L.-M.-E. GRAN'DJEAN
DICTIONNAIRE
DE
LOCUTIONS
PROVERBIALES
Oovraoe ootJlic m les soins de la Moolcipalilé de la Ville de Tooloii (Var)
TOME SECOND
TOULON
IMPRIMERIE RÉGIONALE
Romain LIAUTAUD & C"
^6, Boulf'i'crd de Strasbourg, 5-6
• •• —
■1899
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DICTIONNAIRE
DE
LOGUTIOiNS PROVERBIALES
IMPRIMERIE REGIONALE Romain LIAUTAUD el C'
56, Boulevard de Strasbourg, 56
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L.-M.-E. GRANDJEAN
DICTIONNAIRE
DE
LOCUTIONS
PROVERBIALES
Oovrage publié par les soins de la Monicipalité de la Ville de Toolon (Var)
TOME SECOND
TOULON
IMPRIMERIE RÉGIONAIiE
Romain LIAUTAUD & O"
)6, Boulevard de Strasbourg, 56
1899
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(la haut (le leur, au lieu de w.
prête, au lieu de prête,
repas, au lieu de repos,
par, au lieu de pour,
possessions, au lieu de possession.
Novare, au lieu de Navarre,
tomber, au lieu de tomlter.
diijnitaire, au lieu de dignité,
patriarche, au lieu de jjalriarcliat.
clitellas, au lieu de citellas.
tentés, au lieu de tentées.
DICTIONNAIRE DE LOCUTIONS
M
Macabre (danse) : aiiciomiement danse mncnlré.
Variante du nom propre Machahée. peut-être le nom d'un
[leintre.
Suite d'images que l'on peignait, au Moyen-Age, sur les murs des
églises et des cimetières. Elles représentaient la Mort entraînant à
sa suite des personnages de toutes les "conditions.
Macaire (Robert), origine littéraire.
Filou sinistre, escroc.
Héros de YÂuberye des Adrets, qui fut joué avec grand succès
par Frédéric Lemaître, vers 1830. et vulgarisé par Daumier dans
une suite de caricatures : Les cent et un Robert Macaire.
Wacaronique (stylej ; de l'italien macaroniro, dérivé plaisant
de niucaronl.
Poésie Iturlesque écrite en mots vulgaires latinisés. (Voy. Jntin
de cuisine.)
Exemples : Morto insecto, poudre insecticide : dito, ce ([ui a été
dit ; in fjlobo, en masse, sans examiner les détails.
IVlacédoine, nom géograplil(iue.
— Mets composé de ditTérents légumes.
Par assimilation, ouvrage où plusieurs genres sont mêlés sans
ordre.
Vient peut-être de ce cpie l'empire de Macédoine, ou d'Alexandre,
était formé de nombreux morceaux.
Machiavélisme, origine bistorique.
Doctrine détestable du Florentin Macliiavel, qui justifie le succès
obtenu par les moyens les plus coupables. Elle se trouve dévelop[)ée
2 MAI)
dans le rrhire, qui cnsoinno aux tyrans les moyens de rriissir,
même au mépris de la justice et de l'Iiumanilé.
— Maclùacélhtne est devenu synonyme de rum' cl ({'(isincc. et
les lliéories du Prince ont été fort discutées. Il présente tout un
système violent, mais vrai, allant droit au hiit, sans se soucier des
moyens, mais au bout durpiel le prince acquiert la jïloire et le peuple
le l»ien-ètre.
Pour ju.uci- saiuemeul un livre, il l'aul se reporter à l'époque où il
a été écrit : c'est ce que n'ont pas fait la plupart des contemporains,
et les ennemis poslhumes de Macliiavel.
La postérité a lini par rendre justice à cet écrivain iionnéte et
convaincu, à ce firand homme d'État ; mais le nom de machîavé-
lisme, donné à son système, par ses détracteurs, a pris place dans
tous les dictionnaires avec le sens odieux de politique déloyale,
d'art de relouer despotiquement.
Mâchicoulis ou mû'checoulis , origine inconnue.
Galerie saillante et ajourée des anciennes fortifications, d'où l'on
jetait sur les assaillants des projectiles et des liquides bouillants.
Littré donne l'étymologie inarhicoUamentuw, VicWow déverser
des liquides chauds ; ce qui explique coulis, en laissant inexpliquée
la première partie du mot.
Mâchoire, dérivé de mdclicr: latin masticcn^e.
Jouer de la mâchoire : manaer.
(Di(lon) (lil son licnrdidtc
I^uis on joua de la luâclioiiv.
(ScAiiRON, Virgile travesti.)
— Mâcher à vide : n'avoir rien â manger.
Madelonnettes. Filles de Madeleine, 3Iagdalena.
Religieuses instituées au xiv^ siècle, dont les maisons servaient
de refuge aux péclieresses.
Mademoiselle, ma et demoiselle.
, On donnait, avant la Révolution, le nom de demoiselle, aux
femmes de la bourgeoisie, mariées ou non. Cet usage s'est conservé
en Provence, où les femmes de la classe ouvrière sont appelées
w /.se, qui est l'équivalent provençal de mademoiselle, hç XWyq Ao,
7nadame n'appartenait qu'aux femmes de la classe noble.
Encore aujourd'hui, dans l'usage, on distingue fe?mne et dame.
\\ a été publié â La Haye, en 1712, in-8", un hvret intitulé : Satire
contre les femmes Ijoargeoises qui se font appeler madame.
MÂG 3
lYladras, étymologie historique.
Im)iiI;ii-(1s (le coton f;iliri(|iirs priiniliveuieiit ,'i .M;ulr;is, et dont la
cliaiiie élail en soie.
(^oilViiiT lui'iiirr d'iiii de ces loidards.
IVîadré, ancien français iiKulro: oriiiine uernianicine.
Mdndi'i' est le nom languedocien du renard.
Un ronartt, jiMuic encor, (|iu)i(iue des plus niailrôs.
(L\ FoNTAINF.)
Madrigal, d"ori,uine italienne, madv'ujale.
Ihit'l le lait venir des habitants des Martignes en Provence, très
\ersés dans la gaie science, an Moyen-Age.
Le madrigal, au dire de Boileau (.4;'^ poétique),
Respire la (loiiecur, la tendresse et raiiioiir.
La concision et la grâce en sont les principaux mérites : la fadeur
en est le défaut ordinaire.
(lu peut citer comme modèle les vers suivants de Lemierre, c(ui
accoiupaguaient l'envoi d'un éxenlail :
Dans le temps des chaleurs extrêmes.
Heureux d'amuser vos loisirs,
.le saur.'ii [irès de vous ap|)eler les zéphyrs :
Les amours y viendront d'eux-mêmes.
(Voy. ('venlail, ces vers avec quelques variantes.)
IVIage, ou mieux maje ; du provençal uidjé: anciennement
inajer, qui est le latin major.
Ou disait autrefois la « place mage » jtour la place principale, la
grande place.
Il y avait à Carcassoune le « juge mage ».
La Châtre a sa « place Mage! ». comme Madrid la « place Major ».
...Et tomba c{Mnme une grenouille sur le ventre, en la place
Mage de la dicte ville. (Rabelais, 11, %).)
lYlagie, du grec marjeùi, par le latin niayta.
La magie noire, celle ([ui su[)pose rinler\eution du diable. La
magie blanche ne l'ait intervenir que l'adresse.
— La d ici nation s'a[)pelle de dill'érenls noms, selon les moyens
qu'elle emploie :
Les Ainispices inspectent les entrailles des victimes.
La Biblio/nancie se fait par le sort d'un passage de la Bible.
La Céroniuncie. par l'inspection de la cire fondue vei'sée dans
l'eau chaude.
4 MAH
]/,{ Chiromanrln, ]»;ir rins|)f'cti()n dos li^iios de 1;i iii;iiii.
La Nécromancie, par révocation des iiioris.
XJOrnithoscopie, par le vol des oiseaux.
]JUranosropip, par riiispection du ciel.
IJf/roscopie, par rins[ie(iioii des urines.
Magnan, de incKjmts nens, «irand fileur : on plnUM du participe
du vérité roman wjr/r/w'Vdévorer, noui |»ro\('n(al du ver à soie.
D'où inaijnnnevie.
Magnificat, origine latine et religieuse.
C'est le premier mot du cantique d'actions de grâces de la Vierge,
dans rÉvangile.
Dans ce cantique, qui se chante à la lin des vêpres, la Vierge,
répondant aux iélicitations de sa cousine Elisabeth, remercie Dieu
de l'avoir choisie pour être la mère du Sauveur.
Magnifier s'est dit pour louer.
Nous avons encore magnifique.
— Il ne faut pas chanter Magnifu-at à Matines : se glorifier avant
le temps.
— Corriger le Magnificat : corriger à tort et à travers.
lYlagot : 1*' gros singe, imago Jiominis. (Huet.)
Peut-être. /;/ 0/70(7, nom bibhque(?), owmacctis, acteur bouffon,
qui jouait les rôles de niais (?).
2" Tas d'argent, trésor caché.
On disait autrefois mugot. 11 semble s'être modifié sous l'influence
de magaut, poche, bourse.
— Il est difficile d'admettre qu'il soit une altération de imago.
qui serait une allusion aux effigies ou têtes qui figurent sur les
monnaies trouvées.
Mahomet ferme les yeux ! disent les mahométaus quand ils
boivent du vin, qui leur est interdit par le Coran.
— Dieu envoya sur la terre deux anges, Arot et Marot, pour
enseigner aux liommes à s'abstenir de toute sorte d'excès. Mais ils
s'enivrèrent, dans la compagnie d'une belle femme, qui apprit
d'eux, pendant leur ivresse, le moyeu de monter au ciel. Elle en
usa aussitôt, et Dieu la changea en l'étoile du matin, qu'on nomme
Lucifer ou Aurore. Les deux anges furent punis, et Dieu interdit
aux hommes l'usage du vin. (Voy. vérité.)
— Le Commissaire des subsistances de la Marine, à Toulon, a
remplacé, en 18G0, les ouvriers liltres du magasin des liquides, qui
MAI S
s'enivraient journellement, par des galériens arajjes, qui observent
ri,L!Oiireusenient la défense du Coran.
lYlai, du latin inniiun, de 3Iaia (mère de Mercure) ; ou de
majores, mai étant consacré à la vieillesse, comme juin à la jeu-
nesse.
Cest floréal dans le calendrier républicain.
— Mariage de mai : union formée sous de mauvais ausjjices.
Au mes de mai
Si mariilc que leis aïs.
(Pi-ovcrbc pi'OVfiu;al.)
Dans l'ouest de la France, le mois de mai passe pour être défa-
>orahle aux mariages; on croit qu'il leur porte mallieur, comme
s'il n'était composé que de vendredis.
Ce préjugé vient des Romains, qui célébraient en nuii des céré-
monies funèbres en l'bonneur de Rémus.
Nec vidud' ta'dis eailon nec virr/inis apla
Tempnra ; quœ nupsit, non diulurna fuit.
Hac quoqiie de causa (si te proverbia tanyunt),
Mense ni(das Maio nubere vulgus ait.
(OviDK, Fastes.)
Maigre, du laliu macrum.
— Maigre comme une arête, ...un coucou, ...un eccc homo, ...un
échalas, ...un bareng, ...une baridcUe.
— Maigi'eur ostéologique (E. Sue) ; maigreur diapliane (T. Gau-
tier) ; monofjramrni dii (Cicéron) : des ombres de dieux (des dieux
dont les contours seuls sont dessinés).
— Femme maigre. La célèbre danseuse Gaimard était très
maigre ; sa bonne amie Sopbie Arnould l'avait surnommée « Sque-
lette des Grâces ».
lYlaille, du latin nietalliani, dérivé de melallum.
C'est une autre forme de médaille.
Ancienne petite monnaie de cuivre, valant un demi-denier. Elle
était cari'ée et, selon quelques-uns, devait son nom à sa ressemblance
avec une maille de filet {macula).
Selon d'autres, maille remonterait à malleolus, petit marteau,
à cause de l'ancien procédé usité [lour frapper les monnaies.
— N'avoir ni sou ni maille : être très [)auvre, n'avoir rien.
La maille étant carrée, le sou rond, l'expression signilie: n'avoir
de monnaie d'aucune sorte.
— Avoir maille à partir avec quelqu'un : un dilTérend.
Vu sa valeur infinie, la maille était indivisible : aussi deux i)er-
6 MAI
sonnos fjiii en ;iviiionl iino ;i p.-ii-lir '|i;irl;i!Jor"^. |i()ii\;ii(!iil se (|iici'<'ll('r
élcnicllciiu'iit. le i);irl;i^<' (''Uiiil iiiiiiossililc
\'.\ I nii \()iis \(iil sans cesse ;i\ (tir niaillr a partii-.
(.M)i.iKriK, Étourdi.)
— Un |)inc(Viii;iill(' : un ;i\;ir('. un 'jri|»|i('-?oii. (jiii rerliorchc les
pelits profils.
lYlaillechort, nom crinvcnlcnrs, de Mailloi vA (Ihovlbir, (Icnx
ouvriers do Lyon, qui ont inventé cet ailiîige très dur. noniiné
aussi nrçjenian. Sa coniposilinn est : cuivre oo, nickel ^o. zinc 17.
)o«' 3, étain 2.
lYlain, du latin /tif/niun. Provençal iiiaii.
De là : maintenir, nianclie, manier, manille, nianixelle.
Synonymes : Les quatre doigts et le pouce ; le peigne des Alle-
mands (Rabelais) : la fourchette du père Adam ; les cinq sardines :
la girollée à cinq feuilles.
— Main-levée. Acte qui lève rempèclienient d'une saisie, du ne
opposition, d'une inscription.
— Main-morte (biens de). Se dit des biens appartenant aux
établissements, aux communautés... qui, n'étant pas soumis aux
droits de mutation après décès, sont astreints à une taxe annuelle
au profit du Trésor.
— On dit d'un homme qui a les extrémités grossièrement confor-
mées, qu'il'a les abatis canailles (trivial) ; par opposition à mains
effilées, aristocratiques.
— Mains sales : gantées de crasse.
— Avoir une main de fer : traiter durement ses inférieurs.
On citait chez Laffitte le mot de Napoléon, que, pour gouverner les
Français, il faut avoir des mains de fer gantées de velours. « C'est
vrai, dit quelqu'un, nuiis il oubliait souvent ses gants. »
— Demander la main de...- ; accorder sa main...
Cette locution très ancienne nous vient des bords du Gange. La
jonction des mains a toujours été le signe de la consécration du
mariage.
— Je m'en lave les mains. (Mathieu XXYII. 24.) Je n'en suis point
responsable.
Chez les anciens, celui qui voulait prouxer son innocence d une
faute dont on l'accusait, se lavait les mains devant témoins. C'est
ce que lit Ponce-Pilate. quand le peuple le contra i.ianit à condamner
Jésus-Christ.
MAI 7
On dit aussi dans U» même sens : a\nir los mains noitos d'une
chose.
— Autrefois, on ne se uietlail pas à table sans se laveries mains :
des tromi)ettes sounaicnl 1 lieiirt' du diner: cela s'appelait corner
l'eau. (VoY. lacer.)
Sur ce point on se lavo, et clianin à son rang
Se irlet dans mu' eliaise ou s'assied sur un banc.
(Ki;(;.Mi;ii, Sfll. X.)
— .l'eu iiKMlcais ma main au IVii : j'en suis cei'taiu.
...Kt les pauvres sots, quand en quelque compa.unie parlent
d'elles, jurent qu'ils nu'ttraient leur doigt au feu sans brusler, pour
soutenir qu'elles sont femmes de bien. {Heptaméron, Nouv. XX.)
— .le n'eu mettrais pas la main au feu: je n'en voudrais pas
jurer.
Je n'en vouldroys pas tenir ung fer cliauld. (Hal)elais.)
,\Jinsion à l'ancienne coutume du Moyen-Age, qui soumettait les
accusés aux épreuves de l'eau bouillante ou du feu ai-dent. On
pensait que l'innocent serait préservé par Dieu.
La science moderne a prouvé que l'on pouvait iuqjunément
plonger la main dans l'eau ou l'huile bouillante et nu^me dans des
mélauv en fusion, apivs l'avoir préalablement enduite d'eau, d'alcool,
d'éther...
— Jeux de mains, jeux de vilains. Ce proverbe doit remonter à la
[''éodalité, où les jeux des nobles étaient les tournois, les chasses,
les exercices miUtaires : tandis que ceux des serfs consistaient dans
l'adresse de la main et les exercices corporels.
11 n'y a plus de vilains, mais il y a encore des villageois qui ont
conservé l'habitude de plaisanter en se donnant des tape.'i, ce qui
amène souvent des disputes et des coups sérieux.
Et dirent là une grand tétanie
De plaisants mots et jeux sans vilainie.
(.Marot.)
— La bonne main. La main a été l'étalon primitif du calcul duo-
décimal, parce que, déployée, elle présente les douze phalanges des
quatre doigts articulés à sa paunu». D'où la locution : compter sur
ses doigts.
Dans le commerce, on Unit par faire remise du treizième, qui est
l'appoint du quarteron, représenté par le pouce, ce qu'on donne
par dessus le marché. D'oi'i l'expression : il n'y en a pas treize à la
douzaine, en parlant d'une chose de prix.
8 MAI
On ;ii)|)('lle rel iis,'i,uï' I;i ho/me ma in. puni' (|in' I;i iii.iiii > est
tout enliôro.
J3ans le langage du pt'niilc. le jkhkc siLiiiilic toujours un sim rnit.
une anumcntation : Il en a liiv Irois ccnls francs... ot le ponce
Y nielU'c les (piatrc doigts... cl le poiico. rV'sl-à-dire la nuiin
entière. (C Nodier, //>i;/itis/////ir.)
— On appelle ;iiissi bonne tn<iin nnr uraliliralion (Idiiiirc à un
inférieur.
On dit également : donner des gants.
— Poignée de main, (l'est un signe d'amitié et de honno intelli-
gence.
Deux mains jointes, en blason, signifient bonne foi.
— De marchand à marchand, il n'y a que la main : c'est-à-dire
entre gens de bonne foi, il suffit de se toucher dans la main pour
engager sa parole.
— L'usage de se serrer la main en se rencontrant, est une impor-
tation anglaise, qui date de 1793.
La Hochefoucauld-Doudcauville raconte dans ses Mémoires
qu'ayant émigré à Londres, il y rencontra un ami, qu'il voulut em-
brasser selon l'usage. « Que faites-vous, mon cher, s'écria celui-ci ;
vous allez scandaliser tout Londres! On ne s'embrasse phis, on se
serre la main. » Et joignant l'exemple au précepte, il me prit la
main, qu'il me serra à me faire crier, et me secoua le bras à me le
démettre.
— Une main froide me gène: une main humide me répugne:
une main saccadée m'irrite ; une main qui me prend par le bout des
doigts me fait peur ; mais une main souple et cliaude. qui presse la
mienne du contact de sa paume, m'inspire une conliauce et une
sympathie subites. (G. Sand.)
— Revers de main : soufflet.
Pour châtier son insolence extrême.
Il faut que je lui donne un revers de ma main.
(Jlol.lÉIiE.)
— Les mains me démangent ! Purjnl pnirlunt. (Plante.)
— Une main lave l'autre, et les deux mains lavent le visage.
Mantfs maninn lavât. (Pétrone.)
Maintenant, adverbe; demain et tenant (proposition absolue).
— On disait autrefois : à cette heure.
Cette locution, atTectionnée et abrégée par Montaigne, valait
mieux que maintenant qui la remplacée.
MAI 0
— Le pied romphice quelquefois l;i niaiu, daus les locutions
adverbiales :
De pied ferme: an pied levé.
Ou a dit aussi : en un tenant.
Trois fois nie nasiiie cil im loïKiiit.
iliomnn de la Rose.)
— Eu provençal, ou emploie adês.
Maison, du latin mansionem, de inrnipro, rester.
Du mrme radical \icuiu'nl : masure, manoii'. manant.
Synonynn:;s: un Louvre (une belle maison): Villa (maison de
campagne) ; Arcbe de Xoé (.urande et très liabitée): lionfiounière
(jolie); Baraque, bicoque, cassine (maison peu confoi-table, uuil
tenue).
J'ai là-bas une petite cassine, au bout de votre grand pré, qui est
sur la rivière. {Moyen de parvenir.)
Bouge : habitation dont les murs sont faits dun mortier mclé
de paille hachée, qu'on appelle 7>/.sy'.
Taudis : petit logement malpropre.
Petites-maisons : hôpital des fous.
Maître, du latin macjhtrum, de magls ter.
Pasquier dit que le titre de maître qu'on donne aux ofliciers
ministériels, vient de ce que, à la fin de leurs études, lorsque les
écoliers de l'Université recevaient le bonnet de docteur, c'était pour
montrer qu'ils avaient acquis toute liberté, et n'étaient plus sujets à
la verge des supérieurs ; de même que les Romains donnaient le
bonnet (de liberté) aux esclaves qu'ils atfranchissaient.
^ Petits-tnaUres. Jeunes fats de toutes les époques : la (leur des
pois des désœuvrés du grand monde. Espèce neutre : ni hommes,
ni femmes,, ni auvergnats.
Le prince de Condé avait une sorte de cour, qui, réunie à celles
du prince de Conti et du duc de Longueville, forma contre le
cardinal Mazarin le parti qu'on appela « des Petits-maîtres », parce
qu'ils voulaient renverser le ministre et s'emparer du gouvernement.
(Voltaire.)
Ce nom est resté aux jeunes fats, et s'est même étendu jusqu'aux
femmes capricieuses et vaines, qu'on appelle « petites-maîtresses ».
— Il est curieux d'examiner la succession des noms exprimant la
même idée depuis plusieurs siècles.
Du temps de la Chevalerie, il y avait les preu-x. Leur règne a
duré aussi longtemps que l'honneur a dominé en France.
■10 MAI
Sons FiMiirois I''"", on voit hi?,)niif/i/pfs : les ra/'/iruia el les ni/'r/nons
sous Cliarlos IX ot Honri III.
Sons Louis XIII. ils s';i|i|i<'lleiit /ip/ifs-mof/res : l:i Fronde iinciito
pour les désigner, le nom i\' imporlaiils.
Le règne de Louis XIV amène {^smarquis, si moqués par Molière,
et qui furent remplar(''S par les rour/isf/ns.
La Régence eul les roués: Louis XV, les f/ois du hrl tnr:
Louis XVI, les freluquets.
La Révolution créa les incroi/dhh's. les tnxscadins. la Jeunesse
dorée.
Le Consulat vit les mcrreilleux : l'Empire, les ftishionubles : la
Restauration, les daudi/s, les élégatits, les fjnndins.
Nous avons (18()0) \v^ petits crevés.
Les lions ont fort luultiplié, et nous avons aussi des lionnes
depuis que Musset a dit :
C'csl ma iiiailressi", ma lioiiiio...
Les deux sexes se font fort remarquer par la reclierclie de leur
toilette, et la singidai'ité, pour ne pas dire le sans-gène, de leurs
liahitudes. Les lions et les gandins sont donc les descendants des
preux! Vous en seriez-vous douté ?
La passion toute féminine des petits-maîtres pour les parfums et
les pommades explique les noms de marjolet, de mirliflor. de
nuKjuet, de miiseadin. de narcisse, qu'on leur applique.
De là aussi l'acception de vaniteux donné au moi puant.
— Maître d'études : pion, chien de cour.
— Maître-Jacques : domestique de campagne propre à tout faire.
Tripoteur d'atîaires.
~ Jurer sur la parole du maître :
...Jurare in verba in(i(/islri.
(Horace.)
— Le commencement du talent est le respect des maîtres.
— Cliarhonnier est maître chez lui. (Voy. charbonnier.)
— Tel maître, tel valet. Diynus domino servus. (Plante.)
Maîtresse, dérivé de niait re.
Amante, ainsi dite de l'empire quelle exerce sur celui qui laime.
Liberlas qunniain nnlli juni rcslal oiiinnli,
XhIIus liber rrit, -s/ (jiils (imarc volet.
(l'iiUl'KUCE.)
Maîtrise, dérivé de maiire.
MAL II
Qiinlilé dp niaîtro dnns los jmcienncs corporations de nu'-liors. On
no rolitonait que i)ar un concours. Les maîtres veillaient, dans
chaque corporation, à lexécution des règlements, jugeaient les
dilVérends. etc.
— Maîtrises et jurandes. Lr iiiailre, ou ,uarde, était un ol'licier
cliarué de réprimer les a luis (|ni se commettaient dans les corpora-
tions de marchands: le juré exerçait le même office à l'égard des
cor|mralions d'ouN riers.
lYlajesté, du latin iiuijcsidlcm. de //iaJoi\
Sancli-isima ilicitidrum
Majcilds...
(.IiiVKNAL, Satire I, lli.)
— Gondemar, roi des Visigoths, qui régnait en Espagne, vers
(310, est le plus ancien souverain qui ait pris le nom de Majesté.
Il a été donné aux rois de France par ordonnance de Henri II,
du () mai lo48. Auparavant, le titre usité était Altesse, Excellence.
lYlajolique, ou mnioluiue. de inajoUca, pour mnjovica, de
Majortiuc.
Faïence imitée de celle qu'on lahriiiuait à Majorque, d'après les
procédés arabes. Elle est à fond uniforme d'un émail stannifère
hlanc. dur, opaque, sur lequel sont peints des sujets.
IVIajor de table d'hôte. Espèce de chevalier d'industrie, se don-
nant des allures militaires, portant un grade, des titres, des
décorations qui ne lui ont jamais appartenu. (L. Larchey.)
Majorât, du latin majornlum: de major, aîné.
Titre inaliénable de propriété immobilière, attaché à la posses-
sion d"un titre de noblesse, et qui passe avec lui à l'héritier mâle
du titulaire.
Mal, du latin inaluni et maie.
Mahim signifie aussi pomme : c'est de la pomme qu'est venu le
malheur du genre humain.
En provençal tnau., qui se retrouve dans : maudit, Jiiauvietle
{malam, avem), oiseau malfaisant ; maussade.
Maf se dit quelquefois i)Our maladie : mal caduc : tomber du
haut mal (nom ancien de l'épilepsie). Rabelais {Prol. lir. II) l'appelle
mau de terre, parce qu'il jette à terre.
— Mal de tète veut dormir ou paître. Ce proverbe, inventé sans
doute par un gourmand, ne doit être accepté que sous réserve ;
12 MAL
("ir si r.il)Slin('iico poiil qiiolfiiicfois ciiiiser le rii;il do tcHo, il iirrive
plus souvent qu'il est dû ;'i des e-inharnis piistrifjues, et. d;ins ce
(•;is, la diète est le seul remède eflicace.
— Mal d'aulrui ne nous touche qu'à demi. — Ou n'est i)as
insensible au niallieur de ses amis, mais le jnal qui nous an-iveà
nous-mêmes, nous aiïecte bien davantage.
— Le mal est i)resqi)e loujours suivi de son correctif : c'est ainsi
que la fatuité ius[)ire la risée ; limpudeuce. le mépris : l'audace, le
dégoût; le charlatanisme, la défiance et l'incrédulité.
Malade, du grec malnhos, mou(?): ou bien pbi!(it de uinle
(iplLim, mal disposé : jadis malajife.
0 es maliiptes, o allre prc ta les.
{Piii'-mp de liotcK.)
(Ou il est malade, ou un autre le tient prisonnier.)
Provençal nialaout.
Pcr son joi pot iniihiid: (jitrrir.
(Par sa grâce elle peut guérir les malades.)
Per (jtierir innicuilia de peccal.
(Le comte L'F. l'orntiis.)
[Vices et Vertus, f" 79.)
(Pour guérii' la maladie du péché.)
— Bien malade qui en meurt. Quelqu'un dit à une paysanne, qu'il
n'avait pas vue depuis longtemps : « Ali ! mon Dieu, ma l)onn6
femme ! je vous croyais morte. — C'est ma sœur qui est morte,
répondit-elle ; mais c'est moi qui ai été la plus malade. »
Maladie, dérivé du précédent.
— Les maladies viennent à cheval et s'en retournent à pied.
Les maladies sont, en elîet, très lentes à guérir ; mais on est
souvent prévenu de leur arrivée par des symptômes qui permettent
de les combattre et de les écarter. Il en est de même de nos
alïections morales, auxquelles notre raison doit résister, pour les
empêcher de nous subjuguer.
Princijjiis nlislti : scro mcdieina paratur,
(jnn main ]icr lonijiis invalnere 7noras.
(Oviiii:.)
(Combattez les premières atteintes : il est trop tard de remédier
au mal, quand il s'est fortifié longtemps.)
Facilius cadinitis quam resurcjunus.
La vie n'a qu'une porte, et la mort en a mille.
MAL 13
Malgré, mot ('oni|»os('' do f/ra/m/i. piV'. Provoiu;;il fjfaf. (Kinidar
(plaire).
iMluivniit à : do iiiiiiivais .uiv.
On a dit aussi maufjré, qui se retrouNe dans DKiiujvi'cr.
C'est Estrade, qui s'est fait connestaiile du roy Fraiiçovs uiau.trré
lui. (D'Aubiané.)
— iMdiKjrchieu, pour : malgré Dieu. Kn provençal tnfUKjvahuou.
On disait aussi, dans le sens opposé : <iu (jr il Dieu, c'est-à-dire à
la volonlé de Dieu !
Malheur, du latin malam horam (f). Ou plutôt de mal et heirr
{niujuriinn) : anciennement etir, opposé à bonheur.
— Le malheur produit sur l'âme le même elîet que le feu sur
l'encens, dont on ne connaîtrait pas le parfum, si la llamme ne le
dégageait.
La myrrhe ne coule que par les incisions faites à l'arhre qui la
produit.
Du raisin éc-rasé sous le pressoir, jaillit la liqueur qui réjouit le
cteur de l'homme.
La pluie, qui attriste la nature, féconde la terre et fait naître les
fleurs et les fruits.
— A quelque chose malheur est bon.
Les livres saints ont appelé le malheur « un trésor de miséri-
corde céleste », parce qu'il ramène l'homme à la vertu : Misère
humaine à Dieu ramène.
Heureux ceux qui pleurent. (Mathieu, Y, 4.)
Res sacra miser. (Sénèque.)
Le malheur, loin de dégrader l'homme, l'élève, s'il n'est pas un
lâche. (Silvio Pellico.)
Dans le malheur, l'âme égarée se retire en elle-même, s'assied
toute pensive, et admet en silence la salubrité des réflexions.
(Sterne.)
Pour un liomme énergique, les grandes douleurs et les grandes
joies sont comme de hautes montagnes, d'où il découvre le cours
de la vie. (J.-P. Richter.)
La coupe de la vie serait douce jusqu'à la fadeur, s'il n'y tombait
quelques larmes amères. (Pythagore.)
Ces idées, en apparence paradoxales, sur le malheur, ont été
empruntées par le Christ à la morale de l'antiquité. Les dieux
indulgents du paganisme étaient les dieux de l'homme heureux :
pas un pli sur leur front, pas une ride de tristesse sur leur physio-
Vt MAL
iiomif. ()i',(Oiix qui soiilTiciil nciiIciiI (|ii(' Inirs di(MJ\ S(iiiHV('iit usée
eux: loi est le secret du (li\iii |);ir;i(l(t\(' (le rKvanf{ile : «Heureux
roux qui ]ilouroiit ! « M;iis los liiMuds nioriilisle.s païous avniont
préparé los voies du (llii-ist bien avaut sa venue. Socralo, Pvtlia^oro.
IMaton, avaient déjà disposé le clianip qui devait recevoir la houno
soinence ; et Viraile avait mis dans la houclic de Didon ce \oi's, (pii
est devenu la devise des âmes S(;nsililes :
lldud ù/iuird tmili, uilseris succurrere lUsrn.
[Knriih. 11. IVV.)
MylliC'iirciisc, j'iipijris il |il;iiii(ln' le luylliiMir.
(Cil.Iii hi.l '
Delillc a reproduit littéralement dans sa traduction :
Je connais lo malliour, cl j'y sais compatir.
Ali ! qui vorsa des pleurs treuililc d'en voir couler,
lit, plus on a souffert, mieuv on sait consoler.
(Du BKl.i.nv.)
A raconter ses maux souvent on les soulage.
(Cohnkii.i.k', Pohjeiifip. I, 3.)
Charles Nodier a dit : « Les mallieiireiix aiment mieux » : et
Déranger : « Le plaisir rend l'âme si honne ! »
Ce n'est pas le plaisir qni rend l'âme bonne, comme font dit.
après Béranger, les dévots de la matière ; ce qui rend lame honne,
c'est la douleur. On est hon, il est vrai, tant qu'on est sous le
charme d'une joie nouvelle: mais l'hahitude du honheur n'est pas
l'école de la charité. Le malheur, au contraire, rend hon et compa-
tissant, développe la vertu et rintelligeuce.
Vexât io dat intolJectum. (Isaïe, XXVIII, 19.)
Inijeniam mnld ■so'pe movent.
(OVIDR.)
Mathêmata, path(}mata. (Les malheurs sont des leçons.)
— Presque toutes les hiographies des grands artistes commencent
par ces mots : « Né de parents pauvres... » La gène et les priva-
tions semhlent nécessaires pour féconder le génie.
C'était du moins l'avis de Charles IX, qui disait : « Les artistes
ressemhlent aux chevaux, qui deviennent mous dans la trop grande
ahondance : il faut les nourrir, mais non les engraisser. »
Poussin dit à un gentilhomme qui lui montrait un tableau de sa
composition : « Il ne vous manque. Monseigneur, pour devenir un
grand artiste, qu'un peu de pauvreté. »
J'eus le malheur pour maître, il ma beaucoup appris.
(Traduit de CoNFfcirs.)
MAL 1')
— Les K.iiyplioiis ont rc'itrésenté Mercure (la raison) arracliani
les nerfs à Typhon (le mal), pour en faire les cordes de sa lyic
divine.
— Les iniif()i'niistt!S de Konie ont pris pour eniblèine un fei' Itatln
par un inartcaii. siii' une enclnnie, avec ces mots :
...hll iliiiit rnliirrii furinnm
pour signifier que le malheur fortifie Tàme, la façonne.
— Le malheur rend hon, dit rÉcriture; mais la misère mène
souvent à l'incoiidiiite.
— l'n malheur ne vient jamais seul.
l'n iiialhiiir loiijiMii's Iniiin' un iiiallieui" après soi.
(Piisox, (luxtnve.\
Aliiid ex (ilio maliuii.
('l'KriFNCK.)
— C'est un petit malheur : je ne le regrette pas heaiicoup.
Malheur d'autrui ue déplait rpi'à demi.
Malheureux, dérivé du précédent.
Malheureux comme les pierres.
Mes maux suffiraient à faire plusieurs miséral)les ; comme mou
malheur est sans remède, ma douleur est sans consolations.
— La consolation des malheureux, est d'avoir des seml)Ial)les.
Le coeur humain est ainsi fait, qu'il se réjouit parfois moins d'un
honheur qui lui arrive, que de l'infortune qui frappe le voisin. Cette
triste vérité porte à croire que l'espèce humaine w été appelée ainsi
par antiphrase. 11 est plus consolant de penser que c'est par un
sentiment instinctif que nous applaudissons au malheur, comme
ser\ant de haume apjdiqué par la Providence sur les plaies de
l'orgueil humain.
Quand La Rochefoucauld dit •: « Nous avons tous assez de force
pour supporter les maux d'autrui «^ il paraît supposer, en pessi-
miste qu'il est, que dans ce sentiment il y a d'abord le retour sur
soi-même, et aussi l'attrait d'une curiosité malsaine...
Lenis est consolatio ex miseriis aliorum. (Cicéron.)
— Je suis le plus malheureux des hommes ! Locution hyperbo-
lique, si l'on veut bien regarder au-dessous de soi.
— Pour se consoler de tout ce qu'on soutTre, il faut songer à tout
ce qu'on ne soulïre pas. (Clairon.)
— Toutes les fois que j'éprouve le besoin de me plaindre, je
pense à la dure existence des cochers d'omnibus, dont la journée,
IC. MAL
passée cnlrc r'n'\ cX lerro, diirt^ (h; s<',[)l lifiiiT'S ;'i iiiiiiiiit, ...cA j<}
l'ciifoiico ma [ilainto.
IVIalitorne, du laliii //i////' fonu/fm/i.
Mal luiinié, Jiial l'ail, mal Itàli.
Horace a dit, en parlant de vers mal laits :
Kl imilr lornntos inciuli raldurc rersiis.
Scarron se sert de mnlplaisant dans le sens de malHornp :
11 no kit jamais créature
De plus malplaisante tournure.
C'est le plus jirand malitornc et le plus sot dadais. (Molière.)
lYlalle, du l»as-Iatin mahi : .uermaniqiic mahaJa.
Synonymes : mademoiselle Manette (Vidocq), jeu de mots sur
malle et manne (corbeille) ; Savoyarde.
. lYlalo (Saint-).
Il a été à Saint-Malo, les chiens lui ont mangé les mollets.
Vers le xi« siècle (?) les habitants de Saint-Servan, exposés aux
attaques des pirates, se réfugièrent dans l'île d'Aaron, et y fon-
dèrent une ville, qu'ils nommèrent Saint-Malo, du nom de leur
évèque. Pour éviter d'être surpris la nuit, ils lâchaient autour des
remparts une troupe do chiens, qui dévoraient les étrangers.
Albert le Grand, dominicain, dit : « La garde de Saint-Malo était
commise toute la nuit à la fidélité de certains dogues, qui faisaient
bonne et sure patrouille. »
Chateaubriand {Mémoires, tome I), dit : « Ces chiens furent
condamnés à la peine capitale, pour avoir eu le malheur de manger
inconsidérément les jambes à un gentilhomme, ce qui donna lieu à
la chanson :
Bon voyage, monsieur Dumollel...
On se moque de tout. »
— Le couplet final du vaudeville de Désaugiers : le Départ pour
SatiU-iMalo. joué en 1809, au théâtre des Variétés, par Brunet, est
resté très populaire :
Bon voyage,
Monsieur Duniollet,
A Saint-Malo, déiianiuez sans naufrage ;
Bon voyage,
Monsieur Duniollet,
Et revenez si le pays vous plaît.
Ce Dumollet est, dans la pièce de Désaugiers, une sorte de
Pourceaugnac, de prétendant niais, que l'on éconduit après force
MAN 17
iii\stili(;ilioiis. Ca' type urolesqno. njouté à l;i ,u;ilcrie des Jocrisse
cl dos (];id('l-H()iiss('l. (Mil le plus ,ur;iiid succès ;'i ct'tto ôpoipie.
— Ce (pioliliel siippliipie. ou plaisantant, aux personnes dépour-
vues do inollols: uiais il nosi plus auère en usape, aujourd'hui
(pion 110 porto plus do ciilollos coiirtos. et (pie U' port du pantalon
(lissiuiulo lo |ihis ou moins (rouihoupoiut do la janihe.
lYlalotru, du lalin /iki/p ins/nir/us. (Ménage.) Ou |)liil()t do ma/
et de asfrc. coniine rin(li((iient l'ancienne forme t/ialas(ru, et le
proven('al fnalas(re,uè sous nnc mauvaise étoile. (F. Génin.)
Asfria-, en provençal, signifie qui a les astres favorables.
A l'origine, malotru n'emporte rpie l'idée de mallieui'eux digne
do compassion ; mais, d(''s le xiv siècle, il est pris comme injure,
par suite de la tendance déplorable que nous avons à passer de la
jiilié au mépris.
Collo-ci lit un choiv ((u'oii n'aïu'ail jamais cru,
So trouvant à la lin loni aise et tout Ihmivouso
De renconlrci' un malotru.
(La F(l^rAl^•E, la Fille.)
lYlaltôte, du latin harhare mala tolla. maudite taille. D'où
uialtàlicr.
lYlamamouchi^ mot forgé plaisamment par Molière, dans le
Boarijcois f/enfi//ioi/uiie. Ce mot n'appartient à aucune langue:
)nais on s'en est servi depuis pour désigner un' homme bizarrement
accoutré.
Mamelle, du latin aiainillam. Diminutif do mammam : d'où
maman {'.), l'omau papa.
A'nlha nutra hcstia lia popai^ cf P'C!/-'', •^'''^ liomfi fil éléphanl.
[Elucida ri de las proprielas, f° oO.)
Nulle autre béte n'a les mamelles à la poitrine, sinon homme et
éléphant.
Manant, du latin manenlem, qui demeure. Anciennement
manent. domicilié, riche (?).
Le sens premier s'est altéré, et le mot en est venu à signifier un
campagnard, un vilain, un homme grossier.
Au mémo radical se rattachent: manoir, ménage, mesnie, mesnil.
De (letil l'a mis au grant,
El (ic povri; l'a lait manant.
(Roman de In Rose, vers 2,858.)
Même mésaventure est arrivée à paij.uui et à rilain, qui signi-
fiaient habitant du pays ou de la métairie.
48 M AN
lYlanceau, dérivé du Mîins. nom ,t:éo,Lrr;ii)liiqii('.
Tu M.iiiccMii vjiiit un Xor-ni;in(l cl demi, (^elle locution, qui
ressenddc ;i une siiliro, s'est éluhlie sur ce que les monnaies du
Miiine valaienl mollit'' plus (|ut' c(;iles de Normandie.
Manche, lalin numirain. de mnnus. main.
1" Partie du V(Menient (jui enveloppe le bras.
2° Partie d'un iuslrumml par laqueli(! on le saisit (piaud rm veut
s'en servir. S'apptdie luunpc, quand il s'ai^it d'une lance.
— Au temps où l'on se mouchait sur sa inanciie..., c'est-à-dire
au temps jadis, quand on était très simple.
Il paraît qu'on portait autrefois un mouchoir sur la manche, pour
se moucher ou pour s'essuyer le visa.ae.
La pièce du costume ecclésiastique qu'on appelle audarimn, ou
manipulum , mappuhi, en français fanon, manipule, en est une
preuve. C'était un linge que les prêtres (à l'autel) portaient pour
essuyer les larmes qu'ils versent pendant la consécration, en pen-
sant aux péchés du peuple. Ils récitent, en revêtant cet ornement,
la prière suivante : Merear, Domine, portave manipulum fletiis
et do loris.
— Se faire tirer la manche : se faire prier.
Les Latins disaient : scindere pœnulam. Déchirer le manteau,
c'est-à-dire retenir quelqu'un par son manteau.
Horum vix eijo attiyi pœnulam. (Gicéron.) Je les ai à peine
engagés à rester.
— Jeter le manche après la cognée : désespérer trop vite,
abandonner une a Claire. (Rabelais. Prol. liv. IV.)
Manchot, vieux français manc, du lalin mancum.
Il n'est pas manchot : il a de l'adresse, de la force.
Non manci fuere milites. (Tite-Live, VIII, 31.)
Mandarin, du portugais mandar. corruption du sanscrit man-
trim, conseiller.
Nom des lettrés de la Chine, parmi lesquels sont choisis les
employés de l'État. Ce sont les fonctionnaires de l'ordre administratif
et judiciaire. Ils forment dix-liuit classes et sont plus de cent mille.
J.-J. Rousseau dit : « S'il suffisait, pour devenir le riche héritier
d'un homme qu'on n'aurait jamais vu, dont on n'aurait jamais
entendu parler, et qui habiterait le fin fond de la Chine, de presser
sur un bouton pour le faire mourir, ...qui de nous presserait sur ce
bouton ? ))
MAN 19
Mangeoire, dérivé do t/iaiif/er.
Toiinifr le cul ,'i I;i iii;iii,ueoirc : refuser les moyens de gagner
s;i vie.
In cluirhiliin. ;'i In foire, annonçait (pi'il faisait voir un cheval qui
a\;iit la tète où les autres avaient la quene. C'était un cheval qu'il
iivait attaché à la mangeoire par la queue.
Manger, anciennement manyier. du latin manducore.
Synonymes : jouer de la mâchoire, boulier, boustifailler (trivial),
gobichonner, branler le menton : cotonner le moule de son pour-
point (Rabelais) : s'en donner jusqu'à la garde, faire bombance,
faii'e ripaille.
— Oli ! lu seras ainsi tenu pour un {loltron.
— Suit. poiirMi (|ni' toujours je liranlc le mouton.
|M<ilih;k, Di'fiit, v, 1.)
— Manger avidement, boutVer, bâfrer, bauffrer : Après les pre-
mières baiilTreures. (Rabelais.)
.Manger comme un ogre.
— Manger peu : du hout des dents. Dente supcrho (Horace) :
d'une dent dédaigneuse, pour peindre le dédain avec lequel le rat
de ville goûtait au repas du rat des champs.
— Manger comme un oiseau, l/oiseau ne mange qu'un grain à
la fois ; mais ces giains se succèdent sans interruption toute la
journée. Tout en mangeant peu à la fois, les oiseaux consomment
plus que les mammifères.
— Le public se rue sur les buliets avec un empressement qui
ra|)pelle les navrants épisodes du naufrage de la 3Iéduse.
(lu la p/ui'cs qufDii (jhKJlnx porbnli : l'intempérance tue plus
de gens que l'épée.
— Depuis Milon de Crotone. qui assommait un l)œuf d'un coup
de poing et le mangeait tout entier, il n'y a point eu peut-être de
plus gros mangeur qu'un Saxon, qui dévorait tout ce qu'on lui
présentait : un mouton, un veau, un cocbon, deux boisseaux de
cerises avec leurs noyaux, etc. Il vint à bout, un jour, d'avaler une
éci'itoire. les plumes, l'encre et le sable. Des témoins ont afllrmé le
fait devant le Sénat de Wirtemberg.
L'histoire de cet ogre a été publiée, au xviif- siècle, sous ce titre :
De pobjpJuKjo Wirteinberfjen>ii disserlatlo.
— Les Grecs et les Romains ne mangeaient qu'une fois par
jour ; ne faisaient qu'un grand repas.
Les Gotbs ont introduit l'usage de deux repas.
20 MAN
— Tout It' iiioiidc iiiiuij:»'. riioiiiiiic d'cspi-il seul s;iil iiKiii.ucr.
(Brillât-Savarin.)
— Il faut nian.tinr' poiii" Nivrc cl non |ias \i\it' |ii»iir niaiijrer.
(Molière, Aroî-c, III, rj.)
C'est la lonniilt' ('■cononiiiiiic, et liygiéniqiie des Latins : fj/r ni
vivas, ne vivas ut erlas, (Mionréo en abrétié sons cette forme :
E. V. V. N. V. V. E., et qu'Harpagon trouve si Itelle qu'il la vent
faire graver en lettres d'or sur la clieminée de sa salle à manger.
— Bourdaloue disait à son médecin qu'il ne faisait qu'un repas
par jour. « Ne le dites pas, reprit le docteur, vous nous ôteriez
toutes nos pratiques. «
Vivilur pnrvo bene.
(UORACF.)
(On vit l)ien de peu.)
...Me pascimt olicœ.
Me cichorea, lecesque malvœ.
(HonACE, Odes, I, 31.)
(Des olives, de la cliicorée, des herlies tendres, voilà ma nour-
riture.)
— Qui veut vivre sain, dîne peu et soupe moins.
— Les Touaregs, habitants du Gtiat (désert du Sahara), géants
très robustes, ne mangent ordinairement que de deux jours l'un.
— Manger à la même écuelle. Dans les festins du Moyen-Age,
chaque homme se trouvait placé à côté d'une dame. Un seul couvert
était destiné à chaque couple : verre, assiette, tout était commun.
Cela s'appelait « manger à la même écuelle ».
Et si n'y eut celuy qui n'eust dame à son escuelle. (Roman du
xiii<' siècle.)
Ainsi aura chascun une mienne niepce à son escuelle à souper.
{Percef'orest, vol. I, cli. 144.) Pour ce jour, j'ay à ce manger mangé
à son escuelle. (Ch. suivant.)
— Manger en commun est une grande cause d'intimité. C'est la
satisfaction en commun d'un besoin matériel : et, quand on y
cherclie un sens plus élevée c'est une communion. (Xo}'. ami de
table.)
— Manger à plusieurs râteliers : tirer profit de plusieurs emplois.
Il y a des gens qui, moins embarrassés que l'àne de Buridan,
mangent à deux ràtehers, et s'en trouvent bien.
— Manger son blé en herbe : dépenser d'avance son revenu.
Achetant cher, vendant à bon marché, et mangeant son blé en
herbe. (Molière, Arat^e, H, 1.)
MAN 21
Molièro a oinpnintô ce passage à Rabelais fliv. III, 2).
Les Latins ilisaieiit •.Boniini suinn rona)fiuere{Vè[Yowç:.) Ebibere
rem (Horace.) Decorare pecunia/n (Cicéroii.)
Do grand train, — sur l'eslrain (la paille).
.•\ trraïKk' ciiisiiK', — pauvreté voisine.
Trou trop soineut ouvei't sous le nez, fait porter souliers
décJiirés.
On apprend plut(U à nianuer son i)ain qu'à le gagner. (Proverl)e
russe.)
— ÂNoir mangé son pain blanc le premier: avoir été plus
benreux qu'on ne l'est.
— Gbapon de buit mois, manger de roi.
— Il me mange dans la main : il est trop familier.
— La vie est attelée à deux mauvais cbevaux : le Ijoire et le
manger.
— Manger s'emploie aussi poui' mar((uer le désir, l'affection :
manger de caresses, manger des yeux.
On dit aussi : jolie à croquer.
Mangeur, dérivé du précédent.
(irand mangeur : glouton, goinfre, gouliafre, grandgosier, ogre.
Autrefois : fripe-lipe.
D'un grand mangeur on dit qu'il a toujours dix aunes de boyaux
vides.
Il a la maladie du renard, qui mange une poule et un canard.
Il avalerait la marmite des cordeliers.
Manichéisme, mot bistorique, doctrine de Manès.
Hérésie du m*' siècle, qui admettait deux principes opposés :
celui du bien et celui du mal ; la lumière et les ténèbres.
Manie, du grec mania, folie, égarement d'esprit : d'où maniaque.
Synonymes : dada, marotte, tic, toquade.
En grec, mainesthai sianifie être en fureur.
— Une manie occupe comme une passion, et n'en a pas les tour-
ments.
Manière, du latin maniim.
Le vieux français avait l'adjectif manier, qui a la main babile.
A donné l'adjectif maniéré, plein de manières, d'affectation.
Être maniéré, faire des grâces, poser. Se dit d'une personne qui
22 M AN
force son tiilciil, (•oiiiiue rfiiic de l;i lahlc <>r. r;iHf(i;iiiiiii est In
caricature du naturel.
Manigance, du l;iliii nuinira. inaiiclic (IJicz). La iii;iiicli<' est
très utile aii\ faiseurs de tours.
Quelques-uns le font venir de ///y//(.7o///--o, nwKjnignouner, fardi-r :
de maii(/(>, uiarcliaud d'esclaves, ayant riuihitude de les farder, di'
dissimuler leurs défauts.
IntriLiiie, tromperie.
Le nui là ne se doute pas de la inaniuance. (Molière, Gcorijcs
Dandin.)
lYlanique, du latin mnniram, mitaine.
Morceau de cuir dont les cordonniers se iiarnissenl la |)aiune de
la main poui' ne pas se blesser.
Parler uiani([ue. Parler de ce qui concerne sa profession.
Tractant fal)rilia faliri.
(HoilACE.)
(Chacun parle de son métier.)
Manne, de l'hébreu nuin.
Manna dans l'Évangile : Manducaverunt patres vestri manna.
Nourriture que Dieu donna aux Israélites dans le désert, [)endant
quarante ans. C'était un petit grain blanc et arrondi, qui tombait
tous les matins, excepté le jour du sabbat. i^Exode XYI, 4 :
Psamnes LXXVII, 15.)
— La manne est une substance mielleuse, qui se produit encore
au Sinaï, et que les moines mangent. Selon Bertholet, elle serait
due à la piqûre d'un insecte sur les feuilles du tamaris mannif'era.
L'analyse, faite par Bertholet, a donné : oo de sucre de canne,
25 de sucre interverti, 20 de dextrine.
— La manne céleste : la parole de Dieu (terme mystique).
Manquer, du latin m an eu m, manchot.
Se dit absolument, dans le sens de : faire faillite.
Dans les autres cas, manquer est toujours accompagné d'un
complément.
Bilboquet. Bref, Cabochard est en déconliture : il a manqué. —
Atala. De combien manque-t-il ? — Bilbooikt. Il manque de tout...
et le reste est pour les créanciers. {Les Saltiinbanques. 11, 4.)
Mansarde, nom historique.
Mansard, célèbre architecte du xvii« siècle, introduisit ce senre
MAN 23
do roniltles. invoiilé on Il.ilio. C'osI au Louvre que cette innovation
fut nppliquôo pour la prcuiirro l'ois par P. Lesf'ol.
Manteau, du latin nuinti'Unm.
Isidore de Sô\illo dit : Mnulollmn ll'u^jianl rocdut, qnod manus
tcfjcbdt tanhun, es/ cniin brccis (unirhis.
C'était le nom de la niante coui'te des Kspaunols.
Marliii aiira mou grand manteau
Oui' mautc à eau j\'tymo!ogi.sais.
(S.VHIIAZIX ?)
— Manteau d'Ai-le(piin. Draperie davant-scène, qui masque les
bords du rideau de rlKupie côté du théâtre.
C'est par cette draperie (pie, dans la comédie italienne, Arlequin,
personnage principal, entrait et sortait.
— Le manteau de l'erreur, de la religion, de la vertu, de l'ano-
nyme, etc.
Se couvrir du manteau de la vertu : cacher ses vices sous l'appa-
rence de la vertu. La même image se'troiive dans pallier ses fautes
(palliuî/i, manteau).
C'est s'e.xcuser humhlement, se couvrir du masque de l'humilité,
comme font les hypocrites.
Mea me lirlute involvo.
(IloUACE.)
(Je m'enveloppe de ma vertu.)
Que l'imposteur sait IMen, de traîtresse manière,
Se faire un beau manteau de tout ce qu'on révère !
(MoLifciiE, l'art u/fe.)
Se draper dans le manteau de la gloire ou dans les haillons du
vice. (G. de Nerval.)
— Le manteau d'Aiitisthène. — Antistliène était un philosophe
cynique, qui, pour se distinguer, portait un manteau troué. Socrate
lui dit : « U Antistliène, j'aperçois ton orgueil à travers les trous
de ton manteau. »
L'école cynique porte aujourd'hui le nom de « Bohême ». A côté
de ces fanfarons de la guenille, il y a aussi les vaniteux, à qui l'on
pourrait dire : « Sous les plis de ton riche manteau, j'aperçois...
que tu n'as pas... d'habits. »
— Le manteau de Joseph. — Ou emploie cette locution dans un
sens satirique, pour se moquer du chaste Joseph.
Un dit même que la Putiphar devait être une femme hargneuse,
24 MAQ
Uirdéc oi sur lo roloiii' ; quo, s'il on aviiit éUi ;iiilrciiieiil, le jeune
Joseph se perdiiit... et sauvait son manteau.
— I.e nianlOMU d'Klie faisait des miracles...
l'Uie fut enhué au ciel sur un char lire par des che\an\ d*; feu.
à la vue de son disciple Elisée, à (pii il laissa son manteau pour
gape du don de pro[)liéties et de miracles.
M. Villemaiu a dil, en parlant de Rernardin de Saiul-Pierrc :
« C'était une espèce d'Elisée, (pii aNail reçu le manteau de .leau-
Jaccpies. »
Maquereau, du latin nuiruldni. tache.
1" Poisson tacheté.
2' Au llgiiré et très lihrement : entremetteur, proxénète, soute-
neur, Monsieur Alphonse, Desgrieux de has étage, Mercure galant.
A son féminin maquerelle.
Dans ce sens ligure, le mol semble venir du llamand nxdkeUuir.
de mockciK trallquer.
Maquignon, anciennement maquillon. A la même oriuine que
maquereau (?).
Se rapproche de maquUlnye, à cause des ruses employées par
les maquignons pour dissimuler les défauts des chevaux qu'ils
mettent en vente.
Maquillage, de fnacuia?n(^.), tache.
Peut-être faut-il chercher l'étymologie à la même source que
pour maquignon ?
— Se maquiller, c'est se farder avec force carmin, hlanc de
perle ou poudre de riz : se faire des grains de beauté avec une
épingle rougie au feu ; s'agrandir démesurément les yeux avec du
Itouchon brûlé ; se carminer les lèvres avec du rouge liquide.
Four rt'parer dos ans rirréparable outrage.
(Racine.)
De cette manière, on arrive à faire illusion aux hommes peu
clairvoyants.
On trouve dans Gaultier de Coincy. poète du xiii" siècle, les vers
suivants :
Telle se faiçt nioull remanier
Par senblanchir, par se farder,
Que plus est laide et plus est lilesme
(Jue péchiez mortelz en caresme.
Maquis. Nom donné, en Corse et en Italie, aux petits bois, ou
plutôt aux Ueux incultes couverts d'arbrisseaux^ tels que myrtes,
MAR 2o
arlioiisiers. lauriers, etc.. qui formont des fourrés oi'i l'on se cache
aisément.
Map. Désinence fantaisiste, née vers 18'i0, (lu'on ajoiiiait à la lin
(l'un mot. (Ml l;i sulistituaul à la dernière syllabe : épicier, épiceniar.
lYlarabout, de l'arahe marabath, lié à Dieu, l'rétre musulman.
S'emploie aussi pour désigner un homme très laid, ou une cafe-
tière à £tros ventre.
Maraud, ori.iiine \\\iiç\:\A\\\^. Maraudeur, pour marnais nUlcur ?
Ména.ue le dériNe de riiéiu-<'u nuiroud. ,uueu\(?).
D"a|)rès Génin. il viendrait plul(U de maroulh'. rustre, manant,
(pii n'est lion à rien qu'à manier la marre, sorte de houe [)Our
hécher.
Vous êtes un sot, un maraud, un cocpiin. (Molière, Avare.)
Mais l'origine de maroujh' n'est pas plus connue que celle de
maraud.
Marc, de l'allemand mark, qui a donné aussi marche.
.Monnaie de compte, qui a varié selon les époques.
C'était à l'origine un poids de huit onces, la demi-livre ancienne
de Paris.
Marcellus. (Tu Marcel/us eris.) Commencement d'un vers de
Virgile, qui a servi d'occasion à un tableau d'Ingres.
Auguste se plaisait à se faire réciter par Virgile lui-même des
morceaux de Y Enéide. Le peintre a représenté l'impression pro-
duite sur ce prince et sur Octavie, par l'éloge du jeune Marcellus.
Octavie s'évanouit, dit-on, à ce passage, et, voulant marquer au
poète sa reconnaissance, elle lui fil compter dix grands sesterces
par vers : environ o2.000 francs.
Marchand, du latin mercatiun. marché.
D'autres le dérivent du bas-latin merc«û?«re; quelques-uns vont
jusqu'à y voir une transforiliation de marcheur pour mereatorem .
Au radical mei'c, se rattachent : mercantile, mercenaire, mer-
cerie, commerce.
Il se rapporte aussi à Mercurius, Mercure, dieu du commerce
(et du vol). On représentait ce dieu avec des ailes, une bourse à la
main, pour indiquer que la fortune est la récompense de l'activité.
Le caducée, qu'il tient dans l'autre main, est le symbole de la paix
et de la prospérité : le bâton marque le pouvoir ; les deux serpents,
la prudence : les ailes, la diligence ; l'olivier, emblème de la paix,
2fi MAR
s'onroulo autour du caducée avec les scr|)(;nls. pour luoulrer (jue,
si la ruse est rembléme du roniiuerce, la paix le fait prospérer.
Oe Mercure vient aussi tiicrrurlaJc, lixaliou oflicielle du jirix
des denrées sur les- uiai-cliés.
L'acception marrhcur. (pii représciilc l'idée dacti\ilé. a |»résidé
à la création des noius des piaucipaics fonctions couiuiercialos.
Ainsi de inènie {\\wW marrlunitl uiarclie (le vrai iiiarcliand primitif
a été colporteur) : ['a;/çn/ d'alTaires mène les choses avec activité ;
le néfjoriant (ncr otlum) ne pi'cnd pas de repos : le traficant
va acheter une marchandise pour la transporter au loin.
— Néfjoce et trafic prennent également un sens péjoratif.
Le nom de courtier, provençal courratier, est fait d'un fi'équen-
tatif, (pii siiiuille une agitation perpétuelle.
Le nom de courtaut de boutique, que nos pères donnaient au
modeste commis de magasin, pourrait bien avoir la même origine.
A courlaut vieilli a succédé (jnlopin, puis trottin, saute-ruis-
seau, qui ont une signification analogue.
Commis vient aussi de cbmmittei'e, envoyer ou préposer.
— De marchand à marchand, il n'y a que la main.
La bonne foi doit suffire dans le commerce.
Chasser les marchands du temple. (xMathieu, XXI, 12 ; Luc, XIX,
45; Jean. Il, lo.)
Marchander. Hésiter. Jadis bafjuifjner, barguigner.
Marchandise, dérivé de marchand.
Vanter sa marchandise : faire l'article.
Marchandise d'occasion ou de basard : bric à brac.
Marchandise démodée : rossignol.
Marchandise de mauvaise qualité : camelote.
Marchandises en magasin : stock.
Marche, du latin marchia, frontière d'un pays.
Pays frontière, c'est-à-dire situé à une journée de marche d'un
autre pays.
Un lionrat baron qu'era do la marca de Proensa.
(Po.N* DE CaPDEUIL.)
. (Un baron distingué, qui était de la marche de Provence.)
En roman, marcar, confiner, démarcation.
Las terras del roi de Fransa que marcaron ab las terras d'en
Richart. (Bertrand de Born.) Les terres du roi de France qui
confinaient avec celles de Richard. (Voy. marquis.)
MAR 27
Marché, l.ilin movratuni.
Ht'iiiiioii (le mardiaiids et de iii;nrliandises. Acliat.
— Il n'y a que les lions marcliés qui ruinent.
On n'a jamais Iton marrlié d'une mauvaise nianiiandise. C"est,-;i-
dire ^\\\\^\\ pair tonjotics trop cher ce qui est mau\ais ou ce dont
on u"a pas besoin.
— Par dessus le manlié. (Vo\ . la bonne main.)
Un paysan achète une prosse montre en argent, et, avant de
conclure, en aperccvani une petite, en or, il dit à riiorloger : « Vous
me donnerez i)ien celle-là i)ar dessus le marclié. »
Marcher, du latin nicrcari, les marchands étant obligés d'aller
et de venir pour leui' commerce.
D'après Diez, ce serait passer d'une marche à une autre.
Rabelais dit démarcher : s'en aller, partir, mot fait comme
l'ancien verbe départir.
Démarcher ne se dit plus, mais se retrouve dans démarche.
Synonymes: aller à pied, ...pedibus cum Jambis, ...se servir de
la voiture de M. Soulier, ...piler du poivre (route, en argot, se dit
poirrière).
Marcher en frottant les jambes : l)attre le briquet.
Marcher de travers : aller de guingoi.
Marcher droit : faire son devoir.
— Le poète Pope était bossu et avait les jambes torses. Le roi
d'Angleterre dit un jour, en le voyant à la cour : « Je voudrais bien
savoir à quoi nous sert ce petit homme qui marche tout de travers. »
Le poète répliqua : « A vous faire marcher droit. »
Marcotte, serait plus exactement écrit margotte. de l'italien
margoita, du latin tnergore, plonger.
Branche tenant encore à la plante mère et qui, recourbée et mise
en terre, y pousse des racines, et qu'on sépare du tronc quand elle
a une végétation suffisante. Le marcottage doit toujours précéder
de quelques jours l'ascension de la sève dans les végétaux.
Mardi-Gras.
Synonymes : Carêmentrant, le dieu des andouilles (Rabelais).
Maréchal, vieux français mare.^caf, bas-latin marescalcus.
Celui qui soigne les chevaux.
Le maréchal de France était, à l'origine, chargé, avec le conné-
table, ou comte de l'étable, d'entretenir en bon état les che\aux
du roi.
28 MAR
M;iré(li;)l de Friincc. iiiîiiï;rliiil de niinp, iii;ir(''cli;il des lo;:is,
signiliaieiit iii!in|(ieiii' de <;iiii|), de lofrenients; c'est-à-dire que ces
gens mesuraieiil remplacement et l'espace de terniiii ijne devaient
occnpor le camp ou le logement des troupes.
Maréchaussée, de niaréchfnin, forme ancienne de maréchal
(\n\ se Iroine <li(>z Villehardouin, et encore aujourd'hui dans le
j)atois de certaines provinces.
— Ancienne juridiction des maréchaux de France.
— Corps de gens à cheval, très ancien en France, qui servait à
maintenir la sûreté pui)lique. et qu'on a remplacé, en 1793, par la
gendarmeries
lYlarée, d'un adjectif itiarcus: du latin mure, mer.
Mouvement alternatif et quotidien des eaux de la mer, qui cou-
vrent et ahandonnent successivement le rivage.
C'est l'ensemble des phénomènes connus sous le nom de flux et
de reflux.
— On appelle aussi marée le poisson de mer. D'où l'expression :
arriver comme iiiarée en carême, fort à propos.
Margot, diminutif de Marguerite.
Surnom populaire de la pie ou agasse.
Marguillier, du latin mafrlcularlum : celui qui tient le registre
des pauvres. Autrefois marinier.
Marguillier serait donc la corruption (non, mais la forme popu-
laire) de matrlculler, fabricien gardien des registres matricules
dans les églises. C'étaient, avant 1792, des fonctions importantes,
parce que, depuis 1539 (sous François I^r), ils inscrivaient les
naissances des enfants catholiques apportés au baptême.
La loi du 20 septembre 1792 coulia aux maires la tenue des
registres de l'Etat-Civil. (Voy.)
Mariage, de marltatlcum, dérivé. de marltum, mari.
Dans la mythologie /igmen, usité en poésie.
On le représentait sous les traits d'un beau jeune homme cou-
ronné de marjolaine.
Synonymes: duel à coups de canif; conjungo: amour permis (style
des Précieuses) : savonnette à vilain, quand il s'agit de l'union d'un
roturier avec une tille nolde: un livre ennuyeux avec une belle
préface.
— Les Romains désignaient le mariage légitime sous le nom de
MAH 29
ronJiKjiuin, jnslii' nupliif. Los ciilnnls issus de co mariage s'appe-
laient .//^s7/ libori : tandis (pio les enfants du conculiinat étaient dits
Uhcri na/ura/es. Auguste avait été forcé de donner au concnbinat
un lilie légal. Quant aux enfants nés d'une union défendue jtar la
loi, ils s'appelaient }}of/ii ou spiii'/t.
La femme qui avait des rapports avec un iionime marié s'appelait
pellex (peau). Il y avait, en dehors de ces deux états, la courtisane,
la louve, mise sous la protection de la Vénus vulgaire.
— Aujoiird'liui, les mariages sans légalité s'appellent: mariage
de Jean des Vignes. ...en détrempe, ...sous la cheminée.
On dit aussi : marié au xiii" arrondissement: parce qu'avant
l'annexion des banlieues, en 18G0, Paris ne contenait qne douze
arrondissements ou mairies.
C'est un moiifip, le monde prospère
Des époux sans épouse et des enfants sans père,
Où l'estime s'égare, où s'égare l'amour :
Et si grand, si nombreux, qu'il faudra (piehiiie jour,
Comme ont fait les Humains pour le concubinage.
Annexer forcément ce faubourg au ménage.
(I'aii.i.krox, les Faux Mcnngox, 1868.)
— Il y a encore la variété de mariage appelée morfianatujne
(Voy.) de la main gauclie, ou incognito, contracté par un prince
avec une personne de rang inférieur, à laquelle il donne son nom,
mais qu'il ne reconnaît pas officiellement comme sa femme. Dans ce
mariage, le mari donne la main gauche à sa femme, au lieu de la
droite. Les enfants ipii en naissent ne jouissent pas de tous les
droits de la légitimité.
Moryanalique vient de l'allemand nK^njengahe, don du matin,
présent fait à la femme le matin qui suit le jour des noces.
— Les lois civiles fixent l'époque du mariage :
En France, à 17 ans pour les hommes, lo ans pour les femmes.
En Autriche, 20 et 16.
La loi Romaine, lo et 13.
Lycurgue, 37 et 17.
Platon, 30 et 20.
— On a vu des rois épouser des bergères.
Caribert. dit l'abbé Velly, répudia sa femme légitime pour épouser
Theudégilde, fille d'un berger.
Louis XIY épousa M^e de Maintenon, qui se plaignait un jour de
n'être pas heureuse. « C'en est trop pour une pauvre femme dont
la vie est déjà pleine d'amertume. Je ne peux plus vivre delà sorte,
:iO MAR
et j'iiiiiic mieux luoiiiir tout ;i riiciiic! — Mourir! Madîiiiic, i't''|)!irtil
d'AiiliiuiK''. d'un ;iir |(I;iis;iiit cl iiicrrdnir. niicllc f;irit;iisi(! \oiiS|(reii(l
donc de mourir? Vous avez donc iiromesse d'épouser Dieu le l'ère
en troisièmes noces ? »
— Mnriape d'argent : celui qui se fait dans des Mies d intérêt.
Un mariage daiyent on de raison, opposé àinaiMaged'iiicliiiation,
est lin mariage sans raison, jjarce qu'il se fait sans amour : c'est un
crime contre le hon sens...; mais c'est dn pain sur la plauflie.
Oui se marie par amour,
A bonnes nuits et mauvais jours.
Qui se marie par argent,
A jour et nuit le cœur dolent.
Celui (pii prend la vieille fenmie.
Aime mieux l'argent (pie la dame.
Fol et hors de sens.
Qui prend femme pour son argent.
Un homme qui avait épousé une femme très laide, mais fort riche,
disait pour excuser son choix : « Je l'ai prise au poids, non à la
façon. »
La fortune est un fard qui eml)ellit les plus laides.
Une demoiselle disait en regardant la riche corheille que lui
envoyait son vieux fiancé : « Je préfère le présent au futur. »
Quant aux mariages d'inchnation, il y a le proverhe:
Amours qui commencent par anneaux ,
Finissent par couteaux.
— Dans le mariage, la femme doit apporter le déjeuner, et le
mari le dîner. C'est-à-dire que les conditions et les fortunes doivent
être équivalentes, truand les époux n'ont rien ni l'un ni l'autre,
on dit : « C'est la faim qui épouse la soif. »
— Le fond des choses, dans le mariage, c'est la crémaillère, et,
à hieii prendre, c'est même à cela que se réduit cette admirahle
institution.
— Dans le mariage, l'homme doit acquérir, la femme doit con-
server. (Aristote.)
Ce précepte est pratiqué à rehours dans la haute société de Paris,
où l'on peut dire que le mariage est une raison sociale où le mari
représente la recette, et la femme la dépense.
Marier, du latin mnrltare, de mnritum, mari.
— Se marier: en finir avec la vie de garçon ; prononcer le grand
oui: faire une fin.
MAR :u
On dit : ôtaltlii' s;i lillo.(]'ost l;i Ir.uliiclioiulii latin Collocdro lUiani
tilii'til. (Téronce.)
Marie-toi dans ta nie si tu veux, dans ta maison si tn pcnx.
(jui \a Inin se marier.
Sera trompé ou veut trouiper.
Iluiiimi' (le passajito,
N'attnipr feiimie sage.
Les amants peuvent s'aimer avant de se connaître: les époux
doivent se connaître avant de s'aimer.
Aller à la ^{uerre ou se marier,
Ne doit se conseiller.
Mariez-vous, vous ferez bien : ne vous mariez pas, vous ferez
mieux.
Les jeunes .aens ne doivent pas se nuirier encore, et les vieillards
ne le doivent jamais. (Diogène. )
— Qui non litlgat, cœlebs est. C'est le célibataire qui n'a point
de disputes. (Gem. Varus).
(^e proverbe est cité par saint Jén'ime. Ainsi, il est décidé par
l'autorité même d'un Père de l'Église que la femme apporte le
trouble dans la uiaison ; mais, dit Montaigne, il est pbis facile
d'accuser un sexe que d'excuser l'autre.
— La Genèse a dit : « Il n'est pas bon que l'bomme soit seul,
donnons-lui une compagne à sou image. »
— Qui se marie à la bâte, se repent à loisir.
Le mariage est. en etîet, un acte si important, qu'il demande de
grandes réflexions avant de prendre une résolution définitive.
Un vieux proverbe dit: « Aujourdbui mari, demain marri. »
Melius est nubere quani iiri. (Saint Paul, I, Cor., YII, 9.) Mieux
vaut se marier que brûler.
Marin, du latin marinum, de 7nare (mer).
Le mauvais marin est un marin d'eau douce ; le bon marin est
un loup de mer : ce qui sous-entend parfois un bomme i)rutal et
grossier.
— Les loups de mer ont fait leur temps. Les marins ne jurent
plus par mille sabords, et le jour où l'étiquette sera bannie de tous
les salons, elle se retrouvera à bord des navires de guerre. (E. Al)Out,
Le buste.)
— Femme de marin, femme de cbagrin.
Marine, même origine.
32 MAR
— L'Aiiic (le, l'liiiiii;iiiit('' ;i bien Ljc;iii(li (l('|iiiis rcxpéditioii des
Aruoniiiilcs jiis(iir;'i ccthMlc (llirisloplic (^)loiiil): et do l'Arche de'
No6 jiisiiiriiii (ircdl Easlurn, il y ;i un pi'ojirrs iiiiiiieiise.
Après les informes essais de constructions navales parles sauvages
creusant des troncs d'arhres, viennent successivement: la galère
ou trirème ; les ualions do Saint-Louis: les caraques; les caravelles
deChristO[»]ieColoml) : les vaisseaux de Louis XIY. peints par Vanloo,
sculptés par Puuet, et commandés par les Jean-liart, les Duquosne,
etc. ; les bàtimonls à vapeur, pa(piol)ots, cuirassés, etc.
Il y a aussi les navires desinictcurs : hi-i'ilnls, liomhardes, machines
infernales, etc.
Les navires d'apparat, de plaisance. La .calère sur laquelle Cléo-
pàtre alla rejoindre Antoine ; les mystérieuses jonques lleuries des
villas chinoises; les yachts anglais : les gondoles de Venise.
Citons encore les bateaux amphibies hollandais, nmnis de voiles
et de roues pour la locomotion terrestre.
Le tvideiil de Neptune est le sceptre du monde.
(Lkmiriihe.)
La domination des mers fait la force et la prospérité des nations.
Les États qui ont obtenu de grands succès par leur marine avaient
un port de mer pour capitale. On peut citer comme exemples dans
l'antiquité : Tyr, Carthage, Athènes, Alexandrie, Marseille : dans
les temps plus rapprochés : Venise, Gênes, Amsterdam, Londres.
Marionnette, diminutif de A/aî'ion. venant de Marie.
(juelques-uus y voient la forme mariole, anciennement petite
figure de la Vierge.
— Il y avait à Venise une célèbre procession, où l'on finit par
substituer des poupées de bois aux nobles Vénitiennes qui, à l'origine,
faisaient sous le nom de Marie, l'ornement de cette solennité.
— Horace appelle les marionnettes : alienis nervis mobile
ligniun.
— Jean Brioché, vers le milieu du xvii'^ siècle, a introduit en
France les marionnettes. Son tils les perfectionna.
— On appelle inarionnette ou pantin, un homme sans volonté,
sans énergie, qu'on fait mouvoir comme on veut.
Marivaudage, de Mariraux, écrivain du xviir siècle.
On devrait plutôt dire marivaaxage (?).
Désigne la manière et le style précieux, la recherche afïectée de
l'expression, la subtilité du sentiment.
MAR 33
— (In ;i dit de .M;iri\iiii\ : ( Il conuMit les petits sentiers ((iii
mènent au cœur, mais il iuiiore la lii-ande route. »
On a dit aussi qu'il s'amusait à peser des œufs de mouches dans
des Itaianres de toile d'araiuuée.
Piflarjoiet, de marjoldine (?), ou plut(U de maviolet.
Une des nonilirciises \ai'iétés du petit-uiailre : nu petit homme
qui lait le galant.
Rabelais emploie mavioh't.
L'ori.tiine marjolaine aurait en sa faveur le i'a|)proclienient de
niiKjuet et de narcisse.
Marmite, étymolouie ti-ès iucertaiue. Peut-être marnior : les
anciennes marmites étaient de marbre.
La marmite des Invalides... que tous les provinciaux vont voir, à
cause de ses dimensions ,ui,iiautes(iues.
Cette marmite a hérité de la célébrité de celle des Cordeliers de
Paris, qui était en grande réputation, de même qu'un gril monté
sur quatre roues ; aussi disait-on d'un gros mangeur : « Il avalerait
la marmite des Cordeliers. »
Marmot, marmaille, marmouset.
Petit garçon.
De Laurière le dérive du vieux français merme, très petit, myr-
midon. D'autres le tirent de marmot, singe; ou encore du grec
mormô, épouvantait, figure grotesque. Enlin Géuin y voit le mas-
cidin de mar'motte.
I^aut-il tiLiun iiiariuouset, qu'un maudit étourneau...
(MoLIÈRK.)
— Croquer le marmot : attendre longtemps.
On dit aussi maronner, pour maugréer ou marmonner .
Marmonnant de la langue : mon, mon, mou, von, von, comme
un marmot. (Rabelais, IV, lo.)
Marmotter, onomatopée.
Reniuea' les lèvres, munuurer des mots indistinctement.
Uue marniottoz-\oiis là, petite imperlineule ?
(Mol.lKliK.)
Marotte, pour mariotte, ou pour mérotte, petite mère, petite
poupée.
Espèce de sceptre surmonté dune tète de folie, avec des grelots,
qui est l'attribut de la folie et de Momus.
3
34 MA h
— Los fous (le cdiir iiorl.iicnl l;i iiuirolU-, l*;ii- .siiilf. on ;i ;ijjpr'lé
marolto touto iiiiinic, loiilc ;iHcrli()ii (l(''réjiié(3.
CliMciiii ;i s;i m.'irollc. son (l;i(l;i.
Si/i/s ci/if/itr (ill rihnl IIS l'sl crnir. (il.'iloii.)
-- Tons les fous ne portent p;is lu inîirott(!.
Marque, on rnau:he, de r.-illeniiind uuirck.
D'où : inarue, marécluil, marqnis; niarclie d'Aucône.
Marqne snr l'épaule: armes de Gascogne. (Rabelais.)
iVlarquis, jadis mnrrhU : de marche, frontière.
V\\ marijnis était un oflicicr préposé à la garde d'une marche, ou
frontière d'un État, pour la défendre et la protéger, en chasser les
ennemis. D'où: lettres de marque, ou droit accordé de passer la
frontière d'un autre Etat et d'y exercer la piraterie.
— Les anciens appelaient le commandant d'un pays frontière
nomardm, du grec nomofi, division, arche, pouvoir.
— On appelle marquise (auvent), nne couverture protectrice,
sorte d'ahri pour garantir les marches d'un perron, le seuil de la
porte.
— Dans les mots marquant, (jens de marque, le sens est
détourné et exprime l'idée de noblesse, de haute dignité, qui était
attachée au titre de marquis.
Marronnier, origine incertaine.
— Le marronnier du 20 mars. Le 20 mars, Napoléon rentra à
Paris, venant de l'ile d'Elbe, et le marronnier des Tuileries fleurit,
comme pour exprimer sa sympathie aux Castagniers. On fit cette
remarque, parce qu'à cette époque, les bonapartistes étaient dési-
gnés à Marseille sous le nom de castagniers (châtaigniers), par
allusion à la Corse, patrie de Napoléon, où le châtaignier croît en
abondance.
— Le marronnier du 20 mars donne de rombre aux pi-onieueurs.
et de l'ombrage au Gouvernement (1851).
Mars, origine mythologique.
Mois consacré au dieu Mars parRomulus.
Mars arrive comme un lion, et s'en va comme un mouton.
Mars jette la bar-que en terre, et dit que ce n'est pas lui. (Pro-
verbe provençal). Gest-à-dire que pendant l'équinoxe de printemps,
un calme subit succède souvent à une grande tempête.
Marteau, anciennement marfel, du diminutif inusité m«/Ve//////^,
du latin mar/ulum.
MAS 35
— M<n'U'l s'est ilil ;i\aiit iiKirlc.iii. coiiiiih' 'A^/Ve/ avant cliùleaii.
(lii le retrouve dans iiKirlch'r. nxirlohujc.
— (]liai'los-.Mart('l. iiiaiiv du palais, père de IV'pin-lo-Brcf, aïeul
de Cliarleiiiauiie. icciil son sniMioni à canse de sa \aleni', (jni écrasa
les SaiTa/.ins cuninie a\ec nn inarlean. el les chassa de France.
— A\()ir niarlel en tète : nn ,urand sonci.
Mais j'ai iiiarli'l en liMi-, ri Idiil aiili-c laiirail.
(H.MnKiiocui:, Cri.tjiin.)
M'a donné martel in lesle. (D'Aiihiuné. Fa'no^lr.)
Mienlv \ault eslre niai'leaii (prenclunie. (Uahelais.)
.Mienx \aiit élre haltan! ([ue lialtii : être dn C(Hé du nianclio.
Martin (Lété de la Saint-). La fête se trouve le M novembre.
— 1! y a plus d'un âne à la foire qui s'appelle Martin. Dicton
trivial, par liMpiel on s'evciise dune errenr produite par une sin)i-
litnde de noms.
IVIartingaie, oriuine incertaine.
.loner à la martiniiale : doubler sa mise, dans resjioir de re.eaoner
ce qu"on vient de perdre.
Martyr, du oroc marfui\ témoin.
Celui qui endure la mort ou les supplices pour rendre témoignage
de la vérité.
Le martyr est la victime: le martyre /wr/;V/y;v'('//yo est le supplice.
Mavh'oy est le lieu du supplice.
— Il faut deux personnes pour faire un martyr : une victime et
nn bonri-eaii.
— Souffrir le uiartyre, comme un martyr : soullrir beaucoup.
Je ci'ois volontiers les histoires dont les témoins se font égorger.
(Pascal. Pensées.)
— Le mot inarlijre exprime une soulfrance subie pour une cause
juste. L'errenr peut avoir ses victimes, quelquefois très dignes de
pitié ; la vérité seule a ses martyrs. C'est ce que les Pères de l'Église
ont exprimé pai' ces mots : Causa, non pœna, facit martijriuni.
Les idées végètent de sang humain. Les révolutions descendent
des échafauds : toutes les religions se dixiniseut par le martyre.
(Lamartine.)
— Être du commun des martyrs : n'avoir rien de remarquable.
Cette locution est prise de l'office de l'Église : De ronunuul mar-
Ujrinn, office général des martyrs.
ftlas, l'adical niansion,. demeurer.
36 MAS
l"ji l;iii.L!ii('(l(i(icii si,L!iiili(' /iia/soN.
Au iiK'iiic i"i(lic;il se i';i|i|iorl('iil : iiiiiisoii. iii;isiin'. iik'-imI.
Mascaret, ('lyiiioloj'ic doiitiMisc
U('llii\ viulciit (le la mer dans la (laroinic cl. \i:w rxiciisioii. dans
reniltoncliurc, des autres j'ivirres.
Quel(iut'S-uiis y voient le nom de Saint-Macaii'e (I), ainicUalion de
la localité où l'enioiitent les eaux de la Gironde à neuf lieues de son
enihouchure.
iVlasque, ilalien tiun^rhcrd, i\\\\ reproduit l'ai'alKr nKisrlituuii .
houiïon.
D'où : mascarade, mascarille.
— Va\ provençal mascd siiiiiilie sorcière, que Diez tire de masti-
care, màclier, paire cjue les sorcières passent pour man.iier les
petits entants, comme le Manduciis des Latins.
De celte acception de sorcière, masque en est venu à celle de
faux visage, destiné à faire peur. On pourrait peut-être le rapporter
au provençal mascarar, noircir, màchurer, barbouiller le visage.
— Emmascar, en provençal, est synonyme d'envoûter.
L'envoûtement est une praticjue de sorcellerie qui s'accomplit en
fabricpiant une ligurine de la personne contre laquelle on veut
tourner le malétice, et en soumettant cette figurine à des conjura-
tions. On plante des épingles à l'endroit du cœur ou en d'autres
parties du corps, en articulant des imprécations.
Quant à envoûter, il vient du latin vultum, visage, effigie.
— Rabelais appelle le masque un cachelet (1, 13), pour cache-laid,
les femmes laides s'en servant volontiers.
— Jeter le masque, personam deponere (Gicéron) : se montrer
dans ses vraies dispositions, à visage découvert.
Le masque tombe, riioiiime reste,
Et le héros s'évanoiiil.
I.I.-H. ROLSSKAC.)
...Eripilnr pcrsona, manel res.
(Fa"crkck, UI. 57.)
— Mercutius dit, en entrant au bal des Gapulets : « Masque sur
masque. »
Masse, du latin massam, monceau, amas.
U'où : massif, a.îiasser.
Masse informe et grossière :
...Ttiidis inilificst(iqi(e moles.
(Ovide.)
.MAT 'M
Matamore, oriuino lilléraire. De resp;i,iinol inatamorDs.
F.iiif.iron. faux lirave.
PcrsonnauP de la coméilie espauiiole, qui l'ait le uraïul pourfen-
deur de .Maures (de f/infar, tuer, ipie l'ou reli'OU\e dans inniiidor.)
C'est le pendant de X'HorrihilirrlhUf'ax des Allemands : du
SjKtrriili) milanais : du capitaine Fracasse».
Tous desccndenl du Pi/rtioiioliiniccs de Piaule, le soldai fan-
faron.
IVIatassin, de l'espa.iinol inntaclùn.
Aul reluis danseur hoiilVon.
Mater, du persan mat, mort.
Soumettre à la discipline. Expression empruntée au jeu d'échecs.
011 le roi est mat quand il ne peut plus bouger sans être pris.
Mathieu (Fesse-) : avare, usurier.
('elle locution semble venir de fe^t ('-Mathieu (21 septembre),
parce que saint Mathieu avait été publicain et est fêté par les
usuriers.
— En 1700. lors de la suppression des titres de nohlesse, Mathieu
de Montmorency parla en faveur du décret. Les nobles, mécontents
de son apostasie, lui décernèrent l'épithéte injurieuse de « Fesse-
Mathieu ».
Mathusalem, nom bibliipie.
Pati'iarclie, aieid de Xoé. lils d'Fuoch. Il eut un lils à l'âge de
187 ans, et deux hlles à 782 ans. Il mourut en 1344 avant Jésus-
Christ, à l'âge de 9G9 ans. {Genèse, Y, 21.)
D'où l'expression : vieux coiume Mathusalem. Le peuple dit :
Mathieu salé.
Matin, du latin matiiliinim {tcmpns).
On dit : demain au matin, et demain matin. La première manière
est plus correcte, uiais l'usage a l'ait prévaloir la seconde.
— Matineux se dit de celui qui a rha!)itude de se lever matin :
matinal de celui qui s'est levé matin.
— Matin s'est présenté aussi sous la forme main (manc).
— Tels rit au inaia, iiiii le soir pleure ;
Et tels est au soir courroueiés
Qui le niaiu est joians et liés.
— -Merci, sire, dist le vilain :
Tel rit au main qui le soir plore...
— Je suis vostre homme et soir et main.
38 MAT
Main ('\isl(' riicdrc (l;iiis ilciiidin. (|iii est pour fli' nidfiii. cl (hiiis
Icinlrmiiin (coiTiiiilioii de riiiiciiMiiir liiriiic l' cndiniuiiu). ;iiissi
ridiciilo f|iio, scr.iil Icxprcssioii le Uijtvojiox.
Cctlo t;iii(r (le i"(''(lii|)lic;ili()ii de r;ii'liclt' n'est |i;is l;i S(;iil(' (|ui
oxislo d;iiis l;i hinuiic l'i';mç;iis<'. Ainsi, le mol lu'rvc, v<Mi;inf de
hcdcra. a d'aitord élé /i/'crrc, l'Iiiorrc. Inscnsihiciiioiil on sonda
l'ailiclc an sniislanlif. en sn|i|ii'inianl 17/,: jinis, d<'\ant le mol ainsi
modilié, on plaça de noiiNcan larlirlo. I^os l*n»\rncaii\ disent
Vhierri, poni" le liei're.
— Se lever matin : se lev(>r dès jxih-on minet. (Voy/^
Se lever à l'anlhe des monsclics. (Ha hélais, IV, î).)
Au desjucher (Rabelais, III, !^), c'est-à-dire lorsque la \olaille
descend de la perche on elle s'était juchée pendant la unit, on
jurlioir. antrefois jue.
Cliîiiilons Noi'l tnnt an ^eir (|ir;in (|fsjiici|.
i.Mmioi. Bdlliiilo dit jour de Norl.\
Déjurher s'est dit aussi du départ des troupes pendant la unit.
IViâtin, autrefois inastin. Italien iiiasiuio: du l)as-lalin iiKisnnin.
nuuson, ferme.
Chien de garde, gros chien, chien de berger.
Oui a bon voisin, a bon mâtin.
Matines, du latin matuiinas ijioras).
Première partie de l'office, qui se disait après minuit, à la pre-
mière heure de la journée. On les dit de grand matin, quelquefois
(dans les couvents), à minuit, ou même la veille. On les appelle
alors nocturneft ou r///«Ms\ Elles ont été introduites dans la liturgie
par saint Ambroise. (Voy. lieures.')
On se rappelle les vers de Boileau :
Les cloL'liOs, dans ios airs, (K' leurs voix aruviilim-s.
Appelaient à grand bruit les cliaiilrrs à nialines.
— On a appelé « Matines Françaises » la Sainl-Bartliélemy, le
massacre des protestants, qui commença à l'heure des matines,
par opposition aux Yèpres Siciliennes.
Matois, origine incertaine. Quehpies-uns le tirent de nuite. nom
d'une place de Paris, où s'assemltlaient les liions, appelés alors
« enfants de la mate ».
Entants (|ui sont de la uiaîe
Savent jouer de la {lattc
.le suis un lin matois. (Molière, Georrjes Daiidi/}.')
MAX 39
lYlatrimonium, innt latin, qui sijinilic maruif/f.
Miii'li|iii' ;iiili-(', suiis espoir de mnlrimuiiiiiiii,
/^lll■;lit (iiimtI l'oi-cilli' ;i l;i Icnhilimi.
(.Xiol.lKllK, ljl'-J)it, 11, \,\
Matrone, du l;iliii ma/ro/K/m. (laine.
1*^11 jiiris|)ni(li'nc(' modrnic de iiuMlcriiK^ lépale, juatroue sionilje
sauv-fcmmc.
Vigiles de nialronos : examen (pie loni siihir les sa.ues-feinnies,
[lar ordre de la jiislice. à une l'einino on à nne 1111e.
lYSaures, du latin niaiiros (do eoulenr foncc(^).
Xoiii (jiie les Homains donnaient anx habitants de la Mauritanie,
pays de r.Vfriqiie du Nord, qui comprenait le Maroc et Aluer.
!)e là : architecture moresque.
iViausolée, du nom de Mausole, roi de Carie, mort en 3o3. Son
(!'[)0use Arlémise lui lit (Hever un tombeau tellement magnitique,
(pTil passa pour une des sept merveilles du monde, et que 3jau-
so/c'c (^st de\enii synonyme de riche tomheau.
IVlaussade, mot composé de maa, pour mal, et de sade, vieille
l'orme venant de sapulmii. qui a du goût.
Signilie donc peu agréable.
Des plus génies et des plus sades. (Rabelais, Prol. II.)
Mauvais, anciennement ma/cais, origine incertaine.
En tout pays il y a une lieue de mauvais chemins. C'est-à-dire :
en toute chose il y a des difficultés.
Maxime, latin maximam (sentent ia m).
Maxime, sentence, aphorisme , apophtegme : tous ces mots
s"em|iloient pour désigner une pensée, un précepte exprimé avec
bri('\eté, concision et netteté. iSéanmoins, le mot maxime s'emploie
plus ordinaireuient pour désigner une règle de morale pratique ;
le mot sentence s'emploie dans le même sens ; aphoi'isme est
propre aux langues scientillques ; quant à apopfite(jme, il désigne
une sentence attribuée à quelque personnage célèbre.
— Une maxime est une proposition générale, qui contient une
vérité p l'a tique.
Qiiiiiquiil [ti-u'cipie-Sj eslo brci:is.
(IIoKACK, Art pocliqiie, 335.)
(Les uuiximes doivent être courtes.)
Maximum, mot latin : superlatif, très grand.
40 MI'C
Valeur la plus tiraudc! f(ti(' [iiiissc allfindiv un olijcl.
Les mathématiciens eniploieiii Ir pluiicl iiifi.riina.
iVlayeux.
En 1(S;}(), MaycMx. illiisln"' |)ar le crayon do Traviès, élait un type
de bossu lilicrlin, vaniteux, spiritnel. so taruiiant aussi de l)ra\oure
cl do patriotisme. Mayeux olilinl une iii-aiide noliiio de ridicule.
IVlazette, étyniolouie incertaine.
Petit on mauvais cheval, qui n'obéit ni au fouet ni à l'éperon.
Depuis Imit jours ontiers, avec nos longues traites,
Nous sommes à pifjuer nos cliiennes (Je mazetles.
(Moi.lKliE.)
— Au tlgnré, mazette désiane : une personne sans force, sans
énergie; un joueur inlial)ile.
Mea culpa, expression latine : par ma faute.
Faire son mon eulpa : reconnaître ses torts.
Faire son mea culpa sur la poitrine d'un autre : accuser les aulre>
d'une faute dont on est soi-même coupalde.
Méandre, nom historique. Rivière de l'Asie-Mineure. très
sinueuse.
— Au figuré, chose remplie de détours, de difficultés.
Dialecticœ menndri. (A. Gelle). Les su1)tilités de la dialectique.
— Plutarque, dans son livre Des Rivières, dit que le Méandre
s'appelait autrefois Anulxiinôn, c'est-à-dire qiii retourne sur ses
pas.
Le nom de Méandre lui vint du lils de Gercapbus et d'Anaxibie.
Les anciens croyaient qu'on trouvait toutes les lettres de ral[)haliei
grec dans les sinuosités que l'orme le Méandre pour se rendre dans
l'Archipel.
C'est ainsi que le Yar, latin Varus. courbé, doit son nom à son
cours oblique et serpentant ; et la Seine, au celte ^<?^/<rt«, serpent
On voit sur les anciennes monnaies de Paris un serpent, emblème
de la Seine, qui entourait l'ancienne Lutèce.
— Dans les arts, on appelle méandres, des ornements suivant
une ligne qui revient plusieurs fois sur elle-même.
lYlécène, latin Mecœnas, nom d'homme.
Mécène, ministre et favori d'Auguste, s'est immortalisé par la
protection qu'il accorda aux gens de lettres. Il protégea surtout
Virgile, et, avant de mourir, écrivit à Auguste pour lui i-ecom-
MEC 41
mnndor Tloi'.iciv Vii'iiilc lui dôdia ses Gi'-orîi'Kiuon. ol. Iloriu-c
plusieurs Oïli's.
Lu Mi'C('iii' nisriiiriil pciil faire dos Virj^'ili's.
Aujourd'hui, il u'y ;i plus de Mécènes : iu;iis il n'y a pas heaiiciiiiii
d'Horaces et de Viiyiles.
Méchant, ancien français inesclK'dnl (rcussissiuil mal), de
minus rtitlcnlcm. — .Méchéance: calamité.
Autrefois, on employait dhiI, maie :
Suit l"a(l\rntiin' Ikhiiu' ou malo,
liirc, pliir, (Ml (•(iiii'nuiv mi yale (joie).
(Al, AIN ClIMlIlKl;.)
JA/Z.dans ce sens, est resté dans les composés : malheur, malade,
malheureux, malechauce, uialepeste.
En provençal, mari, marias. D'où le vieux mot marisson.
Il cùl de marisson pli'iirr roninip une vache.
(RÈG^iF.n, Satire III.)
— Méchant comme la ,uale, ...comme la orèle, ...comme un âne
rouge.
— Sur mille hommes, il n'y en a pas un de hon. (Ecclésiasle.)
Riiri ({niijpe boni : numéro vix sunl lotidcm (juni
T/iclinrnm porta-, rcl ilicilis ostia Nili.
(JrVK.NAI., Xm. L'O.I
(IjCs gens de hien sont rares : à peine en pourrait-on com[)ter
autant que Thèbes a de portes, ou le Nil d'embouchures.)
— De même que l'or est plus rare que le ter : qu'il y a plus de
chardons que de roses ; plus de vermine que de bétail ; de même
les méchants sont plus nombreux que les bons. (Scharayl.)
Le l)oniieiir des méchants comme un torrent s"écoulo.
(R.vcixt;, Athalie.)
Les méchants sont buveurs d'eau. La chanson ajoute : « C'est
bien prouvé depuis le déluge. »
Escbine, pour accuser Démosthène de méchanceté, lui reprocha
d'être buveur d'eau.
La méchanceté se troiiNc plus sou\ent a\ec la sottise qu'avec
l'esprit. (Duclos.)
J'aime mieux les méchants que les imbéciles, parce qu'ils se
reposent.
lYlèche, origine incertaine. On a proposé micca, venant de
mixKs. morve.
42 .Mi:i)
— Clioz los ancioiis, qui poétisiiiciit (oui. I;i iii;ili(''i'o iikmiio, les
vases en potorio élaienl fails à l'iiiiilatioii de l;i foiiiio liiiinaiiie et
des (linérontes parties du corps.
Les anses étaient les oreilles : (piel([iies-nnes poêlaient des
anneaux, qni Jignraient des pendeknpies. Certains vases n'avaient
pas d'anses, ce qui jnslilie la lociilion : sourd comme un [lot.
L'orifice du vas(^ ét;iil la honclie, dont les lèvres sont les bords : le
buveur et son vei're s'end)rassent mutuellement. Le vase avait un
col, un ventre ou i)anse. La lampe avait son nez. et lorscpi'elle était
à deux becs, on les com[)arail mu\ narines : le mot latin nast/ftvia,
\ase à trois nez. s'appli{piail à roMioclié. dont l'oi-ilice a la forme
d'une feuille de trèlle. La mèche, mixta, d'une lampe, par suite de
ranalouie, constituait la mucpunise de ce vase, et nous disons
« moucher une chandelle >».
lYlédaille, du latin ini'lnlhnn, mêlai, par riutermédiaire de
l'italien incdatjlia. (Mènui mot que maille.)
Synonyme : la monnaie de la gloire.
— Chaque médaille a son revers: 11 n'y a pas de viande sans os.
pas de rose sans épines.
Ce proverbe-calembour fait allusion à la double signilication du
mot revers, et signifie que tout événement heureux a son mauvais
côté. C'est exact, car il n'y a pas au monde de perfection absolue,
ni de bonheur parfait.
— Médaillon : collret aux sou\enirs, tii'e-lire du cœur.
IVIIédard, nom de saint.
S'il pleiil lo jour de saini MétlarU (x juim.
Il pknit (|uaraiilc j()ur.s plus tard.
Saint Médard, prédestiné par son nom, qui rappelle le verbe
latin madère (mouiller), reçut en partage les orages et la grande-
maitrise des déluges. Le Moyen-Age l'appelait marjister dilu.ru.
Il est probable que le proverbe remonte plus haut que l'étabbsse-
ment du calendrier grégorien, qui l'a dépossédé de sa prérogative.
On a avancé de douze jours les fêtes de tous les saints : avant cette
époque, la Saint-Médard correspondait au solstice d'été (20 juin).
Il est donc probable que le proverl)e s'appliquait plutôt au solstice
qu'à la Saint-Médard. Saint Gervais, au contraire, monta à la place
de saint Médard (19 juin), et hérita de son influence. (Voy. ."mainte
Liice.)
— Le !«'' mai 17i27, fut enterré dans l'église de Saint-Médard le
M Kl) 43
diacre Paris, (pii acipiil une nMioiiiinéo itoslliiimc |»ar los prcHondiis
niiracles (iiii s'accomjilissaienl sur sou loiulieaii. Louis XV, [loiir
iiiellro fin aux scandales causés par les Conru/sioiuiairr.s, lit
feiiuer le ciiutMit're : ce qui donna lieu au distique connu :
De |i;ii- II' l{(>i. (léfcnso ;i Dieu
l)i' l;iiiv iiiii';icl(^ en ce licii.
l/éplise Saiul-Médard. située rue .MoulVetard, a été dé.ua.fjée en
1801). des constructions qui ['entouraient. Elle possède un tableau
de sainte Geneviève par Watleau.
Médecin, du latin meiliciiunn : de //ict/'r/. d"oii aussi reuiède :
d(^ uu'uie (pie curare, avoir soin, a donné curé, médecin de rànie.
— Synonymes : carabin, vieux nom des garçons barbiers, au
temps où les barbiers ex.erçaient la cbirurgie et se servaient de la
seringue, comparée ironitpiemeut à une carai)ine.
On a appelé aussi les apoliiicaires les carabiniers de la Faculté.
{Théâtre de Glierardi, t. YI. )
Suppôt de saint C('tme : mauvais médecin.
Marcliand de mort subite : médecin des cbèvres : docteur en
soupe salée.
Fi (If la pille nuMli'ciiie
Oui l'iiomrao en la mort acheiiiiiie !
Les médecins et les marécliaiu
Tuent les liommes et les chevaux.
.Médecins de Valence,
Longue robe, courte science.
...K.)
Médecin, guéris-toi toi-même. (Saint Luc, IV, 23.)
.Médecin, tu fourmilles d'ulcères.
L'eau, l'exercice, la diète sont trois grands médecins.
La médecine guérit quelquefois, soulage souvent, console tou-
jours.
Médecine est une l'arce à trois personnages : le malade, la
maladie et le médecin. (Rabelais.)
Osiris a inventé la médecine en Egypte : Esculape n'a lait que la
perfectionner.
Caton le Censeur cliassa de Rome et de l'Italie tous les médecins.
Rœrbave disait : « Tenez-vous la tète fraîcbe, les pieds cliauds,
le ventre libre, et moquez-vous des médecins. »
L'École de Salerne recommande trois grands médecins : res[irit
gai et tranquille, l'exercice modéré, la diète.
44 .Mi:iJ
— K(iil;i|>li(; de iiiédcciii :
...llir ]irr i/iirin loi jncufiT jticel.
I';ii- sa liiiiili', j)ai- sa sulislancc,
\a' lail dàiii'sse a n'fail ma sanir ;
Kt je (lois plus, en ci-llc circniislancf,
Aii\ àiii'S (|ir;i la Kaciillr.
Médiocrité, du l;iliii incdiocfis (mriliiix. inilicii).
L;i iii(''di(»cril('' csl l;i reine du monde.
L;i iiiédioci'ilé est le ti'ésor dt'S sa.ucs. (N'olt.'iii-e.)
On doit désirer nne heureuse niédioci-ilé. (|ui soil ;iu-dessiis du
mépris, et ;iu-dessous de l'envie. (S;nnl-K\reniond.)
...0 iiU'diocrili' !
MÎTc lies lidiis ('S|)rils, compa^'iii' du repos.
(La I'.imaim:, YM, 6.)
Aitirmii t(iiis<jnr iiirrliorrihilrni ililii/il.
(UoiiAiK, Car/Il., U, 10.)
La médiocrilé dans les arts est lembarcadère de la prétention.
(Burlesque.)
Très médiocre : minée, de peu de valeur. On dit de même, fami-
lièrement : il n'y en a pas épais.
Médire, du latin /ninus diccre (mes, dire).
Synonymes : casser du sucre, débiner, éreinter.
Médisant, jadis tnalc bouche.
Et ce (pio faire en secret on in-rlcnd.
En plein marché maie itouelic l'entend.
iMahot.)
— L'écoutant fait le médisant. Le premier a le diable dans
l'oreille, et le second l'a sur la langue, a dit saint Bernard.
On devrait pendre le médisant par la langue, et l'écoutant par
les oreilles.
Ne seroient nulz mesdisans
S'it n'estoit des escoutans.
Celui qui souffle le feu s'expose à ce que les étincelles lui sautent
au visage.
Je dis du liien partout de toi.
Tu dis du mat partout de moi :
Quet mallieur est le nôtre !
On ne croit fun ni fautre.
La médisance est la francliise des méchants.
Méduse, nom mythologique.
\ii;l 43
— (y^st la h'Ic lie .Mi'iliist' : (iii ohjct t'IlVayaiit.
— Môdiisc. la plus crlrhrr des Ooi'.uoncs, était, dans sa jeuiiosse,
lin iiiodt'le de i)eaiit(' : sa cluncliire était adiiiirahlc .MIiumnc.
jalouse de sa heanté, {■Jiaiiiiea ses cheveux en serpents, et donna à
SCS yeu.v la propriété de pétriller ceuv qu'elle regardait. Persée,
pour délivrer la terre de ce Iléaii d'un nouveau uenre, lui coiiiia la
tète, et s'en servit depuis pour |)étriliei' ses ennemis.
(Voy. maïujer c(uiinit' un naufragé de la Méduse.)
lYleeting, oi-iiiine anglaise, participe présent du verhe lo iiicd ,
se renconti'er.
Réunion [lopiilaire.
Méfiance, siibslantif \ei-hal de iné/lev: racine /?r/e.s\
l>a iiiéliancc est l'excès de la déllance, et se prend en mauvaise
l)art. La déliance est souvent coiirmandée par les circonstances: la
métiance est presque toujours un défaut.
On liait méliant. ou de\i('iil déliant.
1! élciil exjiériiiieiilé.
Et savait que la nu'fiaiico
Ksi xwbvi' de la sùrcti'.
(I.A Fo.NTAI.NK, l'(ihli;>:, m, IS.)
Mégère, oi-iuine mytliolo.uiqiie.
Nom d'une des Furies. Elle avait pour im'ssion de tourmenter les
méchants après leur mort.
— Au li.uuré : inécliante femme.
Meilleur, du iatiii incliorctn. compai'alif irrégulier de bonus,
lion.
Correspond à l'adverbe iiiimix.
Mélancolique, du "rec //n'/tis, noir, f/iofr, bile, liiiinciir.
Synonymes : rêveur, una.acux, vaporeux.
— Les mélancoliques sont les \oloiitaires de la tristesse.
Mélodrame, du grec //ic/os, chant, draina, drame.
Autrefois, sorte de drame où la musique instrumentale annonçait
l'entrée ou la sortie des personnages importants. Aujourd'hui, .sorte
de tragédie populaire, où la musique ne ligure pas.
— On pourrait croire que nie/os est pour mêlas, et expliquer
« drame noir » ; car ces pièces sont d'ordinaire remplies d'intrigues
ténébreuses, de meurtres, capables de causer dos émotions vio-
lentes.
46 MEN
Melon, (lu l);is-l;iliii iiichnicm, liiriiic s«'iis.
Au lif,Miré : inilK''cil('.
Dnns Xlluulc (11, t'M)), Tli<'isilt' apjM'Ilc, 1rs (irecs inchms
(|h''|)(>ii(;s). l'^l Tcrdilicn a dit : Pcj)()neni cordh loto luthcre : A\uir
un melon ;'i la place du rœur.
On eni|)loie cornichon dans le même sens.
McJo sif forinosiis. Irjirosii.^. /■ofundus el pondcrosiia. (Maxime
oastronoiiii(iii('.)
lYlélusine (l'aire des rris de).
Mi'hisinc (»st pour nicre lucine (nia/er Jji</iia), déesse des
accoiicliciiK'iils.
A moins quon ne le tire de Méliisine. mauicienne ou fée des
contes celtiques (nie/n.s, chant, femme qui (liante).
Cette fée est célèbre dans nos romans de chevalerie. Par son
mariape avec Raymondin, comte de Poitou, elle devint la tige des
Lusignan. Jean d'Arras a écrit son histoire, au xiv" siècle. Elle
revenait annoncer par de grands cris, sur les ruines du château de
Lusignan, la mort des rois de France.
Une comtesse de Lusignan, du nom de Mélnsine, avait une sirène
sur son sceau.
IVlême, anciennement mesme, me'isjne : Aw latin metipshnum.
Autrefois on employait l'adverbe mémement, qui se trouve dans
les commandements de l'Église.
Mèmement. il pillait les églises. (Biblioth. Bleue, Rohcr/ le Diabh.)
Mémoire, du latin memoriam.
Mémoire de lièvre : qui se perd en courant.
Une bonne mémoire est d'ordinaire le signe d'un mauvais juge-
ment. (Montaigne, I, 9.)
Tout le monde se plaint de sa mémoire, et personne ne se plaint
de son jugement. (La Rocliefoucauld.)
Il y a des gens qui apprennent sans retenii* : c'est la digestion
mécanique du canard de Yaucanson.
— Mémoire d'apothicaire. (Voy. allonger les S.)
Ménage, du bas-latin masna(ic/tni, maison.
Il y a lirouille dans le ménage : le torchon brûle.
— De là ménager, user comme dans un bon ménage.
Ménager la chèvre et le chou. (Voy. chèvre.)
Q\\\ vont voyjiucr loin, moiia.u'o sa monture.
(Racine. Plaic/fiirs. I, 1.)
MEN 47
lYlendiant, \ci'li;il de mmdifr.
Autrefois: IriKiiid. cjiiiiiaiul. ht'lilrc.
— Les (iiKitre iiieiidiaiils : dessert composé de quatre sortes de
fruits sers : noisettes, ainandes, limies, raisins.
Les quatre oi'dres de moines mendianis étaient les Cai'ines, les
Dominicains, les Franciscains et les Aii.uiistins. Ils vivaient d'an-
nxines qu'ils (|nétaient de porte en poi'te, et ne pouvaient posséder
aucune rente. llsa\aienl aussi pris le nom des ([uatre ordres de
Bélîtres.
Les Capncins, KécoUels, Miniuies, sont aussi des ordres uiendiants,
mais de création plus moderne.
Les Derviches et les Fakirs sont des religieux maliométans qui
font aussi vceu de pauvreté.
A un huis deux mendiants. (Proverhe espagnol.)
— Les mendiants italiens vous accaltlentdetitres en vous tendant
la uiain : Votre Excellence, mon Prince!...
Mendier, liu latin moiulicdrc (de inenda, faute?).
Autrefois : co(juiner, Irucher.
— Mendier de l'encens, des louanges, des applaudissements.
— Homère, Le Tasse, Bélisaire ont mendié leur pain.
...Crottù jiis(iu'à fécliine.
Va nu'iulicr son pain de cuisine en cuisine.
(Boir.EAu.)
lYîener, du latin manu arjcre. conduire avec la main : ou liien
plut('it du latiii [topulaire m/'/iare.
La main mène, r(eil guide, la tète conduit.
On conduit une voiture, on guide un voyageur, on mène un
enfant, une dame.
C\'<[ lin iiiimnie, entre mius, à mener par le nez.
(.Moi.iù;i;. TarlulTv.)
Ménestrel, ou nx'ncsirii'r. du latin minislerialem, homme au
service d'un autre.
Poète qui composait des mélodies et les chantait de château eu
château.
Ou appelle encore inéiiriricrs, les joueurs de violon <pii fout
danser dans les villages.
Ménil, anciennement incsnll, à rapprocher de mesnle.
Désignait une petite maison d'habitation avec terre attenante.
C'est un diminutif, du latin barbare f/iansioni/em.
48 MEN
On lii (l;ins lo lioman de liciuirl :
La l)()iiiir (l'iiiiiK- ilii tiicsiiil
A (iii\('i't l'Iiiiis (le siiM coiirlil.
Pitr Cdiioixln' Il (/ru, fiml idir ilaim liir iiicsuil.
— Mrsnic. //i/'siii/. si.uiii(i;ii('iil ;iiissi l.i fîiiiiillc. cl (jiitîlqdofois
r;i,ii-.uIoiii(''r;ilioii des li;iltil;iiits d'un vilhi.uc.
Il en est vonii Ix'iuicoiip de noms de lieux on de personnes:
Dinnesnil, Ménilinontiint. I;i l'ue Mironiesnil, etc. (Voy. ar/rf/i/ùi.)
IVIenippée (Siitire). du nom du [)liiloso[ilie Ménipoe, (jni étidl Irrs
niordanl.
Satire mêlée de prose et de vers.
Ménisque, mot <j:rGc (uiénis/ios, croissant).
Plaques surmontées de pointes, que l'on ir.ettait sur la tète des
statues des dieux alin d'empêcher les oiseaux de s'y reposer. C'est
de là que ^iennent les auréoles qn'ou rei)résente autour de la tète
des saints.
Menotte, diminntif tendre et familier de main.
Donne ta menotte, que je la baise. (Molière, Geoï'fjes /Jandin.)
Mensonge, substantif masculin, autrefois féminin.
Sylvius le tire de mentis soin ni a m, songe de l'esprit.
Le provençal messongea le rapprocherait de mes, ([ui signilie
erreur. D'où : songe, mensonge.
Les étymologistes sont fort embarrassés à cause de la désinence.
— Synonymes : bourde, canard, colle, craque, couleur, frime,
gausse.
Cette lille, qui le voyait tant beau et bien parlant, crut sa men-
songe. (^Heptaméron, nouv. 18.)
— En provençal ^nessongea, en italien mensongia, sont féminins.
— Mensonge pieux : fait dans une intention charitalde.
— Le mensonge est l'ingrédient le plus nécessaire au maintien
des relations sociales.
Menteur, substantif de mentir : du latin mentiri.
Synonymes: blagueur, craquetier, hâbleur.
« Mon beau-père, vous êtes un vieux blagueur », dit Robert
Macaire au baron de Worms-Spire.
— Menteur, voleur : le mensonge est un vol en parole, comme le
vol est un mensonge en action.
— Menteur comme un arracheur de dents. Les dentistes sont
MEN 49
oldipés de iiiciilir [loiir drleniiiiior loiirs clients ;'i subir une opé-
r.ilion (lonloureuse; mais leurs mensonges, comme ceux des médecins,
sont excusaltles par leur intention. Le proverbe s'applique plutôt à
ceux (pii mentent à leur [)i'olit t't au détriment des autres.
On dit aussi : menteur comme un chasseur, ...comme une épitaplie,
...comme un laquais.
— Menteur dliiver. — Aussi bien peut-on mentir en liberté de
conscience deux fois par an ; l'une en été, disant : « Je n'ai pas
soif» : l'autre en hiver, disant : « Je n'ai pas froid ». {Motjen de
parvenir, ch. 41.)
— A menteur, menteur et demi.
— J'ai vu, (lit-il, un cliou plus liTanil ([u'une maison.
— Et moi, (lit laulre, un pot aussi ^vznA ({u'uno ét;liso.
Le premier se mo(iuant, l'autre reprit : — Tout doux.
On le fit pour cuire vos choux.
(La Fo>tai>e. IX, 1.)
l'n liomuie prétendait voir une mouche au haut d'un clocher.
« Je n'ai pas la vue aussi bonne que vous, lui répondit-on : mais j'ai
l'ouïe excellente, si je ne vois pas votre mouche, je l'entends mar-
clier. »
Mendacem oportet essemetnorctn. (Apulée.)Iliaut qu'un menteur
ait de la mémoire.
— Un menteur n'est pas écouté, même quand il dit la vérité.
(Aristote.)
Mendad homlni ne verinn quldem dicenti credere solemus.
(Cicéron, <le Dlcinat., 14().)
Mentir, du latin nienliri, de mens, esprit, imagination, parce
que mentir c'est imaginer. (Littré.)
A beau mentir qui vient de loin. (Il ne craint pas d'être démenti.)
Longs voyages, longs mensonges.
Mentor, origine httéraire.
Personnage de YOdi/ssée, auquel Fénelon a donné, dans son
Telemaque. un rôle considérable. C'était le plus fidèle ami d'Ulysse,
qui lui UN ait confié le soin de sa maison, sous les ordres de Laërte.
Minerve prit souvent ses traits pour instruire Télémaque. {Odys-
sée, IL 224.)
— Au figuré : homme sage et de bon conseil.
Menu-vair... Fourrure recherchée au Moyen-Age et réservée
à la noblesse.
50 MEH
Appelée ;iiij()iir(l'liiii « iiclil-'jris ■ .
Les paiiloiilles de rcrrc de (Iciidrilloii m t''l;iiciit f.'iites.
Mépris, (le minus preliuni, iiioiiidi'e estime.
Le mépris est la rallonj-e du Code pénal.
Vous avez beau entasser injure sur injure, vous irarriNcrc/ jamais
à la hauteur de mon mépris, ((iiiizol.) (Du dédain '.).
Mi'prhé a pour synonyme conspué : couvert de (rachats.
lYler, du latin mare; provençal mar ; celtique mor, d'où : Armor,
Armorique.
— La mer est à tous et à personne, parce qu'elle a sui- la tei-re
un immense avantage; c'est d'échapper par son indivisihihté au
fractionnement de la propriété individuelle. Elle ne peut recevoir
de divisions tracées, de fossés, de barrières : elle est sans frontières
et presque sans limites, s'ensemence d'elle-même et produit sans
culture.
Mare natura omnihus patet, (Ulpien.)
— Le golfe Persique a été appelé « mer Bleue », nom qui convien-
drait si bien à la Méditerranée.
La mer de Marmara est la « mer de Marbre » (aux îles blanches).
La mer Noire, ou Pont-Euxin, à cause de ses épais brouillards et
de ses fréquents naufrages.
La mer Vermeille se trouve entre le Mexique et la Californie.
— Mer de sable. « La mer aréneuse » (Rabelais, V, 27). Ce sont
les déserts de l'Arabie Pélrée, entre l'Egypte et la Palestine. Comme
en mer, on ne peut y voyager sans boussole, et les tourbillons de
sable menacent les voyageurs tout autant que les vagues de la mer.
— La brise marine. Le voisinage de la mer rend la température
plus égale, en diminuant le froid en hiver et la chaleur en été,
parce que l'eau est mauvais conducteur de la chaleur.
La brise marine se fait surtout sentir vers le soir, parce que la
terre s'échaulïant plus que l'eau, attire l'air de la mer, qui se trouve
plus frais. Il est aussi plus pur, et dégagé des miasmes du sol haliité,
et rend la promenade sur le rivage très salutaire.
L'inverse a lieu pendant la nuit, où, la terre se refroidissant, la
brise va de celle-ci à la mer, qui est alors plus' chaude.
— La mer occupe à peu près les trois quarts de la surface du
globe. En outre, les parties submergées sont plus creuses que les
parties sèches, îles ou continents, ne sont saillantes.
On peut avoir une idée de la profondeur de la mer du Nord, en
MKft 51
Son,uo;iiil qu'il siitTir;iit d'\ jcicr une des pyrainiilcs d'Épypte pour
y l'aire un «'ciieil. On peiil de iiiénie prendre une idée de la profon-
deur de l'ocraii l'aciliipie. en Songeant (lue le somiuet du Mont-Blanc
y lonnerait un ilol. Mais, landis (pie sur les continents les hauteurs
éiiales à celles du .Monl-lilanc sont de rares exceptions, dans l'océan
Pacifique les profondeurs de cette nature sont plutôt la règle.
l.aplace. d'après de liantes considérations matliématiques, avait
cru pouvoir aflirnu'i- qiu' les profondeurs de la mer, sur notre
planète, étaient comparables à la hauteur des montagnes, et les
prévisions de la science ont été réalisées lorsqu'on s'est occupé de
sonder la mer pour l'immersion des cftbles électriques vers 1830.
— La uier est le seul spectacle qui soit toujours varié et toujours
le même.
— C'est la mer à hoire : une chose très difficile à faire.
Si jappiviiais flu'IuTU, les sciences, l'iiistoire ?
Tout cela, c'est la mer à boire.
(La Fo.ntaim:, VUl, 25.)
— Ésope disait qu'il boirait la mer, si l'on parvenait à détourner
tous les fleuves qui s'y jettent.
~ Si tu veux apprendre à prier, va sur la mer. — La peur rend
dévot, et les dangers perpétuels de la mer tiennent, pour ainsi dire,
la piété en haleine.
— Mal de mer. (Voy. nausée.)
Merci, du latin inercede?n, récompense, grâce, faveur.
Merres, comme merx, se rattache à mereri, mériter.
Du sens de faveur, prix, merci en est venu à l'idée de rachat,
rançon, pardon; d'où reconnaissance.
— Au Moyen-Age, le vaincu était à la "merci du vainqueur, c'est-
à-dire qu'il était réduit à se racheter.
A^oir merci du vaincu, c'était recevoir le prix de son rachat. D'où
l'expression : Qui crie merci, aura pardon.
— Les frères de la Merci, encore à la lin du xvin" siècle, rache-
taient les chrétiens captifs des infidèles.
— Se libérer, c'est de même racheter sa liberté en payant: et
paijer (provençal pagar), vient de pacare, apaiser.
Le latin quietm a fait (juilte (tranquille).
— Merci était féminin, il est devenu masculin (dans le sens de
témoignage de gratitude), à cause de la locution « grand merci »,
où l'on prit grand [)0ur le masculin. En provençal gramaci.
«2 MF.n
Mercier, du l;iliii popiilnirt; nn'rridriinn. de nitn-.r. iii;ii'cli;iii-
dise.
IV/( 1(1 i/icrs j)tis fjifi' no /v//. Vend l;i iii;ir(li;iiidisr plus (|ii'('ll('
no vaut.
Nonrjun non conijn'iird phix /as tnerres de lor. Nid irMclirtcra
plus leurs iiiarcliandises. (Trailiidion de YA/iora/ij/jsf, rli. 18.)
En l'oman nicrcddaria, niai'cliaiidiso ; incrcadier. niarcliand :
mcrcat, jnarcher ; mercandejar, marchander.
— On appelait les merciers porte-paniers. D'où le proverbe :
A petit mercier petit panier.
— Dans le Berry, on appelle mercelot un petit mercier ambu-
lant, porte-balle, dont le commerce est peu important, un colpor-
teur. Il y a aussi le berloJier ou bretelller, qui traîne sa petite
voiture avec une bretelle.
— Avant 1789. Paris avait six corps ou communautés de mar-
chands. Les merciers formaient le troisième corps. Cette corporation
se divisait en vingt classes, et embrassait une infinité d'arti(des de
fabrication diverse, tels que les draps, les toiles, pelleteries, la
chaudronnerie, les tableaux, etc.
IVlercure, du latin iMercurius, dieu des marchands et des
voleurs. (Voy. marchand.)
Mercuriale, dérivé du précédent.
On appelait mercuriale une assemblée du Parlement, qui se
tenait le premier mercredi après la Saint-Martin et après Pâques,
pour réformer les abus de l'administration judiciaire. On y faisait
des discours pour rappeler aux magistrats les devoirs de leur
profession. Comme c'étaient parfois des remontrances sévères, on
■ étendit le sens du mot à toute espèce de réprimande.
