles  on  a  construit  un  pont. 

—  Il  a  l'air  de  revenir  de  Pontoise  :  il  semble  tout  ahuri. 

La  légende  suivante,  tirée  d'un  manuscrit  du  xiv«  siècle,  a  donné 
cours  à  cette  locution. 

Une  princesse  Marguerite  avait  près  de  Pontoise  un  château,  où 
elle  recevait  beaucoup  de  seigneurs  de  la  cour.  Elle  lit  construire 
une  de  ces  trappes  mystérieuses  appelées  oubliettes.  L'ouvrier  qui 
la  construisait,  ayant  entendu  la  princesse  dire  qu'  «  elle  l'y  jette- 
rait le  premier,  pour  les  essayer  »,  émoussa  le  tranchant  des 
rasoirs  et  des  pointes  d'acier  qui  tapissaient  les  murs,  et  plaça  au 
fond  des  matelas.  Grâce  à  ces  précautions,  il  ne  se  fit  aucun  mal 
en  tombant.  Peu  après,  il  fut  suivi  de  plusieurs  seigneurs  que  la 
princesse  voulait  faire  disparaître,  pour  s'emparer  de  leurs  biens; 
mais  ils  s'échappèrent  tous  par  des  souterrains  connus  de  l'ouvrier, 
et  ils  allèrent  se  plaindre  au  roi.  La  princesse  Marguerite,  qui  se 
trouvait  alors  auprès  de  son  père,  leur  ayant  demandé  d'où  ils 
venaient  :  «  Madame,  répondirent-ils  tout  effarés,  nous  revenons 
de  Pontoise  !  »  (Yoy.  étonner.) 


POR  293 

Population,  du  l)ns-latin  pninilallo,  (ia  populus. 

—  J.Kiossiiis  Maltliiis  jiublia,  on  1798,  un  Essai  sur  les  popula- 
fions.  dnns  lequel  il  conseille  de  prévenir  l'excès  de  l'accroissenient 
du  Liciire  liiiinaiu. 

—  La  pojudalion  tend  à  augmenter  en  proportion  géométrique, 
tandis  que  les  produits  du  sol  ne  suivent  dans  leur  accroissement 
(jiic  la  progression  ariliimélique.  (Mayer.) 

La  population  du  globe  est  d'environ  un  milliard  d'individus.  Il 
en  meurt  un  à  chaque  seconde.  (Gliazallon.) 

Port,  du  latin  portas. 

Au  ligure,  arriver  au  port  :  réussir,  atteindre  le  but. 

Avec  un  pou  d'effort. 
On  arrive  toujours  au  port, 
(Juaiul  on  sait  conduire  sa  itarquo. 

Ne  saurai-je  trouver  \\n  favoralite  port 

l'our  me  uiellrc  à  fajjri  des  leuipèles  du  sort? 

(Racan,  Bergeries,  V,  1.) 

PortC;  du  latin  porta. 

—  11  faut  qu'une  porte  soit  ouverte  ou  fermée  :  il  faut  prendre 
un  parti. 

...A mat  jaimn  liinen. 

(UuHACK.) 

(Une  porte  aiuie  à  être  close.) 

—  Les  portes  de  l'enfer.  Dans  l'Évangile  de  saint  Mathieu 
(XYI,  18),  Jésus  dit  à  Pierre  :  «  Tu  es  Pierre,  et  sur  cette  pierre  je 
bâtirai  mon  église,  et  les  portes  de  l'enfer  ne  prévaudront  pas 
contre  elle.  » 

Dans  cette  phrase,  porte  est  pris  pour  tribunal,  pouvoir. 

C'est  une  métonymie,  la  porte  se  disant  pour  le  palais. 

Porte  est  même  employé  pour  ville,  dans  la  Bible  :  Possidebit 
semen  tuum  portas  inimiroruin  tuoruni.  Ta  postérité  possédera 
les  villes  de  tes  ennemis. 

—  La  Sublime-Porte,  ou  Porte-Ottomane.  Le  khalife  Mostadhem 
avait  fait  enchâsser  sur  le  seuil  de  la  porte  du  palais  de  Bagdad  un 
morceau  de  la  fameuse  pierre  noire  de  la  Kaabali,  envoyée  par 
Abraham. 

—  Thèbes  à  cent  portos.  Thèbes,  ville  de  la  Haute  Egypte,  à  la 
droite  du  Ml,  célèbre  dans  l'antiquité  par  ses  cent  portes  qu'a 
chantées  Homère  (Iliade,  I,  381).  D'où  le  nom  de  Hécatompolis, 
c'est-à-dire  à  cent  pylônes,  car  la  ville  n'était  pas  fermée.  Ce  sont 
des  monuments  élevés  par  plusieurs  Louis  XIY  égyptiens,  anté- 


294  l'on 

rieurs  do  i)liis  do  inillo  ;ins  ;"i  Jésiis-Clirisf,  qui  ont  roiiverl  la  |)laino 
de  Tlirhes  do  porlos  Saiiit-Doiiis,  [tour  Iraiisiiietlro  à  la  postérilc 
le  soiivoiiir  do  leurs  Irioiiipliatiles  dynasties. 

Popte-voix,  mol  eoni|)Osé  du  vcrho  porlo^ci  de  voix. 

Iiislrunu3nl  d'acousli(iuc  destiné  à  faire  entendre  la  voix  au  loin. 
Un  porte-voix  d'un  mètre  de  longueur  porte  le  son  à  environ 
oOO  pas. 

I.e  porte-voix  do  marine,  qui  sort  aux  manœuvres  dos  bàliments, 
se  nomme  le  hmillnrd.  Celui  qui  sert  à  transmettre  la  parole  d'un 
navire  à  l'autre,  et  qui  s'allonge  à  volonté,  comme  une  lunette, 
porte  le  nom  de  gueulard. 

On  fait  aujourd'hui,  en  caoutchouc,  des  tuyaux  porto-voix,  qui 
transmettent  la  parole  d'un  étage  à  l'autre. 

Porter,  du  latin  portarc,  provençal  porlar. 

—  De  là  :  portée,  déporter,  déportement,  exporter,  importer, 
rapporter,  etc. 

—  Se  bien  porter,  se  porter  comme  un  charme  :  très  bien. 

On  s'aborde  avec  réternelle  interrogation  :  «  Gomment  vous 
portez-vous?  »  et  l'adieu  est  toujours:  «  Portez- vous  bien!»  le 
souhait  le  plus  vif  de  l'amitié,  car  la  santé  est  le  premier  des  biens, 
et  l'assaisonnement  sans  lequel  la  vie  est  insipide. 

~  Se  mal  porter  :  être  malade. 

—  Porter  de  l'eau  à  la  rivière  ;  comme  porter  du  i)ois  à  la  forêt. 
Les  Anglais  disent  :  porter  du  charbon  à  Newcastle. 

—  Porter  quelqu'un  à  la  cabre  jnorte  (Rabelais)  ;  c'est-à-dire  sur 
le  dos  comme  une  chèvre  morte. 

En  Provence,  les  enfants  aiment  à  être  portés  ainsi,  à  cabri/ne. 

Portier,  dérivé  de  porfe. 

Synonymes  :  Cerbère,  homme  hargneux  comme  le  chien  des 
enfers  ;  M.  de  la  Loge  ;  M.  du  Cordon  :  Pipelet,  nom  emprunté  aux 
Ml/stères  de  Paris,  d'Eugène  Sue  ;  concierge  ;  suisse. 

Portion,  du  latin  porlio. 
Partie  d'un  tout. 

—  Portion  congrue  :  pension  que  faisait  au  desservant  d'une 
cure  celui  qui  en  était  titulaire  et  qui  en  touchait  le  revenu.  La 
portion  congrue  n'était  due  qu'aux  curés  dont  les  revenus  étaient 
inférieurs  à  300  livres. 

Portrait,  dérivé  de  l'ancien  \erhQ  portraire. 


POT  293 

Imatre  iriiiie  pcrsoniio.  f.iite  nii  moyen  do  l'un  dos  arts  du  dessin. 
Reprodiiiro  tr;iil  pour  trail. 

Poser,  du  l.iliu  /if/KsfU'c. 

Prondi'O  ({{'<■  altitudes. 

Il  soiuhlo  inu'DuiN  soi-vii'  d'ohjoclil'  ;'i  uu  [)liotograplic. 

Possible,  du  latin  possibUem,  qui  peut  se  faire. 

—  Au  [lossihle  :  beaucoup.  Il  est  gentil  au  possible:  très  gentil. 
SaiTa/.iu  a  dit.  eu  parlaul  de  Yalstein  :  artitîcieux  au  possiI)le. 

L'KIrriicl  est  grand  au  possible. 

(DKsroKTES,  l'.saiime  XIV.) 

Poste,  du  latin  posltn,  placée. 

—  i.e  service  dos  postes  se  faisait  au  moyen  de  courriers  postés 
de  distance  en  dislanco. 

—  Employé  dos  postes  :  Iionime  de  lettres  (ou  aux  lettres?). 

—  La  poste  restante  est  un  lieu  où  aboutissent  péle-niole  l'amour, 
la  Iiotiso  ol  la  fri[)onnerie. 

Pot,  origine  incortaine,  peut-être  l'idée  de  boisson,  palus  s'y 
retrou vo-t-olle  l 

—  Pot-au-feu,  pot-liouille  :  bœuf  bouilli. 

On  appelait  ;iutrefois  «  pot-pourri  »  un  pot-au-feu  composé  de 
bœuf,  de  mouton,  de  veau,  de  lard  et  de  plusieurs  sortes  d'berbes 
et  de  légumes. 

«  Pot-pourri  »  désigne  un  ouvrage  composé  d'éléments  disparates. 

—  Pot  de  chambre,  vase  destiné  aux  plus  vils  usages. 

—  Synonymes  :  Bourdalou. 

Carlos,  par  altération  de  «  gare  l'eau  !  »  cpii  rappelle  le  passarès 
des  Provençaux. 

Goguenot.  baipiot-tinette,  lati-ino  portative  dans  l(>s  campements. 

Hippocrato.  dont  ranagramme  est  «  pot  à  ch...  ». 

Porcelaine  d'appai'lomont. 

Thomas.  On  prétend  que  ce  surnom  donné  au  vase  nocturne  est 
une  allusion  au  Vide,  T/io/nn,  de  l'hymne  de  Pâques.  11  semble 
venir  plut("»t  de  esfnmnr,  dont  il  est  l'exutoire  ? 

Mangera-t-il  de  riiorlje  aux  chiens,  pour  décharger  son  thomas  ? 
(Rabelais.  V,  40.) 

Les  Anglais  disent  :  aller  voir  la  more  Thomas. 

—  Pot-de-vin  (rappelle  pourboire). 

On  appelait  ainsi  une  so'rte  de  droit  payé  par  les  fermiers  aux 
propriétaires  des  lei'rains. 


296  POT 

Aiijniii'd'liiii.  c'est  lin  |)i-('S('iit  doiim''  cii  dcliors  (riiii  iii;ir(li(''.  iiiic 
gratilinilioii,  (liiiis  iiik^  liMiisMctioii.  ;'i  celui  (]iii  l';i  fuil  coiicliin^  : 
sorte  (le  |»i'i\  du  coiirUi^c,  ([ni.  ;i  l'oi-iiiiiie,  ;i  |»ii  elic  une  inesiire 
do  vin. 

Los  pots-de-vin  sont  |)iinis  piir  l;i  loi.  lorsqu'ils  ont  poiif  Imt  de 
corrompre  les  n.aenis  ou  l'onclionn;iires  piihlics. 

Rabelais  appelle  un  pot-de-viu  or  potable  {{)  :  "  Jay  encorcs 
quoique  escu,  nous  le  boyrons  ;  car  c'est  aumm  jtoiabile.  » 

—  Le  pot  de  terre  contre  le  pot  de  fer  :  la  lutte  du  faillie  contre 
le  fort. 

Ce  proverbe  se  trouve  dans  une  fable  d'Ésope  et  dans  X Ecclésias- 
tique (Xlil,  2)  :  Quid  communicdbit  carabus  ad  olkun^^  quando 
enim  se  colliserint,  confringelur.  Quelle  union  peut-il  y  avoir 
entre  un  pot  de  terre  et  un  pot  de  fer  ?  S'ils  viennent  à  se  heurter, 
le  pot  de  terre  sera  brisé. 

—  Découvrir  le  pot  aux  roses  ;  ou  plutôt  le  pot  au  rose,  parce 
que  les  femmes  qui  se  fardent,  cachent  avec  soin  le  pot  qui  contient 
ce  à  quoi  elles  empruntent  leur  fausse  lieauté. 

Découvrir  le  pot  au  rose,  c'est  découvrir  un  secret,  malgré  les 
précautions  prises  pour  le  tenir  caché. 

Il  se  prend  toujours  en  mauvaise  part,  comme  «  éventer  la 
mèche  ». 

—  11  n'est  si  vilain  pot  qui  ne  trouve  son  couvercle. 
En  provençal  :  Chaque  toupin  trouve  sa  cabucèle. 

Ce  proverbe,  un  peu  trivial,  signifie  qu'il  n'est  pas  de  tille,  tant 
laide  soit-elle,  qui  ne  trouve,  comme  la  plus  jolie,  à  se  marier. 

—  La  fortune  du  pot,  ou  du  pauvre  (Inirlesqiie). 

M.  Decbambre  écrivit  au  marquis  de  Y...  :  «  Je  vous  prie  de 
vouloir  bien  venir  partager  mon  petit  diuer.  et  d'accepter  sans 
façon  la  fortune  du  pot...  Dochamiire.  » 

—  La  poule  au  pot.  Quelque  temps  avant  sa  mort,  Henri  IV  disait 
à  Sully  :  «  Si  Dieu  me  fait  la  grâce  de  vivre  encore  deux  ans,  je 
veux  qu'il  n'y  ait  pas  un  paysan  dans  mon  royaume  qui  ne  mette, 
le  dimanche,  une  poule  dans  son  pot.  » 

A  l'avènement  de  Louis  XYI,  un  marchand  de  Paris  prit  pour 
enseigne  :  La  Poule  au  pot,  et  ces  vers  : 

Eafia  la  poule  au  pot  sera  donc  bientôt  mise  ! 

On  doit  du  moins  le  présumer, 
Car,  depuis  deux  cents  ans  qu'on  vous  l'avait  promise. 

On  n'a  cessé  de  la  plumer. 


POT  297 

Nép.  Lcniorcior,  dans  le  poème  des  Ar/cf;  fraiirnis.  se  sert  dune 
périphrase  singulière  pour  exprimer  Pidée  de  poule  au  [)0[  : 

....le  veux... 
Non  les  payer  on  mois  frixolcs. 
Mais  leur  dDiincr  à  prix  (lobules. 
L'épouse  (lu  eliaiilre  du  jour. 

La  îiK'illi'iirc  (inliiiipif  rsl  (■clic  iW  la  [xtiilc  au  pol  :  c'esl  rahondauce 
et  le  lias  prix  des  p(jmmes  de  terre;  cest  la  vie  facile  et  heureuse, 
sans  excès  de  travail,  sans  misère,  excepté  pour  les  paresseux. 

—  Sourd  comme  un  pot.  Un  pot  n'a  pas  d'oreilles  et  c'est  en  cela 
qu'il  dilVère  d'unc^  écuelle. 

—  Tourner  autour  du  pot  :  hésiter. 

Eli  !  faiil-il  laiil  tourner  autour  du  pol  ? 

^l^^cl^^;,  Plaideurs.) 

Potée,  dérivé  de  //o/. 

Le  contenu  d'un  pot  ;  une  potée  d'eau. 

Au  figuré,  une  grande  quantité  :  une  potée  d'enfants. 

—  Éveillé  comme  une  potée  de  souris.  M""^  de  Sévigné  écrit  : 
«  une  i)ortée  de  souris  ». 

Potence,  du  latin  potenlia.  puissance,  autorité  :  puis  appui,  par 
comparaison  avec  une  béquille. 

—  Au  Moyen-Age,  le  droit  de  dresser  potence  était  une  marque 
de  souveraineté.  La  potence  était  réservée  aux  manants  et  aux 
bourgeois.  C'est  pourquoi  Rabelais  distingue  plaisamment  «  gil)ets  » 
et  «  potences  »,  et  destine  celles-ci  aux  grands  larrons,  jioientes. 

—  La  pendaison  fut  abolie  eu  France,  le  21  janvier  17i)0. 

—  Il  y  a\ait  des  potences  en  permanence,  à  Paris,  à  la  Grève, 
aux  Halles,  à  la  Croix  du  Traboir,  rue  de  l'Arbre-Scc,  qui  doit  son 
nom  à  cet  usage  sinistre. 

Le  gibet,  ou  fourches  patibulaires,  ne  servait  qu'à  accrocher  le 
corps  des  suppliciés,  qui  y  restaient  exposés.  Celui  de  Paris  était  à 
Montfaucon. 

On  pendait  aussi  aux  arbres  des  grands  chemins  et  des  forêts. 

Rabelais  ((II,  51)  y  fait  allusion  dans  ce  passage  :  «  Fenabrègue... 
le  dernier  eut  nom  Ulmeau,  et  feut  grand  chirurgien  en  son 
temps.  »  Fenabrègue,  en  Languedoc,  est  le  nom  de  l'alisier,  où  l'on 
pendait  ordinairement  les  Vaiidois,  sous  Fran(;ois  T''".  Ce  nom  veut 
dire  «  abrège- tin  » . 

—  Gibier  de  potence. 

Furcifer,  pabnlnm  Acherontis. 

(l'i.ALTE.) 


298  POT 

!>(>  mot  «  s;icri|i;iiil  »  sciiihlr  cii  ('Iri'  une  Iriidiiilioii. 

—  l'^vilcr  l;i  |)(»l('iic(':  fnirc  loi'l  ;iii\  corhcMiix. 

SynoiiNiiK'S  :  l)(''(iiiill('  (  Vitl(»i(|)  ;  ;illiisioii  ;"i  lit  for'ine  de  la  potcnco, 
qui  rcssciiihlc  ;'i  iiih'  l)é(|iiillc  jji^^aiitcsquo.  Un  l'appelle  aussi,  pour 
la  jnéine  cause,  la  «  jamix'  eu  Tair  ». 

Potin,  néologisme,  s'emploie  familièreuieut.  Oriuiue  incertaine. 

—  Faire  des  potins:  des  commérages. 

Lq,  potin  est  la  matière  employée  pour  l'aire  la  vaisselle,  dans  les 
pays  où  l'argile  manque.  C'est  un  alliage  de  cuivre  et  d'étain,  et 
quelquefois  de  plomb. 

Faire  des  potins,  dans  le  sens  de  bavarder,  ce  serait  iinilcr  les 
commères,  qui,  lorsqu'elles  se  réunissent  à  la  fontaine  pour  nettoyer 
leur  vaisselle,  font  aller  leur  langue  plus  vite  que  le  frottoir. 

Potiron,  du  grec  polerio/i.  vase  à  boire  (?). 

Sorte  de  gros  cbampignon,  d'où  l'expression  :  avancer  comme 
potiron  (Brantôme),  avancer  rapidement. 

Sorte  de  grosse  citrouille,  qui  a  servi  souvent  de  terme  de 
comparaison  à  une  obésité  excessive. 

Potron-Jaqiiet  ou  Potron-niinet,  origine  incertaine. 

—  Se  lever  dès  Potron-minet...  :  au  petit  jour,  de  grand  matin; 
c'est-à-dire  comme  le  petit  chat,  qui  dislingue  très  bien  les  objets 
dans  l'obscurité  et  se  lève  avant  le  jour  pour  prendre  les  souris. 
Potron  serait  le  diminutif  de  7Jo/?r,  ou.  poutre,  petit  des  animaux. 

Il  avançait  pays,  monté  sur  un  cricjuct, 

Se  levait  tous  les  jours  dès  \o  polron-jaqiiet. 

[l'orme  de  Caftoiic/ir,  VU.  riT.t 

En  Normandie,  on  dit  :  se  lever  dès  le  paître  au  jacquet  (écureuil)  ; 
c'est-à-dire  au  moment  où  l'écureuil  va  chercher  sa  nourriture. 

On  dit  aussi  :  se  lever  dès  les  chats,  parce  que  le  chat  est  réputé 
le  plus  matineux  des  quadrupèdes,  ou  :  dès  que  les  chats  sont 
chaussés.  (Dictionnaire  de  Trévoux.) 

—  Il  y  a  aussi  la  variante  patron  :  parce  que  l'o'il  du  patron  doit 
toujours  être  ouvert. 

—  On  dit  à  l'inverse  :  se  coucher  avec  les  poules  ;  se  lever  au 
desjucher.  (Rabelais  III,  il.) 

—  Rabelais  (lY,  9)  se  sert  de  l'expression  :  à  l'aube  des  mouches, 
que  plusieurs  commentateurs  ont  traduite  par:  le  soir,  sur  le  soir, 
sans  donner  d'explication.  Mais,  sans  le  secours  des  savants,  il  est 


ror  299 

f;iciIo  de  reconiKiitro  qiio  l'aulio  des  moiirlie?,  <ilha  dei  tofrnii  Aos, 
Italiens,  est  midi,  lliem-e  où  le  soleil  est  dans  toute  sa  force,  où  les 
mouches  sont  le  plus  importunes,  ...demandez  plut(U  aux  ânes. 
Huant  au  soir,  l'heure  du  crépuscule,  il  est  dcsi.uné  pai'  la  loiiition  : 
entre  chien  et  loup,  i  Jolianneau.) 

Pou,  anciennement  /jo////,  et  plus  ancifMiueiiienl  /H-oni/  ;  û'oii 
les  dérivés  ponillcr,  pouilleux  Du  latin  jH-dirulus.  d'oii  />c(li- 
ciilairc. 

Un  autre  déri\é  de  y>o?/ est  fripouille  nIcux  mot  qui  siiiniliait 
misérahle.  qui  iiobe  les  poux. 

Chercher  pouille,  chanter  pouille  :  chercher  querelle,  dire  des 
injures. 

—  Insecte  parasite  qui  s'attache  au  coi-[»s  et  aux  cheveux  de 
l'homme,  et  au.x  poils  des  animaux. 

—  Synonymes:  garde  du  corps. 
Grenadier,  gros  pou  :  l'élite  de  la  garnison. 
xMousquetaire  gris. 

Puce  de  meunier,  puce  meunière  (Rabelais).  Le  même  auteur  les 
appelle  aussi  éperviers  de  Monlaigud,  37),  par  allusion  au  collège 
de  pouillerie  de  Montaigu  qui  planait  sur  une  hauteur,  comme  les 
éperviers.  Erasme  devint  malade  à  ce  collège,  par  suite  du  mauvais 
régime  qu'on  y  suivait. 

—  Pou  atl'amé  :  gueux,  avide  de  gain. 

Il  écorcherait  un  pou  pour  en  avoir  la  peau  :  il  est  très  avare. 

Pouce,  anciennement  ;>o/(:-<',  qui  est  provençal:  du  latin  pollex, 
j)ollicem. 

—  Mettre  les  quatre  doigts  et  le  pouce  :  la  main  entière. 

—  Mettre  les  pouces  :  céder,  s'avouer  vaincu.  Les  anciens 
disaient  :  l)i<jHum  lollcrc,  manns  dare.  Le  gladiateur  vaincu 
avouait  sa  défaite  par  ce  signe.  Un  geste  fait  avec  le  pouce  indiquait 
l'approbation. 

Pollice  utroquc  laudare. 

(IIonAr.E.) 

Louer  sans  restriction,  comme  nous  disons  applaudir  des  deux 
mains. 

—  Jouer  du  pouce  :  compter  de  l'argent. 

—  Malade  du  pouce:  avare.  Allusion  au  geste  qui  consiste  à 
frotter  le  pouce  sur  l'index. 

—  Manger  sur  le  pouce:  sans  se  mettre  à  table,  à  la  hâte,  en 


300  POU 

tciiiint  ;'i  l.'i  iiKiiii  le  p.iiii  sur  l('(|iicl  repose  un  morceau  de  \iaii(le... 
Sur  le  poiire  esl  |ioiir  sous  le  ponce. 

—  S'en  mordri;  les  pouces  :  s'en  ropenlir. 
L'nfjuem  denlibits  connimjnl .  (Pélrouc.) 

QiijiikI  un  f;iit  mal  ro  qiiOn  rloil  fairo, 
On  s'en  mord  les  ponces,  dil-oii  ; 
C'est  du  péclié  du  prr'mier  iière 
Que  dérive  ce  vieux  dicliMi  ; 
Car  le  gourmand  avec  sa  iiommo 
Se  mordit  les  pouces  aussi, 
El,  de  père  en  fils,  voilà  comme 
Nous  a\ons  ce  ddigt  raccourci. 

—  Pouce  d'eau.  C'est  la  ciiianlité  deau  qui  s'écoule  par  un  cylin- 
dre de  deux  centimètres  de  dianu''tre  et  de  dix-sept  cenliinètres  de 
longueur,  le  niveau  de  l'eau  du  réservoir  étant  maintenu  à  trois 
centimètres  au-dessus  de  rorilîce.  Cette  quantité  est  de  vingt  mètres 
cultes  en  vingt-quatre  heures. 

Poudre,  du  latin  pi/fri.^.  pu/rerein. 

Particules  très  ténues  de  matière,  que  le  vent  soulève. 

—  Poudre  de  succession  :  poison. 

L'infâme  science  de  la  Voisin  et  de  la  marquise  de  Brinvilliers, 
avait  fait  de  nombreux  élèves,  et  les  poisons  se  vendaient  elïronté- 
ment  dans  toute  la  France,  sons  le  nom  de  «  poudre  de  succession  ». 
La  violence  de  ces  poisons  et  l'ignorance  des  médecins  du  temps 
en  toxicologie,  assuraient  aux  coupables  la  réussite  et  l'impunité. 
La  Revoie,  nommé  lieutenant  de  police,  fit  condamner  la  Voisin  et 
ses  complices  à  être  brûlés  eu  place  de  Grève,  et  Tédit  que  rendit 
le  roi,  la  même  année,  contre  les  empoisonueurs,  fit  cesser  le  mal 
qui  avait  répandu  la  terreur  dans  le  pays. 

...Vous  prenez  une  prise  de  tabac,  ...et  puis.  Dieu  vous  bénisse  ! 
l'atïaire  est  faite...  Il  y  eu  a  qui  vous  empoisonnent  dans  un 
bouillon  :  cela  s'appelle  donner  un  coup  de  pistolet  dans  un  bouillon. 
{La  Marquise  de  Brinvilliers,  drame.) 

La  poudre  de  succession  était  le  sublimé  corrosif  :  ou  deuto- 
clilorure  de  mercure,  sel  blanc,  solublc  dans  l'eau,  extrêmement 
vénéneux.  Quelques  centigrammes  introduits  dans  l'estomac  suffi- 
sent pour  donner  la  mort.  Le  blanc  dceuf  est  l'antidote  le  plus 
efficace  pour  le  combattre. 

—  L'absorption  cutanée  ne  se  produit  qu'à  la  paume  des  mains 
et  à  la  plante  des  pieds.  C'est  pour  cela  que  Catherine  de  Médicis, 


POU  301 

aulôo  du  Florentin  Roui,  avnit   clioisi  les  ponts  et  les  lins   pour 
se  déliai'rnsserde  ses  ennemis. 

Vers  1870,  plusieurs  empoisonnements  furent  causés  par  des  bas 
de  coton  teints  en  ronce  avec  des  sels  de  mercure. 

—  Le  poison  est  l'arme  de  l'assassin  en  chambre  et  qui  n'a  pas 
riiabitude  des  grandes  routes.  La  balle  et  le  couteau  sont  de 
détestables  complices  :  la  victime  crie,  les  blessures  sont  apparentes. 
.Mais  le  poison,  quelle  ai'iiie  discrète!  Une  pincée  de  poudre  entre 
deux  sourires  et  (Hi  n'a  [)iiis  ([\i'i\  prévenir  le  notaire.  On  risque 
bien  de  renconti'er  l'autopsie  et  les  cbiuiistes,  plus  habiles  que  les 
anciens  augures  à  cousidter  les  entrailles  des  victimes  :  mais  on 
a  tant  de  chances  d'impunité! 

La  pubUcité  donnée  aux  débats  des  crimes  d'empoisonnement  est 
malsaine,  et  laisse  trop  d'héritiers  rêveurs. 

—  Il  n'a  pas  inventé  la  poudre  :  il  est  un  peu  niais. 

On  dit  de  même  :  Ou  a  tiré  un  beau  feu  d'artifice  le  jour  de  sa 
naissance. 

Ce  proverbe  prouve  quelle  importance  on  a  attachée  à  l'invention 
de  la  poudre  à  canon,  atlrihuée  longtemps  à  Roger  Racou,  moine 
anglais  mort  en  1290.  Avant  lui,  dès  le  viii^  siècle,  Marcus  Grœcus 
avait  parlé  de  la  poudre  composée  de  soufre,  de  charbon  et  de 
salpêtre. 

—  Jeter  de  la  poudre  aux  yeux  :  Pu/rerem  ocit/is  e/J'andcre. 

—  Vif  comme  la  poudre  :  c'est  un  salpêtre  :  il  s'enllamme 
aisément. 

Pouffer,  onomatopée:  comme  bouffer... 
PoutTer  de  rire.  On  dit  aussi  :  s'esclafïer  de  rire. 

Poule,  anciennement  polc,  du  latin  puUa,  féminin  de  pu//us, 
petit  d'un  animal.  A  remplacé  géline. 

—  C'est  le  fils  de  la  poule  hlanchc  :  un  homme  heureux. 
Suétone  raconte,  au  commencement  de  la    Vie  de  Galba,  qu'une 

poule  blanclie  tomba  des  serres  d'un  aigle  aux  pieds  de  Livie, 
femme  d'Auguste.  Ce  présage  fut  considéré  comme  heui'eux,  et  les 
poussins  qu'elle  donna  furent  révérés  comme  les  poulets  sacrés  et 
élevés  avec  soin  dans  une  ferme  qu'on  nomma  villa  ad  fjaUlnas. 

Juvénal  dit  :  «  Penses-tu,  homme  simple,  qu'on  doive  t'excepler 
de  la  loi  commune,  parce  que  tu  es  le  (ils  de  la  poule  blanche,  et 
nous  autres  de  vils  poussins?...  » 

(Yoy.  poule  au  pot  ;  pliuner  la  poule.) 


302  POU 

—  Poiilf  iii()iiill('('  :  pci'soiinc  i)iisill;iiiiMiG. 

—  Tuer  l:i  poule  ;iii\  œufs  d'or. 

Ksnpc  nicoiiU;  que  le  Imp  ;ivi(lo  possesseur  de  cette  poule,  non 
fontoul  do  \'(p\\\  dor  qu'elle  pondait  tous  les  jours,  la  tua,  pour 
recueillir  le  lr(''S()r  (pi'il  croyait  reul'ei'iué  dans  ses  entrailles.  Il  se 
l)i'i\a  ainsi  d(!  son  l'evenu. 

L'avarice  \k'V{\  loiil  on  MHilanl  luiil  {^ajinor. 

(La  Fontaink.) 

—  Les  Latins  disaient  :  «  Il  faut  tondre  la  brebis  et  non 
l'écorcber.  »  C'est  un  conseil  dbuinanité,  en  même  temps  qu'un 
bon  principe  d'économie  domestique. 

—  En  1814,  l'école  Polytechnique  demanda  à  combattre.  Napoléon 
refusa,  en  disant  qu'«  il  n'en  était  pas  encore  réduit  à  tuer  sa  poide 
aux  œufs  d'or  ». 

Poulet,  diminutif  du  précédent. 
Petit  de  la  poule  et  du  coq. 

—  Lettre  amoureuse,  billet  doux.  Ainsi  nommé  parce  que,  d'après 
Furetière,  il  imite  par  ses  plis,  les  ailes  d'un  poulet. 

Peut-être  parce  que  le  papier  du  format  sur  lequel  s'écrivent  ces 
billets  est  appelé />o^//e/  •'' 

Cette  expi'ession  était  déjà  en  usage  au  temps  de  Henri  IV. 
Lavarenne.  qui  avait  été  cuisinier  de  Catberine.  sœur  de  Henri  IV, 
étant  passé  au  service  du  roi,  se  rendit  nécessaire  en  lui  ménageant 
des  plaisirs  amoureux.  Henri  le  combla  de  biens.  Son  ancienne 
maîtresse  l'ayant  trouvé  dans  celte  nouvelle  situation,  lui  dit  : 
«  Lavarenne,  tu  as  bien  plus  gagné  à  porter  les  poulets  de  mon 
frère,  qu'à  piquer  les  miens.  » 

—  Mercier  (Tableau  de  Pains,  cb.  296)  dit  :  «  C'était  autrefois, 
en  Italie,  les  vendeurs  de  poulets  qui  portaient  les  billets  doux  aux 
femmes  ;  ils  glissaient  le  billet  sous  l'aile  du  plus  gros,  et  la  dame 
avertie  ne  manquait  pas  de  le  prendre.  Ce  manège  ayant  été 
découvert,  le  premier  messager  d'amour  qui  fut  pris  fut  puni  de 
l'estrapade,  avec  des  poulets  vivants  attachés  aux  pieds.  Depuis  ce 
temps,  poulet  est  synonyme  de  billet  doux.  Les  commis  ambulants 
de  la  petite  poste  en  portent  et  reportent  sans  cesse  :  mais  une 
cire  fragile  et  respectée  tient  sous  le  voile  ces  secrets  amoureux  :  le 
mari  prudent  n'ouvre  jamais  les  billets  adressés  à  sa  femme.  » 

Pouls,  du  latin  pulsus  :  d'où  aussi  :  pulsation,  pousser. 
Mouvement  imprimé  à  tout  le  système  artériel,  par  l'ondée  de 


POU  3or^ 

san.u'   que   rli.iqiK»   coiitrnclioii    du   cœur  f;iil    priirti-cr   dans    les 
artiM'és. 

—  Le  pouls  bal  ordiiiairciiiciit  (U)  ;i  70  fois  par  luiiiiiU'. 

—  Se  tàtei'  If  pouls  :  ('(insiiKcr  son  courage. 

Je  smiilc  ma  iini-lcc  cl  me  tâte  lo  pouls. 

(Hkc.mjcii,  Satire  F.) 

Autrefois,  certains  médecins  jugeaient  des  maladies  par  Tinspec- 
tion  des  urines,  et  Ton  Iroiive  dans  Uabelais  (liv.  III,  cli.  33)  : 
«  .le  vouldroye  liicMi  (pie  les  chevaliers  de  Malle  me  résistassent, 
piMii'  voir  leur  urine.  "  On  dii'ail  aujourd'hui  :  «  Je  voudrais  bien 
leui-  làter  le  pouls,  pour  inelti'e  leur  courage  à  l'épreuve,  voir  ce 
ipiils  ont  dans  le  venti'e.  » 

Poupée,  du  lalin  piijxi.  [lelile  lille. 

Petite  ligure  en  matière  plastique,  imitant  la  forme  humaine. 

Kn  latin,  le  petit  de  l'homuic  s'appelle  ym/^^6%  onpupus. 

Martial  appelle  j)iij)n  une  petite  tille.  On  appelait  jadis  une  jeune 
fdlc  pufa,  pule  ou  <j(irce.  Ce  sont  les  féminins  de  pi/tus  et  de  f/ars. 
Nous  disons  encore  poupon,  pour  un  petit  enfant,  et  pupille, 
l'enfant  mineur. 

Peut-être  vient-il  de  Poppce,  femme  de  Néron,  qui  prenait  un 
soin  excessif  de  ses  charmes  et  de  sa  parure.  Elle  avait  dans  ses 
écuries  des  mules  ferrées  d'or,  et  cinq  cents  ânesses,  qui  fournis- 
saient du  lait  pour  la  baignoire  où  elle  allait  chercher  la  fraîcheur 
du  teint.  (Voy.  jnnr tonnelle.') 

Poupon,  pouioi,  noms  d'amitié  donnés  aux  petits  enfants. 
Suétone  (Vie  de  Califjula,  13)  dit  :  Sidus  et  pulluin  et  puj/titn 
et  alumnum  nppellantium. 
(Voy.  Horace,  Salires  I,  III,  4o.) 

Pour,  du  latin  jiro  ;  anciennement  yjor,  pur. 
Se  retrouve  avec  sa   forme  latine  dans  les  SermenH  de  Siraa- 
bourf). 
Préposition  qui  marque  le  motif,  la  destination,  l'échange. 

—  Pour  ou  contre.  On  fait  un  grand  éloge  du  mot  de  César,  au 
début  de  la  guerre  civile  :  «  Qui  n'est  pas  contre  moi  est  pour  moi.  » 
On  a  blfimé  le  mot  tout  contraire  de  Pompée  :  «  Qui  n'est  pas  pour 
moi  est  contre  moi.  » 

Pourceau,  anciennement  porcel,  du  latin  porcellus,  diminutif 
de  porcu.s. 


a04  Vi)V 

Synonymes  :  porc,  coclioii,  roiii|i;i.uiion  de  sainl  Aiiloinc. 

—  Jeter  (les  perles  devant  les  pourceaux.  (Voy.  perle.) 

■ —  PoiiiToaii  (ri''-|iiriir('.  (Voy.) 

Pourfendeur,  de  pourfciulrc^  fendre  roinplrlenient. 
IroniqiKMiicnl  :  laiiiaron. 

—  Godefroy  de  liniiilloM.  clicl'  de  la  preuiirre  crriisade,  était,  dit 
Gnillaiinie  de  Tours,  d'une  force  telle,  qu'au  siège  d'Antioche,  il 
poiirfendil  un  cavalier  turc  depuis  la  tète  jusqu'à  la  selle,  et  blessa 
même  le  dos  du  clunal. 

Pourpoint  (^à  hn'de)  :  de  très  près,  à  bout  portant. 

Et  la  tire  à  brùle-pourpuint 

D'un  petit  arc  qu'on  no  voit  point. 

(Si-.ARRON,  Virgile  travesti.) 

Pourrières.  Ce  sont  les  armes  de  Fourrières,  où  trois  hommes 
portent  une  tuile. 

L'an  107  avant  Jésus-Christ,  Marins  remporta  la  célèbre  victoire 
près  d'Aix-en-Provence,  sur  les  Cimbro-Teutons.  11  y  eut,  dit  Tite- 
Live,  deux  cent  mille  morts,  qui  furent  abandonnés  sans  sépulture 
et  pourrirent  sur  ces  champs,  appelés  dès  lors  campi  pnlruli, 
champs  de  la  pourriture,  d'où  l'on  a  fait  Poia^riêres. 

L'armée  romaine  avait  élevé  sur  le  champ  de  bataille,  à  Marius, 
un  monument  qui  le  représentait  debout  sur  un  bouclier  porté  par 
ses  soldats.  Le  bourg  de  Pourrières  avait  mis  ce  sujet  dans  ses 
armoiries. 

Plus  tard,  la  statue  de  Marius  ayant  été  détruite,  le  peuple,  en 
faisant  allusion  à  la  forme  en  tuile  du  bouclier  romain,  mit  en 
circulation  le  proverbe,  pour  désigner  les  gens  qui  font  de  grands 
elTorts  poiir  une  petite  cause. 


»ir,  du  bas-latin  polere,  pour  posse. 

—  Vouloir,  c'est  pouvoir.  (Saint  Paul.)  (Voy.  vouloir.) 

—  ,\o)i  possmnus  :  Cela  m'est  impossible.  Parole  de  saint  Pierre 
au  prince  des  prêtres.  Exprime  un  refus  péremptoire,  sur  lequel 
on  ne  saurait  revenir. 

—  Il  y  a  dans  l'ordre  physique  des  impossibilités  exprimées  par 
de  nombreux  proverbes  : 

On  ne  peut  courir  deux  lièvres  à  la  fois. 

Sonner  et  aller  à  la  procession. 

Faire  d'une  buse  un  épervier. 

On  ne  peut  pendre  plus  haut  que  la  potence.  ] 


CHK  305 

(Jiii  ut'  peut  c'OiiiiiR'  il  M'iit,  \ciiiUe  l'Oiiiiue  il  peut. 
Qui  ne  peut  lialopci-,  qu'il  trotte. 

—  On  accom|i;igne  parfois  pouroir  de  peitf-rh-c  :  «  Cette  entre- 
prise pourra  pout-tHre  réussir...  » 

Ces  façons  de  parler  sont  des  pléonasmes  à  éviter,  car  il  est 
certain  que  ce  qui  peut  être,  se  pourra. 

—  Kii  politique,  le  pouvoir,  ou  la  puissance  publique,  est  l'auto- 
rité chargée  de  gouverner  la  société.  On  distingue  :'  le  pouvoir 
législatif,  chargé  de  faire  les  lois:  le  pouvoir  exécutif,  ciiargé  de 
les  faire  exécuter  :  le  pouvoir  judiciaire,  chargé  de  poursuivre  et 
de  punir  les  infractions  à  la  loi. 

—  Le  pouvoir  discrétionnaire  est  la  faculté  laissée  au  juge,  et 
spécialement  à  un  président  de  cour  d'assises,  d'agir,  dans  certains 
cas,  selon  sa  volonté  particulière. 

C'est  aussi  le  j)ouvoir  attribué,  en  temps  de  révolution,  à  un 
homme  investi  de  l'autorité  dictatoriale. 

—  Pouvoir  tenq)orel  :  le  bon  pasteur  aimant  ses  hrcbis...  comme 
côtelettes. 

Pratique,  du  ^^vox  praldikr.  S'oppose  à  la  théorie. 
M.  liaussmann  est  un  homme  pratique,  très  pratique,  un  homme 
nfiniment  pratique,  tro[)  [)ratique  même  (1869). 

Pré,  du  latin  prtitum,  provençal  prat  :  d'où  Pradet  (petit  pré), 
nom  d'un  village  très  fertile  des  environs  de  Toulon. 

—  Aller  sur  le  pré  :  se  battre  en  duel. 

Dés  IIGO,  les  écoliers,  appelés  aussi  clercs  au  Moyen-Age,  allaient 
se  récréer  dans  un  pré  voisin  de  l'abbaye  Sain!-Germain-des-Prés, 
qui  prit  de  là  le  nom  de  Pré-aux-Glercs.  Ce  lieu  lut  souvent  témoin 
de  rixes  et  de  comljats  entre  les  écoliers  et  les  gens  de  l'abbaye. 
Il  devint  ensuite  le  rendez-vous  pour  les  duels,  et  la  locution  :  aller 
sur  le  pré,  prit  naissance. 

Le  Pré-aux-Clercs  a  donné  son  nom  à  l'église  Saint-Germain-des- 
Prés,  et,  par  suite,  l'église  a  transmis  le  sien  au  quartier  Saint- 
Germain,  qui,  autrefois,  n'était  qu'un  faubourg. 

—  A  la  Sainl-Barnabé  (Il  juin),  la  faux  au  pré. 

Préalable,  de  prœ,  et  du  verbe  aller. 

Ce  qui  doit  être  fait,  examiné,  avant  de  passer  outre. 

—  La  question  préalable.  Demander  la  question  préalable,  c'est 
vouloir  qu'on  supprime  tout  débat  sur  une  proposition. 

20 


30G  PRK 

Précaire,  du  laliii  /trt'roi'ii/s,  roiiiino  jtrière. 

Soumis  au  bon  plaisir  d'un  aulj'o. 

Se  dit  de  l'usage  de  cerlaiiis  droits,  de  la  possession  de  certaines 
choses,  qui  ne  reposent  que  sur  une  concession  révocable  par  celui 
qui  la  faite. 

Précaution,  dulalin  ])ra\  cauium. 

Précaution  vaut  mieux  (pie  repentir.  (Proverbe  hollandais.) 

Prêcher,  du  lalin  ]>rœdicare  :  d'où  aussi  prédicatenr. 

—  Prêcher  dans  le  désert  :  perdre  son  temps,  ses  efforts. 
Allusion  à  saint  Jean-Baptiste  qui  prêciiait  dans  le  désert  :  Vox 

clainaîilis  in  deser/o. 
La  voix  de  la  sagesse  n'est  pas  écoutée. 
Il  perd  son  alléluia,  qui  à  cul-de-bœuf  le  chante. 

—  Prêcher  un  converti. 

Précieux,  Précieuses,  du  latin  preliosi/s.  àa  prelium,  prix. 

Nom  inventé  par  les  assidus  de  l'hôtel  de  Uaml)ouillet.  (}ui  signi- 
tiait  que  toute  personne  admise  dans  la  chambre  dite  «  du  Génie  », 
où  se  faisaient  les  lectures,  devenait  précieuse  au  monde. 

L'hôtel  de  Rambouillet,  où  se  réunissaient  les  Précieuses,  était 
situé  dans  la  rue  Saint-Thomas-du-Louvre,  qui  a  été  démolie  vers 
1850,  pour  l'aclièveraent  du  Louvre. 

Obligeante,  civile  et  surtout  Précieuse, 
Quel  serait  le  mortel  tiui  ne  l'aimerait  pas  ? 

(Sec;rais.) 

—  Le  nom  de  Précieuses  s'appliquait,  au  wii*^  siècle,  à  des 
femmes  d'un  mérite  réel,  qui  entreprirent  la  réforme  des  mœurs  et 
du  langage,  et  qui,  en  voulant  éviter  la  grossièreté,  tombèrent 
dans  la  recherche  et  l'affectation  du  liel  esprit. 

La  première  époque  des  Précieuses  a  été  très  favorable  au  lan- 
gage. C'est  l'époque  de  la  marquise  de  Rambouillet  et  de  sa  tille 
Julie  d'Augenues. 

Catherine  de  Yivonne,  née  en  J588,  fut  mariée,  à  l'âge  de 
12  ans,  à  Charles  d'Angennes,  marquis  de  Rambouillet.  A  20  ans, 
ennuyée  des  fadeurs  de  la  cour,  elle  abandonna  le  Louvre,  et 
commença  à  réunir  chez  elle  une  société  élégante,  qui  donna  plus 
lard  le  ton  à  la  cour  et  à  la  ville.  Les  réunions  avaient  lieu  sous 
la  présidence  de  la  marquise,  qui  avait  pris  le  nom  à'Arthénice, 
anagramme  de  Catherine. 

Parmi  les  hôtes  assidus  des  réunions  figuraient  :  la  princesse  de 


v\\\:  no7 

Coiulé  et  le  ,m';iii(l  Coiidi'.  son  lils  :  l;i  diicliessc  de  Longiieville  :  lo 
duc  de  L;i  Uocliefoiiciiiild.  rniileiir  des  Maximes  :  M""-' de  Lafayelte  : 
M"'^'  de  Srudéry  :  une  lioiiriienisc  fort  recherchée  par  son  esjjrit, 
M""'  (lormiel  :  hi  marquise  de  Sahlé  ;  M"«  Angélique  Paulet  ;  M"'^  de 
Sé\igué. 

Kntre  autres  écrivains,  il  faut  citer  :  Balzac,  Malherhe,  Racan, 
Voiture  et  Vauuelas.  Seiii-ais.  Hois-lloiiert,  Chapelain,  Sarrazin, 
(I.  Patru.  Kléchier.  Hoirou.  Scarron.  Ménage,  Desniarets  :  le  grand 
(lorueille  y  \iiil  (juehpiel'ois  faire  lecture  de  ses  tragédies. 

(]es  l'éuuious  (le  gens  (res|>ril  et  de  personnes  distinguées  eurent 
une  i.'cande  inlliuMice  sur  les  uiieui'S,  et  contribuèrent  beaucoup  à 
polir  la  languiî  et  à  fornu'r  le  goùl. 

Ce  fut  là  ([ue  Bossuet.  à  Tàge  de  Ki  ans,  prononça  un  discours 
après  iiiiuuil  :  aussi  Voiture  disait-il  qu'  «  il  n'avait  jamais  entendu 
prêcher  ni  si  tôt  ni  si  tard  >. 

Ce  sont  les  Précieuses  qui  ont  l'éhahilité  dans  leur  langage  et 
dans  leur  style  la  pureté  et  l'élégance,  et  qui  ont  enrichi  la  langue 
d'une  foule  de  locutions  aussi  expressives  que  pittores(pu'S.  Cette 
recherche  ayant  dégénéré  i)lus  tard  en  affectation  ridicule,  le  litre 
de  Pfc'r/cNsc  fut  pris  en  iiiau\aise  part,  et  devint  une  épithète 
satirique. 

Les  réunions  de  l'hôtel  de  Uambouillet  cessèrent  à  l'époque  de 
la  Fronde,  en  IGoO.  Alors  commença  la  seconde  époque  de  la 
IM'éciosilé,  sous  le  patronage  de  M"''  de  Scudéry.  Elle  recevait  le 
samedi.  Déjà  célèbre  par  ses  romans,  et  désignée  sous  le  nom 
de  Saplio,  ses  hôtes  assidus  étaient  Pélisson,  Guénégaud,  Godeau. 
Cette  société  exagéra  jusqu'au  ridicule  le  style  affecté  et  précieux, 
dont  Molièi'e  lit  justice  dans  les  l^récicuses  ridicules  flGGl). 

C'est  par  cette  société  que  fut  imaginée  la  carte  du  Tendre. 

i^Voy.  (jiiirlande  de  Julie,  bas-bleu.) 

—  Molière  a  immortalisé  les  Précieuses  par  le  ridicule.  Somme 
tonte,  nous  leur  devons  plus  de  délicatesse  dans  les  sentinuMits  et 
plus  d'atticismc  dans  le  langage. 

Ce  sont  les  Précieuses  qui  ont  dit  pour  la  première  fois  :  un  lin 
sourire,  une  belle  llamme,  etc. 

Somaize  a  publié,  en  IGGO,  le  Grand  Diclionnaire  des  Pré- 
cieuses, en  deux  volumes. 

Voici  un  extrait  du  (îrand  Diclionnaire  des  Précieuses,  ou  le 
Langage  des  ruelles  (Paris,  Jean  Ribou,  IGGS  ;  bibliothèque  Sainte- 
Geneviève)  : 


308  i>RË 

Aiinor  :  nvoir  iiii  Iciulre. 

Alin;macli  :  le  inéinoiro  de  l'avfïiiir. 

Amour  :  l'amour  a  lerriblcmenl  défri(li(''  Jiioii  cuMir. 

Amour  facile  ou  rigoureux  :  vertu  coiiimode,  vertu  sévère. 

Asseyez-vous  :  contentez,  s'il  nous  |)l;iil,  rciiNic  qu"a  ce  siè.tre  de 
vous  embrasser. 

Balai  :  rinstniiiiciil  de  la  [tropreté. 

Bien  (avoir  peu  de)  :  être  de  la  petite  portion. 

Cerveau  :  le  sublime. 

Cbaise-percée  :  la  soucoui)e  inférieure. 

Chandelle  :  ardent  ;  supplément  de  soleil. 

Chapelet  :  chaiue  spirituelle. 

Cheminée  :  l'empire  de  Vulcain. 

Chemise  :  la  compagne  perpétuelle  des  morts  et  des  vivants. 

Chenets  :  les  bras  de  Vulcain. 

Cheveux  :  la  petite  oie  de  la  tète. 

Colère  (être  en)  :  avoir  du  fier  contre  quelqu'un. 

Comète  :  l'interprète  du  couri'oux  des  dieux. 

Commun  :  du  dernier  I)ourgeois. 

Concevoir  mal  les  choses  :  avoir  l'intelligence  épaisse. 

Dents  :  rameul)lemeut  de  la  bouche. 

Eau  :  l'élément  liquide.  Un  verre  d'eau  :  un  bain  intérieur. 

Écran  :  la  contenance  utile  des  dames  quand  elles  sont  devant 
l'élément  combustible. 

Ennuyer  (s')  :  être  dans  le  jeûne  du  divertissement. 

Estimé  (être)  :  faire  ligure  dans  le  monde. 

Éventail  :  zéphir. 

Femmes  :  l'agrément  des  sociétés,  la  politesse  du  langage,  et  les 
divinités  visibles. 

Fenêtre  :  la  porte  du  jour. 

Feu  :  l'élément  combustible. 

Galante  (être)  :  être  de  la  petite  vertu. 

Habillée  (bien)  :  sous  les  armes. 

Joues  :  les  trônes  de  la  pudeur. 

Jupes  de  dessus  :  !•'  la  modeste,  2"  la  friponne. 

Jupe  de  dessous  :  la  secrète. 

Laide  :  belle  à  faire  peur. 

Langue  :  l'interprète  de  l'àme. 

Laquais  :  nécessaire,  fidèle. 

Larmes  :  les  filles  de  la  douleur  et  de  la  joie. 


!»U1-:  :500 

F.nlrinos  :  l;i  liirnrno  dos  antipodes. 

La\(Miii'iil  :  lioiiilloii  des  (](Mi\  SdMirs. 

J^rvrcs  (l)ollos)  :  lovi-cs  liicn  ourlées. 

Lit  :  l('mi)iro  de  Moi'pliée. 

Livivs  :  les  iiiaiires  iniiets. 

Ijiiie  :  le  llaiiilicaii  du  silence  et  de  la  iiiiil. 

.Main  (^helkô  :  belle  nioiivantc. 

.Maria.iic  :  l'amour  peignis. 

Marier  (se)  :  donner  dans  l'amonr  |)ei'i)iis. 

Mii'oir  :  conseiller  des  Grâces. 

.Miisi(iiie  :  le  paradis  des  oreilles. 

Xtv.  :  les  écluses  dn  cerveau. 

Nuit  :  la  déesse  des  ombres  ;  la  mère  du  silence. 

O.anons  :  les  dieux  des  Egyptiens. 

Oreilles  :  les  portes  de  l'entendement. 

Peigne  :  dédale. 

Peintre  :  poète  muet. 

Poète  :  nourrisson  des  Muses. 

Porteurs  de  cbaises  :  mulets  baptisés. 

Promenade  publique  :  l'empire  des  œillades. 

Rire  :  perdre  son  sérieux. 

Seins  :  les  coussinets  d'amour. 

Sentir  :  attacher  la  réilexiou  de  son  odorat. 

Soufflet  :  la  petite  maison  d'Eole. 

Soupirs  :  les  enfants  de  l'air. 

Yeux  :  les  mii'oirs  de  l'âme. 

Zépbir  :  l'amant  des  fleurs. 

Précipice,    du   latin  pr<i'cijniiiiin .   de  pra-,  capuf,  tète  en 
avant. 

—  On  tombe  dans  un  précipice,  on  est  englouti  dans  un  goulfre^ 
on  se  ])erd  dans  l'abîme. 

Préconiser,  du  \)',\?,-\-à\\\\  prœconisai'e,  de  prœco,  béraut. 
Proclamer  les  mérites,  les  louanges  ;  louer  beaucoup. 

—  Préconiser  un  évèque  :  déclarer   en   consistoire  qu'il  a  les 
qualités  i-eqiiises. 

Préface,  du  lalin  /u-d'/ufin. 

11  est  remplacé  quebinefois  par  :  prologue,  discours  préliminaire, 
prolégomènes. 

—  Point  de  préface  !  c'est-â-dire  venons  au  fait  ! 


Préjugé,    pm-liciiM'   du    mm'Iic   /)i-<'Jiif/t'r  :    Inlin   prn'Ji((lii:nre, 
juger  d'il v;i liée. 

—  Lo  pi'éjiigé  est  l'crronr  du  \iMg;iim.  (VoKiiir'c.) 

Prélasser  (sc),  diM'né  ii'i-é.uulicr  du  pm-la/iis,  pivint. 
Au  li,nui-é  :  Icnioigncr   par   se?   nmnirrcs   qu'on    se   cruit   furt 
au-dessus  des  autres  ;  se  donner  des  aii-s  de  prrlal. 

Premier,  du  latin  pri marias  :  comme  prlinab'c. 
A   la    niéuie  famille   appartiennent  :  prime  (de   primo   ahord), 
primeur,  primauté,  prinu'.r,  prince,  prémices. 

—  Les  premiers  seront  les  derniers,  et  les  derniers  s»;ront  les 
premiers.  (Saint  Mathieu,  XIX,  30.) 

Qui  premier  engrène,  premier  doit  moudre. 
Les  premiers  vont  devant. 

Prendre,  du  latin  prenderr.  [)ù\\v  prohcmlere. 

Le  participe  est  pris,  cjui  a  donné  y>/7".st'.  A  ces  mots  se  rattachent  : 
apprendre,  appréhender,  appréhension,  apprenti  ;  comprendre,  se 
méprendre,  surprendre,  etc. 

—  Le  mot  prendre  est  employé  dans  des  acceptions  très  diverses  : 
Je  viens  de  prendre  l'avenue  des  Champs-Elysées,  et  j'ai  pris 

grand  plaisir  à  cette  promenade  ;  mais  je  vais  rentrer  pour  prendre 
un  air  de  feu  de  peur  de  prendre  un  rhume.  Et  vous  !  quel  parti 
prenez-vous?  —  Mais,  vous  lo  voyez,  en  vous  écoutant  je  prends 
patience... 

—  Prendre  la  mouche,  la  chèvre,  sont  des  latinismes  :  ont  le 
sens  de  induere,  revêtir  le  caractère  de... 

—  Prendre  son  hien  où  on  le  trouve.  Molière  avait  coutume  de 
répéter  cette  locution,  et  la  mettait  en  pratique. 

Un  jour,  Rossini  écoutait  un  mauvais  opéra.  Il  saisit  au  passage 
une  idée  charmaute  ;  il  prend  son  crayon,  et  la  note  en  gromme- 
lant :  l'J  troppo  bono  per  queste  coglione!  C'est  trop  bon  pour... 
cet  imbécile. 

—  Ce  qui  est  hou  à  prendre  est  bon  à  garder. 

Or,  ce  qui  est  bon  à  prendre,  n'est  pas  bon  à  rendre.  'Moyen  de 
parvenir,  XXYI.) 

Il  faut  prendre  le  temps  comme  il  vient,  les  gens  pour  ce  qu'ils 
sont,  et  l'argent  pour  ce  qu'il  vaut. 

Les  grands  prennent,  les  petits  sont  pris. 

Quand  on  prend  du  galon  (voy.\  on  n'en  saurait  trop  prendre. 

Trop  prendre  fait  pendre. 


PRE  311 

Prépositicn,  du  Intin  pm\  pn^iliix  (placé  devant). 

.M(i|  iii\;iri;ilil(' ([iii.  plncr  dtMMiit  im  nom,  un  [(roiioiii,  uno  propo- 
sition inlinilivr.  les  lie  ;'i  nii  tci'nic  précédent,  en  marquant  un 
rapport  déterminé  : 

.1,  du  latin  «il. 

Aiiprcs.  (Voy.  jirh.) 

Aranf.  de  ah  nn(e.  Ânte  avait  donné  alns  ;  d'où  oins  né,  aîné, 
opposé  à  jniiné  i'pni.<<-né;.  Aranf  a  donné  anpararanf,  devant. 

Arer,  de  (f/j>/f/  'et  /lor)  .-  ;i  été  aussi  arcrques. 

Chez,  de  ca>fa  :  comme  /rc  de  Icttiis. 

Contre,  de  contra. 

Dans,  de  f/e  infi/s.  (pii  a  donné  ins  dans  la  lan.uue  d'oc.  De  là 
de(/ans. 

De,  du  latin  de. 

Depuis,  de  de  et  post.  (Voy.  puis.) 

Dès,  peut-être  de  de  ex  ^^ 

Désormais,  de  dès,  ores,  mais  :  de  ex  Jiora  magis. 

Durant,  pendant,  nonobstant ,  ne  sont  que  des  participes 
présents  pris  absolument.  Pendant  le  jour,  durant  la  nuit,  équi- 
valent à  :  le  jour  pendant,  la  nuit  durant. 

En,  du  latin  in:  se  pi'ononce  an,  en  français,  tandis  qu'en 
provençal  il  se  pi^ononcc  in. 

Entre,  dn  latin  intra. 

Hors,  hormis,  du  latin  /'o/'/.s',  anciennement /■orA\  Tout  est  perdu, 
fors  l'honneur.  En  provençal,  fouare  signilie  dehors. 

Jusque,  dii  latin  usque,  ou  plus  probablement  de  usque. 

Le:,  du  latin  latus  (côté).  Plessis-lez-Tours  :  I^lessis  près  Tours. 

Malgré,  de  nialum  gralum.  en  provençal  grat.  On  a  dit  niau- 
gré,  pro^  (Miçal  maugra  :  qui  a  donné  maugréer.  Malgré  Dieu  est 
devenu  Maugreljleu. 

Outre,  du  latin  ultra.  Oii  lit  dans  les  lois  de  Guillaume:  «  }suls 
ne  reçoit  liom  iiltre  III  nuicts.  » 

Par,  parmi,  du  latin  per,  el  per  mcdiujn.  Parmi  s'est  écrit  en 
deux  mots,  coDime  <^/i /??^  ;  in  medio,  devenu  aussi  emmi.  Mi  se 
retrouve  dans  midi,  milieu,  et  dans  mi-caréme,  mi-août.  Le  pro- 
vençal dit  mitan,  qui  a  fait  (0  mitogen. 

Pour,  du  latin  pro.  On  trouve  cette  forme  latine  dans  les  Ser- 
ments de  Strasbourg,  842.  Plus  tard,  por,  qui  devint  pur  et  pour. 

Près,  à^iX^ûn  pressas,  [i^oii  après,  auprès. 

fie::,  du  latin  rasus,  de  radere,  raser. 


312  PHK 

Sans,  do  ,sine  avec  s  advcrhiiil  ;  aiiricii  lïiiiir;ii>  sens. 

iSar,  do  super. 

Sus,  do  susuni,  pour  sursum  (?),  s'est  ronservù  dans  la  lonilion 
en  sus;  dans  courir  sus  à  quoiqu'un.  En  le  joignanl  à  de,  on  a  eu 
dessus. 

Sous,  do  suhlus,  on  provençal  .sr>,s7  .-  d'où  dessous. 

Vers,  du  latin  rersus  (tourné  du  c<Mé  de). 

Vis-à-vîs  de:  face  à  face... 

Voir/',  voilà,  sont  pour  î^ois  ici,  vois  là,  {\\\\  jadis  s'écrivaient 
en  deux  mots.  En  provençal  vaqui,  velaqui.  Yoy-me  là  prest  à 
boire,  (Rabelais,  Gargantua,  41.)  Gare  !  voy-le-cy.  {Pantagruel, 
IV,  ?>\.)  Au  xvii«  siècle,  on  donnait  encore  à  voici  et  voilà  un 
inlinilif  pour  complément.  Corneille  dit  :  «  Voici  venir  ma  sœur  », 
qui  équivaut  à  «  Vois  venir  ici  ma  sœur  ».  Béranger  a  dit  aussi  : 
Voici  venir  l'iiuissicr  du  roi. 

Présage,  du  latin  prcesagium  (prœ,  sagire). 
Signe  par  lequel  on  prévoit  l'avenir. 

Là,  je  vois  une  cvoi.v  de  sinistré  [irésago. 

(BoiLtAu,  Satires.) 

Présent,  du  latin  prœsens,  prœsenlem. 
Oui  est  dans  un  lieu  déterminé. 

—  Dans  le  sens  de  don,  c'est  le  substantif  verbal  de  présenter, 
mettre  devant,  présenter  ses  liommages,  une  Heur. 

—  Autrefois  on  disait  de  présent,  pour  à  présent. 

De  présent,  je  ne  fais  que  rêver  :  et  ne  faut  plus  doresnavant  que 
bon  vin,  bon  lict,  le  dos  au  feu,  le  ventre  à  table  et  escuelles  bien 
profondes...  (Rabelais,  Gargantua,  I,  19.) 

Un  bon  l)OiU'geoiSj  dans  sa  maison. 
Le  dos  au  feu,  le  ventre  à  table... 

C'est  la  mise  en  pratique  de  l'insouciance  épicurienne  ! 
Carpe  dieni,  dit  Horace. 

Au  Moyen-Age,  on  disait  :  don  présenté  à  quelqu'un. 
Faire  un  présent  ne  signilie  rien  sans  ce  mot  sous-entendu. 

—  Les  petits  présents  entretiennent  l'amitié. 

Les  présents,  pour  entretenir  l'amitié,  doivent  être  petits,  ils 
peuvent  alors  être  réciproques  ;  mais,  lorsqu'ils  sont  trop  considé- 
rables pour  être  rendus,  ils  blessent  plus  la  vanité  qu'ils  n'excitent 
la  reconnaissance. 


L'amitié  n'est  pas  inh-rossée  do  sa  nature,  et  les  mains  vides 
sont  celles  qui  se  serrent  le  mieux. 

Une  feuille  de  rose  donnée  par  un  ami  est  préférable  ;iii\  [irésonls 
les  plus  riches,  pourvu  qu'elle  ne  soit  pas  fanée.  (Proverl»e  persan.) 

A  petit  présent,  petit  merci:  on  mesure  la  reconnaissance  au 
bienfait. 

Les  présents  peu\eiit  aii.uineuler.  mais  ils  ne  doivent  pas 
diminuer. 

.S7"/v  nul  crcsccre  dcbeni  mnnrra. 

(Maiitim..) 

—  Accepter  un  présent,  c'est  consentir  à  fermer  l'oreille  à  la 
vérité. 

Acceptât io  muneruin  pru'varkallo  est  verUalis.  [Ecciéslasle, 
XX,  31.) 
(Yoy.  })ot-de-vin.) 

Presque,  composé  de  prù.-<  et  de  que. 

—  Il  y  a  des  gens  qui  ont  presque  de  l'amour,  presque  du  talent 
et  presque  du  bon  sens.  (M'"'^  de  Ki-iidner.) 

—  Presque  pas  :  très  peu,  un  soupçon. 

Misé  Pcsqui-pas  (en  provençal)  :  Madame  Presque-pas,  une  façon- 
niére,  une  mijaurée. 

Presser,  du  latin  pressare,  fréq.  de  prctncre. 

—  Pressé  comme  un  lavement.  C'est  plutôt  ^^/y'.ssy//;/  qui!  faudrait 
dire. 

Pressés  comme  harengs  en  caque. 

On  "est  si  pressé  dans  ces  voitures,  que  chacun  redemande  sa 
jambe  ou  son  bras  à  son  voisin,  lorsqu'il  s'agit  de  descendre. 
(Mercier,  Tableau  de  Paris.  Les  Tur<jotines.) 

Prétentaine  (courir  la),  on  jjre/an/aine.  Origine  inconnue. 
Ménage  y  voit  une  onomatopée  du  bruit  que  font  les  chevaux  en 
galopant. 

Prêter,  du  latin  prœslare,  se  iQw'w  decant. 

—  Prêter  son  ajq)ui  à  (jnelqu'un  :  lui  venir  eu  aide. 

Prœslare  damnuni  e)nj>l<>ri  (Cicéron)  :  garantir  la  marchandise 
à  l'acheteur. 

Prêter,  c'est  perdre  son  argent  ou  son  ami. 

Qui  prête,  ne  recouvre;  s'il  recouvre,  non  tout  ;  si  tout,  non  tel 
si  tel,  ennemi  mortel. 

Au  prêter  Dieu,  au  rendre  Diable.  (G.  Meurier.) 


314  PHE 

On  no  pr<'((^  qir.nix  riches,  [imito  qiio  ro  sont  l('s  soûls  qui 
piiisscnl  rondro. 

—  Prêter  ;i  In  polilo  sonininc.  Avis  aux  bourfroois  de  Jérusalem. 
Six  francs,  prèles  à  condilion  qu'on  on  rendra  sept  au  l)Out  d'une 

soniaino,  si  on  les  laisse  au  mumuo  taux  pendant  rinquaiito-deux 
soinaiuos.  en  ajoutant  les  intérêts  au  capital,  donneront  quinze 
mille  neuf  cent  vin,L!t-cinq  francs  trois  centimes.  Voilà  une  somme 
placée  assez  avanta.oeusement.  (Yoy.  interéfs  composés.) 

Prétérition,  du  Jalin  prd'icrirc.  laisser  dr  C(')té. 
Fi,tiure  par  laquelh;  on  attire  l'attention  sur  un  point,  en  disant 
qu'on  ne  s'y  arrête  pas. 
Je  me  garderai  hien  de  i)làmer  la  conduite... 

Préteur,  du  lalin  prœtor,  jiour  pr(r  iior,  (pii  va  devant. 
Magisli'at   romain   chargé   de   rendre   la  justice,  de  diriger  une 
armée,  d'administrer  une  province. 

—  On  appelait /jreVo/r*?  la  tente  du  général,  et.  plus  lard  préto- 
riens les  gardes  de  l'empereur. 

Prétexte.  (Yoy.  pallier.) 

Prêtre,  du  lalin  preshyler,  transcription  du  grec  presbijleros, 
plus  âgé. 

—  Le  cas  régime,  presbylerinn,  avait  donné  pro/ivaire,  et  la 
rue  des  Prouvaires,  à  Paris,  signille  rue  des  prêtres. 

~  Presque  tous  les  mots  qui  désignent  les  ministres  du  culte, 
dans  les  diverses  religions,  signifient  vieillard  ou  père. 

—  Synonymes  :  bonzes,  caloyers,  derviches,  druides,  fakirs, 
mages,  marabouts,  ministres,  popes,  rabbins,  santons. 

En  provençal,  capelnn,  chapelain. 
Gœthe  appelle  les  prêtres  «  les  démons  du  retard  ». 
Calotins.  Cette  expression  satirique  se  trouve  dès  îToO,  dans  le 
Déjeuner  de  la  Râpée  par  TEcluse. 
La  vermine  noire.  (Garibaldi.) 

—  On  dit  d'un  mauvais  prêti'e  :  sa  soutane  ne  tient  qu'à  uu 
bouton. 

—  Il  ne  faut  pas  être  prêtre  plus  qu'il  ne  convient,  daus  l'intérêt 
même  de  la  cause  de  Dieu:  et,  pourvu  que  l'on  conserve  la  soutane, 
on  n'est  pas  tenu  d'être  toujours  en  surplis.  (E.  About.) 

—  Le  prêtre  baptise  son  enfant  le  premier.  (Yoy-  célibat, 
charité.) 

—  Jusqu'au  milieu  du  x^'  siècle,  les  prêtres  pouvaient  se  marier. 


IM\1  31o 

Lf^  papo  Nicolas  VII  coiiimonça  à  troubler  leur  repos  domestique,  et 
Grétioire  VII,  iiiettaut  eu  pr;!li(pie  les  ordonnances  antérieures, 
leur  interdit  foruielleuient  le  niariatie,  afin  d'empèclier  la  dispersion 
des  biens  de  rivalise  p;ir  la  transmission  des  liéritafics  des  desser- 
vants à  leurs  enfants. 

«  Dùt-on  n'invoquer  en  f;iV(Mirdu  célihat  du  ciei'.iié  (pie  les  motifs 
les  [dus  avoualjles.  la  pui'eté  et  la  chasteté...,  c'est  offenser  Dieu 
(pie  de  refaire  les  liommes  sur  des  patrons  de  convention.  Pour 
vouloir  fahi-i(pier  des  an.u'cs,  on  risque  fort  d'estropier  les  gens,  et 
de  ne  créer  fpic  des  fous  ou  des  malheureux.  »  (Gustav(;  Droz.) 

Prévariquer,  du  latin /^/v/'r/'//7'f(7r/,  marcher  de  travers. 

Au  ligiiié:  sécai-ter  du  droit  chemin.  C'est  trahir  la  cause, 
l'intérêt  dont  on  est  chargé  :  manquer  aux  devoirs  essentiels  de 
son  état  :  juge  prévaricateur. 

Prévoir,  du  latin  pra-rulcre.  voir  dans  l'avenir. 

—  Prévoir,  c'est  avoir. 

Ne  niiiips  pas  l'd'iif  iudIIi'I 
Avant  (jiiL'  ton  [lain  suit  prêt. 

(Proverbe  esp.-iijnol.) 

La  prévoyance  est  une  providence  terrestre,  que  chacun  peut 
prendre  à  son  service.  Aide-toi,  le  ciel  l'aidera. 
Prévoyance  vaut  mieux  que  repentir.  (Proverbe  hollandais.) 

Priape,  nom  mythologique. 

Fils  de  Vénus  et  de  Bacchus,  gordien  des  jardins.  Le  figuier  lui 
était  consacré,  à  cause  de  la  prodigieuse  fécondité  de  cet  nrlii'c.  On 
lui  immolait  un  âne. 

.Fiinon,  jalouse  de  Vénus,  le  fit  naitre  avec  une  difïoruiité  extra- 
ordinaire. Vénus,  honteuse  d'avoir  donné  le  jour  à  un  pareil 
monstre,  le  lit  exposer  sur  une  montagne.  Des  bergers  le  trouvèrent 
et  relevèrent  à  Lampsaque.  Phis  tard,  il  fut  chassé  de  cette  ville, 
parce  qu'il  était  devenu  la  terreur  des  maris  ;  mais  les  habitants  le 
rappelèrent  et  en  tirent  l'objet  do  leur  vénération. 

—  Lampsaque.  ville  de  Mysie,  dans  l'Asie-Mineure,  était  célèbre 
par  le  culte  solennel  que  l'on  rendait  à  ce  dieu.  Ce  culte  était  la 
débauche  la  plus  scandaleuse:  aussi  le  mot  Lampmcius  était-il,  à 
Rome  et  en  Grèce,  synonyme  de  débauché,  libertin. 

—  On  a  trouvé  à  Aix  un  autel  antique  consacré  à  Pria[)e.  où 
l'immodeste  dieu  des  jardins  est  représenté  avec  cette  inscription  : 
i.  H.  C.  Jucnndo  Hortomm  Custodi. 


Prier, (lu  h[\\]  prcrari.  provfnc'il  prpf/ar  :  (Yo\\  ;iiissi  :  |ir(''c;iir('. 
impréfiilioii. 
Synonyme:  l)if>otl6r.  (Vidocq.) 

—  Si  tii  veux  apprendro  ;'i  prier,  va  sur  la  nier.  (Von.  //irr.) 

—  Se  faire  prier  :  faire  des  manières,  des  farons,  des  simagrées. 

—  Faire  sa  poire,  sa  Sophie. 

Monsieur  vent  se  faire  prier  :  il  na  pas  besoin  de  cela  [)Our 
donner  du  prix  à  sa  complaisance.  (Pi.nault-Lebrun.) 

Primat,  du  latin  ecclésiastique  /ir/z/ian,  jirundion. 
Dijiuilé  ecclésiastique  au-dessus  d(;  celle  d"arclievéque. 

—  Primat  des  Gaules  :  l'arclievéque  de  Lyon.  C'est  en  1U71J,  que 
Grégoire  VII  institua  cette  primatie. 

—  Primat  est  synonyme  de  pfflrlarrhe. 

Prime,  du  lalin  prima,  sous-entendu  Jiora.  première  heure. 

C'est  la  première  des  quatre  parties  du  jour,  qui  suit  immédiate- 
ment le  lever  du  soleil.  Les  trois  autres  sont:  tierce,  sexte,  noue. 

Prime,  dans  l'Oflice,  se  chantait  immédialemeut  après  l'oftlce  de 
nuit  ou  Laudes. 

—  Prime  d'assurance.  Somme  payée  pour  assurer  une  entreprise 
contre  les  mauvaises  chances.  Vient  alors  de  prœminm  ,  par 
l'anglais. 

Prime-sautier,    dérivé    de    l'ancien  prime  saut,   considéré 
comme  nom  composé. 
Oui  se  décide  du  premier  saut. 

Primeur,  dérivé  déprime. 

—  Il  faut  manger  les  petits  pois  avec  les  riches,  et  les  fraises 
avec  les  pauvres.  Ce  proverbe  gastronomique  nous  apprend  que  les 
petits  pois  ne  sont  bons  que  dans  leur  primeur,  lorsqu'ils  ne  sont, 
par  conséquent,  accessibles  qu'aux  riches,  tandis  que  les  fraises  ne 
sont  bonnes  que  dans  leur  pleine  maturité,  époque  où  elles  sont 
abondantes  et  à  bon  marché. 

Printemps,  du  \n\\n  pr/mam  te/npus. 

La  première  des  quatre  saisons  de  l'année,  celle  où  la  nature, 
parée  de  Heurs,  semble  se  réveiller  et  renaître  à  une  nouvelle 
jeunesse.  Chez  les  anciens,  il  était  consacré  aux  Muses  et  aux  Grâces. 

Son  nom  latin  est  rer,  grec  /ler,  d'où  hirondelle  (?)• 

On  l'a  appelé  aussi  renoureau,  nom  l)ien  fait  pour  désigner  cette 
saison  dans  laquelle  la  nature  semble  commencer  la  période  annuelle 


PlU  317 

do  production,  où  l.i  terre  s'ouvre  pour  donner  ses  ricliesses,  comme 
riiidiipic  le  uiiil  (irrll.  (Voy.) 

Celte  iinuée  (IHGO),  le  printemps  n"est  qu'un  terme  durnlendrier, 
une  niMuvaise  plaisanterie  dalmanacli. 

Priori  ià\  locution  adverbiale,  mots  latins. 

Avaul  Imil  i'miuicu. 

Se  dii  (l'iiu  raisonnement  qui  repose  sur  un  pi'incipe  admis. 

Prison,  du  \d[\\\{)0]^\\\'A\vc  prehen.sioncm. 
Synonymes  :  mettre  en  cage,  tenir  en  cliartre  [uivée. 
—  Triste  cnuimc  une  porte  de  prison. 

On  (lit:  triste  comme  la  porte 

D'une  prison  ; 
Et  je  crois,  le  diable  m'emporte  ! 

(jn'un  a  raison. 

(A.  DE  Musset.) 

Privatif,  du  h\\\\\  pr  ira  tiens. 

Se  dit,  en  grammaire,  dos  lettres  ou  particules  qui,  jointes  à 
certains  mots,  marquent  un  sens  négatif. 

Telles  sont  :  en  grec,  les  pailicules  a  et  r/y.s-  ;  en  latin,  in  ;  en 
français,  in,  nié,  ou  ?n('s,  dé.  Kakia,  méchanceté  :  nkakia,  bonho- 
mie :  utHift,  utile;  inutilis,  inutile;  agréal)le;  désagréable. 

Privilège,  du  latin  j)j'iri/c(/iiini  ;  loi  faite  eu  faveur  d'un  parti- 
culier, [iririis,  pricalas,  et  lex. 
Avantage  exclusif  accordé  à  une  classe  de  la  société. 
Pricilegium  est  lex  privala,  contra  Jus  commune. 
Le  privilège  est  le  contraire  du  principe  républicain. 

—  En  France,  avant  17cS!),  la  noblesse  et  le  clergé  étaient 
dispensés  des  iuqiôts,  et  jouissaient  d'un  grand  nombre  d'autres 
avantages  contraii'es  au  droit  commun.  Tous  ces  privilèges  furent 
abolis  dans  la  nuit  du  4  août  1789. 

—  Les  privilèges  accordés  au  souverain  par  la  Constitution, 
prennent  le  nom  de  prérogatives,  du  nom  de  prœrotjatica,  que 
portait  à  Home  une  centurie  qui  avait  le  droit  de  voter  la  première 
dans  les  élections. 

—  En  matière  de  commerce,  le  privilège  prend  le  nom  de 
monopole.  (Voy.) 

Prix,  du  latin  pretiuni. 

La  mouclie  et  la  Inurmi  contestaient  leur  priv. 

(La  1-'omai>f..) 

—  Remporter  le  prix,  le  grand  prix  de  Rome. 


:m8  pho 

Probable,  du  laliii  jtr<)h(ihH\y,  (qui  pciil  se  |H'()ii\er.  mais  n'est 
pas  «'XfMiipl  de  doute). 
On  a  dit  autrefois  pronrahlc,  pouf  reconnu  cci-lain  : 

Kl  si  ce  le  si'liihic  dolilil.'iblc, 

C/csl  liii'ii  [wir  ;iit,Miiiii'iil  prouvalile. 

[Koman  do  la /{ose.  ver;.  ."iOSH  ?) 

Probité,  du  lalin  iirohilas. 

Probus  avait  tait  le  mot  roman  pro:,  ])reiix,  vaillant  :  d'oi'i 
jyroucsse. 

Oui  iniiU  erc  saf/  o  pvo:.  (ViJleliai'douin.) 

Ayez  de  la  [irohité  lont  juste  autant  ([u'il  on  faut  pour  ne  pas  être 
pendu.  (Beaumarchais,  Barbier,  I,  4.) 

D'après  cette  maxime,  il  sei'ait  pei'inis  de  voler,  mais  défendu  de 
se  laisser  prendre. 

Salis  bone  riri/ar,  si  sine  r;'///?//;^.  (Saint  Auuiistin,  6'//e  ^/e 
Dieu.) 

On  est  sufOsamment  honnête  si  l'on  est  sans  reproche. 

Procédé,  pai'ticipc  passé  ûe  procéder  :  lalin  procedere. 
Synonymes  :  ficelle,  truc.  (Voy.) 

Procès,  dn  latin  processus,  marche  en  avant. 

—  Le  [»lus  mauvais  accommodement  vaut  mieux  que  le  meilleur 
procès. 

Inter  duos  litigantes  terlius  gaudet. 

Les  tribunaux  ressemblent  aux  buissons  épineux  où  la  brebis 
cherche  un  refuge  contre  les  loups,  et  où  elle  laisse  une  partie  de  sa 
laine. 

—  Au  même  radical  se  rattache  le  mot  procession. 

Procureur,  dérivé  ^o,  procurer  ;  du  \dXm.  procura re.  prendre 
soin. 

—  En  1795.  les  procureurs  ont  été  remplacés  par  les  avoués,  qui 
sont  chargés  de  représenter  les  parties  dans  les  instances  civiles. 

Les  fonctions  do  procureur  étaient  considérées  comme  déro- 
geantes, l'opinion  publique  accusait  les  procureurs  d'avidité. 

Les  poètes  comiques  font  souvent  allusion  à  leur  rapacité.  Dans 
une  scène  du  Mercure  galan(,  un  procureur  du  Chfdelet  disait  à 
un  procureur  du  Parlement  : 

On  ojrappillo  cliez  nous,  mais  on  pille  clicz  vous. 

Procuste.  Mettre  sur  le  lit  de  Procusle  :  ramener  tout  au 
même  niveau,  à  la  nuMue  mesure. 


PRO  319 

l'rocuste  élail  iiii  Iiim,u;iiu1  dv  l'Alti(|iie,  qui  fuisuil  étendre  ses 
Ilotes  sur  lin  lit  de  fer.  liMir  coiiiciit  les  extrémités  des  j;imbes 
quand  elles  dépassaient  le  lit,  on  les  faisait  lii-ailler  avec  des  cordes 
jusqu'à  ce  qu'elles  en  atteignissent  la  longiuîur.  Thésée  le  tua  et  en 
délivra  le  pays. 

Prodige,  du  lalin  ])rocligium,  de,  pro,  a(iere{X). 

Les  prodiges,  regardés  parles  anciens  comme  le  signe  d'un  grand 
événement,  hors  de  l'ordi'e  naturel,  étaient  souvent  des  prédictions 
funestes,  et.  par  suite  de  celle  croyance,  le  mot  proditor  était 
synonyme  de  Iraitre.  (^Ces  deux  mots  n'ont  rien  de  commun.) 

Prodigue,  du  \[\{n\  pi'odlgus,  <X^i\  prodigalité. 
Synonymes  :  mangeur,  panier  percé,  tonneau  des  Danaïdes. 

—  Prodiguer  son  bien  :  jeter  sa  maison  par  les  fenêtres.  (Rabe- 
lais.) 

Prndif/cns,  sa  es  doganldire  de  In  sorts  causas. 

Le  prodigue,  c'est  le  dissipateur  de  son  bien.  (Code  de  .Juslinicn.) 

—  En  roman,  bobancicr,  de  boi/iba,  pour  pompa,  ostentation  (?). 

De  pronicsses  son  Ijobaciers. 

(MAtir.Al;KCS.) 

(Us  sont  prodigues  de  promesses.) 

—  C'est  un  enfant  prodigue.  (Yoy.  Éoangile  de  saint  Luc,  XV.) 

Hoiiz  qui  dépend  plus  qu'il  ne  doit, 
En  povi'elé  croler  se  voit  ; 
Et  cil  (jui  (k-pend  par  raison 
Kn  bien  nuillii)licr  voil-on. 

(xint  Siècle.) 

—  L'été  recueille,  l'hiver  mange.  (Proverl)e  russe.) 

Requiem  gagne  l'argent, 
Et  Gaudeamiis  le  dépend. 

—  On  dit  d'un  prodigue,  qu'il  bn'de  la  chandelle  par  les  deux 
bouts.  Ce  proverbe  est  stupide,  et  suppose  une  chose  imi)raticable. 
Il  est  plus  simple  de  dire  :  il  dépense  trop. 

—  On  se  sert  encore  des  expressions  :  semer  l'argent  (voy.)  : 
manger  son  blé  en  herbe. 

—  L'économe  se  contente  de  peu  ;  c'est  à  peine  si  le  prodigue  se 
contente  de  trop. 

Profil,  de  l'italien  pvoffilo. 

Contour  linéaire  d'un  objet  ou  d'un  visage  vu  de  côté. 

—  Profd  de  camée  :  beau,  très  pur.  (Voy.  sllliouelte.) 


320  vwn 

Profit,  profiter,  du  Liliii  jifo/ir/o.  pro/ffliu/i. 
On  (lis;iil  ;iiil refois /^>r//  [iDiir  [irolil.  hénélice. 

Ferez  doii  prei!  (Iiiiilriii  (l;iiii;i!,'e. 

[Fa/j/iati  (le  la  Mort.) 

—  Le  pi-olil  (If  liiii  l';iil  le  dommage  de  liiiitre.  (Montaigne, 
Essais,  tilro  du  cli.  XXI  du  l^'-  livre.) 

Ce  qui  duit  aux  uns  nuit  aux  autres. 

On  ne  peut  dessécher  les  marais  sans  faire  du  tort  aiiv  ure- 
nouilles.  (M'"«  de  Girardin.) 

Progrès,  du  latin  prof/ressus,  marche,  mouvement  en  avant. 
Il  faut  expliquer  ainsi  le  sens  moral  de  ce  mot,  car  les  écrevisses 
marchent  aussi,  mais  en  arrière  (à  la  nage?). 

—  Ce  mot  est  fait  comme  produire. 

—  Le  progrès,  en  civilisation,  doit  s'entendre  de  ce  qui  est  utile 
à  tous.  (M.  G.) 

—  Les  Américains,  pendant  la  guerre  de  l'Indépendance,  ont  fait 
progresser  et  progressif,  qui  ont  été  adoptés,  mais  qu'on  ne  doit 
employer  qu'avec  prudence.  Ainsi,  la  \\vàvc\\Q progressive  des  idées, 
expression  souvent  employée,  équivaut  à  la  marche  raarcliante 
des  idées. 

—  Le  mot  progressif,  appliqué  à  des  personnes,  ne  pourrait 
guère  désigner  que  d'excellents  marcheurs  (?). 

—  Les  ennemis  du  progrès  s'appellent  :  tardigrades,  qui  préfèrent 
l'ornière  au  rail  ;  bonnets  de  coton  ;  éteignoirs  ;  rétrogrades. 

Prolétariat,  àv\\^\^\\\  proletarias,  de  proies,  lignée,  portée. 

État  d'une  société  oïi  il  y  a  des  prolétaires,  c'est-à-dire  des 
individus  qui  ne  possèdent  rien,  et  ne  vivent  que  de  leur  travail 
quotidien. 

Promener^  du  bas-latiu  prom innre,  nndQnwQmeut  jtourmener. 
Des  étymologistes  ont  proposé  pro  manu  agere  ! 

—  Synonymes:  Allez  vous  promener!...  Vade  foras  !  Foras  ! 
(Plante.) 

En  provençal  :  fouare!  (dehors). 

Allez  au  diable  !  ...à  tous  les  diables  ! 

Allez  vous  faire  lanlaire,  ...vous  faire  paître,  ...vous  faire  fiche... 
Ce  dernier,  pour  gazer  une  expression  plus  grossière. 

Envoyer  à  l'ours  ;  envoyer  voir  Martin  au  Jardin  des  plantes. 

Va  piss...  ;  manière  très  grossière  de  congédier  quelqu'un. 
L'injure  est  ancienne.,  car  Ducange,  au  mai  pissare,  cite  un  texte 


PUO  :52I 

de   140*),  où   ciilro  .iiilros    <   .ijr.incles  paroUes   reprochées   ;i    un 
accusé,  on  rappoilc  (jnil  ciiNONa  pisser  son  adversaire  ». 

Promesse,  <lii  lalin  promissa. 

—  l'i'oniesso  de  corljeaii  :  sponsio  rorvina.  Locution  latine,  dont 
saint  Augustin  s'est  souvent  sei'vi.  C'est  une  allusion  au  cri  du 
corlieau  :  cras,  cra.s,  demain,  demain. 

C'est  le  :  Demain,  on  rasera  gratis. 

Prométhée,  du  gi-ec  Promt'f/iens. 

Un  des  Titans,  puni  par  .lupiler  pour  a\oir  dérobé  le  feu  du  ciel 
et  l'avoir  comuiiiniqué  aux  liommes  dans  un  roseau  creux. 

—  Le  hàlon  uéuérateur  du  feu,  (|ui  enllammait  par  un  frottement 
rotatoire  nu  (lis(pie  de  liois  creusé,  s'appelait  Trupnnon  en  grec, 
et  Protndthd  eu  sanscrit.  Dans  cette  langue  Proinàtlins  est  celui 
qui  creuse  en  frottant,  et  (pii  développe  le  feu  caché  dans  le  bois. 
De  là  le  Proméliiée  grec. 

Promettre,  du  latin  promilforc,  envoyer  au  loin... 

—  Promettre  monts  et  merveilles. 

Aureo/t  montes  polliccri. 

(Tkrk.nck,  Phorminn.) 

Mtnjiios  jiroiniltcre  inonles. 

(Perse.) 

Maria  monlesque  poUicevi.  (Salluste.) 

On  dit  aussi  :  promettre  plus  de  beurre  que  de  pain. 

—  Promettre  des  côtelettes  de  Sphinx  à  la  purée  de  Cliimère. 

—  Grand  prometteur,  petit  donneur. 

Se  ruiner  à  [iromettre,  et  s'enrichir  à  ne  pas  tenir. 

Oi'iilioiic  benejkus. 

(Plautk.) 

(Généreux  en  parole.) 

—  Il  est  toujours  imprudent  de  faire  une  promesse,  car  un  événe- 
ment imprévu  peut  vous  empêcher  de  la  tenir.  (M,  G.) 

—  Chose  promise,  chose  due  :  on  doit,  une  fois  qu'on  a  promis. 
Proverbe  analogue  à  cet  autre  :  Un  honnête  homme  n'a  qu'une 

parole.  On  doit,  en  conséquence,  avant  de  promettre,  être  sûr  de 
pouvoir  tenir  ses  engagements,  si  l'on   ne  veut  être  obligé  de  se 
retrancher  derrière  le  proverbe  :  Promettre  et  tenir  sont  deux. 
Promcltre  c'est  (ioniier  ;  espérer,  c'est  jouir. 

(Dti.ir.i.i.) 

Pour  son  bonheur  entretenir 
Promettre  ne  faut  sans  tenir. 

21 


PpÔne,  f;iil  lii'ill-i'Irc  |t;il'  ((illliiiclidll  de  jinrconiiini.  |)r(Hl;iiii;i- 
lioii.  ;iiiiu>iirc(0- 

(l'csl  i.'iiiiioncc  ihiIiIkiiic  (juc  f;iil  If  ciiir,  ('li;i(|iir  (liiii.-iiiclic,  ;i  l.'i 
messe  p.'iroissi.ile,  {U'>  frics,  heures  (lOflices.  Ii;ms.  iii;iii(leiiieiils 
épisrop;uix,  etc.  :  |miir  i;i|iprlcr  ;iii\  ;issisliiiils  les  devoirs  reli).Meii\ 
qu'ils  onl  ;'i  ;iceoiii|>lir. 

—  Uecoimii.'inder  (piehpi'iiii  .iii  pn'me  :  fnii'c  un  i';ipp(»i'l  (pii  lui 
;dlirei;i  (piehpie  i'épriiii;iiide. 

('elle  iDCUlion  \ieiil  de  liisnue  féod.il  de  recoiiimiinder  an  pn'me 
les  seiLïiieurs  ;iii\  pi'ières  des  lidrles.  leurs  \ass;ni\;  do  inëiiie 
qu'aujourd'liiii  on  leniiinc  rnHice  par  le  Ihuniiic,  sa/ra/ti... 

Pronom,  du  laliu  /iroiioinni.  de  /i/-n.  /Ki/iu'nc:  «pii  esl  mis  à  la 
place  du  neui. 

l\irlie  du  discoiii'S  (pi'ou  uiel  au  lieu  du  n(uu  ou  suhsianlif.  poui- 
en  é\ilei'  la  ié|u''li!i(iu.  ainsi  (pu'  |t(Uir  désiijner  la  personne. 

Prononcer,  prononciation,  du  lalin  /iroiui/ifidrc. 

Manièi-e  darlicnler  les  mois  :  sujelle  à  plusieurs  >ieo<ï',  connus 
sons  le  nom  de  halliulieiucul,  liéiiaienuuil.  hredonillemeiit,  gras- 
se\emenl  :  ipii.  le  plus  S(U!\enl,  lienneul  à  de  niau\aises  hal»ilndes 
d'iMifance.  bien  i)lus  (pi'à  un  \ice  d'oriianisnnv 

Pi'ononcialion  alsacienne  :  Mai-cliaud  de  liedis  pal;iis  (luaicliaud 
de  i)elils  lialais). 

Prophète,  du  Li'ec  pr<i/i/ir/(\<.  par  le  lalin  prophcln. 
(a^lni  (pii  prédit  l'avenir,  landis  (pie  le  dcrin  décoiiM'e  ce  ipii  est 
caclié. 

—  l)n  appelail  /iro/i/ir/cs.  clie/.  les  Hébreux,  les  lunnines  inspii'és 
de  Dieu,  (pii  annonçaient  l'aM'uir. 

Les  (pialre  efands  prophètes  sont  :  Isaïe,  .lérémie.  Kzéchiel  et 
Daniel. 

Tarmi  les  douze  pelils.  on  c(tuipte  Hariiih.  ohjtM  de  radmii'atiiui 
de  La  Foulaituv 

—  l*rophèle  de  malheur  :  oiseau  de  mamais  aueiire. 
(V(>sl  la  Loi  et  les  l'rophèles  :  il  fait  autorité. 

Nul  n'est  prophète  dans  S(»n  pays  (ÉcnnijHc  de  saint  >Lilhieu. 
rh.  XXIH,  IVi  :  Marc.  M.  4  :  Luc,  iv".  iL\  :  Jean,  IV,  iV.) 

Tn  savant  dans  son  pays  est  comme  l'or  dans  une  mine.  (^Pro- 
verhe  turc.) 


iM{() 


ogn 


Propos,  (lu  laliii  /tropnsifin/i. 

—  A  j'/opos.  iD'iitioii  ;i(l\t'ilii.ili' :  convenaldomonl  au  lieu  elaux 
cirtonslaiices. 

A  |irn|iu>  de  lintt('<.  {V<)\ .  hofles  ) 

A  |)it)|Mjs.  Tiiiclli'.  jiourquoy  c>t-ro  quo  les  niis?e?  dune  jeune 
deniniselie  sont  toujours  fraîches  ?  (Rabelais,  I.  :2'.>  i 
Cela  vient  ;i  propos,  couinie  lard  eu  pois.  (Id.  III.  '*!.) 

Proposer,  de  ))rn  et  pfiu.son\ 

--  L  liniiiMie  propose,  et  Dieu  dispose.  (G.  Meurier,  xv«  siècle.) 
Les  projets  des  lioniuies  dépendent  de  la  volonté  de  Dieu. 
Nous  trouvons  un   certain    charme   à   disposer   à   l'avance   de 
lavenir,  sans  songer  à  l'inconstance  des  choses  humaines. 
Comme  le  ciel  sô  rit  îles  vains  projets  des  tiommes  ! 

(Rp.r.>ABD.) 

L'homme  sagite,  Dieu  le  mène, 
t^ontr»'  DifMi.  nul  ne  peut. 

Propre,  du  latin  jD-opriux. 

Ca'.  qui  appartient  exclusivement  à  une  personne. 

A  passé  de  ce  sens  :  1°  à  celui  de  convenable,  2''  à  celui  de  net. 

Propre  coniiiie  un  calire.  ...comme  une  écuelle  à  chats.  Celle-ci 
n  est  que  dune  prû[»reté  équivoque  :  nette  peut-être,  mais  pas 
ju'opre. 

Mmtfius  e.ifo.  (Caton.; 

On  dit  d'une  personne  très  propre  :  On  croirait  qu  elle  sort  d'une 
boite. 

Propreté,  dérivé  de  propre,  dans  le  sens  de  net. 

—  La  piupreté  est  une  demi  vertu.  (Saint  Augustin.) 

La  propreté  a  quelque  chose  d'honnête  :  c'est  le  respect  de  soi- 
même. 

La  propreté  est  pour  le  corps  ce  que  la  décence  est  pour  les 
mœurs.  (Bacon.) 

Propriétaire,  'li'lui  qui  possède  en  propre,  en  son  nom.  un 
objet  ipieliunque. 

Il  peut  jouir,  user,  disposer  des  choses  de  la  manière  la  plus 
absolue.  La  loi  d'e.vpropriation  pour  cause  dutihté  publique  prévoit 
le  seul  cas  où  le  propriétaire  puisse  être  dépossédé. 

Prorata  (au),  abréviation  de  la  locution  latine  :  pro  rn(a  parte, 
pour  kl  partie  convenue  ;  à  proportion  de... 


Se  (lil  de  la  réparlilioii  (l'iiiic  soiiiiiie  on  diiii  noiiihrc  qiielcoiiqin' 
de  choses  entre  un  certain  nonilire  d'individus,  proporlionnelloinciit 
aux  droits  do  rliaciiii  d'eux. 

Dans  une  liquidation,  chaque  créancier  reçoit  au  proiata  de  sa 
créance. 

Proroger,  du  lalin  proroijai^c,  prolonger. 
Prolon^ier  le  truq»s  prévu  ou  donné  pour  une  chose. 
A  un  sens  opposé  à  abroger. 

Suspendre  les  séances  d'une  asseuibiée  délibérante,  par  un  acte 
de  l'autorité  souveraine. 

Prose,  du  latin  prosa,  [^our  prorsa  (oralio),  discours  direct. 

—  Prorsa  facundla.  (Apulée.) 

La  prose  est  le  pain  de  la  pensée,  dont  lapoésie  est  le  gâteau. 

—  On  dit  :  vile  prose,  prosaïque,  d'un  discours  commun  et  sans 
élévation,  par  opposition  aux  vers,  qu'on  appelle  «  le  langage  des 
dieux  ». 

—  Horace  appelle  mm^d  pedestris,  nmse  pédestre,  qui  ne  monte 
pas  Pégase,  une  poésie  dont  les  vers  ressemblent  presque  à  de  la 
prose,  sevmo  pedestris. 

Prosopopée,  du  grec  7J/'o.9(î/)on,  personnage,  poiéô,  faire. 
Figure  oratoire,  par  laquelle  on  donne  la  parole  et  la  vie  aux 
morts  ou  aux  êtres  inanimés. 

Prote,  du  ixrcc  prôlos,  le  premier. 

Le  maître  imprimeur. 

Restif  de  la  Bretonne  en  a  dérivé  proferie. 

Protection,  du  latin  prolcclio,  de  ptrotegere,  couvrir. 

—  Le  grand  protecteur,  le  seul  protecteur  de  l'homme,  c'est  le 
travail. 

Protée,  du  grec  Proleus,  de  prôtos. 
Le  plus  ancien  des  dieux. 

—  Protée,  dieu  marin,  tlls  de  Neptune,  était  chargé  de  garder  le 
troupeau  des  moutons  marins.  Il  prédisait  l'avenir  ;  mais  on  ne 
pouvait  le  lui  arracher  qu'en  l'enchaînant,  et,  pour  échapper  à 
ceux  qui  le  consultaient,  il  se  métamorphosait  de  cent  manières,  se 
changeait  en  bête,  en  feu,  en  eau,  etc. 

—  On  appelle  y^ro^e(?,  un  homme  qui  change  sans  cesse  d'opinion, 
de  langage,  comme  les  courtisans,  qui  savent  cacher  leurs  senti- 
ments sous  un  masque  trompeur.  (Voy.  caméléon.) 


PRO  323 

Protestant. 

Syiiuiiyiiii's  :  ralvinlste.  Imiiucnot,  luthérien,  parpaillot,  réformé. 

—  Les  sectateurs  de  Lutlioi'  furent  nommés  protestants  parce 
qu'en  l')29.  ils  protestéi-ent  ronli'e  un  décret  de  l'empereur  et  de 
la  diélt'  de  Spire,  qui  défendait  toute  innovation  en  matière  de  reli- 
f:ion.  et  déclarèrent  qu'ils  en  appelleraient  au  Concile  général. 

—  Parpni/tot  vient  de  Jean-Pierre  de  Parpaille.  l'un  des  chefs 
calvinistes.  déca[»ité  à  Avignon  en  loGïi. 

Protocole. 

A  Byzance.  on  nommait  protocollum,  ou  premier  registre,  le 
\olume  destiné  à  contenir  les  actes  publics,  et  qui  était  fait  de 
papier  dans  la  fabrication  duquel  entrait  de  la  colle. 

—  En  diplomatie,  les  protocoles  sont  les  procès-verbanx  des 
conférences  tenues  par  les  ministres  plénipotentiaires. 

Ce  mot  fut  adopté,  en  181  i  et  I8I0,  au  Congrès  de  Vienne,  ainsi 
qu'à  ceux  d'Aix-la-Chapelle  et  de  Vérone. 

Prou,  adverbe  :  provençal  p?'o un,  du  lalin  probe  :  IAqu  pluti'it 
que  de  prou  fit. 

Assez,  beaucoup. 

On  disait  autrefois  après  les  grâces  :  «  Prou  fasse  !  »  Que  ce  repos 
vous  prolite  :... 

.Madame,  grand  prou  vous  face  :  (Ifeptaméron,  nouv.  20.) 

Prouver,  du  latin  proixire. 

Ce  mot  a  fait  autrefois  preuve,  comme  trouver  treuce,  à  certaines 
formes  de  sa  conjugaison.  La  trare  en  est  restée  dans  le  substantif. 

Provençal,  dérivé  de  Provcme,  latin  Prorincia. 

—  L'idiome  provençal  est  né  de  bi  corruption  du  latin,  pourri- 
ture féconde,  d'où  sont  nées  des  langues  parfaites. 

—  Le  provençal  est  une  la  noue,  tandis  que  le  français  n'est 
qu'un  patois.  (Castil-Blaze.) 

—  Varron  appelait  .Marseille  Trilinr/ui.s,  parce  qu'on  y  parlait  le 
grec,  le  latin  et  le  gaulois,  et  l'on  peut  juger  par  le  Dictionnaire 
qui  suit,  que  de  ces  trois  langues  les  deux  premières  ont  cou- 
couru  presque  exclusivement  à  former  le  provençal,  qui  est  resté 
ce  qu'il  était  au  .Moyen-Age,  avant  la  formation  de  la  laniiue  fran- 
çaise. 

-—  La  laiiLiue  française  ne  se  parle  en  Provence  que  depuis  la 
Révolution  française.  Avant  cette  époque,  elle  n'était  étudiée  que 


326  IMID 

par  los  pcrsonnos  ol)li;i('OS  do  la  savoir.  n(,  dans  los  meilleures 
sociétés,  on  ne  parlait  que  la  lan<:ue  du  pays. 

Lorsque  Louis  XVIII,  encore  comte  de  Provence,  vint  \isiler  relie 
province,  on  eut  de  la  peine,  dans  plusieurs  villes,  à  trouver  des 
personnes  capables  de  le  haranguer  en  français;  et  nn-mc  à  Mar- 
seille, il  y  avait  alors  peu  de  négociants  à  qui  celte  langue  lût 
familière.  On  l'enseignait,  mais  le  provençal  était  resté  dans  l'usage 
général.  Il  ne  lallul  rien  moins  que  la  Révolution  pour  changer  ces 
anciennes  habitudes,  et  répandre  rapidciueul  l'usage  du  français. 
Cependant,  aujourd'hui  encore,  la  population  des  campagnes  et  de 
certains  quai'tiers  des  grandes  villes  reste  fidèle  à  son  ancienne 
langue. 

—  La:  langue  provençale  était  à  son  apogée  de  perfection  de  iOoO 
à  1250. 

(Nota.  —  Ici  devait  prendre  place  un  Dictionnaire  des  mots 
provençaux  tir'es  du  grec,  du  latin,  de  l'arabe,  etc.,  dont  nous  ne 
trouvons  aucune  trace.) 

Provence,  du  latin  Provincla,  la  province  par  excellence. 
Rac.  procul,  ctncere,  vaincre  au  loin. 

—  Synonyme  :  la  Gueuse  parfumée.  (Sévigné,  marquis  de  Galiffet.) 

T.e  Parlement,  le  Gouverneur,  la  Durance, 
Ces  trois  ont  gâté  la  Provence. 

Gâter  est  employé  ici  dans  son  acception  étymologique  de  dévaster. 

On  a  dit  aussi  : 

Trois  choses  gâtent  la  Provence  : 
Le  vent,  la  comtesse,  la  Durance. 

De  ces  trois  fléaux,  le  Parlement  n'existe  plus;  la  Durance, 
dérivée  en  canaux,  désaltère  Marseille,  arrose  ses  jardins,  et  fertilise 
la  Grau  et  une  grande  partie  des  plaines  du  Vaucluse.  Reste  le 
mistral,  que  l'on  continue  à  maudire. 

Lèvent  du  nord-ouest,  appelé  mistral  (maître  vent,  magistral), 
est  un  vent  violent  et  froid,  qui  règne  en  Provence  et  en  Languedoc. 
Les  aûciens  l'appelaient  céphire,  joli  nom  pour  un  bien  vilain  vent  ! 

Auguste,  qui  visita  la  Provence  (7  ans  avant  Jésus-Christ),  lit  élever 
à  Marseille,  un  temple  à  ce  vent,  que  les  Latins  appelaient  Cœcias 
ou  Clrcus,  du  mot  celtique  cyrch,  violence. 

Strabon,  dans  sa  Géographie,  l'appelle  Melamboréas.  vent  noir. 
C'est  un  vent  local  ;  Pline  en  parle  en  naturaliste,  et  dit  qu'il  ne 
faut  pas  planter  d'arbres  dans  la  Gaule  Narbonnaise,  contre  la 


diroction  do  ro  voiil.  miiis  ;i  r;il)i-i.  p;irro  qu'il  onlêvc  même  le  toit 
des  MKiisoiis.  S;i  violence  es!  exliviiie:  il  renverse  les  obstacles 
(|n'il  rencontre,  el  soulève  les  cailloux.  ;in  point  (ju'on  a  renoncé 
de(iuis  lou.Lîtenips  ,'i  Liarnir  de  vili'cs  la  façade  nord  dn  chrdeau  de 
Griuiian.  ancienne  ivsidence  de  la  tille  de  M""^  de  Sévigné,  situé 
près  de  .Montéliinai' :  elles  étaient  brisées  parles  cailloux,  que  le 
Nent  lançait  comme  avec  une  fronde. 

|]n  l7()U-7().  ce  \eiil  l'éuna  pondant  quatre  moisjlo  suite. 

On  l'appelle  i  le  balai  do  la  Provence  «. 

Plusieurs  contrées  de  la  Provence  sont  abritées  du  mistral  par 
des  montaLiues  :  Cannes,  le  Golfe  Juan,  Yallauris,  placés  derrière 
le  l'enipai't  do  rEstérel.  (Voy.  Hyères.) 

—  La  vicomtesse  de  ïurenno,  Cécile  de  Comminge,  maîtresse 
de  Clément  VI,  mort  à  Avignon,  le  (î  décend)re  1352,  exerça  sur  ce 
pape  un  ascendant  funeste,  et  fut  cause  do  beaucoup  do  malheurs 
pour  la  Pi'ovonco. 

—  La  Durance  [Dnicnlid)  a  un  cours  très  rapide,  et  ses  débor- 
dements sont  torrentiels. 

Tite-Livc  (XXI,  'Xi)  la  dt'crivait  déjà,  quand  il  disait,  au  sujet  du 
passage  d'Annibal  :  Non  nariiim  pniivns  esl  ;  elle  n'est  pas 
navigable. 

Silius  Italiens  dit  qu'elle  roule  à  grand  bi'uit  dos  arbres  déracinés 
et  dos  morceaux  do  montagne.  Cependant  son  nom  de  Druenlla 
seuddorait  indi(pier  ((ue  plus  tard  les  Romains  la  rendirent  navi- 
gable, ou  du  moins  tlottablo  pour  les  chouos  que  produisait  la 
Provence. 

—  Godeaù,  évèque  do  Yence,  poète,  académicien,  et  familier  de 
l'hôtel  de  Rambouillet,  dans  des  représentations  au  roi,  au  sujet 
d'un  nouvel  impôt,  appelle  la  Basse-Provence  «  une  gueuse  parfu- 
mée »,  parce  qu'elle  ne  produit  pas  assez  de  grain  pour  nourrir  les 
habitants.  Depuis  ce  temps,  la  gueuse  s'est  enrichie  à  vendre  ses 
paj'fums.  et  Grasse,  où  se  font  la  plupart  des  essences  que  la 
Provence  fournit,  a  été  appelée  la  «  Cassolette  »  de  la  France. 

'—  La  Provence  est  une  serre  chaude  pour  les  santés  délicates. 
(M-^e  de  Sévigné.) 

—  Il  y  a  en  Provence,  un  grand  noml)re  de  localités  encore  plus 
favorisées  que  les  autres,  qui  se  recommandent  par  leurs  qualités, 
et  auxquelles  leur  nom  sert,  en  quelque  sorte,  d'enseigne  : 

Auribeau  (Basses-Alpes),  de  Aura,  hella,  bon  air. 
Flassans  (Var),  de  Flatus  sanus. 


:î28  I'uo 

lîonuvo/.or  (B;issos-Alpos),  si^nilio  l)cllc  vue. 

Y;illt('ll(',  V;il  bonne,  Val  lis,  hclla,  bona. 

Les  Âni(';nicrs  pr^s  Tonlon,  de  Amirnus,  ;igréable. 

Snllicrs  (Var),  de  Solnrla.'.  ensoleille'*. 

Vallensolle  (Basses- Alpes),  de  Vallis  Solis  (?). 

Vallauris  (Alpes-Marilimes),  de  Vall/'s  ainva. 

Yaumeil  (Vaiicliise),  de  Vallis  mellis. 

Digne,  Eyguier,  Marligues,  la  Palud,  le  Pradet,  Vancluse,  rappel- 
lent l'abondance  des  eaux  de  la  Provence,  et  il  semble  que,  dans  ce 
beau  pays,  la  nature  s'est  plu  à  réunir  les  trois  éléments  nécessaires 
à  sa  fécondité  :  le  soleil,  l'eau  et  l'air. 

—  Le  tambourin  et  le  galoubet  de  Provence,  sont  une  tradition 
de  la  musique  arabe  On  sait  que  la  Provence  a  été  assez  longtemps 
occupée  par  les  Maures. 

Le  galoubet  tire  son  nom  de  gai,  joyeux,  et  de  oubet,  pour 
aubeta,  petite  aube  ;  c'est  l'instrument  pour  jouer  des  aubades. 

Le  tambourinaire  provençal  est  joueur  de  galoubet  et  de  tambou- 
rin tout  à  la  fois.  Flûtiste  d'une  main,  grosse-caisse  de  l'autre,  il 
ressemble  par  le  baut  à  un  enfant  suçant  un  sucre  d'orge,  et  par  le 
bas  à  un  marcband  de  plaisir. 

Proverbe,  du  latin  prorerbium. 

—  Suidas,  Zénobius,  Diogénianus,  Apostolius,  sont  des  auteurs 
grecs  qui  ont  fait  des  recueils  de  proverltes. 

—  Le  proverbe  est  une  maxime  populaire,  ou  façon  de  parler 
sentencieuse,  qui  est  dans  la  boucbe  de  toute  sorte  de  personnes. 

—  On  a  prodigué  aux  proverbes  les  noms  les  plus  élogieux  : 
petits  évangiles,  sagesse  monnayée,  algèbre  des  idées  pratiques, 
écho  de  l'expérience,  sagesse  des  uations.  Ils  ont  eu  aussi  leurs 
détracteurs,  et  Molière  (Femmes  saranfes,  acte  IL  scène  7)  parle 
avec  mépris 

De  proverbes  traînés  dans  les  ruisseaux  des  Halles. 

—  Les  proverbes  sexpriment  généralement  en  langage  figuré, 
et  se  rattachent  aux  tropes.  Il  est  curieux  de  retrouver  dans  ces 
locutions,  d'origine  essentiellement  populaire,  des  rapports  si 
fréquents  avec  les  figures  de  rhétorique.  M.  Jourdain  faisait,  sans  le 
savoir,  seulement  de  la  prose  :  le  peuple  fait  presque  de  la  poésie. 

—  Le  proverbe  affecte  les  formes  variées  de  : 
L'allégorie  :  Qui  craint  les  feuilles  n'aille  pas  au  bois. 


PlU'  321) 

L'allitération  :  Son-et  do  deux,  secret  de  Dieu.  Mnl  ;i  qui  a.  pis 
a  qui  n"a.  Palieiicc  passe  science. 

I>anlitlit''se  :  (Iraïul  i)roinetteiir.  [lelil  donneur. 

Le  calembour:  Qui  bâtit,  nient. 

La  concision  :  Tout  ou  rien  :  pou  et  bon. 