Aujourd'hui on appelle mercuriale (a mercium cura) la fixation
officielle du prix du blé dans les marchés publics.
Merde, latin merdam.
Terme grossier, ordurier.
Synonyme : le mot de Cambronne.
Raltelais l'a souvent employé. Les gens grossiers s'en servent,
comme Cambronne, pour marquer un refus.
— Le Temps, du 16 août 1872, donne la relation officielle d'un
procès de cour d'assises où l'accusé s'est obstiné à ne répondre que
par ce mot aux questions du président.
— M. Vatout avait l'amabilité un peu Cambronne -. la chanson
MER 53
qu'il pivlcrail ô\;\\{ colli» ([ii'il ii\;iit écrite sur le iiiairo d'Eu. (Com-
tesse de Bass:invilU>. 186G.)
Mère, du latin utnircm. Provençal maire.
A la mémo racine se l'apportent : mamelle, maman, marraine.
Une mère est la seule peisonne dont on puisse être sûr d'être
aimé.
Le cœur d'une uit-rc est un aliime au fond duquel on trouve
toujours le pai'don.
Les blessures des mères n'ont pas de cicatrices.
La mort d'une mère est le premier cliaiirin qu'on pleure sans elle.
Mérite, du latin mcrituni. Provençal niérit.
Le mérite excite l'envie : on jette des pierres à l'arhre chargé de
fruits.
La personne dont on médit le [dus est quelquefois la meilleure,
de même que souvent le fruit le plus exquis d'un arbre est cellii
que le l)ec des oiseaux a le plus impitoyal)lement déchiré. (Swift.)
L'envie et la cabale ne peuvent rien contre le vrai mérite. On
peut éteiiuli'e une chandelle, mais non le soleil. (Weiser.)
Mériter, dérivé de mérite, gagner, acquérir.
Emeritus miles. Soldat qui a obtenu son congé.
Synonymes : il l'a bien mérité ; il ne l'a pas volé ; c'est pain
bénit.
Merlan. Ce nom trivial donné aux perruquiers date du .wii^
siècle. Jusqu'à 1800, on mettait de la poudre sur les cheveux : les
coiffeurs en étaient littéralement couverts, et ressemblaient à des
merlans que l'on a roulés dans la farine pour les frire.
...Les perruquiers qu'on appelle merlans parce qu'ils sont blancs.
(Journal de Berlin, 18o2.)
Merle, du latin merulam. oiseau noir.
Le merle est, en effet, d'un beau noir; mais les merles blancs ne
sont pas aussi rares que pourrait le faire supposer le dicton popu-
laire : « Si tu fais cela, je te donnerai un merle blanc », en parlant
d'une chose qui parait impossible.
Les Latins disaient : Alhu aris, une l'ai'eté, pour désigner une
Lucrèce, une Pénélope, tout ce qui est difficile à rencontrer.
— On sait maintenant qu'il y a des merles blancs en Auvergne et
en Savoie : tout comme on trouve des cygnes noirs.
— C'est un dénicheur de merles : un fin merle : un homme rusé.
— A d'niilres, dénirlieiirs de merles ! Cest-;'i-dire : vous n«; incn
rontoroz pas.
Un jeune vilUijiCois se confessa à son cnrc d'avoir rompu la liaie
du voisin pour reconnaître un nid de merles : « — Et les avez-vous
pris? — Non, ils étaient trop pelils : mais samedi soir, j'irai les
prendre poni- les fricasser le lendemain. « Le <iiré les dénicha le
samedi malin. Le paysan, rpd s'en doiila. se promit d'être pins
discret à l'avenir. [/anné<'. sni\ante il reloiii-na à confesse: « — Mon
père, dit-il, je m'accuse d'aimer n\u\ jenne lille, et je vais la voir
quand tout le monde dort. — Quel à,ue a-t-elle ? — Qnin/.e ans.
— Belle? — La plus jolie du villa.tie. — Et dans quelle maison
demeure-t-elle ? — A d'antres, dénicheur de merles, répliqua le
manant : on ne m'attrape pas deux fois. » — A curé finaud, paysan
madré.
Merluche, dn latin mai'is lifcius, hrochet de mer (ou du même
radical que merle).
On l'a appelée aussi, dans l'antiquité, nne de mer.
Les Hollandais out nommé une sorte de morue très desséchée
slock-fich (poisson-hois), à cause de sa dureté, ou parce qu'on la
ramollit à coups de Ijàton avant de la mantier.
IVlerveille, dn latin mirabilia, devenu ynirU)ilia.
— C'est la huitième merveille du monde I c'est-à-dire chose digne
de figurer à côté des sept merveilles des anciens.
Les sept merveilles étaient : les Pyramides: les .lardins suspendus
de Babyloue; le Tombeau de Mausole : le Temple de Diane à
Éphèse ; la Statue de Jupiter Olympien, de Phidias ; le Colosse de
Rhodes ; le Phare d'Alexandrie.
IVIés, du latin minits, moins ; me. devant une consonne.
Préfixe de valeur diminutive, devenu péjoratif : méuarde, méses-
timer, mésuser, mépriser.
•. iVIess, uiot anglais, emprunté lui-même au français inefs.
Réunion d'individus mangeant ensemble.
Dîner des officiers. (La popote est celui des sous-officiers.)
Le glossaire de Ducange donne : Prendre Metc, manger ensemble
pendant les travaux de la moisson. (De l'an 1447.)
lYlessaline, nom historique.
C'est une Messaline : une femme dél)auciiée.
Messaline, célèbre par ses débauches, était issue de la nolile
MKS o5
f;iiiiill(' dos M('ss;il;i. Kllc épousa Claude, souilla la (•oiiclic- iiui)ériale,
l't alla jusipi'à (''[xuisci' publiquement, du \i\anl de sou luari, le
jouue Siliiis. I^lle a eu le triste prix i lé et! de laisser sou uoui pour
désieuer loulc feuiiue livrée à la déhauclie et au\ déiwrdeuieuts des
passions.
lYlesse, de riiél)reu missah, oiïrande.
Ou le lait louiiuiiuément venir de /nensa. Mais il vient plut(U du
latin ecclésiastique missa, action de congédier.
— La formule : ifr. //tissa est était primitivement : ite, me/isa
csi, à cause des agapes que les premiers chrétiens taisaient dans
les églises après le service divin.
Mi'/isas f'arii'hri/\t co/n//ii(/ies, et perarla sinaxi post sacra-
//ie/ifo/'/(//i cn/iu/i/i/iio/ie//i, i/iiha/it roiHHcium. (J. Chrysostome,
Ho)/iélie. 27.)
— De //lissa ad /ne/isa//i. Proverbe claustral, pour dire que les
moines passent de l'église au réfectoire.
— Chez les Grecs, à la lin de la cérémonie, le prêtre disait:
« Oue le peuple se retire. »
— Chez les Romains, un crieur [)ublic [)rononçait le mot ex te//iple,
qui est Tabréviation de exire e templo (?), et qui, dans la langue
avait pris la signification adver]»iale : sur le champ, aussitôt {ex
tez/ipulo).
— M. de Chevalet dit que //lissa, en bas-latin, a été dit pour
7/iissio, permission de se retirer, congé. D'après lui, la formule
qui termine l'office divin signifierait : « Allez, c'est permis » ; ce
sei-ait par ignorance de la signification de ce mot 7)iissa que l'office
a pris le nom de messe, et que l'on a traduit dans les paroissiens :
« Allez- vous-en, la messe est dite. »
— Messe basse : dite par un seul prêtre, sans accompagnement
de chant.
Messe noire : messe des morts.
Messe rouge : celle que l'on célèbre lorsqu'une cour de justice est
installée pour la première fois dans ses fonctions.
Messe sèche : sans communion.
— Messe de chasseur, de saint Hubert : dite à la hâte.
— Messe paresseuse (Moye/i de p<i/'ae/ii7\. ch. 80). On appelait
ainsi la messe qui se disait entre onze heures et midi.
11 y avait à Notre-Dame un autel, distingué, dans les anciens
titres, sous le nom de alta/'e pi<j/-oru//i, autel des paresseux, où se
disait la dernière messe de la journée.
m MET
— Messe de commères : de relevnilles, dans le Berry.
— Cliiimpfort raconte que le cardinal Maury, éUint jeune et du
peuple, disait des messes à G sous. Un curé les avait eues à 20, les
avait cédées à un aumônier pour 12, et l'ahhé Maury les avait eues
de «eliii-ci à (J.
Mesure, du latin inenaiiram : d'où aussi : diincusion.
— Les inesures romaines, dont on s'est ser\i iuscpTcn 1840,
étaient empruntées aux diverses parties du corps humain : le [)ied,
le palme, le doi,ct, le pas. la coudée, la brasse, etc.
— Les mesures de lon.aiieur, chez les Romains, sont exprimées
dans les cinq vers suivants :
Qiialtuor ex granis dii/iliis coinpnnUur uniis ;
K-sl iinalcr in jjahiio liifiUus ; qualer in pedc pabnu-'s ;
Qhin(iue pedes pasmiin fnciunl, passas qunque cenlunt
Vi(/inli (juinque stadium dant ; <it miliare
Orlo dahant stadia; (lioc ?) diiplicritum dot Ubi leucam.
Ce qui signitie que le doigt se partageait en quatre grains, (pie le
palme était de quatre doigts, le pied de quatre palmes, et que cinq
pieds formaient le pas. Le stade était de 125 pas : huit stades for-
maient le mille, et deux milles la lieue.
Le mille était exprimé par inil/e passus, ou M. P., ou niiUtire
(sous-entendu saxum), ou miliarius (sous-entendu lapis).
— C'est pour étabhr un type unique et universel de mesures que
l'on a pris pour point de départ les dimensions de la Terre.
Meta, mot grec devenu préfixe et marquant succession, change-
ment, transformation.
Métaphore, mot grec ;/?c/ff7>Ao/Y^ transposition : de meta et
de phéro.
Figure de grammaire, qui consiste à transporter le sens d'un
objet à un autre, par suite d'une comparaison. Ordinairement elle
a pour but de donner au discours plus de vivacité et de brièveté :
c'est un lion, se dit pour : il est courageux comme un lion.
Le langage primitif n'exprime que des sensations. Comme les
mots sont moins nombreux que les idées, il a fallu, pour exprimer
toutes les formes de la pensée, se servir dolijets matériels dési-
gnant des idées abstraites.
Tous les mots abstraits ont commencé par désigner un objet
tangible, un acte matériel, une qualité physique : ainsi les diffé-
rentes opérations de l'esprit qui concernent la pensée sont toutes
exprimées par des mots indiquant un acte matériel.
MET 57
Dans le mot réfléchir^ l'esprit est comparé à mie surface plane
et polie où les objets se rélltHenl comme dans un miroir, et l'image
qui en résulte est la l'éllexion morale.
Penser, du latin jtensare, nous montre l'esprit pesant les objets
comme dans une balance.
Délibérer, répondre, dérivent aussi de l'idée de poids et de
l.ialance.
Décider, c'est tranclu'r. couper un nœud, une difliculté.
Apprenilre, c'est saisir une idée, l'appréhender au col, s'en
emparer.
Distinguer, c'est teindre de diverses nuances : comme désigner
les choses, c'est les dessiner.
De même enseigner, montrer par signes.
Voilà pourquoi la personnitlcation est chose si commune dans le
langage ; voilà pourquoi l'on dit : la croupe, les flancs, les gorges,
le pied d'une montagne; les entrailles de la terre; les bras, les
bouches d'un fleuve ; le sein des flots.
Jésus-Christ a été appelé VAgneaif, parce qu'il avait toute la
douceur d'un agneau.
lYlétaphysique, du grec tneta et phgsica.
Science qui a pour objet l'étude de l'âme, des facultés de l'enten-
dement humain, des idées. C'est ce qui dépasse les choses de la
nature ou physiques.
La métaphysique est le roman de l'esprit. (Voltaire.)
IVlétathèse, du grec métathésis, déplacement.
C'est la transposition d'une lettre dans un mot.
Ainsi, de l'allemand Hunover, nous avons fait Hanovre ; berbis
est deveuu brebis, et beurrage, breuvage.
IVlétayer, du bas-latin medietarium, de ?7iedietatem, moitié.
Fermier qui garde pour lui la moitié de la récolte et donne l'autre
moitié au propriétaire.
Métempsycose, du grec métempsychosis, de niéta, change-
ment, et de empsgchoùn, animer.
Transmigration des âmes d'un corps dans un autre. Cette
doctrine est une ébauche imparfaite de celle de l'immortalité de
l'âme.
Lucrèce appelle cette croyance un officieux mensonge, qui délivre
des frayeurs de la mort, et rassure l'esprit, qui espère revivre
dans un autre corps.
58 mi<:t
l*\lli;i.L!()r(' iiv.'iil pris rcWt' opinion dos aiicii'iis hiMliiii.iiics : clk'
existe encore dans l'Inde et en Chine.
— Les Eoypiiens nietl;iient dans les tombeaux nn scarabée,
parce que le scarabée meurt et renaît trois fois comme la chenille,
et qu'ils pensaient (|ue J)ieu ne peut pas faire moins pour l'Iiomme
qu'il ne fait poui- rinsede.
lYlétier, du lalin ininislcriiim. métier. ^a;:iie,-pain.
— (ihacun son métier <'t les vaches seront bien .!i<''irdées.-(Voy.
rnche..)
Tout va bien, lorsque l'on ne l'ait que ce que l'on doit et que l'on
sait faire.
Prover])e Irivial, mais (rès vrai, à une époque où lout le monde
se croit propre à tout, excepté à i^arder les vaches.
Aijc qnnd agifi.
(Tkhknck.)
(Occupez-vous de votre métier.)
In propria pelle quicsrcre.
(Rester dans sa spécialité.)
iVe, sutor. nlfra crepidnm. Pline {Uisl. nat., lioj cite cet ancien
proverbe attribué à Apelle.
Celui qui est tout entier à son métier, devient un prodige., s'il a
du génie ; s'il n'en a [)as, il est impossible qu'il ne s'élève lias
au-dessus de la médiocrité. Heureuse la société où chacun serait à
sa chose, et ne serait qu'à sa chose ! (Diderot.)
Ne fît-on que des épingles, il faut être enthousiaste de son état
pour y exceller.
Qunm scit quisque libens ccnscbo crcrceat arlem.
(Hou ACE.)
(Je suis d'avis que chacun exerce le métier qu'il connaît.)
Navila de venlis, de tauris narrât arator ; .
Enuinerat miles ruinera, pasior ores.
(PUOPERCK, I, 43.)
Quand Hippocrate escrit, il n'escrit pas de musique. (Montaigne.)
— Maître André, perruquier de Voltaire, qui n'avait pas inventé
la poudre, s'avisa de faire une tragédie en cinq actes : fe Tremble-
ment de terre de Lisbonne (^1736, in-8°). 11 la dédia à l'illustre et
célèbre poète, M. de Voltaire, qu'il appelle « Monsieur et cher
confrère ». Voltaire, qu'il avait consulté, s'était borné à lui
répondre : « Maître André, faites des perruques. »
MKT o9
— En 1818. on nomma sous-piTtVt ;'i ('laiiiccy un incnnisier
parfaitement incapable romnic adininisiralciir. I)ii|iin aiiir. à ipii
les lialiitants adressaient leurs plaintes, leur répondit avec un
sonrire ironique : o Votre anioiii-propre est fi'oissé d'avoii' un
sous-préfet inennisicr. Je le comprends : vous eussiez préféi-é un
éiiénisle : mais, les ébénistes, on les aarde pour les préfectures. «
— [*res(pie tous les métiers eviaent une vertu, une qualité parti-
culière : le soldat doit être brave: le diplomate, mystérieux: le
médecin, .urave : le prêtre, ciiasle: le notaire, probe...
— Faire métier dune chose : la faire babituellcment.
(Ju'im Imiiiiièto lidiuiae une fuis en sa \ ie
Fasse un sonnet, une odv, une élégie,
Je le crois liion :
Mais iine lun ail la tète hien rassise.
Quand on en fait métier et niarciiandise,
.le n'en crois rien.
— il faut avoir tué père et mère, poui' faire un |)areil métier. ?e
dit d'un métier très pénible.
On dit aussi : il n'y a pas de sot métier ; mais les métiers on l'on
sue sont moins aimables que ceux où l'on ne sue pas.
— On reprochait à d'Argenson de n'employer, comme agents do
police, que des fripons et des coquins : « TrouAez-moi, dit-il. des
honnêtes gens, qui veuillent faire ce métier-là. >'
— Chaque profession aune maladie particulière : riiomme trouve
une cause de mort dans le travail qui le fait vivre. (Legouvé.)
Il faut gagner sa vie, dût-on en mourir ! Chaque minute de
travail m'enlève une heure de vie, disait un ouvrier en mercure.
— Il n'y a si petit métier qui ne nourrisse son homme.
Sua cuùjue ars pi'o viatico est. (Proverbe latin.)
— Un nis à qui son père n'avait pas fait apprendre un métier,
était dispensé, par la loi de Selon, de le nourrir dans sa vieillesse.
— Le Coran recommande à tous, même aux fils des rois,
d'apprendre un métier et dy travailler quehpies heures chaque
jour : « Prends un rabot ; c'est une arme qui te fera combattre
cette maladie de l'âme, cet aflreux poison de la vie qu'on appelle
l'ennui. »
— 11 y a des métiers si modestes, si infimes, (pi'ils ne i)eu\ent
s'exercer, même exceptionnellement, que dans des \illes comme
Paris.
Tels sont ceux de : fabiicauts de devises pour confiseurs, ...de
60 MEU
pr-iinellcs poiiryoïix crevés, ...de trous pour écuraoires, ...de verres
noircis pour les éclipses. Il y ;i forcément du cliômajre.
— Quand le raniasseur de bouts de cigares a K^Koé vingt sous
par jour à son métier, il s'estime heureux; mieux vaut être agent
de change.
— Il n'y a pas de sot métier, il n'y a cpie de sottes gens.
La seconde partie de ce proverbe est une leçon un peu vive à
l'adresse de ceux qui oublient, dans leur dédaigneuse vanité, que le
travail ennoblit toul, et qu'en présence du devoir, il n'y a ni grand
ni petit métier, mais qu'il y a [loiir tous un égal mérite à remplir
sa lâche.
Métis, du bitin mixlitlua (pour mîxliis, mêlé).
Se dit (le riiomme et des animaux issus de deux races.
Se dit aussi, par analogie, des végétaux nés de deux espèces
différentes.
— En espagnol, meiico désigne l'enfant né d'un Espagnol et
d'une Américaine, ou d'une Américaine et d'un Européen.
Créole s'emploie de même.
(Yoy. mulet, hybride.)
Métonymie, mot grec : changement de nom.
Cette tîgure emploie la cause pour l'effet, et vice versa, le signe
pour la chose signifiée ; le contenant pour le contenu : la partie
pour le tout, etc.
Dans ce vers de Boileau :
Faire trembler Mempliis et pâlir le Croissant,
il y a deux métonymies. Mempbis est pris pour les Égyptiens et le
Croissant pour les Musulmans.
lYlètre, du grec métron, mesure.
La dix millionnième partie du quart du méridien terrestre,
compris entre le pôle et l'équateur : l'équivalent de 3 pieds 11 lignes
296 millièmes.
iVIétromanle, de métroji. mesure, mania, folie.
La manie des vers. Mot créé par Piron pour servir de titre à sa
comédie en cinq actes, représentée le 10 janvier 1738.
Meunier, ancien français molinier : latin molinarium ; pro-
vençal molinier, mounier.
En argot, on appelle les meuniers gripis. Ce mot est synonyme
MÏI) ' 61
(lo \()l('iii'. f,ts iiKMiniers jcissaiciil [tour IVipons. Comme les proru-
l'ciirs et aiilrcs .ueiis de loi, (IIMUi ;i|i|»t'l,iil (ji-djiiyndns.
Fidèle comme un meunier, dit iroMi(iiiement Oiidiu dans ses
Cil rioa ités f'ni n <^a ises .
Rabelais (111, 2) les ranpe paiini les gens soumis à Mercure.
La chose la jdus hardie du monde, (-"esl la ciiemise dun meusnier,
...parce (pi'elie prt.Mul tous les joiii-s un larron au collet. {Tnbdrin.)
— En aruot. le diable est appelé bonl/nnjev, soit parce que le
diable met au four de l'enfer, soit i)lut('»t parce que, au Moyen-Aoe,
le boulaniier était, coinnu^ le meuniei', 4'épulé voUïur, fripon lielTé.
— Devenir d'évèque meunier, ou d'évêque aumônier.
Les Latins disaient : ah cqiiis ad asino.t : passer des chevaux
aux ânes. C'est passer d'une condition élevée à une condition
intime.
Proverhi'S analogues : Aujourd'hui chevalier^ demain vacher.
Aujourd'hui en chère, demain en bière. Cent ans bannière, cent
ans civière.
Épiphane, évèque de Nevers, en 1547, s'enfuit à Genève avec
une femme dont il était épris, quitta rÉglise, et se fit meunier pour
vivre.
L'abbé Torme, archevêque de Bourges, ayant renoncé à l'état
ecclésiastique, en 1764, s'est marié et a fait valoir un moulin.
{Chronique de l'Œil-de-Bœuf.)
Meurtrières, de meurtrir : origine germanique.
Feules praliijuées dans l'épaisseur des murs des fortifications,
pour tirer sur l'ennemi.
On les appelait autrefois barbacanes, petit canal, à cause de leur
ressemblaïu'c avec les ventouses que l'on fait dans les murs pour
récoulement des eaux.
Mezzetin, personnage boulVou de l'inti'igant, dans l'ancienne
comédie italienne.
Miauler, onomatopée qui exprime le cri du chat, ou miaou.
Micmac, de l'allemand mischmasch, de mischen, mêler.
Intrigue secrète et embrouillée, dans le but de nuire. »
Midas, nom mythologique.
— Midas, roi de Phrygie, avait obtenu de Bacchus de changer
en or tout ce qu'il toucherait. Les mets qu'il portait à sa bouche se
changeant aussi en or, il pria le dieu de lui retirer ce funeste don.
Vd MIE
Le dieu lui ordoniiii iilor^' de se Iciitirici" d;iiis le P;iftolo, (jiii depuis
r()iil;i dii s.ihle d'or'.
— Les oreilles de Midas. (^e iiicnie priiict;, choisi coiiiiiic jiiL''e
dans un dél)at enlre Apollon et le dieu Fan, adjnuea soIlcuMMit le
prix de la iuiisi(pie au dernier. Apollon l'en punit en ralliihlanl
d'oreilles d'àuc
Celte faille a donné lieu au proverbe. (|ni s'appliipie à la sotte
présomption des ignorants (pii iuoentce (piils ne comprennent pas.
IVlidl, niedius et dies, le milieu du jour. So/e iiydio.
Va\ provençal miejorn. On disait autrefois mi'ili.
Ilui au matin estions en nos maisons, aisés et manants, et à niédi
en suivant, sommes conrnie gens en exil, quérant noti'e pain.
{Journal d'un bourfjeols de Pains.)
— Midi vrai. Comme le soleil parcourt les 360 degrés de la sphère
en des temps inégaux, selon les saisons, le midi vrai, qui est
l'instant précis où le soleil passe an méridien d'un lieu, retarde sur
le midi moyen de 14' 32" le 11 février, et avance de 16' 18" le
3 novembre.
Le soleil est d'accord avec l'heure moyenne des liorloges à quatre
époques de l'année : lo avril, 13 juin, i^^ septembre et 23 décembre.
(Voy. chercher midi à quatorze heures.)
IVliel, du latin mel, grec inélL
De là aussi : mélisse, mélasse, Malte (abondante en miel).
— Le miel est appelé par Virgile : Cœleste donum.
Pythagore en faisait sa nourriture.
Pline dit qu'un certain Yedius Pollion était arrivé à l'âge de pins
de cent ans, sans infirmité, en se nouri'issant de miel et se frottant
d'huile : Intiis nielle, extra oleo.
— Le mont Hymette, près d'Athènes, était très célèbre à cause
de l'excellent miel qu'on y recueillait.
De là son nom, Hymelton, en grec, signifiant miel.
Horace (\\, 2, lo) se moque d'un homme délicat qui refuserait de
l)oire du vin de Falerne s'il n'était adouci par le miel de l'Hymette.
Nid Hymeltia mella Falerno
Ne biberis diluta.
— Un peu. de fiel gâte beaucoup de miel. On est plus sensiljle à
la moindre critique qu'à des louanges exagérées : un sifflet fait plus
de mal que cent bravos ne causent de plaisir.
— Bouche de miel, cceur de liel. On se méfie des gens aux paroles
MU. (wi
doucoreiist'S : les .illiii't'S |i;ilt'liiit'S sciiiMciil miiiiiuicim- iiii ciir.iclrrc
pcriido : ;iii ris(|iii' de se Iroiiipcr. il est [(nidciil de sr tcinr en
ttardo cdiiliv ces iiiipiinMiccs,
iVIien, lien, sien : MiiciciiiU' loriiif pour nio/i. /o/i. so/i.
IVlieux, ;iii('i(Miii(Mii('iil //lic/s: du liiliii //if/ii/s.
IVlièvre, (tri^iiic iiicerlaiiic.
Adjectif des doux .ueiires, qui, daiuvs rAcadéiuie, signilio uu
enfant vif, éveillé, reinuanl. uu peu malicieux.
— Dans le Malade imaginaire, Diafoirus parlant de sou (ils, dit
qu"il n"a jamais été uuèvre ni éveillé.
Les oufans iiui sdiit mièvres
Ne gaignenl juis les lièvres.
— Par un malentendu inexplicable, et malgré l'autorité des
auteurs, et de rAcadénde, on emploie aujourd'hui ce mot dans le
sens de : faible, malingre, délicat.
lYlignard, migiion, niignot : vieil allemand minnia, amour.
Miynard signifie joli, gentil. D'où les dérivés : mignardise,
menin(j). mioclie(0-
-- Le grand-père du peintre Mignard s'appelait More. Henri lY le
voyant entouré de ses six enfants, tous officiers, bien faits, dit :
« Ce ne sont pas là des Mores ; ce sont des Mignards. » La famille
prit ce nom.
iYligraine, du e:rec hêmikTania.
Doideiir qui u'alïecte cpie la moitié de la tète.
Rabelais emploie Iléniicraine (iV, 37).
Milieu, du latin médium lornm, le centre.
— Il n'y a pas de milieu : il faut choisir entre deux partis.
Etre [)lacé entre le oui ou le non. Aon est tertium, disaient
les Latins.
— Prendre le juste milieu, le moyen terme. Le juste milieu n'est
ni blanc ni noir, il est gris.
Le juste milieu, en politique, est un système négatif et sans
caractère décidé. Cela rappelle l'homme placé entre deux selles ; et
la pensée de i*ascal disant qu'il n'admire point un homme qui
possède une vertu dans toute sa perfection, s'il ne possède eu
même temps, au même degré, la vertu o'pposée, tel qu'était
64 MIN
Ëpaminondas, r[iii avait l'oxlrriiio valoiir joiiilf ;'i rcxliviiio lionlé.
Autrement, ce n'est i»as iiionlor, mais descendre.
Kst modns in rébus ; sunl ccrli ilcnitjuc fines,
ijitos ullrii ci truque tiequit consislere rectuin.
(lloKAci;, Sut. 1, 106.)
Les choses ont une mesure exacte, chacune a des limites précises
au-delà et en deçà desquelles la perfection ne saurait exister,
/n îurdio i^ir/its. La vertu est dans la modération.
Mrtus est médium vitiorum.
(nuiiACK. Épitrex I. 18, 9.)
Dans une étroite couche, le sage au milieu se couche.
— Le juste milieu en politique n'existe pas. La vérité est que
2 et 2 font 4 ; l'erreur dit 2 et 2 font 8 ; arrive le parti du jn;ite
milieu, qui, pour concilier les deux partis, dit 2 et 2 font G.
(Lafayette.)
Militaire (vieux). Synonymes : culotte de peau, ou encore dur
à eu i 1-e.
lYliltiade. Les trophées de Miltiade l'empêchent de dormir. Se
dit d'une personne jalouse du succès d'un rival.
C'est une allusion au mot de Thémistocle, qui était jaloux de la
gloire que Miltiade avait acquise par ses victoires.
Mine, honne mine (figure colorée), de minium {V).
Diez le dérive de minnre, comme geste de f/erere: ce serait la
contenance, l'allure.
La mine est l'air qui résulte de la conformation du corps et du
visage.
Minois, son dérivé, s'emploie en honne part.
— On dit famihèrement, de quelqu'un qui a mauvaise mine, qu'il
est minable.
Il ne faut pas juger des gens sur la mine.
C'est peut-être que je paie l'intérêt de ma mauvaise mine. (Molière,
Critique.)
— Faire honne mine à mauvais jeu. (Rahelais.) C'est faire contre
mauvaise fortune hon cœur.
Minimes, du latin ntinimum, le plus petit.
Nom d'un ordre religieux fondé au xv« siècle. Les minimes portent
un costume somhre, hrun marron, qui a donné le nom de « couleur
minime ».
Ils furent appelés « Bonshommes », parce que Louis XI appelait
MIU 05
'> lionliniiimc " ItMir tniKliilciir l'"r;mc()is de l*;iiilo. Lciii- nom de
miitliiK's csl lin litre (rimniilili'.
Les jésuites, moins moclestes.se loni appo.loj' « révérends père? i.
— Vax Provence, les femmes |)iens(^s. ;'i la suite d'un vœu lait
pendant nue maladie, portent le minimt' (/on iniiiiine), costume
lait détoll'e de cette couleui'.
— L'usage de vouer les enfants au bleu remonte à la môme
ori.uine.
— Le nom de Billetles, donné à un autre ordre religieux, et
venant du vieux mot hille, bllie, chose vile, est l'ait dans le même
esprit d'humilité (pie celui de niitninea.
iVlinistre, du latin tnkiifilrnrn.
Les minislres ont été appelés à l'origine « clercs du secret »,
d'où le nom de « secrétaires d'État ».
— On cite un mot cruel et malpi'opre du duc de Yilleroy :
« 11 faut tenir le pot de chambre aux ministres tant qu'ils sont en
place, et le leur \ersei- sur la tète quand ils sont disgraciés. »
Minuit, du latin médium noc/is, le milieu de la nuit.
Synonyme : l'heure du crime.
— L'usage a lait minuit masculin, quand il devrait être féminin,
d'abord parce que nuit est féminin, ensuite parce que l'article qui
précède mi est féminin dans la mi-carème, la mi-août, quoique
c(i7'(hne et août soient masculins.
IVlinute, du latin miniiUtm, divisée.
Les minutes sont la monnaie du tenq^s, qui, selon les Américains,
est de l'argent.
IVlinutie, dérivé de minuiia, chose très peu importante.
De minimis non rurat prœtor. Le préteur ne s'occupe pas des
minuties.
Aquild non rupil muscas. L'aigle ne prend pas les mouches,
Synonymes : s'occuper de minuties ; chercher la petite bête.
En art, en littérature, chercher la petite bête, c'est se donner
beaucoiqi de nuil pour ce qui n'en vaut pas la peine.
lYlioche, de mica, mie, terme familier.
On peut le rapprocher de tnion, avec idée de mignon, mignard.
Miracle, du latin miî'acu/um (mot savant).
Prodige, chose étrange, surprenante, dont la cause est inconnue,
et théologiquement, surnaturelle.
66 MIR
— Jrsiisdlirisl lil son pi'ciiiicc iiiiiMclc ;iii\ iiocos do C;m;i.
— I^;i iMolIc, (l;iiis son (ioimiic des Ajiùirrs. dil :
\a' iiiih'I |i;irlc ;iii sourd r'iiiiiin' dr l'iiilrmlrc.
Yoil;'! deux iiiii-.iclcs hieii exprimés diiiis iiu sci'S.
— K;iiro des mir-acles : se siiiiialei' dans son art.
— On appelait « Cour dos Miracles » nn quartier de Paris où
s'assemblaient les mendiants et les gneiix pour passer la nuit à
faire bonne chère. Le miracle était que, rentrés le soir à la bauge,
ces estropiés, ces piètres, ces malingreux, sal)Ouleux, coquillards,
tous ces mourants étaient soudain rendus à la santé. Après avoir
mendié tout le jour, ils quittaient leurs emplâtres, leurs béquilles,
et autres engins d'infirmités simulées.
Le dernier de cos refuges à truands a disparu sons la pioche en
1799, à la place où se trouve le passage du Caire.
IVIirliflore, origine inconmie. Autrefois mirU/ïor.
Petit-maitre. Peut-être faut-il y voir une altération de mille fleurs,
parfumé d'eau des mille Heurs ?
Mirliton, origine inroi>nue.
Cette caricature de la musique instrumentale, à notre époque où
la poésie n'est plus dans les mœurs, couvre de sa popularité dés
vers rimes en spirale, et donne un refuge aux derniers alexan-
drins (?).
iVlirobolant, semble tiré plaisamment de myrnbolan, pour
m\irohalnn, sorte de gland de la famille des myrobolaiiées.
Ce gland donnait une huile d'où les anciens tiraient un onguent
très estimé. (Pline, XIL 21 : Horace. OfMs\)
Rabelais appelle niiroholan un fruit des Indes, halanus ungnen-
larius, aromatique, astringent...
— C'est le nom d'un médecin dans la comédie d'Hauteroche,
Crls))ui médecin .
Ici, il semblerait composé de mire, médecin en vieux français, et
du latin bolus, pilule.
Quelques-uns ont voulu le rapprocher de merveilleux, mirabilis,
et le font remonter à la même origine que mirabelle.
— Mirifique s'emploie dans le même sens.
Rabelais en a souvent fait usage : mais il ne s'emploie plus qu'^n
style liui'lesque.
lYliroir, de mirari, contempler. Provençal mirador.
MIS 67
Sviioiiyiiit' : iiiircliiid. |i;ii- une .illiisioii iiiMliLiiic ;i celui qui s'y
\oi!.
Les Pi'écit'iiscs (se. 5) loiil ;i|>|iolé le coiistMller des Gi-àces :
« Venez me tendre iei dedans le conseiller des grâces. «
licls conseillers ah i/ninz' n'ittiiillas
Aportel lioin docan cnscu...
A(iiiis pnc quix vol ncoiih-iir.
(I- tamenca, 380.)
(Un apporta de\anl cliaciin lieaiix miroirs avec grands vantaux...
là se peut accoutrer qui veut.")
Le miroir est Icj troisirme (oil de la femme. (Cap"" Cook.)
La femme qui s'entend dire constamment qu'elle est jolie, trouve
plaisir ;'i regariier dans un miroii" les traits sur lesquels elle voit
tous les yeux s'arrêter.
Fins (Ir Ih'iiUiI, iniraU d'ataor.
(AuN. iiK .Markuii..)
(Fleur de heaiité, miroir d'amour.)
Iris, cil ce luii'dir loiijuiirs
Vous pouvez \oii- l'uljjet (juc jaime :
Je voudrais bien toujours de luèmo
Y \oir i'oljjet de xos amours.
(Insi'ri|itiiiii siii' un miroir.)
— Omnibus omnui. — Nonce le ijisuiii. (Devises écrites sur des
miroirs.)
— Les premiers miroirs furent rapportés de Sidon à la lin de la
(piatriiMiie croisade. Venise s'empara de la découverte, la perfec-
tionna et en lit longtemps l'objet d'un commerce lucratif.
Colhert en introduisit la fabrication en France vers lG(î().
lYlisérable, latin miserahUeni.
Synonymes : gueux comme un rat d'église (qui n'a rien à
manger) : nnnable; penaillon (Rabelais, IV, 24) ; peineux, besogneux.
Les Romains avaient nomnu'; Ffinon/'us le vent favorable (?).
Rafale, ruiné par le vent de la mauvaise fortune.
Cette épitliète est souvent donnée à celui qui est inalbeureux par
sa faute, par les crimes qu'il a commis.
IVIisèpe, du latin niheriam.
La misère est lille de la paresse, et sœur de la médiocrité. Gouime
la faim, elle est mauvaise conseillère, et souvent devient l'entre-
metteuse de la prostitution et de la débauche.
La misère mène quelquefois à l'incondiiite : l'inconduite mène
plus sou\ent à la uiisère.
68 MIS
La iiiisrrc csl une. (•oiis(''(|ii('iir(' de la naliirc liiiniaiiic -. la cliai'iK''
est d'insliliitioii (li\iii<'. iDiipanloiiii. iiiai-s \H7'.\.)
Misrrc i^lall(lais(^ Miscrriinus : riiillirlc aj(»iil<''(' an nom do
(]|iallcrl(»n snr son (oiiilicaM. à Wcsiiniiistcr.
L'élégance llélric de la niisrrc en liahils noii's: les haillons de
ro|)Mlence ; l'associaiion liidensc dn Inxc cl de la inisrre...
— AJisi'/r, dans l(^ laniiauc du marin, a |)lnl(')l la siiiniliralioii d(;
fatigue excessive, de péril prolongé, (jmc celle de pénurie et de
déniiemont.
Miserere, mol lalin : Ayez pilié.
C'est le début du psaume oO, le qualrième des psanmes de la
pénilence. David le composa après que le prophète Nathan hii eut
reproché le criuie qu'il avait commis avec Bethsabée.
— Il eu a eu depuis tniserere jusqu'à vUulon'.W a été hieu battu.
(Rabelais. III, 13.)
Les uioiues se donuaicut mutuellement la discipline par esprit de
pénitence, et pendant cette flagellation, on chantait le psaume
3Iiscrere. La flagellation la plus longue durait du premier mot.
misci^ere. jusqu'an dernier, qui est i-ilu/os-.
Miséricorde, du latin miscricordiam, cœur compatissant.
Étymologie burlesque : miscrc et corde.
C'est un manteau de miséricorde, d'autant que la misère y est
évidente, et la corde pareillement. [Les Jeux de l Inconnu, 1645.)
J\Iisericordia rilhun est. (Sénèque, De la Clémence.)
Mistral, anciennement maisiral. forme provençale de vinfji^-
tral.
Le maistral... silller à travers les antennes. (Rabelais. lY, 18.)
Vent du nord-ouest. Le balai du ciel.
— Maître vent. C'est ainsi que Rabelais (lY, 44) appelle le gros
fessier de Guélot, « d'où le vent punais sortait comme d'une magis-
trale éolipyle » .
— Ce vent prend naissance au mont Yentoux, c'est-à-dire venteux;
Les Grecs l'appelaient A-erA^/os ; les Latins circius : dans quelques
localités du Midi, on l'appelle encore cers.
Selon Strabon, le mistral, surtout dans la Cran d'Arles, campus
lapideus, renversait souvent le cheval et le cavalier : equum et
ascensorem dejicit. ~ Aulu-Gelle dit qu'il renversait les hommes
et les chars. Il produit encore aujourd'hui les mêmes effets, et il a
plus d'une fois renversé des trains de chemin de fer sur la voie !
.MOI) 69
l/tMii|it'i-('iii- AiiLiiislo lui avilit rimé des teniplos à Aiios et. à
A\iLiiinii. |M»iii' apaiser sdii (•niirroiiv : mais les pi'iri'es et l'encens
des liiiiiiains n'y en! rien fait : il continue à sévir et a niéiMté d'être
mis par nos pèi-es an ran.n' des Iléaux de la Provence. Il faut
con\('nii- c('|MMi(lanl t\\\v son aciion n'est i)as toujours niiisiliie :
s'il l'eiiMM'se les clieininées, s'il enlève quelques cliapeau.v, s'il
commet des indiscrétions à l'éuai-d des dames, en re\aiiclie, ce
liniirru hicnfaisanl l'ail soum'uI la liesoune des balayeurs nninicipaux
el emporlc hicn îles niiasnies...
Mitonner, de fn/'/i.s, dou\(0, ou de mie?
— Miioii se dit, dans certaines provinces, de morceaux de pain
taillés épais pour la soupe : soupe aux mitons.
— Un potage mitonné doit rester lonutenqis à cuii-e à petit fcui.
— L'on.aiient miton-milaine, (pii ne fait ni bien ni mal, serait
alors un cataplasmi^ de mie de pain.
— Au ligure, milonner uni' alTaii'(\ c'est en préparer le succès
de longue main.
lYlitraille, pour inildillc. diiiiinnlif du \ieu\ français miie^
menue nionnaic.
Se dit encore, dans le lau,uau(^ familiei', de la monnaie de cuivre.
La tiiUc ou mifdillc, monnaie llanuinde valant quatre oboles, fut
supprimée par édit de Philip[)e VI, en 1332. Un amas de ces petites
pièces s'appelait mllrnilla: et l'on a transporté le uoni à la
feri'aillc formant la charge des canons.
lYlitron, dérivé de mitre : grec mllra.
Gai'çon boidanger. La coilTurc des garçons i)0ulangers était un
bonnet blanc ressemidant à une mitre.
IVîode, (lu lalin tnnihnn. manière d'être.
Est du mascidin (M1 philosophie, eu granuuaire, dans les arts:
du féminin ([uaiid il désigne la fantaisie du jour.
— Au même l'adical se rapi)ortent : modèle, module, moule,
mod(''ralion, modestie, moderne, commode, accommoder.
11 l'sl mil' (IlT'SSC iiicoiisl.'iiilc, iiicDiiinioiJi',
Hizai'i'c dans ses t;oùls, Idlle ru ses oriiemeiils,
uni parait, luit, rcvii'iit et iiail dans tous les tonips :
l'rol ■•(■ (jlail son ik'tc, et son nom est la. mode.
( Vol.TAlIlh.)
— La mode est un imp(»t (pie l'industrie du pauvre met sur la
vanité du riche.
70 M» >I
Lo vrleinenl s'csl liicii iicrl'cclioiim'-. (li'piiis l;i feuille de \i'jiie (h>
nos premiers p.ireiils.
— Ce qui est (fe mode est destiné ;'i s;itisf;dre ;iii\ cnin-ices de l;i
mode. Ce qui est rÀ la mode est eu faveur acluelleuienl. L'auteur
qui clierche les idées de luode. luaufjue d(î sérieux et de solidité:
celui dont les ouvrages sont à la mode, peut avoir un mérite réel.
— Mode annoiire un succès de iioùl et de caprice; rof/ne m\
succès d'estime et de préférence. La fantaisie fait la mode, l'opiuion
fait la vomie. Vm^ actrice est à la uiode. un écrivain est en \o,iiue.
Modeler, de modèle : italien //lodello, dérivé de modulas ; hien
plutôt que de medullatn, moelle, quoique le Provençal appelle
moudèle la mie de pain, matière plastique, pouvant se mouler.
Modeste, dérivé de tnodus : (\m est modéré.
Modestie, de modesilam.
La modestie est le lantiage le plus captieux de la vanité.
La modestie est une vertu d'hypociile.
Sias humili.s c non vils.
(Vie (le saint Honorât.)
(Sois modeste, non vil.)
La fausse modestie est le dernier ral'lluement de la vanité. (La
Bruyère.)
L'excès de modestie est un excès d'orgueil.
(Chémeu, Nathan.)
La modestie est à la vertu ce qu'un voile est à la beauté : elle en
fait ressortir l'éclat. (Petit-Senn.)
Une enveloppe de modestie couvre nos erreurs, et garantit nos
talents de l'envie: comme une blouse cache nos méchants habits et'
protège les bons.
Mœurs, du latin mores, même sens.
Le temps moralement nécessaire, c'est-à-dire habituellement,
raisonnablement.
Les mœurs sont un colher de perles : ('»tez le nœud, tout défile.
(Restif de la Bretonne.)
Moi, du latin me {me est la fornie sourde, moi est la forme
accentuée).
La piété chrétienne anéantit le moi humain ; la charité chrétienne
le cache et le supprime. (Pascal, Pensées.)
Le moi est haïssable. (Pascal.)
.M<il 71
L"Kt;it. (•"est moi. (Louis XIV.)
IliiiiU' n'est plus dans Uonu', elle es! tonte oiï je suis.
Comme moi {s/'ci/f cf /los). \... (jiii. sfcut el. nos. cioclie d'un
(imI. (Lo GamotMis. i
Moine, du e'i'cc ///o///o.s-. seul : de }/ionos. D'où le hiliii /ikhu/c/u/s.
l'i'ONtMiral nioiif/c. catalan inonjc
Co mot. (jiii désignait d'aliord les solitaires, s'applique au\
l'énohites. (pii mènent la vie en commun dans les couvents, mais
séparés du monde.
Les solitaires s'appellent anachorètes (du urec anarliôrco.)
— Faute d'un moine l'ahliaye ne mainpie pas. (Voy. (ihhai/c.)
— L'Iialiit ne lait pas le moine. (Voy. Inibit.)
Le moine el la liégiiine
Sont pires (|a"ils n'en ont la mine.
— Le moine, c'est un personna,e-e sans jière et sans enfants, sans
passé et sans a\enii'. loul entier an [irésenl el à ses joies maté-
rielles : (jui ne peut loucher à la femmes qu'i'.n la souillant, el
accomplir la loi de la nature (pi'eu violant la loi d(; la famille et de
la société ; mélanue d'i.unorance. d'astuce, de cruauté, de lihertinaiic,
d'oisiveté crasse, de piété stupide, dont le capuchon est plus fort
(jue lijen des coiii'onnes. (Xisard, Recia; des Deux-Mondes, 1835;
reproduit dans Érasme, p. oi.)
Le moine... ne lahoure, comme le paisant ; ne liuarde le pays,
comme l'homme de guerre ; ne guarit les malades, comme le
médecin : ne presche ne endocti"ine le monde, comme le hon
docteur é\augéli([ue el pédagogue: ne [)orte les commoditez et
choses nécessaires à la Répul)li(iiie, comme le marchand ; c'est la
cause ponrquoy de tous sont huez et ahhorrez. (lia hélais, I, 40.)
Les moines non sunt cnstrati : on leur donne le nom de pères.
et ils font en sorte (pie leur nom soit hien appliqué. (Érasme,
(',olloi[ues.)
Tout paiiout pères on les nomme.
Kl de faicl, plusieurs fois advient
Que ce nom très bien leur convient.
(C. .Ma.;ui.)
Héi'anger a reproduit cette plaisanterie dans son Roi li Yvelot :
Ses sujets a\aienl cent raisons
De le nonuner leur père.
Hahelais appelle les moines perpéiaous.^ en tant que leurs
confréi'ies sont perpétuelles.
72 MOI
(Ion; (l'Imid. in (jiKî ncino iKisrilnr ncr inoriliiv, ;i dil IMiiKî
(V, 17) (le. ccrliiiiis |»(M'|)(''Iii()ii.s on onnilrs, ;i|i|)<'l(''S lOssiMiiciis. (jiii
lialiilaieul dans les (1i'<('i-(< de la J'alcsliiic (]"»'sl ce (jircnlciid
lia hélais.
— Moine Itoiirrii : [tréleiidii laiiUniie, dont ou clVrayail les
enfants. On siiijposail que c'était une ànie en peine, qui [larcoiirait
les clicmins et maltraitait les passants. On le représentait errant à
travers les \illes pendant rAvenI, coiiinic l'iiidlipie le passage de
Uégnier {Salira XIV) :
Mais après en clicrcliaiil axdir ;iiil;iiil ('(iiini
Qu'aux Avcnls de Noi'l l'ail le nio\ne bourru.
— Bailler le moine. Vieux proveri)e cité par Rabelais (I, 4o).
Signiliait porter giiignon, malheur. En elïet, selon l'opinion du
xve siècle, la rencontre d'un moine était regardée comme un mau-
vais présage.
On disait aussi :
( Pour faire nette la maison.
N'y îaut ni moine ni pigeon.
— Au moine la hesace ! .
Mes beaux pères religi(>ux.
Vous dînez pour un grammerci fgrand merci) :
0 gens iieureux ! ô demi-dieux !
l'ieusl à Dieu que je leisse ainsy !
(iiiioiiKAr.)
Moineau. On en donne plusieurs étymologies. La plus vraisem-
blable est moisne/, pour moisonel, de muscionellum, proprement
oiseau-mouche, petit oiseau.
Ménage le dérive de moine, à cause de la couleur de son plu-
mage, qui est grise, comme le costume de plusieurs ordres religieux.
On dit : couleur solitaire.
Celuy est nommé moimeau, parce qu'il semble porter un froc de
la couleur des enfumés. (Bolon.)
— Tirer sa poudre aux moineaux : perdre sa peine.
Cette locution vient du nom des moineaux ou moyneaulx, sorte
de guérites en fer, qui, sous Louis XI, servaient d'abri aux soldats
contre les attaques des ennemis, et contre lesquelles ou tirait
inutilement, sans atteindre ceux qui s'y cachaient.
Mois, du latin mensis ; provençal mes ; italien ?nese. Du sanscrit
tnasa, de mas lune, idée de mesurer. Ce radical se retrouve dani
trimestre, semestre.
MON 73
— Les mois, chez les [{oiiiains, étaient di\isés en (rois parties :
les ealeiules. les noues et les ides.
Les calendes étaient le |)reniier de cliaiine mois, (jni connnençail
avec la nonvelle Inné : elles étaient annoncées au peuple par le
pontife, an monuMit du le\er de lastre.
Les noues étaient le nenviènie jour a\anl les ides, et celles-ci
tomltaient le 13 on le lo du mois, d"un nom étrusque qui signifie
partage.
— Les dates d'événenuMits importants sont souvent citées [tour
révénement lui-même : le 10 août, le 1) tliermidoi'.
Moitié, du latin tnc/ieia/c/n : pro\ençal ntilaf.
— Employé pour épouse. Les ralihins disent que le mol liéhreu
que nous traduisons par côle (Genèse. II. 21) siuiiilie rôle, et (pie
Dieu forma Eve d'uu des côtés d'Adam; que le premier homme
était rtn</;'05'y ne. c'est-à-dire réunissait les deux sexes. Dieu n'auiait
fait que séparer en d(Mix le corps d"Adam, d'où le mol sexe (sexu.-:)
de seeare, diviser, partager.
— Platon (i?«n<7«e05 dit aussi que les premiers honunes na(iiiirent
douhles, et que la force dont ils étaient doués par la duj)/ici(é de
leurs membres les rendit insolents envers les dieux. Jupiter, pour
punir leur audace, partagea en deux ces androgynes, et depuis, ces
deux moitiés ont conservé une forte passion pour se réunir : c'est
l'altracliou des sexes.
Môle, du latin moles, masse, d'un grand poids.
D'où aussi : mola, meule^ molaire, dent qui sert à hi-oyer les
aliments comme une meule. Molécule, petite masse de matière.
Mollet, de moles, masse charnue : s'il ne vient pas plut(M de
mol. adjectif: latin moUem.
Moment, du latin momentum, mouvement.
Un simple mouvement, un pas du temps.
Faire une chose à moments perdus..., ou gagnés.
Momerie, du ui-ec //lomos. \no(\\nmr: d'où lUomus, dmi de la
folie.
Ou plutôt du vieux français momer, d'origine germaui(pu', (pii
signifiait se déguiser; d'où momon. employé par Molière.
Monaco, décime, mauvais sou fra|i[)é dans la principauté de ce
nom.
74 MON
La FiMiicc fui iiKiiidrcdr (('lie iiioiifKiic sons le rt'iiTic d'IIonoi'é V,
mort en ISU. l'ii drci'ct en inlcidit I;i cinnlHlioii à cette époque;
et, le 9 noveiiihre ISC),';. [);ii' nue coiivciiliijii ■.wvc la Fraiire. le
prince de Monaco s'obliuea ;'i ne lra[>p('r désormais ses monnaies
(pi'(m France.
Monde, du lalin //h/ik/i/s. |iiir. hrilhinl.
Hesié avec sa siunilicalioii |irt'niiére dans orjre mond? et dans
('monder, ainsi (jiie dans le iiéyalil' immonde.
(Jiii \('iil s;i (•(iiiscicncf iiiondr,
Il ildiht l'iur II' iiKuidr iniiiioïKic.
Par suite, tont ce cpu; nous apercevons de corps (brillants) dans
l'espace.
— Aller au bout du monde : très loin.
Si la terre avait un bout, elle ne serait pas ronde. (Voy. terre.)
Les anciens, qui ignoraient la spbéricité de la terre, croyaient
que Delphes était au centre du monde, dont elle était nommée pour
cette raison le nombril {umb/J/cns).
Le poète Claudien a raconté la fable de deux aigles lâchés par
Jupiter de rOrieut et de l'Occident, et qui se rencontrèrent à
Delphes.
— Les premiers chrétiens croyaient que le milieu de la terre
était la montagne du Calvaire.
— Lamothe leYayer parle d'un anachorète qui se vantait d'èlre
allé jusqu'au bout du monde, et qui, arrivé aux extrêmes limites,
avait été obligé de se courber, à cause de la réunion du ciel et de la
terre.
— Hegnard, dans un de ses voyages, pénétra jusqu'à la mer
Glaciale, et ne sarrèta qu'où la terre lui manqua. Il grava sur un
rocher cette inscription :
Gnllia non genujl, vidit nox Africa, (tandem
Hnusimus, Europanique oculi>t luslr(n'imu>i oiiincm ;
Ciisihus cl variis acti tcrraque mariquc.
Hic tandem sletimus, nohis uhi defttil orbis.
— Le docteur Kaue, dans un voyage à la recherche de Franklin,
de mai 18oo à août 1855, est parvenu au 82^30" de latitude, par
76" de longitude, au point nommé Grinnel. le plus rapproché du
pôle oit Fou fût encore arrivé. Le mercure demeura à 1 état solide
pendant plus de trois mois, et eu noveuil»re le wisky gelait.
MON 7o
— liO tour (lu iikiihIc. ([iii nutrofois exi.uonil Iruis mis ,111 moins,
se f;ii( aiiidiirdliui tMi moins de trois mois.
De Paris ;i Ni'w-Vork ^1 joiii-s.
DeNew-Vork m Siiii-Fniiiciscn (railway). 7 —
De San-Francisco à Yolvoama (^ bateau). . ^I —
De Yokoaina à IIoiiji-Kong' (hateau) C» —
De Hoii.u-Kon.û- à Calcutta (i)ateau) 12 —
De Calcutta à Bombay (railway) '-\ —
De Bombay au Caire l't —
Du Caire à Paris G —
80 jours.
— La fin du monde. Il est certain que le monde finira un jour,
sous peine d'értr/or en rannrd la menace du jugement dci-uicr
laite par les proplirtcs.
— La moitié du monde l'il de l'autre moitié. (Sévigné.)
I.a muilii' des liiunaiiis ril aiiv (i'iicns de l'aiilro.
(Dkstolches.)
La société est partagée en deux classes, les tondeurs et les
tondus. (Talleyrand.)
— Dans la société, on distingue le petit monde, le demi-monde.
et le monde et demi, ou grand monde, qui s'appelle aussi le beau
monde.
— Se retirer du monde. (Voy. ermite.)
Vous n'êtes point du monde ; c'est pour cela que le monde vous
liait. Non estis de miindo, ideo udit ro.v mandas. (Éca/if/i/e de
saint Jean, XY, 19.)
Dès que l'on fuit li' inonde, il nous l'iiil à son tour.
(La Chacsske.)
H y a des gens qui se retirent du monde, et d'autres dont le
monde se retire.
Monnaie, du latin monela : provençal nioneda.
Celle qui avertit; surnom de Jiinon. C'était dans son temple
qu'on fabriquait la monnaie.
Les monnaies sont de véritables monamenfs. d'après lesquels
nous jugeons des arts et de l'état social des peuples éloignés de
nous par le temps ou par l'espace.
— Synonymes : acUetoir, monaco, momieron (argot).
70 MON
— Dnns les pfciiiici-s Iciiips, (|ii;iii(l l.'i iiioiiniiic ii'cxisliiil jcis. on
pesait le iii(''l;il. i|iii v[;\\\ liii-iiK'iiic une iii;ircli;iii(lisc.
Aliraliam [icsail lOO sicics d'aiyonl aii\ lils de llrili. auxquels il
vtMiail (racliclci- une pièce de lorro.
Les Cliinois ont conservé celle Iradilion. e( piilenl avec des
linpols posés en présence d<^ l'aclieleiir. coNiiiie celui-ci pèse la
marchandise (pi'il livre en éclianuc.
De là est resté à certaines monnaies, dans les pays civilisés, le
nom de poida auti'efois et encore aujoni'd'lini en usage. Le talent,
dans la Grèce ancienne ; r«.s-, chez les Romains; Vipound, chez les
Anglais: la lirre, en France, désignaient à la fois des poids et des
monnaies ; celles-ci pesaient, en effet, nn talent, un as, une livre.
— La monnaie est une matière ayant une marque légale, qui lui
assigne une valeur relative, et qui sert jiour les échanges com-
merciaux.
— Toute marchandise est une monnaie, et toute monnaie est.
une marchandise.
Cette formule, créée par Turgot, n'est vraie que si on considère
le métal dont la monnaie est faite ; mais, sous la forme de monnaie
servant d'intermédiaire à l'écliange, elle a des caractères particu-
liers qui la distinguent essentiellement des autres marchandises.
Ainsi, si le fer est rare, ceux qui en ont hesoin souffrent, mais
cette rareté n'agit (jue sur le prix du fer : tandis que, si la monnaie
est rare, le prix de toutes choses s'en ressent.
— Le crédit, en multipliant le billet de banque, ou « monnaie
fiduciaire », provoque les crises financières, si fréquentes à notre
époque, car dans ce cas, la fortune publique ne s'accroît que ficti-
vement, et donne à certains produits uiu? valeur exagérée et
arbitraii'e, tandis que la monnaie est une marchandise tarifée par
la loi, et d'une valeur in\ariable ayant seule le pouvoir d'éteindre
toute dette.
— Fausse monnaie : en argot morn/f/Ie. qui signifie soufllet sur
la joue, c'est-à-dire soufllet appliqué au roi, dont le [)ortrait ligure
sur les monnaies.
— Battre monnaie. Autrefois les pièces de monnaie se faisaient à
la juain. On façonnait une à une. avec le marteau et la lime, des
rondelles que l'on plaçait entre deux coins gravés en creux; et le
coup de marteau qui déterminait la double empreinte, était l'acte
qui a consacré l'expression, battre moumiie.
— En 1(52;), un artiste français du nom de Briot, inventa le
MON 77
|t,il;in(ii'r. don! on sort iiiijoiirdliiii. cl ([iio l;i Kimiko no voulut pas
,Hl(»|ilt'r (l'aliiiril. mais ([iii fui accueilli en An.iilctçri'c, on il remplaça
If iHdnnayaLîc à la main.
— l'n linuol (lOr d lin million osl conveiii dans les Indcls des
monnaies (18()()) en conpiiivs de :
Pièces de 100 Iraïu-s 5.000 francs.
» 50 » 10.000 ))
). 20 » 740.000 »
). 10 » 190.000 ).
,> 5 ). *. ... 55.000 »
— Monnaies divei'ses : blanc, hondjoii, cent, croix, denier, liard,
maille, monnei'on. ohole. para, patar, piastre, pislole, sesterce,
sterlin. son. si\-hlancs. lésion. Ilialer, etc., etc.
Monopole, dn grec monos, seul, pôlciii, vendre.
Tralic exclusif, fait en vertu d'un privilège.
— Le gouvernement, en France, se réserve certains monopoles,
tels que ceux du tabac, de la poudre, des cartes à jouer.
Monotone, du grec inonos, seul, /onos, son.
Oui est toujours sur le même ton ; par suite, ennnyeux.
— Heureux celui qui peut parcourir tous les tons de celte belle
musique, doul aucune note ne reste silencieuse sous sou arcbet !
((t. Sand. Ah/o le rhneiir.)
Monseigneur (Pince-), fausse clef.
Pince à ertraclion du voleur.
On disait autrefois daufe (Monseigneur le Dauphin), parce que
la pince a l'extrémité fourcliue comme la queue du dauphin.
Monseigneur est un jeu de mots, parce que toutes les portes
s'ouvrent devant Monseigneur.
Monsieur est une simplification ou contraction du précédent :
mon. seigneur, de aeniore/n, plus âgé, à qui on doit le respect.
Au xvir' siècle, on faisait parfois sonner la Jinale :
Le ronard sVn saisit, et dit : « Mon hoii luonsiour,
Apitrenez que tout flaltenr... »
(La Foxtaink.)
— Monsieur, tilre doniu'' au frère du roi. Il paraît manquer de
distinction, pnisipie tout le monde le porte. Cependant, quand on
parle au frère du roi, on l'appelle Monseigneur.
Le poète Diicis, eu lui dédiant une tragédie, termine son épître
78 AULX
pnr rcttc fnnitiilo l)i/;ir'ro : « .Iti suis, MnnsoiQticiir, de Monsieur le
(rrs hiiiiililo cl ohôissMiit serviteur, x
— Les cours (1(; justice \ous lr;iiteiil de .s/V'?^;'; certains majris-
Iratsse permettent Texpi-ession dédaiuneuse : le nommé X...
— L'usage de répéter Monsieur siii' l'adresse des lettres est une
marque de 1res urandt- déférence : il semble porler au superlatif le
sentiment du res[»ecl.
Au Moyen-Age, on répétait volontiers le mot scifjnpnr. [loiir faire
plus d'honneur à la personne.
Scinijn'en Monid, non rrc i/iie larzn ijairc
Qu'en ccirtil en lirtiinon, mon seigneur.
( l..llllllfrli DK lioNANKI,.!
(Seigneur seigneur Monal, je ne crois pas rpiil tarde guère que
je ne voie le seigneur Raimond, mon seigneur.)
En roman, senlier s'abrégeait en en. On se servait aussi de la
foriiiule de politesse Mosseujnen : Monseigneur, seigneur.
— Monsieur, madame, sont remplacés, en Italie, par les articles
le, la : le Tasse, la Mali bran.
Cet article, parfaitement honorable en Italie, s'ajoute au nom des
plus grandes dames comme une distinction qui n'est due qu'à elles.
En France, au contraire, quand nous disions la Gaimard, la
Clairon, c'était plutôt avec une moue de dédain involontaire, par
suite de la réprobation morale que l'opinion publique inllioeait
autrefois aux comédiennes.
Monstre, du latin monstrum, de inonstrare.
Quod moneat voluntatem deorum. (Festus.)
lYl ont-de-pi été.
Synonymes : le clou, le plan, ma tante (argotj.
Le r'/oM, parce qu'on suppose que les elïets engagés y sont pendus
au clou.
On mettra tout au plan, plutiH que de refuser un cataplasme au
pauvre chéri. (L. Reybaud.)
Ma tante est dit par rapprochement de mon oncle, qui' désigne
un usurier, un prêteur sur gages.
— L'institution des monts-de-piété date du xv^ siècle. Ce fut un
moine récollet, Rarnabé de Terni, qui organisa le premier, à
Pérouse, en 1462. L'œuvre devait être avant tout charitable, et
c'est à cette idée qu'est dû le nom de mouX-de-piéfé.
Le premier fut établi à Paris sous Louis XYl, et ouvert le
.M( )n 71)
28 (l(M^cinl)ro 1777. ;iii M.ir.iis. nie P,ir;i(lis, ni'i il est iMicnro Miijoiir-
d'Iiiii.
Montagne, (h''ri\i'' de nnnil : latin K'io/ifn/i . qui. il'iiprés
Corssen, .^^c raltaclit' ;'i la raciiu' ui/'/i. de cniinere.
\a\ iiKinlai^iif CM travail riil'anlc iiiii' souris.
(Boil.KAC.)
C'est une li-adiictioii d'IIoi'ace {Art poétique. 39) :
l'iirhirirnl iiiontr,<i. iKtso'liir rldirnliis tnit'i.
Monter, dérivé de /no/il, romiue a/nonf.
Monte?' représente l'idée d'élévation : pour l'idée inverse on dit
totn/ier, (jiii siuiiitie une cliule brusque, et qui exprime moins liien
que (léralev, la perle d'une position élevée, qui se fait par un
abaissement progressif.
On peut s'ai'rèter quand on monte, jamais quand on desrend.
(Napoléon.')
Montjoie Saint-Denis! Cri de guerre sous la première race,
parce qu'après la victoire, on entassait uii monceau de terre en
fonne de pyramide, qu'on appelait mont (de) joie.
S'il ne vient pas plutôt de monge, moine, qui aurait doum;
« Monjoie Saint-Denis », c'est-à-dire abbaye de Saint-Denis, devise
de Vorillamme, et cri de guerre des Français.
Montmartre, de Montem Martis, ou Martijrum.
Quartier de Paris, sur une bauteur. où il y aurait eu un temple
de Mars : où. sel )u d'autres, saint Denis et ses compagnons soiif-
fi'ii-ent le martyre, en 260.
— Académicien de Montmartre : un àne.
Un mauvais poète avait acbelé une maison à Montmartre :
« Ali ! dit Piron. il retourne au pays. »
— On disait autrefois d'un ignorant qu'il avait étudié à l'académie
d'Asnières, à cause, sans doute, de la ressemblance de ce nom
avec àne.
Monument, du latin monutnentiun, qui sert à avertir.
Les moninneuts des ai1s sont la véritable écriture des peuples,
et donnent l'idée la plus exacte de leur civilisation.
Cicéron disait d'Atliènes, qui était remplie de monuments anciens,
qu'à cbaque pas ipi'on y faisait, on marcliait sur un souvenir.
Moquer, du grec mô/càn, ou de mokos, dont les Romains firent
morosus, acteur comique, satirique et bouffon ; à moins qu'il ne
80 MOU
soit lo (Idiililcl (le uioiiclii'i-. Ii;is-I.iliii nnirtirc. coiniiic on dit
oiicoro : iiioiiclicr <[iicI(|imiii.
— J(5 111(^1 iiio(|ii(' : j<! suis (lu n\L:iiiiMiI de (>li;iiii|);i!ii)('.
Je m'en l);i(s Td'il.
Je m'en soucie coiiiino un [)oissoii (l'niic iioninif.
— Je me moque de ca, coiiiiiie du Canada. Celle Incnlion remonte
sans doute an temps de Lonis XIV, oii Ton déportait certains
conpaliles au Canada.
Mercier {Taldenu de Paris, cli. ^lo) dit que Louis XIV ordonna
qu'on ent à sévir contre les membres de la Com]iaunie des œu\res
fortes, et menaça de les envoyer au Caïuida.
— Je m'en moque comme de Colin-Tampon (Voy.), ...comme
de l'an qnarante.
Au commencement du xi^ siècle, on croyait que la fin du monde
devait arriver la quarantième année de ce siècle. Le peuple était
dans la consternation et se convertissait en foule; mais lorsque
l'an qnarante fut passé, on s'en moqua.
— La pelle se moque du fourgon. {Fourgon signifie le crochet de
fer destiné à attiser le feu.)
Le piètre (pied-bot) se moque du boiteux.
Se moque cpii cloque : un vicieux ril d'an autre. (Rabelais.)
Morale, du latin moralem (de mores) qui a rapport aux mœurs.
— Lord Russel, succédant à lord Palmerston (noveuil)re I8G0),
dit au l)anquet du lord-maire : « L'application des principes est
toujours une question de circonstance, de temps et d'opportunité. »
Cette phrase est l'expression de la politique louche de l'Angle-
terre, et une paraphrase de l'opinion professée un jour par
M, Nisard sur la grande et la petite morale.
— Faire de la morale : emberquiner. Allusion aux ouvrages
moraux de Berquin.
lYlorbidezza, mot italien ; de morbiis, maladie.
A passé du sens de maladie à celui de grâce molle. . .
Se dit, dans les arts, de l'expression douce, molle, délicate,
presque maladive, des physionomies.
lYIopdre, du latin mordere. Radical sanscrit mord, broyer.
D'où: mors, morA-^-v: morceau, morsel lus : mordicus (avec les
dents, avec ténacité) : remords.
...Jiivéïial lie sa mordante pliiino
Faisait couler îles flots de fiel et d'amertume.
(BOILEAC.)
MOR 81
Morganatique diinriatie). do ralloninnd morgrngnhe, don du
iiintiii. |irt''S('iit (lu mari à sa l'cmino, au Jondeinaiii des iiores.
C'est iiuc loi'uic |iarliculiri-t'. el uou auficipée, du présent iU'
noces, do la corboillo do niaria.ue. (juol(|uofois ce présent était
considérahlo. ot so composait d'un certain nonil)re de \illos et de
domaiiios.
Un ap[)olait aussi ce don osr/e, de osrubniK l)aiser, parce qu'il
était toujours accompagné d'un haiser.
— Le mariaiio mor.uanatique, secret et mystérieux, ce mariage
do la main gaucho ([)arco que ré|)ou\ présente la main gauche), a
lion entre un prince ot une [)ersoniui de condition inférieure, entre
un noble et une roturière, à condition que les enfants n'auront ni
le titre ni certains biens paternels.
La triste hypocrisie du mariage morganatique est assez fréquente
en Allemagne, pour préserver les jeunes altesses des petits États
d'entraînements de ccour irréparables. Qu'il s'agisse d'une étoile de
théâtre ou d'une honnoto hllo do bonne maison, elle ne ptMit porter
pul)liquement le nom de son époux ; les enfants ne sont point
ofliciellement reconnus. Il arrive souvent que le mari est arraché
au foyer do son choix, i)our épouser une princesse que lui imposent
dos ordres su[)érieurs. {Revue des Deux-3Iondes, 1876.)
Morgue, origine douteuse, peut-être du languedocien mor(ja.
museau. ,
Contenance Hère, hautaine, d'un fonctionnaire : sid'Iisance d'un
vaniteux.
— Morguer. dit Lamarre {Traite de police), signifie regarder
tixemont.
— Cyrano de Bergerac {Histoire cùmique des États... du Soleil),
dit : « Je demeurai dans la morgue jusqu'au soir, où chaque
guichetier, l'un après l'autre, par une exacte dissection des parties
de mon visage, venait tirer mon tal)leau sur la toile de sa mémoire. »
Ce passage de Cyrano indique que la morgue était un lieu do
dépôt dans les prisons, où les agents de police venaient prendre le
signalement des détenus ou constater leur identité.
— La Morgue est aujourd'hui un lieu où l'on expose publiquement
les morts inconnus, afin qu'on puisse les reconnaître.
Le gamin de Paris, qui va à la Morgue comme à un spectacle,
appelle les corps exposés des artistes. Lorsque, par hasard, la
salle d'exposition est vide, il dit qu'il y a relâche.
82 MOU •
IVIorniffle, du \i('.iix fr;in(;;iis cl arg(jt )/i(jnios\ hoiiclic sniifllct
siif l;i joiie, on |)liiU)l sur l;i l)nii('lic. (Voy. monnaie.)
Morphée, (in f^rcc murplu-. iipparence, à cause des formes si
variées des songes.
— Ktre dans les bras de Morpliée : dormir.
Morpliéo, lils du Sommeil et de la Nuit, était lui-même le dieu du
sommeil et des songes, le seul qui annonce la vérité. Il était, dit
Ovide {Mclam. Il), très lialtile à prendre la démarche, le visage,
l'air et le son de voix de ceux quil voulait représenter ; d'où lui
serait venu son nom.
lYlorra, jeu où deux Italiens, en face l'un de l'autre, passent
souvent la journée, ouvrant et fermant la main, et criant le nombre
de doigts ouverts ou fermés.
Mors, du latin morsus, morsure, parce que le cheval le mord.
— Prendre le mors aux dents : s'emporter.
Mort, nom et participe, morlem et mortuum.
1° Divinité infernale, fille de la Nuit, qui la conçut, sans le secours
d'aucun autre dieu.
2" Sort, destin ; la iln de relïet chimique. (Gavarni.)
— Synonymes : la camarde, la dernière heure.
La camarde, celle qur est sans nez. Cette expression, d'un
réalisme elîrayant. peint dun trait énergique la sensation d'horreur
que l'on éprouve à la vue d'un squelette, qui personnilie la mort,
et l'aspect iiideux que l'absence de nez donne à sa face.
C'est par la même raison que la mort a été appelée carline, à
cause de l'absence apparente de nez chez les chiens carlins. (Cf.
Fr. Michel.)
— A mort (locution adA^erbiale) : beaucoup, considérablement.
Il travaille à mort : jusqu'à extinction de chaleur vitale : la^que
ad mortem.
— Cela vient trois jours avant la mort : se dit à quelqu'un qui
s'eft'raie d'une légère indisposition.
— Il y a remède à tout, excepté à la mort. — On considère la
mort comme le plus grand des maux parce qu'il est sans remède,
et l'on dit, pour exprimer le grand déplaisir que quelqu'un a d'une
chose : c'est sa mort.
Hoc instar mortis pulat. (Cicéron.)
M(»K 83
— L;i vie est iiii mal... iloiil on iiioiiil.
Dans kiiil berceau k"'1'"1'' "'i'" tombe.
(V. Huco.)
— .MiHiiircst lin mal : s'il \]\'\\ élail [las ainsi, les dieux mour-
raient. (Sa|»li().)
On n'a poiiil ikhii- la iiku'I de (lis|ienso de Rome.
(Moi.iKUK, Elourili, H, 5.)
C'est la ti'adnclion diiii verset de \' Imitation do Jé^iU^-ChriKt :
Xi'hio itnin'lrare potesl à Tapa hulla.in niinquam mnriondi.
('/est lin arrêt du ciel, il faut (jue riiomme meure.
Tel est son parta^^e. et son sort ;.
Illen n'est |)lus certain ({ue la mort,
El riiMi plus incertain ({uc cette dernière heure.
(L'cil)!»'' Tksti-.)
La MorI a des ri^jueurs à nulle autre pareilles;
On a beau la prier,
T.a cruelle ([u'elle est se bouche les oreilles,
Et nous laisse crier.
Le pauvre en sa cabane où le chaume le couvre
Est sujet à ses lois ;
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre
N'en défend point nos rois.
(.\[M.iir;iini;, Stances à IJnjjfirricr ; Imilalion d'HoFiAOK.)
Piillida murs œqno -puisât pedc pciaperuin tubenias
HcfjmiKjue turres.
(IIouACR, Odeg, I, IV, 13.)
La pâle luort heurte d'un pied égal les tours des riches et la
cahaue du pauvre.
— A cliaque porc vient sa Saint-Martin. (C'est l'époque on on
les tue.)
— La population du jilohe est d'environ un milliard d'habitants.
11 en meurt un par seconde.
Ainsi, à chaque minute de notre existence, de nos sourires, de
nos joies, soixante lioinines expirent, soixante familles gémissent et
pleurent. La vie est une perte permanente. Cette chaîne de deuils
et de funérailles (pii nous entortille, ne se hrise point, elle s'allonge,
nous en formons uous-nuMues un anneau. ((^Iiah'auhriand, J/é''y/<o//r.«,
tome II.)
La vie nous tue tous les jours un peu ; ne l'aidons pas à nous
achever plus vite. On dirait cependant que les hommes ont peur de
ne pas mourir, à voir tout ce qu'ils iuNentent pour se tuer. (Th.
Gautier.)
84 MOR
— Ln poino do mort, c'ost le tnnno.'iu dos Dnnaï.dcs. avec rette
dinV'ronco ([lie l'oaii est remplacée par le sann-. (L. Blanc.)
I.a K"fll<»liii<' tranche la tète, elle ne Iranclie pas la question.
(G. Sand.)
— Il ne faut pas compter sur les souliers d'un mort.
Tous les biens à venir me semblent autant de cIkiiisoiis. Il n'est
rien tel que ce qu'on lient, el Idn cdiirt grand risque de s'abuser,
lorsque l'on compte sur le bien (luiiii autre vous garde. La mort
ii"a pas toujours les oreilles ouvertes aux vœux et aux prières de
Messieurs les héritiers; et l'on a lé temps d'avoir les dents longues,
lorsqu'on attend pour vivre le trépas de quelqu'un. (Molière.
Médecin, II, 2.)
— Je donnerais ma vie pour deux sous... .le voudrais être mort.
— Vous n'êtes pas dégoûté, répond A. Karr.
— Le mort n'a pas d'amis, le malade n'en a qu'un demi.
C'est-à-dire on oublie vite les morts ; et lorsqu'un malade soufîre
beaucoup, on dit : il vaudrait mieux qu'il fût mort.
— Lorsqu'un homme tombe malade, les siens se lamentent les
huit premiers jours ; les huit suivants ils s'habituent à l'idée de sa
mort, calculent ses suites et spéculent sur elle ; ensuite ils disent :
les veilles nous tuent, il serait plus heureux pour tout le monde
que cela finît. (A. de Vigny.)
Hourrab ! les morts vont vite. (Bûrger, Ballades.)
Il est cruel de penser avec quelle facilité l'homme est oublié,
qu'il repose dans une ui-ne ou sous une pyramide. (.I.-P. Richter.)
La pierre garde la méiuoire plus longtemps que le cœur ; c'est
pour cela qu'on grave un nom sur un sépulcre. (Lamartine.)
— Le mort saisit le vif, c'est-à-dire l'héritier légal remplace celui
qui meurt, dans tous ses droits à la propriété.
IVIopte-saison. Pour les médecins, c'est la saison où l'on ne
meurt pas.
On pourrait en dire autant des porteurs de morts {corbeaux en
argot, parce qu'ils vivent de la mort, et qu'ils suivent les corbil-
lards, comme les corbeaux recherchent les cadavres.)
On les appelle aussi croque-morts, par une double allusion à leur
costume noir et aux cadavres qui les font vivre.
Mortier, du latin mortarium.
Le mortier à bâtir se pilait.
MOT 85
— LacoilTiiro d«^s présidents du |i;irl('iinMi( ;i\;iit l;i forint' diiii
iiiorlitM" d"a[)Otliic;iii'e ; d'où itrésidcnt ;"i mortier.
Cette tO(|ue, symhole de la justice souveraine, était une sorte de
couronne pour les rois de France de la première race, et même des
suivantes. Saint Louis est représenté avec un mortier sur les
vitraux de la Sainte (Chapelle.
Les i-ois de France douiièi-cnt le iiiuriicr au\ jn.iics ([uand ils leui'
abaudounérenf leur palais poni' v (''(.ililir le temple de la Justice.
l^Voy. Palfiix <l(> jtislicc.')
IVIot, du lias-latiu uniilion. de mnilirr. murmurer.
— Les mots sont les instruments, le moyen de la manifestation
de nos pensées. Ce sont des si.unes de convention, qui ne siunilient
rien par eux-mêmes, et varient dans chaque langue pour exprimer
la même idée: ce qui prouve que les langues sont d'invention
humaine.
— C'est la multi[)licité des idées (pii a [irodiiit la mulli[ilicité des
mots dans les langues. (L'ahhé Girard.)
Les mots ont plus de contour que les idées. Toutes les idées se
mêlent par les bords: les mots, non: un certain côté dilTus de
l'àme leur échappe toujours. L'expression a des frontières, la
pensée n'en a pas. (V. Hugo, l' flovunc qui ril.)
— Les mots sont des images : d'où insujnarc, enseigner,
ap[treudre \yAY des signes. Aussi les mots agissent sur l'esprit
comme certaines images. Il y en a qui nous émeuvent, il y en a
qui nous afiligent. qui nous saisissent ou (pii nous élèvent; certains
mots répugnent et dégoûtent.
Les mots, comme les peuples,, ont leur origine, leur progrès,
leurs perfectionnements, leurs transformations, qui se lient à
l'histoii'e des peuples.
Horace a dit que les mots sont comme la monnaie, <[ui n'a cours
que quand elle est marquée au coin du public. Comme la monnaie,
ils sont créés, vivent un certain temps, vieillissent et meurent.
Il faut user avec réserve des mots qui ne font que de naître et
de ceux qui ont vieilli : il en est comme des fruits, qui ne valent
rien trop verts, ni trop mûrs.
— Le mot est de la langue ; le terme est du sujet ; l'expression
est de la pensée. La pureté du langage dépend des mots : sa préci-
sion dépend des tei'uies ; son élégance dépend des expressions.
— On dit : la science des mots, et le don de la parole.
- Les mots grecs et latins introduits dans la langue par les
86 .Mf)T
savants pour les hcsoins do la scicnco, sont pou inlolli'.'ililos au
vulgaire. (|ui se sert i)lus volimlicrs dts mois crrôs p;ir imMiiplioro
ou par onomatopée.
Ces mots, véritahlemeni ôlran.uors à la langue, (pji ser\eul eu
français dans les sciences et les arts, pour représenter des idées
que la langue populaire serait impuissante à exprimer, ne s'y sont
pas assimilés, ne servent qu'à expi'imei- une idée isolée: Wf, sont
frappés de stérilité, ne produisent pas de rejetons. Ils composonl la
langue savante, mais sont incompris du peuple.
Nous avons même remplacé des expressions excollcntes. (jiii nous
appartenaient en propre, par d'autres qui n'ont de mérite que leur
forme extraordinaire. Ainsi, à clievaurhcv. on a substitué monter
à cheval, puis cavalcader (?) et cavalaide.
Mais monter à cheval est un art, pour lequel on a emprunté au
latin équUntion. Après l'idée d'art, il y a l'idée de science : la
science du cheval a pris son nom au grec, c'est la science hippi(pie.
Enfin, on arriva ainsi, en souvenir des traditions héroïques de la
Grèce, à dire que les sportmen français s'élancent sur la piste d'un
hippodrome.
- L'étude de l'antiquité a aussi doté le français dune foule de
néologismes, tirés du grec et du latin pour donner de nouvelles
nuances de la pensée ; mais ces uu)ts, tout savants^ sont toujours
restés en dehors du langage usuel, populaire.
Tels sont : cécité, à côté d'aveuglement ; virilité, puérilité, servi-
lité, en regard de force, enfance, esclavage, etc.
MOTS PRIS ABSOLUMKNT :
Alcoran, mot arabe : le livre par excellence.
Anciens (les) : les Grecs et les Romains.
Art (le grand) : la recherche de la composition de l'or.
Bible (la), mot grec : le livre par excellence.
Blé : la graine, la semence par excellence.
Boire, c'est-à-dire être adonné à l'ivrognerie.
Bouilli (le), c'est-à-dire le bœuf bouilli.
Dame (Notre) : la dame par excellence, la Sainte-Vierge.
Écriture (1') : les livres saints, la Bible.
Fabricant (un), de fabrum : l'ouM'ier en fer, par suite l'ouvrier.
JFaculté (la) : le corps médical.
Froment, de frnmentum : le produit par excellence.
Gabelle : le triltut.
MOT
87
Globe, c'est-fi-dirc le doho torrestre.
Lnhourer, laborave : travailler.
Laiidaniiin, pour Inudnndum (!) : remède digne déloges
Lieux, pour latrines.
Mètre, gi'ec f/ielron : la mesure par excellence.
Nécessités (les) : le liesoin d'aller à la selle.
Nourrir, pour allaiter.
Orgue : le roi des instruments.
Parties (les) : sous-entendu sexuelles.
Péninsule (la) : sous-entendu Ibérique : IKspagne.
Pli. pour lettre [iliée, caclietée.
Provence, c'est-à-dire la province par excellence.
Seigneur (le), i)our Dieu, le maitre des maîtres.
Sexe (le) : le sexe le plus beau.
Simples : Heurs simples.
Via mie. cire/tda : les vivres, puis la cbair.
MOIS i:tua.\(;i:hs adoptics i'au la langik fua.ncaise
Alt lioc vl ;ii) iiiic. hilin.
Ab intestat, latin.
Ab irato, latin.
Abrupto (ex), latin.
Acarus, latin.
Accessit, latin.
Acliéron, grec.
Adagio, italien.
Ad boc, latin.
Ad liominem, latin.
Ad bonores, latin.
Ad libitum, latin.
Ad patres, latin.
Ad rem, latin.
Agenda, latin.
Agnus dei, latin.
Album, latin.
Alcool, arabe.
Alcoran, arabe.
Algua/Jl. arabe.
Alibi, latin.
Allegro, italien.
Alléluia, bébreu.
Al|ilia et oméga, grec.
Alto, italien.
Amen, bébreu.
Amoroso, italien.
Andante. italien.
Angélus, latin.
Antbrax, grec.
A. parte, latin.
Auto-da-fé, espagnol.
Ave Maria, latin.
Belvédère, italien.
Bis, latin.
Bravo, italien.
Budget, anglais.
Calera (et), latin.
Campos, latin.
Carbonaro, italien.
Casus beUi, latin.
Catbedra (ex), latin,
Cborus, latin.
Cicérone, italien.
MOT
Clown, niijilais.
Club, anglais.
Codex, latin.
Cœcnni, latin.
Coma, groc.
Comniodo et incoininodo (de), Litii:
Concerto, italien.
Confiteor. latin.
Coram populo, latin.
Crédit, latin.
Crescendo, latin.
Critérium, grec.
Cubitus, latin.
Currente calamo, latin.
Cutter, anglais.
Ua capo, italien.
Débet, latin.
Décorum, latin.
Déficit, latin.
Deliquium, latin.
Delta, gr(5C.
Desiderata, latin.
Détritus, latin.
Dictum, latin.
Dilettante, italien.
Distinguo, latin.
Dito, italien.
Divan, arabe.
Dolce, italien.
Domino, latin.
Duo, latin.
Duodénum, latin.
Duplicata, latin.
Ecce liomo, latin.
Eflendi, turc.
Electron, grec.
Embargo, espagnol.
Emir, arabe.
Épiploon, grec.
Epitome, grec.
i'j'rata. latin.
lOxcal. latin.
K\-pro(esso, latin.
Extra-mnros, latin.
Extremis (in), latin.
Ex-voto, latin.
Faciès, latin.
Fac-siniile, latin.
Factum, latin.
Farniente, italien.
Fatum, latin.
Fiat lux, latin.
Finito, italien.
Florès, latin.
Folio, latin.
Forte-piano, italien.
Fortiori (à), latin.
' Forum, latin.
Franco, latin.
Frater, latin.
Gaster, grec.
Gaudeamus, latin.
Gloria, latin.
Gluten, latin.
Goddam, anglais.
Gratis, latin.
Groog, anglais.
Grosso-modo, latin macaronique.
Haltitus, latin.
Halte, allemand.
Harem, arabe.
Hic. latin.
Hidalgo, espagnol.
Hourra, russe.
Humérus, latin.
Humour, anglais.
Humus, latin.
Ibidem, latin.
Idem, latin.
Illico, latin.
MOT
89
ImliroLilio, il.ilit'ii.
Iniproiuplu. I;itiii.
Iiicojiiiito. iliilii'H.
lu pâte, latin.
Index, latin.
Inloi'JMi. l;itin.
Introït. I;ilin.
Iota, ixvev.
]|)S0 facto, latin.
Inito (ah), laliii.
Ilt'in. latin.
Jcjnnnin. latin.
Jubé, latin.
Junte, espagnol.
Jury, anglais.
Kcapsake, anglais.
Kiosque, turc.
Kirscli-wasser, allemand.
Largo, italien.
Latere (à), latin.
Lavabo, latin.
Lazzarone, italien.
Lazzi, italien.
Libéra, latin.
Loch, anglais.
Lord, anglais.
Lupanar, latin.
Macaroni, italien.
Maestro, it'dien.
Magnificat, latin.
Mandat, latin.
Matador, espagnol.
Maximum, latin.
Mea culpa, latin.
Medianoche, italien.
Médium, latin.
Mémento, latin.
Mémorandum, latin.
Mérinos, espagnol.
Mezzo-termine, italien.
Milord, anglais.
Minaret, arabe.
Minimum, latin.
Miserere. latin.
Morbidezza. it.ilicn.
Mordicus, latin.
Motus, latin.
Muséum, latin.
Naturalihus (in\ latin.
Nec i)lus ultra, latin.
Nescio vos, latin.
Noli me tangere, latin.
Nota hene, latin.
Numéro, latin.
Occiput, latin.
Octavo {\n), latin.
Odéon. grec.
Olim, latin.
Oméga, grec.
Omnibus, latin.
Optime, latin.
Oratorio, italien.
Oremus, latin.
Pace (in), latin.
Palladium, latin.
Palma cbristi. lalin.
Parti bus (in), latin.
Partner, anglais.
Pater, latin.
Pathos, grec.
Pédale, italien.
Pédum. latin.
Pensum, latin.
Petto (in), italien.
Picador, espagnol.
Placenta, latin.
Placet, latin.
Poco, italien.
Populeum, latin.
Populo (coram). lalin.
00
MOT
Posteriori (;V), hilin.
Post-scripliiiii, l;itin.
Prosto, liitin.
Primo, lai in.
Princeps (édition), l;iliti.
Priori (à), latin.
Prorcssns, la lin.
Prol'osso (ex s la lin.
Prorata, latin.
Prospocins. ialin.
Piil', an.i^lais.
Punch, aniilais.
Quaker, an.uiais.
Quarto (in ^, latin.
Quartz, allemand.
Quasi, latin.
Quasimodo. latin.
Quatuor, latin.
Quia, latin.
Quiliiis. latin.
Quidam, latin.
Quiproquo, latin.
Quoniam bonus, latin.
Rabl)in, hébreu.
Uacahoiit, arahe.
Hadius, latin.
Rail, anglais.
Haout ou rout, anglais. '
Raphé, grec.
Rasibds, latin.
Ratatia, indien.
Razzia, arabe.
Rébus, latin..
Récépissé, latin.
Recta, latin.
Recto, latin.
Rectum, latin.
Rem (ad), latin.
Réméré, latin.
Requiem, latin.
nicliis. Ialin.
liosoliii. ilalicn.
Sacrum. Ialin.
Salani. Ii(''br('u.
Salve, latin.
Schérif, anglais.
Schlagiie. allemand.
Scorbut, hollandais.
Secundum, latin.
Sépia, grec-lalin.
Sérum, latin.
Sic, latin.
Sigisbé, italien.
Silex, latin.
Sinciput, latin.
Sine qua non. Ialin.
Siphon, grec.
Slop, anglais.
Sofa, turc.
Solo, italien.
Sopor, latin.
Soprano, italien.
Spath, allemand.
Spéculum, latin.
Spécimen, latin.
Sperma céti, latin.
Sphincter, grec.
Spleen, anglais.
Statu quo, latin.
Steamboat, anglais.
Stentor, grec.
Sternum, grec-lati-n.
Stimulus, latin.
Subito, latin.
Tacet, latin.
Talisman, arabe.
Tampon, celtique.
Tarif, arabe.
Te deum. latin.
Ténor, italien.
MOT
Tél;inns, urec
Yade mecinn. lalin.
Thorax, tirec.
Valse, allemand.
Tihia. latin.
Varietur (ne), lalin.
Tullf. lalin.
Vai'iorum, latin.
Tory, anulais.
Verso, latin.
TosI (toasi). aiiiilais.
Veto, latin.
Transit, lalin.
Vice-versa. lalin.
Tirnia. mvc
Villa, latin.
Trii). ilalitMi.
Virago, lalin.
Ti'iiniixir. lalin.
Visa, visu (de), lalin.
Tronihonc. ila
lien.
Vivat, latin.
Tu aiiloiii. lalin.
Volubilis, latin.
Tuinnlus. lalin
Wagon, anglais.
Tunnel, an.iilai
s.
Waux hall, anglais.
Tnlli ({nanti, il
la lien.
Wist. anglais.
UUiniatunu lat
in.
Yack, anglais.
ITtra, latin.
Zéro, arabe.
Ut, latin.
Zinc, allemand.
MOTS
HKnOUlJLl':;
s (onomatopées) :
Haha.
Dodo.
Micmac.
Bélté.
Drelin-drelin. Nanan.
Bonbon.
Fanfan.
Papa.
Bric-à-lirac.
Flic-llac.
Passe-passe.
Caca.
Flonllon.
Pioiipiou.
Cache-cache.
Froufrou.
Pipi.
Cahin-caha.
Gniangnian. Pompon.
Clopin-clopant
Gogo.
Tata.
Conci-conci.
Joujou.
Tobu-bohu.
Crin-crin.
Lolo.
Tonton.
Dada.
Maman.
Zigzag.
Dare-dare.
Mélimélo.
Etc., etc.
MOTS COMPOSÉS :
Adieu.
à Dieu.
Cependant, pendant ce.
Avenir.
à \enir.
Chafouin, chat fouine.
Aujourdlini.
(voy.).
Culbute, bute cul.
Ah()ara\anl.
(trois mots).
Depuis. (deux mots)
Bienheureux.
bien heureux.
Désormais, (voy.).
Bonlieni-,
lion heur (voy.).
Embonpoint, (trois motsV
92 MOT
Empois. en poix. Mndainr. ma flaiiic.
Kniin. en lin. .Maiiilciiaiil. la main h-nant.
Fainéant, l'ail n(''aiil. Midiiclic. n'\ lomlic.
Fiuneterro, fiimrc de terre. IMaInnd, plal tond.
flonnis, hors mis. IMiih'il, pins lot.
.histai]coi'[)S, (trois mots). Oiiiproquo, (ti'ois mots latins).
Lendemain, le en demain. Toujours, tons jours.
Licou, lie cou. Traquenard, traque renard.
Lustucru, Teusses-lu cru (!j. Verjus, vert jus.
— lion mot : lai-iliole, plaisanterie.
Régnier a dit d'un satirique (|iril perdrait un ami [dutot qu'un
l)on mot.
Horace avait dit a^anl lui :
...iliiiinnodi) ri.sioi)
Excniint sUii, non hic ciiiqinnii pdirrl iiinico.
— Diseur de bous mots : uiauvais caractère. (Pascal.)
X..., avant de lancer un lion mot dans le monde, le répète à
quelques amis. Il appelle cela « essayer son feu d'artitlce ».
— (iros mot : expression peu parlementaire, injure, mot incon-
venant, énormité.
Des choses qu'on ne saurait répéter devant vous, mademoiselle.
— C'est donc bien raide, répUqua l'ingénue. (Figcn^o. cité par
L. Larchey.)
Celte locution est très ancienne, et dans une cbarte de Pbilippe-
le-Bel (1299), on lit : Si quis alicui verha contiuneliosa et (jrossn
dixarit...
— Les ignorants, dans leurs disputes, échangent les mots les
plus violents de leur vocabulaire et éprouvent une grande satisfac-
tion à renchérir dans leurs expressions, à l'imitation des héros
d'Homère.
Mais, si l'un d'eux se sert d'un mot peu usité, que l'autre ne
comprenne pas, la dispute dégénère en rixe sanglante. C'est ainsi
que, dans sa dispute avec Paillasse, Arlequin traité de bélître, de
pendard, de sac à rin, restait indilVéreul et ne se mil en colère
que lorsqu'il s'entendit appeler <7(^'o^;Y//>//e.' Cela lui parut le plus
cruel des outrages.
— Le dictionnaire de l'Académie, pour expiimer qu'un mot est
bas et tri\ial, dit qu'il est populaire. Ainsi, dire à quelqu'un ([u'il
est un cochon, un gros cochon, est une expression populaire. Il
MOT m
ii'ost ni poli ni jiislc de llrtrir .linsi un îKljcclil' (Irrixi'' du mot
piMipIr...
Il on csl (le iiH'inc (le /V///////r/'. (pic r.\c;i(l(''inio rend s\non\nio
de (ji'ossier. Ainsi, ollo (piniilic do /V/y/////r/-e.v les cxprossions salope,
tanpe, uonr.uaiuline. ci'élin. ci'apnle. ( rassenx. etc. Quelles sont les
lainilli'S (on les amitiés) on les auteurs du dictionnaire (mt constaté
ces fanuliarités '. C'est sans doute dans celles dont ils |)aflent à la
lettre V. on l'on se sert, pour désianer une l'einnie ((ui a trop d'em-
lionpoint. de l'expression [(nnHivre : c'est une "rosse vache !
— (îrands mots.
Aiiipiillds pI scsiiuipcdaliu rcrlxi.
(UoicAiM-:.)
Racine, dans les Plaideurs, rappelle le précepte d'Horace d'éviter
les grands mots. Petit-Jean s'exprime ainsi :
Ils inr l'diil dii'i' ;iiissi dos mots Idii^s (J'uiic toise,
]>o yraiids nidls. (|iii tiendraient dici jiis(|;u'à Pontoisc.
Si/pe/-co(/He/ii/ne/ir/cuj\ superlatif burlesque, forpé par Rabelais,
et imité par ïli. Gautier dans (léllcoquendeuseinent, pour déli-
cieusement.
— Mots invariables : ceux qui ne changent point déforme.
C'est: l'adverbe, la préposition, la conjonction, l'interjection.
— Mots qu'on peut lire à rel)Ours : Aoyon^ Léon, Noël, ressasser.
— Pi'eiulre ({uel([u'un au mot.
.le vous attraperais bien, si je vous prenais an mot, dit nue jeune
fdie à nu vieillai"d qui la cajolait.
— Uni entend bien les mots, compreiul bien les choses. (Yarrou.)
La plupart des erreurs et des discussions viennent de ce que l'on
ne s'entend pas sur les mots. (Locke.)
— Entendre à demi-mot. (Voy. entendre.)
— Se donner le mot : s'entendre, se concerter.
Ils se sont tous donné le mot pour être blonds. (Burlesque.)
Motet, de l'italien niolello, diminutif de mollo, mol.
Sorte de petite composition musicale très courte; de nnMue que
le sonnet est une petite poésie, un chant de peu d'étendue.
Presque tons les mots de noli-e lauaue musicale sont enqu'iintésà
l'italien.
lYlotif, du laliii moi i tus, propre à mouvoir.
Signifie au proi)re : qui a la propriété de mouvoir, et a pris le
sens de : qui fait agir.
1>4 MOU
— Nos jugements, lorsqu'ils sont jtrononcés ii\Hc (cj-tinKlc, ont
ponr motif révidence : qiuiiid ils ne sont (jmc des conjertnres, des
{irésomptions, ils ont pour motif la proluihilité.
— L'amour, le plaisir, lintérèt, le devoir, sont lesinoltilesde nos
actions.
Reclierclier (une femme) pour le i)on motif: pour le mariage.
lYlotus! sorte d'interjertion pour imjtoser silence.
Est probablement une altération de niuiiis. muet.
Il se dit pour cliiit ! comme st dans Térence.
Motus! il ne faut pas dire que vous m'avez vii sortir de là!
i^Molière, (leonjes Dandin, I, 2.)
...Encore un coup, motus.
Rouelle eousuf !
(La Fontaine, Conifx, IV, 10.)
Mou, anciennement moJ : du latin mollis.
Synonyme : andouille : homme sans énergie.
Mouchard, dérivé de mouche, avec le suffixe péjoratif ard.
— Au dire de Mézeray. l'inquisiteur Déraocliarès (I06O) se nom-
mait de Mouchy, du nom d'un village de Picardie, et ses espions
s'appelaient mouchards.
Mais on trouvère verbe moucher, pour épier, dans la Légende
de Pierre Faifeu (1532).
Mouche s'employait aussi pour désigner des espions qui marchaient
devant le guet, comme éclaireurs, pour signaler les voleurs.
L'avocat Barbier, dans son journal (17o2), dit : « On a doublé le
guet, et on a même répandu des mouches, déguisés en habits bruns. »
Ménage prétend que les espions sont appelés mouchards, parce
qu'ils s'introduisent partout comme les mouches, et que de là vient
la locution : fine moucbe.
Mouche, du latin musca.
— Fine mouche: personne rusée.
Plus fin que maistre Mouche. (Rabelais, II. 16.)
— En italien, mucceria est le jeu des gobelets, et inaëstro muccio
est un maître gonin, un menteur, un filou.
Coquillard a dit, au Monologue des Perruques :
. Il jouera niieulx (|ue maistre Mouche,
Qui me prendra en désarroy.
— On a aussi appelé wo?/(7?c.?, les espions de l'Inquisition d'Espa-
gne, qui se glissaient partout comme des mouches, même dans les
MOU ilo
cacliots, pour li-nhir les iKiiivrcs |ii'is(iiiiii('i-s .-issc/. simples iioiii- ii.'
se point iik'ticM' d'eux.
— Prendre l;i niouclio : se fficlier.
On (lit (le nK'iiie : (jiielie nioiiclie vons iii(jiie ^
Omis lu cidrs roluhra" ?
(l'iAiri;.)
(Onelles coulenvres vois-tir()
Les Iliiliens disent : La mnscd ri saf/o (// na.so.
Ou ne sait bien suuvenl (|iu'lli' iikiiicIh' le |iii|iii'.
(Boir.KAi-, Satirr IX.)
(îros-Ri'iK', (lis-iiKii (lum- (iiielle un niche to pique?
(.Moi.iKitK, Dé/iil.)
On dit dnns le iiu'nie sens: prendre nn lininie. C'est une des
nombreuses acceptions dans lesquelles s'emploie le verlie prendre.
— .La première mouche qui le piquera sera un taon.
— On prend plus de mouches avec une cuillerée de mic^l qu'avec
un tonneau de Niiiaiiiiv.
Moucher, provençal inourar, latin tniiecare, dcuivé de hiucuh,
morve.
Par assimilation : moucher une chandelle.
— Le verbe moucher est employé substantivement par Saint-
Simon : !■ Le fréquent moucher qu'on entend dans la salle, lorsque
le public est éjuu par une scène pittoresque. »
— Moucher quelqu'un : le réprimander.
Je te moucbei-ni de la h(dle manit're. vieux roupilleur. (Plante.)
— Au temps (ju'on se mouchait sur sa manche. (Soy. niais.)
Se moucher sur sa manche est un [leu plus malpropre que se
moucher dans un mouchoir. Montai.une parle d'un .uentilhomme qui
se mouchait avec les doigts, sous prétexte de délicatesse, alléguant
qu'il était malpropre de porter dans sa poche...
— Il ne se mouche pas du pied, ...du coude: il agit gnindement.
Il ne fait pas comme ceux qui, s'étant mouchés avec les doigts, fout
disparaître la trace avec le pied.
Cuhitn se emungere. (Ad Herennlum.)
Certes, Monsieur Tartuffe, à liicn prendre la cliose.
N'est pas un houiiue, non, ipii se nioucfie du pied.
(Mni.iKiiK.)
— Les Latins appelaient un homme lin : Homo pinancUp naris,
c'est-à-dire, homme au nez bien mouché. Ils disaient aussi : Homo
nasatus, qui a du nez.
96 MOU
iïlouchoir, (lt''ri\t'' de nioKcher. avor le siit(i\t' iiislniiiifiil;il.
Syiioiiyincs: ;is|iir;iiil de ii.irinc ((•.ilciiihdiii-). (|ii;ili-('-c()iiis.
— J(Ucr 1(; iiioiiclioii'. Va\ Tiiinjiiic cl en l'ci'sc. le iciiiic lioiiiiiic
qui va se marier nnoic à sa liaiicéc un aiiiu^'aii, une pircf de mon-
naie et un niouclidir lu-odt''.
C'est sans donic |)ar suite de. cet. usaue que le sidtan. dans son
liarcni, jette le nioiiclioir à celle de ses femmes ([u'il vent lioiioi'er
de ses laveurs.
— Le don d'un mouclioii- clait une gracieuseté die/, les empereurs
romains.
Ipsunujue prunum donasse oraria populo romano r/iii/ji/s
uforentur in Jarorem. (Vopiscus, Aurélien.)
Moue, liermaniqiie f/iouw, lèvre inférieure avancée ; plut(')t que
du jurec inuaô, serrer les lèvres: ou du celtique moua, se fficlier.
En vieux fi-ançais : museau.
Moule, du latin modulus.
— Fait au moule : bien fait.
On disait aussi: fait de cire, c'est-à-dire comme une liou.uie faite
'dans un moule. (Cf. fait au toiu\)
— Ancienne mesure pour le l)ois, valant une demi-corde.
En provençal mouloun, petit tas.
Moulin, de moUnus, dérivé barbare de viola, meule.
— Les moulins remontent à la plus liante antiquité. Moïse et
Homère en font mention. Les meules étaient mises en mouvement
par des esclaves ou des animaux.
— Faire venir l'eau à son moulin : se procurer des profits.
Ce dicton se prend en mauvaise part, et se dit des gens assez peu
délicats dans les moyens qu'ils emploient pour réussir.
— Le mot émolument vient de emolere, moudre, et a désigné le
profit qu'un meunier lire de son moulin.
— Se battre contre des moulins à vent : se créer des cbimères à
combattre. Locution tirée du ronuin de Cervantes, où Don Quicliotfe
se bat contre des mouUns à vent qu'il prend pour des géants.
Mourir, du bas-latin morire.
Presque tous les mots et les péripbrases dont ou se sert pour
remplacer le mot mourir, expriment l'idée de s'en aller, de sortir
de la vie. Interire. aller parmi les morts.
Aller ad patres (voy.) : aller dans l'autre monde.
MOU i)7
Aller aii\ sonilnvs hords (d'oi'i sotnhrer, nllei' diins l;i nuit (Her-
nclk') : lUms le rov;iiiiii(' dcsoiuhros.
l'^lro ;'i l'iirtichMlc l;i iiiorl : près de iiioiii'ir. 11 est ;i r;ii1icl(> cl
dernier moment de son décès. (Il;iliel;iis.)
Décéder, de dercih'rc : se retirei" de l;i vie.
Délnnl, de f/cfnnc/ifs : (\n\ s'est acquitté (de la vie).
Descendre la ,uarde.
Dire bonsoir à la compaiiuie.
Ensevelir, de sepelire, entourer d'une haie.
Enterrer-, inluinier: mettre en terre.
S'éteindre, se dit par métonymie, comme on a dit autrefois tuer
le feu, tuer la chandelle.
Faire le i^rand voyage.
Ktre llajuhé.
Graisser ses bottes : se préparer à partir, en recevant les saintes
huiles, comme un voyaiieni- qui va faire nu erand voyage.
N'avoir plus mal aux dents.
Manger les pissenlits par la racine.
Passer, être passé ; passer l'arme à gauche, de ce que, dans les
convois funèbres, les soldats du cortège passent l'arme sous le bras
gauche.
Périr, aller jusqu'au bout (de la vie); fait comme (repasser, aller
au-delà, faire le grand pas; d'oii péril.
Rendre l'âme, l'esprit, le dernier soupir.
Succomber.
Tourner l'œil : J'aime mieux tourner la salade que tourner l'œil.
{Tin(a?narre.)
■ — Mourir de sa belle mort, se dit par opposition à mourir de
mort violente ou prématurée, car la mort est toujours déplaisante.
Mourir comme un chien : misérablement.
Mourir de rire (voy.).
Mourir en fraude: insolvable.
Mourir de faim, ou plutôt vivre en ayant faim, se dit de ceux qui
ont plus d'appétit que de pain.
— Caml)ronne se fâchait tout rouge quand on lui rappelait son
mot (?) de Waterloo : « La garde meurt et ne se rend pas ! » —
C'est d'anlani [iliis bcte, disait-il. que je ne suis pas mort, et que je
me suis rendu.
— Nous n'en mourrons pas ! — « Écoutons la sonate, nousl'obli-
98 MOU
gérons et nous n'en mourrons p;is ; ...et s'il f;iiil inoiicir, ...IKiilise
lionore la mémoire des martyrs ! «
— On ne sait qui meurt ni fini vit. Cela se dit |)Oiir justifier les
pi'écîiutions que Ton prend pour assurer J'exécMlion dt; certains
engagements, éviter les mécomptes qui pourraient ai'i-iver par suite
du hasard ou de la déloyauté humaine, et se placer sous la protec-
tion de la loi et de la justice.
Mousquetaire, dérivé de mousquet, arme inventée par les
Moscovites: ou, bien plutôt du vieux français moschele. de viusca,
mouche, nom formé comme couleuvrine, bélier, etc.
— Mousquetaire à genoux : apothicaire.
Mousquetaire à genoux, c'est ce que le vulgaire
En langage commun appelle apothicaire,
(BOURSACI.T.)
Feu mon grand-père était apothicaire à genoux. (Poisson.)
Mousse, de l'espagnol mozo, jeune garçon ; en provençal moussi.
Génin le fait venir de mouche, parce que les mousses voltigent
dans les cordages comme des mouches ! D'après lui, mousse de
marine viendrait de musca, et mousse, végétal, de inuscus. Ce
dernier semble venir de l'allemand jnoos.
Mousseline; ce nom d'étoffe x'xQwi Aq Mossoul, ville de Méso-
potamie.
Ce n'est qu'au commencement du xix*^ siècle que les mousselines
se sont fabriquées on France, à Tarare et à Saint-Quentin.
— 0 sainte Mousseline, vierge de la toilette ! sauve, sauve nos
jeunes tilles^ qui se noient dans des flots de dentelles, ...et dans des
rivières de diamants ! (Sardou, FainiUe Benbtion.)
Moutard, de l'ancien proverbe: Les enfants vont à la moutarde:
pour dire qu'on les envoie faire les petites commissions du ménage.
Vient plutôt de mustus, jeune, avec le suffixe péjoratif ard.
Quelques-uns y ont vu une allusion à la malpropreté des petits
enfants. C'est par la même raison qu'on les nomme mei'dous en
Provence, et que dans le Berry on appelle une toute petite fdle :
chici'otte.
Moutarde, jadis moustarde, qui se dit encore en provençal : du
latin musfum, moût. Quelques-uns l'exphquent par multum ardet,
qui brfde beaucoup ! ou par moult me tarde, devise et cri de
Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, ajoutée aux armoiries de la
MOU 99
\ille de Dijon, qui lui ;iv;iit «Mi\oyé, en 1388, un secours de cent
hommes d'armes.
l'n in.înusrrit do In liililiotlièqiie de Saint-Germain-des-Prcs, parle
(le l:i niotilarde de Dijon coninie élant déjà renommée au temps de
Philippe le Bel (l^28o-i;il4).
Celte élymolo.iiie, donnée par \c Mercure de France (mars 1734),
n'est qu'un jeu de mots rapi)orté par Tabourot, danssesZÎ/^rtn"?f;*e5
en 1581. (jiielques auteurs ont eu tort de la prendre au sérieux.
— La moutarde lui monte au nez : il s'impatiente.
Par Castor ! quand il se nourrirait de moutarde, il n'aurait pas
l'esprit plus colère. (Plante.)
— C'est de la moutarde après diner : une chose qui vient trop
tard.
Ce dicton s'applique à une précaution tardive, à un secours qui
arrive quand on n'en a plus besoin.
Il se dit aussi de ceux qui ne savent rien prévoir et qui, par
exemple, appellent le médecin après la mort du malade.
Ouand le cheval est sorti, le fou l'ermc l'écurie.
— S'amuser à la moutarde : être lent. Jeu de mots sur moult
tarde.
— Sucrer la moutarde : adoucir un refus.
Moutardier, dérivé du précédent.
— Il se croit le premier moutardier du pape : il se donne beau-
l'oup d'importance.
Le pape Clément Yil aimait passionnément la moutarde, etPérius
Valériois, qui nous apprend ce détail, dit que le désir de préparer
la moiit.irde la meilleure avait développé chez ses cuisiniers une
émulation terrilile.
D'autres attribuent cet amour de la moutarde à Jean XXII, pape
d'Avignon. L'histoire ne dit [)as si elle lui montait tpielquefois au
nez.
Mouton, vieux français inolton, l)as-latin multa, bélier châtré.
— Les moutons de Panurge : serviim pecus. La multitude est
moutonnière.; c'est-à-dire que chacun fait comme les autres.
Les moutons s'attroupent, les Uous s'isolent.
...Comme vous sçavez estre du mouton le naturel, tousjours
suivre le premier, quelque part qu'il aille. Aussi le dit Aristotc (liv.
1», Hist. aniinalium) estre le plus sot et inepte animal du monde.
(Rabelais, IV, 8.) (Voy. Champenois.)
100 MOY
— L"liistoire des iiinnlons de hindon.iidt, <|iic P.iniir^c t;iit noyer,
est cmprMintéc |t;ii" |{;ilt('l;iis ;i Merlin Cocc'iic (Th. Folengo), qni le
raroule d;inss;i (ItMixirnic Mararoiirc.
Cuiiiiik; iiii iiiiiiiloii i|ui \;i di'ssiis la fni iraiilnii.
(I.A l'..>fAiNK, n, 10.)
An nièmc cluipllrc S du livi'o IV, Hnliclais emploie l'expression
niouionniùri', dont on se sei't encore pour désigner ccnx (pji, comme
de vrais moutons, sont incapables de se déterminer à rien par eux-
mêmes.
Ces gens qui sont, au dire de Juvénal :
Verveciun in jxilrid, cra-ssoque sub aère nali.
— La foule n'est pas intelligente, elle manque dinitiative, elle
conserve les préjugés et les eml)aume : elle obéit aveuglément à la
peur de ne pas faire comme tout le monde.
— Revenons à nos moutons (Rabelais, I, 1, III, 33), c'est-à-dire
trêve de digressions^ allons au fait.
Retournons à nos moutons,
0 grande Reine, et racontons...
(ScAiiRox, Virgile travesti.)
Dans la Ffnxe de Patelin (w" siècle), un marchand plaidant
contre son berger qui lui a mangé des moutons, s'égare souvent à
parler du drap que lui a volé Patelin, l'avocat du berger. Le juge
qui ne comprend rien à ce coq-à-fâne, lui crie plusieurs fois : « Re-
venons à nos moutons ! »
Mouvement, dérivé de mouvoir, latin movcre.
On est étonné de voir réunis les mots imprimer un inouvemenf,
pour dire donner une impulsion. Imprimer signifie presser sur, et
contient l'idée d'immobilité forcée, tandis que impulsion a la même
idée qMQ. mouvement. Il est donc impossible de s'expliquer cette
alliance de mots. ,
...Tout raarclie animé.
D'un mouvement commun par moi-même imprimé.
(C. Delavi(;xe.)
Nota. — L'expression s'expliquera, si l'on veut se rendre compte
que imjjrimer signifie d'abord presser sur. C'est donc communiquer
le mouvement par pression.
— Le mouvement perpétuel ne pourrait exister que si la matière
était douée dun pouvoir créateur, ce qui est contredit par la raison.
lYloyen-Age. Période qui sépare l'antiquité et les temps modernes.
MUL 101
On s'accorde à la faire, coiniiieiicer à la cliule de l'Empire d'Occident
(476], et Unir à la pi'ise de Gonslantinople par les Tares (1433).
C'est l'époque de la Féodalité.
IVluet, ancien français inut. du latin //ii/fits : d'oi'i mutisme.
Et tous iiiiatrc soiin nuits.
(Jasmin, La Semaine d'un fils.)
.\ moi seul no soyez pas muéle.
Fillette jolie, aimalile tunièle.
— .Muet comiiie un poisson, ...comme une carpe.
Les cai'pes sont loquaces en comparaison de ce député.
Muet comme la rancune. (G. Sand, Anton la.)
Muet comme la tomhe, ...comme une statue.
Stalua tacilurnlor. (Horace, Ep. II, 2, v. 33.)
— Les Chartreux, les Trappistes, font vœu de mutisme.
Les disciples de Pytliagore observaient le silence pendant cinq
ans.
lYluette, féminin du précédent.
— Voilà justement ce qui fait que votre lille est muette. (Molière,
Médecin, III, 6.) Et plus bas : « Et qui est ce sot-là, qui ne veut pas
(jue sa femme soit muette ? Plût à Dieu que la mienne eût cette
maladie ! .le me .uarderais bien de la vouloir guérir. «
lYluguet, \ieux français mnsfjuet, latin niuscatus^ nnisqué.
On a dit noix mus-guette, pour noix muscade. (Cf. muscadin.)
Petit-maitre galant qui se parfume d'odeurs musquées. C'est le
nom de la tleur même, transporté à ceux qui s'en parfument.
On lit, au ch. {)2 du Moyen de parvenir, niarjolet pour muguet.
On dit aussi narcisse.
Rivarol disait, à propos de la nomination de Gbamfort à l'Académie :
" C'est une branche de muguet gretïée sur des pavots. »
IVlule, féminin de )nul, devenu ;y/;//^/.- Latin rnula.
D'où mulâtre, né d'un blanc et d'une négresse, comme le mulet
d'un cheval et d'une ânesse, et rice-versa. Le mulet est stérile.
(Voy. Itijt)ri(te.)
— Mule, chaussure. (La mule du pape); de tnuUeas, chaussure
de luxe, que les Romains avaient empruntée aux rois d'Albe. Le
mulleus était en peau rouge, recouvert de broderies d'or, de
perles et de pierres précieuses. Les semelles mêmes en étaient
quelquefois d'or.
102 Ml'U
Aurélicn défendit aux liumiiics cette chaussure, dont il réserva
l'usage à lui et à ses successeurs, et aux dames.
Transmis par les IU)mains an Bas-lMiipirc il passa des empereurs
aux papes.
IVIup, dn latin uiiiruH: prec molva, (pii partage (?).
— Il n'y a que les sots qui écrivent leur nom sur les murs.
Nomina slultornm sempnr parielibus ad.sunl.
F'rançois I^, qui écrivit sur une vitre du château de Chanibord la
fameuse devise :
Soin eut foiniiic ^;ll■ie,
Mal liahil ((iii s\ fie.
écrivit aussi son nom sur une cloche de Rennes, « sur la plomberie de
laquelle, si haute qu'homme de nostre aage n'y pourroit atteindre,
celuy grand de corps et de nom roy François, y escrivit d'ung
poinçon, l'an 1522, ce mot François, qui y est encore». (Coules
d'Eutrapel, XIX.)
— Les murs ont des oreilles. On appelait « oreille de Denis » une
prison que ce tyran avait fait construire d'après des principes
d'acoustique tels que, d'un appartement de son palais, il pouvait
entendre tout ce que disaient les prisonniers.
— La surveillance mystérieuse et jalouse du Conseil des Dix, à
Venise, avait fait pratiquer dans les murs et les plafonds des
appartements du Doge des trous invisibles, par où ils pourraient
entendre et épier à toute lieure du jour ce qui s'y passait.
— Un grand nombre de passages de la Bible sont écrits sur les
murs de Fabbaye de la Trappe ; ce qui a fait dire que, « dans cette
maison, les murs parlent, et les hommes ne disent mot ».
— On dit aussi : Sœpe sepes habent aures. Souvent les haies
ont des oreilles. (Rabelais, Prol. du hvre III.)
— Les anciens avaient des esclaves appelés ôtakoustés. ou
espions (qui prête l'oreille). Tel est, aux Tuileries, le personnage
accroupi, jardinier esclave qui, aiguisant sa serpe,, parait écouter
attentivement les complots que font deux sénateurs derrière une
haie. On le connaît sous le nom de Yémouleur.
Les romanciers modernes ont usé souvent du moyen de démas-
quer les traîtres, qui consiste à faire écouler ce qu'ils disent.
— Où mur y a, y a force murmur. (Rabelais, I, o2.)
Ce jeu de mots en rappelle un autre : Jeannot uuirmure de ce
que les enfants montent sur les murs, pour cueillir des mûres qui
ne sont pas mûres.
MUS mi
— Kii 1781). les leniiiers géiiénuix:, pour cinpèclicr la contre-
haiide qui se taisait au dôlriiucnt des octrois de Paris, obtinrent
de M. de Galonné, minislrc de Louis XVI, de construire le mur
d'enceinte de Paris.
On lit le vers sui\ant. pour exprimer le mécontentement public:
Le mur murant i'aris rciitl Paris nuiriiiiiraiil.
Et ce quatrain :
Pdur aiiyrnenti'i' son niunérairc
Et rcHivcir notre liorizon,
l.a fcrmo a jufjé nécessaire
De niellre Paris en jirison.
Murmurer, du latin munnurdre.
Lu \icu\ soldat doit souffrir et se taire
Sans murmurer.
(SCUICE.)
lYiusard, du vcrl)e muser.
Paresseux qui s'arrête en cbemin, au lieu d'aller à son travail.
De là : s'amuser.
Muscade, du proven(;al muscada.. latin muscala.
La noix muscade est produite par un arbre originaire des îles
Moluques. Elle était très employée en cuisine, dés iriSG, pour
assaisonner les ragoûts.
Il paraît qu'elle était moins en faveur du temps de Boileau,
juiisqu'il dit {Satire III) :
Aimez-vous la muscade ? on en a mis partout.
Le muscadier, naturalisé en 1772, à l'île Bourbon, est aussi
cultivé à Cayenne.
Muscadin, nom donné, en 1793, aux, jeunes gens eiréminés et
musqués.
On appelle muscadin une sucrerie parfumée d'un peu de musc,
et Pellissou rapporte qu'on mit en question à l'Académie s'il fallait
dire muscadin ou muscardin. On décida en faveur de muscadin,
et Voiture lit, par raillerie, le distique suivant :
C'est au temps des vieux palardins
Que l'on disait les muscardins.
Muse, du grec mousa, par le latin musa.
Synonymes : les neuf sœurs, les doctes pucelles, les filles de
Mnémosyne (déesse de la mémoire).
104 MUS
Ces neuf sœurs se nomment :
C;iHio|i('., (|ui ;i une belle voi\: niiisn de l;i i»0('si(' iiéroïquo.
Clio, (jui réiehi-c (Kléon): muse de l'Iiistoire.
Érato, de éroa, amour; muse de la poésie amoureuse.
Euterpe, réjouissanle ; muse de la musique.
Melpomt'ue, qui cliaiite; muse de la Irapédie.
Polyinnie, qui chante ijeaucoui) ; muse de riiymne suhlime.
Terpsichore, (jui aime la danse; muse de la danse.
Tlialie, (lui lleurit ; muse de la comédie.
Uranie, la céleste ; muse de rastronomic.
— Musa pede.iitvis : vers qui ressemiilc, à de la prose, tamilicr.
(Horace.)
La muse qui n'enfourche pas Pégase.
— Courtiser les muses: Canere .nhi el ninsis (Cicéron). Mépriser
le jugement des sots.
Musée, du grec mouseion.
Synonyme : nmsée de mauvais tableaux : croutéum i
— Du ive au X'' siècle, époque de croyance religieuse, l'art fut
dans les temples ; du xi^ au xviir, il passa dans les palais ; mainte-
nant il est dans les musées, oii il offre une nomenclature froide et
un assemblage cpii fatigue l'examen, mais aussi un avantage
immense, relath^ement à la comparaison et à la publicité. La
publicité facilite l'étude et fait progresser l'art, et la comparaison
est la base de l'archéologie. C'est ainsi qu'à l'examen de tous les
blocs de granit et des inscriptions arrachées à l'Egypte par Bona-
parte, Cbampollion put décbitïrer l'énigme qui désespérait depuis
longtemps les savants, et le sphinx s'avoua vaincu.
— Les musées datent du xix'' siècle, car l'Encyclopédie, imprimée
en 1779, au mot musée, cite celui d'Alexandrie comme un lieu de
réunion pour les savants, amis de Ptolémée, et non comme une
collection d'objets d'art.
Mercier (Tableau de Paris, 1783, ch. 531), en parle d'une
manière vague, comme d'établissements nouveaux ayant beaucoup
de peine à réussir. . .
Après le 10 août 1792, lorsque la Monarchie fut renversée, tous
les tableaux, statues, bronzes et objets précieux, qui ornaient
Versailles et les Tuileries, furent transportés dans la grande
galerie du Louvre. Telle fut l'origine du musée actuel.
— Le premier musée fut ouvert en France, sous le nom de
MUS lOo
Musée tk's Moiiiimonts Irniir.iis, le 24 sppteiiil)i'e 1704:16 Musée
des Antiques, en 18(Ki : le Musée du Luxemliour,"-, le 24 iivi-il 1818 :
le Musée d'Auiioul.'iue. le 24 jnilltM 1824: le Musée éuyittien. le 4 no-
Nt'iulii'e IS27.
Musicien, lioir»' couiuic un uiiisicieu. (Voy. Ilùlcr, l(iri(jol .)
La eoi'neniuse ne dit mot, si elle n"a le ventre iilciu.
— Musicien, clianlcur Iciliile : \ii'(uose.
Musique, du uitc inousiLi-. par le latin inKsica.
Moiisilcox, dési.Liuait tout ce (jui concei'ne les muses, les hcaux-
arts.
Les Précieuses apiidaient la musique : le paradis des oreilles.
C'est la langue dans laquelle on écrit les sons.
La musique est l'art d'émouvoir par la comhinaison des sons.
(Fétis.)
La musique, le plus immatériel des arts, traduit les sensations
par les sentiments les plus élevés de l'âme.
La mélodie est à l'harmonie ce (pie la Heur des champs est à la
tleur cultivée.
Les roulades sont à la musique ce que les pirouettes sont à la
danse.
— L'Italie a produit la grande école mélodique et vocale : l'Alle-
magne la grande école harmonique et symphonique.
— Musique mauvaise : symphonie en zut.
— On a abusé de tout temps de la musique : dans l'antiquité,
elle servit à bâtir les murs de Tiièhes et à renverser ceux de
Jéricho.
— Paris, surnommé PinnopolU. est la ville du monde où l'on
aime le moins la musique, et où l'on en fait le plus. Tous les pianos
qui y sévissent, tous ces musiciens ambulants avec des harpes, des
clai'inettes. des violons, qui, entre leurs mains, sont un prétexte
plutôt qu'un instrument, passent leui"s journées sous vos fenêtres à
moudre des airs faux, à massacrer vos oreilles avec de la musique
qui n'est ni de Bach ni d'Olïenliach, ont conduit bien des gens au
dé.'iespoir. On cite des personnes (pii en sont mortes!... On n'a pas
le droit de tuer ces tortionnistes... Ou desrait les mettre au violon.
Si je régnais îui jour eu niaih'o.
De l'aris jusqu'à LaïuliTiieau,
Vite au violon je ferais nietlie
Ceux (jui se mettent au piano.
Paris, en 1807, a été saturé de musique. Les orpliéouistes de
106 MYR
loulc riMirnpc, les |ii;iii()S de ri'lxposilioli. cl iiirine les canons,
l'ont inondé d'li;irnioiiie. Los Parisiens n'en sont pas morts, mais...
— Lonis XVIII disait do la musique : '. Je ne la crains pas. «
Théophile Gantier l'appelle « le phis désagréable et le plus cher
de tous les hruits » : il appelle « ouragans de musique », ces concerts
monstres d'invention moderne où l'on réunit jusqu'à deux ou trois
mille instrumentistes.
— Après la guillotine, le piano est l'instrument le plus redoutable,
et encore, le supplice de la guillotine dure moins longtemps. Je ne
serai heureux que le jour où je verrai le dernier harpiste pendu à
la dernière corde de sa harpe !
C'est ainsi que Voltaire, dérangé de ses études par le bruit des
cloches, écrivit à 10 ans ce vers contré les sonneurs :
Persécuteurs du ^n'ure luunain
Qui sonnez sans miséricorde,
Oue n'avez-vous au cou la corde
Que vous tenez dans votre main !
— Vous êtes malade?... Je vais essayer de vous guérir par le
procédé du roi David... — Et elle se mit au piano.
Mutin, anciennement meulin, déri\é de meute, latin inota.
On trouve aussi anciennement la forme hufin. Louis le Hutin.
Mutuel, du latin )nulualls, pour mut uns, de meus tuus. C'est
\Bjus suum cuique iribuere. C'est-à-dire : fais à autrui ce que tu
voudrais qu'on te fit ? Application de la justice absolue.
Myopie, du grec myôps, de mijein, fermer, cligner.
Quelques-uns le dérivent de myia, mouche, parce que les
mouches ont l'œil saillant (?).
— La myopie et la presbytie sont en rapport avec le télescope et
le microscope.
Myrmidon, nom historique ou mytliologique.
La peste ayant ravagé l'île d'Égin^, Éaque, fils de Jupiter et roi
de cette île, obtint de son père que les fourmis fussent changées en
hommes et donna à ses nouveaux sujets le nom de myrmidons
(myrmexj.
— Individu de peu de force.
C'est bien à vous, petit ver de terre, petit myrmidon que vous
êtes. (Molière, Festin de Pierre.)
Myrobolan. (Yoy. mirobolan.)
MYS 107
IVlystère, (lu urcc mi/sférion. piirlt; Inliii /iii/s/i'rii(m,, de iiii/cin,
sciTiT. ffniit'r. leiiir secret.
On croit ;iii\ iii\stt''res cl ;iii\ iiiir;icles. d'nprcs ce [)rinci[)C :
Credo, ([n'ui fihnurdiiiii .
Mystifier, ct)iii[)usé de//<'ret d'un r.-idical incertiiiii (wiii'- sicclej.
Ahiiser qiieliiuini en se moquant de sa crédulité.
Synonymes : faire poser ; — servir de dupe : poser.
Mystilicalcur : fiiuiisle.
— Mustilier, niystilier, mots nouveaux parmi nous, el (pi'on ne
saurait e\[tliquer que par des exemples. (Mercier, Tableau, uli. 1(14.)
Ou en doit la création au caractère du petit Poinsinet, qui, après
a\oir fait des opéras-comicpies, se noya par accident dans le
l'iuadalipiivir. Yersilicateur, bel esprit, mais d'une crédulité
incroyable, il avait des saillies heureuses, épi.ûrammaliques. et la
simplicité de son caractère était sans bornes.
On raconte qu'on lui proposa d'acheter la charge d'écran chez le
roi, et que, pendant quinze jours, il accoutuma ses jambes à soutenir
l'ardeur d'un [)rasier. On lui oITrit aussi un jour la place de gouver-
neur du roi de Prusse : puis on lui assura qu'il serait nommé
membre de l'Académie de Saint-Pélersbourg, quand il aurait appris
le russe. 11 crut étudier cette langue, et se trouva avoir appris
pendant six mois... le bas-breton.
— L'année 1760, dit Grimm, nous complotâmes avec Diderot,
l'auteur du roman de la Religieuse, Qi deux ou trois bandits de cette
trempe, de nos amis, de rappeler à Paris le bon et vertueux marquis
de Croisemare. ancien officier, qui avait aliandonné depuis doux ans
la société pour habiter ses propriétés de Caen... Ils lui inspirèrent
une si vive amitié pour cette religieuse persécutée, riiénuiit' du
rouum, cet intérêt devint si vif, qu'ils furent forcés, au bout de six
mois d'une correspondance des plus actives, de la faire mourir, et
de terminer ainsi brusqueiiiciil un roman (pii avait pour liut de
rauuMier le sensible marquis au milieu d'eux, en lui otïrant une
occasion de secourir la vei'tu malbeureuse et de faire une bonne
action de plus. (Voy. Diderot, édition 1821. tome Yll.)
— Deux amis de Hacan, ayant appris qu'il avait un rendez-vous
chez M"'^ de Gournay, récemment arrivée de Gascogne, se présen-
tèrent tour à tour sous son nom chez elle; de sorte que, lorsque le
véritable Racan arriva, M"'= de Gournay le prit pour un importun
et le lit jeter à la porte.
108 NAR
Celte anecdote ;i fourni ,'i Hoisfolicrt le siiji^t de sa comédie des
7Vo/.s' Or on te.
— Dans nne pièce de !•■'• rron (Don Japliet d'Arménie), il y a
nne siUiation très comiqne. Les personnaues qui entourent Don
Japliet lui font croire qu'il est sourd, en ouvrant la houclie sans
proférer nne parole.
Mythologie, du .urec mi/z/ios, tiihic, loyos., science.
Les dieux du paganisme ont dispai-u avec le développement du
christianisme: mais les lictions de la mytiiolouie ne périront jamais,
il y aura toiiioiirs des niéf/ères et des /la/'jj/'es dans la lanjiue, parce
qu'il s'en trouvera dans le beau sexe: des A^a/v/.v.ve.s-, des Adonis,
des Sdtyres [)armi les hommes ; des Protées dans la politique: des
oracles dans la médecine, etc.
N
Nabot, origine inconnue. Peut-être napus (?), navet.
Nager, du latin narif/nre, doublet naviguer.
— Na.uer comme un poisson, ...comme un chien de plomb.
— La locution : être tout en nage (tout en sueur), est une corrup-
tion pour : tout en âge (eau).
Naguère, adverbe, ponr (il) n'a guère, il y a peu de temps.
Synonymes : orains (Rabelais), tout à l'heure.
l^uis orains (ju'il vient de la foire.
[Farce de Patelin.)
Naïades, du grec nains, naein, couler.
Divinités païennes qui présidaient aux eaux douces.
Naïf, du latin nativus, doublet natif.
La naïveté est sœur de l'innocence, et cousine de la bêtise.
Naître, du bas-latin nascere, dont la forme complète est gnascere,
idée de engendrer.
— Synonymes : être né, bien né : noide.
Plutarque a dit : « La vanité entend par là né de parents nobles :
et la raison, né de parents honnêtes. »
Narcisse, latin narcissus, grec narkissos. Peut-être y a-t-il la
NAT 109
111(^1110 l'Mciiic que (\;\n9. tKircofit/in' (ii/n'/,o(h. (nircc (|ii(' |"(»(l('iir de
ci'llc |il,iiilt' fiiLioiirdit If ccrM'aii.
— On ;i|»|(rll(' ii.ii'cisst' iiii lu'lil-iii.iilrc (''|)i'is de liii-iiirine.
— Nai'cissc. jciiiio honiiiié doiir d'imo ui-.ind»' IksiiiU'. doiil il rtait
si inf;iliM''. (|iril int-prisa rainoiir de la iiMiiplic l'>(li(». (|iii st-clia de
douleur à caiisr de cette inseiisihililé.
Ayant vu dans une fontaine sa propre iinaue, il en devint é})er-
dument amoureux, la prenant i»our une nymphe des eaux, et,
désespéré de ne pouvoir s'unir à elle, il se donna la mort, et son
sang produisit la Heur qui porte son nom.
Narguer, \iendrait. dit-on, de nasarder, donner une nasarde,
se moquer de quelqu'un à son nez. (Voy. le suivant.)
Narquois, de nav(juer {narlrare)^ ou de l'argot.
Esprit rusé, qui trompe les autres, se moque d'eux à leur nez.
— On appelait jadis drilles et narquois, des membres de l'an-
cienne famille des gueux et des ti'uands. Ils s'étaient fait une langue
qu'ils appelaient l'argot, le jargon des gueux, ou simplement le
jargon.
Naseau, dérivé diminutif de nec, latin nasus.
— Fendeur de nazeaux: bravache. [Moyen de parvenir . ç}\. 60.)
Les quarante-cinq gentilshonniies attachés à la personne de
Henri III. et (pii n'étaient pour ainsi dire que des assassins à gages,
furent désignés sous le nom de fendeurs de naseaux. (Voy. pour-
fendeur.)
Nasse, du latin nassa.
Panier d'osier conique, où le poisson entre sans en pouvoir sortir.
C'est aussi un lilet à prendre les oiseaux.
— Être dans la nasse est, par suite, une locution analogue à :
tomber dans le piège, dans le panneau, dans les lilets...
Les Italiens disent : Lascinre in Nasso, laisser à Naxos, c'est-à-
dire abandonner quelqu'un dans l'embarras, comme Thésée aban-
donna Ariane dans l'île de Naxos. (Génin.)
— Les trois nasses où tout le monde tombe sont le jeu, les femmes
et le vin. (Dictionnaire de Trévoux.)
Nation, du latin natio, correspond à nasci, naître.
Graiule famille, distincte des autres agglomérations humaines.
— Collège des Ouatre-Nations : le Palais Ma/.arin, où se réunit
aujoiird'lini l'Insliliit de France.
110 NAT
Le cardinal Mazarin légua en lOGl, 2.000.000 de livres et 52.000
livres de rente, pour fonder un colhVe destiné aux (ils des ^culils-
liuiiiiues et des hour.ucois de Piunerol, d'Alsare, de Flandre et de
Uoussillon, quatre provinces nouvellenienl conquises.
D'où le nom donné, eu Kîdo. ;i l'étahlissenienl, dû à rarcliitecte
du roi, Louis La\eau.
Naturalibus (in), expression latine : ;'i létal de nature, r"est-;'i-
diro nu.
V(iii(liais-lii \{)\v imm iiiailn- in nulnnilibus ?
(Kki.naki), Joueur, I, 2.)
Nature, du latin nafiwa.
La force qui engendre : l'ensemble de toutes les choses créées.
On a dit aussi neiure.
Neture rit comme il samblc
Quand hic et hœc joignent ensemble.
— Le mot nature, qui chez nous désigne l'ensemble des êtres
créés, signifiait cbez les Romains la naissance des êtres. Tel est le
sens du titre du poème de Lucrèce : De Natura rerum.
Cbez les Grecs, le mot p/it/sis remonte plus baut que la naissance,
il signiOe génération. Ainsi le raisonnement conduit du dogmatisme
à lempirisrae, et de l'idée de génération et de naissance, passe à
celle d'existence.
— Nourriture passe nature : l'éducation corrige le naturel.
Qu'apprend poulain en denture,
Le veut tenir tant comme il dure.
— Socrate disait qu'il s'était corrigé d'une nature vicieuse par la
pbilosopbic et l'éducation.
Naturel, du latin nnluralis, déUvré de naturn.
Qui est conforme à la nature.
Dans certain langage, ou le remplace par nalure : une ci'itelette
nature, un tableau nature: comme si ce barbarisme devait rencbérir,
pour exprimer que ce tableau exprime la nature même.
— Le surnaturel, ou plutôt le contrenaturel, est la violation
manifeste d'une loi établie par le Créateur.
— On appelle, substantivement, naturel ou indigène, celui qui
est né dans un pays.
— On dit improprement naturaliser. Mieux vaudrait dire :
donner le droit de cité, de bourgeoisie.
— Enfant naturel, d'après les Romains, qui appelaient liberi
NAV 111
nahirales los onl';iiits iirs du (•(uiciil(iii,it. |i;ii'op[)(>siti()ii ;iii\ t'iilnnls
Iruitiiiics, lu's sons le réi^iiiH' lt\u;il.
C.liassi'Z le iialtu'cl, il rc\icii( au j^alop.
(Dksioit.iiks. (iloripu.r.)
Xdtuiinii e.iitfUns fuira, luiiifit iixiiuc rmirrct.
(IIni:\,.K ki.ilrl' \, liv. 1.)
L'oiiilire dt's hoilciix csl tortue. (Ali.)
Dans sa peau mourra le renard, l'u/pcs /li/uiii. non niorea
mutât... (Suétone.)
Grattez le Russe, vous trouverez le Cosaque.
Jamais clicval ni iiuriiant lioinnie
N"aiiU'ii(ia pour aller à Rome.
(Voy. Rome.)
Qui fol naquit, jamais ne .uiiarit.
Qui a bu lioira.
L'épine en naissant vient la pointe en avant.
Qao scmel est imbula recens, sercahit udorcm
Testa diu.
(Horace. £[,. 1, II, 70.)
La caque sent toujours le hareng.
Si liarong put (pue), c'est sa nature ;
S'il fleure bon, c'est adventure.
Naufrage, du latin nnufrciQUim, navls. franyo (hris de navire).
Faire naufraoe au port.
NaDujare in porta (Térence) : être en sûreté.
Ex nau /'}'(/ f/io taljula.
— Mancer-comme un échappé du naufrage de la 3Iédut>e.
En 1825, la Méditée, conduisant au Sénégal un gouverneur et
des employés de l'admiiiistration, se i)risa sur des rochers, par
suite de l'incapacité du commandant. Cent quarante-cinq malheu-
reux furent al)andonnés sur un radeau, on ils restèrent douze jours
sans aliments. Le hrick XAi^yua recueillit quinze survivants.
Géricault a représenté le moment où le hrick est aperçu. Savigny, -
un des naufragés, est debout adossé au mât: Corréard lui indique à
l'horizon l'espérance que la Providence leur envoie.
Nausée, du grec nausia. de nauS; navire.
L'elTort que l'on fait pour vomir, et qui rappelle le mal de mer.
Navet, anciennement navenii ; provençal naceoii.
Lui estoit grand contentement attiser son feu, faire cuire des
naveaux aux cendres. (Noël du Fail, Pro;jo,ç rustù/ites.)
112 NEC
— On (lit, (Ml lanfi'.'i.uc h;is : « Des niivfts ! » C'est imc r(''|)onse
ironique et néffiitive. On l;i tr()iiv(! (hiiis le Ci/nihaliim inniiili; de
15. des l'(''i'iers : " Oui (l;"i, des niivets ! "
Naviguer, du latin narùjare, de nnris : ^i-ei- /laiis.
— x\a via lier selon le vent, ...selon lèvent et les Aoiles : iiL'ir selon
les circonstances. •
Selon II' temps (|iril fait, riuiiiiiiie doit naviguer.
(Ri^xMER, Satire VI.)
— On ailriime aux Phéniciens l'invention dn commerce et de la
navigation au lon,i>- cours.
Ne, du latin ne, négation, mol (]ui rend une proposition ni^'.uative.
Forme alTaiblie de non: demande toujours un renforcement.
Néanmoins, formé de néant et de /noins : en rien moins.
Corresi»oiid à ne pas mn/jis.
Nécessaire, du latin necesnarius.
Celui qui a le nécessaire doit être satisfait.
Quod salis est cni conl'ujit, is lùhil innpliiis optet.
(HotiACE.)
Mendlcllatem nec dii-ilias, sed necessaria. {Provei'bes XXX, 8.)
Ni l'indigence, ni l'opulence, mais le nécessaire.
Nécessité, du latin necessifafemiÛG nerf are, nouer, attacher?).
Ce dont on ne peut se passer, ce à quoi on est attaclié.
— Nécessité n'a pas de loi. C'est la traduction littérale de ces
mots de saint Augustin : Legem non habet nécessitas. [Soliloques,
II, 2.)
Nécessitas omnetn legem frangit. (Sénèque. Controverses,
IX. 44.) La nécessité rompt toutes les lois.
Sd'va nécessitas, ...dira nécessitas.
(Horace.)
La nécessité est une ai'iue puissante : Ingens telum nécessitas.
Besoin fait vieilles trotter.
Nunc est caldnm m ingère et frigidum potare. (^Pétroue, Saty-
ricon.)
Facere de necessitate virtuleni. (Saint Jér()me.) Faire de néces-
sité vertu, c'est-à-dire faire de bonne grâce une chose qui déplait.
11 faut faire de nécessité vertu. Le mot vertu ne signifie pas ici
simplement une résignation passive, mais doit être pris dans
l'acception que lui donnaient les anciens, de courage héroïque, de
SIH\ 113
foiTO. |iniir fo<'Oii(|ii('rir Irs ;i\;iiil;i,!:os (iiic le iii;illM'iir iimis ;i l';iil
|iri'tli't'.
Neptar, mol liroc. de nr/ià. liicr.
Ce serait lo liiviiva^io ([iii tiic le souvenir des choses terrestres,
le hreiivoiie d'oubli et d'iiiuuort;dit('^.
Le nectar était la lioisson des dieiiv: Tainliroisie leur nourriture.
I.o nectar (|iic l\tii s^rl ;iii iiKiilrc ilii Idiiiicriv,
...('/est la loiiaiiKc, Iris.
(La I'iimmm:.)
— I.e poète Iliycus prétend que l'amltroisic était neuf l'ois pins
douce (|iie le miel. On sc demande où il avait pu y goûter, pour
éli"e si bien renseigné.
Néfaste^ de ne et ffiri (terme d'antiquité romaine).
.lour où les trilmuaux étaient fermés, où les juges ne pronon-
çaient pas de jugements, ?ion jini dlccbani. où il était défendu par
la religion de vaquer aux atVaires, où le temps était consacré aux
sacrilices et aux spectacles. Jour de deuil en mémoire d'un malheur
public du peuple romain.
Ver l'as et nefas (Tite-Live) : par toutes sortes de voies.
///(' nrfaslns eiil, per ijaem tria vcrlja ailenlar.
Fd'itus erif, pcr qucin leye ticebit uti.
(OviDii, Fastes.)
Ces trois mots, dont parle Ovide, constituaient la formule : //o,
ilico, addlro (je donne, j'ordonne, j'adjuge), que prononçait le
préteur dans les allaires judiciaires, avant d'accorder le droit de
faire des poursuites, de désigner un tuteur aux mineurs, d'adjuger
le fond d'un procès à l'une des parties.
— Les jours néfastes étaient consacrés au repos, soit pour
célébrer des fêtes, soit pour célébrer un deuil national, comme la
défaite de Cannes.
— Lorsque Lucullus s'apprêtait à attacpier Tigrane, on lui vint
dire que c'était à pareil jour (jue Cépion avait été battu par les
Cimbres (() octobre) : « Eh bien ! dit-il, je rendrai ce jour heureux
pour les Romains. »
— De nos jours, les gens superstitieux attachent au vendredi une
intluence funeste, et ne voudraient rien entreprendre ce jour-là.
Pour les Uusses, le jour néfaste est le lundi.
Négociant, de néyoce, latin nec otium (sans loisir).
Nègre, du portugais ne(jro, latin tùgcr : doublet de noir.
fl4 NEM
iN(Hii (loiiiu'' ;iii\ peuples de l;i ('(Me occideiidile (l'Al'i-i(iiie p;ir les
l'orlii.u'.'iis (pii l;i diMuin rii'eiil. el non du Meuve Niger.
(]f. J/oiwe ( iiiaiiros^ S()iiil)r<'), J-^lhioiticn ffpii senihle lirùlé).
-- SyiiniiviDcs : hoiilo de nei.ae (p;ir ;iiili[>lir;i>e). comiite on
appelle « boule de son « une li,uni-e nuirqnée de Uiclies de ronsseur;
rnid lilnnclii ; honraeois d'KlIiiopie.
— Traiter quelqu'un romnie un nègre : 1res durement.
— La traite des nègres est un coniiiierce intei-lope, qui consiste
à vendre les nègres conmie esclaves dans les colonies.
Le prix moyen d'un nègre, en Amérique, était, en ISoG, de
7.(I(K) francs.
Neige, latin nix, nirem: ancien français nolf: provençal néou.
— Blanc comme la neige. Le nom de plusieurs montagnes très
élevées est tiré do la l)lancheur des neiges dont elles sont couvertes.
Tels sont le Mont-Blanc, le Caucase, les Alpes.
— Dut nu-om sicut lanam. (Dieu) donne la neige comme la
laine. (Psaume 147, 16) ; à cause de la ressemblance des deux
matières, et parce que la neige protège en hiver les végétaux contre
le froid et la gelée. La neige, en elïet, à cause de sa blancheur,
étant peu conductrice, empêche la chaleur de la terre de se perdre
dans l'air froid.
La neige a encore la propriété bienfaisante de tempérer la
chaleur excessive de certains lieux, en refroidissant les vents qui
passent sur le sommet des montagnes. Elle sert aussi, en fondant
pendant l'été, à alimenter les rivières, qui inonderaient les vallées,
si la même quantité d'eau leur arrivait subitement sous forme de
phiie.
— Année de neige, année de grains.
— Neige partout, arbres glacés : la terre n'est plus qu'une
meringue, les arbres sont en sucre candi. (Amiral Page, Revue.)
— Faire la Itoule de neige. — La boule de neige est le symbole
de la force de l'association. Alexandre, César, Napoléon, sont
devenus les plus grands conquérants parce qu'ils ont aggloméré
autour d'eux des forces considérables.
La lioule de n.eige. à force de grossir, devient avalanche.
Némésis, nom mythologique ; du grec nemô., distribuer.
Divinité infernale, lille de Jupiter et de la Nécessité. C'était la
déesse de la vengeance : elle punissait le crime et récompensait
la vertu.
XEfi lir;
Nemrod, nom liilili(iiic.
IN'Iit-lils (If CIliiii. cl arrirrc |M'lil lils do Noé. iisiir|i;i le piTiim'i'
la iiiiiss.'iiK'O souvoraiiu', à 1 aille ilc jeiinos ^oiis qu'il avait oiuliircis
au travail par le rude exercice de la chasse aux li('(<s IV'iorcs.
(Genèse, \. S.)
Nenni (iKiniJ. de iien pour /ion et i/ : ce n'est pas cela.
Opposé à ou/ : hoc illiid, c'est cela.
Cet aiherhe. aujourd'hui peu usité, est resté eu proveucal.
In il(Mil\ ni'iiiu ;i\i'(' un doulv Sdurirc
K'^l laiil lioiiiii'sir...
(('.. .Mauot.)
l)il('S-\nllS (Ml (»ll iicniii ?
(RiTF.riKiF, Dit (le l' ErliiTif.)
Néologisme, du erec /ie().'<, nouveau, hxjos, mol.
Opjiosé de arclimsinf.
— Voltaire, parlant de la [laiivreté de la langue Irançaise, et de
la dillicullé qu'on avait à l'aire adopter des mots nouveaux, dit :
« j.a langue française est une gueuse lière : il faut lui faire l'auniône
malgré elle. )> {Me//ioires de l}ar,haunu)nt, mai 1778.)
Voltaire a dit aussi : « La langue française est une pauvresse qui
fait rauni('»ne à tout le monde. »
- On a comparé la langue française à une mendiante orgueil-
leuse, à qui il faut faire la charité malgré elle ; si orgueilleuse,
|)onrrait-(ni ajouter, qu'elle ne \eut l'ccevoir que des pièces d'or.
^Pougens, 1821.>
— Horace a dit :
Liiuit seni]icr(jnr liccbil
Sii/iuitiitii jird'scntr nnln iiroduccrc nomci}...
11 est permis, il sera toujours [)oruiis de fahriquerun mot marqué
au coin de l'usage.
— Les mots, comme les fruits, ne valent rien, ni trop verts, ni
trop mûrs.
— Néologismes créés depuis le xviiic siècle :
Agglomération, agitateur, agrénuMiter, alarmiste, amatrice,
apprêter, atonie, avachi, avicide (tueur d'oiseaux).
Baser, bénéficier, hienfaisance, hlémir, boutiquier, hrfderie.
Camaraderie, caquetage, causerie, cautériser, chaleureux (?),
conllagration, critique, cuirasser, cupide.
Démonétisation, désenchanté, désorganisé, dill'usion, dissem-
blable, dramaturge.
JIG \i:u
l'^U'iicor (s'k (''.tiiiliscr, oiidolor-i, ('iilr(',L;('iil. ciiitlioiiic, ('\|);ilri;itiun,
('\|)l()r;il('iif. cNlr.Klilidii, (•\iilt(''i';iiic('.
K;i(l;is?(', iV'licilcr, lliicliicr. t'r;iiiris(''. t'i'.irtidiiiicr. fi't'.pionro.
(■('iH'r.'ilissiiiic (^). .lii'MiKliosc.
Ilaiiiciix. Ii;iiiiiniiis('i'. hàlil, liiiiiii)risli(|ii('.
iiii;i,u('' (styi('), iiiiiiiiiiriil. iiiiiiioliiliscr. iinprrssioiiiirr, iiicoliôroiit,
iiic()iisisl;iiir(% iii(l('\iii;il)l(', iiKMlit. iiit''liicl;il)lt\ iiil';iis;iltl(', iiifcrlilc'O.
induenccr, infranchissable, inolïcnsif, insaUihriti', insoiilo, instalilc
insuccès, invendu, investi.uation. irascibilité.
Jalouser, ju.miler.
Loreltc.
Machiavélisme, marasme, métrouianie. rniridque. moraliser.
A'eigeux.
Ûhligeance, obscurantisme, obtuse (idée).
Patauger, paupérisme, populariser, ]u'ogrès, prolétaire, prosé-
lytisme.
Regrettable, réorganisation, responsaljilité, romantique.
Salarié, sapide, sensiblerie, sinueux, soporeux, spoliateur, stéréo-
type, stipendier, subversif, surluimain.
Tantaliser, tari, torpeur, tragédien.
rtiliser.
Vagissement, vociférer, vomir (des injures), voyou.
— Néologismes anglais :
Ballast, convict, express, festival, rail, railway (d'où dérailler),
sport, steeple-chase, lender, truc, tunnel, turf, ^vagon, ^\llist, etc.
Népotisme, du latin ncpos, nepolem, neveu, petit-llls.
Ce mot, inventé pour désigner la faveur excessive que certains
papes ont témoignée à leurs neveux, a été appliqué par extension à
toute faveur peu méritée accordée à la sollicitation.
Nerf^ du latin nervus ; provençal nerri.
Les ficelles de la femme.
— Nerveux comme une' guitare. . '
Néron, nom historique.
— C'est un Néron. Racine a bien exprimé l'idée d'horreur
contenue dans ce mot, quand il fait dire par Agrippine à son fils :
Et ton nom paraîtra, dans la race fiitiiro,
Aux plus cruels tyrans une cruelle injure.
[/iri/iiniiicit.t. V. 6.)
NEIT 117
Nescio vos, twiirossiun latine : je ne vous connais pas. C'est
comme si l'on disait : impossilile, cela ne se peut pas.
L'expression est em[)i"iintée à la Hilile.
Dixit pat ri siio ot intlri suw : iiescio ras. (Deulcrunoine,
XXXIII, 9.)
Amen diro rohis, nc.srio ros. (Malliieii, XXV, 12.)
H nie dit (|iril \intlail vous parler un in.slaiit.
iv (lis : Xcscio os.
iScAinio.x. Jaihlot, II. 1.)
niirli|iic aiili'c, dans ri'spnil' du nialriiucninn,
Aurait ouvert loiTille à la trnlatiuii :
Mais moi, ncsch vos !
(Moi.iiriK, iJrpil, W. \.\
.A>,sv'/o ras. dans Piaule, siuiiilie aussi : je ne vous connais pas.
Neuf, du latin /lorc/n : provençal noc.
D'où : novemher, novembre; none, noua: nonanle. (piatre-
vini2t-(li\.
Kntorn l'ora noua.
(\'ie (le saint Honorât.)
(Vers neuf heures.)
— Neuf iisl le pluséle\é des nombres impairs e\[)rimés par un
seul cliill're.
— Los Muses étaient au nuuihrc de neuf. Le ciii-islianisme admet
neuf chœurs d'an.ues, et recommande les 'neuvaines, pendant
lesquelles on fait certains ados do piété en riionneur de la Vierge
ou des saints. La neuvaine de sainte Geneviève se fait à Paris du
3 au 1^ jauNier.
— Te///' fournil un moyen de faire la preuve de la multiplication.
— On a remarqué, sans pouvoir en expliquer la cause, que les
iiivors les plus rigoureux sont des millésimes en neuf, tels que
17(10. 011 l'Adriatique gela en décembre. 1789, 1829, 1839, 18.j9,
18G9...
Neuf, féminin nrui-c. du latin nori/.s...
Haiiit tout ballant neuf, du \ieux mot haf/f, neuf? (argot).
Neutre, du hitin /icufcr, \H)\\y ne i/fcr. ni l'un ni l'autre.
— Le genre neutre, (pii n'est ni mâle ni femelle, s'appelle en
sanscrit klicu, eunuque. (Voy. hermaphrodite.)
In neutrnm partent niocerl (Cicéron), être indilVérenl à tout.
La neutralité ne fait point d'amis, n'ôte point d'ennemis.
Neutrahtas necamicos i^arit, nec ifiindcos lollit. (Tite-Live.IX.)
118 m:z
Neveu, ancien. Ir;m(;;iis sujet nii's, réuiiiie iwceii, de nrjtos.
IICjlOlCIII .
Aït'.v est resté (Inus le iï'ininin itirro.
— Xe\eii ;'i i;i mode de Bretagne : lils d'iiii cuiisin ,L:enii;iiii nu
diiiie cousine tierniainc, parce que. en Bretagne, les cousins lier-
iiiains élait'iil appelés « oncles ■■> par les lils de leurs cousins .■zcrniaiiis.
Nez, (lu latin iiftsiis : provençal nos. D'où naseaux, nasillard.
Partie saillante du visage, (jui est le siège de Todoral.
Les écluses du cerveau, pour les Précieuses.
— Le nez se prend quelquefois pour le visage : se rencontrer
nez à nez.
— Hii'e au nez de quelqu'un, faire une chose à son nez, à sa
barbe. .
On s'aime à son nez. on se marie à sa bai'he. (.1. .lanin.)
I)ispliru/l nnsKs : son nez me déplait, c'est-à-dire son air, sa
personne.
— Mettre son nez partout : faire la mouche du coche.
— Xez rouge, qui a coûté cher à mettre en couleur (trivial),
parce que c'est souvent l'abus du vin qui lui donne cette couleur.
Dans le Moyen de parvenir. [ûvà]^. 21), Denost s'informe à un
médecin comliien il lui demandera pour faire disparaître la rougeur
de son nez. Le médecin lui demande 200 écus : " Vous ne sauriez,
répond Denost, pour si peu, d'autant qu'il m'en a coûté plus de
mille à le rendre ainsi de haute couleur. »
— Avoir bon nez, le nez lin. du nez : être lin. rusé.
Homo nnunchr nmi.''-
C'est-à-dire homme bien mouché, dont les narines sont libres
pour llairer.
Xou cuicuiiHjuc ilaliijii est hulierc nasitm.
(Mai;ti.m,. I. -Vi.i
(11 n'est pas donné à tout le monde d'avoir du nez.)
Cette locution est la conséquence du fait physiologique que le nez
est le siège de l'odorat, du sens qui nous fait connaitre la nature (?)
des choses.
Aussi narine (naris) vient-il. selon Festus, de narus ou (jnarus,
qui sait, qui connaît, qui sent et comprend les choses. D'où encore
narro. raconter, ig narus, ignorant.
La trompe de l'éléphant, qui tue un buflle et déracine des arbres,
est douée d'une sensibilité si exquise, qu'elle semble le siège d'un
,\EZ 110
sons qui nmis csl iiK-oniiii. il sent s;i fi'iiit'llc ;'i qii.ilrc Ii'cik's de
distance.
— Il a lion nez, se dit an |iro|)i"e du cliien de .i^arde ou de cliasse;
an liiiuré. de riioninie de .uoi'd déiical.
Les linesses de resprit sont coniini' une essein'C précieuse que le
sot laisse é\aporei'. Le sot n'a pas de nez; l'iLinoranl n'a qu'un
coryza qui peut se guérir avec des soins, tandis que la sottise est
incuralilt'.
— Avoir un pied de nez exprime la liontc de n'avoir pas réussi.
On dit aussi familièrement : faire un nez ; et pour exprimer la
niiMuc idée, jiar antiphrase : être camus, s'être cassé le nez.
Il en eut le nez si long, qu'il fut camus. — Mais d'où cuidez-vous
que cela est venu, que Ton a fait signifier la même chose à deux
contraires? (.Voi/f/i de jKirrcnii'. v\\. 01.)
Guy Patin plaida au Parlement contre Renaudot, docteur de
Montpellier, qui voulait exercer à Paris sans être agrégé au corps
des nu''decins de cette \ille. Guy Patin gagna, et dit, en sortant, à
son adversaire, qui aNait un nez très court : « Vous avez gagné en
perdant. — Comment ? dit Renaudot. — C'est que vous étiez cauius
en entrant au palais, et que vous en sortez avec un pied de nez. »
— Faire un pied de nez. C'est placer l'extrémité du pouce sur le
bout de son nez. en allongeant la main en avant.
Et (|iiaiiii ils sont cncluiiiu's.
Vous le;u' lailos un pied de nez.
(ScAiiiai.N, /'orsirs biir/ps'/i/rs.)
— Gueux de nez : pauvre de nez, camus.
On dit aussi ne: en moins, par jeu de mois (nf'fininoinsj.
— Jamais grand nez n'a gâté figure. Les grands nez sont estimés
chez certains peuples, tandis que les Maures, les Nègres, les Chinois,
préfèrent les nez camus.
Sur tous les nez son nez a ravantajj-e,
Et jamais un grand nez n'orna mieux un xisago.
(DlCSIlOL'l.lhliKS.)
Son nez, liant élevj. semhle faire la ni(ine
A Ovide Nason, à Scipion .X'asiiine.
(liiJ.MIM;.!
Il a quel(iue chose do grand dans la figure : c'est son nez.
(Sévigné.)
Salomon, dans le Canlu/ue des Cantiques, compare le nez de
son épouse à la tour du Liban.
Dans une épigranime de YAntlioloyle, ou parle d'un nez si long
120 NIA
(|ii(' If liiMs n") poiil iillciiulrc |iftiir le iiioikIht. que l'n-il iiimi voit
pus le boni, (jikî ron'illc ne reiileiid pus éleniiier.
— Le peuple jippelle jiif \\\\ nez éiioniie. (le iilrc. poiiiiiie de pin
qui resseiiihle ;'i un ne/, hoiii-iiroiiiK'' d'iN roune.
Ljiiiln' jour, nie Sniiil-Mjii'lin,
Voilà (|iiiiii |il;iis;iiil jriimin
Me (lit en riniil ;iiiv i-cl.ils :
(ycu(lel-ià, <iiiel iiil' (in'il n !
((JLi.NAii), 1830.)
— Mener quoiqu'un par le nez. Proverhe <2Tec, venu de l'usaire
de passer un anneau dans les narines des buffles, pour les conduire.
— Parler du nez, nasiller, nasonner. Il y a des gens si bavards,
que si on leur fermait la bouclie, ils parleraient du nez.
— La moutarde lui monte au nez. (Voy. moutarde.)
— S'il tombait sur le dos, il se casserait le nez. (Voy. fjnirjnon.)
— Tirer les vers du nez à quelqu'un : bù faire dire la verit(j.
Ni, ancien fran(;ais ne : du latin ner.
Cette forme s'est introduite au wr* si(^'cle. Au \\\\'\ ne n'est plus
nsilé. Aujourd'hui, on ne l'emploie plus que par iilaisanterie, et en
répétant la phrase < ne plus ne moins » du MhUkJi- imaginaire.
(Liltré.)
Ni l'un ni l'autre : ni cliair ni poisson ; ni li.uue ni raisin : ni
Guelfe ni Gibelin : ni Gautier ni Garuuille. (Voy. neutre.)
Niais, d'un type nidax. dérivé de nid ut;, nid.
Synonymes : Niguedouille, Nicodème, Nicaise.
On employait autrefois niée, du latin nescins.
Niais se disait particulièrement du jeune faucon pris au nid. Ce
mot est fait comme na'if, correspondant à natif. Il s'opposait à
madré, qui était le faucon arrivé à connaître toutes les ruses de la
volerie. Madré signifiait au propre tacheté, parce que le faïu'ou
adulte est marqué de taches noires sur le dos.
Le léopard est madré. On dit aussi : savon madré ou marlu'é.
Par mou cliief, tu es fol et nice.
[Roman de la Rose.)
Tant ne fut nico. eiicor ((ue nice fiil.
Madame Alix, que ci' jeu ne lui plnl.
(I.A l'iLMAIM.. I.'u/lles.)
— Faux niais : faux bonhomme.
— Niais de Sologne, qui prend des sous pour des liards, et des
draps de lit pour des mouchoirs de poche. 0 oy- So/or/ne.)
— Semez de la graine de niais, il poussera des actionnaires. {Len
Cent et un lîobert Marairc.)
Niche, lin \it'ii\ mot ///y^'/'. pour n/fjaudcr : ihi latin iiii;/ari,
jouer au\ iioiv.
Celte étymolouie est peu vraiseiniilaiilo. A'ic/ic est une autre
fornu' de nif/itc : faire la iiicpie. et semldo \enir du scandina\e
iii/r/i. malice, méchanceté.
Xous lui ferons tant de pièces, nous lui ferons tant de niches sur
niches, que nous ren\ errons à Limoges M. de Fourceaugnac.
(Molière. I, 3.)
— Aiclie, ferme d'ai-chitecture. vient de Fitalien iiicchia, enfon-
cement en forme de co(piille.
Nicodème, nom dliomme, d'origine grecque. Pris dans le sens
de niais. uiLîaud. [)ar analogie phoni({ue avec ce dernier mot.
Nicolet. De plus en plus fort, comme chez Nicolet. Cette locution
était la de\ise du théâtre fondé en 1700, houlevard du Temple, par
>'icolet, où l'on montrait des marionnettes, des danseurs de corde,
des animaux savants. En 1772, la troupe de Nicolet, appelée à
Choisy, où était la cour, prit le titre de « grands danseurs du roi ».
Par suite de la loi de 1791, qui proclamait la lijjcrté des théâtres,
celui de Nicolet prit, le 22 septemhre 1792, le nom de Théâtre de
la Caité, qu'il a gardé jus(pr;i ce jour, en dépit des glapissements
du mélodrame.
Nicolet, dit Mercier {Tableau, cli. loO), a gagné 50.000 livres de
rente: et le mallieureiix Taconnet. qui lui a fait une partie de sa
fortune, est mort à la Charité. Nicolet a acheté une terre, et forcé
son pasteur, qui lui refusait l'eau liénite, à lui présenter le goupillon.
Oudinot, rival de Nicolet, (}ui fonda l'Amhigu-Comique (17G9-70),
(jlilint d'abord beaucoup de succès avec des marionnettes, qui
étaient des portraits ressemblants des acteurs de l'Opéra-Comique.
En 1771, il substitua à ses marionnettes ses propres enfants, et
écrivit sur le rideau de son théâtre le calembour : Sicut infantes
audi nos.
Nier, du latin nrt/arc : anciennement noier et nier.
Ar-ot : ;iller à Nioi'l.
Nihiliste. Constitution du gouvernement :
Art. i'i. — Il n'y a plus rien.
Art. i*. — Personne n'est chargé de l'exécution de la présente
ordonnance. (N. Roqueplan, 1848.)
122 XIT
Nil, nom géogriipliiqiio : du l;itiii A'i/its : tiroc .\ei/os.
— Inconnu comme les sources du Ml : A'i/us incarlis fonlihuH
art IIS. CPIine.)
...Sine leste creulns.
|( j M lill N.i
Les sources du Ml, inconnues jusqu';'! nos joui'S. oui excité \i\e-
lucnl I;i curiosité des hommes de l'antiquité. Camitysc fit de «rrands
sacrilices poui- celte recliercliejMlM prcuiién' ijuestion (|u"Ale\;indrc
adressM ;i l'oracle de Jupiter Auiinon fut pour savoir oi'i étaient les
sources du iVil.
— Les anciens disaient d'une chose inipossilile : NUI capul
fjuwrere, chercher la source du .Nil.
— Le Bernain a enveloppé d'un voile la tête du Xil.
— En I8oC), le pacha d'Kuypte contia à M. de Lantiire la mission
de remonter le Nil jusqu'à sa source, et ordonna les préparatifs
de cette expédition. Des savants spéciaux des pays les plus éclairés
, du monde devaient en faire partie. Malheureusement elle n'eut pas
lieu.
— Les sources du Nil ont été découvertes en 18Gi.
Nippes, oriiiine fort douteuse. Islandais lineppei^).
Hardes de peu de valeur.
— Je me mettrais en g;i!j:e, on un liosoin ui-;,'enl.
— Sur cette niiipc-là vous aiu'iez peu d'argent.
(Hiii..N\iu>. Joueur. U. li.l
Nique (voy. niche), du danois uijkkc, maUce, méchanceté; ou
de l'allemand nickcn, faire signe de la léte.
NM(iuait de la tète souvent.
(G. Chastklai.n, citO pir LilUr.)
Faire la nique à quelqu'un : s'en moquer. C'est, au propre,
hausser et haisser le menton, pour narguer quelqu'un.
Les mots terminés en iquc
l'^ont au médecin la niiiue. •
Nitouche (sainte), pour n'y touche.
Qui alTecte un air sinq)le et hypocrite.
Un a dit aussi milouche, pour mie toitc/ie, qui n'a pas l'air d'y
toucher.
Timide en son aspect, semblait sainte Nitouche.
. ■ (Rkcmer.)
Les Provençaux disent : misé pesqui pas, madame presque pas.
NOB 123
Niveau, de n/.i-, n/ris, noige, uni roiiuiK." la neiiic. Ou pliitiM de
lihrd, lijdaiice ; d'où lihel, devenu lucel.
Nivelle.
C'est lo cliii'ii (le Jean de Nivi'lli"
Oui sViifiiit (|iian(l on rapiiellf.
Jean II de MoiilMKinMic) . atlaclM' à la cansi' de Lduis XI. somma
5011 lils Jean de M\elle, de venir condiatlre pour le roi de Fr'ance.
Jean, ci'aiLinant (^l'on ne le retint iirisonnici'. s"enïui( au lieu d'ohéir
à son père, ce (pii lit dire : « Ce chien de Jean tle Ni\elle... »
Une Iraili'osso voi.v bk'ii soiiVL'iit vous appelle.
Ne vous pressez donc nullement.
Ce n'était pas un sot, non, non, et croyez-nren,
Que le cliien de Jean de Nivelle.
(La FoXTAi.xK, II, s.)
Noble, du latin nnbilis. (pii mérite d'être connu, qui a un nom,
qui appartient à une classe distint>uée ou privilégiée dans l'Etat,
par droit de naissance. (Voy. corlioii )
Xolile comiiie le roi : noble à 3G carats, à 30 quartiers.
Noblesse, déri\é du précédent.
La Ré\oliition avait supprinu'' les titres de noblesse : Napoléon
les rétablit.
Après la destruction de la féodalité pai" les rois de France, la
noblesse s'est rasseml)lée autour du tr(tne, qu'elle ne pouvait plus
combattre, et qui lavait liuniiliée ; mais les nobles ont conservé
leur crédit, leur opulence et une foule de privilèges qui ont pesé
sur la multitude jusqu'à ce que la Révolution de 1793 les ait fait
rentrer dans le droit. (Mercier, Tabledii, cli. t)49.)
— Les titres de noblesse, en France, sont ceux de : clievalier,
baron, vicomte, comte^ marquis, duc.
Prince désigne les membres de la famille régnante. (Voy. de et
titres.)
En Angleterre, on distingue la haute noblesse, nobililij, qui est
celle des lords, et la basse noblesse, (jcnfry, celle des esquires et
baronnets.
En Espagne, la grande noblesse est la ijrandes.^e, la })elile
noblesse, celle des hidalgos.
On connaît encore les tnaf/nafs polonais et hongrois, les Ooi/ard.s
russes, etc.
— Comte est le plus ancien titre de noblesse, car. 28 ans avant
Jésus-Christ, les sénateurs formant le conseil d'Auguste portaient
124 NOB
le nom tic Ai((/iisfi C'ofiii/rs. (>)iisl;iiiliii lit de ccl oiiiplDi nue
dignité.
Le titre do rotule fut rniisoi'\é clic/ les Frnncs, lorstjii'ils siiccc-
dci'cnt ;'i l;i doiiiiiinliou iuiiimIiic. Les comtés claiciil des divisions
du territoire, où les comtes rendaient la justice. Les comtes palatins
étaient cliarués des alTaires du palais.
La haute dignité du titre de coiiile s'aflirme encore de nos joiii-s.
puisqu'il est toujonrs donné aux prétendants de race royale. C'est
ainsi que le comte de Gliambord et le comte de Paris sont les
prétendants des deux branches des Bourbons en France (1870), et
que jadis les comtes de Savoie, de Flandre, de Champagne, étaient
de véritables souverains.
— Le titre de marquis date de Ciiarlrmagnc. Vi-rs 790. les fron-
tières appelées marches, fui'ent gardées par des chefs militaires
appelés margraves (comtes des marclies), d'où est dérivé le mot
marquis, créé par Louis XU, en faveur des seigneurs de Trans,
en loOO.
— JJa/'on, titre d'origine allemande, sigiiilie hrnre. Il date du
vr siècle, et ne prit de l'importance qu'à partir du xii'".
— Noblesse nouvelle: parvenus. Homo nocus.
On dit d'un parvenu : 11 est noble comme un [lapilluii, il a des
chenilles pour ancêtres.
— Les rois de France guérissent leurs sujets de la roture à peu
près comme des écrouelles, à condition qu'il eu restera des traces.
(Rivarol.)
Il n'est orgueil (jne de pauvre enrichi.
Vilain enrichi ne connaît ni parent ni ami.
— La civilisation enrichit certaines familles comme la culture
perfectionne certains fruits, et fait une rose d'un églantier, et d'un
chardon un artichaut.
Dans l'ordre végétal, la rose serait une marquise, l'artichaut un
duc, etc.
Les mots mêmes s'anoblissent : un perruquier se nomme aujour-
d'hui coiffeur; un apothicaire, pharmacien, etc.
— Un grand arbre, avec les mots rirga fui. c'est la devise d'un
parvenu .qui n'oublie pas son huml)lc origine.
— Agathocle, tyran de Syracuse, était lils d'un potier. Il faisait
servir sur sa table des vases d'argile parmi des vases d'or, et disait :
« Ces vases ont été faits du temps que j'étais potier. »
' — Rollin, lils d'un coutelier, étant devenu recteur de l'Académie,
lie roiiLîit j;iiii;iis de son oriuiiic. Assislaiil un jour ;'i un dinor do
(•('(•('UH)ni(\ et s'rliinl nixTcii (|ut' l;i prrsduni' (|ui di'-coup.-iil ;i\;iit
un iu;iu\;us conU'tiu, il utlVil le sien, on disjinl : « l'roncz colni-ci.
il v;nit inionx : ot jo nfv ('(Hinnis. jo suis lils d(\ ninilro. »
— Noitlosso obligo : llonor omia. VÀW ohliuc ;'i ne pas dôro.uor.
Los liôraiils d'arnios criait'iit dans los loui iidis : « Souvonoz-vous
ipir \(»iis (Mos lils, ot no foiiisiiic/, point. »
Noce, jiorfs : lalin tiujiHa'. do iii/hcrf. Noilor. D'où nnbili\ on
âge dolro niariô. Co/niuhiinii, luaria.iio.
A Ronio. los jounos lillos ôtaiont condnilos clioz lour ôponx,
couYcrtos d'tin voilo i)our proh'uor leur [ludciir.
Alli'Z-\(iMS-en, gens de la iinco...
est nno chanson (pii dato du mariapo du roi Da.iioliort avor la roine
Hatlnldc(?).
Et chacun lit coinnio aux nocos (^s'on alla). (Moijini do pavrcnir,
chap. 4.').)
Nocturne, du latin nodupiius.
Partie de l'oflice divin (pii so chante la nuit, ot dont l'onsoinhle
s'appollo Matlnos. (Voy. heurca.)
— Ronianco, à denx voix ordinairement, d"un caractère tendre
et langonrenx, approchant de la sérénade.
Noël, du latin natalis : provençal nouvé : jour de naissance.
Foie de la nativité de Jésus-Christ, ainsi que l'indique son nom.
douhlet de nafn/.
— Le jour de la naissance do Jésus-Christ est incertain ; les
évangélistes ne le fixent pas.
Saint Luc dit qu'il avait on\iron .'^O ans quand il reçut le haptême
do Joau-Baplisto.
Le pape Jules I, au iv^' siècle, a fixé la date au i^o décemhre, jour
on le soleil commence son cours, de même que Jésus-Christ est
venu pour éclairer le monde.
— En Alloinagno, Xool est la foie dos petits onlanls. On dresse
dans le salon l'arhre du Christ, étincelant de lumière et couvert de
jouets de toute sorte.
En Italie, c'est la Béfana, grande poupée, qui est censée
descendre par la cheminée, à l'heure de la naissance du Christ,
pour distrihuor récompenses ou punitions aux enfants.
— Noël, en provençal, s'appelle aussi Galène, prononciation
modifiée de Ca/endœ ou Calendti, fote.
m NOE
l.;i Iclv (le Noël étant fixée au 25 décembre, le liiiitiéme jour des
ciilfiidcs de jnnvior, re nom de calende fut appl'Kjné dans un sens
spécial, et [ujiir ainsi dire, par excellrnct'. ;'i la WW. nit'inc.
A calcixlds In xrliil jor ilr \iuliil.
(Chron iquf (l'A ries.)
(A calendes, le saint jour do Norl.)
E xi s'dfenc cnlorn Xailnl,
Coin (ijicla ciilcnildH lui.
(T. Vit>Ai..)
(Et arriva ainsi au jour de Noël, qu'on appelle la Calende.)
— On appelait aussi, au Moyen-Age. calonda maia, une chanson
qu'on chantait au mois de mai.
CanUin una calenda iiiidn,
♦ Que di.i : cella domna lien nid
Que non fni lanf/ni son iimic !
{Roman de t Ifimaifd, f- 5(5.)
(Chantant une calende de mai qui dit : Vive la dame qin ne fait
pas languir son ami !)
— De calende, on a fait en provençal cnlendnu, le petit houx,
arhre de N(iël dont on décorait la tahie du festin.
Calendau, ca/ignau, cac/wfuec, est aussi le nom de la orosse
huche qu'on allume la veille au soir, après qu'un enfant a fait trois
libations avec du vin, en disant :
Alhjrè, Dion non dli'ijrè,
Cacliofucc vcn,
Dioli nous fasse la (jraci de veire l'an que ven.
Se sian pas mai, que fout/ucn pds men.
La bûche de Noël est un reste de l'usage antique qui consistait à
allumer le feu nouveau au solstice d'hiver, renouvellement de
l'année.
— Faire Noël, en Provence, signifie faire un grand repas.
(Irc far Pasca o Nadal
Quand son XX dans son oslal.
(lierli'.ind dk i.a Toi:ii.)
(11 croit faire Pâques ou Noël, quand ils sont vingt dans son lu'itel.)
Pâques et Noël sont donc deux grandes fêtes « mangeoires ».
— On cliante tant Noël qu'il vient. Autrefois, longtemps avant
Noël, on chantait dans les églises des cantiques appelés A^oè'ls, et
relatifs à la naissance de Jésus-Christ. Au Moyen-Age, le mot A'oid
devint le cri de joie des Français, et le signal des réjouissances.
On le l'('|)rl;iit llon-Sciilciiiciil ,i r(''|Mii|iic de l;i X;iti\ilr. lii;iis Clicorc
d:\u<. toutes les fé tes popiihiires.
— L'iisn.uo (les trois messes <lu jour de X()("'l est nciiii do Home.
On enteiidinl l;i première i\ Saiiite-Mni-ie-Mnieiiro, ;'i iniiiiiil : la
deiixioiiie ;'i Saiiil-Alliaunse. au point du jiuir. cl la troisième à
Saint-lMori'c. dans la matinée.
Nœud, du laliii nodns: provençal iiohk.
— Kilcr son nœud : s'en aller. Eu uiarino. la liiiue de Locli est
iiarnie de nœuds, de 47 en 47 pieds. iuler\alle qui est la 1 10'' [tartie
du tiers de la lieue marine, de sorte (ju"en déxidant la corde
iKMidaul Ironie secondes, ou compic qiu:' le vaisseau l'ail aiilaul de *
lieues à l'Iieurc. ([ih> Ton a lilé de nieuds en cette deiui-miniite.
(Yoy. (jordirn.)
Noir, du latin niyi'v : provençal n('(jr('.
D'où iioircii', dénifirer, nègre (par le portugais).
— Noir comme un corbeau, ...comme une taupe : très noir.
— 11 fait noii' comme dans un four, ...à se crever l'ceil en voulant
faire le signe de la croix.
— Le noir, qui est la couleur du. deuil, rappelle l'idée lugubre de
la nuit éternelle, exprime la tristesse et la douleur.
Noircir, déi'ivé du précédent.
— On n'est noirci que i)ar le cliarbon : On n'est sali que par la
lioue.
— Le bltinc o.nI la coideur de l'innocence et de la loyauté, comme
le noir est celle de la méclianceté et de la trahison.
— Ame noire, projets ténébreux.
— Dénigrer, noircir quelqu'un : Aiyi'r esl (Horace), c'est un
méchant.
Nifjra sonntia (Til)ulle). songes sinistres.
Alirni uifiununn i)iurere : imprimer à (pu^hpi'un une note
d'infann'e, comme au fer rouge.
Noise, du latin noxhi, méfait, querelle.
Charles IX a écrit à Ronsard :
Kt crois, si \\\ ne viens nii' Iroiucr à Aiiiiiolso,
(jiM'iiti'c nous ;iil\ ii'iuira une hicii .m'aiitic iioiso.
Noix, du latin nux : provençal V^orf'.
De là, en latin, nurjcp, l+agatcUes, jeux d'enfants.
A Rome, les nouveaux époux jetaient des noix aux enfants^
128 NOM
pour cxpriiiior qu'ils iciioiiriiiciil ;iii\ jeux |iii(''rils. (Cf. Vir.trile.
K<jl()<jun, (S.)
On le rappi'oclic de nofh/s, iuimkL pai'ro que a' friiil n-ssciiiblc ;'i
iin.nœud (?); cl de /«o(?(?/'e (?), miins parce que roiiihrt^ du noyer
est inalfaisatile.
— S'est dit autrefois noue: le clianiieiueiil de oue en oie se
retrouve dans nombre de mots. I.a fornu^ ixnie est restée dans
)t(ni(jal . et dans le provençal noufjuier. pour noyer.
Unira niir proilnsl, norri tillern, trrtin mors r.s'l.
ll'Vol.- ,1,- Sill.TIlr.)
(Une noiv est bonne, deux sont nuisibh'S, trois c'est la mort.)
— A la Sainte-Madeleine, les noiK sont pleines. (2:2 juillet.)
A la Saint-Laurent, on regarde dedans. (10 août.)
— Gîte à la noix. Amas de graisse qui se forme sous l'aile de la
volaille lorsqu'elle est grasse, et à certaine partie de l'épaule des
animaux de bouclierie. C'est ce que Pline appelle narleus pinfjul-
fudinis.
Nom, du latin nomen, pour gnomen, qui se retrouve dans
rognonien, et que Festus lire de noscimen (a noscendo) : ce qui
sert à connaître.
— Avoir un nom: être connu, célèbre. (Voy. inimorl alité.)
Il est aisé d'avoir un nom,
La chose ;i gi"uul"|i('iiie peut-on.
(l'mvt'i-lie e.s;)agnol. vvi<" siècle.)
— Ça n'a pas de nom : c'est extraordinaire, inouï.
« Eh liien ! sorcières mystérieuses, noirs fantômes de l'heure de
minuit, que faites-vous là ? — Une chose qui n'a pas de nom. »
(Shakspeare, Macbeth, IV, 1.)
— Les habitants des hôpitaux et des prisons sont désignés par
des numéros. En fait de noms, ces administrations ne connaissent
quelles noms denoml)re.
— Il est arrivé que des ofliciers de l'État-Givil se refusaient à
inscrire des noms inusités donnés par les parents à leurs enfants
nouveau-nés, sous prétexte que ces noms ne se trouvaient pas dans
le calendrier. Les prétentions des maires, en pareil cas, ne semblent
pas fondées, parce que tous les noms ne figurent pas au calendrier
et que les saints eux-mêmes, qui sont au nombre de plus de 40.000,
ne sauraient être contenus tous dans les 3G5 jours de l'année.
Ce n'est pas la loi, c'est l'usage qui restreint les noms à la liste du
calendrier: il eu résulte un défaut de variété qui nuit à la distinc-
NOM 129
tioii des hi(li\iiliis t'I tend |i;irl'uis à clL-m'ici' on (iiichiiic sorte des
noms i)ro[ires en ikuiis coiiiiiiiiiis.
Ainsi le nom de M;ii-iiis est donné, à Marseille, à |)res(iue tons les
jiairons: à l'appel de ce nom, tons les liahilants mfdes ré[iondent
comme nn seid homme. Ile joli nom, dont Tanam-ammeest ai/ii sur.
dérive de ceini de la i)atronne des marins, Marie, on se tronve le
mol (limer: mais on conviendra ([n'il y a trop de Maries et de
Marins.
L"lialiitnde a de même nudli[ilié les Pierres, les Jacques, etc.
Les noms, qni doivent désigner les individus, les distinguer,
devraient être aussi nombreux que ces individus eu.x-niènies.
Nous avons adopté depuis lon,ulenq)S un cci'tain nomlire de noms
tirés du prec, et (jui doivent à leur origine un son doux et Jiiélodienx.
Pourquoi ne nudtiplierait-on pas ces emprunts, comme Eulalie,
Kuplirasie, qui i)arle bien: Eugène, bien né ; Stéplianie, couronnée :
Adèle, cachée, modeste?
— Dans les premiers siècles de l'ère chrétienne, 'le nom de
baptême était seul en usage. Vers le ww siècle, on commença à y
joindre, pour les personnages illustres, quelques épitbétes qui les
désignaient spécialement : Charles Martel, Louis le Débonnaire,
Pépin le Bref, etc. Plus tard, les seigneurs féodaux ajoutèrent à leur
nom de baptême ceUd de leur terre.
Vers le xiii« siècle, le surnom devint général dans toutes les
/ classes. De personnel qu'il était d'al)ord, il iinit par s'appliquer à
toute la fanùlle, passa du père au Mis et se perpétua dans les géné-
rations suivantes.
Les surnoms ont des origines très diverses; on peut di\iser ces
noms de famille en cinq grandes catégories :
l"' Ceux d'industriels: Ghaussier, Pelletier, Taillandier, etc.
2° Ceux de classes agricoles : De la Fontaine, Delavigne, Des-
cbamps, Dumas, Dupré, Dupuy.
3*" Ceux des fonctions civiles : Bailly, Maire, Prév('>t.
4° Ceux qui désignent une qualité physique ou morale : Leblanc,
Le Canins^ Ledoux, Legrand, Leroux.
ri" Les noms de baptême: Gervais, Lucas, Martin.
Mais l'immense variété des noms propres, s'expli([uc par des
analogies avec :
L'âge : Laine, Lejeune, Levicnx, Vieil, Vieillard.
L'amitié : Aimé, Amant, Benticogllo, Lamy.
Les anges : Chérubin, multitude des sciences : Gabriel, la force
i:)0 xo.M
(le Dieu ; Michel, l;i piiissnnce de Dini : I{;i|ili;i("l. lesecoiirsdclJicii :
Séra()liin, eiiilir;iseineiil (r.'mioiir.
Les îinimiiiix : (^;ilirul, Cijciioii. Lmsiic, Lasniei'. Li'ImimiI'. Lcveaii.
IJon, Loiivel, Liiliiii (jeiiii»; loup), Moiilon.
Les armes: L'ahhé de ll-^pée, Sahraii.
Les arts et métiers: Barbier, Bouclier. Boiilaiiiici-. Hoyer, Chan-
delier Chai'pcnlicr, (lordoiinier, (^oin'doiiaii, Coutelier, Coiiliirier,
Fahre, Faiire, Favre, Fé\re, Foulon, Fournier, Lefehvre (de fabci\
forgeron), Lefèvre, Maçon ou Masson, Mercier, Pélissier, Sueur
[aulor, cordonnier), Tisserand, Tisseui", Tissier ou Teissier, Van-
nier, etc. — Fal)re le conventionnel avait ajouté à son nom celui
d'Églantine, iiarce (ju"il avait obtenu une églantine aux jeux Floraux.
Cette famille a pour devise: .1 Fahi^o Fabrl (arma) fahricunlur :
Les armes de Fabre sont forgées par Fabre ; parce qu'un de ses
ancêtres, qui était forgeron, avait obtenu des lettres de noblesse au
siège de Carcassonne par les Espagnols.
Les astres : Astruc, né sous un astre favorai>le (voy. malotru),
L'Étoile, Soleil.
Le bois : Chapuis (autrefois charpentier, de cJiapulser, travailler
au charronnage, dégrossir le bois ; provençal chapar), Dubreuil
(pour Dubois, car, dans le centre de la France, breuil signifie petit
])ois ; italien bror/llo, d'où de Broglie), Faye, Fayet, Lafaye (de faye,
nom du hêtre ; provençal fau), La Goudraye (heu planté de cou-
driers), Sully. — Joiguez-y Boquet, Boquillon, Bosc. Bosquet: Oubois,
Dubos, Houssaye (lieu planté de houx), etc.
Le caractère : Allègre, Bonhomme, Hilaire, Joyant (joyeux), Le
Doux, Malfilàtre (mauvais beau-fils), Marivaux (pour Mal-y-vaut :
c'est un nom fait à l'inverse de Gendebien ou de Bonhomme),
Maupertuis (mauvais trou), Mauvoisin, Sauvage.
La complexion : Fort, Gros, Maigre. Mole (pour moulé ?), Séné-
quier (gaucher), Yigouroux ou Vigoureux.
La couleur : Amaury (noir ?), Blanc, Blancard et Blanchard,
Blanchet, Leblond, Lerouge^ Leroux, Levert, Moreau ou Morel (noirj,
Rousseau, Roussel.
Les dignités" : Archer et Larcher ou Larchey, Aul)er (haut
baron?), Baron, Bedeau, Cardinal, Cliampion, Chapelain, Chapelle,
Chaptal (chef, capitaine), Châtelain, Ghevaher, Clerc, Duc, Dussei-
gneur, Labbé, Leclerc, Lecomte, Lécuyer, Lemoyne, Le Prieur,
Leprince, Leroy, Lévèque, Monge (moine). Prieur, Bornée, Romieu
(pèlerin qui va à Rome), Seigneur.
XUM 131
Les éléments : Ik'llt'l'oiil. Homicfoiit, ncsfonlaincs, l)(!sm;ircs, Des-
marots, Foii((ii«5 (foii), Kroidcfoiil ou Fonfréde, Lacliaiulcloiit (devenu
La (^lianx de Fond), Lafon, Lafoiit, Lafoiilaiiie. Larivirro.
La laniille : Commère, Coiisint', Fille. Fillenl, Frère, Lclils, Le-
gendre, Neveu, Parent, Père
Les Meurs : Marguerite, Uosc.
La force : Briseharre, lirisl'erl, Cassegrain, Lefort.
Les forets : Forestier, Sylvain, Sylva ndre, Sylvestre.
La forme: Beaucorps, Beaulils, Heausirc Belliomme, Boiteux,
Calvet, Lebeau, Lehel, Lel»orgne, Lecorps. Vilain.
Les fruits: Melon, Meslier (néflier), Olive, Olivier, Orange, Poirier,
Pommier.
Les habits: Bonnet, Chaperon, Collet, Soulier.
L'habitation : Cal)anel, Gastel, Château, Desmaisons, Desmazures,
Duchateau, Dumas, ïïausmann, Lafenètre, Laporte.
Les instruments : Arbalète, Bâton, Bourdon, Canon, Lachaise,
Martel, Mortier.
Les légum'es : (cbez les Romains) Cé[)ion, Cicéron, Fabius, Len-
lulus. Pison.
Les mois: Avril, Février, Janvier, Mars.
Les nations, provinces : Allemand, Angevin, Anglais, Berryer,
Breton. Bourgogne. Bourguignon, Champagne, Comtois, Danois,
Flamand, Fi-ançais, Lenormand, Lombard, Picard, Toulon, Toulouse.
Les oiseaux: Agasse, Ayasse, Chapon, Corneille, Faucon, Geai ou
Jay, Lacaille, Laigle, Lecoq, Merle, Pinson, Poule, Rossignol.
Les pâturages: Berger, Pasteur, Pastoret, Pastoureau.
Les pierres : Despériers. Lapierre, Peirol.
Les plantes : Buisson, Delorme, Desnoyers, Duchesne, Dufrêne,
Dupin, Foret, Fougère, Froment, La Saussaye, Xoyer, Pommier,
Rosier, Saussier.
Les poissons : Baleiiu>, (Chabot, l)aii[»liin, Languille.
Les ponts : Duponchel, Dupont, Poucet, et un grand nomiire de
noms de localités : Pont-Audemer, Pont-l'Évéque.
Les repas: Maupas (mauvais repas), Maurepas.
Les rochers: Larocbefoucauld, Laroque, Rochas, Roche, Roche-
fort, Roque, Roquebrune, Roquette, Roquevaire.
La stature: Legrand, Lenain, Lepetit.
La ser\itude: Gobert, Gombert, Jobard, Jol)erJ[, Jouiiert. — Les
Italiens disent Gloherti. Ce nom vient du bas-latin ./o/^a</o, esclave
appliqué à la culture du sol, comme Albert signitie esclave atïran-
J32 NOM
clii. (Diicn 11,^0^ Colliln-iii : L. LmtcIk^v. Didlonnairo des noms
d'/toitinies.)
La terre : La Coiidainiiie (en i-oiiiaii cIkiuiii, piv sciuiieiii'ial),
Des Essarls (de essart, terre défrichée).
Les vallons : Heaiivalloii, Honneval, Devaiix, l)ii\al, i!iilr('\aii\,
Lavallette, Lavallée. Lavallièi'e, Vallon, Yanclnsr.
La vertu : Chrétien, Clément, Gentil, llanii, Lesa.ue, Levuillanl.
Tj'S villes: IJoulo.une, Ciiartres, Paris,. Tonlon.
Au Moyen-Aiie le mol ri//rt, Icrme, maison des champs, se joi-
gnait souvent an nom du propriétaire pour désigner un lieu hahilé.
D'où le grand nombre de noms terminés on lul/c, et aussi en cour!,
(pii avait à [xmi pCv'S h? même; sens.
Les noms latins terminés en r/;<;/,s', tels que Cypi'ianiis, Claiidi;inu>.
(pii ont une voyelle avant celte désinence, donnent icn en français:
Cyprien, Claudien. S'ils ont une consonne, ils gardent un. L'usage
a beaucoup varié à cet égard.
, En Italie, on met l'article le, la, de\aiit les noms projjres des
personnes célèbres : le Tasse, le Dante, lAriosle, le Titien ; la
Grisi, etc.
En Russie, on ne dit guère Monsieur et Madame. En parlant à
quelqu'un, on l'appelle par son nom de baptême suivi du nom de
son père, en ajoutant wltcli pour les hommes, icna pour les femmes.
Ainsi Anastasie Petrowna, pour A. tille de Pierre ; loitch s'applique
à un noble;; of ou ef l\ un roturier. Alexis Alexiewitch, ou Alexis
Alexief: le premier est no1)le, le second est roturier. (Cf. P. Mérimée.)
Les noms anglais terminés en son, sont composés du nom de
famille et du mot son, qui signifie (ils. Thomson, Janson, Jackson :
lils de Thomas, de Jean, de Jacques.
Les noms bretons commencent en ker: les noms angevins finissent
en ière ; les normands en ville ; les gascons en ac ; les noms des
langues du Midi se terminent surtout par des voyelles, / ou o.
— Plus une chose est commune dans un pays, plus on y invente
de noms pour la désigner. Ainsi les Arabes ont prèâ de trois cents
noms pour désigner le lion.
SURNOMS DONNÉS A DES HOMMES OU A DES FEMMES :
Achille : le Bouillant. Aristide : le Juste.
Alexandre : le Grand. Arislote : le Prince des philo-
André del Sarto (sans erreur). sophes.
Antonin : le Pieux. Attila : le Fléau de Dieu.
NOM IXi
Bnltiiiol : lo [iliis savant des plai- Iluniriv : rilliistro avcuoie.
saiils et It' |tliis plaisant dos llii.ûo : le .liivénal français.
sa\ants. .1. .lanin : lo Pa.«anini do la proso.
Balzac : lo Grand rpislulior. Jésuites (le généi-al (h'^) : J'a|K'
Bai'i'as : lo Pourri. noir.
Bayai'd : loChevalior sans pcui'... .losopli : lo l^i(]i([ue.
Boaufort : le Boi dos liallos. Julien : TAposlat.
Bôranwr : rAnacréon moderne. Lalayettc : le Héros des deux
Bernis : Bahol la Bouquetière. mondes.
Bossuet : l'Ai.ulo de M(\iuk. Lamartine : rAmaiif d'Elvire.
Bouelicr : lo Peintre do la chair. Laurent : lo Ma.uniliquo.
(^alianel : le Souverain poncif. Littré : lo Pontife de ralliéismo.
(]alliorine II : la Sémiramis du (Youillot.)
Xord. Louis IX : le Saint.
(-ah in : lo Pa[»o do Genève. Louis XII : lo Pore du peuple.
Charlotte Corday : l'Anuo do Louis XIV : le Boi soleil.
Tassassinal. Louis XVI : le Boi martyr.
Cliangarnier : lo uéuéral Borua- Luciou : le Voltaire dcrantiquilé.
mott(\ Lucrèce : la Ciiaste.
Grillon : lo Bi'a\o. Maric-Antoinetlo: rAiilrichienno.
David : lo Boi proplioto. Masséna : lEnfanl chéri do la
Dolel. : le Libre penseur. vicloii'o.
Dupanloup : le Fougueux prélat. Messaline : l'Impudique.
Don Quichotte : lo Chevalier de Moïse : le Législateur des Hé-
la triste ligure. breux.
Lsope : rKsclave phrygien. Montaigne : lo Sceptique.
Fénolon : le Cygne do (Cambrai. Musset (Alfred) : M"" Byron.
Froissa rd : l'Hérodote du Moyen- / le Grand.
Ane. ^. , , , ! rOore de Corse.
n } 1 T ■< Aapoloon 1"^ ,, . . , ,
Ganelon : le I l'ailro. ^ j Bohespiei-rea che-
. le moderne Cincin- ( val.
Garibaldi nalus. i lo Pdit.
riléroïque ganache. Napoléon 111' Badinguol.
Gay(l)cl()hine): la dixième muse. • / rilommedoSodan.
F. de Guise : le Balafré. Napoléon (lo in-inco) : Plon-Plon.
Henri V : TEnfant du miracle. Nestor : lo Sage.
Henri IV :. lo Gi-and. Ney : le Brave des braves.
Henri VIII : lo Néron moderne. O'Connell : rAgilaleur.
llippocrale : le Père de la mé- Ollivier (Emile) : Cœur léger,
decine. Pascal : l'Aigle de Port-Boval.
13i
NOM
Périclrs : l'Olynipicn.
.Pedro (Doni) : lo .liistirior.
Philippe le Bel : le Faux iiioii-
iiiiyoïir.
Pliilipl)e de Champagne : le
Peintre janséniste.
le Prisonnier du Vatican.
Pic IX Pater (lo/oi'osus. (Veiiil-
' lot.)
i le Cygne de rAcadémie.
Platon] le Divin.
( l'Aheille athénienne.
Plutarquo : la Commère de l'an-
tiqnilé.
Poussin : le Peintre des gens
d'esprit.
Prnd'hon : le Corrége français.
Rahelais : l'Homère honlfon.
Racine : le Tendre.
Raphaël : le Divin.
Raspail : le Conspirateur en re-
traite.
René d'Anjou : le Ron.
Rétif de la Rretonne : le Jean-
Jacques des halles.
Ricord : le Marivaux de la mé-
decine.
Rohespierre : l'incorruptihle.
Rossini : le Cygne de Pesaro.
Rothschild : le Roi de la finance.
Rufini : le Premier des ténors.
Saint Panl : l'Apôtre des gen-
tils.
Saint Pierre : le Prince des
apôtres.
Scot (Jean) : le Docteui- suhtil.
Stacl (.M""^ dej : la Bacchante de
la Révolution.
Suzanne : la Chaste.
Tacite : le Platon de l'histoire.
Thérèse P" : la Sapho catho-
lique.
l Fontriquet(Soult.l8io.)
Thiers | le Lihérateur du lerri-
1 toire (1871).
Thomas d'A(piin : l'Ange de
l'École.
Titus : les Délices du genre hu-
main.
Trajan : Optimus (très hon).
Tudor (Marie) : la Sanglante.
Ulysse : le Prudent.
Vadé : le Démosthènes de l'en-
gueulement.
Yaugelas : le Législateur du heau
langage.
Vénus de Milo : Notre-Dame de
heauté.
Yicat : l'Attila des punaises.
Victor-Emmanuel : le Roi galant
homme.
Virgile : le Cygne deMantoue.
Voltaire : le Patriarche de Fer-
Wellington : le Vainqueur des
vainqueurs.
NOMS EMBLEMATIQUES :
Artémise {h reine) : Fidélité dans Démosthènes : Éloquence.
le veuvage. Eve : Curiosité.
Cicéron : Éloquence. Hercule : Force.
Crésus : Richesse. Joh : Patience ou pauvreté.
Curtius: Dévouement patriotique, Joseph : Chasteté.
NOM 135
Lotli : Iiiresle. (lr|>li(''o : la Miisiqnf.
.Matliiisalciii : la Loii-irvité. Pfiiulorc : la Ciii'iosité.
Messalinc : l'Iinpiitlii'ilé. lV'ii('lop(; : la Fitlélilé conjugale.
Moisc : la Loi. Saloinon : la Sagesse.
Xéi'on : la Cruauté. Sauisou : la Forx'c.
Nestor: la Longévité et la Sagesse. Sardanapale : la Débauche.
Oresic (•! Pyladc : l'Aïuilié. Soci-alo : la Sagesse.
KI'niIKiKS AJOl -ll-KS AIX NOMS DK PAYS, DE VILLKS, ETC. :
Acliéi'on : l'Avai'o.
Allemagne : le Saint-Euipire.
Angleterre : le Royaume-l'iii, la Vieille Angleterre {OUI Emjland),
la Perfide Alliion.
Arles : la Reine des Gaules. (Ausone, iv- siècle.)
l^i'est : le Pot de clianil)re de la P^rance.
Bretagne : la Vieille Armoriqiie.
Bruxelles : le Refugiuni peccatorum de l'Europe.
Cayenne : Coquinville.
Cuba : la Perle des Antilles.
Cliine : le Céleste-Empire, TEmpire du Milieu, le Royaume des
Fleurs.
Domingue (Saint-) : la Reine des Antilles.
Espagne : la Péninsule (ibérique).
France : la Fille aînée de l'Église.
Genève : la Rome protestante.
Irlande : la Pologne anglaise (18G7), la Verte Érin.
Italie : la Péninsule (italique).
Madère : la Fleur de l'Océan.
Marseille : la Cité phocéenne, la Reine de la Méditerranée.
Mer : le sein d"Anq)hitrite.
Mer Bleue : le golfe Persique a été appelé ainsi, d'un nom qui
conviendrait si bien à la Méditerranée, et qui lui a été donné
sans doute parce que pera signilie bleu.
Mer Noire : l'ancien Pont-Euxin a reçu ce nom à cause des
brouillai'ds qui rol)Scurcissent en hiver, ou plutôt à cause des
fréquents naufrages produits par ses tempêtes.
Mer Rouge : le golfe Arabique est appelé ainsi, à cause de ses
bancs de corail.
Mer Vermeille : se trouve entre le Mexique et la Californie.
Naples : l'Antique Parthénope.
m NOM
l'iilcriiic : l"lI(Miroiiso.
PiiiMs : la NoiiNcllc Atliriio?, la Moderne lialiyloiie. la (^aiiilajc du
monde cÎNilisr.
l'oloune : la France dn iS'oi'd.
Rome : la Ville des Césars, la Ville élernclle. la Ville aux se[il
collines, le Palrimoinc de saint Pierre, la Capilale de llnloléi-ancc.
la Niobé des Nations (Byron), la Vieille Dame (Garibaldi).
Russie : la Sainte.
Salamanque : la Mère des Vertus, des Sciences et des Arts.
Sicile : le Grenier de Rome.
Taïti : la Nouvelle Gythère.
Touraine : le Jardin de la France. (Rabelais. II, 0.)
Venise : la Reine, la Sirène de l'Adriatique, la Réinibliquc séré-
nissime.
KlMTHlVi'ES ET SOBRIQUETS DE PEUPLES :
AUemaiuls : LilTre-lofres (Rabelais), Tètes carrées.
' Américains du Nord : Yankees : du Sud : Frère Jonatban.
Anglais : John Bull (Jean Bœuf).
Bourguignons salés (voy.).
Français : Jacques Bdnlioinme, nom des paysans avant la Révo-
lution : Monsieur Prudhomme, le Ijonrgeois du xix'' siècle : Frencb-
Uog, cbien de Français, disent les Anglais.
Irlandais : Paddy, Paddyes.
Lorrain : Vilain, Traitre à Dieu et à son prochain.
Londres (babitants de) : Cockney.
Parisiens : Badauds de Paris. Rabelais dit : Crottés de Paris.
Romains : le Peuple-Roi.
PSEUDONYMES, NOMS DE CUERRE, S0P.RIQUETS :
Pendant longtemps, les gens de lettres, comme les acieurs.
cbangeaient leur nom en paraissant devant le public.
On employait de même des noms supposés pour désigner les
dames qu'on célébrait en vers : Iris, Amaryllis, Cbloris, etc.
De même, au tbéâtre, dans la crainte de rencontrer par basard
le nom d'une personne ([ui aurait pu s'en formaliser, on employait
une douzaine de noms, toujours les inèmes. Les amoureux s'appe-
laient : Valère, Éraste. Clitandre: les pères : Orgon. Géronte : les
amoureuse* : Isabelle, Léonore, Ébse ; les valets : Frontin, Masca-
rille, Lallècbe, etc.: les soubrettes : Nérine, Lisette.
Les Grecs et les Latins composaient les noms des personnages.
.\().M i:!7
MoliiTo h'S a imiU's (mi ap^jclanl un apolliicairc Piiruoii, un
nirclcciii Toiiirs (saignoiir) ou Dosfoiiandrès (tueur d'hoiunios).
riauto appi'lle un pai-asitt' Arlotro.uue (ron.uo-paiu), un vieillard
(:iiiriu»''S (i'raclu)ll(Mir). une aiiiouroiiso (llycèrc (douce), un parasite
(liiallion (uiàciioii-c). un anHiiirciix: l'ain|)hilc.
Manie, acteur d(> la lV)i-le-Saint-Marlin. se lit apiielcr Vaunoy.
Auiié signait 0. G. : Déadé. I). A. 1).
Boniface s'appela Saintine. du village ou il fut éle\é.
Crucli (Einnia) pi'it le nom de Coi'a l'earl.
Kroniage devint M. Laui'encin.
Pasquin prit le i)sendonynie de Valéry.
Rapenouille se III ap[>eler Lal'on.
Ross (Uosalie) s'appela M"""' Despréaux, etc. (Voy. dUeilly,
iJidionnali'f' des Pseudonyinrs, 18()7.)
— Le maréchal d'Ancre avait changé son nom deConcimi (fumier),
en celui de Concini (ha([uet... d'ancrc^f)
Un médecin de François ["''. qui s'apjielait Sans-Malice, traduisit
son nom en grec, et en lit Akakia.
Le W Canard, jésuite, latinisa le sien en 1'. Anat.
Le P. Gonière devint le P. ('onjire.
Platon se nommait Aristoclès; son sui-nom lui ^int de sa largeur
d'épaules et de sa force physique.
— Le nom de (jiierre est le' nom d'emprunt que prenaient les
soldats en s'enn'tlant. Dans la comédie de la Feimiie Capitaine,
on lit :
11 s'est l'ail iiinii [)afi'aiii \\o\\v m'appelei' I.a llosc
— Le sobriquet est une épithète satirique ou Iturlesque, qui
s'ajoute au nom. en rappelant quelque défaut physique ou moral de
rindi\idu.
Chez les Romains, le surnom ou sohriquet était [)ersonnel et se
transmettait rarement. Il servait aussi à désigner les individus
d'une même famille. Ainsi chez les Claudius, il y avait Claudius
Ciecus, Claudius Pulcher; chez les Scipions, Scipio Africaiius et
Scipio Nasica.
Dans les temps modernes, les sohriquets et surnoms ont été peu
usités chez les peuples du Nord, et furent mis en usage d'ahord |)ar
les Grecs et les Italiens. Ils sont dus à la llatteiie, ou à la malignité
qui en est très prodigue.
Il est peu de personnes, dans certaines classes, qui échappent ;'i
ce haptème hurlesque.
138 NOM
Le mot sohriijuci Nient, dil-nii, du liiliii siihruUciiliin), on de
l'espagnol sobra, snr (qni s';ippliqiie sur le nom).
Louis XV ajjpeliiil iMniilirroinont sos filles des noms sni\;inls : l;i
(grasse Victoire, Coclic; So[diie. Griiille; Louise, CliilTe ; (piant à
Adélaïde, qui s'appelait elle-même, dans nur lettre, madame
Torchon, elle avait été surnommée Loque.
Il parait (pu* ces solu'iquets par tro[) lias étaient à la mode à la
cour, car M""' de Pompadonr appelait le duc de Clianiues « mon
cochon » ; M""" d'Amhlemont, mon torchon, etc.
— Kn France, l'esprit national a déni.iiré ou i'idi( idisé ceitains
peui)les en leur attribuant tel défaut, tel vice. Ainsi :
Un Grec est celui qui triche au jeu; un Suisse, un portier: un
Arabe, un Juif est un usurier: un Bohémien, un va.uabôud ; un
Romain, un applaudisseur à gages; un Polonais, nn ivrogne; un
Savoyarii, un homme grossier; un Anglais est un créancier; un
Chinois, un homme laid ou bizarre ; un Gascon, un menteur.
NOMS BIZARRES ET RIDICULES, CHANdEMEIVT DE NOM :
On a vu que tous les noms propres qui signifient une qualité,
une manière d'être, un état, ne sont que des soliriquets consacrés
par l'usage.
Il en résulte parfois de grandes hizarreries. Vous vous appelez
Lehrun, quoique vwis soyez blond, parce qu'un de vos ancêtres était
brun. Tel se nomme Vaillant, qu'un lièvre ferait fuir. On peut s'appeler
Prosper, Félix, Fortuné, et être le plus malheureux des hommes.
De même on serait dans l'erreur, si l'on écrivait à Liège pour
avoir des bouchons, à Pau pour avoir des gants, à Mantes pour
avoir des pastilles.
M. Bul'fin a i)ul)lié (juillet 18G7) un dictionnaire des familles qui,
de 180G à 18G7, ont obtenu de la Chancellerie l'autorisation de
changer de nom. Voici quelques-uns de ces noms abandonnés :
Beljambe, Bellegueule, Braillard, Caca, Cantaloup, Chameau. Fau-
chier, Vachier, Cochon, Fromage, Guignon, Mioche, Lamort^ Pipelet,
Roquet ; sans parler de Louvel et de Papavoine.
Louis XI autorisa (1474) son valet de chambre 0. Le Mauvais à
prendre le nom d'Olivier le Daim.
Le hasard produit parfois des jeux de mots de mauvais goût, et
des noms « horrificques seulement oyant leur son», dont parle
Rabelais au prologue du livre IV.
Nomina sunt ipso pcnc (reinciuhi sono.
NOM i;)9
En iiovoniliro 18G8. la Chanrcllorio a autorisé un diacro nommé
Merda, à allont^er son nom on Mérida.
Le gendarme qui fracassa d'un coup de pistolet la mâchoire à
Roltospierre. s'appelait aussi Merda : à cette époque de raccoiii-cis-
sements, il raccourcit son nom en Méda.
lii nommé Merde sollicita la permission d'intervertir les syllahes
de son nom. Le Chancelier ne l'autorisa qu'à prendro la particule.
Racine, Roileaii, Corneille, on! illustré des noms assez ridicules.
— On a de tout temps altéré les noms de famille. [)ar intérêt ou
par Nanité. Molière s'est moqué de cette manie :
Qni'I aliiis (le (iiiittcr le vrai nom de sos pères,
l'oiir en vouloir prendre un hàli sur des cliimères!
De la piu]iarl des f,'eiis c'est la démangeaison ;
Et, sans \o\\s eml)rasser dans la comparaison.
Je sais un pajsan (pTon a|)pelait (Iros-I^ierre,
Qui, n'ayant [lour Idut liien (luun seul (piartier de terre,
Y fit tout à l'enlour faire un fossé lK)ur])eu\,
El de Monsieur de i'Isle on prit le nom pompeux.
{Ecole des Femmes.)
— La \anilé a aussi contriliué à changer le nom de certaines
professions. Les portiers sont devenus des concierges ; les apothi-
caires, des pharmaciens ; les liquoristes, des distillateurs ; les per-
ruquiers, des coill'eurs et des artistes capillaires. Quand ils sont à la
retraite, ils font imprimer sur leur carte : X..., coilTeur honoraire.
— Il y a des noms prédestinés ; le nom semhle avoir une influence
incontestahle sur la destinée de celui qui le porte. Un général, eût-il
tout le génie de Napoléon, ne sera jamais maréchal, s'il s'appelle
Ferrand.
Cependant Lelièvre défendit héroïquement Mazagran, et l'on ne
manque pas de dire que c'était un « fameux lapin ».
Tout le monde s'est extasié sur le caprice du sort qui a nommé
Gàtechair un célèhre maître d'armes: Lahure, un charcutier.
— Dans un déhat à la Chamhre, sur les liquides, en 1859, c'est
M. Pissard qui a pi'is la parole.
M'"" l^oitrine fut imurrice du premier enfant de Marie-Antoinette.
M. Léonidas est mort le 13 janvier 1868, passage des Thermopyles,
à Montrouge.
M. Pierrot, proviseur du lycée Louis-le-Grand, est mort le Mardi-
Gras.
En avril 1869, dans le xx^ arrondissement, M. Cerf épouse
M"e Biche ...Corne de cerf, ventre de biche !
140 XOM
A Toulon (jionl 18()0). W'" Sclialciii'. l'iio de ril('»|)il;il. î>. ;i (''|iou?(;
M. Fr;iis.
Dans lii nirino \illo, par son inariaiir à M. Fille, M"'- Danio est
devcniio M'"« Fille. Leur tille a é|innsé .M. .Mère, et la fille de ce
dernier niénapc, M"'' Mère, est morte instilntricc à Toulon, en 1872.
M. Legras épouse M"'" AUard (janvier 1870).
M. Ventre ('ponse M"'- Ti'ipe.
Kn mai 187i, M. (]ucu épouse M"'' Bcanpet : M. Lnmorl. .M"'=Cimc-
tièi-e.
— M. de (jnnoul. ministre de riusti'uclion puldirpie (1874). Ce
nom. sou^ eut interverti, par de mauvais plaisants, sij^iiilie en réalité,
montagne allongée en forme de coin {cuncu.s 7?ions). M. de Costoii
lui a consacré quelques lignes de son très curieux livre sur VOr/^/ne
des noms propres. Voici ce passage:
« Le nom actuel de la famille de Cumont, connu depuis longtemps,
sous celui de Montcuq (emprunté à un liourg du Lot. cité i)Our la
beauté des collines qui renlourent. et dont le nom, J/ons rufjnus
ou cnne/fs. en latin, veut dire : montagne faite en forme de coin,
longue coUine). n'a été obtenu qu'en intervertissant l'ordre des
syllabes. Il n'a rien d'inconvenant à l'oreille, grâce à celte méla-
morpliose; mais les dames qui babitent le bourg en question, sont
obligées d'employer des péripbrases souvent embarrassantes, quand
elles parlent des cbarmes de leur résidence. » (Larcliey, Diction-
naire des noms.)
— M. de Forbin-Janson, plaisantant Boileau sur son nom, disait
qu'il vaudrait mieux s'appeler Boivin. « Lt vous, Monseigneur, dit
Boileau, quel nom avez-vous cboisi l Janson ! J'aimerais mieux
m'appeler Jean farine. »
— Un domestique, au moment d'annoncer M. Cucbeval dans un
salon, se retourna en bésitant, et lui dit : « Mais, Monsieur, il y a
des dames. »
— Alexandre Dumas, pour se débarrasser des imporlunités des
époux Bombelle, écrivit sur leur album ces vers vengeurs :
i\iiu'(inni (Idiic ces gens-là .s";u)pel]ent-ils Boiiihellc ?
l.e ai;iri iirst pas bon, la femme ifesl pas belle!
— Le nom de Verdi, l'auteur du Trouvère, est formé des initiales
de Victor Emmanuel, Boi d'Italie. Devise de l'unité italienne, et qui
a ser\i de cri national à l'époque do la révolution d'Italie.
— Jides Simon, député de Paris en 18G0, s'appelait Suisse. Il a
depuis longtemps renoncé à ce nom de famille. Voici dans quelles
XOM 141
(iiTonslance?. Il venait déliv nommé snppléanl de V. Consin, au
Colk\ue lie France : « Mon ami. lui dit Consin, je vous ai fait inscrire
sous le nom de .Iules Simon, tout coni't. laisse/ donc de c(Ué cet
alïreux nom de Suisse. Kst-ce qu'on s'appelle Suisse, quand on vent
arri\er à (iiieliiiie chose ? »
— Xa|)oléon avait iu)mim'' Bigot ministre des cultes ; La unes,
colonel des (irisons; Gardanne, ,yoiiverneur des pa.aes ; (lochon.
préfet des Deu\-Nèthes; .lean Hon, préfet de Ma yeuce. Le général
Mouton était dans les cliamliellans !
— Henoisl est l'anagramme de Incn sot : il a fait benrl.
Claude a fait les diminutifs ridii'ules (lodiche, (iodiclion.
La malignité a criblé .Icdii d'épilliétes satiriques.
On a fait de Thomas le synonyme do pot de chambre, et irqqio-
crate est l'anagramme de jiot à c...
— Le changement de nom est très gênant, en ce qu'il dérange
des habitudes reçues depuis longtemps.
Ainsi le changement de nom des rues est funeste aux relations
commerciales, aux intérêts des négociants qui y sont étahlis.
— L'usage existe aussi en France et en Angleterre, qu'un litre
conféré abolit le nom de celui qui le reçoit, pour le remplacer par
celui qui est attaché au titre nouveau.
En août 187(). d'Israëli ayant été créé pair d'Angleterre, prit le
nom de Lord Beaconslield. Il en est de même de certains générauv
du Premier Enqjire, dont on a de la peine à retrouver le nom de
l'amille sous les titres de Duc de Padoue, de Yicence, de prince
d'Essling, de V\"agram, etc. (Voy. soldat heureux.)
NOMS DIMINUTIFS :
Anne a donné Annette, et, par addition de n, Xanette, Nanon.
Antoine fait Toine, Tony; Antoinette, Toinette, Toinon.
Robert, dont le diminutif est Hohertot, a faitBerthe, Bertliaut(?).
— Les Anglais aiment à contracter les noms de baptême: ainsi
Robert est devenu Bol) ; Alexandre, Sandy.
NOMS PROPRES DEVENUS COMMUNS APPELLATIFS :
Noms d' hommes. — Académie, de Académus : Amphitryon,
de l'époux d'Alcmêne; Août, d'Auguste; ArcliaUfil d'), nom d'inven-
teur ; Aristarquc. Barème, Batiste, Benêt, Brioche, Cadogan, Calepin,
Casimir, Colin, Cretonc, Dédale, Elzévir, Escobar, Espiègle, Fon-
tange, Gobehus, Guillemet, Guillotine, Herschell, Histrion, Hortensia,
142 NOM
Isabelle, .liiillet, Ladre, Lanihiii, l.iaid, Louis, Loveiare, Maradam,
Machiavélisiiio, Madeleine, Maillard, Mansarde, Marionnette, Mari-
vaudage, Mansolée. Mentor, Miiiotaure, Mont,u;ol(ière, Napoléon,
l'asquinade. Patelin, (jninqtiet, liodoniont. Séide, Sillionette, Simonie,
Sorljonne. SIenlor, Stras, Tonliiic Tiirliipiii, Vernir, Zoïle.
jYo//)s de paijti. — An.uora, \ille d'Asie. Mineni-e ; Ardoise f/l/v/ ('se
en Islande) ; Hrette, épée faite, en lirelaaiie ; (lalicot, étoile faite à
Calicnt ; Camaldules, champ donné pai- Maldule (?); Campanile, de
Campanie: Carmélite, du mont Carinel: Colchique; Emeri (d'un cap
d(; l'ile de Naxos) ; Kspa.unolette, Guinée, Iiidiuo, Laconique, Levan-
tin, Maroquin, Ripaille.
A'o/ns <le peiijden. — Assassin, nom d'un peuple de Syrie: Basque;
Bavaroise ; Brigand (des Bri;/nn/cs. peui)les d'Hihernie) ; Cravate
(de Croate) ; Galoche (de galltca, chaussure gauloise) ; Morion
(casque tuoi^e) ; Vandale.
Noms de tu/ /es, lieux, etc. — Atellane, comédie qui prit nais-
sance à Atella ; Babiller (de Babel) : Baïonnette, Bergamotte,
Berline, Bougie ; Brugnon, prune de Brignoles : Cachemire, Chalcé-
doine, Cerise (de Cérnsonte, en Asie Mineure) ; Cognac, Colophane,
Cordonnier (de Cordoue) ; Damas, Échalotte {(}LAscaIonJ; Faïence,
Florin, Futaine {ûeFus/ad, l'ancienne Memphis ?) : (ia7.e(de6^«rr/):
Gruyère, London, Magnétisme (de Magnésie); Malines, Moka, Mous-
quet, Mousseline (de Mossoul), Nankin, Parchemin (de Pergamé),
Pistolet (de Pistoie). Pouzzolane, Solécisme (de Soles), Sybarite (de
Si/bai-is), Tournois (de Tours), Tripoli.
A'oms d'Nes. — Canari (des Canaries), Candi (de l'île de Candie),
Craie (de Crète), Cuivre (de Kupros, Cypre). Curaçao, Phare (île
daP/iaros), Tabac (de Tabago), Topaze.
Noms d'animaux. — Aroude (queue d'), queue d'hirondelle;
Camelotte, étolïe en poil de chameau ; Chenet (de chien) : Édredon
(de Eider) : Hobereau, oiseau de proie ; Sépia {sèche), etc.
Nomade, du grec nomades, peuples pasteui's.
Nombre, du latin numerus: grec ne?no. partager.
— Euclide définit le nombre un assemblage de plusieurs unités.
Les nombres cardinaux sont : un, deux, dix, cent...
Les nombres ordinaux : premier (unième), second (deuxième),
troisième, centième...
Les nombres collectifs: huitaine, dizaine, centaine...
NON 143
I.cs iioiiild't's rt''(lii|ilicatil's : doiililc, triple, qii;Klrii[)l<'...
Les iKiiiihi'es distriliiilil's : un ,'i un, dcnv ;'i doux...
— Le ii()ii*il)ro d'or cxpi-init' nue année de cycle (^l'ei'de on période
de dix-neid" ans). (]es nomhres élaienl autrefois écrits en lettres
d'or dans les calendriers.
yinutero ilcux iinpdiv gautif.t.
(Vinr.ii.K, FtjL, Vni.)
(Les dieux aiment le nonilire impair.) Allusion à la croyance
po|)idaire des anciens sur les nombres impairs.
— Dans le systèmes de Pytliauore, Y unité représente; la divinité;
(k'ii.r, le mainais priuciix' : /?'o/s est le symbole de l'barmonie
parfaite.
Nombril, du latin lonbllicus : par soudure de l'article, on a eu
li))nbril, puis 17 s'est cbangé en n (dissimilation).
Cicati'ice arrondie, située au milieu de l'abdomen, et par on le
cordon ombilical s'attachait au fcelus, avant la naissance.
— Le peintre Santerre a représenté Adam et Eve sans nombril,
comme ayant été créés par Dieu.
Nominal, de nominalis.
— La valeur nominale des monnaies, des titres industriels ou
commerciaux, est celle qui résulte de l'émission primitive, et non
de leur valeur réelle, inlrinséquc et immédiatement réalisable.
Non, du latin non. qui est peut-être pour ne /tonio, comme
niilli/s pour ne iiniis.
— Aon est l'élixir du despotisme en trois lettres (?),
iXon est le verrou qu'une bonnéte tille met à son cœur...
— Les mots qui servent exclusivement à nier sont très rares.
Les Latins n'avaient ([u'iine néjiation (simple), tion, qui nous est
parvenue sans altération. (Jui, est de même la seule aftirmation.
— lYon, dans la langue romane, était le corrélatif d'oc, oui.
Qui sol dire oc, or r//r non. (ï. d'Albest.) Qui a coutume de dire
oui, maintenant dit non.
Mais la négation s'est très souvent renforcée pour répondre aux
nomltreuses exigences de la langue.
A'e. forme réduite, se renforce souvent au moyen de : aucun,
guère, jamais, mie, goutte, pas, personne, point, rien.
lYon (réduit à nen) et la conjonction négative /;/, ont formé nenni.
Nul vient de nullus, pour ne nllua (pas un).
— La négation s'exprime aussi, au moyen des [i;irlicules a. tirée
144 NON
(In isvor. f! in. \\i-vv du liiliii. lAciiipIcs : ;i[);illii('. ;i|);illii(jii('.
jii(-i'i'l;iiii, iii(';i|i;il)lr.
/// cliMiiutï S()ii\('iil [);ir ;issiiiiil;i(ioii sîi consonne (1('\ mil /. ///./>. /• ;
il!('l(i-('', iinpossililc, ininiobilf, irrésislililc
Il lu siippriiiii' (i('\;iiil ;/ : i-,iinor;iiit, i-.unoblc
— Lors(iii"()ii MMil ('\primrr un jiiLiciiK'nt. ;iflinii;ilif on nc'vLS'ilif.
on se sert liiihiliH'liiMiienl (rmic coiiip.iiMisoM. ;ilin de'iloniicr plus
de force à l'expression. Ainsi l'dn dil : liirlic coimMc (^-ésns: p;inM"C
comme Joh.
Ces compiiriiisons sonl snrlonl nondircnscs [lonc t'\pi-iiner la
négation, et, dans le langage éncrgiqne et lignré du peni)lt'. l;i
comi)araison négative trace nne image })0ur rendre l'idée [dns
sensible, et en qnehine sorte matérielle : Cela ne vant pas les
qnatre fers d'nn chien, ...pas un son, nn liard : je ne reculerai pas
d'une semelle, d'une ligne.
Dans ce cas, l'objet est présenté coinme inférienr à un antre, de
très peu de valeur, auquel on le compare.
Les Romains ; faisaient aussi usage de ces façons de parler; on
les rencontre surtout en grand nombre chez leurs poètes comiques,
dont le style reproduit le langage populaire.
Floccus, un flocon de laine : pisus, un pois : cireux, la pellicule
qui sépare les grains de la grenade (de là : chique, chiqnet) : je
n'en donnerais pas une chique : plmna, plnme ; as, sou : iriobo/us.
triobole; trioboli Jiomo (Planter un homme de rien ; /tiluni, petit
point noir de la fève (d'où niliilum, niliil, rien).
Nous disons : une vétille (voy.), de y/^^a, bandelette : un brin de
fil ; rien du tout : rien de rien. Mais l'infîniment petit, le minimiun
des minimorum, c'est encore une partie du tout.
— On a apprécié une valeur négative en la comparant à une
ombre, à une idée, à un soupçon de chose.
On a dit : Donnez-moi un soupçon de \in, une larme, une goutte,
m\ tout petit peu.
— Dans les auteurs du Moyeu-Age, les termes de com[(araison
sont : une noix, une fève, une alizé (fruit de l'alizier). une châ-
taigne, un gland, un pois, une pelure do pomme, une prune.
On dit encore : Ce n'est pas pour des prunes.
Tolz non los preze nn (/hind.
(C/ironlque d'Arlex.)
(Je ne les prise tous un gland.)
NON lio
Vn lioiiton. lin doiiicr, iino niaillo, iiiio lioi-iiiclc (pdilc cofiiiillc),
un liloi'liii. un pas, im [»oiiil. un arain.
Ceste-cy n'est inie la mienne : je n'en voiiK L-rain. ( Uahelais.)
Los rarhapterez-vous? — Grain. (Id.)
l'n navet, nn zeste, un eoupeau d'oignon.
Aujourd'liiii. nos termes de comparaison sont dus souvent à la
fantaisie on au \oraliulaii"e de l'argot.
Nous disons faniilièrement. pour expliquer la négation : des
lunels 1 des nèllcs ! du llau ! Hùtc !
Les gens très grossiers euiploieut le mot de Gamhronno. dont
Rabelais a fait un frécpient usage, ainsi que de bren.
Nos troupiers ont rapporté d'Algérie macach.
— .Xe vient de /ter. et non pas de non.
A'e, devant une voyelle, prenait la forme euphouiiiue nen.
(En réalité, nec a donné ni: ne et nen sont des formes alTaihlies
de non.)
11 lira ;i(l jdic t'ii ce iniiiitl.
(MAlilK HE FliA.\i:K.)
iVe et nen étaient aussi conjonction, dans le cas où nous
employons 7ii, et où les Latins employaient nec.
Ni'H aiili'c L-liiisc kl' vaille lui sont lienier.
((JKnAtlD DE VlANK.)
— .Xenni. ni. Ou a dit neni/ (ou nonUj, composé de ?ien et de //.
comme aï/ de /toc illud. Xenil de\int nenni, comme oU devint oui.
— Au! a remplacé le vieux mot nulni.
Sans niilui avoir inercy. (Rai)elais. IV. 43.) Pitié de personne.
Et se nus ne mile (Icniamle
Comment ge voil (jue cilz rommans
Soit appelez, que ge commans,
(",e est // lidiniiiitn^ de la Rose,
Où larl d'amors est tote enclose.
(li. I)K IjiHlil^.)
{.Xu/ n'a pas remplacé nu/iii : nu.'^ était le cas sujet, nul le cas
direct, nului le cas indirect. Coninie autrui pour autre; celui
pour cil.)
— Aucun : jadis aùjues, (luque, alques un.
Lorsqu'il n'est pas suivi de la négation, aucun affirme, comme
/iliquis eu latin. Aucuns ont dit : quelques-uns ont dit. D'aucuns
disent.
— Guère, Jamais, sont aussi des mots affirma tifs (voy.) qui ne
10
146 XOX
peuvent servir ;'i nier (jh'cii Ncrdi (riiiit' ii(''L',iti(iii ('\|(i-iiii(''e uu
sous-cnlcndue.
Il ne t;ir'der;i ;iiit''i"(\ c'csl-à-dir-c pys Ikmiicoiii). c esl-ii-dirc peu.
Gurre \U'\\\, selon J.-J. Ani|)(''i'o, du ludcsquc f/ar, f/nro, hf.'iu-
coiip. Il ;iv;iit j;idis le sens de hraiicfni/) : inijourd'IiNi c'est le
contraires (;'i causcï des la néualion sous-cntciiduc).
Le sens primitif est resté dans fpKdques locutions : Il a disparu,
sans qu'on sache liuère ce qu'il est devenu.
— Nayiirre est pour : il n'y a auère de temps, ou n'a Lnière.
Le provençal a .uardé le sens ancien : A"aï pas gaïre : je n'en ai
pas beaucoui).
— Goutte, mie ! La terme de comparaison niinima a été lonçr-
temps une miette de pain. Il n'y en a mie.
Ouaiid () fait, mica no s'en ro|K'iil.
[forme tic IM.c.E.)
(Quand il le fait, il ne s'en repent mie.)
Il est tombé en désuétude, et on y a substitué pas et point.
Mais tous ces mots ne deviennent négatifs que par l'adjonction
de la négation ne, la seule que possède notre langue.
Goutte s'emploie encore dans la locution : Je n'y vois goutte ; je
n'entends goutte à cette atïaire.
— Pas, point. Pas [passas) a dû être employé pour exprimer
une négation avec un verbe signifiant mouvement.
lYoH pas do'^ jors ni Ires.
(P. D'AuVEIiCNE.)
(Xi deux jours ni trois.)
On a pu dire : N'approcbez d'un pas; puis n'approchez pas(?)
Comme on dit : Je ne comprends mot à ce qu'il dit.
Pas a fait son chemin, et de sou acception restreinte à l'idée de
mouvement, il en est arrivé à servir comme explétif d'une manière
générale dans toutes les propositions négatives.
Pas remplace quelquefois néant ; pas moins, pour néanmoins.
On me l'a défendu, pas moins je le ferai.
Quelquefois, pour donner plus de force à un refus, à une déné-
gation, on met non pas, que non pas.
Feriez-vous cela ? Non pas ! Irez-vous chez un tel ? Oh ! que non
pas ! C'est-à-dire : Je m'en garderai bien.
— Point (de punctuinj est la trace d'une piqûre ; il désigne
l'étendue la plus restreinte, la plus petite qu'il soit possible de
M ).\ 1 M
concevoir: une partie atomique d'une surface. Il en est venu à
servir d'explétif, comme y>^/.s-, pour accompagner la négation ?t<.'.
— Personne, dn latin persona, acteur dramali(pM\ iiiasipu'. a
[iris ensuite la signilication de homme, iiKli\idu.
Joint à la négation ne, il prend la valeur du lalin lunno, pour
ne honio. En provençal <jes, pour yens; : et deyun, nec unus.
Ainsi employé, pei'soiinc est masculin, tandis qu'il est féminin
dans son emploi comme substantif.
On dit : Votre sœur est une personne très heureuse ; mais : Per-
sonne n'est plus heureux (pie votre sœur.
La négation est souvent sous-enteudue avec personne, comme
avec la plupart de ces mots: cela se produit surtout dans les
réponses. Qui demandez-vous? Personne; c'est-à-dire : .le ne
demande personne.
.l//*e remplace personne d-.m?, l'expression : Je ne vois âme qui vive.
— Rien, du latin rem, chose.
Aftirmatif comme pas, point, personne, il ne devient négatif
qu'autant qu'il est accompagné de ne.
FoiU'(|Uoi consonliez-VDUS à rien prendre de lui 1
(.Moi.iKRR, TartufJ'e.)
Ouelquefois même il est négatif avec ellipse de ne.
La nuit à bien dormir ol le jour à rien îaire.
(lîOILEAr.)
J. du Bellay avait dit avant Boileaii :
Et qui souvent à rien faire
Sont les plus embesognés.
Et Rabelais (Y. 15): Nous ne faisons que rêvasser, que rien faire.
Il est des phrases où l'on peut remplacer rien par chose : Il n'est
chose que je ne fasse pour vous plaire. Mais, si l'on demande à
(piebpi'nn ce qu'il fait, et qu'il réponde : rien: c'est une réponse
elliptique, qui équivaut à : je ne fais rien.
De même que chose est employé, dans celle locution, au sens
négatif (par elli[ise), on emploie quelquefois rien comme négatif :
(]ar, dans le siècle où nous sommes.
On ne donne rien pour rien.
(.Moi,;i'.iii:, Ecole de.'! l'emmea. H, 2 )
Je ne suis pas un homme à vouloir rien pour rien.
[1(1.. IV, 4.)
C'est-à-dire : on ne donne pas quelque cbose pour nulle chose ;
je ne suis pas homme à vouloir quelque chose pour nulle chose.
ri 8 IVOT
Nonce, du hiliii niatfins, ("nvoyé.
Aiiil);iss;i(l('iii' du pape au près des soiiNcniiiis, pour représenter
la [tiiissance tein[iorelle du Sainl-Siè.ue; les léjials à hilare sont
eliarfiés des fondions si)iriluelles dans les pays ratlioli([U('S.
Nonchalant, de non, cfilenleni, ancien \erl)C rhaUtlr.
(Icliii (pii n'a souci de rien, que tout laisse froid.
Nonne, de nonna, lalin du Moyen-Age.
Désignait au M(nen-A<ie une religieuse d'un âge avancé.
Terme respectueux, équivalant à grand'nière.
Noria, mot espagnol, tiré de l'arabe na-ourat, roue hydrauli(|ue
à irrigation ; de «a«r, lancer, faire jaillir.
Normand, du germanique norlh nuinn, homme du Nord.
— Réconciliation normande : peu sincère.
Répondre en Normand : sans dire ni oui, ni non ; réponse évasive.
Parole de Normand. Un président de la cour de Rouen haranguait
Henri IV. Il resta court. Un courtisan dit au roi : « Sire, c'est un
Normand, il manque de parole. »
— La coutume normande accordait un délai de \ingt-quatre
heures pour ratifier ou infirmer une convention, ce qui s'cxpi'imait
légalement par les inots : avoir son dit et son dédit. C'est là peut-
être l'origine de la réputation de duplicité faite aux hahitants d'une
province qui n'est pas moins honorable que les autres.
Nostalgie, du grec nosfos. retour, a/(/os, mal, ennui.
Mal du jiays, névrose cérébrale qui est causée par un violent
désir de revoir du pays.
La nostalgie n'atteint généralement que les habitants de pays
ingrats. Les Lapons, les Groëulandais quittent peu le leur ; tandis
qu'on rencontre partout des Anglais, des Français, des Italiens, qui
ont quitté leur pays.
— La nostalgie de la boue. (E. Augier.)
Notaire, du latin notarius. Provençal notari.
Synonyme : monsieur mal plaqué (argot).
Vient des notes tironnieunes qui furent longtemps en usage pour
écrire les minutes des actes pul)lics. Ces notes étaient une écriture
abrégée, sorte de sténographie des Romains, inventée par Tiron,
aiïranchi de Cicéron, et dont la clef n'a pas été retrouvée par les
philologues.
NOIT 149
— (ycsl ("(Hiimo si le ut'tlaire y Mv;ii( p;issé : e'osi clu^so ;issiirée.
— Dnns le Moi/c/i t/c /irrrroiir {r\\. IW'iiii iiimitIuiiuI. voulant
l'iro aux dé[)eiis de deux notaires qu'il avait fait appeler, dit à sa
servante de passeï' devant eux avce des pois, parce (]u'il a\ait
depuis huiLileiups en\ie de nian.iier des pois passés dexanl notaire
— l'u notaiiv ayant sur[u-is sa l'euiuu' aver un amant, (•elui-ri
a\oua. iH' pouvant niei' un fait |)assé devant notaire.
— l/arucut n"étal>lit de rinéiialité chez les lioninies ((ue [)ar
devant iiotaii'e (0-
Nougat, de l'espaLinol nogado.
Gâteau l'ait do noix ou d'amandes.
— Le noyer se dit en pi'ovençal iioiiynicr.
Nourrir, di[ latin nulrire.
('orps liieu nourri vaut mieux (pu' lioiirse hien rem[)lic.
BourmiiLinons. Ixnaiix de soie, ventre de velours (qui préfèrent
la l)(Hine chère aux. beaux vêtements).
\j\\ helle caue ne nourrit pas l'oiseau.
Nouveau, du lalin /loivl/it.s. diminutif de noms.
Au nouveau tout est beau, ou : tout nouveau, tout beau. C'est le
fjvnîa nocilds des Latins.
On dit aussi : Balai neuf balaie bien, dans le mémo sous que :
ferveur de novice.
il n'y a rien de nouveau sous le soleil : il n'y a (pie des recom-
mencements. Toute chose a été faite à l'imitation d'une autre; Dieu
lui-même a fait riiomme à son image.
Oroire tout découvrir est une erreur ijrofonde :
C\-st prendre IMiorizon pour les bornes du monde.
(Li;moim:.)
Xulluin e-sl JKin iliduin, qnod non diclani sil j^rius.
{Ti.RKycv..}
(On no peut rien dire qui n'ait été dit déjà.)
Il serait plus juste de dire que tout est pensé, mais que tout n'est
pas dit.
La cojubiuaisou des mots est infinie ; c'est un art créateur que
relui de les assortir, de les embellir l'un par l'autre, de donner
ainsi à la pensée une forme nouvelle.
L'art consisterait à faire pour rintelligence ce que Guvier a fait
pour l'histoire naturelle : créer la paléontologie des idées par une
étude ap[)rofondie des monuments littéraires.
irio xoY
Nouveautés (iiiin-cliaiid ilej.
— Le. palroii s'appelle /o.sr^)// ; les roinmis (appreiilis au pair)
sont les his/ofs. les roi/ffions: les ronimis ctalaj'isles sont des
pe/i(/i(!'! : les coinniis [jriiicipaux sont les r/icfs do, rrn/on.
Va\ liloc, les coniniis. s'appellciil riiUrolx. (le nom Iciii' l'ii! appli-
qué à la suite de la repi'ésentatiou d'une «dUKMJie de Scrihe : le
C()mhal(l('!< Moiilaf/ncs (1817), dont le pi'incipal personnage est
appelé ('alicol.
— La niarcliandise démodée se {\\[ fni(j<; : ro^sifjnol n'est plus
guère en usage. Fn/t/c qs[ une ironie: ear ce mot. d'argol signilie
gain, frnil : cl il l'aiil ici le prendre [tar anti[)lirase. Ce sont les
frnges qui i-apportent le plus de f/iiclte au\ commis, car la gnelle
est une prime qui leur est accordée sur la vente des marchandises
démodées ou déiraîcliies.
Les proposillons sont des marchandises étalées à l'extérieur,
avec prix marqués en cliillres usuels, et qui entrent pour un quart
dans les alTaires des plus grandes maisons.
— Deux sur dix, prononce à haute voix, signilie : tixez vos deux
yeux sur les dix doigts ; c'est-à-dire : attention à une cliente
suspecte.
— Marchand de nouveautés signifiait autrefois liltraire.
Nouvelle, adjectif pris suhstantivement au féminin.
Synonymes : canard, fausse nouvelle : racontar, nouvelle de
journaux.
— Pas de nouvelles, bonnes nouvelles. C'est un proverlie qu'on
aime à citer dans l'incertitude où l'on 'se trouve parfois sur le sort
de ceux qu'on aime. Il se rattache à un autre dicton, que les mau-
vaises nouvelles arri\ent toujours promptement.
Noyer, du latin nccatw tuer: provençal, nefjar.
Spécialeme^it faire mourir dans l'eau.
Feil nc<]<ir son nehul Arias.
(B. DK BollN.)
(Fit noyer son neveu Art us.)
n si. iipfjo en alfja. (Liv. de Sidrac.) 11 se noie en eau.
Je ne doute pas de votre adresse : mais ce sont les bons nageurs
qui se noient.
Vous n'êtes pas indulgent pour lui : il vous aime tant, qu'il se
jetterait à l'eau pour vous sauver. — Que voulez-vous? Je ne me
noie jamais, et il m'ennuie toujours.
ME m
— St> noyoi' (l;iiis \o vin. Ihnni' oni'hrint lia jioriJiula la raco e
son oiilcnddini'ii, c rs ai/ss/ ronid najal. l/lioiiiiiic enivré a perdu
sa raison et son t'iiUMKk'incnl. et est coninic noyr. (Viros et
Vertus.)
— So noyer : sonilir/r. Kxprossioii empruntée;'! la Mytholnuie (?):
Aller dans la nuit éternelle, dans le royannie des ombres.
Nu, du latin uiidus : provençal ned. D'où dénndé, dénué.
Synonymes : dans le costume adamique ; in natuvnUhus, décol-
letée iiis(praii\ jalons : sans feuille devi.une: vêtue de salin naturel.
Nuage, déi'i\é de nue, nutjes : d'oi'i aussi nunnre.
— Les nnaues. par leurs formes diverses, leur mobilité, les lian-
teurs dilTérentes auxquelles ils passent dans ratmosplière, varient à
tout instant l'aspect du paysa.ue. Ce sont des Protées dont il est
diflicile di' déci'ii-e les métamoi'pboses.
Les savants ont essayé néanmoins déclasser métbodiquementces
va.uabondes vajieurs, et de donner des noms aux ditl'érents états
sous lesquels elles se présentent. Ils distinouent les cirrus, nuages
alTectant la fm-me d'un [tinceau de poils onde clieveux crépus (voy.) ;
les cumulus (voy.) qui ressemblent à des montagnes ; les stratus,
bandes liorizontales qui se montrent au coucher du soleil; les
cirro-cumulus, petits nuages arrondis, appelés aussi moutonnés.
En mars 1873. M. Poov a proposé à l'Académie des Sciences une
nouvelle classitication, plus intelligible pour le public: Nuage lllé.
ou stratifié, ou pommelé : nuage en couches ; nuage montagneux;
nuage p!u\ieux ou venteux.
— Les gros nuages ne s'élèvent pas au-dessus de 2.500 uuMres,
tandis qiu3 les cirrus atteignent des altitudes de 12.0t)0.
Nue, du latin nuljes.
— Tondier des nues : être très étonné.
Je suis fout éfiaiiliir, et je lomlic des nues.
(MuuiijtF, Tar/ii/l'e.)
— 11 est tomhé des nues : personne ne le connaît.
(',(('1(1 mii.sas.
(TinuM.x.l
(Il est tond lé du ciel.)
— On a fait le quatrain suivant au sujet de la navigation aérienne :
Dans les cieux il est glorieux
D'ouvrir des routes inconnues :
Il est l)eau de nionler aux deux,
Mais triste de loniber des nues.
152 NUI
— Porlci' ;iii\ mif'S : In aslra lollero. {(avvtqw.)
Ail siiln-ii fcnr.
(V'im.ii.K.)
Nuit, (lu l.iliii noclcni, de nox.
L;i iXiiil, lillr (lu (llinos, iiirrc de l;i l.iiiiiirfc cl du Jour, qu'elle eut
de riù'èlie. i'ille eiiucndi'.i seule les l*;ir(jues, les Soiiiics, la Discoi'de,
la Mort, Mojiius et la Kraude.
— On écrivait autrefois iiulcl. où la lettre r raitpelle le radical
latin; on écrivjiit de même Jiuicl, faicl : mais le r supprimé dans
ces mots est resté dans leurs dérivés : noctuime, octave, faction.
C'est un exemple des caprices de la langue dans l'ortliograplie de
certains mots.
(Il y a ici à faire la distinction entre les mots savants, calqués
sur le latin, et les mots populaires, dans lesquels certaines lettres
tombent toujours. Le c en question est déjà représenté par l'inter-
vention de XL)
— Les Gaulois et les Francs comptaient par nuits, et non par
jours, parce que, dit César, ils se prétendaient nés d'un dieu de la
nuit.
Tacite en dit autant des Germains : « Ils ne comptent pas comme
nous par jours, mais par nuits. »
Il reste des traces de cet usage antique dans certaines campagnes,
où l'on dit anuit, pour aiijourd'liui. (Mais on trouve les formes ^/?r><Y
et enhuyt: ce qui supposerait en huL in hoclie?)
— Pausanias parle d'une statue de la Nuit qui tenait dans ses
bras ses deux enfants : le Sommeil et la Mort.
— Nuit blanclie : passée sans dormir.
L'écuyer qui de\ ait être reçu cbevalier, veillait la nuit qui précé-
dait sa réception auprès de ses armes, et revêtu de blanc, comme
les néophytes de l'Église. Cette nuit s'appelait la veillée des armes
et aussi nuit blanche.