La  contradiction:  Los  proverbes  ont  toujours  raisoii,  pai'ce  qu'ils 
ont  tous  leur  contraire,  et  répondent  ainsi  à  toutes  les  denuindes. 
Ainsi  :  Chose  promise,  chose  due.  Promettre  et  tenir  sont  deux.  — 
II  ne  faut  pas  chasser  deux  liè\res  à  la  fois.  Il  faut  avoir  deux  cordes 
ii  son  arc.  —  Il  ne  faut  pas  remettre  au  lendeniain  les  atîaires 
sérieuses.  La  nuit  porte  conseil. 

Le  jeu  do  mots  :  11  y  a  plus  de  trompés  que  de  trompettes. 

L'hyperbole  :  Il  se  noierait  dans  un  crachat. 

La  métaphore:  Graisser  la  patte;  faire  le  plongeon. 

Le  paradoxe:  Qui  paie  ses  dettes  s'enrichit.  L'appétit  vient  on 
mangeant. 

Providence,  du  latin  providentiel,  procidere,  pourvoir. 
C'est  la  sagesse  divine  douée  de  prescience  et  conduisant  toutes 
choses. 
De  la  même  origine  viennent  :  pourvoir,  provision,  prudence,  etc. 

Proxénète,  du  grec  proxénètes,  courtier. 
Désignait  à  Athènes  les  magistrats  chargés  de  loger  les  étrangers 
venus  dans  la  ville  pour  affaires  politiques. 

Prude,  de  rancien  français  ;);'or/e:  féminin  de  preux:  il  s'est 
pris  anciennement  dans  un  sens  avantageux. 
Femme  très  réservée,  qui  manque  d'imprudence.  Misé  Pesqui-pas. 

—  Synonymes  :  sucrée.  Faire  la  prude  :  faire  la  bégueule  :  faire 
sa  Sophie  :  alïocter  des  airs  de  sagesse. 

—  La  pruderie  est  en  raison  directe  de  la  corruption. 

La  pruderie  est  la  grimace  et  l'hypocrisie  de  la  pudeur.  (Massias.) 

Prudence,  ûo,  prudent  lu,  contraction  de  prooldenlla. 
Vertu  qui  fait  éviter  les  dangers,  dans  les  cas  difficiles. 

—  On  dit  de  1" homme  prudent  qu'il  est  «  garé  des  voitures  »,  par 
allusion  aux  dangers  de  la  circulation  à  Paris. 

—  La  prudence  est  la  portière  du  cœur  :  elle  n'ouvre  pas  à  la 
folie. 

—  La  prudence  est  une  des  quatre  vertus  cardinales. 

Chez  les  anciens,  elle  se  confondait  avec  la  science,  comme  on 
le  voit  dans  le  mot  Jurisprudence,  qui  signifie  science  du  droit,  et 


330  IMll 

dans /??v<r/7/r);/?m^,  lioniiiio  insl mit.  fhnisi  pour  jii^f-.'ii-hilrc  dans 
les  ('onlosl;itions  onlre  incmlircs  d'un  corps  de  inùtier. 

—  On  dit  :  la  priidcncf  du  serpent. 

Prud'homme  est  formé  comme  sagr-fcnunn. 

—  Monsieur  .losopli  Pj-ndhomme,  ci'éé  i»arll.  .Monnier.  vers  1830. 
est  le  ty|)e  de  la  lièlise  honrueoise  an  xi.x*"  siècle.  C'est  l'iiomnie  ijiii 
cache  sous  une  apparence  prave  et  sérieuse  la  nullité  de  son  esprit, 
et  répèle  avec  emphase  les  banalités  qu'il  a  lues  dans  son  journal. 

H.  Monnier  a  pris  pour  modèle  de  son  portrait  un  peu  chargé, 
le  bourgeois  de  Paris,  raisonneur  et  sentencieux. 

Prune,  du  latin  prinium. 

—  Ce  nest  pas  pour  des  prunes  :  ce  n'est  pas  pour  rien. 
Prune  est  ici  le  fruit  de  l'épine  noire,  ou  prunelle,  fruit  âpre, 

sans  utilité,  si  commun  qu'on  ne  recueille  pas. 

Si  je  suis  aHligc,  ce  n'est  pus  pour  des  prunes. 

(Moi.ifciiE,  Cocu  iniof/iiiaire,  16.) 

—  Mangez  des  prunes,  nos  pourceaux  n'en  veulent  plus.  {Moyen 
de  parvenir,  ch.  73.)  Vieux  dicton  peu  poli,  pour  oITrir  une  chose 
qu'on  a  en  surabondance. 

—  Les  prunes  de  Reine-Claude  doivent  leur  nom  à  la  reine 
Claudine,  première  femme  de  François  I'''. 

On  raconte  aussi  que  la  reine  Claude,  à  la  suite  de  la  première 
croisade,  donna  son  nom  à  des  prunes  délicieuses  rapportées  de 
Palestine.  Les  arbres,  plantés  dans  le  jardin  du  palais  des  Tour- 
nelles,  donnèrent  des  fruits  exquis,  souvent  volés  la  nuit  par  les 
écoliers.  Ces  amateurs  de  reines-claude  étaient  condamnés  par  le 
Châtelet  à  être  pendus. 

A  quelque  temps  de  là.  un  truand  vola  les  diamants  de  la 
couronne.  Il  fut  aussi  condamné  à  la  potence  :  mais  arrivé  au  pied 
du  gibet,  il  dit  avec  une  certaine  fatuité:  «  Au  moins  ce  n'est  pas 
pour  des  prunes  !  » 

—  Les  prunes  de  Monsieur  reçurent  ce  nom,  parce  que  Monsieur, 
frère  de  Louis  XIY,  les  aimait  beaucoup. 

Prusse. 

Travailler  pour  le  roi  de  Prusse:  sans  salaire,  pour  l'amour  de 
Dieu. 

Le  roi  de  Prusse  dont  il  est  ici  question,  c'est  Guillaume  I'"',  qui 
pressura  le  peuple,  très  malheureux  sous  son  règne. 


PUG  331 

—  Le  soldat  pnission,  avec  son  pai-aloniierre  sur  la  tiHc,  c'est 
Mars  coillV'  en  cliicard.  (Cli.  IIii.oo.  !23  jnilk'l  1870.) 

Pseudo,  (in  Lit-cc  pscados,  niensoMLic. 

Ce  |ir(''li\('  hiMiriiihlc  s'ajonlc  à  crrlains  mois,  [loiir  niar(iin'i'  (jno 
la  ([nalilé  ({n'ils  cviiriMicnt  es!  fausse. 
Ps(Mul()-|)ro|iln'tt'.  |)S(Mi(l()-aMii. 

Pseudonyme,  lonm''  du  |in''i'rdrii(  et  de  onomn.  nom. 

(Voy.  noms  pseudonymes.) 

M"«  Nathalie  (des  Français)  s'appelle  Zaïre  Ma\el;  M"«  Agar, 
reçue  en  ISlîî).  sappelle  Chauvin  ;  M"  "  Belval  et  SilLy,  deux  sœurs, 
se  nomment  Goret  :  M""'  Cora  PearK  est  Crurh  :  Théi'ésa  s'appelle 
Emma  A'aladon. 

Puant,  parti(i|)t'  présent  ({a  puer  ■.  \'A{'m  putere. 
On  ne  saurait  y  \oir  une  syncope  d'impudent. 
Au  ligure:  important,  lier,  orgueilleux. 

Public,   du  latin  pub/icus.  par  popalicits.  qui  appartient  au 
peuple. 
Sa  Majesté  Tout  le  monde. 

—  Combien  faut-il  de  sots  pour  faire  un  public  ?  (Goethe.) 

—  Le  public,  cet  être  aux  cent  têtes,  qui  est. toujours  le  même  et 
toujours  changeant,  ce  tout  le  monde,  enfin,  qu'on  dit  a\oir  plus 
d'esprit  que  Voltaire,  plus  d'argent  que  Crésus... 

—  En  puldic  :  rorani  populo. 

Publicain,  du  latin  puhliranus. 

Dans  la  Bible,  les  pulilicains  sont  les  percepteurs  de  rinqtùl. 

Fermiers  des  deniers  publics  chez  les  anciens  Romains.  Comme 
ils  couraient  de  grands  risques  dans  le  recouvrement  des  impôts,  ils 
se  montraient  fort  durs  à  l'égard  des  débiteurs  de  l'État.  Ils 
abusaient  même  quelquefois  de  leur  pouvoir  au  point  de  se  rendre 
odieux  aux  populations. 

Chez  les  Juifs,  les  publicains  étaient  en  exécration,  et  l'un  des 
reproches  faits  au  Cbi-ist  par  ses  compatriotes,  était  de  fréquenter 
les  publicains  et  les  femmes  de  mauvaise  vie.  (Voy.  saint  Mathieu.) 

Puce,  du  latin  jiule.r,  pullretn. 

—  M.  de  Metteruich  a  la  Prusse  à  l'oreille,  disait-on  en  186G,  à 
propos  des  préparatifs  de  guerre  de  Bismarck. 

—  Avoir. la  puce  à  l'oreille  :  avoir  des  inquiétudes  sur  le  résultat 
d'une  affaire. 


332  PII 

Pure  ;i  l'oreille,  l'homme  réveille. 

La  Didun,  que  laraour  réveille 
Et  lui  met  la  puce  à  loreille. 

(ScARRiis,    Virgile  trace.tti.^ 

Pucelle,  du  diuiinutif  puUitoUn .  de  pulla  :  provençal  piucella  ; 
de  pullus,  tout  petit  animal. 
Le  latin  avait  aussi  pndlcella,  diminutif  de  pudica. 

Pudeur,  du  latin  pudor,  de  piidere,  avoir  honte. 

Pudeur  se  disait  aussi  en  latin  lerecundia,  qui  a  donné  vergo- 
gne: d'où  femme  déver.irondée. 

C'est  Desportes  qui  a  créé  ce  mot  aussi  cher  à  la  poésie  qu'à  la 
prose. 

—  La  pudeur  est  la  couscience  du  corps. 

La  pudeur  lut  toujours  la  première  des  gi'àces. 

(La  Chal-ssée,  Ecole  des  M'tri-t.  II,  9.* 

La  beauté  sans  pudeur  est  une  fleur  tombée  dans  la  boue. 
La  pudeur  !  belle  \ertu,  qu'on  attache  sur  soi  avec  des  épingles. 
La  pudeui-,  sorte  de  modestie  de  la  matière,  n'est  souvent  qu'une 
feuille  de  vigne  à  jour... 

—  Proh  pudor  '....  ô  honte!  Interjection  latine,  qui  exprime  le 
dégoût  inspiré  par  un  acte  inconvenant,  incongru.  Il  répond  à  : 
Fi  donc  !  et  aussi  assez  bien  au  schoking  des  pudiques  ladies. 

Puer,  du  latin  putere. 

—  Puer  comme  un  bouc.  Les  Latins  disaient  hircosus  dans  le 
sens  de  impudique. 

—  De  puer  vient  putois,  mammifère  digitigrade,  voisin  des 
martres,  et  exbalant  une  odeur  fétide. 

De  là  aussi  :  punais,  punaise. 

—  Tuer  les  moucbes  au  vol  :  avoir  l'haleine  puante. 
Puff,  mot  anglais,  qui  signifie  bouffée. 

Désigne  tout  genre  de  publicité  mensongère  qui  a  pour  but 
d'attirer  l'argent  du  public.  C'est  le  dernier  mot  du  charlatanisme. 
Barnum  est  le  Napoléon  du  pulï.  (Voy.  canard.) 

Puis,  du  latin  po-ft,  provençal  pueis. 
De  là  vient  depuis. 

Puissance,  vieux  iràMçViii poissant .  du  latin  hàrlrATe  passent em. 

La  puissance  qui  demande,  ordonne  :  les  prières  des  rois  sont 
armées.  —  Sntis  imperat  qui  rogat  potentia  ;  armatœ  sunt 
preces  regum.  i^Charron,  Sagesse  III,  2.) 


l'I'T  33îi 

Punch,  mot  andnis. 

Hoissoii  spiritiioiise  faite  avec  du  llic,  du  rilruii,  du  sucre  et  du 
rliuui  :  euipruntée  aux  Anglais,  et  introduite  en  France  après  la 
paix  dt'  1703. 

Punir,  du  latin  7^?/n//r.  On  récrivait  autrefois  pugnir,  comme 
s'il  fut  \cuu  de  /ji/f/ims,  poing. 

—  l^e  droit  de  punir  doit  être  elïacé  du  code,  d'après  certains 
philosophes  qui  n'admettent  pas  la  responsahilité  humaine. 

Fouricr  veut  qu'on  ne  réprime  pas  les  passions,  mais  qu'on  les 
dirige.  Le  moyen  de  suppi'inier  la  pénalitèest  l'instruction  répandue 
dans  toute  la  société  :  l'ouverture  des  écoles  fera  fermer  les  prisons. 

—  In  procureur  est  un  magistrat  qui  prouve  son  horreur  du 
sang,  en  faisant  verser  le  plus  de  sang  qu'il  peut. 

Pur,  (lu  h\\\n  j>urus,  du  grec  j)ii/\  le  feu,  qui  est  l'emhlème  de 
toute  purilication. 
Qui  est  sans  mélange. 

—  Dérivés:  pureté,  aiiurer,  purifier,  déi»uratif.  purger,  purga- 
toire, impur. 

—  Aux  purs,  tout  est  pur. 

Purée,  du  latin  piirare,  nettoyer,  passer  à  l'étamine  ;  ou  plutôt 
de  porrum,  poireau,  comme  l'indique  le  vieux  mot  porréo.  ou 
poireo. 

—  Purée  septemhrale  :   le  vin.  (Haijelais.) 

Purgatif,  purger,  du  VaWw puvfinro. 

.Médi(;;tiou  propre  à  déterminer  des  évacuations  alvines. 

Synonyme  :  récurer  le  chaudron  (trivial). 

Purisme,  défaut  ipii  consiste  à  alïecter  une  trop  grande  pureté 
de  langage. 
Le  puriste,  dit  La  Bruyère,  parle  proprement  et  ennuyeusement. 
Le  puriste  est  le  puritain  du  langage. 

Puritains,  secte  qui  était  attachée  plus  pureincnl  (pic  les  autres 
presf)yléri(^us  à  la  lettre  de  l'Ecriture. 

—  On  appelle  7>;o*//rt//«  un  personnage  de  mceurs  rigides. 

Put,  radical  de  putorc,  puer  :  de  pulare,  penser  ;  et  du  mot 
piilus,  petit. 

Pute,  proven(;al  7>^//''/,  petite  lille  ;  féminin  de  petit  garçon: 
comme  fjarse. 


:m  pvi; 

Il  ;i  donné  nii  d(''i'ivé  injnrionx  et  ni;illionnf'to.  nynnt  flinnL'-L'  son 
;ic(0[ili()n  prcniirrc  en  celle  de  juif  if/a,  iin;inte. 

—  PriniilixeNienl.  <e  nicil  ét.iit  lionnëte.  Goldoni  m  coinposé  une 
roniédi(!  inlilnlée  /a  Vula  lioiiorditi,  l;i  lille  honnête. 

—  Les  trouliadoiirs  l'ont  loujoni-s  employé  dans  le  sens  péjoratif 
i\i'  j)i//...,  conrtisnne,  vilaine,  proslitnée. 

—  il  échappait  souvent  à  la  reine,  de  dire  (en  i)ailant  de  M""^  de 
iMontespan)  :  «  Cette  pute  me  fera  mourir.  »  (Saint-Simon.) 

JdHon  ne  pulanos  lio'l  salclh  ex  leintz. 

(P.     CAUblNAr..) 

(Couchant  avec  prostituées  jusqii  au  soleil  levé.) 

Le  très  clier  frère,  indocile  cl  mtifin. 
Vous  la  l'ima  très  riclienient  en  lain. 

(liriEssET.   ]'ert-\'ert.) 

Putiphar.  (Yoy.  Genhe  XXXYil,  et  chaste.) 

Pygmalion,  nom  jnytholoiiique. 

Sculpteur  de  l'ile  de  Chypre,  dégoûté  du  niai'ia.se  par  l'horrilile 
dépravation  des  femmes  d'Amathonte,  résolut  de  vivre  dans  le 
céUhat.  Vénus,  irritée,  le  rendit  follement  amoureux  d'une  helle 
statue  d'ivoire,  œuvre  de  son  ciseau  ;  puis,  à  sa  prière,  anima  cette 
statue,  que  Pygmalion  épousa  et  dont  il  eut  un  lils.  Paplius,  qui 
fonda  la  ville  de  Paphos. 

Pygmées,  du  grec  puanu',  coudée. 

Race  d" hommes  que  la  Fable  place  eu  Liljye. 

Ils  n'avaient  qu'une  coudée  de  hauteur.  Leurs  femmes  devenaient 
mères  à  trois  ans,  et  étaient  vieilles  à  huit.  Une  armée  de  Pygmées 
ayant  assailli  Hercule  endormi,  ce  héros  les  enveloppa  dans  sa  peau 
de  lion,  et  les  porta  à  Eurysthée. 

Les  modernes  ont  vu  revivre  cette  fable  dans  le  Voyage  de 
Gullirer.  (Voy.  mynnidons.) 

Pyrame  et  Thisbé. 

Pyrame,  jeune  Assyrien,  aimait  Thisbé.  Ils  projetèrent  un  rendez- 
vous  hors  de  la  ville  sous  un  mûrier  blanc.  Thisbé,  arrivée  la 
première,  fut  attaquée  par  une  lionne,  qui  avait  la  gueule  ensan- 
glantée. En  s'enfuyant,  la  jeune  lille  laissa  tomber  son  voile,  que  la 
bète  souilla  de  sang  en  le  déchirant.  Pyrame  survint,  aperçut  les 
lambeaux,  et,  croyant  Thisbé  dévorée,  se  perça  de  son  poignard. 
Cependant  Thisbé  revint  du  lieu  où  elle  s'était  réfugiée,  et.  trouvant 
le  cadavre  de  son  ami,  se  perça  du  même  poignard. 


PYT  333 

Le  inùiiiT  fui  teint  du  sang  des  deux  amants,  cl  les  mûres  qu'il 
|)ni-lait  (l('\iiirt'iit  l'onp-fs.  de  Manches  (|ii"elk'S  i-laient  auparavant. 

Pyramidal,  pyramide,  du  iiwc  pin-fu/iis. 
Synonyme  de  ctilossal,  très  grand. 

—  La  grande  jiNramide  de  Clié()|is.  construite  sons  la  iv"  dynastie. 
4000  avant  .lésus-Chrisl,  a  233  mètres  de  côté  à  la  base  ;  sa  hauteur 
primitive  était  de  143  mètres.  Elle  a  une  masse  de  7o  millions  de 
[lieds  cubes,  et  fournirait  l»'s  matériaux  d'un  miii'  liant  de  six  pieds, 
long  de  mille  lieues,  qui  ferait  le  tour  de  la  Fraïu'e.  Supposez  la 
Grande  Pyr;iiiiid('  en  fer  blanc  creux  :  elle  pouri'ait  se  placer  sur 
Saint-Pierre  de  Uome,  qui  disparaîtrait  comme  une  muscade  sous 
le  gobelet.  (J.-J.  Ampère.) 

Leur  masso  indcslrucliljle  a  fatigué  le  temps. 

(Delii.le.) 

Audacia  saxd  (Stace)  :  audacieux  rocbers. 
Portentosœ  moles  (Pline)  :  masses  monstrueuses. 
Du  haut  de  ces  monuments,  quarante  siècles  vous  contemplent. 
(Bonaparte.) 

Pyrénées,  l'yrenœi  (montes). 

—  Il  n'y  a  plus  de  Pyrénées!  Lorsque  le  duc  d'Anjou  p;rrtit  pour 
régner  en  Espagne,  Louis  XIY,  pour  marquer  l'union  future  des 
deux  nations,  dit  :  «  Il  n'y  a  plus  de  Pyrénées  !  » 

Pyrrhonisme,  doctrine  professée  par  Pyrrlion,  (pii  avait  pour 
principe  de  douter  des  choses  que  tout  le  monde  regarde  comme 
certaines. 

Haliitude  de  douter  de  tout;  scepticisme. 

Pythonisse,  ou  l'ylhie. 

Devineresse,  femme  qui  exerce  la  divination  par  le  moyen  d'un 
esprit  malin  qui  est  en  elle.  (Actes  des  Apôlres,  ch.  XVL) 

Cet  esprit  s'appelait  Pytbon,  surnom  d'Apollon,  qui  rendait  ses" 
oracles  à  Delphes  sous  le  nom  de  Pythien,  parce  qu'il  avait  tué  le 
serpent  Python. 


:m  OUA 


Q  et  K  se  prononcent  souvent  comme  c  dur.  Le  «y  ne  faisait  point 
partie,  primitivoinont,  de  l'alplKibet  des  Latin?.  Ils  le  remplaçaient 
par  r  et  (Mi-ivait'nl  ohlicnni,  lociinlnr.  On  rinlr(jdi]isit  plus  tard 
pour  r('iii[tlarcr  la  syllabe  eu,  et  on  ne  le  (il  pas  suivre  d'abord 
de  1';/. 

Au  xvie  siècle,  il  s'éleva  une  dispute,  entre  la  Faculté  des  lettres 
et  celle  de  théologie,  sur  la  manière  de  prononcer  le  q.  La  Sorbonne 
soutenait  que,  dans  les  mots  latins  rjuisquia,  quanquam,  on  devait 
prononcer  /dsLis,  kankan  :  et  le  grammairien  Ramus,  dont  l'opi- 
nion prévalut,  voulait, qu'ils  se  prononçassent  comme  ils  s'écrivent. 
(Voy.  cancan.) 

—  Les  mots  français  coq  et  cinq  sont  les  seuls,  avec  \'0>/)rq,  qui 
terminent  par  un  q. 

Autrefois,  ou  y  pouvait  joindre  desjucq,  matin. 
Chantons  Noël  du  soir  jiisquan  dcsjnc(i. 

{('..  Maiiot.) 

Quadragésime.  (Voy.  canhne.) 
'  Ne  s'emploie  que  dans  la  locution  ecclésiastique  :  dimanche  de  la 
Quadragésime. 

Quadrature  du  cercle. 

Problème  insoluble,  puisque  le  rapport  de  la  circonférence  au 
diamètre  est  incommensural)le.  (Voy.  cercle.) 

Quand,  du  latin  quando,  provençal  quan. 

Quand  les  canes  vont  aux  champs, 
La  première  va  devant... 

Se  dit  à  ceux  qui  demandent  trop  souvent  :  Quand  sera-ce  ? 

—  En  Normandie,  ou  dit  :  «  Tu  partiras  quand  nous.  » 
Cette  locution  était  autrefois  quand  et  nous. 

Quant,  de  quantutn,  se  joint  à  à. 
Quant  à  moi  :  pour  ce  qui  est  de  moi. 

A  été  aussi  adjectif,  Aenant  de  quantus,  comme  on  le  voit  dans 
l'expression  :  toutes  et  quantes  fois. 


OUA  ?,'M 

Quarantaine,  di'ri\é  di'  t/i/arait/c,  i/iiadi-af/i/i/a. 
Noiiiltre  de  quarante  ou  environ. 

—  Temps  qu'un  navire  reste  isolé  des  lialiitants  d'un  pays, 
Ioi-s(pril  vient  d'un  lieu  oi'i  rè.iiue  une  maladie  contagieuse. 

1/épreuve  devait,  autrefois,  durer  quarante  jours,  d'où  lui  était 
\enu  son  nom,  qui  est  demeuré,  quel  que  soit  le  noini)re  de  jours 
ipie  dure  la  séquestration. 

Quart,  du  latin  (judiius,  quatrième. 

—  (juart  d'heure.  On  dit  inipi'oprement  :  six  heures,  huit  heures 
moins  le  quart  :  parce  que  le  quart  est  relatif  à.la  quantité  d'heures 
énoncée:  tandis  que  un  quart  est  a hsolu,  et  représente  le  quart 
d'une  unité.  Ainsi  huit  heures  moins  le  (juart,  [)ourrait,  à  la  rigueur, 
sitiuiller  six  heui-es.  en  retranchant  le  quart  de  8,  qui  est  2.  Mais 
S  heures  uuiins  nu  quart  ne  peut  exprimer  que  7  heures  3/4...  Tout 
au  plus  peut-on  dire  :  une  iieure  moins  le  quart. 

—  Le  quart  d'Iieure  de  Ualielais.  (Voy.) 

C'est  le  moment  de  payer  ce  que  l'on  doit  ;  moment  toujours 
désauréahle  et  souvent  emharrassaut. 

—  Passer  un  mauvais  quart  d'Iieure.  Les  anciens  attrihuaient 
une  mauvaise  influence  à  certaines  heures  ;  d'où  viennent  l,es  mots 
malheur  et  bonheur  (?). 

Quartier,  dérivé  de  quart. 

Ce  mot.  qui  siuniliait  le  quart  d'un  tout,  a  pris  le  sens  de  partie 
d'un  tout  divisé  en  un  nomhre  quelconque  de  parts. 

—  En  terme  de  blason,  le  quart  ou  l'écart  de  l'écusson  écartelé. 
Un  écusson  est  contre-écartelé,  quand  un  de  ses  quartiers  est 

lui-même  écartelé. 

/  escut  en  JllI  earliers,  et  en  cascun  ea?'fier  a  I  leo.  (Tarif  des 
monnaies  de  Provence.)  Un  écu  en  quatre  quartiers,  et  en  chaque 
quartier  un  lion. 

Dans  les  généalogies,  on  appelle  «  quartiers  de  noblesse  »  chaque 
degré  de  descendance,  soit  en  ligne  patei'uelle,  soit  en  ligne  mater- 
nelle. On  ne  pouvait  être  reçu  dans  certains  ordres,  sans  avoir 
justifié  d'un  certain  nomhre  de  quartiers.  Il  en  fallait  huit  pour 
entrer  dans  l'ordre  de  Malte. 

.  Cette  acception  du  mot  quartier  vient  de  ce  que  les  parties  d'un 
grand  écusson  contiennent  les  armoiries  ditïéreutes  désignant  les 
divers  chefs  dont  on  descend. 

A  l'origine,  on  mettait  sur  les  quatre  coins  d'un  tombeau,  les 


'X\S  Ql'A 

écus  du  p(''rc,  de  la  iikto  el  des  deux  ;jï»'u1s  du  défunt.  (Ju  \uil,  en 
Allemagne,  des  toui beaux  où  il  y  a  8,  10  et  32  quartiers. 

—  Quartier  de  ville.  Avant  Pliilippe-Au.uuste,  Paris  était  divisé 
en  quatre  parties  qui  étaient  nommées  quartiers,  à  cause  de  leur 
noml)rc  :  la  Cité,  Sainl-Jacques-la-Bouclieric,  la  Grève  et  la  Yerrei-ie. 

Depuis  1800,  il  est  divisé  en  20  arrondissements  et  80  quartiers. 

—  Pas  de  quartier,  sans  quartier.  Autrefois  il  était  d"usagc,  dans 
les  camps,  de  racheter  un  prisonnier  de  guerre  en  payant  pour  sa 
rançon  un  quartier  de  la  paie;'i  l.-ujncllt^  il  avait  droit  par  son  grade. 

Quasi,  advei'he  latin  :  presque,  en  quelque  sorte. 
On  dit  aussi  qudximent. 

C'est  une  ville,  en  vérité. 
Aussi  grande  (juasi  (](ie  Tlicbos. 

( Mor.itni:,  .1  inp h itrijon .) 

Quasimodo,  le  premier  dimanche  après  Pâques. 
Ce  nom  est  emprunté  aux  premiei's  mots  de  \ introït  de  la  messe 
de  ce  jour  ;  Quasi  modo  geniti  infantes. 

Quatre,  du  latin  quatuor. 

De  là  :  quart  et  quartier,  cadran,  écarleler,  etc.,  équerre  (en 
provençal  escairc)  et  équarrir,  mettre  d'équerre  ;  quadragésime, 
carême,  carré,  quadrature. 

—  Se  mettre  en  quatre  :  déployer  beaucoup  d'activité,  se  multi- 
plier. 

Dans  le  Berry  on  dit  :  se  mettre  en  deux,  se  dédoubler,  d'une 
femme  qui  accouche. 

—  Avoir  de  l'esprit  comme  quatre  :  faire  le  diable  à  quatre  ;  tiré 
à  quatre  épingles.  0  oy-  ^'c^  mots.) 

—  On  remarque  que  le  nombre  quatre  a  été  appliqué  à  des 
usages  très  nombreux.  Il  y  a  :  * 

Les  quatre  âges  du  monde  ;  les  quatre  points  cardinaux  ;  les 
quatre  saisons  ;  les  quatre  temps  ;  les  quatre  règles  de  l'arithmé- 
tique ;  les  quatre  éléments  ;  les  quatre  quartiers  de  la  lune  :  les 
quatre  conjugaisons  ;  les  quatre  évangiles  ;  les  quatre  épices 
(girofle,  muscade,  poivre,  cannelle)  ;  les  quatre  fleurs  (coquelicot, 
violette,  mauve,  camomille)  ;  les  quatre  fruits  (datte,  figue,  jujulie 
et  sebeste). 

—  Les  Quatre-Temps  sont  des  jours  d'abstinence  et  de  jeûne 
ordonnés  par  l'Église,  au  commencement  de  chacune  des  quatre 
saisons  de  l'année. 


()VK  339 

Quelqu'un,  di'  (/nchjue  et  tic  un. 

Parriit  ili'  /x'/sonuc,  (/itc/tj>/'i/n  ost  r;iiiloiir  de  tout  mrfnit 
aiionyiiio. 

Quclqu'im  ;i  l;iit  cela.  Cliaciin  a  eiileiRlii  din;  cela  à  (iiiel(|iriiii... 

Il  n'y  a  pas  une  làclieté,  un  mensonue,  une  boui'de,  une  calomnie 
qu'on  ne  mette  sni-  son  coni|ite.  Si  quelqu'un  existait,  il  réclame^ 
rait  certainement  en  justice  contre  l'alius  ([u'on  fait  de  son  nom,  en 
le  rendant  responsalile  de  toutes  les  turpitudes  de  riiunianilé. 
(Voy.  on.) 

Quenotte,  ancien  Irancais  t/uf/uie. 

Terme  lamiliei'  :  petite  dent,  comme  celle  des  enfants. 

Petites  ([ucnottes  jolies.  (Molière,  Princesse  d' Klide.) 

Querelle,  du  latin  (jnerehi,  plainte,  lamentation. 

(Voy.  querelle  d'A/fe/nand,  (ihjurade,  Cas/il/e.  noise.) 
. —  Synonymes:  prise  de  bec;  le  torchon   Ijrùle,  se  dit  d'une 
querelle  de  ménage  :  chercher  ([uerelle  ;  chercher  garouille  ;  avoir 
des  mots  ;  échanger  des  gros  mots  ;  avoir  des  raisons. 

—  Querelles  de  gueux,  durent  peu. 

Querelles  de  gueux  qui  se  raccommodent  à  la  gamelle. 

A  la  suite  de  bien  des  duels,  il  n'y  a  de  tués  que  des  poulets. 

Un  diner  a  un  coté  excellent  :  on  se  rencontre,  on  se  voit,  on  se 
parle,  on  fraternise,  et  tels  qui  arrivent  brouillés  à  mort,  finissent 
par  choquer  leurs  verres  et  par  se  donner  la  main. 

(Yoy.  ami  de  table.) 

—  Les  querelles  ne  dureraient  pas  tant,  si  tous  les  torts  étaient 
d'un  seul  côté. 

Quérir,  du  latin  (juœrere,  provençal  querre. 

Ce  terme  n'est  guère  resté  que  dans  ses  conqjosés  et  dérivés^  ; 
quête,  question  :  acquérir,  conquérir,  s'enquérir  :  exquis,  requête, 
perquisition,  etc. 

Questeur,  du  latin  quo'sior. 

C'était,  à  Home,  le  magistral  chai'gé  de  l'administration  des 
revenus  publics. 

Dans  les  assemblées  parlementaires,  ce  sont  les  membres  chargés 
de  diriger  renqtloi  des  fonds  alloués  à  ces  assemblées. 

Quêter,  dérivé  de  quête,  quœsita. 
Aller  à  la  chasse  avec  un  fusil  de  toile. 
Quêtes  de  charité  :  bienfaisance  à  la  lire. 


340  QUE 

Queue,  du  Ifiliii  raiuld.  de  c<i'tl<i,  piirrc  ([n'oii  coiipo  sans  daiifror 
la  (iiK'iio  à  (('l'iaiiis  ;iiiiiiiaii\. 

Quia  sine  damno  ohsi-rfdin',  ui  canihits  vidiimix.  (Vossius.) 

—  Dérive  :  roiiai'd.  coiiai'disc. 

—  CliifMi  d(ï  voleur  !  si  lu  recommences,  je  te  couperai  la  queue 
au  milieu  du  dos. 

—  J)i  cauda  vencnum  :  le  poison  est  dans  la  queue  :  c'est-à-dire 
le  piquant,  le  trait  d'une  anecdote,  d'une  épiuramme,  se  trouve 
dans  le  mot  de  la  lin.  Tout  l'intérêt  d'une  lettre  est  souvent  dans 
le  pnst-scrij)lum. 

—  Queue  rouge.  On  désigne  par  là  les  bouffons  de  théâtre,  les 
successeurs  de  Jocrisse  et  de  Cadet-Roussel,  qui  llorissaient  au 
temps  du  premier  Empire,  et  qui  portaient  sur  la  scène  une 
perruque  dont  la  queue  était  tortillée  d'un  ruban  rouge,  pour 
amuser  le  public.  (Voy.  7mban.) 

—  Il  n'est  pas  cause  que  les  grenouilles  n'ont  pas  de  rpieue.  C'est 
comme  :  il  n'a  pas  inventé  la  poudre  ;  il  man(iue  d'esprit. 

Ce  proverbe  vient  de  l'observation  du  pbénomène  de  la  méta- 
morphose du  têtard  en  grenouille.  Le  têtard  destiné  à  se  trans- 
former en  batracien  est  un  poisson  manquant  de  nageoires  latérales 
et  de  vessie  aérienne,  mais  pourvu,  comme  organe  de  locomotion, 
d'une  queue  plus  large  et  plus  longue  que  le  corps,  et  qui  lui 
permet  de  se  mouvoir  comme  avec  la  rame  d'un  godilleur.  Cette 
queue  formidable  a,  pour  la  soutenir,  un  prolongement  de  la 
colonne  vertébrale  :  pour  la  mouvoir,  des  muscles  puissants;  pour 
la  nourrir,  des  vaisseaux  considérables  ;  pour  l'animer,  de  nom- 
breux nerfs.  Pendant  la  métamorphose,  la  queue,  qui  va  devenir 
inutile,  décroît  et  se  résorbe,  pour  servir  au  développement  des 
membres  de  la  grenouille. 

—  Pacha  à  trois  queues.  Des  queues  de  cheval,  au  bout  d'une 
hampe,  servent  d'étendard  aux  Turcs.  C'est  aussi  un  signe  de 
dignité  dans  la  hiérarchie  militaire.  Ainsi,  le  grand  seigneur  a  sept 
queues  :  le  grand  vizir,  trois,  etc. 

—  Ruban  de  queue.  Route  longue  et  ennuyeuse. 

Au  commencement  du  xix*^  siècle,  après  la  grande  perruque  de 
Louis  XIV,  vint  la  mode  de  la  queue,  ou  sa/si  fis,  qui  était  une 
longue  mèche  de  clieveux,  réservée  derrière  la  tête,  et  qui  pendait, 
roulée  jusque  dans  le  dos.  On  se  servait  pour  cela  d'un  long  bout 
de  l'uban  noir,  que  l'on  tournait  autour  de  la  queue  de  cheveux, 
pour  imiter  le  légume  dont  la  mode  avait  fait  une  sorte  d'ornement. 


OUI  3il 

Queux,  (lu  lutin  rnqiiux.  ciiisiiiier :  cot/iio.  cuire;  italien  cuoco. 
On  dit  aussi  ro//.  iii;ii(i-i'  (■()([. 

Qui,  (lu  latin  t/i/i.  Pronom  conjonctif  et  inlerrouatif  :  é([uivaut  à 
U'ijucl  et  à  ItKiui'llc. 

I.r   lli;il    (r,-llllnll|-  csl    llllc  I'IkIi'   IM'illC   : 

i.nrsi|irii  nous  tient,  il  nous  faut  (ni  mourir  ; 
l/lii'il)('  (les  prés,  (|iicl!('  est  si  souveraiao, 
)/lifi|ii'  (ji's  près  ne  saurait  en  gut-rir. 

(Oli.iiil  [)0[)ulairp.  \'oy.  Mouilouv,  i7  inni   IS53.) 

—  Qui  est-(M^  ({iii  la  fait  >.  (|ui  est-ce  qui  l'a  pondu?  qui  est-ce  qui 
l'a  couvé  l  H(''i)onses  à  des  questions  trop  multipliées,  ou  trop 
pressées. 

—  L'ahhé  de  Marsy,  commentateur  de  Rabelais,  au  passage  du 
livre  Y,  cli.  18  :  «  jusqu'au  cul  »,  dit  qu'un  jour  le  Dante  reveuiint 
de  la  foire,  trois  ucntilsliomines  le  rencontrèrent,  et  lui  dirent, 
en  parlant  tous  à  la  fois  : 

«  —   Bonjour.   seiLineur  Dante.  —  D'où   venez-vous,   seigneur 
Dante  l  —  Le  gué  est-il  profond  l  » 
A  quoi  le  poète  répondit  : 
«  —  Bonjoui'.  —  De  la  foire.  —  Jus(prau  cul.  » 

Quia,  mot  latin  :  parce  que. 

—  Ktre  réduit  à  quia  :  ne  savoir  que  dire,  que  répondre. 

—  Dans  les  disputes  de  l'École,  où  l'on  discourait  en  latin,  celui 
qui  ne  savait  donner  le  pourquoi  d'une  chose,  disait  :  quia.  quia. 
et  en  restait  là.  (\o)'.  mettre  à  cul.) 

Régnier  (Satire  X)  dit  : 

l'ar  liasard  disputant,  si  rjnelipriin  lui  rt^'pliipie 
Et  (}u"it  soit  à  quia  :  Vous  cMes  liérétiiiue  ! 

Quibus,  mot  latin.  Sous-entendu  oninia  flniunt. 
L'argent.  (Voy.  /i/iauce.) 

ïu  sais  fart  deinploycr  m^ljlement  ton  (luitms. 

(DKSHOLI.ItKKi.) 

Quiconque,  latin  quicauique,  tout  homme  qui. 
(Voy.  (Ji//nc(n/i/)oix.) 

Quidam,  mot  latin  :  un  cerliiin. 

Terme  de  palais  :  personne  dont  on  ignore  le  nom. 

Quiétisme,  du  latin  quic/us,  tranquille. 

Erreur  de  certains  mystiques  qui   font  consister  la  perfection 


n42  QUI 

clirélionne  dans  l;i  seiilf  roiilcinjil.'ilioii.  on  nruliuïMiil  (■iirK'rciiif'nl 
U'S  a'iivros  exlrriciircs. 

Quille,  pour  rsfinilh'  ('.),  (''ciiillo  de  bois. 
Ail  \\\i\\vv  et  l'.iiiiilicr  :  j;iiiibo. 

—  Doimcr  ;'i  (iiiolqii'iin  sou  sac  cl  ses  quilles  :  le  ronvoycr. 

Quincampoix,  du  latin  (j  u  i  ru  m  (ju  (;('.). 

Une  de  l'aris,  niodilicalion  de  qui  (pien  jKnst .  fjiii  (jni  sen  l'àclie. 
De  môme  Quiquengrogne  élail  une  maîtresse  tour,  conslrnile  en 
dépit  do  (^o\\\  qu'exile  menarait.  «  Je  la  brilirai,  qui  qu'en  .uro.une.  » 

(J:o(jncr  est  remplacé  par  r/i'oi/sscr.  dans  les  vers  suivants  : 

.le  l'oluurnrniN .  qui  i\\['r\\  .unuissc, 
Devers  cet  a(i\t)eat  (rcain'  douce. 

iP'll'-lhi.i 

—  La  rne  (>^//  qu'en  tonne,  est  devenue  Tiquetonne. 

—  Il  y  a  aussi  un  Ouincampoix  sur  la  route  de  Rouen  à  Lille. 

—  M.  Paulin  Paris,  dai)s  un  discours  d'ouverture  du  cours 
d'bistoire  de  la  langue  française,  au  Collège  de  France,  où  il  rem- 
place M.  Julgard  Quinet,  s'excuse  modestement  de  son  insiiflisance  : 
mais  le  ministre  l'a  nommé,  et  «  bon  gré,  m;\\  gré,  il  faut  passer 
outre,  comme  on  disait  autrefois,  qui  qu'en  ait,  qui  qu'en  grogne  ». 

M.  F.  Génin  dit  que  «  qui  qu'eu  ait  »  est  un  idiotisme,  et  n'appar- 
tient pas  au  vieux  langage  français. 

Quine,  du  latin  quini,  cinq  à  la  fois. 

Cinq  numéros  pris  à  la  loterie  et  sortis  ensemble  de  la  roue. 

—  Le  quaterne,  quatre  numéros  sortant  ensemble,  se  payait 
To.OOO  fois  la  mise.  Le  quine  ne  se  jouait  pas  à  la  loterie  de  France. 

Quinquina,  du  péruvien  klnakina,  écorce  des  écorces. 

Le  quimiiiiua  a  été  appelé  «  poudre  de  la  comtesse  ».  C'était  la 
comtesse  Cbiuchon,  femme  du  vice-roi  de  Lima,  en  1G38,  qui  fut 
guérie  par  la  vertu  du  quinquina. 

D'où  le  nom  scientifique  de  cinchona,  donné  à  la  plante. 

—  Le  sulfate  de  quinine  a  été  trouvé,  en  1820,  par  Pelletier  et 
Caventon. 

—  On  appelle  «  quinquina  indigène  »  la  racine  de  gentiane.  (Voy.) 

Quintessence,  de  qubita  essen/ia.  cinquième  essence. 
Cliez  les  anciens,  c'était  la  substance  éthérée  ;  les  quatre  pre- 
mières étant  les  quatre  éléments  :  la  terre,  l'eau,  l'air,  le  feu. 

—  Les  essences  sont  plus  ou  moins  cbargées  d'Iiuiles  odorantes, 


QUO  343 

pnr  dos  (lislill.itioiis  iriu-lccs,  et  on  appelle  eau  de  lleiir  d'orange 
ddultle.  iri|ilf.  etc..  Teaii  plus  ou  moins  chargée  de  parfum;  de 
soric  (pic  celle  cpii  aurait  clé  distillée  cinq  fois  serait  véritablement 
de  la  (piiutessence  de  lleur  d'orange. 

—  On  i-emplace  coui'ammeut  f/itin/essrnrr  par  c/ixir,  de  l'arabe 
c//  a/,s/r.  esseii'-e  i)ai"  t>\relleuc('. 

Quinteux,  de  mauvaise  iiunicur.  (Voy.  grincheux.) 
(juinteux  comme  la  mule  du  |)a[)c. 

Quinze-Vingts,  ib'tiiital  des  aveugles,  à  Paris,  fondé  par  saint 
Louis,  pour  trois  cents  de  ses  cbevaliers.  qui  avaient  perdu  la  vue 
en  Palestine. 

Quiproquo,  du  latin  (pii pro  ([uo.  Prendre  un  (lui  pour  un  <iU()  ; 
ou  (/>////  jiro  >/>/(). 

—  (jui[)roquo  (l'aiJOtliicairc  :  méprise  grossière. 

—  Au  XIV  et  au  xv"^  siècle,  les  médecins  écrivaient  ces  trois  mots 
dans  leurs  ordonnances,  en  tète  d'une  colonne  particulière,  où  ils 
indiquaient  plusieurs  drogues  susceptibles  d'être  substituées  à 
d'autres,  dans  le  cas  où  celles-ci  manqueraient. 

—  Quiproquo  est  invariable. 

Quoi,  du  latin  quid.  Pronom  relatif  et  inlerrogatif. 

Ouoi  ?  de  quoi  ?  Qu'est-ce  ?  qu'y  a-t-il  l 

De  quoi  !  est  pour  :  de  quoi  s'agit-il  ? 

Quoi  !  Eh  quoi  !  sont  des  exclamations  d'étonnement. 

—  De  quoi,  s'emploie  substantivement,  dans  le  sens  de  bien. 
Cette  femme  est  un  bon  parti  :  elle  a  de  quoi. 

Ils  trouvaient  aux  champs  trop  do  (pioi. 

(I.A    FoNrAIMC.) 

—  De  quoi  !  exclamation  populaire,  pour  exprimer  l'indignation 
qu'excite  une  prétention  exagérée. 

Quoique,  conjonction  adversative,  de  quoi  et  (pie. 

C'est  un  solécisme  de  création  moderne,  composé  de  quid  et  de 
quod .  11  ne  se  rencontre  dans  aucun  auteur  français  ancien.  Il  est 
dit  dans  le  sens  du  latin  quanioi.s. 

On  doit  le  remplacer  par  encore  que. 

—  Quoi  que,  écrit  à  distance,  est  seul  français. 

(Juui  (luon  dise  Ai'istole  et  sa  docte  cabale... 

—  Le  général  Cialdini  est  appelé  à  remplacer  à  Paris  l'ambassa- 
deur Mgra.  Les  journaux  religieux  reprochent  au  général  italien 


344  ]\\\i 

(l'nvoir  coiilrihiK''  ;'i  d(''[>oss(''(lf'r  If  iiiipo  do  son  ])Oiivoir  toinporel  ; 
l'opiiiidii  |»iil)li(|ii(;  riicccpU'.  non  |);is  (jnoiqnc,  ni;iis  piircc  (jne. 

Quolibet,  du  l;ilin  (/i/od  lihrl,  ce  ({ni  ()i;nL 
Phiisanlcrio  trivi.ilc 

Quote-part,  du  l.ilin  (piola  pars,  fiiiollo  |);ii-|. 

(Juolc  csl  do  jnônie  origine  qiio  (jiKtlicnl,  di;  (jnotu's,  conihion  do 
fois  le  diviseur  est  contenu  dans  le  dividende. 

—  La  qiiolo-|)artest  la  part  qui  ro\iontà  chacun  des  ayants-droit, 
dans  une  répartition  ;  ou  ce  que  chacun  doit  payer. 


R 


R.  Mensibiif;  errntis,  purissi7na  vlna  bibatis.  Dans  les  mois 
qui  contiennent  un  7%  il  faut  boire  son  vin  sans  eau. 

Si  les  mois  ne  sont  erres, 
Le  poisson  no  nian.ii'i'z. 

(Xllime    SlKCl.E.) 

Rabâcher,  do  re  et  do  bâche  (?). 

La  bâche  est  une  sorte  do  cuvette,  où  se  rend  l'eau  puisée  par 
une  pompe  aspirante,  et  où  elle  est  reprise  par  d'autres  pompes 
pour  être  élevée  do  nouveau.  Ainsi  ral)àcher,  c'est  répéter  toujours 
la  même  chose. 

Eu  provençal,  rabàcbeur  se  dit  rababeon,  ropépiairo. 

—  Rabâcher,  selon  F.  Génin,  ne  vient  pas  de  bâche,  qui  n'existe 
pas  dans  la  langue  avec  le  sens  de  cuvette  :  ce  serait  un  composé 
dont  le  simple  manquerait. 

D'après  lui,  rabâcher  est  pour  rêvasser,  fréquentatif  péjoratif 
do  rêver,  qui  se  rencontre  souvent  dans  les  vieux  autours,  pour 
exprimer  l'idée  attachée  à  rabâcher.  Quant  à  la  permutation  de  v 
en  6,  elle  est  aussi  fréquente  que  colle  de  c  eu  ch.  D'où  la  formule 
V=:B,  C=^Gh. 

blem  dictum  est  crniies. 

(Ti:m;><:i;,  Hvautoniimoi-oumvnos,  V,  1.) 

Incudem  eamdem  t  a nd ère  {Ckér on)  :  rebattre  la  même  enclume. 
Rem  iota  die  concoquere  :  cuire  toujours  la  même  chose. 

—  Fonlenello  dit  à  un  rabâcheur  qui  lui  racontait  dos  faits  très 
connus  :  «  Monsieur,  il  faut  que  ce  que  vous  me  dites  soit  bien  vrai, 


RAB  3'io 

car  vous  iiio  l'iivo/.  ceiil  l'ois  riiconlé.  t'I  je  lai  CL'iit  fois  ciiteiidii 

raconter  aux  autres.  » 

rJiiIaiiKinl  raconte  à  morvoille, 
Mais  il  je  faut  \oir  ran'iiiciil  : 
Le  prcinicr  jour,  il  est  cliarmanl, 
l'jisiiilc  il  est  moins  anuisanl, 
i^uis  il  (k'vi(Mil  lin  peu  iH'danl  : 
Bref,  il  se  ivpMe,  et  sotiM'ut 
Vous  savez  par  coMir  (l("'s  la  x^illu 
Ce  qu'il  dira  le  jour  sui\anl. 

Rabat-joie.  Personne  triste,  sévère,  et  qu'ennuie  le  plaisir  des 
antres. 

Rabbin,  de  raùoin,  diable  O'idocq),  qui  vient  de  l'espagnol 
i^afjo,  queue. 

—  Ce  nom  a  été  donné  aux  docteurs  juifs,  parce  que  le  mépris 
pour  leur  race,  au  Moyen-Age,  les  avait  fait  com[)arer  au  dial)le. 

—  Plus  probablement  de  l'iiébreu  rahbl,  titre  d'bonneiir  qu'on 
trouve  dans  l'Evangile. 

Rabelais. 

Hoileiiu  appelle  Uabelais  «  la  raison  liabillée  en  masque  ». 
On  Ta  aussi  appelé  l'Homère  boulîon. 

—  Les  deux  mots  arabes  r«6,  le:,  signilient  maître  moqueur. 

—  Rabelais  signait  ses  ouvrages  Alcofriôas  Na:ier ,  qui  est 
l'anagramme  de  François  Rabelais.  Mais  il  ne  signa  ainsi  que  les 
deux  premiers  livres  ;  son  nom  parut  en  tète  des  suivants. 

Il  représente,  dans  son  livre,  Louis  XII  sous  le  nom  de  Grand- 
gouzier  ;  Gargantua  est  François  !«'•  ;  Pantagruel,  Henri  IL 

—  La  robe  de  Rabelais.  Rabelais,  cbargé,  par  la  Faculté  de 
Montpellier,  d'une  mission  auprès  du  chancelier  Duprat,  premier 
ministre  de  François  !«■",  obtint  de  lui  le  maintien  des  privilèges  de 
cette  Faizulté.  C'est  en  mémoire  de  ce  service,  et  à  cause  de  sa 
grande  célébrité,  qu'on  a  conservé  jusqu'à  ce  jour,  à  l'école  de 
médecine  de  Montpellier,  la  robe  qu'il  revêtait  pour  professer  ses 
leçons,  et  qui  était  de  drap  rouge  à  larges  mancbes,  avec  un  collet 
de  velours  noir,  sur  lequel  étaient  brodées  en  or  les  initiales  de 
son  nom  :  Franchcus  lîahedvsiis  Chinonen.sis. 

Les  bacheliers  revêtaient  cette  robe  pour  être  reçus  docteurs,  et 
ne  la  quittaient  pas  sans  en  emporter  un  morceau,  comme  relique 
et  souvenir  du  grand  docteur.  Elle  devint  si  courte,  vers  1600,  qu'il 
fallut  la  remplacer,  en  1610,  par  une  robe  neuve,  et  François 
Raucbin,  chancelier  de  la  Faculté,  la  remplaça  encore  en  1700. 


346  \\m: 

—  Le  qiiiirl  (l'In'iirc  de  l{;il)('l;iis  :  le  iiioiiiciit  de  p.'iycr. 
l{;il»t»I;iis  (''Uinl  ;i  Home,  en  l'i^i,  (huis  l;i   suite  de  l'évoque,  de 

Paris,  Je;in  du  Hellay,  ainbassadeiir  de  Fi-aru-ois  I"  aiiprrs  du  pape 
Clément  VII,  fut  rappelé  en  France.  (•////•//  /)/-//ici/)is  /i(iiri<i'(iiir 
rare,  dit-il.  Peut-éti'e  allail-il  portci'  an  l'di  (picl(|ii('  nicssage  inipoi'- 
tant  de  son  ambassadeur. 

On  raconte  qu'arrivé  à  Lyon,  ayant  é|)iiisé  sa  iioiirsc.  il  imagina, 
pour  ne  pas  trahir  le  secret  de  sa  mission,  un  stratatiéme  (pii  est 
passé  en  proverbe  sous  le  nom  de  «  quart  d'heure  de  Rabelais  ». 
Après  avoir  l'éuni  tous  les  principaux  médecins  de  la  ville,  il  ferma 
toutes  les  portes,  et  leur  montra  avec  le  plus  urand  mystère,  des 
poisons  qu'il  disait  être  allé  rhei-cher  en  Italie,  pour  tuer  le  roi  et 
ses  enfants. 

A  cette  révélation,  on  s'eini)are  de  lui,  on  l'enferme  dans  une 
litière,  et  on  l'emmène  à  Paris  sous  bonne  escorte,  avec  tous  les 
égards  que  méritait  un  personnage  de  cette  importance.  C'est  ainsi 
qu'il  arriva  à  Paris  sans  bourse  délier.  Le  roi  lui  fit  le  meilleur 
accueil. 

—  L'idée  de  la  mort  nous  annonce  un  quart  d'heure  qui  est  pour 
tout  le  monde  le  quart  d'heure  de  Rabelais.  (Le  petit  père  André 
de  retour  de  l'autre  monde.) 

Rabobiner,  abréviation  de  rabobcluier  (argot). 

Raci'ommoder  ;  de  bobel/ns,  vieux  souliers. 

Dans  la  corporation  des  cordonniers,  l'ouvrier,  pour  passer 
maître,  devait,  comme  épreuve,  raccommoder  trois  paires  de  vieux 
souliers  pris  au  hasard  dans  un  sac. 

Raboni  (Saint). 

Dans  l'hagiographie  fantaisiste  du  peuple,  saint  Raboni  est  réputé 
pour  rendre  meilleurs  les  caractères  difficiles.  La  maligne  légende 
de  saint  Raboni  rapporte  qu'une  chapelle  de  l'église  Saint-Pierre, 
à  Montmartre,  était  dédiée  à  saint  Chrysogon,  que  le  peuple  avait 
nommé  saint  Raboni,  et  à  qui  il  attribuait  le  pouvoir  de  ramener 
les  maris  égarés,  à  de  meilleurs  sentiments  à  l'égard  de  leurs  épouses. 
Un  jour,  une  femme,  au  l'etour  de  ce  pieux  pèlerinage,  apprit  que 
son  mari  venait  de  mourir  subitement.  Elle  s'écria  :  «  Que  ta  bonté 
est  grande,  saint  Raboni  !  tu  accordes  plus  qu'on  ne  te  demande.  » 

Raca,  mot  syriaque  signiliant  imbécile,  tète  faible. 
Ce  mot.se  trouve  dans  saint  Mathieu  (V,  22;,  avec  le  sens  de 
homme  de  peu  d'intelligen<?e,  tète  vide. 


IIAC  347 

En  provon(;;il.  iino  rosse. 

(JiKii}  iiir  aourcn  de  la  racn. 

(Rmmbali)  uk  Vaqieras.) 

(Quand  il  me  souvient  de  I;i  rosse.) 

Racaille,  de  l';iiii:l;iis  /v/r/,-.  chien. 

A  le  même  sens,  avec  une  niKince  de  mépris  pins  forte  encore, 
qne  canaille. 

Qiielqnes-nns  le  l'appi'oclicnt  de  race:  mauvaise  race,  lie  du 
peuple. 

Race,  du  vieil  allemand  rclca,  ligne  ;  plul(Jt  que  du  latin  vadix. 

—  Au  Pérou,  le  mélange  des  générations  qui  se  sont  succédé 
dans  le  pays,  a  donné  des  i)i'oduits  variés,  désignés  sous  le  nom  de: 
mcfis,  né  du  blanc  et  de  lindien  ;  mulâtre,  du  blanc  et  du  noir; 
créole,  du  blanc  et  du  métis;  :ainbo  noir,  du  nègre  et  du  mulâtre. 

—  Chaque  race  a  sa  larasque.  (Voy.)  Il  y  a  dans  chaque  famille 
une  plaie,  comme  un  ver  dans  une  pomme. 

Presque  toute  faniillt'  un  jieu  nombreuse  est  aflligéed'un  membre 
qui  tourne  à  mal.  et  se  met  à  déshonorer  un  nom  bonorable.  On  a 
vu  les  plus  grandes  maisons  attristées  et  compromises  par  ces 
parasites  de  famille,  altiuu's  de  vices,  de  paresse  et  d'inconduite. 
(J.  Janin). 

—  Il  vaut  mieux  être  le  premier  de  sa  race  que  le  dernier. 
Iphicrate.  capitaine  athénien,  était  fils  d'un  cordonnier.  Un  noble 

lui  reprochant  la  bassesse  de  sa  naissance,  et  faisant  valoir  l'éclat 
de  la  sienne  :  «  Je  serai  le  premier  de  ma  race,  dit  Iphicrate  ;  et 
toi.  tu  seras  le  dernier  de  la  tienne.  » 

—  Un  Grec  obscur  ayant  reprocbé  au  Scytbe  Anacharsis  la 
barbarie  de  son  pays:  «  J'avoue,  dit  le  Scythe,  que  ma  patrie  me 
fait  honte:  mais  toi.  tu  fais  honte  à  la  tienne.  » 

—  U  petite  noblesse  du  sang  !  tu  es  bien  un  manteau  qui  raccour- 
cit vite,  car.  si  on  n'y  ajoute  un  morceau  de  jour  en  jour,  le  temps 
tourne  à  l'entour  avec  des  ciseaux.  (Dante,  Paradis,  XVI,  6.) 

Racine,  du  latin  î'adicina,  dérivé  de  rodix. 

—  Vivre  de  racines  :  se  nourrir  très  sobrement. 

Les  peuples  qui  se  nourrissent  de  végétaux  sont  les  plus  beaux 
et  ceux  qui  vivent  le  plus  longtemps. 

On  peut  citer  en  exemple  les  Suisses  et  les  Russes,  pour  l'Europe. 
Les  nègres,  qui  supportent  tant  de  fatigues  dans  les  colonies,  ne 
vivent  que  de  manioc,  de  patates  et  de  maïs.  Les  Brahmes  de  l'Inde, 
qui  atteignent  souvent  la  centaine,  ne  vivent  que  de  végétaux. 


348  H Ai 

Pytliafïoro  prosci'i\;iil  de  r.iIiiiK'iil.'itioii  l;i  r\\;\'w  de  tons  les 
;iniii);tiix.  et  iiiôiiic  (incliiiics  \(''.u(''t;iii\.  (Voy.  j'i-rc) 

Les  cliiirli-fiix  et  cciliiiiis  ordi'(3S  religieux  d'une  di<(ij)line  sévère, 
ne  se  noun-issenl  que  de  végétaux. 

—  Après  la  mort  de  Corneille,  un  ('omédien  jlil  : 

Piiisi|iii>  ('(iriK'ilIc  est  iiKirl.  i|iii  ikuis  <l(iiiii;iil  ilii  paiiu 
F;iiil  \ivi'('  (le  li;iciiii',  on  liii'ii  imnirir  île  fjiiiii. 

Radical,  partie  (ixe  des  mots  variables,  par  op|)Osition  à  la 
partie  qui  change,  suivant  le  cas,  le  genre,  le  nombre,  etc.,  et  qli'on 
appelle  désinence. 

Radoter,  vieux  français  reduler  :  de  l'anglais  dote. 

—  Étyniologie  burlesque  :  avoir  des  rats. 

—  Le  Yayer  fait  venir  ce  mot  A' Ilérodoïc,  dont  les  Histolrea 
contiennent  des  faits  basardés  et  trop  extraordinaires  pour  être 
vrais  ;  mais  c'est  plut«')t  nue  allusion  maligne  (ju'une  étymologie. 

—  F.  Génin  remarque  que  nous  nous  servons  du  mot  recul  qui  a 
remplacé  redos.  On  disait  :  être,  aller  à  redos,  c'est-à-dire  à  recu- 
lons ;  redoler,  c'est-à-dire  tourner  le  dos  au  but,  et.  par  métaphore, 
déraisonner  de  vieillesse. 

■  Cctrirs  li  )n(i(jnes  vielz  est  cl  redotr. 

(Koi.AM),    1.  240. \ 

—  Avant  d'arriver  à  radoter,  on  a  dit  se  radoter,  de  même 
qu'on  dit  se  reculer  :  mais  la  forme  réfléchie  a  disparu,  et  radoter 
ne  laisse  plus  deviner  la  racine  dos  qu'il  renferme. 

Raffiné,  de  re,  ad  et  fin.  (Yoy.  petil-)naître.) 

Les  raffinés  étaient  des  jeunes  gens  élégants,  duellistes  et  débau- 
chés. Ils  portaient  un  ricbe  costume  tailladé,  et  un  court  manteau 
brodé  d'or. 

Les  mignons  de  Henri  III  étaient  le  type  des  raffinés. 

Sous  Henri  lY,  la  plupart  des  raffinés  étaient  de  jeunes  Gascons, 
qui  se  querellaient  pour  des  riens,  prétendant  ainsi  raffiner  sur  le 
point  d'honneur. 

Raie,  du  verbe  rayer,  latin  radiare,  de  radius,  rayon,  plutôt 
que  du  grec  rhagos,  fente,  crevasse  (?),  d'où  les  Provençaux  ont 
fait  ra^ffs,  source  sortant  d'une  fente  de  rocher;  raiar,  couler: 
ragassa,  fille;  raissa,  ondée. 

Railler,  de  ridiculare{l),  ou  plutôt  d'un  diminutif  de  radere, 
raser. 


—  Ne  raille  personne  :  Xemincin  irriscrh.  (Caton.) 

La  raillerie  est  de  toutes  les  injures  celle  qui  se  pardonne  le 
moins.  (Platon.) 

Raisin,  du  latin  /•arc/m/s,  proveiieal  /'aci/ii. 

Synonyme  :  vin  en  pilules. 

Cure  pour  les  l'aisins  :  cure  uvale. 

Raison,  du  laliu  /•///in  (douidel  de  ratio/i],  mesure... 
L'idt'c  priniilivc.  (pii  Nient  de  Dieu,  est  toujours  l)onne. 

—  Quand  l'idée  est  dominée  par  la  raison,  elle  produit  le  bien  : 
quand  l'idée  domine  la  l'aisou.  elle  produit  le  mal. 

L'arsenie  est  un  médicament,  ce  n'est  pas  un  poison  :  c'est  une 
question  de  quantité. 

La  ciauë,  qui  tue  l'homme,  donne  d'excellent  lait  :  c'est  une 
question  de  tr;insformatiou. 

LIniitre  devient  perle;  c'est  une  question  de  temps. 

—  Cela  n'a  ni  rime  ni  raison. 

uiicliliie  sujet  (|iroii  ti-aili",  ou  plaisant  ou  subliiiii', 
oiM'  idu jdiu's  le  hiin  .sens  s'accoi'de  avec  la  rime. 

fBoii.KAU,  Art  pij('lii/iie,  I.) 

—  Ouaud  Jupiter  veut  perdre  un  homme,  il  lui  ôte  la  raison. 

Qho-s  cuit  perde re  Jupiter,  dementat. 

Ce  vers  d'Horace  a  été  traduit  éloquemment  dans  cette  impré- 
cation de  Joad,  au  l'^''  acte  d'Alhalie  : 

Daijjro,  daigne,  mon  Dieu,  sur  Matlian  et  sur  elle 
Répandre  cet  esprit  dimprudeace  et  d'erreur. 
De  la  chute  des  rois  funi'ste  avant-courear. 

—  Un  être  de  raison  est  un  être  purement  imaginaire,  comme 
un  palais  de  diamant,  une  montapne  d'or. 

Raisonner,  dérivé  du  précédent. 

La  ressemblance  de  son  avec  réfio/iner  a  amené  de  nombreux 
jeux  de  mots  par  comparaison  :  raisonner  comme  un  taïubour, 
...comme  une  cruche,  ...comme  une  pantoufle. 

Il  parle  comme  un  livre,  et  raisonne  comme  la  couverture. 

Râle,  onomatopée;  ou  verbal  du  verbe  i-dler,  d'un  mot  bas-latin 
rasculai'e,  râler. 

—  Au  propre,  l'oiseau  dont  le  cri  est  devenu  appellatif. 

Au  figuré,  lu'uit  ([ue  produit  le  passage  de  l'air  à  travers  les 


350  RAN 

iimcosUés  acciiiniilécs  daiis-lc  larynx  ou  dans  les  liroinlies,  qui,  en 
rétrécissant  ces  condnits  aériens,  modifient  la  nature  du  son. 

Râler,  \ieii\  mol  :  marchander. 

/{a/ri/sc,  |)(Hir  t'ar()/eus(>.  Femme  du  Temple,  qui  arrête  le  pas- 
sant pour  lui  vendre  sa  marchandise,  ap{)elée  elle-même  «  râleuse  ». 
On  donne  aussi  ce  nom  à  la  cliente  qui  marchande  sans  acheter. 

Ramage,  du  mol  lalin  /■a/na/inn/i. 

(]e  mot  était  d"al)0i'd  adjectif,  et  si^niliait  :.qui  touche  aux 
rameaux.  Le  chant  ramage  était  celui  que  les  oiseaux  laisaient 
entendre  dans  les  i-ames  ou  hranches  des  arhres. 

liamagc  s'emploie  aujourd'iiui  seul,  et  comme  substantif. 

Ramasser,  de  re  et  amasser,  du  lalin  massa,  \\\\\[CA  que  de 
ramus. 

C'est,  au  propre,  relever  de  terre  des  rameaux  et  des  hranches  (?). 

D'où  le  jeu  de  la  ramasse,  dont  parle  Ral)elais  (1,  22),  qui  consis- 
tait à  se  traîner  les  uns  les  autres  sur  une  espèce  de  civière  faite 
de  ramée. 

L'idée  de  ce  jeu  vient  des  Alpes,  où,  en  temps  de  neige,  on 
nomme  ramasse  un  traîneau  improvisé  avec  des  hran(;hes  d'arltres, 
sur  lequel  les  voyageurs  se  font  ramasser,  c'est-à-dire  descendre. 

—  Se  faire  ramasser,  se  dit  aussi  au  jeu  des  montagnes  russes. 

—  De  ramasser  est  venu  ramassis,  tas  d'objets  sans  valeur. 

Rameau,  du  latin  ramus,  a  donné  ramier,  pigeon  qui  perche 
sur  les  rameaux  des  arhres.  (Voy.  ramage.) 

Ramoner,  du  vieux  français  ramon  (balai  fait  de  rameaux  de 
1)0uleau),  de  ramus,  branche. 

—  Charles  de  Bovelles  décrit  en  quatorze  vers  l'utilité  du  ramoJi 
qui  se  compose  de  trois  choses  :  i°  le  menu,  qui  sert  à  fouetter  les 
enfants  ;  2"  le  manche,  à  battre  les  valets  :  3°  la  hart  (corde),  à 
pendre  les  larrons.  Après  quoi  il  ajoute  : 

Ainsi  avons  en  la  maison 
Trois  jusliciers  sur  ce  ranion  : 
Par  (luoi  ramon  est  ciioso  digne 
De  mieux  servir  qu'en  la  cuisine... 

Ramoneur. 

Synonymes  :  Savoyard,  hirondelle  d'hiver,  Jean  de  la  suie. 

Rang,  de  l'allemand  ring,  ordre,  arrangement. 

—  Il  faut  serrer  les  rangs.  Se  dit  quand  la  mort  fait  des  vides 
parmi  les  soldats  pendant  la  bataille. 


RAS  331 

Oiiniid  on  nvanco  dans  la  vie,  on  voi;  tomber  pou  à  pou  auloiir 
(k'  soi  les  amis  do  sa  jouiicssc.  C'ost  aiui-s  qu'on  doil  rodoiiiilcr 
d'alïectidn  [khii-  mw  (pii  rcslcnt.  et  (pic  ce  mot  [)eut  avoir  une 
anicre  ;ipplic;ilion. 

Raphaélesque.  Pcintur-e  dans  le  style  de  Raphaël,  1(^  peintre 
le  plus  (('Ifliic  (les  temps  moder-nes.  et  dont  le  nom, aussi  populaii'e 
(piilliislre.  coiiiiiie  celui  d'Apelle  dans  l'antirpiité,  est  dans  toutes 
les  bouches,  ipiaud  on  veut  personnilier  en  quelque  sorte  la  peinture 
dans  ses  qualités  les  plus  élevées. 

Rapport  (sous  le\  est  une  locution  qui  n"a  pas  de  sens. 

/{'//>/)()/'/  estuiu^  absti'action  ;  comment  peut-on  être  placé  dessus 
ou  dessous^  On  ne  peut  donc  pas  dire  (pi'un  homme  est  très  distin- 
tiué  sous  le  rapiiort  de  la  science,  sous  tous  les  rapports.  Un  homme 
est  dislinuué  [)ar  rappoi't  à  la  science,  ou  distinoué  à  tous  é.uards, 
sous  tous  les  aspects  où  l'on  peut  l'envisager  ;  mais  l'Académie, 
sauf  respect,  ne  iiarle  pas  l'rançais,  en  disant  «  distingué  sous  tous 
les  rapports  ». 

Rare,  du  latin  l'arus. 

—  Rai'e  comme  les  beaux  jours. 

Les  anciens  disaient  :  rcnvi  aci.<;,  un  merle  blanc. 

—  Faites-vous  rare,  on  vous  aimera.  (Proverbe  turc.) 

-—  Il  ne  faut  pas  se  voir  souvent,  quand  on  veut  se  voir  longtemps. 

Ras,  du  latin  rasns;  doublet  de  7'ec,  roman. 

—  Au  ras  de  i'eau  :  au  ni\eau. 

—  Faire  table  rase. 

—  Rez-de-chaussée,  rez-terre. 

Rasette,  en  provençal,  signilie  un  petit  verre  de  liqueur  plein 
jus(pi'au  bord. 
C'est  une  sorte  de  diminutif  de  rasade. 

Rasibus,  origine  commune  avec  le  précédent. 
Mot  macaronique  et  populaire. 

—  Cela  lui  passa  rasibus  du  gousier.  (Mot/en  de  parreni?', 
ch.  82.) 

Car  la  porte  le  prit  rasihiis  à  l'oreille. 

(Poisson,  Baron  i/r  la  Craxxf.) 

Rassasié,  suppose  assasier,  du  latin  ad  satiare. 
Synonymes:    saturer,    sofder,    du    latin    salnllarc:   provençal 
sadoular. 


352  HAT 

(lonf.  le  roiiiiin  rissafs,  nsscz,  hcimcoiip. 

Noiinain,  iiiuiiic,  pi'csin'  cl  poult.'ls 
No  sont  jamais  iikiiis  ni  saoulés. 

(XVimc   iioclf  ) 

Rat,  cl(i  ?-as,  ;i  poil  r;is,  rMpc  (0- 
Se  (lit  pour  jivarc,  rapial. 

—  Avoir  dos  rats  dans  la  tète  :  dos  soucis  ou  des  caprires. 
L'ahhé  Desfontaiiies  pense  (pie  rat  est  ici  an  vieux  mot  fait  du 

laliii  ralum,  pensée,  et  que  «  avoir  des  rats  dans  la  It'te  *)  signifie 
avoir  des  id(!'es  folles. 

—  Rat-de-cave.  Petite  hoiiuie  [lour  descendre  à  la  cave. 
S'applique  comme  sobriquet  aux  employés  des  Contributions 

indirectes,  qui  exercent  dans  les  caves  des  marchands  de  vins. 

Ratafia,  de  rack  (ou  rhum)  et  tafia,  spiritueux  avec  lesquels 
on  fait  le  rata  lia  aux  colonies. 
'  D'autres  l'on  tiré  de  {rai)  rata  fiât,  comme  ratifier. 

—  L'usage  de  ratifier,  dans  les  foires,  le  verre  à  la  main,  et  l'an- 
cienne fornuile  qui  précédait  la  signature  dans  les  actes  en  latin  : 
Rea  rata  fiat  (que  la  chose  soit  arrêtée  ainsi),  aurait  fait  donner  à 
la  liqueur  que  l'on  boit  dans  ces  occasions,  le  nom  de  ratafia. 

Rate,  en  provençal  râtela,  d'où  rateleux  ;  QY\gmQ,  néerlandaise, 
plut()t  que  de  radius,  rayon  de  miel. 

—  Dans  l'ancienne  physiologie,  on  croyait  que  la  rate  était  le 
siège  de  la  bile  noire,  et  la  cause  de  l'hypocondrie. 

D'où  la  locution  «  désopiler  la  rate  »  :  faire  rire,  rendre  la  gaieté 
aux  esprits  atrabilaires. 
Désopiler  la  râtelle  soulaige  les  roignons.  (Rabelais,  111,  4.) 

Râtelier,  dérivé  de  râteau,  latin  rastellum. 
Espèce  d'échelle  placée  horizontalement,  pour  recevoir  le  foin, 
dans  les  écuries. 

—  Manger  à  plusieurs  râteliers  :  tirer  profit  de  plusieurs  emplois. 

—  Mettre  le  râtelier  bien  haut  à  quelqu'un  :  lui  rendre  une  chose 
difficile. 

—  Quand  il  n'y  a  pas  de  foin  au  râtelier,  les  ânes  se  battent. 

Ratifier,  du  latin  ratum  et  ficare  :  approuver. 
(Voy.  prorata,  rata /la.) 

—  Le  conte  l'un  del  autre  segon  sa  rata.  {Traite  de  l'arpentage.) 
Le  compte  l'un  de  l'autre  selon  sa  valeur. 


Ratisser,  scmlilc  \(Miir  de  nih'dii. 

—  L'on   M)iis  fil    r.ilissc.   (W[W  Inciilioii   iro:;i(iii(\  ;icroiii|i;it:n(''e 

d'un  geslc  imil.ilil.  c^l  duc  ;'i  rns;i<io  niicicii  de.  f.'ilisscr  une  (•nrollo 

do  tniKic  sur  iiir'   [.clilc  r.î])('  de  poche,  poiii'  olIVii'  iiiie   [d'ise  à 

(|iicl(|ii"iin.  Elle  sitiiiilic  (|iron  n'est  pas  disjiosé  à  nccorder  l;i  chose 

deinimdée.   C'est    h'   l'ctV.iin    (riiiic   \icillc   ch;inson,   ([iii    r.ippcllc 

cet  nul  ce  : 

,l';ii  (lu  hnii  (;il»ac  dans  ma  lahalicro. 

Ravageur,  industriel  interlope,  qui  cherclio  des  ferrailles  et 
antres  uhjels  dans  les  ruisseaux.  Après  la  pluie,  il  ramasse  les 
vieux  clous  qiu»  l'eau  y  a  entraînés. 

Re,  particule  itérative,  du  latin  re. 

Elle  entre  dans  un  urand  nondire  de  uiots  :  redire,  refaire. 

Elle  marque  aussi  le  mouvement  en  arriére  :  relliier. 

Réalisme,  du  lalin  rodlis. 

Culte,  poussé  au  l'analisme,  du  réel  dans  l'art  et  la  littérature. 
C'est,  dans  les  arts,  une  reproduction  exacte,  absolue,  de  la  réalité. 

S'oppose  à  Yidéalismc,  qui  comporte  l'expression,  dans  les  arts, 
des  choses  qui  sont  du  domaine  de  l'imajiination  et  n'ont  pas  une 
existence  réelle. 

—  Le  rêve  du  génie  est  de  surpasser  la  nature  en  l'imitant. 

Rébarbatif,  send)le  venir  de  barbe. 

Se  dit  d'un  homme  qui  résiste  en  face,  an  nez,  à  la  harbe  do 
quelqu'un. 

—  On  lit  dans  Froissard  :  «  Voyez-les,  ilz  sont  plus  reharbatifz 
que  singes  qui  mangent  poires  et  enfans  leur  veulent  toUir.  » 

Rebattre  les  oreilles  :  répéter  souvent  la  même  chose. 
Ohlnndcre  a  lires.  (Cicéron.) 

Per^ioiKua  aurct. 

(UoKAu:.) 

(Voy.  rabâcher.) 

Rebours,  du  bas-latin  rebi/i\sa.'<,  hérissé  (?).  ou  de  re  et  de 
l'allemaïul  bor.sfe  (poil,  soie). 

—  Cela  va  à  l'ebours,  comme  la  queue  d'un  veau. 
Relrorsiiiii  crei^rU .taiiquani  rauda,  ritull.  {Vi'XvowQ.Salirlcon.) 
La  qneue  du  veau  ne  ci'oissant  pas  à  proi)ortion  du  corps,  semble 

rapetisser  à  nn'sure  que  le  corps  grossit. 

—  A  chevaucbon  de  rebours  (Hahelais)  :  à  cheval,  le  visage 
tourné  vers  la  queue  de  l'animal. 

23 


354  REC 

Rébus,  mol  lutin. 

liii  réhiis  est  iiiic  li.mirc  rcpréseiiUiiil  riiii;i,u<'  (!•■  l;i  chose  même. 

Rebuter,  pour  rohoulcr  :  howWv  en  .'irrirre,  i-cponsscr. 

Recette,  provençal el  latin  reccpta,  parliri[)('  du  vcrlic  reccroir. 

Recevoir,  de  recipere  (rc,  va  père). 

Synonyme  :  conjiiuner  à  la  seconde  personne  le  verhe  donner. 

—  Recevoir  quelqu'un  comme  un  chien  dans  un  jeu  de  quilles. 

—  Nous  avons  été  mal  reçus,  et  je  n'éprouve  pas  le  besoin 
d'exprimer  ici  le  témoignage  de  ma  gratitude.  (A.  Dumas.) 

Rêche,  origine  germanique  reache  (rude,  cassant),  vieux   fran- 
çais reschin,  d'où  rechigné. 
Au  propre  :  âpre  au  goût,  rude  au  toucher. 
Au  llguré  :  homme  difficile  à  vivre. 

Récif,  rescif  ou  ressif. 

Rocher  à  fleur  d'eau,  où  se  brisent  les  navires. 

—  L'Académie,  qui  donne  cette  triple  orthographe,  n'accorde  à 
ce  mot  qu'une  seule  signification.  11  n'est  pas  indifTérent,  cepen- 
dant, de  se  servir  de  l'une  ou  de  l'autre  orthographe. 

—  Récif  \\(mU  de  recido,  couper  avec  art  et  dans  un  but  utile; 
recidere  iingnes,  couper  les  ongles  ;  tandis  que  roscif  vient  de 
rescinda,  je  brise,  je  détruis. 

Rescif,  qui  est  la  forme  ancienne,  est  la  meilleure. 
Quant  à  ressif,  c'est  un  barbarisme  qui  n'a  pas  de  sens. 
Mais  l'étymologie  latine  n'explique  guère  le  f  final. 

Réclame,  substantif  verbal  de  réclamer,  du  latin  re  ciclaniare. 

Cri  répété. 

C'est  un  néologisme  l)ien  fait.  Il  est  né  de  la  concurrence  qu'a 
fait  naître  la  hberlé  du  travail  et  la  suppression  des  maîtrises  par 
Turgot. 

—  Le  puff  diffère  de  la  réclame,  en  ce  qu'il  sous-entend  le 
mensonge. 

La  réclame  crie  la  vérité',  en  l'exagérant  quelquefois  ;  le  pufT 
annonce  très  haut  et  effrontément  le  mensonge. 

—  Autrefois,  à  la  Ou  des  pages  d'un  livre,  se  trouvait  écrit  le  mot 
qui  commençait  la  page  suivante,  ce  mot  s'appelait  «  la  réclame  ». 

Aujourd'hui,  les  journaux  annoncent  dans  les  faits  divers  un  avis 
(appelé  réclame),  pour  renvoyer  le  lecteur  à  l'annonce  proprement 
dite,  qui  a  tout  son  développement  à  la  quatrième  page  du  journal. 


—  Vers  18i0.  tons  les  joiirnniix  aniinncrroiil  In  vente  d'une 
p:raine  d'un  clion  colossal  de  la  XouNellc-Zélande,  servant  à  la 
noiiiiilui-e  des  hommes  et  des  liestiaux,  et  donnant  un  ombrage 
a.uri'aliic  pendant  rété.  De  tons  les  coins  de  la  France,  on  demanda 
de  cette  .ui'aine.  Kn  fait,  la  mystilication  seule  était  colossale. 

Recommander,  re  et  co/iu/iciidf/r/'. 

—  Se  recommander  à  tous  les  saints  du  Paradis.  (Yoy.  sainl.) 

—  Un  lirociiet  fait  ])lus  (jifune  lettre  de  recommandation. 

Reconnaissance,  dérivé  du  participe  présent  de  reconnaflre. 

—  La  reconnaissance  est  la  mémoire  du  cœur. 

...Après  la  bienfaisance, 
Le  plus  ^raiiil  des  iilaisirs,  c'est  la  recomiaissance. 

(De  Bi:i.i.o\.  Pierre  le  Cruel.) 

La  reconnaissance  est  ce  qui  s'oublie  le  plus  vite.  (Aristote.) 

La  reconnaissance  est  l'intérêt  d'un  service  :  s'en  alfrancliir,  c'est 

faillite  ;  l'exiger,  c'est  usure. 
La  reconnaissance  de  la  plupart  des  liommes  n'est  qu'une  secrète 

envie  de  recevoir  de  plus  grands  bienfaits.  (La  Rochefoucauld.) 

Recors,  substantif  verbal  de  recorder,  latin  recordarc,  se 
souvenir,  se  remettre  en  mémoire,  proprement  au  cœur. 

Bas  officier  de  justice,  qu'un  liuissier  ou  un  garde  de  commerce 
mène  avec  lui  pour  servir  de  témoin  dans  ses  exploits  d'exécution, 
et  pour  lui  prêter  main-forte,  au  besoin. 

Recrudescence,  de  re  et  crudus,  recrudescere. 
Recrudescence  d'une  maladie. 

On  confond  souvent  ce  terme  avec  <7/7^^/e;?ee  :  quand  on  parle, 
par  exemple,  de  la  recrudescence  du  public  à  la  porte  d'un  théâtre. 

Recrutement,  de  recrue,  recruter,  dérivés  eux-mêmes  de 
recroître:  du  latin  recrescere. 

■Nouvelle  levée  de  soldats  ;  ce  qui  a  crû  depuis  la  levée  précé- 
dente, et  que  l'on  récolte  pour  en  former  une  nouvelle  légion. 

Reculer,  de  re  et  culer,  dérivé  du  latin  culus. 
Synonyme  :  fouiner  (vieux  mol). 

S'ii  est  pressé,  (pii  qui  l'empêche  de  fouiner  ? 

•  (VADli.) 

—  Reculer  pour  mieux  sauter  :  prendre  un  délai  nécessaire  pour 
mener  une  ciiose  à  bien.  Se  dit  d'un  homme  qui,  sous  l'apparence 


do  rirrésoliilion,  sonjic  iiiii(jii('iii('iil  ;'i  |ii(''[i;iror  ses  nioyons  d'iiclion 
et  à  s'assiiroi'  le  succès.  C'est  niic  .illusion  à  ce  que  font  les  sau- 
teurs, qui-  font  (luchiuos  p;is  en  ;ii-i-i<'re  avant  de  prendre  leur  élan. 
Il  recule  poui'  mieux  approcher.  (Proverhe  espagnol.; 

Lo  (Iroc,  opiniâtre- fil  iniilr, 
Afin  (le  miciix  saiitiT  recule. 

(ScAiiKON,  Virijile  Iravesli.) 

—  Gagner  sa  vie  à  reculons.  (Rabelais,  III,  48.)  Se  dit  des  cor- 
diers,  qni  Iravaillont  en  niarcliant  à  i-eculons. 

Référé,  pai-ticipe  passé  du  verbe  l'c'/crer,  latin  vefcvre. 

l*rocédure  sommaire.  Recours  devant  le  pi'ésident  du  tribunal  de 
première  instance,  pour  obtenir  le  jugement  provisoire  et  rapide 
d'une  alTaire  dont  la  décision  est  urgente. 

—  Les  ordonnances  sur  référé  ne  font  aucun  préjudice  au  prin- 
cipal. 

Réflexion,  du  latin  rc  et  flcctere. 

—  Les  longues  réflexions  sont  les  cautions  des  bons  succès. 
(Charles  Quint.) 

Il  y  a  des  surprises  de  l'âme,  comme  des  sens  :  attendez  le  len- 
demain, la  réflexion  est  une  douche  morale.  (V.  Cousin.) 

La  réflexion  est  comme  l'expérience  :  elle  arrive  toujours  trop 
tard.  (De  Clincbamp.) 

—  Réflexion  tardive:  l'esprit  de  l'escalier:  le  gendarme  qui 
arrive  toujours  en  retard.  (Voy.  présence  d'esprit.) 

Réformateur,  latin  re  et  for  mare. 

—  Il  y  a  des  réformateurs  qui  se  plaisent  à  mettre  le  cap  sur  le 
pays  d'Utopie,  et  qui  trouvent  toujours  quelque  féodalité  à  détruire, 
dussent-ils,  comme  Don  Quichotte,  ferrailler  contre  des  moulins 
à  vent. 

Refrain,  substantif  verbal  du  vieux  verbe  refraindre,  du  latin 
refrangere. 
Répétition  d'un  vers  à  la  fin  des  couplets  d'une  poésie  lyrique. 
Les  Italiens  disent  rllornella. 

C'est  toujours  le  refrain  qu'ils  font  à  leur  ballade. 

(Voy.  chanson.) 

—  Espèce  de  pause. 

Il  se  refraint  à  son  chant.  (Perceforest.) 


RKG  357 

Refuser,  provoiirnl  rofiidar,  l;i(in  rcfuldrc. 

—  Die/,  lire  refuser  (rmic  fusion  on  coiifiisioii  dos  deux  mots 
récuser  et  réfuter.  Cotte  ((iiiiiioii  csl  plus  inLUMiiciiso  que  certaine. 

—  Qui  refuse,  nuise. 

—  Synonymes  :  refnseï-  nii  candidai  :  ltlaikl);»iilei'  ;  adoncir  nn 
refns  :  sucrer  la  moutarde. 

—  V\\  prompt  refus  trompe  moins  qu'une  espéi'auce  vaine. 
Minus  fleripitur,  eut  deiiet/ntur  celeriter. 

Val  mais  paraula  (/rosmmens  dicha. 
Que  mçssonjn  poiidamens  escricha. 

(11.  (Ji.iviKR,  d'Arles.) 

(Vaut  mieux  parole  grossièrement  dite,  que  mensonge  poliment 
écrit.  "1 

Régaler,  d('i'i\é  de  régal,  latin  rcgulis,  antre  forme  de  royal, 
ou  i)ent-éîre  dn  \ieux  mot  galer  (d'où  gala,  galant),  s'amuser, 
étaler  de  la  magnidcence  dans  les  réjouissances. 

—  Chez  les  anciens,  il  y  avait  un  roi  du  festin,  i^ex  vini;  il 
présidait  la  table,  et  réglait  le  temps  et  la  manière  de  boire.  Cet 
usage  existait  surtout  pendant  les  Saturnales. 

Regarder,  de  l'ancien  verlie  esgarder  :  allemand  irarteii.  ITfid 
le  suljslaiilif  égard  (voy.),  mégarde. 

—  Un  chien  regarde  bien  un  évoque.  —  Oui  vous  a  dit  que  je 
fusse  un  évéque  ? 

—  Re.uarder  en  chiens  de  faïence  (se)  :  avoir  une  pose  immobile 
et  un  regard  lixe,  comme  les  chiens  de  faïence  dont  on  oniait 
autrefois  les  portes. 

Régicide,  du  latin  rcx,  régis,  et  ea'do,  tuer. 
Ce  crime  est  puni  de  la  peine  des  parricides. 

—  Parmi  les  plus  fameux  régicides,  on  cite  Jacques  Clément, 
meurtrier  de  Henri  III:  Ravaillac,de  Henri  lY:  Damiens.qui  attenta 
anx  jonrs  de  Louis  XV;  Lonvel,  meurtrier  du  duc  de  Berry  ; 
Fieschi,  auteur  de  la  machine  infernale,  sons  Louis-Philippe. 

—  En  1813,  on  appela  régicides  les  députés  qui  avaient  voté  la 
mort  de  Louis  XVI.  Ils  furent  bannis  de  France. 

Régir,  du  latin  regere,  gouverner,  diriger. 

Règle,  du  lalin  régula,  dérivé  ùo.  regere. 

—  Il  n'y  a  [las  de  règle  sans  exception.  Ce  proverbe  est  d'une 
morale  douteuse,  car,  en  principe,  il  ne  doit  pas  y  a\  oir  d'exception 


à  la  n\uio  :  la  irulc  csl  la  \('Til(''.  <'l  i<'\(('|ili()ii.  It'iTciir.  Ce  (|iii  ost 
contro  la  n^'glc  csl  un  dcn'^'lcrneiit.  iiii  (Irsordic.  un  acte  coiiti-e  les 
lois  nalnrcllos,  civiles  on  inorales. 

Exrcjilio  fiDiHil  ro<iul(im  (Cieéron)  :  L'exception  conliniie  la 
règle. 

L'exception  à  la  ivgie  est  la  consé(pience  de  l'imperfection 
Imniaine.  Tonte  exception  tend  même  à  devenir  une  règle  ;  quel- 
quefois elle  y  réussit,  et  dès  lors  elle  devient  respectable. 

—  Admettre  une  exception  à  une  règle,  c'est  ouvrir  une  brèche 
où  viendront  passer  tous  ceux  qui  n'auront  pas  été  exceptés. 
(H.  Miirger.) 

—  11  est  réglé  comme  un  i)apier  à  musique,  mais  son  esprit  n'a 
pas  de  portée.  (Calen)I)onr.) 

Régner,  du  latin  re(j)inrc. 

—  Diviser  pour  régner  :  divûle  ni  Inipoes.  Maxime  machia- 
vélique, mise  en  pratique  par  Louis  XI  et  Catherine  de  Médicis. 
(Yoy.  (Usximulpr.) 

Regretter^  du   latin  r^/yrcs'.s-?/.?,  retour  (?);  ou  peut-être  ;w/^/<!'- 
intari. 
* —  En  genevois,  regretter  une  chose  à  quelqu'un  :  la  lui  envier. 

—  Le  regret  est  un  déplaisir  d'avoir  perdu  une  chose  ou  une 
espérance,  de  re  et  gratua  (?). 

—  On  dit  souvent,  dans  les  discours  sur  la  tombe  dun  auii  : 
«  Il  emporte  nos  regrets  ».  On  pourrait  répondre  que:  s'il  les 
emporte,  il  ne  nous  en  reste  plus'. 

Reguigneou,  en  provençal,  signilie  un  salut  comique,  une 
gaminerie,  qui  consiste  dans  un  mouvement  vif  et  successif  des 
fesses,  de  droite  à  gauche  et  de  gauche  à  droite.  Ce  salut  se  faisait 
dans  le  Jeu  (Je  la  belle  Estello,  des  cérémonies  de  la  Fête-Dieu, 
à  Aix;  les  pages  saluaient  ainsi  les  trois  rois  Mages,  et  celui  qui  y 
réussissait  le  mieux,  recevait  plus  d'argent  que  les  autres.  Il  est 
juste  d'encourager...  les  talents. 

Réhabilitation,  du  latin  re,  de  nouveau,  habil/s.  propre  à. 
Rétahlissement  d'une  personne  dans  son  premier  état. 

—  L'opinion,  plus  sévère  que  la  loi,  a  un  préjugé  cruel,  qui 
déclare  la  tache  indélébile,  la  chute  irrémédiable,  la  faute  irrémis- 
sible, et  fait  de  tout  malade  un  incurable. 


Hr:L  359 

.lîi)ileaii.  iivL'c  son  iiii;i,ue  tic  l'Iionnoiir.  dont  il  a  fait 
Luc  ilo  c^carpL-e  v[  s;iiis  ImuiI^, 

a  ("oiisaci't'"  lin  nicnsoniîc  harliarc.  et  dccoiiraiir  la  vei'lii.  en  feniiaiit 
la  poric  à  r('S|i('raiic('. 

11  faut  piTclicr.  au  coulraii'c,  la  docliMiic  de  la  miséricorde,  qui  a 
élô  le  plus  puissaiit  li'\ioi'  du  cliristiauisuic.  11  faut  «  tuer  le  veau 
gras  »  au  héuélice  de  tout  i>  enfant  [U'odifiiie  »  :  il  faut,  suivant  le 
pi"éce|)le  divin  de  lllvanuile,  se  réjouir  plus  pour  un  pécheur  qui 
fait  pénitence,  (pie  pour  (piali-e-vin,ut-dix-neuf  justes  qui  persé- 
vèrent. 

Reine  blanche  (latin  rtv/ina). 

Toutes  les  \eu\(»s  des  l'ois  de  France,  jusqu'à  Gatlierine  de 
Médicis,  ont  été  appelées  «  reines  ])lanclies  »,  parce  qu'elles  por- 
taient le  d(niil  en  blanc. 

Reître,  de  ralleinand  rcilcr,  cavalier. 
Vieux  reitre  :  qui  a  vu  beaucoup  de  pays. 

Rejointoyer,  \ieux  mot. 

Rejoindi'e  les  pierres  détruites  par  le  temps  (?). 

—  Sire  li  rois  ot  grant  cure  de  rejointoyei'  li  nuiriaux.  (lOGO). 

Réjouissance.  Os  que  les  boucliers  ajoutent  à  la  viande  vendue 
au  poids. 

Ces  os  sont  appelés  ironiquement  «  réjouissance  ».  (Mercier, 
Tableau  de  Paris.  1787.) 

Relaps,  terme  religieux:  du  latin  l'elapsus,  retombé. 
L'Écrilui"e  appelle  relapsn'  les  filles  tombées. 

Relatif,  du  latin  relaiiim  :  qui  marque  un  rapport. 

—  Tout  est  relatif:  à  côté  de  Plialaris,  Guillotiii  est  un  philan- 
thrope. 

Religion,  du  latin  religio. 

Cicérou  {^De  Nalura  tleoruin,  11,  28)  dérive  ce  mot  de  relerjere^ 
relire,  étudier  avec  attention  les  livres  sacrés. 

Saint  Augustin  [De  vera  relUjione,  ch.  Tio)  et  Lactance  {Divines 
instiiutiona,  4)  le  tirent  de  religare,  rattacher,  parce  que  la 
religion  est  un  lien  ipii  nous  unit  à  Dieu. 

—  On  a  de  la  religion,  quand  on  ci'oit  à  Dieu;  ou  a  de  la  piété, 
quand  on  suit  les  pratiques  du  culte  ;  de  la  dévotion,  quand  on 
ajoute  à  ces  pratiques  un  air  centriste  et  composé. 


3G0  REM 

—  L;i  rcli.uioii  csl  rrclicllc  |i;ir  l;i<|iii'll('  li's  lioiimics  iiioiilciil  :iii 
ciel.  (Mavimcï  iiKliciiiic) 

—  Les  noms  donnés  ;in\  iniiiisU'es  des  (lilTrrcnlsciillc^  cxiuimcMl 
prcsqnc  tous  l'idée  de  vieillesse.  (Voy.  pn-irc) 

—  L'édit  de  N;in(es,  qui  ;idn)('ll;iil  i;i  liberté  des  culU'S  en 
Ffiincc,  fnt  rendn  |i;ir  Henri  IV,  en  iriî)S:  Lonis  XIV  le  révoqua, 
en  octobre  Kîsrj. 

—  La  reliuion  rallioli((iie  est  nécessairement  iniiiioliilc.  cl  opposée 
à  tout  ciian.uenient  dans  les  idées  :  le  do.unie  lui  défend  de  rien 
modifiera  ses  croyances,  el  lui  impose  l'oliliLialion  d'une  l'ésistance 
absolue  et  avenule  aux  prourés  de  la  science,  doiil  le  rôle  (.'t  le 
devoir  est,  an  contraire,  un  pro.urés  indéfini. 

—  La  reli.uion  est  comme  un  cor.set  :  elle  ,uène.  mais  soutient. 

Reliques,  du  latin  rcliquice. 

Je -ni'  \  is  onnjucs  prcslrc  (|iii  blasiiiast  ses  n'li(|iR'S. 

—  Vers  la  fin  du  x<=  siècle,  les  Catalans  voulaient  tuer  saint 
Romuald,  pour  avoir  ses  reliques,  parce  qu'ils  craignaient  qu'il  ne 
quittât  le  pays. 

—  Enay  :  C'est  pourquoy  entre  les  reliques  de  sainct  Front,  on 
trouva  dans  une  petite  pbiole,  un  éternuenient  de  Sai net-Esprit. 
—  Fœncsle  :  Ce  sont  des  inbentions  de  bous  autres,  qui  abez  faict 
imprimer  un  imbentaire  de  reliques  où  sainct  Paul  a  dix  liuit 
testes;  sainct  Pierre  seize  corps;  et  sainct  Antoine  quarante  vras. 
(D'Aubiuné,  Arenlures  du  Baron  de  Fœncsle.) 

—  Reliques  des  grands  boni  mes  : 

La  lampe  dEpictète  fut  vendue  3.000  dracbmes  (2.700  francs). 
Le  livre  d"bcures  où  Cbarles  F'"  lisait  en  allant  au  supplice,  fut 
vendu,  en  182o,  100  guinées  (^2.500  francs). 
Une  dent  de  Newton,  en  1816,  Kî.riOo  francs. 
Une  perruque  de  Sterne,  en  1822,  o.OOO  francs. 
Le  cba[)eau  de  Napoléon  à  Eylau  (décenilu'e  1830).  1.920  francs. 

Remède,  pro\ençal  remedi.  du  latin  nnncdiuin. 

—  Remède,  dans  le  sens  de  lavement,  est  un  eupbéniisme  qui 
date  du  temps  de  Louis  XIV. 

—  Le  remède  est  pire  que  le  mal.  Il  faut  de  la  prudence  dans  les 
réformes  ;  on  doit  craindre  de  cbanger  une  situation  mauvaise  en 
une  autre  qui  pourrait  être  pire. 

Un  proverbe  dit  qu'il  vaut  mieux  laisser  son  enfant  morveux,  que 
de  lui  arracber  le  nez. 


REX  3G1 

—  Dnn?  iino  niicionno  conicHlic  il;ilionno,  un  lioiiiiiio  très  ,uros  se 
pl.'iiiit  (les  iiK-oinriiiciits  de  son  olirsilt''.  Arli'qiiiii  lui  propose  de  le 
inetli'c  sons  imc  lorlc  presse,  el  lui  .a;ir;mtil  ipi'il  U\v<\  disparailre 
cet  enilionpoiiit  si  ,m'ii;ii)t.  i>  —  S;iiis  doute,  dit  iMiilre  :  iiinis  j'en 
iiiourrai.  —  Gela  se  lient  :  mais  ce  que  je  puis  vous  assurer,  c'est 
que  vous  deviendrez  aussi  mince  qu'une  feuille  de  papier.  » 

—  Il  y  a  remède  à  tout?  excepté  à  la  mort.  C'est-à-dire  il  ne  faut 
se  déconra.uer  devant  aucune  diflicnlté,  [larce  qu'on  peut  trioniplier 
de  tout  avec  de  réiieruie  el  de  la  \olonté,  excepté  toutefois  de  la 
inoi-|. 

Réméré,  d'un  mol  has-latin  rccmere,  racheter. 

Faculté  de  pouvoii-  racheter,  dans  un  délai  déterminé,  un  objet 
vendu. 

Acte  par  lequel  le  vendeur  d'un  imnjcuhle  interdit  à  l'acipiéi-eur 
de  le  revendre,  et  se  réserve  la  l'acuité  de  le  racheter,  dans  un  délai 
qui  ne  peut  excéder  cinq  ans. 

Remettre,  du  latin  roniltere. 

—  l'iemettre  quehiu'un,  dans  le  sens  de  le  reconnaitre,  est  une 
locution  vicieuse.  11  lanl  dire  :  se  remettre  en  mémoire. 

Remords,  du  lalin  /\"//i(tfsNs.  de  remordere,  remordre.  Ancien 
français  rc/itors ;  le  d  a  été  ajouté  au  xvi"  siècle. 

Uepi'oclie  vif  et  perpétuel  que  fait  au  coupable  sa  conscience. 

C'est  un  pliénoraème  psycholo.uique  complexe,  qui  se  compose 
du  jugement  par  lequel  le  coupable  condamne  son  acte;  et  du 
sentiment  de  douleur  ne  de  cette  condamnation.  Le  remords  est  la 
pbis  puissante  sanction  de  la  loi  morale. 

—  Remords  et  complices:  uiemento  vivant. 

Remouleur:  gagne-petit. 

Habelais  donne  à  un  procureur  le  nom  de  Gaigne-Beancoup. 

Remplir,  de  re  et  e>/i/)///\  lalin  i>n])lore,  roman  omplir. 

Oiniiliilii  ilr  .saiicliis  rrliiiiuts. 

(Pfiii.omkna.) 

(Remiili  de  saintes  i'eli(pies.) 

Renaissance,  dérivé  de  renaissant .  du  latin  rcnasrcnlon. 

l'^ioque  qui.  pour  la  France,  répond  aux  règnes  de  François  I'"'' 
et  de  Henri  II  (loIo-15o9).  Le  goût  des  arts  et  de  la  littérature  de 
l'antiquité  se  ranima  alors  et  modilia  les  anciennes  traditions. 

—  Genre  d'architecture  qui  a  succédé  au  gothique  vers  le  xvi« 


302  RE\ 

siècle  :  (>l  {|iii  coiisislc  (l;ins  l;i  siiltslitiitioii  du  [ilciii  riniro  ;i  l'opivc, 
avec  iiiio  <ir;iii(l('  ;iIh)ii(I;iiic('  (roriiciiiriils  lins  et  gracifiiix. 

Les  cliâlcaiix  de  (lliaiiilxti'd,  de  Koiilainolilfaii,  d'Krouen,  d'Anct, 
lllH^  parlic  du  l.oiivi-c,  dalciil  de  celte  (''pfxine. 

—  La  Ueiiaissaiice.  (|iii  cliaiiuca  la  face  de  l'IjuTipp,  est  le  retour 
aux  éléiiieiils  coiisliliilifs  de  l'art  aiitiiiiie.  par  l'adoption  des  formes 
particulières  (pii  lui  sont  propres  et  qui  en  déi-ivent. 

Renard,  du  \ieil  alleuiaiid  rcinlidrl .  lin,  rusé. 

—  Le  l'enai'd  s'appelait  auti"efois,vo?/yyi/,  vo}'/fi/.  du  laliu  rn//)es: 
lorscpi'au  xiir'  siècle  parut  un  poèuu' satirique  et  hurlesfpie  de  Pierre 
de  Sainl-CIoud.  sous  le  litre  de  Rot/ian  dr  /ienarf.  Le  héros  de  ce 
poème  est  un  rusé  fiouiiil.  ([ui  joue  une  foule  de  mauvais  tours  au 
loup  (Ysenprin),  son  oncle.  L'auteur  donne  au  gonpij  jc  nom  de 
renard,  (pii  vient  du  tudesque,  et  alVulile  les  autres  acteurs  de  noms 
d'hommes,  comme  a  fait  depuis  La  Fontaine  (?). 

Ce  roman  devint  très  populaire,  si  bien  que  le  nom  de  renard 
remplaça  celui  de  (joupiL  qui  linit  par  dispai'aitre  de  la  langue,  où 
il  n'a  laissé  que  goiipillon,  aspersoir  pour  jeter  l'eau  bénite. 

—  De  renard  vient  peut-être  traquenard ,  contraction  pour 
traque-renard  ;  piège  en  forme  de  trél)uchet  pour  })rendre  renards 
et  autres  animaux.  De  goupil,  dégohiUer,  pour  dégoupiller,  qui 
répond  au  dicton  «  écorclier  le  renard  »,  et  à  l'argot  renarder. 

—  Fin  ren;ird  :  rusé  coquin.  Vulpinu>i  animas.  (Plante.) 

Une  jeune  tille  à  qui  on  montrait  un  renard,  mit  la  main  sur  le 
collier  qu'elle  portait.  «  C'est,  dit-elle,  de  peur  qu'il  ne  me  le  vole  : 
les  renai'ds  sont  si  lins  dans  les  fables  de  La  Fontaine!  » 

—  Se  confesser  au  renard:  conlier  ses  alïaires  à  son  ennemi. 

—  Il  faut  coudre  la  peau  du  l'cnard  à  celle  du  lion. 

Où  la  peau  du  lion  ne  peut  suflire,  il  faut  coudre  un  lopin  de  celle 
du  renard.  (^Montaigne,  Essais,  1,  V.) 

—  On  disait  de  Léon  X,  qu'après  s'être  glissé  comme  un  renard 
sur  le  trône  pontifical,  il  avait  régné  comme  un  lion,  et  était  mort 
comme  un  chien. 

Rendre,  du  latin  reddere,  rc  et  dure. 

—  Rendez  à  César  ce  qui  est  à  César.  (Voy.  César.) 

Sauni  cuifjue  fri/jui/o.  est  une  célèbre  maxime  du  droit  romain. 

—  Chacun  son  droit,  chacun  son  dû. 

—  Ce  qui  est  l)on  à  prendre,  n'est  pas  bon  à  rendre. 


iii:\  36:} 

Rengaine,  du  im^l  fj'tinc,  l.iliii  ra;/ina. 

Allusion  ;'i  tiiK'  viiMlli'  cliiiiisoii.  qui  ;iv;iit  ;iu  n'Iriiiu  le  luol  rcn- 
fffn'ne  répété  à  snliélé  :  Tiirlnliiiii  n'iK/ciinc 

—  C'est  loujours  la  inéiiic  rengaine. 

Renommée,  de  re  et  nonuner,  latin  nominare. 
Va\  latin  et  en  roman,  se  dit  fuma,  qui  est  dans:  laineux,  infâme, 
dilVamer. 
Ancien  français  : 

(jn'i'llc  ;ici|iii'r;iil  \\w  tionleuse  lame. 
De  mal  \i\anti'  cl  inipiidiiiiic  femme. 

(//f.\7   (l'Anne  de  /lolein.) 

—  I.es  poètes  i-eprésenlent  la  Renommée  avec  cent  yeux,  autant 
d'oreille?  et  autant  de  lioiiclies,  et  tenant  deux  trompettes,  parce 
qu'elle  [lulilie  la  véiaté  connue  le  menson,ue  :  et  des  ailes,  pour 
marquer  sa  rapidité.  {Enéidp,  liv.  IV;  Ovide,  Melaviorjihoscx.  XII.) 

Ce  monsirc  cnniiMisi'  de  IriiicIios  et  d'oreilles... 

(BoiLEA'J,  Lutrin,  cli.int  U.) 

La  dresse  aii\  ccnl  \oi\  nu  l'arle  d'autre  cliose. 

(La  Foxtai.ne,  Œuvres  post/i urnes.) 

—  La  Renommée,  avec  ses  deux  trompettes,  rappelle  un  vers  de 
Uante,  où  il  dit  de  Barhariccia,  chef  des  démons  : 

E(I  cjH  (iri'ra  dcl  cul  fatlu  Iroinpetfa. 

{/iiferno,  Oinlo  :2'2.) 

—  Bonne  renommée  vaut  mieux  que  ceinture  dorée. 

Les  c-eintures  doréeset  autres  vêtements  de  luxe  étaient  exclusi- 
vement réservés  aux  femmes  honnêtes,  et  un  arrêt  du  28  juin  1420 
lit  défense  aux  filles  de  joie  d'en  porter.  (Voy.  ceint  are.) 

Ce  proverbe,  dit  Pasquier  (Recherches  de  In  Frtntn'}.  indique 
que  la  renommée  est  hien  [)lus  lionorahle  pour  les  fe;nmes,  ({ue 
ne  le  serait  la  ceintui-e  dorée  sans  une  lionne  réputation. 

Renoncer,  du  laliu  renioitidre,  déclarer  qu'on  ahaiulonue. 
Renonremetit  est  du  langage  de  la  piété. 
J{e/ionc/(/fi()/i  est  du  langage  des  alïaires. 

Rente,  du  latin  reddiln,  partici[)e  passé  de  rcddo.  rendre. 

—  Affligé  de  dix  niiiU'  li\res  de  rentes  ;  se  dit  par  antiphrase, 
mais  exprime  cependant  une  idée  vraie. 

—  L'état  de  rentier  est  le  moins  sot  des  métiers,  et  le  métier  des 
sots.  (Voy.  vlagrre.) 

■  C'est  la  position  sociale  la  plus  einiée.  et  peut-être  aussi  la  plus 
enviable. 


364  i\\:v 

Renvoyer,  de  >r  et  cncoijcr,  roinctlre  en  V(jie  (ria). 
Synonyme  do  renvoyer  qiielqn'un  :  lui  donner  son  sac  et  ses 

quilles. 

Mire  renvoyé  :  i-ecevoif  l;i  pelle  un  cnl.  (^Villon.) 

Repaître,  l;itin  rc  el  priscerc. 

—  L'aninKil  se  repaît,  l'Iioninie  nianue.  riioiiiine  d'es|)riî  senl  sait 
mander.  (Brillât-Savarin.) 

—  Lorsqn'on  dit  de  (piehpi'iiii  (jii'il  se  re[(ail  (rilhisions,  on 
semble  indi(pier  qne  les  illnsions,  qui  nous  viennent  de  l'esprit  et 
de  l'imagination,  nous  assimilent  aux  hètcs.  C'est  ravaler  l'àme  au 
niveau  des  animaux.  L'expression  «  se  nonri'ir  d'illusions  »  est 
intiniment  préférable  à  celle  d'une  âme  qu'on  envoie  paitre. 

Repas,  latin  re  et  jiantum,  même  orieinc  que  le  précédent. 

—  Synonymes  :  Balthazar,  festin,  gueuleton  (repas  plantureux). 
Crevaille,  ripaille. 

Pique-nique  :  repas  à  frais  communs. 
Repas  de  brebis  :  repas  sans  boire. 

—  Depuis  ne  feismes  qu'ung  repas,  lequel  dura  tout  le  jour,  et 
ne  sçavions  si  c'esloyt  disnor  ou  soupper,  goustcr  ou  regoubillonner. 
(Rabelais,  V,  7.) 

Rcfjoubillonncr  se  dit  du  réveillon,  de  la  collation  faite  après  le 
souper.  Ce  mot  doit  venir  de  gober,  fjoblllor,  qui  a  pu  se  dire  dans 
le  sens  opposé  à  dégobUlcv  (?). 

Repentir,  de  rc  et  du  vieux  français  pentir  :  du  latin  pœnilerc. 

—  Synonyme  :  s'en  mordre  les  pouces. 

—  Le  repentir  est  la  vertu  du  coupable.  Qui  se  rcpent  est  presque 
innocent. 

Le  repentir  est  une  douleur  volontaire  et  salutaire;  le  remords 
est  une  douleur  vengeresse  et  forcée. 

Répéier,  du  latin  repelcre. 

Tlœc  placiiil  seinel,  lurc  (hrie<  rrpclild  pliicc'oil. 
(Yoy.  rabfic/wr,  rengaine,  rltoarnetle.) 

Répondre,  du  latin  respondere  :  provençal  respondre. 

—  Répondre  de  :  se  porter  caution,  garantir  ;  d'où  les  mots  : 
responsable,  responsabilité. 

—  Le  latin  sponsus,  engagé,  a  donné  époux. 

Vous  lie  ivpoïKiez  point,  et  ce  iiKinn'  silence 
ReJouble  encor  ma  peine  et  innn  impatience. 

(Molière.) 


REP  365 

Réponse,  du  hiliii  7'es/)()nsa  :  môme  ori.uino  qiio  \o  procèdent. 

—  Hrpoiisc  ilo  .WiniKiiid  :  ni  oui,  ni  non. 

Et  tàclirz  (Hicliiiiffois  (II'  n'iMiiiilrc  imi  Xiiriii.iiid. 

(I.A   Kuntaim;,  VII.  H.) 

Repos,  siibslnntif  vctIkiI  de  vcpuscr:  do  re  et  ponere,  par 
pau^avc. 

Quelques-uns  le  tirent  de  repolnre  !  Repotio  ou  potatio  ilcrala 
était  le  repas  que  donnait  le  mari  le  lendemain  des  noces.  (Horace, 
Sat.  II,  50;  Ausone,  Épisl.  XIII,  37.) 

—  Les  Romains  donnaient  toujours  un  lendemain  aux  fêtes,  et 
continuaient  ce  jour-là  le  festin  de  la  veille.  De  là  l'usaoe  de  fêter 
le  lundi,  et  le  dicton  populaire  :  Il  n'y  a  pas  de  bonne  fête  sans 
lendemain. 

—  Le  bonheur  est  dans  le  repos.  (Ilitopadésa.)  Ici  repos  veut 
dire  calme,  sérénité  de  l'àme,  et  c'est  dans  ce  sens  que  Jésus-Christ 
a  loué  Marie,  qui  reste  à  ses  pieds,  plus  que  Marthe,  qui  s'occupe 
des  soins  du  ménage. 

—  Le  bonheur  est  une  illusion  de  jeunesse;  le  repos  est  la  seule 
félicité  qu'on  puisse  obtenir  ici-l)as. 

Le  repos  est  une  chimère  aussi  insaisissable  que  le  bonheur. 

Tout  le  malheur  des  hommes  est  de  ne  pas  savoir  se  tenir  en 
repos  dans  une  chambre.  (Pascal.) 

Similis  quitta  les  emplois  et  les  honneurs  et  passa  dans  la 
retraite  les  sept  dernières  années  de  sa  vie.  Il  fit  mettre  sur  son 
tombeau  :  «  Ci-git  Similis,  ([ui  a  existé  un  grand  nombre  d'années, 
mais  n'en  a  vécu  que  sept.  » 

Littus  amn,  altitiit  nlii  Icncanl. 

(HOUACE.) 

(Aime  le  rivage,  laisse  aux  autres  la  pleine  mer.) 

Le  repos,  trésor  si  précieux 
Qu'on  l'ii  faisnit  jadis  le  partage  des  dieux  ! 

(La  Koxtai.xe,  vu,  1:2.) 

Le  mouvement  du  corps  est  le  repos  de  l'Ame. 
Quand  le  corps  se  repose,  l'âme  s'agite.  (E.  Arago.) 

—  Repos  était  dit  pour  mariage  dans  l'antiquité. 
(Jiia'ram  tihi  requiem.  (Ruth,  III,  1.) 

—  Il  vaut  mieux  marcher  que  courir,  être  debout  que  marcher, 
être  assis  que  debout,  être  couché  qu'assis,  dormir  que  veiller,  être 
mort  que  tout  cela.  (Maxime  indienne.) 


3GG  :  RKS 

Réprimander,  de  n'itriniatulc,  l;iliii  rojii'iinoinlua. 

—  F.'iirc,  iiiic  M'i'lc  n'|»iiiii;iii(l('.  c'est  (loiiiicr  une  Nolée  de  liois 
vert.  (Voy.  rolro.) 

Si  i;iiii;iis  \()l(''e  de  liois  verl  ;i|ipli(iii('e  sur  une  ('•diine...  (Beaii- 
ni;i reliais,  Muruuji'  de  Fujaro.) 

—  Synonymes  :  chapitrer,  guiirinaiider  ;  donner  nnt;  chasse,  nn 
galop,  un  poil,  un  savon  ;  laver  la  télé,  moucher,  vitupérer  ;  faire 
une  mercuriah\ 

République,  républicain,  latin  res  ixiblira,  la  chose  piihhqne. 
(loiiveriiei)ieiil  de   Ions  par  tons  et  }»onr  tous  :  Omnla  omnibus. 

—  Les  poètes  et  les  joueurs  de  (Inte  étaient  hannis  de  la  Répu- 
blique de  Platon.  Terpandrc  fut  exilé  de  Sparte  ponr  avoir  ajonté 
une  corde  à  la  lyre. 

—  La  Répnhliqne  est  une  enchmie  (jui  usera  bien  des  marteaux. 
(Th.  de  Bèze.) 

La  Répuhhque  française  est  comme  le  soleil  :  aveuoie  (jui  ne  la 
voit  p;is.  (Napoléon.) 

—  République  démocratique  et  sociale  :  craque  publi(pie.  démolira 
société.  (Anagramme  1849.) 

—  Synonymes  de  républicain  outré  :  démagogue,  démocrate, 
socialiste,  communiste,  jacobin,  terroriste. 

Réputation,  du  latin  reputalio. 

' —  La  réputation  est  une  enseigne  qui  fait  connaître  on  la  vertu 
loge.  (Saint  François  de  Sales.) 

—  Réputation  surfaite:  Courbet  est  un  excellent  déboulonneur  : 
mais  comme  peintre,  c'est  une  comète  chauve.  (L   Venillot.) 

Requinquer  (se),  du  latin  re  et  quinquare,  nettoyer. 

—  Se  parer,  s'ajuster. 

I^a  voilà  toute  requiiKiiiéc 
Qui  ne  songe  plus  à  Sicliéo. 

(ScARRON,    \"irgile  trare.'ti.) 

Résignation,  du  latin  ?'e  et  signare. 

Soumission  à  une  volonté  étrangère  ou  à  la  destinée. 

Résipiscence,  du  latin  resiplscere,  redevenir  sage. 
Reconnaissance  de  sa  faute,  avec  renoncement. 

Respect,  du  latin  respectus,  regard  en  arrière  ;  d'où  aussi  répit. 

Substantif  uiasculin,  qui  répond  à  récérence.  Il  serait  bon  d'em- 
prunter aux  Anglais  respectabllUé  qui.  mieux  que  honorabilité^ 
répond  à  l'idée  de  respect  dû  à  une  personne  irréprochable. 


RES  3G7 

—  Le  ro?pcct  est  presque  toujours  reflet  de  la  erainte. 

La  distante  aiiirineiite  le  respect  :  Majfstd/is  major  e  lonyinqno 
l'crercnfia.  (Tacite,  Annales  I,  37.) 

—  Sauf  votre  respect;  sauf  le  respect  rpie  je  vous  dois  ;  parlant 
par  respect.  Ces  formules  de  politesse  s'emploient,  dans  les  campa- 
gnes, quand,  en  parlant  à  des  supérieurs,  on  nomme  des  animaux  : 
«  Sauf  votre  respect,  deux  cochons  à  vendre,  i 

Molière,  dans  le  Médecin  inahjré  lui,  se  sert  d'une  e.xcuse  équi- 
valente, en  parlant  d'un  apothicaire:  «  J'avons  dans  notre  village 
un  apothicaire,  révérence  parler,  qui  lui  a  donné  je  ne  sais  comhien 
d'histoii'es.  » 

Rahelais,  dans  PantacjrueL  a  sans  doute  eu  l'intention  de  ridicu- 
liser ces  précautions  oratoires,  quand  il  dit  :  «  Je  les  ameine  d'ung 
pais  auquel  les  pourceaulx  (Dieu  soit  avec  vous  !)  ne  mangent  que 
des  myroholans  ;  les  Iruyes  en  leur  gésiiie  (saulve  l'honneur  de 
toute  la  compaignie)  ne  sont  nourries  que  de  lleurs  d'orangiers.  » 

—  Sauf  votre  respect,  c'est  un  calfat.  (Locution  toulonnaise.) 
Ilonos  sit  aiin'fjus  hahilus  [(}.  Curce")  :  sauf  votre  respect. 

Ressembler,  intens.  de  sembler,  du  latin  similare. 

—  Qui  se  ressemble,  s'assemble.  Ce  proverbe  très  ancien  se  trouve 
dans  XOdyssée  d'Homère  (XVII,  218)  et  dans  beaucoup  d'écrivains 
de  l'antiquité. 

Par  cum  parc  facillinv.  conijreganiur.  (Cicéron,  Calo  major.) 

Xecesne  est  connlin  sequi  cons'nnilia. 

(Tf,iiKM;K,   HfiaiitonlimiiroiuiK'nox.  I.  H.) 

Odcninl  hilarciii  triples,  trisIciiKjue  jocosi. 

(HollACE.) 

La  nature  vit.  au  contraire,  de  contrastes,  et  le  proverbe  «  Qui 
se  ressemhie,  s'assemijle  »  est  une  des  nombreuses  sottises  qui 
tendent  à  discréditer  la  Sagesse  des  nations.  On  ne  cherche  chez  les 
autres  que  ce  qu'on  ne  trouve  pas  chez  soi,  de  même  que  par  le 
commerce  on  échange  des  produits  de  nature  diverse. 

—  Cangrande,  le  plus  illustre  des  Scaliger,  tyrans  de  Vérone, 
donna  Iho-spitalité  à  Dante,  et  l'illustre  exilé  eut  souvent  à  soutïrir 
auprès  de  cet  hôte  redoutable.  Un  jour,  Cangrande  lui  demanda 
insolemment  «  comment  il  se  faisait  que  lui,  personnage  si  docte  et 
si  inspiré,  plût  moins  qu'un  boulïon  dont  les  facéties  divertissaient 
toute  sa  cour  ».  Dante  répondit:  «  Ceux-là  se  ressemblent,  qui  se 
rassemblent.  » 


:ui8  Ri:v 

Restaurrtnt,  du  hiliii  rrsldiirtii-c  r('i;ililir. 

—  Le  iMciiiicr  i-csl;iiir;inl  s'éUihlit,  cii  Fratifc.  on  ITOo,  rue  des 
Ponciez  ;  on  y  vend.'iit  des  consommés  cl  des  ceiifs  fr;jis,  et  on  Ijsjiit 
sur  la  porte  :  VenUe,  omnos  qui  stomacho  lahoralis,  et  ego 
rofldiiraho  ros. 

Le  deuxième  s'ouvi'il,  nie  de  la  Harpe,  en  1708,  non  loin  de  la 
rue  de  la  Huclielle,  (pii  était  célèbre  dès  le  Moyen-Age,  par  ses 
r(')lisseries. 

11  n'y  avait  à  Paris,  avant  cette  é[)0(iiio,  que  des  li()tellerics,  des 
auberges  et  des  cabarets.  Le  plus  ancien  cabaret  de  Paris  est  l'bôtel 
de  Venise,  dans  la  rue  de  ce  nom.  Il  s'appelait,  à  la  fin  du  xvi« siècle, 
«  le  Cabaret  de  l'Epée  de  i)ois  ». 

Dans  les  premiers  restaurants  on  ne  vendait  (pu;  du  bouillon, 
que  l'on  appelait  cordial,  ou  restaurant;  ce  n'est  que  plus  lard 
qu'on  y  fit  une  cuisine  complète. 

...Demeura  cinq  ou  six  jours  enfermé  dans  une  garde-robbe, 
sans  saillir  deliors  ;  et  là  ne  vivoyt  quedercstaurans.  {Ilpptaméron, 
NouY.  49.) 

—  Restaurant  en  plein  vent  :  restaurant  des  pieds  buraides. 

Retenir,  de  retbiere  {re  et  tenere). 

—  Je  ne  vous  retiens  pas  :  allez-vous-en. 

Nthil  vos  moror  (Cicéron)  :  Je  ne  vous  retiens  plus. 

Formule  que  prononçait  le  Consul,  lorsqu'il  congédiait  le  Sénat. 

Réticence,  du  latin  reliceo ,  comp.  de  tareo  (passer  sous 
silence). 

Figure  par  laquelle  l'orateur  interrompt  subitement  une  pbrase 
commencée,  mais  de  manière  à  faire  deviner  ce  que  son  silence 
laisse  sous-entendre. 

Réussir,  vieux  français  réissir,  de  re  et  exire. 
Le  vieux  français  avait  aussi  issir,  d'où  issue. 

—  Synonymes  de  réussi  :  tapé,  enlevé  ;  article  enlevé  ;  scène 
enlevée. 

Ne  pas  réussir:  faire  cbou-blanc  {chou  est  pour  coup):  faire 
fiasco  ;  faire  four  (^voy.)  :  jouer  devant  une  salle  vide,  dont  les  loges 
sans  public  ressemblent  à  des  boucbes  de  four. 

Rêver,  jadis  resver,  doit  venir  de  r«,  pour  re,  et  de  via,  voie. 
Revenir  sur  la  voie,  sur  les  anciennes  pensées  ;  parce  qu'il  est 
fait  comme  desver  {dis  viare),  qui  est  resté  dans  endêver. 
Peut-être  de  revoir  (?)  ou  du  provençal  rêvés,  envers  (?). 


Révérend,  du  I.ilin  ;Y'rc;Y'/?^/</.ç,  l'cspectablc,  qu'on  doit  rôviM'or. 
Titre  (judii  dimnc  ;iii\  pivliits,  aux  diunitaires  de  rKglise. 

Revoir,  /•"  et  coir,  du  latin  videre. 

—  (»n  dit  :  au  revoir. 

«  A  revoir  >  est  nn  solécisme  que  Casimir  Delavigne  a  commis  en 
faisant  dire  à  Marine  i'alieio  : 

A  roviiir  dans  le  cii'l,  mon  \ifii\  cumpagnon  d'armes. 

Révolution,  du  latin  iccolutHin,  de  l'evolco,  retourner. 

SiLiiiilie  aussi  (/ero'i/e/it/'nf,  et  implique  une  idée  d'ordre  et  de 
succession. 

Hume  a  intitulé  son  livre  :  Histoire  des  révolutions  dWnrjleterre, 
c'est-à-dire  des  événements  successifs  qui  se  sont  produits  dans  ce 
royaume. 

C'est  à  tort  qu'il  signifie  aujourd'hui  une  secousse  violente  dans 
l'état  politique  d'un  pays. 

Voltaire  est  nn  des  premiers  qui  ait  dit:  «La  ré\olulion  d'An- 
gleterre »,  en  parlant  de  la  chute  de  Charles  I''. 

Depuis  lors,  on  a  usé  et  abusé  de  ce  mot  ;  on  a  créé  le  substantif 
révolutionnaire,  et  le  verbe  révolutionner,  qui  n'est  pas  français. 
La  uu)indre  émeute  est  traitée  de  révolution  ,  dont  toutes  les 
commèi'es  du  quartier  sont  révolutionnées. 

—  M.  de  Barante  a  pris  pour  épigraphe  de  son  Histoire  de  la 
Convention,  cet  liémistiche  de  Lucain  : 

JasijHe  diitnm  scctcri. 

—  Les  vices  de  la  cour  ont  commencé  la  révolution  de  1789:  les 
vices  du  peuple  l'achevèrent.  (Rivarol.) 

Quand  les  idées  sont  mfires,  les  pavés  se  soulèvent  deux-mômes. 
1791,  la  Constituante,  Mirabeau;  1792,  la  Législative,  Danton; 
1793,  la  Convention,  Robespierre. 

—  En  1790,  on  demandait:  «Que  deviendra  la  Révolution 
française?»  Une  anagramme  répondit:  «Otez  Veto:  un  Corse  la 
Unira.  » 

Revolver,  du  latin  revolvere,  par  l'anglais. 
Mot  ancien,  qui  signifiait  se  rappeler  une  chose. 

Rez,  même  origine  que  ras,  de  radere,  raser.  , 
D'où  rez-de-chaussée. 

Rhétorique,  du  grec  rhèlorikè  (teclmè),  l'art  de  parler. 
Racine  rhéo,  couler  (?j. 


'MO  ftlU 

L'éloquoncc,  en  flïol,  ;i  (''té  sonv(!nt  (•(imp.'iiv'e  ;iii  cniirs  d'iiii  llciivo. 
Snint  .Irrônio,,  (l;iiis  son  épîtrc  îiiix  Galiitos,  conipîii'e  l'éloquence  de 
saint  Ililnire  au  lUiône:  Lallnœ  éloquent iœ  Ji/iodanus. 

De  même,  Fortunat,  an  livre  I  de  la  Vie  de  saint  Martin,  dit  : 

lUioiliinti  torrcntiiir  (tuijilo. 

Rhinocéros,  du  grec  rhis,  nez,  kéras,  corne. 
Corne  en  forme  de  nez  ;  ou  plutôt  corne  sur  le  nez. 
Nez  de  rhinocéros  :  long  et  pointu. 

Rhume,  du  grec  rheiona,  de  rhéo,  couler;  d'où  aussi  rhumatisme. 

Ribambelle,  mol  burlesque,  d'origine  inconnue;  peut-être  de 
riban,  pour  ruban  (?). 

—  Longue  série,  se  dit  en  mauvaise  part  :  une  ribambelle 
d'enfants.  (Voy.  kyrielle.) 

Ribaud,  vieux  français  ribald,  bas  latin  ribaldus,  du  germa- 
nique hriba,  prostituée. 

D'auti'cnt  le  tirent,  avec  peu  de  vraisemblance,  de  robiistus,  ou 
de  l'italien  ribaldo,  qui  saule  de  joie;  d'où  viennent  aussi  baudet 
et  s'ébaudir. 

—  Ce  mol  n'était  pas  odieux,  au  temps  de  Philippe-Auguste,  et 
servait  à  désigner  les  soldats  d'élite  qui  formaient  la  garde  du  roi. 
Le  Roman  de  la  Rose  parle  de  ribauds 

Poiians  sacs  et  cliarbons  en  grève. 

C'était  donc  ce  qu'on  nomme  aujourd'hui  les  débardeurs,   les 
forts,  travaillant  à  charger  et  à  décharger  les  bateaux. 
Dans  ce  cas,  il  viendrait  du  provençal  riba,  rive,  berge. 

I^e  rcis  de  Fransa...  era  sobre  la  riba  d'un  flum... 

(Bkrtb\nd  de  BonN.) 

Les  portefaix  de  Marseille  emploient  encore  aujourd'hui,  pour 
faire  les  travaux  les  plus  pénibles  des  quais,  des  domestiques  qu'ils 
appellent  roubeiroùs,  qui  vient  évidemment  (?)  de  ribaud. 

—  Plus  lard,  ce  mot  servit  à  désigner  des  débauchés,  larrons. 

. .  .Son  filli  de  Irotiors, 

De  ribautz  o  d'autres  pontoniers. 

(Cabanei.,  de  Marseille.) 

• 

(Sont  fds  de  coureurs,  ribauds  ou  autres  gueux.) 

—  Sous  Charles  YI  ,  on  supprima  la  charge  de  «  Roi  des 
Ribauds  »,  dont  l'office  était,  à  la  suite  de  la  cour,  de  connaître  de 


lUC  371 

tous  les  jeux  de  tirs,  de  brelan  el  autres.  Il  levait,  à  sou  proni,  deux 
sous  par  semaine  sur  les  lo.uis  de  prosliluées. 

—  Il  y  a  près  d'Hyôr^îs  l'île  de  Rihaiid.  l'île  du  Pelit-Ribaud  et  l'île 
Ribaudou. 

Ricaner,  vieux  français  rccaner.  recalgner:  ]\VQ\(i\\ç.?\regnnn. 
Rire  lualignenient  :  se  uioijuer. 

Vitilii-l-il  pas  Moiisiriir  (lui  ricane  déjà? 

(TartufTe,  I,  1.) 

Riche,  origine  geriuauicpu',  allemand  reich. 

—  Rie,  dans  les  langues  du  Nord,  signifiait  puissant,  fort. 

La  terminaison  rix,  dans  les  noms  gaulois  (Ambiorix,  Yercingé- 
torix),  et  dans  les  noms  francs  (Gliilpcric),  ou  gotlis  (Alaric),  n'était 
que  l'indice  de  la  puissance,  de  la  force. 

—  Le  poète  Fortunat  explique  le  nom  de  Cbilpéric  :  Chilpe, 
adjutor,  rie,  fortis. 

—  La  langue  des  troubadours  emploie  le  mot  rie,  riche,  dans  le 
sens  de  fort,  puissant. 

Serai  plus  rlcx  (pTil  scnhor  de  Marroc. 

(Ai;gier.) 

Les  rieos  ombres,  en  Espagne,  étaient  les  plus  puissants.  «  Les 
ricbes  hommes  étaient  ainsi  nommés,  non  pour  être  riches  et 
posséder  des  domaines ,  uuiis  pour  être  puissants  et  d'illustre 
lignage.  »  (Rosche.) 

Monstrelet  a  employé  rielie  dans  le  sens  de  fort  :  «  Il  y  eut  maint 
riche  coup  féru  entre  icelles  parties.  » 

—  C'est  dans  le  sens  de  puissant  qu'il  faut  expliquer  la  locution 
proverbiale  rie-n-rie. 

—  Aujourd'hui  encore,  dans  la  langue  populaire,  l'adjectif  riche, 
précédant  le  substantif  qu'il  qiudific,  lui  donne  plus  d'énergie.  On 
dit  :  un  riche  temps,  un  riche  vin  ;  pour  un  bon  temps,  un  vin 
généreux. 

—  Le  changement  de  sens  du  mot  riehe  vint  plus  tard  du  chan- 
gement dans  les  mœurs.  Quand  la  puissance  ue  résida  plus  unique- 
ment dans  la  force  matérielle,  et  que  le  pouvoir  de  l'or  et  de  la 
propriété  balança  la  puissance  féodale  et  militaire,  les  riches,  les 
forts,  les  puissants,  furent  ceux  qui  possédaient  les  terres,  les 
troupeaux,  l'or  et  l'argent. 

Rielie  devint  alors  l'équivalent  du  latin  locuples,  abondant  en 
possession  [locus). 


%n  uic 

—  Synonymes  :  calé,  ('ossu,  Crésus. 

Riche  comme  le  marquis  de  Carabas,  ..  comme  Crésus,  -...comme 
un  colïre,  ...comme  un  niarcliand  de  cochons,  ...comme  hi  mer. 
(Yoy.  Pactole,  Pérou,  Turan;cl.) 

—  Rotschild,  mort  à  Paris,  en  novembre  1808,  a  laissé  deux 
milliards  de  foi'liinc.  Le  marquis  de  Bule.  20  :;ns,  anglais,  prend 
possession  (décembre  18G8J  d'un  patrimoine  de  cent  cinquante 
millions. 

—  Riclie  et  pauvre  :  c'est  l'éternelle  rivalité  du  aras  et  du  mai^rre. 
R  y  a  deux  grandes  iniquités  dans  le  monde,   re\tréme  opulence 

et  l'extrême  misère.  (Chateaubriand,  1832.) 

Il  faut  être  puissant  pour  devenir  riche,  ou  riclie  pour  devenir 
puissant. 

Un  homme  riche  a  de  quoi  entretenir  tous  ses  vices,  et  acheter 
toutes  les  vertus. 

C'est  de  l'enfer  des  pauvres  qu'est  fait  le  paradis  des  riches. 
(V.  Hugo.) 

—  Après  toutes  ces  réprobations,  tous  ces  anathèmes  contre  la 
richesse,  tranchons  le  mot,  et  faisons-en  le  huitième  péché  capital. 

—  S'enrichir  :  mettre  du  foin  dans  ses  bottes  :  faire  sa  pelotte. 

—  Le  riche  ne  dine  qu'une  fois.  La  grande  misère  de  l'homme 
est  l'incapacité  absolue  de  jouir  de  sa  fortune,  faute  de  moyens 
passionnels. 

—  «  Si  j'étais  riche  !  dit-on,  je  ferais...  »  Mensonge;  on  tient  plus 
au  dernier  écu  qu'on  amasse  qu'au  premier  qu'on  a  gagné  ;  car 
l'avarice  est  le  châtiment  du  riche. 

—  Henri  II  de  Montmorency  ayant  entendu  un  paysan  dire  qu'il 
ne  manquerait  rien  à  son  bonheur,  s'il  pouvait  racheter  une  terre 
qui  avait  appartenu  à  sa  famille  :  «  Combien  vaut-elle,  lui  demanda- 
t-il?  —  Deux  mille  écus.  —  Qu'on  les  lui  donne,  et  qu'il  soit  dit  que 
j'ai  fait  un  heureux.  » 

—  On  ne  prête  qu'aux  riches  :  L'argent  cherche  l'argent.  Si  les 
riches  n'ont  point  d'esprit,  on  leur  en  prête,  parce  qu'ils  sont  les 
seuls  qui  puissent  rendre. 

Danlàr  opes  nulli  nisi  dicilibus. 

(.Martial.) 

Richesse,  dérivé  du  précédent. 

—  Le  dieu  des  richesses,  chez  les  Egyptiens,  était  Mammon;  chez 
les  Grecs,  Plutus;  chez  les  Romains,  Dis  ou  Pluton,  dieu  des  enfers, 
et  par  conséquent  des  trésors  que  la  terre  renferme  dans  son  sein. 


HIC  373 

Dis,  le  pôro  ;hi\  rciis   (Riilichiis.  III.  3.) 

—  La  l'ichosse  est  pci-soimiliôe  dans  Citsiis.  Midas,  et  aussi  dans 
Tiircai't't. 

—  La  |>i'()dii(iion  des  rirliossesest  diieà  (iiiatro  sources  principales 
qui  soûl  :  le  travail,  le  capital,  le  coniiuerce  et  la  spéculation. 

La  pro.>;péril(''  sociale  ivsiille  de  la  iirodiiction  et  de  la  répartition, 
d'où  s'ensuivent  la  puissance  pnhiifpieet  le  boniieui"  individuel. 

L'Aniileterre  crée  de  urandes  richesses,  et  les  répartit  mal.  Il  en 
résulte:  ()[)nlciicr  monstrueuse,  misère  luonstrueusc.  Situation 
faiissi'  et  dangereuse,  qui  asseoit  la  puissance  pul)li(pie  sur  la  misère 
puliliqne. 

—  Contentement  [)asse  richesse. 

Lœtnis  sorte  tua,  vives  supicntcr. 

^IIoiiAcF.  Epist.  I.  X,  44.) 

—  Le  malheur  des  pauvi-es,  c'est  de  voir  le  Iiouheur  dans  les 
richesses  ;  le  nialiieui'  des  riches,  c'est  de  ne  pas  l'y  tj'ouver. 
(Chamfoi-t.) 

L'aruent  est  la  fausse  monnaie  du  bonheur. 

Le  houlieur  est  indépeinhiul  ihi  luxe,  et  ou  en  achète  davantage 
avec  un  denier  de  cuivre  qu'avec  une  bourse  d'or,  quand  on  sait  où 
Dieu  l'a  caché.  (Lamartine,  (ircniclla.) 

—  Il  n'est  richesse  que  de  science  et  de  santé. 

La  santé  et  la  gailé  valent  mieux  que  tout  l'or  du  monde. 
(Salomon  ) 

—  L'end)arras  des  richesses,  se  dit  pour  exprimer  les  soins  et  les 
soucis  qu'exige  la  direction  d'une  grande  fortune. 

Ceux  qui  envient  la  richesse  ignorent  ce  qu'il  en  coûte  de  travail 
pour  l'acquérir,  et  de  tourments  pour  la  conserver. 

—  Grande  fortune,  grande  servitude.  On  n'amasse  les  richesses 
qu'avec  peine,  on  ne  les  possède  qu'avec  inquiétude,  on  ne  les  quitte 
qu'avec  regret.  (Ausone.) 

nui  n'a  Knè'"''-  n'^t  guerre. 

—  Les  personnes  comblées  des  dons  de  la  fortune,  sont  comme 
des  vaisseaux  trop  chargés,  qui  risquent  plus  que  d'autres  de  couler 
bas.  (Saint  Chrysostome.) 

—  Philoxène  de  Cythère.  s'apercevant  que  les  richesses  le  ren- 
daient voluptueux  :  «  Par  tous  les  dieux  !  dit-il ,  perdons  nos 
richesses,  plutôt  que  d'être  perdu  par  elles.  » 


,374  \\\V 

Ricochet,  ('tymologio  hironnno. 

—  C'est  la  chanson  du  ricochet.  (Voy.  kyrielle.) 

Cette  locution  vient  du  jeu  du  ricochet,  qui  consiste  ;'i  jeter  sur 
l'eau  une  pierre  plate,  en  sorte  qu'elle  revienne  plusieurs  fois 
au-dessus,  par  petits  bonds,  avant  de  s'enfoncer.  L'eau  est  ainsi 
taillée,  cochée  et  rccochée. 

Dans  la  Chanson  du  Ricochet  les  mêmes  mots  reparaissent 
souvent. 

Johanncau  cite  comme  exemple  le  rondeau  de  Kominagrobis 

(Rabelais,  111,  21)  : 

Pronez-la,  ne  la  pronoz  pas  : 

Si  vous  la  prenez  pas,  c'est  bien  laict  ; 

Si  ne  la  prenez  en  effect 

Ce  sera  ouvré  par  compas 

Gallopez,  mais  allez  au  pas. 

Recuk'Z,  entrez-y  de  faict. . . 

Ridicule,  du  latin  ridiculus,  de  rideo,  rire. 

Le  ridicule  est  une  difformité  sans  douleur.  (Aristote.) 

Le  ridicule  est  plus  redoutable  qu'un  vice.  (Voltaire.) 

Rien,  du  lalin  rem,  chose;  provençal  re. 

Anciennement,  si,unit]ait  une  chose.  On  dit  encore  :  Ne  voulez- 
vous  rien  envoyer?  Voulez-vous  envoyer  quelque  chose? 

Un  rien,  se  dit  pour  un  peu.  Faire  un  rien,  dire  des  riens. 

Aujourd'hui,  rien  est  négatif  et  exprime  l'idée  de  néant,  et  par 
suite  l'idée  de  bagatelle,  comme  son  équivalent  latin  nihil,  nihiliun. 
On  vit  pour  rien  ici. 

—  Bernicle,  que  l'on  prononce  bernique,  anagramme  de  niberrje 
qui  signifie  rien  en  argot,  a  servi  de  terme  de  comi)araison  négatif  ; 
on  disait  :  Gela  ne  vaut  pas  une  bernicle. 

Ce  mot  sert  maintenant  à  exprimer  un  refus  gouailleur:  «Vous 
voudriez  bien  l'avoir?  Bernicle!  )> 

—  Socrate  disait  qu'il  ne  savait  qu'une  chose,  c'est  qu'il  ne  savait 
rien . 

—  Il  existe  une  brochure  anonyme:  Histoire  des  riens,  dédiée 
à  Personne.  (Paris,  in-12  de  3o  pages,  Ant.  Henqueville,  1730.) 

—  Qui  ne  risque  rien  n'a  rien  ;  car  où  il  n'y  a  rien  à  perdre, 
il  ne  peut  y  avoir  grand'choss  à  gagner. 

Riflard,  gros  rabot  qui  rille.  ou  ràlle,  les  aspérités' ou  parties 
raboteuses  du  bois. 

—  Désigne  un  grand  parapluie,  depuis  que,  dans  une  pièce  de 
Picard,  la  Petite  Ville,  jouée  à  l'Odéon,  l'acteur  qui  remplissait  le 


nMo  do  François  Rillai-d  |>;iriit  v\\  scène  avec  nn  énorme  parapluie, 
pour  cliarLicr  son  r('>l('. 

Rigaudon,  et  aussi  rif/odon,  de  Hlyand. 

J.-J.  Housseau  (Diclionnairc  de  inusiquej  dit  :  «  J'ai  oui  dire  à 
nn  niaitre  à  danser  que  le  nom  de  cette  danse  venait  de  celui  de 
linventenr.  lequel  s'appelait  Rieand.  » 

Rigoler  (se),  ancien  allemand  riya.  danser.  D'où  aussi  riole. 
S'amuseï",  folàti'er. 

—  /{if/o/cr  ('?■[  trcs  \itMi.\  dans  la  langue  H  se  trouve  dans  le 
JUnnnit  do  la  lioso,  dans  la  Furrr  de  Patelin,  dans  Rabelais. 

Cestoyt  passe-tem[)S  céleste,  les  voyr  ainsi  soy  rifiouller  (Gar- 
gantua. 1,  4.) 

Se  rigolant,  incnanl  ji'yt'iix  liiVluict. 

(G.  Marot.) 

Hélas  !  ce  n'est  pas  maintenant, 
Feriez-voiis,  (lu'ii  fault  rigoller. 

[Palrlin.] 

J'étais  à  Blois,  à  ri.uoler  comme  nn  père.  (Moyen  de  parvenir.) 

Rillette,  résidus  du  lard  que  Ton  a  fait  fondre  pour  en  tirer  le 
sain  douv.  Ce  qui  reste  au  fond  dn  vase,  et  se  trouve  rissolé;  par 
corruption,  rillé,  comme  (/résilié  a  donné  grillé. 

Ralielais  dit  rilles  pour  reliefs,  restes,  dessertes. 

Rimer,  du  ,urec   rltyihnios,  cadence  ;  ou  de  l'allemand  rini, 

nombre. 

Rimer  malgré  Minerve. 

(BolLEAU.) 

Invita  Minerva.  (Cicéron.) 

Tu  niliil  invita  dices  faciesre  Minerva. 

(Horace.  Poél.  313.) 

—  Le  cliarrae  des  arts  suscite  plus  d'appelés  que  d'élus.  Tel 
pauvre  diable  prend  pour  une  vocation  ce  qui  n'est  que  de  l'entê- 
tement, et  s'épuise  à  un  travail  acharné  et  inutile. 

Ce  n'est  pas  le  bœuf  de  la  peinture,  comme  le  Dominiquin,  c'en 
est  l'âne,  et  du  mai.iire  sillon  ([u'il  trace,  il  ne  sortira  jamais  que 
des  chardons.  Ses  stériles  elïorts  ne  peuvent  empêcher  que  la 
pesanteur  de  sa  médiocrité,  comme  le  rocher  de  Sisyphe,  ne 
retombe  sans  cesse  sur  lui. 

—  Ça  rime  comme  ballebarde  avec  miséricorde.  —  Autrefois, 
deux  consonnes  suivies  d'un  e  miiet,  étaient  suffisantes  pour  cons- 
tituer une  rime  féminine.  Plus  tard,  on  exigea  que  cette  rime  fût 


:^7(;  H  11' 

douille,  cl   ivsiillfil   (In   suii   (|ni   se  lie  iiiiiiir(li;il('iii('iit  ;'i  l;i  sylhilie 
muellc. 

On  racdulc  (iii'iiii    lioiiliqiiici-  do  l';iris,  iioiiiiué  .leaii   I5oiiiIh'|.  lil 

celle  épiliiplie  [tour  sou  ;iiiii,  suisse  de  Sainl-Euslaclie  : 

Ci-^il  iiHiii  iiini  Mardiiclio  : 
Il  ;i  \oiilu  Pire  ciiU'i'ré  à  Siiiiit-Kiist;iclii\ 
Il  \  p<ifl;i  Irciih'  iiMs  In  linllclmnlc; 

Uif'ii  lui  f;issc  iiiis(''i'ic(ir(l('  ! 

—  I^;i  rimé  (ou  pluhU  l'assounucc)  est  iustiuctive  clic/,  le  [»eu[)le  : 
les  pro\erl)CS  et  dirtous  populaires  sont  presque  tous  rimes.  Le  jeu 
du  «  corhillon  qu'y  met-on  'l  »  et  les  comhats  de  jiiieulc  des  halles 
de  Paris,  cliaulés  par  Yadé,  rappellent  les  assauts  d'improvisations 
rimées  familières  aux  liergers  de  Virgile  : 

Kl  cnntiirc  para  cl  irpoixlcrc  parali. 

[E'jloyiics.) 

Rincer  (pour  )'/nsei%  du  lias-latiu  reslncerarc.  faire  redevenir 
net.  Ou  du  germanique  hrelnsa,  nettoyer. 

—  Rincer,  donner  une  rincée,  vient  de  ruhicel,  baguette;  d'où, 
en  architecture  rinceau,  ornement  composé  de  liranches  garnies 
de  leur  feuillage. 

...Liquelz  Loeys  fu  ainsi  comme  li  rains  qui  est  novellemcnt 
tranché  d'un  très  bon  arbre.  (Guil.  deNangis,  Annales  de  Sainl- 
Louls.) 

RipailBe,  origine  historique  :  de  Ripacula,  château  sur  les 
bo^'ds  du  lac  de  Genève,  où  Amédée  YIIl  de  Savoie,  qui  fut  depuis 
anti-pape,  sous  le  nom  de  Félix  Y,  se  relira  (1430)  et  fut  accusé  de 
se  livrer  à  des  excès  de  bonne  chère. 

Débauche  de  table. 

Johanneau  tire  ripaille  de  repalssaille,  ou  de  repuaille,  dérivé 
de  repu,  rassasié. 

Si  l'expression  ne  date  pas  d'Amédée,  et  qu'on  veuille  n'y  voir 
qu'une  injustice  pour  le  duc  et  nue  calomnie  pour  le  pape,  il  faut 
l'attribuer  à  un  autre  duc  de  Savoie  qui,  vers  la  fin  du  règne  de 
Louis  XIY,  lit  de  ce  même  château  de  Ripaille,  le  séjour  de  sa 
favor'ite,  la  comtesse  deYerrue,  ou  dame  de  Yolupté,  dont  on  a  dit  : 

Cette  (lame  do  Voluplé 
Vivant  dans  une  paix  profonde. 
Qui,  pour  plus  grande  sûreté, 
Fit  son  paradis  dans  ce  monde. 


m\  377 

Ripopée,  niiiiciiiuMiicnl  r//if////H'.  do  ro  ot  pojniuilinn,  do 
jioiiiiui .  cali.iiTl . 

Ain  iVclati''  |);ir  les  ciihMi'clicrs  :  iiiaii\;iis  \iii. 

Rire,  du  latin  ridcre. 

Synonymes  :  riiiolei',  pordi'O  son  sérieux,  i iJiciionnairc  des 
Précieuses.) 

—  Sourire  :  it'-Ljcr  rii'e. 

—  Hire  de  vaciièro  :  joie  déniesui'ée. 

—  [.e  rire  est  une  luanifeslaliou  de  l'inlelliLieiice  liuniaine,  car 
les  aiiiuiaiix  ne  laenl  pas.  Aristole  le  premier  a  i'einar(pi('  (|ue.  \{> 
rire  ajjparlient  en  [iropre  à  respéco  humaine.  Les  animaux,  en 
elVet,  ne  concevant  pas  l'idéal,  ne  peuvent  éprouver  ni  dédain,  ni 
orgueil,  ni  le  sentiment  comique  (pii  fait  naitre  le  rire.  Les  animaux 
pleurent  quelquefois  :  riiomnie  seul  a  le  don  de  l'ire. 

Ce  qu'il  faut  sui'tout  admirer  dans  cette  faculté,  c'est  la  |)uis- 
sance  de  volonté  (pii  lui  pei'met  de  recouvrir  l'agonie  de  son  cieur 
du  masque  de  la  joie  :  de  soulTrir,  le  sourire  sur  les  lèvres. 

Le  beau  (vi-ai.  bien)  donne  naissance  aux  sentimenls  sérieux,  au 
sublime;  le  laid  (faux,  erreur)  produit  le  ridicule,  la  mo(]uerie, 
excite  le  rire. 

L'elTet  comique,  ipii  [)i'odui{  le  rire,  naît  de  la  vue  des  vices  et 
des  défauts  des  autres,  {)arce  que  l'amour-propre  nous  persuade 
que  nous  n'avons  aucune  des  imperfections  qu'il  nous  monli*e.  La 
mission  du  comique  est  de  nous  faire  éviter  les  écai"ts,  par  la 
crainte  du  ridicule. 

—  Rire,  c'est  ce  qui  contente  le  plus,  el  c'est  ce  qui  coûte  le 
moins.  (Moyen  de  parvenir.) 

—  Lycurgue  institua  à  Lacédémone  la  divinité  du  rire,  si  néces- 
saire, disait-il.  à  adoucir  le  travail  et  les  peines  de  la  vie. 

—  Un  dit  :  rire;  comme  un  bossu,  ...comme  un  coffre,  ...comme 
un  fou. 

Rire  aux  anges  :  rire  seul,  d'un  souvenir. 

Qui  rit  seul,  de  folie  se  remembre. 

Rire  à  ventre  débouloinn'',  ...aux  éclats:  s'esclalVer. 

Rire  dans  sa  barbe  :  in  .^IoukkIki.  ((]icéron.) 

Rire  sous  cape. 

Rire  du  bout  des  dents,  des  lèvres. 

—  On  distingue  ainsi  :  le  rire  jaune,  forcé,  ou  sardonique  :  le  rire 
dédaigneux;  le  rire  gracieux;  le  rire  inextinguible,  ou  convulsif. 


378  RIR 

dont  parle.  Iloiiirrc;,  el  (jiii  soulève  en  nous  une  convulsion  (jiic  nous 
ne  pouvons  n^prinier. 

—  Le  rire  vient  du  cœur,  le  sourire  de  l'esprit. 

Le  rire  cp;inoui,  lar^e,  profond,  de  Molière,  fait  souL^'or  au  rire 
d'airain  de  la  comédie  antique.  (0.  Feuillet.) 

—  L'ahhé  Dauiasrèno,  astrologue  italien,  publia,  en  1002,  un 
livre  où  il  e\pli(juait  les  tempéraments  et  les  caractères  des  indi- 
vidus pai'  leurs  diverses  manières  de  rire.  11  disait  qu'il  y  avait 
autant  de  rires  que  de  voyelles. 

A.  Les  personnes  qui  rient  en  ha  !  hn  !  lui  !  sont  flegmatiques, 
franches,  inconstantes,  amies  du  bruit  et  du  mouvement. 

E.  Le  rire  en  fié  !  hé!  hé!  appartient  aux  bilieux. 

/.  ///.'  hi!  hi  !  est  le  rire  des  enfants,  des  gens  naïfs  et  mélan- 
coliques. Il  dénote  une  nature  timide  et  irrésolue.  Les  blondes 
rient  en  /  :  ce  qui  ne  veut  pas  dire  que  toutes  les  blondes  soient 
timides. 

0.  Le  rire  en  o/< .'  apparlient  aux  sanguins.  Il  indique  la  géné- 
rosité dans  les  sentiments. 

U.  Évitez  ceux  qui  rient  en  u.  Ce  sont  les  avares,  les  hypocrites 
et  les  ennemis  du  plaisir. 

—  Rire  aux  larmes.  Marot  dit,  dans  l'épitaphe  de  Jean  de  Serre, 
excellent  comique  dans  les  farces  d'alors  : 

Oito  (lis-je  '.'  on  ne  le  iilciiri'  point  ' 
Si  faict-on  ;  et  voicy  le  poincl  : 
On  en  ril  si  fort  en  maints  lieux. 
Que  les  larmes  viennent  aux  yeux. 

—  Mourir  de  rire  :  visu,  solti  (Horace),  crever  de  rire. 

Le  peintre  Zeuxis  mourut  de  rire  en  voyant  le  portrait  qu'il 
avait  fait  dune  vieille  femme.  «  Zeuxis  le  peinctre,  lequel  mourut 
subitement  à  force  de  rire,  considérant  le  minoys  et  pourtraict 
d'une  vieille  femme  représentée  eu  peincture.  »  (^Rabelais,  IV,  17.) 

Léon  X,  dit  Montaigne  (I,  2),  ayant  appris  la  prise  de  Milan, 
entra  dans  un  tel  accès  de  joie,  que  la  lièvre  l'en  prit,  et  il  eu 
mourut. 

—  Je  ne  vous  inviterai  pas  à  mon  enterrement,  vous  me  feriez 

trop  «rire. 

....l'ai  ri,  me  voilà  (tésarmé. 

(PiRo.N,  Métromanie.  UI,  7.) 

Courage,  rira  bien  (jui  rira  le  dernier. 

(■Jh.  Coii.NRii.Lh;.) 


ROH  379 

Ritournelle,  it;ilion  n'fornc/ia.  lalin  ?r  et  lovnnro. 

Ce  mut  est  fait  coinino  ceUii  de  La  Toiinielle.  trihiuial  de  Paris, 
qui  se  partaiieait  avec  celui  du  Cliàtelet  les  alVaires  jiidici.-iires. 
La  Toiirnelle  était  ainsi  iioiiiiiiée  [)arce  (jue  les  conseillers  du 
Parlement  y  faisaient  le  service  à  tour  do  rôle. 

River,  (ii'iuine  ucrnianiiiiie. 

—  Hiver  le  clou  à  quehiii'tin.  C'est  le  mettre  à  la  raison  une 
donne  fois  ;  allusion  au  clou  rivé  qui  ferme  la  chaîne  des  galériens 
pour  les  ompèclier  de  nuire  de  nouveau. 

Rivière,  du  luis-latin  rivaria,  dérivé  de  rirus. 

—  Pascal  a  dit  :  «  Les  rivières  sont  des  chemins  qui  marchent.  )- 
On  dit  :  «Où  va  celte  rivière?  »,  et  par  extension  :  «  Où  va  ce 

chemin  ?  » 

...On  dit,  messieurs,  que  la  Manche  nous  sépare:  mais  ce  sont 
les  montagnes  qui  séparent  les  hommes,  les  rivières  et  les  nappes 
d'eau  servent,  au  roniraire.  à  réiinii-  les  peuples  civilisés.  {Von- 
tanié,  1849.) 

—  Si  lu  veux  aller  à  la  mer.  prends  une  rivière  pour  guide. 

—  Les  rivières  de  Provence  ont  très  peu  d'eau  en  éXé;  à  peine 
navigables  pour  les  canards,  les  oies  y  ont  pied  presque  partout. 

—  Avant  de  quitter  Madrid,  écrit  un  touriste  pendant  les  inon- 
dations de  187(),  i"ai  voulu  voir  le  Mançanarès.  On  ne  saurait  dire 
de  lui  quil  était  sorti...  Il  était  absent. 

Méry  appelait  le  Mançanarès  :  une  rivière  liydropliobe. 

—  Sophie  Arnould  disait  des  petites  rivières  aililiciellcs  :  «  Cela 
ressemble  à  une  rivière...  comme  deux  gouttes  d'eau.  » 

—  Les  grandes  rivières...'  de  diamants,  viennent  des  petits  ruis- 
seaux. 

Robe,  provençal  vanité,  ancien  français  roher.  de  l'allemand 
rauhon. 

Même  origine  que  dérober,  dépouiller. 

Saint  Paul...  que  fou  raubitr:  cniro  al  Icrs  ccl  de  la  diri- 
nilad.  (Vices  et  vertus.)  Saint  Paul  qui  lut  i"a\i  jusf{u"aa  troisième 
ciel  de  la  divinité. 

Robert  (sauce). 

Cestuy  feust  inventeur  de  la  saulce  Robert,  tant  salubre  aux 
connils  rostis,  canai'z,  etc.  (Rabelais,  IV.  'i-O.) 

Robert-Macaire  (C  est  un). 

C'est  un  fripon  audacieux  et  effronté,  (pi i  emploie  toutes  les  ruses 


380  ROC 

(lu  ('linrl;il;iiiisiii('  pour  f.iii-c  des  diipos;  un  fniiibc  foiirhissiino.  un 
blngueur  rlcnicl,  no  croyiinl  ;'i  rien,  so  in(»(iii;iii(  de  hml.  frcond  en 
ressources;  iiiissi  prompt,  ;'i  donner  iin  coup  de  conlenn  ;'i  un  p-n- 
dai'nie,  qu'à  jeter  sn  lahnlière  ;iux  yeux  d'un  roniuiiss;iire  ;  à  f;iiro 
sauter  une  caile,  (ju';'!  hincer  l;i  ré{)lique  ;i  un  ;irliuuii;dre  récal- 
citrant. 

—  Ce  (liclon  prit  n;iissaiice  vers  1830,  ai)rès  la  représentation  de 
\Aiiber(j('  des  Adrcis,  où  le  héros,  Robcrl-Macaire,  joue  le  r61e 
d'un  assassin.  L'acleur  Frédéric  Lemaitre  sut,  donner  à  cet  odieux 
personnap;e  un  caractère  houtïon,  qui  obtint  un  ,urand  succès.  Ce 
héros  ti-iom[)liant  du  vice  a  un  acolyte  du  nom  de  Bertrand,  sorte 
de  niais  perverti,  qui  est  à  la  fois  l'objet  des  sarcasmes  de  Robert 
et  le  complice  servile  de  tous  ses  crimes. 

La  représentation  de  cette  pièce,  interdite  avant  18'i8,  reprise 
sous  la  République,  fut  supprimée  de  nouveau  en  1852. 

Robinson,  origine  littéraire. 

—  Selkick,  matelot  écossais,  a  joué  l'original  du  rôle  de  Robinson 
Crusoé,  dans  l'ile  de  Juan  Fernandez,*  où  les  hasards  de  la  vie 
maritime  l'avaient  laissé  seul  et  sans  secours.  La  famille  de  Selkick 
habite  encore  Horgolîfe  où  il  est  né. 

Daniel  de  Foë,  Français  d'origine  (de  Foix),  écrivit  son  livre 
sous  l'inspiration  de  Selkick.  Ce  n'est  donc  pas  une  pure  fiction 
amusante.  C'est  un  exemple  à  suivre  dans  les  circonstances  diffi- 
ciles de  la  vie,  où  l'on  puisera  le  courage  dans  l'abandon,  de 
l'énergie  et  de  l'esprit  d'invention  dans  la  solitude. 

Rocaille.  Ornement  composé  de  roches  artiticielles  et  de 
coquilles,  en  usage  sous  Louis  XV  ;  d'où  rococo. 

Rocher,  origine  incertaine. 

—  Les  paysans  appellent  les  rochers  les  os  de  la  terre  (?),  comme 
s'ils  connaissaient  la  fable  de  Deucalion  et  de  Pyrrlia. 

La  terre  de  Fontainebleau  est  si  maigre,  que  les  os  (ce  sont 
rocs)  lui  percent  la  peau.  (Rabelais,  Y,  10.) 

Rococo,  suranné,  démodé,  genre  rocaille  outré.  C'est  rocaille 
avec  une  désinence  ridicule. 

—  En  1830,  les  romantiques  ont  créé  ce  mot  pour  désigner  tout 
ce  qui  poi'tait  l'empreinte  des  temps  passés.  Les  Grecs,  les  Romains, 
Racine,  l'école  de  David  :  rococo  ! 

L'on  arrivait  par  la  lilière  des  épithètes  qui  suivent  :  ganache, 


ÙOG  381 

lossile,  perruque...,  ;i  l'épilliète  la  plus  iiifaiiunite  :  nradéniicien, 
iiienil)r(>  de  riiistitiil.  (Tli.  (îaiilier,  iS.'jr).) 

Rôder,  de  rotai-f,  pai"  iiilluence  méridionale:  [iruNtMical  rodar. 
Au  propre,  courir  rà  et  là. 

Rodomont,  oriizine  littéraire  :  l'aiifai'oii. 

l*ei-somiaiiO  créé  par  Boïardo,  (pii  en  fait  un  l'oi  d'Alt^er,  descen- 
dant des  constructeurs  de  la  tour  de  Babel. 

L'Arioste,  dans  le  Roland  furieux,  en  fait  un  personnatie  arro- 
gant et  lui  attribue  des  prouesses  extraordinaires. 

Roger-Bontemps,  origine  littéraire  ;  bon  vivant,  sans  souci. 

Ce  nom  a  été  fait  de  l'altération  de  réjoui  bon  icnipa,  :  ou  de  la 
famille  des  Bontemps,  illustre  dans  le  Vivarais,  dont  le  cbef,  qui 
s'appelait  Roger,  était  d'buuuHir  joyeuse.  Le  nom  de  Hoger  fut 
porté  depuis  par  tous  les  aines  de  la  famille  pendant  plusieurs 
générations,  et  ils  se  tirent  gloire  d'imiter  leur  aïeul,  en  se  trans- 
mettant la  gaîté  comme  un  héritage. 

—  C'est  le  nom  d'un  personnage  de  Roger  de  CoUerye,  poète  du 
commencement  du  xvr'  siècle. 

Rognolet,  dérivé  de  royner. 

Se  dit  d'une  personne  (jui  n'a  pas  su  tirer  parti  d'une  belle 
position. 

Il  est  comme  Pierre  Rognolet,  qui  d"uu  manteau  n"a  su  faire  un 
bonnet. 

Ou  encore  :  tailler  de  la  besogne  sur  le  patron  de  l'abbé  Rognolet. 

—  Rabelais  (IV,  o2)  dit  que  «  à  Paris,  Groignet,  cousturier,  avayt 
employé  unes  vieilles  clémentines  (décrétales)  en  patrons  et 
mesures.  0  cas  estrange  !  tous  babillemens  taillez  suz  telz  patrons 
feurent  gastez  et  perdus,  etc.  » 

Rogue,  celtique  rog,  lier,  arrogant. 

Quelques-uns  y  ont  vu  une  trans[)osition  (?)  des  lettres  du  mot 
rouijo :  en  bas-latin  rocua,  désignant  un  manteau  écarlale. 

Exuens  se  vesliniento  ([uod  lin<jua  ruslica  dicilur  rocus.  (Ilel- 
gandus.) 

Eron  passât  per  la  niar  rog  a  pé  se.  Ils  étaient  passés  par  la 
mer  Rouge  à  pied  sec. 

—  L'usage  de  l'écarlale  alTectée  anciennement  aux  vêtements  des 
hauts  dignitaires,  aux  chevaliers,  aux  docteurs,  introduisit  jadis 
l'expression  j^ouge  pour  hautain,  arrogant. 

Brantôme  s'est  servi  du  mot  rouge  dans  ce  sens,  en  parlant  des 


382  IU)f 

Siiiss(^s,  :i|(rt''S  r;ilT;iiro  de  X;i\;irro,  coiiliX'  L;i  Trémoiiillc,  nlTairc 
doiil  ils  (1('\ lurent  si  rouges  cl  si  arrognnts... 

Roi,  (lu  l.'ttiii  rcf/em,  provençal  rey. 

—  l.e  litre  de  roi  est  plus  ancien  et  plus  honorable  que  celui 
d'empereur.  Il  vient  de  reyeï^e,  celui  qui  régit,  qui  gouverne.  Il 
éveille  l'iniage  du  chef  dune  grande  famille,  et,  de  tonte  antiquité, 
a  été  donné  aux  princes  des  nations. 

—  Empereur  veut  dire  qui  commande.  C'est  un  titre  militaire, 
qui  devint  celui  des  Césars,  lorsqu'ils  eurent  dominé  par  leur 
despotisme  l'anarchie  de  la  République. 

Le  pape  Léon  III  consacra  l'autorité  de  Charlemagne  en  Italie, 
en  le  proclamant  empereur,  successeur  des  anciens  Césars. 

En  Russie,  Ivan  lY,  qui  descendait,  par  sa  mère,  du  dernier 
empereur  de  Constantinople,  prit  le  litre  de  César  (czar)  qui  se 
traduit  par  empereur. 

Bonaparte,  en  succédant  à  la  lignée  de  saint  Louis,  prit  aussi  le 
titre  d'empereur,  que  justifiait  sa  gloire  militaire. 

—  On  dit  «  roi  de  France  »,  et  non  «  roi.de  la  France  »,  parce 
qu'à  l'origine  notre  langue,  comme  la  langue  anglaise,  n'employait 
pas  l'article  devant  les  noms  de  pays. 

Rabelais  dit  :  «  Voilà  Asie:  ici  sont  Tigris  et  Euphrates;  de  ça 
est  Europe.  » 

Ce  n'est  que  vers  la  fin  du  xvi^  siècle  que  l'article  prit  place: 
mais  l'expression  «  roi  de  France  »  survécut  à  celle  petite  révolu- 
tion grammaticale,  parce  que  le  respect  que  nos  pères  avaient  pour 
la  royauté  (et  pour  les  formules  consacrées)  leur  fit  conserver 
intacte  l'expression. 

Louis-Philippe,  qui  succéda,  en  1830,  au  roi  de  France  Charles  X, 
rompant  avec  la  tradition,  se  fil  appeler  roi  des  Français. 

Ménage  parle  d'une  monnaie  d'or  appelée  salut,  frappée  sous 
Henri  A'I,  roi  d'Angleterre,  couronné  roi  de  France  à  Paris,  en 
1422,  qui  portait  d'un  côté  la  Vierge  Marie  recevant  la  salutation 
de  l'ange,  par  le  mot  ai-e.  De  l'autre  étaient  deux  écus,  l'un  de 
France,  l'autre  de  France  et  d'Angleterre,  avec  ces  mots  à  l'entour  : 
Henricus  Dei  gratla,  Francorum  et  Angliœ  rex. 

Henri  VI  y  prend  le  titre  de  roi  des  Français,  tandis  qu'il  se 
donne  celui  de  roi  d'Angleterre  comme  d'un  domaine  héréditaire. 
On  ne  frappe  les  rois  quà  la  tète. 

(V.  Ulgo,  Cromwel,  IV,  8.) 

Le  seul  roi  dont  le  pauvre  ait  garde  la  mémoire  (Henri  IV). 


UO.M  383 

Ce  vers,  ([ii'oii  altfilnie  ;i  Voltiiit-e,  est,  en  clianpennt  pauvre  en 
pi'upfe.  diiiie  odi'  de  riiuliii  de  la  Hriinellerie,  écrile  cinq  ans  après 
la  mort  de  Voltaii'c 

—  Si  j'étais  roi  !  si  j'étais  lioiivernement  !... 

IIoii  !  que  je  ne  suis  roy  de  France  pour  quatre-vingts  ou  cent 
ans!  (Rabelais,  1,  39.) 

Ail  1  iiuc  ni'  siiis-jc  roi  |)uiir  ci'iil  ou  six  vingts  ans. 

(l\kc;.MEn,  Satire  VI.). 

Sémiraniis,  ayant  obtenu  du  l'oi  d'Assyrie  le  droit  de  régner 
absolument  pendant  cinq  jours,  usa  du  pouvoir  pour  faire  mourir 
le  roi  lui-même,  et  s'empara  de  son  trône. 

...Comme  le  berger  de  Génitois,  qui.  se  dépitant  en  temps  de 
pluie,  disait  :  «  Si  je  suis  jamais  roi,  alors  je  gai'derai  mes  moutons 
à  cheval.  »  (Moyen  de  parvenir,  cli.  33.) 

...Beges  prœcurrere  vita. 

(Horace.) 

(Plus  heureux  qu'un  roi.) 

Le  roi  n'est  pas  son  cousin  :  il  s'estime  plus  heureux  qu'un  roi. 

Rôle,  du  latin  rotuJus  (roideau  de  papyrus). 
Rôle  est  fait  comme  volume  :  cliez  les  Romains,  les  livres  étaient 
des  rouleaux  et  non  des  cahiers,  roulés  et  non  plies. 

Romain,  du  latin  roniunus. 

Un  travail  de  Romain.  Exprime  la  grandeur  d'un  ti'avail. 

—  L'art  rom:iin  participe  de  l'art  étrusque  et  de  l'art  grec  ; 
mais  son  génie  personnel  s'est  assimilé  les  éléments  qui  convien- 
nent à  ses  besoins.  Tout  a  été  refondu  dans  le  moule  puissant  d'où 
est  sortie  la  grandeur  romaine  :  l'art,  les  institutions  et  les  usages 
empruntés  aux  civilisations  voisines. 

L'art  romain,  qui  subordonna  l'idéal  à  l'utile,  le  beau  au  grand, 
est  un  type  original,  qui  a  pu  s'imposer  plus  tard  en  souverain,  et 
couvrir  de  ses  œuvres  la  surface  du  monde. 

—  Les  Romains  modernes  sont  des  morts  qui  u'onl  jamais  vécu. 
(Dante.) 

Roman,  même  origine  que  le  précédent,  dont  il  est  une  forme 
dialectale. 

Les  langues  romanes  ou  novo-latines,  sont  au  nombre  de  quatre  : 
l'itaben,  l'espagnol,  le  provençal,  le  français. 

L'espagnol  comprend  le  portugais  et  le  catalan.  Quant  au  pro- 


vcnçal,  c'est  un  idiome  localisé,  qui  ne  se  pnrle  plus  que  dans  le 
midi  de  la  France,  apn"'s  avoir'ieté  un  faraud  éclat  au  Moyen-A^^e. 
Spt''cial(MU(Mil   la  laiiuiu;  des  ti'ouIiadour'S  : 

Trtinift  lo  vers  en  rhanlun 
En  pliinii  letu/ua  romana. 

(<;.    H'i.!:i.  ) 

(Je  transniels  Ui  vers  en  cliaiilani  eu  pure  lauiinc  roinaue.) 

—  Les  lanfiues  romanes  ne  drriMMil  pas  les  wm'^  di^s  autres  :  elles 
sont  toutes  contemporaines  (>l,  en  (pu'lipu;  sorte.  S(eui's  jumencs, 
issues  du  latin,  qui  a  remplacé  à  la  même  époque  les  langues 
indigènes. 

Ces  langues  ont  toutes  le  caractère  latin,  mais  les  divers  peuples 
le  parlèrent  avec  un  accent  qui  leur  était  pro[)re  :  de  là  la  diversité 
des  langues  italienne,  espagnole,  provençale  et  française. 

Après  la  conquête  des  Gaules,  il  se  forma  un  langage  composé  de 
gaulois  et  de  latin,  appelé  roman,  et  qui  fut  l'origine  de  la  langue 
française. 

Les  poètes  du  x"^  siècle,  qui  composèrent  des  fabliaux  et  autres 
fictions,  et  inventèrent  la  (jale  science,  furent  appelés  romanciers. 

Villon  sut  le  promicr,  dans  ces  siècles  grossiers, 
Débroniller  l'art  confus  de  nos  vieux  romanciers. 

(Bi'ii.i.Ai:.) 

—  Le  mot  7'oman  qui,  à  l'origine,  signidait  ouvrage  lilléi'aire  en 
langue  vulgaire,  est  devenu  synonyme  de  fiction. 

Daubenton  lisait  des  romans  pour  se  reposer:  il  appelait  cela 
mettre  son  esprit  à  la  diète. 

Le  paradis  consiste  dans  un  bon  fauteuil  et  un  roman^jiendant 
l'éternité.  (Grey.) 

—  Le  Roman  de  la  Rose,  commencé  par  Guillaume  de  Lorris, . 
dit  Glopinel,  au  début  du  xiiF  siècle,  fut  aclievé  par  Jean  de  Meung. 
Ce  roman,  ou  plutôt  ce  poème  allégorique  et  métapbysique,  était 
regardé  au  Moyen-Age  comme  le  code  de  l'amour. 

UAslrée,  d'Honoré  d'Urfé,  est  une  longue  et  fade  bucolique,  parue 
en  IGIO,  où  sont  peintes  les  délices  imaginaires  de  la  vie  pastorale 
sur  les  bords  du  Lignon. 

Le  Grand  Cyrus,  de  M"«  de  Scudéry,  son  principal  ouvrage,  est 
un  roman  faisant  allusion  au  Grand  Gondé. 

—  Dans  l'ordre  cbronologique,  il  y  eut  d'abord  : 
Les  romans  de  cbevalerie. 

Les  romans  d'amour,  tels  que  Aucassln  el  Nicoletle. 


U(l.\f  ."^.So 

Los  roiiuins  saliriquos,:  Roman  de  la  /{ose,  Rotitan  do  licnai'i . 
II.  (Vl'rfé  :  rAsIréc,  au  (•onimcncomciil  du  xvir  siéclo. 
Camus,  t'vrfiue  do  Belley  :  iiii«'  cnuiuantainc  de  romans,  dont 
Paloinhc,  rt'rditi'p  on  ISliO. 

Sorcl  :  llisloirc  atinUjui-  di'  Francion  (licouciouv). 

M""  do  St'udôi'v  :  le  (ivand  (liivux,  la  (Uidic. 

Scarrou  :  le  Roman  coniu/ae. 

Cyraiu)  do  Horuorac  :  llisloirc  des  E)n))ires  da  Soleil,  etc. 

Furetiore  :  le  Roman  bouiujeois. 

M""  do  Lafayotto  :  la  Princesse  de  Clères,  Zaï/de. 

Fôiiolou  :  Télémaqae. 

Le  Sa.ue  :  Gil  Blas,  le  Diable  hoiteu.r. 

Ilaniiltou  :  Mémoires  du  Cher  aller  de  (Iramnionf . 

Montosquiou  :  les  Lettres  persanes. 

Prévost  (l'ahliô)  :  Manon  Leseaal. 

M'""-  de  Graîlicny  :  Lettres  d'une  Pérurienne. 

M™«  do  Toiu'iii  :  le  Sièfje  de  Calais. 

Voltaire  :  Candide,  Zadi(j. 

Diderot  :  la  ReVujieuse,  Jacques  le  Fataliste. 

J.-J.  Rousseau  :  la  Nouvelle  Hélo'ise: 

Hostif  de  la  Bretonne  :  200  volumes  de  romans. 

Laclos  :  les  Liaisons  dangereuses. 

Bi^rnardin  de  Saint-Pierre  :  Paul  et  ]'irf/inie. 

M"-«  de  Staël  :  Delphine,  Corinne. 

Chateaubriand  :  Atala,  René. 

—  Aujourd'liui,  ou   entend  par  roman  une    liistoire  l'ointe,  oi'i 
l'auteur  cherche  à  intéresser  par  la  i)ointure  des  mœurs. 

—  Les  romans  peuvent  être  : 

Archéologiques,  comme  Notre-Dame  de  Paris,  de  Victor  Hu.uo. 
D'aventures  :  Gil  Blas,  de  Le  Sage;  les   Trois  Mousquetaire^i. 
d'Alexandre  Dumas. 
Épistolaires,  comme  la  Xourelle  Hélo'ise,  de  J.-J.  Rousseau. 
Erotiques,  libertins:  ceux  de  Voisonon,  deCrébillon  fils,  de  Sade. 
Chevaleresques  et  aristocratiques  :  ceux  de  M"''  de  Scudéry. 
Historiques  :  ceux  de  Walter  Scott. 
Maritimes  :  ceux  d'Eugôno  Sue. 

De  mœurs  :  ceux  de  Le  Sage,  de  Marivaux,  de  Ricbardson. 
Pastoraux  :  Daphnis  et  Chloé,  VAstrée. 
Philosophiques  :  ceux  de  Voltaire,  de  George  Sand. 
Sentimentaux:  Werther,  ùq  Gw[\\(i\  René,  de  Chateaubriand. 


386  no.\r 

Sociaux  :  de  Gcorpo  SmikI,  do  Victor  Iliian  (Mv  Misi  rnhhs). 
Il  y  a  encore   les   i'oiikiiis   liioLjra|)liifiiies,  de   ca|ii'   i-i    (l'(''|t('i'. 
Inminristiquos.  oie. 

Romance,  ancien  adjcclif,  connue  i-otiinn. 

—  La  romance,  petite  poésie  légère,  aussi  .uicit  nue  (|u('  la  lant-iie 
française,  est  une  espèce  de  chanson  oi"i  s'cxiirinic  l;i  scnsiltililé.  la 
grâce,  la  galanterie. 

Nos  premières  rouiances  étaient  des  clianls  |)opnlaires  et  patrio- 
tirpies,  imités  des  rouxuicoroa  espagnols.  Depuis,  le  nom  de 
romance  a  été  a|)[)li(pié  à  toute  chanson  tendre  ou  plaintive,  divisée 
en  couplets  avec  refrain. 

—  La  romance  se  montre  à  la  fin  du  x^  siècle,  éporpie  où  la  langue 
française  commence  à  se  former  des  déljris  de  la  langue  romane, 
et  succède  aux  chants  des  trouvères  et  des  troubadours. 

—  Albanèse,  chanteur  sopraniste  de  la  chapelle  du  roi,  a  puldié, 
vers  le  milieu  du  xviii<"  siècle,  plusieurs  recueils  de  mélodies  faciles 
et  charmantes  :  mais  la  plus  grande  vogue  de  la  romance  a  com- 
mencé avec  le  xix"  siècle. 

—  Sous  le  Consulat,  il  faut  citer  Garât,  Boïeldieu,  Pradher  et 
Ch.  Plantade,  dont  la  romance  Langueur  (Vnmour  est  une  mélodie 
pleine  de  sentiment. 

Carbonel  :  Brigitte  et  Paurre  Lise,  qui  ont  eu  beaucoup  de 
vogue. 

Lambert:  De  ma  Céline  ainant  modeste  (inspiration  gracieuse), 
1806. 

Dahvimare  :  Prêt  à  partir  pour  la  rive  africaine,  1809. 

Alex.  Choron  :  la  Sentinelle  eut  un  succès  européen. 

La  Reine  Hortense  :  Partant  pour  la  Sgrie  :  Reposes-rous,  bon 
clievalier,  etc.  C'est  à  elle  qu'on  doit  le  premier  album  qui  ait  été 
pubhé  en  France,  et  l'idée  de  mettre  un  dessin  en  tète  de  chaque 
romance. 

—  Les  quinze  années  de  la  Restauration  furent  une  époque 
])rillante  pour  la  romance. 

Romagnési  :  Faut  l'oublier,  disait  Colette;  Depuis  longtemps 
j'aimais  Adèle:  la  Petite  Mendiante. 

Amédée  de  Beauplan  :  Mon  petit  François:  Bonheur  de  se 
revoir;  Dormez,  chères  amours. 

Edouard  Brugnière  :  Mon  petit  bateau. 

Panseron  :  Appelez-moi,  je  reviendrai:  Vogue,  ma  nacelle. 

Pollet  :  Fleuve  du  Tage. 


Piililiiio  J)iich;iililiLi(' :  ht  llrindurnu'  :  lu  Séparai  ion . 

—  Api't'S  l;i  H('>\(iliiti(iii  (If  IS;»().  1,1  l'oiii.iiict'  p;ii'li(i|it'  an  iiiniivo- 
incnt  l'oinanliqiit'. 

Hippolyte  Moiipoii  :  //  élail  Irais  /-/lassta/rs  :  rAiirlalaasr  :  h's 
Deux  Arc/iers  :  la  Chanson  de  .U/f/non. 

Loïsa  Piiaot  :  fo  Grâce  de  Dieu  ;  Ave  Maria. 

Lahari'c  :  Jcunr  fille  aux  yeux  noirs  ;  le  Kleplile. 

(îi'isar  :  la  Folle  :  les  Laveuses  du  Coucent. 

lît'ral  :  Ma  .Xorrnandie  :  Mon  petit  cochon  de  llarbarie. 

NiodenneviM',  (|ii('  le  l.ar  porlei'a  à  la  postérité. 

Romantiques,  de  rancieii  français  romani ,  (Icaciiii  ronuin. 

Partisans  d'une  écolo  littéraire  et  ai'listi(pie(pii  avait  poni' système 
l'aiTrancliisseiiient  des  réules  imposées  par  les  traditions  anciennes, 
dites  classirjues.  En  oiitiv,  ils  se  rattachaient  passionnément  à  la 
littérature,  aux  monuments  et  aux  traditions  du  Moyen-Ape.  époque 
dite  romane:  doi'i  élait  venu  leur  nom  de  romantiques.  Cette 
elîervescence  a  ou  lieu  pendant  la  lin  d(?  la  Restauration  et  les 
premières  années  du  régne  de  Louis-Pliilippe.  Née  vers  1820, 
l'école  romantique  était  à  son  apogée  vers  1833. 

Les  romantiques  avaient  pour  adversaires  les  classiques,  ou 
partisans  des  anciennes  régies. 

Ces  querelles  n'avaient  que  l'apparence  de  la  nouveauté  :  elles 
rappelaient  le  dill'érend  des  anciens  et  des  modernes,  au  xvir'  et  au 
commencement  du  xviii'^'  siècle. 

Rome  :  la  Ville,  la  Ville  Éternelle  :  la  Ville  des  Césars  :  la  Ville 
aux  sept  (Collines.  Urhs  a'terna.  (Symmaque.) 

On  attribue  son  nom  à  son  fondateur  Romulus,  qui  l'établit  sur  le 
Palatin.  Agrandie  par  ses  successeurs,  elle  couvrit  bientôt  sept 
collines,  d'où  le  surnom  de  Seplicollis. 

Saint  Pierre,  dans  sa  Première  Épiire.  et  saint  .lean,  dans 
X Apocalypse,  la  désignent  sous  le  nom  figuré  de  Bai)ylone.  Les 
rabbins  la  nomment  Edom,  comme  devant  subir  le  soi't  dont  les 
prophètes  menacent  la  ville  de  ce  nom. 

Plutarque  dit  (pie  son  nom  vient  de  rama,  vieux  mot  signifiant 
mamelle:  d'où  y^///<e/m,  déesse  qui  présidait  à  l'alimentaliou  des 
enfants. 

Noël  fait  venir  liotue  du  grec  rhoui<\  force. 

...  La  Rome  des  rois,  sur  l'Aventin  ;  la  Rome  répubhcaiue,  sur  le 


388  IKi.N 

Capilolc;  l;i  Uoinc  iiii|)i''ri;il('.  sur  le    l';il;iliii  :   l;i   lloiiic  (■|ir(''liL'iiiio, 
assise  sur  le  Vatican  (•(uiiinr  sur  iiii  Iri'tiic.  ((î.  Saiid.) 

La  Hôiiu;  des  ])a|)('S  a  succédé  à  cciin  des  cnipiTeurs  :  les  uiissions 
ont  rciuplacé  les  légious,  cl  In  doiuinatiou  de  l'espril  t;sl  encore 
idus  iiuiverselle  que  celle  de  la  force. 

—  liildeliorl,  évé(jue  de  Tours,  \isila  Rome  au  coniineuceinent  du 
xw  siècle.  Il  dit  de  cette  ville:  «  il  en  l'este  ti'op,  et  trop  en  est 
tombé  |)()ur  (pi'ou  puisse  détruire  ce  qui  est  debout  ou  relever  ce 
qui  est  gisant.  » 

—  En  demandant,  on  va  à  Home. 

Tout  cliemiu  mène  à  Rome;  c'est  la  devise  de  rKulise  c;itli(ili(iiie. 
Il  était  plus  diflicile  d'aller  à  Corinthe, 

Avec  le  latin  et  le  roussin,  on  peut  voyager  par  tout  le  monde. 

Si  l'on  en  peut  \o\v  un  i)lus  fou,  je  Tirai  dii'e  à  Rome.  (.Molière, 
Bovrfjeolii  fjen1illi(»iun<\  V,  7.) 

Romérage,  de  l'espagnol  nnnerîa. 

Nom  donné,  en  Provence,  aux  fêtes  patronales  des  villages. 

On  les  appelle  aussi  votes,  roman  vot.  C'est  ce  que  Rabelais 
(I,  45)  désigne  sons  le  nom  de  romicaigcs  (?). 

Au  Moyen-Age,  on  appelait  romieriX^?,  pèlerins  qui  faisaient  le 
voyage  de  Rome  pour  obtenir  la  bénédiction  du  pape. 

—  Les  pèlerinages  les  plus  célèbres  ont  été  :  celui  de  Terre- 
Sainte  ;  celui  des  Saints  Apôtres,  à  Rome  ;  et  ceux  de  Notre-Dame 
de  Lorette  et  de  Saint  Jacques  de  Gompostelle. 

Rompre,  du  latin  rumpere. 

Au  ligure:  se  brouiller. 

Cbez  les  Romains,  on  donnait  un  brin  de  paille,  en  prenant  pos- 
session d'une  propriété  ;  au  contraire,  on  rompait  le  brin  de  paille 
en  s'en  dessaisissant;  d'où  la  locution  alirégée  «  rompre  la  paille  » 
avec  quelqu'un. 

Confrimjcrc  tesscram . 

(Pl.AlTE.) 

(Briser  le  contrat.) 

Rompre  en  visière  avec  le  genre  lui  main. 

(.MoMKUK,  Misanthrope.) 

Rond,  du  latin  rotundus,  provençal  redon. 

Rond  comme  l'o  de  Giotto.  On  raconte  que  le  pape  Boniface  YIII 
fit  demander  à  Giotto  des  dessins,  pour  juger  de  son  talent.  Le 
peintre  lui  envoya  un  cercle  tracé  à  main  levée,  et  qui  était  d'une 
rondeur  parfaite. 


HnS  380 

Vasari  (T/V  de  Ciotio)  raconte  ainsi  cetto-  anordolo  : 

BtMioil  IX.  voulant  oi'nor  do  peintnros  Saint-PioiTo  do  llonio, 
o\[)(''(lia  on  Toscano  un  ^W  <^^'•>  licnlilsliinninos.  [)onr  jnoor  si  le 
mérite  de  Giollo  éualait  sa  rôpulalion.  Lenvoyé  du  pape,  après 
avoir  recueilli  à  Sioiino  des  dessins  de  plusieurs  peintres  et 
mosaïstes,  arri\;!  ;'i  I-'Ioiumicc.  di'i  il  ('\|)osa  sa  mission  à  (îiolto,  en 
lui  demandanl  un  dessin  (pi'il  pùl  montrer  à  Sa  Sainlolé.  (liotto 
prit  ;iiissil('it  une  IVuillo  do  \{'!in.  a[)puya  son  coude  sur  sa  hanche, 
pour  former  une  espèce  do  compas,  et  peignit  d'un  seul  jet,  avec 
nue  délicatesse  toujorirs  égale,  wn  cei-cle  d'une  perfection  merveil- 
leuse, qu'il  remit  en  souriant  entre  les  mains  du  gentilhomme. 
(leliii-ci  se  croyani  joué,  s'écria:  «  \\\\  quoi!  n'aurai-je  d'autre 
dessin  (pie  ce  rond  l  —  Il  est  plus  que  suflisant  »,  répondit  Giolto. 

L'envoyé  du  [)ape.  malgré  ses  instances,  ne  put  ohtenir  que 
ce  trait,  et  se  relii'a  foi't  mécontent.  Néanmoins,  il  présenta  à 
Benoit  IX  le  cercle  de  notre  artiste,  en  lui  indiquant  la  manière 
dont  il  l'aNail  li'acé.  Le  pape  et  ses  courtisans  reconnurent  conihien 
(îiolto  l'emportait  sur  ses  concurrents. 

De  là  le  proverhe  : 

Tu  -y."/'  iiin  ronili)  dm  l'o  di  Giollo. 

(Vasaiu,  traduction  de  Lkcla.nciik.) 

Ronfler.  Diez  en  fait  une  onomalo[)ée. 
Synonyme  :  jouer  de  l'orgue. 

Il  ronlle  comme  s'il  voulait  l'aire  concurrence  an  tonnerre. 
(George  Sand.) 

Ronsard  (Pierre  de  Ronsard).  Anagramme  :  Rose  de  Pindare. 

—  Donner  nu  soufllet  à  Ronsard  :  parler  mal  le  français,  comme 
on  dit  :  être  l'ennemi  de  Lhomond. 

Rose,  du  latin  rosa. 

—  On  appelle  à  tort,  en  France,  le  mois  de  mai  «  le  mois  des 
roses  ».  C'est  une  erreur  due  à  ce  que  nos  poètes,  qui  liahitent  des 
galetas,  au  lieu  de  poindre  d'après  nature,  ont  lu  des  descriptions 
classiques,  où  il  est  dit  que  les  roses  lleurisseut  en  mai.  Cela  est 
vrai  pour  ritalit;,  et  même  pour  la  Provence;  mais,  dans  le  nord 
de  la  Frani-e.  la  nature  relarde  d'un  hon  mois,  et  la  rose  ne  lleurit 
en  réalité  qu'en  juin. 

—  Il  n'y  a  pas  de  roses  sans  épim^s  :  pas  de  plaisir  sans  peine. 

Rose  ne  luiil  sans  piiiiiiToiis. 


:]90  nos 

(]('liii  ([iii  iiiai-clic  sur  los  roses,  priil  ;i\()ir  les  pieds  percés 
d'épines. 

Le  rayon  de  miel  est  donx.  niiiis  rahcille  piipic 

—  Il  n'y  il  si  Itelle  l'ose  (pii  ne  deAienne  uriillf-nil  :  l;i  iMsiiilé 
p;isse. 

—  La  rose,  (Miililriiic  (le  la    hcaiité.  ne  \it,  sclun  .Mallit'i-lir.  (pu.' 

Lrs|t;icr  (11111  iii;iliii. 

Kn  lool),  François  Despériers  perdil,  à  Ai\.  sa  lillf  unitpie  : 
Malherbe,  son  ami,  lit  à  celle  occasion  les  admiraMes  stances  qne 
l'on  sait. 

Malherbe  avait  d'abord  écrit  ce  vers  : 

El  lloscllo  a  vrcii  ce  (|iii'  vixciil  les  roses. 

Par  une  heureuse  erreur.  rim[)rimenr  y  sulistilua  celui-ci  : 
El  rose,  elle  a  vécu  ce  ({ue  vivent  les  roses. 

—  Les  roses  de  Pœstum.  Pœstum,  l'antique  Posidonia,  en 
Calabre,  était  antrel'ois  environnée  de  champs  de  roses,  qui,  deux 
fois  l'an,  donnaient  leur  moisson  de  Heurs. 

Bifcri  ni-sarid  Pa-sli. 

(\'lltl,lLK.) 

Odnrali  vomriu  Pwsli. 

jl'liOPEUCE.) 

—  L'île  de  Rhodes  était  aussi  très  fertile  en  roses,  et  doit  son 
nom  à  celui  de  cette  fleur,  rhodon  en  prec. 

D'où  le  nom  de  Rhodanus,  de  la  ville  de  Rhodè,  que  les  Bho- 
diens  avaient  fondée  à  l'embouchure  du  Rhône, 
Rosas,  ville  de  Catalogne,  fut  aussi  fondée  par  les  Rhodiens. 

Rosée,  du  latin  i^os.  d'où  arroser.  Provençal  air/ungna.  c'est-à- 
dire  eau  de  nuit. 

La  rosée  est  la  vapeur  d'eau  contenue  dans  l'air,  qui  se  condense 
au  contact  de  quelque  substance  froide.  Elle  se  forme  plus  abon- 
damment après  un  jour  chaud  d'été  ou  d'automne,  surtout  si  le 
vent  souffle  de  l'ouest  ;  parce  que  les  vents  d'ouest  passent  sur 
l'océan  Atlantique,  d'où  ils  arrivent  humides  et  chargés  de  vapeurs. 
Ils  augmentent  la  saturation  de  l'air,  qui  en  dépose  une  partie  au 
contact  du  froid  de  la  terre. 

Rosière,  dérivé  de  rose. 

—  Rosière  de  Salency  (près  Noyon). 

Saint  Médard  institua,  en  333,  à  Salency,  le  prix  le  plus  touchant 


ROU  391 

que  la  piôté  ait  jamais  olTei-l  à  la  vertu  :  une  couronne  de  roses 
pour  la  liUe  la  plus  sage  et  la  plus  modeste.  La  première  rosière  fut 
la  sœur  du  saint  évèqiir. 

Le  couronnement  a  lieu  le  dimanche  qui  suit  la  fête  de  saint 
Médard  (18  juin),  joui'  d'inquiétude  et  d'attente,  où,  si  la  pluie 
IoiiiIh'.  elle  doit  tomber  six  semaines  durant. 

La  lèie  de  Salency  a  donné  naissance  à  beaucoup  d'auti'es,  dont 
la  [tins  célèbre  est  celle  de  Xanlerre. 

.Mais  aujourd'hui,  le  |»ri\  de  sagesse,  qui  consiste  en  une  cou- 
ronne de  roses,  est  accompagné  d'une  somme  d'argent,  comme 
appoint  de  la  vertu. 

—  l'ii  prix  qui  ne  coiiiporle  pas  iWfrressit. 

Rosse,  du  lu(l('S(pie  ross.  cheval  de  prix. 

(l'est  [lar  dérision  ({u'on  a  donné  ce  nom  aux  che\aux  sans  force 
et  sans  vigueur. 

De  là  vient  rosser,  fi'apper  comme  on  frappe  une  rosse  pour  la 
faire  marcher. 

Rossinante,  oi-iginc  littéraire. 
.Mauvais  che\al  très  maigre  :  rosse. 
C'est  le  nom  du  cheval  de  Don  Quichotte. 

Tel  fut  Cl'  l'oi  dos  lions  chevnuv. 
Rossinante,  la  l'Iriir  des  cuursiers  d'Iliérie, 
Oui,  trottant  tons  les  jours  el  par  monts  et  par  vaux. 
Galopa,  (lit  fliistoire,  une  fois  en  sa  vie. 

(BoiMCAi-,  Epvjrammc  3").) 

Rot,  du  latin  )'uc/us.  vuctare,  roter. 

Synonyme  :  soupir  de  Danemark  —  ou  d'ivrogne. 

Rôtjp,  ancien  français  roslir,  du  germanique  rosljan,  provençal 

rousth'. 

L'un  aynie  te  rousty,  l'autre  aynie  la  salade. 

(RoNSAiti)  à  L.  Desiiiazures.) 

Ainsy  comme  ils  me  roustissoyent,  je  me  recommandays  à  la 
grâce  divine,  ayant  en  mémoire  le  bon  sainct  Laurent.  (Rabelais, 
Pantagruel.) 

—  Il  a  r(')ti  le  Ijalai,  se  dit  de  quelqu'un  qui  a  beaucoup  usé  de  la 
vie.  el  qui  s'est  épuisé  i)ar  l'excès  des  plaisirs. 

Quand  tu  auras  autant  rousty  comme  j'ay  et  esté  rousty...,  dit 
Panurge. 

Roué,  dérivé  de  roxc,  du  latin  7'ota. 

—  Le  supplice  de  la  roue  fut  en  usage  jusqu'au  xviii«  siècle.  Après 


392  HOU 

;i\oir  Ml(iic|i(''  1(!  |);ilif'iil  siii'  iiiic  croix  en  loriiii'  de  X.  un  lui  l'om- 
piiil  les  os  (les  qiialfc  iiieinhres.  puis  on  e\|i()s;iil  le  coriis  siii-  une 
roue  que  Ton  f.iisnil  tourner. 

—  Ce  iMol,  (|ui,  (l;ins  son  iicceplion  lill(''i-;ile.  e\|ii-inii' une  chose 
lioi-ril»le,  devint,  sous  l;i  Uégence,  un  terme  élogieuv  et  ll;ilteur 
chez  les  jeunes  gens  ;i  la  iiiodc. 

Les  petits  maiires  du  temps,  ccrliiins  novateurs, 

(irjiiids  iii;irii'iirs  do  iimls  l'un  dr  Ijinlrc  cldimi-s, 

y  ajoiitèrenl  même  des  épilliéles  comme  cliaruiant,  délicieux. 

Mercier  {Tableau  do  J'arls,  cli.  47:2)  dit  que  ce  mot  fut  créé  par 
«  rextrèmement  honne  compagnie  »,  ainsi  qu'elle  s'intitule  elle- 
même.  Mais  commeul  a-t-elle  pu  adopter  une  expression  qui  éveille 
une  idée  de  crime  et  de  supplice,  et  l'appliquer  si  légèrement  l 

On  va  jusqu'à  dire  :  un  aimahle  roué,  pour  désigner  un  homme 
du  meilleur  monde,  qui  n'a  ni  vertus  ni  principes,  mais  qui  donne 
h  ses  vices  des  dehors  séduisants,  qui  les  ennohlit  à  force  de  grâce 
et  d'esprit. 

Les  mots  ira f ire,  perfide,  méchanl.  ont  pâli:  on  n'ose  plus 
dire  :  c'est  un  scélérat,  le  mot  ne  passerait  pas  ;  on  dit  :  c'est  un 
roué.  C'est  un  signe  d'immoralité  et  de  décadence  des  sociétés,  que 
ces  expressions  outrées,  où  limpudence  ose  donner  au  vice  les 
apparences  d'une  qualité.  Telle  est  l'expression  de  roué,  empruntée 
à  la  jurisprudence  criminelle,  et  qui  signilie  en  même  temps  un 
roué  en  place  de  Grève,  et  un  roué  de  cour. 

—  Le  cardinal  Dubois,  dit  Saint-Simon,  était  un  petit  homme 
maigre,  eflîlé,  à  mine  de  fouine,  et  bon  à  rouer.  C'est  à  lui  que  le 
nom  de  roué  fut  appliqué  pour  la  première  fois  par  le  Régent. 

Avant  la  Régence,  on  avait  le  nom  de  rompu  pour  désigner  un 
bon  vivant  ;  cette  expression  s'est  conservée  en  provençal  avec  la 
même  acception. 

...Ce  bon  rompu  de  Louis  XI  aima  toutes  les  femmes.  (Brantôme.) 
Les  grands  seigneurs  se  sont  approprié  le  nom  de  roués,  pour  se 
distinguer  de  leurs  laquais,  qui  ne  sont  que  des  pendards. 

—  Les  courtisans  du  régent  disaient  plaisamment  qu'on  les 
a[ipelait  roués,  parce  qu'ils  étaient  prêts  à  se  faire  rouer  pour  lui. 

—  Un  voleur  enrichi,  après  avoir  été  laquais,  roulait  carrosse. 
C'est  un  homme  bien  adroit,  dit-on,  il  a  sauté  du  derrière  d'un 
carrosse  en  dedans,  en  évitant  la  roue. 


Rouge,  ilii  laliii  rubeiis,  provenral  vog.  \ 

D'di'i  :  rou.ueiir.  roiiuoole.  rubis,  riihicoiul,  i-iiltri(iiit\ 

—  Hoii,u-o  coniiiio  un  clu'rubin.  ...coiiiiiic  iiu  c(»(j.  ...rouinic  une 
('■ri-rvisso.  ...un  homard. 

—  Hou.uir  :  en  ar^-ot,  c'est  |ii(int'r  nu  liii'd. 

Dans  le  Herry  on  dit  s'écrevisser.  pour  rougir  de  colère. 

—  Mécliant  comme  nn  âne  rouge  ;  se  fâcher  tout  rouge. 

Rouge  est  pris  ici  piuir  roux.  C'est  un  préjugé  très  ancien  (pu: 
les  cheveux  roux  sont  le  signe  caractéristique  d'un  mauvais  naturel. 

Les    Romains   avaient    déjà    contre   les   pei'sounes  rousses   de 

fâcheuses  préventions:  et,  chez  les  nalious  modernes,  les  cheveux 

roux  inspirent  de  1  aversion  et  une  sorte  de  répugnance.  C'est  un 

vieux  préjugé  qu'il  faut  au  moins  constater,  ne  fût-ce  que  pour  le 

comlialtre. 

lluugi'  au  soir,  likiin-  ;iii  malin. 
C'est  la  jourin'i'  du  pi-lcriii. 

On  croit  généralement  que  le  ciel  rouge  au  coucher  du  soleil,  et 
pâle  â  son  lever,  présage  un  beau  temps.  Ce  dicton  se  retrouve 
chez  tous  les  peuples  de  l'Europe. 

—  En  itolitique  :  Tous  les  rouges  ne  sont  pas  des  forçats;  mais 
tous  les  forçats  sont  rouges.  (Proudhon.) 

Rougeur,  dérivé  du  précédent. 

—  La  rougeur  est  la  couleur  de  la  vertu.  (Socrate.) 

—  Tous  les  sentiments  humains  sont  contenus  dans  un  pot  de 
rouge. 

Le  rouge  signifie  la  pudeur,  quand  il  est  sous  les  yeux  ;  la  colère, 
quand  il  est  sur  le  front:  la  gaité,  quand  il  est  aux  joues:  l'ivro- 
gnerie, quand  il  est  au  nez  ;  la  honte,  quand  il  est  aux  oreilles. 

—  La  rougeur  qui  apparaît  naturellement  sur  le  visage,  est  un 
signe  de  pudeur,  de  décence  et  de  modestie,  causé  par  une 
impression  vive  et  subite. 

Viryincus  ruhitr. 

(ViRciii.i:.) 

—  La  pudeur,  est  une  vertu,  qui,  chez  les  peuples  civilisés,  ne 
vient  qu'avec  la  puberté  :  les  enfants  n'ont  point  de  pudeur,  et 
chez  les  nations  primitives,  la  pudeur  n'existe  pas.  La  Genèse  en 
témoigne,  quand  elle  dit  qu'Adam  et  Eve  non  erubescebant,  ne 
rougissaient  pas. 

Celui  ((iii  sait  rouj^ir  aiiin'  cncoi-  la  vertu. 

(<  JiKMEit,  yatlian.) 


394  RUB 

—  Faire  monter  le  rouge  ;iii  visage. 

Ituhorc  iliijna  vcrha. 


lOviKI.) 


—  On  roiigil  (le  lioiilc  :  on   p.'ilil  do  col(''re. 

Alius  est  ira',  allnsDerocundia'  rubor.  I.ii  cdIi'm'c  roii'jif  d'iuie 
façon,  la  modestie  d'une  autre. 

—  Le  sentiment  qui  fait  rougir  nail  de  la  iiiidcur  dune  honte 
modeste  ;  celui  qui  fait  pfdir  tômoigiie  que  tout  le  sang  rcllue  au 
cœur  pour  en  soutenir  la  faiblesse.  (Scudéry.) 

Tout  le  rouKO  aclioté,  (|iii  ilessus  vuliv  join' 
Fait  rol'l'icc  (II'  la  luidciir... 

(iJKNSKIlADK.) 

—  On  se  mettait  beaucoup  de  fard  sur  les  joues,  au  siècle  der- 
nier, pour  simuler  la  pudeur;  maintenant,  on  met  du  blanc,  pour 
alîecter  la  candeur  et  l'innocence. 

Route,  du  iias-latiu  f/vV/J  vupla,  voie  l'onipue,  faite  en  rouipant 
la  foret  ou  le  terrain. 

De  là  routine,  petite  route,  qu'on  suit  sans  s'en  écarter,  par 
habitude. 

Roux,  féminin  rousse,  du  latin  russus,  rouge  foncé. 

—  Pendant  le  Moyen-Age,  la  barbe  et  les  cheveux  roux  étaient 
considérés  comme  un  mauvais  signe,  et  l'épithéte  de  roux  était 
un  terme  injurieux,  équivalent  de  traitre,  parce  que  la  tradition 
donnait  à  Judas  des  cheveux  roux.  Cette  croyance  explique  le  sens 
qu'il  faut  donner  à  lune  rousse. 

Le  nom  de  rousse,  donné  par  les  argotiers  aux  gens  de  la  police, 
a  aussi  la  même  origine,  et  s'explique  par  l'antipathie  des  malfai- 
teurs pour  les  défenseurs  de  l'ordre. 

Royaliste,  dérivé  de  roijal,  latin  regalls. 
Synonymes  :  blanc,  partisan  du  drapeau  blanc,  [lar  opposition  à 
bleu,  dans  les  guerres  de  la  Vendée. 
Plus  royaliste  que  le  roi  :  plus  catholique  que  le  pape. 

Roxelane  (nez  à  la). 

Uoxelane,  sultane  favorite  de  Soliman  II,  avait  un  nez  retroussé, 

devenu  célèbre,  qui  a  donné  son  nom  à  tous  les  nez  du  même  genre. 

Ruban,  de  rubeus,  rouge  (?).  En  provençal  et  en  vieux  français 

riban. 

Je  voudrais  être  le  rilian 
Oui  serre  ta  belle  i)uitriiie. 

iRoNSAlU).) 


Rubicon,  rtvinolouio  liistoriciuc. 

—  l'.isscr  le  liiihicoii  :  s'riigiigcr  (ruiic  iiiiiiiirre  ii'ivNocMlilc,  [);ir 
une  déiiKii'clii'  hasardée. 

Allusion  à  la  révolto  do  .lidos  César  contre  le  Sénat,  (inaiid  \\ 
l'rancliit,  avec  ses  lé.uions.  le  Uidiicon.  rivière  qui  servait  de  liinitc, 
à  IKlat  romain,  et  ne  pouvait  être  franchie,  même  avec  une  seule 
cohorte,  sans  (lu'on  t'ùt  déclai-é  rebelle  et  parricide.  (Voy.  le  6"or^ 
en  est  jeté.") 

César,  à  son  retour  des  Gaules,  après  s'être  vu  refuser  la  proro- 
gation de  son  i>ouvernenient,  se  décida  à  franchir  le  Uuhicon,  ce 
qui  donna  lieu  à  la  guerre  civile. 

Ce  triste  cours  d"eau,  qui  reste  noté  d'infamie  dans  l'histoire, 
pour  n'avoir  pas  arrêté  la  marche  criminelle  de  César,  est  actuel- 
lement le  Pisatello,  ou  Fiumerino,  entre  Ravenne  et  Rimini. 

Après  avoii- fi-anchi  le  Ruhicon,  César  envoya  des  sommes  énor- 
mes pour  acheter  le  Sénat  et  les  magistrats  :  ce  qui  lit  dire  qu'il 
avait  conquis  la  Gaule  avec  le  fer  des  Romains,  et  Rome  avec  l'or 
des  Gaulois. 

—  Tout  homme,  un  jour  ou  l'autre,  arrive  au  bord  de  sa  petite 
rivière,  et  se  voit  dans  la  nécessité  de  passer  ce  qu'il  peut  appeler 
son  Ruhicon,  de  prendre  une  décision  irrévocable. 

—  On  dit  d'une  tille  qui  a  mal  tourné,  qu'«  elle  a  passé  le 
Rubicon  ». 

Rubrique,  du  latin  ruber,  rouge. 

—  Savoir  toutes  les  rubriques.  —  La  rubrique  était  une  sorte  de 
sanguine,  ou  craie  rouge,  dont  les  Romains  se  servaient  pour  écrire 
le  titre  des  lois. 

Par  une  tradition  de  cet  usage,  rimprimerie,  à  ses  débuts,  adopta 
l'encre  rouge  pour  les  titres,  pour  les  lettres  initiales,  et  pour 
certains  passages  importants,  dans  les  livres  de  droit  et  de  religion. 

«  Savoir  toutes  les  rubriques  »  fut  donc  un  mérite  chez  le  légiste 
et  chez  le  théologien. 

L'expression  s'applique  aujourd'hui  à  un  homme  rusé,  ({ui  n'est 
jamais  à  court  d'expédients. 

—  On  inq)i'imait  surtout  autrefois  en  rouge  les  titres  des 
ouvrages,  et  le  nom  du  lieu  on  le  livre  était  publié.  On  disait  que 
tel  livre  portait  la  ruitrique  de  Genève  ou  d'Amsterdam. 

—  Par  extension,  rubrique  s'est  dit,  en  style  de  journaux,  du 
lieu  d'où  une  nouvelle  est  annoncée:  Ce  fait  est  sous  la  rubrique 
de  Londres,  de  Berlin. 


'M)Q  HUE 

Ruche,  (lu  lirt'loii  rus/,-,  (''corce. 

—  C'était  lin  iisa.uc  fort  ancien  de  faiiT  Ifs  niclios  en  écorce 
(i'arlti'o.  Il  (''lail  |»rati(iii(''  fiiez  les  Uoiiiaiiis.  roiiiine  nous  l'apprond 
Virgile  : 

/yyAVf  ititleni,  srn   corliciltus  sibl  siilit  racalis... 

lOforf/if/uex,   IV,  XK) 

—  radier  une  niche:  s'allirei'  une  foule  de  pelils  enneniis. 
L'abeille  n'attaque  jamais:  mais,  si  on  la  Iroiihle  dans  son  travail, 

elle  se  défend  avec  une  hravoiire  incroyaMe.  Platon  disait  qu'elle 
avait  une  étincelle  de  la  fureur  céleste  qui  anime  les  anciens 
po(Mes.  et  il  conseillait,  si  on  voulait  le  repos,  de  n'irriter  ni  les 
abeilles  ni  les  poètes: 

Gcniti  irfildhilc   vu I nui. 

(HoMAri:.) 

Arclliloque,  poète  satirique,  fut  assassiné  par  ceux  qu'il  avait 
de'ichirés  dans  ses  vers.  On  lit  cette  inscription  sur  sa  tombe: 

«  Passant,  n'a.uite  pas  les  cendres  d'Arcliilrxpie  :  un  essaim 
d'abeilles  eu  sortirait.  »  (Voy.  satire.) 

Rue,  du  bas-latin  ruga,  ride,  sillon. 

D'autres  ont  proposé  le  latin  ruere,  parce  que  les  rues  servent 
d'écoulement  aux:  eaux,  ainsi  qu'à  la  foule  [lurùa  riiif). 

Le  mouvement  de  la  foule,  comparé  à  un  torrent,  est  souvent 
une  réalité  dans  les  grandes  villes,  et  donne  lieu  à  l»ien  des  acci- 
dents. La  rue  de  Montmartre,  à  la  traversée  du  lioulevard,  porte 
le  surnom  de  k  carrefour  des  écrasés  ». 

—  Rue  foraine.  On  a  donné  ce  nom  à  des  rues  qui  étaient  affectées 
anciennement  à  la  fabrication  et  à  la  vente  des  marchandises  de 
certains  corps,  ou  à  certains  usages. 

—  Les  rues  étaient  nommées  des  professions  qui  s'y  exerçaient 
et  qui  groupaient  les  artisans  d'une  même  corporation.  Les  tradi- 
tions locales,  les  événements  qui  s'étaient  passés  dans  un  quartier, 
la  classe  des  gens  qui  l'iialtitaient,  les  monuments  qui  s'y  trou- 
vaient, telles  étaient  les  causes  qui  déterminaient  les  dénominations 
des  rues,  et  qui  aidaient  même  les  habitants  à  se  guider  dans  ce 
dédale. 

Il  y  avait  ainsi  à  Paris  les  rues  de  la  Ferronnerie,  de  la  Coutel- 
lerie, des  Décbargeurs,  du  Fouarre,  etc.  A  Baveux,  la  rue  du 
Massacre,  occupée  jadis  par  les  bouchers  ;  comme  à  Paris  la  Vallée 
de  misère,    parce  qu'on   y   égorgeait  jour  et   nuit  les  volailles, 


nunoniix  ot  miiIi'Cs  ;miiii;iii\  de  |it'tiit'  lniiiclici-ic.  (jni  se  consoniiiinit'iil 
•1  Paris. 

Les  nies  (|iii  (■Inii'iil  le  lh('';'ilfe  (l'exi'ciitioiis  ci-iiiiiiielles  avaient 
(les  iiitiiis  i|iii  i-,i|)|irl;iiciil  ccl  ciiiploi.  Ainsi,  la  rue  de  i'KclH'lle,  à 
Paris,  \il  soiiMMil  se  dresser  la  pulence  des  pendus.  Le  nom  de  rue» 
de  rArltre-Seï-  a  la  même  origine.  Le  supplice  de  re.ç^;'rt/)a^/<? donna 
son  nom  à  la  laie  et  à  la  place  on  on  le  subissait.  Wno  de  riv'handé. 
ou  les  faux  monnayenrs  itoiiillaient  dans  une  marmite.  La  Croix 
du  Ti'alioir  liraii  son  nom  (\\\  supplice  intligé  à  certains  condamnés, 
qu'on  faisait  lirer  à  quatre  clieNaux. 

Rue  des  Hillettcs,  d'un  ordre  religieux  appelé  ainsi  par  esprit 
d'Iiumilité  (comme  les  Minimes),  de  hil/f',  ol)jet  de  peu  de  valeur. 

Les  Carrières  d'Amérique  sont  d'immenses  plAlriri-es.  dont  les 
produits  sont  exportés  jusqu'en  Amérique. 

La  rue  Chantereine.  (Voy.  gi'enouUle.) 

Rue  du  Cherche-Midi.  Au  xiir'  siècle,  il  y  avait  dans  ces  parages 
un  cabaret  en  vogue;  kMjuel  avait  pour  enseigne  nu  gros  lézard 
sculpté  dans  la  pierre,  comme  le  dragon  de  la  rue  du  Dragon,  située 
non  loin  de  là  ;  au-dessous  du  lézard,  on  lisait:  «  Au  Cherche-Midi  », 
par  allusion  à  l'amour  que  cet  animal  ami  de  l'homme  professe  pour 
le  soleil. 

Rue  du  Clos-Briineau.  (Voy.  brcn.) 

Rue  Cossonnerie,  où  se  tenaient  les  marchands  de  volailles. 

Le  carrefour  de  la  Croix-Rouge,  où  il  y  avait,  sous  Charles  IX, 
une  croix  l'ouge  plantée  dans  les  champs,  à  la  rencontre  de  plusieurs 
chemins. 

Rue  du  Foiiarre  ou  fciirn'.  du  latin  foderuin,  à  cause  de  la 
paille  qu'on  y  vendait  pour  jonclier  le  sol  des  écoles  de  littérature 
et  de  médecine,  et  servir  de  siège  aux  écoliers. 

La  place  de  Grève,  située  en  face  de  l'Hôtel  de  Ville,  donnant  sur 
le  bord  de  la  Seine  (grève).  On  voyait  encore,  en  1840,  des  rassem- 
blements considérables  d'ouvriers  en  l)àliment,  se  réunir  sur  cette 
place  pour  y  chercher  de  l'ouvrage.  C'est  dans  cette  espèce  de 
bureau  de  placement  en  plein  vent  que  les  bourgeois  et  les  entre- 
preneurs venaient  les  chercher  et  les  embaucher.  Ceux  qui  ne 
trouvaient  pas  d'emploi  restaient  en  grève.  De  là  l'expression  :  se 
mettre,  rester  en  grève. 

Les  exécutions  capitales  avaient  lieu,  autrefois,  sur  la  place  de 
Grève;  c'est  pour  cela  qu'on  a  appelé  «  saints  de  grève  »  les  Saint- 


IMi.'ir,  S;iinl-Aiii;ir;iiil('.  clc,  noms  (iiic  |ir('ii;ii('iit  NdIoiilit'i'S  los 
chevaliers  (rindiistrio. 

lîiic  S.'iiiil-Hoiiorr  fpali'oii  des  lioiilaiiL'efS).  ainsi  que  les  nies  du 
Foiii'  Saiiil-lloiioré  et  Saiiit-Ciennaiii,  sont  les  \estijies  des  rèj^le- 
Dients  onéreux,  (pii  ont  |)rélevé  lonuleiiips  sur  la  moulure  et  la 
cuisson  du  |)aiii  des  îmiikUs  si  ciMiels. 

Place  Mauiiei'l  est  une  contraction  pour  Ma.i^ni  All)erti(^),  du 
Grand  Albert,  qui,  en  1225,  faisait  des  cours  d'alchimie  sur  cette 
place,  la  foule  étant  trop  à  l'éti'oit  dans  les  écoles. 

Hue  Maubuée,  d"unc  fontaine  donnant  de  Teau  séléniteuse , 
impropre  à  dissoudre  le  savon,  et  par  suite  mauvaise  pour  les 
lessives  ou  huées. 

Rue  de  la  Morlellerie,  habitée  par  ceux  qui  se  servaient  du 
mortier. 

Hue  des  Porcherons,  lieu  où  se  réunissaient  sans  doute  autrefois 
les  marchands  de  porcs.  Le  quartier  des  Porcherons  était  situé  au 
carrefour  du  faubourg  Montmartre,  formé  par  la  rencontre  des  rues 
Saint-Lazare,  des  Martyrs  et  Lamartine.  Ce  lieu,  jadis  Jjors  des 
barrières,  était  rempli  de  cabarets  en  renom. 

Rue  des  Poulies-du-Louvre,  démolie  pour  les  agrandissements  ; 
il  y  avait  des  étables  pour  les  chevaux,  comme  dans  la  rue  des 
Écuries -d'Artois,  et  celle  des  Vieilles -Écuries,  jadis  des  Yiez- 
Poulies. 

Rue  des  Prouvaires,  c'est-à-dire  rue  des  prêtres.  0  ^^y) 

Rue  du  Puits-qui-Parle.  (Voy.  Chanlepleni'e.) 

Rue  Quincampoix.  (Voy.) 

Hue  Tirechape,  ainsi  nommée  parce  que  les  fripiers  qui  Thabi- 
taient,  tiraient  la  cape  ou  manteau  des  passants,  afin  de  les 
engager  à  entrer  dans  leur  l)outique. 

«  Sortant  des  piliers  des  Halles,  dit  Mercier  (Tableau  de  Parisj, 
entrez  dans  la  rue  Tirechape,  lieu  cher  aux  comédiens,  parce  qu'ils 
y  composent  un  habit,  à  peu  près  comme  maint  tragique  moderne 
compose  une  tragédie  française,  de  pièces  et  de  morceaux...  11  faut 
une  chandelle  pour  voir  en  plein  midi  dans  les  boutiques;  et, 
quand  on  veut  vérifier  la  couleur  d'un  chiffon,  on  le  porte  à  la 
croisée,  dont  les  carreaux  sont  enduits  d'une  crasse  séculaire.  » 

Hues  de  la  Grande  et  de  la  Petite-Truanderie  :  habitées  au 
Moyen-Age  par  les  truands.  (Voy.) 

De  même,  à  Toulon,  le  vieux  quartier,  dit  de  Bésagne,  est  habité 
par  les  ouvriers  pauvres,  besogneux. 


—  IMiisit'iirs  nios  dos  vieux  qiiiii'liers  do  Miirsoillc  lirciil  ;iiissi 
Iciii-  iKHii  (les  ét.'its  qui  s'y  exorcMieiil.  Telles  sont: 

J.;i  nie  des  Aiiffiers.  niarcli.Miids  de  sii;ii'lorie,  de  auff'e.  alfa. 

Rue  Houleiie.  où  élaienl  les  lioutirrs  ou  lonneliers. 

Uiu'  (iaisseric,  ou  des  layetici's. 

Canehiére  (du  proveneal  cnnahc),  où  l'on  vendait  le  chanvre. 

Rue  des  Fahi'es.  r'est-à-dire  des  forgerons  et  autres  artisans 
travaillant  les  métaux. 

Rue  Gi[»eiMe.  au  plâtre,  provençal  gi. 

Rue  Lancerie,  des  fabricants  d'armes  blanches. 

Rue  Pavé-d'Amour,  s'appelait,  au  xv^  siècle,  rue  de  la  Triperie. 
Le  nom  actuel  provient  de  la  présence  de  certaines  femmes  qui  y 
exerçaient  leur  industrie  sous  la  surveillance  de  la  police. 

Toulon  possède  aussi  une  rue  de  ce  nom.  \ 

Rue  Tulianeau.  d'une  maison  où  se  réunissaient  les  fumeurs  :  du 
provençal  liihdr.  fumer. 

Place  du  (^ul-de-liœuf.  C'est  la  corruiition  du  cri  jirovençal  : 
Oou  ruach  (lebuou!  Au  bœuf  cuit!  que  faisaient  entendre  les  four- 
nisseurs de  vivres  des  galères,  olïraut  en  vente  les  abattis  des 
buMifs  tués  pour  le  service  de  l'arsenal. 

—  Beaucoup  de  rues  ont  pris  leur  nom  des  enseignes  qu'on  y 
voyait.  Telles  sont  : 

La  rue  de  la  Harpe,  d'une  enseigne  où  était  représenté  David 
jouant  de  la  harpe:  la  rue  de  la  Truie-qui-File,  etc. 

C'était,  encore  à  la  lin  du  xviir-  siècle,  un  moyen  pour  désigner 
les  rues  qui.  alors,  n'étaient  nommées  ni  numérotées  par  l'édilité. 

—  Les  rues  de  Paris  ont  commencé  vers  1728  à  être  désignées 
par  des  noms  inscrits  sur  des  plaques.  On  adopta  aussi  pour  les 
maisons  le  système  du  numérotage,  au  lieu  de  les  désigner  par 
leui'S  enseignes  ou  par  d'autres  signes  extérieurs. 

Ruelle,  diminutif  de  rue,  petite  rue;  comme  venelle,  petite 
veine,  pour  veinelle:  senlier.  du  vieux  mot  seule.  Ruelle  désigne 
aussi  l'espace  qui,  dans  une  ;ilc(')ve,  se  trouve  entre  le  lit  et  le  mur. 

Au  xvir-  siècle,  on  appelait  ruelles  les  alcôves  mêmes,  qui 
servaient  de  lieu  de  réunion  aux  Précieuses,  et  où  la  maîtresse  du 
logis  recevait  les  visites. 

ni'iiscvadc  en  tous  lieux  amuse  les  ruelles. 

fBoiLEAU,  Art  poétique,  IV.  200.) 

—  On  appelait  «  langage  des  ruelles  »  la  langue  adoptée  par  les 
Précieuses. 


400  TU'S 

Rufien,  Miiciciiiiomoiil  VK/'/icn,  tlii  vieux  lr;iiic;iis  nnilin  {'.). 
Déhiiiiclié,  entreinettciir,  souIciumii-. 

Ruine,  du  l;iliii  niiiui,  de  rncri'.  toiiilicr,  sT-croiikîr. 

—  Tyr,  (];u'lli;i,u<',  l;iiil  (r;iiilr(S  \ilh'S  crlèhrcs  do  ranli(|iiit('', 
n'existent  plus  que  diins  le  souvenir.  Du  temj»s  de  Luc.-iin,  il  ne 
restait  même  plus  trace  de  ruines  de  Troie  : 

...Elifim  iicnfi-r  ruina;. 

—  Synonymes  de  ruiné  :  tombé  de  Crésus  en  Jol>:  battre  la  dèclie 
(argot),  (fêc/ie  semble  venir  d(;  <hh-Iioiv. 

Ruisseau,  pour  nilsse/,  du  diminutif  rlriccltus,  de  ricus. 
Autrefois  on  employait  ru  dans  le  même  sens,  et  encore  pour 
désigner  le  bruit,  le  murmure  d'un  ruisseau: 

Au  ru  d'une  clerc  fontaine 
Dont  li  ave  étoit  clère  et  sène. 

{Roman  de  Hou.) 

—  Le  ruisseau  de  la  rue  du  Bac.  —  M™»  de  Staël,  exilée  à 
Coppet,  en  Suisse,  regrettait  le  ruisseau  de  la  rue  du  Bac,  comme 
Andromaque  avait  autrefois  regretté  le  Simoïs. 

On  emploie  cette  expression  pour  dire  que  rien  ne  remplace, 
pour  l'exilé,  le  sol  natal,  et  que  la  patrie  absente  laisse  dans  îe 
cœur  un  regret  ineffaçable. 

Ruse,  de  ruser,  du  latin  recusare,  ancien  français  reuser: 
seiir  (devenu  sûr)  otVre  une  transformation  analogue. 

—  Ruse  de  guerre  :  stratagème. 

Ilolus  (t)i    virlus  qnis  in  hnslc  rapdral  9 

(VlilCII.E.) 

...Qu'importe  si  l'on  use 
Contre  ses  ennemis,  lie  vaillance  ou  de  ruse? 

(Rfrtait.) 

Rusé,  même  origine. 

Synonymes  :  futé,  terme  de  vénerie  ;  madré,  de  manclre,  nom 
du  renard  en  Languedoc  ;  tine-moucbe  ;  narquois  ;  renard  :  retors. 
—  Homme  rusé,  tard  abusé. 

Toulo  ruse  est  iiermisc,  en  amour  comme  en  guerre. 

(Coi.i.ix  D'HAni.F.vii.i.K,  C/iàteaiij-  en   Espagne.) 


SAB  401 


S.  Kritl't'  sil'llilllc. 

—  AlloiiLitM-  k's  .s-,  (iio/,  H;il»cl;iis,  sionific  l'aire  une  tromperie 
iljiiis  III)  compte:  .urossir  un  mémoire.  Du  signe  a hréviatif  .s-,  pour 
son.  i[iii.  iiiloiiué,  ilevenait  /',  ipii  éqiiivalail  ;'i  franc  (^). 

Sabbat,  de  lliéhreu  schabal,  repos,  par  le  latin  snbbalum. 
.loiir  de  re|)os  chez  les  Juifs,  en  souvenir  du  repos  de  Dieu,  après 
la  créalion. 

—  Faire  du  saMial  :  beaucoup  de  liruil,  de  tapa.ue. 