Qu'uni' nuit parait longue à la dniilciu' ([ui \eiliL' !
« Les insomnies ! Vous ne \ ous tigurez pas combien est longue et
triste une nuit qu'un malheureux passe tout entière sans fermer
l'u'il, l'esprit fixé sur une situation "affreuse et sur un avenir sans
espoir..» (X. de Maistre, Le Lépreux.)
— La nuit tous les chats sont gris. (Yoy. entre chien et loup.)
La nuit, Hélène n'a aucun avantage sur Hécube. (H. Estienue.)
— Il ne faut pas se marier seulement pour la beauté de la femme.
(IHK 153
IMiil.irquc ' Ira il é des jjrccvjjfcs (/n .yari<i;/rj, rncoiilc (iiriiue
Itellc femme que Philippe importunait de son amour, lui dit que la
hcaulé qu'il admirait eu clic s"é\anouissait la uiiil et (pie. les llam-
lieaux éleints, la i)liis lielle femme du monde ne dill'éfail pas de la
[ilus laide. (Voy. Conscif.)
— I.a nuit porle conseil. (Voy. ro/tsf//.)
Nymphe, du .erec iiijniphr, jeune lilh^
l.)i\iuilé des eaux, des bois ou des montagnes.
0
0! (les) de Noël, nom pai- lequel on désigne les antiennes qui se
chantent pendant l'Avent. [)arce qu'elles commencent toutes par
l'exclamation O! O Af/oiuiï, etc.
Les lienoitz sainctz 0 de Noël. (Rabelais, IV, lo.)
AuliTfois, pendant la neuvaine qui précède Noël, on avait coutume
de chanter en cha^ur ces antiennes. On exposait aussi aux regards
des fidèles un grand carton sur lequel était peint un (> majuscule en
or et en couleurs, illustré d'ornements.
On a vu dans ces 0 de Noël remhlème représcnlant la porte par
huiiH'lle entra dans le monde le (ils de Dieu fait homme. C'est plut(it
remhlème de l'œuf orphique, de l'œuf dont le monde est sorti, de
l'oeuf de Léda, de l'œuf qu'on donnait pour étrennes à Noël, à
l'époque où cette fête était le comnuîucement de l'année, et qu'on
ne donne à Pâques que depuis qu'on a daté de l'incarnation. Tout a
commencé ah ovo, selon les anciens. (Johanneau.)
— Plus rond que YO de Giotto. (Voy. rond.)
Obédience, de obcdienlia (ohcdire, obéir).
Soumission, obéissance que les religieux doivent à leur supérieur.
— Lettre d'obédience : ordre donné à un religieux ou à une reli-
gieuse d'exercer l'enseignement.
Obéir, du latin obedire (oh audirei).
— Entendre, c'est obéir. (Maxime arabe.)
— Obéir comme un soldat prussien. C'est l'obéissance passive,
érigée en principe i)ar saint Ignace, dans la Conq)agnie de Jésus,
dont la iormule (isi OOserj uiu/n jjerinde ac cadaccr. Soyez obéissant
comme un cadavre.
m OBO
C'est ;iiissi l;i dinisc de l;i (liscipliiic iiiilil;iirT liicn ciiIcikIiio.
S;iiiil l'aiil ;iii coiiliiiiic. ;i dil : 0/jsc(/n/i///i lysfriim .sit rafiono-
bilc. One noIic olK-issiiiuc soit siiliordoiinéc ;'i l;i riiisoii.
(hnnid ini})cri(> cl ohsfujiiio cotislcnit. (Tiicito.) Tout consiste
dans le conimandeiiient et dans l'ohéissance.
Il faut avoir ol)éi ])oiir savoir rominaiider. (Solon.)
Obélisque, du iiv^'v ofjt'/t'.s/.os (de ohi-los, ai.miille).
L'ulȎlis(]iie a la l'orme d'une pyramide, mais il est d'nne seule
Itièce. tandis (}ue les pyramides sont foi-mées d'un grand nombre de
pieri'es li(''es par le mortier. (Voy. ptjrdiuUlc.]
Obésité, du latin obcsus (du ob edere), eml)on[)oint du à un
excès do nourriture.
— L'obésité nuit à la force, en aumuentant le poids de la masse
à mouvoir, sans au.unienter la puissance motrice. Elle nuit à la
Ix^iuté. en détruisant l'iiarmonie des proportions bumaines. attendu
que toutes les parties ne grossissent pas d'une manière égale. Elle
nuit aussi à la santé, en rendant diflicilesles exercicesgymnastiques.
On coml)at l'obésité par la sobriété, l'exercice, les veilles, les
purgatifs, les sudorifiques.
Objet, du latin objectinu, mis devant les yeux.
Tout ce qui se présente à la vue.
— Dans le style poétique, on a souvent appelé la femme : objet
charmant ; l'objet de ma flamme, ...de mes vœux. Mais cette expres-
sion prétentieuse est tombée depuis dans le langage trivial, et un
homme du peuple appelle sa bonne amie : son objet.
Objurgation, du latin objargare [àc Jiirgiufn. querelle),
llépriuuinde \\\ù ; mouvement oratoire animé, pour adresser des
reproches violents.
Oblat, du latin oblatus, offert.
Nom donné aux enfants otTerts par leurs parents au service des
autels. Cet usage est très ancien. Suger, abl)é de Saint-Denis, avait
été élevé dans ce monastère comme oblat.
Un donnait aussi ce nom aux frères lais, aux soldats invalides,
qui étaient nourris dans les monastères où ils étaient chargés des
services inférieurs.
Obole, du grec obolos, petite barre.
Les oboles portaient l'empreinte d'un obéhsque ; ou plutôt on se
servait d'abord de petites barres d'airain, en guise de monnaie.
ORS loo
Pclilo inoiiiiaic f[iii ;i\;iil l;i iin'iiir \;il(^itr que la inaillc. dciiii-
deiiier.
Poids el monnaie des Grei'S, le sixième de la draclinio.
Au xvii« sièclt'. l'obole n'était plus qu'une monnaie de compte,
conservant sa Nalciir nominale d'un demi-denier. (Voy. maille,
(jazclte.)
\a\ itil.r. autre uu)unaie de compte, était encore une \aleur
moindre que l'obole (M que la maille, i)uisqu'elle ne valait qu'un
(piart de denier. 11 en fallait quarante-liuit pour faire un sou.
— L'obole de Hélisaire : l'obole de la veuve.
L'obole devient médaille en tombant des mains d'une nation.
(Lamartine, souscr'iptiou nalionale en I808.)
Obscène, du latin oh, cœnu/n. bourbier ; de mauvais augure.
Synonymes: style décolleté, sans feuillede vigne ; les immondices
du langage; nmt ordurier ; un de ces mots que l'on traduit, dans
la langue écrite, par des initiales et des points.
A'uda cerba. (Pline.) D'où : voiler, gazer.
Maculantia verba (Gellius) : mots salissants.
Buhorc diijnd rerlm.
(Ovide.)
Paroles qui font l'ougii*.
Lipse dit que les ouvrages de Pétrone sont ^^luvi unpurifas :
pnra à cause du style, ùnpiiritas à cause des obscénités.
— On a reprocbé à Suétone, l'iiistorien des douze Césars, d'avoir
été aussi libre dans ses récits, que les empereurs dont il écrit
l'iiistoire l'avaient été dans leurs actions.
— X..., après une conversation obscène, dit : « Maintenant lu'ù-
loiis du sucre ! »
— L'Académie met le mot cul dans son Dictionnaire, parce qu'il
est français ; mais il n'est pas nécessaire d'expliquer ce que c'est
que « baiser le cul à quelqu'un » ; ni le sens moral de ce proverlte,
« qu'il ne faut pas péter plus haut que le cul ».
N'est-ce pas le cas de dire, avec la comtesse d'Escarbagnas :
« Cela s'explique assez de soi. » Le Dictionnaire de l'Académie est
trop riche de ces superlluités, qui sont les immondices du langage.
— L'ahbé Terrasson disait du Nouveau (?) Testament du P.
Ouesnel (édition complète en 4 vol. in-8", Paris, '1695), que c'était
un bon livre, où le scandale du texte était conservé dans toute sa
pureté.
— On ne |)('iil |);is loiil dire, iii;iis on |m'iiI loiil î'crii'c : on peut
loiil lire. (III 110 pciil tout ("lUciidrc!. (VA\. V(}\ij2;(m?,.)
— Il y ;i (k's ,i;(Mis (lui. (i.iiis une Liiilerie de lalilo;iii\, ne soiciil
qiio les niidilrs, cl (|iii. d.uis un li\ro. coiiroiil ;iii\ jcissiijres
oliscôncs, (•oiiinic un porc ;'i l;i l;ii|iit'. (Th. (j.inlicr.)
Obstacle, du hiliii ohsi/niilnni (oh, slai'c. se tenir devanl).
— L'ubsUicIo est, l;i pieirc de touche de la vocation.
(itisiiian Ile (•(iiiiinil plus (ruitslaclcs :
(i'csl un (lien qui ;^iii(le ses pas.
(MortiAiNvii.i.K, te Pii'il iln Mouton.]
Occasion, du laliii ocras-io (oh, cndcrc, tomber devant).
On a dit aiilrcfois odioison.
L'occasion, je sais, fait soini'nt li' larron.
(Kahhk ii"F.r,r..\NTi.\K, Inlriyiii'.)
Aussi doit-on éviter avec soin de s'exposer à la tentation de mal
faire: c'est le moyen le plus sûr de se préserver du danger; car,
si l'occasion fait le larron, le larron fait plus souvent naitre l'occa-
sion.
— Saisir l'occasion aux cheveux : profiter du moment favorable.
...Sinon il n'y a plus mèche, dit-on familièrement.
Aiil niinr, aul nu/if/iim/i : maintenant, ou jamais.
C'est une occasion qu'il faut prendre aux cheveux. (Molière,
Arore.)
Ctipcrc occiisioH'')n.
(Pl.A.TK.)
(Voy. saisir la balle.)
— Les anciens représentaient l'Occasion sur un globe, avec des
aUes aux pieds, le derrière de la tète chauve, pour indiquer qu'il
faut la saisir quand elle se présente en face, et ne pas la laisser
passer, parce qu'elle fuit rapidement, et que sa tête, étant dégarnie
de cheveux par derrière, ne laisse aucun moyen de la ressaisir.
Frontc ctijjillala c-tl, sed po.st occasio cdlrn.
{('.Hé dans le Moijen de prirvoiir. rli. 70.)
Car l'occasion lia tous ses cheveux au front : quand elle oultre-
passe, vous ne la pouvez plus révoquer ; elle est chaulve par le
derrière de la teste, et jamais jilus ne retourne. (Rabelais. I. 38.)
Occulte, du latin nccultum (ocailtare, cacher).
Sciences occultes, au Moyen-Age : l'alchiinie, la magie, l'évocation
des morts, etc.
ODE lo7
Octroi, ilii l.itiii (iiKioriciirc [auctordrc. ;iiil(iris(M"), siiltslaiilif
M'rh;il.
S'est (lit (le tond' coiiression on pi'i\il('uo accordé par le souverain.
Le roi orti'ovail (1(V> lettres de Qràce. Mii I81'i. Louis XVIll ortroya
la Charte.
— Aiijoui'd'liiii : droits que les villes sont autorisées à percevoir.
Ou l'appela ainsi, parce qu'il était perçu en vertu d'une concession
octroyée par le souverain, pour subvenir aux dépenses locales.
L'Etat prélève sur cette taxe le dixième du produit net...
C'est nu iiupôt analogue à celui que les Rouuiins nommaient
portoritiin. droit d'entrée et de sortie des marchandises, qui est
représenté aussi par les douanes.
('"est en 13o2 que lurent étaldisles octrois en France ; Compièiine
fut la première ville où cet impôt fut appliqué.
— Les pi'inci[)aux inconvénients des octrois sont :
1° La répartition sans proportionnalité des fortunes ;
2" La diminidiou de la production par la diminution de la
consommation :
3" Les frais considérahles de perception ;
4" Les vexations qui résultent du mode de perception ;
5" Enfin, on leur reproche d'être <■<■ démoralisants », parce qu'ils
sont un encouragement à la fraude ; et qu'il [)eut arriver que l'on
considère le bénéfice illégal de celle-ci comme une défense légitime
des droits attaqués.
Odalisque, du turc odaiih. de oda. cband)rc.
Concubine, lemine du sultan, ou attachée au service de la femme
ou de la lille du sultan.
Odeur*, du latin odor.
— Les corps se comportent avec les odeurs, comme avec la
lumière et la chaleur, quant à leur pouvoir absorbant et rélléchis-
sant.
Si l'on met deux morceaux de drap, l'un noir et l'autre blanc, en
contact avec un corps odoi'ant, tel que le camphre, le noir s'im-
prègne fortement de l'odeur, tandis que le blanc n'en absorbe
presque pas. ou du moins la laisse vite échapper par le rayonnement.
Le pouvoir absorbant des couleurs pour les odeurs décroit dans
l'ordre suivant : noir, bleu, vert, rouge, jaune, blanc.
— Bonne odeur: copia nnrium (Horace).
Les Anglais disent : nozega\), gaitè du nez.
138 OKI
— Il n'est piiscii odeur (le s.iiiilclr : il ii't'sl |i;is en jiriinde estime.
Odyssée, mot .Lircr, oi-iLiiiic litlt''r;iire.
Célèhrc poriiic oi'i Homère raconte les voyafics très acridontés
d'Ulysse, on fJ(/i/ssc//s, foi dltliaqne, errant de contrée en contrée,
après la tiuerj'e de Troie. |)oiir reloni-ner dans sa patrie.
— S'emploie familièrement pour désigner un voyape semé d'aven-
tures : Raconte/.-moi votre odyss(''e.
Œcuménique, du urec o/7,oi/>nrnr\ la tei're liahitée.
Se dit des conciles généraux: ou universels, auxquels sont convo-
'qués tous les évéques de la chrétienté.
Œdipe, nom dliomme, tiré du grec.
Personnage qui, d'après la fable, devina l'énigme du Sphinx.
D'où, au figuré : Il faudrait être un OEdipe, pour deviner ce que
vous voulez dire.
Œil, du latin oculns, anciennement oll, ueil. Provençal huelli.
Fait au pluriel œlU (dans les mots composés) et yeux.
Le singulier a aussi la forme yeu dans le Berry, où l'on dit yen
pour œil : Mon yeu me fait mal. (Yoy. aïeul et ciel.)
— Les yeux sont le miroir de l'àme.
Le miroir est le troisième œil de la femme.
— Yeux en houles de loto : ronds et saillants.
Bordés d'anchois : aux paupières ronges et dépourvues de cils.
Marécageux : larmoyants.
Au beurre noir, pochés. Rabelais emploie cette expression
(liv. IV, c. 7) : « Il resta tout estourdy et meurtry. un œil poché
au beurre noir. »
— Coup d'œil. Avoir le coup d'œil juste ; avoir le compas dans
l'œil.
Michel-Ange disait qu'il fallait avoir le compas dans l'œil, et non
dans la main.
— L'œil du maître. (Yoy. La Fontaine, lY. M.)
L'œil du fermier vaut fumier.
— Fermer les yeux sur les fautes de quelqu'un. Un Romain qui
avait Mécène à souper, s'étant aperçu de la tendresse de sou h<)te
pour sa femme, eut la complaisance de faire semblant de dormir.
Un esclave voulut profiter du sommeil de son maître pour boire le
vin qui était sur la table ; mais le maître lui dit : « Malheureux ! ne
vois-tu pas que je ne dors que pour Mécène ? »
OEU 159
— Yeux d'aigle, d'émerillon, d'argus, de lynx. (Voy.)
— Ses sourcils sont des arcs et ses coups d'œil des llèclies qui
vous percent le cceur. (.Ma\inu' arabe. )
— Aimer quelqu'un cuinuie la prunelle de ses yeux.
Aliquem amure oculitits.
(Pl.AUTK.)
Sdtic, (>ntli.ssiinc lioino.
(l'i.AI.TE.)
Plus DCtilis nifis (iinarcm.
(Catl-i.i.e, XIV.)
Ges/at i/ht/n in orulis. Est illi in ociûis. (Gicéron.)
— Les beaux yeux de ma cassette. (Molière.)
Cette demoiselle a de fort beaux yeux, mais les yeux de sa
cassette sont encore plus 'beaux : ou lui donne deux millions.
— Le langage des yeux : In oculis aniniiis habitat. (Pline.)
Dans les yeux se fait l'alliance de la matière et de l'esprit. Riva roi
en écrivant ces mots, se rappelait sans doute le vers de la Ilen-
riade :
Lieux où finit le eorps ot commence l'esprit.
— Faire de l'ceil (argot) : orulis venari.
Quif ciro.s oculis caprunt.
(Pl.ArTR.)
— Se mettre le doigt dans l'œil : se tromper. (Voy. doigt.)
— Avoir le mauvais œil: porter malbeur. (Jettatui-a.)
— Voir la paille dans l'œd de son voisin. (Voy. paille.)
Œuf, du latin ovinn : anciennement nef.
— L'ceuf de Christopbe Colomb. Quelqu'un cliercbait à rabaisser
devant Coloml) la découverte du Nouveau-Monde. Colomb, pi-enant
un œuf, dit que sa découverte était, en effet, très simple, et qu'il
bii paraissait plus diflicile de faire tenir un œ\\[ sur sa pointe.
Cbaciiu essaye, sans pouvoir réussir. Alors Colomb cassa le bout
de l'œuf, et le fit ainsi tenir droit. « Voilà, dit-il ensuite, comment
les cboses semblent faciles quand elles sont faites. »
— Dans les sciences, il n'y a rien de si simple que ce qui a été
trouvé liier, mais rien de si difficile que ce qui sera trouvé demain.
(Biot.)
— On peut faii'e tenir debout sur son extrémité la plus large un
œuf frais, après l'avoir secoué pendant dix uiinutes.
— Vasari attribue l'anecdote de l'œuf à Filippo Brunellescbi, à
l'occasion des plans qu'il avait faits pour réunir les quatre nefs de
S;iiil;i-.M;iri;i-(l('M''i()ri, [);ir iinc, iiiimi'iisc coupole ocIo'joiimIc. smiis
employer de cli.irijentcs de vofiles.
En l'i-'^T. il lui vivciiKMit sollirilr |i;ii' les consiils et les iiilendiiiils
(le roiiiiiiiiiii(|iiei' ses pliiiis (rexéciilioii et son modèle. Il s'y refiis;i.
et se honiM ;i leur pii'seiiler un iriif (m disîint : « Celui qui le fera
tenir dehont, ser;i diune de constrnire l;i coupole. » Rrunellesclii
seul ivsolul le iirohlème : après quoi cliacnn se récria (piil en
aurait l'ail autant. Filippo leur i-(''pli([Ma en riant (pi'ils saui'aient
é.ualeinent l'airt; la coupole, s'il leur in(nitrait son niodèh;.
— OKul's de Pàipies. Avant (Charles IX, l'année en France roni-
mcneait vers Pâques, à léquinoxe du |iiMnli'uips (!20 mars). On
donnait à celle occasion des (eul's coloriés, parce ([ue Tceuf est le
commencement de tonte chose (Cf. ah oro). et que le mois de mars,
le premier de l'année, se trouve aussi à l'entrée du printemps,
saison on tout renaît dans la nature ; de même que Pâques est le
symbole d(5 notre rénovation morale par la résurrection de Jésus-
Christ.
Kn Russie, le 20 mars, on donne des œufs teints sur lesquels on
lit : « Christ est ressuscité. »
— On attribue aussi l'usage de donner des œufs de Pâques à la
défense de manger des œufs pendant la Semaine-Sainte. Il en
résultait de grandes provisions, qu'on distribuait à profusion, le
jour de Pâques, à ses parents, à ses amis.
— Les premiers œufs rouges furent vendus à Paris sur le Pont-
Neuf, et eurent une grande vogue.
Saint-Simon dit que, la veille de Pâques, on élevait des pyramides
de CCS teufs dans le cabinet de Louis XIY, qui en faisait don à ses
courtisans.
— Les œufs de Pâques, et le peu de valeur de ce présent, à une
époque où les œufs sont très abondants, ont sans doute donné lieu
au proverbe : Donner un œuf pour avoir un bœuf : proverbe qui
s'applique aux gens qui ne rendent que des services iatéressés.
Œuvre, du latin opéra.
— A l'œuvre on reconnaît l'ouvrier.
Kv ungue leonem : à la grilïe on reconnait le lion.
Ognon, du latin nnionein. L'Académie, 7'^ édition, renvoie â
oifjnon.
On n'écrit plus oujnon, quoique l'Académie dise que l'^ sert à
mouiller le g, mais ne se prononce pas, et empêche de prononcer
OGN Ifil
og-noii : iiiiiis ccltt' r;iisou ifcst piis viilalile, (^ir. dans /ror/iio/i ot
autres mois aiialoLiiies, le // suivi ilc n se iiiouillc sans le seroiirs
de li.
(Faii(-il écrii'e aussi poijnel'?)
— L'o,i>non est originaire trivûvpte. Les Précieuses ont a[i|ielé les
o.iiuons « lesdien\ éuy[)tiens ». Al[)h. Karra ilit: « Les lis, les lnli[)es,
les narcisses, les jacinllies sont des ileurs adoraldes, qui me l'ont
(•om[)ren(lre l'adoration des IvLiVpliens pour les ognons. »
On voit par là condiien on a peu connu les dieux des Egyptiens.
La science nouNelle, civée par Cliampollion, a pu redresser une
foule d'erreurs, telle cpu' la croyance nu culte des Égyptiens pour
les ognons. Celte o[)inion a lui venir d'un liiéroglyplic mal com|)ris,
consistant en un carré, qui exprime lidéc de temple, dans le(piel
est un poireau, endilème de la blancheur; riiiéroglyplio signiliant
maison lilanclie, et non temide du poireau, comme l'ont pensé les
Rouuuns.
Les Égyptiens n'adoraient [»as davantage les animaux, mais bien
les dieux représentés avec une tète et mémo un corps entier
d'animal.
— Regretter les ognons d'Egypte. Allusion aux iïéhreux qui,
délivrés de la servitude d'Egypte, se plaignaient à Moïse d'être
privés des ognons qu'ils mangeaient dans ce pays.
— Il y a de l'ognon : de la brouille.
E. xMarco Saint-IIilaire, dans ses Souvenirs du temps de /'Em-
pire, raconte que la maréchale Lefèvre, marquise de Dantzig,
chanta, dans une réunion chez l'impératrice Joséphine, une chanson
composée par un de ses cochers, auquel elle avait donné le sobri-
quet de Poétrillon. Elle avait pour refrain : « Il y a de l'ognon. »
En voici le premier couplet :
(In ilit (|uo l'empGreiu' d'Autriclie
Qui DC'sl pas blanc d' savon,
11 y a de l'ognon !
A vraiment l'air godiche,
Di-puis qu' nous 1' savonnons.
Il y a de l'ognon !...
Ces couplets, tout vulgaires qu'ils étaient, firent fureur à la cour
et à la ville, sans doute à cause de leur à-propos et du caractère
hien connu de la maréchale à qui on les attribuait. Ils furent bientôt
chantés dans tout Paris, et le refrain passa en dicton populaire.
Mais il existait déjà, au temps de la Ligue ; et « il y a de rognon »
11
si,L!iiili;iil : il y ;i du t;i|t;ii;f'. du lii'iiIiiiiiï; ; roimno le |)roiive une
chanson du Iciiips, (jiii (itc la priorité à la niaivclialo Loiï-vro :
Que plus on ne brigue
Être (le la ]A%uc
De saillie union ;
Car, ne leur (léjilaise,
Puisqiron jiend les Seize,
Il V a de rognon.
{Sol ire Mi-nip/ivr. p. 381.)
— Pleurer tous ses ognons : éproiiNoi- nii prand cliafrrin.
Radicl disait, à bout do souHVances : « Jai (''i»liicli('' tons mes
ognons. »
— Se placer en rang d'ognons : |)aniii des gens de distinction
(ou phit(H sur une iiièuio ligne, ou dans nue assenihlée où l'on n'est
pas invité). Viendrait d'Artus, baron d'Ognon, maitre des céré-
monies aux Étals de Blois (1570).
Cette locution vient sans doute de l'babitude de réunir les ognons
en chapelets, en tenant les tiges pour en former des rangées qu'on
appelle en Provence des rels (i^estis, corde).
Bien des gens se mettent en rang d'ognons, qui ne valent pas une
écbalotte.
— Marchand d'ognons se connaît en ciboules. (Voy. connaître.)
Ogre, de oçjour, nom du peuple dont descendent les Hongrois ;
ou du danois liungre : affamé, vorace ; ou du latin orcus f
— Manger comme un ogre : avidement.
— On appelle ogre.^, dans les contes des fées, des hommes
voraces qui mangent les petits enfants.
Cette croyance aux ogres semble venir de la terreur qu'inspirait,
au Moyen-Age, l'invasion des Hogres ou Ogours, dont la cruauté a.
laissé dans les souvenirs populaires la tradition d'anthropophagie
qui était sans doute habituelle à ces barbares, et dont les annales
contemporaines ne parlent qu'avec horreur.
Suivant nos crédules aïeux, l'ogre est une espèce de géant, sau-
vage et cruels très avide, de chair humaine, et particulièrement de
la chair des enfants.
Oie, latin auca, anciennement oue, qui s'est transformé par le
changement de ou en oi, qui se retrouve dans une foule de mots.
Exemple : noue, noix.
Cette forme oue est restée dans ouailles. (Non : les ouailles ne
sont pas les oies, mais les brebis du Seigneur.)
(IIS 103
— Le nom l'i';in(;;iis l^rdaïK/in' (l;i ri'iiio) est l;i triuliictioii dos
mots \)YO\(^\\i:[\\\\ pc d'aura (pieds doie).
— Le mâle s'appelle y«r.ç (qui a les jambes arquées), parce queii
mar('liaiil. il porte les pieds en dedans.
L'oie sauvage se nomme yanx, qui a donné peut-être : marclicr
de guingois?
— Les oies étaient consacrées à Priape, et entretenues dans son
temi)le. Elles ont la vue l)oniH>, l'ouïe très fine et une vigilance
ivmar(pialile. Tout hî nu^nde connaît l'histoire des oies du (^apitoie,
(jui san\èrent HonuNiu tenifis de Manlius. (Voy. Plutarque, Q/iesdons
ronuiinos, cii. 27.)
— Sainte-Beuve, étant sénateur, écrivit, dans un article adressé
au Temps, au sujet des cours créés par Duruy à la Sorbonne i)Our
les jeunes lilles, et vivement critiqués par l'épiscopat : « ...Les
évèqiies ont poussé des cris comme s'il s'agissait de sauver le
Ca pi tôle. »
— Bétc comme une oie. C'est sans doute à sa démarche gauche
et disgracieuse que cet animal doit sa réputation iunnéritée de
stupidité.
Si vous aviez vécu du temps des Romains, vous auriez sauvé le
Capitole...
X..., le plus fécond des romanciers, gagne heaucoup d'argent,
cpioi(iu'il écrive comme une oie. Gela se comprend, il vit de sa
plume.
...Pauvre oiseau auquel vous avez iniligé à la fois une injure et
un supplice, en méconnaissant ses instincts, jusqu'à en faire le type
de la stupidité, et en le torturant, jusqu'à ce que, malade et près de
mourii-, il livre à la sensualité de nos gourmets ses organes endo-
loris et tuméllés ! Art cruel, déjà pratiqué dans l'antiquité. Il est
d'invention romaine, car Pline raconte qu'Apicius avait trouvé le
moyen de faire grossir le foie des oies, en nourrissant ces oiseaux
de ligues et d'eau miellée. Est-ce le prix que les Homains devaient
aux libérateurs du Capilole ? (G. Saint-Hilairc.)
— L'oie fournit encore à l'industrie des plumes, un duvet, dont
la valeur est très grande, mais (ju'il faut arracher périodiquement
à l'animal vivant.
Oiseau, du latin aucelliun, diminutif de avis.
— Être comme l'oiseau sur la In-anche, c'est-à-dire dans une
grande incertitude.
Manger comme un oiseau : très peu.
m ou
Oisiveté, lirr df o/sif. liii-iiiriiic ncihi de oiseux, ollo^iia.
— Luisivcté est l;i iiirrc do loiis les \ic('S : o/iosi riliosi.
Vax ne Inisiml l'ioii, on ;i|i|ir('ii(l ;i in;il l'.ni'c. (diiloii rAiicicii.)
Oysiveté osl inèrc de Inxiiro, ...et qui oiisicroyt oysivelé du
monde, liientost périroyent les arts de Cupido. (Kidjelîus, III. '.\\.)
Oiin si loUdn, pcrierr C.iipidinis nrte.i.
^Ovl^] , ItoTiu'-ilvx d amour.)
Amour est la passion des esperilz otieux. (Rabelais.)
Il vaut mieux travailler sans but que de ne l'icn faire. (Socrate.)
La paresse n'est pas un vice: c'est une rouille qui détruit toutes
les autres vertus. (Dupont de Nemours.)
— Lorsque la mère du Régent mourut, la nudiuuilé a\ait lancé
un trait sanglant, en proposant d'écrire sur le toml)eau de cette
princesse: « Ci-git l'oisiveté», c'est-à-dire la mère de tous les vices.
— Un oisif est un animal qui broute le temps.
Oison, diminutif de oie, s reproduit le c de auca.
— Oison bridé (auquel on a passé une plume par les narines
pour l'erapêclier de francliir les baies) : qui a rintelligence courte.
— Rabelais appelle Bridoye un juge de son temps ; de même
qu'il appelle Dindeuault un imbécile.
Le nom de Bridoison, que Beaumarcbais a illustré dans le jy^/vV/*;^
de Fif/aro. a été emprunté par lui à Rabelais (liv. III, cb. 4).
Olibrius, nom propre.
Olilu'ius, gouverneur des Gaules, qui, selon la légende, fit mourir
sainte Reine, vers 450 (?). Il figurait dans les Mystères, pour y
personnifier le fanfaron.
— Faire l'olibrius : faire le mécliant.
Faisons rolil)rias, rocciscuv d'ianocenls.
(MoLii'iiiE, Élôitrdi,U\, 5.)
Oligarchie, du grec oUgoi, en petit nombre, arlxhé, commande-
ment.
Forme de gouvernement où le pouvoir est dévolu à un petit nombre
de personnes ; c'est une aristocratie limitée à quelques privilégiés.
Tels furent à Atbènes les Trente Tyrans ; à Rome, lesDécemvirs :
les Deux Triumvirats : à Venise, le Conseil des Dix,
Olifant, pour éléphant, ivoire, cor d'ivoire. (Ancien.)
Olivier, dérivé de olive, latin olira : d'où Ollioules, village où
croît l'olivier (0 kil. N. de Toulon).
OLY I6o
— l/(,»li\i(M' (If la paix: Olira ///ihel/is. (Val. Klacciis.)
Siii\aiit la .Mylliolotiic. Noptmio ot Minerve (en .urec At/u'na), se
(lis|)iitaiit l(> droit de donner nn nom à la ville de Cccrops, Neplnne
fi-appa la leiTcdo son liidciit. el lit naître le cheval, emblème de la
uticri'o,
.Minerve, à son loin-. II! naiiro l'olixier, dont les fruits, oiijt'l (rnn
connncrco considi'ralilo cnlrc 1rs nations, en font nn sinne de paix.
Le don de .Miner\e fui prcMV'ré par les aïeux de Périclés, et Minerve
enl la i^joire de donnei' son nom à Athènes.
— Sophocle dit : .. L'oli\ier [irodiiit ici (dans l'Attiqne) des llenrs
o[ des fruits en ahondance. (l'est nn arhre planté par la main des
Innnortels : janiais. en aucun temps, nnemain étran.^èrc ne pourra
rexlii'|ier du S(»l. car Jupiter et Minerve veillent sur lui d'un (eil
attentif. »
— L'olivier a été connu des peuples les plus anciens. Il est oii.ui-
naire de la Syrie et de la Perse.
CuUi\é en Grèce, il fut apporté à Marseille par les Phocéens ;
mais il était cultivé en Grèce au moins 2.000 ans avant l'ère chré-
tienne, car, vers l(SGo, on a trouvé dans l'Ile de Santorin des cons-
tructions de l'âge de pierre, ensevelies comme Pompéi, sous des
cendres volcaniques, datant au moins de cette époque reculée, et
dont les toitnres étaient de l)ois d'olivier.
— Tonrnefort dit que le mont Ararat, qu'il visita, et où s'arrêta
rai'clit> de Noé, ne poile pas d'oliviers, et qu'il ne sait où la colomhe
a pu en aller chercher une hranche.
— L'oli\ier vit plus de trois cents ans, et la vallée de Gethsé-
mani (.lai'din des Olives), où fut arrêté Jésus-Christ, est remplie
d'oli\iers si vieux (pie l'on est tenté de les croire conlenq^orains du
Sauveur.
— La fête des Rameaux, ou Pâques fleuries, a été instituée en
mémoire des rameaux d'olivier qui furent jetés sur le passage de
Notre-Seignenr, le Dieu de paix, à son entrée à Jérusalem.
— L'olivier a été tué. en grande partie, par le froid, en Provence
pendant les hivers de 1709 et de 1820. ■
OBympe, du grec Ofijiiipos.
Chaîne de montagnes de la Grèce, d'une hauteur d'environ un
mille et demi. Les anciens croyaient qu'elles touchaient le ciel, et
imaginèrent que les dieux y faisaient leur résidence et que Jupiter
y tenait sa cour. Aussi ce mot, chez les poètes, désigne-t-il le ciel
lui-même.
166 ON
Olympiade, du l;ilin oli/injiias, lr;i(liiil du ,LTcr.
I^lspnrodt; (iii;itr<' lins (jiii sr|);ir';iit I;icél(''l)r;iti(jn dos Jeux oImii-
piqiios, clioz los (irors. ;'i Olyiiipio. d;ms rKlidc.
Ombre, du l;iliii tmihrd.
— Oiiiiiid le soleil <'sl coiicIh'', toiito? hostcs soiit ;'t roinlii'c. (Kabc-
hus.)
On dit de inénio : \a\ niiil. Ions los cliiils sont uris.
— Sniv.iiit la M>tliologic, lo corps do llioninio après sa niorl
était j'ôdnit en rondi'os ; son oinbro, sunulfurinn, umhi-d, dosceii-
daildans les Enfers, soit au Tai'tar(;, soit aux (Champs-Elysées.
Oméga, dornière lettre de Talplialiet grec (o lono-. par opposition
à omicron, o bref).
— L'alpha et l'oméga : le conimoncemont et la lin.
\j alpha est la premiore lettre de ce monie alphabet, on \'o/nrf/a
occupe lo dernier rang.
Omelette, étymologle fort incertaine, peut-être œufii tnr/c's.
On lit a-umeletle dans une pièce du théâtre italien, de 1692.
— « On ne peut faire une omelette sans casser des œufs », disait
Bonaparte à un religieux du Mont-Saint-Bernard, qui se plaignait
des dégâts que faisait son armée en traversant les Alpes.
Le frère cuisinier, qui se trouvait là, reprit : « C'est vrai, général,
mais à quoi bon tant d'omelettes ? »
Omnibus, mol latin, qui signifie pour tous.
— Ce mot a été créé pour désigner de grandes voitures publiques
de transport pour les voyageurs. Il en a circulé à Paris, pour la
première fois, en 1828. La première idée en est due â Pascal, et l'on
en avait fait essai en 1G72. (Voy. Revue des Deux-Mondes, 1809,
art. de M. du Camp.)
— Le véritable omnibus est le corbillard.
On, l'on, du latin /lonio, dont l'accusatif a donné /io>nnie.
Vaugelas remarque que ces mots sont les abré\iationsde/a:)A';//«p,
V homme. Dans les anciens actes, il est écrit : hom ou l'hom fait
savoir, pour o)i ou Von.
Les Italiens disent de même huom, et les Allemands man, homme.
— Se moquer du (ju'en dira-t-on, veut dire qu'on ne se préoccupe
pas de l'opinion des hommes, du public.
— L'on est un chroniqueur anonyme, le rédacteur anonyme,
le rédacteur en chef du Scandale, journal raconté à vingt-quatre
éditions par jour.
ONG 107
— On dit... Cette formule liaïKile est I;i ressource des sots qui
inv()(|iieiit l'opinion |)iilili(]ue à l'iippni de lenrs niédis;inces. Mais, si
on (lit est nn sot. on ponrrait ajouter oui dire est un idiot. On
accepte li'op \{)l()nliers de la foule, et sans examen, tons les hrnits
qui courent les rues, surtout lorsqu'ils louchent au scandale et
satisfont notre maliunilé natuivlle. (]iter on dit, c'est se faire le
com[)lice d'une médisance ou d'une calomnie.
On, onne, suffixe parfois diminutif,- qui sert à dériver un grand
nondir*; de suljslantifs. 11 vient peut-être du grec dion (!) qui a un
emploi analogue dans des mots comme oikidion, petite maison,
pijrnniidion, petite pyramide; ou encore de son (?) qui, dans les
langues du Nord, signilie (ils. petit.
Ainsi, nous disons : chaton, petit chat; ânon, aiglon, raton;
coi'don. petite corde : cahanon : Saxon, enfant de la Saxe; Louison,
petite Louise; nourrisson, le petit nourri par sa mère; polisson,
enfant des rues; patron-minet, petit chat; poltron oupoultron, le
petit de la poultre. ou jument.
Quelquefois cette désinence est augmentative, comme dans: hihe-
ron, grand hu\eur: ballon, grosse halle.
Once, du latin unria.
— Ça ne pèse pas une once : c'est une afïaire peu importante,
facile.
— L'once était la douzième partie de l'as, ou livre romaine. C'était
aussi la douzième partie du pied ; d'où l'on appelait les grandes
lettres dans les inscriptions, qui avaient un pouce de haut, « lettres
onciales ».
Ongle, du latin ungnla : autrefois féminin.
— Unis comme la chair et l'ongle.
Tôt temps .-serai nb liens cum cura et un^/ln.
(A. Damei..)
(Je serai toujours avec elle comme la chair et l'ongle.)
Onguent, du latin loujucnliini (de ungcrè, oindre).
Nom générique de toutes les ponnnades à hase de graisse, de cire
ou d'huile, qui sont employées en médecine.
— Les Latins a[)pelaieut unguenta, les préparations lialsamiqiies
en usage dans la toilette. Nous avons remplacé ce mot [)ar pommade
qui ne le vaut pas.
-Dans les petites hoites, les bons onguents. Onguent ç:%{^vh ici
1G8 OIM:
dans \o, sons de parfum, essence. Les essenres. en ftlcl. peuvent se
condenser sous un tirs petit volume.
On fait usage do ce provcrhc, comme d'une espace de comiiliiiicnl
de condoléance, pour les personnes qui paraissent s'afllÎLicr de
rexi.uiiité de leur taille.
Onomatopée, du .arec onomn, nom. poit'ô. je fais.
Tei-me de grauimaire. Mot dont le son imite l'action on l'ohjet
représentés.
Ce mot, qni fait les antres, ne s'est certainement pas fait lui-
même.
« L'onomatopée, dit Dumarsais, est une ligure par laquelle un
mot imite le son naturel de~ ce qu'il signifie. »
Elle a contrihué pour beaucoup à la formation des mots. Presque
tous les noms qui désignent les cris des animaux, et les animaux
eux-mêmes, sont des onomatopées. Ainsi : cri-cri, coucou, ara, et<-.
— Onomatopées tirées d'un mijsirre de la Nativité :
Un coq (d'une voix claire et l)rèYe) : C/irislus natua csf.
Un bœuf, mugissant : IJbi.
Un agneau, bêlant: Beth-léem.
Un âne, bravant: la-tmis.
— Barbotter, bombe, boum, cabot, caquet, cbucbofer, claque,
clinquant, cliquetis, crac, crécelle, croassement, drelin-drelin, fan-
fare, frelon, frire, froufrou, gargariser, gazouiller, glouglou, banne-
ton, liennir, boquet. miauler, pet, rfde, rataplan. rincer, roucoulei-,
siffler, tam-tam, tic-tac, tinter, trictrac, turlututu.
Al laba lerribili sonilu tnrinUarn rii.rit.
(EN>-irs.)
Opéra, do l'itaben opéra : proprement œurre.
— Inventé par les Italiens, l'opéra fut introduit en France, en
'164o, par Mazarin. Le premier opéra français fut fait par labbé
Perrin, et la musique par l'organiste Lamliert. Ces deux auteurs
ol)tinrent, en 1669, un privilège qu'ils cédèrent, en 1672, à LuUy.
Le premier ballet introduit dans l'opéra fut le Triomphe de
r Amour, donné à Saint-Germain (21 janvier 1681).
Opérette. L'opéra-boulTe d'Olîenbacb et C''= est une triste créa-
tion du second Empire, qui tire son entbousiasme de l'absialbe, sa
poétique du carrefour, et ses effets de la ^profanation systématique
de toutes les admirations lionnétes de Ibumanité. Otlenbacb a
inventé une cbose introuvable jusqu'alors pour le tbéâtre, une cbose
OI»T 160
répupiianlc cl Irivialo. qui esl do l'éunir dans iiiio (l'ini-c le niainais
Ion au uiauvnis uoùl.
Opiner, du latin opinari, donner son opinion, iionsor.
D'où inopiné, ce à quoi on no s'attendait pas.
— Opiner du i»onnet. Dans les assenihlées, on ôtait son honnct
v\\ silène (rassonliinciit : c'est-à-diro acquioscei" sans mot dire.
Opinion, du l;iliii ojiiiuo. iimnioro do i)enser.
— L'opinion est un suIVra.ae donné dans \\\\ coniMours do voix.
L'a\is est nn téinoicnapo on faveur d'un parli. Le sentiment soiis-
entend la sincérilé.
On peut être obligé de donner son avis contre son sentiment, et
de se conformer aux opinions du grand nombre.
— On appelle opiniàlrp, celui qui tient trop ;'i son opinidii.
« C'est votre opinion '. — Quand je dis (piobjuo chose, c'est toujours
mon opinion. »
— 11 on est des o[)inions comme de nos montres: pas une ne va
comme les autres, et tout le monde se rapporte à la sienne. (Pope.)
— Les opinions sont libres. On no doit coml)attre l'opinion que
l)ar le raisonnement ; on ne tire })as d(». coups de fusil aux idées.
(Rivarol.)
Ou dit aussi : « Toute opinion consciencieuse est respectable. »
Cotte maxime est absurde, parce qu'elle conduirait à absoudre le
voleur qui prend tout on conscience, et l'assassin qui tue d'après
des principes dont il est bien convaincu (?). Faudra-t-il aussi respecter
les stupidités de la bêtise humaine et les préjugés do la routine, qui
sont l'évangile des sots et des fanatiques? Abattons bien vite ce
paravent trop complaisant de la conscience, et no respectons que ce
qui est lionnête et juste.
— Changer d'opinion. Synonymes: changer de gamme, de note;
déchanter, chanter la palinodie; tourner casaque.
Optimisme, du latin op/inms, le mieux, le meilleur; et non de
opter.
Doctrine opposée im pessimisme.
Ce système ne voit, dans le monde moral et dans le monde [ihy-
si(pie, qu'un élément de l'ordre universel, et afllrme, avec Leibnitz
et Malebrancbe, que tout est bien par rapport à tout. II s'appuie
sur ridée de la sagesse et de la bonté de Dieu.
— Le docteur Pangloss (Voltaire, Candide) est une belle cari-
cature de l'optimisme.
170 OR
Or, du latin nurum, ;'i rnpproclicr d'ain-a, éclat, et (Yaurora.
Corps simple, jnélulliqiie, d'une couleur jaune et brillante.
11 a été appelé le « Roi des métaux « par les alchimistes, qui, par
suite, avaient appelé «eau régale» un mélange liquide dacide
nitrique et d'acide muriatique, qui est le dissohant de l'or.
t)n l'appelle aussi le « vil métal », parce qu'il corromi^t.
— On demandait à un roi de Sparte pourquoi les Lacédémoniens
n'avaient pas de trésor : « C'est, dit-il. aliu de ne pas corrompre
ceux qui en auraient la clef. »
— L'or et la vcitu semblent placés dans les deux côtés d'une
balance, et l'on ne peut ajouter au poids du premier, sans que l'autre
devienne aussiliH plus léger. (Platon.)
L'or, semblable au soleil, qui fond la cire et durcit la boue, déve-
loppe les grandes âmes, et durcit les mauvais cœurs. (Rivarol.)
— En argot, on appelle l'or orient, jeu de mots pour or riant,
qui plait à tous.
Placer, lieu où l'on trouve l'or en Californie, signifie aussi plai-
sant.
— On trouve dans les terrains aurifères des morceaux d'or pur,
qu'on appelle pépites en Californie, et niif/r/ets en Australie.
En 1842, on a extrait des monts Ourals une pépite pesant 35 kilog.
Elle est conservée au Musée de Saint-Pétersbourg.
En 1838, on a trouvé à Ballarat (Australie), à o4 mètres de pro-
fondeur, un nugget de 70 kilog. d'or très pur. Il fut Ijaptisé du nom
de Welcome, le bien venu, et vendu 202.000 francs.
— Or de Toulouse. Avoir de l'or de Toulouse était une locution
proverbiale chez les Gaulois et chez les Romains, pour signifier une
destinée funeste. On suppose que le général Cépion, qui avait pillé
les temples de Toulouse, et en avait tiré une grande quantité d'or,
fut battu par les Cimbres, et perdit son armée et ses trésors.
Or de Tholose — duquel parlent Cicero, de Natura décru m,
liv. 111: Aulu-GeUius. liv. 111: Justin, liv. XXIl : Strabo, liv. IV —
pourta mallieur à ceulx qui l'empourtèrent : sçavoir Cépio, consul
romain et toute son armée, qui tous, comme sacrilèges, périrent
malheureusement. (Rabelais.)
— On disait aussi dans l'antiquité, duu homme voué à la mau-
vaise chance: « Il a le cheval de Séjan » ; parce que le cheval de
Séjan fut funeste à son maître et à ceux qui le possédèrent après
lui: Dolabella, Cassius. Marc-Antoine. (Aulu-Gelle, III, 9.)
OR 171
— Adorer le veau d'or.
...11 vil 111(11111110 liyporoiidri'
Adoror li^ nii'l;il iinc liii-iuèiiio il fit fondre.
(UdiLiAi:, Satire VIII.)
— Les AnuM'icains \o\an( l'avidilô des ]"]tiro|i('('ns pour l'or,
crovaieiil (juc ("(''lail le dieu qu'ils adoraioiiK cl lui adressaient des
prières [tour (|u'il lit cesser les perséculioiis doiil ils rlaicul rdhjcl.
— Dans rOiu'st de la France, [lar une nirlapliore hardie, on
ap|)('lle '< reliiiion sonnante » le culte que tant de ,uens p.rolessenl
jiour l'or.
— La clef d'or ouvre toutes les portes ; aussi tons les elïorls des
hommes tendent à se procurer ce talisman, (jui conduit à tout,
excepté peut-être au honheur.
Le rameau d'or que la Sihylle de Cumes lit [trendre à Enée, pour
lui ouvrir la route des Enfei's, fut aussi le talisman qui ouvrait les
lieux les plus inaccessihles, les portes les mieux closes. Arrivé au
palais de Pluton, Éuée attacha le rameau à la porte, et elle s'ouvrit.
— La soif de l'or.
Aari sacra famcs.
(Viiiiri.K. Eiu'hJr, III. ."i".)
La soif de l'or a toujours éleint dans les hommes tout sentiment
d'humanité. (Rollin )
L'avidité de Crassus lui lit jtorter la guerre chez les Parthes.
Vaincu, sa tète fut portée au roi Orodès, qui lui fit couler de l'or
fondu dans la hoiu-he, en disant : « Rassasie-toi de ce métal, dont
ton cceur a été insatiahle. »
Cette passion violente a été combattue de tout temps par les
moralistes, qui ont hlàmé l'amour des richesses, mais n'out pu
convertir personne.
L'occasion aidant, ils ont prouvé que tous leurs i-aisonuemenls
ne les avaient pas convaincus eux-mêmes.
— On demandait à Simonide ce qui était le iilus à souhaiter,
des richesses ou de lu sagesse : « Je ne sais, dit-il, mais je vois
beaucoup de sages venir faire la cour aux riches. »
— Tout ce qui reluit n'est pas or.
Tout iiVst pas or ci' i|iii rcitiil.
Ni iariiir ce (|ui Idaiieliil.
— La boue devient brillante quand le soleil luit. (Gcelhe,)
— Valoir son pesant d'or. Se dit d'une chose de prix.
Michelet atti'ibiie comme origine à cette expression, l'usage
172 on A
iincion de donnor ;iii\ p;iroii(s (l'iiii lioiiiiiio liir le imids do son
(Mirps en or on on ;ir,u(Mit |ioiii' los dôdoniinn^or. Un lioiinno do conl
kilogrannncs v;ni(li;iil ;'i ce loniiilo 1500.000 francs.
— L'or os( une cliiinoro... [lour roux qni n'en ont |)as.
L'or, c'est le nerf do l'inlriixno. (lioanniardiais, Ikirhier.)
Oracle, du lalin ovtiriihnn (doo/r/jv. [»;ii-lor).
— l*arloi- coninio nw oi'aclo : c'osl nn oracle. C'est-à-dire : il est
infailliltlo.
(\v\ oracle est i)lus sia' (|ii(' celui de Cali'lias.
(Ii\<;i.\f, liiliif/rnir, \\\. 2.)
— Pliilanine dit qn'un pâtre noniinc Goritas déconvril l'oracle
do Delphes, en voyant ses chèvres agitées pousser des cris extraor-
dinaires, quand elles approchaient d'une cavité d'où sortaient des
vapeurs. Cet oracle fut longtemps le plus renommé. Apollon y lit
ses réponses en vers pendant plusieiys siècles ; mais, comme les
mauvais plaisants riaient des vers du dieu do la poésie, il répondit
en prose.
— L'oracle de Dodone. au dire de Suidas et d'Aristoto. n'était
qu'une suite de hassins de cuivre suspendus en cercle. Leur choc,
provoqué par le vent, ou par l'artilice des prêtres, produisait
un retentissement cpouvantahle. (Voy. Fontenelle, Histoire des
oimdes.)
— Rahclais (III, 2'.}), après avoir énuniéré los oracles les plus
célèhres de l'antiquité, ajoute : « Mais vous sçavez que tous sont
devenuz plus mulz que poissons, depuys la venue de celluy roy
servateur, ouquel ont prins fin tous oracles et toutes prophéties,
comme advenant la lumière du cler soleil, disparent tous luttins,
lamies, lémures, garoux, farfadets et ténéhrious. »
— La marguerite est l'oracle dos amants. « La jeune lille Tintor-
roge sur les secrets de l'avenir : sa hlanche main elTeuille \n\ à un
les pétales de cette frêle et tondre (leur, et selon que le charmant
oracle a répondu, un Ijaisor ou une larme toml)e sur ses dél)ris. >»
(M"*-' Marie-Rose Patout, Fiantes médicinales des environs de
Toulon.)
Orange, du latin aiiriun. poininn aurnntii (?).
Somlili' plut(')t tiré de l'aralie narandj, devenu orange, puis
orange, sous rinlUieiu'O do or.
— L'oranger, dont la llour est d'argent, et dont le fruit est d'or.
Les pommes d'or des Hospérides.
Typo do la taiiiillt' des aiirciiliacrcs, (jni coinin'ciid h' cili'oiiiiicr,
le cédralicr. le liiiidiiicr. le hcriiamoUier, oie
L"oran,L^<'i' cl It^ (•ilroiink'r, oriiiinaires d'Afriqiio. oui rlr trans-
plantés on Provonro par los colonios urocqucs.
Hor('nl<\ siii\anl la Fable, les avait apportés en Gi'ôco du jai-din
dos Hospéridos. (pic los Géortiuiucs placent en Afrique.
— An xvii'- siècle, les oranges étaient encore rares on France,
puisque M"*^ de Montpensier dit dans ses Mémoires : « Monsieur
vint me voir et me donna dos oranges de Portugal. »
.M""" do Sévigné écrit, à l'occasion du mariage de M"*' de t.ouvois,
(pii eut lieu le ^'î novembre 1079 : « On a fait venir le printemps :
tout était plein d'oi'angors lleuris. »
— Fan de Heur d'orange. Flein\ dans cotte expression, vient de
fleurer, qui signiOc répandre une biuine odeur. On dit : cela Meure
bon : on ne dirait pas : cela Heure mauvais.
Fleur d'orange peut s'expliquer aussi par : Heur qui i»roduit
l'orange: la tleur d'où résulte le fruit. (Voy. fleur.)
En réalité, orange s'est dit autrefois pour oranger, et l'expres-
sion équivaut à eau de fleur d'oranger.
— Un bouquet de flours d'oranger est un brevet d'innocence
s. G. D. G.
La couronne de soucis que portent los jeunes lilles bulgares, le
jour du mariage, est un symijole plus signilicatif et moins trompeur
que le bouquet de fleurs d'oranger.
— Les orangers de Versailles, taillés en boule sur des caisses
carrées, datent du temps où les ifs prenaient la forme de cigognes,
oii les buis devenaient des vases, où il semblait qu'à l'exemple du
roi, des courtisans et des dames, tout, jusqu'aux arbres, devait
porter perruque et panier.
Orateur, du latin orator {orare, parler).
— Lorateur doit instruire, plaire, toucber.
— 0 Cicéron ! Déraostliène l'enlève la gloire d'être le premier
orateur, et tu lui êtes celle d'être l'unique.
— Cicéron compare le nond)re des orateurs qui sortirent de
l'école du célèbre Isocrate, à celui des guerriers (pii sortirent des
flancs du cboval de Troie.
— On plaça sur le tombeau d'Isocrate une Sirène.
Oratoiref de omtorlus.
— L'ordre de l'Oratoire était une congrégation d'ecclésiastiques
174 OUE
qui ne f;iis;iio,iit iKiiiil do v(r'ii\. Fonde'' ;"i Homo jcir IMiilippo de Néri,
mort eu iriDrj.
Le cardimil do hônillo IrUihlil on Fi-anco en 1G12.
Ordinaire, qui <'st (l;ins l'ordre, liiiliilncl.
— Dinor .ivoc la soupe et le bœuf. Dans les ^argotles de Paris,
les plats pris en sus do l'ordinaire sont ai)[)elés c.x7/y/. (Voy.)
Ordonner, ordlnarc, mettre en ordre.
Donner un ordre, couimander.
Dans le langapc familier, on dit : Madame J'ordonne, mot très
bien fait, et (pii exprime bien la nuance du romuiandement exercé
avec sottise et vanité, à tout propos et bors de propos.
Ordre, du latin ordlnem (de ordo).
— TranquilHté. Do 18G0 à 1861), M. Haussmann, préfet de la
Seine, a dépensé deux milliards pour les embellissements de Paris.
Les crédits de la Ville avaient été dépassés de oOO millions, en
février 1809, lorsque M. Rouber dit à la Cbaml)ro qu' « on avait pu
ainsi donner du travail aux ouvriers, et traverser une lonpiie
période sans émeutes ».
Semblable à Caussidière, M. Haussmann avait fait ainsi de l'ordre
avec du désordre : ordre dans la rue, désordre dans les finances.
Le préfet de police Caussidière a eu aussi pour imitateur, en 1871,
Cluseret, généralissime de la Commune, qu'on a appelé c< l'organi-
sateur de la désorganisation ».
— Distinction, décoration militaire.
^ Le sacrement qui donne un caractère sacré aux ecclésiastiques.
La collation de la prêtrise s'appelle ordination.
On distingue quatre ordres mineurs et trois majeurs. Les mineurs
sont ceux de portier, d'exorciste, de lecteur et d'acolyte. Les
majeurs sont : le diaconat, le sous-diaconat et la prêtrise.
Ordure, dérivé de. l'ancien adjectif ovd (/torridns, et non de
so)'didi/s).
La langue a conservé ordure, et abandonné ord, que remplace
mal le mot sale.
— Mots orduriers. (Voy. obscène.)
Oreille, anciennement aureille, du latin auricula, diminutif
de aiiris. On a employé aussi ouyes, ouïes.
Confesser vous faut des ouyes.
Des yeux, du nez et de la bouclie.
{Te:<tanient de Patelin.)
X;itiiro nie si'inlilc non sans cause nous avoir fornié aurcillcs
ouvertes, nv opposant porte ni clousture aulcune, coinnio ha faict
aux yeulx, lanjzue et aiiltres issues du eorps. La cause je cuyile
estre aflin que tous jours, toul(S nuictz, continuellement puissions
ouyr, et pai- ouye perpétiiellfincnt ap[)rendre. (Rabelais, III, 10.)
L'honune devant ouïr pour lui-même, Toreille a été placée sur
les côtés de la tète, presque cacliée et sans ornement. (G. Sand.)
— Oreilles chastes.... comme celles dont parle Rabelais (IV, 43) :
'< ...Les sanctimoniales (saintes recluses) qui appellent un pet virginal
un sonnet », c'est-à-dire un petit son.
(i'est peut-être de ces décentes nonnains qu'on a[)pelle « pet de
nonne » un petit beignet de la grosseur d'une noix.
— Autant \ous en pend à l'oreille, ...ou à I'omI.
Cette locution fait allusion au dénomncnt d'une farce intitulée :
Sœiu' f'essue. qui est le sujet du Psaufier, de La Fontaine.
— Avoir l'oreille basse : être confus, humilié.
C'est l'idée inverse qu'exprime le proverbe : Sac plein dresse
l'oreille.
Dcmitlo anricitldt, ni iniijiur mentis asellus.
(Uorac:k.)
Serrant la queue et portant bas l'oreille.
(La Fontaixe.)
Au contraire, on dresse l'oreille quand on est (ier du succès.
— Faire les enfants par l'oreille.
Votre simplicité, ([lii semble sans pareille,
Demande si l'on fait les enfants par l'oreille.
(.Moi.iKRE, Erole rfp.s- Femmes. V, 4.)
On chantait autrefois, dans une prose de la Vierge :
Gaude, virgo mater C/iristi,
Quce per aurem concepisti.
(Mînialnre de V Annonciation.)
Sitôt qu'eut i)arlé (labriel,
La Vierge conçut l'Kternel
Par une divine mer\eille.
L'Archange ainsi l'avait prédit.
Et de là peut-être a-t-on dit :
Faire les enfants par l'oreille.
Rabelais raconte ainsi connncnt Gargamelle lit Gargantua par
l'oreille : « ...Par cest inconvénient furent au-dessus relaschés les
cotylédons de la matrice, par lesquels sursaulta l'enfant, et entra
en la veine creuse, et gravant par le diaphragme jusqu'au dessus
17G ORF
(les cspanlt'S, oi'i l.i didc veine S(; piirl en deux, priiit le clieniiii à
^iiiiclie, el sortit par l'aureille seiiestre... «
VA [lins lias : « (]ar je, vous dis que si Dieu voulait, les feiiiines
auraient doi'eseua\aul leurs enfants par l'aureille. Bacchus ne fut-il
pas eii^cudiV' [)ar la eiiysse de Jupiter ^ Ro(pielailIad<^ nasqiiit-il pas
du talon do sa mère '. Crocpieiiiouclie, de la pantoultle de sa nour-
rice? Minerve nasquit-elle pas du cerveau par Taureille de Jupiter?
Adonis, par rescorce d'un arbre de niirrc? Castor et Pollux. de la
coque d'un (cuf jioudu par Jxda '. »
— Je vous couperai les oreilles, ...si...
La loi salique punissait de l'aniiMitalion des oreilles tout vilain
qui aurait osé approcher d'une l'einiue uoltle pour la caresser.
— L'oreille est le clieuiin du cœur. (Voltaire.) (Voy. flcurelles.)
— luCS I^atins appelaient auvicu/arius un conseiller intime.
Nous disons, dans un sens approcliant : avoir l'oreille de quel-
qu'un.
C'est à cause de ces rapports intimes avec l'oreille, que le petit
doigt a été appelé auriculaire.
— L'oreiller, sur lequel repose l'oreille, s'appelait autrefois
cnnaeiller, uiot qui est devenu coussin (?).
On dit encore : consulter l'oreiller ; la uuit porte conseil.
— Il vaut mieux en croire ses yeux que ses oreilles.
Pluris est oculatu-s lesiis unus, (jauni aiirili dcccm.
(Plal-ik.)
C'est-à-dire : mieux vaut un témoin oculaire que dix témoins
auriculaires.
Ne vous en rapportez qu'à vos yeux, et ne vous liez jamais à ce
qu'on vous dira. (M""" Campan.)
— Se faire tirer l'oreille : se faire beaucoup prier.
Chez les Romains, lorsqu'un homme était assigné devant le
préteur, et qu'il ne comparaissait pas, l'oiïensé avait le droit de l'y
mener en le saisissant par l'oreille.
— Avoir la puce à l'oreille. (Voy. puce.)
Les oreilles ont dû vous tinter. (Voy. tinter.)
Dormir sur les deux oreilles. (Voy. dormir.)
Les murs ont des oreilles. (Voy. 7nur.)
Orfèvre, du latin auri faber, ouvrier qui façonne l'or.
— L'orfèvre fabrique de la vaisselle, des vases, des flambeaux,
des couverts d'or ou d'argent ; l'orfèvre-liijoutier fabrique et vend
OKG 177
des bijoux : rorfêvre-joaillior voiul des di;im;inls. des perles, des
pierres précieuses.
Vous êtes orfèvre, Moiisifui' Josse...
(Mi)i.iKici:, Amour médecin, I, 1.)
C'est-à-dire : vos conseils sont intéressés.
— Le contrôle de i^arnntie pour l'orfèvrerie d'argent coûte
11 francs le kilogramme ; pour celle d'or, 200 à 205 francs.
— Largenterie se revend au poids 200 francs le kilogramme.
L'or des bijoux se revend 2 francs à 2 fi'. 25 le gramme.
Orgies, du latin orgia. tiré du grec ta orgia.
Les l'êtes de Bacclms, appelées aussi Dionysiaques. Elles corres-
pondaient aux Bacchanales des Romains, et avaient été instituées
en souvenir des conquêtes de Bacclius dans l'Inde.
On y faisait des processions où l'on portait le phallus, et dans
lesquelles se commettaient toutes sortes de débauches.
Il y avait aussi à Rome les orgies de Cybéle, de Cérès; mais à
cause des excès qui s'y commettaient, le Sénat les prohiba en
l'an 528.
Orgue, du latin or/janiun, tiré du grec organon, instrument.
— Saint Augustin se sert du mot organa pour désigner l'en-
semble des instruments de musique, bien que l'instrument appelé
orgue existât déjà à cette époque.
— Orgue est masculin au singulier, et féminin au pluriel : un l)el
orgue, de belles orgues. L'usage le veut ainsi, et l'Académie
elle-même s'incline sans protester contre cette irrégularité ; de
sorte qu'il faut dire : « C'est un des plus belles orgues que j'ai
jamais vu » (sic).
— En 757, Pépin, père de Charlemagne, reçut en présent le
premier orgue qui ait paru en France. Il fallait que ce fût un orgue
de Barbarie, mu par une manivelle, car il n'y avait alors personne
en France qui fût capable de toucher un clavier.
A cette époque, on prononçait ogre; ce n'est que longtemps
après qu'on dit orgue et organon.
— Orgue de Barbarie. Les premiers instruments de ce genre
furent fabriqués par un luthier de Modène, nommé Barberi. On les
appelait orgues de Barberi, comme on dit : un piano d'Érard ou de
Pleyel. C'est par corruption que le peuple a adopté l'expression
actuelle.
— Jouer de l'orgue de Barbarie : moudre des airs.
i2
178 OHM
Orgueil, du lii'cc onjaù. (Mrc gondé, parce (}iir l'oririicil est
rcnllurG du C(Ciir : oti de ralleiiiand iiryoli, qui est supérieur.
C'est peut-être yiissi la niènie nri.Lnne que jiour o/Y/?/r'r?). inhc
souore et plein de vent.
— L'oruueil déjeune avec rabondance, dîne avec la paii\relé, et
soupe avec la honte. (Franklin.")
Les orgueilleux ont cela de lion ipTils se cliargenl Nolnnlaii-enieiit
de presque toutes les corvées sociales et se contentent d'une
récompense platoni(iue : des croix et l'approbation du public.
L'orgueil est la maladie du génie et le tic de la médiocrité.
L'orgueil ainbilionne la gloire ; la vanité se contente de la gloriole.
L'orgueil ])erd beaucoup d'bonimes : la vanité beaucoup de
femmes. (M. G.)
La femme se sauve quelquefois par l'orgueil, elle se perd toujours
par la vanité. (M. G.)
L'orgueil de l'or est aussi ridicule que l'orgueil des haillons.
— On dit d'un orgueilleux : c'est une statue qui cherche son
piédestal.
— Synonymes : avoir de l'orgueil: faire jabot ; se pousser du col.
Orient, du latin orlens, orientem, qui se lève.
Celui des quatre points cardinaux où le soleil se lève.
Oriflamme, latin auri flamma.
— C'était l'enseigne militaire de saint Denis, patron de la France
et premier évêqne de Paris. Le roi de France était l'avoué de
l'abliayc, et son .sigjiifer.
L'orillamme était en soie rouge, terminée par trois pointes, et
attachée à une lance dorée ; d'où son nom.
Oripeau, de aiwi pe//is.
Lame de cuivre très mince, polie et brillante, qui a l'apparence
et l'éclat de l'or. (La Crusca.)
Orme, du latin ulmus, devenu d'abord olme.
Attendez-moi sous l'orrae,
Vous m'attendrez longtemps,
dit la chanson. En d'autres termes : je ne reviendrai pas.
Autrefois, il y avait ordinairement sur les places, devant les
éghses, un orme sous lequel se tenaient les assemblées, où se
passaient certains actes publics. « Attendez-moi sous l'orme »,
disait-on à un ennemi qu'on menaçait de le citer devant le bailli,
OUT 179
qui rendait l;i justico sous I'oimuo planté devant lo umnoir sei-
gneurial.
Attendre quelqu'un sous l'oriue si.uniliait ne pas craindre d'être
attaque par lui en justice.
— ...Le cardinal Patriicci les attend sous l'orme (les juges de
l'Inquisition), et ils n'oseront l'attaquer. (Sévigné.)
Cette locution a passé depuis au sens ironique de ne pas vouloir
faire ce que quelqu'un demande, ou de ne pas croire à une affir-
mation.
C'est la comédie de Regnard (1GÎ)4) : Altcndez-inoi sous l'orme,
qui a popularisé cette locution. La scène se passe sous l'orme d'un
village, où Lisette donne à Dorante un rendez-vous auquel elle ne
se rend pas, et où le clueur cliante à plusieurs reprises :
AUc'iulez-nioi sous l'orme.
Vous m'aUciuirc'Z longtemps.
— Le Dictionnaire de Trévoux à ce mot dit : « Au village, on
place un ormeau devant l'église ; d'où sont venues ces paroles :
danser sous l'orme..., juges de dessous l'orme, qu'on appelait aussi
juges pédanés, c'est-à-dire sans siège, qui rendaient leurs sentences
debout fstantes in pedlbus), sous un orme ; de là le proverbe :
Attendez-moi sous l'orme. »
...Chascun vous appelle
Partout rad\ocat dessous l'orme.
(Patelin.)
Et, du reste, bonsoir, attendez-moi sous l'orme.
(Hai itnocHE.)
Il y a aussi une pièce du tliéâtre italien : Attendez-moi sous
l'orme.
— L'ambassadeur turc est parti pour Gonstantinople, où il doit
attendre l'impératrice. Sur les rives du Bospbore, y a-t-il des
ormes?... (18GU).
Ornière, de orne: anciennement ourne ; latin ordinem.
L'ornière : le cbemin de la routine.
Orphée, nom mytiiologique.
— En 1848, Lamartine, pendant une grande commotion politique,
renouvelait le prodige attribué à Orphée, charmant par sa parole
harmonieuse les tigres et les lions rassemblés sous le balcon de
l'Hôtel de Ville.
Orteil, du latin articulum. doublet de article.
180 OSA
Le gros doigl du pied s'appelle orteil, le gros orteil ; autrefois
orteil se disait de tous les doigts du pied. En provenral, arleoiis,
au pluriel, signillc les cinq doigts du |»i<Ml. Arfcou rapix'lle mieux
qu'orteil Trlvuiologie laliue.
Orthographe, du gi-ec oriJiÔK, droit, r/rdiiho. j'écris.
— Ortliograplic phonograpliiqiie ou plioiiétiquo, c'cst-à-dirc
d'après la prononciation.
Marie voulait qu'on écrivît : érita<je. boneur.
f^'idée de rapprocher l'écriture de la prononciation est ration-
nelle; mais l'exécution est diflicile, quand on pense que Voltaire
arriva difficilement à faire substituer Français à Fraiirois.
Malgré les nombreuses réformes faites depuis Voltaire, les
étrangers reprochent, non sans raison, à la langue française les
difficultés qu'elle leur présente pour l'orthographe, la prononciation
et les homonymes nomljreux :
Nous portions nos portions.
Les poules du couvent couvent.
Mes fils ont cassé mes fils.
Il est de l'Est.
Peut-on se fier à cet homme si fier ?
Nous relations ces relations intéressantes.
Nous acceptions les diverses acceptions de ce mot.
Il convient qu'ils convient leurs amis.
Il convient qu'ils obvient à cet inconvénient, etc.
Orviétan, italien orr«W«no, originaire d'Orviéto.
L'orviétan, remède empirique, fut apporté à Paris, en 1647, par
Ilieronymo Ferrante, d'Orviéto, qui le vendait place Dauphine,
appelée alors cour du Palais, La thériaque était la base de cette
drogue, qu'il appelait orviétan, du nom de son pays.
Le mot est resté dans la langue pour désigner un remède sans
valeur, une drogue de charlatan.
Os, du latin os, ossis, même sens.
— Les os des animaux forment un cinquième du poids total du
corps.
— Deux chiens pour un os : avoir maille à partir.
Sophie Arnould parodia ce proverbe, en l'appliquant à deux
amants de M"e Guimard, actrice célèbre par sa maigreur.
O Salutaris, nom de prière.
— L'usage de chanter cette hymne à l'élévation, ne date que du
OUA 181
rnmmoncomont du xvi« si(^rle, et fut ordonné par Louis XII après la
bataille de Uavenne. Voici le verset :
0 Sdlntm-is hosha,
Qud' cwli panilis ostium,
Jh'lld prémuni hotitilin,
]l(i rohitr, fer nud-ilinni.
Los chantres de la chapelle royale reniplaçaieiit les mots fc?'
auxilium, par scri-a liliinn (garde les lis).
Osanores ulciits sans or).
Mot lor.ué par le dentiste William Roger pour désigner les fausses
dents qui se moulent sur la gencive, et tiennent par l'ellct de la
simple succion, sans crochets ni ligatures.
Osmazôme, du grec osmc, odeur, soinos, liouillon.
Madère azotée qui se trouve dans la viande et parfume le bouillon,
dont il est le pnnci[te nutritif.
Ostracisme, du grec ostrakismos (de ostrakon, coquille).
Sorlo de jugement en usage chez les Athéniens, ainsi nomme
parce que les citoyens donnaient leur sullVage eu écrivant le nom
de l'accusé sur une coquille. Le jugement condamnait à un exil de
dix ans, qui n'avait rien d'infanuint, et ne s'appliquait qu'aux
citoyens dont la popularité portait ombrage à la démocratie. Aristide,
Thémistocle, Alcibiadc, Cimon, Timothée, Iphicrate, Chabrias,
furent bannis par ostracisme. (Voy. lémoins.)
Otage, anciennenieut ostagc : do hôle et agere (?).
L'otage est l'hôte considéré comme ennemi.
Personne remise à l'ennemi comme garantie d'un traité.
(Semble venir, bien plutôt, de obsidaticum, dérivé de obscs,
obsidis, qui eu avait le sens en latin.)
Ou, conjonction et adverbe.
Conjonction : du latin aut, marque ralternative, la disjonction.
Adverl)e de lieu : du latin ubi, prend alors l'accent grave.
Ouaiile, [n)\\v ouei/lr : du latin ovlruhi, petite brebis; roman
ovellia.
Ne s'emploie plus qu'au (iguré, et au pluriel, en langage d'église,
pour désigner les fidèles, par opposition au pasteur.
A Ids suas orelhas m'« donat per pastor. (Guillaume de Tudéla.)
A ses ouailles il m'a donné pour pasteur.
182 OUB
Ouaille se prononçait oucille.
Il in'ii liion (lict : jo coj^iiois mes ouailles.
Kl l'ili'S m'oyent cii oii\r;ml les oreilles.
(C. Marot.
Ouais, onomatopée.
Inferjerlion do surprise, (rélonnement.
Ouais! voici (pii est plaisant. (Molii-re, Malade imaginaire.)
Ouate, du \ieu\ mot oue, qui s'est dit pour oie (?), à cause du
lin duvet, semblable au coton en rame, qui recouvre les oisons.
— On dit la ouate, quoiqu'il n'y ait aucune h aspirée ; de même
on dit le onzième. L'Académie autorise à dire /'ouate; mais l'usage
le plus répandu est de ne pas l'aire l'élision.
Araiio écrit dans l'éloge de Bailly : « M'"« Bailly avait substitué à
la ouate d'un de ses vêtements, le produit en assignats de la vente
de leur maison de Gliaillot. »
Si Boileau a dit :
Où sur l'ouato molle éclate le tabis,
c'est que la poésie interdit l'biatus, et que l'élision le lui évitait.
Oublie, du latin oheliœ.
Petits pains coniques, consacrés à Baccluis, dont les Égyptiens
avaient fait obélisques par antipbrase (?).
La forme ancienne oublée, suppose plutôt oblata, otïerte.
Gaufre très mince en forme de cornet.
Oublie est dit pour hostie, à cause de la ressemblance avec le
pain des bosties. (Furetière.)
Cette pâtisserie était connue dès le xiii^ siècle, et Ion criait déjà
dans les rues, le soir après souper : « Voilà le plaisir, Mesdames,
voilà le plaisir ! »
Oublier, du latin oblilare (de oblilus, participe de oblivisci).
Provençal oblidar, de ob et d'un radical liv, qui se rattacbe à
livor, lividus, pâle :
Licidas obliviones.
(Horace.)
— Synonyme : boire l'eau du Létbé.
— Gomme ma grand'mère, qui tant plus disait sa patenostre, et
moins la savait; si enfin qu'elle la dit tant et tant qu'elle l'oublia.
{Moyen de pa?' venir.)
— Ne m'oubliez pas. Myosotis, la Heur du souvenez-vous.
On l'appelle aussi : plus je vous vois, plus je vous aime.
OUI 183
En alloinancl : Vergiss mein nlcht.
— L"oul)li n'est qu'un palimpseste; qu'un accident survienne,
tous les elïacenients reviennent dans les interlignes de la mémoire
('■Ioiuk'mv ( V. lliiuo.)
Oubliettes, dérivé du précédent.
(^acliols soiilerrains où l'on enfermait des prisonniers condamnés
à une réclusion p('i'i)étuelle, et sur lesquels s'appesantissait un
éternel oiilili.
Dans les coum'iiIs. ou les a[)peiail /// jxtcc. (Voy.)
Oui, ancieiiueiuent oi'7; du latin hoc illad, c'est cela. Adveritc
alTiniialif.
— Au Moyen-Age, la Franco étail partagée en langue d'o/7 et en
langue d'oc.
La langue d'oc comprenait toute la France méridionale, au-delà
de la Loire, et non, comme on l'a cru la seule province de Lan-
guedoc. On lit, en (llet, dans Froissard (ch. Iy7): « LeducdeBerry
eut le gouvernement de la langue d'oc, et le duc de Bourgogne celui
de la langue d'oïl. »
— Le signe de consentement, au xir- et au xui'^ siècle, était uïl
dans la langue du nord de la France. « Oïl, sire. » (Chanson de
lloldnd, stance oO.)
Dans le Midi, ou disait oc, et c'est à ce mot que la langue des
Troubadours devait son nom de langue d'oc.
On disait aussi ho et o pour o'il et oc.
Qw il lie .sel iic lio ne non.
(RuTEnElF.)
Ta: coiz se Uni, ne diil, ne ho ne non.
(C'/ianson de Ronecvaux.)
Oïl devint ensuite onil et oui.
Volz-lu [aire iiioii conseil ? — Certes, dame, ouïl.
{Iloinan des Sept Saffcs.)
— Prononcer le graïul oui : se marier.
— Les deux mots les plus courts à prononcer, oui et non, sont
ceux qui demandent le jdus d'examen.
— La femme vertueuse dit non ; la passionnée, oui ; la capricieuse,
oui et non ; la coquette, ni oui ni non.
— Réponse de Normand : ni oui ni non. (Yoy. Normand.)
— Oui-et-Non. Bertrand de Born donna ce sobriquet à Henri II,
184 OUR
roi d'Angleterre, pour cnrnrtérisf'r In |iolili([iie versatile de ce
monarque.
En oc et no conais (/ii'iin ilnz iiii iilitiiilm.
(Je rccoiinnis ([ue le seigneur Oui-cl-.Nou nie ploiulK' un dé.)
A'on es 1)0, lie ço que rey.s ftutreijfi.
Quant (t di(j d'or, que pucis diijn de no.
(li. I)K IJOIIX.)
(Il n'est pas l)on, de ce qu'un roi Oftroio, quand il a dit oui qu'il
dise non ensuite.)
On remarquera aussi dans cette phrase dcB. deBorn rexplication
de la locution provençale : Fat) pas dire <lc oui.
Ilippocratc dit oui, t't Galion dit non.
(Yoy. Ilippocratc.)
Ourdir, du latin ordiri, commencer, faire une trame.
l^]st peut-être pour Iiorder. faire une clôture : hordel, hardies
signiliaient claies ou clôture.
Au propre : disposer les fds qui doivent former la chaîne d'un
tissu.
Au figuré : ourdir, tramer un complot.
Ours, du latin ursus.
— Un ours mal léché : un brutal, un homme peu sociable.
— Isidore dérive ours du latin orsus, commencé, ébauché, parce
qu'il est dill'orme en naissant, et que sa mère semble l'achever en
le léchant, comme le sculpteur achève sa statue par de légers coups
d'ébauchoir, ce qui s'appelle, en style d'atelier, lécher son ouvrage.
Aristote et Pline disent aussi que les oursons sont très mal faits
et que leur mère corrige ce défaut de forme en les léchant.
— Comme ung ours naissant, n'ha pieds, ne mains, peau, poil,
ne teste ; ce n'est qu'une pièce de cliair rude et informe. L'ourse, à
force de leischer, le met en perfection de membres. (Rabelais, III, 42.)
Toute sa personne velue
Représentait un ours, mais un ours mal léché.
{Li\ Fontaine, Paysan.)
— L'ourse léchait chaque instant son ourson. (Mercure, juin 1734.)
— Le pavé de l'ours. (La Fontaine, rOuj^s et V Amateur des
jardins.)
11 faut se défier, dans le monde, de ces lourdauds qui ne sauraient
vous obliger sans vous marcher sur les pieds.
— 11 ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.
(Yoy. vendre.)
OrV 183
— Vivre roninic un ours: comme un ermite, un misanthrope.
— Prenez mon oiii's. Dans l'Ours ot Jo Pacha, de Scribe (1820,
se. Yl), Marescot dit : « 1! me faiidrail qnchiiie poisson extraordi-
naire, ...vous devez avoir cela. » Lagin,ueole : «Parbleu! j'ai votre
atl'aire... Prenez mon ours. C'est sou état; ...c'est un ours marin. »
— Ours, pièce de lliéûtre (pii a vieilli dans les cartons. Ces pièces
ne se jouent qu'en été quand les tliéàtres sont déserts.
Allusion à l'ours, qui dort eu hiver, et ne se montre qu'en été.
(L. Larchey.)
Outrage, de iiltva, outre, avec suffixe arje.
Outre, préposition : du laliu nJlra.
— Ou lit dans les lois de (iiiillaiiiue : « Nulz ne reçoit liom ultre
III nuitz. ')
De là viennent: outrer, outrance, outrage, outrecuidance {outre
et cutdei', anciennement croire : s'en croire trop).
Jeune l)eaulé, nuiis \ro\) ontrccnidOi'
Des présents de Vénus,
Quand tu ^ erras ta peau toute ridée.
(Hkine 0!-; Xavaiuif..)
Outrer, dérivé du précédent.
— Etre outré des mauvais procédés de quelqu'un.
— Outré de colère : prêt à éclater comme une outre (!) trop
gonflée.
C'est une expression tirée de l'ancienne escrime, oi'i, dans les
joutes sérieuses^ c'était à qui outrerait son adversaire, le i)ercerait
d'outre en outre.
Les coml)ats à outrance étaient opposés, dans les tournois, aux
luttes courtoises, où l'on joutait avec des lances émoiissées, ou gra-
cieuses. Les joutes représentaient les combats seul à seul. Dans les
tournois, le combat avait lieu par groupe de deux ou plusieurs
chevaliers, en nombre égal dans les deux camps, qui figuraient les
escarmouches. Les combats à la foule, ou mêlées, étaient comme les
essais, les représentations des batailles générales.
Ouvrage, dérivé de œurrc : latin opéra. Provençal o/tra/f/c.
Terme honnête pour désigner le travail des vidangeurs et la
matière extraite.
— Ouvrage mal fait : bousillage.
Au propre, c'est une maçonnerie de bouse, ou paille hachée, et de
terre détrempée qu'on appelle 7>/.ye.
180 OVO
Ovale, (le ore, Inliii ovum.
Figure ('iirvili;jiio l'cprcsoiitrc pur l;i section pljnf (riiii n'iif selon
son grand axe, et qui prend le nom {Y ellipse, lorsque les extrémités
sont égales et régulières.
Ovo (ab), expression latine: depuis Tœnf, depuis le commen-
cement.
AVf ijoiiiiin hrlhun Irojiituiin ordilnr ab ovo.
(IloltACK.)
(Pour i-aconter la guerre de Troie, il ne remonte p.is à l'œuf
double de Léda.)
Horace veut dire qu'Homère a tiré l'Iliade de la colère d'Achille,
sans remonter jusqu'à la naissance d'Hélène, cause de la guerre, et
qui, suivant la Fable, était née de l'œuf de Léda.
— Les anciens considéraient l'œuf comme le principe de toutes
choses; ils commençaient leur repas par des œufs et le finissaient
par des fruits, d'oii l'expression d'Horace :
Ab ovo iisquc nd maUi.
— Inlegrani famem ad ovum a/J'ero. (Cicéron.)
J'apporte au premier service un vigoureux appétit.
— Omne vivum ex ovo (Hervey). Tout être vivant vient d'un
œuf, c'est-à-dire d'un germe existant avant lui.
D'autres ont modillé l'aphorisme, et dit : Omne vivum ex vico;
tout être vivant vient d'un être vivant.
D'autres entîn ont admis la génération spontanée de quelques
êtres animés.
— La fécondité de certains animaux est prodigieuse.
La femelle de l'esturgeon contient jusqu'à huit millions d'œufs :
celle du muge, treize millions.
La carpe est appelée en latin cijprinus, de C y pris (Vénus), à
cause de sa fécondité.
Ces animaux pullulent véritablement.
PAC 187
P. L";iIiIm'' rcll('i;riii. (iiii diiiiiil df r.'iiilcl cl S()ii[>;iil du lli('';'ilro.
Piiiivre ahhé: pauvre aiileur ! On lit sur l'une de ses pièces,
Pc/opée, tra.uédio, une épigraniine dont chaque mot commençait
par un P.
Pélopc'e, pièce pitOYal)le, par Pell(\iiriu, iio.Me. pauvre prêtre
provençal.
Pace (in), expression latine : en paix.
Prison pour les moines : cachot où l'on enfermait pour la vie,
les relii^ieux coupahles.
Pacha, de l'arabe P« schach. vice-roi ; ou du turc hac/ut, de
basch, tête, chef.
Gouverneur, grand dignitaire. (Voy. queue.)
Pactole, nom géographique.
Petite rivière de Lydie, qui charriait de l'or.
S'appelait aussi C/irysorr/ious, mot fait comme Ariège (aur/f/fra),
ou comme Uio de la Plata, rivière de l'Argent.
Aujourd'hui Bagoulet.
— Silius Italiens (IV. 2oi) compare le Tage au Pactole, parce
qu'il roulait de l'or :
Hic cerlnnl. Pactole, tihi Duriiisrjuc Tdijnsqnc.
— Sorti du mont ïmolus, le Pactole passait à Sardes et tomliait
dans l'Hémus. Son nom ancien était dû à un sable chargé de
paillettes d'or qu'il charriait, et qui avait si prodigieusement
enrichi Grésus! D'après la Fable, il était aurifère depuis que Midas
s'y était baigné.
— Posséder le Pactole : être très riche.
On emploie aujourd'hui avec la même valeur les mots : Californie,
Eldorado, Pérou, Opliir, etc.
— L'Eldorado est un pays imaginaire que rEsi)agnol Martinez
prétend avoir découvert dans l'Amérique Méridionale, et qu'il avait
nommé ainsi à cause de l'immense quantité d'or et de pierres
précieuses qu'il disait avoir vue dans Manoa, capitale de la contrée.
— L'Écriture fait mention d'un pays d'Ophii-, où les flottes
d'Hiram, roi de Tvr, et celles do Salomon, allaient tous les trois
188 PAI
ans, ot d'où elles rnpporliiieiit qnrmlitû d'or. Les iiiterpn''les de
l'Iicriture, ne sachant où placer ce pays d'Opliir, l'ont vainement
cherciié tour à tour en Asie, en Afrirpie, en Amérique. Jospplie dit
qu'il s'appelait « la Terre d'Or ». On croit que c'est la Californie.
Paganisme, du latin paganus, habitant des campagnes, parce
que ce fut dans les campagnes que cette religion se réfugia après
rétablissement officiel du clirislianismo.
Aujourd'hui même, certaines traditions et superstitions du paga-
nisme subsistent dans les campagnes. (Yoy. paijsan.)
On l'appelle aussi panthéisme {'i), polythéisme, idolâtrie.
Page, de l'italien paggio. du grec paldion. enfant.
D'où le latin p(edagogium : lieu où sont élevés les enfants.
Quelques-uns le tirent de pagani (?), jeunes paysans que les
seigneurs prenaient à leur service.
— Être hors de page, c'est-à-dire n'être plus sous la dépendance
d'autrui, sous la surveillance d'un gouverneur, comme l'étaient les
pages. Être d'âge à se diriger soi-même.
Au temps de la chevalerie, les fds des gentilshommes étaient
placés, dès l'âge de sept ans, auprès d'un haut baron, comme pages,
damoiseaux, varlets. A quatorze ans, ils étaient hors de page et
devenaient écuyers.
— Napoléon avait des pages, choisis parmi les enfants de grande
famille. Il leur avait donné pour gouverneur le général Gardanne.
— Hardi comme un page. (Beaumarchais, Figaro, Y, 6.)
Page d'écriture ; du latin pagina.
Quod in illis rei'sus panguntur (Festus), parce que les lignes
d'écriture s'y étalent, y sont écrites.
Pagne, de l'espagnol 7>«/jo, latin pannus, pièce d'étolïe.
Morceau d'étolïe dont les sauvages de l'Afrique se couvrent le
milieu du corps, de la ceinture aux genoux.
— Quelques-uns citent le vieux français crépagne, Christi
pannus. On couvrait d'un lambeau d'étolïe la nudité des suppliciés.
Haillon hideusement pudique, sorte de feuille de vigne des supplices
antiques. Jésus-Christ sur la croix n'avait que ce lambeau.
Paillard, latin palea.
Au propre : qui couche sur la paille.
\)\X(iM\^Q Aè^iïiii palliardus : Homo nihili et in/lmœ conditionis,
homme de rien, de la plus basse condition.
PAI 189
Au liiiuré : débaiirhé, luxurieux, adounc aux fcuiiuos.
Cela vieut sans doute de l'ancien usage de donner un anneau de
paille aux personnes qui avaient compromis l'iionuenr de leur
famille, et que Ton forçait à se marier.
Peut-être aussi faut-il le rapporter à pa// lasse.
Rabelais (I. 21) emploie pa/Nfu'der pour se rouler, fainéanter au
lit. Ailleurs il dit que < paillardise est Toccupation des gens non
aultrement occupés ».
Ce petit paillard toujours lastouuait ses gouvernantes. (Rabelais,
livre I.)
Paillasse, niais, bouribn de salliudianque. qui amuse le public;
par ses naïvetés. Il doit son nom à son costume, qui est taillé dans
une bousse de paillasse.
On l'appelle aussi p//re, du vieux mot pistre, boulanger, parce
que les anciens boutions s'enlarinaient le visage, comme fait encore
Piei'rot.
Paille, du latin pa/ea : \)ro\ençà\ pa/ ha.
— Avoir la paille et le Idé; comme la toison et la peau^ c'est-à-
dire garder tout pour soi.
— Dans l'Évangile, la paille désigne les réprouvés. Le Seigneur
a dit qu'il séparerait la paille du froment, et qu'il la brûlerait.
— l'être sur la paille, c'est-à-dire être misera l)le.
— De grand train, sur l'estrain. {Estrain signifiait autrefois
paille ; latin stramen.)
— On voit un:; paille dans l'œil de son voisin ; on ne voit pas une
poutre dans le sien (Matliieu, Yll, 23 ; Luc, YI, 41.)
Ut ociilus, sic anunus se non videns, alla cernil. (Gicéron, I,
Tusculnnes.)
L'cimI, qui voit tout, ne se voit pas lui-même.
Si nous n'avions pas tant de défauts, nous ne prendrions pas tant
de plaisir à remarquer ceux des autres.
In alio pedlculum vides, in te ricinum non vides. (Pétrone,
Satiricon.) Tii\o\?,\u\ pou sur ton voisin, et tu ne vois pas un
ricin sur toi. (Le ricin est un insecte qui s'attaclie aux oreilles des
bœufs et des chiens.)
-- Rompre la paille : conclure un marché, stipuler quelque chose.
Cette locution vient d'un usage ancien. C'était une véritable
quittance, à l'époque où l'écriture était peu en usage, que de
présenter un des brins d'un fétu brisé. Seul il pouvait bien s'adapter
à l'autre.
190 PAI
C'est encore le |ii-iii{i|i(' iidoph'- pour les registres à souclie, dont
on détache les qiiitttinces en les coupant suivant nne ligne sinueuse.
— C'est ainsi que, par l'étude de la linguistique, on peut dégager
des ombres des temps obscurs le sens de certains mots et de
certains usiiges juridiques.
Dans le D('])ll (imourcux (IV, 4), Gros-Uéné dit à Marinette :
l'niii' (•(iii|icr loiit fliemiii à nous rapatrier,
Il faut rcjiiiprc la paille : une i)ailli' rompue
Rend entre gens d'honneur une affaire conclue.
IMiis bas, il ajoute :
Romps, voilà le moyen de ne s'en ]iliis dédire.
Eu latin sllpuln, paille, et .s/ipii/are, dont on a fait stipule?',
signifiaient aussi : l'aire une convention.
Pecunia slipulata (Cicéron): prix convenu.
Le mot stipulation est ainsi expliqué dans la loi romaine :
« Arracher une paille, puis la jeter sur le sol, en prononçant ces
paroles : Par celte paille, j'abandonne tout droit. L'acquéreur
prendra la paille et la conservera, et si quelqu'un conteste son
droit, la uième paille sera présentée en justice devant témoins. »
— En 922, les seigneurs du royaume, pour déclarer à Charles le
Simple sa déchéance, à cause des concessions qu'il avait faites à
Raoul, chef des Normands, brisèrent au pied du trône des pailles
qu'ils tenaient à la main.
— Sully rapporte dans ses Mémoires, que le comte de Soissons
lui ayant demandé une grâce, le menaça, s'il ne l'obtenait, de
rompre la paille avec lui.
— Tirer à la courte paille, consiste à décider un litige en s'en
remettant au sort, qui fait échoir de deux pailles la plus courte à
l'un des contestants.
— Pour indiquer qu'un animal est à vendre, on lui attache
encore à la queue un bouchon de paille.
— Homme de paille : préte-nom, homme complètement étranger
aux choses dont il assume la responsabilité.
Viendrait de pallot, paysan, qui couche sur la paille (?).
Pain, du latin panis, remonlaut à pasco ; provençal y^an.
De là : panade, panier, panetière, apanage, compagnon.
En argot, larton : pour les amateurs de calemhours, le « mot de
la faim », ou la « pierre à aiguiser les couteaux ».
— Pain trompé dans du vin : soupe de perroquet.
PA( 191
— l*aiii 1(111.'-; : pain jorko. Ce mol dati' de IS^i. année où le sin.uc
Jocko enl tant de succès à Paris.
— An pain el à l'ean. Sixie-Qninl. an coniinenccMncnl de sa car-
rière, disait a\('c iiiic hninililé sinndèf : Pa/iis et (k/iki, vlfn hoaln .
Devenn pape, il imidilia ainsi la [ilirase: Af/ur/ cl jxm/'s, ri//t rmiis.
Kan et pain. \ie de chien.
— A\oir (In pain ([nand un n'a jdns de dénis : devenii' l'iche
dans sa vieillesse.
— La société se compose de ceux qui ont pins de pain que
d'appétit, et de cenx qui ont plus d'appétit que de pain. (Cliamfort.)
— ^"avoir pas de pain. Malherbe écrivait à Racan : « J'ai le
courage du philosophe pour les choses superllues ; pour les néces-
saires, je n'ai autre sentiment que d'un crocheleur. On peut se
passer de conlitnres ; mais du pain, il faut en avoir ou mourir. »
— Manger son pain hlanc le premier : commencer par le
hoidieur ; avoir été plus heureux qu'on n'est.
— J)n pain et des spectacles. (Yoy. .^ipcctacles.)
— Pain bénit. La distribution du pain hénit dans les églises est
un souvenir de la communion, à laquelle tous les lidèlcs prenaient
part dans la primitive Kglise : d(>pnis. IT-^glise ne donne la commu-
nion qu'à cenx qui s'y sont préparés.
— C'est pain ])énit [)0ur lui : c'est bien l'ait.
Pair, du latin />ar. égal, semblal)le.
D'où : parage, pareil.
— Les pairs étaient autrefois les grands vassaux.
— Depuis J81o, ce nom était appliqué aux membres de la
Chambre haute, dite des Pairs, qui avait mission de veiller à la
conservation des lois fondamentales.
— Aller de pair : être l'égal.
— Être au pair, dans une maison de commerce, c'est-à-dire sans
rien gagner, mais aussi sans payer de prime pour son appren-
tissage.
Paître, du Vàtïn pascere, nourrir. Provençal pa^lré.
D'où : pâtre, pasteur.
— Allez vous faire paître!... vous faire lanlaire (voy.). se dit à
un importun dont on veut se débarrasser.
Allez, l)ix'liis, vous faire pailre.
Je ne suis plus votre berger.
Paix, du latin pax, de pango, ficher, arrêter.
102 P.U.
Silii.'ilion (^xciiipUî do Iroiililc cl d'ii^itation.
On a la paix avec les aiilrcs, la tcaïKinillitc avec soi-inènie, le
calme après l'agilation.
— Qui vit en paix, dort en repos. (Voy.)
Si vis pacem, para belliDn. (Gicéron.) Celle maxime paradoxale
est moins juslc que : aS'^' vis pacem, para pacem.
On dit aussi : se garder à carreau ; pour se tenir prêt à tout
événement {carreau désif;iiait aiili'olois un trait, un gros [)rojectile
de guerre) .
— Les hommes (pii ont rêvé la paix universelle, et se sont
elîoi'cés de la faii'e ivgner en luirope, sont Henri IV, Saint-Simon,
l'abbé de Saint-Pierre, Gobden.
— Le 25 décembre 1873, à un banquet offert à Paris, à M. II.
Richard, par les amis de la paix, M. Richard prononça un discours
où il dit qu'aucune idée ne réussit sans le patronage de la France,
dont l'inlluence est sans égale, et dont la langue, la littérature et
les lois sont universelles. Il ajoute que sa proi»osition n'est pas plus
une utopie que ne l'était la proposition de l'abolition de l'esclavage
et celle du libre-échange, qui se sont réalisées. Il termine en disant
que ses idées rencontrent partout un accueil sympathique.
Paladin, forme adoucie de palatin : latin palalimis.
Homme do palais, homme de cour.
Ce nom fut donné d'abord aux officiers les plus notables du palais
de Charlemagne : Roland, Ogier, Olivier, etc.
Chevalier-errant des romans.
Palais, du latin palatium, maison des Césars sur le Palatin,
la plus célèl)ro des sept collines et la plus fameuse par ses sou-
venirs.
Le Palatin était le véritable berceau de Rome : Romulus l'entoura
du premier fossé. Il devait sou nom à une colonie de Grecs venus
de Pallantium, ville d'Arcadie, sous la conduite d'Évandre, et qui
s'établirent sur cette coHine, soixante ans environ avant la guerre
de Troie.
Auguste s'y était fait construire une maison, palatium, dont le
nom est devenu depuis lors une appellation générique.
— En 18G0, Napoléon III a acheté les Jardins Farnèse, situés sur
l'emplacement du palais impérial, et y a fait pratiquer des fouilles
sous la direction de l'antiquaire itahen Pietro Rosa, qui est parvenu
à mettre au jour les fondations de l'antique habitation des Césars.
V\L 193
Palais, partie siipérioiu'O do la lioiiclie, vient, comme pain,
jxiiU'i', du lirec paô.
Non, mais lùeii i>liit(U de /xilafinn. comparé à une ,urande salle
voûtée.
Palais de Justice. A été ainsi nommé parce que les édilices
où se rendait la justice étaient les palais des rois ou des maisons
leur appai'tenaut : ils y tenaient eux-mêmes leurs plaids. Depuis,
ils abandonnèrent ces maisons aux magistrats, et elles conservèrent
leur ancien nom de palais.
(In l'appelait aussi hasi/ica, d'où est venu le nom de basoche.
— Le caltinel du ministère public s'appelle parquet, mot fait
comme celui de rouv île l'Échiquier, en Anuleterre, à cause du
pavage en écbiquier de cette salle.
De même, à Rome, la cour de Rote, dont le parquet, fait sous le
pape Jean XXII, était en forme de roue ou de dessin circulaire.
Palatine. Sorte de fourrure adoptée par les femmes, à la lin du
wii'- siècle.
Cette mode fut introduite par Madame, duchesse d'Orléans, tille
de l'électeur palatin, et seconde femme de Monsieur, frère de
Louis XI Y.
Ce vêtemeut, encore en usage, sert à couvrir les épaules et la
poitrine.
Pâle, du latin ])allidus.
Oui a l'air d'avoir oui»lié de se faire enterrer (?).
Palefroi, anciennement yjfl/tyV'o/r/; bas-latin parafredus.
D'où : palefrenier, anciennement palefredier.
Cheval de parade sur lequel seigneurs et châtelaines faisaient
leurs entrées solennelles.
Ce mot est vieux, et ne sert plus depuis les romans de Chevalerie.
Nicod le dérive de /ja?' le frein, parce que, dans les cérémonies,
les notables s'honoraient de conduire ces chevaux par la bride.
— Le palefrenier : valet qui panse les chevaux.
Ce titre était autrefois honorable, et a été remplacé par celui de
grand-écuyer.
Le connétable était aussi, à l'origine, l'officier gardien des écuries.
Palindrome, se dit d'un vers ou d'une ligne de prose qui se
peut lire indistinctement, de gauche à droite ou de droite à gauche,
sans que la forme des mots soit changée.
13
i94 PAL
Palinodie, du niv'c jkiIIu, de iioiivcîiii, oih-, cli.'iiit.
Clmiit (l.'iiis l('(iiicl lin [lorlc )-('li';icl(' ce fjii'il ;i rli;iii(('' préccdem-
meiil.
Horace ayant oll't'iisr la iiirre de la iciiiic Tviidaris, composa en
son lioiiiiciir une cliaiiiiante palinodie :
0 iiiiilrr piilrlira fiUa pitic/irior.
Anjourd'lnii, le mot a perdu cette acception littéraire.
Il se dit de tout clianpement brusque dans les paroles et dans la
conduite. Gliantcr la palinodie, c'est se rétracter, louer sans pudeur
ce qu'on avait déni.uré, etc. (Voy. gamme.)
Palladium, mot latin.
Statue de l*aihis, ou Minerve, que Ton conservait dans Troie, et à
laquelle les destinées de la ville étaient attachées. Elle était tombée
du ciel dans le temps où Ilus fondait Troie. Ulysse et Diom(''de
parvinrent à l'enlever.
Pallier, du latin paUiare. couvrir d'un manteau, cacber.
C'est le contraire de révéler, revelare, démasquer, enlever le
voile.
— Le pallium, manteau grec, était un vêtement plus étroit que
la toge romaine. C'était le costume des anciens pbilosopbos,
qu'avaient adopté les prêtres cbrétiens^ et dont la soutane rappelle
probaltlement la forme.
— Du mot pallium vient le provençal pâli, dais en soie sous
lequel ou abrite le Saint-Sacrement.
CnacHS (ic ho minitel de pâli bcn ohral.
[Fierahras, v. 1270.)
(Cbacun eut un beau manteau de soie bien travaillé.)
Le poêle, drap mortuaire, qui se porte devant le cercueil, s'appe-
lait autrefois paile. ,
l'iiis l'a lait d'un paile couvrir.
(Roman de la Ilose.)
— Le mot prcle.rte, excuse pour dissimuler une faute, a été fait
comme pallier, du latin prœtexta, la robe prétexte que portaient à
Rome les enfants de qualité, et dont les grands personnages étaient
vêtus pendant les jeux publics.
Ad prœtextum mutatœ uolantatis. (Suétone.) Pour justifier son
infidélité.
Palme, du latin palma. doublet paume,, main, à cause de la
PAN 193
forme de la fouille du pnlniier, dont le fruit est niipelé (hifte, autre-
fois (laclc, du lirec dactylos, doigt, parce que les dattes ressemhlent
aux doigts.
Ancienne mesure romaine : étendue de la main ouverte.
— Les pahues du mart\re. ...de la victoire. (Voy. laurier.)
Les Romains appelaient pahnariuni, le prix de la victoire, et
palinariiis, celui (pii Tohlenait.
I/omo inHltaruin pahitanu/i. (Cicéron.) Un homme couvert de
gloire, de lauriers.
Paltoquet, radical paletot, que Ménage dérive de palliolum (?).
On ai^ieile ainsi un homme grossier, sans importance.
— Au Moyen-Age, le paletot était une casaque à coqueluchons,
comme le manteau de certains religieux. Le paletot servait aux gens
de guerre qui furent appelés « paltoquets », à cause de leur costume.
Les soldats romains se servaient aussi d'un vêtement que Slrabon
désigne sous le nom de paltos.
Notre paletot moderne est ce que les Romains appelaient ey^Z/o^e.
Pan, du grec Pan, dieu champêtre ; et aussi de Pas, tout, la
nature personniUée.
— Le grand Pan est mort ! Cette mort du grand Pan arrivée
sous Tibère, à laquelle on trouve une allusion dans Pantagruel,
quelques-uns l'ont interprétée de la mort de Jésus-Christ.
Pandémonium, du grec pas, tout, dai/non, démon.
Milton, dans le Paradis perdu, appelle ainsi la salle du Conseil
des démons.
Lieu de désordre et de bruit.
Pandore, nom mythologique; dnf^rec pan, tout, doron, présent.
— La boite de Pandore : présent fatal.
Selon Hésiode, Pandore est la première femme, créée par Vulcain
et Jupiter. Yulcain la conduisit à l'assemblée des dieux, qui tous lui
tirent un présent. Pallas lui donna la sagesse; Vénus, la beauté;
Apollon, la science et l'art: Mercure, l'éloquence. Jupiter, pour se
venger de Prométhée, qui lui avait ravi le feu du Ciel pour animer
l'homme, donna à Pandore une boite fermée et l'envoya chez Épi-
méthée. Celui-ci, malgré l'avis de Prométhée, ouvrit la boite, et il
en sortit tous les maux qui affligent le genre humain. Pandore se
hâta de la refermer, mais elle ne put y retenir que l'Espérance,
prête à s'envoler.
m PAN
— Los voleurs iippcUciil « boilc ;'i l'andurc ». l:i nvc iikiIIc (loiir
mouler rcmprcinlc dos dofs.
Panier, du hiliii iiinniriinii. corhcillr à |i;iiii.
— Ou iippellc « |»;iiii('i' jicrcc» un dissii»;iloMr', |i;ir foiui)nr;iison
à un jjauior s;ius fond, cpii no peut ricu gjii'dor.
« Panier percé » se dit dans le uièuie sons que « sot coiiiuic nu
panier », c'est-à-dire incapable de rien retenir de ce qiiou lui
apprend.
— Faire danser l'anse du panier : faire son beurre: gratter.
Le petit pain d'un sou [lour le déjeuner de Monsieur, ci : deux
sous.
— Au jour de l'an, l'intendant du cardinal Dubois venait rendre
ses devoirs à son maître, qui lui disait : « Monsieur, je vous donne
ce que vous m'avez volé. »
— Le dessus du panier : c'est-à-dire le premier cboix.
M"°£' de Sévi.iiué disait des fables de La Fontaine, qu'elle compa-
rait à un panier de cerises : « On veut cboisir les plus l)ellos, et on
finit par vider le panier. »
On dit dans le Berry d'une personne de mauvaise bumour :
« Quelqu'un lui a manaé le dessus de sa soupe. » C'est là un pro-
verbe de gourmand bien réllécbi, car la partie la meilleure d'une
soupe grasse surnage et se trouve toujours au-dessus. Le premier
bouillon de la marmite est comme le dessus du panier, où l'on
place les plus beaux fruits.
— La crinoline, qui a commencé, en I800, à transformer la
femme en nne tour pyramidale, a déjà existé au temps de François I^r
sous le nom de vertugadin, et à la cour de Louis XIY, sous celui
de panier. (Yoy. tournure.)
Panique. Terreur panique, c'est-à-dire sans motif.
C'est le nom que les Grecs donnaient à l'espèce de crainte qui
n'est produite par aucun danger véritable.
Cette locution vient de ce que Pan, dieu des bergers, venu au
secours de Jupiter contre les Titans, les épouvanta d'une frayeur si
subite, qu'ils prirent la fuite.
Polyenus raconte aussi que Pan, l'un des capitaines de Bacchus,
mit en fuite ses ennemis par un grand l)ruit de cris et de trompettes,
qu'il fit faire à ses soldats, dans une vallée où il avait observé plu-
sieurs écbos. Cela fit croire aux ennemis que les troupes de Pan
étaient très nombreuses et les mit en fuite.
PAX 107
De l;'i vient l;i fiihlo qiio lu nyiii|)lie Kclio a été ainiéo pai- le dieu
Tan.
I'aiisaiiia< iiai'lc aussi de lori'eiirs imniqiics, ce qui itrouvc l'anli-
qiiité de celle lociilion.
Panneau, tliininiitil' de ixin : latin pannus.
— Ddiiiier dans le iianiitMii. Panneau est un tenue de cliasso et
dr'siaiio une (^spéco de lilet [tour |»i'endre le ciiùer, et surtout les
lajiins.
— Ttunl);'!- dans le panneau. Ici, panneau, est pris dans le sens
de écoutille ouverte sur le pont du navire, pour descendre dans
l'intérieur (0- H se dit dans le sens de attraper, prendre dans une
trappe ; comme tréhuclier, tomber dans un trou.
Il est liomme à tomber dans tous les panneaux qu'on lui présen-
tera. (Molière. Pourccaugnar, I, \.)
Panorannaj, du lirec pan, et orania, vue.
Grand taltleau circulaire et continu, qui est vu du centre de la
rotonde où il est i)lacé. et qui produit l'illusion de la nature elle-
même.
Le pantu'ania a été in\enlé [lar Breyzi.i!', de Dantzig, en 1793. Il l'ut
importé en AuLilelerre par le peintre écossais Burker. En 1800,
Fulton l'inti'oduisit en Fran.ce.
— Le i)remier panorama l'ut établi à Paris près le passage qu'on
appelle depuis « des Panoramas «. d'où il a été transporté, vers 18i0,
dans la rotonde des Ciiamps-Élysées.
— Le pauoi'ama a donné lieu à diverses inventions analogues:
cosmorama, diorama, etc.
Panse, du latin panier, /nnidre/n, ventre.
Autrefois on disait: panser, nourrir, donner largement à manger.
Il prit dedans Paris cent beaux jeunes et gualants compaignons
bien délibérez, et cent belles garces Picardes, et les feit bien traicter
et bien panser pour huict jours. (Rabelais.)
Panser, soignei' nue [daie, est le même mot que penser, du
latin pensare, s'occuper de.
,Te le pansai, Dieu le guérit. (A. Paré.)
Pantalon, vêtement ainsi nommé parce qu'il était en usage cliez
les Vénitiens, nommés eux-mêmes « pantalons », à cause de saint
Panlaleoue, très honoré cliez eux.
— Synonyme : Inexpressible (pour les prudes Anglaises).
198 PAN
— Jiidis chausse. La i»arlie supérieure du vèleinenl don bas
était le liaut-dc-cliausses : l'autre, le has-de-cliausscs, et, par abré-
viation, bas, quand on porta des culottes.
— Le saint Panlaléon, ancien patron des Vénitiens, avant saint
Marc, avait un nom grec signifiant tout miséricordieux.
Il a donné son nom à un personnage grotesque de la comédie
italienne, qui représentait les vieillards, portait nn masque à barbe,
une espèce de robe déjuge et une culotte longue, dite d'après lui
pantalon.
Panl;don est vénitien, comme Arlequin est bergamesque, et le
Docteur, vénitien.
On appelle pantalonnades, des farces dans lesquelles parait cet
acteur. C'est ordinairement un marcliand ou un bourgeois de Venise,
bonbomme ridicule, amoureux et dupe: type des Gérontesde notre
comédie, et qui avait lieaucoup de rapports avec les vieillards de
Térence et de Plante.
Pantalon était né sous une étoile fâcbeuse : s'il y avait un soufllet
dans l'air, c'était pour lui : sa fille était séduite parle premier venu ;
son tUs était empaumé par une égrillarde debasard.
— On lit dans le Macjasin Pittoresque (1837, p. 294) : « Les
prolétaires de la Répul)lique de Venise, à la fin du xvi^ siècle, por-
taient des culottes à longues jambes, réputées par les étrangers
comme une des plus bizarres cboses qu'il y eût au monde. Comme les
Vénitiens étaient désignés en Italie par le sobriquet de Pantaloni,
à cause, dit-on, de saint Pantaloni, leur patron, ce nom passa à leurs
culottes. »
Pantin, de l'italien fantoccio, fantocbe, poupée.
Ce sont de petites figures articulées, en carton, représentant des
personnages burlesques, dont on fait mouvoir les membres avec un
fil. Ils furent introduits en France vers 1747, et firent un instant
fureur. Bouclier en peignit lui-même qui se vendaient très cber. La
ducbesse de Cbartres en paya un l.oOO Uvres. On ne pouvait aller
dans une maison sans en trouver de pendus à toutes les cbeminées:
on fit même une cbanson sur les pantins :
Que Paulin serait content,
S'il avait lart de vous plaire !
Que Paulin serait coulent,
S'il vous jilaisait eu dansant !
— D'autres tirent ce nom des habitants de Pantin, près Paris,
PAP 100
réputé? lioiir Iciii- lialiilctt'' ;"i la diiiiso. rninnio l'indique une vieille
cliaiisoii :
(".'■ii\ ilf l';iiitiii. (If Saiiit-OiiL'ii. (le Siiint-CloïKi
Dausnil bini iiiinix (|iie tous ceux de ciiez iiuiis.
— D'autres enrore \ voient un rapport avec le vieux verbe fran-
çais / (inicr, étendre : ou avec le latin penditure, être suspendu.
Pantomime, du ,urec panta, tout, mimeomai, j'imite.
Art de rendi-e les sentiments et les idées d'une scène dramatique
par des gestes, sans recourii' à la parole.
— Nom des comédiens (pii l'eiu'ésenlaient, à Home, des pièces de
théâtre sans pai'ler.
Sous Auguste, Batliylle et Pylade établii'eiit une école de panto-
mimes.
Pantoufle, origine très incertaine.
Rabelais dit (liv. I, ch. 21) : « Car il disoyt que les mêles et
bornes de boyre estoyenl quand, la personne beuvant, le liège de
ses pantopides eniloyt en haut d'ungdemy pied. » C'est-à-dire qu'il
fallait que le vin qui sortait des pores du buveur lit gonller le liège
qui formait les semelles de ses pantoufles.
D'où il parait que Rabelais faisait venir ce mot du grec pan,
p/iel/os, tout liège ; et que de son temps, les semelles des pantoufles
étaient de liège.
— Pantoiilles de. verre. (Voy. verre.)
Paon, du \\\\\\\ pava, paroneni (onomatopée).
D'où: se pavaner, faire la roue, comme le })aon, qui étale sa
queue, pour eu faire ressortir les belles couleurs.
Oiseau galliuacé, apporté d'Asie. (Voy. Argus.)
— On dit : fier, orgueilleux comme un paon. Le i)aon est le sym-
bole de la vanité. Sa queue, dont il est si lier, tombe à la chute des
feuilles, et ne repousse qu'au priiiteini)s. Pendant sa mue, il se
cache de honte.
Papa, terme enfantin, tiré du grec (onomatopée) ; comme mnman,
en provençal marna.
Lorsque les enfants commencent à parler, ils ne prononcent que
quelques syllabes des mots qu'on leur suggère, et les répètent sou-
vent deux fois.
Le mot papa est fait comme maman, bébé, caca, fanfan, dodo, etc.
Pape, du grec 2)appas, père.
200 PAP
On le dérive aussi de la première syllabe des mois y^ft/rv y>(///'/7y/<,
ou de la première lettre des quatre mots latins Peints aposlolus
jjoleatalcm arcipiena... C'est aller cherclier bien loin.
— Autrefois ce nom était appliqué aux évè(iues. En 1U7;3, (jré-
goire Yll l'aHecta au seul évêque de Rome.
— On donne au |)ape les lili-es de : Sa Sainleté. le Sainl-Père, le
Souverain-Pontife, lEvèque de Home. le Successeur de Saint Pierre.
On l'a appelé aussi le Grand Vicaire du Ciel. (Voltaire.)
Palcv f/o/o)'nsi(s (Veuillot) ; le Prisonnier du Vatican (187IÎ).
« Sa Sainteté » est une expression oflicielle d'une llatlerie exces-
sive, qui donnerait à penser que le pape est déjà dans le ciel.
On a appelé, en 18G9, le pape le Grand Mendiant, à cause du
denier de saint Pierre.
T)rl papa, xdi ([ue (hini liinpimon
Pro (Ici piirdon cl jiattr ilr son nrfjrn.
(li. Ii'.VlTAMAVON.)
(Touchant le pape, je sais qu'il donnera pardon largement, mais
peu de son a ruent.)
Âccipe, sume, cape, sunt verba placenlin popœ. (Rabelais.)
— La couronne du pape s'appelle tiare en français, et en italien
triregno. Elle est à triple étage. synil)orisant les trois pouvoirs du
pape : 1'^ chef de l'Église ; 2'' évêque de Rome ; 3" souverain tem-
porel des États de l'Église.
La couronne, simple d'abord, fut doublée par Roniface VIII, et
triplée par Urbain V, en 1352.
— Le terme moyen du règne des papes est de 8 ans ; Saint Pierre
a régné 2o ans ; Pie VII, 24 ans : Pie IX a dépassé aujourd'hui (1870)
sa 24'' année depuis son exaltation. Ce sont les règnes les plus
longs.
— Deux cent cinquante-trois papes ont occupé la chaire de
Saint Pierre dans l'espace de 1.800 ans: c'est la succession de
souverains la plus longue qui ait jamais été.
— En avril 130G, Rertrand de Got (de Razas), archevêque de
Rordeaux, nommé pape par l'influence de Phihppe le Rel, établit le
Saint-Siège à Avignon.
Ses successeurs y demeurèrent 72 ans, et conservèrent la souve-
raineté du pays jusqu'en 1768. (Voy. Avignon.)
— Les papes sont sortis trente-neuf fois de Rome, et ils y sont
toujours rentrés.
— Grégoire I'^'' est en quelque sorte le premier pape qui ait réuni
PAP 201
le pouvoir temporel au spirituel, et crée cette tliéocralie qui fut si
puissante jusqu'à luuorenl III, et qui perdit peu à peu son prestige.
— Dans les Ktals de ri;dise, le pape règne en maitre absolu,
ayant à la fois le ciel et la terre, les clefs de Taulre monde et de
ceUii-ci, pouvant vous damner et vous faire pendre, tuer voire âme
et votre corps : pouvoir énorme, le plus grand ipii lui jamais...
(Tli. Gautier.)
— (Jui enlre pape au conclave, en sort cardinal : le sort d'une
élection est douteux. (Voy. conclave.)
— Les partisans exallés du pajjo s'appell Mil ulli-amontains, ou
papistes, possédés du iia[)e.
Papegault, nom ancien du perroquet, parce qu'il pape, c'est-à-
dire mâche les branches des arbres, du gault.
Ce mot est fait commc^. pape/art/, qui mange le lard, et j)ape-
figue, nom ancien du bec-tigue.
On a dit plus tard papetjal.
Papelard, A^ paper. manger avec sensualité; W\\\ pdp pitre.
(Cf. croiiuelanlon, dans Rabelais.)
— Pappare tninutiim (Perse) : paper menu.
— Un papelard feint ralisliiience et fait gras en secret.
Tel l'ait devant le papelart,
(Jul derrière pape le lart.
{Mirœlc de la Vierr/c.)
Papier, du latin papyrins, adjectif dérivé de papyrus.
Le papyrus, écorce d'un roseau du Ml, servait à écrire, comme
le liber, ou écorce, qui a donné livre.
Le mot volume vient de volvei^e, rouler, comme rouleau, do
rotulus, parce que les anciens roulaient ces diverses écorces, une
fois écrites.
Les Grecs et les Romains se servirent longtemps du papyrus, et
aussi du parchemin. (Voy.)
— Le papier de cliilTon fut inventé au xiF siècle, à Râle.
Les premières papeteries s'établirent en France vers 1312.
L'invention du papier à la mécanique est due à Robert, (uivrier
d'Essonne, en 1798 ; elle ne fut exploitée en grand qu'en JSirj.
Les papiers peints ont été importés de Chine vers 1750.
— Papier ministre, ou tellière. Papier de forme et de qualité
spéciales, qui sert à adresser des rapports aux ministres, et qui fut
fabriqué par ordre du ministre Letellier.
202 PAF'
— Papier (\(\ soio, nii paiiicr Josopli : du nom de l'invcntoiir
Joseph Monl.uollicr.
— Papi(>r Jésus. (Vov.)
— Los Précieuses nul appelé le papier <' riiilerpi'rle iNiiel du
cœur ».
A la laiidi'iir (iiii brille en moi
Sr joint lo |)iiis noir (•araclérc ;
Il n'est rien (iiir je ne tolère :
.Mais je suis inéelianl (juand je bois.
(lùiigrric.)
— Le MX'' siècle est le siècle du papier. LXudier.)
— l'apiei's. l/adiuiuislratioii de la [lolice n'accorde que diflicile-
meul des uiédailles autorisant l'exercice de certaines professions
intei'lopes de la rue, telles que musiciens et chanteurs ambulants,
grimaciers, chilTonniers, etc. Elle exi^f' du requérant plus de
garanties ipie pour un inspecteur généi'al. Il faut des certilicats de
toutes soi'les : de bonnes vie et mœurs, de bonne conduite : des
quittances de loyer, et enfin des papiers.
Ce mot Aq papiers semble bien innocent d'abord : mais il cache
son jeu; il est terrible, gros de menaces et de diflicultés; il est
inexplicable, multiforme ; il ne veut rien dire, il signifie tout. Dans
notre civilisation, un homme qui n'a pas de papiers est un homme
perdu.
Qu'est-ce que des papiers? Personne ne l'a jamais su. C'est un des
termes de cette terrible langue administrative que personne ne
parle et ne comprend, et qui s'écrit sur de si vilaines petites feuilles
de papier entachées du timbre qui coûte si cher. (Pr. d'Anglemont,
les Chiffonniers.)
— Être bien, ou inal, dans les papiers de quelqu'un ; c'est-à-dire
dans son esprit.
— Rayez cela de vos papiers : n'en croyez rien.
Moi, voire ami ! Rayez cela do vos papiers.
(MoLitiiE, Misanthrope.)
— Paperasses, papier à ratures, servant pour les brouillons.
Papillon, du \dX\n papilio. Autrefois aussi parpaillon, qui est
resté en provençal.
Gargantua couroyt voulentiers après les parpaillons. (Rabelais,
cil. XI.)
— L'inconstance du papillon est une erreur des poètes, que les
naturalistes ont rejetée depuis longtemps. Le papillon prend le suc
des Heurs, sans eu être le moins du monde épris. Il s'en nourrit, mais
PAR 203
ne les courtise pas ; en volant do runo à raiilro. il xaiic ses mets.
non SOS honiniajics. C'est un coiivivo délicat, mais (''esl un é[H)ii\
constant et lidèle : il vole toujoui's à cùlé de s;i compagne, et ils
meurent ensemble le jour de leur union.
— Chez les Japonais, le pai)iIlon est renililrmc du maria.uc.
— Fonrier a fait de Tinconstance une \ertii. (pTil ap[)ellc
« i),i|)ill()niie ».
— l'n [)elit bas-relief en bronze (Empire), représente une vestale
brûlant un papillon sur l'autel de bi déesse. Ingénieuse allégorie,
où la jeune prétresse, immolant ce symbole de l'inconstance,
témoigne de sa fidélité à Yesla.
— La tourterelle, dont les poètes ont fait un modèle de constance,
de fidélité et de tendresse, a justement tous les défauts op[)osés à
ces qualités. (Voy. tourterelle.)
Béranger. (pii connaissait sans doute la réliabilitalion du [)ai)illon,
fait (lire à une tourterelle :
Quoi! les paitilloiis sont constants!
Et c'est nous qu'on prend |ionr modèles !
Même il se peut qu'ils soient lidèles :
Le papillon vil peu d'instants.
Pâque, de l'bébreu, \)\\v le latin, jia.sc/ia. passage.
Temps où les Juifs célébraient le passage de l'ange exterminateur,
qui avait é[)argné leurs premiers-nés, en Egypte: ou en mémoire
du passage de la mer Rouge.