Vii>i'Z  11'  hi',-111  salilml  qu'ils  fdiil  ;'i  notro    porlc  ! 

(H.ac.im:.  P/aif/dirs.) 

Les  Juifs,  le  jour  du  S.'ihlial,  qui  est  le  samedi,  ciianteut  des 
lisaiimes  dans  leurs  syuaiio.uiies,  cliaciiu  dans  un  Ion  dilTérent:  ce 
qui  produit  un  son  désagréal)le. 

—  On  appelle  aussi  sabbat  rassemblée  nocturne  que  Ion  suppo- 
sait tenue  le  samedi  par  les  sorcières,  et  où  le  diable  pai'aissait 
sous  la  forme  d'un  bouc.  Il  s'y  faisait  des  danses  et  des  cérémonies 
magiques  décrites  dans  les  livres  de  démonomanie. 

Sabir.  Lanuue  qui  se  parle  en  Algérie,  dans  les  relations  entre 
Européens  et  Arabes.  C'est  un  mélange  confus  d'ai'abe,  de  français, 
d'espagnol  et  d'italien. 

Sable,  du  l.itiii  sab///ui/i,  roman  arciui.  qui  est  aussi  latin. 

El  es  plus  fols,  mon  cscien, 
Que  tel  que  snnena  en  nrrun. 

(liicnNAiin  DE  ViùXTAnouri.) 

(Il  est  plus  fou.  à  mon  avis,  que  celui  qui  sème  sur  le  sable.) 

Sablier,  dérivé  du  précédent. 

—  Le  sable  de  ma  vie  est  presque  écoulé:  mais  ne  secouez  pas 
le  sablier  pour  le  faire  tomber  plus  vite.  (W.  Scott.) 

Sabot,  du  bas-latin  sabbafam,  savate.  Un  a  proposé  aussi  sapi- 
ni/s,  fait  de  bois  de  sapin.  Un  encore  Sabaudia,  Savoie  (chaussure 
usitée  en  Savoie). 

—  Synonymes  :  escarpins  de  Limoges  :  esclots  (mot  commun  à 
l'argot  et  au  provençal). 

2G 


402  SAC 

—  Dormir  foniiiic  un  s;il)Ot.  Coiiipiii-iisoii  <Mii|)riiiit('M'  ;'i  une  sorte 
do  toupie  np|)(îlôo  ;iiissi  srihol ,  qui,  [ij)r('S  avoir'  ronllc'.  a  un  moment 
de  rotation  à  peine  sensii)ie  à  l'ieil  et  (ju'on  ai»pelle  dormir. 

Sac,  du  latin  soccu.s:  proveiu;al  sa. 

Ce  mot  est  de  toutes  les  langues  :  hébreu  sa/c  ;  grec  mkhos. 

De  là  sont  venus:  havresac  (sac  à  avoine),  besace  ou  bissac 
(double  sac),  saccager,  détruire  et  emporter. 

Le  provençal  dit  ensaquar  dans  le  sens  du  latin  saccare,  mettre 
dans  un  sac. 

—  Sac  à  vin  :  ivrogne.  Au  propre,  c'est  une  outre,  une  peau  de 
•bouc  où  l'on  met  le  vin,  en  Orient. 

—  Sac  de  soldat  :  as  de  carreau,  azor. 

—  Gens  de  sac  et  de  corde  (voy.  cordé)  :  qui  méritent  d'être 
pendus  ou  noyés. 

Sous  Louis  XI,  les  criminels  étaient  enfermés  dans  un  sac,  sur 
lequel  était  écrit  :  «  Laissez  passer  la  justice  du  Roi.  » 

Lq  Dictionnaire  de  Trévoux  dit  que,  dans  cette  locution,  me 
vient  du  vieux  français  sak,  forfait. 

—  Juger  sur  l'étiquette  du  sac  :  sans  voir  les  pièces  du  procès. 

—  Voir  le  fond  du  sac  :  se  rendre  bien  compte  d'une  atVaire. 

Sans  voir  le  fond  du  sac,  ils  prononcent  l'arrêt. 

(Régnier.) 

—  Tirer  d'un  sac  double  mouture.  Cette  locution  se  prend  en 
mauvaise  part.  Elle  s'applique  aux  gens  assez  peu  délicats  dans  les 
atïaires,  et  assez  babiles,  pour  tirer  un  double  profit,  là  où  un 
honnête  homme  n'en  aurait  aucun. 

—  Il  ne  sort  d'un  sac  que  ce  quon  y  met.  C'est  pour  cela  qu'on 
ne  peut  attendre  de  la  modestie  d'un  orgueilleux,  de  la  ])onté  d'un 
méchant,  de  l'équité  d'un  homme  de  parti. 

Il  n'y  a  de  sentiments  justes  que  dans  les  cœurs  vertueux  et 
humains. 

—  Mettre  à  sac,  ou  saccager  :  piller. 

—  De  sac,  on  a  aussi  dérivé  saccade. 

Sacre,  sacré,  du  latin  sacer,  sacrum. 

Le  mot  latin  avait  la  double  signification  de  saint,  sacré,  divin  ; 
et  de  impie,  infernal,  voué  aux  dieux  infernaux. 
Sacer  (Virgile)  :  voué  aux  enfers. 
Auri  sacra  famés  (Virgile)  :  la  soif  exécrable  de  l'or. 

—  Vouer   aux  dieux  infernaux,  c'était  l'équivalent  de   notre  : 


SAG  40:^ 

onvoyor  à  Ions  los  difiMcs.  ;iii(|iiol  on  snltslituo  l"oii   liion  :  Ono  Difii 
vons  liénisso  ! 

—  SariH',  sni\i  (riinc  ('pillirlc  spécifiqne,  devient  un  siirci-oil 
d"injnre  :  sacré  volcnr,  [lonr  volcnr  liotlV'. 

—  Le  sacre  des  senverains  est  une  tradition  iU'  l'aiiti(iuité 
(du  moins  de  ranli(initt''  hrhraïque  :  les  rois  liébreux  recevaient 
ronrtioii). 

—  De  AY/r/v  dérivent  :  sacrer,  sacrement,  consécration,  sacrifier, 
sacrilège,  exécrer. 

—  Le  nom  d'Anunsle,  qne  prenaient  les  empcrenrs  romains,  vient 
de  angurio  consccralus,  sacré  par  les  augures,  c'est-à-dire  saint, 
vénérable. 

Sacrement,  du  latin  sarrf/hwnfi/m,  qui  a  donné  aussi  la  forme 
[lopuiaire  seniienf. 

—  Les  Sacrements  de  l'Eglise  sont  des  vœux  (pie  l'on  jure 
(sacrare)  d'accomplir. 

—  Une  foule  de  lettres  de  décès  constatent  que  le  défunt  est 
«  muni  de  tous  les  sacrements  ».  C'est  absurde,  car  il  y  en  a  deux  : 
l'ordre  et  le  mariage,  qui  ne  peuvent  être  conférés  à  la  même 
personne.  (On  a  vu  plus  d'une  fois  des  gens  mariés  ou  veufs  entrer 
dans  les  ordres.) 

Sacripant,  étymologie  littéraire. 

Nom  dnn  roi  deCircassie,  dans  le  Roland  Furieux,  deTArioste. 

PersonnaQe  querelleur,  tapageur,  sorte  de  rier-;'i-l)ras. 

Sage,  du  latin  sagire,  avoir  dn  discernement:  ou  bien  plutôt 
de  sapius,  qui  vient  de  sapere,  goûter,  apprécier. 

On  ne  trouve  pas  sapins  dans  les  auteurs  ;  mais  Pétrone  (Sufi- 
ricon,  oO)  se  sert  de  iiesapius.  (Voy,  Littré.) 

—  Les  Sept  Sages  de  la  Grèce:  Thaïes,  Solon,  Bias,  Cliilon, 
Pittacus,  Périandre,  Cléobule.  '^ 

—  On  entend  par  sagesse  la  pratique  de  la  morale,  la  bonne 
conduite  dans  le  cours  de  la  vie. 

Pour  les  anciens,  la  sagesse  (sophia)  comprenait  à  la  fois  la 
science  et  la  sagesse,  qui  doit  en  être  la  conséquence. 

Les  Grecs  appelaient  sop/ioi,  sages,  ceux  qui  se  livraient  à  l'étude 
de  la  physique  et  de  la  morale,  seules  sciences  alors  cultivées. 
Pythagore,  prenant  le  mot  dans  un  sens  plus  large,  lui  substitua  le 
titre  plus  modeste  de  phiiosophos.  ami  de  la  sagesse. 

Minerve,  déesse  dej  la  sagesse,  avait  pour  attributs  un  rameau 


404  SAI 

d'olivitïr,  (3ml)l<''iii('  de  l;i  pjiix  ;iii  dcdiiiis  cl  ;iii  dolioi's  :  cl  une 
chouette,  oiseau  qui  voit  dniis  les  ténèbres,  pour  sijxnilicr  (|iic  |;i 
vraie  sagesse  veille,  (!t  découvre  tout. 

—  La  sagesse  est  une  folie  qin  ne  dérange  personne. 

Sage-femme:  accoucheuse,  dasuf/e  pour  habile. 

— •  Il  n'est  pas  nécessaire  de  faire  remarquer  la  dilïérencc  (piil 
y  a  eniro,  sa f/c-p'/iuiic  o\  fonnno  nage.  Il  ne  faut  pas  plus  confondre 
ces  deux  termes  que  :  grosse  femme  et  femme  grosse,  galant  homme 
et  hoinnu;  galant. 

11  n'est  pas  rare  cependant  d'entendre  à  ce  sujet  de  mauvaises 
équivoques. 

La  mère  de  Louis  XIV  s'adressant  à  un  seigneur  fort  gros,  lui 
demanda  quand  il  accoucherait:  «  Quand  j'aurai  trouvé  une  sage- 
femme  »,  répondit-il. 

Ménage,  avant  de  mourir,  disait  au  P.  Airaut,  qui  l'assistait  : 
«  Je  vois  qu'on  a  besoin  d'une  sage-femme  pour  entrer  dans  le 
monde,  et  d'un  homme  sage  pour  en  sortir.  » 

Saigner,  du  bas-latin  sanguutare. 

—  Se  faire  saigner  sans  ordonnance  de  médecin  :  être  blessé  en 
duel. 

...Surtout  ne  dégainez  pas  au  premier  mot  :  vous  vous  feriez 
saigner  sans  ordonnance  du  médecin.  (W.  Scott.) 

Les  Américains  disent  :  «  Je  vais  faire  un  trou  dans  votre 
personne.  » 

C'est  une  expression  qui  rappelle  homicide  (hominem  cœrJere]. 

—  Saigner  du  nez  :  manquer  de  courage. 

—  On  ne  doit  pas  dire  :  saigner  au  nez  ;  c'est  au  V)ras  que  se  fait 
la  saignée. 

Saindoux^  de  sahi,  latin  sagùia  et  de  doux,  c'est-à-dire  non 
salé,  parce  que  c'est  de  la  graisse  de  porc  fondue  et  non  salée. 

Quelques-uns  ont  voulu  voir  dans  doux  une  modification  de 
doue,  pour  d'oie {1). 

Saint,  du  latin  satictus,  provençal  sa)}ct,  de  sandre,  sanction- 
ner, consacrer. 

—  Les  boUandistes  sont  des  jésuites  d'Anvers  qui  recueillent  et 
publient  la  Vie  des  Sainfs.  Bollandus  commença,  en  iG30,  le 
grand  recueil  projeté  par  Roswied,  et  publia  les  deux  premiers 
volumes  en  1641.  Cette  œuvre  s'est  toujours  continuée  depuis,  et 


SAI  iOo 

les  hoIUindisles  oui  iMiMir  iicliicllciiioiit  l;i  \ie  de  plus  do  quarante 
mille  saints. 

—  Svnonvinc  :  iKMilioiniiio  (Vidocq).  Allusion  au>:  figurines  de 
sainis,  appelées  bonslioniines. 

Il  y  a\  ail  autrefois  à  Pai'is  nue  maison  de  refuge  pour  les  vieillards, 
sous  riuvocatiou  des  saints,  et  appelée  «  Hospice  des  bonshommes  ». 

—  Le  uKtl  sailli,  précédant  un  nom  propre  de  saint,  demande 
devant  lui  i'arlicle  fi-miniii  (quand  il  désigne  un  jour),  parce  que 
le  mol  p'h'  ("Si  sous  cnlendii  :  la  Saiul-.Iean,  la  Saint-Michel. 

—  A  ilia(pie  saiul.  sa  chandelle. 
A  petit  saint,  petit  encens. 

—  Saints  gelés,  ou  de  glace:  froid  des  quatre  caNaliers.  (Voy.  à 
la  Chandeleur  les  grandes  douleurs.) 

—  Se  recoinmaudei'  à  tous  les  saints  :  ne  savoir  plus  à  quel  saint 
se  voiuM".  Se  dit  de  ipichp^iiu  à  ([iii  rien  ne  réussit,  et  qui  se  trouve 
à  bout  de  ressources. 

Inverlus  (jucni  (liviim    vocet. 

{lkn:.\CK.) 

.Ne  sacliaiil  plus  tuiilùl  à  nucl  saint  se  \ûaer. 

(Boii.F.AU,  Salirex.) 

Le  vaisseau  de  l'amiral  Forhin  ayant  une  voie  d'eau,  l'équipage 
se  lamentait  et  adressait  des  vœux  à  tous  les  saints.  «  Courage, 
mes  amis,  dil-il  aux:  uip.telols.  tous  les  vœux  sont  bons;  mais 
Saiule  Pompe  !  c'est  à  elle  (pi'il  faut  s'adresser.  » 

(Hi  !  cuinhiou  le  pùi'il  onricliirall  les  dieux, 

Si  nous  luiiis  suiiveiiiiMis  des  \œ\\x  qu'il  «uns  fait  faire  ! 

(La  Fontaine.) 

Mais,  comme  disent  les  Italiens  :  Passalu  el  perlcolo,  gabato  el 
san/o. 

Ce  proverbe,  cité  par  llabelais  (l\,  24)  siguitîe  :  Passé  le  danger, 
le  saint  est  moqué. 

—  L'invocation  des  saiuls,  dans  la  communion  romaine,  prenait 
sa  soui'ce,  au  Moyen-Age,  dans  la  croyance  que  certains  d'entre 
eux.  (piand  on  les  fâchait,  envoyaient  des  maladies  ou  des  calamités, 
dont  ils  préservaient,  au  contraire,  ceux  qui  les  apaisaient  par 
des  vœux  et  par  des  prières. 

C'était  aussi  l'usage  des  Romains,  qui,  du  mot  juvare  avaient 
fait  Joins,  Jupiter  aidant,  et  son  contraire  Vejovls ,  Jupiter 
tonnant,  le  dieu  malfaisant. 

Les  innombrables  légendes  du  Moyen-Age,  nées  dans  les  monas- 
tères, olïrent  parfois  un  singulier  mélange  de  mvsticisme  chrétien 


406  SAI 

et  (lo  réininisccnccs  pinoniics,  oi'i  l'on  iciicoiilrc.  plus  diiii  saint 
d'origine  siispootc. 

Nos  hons  nioux,  plus  rrédiilos  (priiisU-iiils,  riNaicnt  placé  presque 
toutes  les  maladies  sous  la  prolerlion  de  quelque  saint,  qu'il  fallait 
invoquer  pour  s'en  délivrer.  Cette  croyance  venait  de  i'iinbécihî 
crédulité  dos  uons,  qui,  à  cause  du  son  équivoque  des  noms,  ou  de 
leur  similitude  avec  celui  des  maladies,  ou  pai'  un  autre  motif 
aussi  ridicule,  atli'ibuaient  aux  saints  une  iiilliieuce  sur  cei-laiiis 
izenres  de  maladies.  Ou  dési.unait  crrlains  maux  par  le  noiu  des 
saints  auxquels  ou  attribuait  la  puissance  de  les  guérir. 

Encore  aujourd'liui,  dans  les  campagnes,  il  n'est  pas  de  maladie 
qui  n'ait  dans  quelque  paroisse  voisine  son  saint  guérisseur.  C'est 
saint  Marcou  qui  partage  avec  les  anciens  rois  de  France  le 
privilège  de  guérir  des  écrouelles  ;  sainte  Anne  rend  des  points  au 
sulfate  de  quinine,  s'il  s'agit  de  guérir  une  fièvre  rebelle  ;  saint 
Maur  guérit  les  douleurs  rbumatismales  ;  sainte  Apolline,  les  maux 
de  dents  ;  saint  Cloud  guérit  des  furoncles  (alïaire  d'assonance 
évidemment)  ;  de  même  saint  Ouen,  à  qui  on  attribue  le  pouvoir  de 
faire  oiur,  et  sainte  Claire,  qui  y  fait  voir. 

L'épilepsie  s'appelait  la  danse  de  saint  Gny  ;  l'érésypèle,  le 
mal  saint  Antoine  ;  la  folie,  le  mal  saint  Matburin. 

De  même,  les  corps  de  métiers  ont  clioisi  pour  patrons  des  saints 
qui  ont  exercé  leur  industrie,  ou  dont  les  noms  ont  une  analogie 
pbonique  avec  ceux  de  leurs  professions. 

Certes,  il  n'est  rien  de  plus  toucbant,  de  plus  respectable,  qu'une 
famille  agenouillée,  demandant  à  Dieu,  avec  les  larmes  de  l'amour, 
la  conservation  d'un  être  bien-aimé  ;  mais  les  pratiques  supersti- 
tieuses dont  il  s'agit,  affectent  un  matérialisme  si  grossier,  qu'elles 
sont  odieuses  et  répugnantes.  On  ne  saurait  trop  désirer  le  jour 
où  nos  populations,  renonçant  aux  pèlerinages  et  à  ces  absurdes 
fétichismes,  se  borneront  à  rester  à  la  maison  pour  soigner  leurs 
malades  par  les  moyens  que  recommande  la  saine  raison. 

Le  culte  des  saints  était  ainsi  descendu,  dans  la  forme,  à  des  jeux 
de  mots,  à  de  burlesques  équivoques,  sans  que  le  clergé,  dont  le 
préjugé  populaire  augmente  le  crédit,  ait  jamais  réagi  contre  ces 
tendances  bétérodoxes. 

SAINTS   DIVERS  :    PARTICULAmTÉS    SUR   LES    SAINTS  : 

Saint  ad  auras.  (Voy.  pendu.) 

Saint  Alipantin.  Rabelais  (Uv.  II,  cb.  G)  linvoque  pour  cbasser 
des  odeurs  puantes.  Ce  serait  le  patron  des  parfumeurs.    «  Saint 


SAI  407 

Alipantin,  quelle  civollc  !  Au  (lyal)le  soit  le  maschérable,  tant  il 
put  !  » 
Saint  iiariialié  ét;iil  patron  dt-.s  moissonneurs,  des  faucheurs. 

Bitriifihds  .sunclus  fulccm  jubet  ire  pcr  licrbam. 

La  lioltc  s;iiiit  Henoil.  (Voy.  honlfille.) 

Saint  Cloud  est  le  patron  des  cloutiers. 

Saint  (li'iine,  patron  des  médecins,  appelés  jadis,  pour  celte 
raison.  sui)p()ls  de  saint  (^uno. 

Saint  Crapasi.  Le  mal  saint  Crapasi.  Crapaslus,  dont  les  méri- 
dionaux ont  fait  Crapasi. 

Les  Lorrains  disent  :  les  trois  évéchés  S.  Cravaz,  pour  désigner 
les  trois  jours  gras,  parce  qu'on  y  mange  et  boit  à  crever.  {Aven- 
tui'es  (lu  baron  de  Fœnestc,  IV,  ch.  2.) 

Saint  Crépin,  patron  des  cordonniers.  Ce  mot,  dans  la  langue 
populaire,  désigne  tout  ce  qu'on  possède,  la  bourse  appelée  autrefois 
crépine,  contenant  les  outils  du  cordonnier. 

Saint  Elme  {\e  feu).  Cette  expression  est  la  corruption  de  «  feu 
sainte  Hélène»;  on  appelait  «Hélène»  le  feu  qui,  sur  mer, 
présageait  la  tempête.  Hélène,  dont  on  a  fait  une  sainte,  par 
ignorance,  est  la  belle  Hélène,  sœur  de  Castor  et  Pollux.  La  llamme 
de  Castor  était  un  signe  favorable  pour  les  navigateurs.  Horace  en 
parle  : 

Frulres  Hclenw  lucida  sidcra, 

Rabelais  (IV,  22)  les  nonmie  Mixarchagevas  selon  les  Argives. 
Les  Argiens,  en  elTet,  dit  Plutarque,  donnaient  à  Castor  le  surnom 
de  Mixarchagevas,  qui  signilie  bâtard  (ou  plut()t  demi-dieu  fonda- 
teur). D'autres  voient  dans  saint  Elme  une  modification  de  Elmo, 
pour  Erasme,  saint  que  les  Italiens  invoquent  dans  la  tempête. 

Saint  Ferréol,  d'Abbeville,  prenait  soin  d'engraisser  les  oies. 

Saint  Frusquin,  comme  saint  Crépin,  signifie  tout  l'avoir  d'une 
personne,  tout  ce  qu'on  a  gagné,  les  habits,  les  hardes,  ce  qui 
touche  de  plus  près. 

Saints  gelés.  Rabelais  (liv.  III,  33)  dit  :  «  Jupiter  voyant  les 
bourgeons  de  la  vigne  perduz  par  les  gelées,  bruines,  frimatz, 
verglatz,  froidures,  gresles  et  calamitez  advenant  par  les  festes  de 
sainctz  Georges,  Marc,  Vital,  Eutrope,  Phibppe,  etc.,  qui  sont  ou 
temps  que  le  soleil  passe  soubz  le  signe  de  Taurus,  entra  en  ceste 
opinion  que  les  sainctz  subdictz  estoient  sainctz  gresleurs,  geleurs, 
et  gasteurs  du  bourgeon.  Pourtant  voulovt-il  leurs  festes  translater 


408  SAI 

en  liyver,  les  licenciant  <'n  lonl  lioniii'iir  et  révérence  de  gresler 
lors  et  geler  tant  que  ils  vonldroyeiil. 

Saint  Gris.  C'est  saint  François  d'Assise,  chef  des  uris-vèliis,  ou 
moines  gris  (les  cordeliers),  car  ils  étaient  ceints  d'une  corde  et 
vêtus  de  gris  On  les  appelait  aussi  diables  gris, 

Ileni-i  IV.  qui  était  toujours  un  peu  huguenot,  jurait  parle  ventre 
(de)  saint  (iris,  comme  d'autres  par  celui  de  saint  (juenet.  (Voy.) 
Rabelais,  qui  avait  été  cordelier,  dit  (IV,  9)  :  Sang  saint  Gris.  Ce 
juron  était  donc  antérieur  à  Ileni'i  lY. 

Saint  Jean-Baptiste  (24  juin),  ainsi  nommé  parce  qu'il  baptisa 
Jésus-Clirist  dans  les  eaux  du  Jourdain.  C'est  sans  doute  en  souve- 
nir de  ce  fait  que,  dans  les  villes  du  Midi,  on  jette  ce  jour-là  de 
l'eau  sur  les  passants. 

Saint  Jean-le-Uond.  Autrefois  le  peuple  de  Paris  désignait  par 
celte  expression  le  derrière,  du  nom  d'une  église  ainsi  appelée: 

El  fait  à  leiinemi  l'affroiil 

De  lui  montrer  Sainl-Jeaii-le-Rund. 

/(/  est  son  gros  \ilain  derrière. 

(La  llciviade  travestie.) 

Saint  Julien  l'Hospitalier,  ou  patron  des  voyageurs,  faisait  trouver 
bon  gîte  au  voyageur,  s'il  avait  dit  le  matin  l'oraison  qui  porte  sou 
nom. 

Saint  Lazare,  ou  saint  Ladre,  était  le  patron  des  lépreux.  (Voy. 

Saint  Lundi,  qui  suit  sainte  Touche.  Le  plus  fêté,  le  plus  chômé 
de  tous  les  saints.  Allusion  à  l'usage  où  sont  les  ouvriers  de  Paris, 
de  ne  pas  travailler  le  lundi,  mais  de  le  passer  à  s'amuser,  et  à 
boire  le  salaire  touché  le  samedi  précédent. 

Sainte  Marie-Madeleine,  Gahléenne  de  grande  naissance,  mais 
de  mœurs  dissolues,  se  convertit  à  la  vue  des  miracles  de  Jésus- 
Christ,  assista  à  sa  passion,  et,  après  la  résurrection,  alla  terminer 
ses  jours  dans  une  austère  pénitence,  à  la  grotte  de  la  Sainte- 
Baume,  près  Marseille.  (Voy.  madelonnettes.) 

Saint  Main.  Le  mal  saint  Main  était  la  gale,  la  rogne. 

Saint  Marcou  guérit  les  écrouelles  (mal  du  cou).  Allusion  à  la 
coutume  des  rois  de  France,  d'aller,  après  leur  sacre,  à  l'église 
Saint-Marcou,  à  Corbigny,  pour  toucher  les  malades  atteints  des 
écrouelles,  en  disant  :  «  Le  roi  te  touche,  que  Dieu  te  guérisse  !  » 
Louis  XIV  et  Charles  X  s'y  rendirent  à  l'époque  de  leur  sacre. 

Saint  Marcou  guérit  les  écrouelles 
Ainsi  qu'ung  maeon  sans  truelle. 


SAI  'jOO 

Sainl  Martin  guérissail  de  rivrognerio. 

A  la  Saint-Mai-tiii.  on  lasle  le  \m. 

Rabelais  (IV,  33)  appelle  le  diable  «  l'estaflier  de  s.iiiicl  Martin  ». 
La  légende  rapporte,  en  elTet,  que  le  diable  \inl  un  jour  tenter 
saint  M.irtin,  sous  la  ligure  d'un  pauvre  transi  de  froid.  Mais  bi 
sainl  lui  donna  sans  bésiterla  moitié  de  son  manteau  :  ce  qui  ne 
lit  pas  le  compte  du  tentateur. 

Saint  Matliieu  était  puiiiicain  avant  sa  conversion.  I)"oi'i  l'on  a 
appelé  un  usurier  ><  fesse-malbieu  »,  qui  est  peut-être  la  coi'ruption 
de  «  fète-Matbieu  «. 

Saint  Miciiel.  D'ai)rés  la  légende  normande,  le  mont  Saint-Michel 
est  le  lieu  où  l'archange  Michel,  ajuvs  avoir  terrassé  Helzéhuth,  l'a 
enterré  sous  une  montagne,  qui  a  pris  le  nom  de  Tombelaine, 
tombe  de  Bélénus  on  Héel/.ébuth.  (Victor  Hugo.  Quatre-tHntjt-trehe, 
livre  H.)  Saint  Michel  terrassant  l'hydre  des  révolutions  est  un 
emprunt  de  M.  Prudliomme  à  cette  légende. 

Saint  Nicolas,  patron  des  enfants.  On  a  abuse  de  ce  nom  de  saint, 
à  cause  de  sa  ressemblance  i)honique  avec  le  mot  nujaud,  pour 
faire  de  son  abrégé  Colas  le  synonyme  de  niais. 

Saint  Nicolas,  évéque  de  Myre,  aperçut,  dans  un  \illage  de 
Bohème,  un  charcutier  fort  occupé  à  saler  de  la  chair,  qu'il  vendait 
ensuite  comme  chair  de  porc.  Il  entra  dans  une  grande  colère,  car 
il  avait  d'abord  reconnu  les  corps  de  trois  petits  enfants  qui,  depuis 
quelques  jours,  avaient  disparu  de  la  demeure  du  sabotier  Otto. 
S'approchant  du  baquet  où  les  trois  petits  innocents  étaient  coupés 
en  morceaux,  saint  Nicolas,  en  présence  de  la  foule  accourue  à  sa 
voix,  leva  les  bras  au  ciel,  et  soudain  ou  entendit  des  voix  mélo- 
dieuses chanter  un  cantique  d'actions  de  grâces:  puis  les  trois 
petits  enfants  se  levèrent,  et,  après  avoir  remercié  le  grand  saint, 
re[U'ii'ent  le  chemin  de  la  maison  paternelle.  Le  peuple  cria  Noël  ! 
et  saint  Nicolas  devint  le  patron  des  enfants.  Faut-il  conclure  de  là 
que  saint  Nicolas  doit  être  en  froid  avec  saint  Antoine,  patron  des 
charcutiers  ? 

Sainte  Nitouche  :  hypocrite. 

Saint  Pierre  est  le  saint  que  les  peuples  ont  le  plus  poursuivi  de 
leurs  lazzi.  Sa  calvitie,  ses  défaillances,  tout,  jusqu'à  ce  rcMe  de 
portier,  que  la  tradition  lui  attribue,  aide  à  faire  de  lui  un  person- 
nage comique,  et  presque  Ijurlesque. 

Saint  Quenet.  Ventre  sainct  Quenet  !  Par  la  dive  oye  Quenet. 
(Uabelais,  111,  8.)  Ce  saint,  invoqué  en  Bretagne,  et  surtout  dans 


410  SAl 

rôv(Vli('  (lo,  Y;innos,  ost  lo  niriiic  qiio  rfliii  des  Vonetœ,  peuples  de 
G;iiile  cl  dll.ilic,  îippch's  priiiiilivciiiciit  flcnchi',  du  l.iljii  A/iates, 
les  canards,  et  liciil  ;'i  l;i  posilioii  de  l;i  (•.■ipiliilc,  ;iii  inilit'ii  des 
lapiiiies.  Il  y  a  de  iiiémiî,  aux  environs  d(!  VaiiiK^s,  deiiv  iles.  Iloiiat 
et  lloiiédic,  c'est-à-dii'e  Tile  des  ranards  et  l'ile  des  pelils  ranards. 

Saint  Hocli  ^uri'it  de  la  pesle.  La  iéucnde  iiien  connue  d(î  saint 
Horli,  rapi»oi'le  qu'il  fut  i^uéi'i  de  la  peste  |iar  son  chien,  fjni  léchait 
ses  i)laies.  Mlle  est  d'accord  avec  la  thérapeuti(pie  ;  on  sait  que  la 
salive  a  la  vertu  de  nuérir  certaines  maladies  d(i  la  peau. 

On  dit,  pour  exprimer  l'amitié  insépai'alde  de  deux  pei'sonnes  : 
«  C'est  saint  Koch  et  son  chien.  »  Ce  provei'be  rappelle  le  fidus 
Achates  d'Énée.  dans  Virgile. 

Saint  Sébastien,  ou  Séhaste,  était  le  patron  des  compagnies 
d'archers  et  d'arbalétriers,  parce  qu'on  le  représentait  tout  percé 
de  (lèches;  il  eût  été  plus  naturel  que  le  patron  des  archers 
transperçât  ses  ennemis. 

Sébaste  signifie  vénérable,  et  c'est  par  ce  nom  que  les  Grecs 
traduisaient  Auguste. 

Sainte  Véronique,  patronne  des  lingères  (13  janvier).  Lorsque 
Jésus,  portant  sa  croix,  était  conduit  au  Calvaire,  une  femme  de 
Jérusalem  lui  essuya  le  visage  de  son  voile,  sur  lequel  l'image  du 
Seigneur  resta  imprimée.  Cette  image  fut  apportée  à  Rome,  au 
temps  de  Vespasien,  et  l'on  dit  qu'elle  guérit  Titus  de  la  lèpre. 
Les  peintres  font  tenir  cette  image  par  une  femme,  et  la  légende 
donne  à  cette  femme  le  nom  de  sainte  Véronique,  tandis  que  c'est 
le  linge  même  qui  est  la  sainte  véronique,  vet^a  iconia  {là  \rsie 
image),  le  portrait  de  Jésus  imprimé  sur  le  voile  de  Bérénice,  dont 
il  se  servit  pour  essuyer  sa  face  couverte  de  sueur  et  de  sang.  Vei^a 
iconia,  un  mot  latin  et  un  mot  grec,  symbolisait  l'union  de  l'Église 
latine  et  de  l'Église  grecque.  (Voy.  Maxime  du  Camp.) 

Saint  Yves,  patron  des  avocats  et  des  procureurs.  Parmi  les 
nombreux  petits  saints  qui  ne  sont  vénérés  qu'en  Bretagne,  il  n'en 
est  point  dont  le  culte  soit  plus  répandu  dans  ce  pays  que  celui  de 
saint  Yves,  natif  de  Tréguier,  dans  la  Basse-Bretagne.  Avocat  et 
curé,  au  xiiF  siècle,  il  fut  le  défenseur  d'oftice  des  pauvres. 

Il  y  avait  à  Paris  une  église  sous  son  vocable,  construite  aux  frais 
des  écoliers,  au  coin  des  rues  Saint-Jacques  et  des  Noyers.  On  y 
lisait  cette  inscription  élogieuse  : 

Advocatas  et  non  latro, 
Res  miranda  populo, 


SAI  411 

La  légende  rapporte  que  saint  Yves  s'étant  présenté  à  la  porte 
du  Paradis,  fut  repoussé  par  saint  Pierre,  qui  le  confondit  avec  les 
hoiuuu'S  de  sa  pi-ofcssion.  Mais  le  saint  ,  s'étant  filissé  dans  la 
foule,  pai\int  ;'i  cntivr.  Saint  Pierre  voulait  l'expulser  :  il  résista, 
protestant  (juil  ne  sortirait  que  lorsqu'on  le  lui  aurait  fait  signilier 
par  huissier.  Ou  en  clierclia  un  partout  ;  mais,  comme  il  n'en  est 
jamais  entré  dans  le  Paradis,  il  lut  iuipossiltlc  deu  trouver  un,  et 
saint  Yves  eut  gain  de  cause,  (Voy.  arocaf.) 

—  Va\  somme,  les  archers  ont  pour  patron  saint  Séi)astien  :  les 
aruniriers.  saint  Georges:  les  artilleurs,  sainte  Barlie  ;  les  avocats, 
saint  Y\es;  les  hanquiers,  saint  Mathieu  ;  les  blanchisseuses,  saint 
Hiaiic:  les  bouchers  et  les  vieilles  tilles,  sainte  Catherine:  les 
boulangers,  saint  Honoré;  les  chapeliers,  saint  Jacques:  les 
charcutiers  ,  saint  Antoine  ;  les  chasseurs  ,  saint  Hubert  ;  les 
chirurgiens,  saint  Côme  et  saint  Damien  ;  les  cloutiers,  saint 
Gloud  ;  les  comédiens,  saint  Genest  :  les  cordonniers,  saint  Grépin 
et  saint  Grépinien  ;  les  couteliers  fêtent  la  Décollation  de  saint 
Jean-Baptiste:  les  crieurs  de  nuit,  saint  Bonaventure;  les  danseurs, 
saint  Julien  des  Ménétriers;  les  écoliers,  saint  Gharlemagne  et 
saint  Nicolas  ;  les  enfants,  les  saints  Innocents;  les  fondeurs  et  les 
forgerons,  saint Éloi;  les  gantiers  et  les  tanneurs,  saint  Barthélémy; 
les  hôtes,  les  cabaretiers  et  les  pâtissiers,  sainte  Marthe;  les 
huissiers,  saint  Protais  ;  les  jardiniers,  saint  Fiacre  ;  les  lanterniers 
et  les  verriers,  saint  Glair  ou  sainte  Claire  ;  les  lingères,  sainte 
Yéronique  ;  les  marins  ,  sainte  Marie  ;  les  canonniers  ,  sainte 
Épissoire,  canonisée  par  l'amiral  Tréhouart  ;  les  menuisiers  et 
les  charpentiers ,  saint  Joseph  ;  les  musiciens  et  les  luthiers , 
sainte  Cécile  ;  les  ouvriers,  sainte  Touche  ;  les  parcbeminiers, 
saint  Jean  l'Évangéliste  ;  les  paveurs,  saint  Roch  ;  les  pécheurs, 
saint  Pierre  ;  les  peintres  et  les  sculpteurs,  saint  Luc;  les  portefaix, 
saintChristophe;  les  soldats,  saint  Maurice;  les  tisserands,  sainte 
Anne  ;  les  vignerons,  saint  Vincent  ;  les  voyageurs,  saint  Julien. 

—  Saint-Simonisme,du  nom  du  fondateur.  Système  philosophique 
et  social  du  comte  de  Saint-Simon,  mort  en  1825,  mis  en  pratique 
par  une  réunion  de  ses  adeptes  (1831-1832). 

Saison,  du  latin  satio,  sationcm,  l'action  de  semer. 

Temps  propre  aux  semailles. 

Ménage  dérivait  ce  mot  de  statlo  :  Le  Duchat,  de  seclio. 

—  Au  figuré  :  Gela  est  hors  de  saison,  c'est-à-dire  déplacé. 

—  Morte-saison  :  le  temps  de  l'année  où  une  industrie  chôme. 


412  SAL 

Salade,  (k'i'i\é  iiu'i-idioii.'il  de  sal,  sel. 
lIorl)es  s;ilées,  ussiiisoniic'cs. 

Qui  \  in  iH'  Imil  Mpi'i'S  saLuir, 
l-;st  en  risiiiic  (l'ctrr'  iiiaindc. 

Salaire,  du  liiliii  salariuni,  solde  militaires  ddiinée  aux  troupes 
pour  acheter  du  sel.  Provençal  snlari. 

—  Roquefort  explique  que  les  preuiiers  Rouiains  se  servaient  de 
sel  coinute  appoint  des  échanges,  avant  la  falii'icalion  des  monnaies. 

Salamalec,  expression  comique,  de  l'arabe  sdluia  alellc,  paix 
sur  toi. 
Salut  à  l'orientale^  à  la  turque,  avec  de  grandes  révérences. 

—  Faire  un  grand  salamalec.  Cette  locution  nous  vient  des 
Sarrazins,  qui  ont  occupé  longtemps  une  grande  partie  du  midi  de 
la  France.  Un  troubadour  provençal  dit  que,  de  son  temps,  lors- 
qu'on saluait  un  Sarrazin  par  celle  formule,  il  répondait  :  lYaipca 
s  (fia  m  I  Dieu  le  confonde  ! 

Les  Sarrazins  ftireut  chassés  du  Fraxinet,  en  Provence,  l'an  908, 
par  Guillaume,  comte  d'Arles  et  de  Provence,  qui  fut  secondé  dans 
cette  expédition  par  Gibelin  de  Grimaldi,  à  qui  il  donna  le  golfe 
de  Sambracie,  appelé  depuis  golfe  Grimaldi.  et  par  corruption, 
Grimaud.  Après  celte  expulsion,  Iteaucoup  do  familles  de  Sarrazins 
restèrent  en  Provence,  et  s'y  perpétuèrent. 

Avec  grande  crainte  et  respect. 
Dit  par  trois  fois  salamalec. 

(ScARP.ox,   Virgile  travesti.) 

Salamandre,  du  grec  salamandra. 

—  C'est  un  préjugé  que  la  salamandre  vit  dans  le  feu  ;  le  fait  est 
qu'elle  meurt  quand  on  l'y  met.  Ce  qui  a  pu  accréditer  cette  erreur, 
c'est  qu'elle  suinte,  au  contact  du  feu.  un  liquide  abondant,  qui 
peut  éteindre  un  feu  médiocre. 

Rabelais  (liv.  Y,  cb.  oâ)  dit  :  «  Je  confesse  bien  que  petit  feu  de 
paille  la  végète  et  resjouit,  mais  je  vous  asseure  que,  en  grande 
fournaise,  elle  est,  comme  tout  aultre  animal,  sulToquée  et 
consumée.  » 

—  François  I^''  avait  pris  pour  devise  une  salamandre  au  milieu 
des  llammes,  avec  ces  mots  :  «  J'y  vis  et  je  l'éleins.  » 

—  •  La  devise  d'une  femme  insensible  à  l'amour  serait  une  sala- 
mandre au  milieu  des  flammes,  avec  les  mots  :  «  Froide,  même  au 
niilieu  des  llammes.  » 


Sale,  (''tymolopie  germanique  (0- 

SyiKtiiymes  :   Iciron   de   l;i   Grasse,   cochon,  marsouin,   salaud, 
saliiraud,  souillon. 
Sale  comme  un  peiune. 

—  On  dit  d'une  personne  qui  a  du  linge  sale,  qu'elle  porte  le 
deuil  de  sa  lilanchissoiise.  et  a  divorcé  depuis  longtemps  avec  le 
savon. 

Baclie  aciielail  deux  cravates  (pii  devaient  ser\ii'  toute  l'année  : 
une  blanche  et  une  noire,  l'endant  les  six  derniers  nmis  c'était  la 
noire  (pii  devenait  Itlanche,  et  la  blanche  qui  devenait  noire. 

—  Mains  sales  :  gantées  de  crasse. 

Ongles  sales  :  ongles  en  deuil,  comme  un  billet  d'enterrement. 
(L.  Larcbey.) 
Femme  sale  :  Marie-Graillon. 

—  L'horrible  malpropreté  des  habitants  de  ce  pays,  est  un  des 
maux  auxquels  je  me  résigne  le  plus  difficilement  ;  j'espère  bien 
ne  jamais  m'y  habituer.  0  t»y-  stercoraire.) 

—  ...Ghodruc  Duclos,  ...cet  homme  endimanché  de  misère, 
couvert  de  vêtements  sordides,  se  traînait,  suait,  pendillait,  puait  à 
faire  reculer  les  tonneaux  de  Domange...  C'était  un  incroyalde 
fouiUis  de  loques,  de  guenilles,  de  haillons,  où  tout  ce  qui  n'est  pas 
trou  est  tache.  Tout  cela  pendille  llasquement,  sinistrement, 
grouille,  remué  vaguement  par  la  vermine. 

—  11  faut  laver  son  linge  sale  en  famille.  (Napoléon.)  G'est-à-dire 
qu'il  ne  faut  pas  raconter  les  turpitudes  des  siens. 

G'est  nu  vilain  oiseau  ([ue  celui  qui  salit  son  propre  nid. 

Salé,  participe  du  verbe  saler,  du  latin  sal,  sel. 
Salé  comme  la  mer. 

Temps  salé  (burlesque)  :  temps  chaud,  qui  altère. 
G'est  salé,  se  dit  d'une  chose  trop  chère. 

Saluer,  du  lalin  saluUire. 

G'est  donnei'  à  quelqu'un,  en  l'abordant,  une  marque  extérieure 
de  civilité  ou  de  l'espect. 

—  Les  Ronmins  saluaient  en  baisant  l'index,  et  ce  doigt  était 
appelé  .?«/^//«;v'.s.  Ils  disaient  :  Num  quid  vis  ?  Désirez-vous  quelque 
chose?  A  quoi  on  répondait  :  Ut  valeas.  Que  vous  vous  portiez 
bien.  (Plante,  Auip/iit7'i/on.) 

Quomndn  raies  ?  (Plante.)  Comment  vous  portez-vous  ? 
Sa/re,  salrum  te  rolo  (Térence)  :  bonne  santé. 


414  SAN 

—  Jùi  l'iiii'ope,  011  s;ilm\  eu  (Uîiiil  suii  cluipciiii. 

Les  Orientaux  placent  la  main  sur  la  poitrine,  en  sinclinani. 

Au  Tliilict,  lorsqu'on  veut  saluer,  on  allono-e  la  lanuue,  on  fait  la 
révérence  et  l'on  se  <i:ratte  la  tête.  Ces  trois  opérations  doivent 
être  simultanées.  (Hue,  Voyage  au  Thibet.  I8G0.) 

—  Les  militaires  saluent  de  l'épée. 

Les  vaisseaux  saluent  par  une  décharge  de  canons  (salve)  :  les 
coups  sont  impairs  :  le  vaisseau  dans  le  vent  salue  le  premier. 

On  a  calculé  qu'en  salv(^s  ,  politesses  royales  et  militaires, 
formalités  de  rades  et  de  citadelles,  levers  et  couchers  de  soleil, 
salués  tous  les  jours  par  les  forteresses,  navires  de  guerre,  etc.,  le 
monde  civilisé  tirait  à  poudre,  par  toute  la  terre,  toutes  les  vingt- 
quatre  heures  ,  cent  cinquante  mille  coups  de  canon  inutiles. 
A  six  francs  le  coup  de  canon,  cela  fait  neuf  cent  mille  francs  par 
jour,  trois  cents  millions  par  an  qui  s'envolent  en  fumée.  Ceci  n'est 
qu'un  détail.  Pendant  ce  temps-là,  le  pauvre  meurt  de  faim  !  (Victor 
Hugo,  les  Misérables.) 

—  Saluer  du  chapeau  :  jouer  du  l)ilhoquet. 
Saluer  vivement  :  plonger. 

...Philippe  s'était  découvert  en  faisant  un  grand  salut,  qui 
consiste  à  lever  le  chapeau  très  haut  et  à  le  tenir  au-dessus  de  la 
tête,  comme  quand  on  acclame  un  souverain  ou  un  personnage 
populaire.  (G.  Sand,  iMarianne.) 

«J'ai  l'honneur...»,  dit-il,  en  saluant  avec  la  véhémence  de 
quelqu'un  qui  éternue. 

Sang,  du  latin  sangnis.  De  là  aussi  :  saigner,  sanglant,  sangui- 
naire, consanguin,  sangsue,  sanguine  et  sandragon  (couleurs 
rouge  de  sang). 

—  Chez  l'homme  et  chez  les  mammifères,  le  sang  artériel  est 
rouge,  et  le  sang  veineux  est  noir.  L'oxygène  absorbé  par  la  respi- 
ration change  le  sang  de  rouge  foncé  en  rouge  vermeil.  La  couleur 
rouge  du  sang  est  due  à  des  corpuscules  appelés  globules,  qui 
nagent  dans  un  '.liquide  incolore  appelé  sérum.  Le  sérum  se  com- 
pose d'alhumine,  et  de  fibrine  qui  sert  à  constituer  les  fibres 
musculaires. 

Le  sang,  abandonné  à  l'air,  se  décompose  en  liquide  (sérum)  et 
en  une  masse  solide  et  rouge  (caillot). 

La  circulation  du  sang  a  été  découverte  par  Hervey,  en  1628. 

—  Avoir  le  sang  chaud  :  le  caractère  vif  et  emporté  :  par  oppo- 
sition à  sang-froid,  qui  indique  un  esprit  calme. 


SAN  415 

—  Bon  s.'iiiu-  110  ptMit  niontir.  Les  bons  exemples  que  l'on  reçoit, 
chez  ses  parents,  rendent  soii\ent  les  vertus  liéréditaires.  Le, 
principe  n'est  pas  aussi  absuln  clic/  llioniine  que  chez  les  animaux, 
où  les  races  se  perpéluenl  avec  une  ré.uiilarité  constante,  iiotain- 
nient  chez  les  chevaux  et  les  chiens. 

—  Se  faire  du  hou  sang  :  prendre  du  [)laisir,  éprouver  des 
impressions  a,urî'al)les.  d'où  résulte  un  hien-étre  favorable  à  la 
santé  :  princijje  de  physiologie  à  la  portée  de  tout  le  monde. 

C'est  l'opposé  de  la  locution  :  se  faire  de  la  bile. 

—  N'avoir  pas  une  poiitte  de  sang  dans  les  veines  :  être  saisi 
d'etVroi. 

linlhnn  li'tiiil  liohcs  san(/uinis. 

(Pi,ai;tk,  Moslellarin.) 

Ail  1  vt)us  iiu'  fjiitis  iicur.  cl  Icuil  mou  sang  se  fige. 

(Mor.iKRE,  Ecole  des  femmes.) 

—  Sany  se  dit  [)our  parenté. 

Saiifjuini-s  ntirlor. 

(VlIlCII.F..) 

(Le  premier  de  la  race.) 

Les  liens  du  sang:  être  du  même  sang,  ou  consanguins. 

Le  sanc  ne  remonte  jamais  :  l'amour  paternel  est  plus  fort  que 
l'amour  lilial.  Le  père  aime  dans  son  enfant  son  ouvrage  et  l'au- 
torité qu'il  a  sur  lui.  L'orgueil,  qui  fait  aimer  au  père  sa  supériorité, 
fait  haïr  à  l'enfant  sa  dépendance.  En  outre,  le  père  se  voit  survivre 
dans  son  enfant  :  le  (ils  se  voit  mourir  dans  la  personne  de  son 
père.  C'est  de  l'i  qu'est  venu  le  proverbe:  le  sang  ne  remonte  pas. 

—  Comme  la  mort  est  naturelle,  et  qu'il  est  naturel  que  les  pères 
meurent  plus  t()t  que  les  enfants,  aussi  la  douleur  que  l'on  a  de  leur 
mort  se  dissipe  peu  à  peu.  C'est  tout  autre  chose  de  l'amour;  car, 
au  lieu  de  nous  apporter  la  mort,  il  nous  apporte  la  vie,  en  nous 
donnant  des  enfants  qui  nous  rendent  immortels,  par  manière  de 
dire.  {Heptnméi^on,  Nouv.  4'i.) 

—  Quand  le  père  donne  au  fils,  le  père  et  le  fils  rient:  mais 
quand  le  fils  donne  au  père,  le  père  et  le  fils  pleurent. 

Sangsue,  du  latin  sanf/Nisuga,  de  saiif/uis  et  de  siiyo,  sucer. 

—  C'est  une  sangsue  :  au  figuré,  se  dit  d'un  homme  d'une  extrê- 
me avidité. 

—  Une  sangsue  avec  les  mots  :  Et  dum  satiatur  aà/Keret,  est 
l'emblème  de  l'avidité  et  de  la  fausse  amitié. 

Avec  les  mots  :  J/ordendo  sanat,  elle  symbolise  la  critique. 


416  SAN 

Sans-culottes.  Xoiii  des  républicains  de  ITUli. 
Le  nom  vient  de  ce  qu'ils  nvaicnl  proscrit  la  culotte  de  l'ancien 
réaiiiie.  pour  ad()|)ler  le  [tanlalou. 

Santé,  du  latin  smiifas,  sanilafom. 

Etat  de  celui  qui  est  sain,  qui  se  porte  bien. 

—  Santé  est  l'opposé  de  maladie,  et  exprime  l'idée  dun  état 
normal  des  fonctions  vitales. 

—  Santé  QSl  un  terme  absolu  qui  ne  soullVe  aucune  épitliète. 
Ainsi,  lorsqu'on  dit:  jouir  d'une  bonne  santé,  on  fait  une  sorte  de 

pléonasme:  mais  lorsqu'on  dit:  avoir  une  mauvaise  santé,  on  dit 
une  absurdité.  C'est  aussi  absurde  que  de  dire  :  une  bonne  maladie. 
Il  s'ensuit  qu'on  doit  dire  contracter  et  non  gagner  une  maladie  : 
gagner  ne  pouvant  se  dire  que  des  clioses  avantageuses  et  profita- 
bles. Ce  serait  jouer  à  qui  perd  gagne. 

Il  en  est  de  même  des  locutions:  mauvaise  qualité,  mauvaise 
valeur,  en  parlant  de  valeurs  dépréciées,  comme  celles  de  la  rue 
Quincampoix.  L'idée  de  valeur  et  de  qualité  ne  saurait  s'appliquer 
à  une  chose  mauvaise.  (Etymologiquement,  ////«///e  signifie  non  pas 
qu'une  chose  est  bonne,  mais  qu'elle  est  de  telle  ou  telle  nature, 
bonne  ou  mauvaise.) 

—  Santé  de  fer:  excellente. 

—  A  votre  santé!  Souhait  que  l'on  échange  en  buvant.    (Voy. 

toast.) 

Le  vin  ne  tourne  à  ma  santr 
Qu'autant  que  je  le  bois  moi-même. 

(Pauny.) 

En  provençal,  ou  dit  :  A  la  santé  !  C'est  une  tradition  païenne, 
comme  si  l'on  faisait  une  invocation,  une  lil)ation  à  la  déesse  de  la 
Santé. 

Les  Romains  portaient  la  santé  d'une  personne  en  buvant  autant 
de  coupes  de  vin  qu'il  y  avait  de  lettres  dans  son  nom.  Ainsi,  l'on 
vidait  cinq  coupes  en  l'honneur  de  César,  et  dix  en  l'honneur  de 
Germanicus.  D'où  l'expression  :  BiJjere  nomen.  (Martial.) 

...Beuvons  une,  trois,  neuf  fois,  jusqu'à  quinze  fois  en  évitant  le 
nombre  pair,  suivant  le  conseil  de  Démocrite.  (Rabelais,  V.  7.) 

Ores,  amis,  qu'on  n'oul)lie 

De  l'amie 
Le  nom  qui  vos  cœurs  lia  : 
Qu'on  vuide  autant  cette  coupe, 

Chère  trouppe. 
Que  de  lettres  il  v  a. 


SAn  \  1 7 

XiMif  fuis  au  luiiu  (le  ('.assandro. 

Je  vay  iirciidrc 
Neuf  fois  (lu  vin  du  fiai'oii. 
Afin  de  neuf  (ois  le  lioirc 

Vm  iiK'Uioiiv 
jii's  iinif  li'lln.'s  de  son  nom. 

(Ro>-:,\RD,   Le    Voyarjc  r/'/fi'i'riifil.) 

\<i'cia  sr.r  cnldUd'i,  xeiitcm  .litsiiiia  bilxilnr, 
Qnintjur  Lijcds,  Ljjdr  iinnllnur,  hla  tribus. 

(FIoRAcK,  Odex.  III,  19.) 

l'ii  in'ovtM'lM'  l;itiii  disait:  Aiil  1er  hibendinn.  aiU  fiocies. 
Ce  (iirAusoiie  ;i  tradiiil  iiinsi  : 

Ter  bibc,  tel  loties  ternum,  xic   mi/slica  lex  est, 
Yel  tria  potanli,  tel  ter  tria  muUiplicanti. 

—  Il  n'est  l'irliossc  que  de  scieiue  et  de  santé. 

Xon  est  cicere,  sed  valere  cita. 

(Martiai.  VII,  G.) 

Orandiim  est  ni  sil  mens  sana  in  corpore  sano. 

(.Ii;vK>-Ai.,  Satire  X,  UoG.) 

On  attribué  ce  mot  à  Thaïes  de  Milet. 

—  Louis  XI  voulait  que,  dans  les  prières  qu'on  adressait  à  Dieu 
pour  lui,  on  ne  demandât  que  la  santé  du  corps,  atin  de  ne  pas 
demander  trop  à  la  fois. 

Sarabande,  de  la  comédienne  espagnole  Zarabanda,  qui,  la 
première,  exécuta  en  France  cette  danse  d'un  caractère  grave, 
accompagnée  de  castagnettes,  et  qui  avait  une  grande  analogie 
avec  le  menuet. 

Sarcophage,  du  grec  xarx,  chair,  pharjô,  manger. 

Nom  donné  dans  l'antiquité  à  des  tombes  faites  d'une  pierre 
douée  de  la  propriété  de  cousiimer  les  cadavres  en  très  peu  de 
temps. 

—  Autrefois  sarcou  et  surqiieii,  devenu  cercueil. 

Kn  un  riclio  sarquou  font  mise, 
Par  dessus  une  i)ierre  bise, 
Et  sor  lui  des  (loretes  niistrenl 
Et  ces  dois  vers  sor  lui  escriprent  : 
Ici  Florence  est  enfoïo. 
Qui  au  chevalier  fut  amie. 

(l-'able  de  Florence  et  Blanrhefleiir.) 

Sardanapafe.  Origine  bistorique. 

Nom  du  dernier  roi  de  Ninive,  qui  vécut  dans  la  mollesse  et  la 


4l8  SAÎ 

voliipU'.  Il  iviiiiji  viiitil  ;iiis.  Il  passait  son  Uîiiips  avec  ses  eiiiiiiqnes 
et  ses  concuhiiios,  vétii  lui-même  en  Icmmc. 

lîcliis  et  Arsace  conspirèrcnl  contre  lui  et  assiéfièrent  Ninive. 
Sardaiiapale,  désespérant  de  son  salut,  mit  le  feu  à  son  palais,  et 
s'y  brfda  avec  ses  feinnies  et  ses  trésors  (vers  820  ;ivant  Jésus- 
Christ). 

Strabon  rapporte  rpio  son  épitaplie  était  :  «  Passant,  bois,  mange, 
divertis-toi  :  tout  le  reste  ne  vaut  pas  une  chiquenaude.  « 

—  C'est  un  Sardanapale  :  un  homme  adonné  à  la  débauche. 

Voulez-vous  bien  passer  vos  jours 
A  faire  le  Sardanapale? 

(ScAnitoN,    Vlrijile  travesti.) 

Sardonique  (rire). 

—  Une  terrible  piaule,  originaire  de  Sardaigne,  la  Sai'donie, 
lUmuncuIus  sce/era/us,  dont  les  feuilles  ressemblent  à  celles  du 
persil  sauvage,  et  contiennent  un  poison  dont  l'absorption  provoque 
de  violents  éclats  d'un  rire  convulsif,  au  milieu  desquels  on  meurt, 
a  donné  son  nom  à  une  sorte  de  rire  amer  et  méchant. 

Sarment,  du  latin  sarmenfum,  pour  sarpmentiun,  desaî^pere, 
tailler  la  vigne.  (PlutiH  que  du  verl)e  sera,  .satum,  semer,  qui  n'ex- 
plique pas  l'r.) 

Le  bois  que  donne  un  cep  de  vigne. 

On  en  fait  en  Provence  de  petits  fagots  qu'on  appelle  gavcou. 

—  On  a  équivoque  sur  sarment  f^i  serment,  et  Ral)elais  fait  dire 
à  Panurge  (Y,  28):  «  Par  le  serment  de  Itois  qu'avez  faict.  » 

Sarrasin,  nom  qu'on  donnait  autrefois  aux  musulmans:  de 
l'arabe  scharhiin,  peuple  de  l'Orient. 

—  C'est  aussi  le  nom  du  blé  noir. 

Sasser,  du  vieux  français  séas,  devenu  .sr/,ç,  dérivé  du  bas-latin 
sitaciuni  pour  sœtnceum,  de  soie. 
Passer  au  sas,  au  crible,  au  tamis. 
De  là  le  verbe  ressasser  :  répéter  souvent. 

Satire,  du  latin  sa  tira. 

Dans  l'origine,  à  Rome,  sorte  de  pièce  dramatique  où  il  y  avait 
un  mélange  de  uiusique,  de  paroles  et  de  danse.  D'où  satira,  pour 
satura,  farcissure,  mélange.  Le  nom  est  resté  au  genre  qui  a  pour 
but  la  censure,  la  critique  des  vices  et  de  la  sottise  humaine.  Telles 
sont  les  satires  de  Juvénal,  d'Horace,  de  Boileau. 

La  satire,  vieille  comme  le  monde,  durera  autant  que  lui. 


î^AU  419 

Klle  est  l'aiilillh'st'  cl  le  coiTci-til'  nécessaire  de  roiiliiiiisme 
aveugle  et  crédule. 

—  Le  hàloii  est  la  palme  de  la  satire.  (Céruti.) 

Un  écrit  satirique  est  une  letti'e  de  change  de  coups  de  liàton 
payable  à  vue.  (lîodin.) 

Le  poète  Koy  é[trouva  souvent  la  vérité  de  cette  maxime.  Tu  de 
ses  amis  ne  voidiit  pas  sortir  a\ec  lui  à  minuit,  parce  cjue,  disait-il, 
«  c'était  l'heure  des  coups  de  hàton  ». 

Roy  dit  un  jour  à  (pieUpfun  qu'il  travaillait  à  nn  ballet.  «  Un 
balai  !  .Monsieur,  prenez  i^arde  au  manche!  »  (Voy.  vo's  iambique.) 

Saturnales,  du  latin  Sa/urnalia,  l'êtes  de  Saturne;  dérivé  de 
Satiu^ne,  du  latin  saturarit.  Il  se  rassasia  en  dévorant  ses  enfants. 
Il  donna  là  un  lùen  mauvais  exemple  à  Ugolin  ! 

Sa  femme  lui  donna  à  dévorer  une  pierre  emmaillotée,  pour 
soustraire  à  sa  voracité  son  tils  Jupiter. 

—  Les  Saturnales  se  céléljraient,  chez  les  Romains,  les  IG,  17  et 
18  décembre.  Pendant  ces  l'êtes,  en  souvenir  de  l'Age  d'or,  où 
l'égalité  régnait  sur  la  terre,  les  rangs  étaient  confondus  et  les 
esclaves  étaient  servis  par  leurs  maîtres. 

—  Ce  sont  des  Saturnales  :  des  fêtes  bruyantes  et  licencieuses. 
JVon  semper  erunf  Salurnalia  (Sénèque)  :  Ce  n'est  pas  tous  les 

jours  fête. 

Satyre,  du  latin  Satijnts  ;  origine  mythologique. 

—  L'homme  des  bois,  appelé  satyre,  par  sa  conformation  semble 
moins  dilïérer  de  l'homme  que  du  singe.  (Buffon.) 

—  Les  Satyres,  demi-dieux,  selon  la  Fable,  habitaient  les  bois  et 
avaient  des  pieds  de  bouc. 

Saint  Jérôme  dit  que  saint  Antoine  vit  un  Satyre,  et  Plutarque 
conte  qu'on  en  présenta  un  à  Sylla,  et  qu'on  ne  put  rien  compren- 
dre à  son  langage.  Il  est  probable  que  ces  prétendus  Satyres  étaient 
des  singes  de  grande  taille. 

—  Les  Satyres,  comme  les  singes,  étaient  très  lascifs,  et  ce  nom 
désigne  un  homme  luxurieux. 

—  Le  Salyriasls  est  l'hystérie  des  hommes. 

Sauce,  du  latin  saha,  salée,  assaisonnée. 

—  Gàte-sauce  :  apprenti  cuisinier. 

Après  la  signature  de  la  paix  (mars  18o6),  M.  Thiers  dit  de 
Napoléon  III  et  de  ses  actes  politiques  :  «  J'aime  mieux  la   cuisine 


420  SAV 

(|ii('  le  ciiisiiiit'i'.  »   N;i|i(il(''(>ii  iiiirail  réi)()ndii  :    "  Si  iii;i  ciiisiiie  est 
lion  ne.  (•■('Si  ([[{('  je  ir;ii  pas  pris  ce  gûte-saiice.  » 

—  La  sauce  vaiil  mieux  (pic  le  poisson  :  l'accessoire  vaut  inieiix 
que  le  principal. 

Ce  proverbe  gaslrononiique  est  très  vrai,  car  un  liaiiile  cuisinier 
ajoute  beaucoup  de  valeur  aux  mets  qu'il  apprête. 

Au  figuré,  il  signifie  que,  par  certaines  formules  adroites  de 
flatterie,  on  peut  dire  aux  liommes  des  clioscs  qui,  sous  une  autre 
forme,  leur  sembleraient  très  désagréables. 

—  On  dit  aussi  :  On  ne  sait  à  quelle  sauce  le  manger,  de  quelque 
chose  qui  n'est  l)on  à  rien. 

C'est  une  allusion  à  nue  anecdote  de  la  vie  de  Domitien,  qui, 
un  jour,  convoqua  le  Sénat  pour  le  consulter  sur  la  sauce  à  laquelle 
il  fallait  accommoder  un  turbot  d'une  grosseur  prodigieuse,  dont 
on  lui  avait  fait  présent. 

Sauge,  du  latin  sahna,  de  sairns,  sain,  à  cause  des  vertus 
attribuées  à  cette  plante. 

Saugrenu,  do  sel  et  grenu  :  sel  en  grains. 
S'est  dit  familièrement  pour  salé,  piquant  ;  et  plus  tard  a  signifié 
le  contraire,  alisurde  (comme  gros  sel). 

Saule  pleureur. 

Mes  cliers  amis,  quand  je  mourrai, 

I^iantez  un  saule  au  cimetière  : 

J'aime  son  feuillage  (^'ploré, 

La  pâleur  m'en  est  douce  et  chère. 

Et  son  ombre  sera  légère 

A  la  terre  où  je  dormirai. 

(A.  DK  AfussET,   Lucie,  Élégie,  i83.ï.) 

Saut-de-loup.  Fossé  qu'on  pratique  au  bout  d'une  allée,  à 
l'extrémité  d'un  parc,  pour  en  défendre  l'entrée  sans  masquer  la 
vue. 

Sauter,  du  latin  saltare  ;  fréq.  de  salive,  saillir. 

Allons,  saule,  Manjuis. 

{Reg.n\i!D,  Joueur.  IV,  10.) 

Saute,  crapaud,  nous  aurons  de  l'eau. 

Savant,  du  verbe  saroi)\  latin  sapere. 
Synonymes:  dictionnaire  vivant;  puits  de  science. 


SAV  421 

—  S;i\;iiit  en  ns.  ?;iv;iiiI  jnsqu'iiiiN.  dciils.  s;iv;in(;isse  :  pédant. 

Grands  savaiilas,  iiatidii  iiicivik', 
Dont  cali'iiiii  est  k-    seul   iisleiisik\ 

(.M'i'c  Dtsiioui.iiaiKS.) 

De  linis  ees  sa\;int;is  i|ni  ne  sont  bons  àvkni. 

(Mui.ih.ui:,  Fâcheux.) 

Savoie  (lîisciiit  de). 

(If  L;;ile;iii.  [)liis  csliiné  des  uoiiniK^ls  que  des  architerles,  a  été 
iii\(Mit(''  |t;ir  Jean  de  Uellr\il!e,  euisinier  d'Aniédée  VI,  comte  de 
Savoie  en   VX'A). 

Savoir,  du  latin  .sajicre,  avoir  dn  uont. 

—  l'ouf  passer  de  la  sensation  piiysi(iue  au  sens  moral  qu(^  nous 
donnons  au  mot  .^v/rry//'.  nous  n'avons  qu'à  prendre;  l'elTet  pour  la 
eause. 

(tn  trouve  déjà  dans  IMante  : 

lU'clc  t'iji)  rem  inaon  ■■<apio. 

[Pr.cudolus,  I,  ,'j  ) 

—  Le  mot  saculr  a  cela  de  particulier  qu'il  renferme  en  lui  tout 
ce  qui  peut  tenter  riiomnie  le  plus  ambitieux.  En  en  retranchant 
successivement  une  lettre,  on  obtient:  savoir,  aiwir,  voir. 

—  Je  ne  sais  pas,  présente  la  variante  je  ne  sache  pas. 

On  l'a  souvent  employée  au  siècle  dernier,  sans  avoir  essayé  de 
la  justilier,  que  je  sache. 

—  Ne  savoir  ni  a  ni  ù.  Les  Latins  disaient  :  Ne  savoir  ni  lire  ni 
nager,  indiquant  pai'  là  que  l'homme  doit  exercer  à  la  fois  les 
qualités  de  son  corps  et  celles  de  son  esprit. 

D'un  i.unorant  on  dit  :  «  On  ferait  un  beau  livre  de  ce  qu'il  ne 
sait  pas.  » 

Lisfranc  disait  :  «  Je  chan.uerais  bien  tout  ce  que  je  sais  pour  ce 
que  je  ne  sais  pas.  » 

—  Savoir  par  cœur  (voy.),  ...sur  le  bout  du  doigt  (voy.). 
Savoir  une  chose  comme  son  paler  :  la  savoir  très  bien. 

Laissez  dire  les  sots,  le  savoir  a  son  priv. 

(La  Fu.m-ai.m:,  FaO/es  VUI,  19.) 

Je  ne  sais  bien  (pi'une  chose,  c'est  que  je  ne  sais  rien. 

IJoc  utiuni  sclo,  qnod  nil  scia.  (Pline,  Histoire  naturelle,  II,  J7.) 

Savon,  du  latin  saponcin,  d'où  saponaire. 
Ce  mot  est  d'origine  gauloise,  et  Pline  attribue  l'invention  du 
savon  aux  Gaulois, 


422  SCI-: 

—  S.ivonnctlo  ;"i  vihiin  :  chnrtrc  fiuDii  nclictiiit  pour  s'iiiioblir. 
Mfiri.'iuc  (l'im  roturier  nvoc  iino  lille  nolile. 

A\;iiil  J7S0,  los  rliaracs  do  sccrékiiro  du  roi,  et  .'iiilrcs,  s"aclie- 
liiicnt  cl  coiiféi'iiiiMil  l;i  noltlcssc 

Savoyard,  de  Savoie. 

Nom  pou  li.ii'iiionieux,  qui  est  presque  devenu  ?;itiri(|ue.  rouinie 
un  grand  noinl)ro  de  mots  terminés  en  ard.  On  l'a  remplacé  par 
Savoisien.  M.  de  Saint-Genis,  dans  son  Histoire  de  la  Saroie 
(18G0),  a  propose  Savoyen,  plus  conforme  à  l'étymologie,  mais 
moins  eupl ionique  que  Savoisien. 

—  Synonymes  :  ramoneur,  Jean  de  la  Suie. 

—  C'est  un  Savoyard,  cpitliétc  ironique  donnée  à  celui  qui 
manque  trop  de  distinction  dans  les  manières. 

Les  Romains  disaient  :  C'est  un  Allobroge  ;  on  sait  que  les 
Allohroges  étaient  les  habitants  de  la  Savoie  et  du  Dauphiné. 

Rufus,  qui  loties  Ciceroncm  Allobroga  dixit. 

(Ji;vi:n.u,.  Satire  VU,  214.) 

Scandale,  du  grec  skandalon,  par  le  latin  seandaltnn,  piège, 
pierre  d'acboppement. 
Forme  populaire  :  esclandre. 

—  C'est  la  pierre  de  scandale,  c'est-à-dire  la  cause  du  scandale, 
la  pierre  oîi  l'on  se  heurte,  où  l'on  se  choque.  C'est  donc  ce  qui 
heurte,  choque,  otïense  la  morale. 

Lorsque  Jules  César  al)rogea  la  loi  des  Douze  tal)les,  qui  permet- 
tait au  créancier  de  couper  un  morceau  du  débiteur  insolvable, 
il  y  suhstitua  une  autre  loi,  en  vertu  de  laquelle  le  déhiteur  faisait 
cession  de  tous  ses  biens  en  frappant  trois  fois  à  cul  sur  une  pierre 
placée  devant  le  Capitole,  et  en  prononçant  les  mots  :  Cedo  bonis. 
Cette  pierre  était  appelée  «  la  pierre  du  scandale  ».  (Voy.  cul  et 
2)ayer.) 

—  L'enlèvement  est  le  plus  poétique  des  scandales. 

Scaramouche,  origine  httéraire. 

Personnage  boulfon  de  l'ancienne  comédie  itahenne.  Il  est  habillé 
de  noir  des  pieds  à  la  tète.  Son  rôle  est  celui  d'un  poUron  fanfaron. 

Sceau,  anciennement  séel,  du  latin  sigiUuni,  diminutif  de 
signa  m. 

Grand  cachet,  où  sont  gravées  en  creux  les  armoiries  d'un  État, 
d'un  prince,  d'une  communauté. 


SCI  423 

Le  ^.  (jui  II';)  ricii  (l'rlynmlopitiiic.  srrl  ;'i  disliiiuiier  saV/c?"  do 
son  lioilioplioiic  seller. 

Schail,  mol  |)ei's;iii. 

—  Les  ambassadeurs  dr  Ti|i|)o-S;rili  ;i|i[i(ir!riTiii  en  France  les 
premiers  sctialls  de  Cachemire,  qui  furent  accueillis  comme  la 
partie  la  pltis  |irt'cieuse  des  présents  de  ce  prince. 

Scie,  Ncrlial  de  scier,  latin  soraro,  couper. 

Le  pi'oNciical  scrirr  sJLiiiilic  à  la  t'ois  scier  cl  enunyï^'. 

—  (Ml  ap[)elle  scie  une  chose  ennuyeuse  répelée  à  satiété,  une 
mystification  (pii  recommence  avec  une  [)ériodicitc  agaçanle.  D'où  : 
scici"  le  dos. 

On  dit  dans  le  même  sens  hiiincr.  pour  ennuyer,  du  bourdonne- 
ineiil  insu[)[)orlal)le  du  laou. 

Scie,  dans  le  langage  familier,  est  donc  synonyme  de  rabâchage, 
ritournelle,  l'eugaine.  (Voy.) 

Science,  du  latin  scieniia.  de  scire,  savoir. 

—  La  science  enorgneiUit  :  Scientia  inflat.  (Saint  Paul,  I'''  aux 
Corinihiens,  8.) 

—  Avec  les  lettres  et  les  arts,  les  sciences  composent  tout  le 
domaine  de  l'esprit  hnmain. 

Dans  l'antiquité,  la  science,  scientia,  sophia,  se  confondait  avec 
la  sagesse,  sapienfia,  parce  qne  la  seconde  vient  de  la  première. 

Il  n'y  a  dans  l'arbre  de  la  science  que  deux  branclies-mères, 
correspondant  aux  deux  modes  fondamentaux  de  l'esprit  liumain. 
Il  n'y  a  que  la  physique,  qui  constate  les  faits,  et  la  métaphysique, 
qui  les  analyse  et  en  recherche  les  rapports  :  c'est  là  toute  la 
philosophie. 

—  La  science,  c'est  le  pouvoir.  (Bacon.) 

La  science  est  une  souveraineté  dont  l'empire  n'a  pas  de  bornes. 

Ut  rosa  dut  flores,  flos  fructus,  frnctns  adores; 
Sic  schola  dut  mores,  mos  ccn.ius,  census  honores. 

(E|iigrnniiiie  du  Livre  des  l'roverhex  de  A.  Wai.trr.  Ifil.iO.) 

Un  fait  nouveau  acquis  à  la  science,  une  découverte  utile  à 
riiumanité.  donne  à  l'auteur,  dans  le  sénat  universel  des  intelli- 
gences, un  rang  méiité,  dont  ni  l'intluence  d'un  ministre,  ni  le 
caprice  populaire  ne  i)euveul  le  faire  descendre,  comme  ils  ne 
pourraient  l'y  élever.  (Gui/.ot.) 

Les  racines  de  la  science  sont  amères.'mais  les  fruits  en  sont 
doux.  (Aristote.) 


424  si;(: 

—  H  (l'oil  avoir  la  science  iiiliise  :  loiil  savoir. 

(In  (lil  qu'Adam  et  Salonioii  avaient  toutes  les  sciences  infuses, 
par  un  privilège  sp«''cial  de  Dieu. 

—  La  science  s'acquiert  par  la  patience. 

La  science  est  une  serrure  dont  l'étude  est  la  ciel. 

La  science  et  le  talent  sont  la  noblesse  des  [)anvres.  (L.  l'ibacii. j 

Scot  (Jean),  cordelier  écossais. 

—  Ualielais  (11,  7)  dit  :  JUirhouUlaiiit'uiti  Scoli,  titre  inia.L^naire 
d'un  ouvrage  de  cet  auteur,  surnommé  le  Docteur  subtil,  à  cause 
de  robsciirité  de  ses  ouvrages, qui  foi'mentdix-se[tt  volumes  in-folio, 
et  semltleul  n'être  qu'un  barbouillage  de  papier. 

Scrupule,  du  latin  scrupulus,  petite  pierre. 
Doute,  délicatesse  de  conscience. 

—  Les  scrupules  sont  les  gants  de  la  conscience. 

—  On  appelait  anciennement  scrupule  un  poids  valant  vingt- 
quatre  grains. 

Se,  particule  marquant  séparation  :  séduire,  sevrer. 

Seau,  ancien  séel,  du  latin  sitellus,  urne  (de  scrutin). 
11  a  donné  aussi  la  forme  scilfe  (baquet),  dans  Rabelais. 

Sec,  du  latin  siccus. 

—  Être  à  sec  :  être  sans  argent. 

Un  dit  dans  le  même  sens  :  être  bas  percé,  être  à  la  côte. 
On  dit,  dans  l'acception  contraire  :  être  à  flot. 

Secret,  du  latin  secretum,  de  secevno,  mettre  à  l'écart.  De  là 
aussi  sécrétion. 
Le  contraire  de  arjréfjor. 

—  La  loi  punit  la  révélation  du  secret  professionnel,  d'un  empri- 
sonnement de  un  à  six  mois.  {Code  pénal,  art.  378.) 

Cette  loi  impose  le  secret  aux  médecins,  pliarmaciens  et  à  toute 
autre  personne  dépositaire,  par  état  ou  profession,  des  secrets 
qu'on  lui  confie.  La  jurisprudence  a  étendu  l'obligation  de  la  discré- 
tion au  confesseur,  à  l'avocat,  à  l'avoué,  au  notaire. 

—  Notre  secret  est  un  esclave,  qui  devient  notre  maître  en  nous 
écbappant.  (Louis  XL) 

—  Secret  de  deux,  secret  de  Dieu;  secret  de  trois,  secret  de 
tous. 

Ce  que  trois  savent,  tous  le  savent. 


SEL  l2o 

C'est  le  secrcl  il('  l;i  comédie,  ...le  secret  de  Policliincllf  :  cesl 
chose  connue  df  lonl  le  inonde. 

...ni  in  coniiriliis, 
(hiiniit  Dinnrs  ithi  rciriscunt. 

^T^;ltK^CK,   Hi'fjrf.    V,  2.) 

Coninie  dans  les  comédies,  où  lonl  le  monde  est  dans  le  secret. 

Uieii  m-  |)(''si'  t;ml  (nriin  scci'cl. 
Le  iKirtiT  liiiii  es!  diflicilc  aux  daint's, 

l-;i  ji'  sais  iiKMiU'  sur  ce  lail 
liuii  iioiultri,'  (l'IiuiniiiL'S  qui  suiU  [rniun'S. 

(La  Fo^iTAiME,  Fablcx.) 

—  Xole  secrcle.  Socrclhsimo,  (ibi  sali. 

Seigneur,  du  latin  seniorem:  le  nominatif  senior  a  donné  .s7/'e. 
De  là  :  sienr,  monsieur,  messire. 

Ce  mot  rappelle  riiomma.ue  que,  dans  les  temps  anciens,  on 
rendait  à  la  vieillesse,  et  témoigne  de  la  moralité  de  nos  ancêtres. 

—  A  lont  seigneur,  tout  honneur  :  il  faut  rendre  à  chacun  les 
honneurs  qui  lui  sont  dus. 

—  Droit  du  seigneur.  Coutume  bizai're  et  honteuse,  qui  accordait 
au  seigneur  d'un  pays  la  première  nuit  des  nouvelles  mariées. 
Prif'lifjfido.  Dejlorntio  rirgini/alis. 

On  prétend  que  ce  droit  fut  établi  par  Éven.  roi  d'Ecosse;  aholi 
par  Malcom  III  et  converti  en  une  taxe,  que  les  seigneurs  préle- 
vaient sur  leurs  vassaux,  à  l'occasion  du  mariage.  On  l'appelait 
«  droit  de  marquette  ».  C'était  un  demi-marc  d'argent  que  les 
femmes  payaient  pour  se  racheter.  (Voy.  la  Mésangcre,  p.  228.) 

Il  n'existe,  en  réalité,  aucune  preuve  certaine  que  le  droit  du 
seigneur  ait  eu  le  caractère  de  brutalité  sensuelle  qu'on  lui  a 
attribué.  Si,  à  l'époque  féodale,  où  régnait  la  force,  il  y  a  eu  des 
exemples  d'aijus  odieux,  ils  ne  constituèrent  jamais  un  droit. 

Sein,  du  latin  sinus. 

L'entre-deux  des  mamelles;  le  pli  du  giron, où  l'enfant  se  repose; 
et,  par  extension,  mamelle. 

—  Synonymes  :  les  coussinets  d'amour  (Dictionnaire  des  /Pré- 
cieuses); appas;  avant-scènes  (allusion  à  la  saillie  des  loges  d'avant- 
scène)  ;  l)ossoirs  d'avant  (terme  de  marine)  ;  nénais  :  «  Petite 
maman  s'est  fait  faire  des  nénais  avec  du  coton.  »  (Gavarni,  les 
Enfants  terribles.) 

Sel,  du  latin  sal,  salis.  En  provençal  saù  (féminin). 

—  L'a  du  latin,  devenu  e  en  français,  reparaît  dans  un  grand 


426  SEL 

noiiibro  de  dérivés  :  sîilé.  siiliidc,  salière,  saline,  saiirp,  saumure, 
saunier,  sanpondi-er. 

—  Le  sel  marin  a  été  connu  de  toul  trm[is.  Les  Grecs  ima,Ln- 
nérent  les  pr(^miers  de  saler  les  viandes  et  le  poisson,  pour  hîs 
empêcher  de  se  corroniprc 

—  Le  sel  n'est  pas  un  .iliiiicnl.  m;iis  il  relève  le  ,uoiit  des  subs- 
tances alimenlaires.  Il  pi-éserve  les  corps  de  la  fermentalion,  et 
communique  une  éternelle  jeunesse  aux  eaux  de  la  mer  et  de 
certains  lacs,  qui,  sans  lui,  seraient  des  foyers  de  corruption. 

—  Jésus-Christ  dit  à  si^s  apôtres  qu'  «  ils  étaient  le  sel  de  la 
terre»,  voulant  dire  qu'ils  devaient  préserver  les  hommes  de  la 
corruption. 

—  Le  sel,  que  l'on  appelle  le  sucre  des  pauvres,  a  reçu  d'Homère 
l'épithéte  de  divin,  et  a  été  pris  pour  symbole  de  la  sagesse. 

—  Sel  attique  (voy.)  :  raillerie  tine  des  Athéniens,  atlicisme. 
D'où  :  Il  n'y  a  aucun  sel  dans  ce  qu'il  dit  ;  c'est  fade,  insipide. 
Salem  habere  (Térence)  :  avoir  de  l'esprit. 

ScdsHs  homo  (Gicérou)  :  homme  spirituel. 

Il  est  de  sel  allùiue  assaisonné  partout, 

Et  vous  le  trouverez,  je  crois,  d'assez  Lon  goût. 

(Molière.) 

—  Le  sel  de  .luvénal  est  très  piquant  :  celui  de  Plante,  grossier  ; 
celui  de  Térence,  très  lin. 

—  Il  faut  du  gros  sel  pour  saler  les  grosses  bétes  :  de  l'esprit 
grossier  pour  amuser  la  populace. 

—  Le  mot  sai/fjrenu,  signifie  aujourd'hui  absurde.  (Voy.) 

—  Cl.  de  Pixérécourt,  auteur  de  plusieurs  mélodrames  joués  au 
l)Oulevard  du  Temple,  disait  :  «  J'écris  pour  des  gens  qui  ne  savent 
pas  lire.  » 

—  Pour  se  dire  l'ami  de  quelqu'un,  il  faut  avoir  mangé  un  minot 
de  sel  avec  lui.  (^Gicéron,  De  r Amitié.) 

—  Amicitia,  pactum  salis.  L'Écriture  emploie  cette  expression 
pour  signiller  une  alliance  inaltérable. 

—  Les  Francs  admettaient  le  sel  dans  leurs  pactes,  et  l'on  croit 
que  le  nom  de  loi  salique  provient  de  cet  usage. 

—  Renverser  une  salière. 

...Si  je  renverse  une  sahère.  dit  un  rédacteur  de  \ Illustration, 
je  prends  sur  la  lame  de  mon  couteau  quelques  grains  du  sel 
répandu,  et  je  les  lance  par-dessus  l'épaule  gauche,  en  prononçant 
la  formule  romaine  sinistinun.  —  Pourquoi  ?  Je  n'eu  sais  trop  rien. 


si:r.  427 

(Jiioi  (in'il  fil  ?()il  (le  ci'lto  siiporstitioii.  It*  sel  ;i  IiMijoiirs  (-Ir  consi- 
dère coiiimo  une  ?ii])St.;inre  sacrée  et  a  toujours  joué  un  liraud  rôle 
dans  les  relations  humaines  depuis  l'origine  du  monde. 

—  On  voit  dans  la  Bihle  que  le  pain  et  le  sel  sont  les  symboles  de 
riiospilalilé.  (juaud  on  rasait  une  maison,  on  y  st;iuait  du  sel.  La 
l'cmme  de  I.olli  fut  changée  en  statue  de  sel.  Les  prêtres  païens 
uu'Itaient  du  sel  dans  l'eau  lustrale.  Dans  le  liapiciiie  chrétien,  ou 
met  une  pincée  de  sel  sur  la  langue  de  l'enfant.  Eulin  les  gardes- 
champétres  en  mettent  dans  leur  fusil  pour  remplacer  les  chevro- 
tines (?). 

Selle,  du  lalJM  sella,  siège,  qui  est  aussi  provençal. 

Ce  mot,  qui  sa[iplique  spécialement  à  une  pièce  du  harnais  du 
cheval,  a  eu  la  signification  générale  de  siège. 

Il  se  dit  aussi  d'un  siège  de  tout  autre  genre  que  la  selle  du 
cavalier.  Par  extension,  il  s'emploie,  en  médecine,  pour  les  déjec- 
tions alvines  :  du  latin  celare,  cacher  (?).  Quod  e.a  celantur  quœ 
rc'l/fiius  esse  occulta... 

Ce  mot  devrait,  par  conséquent,  s'écrire  par  un  c  au  lieu  d'un  .v, 
qui  a  prévalu;  il  se  trouve,  en  quelque  sorte,  placé  ainsi  entre  deux 
selles  (?). 

—  Synonymes  de  «  aller  à  la  selle  »  :  faire  ses  besoins;  faire 
ses  nécessités;  faire,  absolument,  parce  qu'il  se  dit  de  la  fonction 
la  plus  iuqiortante  du  corps  humain  ;  faire  le  gros  :  faire  caca,  du 
latin  cdcnre,  provençal  cacar  :  avoir  la  courante,  la  va-vite. 

Touser  (en  argot).  Au  commandement  des  argousins,  pendant 
le  voyage  de  la  chaîne,  tous  les  forçats  descendaient  pour  lonser, 
ou  faire  de  la  corde. 

Aller  où  le  roi  va  à  pied.  «  C'est,  à  mots  couverts,  le  lieu  on  l'on 
va  se  décharger  du  tro[)  plein  de  la  mangeaille.  »  (Scarron.) 

—  Raltelais  appelait  selle  percée,  ce  que  nous  a[)pelons  chaise 
percée  :  «  Le  fond  de  voz  chausses  feroit  office  de  bassin  fécal  et  de 
selle  percée.  » 

—  Etre  entre  deux  selles  le  cul  par  terre.  (Rabelais,  liv.  I,  2.) 
Avoir  deux  projets  et  n'en  réussir  aucun.  Se  dit  des  personnes 

qui,  voulant  occuper  plusieurs  positions  à  la  fois,  finissent  par  n'en 

pouvoir  conserver  aucune. 
Entre  deux  selles  chet  dos  à  terre.  (Proverbe  ancien.) 
...La  Bourse  a  baissé  aujourd'hui  :  on  redoute   l'irritation  de 

la  Chambre  et  l'inditierence  du  Sénat.  Le  maréchal  est  entre  deux 

selles.  (Débats.) 


428  si«:m 

—  Le  liilioiirot,  sirnc  sans  l)ras  ni  dossier,  «''tait  accordé,  au 
Louvre,  aux  pi-incesses  et  aux  duchesses  seulement,  et  leur  donnait 
le  droit  de  s'asseoir  au  cercle  de  la  reine. 

Scarroii  dit  à  ce  sujet  : 

Votre  ciil,  (|iii  (Idil  cliv  lin  (les  l)i';iii\  ciils  (If  Kraiii-r, 

lloiiiiiic  un  ciil  (l'iiiipiii'hinci', 
A  reçu,  cIil'Z  la  n'ino,  enfin  le  lahunrrl. 

...La  pauvre  comtesse  du  Plessis  est  fort  lâchée  que  son  mari  ne 
lait  pas  laissée  duchesse.  II  est  bien  dur  pour  elle  de  voir  sa  belle- 
m(''r(^  et  sa  lielle-lille  avoir  un  tabouret,  et  demeurer  ainsi  ce  (ju'on 
appelle  entre  deux  selles  le  cul  à  terre.  (Hussy,  Leflres.) 

Selon,  sorte  de  fusion  du  latin  seci/ii(/unt  et  de  loïKjiun. 

—  Évangile  selon  saint  .lean.  Agir  selon  son  inspiration,  c'est-à- 
dire  en  suivant  son  inspiration  :  scfundiim  vient  de  sequi. 

Semaine,  du  latin  sepfi/nana,  provençal  setmana. 

Espace  de  sept  jours.  Les  quatre  quartiers  de  la  lune,  qui  sont 
d'environ  sept  jours  chacun,  ont  sans  doute  donné  lieu  à  ce  mode 
de  partage  du  temps. 

—  Les  Assyriens,  les  Egyptiens  et  presque  tous  les  peuples  de 
l'Orient,  ont  connu  la  semaine.  Dieu  avait  lui-même,  en  souvenir 
de  la  création,  ordonné  aux  Juifs  de  travailler  six  jours,  et  de  se 
reposer  le  septième. 

Les  Romains  ni  les  Grecs  ne  connaissaient  la  semaine. 

Semer,  du  latin  sefuinarc,  provençal  scinenar  :  d'où  aussi 
séminaire. 

—  Semer  la  zizanie  :  la  discorde. 

Semez  de  la  graine  de  niais,  il  poussera  des  actionnaires.  {Les 
1 01  Robert-Maca  ire.) 
Semez  des  Gascons,  ça  pousse  partout.  (Henri  lY.) 

—  Il  ne  faut  pas  laisser  de  semer  par  crainte  des  pigeons  :  dans 
les  affaires,  il  ne  faut  pas  se  laisser  rebuter  par  les  difiicultés. 

—  Quand  vous  n'avez  rien  à  faire,  plantez  un  arbre;  il  poussera 
pendant  que  vous  dormirez. 

Qui  sème  bon  grain,  recueille  bon  pain. 

Qui  sème  la  vertu,  récoltera  l'honneur. 

Qui  sème  le  vent,  récolte  la  tempête. 

Qui  sème  l'injustice,  récoltera  la  haine  et  la  vengeance.  (Franklin.) 

Qui  sème  des  chardons,  recueille  des  épines, 


Sempiternel,  mol  |ioii  iisitr  :  du  l;itin  semjiilornua. 

—  Vicillt'  S(Mii|)iît'nit'll('.  l'A|ii-('ssioii  contciKiiit  iiiio  idée  comi(iiie. 
Il  est  siipcrllii  (le  (lire  (juc  ce  (jiii  csl  ('icrnc!  dure  toujours.  Mais 
lilio  vieille  n'esl  jias  pour  cel;!  iiiiMiie  (''lenielle. 

Sens,  du  Inliu  se>isi/s.  l'acuité  de  recevoir  l'iiiipi-ession  des 
olijets.  D'où  :  sensé,  insensé,  forcené,  etc. 

—  Les  cinq  sens. 

—  Le  bon  sens  :  raison.  Prendre  dans  le  bon  sens  :  du  bon  côté. 

—  Il  ne  faut  rien  accoider  aux  sens,  quand  on  veut  leur  refuser 
quelque  chose. 

—  De  tous  les  sens  donnés  à  riioniine,  le  plus  rare  est  le  sens 
commun.  (Calembour.) 

—  Sens  dessus  dessous  :  sens  devant  derrière.  Ces  expressions 
sont  pour  :  ce  dessus  dessous,  ce  devant  derrière,  qui  se  disaient 
autrefois.  On  a  dit  ensuite  :  c'en  dessus  dessous. 

Si  fut  l;i  chose  liislournée 
Et  all;i  Cl'  (Icvaiil  dorrière. 

Sensible,  dérivé  du  précédent. 

—  Sensible  comme  une  tourierelle,  ...comme  un  caillou. 

Il  y  a  des  gens  si  sensibles  qu'ils  vous  aflligent  de  vos  douleurs. 
(Voy.  fcnune  sensible.) 

Sensitive. 

La  sensitive  est  douée  d'une  grande  irritabilité,  qui  lui  a  fait 
donner  par  les  botanistes  le  seul  nom  gracieux  qu'ils  aient 
inventé  :  nii/nosa  pudica.  Cette  propriété,  qui  augmente  sous 
l'action  de  la  chaleur  et  de  la  lumière,  a  beaucoup  d'analogie  avec 
la  sensibilité  physique  des  animaux.  Un  dernier  trait  de  ressem- 
blance, c'est  qu'elle  est  paralysée  par  l'étber.  (.I.-.I.  Ampère.) 

Sensualisme,  doctrine  qui  prétend  que  toutes  nos  idées  vien- 
nent des  sens,  et  ([ui  se  résume  dans  la  maxime  :  Niliil  est  in 
intellectu,  quod  non  prius  fiierit  in  sensu.  11  n'y  a  rien  dans 
l'esprit  (pii  n'ait  été  d'abord  dans  les  sens. 

Sentiment,  dérivé  de  sentir,  latin  sent  ire. 

—  Il  est  plus  diflicile  de  dissimuler  les  sentiments  que  l'on  a,  que 
de  feindre  ceux  que  l'on  n'a  pas. 

Si  l'on  peut  se  tromper  dans  le  domaine  des  sensations,  que 
sera-ce  donc  dans  le  domaine  des  sentiments? 


430  SKQ 

Sépia,  nom  il.'ilicii  (t'I  hiliii)  de  l;i  selrhc. 

On  ;i|)|)('llt!  .'iiissi  I;i  sciclic  unevicr,  on  calciniir:  on  Jippohiit 
iinlicJ'ois  lin  encrier  (j(iliinar(  on  calaindr.  d(;  (([((nnarins.  tii'é 
(In  liilin  ra/a//ins,  roseau  à  écrire. 

—  Ce  poisson  a  reçu  le  nom  de  calernar,  parce  qu'il  épanche  à 
volonté  une  liqncnr  noinltrc,  avec  laquelle  il  Iroiihle  Tean.  ]ionr 
éclia[)per'  aux  i)oiirsni(cs  de  ses  ennemis. 

Les  Italiens  l'ont  sécher  celte  liqueur  hourheuse,  qu'ils  vendent 
pour  la  peinture  à  l'aquarelle,  sous  le  nom  de  sépia  dl  Jtoma. 

—  La  seiche,  qui  semhle  nager  dans  l'encre,  est  excellente 
accommodée  à  la  sauce  hlanche. 

Sept,  dn  latin  sepfe/u,  en  grec  hepta. 

Ce  nombre,  comme  le  nombre  trois,  a  toujours  été  vénéré. 

Les  anciens  comptaient  sept  ciels,  correspondant  aux  sept  planètes. 

Le  nombre  sept  était  consacré  chez  les  Juifs,  et  un  grand  nombre 
de  choses  étaient  chez  eux  ordonnées  par  sept  :  le  chandeher  à 
sept  branches  ;  les  sept  lampes  ;  le  sabbat  était  tîxé  au  septième  jour. 

Dans  la  religion  clirétienne,  on  a,  comme  chez  les  Juifs,  la 
semaine,  avec  le  repos  le  septième  jour. 

Jésus-Christ  a  dit  à  saint  Pierre  :  «  Tu  pardonneras  jusqu'à 
septante  fois  sept  fois.  » 

Le  juste  pèche  sept  fois  par  jour. 

Il  y  a  les  sept  vertus,  trois  théologales  et  quatre  cardinales. 

On  compte  sept  heures  canoniales. 

On  fête  les  sept  douleui's  de  Notre-Dame. 

Citons  en  outre  les  sept  sacrements,  les  sept  péchés  capitaux, 
les  sept  psaumes  de  la  pénitence,  les  sept  œuvres  de  la  miséricorde. 

L'antiquité  avait  les  sept  sages  de  la  Grèce,  les  sept  merveilles 
du  monde,  et  Rome  était  la  ville  aux  sept  colhnes. 

Dans  la  nature,  on  trouve  les  sept  couleurs  primitives,  les  sept 
tons  de  la  musique,  les  sept  planètes,  et,  d'après  Aristote,  les  sept 
métaux  ;  les  sept  étoiles  des  Pléiades.  (Voy.  ce  mot.) 

Enfin  le  nombre  sept  se  trouve  trois  cent  cpiarante-sept  fois  dans 
la  Bible. 

Sépulture,  du  latin  sepullura,  desepe/ii'e,  ensevehr. 
Le  verbe  provençal  espeli>\  naître,  éclore,  est  l'opposé  de  ense- 
velir {^). 

Séquelle,  du  latin  seqiiela,  suite. 
Se  prend  en  mauvaise  part. 


SEU  431 

Sérail,  du  persan  sera)',  palais,  par  l'italien. 
(l'est  If  palais  du  sultan  l'i  (lonslantinoiiic. 

—  On  confond  ce  mol   avec  luirciii.  lieu  où  sont  cnfcrniécs  les 
IVnunes,  et  dont  rai)[iroclie  est  interdite  à  tous  les  hommes. 

Kn  aral)e,  liaron  siiinilie  défendu,  sacré.  C'est  le  (jijnécée  des 
Grecs. 

Serf,  du  latin  servus,  esclave. 

Celui  ipii  a  été  sauvé,  conservé  à  la  .uuerre,  au  lieu  d'être  tué  (?). 

De  là  :  servile,  servage,  sergent,  servialde. 

Sergent,  tin  Liliii  serricns,  serrientem,  servant. 

Je  vous  (lomando  ca  (Icmandant, 
Coiniiie  le  roy  à  son  sergent. 

(HAnKi.Ais,  IV,  27.) 

—  Philippe-Auguste  chassa  de  France  tous  les  Juifs,  parce  (pi'ils 
avaient  des  sergents  et  des  chanihrières. 

On  appelle  encore  sercanfes,  les  domestiques  femmes. 

—  Le  sergent  militaii'o  es!  le  cc/tfuriœ  ins/rucior  des,  Latins; 
le  sergent  de  ville  ou  de  police.  \'aj)pari/or;  le  sergent  de  menui- 
serie, Iku'jxkjo  rirlorttts.  ipii  serre,  (pii  lie. 

Sérieux,  du  latin  scriosus,  dérivé  de  sérias. 

—  Le  sérieux  est  un  mystère  du  corps  et  de  la  parole,  inventé 
par  les  sots,  pour  cacher  leur  nullité  d'esprit. 

Vn  homme  sérieux  ne  saurait  plaire  aux  femmes,  parce  qu'il  n'a 
à  perdre  aucune  des  trois  choses  que  les  femmes  dissipent  d'ordi- 
naire :  l'argent,  la  parole  et  le  temps. 

Seringue,  du  latin  sijrinf/n.  dérivé  de  si/rinx,  roseau. 
Synonyme  :  escopette  d'Ilip[)Ocrate.  (Rahelais.) 

—  Chanter  comme  une  seringue  ;  parce  qu'en  grec  syrlnx 
signifie  flûte. 

Serment,  d'abord  sat/rcu/ie/it.  puis  sobrement  :  du  latin  snrra- 
mentutn,  qui  a  tait  aussi  sacremcnf. 

Sa  prononciation  s'est  confondue  [)arfois  avec  celle  de  sarment, 
ce  qui  a  donné  lieu  à  des  jeux  d(;  mots. 

—  Puisqu'ils  gaignent  tant  aux  grappes,  le  serment  leur  peut 
beaucoup  valoir.  (Uahelais,  V,  IG.) 

—  L'année  du  mariage  de  Charles  YIII,  avec  Anne  de  Bretagne, 
les  vins  furent  verts,  à  cause  des  grandes  pluies.  On  servit  de  ces 
vins  à  la  table  de  Marguerite  d'Autriche,  que  ce   prince  avait 


432  SKÏI 

|-('ii\()u';e,  iiniljiré  son  scriiiriil  de  r(''|ioii?f'i'.  I']lle  dil  aloi'S  que 
«  la  verdeur  de  ces  vins  inovciiail  de  ce  que  celle  année  les 
serments  n'avaient  rien  \alii  ». 

Depuis  lors,  heaucoup  de  gens  se  sont  fait  aussi  un  jeu  des 
serments. 

Serpent,  du  latin  sei-pcns,  de  serpere,  ramper. 

—  C'est  un  sei'pent  que  j'ai  récliaulTé  dans  mon  sein  :  un  ingrat. 
L'ingratitude  n'est  pas  le  seul  atlrihut  du  serpent  :  il  est  l'em- 

hlème  du  démon,  de  la  santé,  de  la  longévité,  de  la  prudence, 
comme  de  l'ingratitude. 

—  En  1870,  la  Répul)lique  proclamée  le  4  septembre,  eut  à  lutter 
contre  les  ennemis  du  deliors  et  ceux  du  dedans  :  les  démagogues 
et  les  Prussiens.  C'était  trop  de  serpents  dans  le  berceau  d'Hercule. 

Serrer,  du  has-latin  serra,  verrou,  d'où  serare,  fermer. 
De  là  aussi  :  serrure,  serre,  enserrer. 

—  Serrer  quelqu'un  de  près  :  le  poursuivre  vivement. 

S'il  vous  serrait  le  bras,  il  vous  ferait  sortir  du  sang  dos  ongles. 
(W.  Scott.) 

—  Serrés  comme  harengs  en  caque. 

Il  y  a  de  la  place  pour  deux,  en  se  serrant...  beaucoup. 

Servilité,  disposition  à  la  servitude. 

—  La  servitude  abaisse  les  hommes  jusqu'à  s'en  faire  aimer. 
(Vauvenargues.) 

Servir,  du  latin  servlre,  être  esclave. 

—  Nul  ne  peut  servir  deux  maîtres.  (Saint  Mathieu,  YI,  24.) 

—  Ne  servir  de  rien  :  n'être  utile,  l)on  à  rien. 

Ilien  ne  sert  de  courir,  il  l'aul  partit'  à  point. 

(La  Fontaine.) 

Ne  servir  à  rien,  se  dit  quand  un  objet  n'est  pas  employé  à  un 
moment  et  peut  servir  dans  un  autre  :  «  Ce  livre  ne  vous  sert  à 
rien,  prètez-le  moi.  » 

Seul,  du  latin  solus  :  provençal  sol. 

—  Seul  sous  sa  tente,  dans  le  grand  désert...  de  la  vie. 

Seul  comme  Robinson...  Robinson,  dans  son  ile,  par  les  ressources 
de  son  génie  inventif,  exécute  un  grand  solo  au  milieu  de  l'har- 
monie universelle. 

Vœ  snli!  fGenèse,  II,  8;  Ecclésiaste,  IV,  10.)  Il  n'est  pas  bon 
que  riiomme  soit  seul,  donnons-lui  une  compagne  à  son  image. 


Sm  433 

—  La  solitiido  donne  lonjoni's  de  pcrnirieux  conseils. 
SoliiH(h)  otiudd  innld  jicrsiiailct .  (Sénèqiie..  Lettre  25.) 
L'Iiouiine  solit;iire  est  un  dieu  on  une  hête.  (Aristote,  PolUiqno,  L) 
Il  est  [lins  siipitorliililt'  d'rire  toujours  seul,  qne  de  n'tMre  jamais 

seul.  i^.MontaiLiiie.') 

Sevrer,  du  latin  xopavnro.  d'où  aussi  xôparer. 
U  est  restreint  aujonrdlMii  à  l'action  de  séparer  l'enfant  du  sein, 
de  cesser  rallaiteincMl. 

Si,  conjonction  et  adverbe  :  du  latin  si  et  sic. 

—  La  vie  liuuiaine  est  une  phrase  remplie  de  si  et  de  mais. 
Si  le  ciel  lonihail,  il  v  aurait  bien  des  alouettes  prises. 

Si  ii'iHaii'ut  les  si  ot  los  mais. 
Serions  tous  ricties  à  jamais. 

Les  deux  conjonctions  si  et  mais,  si  fréquentes  dans  la  conver- 
sation, sont  comme  la  formule  générale  qui  contient  un  vœu  de 
l'homme  et  le  refirs  de  la  nature. 

—  Qui  m'ayme,  sy  me  suyve.  (Rabelais,  I,  33.) 

Si,  dans  cette  phrase,  ne  signifie  pas  il  ou  qiiil:  mais  ainsi, 
et  vient  du  latin  sic.  C'est  le  sens  qu'il  a  dans  l'ancien  axiome  du 
pouvoir  absolu,  qu'un  ministre  a  osé  invoquer  à  la  tribune,  sous  la 
Restauration  :  «  Si  veut  le  Roi,  si  veut  la  Loi  »  ;  tandis  que  la 
Charte  avait  consacré  le  principe  :  «  Si  veut  la  Loi,  si  veut  le  Roi.  » 

Sibylle,  du  grec  par  le  latin  Sibylla. 

Ce  nom  s'appliquait  à  des  femmes  auxquelles  les  anciens  attri- 
buaient le  don  de  prévoir  l'avenir. 

Les  principales  sibylles  étaient  celle  de  Delphes,  fille  de  Tirésias, 
et  celle  de  Cumes,  qui  présenta  à  Tarquin  les  livres  sibyllins.  On 
les  représente  sous  les  traits  de  vieilles  femmes. 

Dés  les  premiers  temps  du  christianisme,  et  jusqu'au  wi"  siècle, 
on  admettait  l'opinion  que  l'antiquité  païenne  avait  pressenti  et 
prédit  le  Rédempteur  du  monde.  De  là,  les  siitylles  citées  à  côté  des 
prophètes,  par  les  écrivains  ecclésiastiques. 

C'est  pour  cela  que  Michel-Ange  a  peint  alternativement  un 
prophète  et  une  sibylle  au  plafond  de  la  chapelle  Sixtine. 

—  La  îjro.^c  qui  se  chante  aux  messes  des  morts,  commence 
ainsi  : 

Dies  irœ,  (lies  illa 
Solcet  scf'clum  in  favilln. 
Teste  David  cum  Sibi/lla. 


434  SIË 

—  J.cs  livres  sibyllins  contenaient  les  prédictions  des  sibylles, 
et  les  Romains  n'enln^prcMiaient  rien  sans  les  consnlter.  On  prétend 
que  les  prédictions  des  sibylles  concernant  la  venue  du  Messie 
étaient  plus  claires  (jue  celles  des  propliètes. 

Sic,  mot  latin  sinnidant  ainsi. 

On  s'en  sert  en  tVancais,  entre  parenthèses,  pour  indiquer  qu'on 
cile  textuell(;meut,  sans  suppression,  ou  sans  correction. 

—  Sic  vos  non  cohis.  (Voy.  htinéfice.) 

Les  Chinois  dressent  pour  la  pêche  des  cormorans  à  qui  ils 
apprennent  le  sic  cos  non  robis,  en  leur  passant  au  cou  un  anneau 
qui  arrête  le  poisson,  et  permet  au  pécheur  de  s'en  emparer. 

—  Avec  les  ciels  d'un  palais,  l'architecte  en  remet  au  riche  tous 
les  agréments  et  toutes  les  jouissances,  sans  y  prendre  aucune 
part.  (Gœthe.) 

Siècle,  du  latin  secuhtni. 
Espace  de  cent  années. 

—  Le  siècle  actuel  a  commencé  le  h''  janvier  1801  et  finira  le 
31  décembre  1900. 

—  Les  quatre  grauds  siècles  (ou  époques),  sont  ceux  de  Périclès, 
d'Auguste,  de  Léon  X  et  de  Louis  XIV. 

Siège,  substantif  verbal  de  siéger,  qui  suppose  sediare,  dérivé 

de  sedere. 

l'rends  ua  siège,  Ciniia... 

(ConNEii.LE,  Cinna.  V,  1.) 

• —  Sièges  durs  :  rembourrés  de  noyaux  de  pêches. 
...Le  directeur  du  théâtre  de  la  Gaîté  a  vendu  les  vieilles  ban- 
quettes du  parterre  à  un  distillateur,  pour  faire  de  l'eau  de  noyaux. 

—  Mon  siège  est  fait.  Cette  locution  vient  de  la  réponse  de  l'abbé 
Yertot,  qui  venait  d'écrire  l'histoire  du  siège  de  Malte,  sans  se 
préoccuper  des  détails  historiques  qu"il  avait  fait  demander  au 
Grand-Maître  de  l'Ordre.  Les  tardifs  renseignements  arrivèrent 
enfin:  mais  il  ne  changea  rien  à  son  récit,  et  dit  :  «  J'en  suis  fâché, 
mon  siège  est  fait.  » 

Sieste,  du  latin  sexta  (la  sixième  heure  du  jour,  midi)  ;  plutôt 
que  du  latin  sisfere. 

Les  Arabes  expriment  la  même  chose  par  h-cf,  dont  sieste  n'est 

qu'un  faible  équi\  aient. 

C'est  là  que  le  prélat,  muni  d'iiii  déjeuner, 
Diirnianl  d'un  léger  somme,  attendait  le  dîner. 

(BoiLEALT,  Lutrin.) 


SIG  4âS 

Siffler,  provençal  siblar,  du  latin  sihilare. 

Dans  le  patois  liorrichon,  on  dit  suhiar,  (jui  est  l'ancienne  forme 
française  (^)  et  se  trouve  dans  Hahelais. 

Ce  l)iaii  marie  (pii  siihlail  si  tiiiciiiciil  liant.  (Cyrano  de  Bergerac, 
h'  Pédant  Joué.) 

—  Siffler  comnu'  un  merle. 

—  Se  faire  siffler  :  se  faire  moquer  de  soi.  Le  public  siffle  un 
mauvais  acteur,  pour  lui  témoigner  son  mécontentement. 

CCst  un  droit  quà  fa  porto  on  acliète  en  entrant. 

(Boir.KAij.) 

Ptijuilus  me  silnhit. 

(HoriACK.) 

(Le  peuple  me  siffle.) 

Sibilis  e  scemt  explodl  ((^.icéron)  :  être  chassé  de  la  scène  par 
les  sifflets. 

—  Dans  la  tragédie  de  CléoixUre,  de  Maruiontel,  l'aspic  dont  se 
sert  Cléopàtre  pour  se  donner  la  mort,  était  un  automate  de 
Vaucanson,  qui  faisait  entendre  un  sifflement.  La  pièce  n'eut  pas 
de  succès,  et  un  critique,  à  qui  l'on  demandait  ce  qu'il  en  pensait, 
répondit  :  «  Je  suis  de  l'avis  de  l'aspic.  » 

Sifflet,  dérivé  du  précédent. 

—  Couper  le  sifflet  à  quelqu'un  :  lui  couper  la  parole. 

Si  vous  voulez  que  je  dise  des  merveilles,  que  Monsieur  ne  vienne 
pas  me  couper  le  sifflet.  (Don  (Juichottc.J 

Sigle,  du  latin  sùjil/uin,  dérivé  de  sujnuni. 
Lettre  initiale,  exprimant  à  elle  seule  un  mot  très  usité  dans  les 
inscriptions  anciennes. 

Telles  sont  les  lettres  S.P.Q.R  :  Senatns  populus(iue  romanus. 

Signe,  du  latin  s/f/niun,  d'où  aussi  seing. 
D'oi'[  :  tocsin,  signer,  désigner... 

Signer,  du  latin  sùjnare,  marquer. 

—  Cicéron  appelle  auruni  sUjnatinn  la  monnaie  d'or. 

—  Aux  époques  d'ignorance,  ceux  qui  ne  savaient  pas  signer 
faisaient  une  croix,  ou  signe  de  la  croix,  au  bas  des  actes,  comme 
s'ils  avaient  juré  sur  la  croix  d'en  observer  le  contenu. 

Soliman  signa  d'une  croiv  la  capitulation  de  l'île  de  Rhodes. 

—  Signe  de  la  croix  se  dit  depuis  que  Constantin,  ayant  vu  dans 
le  ciel  une  croix  lumineuse  avec  la  légende  :  In  hoc  sif/no  vinces, 
fit  placer  une  croix  sur  les  étendards  des  légions. 


43G  S(f. 

Sailli  l'4)i[)liano  dit  qiio  lo  sif-nc  de  la  croix  rendait  les  cliarmes 
impuissants,  et  chassait  les  démons. 

Si!ence,  du  hilin  sili-nliinn  :  provençal  silcnri. 

—  Ilar[)ocrate,  dieu  du  silence,  est  représenté  sans  bouche,  on 
avec  un  doi.gt  sur  les  lèvres. 

Je  mis  un  doigt  sur  les  lèvres,  pour  lui  dire,  sans  parler,  de  se 
taire.  (Lamartine,  Fior  d'Alisa.) 

—  Silence  !  interjection,  pour  :  faites  silence,  eu  latin  fii/efe,  que 
Térence  exprime  par  si. 

—  Synonymes  :  chut!  uiotus  !  paix  ! 

—  Taisez-vous,  ou  dites  quelque  chose  qui  vaille  mieux  que  le 
silence.  (Pythagore.) 

—  Il  a  la  passion  du  silence. 
La  conspiration  du  silence. 

La  parole  est  d'argent,  et  le  silence  est  d'or. 

Oy,  voy  et  te  tay. 

Si  tu  veux  A  ivre  en  paix. 

(xmmc   SlfXLE.) 

Le  silence  est  l'esprit  des  sots. 

Un  sot  qui  ne  dit  rien   ne  se  distingue  pas 
D'un  savant  (jui  se  tait... 

(MouÈRE,  Dépit,  ik  7.) 

—  Un  Grec  a  ajouté  une  dixième  muse  aux  neuf  autres  ;  il  l'a 
appelée  la  Muse  muette.  «  J'aime  cette  muse  muette,  disait  Balzac, 
je  la  trouve  plus  sage  que  les  autres.  » 

—  La  règle  de  certains  ordres  religieux,  Chartreux,  Trappistes, 
prescrit  le  silence. 

Les  disciples  de  Pythagore  observaient  aussi  le  silence  pendant 
cinq  ans. 

—  D'un  endroit  silencieux,  on  dit  qu'on  y  entendrait  voler  une 
mouche.  Gham  dit:  marcher  un  fromage. 

Silhouette,  étymologie  historique. 

Dessin  représentant  le  profd  d'un  visage  ou  d'un  objet. 

C'est  la  reproduction  de  rom])re  projetée,  sur  une  surface  verti- 
cale; le  dessin  a  été  connu  de  tout  temps,  mais  le  nom  est  moderne. 
11  vient  d'Etienne  Silhouette,  contrôleur  des  finances,  sous  Louis  XV, 
qui  contribua  à  mettre  ce  genre  à  la  mode.  Les  réformes  financières 
de  ce  ministre  ayant  paru  mesquines  et  insignifiantes,  la  caricature 
s'en  empara,  et  l'on  donna  le  nom  de  silhouettes  à  ces  dessins 
imparfaits  qui  se  bornent  à  un  simple  trait. 


SIX  437 

Voici  (0  ({n'en  dit  Mercier  {Tableau  de  Paris]  : 

«  La  l'élébrilé  d'un  conlrùleiir  général  des  linances,  iiionlé  à 
cette  place  avec  la  plus  liaiile  réputation,  tomba  précipitamment. 
Il  lit  plusieurs  écoles,  quoi(pie  doué  d'esprit  et  de  connaissances. 
Dès  lors  tout  parut  à  la  silhouette,  et  son  nom  ne  tarda  pas  à 
devenir  ridicule.  Les  modes  prirent  à  dessein  une  empreinte  de 
sécheresse  et  de  mesquinerie  ;  les  surtouts  n"avai(;nt  point  de  plis, 
les  culottes  point  de  poches;  les  tabatières  étaient  de  bois  brut; 
les  portraits  lurent  des  visages  tirés  de  prolll  sur  du  papier  noir, 
d'après  l'ombre  de  la  chandelle  sur  une  feuille  de  papier  blanc. 
Ainsi  se  vengea  la  nation.  » 

—  L'histoire  des  règnes  de  Louis  XIY  et  de  Louis  XY  serait  tout 
entière  dans  l'histoire  des  contrôleurs  généraux.  Fouquet,  Colbert, 
Desmaretz,  Law,  Orry,  Silhouette,  Berlin,  Lavardi,  l'abbé  Terray, 
sans  parler  des  autres,  fourniraient  des  observations  curieuses. 

Simagrée,  étymologie  très  controversée.  Les  uns  donnent 
similis,  singe  :  d'autres  le  font  venir  de  si  m" agrée  ou  s  il  m'agrée, 

—  Manières  alVectées  et  prétentieuses. 

Se  faire  prier  et  n'acquiescer  que  difticilemcnt  à  un  désir. 
Faire  des  singeries  :  prendre  des  airs  atïectés. 

Simonie,  origine  historique. 

—  La  simonie  est  le  trafic  des  choses  saintes. 

Ce  mot  vient  de  Simon  le  Magicien  qui,  ayant  reçu  le  baptême, 
à  Samarie,  et  voyant  que  le  Saint-Esprit  était  donné  par  l'imposition 
des  mains,  otïrit  de  l'argent  aux  apôtres,  en  disant  :  «  Donnez-moi 
aussi  ce  pouvoir,  que  ceux  à  qui  j'aurai  imposé  les  mains  reçoivent 
le  Saint-Esprit.  «  Saint  Pierre  lui  répondit  :  «  Que  ton  argent 
périsse  avec  toi,  puisque  tu  crois  que  le  don  de  Dieu  se  peut  acqué- 
rir pour  de  l'argent.  »  [Actes  des  Apôtres,  YIII,  18.) 

Simoniaix,  encanlors,  luxurios  et  renoviera. 

(Mahcaukus.) 

(Simoniaques,  enchanteurs,  débauchés  et  usuriers.) 

Simple,  du  latin  simplex,  sans  pli,  ouvert. 
Xom  donné  à  toutes  les  plantes  dont  la  médecine  fait  usage.  Est 
pour  médicament  simple.  {\o\.  végétaux.) 

Sincère,  du  latin  sincerus  (sine  cera  ?J. 

—  Aujourd'hui  la  falsilicalion  ne  se  borne  pas  à  aUérer  le  miel; 
et  la  cire  elle-même,  par  une  singuUèrc  antiphrase,  devrait  s'appe- 


438  su; 

1er  .s7'//r/'/r,  c;ir  elle  ne  coiiliciU  plus  de  cire,  depuis  l'inveiilioii  de 
la  stéarine. 

Singe,  dti  l.iliii  shniits,  [trovençal  simi. 

—  On  dit:  adroit,  malin,  laid  comme  un  singe. 

—  Les  grands  singes  sont  appelés  par  la  science  (/)if/iroj)o- 
morplies. 

—  Payer  en  monnaie  de  singe  :  en  grimaces,  en  gambades. 

On  lit  dans  Sainte-Foix,  que  le  joculateur  qui  se  présentait  au 
pont  du  Cliàtelet  avec  un  singe,  et  le  faisait  jouer  et  danser,  était 
quitte  du  péage,  tant  du  dit  singe  que  de  ce  qui  était  à  son  usage. 
[Meraire,  février  173G.) 

L'Opéra  donne  tous  les  ans  quelques  représentations  extraordi- 
naires pour  la  capitation  des  acteurs.  Ainsi,  ils  paient  en  monnaie 
de  singe,  en  sauts  et  gambades;  le  surplus  leur  tient  lieu  de 
gratification.  (Mercier,  Tableau  de  Paris.) 

Sire,  que  quelques-uns  ont  voulu  tirer  de  kijrios,  en  grec 
seigneur,  vient  du  latin  senior,  dont  l'accusatif  seniorem  a  donné 
seigneur. 

Titre  d'bonneur  donné  aux  souverains.  N"a  pas  de  féminin. 

Il  a  été  synonyme  de  seigneur  :  les  sires  de  Joinville,  de  Couci. 

En  Angleterre,  sir  a  la  même  signification  que  sieur  et  monsieur 
en  français. 

Sirène,  provençal  serenu,  latin  sirena:  dupbénicien  sir,  chant. 

Nymphes  célèbres  par  la  douceur  magique  de  leur  voix.  Gérés 
les  changea  en  monstres  moitié  femmes,  moitié  oiseaux.  C'est  ainsi 
qu'on  les  trouve  représentées  dans  les  anciens  monuments. 

A  une  époque  plus  rapprochée,  quelques  auteurs  ont  prétendu 
que  les  sirènes  avaient  la  forme  de  poissons,  de  la  ceinture  à  l'extré- 
mité inférieure,  et  que  c'était  d'une  sirène  qu'Horace  entendait 
parler,  quand  il  suppose  une  belle  femme  dont  le  corps  se  termine 
en  poisson  (Début  de  l'Art  poétique)  : 

Desinil  in  pisccm  iniilicr  formosa  .siqjerne. 

Mais  il  n'y  a  aucun  auteur  de  l'antiquité  qui  nous  les  ait  présentées 
comme  des  femmes-poissons. 

On  a  supposé  que  les  anciens  avaient  découvert,  dans  les  parages 
de  la  Sicile,  des  filles  bizarres  et  contre  nature,  sortes  de  monstres 
marins.  Elles  étaient  au  nombre  de  trois  :  Leucosie,  Sigée  et  Par- 
thénope.  On  les  disait  lilles  du  fleuve  Achéloiis  :  elles  se  nourris- 


SIS  i30 

sniont  do  clinir  lininaiiio,  ol  abusaient  du  pouvoir  lascinalonr  de  la 
luusiqiie  pour  ap[irûvisioniier  leur  tiarde-nianiier. 

Ou  croit  qu'elles  étaieut  un  symbole  de  la  triple  volupté  des 
sens:  le  vin.  la  niusi(|ue  et  l'amour,  qui  sont  si  puissants  pour 
séduire  les  hommes.  De  là  les  exhortations  à  éviter  le  eliant  des 
sirènes. 

Il  y  a  ipiclqiie  chose  de  répuiiiiant  dans  ce  mythe  anti(jue.  Des 
femmes-poissons,  vilaines  bêtes  !  ne  pouvaient  plaire  qu'à  moitié, 
et  leur  Lialbe  monslrueiix  réveiller  les  appétits  les  plus  disparates  : 
ceux  de  l'amour  (-t  de  la  bouillabaisse. 

—  S/rè/w  s'est  écrit  aiil  relois  sera /ne  et  sereine. 

il   y   avait   à   Bourges   une   rue  Seraine.  ainsi  nommée  d'une 

auberge  de  la  Si/nrine.  Le  Conseil  municipal,  dans  sa  délibération 

du  23  décembre  1846,  a  jugé  à  propos  défaire  disparaître  ce  vestige 

du  vieux  langage,  en  lui  substituant  la  forme  plus  moderne  de 

sijx'ne. 

La  royne  blanclic  comme  un  lys. 
Qui  chanto\t  à  voix  de  soroino. 

(VlM.ON.) 

Sa  voix  |iassail  le  ciianl  de  la  sereine. 

(Marot.  Ualtadcx.) 

...Sevenas...  ha  cors  de  femna,  et  cna  de  pef/sso,  et  ongfas 
d'airjla.  (Vices  et  Vertus,  f"  23.)  La  sirène  a  corps  de  femme, 
queue  de  poisson  et  serres  d'aigle. 

Sisara  (^le  clou  de). 

Sisara,  lieutenant  de  l'armée  de  Jabès,  roi  de  Chanaan,  voyant 
ses  troupes  vaincues  par  Déborah  et  Barach,  se  réfugia  dans  la 
lente  de  Jahel,  femme  d'Héber  le  Cinéen.  Elle  parut  le  recevoir 
volontiers,  mais  elle  lui  enfonça  un  clou  dans  la  tète,  pendant  qu'il 
dormait.  {Juges,  ch.  4  et  5.) 

Cette   histoire  de  .label   perçant   le  crâne   à  Sisara,  doit  être 

apocryplie. 

Ce  elou  pointu,  funeste  a  Sisara. 

(VoMMIiK.    P,l,-olln.     II.) 

Sisyphe,  personnage  mythologique. 

Bâtit  Corintlie,  dont  il  fut  le  premier  roi.  Ses  brigandages  et  ses 
cruautés  le  tirent  condamner,  dans  les  enfers,  à  rouler  perpétuelle- 
ment une  grosse  roche  ausommet  d'une  montagne,  d'où  elle  retom- 
bait aussitôt  par  son  propre  poids  :  et  â  la  remonter  de  nouveau, 
par  un  travail  sans  relâche. 

D'où  la  locution  :  le  rocher  de  Sisyphe. 


440  SOI 

—  {>  rocliei-,  pour  les  sociétés  asservies,  c'est  l;i  liborlé.  (Glais- 
Hi/.oin,  18(58.) 

Sobriquet,  ('lymologie  fort  inccrtaiiit'.  On  \':\  l;iil  venir  de 
res|i;iKnol  .so/»Y/,  sur,  c'est-;i-dire  .v/^r/îo/// ;  on  du  lutin  si/hridicu- 
luni  (sous-entendn  nomen),  nom  ridiculisé. 

Kpitlièto  satirique  ou  ])urlesque,  ajontée  an  nom.  ra[)pelant 
(pu'iqne  défant  |)liysiqnc  ou  moral  dcTindividn,  tels  (pu;  LillrclolTres. 
nom  (pic  UalK'lais  donne  aux  Allemands,  [)arce  qu'ils  smiblenl, 
quand  ils  parlent,  ne  dire  autre  chose. 

De  Tiberlufi  Nero,  on  avait  fait  Biberius  mero,  ivrogne. 

—  On  trouve  dans  la  liste  des  rois  des  premières  races,  de 
nombreux  sobricfuets  :  Pépin  le  Bref,  Charles  le  Chauve,  le  Gros, 
le  Simple,  etc. 

Soi,  du  latin  .se. 

—  Etre  soi  :  être  original  dans  ses  créations. 

Mon  verre  est  petit,  mais  je  jjuis  dans  mon  verre. 

(A.    DR    .MUSS.ET.) 

—  Raphaël  Sadeler,  graveur  en  1612,  avait  pour  marque  une 
tortue,  avec  cette  devise:  Sub  parro,  sed  nieo.  Mon  toit  est  petit, 
mais  il  est  mien. 

Un  poète  du  xiii''  siècle  avait  écrit  sur  la  porte  de  sa  maison  : 
Parvuius,  sed  avilus.  Le  domaine  est  petit,  mais  il  vient  de  mes 
pères. 

Devise  que  le  comte  de  Grammont  avait  traduite:  «  Si  je  suis 
gueux,  c'est  de  ma  race.  )> 

—  Pour  soi.  pourceau.  (Yoy.  égoïsme.) 

—  Chacun  pour  soi,  chacun  chez  soi.  On  attribue  cette  phrase  à 
Dupin  aîné.  Il  a  dit  en  réahté  :  «  Chacun  chez  soi,  chacun  son 
droit  »  ;  maxime  éminemment  protectrice  du  faible  contre  le  fort. 
{Moîiifeur,  7  décembre  1830.) 

—  Le  dicton  populaire  :  «  Chacun  pour  soi,  et  Dieu  pour  tous  », 
qui  est  la  devise  favorite  des  égoïstes,  peut  être  aussi  envisagé  à 
un  point  de  vue  honorable,  comme  signitiant  que  tout  homme  a 
des  devoirs  à  remplir  dans  l'intérêt  de  sa  conservation  personnelle, 
et  que  Dieu,  à  son  tour,  veille  également  sur  tous  les  hommes. 

—  La  maxime  que  les  Américains  ne  perdent  jamais  de  vue  dans 
la  pratique  de  la  vie,  est  :  Go  a  liead.  Dieu  pour  tous,  et  que  le 
diable  emporte  le  dernier. 


SOI  Vil 

Soie,  du  latiii  scia,  provençal  aede. 

—  La  soie  s'appelait  aussi  sericiun,  de  Scres,  nom  des  Chinois, 
du  pays  desquels  on  riuii)ortait  à  Rome,  où  elle  se  vendait  au  poids 
de  l'or. 

—  Hélioualinlc  lui  Ir  pivniier  ciiipcrenr  (pii  iioiia  des  lial)ils  de 
soie. 

—  Au  vi«  siècle,  sous  Jusliiiien,  deux  moines  rapporlrrenl  de 
Chine  à  Conslantinople,  des  ulïuI's  de  vers  à  soie  renfermés  entre 
les  nœuds  d'un  roseau,  et  les  firent  éclore. 

Pendant  lon,uten)i)s  la  soie  resta  une  rareté  luxueuse,  et  Yopiscus 
rapporte  qu'Aurélien  avait  refusé  à  l'impératrice  une  rohe  de  soie, 
à  cause  de  sa  cherté. 

—  En  1145.  Hoper,  roi  de  Sicile,  ravagea  la  Grèce,  et  amena  en 
Sicile  des  ouvriers  en  soie,  qui  propagèrent  leur  industrie  jusqu'en 
Provence,  à  l'époque  où  la  maison  d'Anjou  reçut  l'investiture  de 
Naples  et  de  Sicile. 

—  La  ville  de  Lyon  consomme  annuellement  un  million  de 
kilogrammes  de  soie.  La  longueur  du  fil  d'un  cocon  est  en  moyenne 
de  oOO  mètres.  Lyon  met  en  œuvre,  par  an,  une  quantité  de  soie 
produite  par  quatre  milliards  deux  cents  miUions  de  cocons,  donnant 
une  longueur  de  111  de  deux  milliards  cent  raillions  de  kilomètres, 
soit  quatorze  fois  la  distance  de  la  terre  au  soleil. 

—  La  sériciculture  est  la  culture  de  la  soie. 

—  Jours  filés  de  soie  et  d'or  :  vie  heureuse. 

Soif,  du  latin  sitis,  provençal  set. 

Tailla  fan,  tunla  sel  cl  tan  .soin. 

(Bhrini.VM)  m:  Buu.n.) 

(Sigrand'faim,  si  grand'soif  et  si  grand  sommeil.) 

—  Synonymes:  avoir  soif;  avoir  la  pépie;  cracher  blanc. 

—  Beali  qui  esiununt  et  sitiunt  justltiam  !  {Ecnnglle.)  Heu- 
reux ceux  qui  ont  faim  et  soif  de  !a  justice  ! 

—  C'est  la  soif  qui  épouse  la  faim  :  union  de  pauvres  diables. 

—  La  soif  de  l'or,  du  pouvoir,  de  la  vengeance. 

—  La  soif  est  un  besoin  très  impérieux,  et  qui  fait  endurer  plus 
de  soulTrances  que  la  faim;  comme  aussi  il  n'y  a  pas  de  jouissance 
plus  grande  que  de  satisfaire  une  soif  ardente. 

On  meurt  plus  vite  de  soif  que  de  faim.  Cela  s'explique  par  la 
chaleur  de  30°  que  possède  le  corps  humain,  chaleur  qui  tend  sans 
cesse  à  vaporiser  les  divers  fluides  dont  la  circulation  entretient  la 


442  S(  IL 

vie.  cl  liiiil  |);ii'  dôvclopiiri'  une  lir \  rc  qui  lin'ilc.  si  on  ni^  renom  elle 
pas  CCS  liquides  ;i  niesui-i'  qnils  se  l;ii'issent. 

—  AKérei',  (-"est  rendre  ;nili'e,  changer  en  mal,  délniire  :  la  soif 
délrnii'ail  la  \ie. 

Soirée,  dérivé  de  soir,  lalin  scrutn. 

—  Dans  une  soirée  chez  M"'"  Lncifer,  on  oITril  aux  in\ilés(ies 
lilaces  au  ploiiil»  fondu,  des  limonades  au  vilriol,  des  gâteaux  à 
l'arsenic,  de  Tcau  de  feu,  le  Vésuve  en  houleilles,  et  l'enfer  distillé  ; 
les  divans  étaient  rembourrés  en  baïonnettes  et  en  lames  de 
rasoirs;  un  potage  de  vers  solitaires  fut  servi... 

Un  démon  d'une  prodigieuse  laideur,  armé  d'une  fourche  de  fer, 
conduisait  les  invités  à  une  table  couverte  de  draperies  noires. 
Sur  les  plats  de  ce  banquet  infernal  élaient  entassés  des  serpents, 
des  couleuvres,  des  tarentules,  des  lézards,  des  crapauds,  des 
chauves-souris,  et  d'autres  semblables  animaux,  accommodés  par 
les  cuisiniers  de  Pluton. 

Ces  mets  étaient  placés  sur  la  table,  à  l'aide  d'une  pelle,  par  les 
démons,  tandis  que  d'autres  suppôts  d'enfer  versaient  à  boire  dans 
des  creusets,  qui  tenaient  lieu  de  verres. 

Au  dessert,  furent  jetés  sur  la  table,  en  guise  de  sucreries,  des 
ossements  de  morts.  (Vasari,  Vie  de  Ruslicia.) 

(Yoy.  burlesque.) 

Sol,  du  latin  solum:  vient  de  solus,  seul,  comme  soleil  {^.). 
On  a  dit  sole.,  de  solea.  plante  des  pieds. 

—  Tota  bestia  cornuda  ha  las  solas  del  pes  fendudas.  Toute 
bète  cornue  a  la  sole  des  pieds  fourchue. 

Soldat.  On  a  dit  soudard,  soldier. 

—  Synonymes  (dans  le  langage  familier)  :  ratapoil  (mauvaise 
part);  culotte  de  peau;  grognard,  vieux  soldat  de  l'Empire,  ils 
grognaient  et  murmuraient  souvent,  tout  en  se  battant  bien  ;  Jean- 
Jean,  jeune  conscrit  naïf;  lignard,  soldat  d'infanterie  de  bgne; 
officier  de  guérite  ;  tourlourou  0  oy-) 

—  Soldat  du  pape  :  mauvais  soldat.  En  1788,  Le  Duchat  disait  : 
«  Soldats  du  pape,  méchantes  troupes.  » 

Les  compagnies  de  l'Flglise  sont  le  déshonneur  de  la  gendarmerie. 
(Machiavel.) 

Le  promior  nui  fut  roi  fut  un  soldat  lioureuv. 

(Voltaire,  Mérope.' 


SOF.  443 

—  On  (lit.  on  Franco,  d'im  i<Mino  soldai,  qu'il  a  lo  liàton  do,  inai'ô- 
rlinl  dans  sa  gibenio.  Los  Laliiis  disaiont  :  Cdlh/a  ad  ronsi/ladun 
proihiriKs  (Séoèque,  parlant  do  Marins).  La  rali,i:a  rtait  la  cliaus- 
snro  dn  soldat. 

—  Soldats  do  (ortuno  : 

Aujrereau,  duc  do  Gastigiiono.  riail  lils  d'un  liiiiioristo  dol*aris. 
Rt'i-nadotto.  roi  do  Sncdo.  lils  d'un  avocat  do  Pau. 
liortliior,  prince  do  Xoulchàlol,  lils  d'un  portier. 
Bcssière,  duc  d'Istrie,  tîls  d'un  porrucpiior. 
Bonaparte,  empereur,  tlls  d'un  liroflier. 
.MuiMt,  roi  do  Na^ilos.  lils  d'un  auliortiisle. 

—  Ce  qui  toml'O  dans  le  fossé  est  pour  le  soldai  :  llioinnie 
soipnoux  prolito  do  la  né.uliaonco  dos  antres. 

Ce  provcrlie  remonte  à  l'époque  où  les  troupes  n'avaient  pas  de 
paie  régulière,  et  où  la  maraude  était  autorisée. 

Solécisme,  oriiilno  historique. 

—  On  parlait  fort  incorrectement  à  Soles,  ville  de  Cilicie. 
Solécisme  dési,i>na  une  faute  de  grammaire,  de  syntaxe,  comme 

celles  dont  étaient  coutuniiers  les  habitants  de  Soles. 

Soleil,  du  latin  sa/ /eu fus,  diminutif  de  sol. 

—  Synonymes  :  la  cheminée  du  roi  René  ;  cagnard,  Ueu  exposé 
au  soleil. 

—  Où  le  soleil  n'entre  pas,  le  médecin  entre. 

—  Le  soleil  était  remldome  de  Louis  XIY,  avec  la  devise  :  Tec 
2}luribus  im}iar. 

Les  Hollandais,  qui  étaient  en  guerre  avec  lui,  avaient  pris 
reml)léme  do  Josué  arrêtant  le  soleil,  avec  le  mol  :  SUi. 

—  Adorer  le  soleil  levanl.  On  est  porté  à  se  prosterner  devant 
les  pouvoirs  nouveaux,  par  un  mélange  de  crainte  et  d'espérance. 

—  Coup  de  soleil,  insolation.  — Hans  l'Inde,  chaque  rayon  de 
soleil  frappe  et  tue.  comme  un  boulot  rouge.  On  dirait  que  l'antique 
Apollon  fait  campagne  dans  le  Nouveau-Monde,  et  qu'il  épuise  sur 
les  populations  son  carquois  de  Hoches  d'or,  i L(?  Times.) 

—  Soleil  de  l'Itaho.  —  .l'aime  à  voir  le  soleil  se  coucher  à  Venise, 
sûr  qu'il  se  lèvera  demain,  non  pas  débile  et  clignotant  dans  le 
brouillard,  comme  l'œil  morne  d'un  ivrogne  qui  geint,  mais  avec 
tout  le  ciel  pour  lui  seul,  sans  que  le  jour  soit  forcé  d'emprunter  sa 
lumière  à  ces  lampions  d"un  sou,   qui   se  mettent  à  trembloter 


444  S(  )\I 

quand  Londres  ronfiiniL'O  fait   lioiiillii' son  cliaudron  troiililc  (Lord 
H  y  l'on,  lit'ppa.) 

Solitude,  du  latin  soUliido. 

La  solitude  était  prolondo, 
Sï'loiidant  pailout  à  la  rondo. 

(La   KoMAlNE.) 

Sologne,  en  latin  segnlonla,  d(i  scfjdlu,  seigle,  céréale,  dont  le 
[lays  iii'odiiil  grande  abondance. 

—  Niais  de  Sologne  :  faux  bonhomme.  (Voy.  nuiis.) 

Les  Solognois,  sols  à  demi, 
Qui  se  trompent  à  leur  profit. 

Dorvigny  a  fait  pour  le  théâtre  de  la  Monlausier,  une  pièce 
intitulée  :  le  Niais  de  Sologne. 

Solstice,  du  latin  sohtiliuin,  do  sol  et  stare. 

Temps  de  l'année  où  les  jours  sont  le  plus  longs  ou  le  plus 
courts.  C'est  l'époque  à  laquelle,  deux  fois  par  an,  le  soleil,  arrivé 
à  son  plus  grand  éloignement  de  l'équateur,  semble  pendant 
quelques  jours  y  être  stationnaire,  puis  revenir  sur  ses  pas.  C'est 
à  partir  du  solstice  d'hiver  (23  décembre)  que  les  jours  croissent, 
et  à  partir  de  celui  d'été  (21  juin)  qu'ils  diminuent,  pour  notre 
hémisphère. 

Sommation  respectueuse. 

Accouplement  de  mots  inconciliables  :  rien  n'est  plus  opposé  au 
respect  qu'une  sommation,  l'action  la  plus  rigoureuse,  la  plus  irré- 
vérencieuse. Ces  requêtes  des  enfants  majeurs,  qui  veulent  se 
marier  malgré  leurs  auteurs,  ont  reçu  le  nom  d'  «  actes  respec- 
tueux ».  On  notifie  ces  actes,  on  ne  les  signifie  pas. 

Somme  (bête  de),  du  grec  sagma,  devenu  sauma. 
En  provençal,  une  ànesse  s'appelle  sauma. 

—  Assommer  :  frapper  comme  sur  une  bête  de  somme. 

Somme,  du  latin  summa,  le  point  le  plus  élevé. 

Sommeil,  aussi  sonune,  de  somniculus. 

Divinité  allégorique,  fds  de  l'Érèbe  et  de  la  Nuit,  et  père  des 
Songes.  Il  est  représenté  endormi  dans  un  antre  profond,  dont 
l'entrée  est  obstruée  de  touffes  de  pavots  et  autres  plantes  somni- 
fères. Les  Songes  voltigent  autour  de  lui,  et  Morpliée,  son  principal 
ministre,  entrelient  un  éternel  silence  dans  cette  obscure  demeure. 


SON  44o 

Sommelier,  de  sagma.  puis  aauma.  provision,  rlinraes. 
Ollicirr  clwiiui''  de  la  cave,  et  d'aliord  de  tous  les  approvisionne- 
ments de  la  maison. 

—  Sommelier,  iiarde-nons  dn  sommeil. 

Arûus  avoyt  cent  yenlx  pour  voir,  cent  mains  tant  an  sommelier, 
comme  a\ait  Hi'iai-rt'.  poiii-  inlali'jalilcinenl  verser,  (lial)eiais,  I,  'J.) 

Somptueux,  du  latin  aumplus,  dé[)ense. 
Appartement  somptnenx.  repas  somptueux. 
D'où  aussi  somptuah^e  :  lois  sompluaires. 

Son,  dans  les  langues  germaniques,  signifie  (ils,  et  a  servi  à 
composer  nu  grand  nombre  de  mots,  tels  que  :  Hohertson,  Nelson, 
Hohinson  :  nourrisson,  enfant  nourri  par  sa  mère  (ou  par  une 
noiiri'ict' :,  :  clianson,  le  produit  du  chant  (ou  plut(U  celui  de 
raniioiicm)  :  polisson,  renfant  des  villes,  des  rues,  plus  vicieux 
que  ceux  de  la  campagne  (à  moins  que  ce  ne  soit  celui  de  la 
police  ?). 

—  En  provençal,  on  ai)pclle  les  jumeaux  bcssons,  c'est-à-dire 
deux  fils,  deux  enfants. 

Sonate,  de  Titalieu  sonala,  du  latin  sonave. 

Composition  instrumentale  formée  de  trois  ou  quatre  morceaux 
de  caractère  dilïérent  :  allegro,  adagio,  rondo... 

Ce  genre  de  composition,  qui  a  eu  jadis  une  grande  vogue,  est 
aujourdliui  abandonné. 

—  «  Sonate,  que  me  veux-tu  ?  »  s'écria  un  jour  Fonlenelle,  dans 
un  transport  d'impatience  et  d'ennui,  causé  par  les  éternelles 
symphonies  des  concerts. 

Foutenelle  n'aimait  pas  la  musique,  à  ce  qu'il  parait.  Trop  amou- 
reux de  lui-même  pour  partager  ses  affections,  c'est  avec  soin  qu'il 
évitait  toutes  les  émotions  de  nature  à  troubler  l'équilibre  de  ses 
heureuses  facultés.  «  Je  n'ai  jamais  fait  ah  !  ah  !  »  avouait-il:  ses 
yeux  ne  furent  jamais  mouillés  de  larmes,  et  son  égoïsme  conser- 
vateur le  mettait  à  l'abri  de  toutes  les  langueurs  de  l'âme  et  des 
énervements  de  l'amour. 

Dans  quelle  occasion  lit-il  entendre  cette  phrase  devenue  célèbre  ? 
C'est  proI)al)lement  dans  un  salon  où  l'on  se  préparait  à  entendre 
quelque  virtuose,  que,  forcé  de  changer  son  rôle  de  causeur 
brillant  et  écoulé,  contre  celui  d'auditeur  muet  et  attentif,  il  aura 
laissé  échapper:  «Sonate,  que  me  veux-tu?»  (Voy.  Kastner, 
Parémiologie  musicale.) 


446  son 

Songes,  (lii  hitiii  .so/miiiu/i.  Ku  [)ro\(Mi(;;il,  sonya^a  dit  ixuiUiUh. 
du  jii'cc  pliiinlasmn  (?). 

—  Knfants  du  Souiuieil,  les  Soujios  étaient  aussi  nombi'oux  que 
les  sahles  de  la  nier.  Il  y  en  avait  trois  principaux  :  Morpliée, 
Pliohétor  et  Pliantase. 

—  Macrohe  (Songe  de  Scipion,  liv.  I)  dit  que  les  son.ues  faux  et 
confus  viennent  par  la  porte  d'ivoire,  et  que  les  soupes  vrais  et 
clairs  viennent  par  la  porte  de  corne,  qui  est  transparente.  (Voyez 
Virgile,  Enéide,  VI.) 

—  Songes,  mensonges.  Beaucoup  de  personnes  ne  le  croient  pas, 
et  pensent  trouver  la  vérité  dans  l'interprétation  des  songes.  Ce 
préjugé  des  esprits  faibles  est  même  exploité  etlVontément  par  des 
charlatans  qui  abusent  de  cette  ridicule  crédulité. 

Sonneur,  dérivé  de  sonner,  latin  sonare. 

—  Boire  comme  un  sonneur.  (Voy.  tire-Iarir/ot.) 

Il  semble  qu'on  devrait  dire  plutôt  :  boire  comme  un  saunier, 
parce  que  le  sel  altère. 

...Ponocrates  remonstrant  que  c'estoyt  mauvaise  diète,  ainsy 
hovre  après  dormir,  c'est,  dit  Gargantua,  de  ma  nature,  je  dors 
salé.  (Rabelais.) 

Sopha,  de  l'arabe  ro(]'ah. 

Sorte  de  lit  de  repos  à  dossier,  dont  l'usage  a  été  introduit  en 
France  au  wiii^  siècle.  Il  a  la  même  patrie  que  les  mots  divan  et 
ottomane,  qui  sont  aussi  des  sièges  orientaux. 

Sophisme,  du  grec  sophisina. 

Raisonnement  captieux,  ayant  l'apparence  de  la  vérité. 

D'où  aussi  :  sopliiste,  sophistiquer. 

Soprano,  mot  italien,  de  sopim,  au-dessus. 
La  voix  (pi'on  appelait  autrefois  dessus  ;  c'est  la  plus  élevée  de 
toutes. 
Un  castrat,  par  euphémisme,  s'est  appelé  sopu^ano. 
Les  soprani  sont  des  femmes,  des  enfants  ou  des  castrats. 

Sorcier,  du  l)as-latiu  sortiarius.  qui  jette  des  sorts,  ou  qui 
prévoit  l'avenir. 

—  Le  sorcier  dil'fère  du  magicien,  en  ce  qu'il  est  de  plus  bas 
étage,  et  ne  fait  que  du  mal.  On  supposait  que  les  sorciers  avaient 
fait  un  pacte  avec  le  diable,  pour  opérer,  par  son  secours,  des 
prodiges  et  des  maléfices. 


S(  )K  447 

Ail  Moyen-Auo  ot  loiiLitcmiis  .'iprt'S,  ils  (''titioiit  hrùlés  \il's.  P.iniii 
les  \i(liinos  les  plus  déplui'iililes  do  celle  superslitioii,  on  peut  citer 
Jeanne  d'Arc,  U.  Grandier,  et  la  maréchale  d'Ancre. 

Les  accusations  de  sorceller'ie  cessèrent  d'èlre  admises  par  les 
tribunaux,  en  France,  en  iG7^  ;  mais  la  croyance  aux  sorciers  et 
aux  sortilèges  existe  encore  dans  quelques  campagnes. 

—  Les  sorcières,  vieilles  femmes  hideuses,  représentaient  les 
Krinnyes  do  l'ancienne  Grèce  (?). 

Sornette,  du  vieux  verho  sonwr.  Quelques-uns  le  font  venir  de 
serolina  [fabula),  conte  du  soir,  conte  de  la  veillée. 
De  là  :  conte  à  dormir  debout. 

Dites,  je  vous  pi'y,  sans  sorner. 

(Patelin.) 

Sort,  du  latin  sor>i.  sortem. 

—  Le  sort  en  est  jeté  :  Aléa  jarta  est,  c'est-à-diro  le  dé.  Mot  que 
prononça  César  quand  il  eut  pris  le  parti  de  franchir  le  Rubicon 
(voy.),  pour  marcher  sur  Rome. 

De  là  est  venu  aléatoire. 

—  Synonyme  :  risquer  le  paquet  i^trivial). 

—  Faire  un  sort  à  quelqu'un  :  le  mettre  dans  une  situation  aisée, 
fortunée. 

Sor.<i  avait  la  même  origine  que  fortuna. 
...Delille  fait  un  sort  à  chacun  de  ses  vers,  et  néglige  la  fortune 
du  poème.  (Rivarol.) 

De  sorte  mine  renio  in  dahinm. 

(TKliRNCE.) 

(.le  commence  à  craindre  pour  mon  argent.) 

Periil  sors  cl  usuni. 

{Pi.M-n:.) 

(J'ai  perdu  capital  et  intérêts.) 

Le  sort,  l'usure  et  les  intérêts,  je  pardonne  ;  je  me  contente  des 
dépens.  (Rabelais,  IH,  lo.) 

Ne  réduysant  rien  du  sort  princi[)al.  (A/,  lll,  Ti.) 

L'abbé  de  Marsy,  commentateur  do  Rabelais,  n'a  pas  vu  la  signi- 
llcation  de  sort,  et  l'a  traduit  par  fond,  disant  que  sort  n'avait 
aucun  sens.  Johanneaii  dit,  au  contraire,  que  sort  est  le  mot 
propre  pour  les  bénéfices  du  clergé,  puisque  les  mots  tierr,  clergé, 
viennent  du  grec  kléros,  sort,  héritage. 


448  SOT 

Sortir,  du  l;iliii  sorliri,  loiiilicr  en  piirtii^io. 

(In  (lisiiil  .iiitrclois  /.s-.s7/%  doiil  il  n'est  resté  que  insu,  haur. 

—  Sortons  !  S(3  dit  on  |)l;iis;int;inl.  ponr  simuler  nno  provocation. 
Le  comte  de  Cliarolais   ayant   snrpris   M.   de  IJrissac   chez   sa 

inaiiresse,  Ini  dit:  «  Sortez,  monsieur!  — Monseigneur,  répondit 
le  (Inc.  vos  ancêtres  anraient  dit  :  Sortons  !  « 

Sot,  transposition  des  prcMnières  lettres  do  slolidiis:  ou  bien 
pliil(")l  du  has-lalin  sollus.  du  syriaque  achoteh.  Anciennement 
solicH.  a  désigné  certaines  pièces  houllonnes. 

—  Synonymes  :  sot  en  trois  lettres,  sot  cramoisi,  sot  comme  un 
panier. 

Molière,  dans  les  Fanmes  savantes,  a  créé  le  mot  Trissolin, 
qui  signitie  triple  sot.  Rabelais  (I,  15)  avait  fait  le  mot  Itassoli, 
douI)le  sot. 

—  Sot-l'y-laisse  ;  morceau  très  délicat  que  le  fin  gourmet  ne 
dédaigne  pas,  le  croupion  d'une  volaille. 

—  A  sot  auteur,  sot  admirateur. 

...Ainsi  qu'en  sots  auteurs. 
Notre  siècle  est  fécond  en  sots  admirateurs. 

(Boii.EAi;.) 

Un  sot  trtjuve  toujours  un  plus  sot  qui  l'admire. 

(Boii.HAu,  Art  poi'-tique,  I.j 

Niillus  est  tam  Imperitus  scriptor,  qui  lectorem  non  inventât 
similem  siii.  (Saint  Jénune.) 

—  C'est  un  sot  on  trois  lettres  :  un  sot  fielïé.  Plante  se  servant 

du  même  jeu  de  mots,  dit  d'un  voleur  (fur)  :  Homo  triiun  litte- 

j'oruin. 

...Vous  êtes  un  sot  en  trois  lettres,  mon  fils  ; 

C'est  moi  qui  vous  le  dis,  (jui  suis  votre  grand'mere. 

(Molière,   TaAuffv.  I,    1.) 

—  Tbéodulfe,  évêque  d'Orléans,  au  ix-^  siècle,  disait  de  Jean 
Scot  que,  dans  son  nom,  la  lettre  c  était  une  faute  d'ortbograpbe, 
qu'il  fallait  la  retrancher. 

Un  sot  savant  est  sot  plus  (pi'un  sot  ignorant. 

(MouÈiiE,  Femmex  snvantes.) 

La  nature  fait  les  bêtes,  la  société  fait  les  sots. 

—  On  n'est  pas  nécessairement  un  sot  pour  avoir  dit  ou  fait  une 
sottise  ;  mais  on  l'est  deux  fois  quand  on  cherche  à  la  justifier. 

La  Rochefoucauld  a  dit  qu'on  était  quelquefois  sot  avec  de 
l'esprit,  mais  jamais  avec  du  jugement. 


sou  419 

II  n'y  ;i  point  dt»  sols  si  iiicomiiiodos  qiio  conx  (|iii  oui  de  ros|irif. 
{\.n  Hociu'i'oiirjiiild.) 

—  Le  prince  des  sots  était  le  cliof  de  la  compagnie  des  Sois  qui 
jouaient  des  pièces  appelées  soties. 

Il  est  possible  que  sof  ait  élé  dit  par  coi'i'uption  pour  s/m/,  parce 
((ue  les  danses  et  les  sauts  ('■laicul  Icui's  principaux  exercices  (0- 

Sou,  anciennement  soi,  qui  se  dit  en  provençal;  dulatin  .vo/<^/w.s-, 
qui  si»niliait,  à  Rome,  toute  monnaie  considérée  comme  matière, 
et  non  divisée  en  fraction.  Le  solidus  était  l'unité  monétaire,  et  la 
vingtième  partie  de  la  livre  de  conqite. 

De  là  aussi  :  solder,  soldat,  soulte,  soudoyer,  et  le  rouiau  souda- 
(h'iru,  prostituée. 

—  L'usage  du  mot  sou.  comme  monnaie  de  compte,  s'est  main- 
tenu dans  les  petits  nombres.  On  dit  même  encore  :  cent  sous, 
pour  cinq  francs. 

—  N'avoir  ni  sou  ni  uuiille.  (Voy.) 

—  Perdre  jusqu'à  son  dernier  sou. 

.1(/  asscin  oiiDiia  perderc. 

(UoilAC.K.) 

Soubrette,  origine  inconnue,  tradiu^tion  de  l'italien  ruffJanella. 
(Odin ,  Dict  ion  n a  ire.) 

En  espagnol,  sobretarde,  sur  le  tard,  à  la  brune. 

C'était  autrefois  la  servante  entremetteuse  qui,  vers  le  soir,  allait 
porter  les  billets  doux. 

Souci  :  l^^  de  solser/uiufn,  vieux  français  soulcie.  On  l'appelle 
aussi  cafendu/a  et  inétéorine,  jtarce  que  ses  fleurs  s'épanouissent 
aux  rayons  du  soleil,  et  se  ferment  quand  l'astre  disparaît. 

Souci  est  formé  comme  tournesol  (en  roman  giraflor)  et 
héliotrope. 

—  Cette  plante  est  remblème  des  chagrins,  par  suite  de  la 
ressemblance  de  son  nom  avec 

Souci  :  2^  verbal  de  soucier,  latin  soUiriiare,  causer  de  l'inquié- 
tude. 

—  Avoir  du  souci  :  avoir  martel  en  tète. 
Sans-souci  :  bon  vi\ant,  Hoger-Bontenips. 
Soucieux,  mélancolique,  encolillucbeté  (Rabelais). 

—  On  dit  d'une  petite  contrariété  :  C'est  le  cadet  de  mes  soucis. 
Il  serait  burlesque  de  retourner  l'expression,  et  de  dire  :  ...l'aîné 
de  mes  soucis,  pour  un  grand  chagrin. 

29 


450  SOU 

Il  y  a  une  foule  de  petits  Soucis  volli-iCMiits.  (jui  \it'iiiH'iit  cliMfjue 
iiKilin  ;'i  M)lre  iVncil,  et  qui  ne  vous  qiiillciit  plus  ([iic  le  soir. 
(Féiieloii.) 

Souffler,  (In  l;iliii  su/'/hu'e,  de  suit  et  [hire. 

—  Soufder  le  diaiid  et  le  fi'oid  :  dire  du  bien  et  du  in;il  d'une 
même  chose. 

Avrirro  coiix  dont  la  Imhu-Iic 
Souffle  le  cliaiid  cl  le  froid. 

(I.A    l'oNTAlNK.) 

C'est  V/tonio  bUuujuis  de  l'Écriture. 

Je  suis  oiseau,  voyez  mes  ailes. 
Je  suis  souris,  vivent  les  rats  ! 

(La  Fontaine.) 

Soufflet.  Coup  applique  sur  la  joue  avec  la  main. 
Synonymes  :  giflle,  .airoflée  à  cinq  feuilles,  mornifle,  revers  de 
main. 

—  Si  quelqu'un  vous  donne  un  soufflet,  présentez  l'autre  joue. 
(Mathieu,  V,  39  :  Luc,  YI,  29.) 

—  Un  démenti  vaut  un  soufflet  :  un  soufflet  vaut  un  coup  d'épée. 
Le  soufflet  est  regardé  chez  nous  comme  une  injure  grave, 

sanglante,  parce  qu'il  n'y  avait  autrefois  que  les  vilains  qui 
combattissent  la  face  découverte  et  pussent  être  frappés  au  visage. 
Souffleter  un  gentilhomme,  c'était  donc  le  traiter  en  vilain. 

—  Dans  l'antiquité,  quand  on  achetait  un  esclave,  on  en  prenait 
possession  en  lui  donnant  un  soufflet. 

Ce  n'est  que  dans  le  sang  qu'on  lave  un  tel  outrage. 

(CdliNEII.I.E   ) 

—  Donner  un  soufllet  à  Ronsard,  c'est  parler  mal  le  français, 
parce  que  Ronsard  a  été  une  autorité. 

—  Aulu-Gelle  parle  d'un  certain  Lucius  Yéranius,  Romain  très 
riche,  qui  se  faisait  suivre  d'un  esclave  porteur  d'une  bourse  pleine 
d'argent.  Lorsqu'il  rencontrait  quelqu'un  qui  lui  déplaisait,  il  lui 
donnait  un  soufllet,  puis  lui  remettait  vingt-cinq  sous,  prix  fixé  par 
la  loi  des  Douze  tahles  pour  la  réparation  de  cet  atïront. 

—  Soufflet  à  feu  :  la  petite  maison  d'Éole.  (Dictionnaire  des 
Pî'édeuses.J 

Souffre-plaisir  devrait  s'employer,  aussi  bien  que  souffre- 
douleur,  pour  désigner  certains  états,  qui  obligent  ceux  qui  les 
exercent  à  se  rompre  le  cou  ou  à  se  briser  le  cœur. 


sou  451 

Tels  sont  racrolialo,  qui  risque  tous  les  jours  sa  vie  pour  amuser 
la  foule  ;  et  l'écrivain,  qui  torture  son  esprit  pour  la  faire  rire. 

Le  plailiateur  conilialtait  aussi  pour  le  plaisir  du  peuple  ;  il 
s'etïorçait  de  louilior  aNcc  uràrr.  et,  après  sa  mort,  tout  était  dit. 
Aujourd'hui,  ou  uc  meurt  [ilus  sur  la  scène  :  le  supplice  dure  toute 
la  vie. 

Souffrir,  du  latin  mifferre,  supporter. 

Syuonwnes  :  aller  au  [)aradis  par  la  voie  étroite  ;  souffrir  comme 
un  martyr,  le  martyre. 

Quod  est  fcrcndum,  feras. 

(Tkuk.nck,  Phormion,  II,  o.) 

(Souffre  ce  que  tu  ne  peux  éviter.) 

Feras,  non  culpes,  quod  vitarc  non  potes. 

(P.    SVRUS.) 

Le  mieux  est  de  soulfrir  ce  qu"on  ne  peut  empêcher  :  Optimum 
pâli  quod  emcndare  non  possi.s.  (Sénèque,  Epdre  107.) 

—  Veux-tu  des  œufs  ?  Soufire  le  caquetage  des  poules.  (Proverbe 
allemand.) 

D'une  lionne  vache  à  lait  on  peut  bien  soulfrir  quelques  coups  de 
pied.  (Proverbe  indien."^ 

Souhait,  de  soua  et  du  verbe  français  haitier. 

—  A  vos  souhaits  !  (Voy.  hénUae.)  En  latin  ave. 
Oncques  souhait  n'emplit  le  sac. 

Les  souhaits  ne  sont  que  des  placets  que  la  folie  de  l'homme 
présente  au  Destin,  et  auxquels  il  fait  si  peu  d'attention,  qu'il  ne  se 
donne  pas  la  peine  de  les  lire.  (Fénelon.) 

Jksine  falu  deinn  flecli  sperare  precando. 

(ViiiciLK,  Enéide  )V,  37G.) 

(N'essaie  plus  de  tléchir  par  tes  prières  les  divines  destinées.) 

Si  tous  nos  souhaits  étaient  exaucés,  il  n'y  aurait  plus  d'espérance. 
(M.  de  la  Palisse.) 

Si  les  chats  avaient  des  ailes,  il  ny  aurait  plus  d'oiseaux  dans  les 
airs;  si  chacun  avait  ce  qu'il  souhaite,  qui  aurait  encore  quelque 
chose  ?  (Herder.) 

Si  j'avais  un  souhait  à  faire,  ce  serait  de  n'avoir  rien  à  souhaiter. 

Souhaiter,  dérivé  du  précédent  :  rendre  joyeux. 
Dans  riUe-et-Vilaine,  on  dit  encore  liaifer,  pour  plaire. 
Je  bois  à  votre  hait  :  à  votre  santé. 

—  Je  ne  le  souhaiterais  pas  à  mon  plus  mortel  ennemi  ! 


452  SOU 

Lii'c  limviiio,  (Milciidrc  iiiiê  Irajïédie,  iii.il  dînci'.  \()il;'i  co  (|iie  je 
iKî  S(jiiliailo  pas  à  mes  omioinis.  (Rivnrol.) 

—  Je  vous  eu  soiiliaile!  iMirase  ironique,  adressée  à  ceux  (|ui 
cherchent  l'impossihle. 

Vous  voudriez  bien  un  logement  de  500  francs  sur  les  boulevards? 
Je  vous  eu  souhaite  ! 

Souillard,   vieux    mol,  terme  de  mépris,  dérive  de  mouiller, 
peut-être  de  soiti//e,  sucala,  dérivé  de  sus. 
13our])ier  où  se  vautre  le  porc:  siiile,  étahle  à  porcs. 
De  là  est  venu  souillon,  servante  malpropre. 
Gens  dignes  d'être  soiiillards  de  cuisine.  (Saint  François  de  Sales.) 

Soûl,  anciennement  saoul,  du  \alin  satiillus,  diminutif  de  salu}\ 
rassasié  ;  provençal  sadol  ;  de  là  :  se  soûler  (s'enivrer). 

Des  laros  paternels  un  jour  se  trouva  soûl. 

(La  FoNTArNE.) 

Soulier,  du  latin  solarlns,  dérivé  de  solea. 

—  Au  classique  cothurne  des  Grecs,  succédèrent  chez  les  Romains, 
le  calceus,  qui  ressemblait  beaucoup  à  notre  soulier:  et  la  sandale, 
solea,  qui  garnissait  seulement  la  plante  des  pieds,  où  elle  était 
fixée  par  des  courroies  ou  lanières  de  cuir.  La  chaussure  militaire 
était  la  caliga,  botte  ou  guêtre,  garnie  de  clous. 

Au  Moyen-Age,  les  souhers  dits  à  la  7>o?</f/m^,  terminés  en  pointe, 
furent  en  grande  faveur.  Sous  Philippe-Auguste,  une  ordonnance  de 
1367  interdit  en  France  cette  chaussure. 

En  Russie,  le  peuple  se  sert  de  chaussures  d'écorce. 

—  Il  sait  où  le  soulier  le  blesse. 

Paul-Émile,  patricien  romain,  avait  pour  femme  Papiria,  belle, 
jeune,  riche  et  honnête.  Il  la  répudia  cependant.  Comme  ses  amis 
s'en  étonnaient,  il  leur  répondit  en  avançant  le  pied  :  «  Regardez 
mon  soulier  ;  il  est  bien  fait  et  très  élégant,  mais  il  n'y  a  que  moi  qui 
sache  où  il  me  blesse.  »  (Plutarque,  Vie  de  Paul-Émile,  ch.  Ylll.) 

—  On  dit  aussi  :  trouver  chaussure  à  son  pied,  et  :  être  dans  ses 
petits  souliers. 

Cicéron  dit:  calceos  niutare,  pour:  changer  d'état. 

—  Synonymes  de  souliers  larges  :  bateaux,  boites  à  violon. 
Souliers  trop  étroits  :  souliers  seize  (13  et  3). 

Vieux  souliers  :  gâteaux  feuilletés,  pompe  aspirante,  reniflants. 
On  les  appelle  aussi,   en  argot,  philosophes.    «  Serait-ce,   dit 
Francisque  Micheb  parce  qu'au  métier  de  philosophe  il  n'y  a  que 


sou  453 

do  l'eiiii  ;'i  hoii'o?  Jo  cnMs  (jiio  c'est  pliit(U  à  cause  do  l'analogie 
plioniqiiode  sfinifc  ot  do  sarfiiif,  qui,  ciioz  le  peuple,  est  synonyme 
de  pliilostqjlio.  I 

On  appollo  oucoi'o  souliers  di\-liuit.  des  souliers  racommodés.  Ils 
sont  deu\  l'ois  luuifs. 

Le  fahi'icaut  de  di\-liuil  s'appelle  rihoni. 

—  C'est  un  faiseur  de  vieux:  souliers  :  un  faiiiéaut. 

—  Raltelais  (I,  IG)  joue  sui*  le  mot  soulier. 

il  no  f;nit  |):is  roiniilci-  sur  les  souliers  d'un  mort.  (Voy.  mort.) 

Soulte,  du  l;iliu  suf/iis,  pour  solutun,  payé, 
l'aieiuout  que  l;iil  une  personne  pour  compléter  la  valeur  d'un 
objet  échantié  contre  une  autre  \aleur  supéiicurc. 

Soupçon,  du  latin  sicspicio,  siispicionem. 

oiik'uiniuc  C3t  soupçonneux,  invite  à  le  trahir. 

(VoLTAiiit:,  Zàire.) 

Soupe,  du  .aerina nique  i^nup,  allemand  suppe. 

—  L'Académie  confond  à  tort  dans  une  même  acception  soupe 
et  potage  ;  potage  (ÛQ  pol(irc?)  est  un  terme  générique,  de  tout 
aliment  liquide,  spécialement  confectionné  avec  des  légumes  ;  tandis 
que  soupe  ne  se  dit  que  d'un  potage  au  pain. 

Sojta,  en  espagnol,  est  une  mince  tranche  de  pain. 
Au  xv«  siècle,  soupe  n'avait  pas  chez  nous  un  autre  sens. 
Le  ti'ouvère  Cuvelier  dit  (pie  Duguesclin  ne  prenait  liabituelleuuMit 
dans  ses  repas  qu'une  tranche  de  jtain  (soupe)  trempée  dans  du  vin. 

Ne  a  lalili-  sisl  por  son  rcpastement, 
t'oi-s  une  SDiiiii'  en  \in  pivadre  liastenient. 

—  L'étiquette  voulait  autrefois  qu'on  présentât  au  nouveau  roi 
d'Espagne  trois  soupes  dans  un  gobelet. 

Tallemant  des  Réaux  (tome  Y  des  Historiettes)  parle  d'un  potage 
où  il  n'y  a\;iit  ([iie  deux  pauvres  soupes  qui  couraient  l'une  après 
l'auti'o. 

...Tripet...  lumbanl  rendit  plus  de  quatre  potées  de  souppes,  et 
l'anme  meslée  parmy  ces  souppes.  (Rabelais,  I,  35.) 

—  Plus  ivre  ([u'iine  soupe  ou  une  éponge.  (Proverbe  espagnol, 
wi*"  siècle.) 

—  L'Académie  cite  les  locutions  :  ivre,  mouillé,  trempé  comme 
nue  soupe,  qui  peuvent  bien  s'apiiliqiier  à  du  pain  trempé  dans  un 
liquide  :  mais  comment  oxplitpier  :  iM-e  comme  un  potage  ? 

Les  expressions:   tailler,    tremper   une  soupe,   sont  aussi   des 


454  SOU 

preuves  que  le  mot  soujio  ne  s'applique  qii;'i  un  mélange  de  pain 
avec  un  liquide  ;  que,  par  (-onséquent,  il  n'est  pas  logique  de  dire: 
soupe  de  légumes,  de  vermicelle. 

—  Soupes  de  prime  (Rabelais,  V,  7):  soupes  mangées  à  l'heure 
de  prime,  qui  est  la  plus  matinale.  Rabelais  les  vante  et  les  appelle 
«  grasses  »,  parce  qu'elles  sont  trempées  avec  le  premier  bouillon. 
Les  autres,  qu'il  appelle  «  soupes  de  lévrier  »,  sont  ainsi  comparées 
à  la  pâtée  des  chiens,  à  cause  do  l'eau  qu'on  a  dû  ajouter  au  pot-au- 
l'eu. 

Souper,  dérivé  du  précédent,  l)ien  plutôt  que  de  sopire.  endor- 
mir. 

Repas  du  soir,  qui  doit  être  très  léger,  surtout  pour  les  vieillards. 

Comme  l'indique  son  nom,  il  ne  devrait  consister  qu'en  une 
soupe. 

—  Qui  veut  vivre  sain,  dine  peu  et  soupe  moins.  Ce  proverbe 
liygiénique  est  un  de  ceux  que,  dans  la  pratique,  il  ne  faut  jamais 
oublier. 

Un  célèbre  médecin  disait  :  «  Un  n'est  jamais  venu  m'appeler  la 
nuit  pour  un  homme  qui  n'avait  pas  soupe.  » 

Les  Espagnols  disent  que  celui  qui  vole  le  souper  d'un  vieillard, 
lui  rend  un  véritable  service. 

Ex  magna  cerna  slotnacho  pi  nui. rima  jnrna  : 
Ul  .ns  nocte  lei'is,  sit  tibi  aena  brecis. 

(École  (le  Salerne.) 

Uinons  peu  et  ne  soupons  guères. 
Et  nous  vivrons  plus  que  nos  pères. 

—  Le  souper  était  autrefois  le  principal  repas:  l'heure  a  varié 
de  0  heures  à  minuit. 

Au  xviiie  siècle,  les  soupers  eurent  beaucoup  de  vogue  ;  ils 
avaient  lieu  de  nuit,  et  s'appelaient  «  petits  soupers  ». 

Soupir,  du  latin  suspirium. 

Les  enfants  de  l'air.  {Dictionnaire  des  Précieuses.) 

—  Pousser  un  soupir  à  renverser  les  meubles.  (Comte  de  Forbin.) 
Soupirer  comme  un  soufflet  de  forge. 

Cette  grosse  femme  poussa  un  soupir  à  fendre  du  bois. 
Cette  aimable  dame  poussa  un  long  soupir,  comme  si  elle  venait 
de  s'éveiller.  (Boccace,  Décoméron.) 

—  Cœur  content,  soupire  souvent.  Cœur  qui  soupire,  n'a  pas  ce 
qu'il  désire.  Proverbes  contradictoires. 


sou  4oo 

Souple,  (lu  l;i(iii  si//)ji/<'.i':  ;iiici('ii  fr;inr;iis  siijifu/cr,  être  souple. 
Soiiplo  comme  un  L:;ml.  ...coinine  l'osier,  ...coiiim»^  une  couleuvre. 
Cohihrino  inijenio  (IMaute)  :   d'esprit  souple. 
AuricK/a  /ii/iina  Nio//ior  (Ckèvon):  plus  souple  que  le  lias  de 
l'oreille. 

Souquet,  du  latiu  super  tjita  {>.). 

La  lumuc  uu'surc  :  la  l'éjouissauce  que  le  liouclier  ajoute  pour 
l'aire  Iréituclier  la  halance. 

Source,  de  raucieii  participe  de  sourdre  (sursiun),  doublet  de 
sur;/ h-,  laliu  surycrc.  provençal  sorger. 

Sourd,  du  latiu  sunlus,  de  sordes,  ordure:  comme  si  l'on  avait 
les  oreilles  bouchées  par  des  ordures. 

—  Les  sourds  de  naissance  sont  en  même  temps  muets,  non  par 
suite  de  l'imperfection  de  l'organe  de  la  parole,  mais  parce  qu'ils 
n'ont  jamais  entendu  parler. 

—  Sourd  comme  le  destin.  ...comme  un  pot. 

—  On  appelle,  par  extension,  bruit  sourd,  un  bruit  voilé  :  Cœcum 
murmnr.  (Virgile.) 

—  Jouer  en  sourdine  :  avoir  un  caractère  sournois. 
Ou  (lit  aussi  :  une  douleur  sourde. 

Souricière,  de  souris,  latin  sorex,  soricem. 

Au  llguré.  piège  tendu  parla  police;  lieu  surveillé  par  des  agents; 
tapis  franc,  fréquenté  par  les  voleurs  et  les  repris  de  justice. 

On  appelle  aussi  souricière  le  dép(")t  des  prévenus,  à  la  préfecture 
de  police. 

Souris.  (Voy.  le  précédent.) 

—  Souris  qui  n'a  qu'un  trou  est  ltient()t  prise. 

Moult  a  souris  povre  recours 

Et  on  içraïuj  péril  la  drugo  (fuite). 

Oui  M'a  (ju  lui  perlais  à  refuge. 

[Roman  de  la  Rose.) 

Qudsi  fiorc.t:  Itodie  pcrii  ! 

(TtRE.NCE,  Eunuque,  V,  7.) 

(Je  suis  pris  comme  une  souris.) 

La  montague  eu  travail  eafanle  une  souris. 

(La  Fontaine.  ) 
Parlarienl  inonles,  nuscctur  ridiculus  mus. 

(HOPACE.) 


456  SPH 

Souvenir,  du  lilin  suboenire. 

—  Il  m'en  soii\iciil  aussi  pou  fjiic  de  ma  première  (■iiemisc. 

Ma  foi,  s'il  inCii  soiiNitiil,  il  ne  iii"en  soiivioiil  }<iièrc. 

(Tll.    CoiIXEll.l.K.) 

Souvent,  du  lalin  si/h/nde,  successivement:  provençal,  soren. 

Spadassin,  de  l'italien  spadaccino,  brcUeur  ;  de  s/iadn,  épéc. 

Synonyjues  :  hi-elleni',  duelliste,  gàte-cliair. 

Spadassin  à  gages  :  assassin,  bravo,  chevalier  du  poignard. 

Spécifique,  du  latin  species. 

Se  dit  des  médicaments  qni  ont  une  action  spéciale  sur  un  organe, 
qui  guérissent  une  maladie  particulière,  comme  le  quinquina  qui 
est  nn  spécifique  contre  les  lièvres  intermittentes. 

Spectacle,  du  latin  spec/aculum,  de  spec/are,  regarder. 
Au  même  radical  se  rapportent  :  spectre,  spéculation,  suspect, 
sceptique. 
A  Rome,  on  appelait  les  gradins  du  théâtre  spectaculu. 

—  Du  pain  et  des  spectacles!  Panem  et  circenses. 

Cette  maxime  politique  était  souvent  citée  par  Aurélien,  qui 
croyait  les  deux  choses  nécessaires  pour  maintenir  le  peuple  dans 
la  soumission.  Il  disait  aussi  qu'  «  il  n'y  avait  rien  de  plus  aimable 
que  le  peuple  romain  quand  il  était  bien  nourri  ». 

Spectateur  solitaire.  Amateur  de  spectacles,  qui,  pour  payer 
moins  cher  sa  place,  entre  au  théâtre  dans  les  rangs  de  la  claque, 
sans  être  obligé  de  claquer.  (L.  Larchey.) 

Spectres,  figures  fantastiques,  fantômes  qui,  dit-on,  rappellent 
les  morts  tels  qu'on  les  a  connus  pendant  la  vie. 
Cette  croyance  superstitieuse  remonte  au  paganisme. 

Sphinx,  du  grec  sphiggo,  serrer,  étrangler. 

Animal  fabuleux  que  Junon  créa  pour  se  venger  des  Thébains. 
Il  proposait  aux  passants  des  énigmes,  et  les  dévorait  aussitôt,  s'ils 
n'en  donnaient  pas  l'expUcation. 

11  proposa  l'énigme  suivante  à  OEdipe,  qui  la  devina  :  «  Quel  est 
l'animal  qui,  le  matin,  a  quatre  pieds,  deux  à  midi  et  trois  le  soir?  — 
C'est  l'iiomme.  » 

—  Le  sphinx  d'Egypte,  au  buste  de  vierge  perdu  dans  les  reins 
puissants  du  lion,  était  le  symbole  de  la  religion,  à  cause  de  l'obs- 
curité de  ses  mystères.  Par  l'asssniblage  de  la  tète  humaine  avec  le 


STA  457 

corps  du  lion,  il  siLiiiilhiit  l;i  force  inoralc  iinio  ;'i  la  (orce  physique, 
et  e\|iriiiiait  ainsi  l'idre  (b»  iiiaitrc  et  seigneur. 

Spiritisme,  du  latin  spiritus,  esprit. 

Croyance  à  l'intervention  surnaturelle  des  esprits,  qui  pourraient 
être  évoqués  par  certains  individus  appelés  médiums,  et  répondre 
à  toutes  les  (piestions  qu'on  leur  adresse. 

Spleen,  mot  aiiulais  venu  du  ,urec  splen,  rate. 

Sorte  d'hypocondrie  profonde,  qui  consiste  en  un  état  de  consomp- 
lion  engendré  par  la  mélancolie,  et  caractérisé  par  la  tristesse,  le 
dégoût  de  la  vie  et  de  toute  ciiose. 

Son  uoni  vient  de  ce  qu'on  a  placé  longtemps  daus  la  rate,  la  liile 
noire,  qui,  disait-on.  en  réagissant  sur  le  cerveau,  déterminait  les 
accidents  de  tristesse. 

Cette  théorie,  que  Cl.  Bernard  a  expliquée,  sinon  rélialiilitée,  était 
vraie  en  principe,  dans  ce  sens  que  le  plaisir  causé  par  des  émo- 
tions douces  et  agréables,  est  le  remède  souverain  du  S[)leen,  et 
s'exprime  encore  par  l'expression  familière  :  se  faire  du  bon  sang. 

Passant,  ci-git  Rosbif,  ûcuyer, 
Le(iiii;'l  mtiiu'iil  pDiir  se  drscnnuycr. 

(Kj)itai)he  d'un  Anglais.) 

Stabat,  mot  latin. 

Pi'ose  célèbre  qui  commence  par  ces  mois  :  Stabat  mater  dolo- 
rosa.  Elle  séchante  le  dimanche  delà  Passion,  au  salut,  et  rappelle, 
dans  un  style  plein  de  mélancolie,  les  souffrances  de  la  Sainte-Vierge 
pendant  le  crucifiement  de  son  tils. 

Le  Slabat  est  attribué  au  pape  Innocent  111,  et.  avec  plus  de  pro- 
babilité, au  frère  Jacopone  Todi,  moine  franciscain,  au  xiv'  siècle. 

Le  Slabat  a  été  mis  en  musique  par  les  plus  grands  maîtres,  tels 
que  Pergolése,  Hœndel,  Bossini. 

Statistique,  du  grec  staticein,  constater  ;  plut()t  que  du  latin 
status. 

Moreau  la  définit  :  «  La  science  des  faits  sociaux  exprimés  par  des 
chifires  ;  science  dans  laquelle  on  étudie  un  pays  sous  le  rapport  de 
l'étendue,  de  la  population,  de  l'industrie,  etc.  » 

Ce  mot  est  récent,  et  date  de  17(58,  quoique  la  chose  fût  pratiquée 
déjà  avant  cette  époque. 

—  Un  décret  du  l'''  janvier  1852  a  créé  dans  cliaque  chef-lieu  de 
canton,  une  statistique,  dont  les  travaux  sont  centralisés  au  Minis- 
tère de  l'Intérieur. 


4o8  STi: 

Statue,  (lu  l-iliii  slalua.  de  slahio,  ('•lo\or. 

—  C'csl  iiiic  licllc  st;itii(' :  iiiic  licllc  personne.  s;ins  esprit. 

JiL'lk'  lèk',  ...iii.'iis  (le  cervelle  iKiint. 

|f.  \    l'o.NrAINK.) 

Immobile  coinnic  une  statue,  ...conmie  ini  terme. 

Liijiis  (jiiiil  sliis  y 

(■I'kiikmje). 

Muet  cninuie  nue  statue.  (Voy.  ro/ossc] 

—  La  calliédrale  de  Milan  contient  0.700  statues  en  juarjjre. 
(Th.  Gautier.) 

Statu  quo,  mots  latins,  employés  pour  signifier  qu'une  chose 
reste  dans  le  même  état  qu'auparavant  :  in  eodem  slatn,  (juo  nnte. 

Steeple-chase,mot  anglais,  àQ.sieeplc,  clocher, et fA«it',  chasse. 

Course  à  cheval,  qui  se  fait  en  aUant  à  travers  champs,  vers  le  but 
indiqué,  en  franchissant  toute  espèce  d'obstacles  :  haies,  buissons, 
fossés,  cours  d'eau. 

Stellionat,  du  latin  sit'lliondius,'  fourbe  ;  de  slellio,  lézard 
tacheté,  qui  se  dissimule  ou  change  aisément  de  peau... 

Fraude  qui  consiste  à  veudre  la  même  chose  à  deux  personnes:  à 
faire  un  paiement  avec  des  deniers  qui  ne  vous  appartiennent  pas  ; 
à  substituer  une  marchandise  à  une  autre;  à  vendre  ou  à  hypothé- 
quer une  chose  dont  on  n'est  pas  propriétaire. 

Stentor,  origine  httéraire. 

Un  des  guerriers  qui  allèrent  au  siège  de  Troie.  Sa  voix,  plus  écla- 
tante que  l'airain,  faisait  plus  de  bruit,  à  elle  seule,  que  cinquante 
hommes  criant  ensemble.  Elle  servait  de  trompette  à  l'armée  des 
Grecs.  (Iliade,  V,  785.) 

Stoitorc  daiiiosior. 

(JuvÉ.NAi.,  Salire,  XUI.) 

Stentor  n'eust  oncque  telle  voix  à  la  bataille  de  Troye.  (Rabe- 
lais, 1,  23.) 

Stercoraire,  du  latin  slercus,  stercoris,  excrément. 

...Les  populations  stercoraires  de  toutes  les  grandes  villes  d'Italie 
et  du  Levant...  Certaines  villes  du  Midi  de  la  France  sont  aussi 
peuplées  de  stercoraires  humains. 

L'homme,  animal  stercoraire,  qui  dépose  ses  ordures  dans  tous 
les  coins  des  rues  et  des  maisons. 

Stérile,  du  latin  slerilis. 


stipuler,  du  latin  s//j)n///.  paille,  de  sf/po,  foider,  oiiilialler  ; 
nialière  d'emNallaLio.  dOi'i  sfi/jia,  é[ou\)G,  s fip/ùjue,  qui  constipe. 

—  Sn'pi(/i'>\  (■"était  spécialement  lier  deux  personnes  dans  les 
conclusions  d'un  niarclié,  en  brisant  une  paille  dont  cliaque  inté- 
ressé gardait  un  morceau. 

Pecunia  siîpulnfa  (Gicéron)  :  somme  convenue. 

Font  meirat  al  nosfre  senJior,  et  feront  la  pahnada  po' 
fevnm  stipulât lo  de  rot.  {Vices  et  Vertus.)  Font  marché  avec 
notre  sei.uneur,  et  frappent  la  paumée  pour  ferme  stipulation  de 
promesse. 

Stock,  mot  aniilais,  to  stoclc,  emmagasiner. 
Huantité  de  marchandises  qui  reste  en  entrepôt,  dans  un  dock  ou 
dans  des  magasins  générau.x. 

Stoîque,  étymologie  historique,  du  grec  stoa,  portique,  galerie 
cou\erle,  parce  que  Zenon,  chef  de  cette  secte,  enseignait  sous  un 
portique. 

Stoi'cien,  celui  (pii  professe  le  stoïcisme,  doctrine  dont  la  hase 
est  une  morale  très  sévère. 

—  Courage  stoîque.  La  devise  des  stoïques  ou  stoïciens  était  : 
Sustine  et  abstine  :  soulîrir  et  s'abstenir. 

Zenon  se  coupa  la  langue  avec  ses  dents,  et  la  cracha  au  visage 
du  tyran  Xéarque,  contre  lequel  il  avait  conspiré,  et  qui  voulait  le 
forcer,  par  la  torture,  à  dénoncer  ses  complices. 

—  Plutarque  compare  les  stoïciens,  à  cause  de  leurs  vertus 
outrées,  à  des  enfants  qui  tâchent  de  sauter  au-delà  de  leur  ombre. 

Les  stoïciens  sont  des  fanfarons  de  morale. 

Stratégie,  du  grec  stratèges,  général  d'armée. 

L'art  de  diriger  les  armées. 

De  là  viennent  aussi  :  route  stratégique,  stratagème. 

Stupeur,  de  stupor,  de  stupeo,  être  engourdi. 

Stupide  a  la  même  origine  :  interdit,  immobile  de  frayeur. 
Je  (icmcuro  slupidc... 

(Cori.NKlLLE.) 

A  pris  le  sens  de  sot. 

Style,  du  grec  stulos,  par  le  latin  slijlus,  poinçon  aplati  à  une 
extrémité.  La  pointe  servait  à  tracer  les  caractères  sur  des  tablettes 


460  STY 

de  cire;  l'extrémité  aplatie,  à  les  efTacer.  De  l;i  l'expression  atyliim 
verlere,  retourner  le  slvle,  elïacer. 


Sii'jte  slijlnm  vcrUis  .. 


(H()Ii\i;k,  Salirex  I,  X.  72.) 


—  Le  style  est  le  vèteineiil  de  l'idée. 
Le  style,  c'est  l'honiine  même.  (Bull'on.) 

—  1"  Synonymes. 

Style  alTecté,  emphatique,  l)Oiir.-^on(1é,  ampoulé  :  Pliœbus. 

Grands  mois:  [jliraséoldiiie  i)()iiip(;iise. 

Un  air  de  lla.ueohît  joué  siii-  Topliicléide. 

Exemples.  —  Il  existe  un  [)oéme  intitnlé  :  la  Mafidclcinc  an  désert 
de  la  Sainte-Baume,  en  Provence,  poème  spirituel  en  don/.e  cliants 
(Lyon,  1694,  in-12),  par  Barthélémy,  canne,  sous  le  pseudonyme 
de  Pierre  de  Saint-Louis.  L'auteur  y  appelle  les  rossi.-inols,  des  luths 
animés,  des  orgues  vivantes,  des  sirènes  volantes.  Il  apostrophe  les 
dames  sur  leur  tenue  à  l'église  : 

Vous  faites  à  l'église  avecf|ue  voire  teste 
Ce  que  sur  le  cloclier  faisait  la  girouette. 

Puis,  après  leur  avoir  reproché  leur  amour  des  cartes,  il  dit  que 
la  Magdeleine 

Pour  le  grand  roi  des  cœurs  couchait  sur  le  carreau. 
Ses  yeux  sont 

...les  bénitiers  (J"où  coule  l'eau  liénite 
Qui  chasse  le  démon  jusqu'au  fond  di'  son  gite. 

Voici  comment  Magdeleine  parle  de  son  sein  : 

Sein,  dont  mon  cjeil  enflé  fit  un  \allon  de  larmes. 
Quand  ses  monts  désenfles  perdirent  tous  leurs  charmes. 

—  Les  chevaliers  combattaient  pour  l'amour  de  l'honneur,  et  en 
l'honneur  de  l'amour.  (Féhcien  Salva.) 

La  marquise  de  Boufllers  était  la  reine  de  la  main  gauche  de  ce 
roi  sans  royaume,  Stanislas,  qui  avait  donné  sa  tille  à  un  royaume 
sans  roi.  (A.  Houssaye,  le  Roi  Voltaire.) 

I^e  voilà,  ce  poignard  (jui  du  sang  de  son  maître 
S'est  souillé  làcliement  !  Il  en  rougit,  le  traître  ! 

(  l'iiéophile  DE  ViAu,  l'ijnimc  et   T/iisbc.) 

L'Arétin  écrit  à  sa  maitresse.  la  Franceschina,  que  sa  beauté  est 
la  dorure  qui  enveloppe  un  excellent  gâteau  de  frangipane  ;  mais  la 
beauté  trompeuse  des  autres  femmes  u'est  que  la  feuille  d'argent 
qui  recouvre  des  pilules  empoisonnées. 


STY  461 

Je  me  déliais  dans  le  dt'-lroit  de  la  dilliculté,  et  je  \uis  sans  cesse 
le  niiaoe  de  1  aliaiuloii  jeter  sur  mon  étoile  son  ombre  sinistre. 
(.1.  .la  ni  II.  1 

Voiture   éci'ivait    à    M l'aidrl    (|iril    s'était    eiiiliai-(|ii(''   sur  nn 

vaisseau  char.ué   de  sucre,  li  sera  coulit  à  siui  arri\(''e,  et  s'il   fait 
nanfra.ue,  il  aura  du  moins  la  consolation  de  mourir  en  eau  douce. 

La  lime  de  la  conversation  aiguist^  la  linesse  de  l'esprit.  (L'Arétin.) 

L'aime,  indite  et  célèbre  université  que  l'on  vocite  Lntèce. 
(Rabelais,  11,  G.) 

2°  Style  brillant. 

Cérntti  fait  des  pbrases  luisantes.  C'est  le  limaçon  de  la  littéra- 
ture :  il  laisse  nne  trace  arpentée;  mais  ce  n'est  que  de  l'écume. 
(H  i  va  roi.) 

'i"  Style  burlesque.  (Voy.) 

4°  Style  de  cbarlatan. 

Avec  trois  gouttes  de  mou  élixir,  j'ai  eu  l'honneur  de  guérir 
Sa  Hautesse  le  dey  d'Alger  d'une  indigestion  de  blé  de  Turquie. 

5"  Style  ennuyeu.x. 

Rivarol  a  dit  :  «  Condorcet  écrit  avec  de  ro})ium  sur  des  feuilles 
de  plomb.  » 

Tous  les  genres  .sont  jiuiis,  liors  le  geiu'e  einuiyeuv. 

G"  Style  épistolaire. 

Si  j'en  crois  l'almanacb,  il  n'y  a  que  deux  jours  que  je  suis 
séparé  de  ^ous  :  si  j'en  crois  mon  canir,  il  y  a  deux  siècles. 

7"  Style  fleuiM. 

L'abbé  Bernis,  à  cause  de  son  style  I1eui-i,  avait  été  surnommé 
«  Babct  la  Bouquetière  » . 

8°  Style  à  la  Janot. 

Un  a  beaucoup  parlé  du  singe  de  l'impératrice  :  c'est  une 
guenon.  {Gazette,  3  mars  1870.) 

9°  Style  de  journaux  (style  créé  par  Josepb  Prudhomme). 

Par  suite  de  la  tàcbe  que  j'assume,  je  ne  me  dissimule  pas  la 
responsabibté  qui  m'incombe. 

Cet  accident  a  produit  une  douloureuse  sensation. 

Un  dél)utant  all'rontant  pour  la  première  fois  le  feu  de  la  rampe. 

La  justice  poursuit  le  cours  de  ses  investigations. 

Les  voyageurs  sont  tenus  d'obtempérer  aux  injonctions  de  l'au- 
torité. 

L'hydre  de  la  révolution  ;  la  soldatesque  elfrénée  ;  le  verdict  de 
la  postérité  ;  le  vaisseau  de  l'État. 


462  STY 

10"  Slylc  l;ic()iii(|ii('.  (Voy.) 

11»  Slylt'  inaciiroiiKiiie.  (Voy.) 

12'  Slylc  iiiyllioloiiiqiK;. 

L;i  lyre  d'AinpIiion  :  la  laiilcnic  do  Diouviie  :  lo  caducée  de 
Mcrciii-c  ;  la  troiiipcllc  de  la  Reiioiniiiée ;  les  ciseaux  des  Parques; 
le  lil  de  Procusle. 

13"  Style  obcur.  (Voy.  (j/ilinuiiias.) 

l'i."  Style  ordiirier  (dit  des  natiiralisles). 

Style  où  le  mot  propi'e  est  toujours  inalproi)re.  (Voy.  Cam- 
bronne.) 

loo  Style  à  la  La  Palisse. 

Avant  que  la  foule  fût  arrivée,  on  circulait  lii^rement  dans  les 
salons  des  Tuileries.  {Gazette  de  France,  février  1870.) 

10°  Style  en  proverbes. 

Je  voudrais  une  femme  qui  eût  le  cœur  sur  la  main  :  qui  sût 
quelquefois  mettre  sa  langue  dans  sa  poche  ;  qui  eût  le  bras  long, 
un  peu  de  plomb  dans  la  tète,  et  celle-ci  pas  trop  près  du  bonnet. 
Je  crois  qu'alors  notre  ménage  serait  sur  un  bon  pied. 

17''  Style  réaliste. 

Le  Petit  Marseillais  du  19  avril  1877  raconte  que  M.  Tbiers, 
qui  vient  d'entrer  dans  sa  SI™*'  année,  se  rase  lui-même,  qu'il  passe 
avec  dextérité  le  rasoir  sur  le  cuir,  et  qu'il  le  promène  sans  bésita- 
tion  sur  toute  sa  ligure,  car  on  sait  qu'il  ne  porte  ni  favoris  ni 
moustaches  ;  et  cela,  sans  se  faire  la  plus  légère  entaille.  Il  lui 
arrive  même,  pendant  l'opération,  de  continuer  une  conversation 
avec  un  visiteur;  cela  ne  le  dérange  ni  ne  le  distrait.  Il  parle,  il 
sourit,  il  s'anime,  et  on  le  voit  quelquefois  quitter  la  croisée  et  la 
glace  devant  laquelle  il  se  rase,  pour  s'avancer,  le  rasoir  à  la  main, 
et  la  figure  barbouillée  de  savon,  vers  son  interlocuteur,  pour 
discuter  de  plus  près  et  triompher  de  ses  objections. 

18"  Style  sentimental.  (Voy.  pathos.) 

19°  Style  sul)lime. 

Le  sublime  touche  au  ridicule  ;  le  pathos  est  la  parodie  du 
pathétique,  et,  même  après  les  larmes  d'attendrissement,  on  finit 
toujours  par...  se  moucher. 

Styx,  du  grec  stux,  horreur. 

Fleus^e  d'Arcadie,  regardé  comme  fleuve  des  enfers. 

—  Jurer  par  le  Styx.  Ce  fleuve,  qui  faisait  neuf  fois  le  tour  des 
enfers,  était  redouté  des  dieux  eux-mêmes  ;  ils  ne  violaient  jamais 
le  serment  qu'ils  avaient  fait  par  le  Styx. 


Firn  463 

Suaire,  du  kilin  sun,  cuiulrr  :  un  l)ieii  [)liit(U  de  siidaritini. 

Moiiclioir  pour  s'essuyer  le  visage,  et  qui  plus  lard  servit  à 
euvoloppor  i;i  tète  du  mort,  avaut  de  l'ensevelir.  Dans  la  suite,  le 
suaire  s'élargit  pour  envelopper  tout  le  coi'ps. 

Sub,  préposition  latine  qui  niaicpie  l'infériorité. 
A  formé  un  préfixe,  qui  modifie  sa  consonne  finale,  par  assimi- 
lation, dans  des  mots  romme  :  succomber,  suagércr,  supporter. 
Devenu  sous  en  français  :  sous-entendu,  soutenir,  soutVrir. 

Subreptice,  du  latin  suh  et  ropere,  prendre  en  dessous. 
Terme  de  jurisprudence. 
Se  dit  des  faveurs  ol»tenues  sur  un  faux  exposé. 
Subrepticement  :  furtivement,  illicitement. 

Substantif,  si/hs/fnifiruin  {nomon). 

Mot  variable  (pii  sert  à  désigner  l'être,  par  opposition  au  nomcii 
adjerf/rin/i.  f[ui  désigne  la  manière  d'être. 

Subtil,  du  latin  subiilh.  qui  passe  dessous,  se  dérobe. 
Synonymes  :  délié,  lin,  rusé. 

Sucre,  de  l'arabe  sokkar,  qui  a  donné  le  latin  saccliarum. 

—  La  canne  à  sucre  est  originaire  de  l'Inde.  Le  mot  grec 
sakkaron  et  le  latin  saccharum  dérivent  peut-être  du  sanscrit 
sarkaria,  gravier,  débris,  c'est-à-dire  sucre  solide,  de  même  que 
le  sanscrit  kandali  signifiait  sirop  sécbé,  ou  candi. 

—  Arrien  nomme  le  sucre,  miel  de  roseau.  Dioscorides  l'appelle 
le  miel  solide.  Tzelzis,  au  xii''  siècle,  nomme  la  canne  à  sucre 
ylijcijcalamos.  équivalent  de  nieUlna  canna  ou  canna  mellis, 
noms  donnés  à  la  canne  dans  la  basse  latinité. 

—  Tliéoiiliraste  parle  de  roseaux  qui  font  du  miel  sans  abeilles. 

Qnique  hibnnt  tencra...  nrundinc  -succos. 

(LucAiN,  P/iar.<a/e.) 

(Ceux  qui  boivent  la  douce  liqueur  des  tendres  roseaux.) 

—  Pline  {Illsloire  naturelle)  parle  le  premier  du  sucre  comme 
médicament  :  «  L'Arabie  produit  le  saccliarum  ;  mais  il  est  meilleur 
dans  l'Inde  :  on  ne  l'emploie  qu'en  médecine.  » 

—  La  cristallisation  du  sucre  paraît  due  aux  Arabes,  qui,  vers 
lloO,  transportèrent  en  Sicile  la  culture  de  la  canne  et  les  procédés 
de  la  fabrication  du  sucre. 

—  En  France,  les  premières  raffineries  furent  établies  à  Nantes, 
en  1770,  et  plus  tard  à  Orléans  et  à  Paris. 


464  SUF 

l'iii  177S,  les  fi't'TOS  Hoiiclirric.  de  |{oi'(l(';iii\.  iicrl'cctioiiiH'-n'nl  le 
ral'liiin.uo  et  ohtinroiit  00  0/0  du  siicn'  luiil.  dont  on  nohtcn.iit 
jiiS(iirnloi-s  que  ()7. 

Vers  J(S10,  le  Hlociis  coiilinciilMl  doiiii;i  iiaissaiire  nu  snrre  indi- 
ut'iic  de-  Ijelterave,  dont  la  production  était  devenue  si  considérahle, 
en  JS'il{,  f|iie  lo  aoiivcrnomcnt  en  proposa  la  suppression  par  voie 
dindeninité. 

—  Le  sucre  ne  fait  de  mal  qu'à  la  bourse.  Ce  proverbe,  très 
accrédité  dans  le  peuple,  est  démenti  par  la  science,  qui  affirme  et 
démontre  que  le  sucre  est  écliaulfant. 

—  C'est  un  apothicaire  sans  sucre  :  il  manque  des  choses  les 
plus  indispensables  à  sa  profession. 

—  Le  sucre  a  été  employé  dans  les  pharmacies  bien  avant  d'être 
d'un  usage  aussi  universel  qu'aujourd'hui. 

Ce  n'est  pas  une  substance  uutrili\e,  mais  respiratoire.  Il  fournit 
dans  l'acte  de  la  digestion,  les  éléments  combustibles  qui  entre- 
tiennent la  source  de  la  chaleur  et  la  production  de  l'acide  carbo- 
nique. 

—  Le  mot  sucre,  dans  la  langue  populaire,  remplace  quelquefois 

un  mot  ordurier. 

Et  l'on  vous  renverra 
Faire  du  sucre  et  eœtera. 

(Coi.i.i-:,  C/iansons.) 

Au  temps  du  Blocus  continental,  une  caricature  représenta  le 
roi  d'Angleterre  jetant  de  l'autre  côté  du  détroit  une  betterave,  et 
s'écriant  :  «  Va  te  faire...  sucre  !  » 

—  Morceau  de  sucre  trempé  dans  l'eau-de-vie  :  canard. 

—  Pain  de  sucre  :  enfant  de  chœur  (Vidocq).  Allusion  à  sa  petite 
taille  et  à  sa  robe  blanche. 

Sucrée.  Faire  la  sucrée  :  la  prude,  la  bégueule. 

Ne  fais  point  tant  la  sucrée.  (Molière,  Georye  Dandin.) 

Suer,  du  latin  sudai'e,  provençal  sudar. 
Synonymes  :  suer  sang  et  eau  ;  suer  d'ahan  ;  être  tout  en  nage. 
(Voy.  eau.) 

Suffisance.  (Voy.  outrecuidance.) 

La  suffisance  est  Tamour-propre  des  autres  (?). 

Les  gens  suffisants  sont  toujours  insuffisants. 

Suffixe,  du  latin  sub  et  fixas,  ajouté  à  la  suite. 

Syllabe  ou  lettres  qu'on  ajoute  à  la  suite  d'un  radical,  pour  en 


sur  465 

niodilier  l;i  siuiiiliciition.  S'oppose  h  pi-r/irc.  (f/iiii  et  r.iiilro  sont 
des  ff/'/îj'c's.) 

Suicide,  foniié  des  éléiuenls  latins  .sui,  de  soi,  el  rœ//erc,  idée 
de  iiietti'e  en  pièces,  tuer,  qnl  se  retronve  dans  homicide. 

—  C'est  l'alihé  Desfonlaiiies  qui  créa  ce  mot,  en  1738,  à  l'iinila- 
lion  de  homicide.  Les  anciens  employaient  des  périphrases  pour 
exprimer  l'idée  de  suicide  :  se  faire  mourir,  se  tuer,  se  donner  la 
mort.  Suicide,  mot  très  inlelliuihie.  est  plus  rapide  dans  le  lan- 
«iage,  et  exprime  parl'aitemenl  la  pensée.  .Mais  le  verlie  se  suicide}' 
constitue  un  pléonasme  :  je  me  suiciderai  (ji;  me  tuerai  soi-même), 
est  absurde. 

—  L'iionune  est  le  seul  auiuial  (pii  se  douue  la  mort. 

—  Platon  (/V/t'V/o/<)  c(Hi(la ni iu>  le  suicide,  commo  l'acte  d'un  lâche 
qui  déserte  son  poste. 

Sénèque  et  les  stoïciens  l'exalleut  comme  un  acte  héroïque. 

La  religion  catholique  le  condamne,  comme  un  acte  de  rébellion 
contre  la  volonté  divine,  et  refuse  au  suicidé  la  sépulture  en  terre 
sainte. 

—  H  faut  être  brave  pour  commettre  la  lâcheté  du  suicide. 

—  Le  suicide  peut  être  attribué  à  des  causes  très  diverses  et 
apprécié  difïéreminent  selon  ses  causes. 

Il  peut  être,  chez  Judas,  la  peine  que  le  criminel  s'inflige  à  lui- 
même.  Chez  Caton  et  Brutus,  c'est  l'eflet  du  désespoir  d'une  grande 
âme  ;  chez  les  veuves  du  Malabar,  un  acte  de  dévoùment,  ou  le 
résidtat  d'un  préjugé  barbare  :  ou  enfin  chez  un  Chatterton  ou  un 
Werther,  le  fruit  du  dérèglement  de  l'imagination.  Le  plus  souvent 
il  faut  l'attribuer  à  la  foUe. 

Suisse,  colonie  grecque  de  Marseille,  s'appelait  Helvelia  au 
temps  des  Romains,  et  a  pris  le  nom  de  Suisse  de  celui  du  canton 
de  Scliwitz,  où  se  donna  le  premier  comljat  qui  assura  la  liberté 
du  pays. 

—  Nom  donné  aux  portiers. 

Depuis  Louis  XI  les  Suisses  ont  servi  la  France,  et,  sous 
Louis  XIV,  on  a  appelé  suisses  les  portiers  des  grandes  maisons^ 
parce  qu'ils  étaient  très  recherchés  pour  ces  fonctions.  Une  dépêche 
du  18  juin  17^2  prescrit  aux  intendants  des  arsenaux  de  remplacer 
les  gardiens  des  portes  par  des  Suisses  de  nation. 

Ce  larj^e  Suisse  à  cheveux  blancs 
Qui  ment  sans  cesse  à  votre  porte. 

(VoLIAlliK.) 


4()(i  SUf 

—  Mercier  {Tuhloau  de  Parla,  rli.  370)  dit  :  «  Portier  et  Suisse 
sont  (Icvemis  synonymes  en  France...  Ces  Suisses  conservent  leiii-s 
mœurs  étrangères  an  milieu  de  Paris.  Leurs  manières  sont  loii- 
jours  un  peu  brutales;  mais  le  Suisse  le  plus  urossier  devient  poli 
vers  le  temps  des  éti-ennes. 

«  Aux  portes  des  jardins  royaux,  les  Suisses  ne  laissent  passer 
ni  domestique,  ni  servante,  ni  soldat,  ni  ouvrier,  et  les  livrées  de 
l'indigence  sont  repoussées  avec  dédain.  Les  filles  de  joie,  qui,  à 
l'entrée  de  la  nuit,  se  glissent  dans  les  jardins,  sont  renvoyées  par 
les  Suisses  ou  même  arrêtées,  quand  il  y  a  scandale;  mais  plusieurs 
obtiennent  grâce  et  vaguent  librement,  quand  elles  ont  su  partager 
avec  le  portier  leur  bénéfice  nocturne.  » 

Point  (rargcnl,  jtoini  de  Suisse. 

(Kacinh,  Plaideurs.) 

(On  n'a  rien  pour  rien.) 

Les  Suisses  qui  servaient  autrefois  en  France,  tenaient  beaucoup 
à  être  exactement  payés,  et  leurs  réclamations,  en  cas  de  retard, 
étaient  exprimées  par  ces  mots  :  «  Argent  ou  congé.  » 

Grillon,  dont  Henri  IV  faisait  grand  cas,  mais  qu'il  ne  pouvait 
payer,  lui  dit  un  jour  :  «  Sire,  trois  mots  :  argent  ou  congé.  »  Le 
roi  lui  répondit  :  «  Grillon,  quatre  mots  :  ni  l'un  ni  l'autre.  » 

—  Sous  la  Restauration  (1815),  un  officier  françafs  dit  à  un 
officier  suisse  :  «  Je  ne  voudrais  pas  servir,  comme  vous,  pour  de 
l'argent  ;  nous  autres,  Français,  nous  servons  pour  l'iionneur.  » 
Le  Suisse  lui  répondit  :  «  Nous  servons  tous  deux  pour  ce  qui  nous 
manque.  » 

—  La  devise  des  cantons  suisses  est  :  «  Un  pour  tous,  tons 
pour  un.  » 

Suivre,  vieux  français  seure,  du  latin  barbare  sequere. 
Au  même  radical  se  rattachent  :  obséquieux  et  séquelle,  qui  se 
prennent  en  mauvaise  part;  conséquence,  persécuter,  obsèques,  etc. 

—  Il  y  a  deux  cboses  qui  nous  suivent  malgré  nous  :  notre  ombre 
et  nos  chagrins. 

—  Qui  m'aime  me  suive  I  c'est-à-dire  imite  mes  actions,  me 
seconde. 

Sequi  amicum  ''Gicéron)  :  rester  fidèle  à  son  ami. 

PhiUppe  VI,  de  Valois,  décida  du  sort  d'une  bataille  contre  les 
Flamands,  malgré  l'avis  du  Gonseil,  en  criant:  «  Qui  m'aime  me 
suive  !  » 


SUP  467 

FraïK-ois  h'\  en  IDIo,  ;'i  ITiuc  de  slwA  nn?,  iiiiilM  rot  exemple  ;"i 
I;i  iKitnillo  do  M;n'i,uii;m. 

Lo  diif  do  lirissiir.  |)n"'t  ;'i  clwirLîor  ;ivoc  sa  rav;dorio  un  corps 
onnenii  considrialilc  se  retourna  vers  sa  troupe  ot  rria  :  «  Kn 
avant  !  et  Jean  1...  (pii  ne  me  suit  pas  !  » 

Henri  de  la  Rocliejaqueloin  harangua  ainsi  ses  soldats  au  moment 
de  la  bataille  :  «  Si  j'avance,  suivez-moi  :  si  je  recule,  tuez-nu)i  :  si 
je  meurs,  vengez-moi  !  » 

—  Synonymes  :  filer,  espionner,  surveiller  quelcpiiiu  on  lo  suivant 
pailoiil. 

Sujet,  du  latin  siibjectum,  placé  sous,  inférieur. 

—  Mauvais  sujet.  Cette  locution  semble  en  contradiction  avec  le 
sens  du  mot  sujel,  qui  exprime  l'idée  de  soumission  et  d'obéissance. 
.Mais,  ici,  il  est  pris  pour  liommo  en  général.  L'homme  est.  en  elTet, 
soumis,  assujetti  pendant  toute  sa  vie  aux  inlluoncos  extérieures  ; 
il  est  l'esclave  de  ce  qui  l'environne,  et,  par  conséquent,  un  sujet, 
dans  la  force  du  mot. 

Dans  lo  langage  familier,  l'expression  injurieuse  «  mauvais  sujet»» 
se  prend  souvent  en  bonne  part,  et  quelquefois  c'est  plus  qu'une 
louange,  c'est  une  caresse. 

—  Dans  une  discussion  que  le  Dauphin,  fils  de  Louis  XV,  eut 
avec  M.  de  Choiseul,  premier  ministre,  le  prince  se  mit  à  dire  que, 
s'il  régnait  un  jour,  il  saurait  bien  réprimer  l'orgueil  de  ce  sujet. 
«  11  est  vrai,  Monseigneur,  dit  le  ministre,  que  je  pourrai  devenir 
votre  sujet  :  mais  je  ne  serai  jamais  votre  serviteur.  » 

—  Après  la  mort  do  Louis  XYlll,  lo  docteur  Breschot  dit  à  ses 
aides,  au  momonl  do  faire  lautopsio  :  «  A[)[»rochez  le  sujet.  »  C'est 
lo  uoui  ([u'on  donne  aux  cadavres  dans  les  amphithéâtres.  —  M.  de 
Duras  en  fut  lilossé  et  dit  :  «Je  vous  ferai  remarquer.  Monsieur, 
qu'il  n'y  a  de  sujets  ici  que  ces  Messieurs,  vous  et  moi  :  ces  dépouil- 
les sont  celles  du  feu  roi.  » 

Superflu,  du  latin  super  et  fluere,  déborder. 

Le  sii|U'rflM,  chose  si  inrossairo. 

(Voi.TAlIlK.) 

Supérieur,  du  latin  sujtcrior,  qui  est  au-dessus. 

—  C'est  supérieur  à  tout  :  il  faut  tirer  l'échelle. 

Superstition,  du  latin  sapei^slltio,  super  et  slnre:  ce  qui 
dépasse  les  limites  de  la  croyance  (?). 


468  SUR 

SonlinUMit  do  vénérntion  religieuse,  fondé  sur  l;i  civiinte  on 
ri,mi()r;iii(('. 

—  f.;i  siipcrsliliim.  on  croyance  ;'i  une  puissjince  iinfiginaire,  a 
exei'cé  (le  loiil  I<'iii|is  iiiic  urando  inllneiice  sur  les  coiitiimes  des 
nations. 

Telles  sont  les  croyances  aux  fées  ;  aux  korriganes,  en  Hretagne  ; 
au  drac,  en  Languedoc.  Tels  sont  le  follet,  le  gobelin,  de  Normandie; 
les  sorciers  ;  le  loup-garou;  le  meneur  de  loups,  du  Berry. 

Ajontons-y  les  sortilèges,  la  magie,  la  divination,  les  i)ropliéties 
de  Martin  et  de  Noslradamus  :  la  terreur  causée  par  les  comètes  : 
la  cartomancie,  l'envoûtement,  etc.  (Voy.  treize,  vendredi.) 

—  Poni'  régir  les  l'onles,  il  n'y  a  rien  de  plus  efficace  que  la 
superstition. 

Nu  lia  res  mnllilnd  iiicni  officariiis  rcyil  (pi  a  m  si/jierslido. 
(Quinte-Curce,  liv.  IV,  cli.   10.) 

Supplice,  du  latin  siip})Urhiin,  sup])li('alion. 

Prière  (pii  précédait  l'exécution  d"iin  condamné,  à  Rome. 

—  V\\  dictionnaire  des  dilïérents  supi)lices  pratiqués  chez  tous 
les  peuples,  ferait  frémir  la  nature,  et  montrerait  l'étendue  de  la 
barbarie  et  de  la  cruauté  du  cœur  humain.  (Voy.  knout .) 

Sur,  sus,  préposition  et  adverlie,  de  suj)er  et  snrsum. 
Sus  s'est  conservé  dans  la  locution  en  :<us,  et  dans  rinterjcclion 
or  sus  !  synonyme  de  debout!  alerte  ! 
On  dit  encore  :  courir  sus  à  quelqu'un. 
Sus.  joint  à  (le,  a  donné  dessus. 

—  Sur,  adjectif  (certain),  ancien  sciir.  du  latin  securum. 
Pour  sûr,  il  arrivera  demain. 

—  Sur,  adjectif  (acide),  de  l'allemand  .s-r/^/^r:  d'où  suret.  (Il  serait 
risqué  de  le  faire  venir  de  Suresnes.) 

L'apprendre  est  sour; 
.Mais  le  fruit  est  douceiir. 

Suresnes  (vin  de)  :  mauvais  vin  (vin  sur,  aigre). 

—  Pour  boire  un  verre  de  vin  de  Suresnes,  il  faut  être  trois  : 
celui  qui  le  boit,  et  deux  acolytes  pour  le  soutenir^  si  le  cœur  lui 
manque. 

—  11  y  a  aux  environs  de  Vendôme,  dans  l'ancien  patrimoine  de 
Henri  IV,  une  sorte  de  raisin  qu'on  appelle  su7'en.  Il  produit  un 
vin  blanc  très  agréable,  qui  se  bonitie  en  vieillissant.  Henri  IV 
l'aimait  beaucoup,  et  il  y  a  encore  dans  ce  pays  un  champ  de 


SYB  469 

viiînos  qui  s'appollo  le  dos  (VIItMiri  ÏV.  Plus  tard,  on  a  cru  quft 
c'rlait  le  villauc  do  Surosuos.  pivs  Paris,  qui  avait  |)i-o(luit  le  vin 
fa\()ri  (lu  Ht'aruais  :  c'est  la  réssoniltlauco  dos  iioiiis  qui  a  causé 
cette  eiTi'Ui-. 

—  PieiTO  d'Andeiss,  daus  S(»u  [loèuu'  de  la  lUildilIc  dex  r/'iis, 
nomme  Deuil.  Monliuorency,  iMarly,  Arpenteuil,  mais  ne  dit  rien 
de  Siiresues.  qui  est  aussi  dans  le  voisina.ae  de  Paris  :  ce  (pii  i)rouvo 
qu'au  xiir'  siècle,  ce  vin  n'avait  pas  [)lus  de  mérite  qu'à  présent. 

Surfaire,  de  sur  el  foire. 

—  L(>  P.  Bourdaloue  surfait  dans  la  chaire:  mais,  daus  le  confes- 
siiiiiiial.  il  donne  à  hon  mai'clié. 

Surnom  \iendrait.  selon  Ducanae,  de  ce  qu'autr(M'ois.  dans  les 
actes,  (in  l'écrivait  au-dessus  du  nom. 

Suzanne  (la  cliasle),  oriuine  hildique. 

Suzanne,  femme  de  Joacliim,  très  belle  et  très  vertueuse,  fut 
surprise  par  deux  vieillards  pendant  qu'elle  était  au  bain.  Ils  la 
menacèrent  de  la  faire  condamner  pour  adultère,  si  elle  refusait 
de  les  écoulei'.  Su/aune  jeta  un  ci'i  :  les  deux  suborneurs  l'imi- 
tèrent et  aflirmèreul  ([u'ils  \enaienl  de  la  voir  avec  un  jeune 
homme,  qui  s'était  enfui  aussitôt.  On  la  jugea  et  on  allait  la 
condamm'r  à  mort  :  mais  les  deux  accusateurs  furent  confondus 
par  Daniel,  et  ils  subirent  le  supplice  qu'ils  avaient  injustement 
réclamé  contre  Suzanne. 

Sybarite,  oi'i.uine  péopraitliifpu' :  de  .S'y 6r//v',s-,  ville  de  l'Italie 
méridionale,  dont  les  babitants  étaient  si  voluptueux  que  leur 
mollesse  était  passée  en  proverbe.  Cette  ville  tirait  son  nom  de  la 
rivière  de  Svbaris,  à  remboucbure  de  laquelle  elle  était  bâtie;  ou 
du  grec  sijharis,  luxe(0- 

Svbaris  fut  détruite,  TilS  avant  .lésus-tJbrist,  parles  Grotoniates. 

Les  médailles  de  Svbaris  prouvent  que  les  arts  y  étaient  portés 
au  plus  haut  degré  de  pei-feclion. 

—  Les  Sybarites  n'étaient  occupés  que  de  festins,  de  jeux,  de 
spectacles.  Ils  récompensaient  magnifiquement  les  cuisiniers  qui 
réussissaient  le  mieux  à  faire  des  découvertes  dans  l'art  de  flatter 
leur  palais  et  de  satisfaire  leur  gourmandise.  Ils  bannii-ent  de  leur 
ville  les  coqs,  pour  ne  pas  être  réveillés  par  leur  chant  matinal,  et 
les  artisans  qui  faisaient  du  bruit  en  travaillant.  Un  Sybarite  se 
plaignit  d'avoir  passé  une  mauvaise  nuit,  parce  que,  parmi  les 


470  SVN 

feuilles  de  roses  dont  ét;»it  seim''  <ihi  lit,  il  \  m  .u.iit  inif  i|iii  s'était 
pliée  en  deux. 

—  On  appelle  aujounriuii  sijhnriit'  uu  lioiiiuie  qui  luéne  une  vie 
e\trènieuieut  molle  et  \oluptueuse. 

—  Il  y  avait  chez  les  anciens  les  proverbes  :  Sybaritirn  mensti, 
tal»le  de  Sybaris:  Si/hariticus  sus,  pourceau  de  Sybaris. 

Sycophante,  du  urec  sijinpluintf's.  de  sukf',  ligue,  et  phfiinù, 
uionlror. 

—  Les  Athéniens  avant  défendu  par  une  loi,  d'exporter  les  ligues 
de  l'Attique.  et  une  forte  récompense  étant  accordée  à  ceux  qui 
révéleraient  la  fraude,  des  hommes  pervers  abusèrent  souvent 
de  ce  prétexte  pour  accuser  des  innocents  :  de  sorte  que  le  mot 
si/cophnntf  devint  synonyme  de  délateur  et  de  calomniateur. 

Syl,  sym,  syn,  préfixe  grec,  correspondant  à  runi  du  latin: 
Il  du  grec  sassimile  parfois,  on  s^>  supprime  :  <\métrie\  syUepse, 
symbole,  synthèse. 

Syllogisme,  du  grec  sun,  avec  et  /o;/isoitini.  je  raisonne. 

—  Les  stoïciens  avaient  imaginé  ce  syllogisme  captieux  :  Une 
mère  supplie  un  crocodile  de  lui  rendre  son  enfant,  qu'il  est  prêt  à 
dévorer.  «  —  Je  te  le  rendrai,  dit  le  crocodile,  si  tu  réponds  juste 
à  cette  question  :  Ai-je  envie  île  te  le  rendre  '.  —  Non.  —  Tu  as 
deviné,  dit  le  monstre:  mais,  si  je  te  le  rendais,  tu  n'aurais  pas 
deviné.  > 

—  Épiménide  a  dit  que  tous  les  Cretois  sont  menteurs.  Or,  il  est 
Cretois  lui-même  :  donc  il  a  menti  :  donc  les  Cretois  ne  sont  pas 
tous  menteurs  :  donc  Épiménide  n'a  pas  menti  :  donc  les  Cretois 
sont  menteurs  (0- 

Sylphe,  sylphide,  se  rattache  sans  doute  au  grec  sylphe, 
insecte  qui  ue  vieillit  pas. 

Génies  élémentaires,  qui.  dans  la  mythologie  poétique  du  Moyen- 
Age,  habitent  les  airs  dont  ils  ont  l'empire,  et  se  mettent  eu 
rapport  avec  les  hommes. 

Syncope,  mot  grec,  de  sun.  et  kuptô,  retrancher. 

En  grammaire,  raccourcissement  d'un  mot  par  le  retranchement 
d'une  syllabe. 

Désigne  aussi  la  perte  subite  et  momentanée  du  seutim^^'"  «lu 
mouvement,  avec  arrêt  de  la  respiration. 


TAI{  'i7I 

Synonyme,  <iii  '^vor  si//i,  cnsciiililc.  ononui,  ikhii. 

(l'c-i  (l.iiis  li'S  s;iliiiis  du  iiiilini  du  wii"  sirclc,  (iiTon  li-oinc, 
roi'i.irinc  de  l;i  sricncc  des  sviioiiviiios.  M""'  de-  Srvi^iir,  Hiissy,  cl 
M"'"  de  (Idliuiiy,  s;i  lillc,  s'i'l.iiciil  drjfi  li\i'(''S  ;'i  ce  |iii|ii:iiil  jeu  do 
l'cspril.  i|iii  li\c  .incc  |iivcisi(iii  l:i  N.ilciir  de  cIlkiiic  mol,  cl  iii;ir(|iic 
;iii  (■(lin  (le  |;i  Imiiiih'  SMci(''l(''  l;i  iiKHiiiMic  du  Im';iii  I.iipj, •!;.'■('. 

K\i'iii|ilrs  :  Imiii  sens.  jiij^ciiiniL  ^^riiic,  lidciil. 

Le  liuii  sens  s';i|i|»li(|ii('  ;iii\  iiciisccs  cl  ;ni\  expressions  ;  \v.  jiijjc- 
iiiciil,  :'i  l;i  condnilr. 

(îcnic  csl  )^cn(''i';il  ;  hdcnl  csl  p.irliinlicr. 

—  I.;i  n;ii\clc  csl  tmc  (pudih''  :  rin;j(''Mnilt'  est  un  di'l'.nil. 

Synonymie.   l''i.L:nrc  de   rlK'Ioriipic.   (pii   consislc  ;i   i'(''pclcr   j.i 
nicnic  idi'c.  en  Icrnics  dillcrcnls  :  Ahiil,  riuisif,  cre/isif,  c/l'iKjil. 
Mlle  ;i  pour  ImiI  {\v  lr;ip|)er  pIns  forteiiienl  l'esprit  des  ;jiidileiirs. 

Synthèse,  iln  lircc  si/nilicsis.  <'onipositioii. 

Mi'lliodc  d"invesli,!j;ilion  qni  pfocrdc  du  simple  ;iu  composi'',  des 
élcmcnls  ;iii  huil.  de  l;i  cinise  ;mi\  elTeis. 

(^esl  le  ("onli'.iii'e  de  YaïKilijsc,  qni  [»;irl  du  connu  |)our  ;iiTiver  à 
rini'oniiu. 

Système,  du  ucec  .v//n,  avec,  isfihni,  se  tenir. 
A>semlil;eje   de  princi|)es,  vrais  ou  faux,  réunis  en  un  coi-ps  do 
dociriiie. 

—  On  disliiiijiie,  en  pliilosopliic;,  l(;s  systèmes  de  l*lalon.  d'Aris- 
tote,  (le  l)es(  arics.  Kn  astronomie,  il  y  a  le  système  de  Copernic, 
celui  de  .New Ion.  etc. 


Tabac,  de  kiIkico.  nom  (pie  d(uinaienl  les  lialiilants  de  San- 
Salvador  à  la  pinc(''c  d'liei-he  allumée  dont  ils  as[iiraient  la  fuiiié(!. 
Us  appelaient  l'Iicrltc  elle-mèn)(;  oilùha. 

Le  nom  de  lalxicn  a  pr(''\alu. 

—  On  (1(5  Tahmjo,  imk!  des  petites  Antill(!S,  d'où  le  lahac  hit  im- 
porté en  l'^spacrne  pour  la  prennent  fois. 

—  On  encore  de  Tahasco,  pays  du  Mexique. 

.I.-.I.  Ampère  dit  que  lahascn  était  le  nom  du  roseau  [)crcé  avec 
lequel  les  Indiens  d'Haïti  aspiraient  la  fumée.  Ils  appelaient  le  tabac 


47^2  TAH 

m  hua.  C'ost  pnr  confusion,  ou  par  niélonMiiic  (jih'  le  ihjiu  du  tuy;iu 
de  [lipc  ;iuî',iil  été  trans[)orté  à  la  piaille. 

—  I^a  |)laii!('  du  tahac  a  été  inlroduilc  eu  Krancc  par  .Icau  .N'icol, 
d(;  iSinios,  médecin  et  ambassadeur  de  France  en  Porluual. 

On  lui  donna  le  nom  de  ;«/V;o//«<?,  réservé  maintenant  aux  qualités 
toxiques  du  laliac.  Ou  l'appela  aussi  «  herbe  à  la  reine  »,  parce 
qu'elle  fut  présfnh'e  à  la  reine  Catherine  de  .Médicis. 

—  Amurat  iV  prohiba  l'usage  du  tal)ac,  sous  peine  d"a\oir  le 
nez  coupé. 

—  Eu  \i')\^l.  Urbain  Ylll  pulilia  une  biilh?.  (jui  défendait  de 
prendre  du  laliac  dans  les  é.tilises. 

Pasquier  lui  reproche  cette  sévérité,  en  cilaut  le  passage  suivant 
de  Job  :  Contra  folium  quod.  venta  rnpitur  cstcnf/is  jjotentiain 
taani,  cl  stipulani  siccani  persequcrh.  Vous  faites  éclater  votre 
puissance  contre  une  feuille  sèche,  et  vous  persécutez  une  feuille 
desséchée. 

On  rapporte  la  même  anecdote  à  propos  d'un  imi)(")l  mis  par 
Innocent  XI  sur  le  tabac  et  le  papier  timbré. 

—  Le  tabac  est  un  poison,  ...une  Brinvilliers,  qui.  pour  o[jérer 
plus  librement,  partage  ses  profits  avec  l'État. 

—  Synonyme  :  encens  de  caporal.  Le  tabac  à  fumer,  dit  caporal, 
est  plus  (in  et  plus  aromatique  que  celui  de  cantine,  qui  se  vend 
aux  niiUtaires  à  prix  réduit. 

—  Le  grand  nombre  de  pipes  à  ligures  symboliques  trouvées 
parmi  les  antiquités  américaines,  prouve  que  Tusage  de  fumer 
remonte,  comme  les  monuments,  au  moins  à  l'an  800. 

Cet  usage  était,  chez  certaines  nations  de  l'Amérique,,  une  céré- 
monie religieuse  ;  aujourd'hui  encore,  c'est,  chez  plusieurs  d'entre 
elles,  la  formule  la  plus  essentielle  du  cérémonial  dans  les  assem- 
blées et  pour  la  ratitication  des  traités. 

Quelques  trilius  disent  avoir  reçu  le  tabac,  comme  le  mais,  d'un 
messager  du  Grand-Esprit,  auquel  elles  olïrent  la  fumée  de  leurs 
pipes,  dans  toutes  les  solennités  religieuses. 

Ainsi,  quelque  bizarre  que  la  chose  paraisse,  le  tabac  était  bien 
un  encens,  que  l'on  brûlait  pour  rendre  hommage  à  la  di\iullé. 
(Voy.  J.-J.  Ampère,  Voyaye  en  Amérique.) 

Quoi  qu'en  di.so  Arlstotc  et  sa  docte  cahalc. 
Le  lal)ac  est  divin  ;  il  nest  rien  qui  légale. 

(Cou.NEMi  E,  l'cxlin  de  Pierrp. 

—  Quoi  qu'en  dise  Aristote  et  toute  la  philosophie,  il  n'est  rien 


TAB  473 

d'égal  nii  tnliar  :  ("est  la  passion  dos  lionnrtos  gens,  cl  qui  vil  sans 
tabac,  n'est  pas  digne  de  vivre.  (Molière.  Fcsfin.) 

A  cette  époque  (KJGo),  le  tabac,  cultivé  depuis  pou  en  Franco, 
était  devenu  l'objet  de  discussions  Irès  ^ives,  relativement  aux 
(jualités  qu'on  lui  attribuait,  ot  ces  disputes  nuMues  contribuèrent  à 
le  mettre  à  la  modo. 

.l'ai  (lu  liuii  lal)ac  liaiis  ma  lalialièi'c. 

(Voy.  ra/isser.) 

Tabellion,  du  latin  /ahri/t/.  planclicUo,  tablette  do  bois  ou 
d'ivoii'o  enduite  de  cire,  pour  prendre  dos  notes. 