— Cbez les cbi'étiens, Pàqiie.s vient du latin pascol^i), nourrir,
à cause de l'agneau pascal, qui s'immole pour nourrir les bommes.
(Yoy. cierge pascal, œufs de Pâques.)
— Pâques est lixé par le concile de Nicée (32o), au dimancbe qui
suit la pleine lune de mars. Cette fête mobile se trouve toujours
comprise entre le 22 mars et le 25 avril. Elle inaugure le printemps,
et concorde avec la fête de la nature. Toutes les fêtes mobiles de
l'Église se règlent sur Pâques.
— On appelle Pâques jleuries le dinuinclie des Rameaux.
Alressi clianl quan l'irrr es rengutz,
Cum faz l'estalz ni la Pasca (loria.
(l\ Xw.u..)
(Pareillement je cliante (piand l'biver est venu, comme je faisais
l'été et â Pâques lleuries.)
Par, parmi, du hlin per, per medluni: préposition.
204 TAU
Por/ni &i'cr\\;\\\ en dciiv mois cl <i,uMili;iil |i;ir le milieu, comme
emnil iiii milieu.
y]// se retrouve dans : jui-iioi'il, mi-carèiiie, milieu, midi.
En i)roven(;al, on dit nii/f/n, milieu, qui corresiiond an mol
français miloiji'ii.
— De par le i"oi <'sl dit iioni- de pai'l le l'iti. (|ni s'esl employé
anlrel'ois.
Un brief d(^ pari le roi-, et qui a son séel. (Livide drs liois.)
— On connail l'inscription plaisante mise sur la [)orte du cime-
tière de Sainl-Alédard (rue MoulTetard, à Paris), fermée à cause des
convulsionnaires du diacre Paris :
Do par le roi, dOIonsc à Dieu
De faire miracle en ce lieu.
Parabole, (\\x iivw, para hoir, conqiaraisoii.
Dans le style de l'Écriture, narration dnn fait qui renferme,
sous forme allégorique, une vérité morale. '
Parade, de l'italien parafas, montre, étalage.
11 signilie, en espagnol, le lieu de balte d'un cbeval de manège.
Ce mot s'introduisit en France, dans les carrousels, sous Fran-
çois l''.
Une ordonnance de Louis XIV (t2o juillet IGGo), porte que les
gardes françaises feront parade. (Colonel Ambert.)
Paradis, du clialdéen pardrs. verger: en ixrec paraf/cisos, lieu
de délices. Éden signilie volupté.
— On dit : les joies du paradis ; être au paradis.
— Dans les représentations de mystères religieux, au Moyen-Age,
la scène se trouvait coupée en trois étages, ou plans superposés :
l'enfer, au niveau du sol: la terre, au milieu ; le paradis, au-dessus,
formant la partie la plus élevée de la décoration, où trônait Dieu le
Père, entouré d'anges et de saints.
C'est de là, sans doute, que vient le nom donné aux galeries,
médiocrement édenesques. qui se trouvent au plus baut des salles
de spectacles. En i-éalité, ces galeries sont un véritable €nfei\ par
suite de la cbaleur sulïocante et des exbalaisous puantes qui y
montent du parterre et des galeries inférieures.
Ale.\andre Dumas lils dit un jour qu'on employait ce terme de
paradis à cause des nomlireuses pommes qu'on y mange. C'est
peut-être aussi par antitbèse, parce qu'on y fait le diable...
— Le paradis des mabométaus se compose de sept ciels, qui sont
PAR 20o
autant de paradis oradués : le premier, d'argent : le deuxième, d'or:
le troisième, de pierres précieuses; le quatrième, d'émeraude; le
einquième, de cristal: le sixième, de couleur de feu; le septième est
un jardin délicieux, tu'i cnulent des rivières de vin. de lait, d'huile
et de miel, et où les ci-ovaiils. entourés do liouris, doivent jouir de
la félicité éternelle. (Voy. ciel.)
Paradoxe, du gvcc para, contre, doxa, opinion.
Ce qui est contraire à l'opinion commune.
Ciccron, dans ses Paradoxes, a développé certaines théories
célèlii-es, fondées sur des paradoxes.
Le paradoxe de la veille devient la vérité du londeniain. Ainsi,
dans les sciences, certains paradoxes sont devenus des vérités
incontestables : la sphéricité et la rotai ion de la teiTe, les anti-
podes, etc.
Parage, (lu lias-lalin paragiiun {([q, par), noblesse d'extraction.
Gentilhomme de haut parago signifie qui descend d'un père ou
d'aïeux illustres.
Parangon, anciennement pora(/on : peut-être de l'italien
paragone.
Sans parangon : sans pareil.
Paraphe, contraction de paragraphe : du grec para, grapJiein.
Marque ajoutée à la signature, pour qu'il soit plus difficile de la
contrefaire.
D'où l'expression : signer avec paraphe, ne varielar.
Vous dictes paraphe, corrompans la diction, laquelle signifie ung
signe ou note poussée près l'escripture. (Rabelais, liv. II, ch. 13.)
Parapet, de l'italien para petto, préserver la poitrine.
Partie supérieure du rempart, destinée à couvrir les assiégés.
Rabelais (prologue du liv. III) écrit parapecles.
C'est aussi un garde-fou.
Parapluie, mot formé commo, 2yarasol, paratonnerre, où l'élé-
menl jiara provient de l'italien, à l'imitation de iiarapet.
Ami cominode, ami nouveau,
Oui, contre fordinairo usai^e.
Reste à l'écart quand il lait l)eau
Et se montre les jours (roraj':e.
(Sr.iiiiti:.)
— Synonymes : pépin, riffiard, robinson.
206 PAR
//////^//v/ \i<'ii(li-;iil i\v /a Pr///r T/V/r, de Pic'ird, joiiéo ;'i Paris
en 1801, où riificiir (jni joii.'iil le r<")le de Kifll;ir(l |i;ii'iil en scène
avec un énoniKî i);ii-;i[)luie.
Robinaon est iuissi un soiiNciiir de, r.iciciif (|iii jouait lioljinson
dans la pircc de Pixérécourt ninsi inlitnléc.
— Le parapluie fei-jué, emblènic du hourpeois : instrument paci-
fique, s'il en fut, rappelle trop la malheureuse mère qui, ne pouvant
défendre, avec son parapluie, ses enfants contre l'assassin Papavoine,
s'écrie dans la complainte :
Il cul étr plus ni'i^cnt
Oui' riiislriimciit fût Irniiclwint.
Parapluie qui fait la tulipe (K. Sue) : parapluie retourné par le vent.
Parasite, du .urec y>ft/Y/.v//o.v; proprement celui qui niancre à
côté d'un autre.
— Synonymes : croquelardon (provençal crocalard)^ écornilleur,
coureur de franches lippées, fripe-sauce, happe-lopin, lèche-plat,
pique-assiette.
— Apaticher se disait autrefois d'un parasite, qui nian.«e tou-
jours chez les autres.
Li trovèiTS do maintenant
Deliors apaticlicnt ti>iit l'an.
— On désignait sous ce nom, à Athènes, ceux qui étaient nourris
au Prytanée, ou qui prenaient part au repas du sacrilice.
Par la suite, le nom de parasite fut donné ironiquement à ceux
qui sollicitaient une place à la table des grands. Sous Auguste, ils
étaient très nombreux à Rome ; on les divisait en trois classes :
Les derisores, qui faisaient rire les convives par leurs facéties et,
pendant le repas, débitaient les nouvelles du jour.
Les adulatores, qui avaient recours à la Uatterie pour se faire
inviter.
Les plagipatida', ou souffre-douleurs, dont on se faisait un jouet
pendant le festin : on leur jetait à la tète les pots ou des noyaux
d'olives ; ils se soumettaient volontairement à toutes les avanies et
faisaient gloire de leur insensibilité.
— Les Grecs disaient : « Le parasite vend sa liberté pour un
morceau de pain. »
Diogène, voyant des souris qui venaient manger les miettes de
son pain, dit en riant : « Qui l'eût cru? Diogène a aussi des para-
sites ! »
PAR 207
— Pierre de Muiiliiiiiiir. doiil .Méiingc a érrit la vie, et qui était
professeur de grec au CoUè.iie de Frauce (lo7()-l()'i-8), fut un (•(Mèhre
parasite. On lit de suu nom les aiiaurauunes : Né pour nijimiiler,
mine pour rauier.
Très spiriluel. il savait payer son écot en hons mots, cl disait à
ses amphitryons : « rouruissez les viandes et le vin, je fouriiir;ii
le sel. »
Le cliaucelier Séuiiier lit uii jour répandre sur lui un plat de
ra.u'oùt. .Moutuiaiir. reuardaut le cliancelier d'un aii' de reproche,
cita le mot de fjcérou : Sit/ii//in//i Jus. summa injuria, qui faisait
une (loiihlc allusion au\ f(ni(ii(Uis judiciaii'es du chancelier, et au
mol Jus. qui siuuilie à la lois sauce et justice.
.Miinliuaiir rlaiit a tai)lo avec cfrUiiiis péilaiils,
Qui criait'iit el prèchaii'iil trop haut sur la vciulaiijfo,
Lui, (pii Ml' siiiijj:(> alors (pià ee que font ses (lcnt.s :
l'aiv là: l*ai\ la I ilil-il, (iii ne sait ce (luoiimange.
Paratonnerre. Ce uu)t exprime assez hien rohjet désigné ; mais
il parait siuiiulier qu'il ail été fait sur le modèle dç, parapluie. (Voy.)
— Inventé par Franklin, en 1757.
Le double i'()le de Franklin, à la fois politique et scientili(pH% a
été justement caractérisé dans ce vers :
Eripuit cœlo fiilmeu, sceptrumque tyrnnnis.
Ravit la foudre au ciel et leur sceptre aux tyrans. (Voy. foudre.)
— Le paratonnerre protèjze autour de lui un espace d'environ le
double de sa liauleur: ainsi un l)àtiment de vingt mètres de diamètre
n'aurait besoin que d'une tige de cinq mètres de haut.
Paravent, formé de />«/•« et de vent.
Ce meuble, composé de châssis mobiles recouverts d'élolïe ou de
papier, nous est venu de la Chine, s'il en faut croire les vers de
Lemierre :
Lo niuhile rL'Uiparl iiii'hivcnta le Chinois,
Près de nous, pour abri déployé sous nos toits,
Interdisant au froid raccès de nos asiles,
1^1 écarte des venls les alteiuti's sulitiles.
Parchemin, vieux français 7>t'/'tY/ ////«: du latin percjaincnum,
churla per(ja)nena, de Perganu'.
Peau de béte préparée pour écrire. Inventé sous Eumène, roi de
Pergame, quand Ptolémée, roi d'Egypte, avait interdit l'exportation
du papyrus.
Pardonner, du Itas-latin perdonare, remettre complètement.
208 PAR
— 11 sci'ii l)<';iiic()ii|i |i;ii(l(iiiii('' ;'i qui ;iiii-;i lif';iiiroii|) iiiiiu''. (Kvan-
uUo.)
L;i vertu ii.iidoiinc an iiK-cliaiit, coimne l'aritre do santal |iai-fnnio
la liaclio iiiènic i\\\\ la iVappé. (Maxime indionno.)
Le pardon est lin placcnioiit ascnluré. mais (|ni peut plus tai'd
rapporter de f;i'os intér»'ts.
Le lâche se complaît dans la haine, comme le liravcdans le pardon.
On pardonne tant que l'on aime. (La Hoclieloucauld.)
Pareil, du latin ixiriculion, diminulif de /;«?', é<ial : provençal
jxirlr.
Qui est de même qualité.
— Rendre la paix'ille.
Pav pari rcferto.
(TtRENCK, Eunuque.)
A ])on chat hon rat. (Yoy. lali<ni.)
Parent, du latin parens, parent em, de pnrlo, enfanter.
Dans le latin littéraire, parentes désionait senlement les ascen-
dants, le père et la mère. Dans le latin rustique, il désignait, comme
chez nous, non seulement les ascendants, mais encore les collatéraux
et les aUiés.
— Les parents sont de trois classes ou degrés :
Ligne directe: 1° le père, la mère, les aïeuls; 2° les enfants et
petits-enfants. Ligne collatérale : 3'^ les frères, sœurs, oncles, cousins.
— Un lion ami vaut mieux que cent parents.
Le sort fait les parents, le choix fait les amis.
(Dti.ir.i.E.)
— Montaigne dit que « la communauté des hiens, les partages,
la jalousie des intérêts, détrempent et relâchent la soudure fra-
ternelle » .
(Voy. Ou n'est jamais trahi que par les siens.)
Parer, du latin jjarare : provençal ;ji«;Y/r.
(Voy. cossu, liabit, s'attifer.)
Synonyme: être huppé, pimpant, se pomponner.
Paresse, du grec parésis, relâchement, alïaissement.
Malgré la similitude de forme, cette étymologie est fausse. La
vraie est le latin piijritia.
— Déesse allégorique des anciens, elle était tille du Sommeil et
de la Nuit. Le limaçon et la tortue lui étaient consacrés.
PAR 209
— On (lit sainto paresse, pour désigner un repos nécessaire et
qui ninduit pas au mal.
Les Latins disaient: Ollum cum dignitate.
Boileau a dit des chanoines qu'ils
S"ongraisscnt d'une longue et sainte oisiveté.
Après une existence laborieuse, l'homme a le droit de se recueillir
dans la dignité du repos.
— La paresse chemine si lentement que la pauvreté ne tarde pas
à l'atteindre.
— Paresse, de pigritia, a l'ait Vdrgoi pègre, \o\e\ir,et pégrène,
faim. Tout commentaire est inutile, n'est-ce pas ? De même que
l'oisiveté est mère de tous les vices, ce terme d'argot signilie que la
misère est tille de la paresse et sœur du vol.
— La paresse ouvre la porte à l'ennui, à la misère et à tous les
vices.
Celui qui ne veut pas travailler, ne mangera pas. (Saint Paul.)
0 paresseux, la pauvreté fondra sur toi comme un homme qui
marche à grands pas, et l'indigence comme un homme armé.
(Salomon.)
Le paresseux pour ne point faire un pas en fait deux.
La paresse, compagne inséparable de l'ennui, est un fardeau bien
plus lourd à supporter que le travail.
Plus est negotii in otio quam in negotio. (Sénèque.)
Les paresseux ont plus de peine que ceux qui travaillent.
Ne rien faire produit beaucoup d'alîaires.
...Ils s'encouragent à ne rien faire, et bercent mutuellement le
hamac de leur paresse. (Miirger.)
Paresseux. Les synonymes sont innombrables : Clampin, côtes
en long, fainéant, lazzarone, musard, las-d'aller (Rabelais), mar-
motte.
On est paresseux par défaut d'énergie, fainéant par défaut d'action,
indolent par défaut de sensibihté, nonchalant par défaut d'ardeur,
négligent par défaut de soin.
Le paresseux dit : On n'est bien qu'assis, et très bien que couché.
Parfait, du latin perfectus, achevé.
Le jeune homme est riche, instruit, charmant... et s'appelle
Bernard : on n'est pas parfait.
Parfois, adverbe, comme toutefois, quelquefois.
14
2i0 PAU
Lo sul)stnnlif fois ;i\;iil, j;idis l;i forme veio, f'i'iv, foie.
On dit encore en provençal fés ; du latin vicetn.
Dans le Liv?'e des Rois, l'ablatif vice est rendu jmr fric : A
ceste fciz.
Paria, du taiiioiii jx/fci/crs, lioniiiic hors classe.
Homme de la dernière caste des Indoiis qui suivent la loi de
Bralima. Les Parias vivent méprisés et subissent une foule d'inter-
dictions. Considérés comme impurs, ils sont évités par les autres
castes, qui craindraient de se souiller.
— Je suis Indien, c'est-à-dire un -ver de terre qui se tapit dans
l'herbe ; toute main l'évite et tout pied le meurtrit. (Galvan, poète
mexicain.)
— Dans l'antiquité, il y avait lo maître et l'esclave ; aux colonies
d'Amérique, les noirs étaient naguère hors de l'humanité : au
Moyen-Age, il y avait entre le juif et le chrétien d'elfroyables
barrières, des abîmes de mépris et des montagnes d'orgueil infran-
chissables.
Paris, du bas-latin Parisius, ville des Parisii.
Synonymes : la Grande Ville, la Capitale du Monde civihsé, la
Nouvelle Athènes, la Moderne Babylone, la Capitale des Péchés
capitaux.
Paris, divine capitale,
Où Ion peut à toute lieure, à tout prix, en tout lieu.
Trouver l'occasion de chiffonner un peu
La lunit}ue de la morale.
— Paris doit son nom aux Parisii, peuple celtique ; mais son nom
primitif était Lutelia, Lutèce, que Mercier dérive ironiquement de
/utum, boue ; ville de boue.
— César dit qu'il transféra dans la ville de J.utetin Parisiorum
l'assemblée générale des Gaules.
Ptolémée l'appelle Lucotetia, que Noël explique par la blancheur
de ses murs ; comme il dérive Paris d&Parrhesia, liberté de parler
(de ses habitants).
Sont dicts Parrliisiens, en Grécisme, c'est-à-dire francs à parler.
(Rabelais.)
— La ville de Paris a un vaisseau dans ses armes, avec ces mots :
Fluctuât, nec mergitur. Le vaisseau rappelle la forme de son
berceau, l'île étroite de la Cité, où fut Lutèce, et que la Seine
entoure de ses bras.
PAR 2H
Mnloré son vaisseau et sa devise, Paris n"est pas port de mer, et,
inallieiireiisement. ses armes ne sont pas parlantes.
— Pai'is est le paradis des femmes, le purgatoire des hommes,
l'enfer des clievaux.
— Le Parisien est llioninie qui sait tout, particulièrement ce
qu'il n'a point appris. « Ils savent tout par le perpétuel ouï-dire de
la vie d'ex[)ansion et de contact. « (G. Sand.)
Pour le Parisien, la province n'existe pas : tout ce qui n'est pas
Paris, c'est la campagne. Le Parisien en province se croit exilé cliez
les Scythes.
C'est un Parisien qui, se trouvant sur les hords de la Loire, en
admirait la largeur, puis ajoutait : « Voilà une helle rivière, pour
une rivière de province ! »
Les Parisiens ressemblent à des singes dans une maison de fous.
(Warburn, ambassadeur américain, 1871.)
Le vrai Parisien ne pleure pas, il pleurniche; il ne rit pas, il
ricane; il ne plaisante pas, il blague ; il ne danse pas, il cancane;
il n'est pas amoureux, il est lil»ertin.
La Parisienne ne mange pas, elle grignotte ; elle ne parle pas,
elle jahote ; elle ne marche pas, elle trotte.
— Paris ne s'est pas fait en un jour.
Tanlw mijli'i crut romanam condere rjentem.
(Virgile.)
La grandeur de Paris l'a fait surnommer la Grand'Ville, le Grand
Village, et François T'' disait : Luleiia non urbs, sed oi^bis.
— De Lutèce devenir Paris, quelle plus étonnante transforma-
tion ? Avoir été fange et devenir esprit ! (V. Hugo.)
Supprimez de ce monde l'humanité tout entière, et ne laissez
subsister que Paris, comme une autre arche de Noé ; vous n'auriez
à regretter l'absence d'aucun des échantillons qui composent les
variétés naturelles du monde.
Paris est pour le riche un pays de cocagne.
(BoiLEAL.)
Il n'y a qu'un Paris en ce monde et le Paradis dans l'autre.
M™° de Staël, à Coppet, regrettait le ruisseau de la rue du Bac.
Paris commence à la Ghaussée-d'Antin, et finit au Tliéàtre des
Variétés : le reste n'est que du rempUssage. (Méry.)
Une femme disait qu'elle aimerait mieux être enterrée à Saint-
Sulpice, que de vivre en province. (Mercier, Tableau de Paris.)
2lâ PAR
Parler, îinrioiincinoiil jinrolcr. du l.iliii jxirtiholfirc. cl non
comme rexpliquaienl quclquos-iins, ûc, per linymna (K/crc.
Pallas se lail, Vénus (inroli-.
(Cilé par IloiiiiKr..)
(',cllc .IfClll (Idlll je \()IIS |)ar(>li'.
(Roman de lu Rose.)
— Anciennement voisier.
Famé voisie la note et li jor. (Femme parle nuit et jour.)
— Synonymes: canser, c'est s'entretenir familièrement de choses
graves ou frivoles, d'aiïaires ou de plaisirs : jaboter, jaser, jacasser,
caqueter, s'appliquent toujours à des conversations futiles et insi-
gnifiantes.
— Parler gi-as. (Voy.)
Parler ab /loc cl ab hac. fVoy. hoc.)
Parler d'or, ...comme saint Jean Bouche d'Or, ...comme un livre
(voy.), ...comme un perroquet, ...comme une pie (voy.), ...comme
un oracle (voy.).
— Parler pour ne rien dire. Dans la conversation, il vaut mieux
ne rien dire que de dire des riens.
Les Persans ont le proverl)e : J"entends le bruit de la meule,
mais ne vois pas la farine.
— Elle fait parler d'elle. Se dit d'une femme dont la conduite
équivoque donne prise à la médisance.
Je veux croire (ju'au fond il ne se passe rien.
Mais enfin on en parle, et cela n"cst pas bien.
(Moi.iKnE.)
In fabulis esse (Suétone) : être la fable du quartier.
La femme la plus veitueuse est celle dont on parle le moins.
(Thucydide.)
— Il y a de la gloire pour un homme à faire parler de lui ; et de
la honte pour une femme à faire parler d'elle.
— Trop gratter cuit, trop parler nuit, ...et trop manger fait mal
au ventre.
Pour arriver au comble de la sagesse, il ne faut ni trop dormir,
ni trop manger, ni trop parler. (Maxime arabe.)
Quand on n'a pas assez d'esprit pour parler, il faut avoir assez
de jugement pour se taire.
— On lit sur un vitrail de l'hôtel de Jacques-Cœur, à Bourges,
celte devise mystérieuse :
En close bouclie.
N'entre mouche.
PAR 213
— Vous parle/, (rop. vous n'aurez pas ma toile. Flciiry de
BelliiiLaMi l'acoiite (pi"iiii paysan niais, (-iiarjié par sa mrrc (Vallcr
vendre une pi(''('e de toile, ri pi't''\enu d'éviter de faire marché avec
des femmes liaNardcs. renvoya tontes celles qui se présentèrent, en
leur disant : « Vous pai'le/, trop, vous n'aurez pas ma toile « ; et
Huit par la laisser à une statue de la Vierae, placée sur la roule, et
ipii lie parlait pas.
Oui licaucoin) iKirIc cl piMi l'iilciiil (l'Cduli'i,
l^onr iuic à la foiro se vcinl.
— Un homme fait, en moyenne, trois heures de conversation
par jour. .\u taux de cent mots à la minute, cela fait environ cent
I)a,iies par semaine.
— Parle peu. et écoule hoaucoup. (I)émonax.)
Tout oiiyr, tout voir ot rien dire,
.Mt-rito en tout temi).s qu'on fariniiro.
(PvAliliLAlS.)
Les personnes qui savent le plus sont celles qui parlent le moins.
Les ruisseaux hahilleul Iteaucoiip, parce qu'ils ont peu de profon-
deui-: les grands lleuves sont silencieux.
— Descartes gardait ordinairement le silence dans les réunions
nombreuses. Thomas dit de lui qu' « il possédait des richesses en
lingots, mais non en monnaie courante ».
La Fontaine avait dans le inonde un air timide et niais.
Le grand Corneille était ennuyeux dans la conversation, et ne
parlait pas même correctement la langue qu'il savait si bien écrire.
Rousseau était d'une timidité qui l'empêchait d'ouvrir la bouche
dans un salon. (Confessions, liv. 1(1.)
Montesquieu. Fénelon, Foutenelle, Voltaire, xM'"^ de Staël possé-
daient, au contraire, le talent de la conversation au suprême degré.
— Celui (pii parle peu se fait respecter comme un homme mysté-
rieux, aimer comme un homme discret, consulter comme un honnne
prudent.
La nature nous a donné deux oreilles, et une seule Ijouche, pour
nous appi'endre que nous devons plus écouter que parler. (Zenon.)
Os' umun, natiira dans formavit et aures,
il plus audircl quant loijuerelur homo.
(Catox le Censeur.)
En parlant peu, on entend davantage. (Proverbe russe.)
Que ta bouche soit la prison de ta langue. (Le brahme voyageur.]
Il faut tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler.
214 ' PAR
Oui no s.'iit pns se laire, no s;iit pns parler. (PiUaciis.)
l'Iiis a appris (|iij se lail
Mlle (pii parli' et haut lirait.
Oy, voy ot te tay, si tu veux vivre on paix. (xiii« siôde.)
Ouïr, \()ir, si- taire de tout,
Fait l'IiDiiiuic l)i('n venir partdul.
Oui parle sèmo, qui érotitc récolte. (Pytha.^ore.)
La parole est d'argent, et le silence est d'or.
11 est 1)011 (le |)arler, et meilleur de se taire.
(La Fo.ntaixk.)
Le fou même passe pour sage quand il se tait. Stultus qurxjue,
si tacucril, sapiens repiUalur. (Salomon.)
Un sot (lui lie dit mot, ne se distinj.;uf pas
D"un sa^ant qui se tait.
(Moi.iKiiK, Déj/it.)
Aussi dit-on que le silence est l'esprit des sots.
La bouche parle de l'abondance du cœur. (Mathieu, XIL 14.)
Parole ouïe est perdue,
Si elle n'est de cœur entendue.
On parle volontiers de ce qu'on aime, et la passion rend éloquent.
La langue ne doit pas parler
Sans congé au cœur ilemander.
Parodie, du grec pai'a, contre, ôdé. chant.
Ouvrage dans lequel on traduit en comique une œuvre sérieuse.
Tel est le Chapelain décoiffé, où Boileau et Racine ont parodié
quelques scènes du Cid. On connaît \ Enéide travestie, de Scarron,
YOvide en belle liumeur.
Les pièces de théâtre ont été souvent parodiées. Ainsi Inès de
Castro est devenue Agnès de Chaillot.
Parole, anciennement 7K/;"««/e, du X^ûw j^araàola.
La parole est le vêtement de la pensée. Selon Talleyrand, elle
n'en serait que le déguisement.
La parole est l'interprète de l'âme.
Parole d'honneur ! — Cet homme n'a qu'une parole.
Le bœuf s'attache par les cornes, et l'homme par la parole.
Parole lancée ne peut être rappelée.
Nescit vox missa recerti.
(HuRACE, Pisons. 318.)
El semel emifsum volât irrevocabilc verbum.
(HouACK, Ejiitrc I, 18.)
l'Ail 213
— Surveille (a parole : un jour elle se retournera contre toi.
(Proverbe italien.)
Le mot qui t'échappe es! Ion maître ; celui que tu reliens est ton
esclave. L'auteur <X Adolphe parle de mots irrévocables, qui, une
fois prononcés, ne s'etlaceut plus du souvenir, et détruisent les
liaisons les plus fortes.
Verba volant, srrlpta marient. (Voy. écrits.)
— Il ne lui manque que la parole. Se dit d'un portrait ressem-
blant.
-Miciiel-Ange disait en présence d'une statue de saint Marc par
Donatello : Marco, perche non mi parla ?
M*-'"" de Beaumanoir de Lavardin, évèque du Mans, était sujet à
rester court en chaire. M'"" de SaT)lé, voyant son portrait, dit :
« Mon Dieu ! qu'il est ressemblant ; on dirait qu'il prêche. »
Spirantia signa (Virgile) : des statues animées.
— Les paroles n'ont pas d'odeur. — Un mot obscène fait sur
l'esprit la même impression qu'une odeur fétide sur l'odorat.
(Lamartine.)
Les paroles sont l'ombre des actions. (Démocritc.)
A [)eu parler, l)ieu iteso.uricr.
Bien dire fait rire, bien faire fait taire.
Dict sans faict à Dieu déplaist.
Dict faisant, à Dieu plaisant.
(BocvEi.LE, xvic siècle.)
La meilleure leçon est celle do l'exemple. (La Harpe.)
— On a comparé la parole à une arme, et la discussion à un
combat. De là sont venues les locutions : lutte parlementaire ;
s'escrimer; entrer en lice; descendre dans l'arène; baisser pavil-
lon ; rendre les armes ; mettre les pouces {manns dare). On dit
aussi : je ne vous suivrai pas sur ce terrain.
Spadassins de la plume (Saint-Amant) ; les gladiateurs du beau
dire, — de la république des lettres,
Qui sur un pré de papier lilanc
Versent de l'encre au lieu de sang.
— Dispute de mots : logomachie, du grec lorjos, et machâ,
combat.
Flux de paroles. (Voy. flux.)
Paroi i, étymologie incertaine.
Ternie de jeu : le double de la mise précédente. Diffère de la
martingale en ce que celle-ci double la mise jusqu'à ce que le joueur
216 PAR
ait regagne ce qu'il innil [)erdii : tandis qne dans le paroli, on peut
ne la doubler qu'uni; l'ois.
Paronomase, du gvac jxira, à coté de, onoma, nom.
Figure (jui consiste à suiistilucr à un mot un autre mol qui a à
peu prcs le même son.
Ualtelais a usé et abusé de cette ligure. « Appelez-vous cccy
liansailles? Je les appelle (iantailles de m. ..de. »
(Voy. équivoque, conlrepetlerie.)
Paronyme, des mêmes éléments que le précédent.
Mot qui a des rapports avec un antre par son étymologie, ou
seulement par sa forme, comme imjms.^ih/e et impossible.
Parpaillot, origine historique ou anecdolique.
Le surnom de « parpaillots » fut donné aux protestants, de
Jean-Pierre de Parpaille, d'Orange, l'un des chefs calvinistes déca-
pités à Avignon en lo62.
Parques, du latin jxircere, épargner (par antiphrase), ou de
parcus, économe (de la vie humaine).
— Fatales deœ : les déesses fatales, les divinités infernales.
Elles étaient au nombre de trois : Clotho, Lachésis et Atropos.
Clotho, la plus jeune, présidait au moment de la naissance de
l'homme, et tenait la quenouille; Lachésis filait les jours et les
événements de la vie ; Atropos, l'aînée des sœurs, coupait de ses
ciseaux le fil des destinées Immaines.
C'est là, cher Lamoignon, que mon esprit tranquille
Met à prolit les jours que la Parque me file.
(BoiLEAu. Epitrc VI.)
Les Parques filent pour les gens heureux, des jours de soie et d'or.
Part, du latin partem ; d'où parti, partie, partir.
— A part soi. On devrait dire : à par soi, per se, et non ad
partem. (Aussi ne vient-il pas de ad partcfu, mais de a parte, qui
est aussi français.)
— Prendre cpielqu'un à part. On disait autrefois à quartier.
J'ai quelque chose à vous dire, ajouta-t-elle, en la tirant un
moment à quartier. (Marivaux, Vie de Marianne.)
Encore une locution dont l'usage s'est perdu.
Ita verborum velus interil a-tas.
(UORACE.)
(Ainsi tombent de vétusté les mots autrefois florissants.)
AR
217
— La pari du dialil(\ du feu. du lion: c'ost-à-dirc du plus lorl.
Allusion à une fable de Phèdre, iuiilée par La Fontaine.
— On écrit souvent : « Je prends une [);ui l>ien vive au uMllicur
qui vient de vous frapper... '< Une part peut èlre .-i-aude ou pelile;
elle in^ saui'ait èlre \ive.
Partageux, néoloL^isuie.
Utopistes, couinuinisles, qui croioiU à la possihililé du partage
égal de tous les i)ieus entre tous.
Parti, du veriie jinrlli': anciennonTent ^^■'«r/r/^e/': latin juir/iri.
— Changer de parti : tourner casaque. (Yoy. opinion.)
PARTIS c-i:lki3Ui:s
Anciens, Modernes.
Blancs, Bleus.
Bien, Mal.
Capnlets, Montaigus.
Christianisme. Paganisme.
Classiques, Uomanliques.
Conservateurs, Radicaux.
Droite, Gauche.
Foi, Scepticisme.
Frondeurs, Mazarins.
Gallicans, Ultramontains.
Gluckistes,
Guelfes,
Idéalistes,
Jansénistes,
Montagnards,
Luthériens,
Républicains,
Rouges,
Verts,
Wigh,
Piccinistes.
Gibelins.
Réalistes.
Molinistes.
Girondins.
Papistes.
Monarchistes.
Blancs.
Bleus (au cirque).
Torv.
Yorck (rose Manche), Lancastro (rose nm)
Partibus (in). (Yoy. évêque.)
Participe, du latin particeps (parlem caperel.
Mot (jui tient du verbe et de l'adjectif. C'est une forme [larlicu-
lière, un mode du verbe, qui joue dans la phrase le rc'ile d'un
adjectif.
On distingue le participe présent et le participe passé : aimant,
aimé.
Particule, du latin diminutif pnrtîcu/a.
Petit mot, ou portion de mot, qui ne s'emploie pas seul, et
destiné à moditier le sens d'un autre mot.
Telles sont les syllabes dis, me, dé, dans disjoindre, nu'priser,
déplaire (préhxes) ; aille, cule ou icule, dans rocaille, monticule
(suffixes).
-— Particule nobiliaire, préposition ou article contracté qui
précède un nom propre : de, du, des, de la.
218 PAR
Particulier, du l.'iiiii jxirliculdvls.
1" Adj('rli\('iii('iil : s'(i|(|i()S(' ;'i piihlic, ;'i onliiuiirc ou ii coiiiiniin,
dans le sens dcoxlr.'iordiii.iiir, lii/urrc
2" Siil)Sl!iiilivoiiienl : un individu, un (luidiim.
Partie, dérivé du porticiitc ûa parli7% im féminin.
— P;ii(ic carrée : partie de plaisir où se trouvent ivunis deux
jioninics et deux femmes.
Nous l'erons quelquel'ois de petites parties carrées. (Le Sage,
Turca7'et.)
Partir, du latin partiri, partager.
Partii' d'un lieu, c'est s'en séparer.
Le mot est resté avec son premier sens dans la loculion : avoir
maille à partir. (Voy. maille.)
— Synonymes : s'en aller. Et, avec idée de l'uite : liclier son
camp, décamper, prendre la poudre d'escampette, décarrer (Grand-
val), enliler la venelle, montrer les talons.
Partir sans tambour ni trompette.
Parure, dérivé de parer, latin parare.
El toujours la parure t'iiiliollit la beauté.
{Marie, oijéiii-romirjiie.)
Iiulullur, formosa est : exuitur f(>r)na ipsa est. (Aristénète.)
Vêtue, elle est belle ; nue, c'est la beauté même.
Pulchra inniier nvjhi rril fjurnii iinrpnrala pulclirior.
(Plalik.)
Parvenu, participe de parrenir, hûn perrentre.
Synonymes : vulgo concepti; un aigle né dans un poulailler.
Rabelais (livre I, cli. 1) dit : « Plusieurs sont aujourd'buy empe-
reurs, roys, ducs, princes et papes, en la terre, lesquelz sont
descendus de quelques porteurs de rogatons et de coustrez ; comme
au rebours plusieurs sont gueux de l'bostière (h()pital), soulTreteux
et misérables, lesquelz sont descendus de sang et ligne de grands
roys et empereurs. »
— Il n'est orgueil que de pauvre enrichi.
Vous lie savez donc pas jusrprdû \a rarrogance
D'un bourgeois cnnoî)li, fier de son opulence "?
(Destolxhf.s.)
Vilain enriclii
Ne connaît parent ni ami.
Quand vient la gloire
S'en va la mémoire.
PAS 219
Parvis, doublet ûq pnraf/is : ori.uinc IiélinViquo cl liiltliiiiic.
(Jiiclques-uiis prétendent le tirer a parcls educandis, parce (jne
les écoles étaient étaldies auprès des églises.
Place devant la urande porte d'nne église, et in-inciiialcnicnt
d'une cathédrale.
Désigne aussi, dans la Bible, l'espace cpii entoui-ait le labcrnacle,
dans le temple de .lérusalem.
Pas, du latin /lassus, mouvement des jambes.
S'emploie très fré(iuemiuent, comme poinl, (jouUc, mie, pour
renforcer la négation.
— Pas de clerc : démarche maladroite.
— Faux pas : un faux pas est souvent plus dangereux qu'une
chute.
— Être dans un mauvais pas : sortir d'un mauvais pas. Expres-
sions empruntées à l'ancienne chevalerie.
Pas est pour passage, passade, et le pas d'armes consistait à
forcer un passage fortilié ou gardé par l'ennemi : à attaquer un
pont, un défilé ; à franchir une rivière ou tout autre passage étroit
ou diflicile, qu'il était important d'occuper.
— Il n'y a que le premier pas qui coule : le plus diflicile est de
commencer.
Dans le crimo il suffit (ju'iuie fois (ni drlmto ;
L'iie chute toujours attire une autre rlmic.
— S'il n'est pas exact de dire qu'il n'y a que le i)remier pas qui
coûte, il faut convenir que c'est celui qui coûte le plus.
Le cardinal de Polignac racontait à M™^ du DelTand la légende de
saint Denis, qui, après avoir été décapité à Montmartre releva sa
tète, la porta dans ses mains en la baisant, jusqu'au lieu où l'on a
bâti la catbédrale de Saint-Denis. Comme l'Éminence disait que la
route parcourue par le saint était bien longue, la dame répondit :
« Monseigneur, il n'y a que le premier pas qui coûte. «
Pasquinade, de Pasquin, nom d'homme.
Pasquin était le nom d'un savetier de Rome, connu par ses
brocards. On donna ce nom, par extension, à une statue mutilée,
en marbre, qui est au coin du palais des Ursins, et à laquelle on
attacbe des satires et des plaisanteries. Marforio, autre statue
antique, placée en face de Pasquin, fait les questions auxquelles
Pasquin répond. Pasquin et Marforio sont, en quelque sorte, les
historiens satiriques de la papauté; le dialogue dure depuis cinq
220 PAS
cents ans. PcikIiiiiI la miil. iiiic main fiiflivo rollo sur li' piôdcstal
répi.uramnio vcii<ioresso (iiii liiciiliil circiih; do boiiclie en hoiiclio.
Les papos, (lit .Mercier, ont laissé Pasquin et Marforio jiarlcr et
se répondre. Des railleries, des lardons amusent le peiijile et
l'assoupissent. Ne >aMl-il i)as mieux encore que la satire soit dans
la bouche de la statue, ipic de rester dans le cœur, où elle fermente
et s'aigrit? La mauvaise humeur du peuple s'évapore ainsi, et
jamais les hi-is ne se lèvent, quand la langue a pu se soulager
pleinement.
Le nom donné à la statue Nient peut-être de Pasquin, acteur
de la comédie italienne, bel esprit, beau parleur et menteur on
diable.
Passer, verbe tiré de jxis.
— Passer un mauvais moment, ...un mauvais quart-d'heurc.
— Génin (Varialions), explique les locutions diverses où se
rencontre le verljo passer : passer le temps ; passer la rivière ;
passer pour un honnête liomme : les pièces de Lucques et de
Monaco ne passent pas en France. Toutes ces locutions ont pour
origine le mot pas : pa'iser y est synonyme de cheminer.
Mais dans les locutions suivantes, /ja^.^^?' vient du VàWw pal ior :
Je passe condamnation ; c'est-à-dire je soulTre qu'on me condamne.
Je vous passe le mot ; c'est-à-dire je vous le pardonne. Il passe à
son enfant tous ses caprices : il souffre tout de son enfant. Passer
un mauvais moment signifierait donc aussi endurer un mauvais
moment.
Il suffit de constater que passer, d'abord neutre, devient actif
dans le sens de traverser, faire traverser, puis de inscrire, de
laisser aller, d'accepter, etc.
Tout passe, tout casse, tout lasse.
Tout Dorante devient Géronte.
J'en passe et des meilleurs.
(V. Ui GO. ffernani, UI. 4.)
Passe-passe (faire des tours de). Se dit des tours que fout les
joueurs de gobelets, les prestidigitateurs.
Raltelais dit (liv. 1, chap. 2i) : trajectaires.
Passion, du latin passio, du participe passas, de paf/or,
soutïrir, qui a donné aussi : patir, patient, patience.
Ce mot, qui désigne une vive atïection de l'âme, a conservé sa
PAT 221
si,!ini(icMlioii latine de soiitlVance physique, dans la lociilioii : souf-
frir mort et passion : la Passion de .lésns-Clirist.
Venc, pcr noslre salvnmcn,
liccrbre mort e passio.
(P. D'AlIVKnCNE.)
(Il vint pour notre saint, recevoir niort et passion.)
— Une passion est un caiJrico rpii a rencontré des obstacles.
La passion passe quand rolijct est (létri.
— Le pire de tons les vices est de n'avoir aucune passion.
Tonte passion est éloqiu^ite : tout homme persuadé persuade ;
pour arracher des pleurs, il faut pleurer; l'enthousiasme est
conta.uieux. (V. Iliiuo.)
Pastiche, de l'italien /)nsfirrio, mélange, pot-pourri.
OLinre d'art ou de littérature, dont la manière est imitée d'un
autre auteur.
Patafiole, terme d'araot populaire.
Oue le liou Dieu ...le dialtle te pataliole !
De l'italien pata/lo. abréviation de opilafio, épitaplie.
Cela revient à dire : (pie Dieu fasse ton épitaphe, que le diable
t'emporte !
Pataquès (voy. cuir). Terme po[)ulaire.
Faute de langage qui consiste à faire entendre un / llnal quand
il y a un s, et réciproquement.
Domergue dit qu'un homme se trouvant avec deux dames peu
lettrées, aperçut à terre un éventail :
« Cet éventail est-il à vous ? dit-il à l'une d'elles. — Il n'est point
z'à moi. — Il est donc à vous l dit-il eu s'adressaut à l'autre. — Il
n'est pas t'a moi. — Alors, s'il n'est point z'à vous, s'il n'est pas
t'a vous, je ne sais pas t'a qu'est-ce. »
Le mot est resté, après avoir fait beaucoup rire. Mais l'étymologie
est-elle bien sûre ?
Patapd, nom d'une petite monnaie sous Louis XII. Elle valait
trois deniers, et a subsisté longtemps dans les Flandres.
Patati-patata, onomatopée qui imite le bruit fait par plusieurs
forgerons qui frappent ensemble sur l'enclurae.
...Palatk patdtncqnc sonnnles
Enclumas...
(BF.i.LEAf, Diclamen mctrificum.)
Patatras, onomatopée.
222 PAT
h>xcl;iiii;i(ioii iroiminc (^ii voyaiil t()iiil)t'r qii('lqii"iiii, ou on pnrlant
do (|ii('l(iii(' clioso (|iii loiiihc.
— François de (loii/.a.Liiic, duc do Nevcrs, étant tombé de dicval
on liaNorsanl ]*ouilly, nno vioillo l'oinme lui cria: « Patatras!
Monsieur de Nevers. » lien lui si l'ori ii-rilé. qu'il (it saccager la
vill(! par ses soldats.
Pataud, dérivé do j)ct((e.
Jeiino chien à grosses pattes, et, par suite, désigne un gros
lioinmo mal l'ait, un lourdaud.
Pâte, du latin /xis/a, isrec pnslt^, bouillie.
— Bonne, [làto d'homme : qin manque de levain, (^eliii qu'on
pourrait ([ualilioi- d'hoiiimo apathique avec calembour.
Ouiuaidt, le [)0(''te du xvii'^ siècb', était fils d'un boulanger, et
doué d'un caractère doux et conq)laisant. Furetière y fait allusion,
quand il dit : « Quinault est la meilleure pâte d'homme que je
connaisse ; il ne lui reste aucun venin des injures qu'il reçoit. Il
connaît cinq ou six cents mots de la langue, qu'il blute, sasse et
ressasse, et qu'il pétrit du mieux qu'il peut. »
Patelin, mot d'origine littéraire.
Homme faux et mielleux, comme le personnage de la farce qui
porte ce nom (xv^ siècle), attribuée à Pierre Blancbet.
— Patelin, comme le \wo\enç?i\ jjaiefile, patte de chat, patte de
velours, signilie patte douce (loils).
La première édition de la Farce de Patelin est datée de Paris,
Germain Benant, in-4°, 20 décembre 1490,
Pierre Blancbet a eu la même gloire que Molière. Si Tartulîe est
devenu un nom appellatif, et signiOe hypocrite, PateUn signifie un
homme qui en llatte un autre pour le duper, et patelinage est
devenu synonyme de jargon doucereux. « Parlez-vous Christian,
mon amy, ou langage patheUnoys? » (Rabelais, II, 9.)
Il en est de même de Renard, nom donné par Pierre de Saint-
Cloud au goupil, dans le Roman de lîenart, et qui est devenu en
quelque sorte, synonyme de finesse et de ruse.
— On trouve dans patelin une formation analogue à celle de
papelu, patepelue, nom satirique donné, à l'époque de la Réforme,
aux papistes hypocrites, qui ne pratiquaient pas fÉvangile pur
comme les luthériens.
Patenôtre. Emprunté du début de l'oraison dominicale, Pater
7X0 s ter.
l'AT 223
— Diiv la (laleiKUro à l'cMuers (Rabelais) : dire des injures,
prononcer des nialédietions.
Patente, du lalin ixticnicm.
AbréNialion de lettres palentcs, c'csl-à-dire ouverlcs.
Patience, dn latin pat lent ia. de pat i, endurer.
— La [)atienee est Tart despércr. (Vauvenargues.)
La patience est le remède à tous les maux. Cairii^ dolori
remedium est patientia.
La patience est la vertu des mallieui-eux.
La patience est la force des faibles. (J. Delacroix.)
— On me parle de la patience, qui est, dit-on, le remède à tous
les maux ; je la prends comme une médecine qui ne coûte guère,
mais qui ne guérit de rien. (Poussin, Lettre à M. de Chanteloup.)
— Avec du temps et de la patience, on vient à bout de tout.
(Voy. temps.)
— Patience passe science.
BulVon a dit : « Le génie est une longue patience. » La patience
est, en elVet, ce qui cbez Tliomme ressemble le plus au procédé que
la nature emploie dans la création. C'est une manière d'être de
l'infini.
Patiens quia a'tei'nus, a dit saint Augustin : Dieu est patient
parce qu'il est éternel.
— La patience ne donne pas le génie ; mais il n'y a pas de génie
sans patience.
Patine, mot d'origine incertaine.
Carbonate vert de bronze, qui se forme sur les statues et les
médailles de bronze antiques ; sorte de rouille verdâtre du cuivre
et du bronze : vert de gris.
Peut-être du hlin patina, plat, parce que les plats antiques ou
patines, quand on les trouve, sont revêtus de ce sel.
Tempus pictor, dit l'arcbéologie.
Patiner, dérivé de- patte.
Manier sans ménagement, manier d'une façon désbonnête.
Ah ! doucement, je n'aime pas les patineurs. (Molière, Georges
Dandin.)
Los palineurs soiil ficiis insufjportables
.Même aux boaiilés (|ui sont 1res patinablos.
(ScAIlI'.OX.)
Pâtir, emprunté du lalin pâli, soullVir.
224 PAT
l']ii(liii'('i' un iii:il cause par aiili'iii. iJ'oii jxtliras (argot), soull'rc
douleur.
On \(iil (|||(' (le lulll tf'nips
Les [iclils (iiit |);ili des sollises (los gi'ands.
(La Fontaine.)
<Jitiil(jiiiil ilcliraitl rerjes plecluntnr Ackici.
(HotlACE.)
Patois, de palrius (sermo), langage du pays.
Ce mot s'écrivait patrois, et dans les adjectifs en oi.^, tels que
François, Anglois, Chinois, le suffixe est analogue aux terminaisons
latines en us, tus, osus, u'/t.sis...
Peut-être aussi de /V;/rt/v/.s-, iialùtant de Padoue : parler patois
serait pai-ler conimc à Padoue. (Voy. vache espagnole.)
— Le mot jxilois, dit Granier de Cassagnac {Histoire des Ori-
gines de la langue française), signifie « langue locale ». Les patois
des diverses contrées d'un pays sont les dialectes, et la langue
nationale des grands États n'est qu'un patois privilégié, qui a été
adopté par l'État, est imposé par la loi et enseigné dans les écoles
comme langue nationale, pour qu'elle serve de lien entre toutes les
parties d'une grande nation. C'est ce qui est arrivé, en Italie, au
dialecte de Florence ; en Allemagne, au dialecte de la Souabe ; en
Espagne, à celui de la vieille Castille ; en Angleterre, à celui des
comtés de Kent et de Midlcsex ; en France, au dialecte de l'Ile de
France et de Paris.
Ces patois d'élection, perfectionnés par les savants et les poètes,
sont devenus des langues littéraires, servant d'interprètes entre la
population, dans les relations officielles: mais ce n'en sont pas moins
d'anciens patois parvenus aux honneurs ; tout le monde les parle,
ou du moins les comprend, et les habitants des campagnes eux-
mêmes ont deux langues : l'une est la langue naturelle, apprise au
berceau ; l'autre, la langue artificielle, apprise à l'école. (Chap. YII.)
— Alexandre Dumas, au sujet de l'idiome d'une bourgade des
Alpes, dit : « L'abominable patois de ce pays pourrait passer pour
de l'auvergnat corrompu. »
Les patois, si méprisés dans les villes, sont regardés comme du
français qui s'est altéré dans la bouche du peuple des provinces.
C'est tout le contraire, et les patois sont les héritiers des dialectes
qui se parlaient avant le xiv^ siècle, dont la langue française s'est
éloignée de plus en plus, car l'idiome du peuple change moins que
celui des classes lettrées, et une preuve évidente en est dans la
manière dont parlent les paysans dans les comédies, et notamment
PAT 22o
(lins riilliaiK-e d'un verbe pluriel avec la première personne du
sin,uiilier : je soninies. j'allons. je disons..., de iiicnie (pn; la siilisli-
liition de Va à \'c\ de la diplitlionguc ou à l'o, lorsipiils disent
Piarre, nuir/c, pour Plcrro. merle, et chouse pour chose.
C'est pourtant ainsi qu'on parlait à la cour de Fi'aneois l''% le
Père des Lettres, et voici nu fragment de la correspondance de ce
roi à M. de Montmorency : « Le cerf nous a menés jusqu'au tartre
de Dumigny... J' avons espérance qu'il fera beau temps, veu ce que
disent les estoiles (\\\(i façons eu le loysir de voir... Perot s'en est
fouy, qui ne s'est ousé trouver devant moy. »
— Tout en nous moquant de ces formes surannées du langage
chez les paysans, nous commettons tous les jours la même faute
sans nous en douter (?), avec cette dllférence toutefois que nous
mettons le verbe au singulier (?) avec le pronom pluriel, en nous
servant, comme les rois et les évèques, de nous au lieu de je :
« Dans cet ouvrage que nous offrons au public... » Ce nous préten-
tieux est plus solennel, mais moins modeste et moins grammatical
que je.
Patres (ad), locution latine.
— Aller ad patres : aller retrouver ses pères ; mourir. (Yoy.)
— On lit dans la Genèse (X\, 15) : Tu auteni ibis ad paires :
quant à toi, tu iras vers tes pères.
Et (Juf/es, II, 10) : Congrerjari ad patres suos.
Nous aussitôt, faisant partout florès.
Sûrs de trou\er déjà le boiihoiniiic ad palre^i.
(Recnaiio.)
Mais j'ai grand'peur, francliement, que cela ne l'envoie ad patres.
(Molière, Médecin mabjré lui.)
Patriarche, du latin ecclésiastique 7:>«^/'mrcArt.
Un donne ce nom, dans la Biljle, aux principaux cliefs de famille
avant Moïse. Les plus connus sont : Adam, Abraham, Isaac, Jacob...
Autant (lu'uu patriarche il vous faudrait vieillir.
(La Fo.mai.ne.)
Patricien, dérive du latin patricius, patrice.
Celui qui connaît ses pères. Le patriciat était une noblesse
instituée par Romulus.
S'opposait à plébéien.
Les Espagnols appellent liidahjo un noble, un gentilhomme
15
ii2G PAU
C'est la contrnrlion do Jtijo (l'ahjo, fils do quoiqu'un. rV?t-;'i-dir6
légitime, par npposjlion à hûlard.
C'est aussi roriiiiiM^ do fjerniain, celui dont le pornio, ou l'oi'igine
est connue.
Noble, Jiobifi.s, qui môrile d'«''tre connu, est d'origine analogue.
Patrie, du latin palrin, sous-cnlcndu Ini^ra : la terre paternelle.
Los anciens poètes latins l'ont souvont appoléo afma parens,
mère bienfaisante.
A tous les cœurs ])ien nrs ([iic la pytric est chère !
(Voi.TAiiiK, Tancrède.)
Nescio qua natale solum dulcedine ciinclos
Ducit, et itnmemores non sinit esse sui.
(OVII.K.)
(Je ne sais par quel cliarme le sol natal nous attire tous, et nous
empêcbe de l'oublier.)
Plus je vis d'étrangers, plus j'aimai ma patrie.
(Du Bellay, Siège de Calais.)
Mourir pour la patrie
C'est le sort le plus beaU;, le plus digne d'envie.
Bulce et décorum est pro patria inori.
(Horace.)
Pro patria et in patria mori prœclarum. (Gicéron, Ad Atti-
eu m. YIII.)
Patrouille, de patrouiller, nnciemiement patouiller, dérivé de
patte, agiter les pattes.
Dans mon église l'on patrouille
Si l'on ne prend bien garde à soi ;
Et le crapaud et la grenouille
Coassent l'office avec moi.
(L'abbé Saxlecq-e au Père-Lacbaise.)
Patte, mot d'origine incertaine.
— Faire patte de velours. (Yoy.)
Graisser la patte. (Voy.)
— Pigeon pattu, en \^ro\ençs^^ pe'pel ut (pied pelu).
La Fontaine a employé patte-pelu : doucereux.
Paume, du \?A\\\ palma, même sens.
Jeu qui consiste à cbasser une balle avec la paume de la main.
— Du jeu de paume viennent un grand nombre de locutions :
Argent sous corde : au jeu de paume, le prix des enjeux se met
PAÛ 22r
sous une corde tendue :ni milieu du jeu. et ûiii-nie de filets qui
toucliont le sol.
li;ill()ler quelqu'un : se jouer de lui. le herner.
liricoler : siiisir la halle qui retoui-ne après avoir louché le mur.
Einpauuier : recevoir une halle eu plein dans la paume de la
main. (Voy.)
Fiiire fau\-houd : au liuuré. manquer de [)arole.
Friser la corde : lorsque la halle touche légèrement la corde, en
passant par dessus.
Peloter en attendant partie : au propre, jouer à la paume, pour
s'exercer, avant que la partie soit engagée.
Prendre la halle au hond, ou à la volée : saisir le moment favo-
rahle.
Renvoyer la halle, ou l'éteuf : au ligui'é, répliquer vivement.
L'éleuf est la halle du jeu de longue-paume.
A hou joueur la halle vient : les habiles réussissent.
Pauvre, du latin imuper, pauperem: d'où aussi paupérisme.
Le diminutif pauvret s'exprime en provençal par pecca'iré
(pécheur), digne de compassion.
— Synonymes : has-percé. Lorsqu'on portait les culottes courtes,
il fallait être bien pauvre pour ne pouvoir pas faire raccommoder
ses has à la ravaudeuse.
Panne (trivial) vient de pannus, comme pannosus, déguenillé,
mendiant.
— Le pauvre est celui qui n'a que strictement le nécessaire pour
vivre : l'indigent, celui qui, n'ayant rien, ni aucune industrie
productive, est forcé de recourir à l'assistance publique.
— Qui donne aux pauvres, prête à Dieu. Qui donne pour Dieu,
donue pour deux. C'est pour cela qu'il ne faut pas confondre
« donner aux pauvres » avec « donner pour les pauvres ».
— Le droit des pauvres est une taxe prélevée, en France, au
bénéfice des h()pitaux. sur la recette des spectacles, bals, concerts,
etc., etc.
Louis XIY, en 1G!)9, rendit ce droit obligatoire. Le o décembre
1809, il fut fixé à un décime par franc, eu sus du prix de chaque
billet d'entrée.
La taxe des pauvres est un impôt établi en Angleterre dès 1602,
sous le règne d'Elisabeth. Cette taxe a augmenté considérablement
le nombre des pauvres dans ce pays.
— bcpjuuper, les Anglais ont fait paupérisme, qui est la pau-
228 PAV
vreté en ^réiiér;il. Paiijjcrisnic c&l iiii \il;iin mot, qui désifiiie la
cinsse tout (Mitirrc dos pariîis do la sociôt»'', dos dôsliôritôs du
hoiiliour, ol (jiii sert do lili'o. au cliapitrc; do la nouvello science
ôconniiiistc ot socialislo où Irs (juoslions de la misère publique sont
traitées par des philanthropes qui pourraient s'appeler paupé-
7'is/es...
Pauvreté, du latin pnnpertas, par métathèsc.
DÎNinité all(''!i:()ri(pio, Mlle du Lnxe ot de la Paresse, et sœur de
la Faim.
— Pauvreté n'est pas vice : c'est bien pis. (Voltaire.)
Ce proverbe est ce qui reste d'un ancien axiome de droit cité
dans les InstUules de Loisel : « Pauvreté n'est pas vice, et ne
désanoblit point. »
Il y avait aussi une autre maxime de droit sur le même sujet :
« Pauvreté n'est pas vice, mais en grand'pauvreté il n'y a pas
grand'loyauté. » (Loisel.)
— La pauvreté est mauvaise conseillère, comme la faim.
Malesuada famés.
(VmGii.K.)
Qui n'a rien, en ce maudit âge.
Est tenu pour fol, fût-il sage.
Pauvreté empcscbe les bons espritz de parvenir. (B. Palissy.)
Pavaner (se), dérivé de patanc. troriginc inconnue.
Étaler son orgueil connue le paon étale sa queue (?).
— Rabelais dit penadcr (I, 12) d'un clieval qui marche fièrement
comnie un paon. Et La Fontaine emploie se panada.
— La pavane, danse équestre des Espagnols, était exécutée
dans les carrousels pour la clôture des jeux, et au moment de la
parade. (Colonel Ambcrt.)
La pavane est une danse de caractère, grave et noble, dont les
mouvements imitent ceux du paon.
Pavillon, du latin papUionem.
S'est dit d'abord d'une toute, des tentures servant d'abri.
— Drapeau, dans la marine.
— Pavillon blanc (parlementaire), pavillon de signal, pour avertir
qu'on demande à parlementer.
Le 18 décembre 1784, le ballon de M. do Montgolfier devait
I>AY 220
s'ôlovor ;'i I.von. I/nsconsinn no put avoir lien, parco qu'il tomba do
la iKMuf loiilc l;i joiiriirr. M. S... adressa ces vers aux aéronautes :
V'ivvs assir^ronnts du séjour du lonncriv,
CaluU'Z votre colère :
i:ii I ne \ oyez-vous pas (jue .luiiiler tremlilant
Vous demande la paix par son pavillon liJane 1
— Baisseï" pa\illoii : s'a\onor vaincu ; roudi'c I(>s armes.
LKÙM'nl sans cdulredil lueltre bas pavillon.
(.M;ii,n' iii;, Etourdi.)
Vc.villiiin sulDitiUnr.
(Stack.)
Fasccs submiUcrc, ...Jfanus (/arc. mettre les pouces.
Tous les poètes Itaissent pavillon devant Homère et Virgile.
— Eu terme d'architecture, hàliineiit isolé, ayant une toiture à
quatre faces ou en d()ine.
Pavois, du latin /x/r/'/n-i.
Arme (lèt'(Misiv(> sous latpielle ou s'ahrite, bouclier.
— Vient [)eul-ètre plnt()t de Titalien paresc. de Pavie, où se
fabriquaient ces bouciiei's.
Payer, (\\\ latin pùnivr. apaiser (ses créancici's).
Eu acquittant une dette, on fait laire b^s réclamations, on se
soustrait aux poni'siiilcs. on est tranquille iquielus). Ou se délie
d'une ser\ilii(lo par la solvabilité Iso/t-fre). de même (pi'on rachète
son indépendance par une rançon (redcinpllo).
Au contraire, on reste l'esclave du créancier, tant qu'on est
obéré (oha-rafiis. d(> (rs).
— Synonymes : jouer de la poche, jouer du pouce, c'est faire le
geste si bien compris de tout le monde, qui consiste à glisser
vivement le pouce sur le i)ont de l'index.
— Payer eu chansons (voy.), ...en monnaie de singe (voy.)
Payer de toupet, c'est-à-dire d'elïronterie.
Payer les violons. (Voy.)
Payer ric-à-ric, ou rubis sur l'ongle : très exactement.
— Il me la paiera plus cher qu'au marché : je me vengerai.
Expression synonyme de : il ne renq3ortera pas en Paradis.
— Ou dit : la paye d'nn soldat, le salaire d'un ouvrier, les gages
d'un domestique, les appointements d'un commis, les lionoraires
d'un avocat.
— Payer de sa personne : s'exposer hardiment.
Solrere in œre nul, in cute. Payer de sa bourse ou de sa peau.
230 PAY
La loi des Dnii/o, (aides, à Uonie. livrait le (It'hilciir insolvable à
la merci de ses créanciers et leur donnait le droit de le mettre aux
fers, de le rrdnire en serviliidi^. de [iréicver sur son corps un
morcean de cliaii'.
I.a loi .Inlia alléMiia cette lauuenr, en libérant le débiteur qui
faisait à ses créanciers l'abandon complet de ses biens.
— Le moment de payer : le quart-d'iienre de Rabelais. (Voy.)
— Partir î^ans payer : emporter le cliat: faire nn pouf: faire un
trou dans la Inné.
Au xvi" siècle, on disait, pour s'en aller: faire un perluis dans
l'air, faire un trou dans la nuit.
Pays, anciennement païeïs, païs : du latin parjensem, sous-
entendii agrum, territoire du canton.
— L'Académie confond dans la même acception les mots pG\jii et
pairie : en réalité, le mot patrie s'entend du lieu de naissance,
considéré au point de vue politique et moral, tandis que 7>fl'y5 a
rapport au côté matériel et plus restreint de la même idée.
Ma patrie est la France, mon pays est la Provence.
— Le mot pairie est employé dans un sens politique ; pour
les intérêts matériels, on se sert du moi pai/s.
Le pays est sillonné de chemins de fer et de canaux, qui ont donné
l'essor au commerce, en contribuant à rendre la patrie florissante.
Guillaume Tell a délivré sa patrie du joug de la tyrannie.
Un provincial quittant Paris pour son département retourne dans
son pays sans quitter sa patrie.
— Il est bien de son pays : il est bien naïf. C'est comme si l'on
disait : il n'a jamais perdu de vue son clocher.
— Nul n'est prophète en son pays. (Voy. prophêle.)
— Pays imaginaires : les Champs-Elysées, Cocagne, Éden, Eldo-
rado, le pays de Tendre.
— Pays, féminin paijse, se dit aussi dans le sens de compagnon,
originaire du même pays. En allemand laïuhmann.
Paysage, de pays et sagire, savoir, voir iX).
(En réalité, dérivé àe pays avec le suffixe âge.)
Tableau d'un site pittoresque.
Synonyme : plat d'épinards (mauvais paysage).
— Il y a trois époques du paysage, en France : l'' le paysage
épique, de Poussin et de Claude Lorrain ; 2° le paysage fantaisiste,
Pi: A 2;ji
do Watloaii et do son école ; '^'^ lo paysage réaliste, créé par
J. Veniet. (II. Uela houle.)
L'école classique du paysage était représentée, en i830, par
Bidault, Hertin et Bourgeois, qu'on appelait les trois B, par opposi-
tion au\ (piatre G : Gros, Girodct, Guérin et Gérard.
Il y avait aussi Jolivard, dit Jolivert, à cause de la couleur de ses
paysages, et Watelet, avec son éternel moulin, battant de sa roue
une eau savonneuse, au milieu d'un maigre bouquet d'arbres.
Ils s\mi vont dans les forêts
Fair" du rliic d'après nature;
Voyez (jnelle l)ai'l)(' ils ont,
I^es peintres de liarhizon !
Barliizon est un hameau de la foret de Fontainebleau, où s'est
formée, vers 1840, une colonie de paysagistes, parmi lesquels Diaz,
A. Milet, Dauhigny, etc.
A la vente Patureau (avril 18rj7), un paysage d'IIobhema, Le
Moulin, s'est vendu 100.000 francs. On aurait eu pour cette somme
tout le terrain qu'il représente.
— Quelle vanité, que la peinture attire l'admiration par la
ressemblance des choses dont on n'admire pas les originaux !
(Pascal, Pensées.)
— Préault disait des paysagistes grands fumeurs, qui produisent
peu : « Ils fument trop de pipes d'après nature. »
Paysan, dérivé de pays.
Habitant de la campagne.
— l'agns a donné aussi, par jxiganns, le mot païen.
Constantin le Jeune, réformant les soldats qui n'embrassaient pas
le christianisme, les réduisit à la condition de villageois. De là la
dénomination de païens appliquée à ceux qui professaient le culte
des idoles.
Peau, du latin pellls, d'où aussi : peler, pelage.
S'emploie quelquefois pour la personne elle-même.
On dit : avoir peur pour sa peau, défendre sa peau.
Curare cuteni, cuticuUun. (Horace; Perse.) Avoir soin de sa
petite personne.
— Les Romains appelaient une femme débaucliée pellls ou
scortum, peau, cuir.
— Dans sa peau mourra le renard : on ne peut changer do
naturel.
232 PEC
A iiioiiis qu'oïl no récnrclie vif, il moiirr;i d.'ins la peau d'un lier
insolent. (Beaumarchais, Figaro, I, 4.)
Avoir la peau dure : un lonipéramenl de fer.
— Changer de peau : cjian.uer de conduite. Celle locution est
empruntée des reptiles, qui changent de peau cl sont devenus l'em-
blème de la fraude. (Voy. stelUonnl.)
Les anciens appelaient le loup-garou versipe/l/s, qui change de
peau.
Pêche, du htm per s ica ou persicu m Onalum).
Fruit du pêcher, venu de Perse.
En provençal pességue.
Péché, du latin peccalum, provençal ^yeccft^.
Transgression de la loi religieuse.
Delictum est declinarc a bono ; peccalum est ciun malum {il.
(Saint Augustin.)
— Péché mignon : celui que l'on commet volontiers.
— Péché mortel. « C'est un péché mortel que de faire l'amour,
disait-on à une lorette. — Si cela était, répondit-elle, il y a longtemps
que je serais morte ! »
— A tout péché miséricorde : il faut être toujours indulgent.
On l'a parodié ainsi : A tout péché misère et corde.
— Péché caché est à demi pardonné. Rien n'est plus funeste que
cette maxime d'une casuistique étroite. C'est exactement le contraire
qu'il faudrait dire et Grégoire le Grand, l'un des hommes les plus
illustres du catholicisme, a dit : « Mieux vaut le scandale que le
mensonge. »
Le pùcliù que l'on caclio est demi pardonné.
(Rko.mer, Satire XUI.)
Le scandale dn monde est ce (lui f;iit Toffense,
Et ce n"est pas pécher (pie i)éclier en silence.
(MoLiKrsF, Tartuffe, IV, 5.)
— La décence ne consiste pas à pratiquer le bien, mais à cacher
le mal.
— Le Juste pèche sept fois par jour. Cette locution vient d'un
passage de l'Écriture uial interprété : Septies cadlt Justiis. —
Seplles est pour sœpe, souvent. (Trévoux.)
— Le Juste pèche sept fois par jour, mais ce sont des péchés de
juste: il y en a qu'il ne commet jamais, et qu'il ne soupçonne même
pas. (^G. Sand.)
PEl) 2:33
Pêcher, du latin ])i>irnri, \)Yù\Q\\n\\ pcsca.
Prcndi'c (lu itoissoii.
— Pèciief (Ml caii Iroiililc. (Voy. froi/h/t\)
Itnniillai'd &M>. la vallùc,
l'iH'litMir. fais la jniirnéc;
Uroiiillaril siu- lo mont,
Pèclieiir, reste à la maison.
— Poclio iniraciiloiise. (Saint Jean. Érarif/i/c, XXI.)
Pécore, du latin y>«'o/Y/, pluriel neutre pris pour un sinpiilicr
l'éiuinin.
...La ciiétivo pécore
S"en(la si jjien qu'elle crc\a.
(L.\ FOMMNK.)
Pécule, du latin porulium. dérivé de pecu.s, comme pcnniia,
pai-cc (pie les premières monnaies des Romains portaient la li.uiire
d'iii! Ixeuf. d'un mouton. (Piutartpie, Me de J'ahlicola.)
Sous Servius Tullius, si.\iéme roi de Rome, on fraiipa des monnaies
appelées « moutons » ou « Ixeufs », qui portaient Timaue de ces
animaux. Y\\ bœuf valait 15 moutons. (Yertot.)
D'où le proverbe Bos in Ilnçiua. pour dire que quelqu'un était
payé pour se taire.
— Rabelais dit (liv. IV, cli. otî) que Démosthènes vendit clière-
ment son silence aux Araicns, en ne plaidant pas contre eux,
moyennant finances, sous prétexte qu'une angine ou esquinancie
venait de le prendre à la gorge. Un malin prétendit qu'il avait non
pas une angine, mais une argentanglnc, argurankè .
— Pécule désignait l'argent gagné et économisé par un esclave;
il pouvait l'employer pour son utilité personnelle et parfois pour
son rachat.
— ])q pécule, nous avons fait péculaf, vol des deniers publics
commis par celui qui en a le maniement, l'administration. (Voy.
co/icu.ssion.)
Pédant, de l'italien pédante, d'origine incertaine.
Celui qui fait parade de savoir. (Voy. savant.)
....Mji'z, iM'Iilrc (le pi'dant.
(.MoMtRli.)
Pédauque (la Reine), pedeni aucw, pied d'oie.
La reine Pédauque est la statue d'une reine de France, Berllie
de Bourgogne, cousine au 4« degré de Robert, roi de France, qui
ré[)ousa en 99o, malgré la défense du pape. Il la répudia depuis, et
234 im:i
la léjïondo dit que, pciKhiiit riiilci'dil. licrtlic ;iccoiirli;i (]"iiii lils aux
pieds d'oie.
11 est souvent (jiieslioii d<' celle reine Péd;iii(|ii(' d;ins les dictons
et dans les iiioniinients du Moyen-Age, on sa slaliic liL-iire avec un
pied d'oie, nolaimncnt à Sainl-Bénif^nc-de-Dijon, oi'i h' roi Robert,
fondateur de i'é.ulise, se trouve placé en face de sa fi'uiuic
Peigne, du latin pecline/n.
Dédale, dans le Dictionnaire des Précieuses.
— Le peigne des Allemands : la main.
Se pygnant du pygne des Allemains : c'estoyt des quatre doigts et
du poulce. (Rabelais, I, 21.)
Rabelais peut avoir eu en vue de railler les Allemands sur leur
malpropreté, ou fait un jeu de mots sur la main qu'on se passe dans
les cheveux, et l'ancienne forme Allemains pour Allemands. C'est ce
qu'on appelle aussi « le peigne du père Adam »,
Peigner, du latin ])ecfina)'e, anciennement ^^/y/î^r.
— Il y a des endroits de ï Enéide auxquels l'auteur eust donné
encore quelque tour de pigne, s'il en eust eu le loisir. (Montaigne,
Essais, II, 10.)
Ane rascas non omet psndienar.
(P. Cardinal.)
(Jamais teigneux n'aima le peigne.)
— Se peigner : se battre.
Se donner une peignée : se prendre aux cheveux.
Or viens cza, que je te donne ung tour de pigne. (Rabelais.)
Quand il s'agit de combattantes : se crêper le chignon.
— En 1786, deux fils de fermiers généraux, C... et R..., se trou-
vant au parterre de l'Opéra, au milieu de la foule, l'un d'eux, R...,
se mit à crier: « Qui donc pousse comme cela? C'est sans doute un
garçon perruquier? — C'est moi qui pousse, répondit C..., donne-
moi ton adresse, et demain j'irai te donner un coup de peigne. »
Le lendemain, un duel eut lieu aux Champs-Elysées, où C... fut tué.
Peindre, du latin pingere.
Jamais, s'il me veut croire, il ne se fera peindre.
(La Fontaine.)
Peine, du latin pœna : d'où peiner, pénible.
— Homme de peine. Expression douloureuse d'une vie de misères.
— La peine du vilain ne compte pour rien.
A chaque jour suffit sa peine. Proverbe favori de Napoléon.
Sitf/tcif (fie/ nia/ida sua. (Saint-Mathieu. YI, 24.)
Les ix'inos (h> la \ie sont coninie les onihres an tablean, elles
servent à en niienv faire apprécier les i)laisirs. (De Clincluinip.)
Peintre, dn latin populaire pinclor, déformation de ]>/r(or.
Italien pill<»\ qui a donné pittoresque.
— Synonymes : poète muet {Dictionnaire des rrécieuses) :
l'oiisin de l'arc-en-ciel (M. Régnier): rapin, élève peintre.
— Croûton : mauvais peintre. On emploie aussi dans ce dernier
sens : Raphaël à la toise.
— Les peintres se divisent aujourd'hui en : coloristes, harmo-
nistes, impressionnistes, idéalistes, réalistes. 11 y a même depuis
peu la coterie des intransigeants (I80O).
La peinture réaliste a la prétention de faire admirer la ressem-
hlance des choses, dont on n'admire pas la réalité : quelle vanité !
— Gueux comme un peintre. Les pauvres artistes font les artistes
pauvres ; les grands artistes sont des alchimistes qui font de l'or
avec de la toile ou du papier.
Un paysage d'Hobhema s'est vendu 100.000 francs (avril 1857).
La lille d'Hérode, du Titien, 226.000 francs rl82G).
Les grandes Bacchanales de Poussin, 375.000 francs (1805).
La vache de Potter a été cédée à l'empereur Nicolas, en 1805, par
Joséphine, au prix de 800.000 francs.
Peinture, du latin j)ictura, modifié comme le précédent.
La peinture est une imitation faite, avec hgnes et couleui's, sur
une surface, de tout ce (jui se voit sous le soleil. (H. Poussin.)
— Synonymes de mauvaise peinture : croule, épigramme contre
la nature, enseigne de cabaret, peinturlurage. Habileté de main :
patte. Beaucoup de patte et de chic, mais peu de dessin !...
— Gros disait: « La peinture était une langue; ce n'est plus
qu'un patois. » S'il vivait aujourd'hui, il trouverait que ce n'est plus
que de l'argot.
Les poètes peignent avec la parole ; les peintres parlent avec le
pinceau. (Carrache.)
La peinture est une poésie muette ; la poésie est une peinture
parlante. (Sisraondi.)
La peinture a sur la poésie cet avantage, qu'on la lit d'un coup
d'oeil ; elle parle comme une langue muette, intelligible à tous ; elle
n'a pas besoin de traducteur. (T. Gautier.)
La première condition pour obtenir un résultat avantageux, est
236 PEK
de, hicn espérer jtonr le sujet... i";ii toujours en une idét; iissez ;iv;in-
lapcusc non de ce ([iic je fuis, mais de ce que je ferai. (F^éop. Hobcrl,
Lettre à Madame Marcolle.)
— Les niélaphores empruntées à la peinture sont d autant plus
nombreuses, que rohjet de ce tropc est de peindre les choses avccla
pensée; mais on se trompe souvent en faisant des comparaisons que
l'art ne saurait admettre. Ainsi, on dit « un crayon » pour un croquis,
une esquisse.
— Peindre sous des couleurs fausses, sous des couleurs hrillanles
est un non sens, comme si Ton disait : dessiner .sous un crayon. (Jn
peint avec des couleurs, et non sous des couleurs. On doit dire : voir,
ou peindre sous un jour favorable ou sous un faux joui".
Casimir Delavigne dit, dans une couu''die : « l'n tablciiu lidélcdoit
tout peindre, le bon et le mauvais côté.» D'alinni un lalilcau ne
peint pas ; ensuite, il ne peut pas représenter à la fois le bon et le
mauvais côté des clioses, car la perspective des objets s'y oppose,
etc. La piirasc toute simple: «Un tableau doit être lidèle», dirait
mieux et plus juste.
— Peinture à Tbuile. « Le peintre Van Eyck, dit Jean de Bruges,
inventa les procédés de la peinture à l'huile (1370-I4y). Il confia
son secret à Antoine de Messine, qui le tint lonulemps caché : mais
Jean Belin se désuisa en grand seigneur, et étant allé chez le peintre
sans exciter sa méliance, par\inl à le lui (iéroI>er et le rendit [tiiblic »
Péjoratif, du latin pcjovarc, rendre pire, néologisme et terme
de grammaire.
Se dit de certains mots dérivés qui se prennent en mauvaise part :
criailler est le péjoratif de rrier.
Les suffixes ard et aille sont péjoratifs.
Pékin, terme d'argot militaire.
Adopté, mais non inventé, par les chauvins de l'Empire, pour
désigner un « bourgeois».
— J.-J. Ampère suppose que ce vocable vient de ;jr/.yrt/t/i5, païen,
dans le même sens que les étudiants allemands appellent un bour-
geois pli i lis/ in.
F. Génin le dérive àe j)er qaem (sous-entendu omnia farianf),
d'après une ancienne expression employée par Henri Estienne : faire
le per quem, c'est-à-dire l'homme d'importance, le fat, l'imper-
tinent.
Si cette origine du mot pékin est vraie, il n'aurait pas le sens
PKf. 237
que nous y atfMclions : il aiirait l'Iô appliqué à Unis, aux hoiir.ijoois
par les militaires, à une é|)0(pie où le Ituuriicois n'était rien.
On écrivait alors le mot ix'hin, comme le nom de la ville chinoise,
et, par suite, on substituait V(il(iiiti(M'S r(''|)ithète de c/ii/inis à celle
de pi'kin.
— Pour d'autres, ce serait une modilicniion de phiue-chicn ou
pisse-chien, injure usitée an xiv-' siècle.
De vieux dialogues des règnes de Heui'i III et de Henri IV,
employaient souvent prqitin wx péhiii, pour désigner les adversaires
de la religion. (Ambert.)
« Nous appelons pékin, dit le général D... à M. de Talleyrand,
tout ce qui n'est pas militaire. — Ah ! fort bien ; comme nous appe-
lons m il il a ire tout ce qui n'est pas civil. »
Peler, dérivé ih^ peau, anciennement y^tV, du latin pellis.
Oter la peau.
Il n'y avait que quatre pelés et un tondu. (Voy. tondu.)
Pèlerin, du latin peregrinus, voyageur. En roman pélcgrin.
De là aussi péréiji'ination.
Am que pnssaca l'aida Jet V(tr ni prUcrjrin^.
( Vie de saint Honorât.)
(Avec quoi il faisait passer l'eau du Yar aux pèlerins.)
— Synonymes : coquillard, faux pèlerin de la Gourdes Miracles :
qui porte des coquilles sur le collet de sa robe et à son chapeau.
Ces coquilles, en forme de bénitier, sont appelées pèlerines, et leur
nom s'est associé à celui des pèlerins.
Romieu : Son plus paubres que romieu. (Raymond deCastelnau.)
Ils sont plus pauvres que le pèlerin.
Ce mot, désignant les pèlerins qui allaient à Rome, a été modifié
par Rabelais (liv. IV, nouv. prologue), en romipète : « Petits romi-
pétes vendans le leur, empruntant l'aultruy. »
On créa même le verbe romipéter : « Maudissant l'heure d'avoir
fait un pet à Rome, c'est-à-dire d'être romipété et estre venu de si
loing. » (Contes d'Eutrapel.)
— C'est un fin pèlerin : un rusé compère.
Pélican, du latin pelicanus (du grec pélékus, son bec ressem-
blant à une liacl:e?).
— Le pélican se perce les flancs pour nourrir ses enfants.
On représente cet oiseau se déchirant les flancs avec son bec,
238 PKL
|)()iii' l'.iifc l»()in', son s;in^- ;'i sn couvée. C'est sons celle forme (jnil
li,uiii'(5 (liiiis les Itlnsons, oii on r;ii)[)elle ï'ilic.
W est (levenn reinlilrine de r.'inioiir palernel, el iiiAine de la Pro-
vidence divine.
Dans l'oratoire du cliàleau de La Barre, on lil ce quatrain, au has
de la représentation du pélican :
Je suis (ruiic (livc iialurr-,
Car (juand je vois mourir los miens.
Vie leur rends par ma morsure :
Ainsi fil Jésus-Clirist aux siens.
— La tradition de ce dévouement du pélican ne se trouve ni
dans Aristote, ni dans Pline ; mais elle apparaît dans le monde
romain dès les premiers siècles de notre ère. Elle est présentée par
les Pères de l'Église comme l'emMême de la Charité. Saint Jérôme
et saint Augustin assimilent le sacrifice volontaire du pélican à celui
du Fils de Dieu. Par suite il devient l'emblème de la Rédemption,
comme le phénix celui de la résurrection de la chair et de l'immor-
talité.
Cette légende est assurément d'un assez beau caractère pour être
conservée; toutefois il faut convenir qu'il s'agit, comme dans celle
du phénix, non d'un animal véritable, mais d'un être purement
imaginaire.
En elîet, cet oiseau de convention est peint en vert et en jaune,
tandis que le pélican véritable est blanc. On le représente avec un
bec court et aigu, tandis que celui du pélican est large et aplati.
Il en est de même de toutes les autres formes du corps, qui
ditïèrent entièrement dans l'oiseau naturel et dans l'oiseau de la
légende.
Péiion. Entasser Pélion sur Ossa.
Les poètes ont imaginé que le Pélion, montagne de Thessalie,
fut mis par les Géants sur le mont Ossa, lorsqu'ils voulurent
escalader le ciel.
Ter siuil conati imponere PcJio Ossam,
Sciiicet Clique Ossœ frondosum involvere Olt/mpum.
(Virgile, Géorgiques, 1,281.)
(Trois fois ils tentèrent d'entasser Ossa sur PéUon, de rouler sur
Ossa le verdoyant Olympe.)
Pelle, autrefois jjalle, qui se dit encore en provençal. Du latin
jjala. Le redoublement de / est arbitraire.
— La pelle se moque du fourgon.
L'iing nppolloyt iino aiiltre sa i»alle, elle lo nppelloyt son fourgon.
(Raliolais, ranldunicl.)
Penaillon, ilrriNr de pouiillc. du laliii jfciuia (i) Da \i\ dépe-
iiailli'. vêtu de liaillons.
Ce ])enaill(Mi de nioyne. (Rabelais, IV, 24.)
Pénates, du laliu pénales, déi'ivé ^l(d pênes, penilus.
Divinités domestiques des Romains.
Les dieux Pénates étaient les dieux de la famille que Ton adorait
dans l'intérieur de l'iiahitation, dans le lieu le plus retiré. Cicéron
(De natura deonuit) dit que ce mot vient fjnod pênes nos nali
sinf. On n'est jamais bien tombé d'accord sur leur origine. C'étaient
les dieux tutélaires de Troie, qu'Énée emporta après la prise de
cette ville, et (jue les Romains adoptèrent.
C'est à tort (pi'ou les a confondus avec les lares et les génies.
Les Pénates n'étaient pas des dieux d'une classe particulière : ils
étaient, au contraire, choisis indilTéremment parmi les dieux du
ciel et de la terre, des eaux et des enfers. C'étaient, en quelque
sorte, les dieux protecteurs des familles, comme sont dans le
christianisme, les saints patrons. Leur nom leur venait de ce qu'ils
étaient placés dans le lieu le plus retiré de la maison, in penifis-
sinia œdiiun parle, dans ce qu'on appelait penelralla.
Les dieux Mânes (de manere, demeurer) étaient, chez les Romains,
les âmes des morts considérées comme divinités infernales. On
distinguait les bons et les mauvais. Les bons étaient les Pénates et
les Lares ; les méchants, les Larves et les Lémures.
Penaud, semble dérivé de yx^'/ne, et n'être qu'une autre forme
de péneux, qui est en peine.
Borel le dérive de pes nudus : pied nud !
— Les Provençaux appellent pénéquer la transition de la veille
au sommeil, lorsque la tète alourdie s'incline sur la poitrine, comme
les figues trop mûres qui pendent vers le sol, et qu'ils appellent
l)énèques.
Penchant, participe pris substantivement àa pencher : du latin
pend Ira fc dérixé de pendere.
— Chacun se laisse aller à son penchant. (Voy. plaisir.)
Trahit sua ijitonque ci)luptas\
(Vinr.ii.K, Egloyue, III,)
Animo obsequi (Térence) : suivre ses goûts.
240 PEN
— On loiiilx; loiijoiii'S du ('(Mo où l'on pciiclic (Giiizol); c'esl-à-dire
qu'il faut so ni(''li(M' do, l'ciiU-aincmcrit des passions.
Pendre, pendu, \:A\\\ i»'n(lcre.
])(' là aussi pendai'd, honiino de sac et do oordo.
— Synonymes : évoque dos champs, qui donne la liôiiédiction
avec les pieds. (Rabelais.)
Painii les autres synonymes de pendu, ou de être pendu : être
branché ; épouser la potence, ou la veuve (la corde s'appelait
mariage) ; faire le guet à Montfaucon ; jouer du liaull»ois ; monter
par une échelle et descendre par une corde; iiioiirir on l'air:
regarder par une fenêtre de chanvre.
L'expression « évoque des champs, donnant la bénédiction avec
les pieds », se trouve pour la première fois (?) dans la Satire
Ménippée, et ne parait pas remonter au-delà du xvf siècle.
Ci-git mon cousin d'Avenas
Qui repose quand il ne vente pas.
(Epitaphe d'un pendu.)
— C'est François I*"" qui substitua le supplice de la corde et de
l'estrapade à celui de la liart. Rabelais l'appelle pour cela Panta-
gruel, qui prend à la gorge, mot tiré du grec pantayruellon.
— Par saint Antoine ad auras, tu seras une foys pendu ; et toy,
dit-il, tu seras une foys enterré ; lequel est plus honorable, ou l'air
ou la terre? (Rabelais, II, 17.)
Le nom de saint Antoine ad auras, forgé par Rabelais, est
invoqué ici comme pour prédire à quelqu'un qu'il sera pendu, quia
pendebit ad auras, il mourra en l'air. Quant à la comparaison
avec la mort en terre, c'est un souvenir du supplice de l'estrapade
(voy.) pratiqué alors contre les protestants.
— Se pendre :
Lilleram ex se lonfjam facere.
(Pl.Al'TK.)
Faire de son corps une lettre longue; faire 1"/.
— Allez vous faire pendre !
Abi in malam crucem.
(TtHEXCE.)
...In malam pesten\. (Cicéron.)
— Aussitôt pris, aussitôt pendu. Corripi ac suspendi. (Cicéron.)
Dès le règne de Charles Y, la maréchaussée avait une justice
ambulante, qui cbevauchait avec les gendarmes. Lorsqu'un coupable
PKN 2V1
était saisi siif les Liraiids cliéiiiins, les inaii'istrats se conslitiiaioiit
aussitôt (Ml triliiiiial [loiir le juger, ...et le faire pendre.
Sous l'AssiMiiiilée conslitiiautc tITDl), ou voulait reudre la justice
(nnhnlatoire. M. Fruuuou dit, pour combattre ce projet : « Il est
des décences publiques qu'il tant respecter... La justice est une
seconde Providence... IVa[trt's le nouveau système, la vie des
niaiiistrats ne serait qu'un pin-pélnel postillonnage. Les grandes
router les retiendraient pbis longtemps que les grandes causes, et
le livre des postes serait plus consullé (pu^, le livre des lois. » (Yoy.
aiyuilh'tle.)
— Le peuple semble se rappeler encore au xix^ siècle la loi
salique, qui, au v\ défendait sous peine de pendaison de décrocher
un pendu en l'absence des magistrats.
Oui II' |)L'iulu clespcndra
Dessus sou col le faix clierra.
(Le Cha^tniement.)
— La corde pour pendre s'appelait mariage, cravate de Normand,
cravate de chanvre.
Cette dernière expression était en usage chez les Romains, car
on lit dans le Satiricon de Pétrone (cliap. I, YI), qu'au tirage d'une
loterie comique, ce que nous appelons aujourd'hui tombola, le sort
ayant amené une cravate (?), on appela une corde de potence :
Cervical! of'fla collaris ahlata est{X).
— Avoir de la corde de pendu : un bonheur constant.
Pline (Histoire naturelle^ XXYIII) dit qu'» à Rome le peuple
croyait que la corde qui avait servi à pendre quelqu'un, possédait
des vertus merveilleuses ».
Pêne, anciennement pesne et i)esle. du latin pessulas, verrou.
Pièce de fer mobile de la serrure, que la clef fait entrer ou sortir,
de manière à ouvrir ou à fermer la porte.
Pénélope, origine poétique, homérique.
— La toile de Pénélope. Penclojjes felam retexere (Cicéron) :
refaire la toile de Pénélope.
— Pénélope, fille d'Icare, pendant la longue absence de son
mari Ulysse, pour se soustraire aux poursuites des prétendants à
sa main, leur promit de se décider en faveur de l'un d'eux quand
elle aurait achevé un voile auquel elle travaillait, et qui devait
servir aux funérailles du vieux Laërte. Pour éluder sa promesse,
elle défaisait la nuit ce qu'elle avait fait le jour. L'ouvrage dura
ainsi trois ans.
10
242 ÏT.X
Les iV'Voliilioiis ont drlniil les îihiis, il s<M';iit iihsiirdi; de IcS
ivl.ililir : l'œuvre de l;i civilisjilioii n'est pjis la loile de Pénélope.
— Le nom d(; Pénélope est devenu aussi proverbial pour dési^mcr
la lidélité conjugale. Cependant sa vertu est loin d'être restée sans
atteinte. On dit (pie tous les princes qui prétendaient à sa main
eurent part à ses faveurs, et qu'ils la rendirent mère du dieu Pau,
nommé ainsi du mot pan, panlos, qui, en grec, signifie tout.
Pénis, mol latin. Aussi mcnlula: en sanscrit, le bâton qu'on
taisait tournei- dans le creux d'un morceau de bois, pour obtenir
du feu. Ce bâton est souvent comparé à nn pliallus.
Pénitence, du latin iKcniicntia.
Un des sept sacrements de l'Église catbolique; celui par lequel le
prêtre remet les pécbés à ceux qui s'en repentent et les confessent
au tribunal de la pénitence.
Ce sacrement a été institué par Jésus-Clirist lorsque, après sa
résurrection, il dit à ses apôtres : « Les pécbés seront remis à ceux
à qui vous les aurez remis. » (Jean, XX.)
Pénitent, du latin pœnilentem.
Celui qui a regret d'avoir ofîensé Dieu.
— On appelle « pénitents » les membres de certaines confréries,
qui font vœu de pratiquer la pénitence publique, en allant dans les
rues couverts d'un sac ou babit de pénitent.
Ces confréries, déjà connues en 1200, en Provence, y prirent un
grand développement, vers 1350, sous Charles d'Anjou.
— Les Hébreux nommaient « cilices » les babits servant à faire
pénitence ; mais les Septante appellent « sacs » ces mêmes babits,
parce qu'ils en avaient la forme.
Penser, du latin penmre : doublet de peser.
Peser, apprécier la valeur ou le poids d'une idée avec la balance
de l'esprit ; comme delUiérer, du latin llbra, balance.
— Penser est une métapbore, comme les autres mots dont on se
sert pour exprimer les opérations de l'esprit : réfléchir, méditer,
agiter.
Les Romains disaient ro,7//rtr(? (cum-o(/itareJ. agiter en soi-même.
Les peuples de l'Océanie, dans leur langage primitif, disent : parler
dans son ventre ; et les Italiens in petto, dans sa poitrine.
— Penser et dépenser, se taire et parler.
Le savant pense à ses théories ; le négociant songe à ses affaires;
l'amant rêve à ses amours.
— Ponsor, c'est vivre : rircre es/ co// il a i'e (Cicôvon, Tasculaiies.)
Les tiraiides pensées vieiineiit du cœur. (Vauveuaruues.)
Pépie, origine incertaine.
Maladie, souvent mortelle, des oiseaux, et surtout des uallinacés.
Elle consiste en une pellicule lilanclie qui entoure la langue, et
empêche les animaux de boire.
— Avoir la i)épie : avoir soif.
— Quelques-uns veulent y voir le même radical que dans [& piot,
auquel Ralielais lail niainte allusion.
Pépite, de respagnoI;j(?/9//«, même mot que pépin.
Petite masse d'or natif, sans gangue, qu'on trouve dans les
terrains aurifères, particulièrement en Australie et en Californie.
Pep, préfixe augmentatif, marquant souvent l'idée d'achèvement
complet ou de superlalLf.
Se traduit en français par les préfixes pe?' on par, qui servent à
composer des mots tels que : perfection, perfide (qui sont tout
latins) ; parfait, parcourir, parjure.
Percer, du latin percœdo, couper au-delà ; ou, Itien plutôt, de
perlusiare, qui donna ([\\\)or([ pc)'sie}\
— Être has percé : n'avoir pas d'argent.
Le curé Huchou a employé cette locution l)ien maladroitement
dans un sermon de charité prêché à Versailles, en présence de
M'"« de Maintenon et des dames de la cour : « Je sais bien.
Mesdames, combien vous êtes bas percées ; mais les besoins des
pauvres sont si grands. »
— On perce Ijas les tonneaux où il reste un peu de hquide.
— On dit aussi panier percé, d'un dissipateur.
Perdre, du latin perdere. Provençal T^erc^re.
— Perdre la tête, l'esprit, la carte, la boussole, la tramontane :
toutes expressions qui équivalent à perdre la raison.
Perdre jusqu'à sa chemise.
...Laissez faire, ils ne sont pas au Ijoiil :
J'y vendrai ma clieniise, et je veux rien, ou tout.
(Racixk, Plaideurs.)
Perdre jusqu'à son dernier sou.
Ad assetii otnnia perdere.
(HoiîACE.)
Il perd son alléluia, qui à cul de bœuf la chante.
-- Être perdu : se trouver dans une situation très dangereuse.
Synoiiyino: rlrt' ll;iiiil)(''. le conli-iiii-»' de |];iiiili;iiil cl de flambard.
Allusion i'i la ( iviii.ilioii yW> iiiocls chez les anciens.
Être fricassé, frit : « l-.a rijyne fténérallo dont le royaume est
menacé si Paris est fi-icassé. » (Second courr'mr français, Paris,
1G40.)
Les gueux sont frits, je vous le dis. (La Vie de saint Clirislophe.)
Etre fumé, cuit.
Être perdu de réputation. « C'est une femme perdue », se dit de
celle qui s'égare dans des chemins semés de pierres précieuses, se
noie dans des Ilots de dentelles ou dans des rivières de diamants.
Perdrix, du lalin jierdix; jierdicem.
— Aile de perdrix, cuisse de bécasse : les meilleurs morceaux.
Prenez l'aile de la perdrix, ou la cuisse d'une nonnain. (Rabelais,
1, 29.)
Père, du latin paler.
De là aussi : compère, patron, parrain.
— Il ressemble à son père comme deux gouttes d'eau.
On dit aussi : C'est son père tout craché. (Voy. ressembler.)
Grand' honte fait à sa mère
Qui ne ressemble à son père.
(xmrac Siècle.)
Tel père, tel fils : bon sang ne peut mentir.
Bon cbien chasse de race.
Bien pert aun tes qites U pal furent.
(On reconnaît aux tessons ce que furent les pots.)
Colubra restem non parit. (Pétrone). La couleuvre n'engendre
pas une corde.
Les Provençaux disent : Le figuier ne fait pas de raisin.
— Le père est celui qui est le mari. Pater est quem nuptiœ
demonstrant. Le droit romain entendait par justœ nuptiœ le
mariage légitime, conjugium, par opposition au concubinat, qui
avait aussi titre légal depuis Auguste. (Voy. mariage.)
Qui que saille notre jument, le poulain est nôtre.
— Fère, mère, se disent, par une sorte de courtoise familiarité,
dans la classe ouvrière, aux liommes et aux femmes d'un certain
âge : père Vincent, mère Michel.
— On donne le nom de « Pères » aux moines de divers ordres.
Rabelais nomme un religieux « beau-père », peut-être à cause
des moines caloyers, beaux religieux (0-
PEU 24o
, — Pères de l'Église. Le petit P. André, prédicateur des Petits-
Aiiuiistins de Pnris, compara un jour les Pères de l'Eulise aux quatre
rois du jeu de caries : salut Auûiistiu au roi de cœur, par sa grande
charité: saint Anilu-oisc au l'oi de trèfle, par la (leur de son
élo(pience : saint Jérôme au roi de pique, par son style mordant;
saint Grégoii-e au roi de carreau, à cause du peu d'élévation de sa
pensée.
Période, du grec jx-riodos, par le latin pcriodus.
l'ue période est la révolution complète d'un astre.
— Période est toujours du féminin, excepté quand il est employé
au figuré, pour signifier un haut degré de prospérité.
Au temps d'Auguste, reuijtire était au plus haut période de sa
grandeur.
Péripétie, du grec péripéléia.
Événement qui change inopinément la face des choses, et qui,
dans un ouvrage dramatique, fait passer le liéros du malheur à la
prospérité, de la prospérité au mallieur, et amène le dénouement.
Périphrase, du grec pàrlplirasis, par Fintermédiaire du latin.
Figure de mots, qui consiste à remplacer un mot par un tour de
phrase.
Elle contrihue, eu poésie, à l'ornement, à la variété; elle sert à
remplacer les mots peu nohles ou trop techniques, par des expres-
sions polies, ou des circonlocutions qui permettent de faire passer
des choses déplaisantes sans hlesser l'amour-propre, comme la
sauce fait passer le poisson.
« Vous avez tort », est une expression blessante. « Vous n'avez
pas raison » la remplace avantageusement. (C'est plutôt un euphé-
misme.)
Les Précieuses traduisaient « rire « par « perdre son sérieux ».
« L'animal qui se nourrit de gland » est une périphrase transpa-
rente.
Perle, du latin pirula, petite poire.
— Enliler des perles : faire des niaiseries.
Trouver des perles dans un fumier. (Voy.) Virgile en avait trouvé
dans le fumier d'Ennius.
Jeter des perles aux pourceaux; donner à quelqu'un des choses
qu'il n'est pas capable d'apprécier. Allusion au mot de l'Évangile.
(Mathieu, VII, G.)
NoUte mittere niargaritas ante porcos, ])Q\\T ù\YQ, qu'il ne faut
246 PER
pas pnrlfr devant les ipnoranls de choses qu'ils ne sauraient
coniprendre.
Permettre, du latin jx'riniUcrc.
— On permet une chose, quand on l'autorise de son consente-
ment; on la tolère, lorsque, pouvant l'empêcher, on la laisse faire;
on la soulïre, quand on ne peut lenipêcher.
Permutation, du latin pertiwilarc
— La permutation, dans le calcul des combinaisons, est la
manière dont plusieurs choses peuvent être disposées entre elles.
Exemple : les trois lettres ABC sont susceptibles de six
permu ta t i o ns d i fl ercn tes .
— Les douze apôtres étant en discussion pour savoir qui serait
le premier, Jésus leur dit que « celui qui voudrait être le premier
serait le dernier ». Alors il s'éleva entre eux une telle émnlation
d'iiumilité, qu'ils se mirent successivement à se céder la première
place. Ils auraient pu ainsi permuter quatre cent soixante-dix-neuf
millions six cents t'ois, avant de se retrouver dans une disposition
absolument semblable à l'une des précédentes. (Voy. coinhinaison.)
— Un carillon de trois cloches donne six changements ; quatre
cloches en donnent vingt-quatre... Étant donné un carillon de
vingt-quatre cloches, il faudrait seize mille cinq cent soixante-quinze
ans pour exécuter toutes les combinaisons possibles, à raison de
deux coups par seconde.
Péronnelle, diminutif de Pcrronnc : autre forme de Pelroniile.
Autrefois nom propre familier, comme Perrette, et devenu appel-
latif comme Catin : désigne une jeune femme sotte et bavarde.
Taisez-vous, pérun nette !
(.Moi.[f:iiF., Femmes savantes.)
Pérorer, du latin perorare : discourir.
Mais ta jeune Piitctiérie
Pour Vert- Vert pérorera.
Pérou, contrée de l'Amérique du Sud, très riche en or et en
argent.
La richesse de cette contrée, découverte en lo2o par don Pizarre,
a donné naissance à une locution proverbiale très usitée, dans le
sens de rabaisser une chose. Ce n'est pas le Pérou : c'est bien peu
de chose.
Perpendiculaire, du latin perpendicularia.
PKR 247
Une ligne porpomlinilairr l'.ut loiijoiii-s deux jindcs droits avec
la lieno on le plan (|U('lie ivnconiro.
rnt> liiine tv/V/m/t' est celle qui passe par le zénitli du lien où
l'on est.
La iicrpi'iKlifiilairi' se piquo
P'c'lfi' plus coiirk' (iiU' lubliipio.
(Kc-iilf l'olytfchniqiie.)
Perpétrer, de fier et jxifrrn'c. faire, foninicllre.
Ne s'emploie (jimmi lennc de jiii'is[)i'udence : perpétrer un crime,
un foi'f.iit.
Perron, dérivé de pierre, lalin petra : roman ])ciron.
FélihiiMi le (ait vonir de jiar rond, parce que, dit-il, les perrons
ont des marches arrondies.
Petit escalier de [)ierre on do marhre placé à la [)orte d'une
iialiilaliiui.
rejrons ohntlz c hels liuilirrs.
(Vie de S'tiiit /foiiorat.)
(Perrons ouvres et lieanx tabliei's.)
Au iH'i'nui de la sak' -la roïno (lescenl.
(Bcrie aies r/rans piéx, 3278.)
Perroquet, de perrof, pour Pierre. Ou de l'italien parrorhetlo,
diniiuutil' de parrocco, curé.
— Parler couiiut' un [)erroquet : répéter ce qu'on a entendu, ou
parler sans réllexion.
— Soupe de perro(piet : du pain trempé dans du vin.
Dans le Médecin malgré lui, Sganarelle ordonne pour remède à
Lucinde, qui passe pour muette, quantité de pain trempé dans du
vin, « parce que, dit-il, il y a dans le pain et le vin mêlés ensemble
une vertu sympathique qui fait parler. Ne voyez-vous pas bien
qu'on ne donne autre chose aux perroquets, et qu'ils apprennent à
parler en mangeant de cela ? » (Acte II, scène 6.)
Perruque, origine inconnue.
Synonymes : gazon (trivial) ; académicien, rococo.
Injure prodiguée par les roniantiqiu^s éclievelés de 1830, qui
avjiiciil [tour principaux adversaires les membres de l'Académie,
restés lidéles à la littérature classique.
Perruquier, dérivé du précédent.
Synonymes : coiffeur, merlan, pommadin, tlgaro.
Merlan se rapporte aux perruquiers d'autrefois, toujours enfa-
rinés comme des merlans qu'on va frire.
248 PKS
— Sur l(is neuf liciircs, on voit coin'ir les |»(M'riiq(ii('r?, s;iiipoiidrés
des pieds à la lèlo, ce qui les a f;iit apitclcr « merlans »-, tenant
d'une main le fer à loiip(;t, et de l'auli-e la peii'iKpie. (Mercier,
Tableau de Paris, cli. îiliO.)
— En 180'), il n'y avait presque [iliis d'Iiomnies qui portassent
encore de la [>oudre, les femmes y avaient renoncé depuis plus de
dix ans.
Pers, peut-être de per.su.s, pour iiersicus (?).
Il eut un ceinture de pers et vert, parce qu'il avoyt esté pervers.
(Rabelais.)
Personne, du latin jjersona, masque scénique, puis rôle,
acteur, personnage de comédie.
De là est venu le sens d'être qui a conscience de son existence,
qui doit répondre de ses actes, qui a une individualité propre.
— Personne, qui chez les Latins était substantif, est devenu
souvent chez nous pronom, et s'emploie parfois avec la valeur
négative, dans les réponses.
Eu provençal, gés (gens) s'emploie d'une manière analogue.
Patz forsada nu me platz ijes.
(Beruard de la Beuthe.)
(Paix forcée ne me plaît point.)
Peser, du latin pensare, jadis poiser.
— On lit sur une grosse cloche de Rennes celte inscription du
xv^ siècle :
Je suis nommée dame Françoise,
Qui cinquante mille livres poisc :
Et si de tout ne me croyez,
Descendez-moy et me poisez.
— On connaît les vers que se composa Villon après la sentence
du Châtelet, qui le condamnait à la pendaison :
Je suis François, dont ce me poise.
Né à Paris emprès Pontoise ;
Or d'une corde d'une toise
Saura mon col que mon cul poise.
— A peser, moi de forme populaire, Yé[)o\\^ penser, mot savant
qui a laissé le sens matériel pour prendre le sens moral : penser,
c'est peser les idées.
Pester, de peste, latin pestis.
S'emporter en malédictions contre quelqu'un.
Vient sans doute de linterjectiou : Peste ! la peste soit I...
l'ET "^i^
Pet, (lu latin jK'ililitiii.
Vent (lui sort par le lias. a\(M- bruit.
Swu)U\uiL'S : vents intestinaux : vent de la clicniise (llahelais) ;
tlaluosilés; pnennialose : lyniiiaiiile: ventr(tse (llahelais, IV, 4'5) ;
inconuruit»!'.
Tais iirilz i/uc ■■ioii de cor cos scmblaran.
il'. DV. .Mo.MAN.)
(Tels pets (pi'ils vous sembleront le son du cor.)
— Recette : on combat les vents intestinaux en s'alislenant
d'aliments vég(îtau\ et féculents; en prenant des infusions chaudes
de m(!'lissc, de camomille ou d'anis.
— Pet de nonne. « Les sanctimoniales (pii ap[)ellent un pet
virginal un sonnet » (un petit son). (Hahelais, lY, 4)1)
C'est peut-être de ces dt^'centes nonnains ({uest venue l'expres-
sion : pet de nonne, pour d(!'signer un petit beignet de la grosseur
d'une noix.
On ne devait pas faire des pets de nonne chez les nobles nonnains
de Pette-sec, que l'on suppose être l'abbaye royale de Poissy.
(Voy. Hahelais, IV, 4o.)
Pétaud (la cour du roi).
('.Iiai-nii y contredit, ciiaciin y pai'li' liant.
Et c'est tout justement la cour du roi Pétaud.
(.MoLiKRE, Tartuffe, I, 1.)
C'est la maison où tout le monde commande et où personne
n'obéit : le contraire de la congrégation de l'Oratoire, dont Bossuet
disait : « Cette congrégation où personne ne commande, et où tout
le monde obéit. »
— .Jadis le mot roi se prenait souvent pour le chef d'une réunion ;
il n'implicjuait pas l'idée de puissance souveraine que nous lui
attribuons aujourd'hui. On avait des rois d'armes, le roi des
ribauds, le roi de la fève.
On prétend que les mendiants, qui formaient une sorte de
corporation et se réunissaient dans la Cour des Miracles, avaient
un roi, qu'on nommait en latin peto, je demande. Comme il n'avait
pas une autorité bien respectée, on appela « cour du roi Pétaud »
un lieu où tout le monde commande.
— Froissard appelle pétamls, du latin pes, pndls, comme on
disait piétons, les anciens routiers et les grandes compagnies
licenciées en temps de paix, et qui n'avaient d'autre ressource que
le vol et le meurtre.
2o0 PET
Pétaudière, (Irrivr fin iinV-rdcnt.
Assciiilth'c coiifiisi^ ; ét;il)lisseiin'iil iii;il dii'igé.
Péter, (Ic'rivé de pet.
Synonymes : fjiiro cliaiilcr la tourterelle. Aristote dit, on eiïet
(Iliiilnlre nahirclh;, AninKni.r, IX\ que l;i tniii-lcrclleptHe souvent
quand elle clianle.
Prouter (?).
— Péter plus liant que le ml : avoir des iirétentions au-dessus
de sa condition.
(Jloi'ii'iix conimo un pet.
Oui ('liante des (ju'il iiail.
Mintjcrc cum liomins
Eut res mnismnu lumbis.
(Krole de Salerne.)
Bombns, dit le Ménagluna. signifie pet, dans la liasse latinité.
Bèze Unit son Passavant par ces mots : Et ccce untim Ijombum
pro ist's hœrellcts.
— Rabelais (IV, 43) dit : « Ils ne pissent, ils ne crachent en
ceste isle ; en récompense, ils vesnent, ils pèdent, ils rotent copieu-
sement. »
Et pins bas : « Ils meurent tous liydropicques tympanites ; et
meurent les hommes en pédant, les femmes en vesnant. »
— Suétone (Claude, 32) dit que « cet empereur voulait donner,
par un édit, la liberté de péter en compagnie ».
Combien de fois nostre ventre, par le refus d'un seul pet, nous
mène jusqu'aux portes d'une mort très angoisseuse ! et pleust à
Dieu que l'empereur Claude, qui nous donna la liberté de péter
partout, nous en eust aussi donné le pouvoir. (Montaigne, I, 20.)
...Celluy honteux, lequel, pour retenir son vent, et défaut de
péter un méchant coup, subitement mourut, en la présence de
Claudius, empereur romain. (Rabelais, IV, 17.)
— Campden dit que « tout vassal du comte de SulTolk devait
faire, le jour de Noël, devant le roi, un saut, un rot et un pet ».
Péteux, dérivé du précédent, pour péteur.
Confus, comme celui qui a fait une incongruité.
— S'en aller comme un péteux.
Et l'autre on fut cliassé comme un péteux d'église.
(Rkgmeu, Satire XIV.)
Petit, d'origine incertaine, peut-être celtique.
— Petit à petit, l'oiseau fait son nid : pas à pas on va loin.
PET 251
Miiillc à iiKiillo se f;iit le liiiiiborueon. (Raltelais.)
La goutte d"(Mii ci-ciiso la itieiTO.
Les petits ruisseaux (ont les liraiules rivirres.
Un peu, répété plusieurs fois, fait lieaiicoup. (Fi-aiiklin/)
Ce sont les pains légers qui rendent la bourse pesante, car les
petits gains reviennent souvent, au lieu que les grands arrivent
rarement. (Bacon.)
A petit saint, petite olVrande.
A petit ménage, petit potage.
Dans les petites boites, les bons onguents, ...et dans les grandes
les excellents.
Mdi/nus Alcj-ander corpore parvus eral.
Plus une rbose est petite, plus elle doit être précieuse. Une
cbaiiie de montagnes peut ne se composer que de couclies de sel,
de houille ou de craie ; mais un anneau doit resserrer dans sa
monture quelque chose de plus rare que l'argile. C'est ainsi qu'on
attribue à un seul homme plus de vertu, de sagesse et de génie
qu'à tout un peuple. (J.-P. liirhter.)
Pt'lil homme abat un grand rliéue.
D'un petit gland sourd un grand chêne.
On ne se ligure pas la })uissance de la faiblesse, cette force du
ver qui ronge un ormeau en faisant le tour de l'écorce. Les tarets
ont mis la Hollande ta deux doigts de sa perte, en rongeant les
digues.
Le scorpion est tout petit, mais tout venin. (Shakspeare.)
Se persuader qu'un petit ennemi ne peut nous nuire, c'est croire
qu'une étincelle ne suffit pas pour allumer un incendie.
On a souvent l)est)in d'un plus petit que soi.
(La Fo.ntaink.)
Ou tost ou lard, ou près ou loin,
A ii fort (lu faillie Ijosoin.
(xiiii: Siècle.)
Les grands protègent ; les petits ohligent.
Franklin, dans le Bonhomme lilrhard, dit : « Parfois petite
négligence accouche d'un grand mal : faute d'un clou, le fer du
cheval se perd ; faute de fer, on perd le cheval ; et faute du cheval,
le cavalier lui-même est perdu, parce que l'ennemi l'atteint et le
tue ; et tout cela pour avoir négligé de faire attention à un clou ! »
— Petit entre encore dans les locutions : petit à petit, gagne-
petit.
252 PEU
Petites-Maisons, liùpilal fondé à Piiris, oji IW?.
Ainsi iioniNK' piii-cc (|iki les cours (''tîiicnl (Mitoiin'T's de |)etites
maisons basses, qui scrN.iiciil de i()^:('nient à pins de (inatrc ccnls
vieillards.
Cet hôpital recevait anssi des fons, et lexpression « pi'tites-
maisons » devint synonyme d'hôpital de fons. C'est jionr cela ipu^
Boilcau a dit. en parlant d'Alexandre (Satire VllI) :
lli'iirciiv, si (le son temps, pour cent mille raisons,
La Macédoine eût en des petites-maisons !
Pétrifier, dn latin pctra, pierre, et dn suflixe ficare.
Changer en pierre; par suite, rendre iniiuolnle comme une
statue.
— La tète de Méduse pétriliait ceux cpù la re.uardaient. (Voy.
égide,)
Pétrifié sa \eine et glacé son esprit.
(Boii.tAu, Satire IX.)
— Niobé, fdle de Tantale, eut pour époux Amphion, roi de
Thébes, et donna le jour à quatorze enfants, sept fils et sept filles.
Fière de sa fécondité, elle méprisait Latone, qui n'avait que deux
enfants, Apollon et Diane. Latone irritée, chargea ceux-ci de la
venger; ils tuèrent toute la progéniture de Niobé, qui, accablée de
douleur, resta pétrifiée auprès des cadavres.
...Les poètes figurent cette misérable mère Niobé, ayant perdu
premièrement sept fils, ensuite sept filles, surchargée de pertes,
avoir été enfin transmuée en rocher. (Montaigne, Essais, I, 2.)
Diriijuitquc inalis.
(Ovide, Mé/am., VI.)
Pétrir, du latin \}o\mh\re jiisturire.
Pétrousquin, qui a signifié badaud, est une sorte de dérivé de
pierrot (?). Il désigne un imbécile, ou un homme sans valeur.
Peu, anciennement />o?<^ du latin paucum.
— Parmi les comparaisons auxiliaires imaginées pour multiplier
la forme négative, on s'est servi du mot poil : Cela ne vaut pas un
poil. Ce mot s'écrivait autrefois pou, peou, peu, et c'est cette
dernière forme qui est restée dans la langue pour exprimer une
quantité très petite. Le Provençal dit encore péou, un poil, et
pou, peu.
Dans l'argot populaire, on emploie fi ferlin, fraction infinitésimale
d'un poil. C'était autrefois une petite monnaie valant le quart du
denier.
pFXt m
î);ins la laiiLîiic roniano. \o mot peu ii't'xistail pas (?), et avait
pour équivalent jx'///.
Salictz pclil. cai' jiaiu- avclz appris.
^li^:lllltA^•n de Pahis.)
El pour moi, j(^ comnionco à lo croire un petit.
(Moi.iKiii:, AmpliitnjdH.)
Oïl a quelqiiofoi;^ réuni les deux mots. (M fait la locution : un petit
})eu, e'est-à-dire très peu.
On dit encore : nn tant soit peu, un tantinet, qui répond au
tant il lu in des Latins.
— Les grammaii'iens interdisent à tort la locution un petit peu,
parce que, disent-ils, il n'y a ni petit ni grand peu, et que un peu
dit tout. (F. Génin.)
On a tort également, dit-il, de tirer pieu de l'adverbe latin
paucum; peu vient de poil. (Yoy. pauc, exemple ci-dessus.)
— Les Latins employaient ce mot : Ex Cappadocia ne plluni
quideni. dit Cicéron. Et Caton : Aliquid non faccre pili. N'en pas
l'aire plus de cas que d'un poil.
On dit, dans le langage populaire : 11 n'en fait pas lourd, pour il
fait peu de besogne.
— Peu de biens, peu de soucis.
Il en est du bonheur comme des montres : les moins compliquées
sont celles qui se dérangent le moins. (Chamfort.)
Le sage se contente de peu.
Qui vit (le peu, connaît l'indépendance.
(Bëhms.)
Les vrais besoins sont très bornés dans les enfants, comme dans
les bommes. (J.-J. Rousseau.)
Que faut-il pour Ijien vivre ? A peu près mille écus ;
Qui sait borner ses goûts n'a pas besoin de plus.
(l'oNSAïui, la Bnurxc, 1, o.)
Qnnd salis est eut conlin<jil, ni/iil ainplius oplet.
(Horace.)
Celui qui sait jouir de peu est toujours assez riche. (Démocrite.)
Faaper cnim non esl, rcrum eut siippelit usus.
(HouACK, Ejjilre XU.)
— On vit si peu de temps, et de si peu de chose.
L:\ iiMiivrcIr i|iii n'.i hcsoiii de ricii csl plii^ i-icli(; (jiie l'opiilence
(jiii ;i hcsoiii de loiil.
Qiinnd lu iia(|iiis, lu n'avais rien,
l'rciids (loiK- cil j,'iv Ion [ii-tit bien.
Oui a (li's |i(iis cl (lu |iaiii d'orge.
Kl du lard |)our oindre sa gorge.
Avec ciii(| sous, cl ne doit rien.
Il peut liicn dire qu'il est bien.
Peuple, du kiliu ]>ojni/iis.
Vox jiopiili, vox Dei : la \(ii\ du peuple est la voix de Dieu.
C'est une pensée d'Hésiode, l'apportée par Aristote.
— En masse, le peuple est roi : mais en détail, c'est un pauvre
sire.
Horace l'appelle belliia inulforian capitum. {Épitre I, 1.)
Quod fcril atque furit, sœvis-Hma bellua vidijus.
Nos gouvernements modernes ont traduit ces comparaisons gran-
dioses par l'hydre des révolutions et le spectre rouge, qui a eu un
si grand succès dans le style de M. Prudhomme.
Multœ un matins, ilU una cervix. (Gicéron, Of/lc. II, 7.)
La multitude a des millions de mains qui se dirigent contre une
seule tête.
Multorum odiis nullœ opes possunt resistere. (Gicéron^ Offic.
II, 7.)
Nul pouvoir ne peut résister à la liaine pul)lique.
— Il faut faire tout pour le peuple, et rien par le peuple. (Mon-
tesquieu.)
En 1848, on disait : « Tout pour le peuple ; tout par le peuple. »
Peup, autrefois 7;»flo?/r, du XwWn pavorem.
Synonyuies : talïe, vieux mot. Les fesses lui fout /// taf. (Oudin,
1640). Trac, maladie qui donne un frisson continu. Ganer.
— Avoir peur de son ombre.
La peur grossit les oltjets : on s'exagère ce que l'on craint.
Sans peur et sans reproche. (Devise de Bayard.)
Il n'y a que les fous qui ne connaissent pas la peur. Les anciens
preux, qui faisaient si bon marché de leur vie, n'étaient pas sans
peur, comme le dit le blason de Bayard ; mais ils avaient plus peur
de la honte que de la mort. Leur grand courage était un calcul, qui
leur faisait braver un mal pour en éviter un autre pire à leurs
yeux, la perle de l'honneur.
Heiivi'iHild Cclliiii disait : . J'iuiioiv de quelle couleur est la pour. »
Jusliuii cl IniiifCiii iiroiiosili riruiii
...Si fnielits illubalar orbis,
Iiiipiiriihuii ferlenl ruime.
(HonACE, Odes, III, .").)
— Un Gascon disait : ^ J'ai l'air si martial que, quand je me vois
dans la glace, je me fais peur à JUdi-inrine. »
— Ga reins II, roi de Navarre, dit le Ti'einbleur, était pris d'un
treinlilenient nerveux, lorsqu'il mettait son armure pour aller au
comlial. Il disait à ce sujet : « Mon corps tremble des périls où mon
courage va le porter. »
Peureux, dérivé de peur.
Syiion suies : capon, couard, polli'on.
— Les heures du peureux s'écoulent comme une horloge (?),
toujours en craiiile de se casser. (Gœthe, 2" Faust.)
Phallus, du grec yjAa/Zo.s-, pieu. (Pénis llyneus, reclus.]
Lilhyphalle était l'attribut de Priape;les anciens le représen-
taient dans les jardins et le portaient dans les processions.
De là vient falot, lanterne (?j, à cause de la chandelle qui y est
renfermée, et qui est comme la parodie (?) de cette effigie païenne.
Phare, du grec jiharos, nom d'une ile voisine d'Alexandrie, où
Ptolémée Philadelphe lit élever une tour surmontée d'un fanal.
C'était une des Sept Merveilles du Monde.
— Étoile du marin : Maris Stella.
Pharisien pour p/iarise'en, du latin éxsiBgéllqne pharisœus.
Membre dune secte juive, qui, sous l'apparence d'une grande
sévérité de mœurs, cachait des habitudes dissolues.
Pharmacien. (Voy. apothicaire.)
Phébus, du latin Pliœbus, grec Plioibos, brillant.
Surnom du soleil cliez les poètes grecs.
— Style trop figuré, mais moins obscur que le galimatias. (Yoy.)
Le soleil l'éclairé parfois ; c'est ce qui lui a peut-être fait donner
le nom de Phébus. (Le P. Bonheurs.)
Peut-être l'origine de la locution est-elle dans le livre sur la
chasse, de Gaston Phœbus, comte de Foix, intitulé Mémoires de
Phœbus, livre ti'ès ennuyeux et très obscur.
Phénix, du grec phoinix, rouge.
Oiseau fabuleux, dont les Égyptiens a\aient fait une divinité. Ils
le représ('iit;ii<'ii( himikI et lier coiiiiiic un iii^lc, une lioiiiipo de
pourpre sur la lêl»!, (I(!S pliiiiies coiilciii- de poiiinfc. et d'or-, les
yeux élincclanls comme des étoiles.
Le phénix était remblème du Soleil : il est devenu, dans la
symbolique clirétifMine, celui du Christ et de la Hésurreclion.
— L'histoire du phénix n'est pas plus authentique que celle du
pélican ; mais elle est plus ancienne, et a passé des Éfivptiens aux
Grecs et aux Romains, pour ai'river jusqu'à nous.
Les historiens et les naturalistes les plus graves aflii-ment son
existence. Tacite (Annales, YIII, 18) dit qu'on vit un i)hénix sous
le considat de Yilellius, l'an 34 de notre ère. On en vit un aussi
sous Sésostris, et on le vit reparaître sous Amasis II, puis sous
Ptolémée.
— Suivant la tradition, le phénix est né en Arabie, où il est
consacré au soleil. Il vit mille ans; il est unique au monde. D'après
d'autres, il renaît tous les quatorze cent soixante ans. Au Moyen-Age,
on le représente avec des ailes de saphirs, de perles et d'émeraudes.