—  Oftlcior  qui  rédigeait  les  ados  publics,  mais  n'en  avait  pas  le 
dépôt  comme  les  notaires.  (Vieilli.) 

Tablature,  dérivé  de  tabula,  lablo. 

—  Donner  de  la  tablature  à  quoiqu'un  :  lui  causer  de  l'embarras. 
Le  mot  tablature  désignait  la  table  où  étaient  tracés  les  signes 

qui  servaient  à  écrire  la  musique  avant  l'invention  des  note^.  Cette 
mélliode  oITrait  de  grandes  dillicultés. 

—  En  1023,  Gui  d'Arezzo  (en  Toscane),  moine  bénédictin,  inventa 
les  lignes  ou  portées,  les  clefs,  et  substitua  aux  six  lettres  de 
l'alpliabet  romain  do  l'ancienne  gamme,  les  six  fameuses  syllabes  : 
ut,  /Y',  mL  fa,  soi.  la.  qu'il  trouva  dans  1" hymne  de  saint  Jean, 
composée  par  Paul  Diacre,  en  774  : 

L'T  queanl  la.vis  REsonarc  flbri^ 
Mira  (jesloruin  EAmuli  tunnnii 
■  SOLvii  jwiluti  LAbii  rcalum. 
Sa  ne  le  Joannc-i  ! 

Vers  IHOO,  un  Français,  nommé  Lemaitro.  ajouta  la  septième 
note,  st.  (Voy.  fjammc.) 

Table,  du  latin  tabula,  planche:  provençal  taula. 

—  A  tal)le  jusqu'au  menton.  (Balzac.) 

S'il  se  tenait  aussi  bien  à  cheval  qu'à  taltlo,  il  serait  le  proiuier 
écuyer  de  France.  (Moyen  de  par  tenir.) 

De  niissa  ad  niensam.  De  la  messe  à  la  t.iblo.  (l'rovoi'be 
monacal.) 

—  Chevaliers  de  la  Table  ronde.  «  Après  le  pas  darnu^s,  dit  un 
auteur,  les  combattants  soupaient  à  la  même  table  :  et  on  avait  soin 
qu'elle  fût  ronde,  afin  d'éviter  toute  dispute  de  préséance.  « 

On  sait  que  ce  fut  le  fameux  Artus,  roi  de  la  Grande-Bretagne, 
qui,  vers  520,  établit  l'ordre  des  Chevaliers  de  la  Table  ronde,  si 


474  TAI 

v;iiil(''S  d.iiis;  nos  vieux  ivmii.iiis.  Il  m)ii1iiI,  en  1rs  ;i|i|)f'l;int  ainsi, 
(in'oii  jiincfil  (|irils  ('laiciil  Idiis  ('uaiix,  sinon  en  naissance,  du  moins 
en  coiii'ago  el  en  v(;rlM. 

A  laiilc  riniili'  ir>  a  dchal 
Pour  être  assis  au  pri'iiiier  plat. 

(I'rovfrl)c  cspngnol  du  .\vi«  .siétlt-  ) 

Ifoiidi'  taille  (iste  \o  dosbat, 
riiasciiii  estant  aiijirè'S  du  plat. 

Tablier,  so  rapitorli;  an  prérédent. 

—  Le  coup  du  tablier.  Louis  Veuillol  emploie  cette  expression  au 
sujet  des  oîîrcs  de  démission  de  M.  Tliiers,  en  1872.  C'est  une 
allusion  aux  cuisinières,  qui  abandonnent  le  tablier  en  (piittant  leur 
[tlace. 

Tache,  en  provençal  fara,  souillure,  dans  le  sens  de  macula. 

Joackim  prcs  un  (uind 

Sens  tnctt,  que  u  hlanc  le  pcl. 

(Evangile  apocryphe.) 

Tâche,  de  l'allemand  tasche,  poche,  mesure.  Ou  le  dérive  aussi 
du  latin  taxare,  fréquentatif  de  tangere  (?). 

Tact,  du  latin  lactus,  participe  de  langerc,  toucher,  qui  a  donné 
aussi  :  tangente,  contact,  contagion,  intact. 

Taille,  de  lalca,  bouture,  branche  coupée. 
De  là  viennent  aussi  :  tailleur,  taillis. 

—  Eu  vieux  français,  taille  signiliait  llèche.  Comme  la  (lèche  a\ait 
une  coche,  à  l'opposé  de  la  pointe,  le  mot  taille,  et  entaille.^  est 
devenu  synonyme  de  coche. 

—  Tailler,  dans  le  sens  de  couper,  est  resté  dans:  tailleur  (de 
pierres  ou  d'habits),  taillandier,  taillable  et  corvéable. 

On  dit  aussi:  la  taille  d'une  personne,  pour  sa  façon  d'être,  ses 
proportions. 

Jai  col  que  non  tailli,  c  fa'l  fer  lalliar. 

(B.  Mautix.) 

(La  pierre  à  aiguiser  qui  ne  coupe  pas  et  fait  couper  le  fer.) 

—  Faire  une  cote  mal  taillée  :  un  compromis.  Arrêter  un  compte 
en  rabattant  quelque  chose  de  part  et  d'autre,  sans  examen  trop 
rigoureux. 

—  Gens  taillal)les  et  corvéables  à  jnerci.  Ceux  dont  on  peut  exiger 
tout  ce  qu'on  veut. 

On  appelait  ainsi,  au  temps  de  la  Féodalité,  les  serfs  sur  lesquels 


TAI  47-) 

le  soimiour  pouvait  ;'i  volonté  iiiottrc  un  iinni")!  ((nillo.  ot  ;ni\(iii('ls 
il  pouvait  à  son  tiré  imposer  tles  corvées. 

L'impôt  de  la  taille,  qui  n'était  levé  que  sur  les  roliii'icrs,  était 
à  la  fois  mobilier  et  foncier.  Ce  qui  rendait  les  tailles  odieuses, 
c'était  sui-lout  l'inégalité  des  charues.  Les  exceptions  ne  se  hor- 
nait-nt  pas  au  clertié  et  à  la  noblesse:  elles  furent  étendues  aux 
officiers  royaux  et  aux  cours  souveraines. 

Cet  imp('»t  portait  sur  divei's  objets  do  consommation,  comme  les 
contributions  indirectes  de  nos  jours;  il  était  le  même  que  Vaccine 
(de  accidere,  couper),  qui  est  encore  en  vipiieur  en  Angleterre, 
sous  le  nom  d^ excise. 

—  L'expression  de  lallle,  qui  s'est  conservée  jusqu'à  la  Révolution, 
est  une  preuve  parlante  de  l'ignorance  des  populations  au  siècle 
dernier.  Ces  termes  de  taille,  de  cote  mal  taillée,  viennent  de 
l'ancien  usage  qui  existe  encore  dans  le  commerce  de  détail  de  la 
boulangerie,  de  )nrn'qu('r  sur  un  morceau  de  liois  fendu  en  deux, 
dont  cbacun  des  deux  intéressés  garde  la  moitié,  et  sur  lesquels  on 
fait,  en  les  réunissant,  une  entaille  à  chaque  livraison  de  pain.  C'est 
ainsi  que  se  percevaient  les  impôts  à  l'origine.  Lorsque  les  tailles 
faites  sur  chacun  des  morceaux  de  bois  ne  se  rapportent  pas,  ou 
(lit  (pic  c'est  une  cote  mal  taillée. 

De  là  est  venue  aussi  l'expression  :  détailler,  vendre  au  détail. 
Telas  per  cendre  a  talli.  {Carlulalre  de  Montpellier,  f"  30.) 
Toiles  pour  vendre  en  détail. 

—  En  proven(;al  on  appelle  lailloun,  un  petit  morceau. 
Mangez  ce  taillon  de  massepain.  (^Rabelais,  III,  30.) 

E  levaran  novelamen 
'Inlhas,  e  quislas,  e  uzalges, 
E  fjabclas,  e  pesatges. 

(Brcv.  (l'amor,  f"  '2i.) 

(Et  lèveront  nouvellement  tailles,  et  quêtes,  et  impôts,  et  ga- 
helles,  et  pesages.) 

Tailleur,  dérivé  de  (ailler. 

—  Synonymes  :  artiste  aux  jamjjes  croisées,  pique-prunes,  pique 
à  l'azor. 

Mangeur  de  prunes.  «  Un  croque-prunes,  autrement  compagnon 
tailleur  »  {Le  facétieux  réceil-matin  des  esprit:  inélancholiques.) 

Le  surnom  de  «  pique-prunes  »,  donné  aux  tailleurs,  est  popu- 
laire, mais  son  origine  est  inconnue.  Rabelais  (IV,  o2)  y  fait  allusion, 


476  TAL 

qinmd  il  dit  f|irim  l;iillriii"  ;iy;iii(  lailh'-  ses  |i;ili'()tis  (l;ins  des  décré- 
talcs  (lu  |);i|i('.  (l('\iii(  toiil  ;iHol(''.  cl  ([iic  "  ;iii  lien  d'iing  savon,  il 
tailloYl  iiii.!^'  ('Iia|)!'aii  ;i  priiiics  sucrées  «. 

—  L'ouvrier  lailleiirs'a[tpelle /va^///"  ;  s"il  esl  Allciiiaiid,  il  prend 
le  nom  A' hirondelle. 

L'ouvrier  qui  fait  des  retouches,  s'apiielle  poinpicr. 

L(^  rahonlseur  est  celui  qui  reiuet  à  ueuf  les  vieux,  liahils. 

L'apprenti  tailleur  est  un  tarturc. 

—  Tailleur,  voleur.  On  dit  que  saint  Pierre  n'a  jamais  voulu  ouvrir 
les  portes  du  paradis  aux  tailleurs  ni  aux  meuniers.  (Voy.j 

Mets  un  tailleur,  un  tisserand,  un  meunier  dans  un  sac,  et  secoue 
bien  :  le  premier  qui  en  sortira  sera  un  voleur.  (Proverbe  an.dais.) 

Taire,  du  latin  lacère. 

—  Vous  venez  de  dire  une  sottise  :  vous  avez  juanqué  là  une  belle 
occasion  de  vous  taire. 

—  Synonymes  de  taisez-vous  :  allez  vous  asseoir.  C'est  ce  que  le 
président  dit  au  témoin  après  sa  déposition,  quand  il  n'a  plus  qu'à 
se  taire. 

Assez  causé.  Bouche  close  (Rabelais). 

As-tu  fini  ?  Tu  ne  sais  pas  ce  que  tu  dis,  tais-toi. 

Fichez-nous  la  paix  !  Taisez-vous  :  vous  nous  ennuyez. 

Talent,  du  .urec  talanlon,  par  le  latin  falen/xm. 

C'était,  chez  les  Grecs,  un  poids,  une  mouuaie  de  convention.  Le 
talent  attique  d'aruent  valait  60  mines,  ou  6.001)  drachmes  ("3.560 
francs)  ;  le  talent  d'or  valait  dix  fois  plus. 

—  Talent  a  passé  au  sens  de  désir  et  de  volonté. 

Les  Sarrazins  répondirent  que  nous  n'avions  nul  talent  d'être 
délivrés.  (Joinville.) 

Au  xvii"^  siècle,  il  a  pris  celui  de  don  naturel,  aptitude. 

En  cette  acception,  il  se  rapproche  de  génie,  avec  cette  nuance 
que  le  génie  découvre  et  que  le  talent  ne  fait  que  manifester. 

Soyez  plutôt  maçon,  si  c'est  \otre  talent, 
Qu'écrivain  du  commun  et  poète  vulgaire. 

(BoiLKAu,  Art  poétique,  IV,  26.) 

Talion,  du  latin  talio,  de  (al/s,  la  pareille. 

—  Sine  talione  (Martial")  :  impunément. 

—  La  loi  du  talion  inflige  une  peine  égale  au  crime  commis. 
Moïse  lavait  inscrite  au  code  des   Hébreux,  mais  les  Romains 

l'abolirent  en  Judée. 


TAM  477 

...Celui  qui  aura  l)lc?sé  quelqu'un,  sera  traité  comme  il  a  traité 
l'autre  :  il  recevra  fracture  pour  fracture,  et  perdra  œil  pour  œil, 
dent  pour  dent.  (Léci/if/iie,  XXIV,  10.) 

Celui  qui  frappe  par  ré[)ée,  |)érira  par  lépée.  (Mathieu.  XXVI,  oii.) 

—  Les  Américains  [)i"atiqueiit  le  talion  sous  le  nom  de  lijnch. 

—  ]'iin  ri  rcjiellerc  licet  in  condnenti,  non  ex  inlercallo. 
(Bartliole.) 

Le  talion  est  la  justice  tles  injustes.  (Saint  Au.uustin.) 
Par  pari  rc/'ci'tiu'  :  on  rend  la  [)areille. 
Tel  pour  moi,  tel  pour  toi. 

Comme  à  aullriiy  faict  tu  auras, 
D"aullriiy  aussi  tu  rccopvras. 

Ibi  débet  fjitis  piinivi,  uhi  delitjuit .  (Bartliole.) 

Qucii.'isi  (/iieumi.  (Molière,  Bouvrjcois  genlil/iomme.  III,  10.) 
C'est  une  locution  herriclionne,  qui  signifie  :  Comme  tu  m'as  fait,  je 
te  fais;  je  te  rends  la  pareille.  Queu  est  l'ancienne  forme  de  lequel. 

Moroué  !  queu  mal  te  fais-je  ?  (Molière,  Festin  ) 

—  La  devise  de  la  ville  de  Morlaix  :  «  S'ils  te  mordent,  mords-les.  » 

Talmouse,  de  telemelier,  qui  sigiiifiiiiL  lioulaiiger  ;  de  talev^ 
battre,  et  mêler. 

Ce  mot  a  un  double  sens  et  rappelle  croquignolle,  qui  signifie  à 
la  fois  petite  pâtisserie,  et  coup  donné  sur  la  figure,  casse-museau. 
Taie  mousc  représente  alors  taler  et  museau.  C'est  un  soufflet  qui 
tombe  principalement  sur  la  l)Ouche  et  sur  le  nez. 

—  Ce  nom  s'est  appliqué  aussi  à  un  petit  gâteau,  qui  se  fait  à 
Saint-Denis  et  se  compose  de  crème,  de  farine,  d'œufs,  de  beurre  et 
de  sucre.  Il  est  très  tendre^  et  Rabelais  l'appelle  «  casse-museau  » 
par  antipbrase. 

Taloche,  dérivé  de  taler,  coup  de  main  sur  la  tète. 

Talons-rouges  :  petits-maîtres.  (Voy.) 

...Je  vis  M.  le  premier  président.  M'"''  de  Soubise,  et  une  foule 
d'bonnètes  gens,  des  moines,  des  prêtres,  des  militaires,  des 
magistrats,  des  femmes  pieuses,  des  femmes  du  monde,  et  parmi 
tout  cela,  cette  sorte  d'étourdis  que  vous  appelez  des  talons-rouges, 
et  que  j'eus  bientôt  congédiés.  (Diderot,  la  Religieuse.) 

Tampon,  de  rancien  mot  tapon,  jjoucbon  ;  suédois,  tapp. 
Eu  provençal,    on   appelle    un   bouchon  tap  ;  et  tapar,  c'est 
boucher  un  vase,  ou  se  couvrir  contre  le  froid. 


478  TAR 

Tandis,  du  l;ilin  Idindiu,  [tliiliH  (juc,  dt;  lani  el  (lies,  jour. 

Co  mot,  ([iii  s'employnit  autrefois  seul,  comme  adverbe,  se  joint 

actuellciiiciit  a\('c  (pir. 

Tant,  (lu  laliii  laiilittn,  advorl)0  de  quantité. 
Il  a  l'ait  :  pavUml,  qui  siauilie  par  conséquent. 

Plus  (laiiKPiU',  |i;irl.iiit  |iliis  de  joie. 

(I„\  Fo.NTAiNE,  lea  Animnnx.) 

Pourtant  :  il  est  riche,  et  pourtant,  il  fait  peu  de  dépenses. 
Alitant,  tantinet,  tantôt. 

Tantale  (Le  supplice  de). 

Tantale,  roi  de  l-.ydie,  entre  autres  forfaits,  avait  servi  aux  dieux, 
dans  un  repas,  les  membres  de  son  lils  Pélops.  il  fut  condamné  à 
souiïrir  perpétuellement  une  soif  brûlante,  au  milieu  d'un  lac^  dont 
l'eau  échappait  sans  cesse  à  ses  lèvres  desséchées:  et  à  être  dévoré 
par  la  faim,  sous  des  arbres  dont  le  vent  élevait  les  fruits  hors  de 
sa  portée,  toutes  les  fois  que  ses  mains  essayaient  de  les  cueillir. 

Horace  (Sath^e  I,  1,  68)  trouve  le  portrait  de  l'avare  dans  le 
supplice  de  Tantale.  (Voy.  Bouillet,  Dictionnaire.) 

Tante,  jadis  ante,  du  latin  aniita,  et  non  de  antiqiia. 

Qui  fut  frère  de  sa  bellf  ànte. 

(Patelin.) 

Tape,  taper,  de  l'allemand  tappen.  frapper  du  pied. 

Tapir  (se),  se  cacher,  agir  en  tapinois.  Etymologie  douteuse. 
Du  Gange  le  tire  de  lalpa,  taupe  (?). 

—  Taupetiéres  (Rabelais),  couvent  de  moines,  et  l'ile  de  Tapinois 
(liv.  IV,  2!)),  du  grec  tapeinosis,  humilité,  abaissement  :  «  comme 
en  tapinois  »  signifie  secrètement,  en  rampant. 

—  Le  nom  provençal  du  câprier,  plante  rampante,  est  tapenier. 

Tarabuster,  probablement  forme  extensive  de  l'ancien  verbe 
tahusier,  faire  du  tapage;  plutôt  que  du  grec  tliorubéô. 

Tarasque.  Chaque  race  a  sa  tarasque. 

Au  Moyen-Age  (?),  un  serpent  monstrueux  ravageait  la  ville  de 
Tarascon.  Sainte  Marthe,  patronne  de  cette  ville,  s'en  empara,  en 
le  liant  avec  sa  jarretière  (?).  Cet  animal  fabuleux,  représenté  en 
madriers  et  en  charpentes,  sous  la  forme  d'un  énorme  lézard,  est 
promené  solennellement  à  Tarascon,  à  certains  jours  de  l'année. 

Le  monstre  a  pris  son  nom  de  la  ville  de  Tarascon,  au  lieu  de  lui 


TAU  479 

nvoir  doniu''  lo  sien,  roniiiio  on  Im  cni  :  cir  Slr.ilion  ot  IMoléinée 
iioiiinieiit  déjà  Tarascoii. 

Cette  ville,  située  sur  le  UIkhic.  porte  de  gueules  ;'i  uu  château 
donjonné  d'ai'.aeut,  souteuu  d'un  dragou  jnouslrueux  de  siuople, 
dévorant  un  homme.  Ces  armes  rappellent  le  heau  château  cons- 
truit au  xiv^  siècle  par  les  comtes  de  Provence,  ensuite  la  légende 
de  la  Tarasque.  On  ne  voit  plus  aujourd'hui,  dans  cette  vieille 
croyance  populaire,  qu'une  allusion  à  la  destruction  du  paganisme 
par  le  christianisme. 

—  D'autres  localités  ont  des  légendes  analogues  à  celle  de  la 
Tarasque,  avec  quelques  modifications.  Citons  la  Gargouille  de 
Kouen,  vaincue  par  saint  Roman;  la  Graouilly,  à  Metz:  la  Lézarde, 
à  Provins.  Draguignan,  porte  de  gueules  à  un  dragon  d'argent:  ce 
sont  des  armes  parlantes,  rappelant  le  dragon  ( Dracœna]  qui  rava- 
geait son  territoire,  et  qui  périt  sous  la  main  de  saint  Hermentaire, 
premier  évèque  d'Antihes. 

Tard,  adverhe,  du  latin  tarde. 

—  Bien  tard  venu,  pour  néant  venu;  proverbe  eu  contradiction 
avec  :  Mieux  vaut  tard  que  jamais. 

—  Il  est  un  peu  tard.  —  Qu'appelez-vous  tard  ?  Midi,  est-ce  tard? 
Minuit,  est-ce  de  bonne  heure  ?  Où  prenez-vous  la  journée  ? 
(A.  de  Musset.) 

Tare,  taré,  de  l'arabe  tarah,  laissé  en  arrière,  rebut. 

DéJiu'tion  du  poids  de  l'enveloppe  d'un  colis,  afin  de  faire  res- 
sortir le  poids  net  de  la  marchandise. 

A  donné  tarel,  ver  rongeur,  qui  taraude;  tarière,  vrille  qui 
perce  ;  et  homme  taré,  dont  la  réputation  est  entamée. 

Tarentule,  de  Tarente. 

—  Etre  piqué  de  la  tarentule  :  être  fou. 

—  La  tarentule  est  une  grosse  araignée  qui,  dit-on,  se  trouve 
très  communément  dans  les  environs  de  Tarente,  ville  de  la  Pouille. 
Sa  morsure  est  venimeuse  et  détermine  une  maladie  qui  se  traduit 
en  des  danses  frénétiques. 

Targe,  origine  germanique,  de  farga,  bouclier.  En  provençal 
larju,  targua. 

Sorte  de  boucher  dont  on  se  sert  pour  jouter  sur  l'eau;  puis  le 
jeu  lui-même. 

De  là  :  se  targuer  ^wwq  chose,  s'en  prévaloir,  s'en  couvrir  comme 


480  TAU 

d'un  l)Oiiclior;  lavf/ctio.  \w\\\  vcitoii   nioiilc''  sur  une  plaiinf  [(oni' 
fermer  une  porte. 

—  Le  jeu  de   la  iiir(jiii\  eu   l'rovenee,  est   aecompafrné   d'une 

chanson  ainsi  concMc  : 

Qu'il  <jiiijtin  In  lari/d  ? 
N'es  patroun  (Ituioau  : 
De  lin  de  Ijt  Marna 
Bnyuen  toux  un  coou, 
A  n'uquenii  lanjnirc 
Dur  coiimo  un  peirar 
Qu'a  maudu  Ici.s  fraïre 
HueijHrc  (lins  In  uinr. 

Tarif,  mot  arabe.  Espagnol  tarifa. 

A  Tarifa,  ville  située  à  l'eutréedu  détroit  de  Gibraltar,  les  .Maures 
exigeaient  le  droit  de  passage  de  tous  les  navires  qui  pénétraient 
dans  la  Méditerranée. 

Tartufe  ou  Tar(nfJ't\  origine  littéraire. 

Hypocrite,  faux  bonhomme;  signifie  en  allemand  le  diable. 

En  italien  et  en  vieux  français,  tartuffe  signifie  truiïe. 

—  Molière  a  emprunté  ce  nom  à  l'italien.  Tartufe  se  trouve  dans 
le  MalniantUe  de  Lippi,  avec  le  sens  d'homme  à  esprit  méchant. 
(Littré.) 

On  conte  que  Molière  créa  ce  mot  en  voyant  un  béat  s'extasier 
devant  de  belles  trutîes. 

Selon  Génin,  Molière  n'a  pas  inventé  le  mot  Tartuffe:  il  l'a  pris 
tout  fait  dans  la  langue  italienne  vulgaire,  où  il  s'employait  déjà 
comme  épilhète,  non  pas  tout  à  fait  avec  le  sens  d'hypocrite,  que  le 
chef-d'œuvre  de  Molière  lui  a  imprimé,  mais  avec  un  sens  voisin. 

—  En  provençal,  on  appelle  les  topinambours  des  tartiffhs. 

—  En  vieux  français,  et  en  provençal,  truffer  signifie  se  moquer; 
d'oîi  trufaldin,  imbécile. 

Aprè.s,  à  vous,  mon  conseiller, 
Mcssor  Jean,  sans  truffe  et  sornette. 
Je  laisse,  pour  faire  oreiller 
Les  deux  fesses  de  Guillemette 
.Ma  femme  :  cela  esthonncste. 

(Texlnincnl  de  Patelin.) 

«  Comme  vous  savez  bien  trulTer  les  bonnes  gens  !  »  dit  Panurge 
à  Dindenaut.  (Rabelais,  lY,  G.) 

—  Tartuffe  vient  de  tartuf'olo,  une  truffe,  que  l'on  considérait 
comme  une  pourriture,  un  excrément  de  la  terre.  C'est  un  souvenir 


Tllf.  481 

ilos  Uoniîiin?,  qui  ?o  ?orv;iionl  du  clwiiniiitinnn  pour  l;i  inrino  niôln- 
[iliorc  iiii'prisMiitc. 

Tdiili  rsl  ijunnU  fumius  pntidn^t. 

(l'i  vriK.    /I',r,/n,lr<.    IV,   7.) 

(.rcii  l;ii>  ;iiil;iiit  tic  cjis  (|iu'  d'un  clKniipi.uiioii  pourri.) 
D.iiis  i;i  iiiriiH'  |iirc('  de  l'iiiiit»'.  un  homme  trompé  s'écrie: 

Ailrnii  me  fuisse  fiDU/Kiii,  td  i/ui  illi  erederein  ? 

Ce  qu'on  pont  ti'adnire  lilirement  :  «  Faut-il  que  j'aie  été  assez 
rornichon  pour  le  croire  ?  » 

—  Ce  mot  Tarfit//'e,  qui  uuuKiuail  à  la  langue,  a  pris  sous  la  plume 
de  Molière  nue  valeur  spéciale,  pour  exprimer  un  im[)OSteur. 

Il  eu  a  l'ait  aussi  le  verbe  farfu/fier. 

VA  vous  serez,  ma  foi,  lartuffiée. 

(Acl.  U,  se.  3.) 

Vous  épouserez  .M.  TartulTe. 

Tattersall  était  un  lirooni  du  duc  de  Kingston,  qui,  après  s'être 
enrichi,  fonda  à  Londres  un  marché  au\  chevaux  qui  porta  son 
nom.  (Cf.  Littré.") 

Taupe,  du  latin  lalpa. 

—  Aveugle  comme  une  taupe.  Ce  qui  a  fait  croire  que  la  taupe 
était  aveugle,  c'est  qu'elle  a  les  yeux  très  petits  et  recouverts 
de  poils. 

Taverne,  du  latin  taherna,  maison  de  planches. 
Se  disait  non  seulement  des  boutiques  de  marchands  de  vins, 
mais  des  autres  mauvais  lieux. 
On  se  demande  pourquoi  les  chrétiens  en  out  fait  tabernacle. 

Teint,  participe  du  verbe  teindre:  latin  tingere. 

—  Teint  de  lis  et  de  roses  :  c'était  celui  de  la  Cynthie  de  Properce. 

—  Le  chevaher  de  Grammont  comparait  le  teint  des  Anglaises 
à  une  jatte  de  lait,  dans  laquelle  on  aurait  eiïeuillé  des  roses. 

—  Son  teint  se  compose  du  blanc  de  l'innocence  et  du  rouge  de 
la  pudeur.  (Le  P.  Leraoyne.) 

Tel,  du  latin  tnlis,  corrélatif  de  quel:  qui  a  la  même  qualité  :  tel 
quel,  tellement  quellement. 

—  Tel  pot,  tel  couvercle:  Dignus  palcUa  operculuni  (proverbe 
latin). 

Les  Provençaux  disent  :  Chaque  fnupin  a  sa  caburèlo. 

31 


482  ti:m 

Tel  v;i  rlicrclioi- (!<'  I;i  laino,  qui  s'en  retourne  tondu. 

Ti'l  porli'  If  iKilon, 
Ddiil  SDiivciil  le  iKil-on. 

Télamons,  du  urtîc  (liaô,  supporter. 

Figures  liuuiaines  servîint,  connue  les  caryntides,  ;'i  supporter  des 
corniches  et  des  entablements.  (Voy.  caryatides.) 

Télégraphe,  du  grec  lélé,  au  loin,  graphô,  j'écris. 
Invention  renouvelée,  en  1793,  par  les  frères  Cliappe. 

—  Dépêche  télégraphique  :  télé.ii ranime,  néologisme  créé  en  ISoT. 

—  Le  m  parlant,  qui  n'était  qu'une  métaphore,  est  devenu  une 
réahté,  depuis  l'invention  du  téléphone,  par  l'Américain  Bell, 
en  1877. 

—  La  poste  aux  pigeons  était  connue  des  anciens.  (Yoy.  Pline, 
liv.  X.  ch.  22,  et  Rahelais,  IV,  3.) 

Témoin,  anciennement  tesmoinfj,  du  latin  le>>tunonium,  témoi- 
gnage. 
Au  même  radical  se  rattachent  :  tester,  testament,  attestation. 

—  lYetno  tesfis  in  re  sua  intolliriitur. 
Testis  unus,  testis  nullus.  (Axiomes  de  droit.) 

Tempépament,  du  latin  temperamontam,  modération  :  de 
temperare,  faire  un  mélange  dans  de  justes  proportions. 

Cicéron  emploie  temperamentum  dans  ce  sens  ;  Martial  l'emploie 
dans  le  sens  d'expédient. 

—  On  s'est  ser\i  improprement  de  ce  mot  pour  désigner  le 
mélange  des  humeurs  qui  constituent  l'organisation  d'un  individu. 
Il  y  a  des  tempéraments  sanguins,  nerveux,  biheux,  lymphatiques  ; 
mais  l'acception  moderne  de  ce  mot,  pour  signifier  la  constitution, 
la  complexion  physique  du  corps,  est  un  sens  figuré  que  l'Académie 
dit,  à  tort,  être  le  sens  propre. 

C'est  plutôt  l'usage  qui  a  éta])li  une  pareille  inversion,  car  l'éty- 
mologie  est  temperare,  faire  une  chose  à  temps  et  avec  modération  ; 
tandis  qu'on  dit  d'un  homme  livré  aux  excès  physiques  qu'il  a  du 
tempérament,  il  faudrait  dire,  au  contraire,  qu'il  n'use  point  de 
tempérament,  qu'il  est  intempérant. 

Tempérance,  du  latin  tetnperans,  de  temperare. 

—  La  lempéraii/'e  enseigne  à  jouir  des  plaisirs  avec  mesure. 
Elle  tient  le  milieu  entre  la  sévérité  des  stoïques,  qui  rejette 

toutes  les  voluptés,  et  la  mollesse  des  épicuriens,  qui  s'y  abandonne. 
(Aristote.) 


TKM  WA 

—  Tempera  est  \\o\{\'  trinpori:  à  temps,  tenipeslif. 

—  Don  :  lonjit'i'L'r,  cl,  par  iiuMatlirse,  tremper  :  tremper  son  vin. 
Atlremper,  cliez  Marot,  siuriilie  moiUM'er.  Le  roman  avait   aussi 

oifrempnnce,  pour  désigner  cette  douceur  acquise,  (pii   rend  làiue 
maîtresse  d'elle-même. 

Kii  atrcmpa  \cfs  lui  son  iro. 

{Roman  fie  la  /{ose.  15.779.) 

Tempérafiire.  ronstiliitiou  de  ratmosplière. 

Oh/ein/ierer. 

■-  La  tem[)érance  est  une  question  de  tempérament  et  snrtout  de 
température.  Les  pays  chauds  qui  produisent  le  plus  de  liqueurs 
alcooliques,  sont  ceux  qui  en  consomment  le  moins  ;  et  au  Groenland, 
011  le  froid  est  excessif,  l'alcool  est  insuffisant  pour  entretenir  la 
chaleur  animale,  et  les  hahitants  hoivenl  de  l'huile  de  poisson. 

Tempête,  du  latin  tempeslas,  provençal  tempesta. 

Violente  agitation  de  l'air,  souvent  accompagnée  de  pluie  et  de 
tonnerre.  A  signifié  d'abord  état  de  l'atmosphère,  puis  spécialement 
mauvais  temps. 

—  Les  mugissements  de  la  tempête. 

(îarijdUHin  nuii/irc  putes  nemus,  aitl  mare  Tuncnm. 

fHoHACK,  Epitres,  liv.  H.  1.  '202.) 

—  Une  tempête  dans  un  verre  d'eau.  Montesquieu  {Esprit  des 
Lois)  se  sert  de  cette  locution  pour  exprimer  une  émeute  populaire 
dans  la  petite  république  de  Saint-Marin. 

Les  Romains  disaient  dans  le  même  sens  :  Af/itare  /Iiictiim  in 
siinpnla.  Soulever  une  tempête  dans  un  vase  à  boire. 

Templier,  dérivé  de  temphim,  temple. 

—  Ivoire  comme  un  templier.  (Rabelais,  I,  o.) 

—  Vers  1118,  neuf  chevaliers  fondèrent  l'ordre  des  Templiers, 
et  bâtirent  leur  maison  bospitalièro  dans  l'enclos  du  Temple  de 
Salomon,  à  Jérusalem,  pour  y  recevoir  les  pèlerins  de  Terre-Sainte. 
L'ordre  fut  confirmé  par  le  concile  de  Troyes,  en  1127.  La  règle  en 
fut  composée  par  saint  Rernard. 

L'habit  des  templiers  était  blanc,  avec  une  croix  rouge. 

Ils  se  répandirent  liientcH  par  toute  l'Europe,  et  le  nombre  de 
leurs  maisons  s'éleva  à  plus  de  neuf  mille. 

A  la  fin  du  xiii«  siècle,  cet  ordre  était  devenu  dangereux  par  ses 
richesses,  son  ambition  et  ses  vices,  et,  le  13  octobre  1307,  les 
templiers  furent  tous  arrêtés,  en  France,  sous  PhiUppe  le  Rel.  Le 


484  Tl'M 

pnpc  sicncail  ;'i  Avijiiioii  (l<'|iiiis  r;mnéc  |irécédciile.  I);iiis  li;  procrs 
qu'on  leur  fit,  on  leur  n;procha  d'exiger  du  récipi<Midaire  qu'il 
reniât  Jésiis-Clirisl.  (piil  crMclifit  trois  fois  sur  le  crucifix,  qu'il 
baisùl  le  supéri<!ur  sur  la  houclie,  au  nouiljril  et  à  la  iiarlie  du 
corps  destinée  au  soula.uoujent  des  besoins  les  plus  abjects. 

Ou  lu'ctondait  (pic  dans  leurs  asseuibléfîs  nocturnes,  les  cliova- 
liers  adoraient  une  idole:  qu'ils  s'interdisaient  tout  commerce  avec 
les  femmes  et  se  Un  raient  à  la  sodomie. 

L'ordre  fut  aboli,  ses  biens  conlisipiés,  et  les  templiers  dispersés 
portèrent  dans  le  inonde  le  spectacle  de  leurs  vices  et  de  leurs  excès. 
(Extrait  de  Papou.) 

Temps,  du  latin  fp/npita  :  d'où  tenqiorel.  temporaire,  tempo- 
riser. 

La  durée  des  clioses,  en  tant  qu'elle  est  mesurée  ou  mesurable. 

Ce  mot  s'écrit  avec  ps,  et  non  avec  s  seulement,  à  cause  de 
l'étymologie  et  des  dérivés.  De  même,  enfant,  prudent,  et  autres 
mots  terminés  en  nt,  doivent  garder  le  t  devant  .s-  au  pluriel,  à 
cause  de  l'étymologie  latine. 

—  Les  noms  donnés  aux  principales  divisions  du  temps  sont  :  le 
jour,  le  mois,  l'année,  le  siècle. 

—  Le  temps  est  personnifié  sous  les  traits  d'un  vieillard  boiteux 
avec  une  faux  et  des  ailes. 

On  dit  :  «  Il  faut  attendre  le  boiteux  »,  c'est-à-dire  attendre  des 
nouvelles. 

L'un  des  plus  anciens  almanachs  s'appelle  :  le  AJessar/er  boiteux. 
Pythagore  appelle  le  temps  «  l'âme  de  l'univers  ». 

—  Avec  le  temps,  on  vient  à  bout  de  tout. 
Avec  le  temps,  les  petits  deviennent  grands. 

Avec  le  temps  et  la  patience,  la  feuille  du  mûrier  devient  satin. 
(Proverbe  arabe.) 
Avec  du  temps  et  de  la  paille,  les  nèfles  mûrissent. 

La  grande  Ijoite  à  guérison 
Est  dans  le  temps  et  la  raison. 

Le  temps  est  un  grand  maître. 

(ConxEiLLE,  Sertorius.) 

Le  temps  est  un  vieux  juge,  qui  appelle  à  son  tribunal  tous  les 
coupables.  (Sbakespeare.) 

—  Gbaque  vague  de  la  mer,  cliaque  flot,  cbaqiie  flocon  d'écume 
travaillent  à  rendre  une  perle  plus  parfaite,  et  ajoutent  une  teinte 
mystérieuse  à  sa  beauté.  (A.  de  Vigny.) 


TI:M  483 

—  Il  y  av.iil  aiilrcluis  un  liraiii  tic  salilc  (ini  se  lamentait  dV'lrc 
lin  atonio  clans  les  déserts.  An  hout  do  (inehjne  temps,  il  de\int 
diamant,  et  anjonrd'lini  il  est  le  pins  bel  ornement  de  la  couronne 
dn  roi  des  Indes.  (Voltaire,  Zadig.) 

—  {]liaiiu('ment  de  temps,  entretien  des  sots.  (Proverbe espagnol.) 

Lo  temps  luin.  I)i'aii  on  fàclieux. 
Est  rentrolifii  ilr  qui  ii;i  inioux. 

—  Miil/ilard  :  Voti'e  très  linmblo  serviteur,  monsieur  et  made- 
moiselle :...  enchanté  de  ce  que...  II  fait  bien  chaud  aujourd'hui. 
—  Gaillard  :  Mais  oui.  —  Malfîlanl  :  Nous  ne  tarderons  pas  à  avoir 
de  l'eau  :  je  le  sens  à  mon  rhumatisme.  Je  porte  un  baromètre  avec 
moi.  —  Gcovijoji  :  Cela  ne  laisse  pas  que  d'avoir  son  agrément.  — 
Malfilaril  :  Cela  sera-t-il  bon  pour  les  biens  de  la  terre?  Vous  devez 
savoir  cela,  vous  autres,  messieurs.  —  Gaulard  :  Ah  !  dame,  les 
foins  sont  faits  et  rentrés,  et  une  goutte  d'eau  ne  nuirait  pas  aux 
grains,  etc.  (Picard,  les  ProDinciaux  à  Paris,  111,  8.) 

Il  faisait  00  matin  le  plus  beau  teulps  du  monde. 
Pour  aller  à  cheval  sur  la  terre  et  sur  l'onde. 

(MAi,:;:i:tANCiiE.) 

Rouge  le  soir,  blanc  au  matin. 
C'est  le  vrai  lot  du  pèlerin. 

C'est  un  proverbe  satiriipie,  auquel  pensait  Rabelais,  en  écrivant, 
au  prologue  du  Quart  livre  :  <  Doncque  vous  voulez  que  à  prime  je 
boyve  vin  blanc:  à  tierce,  sexte  et  none  pareillement;  à  complies 
vin  clairet.  » 

—  Du  temps  que  Bertlie  filait.  (Voy.)  Se  dit  par  regret  du  passé. 
On  dit  aussi  :  Du  temps  que  les  bétes  parlaient...  C'était  le  bon 

teiiqis. 

—  De  mon  temps  :  c'est-à-dire  au  temps  de  ma  jeunesse  ;  ce  que 
Cicéron  appelle  Oona  œtas. 

—  Le  temps  présent,  [lour  un  vieillard,  est  celui  des  illusions 
perdues,  le  temps  où  l'on  a  depuis  de  longues  années  enfermé, 
dans  le  tiroir  de  l'oubli,  les  vieilles  lettres  d'amour  et  les  mèches 
de  cheveux. 

—  Un  vieillard  qui  regrette  le  bon  \ieux  tenqjs,  regrette  seule- 
ment le  temps  où  il  n'était  pas  vieux  ;  le  souvenir  plein  de  charmes 
de  sa  jeunesse  passée  lui  fait  exagérer  l'éloge  du  bien  qu'il  trouvait 
alors.  C'est  le... 

...Laudator  Iciiiporis  uctl 
Se  jjucro,,, 

(HuiiAct,  Art  iioclique,  17Ô.) 


480  TKM 

—  Lo.  vioiix  roi  Slfinislas  |)rétondail  qiio  les  rossifrnols  de  la 
l*olognc,  où  il  avilit  passé  sa  jfMinesse,  avaient  la  voix  plus  iiiélo- 
diciise  que  ceux  de  France. 

—  On  passe  sa  vie  à  regretter  le  passé,  à  se  plaindi'c  du  présent, 
à  craindre  jjour  l'avenir. 

—  Ne  prétendons  pas  arrêter  le  monde  au\  jours  où  nous  nous 
sommes  arrêtés  nous-mêmes;  si  doux  que  soient  nos  souvenirs,  ne 
disons  jamais  d'aucune  époque  :  «  C'était  le  bon  temps!  » 

C'est  toujours  le  bon  temps  !  S'il  y  a  toujours  des  vieillards  qui 
Unissent  et  qui  regrettent,  il  y  a  toujours  des  jeunes  gens  qui 
conniiencent  et  qui  espèrent.  (Maréchal  Vaillant,  18G3.) 

—  Ce  qu'on  regrette,  ce  qu'on  voit  à  travers  un  prisme  trompeur 
dans  le  temps  passé,  c'est  un  mérite  imaginaire,  qui  n'est  autre  que 
celui  de  notre  première  maîtresse,  de  notre  amour  pour  notre 
propre  jeunesse. 

La  Providence  se  montre  généreuse  :  elle  nous  détache  douce- 
ment de  la  vie,  racine  par  racine.  Nous  commençons  ainsi  à  ne 
plus  aimer  ce  qu'il  faudra  bientôt  quitter:  nous  sommes  étrangers 
et  presque  absents  déjà,  avant  l'exil,  avant  le  départ. 

C'esl  du  \ilaiii  présent  (luosl  fait  lo  licau  passi', 
Mais  être,  je  le  crois,  vaut  mieux  (juavoir  été. 

(E.  Paim.f.ron.) 

—  Le  temps  qu'on  doit  regretter  le  plus,  c'est  celui  qui  a  été 
dépensé  sans  prolit  pour  le  corps,  pour  l'esprit  et  })Our  le  cœur. 
(Dubief,  directeur  de  Sainte-Barbe-des-Champs.) 

Le  temps  ne  respecte  pas  ce  qu'on  a  fait  sans  lui.  (Eschyle.) 

Les  œuvres  sont  comme  les  figues  ;  plus  elles  sont  mûres,  meil- 
leures elles  sont.  (Pascal.) 

Ce  qui  croit  soudain,  périt  le  lendemain. 

Quand  on  ne  s'en  rapporte  pas  au  temps,  pour  ce  qu'il  doit  faire 
tout  seul,  on  ne  peut  que  l'entraver  dans  sa  marche  réparatrice. 
(Talleyrand.) 

—  Agatharque,  peintre  de  Samos,  se  vantait  devant  Apelles  de 
peindre  vite  :  «  On  s'en  aperçoit  »,  lui  dit  Apelles. 

Voltaire,  âgé  de  69  ans,  composa  Olympia  en  six  jours.  Il  écrivit 
à  d'Alembert,  en  lui  envoyant  son  œuvre  :  «  C'est  l'ouvrage  de  six 
jours.  »  D'Alembert  répondit  :  «  L'auteur  n'aurait  pas  dû  se  reposer 
le  septième.  » 

—  Archidamus  disait  des  trois  points  du  temps,  que  «  le  passé 
n'existait  plus,  que  le  futur  n'existait  pas  encore,  et  que  le  présent, 


TKM  487 

point  insaisiss;il)lc  entre   le  pnssé  et  le  futur,  n'existait  pas  da- 
vantage ». 

—  Les  ailes  du  tonips. 

Sur  les  ;\ilos  tlii  Temps  la  tristesse  s'envole. 
On  fait  beaiicoii|)  de  bruit,  et  puis  on  se  console. 

(L.V  Fontaine,  la  Vetive.) 

Ilàlons-noiis.  le  temps  luit  et  ndiis  Iraine  après  soi  : 
Le  moment  où  je  parle  est  déjà  loin  de  moi. 

(Bmi.KAL-.  Eiiilre  111.) 

...iJuin  Inquimiir,  ftKjit  inriild 
OEliis  ;  carpe  dicm,  quani  minimion  cvedida  jjo.slero. 

(Horace,  Oi/ps,  1,  H.)- 

I/iiislaul  où  nous  \ivons  esl  un  pas  vers  la  mort. 

(Voi.taiiif:.) 

Le  temps,  comme  les  Partîtes,  triomphe  do  tout  en  s'enfuyant. 
Le  temps  est  un  charlatan,  qui  escamote  le  présent  en  faisant 
briller  Favenir.  (I^ntenelle.) 

—  Les  temps  sont  durs  :  Durls  temporlhus.  (Cicéron.) 
Durissima  reipubllcœ  teinpora.  (Cicéron.) 

0  lempora  !  o  mores  !  s'écrie  Cicéron^  se  plaignant  de  la  corrup- 
tion des  hommes  de  son  temps. 

Dans  quel  temps  vivons-nous  !  ô  temps  !  ô  mceurs  ! 

—  Perdre  son  temps  :  jeter  le  temps  par  les  fenêtres.  (A.  de 
Musset.) 

—  Un  Yankee,  pour  utiliser  sa  promenade,  adapte  un  moulin  à 
café  ;'i  l'avant  de  son  vélocipède,  et  une  baratte  à  l'arrière.  A  son 
retour,  il  ti'ouve  son  café  moulu  et  son  beurre  fait. 

—  Le  temps,  c'est  de  l'argent  :  Tuiips  is  money.  (Maxime  amé- 
ricaine.) 

De  tous  les  biens  que  nous  possédons,  le  temps  est  le  seul  dont 
nous  devions  être  avares. 

Dissiper  le  temps,  c'est  user  l'étoffe  dont  la  vie  est  faite.  (Franklin.) 

De  toutes  les  prodigalités,  la  plus  grande  est  l'oisiveté.  (Franklin.) 

Oui  perd  son  temps  trouve  la  misère. 

On  n'est  pas  né  pour  la  gloire,  lorsqu'on  ne  connaît  pas  le  prix 
du  tenq^s.  (Vauvenargues.) 

I^es  amis  sont  des  voleurs  de  tenq)S. 

Philippe  de  Champagne  ne  perdait  pas  un  moment  de  la  journée, 
qu'il  consacrait  tout  entière  à  l'art.  Il  disait  à  ses  élèves  :  «  Vous 
devez  déjeuner  sans  quitter  l'ouvrage,  et  la  récréation  qu'il  faut 


W8  TEN 

prendre  aprrs  dîner,  (•"est  de  descendre  resciilicr  pour  ;dk'r  à 
ïatelier.  » 

L'Iioniiiie  oisif  tiio  le  (einps  :  le  lem|)S  lin;  riioiiiine  oisif. 

La  vie  est  courte,  et  les  joiirnces  sont  lonuiies. 

Comme  elle  i-ampe  lentement,  cette  limace  horrihle  appelée  le 
temps!  (II.  Heine.) 

Tendre,  verbe,  du  latin  tendere:  d'où  étendre,  tente,  tenture, 
attendre,  entendre,  prétendre,  etc.,  intensité,  extension,  etc. 

—  Tendre  un  arc,  autrefois  fésir,  provençal  (ésar ;  d'où  tèse, 
allée  d'arbustes  loulïus,  où  l'on  tend  des  pièges,  des  filets. 

Il  a  tanlost  pris  une  flèche 

En  la  cordo  la  niisi  on  croèchc  (croix). 

Si  la  li'sa  jiisi]ua  rorcijle 

L'arc  qui  élait  fort  à  merveille. 

{Roman  de  la  Iiosc.) 

Tendre,  adjectif,  du  latin  fcner,  (eneruni. 

—  La  carte  de  Tendre.  C'est  une  fiction  allégorique  de  la  Clélie, 
roman  de  M"'^  de  Scudéry.  On  y  voit  le  fleuve  d'Inclination,  le  lac 
d'Inditïérence,  la  mer  Dangereuse,  etc.  Pour  parvenir  à  la  >ille  de 
Tendre,  il  îaut  passer  par  les  villages  de  Billets-Doux,  de  Petits- 
Soins,  etc. 

Cette  carte  a  été  gravée  dans  le  Magasin  pittoresque  (18io). 

La  carte  de  Tendre,  de  M'""  de  Scudéry,  et  celle  du  royaume  de 
Coipietterie,  de  l'abbé  d'Aiiljignac,  sont  probablement  des  imita- 
tions d'une  carte  ancienne  gravée  en  Italie,  oii  l'on  voit  des  prisons 
pour  ceux  qui  travaillent.  Elle  est  accompagnée  d'un  sonnet,  où 
on  lit  :  «  Ici,  plus  on  travaille,  moins  on  gagne,  et  qui  n'est  pas 
fainéant  est  cbassé  avec  ignominie...  Ici,  les  fours  produisent  natu- 
rellement du  pain  »,  etc. 

Cette  carte  doit  avoir  été  faite  à  Naples.  (Voy.  cocayne.) 

Tenir,  du  latin  tenere. 

Avoir  à  la  main,  ou  entre  les  mains. 

—  Il  vaut  mieux  tenir  qu'attendre,  ...ou  que  courir.  Ici,  courir 
est  pour  quérir,  c'est-à-dire  demander  (O- 

...Un  tiens  Aaut  mieux  que  deux  fu  l'auras  : 
L'un  est  sûr,  l'autre  ne  l'est  pas. 

(La  Fom.mne,  V,  o.) 

Les  anciens  disaient  :  «  Mieux  Aaut  aujourd'hui  lœuf,  que  demain 
la  poule.  » 
Mieux  vaut  avoir  qu'espoir. 


TER  489 

MitMix  \iiiil  im  invsiMil  (jiio  diMix  futurs. 

Mieux  \;iul  l;i  saucisse  de  la  réalité  que  rortolan  de  l'avenir 
(Iturlesque). 

Ténor,  de  Tilalieu  /cnorr.  eelui  qui  donne  le  ton,  qui  soiilienl  le 
cliant:  parce  que,  dans  les  motets  à  plusieurs  parties,  pendant  ((uc 
le?  voix  secondaires  exécutaient  des  variations  d'accouipagnement, 
le  léiioi-  disait  le  plain-cliant,  en  maintenant  toujours  le  thème  do 
la  ((unposilion  musicale. 

—  La  voix  de  ténor,  voix  d'homme  entre  la  hasse-taille  et  la 
liaute-contre,  est  la  voix  dMiomme  la  plus  aiguë  que  l'on  puisse 
obtenir  sans  contrarier  la  nature.  Le  ténor  a  la  même  étendue  ([uc 
le  soprano,  voix  ordinaire  des  femmes  et  des  enfants,  mais  il  est  à 
une  octave  plus  bas.  La  basse-taille  est  un  ténor  grave. 

Le  ténor  est  la  voix  la  plus  brillante  de  nos  opéras.  Nourry  et 
Duprez  y  ont  surtout  excellé. 

Tentation,  du  latin  tenlalio, 

—  La  tentation,  à  sa  naissance,  n'est  qu'une  fourmi  qui  cha- 
touille ;  à  la  fin,  c'est  un  lion  qui  dévore.  (Camus,  évèque  de  Belley.) 

Ne  nos  induras  in  tentationon.  (Mathieu,  YI,  13.) 

Tente,  du  latin  tentutn,  de  tendere. 

—  La  tente  d'Achille.  Lorsque  Achille  eut  appelé  Agamemnon 
«  chien  d'ivrogne  »,  il  rentra  dans  sa  tente  avec  son  ami  Patrocle, 
et  y  resta  oisif  pendant  que  les  Grecs  se  battaient. 

On  dit  encore  aujourd'hui,  d'un  homme  en  place,  qui.  [)ar  dépit, 
s'éloigne  volontairement  des  atTaires,  qu'il  s'est  retiré  sous  sa 
tente.  S'il  va  à  la  campagne,  ses  amis  disent  ([u'il  retourne  à  sa 
charrue,  comme  Cincinnalus  ;  ses  détracteurs,  ([uil  va  i)lanter  ses 
choux. 

Terme,  du  latin  lo  minus,  borne. 

Statue  sans  pieds:  borne  qui  indique  une  limite. 

—  Les  hennés  ou  ternies,  sont  des  bornes  de  forme  cubique, 
Unissant  en  gaine  par  le  bas,  surmontées,  à  l'origine,  d'une  tète  de 
Mercure  ou  Hermès,  et,  par  la  suite,  d'autres  dieux. 

Les  anciens  personniiiaient  le  repos,  la  station,  liiumobilité,  par 
le  dieu  Terme,  auquel  ils  donnaient  une  léte  luuuaine  et  un  torse 
sans  jambes  :  être  vivant  par  le  liant,  rocher  par  le  bas. 

—  Terme  se  dit  aussi  pour  limite,  délai  accordé  pour  [layer  une 
somme.  D'où  :  attermoiement.  délai  accordé  à  un  débiteur. 


v.)0  Ti:i{ 

(Jiii  :i  U'iiiie,  iiu  doit  rien  :  avec  le  U',iii|)S  on  s'acquillc. 

—  Terme,  mot,  expression,  est  dit  aussi  pour  limite,  borne;  c'est 
la  Incalisalion  de  l'idée. 

Mesurer  ses  termes  :  se  scr\ii'  de  mots  qui  ne  passent  pas  les 
limites  de  riionnéteté  et  des  convenances. 
Tei'iiie  pi'dpre,  impropre,  technique. 

Terne,  du  latin  lerni,  trois  à  la  fois. 

A  la  loterie,  ce  sont  trois  nombres  pris  ensemi)le  et  qui  sortent 
en  même  temps.  Le  terne  gagnait  3.500  fois  la  mise. 

Terre,  du  latin  lerra.  qui  est  aussi  provençal.  De  torrere, 
bn'der  (la  chose  sèche). 

Le  plancher  des  vaches.  Joseph  Autran  (Poèmes  de  la  mer)  a  dit 
d'une  vache  à  bord  : 

Morne,  clic  rcgrellait  sur  le  plancher  mouvant 
La  plaine,  qui  jamais  n'ondule  sous  le  vent. 

—  La  terre  ferme  est,  en  réalité,  bien  peu  digue  de  ce  nom  ; 
car,  indépendamment  du  mouvement  rotatoire  dont  elle  est  animée, 
les  trcmbleiueuts  de  terre  la  font  onduler  comme  une  mer  agitée, 
et  nous  démontrent  combien  est  mince  et  fragile  cette  pellicule  qui 
enveloppe  la  partie  fluide  du  glojje  et  combien  elle  serait  prompte- 
ment  détruite,  si  oo9  volcans  distribués  à  la  surface,  comme  autant 
de  soupapes  de  sûreté,  ne  présentaient  une  libre  issue  à  l'action 
des  feux  souterrains.  (De  Quatrefages.) 

—  La  surface  totale  du  globe  est  de  50.940. 100  hectares.  La  terre 
sèche  occupe  seulement  le  quart  de  celte  surface.  (Babinet.) 

—  La  terre  est  un  soleil  enkysté.  Son  diamètre  est  d'environ 
12.000  kilomètres,  et  la  croûte  solide  qui  s'est  formée  à  sa  surface, 
par  le  refroidissement,  n'a  que  20  à  40  kilomètres  d'épaisseur, 
suivant  la  fusibilité  des  matières  qui  la  composent  ;  toute  la  masse 
intérieui-e  est  à  l'état  de  lluide  incandescent.  Cette  épaisseur  serait 
de  3  à  6  millimètres  sur  un  globe  d'un  mètre  de  rayon.  La  tempé- 
rature de  la  terre  augmentant,  à  mesure  que  l'on  descend,  de 
1  degré  centigrade  par  33  mètres,  on  doit  trouver  100  degrés  à 
3  kilomètres,  6GG  degrés  à  20  kilomètres,  et  au  centre  200.000 
degrés. 

—  La  terre  a  élé  appelée  la  «  machine  ronde  ».  (La  Fontaine.) 

—  En  1736,  Maupei'tuis  fut  envoyé  en  Laponie  pour  vériller  une 
des  conjectures  les  plus  hardies  de  Newton,  sa  théorie  de  l'aplatis- 


TER  491 

scment  aux  polos.  M.  do  la  Condaniino  fui  rlLiriir  (riino  mission 
soinblaltlo  dans  rAinériqiic  du  Sud. 

Voltaire  célébra  dans  ses  vorsle  résultat  acquis  parla  scionco,  que 
le  globe  est  plat  aux  deux  extrémités  de  son  axe:  ce  qui  anéantit  le 
vieux  préjugé  et  le  nom  de  «  machine  ronde  » 

Oiii'  nos  fl;isi|iirs  auteurs,  on  clicvillaiil  leurs  a  ers, 

Ddiiiiaiciil,  ;i  raM'iiliiri',  a  n'  plat  uiiixers. 

—  Le  mouvement  de  la  teri-e  —  Galilée  fut  persécuté  par  l'Inqui- 
sition de  Rome,  sous  l'ri)ain  YIII.  pour  avoir  propagé  la  découverte 
du  nu)uvement  de  la  terre. 

Les  passages  de  l'Ecriture  :  Terra  in  œteimum  sfnt,  et  Deits 
f'undacit  terrain  auper  stabilUatem  sitam  {Psaume  CIII),  et  celui 
où  Josué  commande  au  soleil  de  s'arrêter,  ne  pouvaient  s'accorder 
avec  la  vérité  proclamée  par  le  Florentin. 

Le  P.  Caccini,  dans  un  sermon  contre  Galilée,  lui  a|ii)liqua  ces 
pai'oles  de  saint  Luc  :  Mri  Galilœi,  qukl  stalis  adsplcienlcs  in 
cœlain?  CqUq  citation  peut  donner  une  idée  de  l'ignorance  des 
persécuteurs. 

La  devise  de  rivalise  est  :  In  dnbiis  liber/as  :  ce  qu'il  faut 
entendre  par  :  la  Foi  et  la  Raison  sont  deux  puissances  distinctes, 
et  là  où  la  Foi  ne  pi'ononce  pas,  la  Raison  est  libre.  Or,  à  cette 
époque,  les  sciences  physiques  avaient  abandonné  les  vieilles 
théories  de  l'antiquité,  tandis  que  l'Église  en  est  toujours  restée 
aux  doctrines  d'Arislote,  ne  pouvant  les  abandonner  sans  changer 
le  dogme  et  la  base  fondamentale  de  sou  autorité. 

«  La  Rible,  dit  J.-J.  Ampère,  est  un  livre  de  religion  et  de  poésie, 
et  non  de  science.  L'Église  doit  rester  étrangère  aux  doctrines 
scientiliques.  qui  ne  sont  souvent  que  des  liypothèses.  et  peuvent 
être  reconnues  fausses  ;  et  la  science  n'a  point  à  chercher  d'appui 
hors  d'elle-même,  fût-ce  dans  la  Bible.  Si  Galilée  eut  un  tort,  ce 
fut  celui-là.  » 

Les  expressions  :  le  lever,  le  coucher  du  soleil,  sont  aussi  des 
hérésies  scientifiques. 

La  fameuse  étoile  des  trois  rois  Mages  aurait  fort  embarrassé  un 
Lalande,  un  Cassini,  un  Newton,  s'ils  avaient  vécu  alors. 

—  Il  voudrait  être  à  cent  pieds  sous  terre.  Se  dit  de  celui  qui 
voudrait  re  soustraire  à  la  honte  de  quelque  mauvaise  action. 

...Ah  !  dure  terre!  pourquoi  ne  t'es-tu  pas  entr'ouverte  ?  (Dante.) 
Auriou    vnugut  estre   un    ayliind,  et   qu'un   porc   m'af/uesse 
mangeât.  (Proverbe  provençal.) 


492  TET 

Testament,  du  l;iliii  IcsIdnirnliDn,  d(^  loatare,  nllostor. 

—  I);iiis  l'.iiiciciiiu',  coiilimic.  l'oiiiiiiiio,  lo  IcslMiiioiit  no  s'écrivail 
pas,  mais  1«3  l.ostat(;iir  (''iioiiçait  sa  voloiitc'"  devant  h'iiKiiiis  '  h'slia). 

—  Jiistiiiion  dérive  tcsidinenlion  de  lesidtio  t/icnfis  :  mais 
Vinnius  se  moque  de  cette  étymologie  en  disant  qne,  par  la  même 
raison,  excrementiun  viendrait  de  excretio  mentis. 

La  terminaison  ment,  dans  certains  mots,  vient  cependant  de 
7nens,  esprit.  Tels  sont  les  adverbes  :  bonnement,  justement, 
comment. 

—  Bonne  marmite,  mauvais  (eslameiil  :  les  dents  sont  plus 
proches  que  les  parents. 

Tête,  du  latin  testa,  proprement  tesson  de  pot.  Le  haut  du 
crâne  ressemble  à  un  tesson. 

Testa  signilie,  en  espagnol  et  en  portugais,  le  sommet  de  la  tète. 

—  Synonymes  :  on  employait  autrefois  clief.  qui  traduit  caput. 
Rabelais  (1,  TiO)  appelle  la  tète  le  moule  du  bonnet  :  «  C'est  le 

pot  au  vin,  parce  que  le  vin  monte  à  la  teste,  et  que  teste  vient  de 
teslu,  qui  signilie  cruche.  >) 

Cap,  est  la  forme  méridionale  de  caput. 

On  dit  aussi  :  binette,  caboche,  boule.  (Yoy.  ces  mots.) 

—  Tête  se  dit  pour  bomme  :  payer  tant  par  tète. 
Oh  !  la  drôle  de  tête  !  le  plaisant  personnage  ! 

O  lepulum  caput  !  (Térence.) 

—  Tète  de  linotte  :  légère,  sans  cervelle,  étourdi. 

—  Avoir  la  tète  cbaude  :  être  irascible,  s'emporter  facilement. 

Ma  femme,  jjien  souvent,  a  la  tète  un  peu  chaude. 

(Moi.LÈKt,  Femmes  srivnntes.) 

On  dit  aussi  dans  le  même  sens  :  avoir  la  tète  près  du  bounet. 

—  Le  héros  de  Vl/iade  justifie  bien  répithète  de  «  bouillant 
Achille  »  quand  il  appelle  Agamemnon  «  chien  divj'ogne  »,  et  tue 
Thersite  d'un  coup  de  poing. 

Kt  (le  plus  (jue  Jimon  la  l'olle. 
Dont  la  tête  est  près  du  bonnet. 

(ScAr.RO.N,  Virgile  travesti.) 

—  Tête-bêche.  (Yoy.  chevet.) 

—  Grosse  tète,  peu  de  sens.  Une  grosse  tête  annonce  de  la 
pesanteur  par  habitude,  de  l'enthousiasme  par  éclair,  beaucoup  de 
volonté  et  souvent  du  génie. 

J'ai  la  tète  plus  grosse  que  le  poing,  et  si  (cependant)  elle  n'est 
eullée.  (Molière,  Bouryeols.) 


TIÏE  -  493 

—  Fniro  s;i  trie  :  (Mrc  [trôh'iiliciix. 

Mi'cliaiil  poi'li.'  (1  fal,  Calulli^  a  deux  travers: 
Hélas  !  il  fait  sa  lèli-  et  m-  fait  pas  ses  vers. 

—  X';iV(iir  pus  de  tt'-tf  :  ;i\()ir  une  Irtc  sans  corM'lIt'.  l'ii  ci-iiiic 
cominis  ji;ii"  un  idiot  n'est  |);is  piiiiissalile  :  on  ne  s;ini";iit  coiiixt  1;i 
tète  à  qni  n'eu  a  pas. 

—  N'en  faire  qu'à  sa  tète.  Il  est  comme  le  honnetier,  il  n'en  fait 
qn'à  sa  tète. 

Têtu,  dérivé  de  (rie. 

—  Télu  comme  nn  ninlel,  comme  une  mule. 

On  disail  autrefois  :  qiiinteux  comme  la  mnle  dn  pape. 

—  Lentétemcnt  nait  de  la  stérilité  de  resjtril  :  <piand  on  n'a 
(pi'nne  idée,  on  y  tient. 

«  Tiiez-moi  sur  place,  coupez-moi  par  morceaux,  la  tête  sur  le 
billot,  je  n'avouerai  i»as  que...  » 

Texte,  du  latin  lexliis,  tissu,  de  lexcre:  anciennement  tlslre. 
Le  texte  d'un   livre  est   l'écriture  contenue  dans  le  corps  de 
l'ouvra^ue.  par  opposition  aux  notes  et  commentaires. 

Théâtre,  du  prec  thcfitron,  par  le  latin  thcdtriiin. 

—  Le  tliéàtre  corrige  les  mœurs  par  le  rire. 

Cusli(jal  ridendo  mores. 

(Santeuil.) 

Le  théâtre  est  un  miroir  on  chaque  époque  vient  montrer  ses 
défauts,  ses  qualités,  ses  ridicules. 

La  mission  du  comique  est  de  nous  faire  éviter  les  écarts  par  la 
crainte  du  ridicule. 

Le  théâtre,  avec  toutes  ses  imperfections  et  toutes  ses  lacunes, 
n'en  est  pas  moins  un  des  produits  les  plus  délicats  de  la  vie 
civilisée,  un  des  elïorts  les  plus  heureux  de  l'homme  vivant  en 
société,  pour  alléger  ses  ennuis  et  augmenter  ses  plaisirs. 

—  Poulailler,  paradis.  Le  dernier  étage  des  galeries  d'un  théâtre 
est  appelé  ironiquement  poulaiUcr,  parce  que  les  spectateurs  y 
sont  juchés  comme  sur  un  perchoir  (L.  Larchey).  Ou  le  nomme 
aussi  paradis. 

—  Les  pièces  de  théâtre  portent  difierents  noms  : 
Pièces  à  femmes,  destinées  à  exhiber  de  jolies  femmes. 

Pièces  à  poudre,  dont  l'action  se  passe  sous  Louis  XY  ou 
Louis  XYI,  et  dont  les  acteurs  portent  perruque  et  poudre. 


494  TIM 

Pièces;']  liroii-s,  on  le  niriiie  ;u'l<'iir  joue  plusieurs  n")les  dilTéreiils, 
en  cliange;iiil  de  costume. 

Pièces  ;i  Iriirs,  oi'i  les  ciiaiigemcnls  ;'i  vue  sont  noiiilireiix.  telles 
(jue  sont  les  féeries. 

—  Les  lliéfilres  romains  étaient  consacrés  à  Vénus,  à  cause  du 
jeu  immoi'al  et  de  rimpudicité  des  acteurs. 

Thébaïde. 

C'est  une  tliéhaide;  un  lieu  désert. 

La  Tliéhaïde,  partie  méi'idiouale,  de  TLaypte,  dans  laquelle  se 
trouvait  Tiu'!l)es  à  cent  portes,  qui  lui  avait  donné  son  nom,  est 
devenu(>  célèbre  dans  l'histoii-e  ecclésiastique,  par  le  grand  nond)re 
de  saints  solitaires  qui  s'y  retirèrent  dans  les  premiers  siècles  du 
christianisme,  et  y  vécurent  dans  les  rigueurs  de  la  pénitence. 

Thémis,  fdle  du  Ciel  et  de  la  Terre,  régnait  en  Thessalie  avec 
tant  de  sagesse,  qu'elle  fut  honorée  depuis  comme  déesse  de  la 
justice. 

Selon  la  Fahle,  Jupiter  eut  d'elle  trois  iiUes  :  l'Équité,  la  Foi  et 
la  Paix. 

On  la  représente  tenant  une  épée  d'une  main  et  des  balances  de 
l'autre. 

Théorie,  du  grec  théùria^  contemplation. 

Tantôt  signifie  une  connaissance  qui  s'arrête  à  la  simple  spécu- 
lation, sans  passer  à  l'action  ;  alors  on  oppose  la  théorie  à  la 
pratique  ;  elles  sont  dans  le  même  rapport  que  la  science  et  le 
métier.  Tantôt  ce  mot  indique  un  ensemble  de  connaissances 
encbainées. 

—  Les  Grecs  appelaient  théorie  une  députation  solennelle,  qu'ils 
envoyaient  tous  les  ans  à  Délos.  Les  membres  de  cette  députation 
s'appelaient  théores. 

Thersite,  du  grec  thersos,  audace,  insolence. 

Le  plus  dill'orme,  comme  le  plus  lâche,  de  tous  les  Grecs  qui 
allèrent  au  siège  de  Troie.  Railleur,  insubordonné,  il  insultait  les 
chefs.  Un  jour  qu'il  s'était  moqué  de  la  douleur  que  témoignait 
Achille  pour  la  mort  de  l'amazone  Penthésilée,  le  héros  le  tua  d'un 
coup  de  poing.  {Iliade,  II,  212.) 

Tiers,  du  latin  tertius,  provençal  ters. 

La  troisième  partie  d'une  chose  ;  trois  est  le  tiers  de  neuf. 


TIR  495 

Il  ;i  cdiist'rvi''  lé  sens  de  troisiriiic  (l;iiis  :  tici's  él;it,  tiers  ordre, 
être  en  tiers,  la  lièvre  tieive. 

Le  tiei's  état  est  le  iiem  domié  aiilrel'ois,  en  France,  à  la  classe 
bourgeoise,  (ini  \t'ii;iil  au  li'disii'iiic  ran,u„  après  la  mililesse  et  le 
clerué- 

On  a[i|ielle  tiers  ordre,  des  [X'rsonnes  du  siècle,  qui  s'attaciient  à 
un  ordre  religieux,  sans  renoncer  à  la  vie  civile,  et  qui  suivent  une 
règle  à  part,  appelée  la  tierce  (ou  troisième  règle). 

Tinette,  récipient  pour  les  déjections  ménagères;  diminutif  du 
latin  tina,  vase  à  mesurer  le  vin. 

En  provençal  tina.  cuve  on  l'on  fait  fermenter  le  vin.  Cuvier 
pour  la  1essi\e. 

Tintamarre.  (À;  mol  vient,  d'après  Pasquier,  de  tinte  la  niavrc, 
la  (in  marra.  Iioyau. 

Les  cultivateurs,  dans  le  Berry,  ont  lliabitudo  de  s'avertir  (pi'il 
est  teu)ps  de  cesser  la  Ijesogne,  en  frappant  sur  le  fer  de  leurs 
marres,  et  usant  ainsi  d'une  sorte  de  télégraphie  acoustique. 

...Duquel  faisant  les  fossés,  touclièrent  les  pioclieurs  de  leurs 
marres  ung  grand  tombeau  de  bronze.  (Habelais,  I,  1.) 

Tinter,  du  latin  tinnitare,  fréq.  de  tinnire. 

—  Les  oreilles  ont  dû  lui  tinter  :  on  a  beaucoup  parlé  de  lui. 
Absentes   tinnitu   auriiua  prœsentire   sermones    (Pline).   Ces 

discours  étaient  supposés  favorables,  si  c'était  l'oroille  droite  qui 
tintait;  défavoraiiles,  si  c'était  l'oreille  gaucbe.  Les  Romains  avaient 
reçu  cette  superstition  des  Grecs,  et  on  lit  dans  une  lettre  d'amour 
dWntistliène  :  «  Ton  oreille  ne  résonnait-elle  pas,  quand  je  parlais 
de  toi  en  pleurant  ?  » 

Tintoin,  se  rattache  au  précédent. 

Perversion  de  l'ouïe,  dans  laquelle  on  croit  entendre  des  sons, 
qui  n'ont  rien  de  réel. 

Ce  mot  se  prend  souvent  au  figuré,  dans  le  sens  d'embarras  : 
donner  du  lintoin. 

Tirelire,  de  l'italien  tira-lira,  tire-franc. 

—  Lorscpie  Lamartine,  après  1848,  ouvrit  une  souscription 
populaire  eu  sa  faveur,  on  dit  qu'il  avait  changé  sa  lure  en  tirelire. 

Ce  mot  hjre,  qui  prête  à  l'équivociue,  a  fait  dire  à  llennequin, 
expliquant  un  passage  du  Deutdrononie,  que  de  Lyra,  Lambin  et 
Juste-Lipse,  s'y   étaient  trompés  tous  les   trois  :  «  Ilic  de  Lyra 


41)6  TIT 

ck'lir;it;   Liiiiibiiiiis    l;iiiiltiii;il  :    .liisliis    Li[)siiis   juste    lapsus  est.    » 
(Yoy.  HalKîliiis,  liv.  III,  cli.  I.  Edition  Jolianneau.) 

Tisane,  du  lalin  jiUsanfi,  [woveiiral  /ipsriîia. 

Décoction  dOi-ur,  ([ni  élait  la  tisane  ordinaire  riiez  les  ;mfieiis. 

—  Tisane  Nient  (iiiel(|nel'ois  de  courtisane.  ((Calembour.) 

Titre,  du  lai  in  lilnhta. 

Se  dit  de  toute  ([ualilication  lionoralde,  des  Jioins  rpii  marquent 
dignité,  distinction,  prééminence. 

—  Les  titres  nobiliaires  sont  ceu\  de  :  prince,  duc,  marquis, 
comte,  vicomte,  baron,  clievalier. 

TrrUKS    nONOUIFIQUKS    ATTACHKS   A    CERTAINS   ÉTATS  : 

Abbé,  supérieur  d'une  communauté  religieuse.  Féminin  altbesse 
(ahbas,  abbatisaa). 

Alcade,  arabe  al,  cadl,  le  juge. 

Altesse  royale,  prince  d'une  maison  souveraine. 

Arcbiduc  ou  archiduchesse,  prince  ou  princesse  royale  d'Autriche. 

Bailli,  oîTicier  civil  qui  rendait  la  justice  dans  un  certain  rayon. 

Barigel,  olTicier  chargé,  à  Rome,  de  veiller  à  la  sécurité  publique. 

Bey,  gouverneur  de  province  turc.  S'ajoute  au  nom  des  hauts 
fonctionnaires  turcs  ou  égyptiens. 

Burgrave,  seigneur  d'un  cliAteau-fort,  en  Allemagne. 

Cadi,  juge,  chez  les  Turcs  ou  les  Arabes. 

Caïd,  magistrat  chargé  de  la  justice  et  de  la  police,  dans  l'Afrique 
du  Nord. 

Gahfe,  vicaire  do  Mahomet:  nom  qu'a  porté  longtemps  le  chef 
politique  de  l'islamisme. 

Caporal,  autrefois  corporal. 

Cardinal,  Son  Eminence. 

Cheik,  chef  de  tribu  arabe,  seigneur,  vieillard. 

Chevalier  de  Malte,  au-dessus  du  commandeur. 

Colonel,  jadis  coroncl. 

Consul,  de  considère,  veiller  sur. 

Corrégidor,  premier  officier  de  justice  dans  une  ville  d'Espagne. 

Czar,  ou  Tsar,  empereur  de  Russie. 

Dauphin,  prince  héritier  de  la  couronne  de  France. 

Dey,  titre  que  portait  le  chef  de  lEtat  à  Alger.  Signifie  oncle 
maternel.  Les  Musulmans  regardaient  le  sultan  comme  leur  père: 
leur  république,  comme  leur  mère;  le  dey,  comme  le  frère  de  leur 
république. 


TIT  497 

Dictateur.  (Voy.) 

Doue.  (Voy.) 

Dom,  altrévi;ition  tlo  Do/niniis.  (Voy.  abdé.) 

Kmiiience,  titre  donné  aux  cardinaux. 

Kinir.  de  X\\\"à\)Qamara,  commander:  titre  arabe  qui  correspond 
à  celui  de  prince. 

Kvcque,  Sa  Grandeur. 

Kxceilence,  titre  donné  aux  ministres,  ambassadeurs. 

Feld-marécbal,  litre  de  commandement  militaire  en  Allemagne; 
correspond  à  celui  de  général  de  division. 

Frère,  nom  que  se  donnent  les  membres  des  confréries  religieuses. 

Général  (sous-entendu  oflicier),  qui  commande  en  clief. 

Gentleman,  gentilhomme  anglais:  Son  Honneur. 

Gonl'alonnier,  titre  du  chef  de  quelques-unes  des  républiques 
italiennes  au  Moyen-Age. 

Hautesse  (Sa),  titre  donné  au  sultan. 

Hidalgo,  titre  des  nobles  espagnols,  descendus  d'anciennes  races 
chrétiennes,  sans  mélange  de  sang  juif  ou  maure. 

Honneur  (Son),  s'applique  aux  lords  anglais. 

Honorable,  épithète  des  députés,  représentants  du  peuple. 

Hospodar,  titre  de  certains  princes  vassaux  de  la  Turquie,  parti- 
culièrement des  princes  valaques  et  moldaves. 

Landgrave,  titre  de  quelques  princes  allemands. 

Légat,  ambassadeur  du  pape. 

Maitre,  officier  ministériel. 

Majesté  (Sa)  Catholique,  le  roi  d'Espagne. 

Majesté  (Sa)  Très  Chrétienne,  le  roi  de  France. 

Mirza,  seigneur  de  l'Inde  et  du  Thibet. 

Nabab,  gouverneur  commandant  dans  l'Inde. 

Nonce,  ambassadeur  du  pape. 

Pacha,  titre  donné  en  Turquie  aux  chefs  des  armées,  aux  gouver- 
neurs de  provinces. 

Pape,  Sa  Sainteté,  le  Saint-Père,  le  Souverain  Pontife. 

Prélats,  Révérends  Pères. 

Primat,  dignité  ecclésiastique  au-dessus  de  l'archevêque.  Syno- 
nyme, en  Occident,  de  patriarchat  en  Orient. 

Rabbin,  dans  le  sens  de  docteur,  chez  les  Juifs. 

Satrape,  gouverneur  de  province  chez  les  anciens  Perses. 

Schah  ou  Sophi,  le  roi  de  Perse. 

Seigneurie  (Sa),  titre  donné  aux  lords  anglais. 


im  TOI 

Sénéchal,  siirinlendant  de  la  maison  du  roi. 

Sérénissimc  (Altesse),  titre  des  princes.  S'appliquait  aussi  à  la 
République  de  Venise. 

Sire,  litre  des  rois  et  souverains. 

Sultan,  souverain  des  Turcs. 

Taïcoun,  empereur  du  .lapon. 

Uléma,  docteur  de  la  Loi,  chez  les  Turcs. 

Vénérable,  président  d'une  loge  de  francs-maçons. 

Vicaire.  (Voy.) 

Vizir,  ministre  du  sultan. 

Titus  (coilîure  à  la). 

Le  buste  de  l'empereur  Titus,  qui  est  au  premier  étage  du  Louvre, 
représente  ce  prince  avec  les  cheveux  courts,  dont  les  petites  mèches 
aplaties  s'appliquent  sur  la  tête.  Le  nom  de  Titus  est  resté  attaché 
à  ce  genre  de  coiffure. 

Toast,  mot  anglais,  signifiant  rôtie  ;  s'écrit  aussi  tost. 

Proposition  de  boire  à  la  santé  de  quelqu'un,  à  l'accomplissement 
d'un  souhait. 

—  Le  mot  anglais  signifie  rôtie.  Autrefois,  en  buvant  à  la  santé 
de  quelqu'un,  on  mettait  dans  le  verre  une  croûte  de  pain  rôtie 
que  mangeait  le  dernier  convive,  qui  recevait  la  coupe,  passée  de 
main  en  main. 

Tocsin,  pour  toque-sin;  du  vieux  français  toquer,  heurter,  et 
sing,  cloche. 

Cloche  qui  sert  à  donner  l'alarme  dans  les  incendies  et  autres 
dangers. 

Tohu-Bohu,  expression  biblique  :  tohou  va  bohoii. 

Etat  du  monde  avant  la  création,  le  chaos.  Ces  mots  hébreux 
signifient  vide  et  sans  forme.  Tohou,  confus,  va,  conjonction  copula- 
tive,  tohou,  vide. 

Les  deux  adjectifs  hébreux  sont  toujours  joints  ensemble  pour 
former  une  sorte  de  composé  invariable,  exprimant  l'idée  de  chaos, 
de  mélange  confus. 

Le  chapitre  XVII  du  livre  IV  de  Rabelais  est  intitulé  :  «  Comment 
Pantagruel  passa  les  isles  de  Tohu  et  Bohu.  » 

Toile,  du  latin  tela.  (Voy.  toile  de  Pénélope.) 

Toilette,  diminutif  du  précédent. 

Petite  toile  blanche,  ornée  de  dentelles,  que  l'on  étend  sur  une 
table  où  l'on  met  ce  qui  sert  à  l'ajustement  des  femmes. 


TO.M  401) 

Par  suite  :  cosliimo. 

—  Toiletle  oAtravauante,  tapageuse  :  qui  dénote  une  absence 
complète  de  bégueulerie. 

Faire  toilette  :  se  requinquer:  se  mettre  sous  les  armes.  (Dict. 
(les  J'rccieifses.) 
Avoir  une  toilette  très  soignée  :  être  tiré  à  quatre  épingles. 

—  Marchande  à  la  toilette  :  ogresse,  madame  la  Ressource, 
colle  qui  loue  des  nippes  aii\  lilles  galantes  et  leur  dévore  tout  ce 
({n'eiles  gagnent. 

Toise,  du  latin  (ensa.  anciennement  teise,  corde  tendue. 
Mesure  de  longueur  valant  six  pieds. 

Toison,  représente  le  latin  (onsio,  tonsionem,  comme  mnlsnn 
reitréscnto  manslo. 

Tolérer,  du  latin  tolernre,  de  tollere. 

Au  propre,  c'était,  d'après  la  loi  romaine,  relever  de  terre  l'enfant 
qui  venait  de  naître,  et  lui  accorder  le  droit  de  vivre. 

Tolet,  du  danois  toile,  cheville. 

Ghe\ille  fixée  au  bateau  pour  faire  mouvoir  l'aviron. 

Tombeau,  dérivé  de  tombe,  latin  tiunba. 

—  On  appelle,  au  propre,  tombe  une  talde  de  pierre,  une  dalle 
de  marbre  dont  on  couvre  une  fosse;  et  tombeau,  tout  monument 
élevé  sur  les  restes  d'un  mort. 

Chez  les  païens,  un  écusson  était  placé  sur  une  des  faces  du 
tombeau,  pour  recevoir  l'épitaphe  ou  inscription,  commençant, 
pour  les  Romains,  par  les  lettres  D.  M.  {Dits  Manibus)  :  aux  Dieux 
Mânes. 

—  Nombreux  sont  les  mots  qui  servent  à  désigner  les  sépultures  : 
Bière,  bûcher,  catafalque,  cercueil,  s'y  rattachent  moins  directe- 
ment. 

Catacombes,  mot  d'origine  grecque,  Aa/«  et  kumbos,  creux  ; 
tombes  souterraines  (des  premiers  chrétiens). 

Cénotaphe,  du  grec  kénos,  vide,  taphos,  toml)eaii,  désigne  un 
monument  qui  ne  contient  pas  les  restes  de  celui  dont  il  rappelle 
la  mémoire. 

Cimetière,  du  gVQckolmétérion,  dortoir  ;  terme  surtout  chrétien. 
On  a  dit  aussi  chaniier. 

Cippe  (voy.),  du  latin  cippus.  On  appelait  ainsi  des  tombeaux 
plus  ou  moins  ornés,  dont  les  Romains  décoraient  le  bord  de  leurs 


500  TOM 

grandes  voies.  Ils  avaient  la  forme  d'nii  autel,  (jiielqiiefois  celle 
d'une  tour  à  plusieurs  ('la.ues. 

Columbarium  :  salle  mortuaire,  où,  comme  dans  un  colombier,  il 
y  avait  de  nombreuses  nicbes  contenant  des  urnes  cinéraires. 

Hypogée,  du  grec  hyjio,  sous,  (jaia,  terre. 

Latomie,  du  grec  /a/ot/téô,  tailler  la  pierre. 

Mausolée.  Les  tombeaux  les  plus  magnifiques  portent  ce  nom,  à 
l'imitation  de  celui  que  la  reine  de  Carie,  Artémise,  avait  élevé  à  la 
mémoire  de  son  éi)Oux,  Mausole,  et  dont  on  a  retrouvé  les  ruines, 
en  1857,  à  Boudroum,  l'ancienne  Halicarnasse.  Les  Romains  en 
avaient  construit  de  gigantesques.  Aujourd'hui,  celui  d'Auguste 
sert  de  théâtre;  celui  d"ITa(1rien  est  une  forteresse  et  une  prison 
d'État. 

Nécropole,  du  grec  nécros,  mort,  polis  :  la  cité  des  morts. 

Ossuaire,  du  latin  ossuarium  :  lieu  où  l'on  entasse  des  ossements. 

Pyramide.  (Voy.)  Les  pyramides  d'Egypte  étaient  d'immenses 
tombeaux.  (J.-J.  Ampère.) 

Sarcophage,  du  grec  sarx,  phcKjô.  (Voy.  cercueil.) 

Sépulcre,  du  verbe  sepolire,  ensevelir. 

Tmnulus,  mot  latin  signifiant  tertre,  monticule,  renflement  de 
terre  (tumeo).  De  là  est  venu  tumulaire,  qui  s'applique  à  tout  ce 
qui  a  rapport  aux  tombeaux  :  pierre,  inscription  tumulaire. 

Tomber,  étymologie  douteuse. 

D'où  tombereau,  voiture  qui  se  décharge  en  culbutant. 

—  Tomber  a  le  sens  absolu  de  chute,  perte,  ruine.  Il  est  tombé 
bien  bas.  Ce  projet  est  tombé  à  l'eau. 

—  Synonymes  :  prendre  un  billet  de  parterre  (jeu  de  mots 
familier)  ;  tomber  de  Gbarybde  en  Scylla.  (Voy.) 

Je  tomiie,  par  malheur,  de  la  poêle  en  la  braise. 

(Régnier,  Satire  X.) 

Il  tomberait  sur  le  dos,  qu'il  se  casserait  le  nez.  (Napoléon.) 

—  Au  figuré  :  faire  une  chute,  commettre  une  faute. 

—  En  italien  cascata,  chute,  cascade  ;  d'où  le  mot  du  slang  pari- 
sien cascader,  faire  des  cascades. 

Dis-moi,  Vénus,  pourquoi  t'obstines-tu 
A  faire  ainsi  cascader  ma  vertu  ? 

[La  Belle  Hélène,  486o.) 

—  En  provençal,  on  appelle  cascarelelte  une  jeune  fille  légère, 
qui  se  plait  à  rire  et  à  folâtrer. 


TOR  501 

Tombola,  iiml  il.ilicn.  du  Ncflio  tiimhof(n\  ciilhiitcr. 
Sorte  (le  j(Mi  de  lolo,  loleno  do  société  dont  los  lots  consistent,  les 
lins  (Ml  (dijcts  de  viilcni'.  les  autres  en  ohjets  ridicules  ou  plaisants. 

Tondre,  du  latin  lomlere. 

—  Je  \eii\éti'e  tondu,  si...!  Anciennement,  on  coupait  les  cheveux 
aux  criminels,  comme  mai'cpic  de  leur  dégradation. 

Les  serfs,  chez  les  Gaulois,  avaient  la  tète  rasée.  Les  moines, 
pour  iii;ir(|iit'î'  leur  servitude  spirituelle,  se  rasaient  la  tête,  et  ne 
conser\  aient  cpiiin  cercle  de  cheveux.  C'est  par  suite  de  cet  usage 
que  les  prêtres  catholiques  conservent  encore  la  tonsure,  comme 
serfs  de  Dieu(?). 

—  11  n'y  avait  que  trois  pelés  et  un  tondu.  Se  dit  d'une  réunion 
pou  nomhrouse  et  pou  distinguée. 

...Pourtant  vouloyt  estudieren  loix,  mais  voyant  que  là  n'estoyent 
que  trois  tigneux  et  ung  pelé  de  légistes,  se  partit  du  dict  lieu. 
(Rabelais,  II,  o.) 

Dans  une  réunion,  il  ne  faut  jamais  être  moins  que  les  Grâces,  ni 
plus  (juo  les  .Muses.  (Plutarque.) 

Tonne,  tonneau,  du  vieil  allemand  (mina. 

—  Le  tonneau  des  Danaïdes.  (Voy.) 

—  Le  tonnage  d'un  navire  est  le  volume  de  son  contenu. 

Toper,  allemand  toppen. 

Consentir  à  une  otïre,  conclure  un  marché. 

—  Topez  là,  dit-on,  en  se  touchant  la  main. 

Cette  locution  a  quelque  analogie  avec  le  mot  ratifiev{^.). 

—  Dans  le  centre  de  la  France,  on  appelle  topette  une  mesure 
pour  les  liquides,  de  la  contenance  de  vingt-cinq  centilitres  environ. 

Torcher,  du  has-latin  torcare,  dérivé  de  torquere. 

Frotter  pour  essuyer. 

Un  ouvrage  bien  torché  :  proprement  fait. 

Torchis,  mélange  de  terre  glaise  et  de  paille  coupée,  qu'on 
emploie  pour  remplir  les  vides  des  pans  de  bois,  dans  certaines 
constructions  rurales.  (Voy.  phé.) 

Tordre,  du  latin  torquere,  pro.vençal  torser. 
Doii  :  torsade,  torse,   tort,  tortu,   tortiller,   tortueux,  entorse, 
rétorquer,  contorsion,  etc. 

Tort,  dérivé  du  précédent;  opposé  à  droit. 

—  Les  absents  ont  tort.  (Voy.  absent.) 


rjo2  ïou 

Qui  so  fficlio  a  tort.  (Voy.  fûchor?) 

Quand  Iniil  le  inonde  n  lorl,  tout  le  monde  a  raison. 

(I.A  (JiM.ssi.K,  la  t'ionvernante,  1,  3.) 

Torticolis,  foi'iiit''  do  lorlum  rollum,  roii  tordu. 

—  Unlichiis  ;ii)i)ell(;  lard-cou  les  cafards  cl  hypocrites  qui  tordent 
leur  cou  en  public,  pour  paraître  en  extase  séraphiquc.  Il  dit 
(liv.  IV,  ciiap.  IM)  que  Carcuio-[)rcnaut  a  la  tète  contournée  en 
alambic. 

Torture,  latin  tortura,  action  de  tordre. 

Par  une  sorte  d'euphémisme,  qui  révèle  le  but  qu'on  se  proposait, 
on  appelait  question  l'appareil  elTroyable  des  tortures  appliquées 
aux  accusés  pour  leur  faire  avouer  des  crimes  réels  ou  supposés. 

La  Torliu'o  interroge,  et  la  Douleur  répond. 

Tory,  mot  anglais,  du  celtique  signifiant  sauvage. 
Partisan  de  Charles  II,  en  Angleterre  :  est  resté  pour  signifier  : 
attaché  au  parti  conservateur. 
S'oppose  à  ivhig. 

Tôt,  adverbe,  du  latin  tôt  clto,  comme  nous  disons  tout  aussitôt. 
Dérivés  :  aussitôt,  tantôt,  bientôt,  plutôt. 

Toton,  fatum,  prononcé  à  la  manière  ancienne. 

Dé  percé  d'une  cheville  sur  laquelle  on  le  fait  tourner. 

Les  quatre  faces  sont  marquées  des  lettres  A.  D.  R.  T. 

A,  initiale  du  mot  latin  accipe,  prends,  fait  gagner  :  D,  initiale 
de  da,  fait  mettre  un  jeton  ;  R  indique  qu'il  n'y  a  rien  à  prendre 
ni  à  mettre;  T.  initiale  de  tôt  uni,  indique  que  le  joueur  prend 
tous  les  enjeux. 

Toujours,  est  pour  tous  jours,  son  ancienne  orthographe. 

—  Ni  jamais,  ni  toujours  :  c'est  la  devise  des  amours. 
Toujours  est  la  devise  des  amours,  cowwwq  jamais  est  celle  des 

ivrognes.  (Miirger.) 

Toujours  !  c'est  un  billet  signé  par  l'enthousiasme,  et  protesté 
t("»t  ou  tard  par  l'oubli.  (Miirger.) 

Toupet,  petite  toufle  de  cheveux.  Origine  germanique. 

—  Avoir  du  toupet,  se  dit  dans  le  même  sens  que  :  avoir  du 
front,  le  front  de... 

Avoir  du  toupet,  c'est  avoir  de  l'audace,  de  l'aplomb. 

Toupin,  tupin  dans  Rabelais. 

Pot  de  terre  servant  anciennement  de  mesure. 


TOU  503 

En  Provonro.  on  appollc  toiipin  un  petit  pot  de  terre  qui  va 
nn  feu. 

Le  féiiiiiiiii  toujtinc,  di'siiine  une  petite  jarre  ou  amphore,  qui 
reçoit  les  eaii\  iik'ii avères  destinées  au  ruisseau. 

De  bonne  vie  bonne  fin. 
De  bonne  terre  bon  toupin. 

(\'ieti\  provcrlie.) 

—  Cliaque  toupin  trouve  sa  cal)ucelle.  (Proverl»e  provençal.) 

Tour,  est  le  sui)Slantif  verbal  de  tournrr  :  latin  tornare. 
De  là  :  détourner,  détour,  détournement;  contour,  atours,  pour- 
tour, retourner.  , 
Détournement  de  fonds  pul)lics  :  malversation. 

—  Jouer  un  mauvais  tour,  ...un  tour  de  Basque. 

—  Jambe  faite  au  tour,  au  propre,  serait  une  jambe  de  bois. 
(Voy.  fait  au  moule)  :  mais  on  entend  par  là  une  jambe  bien  faite, 
qui  a  bonne  lournure. 

Bien  loiirné  qsI  Topposé  de  ma/i(onie  (voy.),  homme  ou  femme 
difforme. 

—  Le  mot  a/ours,  ornements,  ne  vient  pas  du  grec  tornéô^ 
embellir  ;  il  correspond  au  roman  adoni. 

—  Teres  hrarlnolinn  (Catulle)  :  un  petit  bras  rondelet. 

—  Les  Latins  disaient  d"un  homme  bien  fait  :  homo  /'actifs  ad 
unguem,  parce  que  les  sculpteurs  se  servent  de  l'ongle  comme 
d'un  ébauchoir  naturel,  pour  polir  et  perfectionner  le  modelé  de 
leurs  statues. 

—  Faire  un  tour  (de  promenade). 

Faire  sou  tour  de  France,  ...le  tour  du  monde. 

Benc  (unhnia  et  redamhula  (Plaute)  :  bon  voyage  et  bon  retour, 

Tourlourou,  jeune  soldat  d'infanterie. 

Turelureaii,  soldat  de  garnison.  (Ducange.) 

Au  xiv^  siècle,  on  appelait  turc  lure  (tourelourc)  un  château  à 
tourelles,  et,  au  xvii''  siècle,  on  trouve  dans  Gotgrave,  turelureau, 
garçon  jovial  (cf.  (jodrlureauj  ;  d'où  les  mots  toure-loure,  turlu- 
rette,  turlututu,  si  fréquents  dans  les  refrains  populaires,  et  qui 
ont  fait  donner  le  nom  de  hmrc  à  la  cornemuse.  (Voy.  Fr.  Michel, 
Études  de  philologie  sur  l'argot.) 

Tournoi,  ainsi  appelé  de  ce  que,  dans  ces  exercices  militaires 
de  l'ancienne  chevalerie,  les  combattants  ou  bâtonniers,  faisaient 


504  TOIT 

tourner  rnijidcmcnl  leur  lifilon,  épée  ou  Inncc,  et  qu'ils  se  retour- 
nniciit  eux-Mirnics  inec  l;i  plus  .ui"indc  vivacité. 

Tournure,  dérivé  de  lourncr. 

Synonymes  :  crinoline,  paniers,  polisson,  vertugadin. 

Derrière  postirlie  rpie  portent  les  femmes.  Kspère  de  supplément 
à  reiiihonpninl  de  plus  en  plus  usité  dans  la  toilelle  des  femmes, 
et  qui  a  pris,  avec  la  modo  des  crinolines,  une  exagération  presque 
aussi  grande  qu'autrefois  celle  des  paniers. 

...De  quoi  elles  n'ont  plus  honte  que  les  femmes  de  bien  qui 
montrent  l'apanage  de  leur  fessier  aux  eaux  de  Pougues.  (Moyen 
de  parveni7\) 

Henri  Estienne  dit  que,  vers  1580,  cette  mode  existait,  et  que 
lorsqu'une  dame  demandait  son  bonnet  pour  sortir,  elle  disait  : 
«  Apportez-moi  mon  cul  »  ;  et  quelquefois  on  répondait  :  «  On  ne 
trouve  pas  le  cul  de  madame.  » 

—  Boursault,  dans  les  Mots  à  la  mode  (1604),  donne  les  noms 
de  quelques  ajustements  des  femmes  de  cette  époque  :  le  chou,  la 
gourgandine,  la  culbute,  le  tâtez-y,  le  papillon,  etc. 

—  En  1828,  on  adopta  un  bourrelet  de  crin  attaché  au-dessous 
des  hanches,  pour  les  faire  paraître  plus  saillantes,  et  qui  fut 
appelé  «  polisson  ». 

En  1868,  on  porte  derrière  la  taille  de  longs  rubans  flottants,  qui 
s'appellent  des  «  suivez-moi,  jeune  homme»,  et  des  nœuds  énormes 
appelés  ((  protégez-moi;,  mon  père  !  »  et  «  tapez-moi  là-dessus  ». 

En  1870,  le  «  pincez-moi  ça  »  était  un  large  ruban  formant  un 
grand  nœud  derrière  la  taille. 

Tourterelle,  du  latin  tui^lur,  par  le  diminutif  turfurelki. 
.  Columbœ  Veneri  dictœ,  tanquam  in  a/nore  prannoUissimœ. 
Les  anciens  en  faisaient  le  syml)ole  de  la  foi  conjugale. 
Conjugil  fidem  non  violant  columbœ.  (Pline,  X,  34.) 

Tousser,  jadis  tussir,  provençal  tussiar,  du  latin  tussive. 

...Ils  demourarent  tous  estonnez  comme  canes,  et  ne  osoyent 
seulement  toussir.  (Rabelais.) 

...Puis  s'estant  rassis  et  toussy  trois  bonnes  fois,  non  sans  excréa- 
tion phlegmatique...  (Satire  Ménippee,  harangue  de  M.  le  Légat.) 

Tout,  du  latin  totum,  provençal  tôt. 

—  Le  grand  tout.  L'univers  a  été  personnifié  dans  le  dieu  Pan, 
dont  le  nom,  en  grec,  siguitie  tout. 


TRA  505 

Chez  R;il)ol;iis  (V,  ;]S),  li^  pilolc  Tli;iiiions  ciiltMidil  une.  ,ùr;in(lo 
voi\  qui  criiiil  :  "  l.o  ,L:r;iiul  l*;in  ost  mort!  »  Hiiltohiis  ajoute,  faisant 
allusion  à  la  niorl  de  Jésus-Clirisl  :  «  Car  ceslny  très  bon,  très 
grand  Pan.  nostre  unicciuc  servateur.  mourut  lez  Hiérusalem, 
ré.unant  à  Uoine  Tibère  César.  » 

Ual)elais  n'est  pas  le  iircniier  qui  ail  eu  rid(''e  d'appliquei-  le  récit 
laliiiltMix  (le  IMular(|ii('  à  un  personnage  allégorique  sur  lequel  tous 
les  historiens  de  ranli([uilé  ont  gardé  le  silence  le  })lus  absolu. 

—  Tout  à  tous. 

Nous  sommes  faicts,  beaux  fils,  sans  (iouljles. 
Toutes  pour  Ions,  et  tous  pour  loiiles. 

{Roman  de  In  Rose.) 

Tout  est  dans  tout.  (Formule  de  la  méthode  Jacotot.) 

Tout  ou  rien  :  Aul  Cœsa?',  aut  nihil.  (Devise  de  César  Borgia.) 

—  Toul  se  prend  adverbialement  dans  une  foule  de  locutions. 
Tout  à  riieiirc  :  à  l'instant. 

Tout  comme  :  la  même  chose. 

—  Tout  partout  ne  s'emploie  plus  que  dans  le  langage  populaire. 

Tout  partout  pères  on  les  nomme, 
Et,  de  fait,  plusieurs  fois  advient 
Que  ce  nom  très  bien  leur  convient. 

(Mauot,  ?c  colloque  d'Erasme.) 

—  Tout  de  mcme  s'emploie  pour  :  en  vérité,  néanmoins,  malgré 
tout  :  «  On  me  l'a  défendu,  mais  je  le  fais  tout  de  même.  » 

—  A  tout  le  moins  :  au  moins. 

Tous  tes  pécliés  confesseras 
A  tout  le  moins  une  fois  l'an. 

(Commandements  de  l'Eglise.) 

Touzelle  (Rabelais,  lY,  4),  vient  de  tonsella,  diminutif  de  tonsa 
(spicdj,  parce  que  les  épis  de  ce  blé,  qui  est  comiue  la  femelle 
du  froment,  n'ont  pas  de  barbe,  et  semblent  être  tousés,  mot  qui 
autrefois  se  disait  pour  tondus. 

Aussi  touzés  que  moine  ou  capelan. 

(Mauot,  Rondeaux.) 

—  Ce  blé  très  estimé,  mûrit  plus  tôt  que  le  froment,  et  le  pain 
qu'on  en  fait  est  plus  blanc  et  plus  savoureux. 

—  S'écrit  aujoiird'Iiui  foiisclle. 

Traducteur,  traduire,  du  latin  traducere,  faire  passer. 
Faire  passer  un  texte  d'une  langue  dans  une  autre. 

—  Traducteur,  traître  :  traduttore.  traditore. 


50G  '  TRA 

Les  sols  Irnrliirlonrs  lossonililoiit  ;'i  des  v;ilots  imlH'ciles,  qui 
clianjionl  on  sottises  les  coiiipliiiieiils  dont  on  les  charge.  (M""-'  de 
Lafayetlc.) 

Tragédie,  du  grec  (mr/ôdln,  par  le  latin  Ircuju'dia. 

—  Le  prix  de  la  tragédie,  à  Athènes,  était  un  houe  [Irarjoti),  qu'on 
oITrait  en  sacrifice  à  Bacchus,  dans  les  fêtes  duquel  la  tragédie  avait 
pris  naissance, 

])ii  plus  liahilo  clianlro  un  houe  Olail  lo  prix. 

(lioii.i:Ai:,  Art  poétique.) 

—  Jouer  la  tragédie  :  chausser  le  cothurne. 

—  La  tragi-comédie  est  un  mélange  de  tragique  et  de  comique. 

Trahir,  du  latin  Irndire,  pour  trnder'e,  anciennement  traïr. 

—  On  n"cst  jamais  trahi  que  par  les  siens.  C'est  parce  qu'on  ne 
saurait  prendre  les  étrangers  pour  confidents. 

On  reprochait  à  Malherlie  d'être  toujours  en  procès  avec  ses 
parents  :  «  Voulez-vous  donc,  dit-il,  que  je  plaide  avec  les  Turcs 
et  les  Moscovites  qui  ne  me  disputent  rien  ?...  » 

Le  moine  Luther,  le  curé  Ra hélais,  ont  été  les  plus  grands 
ennemis  de  l'Église  :  on  n'est  jamais  trahi  que  par  les  siens. 

—  Haine  de  frères,  haine  de  diables. 

Les  hommes  seront  trahis  par  leurs  pères,  les  frères  par  leurs 
parents  et  leurs  amis.  [Évangile,  saint  Luc.) 

Train,  anciennement  tm'in,  suppose  traliimen. 
Train  de  hateaux,  de  ^vagons. 

—  Aller  grand  train,  son  petit  train,  son  train-train. 
Se  mettre  en  train. 

Avoir  un  grand  train  de  maison  (attirail). 

—  Train  se  dit  aussi  pour  hruit  ;  ce  qui  traîne  fait  du  Ijruit. 

—  De  là  vient  traille,  corde  tendue  d'une  rive  à  l'autre  d'un 
cours  d'eau,  pour  haler  les  bateaux. 

Traiter,  du  latin  tractare. 

Traiter  quelqu'un  sans  façon,  du  haut  en  bas,  comme  un  nègre, 
de  Turc  à  More. 

Trame,  du  latin  trama,  de  tramcare,  passer  au-delà. 

Fil  que  le  tisserand  fait  passer  transversalement,  au  moyen  de  la 
navette,  entre  les  fils  de  la  chaîne,  pour  former  les  tissus. 

Dans  les  étolTes  de  fantaisie,  la  chaîne  est  ordinairement  en 
fil  d'une  matière  moins  précieuse  que  la  trame. 


TUA  507 

Tramontane,  d."  l'italitMi  tminonlana,  /ra/ts  monfrs. 
i\oiu  (iiioii  (loiino  dans  la  .MédiUM-ranée  au  veut  du  Nord,  ou  Itise. 
Los  Italiens  donnaient  aussi  ce   nom  à  rétoile  polaire,  parce 
quelle  indique  le  Nord. 

—  L'expression  :  perdre  la  tramontane,  pour  :  perdre  la  lète, 
\ient  de  ce  qu'avant  la  découverte  de  la  boussole,  les  marins  de  la 
Méditerranée  s'orientaient  au  moyen  de  la  tramontane:  dès  qu'ils 
la  perdaient  de  vue.  ils  s'égaraient. 

Trancher,  peut-être  de  truncareij). 

—  Trancher  le  pain,  trancher  la  léte. 

Trancher   une  difliculté  :  décider  une   question,  faire  comme 
Alexandre  à  l'égard  du  nœud  gordien.  (Voy.) 
De  là  tranchées,  coliques. 

—  Autrefois,  ce  verl)e,  comme  iieaucoup  d'autres  de  la  première 
conjugaison,  faisait  son  parfait  délini  en  is  : 

.Mnis  jo  lui  fraiicliis  une  jaiiibo 
D'uiig  revers  jusiiues  à  la  hanche. 

(Vii.LON,  Monologue  du  Franc  Archer,] 

Lors  d'ung  coup  lui  franchis  la  teste.  (Rabelais.) 

Tranquille,  du  latin  franqni//us. 

Tran(piilk'  comme  Baptiste.  Ce  Baptiste  est  inconnu. 

Trans,  préfixe  latin,  qui   ajoute  l'idée  de  au-delà   aux  mots 
devant  lesquels  il  se  place. 
Devient  aussi  tra,  tré  :  transporter,  traduire,  trépasser. 
A  donné  aussi  l'adverbe  ti-ès. 

—  Le  verbe  timnsir,  qui  a  signifié  mourir,  vient  du  latin  tran- 
sire  (et  non  de  st ingère,  d'où  élreindre). 

Trappe,  ancien  allemand  trapo,  piège. 

Porte  posée  horizontalement  sur  une  ouverture,  au  niveau  du 
plancher. 

—  La  Trappe,  ordre  religieux,  dont  la  maison-mère  est  à  la  Trappe, 
près  Mortagne.  Trnppan,  dans  le  patois  de  Mortagne,  signifie  tertre, 
monticule  ;  le  couvent  est  sur  une  éminence. 

Traquenard,  contraction  de  traque-renard(l). 
Piège  en  furme  de  trébuchet  pour  prendre  les  renards  et  autres 
animaux  nuisibles. 
S'emploie,  au  figuré,  dans  le  sens  de  piège. 


50g  TRA 

Travail,  du  Inlin  Irons,  r/(/ift'a.  ;'i  tr;ivors  los  vcillosf?).  Pro- 
vcnriil  I rdhfillt,  fiiliniio.  niiclqiios-iins  le  rapprocliont  de  e/tt/'orcr, 
et  le  liront  de  trabs,  poutre.  Étymologie  très  incertninc. 

—  Travailler,  se  donner  de  la  peine,  sont  synonymes.  La  pré- 
tention de  Cti.  Foui'ier,  de  i-endre  le  travail  attrayant,  est  donc 
paradoxale. 

Dieu  a  voulu  que  le  travail  fût  une  peine  ;  ne  clicrclions  pas  à 
le  rendre  attrayant  ;  c'est  le  plaisir  qu'il  faut  rendre  instructif. 
(H.  Ri.aaud.) 

Le  travail  est  à  la  société  ce  que  le  mouvement  est  à  l'univers. 

Le  travail  est  l'application  des  facultés  de  l'homme  à  la  pro- 
duction. 

—  L'organisation  du  travail  industriel  est  un  des  grands 
problèmes  de  l'économie  sociale.  Longtemps  le  travail  fut  entravé 
par  les  privilèges  connus  sous  le  nom  de  maftrlscx,  Jurandes,  etc. 

La  liberté  du  travail  a  été  proclamée  eu  France,  en  1789. 

Un  édit  de  Turgot,  de  février  1776,  avait  déjà  supprimé  les 
jurandes,  maîtrises  et  corporations.  (Yoy.  Reçue  des  Deux-Mondes, 
1850.) 

—  Le  droit  au  travail  demandé,  après  la  Révolution  de  1848,  par 
le  parti  socialiste,  et  appliqué  aux  ateliers  nationaux,  n'est  réclamé 
que  par  ceux  qui  ne  veulent  rien  faire,  ou  ne  sont  bons  à  rien  : 
par  ceux  qui,  comme  on  dit,  cherchent  de  l'ouvrage  et  prient  Dieu 
de  n'en  pas  trouver. 

—  Le  droit  au  repos,  ou  du  minimum,  de  Fourier,  sera  sans 
doute  l'objet  d'une  nouvelle  révolution  de  l'avenir.  Ce  serait  le 
droit  des  pauvres  étendu  aux  masses  et  remplaçant  l'exception  par 
la  règle. 

—  Le  droit  aux  travailleurs,  c'est-à-dire  l'anéantissement  du 
capitaliste  par  le  travailleur,  a  été  réclamé  par  Splingard,  au 
Congrès  des  étudiants,  à  Liège  (novembre  18Go). 

Deus  nobis  Itwc  olia  fccit. 

(VmGILE.) 

(Le  travail  est  le  dieu  qui  donne  le  repos.) 

Après  besogner,  repos  et  denier. 

Le  travail,  c'est  la  liberté. 

Qui  aime  labeur,  parvient  à  honneur. 

Absque  labore  gravi  non  venil  ulla  seges. 

(HoitACE.) 

C'est-à-dire,  sans  un  travail  pénible^  aucune  moisson. 


TRE  509 

Celui  qui  ut'  veut  pas  travaillei',  ne  mangera  pas.  (Saint  Paul.) 

(îraud  lra\ail,  i^iMiid  plaisii'  :  mains  ouvreuses  sont  iieui'euses. 

Le  fruit  du  travail  est  le  plus  doux  de  tous  les  plaisirs.  (Vauve- 
nargues.) 

La  nature  nous  imposte  le  travail  comme  un  besoin,  la  société 
nous  en  lait  un  devoir,  l'habitude  nous  en  fait  un  plaisir. 

Ldhor  omiiiii  rincit 
Improbas,  el  durix  unjcns  in  rébus  ei/estas. 

(Viiu;ii.F.,  Géorrjiqnes,  I,  IV8.) 

Travailler,  mtMue  origine  que  le  précédent. 

Synonymes  :  liùrher.  travailler  beaucoup,  comme  le  bùcberon  : 
piocher,  Iravailler  comme  l'agriculteur. 

Travailler  à  la  journée  :  à  la  conscience. 

Travailler  pour  les  autres  :  être  le  bœuf. 

Travailler  pour  le  roi  de  Prusse  (voy.)  :  (jratis  pro  Deo,  inuti- 
lement. 

Exemple  de  travail  pour  le  roi  de  Prusse  :  porter  de  l'eau  à  la 
rivière,  du  Itois  à  la  forêt. 

Envoyer  des  clioueltes  à  Athènes  :  Noctuas  Alhenas  miltere. 
(Cicéron.) 

Demander  de  la  pitié  à  sa  belle-mère  :  Apud  novercam  qaeri. 
(Plante.) 

Travailler  mal  :  bousiller. 

Travailler  à  des  niaiseries  :  en  cogne-fétu. 

Cesser  de  travailler,  se  mettre  en  grève.  (Voy.) 

Tréfonds,  contraction  de  lerrœ  fundus. 

Le  fond  qui  est  sous  le  sol,  qu'on  possède  comme  le  sol  même. 

Treize,  du  latin  iredccua. 

—  L'idée  superstitieuse  attachée  au  nombre  treize  vient  sans 
doute  de  ce  que  les  apôtres  étaient  treize  à  tal)le  lorsque  Jésus- 
Christ  célébra  la  Cène  avec  eux,  et  que  l'un  d'eux  le  trahit.  Aussi 
appelle-t-on  le  nombre  treize  «  le  point  de  Judas  »  et  «  la  douzaine 
du  diable  ». 

Cette  superstition  a  donné  naissance  à  la  profession  fantaisiste 
de  quatorzième,  ou  de  convive  toujours  disponible  pour  rompre  le 
charme  quand  on  ne  serait  que  treize  à  table. 

Les  hommes  les  plus  intelligents  sont  quelquefois  frappés  d'une 
terreur  inexplicable  par  ce  cbilïre  funeste.  (Voy.  néfaste,  ven- 
dredi.) 


510  TRK 

—  Ktrc  treize  à  table  est  chose  tivs  mnllieiireiise.  surtout  qimnd 
il  n'y  a  à  manger  que  pour  douze. 

—  Alphonse  de  Rotlischild  fait  changer  en  12  Ins  le  numéro  13 
de  son  hôtel  (18(58). 

—  Il  n'y  a  que  la  Ireiziruie  pomuio  à  la  douzaine,  (jui  soit  bien 
accueillie  dans  le  monde  superstitieux. 

—  La  boutique  à  treize  a  aussi  un  grand  succès  dans  le  public, 
et  a  enrichi  plus  d'un  modeste  spéculateur. 

—  La  Société  des  Treize,  à  Bordeaux,  se  propose  de  détruire  par 
l'exemple  cet  absurde  préjugé  du  nombre  treize.  Les  séances  de 
celte  société  sont  des  banquets,  où  treize  convives  vont  s'asseoir  le 
vendredi  de  chaque  semaine.  La  fête  de  l'association  se  célèbre  le 
treizième  vendredi  de  Tannée.  On  prend  l'engagement  de  com- 
mencer un  vendredi  toutes  ses  entreprises,  et  de  se  mettre  en 
voyage  ce  jour-là,  de  préférence  à  tout  autre,  A  table,  on  renverse 
le  sel,  et  on  allume  trois  tlambeaux  ;  on  retourne  le  pain,  et  on 
met  les  couverts  en  croix.  Les  personnes  réputées  pour  avoir  le 
mauvais  œil  sont  aduiises  de  plein  droit. 

—  Les  gens  superstitieux  se  servent  aussi  d'une  foule  de  mome- 
ries,  pour  conjurer  des  maléfices  imaginaires.  Ils  font  une  croix  sur 
le  pain  avant  de  l'entamer  ;  un  sou  troué  doit  leur  porter  bonheur, 
comme  la  corde  de  pendu.  0  o.^') 

Le  vin  répaiida  est  bon  signe. 
Sel  renversé,  mauvais  oniine. 

(xvi»  siècle.) 

—  Araignée  du  matin,  chagrin  ;  du  soir,  espoir. 

Tréma,  du  grec  tréma,  trou  (dans  les  dés  à  jouer). 
Deux  points  mis  sur  une  voyelle,  pour  indiquer  qu'elle  se  détache 
de  celle  qui  précède  :  aïeul,  ciguë. 

Tremper,  du  latin  temperare,  par  métathèse. 
Tremper  du  pain  dans  son  vin  :  boire  par  procuration.  (Rabe- 
lais.) 
Manger  la  soupe  du  perroquet. 

Tremplin,  du  vieux  verbe  ti^éper,  triper  ;  d'où  trépigner. 
Planche  inclinée,  élastique,  qui  sert  à  prendre  son  élan   pour 
faire  le  saut  périlleux. 

Trente  et  quarante. 

.Jeu  do  hasard,  qui  se  joue  avec  six  jeux  de  cartes  mêlés,  tenus 
par  un  banquier  qui  dépose  successivement  sur  la  rouge  et  sur 


TRI  SU 

la  noire,  des  cartes,  jusqu'à  une  valeur  moindre  de  quarante  et 
siipérioiire  à  trente.  Celle  des  deux  ronleurs  qui  approche  le  plus 
de  trente  et  un  a  ^uaiiué. 

Trépied,  du  latin  trijx's,  tripedis. 

—  Le  li'épied  d'A[)oll()n  étail  un  Nase  à  trois  pieds,  qui  jouait  un 
r(')le  important  dans  le  mobilier  de  la  diseuse  de  bonne  aventure 
appelée  chez  les  anciens  Pythie. 

—  Aujourd'hui,  être  sur  le  trépied,  c'est  être  inspiré,  transporté 
de  la  fureur  [)oéti(iue  ou  pro[)hétique. 

Très,  du  latin  /fans. 

Adverbe  anipliatif  :  qui  passe  les  limites,  va  jusqu'au-delà. 
On  disait  jadis  Iréstoiis ;  ce  vieux  mot  exprimait  le  superlatif  de 
tons. 

—  Trans  se  trouve  dans  frcssuer,  suer  abondamment  (en  pro- 
vençal tressusar) ;  tressaillir. 

—  Dans  certaines  provinces,  très  devient  ter,  par  métathèse  : 
tersauter,  pour  tressauter  ;  tertous. 

—  Très  s'emploie  devant  les  adjectifs  et  les  adverljes,  pour  leur 
donner  la  valeur  d'un  superlatif  absolu.  (Voy.  trans.) 

Trêve,  vieux  français  trtce,  du  bas-latin  trenga. 
Cessation  temporaire  des  hostilités. 

—  La  trêve  de  Dieu  :  convention  entre  les  seigneurs,  au  xi°  siècle, 
de  cesser  toute  hostilité,  du  mercredi  soir  au  lundi  matin. 

Tricher,  du  latin  trlcare,  chercher  des  détours. 
Ou  de  trucher  {'.)  qui,  en  argot,  signifie  gueuser. 
De  là,  tricherie. 

La  triclierio,  enfin,  va  toujours  à  son  maître. 

(Uauteuochk,  l(;  Soupev  mal  apprêté.) 

Tricot,  tricoter,  tricoteuse;  d'un  bourg  du  département  de 
l'Oise  où  l'on  a  inventé  le  tricot  au  métier.  Ou  de  l'allemand  strick, 
lacet. 

—  On  a  appelé,  en  1793,  certaines  femmes,  tricoteuses. 

Le  6  nivôse,  an  ii,  la  commune  de  Paris  décrète:  «  Les  femmes 
assisteront  aux  fêtes  nationales  avec  leurs  époux  et  leurs  enfants  ; 
et  elles  tricoteront.  » 

Trinité,  du  latin  trinitas. 

Ut  unitas,  trinitas.  (Inscription  sur  l'église  de  la  Trinité,  1867.) 

Nix,  glacies,  aqiia,  sunt  tria  nomina,  res  tamen  una  : 
Sic  in  personis  trinus  Deiis  est  tamen  unus  (157ii). 


Slâ  TllO 

Trinqueballer  (Rnbclais)  ot  irimhalor,  terme  populnire. 

Syiioiiyiiics  :  l'eiiiiKîr,  lir;iiuloiiiller  (?). 

A  force  de  trinqueballer  les  cloches  (Hahekiis,  liv.  I). 

Trinquer,  de  l'allemand  trinhen,  boire. 
IJoiro  (Ml  clioqnant  les  verres. 

Triomphe,  du  latin  iriiunphiis.  Du  vieux  latin  trioiies,  attelage 
de  bœufs  (0- 

Le  triomphateur,  arrivé  au  Gapilole,  iuiinolait  deux.  I)œufs,  de 
même  que,  dans  l'ovation,  ou  petit  triomplie,  il  immolait  des  béliers. 

Tripot,  du  latin  irlpodium,  sorte  de  danse  des  anciens,  qui 
s'exécutait  dans  les  mauvais  lieux. 
Ou  du  vieux  français  triper,  marcher,  gambader. 
On  a  aussi  donné  ce  nom  au  jeu  de  paume. 

Trique,  anciennement  e5/?'/^^^e;  du  néerlandais^/r^y/i^;?,  frapper. 
On  appelle  aussi,  par  antiphrase,  triques,  les  petites  aiguilles  qui 
servent  à  tricoter,  à  démêler  le  fil  et  la  laine. 

Triste,  du  latin  tristis,  de  tei^o,  trivi  (?). 

—  Triste  comme  un  bonnet  de  nuit. 

11  me  parut  d'une  tristesse  comme  lorsqu'on  a  fait  un  pacte  avec 
le  diable,  et  que  le  jour  de  se  livrer  approche.  (Sévigné). 

Jérémie  aurait  été  un  bouffon  auprès  de  lui,  disait  Rivarol,  en 
parlant  de  son  frère. 

—  Synonymes:  broyer  du  noir  ;  en. voir  de  grises;  être  insup- 
portable à  soi-même;  n'avoir  pas  le  cœur  à  la  danse;  avoir  des 
soucis. 

Triton,  origine  grecque  et  mythologique. 

Divinité  marine  qui  semble  être  le  symbole  du  mugissement  de 
la  mer.  C'est  au  son  de  sa  conque  que  Neptune  soulève  les  flots,  ou 
les  apaise  après  la  tempête.  Les  tritons,  monstres  moitié  hommes 
et  moitié  poissons,  accompagnent  le  char  de  Neptune  et  sont  ses 
hérauts. 

Troglodytes,  du  grec  troglê,  caverne,  duein,  entrer. 

Peuples  fabuleux  de  l'Afrique  orientale,  qui,  selon  Pline,  habi- 
taient, le  long  du  golfe  Arabique,  dans  des  souterrains,  sans  doute 
pour  échapper  aux  ardeurs  du  climat. 

Trognon,  pour  tronçon  (?). 
Trognon  de  cliou,  de  pomme, 


TRO  olâ 

On  (lis.iit  iiiid'ofois  tron  de  cliou,  de  lance.  Ce  mot  ne  sert  plus, 
et  rAciidéiiiii'  l'a  siipiirinié  dans  réditioii  de  183o. 

Trois,  du  latin  très,  qni  est  [irovençal. 

—  Les  HoMiains  appeUiient  la  l'ègle  de  trois,  aurea  /'Cfju/a. 

—  Kn  ti'inité  ,ait  perfection.  (Bovilly.) 

—  Les  anciens  buvaient  trois  fois,  en  llionncur  des  trois  Grâces. 
11  y  a  trois  vertus  tliéolojjales. 

11  y  avait  dans  la  mythologie  trois  grands  dieux  :  Jupiter,  Nep- 
tune et  Pluton  ;  trois  Parques,  trois  Furies,  trois  Gorgones,  trois 
Grâces,  trois  Sibylles. 

Cerbère  avait  trois  tètes  :  Géryon,  trois  corps. 

On  comptait  trois  âges. 

Il  y  a  trois  couleurs  primitives  :  bleu,  jaune,  rouge. 

—  M.  de  Bouald  a  a[)pliqué  le  principe  triple  de  cause,  moyen  et 
ell'et  : 

A  la  Trinité  :  le  Père,  le  Fils  et  le  Saint-Esprit. 
Aux  mystères  de  la   foi  catholique  :  la  Trinité,  Tlncarnation,  la 
Rédemption. 
A  la  société  politique  :  le  pouvoir,  le  ministre,  le  sujet. 
A  la  société  domestique  :  le  père,  la  mère,  l'enfant. 
A  la  vie  de  l'homme:  la  volonté,  le  mouvement,  l'action. 
Aux  pronoms  personnels  :  je,  tu,  il. 

Trombe,  du  latin  (wbn  (?)  :  italien  et  espagnol  tromba. 

Colonne  d'eau  enlevée  par  le  vent,  et  tournant  sur  elle-même 
avec  une  très  grande  vitesse. 

Peut-être  vient-il  de  l'italien  tromba,  à  cause  de  sa  forme  arrondie 
comme  celle  d'une  trompette. 

Tromper,  ètymologie  inconnue. 

Au  [uupre,  sonner  de  la  trompe  ;  a  passé  au  sens  de  se  jouer  de 
quelqu'un. 

—  Il  y  a  plus  de  trompés  que  de  trompettes  :  la  honte  d'avoir 
été  pris  pour  dupe  empêche  de  publier  sa  mésaventure. 

Il  fait  bon  battre  un  glorieux,  il  ne  s'en  vante  pas. 
(Jui  diable  est-ce  donc  qu'on   trompe  ici?...   (Beaumarchais, 
Barbier,  III,  1.) 

—  On  n'est  jamais  trompé  :  on  se  trompe  soi-même. 

—  Synonymes  :  attraper,  carotter,  confondre,  leurrer,  mystifier, 
piper,  tricher. 

Se  tromper  :  faire  une  bévue;  avoir  la  berlue  ;  se  blouser, couper 

33 


514  TRO 

dans  le  pont:  se  fourvoyer;  tomber  dans  le  panneau,  ...dans  le 
piège. 

S'enconoonrder,  en  provençal:  se  mal  marier,  faire  un  marché 
de  dupe,  acheter  une  coiiri^e  i)Oiir  un  melon. 

Prendre  son  cnl  pour  ses  chausses  ;  prendre  Gauthier  pour  Gar- 
guille  ;  prendre  martre  pour  renard;  prendre  le  Pirée  pour  un 
homme  ;  prendre  des  vessies  pour  des  lanternes. 

—  Trom[)e-rœil  :  sorte  de  tahleau  où  les  ohjets  de  nature  morte 
sont  représentés  avec  une  vérité  qui  fait  illusion. 

Trop^  du  bas  latin  troppus,  grande  quantité. 

Dans  la  basse  latinité,  troppus  a  signifié  troupeau. 

Si  cnim  in  Iroppo  de  jumentis.  {Loi  des  Allemands,  de  030.) 

—  Adverl)e  de  (piautité:  plus  qu'il  ne  faut,  avec  excès. 

—  En  provençal,  irop  signifie  excès  et  troupe. 
En  roman,  (rop  équivaut  à  beaucoup. 

Trop  vos  am  mais  qu'ien  no  sai  dir. 

(Elias  de  Barjols.) 

(Je  vous  aime  beaucoup  plus  que  je  ne  saurais  dire.) 

—  Trop  se  disait  aussi  en  vieux  français  dans  le  sens  de  beaucoup 
et  se  rapportait  à  ce  qui  peut  se  compter.  On  disait  :  trop  de  gens 
(troupe  de  gens),  pour  :  beaucoup  de  gens  ;  comme  nous  disons  : 
une  foule  de  gens. 

Et  ce  a-t-il  lait  a  trop  de  gent, 
Saiiz  prendre  salaire  ne  argent. 

{Miracle  (le  aaint   Va!eiitin.] 

—  7'rop  garde  encore  la  valeur  de  l»ien.  pai'faitement,  dans  : 
Je  ne  sais  pas  trop  si...  (3n  ne  peut  trop  dire  si... 

—  Qui  trop  embrasse,  mal  estreind.  (xvie  siècle.) 

Fais  quatre  choses  à  la  fois, 

Ta  dois  en  manquer  près  de  trois. 

Cil  qui  trop  convoite,  tout  perd. 

(Voy.  lièvre). 

—  Rien  de  trop  :  lYe  quid  nimis  (Phèdre  et  Chilon). 

Maxime  que  les  Grecs  avaient  écrite  dans  le  temple  dApoUon, 
auquel  ils  l'attribuaient.  (Mêden  agan.) 

Le  sens  était  :  L'excès  en  tout  est  un  défaut. 

Rien  de  trop  est,  à  mon  sens,  la  maxime  la  plus  utile  de  la  vie. 

Dans  le  Paradis  perdu,  de  Milton,  Adam  demande  à  l'ange 
Gabriel  s'il  vivra  longtemps  :  «  Oui,  dit  l'ange,  si  tu  observes  la 
grande  règle  :  Rien  de  trop.  » 


THO  ol5 

—  Tro|),  c'ost  trop.  (Kivarol.) 

T;ilk'\r;iii(l  disail  à  ses  agents   diplomatiques  :  «    Surtout,  Mes- 
sieurs, pas  de  zèle  !  » 
Il  faut  être  sage  même  avec  modération. 

...Sam  iil  (irbilror 
.Appriinc  in  riln  cs-ic  utile,  ut  ne  quid  nimis. 

(TtJnENCE,  Andrienne,  I,  1.) 

—  BeaumaiTliais  (Miiruige  de  Figaro,  IV,  1)  dit  :  «  En  fait 
d'amour,  vois-tu.  trop  n'est  pas  assez.  » 

Pour  être  assez  l)on,  il  faut  l'être  trop. 

...Il  s'y  était  amusé  fougueusement  d'abord,  plus  qu'assez  et 
même  plus  que  trop,  presque  jusqu'à  se  détruire. 

—  Panard  a   fait  sur  Rien  de  trop,  une  pièce  dont  voici  un 

fragment  : 

Troj)  (lo  repos  nous  eiigoiinlit, 
Trop  (lo  fracas  nous  iHouriiil  ; 
Trop  de  froideur  est  indolence. 
Trop  dacUvilé.  turbulence; 
Trop  damour  trouble  la  raison. 
Trop  de  remède  est  un  poison  ; 
Trop  de  finesse  est  artifice, 
Trop  de  rigueur  est  cruauté. 
Trop  d'audace,  témérité, 
Trop  d'économie,  avarice  ; 
Trop  de  bien  devient  un  fardeau, 
Trop  d'honneur  est  un  esclavage  ; 
Ti'up  de  plaisir  mène  au  ti)mbeau. 
Trop  d'esprit  nous  porte  dommage  ; 
Trop  de  confiance  nous  perd, 
Tro[i  de  franchise  nous  dessert  ; 
Trop  de  bonté  devient  fail)lesse. 
Trop  de  fierté  devient  hauteur. 
Trop  de  complaisance,  bassesse. 
Trop  de  politesse,  fadeur. 

—  Monsieur  de  Trop...,  qu'on  chasse  de  partout. 

Trope,  du  grec  (rnpos,  de  trepo,  tourner. 

—  Les  iropes  tournent  au  sens  lîguré  le  sens  naturel  des  mots. 
Ce  sont  des  ternies  d'écolo  à  la  physionomie  un  peu  pédante,  mais 
qui  ont  l'avantage,  une  fois  expliqués,  d'épargner  de  grandes  circon- 
locutions. Le  irope  est  donc  l'emploi  d'une  expression  dans  un  sens 
ligure.  Exemple  :  La  lumière  du  soleil  éclaire  le  monde. 

Cet  écrivain  fut  nne  des  lumières  de  son  siècle. 

—  On  peut  réduire  les  tropes  à  quatre  principaux  :  la  synecdoque, 
la  mélaphore,  la  mdlonyniie,  la  mélalepse. 

1°  La  synecdoque  est  un  trope  par  lequel  un  mot,  au  lieu  de 


Mû  TIU) 

l'objet  qu'il  dési,a'n;iit  priiiiilivemcnt,  en  désip^ne  un  autre,  en  vertu 
de  leur  coexistence.  Ainsi  :  les  ?nor(el.s,  pour  les  hommes-,  une 
voile,  pour  un  navire. 

2°  La  métapliorc  est  un  trope  par  lequel  un  mot,  au  lieu  de 
l'objet  qu'il  désipnc  au  propre,  arrive  à  en  dési.uner  un  autre,  en 
vertu  de  la  ressemblance  que  l'esprit  aperçoit  entre  eux. 

Toute  métapliore  est  une  comparaison.  Le  désespoir  peut  faire 
un  tigre  d'un  agneau  ;  lif/re  et  arjneau  sont  pris  pour  liomme  doux 
et  homme  cruel.  Dur,  pour  impitoyable  ;  pen.Her,  pour  peser, 
sont  des  métaphores. 

3°  La  métonymie  est  un  trope  par  lequel  un  mot  fait  pour  repré- 
senter une  idée,  est  employé  pour  un  autre  mot  exprimant  une 
idée  voisine  de  la  première,  en  vertu  d'un  rapport  commun. 

Ainsi,  le  mot  tjmvail  se  prend  pour  la  subsistance  qu'il  procure, 
et  l'on  dit  :  vivre  de  son  travail  ;  son  travail  nourrit  toute  sa  famille. 
C'est  prendre  la  cause  pour  l'etret.  Il  gagne  sa  vie  avec  peine  ;  ici 
vie  est  mis  pour  subsistance,  et  l'elïet  est  pris  pour  la  cause.  On 
dit  pastel,  pour  peinture  au  pastel. 

La  métonymie  emploie  aussi   le  contenant  pour  le  contenu,  et 

réciproquement  :  le  jKilais,  pour  les  juges  ;  la  maison,  pour  les 

habitants. 

...Pour  punir  les  crimes  de  la  terre. 

(La  Fo.ntaine.) 

Eulin  ce  trope  se  sert  du  nom  d'origine  pour  désigner  la  chose 
qui  en  provient.  C'est  ainsi  que  sont  formés  les  mots  cachemire, 
madapolam,  madras,  tulle. 

On  a  nommé  de  l'Inde  les  produits  que  ce  pays  nous  envoie  : 
indienne,  indigo,  dinde. 

4"  La  métalepse  est  un  trope  par  lequel  un  mot,  au  lieu  de  l'idée 
qu'il  exprimait  primitivement,  rend  une  autre  idée,  eu  vertu  de  la 
relation  d'ordre  qui  existe  entre  elles.  Cette  ligure  prend  l'antécé- 
dent pour  le  conséquent,  ou  le  conséquent  pour  l'antécédent. 

Ainsi,  on  emploie  entendre  pour  comprendre  :  J'entends  bien 
votre  affaire.  Il  a  vécu,  pour  il  est  mort.  (Yoy.  antonomase, 
amphibologie.) 

Tpou,  origine  fort  incertaine. 

—  Il  n'a  vu  le  soleil  que  par  un  trou  :  c'est  un  ignorant,  qui 
n'est  jamais  sorti  de  son  village. 
Rabelais  (II,  34)  dit  qu'il  faut  se  déiler  des  gens  qui  regardent 


TIIO  ;j!7 

par  un  portnis,  ou,  comme  on  dit,  par  une  fencMrc  de  drap.  Il  veut 
parler  des  moine?,  qui  voient  par  l'ouverture  de  leur  cauoule. 

Troubadour. 

Les  purlfs  (le  raucicnne  Ti'ance  étaient  les  Ironlxidourti  pour  la 
lanuue  d(n',  et  les  irouvi'res  pour  la  lanuiic  d'oïl. 

Ces  deux  termes  signilient  également  trouvcur,  créateur,  inven- 
teur :  dans  lroubadoiu\  le  b  gascon  a  remplacé  le  v,  et  le  d  repré- 
sente le  t. 

LQ,mo\  barde  siguiliait  aussi  chanleur  ;  comme  le  grec  y^o/eVe*', 
d'où  poète,  créateur. 

—  Le  plus  ancien  troubadour  connu  est  Guillaume  IX,  comte 
de  Poitiers  et  duc  de  Guienne,  né  le  20  octobre  1071,  mort  le 
JO  lé\rier  1127.  Le  second  poète,  par  ordre  de  date,  est  le  trouvère 
Wace,  qui  puldia  le  Rof/ia/i  de  Brul  et  le  lioman  de  Hou,  en 
dialecte  normand  (ll'w). 

Trouble.  (Voir  le  suivant.) 

—  Pècber  en  eau  tronhle  :  faire  des  prolits  illicites. 

Il  n\'st  que  ijèclior  en  eau  trouble. 

Il  n'y  a  jamais  eu  de  troubles  dans  l'État,  sans  profit  pour  les 
vauriens  :  quand  beau  bout,  l'écume  surnage. 

Troubler,  \ieu\  français  torbler,  du  latin  (urbulare. 
De  tai'bulare  viennent  :  turbulent,  perturbation,  imperturbable. 
Quelques-uns  le  font  venir  de  tribukire,  qui  a  laissé  tribulation, 
et  qui  se  rapprocbe  de  tinbulus,  cbardon  à  trois  pointes. 

Trop  sommes  aveugles  qiuuKl  si  le  Irihoiilons. 

(J.  nv.  .\Iki:.m;.) 

...Sont  foulez 
Et  par  fortune  trihuiilez. 

(Al.    ClIMlTIKIl.) 

Géniu  condamne;'!  regret  cette  étymologie  ingénieuse,  et  rapporte 
troubler  à  lurbare.  L';'  a  été  transposé  comme  dans  beaucoup 
d'autres  mots,  par  exemple  dans  frouiaye,  brebis. 

—  Synonymes  de  se  troubler  :  perdre  la  boule,  la  boussole,  la 
carte,  la  tramontane.  (Yoy.  désorienter.) 

Troupe,  du  bas-latin  troppus,  d'un  type  trupa  pour  turba. 
De  là  :  troupeau,  attroupement. 

—  Troupe  de  comédiens.  A  Rome,  une  compagnie  de  comédiens 
s'appelait  aussi  grex. 


5i8  THU 

Trousser,  ;incion  fiMiiciiis  loracr;  du  l.itiii  lortUire,  (U'Tivc  de 
(or/IIS,  cl  de  lorf/iirre,  ;itl;iclior  solidement. 

D'oii  :  trousse,  haun.uos,  l'éiiiiioii  d'olijcts  lirs  eiiseiiihl)' :  retrous- 
ser. Illettré  plus  liant. 

(Ml  iippelle  Mussi  /rousse  ce  qui  enveloppe  nii  ohjet  porté;  c'est 
relui  du  carquois  de  Cupidou,  aussi  bien  que  celui  du  harhier  ou 
du  cliii-uroien. 

Le  trousseau  de  la  mariée,  c'est  le  paquet  de  ses  liardes. 

Un  trousseau  de  clefs,  c'est  proprement  un  paquet  de  clefs. 

Trousser  bagage,  c'est  plier  hagapes,  partir. 

Les  trousses  sont  le  vêtement  cpi'oii  porte,  et  se  retrousser  c'est 
relever  le  bas  de  ce  vêtement. 

Se  mettre  aux  trousses  de  quelqu'un,  c'est  s'attacber  à  ses  vête- 
ments, cbercher  à  le  saisir  par  là. 

Comme  Molière  a  dit  :  tenir  au  cul  et  aux  cbausses. 

Trouver,  peut  se  rattacher  au  latin  turbare,  remuer,  fouiller. 
Provençal  trobar. 
Rencontrer,  par  basard  ou  en  cbercbant. 

—  Trouver  la  pie  au  nid.  (Voy.  pie.') 

Aurl  venas  invenire  (Gicéron)  :  trouver  une  mine  d'or. 

Il  ne  trouverait  pas  de  l'eau  à  la  mer. 

J'ai  trouvé  !  Eurêka  ! 

Je  puis  m'écrier,  comme  Arciiimède  :  Eurêka  ! 

Truand,  origine  très  douteuse. 

Signilie,  dans  l'usage,  un  coquin,  un  mendiant;  mais  il  vient  de 
tributum,  ira,  pour  tribut,  et  a  le  sens  de  vilain,  qui  paie  taille 
et  tribut.  Serait  ainsi  l'opposé  de  genlil,  noble,  qui  se  trouve  dans 
gentilhomme  (?\ 

Rabelais  dit  (liv.  III)  :  «  Toute  cette  Iruandaille  de  monde  qui  ne 
preste  rien...  et  qu'il  faut  nourrir.  »  11  entend  par  là:  Tout  ce 
monde  parasite  et  inutile  de  bélîtres,  ou  moines  mendiants,  appelés 
autrefois  truands,  à  cause  que  leur  paresse  et  leur  gueuserie  leur 
constitue  une  sorte  do  tribut  sur  le  reste  de  la  société,  qui  travaille. 

—  Les  rues  de  la  Grande  et  de  la  Pctite-Truanderie,  à  Paris, 
étaient  habitées  par  les  truands;  le  repaire  principal  où  ils  se 
réunissaient,  était  la  Cour  des  Miracles.  (Yoy.) 

Quand  je  vois  tous  nods  ces  truands. 
Trembler  sur  ces  fumiers  puants, 
De  froid,  de  faim,  crier  et  Ijraire, 
Conte  ne  fais  de  leur  affaire. 

(Marot.) 


*  Tl'H  ol9 

—  De  trunnd  \iont  l'arf^ot  t7'uchej%  mendier,  voler. 

On  n  dit  ;iu?si  (iiie  (rnnnd  vient  de  ce  qu'autrefois,  en  Bour^opne, 
on  ;iv;iit  donm''  le  nom  de  //•//,  à  un  imp()t  onéreux,  qui  réduisait 
les  contriliiialiics  à  la  iiicmlicité. 

True,  dans  l'argot  foiirhesqne,  est  une  manière  de  voler.  De 
tnicco.  Iifiloii.  moyen  d'introduction  pour  extorquer  de  l'argent. 

—  Tntr,  dans  le  sens  de  rouerie,  malice,  était  déjà  usité  au 
XI v«  siècle. 

—  En  langage  des  coulisses,  tinic  sert  à  désigner  un  des  cliefs- 
d'd'uvre  du  machiniste,  un  coup  de  théâtre  bien  réussi  et  ne  mon- 
trant pas  la  licelle. 

Les  féeries  sont  des  pièces  à  truc. 

—  La  ^ertu  simulée  qui  cache  un  vice,  est  uu  trur  :  bref,  un  truc 
est  uu  procédé  ingt''nieux.  un  moyen  peu  connu  pour  arriver  à  un 
but. 

—  LoH  Trnq  (d'Auhigné,  Aventurpa  du  baron  de  Fœneste. 
liv.  IV.  ch.  14).  jeu  de  cartes  à  deux  personnes,  où  les  meilleures 
cartes  sont  le  sept,  le  six  et  l'as. 

Truqueur,  vient  du  saxon  fo  iriir.  commercer  par  éciiange. 
Brocanteur,  ai'tiste  qui  fait  et  qui  vend  de  fausses  antiquités  et 
autres  objets  de  curiosité. 

Tu  autem,  mots  latius. 

—  Savoir  le  lu  aufcm...  Eu  sçaurez  le  fu  auiem  (Rabelais,  liv.  l. 
ch.  12). 

C'est  une  façon  de  parler  ancienne,  prise  des  leçons  du  bréviaire, 
qui  Unissent  par  celte  formule  :  Ta  autem.  Domine,  miserere 
nobis. 

Savoir  la  fin  d'une  choie,  par  suite  la  connaître  à  fond. 

Tuer,  étyniologie  incertaine;  du  latin  tuditare,  fréquentatif  de 
tudan;  \l},  Ijieii  itlut()t  que  du  grec  thaein,  immoler. 

Avant  de  prendre  la  signilication  de  «  faire  périr  »,  a  eu  celle  de 
frapper,  éteindre,  étouffer. 
On  a  dit  :  tuer  le  feu,  la  chandelle,  et  :  ma  chandelle  est  morte. 
Tant  tués  que  blessés,  il  n'y  a  personne  de  mort. 
Les  gens  <iiie  vous  tuez  se  purleiit  assez  bien. 

(ConNEii.r.K,  le  Menicur.) 

Vous  tuez  donc  des  gens  qui  se  portent  fort  bu/ii. 

(.MoLiÉnE,  Etourdi,  U,  7.) 


320  TUU 

—  Tuer  le,  leinps.  (Voy.) 

—  On  (lit,  dans  le  Herry,  d'un  Mniricn  qui.  |ioiii-  le  plus  mince 
prolit,  ne  recule  devfint  ;iucune  mniivaise  adion  :  «  Il  tuerait  bien 
un  mercier  (colporteur  auihulant)  pour  un  pei.uue.  » 

Rabelais  intervertit  plaisamment  les  termes  de  ce  dicton  :  c  Oli  ! 
si  vous  moy  (aides  vostre  lieutenant,  dit  Merdaillc  je  lucroye  ung 
pigne  pour  un  marcier.  » 

—  Tuer  la  poule  aux  œufs  d'or.  Allusion  à  un  ancien  apologue 
attribué  à  Ksope.  Un  boinme  possédait  une  poule  qui  pondait 
cliaque  jour  un  œuf  d'or.  Il  la  tua  pour  devenir  ricbe  tout  d'un 
coup,  et  ne  trouva  rien. 

Il  y  a  aussi  des  fous  de  cette  espèce,  qui  jouent  une  fortune  mé- 
diocre mais  assurée,  dans  l'espoir  d'une  grande  fortune  qui  n'arrive 
jamais. 

Tuffîère,  du  grec  tup/tos,  orgueil. 

—  Destouches  a  appelé  «  marquis  de  Tufiiére  ■  le  liéros  du 
Glorieux,  comédie  jouée  le  18  janvier  1732. 

Tuile,  vieux  français  toule,  du  latin  icgula.  ce  (jui  sert  à 
couvrir. 

—  Il  lui  est  tombé  une  tuile  sur  la  tête  :  un  accident,  un  malheur 
imprévu  lui  est  arrivé. 

Quelle  tuile  !  —  Pyrrhus,  roi  d'Epire,  fut  tué,  au  siège  d'Argos, 
par  une  vieille  femme  qui  lui  envoya  une  tuile  du  haut  d'une 
maison  (272  avant  Jésus-Christ). 

Patatras  !  voilà  la  tuile;  voilà  le  seau  de  glace  que  je  redoutais. 

Tu  quoque!  phrase  latine  elliptique  :  Toi  aussi  ! 
Ce  sont  les  paroles  de  César,  lorsqu'il  aperçut  au  nomlire  de  ses 
assassins  Brutus,  qui  passait  pour  être  son  (ils. 

Turc. 

Les  Turcs  font  remonter  leur  origine  à  Turc,  (Ils  aine  de  Japhet. 
Synonyme  :  mamamouchi. 

—  Le  Grand  Turc.  Au  xvi"  siècle,  Mahomet  II,  empereur  des 
Turcs,  fut  appelé  par  les  chrétiens  «  le  Grand  Turc  »,  à  cause  de 
l'étendue  de  son  empire;  par  opposition  au  sultan  de  Cappadoce, 
qu'on  appelait  «  le  Petit  Turc  » . 

—  Fort  comme  un  Turc.  C'est  sans  doute  un  Turc  qui  a  donné 
cours  à  ce  proverbe,  comme  l'homme  s'est  intitulé  «  roi  de  la 
création  ». 

On  peut  supposer  que  c'est  pour  combattre  cette  prétention  qu'a 


Tl'ï  521 

été  inventée  la  «  létc  de  Tiiir  »,  surmontée  d'iin  lnrh.iti.  sur  laquelle 
on  frappe  des  coups  si  terrililes  pour  donner  la  prcinc  de  la  vigueur 
de  son  liras. 

—  Trailer  de  Turc,  à  More  (Molière,  Pt'écieuses,  se.  X).  Traiter 
quelfpi'uu  avec  la  dernière  riuueur  ;  sans  doute  parce  que  les  Turcs 
et  les  Mores,  dans  leurs  anciennes  guerres,  ne  se  faisaient  aucun 
quartier. 

—  Les  Turcs  nous  appellent  «  chiens  de  chrétiens  ».  A  notre 
tour,  nous  donnons  souvent  à  des  chiens  les  noms  de  Turc  et 
même  de  Siill.ni. 

Turcaret,  riche  tlnancier,  sot  parvenu. 

C"est  le  héros  de  la  comédie  de  Lesage  qui  porte  ce  nom,  jouée 
en  170Î). 

Turlupin. 

Moliéi-e  appelle  (urhipin^  les  faiseurs  de  jeux  de  mots  et  de 
calemhours,  qui  étaient  très  nombreux  de  son  temps.  (Yoy.  Criti- 
que de  l'Ecole  des  femmes,  se.  I.) 

La  Bruyère  se  plaignait  encore  de  leur  langage  extravagant  et  de 
leurs  gestes  alîectés. 

Boileau,  dix  ans  après  Molière,  avait  dit,  dans  XArl  poétique  : 

Toutefois  à  la  cour  les  turlupins  resièi'eiit. 
Insipides  piaisanls,  bouffons  inforlunés. 
D'un  ji'U  (le  mois  grossier  partisans  suranni-s. 

— -  Ti(rlu])in  fut  le  nom  de  guerre  d'un  comédien,  dont  le  vrai 
nom  était  Henri  Legrand,  garçon  Ijoulanger  qui  se  lit  acteur  en 
1383  et  joua  la  cotnédie  pendant  plus  de  cinquante  ans.  Il  était 
associé  avec  Gautier  Garguille  et  Gros-Guillaume.  Le  caractère  des 
rôles  de  Turlupin  était  la  raillerie  et  le  ridicule.  Gautier  faisait  le 
maitre  d'école,  et  Guillaume  l'homme  sentencieux. 

Turlututu,  imitation  du  son  de  la  llùte. 
Refrain  de  vieilles  chansons. 

—  En  1820,  on  appelait  au  Conser\atoire  de  Paris  les  opéras 
de  Rossini,  des  turlututu.  (A.  Adam.j 

Tutoyer,  formé  de  tu  et  de  toi. 

—  Dire  tu  à  quelqu'un:  être  à  tu  et  à  toi:  traiter  familièrement. 
Ne  tutoyez  pas  mes  atïaires,  n'y  touchez  qu'avec  précaution. 

On  rit  avec  vous,  et  lu  te  fâches  !  (Burlesque.) 

—  Les  Provençaux  ont  l'habitude  de  se  tutoyer  eux-mêmes  dans 


522  UNI 

ccrtnins  iiioiiolo.uiies  iiiliiiics  :  "  Je  iik;  suis  dit  :  Va  ;i  la  caiiipa^mc; 
on  ne  t'attend  pas,  tu  siirprciulras  Ion  monde.  » 

On  tr'oiive  dans  le  roman  (''.ay|)lien  (W  Sr'fo.  Ii"idiiit  |)ai'  .M.dlialias, 
sur  les  j)apviMis  troiiv(''S  dans  les  hypogées  de  la  ilaiilc-lveypte,  Srta 
se  parlant  à  liii-mrme  en  ces  termes  :  «  Dois-tii  aller  à  Copies  pour 
fnnir  avec  eux  ?  » 

Tympanite,  du  prec  lijmpnnon .  par  le  latin  tijmpnnum, 
tanilioiir. 

Ballonnement  du  ventre.  Citez  les  hëtes  à  laine,  on  lui  donne  le 
nom  de  méléorisnflon.  (Yoy.  pet.) 


u 

U.  La  lettre  u  est  le  v  arrondi.  Elle  n'a  été  introduite  dans  la 

typographie  qu'en  1629,  par  Zeitner,  imprimeur  à  Strasbourg. 

Le  t  et  le  ./  ont  été  créés  au  xvi"  siècle  comme  consonnes  pour 
doubler  1'/  et  1'/^.  On  les  appelle  des  semi-voyelles. 

Ultramontain^  du  latin  ultra,  montes. 

Nom  donné  aux  partisans  du  pouvoir  spirituel  et  temporel  du 
pape,  parce  que  Rome,  où  siège  le  pape,  est  située,  par  rapport  à 
nous,  au-delà  des  monts. 

—  S'oppose  à  gallican. 

Un,  du  latin  uniis. 

Qui  est  seul. 

De  là  :  aucun,  chacun,  quelqu'un. 

—  Autrefois  on  écrivait  souvent  ung,  et  au  pluriel  uns. 
Rabelais  (liv.  IV,  52)  dit  :  Unes  vieilles  Clémentines. 

En  provençal,  on  dit  aussi  uneis  au  pluriel,  se  rapportant  à  des 
noms  pluriels  :  uneis  ciseaux,  uneis  l)as. 

...Délectation  nous  combat,  luxure  nous  abat,  ambition  nous 
guerroyé,  avarice  nous  tourmente,  envie  nous  insidie,  et  ire  nous 
surprend.  Si  l'ung  de  ces  vices  est  vaincu,  l'aultre  recommence  la 
bataille.  (Le  Triomphe  de  la  noble  et  amoureuse  dame) 

Uni,  datif  de  unus.  Ou  plul()t  participe  de  unir,  du  latin  unire  : 
sauf  en  composition,  où  il  est  le  radical  latin  ;  uniforme,  unanime, 
quand  il  a  le  sens  d'unique. 


USA  523 

—  Unis  rnmmc  la  chair  ot  l'onulo.  conniio  les  doijils  de  la  main, 
coniiiie  le  licri'o  à  l'oiMiieaii. 

Union,  du  laliii  iinio. 

—  L'unidii  fait  la  foi'cc.  On  (•tniiiail  la  fable  des  Iia.iiiieltes  qiroii 
brise  isoléiiicnt.  cl  ([ii'il  est  iiii[)i)ssililt',  de  rompre  (jiiaiid  elles  sont 
unies  en  faisceau. 

L'homme  n'est  fort  que  par  l'union.  (Mirabeau.) 

—  Trait  d'union.  L'enfant  est  le  trait  d'union  entre  l'homme  et 
la  femme.  L'intérêt  est  le  trait  d'union  des  familles  (  ?). 

Univers, du  latin  iin/'rersNs:  d'où  uniL^crscf,  qui  s'étend  à  tout. 
General,  commun  à  un  très  .urand  nomlu'e,  soutire  des  exceptions; 
unir  erse/,  les  exclut. 

—  L'auteur  de  la  préface  du  Dictionnaire  de  VAcadéinie  (183o), 
dit  que  «  notre  lanaiie  a  pris  en  Europe  un  empire  presque 
universel  ».  Il  y  a  deux  fautes  dans  cette  phrase  :  ce  qui  est 
presque,  n'est  pas  tout  à  fait  :  et  ce  qui  se  fait  en  Europe,  n'est  pas 
plus  iinivorsol  que  l'iMirope  n'est  l'univers. 

Université.  Corps  établi  pour  enseigner  l'universalité  des 
coiniaissanres  humaines  :  langues,  belles-lettres,  sciences,  etc. 

Urbanité,  du  latin  urbanitas.  dérivé  de  urbs  (urbore,  tracer 
le  sillon). 

L'usage  cliez  les  anciens  était  de  tracer  uu  sillon  pour  circons- 
crire resi)ace  où  l'on  voulait  construire  une  ville. 

L'rbs  ex  conjunclis  doniici/iis  constat;  ciritas  ex  convenli- 
culis  hominum.  (Cicéron.) 

Uriner,  du  latin  urina,  de  urne,  vase  de  nuit  (?). 
Synonymes  :  pisser,  lâcher  l'écluse;  faire  le  petit,  faire  pipi. 
Expulser  le  superllu  de  la  boisson.  (Molière,  Médecin  inalrjré  lui.) 

—  Uriner  contre  un  mur  :  lire  les  aftiches.  (Yoy.  jocrisse.) 

Urinoir. 

Synonymes  :  vespasienne;  porcelaine  d'appartement;  Bourdalouc. 

Rambuteau.  Guérite-urinoir  en  forme  de  colonne,  servant  à 
l'allichage,  autorisée  sur  la  voie  publique  sous  Louis-Philippe,  par 
M.  de  Rambuteau,  préfet  de  police. 

Usage  ;  anciennement  us,  de  usus,  avec  le  suffixe  âge. 

—  On  use  d'une  chose  co//? m ?/;?e  (accoutumée),  usitée  {(\m  sert 
souvent),  inusitée  (tombée  en  désuétude). 


o24  rsu 

—  On  emploie  encore  Texpressioii  :  les  us  et  coiiUinies,  pour 
signifier  les  anciens  nsaaes.  la  pratique  suivie  clans  un  pays. 

—  L'usage  fait  la  lui.  More  m  far  II.  us  us.  (Ovide.) 

Usas.  cfficacisHiinns  reriim  omnium  mnghler.  (VWnc.  J/i.s/on^e 
nalurelle,  XXVI,  2.)  En  toute  chose,  l'usage  est  le  meilleur 
maître. 

—  Il  n'y  a  ni  bien  ni  mal,  ni  vice  ni  vertu,  ni  beauté  ni  laideur  : 
il  y  a  des  ti'adilions  reçues,  des  usages  admis,  et  des  a[)préciations 
relatives  au  temps  et  à  la  société  où  l'on  vit. 

—  Bossuet  appelait  l'usage  «  le  père  des  langues  ». 

—  L'usage  est  un  quarante  et  unième  académicien,  qui  fait  la  loi 
aux  quarante  autres. 

—  Synonymes:  enseigner  les  usages  du  monde:  décrasser; 
employer  la  savonnette  à  vilain. 

User,  de  usure,  dérivé  fréquentatif  de  uti. 
De  là  :  utile  et  outil,  abus,  usure,  usurpé,  usité. 

—  Usé  jusqu'à  la  corde,  ...comme  une  vieille  ficelle. 
Usé,  llétri  par  l'usage  ;  frais  comme  les  épinards  bouillis. 

—  La  goutte  d'eau  use  la  pierre.  (Yoy.  rjoutte.) 

...Il  y  a  (dans  les  églises  d'Italie)  de  ces  images  des  marbres  les 
plus  durs,  de  ceux  qui  font  rebrousser  le  ciseau  du  sculpteur,  usées 
et  fondues  comme  la  cire,  sous  l'ardeur  et  la  persévérance  des 
baisers  des  fidèles... 

Les  socles  des  deux  colonnes  de  la  Piazzelta  (à  Venise),  ornées 
primitivement  de  sculptures,  sont  entièrement  usées  par  le  frotte- 
ment. Combien  il  a  fallu  de  fonds  de  culottes  pour  user  ce  granit, 
est  un  problème  que  nous  laissons  à  résoudre  aux  mathématiciens 
sans  ouvrage.  (Th.  Gautier.) 

—  L'esprit  use  le  corps.  (Yoy.  esprit.) 

Usure,  du  latin  usura. 

—  Faire  l'usure,  c'est  agir  dans  un  temps  très  court  comme  le 
temps  fait  à  la  longue  en  usant  (rendant  frustes)  les  monnaies. 

Les  usuriers  soutiennent  les  tils  de  famille,  comme  la  corde 
soutient  les  pendus. 

Les  usuriers  ne  nous  prêtent  cinq  francs,  qu'à  la  condition  qu'on 
ajoutera  des  zéros  à  la  reconnaissance. 

—  Synonymes  d'usurier  :  Gobseck,  mot  créé  par  Balzac. 
Ogre  :  il  finit  toujours  par  dévorer  ses  clients. 


TTO  tm 

Onclo,  coiniue  «  ma  tante  ■  désigne  le  mont-dc-piélé.  S'applique 
snrtont  aux  [trt'tcnrs  sur  gages. 
Sliilock.  vampire. 

Usufruit,  (lu  latin  i/si/s  frutius. 

Jouissance  des  revenus,  des  frnifs  diin  héritage,  des  intérêts 

d"un  rapital  dont  un  autre  est  prnpriétaii-e. 

Utile,  du  latin  u/i/is,  ce  qui  est  bon  pour  l'usage. 
D'où  futile  (fu/'l  nti/iii),  c'e.st-à-dire  inutile. 

—  D'utile  on  a  l'ait,  au  commencemcïnt  du  xix«  siècle,  le  mot 
utiliserai  même  utilitaire,\>om'  désigner  l'école  fondée  vers  1800, 
par  Bentliam.  et  qui  ne  reconnaît  pour  principe  du  bien,  que 
l'utile  ou  l'utilité  générale. 

Les  sectateurs  de  Bentliam  ont  eu  leurs  fanatiques,  qui  auraient 
voulu  semer  du  cbanvre  sur  le  boulevard  des  Capucines. 

Ik'urt'uv  (|iii  sait  mêler  l'utile  à  raj^ivahlo. 

Omne  tulit  piinclum  qui  miscuil  iililc  dnlci. 

(Udiiaci:,  Art  pocli(jue.) 

Utopie,  du  grec  ou,  négation,  topos,  lieu. 

Nom  donné  à  une  île  imaginaire,  ainsi  appelée  iVC/tope  (person- 
nage créé  par  Thomas  Morus),  qui  conquit  cette  île  et  y  établit  un 
gouvernement  idéal. 

Le  plan  de  ce  gouvernement,  exposé  par  Thomas  Morus  au 
II''  livre  de  l'ouvrage  intitulé  Utopia  (lolO),  renferme  des  idées 
excellentes,  mais  peu  pratiques.  On  a  donné  depuis  ce  nom 
d'uiopie  à  l'idéal  du  gouvernement. 

—  On  peut  citer  parmi  les  écrivains  de  ce  genre  (utopistes)  : 
Babeuf,  (pii.  à   la   lin  du  xviip  siècle,  inventa  le  babouvisme, 

système  qui  prétendait  établir  l'égalité  absolue  des  fortunes. 

Campanella,  auteur  de  la  Cité  du  Soleil  (1620). 

Cabet,  /m/'/e  (18G8). 

Comte  (Auguste),  dont  la  formule  est  :  L'amour  pour  principe,  le 
progrès  pour  but,  l'ordre  pour  base. 

Fénelon,  dans  sa  description  de  Salente  [Téléinaquc). 

Fontenelle,  République  des  Philosophes. 

Fourier  et  le  fouriérisme,  dont  la  formule  est  :  Répartition  [u'o- 
portionnelle  du  capital  au  travail  et  au  talent. 

Owen  (Robert),  né  eu  1771,  est  l'auteur  d'un  système  socialiste 
établi  sur  la  communauté  et  l'irresponsabilité  humaine.  Son  expé- 
rience de  NeM-Lanark.  en  Ecosse,  vers  1806,  eut  un  plein  succès, 


S26  VAC 

dû  moins  à  la  honte  de  la  lliéoric  qu'au  caractère  de  l'auteur.  Des 
essais  à  New-IIanuony  (Anicrique)  en  1824,  et  à  Orhiston,  réussirent 
moins  liicu.  (Vdv.  licrnc  des  Deux-Mondes,  ISÎiB. ) 

IMalou.  1(1  J{i''i)iihli</ne. 

Rabelais,  r Abbaye  de  Thélèine,  où  l'on  suit  la  maxime  :  «  Fais 
ce  que  vouldras  »,  et  où  l'idéal  de  la  vie  forme  le  contre-pied 
al)Solu  de  tout  ce  que  les  couvents  ont  imafriné  pour  réduire  la 
vie  humaine  à  sou  minimum  d'activité,  d'intelligence  et  de  plaisir. 

Saint-Simon  et  le  saint-simonisme,  dont  la  formule  est  :  L'œuvre 
selon  la  capacité  ;  le  crédit  selon  la  solvabilité  ;  le  salaire  selon  le 
travail  ;  la  rente  selon  le  capital.  (Ollnde  Rodrigue.) 

—  La  quadrature  du  cercle  est  une  utopie  mathématique. 

—  L'uloi)ic  est  le  pathos  de  l'idéal,  et  le  génie  de  ceux  qui 
manquent  de  bon  sens. 


V 


Vacance,  dérivé  du  latin  vacare,  être  libre,  vide. 
Etat  do  loisir.  Répond  au  grec  sc/toIé,  loisir. 

Vacation,  même  origine  que  le  précédent. 

Cessation  des  séances  des  tribunaux. 

Au  même  radical  remontent  les  mots  :  vaquer,  évacuer. 

Par  un  singulier  a!)us,  raquer  s'emploie  dans  le  sens  de  s'occuper  : 
vaquer  à  ses  atïaires.  Cela  signifie  simplement  qu'on  est  libre  pour 
s'occuper  de  ses  affaires,  que  rien  n'en  détourne. 

Vache,  du  latin  vacca,  pour  boacca,  de  bos,  femelle  du  bœuf. 

—  Cliacun  son  métier,  et  les  vaches  seront  bien  gardées.  (Yoy. 

métier.) 

Qui  se  mêle  d'autrui  meslier. 
Trait  sa  vache  dans  un  panier. 

Si  chacun  se  renfermait  dans  ce  qui  convient  à  sa  vocation,  il  y 
aurait  peut-être  plus  de  vaches  que  de  vachers  (?). 

—  Parler  français  comme  une  vache  espagnole.  Vache  est  ici 
pour  vace  ou  ba:<que,  nom  donné  aux  habitants  de  la  Biscaye; 
d'autant  mieux  que  jadis  vache  se  disait  vacce  (?)  et  que  les  Gascons 
ont  apporté  d'Espagne  l'habitude  de  changer  le  b  en  v:  ce  qui 
a  fait  dire  à  Scahger  :  Felices  populi,  quibus  bibere  est  cicere  ! 


VAI  o27 

(Peut-être  pourrait-on  expliquer  :  comme  une  vaciie,  ou  un 
Bnsque,  parle  espaunol  i) 

La  langue  des  Basques  est  si  étran,t,^e,  que  Scaliger  disait  d'eux: 
«  On  prétend  qu'ils  comprennent  leur  langue,  mais  je  n'en  crois 
rien.  » 

—  Bori  citellas  imponere  (Cicéron)  :  hâter  un  iiceuf. 

—  Le  plancher  des  vaches.  (Voy.  terre.) 

Vade-mecum,  expression  latine  :  va  avec  moi. 
Nom  doiiué  à  certains  livres  portatifs  (appelés  aussi  manuels), 
qui  peuvent  être  consultés  coninuxléuient. 

Vagabond,  du  laliu  raf/ohundiis,  eri-ant. 

Au  même  radical  se  rai  tachent  :  vague,  extravaguer,  divaguer. 

—  Synonymes:  hohémien  (voy.),  goueppeur  ou  gouapeur,  de 
guêpe,  qu'où  prononce  gouape,  en  Normandie.  La  guêpe  hutine 
çà  et  là  pour  vivre. 

Vain,  du  latin  ranus,  léger,  \iàe.  Rattachez-y:  vanité,  vanter, 
vantard,  s'évanouir. 

—  H  y  a  des  gens  que  l'on  croit  profonds,  qui  ne  sont  que  creux. 

—  La  vanité  se  nourrit  de  llatterie:  quand  on  est  e/i/I«',  la  vanité 
est  satisfaite. 

—  Rahelais  (Testament  de  Patelin)  se  sert  du  mot  vain  dans 
le  sens  de  défaillant  :  «  lia  !  tant  je  suis  vain.  » 

Vaincre,  du  latin  vinceve. 

—  Vaincre  ou  mourir.  Les  amis  de  Pompée  lui  reprochaient  de 
trop  s'exposer  dans  les  comhats  :  «  Il  est  nécessaire  de  mourir,  et 
non  de  vaincre  »,  répondit-il. 

—  On  lit  cette  incription  sur  la  lame  d'une  épée  trouvée  à  Hercu- 
lanum  :  Senatus  consulta,  Roma  i-incit.  Rome  doit  vaincre,  par 
ordre  du  Sénat.  Quelle  confiance  dans  la  disciphne,  le  courage  et  le 
patriotisme  des  soldats  ! 

—  Malheur  aux  vaincus  I  Vœ  victis  I  Mot  qui  résume  la  loi  injuste 
du  plus  fort. 

Le  20  juillet  de  l'an  392  avant  Jésus-Christ,  les  Gaulois  Sénons, 
venus  du  fond  de  l'Âhruzze,  où  ils  étaient  étahlis  depuis  plus  de 
deux  cents  ans.  prirent  Rome,  la  hrrUèrent,  et  tuèrent  les  sénateurs, 
qui  les  attendaient  à  l'entrée  de  leurs  maisons,  en  hahits  d'apparat, 
assis  sur  leurs  chaises  curules. 

Ils  campèrent  sept  mois  sur  les  ruines  de  Rome,  et  se  retirèrent 


m  VAï 

sans  (Hro  iiiqniiHôs,  (jiioiqiu'  Tito-Livc  préteiulo  que  Cninillo  les 
;iiir;iit  (oiis  iiiiissMcrés. 

L'or  (le  la  rançon  \);\\v('.  aii\  (laiilois  lut  de  deii\  iiiillo  livres,  pi'is 
parmi  les  oi'iu'iiieiils  des  l(Mnpl(;s  et  les  liijoiix  des  matroïK'S.  L'or 
fut  ap|)oi'lé  an  camp  .uanlois.  et,  an  moment  on  on  le  pesait,  le  Hrenn 
détaciia  son  handrier  et  le  jeta  av(M'  son  sal)r(!  dans  le  plateau  de 
la  balance.  L(;s  Uomains  ayant  réclamé,  il  cria  :  «  Malheur  aux 
vaincus!  »  Pai'ole  alors  nouvelle,  mais  qni,  dit  Plutarque,  passa 
depuis  en  proverbe.  (Plutarque,  Vie  de  Camille,  XXXYL) 

(Notons  ([uaBrennus  n'est  pas  un  nom  propre,  mais  un  (pialificatif, 
un  litre;  il  si.unilie,  en  bas-breton,  7'oi,  c/tef.) 

—  Sanve  qui  peut  !  Malheur  à  qui  est  pris. 

Oiriinpoi'lc  (lu'dii  Iriomplie  ou  par  force  ou  par  ruse? 

(Dei.h.i.f..) 

,..Doltci  (in  rirtusj  (juts  in  lio-stc  requiral? 

(ViF(i;ii,E.) 

A  Miincre  sans  péril,  on  trionipiic  sans  gloire. 

(GoRXKILLE,  le  C'id.) 

—  Venl,  iridi,  vici  :  je  suis  venu,  j'ai  vu,  j'ai  vaincn. 

Jules  César  écrivit  ces  trois  mots  à  ses  amis,  pour  leur  annoncer 
la  rapidité  de  la  victoire  qu'il  venait  de  remporter,  dans  le  Pont, 
contre  Pharnace,  fils  de  Mithridate. 

—  Le  cardinal  de  Richelieu  écrivait  au  bas  des  projets  qui  lui 
étaient  soumis:  ]'idi,  legi,  probavi:  vu,  lu,  approuvé. 

Vair,  vairon,  du  latin  variua. 

Vair  signifie  de  diverses  couleurs;  d'où  \en\  ca irons,  d'un  bleu 
mêlé  de  gris. 

—  Menu-vair,  ou  petil-qris,  désignait  une  pelleterie  gris-blanc, 
fourrure  très  estimée  au  Moyen-Age.  Son  nom  de  menu-vair  lui 
venait  de  ce  que  cette  peau  d'une  sorte  d'écureuil,  est  grise  sur  le 
dos,  blanche  sous  le  ventre. 

Vaisseau,  anciennement  vasciel,  du  latin  vascellus,  diminutif 
de  vas. 

—  Brûler  ses  vaisseaux  :  s'ôter  les  moyens  de  battre  en  retraite. 
(Voy.  Rabicon.) 

Allusion  à  la  conduite  de  quelques  hardis  capitaines  qui  brûlèrent 
les  vaisseaux  qui  les  avaient  portés  sur  des  rivages  étrangers  ou 
ennemis,  afin  que  leurs  soldats  fussent  par  la  nécessité  déterminés 
à  vaincre  ou  à  mourir.  Agathocle,  tyran  de  Syracuse,  fut  le  premier 


VAL  520 

qui  donna,  sur  les  entes  d'Afrique,  l'exemple  de  celle  heureuse 
audace,  il  lui  imité  jtar  Asclépiade,  lieulenant  de  Dioclélien.  L'empe- 
reur Julien.  (îuiliaunie  le  Conquéranl,  Roi)ert  (luiscard  et  Fernand 
Corle/.  lii-cnt  de  uiénie. 

Valet,  ancieunenient  cavlet,  et  d'abord  va.flef  :  Aa  raasaletua, 
diniiniilif  de  rasaal.  (Voy.) 

Le  sens  primitif  de  cassai,  jusqu'au  xiii'^  siècle,  est  hrace, 
vaillant .  Dans  la  Clianson  de  Roland  (st.  28G),  cette  épithéte  est 
appliquée  à  Cliai'lematine  lui-iuèuie: 

Mult  est  vassals  Karlcs  de  France  ihdce. 

Le  valet  ou  vaslet  est  un  jeune  Itravc,  souvent  un  fils  de  roi 
ou  d'euqjereiir.  Dans  un  fabliau,  le  fils  du  comte  de  Beauvais  est 
appelé  «  gentil  valet  »  ;  et  dans  les  comptes  de  la  maison  de 
Philippe  le  Bel,  les  fds  du  roi  se  nomment  «  valets  ». 

—  Tel  maître,,  tel  valet  :  Dignus  domino  servus.  (Plante.) 

I^ar  les  airs  du  valet,  on  peut  juger  le  maître. 

(Destouchks,  le  Glorieux.) 

—  Dans  les  jeux  de  cartes  qui  datent  d'une  époque  très  ancienne, 
on  retrouve  encore  les  figures  où  le  ro/,  la  da?ne  et  le  valet 
représentent  le  père,  la  mère  et  le  fils.  Ce  n'est  pas  à  des  laquais 
qu'on  eût  donné  les  noms  des  chevaliers  les  plus  illustres  :  Hector, 
Ogier,  Lahire,  Lancelot.  Ici,  les  quatre  valets  sont  quatre  princes 
héritiers  de  quatre  rois. 

Ainsi  voilà  de?  noms  qui,  après  avoir  honoré  longtemps  la  plus 
haute  noblesse,  ont  été  rabaissés  à  désigner  l'homme  dans  sa  plus 
basse  condition,  et  à  devenir,  de  nos  jours,  des  termes  humiliants 
et  injurieux,  bannis  en  quelque  sorte  d'une  langue  où  ils  avaient 
brillé  si  longtemps  comme  des  litres  d'honneur  et  de  vaillance. 

Les  noms,  comme  les  hommes,  sont  exposés  à  dégénérer  et  à  des- 
cendre de  significations  élevées  à  des  significations  basses.  Donzelle 
signifiait  autrefois  demoiselle,  la  petite  dame,  la  jeune  maîtresse, 
la  fille  de  la  nuiison. 

Au  Moyen-Age,  le  mot  qui  avait  le  sens  actuel  de  valet,  est  garçon. 
Il  a  gardé  cette  ancienne  acception. 

Aujourd'hui,  valet  ne  se  dit  plus  que  d'un  homme  gagé  pour 
faire  le  service  domestique.  On  distingue  les  valets  de  chambre,  les 
valets  de  pied  ;  en  vénerie,  les  valets  de  chiens  ;  dans  les  fermes, 
les  valets  de  charrue  ou  d'écurie. 

Au  théâtre,  les  valets  ont  de  l'esprit  et  de  la  ruse,  et  sont  propres 

34 


mO  VAX 

;i  toutes  sortes  d'intrigues.  Tels  sont  les  Si-ipin.  les  Crisjiin,  les 
Frontin. 

Valeur,  du  hiliii  ralere,  être  fort,  bien  portant. 
De  là  :  valide,  vaillant,  valétudinaire. 

—  Valeurs  :  argent  monnayé,  ou  titres  de  rentes. 
Mauvaises  valeurs  :  valeurs  de  la  rue  Quincampoix. 

Torche  c...  —  Si,  au  dire  de  Rabelais  (I,  13),  le  papier  n'est  pas 
le  meilleur  des  anitergea.  celui  des  assignats,  de  la  banque  de  Law, 
et  de  certaines  entreprises  industrielles,  modernes,  est  à  coup  sûr 
le  plus  cher.  L'expérience  ruineuse  de  Law  inspira  à  la  mère  du 
Régent  celte  boutade  qu'on  trouve  dans  une  lettre  du  1"  juin  1720  : 
«  Personne  en  France  n'a  plus  le  sou  maintenant  :  mais  je  dirai, 
sauf  respect,  en  bon  allemand  palatin,  qu'ils  ont  tous  des  torche-culs 
de  papier.  » 

Vallon,  dérivé  de  val,  du  latin  vallis. 

D'où  :  vallée,  a^al,  dévaler,  vau  (dans  à  vau-l'eau,  voy.) 

Vampire,  origine  incertaine. 

Mort  que  lopinion  populaire  fait  sortir  des  tombeaux  pour  sucer 
le  sang  des  vivants. 
Au  figuré  :  un  usurier  ;  celui  qui  pressure  les  malheureux. 

Vandales.  Peuple  barbare  de  la  Germanie;  du  gothique  van- 
dalen,  errer,  parce  qu'ils  changèrent  souvent  de  séjour.  Ils  lialii- 
taient,  à  l'origine,  le  long  de  la  Baltique,  entre  l'Elbe  et  la  Vistule. 
Sous  Auguste,  une  partie  alla  s'établir  sur  les  bords  du  Rbin,  et 
plus  lard,  sur  les  rives  du  Danube.  Au  v^  siècle,  ils  ravagèrent  la 
Gaule  pendant  deux  ans  (406-408],  puis  allèrent  piller  l'Espagne  et 
l'Afrique,  jusqu'au  moment  où  Juslinien  envoya  Bélisaire,  qui  en 
délivra  l'empire  (534). 

—  Vandale  et  vandalisme  s'emploient  pour  désigner  et  flétrir 
l'ignorance  stupide  de  ceux  qui  dégradent  les  monuments  des  arts. 

Vanité,  du  latin  vanitas,  de  vanus,  vide. 

—  Une  once  de  vanité  gâte  un  quintal  de  mérite- 
Les  Anglais  disent  :  «  Il  n'y  a  pas  de  gens  plus  vides  que  ceux 

qui  sont  pleins  d'eux-mêmes.  » 

La  vanité  n'est  que  l'afïectation  de  quelque  qualité  qu'on  n'a 
pas  :  qui  dit  vain,  dit  vide. 

...11  prétendait  en  être  l'auteur:  c'était  un  mensonge  gretïé  sur 
une  vanité.  (H.  Miirger.) 


VAU  oU 

L;i  v;inité  au  dehors  est  la  marque  de  la  pauvreté  au  dedans. 
(Saint  Clirysostonio.) 

La  vanité  est  raniour-[)n)|ire  ([ui  se  montre;  la  modestie  est 
raniour-|in)|ir('  (jui  se  caclie.  (Fontenelle.) 

La  vanité  et  l'oruiuMl  coûtent  plus  que  la  faim  et  la  soif.  (JelTei'son.) 

Tout  nest  que  vanité.  (^Salomon.) 

Tout  liomine  vivant  n'est  que  vanité.  (Saint  Paul,  Romains  YIII,20.) 

L'homme  est  le  rêve  d'une  ombre  (Pindare).  Ce  qui  sipnifie  que 
1  lionnne,  par  sa  vanité,  est  comparable  aux  deux  choses  les  plus 
vaines  qui  soient  au  monde. 

La  vertu  n'irait  pas  loin,  si  la  vanité  ne  lui  tenait  compagnie. 
(La  Rochefoucauld.) 

—  (Juelqu'un  plaignit  un  jour  Diogène  de  le  voir  exposé  à  une 
pluie  froide  et  abondante.  «  Si  vous  le  plaignez,  dit  Platon,  ne  le 
regardez  pas  :  il  se  mettra  bientôt  à  l'abri.   » 

—  Epaminondas  disait,  après  la  bataille  de  Leuctres  :  «  Ce  qui 
flatte  le  plus  mon  cœur  dans  cette  victoire,  c'est  de  l'avoir  rem- 
portée du  vivant  de  mon  père  et  de  ma  mère.  » 

Vanner,  du  latin  rannus,  van. 
Nettoyer  le  grain  au  moyen  d'un  van. 
De  là  :  vannier,  vanneur,  vanne. 

Vantard,  de  canler,  avec  le  sufllxe  péjoratif  ard.  Fanfaron. 

—  Tout  homme  manque  surtout  de  la  qualité  dont  il  se  vante 
le  plus. 

—  S'il  se  vante,  je  l'abaisse  ;  s'il  s'abaisse,  je  le  vante.  (Pascal.) 

—  De  grands  vanteurs,  petits  faiseurs. 

Vanter,  du  latin  vanltare,  qui  se  trouve  dans  saint  Augustin. 

(juelques-uns  ont  proposé  cendlture,  faire  l'article,  chercher  à 
placer  sa  marchandise;  faire  valoir  une  personne,  une  chose, 
comme  un  article  de  commerce  (?). 

Varech,  de  l'anglo-saxon  ivac,  rejeté  ;    anglais  wrecli,  débris 
de  na\ii'e. 
Plante  marine  que  le  Ilot  rejette  sur  le  rivage. 

Varié,  du  latin  carlus,  comme  vair.  (Voy.) 

Varus,  rends-moi  mes  légions  ! 

Varus,  général  romain  des  troupes  de  Germanie,  se  laissa  attirer 
par  Arminius  dans  un  défilé  où  son  armée  fut  anéantie.  Ce  désastre 


ty^'2  YKA 

causa  à  Auguste  une  douleur  si  viv(^,  que,  pendant  londoinps.  il 
s'écriait  sans  cesse:   «  Vai-iis,  rends-moi  mes  lésions  !   « 

Six  ans  après,  (iermanicus  donna  la  sépulture  aux  soldats  de  Yarus, 
dont  les  ossements  joncliaicnt  le  cliam])  de  bataille.  (Voy.  Tacite.) 

Vassal,  du  celtique  gicas,  jeune  garçon,  par  le  has-latin  vassa- 
lus.  IMutùt  que  du  latin  vas,  caution.  (Voy.  valet.) 
Vas.sal  a  signilié  brave,  vaillant,  jusqu'au  xiii^  siècle. 
Les  vavasseurs  étaient  les  feudataires  des  vassaux  du  sûu\eraiu. 
(Syncope  de  vassus  vassormn.) 

Vau,  forme  vocalisée  de  vat,  latin  vallia. 
A  vau-l'eau  :  au  courant  de  l'eau,  à  l'aventure,  sans  qu'on  ait  rien 
dirigé. 

Vaudeville,  ou  vau  de  vire:  de  vau  et  vire. 
Mot  créé  par  Olivier  Basselin  pour  les  pièces  de  vers  qu'il  compo- 
sait dans  le  val  de  Vire  ;  le  mot  s'est  modifié  en  vaudeville. 

1)1111  trait  de  la  satire  en  bons  mots  si  fertile. 
Le  Français,  né  malin,  créa  le  Vaudeville. 

(BoiLEAii,  Art  poétique.) 

—  Le  vaudeville  a  changé  de  caractère.  Le  premier  théâtre  où  fut 
joué  à  Paris  le  vaudeville,  s'ouvrit  rue  de  Chartres,  le  12  janvier 
1792.  Barré,  qui  en  fut  le  directeur,  prit  pour  épigraphe  de  son 
affiche,  le  vers  de  Boileau. 

Vaugirard. 

C'est  le  grelVier  de  Vaugirard,  qui  ne  peut  écrire  si  on  le  regarde  : 
le  moindre  ol>stacle  arrête  les  gens  peu  habiles. 

Ce  greffier  tenait  son  bureau  d'écritures  dans  une  chambre  qui 
n'était  éclairée  que  par  une  étroite  lucarne.  Regarder  par  cette 
ouverture,  c'était  l'empêcher  de  voir. 

—  Prendre  Vaugirard  pour  Rome  :  se  tromper  grossièrement. 

—  La  burette  du  curé  de  Vaugirard  :  une  grande  bouteille. 

Vautrer  (se),  autrefois  voltrer,  voutrer.  Ménage  le  dérive  de 
volutare  ({). 

—  On  appelle  vautre  un  chien  dressé  à  la  chasse  du  sanglier  et 
de  l'ours,  et  qui  se  roule  comme  eux  dans  la  boue. 

—  Au  figuré  :  se  vautrer  dans  la  débauche^  dans  le  vice. 

Veau,  anciennement  ve'el,  de  vitellus,  pour  vitulus,  dont  on  a 
rapproché  Italie,  qui  semble  avoir  pris  son  nom  de  ce  qu'elle 
nourrit  de  nombreuses  bêtes  à  cornes. 


VEL  533 

—  I);ms  \o  \]ovv\ .  on  emploie  le  féniiiiiii  n'/r.  |ioiii-  In  bénisse  du 
premier  fiu(\  Ce  lemiiiin  maïupic  ;iii  Irniiciis,  ou  il  y  a  cependant  le 
verlie  rr'/cr. 

—  IMeiirei-,  lieuuler,  s'étendre  comme  un  ve;ni. 
Le  cuir  ne  sei'a  pas  cher,  les  veaux  s'étendent. 

Il  oùt  (le  marisson  (cha^'rin)  plomv  coinmo  uno  vaclio. 

(i;r,i.Mi:ii,  Salira  III.) 

—  Veau  d'or.  Idole  que  les  Israélites  érigèrent  aux  faux  dieux, 
pendant  une  absence  de  quatrc-vinûts  jours  que  fit  Moïse  sur  le  mont 
Sinai.  {Exode  XXXII.) 

Adorer  le  veau  d'or. 

—  Tuer  le  veau  gras  :  faire  à  quelqu'un  grand  accueil. 

Cette  locution  est  enqirûntée  à  la  paralmle  de  l'Enfant  prodigue. 
C'est  juste  le  contraire  de  «  manger  de  la  vache  enragée  ». 

Veiller,  provençal  velhar,  du  latin  vigi/are. 

La  Neille  est  la  privation  de  sommeil  pendant  la  nuit. 

—  Le  mot  veille,  dans  le  sens  de  jour  précédent,  s'est  appliqué 
d'ahord  au  jour  qui  précède  les  grandes  fêtes  religieuses,  parce  que 
les  premiers  chrétiens  passaient  en  prières  la  nuit  intermédiaire 
(ciffiliaj.  Aujourd'hui  encore,  l'Église  prescrit  le  jeûne,  la  veille  ou 
vl(jlle  des  grandes  solennités. 

—  On  appelle  reillcu.se  une  petite  lampe  qu'on  laisse  allumée 
toute  la  nuit. 

—  En  provençal  on  appelle  villore,  le  veilleur  de  nuit  (qui  veille 
au  repos  des  hahitants). 

—  L'homme  vigilant  est  celui  dont  rintelligence  ne  reste  pas 
endormie. 

Veine,  du  latin  vena.  du  verbe  venire  :  c'est  par  là  que  le  sang 
vient  au  cœur. 

—  N'avoir  pas  de  sang  dans  les  veines  :  manquer  d'énergie. 

—  Qui  voit  ses  veines  voit  ses  peines.  Il  serait  plus  exact  de 
remplacer  reiîie  par  déveine  (manque  de  chance  au  jeu). 

Vélin,  peau  de  veau  :  fait  comme  velcr. 

Velléité,  Icniu'  de  philosophie,  cahpié  sur  velle,  voidoir. 

Volonté  faible.  On  peut  s'agiter  sans  agir,  piétiner  sans  avancer; 
velléité  n'est  pas  volonté. 

Il  y  a,  entre  la  \elléilé  et  la  volonté,  la  même  différence  qu'entre 
la  paresse  et  le  travail. 


534  VRX 

Les  parossonx  ont  tnnjoiirs  onrir  do  f;iiro  f|iiolrjiip  rlioso.  (Vauvc- 
mirpiios.) 

Velours,  ;m(ionnemcnl  vcloits,  du  hiiin  rillosus,  rouvert  de 
poils. 

—  Isiiro  iiiilte  d<5  velours  :  cacher  sous  dos  dehors  caressants  hi 
dessein  de  nuire. 

Le  cliat  ne  nous  caresse  pas  :  il  se  caresse  à  nous.  (Rivarol.) 

—  Montcrif  composa  une  histoire  des  chats,  (pii  le  lit  siirnoniiner 
«  historiogriplic  ».  Le  poète  Roy,  très  satirique  et  très  mordant, 
poursuivit  de  ses  sarcasmes  riiistorien  des  chats.  Montcrif  s'en 
vengea  en  lui  donnant  une  volée  de  coups  de  canne.  Mais,  sous  le 
bâton  même,  Roy  se  mit  à  crier:  «  Patte  de  velours,  Minon.  patte 
de  velours  !  » 

Vendange,  du  latin  vindomia  {dcmere  viniim  ''). 

De  là  :  vendémiaire,  dans  le  calendrier  républicain. 

Setembre...,  el  quai  so  vendemins,  perque  en  scmhlensn  de 
vendemlutov  lo  dipinho.  Septembre...,  auquel  sont  vendanges, 
c'est  pourquoi  on  le  représente  en  ressemblance  de  vendangeur. 

Vendre,  du  latin  vend  ère. 

—  Il  y  a  autant  d'exagération  dans  le  dénigrement  de  ce  qu"on 
marchande,  que  dans  l'éloge  de  ce  qu'on  vend.  (Petit-Senn.) 

—  Il  ne  faut  pas  vendre  la  peau  de  l'ours  avant  de  l'avoir  tué. 

Deux  compagnons  pressés  d'argent 
A  leur  voisin  fourreur  vendirent 
La  peau  d'un  ours  eneor  vivant, 
Mais  qu'ils  tueraient  bientôt,  du  moins  à  ce  qu'ils  dirent. 

(La  FoxTAiNK,  Fables  V,  -20.) 

On  dit  de  même  :  Il  ne  faut  pas  chanter  Magnificat  à  Matines. 

—  Vous  ai-je  vendu  des  pois  qui  ne  voulaient  pas  cuire  ?  Vous 
ai-je  trompé  ? 

Vendredi,  du  latin  Veneris  dies. 

Jour  que  la  superstition  regarde  comme  funeste. 

Dans  l'antiquité,  c'était  le  jour  heureux  par  excellence,  le  jour 
fécond  de  la  joie  et  du  bonheur,  consacré  à  Vénus. 

Il  a  été  maudit  par  le  christianisme,  ou  peu  s'en  faut,  parce  que 
c'est  lui  qui  a  vu  le  supplice  du  Golgotha. 

—  La  superstition  du  vendredi  est  une  des  plus  fortement  enra- 
cinées. La  statistique  des  chemins  de  fer,  établie  par  le  chiffre  des 
recettes,  constate  que  le  nombre  des  voyageurs  subit  une  baisse 
sensible  et  régulière,  ce  jour-là,  sur  les  grandes  lignes.  (Voy.  treize.) 


VEX  535 

—  On  li'dint'  h(';inc(i!i|t  de  uciis  ([iii.  do  crMinlc  de  iiialliciir, 
irciili'i'iii'ciiiKMit  ri(Mi  ce  jniii'-h'i.  11  faut  en  l'ire. 

'['c\  qui  ril  \('ii(ln'(li,  (lini;iiii-lii'  iileiircra. 

(Kacim:,  Plnideurx.) 

Venelle,  pour  relnelle,  dérivé  de  veine. 

S'est  dil  pour  nielle.  No  s'emploie  plus  ûiière  que  dans  la  lonilion  : 
enliler  la  venelle. 

Fui  siii'  1'  pniiil  (l'ciililrr  la  nliu'IIc 

f!.\    l'OMAlNK,    V.    SI 

11  y  a.  dans  cet  eni|)!ni  de  reuelle,  la  inèuie  mélapliore  (pi'on 
trouve  dans  re\|)ression  actuelle  arlr/-e:  k  Les  boulevards  sont  les 
grandes  artères  de  Paris.  » 

—  Je  pcnseye  qu'en  la  venelle  du  licl  l'eust  voslre  selle  persée. 
iHal.elais.  IV.  ('.7.) 

Vénerie,  dérivé  de  reneur,  du  latin  venatorem. 
Lart  du  veiuuir,  de  la  chasse. 
De  là  aussi  :  venaison. 

Vengeance,  siihslanlif.  dérivé  de  reiifjer,  latin  riiuUrare. 
A  donné  aussi  les  mots  savants  :  revendiquer,  revendication. 

—  La  ven.u'eance  est  une  sorte  de  justice  sauvage  et  barbare.  Elle 
semble  destituer  la  loi,  et  se  mettre  à  sa  place.  (Bacon). 

Quand  on  se  venge,  on  est  juge  de  sa  propre  cause;  il  est  bien 
diflicile  de  ne  pas  demander  plus  qu'il  n'est  dû.  (M"!"^  de  Puisieux.) 

La  vengeance  est  une  arme  à  deux  tranchants,  qui  peut  blesser 
à  la  fois  celui  fpii  frappe  et  celui  qui  est  frappé. 

Venin,  de  cenenum,  de  vena,  parce  que  le  poison  circule  dans 
le  sang  Neineux. 

—  ]'eni)neu.r,  se  dit  des  animaux;  vénéneux,  des  autres  êtres. 

—  Morte  la  béte,  moi't  le  venin  :  on  n'a  rien  à  craindre  d'un 
ennemi  mort. 

Le  comte  de  Vogé  fut  exilé  pour  avoir  dit  qijc  le  Régent  pouvait 
faiiv  de  Dubois  un  ministre,  mais  qu'il  n'en  ferait  jamais  un  honnête 
homme,  k  la  mort  de  Dubois,  le  Uégent  écrivit  à  Vogé,  pour  le 
rappt'Ier  de  l'exil,  ce  singulier  billet:  «  Morte  la  béte,  mort  le 
venin  :  je  t'attends  ce  soir  à  souper  au  Palais-Hoyal.   » 

—  In  ecuuln  venenuin  :  C'est  dans  la  queue  qu'est  le  venin. 

Ce  proverbe  latin  fait  allusion  au  scorpion,  dont  le  poison  est 
caché  dans  la  queue. 


o36  YEN 

—  La  inali.Liiiilô  diinc  Icllro  est  souvoiU  dans  le  posl-scriplmn,  et 
l'on  dit:  In  cauda  vcnenum.  (Voy.  queue.) 

Venir,  du  latin  vcnlrc. 

Sonclic  d'nn  firand  nombre  do  mots:  Avenant,  aventure,  avenir, 
avent,  convent,  convention,  contravention,  événement,  inconvénient, 
inventeur,  inventaire',  parvenu,  prévention,  revenant,  souvenir, 
subvention,  etc. 

Vent,  du  lalin  i-ontus. 

Les  vents  sont  les  mouvements  de  Tatmospiiére. 

—  Enfants  du  ciel  et  d(;  la  ferre,  les  Vents  étaient  placés  par  les 
anciens  dans  les  îles  Eoliennes  (Llparl);  ils  avaient  pour  roi  Eole, 
qui  les  tenait  enchaînés  dans  une  caverne. 

Les  quatre  vents  principaux  chez  les  anciens  étaient  :  Borée  (nord), 
Eurus  (est),  Auster  (midi).  Zéphyr  (ouest). 

—  La  rose  des  vents  est  une  étoile  à  32  pointes,  pour  représenter 
les  32  aires  ou  rhombes  des  vents,  et  dont  la  circonférence  est 
divisée  en  3G0  degrés. 

—  Un  vent  fort  parcourt  de  30  à  70  kilomètres  à  l'heure  :  un 
vent  de  tempête,  100  kilomètres;  un  ouragan,  130  kilomètres. 

—  Noms  des  vents  : 

Alises,  du  lalin  aliseus,  qui  soufdent  d'Orient  en  Occident  ; 
Africus,  chez  les  Latins,  nord-est;  Aquilon,  nord;  Argestus.  latin, 
nord-ouest;  Auster,  latin,  nom  poétique  du  vent  du  midi  ;  Autan, 
vent  du  sud-est  qui  souffle  sur  les  cotes  de  la  Méditerranée.  (On 
n'emploie  guère  ce  mot  qu'en  poésie,  comme  synonyme  de  grand 
vent.)  Bise,  de  l'allemand  biso,  tourbillon  (?),  nord  ;  Brise  ou  Zépbyre, 
ouest;  Gœcias,  latin,  nord-est;  Caurus,  latin,  nord-ouest;  Etésius, 
lafin,  nord-est;  Euronotus,  latin,  sud-est;  Eurus,  latin,  est;  Favonius, 
latin,  ouest;  Lebecchio,  sud  ;  Maestro,  nord-est  ;  Mistral,  nord-ouest; 
Moussons  (Voy.);  Notus,  sud;  Simoun,  vent  d'Afrique. 

(Yoy.  Sirocco,  Tramontane,  Typhon.) 

—  En  provençal,  les  vents  se  nomment  : 

Tramontana,  nord;  Miejournari,  sud;  Levant,  est;  Larg ou Ponent, 
ouest;  l'Eisseroc,  sud-est;  l'Abech,  sud-ouest;  Mistrau,  nord-ouest; 
Gregali,  nord-est. 

—  L'alternance  régulière  de  la  brise  de  mer  pendant  le  jour  et 
de  la  brise  de  terre  pendant  la  nuit  ;  ainsi  que,  dans  les  pays 
accidentés,  le  mouvement  alternatif  d'ascension  et  de  descente  de 
l'air  sur  la  pente  des  montagnes,  est  due  à  la  même  cause  que  le 


YEN  537 

rriiliiio  dos  voiils  ;ilis(''S  ol  des  iiiniissons,  qui  rririUMil  ppiulaiit  ?ix 
mois  (hins  roci'aii  Iiulicn.  Les  iiioiissons  soiiflleiit  à  peu  prrs  du  sud 
au  nord,  d'avril  à  oc(oI)r(\  quand  lo  soleil  est  au  nord  d(;  la  ligne, 
et  dans  la  direction  opposée,  de  novembre  à  mars,  lorsqu'il  est 
dans  riiémisplière  auslrnl.  Les  relations  maritimes  se  rèdent  sur 
la  [lériodicilé  de  ces  deux  courants. 

Dans  la  zone  tempérée,  la  direction  des  vents  opposés  souillant 
de  tous  les  points  de  Thorizon,  donne  naissance  aux  terribles 
méléores  qui,  sous  le  nom  de  (orn/tdos,  ci/clonea,  dans  l'océan 
Indien,  de  typhons,  dans  les  mers  de  Gliine,  sont  un  sujet  d'épou- 
vante pour  les  marins.  La  vitesse  circulaire  du  vent  atteint  jus([u';i 
quarante  lieues  à  Ibeurc. 

Nos  tempêtes  d'Europe  ne  sont  aulre  chose  que  des  cyclones 
d'un  rayon  plus  étendu,  et  dont  l'intensité  diminue  avec  l'étendue 
des  surlaces:  leur  maximum  de  vitesse  est  de  dix  lieues  à  l'heure. 

—  Cyclone.  tourlMllon  de  vont  qui  prend  naissance  et  se  propage 
en  pleine  mer,  et  forme  une  trombe  spiroïdale,  dont  le  diamètre 
est  sonvoni  très  ui'and.  qui  lourno  sur  Ini-ménie  avec  une  vitesse 
considérable. 

—  On  nomme /Y//V//e  une  augmentation  de  vent  soudaine  et  très 
forte,  mais  qui  dure  peu.  Les  rafales  se  produisent  pendant  les 
tempêtes  et  causent  de  grands  ravages. 

...Des  personnes  ont  été  blessées  pendant  cette  rafale,  par  la 
chute  des  tuiles,  qui  voltigeaient  dans  les  airs  comme  des  feuilles 
mortes.  (Jolie  hyperbole  du  Toulonnab,  1868.) 

—  Vents  intestinaux.  Synonymes:  llatuosités,  pnouinalose,  pet, 
vent  de  la  chemise  (Rabelais). 

—  Autant  en  emporte  le  vent.  Se  dit  d'une  chose  sans  importance 
qu'on  oublie  aussitôt. 

Rabelais  (IV,  12),  parlant  d'un  chicanons  (huissier)  mort  sous 
le  bâton  du  Seigneur  de  Basché,  ajoute  :  «  Depuis,  n'en  feust  parlé. 
La  mémoire  en  expira  avec  le  son  des  cloches,  lesquelles  quarillon- 
nèrent  à  son  enterrement.  » 

(irégoire  de  Tours  dit  de  mémo  d'un  hérétique  mort  subitement: 
Perlit  hujns  nienioria  cuni  sonitit.,  et  Dominus  in  œternum per- 
nianef. 

Il  (lit,  il  vole,  ft  If  \oiit  eniporfait 
Lui,  son  clieval  et  tout  ce  i|iril  disait. 

(VoLTAiiiE,   Pucelle,  6.) 

Ramer  il'faut,  si!  no  vente. 
Aller  contre  vent  et  marée.  Remis  velisque.  (Gicéron.) 


538  YKN 

—  Lo  vent  osl  iino  forro  irrésistible  ot  i)j'osqiio  myslérioiisc  ;  il 
vient  d'en  luiut.  Quand  il  est  favorable,  il  semble  un  souflle  des 
bons  génies.  La  raine  est  un  instrument  matériel  et  bai^médela 
siienr  liimiainc;  le  rameur  fait  toujours  un  peu  penser  au  ,L^alérien. 
(J.-.l.  Ampère.) 

Ventre,  du  latin  renier,  en  .arec  eniéron,  les  intestins. 
Cavité  du  coi'ps  qui  coutiont  l'estomac  et  les  entrailles. 

—  Synonyme:  iH'dou,  i)edaiue  (boulet  de  pierre  lancé  par  la 
catapulte  nommée  hedoxddine)  ;  })anse:  le  cimetière  des  poulardes. 

Vciitri'  ;il'f;iiiié  n'a  ikmmI  ildrcillrs. 

(La  Tontaink,  Fahlfx,  I.\,  8.) 

Jcjnnas  renier  non  nndil  rerlm  lihenler. 

Ce  proverbe,  né  cliez  les  Grecs,  a  passé  dans  toutes  les  lansiies. 

Caton  commence  ainsi  un  discours  au  |)euple  romain  sur  la  loi 
agraire  :  Arduum  est,  (Jabnles,  ad  venlrem  auribus  cai'entem 
verba  facere.  \\  est  difficile,  citoyens,  de  se  faire  entendre  d'un 
ventre  qui  n'a  pas  d'oreilles. 

Orpbée  n'avait  pas  oublié  ce  dicton,  déjà  répandu  de  son  temps, 
puisque,  pour  descendre  aux  enfers,  il  avait  pris,  avec  sa  lyre,  une 
provision  de  gâteaux  au  miel.  Ce  n'est  qu'après  en  avoir  donné  à 
Cerbère,  qu'il  lui  lit  un  peu  de  musique. 

—  La  faim  est  une  mauvaise  conseillère,  qui  a  suscité  bien  des 
révolutions. 

Quand  il  n'y  a  pas  de  foin  au  râtelier,  les  ânes  se  battent. 

Le  peuple  est  un  souverain  qui  ne  demande  qu'à  manger  :  Sa 
Majesté  est  tranquille  quand  elle  digère.  (Rivarol.) 

Le  véritable  acteur  de  la  Révolution  française,  ce  n'est  ni  Miralteau, 
ni  Danton,  ni  Robespierre  ;  mais  le  peuple. 

La  révolution  n'est  ni  dans  les  fautes  de  la  royauté,  ni  dans  celles 
des  assemblées,  mais  dans  les  souffrances  de  vingt-cinq  millions 
d' affamés. 

11  fallait  au  peuple  romain  du  pain  et  des  spectacles  pour  qu'il  se 
tînt  tranquille  ;  ce  qui  lit  dire  à  Aurélien  :  «  Le  peuple  romain  est 
cbarmant  quand  il  a  bien  diné.  » 

Le  vulgaire  no  s'occupe,  en  politique,  que  des  subsistances. 

Vulgo  una  ex  republlcn  annonce  eura.  (Tacite,  Ilislor.,  lY,  38.) 

Une  armée  à  jeun  n'observe  pas  la  discipline. 

Bisciplinam  Jejunus  non  serraf  exerc/'tus. 

Sixte  Quint  disait  que  deux  cboses  étaient  nécessaires  pour  main- 
tenir le  peuple  dans  l'obéissance  :  le  pain  et  le  fer. 


YEN  539 

I^a  vio  est  ;iU('lt''r  ;'i  deux  iiiaiiv;iis  clievaiix  :  le  iMiircct  le  iiiaiiûer. 
(Ronsard.) 
Najioléon  tlisail  :  «  C'est  le  veiiti-e  qui  fait  mouvoir  le  inonde.  » 

MfKjinter  urlis,  inijeniijitc  hinjitur 
Venter. 

(Pf.rsk,  Satires.  Prolo<;ue,  U.) 

L'antagonisme  de  tous  les  partis  politiques  peut  se  résumer  en 
deu\  catruorit^s  :  l(>s  maigres  et  les  gras. 

—  Faire  un  dieu  de  son  ventre.  Les  anciens  avaient  di\iuisé  le 
vjMiIre  dans  Coinus,  comme  étant  le  preniier  moteur  de  l'activité 
humaine,  le  principe  de  l'ordre  et  le  régulateur  de  l'univers;  car 
la  faim  pousse  au  travail,  le  tra\ail  crée  l'aiiondance,  et  de  l'aliou- 
dauce  uait  rauiour.  le  gi-and  moliile  de  l'attraction  et  de  riiarmonie 
sociale. 

Cornus,  dépouillé  par  les  modernes  de  ses  attributions  primitives, 
est  devenu  le  dieu  de  la  bonne  chère  et  des  appétits  sensuels;  faire 
un  dieu  de  son  ventre,  se  prend  aujourd'iiui  en  mauvaise  part,  pour 
signilier  une  extrême  gourmandise. 

Veniri  servire. 

(Tkkknce.) 

Ventre  alTamé  prend  tout  à  gré:  au  ventre,  tout  y  entre. 

Jrjioiits  niro  sloinachiis  cnlgaria  temnit. 

(HoiiAcK,  Snlire,  U,  'X.) 

(Un  estomac  vide  ne  dédaigne  pas  les  aliments  communs.) 

—  Louer  son  ventre  :  s'engager  à  dîner  en  ville. 

—  Synonyme  de  prendre  du  ventre:  bâtir  sur  le  devant,  grossir, 
ventru,  ventripotent. 

—  Le  ventre  anoblit.  D'après  une  ancienne  coutume  de  (Champa- 
gne, une  dame  noble  anoblissait  ses  enfants. 

De  là  est  venue  la  locution  ci-dessus. 

On  attribue  cette  coutume  au  massiicre  d'un  gi'and  nombre  de 
guerriers  champenois,  à  la  bataille  de  Fontanet,  en  8il,  qui  obligea 
à  admettre  le  principe  que  la  mère  transmettait  la  noblesse. 

Vénus,  latin  Venus,  Vcnevis,  wwvq  de  l'amour  et  déesse  de  la 
beauté. 

—  Les  Latins  adoraient  Venus  plebela,  Venus  furticu,  Venus 
rulgaris,  etc. 

— -  Vénus  Aphrodite,  cbez  les  Grecs,  signifie  née  de  l'écume. 
Déesse  de  la  beauté,  elle  naquit  de  l'écume  de  la  mer,  près  de 
l'île  de  Cytbère.  Son  culte,  appelé  veneratio,  a  donné  cénérer. 


540  \FA\ 

■  I/idéo  do  bo.'iiilô  friiiiiiiiic  (''l;ii(   o.\i)riiii(''(' en  lutin  |inr /-(^/(//.ç/^.s-, 
qui  n'a  pas  d'(''qiiival('iit  on  français. 

Sans  CL'ii's  cl  liaccliiis,  vr-niis  est  langiiissanlc 

(Voy.  plalonu/ue.) 

Sine  Cerere  cl  Lihrro,  frii/rl  Venus. 

(TÉnKNCE,  Eunuque,  IV,  6.) 

Vernis  se  inoiinnd  sans  la  coiniiaiuiiie  do  (^ôrès  ot  de  Hacchiis,  et 
eslovt  ropinioii  dos  anciens  que  inesseï-  Priapus  lent  lils  de  Bacclius 
el  Vénus.  (Rabelais,  III,  .31.) 

Saint  Paul,  en  vertu  de  cet  aphorisme,  et  par  mesure  d'hygiène, 
dispensait  les  époux  du  devoir  conjugal  lorsqu'ils  jeûnaient. 

Luxure  est  un  péché  ([ue  gloutonie  alkiclie, 
Et  si  le  lait  flamber  plus  sec  que  sèciie  bùclie. 

L"amour,  ce  dieu  si  triomphant, 
Mange  et  hoit  comme  un  autre  enfant. 
Et  n'a  peur  que  de  la  famine  ; 
Aussi  n"est-il  jamais  plus  galant  et  plus  beau 
Que  quand  au  feu  de  la  cuisine 
11  peut  allumer  son  flambeau. 

Vêpres,  provençal  vespres.  du  latin  vesperas  (du  soir). 

L'une  des  grandes  heures  faisant  partie  de  l'office  divin.  Elles  se 
disaient  autrefois  le  soir,  vers  le  coucher  dii  soleil.  Aujourd'hui,  on 
les  dit  vers  3  heures  de  l'après-midi.  (Voy.  heures.) 

Mer,  du  latin  vermis  :  d'où  :  vermine,  vermicelle,  vermisseau. 

—  Tirer  les  vers  du  nez  à  quelqu'un  (Rabelais)  :  lui  arracher  la 
vérité,  sans  qu'il  s'en  aperçoive. 

En  langue  romane,  fer  signifie  vrai,  vérité. 

Mez  ver  est  ke  li  vilains  dit. 

(Robert  Waci;.) 

(Mais  ce  que  dit  le  vilain  est  vrai.) 

Vous  avez  envie  de  me  tirer  les  vers  du  nez.  (Molière,  G.  Dandin.) 

—  Tuer  le  ver.  Cette  expression  remonte  au  temps  de  François  P-". 
Au  mois  de  juillet  lol9,  la  femme  du  sieur  de  la  Veruade,  maitre 
des  requêtes,  mourut  de  mort  subite.  On  fit  l'autopsie,  et  les  chroni- 
queurs naïfs  du  temps  assurent  que  la  mort  avait  été  causée  par  un 
ver,  qui  lui  avait  percé  le  cœur.  On  appliqua  sur  ce  ver  un  morceau 
de  pain  trempé  dans  du  vin,  et  immédiatement  il  mourut. 

C'est  depuis  lors,  dit-on,  que  l'ouvrier,  avant  d'aller  au  travail, 
le  matin,  boit  une  chopine  de  vin  blanc. 


VKR  541 

Vergogne,  lia  latin  vcrecundid,  pudeur;  provençal  vo'gonia. 
Ce  Iciiiii'.  aulrefois  roiirant  ot  très  iiolile,  est  devenu  familier  et 
d'un  emploi  plus  rare.  Il  avait  plus  de  force  que  honte. 
11  est  resté  son  déi'i\é  dérmuiondi'. 

Vérité,  (lu  laliu  ren'las. 

(Juiililé  (pii  l'ait  paraître  les  choses  telles  qu'elles  sont. 
Divinité  alléuorique.  tille  de  Saturne  et  mère  de  Yesta. 
Démocritc  disait  qu'elle  se  tenait  au  fond  d'un  puits,  pour  expri- 
mer qu'il  était  difficile  de  la  découvrir. 
—  La  vérité  est  le  nom  que  chacun  donne  à  son  opinion. 
L'or  et  la  vérité  sont  les  deux  choses  les  plus  précieuses. 

La  morale  a  Ijosuiii,  pour  élrc  l)ion  reçue. 
Du  inas(|iie  de  la  fable  et  du  cliarine  du  vers  : 
La  vérité  plail  moins  quand  elle  est  toute  nue. 
Et  cest  la  seule  vierge,  en  ee  vaste  univers. 
Qu'on  aime  à  \oir  un  peu  velue. 

(nori-[-i.Eiis.) 

A/nicus  Plafo,  sed  magis  (imica  verltas  (Aristote  et  Gicéron)  : 
J'aime  Platon,  mais  plus  encore  la  vérité. 

Yilnm  iiiipenilere  vero. 

(Jl'VF.NAI..) 

Consacrer  sa  vie  à  la  vérité.  (Devise  de  J.-J.  Rousseau.) 

La  vérité  ne  fait  pas  autant  de  bien  que  ses  apparences  font  de 
mal.  (La  Rochefoucauld.) 

Il  n'y  a  que  la  vérité  qui  offense  :  toutes  les  vérités  ne  sont 
pas  bonnes  à  dii'e. 

Il  y  a  des  vérités  qu'il  faut  laisser  au  fond  de  leur  puits. 

Les  injures  sont  souvent  des  vérités  sans  voiles. 

Les  vérités  qu'on  aime  le  moins  à  entendre,  sont  souvent  celles 
qu'il  importe  le  plus  de  savoir.  (Roiste.) 

La  vérité  est  utile  à  qui  l'entend,  et  nuisible  à  qui  la  dit. 

Obscquiuni  amicos,  vcritas  oïlium  jtarit. 

(Tkhence,  Andrienne,  I,  1;  Cickkon,  Pro  Cœlio.) 

(La  complaisance  nous  fait  des  amis  :  la  franchise,  des  ennemis.) 
Ce  vers  de  Térence  était  la  devise  de  l'Arétin. 
—  Fontenello  disait  que  s'il  tenait  toutes  les  vérités  dans  sa 
main,  il  se  garderait  bien  de  l'ouvrir. 

Que  de  gens  sont  damnés  pour  avoir  eu  raison  ! 

(Cm'.xiEii,  .Xnthan,  IV,  4.) 


5i2  VER 

—  Dire  la  vûrilé  en  riant. 

...Hidrnilo  (lierre  ver  uni 
Quid  rcltit  ? 

(Hotucr;,  Satires  I,  I,  24.) 

C'est,  en  ellet,  la  nianirrc  la  |)1ms  adroite  de  la  dire;  c'est,  en 
quelque  sorte,  dorer  la  pilule,  anière  et  difticile  à  avaler,  car  un 
autre  proverbe  dit  que  «  toute  vérité  n'est  pas  bonne  à  dire». 
Un  bonime  prudent  ne  dit  jamais  la  vérité  qu'en  l'entourant  des 
formules  les  plus  polies  et  les  moins  désobligeantes,  tandis  qu'un 
liomme  mal  élevé  se  croit  franc  en  la  disant  brutalement  à  ses 
amis,  qui  s'en  trouvent  toujours  blessés.  (Voy.  périphrase.) 

—  Le  temps  découvre  la  vérité. 

Attendre  est  toujours  la  vengeance  de  la  vérité.  (Lamartine.) 

—  Huile  et  vérité  montent  en  sommité. 

La  vérité  est  comme  le  liège,  qui  surnage  toujours,  quelque  elTort 
qu'on  fasse  pour  l'immerger.  (William  Temple.) 

La  Vérité  est  fille  du  Temps  :  à  la  longue,  elle  obtient  tout  de 
son  père.  (M.  de  Feydet,  Cour  d'assises  d'Albi,  182^.) 

—  In  vino  Veritas  (Salomon)  :  la  vérité  est  dans  le  vin. 
On  est  expansif  dans  l'ivresse. 

Vin  et  confession  découvrent  tout.  Le  vin  et  les  enfants  disent  la 
vérité. 

Nnlltim  secretnm  est  ubi  régnai  ehrietas  (Salomon,  Proverbes, 
cil.  XXXIl,  V,  4).  Pas  de  secret  où  règne  l'ivresse. 

—  Primo,  au  vin  la  vérité,  comme  nous  disons,  nous  autres 
Latins;  secundo,  il  est  de  serment;  tertio,  on  lève  la  main  en  le 
prenant  ;  quarto,  et  pour  le  mieux,  on  le  prend  et  on  le  met  sur 
la  conscience.  (Moyen  de  parvenir,  cli.  109.) 

—  La  vérité  est  au  fond  d'un  puits  (Démocrite).  Et  l'on  dit  d'une 
vérité  évidente  :  C'est  clair,  c'est  une  profonde  vérité. 

Si  Démocrite  place  la  vérité  dans  un  puits,  Salomon  la  met  dans 
une  cave.  N'est-ce  pas  avouer,  qu'en  somme,  on  ne  sait  où  elle  est  ? 

—  Le  P.  Loriquet  est  un  puits  de  vérité,  en  comparaison  de  cet 
bistorien  !... 

Vermeil,  du  latin  verinieulus  :  d'où  vermillon. 

Argenterie  dorée  au  mercure. 

Vernis  composé  de  gomme  et  de  cinabre,  broyés  avec  de  l'essence 
de  térébentbine,  dont  on  se  sert  pour  donner  de  l'éclat  aux 
dorures. 


Vérole,  pour  rairole,  dérivé  de  caiv  (voy.)  ;  rapprocliez  de 
variole,  du  latin  rariolus,  et  de  barioler. 

—  Ralielais  {\\\.  IV,  cli.  52)  appollc  la  petite  vérule  la  jiirotc,  de 
jtiquer.  [)arce  que  le  visage  est  souvent  piqué,  marqué,  par  cette 
maladie. 

Ou  dit  encore  :  jiicoté  de  la  petite  vérole.  (Voy.  (jrûlé.) 

—  SyiUTuynies  de  inarqiu''  de  la  petite  vérole  :  .arélé,  écumoire, 
M.  des  Gi'élons.  râ|)e  à  suci'e,  vacciné  à  coups  de  pioche. 

Verre,  du  laliu  lutrum,  provençal  ceire,  qui  siguilie  en  même 
temps  roir  :  le  verre  est  transparent. 

—  Corps  solide,  dur,  fragile  et  transparent,  qu'on  obtient  en 
fondant  du  sattle  silicieux  avec  de  la  potasse  ou  de  la  soude. 

—  La  pantoulle  de  verre  de  Gendrillon,  dans  le  conte  de  Per- 
rault, est  une  pantoulle  de  rair  (voy.),  nom  sous  lequel  on 
désignait  auti'efois  la  fourrure  appelée  aujourd'hui  y^e/^V-^/r/*". 

C'est  ainsi  que  le  mot  est  écrit  dans  les  vieux  recueils  de  contes 
populaires.  Les  Itonnes  éditions  modernes,  notamment  celle  de 
Hachette,  illustrée  pai'G.  Doré,  ont  restitué  l'ancienne  orthographe. 

Verrier,  dérivé  de  cerrc. 

—  Gentilhomme  verrier,  gentilhomme  souflleur. 

Au  retour  des  Croisades,  saint  Louis  anohlit  tous  ceux  qui  rap- 
portèrent en  France  l'art  de  la  verrerie,  et  avec  eux,  leurs 
descendants.  Ils  reçurent  le  titre  de  «  gentilshommes  verriers»,  et 
le  conservèrent  jusqu'à  la  Révolution,  qui  put  appliquer  à  leur 
noblesse,  cette  chute  si  connue  d'une  stance  de  Polyeucte  : 

Et,  comme  elle  a  l'éclat  du  verre. 
Elle  on  a  la  fragilité. 

Le  poète  Saint-Arnaud  était  de  celte  noblesse  ;  et  son  confrère 
Maynard  lui  lança  cette  épigramme  : 

Votre  noblesse  est  miiico, 
Car  ce  n'est  pas  d'un  prince, 
Daphnis,  (|ue  vous  sortez  ; 
Gcntilhonune  de  verre. 
Si  vous  tombez  à  terre. 
Adieu  vos  qualités  ! 

Filles  de  verrier 
Sont  toujours  en  dan^ier. 

(Vieux   jjrovei'be.) 

Vers,  du  latin  versus:  de  verlere,  tourner,  parce  qu'aussitôt 
après  avoir  lu  une  ligne,  on  retourne  à  une  autre  ligne  (?). 


VM  VEU 

D'oii  rrr.'U'f. 

I",t  iiiiii,  ji'  \niis  sotilicns  (|iic  mes  vers  sont  fort  Ijoiis. 

(Mot.iKiiK,  Misanthrope,  I,  2.) 

Verser,  du  l;itin  rornarc,  fréq.  de  i^ertorc,  tourner:  on  tourne 
un  Viiso  [)onr  vider  re  qu'il  contient. 

De  là  :  versement  (d'nruenl),  injdversation  (déloiirnenienl  d'ar- 
gent). 

—  Comparez  :  convertir  des  rentes,  virement  de  fonds;  ce  sont 
des  latinismes. 

Facere  versuram  (Gicéron)  :  l'aire  un  emprunt  pour  payer  une 
créance. 

Faire  un  trou  pour  en  l)ouclier  un  autre,  dit  Térence. 

Faire  vcrsure,  et  de  la  terre  d'aultruy  remplir  le  fossé.  (Rabe- 
lais, m,  3.) 

Vert,  du  latin  viridis  ;  d'où  :  verdir,  verdure,  verger. 

—  Vert  comme  pré. 

—  Au  figuré  :  vert  galant,  verte  vieillesse,  verte  réprimande. 
On  dit  d'un  vieillard  qu'il  est  encore  vert. 

...viridisqne  senectus. 

(ViriGiLK,  Enéide,  VI.) 

On  peut  rapprocher  de  «  verte  l'éprimande  »  l'expression  «  donner 
une  volée  de  bois  vo-t  » . 

—  On  a  écrit  autrefois  verd,  plus  rapproché  du  latin  viridis. 
Pour  être   conséquent,  on   devrait  changer  aussi   verdure  en 

verture,  et  verdir  en  vertir. 

Ils  sont  trop  verts. 

(La  Fontaine,  Fables,  \\\,  {{.) 

Se  dit  à  propos  de  celui  qui  méprise  une  chose  qu'il  ne  peut 
obtenir. 

La  Fontaine  a  pris  cette  fable  du  vieux  proverbe  :  «  Autant  en 
dit  le  renard  des  mûres.  » 

—  Prendre  quelqu'un  sans  vert  :  le  prendre  au  dépourvu. 
Cette  locution  est  due  à  un  jeu  très  ancien,  qui  consistait,  pen- 
dant le  carême,  à  porter  sur  soi  un  brin  de  feuillage  vert. 

Après  que  \ Angélus  était  sonné,  celui  des  joueurs  qui  était 
accosté  par  l'autre  devait  montrer  sa  feuille  verte,  et,  s'il  en  était 
dépourvu,  ou  si  son  vert  était  moins  foncé  que  celui  de  son  adver- 
saire, il  perdait  la  partie. 

Il  est  probable  que  le  jeu  du  vert  tire  son  origine  de  l'obligation 
imposée  aux  fidèles  de  porter  des  branches  de  verdure  à  la  pro- 


\\A\  Mo 

cession    du   (liiii.iiiclic   des    U;iiiic;iii\  :   on   le   coiniiitMK^iil  dès   le 

in'eiiiicr  joui'  de  ctuvine. 

Je  vous  pi'ciuls  sans  verd  est  un  des  jeii\  de  Gar.t2iinlM;i.  (l\al)elais, 

liv.  1.  ±2.) 

C'i'st  Cl'  ijiii  l'ail  toujours  qut'  jr  suis  pris  sans  vert. 

(MoLiÈnE,  Etourdi.) 

—  Ce  may  nous  avertit  (jnil  faut  songer  au  verd. 

—  Vous  y  jouez  donc?  —  Oui.  —  Ganiez  dètre  attrapée  ! 

Ces  deux  vers  sont  tirés  de  la  scène  YllI  d'une  comédie  de  La 
Fontaine,  intitulée  :  Jf  vous  jtrcnds  sans  cerd. 

Vertige,  du  latin  ceiiujo,  qui  s'emploie  aussi  en  français  (tour- 
noiement). 
De  là  :  vertigineux. 

—  Le  vertiijo  est,  au  propre,  une  maladie  du  ciieval.  qui  le  fait 
chanceler  et  donner  de  la  tète  contre  les  murs. 

Au  fjouré  :  transport  de  folie. 

Vo\rz  un  pi'U  ipii'l  verti^t»  le  prend. 

(Moi.iKRK,  Pourceau(/nac.) 

Vertu,  du  latin  virtus,  force,  vaillance;  de  clr,  homme. 
Divinité  allégorique,  tille  de  la  Vérité. 

—  Marcellus  éleva  un  temple  à  la  Vertu,  et  un  autre  à  l'Honneur. 
Il  fallait  passer  par  le  premier  pour  arriver  au  second.  Idée  ingé- 
nieuse, pour  faire  entendre  que  la  vertu  est  le  principe  même  de 
l'honneur. 

—  La  vertu,  hut  de  toute  morale,  est  la  disposition  ferme  de 
l'àrae,  qui  nous  porte  à  faire  le  bien  et  à  fuir  le  mal. 

La  vertu  est  une  continuité  de  sentiments  généreux.  (M"""  de 
Staël.) 

—  Les  théologiens  distinguent  trois  sortes  de  vertus  : 

lo  Les  vertus  intellectuelles,  qui  perfectionnent  le  jugement. 
Il  y  en  a  cinq  :  l'intelligence,  la  science,  la  sagesse,  la  prudence 
et  l'art. 

2°  Les  vertus  morales,  ou  cardinales,  qui  perfectionnent  la 
volonté  :  la  prudence,  la  force,  la  tempérance,  la  justice. 

3"  Les  vertus  théologales,  qui  ont  Dieu  pour  objet  immédiat  : 
la  foi,  l'espérance  et  la  charité. 

—  On  a  appelé  la  vertu  :  l'amour  de  l'ordre,  la  musique,  la 
poUtesse  et  la  beauté  de  l'àme  ;  le  devoir. 

Platon  la  nomme  une  chose  divine;  c'est  pour  cela,  sans  doute, 
que  les  hommes  la  pratiquent  si  peu. 

35 


546  VEU 

—  Chez  l(^s  aiifions,  rlrlKs  si^Miili;ii(  force,  (''iiertiie,  roiira.tre'. 

L;i  hiii.^iie  provciirMlc,  liôritiri-c-  (lii'ccto  du  latin,  a|i[)elle  brave 
nn  lioinine  vertueux. 
I.cs  luots  vh  et  rirtus  étaient  presque  synonymes. 
On  (lit  encore  d'un  lioininc!  faible,  qu'il  n'a  ni  force  Jii  vertu. 

—  La  vertu  des  plantes,  des  simples.  En  vertu  de  ce  principe. 
C'est  dans  ce  sens  qu'il  faut  entendre  le  mot  de  Brutus  :  «  La 

vertu  n'est  qu'un  nom  !  »  car  une  vertu  pareille  est  bien  voisine 
du  crime,  et.  en  face  du  cadavre  de  ses  enfants,  la  conscience  de 
ce  farouche  républicain  dut  se  révolter,  et  renier  une  vertu  dont 
il  subissait  les  funestes  conséquences. 

Brutus,  le  meurtrier  de  César,  tantôt  maudit,  tantôt  divinisé, 
est  plongé  par  Dante  à  mi-corps  dans  la  gueule  de  Satan,  qui  le 
dévore  éternellement,  tandis  que  Allleri  le  glorilie  comme  le  héros 
de  Borne  et  le  sauveur  de  la  liberté  expirante. 

Les  vertus  comme  celle  de  Brutus  sont  si  voisines  du  crime,  que 
la  conscience  des  républicains  eux-mêmes  se  troubla  en  face  du 
vote  du  duc  d'Orléans  qui  prononça  la  mort  de  Louis  XYl.  (Lamar- 
tine, les  Girondins.) 

Balzac  a  dit  :  La  vertu,  c'est  Achille  sans  talon.  {La  Peau  de 
chagrin.) 

—  Dans  la  morale  éclairée  des  temps  modernes,  le  mot  vcrlu 
exprime  absolument  l'idée dhonnéteté, l'accomplissement  du  devoir 
dicté  par  la  raison. 

...Homme  d'austère  vertu  et  d'une  grande  prévoyance,  il  joignait 
la  finesse  athénienne  à  l'inflexibilité  Spartiate. 

—  La  vertu  rapporte  plus  que  le  vice  :  d'ailleurs  il  y  a  moins  de 
concurrence.  (Voy.  vice.) 

Pour  parvenir  au  bonheur,  la  vertu  est  la  voie  la  plus  courte  et 
la  moins  fréquentée. 
La  vertu  est  le  plus  grand  de  tous  les  plaisirs.  (Épicure.) 

—  Où  la  vertu  va-t-elle  se  nicher  ?  -  Un  pauvre,  à  qui  Molière 
avait  donné  une  pièce  d'or,  courut  après  lui  pour  l'avertir  de  son 
erreur.  «  Où  diable  la  vertu  va-t-elle  se  nicher?  s'écria  Molière. 
Tiens,  mon  ami,  en  voilà  une  autre.  » 

—  On  vantait  devant  Agésilas,  roi  de  Sparte,  un  scélérat  qui  avait 
supporté  la  torlare  avec  courage.  «  Que  de  vertu  perdue  !  »  dit-il. 

—  Faut  de  la  vertu,  pas  trop  n'en  faut.  In  medio  virlas  :  la 
vertu  est  dans  la  modération. 

Nos  plus  grands  ennemis  dans  le  monde,  sont  nos  vertus. 


VKS  r,M 

Nos  vertus  ne  sont  soinciit  (iiic  dos  vices  déuiiisés.  (La  Roclie- 
foiicanUl.) 