Quand sa vie est près de finir, il construit dans la terre natale
un nid avec de l'écorce de cannelle et de l'encens : et, après l'avoir
inondé d'un principe régénérateur et y avoir mis le feu, il meurt
dessus. De ses cendres sort un ver, qui se change bientôt en un
nouveau phénix qui, devenu grand, enlève ce qui reste de son
prédécesseur, et le brûle sur lautel du soleil.
Cette fable égyptienne fut accueillie par les Pères de l'Église, qui
en tirèrent de belles leçons. Saint Jérôme en a fait la consolante
image de l'immortalité, comme il a fait du pélican le symbole de la
tendresse paternelle. Elle est très ingénieuse, mais entièrement
imaginaire, et contraire à toutes les lois de la nature ; car aucune
espèce du règne animal ne se reproduit par un seul individu :
aucun animal ne se détruit lui-même ; tous, au contraire, obéissent
à la loi générale de l'instinct de la conservation. La faculté de faire
du feu n'existe également cbez aucun animal, c'est une propriété
de l'homme, aussi bien que la parole. Enfui aucun oiseau ne vit
raille ans ; aucun ne se reproduit sous la forme d'un ver.
On ne croit donc plus à l'existence d'un oiseau si merveilleux ;
mais le nom de phénix continue à être donné aux êtres extraordi-
naires, uniques, en quelque sorte, dans leur genre. C'est ainsi que
La Fontaine fait dire au corbeau :
V^ous êtes le phénix des hôtes de ces bois.
[Fal)/e.<, I, 2.)
Pin 257
Hoiloriii (lit d'un sonnet sans défont :
Kt Cri liciiiciiv iilii'iiix csl encore ii trouver.
{Art poétique.)
.Iciii lliiss, sur le lificlicr. dit ([n'oii lu niait l'oie (A?/.v si.unifie o/e
en allemand), mais qne. cent ans après sa mort, m\ eyunc naîtrait
de ses cendres, qui ferait triom[)lier les vérités pour lesquelles il
mourait. 11 |i,irl;;il de Liillicr.
— On appelle le palmier dattier />Ar/';(Az; r/^/r//////(V'« .• c'est le
phénix, du réune vé.uétal.
Phénomène, du isvrc ji/i(/inof/t('iioii. qm apparaît clairement.
Ce mot qui, dans le langage vulgaire, ne s'entend que de ce qui
est très rare, extraordinaire, s'applique, dans la langue scientilicpie,
à tous les faits extéi'ieurs qui apparaissent;') nos sens et qui peuvent
se ranger sous une loi commune. Tels sont les i)liénomènes de
l'électricité, de la chaleur, etc.
Philanthropie, du grec philos, ami. anf/iro/tos, homme.
Amour de llrnuanité.
— Ce mot, créé au siècle dernier, a un sens plus pratique que
charité et bienfaisance, et exprime l'idée de l'amélioration du
sort des masses. On en trouve le germe dans ce vers de Térence,
souvent cité :
Homo ■sain : kumani a nie niliil alienuin pulo.
— On doit aux philantliropes l'abolition de la traite des noirs, la
propagation de l'instruction primaire, les salles d'asile, les four-
neaux économiques, les sociétés de secours mutuels...
Philémon et Baueis, tous deux très âgés, donnèrent l'hospi-
talité à Mercure et à Jupiter, déguisés en simples mortels, et qui
avaient été rebutés par les autres habitants du pays.
Jupiter submergea tous les environs, et ne préserva que leur
cabane, qui fut changée en un temple, dont ces époux pieux et
Immains devinrent les prêtres. De longs jours après, ils furent
métamorphosés, le même jour, Philémon en chêne, et Baiicis en
tilleul. (^Ovidc, Métamorphoses.)
Ils personnifient l'amour conjugal sans nuages.
Phiiippique, dérivé du grec philippikos.
Satire, discours violent contre quelqu'un.
C'est le titre des discours de Démoslhène contre le roi de Macé-
17
iA^8 IMII
doiiio, IMiiliiipo. Los Oriiisnns de Ciréron conlro Aiitoiiio, sont nii^si
désignées sons ro nom.
Philistin, iHun d'ww iicnplc \(iisin dos llôhriMix.
So dit on Alloni;iL!iio pour /joitrf/cois.
« — A |iro|)os, (|irosl-co qn'nii Philistin ? — Antrofois, on Gn'cc,
il s";ippol;iil Uôolion : on 1(> noniino (]oknoy on Annleterre ; épicier
et Joseph l^'iidhoninio ;'i Paris; et h'S ôtndiants d'AMonifi^no lui ont
fonfôré h' nom de Philistin. » (Do Nouvillo, cité par L. Larchey.)
Philologie, dn grec /t/ti/os, /of/os.
Étude de la littératuro an point de vue technique et de la firam-
niaire générale. Analyse du langage.
— Un philologue est un littérateur qui n"ap])rofondit rien.
Ératosthène, philologue grec sous Ptolémée Philadelpho, fut
nommé Béta, de la deuxième lettre de l'alpha het grec, parce que, ne
pouvant aspirer au premier rang dans aucun genre, il était arrivé
au second dans plusieurs.
— Zenon appelait pkilologiies ceux qui recherchaient les lois
grammaticales, et logophlles ceux qui ne visaient qu'à l'élégance
du langage.
Philosophie, du grec phUosophia. étude de la sagesse.
Ensemhle des connaissances relatives à Tàme, à l'intelligence.
Un pliilosophe est un homme qui oppose la nature à la loi, la
raison à l'usage, la conscience à l'opinion, et le jugement à l'erreur.
Aristote et les anciens appelaient philosophie ce que nous
appelons science, et surloiit la science appliquée à la physique du
giohe.
— Le cours de philosophie se divise en : lorju^ue, morale, phy-
sique et métaphysique.
En philosophie, le malérialisine est opposé à \ Idéalisme, le
sensualisme au splrilualisfne, l'empirisme au ymtionallsme.
Parmi les anciens, Platon représente l'idéalisme, et Aristote le
matérialisme.
Les chefs de la philosophie moderne sont : Descartes (France),
Locke (Angleterre), Leihnitz, Kant (Allemagne), Spinoza (Hollande).
— La philosophie apprend à faire volontairement ce que les
autres font par contrainte. (Aristote.)
La philosophie enseigne à se contenter de peu, à vivre lihre et
heureux. (Gratès.)
La j/hilosophie, pour être utile et pratique, doit être une action
IMA 239
et une riicrL;!!*. L;i sciciicr doil rire un cordi;!! et un rlivir préstMilr
à la soil' lit' riiomnio : la sagesse doit ('li'C une romniiinioii sarrôe,
t'i ("est le sens ([ii'il faut donner à ces paroles de Jésiis-Clirist :
IMi'iiez, ceci est nia chair, ceci est mon sang. » Jonir est un hnt
clirlil: la liiMile jonil. F'enser, voilà le triomphe vrai de Tàme. La
pliil()S0(>iiie a |)oMr molcnrs deux: forces : croire et aimer. (V. Hupo,
/(';< M/si'rnfj/cs.)
Tonte pliilosopliie se résnnie dans l'art d'élargir le libre arbitre
an\ dépens de la conscience.
Phrase, du gi'ec /iJirasis. latinisé : p/nmo, [lai'ler.
Assemblage de mots exprimant une idée, formant un sens complet.
La jilirase la pins simple se compose dune proposition nniqne :
sujet. veri)e et attribut.
Dans la pbi-ase: « Dieu est bon », Dieu est le sujet: bon. l'attri-
but : est. le verbe.
Physique, dn grec 7^//'/.v//.r, de. j)/n/sis^ nature.
— Physiquement parlant, c'est-à-dire [larlant d'une manière
physique, est du galimatias bien réussi.
Piano, mot italien, correspondant au français ^)/r/;K plain.
— Piano, piano : tout doucement, pas à pas.
Et s";ip|)roclia in;ircli;inl pian-pian.
(ScARROx, Virr/ile travesti.)
Chi ra /lia no. ra san(K (jui \a doucement, va sainement.
— Piano-forté, ou forlc-piano, ou simplement piano, niani-
cordion. Instrument de musique inventé par Bartolomo Cristofari,
de Padoue, en 171 J. On l'aftpela de ce nom, qui signifie doucement
et fort, parce qu'il doniie tous les tons et forme à lui seul un orchestre
complet.
Le piano est pour les insti'umenls à cordes ce que l'orgue est
pour les instruments à vent.
Les premiers pianos fabriqués en France sont dus aux frères
Erard, vers 1780. En ISoo, il se vend annuellement, à Paris, plus
de 2o.()()0 pianos.
« Le piano, dit Ilalévy, sur lequel tous les tons de réchelle
musicale, fi.xés d'avance, n'attendent que la pression d'une main
habile pour vilu'er en gerbes d'accords harmonieux, ou pour éclater
en gammes rapides, serait le premier des instruments si l'orgue
n'existait pas. »
Le piano. In'tte de la maison, se prête aux passe-temps les plus
%0 PIE
fi'ivoles aussi hicn qn'jiux éludes les plus sérieuses. Comme il recèle
dans son sein Ions les trésors de riiarmonie, il est de tous les
instruments celui qui a le plus contriliué ;i lépandtf^ le .uoût de la
musique et à en faciliter l'élude.
— On a appelé Pai-is Pianopnlis, parce (|ii"oii y f;iil hcaiicoup
de musique, quoique ce soit la a ille où on aime le moins la musique.
— Mauvais |)iauo : chaudi'on. Allusion aux cjiaudronsde Dodone.
Picaillon, synonyme Ciaryenl. Oi'i.uine incertaine.
Petite monnaie de enivre, piémontaise, valant deux deniers.
Picard, vient, au dire de Bru/ou de la Mailiiiiére. du caractère
des habitants de la Picardie, qui se piqncui, ou se fâchent
volontiers.
On a supposé aussi que les Picards auraient tii'é leur nom des
piques dont ils se servaient pour combattre : mais alors on aurait
dû les appeler 7j/^?«/^r5. Car le suffixe ard marque une habitude
blâmable, comme dans les termes injurieux criard, bavard, paillard.
Picard est plutôt un sobriquet injurieux, résultant du vice de
caractère, et non de la manière de combattre avec des piques,
quoique Lucain ait dit (P/tar.sa/e, I, 423) :
...Lour/isque levés Suessones in armis,
preuve unique et insuffisante, pour justifier cette origine.
— Prière de Picard : imprécations, comme peuvent en formuler
des gens vindicatifs.
Picaresque, de l'espagnol picaro, vaurien, vagabond. Ce mot
manque au Dictionnaire de l'Académie.
Il se dit des romans, des pièces de théâtre où le principal person-
nage est un picaro, un coquin.
Picotin, dérivé de l'ancien français 7>/eo^ origine incertaine.
Petite mesure dont on se sert pour l'avoine qu'on donne aux
chevaux.
Pie, du latin jjica, en provençal inga.
Oiseau â plumage blanc et noir.
De là : cheval pie, blanc avec des taclies noires.
— Synonymes : la pie s'appelle aussi «^«cf; en itahen ^«rra ;
margot.
L'aigle, reine des airs, avec Margot la pie.
(La Fontaine.)
Perruche de savetier.
PIE 2G1
— Jn?or coninio uno pio. ...roninio une pic borgne.
11 a trouvé la pic an nid : (piclqiic chose de rare.
Voleur comme mie i)ie. IMiiie ap[)clle la pie moncdula (a surri-
pic/u/is jnonctisj.
Menteur comme une pie.
Ain mentez coin -l'eralz ijnc/ta.
[ r. m: ISi.iiTiiAND.)
(Vous meule/, comme si vous étiez une [)ie.)
— /*i('-;/ri('r/u\ [lie prise et commune.
Cet oiseau a le couraue et les goûts des oiseaux de proie. Il
coml)at avec intréiiidité des oiseaux beaucoup plus grands et plus
forts. C'est par allusion à celte humeur belliqueuse, ([u"ou appelle
« pie-griéche » une femme querelleuse, acariâtre.
En provençal, cet oiseau s'appelle darnagas, nom qui se donne
aussi aux personnes d'un caractère désagréable.
Fontenellc a dit : « La plupart des femmes sont des faons dans
le monde, des pies-griécbes dans l'intérieur, des colombes dans le
tête-à-téte. »
Ainsi, outre sa réputation bien étalilie de bavarde, de menteuse
et de voleuse, la pie a encore celle de querelleuse.
C'est à elle que remontent les mots agacer et grincheux.
Pièce, italien j)e:ra. Origine incertaine.
Nom pris dans une foule d'acceptions très diverses, particulière-
ment comme mesure pour les vins :
La pièce ])ordelaise vaut 201 litres ; la màconnaise, 213 ; celle du
Languedoc, 274 ; celle d'Auvergne, 2'J4.
Pied, du latin pes. pedis: en provençal ;^c.
Au même radical remontent : pédale, pédestre, peton, piège,
empêcher, piéton, piétiner, expédier, etc.
— Synonymes d'aller à pied : marcher ; voyager sur la baquenée
des cordeliers : monter ses chevaux à deux semelles ; prendre la
voilure de saint Crépin : [)rendre la poste de MM. Talon frères.
— Depuis les pieds jusqu'à la tète.
— Partir du pied droit : bien commencer une chose.
On trouve dans Apulée : Slnislro pede proficisci, partir du pied
gauche.
— Trouver chaussure à son pied, c'est-à-dire une bonne position.
Cicéron dit d'une nuuiière analogue : Catceos )iiulare, changer
d'état.
262 IMK
On d'il iiiissi d'iiiu' clioso qui \;\ de knit |»oiiil : ccl;! iiie cliîiiisse,
iiio bnllc. me v;i coiniiic iiii uiiiit.
Vin^t mille francs de renies, ça me hutle ! .
— Pied plat : homme de basse naissance. (]liez les Romains, on
appelait jxi/m/jx'ffes. pieds ])alm<''S. on ]»ieds plats, les bateleurs,
mimes, etc.
Cette dénominalion dédaigneuse a été donnée. Sdiis Louis \1V.
aux ijens de peu, (]iii ne p(»rlai(Mil pas des talons hauts comme la
noblesse.
— Grand pied : piédestal, pied à dormir debout.
Elle a de petits pieds, mais les Grands souliers lui vont bien.
Grand pied se dit eu bonne part et marque la supérioi-ité. taudis rpie
petit pied, comme pied plat, est dépréciatif : doi'i jiirirr, mesquin,
autre forme Aç pcdeaire.
— Être sur un bon pied, ou sur un arand pied dans le monde :
être considéré, jouer un rôle important.
On dit dans nu sens analogue, mais au propre : avoir bon pied.
})on œil.
— Il retomlje toujours sur ses pieds.
— Marcher sur le pied à quelqu'un : lui faire une injure.
— GeolTroi Planlagenet, comte d'Anjou, pour dissimuler une
difformité au pied, imagina de porter des souliers dits à la poulaine,
ou à la Polonaise. (Borel.)
Les souliers d'un prince avaient deux pieds et demi de long :
ceux d'un baron, deux pieds; ceux d'un simple chevalier, un pied
et demi.
Plus tard, sous Louis XIY, la noblesse porta des talons liauts,
parce que le roi avait besoin de cet artifice pour hausser sa taille.
— Mettre les pieds dans le plat : faire une inconvenance.
Les Provençaux disent : marcher dans ce qui est semé.
Régnier parle de gens qui
Pissent au liéiiiticr afin iin'on piii'lc d'eux.
Les anciens disaient : In Pythu tcmplo cncare : se soulager
dans le temple d'Apollon.
11 n'y a que les cochons à qui on permette de mettre les pieds
dans le plat, ...pourvu qu'ils soient à la Sainte-Menehould.
— Un pied chaussé et l'autre nu.
Quand Molière lit la Princesse d'Élide, pour les fêtes de Ver-
sailles, il la commença en vers et, faute de temps, l'acheva en
prose. On dit alors que la Comédie n'avait eu le temps de prendre
PIK 203
qu'iiii do SOS Iti-odoqnins cl étnil voniic donner dos marques de son
ohéiss.iiico un pied chaussé el Taiilro nu.
— Va-nu-pieds: vagabond, mendiant. Un de ceux dont La Bruyrrc
di( qu" <' ils n'ont pas môme do quoi aller à pied ».
On dit do (pioiqu'nn. pour marquer son extrome misère, qu'il n'a
pas de souliers.
On appelle moines déchaussés (ou déchaux) certains religieux
(jui \ont [lieds nus dans des sandales.
Pour certaines gens, ceux (pii ne portent pas do gants sont des
va-nu-pieds.
— En 1(î;î9. les liahilanls do la Normandie se soulevèrent contre
un édit qui déclarait les communes solidaires pour le paiement des
taxes. Ils inscrivirent sur une bannière le nom de va-nu-pleds, qui
leur était donné par mépris, et qu'ils adoptèrent comme un cri de
déli et un signal de vengeance.
— Puanteur des pieds : essence de chaussettes.
— Mettre à pied : mettre en non activité temporaire, en dispo-
nibilité, par mesure disciplinaire.
Pierre, du latin peira.
— Synonyme : miche de saint Etienne (Rabelais), parce que ce
sailli lui lapidé. Le jour de Saint-Étienne, en Provence, les boulan-
gers pétrissent des pains qui ont la forme d'une pierre.
— Pierre philosophale. Rabelais (II, 34) dit que ce n'est que la
manière d'user avec intelligence des joies et des plaisirs de la vie.
(Voy. alchimie.)
— La pierre tombe toujours au clapier. (Proverbe provençal.)
L'argent cherche l'argent.
— Pierre qui roule n'amasse pas de mousse.
Qui est bien, ne se remue. Douze métiers, treize misères.
De gerbe remuée, chiot le grain.
Les Arabes nomades disent au contraire : « Chien qui coiii-t
trouve sa vie. »
— Faire d'une pierre deux coups : tirer d'une chose doulile prolil.
Apros duos uno sallu capere.
(Pt.AtJTE.)
De i/na fidelia duos parieles deaWare. (Quinte-Curce.)
Blanchir d'un seul pinceau les deux cotés delà muraille. (Proverbe
obscène des latins.)
— Un individu qui partageait sa vie entre l'amour et la bonne
264 PIK
chère, s'élMit lo.ué ii rciilrcsol, aii-dcssiis de l;i cuisiiK; d'un nîstau-
raleur ol nii-dcssoiis de l;i cli;iml>ro de sa Itelle. Quand il voulait
jouir du double nvanla.ae de sa position, il lançait au plafond une
pierre qui relonihail sur le par([uet, avertissant ainsi à la fois la
demoiselle de descendre et le cuisinier de monter.
— Un certain Durand devint veuf. 11 éleva à sa femme un heau
mausolée, avec cette inscri[)lion : « Monsieur Durand à Madame
Durand. » Yeuf pour la seconde fois, il lit clianj^er Madame en
Mesdames. C'était bien faire d'une pierre deux coups.
— Jeter la pierre à quelqu'un ; jeter une pierre dans le jardin de
quelqu'un : 1 atlaquer dans son intérêt, lui faire des reproches.
Lapides loqiii (Plaute) : dire des duretés.
On ne jette des pierres qu'à l'arbre chargé de fi-uits. En d'autres
termes, le mérite seul excite l'envie.
Pierrier, anciennement perrier ou perrlùre.
Canon qui se chargeait avec un boulet de pierre.
Et dressa sur une porrière
Qui jeclal devant et derrière
...lels cailloux...
(Jean de .Mi;unc..1
Pierrot, en italien Pedro/ino, fait, dès la lin du xvf siècle,
partie des acteurs du théâtre italien. Son costume est entièrement
blanc, son visage enfariné, son air niais et ingénu.
A Florence, on l'applaudissait sous le nom de Gian-Farina,
Jean-Farine. En France, on l'enfarinait aussi :
Le front, la joue et la narine
Toute couverte de farine.
— Gros-Guillaume, dit le Barbouillé, introduisit le personnage de
Pierrot sur la scène du théâtre de Bourgogne. Il avait exercé la
profession de boulanger, avant de monter sur les tréteaux.
Pierrot, le niais enfariné, le gobe-mouche de la comédie italienne,
se faisait remarquer par sa stupidité et sa maladresse. Quoique très
poltron, il conseillait toujours les entreprises les plus hardies, et
entraînait dans des chutes déplorables son vieux maître, qu'il avait
l'air de soutenir.
Aux premiers temps de la comédie française, il portait le nom de
Mugnier (meunier), qui, au Moyen-Age, était entaché d'une très
mauvaise renommée, car on disait qu'on était toujours sûr de
trouver un voleur dans la chemise d'un meunier.
— L'uniforme blanc des gardes- françaises les lit appeler pierrots
l'IG 2Go
par le peuple de Paris : et les .uaiiiins. en les voyant passer, inii-
taient le cri du moineau : plnu, piou. doii le sobriquet qui est
resté au\ fantassins.
— La vo.uiie de Pierrot lui eonsacréc par la fameuse cliiinson (pie
tout le monde ronnait : Au clair do la lune.
Molière a appelé Pierrot un paysan de son Don Juan.
AVatteau et Lancret Tout illustré dans leurs peintures.
Dt'liureau, né à Xeukolin. prés de Prague, a rendu rélébrc le
rôle de Pierrot, de 18120 à ISriO. au Théâtre des Funambules.
Piété, du latin pleins, qui a donné aussi pillé.
De là encore les mots : piteux, pitoyable, s'apitoyer^ et aussi
pitance, parce que la nourriture des moines provenait de la piété
des lldéles.
On a fait depuis peu (1871) le mot piétisle, pour désigner le
parti ullraniontain.
— La piété et la foi sont comme deux jalons plantés sur le chemin
de l'éternité. (M. G.)
Pieuvre, du latin pohjpus, d'abord pueuve, pleure. Poulpe,
de la famille des mollusques invertébrés, comprenant les calmars,
les sé[)iaires, les céplialopodes, que les Anglais appellent hlond-
sucher. suceur de sang. (Yoy. Y. Hugo, Trarallleurs de la Mer.)
Pigeon, du latin pljfio, piplonl.^.
— Plfjeon n'a pas de féminin. M"'' de Scudéry, malgré tout son
crédit à l'iu'jtel de Rambouillet, ne put faire adopter plijeunne,
qu'elle proposait à la place de colombe.
— Au ligure, dupe, qui se laisse dépouiller, plumer comme un
pigeon.
Les femmes de Paris se servent du fard et du maquillage pour
attirer les pigeons dans le colombier de Cypris.
Pignon, de plnnlone/n, dérivé de pinna, créneau de murailles.
Le pignon est le faite d'une maison que termine l'inclinaison de
deux toits formant triangle, comme un fronton. C'est le mur
terminé en pointe qui soutenait le laitage des maisons : il était
souvent orné de sculptures et d'enjolivements.
Dans les anciennes maisons du xv siècle, qu'on voit encore en
grand nombre dans le nord de l'Europe, les pignons font face à la
rue. D'où la locution ancienne : avoir pignon sur rue, c'est-à-dire
une maison à soi. (Yoy. pinacle.)
266 PIN
Pile, (lu l.iliii ])il«i. (■oloiiiic.
Côte (rime iiioiiii;ii(' opposi'" ;'i l;i f.'irc. ( Voy. cvoix (Hi pile.)
— Pila^ dOi'i est venu jixlolc, scimH iiii nIciiv iikiI fr;iiic;iis ;iy;iiil
signiCié navire.
Macrobe (Saturnales, I) dit que les Romains joiiMiciil à ce que
nous appelons pile nu face, en disant : Caput aiU nacis, avec une
monnaie faite en mémoire de Salnrne. oi'i l'on voyait d'un côté la
lèle de .lanns, et de l'aiiln' le iia\if(' sur Icipicl il était arrisé en
Italie.
TittK liinid jKixtcrilris jiuppiiii lialnril in wre.
(Ovil.E.)
— Doiiiiei" une [)i!e ; expression tri\ial(': i)atti'e quelqu'un comuie
un pilotis.
Au vieux mot l'raneais j)i./e, siiiiiiliant pièce de Itois, et qui se
trouve souvent dans .loinville, se rattachent : pilori, piler, pilotis.
— En provençal, jii/e, picu're d"évier, percée d'un trou par où
l'eau s'écoule.
Piller, du latin populaire piliare, pour ptlare.
Siirnilie au propre se prendre aux clieveux.
Se dit des chiens qui se jettent sur le pi hier.
— De là houspiUf'r{l).
Pilule, du latin pllula, diminutif de j)il(i, halle.
— Dorer la pilule, comme sucrer la uioutarde ; c'est adoucir un
refus par des paroles lùenveillantes, ou faire passer sous des com-
pliments quelque chose de désagréable.
Le seigneur Jupiter sait dorer la pilule.
(MoLiÈREj Amphitryon.)
Ce vers est devenu proverbe plutôt par sa tournure piquante que
par l'idée qu'il renferme ; car Rotrou avait dit avant Molière :
On appelle cela lui sucrer le breuvage.
Pimbêche, nom donné par Racine à la comtesse des P/ff«V/ewns,-
il est resté dans la langue pour désigner une femme au bec pincé (?),
une vieille Précieuse acariâtre.
C'est une pimbêche : une femme qui fait des embarras.
Pimpant, de l'ancien verbe phnpcr, pour piper, bien plutôt
que de pompe, ou même de bimbo, qui se retrouverait dans bim-
belotier^ bibelot.
Pinacle, du latin piiuiacuhnn.
riP 267
La pnrtio la plus élt?véo du Toniplo do Jériisalom.
— l'Avr ;iii pinacle : au (■oiiiiilc ilii honliOMi". de la [irospérilé.
Le Sénat r»iiii;iiii accordait (piehpu'fois aux particuliei'S la faveur
de inellre un pinacle, ou comlilc terminé en poinle an liant de sa
maison.
Pince-maille, de pinrrr et i/iaU/c. (Voy.)
Synonymes : i:rippe-son. avare, pingre.
Lu [liiico-inaille avjiit laiit amasst-...
;I,A l''i).NTM.Nt, L'Enfouixxeur.]
Pincer, .louer à je te pince sans rii-e. on chacun pince le nez ou
le menton de son voisin de droite; celui rpii rit donne un gage. Le
piquant de ce jeu consiste en ce cpie deux personnes de la société
se sont entendues pour se noircir les doigts. Ceux dont elles noir-
cissent ainsi le visage prêtent à rire, d'autant plus que chacun croit
qu'on rit de l'autre (?).
Pingre, mot (rorigine inconnue ou incertaine.
— Un appelait jtingrcs, au Moyen-Age, les arêtes de poisson et
de longues é[»ingles. Le moi pinrjre désigne aujourd'hui nn avare,
un usurier. L'origine de cette transformation de sens serait la
croyance que les .Juifs crucifiaient des enfants dans la nuit du
Vendredi-Saint, et les toiluraient en leur enfonçant des épingles
dans la chair.
Le l*arlement condamna à mort plusieurs Juifs pour le crime de
piuf/res ou des épingles. Le nom de pingres resta aux .Juifs, (pii
avaient dès lors le monopole de la hanque et de l'usure.
— En argot, ce mot désigne un misera hle, et prend l'acception
de sale, déguenillé, ce qui tiendrait encore à la sordide avarice des
Juifs qui, malgré leurs richesses, et peut-être pour les dissimuler,
poi'taient des vêtements sales et misérables.
Piot, semble dérivé du grec pie in, boire.
Humer le piot. (Rabelais.)
Lui voyant de fiiul la coi'\('ll(' écliaiiffée.
(Rélnirr.)
Pipe, (lu has-lalin pipa, pipeau, chalumeau.
A ce dernier mot correspond le caliiniel des Indiens.
La pipe de l'Arabe s'appelle chiboiuiuc : celle du Turc nnrçjliilé.
Piper, du latin pipiare, pip-irc, glousser, tromper.
Dés pipés : faussés.
268 PIS
— Tt'i'Dif (r;i\ico[t(olo;^i(' : on pi'ciKl les oisL';iii\ ;'i la pipée en
iiiiilaiil Iccliaiit des petits oiseaux, ;>/, />/.
Pique-assiette, parasite.
Celui (pii apporte cliez les autres un ap[uMit loujoui's roni[ilaisaiit.
Pique-nique, origine inconnue.
liepas où cliacun i)aye son écot, apporte son plat.
Dîner à pique-nique, c'est faire un repas dans lequel aucun des
convives n'est redevaJjle à son voisin, attendu que chacun paie le
même écot.
— F. Gcnin propose l'étymologie suivante : « On sait ce que c'est
qu'une pique entre deux personnes. Le Français dit faire la nUjxie
dans le sens de se moquer. En supposant que le verbe niquer
existe en français, on aurait pu faire la phrase suivante : Tu me
piques, je te nique, partant quittes. Eh bien ! c'est justement le
sens du mot pique-nique, fait comme la locution : A bon chat, bon
rat; bien attaqué, bien défondu. »
M. Génin fait ensuite remarquer que TAcadémie, en 1835, exige
qu'on dise au pluriel des pique-niques, comme des cbasse-mouches.
A-t-elle cru qu'il s'agissait de piquer des niques ? Elle ne se serait
pas rendu compte des éléments de ce mot.
Piquer, peut-être d'origine celtique y>/r/,-, pointe.
— Se piquer : se fàclier, prendre la mouche. (Voy.)
— Qui s'y frotte s'y pique. La paraphrase de ce proverbe est
dans YEcclésiaste : « Celui qui creuse un fossé y tombera, et celui
qui traverse une clôture sera mordu par un serpent. »
(Voy. picard, pique-nique, pique-assiette.)
Pirate, du latin pirata.
Voleur, écumeur de mer, corsaire qui n'a aucune lettre de
marque, qui court les mers en pleine paix, pour voler et piller les
navires.
— La Méditerranée, infestée par la piraterie depuis Tantiquité,
en a été délivrée, en 1830, par les Français, qui se sont emparés
d'Alger.
Au xvii« siècle, les flibustiers américains épouvantèrent de leurs
ravages la mer des Antilles et les colonies espagnoles. (Voy. corsaire.)
Pis, du latin pccfus, poitrine.
Pris autrefois dans le sens du latin, ne désigne plus que les
mamelles de la vache, de la chèvre, etc.
PIT 269
Pisé, (le r;iiicion vorlte piser, battre.
IVilr luiini'c (le tciTo ulaiso qu'on détrompe et qu'on moule en
carreaux, en y nidanl de la paille hachée. Ou la laisse sécher pour
en faire des consli-iKiious iMistiques.
Pistole, semble déri\é. ('(imme p/sfo/cf, de Pistoic, ville d'Italie.
— (In nomma ju'sf o/cs-, les écus d'Kspagne et d'Italie, qui étaient
plus [x'tits que ceux de France.
La pistole d'Espaune vaut environ 20 francs. On emploie quel-
quefois ce tenue, comme monnaie de compte, valant tO fi-ancs.
— La pistole dans les prisons pour dettes, est le logement que
les détenus obtiennent en payant.
Pistolet.
Synonymes: pied de cochon (allusion de forme).
Crucifix à ressort : comme le crucifix, il se montre à l'heure
suprême.
— fleuri Estienne dit qu'à Pisloie, petite ville à une journée de
Florence, se faisaient de petits poignards qui furent appelés en
France pisloycrs, pistoliers, et pislolets. Quelque temps après
étant venue l'invention des petites arquebuses, on leur transporta
le nom de ces petits poignards, et ce pauvre mot, ayant été ainsi
promené longtemps, à la fin a signifié les petits écus « et croy
qu'encore quelque matin les petits hommes s'appelleront pistolets
et les petites femmes pistolettes ».
La plaisanterie de la fin pourrait passer pour une prophétie ; on
connaît la locution populaire : Quel singulier pistolet !
On rit avec vous et tu te fâches ! En voilà un drôle de pistolet!
(Gavarni.)
Pitance, du latin barbare pilnncla, parce que la subsistance
des moines provenait de la pitié publique.
— Désigne les aliments autres que le pain et le vin.
Pitié, du latin piela^, pietafem. (Yoy. piété.)
— La pitié que nous inspirent les maux d'autrui est due en
grande partie à la crainte que nous avons de les éprouver
nous-mêmes.
La pitié est sœur du dédain ; c'est l'aumône qu'on fait aux
coupables et aux faibles. (G. Sand.)
Mon Dieu ! ayez pitié de moi, ...et jetez des pierres aux autres.
— Il vaut mieux faire envie que pitié, parce que les hommes ne
270 PI.A
foiil .uiirrc (le. Iiicii (jn';'! ceux (jiii pciivoiil le Inir rciulro ; fomnie
(lil le provoi'hc : « On ne prrir (iir;iii\ lidic!^. » (l'est surtout ;'i ses
ninis (jn'il faut cacher sa uiisère; s'ils ont du co'ur, ils soulVicut de
nos clia.ui'ins : s'ils n'eti ont pas, nous soulîi'ons de leur égoisnic.
i.c soutinicut (pie lliomnic supporte le plus difficilement, c'est la
pitié, surtout (juaud il la mérite. La pitié es! un mépris dans la
tendresse, ou une tendresse qui offense et qui Mlïaildil eucoi'e notre
faiblesse.
■ — De la pitié au nu''pris, il n'y a pas plus de distance qu'entre
uuc poire molle et une poire pourrie. (X. de Maistre.)
Il vaut mieux être envié qu'apitoyé.
Il n'y a que les mendiants qui vivent de ItMirs plaies: les honnêtes
gens les cachent.
Il faut cacher ses misères devant les forts. (Sévigné.)
Qui chante ses misères épouvante.
L'homme qui soutïre est un Iléau ! c'est un sujet de tristesse*et
de dégoût pour les autres ! c'est un cadavre qui encombre la voie
publique, et dont les passants se détournent avec etlroi. (G. Sand,
A/ do.)
Pitre, origine incertaine.
Sorte de Paillasse faisant la parade sur les tréteaux, et engageant
par ses lazzi la foule à entrer dans la baraque du saltimbanque.
(Voy. Paillasse.)
Au ligure : bouffon grossier.
Pittoresque, de ritalion p/tforesco, relatif à la peinture.
S'entend de ce qui est agréable à la vue et peut servir de sujet à
un tableau.
— Par extension, on a appelé pittoresques des publications
dont les pages sont ornées de gravures présentant à l'œil l'image
des faits racontés.
Le Magasin pitloresquc, recueil le plus ancien de ce genre, date
de 1832.
— Au mot pittoresque a succédé le mot illustré.
Place, de l'italien pia::a, du latin platea.
Le jour de la Saint-Lamliort,
Oui quitte sa place la perd.
Remettre quelqu'un à sa place.
Assieds-toi à ta place, et Ton l'y laissera.
l'LA 271
Plafond, iiKil roniposr, jadis iilal-fond.
— Dieu (irs [iLifoiids. inspii'c-moi ! seiiil)lcdirc un iioèlcélégiaquc,
qui parait clit'nlit'r en l'aif riuspiratioii.
Plagiaire, du latin iihKjiariiis (qui est roupablo de drlournc-
uu:>nt d'csi-lavcsi.
Les Uouiaius .-ippclaicut /i/ai//t/i /i, cr\\\ (pii l'jiisaicut de la fraudo
sur le cûiiiiut'ire des esclaves. Ils étaient condauinés au fouet,
ad /)laf/as.
Aujourd'hui, ou ;ipp('llt' /)la;/iaire celui (jui conqùlo les ouvrages
des autres, qui \(mu1 à son prolit la pensée d'aulrui.
On (lit que l'ai)!)!' Roiiudtc
Prêche le.s sermons (iaiilrui ;
Moi. (|iu sais qu'il les achète.
Je soutiens quils sont à lui.
Synonyme : déiuarciueur de linge.
Plaider, de j)f{/i/f, déi'ivé de placiliu/i, volonté.
— Plaise à la cour... Un plaidoyer est une requête à la cour pour
qu'il lui plaise de..., développée par l'avocat.
Plaie, du latin jildgn.
— Il est comme le chirurgien, il ne demande que plaie et bosse :
il recherche son prolit dans le mal d'autrui.
Je ne demandai plus que plaie et bosse. (Le Sage.)
— Dans la langue romane, pica plag était un terme de mépris
pour désigner les chercheurs de procès.
Pieu phifj per a roc ni.
{Lei/t r/'amors, S» 147.)
Piain-chant, mot com[)Osé do plain, latin planus, et de chant,
cafifas.
Chant uni, égal, simple, pratiqué dans les églises catholiques, et
dans lequel toutes les voix chantent à l'unisson.
Plain est ici le même que dans l'expression fie plain-pied, qu'il
ne faut pas confondre avec plein de terre-plein.
Plaindre, du latin plangere.
— Se plaindi'c : geindre, marronner. avoir la douleur geignarde.
— Se plaindre que la mariée est ti'op belle: d'être trop heureux.
Chacun se [ilaint que son grenier n'est pas plein.
La |)tainte est {lour le fat, le bruit est pour le sot :
L'honnête houinie trompé s'éloigne et ne dit mot.
(La Noi.e.)
272 PLA
Plaire, du l.iliii jilacaro.
M;ircli;iiiilisi' ijui jil.iil l'st à iiioilir vciwliK'.
(I.M.iiwh, /(/ /'aiiiil/r n.ilrftvrif/anle, se. XIV.)
r)ii îipprécic ce qui est utile et l)on, on ;i(lniire re qui est beau,
mais 011 n'aime que ce qui plaît.
Soyez 1)1111, \()iis |il;iircz.
(OllK'iSKT.)
On ne saurait plaire à tout le monde, ...à moins d'être tarte ou
gâteau, disait Bion. Nous disons aujourd'liui : à moins d'être louis
d'or. C'est encore plus vrai, car il y a des gens qui n'aiment pas la
pâtisserie, il y en a peu pour lesquels l'or n'ait des charmes
irrésistibles.
— Eu argot, on appelle l'or orient, c'est-à-dire or riant.
Cette petite en'rontée m'avait juré qu'elle était [)liis nette qu'une
perle d'or riant. (Histoire rotnique de Franc ion.)
— Celui à (jui personne ne plait est bien plus malheureux que
celui qui ne plaît à personne.
— Plait-il 1 se dit à ceux à qui on doit le respect ; aux autres,
on dit : hein ? pour faire répéter ce qu'on n'a i)as entendu.
Plaisance, dérivé de p/aisant, lieu plaisant.
Nom d'une locahté do la banlieue de Paris.
Plaisant, qui divertit en faisant rire.
Par la saml)leu ! messieurs, je ne croyais pas être
Si plaisant que je suis...
(Moi.iftiiF., Misanthrnjie.)
Plaisanterie gauloise : c'est l'atticisme moderne, l'esprit piquant
de la vieille société française.
— Plaisanterie de famille : grossière, de mauvais goût.
— Plaisanterie à part. Rivarol disait de l'acteur Dugazon, qui
chargeait trop ses rôles : « C'est un bon acteur, plaisanterie à
part. »
— Porter trop loin la plaisanterie. Le président : « Pourquoi
avez-vous pris cette pioche? — C'était par pure plaisanterie. — Mais
on l'a retrouvée chez vous, à cinq kilomètres de distance : c'est
porter la plaisanterie trop loin. »
Plaisir, du hiln placere, ancienne forme de plaire; en roman
placer : en italien piacere.
— Le plaisir n'est que l'éclair de la sensation, il expire avec
elle ; le bonheur est une suite de plaisirs ; le contentement est un
l'LV TiW
liieii-iM rc iiit(''ii«Mir : la joie est iiiit' (Iriiioiislralioii cxliTiciiri^ : la
salislai'l'nm se raii|i(>rl(' aii\ passidiis : la \olii|)t('' ativ sens.
— Les [)laisii"s sont la coiisdlalioii de cciik (|iii ne ronnaissoni pas
le hoiiheiir. (De Laiiusdoi'f.)
(ycsl tic nos plaisirs ipic lums \ieiiiitMil nos peines.
l'util" un plaisir iiiIIIl' doiilctirs.
Soit cil tH- moiitli', soll ailleurs.
(xvic Siècle.)
La soltriék' tlans les plaisirs est la fontaine de Jouvence.
11 est plus dilTicile de supporter les chagrins que de s'abstenir
des plaisirs. (Aristote, El h unie. 111, li2.)
Les ])laisirs courent aprt'^s ceux qui les fuient. (Franklin.)
— Benlliain dt'crit la série des plaisirs et des peines : « Plaisirs
des sens, peines de la maladie. Plaisirs de la nouveauté, peines de
l'ennui. Plaisirs de laniitié et de l'amour, de la renommée, du
pouvoir, de la piété, de la sympathie, de la mémoire, de l'imagi-
nation, etc. ))
— Chacun prend son plaisir où il le trouve : Alios alùi dclccUiiit.
(Cicéron.)
...Trnhil sun qncmque rolupltts.
(VH,,;n.K.)
Le plaisir se double en se partageant.
Le vice empoisonne les plaisirs, la modération les aiguise, l'amitié
les multiplie.
Plat, du latin populaire philluin.
Dont la surface est unie.
— C'est plat : c'est héte, sans esprit.
Style plat : qui n'a rien de saillant, de relevé.
— Un homme très gros se trouvait un jour à l'Opéra, où il gênait
ses voisins. L'un d'eux dit tout haut : « Quand on est fait comme
cela, on ne devrait pas venir ici. » Le gros homme répondit :
« Monsieui-, il n'est pas permis à tout le monde d'être plat. »
— Sei'vir un plat de sa fa(;on.
Oui, ji' \ais lui s{'i'\ir iiu plat tle ma façon.
(.Moi.iKni;, Etourdi.)
Platonique, du latin jtldlonicu^.
— Amour platonique : amour idéal, séraphique, chevaleresque,
auquel les sens sont étrangers. C'est celui auquel fait allusion le
proverbe: Vivre d'amour et d'eau fraîche.
Il est assez rare aiii()iirtriiiii,et ne se manifeste que chez certains
18
274 PLK
adolcscciils iiail's ; il ;i |)ris [loiii- devise;: rue rliaiiiiiii'i'c (,'t son
C(ri)i'.
— La ])liilos()|)liio de IMidon. siirnoiiiiiié le Divin, (''tait laspinilion
vers l'idéal el l'ainoiii- d'un dieu créaleiir: c'étail l'opiiosé de la
pliUosophie d'Epiciire, (jiii no. i-econnaissail que la naliire el rainoiir
des choses créées.
Néanmoins Platon, dans le Jianqucl, expose une lliéoi-ie de
l'amour si étrange, au point de vue des mœurs, que l'esprit est
épouvanté de voir ériger en principe une corruption, un cynisme
si elïronté. Si l'on faisait aujourd'hui un procès à Platon pour son
Dialo(jiie, il faudrait le juger à huis clos.
L'amour s'accroît par les ohstacles, et s'éteint dans les voluptés.
(Virey.)
— Ninon de Lenclos disait que l'amour ne mourait jamais de
besoin, mais d'indigestion.
L'amour commence au premier regard, et finit avec le premier
baiser. (Lola Montés.)
L'amour ne peut se passer ni d'idéal, ni de possession ; le premier
le pousse invinciblement à la seconde ; mais celle-ci obtenue, l'idéal
est souillé et l'amour expire.
L"amoiir est toujours à la recherche de l'inconnu.
Le grand art c'est d'être impénétrable : quand le masque est
tombé, le carnaval cesse. (A. Houssaye.)
Il y a le monde antiplatonique des lorettes et des cocotes.
— Année platonique, ou périodique. La grande année des
Platoniciens est une révolution de trente-six mille ans, après
laquelle ils prétendent que les planètes et les étoiles se retrouvent
dans le même ordre et la même position.
Plâtre, du grec p/assô, façonner.
Battre (pielqu'uu comme plâtre.
Pléiade, du grec Plélas. Groupe de dix étoiles qui se trouve dans
la constellation du Taureau.
— Les Grecs donnèrent le nom de « Pléiade » à une réunion de
poètes qui vivaient au temps de Ptolémée Philadelphe.
Au xvie siècle, à limitation des Grecs, Ronsard forme une
Pléiade française.
Plein, du latin plenu.^. S'oppose à cide.
Plein comme un boudin, ...comme un œuf.
Plénière, dérivé de plein.
(loiir |i!riiit'M'(' : iii(liil,L!(Mic(> |il(Mii(''i'(\ rt'mission iilciiic o( oiitirre
(le toiilc^ les [iciiit'S d\\v<~ an immIk''.
Pléonasme, du Lircc /i/conas/nos, alKiiKlance.
Le pléoiiasiiic csl le ('(iiilraii'c de rdliiiso.
Vu plt'onasiiic en a.uiiciillmr. (•"est d'ai-i'oser pendant la pluie.
.!('\ais l'allt'i- cliciclicr : an jdiir daiiidiircriiui ; descendre en bas;
s'entr'aidtM' niiiliicilcnuMil : cire forcé nialgi'é sui : prc\oir d'avance...
Tout aillant ih' pléonasmes 1res vicieux.
Pleurer, du lalin jilordre.
Synonymes : Ncrser (\<,'^ larmes, des loi'rents de larmes: éplucher
des oi.unons.
« .l'ai épluché tous mes oii^nons »>, dit M"« Uacliel au moment de
mourir.
— Pleurer comme nne naïade. ...comme une fontaine. ...comme
une vigne, ...comme uiu' vache, ...comme un veau.
— Jean ipii [ileni-e et .leaii qui rit : Heraclite et Démocrite.
Car ([u'iuie fcrnau' plciirc, iiiic autro pleurera.
Et toutes iileureruiil laiil ijifil en snrviciuira.
(DKSTO-.rcUKS.)
— Il ne lui reste plus que les yeux pour pleurer.
— Dans une maison destinée à une famille de onze enfants,
tout en bas, rarcliitecte a désigné sui' le i)lan, une chambre sous
le nom siunilicatif àc plouroir.
Pleutre, origine inconnue.
Homme méprisable.
— Le pleutre diiïère du bélifre en ce qu'il ne mendie pas: mais
il a les sentiments bas du uu'udiant. mémo dans une haute fortune.
Pleuvoir, du latin populaire pforerc, pour plucre.
Synonymes: Il tombe des hallebardes: il pleut à ne pas mettre un
chien à la [lorte.
Unaiid il |ilcnl a la Saiiil-dervais,
Il pleut ipiai'anlo jonrs après :
S'il pleut le j(»nr de Saint-.Médard,
Il plriil ipiaranlc jdurs pins lard.
La légende de saint Médard nous apprend qu'il gardait un jour
les chevaux de sou père, riche seigneur de Normandie, et qu'ayant
aperçu un cavalier désarçonné, il lui donna un des chevaux qu'il
avait à garder. Sa bonne action fut récompensée aussitôt, car il
éclata un orage effroyable, (jui trem[ia jusqu'aux os tous ceux qui
2% VU)
se trouvaient aux cliaiiips. Médard fut seul préservé par un aigle,
qui l'abrita de ses ailes immenses. (Voy. rosièj^e.)
Saint Gcrvais (<'t saint Protais), dont la fête arrive onze jours
après ('(ille de saint Médard. partagent avec lui la direction des
calaracles célestes. L'Iiiiiiiidih'' de saini Ah'-dai'd csl la |iliis célélin; :
])ourtanl il serait plus l()gi(pie d'accoi'der la pi'ééniinence à saint
Gervais, car sa fête est plus voisine de l'équinoxe, et l'on sait
que la cause de ces pluies est due aux vents qui commencent à cette
époque et soufflent d'ordinaire une quarantaine de jours.
Saint Médard, dans les suiierstilions clirélicnnes, a remplacé les
Hyades du paganisme.
— Année pluvieuse, année frumenteusc.
Quand il pleut on août,
II |ilcnt miel et lion moût.
Pli, sul)stantif verbal dç plier, anciennement />/o/, qui se retrouve
dans emploi.
— 11 est comme le camelot, qui a pris son pli : il a pris une
mauvaise babitude.
Plier, du latin plicare, provençal ^^/f^a/', doublet de ployer.
— On plie un vêtement, on ploie une barre de fer.
Il vaut mieux plier que rompre.
Je plie, et ne romps pas.
(La Fontaine.)
Plomb, du latin plumhus.
— A cause de sa grande pesanteur spécifique, le plomb exprime
l'idée de lourdeur dans les expressions suivantes : sommeil de
plomb ; nager comme un cbien de plomb ; plonger, proprement
s'enfoncer comme le plomb.
— Fil à ploml) : fil muni d'une masse de plomb à son extrémité,
pour obtenir une direction verticale.
— \)ç plomb viennent: aplomb, surplomber.
Avoir de l'aplomb : rester debout sur le terrain de la discussion.
Surplomber: être bors de la perpendiculaire tracée par le fil à
plomb.
Plongeon, dérivé de plonger, latin plumhicare.
Au figuré, faire le plongeon : reculer devant le danger.
Dans le langago trivial, caner: plonger comme un canard.
Qtù fera la cane de vous aultres? (Rabelais I, 42.)
Ploutocratie, néologisme ; du grec ploutos, ricbesse.
PLU 277
Gonvcrnemont oi'i le pouvoir appiirlient ;iux riches.
Arislorratio d';ir,i:i.Mit.
Pluie, du I.iliii p/iiria.
— La pluie est l'elTet île la i)récipi(ation des vapeurs contenues
dans ratniosphr'rc. Il y a /i/i/ir ipiaud elles se précipilent à l'état
li(pii(le: si Teau est à ['(''iat NrsiciilciiX: il y a broiii/lard. La pluie
qui loiiilic sans que lalinosplirrc soit nuageuse, s'appelle serein
le soir, ro.sr'c le matin. Les (jiboitlées sont les pluies de printemps,
souda.ines et fréipientes, souvent mêlées de yrèle et de neige. Enlin,
on appelle orage, ondée, averse, une grosse pluie de peu de durée.
(Voy. (jirre, grésil.)
— Synonymes : liouillon de chien ; ralalia de grenouille ; déluge.
— Les hirondelles rasent la terre et les grenouilles coassent
plus haut, (piand la phiic menace.
On dit aussi : » Sauto, ci'apaud, nous aurons de l'eau. »
— Petite pluie ahat grand vent.
A [JKii (II' pluie cliiet grans vous.
[Romiin dp Rcnart.)
— L'été, la pluie ne mouille pas. Cela signifie que l'eau qui
tombe dans cette saison s'évapore rapidement. En été, la force
évaporatrice de la température est cinq à six fois plus grande qu'en
hiver : de là vient le rapide dessèclienient qui succède alors aux
plus fortes averses.
Plume, du latin pluma.
— Les anciens, pour écrire, se servaient de roseaux taillés, ou
de cannes : d'où canif (?).
Au xo siècle, le roseau fit place à la plume d'oie.
Mauvaise plume, qui ne fait honneur ni à l'oie qui l'a fournie ni
à celui qui Fa taillée.
Vei's IToO, le mécanicien Arnoux proposa l'emploi de plumes
métalliques, dont l'usage ne se propagea qu'au commencement du
xix« siècle.
— Chargé d'argent comme un crapaud de plumes.
Plumer, dérivé da plu/ne.
— Plumer la poule sans la faire crier. (Voy. éeorcher.)
Faire pondre la poule aux œufs d'or sans l'éventrer. (Mirabeau.)
Les lorettes sont des anges dont les ailes sont faites de plumes
de pigeons.
278 POC
Aiijoiiririiiii, ce soni (!(■> |)i.<jï'Oiis. iioii jiliis des coloiiilics. qui
Iniiiiciil le cluir de Vénus.
Pliiiiiei- lin iiiLiOon. (Voy.)
Kolle osl (|Lii son ;im;iiil ru- ithimt-
JiisijiK'S ji s;i (lcri)i('ro [iIiiiik' :
Car ijiii mieux iilimicr le saura.
C'est collo (]ui meilleur aura.
Plumet, \\Gi\l de plume.
— Mé/X'i"iy se trompe, qunnd il dit que les pliiinels et [t.iiKiclics
ne sont en usage que depuis les Croisades. Virgile re[)résente le
chef des Liguriens, Cupavo, avec des plumes de cygne à son casque,
quand il vient au secours d'Enée contre ïurnus.
...Piiucis cnmitrilc Cupavo,
Ciijits olnriniv suryunt de icriicc pennœ.
{Enéide, X. ISfi.)
Plupart (la), de pJxs et jiarl.
Terme coUeiiil. pour la [iliis grande part : il s'éeri\ait autrefois
la plus par/.
— Pour la plupart est un adverbe, dont on ne i)eut retrancher
pour.
On ne doit jias dire : Ces hommes sont instruits la plupart, mais
pour la plu|iart.
Plus, adverbe latin, passé en h'ançais et en provençal.
Ce dernier se sert aussi de mais, usité antrelois en français.
Plus i'csgurd, inuis la vnj abclhir.
(Plus je la regarde, plus je la vois Inillcr.)
Ils chastient leur corps qui n'en peut mais. (Amyot. )
— Plus est peut-être (?) l'abréviation de amplus.
— Devant un adjectif, ^j/^^s- marque le comparatif : < Plus fraîche,
plus brillante que la rose. »
Précédé de Tarticle ou de Tadjectif possessif, il marque le super-
latif.
— Autrefois on ne prononçait pas / de plus, aujourd'hui on la
prononce. (Yaugelas, licmarques.)
C'est par un reste de cet usage qu'on dit dans le peuple : « Pus
souvent ! » dans le sens de : va-t'en voir s'ils viennent.
Poche, origine incertaine.
F. Génin le fait venir du grec du Bas-Empire pougéion.
— La forme d'une poche gonllée, a donné naissance au nom de
POE 270
porlio nppliqiit'o à la ciiilloi" à pot. On dit aussi œufs pocliés ou à la
ciiilkM'. pai'co (pi'oii les apprête avec la cuiller à pot. Et par suite
d'une comparaison : (eil poclié.
Il l'esla tout estourdy cl nieiirli'v. iinu' œil poclié, au I)euiTe noir.
(Halieiais.)
— Synonvines: ((enrde liuancier; profonde (Vidocq); fouillouse
(Uahelais) : dé[iartein('iil île la Creuse.
V\ vous aurez, sravoz-voiis (iiioy '?
Force il'auljerl en la fouillouse.
[Vie de saint Christophe ; (irennlilc I.TJO)
— Jouer de la poche : payer. Allusion au petit violon des maîtres
de danse, [\\)[hAc jioc/wfft'.
Pochon, [làté d'encre. Terme technique à l'usage des maîtres
d'écriture. (^Dictionnaire de Trévoux.)
Poêle, nom masculin : du latin palluim.
Voile (pi'ou tient sur la tête des mariés pendant la bénédiction
nuptiale.
L'usaue d'élendi'e ce \oilesur les nouveaux mariés vient [)roha-
blement de la cérémonie qui consistait, dans le mariage romain,
à faire passer les nouveaux époux sous le joug : d'où le mot
conjnfjuiin, joug commun.
— Drap mortuaire. (Sos. pctUier.)
Poêle, nom féminin ; du latin patella, plat.
Ustensile de fer pour faire frire les aliments.
— Qui tient la queue de la poêle, il la tourne comme il veut.
Poésie, du grec poirsis, par le latin poésie-.
Synonymes : la gaie science, la langue des dieux.
— Les poètes se logent sous les toits: étant en communication
journalière avec les dieux, il leur convient de faire la moitié du
chemin.
L'héroïsme d'un peuple crée la [loésie, la poésie engendre la
civilisation : c'est du poème d'Homère C[u'est sortie la Grèce
civilisée: c'est un livre qui a converti le genre humain au chris-
tianisme. (J.-J. Ampère.)
Aujom-d'hui, tous les chai-mants esprits, nés au commencement
du siècle, iinissenl ou ont disparu. La génération nouvelle est tout
à fait ignorante de cette aimable tradition, cjui menace de se perdre.
Faisons du moins revivre par le souvenir ces personna.lités, alin
qu'elles n'emportent pas avec elles les restes d'une poésie qui tend
280 POI
à (lis|)nr;iîlro tous les jours, et. si on vont l;i l);imiir roiiiiiii' iiiiililc
évorliioiis-iioiis (lu moins ;'i i-ciidi'c riiliic un pcn |)0(''tiqiH'.
I);ins l;i \\r |)i';ili([ii(', l;i poi'^sic do ri(l('';il ne vient (|n ;ipi'(''S la
poésie (le la réalilé.
Poète, du t>rcc, jtoii'lrs, p;ii' le lalin jiorl(/, celni (jui fail, le
créateur, le trouveur.
— Synonymes: favori d'Apollon, nourrisson des Muses, rimailleur,
poète crotté.
— En argot : j)oi(/rt% al)ré\ialion pour : a\aliMii' de [lois uris.
— L'esprit court les rues : c'est i)our cela (pi'il y a des poètes
crottés.
Tandis (|ne Cullclct, croltr- jiisi|ir;i Ircliino,
S'en va clieirlifr son pain ilc cnisinc en cuisine.
(lion.K.v, Satire I.)
— Un bon poète n'est pas plus utile à l'Klat ([u'nn lion joueur de
quilles. (Malherbe.)
Il n'y a pas au monde d'être plus inutile qu'un mauvais poète.
(Blot.)"
...Dans lart dangereux de rimer el d'écrire.
Il n'est pas de degré du médiocre au pire.
'Boii.KAL-, .1/7 pocH'/ue.)
Un mauvais poète ne mérite aucune indulgence. Apollon n'a-l-il
pas écorché Marsyas ?
— Parmi les grands poètes du xix<^ siècle, V. Hugo représente
l'iiomme; Lamartine, la femme ; A. de Musset, le jouvenceau.
— On naît poète, on devient orateur. A^ascunlur poc/œ, flunt
oratores.
— L'esprit du savant est éclairé, celui du poète est lumineux.
Poids, du latin pensum, chose pesée ; provençal pés.
Le d provient de la méprise de certains grannnairiens.
— Les poids et mesures, au dire de Josè[)lie. ont été inventés
par Gain.
— Faire une chose avec poids et mesure : Omnia in mensura,
et numéro et pondère. {La Sarjesse, XI. 21.)
Poignard, dérivé de poing, lalin puynus.
Au dire deGénin, il viendrait de pénard, qui désignait une épée
courte servant aussi à couper le pain, et qui, à cause de ce double
usage, devenait une arme peu dangereuse.
Rabelais (prologue du livre 111) dit : « Ghascun exerçoyt son
POl 281
pcnarcl. » Pdnard s'ost dil pour imc vioille épôo. et ;iussi pùiir un
vieilhii'd usé ; dans ce sens, un vieux galant, niu' vieille l;iiiie.
Le [leuple a altéré la l'ornic et le sens de ce mot : iin \ieii\ pa/ia
signilie une vieillerie démodée et usée, comme on en trouve dans
les greniers et dans les boutiques des brocanteurs.
Poil, du laliii /)ihis.
— Brave à trois poils. Sous (Charles iX. on désignait ainsi les
spadassins, cpii portaient une longue inoustaclic terminée de chaque
coté par quehpu^s poils très cITdés, et un bouquet de barbe de la
même forme, au menton. La mode venait d'Espagne.
Ou la retrouve dans quelques portraits du temps de Louis XIIL
Poing, du latin pinjnus, qui a donné aussi pugna et pugilat,
répugner, répugnance ; poignée, ce qu'on peut tenir dans la main
fermée.
— Montrer le poing à quelqu'un : le menacer.
Je vais faire débarquer mon poing sur tes côtes.
Point, du latin puncluin: proprement, trace d'une piqûre.
— Dans les anciennes mesures, le point valait le 12e (\q \^ ligne.
— On emploie aussi point pour moment : Il fut sur le point de,..
Le point du jour, c'est-à-dire quand le jour perce.
— La ponctualité est la qualité de celui qui agit à point.
— Point a fourni aussi : pointer, appointements, désappointé.
— Point, état de santé, a donné embonpoint.
— Bon point. Les Bomains donnaient leur suffrage à quelqu'un
en marquant son nom d'un point.
(hnnc Inlil punclain.
(HOKACE.)
(Il a obtenu tous les sulfrages.)
— On prétend que c'est Aristoi)liane qui a inventé les points
qui indiquent certains repos.
Les Latins en mettaient entre chaque mot, comme on le voit
dans certaines inscriptions; cela revenait à n'en pas mettre du
tout. Les livres hébreux originaux sont écrits sans points ni virgu-
les. Saint Jérôme y introduisit la division en versets.
La ponctuation actuelle est d'origine moderne , et date du
vue siècle. Elle a été perfectionnée peu à peu, surtout après la
découverte de l'imprimerie, pour donner plus de clarté au discours.
— Faute d'un point, Martin perdit son âne.
282 POI
M;ii'tiii. pi'itMii- (le r.ililinyo dWsclIo, ;iv;ii( f;iil <ii-|i\(,'i" siii' la
})()rle (lu coitvciil celle iiiscriiiiioii :
l'iirhi, iKtlens cslo iinlli, cliiuil'tris honrslo.
(Porte, ne sois ouvert*' ;'i personiie, n'Sle fennec ;i riioiiiiéle
IlOlIlllM?.)
Poiic celte l'.'iiilc. il lui dcsIiMu''. et son successeur' n'eul (|u';'i
clKiil'iel" (le place un sitiiie de ponctuation poui' rectilier riusciiplioii :
Porln, païens nsto, nidli clauihiris fionr-slu.
(Porte, sois ouverte à tous, ne sois fermée pour aucun lionni'te
homme.)
Il ajouta :
l'no jii'O puncln candi Marlinus Ascllo.
(^Pour un seul point, Martin perdit Asello, — son âne.)
— Un hoinnie qui avait des ennemis consulta l'oracle pour savoir
s'il devait ai)andouner son pays. 11 lut : Domine, s/cs securns. Mais
apirès avoir couru un craïul danuer. il s'aperçut, eu relisant la
réponse de l'oracle, qu'il aurait dû lire : Doini ne ste.s securits.
— Un poète latin composa ce vers en l'honneur d'un conspi-
rateur :
In mcmoria .seinpcr cril.
(Il vivra toujours dans la mémoire des hommes.)
Poursuivi en justice, il expliqua ainsi son inscription :
In me maria acmper cril.
(Il y aura toujours en moi de la folie.)
— Une viraule transposée enfanta la secte des Manichéens.
— Le général Fairfax écrivit après sa signature, sous la sentence
de mort de Charles P"", sans aucune ponctuation : SI omnes consen-
tiunt ego non dissenlio.
Il se réservait, si les événements le demandaient, de l'expliquer :
Si omnes conscntiunt, ego non : dissentio. (Si tous approuvent,
moi non : je suis d'avis contraire.)
— Un négociant de Londres ayant engagé un célèhre médecin
d'Édimhourg à venir opérer l'accouchement de sa femme, le docteur
re('ut ce télégramme : « Ne venez pas trop tard. » II se pressa de
partir, et trouva la femme délivrée. On avait écrit : « Xe venez pas.
Trop tard. »
Pointe, du latin piincta, participe de yy/z/^yr^rc, poindre.
Au figuré, des pointes d'aiguille : des suhlilités.
l'OI 283
— Fairo dos poiiitos : dos traits d'esprit piquants.
— Esprit poiutillouK : (pii er.ûotc sur les moindres choses. l*eut
s'opposer à es[n'it oldiis ou épais.
Poire, du ialin populaire itira. |iour jurum.
— Kutro la poiivol le Ironiaue : inli'v pornUi . pendant le dessert,
quand laijpôtit est satisi'ail, que le viu a délié les langues et rend
l;i l'ouversaliou uéuéraie.
.( Colle ioculion. dit Diiplossis. indi(pie l'ospèee d'inliuiilé qui
s'étaitlil naluroilouiont outre les convives, à la suite d"un hou dinor,
au dessert, au moment où Ton apporlo le fromaiic et les fiaiits.
C'est le moment dos oonlidences et des ronversations tout ami-
cales. »
— Après la poire, rhoinmo veut hoire.
— Garder une poire pour sa soif : éparpner quelque chose pour
l'aNonir, pour jouir plus tard du « l'iaiit » de ses économies.
— Après le hoau temps vionl lo mauvais, et pondant l'été il faut
se hàtir une maison })Our être à Tahri dos rigueurs de l'hiver.
(P. Pérngin, Vie de Vasori.)
— Se contenter de peu est i)ien : retrancher par prévoyance
quelque chose de ce peu, est mieux. Celui qui prali(pH' ce proverhe
est sur de conserver son indépendance.
M;il siiiipo (jui huit (lisiic
Qui au soir ne laisse levain,
Ja ne fera au matin lever pasle.
(K.VBFr.AlS.l
— Poires de hon-cli rétien. (Voy. bon.)
Cette expression est sans doute la corru}itiou de * i»onuos poyros
crusteménies », dont parle Uahelais (lil, 13) ; elle? étaient originaires
de Crustumenum, ville de Toscane.
C'est à propos de ces poires que Virgile a dit :
('.ricilniniis -sj/i-i-svc piri-i.
\r,,-r,riji,]lir.<, 11, SS.I
Poireau, de porre//i/>n, diminutif (W porniin.
— Il est coinmo les poiroaiix, la P'Ii' hlanrlio el la (pu'iio verte. Se
dit d'un \ioillard \igouroux.
Tu me l'eproches mon poil gi-isonuant et ne consydèros jioint
comment il est de la nature des i)oiirreaulx, esquels nous voyons
la teste blaïu'he et la ([uoue verte, droicte et vigoureuse. (Uahelais,
III, 28.)
284 POI
Pois, (lu l;iliii pisiint. du nciMic /)inso, lifoycr, prircc qu'on
manpc.'iil les pois en piii'iM'.
— Les |M)is cliiclies, ou pois [loiiilus, (''Uiicut (•ons;in'(''S ;"i Vénus.
En vorlu d'iino croyjinco rolitiicuse, on les ni;ing(3ait cuils dans l'oau
salée. (Pline, XYIII^ 12.)
Cet usage s'est pcrpélué en l'rovence ; on les mantre aussi cuits
dans l'eau salée, spécialement le dimanche des Hameaux, alin de
se préserver des... clous ou furoncles.
— Avaleur de pois gris. On appelait ainsi jadis un homme très
vorace ; sans doute à cause des pois et muscades (pi'avalaient les
charlatans?
Les uvalk'z luiil ainsi qiio des pois j,'i-is.
(.MoLii:iiE, Etourdi, IV.)
(Voy. donner des pois pour des fèves.)
Poison, du latin potio, rpii a donné aussi potion.
En 'roman, poijson signifie potion, hreuvage.
Les anciens auteurs l'ont employé dans le même sens de potion
médicale, enchantée, philtre... Aujourd'hui, il est toujours pris dans
le sens de substance cpii donne la mort.
On trouve polionatus avec le sens d'empoisonné? (Suétone,
Caliguhi.)
— Synonymes : bouillon d'onze heures : poudre de succession ;
toxique.
— Les Grecs croyaient que les barbares empoisonnaient leurs
flèches, comme font certaines peuplades sauvages : d'où toxique.
— Poison a été longtemps féminin : il l'est encore dans le langage
populaire, dans les patois.
Ils veulent, malgré la raison.
Qu'on dise aujourd'hui la poison.
(.Ménage, Requête des Dictionnaires.)
Poissarde, de poix, qui a de la poix, de la glu aux doigts.
Martial donne le mot analogue :
Non fuit AnloUjci tam piccata manu-s.
(Epigrananes, VUI, o9.)
Le nom de poissard est donc venu de poix, poisser : c'est sous
Louis XIY que, par l'analogie des mots poisson et poissard, ce
dernier nom fut décerné aux marchands de marée. Mais les haren-
gères n'acceptèrent pas ce baptême sans protester énergiquement ;
elles prirent le nom comme une injure sanglante, la première
image présentée par le mot n'étant pas encore assez fruste.
roi 28o
Lis mctiois qui font usn.ao do la poix étaient aussi on butto à dos
plaisauloi-ios dôdaiunousos. Toi ost lo nom do jx'fjol donnô ou
ProYcncr aux cordonniers. Telle aussi la loculiini : (^ost un pégou-
lier (un call'a! )... sauf r(^sj)ect !
Poisson, du latin populaire y^/.vr/o. /u'sc/o/t/'t/i. pour y^/.sT /.>.•.
— L'intelliueuce des poissons est à peu |U'ôs nulle : leur vue est
très l)onne, mais leur voi'acilé et leur fécondité sont prodigieuses.
— Poinaon (l'/n-riL Doihkm" un poisson d'avril à quel(pi"un : lui
donner des couimissious ridicules, le pousser à des courses, à des
démarches inutiles, le l'^'' avril, pour se moquer de lui.
Cet usage l'omonte au temps où Tannée civile commençait au
mois d'aNcil. (ui pliil('(t au 2o mars.
C'est Charles JX qui a lixé le commencement de l'année au
l"^'" janvier, par un édit publié en ITitilî. Les étrennes ayant été
renvoyées alors au 1^'' janvier, on ne lit plus au l^"" avril que des
félicitations plaisantes et éqm'voques; et, comme en avril le soleil
vient de quitter le signe des Poissons, on donna à ces plaisanteries
le nom de « poissons d'avril » .
Fleury de Bellingen fait venir « poisson d'avril » de « passion
d'avril », parce que la Passion a eu lieu au commencement d'avril,
et que les courses inutiles que l'on fait faire ce jour-là aux gens
crédules, sont comparaldes à celles qu'on fit faire à Jésus-Christ,
d'Anne à Caïphe, à Pilate, etc.
D'autres ont vu l'explication de ces courses dans lo sens du mot
cici'il, en provençal ahriou, qui a fait ahricar, s'élancer étourdi-
ment sur une chose comme le poisson sur l'appât.
Au xv!*^ siècle, on entendait par « poisson d'avril » un maquereau,
parce que ce poisson est excellent à manger en avril. (Rabelais.
V, 30.)
Le maquereau, ainsi nommé, de macula, tache, parce qu'il a la
peau tachetée, sert à désigner un entremetteur de mauvais com-
merce, à cause de la ressemblance qui existe entre la bigarrure de
sa peau et lo vêtement de l'acteur qui jouait le rôle de proxénète
dans la comédie antique ; peut-être aussi à cause de la ressemblance
de iiuKiuereau avec mcrcureau, petit Mercure. On sait quel était
le rôle de ce dieu.
— L'électeur de Cologne, étant à Valenciennes, annonça qu'il
prêcherait le 1"' avril. La foule était grande. L'électeur monta en
chaire, lit le signe de la croix, et cria d'une voix de tonnerre :
« Poisson d'avril ! » Et il descendit.
28G POI
— Un Mdrliiinii, \()iil;iiil doiiiici' un poisson (r;i\i-il ;'i ses conipn-
lriot(is, leur ;uinoiir;i (|n nue énoniic li.-ilciiic Ncn.iil de s"(''clioMor ;'i
rentrée du poil, l'diir jiiLKjr de rellel lio sa plaisanl(;rie, il se
cacha ; niais, \o\aiil loiit h; monde y courir, il \ coiinil Ini-inéine,
pensant que ce pouvait être ari'ivé.
— I.a mec de (lénes csl sans [loissons. dit lo |iro\<'i-|i('. (In en
[(oiiccait dire aiilaiil de toiilc la Méditerranéf!, en ajoiitaiil ipie le
peu de poisson qu'elle contient est dt; (pialilé médiocre. Kn ,i!énéi"a],
les espèces de poissons cor'res[)ondant à celles de l'Océan, y sont
moins délicates. Le muge, on imilet, ne vaut rien : le maquereau et
la raie sont médiocres : cependant, les sardines y sont exquises: le
rouget est peut-être le meilleur de tous les poissons ; le loup et le
sarran sont excellents. Le poisson de la Méditerranée ne s'occupe
que d'être bien habillé : le rouget y est d'un rouge charmant. Il y a
des poissons verts comme des grenouilles, d'autres bleus, jaunes
comme de l'or, etc.
— Mauvais poisson : étrangle-chat, éti'angle-helle-mère.
— Jeune chair et vieux poisson. La chair des vieux poissons est
la meilleure.
En vérité, mon compère, vous faites bien mentir le proverbe,
car, n'étant qu'un jeune brocliet, vous avez la fermeté du vieux
esturgeon. (Voiture.)
— Le poisson naît dans l'eau, et meurt dans l'huile.
Si les mois, ne sont erres,
Li- poisson ne mangez.
(xvi'' siècle.)
C'est-à-dire qu'il ne faut pas manger de poisson dans les mois
dont le nom ne contient pas la lettre r ; c'est l'époque du frai.
— Muet comme un poisson.
0 midis quoque pisdhus.
Donaturii ciicni, si liheat, sonuin.
(UuiiAci:, Of/f*-, IV, 3.)
(0 Muse, qui donnerais, si tu voulais, même aux poissons muets
le chant du cygne.)
Tout pai'le eu mon ouvrage, et même les poissons.
(La FONTAINK.)
La Fontaine, en etïet, a donné trois fois la parole aux poissons
dans ses fables.
M. Coste, dans la séance de l'Académie des sciences du lo février
1838, a lu un rapport sur les recherches du docteur Dufossé, de
V()\. 287
.M;ii'scill(\ (roi'i il ivsiillo qirim ui'.'iiitl noiiilii'O de poissons infilos
Ijossrdciit la \(iix. Ils sont pourvus d'un appareil vocal, inius non
tiultuial. à raid(> du(piel ils pcuM'uI se manifeslor leurs désirs à
dislance. Oininl aux l'euielles, au rebours de ce qui se passe dans
notre espèce, elles restent coinplrtenient muettes.
Puis(pie raiicicu proverbe se ti'ouve ainsi démenti par décision
de rAcadiMiiic des sciences. l'Académie française de\rail douiici'
un léniinin à [loissoii. pdur [lerineltre de dire : muet comme une
jjoissoiuic.
Rabelais (111. '-2\] dit. eu parlant des oracles des païens : « Vous
sçavc/, (pie tous sont devenuz plus mutz que poissons, depuys la
venue de celluy Roy servateiir auquel ont pris lin tous oracles et
tontes prophéties: comme advenanle la lumière du clair soleil,
disparaissent tons lutins... »
— On ne sait s'il est chair ou poisson : on ne peut le définir.
Il est possible que ce proverbe ait été écrit d'abord en latin, et
ait signifié : s'il man.ue chair ou poisson ?
— Les gros poissons mangent les petits : le fort opprime le faible.
Les anciens disaient: vivre en poisson, pour: exercer le droit du
plus fort.
(Yoy. la sauce fait manger le poisson ; vaut mieux que le poisson.)
Poivre, anciennement jjeivre, du latin piper.
— De toutes les épices, le poivre a de tout temps été la plus
répandue, la plus employée dans les cuisines. Il y a eu même une
époque où toutes les épices furent désignées sous le nom de poivre,
et les épiciers sous le nom de poivriers. Le prix du poivre était
très élevé, cl il en était résulté l'ancien proverhe « cher comme
poivre », qui se dit encore. On donnait du poivre en présent, et
c'était un moyen employé pour se rendre ses juges favorables.
PoiX;, du latin pix, grec pissa, provençal pèrjue.
Rabelais se sert (^comme le provençal) de parasine, pour poix-
résine.
(Voy. poissarde.)
— Lg j)ico/i/K petite mesure pour l'avoine, était un panier d'osier
enduit de poix à l'intérieur, pour empêcher l'avoine de se perdre.
— De y^o/x vient aussi y^o//îco;î, tonneau de vin, et, dans l'origine,
outre, ÛG piceu/n, à cause de la poix dont l'outre est enduite. On a
intercalé un n, comme dans lanterne, de laterna.
Poli, du verbe polir, latin polire.
288 l'dL
On ne s;iiir;iil h' rallMclicr ;iii <i\vr /lo/is, cilr. iifiii plii;; (iiT;!
jio/iis, iioiiiliroiix.
— Soyez poli : Uhuidus cs/o. ((/itoii.)
C(; n'est |);is toni d'cliT [loli. il laiil riicdi'c (•In' Iioiiim'Ic.
11 faut plus (Vcîspril poui- cti'e poli (pic pour cli'e honnête.
Police, (lu prec po/ifcia, p;ii' le laliu po/ifia, ,uou\-erneinent.
— Synonyuuî : la rousse (aiyol).
— La police se subdivise en : 1'^ police politique, qui écarte les
divisions et les complots; 2'^ police de sûreté, qui prévient et
découvre les attentats: 3" police administrative, qui pourvoit au
bien-être des citoyens.
— Le service de la police parisienne contre les voleurs (l8Co)
coûte 16 millions aux contribuables : à ce prix, il y aurait bénéfice
à se laisser voler.
— Un piège tendu par la police s'appelle une souricière.
— Police d'assurances vient du bas-latin j)oleticum, registre.
Polichinetle, de l'italien PulriaelUi : de pu/linaceus, jeune
poulet, à cause de la ressemblance de son nez avec le bec d'un
poulet.
Dans l'antiquité, il s'appelait Maccus, et a pris naissance, quelque
deux mille ans avant Jésus-Christ, dans la cité osque d'Atella, entre
Gapoue et la mer. On prétend même qu'il est contemporain des
Pharaons, et ChampoUion a reconnu sa grotesque figure dans les
peintures égyptiennes.
— Polichinelle est égoïste, méchant et galant : il ne distingue pas
très nettement le bien d'autrui du sien.
— Le secret de Polichinelle : ce que tout le monde sait.
Polisson, ûe polifi, son, enfant des villes.
(Cette étymologie hétérogène est invraisemblable. Le mot parait
venir de l'argot ; à moins qu'on ne veuille voir un rapport entre
polisson ; qui est à polir, et nourrisson, qui est à nourrir.)
On donne ce nom à un petit garçon qui joue dans les rues ; à celui
qui dit ou fait des choses grivoises.
Polisson était un membre de la grande famille des gueux.
— Le Dictionnaire du Jargon traduit polisson par : ceux qui
vont presque tout nus. Serait synonyme de va-nu-pieds. Vers 1071,
le mot commence à signifier dél)auché.
Si ses manières te paraissent polissonnes, c'est que tu ne fré-
quentes pas le grand monde. (TliMirc de Ghérardi. t. L p. 351.)
por. 2fi9
Tono/. iii;i(l,iin(\ je suis nolissoii ;iii sii[ir("'iiie dci^ré. (Tliéfilrt^
ilalion.)
Politesse, du .uroc />o//.s-, ville; comme nrhanifc', de ;//-^,s'.
Bonté artiliciclle.
— La politesse est une envie de plaire : la natui-e la donne, mais
l'éducation l'auuinente. (M™« de Lambert.)
La politesse n'est (jifune forme de la bonté, de la ciiarité et de
la bienveillance, et une imitation de l'amitié. (A. Karr.)
La politesse ne coûte rien, et achète tout.
La politesse est une monnaie qui ue coûte rien, et rapporte
beaucoup.
La politesse est une courtisane, qui caresse également tous ceux
qui vont chez elle.
La politesse méprisante et dédaigneuse des grands est une vertu
artiiicieuse qui écarte la t'amiUarité.
La politesse exquise vient du cœur et d'un grand sentiment de
dignité personnelle.
Poltron, du latin poUcx h'uncus. pouce coupé, parce que les
lâches parmi les soldats romains étaient ainsi désignés, quand ils
s'étaient mutilé le pouce, afin de se rendre impropres à lancer le
javelot.
A notre époque, les jeunes conscrits usent quelquefois d'un
moyen analogue, en se mutilant l'index de la main droite, ce qui
les rend impropres à presser la détente du fusil. Mais la jurispru-
dence des tribunaux militaires les condamne ordinairement à un
an de prison, qui ne se confond pas avec le temps du service
militaire, qu'ils accomplissent dans les infirmiers, les pontonniers,
etc., etc.
— Valentinien avait fait une loi qui juinissait de la peine du feu
ceux qui s'étaient uiiitilé le pouce.
— Ce mot vient plus probablement de ïhiûlcn jto/frone, qui se
rapproche du vieux mai poulire, poulain.
Les jeunes poulains sont faciles à elïrayer.
— Synonymes : foireux, autrefois conchière.
Vous n'aurez en vostre armée que des foireux. (Parabole de
Cicquot, lo93.)
— Poltron conime un lièvre, ...comme la lune.
Le lâche recule, le poltron n'avance pas. Le premier ne se défend
i9
2(90 POM
pas, le sororid n'oso attaquer. Il iio faut jtas foiniiloi- sur la résîs-
taïu'o d'un làclio. ni sur le scroiirs (riiii jiollroii.
Polytechnique (l^colc). du .iircc y^o/i-zx, icrlim".
— L'école Polyl('(liiii(|iio est destinée à former des élèves irifré-
nicurs civils et iiiililaires, et des ofdcicrs de qiicifjiics services
spéciaux. Elle lut créée parla Convention, le 28 s(,'|il(;iid)re 17i)4,
sur la proposition de Mon^e et de Fonrcroy.
Elle ne recevait d'al)ord que des externes ; c'est à partir de 1804
qu'elle a été internée.
Les élèves de l'école se signalèrent, en 1814, à la défense de
Paris, et à la Révolution de 1830.
Licenciée par Louis XVIII, elle fut rétablie peu de temps après.
Polythéisme, du tirec jxjIus, t/iéos.
Religion qui admet la pluralité des dieux.
— On peut distinguer plusieurs espèces de polythéisme :
L'idolâtrie, ou adoration des idoles, qu'on appelle antliropomoi'-
•phisme, régna en Grèce et à Rome avant l'établissement du
christianisme.
Le sabéisme est le culte des astres et du feu; il était répandu
surtout en Arabie et en Clialdée.
Le fétichisme est Tadoration de tout ce qui frappe les sens, de
tout ce à quoi on attribue quelque puissance. C'est la forme de
religion la plus grossière, celle des sauvages.
— S'oppose à monothéisme.
Pommade, de l'itaUen pomnla.
Onguent fait jadis de pulpe de pomme et de graisse.
Pomme, du latin po/na, pris i)Our po/num. Provençal poume.
— Le moi pommn, dont le sens s"est restreint en français, était
chez les Romains le nom générique de tous les fruits, à pépins
ou à noyaux, comestibles.
Pomone était la déesse des vergers.
— Pomme pourrie gâte la compagnie. (Voy. fréquenter.')
11 y en a plus que de pommes en Normandie : c'est chose com-
mune.
— Pomme de discorde. (Voy. brandon.)
Aux noces de Tliétis, la Discorde, pour se venger de n'avoir pas
été conviée, appai'ut au milieu d'un nuage, et jeta dans l'assemblée
des dieux une pomme d'or, avec ces mots : « A la plus belle. »
VOM 291
Toutes les déesses avaient la prétention de l'obtenir; mais Vénns.
Minerve et JuiKtn concoururent seules, et Jupiter les envoya sur le
mont Ida pour y être jugées par le berger Paris. Gliacune d'elles
lui m une promesse pour obtenir son suffrage. Junon Itii promit le
pouvoir et la ricliesse : Minerve, le savoir et la vertu: Vénus, la
possession de la plus belle femme. Séduit par la beauté de Vénus,
et plus peut-être encore par sa promesse, Paris lui donna la pomme.
D'osprit co(|nct los déesses étaient,
D"allcr ainsi, sans eunnailre un jeune homme.
Lui (lécoiurir tout ce qu'elles portaient,
Kl lui montrer le c... pour une pomme.
(SArillAZlN.)
— Donner la pomme : accorder le i)rix.
— Il faut que la pomme soit un fruit maudit, puisqu'elle a perdu
nos premiers parents, et qu'elle porte le nom de « fruit défendu ».
Elle a allumé la guerre de Troie, et son nom latin vialum, signifie
en même temps malbeur et cbâtiment.
« ...Moi, amoureuse de ce jeune blondiu ! S'il n'y avait eu que
lui et moi dans le Paradis terrestre, la pomme restait sur le
l)ommier. »
— Pomme d'Adam. Cartilage en saillie du larynx, dans la partie
antérieure du cou. Une tradition niaise croit que c'est un morceau
du fruit défendu qui s'arrêta en cliemin.
— Pomme de terre : goujon pêcbé à coups de piocbe ; orange à
codions (Balzac).
Ce tubercule fut importé d'Amérique en Eurojjf^. vers looO, par
les Espagnols. En 1580, sous le règne d'Elisabetb, Walter Raleigb
l'introduisit en Angleterre, où elle ne fut employée comme aliment
qu'à la fin du xvii« siècle.
En France, son usage ne se propagea que cent ans plus tai-d,
à la lin du xviir siècle, par les soins de Turgot, ministre de
Louis XVI, et do Parmentier. C'est par la persévérance de ce
dernier, qu'elle fut adoptée comme aliment. Louis XVI orna sa
boutonnière des premières fleurs de solanum tuberosum. A la
suite de la première récolte, Parmentier donna un grand repas
dont la pomme de .terre fit tous les frais.
Pomper, boire; expression triviale, argot.
Lupold, avec son nez à pompette, conclud tous ses contes par vin.
(Contes d'Eutrapel, cité par L. Larcbey.)
Pompon, de 7)om/>e (?), ornement fastueux (?).
29â PON
Avoir In pompon : In snporioritr. Lonition om](nnit(V' nii Inripotrc^.
mililiiiro.
Poncif, autrefois poncif;, dérivé de poncer, \){)\\y i\ \\\ pierre
ponce.
Peut-être de jjun;jcrc, piquer (?).
Dessin piqué et décalqué, imitation banale et sans originalité.
— Le poncif, en littérature, est un vieil attirail de phrases toutes
faites, et en quelque sorte stéréotypées, à l'usage de certains
journaux. Telles sont: le char de l'Etat; l'horizon politique;
l'hydre de l'anarchie. (Yoy. s(y/c.)
— Faire poncif, en peinture, c'est produire une œuvre en
décalquant l'œuvre d'un autre.
Pondre, du lalin ponere, sous-entendu ova : mettre bas ses
œufs.
— Pondre sur ses œufs : accumuler ses revenus.
Pont, du latin pojis, pontem.
(Yoy. le pont aux ânes : la foire n'est pas sur le pont.)
Pontoise doit son nom à un pont sur la rivière d'Oise. Elle
s'appelait Brivisara, selon ï Itinéraire d'Antonin ; de iïr/ra, pont,
en celtique, et de Sara, Oise.
Brive-la-Gaillarde, Bruges, Cambridge, désignent aussi des lieux
situés au bord de rivières sur lesquelles on a construit un pont.
— Il a l'air de revenir de Pontoise : il semble tout ahuri.
La légende suivante, tirée d'un manuscrit du xiv« siècle, a donné
cours à cette locution.
Une princesse Marguerite avait près de Pontoise un château, où
elle recevait beaucoup de seigneurs de la cour. Elle lit construire
une de ces trappes mystérieuses appelées oubliettes. L'ouvrier qui
la construisait, ayant entendu la princesse dire qu' « elle l'y jette-
rait le premier, pour les essayer », émoussa le tranchant des
rasoirs et des pointes d'acier qui tapissaient les murs, et plaça au
fond des matelas. Grâce à ces précautions, il ne se fit aucun mal
en tombant. Peu après, il fut suivi de plusieurs seigneurs que la
princesse voulait faire disparaître, pour s'emparer de leurs biens;
mais ils s'échappèrent tous par des souterrains connus de l'ouvrier,
et ils allèrent se plaindre au roi. La princesse Marguerite, qui se
trouvait alors auprès de son père, leur ayant demandé d'où ils
venaient : « Madame, répondirent-ils tout effarés, nous revenons
de Pontoise ! » (Yoy. étonner.)
POR 293
Population, du l)ns-latin pninilallo, (ia populus.
— J.Kiossiiis Maltliiis jiublia, on 1798, un Essai sur les popula-
fions. dnns lequel il conseille de prévenir l'excès de l'accroissenient
du Liciire liiiinaiu.
— La pojudalion tend à augmenter en proportion géométrique,
tandis que les produits du sol ne suivent dans leur accroissement
(jiic la progression ariliimélique. (Mayer.)
La population du globe est d'environ un milliard d'individus. Il
en meurt un à chaque seconde. (Gliazallon.)
Port, du latin portas.
Au ligure, arriver au port : réussir, atteindre le but.
Avec un pou d'effort.
On arrive toujours au port,
(Juaiul on sait conduire sa itarquo.
Ne saurai-je trouver \\n favoralite port
l'our me uiellrc à fajjri des leuipèles du sort?
(Racan, Bergeries, V, 1.)
PortC; du latin porta.
— 11 faut qu'une porte soit ouverte ou fermée : il faut prendre
un parti.
...A mat jaimn liinen.
(UuHACK.)
(Une porte aiuie à être close.)
— Les portes de l'enfer. Dans l'Évangile de saint Mathieu
(XYI, 18), Jésus dit à Pierre : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je
bâtirai mon église, et les portes de l'enfer ne prévaudront pas
contre elle. »
Dans cette phrase, porte est pris pour tribunal, pouvoir.
C'est une métonymie, la porte se disant pour le palais.
Porte est même employé pour ville, dans la Bible : Possidebit
semen tuum portas inimiroruin tuoruni. Ta postérité possédera
les villes de tes ennemis.
— La Sublime-Porte, ou Porte-Ottomane. Le khalife Mostadhem
avait fait enchâsser sur le seuil de la porte du palais de Bagdad un
morceau de la fameuse pierre noire de la Kaabali, envoyée par
Abraham.
— Thèbes à cent portos. Thèbes, ville de la Haute Egypte, à la
droite du Ml, célèbre dans l'antiquité par ses cent portes qu'a
chantées Homère (Iliade, I, 381). D'où le nom de Hécatompolis,
c'est-à-dire à cent pylônes, car la ville n'était pas fermée. Ce sont
des monuments élevés par plusieurs Louis XIY égyptiens, anté-
294 l'on
rieurs do i)liis do inillo ;ins ;"i Jésiis-Clirisf, qui ont roiiverl la |)laino
de Tlirhes do porlos Saiiit-Doiiis, [tour Iraiisiiietlro à la postérilc
le soiivoiiir do leurs Irioiiipliatiles dynasties.
Popte-voix, mol eoni|)Osé du vcrho porlo^ci de voix.
Iiislrunu3nl d'acousli(iuc destiné à faire entendre la voix au loin.
Un porte-voix d'un mètre de longueur porte le son à environ
oOO pas.
I.e porte-voix do marine, qui sort aux manœuvres dos bàliments,
se nomme le hmillnrd. Celui qui sert à transmettre la parole d'un
navire à l'autre, et qui s'allonge à volonté, comme une lunette,
porte le nom de gueulard.
On fait aujourd'hui, en caoutchouc, des tuyaux porto-voix, qui
transmettent la parole d'un étage à l'autre.
Porter, du latin portarc, provençal porlar.
— De là : portée, déporter, déportement, exporter, importer,
rapporter, etc.
— Se bien porter, se porter comme un charme : très bien.
On s'aborde avec réternelle interrogation : « Gomment vous
portez-vous? » et l'adieu est toujours: « Portez- vous bien!» le
souhait le plus vif de l'amitié, car la santé est le premier des biens,
et l'assaisonnement sans lequel la vie est insipide.
~ Se mal porter : être malade.
— Porter de l'eau à la rivière ; comme porter du i)ois à la forêt.
Les Anglais disent : porter du charbon à Newcastle.
— Porter quelqu'un à la cabre jnorte (Rabelais) ; c'est-à-dire sur
le dos comme une chèvre morte.
En Provence, les enfants aiment à être portés ainsi, à cabri/ne.
Portier, dérivé de porfe.
Synonymes : Cerbère, homme hargneux comme le chien des
enfers ; M. de la Loge ; M. du Cordon : Pipelet, nom emprunté aux
Ml/stères de Paris, d'Eugène Sue ; concierge ; suisse.
Portion, du latin porlio.
Partie d'un tout.
— Portion congrue : pension que faisait au desservant d'une
cure celui qui en était titulaire et qui en touchait le revenu. La
portion congrue n'était due qu'aux curés dont les revenus étaient
inférieurs à 300 livres.
Portrait, dérivé de l'ancien \erhQ portraire.
POT 293
Imatre iriiiie pcrsoniio. f.iite nii moyen do l'un dos arts du dessin.
Reprodiiiro tr;iil pour trail.
Poser, du l.iliu /if/KsfU'c.
Prondi'O ({{'<■ altitudes.
Il soiuhlo inu'DuiN soi-vii' d'ohjoclil' ;'i uu [)liotograplic.
Possible, du latin possibUem, qui peut se faire.
— Au [lossihle : beaucoup. Il est gentil au possible: très gentil.
SaiTa/.iu a dit. eu parlaul de Yalstein : artitîcieux au possiI)le.
L'KIrriicl est grand au possible.
(DKsroKTES, l'.saiime XIV.)
Poste, du latin posltn, placée.
— i.e service dos postes se faisait au moyen de courriers postés
de distance en dislanco.
— Employé dos postes : Iionime de lettres (ou aux lettres?).
— La poste restante est un lieu où aboutissent péle-niole l'amour,
la Iiotiso ol la fri[)onnerie.
Pot, origine incortaine, peut-être l'idée de boisson, palus s'y
retrou vo-t-olle l
— Pot-au-feu, pot-liouille : bœuf bouilli.
On appelait ;iutrefois « pot-pourri » un pot-au-feu composé de
bœuf, de mouton, de veau, de lard et de plusieurs sortes d'berbes
et de légumes.
« Pot-pourri » désigne un ouvrage composé d'éléments disparates.
— Pot de chambre, vase destiné aux plus vils usages.
— Synonymes : Bourdalou.
Carlos, par altération de « gare l'eau ! » cpii rappelle le passarès
des Provençaux.
Goguenot. baipiot-tinette, lati-ino portative dans l(>s campements.
Hippocrato. dont ranagramme est « pot à ch... ».
Porcelaine d'appai'lomont.
Thomas. On prétend que ce surnom donné au vase nocturne est
une allusion au Vide, T/io/nn, de l'hymne de Pâques. 11 semble
venir plut("»t de esfnmnr, dont il est l'exutoire ?
Mangera-t-il de riiorlje aux chiens, pour décharger son thomas ?
(Rabelais. V, 40.)
Les Anglais disent : aller voir la more Thomas.
— Pot-de-vin (rappelle pourboire).
On appelait ainsi une so'rte de droit payé par les fermiers aux
propriétaires des lei'rains.
296 POT
Aiijniii'd'liiii. c'est lin |)i-('S('iit doiim'' cii dcliors (riiii iii;ir(li(''. iiiic
gratilinilioii, (liiiis iiik^ liMiisMctioii. ;'i celui (]iii l';i fuil coiicliin^ :
sorte (le |»i'i\ du coiirUi^c, ([ni. ;i l'oi-iiiiiie, ;i |»ii elic une inesiire
do vin.
Los pots-de-vin sont |)iinis piir l;i loi. lorsqu'ils ont poiif Imt de
corrompre les n.aenis ou l'onclionn;iires piihlics.
Rabelais appelle un pot-de-viu or potable {{) : " Jay encorcs
quoique escu, nous le boyrons ; car c'est aumm jtoiabile. »
— Le pot de terre contre le pot de fer : la lutte du faillie contre
le fort.
Ce proverbe se trouve dans une fable d'Ésope et dans X Ecclésias-
tique (Xlil, 2) : Quid communicdbit carabus ad olkun^^ quando
enim se colliserint, confringelur. Quelle union peut-il y avoir
entre un pot de terre et un pot de fer ? S'ils viennent à se heurter,
le pot de terre sera brisé.
— Découvrir le pot aux roses ; ou plutôt le pot au rose, parce
que les femmes qui se fardent, cachent avec soin le pot qui contient
ce à quoi elles empruntent leur fausse lieauté.
Découvrir le pot au rose, c'est découvrir un secret, malgré les
précautions prises pour le tenir caché.
Il se prend toujours en mauvaise part, comme « éventer la
mèche ».
— 11 n'est si vilain pot qui ne trouve son couvercle.
En provençal : Chaque toupin trouve sa cabucèle.
Ce proverbe, un peu trivial, signifie qu'il n'est pas de tille, tant
laide soit-elle, qui ne trouve, comme la plus jolie, à se marier.
— La fortune du pot, ou du pauvre (Inirlesqiie).
M. Decbambre écrivit au marquis de Y... : « Je vous prie de
vouloir bien venir partager mon petit diuer. et d'accepter sans
façon la fortune du pot... Dochamiire. »
— La poule au pot. Quelque temps avant sa mort, Henri IV disait
à Sully : « Si Dieu me fait la grâce de vivre encore deux ans, je
veux qu'il n'y ait pas un paysan dans mon royaume qui ne mette,
le dimanche, une poule dans son pot. »
A l'avènement de Louis XYI, un marchand de Paris prit pour
enseigne : La Poule au pot, et ces vers :
Eafia la poule au pot sera donc bientôt mise !
On doit du moins le présumer,
Car, depuis deux cents ans qu'on vous l'avait promise.
On n'a cessé de la plumer.
POT 297
Nép. Lcniorcior, dans le poème des Ar/cf; fraiirnis. se sert dune
périphrase singulière pour exprimer Pidée de poule au [)0[ :
....le veux...
Non les payer on mois frixolcs.
Mais leur dDiincr à prix (lobules.
L'épouse (lu eliaiilre du jour.
La îiK'illi'iirc (inliiiipif rsl (■clic iW la [xtiilc au pol : c'esl rahondauce
et le lias prix des p(jmmes de terre; cest la vie facile et heureuse,
sans excès de travail, sans misère, excepté pour les paresseux.
— Sourd comme un pot. Un pot n'a pas d'oreilles et c'est en cela
qu'il dilVère d'unc^ écuelle.
— Tourner autour du pot : hésiter.
Eli ! faiil-il laiil tourner autour du pol ?
^l^^cl^^;, Plaideurs.)
Potée, dérivé de //o/.
Le contenu d'un pot ; une potée d'eau.
Au figuré, une grande quantité : une potée d'enfants.
— Éveillé comme une potée de souris. M""^ de Sévigné écrit :
« une i)ortée de souris ».
Potence, du latin potenlia. puissance, autorité : puis appui, par
comparaison avec une béquille.
— Au Moyen-Age, le droit de dresser potence était une marque
de souveraineté. La potence était réservée aux manants et aux
bourgeois. C'est pourquoi Rabelais distingue plaisamment « gil)ets »
et « potences », et destine celles-ci aux grands larrons, jioientes.
— La pendaison fut abolie eu France, le 21 janvier 17i)0.
— Il y a\ait des potences en permanence, à Paris, à la Grève,
aux Halles, à la Croix du Traboir, rue de l'Arbre-Scc, qui doit son
nom à cet usage sinistre.
Le gibet, ou fourches patibulaires, ne servait qu'à accrocher le
corps des suppliciés, qui y restaient exposés. Celui de Paris était à
Montfaucon.
On pendait aussi aux arbres des grands chemins et des forêts.
Rabelais ((II, 51) y fait allusion dans ce passage : « Fenabrègue...
le dernier eut nom Ulmeau, et feut grand chirurgien en son
temps. » Fenabrègue, en Languedoc, est le nom de l'alisier, où l'on
pendait ordinairement les Vaiidois, sous Fran(;ois T''". Ce nom veut
dire « abrège- tin » .
— Gibier de potence.
Furcifer, pabnlnm Acherontis.
(l'i.ALTE.)
298 POT
!>(> mot « s;icri|i;iiil » sciiihlr cii ('Iri' une Iriidiiilioii.
— l'^vilcr l;i |)(»l('iic(': fnirc loi'l ;iii\ corhcMiix.
SynoiiNiiK'S : l)(''(iiiill(' ( Vitl(»i(|) ; ;illiisioii ;"i lit for'ine de la potcnco,
qui rcssciiihlc ;'i iiih' l)é(|iiillc jji^^aiitcsquo. Un l'appelle aussi, pour
la jnéine cause, la « jamix' eu Tair ».
Potin, néologisme, s'emploie familièreuieut. Oriuiue incertaine.
— Faire des potins: des commérages.
Lq, potin est la matière employée pour l'aire la vaisselle, dans les
pays où l'argile manque. C'est un alliage de cuivre et d'étain, et
quelquefois de plomb.
Faire des potins, dans le sens de bavarder, ce serait iinilcr les
commères, qui, lorsqu'elles se réunissent à la fontaine pour nettoyer
leur vaisselle, font aller leur langue plus vite que le frottoir.
Potiron, du grec polerio/i. vase à boire (?).
Sorte de gros cbampignon, d'où l'expression : avancer comme
potiron (Brantôme), avancer rapidement.
Sorte de grosse citrouille, qui a servi souvent de terme de
comparaison à une obésité excessive.
Potron-Jaqiiet ou Potron-niinet, origine incertaine.
— Se lever dès Potron-minet... : au petit jour, de grand matin;
c'est-à-dire comme le petit chat, qui dislingue très bien les objets
dans l'obscurité et se lève avant le jour pour prendre les souris.
Potron serait le diminutif de 7Jo/?r, ou. poutre, petit des animaux.
Il avançait pays, monté sur un cricjuct,
Se levait tous les jours dès \o polron-jaqiiet.
[l'orme de Caftoiic/ir, VU. riT.t
En Normandie, on dit : se lever dès le paître au jacquet (écureuil) ;
c'est-à-dire au moment où l'écureuil va chercher sa nourriture.
On dit aussi : se lever dès les chats, parce que le chat est réputé
le plus matineux des quadrupèdes, ou : dès que les chats sont
chaussés. (Dictionnaire de Trévoux.)
— Il y a aussi la variante patron : parce que l'o'il du patron doit
toujours être ouvert.
— On dit à l'inverse : se coucher avec les poules ; se lever au
desjucher. (Rabelais III, il.)
— Rabelais (lY, 9) se sert de l'expression : à l'aube des mouches,
que plusieurs commentateurs ont traduite par: le soir, sur le soir,
sans donner d'explication. Mais, sans le secours des savants, il est
ror 299
f;iciIo de reconiKiitro qiio l'aulio des moiirlie?, <ilha dei tofrnii Aos,
Italiens, est midi, lliem-e où le soleil est dans toute sa force, où les
mouches sont le plus importunes, ...demandez plut(U aux ânes.
Huant au soir, l'heure du crépuscule, il est dcsi.uné pai' la loiiition :
entre chien et loup, i Jolianneau.)
Pou, anciennement /jo////, et plus ancifMiueiiienl /H-oni/ ; û'oii
les dérivés ponillcr, pouilleux Du latin jH-dirulus. d'oii />c(li-
ciilairc.
Un autre déri\é de y>o?/ est fripouille nIcux mot qui siiiniliait
misérahle. qui iiobe les poux.
Chercher pouille, chanter pouille : chercher querelle, dire des
injures.
— Insecte parasite qui s'attache au coi-[»s et aux cheveux de
l'homme, et au.x poils des animaux.
— Synonymes: garde du corps.
Grenadier, gros pou : l'élite de la garnison.
xMousquetaire gris.
Puce de meunier, puce meunière (Rabelais). Le même auteur les
appelle aussi éperviers de Monlaigud, 37), par allusion au collège
de pouillerie de Montaigu qui planait sur une hauteur, comme les
éperviers. Erasme devint malade à ce collège, par suite du mauvais
régime qu'on y suivait.
— Pou atl'amé : gueux, avide de gain.
Il écorcherait un pou pour en avoir la peau : il est très avare.
Pouce, anciennement ;>o/(:-<', qui est provençal: du latin pollex,
j)ollicem.
— Mettre les quatre doigts et le pouce : la main entière.
— Mettre les pouces : céder, s'avouer vaincu. Les anciens
disaient : l)i<jHum lollcrc, manns dare. Le gladiateur vaincu
avouait sa défaite par ce signe. Un geste fait avec le pouce indiquait
l'approbation.
Pollice utroquc laudare.
(IIonAr.E.)
Louer sans restriction, comme nous disons applaudir des deux
mains.
— Jouer du pouce : compter de l'argent.
— Malade du pouce: avare. Allusion au geste qui consiste à
frotter le pouce sur l'index.
— Manger sur le pouce: sans se mettre à table, à la hâte, en
300 POU
tciiiint ;'i l.'i iiKiiii le p.iiii sur l('(|iicl repose un morceau de \iaii(le...
Sur le poiire esl |ioiir sous le ponce.
— S'en mordri; les pouces : s'en ropenlir.
L'nfjuem denlibits connimjnl . (Pélrouc.)
QiijiikI un f;iit mal ro qiiOn rloil fairo,
On s'en mord les ponces, dil-oii ;
C'est du péclié du prr'mier iière
Que dérive ce vieux dicliMi ;
Car le gourmand avec sa iiommo
Se mordit les pouces aussi,
El, de père en fils, voilà comme
Nous a\ons ce ddigt raccourci.
— Pouce d'eau. C'est la ciiianlité deau qui s'écoule par un cylin-
dre de deux centimètres de dianu''tre et de dix-sept cenliinètres de
longueur, le niveau de l'eau du réservoir étant maintenu à trois
centimètres au-dessus de rorilîce. Cette quantité est de vingt mètres
cultes en vingt-quatre heures.
Poudre, du latin pi/fri.^. pu/rerein.
Particules très ténues de matière, que le vent soulève.
— Poudre de succession : poison.
L'infâme science de la Voisin et de la marquise de Brinvilliers,
avait fait de nombreux élèves, et les poisons se vendaient elïronté-
ment dans toute la France, sons le nom de « poudre de succession ».
La violence de ces poisons et l'ignorance des médecins du temps
en toxicologie, assuraient aux coupables la réussite et l'impunité.
La Revoie, nommé lieutenant de police, fit condamner la Voisin et
ses complices à être brûlés eu place de Grève, et Tédit que rendit
le roi, la même année, contre les empoisonueurs, fit cesser le mal
qui avait répandu la terreur dans le pays.
...Vous prenez une prise de tabac, ...et puis. Dieu vous bénisse !
l'atïaire est faite... Il y eu a qui vous empoisonnent dans un
bouillon : cela s'appelle donner un coup de pistolet dans un bouillon.
{La Marquise de Brinvilliers, drame.)
La poudre de succession était le sublimé corrosif : ou deuto-
clilorure de mercure, sel blanc, solublc dans l'eau, extrêmement
vénéneux. Quelques centigrammes introduits dans l'estomac suffi-
sent pour donner la mort. Le blanc dceuf est l'antidote le plus
efficace pour le combattre.
— L'absorption cutanée ne se produit qu'à la paume des mains
et à la plante des pieds. C'est pour cela que Catherine de Médicis,
POU 301
aulôo du Florentin Roui, avnit clioisi les ponts et les lins pour
se déliai'rnsserde ses ennemis.
Vers 1870, plusieurs empoisonnements furent causés par des bas
de coton teints en ronce avec des sels de mercure.
— Le poison est l'arme de l'assassin en chambre et qui n'a pas
riiabitude des grandes routes. La balle et le couteau sont de
détestables complices : la victime crie, les blessures sont apparentes.
.Mais le poison, quelle ai'iiie discrète! Une pincée de poudre entre
deux sourires et (Hi n'a [)iiis ([\i'i\ prévenir le notaire. On risque
bien de renconti'er l'autopsie et les cbiuiistes, plus habiles que les
anciens augures à cousidter les entrailles des victimes : mais on
a tant de chances d'impunité!
La pubUcité donnée aux débats des crimes d'empoisonnement est
malsaine, et laisse trop d'héritiers rêveurs.
— Il n'a pas inventé la poudre : il est un peu niais.
On dit de même : Ou a tiré un beau feu d'artifice le jour de sa
naissance.
Ce proverbe prouve quelle importance on a attachée à l'invention
de la poudre à canon, atlrihuée longtemps à Roger Racou, moine
anglais mort en 1290. Avant lui, dès le viii^ siècle, Marcus Grœcus
avait parlé de la poudre composée de soufre, de charbon et de
salpêtre.
— Jeter de la poudre aux yeux : Pu/rerem ocit/is e/J'andcre.
— Vif comme la poudre : c'est un salpêtre : il s'enllamme
aisément.
Pouffer, onomatopée: comme bouffer...
PoutTer de rire. On dit aussi : s'esclafïer de rire.
Poule, anciennement polc, du latin puUa, féminin de pu//us,
petit d'un animal. A remplacé géline.
— C'est le fils de la poule hlanchc : un homme heureux.
Suétone raconte, au commencement de la Vie de Galba, qu'une
poule blanclie tomba des serres d'un aigle aux pieds de Livie,
femme d'Auguste. Ce présage fut considéré comme heui'eux, et les
poussins qu'elle donna furent révérés comme les poulets sacrés et
élevés avec soin dans une ferme qu'on nomma villa ad fjaUlnas.
Juvénal dit : « Penses-tu, homme simple, qu'on doive t'excepler
de la loi commune, parce que tu es le (ils de la poule blanche, et
nous autres de vils poussins?... »
(Yoy. poule au pot ; pliuner la poule.)
302 POU
— Poiilf iii()iiill('(' : pci'soiinc i)iisill;iiiiMiG.
— Tuer l:i poule ;iii\ œufs d'or.
Ksnpc nicoiiU; que le Imp ;ivi(lo possesseur de cette poule, non
fontoul do \'(p\\\ dor qu'elle pondait tous les jours, la tua, pour
recueillir le lr(''S()r (pi'il croyait reul'ei'iué dans ses entrailles. Il se
l)i'i\a ainsi d(! son l'evenu.
L'avarice \k'V{\ loiil on MHilanl luiil {^ajinor.
(La Fontaink.)
— Les Latins disaient : « Il faut tondre la brebis et non
l'écorcber. » C'est un conseil dbuinanité, en même temps qu'un
bon principe d'économie domestique.
— En 1814, l'école Polytechnique demanda à combattre. Napoléon
refusa, en disant qu'« il n'en était pas encore réduit à tuer sa poide
aux œufs d'or ».
Poulet, diminutif du précédent.
Petit de la poule et du coq.
— Lettre amoureuse, billet doux. Ainsi nommé parce que, d'après
Furetière, il imite par ses plis, les ailes d'un poulet.
Peut-être parce que le papier du format sur lequel s'écrivent ces
billets est appelé />o^//e/ •''
Cette expi'ession était déjà en usage au temps de Henri IV.
Lavarenne. qui avait été cuisinier de Catberine. sœur de Henri IV,
étant passé au service du roi, se rendit nécessaire en lui ménageant
des plaisirs amoureux. Henri le combla de biens. Son ancienne
maîtresse l'ayant trouvé dans celte nouvelle situation, lui dit :
« Lavarenne, tu as bien plus gagné à porter les poulets de mon
frère, qu'à piquer les miens. »
— Mercier (Tableau de Pains, cb. 296) dit : « C'était autrefois,
en Italie, les vendeurs de poulets qui portaient les billets doux aux
femmes ; ils glissaient le billet sous l'aile du plus gros, et la dame
avertie ne manquait pas de le prendre. Ce manège ayant été
découvert, le premier messager d'amour qui fut pris fut puni de
l'estrapade, avec des poulets vivants attachés aux pieds. Depuis ce
temps, poulet est synonyme de billet doux. Les commis ambulants
de la petite poste en portent et reportent sans cesse : mais une
cire fragile et respectée tient sous le voile ces secrets amoureux : le
mari prudent n'ouvre jamais les billets adressés à sa femme. »
Pouls, du latin pulsus : d'où aussi : pulsation, pousser.
Mouvement imprimé à tout le système artériel, par l'ondée de
POU 3or^
san.u' que rli.iqiK» coiitrnclioii du cœur f;iil priirti-cr dans les
artiM'és.
— Le pouls bal ordiiiairciiiciit (U) ;i 70 fois par luiiiiiU'.
— Se tàtei' If pouls : ('(insiiKcr son courage.
Je smiilc ma iini-lcc cl me tâte lo pouls.
(Hkc.mjcii, Satire F.)
Autrefois, certains médecins jugeaient des maladies par Tinspec-
tion des urines, et Ton Iroiive dans Uabelais (liv. III, cli. 33) :
« .le vouldroye liicMi (pie les chevaliers de Malle me résistassent,
piMii' voir leur urine. " On dii'ail aujourd'hui : « Je voudrais bien
leui- làter le pouls, pour inelti'e leur courage à l'épreuve, voir ce
ipiils ont dans le venti'e. »
Poupée, du lalin piijxi. [lelile lille.
Petite ligure en matière plastique, imitant la forme humaine.
Kn latin, le petit de l'homuic s'appelle ym/^^6% onpupus.
Martial appelle j)iij)n une petite tille. On appelait jadis une jeune
fdlc pufa, pule ou <j(irce. Ce sont les féminins de pi/tus et de f/ars.
Nous disons encore poupon, pour un petit enfant, et pupille,
l'enfant mineur.
Peut-être vient-il de Poppce, femme de Néron, qui prenait un
soin excessif de ses charmes et de sa parure. Elle avait dans ses
écuries des mules ferrées d'or, et cinq cents ânesses, qui fournis-
saient du lait pour la baignoire où elle allait chercher la fraîcheur
du teint. (Voy. jnnr tonnelle.')
Poupon, pouioi, noms d'amitié donnés aux petits enfants.
Suétone (Vie de Califjula, 13) dit : Sidus et pulluin et puj/titn
et alumnum nppellantium.
(Voy. Horace, Salires I, III, 4o.)
Pour, du latin jiro ; anciennement yjor, pur.
Se retrouve avec sa forme latine dans les SermenH de Siraa-
bourf).
Préposition qui marque le motif, la destination, l'échange.
— Pour ou contre. On fait un grand éloge du mot de César, au
début de la guerre civile : « Qui n'est pas contre moi est pour moi. »
On a blfimé le mot tout contraire de Pompée : « Qui n'est pas pour
moi est contre moi. »
Pourceau, anciennement porcel, du latin porcellus, diminutif
de porcu.s.
a04 Vi)V
Synonymes : porc, coclioii, roiii|i;i.uiion de sainl Aiiloinc.
— Jeter (les perles devant les pourceaux. (Voy. perle.)
■ — PoiiiToaii (ri''-|iiriir('. (Voy.)
Pourfendeur, de pourfciulrc^ fendre roinplrlenient.
IroniqiKMiicnl : laiiiaron.
— Godefroy de liniiilloM. clicl' de la preuiirre crriisade, était, dit
Gnillaiinie de Tours, d'une force telle, qu'au siège d'Antioche, il
poiirfendil un cavalier turc depuis la tète jusqu'à la selle, et blessa
même le dos du clunal.
Pourpoint (^à hn'de) : de très près, à bout portant.
Et la tire à brùle-pourpuint
D'un petit arc qu'on no voit point.
(Si-.ARRON, Virgile travesti.)
Pourrières. Ce sont les armes de Fourrières, où trois hommes
portent une tuile.
L'an 107 avant Jésus-Christ, Marins remporta la célèbre victoire
près d'Aix-en-Provence, sur les Cimbro-Teutons. 11 y eut, dit Tite-
Live, deux cent mille morts, qui furent abandonnés sans sépulture
et pourrirent sur ces champs, appelés dès lors campi pnlruli,
champs de la pourriture, d'où l'on a fait Poia^riêres.
L'armée romaine avait élevé sur le champ de bataille, à Marius,
un monument qui le représentait debout sur un bouclier porté par
ses soldats. Le bourg de Pourrières avait mis ce sujet dans ses
armoiries.
Plus tard, la statue de Marius ayant été détruite, le peuple, en
faisant allusion à la forme en tuile du bouclier romain, mit en
circulation le proverbe, pour désigner les gens qui font de grands
elTorts poiir une petite cause.
»ir, du bas-latin polere, pour posse.
— Vouloir, c'est pouvoir. (Saint Paul.) (Voy. vouloir.)
— ,\o)i possmnus : Cela m'est impossible. Parole de saint Pierre
au prince des prêtres. Exprime un refus péremptoire, sur lequel
on ne saurait revenir.
— Il y a dans l'ordre physique des impossibilités exprimées par
de nombreux proverbes :
On ne peut courir deux lièvres à la fois.
Sonner et aller à la procession.
Faire d'une buse un épervier.
On ne peut pendre plus haut que la potence. ]
CHK 305
(Jiii ut' peut c'OiiiiiR' il M'iit, \ciiiUe l'Oiiiiue il peut.
Qui ne peut lialopci-, qu'il trotte.
— On accom|i;igne parfois pouroir de peitf-rh-c : « Cette entre-
prise pourra pout-tHre réussir... »
Ces façons de parler sont des pléonasmes à éviter, car il est
certain que ce qui peut être, se pourra.
— Kii politique, le pouvoir, ou la puissance publique, est l'auto-
rité chargée de gouverner la société. On distingue :' le pouvoir
législatif, chargé de faire les lois: le pouvoir exécutif, ciiargé de
les faire exécuter : le pouvoir judiciaire, chargé de poursuivre et
de punir les infractions à la loi.
— Le pouvoir discrétionnaire est la faculté laissée au juge, et
spécialement à un président de cour d'assises, d'agir, dans certains
cas, selon sa volonté particulière.
C'est aussi le j)ouvoir attribué, en temps de révolution, à un
homme investi de l'autorité dictatoriale.
— Pouvoir tenq)orel : le bon pasteur aimant ses hrcbis... comme
côtelettes.
Pratique, du ^^vox praldikr. S'oppose à la théorie.
M. liaussmann est un homme pratique, très pratique, un homme
nfiniment pratique, tro[) [)ratique même (1869).
Pré, du latin prtitum, provençal prat : d'où Pradet (petit pré),
nom d'un village très fertile des environs de Toulon.
— Aller sur le pré : se battre en duel.
Dés IIGO, les écoliers, appelés aussi clercs au Moyen-Age, allaient
se récréer dans un pré voisin de l'abbaye Sain!-Germain-des-Prés,
qui prit de là le nom de Pré-aux-Glercs. Ce lieu lut souvent témoin
de rixes et de comljats entre les écoliers et les gens de l'abbaye.
Il devint ensuite le rendez-vous pour les duels, et la locution : aller
sur le pré, prit naissance.
Le Pré-aux-Clercs a donné son nom à l'église Saint-Germain-des-
Prés, et, par suite, l'église a transmis le sien au quartier Saint-
Germain, qui, autrefois, n'était qu'un faubourg.
— A la Sainl-Barnabé (Il juin), la faux au pré.
Préalable, de prœ, et du verbe aller.
Ce qui doit être fait, examiné, avant de passer outre.
— La question préalable. Demander la question préalable, c'est
vouloir qu'on supprime tout débat sur une proposition.
20
30G PRK
Précaire, du laliii /trt'roi'ii/s, roiiiino jtrière.
Soumis au bon plaisir d'un aulj'o.
Se dit de l'usage de cerlaiiis droits, de la possession de certaines
choses, qui ne reposent que sur une concession révocable par celui
qui la faite.
Précaution, dulalin ])ra\ cauium.
Précaution vaut mieux (pie repentir. (Proverbe hollandais.)
Prêcher, du lalin ]>rœdicare : d'où aussi prédicatenr.
— Prêcher dans le désert : perdre son temps, ses efforts.
Allusion à saint Jean-Baptiste qui prêciiait dans le désert : Vox
clainaîilis in deser/o.
La voix de la sagesse n'est pas écoutée.
Il perd son alléluia, qui à cul-de-bœuf le chante.
— Prêcher un converti.
Précieux, Précieuses, du latin preliosi/s. àa prelium, prix.
Nom inventé par les assidus de l'hôtel de Uaml)ouillet. (}ui signi-
tiait que toute personne admise dans la chambre dite « du Génie »,
où se faisaient les lectures, devenait précieuse au monde.
L'hôtel de Rambouillet, où se réunissaient les Précieuses, était
situé dans la rue Saint-Thomas-du-Louvre, qui a été démolie vers
1850, pour l'aclièveraent du Louvre.
Obligeante, civile et surtout Précieuse,
Quel serait le mortel tiui ne l'aimerait pas ?
(Sec;rais.)
— Le nom de Précieuses s'appliquait, au wii*^ siècle, à des
femmes d'un mérite réel, qui entreprirent la réforme des mœurs et
du langage, et qui, en voulant éviter la grossièreté, tombèrent
dans la recherche et l'affectation du liel esprit.
La première époque des Précieuses a été très favorable au lan-
gage. C'est l'époque de la marquise de Rambouillet et de sa tille
Julie d'Augenues.
Catherine de Yivonne, née en J588, fut mariée, à l'âge de
12 ans, à Charles d'Angennes, marquis de Rambouillet. A 20 ans,
ennuyée des fadeurs de la cour, elle abandonna le Louvre, et
commença à réunir chez elle une société élégante, qui donna plus
lard le ton à la cour et à la ville. Les réunions avaient lieu sous
la présidence de la marquise, qui avait pris le nom à'Arthénice,
anagramme de Catherine.
Parmi les hôtes assidus des réunions figuraient : la princesse de
v\\\: no7
Coiulé et le ,m';iii(l Coiidi'. son lils : l;i diicliessc de Longiieville : lo
duc de L;i Uocliefoiiciiiild. rniileiir des Maximes : M""-' de Lafayelte :
M"'^' de Srudéry : une lioiiriienisc fort recherchée par son esjjrit,
M""' (lormiel : hi marquise de Sahlé ; M"« Angélique Paulet ; M"'^ de
Sé\igué.
Kntre autres écrivains, il faut citer : Balzac, Malherhe, Racan,
Voiture et Vauuelas. Seiii-ais. Hois-lloiiert, Chapelain, Sarrazin,
(I. Patru. Kléchier. Hoirou. Scarron. Ménage, Desniarets : le grand
(lorueille y \iiil (juehpiel'ois faire lecture de ses tragédies.
(]es l'éuuious (le gens (res|>ril et de personnes distinguées eurent
une i.'cande inlliuMice sur les uiieui'S, et contribuèrent beaucoup à
polir la languiî et à fornu'r le goùl.
Ce fut là ([ue Bossuet. à Tàge de Ki ans, prononça un discours
après iiiiuuil : aussi Voiture disait-il qu' « il n'avait jamais entendu
prêcher ni si tôt ni si tard >.
Ce sont les Précieuses qui ont l'éhahilité dans leur langage et
dans leur style la pureté et l'élégance, et qui ont enrichi la langue
d'une foule de locutions aussi expressives que pittores(pu'S. Cette
recherche ayant dégénéré i)lus tard en affectation ridicule, le litre
de Pfc'r/cNsc fut pris en iiiau\aise part, et devint une épithète
satirique.
Les réunions de l'hôtel de Uambouillet cessèrent à l'époque de
la Fronde, en IGoO. Alors commença la seconde époque de la
IM'éciosilé, sous le patronage de M"'' de Scudéry. Elle recevait le
samedi. Déjà célèbre par ses romans, et désignée sous le nom
de Saplio, ses hôtes assidus étaient Pélisson, Guénégaud, Godeau.
Cette société exagéra jusqu'au ridicule le style affecté et précieux,
dont Molièi'e lit justice dans les l^récicuses ridicules flGGl).
C'est par cette société que fut imaginée la carte du Tendre.
i^Voy. (jiiirlande de Julie, bas-bleu.)
— Molière a immortalisé les Précieuses par le ridicule. Somme
tonte, nous leur devons plus de délicatesse dans les sentinuMits et
plus d'atticismc dans le langage.
Ce sont les Précieuses qui ont dit pour la première fois : un lin
sourire, une belle llamme, etc.
Somaize a publié, en IGGO, le Grand Diclionnaire des Pré-
cieuses, en deux volumes.
Voici un extrait du (îrand Diclionnaire des Précieuses, ou le
Langage des ruelles (Paris, Jean Ribou, IGGS ; bibliothèque Sainte-
Geneviève) :
308 i>RË
Aiinor : nvoir iiii Iciulre.
Alin;macli : le inéinoiro de l'avfïiiir.
Amour : l'amour a lerriblcmenl défri(li('' Jiioii cuMir.
Amour facile ou rigoureux : vertu coiiimode, vertu sévère.
Asseyez-vous : contentez, s'il nous |)l;iil, rciiNic qu"a ce siè.tre de
vous embrasser.
Balai : rinstniiiiciil de la [tropreté.
Bien (avoir peu de) : être de la petite portion.
Cerveau : le sublime.
Cbaise-percée : la soucoui)e inférieure.
Chandelle : ardent ; supplément de soleil.
Chapelet : chaiue spirituelle.
Cheminée : l'empire de Vulcain.
Chemise : la compagne perpétuelle des morts et des vivants.
Chenets : les bras de Vulcain.
Cheveux : la petite oie de la tète.
Colère (être en) : avoir du fier contre quelqu'un.
Comète : l'interprète du couri'oux des dieux.
Commun : du dernier I)ourgeois.
Concevoir mal les choses : avoir l'intelligence épaisse.
Dents : rameul)lemeut de la bouche.
Eau : l'élément liquide. Un verre d'eau : un bain intérieur.
Écran : la contenance utile des dames quand elles sont devant
l'élément combustible.
Ennuyer (s') : être dans le jeûne du divertissement.
Estimé (être) : faire ligure dans le monde.
Éventail : zéphir.
Femmes : l'agrément des sociétés, la politesse du langage, et les
divinités visibles.
Fenêtre : la porte du jour.
Feu : l'élément combustible.
Galante (être) : être de la petite vertu.
Habillée (bien) : sous les armes.
Joues : les trônes de la pudeur.
Jupes de dessus : !•' la modeste, 2" la friponne.
Jupe de dessous : la secrète.
Laide : belle à faire peur.
Langue : l'interprète de l'àme.
Laquais : nécessaire, fidèle.
Larmes : les filles de la douleur et de la joie.
!»U1-: :500
F.nlrinos : l;i liirnrno dos antipodes.
La\(Miii'iil : lioiiilloii des (](Mi\ SdMirs.
J^rvrcs (l)ollos) : lovi-cs liicn ourlées.
Lit : l('mi)iro de Moi'pliée.
Livivs : les iiiaiires iniiets.
Ijiiie : le llaiiilicaii du silence et de la iiiiil.
.Main (^helkô : belle nioiivantc.
.Maria.iic : l'amour peignis.
Marier (se) : donner dans l'amonr |)ei'i)iis.
Mii'oir : conseiller des Grâces.
.Miisi(iiie : le paradis des oreilles.
Xtv. : les écluses dn cerveau.
Nuit : la déesse des ombres ; la mère du silence.
O.anons : les dieux des Egyptiens.
Oreilles : les portes de l'entendement.
Peigne : dédale.
Peintre : poète muet.
Poète : nourrisson des Muses.
Porteurs de cbaises : mulets baptisés.
Promenade publique : l'empire des œillades.
Rire : perdre son sérieux.
Seins : les coussinets d'amour.
Sentir : attacher la réilexiou de son odorat.
Soufflet : la petite maison d'Eole.
Soupirs : les enfants de l'air.
Yeux : les mii'oirs de l'âme.
Zépbir : l'amant des fleurs.
Précipice, du latin pr<i'cijniiiiin . de pra-, capuf, tète en
avant.
— On tombe dans un précipice, on est englouti dans un goulfre^
on se ])erd dans l'abîme.
Préconiser, du \)',\?,-\-à\\\\ prœconisai'e, de prœco, béraut.
Proclamer les mérites, les louanges ; louer beaucoup.
— Préconiser un évèque : déclarer en consistoire qu'il a les
qualités i-eqiiises.
Préface, du lalin /u-d'/ufin.
11 est remplacé quebinefois par : prologue, discours préliminaire,
prolégomènes.
— Point de préface ! c'est-â-dire venons au fait !
Préjugé, pm-liciiM' du mm'Iic /)i-<'Jiif/t'r : Inlin prn'Ji((lii:nre,
juger d'il v;i liée.
— Lo pi'éjiigé est l'crronr du \iMg;iim. (VoKiiir'c.)
Prélasser (sc), diM'né ii'i-é.uulicr du pm-la/iis, pivint.
Au li,nui-é : Icnioigncr par se? nmnirrcs qu'on se cruit furt
au-dessus des autres ; se donner des aii-s de prrlal.
Premier, du latin pri marias : comme prlinab'c.
A la niéuie famille appartiennent : prime (de primo ahord),
primeur, primauté, prinu'.r, prince, prémices.
— Les premiers seront les derniers, et les derniers s»;ront les
premiers. (Saint Mathieu, XIX, 30.)
Qui premier engrène, premier doit moudre.
Les premiers vont devant.
Prendre, du latin prenderr. [)ù\\v prohcmlere.
Le participe est pris, cjui a donné y>/7".st'. A ces mots se rattachent :
apprendre, appréhender, appréhension, apprenti ; comprendre, se
méprendre, surprendre, etc.
— Le mot prendre est employé dans des acceptions très diverses :
Je viens de prendre l'avenue des Champs-Elysées, et j'ai pris
grand plaisir à cette promenade ; mais je vais rentrer pour prendre
un air de feu de peur de prendre un rhume. Et vous ! quel parti
prenez-vous? — Mais, vous lo voyez, en vous écoutant je prends
patience...
— Prendre la mouche, la chèvre, sont des latinismes : ont le
sens de induere, revêtir le caractère de...
— Prendre son hien où on le trouve. Molière avait coutume de
répéter cette locution, et la mettait en pratique.
Un jour, Rossini écoutait un mauvais opéra. Il saisit au passage
une idée charmaute ; il prend son crayon, et la note en gromme-
lant : l'J troppo bono per queste coglione! C'est trop bon pour...
cet imbécile.
— Ce qui est hou à prendre est bon à garder.
Or, ce qui est bon à prendre, n'est pas bon à rendre. 'Moyen de
parvenir, XXYI.)
Il faut prendre le temps comme il vient, les gens pour ce qu'ils
sont, et l'argent pour ce qu'il vaut.
Les grands prennent, les petits sont pris.
Quand on prend du galon (voy.\ on n'en saurait trop prendre.
Trop prendre fait pendre.
PRE 311
Prépositicn, du Intin pm\ pn^iliix (placé devant).
.M(i| iii\;iri;ilil(' ([iii. plncr dtMMiit im nom, un [(roiioiii, uno propo-
sition inlinilivr. les lie ;'i nii tci'nic précédent, en marquant un
rapport déterminé :
.1, du latin «il.
Aiiprcs. (Voy. jirh.)
Aranf. de ah nn(e. Ânte avait donné alns ; d'où oins né, aîné,
opposé à jniiné i'pni.<<-né;. Aranf a donné anpararanf, devant.
Arer, de (f/j>/f/ 'et /lor) .- ;i été aussi arcrques.
Chez, de ca>fa : comme /rc de Icttiis.
Contre, de contra.
Dans, de f/e infi/s. (pii a donné ins dans la lan.uue d'oc. De là
de(/ans.
De, du latin de.
Depuis, de de et post. (Voy. puis.)
Dès, peut-être de de ex ^^
Désormais, de dès, ores, mais : de ex Jiora magis.
Durant, pendant, nonobstant , ne sont que des participes
présents pris absolument. Pendant le jour, durant la nuit, équi-
valent à : le jour pendant, la nuit durant.
En, du latin in: se pi'ononce an, en français, tandis qu'en
provençal il se pi^ononcc in.
Entre, dn latin intra.
Hors, hormis, du latin /'o/'/.s', anciennement /■orA\ Tout est perdu,
fors l'honneur. En provençal, fouare signilie dehors.
Jusque, dii latin usque, ou plus probablement de usque.
Le:, du latin latus (côté). Plessis-lez-Tours : I^lessis près Tours.
Malgré, de nialum gralum. en provençal grat. On a dit niau-
gré, pro^ (Miçal maugra : qui a donné maugréer. Malgré Dieu est
devenu Maugreljleu.
Outre, du latin ultra. Oii lit dans les lois de Guillaume: « }suls
ne reçoit liom iiltre III nuicts. »
Par, parmi, du latin per, el per mcdiujn. Parmi s'est écrit en
deux mots, coDime <^/i /??^ ; in medio, devenu aussi emmi. Mi se
retrouve dans midi, milieu, et dans mi-caréme, mi-août. Le pro-
vençal dit mitan, qui a fait (0 mitogen.
Pour, du latin pro. On trouve cette forme latine dans les Ser-
ments de Strasbourg, 842. Plus tard, por, qui devint pur et pour.
Près, à^iX^ûn pressas, [i^oii après, auprès.
fie::, du latin rasus, de radere, raser.
312 PHK
Sans, do ,sine avec s advcrhiiil ; aiiricii lïiiiir;ii> sens.
iSar, do super.
Sus, do susuni, pour sursum (?), s'est ronservù dans la lonilion
en sus; dans courir sus à quoiqu'un. En le joignanl à de, on a eu
dessus.
Sous, do suhlus, on provençal .sr>,s7 .- d'où dessous.
Vers, du latin rersus (tourné du c<Mé de).
Vis-à-vîs de: face à face...
Voir/', voilà, sont pour î^ois ici, vois là, {\\\\ jadis s'écrivaient
en deux mots. En provençal vaqui, velaqui. Yoy-me là prest à
boire, (Rabelais, Gargantua, 41.) Gare ! voy-le-cy. {Pantagruel,
IV, ?>\.) Au xvii« siècle, on donnait encore à voici et voilà un
inlinilif pour complément. Corneille dit : « Voici venir ma sœur »,
qui équivaut à « Vois venir ici ma sœur ». Béranger a dit aussi :
Voici venir l'iiuissicr du roi.
Présage, du latin prcesagium (prœ, sagire).
Signe par lequel on prévoit l'avenir.
Là, je vois une cvoi.v de sinistré [irésago.
(BoiLtAu, Satires.)
Présent, du latin prœsens, prœsenlem.
Oui est dans un lieu déterminé.
— Dans le sens de don, c'est le substantif verbal de présenter,
mettre devant, présenter ses liommages, une Heur.
— Autrefois on disait de présent, pour à présent.
De présent, je ne fais que rêver : et ne faut plus doresnavant que
bon vin, bon lict, le dos au feu, le ventre à table et escuelles bien
profondes... (Rabelais, Gargantua, I, 19.)
Un bon l)OiU'geoiSj dans sa maison.
Le dos au feu, le ventre à table...
C'est la mise en pratique de l'insouciance épicurienne !
Carpe dieni, dit Horace.
Au Moyen-Age, on disait : don présenté à quelqu'un.
Faire un présent ne signilie rien sans ce mot sous-entendu.
— Les petits présents entretiennent l'amitié.
Les présents, pour entretenir l'amitié, doivent être petits, ils
peuvent alors être réciproques ; mais, lorsqu'ils sont trop considé-
rables pour être rendus, ils blessent plus la vanité qu'ils n'excitent
la reconnaissance.
L'amitié n'est pas inh-rossée do sa nature, et les mains vides
sont celles qui se serrent le mieux.
Une feuille de rose donnée par un ami est préférable ;iii\ [irésonls
les plus riches, pourvu qu'elle ne soit pas fanée. (Proverl»e persan.)
A petit présent, petit merci: on mesure la reconnaissance au
bienfait.
Les présents peu\eiit aii.uineuler. mais ils ne doivent pas
diminuer.
.S7"/v nul crcsccre dcbeni mnnrra.
(Maiitim..)
— Accepter un présent, c'est consentir à fermer l'oreille à la
vérité.
Acceptât io muneruin pru'varkallo est verUalis. [Ecciéslasle,
XX, 31.)
(Yoy. })ot-de-vin.)
Presque, composé de prù.-< et de que.
— Il y a des gens qui ont presque de l'amour, presque du talent
et presque du bon sens. (M'"'^ de Ki-iidner.)
— Presque pas : très peu, un soupçon.
Misé Pcsqui-pas (en provençal) : Madame Presque-pas, une façon-
niére, une mijaurée.
Presser, du latin pressare, fréq. de prctncre.
— Pressé comme un lavement. C'est plutôt ^^/y'.ssy//;/ qui! faudrait
dire.
Pressés comme harengs en caque.
On "est si pressé dans ces voitures, que chacun redemande sa
jambe ou son bras à son voisin, lorsqu'il s'agit de descendre.
(Mercier, Tableau de Paris. Les Tur<jotines.)
Prétentaine (courir la), on jjre/an/aine. Origine inconnue.
Ménage y voit une onomatopée du bruit que font les chevaux en
galopant.
Prêter, du latin prœslare, se iQw'w decant.
— Prêter son ajq)ui à (jnelqu'un : lui venir eu aide.
Prœslare damnuni e)nj>l<>ri (Cicéron) : garantir la marchandise
à l'acheteur.
Prêter, c'est perdre son argent ou son ami.
Qui prête, ne recouvre; s'il recouvre, non tout ; si tout, non tel
si tel, ennemi mortel.
Au prêter Dieu, au rendre Diable. (G. Meurier.)
314 PHE
On no pr<'((^ qir.nix riches, [imito qiio ro sont l('s soûls qui
piiisscnl rondro.
— Prêter ;i In polilo sonininc. Avis aux bourfroois de Jérusalem.
Six francs, prèles à condilion qu'on on rendra sept au l)Out d'une
soniaino, si on les laisse au mumuo taux pendant rinquaiito-deux
soinaiuos. en ajoutant les intérêts au capital, donneront quinze
mille neuf cent vin,L!t-cinq francs trois centimes. Voilà une somme
placée assez avanta.oeusement. (Yoy. interéfs composés.)
Prétérition, du Jalin prd'icrirc. laisser dr C(')té.
Fi,tiure par laquelh; on attire l'attention sur un point, en disant
qu'on ne s'y arrête pas.
Je me garderai hien de i)làmer la conduite...
Préteur, du lalin prœtor, jiour pr(r iior, (pii va devant.
Magisli'at romain chargé de rendre la justice, de diriger une
armée, d'administrer une province.
— On appelait /jreVo/r*? la tente du général, et. plus lard préto-
riens les gardes de l'empereur.
Prétexte. (Yoy. pallier.)
Prêtre, du lalin preshyler, transcription du grec presbijleros,
plus âgé.
— Le cas régime, presbylerinn, avait donné pro/ivaire, et la
rue des Prouvaires, à Paris, signille rue des prêtres.
~ Presque tous les mots qui désignent les ministres du culte,
dans les diverses religions, signifient vieillard ou père.
— Synonymes : bonzes, caloyers, derviches, druides, fakirs,
mages, marabouts, ministres, popes, rabbins, santons.
En provençal, capelnn, chapelain.
Gœthe appelle les prêtres « les démons du retard ».
Calotins. Cette expression satirique se trouve dès îToO, dans le
Déjeuner de la Râpée par TEcluse.
La vermine noire. (Garibaldi.)
— On dit d'un mauvais prêti'e : sa soutane ne tient qu'à uu
bouton.
— Il ne faut pas être prêtre plus qu'il ne convient, daus l'intérêt
même de la cause de Dieu: et, pourvu que l'on conserve la soutane,
on n'est pas tenu d'être toujours en surplis. (E. About.)
— Le prêtre baptise son enfant le premier. (Yoy- célibat,
charité.)
— Jusqu'au milieu du x^' siècle, les prêtres pouvaient se marier.
IM\1 31o
Lf^ papo Nicolas VII coiiimonça à troubler leur repos domestique, et
Grétioire VII, iiiettaut eu pr;!li(pie les ordonnances antérieures,
leur interdit foruielleuient le niariatie, afin d'empèclier la dispersion
des biens de rivalise p;ir la transmission des liéritafics des desser-
vants à leurs enfants.
« Dùt-on n'invoquer en f;iV(Mirdu célihat du ciei'.iié (pie les motifs
les [dus avoualjles. la pui'eté et la chasteté..., c'est offenser Dieu
(pie de refaire les liommes sur des patrons de convention. Pour
vouloir fahi-i(pier des an.u'cs, on risque fort d'estropier les gens, et
de ne créer fpic des fous ou des malheureux. » (Gustav(; Droz.)
Prévariquer, du latin /^/v/'r/'//7'f(7r/, marcher de travers.
Au ligiiié: sécai-ter du droit chemin. C'est trahir la cause,
l'intérêt dont on est chargé : manquer aux devoirs essentiels de
son état : juge prévaricateur.
Prévoir, du latin pra-rulcre. voir dans l'avenir.
— Prévoir, c'est avoir.
Ne niiiips pas l'd'iif iudIIi'I
Avant (jiiL' ton [lain suit prêt.
(Proverbe esp.-iijnol.)
La prévoyance est une providence terrestre, que chacun peut
prendre à son service. Aide-toi, le ciel l'aidera.
Prévoyance vaut mieux que repentir. (Proverbe hollandais.)
Priape, nom mythologique.
Fils de Vénus et de Bacchus, gordien des jardins. Le figuier lui
était consacré, à cause de la prodigieuse fécondité de cet nrlii'c. On
lui immolait un âne.
.Fiinon, jalouse de Vénus, le fit naitre avec une difïoruiité extra-
ordinaire. Vénus, honteuse d'avoir donné le jour à un pareil
monstre, le lit exposer sur une montagne. Des bergers le trouvèrent
et relevèrent à Lampsaque. Phis tard, il fut chassé de cette ville,
parce qu'il était devenu la terreur des maris ; mais les habitants le
rappelèrent et en tirent l'objet do leur vénération.
— Lampsaque. ville de Mysie, dans l'Asie-Mineure, était célèbre
par le culte solennel que l'on rendait à ce dieu. Ce culte était la
débauche la plus scandaleuse: aussi le mot Lampmcius était-il, à
Rome et en Grèce, synonyme de débauché, libertin.
— On a trouvé à Aix un autel antique consacré à Pria[)e. où
l'immodeste dieu des jardins est représenté avec cette inscription :
i. H. C. Jucnndo Hortomm Custodi.
Prier, (lu h[\\] prcrari. provfnc'il prpf/ar : (Yo\\ ;iiissi : |ir(''c;iir('.
impréfiilioii.
Synonyme: l)if>otl6r. (Vidocq.)
— Si tii veux apprendro ;'i prier, va sur la nier. (Von. //irr.)
— Se faire prier : faire des manières, des farons, des simagrées.
— Faire sa poire, sa Sophie.
Monsieur vent se faire prier : il na pas besoin de cela [)Our
donner du prix à sa complaisance. (Pi.nault-Lebrun.)
Primat, du latin ecclésiastique /ir/z/ian, jirundion.
Dijiuilé ecclésiastique au-dessus d(; celle d"arclievéque.
— Primat des Gaules : l'arclievéque de Lyon. C'est en 1U71J, que
Grégoire VII institua cette primatie.
— Primat est synonyme de pfflrlarrhe.
Prime, du lalin prima, sous-entendu Jiora. première heure.
C'est la première des quatre parties du jour, qui suit immédiate-
ment le lever du soleil. Les trois autres sont: tierce, sexte, noue.
Prime, dans l'Oflice, se chantait immédialemeut après l'oftlce de
nuit ou Laudes.
— Prime d'assurance. Somme payée pour assurer une entreprise
contre les mauvaises chances. Vient alors de prœminm , par
l'anglais.
Prime-sautier, dérivé de l'ancien prime saut, considéré
comme nom composé.
Oui se décide du premier saut.
Primeur, dérivé déprime.
— Il faut manger les petits pois avec les riches, et les fraises
avec les pauvres. Ce proverbe gastronomique nous apprend que les
petits pois ne sont bons que dans leur primeur, lorsqu'ils ne sont,
par conséquent, accessibles qu'aux riches, tandis que les fraises ne
sont bonnes que dans leur pleine maturité, époque où elles sont
abondantes et à bon marché.
Printemps, du \n\\n pr/mam te/npus.
La première des quatre saisons de l'année, celle où la nature,
parée de Heurs, semble se réveiller et renaître à une nouvelle
jeunesse. Chez les anciens, il était consacré aux Muses et aux Grâces.
Son nom latin est rer, grec /ler, d'où hirondelle (?)•
On l'a appelé aussi renoureau, nom l)ien fait pour désigner cette
saison dans laquelle la nature semble commencer la période annuelle
PlU 317
do production, où l.i terre s'ouvre pour donner ses ricliesses, comme
riiidiipic le uiiil (irrll. (Voy.)
Celte iinuée (IHGO), le printemps n"est qu'un terme durnlendrier,
une niMuvaise plaisanterie dalmanacli.
Priori ià\ locution adverbiale, mots latins.
Avaul Imil i'miuicu.
Se dii (l'iiu raisonnement qui repose sur un pi'incipe admis.
Prison, du \d[\\\{)0]^\\\'A\vc prehen.sioncm.
Synonymes : mettre en cage, tenir en cliartre [uivée.
— Triste cnuimc une porte de prison.
On (lit: triste comme la porte
D'une prison ;
Et je crois, le diable m'emporte !
(jn'un a raison.
(A. DE Musset.)
Privatif, du h\\\\\ pr ira tiens.
Se dit, en grammaire, dos lettres ou particules qui, jointes à
certains mots, marquent un sens négatif.
Telles sont : en grec, les pailicules a et r/y.s- ; en latin, in ; en
français, in, nié, ou ?n('s, dé. Kakia, méchanceté : nkakia, bonho-
mie : utHift, utile; inutilis, inutile; agréal)le; désagréable.
Privilège, du latin j)j'iri/c(/iiini ; loi faite eu faveur d'un parti-
culier, [iririis, pricalas, et lex.
Avantage exclusif accordé à une classe de la société.
Pricilegium est lex privala, contra Jus commune.
Le privilège est le contraire du principe républicain.
— En France, avant 17cS!), la noblesse et le clergé étaient
dispensés des iuqiôts, et jouissaient d'un grand nombre d'autres
avantages contraii'es au droit commun. Tous ces privilèges furent
abolis dans la nuit du 4 août 1789.
— Les privilèges accordés au souverain par la Constitution,
prennent le nom de prérogatives, du nom de prœrotjatica, que
portait à Home une centurie qui avait le droit de voter la première
dans les élections.
— En matière de commerce, le privilège prend le nom de
monopole. (Voy.)
Prix, du latin pretiuni.
La mouclie et la Inurmi contestaient leur priv.
(La 1-'omai>f..)
— Remporter le prix, le grand prix de Rome.
:m8 pho
Probable, du laliii jtr<)h(ihH\y, (qui pciil se |H'()ii\er. mais n'est
pas «'XfMiipl de doute).
On a dit autrefois pronrahlc, pouf reconnu cci-lain :
Kl si ce le si'liihic dolilil.'iblc,
C/csl liii'ii [wir ;iit,Miiiii'iil prouvalile.
[Koman do la /{ose. ver;. ."iOSH ?)
Probité, du lalin iirohilas.
Probus avait tait le mot roman pro:, ])reiix, vaillant : d'oi'i
jyroucsse.
Oui iniiU erc saf/ o pvo:. (ViJleliai'douin.)
Ayez de la [irohité lont juste autant ([u'il on faut pour ne pas être
pendu. (Beaumarchais, Barbier, I, 4.)
D'après cette maxime, il sei'ait pei'inis de voler, mais défendu de
se laisser prendre.
Salis bone riri/ar, si sine r;'///?//;^. (Saint Auuiistin, 6'//e ^/e
Dieu.)
On est sufOsamment honnête si l'on est sans reproche.
Procédé, pai'ticipc passé ûe procéder : lalin procedere.
Synonymes : ficelle, truc. (Voy.)
Procès, dn latin processus, marche en avant.
— Le [»lus mauvais accommodement vaut mieux que le meilleur
procès.
Inter duos litigantes terlius gaudet.
Les tribunaux ressemblent aux buissons épineux où la brebis
cherche un refuge contre les loups, et où elle laisse une partie de sa
laine.
— Au même radical se rattache le mot procession.
Procureur, dérivé ^o, procurer ; du \dXm. procura re. prendre
soin.
— En 1795. les procureurs ont été remplacés par les avoués, qui
sont chargés de représenter les parties dans les instances civiles.
Les fonctions do procureur étaient considérées comme déro-
geantes, l'opinion publique accusait les procureurs d'avidité.
Les poètes comiques font souvent allusion à leur rapacité. Dans
une scène du Mercure galan(, un procureur du Chfdelet disait à
un procureur du Parlement :
On ojrappillo cliez nous, mais on pille clicz vous.
Procuste. Mettre sur le lit de Procusle : ramener tout au
même niveau, à la nuMue mesure.
PRO 319
l'rocuste élail iiii Iiim,u;iiu1 dv l'Alti(|iie, qui fuisuil étendre ses
Ilotes sur lin lit de fer. liMir coiiiciit les extrémités des j;imbes
quand elles dépassaient le lit, on les faisait lii-ailler avec des cordes
jusqu'à ce qu'elles en atteignissent la longiuîur. Thésée le tua et en
délivra le pays.
Prodige, du lalin ])rocligium, de, pro, a(iere{X).
Les prodiges, regardés parles anciens comme le signe d'un grand
événement, hors de l'ordi'e naturel, étaient souvent des prédictions
funestes, et. par suite de celle croyance, le mot proditor était
synonyme de Iraitre. (^Ces deux mots n'ont rien de commun.)
Prodigue, du \[\{n\ pi'odlgus, <X^i\ prodigalité.
Synonymes : mangeur, panier percé, tonneau des Danaïdes.
— Prodiguer son bien : jeter sa maison par les fenêtres. (Rabe-
lais.)
Prndif/cns, sa es doganldire de In sorts causas.
Le prodigue, c'est le dissipateur de son bien. (Code de .Juslinicn.)
— En roman, bobancicr, de boi/iba, pour pompa, ostentation (?).
De pronicsses son Ijobaciers.
(MAtir.Al;KCS.)
(Us sont prodigues de promesses.)
— C'est un enfant prodigue. (Yoy. Éoangile de saint Luc, XV.)
Hoiiz qui dépend plus qu'il ne doit,
En povi'elé croler se voit ;
Et cil (jui (k-pend par raison
Kn bien nuillii)licr voil-on.
(xint Siècle.)
— L'été recueille, l'hiver mange. (Proverl)e russe.)
Requiem gagne l'argent,
Et Gaudeamiis le dépend.
— On dit d'un prodigue, qu'il bn'de la chandelle par les deux
bouts. Ce proverbe est stupide, et suppose une chose imi)raticable.
Il est plus simple de dire : il dépense trop.
— On se sert encore des expressions : semer l'argent (voy.) :
manger son blé en herbe.
— L'économe se contente de peu ; c'est à peine si le prodigue se
contente de trop.
Profil, de l'italien pvoffilo.
Contour linéaire d'un objet ou d'un visage vu de côté.
— Profd de camée : beau, très pur. (Voy. sllliouelte.)
320 vwn
Profit, profiter, du Liliii jifo/ir/o. pro/ffliu/i.
On (lis;iil ;iiil refois /^>r// [iDiir [irolil. hénélice.
Ferez doii prei! (Iiiiilriii (l;iiii;i!,'e.
[Fa/j/iati (le la Mort.)
— Le pi-olil (If liiii l';iil le dommage de liiiitre. (Montaigne,
Essais, tilro du cli. XXI du l^'- livre.)
Ce qui duit aux uns nuit aux autres.
On ne peut dessécher les marais sans faire du tort aiiv ure-
nouilles. (M'"« de Girardin.)
Progrès, du latin prof/ressus, marche, mouvement en avant.
Il faut expliquer ainsi le sens moral de ce mot, car les écrevisses
marchent aussi, mais en arrière (à la nage?).
— Ce mot est fait comme produire.
— Le progrès, en civilisation, doit s'entendre de ce qui est utile
à tous. (M. G.)
— Les Américains, pendant la guerre de l'Indépendance, ont fait
progresser et progressif, qui ont été adoptés, mais qu'on ne doit
employer qu'avec prudence. Ainsi, la \\vàvc\\Q progressive des idées,
expression souvent employée, équivaut à la marche raarcliante
des idées.
— Le mot progressif, appliqué à des personnes, ne pourrait
guère désigner que d'excellents marcheurs (?).
— Les ennemis du progrès s'appellent : tardigrades, qui préfèrent
l'ornière au rail ; bonnets de coton ; éteignoirs ; rétrogrades.
Prolétariat, àv\\^\^\\\ proletarias, de proies, lignée, portée.
État d'une société oïi il y a des prolétaires, c'est-à-dire des
individus qui ne possèdent rien, et ne vivent que de leur travail
quotidien.
Promener^ du bas-latiu prom innre, nndQnwQmeut jtourmener.
Des étymologistes ont proposé pro manu agere !
— Synonymes: Allez vous promener!... Vade foras ! Foras !
(Plante.)
En provençal : fouare! (dehors).
Allez au diable ! ...à tous les diables !
Allez vous faire lanlaire, ...vous faire paître, ...vous faire fiche...
Ce dernier, pour gazer une expression plus grossière.
Envoyer à l'ours ; envoyer voir Martin au Jardin des plantes.
Va piss... ; manière très grossière de congédier quelqu'un.
L'injure est ancienne., car Ducange, au mai pissare, cite un texte
PUO :52I
de 140*), où ciilro .iiilros < .ijr.incles paroUes reprochées ;i un
accusé, on rappoilc (jnil ciiNONa pisser son adversaire ».
Promesse, <lii lalin promissa.
— l'i'oniesso de corljeaii : sponsio rorvina. Locution latine, dont
saint Augustin s'est souvent sei'vi. C'est une allusion au cri du
corlieau : cras, cra.s, demain, demain.
C'est le : Demain, on rasera gratis.
Prométhée, du gi-ec Promt'f/iens.
Un des Titans, puni par .lupiler pour a\oir dérobé le feu du ciel
et l'avoir comuiiiniqué aux liommes dans un roseau creux.
— Le hàlon uéuérateur du feu, (|ui enllammait par un frottement
rotatoire nu (lis(pie de liois creusé, s'appelait Trupnnon en grec,
et Protndthd eu sanscrit. Dans cette langue Proinàtlins est celui
qui creuse en frottant, et (pii développe le feu caché dans le bois.
De là le Proméliiée grec.
Promettre, du latin promilforc, envoyer au loin...
— Promettre monts et merveilles.
Aureo/t montes polliccri.
(Tkrk.nck, Phorminn.)
Mtnjiios jiroiniltcre inonles.
(Perse.)
Maria monlesque poUicevi. (Salluste.)
On dit aussi : promettre plus de beurre que de pain.
— Promettre des côtelettes de Sphinx à la purée de Cliimère.
— Grand prometteur, petit donneur.
Se ruiner à [iromettre, et s'enrichir à ne pas tenir.
Oi'iilioiic benejkus.
(Plautk.)
(Généreux en parole.)
— Il est toujours imprudent de faire une promesse, car un événe-
ment imprévu peut vous empêcher de la tenir. (M, G.)
— Chose promise, chose due : on doit, une fois qu'on a promis.
Proverbe analogue à cet autre : Un honnête homme n'a qu'une
parole. On doit, en conséquence, avant de promettre, être sûr de
pouvoir tenir ses engagements, si l'on ne veut être obligé de se
retrancher derrière le proverbe : Promettre et tenir sont deux.
Promcltre c'est (ioniier ; espérer, c'est jouir.
(Dti.ir.i.i.)
Pour son bonheur entretenir
Promettre ne faut sans tenir.
21
PpÔne, f;iil lii'ill-i'Irc |t;il' ((illliiiclidll de jinrconiiini. |)r(Hl;iiii;i-
lioii. ;iiiiu>iirc(0-
(l'csl i.'iiiiioncc ihiIiIkiiic (juc f;iil If ciiir, ('li;i(|iir (liiii.-iiiclic, ;i l.'i
messe p.'iroissi.ile, {U'> frics, heures (lOflices. Ii;ms. iii;iii(leiiieiils
épisrop;uix, etc. : |miir i;i|iprlcr ;iii\ ;issisliiiils les devoirs reli).Meii\
qu'ils onl ;'i ;iceoiii|>lir.
— Uecoimii.'inder (piehpi'iiii .iii pn'me : fnii'c un i';ipp(»i'l (pii lui
;dlirei;i (piehpie i'épriiii;iiide.
('elle iDCUlion \ieiil de liisnue féod.il de recoiiimiinder an pn'me
les seiLïiieurs ;iii\ pi'ières des lidrles. leurs \ass;ni\; do inëiiie
qu'aujourd'liiii on leniiinc rnHice par le Ihuniiic, sa/ra/ti...
Pronom, du laliu /iroiioinni. de /i/-n. /Ki/iu'nc: «pii esl mis à la
place du neui.
l\irlie du discoiii'S (pi'ou uiel au lieu du n(uu ou suhsianlif. poui-
en é\ilei' la ié|u''li!i(iu. ainsi (pu' |t(Uir désiijner la personne.
Prononcer, prononciation, du lalin /iroiui/ifidrc.
Manièi-e darlicnler les mois : sujelle à plusieurs >ieo<ï', connus
sons le nom de halliulieiucul, liéiiaienuuil. hredonillemeiit, gras-
se\emenl : ipii. le plus S(U!\enl, lienneul à de niau\aises hal»ilndes
d'iMifance. bien i)lus (pi'à un \ice d'oriianisnnv
Pi'ononcialion alsacienne : Mai-cliaud de liedis pal;iis (luaicliaud
de i)elils lialais).
Prophète, du Li'ec pr<i/i/ir/(\<. par le lalin prophcln.
(a^lni (pii prédit l'avenir, landis (pie le dcrin décoiiM'e ce ipii est
caclié.
— l)n appelail /iro/i/ir/cs. clie/. les Hébreux, les lunnines inspii'és
de Dieu, (pii annonçaient l'aM'uir.
Les (pialre efands prophètes sont : Isaïe, .lérémie. Kzéchiel et
Daniel.
Tarmi les douze pelils. on c(tuipte Hariiih. ohjtM de radmii'atiiui
de La Foulaituv
— l*rophèle de malheur : oiseau de mamais aueiire.
(V(>sl la Loi et les l'rophèles : il fait autorité.
Nul n'est prophète dans S(»n pays (ÉcnnijHc de saint >Lilhieu.
rh. XXIH, IVi : Marc. M. 4 : Luc, iv". iL\ : Jean, IV, iV.)
Tn savant dans son pays est comme l'or dans une mine. (^Pro-
verhe turc.)
iM{()
ogn
Propos, (lu laliii /tropnsifin/i.
— A j'/opos. iD'iitioii ;i(l\t'ilii.ili' : convenaldomonl au lieu elaux
cirtonslaiices.
A |irn|iu> de lintt('<. {V<)\ . hofles )
A |)it)|Mjs. Tiiiclli'. jiourquoy c>t-ro quo les niis?e? dune jeune
deniniselie sont toujours fraîches ? (Rabelais, I. :2'.> i
Cela vient ;i propos, couinie lard eu pois. (Id. III. '*!.)
Proposer, de ))rn et pfiu.son\
-- L liniiiMie propose, et Dieu dispose. (G. Meurier, xv« siècle.)
Les projets des lioniuies dépendent de la volonté de Dieu.
Nous trouvons un certain charme à disposer à l'avance de
lavenir, sans songer à l'inconstance des choses humaines.
Comme le ciel sô rit îles vains projets des tiommes !
(Rp.r.>ABD.)
L'homme sagite, Dieu le mène,
t^ontr»' DifMi. nul ne peut.
Propre, du latin jD-opriux.
Ca'. qui appartient exclusivement à une personne.
A passé de ce sens : 1° à celui de convenable, 2'' à celui de net.
Propre coniiiie un calire. ...comme une écuelle à chats. Celle-ci
n est que dune prû[»reté équivoque : nette peut-être, mais pas
ju'opre.
Mmtfius e.ifo. (Caton.;
On dit d'une personne très propre : On croirait qu elle sort d'une
boite.
Propreté, dérivé de propre, dans le sens de net.
— La piupreté est une demi vertu. (Saint Augustin.)
La propreté a quelque chose d'honnête : c'est le respect de soi-
même.
La propreté est pour le corps ce que la décence est pour les
mœurs. (Bacon.)
Propriétaire, 'li'lui qui possède en propre, en son nom. un
objet ipieliunque.
Il peut jouir, user, disposer des choses de la manière la plus
absolue. La loi d'e.vpropriation pour cause dutihté publique prévoit
le seul cas où le propriétaire puisse être dépossédé.
Prorata (au), abréviation de la locution latine : pro rn(a parte,
pour kl partie convenue ; à proportion de...
Se (lil de la réparlilioii (l'iiiic soiiiiiie on diiii noiiihrc qiielcoiiqin'
de choses entre un certain nonilire d'individus, proporlionnelloinciit
aux droits do rliaciiii d'eux.
Dans une liquidation, chaque créancier reçoit au proiata de sa
créance.
Proroger, du lalin proroijai^c, prolonger.
Prolon^ier le truq»s prévu ou donné pour une chose.
A un sens opposé à abroger.
Suspendre les séances d'une asseuibiée délibérante, par un acte
de l'autorité souveraine.
Prose, du latin prosa, [^our prorsa (oralio), discours direct.
— Prorsa facundla. (Apulée.)
La prose est le pain de la pensée, dont lapoésie est le gâteau.
— On dit : vile prose, prosaïque, d'un discours commun et sans
élévation, par opposition aux vers, qu'on appelle « le langage des
dieux ».
— Horace appelle mm^d pedestris, nmse pédestre, qui ne monte
pas Pégase, une poésie dont les vers ressemblent presque à de la
prose, sevmo pedestris.
Prosopopée, du grec 7J/'o.9(î/)on, personnage, poiéô, faire.
Figure oratoire, par laquelle on donne la parole et la vie aux
morts ou aux êtres inanimés.
Prote, du ixrcc prôlos, le premier.
Le maître imprimeur.
Restif de la Bretonne en a dérivé proferie.
Protection, du latin prolcclio, de ptrotegere, couvrir.
— Le grand protecteur, le seul protecteur de l'homme, c'est le
travail.
Protée, du grec Proleus, de prôtos.
Le plus ancien des dieux.
— Protée, dieu marin, tlls de Neptune, était chargé de garder le
troupeau des moutons marins. Il prédisait l'avenir ; mais on ne
pouvait le lui arracher qu'en l'enchaînant, et, pour échapper à
ceux qui le consultaient, il se métamorphosait de cent manières, se
changeait en bête, en feu, en eau, etc.
— On appelle y^ro^e(?, un homme qui change sans cesse d'opinion,
de langage, comme les courtisans, qui savent cacher leurs senti-
ments sous un masque trompeur. (Voy. caméléon.)
PRO 323
Protestant.
Syiiuiiyiiii's : ralvinlste. Imiiucnot, luthérien, parpaillot, réformé.
— Les sectateurs de Lutlioi' furent nommés protestants parce
qu'en l')29. ils protestéi-ent ronli'e un décret de l'empereur et de
la diélt' de Spire, qui défendait toute innovation en matière de reli-
f:ion. et déclarèrent qu'ils en appelleraient au Concile général.
— Parpni/tot vient de Jean-Pierre de Parpaille. l'un des chefs
calvinistes. déca[»ité à Avignon en loGïi.
Protocole.
A Byzance. on nommait protocollum, ou premier registre, le
\olume destiné à contenir les actes publics, et qui était fait de
papier dans la fabrication duquel entrait de la colle.
— En diplomatie, les protocoles sont les procès-verbanx des
conférences tenues par les ministres plénipotentiaires.
Ce mot fut adopté, en 181 i et I8I0, au Congrès de Vienne, ainsi
qu'à ceux d'Aix-la-Chapelle et de Vérone.
Prou, adverbe : provençal p?'o un, du lalin probe : IAqu pluti'it
que de prou fit.
Assez, beaucoup.
On disait autrefois après les grâces : « Prou fasse ! » Que ce repos
vous prolite :...
.Madame, grand prou vous face : (Ifeptaméron, nouv. 20.)
Prouver, du latin proixire.
Ce mot a fait autrefois preuve, comme trouver treuce, à certaines
formes de sa conjugaison. La trare en est restée dans le substantif.
Provençal, dérivé de Provcme, latin Prorincia.
— L'idiome provençal est né de bi corruption du latin, pourri-
ture féconde, d'où sont nées des langues parfaites.
— Le provençal est une la noue, tandis que le français n'est
qu'un patois. (Castil-Blaze.)
— Varron appelait .Marseille Trilinr/ui.s, parce qu'on y parlait le
grec, le latin et le gaulois, et l'on peut juger par le Dictionnaire
qui suit, que de ces trois langues les deux premières ont cou-
couru presque exclusivement à former le provençal, qui est resté
ce qu'il était au .Moyen-Age, avant la formation de la laniiue fran-
çaise.
-— La laiiLiue française ne se parle en Provence que depuis la
Révolution française. Avant cette époque, elle n'était étudiée que
326 IMID
par los pcrsonnos ol)li;i('OS do la savoir. n(, dans los meilleures
sociétés, on ne parlait que la lan<:ue du pays.
Lorsque Louis XVIII, encore comte de Provence, vint \isiler relie
province, on eut de la peine, dans plusieurs villes, à trouver des
personnes capables de le haranguer en français; et nn-mc à Mar-
seille, il y avait alors peu de négociants à qui celte langue lût
familière. On l'enseignait, mais le provençal était resté dans l'usage
général. Il ne lallul rien moins que la Révolution pour changer ces
anciennes habitudes, et répandre rapidciueul l'usage du français.
Cependant, aujourd'hui encore, la population des campagnes et de
certains quai'tiers des grandes villes reste fidèle à son ancienne
langue.
— La: langue provençale était à son apogée de perfection de iOoO
à 1250.
(Nota. — Ici devait prendre place un Dictionnaire des mots
provençaux tir'es du grec, du latin, de l'arabe, etc., dont nous ne
trouvons aucune trace.)
Provence, du latin Provincla, la province par excellence.
Rac. procul, ctncere, vaincre au loin.
— Synonyme : la Gueuse parfumée. (Sévigné, marquis de Galiffet.)
T.e Parlement, le Gouverneur, la Durance,
Ces trois ont gâté la Provence.
Gâter est employé ici dans son acception étymologique de dévaster.
On a dit aussi :
Trois choses gâtent la Provence :
Le vent, la comtesse, la Durance.
De ces trois fléaux, le Parlement n'existe plus; la Durance,
dérivée en canaux, désaltère Marseille, arrose ses jardins, et fertilise
la Grau et une grande partie des plaines du Vaucluse. Reste le
mistral, que l'on continue à maudire.
Lèvent du nord-ouest, appelé mistral (maître vent, magistral),
est un vent violent et froid, qui règne en Provence et en Languedoc.
Les aûciens l'appelaient céphire, joli nom pour un bien vilain vent !
Auguste, qui visita la Provence (7 ans avant Jésus-Christ), lit élever
à Marseille, un temple à ce vent, que les Latins appelaient Cœcias
ou Clrcus, du mot celtique cyrch, violence.
Strabon, dans sa Géographie, l'appelle Melamboréas. vent noir.
C'est un vent local ; Pline en parle en naturaliste, et dit qu'il ne
faut pas planter d'arbres dans la Gaule Narbonnaise, contre la
diroction do ro voiil. miiis ;i r;il)i-i. p;irro qu'il onlêvc même le toit
des MKiisoiis. S;i violence es! exliviiie: il renverse les obstacles
(|n'il rencontre, el soulève les cailloux. ;in point (ju'on a renoncé
de(iuis lou.Lîtenips ,'i Liarnir de vili'cs la façade nord dn chrdeau de
Griuiian. ancienne ivsidence de la tille de M""^ de Sévigné, situé
près de .Montéliinai' : elles étaient brisées parles cailloux, que le
Nent lançait comme avec une fronde.
|]n l7()U-7(). ce \eiil l'éuna pondant quatre moisjlo suite.
On l'appelle i le balai do la Provence «.
Plusieurs contrées de la Provence sont abritées du mistral par
des montaLiues : Cannes, le Golfe Juan, Yallauris, placés derrière
le l'enipai't do rEstérel. (Voy. Hyères.)
— La vicomtesse de ïurenno, Cécile de Comminge, maîtresse
de Clément VI, mort à Avignon, le (î décend)re 1352, exerça sur ce
pape un ascendant funeste, et fut cause do beaucoup do malheurs
pour la Pi'ovonco.
— La Durance [Dnicnlid) a un cours très rapide, et ses débor-
dements sont torrentiels.
Tite-Livc (XXI, 'Xi) la dt'crivait déjà, quand il disait, au sujet du
passage d'Annibal : Non nariiim pniivns esl ; elle n'est pas
navigable.
Silius Italiens dit qu'elle roule à grand bi'uit dos arbres déracinés
et dos morceaux do montagne. Cependant son nom de Druenlla
seuddorait indi(pier ((ue plus tard les Romains la rendirent navi-
gable, ou du moins tlottablo pour les chouos que produisait la
Provence.
— Godeaù, évèque do Yence, poète, académicien, et familier de
l'hôtel de Rambouillet, dans des représentations au roi, au sujet
d'un nouvel impôt, appelle la Basse-Provence « une gueuse parfu-
mée », parce qu'elle ne produit pas assez de grain pour nourrir les
habitants. Depuis ce temps, la gueuse s'est enrichie à vendre ses
paj'fums. et Grasse, où se font la plupart des essences que la
Provence fournit, a été appelée la « Cassolette » de la France.
'— La Provence est une serre chaude pour les santés délicates.
(M-^e de Sévigné.)
— Il y a en Provence, un grand noml)re de localités encore plus
favorisées que les autres, qui se recommandent par leurs qualités,
et auxquelles leur nom sert, en quelque sorte, d'enseigne :
Auribeau (Basses-Alpes), de Aura, hella, bon air.
Flassans (Var), de Flatus sanus.
:î28 I'uo
lîonuvo/.or (B;issos-Alpos), si^nilio l)cllc vue.
Y;illt('ll(', V;il bonne, Val lis, hclla, bona.
Les Âni(';nicrs pr^s Tonlon, de Amirnus, ;igréable.
Snllicrs (Var), de Solnrla.'. ensoleille'*.
Vallensolle (Basses- Alpes), de Vallis Solis (?).
Vallauris (Alpes-Marilimes), de Vall/'s ainva.
Yaumeil (Vaiicliise), de Vallis mellis.
Digne, Eyguier, Marligues, la Palud, le Pradet, Vancluse, rappel-
lent l'abondance des eaux de la Provence, et il semble que, dans ce
beau pays, la nature s'est plu à réunir les trois éléments nécessaires
à sa fécondité : le soleil, l'eau et l'air.
— Le tambourin et le galoubet de Provence, sont une tradition
de la musique arabe On sait que la Provence a été assez longtemps
occupée par les Maures.
Le galoubet tire son nom de gai, joyeux, et de oubet, pour
aubeta, petite aube ; c'est l'instrument pour jouer des aubades.
Le tambourinaire provençal est joueur de galoubet et de tambou-
rin tout à la fois. Flûtiste d'une main, grosse-caisse de l'autre, il
ressemble par le baut à un enfant suçant un sucre d'orge, et par le
bas à un marcband de plaisir.
Proverbe, du latin prorerbium.
— Suidas, Zénobius, Diogénianus, Apostolius, sont des auteurs
grecs qui ont fait des recueils de proverltes.
— Le proverbe est une maxime populaire, ou façon de parler
sentencieuse, qui est dans la boucbe de toute sorte de personnes.
— On a prodigué aux proverbes les noms les plus élogieux :
petits évangiles, sagesse monnayée, algèbre des idées pratiques,
écho de l'expérience, sagesse des uations. Ils ont eu aussi leurs
détracteurs, et Molière (Femmes saranfes, acte IL scène 7) parle
avec mépris
De proverbes traînés dans les ruisseaux des Halles.
— Les proverbes sexpriment généralement en langage figuré,
et se rattachent aux tropes. Il est curieux de retrouver dans ces
locutions, d'origine essentiellement populaire, des rapports si
fréquents avec les figures de rhétorique. M. Jourdain faisait, sans le
savoir, seulement de la prose : le peuple fait presque de la poésie.
— Le proverbe affecte les formes variées de :
L'allégorie : Qui craint les feuilles n'aille pas au bois.
PlU' 321)
L'allitération : Son-et do deux, secret de Dieu. Mnl ;i qui a. pis
a qui n"a. Palieiicc passe science.
I>anlitlit''se : (Iraïul i)roinetteiir. [lelil donneur.
Le calembour: Qui bâtit, nient.
La concision : Tout ou rien : pou et bon.
La contradiction: Los proverbes ont toujours raisoii, pai'ce qu'ils
ont tous leur contraire, et répondent ainsi à toutes les denuindes.
Ainsi : Chose promise, chose due. Promettre et tenir sont deux. —
II ne faut pas chasser deux liè\res à la fois. Il faut avoir deux cordes
ii son arc. — Il ne faut pas remettre au lendeniain les atîaires
sérieuses. La nuit porte conseil.
Le jeu do mots : 11 y a plus de trompés que de trompettes.
L'hyperbole : Il se noierait dans un crachat.
La métaphore: Graisser la patte; faire le plongeon.
Le paradoxe: Qui paie ses dettes s'enrichit. L'appétit vient on
mangeant.
Providence, du latin providentiel, procidere, pourvoir.
C'est la sagesse divine douée de prescience et conduisant toutes
choses.
De la même origine viennent : pourvoir, provision, prudence, etc.
Proxénète, du grec proxénètes, courtier.
Désignait à Athènes les magistrats chargés de loger les étrangers
venus dans la ville pour affaires politiques.
Prude, de rancien français ;);'or/e: féminin de preux: il s'est
pris anciennement dans un sens avantageux.
Femme très réservée, qui manque d'imprudence. Misé Pesqui-pas.
— Synonymes : sucrée. Faire la prude : faire la bégueule : faire
sa Sophie : alïocter des airs de sagesse.
— La pruderie est en raison directe de la corruption.
La pruderie est la grimace et l'hypocrisie de la pudeur. (Massias.)
Prudence, ûo, prudent lu, contraction de prooldenlla.
Vertu qui fait éviter les dangers, dans les cas difficiles.
— On dit de 1" homme prudent qu'il est « garé des voitures », par
allusion aux dangers de la circulation à Paris.
— La prudence est la portière du cœur : elle n'ouvre pas à la
folie.
— La prudence est une des quatre vertus cardinales.
Chez les anciens, elle se confondait avec la science, comme on
le voit dans le mot Jurisprudence, qui signifie science du droit, et
330 IMll
dans /??v<r/7/r);/?m^, lioniiiio insl mit. fhnisi pour jii^f-.'ii-hilrc dans
les ('onlosl;itions onlre incmlircs d'un corps de inùtier.
— On dit : la priidcncf du serpent.
Prud'homme est formé comme sagr-fcnunn.
— Monsieur .losopli Pj-ndhomme, ci'éé i»arll. .Monnier. vers 1830.
est le ty|)e de la lièlise honrueoise an xi.x*" siècle. C'est l'iiomnie ijiii
cache sous une apparence prave et sérieuse la nullité de son esprit,
et répèle avec emphase les banalités qu'il a lues dans son journal.
H. Monnier a pris pour modèle de son portrait un peu chargé,
le bourgeois de Paris, raisonneur et sentencieux.
Prune, du latin prinium.
— Ce nest pas pour des prunes : ce n'est pas pour rien.
Prune est ici le fruit de l'épine noire, ou prunelle, fruit âpre,
sans utilité, si commun qu'on ne recueille pas.
Si je suis aHligc, ce n'est pus pour des prunes.
(Moi.ifciiE, Cocu iniof/iiiaire, 16.)
— Mangez des prunes, nos pourceaux n'en veulent plus. {Moyen
de parvenir, ch. 73.) Vieux dicton peu poli, pour oITrir une chose
qu'on a en surabondance.
— Les prunes de Reine-Claude doivent leur nom à la reine
Claudine, première femme de François I'''.
On raconte aussi que la reine Claude, à la suite de la première
croisade, donna son nom à des prunes délicieuses rapportées de
Palestine. Les arbres, plantés dans le jardin du palais des Tour-
nelles, donnèrent des fruits exquis, souvent volés la nuit par les
écoliers. Ces amateurs de reines-claude étaient condamnés par le
Châtelet à être pendus.
A quelque temps de là. un truand vola les diamants de la
couronne. Il fut aussi condamné à la potence : mais arrivé au pied
du gibet, il dit avec une certaine fatuité: « Au moins ce n'est pas
pour des prunes ! »
— Les prunes de Monsieur reçurent ce nom, parce que Monsieur,
frère de Louis XIY, les aimait beaucoup.
Prusse.
Travailler pour le roi de Prusse: sans salaire, pour l'amour de
Dieu.
Le roi de Prusse dont il est ici question, c'est Guillaume I'"', qui
pressura le peuple, très malheureux sous son règne.
PUG 331
— Le soldat pnission, avec son pai-aloniierre sur la tiHc, c'est
Mars coillV' en cliicard. (Cli. IIii.oo. !23 jnilk'l 1870.)
Pseudo, (in Lit-cc pscados, niensoMLic.
Ce |ir(''li\(' hiMiriiihlc s'ajonlc à crrlains mois, [loiir niar(iin'i' (jno
la ([nalilé ({n'ils cviiriMicnt es! fausse.
Ps(Mul()-|)ro|iln'tt'. |)S(Mi(l()-aMii.
Pseudonyme, lonm'' du |in''i'rdrii( et de onomn. nom.
(Voy. noms pseudonymes.)
M"« Nathalie (des Français) s'appelle Zaïre Ma\el; M"« Agar,
reçue en ISlîî). sappelle Chauvin ; M" " Belval et SilLy, deux sœurs,
se nomment Goret : M""' Cora PearK est Crurh : Théi'ésa s'appelle
Emma A'aladon.
Puant, parti(i|)t' présent ({a puer ■. \'A{'m putere.
On ne saurait y \oir une syncope d'impudent.
Au ligure: important, lier, orgueilleux.
Public, du latin pub/icus. par popalicits. qui appartient au
peuple.
Sa Majesté Tout le monde.
— Combien faut-il de sots pour faire un public ? (Goethe.)
— Le public, cet être aux cent têtes, qui est. toujours le même et
toujours changeant, ce tout le monde, enfin, qu'on dit a\oir plus
d'esprit que Voltaire, plus d'argent que Crésus...
— En puldic : rorani populo.
Publicain, du latin puhliranus.
Dans la Bible, les pulilicains sont les percepteurs de rinqtùl.
Fermiers des deniers publics chez les anciens Romains. Comme
ils couraient de grands risques dans le recouvrement des impôts, ils
se montraient fort durs à l'égard des débiteurs de l'État. Ils
abusaient même quelquefois de leur pouvoir au point de se rendre
odieux aux populations.
Chez les Juifs, les publicains étaient en exécration, et l'un des
reproches faits au Cbi-ist par ses compatriotes, était de fréquenter
les publicains et les femmes de mauvaise vie. (Voy. saint Mathieu.)
Puce, du latin jiule.r, pullretn.
— M. de Metteruich a la Prusse à l'oreille, disait-on en 186G, à
propos des préparatifs de guerre de Bismarck.
— Avoir. la puce à l'oreille : avoir des inquiétudes sur le résultat
d'une affaire.
332 PII
Pure ;i l'oreille, l'homme réveille.
La Didun, que laraour réveille
Et lui met la puce à loreille.
(ScARRiis, Virgile trace.tti.^
Pucelle, du diuiinutif puUitoUn . de pulla : provençal piucella ;
de pullus, tout petit animal.
Le latin avait aussi pndlcella, diminutif de pudica.
Pudeur, du latin pudor, de piidere, avoir honte.
Pudeur se disait aussi en latin lerecundia, qui a donné vergo-
gne: d'où femme déver.irondée.
C'est Desportes qui a créé ce mot aussi cher à la poésie qu'à la
prose.
— La pudeur est la couscience du corps.
La pudeur lut toujours la première des gi'àces.
(La Chal-ssée, Ecole des M'tri-t. II, 9.*
La beauté sans pudeur est une fleur tombée dans la boue.
La pudeur ! belle \ertu, qu'on attache sur soi avec des épingles.
La pudeui-, sorte de modestie de la matière, n'est souvent qu'une
feuille de vigne à jour...
— Proh pudor '.... ô honte! Interjection latine, qui exprime le
dégoût inspiré par un acte inconvenant, incongru. Il répond à :
Fi donc ! et aussi assez bien au schoking des pudiques ladies.
Puer, du latin putere.
— Puer comme un bouc. Les Latins disaient hircosus dans le
sens de impudique.
— De puer vient putois, mammifère digitigrade, voisin des
martres, et exbalant une odeur fétide.
De là aussi : punais, punaise.
— Tuer les moucbes au vol : avoir l'haleine puante.
Puff, mot anglais, qui signifie bouffée.
Désigne tout genre de publicité mensongère qui a pour but
d'attirer l'argent du public. C'est le dernier mot du charlatanisme.
Barnum est le Napoléon du pulï. (Voy. canard.)
Puis, du latin po-ft, provençal pueis.
De là vient depuis.
Puissance, vieux iràMçViii poissant . du latin hàrlrATe passent em.
La puissance qui demande, ordonne : les prières des rois sont
armées. — Sntis imperat qui rogat potentia ; armatœ sunt
preces regum. i^Charron, Sagesse III, 2.)
l'I'T 33îi
Punch, mot andnis.
Hoissoii spiritiioiise faite avec du llic, du rilruii, du sucre et du
rliuui : euipruntée aux Anglais, et introduite en France après la
paix dt' 1703.
Punir, du latin 7^?/n//r. On récrivait autrefois pugnir, comme
s'il fut \cuu de /ji/f/ims, poing.
— l^e droit de punir doit être elïacé du code, d'après certains
philosophes qui n'admettent pas la responsahilité humaine.
Fouricr veut qu'on ne réprime pas les passions, mais qu'on les
dirige. Le moyen de suppi'inier la pénalitèest l'instruction répandue
dans toute la société : l'ouverture des écoles fera fermer les prisons.
— In procureur est un magistrat qui prouve son horreur du
sang, en faisant verser le plus de sang qu'il peut.
Pur, (lu h\\\n j>urus, du grec j)ii/\ le feu, qui est l'emhlème de
toute purilication.
Qui est sans mélange.
— Dérivés: pureté, aiiurer, purifier, déi»uratif. purger, purga-
toire, impur.
— Aux purs, tout est pur.
Purée, du latin piirare, nettoyer, passer à l'étamine ; ou plutôt
de porrum, poireau, comme l'indique le vieux mot porréo. ou
poireo.
— Purée septemhrale : le vin. (Haijelais.)
Purgatif, purger, du VaWw puvfinro.
.Médi(;;tiou propre à déterminer des évacuations alvines.
Synonyme : récurer le chaudron (trivial).
Purisme, défaut ipii consiste à alïecter une trop grande pureté
de langage.
Le puriste, dit La Bruyère, parle proprement et ennuyeusement.
Le puriste est le puritain du langage.
Puritains, secte qui était attachée plus pureincnl (pic les autres
presf)yléri(^us à la lettre de l'Ecriture.
— On appelle 7>;o*//rt//« un personnage de mceurs rigides.
Put, radical de putorc, puer : de pulare, penser ; et du mot
piilus, petit.
Pute, proven(;al 7>^//''/, petite lille ; féminin de petit garçon:
comme fjarse.
:m pvi;
Il ;i donné nii d(''i'ivé injnrionx et ni;illionnf'to. nynnt flinnL'-L' son
;ic(0[ili()n prcniirrc en celle de juif if/a, iin;inte.
— PriniilixeNienl. <e nicil ét.iit lionnëte. Goldoni m coinposé une
roniédi(! inlilnlée /a Vula lioiiorditi, l;i lille honnête.
— Les trouliadoiirs l'ont loujoni-s employé dans le sens péjoratif
i\i' j)i//..., conrtisnne, vilaine, proslitnée.
— il échappait souvent à la reine, de dire (en i)ailant de M""^ de
iMontespan) : « Cette pute me fera mourir. » (Saint-Simon.)
JdHon ne pulanos lio'l salclh ex leintz.
(P. CAUblNAr..)
(Couchant avec prostituées jusqii au soleil levé.)
Le très clier frère, indocile cl mtifin.
Vous la l'ima très riclienient en lain.
(liriEssET. ]'ert-\'ert.)
Putiphar. (Yoy. Genhe XXXYil, et chaste.)
Pygmalion, nom jnytholoiiique.
Sculpteur de l'ile de Chypre, dégoûté du niai'ia.se par l'horrilile
dépravation des femmes d'Amathonte, résolut de vivre dans le
céUhat. Vénus, irritée, le rendit follement amoureux d'une helle
statue d'ivoire, œuvre de son ciseau ; puis, à sa prière, anima cette
statue, que Pygmalion épousa et dont il eut un lils. Paplius, qui
fonda la ville de Paphos.
Pygmées, du grec puanu', coudée.
Race d" hommes que la Fable place eu Liljye.
Ils n'avaient qu'une coudée de hauteur. Leurs femmes devenaient
mères à trois ans, et étaient vieilles à huit. Une armée de Pygmées
ayant assailli Hercule endormi, ce héros les enveloppa dans sa peau
de lion, et les porta à Eurysthée.
Les modernes ont vu revivre cette fable dans le Voyage de
Gullirer. (Voy. mynnidons.)
Pyrame et Thisbé.
Pyrame, jeune Assyrien, aimait Thisbé. Ils projetèrent un rendez-
vous hors de la ville sous un mûrier blanc. Thisbé, arrivée la
première, fut attaquée par une lionne, qui avait la gueule ensan-
glantée. En s'enfuyant, la jeune lille laissa tomber son voile, que la
bète souilla de sang en le déchirant. Pyrame survint, aperçut les
lambeaux, et, croyant Thisbé dévorée, se perça de son poignard.
Cependant Thisbé revint du lieu où elle s'était réfugiée, et. trouvant
le cadavre de son ami, se perça du même poignard.
PYT 333
Le inùiiiT fui teint du sang des deux amants, cl les mûres qu'il
|)ni-lait (l('\iiirt'iit l'onp-fs. de Manches (|ii"elk'S i-laient auparavant.
Pyramidal, pyramide, du iiwc pin-fu/iis.
Synonyme de ctilossal, très grand.
— La grande jiNramide de Clié()|is. construite sons la iv" dynastie.
4000 avant .lésus-Chrisl, a 233 mètres de côté à la base ; sa hauteur
primitive était de 143 mètres. Elle a une masse de 7o millions de
[lieds cubes, et fournirait l»'s matériaux d'un miii' liant de six pieds,
long de mille lieues, qui ferait le tour de la Fraïu'e. Supposez la
Grande Pyr;iiiiid(' en fer blanc creux : elle pouri'ait se placer sur
Saint-Pierre de Uome, qui disparaîtrait comme une muscade sous
le gobelet. (J.-J. Ampère.)
Leur masso indcslrucliljle a fatigué le temps.
(Delii.le.)
Audacia saxd (Stace) : audacieux rocbers.
Portentosœ moles (Pline) : masses monstrueuses.
Du haut de ces monuments, quarante siècles vous contemplent.
(Bonaparte.)
Pyrénées, l'yrenœi (montes).
— Il n'y a plus de Pyrénées! Lorsque le duc d'Anjou p;rrtit pour
régner en Espagne, Louis XIY, pour marquer l'union future des
deux nations, dit : « Il n'y a plus de Pyrénées ! »
Pyrrhonisme, doctrine professée par Pyrrlion, (pii avait pour
principe de douter des choses que tout le monde regarde comme
certaines.
Haliitude de douter de tout; scepticisme.
Pythonisse, ou l'ylhie.
Devineresse, femme qui exerce la divination par le moyen d'un
esprit malin qui est en elle. (Actes des Apôlres, ch. XVL)
Cet esprit s'appelait Pytbon, surnom d'Apollon, qui rendait ses"
oracles à Delphes sous le nom de Pythien, parce qu'il avait tué le
serpent Python.
:m OUA
Q et K se prononcent souvent comme c dur. Le «y ne faisait point
partie, primitivoinont, de l'alplKibet des Latin?. Ils le remplaçaient
par r et (Mi-ivait'nl ohlicnni, lociinlnr. On rinlr(jdi]isit plus tard
pour r('iii[tlarcr la syllabe eu, et on ne le (il pas suivre d'abord
de 1';/.
Au xvie siècle, il s'éleva une dispute, entre la Faculté des lettres
et celle de théologie, sur la manière de prononcer le q. La Sorbonne
soutenait que, dans les mots latins rjuisquia, quanquam, on devait
prononcer /dsLis, kankan : et le grammairien Ramus, dont l'opi-
nion prévalut, voulait, qu'ils se prononçassent comme ils s'écrivent.
(Voy. cancan.)
— Les mots français coq et cinq sont les seuls, avec \'0>/)rq, qui
terminent par un q.
Autrefois, ou y pouvait joindre desjucq, matin.
Chantons Noël du soir jiisquan dcsjnc(i.
{('.. Maiiot.)
Quadragésime. (Voy. canhne.)
' Ne s'emploie que dans la locution ecclésiastique : dimanche de la
Quadragésime.
Quadrature du cercle.
Problème insoluble, puisque le rapport de la circonférence au
diamètre est incommensural)le. (Voy. cercle.)
Quand, du latin quando, provençal quan.
Quand les canes vont aux champs,
La première va devant...
Se dit à ceux qui demandent trop souvent : Quand sera-ce ?
— En Normandie, ou dit : « Tu partiras quand nous. »
Cette locution était autrefois quand et nous.
Quant, de quantutn, se joint à à.
Quant à moi : pour ce qui est de moi.
A été aussi adjectif, Aenant de quantus, comme on le voit dans
l'expression : toutes et quantes fois.
OUA ?,'M
Quarantaine, di'ri\é di' t/i/arait/c, i/iiadi-af/i/i/a.
Noiiiltre de quarante ou environ.
— Temps qu'un navire reste isolé des lialiitants d'un pays,
Ioi-s(pril vient d'un lieu oi'i rè.iiue une maladie contagieuse.
1/épreuve devait, autrefois, durer quarante jours, d'où lui était
\enu son nom, qui est demeuré, quel que soit le noini)re de jours
ipie dure la séquestration.
Quart, du latin (judiius, quatrième.
— (juart d'heure. On dit inipi'oprement : six heures, huit heures
moins le quart : parce que le quart est relatif à.la quantité d'heures
énoncée: tandis que un quart est a hsolu, et représente le quart
d'une unité. Ainsi huit heures moins le (juart, [)ourrait, à la rigueur,
sitiuiller six heui-es. en retranchant le quart de 8, qui est 2. Mais
S heures uuiins nu quart ne peut exprimer que 7 heures 3/4... Tout
au plus peut-on dire : une iieure moins le quart.
— Le quart d'Iieure de Ualielais. (Voy.)
C'est le moment de payer ce que l'on doit ; moment toujours
désauréahle et souvent emharrassaut.
— Passer un mauvais quart d'Iieure. Les anciens attrihuaient
une mauvaise influence à certaines heures ; d'où viennent l,es mots
malheur et bonheur (?).
Quartier, dérivé de quart.
Ce mot. qui siuniliait le quart d'un tout, a pris le sens de partie
d'un tout divisé en un nomhre quelconque de parts.
— En terme de blason, le quart ou l'écart de l'écusson écartelé.
Un écusson est contre-écartelé, quand un de ses quartiers est
lui-même écartelé.
/ escut en JllI earliers, et en cascun ea?'fier a I leo. (Tarif des
monnaies de Provence.) Un écu en quatre quartiers, et en chaque
quartier un lion.
Dans les généalogies, on appelle « quartiers de noblesse » chaque
degré de descendance, soit en ligne patei'uelle, soit en ligne mater-
nelle. On ne pouvait être reçu dans certains ordres, sans avoir
justifié d'un certain nomhre de quartiers. Il en fallait huit pour
entrer dans l'ordre de Malte.
. Cette acception du mot quartier vient de ce que les parties d'un
grand écusson contiennent les armoiries ditïéreutes désignant les
divers chefs dont on descend.
A l'origine, on mettait sur les quatre coins d'un tombeau, les
'X\S Ql'A
écus du p(''rc, de la iikto el des deux ;jï»'u1s du défunt. (Ju \uil, en
Allemagne, des toui beaux où il y a 8, 10 et 32 quartiers.
— Quartier de ville. Avant Pliilippe-Au.uuste, Paris était divisé
en quatre parties qui étaient nommées quartiers, à cause de leur
noml)rc : la Cité, Sainl-Jacques-la-Bouclieric, la Grève et la Yerrei-ie.
Depuis 1800, il est divisé en 20 arrondissements et 80 quartiers.
— Pas de quartier, sans quartier. Autrefois il était d"usagc, dans
les camps, de racheter un prisonnier de guerre en payant pour sa
rançon un quartier de la paie;'i l.-ujncllt^ il avait droit par son grade.
Quasi, advei'he latin : presque, en quelque sorte.
On dit aussi qudximent.
C'est une ville, en vérité.
Aussi grande (juasi (](ie Tlicbos.
( Mor.itni:, .1 inp h itrijon .)
Quasimodo, le premier dimanche après Pâques.
Ce nom est emprunté aux premiei's mots de \ introït de la messe
de ce jour ; Quasi modo geniti infantes.
Quatre, du latin quatuor.
De là : quart et quartier, cadran, écarleler, etc., équerre (en
provençal escairc) et équarrir, mettre d'équerre ; quadragésime,
carême, carré, quadrature.
— Se mettre en quatre : déployer beaucoup d'activité, se multi-
plier.
Dans le Berry on dit : se mettre en deux, se dédoubler, d'une
femme qui accouche.
— Avoir de l'esprit comme quatre : faire le diable à quatre ; tiré
à quatre épingles. 0 oy- ^'c^ mots.)
— On remarque que le nombre quatre a été appliqué à des
usages très nombreux. Il y a : *
Les quatre âges du monde ; les quatre points cardinaux ; les
quatre saisons ; les quatre temps ; les quatre règles de l'arithmé-
tique ; les quatre éléments ; les quatre quartiers de la lune : les
quatre conjugaisons ; les quatre évangiles ; les quatre épices
(girofle, muscade, poivre, cannelle) ; les quatre fleurs (coquelicot,
violette, mauve, camomille) ; les quatre fruits (datte, figue, jujulie
et sebeste).
— Les Quatre-Temps sont des jours d'abstinence et de jeûne
ordonnés par l'Église, au commencement de chacune des quatre
saisons de l'année.
()VK 339
Quelqu'un, di' (/nchjue et tic un.
Parriit ili' /x'/sonuc, (/itc/tj>/'i/n ost r;iiiloiir de tout mrfnit
aiionyiiio.
Quclqu'im ;i l;iit cela. Cliaciin a eiileiRlii din; cela à (iiiel(|iriiii...
Il n'y a pas une làclieté, un mensonue, une boui'de, une calomnie
qu'on ne mette sni- son coni|ite. Si quelqu'un existait, il réclame^
rait certainement en justice contre l'alius ([u'on fait de son nom, en
le rendant responsalile de toutes les turpitudes de riiunianilé.
(Voy. on.)
Quenotte, ancien Irancais t/uf/uie.
Terme lamiliei' : petite dent, comme celle des enfants.
Petites ([ucnottes jolies. (Molière, Princesse d' Klide.)
Querelle, du latin (jnerehi, plainte, lamentation.
(Voy. querelle d'A/fe/nand, (ihjurade, Cas/il/e. noise.)
. — Synonymes: prise de bec; le torchon Ijrùle, se dit d'une
querelle de ménage : chercher ([uerelle ; chercher garouille ; avoir
des mots ; échanger des gros mots ; avoir des raisons.
— Querelles de gueux, durent peu.
Querelles de gueux qui se raccommodent à la gamelle.
A la suite de bien des duels, il n'y a de tués que des poulets.
Un diner a un coté excellent : on se rencontre, on se voit, on se
parle, on fraternise, et tels qui arrivent brouillés à mort, finissent
par choquer leurs verres et par se donner la main.
(Yoy. ami de table.)
— Les querelles ne dureraient pas tant, si tous les torts étaient
d'un seul côté.
Quérir, du latin (juœrere, provençal querre.
Ce terme n'est guère resté que dans ses conqjosés et dérivés^ ;
quête, question : acquérir, conquérir, s'enquérir : exquis, requête,
perquisition, etc.
Questeur, du latin quo'sior.
C'était, à Home, le magistral chai'gé de l'administration des
revenus publics.
Dans les assemblées parlementaires, ce sont les membres chargés
de diriger renqtloi des fonds alloués à ces assemblées.
Quêter, dérivé de quête, quœsita.
Aller à la chasse avec un fusil de toile.
Quêtes de charité : bienfaisance à la lire.
340 QUE
Queue, du Ifiliii raiuld. de c<i'tl<i, piirrc ([n'oii coiipo sans daiifror
la (iiK'iio à (('l'iaiiis ;iiiiiiiaii\.
Quia sine damno ohsi-rfdin', ui canihits vidiimix. (Vossius.)
— Dérive : roiiai'd. coiiai'disc.
— CliifMi d(ï voleur ! si lu recommences, je te couperai la queue
au milieu du dos.
— J)i cauda vencnum : le poison est dans la queue : c'est-à-dire
le piquant, le trait d'une anecdote, d'une épiuramme, se trouve
dans le mot de la lin. Tout l'intérêt d'une lettre est souvent dans
le pnst-scrij)lum.
— Queue rouge. On désigne par là les bouffons de théâtre, les
successeurs de Jocrisse et de Cadet-Roussel, qui llorissaient au
temps du premier Empire, et qui portaient sur la scène une
perruque dont la queue était tortillée d'un ruban rouge, pour
amuser le public. (Voy. 7mban.)
— Il n'est pas cause que les grenouilles n'ont pas de rpieue. C'est
comme : il n'a pas inventé la poudre ; il man(iue d'esprit.
Ce proverbe vient de l'observation du pbénomène de la méta-
morphose du têtard en grenouille. Le têtard destiné à se trans-
former en batracien est un poisson manquant de nageoires latérales
et de vessie aérienne, mais pourvu, comme organe de locomotion,
d'une queue plus large et plus longue que le corps, et qui lui
permet de se mouvoir comme avec la rame d'un godilleur. Cette
queue formidable a, pour la soutenir, un prolongement de la
colonne vertébrale : pour la mouvoir, des muscles puissants; pour
la nourrir, des vaisseaux considérables ; pour l'animer, de nom-
breux nerfs. Pendant la métamorphose, la queue, qui va devenir
inutile, décroît et se résorbe, pour servir au développement des
membres de la grenouille.
— Pacha à trois queues. Des queues de cheval, au bout d'une
hampe, servent d'étendard aux Turcs. C'est aussi un signe de
dignité dans la hiérarchie militaire. Ainsi, le grand seigneur a sept
queues : le grand vizir, trois, etc.
— Ruban de queue. Route longue et ennuyeuse.
Au commencement du xix*^ siècle, après la grande perruque de
Louis XIV, vint la mode de la queue, ou sa/si fis, qui était une
longue mèche de clieveux, réservée derrière la tête, et qui pendait,
roulée jusque dans le dos. On se servait pour cela d'un long bout
de l'uban noir, que l'on tournait autour de la queue de cheveux,
pour imiter le légume dont la mode avait fait une sorte d'ornement.
OUI 3il
Queux, (lu lutin rnqiiux. ciiisiiiier : cot/iio. cuire; italien cuoco.
On dit aussi ro//. iii;ii(i-i' (■()([.
Qui, (lu latin t/i/i. Pronom conjonctif et inlerrouatif : é([uivaut à
U'ijucl et à ItKiui'llc.
I.r lli;il (r,-llllnll|- csl llllc I'IkIi' IM'illC :
i.nrsi|irii nous tient, il nous faut (ni mourir ;
l/lii'il)(' (les prés, (|iicl!(' est si souveraiao,
)/lifi|ii' (ji's près ne saurait en gut-rir.
(Oli.iiil [)0[)ulairp. \'oy. Mouilouv, i7 inni IS53.)
— Qui est-(M^ ({iii la fait >. (|ui est-ce qui l'a pondu? qui est-ce qui
l'a couvé l H(''i)onses à des questions trop multipliées, ou trop
pressées.
— L'ahhé de Marsy, commentateur de Rabelais, au passage du
livre Y, cli. 18 : « jusqu'au cul », dit qu'un jour le Dante reveuiint
de la foire, trois ucntilsliomines le rencontrèrent, et lui dirent,
en parlant tous à la fois :
« — Bonjour. seiLineur Dante. — D'où venez-vous, seigneur
Dante l — Le gué est-il profond l »
A quoi le poète répondit :
« — Bonjoui'. — De la foire. — Jus(prau cul. »
Quia, mot latin : parce que.
— Ktre réduit à quia : ne savoir que dire, que répondre.
— Dans les disputes de l'École, où l'on discourait en latin, celui
qui ne savait donner le pourquoi d'une chose, disait : quia. quia.
et en restait là. (\o)'. mettre à cul.)
Régnier (Satire X) dit :
l'ar liasard disputant, si rjnelipriin lui rt^'pliipie
Et (}u"it soit à quia : Vous cMes liérétiiiue !
Quibus, mot latin. Sous-entendu oninia flniunt.
L'argent. (Voy. /i/iauce.)
ïu sais fart deinploycr m^ljlement ton (luitms.
(DKSHOLI.ItKKi.)
Quiconque, latin quicauique, tout homme qui.
(Voy. (Ji//nc(n/i/)oix.)
Quidam, mot latin : un cerliiin.
Terme de palais : personne dont on ignore le nom.
Quiétisme, du latin quic/us, tranquille.
Erreur de certains mystiques qui font consister la perfection
n42 QUI
clirélionne dans l;i seiilf roiilcinjil.'ilioii. on nruliuïMiil (■iirK'rciiif'nl
U'S a'iivros exlrriciircs.
Quille, pour rsfinilh' ('.), (''ciiillo de bois.
Ail \\\i\\vv et l'.iiiiilicr : j;iiiibo.
— Doimcr ;'i (iiiolqii'iin sou sac cl ses quilles : le ronvoycr.
Quincampoix, du latin (j u i ru m (ju (;('.).
Une de l'aris, niodilicalion de qui (pien jKnst . fjiii (jni sen l'àclie.
De môme Quiquengrogne élail une maîtresse tour, conslrnile en
dépit do (^o\\\ qu'exile menarait. « Je la brilirai, qui qu'en .uro.une. »
(J:o(jncr est remplacé par r/i'oi/sscr. dans les vers suivants :
.le l'oluurnrniN . qui i\\['r\\ .unuissc,
Devers cet a(i\t)eat (rcain' douce.
iP'll'-lhi.i
— La rne (>^// qu'en tonne, est devenue Tiquetonne.
— Il y a aussi un Ouincampoix sur la route de Rouen à Lille.
— M. Paulin Paris, dai)s un discours d'ouverture du cours
d'bistoire de la langue française, au Collège de France, où il rem-
place M. Julgard Quinet, s'excuse modestement de son insiiflisance :
mais le ministre l'a nommé, et « bon gré, m;\\ gré, il faut passer
outre, comme on disait autrefois, qui qu'en ait, qui qu'en grogne ».
M. F. Génin dit que « qui qu'eu ait » est un idiotisme, et n'appar-
tient pas au vieux langage français.
Quine, du latin quini, cinq à la fois.
Cinq numéros pris à la loterie et sortis ensemble de la roue.
— Le quaterne, quatre numéros sortant ensemble, se payait
To.OOO fois la mise. Le quine ne se jouait pas à la loterie de France.
Quinquina, du péruvien klnakina, écorce des écorces.
Le quimiiiiua a été appelé « poudre de la comtesse ». C'était la
comtesse Cbiuchon, femme du vice-roi de Lima, en 1G38, qui fut
guérie par la vertu du quinquina.
D'où le nom scientifique de cinchona, donné à la plante.
— Le sulfate de quinine a été trouvé, en 1820, par Pelletier et
Caventon.
— On appelle « quinquina indigène » la racine de gentiane. (Voy.)
Quintessence, de qubita essen/ia. cinquième essence.
Cliez les anciens, c'était la substance éthérée ; les quatre pre-
mières étant les quatre éléments : la terre, l'eau, l'air, le feu.
— Les essences sont plus ou moins cbargées d'Iiuiles odorantes,
QUO 343
pnr dos (lislill.itioiis iriu-lccs, et on appelle eau de lleiir d'orange
ddultle. iri|ilf. etc.. Teaii plus ou moins chargée de parfum; de
soric (pic celle cpii aurait clé distillée cinq fois serait véritablement
de la (piiutessence de lleur d'orange.
— On i-emplace coui'ammeut f/itin/essrnrr par c/ixir, de l'arabe
c// a/,s/r. esseii'-e i)ai" t>\relleuc('.
Quinteux, de mauvaise iiunicur. (Voy. grincheux.)
(juinteux comme la mule du |)a[)c.
Quinze-Vingts, ib'tiiital des aveugles, à Paris, fondé par saint
Louis, pour trois cents de ses cbevaliers. qui avaient perdu la vue
en Palestine.
Quiproquo, du latin (pii pro ([uo. Prendre un (lui pour un <iU() ;
ou (/>//// jiro >/>/().
— (jui[)roquo (l'aiJOtliicairc : méprise grossière.
— Au XIV et au xv"^ siècle, les médecins écrivaient ces trois mots
dans leurs ordonnances, en tète d'une colonne particulière, où ils
indiquaient plusieurs drogues susceptibles d'être substituées à
d'autres, dans le cas où celles-ci manqueraient.
— Quiproquo est invariable.
Quoi, du latin quid. Pronom relatif et inlerrogatif.
Ouoi ? de quoi ? Qu'est-ce ? qu'y a-t-il l
De quoi ! est pour : de quoi s'agit-il ?
Quoi ! Eh quoi ! sont des exclamations d'étonnement.
— De quoi, s'emploie substantivement, dans le sens de bien.
Cette femme est un bon parti : elle a de quoi.
Ils trouvaient aux champs trop do (pioi.
(I.A FoNrAIMC.)
— De quoi ! exclamation populaire, pour exprimer l'indignation
qu'excite une prétention exagérée.
Quoique, conjonction adversative, de quoi et (pie.
C'est un solécisme de création moderne, composé de quid et de
quod . 11 ne se rencontre dans aucun auteur français ancien. Il est
dit dans le sens du latin quanioi.s.
On doit le remplacer par encore que.
— Quoi que, écrit à distance, est seul français.
(Juui (luon dise Ai'istole et sa docte cabale...
— Le général Cialdini est appelé à remplacer à Paris l'ambassa-
deur Mgra. Les journaux religieux reprochent au général italien
344 ]\\\i
(l'nvoir coiilrihiK'' ;'i d(''[>oss(''(lf'r If iiiipo do son ])Oiivoir toinporel ;
l'opiiiidii |»iil)li(|ii(; riicccpU'. non |);is (jnoiqnc, ni;iis piircc (jne.
Quolibet, du l;ilin (/i/od lihrl, ce ({ni ()i;nL
Phiisanlcrio trivi.ilc
Quote-part, du l.ilin (piola pars, fiiiollo |);ii-|.
(Juolc csl do jnônie origine qiio (jiKtlicnl, di; (jnotu's, conihion do
fois le diviseur est contenu dans le dividende.
— La qiiolo-|)artest la part qui ro\iontà chacun des ayants-droit,
dans une répartition ; ou ce que chacun doit payer.
R
R. Mensibiif; errntis, purissi7na vlna bibatis. Dans les mois
qui contiennent un 7% il faut boire son vin sans eau.
Si les mois ne sont erres,
Le poisson no nian.ii'i'z.
(Xllime SlKCl.E.)
Rabâcher, do re et do bâche (?).
La bâche est une sorte do cuvette, où se rend l'eau puisée par
une pompe aspirante, et où elle est reprise par d'autres pompes
pour être élevée do nouveau. Ainsi ral)àcher, c'est répéter toujours
la même chose.
Eu provençal, rabàcbeur se dit rababeon, ropépiairo.
— Rabâcher, selon F. Génin, ne vient pas de bâche, qui n'existe
pas dans la langue avec le sens de cuvette : ce serait un composé
dont le simple manquerait.
D'après lui, rabâcher est pour rêvasser, fréquentatif péjoratif
do rêver, qui se rencontre souvent dans les vieux autours, pour
exprimer l'idée attachée à rabâcher. Quant à la permutation de v
en 6, elle est aussi fréquente que colle de c eu ch. D'où la formule
V=:B, C=^Gh.
blem dictum est crniies.
(Ti:m;><:i;, Hvautoniimoi-oumvnos, V, 1.)
Incudem eamdem t a nd ère {Ckér on) : rebattre la même enclume.
Rem iota die concoquere : cuire toujours la même chose.
— Fonlenello dit à un rabâcheur qui lui racontait dos faits très
connus : « Monsieur, il faut que ce que vous me dites soit bien vrai,
RAB 3'io
car vous iiio l'iivo/. ceiil l'ois riiconlé. t'I je lai CL'iit fois ciiteiidii
raconter aux autres. »
rJiiIaiiKinl raconte à morvoille,
Mais il je faut \oir ran'iiiciil :
Le prcinicr jour, il est cliarmanl,
l'jisiiilc il est moins anuisanl,
i^uis il (k'vi(Mil lin peu iH'danl :
Bref, il se ivpMe, et sotiM'ut
Vous savez par coMir (l("'s la x^illu
Ce qu'il dira le jour sui\anl.
Rabat-joie. Personne triste, sévère, et qu'ennuie le plaisir des
antres.
Rabbin, de raùoin, diable O'idocq), qui vient de l'espagnol
i^afjo, queue.
— Ce nom a été donné aux docteurs juifs, parce que le mépris
pour leur race, au Moyen-Age, les avait fait com[)arer au dial)le.
— Plus probablement de l'iiébreu rahbl, titre d'bonneiir qu'on
trouve dans l'Evangile.
Rabelais.
Hoileiiu appelle Uabelais « la raison liabillée en masque ».
On Ta aussi appelé l'Homère boulîon.
— Les deux mots arabes r«6, le:, signilient maître moqueur.
— Rabelais signait ses ouvrages Alcofriôas Na:ier , qui est
l'anagramme de François Rabelais. Mais il ne signa ainsi que les
deux premiers livres ; son nom parut en tète des suivants.
Il représente, dans son livre, Louis XII sous le nom de Grand-
gouzier ; Gargantua est François !«'• ; Pantagruel, Henri IL
— La robe de Rabelais. Rabelais, cbargé, par la Faculté de
Montpellier, d'une mission auprès du chancelier Duprat, premier
ministre de François !«■", obtint de lui le maintien des privilèges de
cette Faizulté. C'est en mémoire de ce service, et à cause de sa
grande célébrité, qu'on a conservé jusqu'à ce jour, à l'école de
médecine de Montpellier, la robe qu'il revêtait pour professer ses
leçons, et qui était de drap rouge à larges mancbes, avec un collet
de velours noir, sur lequel étaient brodées en or les initiales de
son nom : Franchcus lîahedvsiis Chinonen.sis.
Les bacheliers revêtaient cette robe pour être reçus docteurs, et
ne la quittaient pas sans en emporter un morceau, comme relique
et souvenir du grand docteur. Elle devint si courte, vers 1600, qu'il
fallut la remplacer, en 1610, par une robe neuve, et François
Raucbin, chancelier de la Faculté, la remplaça encore en 1700.
346 \\m:
— Le qiiiirl (l'In'iirc de l{;il)('l;iis : le iiioiiiciit de p.'iycr.
l{;il»t»I;iis (''Uinl ;i Home, en l'i^i, (huis l;i suite de l'évoque, de
Paris, Je;in du Hellay, ainbassadeiir de Fi-aru-ois I" aiiprrs du pape
Clément VII, fut rappelé en France. (•////•// /)/-//ici/)is /i(iiri<i'(iiir
rare, dit-il. Peut-éti'e allail-il portci' an l'di (picl(|ii(' nicssage inipoi'-
tant de son ambassadeur.
On raconte qu'arrivé à Lyon, ayant é|)iiisé sa iioiirsc. il imagina,
pour ne pas trahir le secret de sa mission, un stratatiéme (pii est
passé en proverbe sous le nom de « quart d'heure de Rabelais ».
Après avoir l'éuni tous les principaux médecins de la ville, il ferma
toutes les portes, et leur montra avec le plus urand mystère, des
poisons qu'il disait être allé rhei-cher en Italie, pour tuer le roi et
ses enfants.
A cette révélation, on s'eini)are de lui, on l'enferme dans une
litière, et on l'emmène à Paris sous bonne escorte, avec tous les
égards que méritait un personnage de cette importance. C'est ainsi
qu'il arriva à Paris sans bourse délier. Le roi lui fit le meilleur
accueil.
— L'idée de la mort nous annonce un quart d'heure qui est pour
tout le monde le quart d'heure de Rabelais. (Le petit père André
de retour de l'autre monde.)
Rabobiner, abréviation de rabobcluier (argot).
Raci'ommoder ; de bobel/ns, vieux souliers.
Dans la corporation des cordonniers, l'ouvrier, pour passer
maître, devait, comme épreuve, raccommoder trois paires de vieux
souliers pris au hasard dans un sac.
Raboni (Saint).
Dans l'hagiographie fantaisiste du peuple, saint Raboni est réputé
pour rendre meilleurs les caractères difficiles. La maligne légende
de saint Raboni rapporte qu'une chapelle de l'église Saint-Pierre,
à Montmartre, était dédiée à saint Chrysogon, que le peuple avait
nommé saint Raboni, et à qui il attribuait le pouvoir de ramener
les maris égarés, à de meilleurs sentiments à l'égard de leurs épouses.
Un jour, une femme, au l'etour de ce pieux pèlerinage, apprit que
son mari venait de mourir subitement. Elle s'écria : « Que ta bonté
est grande, saint Raboni ! tu accordes plus qu'on ne te demande. »
Raca, mot syriaque signiliant imbécile, tète faible.
Ce mot.se trouve dans saint Mathieu (V, 22;, avec le sens de
homme de peu d'intelligen<?e, tète vide.
IIAC 347
En provon(;;il. iino rosse.
(JiKii} iiir aourcn de la racn.
(Rmmbali) uk Vaqieras.)
(Quand il me souvient de I;i rosse.)
Racaille, de l';iiii:l;iis /v/r/,-. chien.
A le même sens, avec une niKince de mépris pins forte encore,
qne canaille.
Qiielqnes-nns le l'appi'oclicnt de race: mauvaise race, lie du
peuple.
Race, du vieil allemand rclca, ligne ; plul(Jt que du latin vadix.
— Au Pérou, le mélange des générations qui se sont succédé
dans le pays, a donné des i)i'oduits variés, désignés sous le nom de:
mcfis, né du blanc et de lindien ; mulâtre, du blanc et du noir;
créole, du blanc et du métis; :ainbo noir, du nègre et du mulâtre.
— Chaque race a sa larasque. (Voy.) Il y a dans chaque famille
une plaie, comme un ver dans une pomme.
Presque toute faniillt' un jieu nombreuse est aflligéed'un membre
qui tourne à mal. et se met à déshonorer un nom bonorable. On a
vu les plus grandes maisons attristées et compromises par ces
parasites de famille, altiuu's de vices, de paresse et d'inconduite.
(J. Janin).
— Il vaut mieux être le premier de sa race que le dernier.
Iphicrate. capitaine athénien, était fils d'un cordonnier. Un noble
lui reprochant la bassesse de sa naissance, et faisant valoir l'éclat
de la sienne : « Je serai le premier de ma race, dit Iphicrate ; et
toi. tu seras le dernier de la tienne. »
— Un Grec obscur ayant reprocbé au Scytbe Anacharsis la
barbarie de son pays: « J'avoue, dit le Scythe, que ma patrie me
fait honte: mais toi. tu fais honte à la tienne. »
— U petite noblesse du sang ! tu es bien un manteau qui raccour-
cit vite, car. si on n'y ajoute un morceau de jour en jour, le temps
tourne à l'entour avec des ciseaux. (Dante, Paradis, XVI, 6.)
Racine, du latin î'adicina, dérivé de rodix.
— Vivre de racines : se nourrir très sobrement.
Les peuples qui se nourrissent de végétaux sont les plus beaux
et ceux qui vivent le plus longtemps.
On peut citer en exemple les Suisses et les Russes, pour l'Europe.
Les nègres, qui supportent tant de fatigues dans les colonies, ne
vivent que de manioc, de patates et de maïs. Les Brahmes de l'Inde,
qui atteignent souvent la centaine, ne vivent que de végétaux.
348 H Ai
Pytliafïoro prosci'i\;iil de r.iIiiiK'iil.'itioii l;i r\\;\'w de tons les
;iniii);tiix. et iiiôiiic (incliiiics \(''.u(''t;iii\. (Voy. j'i-rc)
Les cliiirli-fiix et cciliiiiis ordi'(3S religieux d'une di<(ij)line sévère,
ne se noun-issenl que de végétaux.
— Après la mort de Corneille, un ('omédien jlil :
Piiisi|iii> ('(iriK'ilIc est iiKirl. i|iii ikuis <l(iiiii;iil ilii paiiu
F;iiil \ivi'(' (le li;iciiii', on liii'ii imnirir île fjiiiii.
Radical, partie (ixe des mots variables, par op|)Osition à la
partie qui change, suivant le cas, le genre, le nombre, etc., et qli'on
appelle désinence.
Radoter, vieux français reduler : de l'anglais dote.
— Étyniologie burlesque : avoir des rats.
— Le Yayer fait venir ce mot A' Ilérodoïc, dont les Histolrea
contiennent des faits basardés et trop extraordinaires pour être
vrais ; mais c'est plut«')t nue allusion maligne (ju'une étymologie.
— F. Génin remarque que nous nous servons du mot recul qui a
remplacé redos. On disait : être, aller à redos, c'est-à-dire à recu-
lons ; redoler, c'est-à-dire tourner le dos au but, et. par métaphore,
déraisonner de vieillesse.
■ Cctrirs li )n(i(jnes vielz est cl redotr.
(Koi.AM), 1. 240. \
— Avant d'arriver à radoter, on a dit se radoter, de même
qu'on dit se reculer : mais la forme réfléchie a disparu, et radoter
ne laisse plus deviner la racine dos qu'il renferme.
Raffiné, de re, ad et fin. (Yoy. petil-)naître.)
Les raffinés étaient des jeunes gens élégants, duellistes et débau-
chés. Ils portaient un ricbe costume tailladé, et un court manteau
brodé d'or.
Les mignons de Henri III étaient le type des raffinés.
Sous Henri lY, la plupart des raffinés étaient de jeunes Gascons,
qui se querellaient pour des riens, prétendant ainsi raffiner sur le
point d'honneur.
Raie, du verbe rayer, latin radiare, de radius, rayon, plutôt
que du grec rhagos, fente, crevasse (?), d'où les Provençaux ont
fait ra^ffs, source sortant d'une fente de rocher; raiar, couler:
ragassa, fille; raissa, ondée.
Railler, de ridiculare{l), ou plutôt d'un diminutif de radere,
raser.
— Ne raille personne : Xemincin irriscrh. (Caton.)
La raillerie est de toutes les injures celle qui se pardonne le
moins. (Platon.)
Raisin, du latin /•arc/m/s, proveiieal /'aci/ii.
Synonyme : vin en pilules.
Cure pour les l'aisins : cure uvale.
Raison, du laliu /•///in (douidel de ratio/i], mesure...
L'idt'c priniilivc. (pii Nient de Dieu, est toujours l)onne.
— Quand l'idée est dominée par la raison, elle produit le bien :
quand l'idée domine la l'aisou. elle produit le mal.
L'arsenie est un médicament, ce n'est pas un poison : c'est une
question de quantité.
La ciauë, qui tue l'homme, donne d'excellent lait : c'est une
question de tr;insformatiou.
LIniitre devient perle; c'est une question de temps.
— Cela n'a ni rime ni raison.
uiicliliie sujet (|iroii ti-aili", ou plaisant ou subliiiii',
oiM' idu jdiu's le hiin .sens s'accoi'de avec la rime.
fBoii.KAU, Art pij('lii/iie, I.)
— Ouaud Jupiter veut perdre un homme, il lui ôte la raison.
Qho-s cuit perde re Jupiter, dementat.
Ce vers d'Horace a été traduit éloquemment dans cette impré-
cation de Joad, au l'^'' acte d'Alhalie :
Daijjro, daigne, mon Dieu, sur Matlian et sur elle
Répandre cet esprit dimprudeace et d'erreur.
De la chute des rois funi'ste avant-courear.
— Un être de raison est un être purement imaginaire, comme
un palais de diamant, une montapne d'or.
Raisonner, dérivé du précédent.
La ressemblance de son avec réfio/iner a amené de nombreux
jeux de mots par comparaison : raisonner comme un taïubour,
...comme une cruche, ...comme une pantoufle.
Il parle comme un livre, et raisonne comme la couverture.
Râle, onomatopée; ou verbal du verbe i-dler, d'un mot bas-latin
rasculai'e, râler.
— Au propre, l'oiseau dont le cri est devenu appellatif.
Au figuré, lu'uit ([ue produit le passage de l'air à travers les
350 RAN
iimcosUés acciiiniilécs daiis-lc larynx ou dans les liroinlies, qui, en
rétrécissant ces condnits aériens, modifient la nature du son.
Râler, \ieii\ mol : marchander.
/{a/ri/sc, |)(Hir t'ar()/eus(>. Femme du Temple, qui arrête le pas-
sant pour lui vendre sa marchandise, ap{)elée elle-même « râleuse ».
On donne aussi ce nom à la cliente qui marchande sans acheter.
Ramage, du mol lalin /■a/na/inn/i.
(]e mot était d"al)0i'd adjectif, et si^niliait :.qui touche aux
rameaux. Le chant ramage était celui que les oiseaux laisaient
entendre dans les i-ames ou hranches des arhres.
liamagc s'emploie aujourd'iiui seul, et comme substantif.
Ramasser, de re et amasser, du lalin massa, \\\\\[CA que de
ramus.
C'est, au propre, relever de terre des rameaux et des hranches (?).
D'où le jeu de la ramasse, dont parle Ral)elais (1, 22), qui consis-
tait à se traîner les uns les autres sur une espèce de civière faite
de ramée.
L'idée de ce jeu vient des Alpes, où, en temps de neige, on
nomme ramasse un traîneau improvisé avec des hran(;hes d'arltres,
sur lequel les voyageurs se font ramasser, c'est-à-dire descendre.
— Se faire ramasser, se dit aussi au jeu des montagnes russes.
— De ramasser est venu ramassis, tas d'objets sans valeur.
Rameau, du latin ramus, a donné ramier, pigeon qui perche
sur les rameaux des arhres. (Voy. ramage.)
Ramoner, du vieux français ramon (balai fait de rameaux de
1)0uleau), de ramus, branche.
— Charles de Bovelles décrit en quatorze vers l'utilité du ramoJi
qui se compose de trois choses : i° le menu, qui sert à fouetter les
enfants ; 2" le manche, à battre les valets : 3° la hart (corde), à
pendre les larrons. Après quoi il ajoute :
Ainsi avons en la maison
Trois jusliciers sur ce ranion :
Par (luoi ramon est ciioso digne
De mieux servir qu'en la cuisine...
Ramoneur.
Synonymes : Savoyard, hirondelle d'hiver, Jean de la suie.
Rang, de l'allemand ring, ordre, arrangement.
— Il faut serrer les rangs. Se dit quand la mort fait des vides
parmi les soldats pendant la bataille.
RAS 331
Oiiniid on nvanco dans la vie, on voi; tomber pou à pou auloiir
(k' soi les amis do sa jouiicssc. C'ost aiui-s qu'on doil rodoiiiilcr
d'alïectidn [khii- mw (pii rcslcnt. et (pic ce mot [)eut avoir une
anicre ;ipplic;ilion.
Raphaélesque. Pcintur-e dans le style de Raphaël, 1(^ peintre
le plus (('Ifliic (les temps moder-nes. et dont le nom, aussi populaii'e
(piilliislre. coiiiiiie celui d'Apelle dans l'antirpiité, est dans toutes
les bouches, ipiaud on veut personnilier en quelque sorte la peinture
dans ses qualités les plus élevées.
Rapport (sous le\ est une locution qui n"a pas de sens.
/{'//>/)()/'/ estuiu^ absti'action ; comment peut-on être placé dessus
ou dessous^ On ne peut donc pas dire (pi'un homme est très distin-
tiué sous le rapiiort de la science, sous tous les rapports. Un homme
est dislinuué [)ar rappoi't à la science, ou distinoué à tous é.uards,
sous tous les aspects où l'on peut l'envisager ; mais l'Académie,
sauf respect, ne iiarle pas l'rançais, en disant « distingué sous tous
les rapports ».
Rare, du latin l'arus.
— Rai'e comme les beaux jours.
Les anciens disaient : rcnvi aci.<;, un merle blanc.
— Faites-vous rare, on vous aimera. (Proverbe turc.)
-— Il ne faut pas se voir souvent, quand on veut se voir longtemps.
Ras, du latin rasns; doublet de 7'ec, roman.
— Au ras de i'eau : au ni\eau.
— Faire table rase.
— Rez-de-chaussée, rez-terre.
Rasette, en provençal, signilie un petit verre de liqueur plein
jus(pi'au bord.
C'est une sorte de diminutif de rasade.
Rasibus, origine commune avec le précédent.
Mot macaronique et populaire.
— Cela lui passa rasibus du gousier. (Mot/en de parreni?',
ch. 82.)
Car la porte le prit rasihiis à l'oreille.
(Poisson, Baron i/r la Craxxf.)
Rassasié, suppose assasier, du latin ad satiare.
Synonymes: saturer, sofder, du latin salnllarc: provençal
sadoular.
352 HAT
(lonf. le roiiiiin rissafs, nsscz, hcimcoiip.
Noiinain, iiiuiiic, pi'csin' cl poult.'ls
No sont jamais iikiiis ni saoulés.
(XVimc iioclf )
Rat, cl(i ?-as, ;i poil r;is, rMpc (0-
Se (lit pour jivarc, rapial.
— Avoir dos rats dans la tète : dos soucis ou des caprires.
L'ahhé Desfontaiiies pense (pie rat est ici an vieux mot fait du
laliii ralum, pensée, et que « avoir des rats dans la It'te *) signifie
avoir des id(!'es folles.
— Rat-de-cave. Petite hoiiuie [lour descendre à la cave.
S'applique comme sobriquet aux employés des Contributions
indirectes, qui exercent dans les caves des marchands de vins.
Ratafia, de rack (ou rhum) et tafia, spiritueux avec lesquels
on fait le rata lia aux colonies.
' D'autres l'on tiré de {rai) rata fiât, comme ratifier.
— L'usage de ratifier, dans les foires, le verre à la main, et l'an-
cienne fornuile qui précédait la signature dans les actes en latin :
Rea rata fiat (que la chose soit arrêtée ainsi), aurait fait donner à
la liqueur que l'on boit dans ces occasions, le nom de ratafia.
Rate, en provençal râtela, d'où rateleux ; QY\gmQ, néerlandaise,
plut()t que de radius, rayon de miel.
— Dans l'ancienne physiologie, on croyait que la rate était le
siège de la bile noire, et la cause de l'hypocondrie.
D'où la locution « désopiler la rate » : faire rire, rendre la gaieté
aux esprits atrabilaires.
Désopiler la râtelle soulaige les roignons. (Rabelais, 111, 4.)
Râtelier, dérivé de râteau, latin rastellum.
Espèce d'échelle placée horizontalement, pour recevoir le foin,
dans les écuries.
— Manger à plusieurs râteliers : tirer profit de plusieurs emplois.
— Mettre le râtelier bien haut à quelqu'un : lui rendre une chose
difficile.
— Quand il n'y a pas de foin au râtelier, les ânes se battent.
Ratifier, du latin ratum et ficare : approuver.
(Voy. prorata, rata /la.)
— Le conte l'un del autre segon sa rata. {Traite de l'arpentage.)
Le compte l'un de l'autre selon sa valeur.
Ratisser, scmlilc \(Miir de nih'dii.
— L'on M)iis fil r.ilissc. (W[W Inciilioii iro:;i(iii(\ ;icroiii|i;it:n(''e
d'un geslc imil.ilil. c^l duc ;'i rns;i<io niicicii de. f.'ilisscr une (•nrollo
do tniKic sur iiir' [.clilc r.î])(' de poche, poiii' olIVii' iiiie [d'ise à
(|iicl(|ii"iin. Elle sitiiiilic (|iron n'est pas disjiosé à nccorder l;i chose
deinimdée. C'est h' l'ctV.iin (riiiic \icillc ch;inson, ([iii r.ippcllc
cet nul ce :
,l';ii (lu hnii (;il»ac dans ma lahalicro.
Ravageur, industriel interlope, qui cherclio des ferrailles et
antres uhjels dans les ruisseaux. Après la pluie, il ramasse les
vieux clous qiu» l'eau y a entraînés.
Re, particule itérative, du latin re.
Elle entre dans un urand nondire de uiots : redire, refaire.
Elle marque aussi le mouvement en arriére : relliier.
Réalisme, du lalin rodlis.
Culte, poussé au l'analisme, du réel dans l'art et la littérature.
C'est, dans les arts, une reproduction exacte, absolue, de la réalité.
S'oppose à Yidéalismc, qui comporte l'expression, dans les arts,
des choses qui sont du domaine de l'imajiination et n'ont pas une
existence réelle.
— Le rêve du génie est de surpasser la nature en l'imitant.
Rébarbatif, send)le venir de barbe.
Se dit d'un homme qui résiste en face, an nez, à la harbe do
quelqu'un.
— On lit dans Froissard : « Voyez-les, ilz sont plus reharbatifz
que singes qui mangent poires et enfans leur veulent toUir. »
Rebattre les oreilles : répéter souvent la même chose.
Ohlnndcre a lires. (Cicéron.)
Per^ioiKua aurct.
(UoKAu:.)
(Voy. rabâcher.)
Rebours, du bas-latin rebi/i\sa.'<, hérissé (?). ou de re et de
l'allemaïul bor.sfe (poil, soie).
— Cela va à l'ebours, comme la queue d'un veau.
Relrorsiiiii crei^rU .taiiquani rauda, ritull. {Vi'XvowQ.Salirlcon.)
La qneue du veau ne ci'oissant pas à proi)ortion du corps, semble
rapetisser à nn'sure que le corps grossit.
— A chevaucbon de rebours (Hahelais) : à cheval, le visage
tourné vers la queue de l'animal.
23
354 REC
Rébus, mol lutin.
liii réhiis est iiiic li.mirc rcpréseiiUiiil riiii;i,u<' (!•■ l;i chose même.
Rebuter, pour rohoulcr : howWv en .'irrirre, i-cponsscr.
Recette, provençal el latin reccpta, parliri[)(' du vcrlic reccroir.
Recevoir, de recipere (rc, va père).
Synonyme : conjiiuner à la seconde personne le verhe donner.
— Recevoir quelqu'un comme un chien dans un jeu de quilles.
— Nous avons été mal reçus, et je n'éprouve pas le besoin
d'exprimer ici le témoignage de ma gratitude. (A. Dumas.)
Rêche, origine germanique reache (rude, cassant), vieux fran-
çais reschin, d'où rechigné.
Au propre : âpre au goût, rude au toucher.
Au llguré : homme difficile à vivre.
Récif, rescif ou ressif.
Rocher à fleur d'eau, où se brisent les navires.
— L'Académie, qui donne cette triple orthographe, n'accorde à
ce mot qu'une seule signification. 11 n'est pas indifTérent, cepen-
dant, de se servir de l'une ou de l'autre orthographe.
— Récif \\(mU de recido, couper avec art et dans un but utile;
recidere iingnes, couper les ongles ; tandis que roscif vient de
rescinda, je brise, je détruis.
Rescif, qui est la forme ancienne, est la meilleure.
Quant à ressif, c'est un barbarisme qui n'a pas de sens.
Mais l'étymologie latine n'explique guère le f final.
Réclame, substantif verbal de réclamer, du latin re ciclaniare.
Cri répété.
C'est un néologisme l)ien fait. Il est né de la concurrence qu'a
fait naître la hberlé du travail et la suppression des maîtrises par
Turgot.
— Le puff diffère de la réclame, en ce qu'il sous-entend le
mensonge.
La réclame crie la vérité', en l'exagérant quelquefois ; le pufT
annonce très haut et effrontément le mensonge.
— Autrefois, à la Ou des pages d'un livre, se trouvait écrit le mot
qui commençait la page suivante, ce mot s'appelait « la réclame ».
Aujourd'hui, les journaux annoncent dans les faits divers un avis
(appelé réclame), pour renvoyer le lecteur à l'annonce proprement
dite, qui a tout son développement à la quatrième page du journal.
— Vers 18i0. tons les joiirnniix aniinncrroiil In vente d'une
p:raine d'un clion colossal de la XouNellc-Zélande, servant à la
noiiiiilui-e des hommes et des liestiaux, et donnant un ombrage
a.uri'aliic pendant rété. De tons les coins de la France, on demanda
de cette .ui'aine. Kn fait, la mystilication seule était colossale.
Recommander, re et co/iu/iciidf/r/'.
— Se recommander à tous les saints du Paradis. (Yoy. sainl.)
— Un lirociiet fait ])lus (jifune lettre de recommandation.
Reconnaissance, dérivé du participe présent de reconnaflre.
— La reconnaissance est la mémoire du cœur.
...Après la bienfaisance,
Le plus ^raiiil des iilaisirs, c'est la recomiaissance.
(De Bi:i.i.o\. Pierre le Cruel.)
La reconnaissance est ce qui s'oublie le plus vite. (Aristote.)
La reconnaissance est l'intérêt d'un service : s'en alfrancliir, c'est
faillite ; l'exiger, c'est usure.
La reconnaissance de la plupart des liommes n'est qu'une secrète
envie de recevoir de plus grands bienfaits. (La Rochefoucauld.)
Recors, substantif verbal de recorder, latin recordarc, se
souvenir, se remettre en mémoire, proprement au cœur.
Bas officier de justice, qu'un liuissier ou un garde de commerce
mène avec lui pour servir de témoin dans ses exploits d'exécution,
et pour lui prêter main-forte, au besoin.
Recrudescence, de re et crudus, recrudescere.
Recrudescence d'une maladie.
On confond souvent ce terme avec <7/7^^/e;?ee : quand on parle,
par exemple, de la recrudescence du public à la porte d'un théâtre.
Recrutement, de recrue, recruter, dérivés eux-mêmes de
recroître: du latin recrescere.
■Nouvelle levée de soldats ; ce qui a crû depuis la levée précé-
dente, et que l'on récolte pour en former une nouvelle légion.
Reculer, de re et culer, dérivé du latin culus.
Synonyme : fouiner (vieux mol).
S'ii est pressé, (pii qui l'empêche de fouiner ?
• (VADli.)
— Reculer pour mieux sauter : prendre un délai nécessaire pour
mener une ciiose à bien. Se dit d'un homme qui, sous l'apparence
do rirrésoliilion, sonjic iiiii(jii('iii('iil ;'i |ii(''[i;iror ses nioyons d'iiclion
et à s'assiiroi' le succès. C'est niic .illusion à ce que font les sau-
teurs, qui- font (luchiuos p;is en ;ii-i-i<'re avant de prendre leur élan.
Il recule poui' mieux approcher. (Proverhe espagnol.;
Lo (Iroc, opiniâtre- fil iniilr,
Afin (le miciix saiitiT recule.
(ScAiiKON, Virijile Iravesli.)
— Gagner sa vie à reculons. (Rabelais, III, 48.) Se dit des cor-
diers, qni Iravaillont en niarcliant à i-eculons.
Référé, pai-ticipe passé du verbe l'c'/crer, latin vefcvre.
l*rocédure sommaire. Recours devant le pi'ésident du tribunal de
première instance, pour obtenir le jugement provisoire et rapide
d'une alTaire dont la décision est urgente.
— Les ordonnances sur référé ne font aucun préjudice au prin-
cipal.
Réflexion, du latin rc et flcctere.
— Les longues réflexions sont les cautions des bons succès.
(Charles Quint.)
Il y a des surprises de l'âme, comme des sens : attendez le len-
demain, la réflexion est une douche morale. (V. Cousin.)
La réflexion est comme l'expérience : elle arrive toujours trop
tard. (De Clincbamp.)
— Réflexion tardive: l'esprit de l'escalier: le gendarme qui
arrive toujours en retard. (Voy. présence d'esprit.)
Réformateur, latin re et for mare.
— Il y a des réformateurs qui se plaisent à mettre le cap sur le
pays d'Utopie, et qui trouvent toujours quelque féodalité à détruire,
dussent-ils, comme Don Quichotte, ferrailler contre des moulins
à vent.
Refrain, substantif verbal du vieux verbe refraindre, du latin
refrangere.
Répétition d'un vers à la fin des couplets d'une poésie lyrique.
Les Italiens disent rllornella.
C'est toujours le refrain qu'ils font à leur ballade.
(Voy. chanson.)
— Espèce de pause.
Il se refraint à son chant. (Perceforest.)
RKG 357
Refuser, provoiirnl rofiidar, l;i(in rcfuldrc.
— Die/, lire refuser (rmic fusion on coiifiisioii dos deux mots
récuser et réfuter. Cotte ((iiiiiioii csl plus inLUMiiciiso que certaine.
— Qui refuse, nuise.
— Synonymes : refnseï- nii candidai : ltlaikl);»iilei' ; adoncir nn
refns : sucrer la moutarde.
— V\\ prompt refus trompe moins qu'une espéi'auce vaine.
Minus fleripitur, eut deiiet/ntur celeriter.
Val mais paraula (/rosmmens dicha.
Que mçssonjn poiidamens escricha.
(11. (Ji.iviKR, d'Arles.)
(Vaut mieux parole grossièrement dite, que mensonge poliment
écrit. "1
Régaler, d('i'i\é de régal, latin rcgulis, antre forme de royal,
ou i)ent-éîre dn \ieux mot galer (d'où gala, galant), s'amuser,
étaler de la magnidcence dans les réjouissances.
— Chez les anciens, il y avait un roi du festin, i^ex vini; il
présidait la table, et réglait le temps et la manière de boire. Cet
usage existait surtout pendant les Saturnales.
Regarder, de l'ancien verlie esgarder : allemand irarteii. ITfid
le suljslaiilif égard (voy.), mégarde.
— Un chien regarde bien un évoque. — Oui vous a dit que je
fusse un évéque ?
— Re.uarder en chiens de faïence (se) : avoir une pose immobile
et un regard lixe, comme les chiens de faïence dont on oniait
autrefois les portes.
Régicide, du latin rcx, régis, et ea'do, tuer.
Ce crime est puni de la peine des parricides.
— Parmi les plus fameux régicides, on cite Jacques Clément,
meurtrier de Henri III: Ravaillac,de Henri lY: Damiens.qui attenta
anx jonrs de Louis XV; Lonvel, meurtrier du duc de Berry ;
Fieschi, auteur de la machine infernale, sons Louis-Philippe.
— En 1813, on appela régicides les députés qui avaient voté la
mort de Louis XVI. Ils furent bannis de France.
Régir, du latin regere, gouverner, diriger.
Règle, du lalin régula, dérivé ùo. regere.
— Il n'y a [las de règle sans exception. Ce proverbe est d'une
morale douteuse, car, en principe, il ne doit pas y a\ oir d'exception
à la n\uio : la irulc csl la \('Til(''. <'l i<'\(('|ili()ii. It'iTciir. Ce (|iii ost
contro la n^'glc csl un dcn'^'lcrneiit. iiii (Irsordic. un acte coiiti-e les
lois nalnrcllos, civiles on inorales.
Exrcjilio fiDiHil ro<iul(im (Cieéron) : L'exception conliniie la
règle.
L'exception à la ivgie est la consé(pience de l'imperfection
Imniaine. Tonte exception tend même à devenir une règle ; quel-
quefois elle y réussit, et dès lors elle devient respectable.
— Admettre une exception à une règle, c'est ouvrir une brèche
où viendront passer tous ceux qui n'auront pas été exceptés.
(H. Miirger.)
— 11 est réglé comme un i)apier à musique, mais son esprit n'a
pas de portée. (Calen)I)onr.)
Régner, du latin re(j)inrc.
— Diviser pour régner : divûle ni Inipoes. Maxime machia-
vélique, mise en pratique par Louis XI et Catherine de Médicis.
(Yoy. (Usximulpr.)
Regretter^ du latin r^/yrcs'.s-?/.?, retour (?); ou peut-être ;w/^/<!'-
intari.
* — En genevois, regretter une chose à quelqu'un : la lui envier.
— Le regret est un déplaisir d'avoir perdu une chose ou une
espérance, de re et gratua (?).
— On dit souvent, dans les discours sur la tombe dun auii :
« Il emporte nos regrets ». On pourrait répondre que: s'il les
emporte, il ne nous en reste plus'.
Reguigneou, en provençal, signilie un salut comique, une
gaminerie, qui consiste dans un mouvement vif et successif des
fesses, de droite à gauche et de gauche à droite. Ce salut se faisait
dans le Jeu (Je la belle Estello, des cérémonies de la Fête-Dieu,
à Aix; les pages saluaient ainsi les trois rois Mages, et celui qui y
réussissait le mieux, recevait plus d'argent que les autres. Il est
juste d'encourager... les talents.
Réhabilitation, du latin re, de nouveau, habil/s. propre à.
Rétahlissement d'une personne dans son premier état.
— L'opinion, plus sévère que la loi, a un préjugé cruel, qui
déclare la tache indélébile, la chute irrémédiable, la faute irrémis-
sible, et fait de tout malade un incurable.
Hr:L 359
.lîi)ileaii. iivL'c son iiii;i,ue tic l'Iionnoiir. dont il a fait
Luc ilo c^carpL-e v[ s;iiis ImuiI^,
a ("oiisaci't'" lin nicnsoniîc harliarc. et dccoiiraiir la vei'lii. en feniiaiit
la poric à r('S|i('raiic('.
11 faut piTclicr. au coulraii'c, la docliMiic de la miséricorde, qui a
élô le plus puissaiit li'\ioi' du cliristiauisuic. 11 faut « tuer le veau
gras » au héuélice de tout i> enfant [U'odifiiie » : il faut, suivant le
pi"éce|)le divin de lllvanuile, se réjouir plus pour un pécheur qui
fait pénitence, (pie pour (piali-e-vin,ut-dix-neuf justes qui persé-
vèrent.
Reine blanche (latin rtv/ina).
Toutes les \eu\(»s des l'ois de France, jusqu'à Gatlierine de
Médicis, ont été appelées « reines ])lanclies », parce qu'elles por-
taient le d(niil en blanc.
Reître, de ralleinand rcilcr, cavalier.
Vieux reitre : qui a vu beaucoup de pays.
Rejointoyer, \ieux mot.
Rejoindi'e les pierres détruites par le temps (?).
— Sire li rois ot grant cure de rejointoyei' li nuiriaux. (lOGO).
Réjouissance. Os que les boucliers ajoutent à la viande vendue
au poids.
Ces os sont appelés ironiquement « réjouissance ». (Mercier,
Tableau de Paris. 1787.)
Relaps, terme religieux: du latin l'elapsus, retombé.
L'Écrilui"e appelle relapsn' les filles tombées.
Relatif, du latin relaiiim : qui marque un rapport.
— Tout est relatif: à côté de Plialaris, Guillotiii est un philan-
thrope.
Religion, du latin religio.
Cicérou {^De Nalura tleoruin, 11, 28) dérive ce mot de relerjere^
relire, étudier avec attention les livres sacrés.
Saint Augustin [De vera relUjione, ch. Tio) et Lactance {Divines
instiiutiona, 4) le tirent de religare, rattacher, parce que la
religion est un lien ipii nous unit à Dieu.
— On a de la religion, quand on ci'oit à Dieu; ou a de la piété,
quand on suit les pratiques du culte ; de la dévotion, quand on
ajoute à ces pratiques un air centriste et composé.
3G0 REM
— L;i rcli.uioii csl rrclicllc |i;ir l;i<|iii'll(' li's lioiimics iiioiilciil :iii
ciel. (Mavimcï iiKliciiiic)
— Les noms donnés ;in\ iniiiisU'es des (lilTrrcnlsciillc^ cxiuimcMl
prcsqnc tous l'idée de vieillesse. (Voy. pn-irc)
— L'édit de N;in(es, qui ;idn)('ll;iil i;i liberté des culU'S en
Ffiincc, fnt rendn |i;ir Henri IV, en iriî)S: Lonis XIV le révoqua,
en octobre Kîsrj.
— La reliuion rallioli((iie est nécessairement iniiiioliilc. cl opposée
à tout ciian.uenient dans les idées : le do.unie lui défend de rien
modifiera ses croyances, el lui impose l'oliliLialion d'une l'ésistance
absolue et avenule aux prourés de la science, doiil le rôle (.'t le
devoir est, an contraire, un pro.urés indéfini.
— La reli.uion est comme un cor.set : elle ,uène. mais soutient.
Reliques, du latin rcliquice.
Je -ni' \ is onnjucs prcslrc (|iii blasiiiast ses n'li(|iR'S.
— Vers la fin du x<= siècle, les Catalans voulaient tuer saint
Romuald, pour avoir ses reliques, parce qu'ils craignaient qu'il ne
quittât le pays.
— Enay : C'est pourquoy entre les reliques de sainct Front, on
trouva dans une petite pbiole, un éternuenient de Sai net-Esprit.
— Fœncsle : Ce sont des inbentions de bous autres, qui abez faict
imprimer un imbentaire de reliques où sainct Paul a dix liuit
testes; sainct Pierre seize corps; et sainct Antoine quarante vras.
(D'Aubiuné, Arenlures du Baron de Fœncsle.)
— Reliques des grands boni mes :
La lampe dEpictète fut vendue 3.000 dracbmes (2.700 francs).
Le livre d"bcures où Cbarles F'" lisait en allant au supplice, fut
vendu, en 182o, 100 guinées (^2.500 francs).
Une dent de Newton, en 1816, Kî.riOo francs.
Une perruque de Sterne, en 1822, o.OOO francs.
Le cba[)eau de Napoléon à Eylau (décenilu'e 1830). 1.920 francs.
Remède, pro\ençal remedi. du latin nnncdiuin.
— Remède, dans le sens de lavement, est un eupbéniisme qui
date du temps de Louis XIV.