Les  vices  entrent  dans  la  composition  des  vei'tiis,  comme  les 
poisons  entrent  dans  la  composition  des  remèdes.  La  prudence  les 
assemble  et  les  tenipriv,  et  elle  s'en  sert  utilement  contre  les  nian\ 
de  la  \ie.  (La  Rochefoucauld.) 

Vertugadin,  de  l'espagnol  vertugado,  gardien  de  vertu;  on  dimi- 
nutif du  vieux  mot  verturjade,  que  l'on  explique  par  certu-en-yarde. 

Gros  bourrelet  que  les  femmes  portaient  au-dessous  de  leur 
corps  de  robe  ;  ce  qu'on  a  appelé  plus  tard  paniers. 

En  Espagne,  sous  Philippe  IV,  on  appelait  fjuarda-infanles, 
cache-grossesse,  ces  sortes  de  faux. 

Rabelais  (1,  55)  emploie  veiHugale  dans  le  sens  de  jupon.  (Voy. 
panier,  tournure.) 

Verveine,  du  latin  rerhena  :  veneris  vena,  parce  que  les 
magiciens  l'employaient  pour  rallumer  les  feux  de  l'amour. 

Ou  de  rerro,  balayer,  parce  qu'on  se  servait  des  tiges  de  cet 
arbrisseau  odorant  pour  balayer  les  autels  de  Jupiter. 

Les  païens  ap[)elaient  la  verveine  lierba  sacra  pour  ce  motif. 

—  Appliquée  sur  la  peau  après  avoir  été  écrasée,  la  verveine  la 
teint  en  rouge  pourpre;  ce  qui  a  fait  croire  qu'elle  attirait  le  sang. 

Vesce  cultivée,  du  latin  vicia. 

Ce  légume,  dans  certaines  parties  de  la  France,  s'appelle  cosce, 
sans  doute  pour  éviter  une  équivoque  déplaisante. 

Vespasienne,  origine  bistorique. 

l'i'inoii-  nommé  ainsi  de  Vespasien,  successeur  de  Vitellius,  qui 
établit  sur  ces  vases  un  impiH  qui  lui  a  assuré  l'immortalité  du 
ridicule.  C'est  pour  augmenter  les  revenus  du  Trésor,  fort  endetté 
par  ses  prédécesseurs,  qu'il  avait  imaginé  ce  nouvel  impôt. 

Comme  son  fds  Titus  le  raillait  à  ce  sujet,  il  lui  dit,  en  lui 
présentant  les  premières  sommes  produites  par  cette  singulière 
taxe  :  «  Cela  sent-il  mauvais  ?  » 

Vesse,  vient  de  véier,  du  latin  visire. 

(Quelques-uns  le  font  venir  de  cesica,  vessie,  qu'on  retrouve  dans 
billevesée  et  dans  vè:e,  qui  signifie  musette. 

Marchand  qui  no  tient  sa  promesse, 
Juge  qui  vérité  délaisse. 
Avocat  vide  de  sagesse 
Ne  valent  |ias  une  vesse. 


548  VET 

—  Avoir  la  vcssc  :  vcssor  de  peur. 

«  Il  est  certain,  dit  Montai.cne,  que  la  peur  cxtréiiie  et  rexlrciiie 
ardeur  du  courage,  troublent  également  le  ventre  et  le  laschent.  » 

—  Dans  Arlotiuln-Jaaon  du  théâtre  italien  (tome  I.  page  î()9), 
Jason  dit  à  Médée  que  les  soupirs  dont  elle  se  plaint  sont  un  elVet 
d'amour  et  de  peur.  Et  il  ajoute  : 

Tous  deux  les  font  sortir  par  un  clieniin  contraire, 
Mon  iunour  par  devant,  et  ma  peur  par  derrière. 

—  Au  xvi«  siècle,  on  disait  vézic  pour  pc.av.iA  i)lus  tard  ou 
employa  vésarde. 

—  Oudin,  dans  les  Recherclies  françaises,  note  l'expression 
vesou  :  le  derrière. 

Vessie,  vesse,  a  aussi  désigné  les  femmes  de  mauvaise  vie. 

Brantôme  (Daines  galantes!  se  sert  du  terme  injurieux  de 
vesses  pour  désigner  les  dames  débauchées. 

Et  Rabelais  (liv.  III,  cli.  12)  dit  qu'il  fut  décrété  qu'on  chasserait 
des  cieux  «  toute  cette  vossaille  de  déesses  ».  Cette  expression  est 
mise  ici  pour  les  dames  de  la  cour,  qui  suivaient  François  I*^^""  à 
l'armée,  et  qui  amollissaient  ainsi  le  courage  des  combattants. 

Vessie,  du  latin  veslca,  mot  fait  comme  billevesée. 
Balle  pleine  de  vent. 

—  En  provençal,  on  appelle  une  vessie  bouffigue,  et  boudenfle, 
pour  boute  e;î/?e  (boute  souffle),  mot  fait  comme  boute-feu.  Enetïet, 
lorsque  les  enfants  veulent  enfler  une  vessie,  ils  y  boutent  leur 
souffle  au  moyen  d'un  tuyau.  (Yoy.  lanterne.) 

Vesta,  nom  latin  ;  correspond  au  grec  heslla,  foyer,  qui  répond 
lui-même  à  œstus,  chaleur. 

Vestales,  du  lai  in  vestalls. 

Jeunes  vierges  romaines  qui  entretenaient  perpétuellement  le  feu 
sacré  sur  l'autel  de  Yesta  ;  dans  le  temple  où,  sous  ce  nom,  on 
adorait  réellement  le  feu,  le  foyer. 

Numa  avait  créé  ce  culte,  et  lui  avait  consacré  un  temple  de  forme 
ronde  où  étaient  conservés  le  feu  sacré  et  le  palladium  de  Troie. 

On  entretenait  aussi  le  feu  sacré  à  l'entrée  des  maisons  particu- 
lières, d'où  venait  le  nom  d'atrium  donné  à  cette  partie  de  la 
maison  ;  et  aussi  le  nom  de  uestibulum  :  Vestœ  slabulum. 

Vétiile,  origine  peu  connue;  peut-être  de  vitta,  bandelette  (?). 
Provençal  veta.  Ou  de  vitilitigare,  chicaner  sur  des  riens,  s'attacher 
à  des  riens. 


VF/r  549 

—  Pniiliiv  l;iii'on  ponl  lioin  per  iina  ve(a.  (P.  Cardinnl.)  Paiivro 
lari'oii  t'sl  |KMi(lii  pour  une  vélillo. 

Vêtement,  du  laliu  l'cstimontion.  provençal  ccslunenl. 

Ce  qui  sei"t  à  eouvrir  le  corps. 

Méine  radical  re^te  :  luibil  sans  basque  qu'a  remplacé  le  .iiilct. 

Vêtir,  du  lalin  rcs/ire. 

De  là  \iennenl  aussi  :  investir,  vestiaire,  revêtir,  etc. 

—  Velu  coiuiue  un  oiiinon  :  qui  a  [ilusieurs  vêtements.  Se  dit 
dans  le  sens  de  cossu. 

Si/fra/us  lionio  (Pline)  :  qui  est  bien  mis,  n'a  pas  froid,  recouvert 
comme  l'oignon,  de  plusieurs  pelures. 

Ce  dicton  by.aiénique  conseille  des  vêlements  superposés,  sans 
doute  comme  préservatif  du  fi'oid. 

On  pourrait  aussi  conseiller  le  choix  de  la  couleur  blanche,  car 
les  vêtements  noirs  laissent  pénétrer  la  chaleur  du  soleil  et  sortir 
celle  du  corps  :  ils  habillent  peu  :  ils  sont  froids  à  l'ombre  et  chauds 
au  soleil,  double  désavantage.  Les  vêtements  Idancs,  au  contraire, 
conservent  la  chaleur  du  corps,  et  ne  se  laissent  pas  pénétrer  par 
les  rayons  du  soleil. 

—  Les  anciens  avaient  des  vêtements  si  légers,  que  Pétrone  les 
appelle  du  «  vent  tissé  ».  (Voy.  ga-:c.) 

Dans  le  roman  égyptien  de  Setua,  traduit  par  M.  Cliahas,  on  lit  : 
«  Tabaha  se  leva  :  elle  s'habilla  d'un  habit  de  lin  :  Setua  voit  tous 
ses  membres  à  travers  rétoffe,  et  son  amour  grandit  encore.  » 

—  Les  «  .Merveilleuses  »,  lorsqu'elles  allaient  danser  dans  les 
bals  à  la  sauvage,  se  montraient  en  maillot  collant  couleur  chair, 
recouvert  d'une  simple  tunique  de  batiste  très  cl;iire. 

M"'«  ïallieu  allait  dans  les  salons  avec  une  tuuicjuo  tellement 
transparente,  ([ue  ce  vêtement  pouvait  passer  pour  une  indiscrète 
superiluité. 

Vétiver,  plante  graminée  de  l'Inde,  voisine  du  chiendent,  dont 
les  racines,  très  odorantes,  servent  à  [)réserver  les  vêtements  des 
insectes  nuisibles. 

Veto,  mot  latin  :  empêcher. 

C'était,  à  Rome,  la  formule  employée  par  les  tribuns  du  peuple 
pour  s'opposer  à  un  décret  du  Sénat. 

En  France,  la  Constitution  de  1791  accordait  au  roi  le  veto 
suspensif.  Louis  XVI  l'ayant  opposé  aux  décrets  des  17  et  29 
novembre  contre  les  prêtres  et  les  émigrés,  le  peuple  lui  donna, 


550  VIA 

ainsi  qii';'i  la  reine,  les  noms  injurieux  de  "  Monsieur  et  .Miulamc 
Yelo  ». 

Veuve,  (lu  lalin  ridua  :  ancien  français  v ed ne,  redire  ;  WaWom 
vedova  ;  sanscrit  vidhava,  de  vi,  sans,  dhdca,  époux. 
L'étymolopie  ridua.  vide(?),  est  adoptée  bien  souvent. 
Synonyme:  une  liancée  d'occasion. 

—  Le  de'nier  de  la  veuve. 

—  Veure  s'ajoute  seulement  au  nom  des  femmes.  Ou  dit  : 
«  M™"  veuve  X...  »  ;  mais  on  ne  dit  pas  :  «  M.  veuf  X...  » 

—  Secourir  la  veuve  et  l'orplielin.  La  pièce  intitulée  /a  Vcnrc 
du  Malabar  était  à  l'étude  depuis  longtemps,  au  Théâtre-Français, 
lorsqu'on  fit  jouer  l'Orphelin  de  la  Chine,  de  Voltaire,  qui  venait 
d'être  reçu  depuis  peu. 

Lemierre  adressa  alors  ce  quatrain  au  comité  : 

Par  vos  délais  longs  et  sans  fin 
C'est  assez  me  mettre  à  l'épreiive. 
Vous  qui  protégez  Y  Orphelin, 
Ne  ferez-vous  rien  pour  la  Veuve  ? 

Vexer,  du  latin  vexare,  tourmenter,  fréquentatif  de  vehere, 
veclu/n,  porter. 

—  Synonymes  :  tourmenter  :  en  faire  voir  de  grises  ;  empêcher 
de  voir  la  vie  en  rose  ;  faire  passer  les  mers  rouges  (locution  pro- 
vençale) ;  bassiner. 

Être  vexé  :  maugréer,  pester  ;  jurer  entre  cuir  et  ciiair  (Pré- 
cieuses) ;  ronger  son  frein  en  silence;  fumer  sans  tabac  et  sans 
pipe  ;  mousser. 

Via,  mot  latin,  signiliant  chemin. 

S'emploie  quelquefois  dans  une  adresse  :  ria  Suez,  faire  passer 
par  Suez. 

Se  trouve  dans  le  mot  savant  :  viatique. 

A  aussi  formé  les  mots  :  voyage,  provençal  ciagi  :  convoi,  dévier, 
obvier,  fourvoyer. 

Viager,  qui  est  à  vie,  pour  la  vie  durant.  Ancien  français  viage, 
cours  de  la  vie. 

—  Revenu  viager. 

La  rente  viagère  ne  peut  pas  même  assurer  à  la  vieillesse,  par 
l'appât  d'un  héritage,  le  mensonge  d'un  peu  de  dévoùment.  (Octave 
Feuillet,,  le  Villar/e.) 


VIA  Soi 

Viande,  du  bas-latin  rirenda,  vivres,  nourriture. 
A  tl(''sii:ii('  dahord  tout  ce  (iiii  est  propre  à  soutenir  la  vie. 
Aiijoui'd'hui,  il  ne  se  dit  [dus  que  de  la  chair  des  animaux  de 
lioiiclici'ie. 

—  Kn  roman,  il  se  disait  carnnl  fcarnem,  chair).  Ce  radical  se 
retrouve  dans  un  urand  noinl)re  de  dérivés  du  mot  c/ia/r;  carnage, 
carna\al.  cai-nalion.  (•arai\ore  :  cliarnier. 

Pua  ylutz  elz  de  pelha 
Non  es  loi)  d'ovelha 
Ni  d'autre  carnnl. 

(I!.   DE    RoVEXAC.) 

(Vous  êtes  plus  avide  de  vêtement,  que  le  loup  n'est  d'ouailles 
ni  d'autres  viandes.) 
Ainsi  le  mot  riaude  est  parvenu  à  se  substituer  à  chair. 

—  Le  provençal  a  la  forme  rioiirc,  qui  correspond  au  terme 
général  dn  français  rirrcs. 

Par  nn  phénomène  aimlogue,  boucher  et  boucherie  ont  désigné 
d'abord  le  métier  de  la  hiuiche  (buccaj. 

L'or/z/Vr  s'appli(piail  au\  corps  d'état  qui  vendaient  des  chairs 
d'animaux  comeslihles.  Celui  qui  vendait  spécialement  de  la  chair 
de  liuNif.  s'a[)pelnit  bouder. 

On  lit  dans  les  Cartulnires  de  Montpellier  (1°  45)  :  «  IMazeliers 
aion  V  tutlos,  ço  es  assaber  :  1  boacier,  dos  motoniers,  1  porcier 
et  1  peychonier.  »  Que  les  boucliers  aient  cinq  votes,  à  savoir  : 
un  vendeur  de  chair  de  bœuf,  deux  vendeurs  de  chair  de  mouton, 
un  vendeur  de  porc,  et  un  poissonnier. 


La  sicnna  viandn  era 
I'(in>!  et  ai/rjua  tôt  dia. 


Vie  de  saint  Honorai.) 


(Sa  nourriture  était  du  pain  et  de  l'eau  toujours.) 

Com  so  riandas  /'ai/fus  de  froment  cueyt  ani  airjua  e  ria. 
(Trailiiction  d"All)urasis,  f°  57.)  Comme  sont  aliments  faits  de 
froment  cuit  avec  eau  et  riz. 

En  cesle  isle  seule  naissent  ces  belles  poires...  Si  on  les  cuisoit 
en  casserons  par  quartiers  avecques  ung  peu  de  vin  et  de  sucre,  je 
pense  que  ce  seroit  viande  très  salubre,  tant  es  malades  comme 
es  sains.  (Rabelais,  liv.  IV,  cli.  34.) 

Notez  que  c'est  viande  céleste,  manger  à  desjeuner  raisins 
avecques  fouaces  fraisches.  (Rabelais,  I,  30.) 

—  Débris  de  viandes  :  arlequins,  rogatons.  (Voy.) 


oo2  Vie 

Vice,  du  l;ilin  vithim,  do  rilare,  éviler(?). 

—  Tout  vice  est  issu  d';merie.  (Voy.  ûjnoruncc.) 

Le  vice  est  une  imporfoction  morale  pra\e;  le  défaut  nue  imper- 
fection légère,  soit  morale,  soit  intellectuelle. 

On  a  dit  de  César  qu'il  avait  tous  les  vices,  et  pas  un  seul  défaut. 

Certains  vices  n'existeraient  pas.  sans  les  vertus  qui  leur  sont 
opposées.  Ainsi,  l'avarice  s'appuie  sur  la  générosité  :  l'asture,  sur 
la  bonne  foi  :  l'exigence,  sur  la  bonté  ;  l'hypocrisie,  sur  la  religion  ; 
le  crime,  sur  la  clémence  ou  le  pardon. 

Souvent  la  peur  d'un  mal  fait  tomber  dans  un  pire.  Nos  vices,  à 
leur  tour,  peuvent  faire  naître  des  qualités.  L'avarice  produit  la 
sobriété  :  la  peur,  la  prudence  :  la  défiance,  l'ordre  :  l'orgueil,  la 
cliarité. 

—  Vice  rédhibitoire.  Défaut  qui  oblige  le  marchand  à  reprendre, 
avant  neuf  jours  révolus,  le  cheval  qu'il  a  vendu. 

—  Fanfaron  de  vice. 

Il  y  a  deux  sortes  de  corruption  morale  :  celle  qui  se  cache,  et 
que  l'on  compare  à  l'eau  qui  dort  ;  la  corruption  elïrontée,  qui 
étale  sa  turpitude,  et  que  l'on  appelle  la  fanfaronnade  du  vice. 
Dans  l'intérêt  de  la  société,  l'hypocrisie,  suivant  certains  moralistes, 
est  préférable  au  scandale. 

Osuperbiam  inauditam,  facinorn  fffoi'iari  !  (Ckévon  à  Brutus.) 

—  Il  vaut  mieux  rendre  un  vice  aimable,  que  de  dégrader  la 

vertu. 

Jaimo  mieux  un  vice  comaiode 
Quane  fatigante  vertu. 

(MoLiKRE,  Anip/iilrijon.\ 

Le  vice  rapporte  plus  que  la  vertu.  (Plus  de  plaisir,  mais  moins 
de  bonheur.) 

L'innocence  est  un  capital  qui  ne  rapporte  que  quand  on  le  perd. 
(Grévin.  la  Vie  parisienne. J 

Tanlo  magis  expedil  inguino.  cjuam  ingénia  friairc  ! 

s'écria  Eumolpe,  le  poète,  en  faisant  un  calembour,  dans  sou  dépit 
de  se  voir  dédaigné  pour  Asclyte,  qui  a  de  plus  grands  avantages 
corporels.  (Pétrone,  Satyricon.) 

Probilas  landalur  et  alget. 

(JrvLNAi.,  Satire  I.) 

Le  pire  de  tous  les  vices  est  de  n'en  avoir  aucun. 
Il  y  a  des  esprits  si  stériles  qu'il  n'y  pousse  rien,  pas  même  des 
bêtises.  (Lamennais.) 


vie  oo3 

On  ne  inépriso  pas  tous  ceux  qui  ont  des  vices,  mais  tous  ceux 

(jni  n"ont  auiiine  vertu.  (La  Hocliefoucauld.) 
Son  Nice  le  plus  urand  est  dftre  sans  vertu.  (^Bignon.) 
C'est  un  simple  mangeur  d'argent,  oisif,  ennuyé  et  ennuyant  les 

autres.  Si  le  ciel  lui  avait  accordé  une  vraie  passion  pour  quoi  que 

ce  soit,  fût-ie  pour  la  pèclie  à  la  ligne,  je  le  respecterais:  mais... 

(II.  Beyle.  la  Chartreuse  de  Parme.) 

Vice,  du  latin  ricem,  rice,  rôle.  Particule  qui  entre  dans  la 
composition  d'un  grand  nombre  de  mots. 

Indique  fonction  en  sous-ordre  :  vice-amiral,  vicomte,  vidame, 
vice-roi. 

Se  retrouve  dans  :  vicaire. 

On  désignait  sous  le  nom  de  viguiei^s  (vicaires)  les  juges  dans  le 
midi  de  la  France. 

Yimaire  ou  vice-maire  équivalait  à  adjoint. 

—  Vice-versa  :  réciproquement. 

Xe  trouver  personne,  quand  on  fait  des  visites  de  cérémonie  et 
vice-versa,  est  un  des  petits  bonheurs  de  la  vie  sociale. 

Tromper  sa  femme  et  vice-versa  ne  donnent  pas  la  même  satis- 
faction. 

Vicieux,  dérivé  de  viciosus  :  adonné  au  vice. 

...Il  regrette  le  vin  bleu  et  le  ragoût  du  cabaret  :  il  a  la  nostalgie 
de  la  boue,  l'appétit  dépravé  de  la  mauvaise  compagnie,  la  tache 
originelle  de  Paris  ! 

La  mer  y  passerait  sans  laver  la  souillure  ! 

Victime,  du  latin  victima,  que  les  étymologistes  rapportent  les 
uns  à  vincire,  enchaîner,  les  autres  à  vincere,  vaincre. 
Ils  l'opposent  à  hostia,  sans  être  bien  d'accord.  (Cf.  Littré.) 
Voici  le  sentiment  d'Ovide  : 

Viclima,  qtiœ  dexlra  cecidit  vicirice,  vocalur  : 
Hoslibus  a  domifis  lioslia  nomen  habet. 

[Fastes,  I,  33.5.) 

Victoire,  du  latin  Victoria. 

—  Victoire  à  la  Pyrrhus.  Pyrrlius,  roi  dÉpire,  ayant  gagné 
contre  les  Romains  la  grande  bataille  d'Asculum,  où  il  perdit  un 
grand  nombre  de  soldats  et  ses  meilleurs  officiers,  dit  à  ses  amis  : 
«  Encore  une  victoire,  et  je  suis  perdu  !  » 

—  La  victoire  est  une  joie  publique,  faite  de  douleurs  privées... 
et  d'une  douleur  publique. 


S54  VIE 

Victuaille.  f.'imilicr  ol  siiniiiiK''.  du  l;iiiii  ririm,  vivre,  et  du 
suflixe  [irjoriilil'. 

(^ir;i|)crrt)is-ji' ■.'  (|il-i|  ;  (■'csl  (jiif|(|iic  \  iclimilli'  ! 

(I,A    Imi.MAI.NK.) 

Vidangeur,  déi-ivc  du  o'ubuKje,  action  de  vider. 
Syiioiiynics  :  (ladoiiard,   ouvrier   nocturne,   dont  le   nom   seid 
réclame  toutes  les  délicatesses  de  la  iilmiit'. 

—  Une  ordonnance  de  Henri  IV,  ap[ielle  les  vidangeurs  «  maistres 
Fin  ».  (Pasqiiier,  Rerliei^rhei^.} 

Rabelais,  avant  cette  époque,  avait  déjà  employé  ce  mot  :  «  Bon 
vespre,  mestre  Fili,  curaire  de  latrine.-;.  » 

J'eus  ung  aultre  procez  bien  ord  et  bien  sale,  contre  mestre  Fili 
et  ses  suppotz.  (Rabelais,  II,  17.) 

Flfi  est  la  réduplication  de  rinterjcction  de  dégoût  fi  !  à  cause 
de  la  mauvaise  odeur  quexbaleut  ceux  qu'on  a  appelés  aussi  : 
in'aîtres  des  basses-œuvres. 

—  Les  vidangeurs  appellent  ouri^age  la  matière  même  sur 
laquelle  s'exerce  leur  industrie.  Ils  disent  :  tomber  dans  l'ouvrage. 
Travailler  proprement,  c'est  connaître  son  métier. 

Vide,  du  latin  viduus,  anciennement  cuide. 
Correspond  à  reuf,  riduilé. 

Vie,  du  latin  vita,  provençal  vida. 

—  La  vie  est  l'ensemble  des  fonctions  qui  résistent  à  la  mort. 

La  respiration  et  la  nutrition  sont  les  deux  fonctions  indispen- 
sables à  la  vie  animale. 

—  Les  deux  organes  essentiels  de  la  vie  sont  ceux  de  la  digestion 
et  de  la  génération  :  l'un  assure  la  vie  individuelle;  l'autre,  la 
conservation  de  l'espèce.  (Rivarol.) 

—  Avoir  la  vie  dure  :  vivre  très  vieux. 

—  Mener  la  vie  à  grandes  guides  :  grand  train. 

—  Vie  de  cocbon  :  courte  et  I)onne. 

Les  Épicuriens  de  Rome  avaient  pris  pour  devise  un  vers  de 
Ménandre  traduit  ainsi  par  Cécilius  :  3Jihi  sex  menses  salis  sunt 
vitœ;  septimum  Orco  spondeo. 

Regnier-Desmarais  l'a  imité  dans  les  vers  suivants  : 

Donnez-moi  six  mois  de  plaisir. 
Je  donne  à  Pluton  le  septième. 


La  duchesse  de  Bon-y,  lillo  du  Hé;2ent,  mniinil  ;i  2'^  ans.  Quand 
on  lui  disait  que  les  excès  abrégeraient  ses  jours,  elle  répondait  : 
«  Courte  et  bonne  !  » 

C'est  la  devise  des  lib(M-lins.  (pii  saiiilieiit  leur  santé  et  leur 
foi-tune  à  quelques  jouissances  matérielles,  et  ([ui  escouiptent  ainsi, 
dans  une  jeunesse  débauchée,  la  vigueur  et  le  bien-être  de  leur 
à, Lie  nu'ir. 

Ce  proverbe  n'est  vrai  qu'à  moitié  ;  car,  si  l'abus  des  plaisirs 
tarit  les  sources  de  la  vie  et  la  l'end  courte,  on  ne  saurait  soutenir 
qu'il  la  rend  bonne,  parce  que,  au  lieu  d'élever  l'homme,  il  l'abaisse 
au  niveau  de  la  l)rute,  eu  allai blissant  sou  intelligence. 

Sponic  -sua  sihi  qui.sqiti;  vdicre  cl  vicere  dodus. 

(LucnfxE,  dfi  .Xatio-ri,  V,  9.")8.) 

(^Chacun,  par  instinct,  usait  de  ses  forces  et  ne  vivait  que 
pour  soi.) 

—  Vie  de  Sai'dauapale.  (Voy.) 

Vie  de  Polichinelle,  qui  consiste  à  se  donner  des  bosses...  au 
ventre... 
Grande  vie,  existence  panachée,  accidentée. 

—  Beaumarchais  fait  dire  à  Figaro  :  «  Vive  la  joie  !  Qui  sait  si 
le  monde  durera  encore  trois  semaines  ?  » 

Il  a  imité  Rabelais  (liv.  Ill,  ch.  2)  :  «  Qui  scait  si  le  monde  durera 
encore  trois  ans  ?  » 
Cette  pensée  est  déjà  dans  Sénèque  {Thyesté)  : 

Nemo  tam  divos  habuit  fuvenles 
Craalinum  ut  posset  -sibi  pnlliceri. 

(Aucun  n'est  assez  sur  de  la  faveur  divine,  pour  s'assurer  seule- 
ment du  lendemain.) 

—  l'u  homme  très  malade  des  suites  d'une  vie  déréglée,  disait  au 
médecin  qui  cherchait  à  le  rassurer  :  «  Ne  comptez  pas  sur  mes 
quarante-six  ans  ;  il  faut  les  doubler,  car  j'ai  vécu  jour  et  nuit.  » 

—  On  dit  aussi  :  faire  la  vie,  c'est-à-dire  faire  la  débauche. 
Rabelais  se  sert  du  mot  vu-ablp,  adjectif  énergique  qui  n'est  plus 

d'usage,  qui  équivaut  au  riret'c  ritain  des  Latins  (et  surtout  au 
rita  vitalis  de  Cicéron),  opposé  à  ferre  vitam  :  porter  le  fardeau 
de  la  vie. 

—  Les  Provençaux  disent  d'un  gros  mangeur,  qu'il  est  d'une 
«  grosse  vie  « . 


556  VIE 

—  Fiiiro  vie  qui  dure,  ou  feu  rjui  dure,  est  le  proxerlte  opposé  à 
celui  des  débiiuciiés  ;  et  il  est  pi-éférahle  ;i  tous  les  poiuts  de  vue. 
(]'est  Hu'^ujiner  sa  sauté,  ses  plaisirs  et  sa  fortune,  eu  en  usant 
modérément,  pour  en  prolonger  la  jouissance. 

Cicéron,  dans  le  traité  de  Senectute,  dit  :  «  Soyez  vieux  de  bonne 
heure,  si  vous  voulez  Tètre  longtemps.  » 

An  baiiqiii't  di'  l;i  \ic  iiifurliiiir  convive... 
Ce  vers  de  Gilbert  est  imité  de  Lucrèce  (UI,  92G)  : 

Ctir  non  itl  vilœ  jdcnus  conviva  recedis  ? 

(Que  ne  sors-tu  de  la  vie  comme  un  convive  rassasié?) 

—  Je  donnerais  dix  ans  de  ma  vie  pour... 

La  première  moitié  de  la  vie  se  passe  à  désirer  la  seconde  ;  la 
seconde,  à  regretter  la  première.  (A.  Karr.) 

...C'est  une  mauvaise  action.  Je  ne  voudrais  pas  l'avoir  faite, 
pour  tous  les  jours  qui  restent  au  fond  de  mon  saljlier.  (A.  de 
Vigny.) 

—  Le  cours  de  la  vie. 

Ef finit  œfas  (Cicéron)  :  La  vie  s'écoule. 

Descendre  le  fleuve  de  la  vie. 

...Sa  vie  ressemble  à  un  limpide  ruisseau,  qui  coule  entre  deux 
rives  fleuries. 

Platon  {Banquet),  et  après  lui  M.  Flourens,  ont  défini  la  vie  «  un 
mouvement  ». 

Leibnitz  dit  :  «  Notre  corps  est  dans  un  flux  perpétuel,  comme 
une  rivière,  et  des  parties  y  entrent  et  en  sortent  continuelle- 
ment. » 

Avant  Leibnitz,  les  physiologistes  avaient  comparé  le  corps 
liumain  au  vaisseau  de  Tliésée  qui,  à  force  de  réparations,  n'avait 
plus  aucune  des  pièces  qui  le  composaient  à  l'origine. 

Les  moralistes  ont,  comme  les  physiologistes,  assimilé  la  vie  à 
un  mouvement,  en  la  comparant  à  un  voyage,  à  un  fleuve,  à  un 
torrent. 

On  dit  :  marcher  droit,  cbarrier  droit,  faire  son  chemin  ;  par- 
courir une  carrière  (en  provençal  rue);  cet  homme  ira  loin:  il 
arrivera  malgré  ses  concurrents  ;  et  enfin  :  il  est  arrivé,  qui  est  le 
grand  mot,  le  but  de  tous  les  efïorts,  le  terme  du  voyage  (lorsqu'on 
a  acquis  une  fortune  assurée). 

Pans  l'expression  (^  le  cours  de  la  vie  »,  cours  (cursus)  indique 


VIK  Hol 

iiii  iiioiivciiient  précipité,  un  ospace  parcouru  rapidement.  Nous  ne 
vivons  plus  (HMil  vingt  ans,  coiiune  avant  le  déiiiuc.  et  ct'ttt'  coinjia- 
raison  poétique  avec  une  eau  fu.uilive  et  rapide,  fait  allusion  à  la 
brièveté  de  la  vie,  qui  est  une  véritable  course,  sans  ai'rèt  ni 
retour  en  arrière. 

La  fréquente  comparaison  de  la  vie  à  un  fleuve  tient  à  ce  que  les 
années  se  suivent  et  s'écoulent  comme  des  ondes  :  un  flux  sans 
rellux:  nous  emporte,  et  c'est  pour  cela  que  Bernardin  de  Saint- 
IMerre  a  pu  dire  :  «  On  ne  jette  pas  l'ancre  dans  le  fleuve  de  la  vie.  » 

Ue  là  les  locutions  mélaplioriques  :  vogue  la  galère!  être  en 
vogue  ;  conduire  bien  sa  barque  ;  arriver  au  port. 

Ayez  le  vent  en  poupe,  et  vous  trouverez  des  gens  qui  rempliront 
votre  barque. 

Les  Grecs  disaient  d'un  bomnie  beureux  :  «  Il  pourrait  naviguer 
sur  une  claie.  " 

Saint-Évremond  souliaite  d'un  liomme  précieux  au  monde,  que 
le  cours  de  ses  ans  dure  autant  que  le  cours  de  la  Seine  et 
de  la  Loire. 

...Dans  le  cours  de  la  vie,  la  folie  est  au  gouvernail,  l'amour  à  la 
boussole  :  les  passions  enflent  les  voiles,  la  raison  seule  veille  au 
grain.  (De  Clinchamp.) 

Viédaze.  Les  Italiens  disent  viso  dl  cat:o  :  imbécile. 

Je  puis  cfire  sans  périphrase 
Que  vous  êtes  un  franc  viédaze. 

[Enfer  hiirlex'/iie.) 

Vieillard,  dérivé  de  rieil,  ancienne  forme  de  rieux,  latin 
vetulus. 

N'a  pas  de  féminin.  La  langue  française  a  supprimé  vieillarde 
du  dictionnaire  par  un  sentiment  de  délicatesse  et  de  galanterie, 

Ek  pus  cilianl-s  non  es  sers. 

(A.  Damki..) 

(Il  est  plus  vieux  qu'un  serpent.) 

.1/  cap  ses  nna  viehtrda. 

[Ihmiai  de  Jaii/fre.) 

(Au  cbevet  sied  une  vieillardc.) 

Vierge,  vieux  français  rirye,  du  latin  rlrgo. 
—    Viiyjo.   clicz  les   Romains,  signiliait   fille   nubile  :   fœmina 
viripotens.  Avant  l'âge  nubile,  c'éVcùi  piiella  [1). 
Cependant  on  appelait  aussi  vii^ffo,  a  viridiore  œtate,  une  jeune 


558  Vifi 

fenimc.  C'est  ainsi  que  Virgile  dit,  en  |);ii-l;uil  de  l'iisipliaé,  qui  avait 
eu  déjà  trois  enfants  : 

Ah!  cir(/o  ùiffli.r,  t/iur  If  ilrnirntift  repil  ? 

(Eijlogne,  \\,  '»".) 

—  Ainonr(in\  des  onze  mille  vierges  :  de  toutes  les  femmes. 
Cette  locution   ra|)[)elle  la  légende  apocryphe  des  onze  mille 

vierges,  suivant  laquelle  sainte  Ursule  partit  de  Londres  pour  la 
Basse-Bretagne,  avec  onze  mille  vierges,  qui  devaient  épouser  les 
onze  mille  soldats  de  Conan,  son  liancé.  Une  tempête  les  ayant 
poussées  dans  le  Rhin,  jusqu'à  Cologne,  elles  furent  mises  à  mort 
par  les  Huns,  auxquels  elles  refusaient  de  s'unir. 

Les  anciens  martyrologes  portent  S.  S.  Ursula  et  Underimille 
Virg.  Mart.  Les  copistes  ont  pris  un  nom  de  femme  pour  un 
nom  de  nombre,  et  ont  cru  que  Undecimille  était  pour  undecim 
millla. 

—  La  fête  des  onze  mille  vierges  se  célébrait  autrefois  le 
22  octobre. 

On  lit  dans  le  Journal  d'un  bourgeois  de  Paris  :  «  Le  vingt- 
imième  jour  du  moys  d'octobre,  vigile  des  onze  mille  vierges, 
trépassa  de  ce  siècle  le  bon  roy  Charles  YL  » 

Cette  légende  a  été  prise,  en  mauvaise  interprétation,  dans  un 

sens  erotique. 

On  m'appelait  l'amant  des  onze  mille. 

Qui  tous  les  jours  en  aymoit  deux  ou  trois. 

(Lps  Bi(iarrnres  du  sieur  r/e.t  Accords,  1008.) 

Vieux,  jadis  vieil,  qui  s'emploie  encore  dans  certains  cas.  Du 
latin  vetulus  :  d"où  vieillir,  vieillesse,  vieillard. 

—  En  conseil  oi  le  vieil. 

L'expérience  de  la  vieillesse  l'appelle  aux  conseils  du  gouverne- 
ment, et  un  grand  nombre  de  mots  l'indiquent  :  gérousia,  chez  les 
Grecs,  et  senatus  chez  les  Latins  :  Conseil  des  Anciens.  Le  mot 
seigneur,  en  français,  scheik,  en  arabe,  signifient  vieillard. 

—  Une  chose  est  vieille,  lorsqu'elle  a  cessé  d'être  en  usage  ;  elle 
est  ancienne,  lorsque  l'usage  en  est  entièrement  passé;  elle  est 
antique,  lorsqu'il  y  a  déjà  longtemps  qu'elle  est  ancienne. 

—  Vieux  comme  les  chemins,  ...comme  Hérode,  ...comme  Mathu- 
salem,  ...comme  le  temps. 

—  On  dit  d'un  homme  très  âgé  :  Il  a  plus  de  jours  que  de 
cheveux;  il  faudra  l'assommer  pour  qu'il  meure;  il  fera  l'épitaphe 
du  genre  humain  ;  la  mort  ne  veut  pas  de  lui. 


\IG  ooU 

D'un  vicill.ird  (lui  l;iil  le  jciiiic  :  l'ii  \itMi\  |)oi'lr:iit  dans  un  cadre 
niMif  :  tons  les  miroirs  cliaiiliMit  en  cIki'iii'  snr  sa  jeunesse  nioi'le  un 
irrévocable  De  pro/'iindls. 

D'une  femme  de  cinquante  ans  :  Son  dixième  lustre  Ijrûle. 

Aristophane  appelle  une  vieille  mendiante  «  des  haillons  amliu- 
lants  ... 

—  Sur  nu  livre  imprimé  à  Paris,  en  lo07,  chez  André  Bocard,  on 
trouve  ce  vieii  pour  la  durée  de  l'exemplaire  : 

...Sicl  thon  /Inclus  formica  marinns 
Kliilidl,  cl  lolniti  lestudo  pcrambulet  orbcm. 

—  Le  vieil  homme.  Expurgate  velus  fermentum,  exiiile 
vetevem  hominein.  (Saint  Paul,  /■■«  aux  Corlnth.,  eh.  o.)  Purifiez- 
vous  du  vieux  levain,  dépouillez  le  vieil  homme. 

Vigile-jeûne,  du  latin  rifiilia. 

Vicjile  est  la  forme  savante  de  veille.  Il  s'emploie,  dans  la  lanaue 
de  l'Eglise,  pour  désigner  la  veille  d'une  fête  solennelle  ([ue  l'on 
sanctifie  par  ialislinence  et  le  jeûne. 

Les  premiers  chrétiens  s'assemblaient  d'abord  la  veille  de 
Pâques,  i)our  veiller  et  prier  en  attendant  l'office  du  malin,  célébré 
en  mémoire  de  la  résurrection.  Cet  usage  s'étendit  aux  autres 
fêtes:  mais,  à  cause  des  inconvénients  qu'avaient  ces  assemblées 
nocturnes,  les  veilles  furent  défendues  par  un  concile,  en  1322,  et 
remplacées  par  des  jeunes,  qui  ont  pris  le  nom  de  vigiles-Jeûnes. 
C'est  de  cette  coutume  qu'est  venu  au  uiot  veille  le  sens  de  <.  jour 
précédent  » . 

—  Autrefois,  on  disait  aussi  vaille.  On  lit  dans  les  Sermons  de 
saint  Bernard  :  «  Li  première  vaille  est  li  droiture  de  loyvre.  » 
Prima  vigilia  est  reelitudo  operis. 

Vigne,  [)rovençal  vin/ia,  du  latin  vinea,  de  vi/tum. 
Le  bois  lortu.  (Rabelais.) 
Anbre  touart.  (Brueys.) 

—  Être  dans  les  vignes  du  Seigneur  :  être  ivre. 

—  Unis  comme  la  vigne  et  l'ormeau.  (Voy.  lierre.) 

Dans  l'antiquité,  l'usage  était  déjà,  en  Italie,  de  faire  grimper  la 
vigne,  et  c'était  l'ormeau  qui  lui  servait  de  tuteur. 

riinisqne  <iiljun(/ere  vite.s. 

(Viiii;'].r:,  Gdorgiquex,  1.) 

///((  tihi  Id'tis  intexel  vilibus  ulinos'. 

(ViKGii.t:,  Géorgirpies,  U,  221.) 


SGO  Vit 

Niihnit  pojiKlis  riicH  (IMiiio)  :  on  marie  les  vif^mes  aux  peiijiliers. 

...Adiilla  riliuni  jiroptiyinc 
Allas  iiKiritiil  })(ji)id()S. 

(IIoiiAci-,  Epodet  I.) 

—  La  vigne,  symbole  de  l'inlempérance,  laisse  ramper  ses 
rameaux,  à  moins  qu'elle  ne  rencontre  l'ormeau  pour  la  soutenir, 
ou  l'espalier  qui  lui  prête  son  épaule. 

—  En  Italie,  on  fait  monter  et  grimper  la  vigne  en  treilles,  en 
guirlandes,  après  des  l)aliveaux  écimés,  qu'elle  f&stonne  de  son 
feuillage.  Rien  n'est  plus  gracieux  que  ces  longues  rangées  d'arbres 
qui,  reliées  par  leurs  bras  de  pampres,  ont  l'air  de  se  donner  la 
main  et  de  danser  autour  des  champs  une  farandole  immense. 
Ces  vignes  folles,  en  courant  de  branches  en  branches,  semblent 
célébrer  l'antique  fête  de  Bacchus.  (Th.  Gautier,  Italia.) 

—  Pleurer  comme  une  vigne.  (0.-  Feuillet.) 

—  Fontanes,  dans  sa  Maison  rustique,  fait  rire  la  vigne  : 

L'enclos,  où  la  scrpetU»  arrondit  le  ftommier. 

Où  la  treille  en  fi:rini}iant  rit  aux  yeux  du  frrniier. 

Vignette,  diminutif  de  vigne. 

Jadis  on  mettait  au  commencement  des  chapitres  d'un  livre,  ou 
à  la  lin  des  pages,  de  petites  gravures  qui  représentaient  des  ceps 
de  vigne. 

Vilain,  du  latin  villanus,  dérivé  de  villa,  maison  des  champs; 
comme  rusticus,  rustique,  de  rus  :  paysan,  de  pagensis. 

Au  Moyen-Age,  gens  de  la  campagne,  de  roture,  classe  asservie 
et  méprisée.  De  là  le  sens  péjoratif  que  le  mot  a  pris  dans  la 
langue,  pour  en  venir  à  signifier  :  laid,  avare,  méchant,  dangereux, 
déshonnête,  incommode,  comme  s'il  venait  de  vil. 

Dés  le  xvF  siècle,  il  avait  déjà  le  sens  d'avare,  ladre. 

En  etïet,  Rabelais  (hv.  1,  ch.  33)  fait  appeler  par  Pichrochole 
Grandgousier  (Louis XII?)  du  nom  de  vilain.  «  Yillain,  disons-nous, 
parce  que  ung  noble  prince  n'ha  jamais  uug  sou.  Thésaurizer  est 
faict  de  villenie.  » 

Louis  XU  passait,  il  est  vrai,  pour  avare  ;  mais  il  répondait  à  cela 
qu'il  aimait  mieux  faire  rire  ses  courtisans  de  son  avarice,  que 
faire  pleurer  le  peuple  de  ses  profusions. 

Un  proverlie  de  l'époque  dit  : 

Un  noble  prince,  un  gentil  roy 
N'a  jamais  ni  pile  ni  croix. 


VIL  5GI 

—  Tous  les  iincions  [ii'ovorlios  inontront  liieii  le  mépris  (];ms 
lociiit'l  on  t(Mi;iil  los  vilains  : 
Loi'fains,  \il;nns.  (Hahelais.) 

Oignez  \ilaiii.  il  vous  poindra; 
Poi^moz  \ilaiii.ii  muis  oinrlra. 

Les  termes  dans  lesquels  est  exprimé  ce  proverbe,  en  montrent 
Tancienneté.  Aujourd'hui,  les  vilains  proprement  dits,  les  serfs 
attachés  à  la  .Gléhe,  ont  disparu  avec  la  Féodalité;  mais  il  existe 
toujours  de  \  ilaines  gens,  qui  prennent  la  honte  qu'on  leur  témoione 
pour  de  la  faiblesse,  et  qui  sont  toujours  tentées  d'en  abuser. 

Vilain  alïamé,  demi-enragé. 

(jiii  |)rie  le  vilain,  se  fatigue  en  vain. 

Graissez  les  bottes  d'un  vilain,  il  dira  qu'on  les  lui  bn'de.  C'est- 
à-dire  :  quand  on  oblige  un  malhonnête  homme,  on  n'en  reçoit 
qu'ingratitude. 

Il  n'est  chère  que  de  vilain.  Gest-à-dire  :  quand  uu  avare  se 
décide  à  donner  à  dîner,  il  se  livre  à  des  prodigalités  insensées,  et 
sa  talde  ferait  reculer  d'épouvante  un  Gargantua.  On  dirait  qu'il 
veut  bourrer  ses  convives  et  les  faire  crever,  alin  qu'ils  n'y 
reviennent  plus. 

Jeux  de  mains,  jeux  de  vilains.  (Yoy.  main.) 

Et  dirent  là  lUie  grand  letanie 

De  plaisants  mots  et  jcii\  sans  villanio. 

(M.UlOT.) 

Villa,  mol  latin,  maison  des  champs. 

.Jadis,  maison  de  plaisance  à  la  campagne  se  disait  plessis 
(Plessis-lez-ïonrs). 

—  Pline  le  .leune,  qui  était  de  Côme.  avait  deux  villas  près  du  lac: 
Tune  s'appelait  Comédie,  et  l'autre  Tragédie.  (Pline,  Lettres  I,  9.) 

—  La  campagne  favorite  de  Gicéron  était  à  Tusculum.  G'est  là 
qu'il  écrivit  ses  Tascu/anes,  dialogues  philosophiques.  (Aujourd'hui 
Frascati.) 

—  Le  général  Bertrand  possède,  à  Saint-Yalentin  (Indre),  deux 
propriétés  qu'il  a  baptisées  les  Pi/ra/nides  d'Egypte,  et  le  Grand 
Caire,  en  sou\euir  de  l'expédition  d'Egypte. 

—  La  villa  de  (juinlus,  frère  de  Gicéron,  s'appelait  Arcannm. 
Celle  de  M.  de  Ghoiseul  s'appelait  Chanteloup  :  celle  de  M"'^ 

Dubarry,  Luciennes  :  celle  de  Lamartine,  Milly  ;  celle  de  Marie- 
Antoinette,  Trianon. 

36 


S6Î  VÏL 

Celle  de  M'""  de  iMuiiiUînoii  se  iioiiiiiiiiit  le  Itcirait,  et  était  â 
la  chaussée  de  Ménilmontant.  Les  époux  Favart  l'ont  occupée  plus 
tard.  Ce  nom,  devemi  lidirait.  dans  le  lanp'a.L'-o  des  faultoiircrs.  a 
servi  de  prétexte  à  diverses  enseignes  de  cabaret,  telles  que  : 
Au  Rat  très  ?nnlheureux  ;  Au  Rat  très  distingué. 

La  villa  (?)  de  Rabelais  était /«  Derinière,  à  Scnilli,  près  deCiiinon. 

La  Muette,  ancien  rendez-vous  de  chasse,  est  une  corruption  de 
la  meute. 

Village,  du  bas-latin  villaticum. 

A  .cens  de  village,  trompette  de  hois. 

Il  faut  du  gros  sel  pour  saler  les  grosses  bêtes.  (Voy.  sel.) 

Ville,  forme  française  du  mot  villa. 

Ce  que  nous  nommons  ville,  s'appelait  en  latin  urhs. 

—  Ville  est  un  exemple  du  passage  d'un  mot  de  son  premier 
sens  à  un  sens  très  dilTérent.  Il  n'est  pas  rare  de  voir  dans  les 
langues  des  faits  analogues,  produits  par  la  tendance  à  faire  passer 
les  mots  d'acception  en  acception,  au  point  de  les  conduire,  par 
une  suite  d'évolutions,  à  représenter  une  idée  très  éloignée  de  celle 
qu'ils  avaient  primitivement. 

—  Assemblage  d'un  grand  nombre  de  maisons. 

Ce  sont  les  villas  et  les  villages  qui  ont  servi,  en  quelque  sorte, 
de  noyaux  autour  desquels  se  sont  formées  des  agglomérations. 

—  Il  y  a  des  villes  qui  sont  devenues  célèbres  parce  qu'elles  ont 
donné  le  jour  à  des  grands  hommes.  Sept  villes  se  sont  disputé 
l'honneur  d'avoir  produit  Homère. 

D'autres  doivent  leur  célébrité  h  des  faits  mémoraliles  qui  s'y 
sont  passés. 

Quelques-unes  enfin  ont  vu  leur  nom  devenir  appellatif  pour 
désigner  les  objets  usuels  qui  y  ont  été  inventés,  ou  qui  s'y 
fabriquent.  (Yoy.  immortalité.) 

—  Certains  noms  de  villes  ont  été  pris  dans  une  acception  comique 
ou  ridicule.  Nos  ancêtres  affectionnaient,  dans  le  langage  famiher, 
les  jeux  de  mots  sur  les  noms  de  localités,  comme  ils  en  faisaient 
sur  les  noms  de  saints.  (Voy.) 

On  lit  dans  les  Dicts  de  VApostnille  :  «  Les  plus  serfs  sont  en 
Esclavonie.  » 

Aller  en  Bavière,  c'est  baver;  il  se  disait  de  la  salivation  mercurielle. 

La  vallée  d'Angoulême,  c'est  le  gosier.  Jeu  de  mots  sur  avaler 
et  eiKjouler. 


VIL  003 

l'ii  Lioiiniiand  onvoio  toiil  à  Anp-oulèmc. 

H;ili('l;iis  (!il  :  nninduoiisier  d'Avalon. 

Un  iunoi-;int  sorl;iit  de  l'iiniversik''  d'Asnières. 

il  ('st  de  Lunel,  se  disait  d'un  liin;ili([iie. 

Aller  à  Versailles,  c'était  être  renversé. 

Aller  à  Patras,  ou  nd  patres,  c'était  mourir.  ' 

F.,es  Manceaux  étaient  menteurs,  comme  ceux  de  Cracovie. 

Un  lioniine  trompé  par  sa  femme,  voyageait  en  Cornouailles  ou  à 
Corneto. 

Aller  à  Argentan,  c'est  aller  chercher  de  l'argent. 

Aller  à  Crevant  (petit  Iioura-  près  de  La  Châtre),  c'était  mourir. 

Pour  congédier  quclcpi'un,  on  l'envoyait  à  l'abhaye  de  Vatan 
(Indre). 

Loiscau,  dans  son  Trailé  des  Of/lces  (hv.  V,  cli.  4)  dit,  au  sujet 
des  injustices  que  commettaient  les  juges  :  «  Et  tout  cela  vient  de 
ce  que  le  juge  n'ose  contredire  la  volonté  de  Monsieur,  de  peur 
qu'il  ne  change  son  office  en  une  prébende  de  Vatan.  » 

—  Certains  noms  de  villes,  lorsqu'on  les  prononce,  excitent  un 
sourire  ironique,  sans  qu'on  l'explique  bien.  Tels  sont  ceux  de 
Brive- la-Gaillarde,  Carpentras,  Landerneau,  Pézenas,  Quimper- 
Corentin,  Saint-Jean-Pied-de-Port,  Vaugirard. 

De  même  certains  peuples,  certaines  provinces  sont,  on  ne  sait 
pourquoi,  ridicules  :  les  Béotiens,  les  Chinois,  les  Iroquois. 

—  l»  Villes  tirant  leurs  noms  d'une  quahté  : 
Agde,  anciennement  agathè  tychr:  bonne  fortune. 
Apt,  de  (/plus,  propre  à. 

Bayonne,  du  basque  baïri,  ona,  bonne  ville. 

Belle-Isle,  Beaucairc. 

Béziers.  Si  Dieu  venait  habiter  la  terre,  il  choisirait  Béziers. 

Brignolles,  pays  des  bonnes  prunes. 

Buenos-Ayres  :  bon  air. 

Capoue,  chauq)  fertile. 

Clairvaux:  clara  vallis,  belle  vallée. 

Dôle,  bâtie  sur  le  Doubs,  dans  un  lievi  appelé  Val  d'Amour. 

Embrun,  montagne  fertile. 

Eu,  signifie  prairie. 

Florence,  la  belle,  le  pays  des  fleurs. 

Gallipoli,  la  jolie  ville. 

Montmirail  :  tfions  mirabilis. 

Ninive.  signifie  belle. 


664  \\l 

Ollioules,  de  olen,  à  cause  de  ses  oliviers. 

Venise:  Venelia,  pour  roni  eliam,  viens  encore  (?). 

2°  De  leur?  défauts  : 

Tonlifaut,  localité  prés  de  Cliàleanroiix. 

Montifaut,  prés  Jîourges  :  il  y  faut  monter. 

Ïravaille-Gliien,  Travaille-Coquin,  localité  de  l'Indre. 

3°  De  la  chaleur  : 

Asti,  nom  ancien  d'Icija,  ville  entre  Séville  et  Gordoue,  sur- 
nommée la  Sertanilta  (poêle  à  frire).  Elle  a  pour  blason  un  tournesol 
avec  ces  mots:  «  Une  seule  sera  nommée  la  ville  du  soleil.  >' 

Balbecli  signifie  :  la  ville  du  soleil. 

Pékin,  résidence  d'été. 

Pondichéry,  ])nin  cli;iud. 

4°  Des  eaux  : 

Les  agglomérations  humaines  se  forment  toujours  auprès  d'un 
cours  d'eau  ou  d'une  source,  qui  est  la  première  cause  de  leur  séjour 
et  devient  comme  un  patrimoine  que  se  transmettent  les  races  et 
les  générations  successives.  Comme  les  sources  ne  changent  pas  de 
place  (?),  lorsque  la  population  a  disparu  ou  s'est  éteinte,  elles 
peuvent  servir  aux  archéologues  à  retrouver  l'emplacement  d'un 
lieu  historique,  d'une  ville,  ou  d'un  village  disparu  depuis  longtemps. 
(Voy.  i^dys.) 

Les  pays  les  plus  arrosés  sont  les  plus  habités.  Aussi  un  grand 
nombre  de  villes  tirent  leur  nom  des  eaux  qui  les  alimentent. 

Tels  sont:  Aiguebelle,  Eaux-Bonnes,  Chaudes-Aiguës,  Lafont 
(Cher),  Clairfont  (Indre),  Font-Jouan  (Cher),  Frèdefont  (Indre)  ; 
Segoules.  village  de  la  Nièvre,  ainsi  nommé  de  ses  sept  fontaines: 
Les  Palaz,  près  de  Bourges,  lieux  marécageux  ;  Tremhlevif,  com- 
mune de  la  Sologne,  marécageux  et  fiévreux. 

«  Les  villes  d'eaux  et  de  plaisir,  telles  que  Nice  et  Monaco,  sont 
des  pays  délicieux,  des  tableaux  splendides  de  la  nature,  dit  George 
Sand  ;  mais  on  y  rencontre  trop  de  Parisiens,  trop  d'Anglais,  trop 
de  villas  prétentieusement  bêtes.  Un  pays  sul)lime,  un  ciel  divin, 
empestés  de  civilisation  idiote.  » 

Les  villes  d'Europe  qui  possèdent  la  plus  grande  quantité  d'eau 
par  jour  et  par  habitant,  sont,  en  1860  :  Rome,  900  litres  ; 
Carcassonne,  400  :  Paris  n'en  a  que  2G7  :  Londres,  104. 

Aigues-Mortes  :  eaux  stagnantes. 

Aix,  Ax,  du  latin  nquas. 

Amboise  :  amheuntibus  aquis  (?). 


VIL  oCo 

Ainsterdniii.  do  l.i  rivit'-ro  irAinstol. 

Annory  :  rnincrinn  f/quis',  ville  entourée  d'eaux. 

A(Hia-IVndtMite.  en  latin  nqidi'  larinœ. 

Arc'ueil  :  (ir<-iis  .lididni,  les  arcades  de  I 'a([iieduc  des  thermes  de 
Julien. 

Arles,  t'ii  ccitiiint'  lit'ii  marécageux. 

Hade.  de  1  allemand  bad,  j)ain  ;  comme  Bagnéres,  Bagnols. 

Harlleiir,  bai're  du  (lot  :  comme  Harfleur,  Ilonlleur. 

Bilbao,  corruption  de  helcoo,  beau  gué. 

Bordeaux,  qui  est  sur  le  bord  de  l'eau  (?). 

Bourbon-L'Arcliambaud  :  eaux  bourbeuses. 

Bruxelles,  de  bruc/i,  marais. 

Calais,  du  celtique  ca/,  port. 

Gaulerels,  anciennement  rnulderès  :  eaux  chaudes  ou  thermales. 
Elles  étaient  déjà  célèbres  au  temps  des  Romains. 

(]oblent/.,  en  latin  con/Iuenfcs,  situé  sur  deux  rivières  (à  la 
jonction  du  Rhin  et  de  la  Moselle). 

Condillac  :  cundi/fe  ar/iiœ,  eaux  savoureuses. 

Conllans,  au  coniluent  de  la  Seine  et  de  la  Marne. 

Divone,  signilie  fontaine  des  dieux  (Ausone). 

Dusseldorf,  entouré  de  la  rivière  Dussel. 

Fontainebleau,  pour  fontaine  l)elle  eau. 

Mai'tigues,  anciennement  maritima. 

Monlrieux  (Chartreuse  de)  :  montagne  des  ruisseaux. 

Subiaco,  an.'iennement  suhlaqiicuin,  à  cause  des  lacs  \oisins. 

Utrecht,  latin  trajeciiis,  parce  qu'on  y  traversait  le  Hhiu. 

Verdun,  signifie  ville  du  gué. 

o"  De  l'altitude,  de  la  position  : 

Ancône,  coude. 

Gourbevoie,  près  Paris  ;  ce  nom  est  fait  comme  Tortes-Voies,  près 
Va  le  nç  a  y  (Indre"). 

Dieppe,  mouillage  profond. 

Montargis:  hauteur  d'où  l'on  voit  au  loin. 

Épinal,  de  spina  :  crête  de  montagne. 

Embrun  :  Ebrodunum,  montagne  fertile. 

Falaise,  des  falaises  voisines. 

Heidelberg,  ville  entourée  de  montagnes. 

6°  De  la  religion  : 

Abbeville,  ville  de  l'Abbé. 

Alger,  ville  qui  coiiibat  pour  la  foi. 


S66  VIN 

Ani^ely  (SîiiiU-Jeaii-d"),  duncltHc  de  sainl  Jcnn-Biiptislc  qu'on  y  y 
trouvée. 
Appcnzel  :  cellier  de  l'abhé. 
Hainboiiru,'  :  ville  de  Dieu. 
Ilyères,  de  ///rVo.s,  saiul  (?). 
Issy,  de  la  déesse  Isis  (?). 
Jouarre,  àoJoi'is  ara. 

Monaco,  d"llercule  Monœcus,  qui  y  avait  un  lenqjle. 
Moutier,  Munich,  Munster,  de  monaslerium. 
Port-Yendres  :  portas  Vcneris. 
Saint-Tropez,  nom  de  saint. 
7°  De  la  nouveauté  ou  de  l'ancienneté  : 
Gliàteauneuf,  Villeneuve. 
Naples  :  Nea polis,  ville  neuve,  en  grec. 
Civila-Vecchia. 
New-Yorck. 

Vin,  du  latin  vinum,  grec  oinos,  hébreu  l'ii/i,  de  ioan,  faire 
elïervescence. 
Liqueur  alcoohque  résultant  de  la  fermentation  du  raisin. 

—  C'est  à  tort  qu'on  le  prononce  t'a  in.  Un  devrait  prononcer 
vine  (?),  comme  on  le  prononce  en  provençal  et  dans  les  composés  : 
vinaigre,  vineux,  vinicole. 

—  Synonymes  :  eau  bénite  de  cave  (Rabelais  I,  18)  :  le  piot  :  la 
purée  septembrale  (Rabelais)  ;  le  lait  des  vieillards  :  la  liqueur  de 
Bacchus  ;  huile  de  sarments. 

—  Vin  d'Espagne  :  soleil  en  bouteille. 

—  Vin  frelaté,  vin  baptisé.  On  appelle,  à  Paris,  un  marchand  de 
vins  «  Monsieur  Mélange  » . 

Pétrone  place  les  cabaretiers  de  Rome  dans  le  signe  du  Verseau. 

—  Mauvais  vin  :  guinguet,  ripopée,  vin  de  Suresne. 

—  Les  principaux  vins,  chez  les  anciens,  étaient  : 

En  Italie:  leCécube,  vin  favori  d'Horace:  le  Galène, de  Ca/cnanK 
en  Campanie  que  le  même  poète  égale  au  Cécube  {(h/es  l.  20)  : 
le  Falerne,  qui  n'avait  acquis  toutes  ses  qualités  qu'au  bout  de  dix 
ans;  le  Massique,  produit  de  la  Campanie,  comme  le  Falerne:  le 
Sétine,  très  estimé  d'Auguste  II  y  avait  encore  le  Sabin,  le  Nomen- 
tin,  le  Spoletum. 

En  Sicile,  près  de  Messine,  se  récoltait  le  Mamertin. 

En  Grèce,  on  vantait  le  Gbio,  le  Lesbos,.  le  Thasos,  le  vin  de  Crète, 
doux  et  de  couleur  d'ambre. 


VIN  567 

La  Gaule  foiiniissail  l(>s  vins  de  Marseille  et  de  Narbonne,  qui, 
selon  Martial,  sentaient  trop  la  fumée,  parce  qu'on  les  soumettait 
au  f/n/Kiriiu/i,  atin  de  les  vieillir,  sans  prendre  soin  de  les  boucher. 

—  Parmi  les  vins  modernes,  ceux  de  France  sont  les  premiers,  et, 
en  quelque  sorte,  les  seuls. 

La  trinilé  vinicole:  Champagne,  Bourgogne  et  Bordeaux,  corres- 
pond aii\  trois  âmes  dont  parle  Platon.  Il  y  a  le  vin  du  cerveau, 
le  vin  du  (■(l'ui-  et  le  vin  de  l'estomac. 

Les  meilleurs  vins  de  Bourgogne  (^Côte-d'Or;  sont  :  le  Bomanée,  le 
Clos-Vougeot,  le  Ghambertin,  le  Clos-de-Bèze  (à  Gevrey). 

Viennent  ensuite  :  le  .Miisiguy,  le  Bichebourg,  le  Saint-Georges. 

Les  trois  grands  vins  de  Bordeaux  sont  :  Chàteau-Margaux, 
Chàteau-Laflitte,  Chàteau-Latour.  Ensuite:  le  Château-Larose,  le 
Saint-Kmilion. 

Les  vins  blant's  :  Chàteau-Yquem,  Sauterne,  Graves. 

Les  vins  de  Champagne:  Ay,  Bouzy,  Épernay. 

Dans  les  Basses-Pyi-énées  :  les  vins  de  Jurançon. 

Drûme,  Ardèclie  :  Ermitage,  Saint-Péray. 

Gard  :  ïavel,  Saint-Gilles. 

Dordogiie  :  Bergerac. 

Jura  :  A  r bois. 

Hérault  :  Frontignan,  Lunel. 

Pyrénées-Orientales  :  Grenache,  Malvoisie. 

Bouches-dii-Blionc  :  Cassis. 

—  Béranger,  qui  était  très  sobre,  et  qui  ne  se  connaissait  guère 
en  vins,  préférait  cependant  le  Bourgogne  au  Bordeaux,  parce  que, 
disait-il,  lorsqu'on  a  bu  une  bouteille  de  Bordeaux,  on  est  aussi  bêle 
qu'auparavant. 

—  Vin  sur  lait,  c'est  santé  ;  lait  sur  vin,  c'est  venin. 

Cela  signilie  qu'au  sortir  de  l'enfance,  où  l'on  a  été  nourri  de  lait, 
on  arrive  à  l'âge  où  l'on  boit  du  vin;  et  qu'il  ne  faut  pas  revenir 
au  régime  du  lait  après  cette  époque,  parce  que  c'est  signe  qu'on 
est  malade.  C'est  pour  cela  qu'on  appelle  le  vin  «  lait  des  vieillards  ». 

—  Ou  dit  qu'un  verre  de  vin  donne  de  la  force  ;  en  voilà  plus  de 
quarante  que  je  bois,  et  je  ne  puis  me  tenir  sur  mes  jambes,  disait 
Ai'lequin. 

—  Vin  versé  n'est  pas  avalé.  (Voy.  l'homme  pj'opose.) 

Ancée,  le  plus  ancien  souverain  de  Samos,  de  retour  de  l'expé- 
dition des  Argonautes,  s'appliqua  à  la  culture  de  la  vigne.  Un  des 
ouvriers  qu'il  employait,  nommé  Tliètcs,  lui  prédit  qu'il  ne  boirait 


o08  VIN 

pus  (le  ce  vin,  pour  loqiifl  il  les  nccahlait  de  tant  de  travaux. 
Aiissit/)!,  Ancée  ordonne  qu'on  inculte  sous  le  pressoir  les  j:i-appes 
vermeilles,  et,  recueillant  le  jus  du  raisin  à  mesure  qu'il  s'écoule, 
il  porte  déjà  la  coupe  à  ses  lèvres,  quand  tout  :'i  coMp  on  lui 
annonce  qu'un  san.tilier  ravage  ses  terres.  H  y  coml.  un  cniip  de 
boutoir  le  tue.  (^esl  loriûine  du  proverbe  i^rec  (pi'Ilorace  a  Irndiiil  : 

Mulhi  cndanl  inter  calices  suj)  renia  que.  lahra. 

Du  bord  du  verre  au  l)f)rd  des  lèvres 
La  route  est  longue,  on  peut  verser. 

Dans  V(Uft/ssée,  Antinous,  un  des  poursuivants  de  Pénélope,  a  la 
gorge  percée  par  une  llècbe  d'Ulysse,  au  moment  où  il  [)ortait  la 
coupe  à  ses  lèvres. 

Entre  la  coupe  et  les  lèvres,  il  y  a  place  pour  le  malbeur. 

Entre  la  bouche  et  la  cuiller, 
Maint  enconibrier. 

I  On  n"exccute  pas  tout  ce  ([n'on  se  propose. 

Et  le  chemin  est  long  du  projet  à  la  clioso. 

(Molièhf;,  Tarliiff-e^UlA.) 
A  la  Sainl-.Martin 
Boit-on  le  bon  vin. 

(xv"><:  siècle.) 

—  En  Provence,  les  tonneaux  se  l)Ouclient  ordinairement  vers  la 
mi-novembre. 

D'où  le  proverbe  :  A  la  San-Marlin,  (asfo  toun  cin  et  lapo  la 
boulo.  (A  la  Saint-Martin,  goûte  ton  vin  et  boucbe  ton  tonneau.) 

Saint  Antoine  sec  et  lieau 
Remplit  la  cave  et  le  tonneau. 

—  Avoir  le  vin  gai. 

...Dissipai  OEvius. 
'  Curas  edaccs... 

(HonAcii,  Odes,  ni,  :;.) 

Bacclius  dissipe  les  soucis  rongeurs. 

Mtdtoque  liilarans  concivia  Bacc/io. 

(Viiu.ii.t.) 

Le  vin  réjouit  le  cœur  de  l'Iiomme  :  Vinuni  lœti/ical  cor 
hominis.  (Écriture.) 

—  Le  Coran  interdit  le  vin. 

—  Cuver  son  vin  :  s'endormir  dans  l'ivresse. 
Se  dégriser  en  dormant. 

Ef/larc  cinuin  soiiuio. 


VIP  569 

—  Quand  le  \in  est  tiré,  il  faut  le  lioire....  ;'i  moins  qu'il  ne  soit 
mauvais. 

(Voy.  les  locutions  :  esprit-de-\in,  véiitc  dans  le  vin,  mettre  de 
l'eau  dans  son  vin,  pot-de-vin,  sac-à-vin.) 

Vinaigre,  mot  composé  des  éléments  rin  et  aigre. 

—  Vinaigre  des  quatre  voleurs.  Ou  raconte  que  (piatre  voleurs, 
pendant  la  poste  de  Marseille,  avaient  composé  ce  vinai.ure  anti- 
pestilentiel,  au  moyen  duquel  ils  parcouraient  impunément  les 
maisons,  s'emparant  de  tout  ce  (pi'ils  y  trouvaient  de  précieux. 

Violent,  du  latin  rio/enh/s.  de  ris. 

—  Violent  comme  le  mistral  (voy.);  des  odeurs  violentes;  des 
mains  violentes  (Méry)  :  lord  Kluin,  célèbre  par  la  violence  de  son 
admiration... 

—  De  là  aussi  :  violer,  viol,  violation,  inviolable. 

Violette,  dérivé  diminutif  du  latin  viola,  vloller. 

—  L'bumble  violette.  La  violette,  symbole  do  la  modestie,  se 
caclie.  comme  pour  se  dérober  à  tous  les  yeux. 

Violon,  de  l'italien  rlolone ;  provençal  viola:  bas-latin  vlinla, 
que  Diez  rattache  au  latin  vitulare,  se  réjouir,  de  vituhis,  veau  ; 
pamltader  comme  un  veau. 

—  Synonyme  :  crin-crin. 

—  Payer  les  violons  :  payer  les  frais. 

On  dit  aussi  :  jouer  de  la  pocbe  (voy.  imycr),  par  allusion  au 
petit  violon  appelé  pochette,  dont  se  servent  les  maîtres  de  danse. 

Nous  verrons  s'il  me  faut  a\ec  ces  scélérats 
Pa\er  les  viuluus,  ([uand  je  ne  danse  pas. 

(Poisson,  les  Fans  (/irirlissaiits.) 

—  Prison  annexe  au  corps-de-garde. 

Ce  nom  remonte  à  une  coutume  monacale.  Quand  un  moine  avait 
commis  une  l'auto  légère,  il  était  enfermé  dans  un  petit  cachot 
nommé  psaltérlon,  non  à  cause  de  l'instrument  de  musique  de  ce 
nom,  mais  parce  que  le  prisonnier  y  restait  le  temps  de  réciter  les 
sept  psaumes  do  la  pénitence. 

Par  suite  de  celte  équivoque,  quand  le  violon  remplaça  le 
psaltérion,  comme  instrument  de  musique,  on  appliqua  aussi  son 
nom  à  la  prison. 

Vipère,  du  latin  vlpcra,  pour  vivlpara  (?). 
En  terme  de  blason  :  guivre. 


570  VIS 

On  crovr'iit  autrefois  que  la  vipt-i'o  (Hait  vivipare.  Do  là  son  nom. 
On  a  reconnu  qu'elle  esl  ovipare. 
Race  de  vipt'ircs.  (Saint  Mathieu,  XII,  2i,  .X.XIII,  'X\.) 

Virago,  jioiir  rinn/t  of/o  :  d'où  probaltlenient  rù-yo. 

Femme  d'un  courape  vii'il. 

Surnom  donné  à  Minerve  et  à  Diane. 

—  Didon,  reine  de  Cartliagc,  s'appelait  Klissa.  VAh'  fut  siiriiom- 
mée  Dido  (en  langue  punique  riruyoj,  à  cause  de  sa  mort 
liéroïque. 

—  Synonyme  :  amazone. 

—  Se  prend  toujours  en  mauvaise  part.  (Voy.  femme  rolontaire.) 

Virgule,  du  latin  vlrgula,  diminutif  de  virga,  baguette. 
Signe  de  ponctuation  qui  sert  à  séparer  les  divers  membres  d'une 
même  phrase.  C'est  le  plus  petit  repos. 

Virtuel,  dérivé  de  virlus. 

S'oppose  à  formel.  Intention  virtuelle  et  non  actuelle. 

Le  chêne  est  virtuellement  renfermé  dans  le  gland. 

Virtuose,  mot  italien,  rir/uoso.  habile  en  musique. 

Les  chanteurs  en  réputation  se  glorifient  du  titre  qu'on  leur 
donne,  sans  se  douter  de  sa  signification  équivoque. 

Comme  un  grand  nombre  de  mots  du  vocabulaire  musical,  il  est 
emprunté  à  l'italien,  et  veut  dire  rertueux.  Il  a  été  donné  ironi- 
quement aux  castrats.  Beaucoup  d'artistes  de  nos  jours  ne  sont  pas 
aussi  vertueux,  et  pour  cause. 

Vis-à-vis,  de  l'ancien  français  vis;  d'oîi  visage. 
Proprement  :  visage  à  visage,  face  à  face,  nez  à  nez. 

—  Vis  est  dérivé  du  latin  risus  :  il  a  signifié  aussi  vif,  ricus. 

De  la  l'ondrc  li  jMo  au  \  is. 

(Iloman  de  Rcnarl.) 

Telle  fois  tu  seras  advls 

Que  tu  tiendras  celle  au  clcr  vis. 

[Roman  de  la  Roxe  ) 

Li  tis  a  pou  d'cnnis,  li  mors  n'en  a  nus.  (^Vieux  proverbe.) 

Visite,  substantif  verbal  de  risi/cr,  du  latin  risHare. 

—  Les  visites  font  toujours  plaisir  ;  si  ce  n'est  en  arrivant,  c'est 
en  parlant. 


VIT  571 

Il  n'i'st  pas  tlf  |iirli)ii  i|iii,  Imltaiil  Sdiis  la  pliiio. 
No  s'ao|uiUo  on  juraiil  (l'iiii  dL-Noir  t|iii  rt'iimiic  ; 
Kt  tous  ces  visiteurs  seraieiil  au  désespoir 
He  reiicoiiliiT  chez  eux  les  amis  (ju'ils  vont  voir. 

(ViKNMiT,  lex  \'isilex  du  jour  de  l'an.) 

—  Il  ne  laiil  pas  se  voir  souvent,  si  l'on  veut  se  voir  lonjzlenips. 

Vite,  provençal  vista,  vue. 

Signilierait  :  en  nn  clin  d'œil,  et  viendrait  de  viste,  comme  tôt 
de  (osf. 
D'autres  le  rapportcnl  à  r('(jotus{l). 

—  A  été  adjectif. 

Tu  le  vantais  d'être  si  vite. 

(L\   P'O.MAIXE.) 

—  Velis  reniisque  i^Cicéron)  :  avec  toute  la  vitesse  possible. 

—  En  moins  de  temps  qu'il  n'en  faut  pour  faire  cuire  des 
asperges.  (Voy.  Habelais,  Y,  7.)  C'est  la  traduction  du  proverbe 
familier  à  Auguste:  Cifius  quam  asparagi  coquuntur. 

Vitesse,  dérivé  de  vile. 

—  Vitesse  que  la  foudre  ne  désavouerait  pas. 

—  Quand  on  dit  :  rapide  comme  la  pensée,  on  s'imagine  volon- 
tiers qu'on  vient  d'exprimer  le  nec  plus  ultra  de  la  vitesse  hyper- 
bolique, en  quelque  sorte  immatérielle  et  instantanée.  C'est  une 
erreui-,  à  laquelle  la  science  donne  le  plus  complet  démenti. 

M.  IlouUioltz.  à  l'aide  d'expériences  très  délicates,  a  démontré, 
en  I80O,  que  la  vitesse  de  transmission  de  la  volonté  par  le  courant 
nerveux  qui  communique  la  sensation  des  organes  au  cerveau,  et 
les  ordres  de  la  volonté  aux  organes,  n'est  que  de  vingt-six  mètres 
par  seconde,  vitesse  du  pigeon  voyageur.  Ainsi,  par  exemple,  ce 
n'est  qu'au  bout  d'un  vingtième  de  seconde  que  nous  pouvons  avoir 
conscience  d'une  blessure  faite  à  l'un  de  nos  pieds.  La  même 
lenteur  se  retrouve,  s'il  s'agit  d'un  ordre  que  le  cerveau  donne 
aux  pieds  de  se  mouvoir.  Il  résulte  de  là  que  l'agent  nerveux  est 
vingt  millions  de  fois  moins  rapide  que  le  lluide  électrique. 

Pendant  la  durée  d'une  seule  pulsation  de  l'artère,  l'électricité 
ferait  sept  fois  le  tour  de  la  terre.  (Levcrrier.) 

—  La  pensée  est  encore  plus  rapide  que  l'électricité,  puisqu'elle 
se  plonge  parfois  dans  les  abstractions  de  l'infini. 

Vitrix  (Vénus)  :  Vénus  qui  attache,  de  viiicire,  lier,  selon 
Varron  ;  d'où  cinriila.  cliaines  pour  les  vaincus,  vlctima,  victime 
sacrifiée  par  le  vainqueur. 


572  VIV 

iJo  là  ;uissi  intia,  les  Icmdt'letlc^  (jai  aviiienl  le  don  hic  f'iiij)loi 
d'attacher  cl  d'orner  la  chevelure.  Les  femmes  honnêtes  avaient 
seules  le  droit  do  s'en  servir. 

Ente  procul,  vittœ  tenues,  insigne  piuloris, 
Qiiœque  letjis  medios,  inslitu  lonija,  pedes. 

(Ovii)K,  .I/-.V  mii'iloriii,  i,  'i\.) 

Vivace,  du  kiliii  r/ra.v,  (jui  vit  [<)ii.ult'iii[ts. 

—  Plante  vivace  :  qui  vit  plus  de  trois  ans.  S'oppose  aux  plantes 
annuelles  et  bisannuelles. 

Vivre,  du  latin  vivere. 

Se  dit  aiisolument,  comme  autrefois  à  Rome,  pour  :  user  de  tous 
les  plaisirs  de  la  vie.  (Yoy.  vie  de  cochon.) 

—  On  a  trouvé  à  Narbonne,  sur  une  pierre  antique,  une 
inscription  terminée  par  ces  mots  :  Du/n  vicunus,  virnmus. 

—  Vivre  à  pot  et  à  rôt  avec  quelqu'un  :  familièrement. 
Vivre  au  jour  le  jour  :  sans  prévoyance. 

Vivre  comme  un  bohémien  ;  comme  un  chien,  un  ermite,  un 

chanoine,  un  loup,  un  hibou,  un  ours. 

Vivre  de  racines  :  sobrement. 

Lever  à  six,  diner  à  ili\. 
Souper  à  six,  couclier  à  dix, 
Fout  vivre  l'iiomnie  dix  fois  dix. 

Qui  vit  de  peu,  connaît  l'indépendance. 

Rien  n'est  plus  délicieux  dans  la  vie  que  le  coin  du  feu,  une 
salade  de  homard,  du  Champagne  et  de  la  causette.  (Lord  Byron, 
Don  Juan.) 

N'avoir  pas  de  quoi  vivre  :  vivre  de  privations. 

Avoir  juste  de  quoi  vivre  :  de  quoi  joindre  les  deux  bouts,  de 
quoi  ne  pas  mourir  de  faim. 

—  Qui  vivra  verra. 

Ouc;]  iiomme  u'eul  les  dieuv  tant  hieu  eu  maiu, 
Ou'asseuré  îust  de  vivre  au  leudemain. 

(IxABtl.AlS.) 

C'est  la  traduction  exacte  de  ces  vers  du  Jliyeste  de  Sénèque  : 

Ncmo  tam  divos  hahuit  fa  ventes, 
Crastinum  ut  posset  sibi  polliceri. 

—  Il  faut  que  tout  le  monde  vive. 

Primo  vicere,  deinde  philosopha  ri. 

TertuUien  (Traité  de  V Idolâtrie,  ch.  14)  dit  qu'il  n'est  pas 
permis  de  faire  des  idoles,  et  que,  si  un  statuaire  lui  disait  qu'il  n'a 


VOI  573 

pas  d'aiilro  iiiovoii  de  vi\rt\  il  lui  iM'iiondrail  :  ^  Kli  ([iioi  1  mon 
ami,  ost-il  m'-ccssairo  que  In  vives  ^  » 

L'ahlié  Desloiitaines  répondit  à  M.  d"Ai\uensoii,  lienlenant-général 
de  police,  cpii  lui  reprochait  ses  éerits  scandaleux  :  «  —  H  faut  que 
(ont  le  monde  \i\('.  —  Je  n'en  vois  ])a?  la  nécessité  ».  Ini  réjdiqna 
d'Ai'genson. 

Henri  IV  arriva  un  jour  chez  Gahrielle,  sans  être  attendu,  et  vit 
le  duc  de  Belleaarde.  son  rival,  se  glisser  furtivement  sous  la  table, 
où  le  diner  était  servi.  Le  roi  lui  passa  une  Ijoite  de  coniitures,  en 
disant  :  *  Il  faut  que  tout  le  monde  vive.  » 

—  Petit  ])onhomme  vit  encore  ! 

Jeu  renouvelé  des  Grecs,  qui  consiste  à  se  passer  de  main  en 
main  une  allumette  eullammée,  en  disant  :  «  Petit  bonhomme  vit 
encore  »,  jus(prà  ce  qu'elle  s'éteigne  entre  les  mains  d'un  joueur, 
qui  est  le  perdant. 

—  Je  dois  une  belle  chandelle  à  mon  médecin  :  la  Camai'de  n'a 
pas  jugé  à  propos  de  poser  son  éteignoir  sur  le  lumignon  de  mon 
existence.  (Burlesque.) 

Vœu,  du  latin  votum,  roman  col. 

De  là  \iennent  aussi  :  vouer  et  voter,  ex-volo,  votif,  aveu,  dévot. 

Voici,  voilà  (préposition),  pour  vois-ci,  rois-là,  c'està-dire 
vois  ici...  Se  sont  écrits  en  deux  mots. 

—  On  disait  autrefois  :  vois-me-ci,  vois-me-là. 
Yoy-me-là  prest  à  boyre.  (Hahelais,  Garganfiia,  41.) 
Gare  !  voy-le-cy.  (Rabelais,  Pantagruel,  IV,  26.) 

Triboidet  fut  envoyé  devant  pour  dire  :  vois-les-cy  venir.  (Bon. 
Despériers,  Contes.) 
Voy-vous-là  composeur  de  pets.  (Rabelais,  I.  40.) 

—  Le  verbe  s'employait  aussi  au  pluriel  : 

Mais  voyez-ci  ce  qu'il  advint.  [Qaince  joies  du  niaviage.) 

—  Au  XVII''  siècle,  on  donnait  encore  à  voici  et  voUà  un  inlinitif 
pour  complément. 

Corneille  a  dit  : 

Voici  vi-nir  ma  sœiu*  pour  ï^o  jiUundro  avec  vous. 

[Horace.  330.) 

Voie,  dn  latin  via,  qui  est  aussi  provençal. 
D'où  :  voyage,  envoyer,  dévoyé,  dévoiement. 

—  Voie  de  bois,  d'eau,  se  dit  pour  :  ce  qu'on  pent  apporter  d'eau 
ou  de  bois  en  un  voyage. 

—  Voies  de  fait,  moyens  violents. 


574  VOI 

Voir,  ;iii(i(Miii('iii('iil  rcoif.  du  l.itiii  r'nh'ro,  provençal  rcirc. 

—  Le  futur  ;i  élé  aussi  je.  voirai  on  roirrrti.  (Dilîéronce  de 
prononcialiou.) 

One  voinï'Z-voiis  là-liaiil,  que  roncos  cl  orties? 
Ici.  Miiis  lie  vuiiToz  (]iie  fleurcUcs  sorties 
Du  sclii  (Jii  renouveau. 

(RoXSAIlD.) 

Attendez  ung  pou,  et  voirrons  la  vérité  du  tout.  (Rabelais.) 

—  Voir,  c'est  savoir. 

Quiconque  a  l)eaucoup  vu 
Peut  avoir  Ijcaucoup  retenu. 

(La  Fontaine.) 

—  Voir  une  paille  dans  l'd'il  de  son  voisin,  et  ne  pas  voir  une 
poutre  dans  le  sien.  (KiHingile,  saint  Mathieu.  VII,  3.) 

Quand  dauitruy  parler  vouldras, 
Regarde-toy,  et  te  tairas. 

Ce  conseil  de  nos  anciens  est  d'autant  meilleur  à  rappeler  qu'il 
est  moins  pratique. 

Les  Espagnols  disent  :  «  Quand  on  a  une  maison  de  verre,  il  ne 
faut  pas  jeter  des  pierres  dans  le  jardin  du  voisin.  » 

Je  l'ai  vu,  dis-je,  vu,  de  mes  propres  yeux  au, 
Ce  ([ui  s'appelle  vu. 

(Moi.iKiiE,  Tartuffe.  V,  3.) 

«  — Je  vous  ai  vu  quelque  part.  —  En  effet,  j'y  vais  quelquefois.  » 

—  Voir  trente-six  cfiandelles.  (Voy.) 

—  Voir  tout  en  noir  :  être  pessimiste. 

Il  n'y  a  rien  de  plus  facile  que  de  voir  tout  en  noir  :  il  n'y  a  qu'à 
fermer  les  yeux  (?). 

—  On  voit  les  objets  qui  frappent  la  vue  :  on  regarde  ceux  qui 
excitent  la  curiosité. 

L'artiste  regarde  les  beautés  d'un  tal)leau  qu'il  voit  ;  l'ignorant 
regarde  le  tableau,  mais  n'en  voit  pas  les  Ijeautés. 

—  N'y  voir  goutte  :  ne  rien  comprendre  à  une  chose. 

Tel  a  des  yeux,  qui  n'y  voit  goutte. 

—  Il  ne  voit  pas  plus  loin  que  son  nez  :  il  est  peu  clairvoyant. 
Qui  de  loin  voit,  de  près  se  réjouit. 

Ils  ont  des  yeux,  et  ne  verront  pas  ;  ils  ont  des  oreilles,  et 
n'entendront  pas.  (Psaumes.) 

—  Il  est  une  beauté  facile  à  méconnaître,  que  l'artiste  saisit. 
L'admiration  que  font  éprouver  à  l'artiste  une  foule  de  sensations 


VOI  573 

natiirollcs,  est  duo  ;i  uno  (''{liic;ition  spécirilo,  qui  lui  permet  de 
distin.mier  et  d'exlrnii-e.  en  (ptel([iie  sorte,  des  clioses  les  plus  ordi- 
naires, des  heaiilrs  (inc  le  viilaaire  n'aperçoit  pas. 

Dans  le  heau,  il  n'y  a  de  vaiii'lr  (pic  [loiir  les  observateurs;  les 
sots  ne  sont  frappés  de  rien. 

—  Sous  Louis  XIV,  on  vit  ;'i  Pai-is  des  Iroipiois,  (pii  ne  furent 
éinci'veillrs  que  des  l)ouli(pi('S  de  iVtlisseurs. 

Voisin,  du  latin  r/r/n/is  ;  provençal  rcstn. 
11  a  siuniru''  lialiitant  d'un  nièiue  lieu  (vicus). 

—  On  le  fait  aussi  venir  de  voix  :  d'où,  anciennement,  i:oisier(l). 

Li  faine  voisic  lu  noctc  et  li  jor. 

—  Qui  a  bon  voisin,  a  bon  matin. 

Qui  ha  bon  voisin,  lia  bon  matin  (Rabelais).  Matin  est  mis  pour 
journée. 

On  dit  aussi,  par  homonymie:  «  Qui  a  bon  voisin,  a  bon  màtiu  »  : 
parce  qu'un  bon  voisin  est  comme  un  chien  de  garde. 

Rabelais  donne  encore  le  proverbe:    «    Bon   avocat,   mauvais 

voisin.   » 

Puissant  seigneur,  crrami  fleuve,  grands  clieniins. 
En  tout  temps  sont  mauvais  voisins. 

N'achète  pas  la  maison,  mais  achète  le  voisin.  (Proverbe  russe.) 
Bonus  eslo  ririnus  (^Caton)  :  Sois  Ijon  voisin. 
Si  vous  voulez  vivre  en  paix  avec  vos  voisins,  n'en  ayez  pas. 
(A.  Karr.) 

Voiture,  du  latin  veciura,  transport. 

—  Ou  disait  autrefois  «  carrosse  de  voiture  ». 

...Rs  ont  été  assassinés  par  des  voleurs  qui  arrêtèrent  le  carrosse 
de  voiture  où  ils  étaient  avec  moi.  (Marivaux,  Vie  de  Marianne.) 

...11  était  parti  pour  Bordeaux  dans  le  carrosse  de  voiture. 
(M™e  Riccoboni.) 

—  Synonymes:  cab  (anglicisme),  cabriolet  où  le  conducteur  est 
placé  derrière:  dog-cart  (anglic),  voiture  de  chasse;  guimbarde, 
vieille  voiture  démodée. 

Panier  à  salade  :  voiture  pour  le  transport  des  provisions  ;  était 
autrefois  à  claire-voie. 

Voix,  du  latin  vo.n:  d'où  aussi  vocal,  voyelle,  avocat,  équivoque. 

—  Voix  de  stentor  (voy.) 
Voix  de  tonnerre  :  très  forte. 


tm  VOL 

Il  n'y  a  qu'une,  voix  pour  le  hlfinior. 

La  voix  (lu  \)cuplc  est  la  voix  dé  Dieu.  Vax  jtojiiiH,  rox  Dei. 

Vole  (faire  la),  se  dit,  à  quelques  jeux  de  cartes,  quand  un  des 
joueurs  fait  toutes  les  levées. 

(yest  une  corruption  du  mot  voile,  qui  se  disait  au  temps  d'Henri 
Estienne,  et  qui  vient  de  l'italien  volfd,  tour,  coup  de  dés.  /•>//•  ht 
voila  :  faire  le  coup,  .^aiiner  la  partie. 

Volée  (de  coups). 

On  ai)|)elait  jadis  volaiil  un  .uros  bâton  court  pour  se  hatlre. 

Rabelais  (lY,  IG)  dit:  «  Si  en  tout  le  territoire  n'estoyent  que 
trente  coups  de  baston  à  gaigner,  il  en  emboursoyt  toujours  vinat- 
huict  et  demy.  » 

Racine  a  mis  en  vers  cette  phrase.  Il  fait  dire  à  i'Intimé  : 

Et  si  dans  la  province 
Il  se  donnait  en  tout  vingt  coups  do  nerf  de  i)fpiif, 
^  Mon  père,  pour  sa  part,  en  einboursait  dix-neuf. 

(Plaideurs.  I,  o.) 

...Basile,  ô  mon  mignon  !  si  jamais  volée  de  bois  vert,  appliquée 
sur  une  écbine...  (Beaumarchais,  Mai^iage.) 

—  Synonymes  :  tripotée,  raclée. 

Voler,  mot  récent,  dans  le  sens  de  prendre,  dérober.  Il  ne  date 
que  de  la  lin  du  xvi^  siècle.  On  disait  autrefois  :  rober,  larronner, 
emliler.  Biez  le  tire  de  la  racine  vola,  paume  de  la  main  :  empoi- 
gner. Peut-être  est  il  pour  :  soustraire,  détourner  les  oiseaux  dressés 
pour  la  chasse. 

—  Synonymes:  dépouiller,  déprédations,  dévaliser,  dérober,  dé- 
trousser, dilapider,  escroquer,  extorquer,  gruger,  marauder,  piller; 
piraterie,  rapine. 

Voler  l'État:  baraterie,  concussion,  exaction,  dilapidation,  détour- 
nement, malversation,  péculat,  prévarication,  steUionat. 

—  Bien  volé  ne  profite  jamais. 

Le  bien  d'autrui  jamais  ne  produit. 

Les  gains  illicites  sont  les  arrhes  du  malheur.  (Saint  Grégoire  de 
Naziance.) 

Mule  parla,  maie  dilabunlur. 

(X.nEvii-s.) 

A'o«  halel  ecentus  sonUdn  causa  honos. 

(Ovide.) 

—  Il  ne  Ta  pas  volé  ! 


VOL  577 

Quand  je  dis  l)ri,L:;iiid,  jt;  raiipcllc  par  son  nom  :  c'est  la  seule 
chose  qu'il  n"ait  pas  volée.  (A.  Dumas.) 

—  Il  n'est  pas  défendu  de  voler  :  il  est  défendu  de  se  laisser 
prendre. 

Voleur,  dérivé  de  coler. 

C'est  le  (pi;dilicatif  commun  à  tous  ceux  qui  prennent  le  l)ien 
d'autrui. 

Le  filou  (voy.),  voleur  à  la  tire,  vole  subtilement,  escamote. 

Le  fourbe  prend  furtivement. 

Le  fripon  (voy.)  prend  avec  finesse,  il  vole  les  bardes,  dérol)e. 
Ce  mot  est  de  la  même  origine  que  fripier,  celui  qui  vend  de  vieux 
etïets  d'bai)illement. 

Le  larron  vole  en  cacbette. 

—  Les  noms  de  Cartoucbe,  de  Mandrin,  de  Gaspard  de  Besse, 
voleurs  fameux  du  siècle  dernier,  sont  devenus  appcllatifs. 

—  Voleur  comme  une  pie.  (Voy.  pie.) 

—  Être  mis  comme  un  voleur  :  être  mal  vêtu. 

On  dit  aussi  :  Cet  bai)it  fait  peur  aux  voleurs,  il  montre  la  corde. 

Un  jour,  M.  Parceval-Orandmaison,  membre  de  l'Académie,  dont 
la  tenue  était  négligée,  s'étant  présenté  pour  entrer  aux  Tuileries, 
un  officier  doré  sur  toutes  les  coutures,  lui  dit  :  «  Vous  n'entrerez 
pas,  vous  êtes  mis  comme  un  voleur.  »  L'académicien  l'examina  de 
la  tète  aux  pieds  et  lui  répliqua  :  «  C'est  vous,  qui  êtes  mis  comme 
un  voleur,  et  moi  comme  un  volé.  » 

—  C'est  un  pays  d'bonnètes  gens  :  quand  on  crie  au  voleur  !  tout 
le  monde  se  sauve. 

—  Au  HvrelV,  cb.  16,  de  Rabelais,  on  vient  annoncer  à  Gymnaste 
que  les  deux  plus  bonnètes  bommcs  du  pays  (des  Chicanons)  viennent 
d'être  pendus.  On  peut  juger  par  là  du  reste  des  habitants. 

—  Le  mécliant  fuit  sans  être  poursuivi;  mais  le  juste  est  hardi 
comme  un  lion,  et  ne  craint  rien.  (Salomon.) 

—  Quand  tout  le  monde  est  voleur,  le  meilleur  est  celui  qui  ne 
tue  pas. 

Benefriuui  latronis  non  occidere.  (Cicéron.) 

Volume,  du  latin  volumen,  de  volvo,  rouler. 

De  là  aussi  :  volute,  volubilité,  qui  signifie  proprement  promptitude 
à  tourner. 

Rabelais  emploie  l'adjectif  voluble,  qui  ne  s'est  pas  conservé,  et 
dont  les  Anglais  se  sont  emparés. 

37 


:J78  VOT 

Volupté,  (lu  Inliii  iu)luj)i(iii,  voluplnlom,  de  rr>/o,  je  veux  (?). 

—  Lu  volupté  est  mère  de  la  douleur.  (Voy.  jeunesse.) 
L;i  volupté  iilimente  les  maux. 

Malonim  c.sca  rolnptan. 

(Pi.ai:tk,  Morcdtnr,  V,  It.) 

Les  voluptés,  eu  trop  complaisautcs  maîtresses,  nous  fout  tomber 
dans  un  houleux  allaiblissemenl. 

Debilitatem  induxere  deliciœ,  blandissimœ  doyninœ  (Sénèque, 
Ep.  à  LuciUus,  LV.) 

La  plus  ,121'aude  ennemie  de  la  volupté,  c'est  l'indécence. 

Voluptuaire,  se  dit  des  dépenses  de  luxe,  de  fantaisie,  faites 
uniquement  en  vue  de  l'agrément.  (Voy.  somptueux.) 

—  On  a  appelé  voluptuaircs  les  travaux  publics  d'art,  tels  que 
les  théâtres,  promenades,  décorations  luxueuses. 

Vomir,  du  latin  vomere. 

—  Synonymes  nombreux  : 

Appeler  Huet  ;  Iluet  est  l'imitation  du  bruit  des  hoquets  qui  pré- 
cèdent le  vomissement. 

Revoir  la  carte  :  la  liste  des  mets  du  dernier  repas. 

Dégobiller,  le  contraire  de  (jober,  —  moins  ignoble  que  dégiieuler, 
dérivé  de  gueule. 

Compter  ses  chemises  ;  jeter  du  cceur  sur  le  carreau. 

Renarder,  écorcher  le  renard.  (Rabelais  lY,  14.) 

Rendre  la  monnaie  de  la  pièce  ;  rendre  tripes  et  boyaux. 

—  Au  même  radical  se  rattache  vomitif. 

A  la  lin  de  la  république  romaine,  la  gourmandise  était  telle,  que 
les  Romains  se  faisaient  vomir  pour  recommencer  de  manger. 
Sénèque  dit  :  Vomunt  ut  edant,  et  edunt  ut  vomant. 
César,  au  dire  de  Cicéron,  fut  souvent  dans  ce  cas. 

—  Vomir  des  injures  est  une  expression  qui  déplut  à  l'origine,  dit 
Vaugelas,  à  cause  de  limage  qu'elle  éveille  ;  mais  Condillac  est  d'avis 
de  la  conserver,  parce  qu'elle  est  juste  et  peint  fidèlement  la  pensée. 

Vomissement,  dérivé  de  vomir. 

—  Retourner  à  son  vomissement  :  retomber  dans  ses  erreurs, 
dans  ses  fautes.  (Salomon,  Proverbes  XXVI,  M.) 

Le  chien  rehume  ce  qu'il  a  vomi.  (Proverbe  espagnol,  xvi^  siècle.) 

Voter,  du  latin  votare. 

—  Voter  contre  :  l)lackhouler  ;  de  l'anglais  black,  noir:  la  boule 
noire  exprimant  un  vote  négatif. 


VOU  o79 

Voto  (ex-),  iiKils  l;ilins.  Soii<;-oiitcntlii  ohlatnm.  Otl'crt  |)Oiir 
r.'u-coiiiplisscmt'iil  d'iiii  \m'ii.  Mol  foi'iiu''  coiiiiiic  le  l;iliii  expio,  [vay 
III)  sjicrilico. 

Tabula  rôtira.  (Horace,  Ode.-;.) 

Los  aïK'iciis  ornaient  leurs  temples  do  ces  sortes  de  tableaux, 
qu'ils  appelaient  lahalo'  votlrœ.  La  plupart  étaient  accompagnés 
(1  une  inscription  qui  Unissait  par  les  mots  ex  roto,  pour  marquer 
(pic  i'aiileiir  s'acquittait  (run  vœu  fait  à  quelque  divinité,  dont  il 
a\ail  in\()([U(''  rassistaiice  dans  un  extrême  danger. 

Cet  usage  nous  a  été  transmis  par  le  paganisme,  et  l'on  suspend 
souvent  dans  les  églises  des  tableaux  qui  représentent  la  scène  du 
danger  auquel  a  échappé  celui  qui  les  a  olTerts  par  suite  d'un  vœu, 
ex  volo. 

—  Jacques  Tboniassin  a  fait  un  traité  de  taballs  rot  iris. 

Vouloir,  provençal  rofcr,  du  latin  volerc,  pour  relie. 
Les  Latins  disaient  noio  :  je  ne  veux  pas. 

—  Velint,  iioli/tt  :  (jn'iis  le  veuillent  ou  non  ;  bon  gré,  mal  gré. 
(Cicéron.) 

—  Vouloir,  c'est  pou\oir.  (Saint  l^inl.) 
Mais  vouloir  est  plus  lieaii  que  pouvoir. 

—  Vouloir  se  dit  dans  le  sens  ûo  poaroir,  en  parlant  de  choses 
inanimées. 

Le  temps  ne  veut  pas  changer;  ce  bois  ne  veut  pas  brfiler. 

C'est  nue  fanfaronnade  de  dire  qu'on  peut  tout  ce  qu'on  veut: 
mais,  assurément,  un  [leiit  lieaiicoiip  quand  on  sait  vouloir.  (Saint- 
Simon.) 

—  Voir,  c'est  savoir .  vouloir,  c'est  pouvoir  ;  oser,  c'est  avoir. 

Sic  volo,  HIC  jubeo,  sit  pro  rnlionc  voiunlds. 

(.Iuvi.;nai„   VI,  222.) 

(Je  le  veux,  je  rurdonne:  ma  volonté,  voilà  la  raison.) 

—  Plus  fait  celui  qui  \eiit  que  celui  qui  peut. 

PoHHunt,  fjuia  po.ise  cidcntur. 

(VniGii.i:,  Envidc,  W,  231.) 

Les  grandes  âmes  ont  des  vouloirs  :  les  autres  n'ont  que  des 
velléités.  (Proverbe  chinois.) 
Ce  que  femme  veut,  Dieu  le  veut. 

—  En  vouloir  à  quelqu'un,  c'est  lui  vouloir  du  mal. 

Pourquoi  pas  du  bien  ?  Est-ce  que  le  principal  versant  de  notre 
volonté  serait  du  côté  du  mal?  Un  des  plus  rudes  labeurs  du  juste, 


580  VOV 

c'est  de  s'exlniire  conliniiclleiiieiil  de  r.'nne  l:i  iii;ilv('ill;ini:o  diflicile- 
menl  épuisable.  (Victor  Iln.iio,  V lloimnc  (pu  rit.) 

Vous,  du  latin  ros. 

Pronom  qui  csl  le  pluriel  de  ///.  S'est  employé  dîins  les  temps  de 
civilisation  moderne  en  parlant  à  des  personnes  que  l'on  veut 
respecter.  C'est  une  sorte  de  flatterie  dont  on  se  sert,  comme  pour 
dire  qu'une  personne,  mise  dans  la  l)alanre  de  l'opinion,  mérite  les 
honneurs  de  plusieurs. 

De  même  les  souverains  s'arrogent  le  droit  de  parler  d'eux  au 
pluriel,  en  disant  «  Nous  ordonnons  »,  au  lieu  de  «  J'ordonne  ». 

Dans  les  républiques  démocratiques  et  cgalitaires,  on  supprime 
ces  locutions  puériles  et  blessantes  autant  que  contraires  aux  lois 
grammaticales  (?). 

Voyage,   voyager,   du  latin   viaticum,   provision   de  route. 
Aujourd'hui,  viafique  a  ce  sens.  (Ne  saurait  venir  de  viajyi  agere.) 
Provençal  riatge,  italien  viaggio,  bourguignon  viaigc. 
Chemin  que  l'on  l'ait  pour  aller  d'un  lieu  à  uu  autre  lieu  éloigné. 

—  Synonyme  :  pérégrination. 

—  Voyager  :  passer  sa  vie  cà  passer  son  chemin. 

—  Avant  de  voyager  pour  s'instruire,  il  convient  de  s'instruire 
pour  voyager. 

—  Passer  six  mois  de  l'année  à  la  campagne,  quatre  mois  à  Paris 
et  deux  mois  en  voyage,  voilà  le  souhait  d'une  vie  heureuse.  (Babinet.) 

...Si  j'étais  riche...,  je  jouerais  cinq  mois  à  Monaco,  de  décembre 
à  avril,  coupés  d'excursions  en  Italie  ;  pendant  les  mois  de  mai,  juin, 
juillet,  août,  je  ne  quitterais  guère  la  campagne  :  en  septembre,  je 
ferais  un  petit  voyage  maritime.  Je  donnerais  à  la  vie  de  Paris 
octobre  et  novembre,  et  je  trouve  que  ce  serait  bien  assez...  (Ville- 
messant,  1865.) 

Ce  qui  guérit  le  plus  de  la  tristesse,  c'est  le  mouvement  d'une 
queue  poudrée  de  postillon.,  sur  le  collet  d'une  veste  d'uniforme. 
(Rossini.) 

—  Le  voyage  en  seize  heures  de  Paris  à  Marseille,  pendant  la 
saison  froide,  n'est  qu'une  enjambée  de  l'hiver  à  l'été. 

—  Un  voyage  en  commun  est  comme  un  mariage  ;  on  se  voit  jour 
et  nuit,  on  se  pratique,  on  se  contraint  si  peu,  qu'il  en  résulte 
souvent  du  malaise  et  souvent  de  l'humeur.  (Le  président  de 
Brosses.) 

Dans  l»g  voyages  en  commun,  il  y  a  toujours  un  des  voyageurs 


\\\X  381 

qui  est  le  plastron  ot  Idlijet  des  sarcasmes  de  son  rompa.gnon.  De 
Brosses  se  moque  de  l.a  Moniioye  ;  Delessert,  de  Loysel  ;  Dumas, 
de  Jadin.  etc. 

—  11  ne  faut  pas  trop  remuer  ses  os,  surtout  les  femmes,  à  moins 
d'être  ambassadrice.  (M'"''  de  Sévigné.) 

—  Dans  tout  voyage,  il  y  a  quelque  chose  de  plus  agréa hle  que 
le  drpart.  c'est  le  retour.  (P.  Véron.) 

—  Longs  voyages,  longs  mensonges.  (Yoy.  tnenlir.) 

—  Qui  voyage  prie  ;  la  terre,  comme  le  ciel,  raconte  la  gloire 
de  Dieu. 

—  Commis-voyageur  :  chevalier  errant  de  l'industrie. 

—  Voyageur  infatigable  :  Juif  errant. 

Voyou,  Ijlousier,  vagabond  des  rues  de  Paris. 

Le  mot  a  été  inventé  par  Gavarni,  le  dessinateur;  il  est  tiré  de 
coie  (publique). 

Homme  qui  a  tous  les  vices  du  peuple,  sans  en  avoir  les  qualités  ; 
crapuleux  dans  sa  conduite  et  dans  ses  expressions,  canaille  al)jecte, 
en  dehors  du  vrai  peuple. 

—  De  ce  mot  on  a  formé  voi/oucratie,  le  despotisme  de  la 
canaille,  l'aristocratie  à  rebours. 

—  Voyoute,  la  femelle  du  voyou,  comme  la  peste  est  la  femelle 
du  choléra. 

Des  voyous  de  quatorze  ans  avec  des  voyoutes  de  douze;  des 
enfants  qui  n'ont  jamais  eu  d'enfance,  des  tilles  qui  n'ont  jamais  eu 
d'innocence.  (A.  Delvau.) 

Vrai,  anciennement  verai,  suppose  ve?ricus,  du  latin  vcrus. 
11  y  a  aussi  dans  l'ancien  français  voir',  voire  même. 

—  Le  beau  est  la  splendeur  du  vrai.  (Platon.) 

Rien  n'est  lirau  (iiie  Iv  vrai,  lo  vrai  seul  est  aimable. 

(BoiLKAu,  E/iifre  IX,  13.) 

—  Plaider  le  faux  [loiir  savoir  le  vrai. 

La  ruse  se  sert  du  mensonge  pour  connaître  la  vérité. 

—  De  vi-ai,  se  dit  pour  vraiment,  véritablement. 

Ilélas  !  si  ma  femme  perdoye. 
Je  sai  de  vray  que  je  mourroyc 
Apres  elle... 

{Ancien  Théâtre  frnnrnis,  t.  I,  p.  320.) 

Le  ciel  défend,  de  vrai,  certains  contentements. 
Mais  il  est  avec  lui  des  accommodements. 

{TarOi/Te,  IV,  5.) 


582  YEU 

Vrille,  est  pour  lutrllli',  du  Inlin  oeru. 

Avant-trou,  dans  le  Bcrry.  Expression  composée  coninie  chansse- 
pied,  pour  corne. 

Vulgaire,  du  Inliu  rii/r/xs,  la  foule,  de  volco[l). 
La  foule  qui  l'oule  dans  les  rues. 
—  Le  vulgaire  :  les  autres. 

Les  Anglais  appellent  la  popularc,  moJi,  ahrévialiou  (?)  de  mohik 
V  ni  (JUS. 
Loin  de  moi  le  profane  vulgaire  ! 

Odi  profdiinm   riil(/i(s  et  nrcco. 

(UoiiACK,  Odex  UI.  1.) 

Willls.  Jeunes  fdles,  qui,  selon  les  légendes  allemandes,  sortent 
chaque  nuit  de  leur  tombe  et  dansent  jusqu'au  jour. 

Wrac,  de  l'anglais  wreck,  naufrage,  désordre,  pèle-méle. 
Se  dit  de  marchandises  jetées  pèle-méle  au  fond  de  la  cale  d'un 
navire,  et  qui  sont  expédiées  sans  aucun  emballage. 


Y  (I  grec).  C'est  la  réunion  de  deux  /,  dont  le  second  aurait  été 
allongé,  surtout  à  la  fin  des  mots,  par  les  copistes  calligraphes. 

C'est  Vu  (upsilon  grec)  auquel  on  a  ajouté  une  queue. 

Entre  deux  consonnes,  il  a  le  son  simple  de  /:  entre  deux 
voyelles,  il  a  la  valeur  de  deux  i.  Seul,  il  équivaut  à  /. 

—  Quel  chemin  faut-il  prendre  ?  Car  quelquefois  il  s'en  trouve 
de  faicts  comme  un  y.  (Histoire  macaronique.) 

Yankee,  est  le  mot  emjlish  (anglais),  défiguré  par  la  pronon- 
ciation des  Peaux-Rouges. 

Sobriquet  donné  aux  Américains  du  Nord,  surtout  à  ceux  qui 
sont  enthousiastes  des  institutions  de  leur  pays,  et  méprisent  celles 
des  autres. 

Yeux  :  les  miroirs  de  l'âme.  (Diclionnaire  des  Précieuses.) 

—  On  emploie  yeu  au  singulier  dans  le  Berry.  (Voy.  œil.) 

—  Comme  les  yeux  sont  les  miroirs  de  l'âme,  il  faut  se  défier  de 
ceux  qui  ne  regardent  jamais  en  face  ;  c'est  qu'ils  craignent  que 
leurs  veux  ne  trahissent  leurs  mauvais  sentiments. 


;  ,         ■ .  .    .      >  \ 

\A  ^.l  r«    il  >j    {/7J  M 


ZEI{  583 

—  On  dil  :   aimer  quelqu'un  comme  la  priiiiolle  de  ses  yeux; 
c'est-à-dire  y  tenir  heaucoup. 

—  Dim   ohjcl  qui  coûte  cher,  on  dit  qu'il   conte  les  yeux  de 
la  tète. 

—  Loin  des  yeux,  loin  du  cœur.  C'est  une  variante  de  cet  autre 
proverbe  :  Les  absents  ont  tort.  (Voy.  cœur.) 

—  Synonymes  de  yeux  pros  et  saillants  :  houles  de  loto,  lanternes 
de  calu-iolet. 

Yeux  orands  :  salières. 

—  Avoir  les  yeux  chassieux  :  faire  de  la  cire  pour  Notre-Dame. 

—  Il  a  les  yeux  d'un  poisson  mort  :  très  ternes. 


Zéphire  ou  zêphir.  dn  prec  zcphuroa,  par  l'intermédiaire  du 
la  lin  Lcplujrus. 

Vt'iil  d'ouest  chez  les  anciens  :  de  rof',  vie,  et  pliera,  porter,  qui 
porte  la  vie  ipii  anime  (]èl;iit  le  même  que  le  Fdvonuis  des 
Latins. 

—  L'Académie  écrit  zrphire,  vent  d'occident,  ^i zéphyr,  par  un  ij, 
pour  sianilier  un  vent  doux  et  apréahle. 

—  Les  amours  de  Flore  et  de  Zéphire. 

—  Les  Précicjses  ont  appelé  Zéphire  l'amant  des  Heurs,  parce 
qu'il  les  caresse  et  les  fait  épanouir. 

Zéro,  altération  de  zeftro  (?)  venant  lui-même  de  l'arabe  cifron, 
({iii  siunilie  \ide. 

Cifron  a  donné  les  deux  mots  zéro  et  chiffre. 

—  C'est  un  zéro  :  un  homme  nul. 
Homo  nullins  nutncri.  (Cicéron.) 

C'est  un  zéro  en  chilïre  :  un  homme  sans  valeur,  sans  caractère, 
sans  talent. 

On  disait  autrefois  :  un  o  en  chiffre  (la  lettre  o,  qui  sert  à  fijiiirer 
le  zéro).  En  1491,  Philippe  Calender  introduisit  le  mot  zéro  pour 
désigner  le  chiffre.  On  changea  dès  lors  o  en  chiffre  en  zéro  en 
chiffre,  qui  est  im  pléonasme. 

—  Il  regardait  un  liomme  comme  une  unité,  et  une  femme 
comme  un  zéro.  (Alex.  Dumas.) 


584  /or 

Sachant  que  le  zéro  n'a  aucune  valeur  par  lui-iurnie,  il  s'était 
mis  à  la  suite  d'un  cliiiïre.  (Halzac.) 

Tel  lirillc  au  second  rima,  qui  .s"i'clii).sc  :iu  prf'mior. 

{Zéro,  énigme.) 

Quatre  membres  font  tout  mon  bien  : 
Mon  dernier  vaut  mon  tout,  et  mon  tout  ne  vaut  rii-n. 

[Zéro,  charade.) 

Zeste,  (lu  latin  schistns,  du  ,urec  schico,  diviser. 

—  Le  zeste  est  la  pellicule  jaune  extérieure  des  aurentiacées,  qui 
contient  une  huile  essentielle  aromatique,  volatile  et  inllammahle. 

L'enveloppe  hlanche,  charnue,  qui  est  sous  le  zeste,  s'appelle 
:::iste,  et  contient  un  principe  amer. 
D'où  :  entre  le  ziste  et  le  zeste,  c'est-à-dire  dans  l'incertitude. 

—  On  a  dit  sèke  (zeste)  pour  rien.  Gela  ne  vaut  pas  un  sèke. 
D'où  l'argot  :ut  (?). 

Zigzag.  Suite  de  lignes  formant  des  angles  rentrants  ou  sor- 
tants. De  l'allemand  zacke,  chose  pointue  ;  ou  de  l'arabe  r/y,  table 
astronomique,  où  les  figures  forment  de  vrais  zigzags. 

Zoïle,  nom  d'homme,  origine  littéraire. 

Zoïle  naquit  à  Amphipolis,  vers  200  avant  Jésus-Christ. 

L'indignation  qu'excitèrent  ses  commentaires  injustes  des  poèmes 
homériques,  a  fait  de  son  nom  le  synonyme  de  critique  méchant, 
envieux. 

On  l'oppose  à  Aristarque. 


FIN     DU     TOME     SECOND 


Toulon.  —  Impr.  Régionale  Rom.\in  LIAUTAUD  et  G'^,  boulevard  de  Strasbourg,  56.