— Le remède est pire que le mal. Il faut de la prudence dans les
réformes ; on doit craindre de cbanger une situation mauvaise en
une autre qui pourrait être pire.
Un proverbe dit qu'il vaut mieux laisser son enfant morveux, que
de lui arracber le nez.
REX 3G1
— Dnn? iino niicionno conicHlic il;ilionno, un lioiiiiiio très ,uros se
pl.'iiiit (les iiK-oinriiiciits de son olirsilt''. Arli'qiiiii lui propose de le
inetli'c sons imc lorlc presse, el lui .a;ir;mtil ipi'il U\v<\ disparailre
cet enilionpoiiit si ,m'ii;ii)t. i> — S;iiis doute, dit iMiilre : iiinis j'en
iiiourrai. — Gela se lient : mais ce que je puis vous assurer, c'est
que vous deviendrez aussi mince qu'une feuille de papier. »
— Il y a remède à tout? excepté à la mort. C'est-à-dire il ne faut
se déconra.uer devant aucune diflicnlté, [larce qu'on peut trioniplier
de tout avec de réiieruie el de la \olonté, excepté toutefois de la
inoi-|.
Réméré, d'un mol has-latin rccmere, racheter.
Faculté de pouvoii- racheter, dans un délai déterminé, un objet
vendu.
Acte par lequel le vendeur d'un imnjcuhle interdit à l'acipiéi-eur
de le revendre, et se réserve la l'acuité de le racheter, dans un délai
qui ne peut excéder cinq ans.
Remettre, du latin roniltere.
— l'iemettre quehiu'un, dans le sens de le reconnaitre, est une
locution vicieuse. 11 lanl dire : se remettre en mémoire.
Remords, du lalin /\"//i(tfsNs. de remordere, remordre. Ancien
français rc/itors ; le d a été ajouté au xvi" siècle.
Uepi'oclie vif et perpétuel que fait au coupable sa conscience.
C'est un pliénoraème psycholo.uique complexe, qui se compose
du jugement par lequel le coupable condamne son acte; et du
sentiment de douleur ne de cette condamnation. Le remords est la
pbis puissante sanction de la loi morale.
— Remords et complices: uiemento vivant.
Remouleur: gagne-petit.
Habelais donne à un procureur le nom de Gaigne-Beancoup.
Remplir, de re et e>/i/)///\ lalin i>n])lore, roman omplir.
Oiniiliilii ilr .saiicliis rrliiiiuts.
(Pfiii.omkna.)
(Remiili de saintes i'eli(pies.)
Renaissance, dérivé de renaissant . du latin rcnasrcnlon.
l'^ioque qui. pour la France, répond aux règnes de François I'"''
et de Henri II (loIo-15o9). Le goût des arts et de la littérature de
l'antiquité se ranima alors et modilia les anciennes traditions.
— Genre d'architecture qui a succédé au gothique vers le xvi«
302 RE\
siècle : (>l {|iii coiisislc (l;ins l;i siiltslitiitioii du [ilciii riniro ;i l'opivc,
avec iiiio <ir;iii(l(' ;iIh)ii(I;iiic(' (roriiciiiriils lins et gracifiiix.
Les cliâlcaiix de (lliaiiilxti'd, de Koiilainolilfaii, d'Krouen, d'Anct,
lllH^ parlic du l.oiivi-c, dalciil de celte (''pfxine.
— La Ueiiaissaiice. (|iii cliaiiuca la face de l'IjuTipp, est le retour
aux éléiiieiils coiisliliilifs de l'art aiitiiiiie. par l'adoption des formes
particulières (pii lui sont propres et qui en déi-ivent.
Renard, du \ieil alleuiaiid rcinlidrl . lin, rusé.
— Le l'enai'd s'appelait auti"efois,vo?/yyi/, vo}'/fi/. du laliu rn//)es:
lorscpi'au xiir' siècle parut un poèuu' satirique et hurlesfpie de Pierre
de Sainl-CIoud. sous le litre de Rot/ian dr /ienarf. Le héros de ce
poème est un rusé fiouiiil. ([ui joue une foule de mauvais tours au
loup (Ysenprin), son oncle. L'auteur donne au gonpij jc nom de
renard, (pii vient du tudesque, et alVulile les autres acteurs de noms
d'hommes, comme a fait depuis La Fontaine (?).
Ce roman devint très populaire, si bien que le nom de renard
remplaça celui de (joupiL qui linit par dispai'aitre de la langue, où
il n'a laissé que goiipillon, aspersoir pour jeter l'eau bénite.
— De renard vient peut-être traquenard , contraction pour
traque-renard ; piège en forme de trél)uchet pour })rendre renards
et autres animaux. De goupil, dégohiUer, pour dégoupiller, qui
répond au dicton « écorclier le renard », et à l'argot renarder.
— Fin ren;ird : rusé coquin. Vulpinu>i animas. (Plante.)
Une jeune tille à qui on montrait un renard, mit la main sur le
collier qu'elle portait. « C'est, dit-elle, de peur qu'il ne me le vole :
les renai'ds sont si lins dans les fables de La Fontaine! »
— Se confesser au renard: conlier ses alïaires à son ennemi.
— Il faut coudre la peau du l'cnard à celle du lion.
Où la peau du lion ne peut suflire, il faut coudre un lopin de celle
du renard. (^Montaigne, Essais, 1, V.)
— On disait de Léon X, qu'après s'être glissé comme un renard
sur le trône pontifical, il avait régné comme un lion, et était mort
comme un chien.
Rendre, du latin reddere, rc et dure.
— Rendez à César ce qui est à César. (Voy. César.)
Sauni cuifjue fri/jui/o. est une célèbre maxime du droit romain.
— Chacun son droit, chacun son dû.
— Ce qui est l)on à prendre, n'est pas bon à rendre.
iii:\ 36:}
Rengaine, du im^l fj'tinc, l.iliii ra;/ina.
Allusion ;'i tiiK' viiMlli' cliiiiisoii. qui ;iv;iit ;iu n'Iriiiu le luol rcn-
fffn'ne répété à snliélé : Tiirlnliiiii n'iK/ciinc
— C'est loujours la inéiiic rengaine.
Renommée, de re et nonuner, latin nominare.
Va\ latin et en roman, se dit fuma, qui est dans: laineux, infâme,
dilVamer.
Ancien français :
(jn'i'llc ;ici|iii'r;iil \\w tionleuse lame.
De mal \i\anti' cl inipiidiiiiic femme.
(//f.\7 (l'Anne de /lolein.)
— I.es poètes i-eprésenlent la Renommée avec cent yeux, autant
d'oreille? et autant de lioiiclies, et tenant deux trompettes, parce
qu'elle [lulilie la véiaté connue le menson,ue : et des ailes, pour
marquer sa rapidité. {Enéidp, liv. IV; Ovide, Melaviorjihoscx. XII.)
Ce monsirc cnniiMisi' de IriiicIios et d'oreilles...
(BoiLEA'J, Lutrin, cli.int U.)
La dresse aii\ ccnl \oi\ nu l'arle d'autre cliose.
(La Foxtai.ne, Œuvres post/i urnes.)
— La Renommée, avec ses deux trompettes, rappelle un vers de
Uante, où il dit de Barhariccia, chef des démons :
E(I cjH (iri'ra dcl cul fatlu Iroinpetfa.
{/iiferno, Oinlo :2'2.)
— Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée.
Les c-eintures doréeset autres vêtements de luxe étaient exclusi-
vement réservés aux femmes honnêtes, et un arrêt du 28 juin 1420
lit défense aux filles de joie d'en porter. (Voy. ceint are.)
Ce proverbe, dit Pasquier (Recherches de In Frtntn'}. indique
que la renommée est hien [)lus lionorahle pour les fe;nmes, ({ue
ne le serait la ceintui-e dorée sans une lionne réputation.
Renoncer, du laliu renioitidre, déclarer qu'on ahaiulonue.
Renonremetit est du langage de la piété.
J{e/ionc/(/fi()/i est du langage des alïaires.
Rente, du latin reddiln, partici[)e passé de rcddo. rendre.
— Affligé de dix niiiU' li\res de rentes ; se dit par antiphrase,
mais exprime cependant une idée vraie.
— L'état de rentier est le moins sot des métiers, et le métier des
sots. (Voy. vlagrre.)
■ C'est la position sociale la plus einiée. et peut-être aussi la plus
enviable.
364 i\\:v
Renvoyer, de >r et cncoijcr, roinctlre en V(jie (ria).
Synonyme do renvoyer qiielqn'un : lui donner son sac et ses
quilles.
Mire renvoyé : i-ecevoif l;i pelle un cnl. (^Villon.)
Repaître, l;itin rc el priscerc.
— L'aninKil se repaît, l'Iioninie nianue. riioiiiine d'es|)riî senl sait
mander. (Brillât-Savarin.)
— Lorsqn'on dit de (piehpi'iiii (jii'il se re[(ail (rilhisions, on
semble indi(pier qne les illnsions, qui nous viennent de l'esprit et
de l'imagination, nous assimilent aux hètcs. C'est ravaler l'àme au
niveau des animaux. L'expression « se nonri'ir d'illusions » est
intiniment préférable à celle d'une âme qu'on envoie paitre.
Repas, latin re et jiantum, même orieinc que le précédent.
— Synonymes : Balthazar, festin, gueuleton (repas plantureux).
Crevaille, ripaille.
Pique-nique : repas à frais communs.
Repas de brebis : repas sans boire.
— Depuis ne feismes qu'ung repas, lequel dura tout le jour, et
ne sçavions si c'esloyt disnor ou soupper, goustcr ou regoubillonner.
(Rabelais, V, 7.)
Rcfjoubillonncr se dit du réveillon, de la collation faite après le
souper. Ce mot doit venir de gober, fjoblllor, qui a pu se dire dans
le sens opposé à dégobUlcv (?).
Repentir, de rc et du vieux français pentir : du latin pœnilerc.
— Synonyme : s'en mordre les pouces.
— Le repentir est la vertu du coupable. Qui se rcpent est presque
innocent.
Le repentir est une douleur volontaire et salutaire; le remords
est une douleur vengeresse et forcée.
Répéier, du latin repelcre.
Tlœc placiiil seinel, lurc (hrie< rrpclild pliicc'oil.
(Yoy. rabfic/wr, rengaine, rltoarnetle.)
Répondre, du latin respondere : provençal respondre.
— Répondre de : se porter caution, garantir ; d'où les mots :
responsable, responsabilité.
— Le latin sponsus, engagé, a donné époux.
Vous lie ivpoïKiez point, et ce iiKinn' silence
ReJouble encor ma peine et innn impatience.
(Molière.)
REP 365
Réponse, du hiliii 7'es/)()nsa : môme ori.uino qiio \o procèdent.
— Hrpoiisc ilo .WiniKiiid : ni oui, ni non.
Et tàclirz (Hicliiiiffois (II' n'iMiiiilrc imi Xiiriii.iiid.
(I.A Kuntaim;, VII. H.)
Repos, siibslnntif vctIkiI de vcpuscr: do re et ponere, par
pau^avc.
Quelques-uns le tirent de repolnre ! Repotio ou potatio ilcrala
était le repas que donnait le mari le lendemain des noces. (Horace,
Sat. II, 50; Ausone, Épisl. XIII, 37.)
— Les Romains donnaient toujours un lendemain aux fêtes, et
continuaient ce jour-là le festin de la veille. De là l'usaoe de fêter
le lundi, et le dicton populaire : Il n'y a pas de bonne fête sans
lendemain.
— Le bonheur est dans le repos. (Ilitopadésa.) Ici repos veut
dire calme, sérénité de l'àme, et c'est dans ce sens que Jésus-Christ
a loué Marie, qui reste à ses pieds, plus que Marthe, qui s'occupe
des soins du ménage.
— Le bonheur est une illusion de jeunesse; le repos est la seule
félicité qu'on puisse obtenir ici-l)as.
Le repos est une chimère aussi insaisissable que le bonheur.
Tout le malheur des hommes est de ne pas savoir se tenir en
repos dans une chambre. (Pascal.)
Similis quitta les emplois et les honneurs et passa dans la
retraite les sept dernières années de sa vie. Il fit mettre sur son
tombeau : « Ci-git Similis, ([ui a existé un grand nombre d'années,
mais n'en a vécu que sept. »
Littus amn, altitiit nlii Icncanl.
(HOUACE.)
(Aime le rivage, laisse aux autres la pleine mer.)
Le repos, trésor si précieux
Qu'on l'ii faisnit jadis le partage des dieux !
(La Koxtai.xe, vu, 1:2.)
Le mouvement du corps est le repos de l'Ame.
Quand le corps se repose, l'âme s'agite. (E. Arago.)
— Repos était dit pour mariage dans l'antiquité.
(Jiia'ram tihi requiem. (Ruth, III, 1.)
— Il vaut mieux marcher que courir, être debout que marcher,
être assis que debout, être couché qu'assis, dormir que veiller, être
mort que tout cela. (Maxime indienne.)
3GG : RKS
Réprimander, de n'itriniatulc, l;iliii rojii'iinoinlua.
— F.'iirc, iiiic M'i'lc n'|»iiiii;iii(l('. c'est (loiiiicr une Nolée de liois
vert. (Voy. rolro.)
Si i;iiii;iis \()l(''e de liois verl ;i|ipli(iii('e sur une ('•diine... (Beaii-
ni;i reliais, Muruuji' de Fujaro.)
— Synonymes : chapitrer, guiirinaiider ; donner nnt; chasse, nn
galop, un poil, un savon ; laver la télé, moucher, vitupérer ; faire
une mercuriah\
République, républicain, latin res ixiblira, la chose piihhqne.
(loiiveriiei)ieiil de Ions par tons et }»onr tous : Omnla omnibus.
— Les poètes et les joueurs de (Inte étaient hannis de la Répu-
blique de Platon. Terpandrc fut exilé de Sparte ponr avoir ajonté
une corde à la lyre.
— La Répnhliqne est une enchmie (jui usera bien des marteaux.
(Th. de Bèze.)
La Répuhhque française est comme le soleil : aveuoie (jui ne la
voit p;is. (Napoléon.)
— République démocratique et sociale : craque publi(pie. démolira
société. (Anagramme 1849.)
— Synonymes de républicain outré : démagogue, démocrate,
socialiste, communiste, jacobin, terroriste.
Réputation, du latin reputalio.
' — La réputation est une enseigne qui fait connaître on la vertu
loge. (Saint François de Sales.)
— Réputation surfaite: Courbet est un excellent déboulonneur :
mais comme peintre, c'est une comète chauve. (L Venillot.)
Requinquer (se), du latin re et quinquare, nettoyer.
— Se parer, s'ajuster.
I^a voilà toute requiiKiiiéc
Qui ne songe plus à Sicliéo.
(ScARRON, \"irgile trare.'ti.)
Résignation, du latin ?'e et signare.
Soumission à une volonté étrangère ou à la destinée.
Résipiscence, du latin resiplscere, redevenir sage.
Reconnaissance de sa faute, avec renoncement.
Respect, du latin respectus, regard en arrière ; d'où aussi répit.
Substantif uiasculin, qui répond à récérence. Il serait bon d'em-
prunter aux Anglais respectabllUé qui. mieux que honorabilité^
répond à l'idée de respect dû à une personne irréprochable.
RES 3G7
— Le ro?pcct est presque toujours reflet de la erainte.
La distante aiiirineiite le respect : Majfstd/is major e lonyinqno
l'crercnfia. (Tacite, Annales I, 37.)
— Sauf votre respect; sauf le respect rpie je vous dois ; parlant
par respect. Ces formules de politesse s'emploient, dans les campa-
gnes, quand, en parlant à des supérieurs, on nomme des animaux :
« Sauf votre respect, deux cochons à vendre, i
Molière, dans le Médecin inahjré lui, se sert d'une e.xcuse équi-
valente, en parlant d'un apothicaire: « J'avons dans notre village
un apothicaire, révérence parler, qui lui a donné je ne sais comhien
d'histoii'es. »
Rahelais, dans PantacjrueL a sans doute eu l'intention de ridicu-
liser ces précautions oratoires, quand il dit : « Je les ameine d'ung
pais auquel les pourceaulx (Dieu soit avec vous !) ne mangent que
des myroholans ; les Iruyes en leur gésiiie (saulve l'honneur de
toute la compaignie) ne sont nourries que de lleurs d'orangiers. »
— Sauf votre respect, c'est un calfat. (Locution toulonnaise.)
Ilonos sit aiin'fjus hahilus [(}. Curce") : sauf votre respect.
Ressembler, intens. de sembler, du latin similare.
— Qui se ressemble, s'assemble. Ce proverbe très ancien se trouve
dans XOdyssée d'Homère (XVII, 218) et dans beaucoup d'écrivains
de l'antiquité.
Par cum parc facillinv. conijreganiur. (Cicéron, Calo major.)
Xecesne est connlin sequi cons'nnilia.
(Tf,iiKM;K, HfiaiitonlimiiroiuiK'nox. I. H.)
Odcninl hilarciii triples, trisIciiKjue jocosi.
(HollACE.)
La nature vit. au contraire, de contrastes, et le proverbe « Qui
se ressemhie, s'assemijle » est une des nombreuses sottises qui
tendent à discréditer la Sagesse des nations. On ne cherche chez les
autres que ce qu'on ne trouve pas chez soi, de même que par le
commerce on échange des produits de nature diverse.
— Cangrande, le plus illustre des Scaliger, tyrans de Vérone,
donna Iho-spitalité à Dante, et l'illustre exilé eut souvent à soutïrir
auprès de cet hôte redoutable. Un jour, Cangrande lui demanda
insolemment « comment il se faisait que lui, personnage si docte et
si inspiré, plût moins qu'un boulïon dont les facéties divertissaient
toute sa cour ». Dante répondit: « Ceux-là se ressemblent, qui se
rassemblent. »
:ui8 Ri:v
Restaurrtnt, du hiliii rrsldiirtii-c r('i;ililir.
— Le iMciiiicr i-csl;iiir;inl s'éUihlit, cii Fratifc. on ITOo, rue des
Ponciez ; on y vend.'iit des consommés cl des ceiifs fr;jis, et on Ijsjiit
sur la porte : VenUe, omnos qui stomacho lahoralis, et ego
rofldiiraho ros.
Le deuxième s'ouvi'il, nie de la Harpe, en 1708, non loin de la
rue de la Huclielle, (pii était célèbre dès le Moyen-Age, par ses
r(')lisseries.
11 n'y avait à Paris, avant cette é[)0(iiio, que des li()tellerics, des
auberges et des cabarets. Le plus ancien cabaret de Paris est l'bôtel
de Venise, dans la rue de ce nom. Il s'appelait, à la fin du xvi« siècle,
« le Cabaret de l'Epée de i)ois ».
Dans les premiers restaurants on ne vendait (pu; du bouillon,
que l'on appelait cordial, ou restaurant; ce n'est que plus lard
qu'on y fit une cuisine complète.
...Demeura cinq ou six jours enfermé dans une garde-robbe,
sans saillir deliors ; et là ne vivoyt quedercstaurans. {Ilpptaméron,
NouY. 49.)
— Restaurant en plein vent : restaurant des pieds buraides.
Retenir, de retbiere {re et tenere).
— Je ne vous retiens pas : allez-vous-en.
Nthil vos moror (Cicéron) : Je ne vous retiens plus.
Formule que prononçait le Consul, lorsqu'il congédiait le Sénat.
Réticence, du latin reliceo , comp. de tareo (passer sous
silence).
Figure par laquelle l'orateur interrompt subitement une pbrase
commencée, mais de manière à faire deviner ce que son silence
laisse sous-entendre.
Réussir, vieux français réissir, de re et exire.
Le vieux français avait aussi issir, d'où issue.
— Synonymes de réussi : tapé, enlevé ; article enlevé ; scène
enlevée.
Ne pas réussir: faire cbou-blanc {chou est pour coup): faire
fiasco ; faire four (^voy.) : jouer devant une salle vide, dont les loges
sans public ressemblent à des boucbes de four.
Rêver, jadis resver, doit venir de r«, pour re, et de via, voie.
Revenir sur la voie, sur les anciennes pensées ; parce qu'il est
fait comme desver {dis viare), qui est resté dans endêver.
Peut-être de revoir (?) ou du provençal rêvés, envers (?).
Révérend, du I.ilin ;Y'rc;Y'/?^/</.ç, l'cspectablc, qu'on doit rôviM'or.
Titre (judii dimnc ;iii\ pivliits, aux diunitaires de rKglise.
Revoir, /•" et coir, du latin videre.
— (»n dit : au revoir.
« A revoir > est nn solécisme que Casimir Delavigne a commis en
faisant dire à Marine i'alieio :
A roviiir dans le cii'l, mon \ifii\ cumpagnon d'armes.
Révolution, du latin iccolutHin, de l'evolco, retourner.
SiLiiiilie aussi (/ero'i/e/it/'nf, et implique une idée d'ordre et de
succession.
Hume a intitulé son livre : Histoire des révolutions dWnrjleterre,
c'est-à-dire des événements successifs qui se sont produits dans ce
royaume.
C'est à tort qu'il signifie aujourd'hui une secousse violente dans
l'état politique d'un pays.
Voltaire est nn des premiers qui ait dit: «La ré\olulion d'An-
gleterre », en parlant de la chute de Charles I''.
Depuis lors, on a usé et abusé de ce mot ; on a créé le substantif
révolutionnaire, et le verbe révolutionner, qui n'est pas français.
La uu)indre émeute est traitée de révolution , dont toutes les
commèi'es du quartier sont révolutionnées.
— M. de Barante a pris pour épigraphe de son Histoire de la
Convention, cet liémistiche de Lucain :
JasijHe diitnm scctcri.
— Les vices de la cour ont commencé la révolution de 1789: les
vices du peuple l'achevèrent. (Rivarol.)
Quand les idées sont mfires, les pavés se soulèvent deux-mômes.
1791, la Constituante, Mirabeau; 1792, la Législative, Danton;
1793, la Convention, Robespierre.
— En 1790, on demandait: «Que deviendra la Révolution
française?» Une anagramme répondit: «Otez Veto: un Corse la
Unira. »
Revolver, du latin revolvere, par l'anglais.
Mot ancien, qui signifiait se rappeler une chose.
Rez, même origine que ras, de radere, raser. ,
D'où rez-de-chaussée.
Rhétorique, du grec rhèlorikè (teclmè), l'art de parler.
Racine rhéo, couler (?j.
'MO ftlU
L'éloquoncc, en flïol, ;i (''té sonv(!nt (•(imp.'iiv'e ;iii cniirs d'iiii llciivo.
Snint .Irrônio,, (l;iiis son épîtrc îiiix Galiitos, conipîii'e l'éloquence de
saint Ililnire au lUiône: Lallnœ éloquent iœ Ji/iodanus.
De même, Fortunat, an livre I de la Vie de saint Martin, dit :
lUioiliinti torrcntiiir (tuijilo.
Rhinocéros, du grec rhis, nez, kéras, corne.
Corne en forme de nez ; ou plutôt corne sur le nez.
Nez de rhinocéros : long et pointu.
Rhume, du grec rheiona, de rhéo, couler; d'où aussi rhumatisme.
Ribambelle, mol burlesque, d'origine inconnue; peut-être de
riban, pour ruban (?).
— Longue série, se dit en mauvaise part : une ribambelle
d'enfants. (Voy. kyrielle.)
Ribaud, vieux français ribald, bas latin ribaldus, du germa-
nique hriba, prostituée.
D'auti'cnt le tirent, avec peu de vraisemblance, de robiistus, ou
de l'italien ribaldo, qui saule de joie; d'où viennent aussi baudet
et s'ébaudir.
— Ce mol n'était pas odieux, au temps de Philippe-Auguste, et
servait à désigner les soldats d'élite qui formaient la garde du roi.
Le Roman de la Rose parle de ribauds
Poiians sacs et cliarbons en grève.
C'était donc ce qu'on nomme aujourd'hui les débardeurs, les
forts, travaillant à charger et à décharger les bateaux.
Dans ce cas, il viendrait du provençal riba, rive, berge.
I^e rcis de Fransa... era sobre la riba d'un flum...
(Bkrtb\nd de BonN.)
Les portefaix de Marseille emploient encore aujourd'hui, pour
faire les travaux les plus pénibles des quais, des domestiques qu'ils
appellent roubeiroùs, qui vient évidemment (?) de ribaud.
— Plus lard, ce mot servit à désigner des débauchés, larrons.
. . .Son filli de Irotiors,
De ribautz o d'autres pontoniers.
(Cabanei., de Marseille.)
•
(Sont fds de coureurs, ribauds ou autres gueux.)
— Sous Charles YI , on supprima la charge de « Roi des
Ribauds », dont l'office était, à la suite de la cour, de connaître de
lUC 371
tous les jeux de tirs, de brelan el autres. Il levait, à sou proni, deux
sous par semaine sur les lo.uis de prosliluées.
— Il y a près d'Hyôr^îs l'île de Rihaiid. l'île du Pelit-Ribaud et l'île
Ribaudou.
Ricaner, vieux français rccaner. recalgner: ]\VQ\(i\\ç.?\regnnn.
Rire lualignenient : se uioijuer.
Vitilii-l-il pas Moiisiriir (lui ricane déjà?
(TartufTe, I, 1.)
Riche, origine geriuauicpu', allemand reich.
— Rie, dans les langues du Nord, signifiait puissant, fort.
La terminaison rix, dans les noms gaulois (Ambiorix, Yercingé-
torix), et dans les noms francs (Gliilpcric), ou gotlis (Alaric), n'était
que l'indice de la puissance, de la force.
— Le poète Fortunat explique le nom de Cbilpéric : Chilpe,
adjutor, rie, fortis.
— La langue des troubadours emploie le mot rie, riche, dans le
sens de fort, puissant.
Serai plus rlcx (pTil scnhor de Marroc.
(Ai;gier.)
Les rieos ombres, en Espagne, étaient les plus puissants. « Les
ricbes hommes étaient ainsi nommés, non pour être riches et
posséder des domaines , uuiis pour être puissants et d'illustre
lignage. » (Rosche.)
Monstrelet a employé rielie dans le sens de fort : « Il y eut maint
riche coup féru entre icelles parties. »
— C'est dans le sens de puissant qu'il faut expliquer la locution
proverbiale rie-n-rie.
— Aujourd'hui encore, dans la langue populaire, l'adjectif riche,
précédant le substantif qu'il qiudific, lui donne plus d'énergie. On
dit : un riche temps, un riche vin ; pour un bon temps, un vin
généreux.
— Le changement de sens du mot riehe vint plus tard du chan-
gement dans les mœurs. Quand la puissance ue résida plus unique-
ment dans la force matérielle, et que le pouvoir de l'or et de la
propriété balança la puissance féodale et militaire, les riches, les
forts, les puissants, furent ceux qui possédaient les terres, les
troupeaux, l'or et l'argent.
Rielie devint alors l'équivalent du latin locuples, abondant en
possession [locus).
%n uic
— Synonymes : calé, ('ossu, Crésus.
Riche comme le marquis de Carabas, .. comme Crésus, -...comme
un colïre, ...comme un niarcliand de cochons, ...comme hi mer.
(Yoy. Pactole, Pérou, Turan;cl.)
— Rotschild, mort à Paris, en novembre 1808, a laissé deux
milliards de foi'liinc. Le marquis de Bule. 20 :;ns, anglais, prend
possession (décembre 18G8J d'un patrimoine de cent cinquante
millions.
— Riclie et pauvre : c'est l'éternelle rivalité du aras et du mai^rre.
R y a deux grandes iniquités dans le monde, re\tréme opulence
et l'extrême misère. (Chateaubriand, 1832.)
Il faut être puissant pour devenir riche, ou riclie pour devenir
puissant.
Un homme riche a de quoi entretenir tous ses vices, et acheter
toutes les vertus.
C'est de l'enfer des pauvres qu'est fait le paradis des riches.
(V. Hugo.)
— Après toutes ces réprobations, tous ces anathèmes contre la
richesse, tranchons le mot, et faisons-en le huitième péché capital.
— S'enrichir : mettre du foin dans ses bottes : faire sa pelotte.
— Le riche ne dine qu'une fois. La grande misère de l'homme
est l'incapacité absolue de jouir de sa fortune, faute de moyens
passionnels.
— « Si j'étais riche ! dit-on, je ferais... » Mensonge; on tient plus
au dernier écu qu'on amasse qu'au premier qu'on a gagné ; car
l'avarice est le châtiment du riche.
— Henri II de Montmorency ayant entendu un paysan dire qu'il
ne manquerait rien à son bonheur, s'il pouvait racheter une terre
qui avait appartenu à sa famille : « Combien vaut-elle, lui demanda-
t-il? — Deux mille écus. — Qu'on les lui donne, et qu'il soit dit que
j'ai fait un heureux. »
— On ne prête qu'aux riches : L'argent cherche l'argent. Si les
riches n'ont point d'esprit, on leur en prête, parce qu'ils sont les
seuls qui puissent rendre.
Danlàr opes nulli nisi dicilibus.
(.Martial.)
Richesse, dérivé du précédent.
— Le dieu des richesses, chez les Egyptiens, était Mammon; chez
les Grecs, Plutus; chez les Romains, Dis ou Pluton, dieu des enfers,
et par conséquent des trésors que la terre renferme dans son sein.
HIC 373
Dis, le pôro ;hi\ rciis (Riilichiis. III. 3.)
— La l'ichosse est pci-soimiliôe dans Citsiis. Midas, et aussi dans
Tiircai't't.
— La |>i'()dii(iion des rirliossesest diieà (iiiatro sources principales
qui soûl : le travail, le capital, le coniiuerce et la spéculation.
La pro.>;péril('' sociale ivsiille de la iirodiiction et de la répartition,
d'où s'ensuivent la puissance pnhiifpieet le boniieui" individuel.
L'Aniileterre crée de urandes richesses, et les répartit mal. Il en
résulte: ()[)nlciicr monstrueuse, misère luonstrueusc. Situation
faiissi' et dangereuse, qui asseoit la puissance pul)li(pie sur la misère
puliliqne.
— Contentement [)asse richesse.
Lœtnis sorte tua, vives supicntcr.
^IIoiiAcF. Epist. I. X, 44.)
— Le malheur des pauvi-es, c'est de voir le Iiouheur dans les
richesses ; le nialiieui' des riches, c'est de ne pas l'y tj'ouver.
(Chamfoi-t.)
L'aruent est la fausse monnaie du bonheur.
Le houlieur est indépeinhiul ihi luxe, et ou en achète davantage
avec un denier de cuivre qu'avec une bourse d'or, quand on sait où
Dieu l'a caché. (Lamartine, (ircniclla.)
— Il n'est richesse que de science et de santé.
La santé et la gailé valent mieux que tout l'or du monde.
(Salomon )
— L'end)arras des richesses, se dit pour exprimer les soins et les
soucis qu'exige la direction d'une grande fortune.
Ceux qui envient la richesse ignorent ce qu'il en coûte de travail
pour l'acquérir, et de tourments pour la conserver.
— Grande fortune, grande servitude. On n'amasse les richesses
qu'avec peine, on ne les possède qu'avec inquiétude, on ne les quitte
qu'avec regret. (Ausone.)
nui n'a Knè'"''- n'^t guerre.
— Les personnes comblées des dons de la fortune, sont comme
des vaisseaux trop chargés, qui risquent plus que d'autres de couler
bas. (Saint Chrysostome.)
— Philoxène de Cythère. s'apercevant que les richesses le ren-
daient voluptueux : « Par tous les dieux ! dit-il , perdons nos
richesses, plutôt que d'être perdu par elles. »
,374 \\\V
Ricochet, ('tymologio hironnno.
— C'est la chanson du ricochet. (Voy. kyrielle.)
Cette locution vient du jeu du ricochet, qui consiste ;'i jeter sur
l'eau une pierre plate, en sorte qu'elle revienne plusieurs fois
au-dessus, par petits bonds, avant de s'enfoncer. L'eau est ainsi
taillée, cochée et rccochée.
Dans la Chanson du Ricochet les mêmes mots reparaissent
souvent.
Johanncau cite comme exemple le rondeau de Kominagrobis
(Rabelais, 111, 21) :
Pronez-la, ne la pronoz pas :
Si vous la prenez pas, c'est bien laict ;
Si ne la prenez en effect
Ce sera ouvré par compas
Gallopez, mais allez au pas.
Recuk'Z, entrez-y de faict. . .
Ridicule, du latin ridiculus, de rideo, rire.
Le ridicule est une difformité sans douleur. (Aristote.)
Le ridicule est plus redoutable qu'un vice. (Voltaire.)
Rien, du lalin rem, chose; provençal re.
Anciennement, si,unit]ait une chose. On dit encore : Ne voulez-
vous rien envoyer? Voulez-vous envoyer quelque chose?
Un rien, se dit pour un peu. Faire un rien, dire des riens.
Aujourd'hui, rien est négatif et exprime l'idée de néant, et par
suite l'idée de bagatelle, comme son équivalent latin nihil, nihiliun.
On vit pour rien ici.
— Bernicle, que l'on prononce bernique, anagramme de niberrje
qui signifie rien en argot, a servi de terme de comi)araison négatif ;
on disait : Gela ne vaut pas une bernicle.
Ce mot sert maintenant à exprimer un refus gouailleur: «Vous
voudriez bien l'avoir? Bernicle! )>
— Socrate disait qu'il ne savait qu'une chose, c'est qu'il ne savait
rien .
— Il existe une brochure anonyme: Histoire des riens, dédiée
à Personne. (Paris, in-12 de 3o pages, Ant. Henqueville, 1730.)
— Qui ne risque rien n'a rien ; car où il n'y a rien à perdre,
il ne peut y avoir grand'choss à gagner.
Riflard, gros rabot qui rille. ou ràlle, les aspérités' ou parties
raboteuses du bois.
— Désigne un grand parapluie, depuis que, dans une pièce de
Picard, la Petite Ville, jouée à l'Odéon, l'acteur qui remplissait le
nMo do François Rillai-d |>;iriit v\\ scène avec nn énorme parapluie,
pour cliarLicr son r('>l('.
Rigaudon, et aussi rif/odon, de Hlyand.
J.-J. Housseau (Diclionnairc de inusiquej dit : « J'ai oui dire à
nn niaitre à danser que le nom de cette danse venait de celui de
linventenr. lequel s'appelait Rieand. »
Rigoler (se), ancien allemand riya. danser. D'où aussi riole.
S'amuseï", folàti'er.
— /{if/o/cr ('?■[ trcs \itMi.\ dans la langue H se trouve dans le
JUnnnit do la lioso, dans la Furrr de Patelin, dans Rabelais.
Cestoyt passe-tem[)S céleste, les voyr ainsi soy rifiouller (Gar-
gantua. 1, 4.)
Se rigolant, incnanl ji'yt'iix liiVluict.
(G. Marot.)
Hélas ! ce n'est pas maintenant,
Feriez-voiis, (lu'ii fault rigoller.
[Palrlin.]
J'étais à Blois, à ri.uoler comme nn père. (Moyen de parvenir.)
Rillette, résidus du lard que Ton a fait fondre pour en tirer le
sain douv. Ce qui reste au fond dn vase, et se trouve rissolé; par
corruption, rillé, comme (/résilié a donné grillé.
Ralielais dit rilles pour reliefs, restes, dessertes.
Rimer, du ,urec rltyihnios, cadence ; ou de l'allemand rini,
nombre.
Rimer malgré Minerve.
(BolLEAU.)
Invita Minerva. (Cicéron.)
Tu niliil invita dices faciesre Minerva.
(Horace. Poél. 313.)
— Le cliarrae des arts suscite plus d'appelés que d'élus. Tel
pauvre diable prend pour une vocation ce qui n'est que de l'entê-
tement, et s'épuise à un travail acharné et inutile.
Ce n'est pas le bœuf de la peinture, comme le Dominiquin, c'en
est l'âne, et du mai.iire sillon ([u'il trace, il ne sortira jamais que
des chardons. Ses stériles elïorts ne peuvent empêcher que la
pesanteur de sa médiocrité, comme le rocher de Sisyphe, ne
retombe sans cesse sur lui.
— Ça rime comme ballebarde avec miséricorde. — Autrefois,
deux consonnes suivies d'un e miiet, étaient suffisantes pour cons-
tituer une rime féminine. Plus tard, on exigea que cette rime fût
:^7(; H 11'
douille, cl ivsiillfil (In suii (|ni se lie iiiiiiir(li;il('iii('iit ;'i l;i sylhilie
muellc.
On racdulc (iii'iiii lioiiliqiiici- do l';iris, iioiiiiué .leaii I5oiiiIh'|. lil
celle épiliiplie [tour sou ;iiiii, suisse de Sainl-Euslaclie :
Ci-^il iiHiii iiini Mardiiclio :
Il ;i \oiilu Pire ciiU'i'ré à Siiiiit-Kiist;iclii\
Il \ p<ifl;i Irciih' iiMs In linllclmnlc;
Uif'ii lui f;issc iiiis(''i'ic(ir(l(' !
— I^;i rimé (ou pluhU l'assounucc) est iustiuctive clic/, le [»eu[)le :
les pro\erl)CS et dirtous populaires sont presque tous rimes. Le jeu
du « corhillon qu'y met-on 'l » et les comhats de jiiieulc des halles
de Paris, cliaulés par Yadé, rappellent les assauts d'improvisations
rimées familières aux liergers de Virgile :
Kl cnntiirc para cl irpoixlcrc parali.
[E'jloyiics.)
Rincer (pour )'/nsei% du lias-latiu reslncerarc. faire redevenir
net. Ou du germanique hrelnsa, nettoyer.
— Rincer, donner une rincée, vient de ruhicel, baguette; d'où,
en architecture rinceau, ornement composé de liranches garnies
de leur feuillage.
...Liquelz Loeys fu ainsi comme li rains qui est novellemcnt
tranché d'un très bon arbre. (Guil. deNangis, Annales de Sainl-
Louls.)
RipailBe, origine historique : de Ripacula, château sur les
bo^'ds du lac de Genève, où Amédée YIIl de Savoie, qui fut depuis
anti-pape, sous le nom de Félix Y, se relira (1430) et fut accusé de
se livrer à des excès de bonne chère.
Débauche de table.
Johanneau tire ripaille de repalssaille, ou de repuaille, dérivé
de repu, rassasié.
Si l'expression ne date pas d'Amédée, et qu'on veuille n'y voir
qu'une injustice pour le duc et nue calomnie pour le pape, il faut
l'attribuer à un autre duc de Savoie qui, vers la fin du règne de
Louis XIY, lit de ce même château de Ripaille, le séjour de sa
favor'ite, la comtesse deYerrue, ou dame de Yolupté, dont on a dit :
Cette (lame do Voluplé
Vivant dans une paix profonde.
Qui, pour plus grande sûreté,
Fit son paradis dans ce monde.
m\ 377
Ripopée, niiiiciiiuMiicnl r//if////H'. do ro ot pojniuilinn, do
jioiiiiui . cali.iiTl .
Ain iVclati'' |);ir les ciihMi'clicrs : iiiaii\;iis \iii.
Rire, du latin ridcre.
Synonymes : riiiolei', pordi'O son sérieux, i iJiciionnairc des
Précieuses.)
— Sourire : it'-Ljcr rii'e.
— Hire de vaciièro : joie déniesui'ée.
— [.e rire est une luanifeslaliou de l'inlelliLieiice liuniaine, car
les aiiiuiaiix ne laenl pas. Aristole le premier a i'einar(pi(' (|ue. \{>
rire ajjparlient en [iropre à respéco humaine. Les animaux, en
elVet, ne concevant pas l'idéal, ne peuvent éprouver ni dédain, ni
orgueil, ni le sentiment comique (pii fait naitre le rire. Les animaux
pleurent quelquefois : riiomnie seul a le don de l'ire.
Ce qu'il faut sui'tout admirer dans cette faculté, c'est la |)uis-
sance de volonté (pii lui pei'met de recouvrir l'agonie de son cieur
du masque de la joie : de soulTrir, le sourire sur les lèvres.
Le beau (vi-ai. bien) donne naissance aux sentimenls sérieux, au
sublime; le laid (faux, erreur) produit le ridicule, la mo(]uerie,
excite le rire.
L'elTet comique, ipii [)i'odui{ le rire, naît de la vue des vices et
des défauts des autres, {)arce que l'amour-propre nous persuade
que nous n'avons aucune des imperfections qu'il nous monli*e. La
mission du comique est de nous faire éviter les écai"ts, par la
crainte du ridicule.
— Rire, c'est ce qui contente le plus, el c'est ce qui coûte le
moins. (Moyen de parvenir.)
— Lycurgue institua à Lacédémone la divinité du rire, si néces-
saire, disait-il. à adoucir le travail et les peines de la vie.
— Un dit : rire; comme un bossu, ...comme un coffre, ...comme
un fou.
Rire aux anges : rire seul, d'un souvenir.
Qui rit seul, de folie se remembre.
Rire à ventre débouloinn'', ...aux éclats: s'esclalVer.
Rire dans sa barbe : in .^IoukkIki. ((]icéron.)
Rire sous cape.
Rire du bout des dents, des lèvres.
— On distingue ainsi : le rire jaune, forcé, ou sardonique : le rire
dédaigneux; le rire gracieux; le rire inextinguible, ou convulsif.
378 RIR
dont parle. Iloiiirrc;, el (jiii soulève en nous une convulsion (jiic nous
ne pouvons n^prinier.
— Le rire vient du cœur, le sourire de l'esprit.
Le rire cp;inoui, lar^e, profond, de Molière, fait souL^'or au rire
d'airain de la comédie antique. (0. Feuillet.)
— L'ahhé Dauiasrèno, astrologue italien, publia, en 1002, un
livre où il e\pli(juait les tempéraments et les caractères des indi-
vidus pai' leurs diverses manières de rire. 11 disait qu'il y avait
autant de rires que de voyelles.
A. Les personnes qui rient en ha ! hn ! lui ! sont flegmatiques,
franches, inconstantes, amies du bruit et du mouvement.
E. Le rire en fié ! hé! hé! appartient aux bilieux.
/. ///.' hi! hi ! est le rire des enfants, des gens naïfs et mélan-
coliques. Il dénote une nature timide et irrésolue. Les blondes
rient en / : ce qui ne veut pas dire que toutes les blondes soient
timides.
0. Le rire en o/< .' apparlient aux sanguins. Il indique la géné-
rosité dans les sentiments.
U. Évitez ceux qui rient en u. Ce sont les avares, les hypocrites
et les ennemis du plaisir.
— Rire aux larmes. Marot dit, dans l'épitaphe de Jean de Serre,
excellent comique dans les farces d'alors :
Oito (lis-je '.' on ne le iilciiri' point '
Si faict-on ; et voicy le poincl :
On en ril si fort en maints lieux.
Que les larmes viennent aux yeux.
— Mourir de rire : visu, solti (Horace), crever de rire.
Le peintre Zeuxis mourut de rire en voyant le portrait qu'il
avait fait dune vieille femme. « Zeuxis le peinctre, lequel mourut
subitement à force de rire, considérant le minoys et pourtraict
d'une vieille femme représentée eu peincture. » (^Rabelais, IV, 17.)
Léon X, dit Montaigne (I, 2), ayant appris la prise de Milan,
entra dans un tel accès de joie, que la lièvre l'en prit, et il eu
mourut.
— Je ne vous inviterai pas à mon enterrement, vous me feriez
trop «rire.
....l'ai ri, me voilà (tésarmé.
(PiRo.N, Métromanie. UI, 7.)
Courage, rira bien (jui rira le dernier.
(■Jh. Coii.NRii.Lh;.)
ROH 379
Ritournelle, it;ilion n'fornc/ia. lalin ?r et lovnnro.
Ce mut est fait coinino ceUii de La Toiinielle. trihiuial de Paris,
qui se partaiieait avec celui du Cliàtelet les alVaires jiidici.-iires.
La Toiirnelle était ainsi iioiiiiiiée [)arce (jue les conseillers du
Parlement y faisaient le service à tour do rôle.
River, (ii'iuine ucrnianiiiiie.
— Hiver le clou à quehiii'tin. C'est le mettre à la raison une
donne fois ; allusion au clou rivé qui ferme la chaîne des galériens
pour les ompèclier de nuire de nouveau.
Rivière, du luis-latin rivaria, dérivé de rirus.
— Pascal a dit : « Les rivières sont des chemins qui marchent. )-
On dit : «Où va celte rivière? », et par extension : « Où va ce
chemin ? »
...On dit, messieurs, que la Manche nous sépare: mais ce sont
les montagnes qui séparent les hommes, les rivières et les nappes
d'eau servent, au roniraire. à réiinii- les peuples civilisés. {Von-
tanié, 1849.)
— Si lu veux aller à la mer. prends une rivière pour guide.
— Les rivières de Provence ont très peu d'eau en éXé; à peine
navigables pour les canards, les oies y ont pied presque partout.
— Avant de quitter Madrid, écrit un touriste pendant les inon-
dations de 187(), i"ai voulu voir le Mançanarès. On ne saurait dire
de lui quil était sorti... Il était absent.
Méry appelait le Mançanarès : une rivière liydropliobe.
— Sophie Arnould disait des petites rivières aililiciellcs : « Cela
ressemble à une rivière... comme deux gouttes d'eau. »
— Les grandes rivières...' de diamants, viennent des petits ruis-
seaux.
Robe, provençal vanité, ancien français roher. de l'allemand
rauhon.
Même origine que dérober, dépouiller.
Saint Paul... que fou raubitr: cniro al Icrs ccl de la diri-
nilad. (Vices et vertus.) Saint Paul qui lut i"a\i jusf{u"aa troisième
ciel de la divinité.
Robert (sauce).
Cestuy feust inventeur de la saulce Robert, tant salubre aux
connils rostis, canai'z, etc. (Rabelais, IV. 'i-O.)
Robert-Macaire (C est un).
C'est un fripon audacieux et effronté, (pi i emploie toutes les ruses
380 ROC
(lu ('linrl;il;iiiisiii(' pour f.iii-c des diipos; un fniiibc foiirhissiino. un
blngueur rlcnicl, no croyiinl ;'i rien, so in(»(iii;iii( de hml. frcond en
ressources; iiiissi prompt, ;'i donner iin coup de conlenn ;'i un p-n-
dai'nie, qu'à jeter sn lahnlière ;iux yeux d'un roniuiiss;iire ; à f;iiro
sauter une caile, (ju';'! hincer l;i ré{)lique ;i un ;irliuuii;dre récal-
citrant.
— Ce (liclon prit n;iissaiice vers 1830, ai)rès la représentation de
\Aiiber(j(' des Adrcis, où le héros, Robcrl-Macaire, joue le r61e
d'un assassin. L'acleur Frédéric Lemaitre sut, donner à cet odieux
personnap;e un caractère houtïon, qui obtint un ,urand succès. Ce
héros ti-iom[)liant du vice a un acolyte du nom de Bertrand, sorte
de niais perverti, qui est à la fois l'objet des sarcasmes de Robert
et le complice servile de tous ses crimes.
La représentation de cette pièce, interdite avant 18'i8, reprise
sous la République, fut supprimée de nouveau en 1852.
Robinson, origine littéraire.
— Selkick, matelot écossais, a joué l'original du rôle de Robinson
Crusoé, dans l'ile de Juan Fernandez,* où les hasards de la vie
maritime l'avaient laissé seul et sans secours. La famille de Selkick
habite encore Horgolîfe où il est né.
Daniel de Foë, Français d'origine (de Foix), écrivit son livre
sous l'inspiration de Selkick. Ce n'est donc pas une pure fiction
amusante. C'est un exemple à suivre dans les circonstances diffi-
ciles de la vie, où l'on puisera le courage dans l'abandon, de
l'énergie et de l'esprit d'invention dans la solitude.
Rocaille. Ornement composé de roches artiticielles et de
coquilles, en usage sous Louis XV ; d'où rococo.
Rocher, origine incertaine.
— Les paysans appellent les rochers les os de la terre (?), comme
s'ils connaissaient la fable de Deucalion et de Pyrrlia.
La terre de Fontainebleau est si maigre, que les os (ce sont
rocs) lui percent la peau. (Rabelais, Y, 10.)
Rococo, suranné, démodé, genre rocaille outré. C'est rocaille
avec une désinence ridicule.
— En 1830, les romantiques ont créé ce mot pour désigner tout
ce qui poi'tait l'empreinte des temps passés. Les Grecs, les Romains,
Racine, l'école de David : rococo !
L'on arrivait par la lilière des épithètes qui suivent : ganache,
ÙOG 381
lossile, perruque..., ;i l'épilliète la plus iiifaiiunite : nradéniicien,
iiienil)r(> de riiistitiil. (Tli. (îaiilier, iS.'jr).)
Rôder, de rotai-f, pai" iiilluence méridionale: [iruNtMical rodar.
Au propre, courir rà et là.
Rodomont, oriizine littéraire : l'aiifai'oii.
l*ei-somiaiiO créé par Boïardo, (pii en fait un l'oi d'Alt^er, descen-
dant des constructeurs de la tour de Babel.
L'Arioste, dans le Roland furieux, en fait un personnatie arro-
gant et lui attribue des prouesses extraordinaires.
Roger-Bontemps, origine littéraire ; bon vivant, sans souci.
Ce nom a été fait de l'altération de réjoui bon icnipa, : ou de la
famille des Bontemps, illustre dans le Vivarais, dont le cbef, qui
s'appelait Roger, était d'buuuHir joyeuse. Le nom de Hoger fut
porté depuis par tous les aines de la famille pendant plusieurs
générations, et ils se tirent gloire d'imiter leur aïeul, en se trans-
mettant la gaîté comme un héritage.
— C'est le nom d'un personnage de Roger de CoUerye, poète du
commencement du xvr' siècle.
Rognolet, dérivé de royner.
Se dit d'une personne (jui n'a pas su tirer parti d'une belle
position.
Il est comme Pierre Rognolet, qui d"uu manteau n"a su faire un
bonnet.
Ou encore : tailler de la besogne sur le patron de l'abbé Rognolet.
— Rabelais (IV, o2) dit que « à Paris, Groignet, cousturier, avayt
employé unes vieilles clémentines (décrétales) en patrons et
mesures. 0 cas estrange ! tous babillemens taillez suz telz patrons
feurent gastez et perdus, etc. »
Rogue, celtique rog, lier, arrogant.
Quelques-uns y ont vu une trans[)osition (?) des lettres du mot
rouijo : en bas-latin rocua, désignant un manteau écarlale.
Exuens se vesliniento ([uod lin<jua ruslica dicilur rocus. (Ilel-
gandus.)
Eron passât per la niar rog a pé se. Ils étaient passés par la
mer Rouge à pied sec.
— L'usage de l'écarlale alTectée anciennement aux vêtements des
hauts dignitaires, aux chevaliers, aux docteurs, introduisit jadis
l'expression j^ouge pour hautain, arrogant.
Brantôme s'est servi du mot rouge dans ce sens, en parlant des
382 IU)f
Siiiss(^s, :i|(rt''S r;ilT;iiro de X;i\;irro, coiiliX' L;i Trémoiiillc, nlTairc
doiil ils (1('\ lurent si rouges cl si arrognnts...
Roi, (lu l.'ttiii rcf/em, provençal rey.
— l.e litre de roi est plus ancien et plus honorable que celui
d'empereur. Il vient de reyeï^e, celui qui régit, qui gouverne. Il
éveille l'iniage du chef dune grande famille, et, de tonte antiquité,
a été donné aux princes des nations.
— Empereur veut dire qui commande. C'est un titre militaire,
qui devint celui des Césars, lorsqu'ils eurent dominé par leur
despotisme l'anarchie de la République.
Le pape Léon III consacra l'autorité de Charlemagne en Italie,
en le proclamant empereur, successeur des anciens Césars.
En Russie, Ivan lY, qui descendait, par sa mère, du dernier
empereur de Constantinople, prit le litre de César (czar) qui se
traduit par empereur.
Bonaparte, en succédant à la lignée de saint Louis, prit aussi le
titre d'empereur, que justifiait sa gloire militaire.
— On dit « roi de France », et non « roi.de la France », parce
qu'à l'origine notre langue, comme la langue anglaise, n'employait
pas l'article devant les noms de pays.
Rabelais dit : « Voilà Asie: ici sont Tigris et Euphrates; de ça
est Europe. »
Ce n'est que vers la fin du xvi^ siècle que l'article prit place:
mais l'expression « roi de France » survécut à celle petite révolu-
tion grammaticale, parce que le respect que nos pères avaient pour
la royauté (et pour les formules consacrées) leur fit conserver
intacte l'expression.
Louis-Philippe, qui succéda, en 1830, au roi de France Charles X,
rompant avec la tradition, se fil appeler roi des Français.
Ménage parle d'une monnaie d'or appelée salut, frappée sous
Henri A'I, roi d'Angleterre, couronné roi de France à Paris, en
1422, qui portait d'un côté la Vierge Marie recevant la salutation
de l'ange, par le mot ai-e. De l'autre étaient deux écus, l'un de
France, l'autre de France et d'Angleterre, avec ces mots à l'entour :
Henricus Dei gratla, Francorum et Angliœ rex.
Henri VI y prend le titre de roi des Français, tandis qu'il se
donne celui de roi d'Angleterre comme d'un domaine héréditaire.
On ne frappe les rois quà la tète.
(V. Ulgo, Cromwel, IV, 8.)
Le seul roi dont le pauvre ait garde la mémoire (Henri IV).
UO.M 383
Ce vers, ([ii'oii altfilnie ;i Voltiiit-e, est, en clianpennt pauvre en
pi'upfe. diiiie odi' de riiuliii de la Hriinellerie, écrile cinq ans après
la mort de Voltaii'c
— Si j'étais roi ! si j'étais lioiivernement !...
IIoii ! que je ne suis roy de France pour quatre-vingts ou cent
ans! (Rabelais, 1, 39.)
Ail 1 iiuc ni' siiis-jc roi |)uiir ci'iil ou six vingts ans.
(l\kc;.MEn, Satire VI.).
Sémiraniis, ayant obtenu du l'oi d'Assyrie le droit de régner
absolument pendant cinq jours, usa du pouvoir pour faire mourir
le roi lui-même, et s'empara de son trône.
...Comme le berger de Génitois, qui. se dépitant en temps de
pluie, disait : « Si je suis jamais roi, alors je gai'derai mes moutons
à cheval. » (Moyen de parvenir, cli. 33.)
...Beges prœcurrere vita.
(Horace.)
(Plus heureux qu'un roi.)
Le roi n'est pas son cousin : il s'estime plus heureux qu'un roi.
Rôle, du latin rotuJus (roideau de papyrus).
Rôle est fait comme volume : cliez les Romains, les livres étaient
des rouleaux et non des cahiers, roulés et non plies.
Romain, du latin roniunus.
Un travail de Romain. Exprime la grandeur d'un ti'avail.
— L'art rom:iin participe de l'art étrusque et de l'art grec ;
mais son génie personnel s'est assimilé les éléments qui convien-
nent à ses besoins. Tout a été refondu dans le moule puissant d'où
est sortie la grandeur romaine : l'art, les institutions et les usages
empruntés aux civilisations voisines.
L'art romain, qui subordonna l'idéal à l'utile, le beau au grand,
est un type original, qui a pu s'imposer plus tard en souverain, et
couvrir de ses œuvres la surface du monde.
— Les Romains modernes sont des morts qui u'onl jamais vécu.
(Dante.)
Roman, même origine que le précédent, dont il est une forme
dialectale.
Les langues romanes ou novo-latines, sont au nombre de quatre :
l'itaben, l'espagnol, le provençal, le français.
L'espagnol comprend le portugais et le catalan. Quant au pro-
vcnçal, c'est un idiome localisé, qui ne se pnrle plus que dans le
midi de la France, apn"'s avoir'ieté un faraud éclat au Moyen-A^^e.
Spt''cial(MU(Mil la laiiuiu; des ti'ouIiadour'S :
Trtinift lo vers en rhanlun
En pliinii letu/ua romana.
(<;. H'i.!:i. )
(Je transniels Ui vers en cliaiilani eu pure lauiinc roinaue.)
— Les lanfiues romanes ne drriMMil pas les wm'^ di^s autres : elles
sont toutes contemporaines (>l, en (pu'lipu; sorte. S(eui's jumencs,
issues du latin, qui a remplacé à la même époque les langues
indigènes.
Ces langues ont toutes le caractère latin, mais les divers peuples
le parlèrent avec un accent qui leur était pro[)re : de là la diversité
des langues italienne, espagnole, provençale et française.
Après la conquête des Gaules, il se forma un langage composé de
gaulois et de latin, appelé roman, et qui fut l'origine de la langue
française.
Les poètes du x"^ siècle, qui composèrent des fabliaux et autres
fictions, et inventèrent la (jale science, furent appelés romanciers.
Villon sut le promicr, dans ces siècles grossiers,
Débroniller l'art confus de nos vieux romanciers.
(Bi'ii.i.Ai:.)
— Le mot 7'oman qui, à l'origine, signidait ouvrage lilléi'aire en
langue vulgaire, est devenu synonyme de fiction.
Daubenton lisait des romans pour se reposer: il appelait cela
mettre son esprit à la diète.
Le paradis consiste dans un bon fauteuil et un roman^jiendant
l'éternité. (Grey.)
— Le Roman de la Rose, commencé par Guillaume de Lorris, .
dit Glopinel, au début du xiiF siècle, fut aclievé par Jean de Meung.
Ce roman, ou plutôt ce poème allégorique et métapbysique, était
regardé au Moyen-Age comme le code de l'amour.
UAslrée, d'Honoré d'Urfé, est une longue et fade bucolique, parue
en IGIO, où sont peintes les délices imaginaires de la vie pastorale
sur les bords du Lignon.
Le Grand Cyrus, de M"« de Scudéry, son principal ouvrage, est
un roman faisant allusion au Grand Gondé.
— Dans l'ordre cbronologique, il y eut d'abord :
Les romans de cbevalerie.
Les romans d'amour, tels que Aucassln el Nicoletle.
U(l.\f ."^.So
Los roiiuins saliriquos,: Roman de la /{ose, Rotitan do licnai'i .
II. (Vl'rfé : rAsIréc, au (•onimcncomciil du xvir siéclo.
Camus, t'vrfiue do Belley : iiii«' cnuiuantainc de romans, dont
Paloinhc, rt'rditi'p on ISliO.
Sorcl : llisloirc atinUjui- di' Francion (licouciouv).
M"" do St'udôi'v : le (ivand (liivux, la (Uidic.
Scarrou : le Roman coniu/ae.
Cyraiu) do Horuorac : llisloirc des E)n))ires da Soleil, etc.
Furetiore : le Roman bouiujeois.
M"" do Lafayotto : la Princesse de Clères, Zaï/de.
Fôiiolou : Télémaqae.
Le Sa.ue : Gil Blas, le Diable hoiteu.r.
Ilaniiltou : Mémoires du Cher aller de (Iramnionf .
Montosquiou : les Lettres persanes.
Prévost (l'ahliô) : Manon Leseaal.
M'""- de Graîlicny : Lettres d'une Pérurienne.
M™« do Toiu'iii : le Sièfje de Calais.
Voltaire : Candide, Zadi(j.
Diderot : la ReVujieuse, Jacques le Fataliste.
J.-J. Rousseau : la Nouvelle Hélo'ise:
Hostif de la Bretonne : 200 volumes de romans.
Laclos : les Liaisons dangereuses.
Bi^rnardin de Saint-Pierre : Paul et ]'irf/inie.
M"-« de Staël : Delphine, Corinne.
Chateaubriand : Atala, René.
— Aujourd'liui, ou entend par roman une liistoire l'ointe, oi'i
l'auteur cherche à intéresser par la i)ointure des mœurs.
— Les romans peuvent être :
Archéologiques, comme Notre-Dame de Paris, de Victor Hu.uo.
D'aventures : Gil Blas, de Le Sage; les Trois Mousquetaire^i.
d'Alexandre Dumas.
Épistolaires, comme la Xourelle Hélo'ise, de J.-J. Rousseau.
Erotiques, libertins: ceux de Voisonon, deCrébillon fils, de Sade.
Chevaleresques et aristocratiques : ceux de M"'' de Scudéry.
Historiques : ceux de Walter Scott.
Maritimes : ceux d'Eugôno Sue.
De mœurs : ceux de Le Sage, de Marivaux, de Ricbardson.
Pastoraux : Daphnis et Chloé, VAstrée.
Philosophiques : ceux de Voltaire, de George Sand.
Sentimentaux: Werther, ùq Gw[\\(i\ René, de Chateaubriand.
386 no.\r
Sociaux : de Gcorpo SmikI, do Victor Iliian (Mv Misi rnhhs).
Il y a encore les i'oiikiiis liioLjra|)liifiiies, de ca|ii' i-i (l'(''|t('i'.
Inminristiquos. oie.
Romance, ancien adjcclif, connue i-otiinn.
— La romance, petite poésie légère, aussi .uicit nue (|u(' la lant-iie
française, est une espèce de chanson oi"i s'cxiirinic l;i scnsiltililé. la
grâce, la galanterie.
Nos premières rouiances étaient des clianls |)opnlaires et patrio-
tirpies, imités des rouxuicoroa espagnols. Depuis, le nom de
romance a été a|)[)li(pié à toute chanson tendre ou plaintive, divisée
en couplets avec refrain.
— La romance se montre à la fin du x^ siècle, éporpie où la langue
française commence à se former des déljris de la langue romane,
et succède aux chants des trouvères et des troubadours.
— Albanèse, chanteur sopraniste de la chapelle du roi, a puldié,
vers le milieu du xviii<" siècle, plusieurs recueils de mélodies faciles
et charmantes : mais la plus grande vogue de la romance a com-
mencé avec le xix" siècle.
— Sous le Consulat, il faut citer Garât, Boïeldieu, Pradher et
Ch. Plantade, dont la romance Langueur (Vnmour est une mélodie
pleine de sentiment.
Carbonel : Brigitte et Paurre Lise, qui ont eu beaucoup de
vogue.
Lambert: De ma Céline ainant modeste (inspiration gracieuse),
1806.
Dahvimare : Prêt à partir pour la rive africaine, 1809.
Alex. Choron : la Sentinelle eut un succès européen.
La Reine Hortense : Partant pour la Sgrie : Reposes-rous, bon
clievalier, etc. C'est à elle qu'on doit le premier album qui ait été
pubhé en France, et l'idée de mettre un dessin en tète de chaque
romance.
— Les quinze années de la Restauration furent une époque
])rillante pour la romance.
Romagnési : Faut l'oublier, disait Colette; Depuis longtemps
j'aimais Adèle: la Petite Mendiante.
Amédée de Beauplan : Mon petit François: Bonheur de se
revoir; Dormez, chères amours.
Edouard Brugnière : Mon petit bateau.
Panseron : Appelez-moi, je reviendrai: Vogue, ma nacelle.
Pollet : Fleuve du Tage.
Piililiiio J)iich;iililiLi(' : ht llrindurnu' : lu Séparai ion .
— Api't'S l;i H('>\(iliiti(iii (If IS;»(). 1,1 l'oiii.iiict' p;ii'li(i|it' an iiiniivo-
incnt l'oinanliqiit'.
Hippolyte Moiipoii : // élail Irais /-/lassta/rs : rAiirlalaasr : h's
Deux Arc/iers : la Chanson de .U/f/non.
Loïsa Piiaot : fo Grâce de Dieu ; Ave Maria.
Lahari'c : Jcunr fille aux yeux noirs ; le Kleplile.
(îi'isar : la Folle : les Laveuses du Coucent.
lît'ral : Ma .Xorrnandie : Mon petit cochon de llarbarie.
NiodenneviM', (|ii(' le l.ar porlei'a à la postérité.
Romantiques, de rancieii français romani , (Icaciiii ronuin.
Partisans d'une écolo littéraire et ai'listi(pie(pii avait poni' système
l'aiTrancliisseiiient des réules imposées par les traditions anciennes,
dites classirjues. En oiitiv, ils se rattachaient passionnément à la
littérature, aux monuments et aux traditions du Moyen-Ape. époque
dite romane: doi'i élait venu leur nom de romantiques. Cette
elîervescence a ou lieu pendant la lin d(? la Restauration et les
premières années du régne de Louis-Pliilippe. Née vers 1820,
l'école romantique était à son apogée vers 1833.
Les romantiques avaient pour adversaires les classiques, ou
partisans des anciennes régies.
Ces querelles n'avaient que l'apparence de la nouveauté : elles
rappelaient le dill'érend des anciens et des modernes, au xvir' et au
commencement du xviii'^' siècle.
Rome : la Ville, la Ville Éternelle : la Ville des Césars : la Ville
aux sept (Collines. Urhs a'terna. (Symmaque.)
On attribue son nom à son fondateur Romulus, qui l'établit sur le
Palatin. Agrandie par ses successeurs, elle couvrit bientôt sept
collines, d'où le surnom de Seplicollis.
Saint Pierre, dans sa Première Épiire. et saint .lean, dans
X Apocalypse, la désignent sous le nom figuré de Bai)ylone. Les
rabbins la nomment Edom, comme devant subir le soi't dont les
prophètes menacent la ville de ce nom.
Plutarque dit (pie son nom vient de rama, vieux mot signifiant
mamelle: d'où y^///<e/m, déesse qui présidait à l'alimentaliou des
enfants.
Noël fait venir liotue du grec rhoui<\ force.
... La Rome des rois, sur l'Aventin ; la Rome répubhcaiue, sur le
388 IKi.N
Capilolc; l;i Uoinc iiii|)i''ri;il('. sur le l';il;iliii : l;i lloiiic (■|ir(''liL'iiiio,
assise sur le Vatican (•(uiiinr sur iiii Iri'tiic. ((î. Saiid.)
La Hôiiu; des ])a|)('S a succédé à cciin des cnipiTeurs : les uiissions
ont rciuplacé les légious, cl In doiuinatiou de l'espril t;sl encore
idus iiuiverselle que celle de la force.
— liildeliorl, évé(jue de Tours, \isila Rome au coniineuceinent du
xw siècle. Il dit de cette ville: « il en l'este ti'op, et trop en est
tombé |)()ur (pi'ou puisse détruire ce qui est debout ou relever ce
qui est gisant. »
— En demandant, on va à Home.
Tout cliemiu mène à Rome; c'est la devise de rKulise c;itli(ili(iiie.
Il était plus diflicile d'aller à Corinthe,
Avec le latin et le roussin, on peut voyager par tout le monde.
Si l'on en peut \o\v un i)lus fou, je Tirai dii'e à Rome. (.Molière,
Bovrfjeolii fjen1illi(»iun<\ V, 7.)
Romérage, de l'espagnol nnnerîa.
Nom donné, en Provence, aux fêtes patronales des villages.
On les appelle aussi votes, roman vot. C'est ce que Rabelais
(I, 45) désigne sons le nom de romicaigcs (?).
Au Moyen-Age, on appelait romieriX^?, pèlerins qui faisaient le
voyage de Rome pour obtenir la bénédiction du pape.
— Les pèlerinages les plus célèbres ont été : celui de Terre-
Sainte ; celui des Saints Apôtres, à Rome ; et ceux de Notre-Dame
de Lorette et de Saint Jacques de Gompostelle.
Rompre, du latin rumpere.
Au ligure: se brouiller.
Cbez les Romains, on donnait un brin de paille, en prenant pos-
session d'une propriété ; au contraire, on rompait le brin de paille
en s'en dessaisissant; d'où la locution alirégée « rompre la paille »
avec quelqu'un.
Confrimjcrc tesscram .
(Pl.AlTE.)
(Briser le contrat.)
Rompre en visière avec le genre lui main.
(.MoMKUK, Misanthrope.)
Rond, du latin rotundus, provençal redon.
Rond comme l'o de Giotto. On raconte que le pape Boniface YIII
fit demander à Giotto des dessins, pour juger de son talent. Le
peintre lui envoya un cercle tracé à main levée, et qui était d'une
rondeur parfaite.
HnS 380
Vasari (T/V de Ciotio) raconte ainsi cetto- anordolo :
BtMioil IX. voulant oi'nor do peintnros Saint-PioiTo do llonio,
o\[)(''(lia on Toscano un ^W <^^'•> licnlilsliinninos. [)onr jnoor si le
mérite de Giollo éualait sa rôpulalion. Lenvoyé du pape, après
avoir recueilli à Sioiino des dessins de plusieurs peintres et
mosaïstes, arri\;! ;'i I-'Ioiumicc. di'i il ('\|)osa sa mission à (îiolto, en
lui demandanl un dessin (pi'il pùl montrer à Sa Sainlolé. (liotto
prit ;iiissil('it une IVuillo do \{'!in. a[)puya son coude sur sa hanche,
pour former une espèce do compas, et peignit d'un seul jet, avec
nue délicatesse toujorirs égale, wn cei-cle d'une perfection merveil-
leuse, qu'il remit en souriant entre les mains du gentilhomme.
(leliii-ci se croyani joué, s'écria: « \\\\ quoi! n'aurai-je d'autre
dessin (pie ce rond l — Il est plus que suflisant », répondit Giolto.
L'envoyé du [)ape. malgré ses instances, ne put ohtenir que
ce trait, et se relii'a foi't mécontent. Néanmoins, il présenta à
Benoit IX le cercle de notre artiste, en lui indiquant la manière
dont il l'aNail li'acé. Le pape et ses courtisans reconnurent conihien
(îiolto l'emportait sur ses concurrents.
De là le proverhe :
Tu -y."/' iiin ronili) dm l'o di Giollo.
(Vasaiu, traduction de Lkcla.nciik.)
Ronfler. Diez en fait une onomalo[)ée.
Synonyme : jouer de l'orgue.
Il ronlle comme s'il voulait l'aire concurrence an tonnerre.
(George Sand.)
Ronsard (Pierre de Ronsard). Anagramme : Rose de Pindare.
— Donner nu soufllet à Ronsard : parler mal le français, comme
on dit : être l'ennemi de Lhomond.
Rose, du latin rosa.
— On appelle à tort, en France, le mois de mai « le mois des
roses ». C'est une erreur due à ce que nos poètes, qui liahitent des
galetas, au lieu de poindre d'après nature, ont lu des descriptions
classiques, où il est dit que les roses lleurisseut en mai. Cela est
vrai pour ritalit;, et même pour la Provence; mais, dans le nord
de la Frani-e. la nature relarde d'un hon mois, et la rose ne lleurit
en réalité qu'en juin.
— Il n'y a pas de roses sans épim^s : pas de plaisir sans peine.
Rose ne luiil sans piiiiiiToiis.
:]90 nos
(]('liii ([iii iiiai-clic sur los roses, priil ;i\()ir les pieds percés
d'épines.
Le rayon de miel est donx. niiiis rahcille piipic
— Il n'y il si Itelle l'ose (pii ne deAienne uriillf-nil : l;i iMsiiilé
p;isse.
— La rose, (Miililriiic (le la hcaiité. ne \it, sclun .Mallit'i-lir. (pu.'
Lrs|t;icr (11111 iii;iliii.
Kn lool), François Despériers perdil, à Ai\. sa lillf unitpie :
Malherbe, son ami, lit à celle occasion les admiraMes stances qne
l'on sait.
Malherbe avait d'abord écrit ce vers :
El lloscllo a vrcii ce (|iii' vixciil les roses.
Par une heureuse erreur. rim[)rimenr y sulistilua celui-ci :
El rose, elle a vécu ce ({ue vivent les roses.
— Les roses de Pœstum. Pœstum, l'antique Posidonia, en
Calabre, était antrel'ois environnée de champs de roses, qui, deux
fois l'an, donnaient leur moisson de Heurs.
Bifcri ni-sarid Pa-sli.
(\'lltl,lLK.)
Odnrali vomriu Pwsli.
jl'liOPEUCE.)
— L'île de Rhodes était aussi très fertile en roses, et doit son
nom à celui de cette fleur, rhodon en prec.
D'où le nom de Rhodanus, de la ville de Rhodè, que les Bho-
diens avaient fondée à l'embouchure du Rhône,
Rosas, ville de Catalogne, fut aussi fondée par les Rhodiens.
Rosée, du latin i^os. d'où arroser. Provençal air/ungna. c'est-à-
dire eau de nuit.
La rosée est la vapeur d'eau contenue dans l'air, qui se condense
au contact de quelque substance froide. Elle se forme plus abon-
damment après un jour chaud d'été ou d'automne, surtout si le
vent souffle de l'ouest ; parce que les vents d'ouest passent sur
l'océan Atlantique, d'où ils arrivent humides et chargés de vapeurs.
Ils augmentent la saturation de l'air, qui en dépose une partie au
contact du froid de la terre.
Rosière, dérivé de rose.
— Rosière de Salency (près Noyon).
Saint Médard institua, en 333, à Salency, le prix le plus touchant
ROU 391
que la piôté ait jamais olTei-l à la vertu : une couronne de roses
pour la liUe la plus sage et la plus modeste. La première rosière fut
la sœur du saint évèqiir.
Le couronnement a lieu le dimanche qui suit la fête de saint
Médard (18 juin), joui' d'inquiétude et d'attente, où, si la pluie
IoiiiIh'. elle doit tomber six semaines durant.
La lèie de Salency a donné naissance à beaucoup d'auti'es, dont
la [tins célèbre est celle de Xanlerre.
.Mais aujourd'hui, le |»ri\ de sagesse, qui consiste en une cou-
ronne de roses, est accompagné d'une somme d'argent, comme
appoint de la vertu.
— l'ii prix qui ne coiiiporle pas iWfrressit.
Rosse, du lu(l('S(pie ross. cheval de prix.
(l'est [lar dérision ({u'on a donné ce nom aux che\aux sans force
et sans vigueur.
De là vient rosser, fi'apper comme on frappe une rosse pour la
faire marcher.
Rossinante, oi-iginc littéraire.
.Mauvais che\al très maigre : rosse.
C'est le nom du cheval de Don Quichotte.
Tel fut Cl' l'oi dos lions chevnuv.
Rossinante, la l'Iriir des cuursiers d'Iliérie,
Oui, trottant tons les jours el par monts et par vaux.
Galopa, (lit fliistoire, une fois en sa vie.
(BoiMCAi-, Epvjrammc 3").)
Rot, du latin )'uc/us. vuctare, roter.
Synonyme : soupir de Danemark — ou d'ivrogne.
Rôtjp, ancien français roslir, du germanique rosljan, provençal
rousth'.
L'un aynie te rousty, l'autre aynie la salade.
(RoNSAiti) à L. Desiiiazures.)
Ainsy comme ils me roustissoyent, je me recommandays à la
grâce divine, ayant en mémoire le bon sainct Laurent. (Rabelais,
Pantagruel.)
— Il a r(')ti le Ijalai, se dit de quelqu'un qui a beaucoup usé de la
vie. el qui s'est épuisé i)ar l'excès des plaisirs.
Quand tu auras autant rousty comme j'ay et esté rousty..., dit
Panurge.
Roué, dérivé de roxc, du latin 7'ota.
— Le supplice de la roue fut en usage jusqu'au xviii« siècle. Après
392 HOU
;i\oir Ml(iic|i('' 1(! |);ilif'iil siii' iiiic croix en loriiii' de X. un lui l'om-
piiil les os (les qiialfc iiieinhres. puis on e\|i()s;iil le coriis siii- une
roue que Ton f.iisnil tourner.
— Ce iMol, (|ui, (l;ins son iicceplion lill(''i-;ile. e\|ii-inii' une chose
lioi-ril»le, devint, sous l;i Uégence, un terme élogieuv et ll;ilteur
chez les jeunes gens ;i la iiiodc.
Les petits maiires du temps, ccrliiins novateurs,
(irjiiids iii;irii'iirs do iimls l'un dr Ijinlrc cldimi-s,
y ajoiitèrenl même des épilliéles comme cliaruiant, délicieux.
Mercier {Tableau do J'arls, cli. 47:2) dit que ce mot fut créé par
« rextrèmement honne compagnie », ainsi qu'elle s'intitule elle-
même. Mais commeul a-t-elle pu adopter une expression qui éveille
une idée de crime et de supplice, et l'appliquer si légèrement l
On va jusqu'à dire : un aimahle roué, pour désigner un homme
du meilleur monde, qui n'a ni vertus ni principes, mais qui donne
h ses vices des dehors séduisants, qui les ennohlit à force de grâce
et d'esprit.
Les mots ira f ire, perfide, méchanl. ont pâli: on n'ose plus
dire : c'est un scélérat, le mot ne passerait pas ; on dit : c'est un
roué. C'est un signe d'immoralité et de décadence des sociétés, que
ces expressions outrées, où limpudence ose donner au vice les
apparences d'une qualité. Telle est l'expression de roué, empruntée
à la jurisprudence criminelle, et qui signilie en même temps un
roué en place de Grève, et un roué de cour.
— Le cardinal Dubois, dit Saint-Simon, était un petit homme
maigre, eflîlé, à mine de fouine, et bon à rouer. C'est à lui que le
nom de roué fut appliqué pour la première fois par le Régent.
Avant la Régence, on avait le nom de rompu pour désigner un
bon vivant ; cette expression s'est conservée en provençal avec la
même acception.
...Ce bon rompu de Louis XI aima toutes les femmes. (Brantôme.)
Les grands seigneurs se sont approprié le nom de roués, pour se
distinguer de leurs laquais, qui ne sont que des pendards.
— Les courtisans du régent disaient plaisamment qu'on les
a[ipelait roués, parce qu'ils étaient prêts à se faire rouer pour lui.
— Un voleur enrichi, après avoir été laquais, roulait carrosse.
C'est un homme bien adroit, dit-on, il a sauté du derrière d'un
carrosse en dedans, en évitant la roue.
Rouge, ilii laliii rubeiis, provenral vog. \
D'di'i : rou.ueiir. roiiuoole. rubis, riihicoiul, i-iiltri(iiit\
— Hoii,u-o coniiiio un clu'rubin. ...coiiiiiic iiu c(»(j. ...rouinic une
('■ri-rvisso. ...un homard.
— Hou.uir : en ar^-ot, c'est |ii(int'r nu liii'd.
Dans le Herry on dit s'écrevisser. pour rougir de colère.
— Mécliant comme nn âne rouge ; se fâcher tout rouge.
Rouge est pris ici piuir roux. C'est un préjugé très ancien (pu:
les cheveux roux sont le signe caractéristique d'un mauvais naturel.
Les Romains avaient déjà contre les pei'sounes rousses de
fâcheuses préventions: et, chez les nalious modernes, les cheveux
roux inspirent de 1 aversion et une sorte de répugnance. C'est un
vieux préjugé qu'il faut au moins constater, ne fût-ce que pour le
comlialtre.
lluugi' au soir, likiin- ;iii malin.
C'est la jourin'i' du pi-lcriii.
On croit généralement que le ciel rouge au coucher du soleil, et
pâle â son lever, présage un beau temps. Ce dicton se retrouve
chez tous les peuples de l'Europe.
— En itolitique : Tous les rouges ne sont pas des forçats; mais
tous les forçats sont rouges. (Proudhon.)
Rougeur, dérivé du précédent.
— La rougeur est la couleur de la vertu. (Socrate.)
— Tous les sentiments humains sont contenus dans un pot de
rouge.
Le rouge signifie la pudeur, quand il est sous les yeux ; la colère,
quand il est sur le front: la gaité, quand il est aux joues: l'ivro-
gnerie, quand il est au nez ; la honte, quand il est aux oreilles.
— La rougeur qui apparaît naturellement sur le visage, est un
signe de pudeur, de décence et de modestie, causé par une
impression vive et subite.
Viryincus ruhitr.
(ViRciii.i:.)
— La pudeur, est une vertu, qui, chez les peuples civilisés, ne
vient qu'avec la puberté : les enfants n'ont point de pudeur, et
chez les nations primitives, la pudeur n'existe pas. La Genèse en
témoigne, quand elle dit qu'Adam et Eve non erubescebant, ne
rougissaient pas.
Celui ((iii sait rouj^ir aiiin' cncoi- la vertu.
(< JiKMEit, yatlian.)
394 RUB
— Faire monter le rouge ;iii visage.
Ituhorc iliijna vcrha.
lOviKI.)
— On roiigil (le lioiilc : on p.'ilil do col(''re.
Alius est ira', allnsDerocundia' rubor. I.ii cdIi'm'c roii'jif d'iuie
façon, la modestie d'une autre.
— Le sentiment qui fait rougir nail de la iiiidcur dune honte
modeste ; celui qui fait pfdir tômoigiie que tout le sang rcllue au
cœur pour en soutenir la faiblesse. (Scudéry.)
Tout le rouKO aclioté, (|iii ilessus vuliv join'
Fait rol'l'icc (II' la luidciir...
(iJKNSKIlADK.)
— On se mettait beaucoup de fard sur les joues, au siècle der-
nier, pour simuler la pudeur; maintenant, on met du blanc, pour
alîecter la candeur et l'innocence.
Route, du iias-latiu f/vV/J vupla, voie l'onipue, faite en rouipant
la foret ou le terrain.
De là routine, petite route, qu'on suit sans s'en écarter, par
habitude.
Roux, féminin rousse, du latin russus, rouge foncé.
— Pendant le Moyen-Age, la barbe et les cheveux roux étaient
considérés comme un mauvais signe, et l'épithéte de roux était
un terme injurieux, équivalent de traitre, parce que la tradition
donnait à Judas des cheveux roux. Cette croyance explique le sens
qu'il faut donner à lune rousse.
Le nom de rousse, donné par les argotiers aux gens de la police,
a aussi la même origine, et s'explique par l'antipathie des malfai-
teurs pour les défenseurs de l'ordre.
Royaliste, dérivé de roijal, latin regalls.
Synonymes : blanc, partisan du drapeau blanc, [lar opposition à
bleu, dans les guerres de la Vendée.
Plus royaliste que le roi : plus catholique que le pape.
Roxelane (nez à la).
Uoxelane, sultane favorite de Soliman II, avait un nez retroussé,
devenu célèbre, qui a donné son nom à tous les nez du même genre.
Ruban, de rubeus, rouge (?). En provençal et en vieux français
riban.
Je voudrais être le rilian
Oui serre ta belle i)uitriiie.
iRoNSAlU).)
Rubicon, rtvinolouio liistoriciuc.
— l'.isscr le liiihicoii : s'riigiigcr (ruiic iiiiiiiirre ii'ivNocMlilc, [);ir
une déiiKii'clii' hasardée.
Allusion à la révolto do .lidos César contre le Sénat, (inaiid \\
l'rancliit, avec ses lé.uions. le Uidiicon. rivière qui servait de liinitc,
à IKlat romain, et ne pouvait être franchie, même avec une seule
cohorte, sans (lu'on t'ùt déclai-é rebelle et parricide. (Voy. le 6"or^
en est jeté.")
César, à son retour des Gaules, après s'être vu refuser la proro-
gation de son i>ouvernenient, se décida à franchir le Uuhicon, ce
qui donna lieu à la guerre civile.
Ce triste cours d"eau, qui reste noté d'infamie dans l'histoire,
pour n'avoir pas arrêté la marche criminelle de César, est actuel-
lement le Pisatello, ou Fiumerino, entre Ravenne et Rimini.
Après avoii- fi-anchi le Ruhicon, César envoya des sommes énor-
mes pour acheter le Sénat et les magistrats : ce qui lit dire qu'il
avait conquis la Gaule avec le fer des Romains, et Rome avec l'or
des Gaulois.
— Tout homme, un jour ou l'autre, arrive au bord de sa petite
rivière, et se voit dans la nécessité de passer ce qu'il peut appeler
son Ruhicon, de prendre une décision irrévocable.
— On dit d'une tille qui a mal tourné, qu'« elle a passé le
Rubicon ».
Rubrique, du latin ruber, rouge.
— Savoir toutes les rubriques. — La rubrique était une sorte de
sanguine, ou craie rouge, dont les Romains se servaient pour écrire
le titre des lois.
Par une tradition de cet usage, rimprimerie, à ses débuts, adopta
l'encre rouge pour les titres, pour les lettres initiales, et pour
certains passages importants, dans les livres de droit et de religion.
« Savoir toutes les rubriques » fut donc un mérite chez le légiste
et chez le théologien.
L'expression s'applique aujourd'hui à un homme rusé, ({ui n'est
jamais à court d'expédients.
— On inq)i'imait surtout autrefois en rouge les titres des
ouvrages, et le nom du lieu on le livre était publié. On disait que
tel livre portait la ruitrique de Genève ou d'Amsterdam.
— Par extension, rubrique s'est dit, en style de journaux, du
lieu d'où une nouvelle est annoncée: Ce fait est sous la rubrique
de Londres, de Berlin.
'M)Q HUE
Ruche, (lu lirt'loii rus/,-, (''corce.
— C'était lin iisa.uc fort ancien de faiiT Ifs niclios en écorce
(i'arlti'o. Il (''lail |»rati(iii('' fiiez les Uoiiiaiiis. roiiiine nous l'apprond
Virgile :
/yyAVf ititleni, srn corliciltus sibl siilit racalis...
lOforf/if/uex, IV, XK)
— radier une niche: s'allirei' une foule de pelils enneniis.
L'abeille n'attaque jamais: mais, si on la Iroiihle dans son travail,
elle se défend avec une hravoiire incroyaMe. Platon disait qu'elle
avait une étincelle de la fureur céleste qui anime les anciens
po(Mes. et il conseillait, si on voulait le repos, de n'irriter ni les
abeilles ni les poètes:
Gcniti irfildhilc vu I nui.
(HoMAri:.)
Arclliloque, poète satirique, fut assassiné par ceux qu'il avait
de'ichirés dans ses vers. On lit cette inscription sur sa tombe:
« Passant, n'a.uite pas les cendres d'Arcliilrxpie : un essaim
d'abeilles eu sortirait. » (Voy. satire.)
Rue, du bas-latin ruga, ride, sillon.
D'autres ont proposé le latin ruere, parce que les rues servent
d'écoulement aux: eaux, ainsi qu'à la foule [lurùa riiif).
Le mouvement de la foule, comparé à un torrent, est souvent
une réalité dans les grandes villes, et donne lieu à l»ien des acci-
dents. La rue de Montmartre, à la traversée du lioulevard, porte
le surnom de k carrefour des écrasés ».
— Rue foraine. On a donné ce nom à des rues qui étaient affectées
anciennement à la fabrication et à la vente des marchandises de
certains corps, ou à certains usages.
— Les rues étaient nommées des professions qui s'y exerçaient
et qui groupaient les artisans d'une même corporation. Les tradi-
tions locales, les événements qui s'étaient passés dans un quartier,
la classe des gens qui l'iialtitaient, les monuments qui s'y trou-
vaient, telles étaient les causes qui déterminaient les dénominations
des rues, et qui aidaient même les habitants à se guider dans ce
dédale.
Il y avait ainsi à Paris les rues de la Ferronnerie, de la Coutel-
lerie, des Décbargeurs, du Fouarre, etc. A Baveux, la rue du
Massacre, occupée jadis par les bouchers ; comme à Paris la Vallée
de misère, parce qu'on y égorgeait jour et nuit les volailles,
nunoniix ot miiIi'Cs ;miiii;iii\ de |it'tiit' lniiiclici-ic. (jni se consoniiiinit'iil
•1 Paris.
Les nies (|iii (■Inii'iil le lh('';'ilfe (l'exi'ciitioiis ci-iiiiiiielles avaient
(les iiitiiis i|iii i-,i|)|irl;iiciil ccl ciiiploi. Ainsi, la rue de i'KclH'lle, à
Paris, \il soiiMMil se dresser la pulence des pendus. Le nom de rue»
de rArltre-Seï- a la même origine. Le supplice de re.ç^;'rt/)a^/<? donna
son nom à la laie et à la place on on le subissait. Wno de riv'handé.
ou les faux monnayenrs itoiiillaient dans une marmite. La Croix
du Ti'alioir liraii son nom (\\\ supplice intligé à certains condamnés,
qu'on faisait lirer à quatre clieNaux.
Rue des Hillettcs, d'un ordre religieux appelé ainsi par esprit
d'Iiumilité (comme les Minimes), de hil/f', ol)jet de peu de valeur.
Les Carrières d'Amérique sont d'immenses plAlriri-es. dont les
produits sont exportés jusqu'en Amérique.
La rue Chantereine. (Voy. gi'enouUle.)
Rue du Cherche-Midi. Au xiir' siècle, il y avait dans ces parages
un cabaret en vogue; kMjuel avait pour enseigne nu gros lézard
sculpté dans la pierre, comme le dragon de la rue du Dragon, située
non loin de là ; au-dessous du lézard, on lisait: « Au Cherche-Midi »,
par allusion à l'amour que cet animal ami de l'homme professe pour
le soleil.
Rue du Clos-Briineau. (Voy. brcn.)
Rue Cossonnerie, où se tenaient les marchands de volailles.
Le carrefour de la Croix-Rouge, où il y avait, sous Charles IX,
une croix l'ouge plantée dans les champs, à la rencontre de plusieurs
chemins.
Rue du Foiiarre ou fciirn'. du latin foderuin, à cause de la
paille qu'on y vendait pour jonclier le sol des écoles de littérature
et de médecine, et servir de siège aux écoliers.
La place de Grève, située en face de l'Hôtel de Ville, donnant sur
le bord de la Seine (grève). On voyait encore, en 1840, des rassem-
blements considérables d'ouvriers en l)àliment, se réunir sur cette
place pour y chercher de l'ouvrage. C'est dans cette espèce de
bureau de placement en plein vent que les bourgeois et les entre-
preneurs venaient les chercher et les embaucher. Ceux qui ne
trouvaient pas d'emploi restaient en grève. De là l'expression : se
mettre, rester en grève.
Les exécutions capitales avaient lieu, autrefois, sur la place de
Grève; c'est pour cela qu'on a appelé « saints de grève » les Saint-
IMi.'ir, S;iinl-Aiii;ir;iiil('. clc, noms (iiic |ir('ii;ii('iit NdIoiilit'i'S los
chevaliers (rindiistrio.
lîiic S.'iiiil-Hoiiorr fpali'oii des lioiilaiiL'efS). ainsi que les nies du
Foiii' Saiiil-lloiioré et Saiiit-Ciennaiii, sont les \estijies des rèj^le-
Dients onéreux, (pii ont |)rélevé lonuleiiips sur la moulure et la
cuisson du |)aiii des îmiikUs si ciMiels.
Place Mauiiei'l est une contraction pour Ma.i^ni All)erti(^), du
Grand Albert, qui, en 1225, faisait des cours d'alchimie sur cette
place, la foule étant trop à l'éti'oit dans les écoles.
Hue Maubuée, d"unc fontaine donnant de Teau séléniteuse ,
impropre à dissoudre le savon, et par suite mauvaise pour les
lessives ou huées.
Rue de la Morlellerie, habitée par ceux qui se servaient du
mortier.
Hue des Porcherons, lieu où se réunissaient sans doute autrefois
les marchands de porcs. Le quartier des Porcherons était situé au
carrefour du faubourg Montmartre, formé par la rencontre des rues
Saint-Lazare, des Martyrs et Lamartine. Ce lieu, jadis Jjors des
barrières, était rempli de cabarets en renom.
Rue des Poulies-du-Louvre, démolie pour les agrandissements ;
il y avait des étables pour les chevaux, comme dans la rue des
Écuries -d'Artois, et celle des Vieilles -Écuries, jadis des Yiez-
Poulies.
Rue des Prouvaires, c'est-à-dire rue des prêtres. 0 ^^y)
Rue du Puits-qui-Parle. (Voy. Chanlepleni'e.)
Rue Quincampoix. (Voy.)
Hue Tirechape, ainsi nommée parce que les fripiers qui Thabi-
taient, tiraient la cape ou manteau des passants, afin de les
engager à entrer dans leur l)outique.
« Sortant des piliers des Halles, dit Mercier (Tableau de Parisj,
entrez dans la rue Tirechape, lieu cher aux comédiens, parce qu'ils
y composent un habit, à peu près comme maint tragique moderne
compose une tragédie française, de pièces et de morceaux... 11 faut
une chandelle pour voir en plein midi dans les boutiques; et,
quand on veut vérifier la couleur d'un chiffon, on le porte à la
croisée, dont les carreaux sont enduits d'une crasse séculaire. »
Hues de la Grande et de la Petite-Truanderie : habitées au
Moyen-Age par les truands. (Voy.)
De même, à Toulon, le vieux quartier, dit de Bésagne, est habité
par les ouvriers pauvres, besogneux.
— IMiisit'iirs nios dos vieux qiiiii'liers do Miirsoillc lirciil ;iiissi
Iciii- iKHii (les ét.'its qui s'y exorcMieiil. Telles sont:
J.;i nie des Aiiffiers. niarcli.Miids de sii;ii'lorie, de auff'e. alfa.
Rue Houleiie. où élaienl les lioutirrs ou lonneliers.
Uiu' (iaisseric, ou des layetici's.
Canehiére (du proveneal cnnahc), où l'on vendait le chanvre.
Rue des Fahi'es. r'est-à-dire des forgerons et autres artisans
travaillant les métaux.
Rue Gi[»eiMe. au plâtre, provençal gi.
Rue Lancerie, des fabricants d'armes blanches.
Rue Pavé-d'Amour, s'appelait, au xv^ siècle, rue de la Triperie.
Le nom actuel provient de la présence de certaines femmes qui y
exerçaient leur industrie sous la surveillance de la police.
Toulon possède aussi une rue de ce nom. \
Rue Tulianeau. d'une maison où se réunissaient les fumeurs : du
provençal liihdr. fumer.
Place du (^ul-de-liœuf. C'est la corruiition du cri jirovençal :
Oou ruach (lebuou! Au bœuf cuit! que faisaient entendre les four-
nisseurs de vivres des galères, olïraut en vente les abattis des
buMifs tués pour le service de l'arsenal.
— Beaucoup de rues ont pris leur nom des enseignes qu'on y
voyait. Telles sont :
La rue de la Harpe, d'une enseigne où était représenté David
jouant de la harpe: la rue de la Truie-qui-File, etc.
C'était, encore à la lin du xviir- siècle, un moyen pour désigner
les rues qui. alors, n'étaient nommées ni numérotées par l'édilité.
— Les rues de Paris ont commencé vers 1728 à être désignées
par des noms inscrits sur des plaques. On adopta aussi pour les
maisons le système du numérotage, au lieu de les désigner par
leui'S enseignes ou par d'autres signes extérieurs.
Ruelle, diminutif de rue, petite rue; comme venelle, petite
veine, pour veinelle: senlier. du vieux mot seule. Ruelle désigne
aussi l'espace qui, dans une ;ilc(')ve, se trouve entre le lit et le mur.
Au xvir- siècle, on appelait ruelles les alcôves mêmes, qui
servaient de lieu de réunion aux Précieuses, et où la maîtresse du
logis recevait les visites.
ni'iiscvadc en tous lieux amuse les ruelles.
fBoiLEAU, Art poétique, IV. 200.)
— On appelait « langage des ruelles » la langue adoptée par les
Précieuses.
400 TU'S
Rufien, Miiciciiiiomoiil VK/'/icn, tlii vieux lr;iiic;iis nnilin {'.).
Déhiiiiclié, entreinettciir, souIciumii-.
Ruine, du l;iliii niiiui, de rncri'. toiiilicr, sT-croiikîr.
— Tyr, (];u'lli;i,u<', l;iiil (r;iiilr(S \ilh'S crlèhrcs do ranli(|iiit('',
n'existent plus que diins le souvenir. Du temj»s de Luc.-iin, il ne
restait même plus trace de ruines de Troie :
...Elifim iicnfi-r ruina;.
— Synonymes de ruiné : tombé de Crésus en Jol>: battre la dèclie
(argot), (fêc/ie semble venir d(; <hh-Iioiv.
Ruisseau, pour nilsse/, du diminutif rlriccltus, de ricus.
Autrefois on employait ru dans le même sens, et encore pour
désigner le bruit, le murmure d'un ruisseau:
Au ru d'une clerc fontaine
Dont li ave étoit clère et sène.
{Roman de Hou.)
— Le ruisseau de la rue du Bac. — M™» de Staël, exilée à
Coppet, en Suisse, regrettait le ruisseau de la rue du Bac, comme
Andromaque avait autrefois regretté le Simoïs.
On emploie cette expression pour dire que rien ne remplace,
pour l'exilé, le sol natal, et que la patrie absente laisse dans îe
cœur un regret ineffaçable.
Ruse, de ruser, du latin recusare, ancien français reuser:
seiir (devenu sûr) otVre une transformation analogue.
— Ruse de guerre : stratagème.
Ilolus (t)i virlus qnis in hnslc rapdral 9
(VlilCII.E.)
...Qu'importe si l'on use
Contre ses ennemis, lie vaillance ou de ruse?
(Rfrtait.)
Rusé, même origine.
Synonymes : futé, terme de vénerie ; madré, de manclre, nom
du renard en Languedoc ; tine-moucbe ; narquois ; renard : retors.
— Homme rusé, tard abusé.
Toulo ruse est iiermisc, en amour comme en guerre.
(Coi.i.ix D'HAni.F.vii.i.K, C/iàteaiij- en Espagne.)
SAB 401
S. Kritl't' sil'llilllc.
— AlloiiLitM- k's .s-, (iio/, H;il»cl;iis, sionific l'aire une tromperie
iljiiis III) compte: .urossir un mémoire. Du signe a hréviatif .s-, pour
son. i[iii. iiiloiiué, ilevenait /', ipii éqiiivalail ;'i franc (^).
Sabbat, de lliéhreu schabal, repos, par le latin snbbalum.
.loiir de re|)os chez les Juifs, en souvenir du repos de Dieu, après
la créalion.
— Faire du saMial : beaucoup de liruil, de tapa.ue.
Vii>i'Z 11' hi',-111 salilml qu'ils fdiil ;'i notro porlc !
(H.ac.im:. P/aif/dirs.)
Les Juifs, le jour du S.'ihlial, qui est le samedi, ciianteut des
lisaiimes dans leurs syuaiio.uiies, cliaciiu dans un Ion dilTérent: ce
qui produit un son désagréal)le.
— On appelle aussi sabbat rassemblée nocturne que Ion suppo-
sait tenue le samedi par les sorcières, et où le diable pai'aissait
sous la forme d'un bouc. Il s'y faisait des danses et des cérémonies
magiques décrites dans les livres de démonomanie.
Sabir. Lanuue qui se parle en Algérie, dans les relations entre
Européens et Arabes. C'est un mélange confus d'ai'abe, de français,
d'espagnol et d'italien.
Sable, du l.itiii sab///ui/i, roman arciui. qui est aussi latin.
El es plus fols, mon cscien,
Que tel que snnena en nrrun.
(liicnNAiin DE ViùXTAnouri.)
(Il est plus fou. à mon avis, que celui qui sème sur le sable.)
Sablier, dérivé du précédent.
— Le sable de ma vie est presque écoulé: mais ne secouez pas
le sablier pour le faire tomber plus vite. (W. Scott.)
Sabot, du bas-latin sabbafam, savate. Un a proposé aussi sapi-
ni/s, fait de bois de sapin. Un encore Sabaudia, Savoie (chaussure
usitée en Savoie).
— Synonymes : escarpins de Limoges : esclots (mot commun à
l'argot et au provençal).
2G
402 SAC
— Dormir foniiiic un s;il)Ot. Coiiipiii-iisoii <Mii|)riiiit('M' ;'i une sorte
do toupie np|)(îlôo ;iiissi srihol , qui, [ij)r('S avoir' ronllc'. a un moment
de rotation à peine sensii)ie à l'ieil et (ju'on ai»pelle dormir.
Sac, du latin soccu.s: proveiu;al sa.
Ce mot est de toutes les langues : hébreu sa/c ; grec mkhos.
De là sont venus: havresac (sac à avoine), besace ou bissac
(double sac), saccager, détruire et emporter.
Le provençal dit ensaquar dans le sens du latin saccare, mettre
dans un sac.
— Sac à vin : ivrogne. Au propre, c'est une outre, une peau de
•bouc où l'on met le vin, en Orient.
— Sac de soldat : as de carreau, azor.
— Gens de sac et de corde (voy. cordé) : qui méritent d'être
pendus ou noyés.
Sous Louis XI, les criminels étaient enfermés dans un sac, sur
lequel était écrit : « Laissez passer la justice du Roi. »
Lq Dictionnaire de Trévoux dit que, dans cette locution, me
vient du vieux français sak, forfait.
— Juger sur l'étiquette du sac : sans voir les pièces du procès.
— Voir le fond du sac : se rendre bien compte d'une atVaire.
Sans voir le fond du sac, ils prononcent l'arrêt.
(Régnier.)
— Tirer d'un sac double mouture. Cette locution se prend en
mauvaise part. Elle s'applique aux gens assez peu délicats dans les
atïaires, et assez babiles, pour tirer un double profit, là où un
honnête homme n'en aurait aucun.
— Il ne sort d'un sac que ce quon y met. C'est pour cela qu'on
ne peut attendre de la modestie d'un orgueilleux, de la ])onté d'un
méchant, de l'équité d'un homme de parti.
Il n'y a de sentiments justes que dans les cœurs vertueux et
humains.
— Mettre à sac, ou saccager : piller.
— De sac, on a aussi dérivé saccade.
Sacre, sacré, du latin sacer, sacrum.
Le mot latin avait la double signification de saint, sacré, divin ;
et de impie, infernal, voué aux dieux infernaux.
Sacer (Virgile) : voué aux enfers.
Auri sacra famés (Virgile) : la soif exécrable de l'or.
— Vouer aux dieux infernaux, c'était l'équivalent de notre :
SAG 40:^
onvoyor à Ions los difiMcs. ;iii(|iiol on snltslituo l"oii liion : Ono Difii
vons liénisso !
— SariH', sni\i (riinc ('pillirlc spécifiqne, devient un siirci-oil
d"injnre : sacré volcnr, [lonr volcnr liotlV'.
— Le sacre des senverains est une tradition iU' l'aiiti(iuité
(du moins de ranli(initt'' hrhraïque : les rois liébreux recevaient
ronrtioii).
— De AY/r/v dérivent : sacrer, sacrement, consécration, sacrifier,
sacrilège, exécrer.
— Le nom d'Anunsle, qne prenaient les empcrenrs romains, vient
de angurio consccralus, sacré par les augures, c'est-à-dire saint,
vénérable.
Sacrement, du latin sarrf/hwnfi/m, qui a donné aussi la forme
[lopuiaire seniienf.
— Les Sacrements de l'Eglise sont des vœux (pie l'on jure
(sacrare) d'accomplir.
— Une foule de lettres de décès constatent que le défunt est
« muni de tous les sacrements ». C'est absurde, car il y en a deux :
l'ordre et le mariage, qui ne peuvent être conférés à la même
personne. (On a vu plus d'une fois des gens mariés ou veufs entrer
dans les ordres.)
Sacripant, étymologie littéraire.
Nom dnn roi deCircassie, dans le Roland Furieux, deTArioste.
PersonnaQe querelleur, tapageur, sorte de rier-;'i-l)ras.
Sage, du latin sagire, avoir dn discernement: ou bien plutôt
de sapius, qui vient de sapere, goûter, apprécier.
On ne trouve pas sapins dans les auteurs ; mais Pétrone (Sufi-
ricon, oO) se sert de iiesapius. (Voy, Littré.)
— Les Sept Sages de la Grèce: Thaïes, Solon, Bias, Cliilon,
Pittacus, Périandre, Cléobule. '^
— On entend par sagesse la pratique de la morale, la bonne
conduite dans le cours de la vie.
Pour les anciens, la sagesse (sophia) comprenait à la fois la
science et la sagesse, qui doit en être la conséquence.
Les Grecs appelaient sop/ioi, sages, ceux qui se livraient à l'étude
de la physique et de la morale, seules sciences alors cultivées.
Pythagore, prenant le mot dans un sens plus large, lui substitua le
titre plus modeste de phiiosophos. ami de la sagesse.
Minerve, déesse dej la sagesse, avait pour attributs un rameau
404 SAI
d'olivitïr, (3ml)l<''iii(' de l;i pjiix ;iii dcdiiiis cl ;iii dolioi's : cl une
chouette, oiseau qui voit dniis les ténèbres, pour sijxnilicr (|iic |;i
vraie sagesse veille, (!t découvre tout.
— La sagesse est une folie qin ne dérange personne.
Sage-femme: accoucheuse, dasuf/e pour habile.
— • Il n'est pas nécessaire de faire remarquer la dilïérencc (piil
y a eniro, sa f/c-p'/iuiic o\ fonnno nage. Il ne faut pas plus confondre
ces deux termes que : grosse femme et femme grosse, galant homme
et hoinnu; galant.
11 n'est pas rare cependant d'entendre à ce sujet de mauvaises
équivoques.
La mère de Louis XIV s'adressant à un seigneur fort gros, lui
demanda quand il accoucherait: « Quand j'aurai trouvé une sage-
femme », répondit-il.
Ménage, avant de mourir, disait au P. Airaut, qui l'assistait :
« Je vois qu'on a besoin d'une sage-femme pour entrer dans le
monde, et d'un homme sage pour en sortir. »
Saigner, du bas-latin sanguutare.
— Se faire saigner sans ordonnance de médecin : être blessé en
duel.
...Surtout ne dégainez pas au premier mot : vous vous feriez
saigner sans ordonnance du médecin. (W. Scott.)
Les Américains disent : « Je vais faire un trou dans votre
personne. »
C'est une expression qui rappelle homicide (hominem cœrJere].
— Saigner du nez : manquer de courage.
— On ne doit pas dire : saigner au nez ; c'est au V)ras que se fait
la saignée.
Saindoux^ de sahi, latin sagùia et de doux, c'est-à-dire non
salé, parce que c'est de la graisse de porc fondue et non salée.
Quelques-uns ont voulu voir dans doux une modification de
doue, pour d'oie {1).
Saint, du latin satictus, provençal sa)}ct, de sandre, sanction-
ner, consacrer.
— Les boUandistes sont des jésuites d'Anvers qui recueillent et
publient la Vie des Sainfs. Bollandus commença, en iG30, le
grand recueil projeté par Roswied, et publia les deux premiers
volumes en 1641. Cette œuvre s'est toujours continuée depuis, et
SAI iOo
les hoIUindisles oui iMiMir iicliicllciiioiit l;i \ie de plus do quarante
mille saints.
— Svnonvinc : iKMilioiniiio (Vidocq). Allusion au>: figurines de
sainis, appelées bonslioniines.
Il y a\ ail autrefois à Pai'is nue maison de refuge pour les vieillards,
sous riuvocatiou des saints, et appelée « Hospice des bonshommes ».
— Le uKtl sailli, précédant un nom propre de saint, demande
devant lui i'arlicle fi-miniii (quand il désigne un jour), parce que
le mol p'h' ("Si sous cnlendii : la Saiul-.Iean, la Saint-Michel.
— A ilia(pie saiul. sa chandelle.
A petit saint, petit encens.
— Saints gelés, ou de glace: froid des quatre caNaliers. (Voy. à
la Chandeleur les grandes douleurs.)
— Se recoinmaudei' à tous les saints : ne savoir plus à quel saint
se voiuM". Se dit de ipichp^iiu à ([iii rien ne réussit, et qui se trouve
à bout de ressources.
Inverlus (jucni (liviim vocet.
{lkn:.\CK.)
.Ne sacliaiil plus tuiilùl à nucl saint se \ûaer.
(Boii.F.AU, Salirex.)
Le vaisseau de l'amiral Forhin ayant une voie d'eau, l'équipage
se lamentait et adressait des vœux à tous les saints. « Courage,
mes amis, dil-il aux: uip.telols. tous les vœux sont bons; mais
Saiule Pompe ! c'est à elle (pi'il faut s'adresser. »
(Hi ! cuinhiou le pùi'il onricliirall les dieux,
Si nous luiiis suiiveiiiiMis des \œ\\x qu'il «uns fait faire !
(La Fontaine.)
Mais, comme disent les Italiens : Passalu el perlcolo, gabato el
san/o.
Ce proverbe, cité par llabelais (l\, 24) siguitîe : Passé le danger,
le saint est moqué.
— L'invocation des saiuls, dans la communion romaine, prenait
sa soui'ce, au Moyen-Age, dans la croyance que certains d'entre
eux. (piand on les fâchait, envoyaient des maladies ou des calamités,
dont ils préservaient, au contraire, ceux qui les apaisaient par
des vœux et par des prières.
C'était aussi l'usage des Romains, qui, du mot juvare avaient
fait Joins, Jupiter aidant, et son contraire Vejovls , Jupiter
tonnant, le dieu malfaisant.
Les innombrables légendes du Moyen-Age, nées dans les monas-
tères, olïrent parfois un singulier mélange de mvsticisme chrétien
406 SAI
et (lo réininisccnccs pinoniics, oi'i l'on iciicoiilrc. plus diiii saint
d'origine siispootc.
Nos hons nioux, plus rrédiilos (priiisU-iiils, riNaicnt placé presque
toutes les maladies sous la prolerlion de quelque saint, qu'il fallait
invoquer pour s'en délivrer. Cette croyance venait de i'iinbécihî
crédulité dos uons, qui, à cause du son équivoque des noms, ou de
leur similitude avec celui des maladies, ou pai' un autre motif
aussi ridicule, atli'ibuaient aux saints une iiilliieuce sur cei-laiiis
izenres de maladies. Ou dési.unait crrlains maux par le noiu des
saints auxquels ou attribuait la puissance de les guérir.
Encore aujourd'liui, dans les campagnes, il n'est pas de maladie
qui n'ait dans quelque paroisse voisine son saint guérisseur. C'est
saint Marcou qui partage avec les anciens rois de France le
privilège de guérir des écrouelles ; sainte Anne rend des points au
sulfate de quinine, s'il s'agit de guérir une fièvre rebelle ; saint
Maur guérit les douleurs rbumatismales ; sainte Apolline, les maux
de dents ; saint Cloud guérit des furoncles (alïaire d'assonance
évidemment) ; de même saint Ouen, à qui on attribue le pouvoir de
faire oiur, et sainte Claire, qui y fait voir.
L'épilepsie s'appelait la danse de saint Gny ; l'érésypèle, le
mal saint Antoine ; la folie, le mal saint Matburin.
De même, les corps de métiers ont clioisi pour patrons des saints
qui ont exercé leur industrie, ou dont les noms ont une analogie
pbonique avec ceux de leurs professions.
Certes, il n'est rien de plus toucbant, de plus respectable, qu'une
famille agenouillée, demandant à Dieu, avec les larmes de l'amour,
la conservation d'un être bien-aimé ; mais les pratiques supersti-
tieuses dont il s'agit, affectent un matérialisme si grossier, qu'elles
sont odieuses et répugnantes. On ne saurait trop désirer le jour
où nos populations, renonçant aux pèlerinages et à ces absurdes
fétichismes, se borneront à rester à la maison pour soigner leurs
malades par les moyens que recommande la saine raison.
Le culte des saints était ainsi descendu, dans la forme, à des jeux
de mots, à de burlesques équivoques, sans que le clergé, dont le
préjugé populaire augmente le crédit, ait jamais réagi contre ces
tendances bétérodoxes.
SAINTS DIVERS : PARTICULAmTÉS SUR LES SAINTS :
Saint ad auras. (Voy. pendu.)
Saint Alipantin. Rabelais (Uv. II, cb. G) linvoque pour cbasser
des odeurs puantes. Ce serait le patron des parfumeurs. « Saint
SAI 407
Alipantin, quelle civollc ! Au (lyal)le soit le maschérable, tant il
put ! »
Saint iiariialié ét;iil patron dt-.s moissonneurs, des faucheurs.
Bitriifihds .sunclus fulccm jubet ire pcr licrbam.
La lioltc s;iiiit Henoil. (Voy. honlfille.)
Saint Cloud est le patron des cloutiers.
Saint (li'iine, patron des médecins, appelés jadis, pour celte
raison. sui)p()ls de saint (^uno.
Saint Crapasi. Le mal saint Crapasi. Crapaslus, dont les méri-
dionaux ont fait Crapasi.
Les Lorrains disent : les trois évéchés S. Cravaz, pour désigner
les trois jours gras, parce qu'on y mange et boit à crever. {Aven-
tui'es (lu baron de Fœnestc, IV, ch. 2.)
Saint Crépin, patron des cordonniers. Ce mot, dans la langue
populaire, désigne tout ce qu'on possède, la bourse appelée autrefois
crépine, contenant les outils du cordonnier.
Saint Elme {\e feu). Cette expression est la corruption de « feu
sainte Hélène»; on appelait «Hélène» le feu qui, sur mer,
présageait la tempête. Hélène, dont on a fait une sainte, par
ignorance, est la belle Hélène, sœur de Castor et Pollux. La llamme
de Castor était un signe favorable pour les navigateurs. Horace en
parle :
Frulres Hclenw lucida sidcra,
Rabelais (IV, 22) les nonmie Mixarchagevas selon les Argives.
Les Argiens, en elTet, dit Plutarque, donnaient à Castor le surnom
de Mixarchagevas, qui signilie bâtard (ou plut()t demi-dieu fonda-
teur). D'autres voient dans saint Elme une modification de Elmo,
pour Erasme, saint que les Italiens invoquent dans la tempête.
Saint Ferréol, d'Abbeville, prenait soin d'engraisser les oies.
Saint Frusquin, comme saint Crépin, signifie tout l'avoir d'une
personne, tout ce qu'on a gagné, les habits, les hardes, ce qui
touche de plus près.
Saints gelés. Rabelais (liv. III, 33) dit : « Jupiter voyant les
bourgeons de la vigne perduz par les gelées, bruines, frimatz,
verglatz, froidures, gresles et calamitez advenant par les festes de
sainctz Georges, Marc, Vital, Eutrope, Phibppe, etc., qui sont ou
temps que le soleil passe soubz le signe de Taurus, entra en ceste
opinion que les sainctz subdictz estoient sainctz gresleurs, geleurs,
et gasteurs du bourgeon. Pourtant voulovt-il leurs festes translater
408 SAI
en liyver, les licenciant <'n lonl lioniii'iir et révérence de gresler
lors et geler tant que ils vonldroyeiil.
Saint Gris. C'est saint François d'Assise, chef des uris-vèliis, ou
moines gris (les cordeliers), car ils étaient ceints d'une corde et
vêtus de gris On les appelait aussi diables gris,
Ileni-i IV. qui était toujours un peu huguenot, jurait parle ventre
(de) saint (iris, comme d'autres par celui de saint (juenet. (Voy.)
Rabelais, qui avait été cordelier, dit (IV, 9) : Sang saint Gris. Ce
juron était donc antérieur à Ileni'i lY.
Saint Jean-Baptiste (24 juin), ainsi nommé parce qu'il baptisa
Jésus-Clirist dans les eaux du Jourdain. C'est sans doute en souve-
nir de ce fait que, dans les villes du Midi, on jette ce jour-là de
l'eau sur les passants.
Saint Jean-le-Uond. Autrefois le peuple de Paris désignait par
celte expression le derrière, du nom d'une église ainsi appelée:
El fait à leiinemi l'affroiil
De lui montrer Sainl-Jeaii-le-Rund.
/(/ est son gros \ilain derrière.
(La llciviade travestie.)
Saint Julien l'Hospitalier, ou patron des voyageurs, faisait trouver
bon gîte au voyageur, s'il avait dit le matin l'oraison qui porte sou
nom.
Saint Lazare, ou saint Ladre, était le patron des lépreux. (Voy.
Saint Lundi, qui suit sainte Touche. Le plus fêté, le plus chômé
de tous les saints. Allusion à l'usage où sont les ouvriers de Paris,
de ne pas travailler le lundi, mais de le passer à s'amuser, et à
boire le salaire touché le samedi précédent.
Sainte Marie-Madeleine, Gahléenne de grande naissance, mais
de mœurs dissolues, se convertit à la vue des miracles de Jésus-
Christ, assista à sa passion, et, après la résurrection, alla terminer
ses jours dans une austère pénitence, à la grotte de la Sainte-
Baume, près Marseille. (Voy. madelonnettes.)
Saint Main. Le mal saint Main était la gale, la rogne.
Saint Marcou guérit les écrouelles (mal du cou). Allusion à la
coutume des rois de France, d'aller, après leur sacre, à l'église
Saint-Marcou, à Corbigny, pour toucher les malades atteints des
écrouelles, en disant : « Le roi te touche, que Dieu te guérisse ! »
Louis XIV et Charles X s'y rendirent à l'époque de leur sacre.
Saint Marcou guérit les écrouelles
Ainsi qu'ung maeon sans truelle.
SAI 'jOO
Sainl Martin guérissail de rivrognerio.
A la Saint-Mai-tiii. on lasle le \m.
Rabelais (IV, 33) appelle le diable « l'estaflier de s.iiiicl Martin ».
La légende rapporte, en elTet, que le diable \inl un jour tenter
saint M.irtin, sous la ligure d'un pauvre transi de froid. Mais bi
sainl lui donna sans bésiterla moitié de son manteau : ce qui ne
lit pas le compte du tentateur.
Saint Matliieu était puiiiicain avant sa conversion. I)"oi'i l'on a
appelé un usurier >< fesse-malbieu », qui est peut-être la coi'ruption
de « fète-Matbieu «.
Saint Miciiel. D'ai)rés la légende normande, le mont Saint-Michel
est le lieu où l'archange Michel, ajuvs avoir terrassé Helzéhuth, l'a
enterré sous une montagne, qui a pris le nom de Tombelaine,
tombe de Bélénus on Héel/.ébuth. (Victor Hugo. Quatre-tHntjt-trehe,
livre H.) Saint Michel terrassant l'hydre des révolutions est un
emprunt de M. Prudliomme à cette légende.
Saint Nicolas, patron des enfants. On a abuse de ce nom de saint,
à cause de sa ressemblance i)honique avec le mot nujaud, pour
faire de son abrégé Colas le synonyme de niais.
Saint Nicolas, évéque de Myre, aperçut, dans un \illage de
Bohème, un charcutier fort occupé à saler de la chair, qu'il vendait
ensuite comme chair de porc. Il entra dans une grande colère, car
il avait d'abord reconnu les corps de trois petits enfants qui, depuis
quelques jours, avaient disparu de la demeure du sabotier Otto.
S'approchant du baquet où les trois petits innocents étaient coupés
en morceaux, saint Nicolas, en présence de la foule accourue à sa
voix, leva les bras au ciel, et soudain ou entendit des voix mélo-
dieuses chanter un cantique d'actions de grâces: puis les trois
petits enfants se levèrent, et, après avoir remercié le grand saint,
re[U'ii'ent le chemin de la maison paternelle. Le peuple cria Noël !
et saint Nicolas devint le patron des enfants. Faut-il conclure de là
que saint Nicolas doit être en froid avec saint Antoine, patron des
charcutiers ?
Sainte Nitouche : hypocrite.
Saint Pierre est le saint que les peuples ont le plus poursuivi de
leurs lazzi. Sa calvitie, ses défaillances, tout, jusqu'à ce rcMe de
portier, que la tradition lui attribue, aide à faire de lui un person-
nage comique, et presque Ijurlesque.
Saint Quenet. Ventre sainct Quenet ! Par la dive oye Quenet.
(Uabelais, 111, 8.) Ce saint, invoqué en Bretagne, et surtout dans
410 SAl
rôv(Vli(' (lo, Y;innos, ost lo niriiic qiio rfliii des Vonetœ, peuples de
G;iiile cl dll.ilic, îippch's priiiiilivciiiciit flcnchi', du l.iljii A/iates,
les canards, et liciil ;'i l;i posilioii de l;i (•.■ipiliilc, ;iii inilit'ii des
lapiiiies. Il y a de iiiémiî, aux environs d(! VaiiiK^s, deiiv iles. Iloiiat
et lloiiédic, c'est-à-dii'e Tile des ranards et l'ile des pelils ranards.
Saint Hocli ^uri'it de la pesle. La iéucnde iiien connue d(î saint
Horli, rapi»oi'le qu'il fut i^uéi'i de la peste |iar son chien, fjni léchait
ses i)laies. Mlle est d'accord avec la thérapeuti(pie ; on sait que la
salive a la vertu de nuérir certaines maladies d(i la peau.
On dit, pour exprimer l'amitié insépai'alde de deux pei'sonnes :
« C'est saint Koch et son chien. » Ce provei'be rappelle le fidus
Achates d'Énée. dans Virgile.
Saint Sébastien, ou Séhaste, était le patron des compagnies
d'archers et d'arbalétriers, parce qu'on le représentait tout percé
de (lèches; il eût été plus naturel que le patron des archers
transperçât ses ennemis.
Sébaste signifie vénérable, et c'est par ce nom que les Grecs
traduisaient Auguste.
Sainte Véronique, patronne des lingères (13 janvier). Lorsque
Jésus, portant sa croix, était conduit au Calvaire, une femme de
Jérusalem lui essuya le visage de son voile, sur lequel l'image du
Seigneur resta imprimée. Cette image fut apportée à Rome, au
temps de Vespasien, et l'on dit qu'elle guérit Titus de la lèpre.
Les peintres font tenir cette image par une femme, et la légende
donne à cette femme le nom de sainte Véronique, tandis que c'est
le linge même qui est la sainte véronique, vet^a iconia {là \rsie
image), le portrait de Jésus imprimé sur le voile de Bérénice, dont
il se servit pour essuyer sa face couverte de sueur et de sang. Vei^a
iconia, un mot latin et un mot grec, symbolisait l'union de l'Église
latine et de l'Église grecque. (Voy. Maxime du Camp.)
Saint Yves, patron des avocats et des procureurs. Parmi les
nombreux petits saints qui ne sont vénérés qu'en Bretagne, il n'en
est point dont le culte soit plus répandu dans ce pays que celui de
saint Yves, natif de Tréguier, dans la Basse-Bretagne. Avocat et
curé, au xiiF siècle, il fut le défenseur d'oftice des pauvres.
Il y avait à Paris une église sous son vocable, construite aux frais
des écoliers, au coin des rues Saint-Jacques et des Noyers. On y
lisait cette inscription élogieuse :
Advocatas et non latro,
Res miranda populo,
SAI 411
La légende rapporte que saint Yves s'étant présenté à la porte
du Paradis, fut repoussé par saint Pierre, qui le confondit avec les
hoiuuu'S de sa pi-ofcssion. Mais le saint , s'étant filissé dans la
foule, pai\int ;'i cntivr. Saint Pierre voulait l'expulser : il résista,
protestant (juil ne sortirait que lorsqu'on le lui aurait fait signilier
par huissier. Ou en clierclia un partout ; mais, comme il n'en est
jamais entré dans le Paradis, il lut iuipossiltlc deu trouver un, et
saint Yves eut gain de cause, (Voy. arocaf.)
— Va\ somme, les archers ont pour patron saint Séi)astien : les
aruniriers. saint Georges: les artilleurs, sainte Barlie ; les avocats,
saint Y\es; les hanquiers, saint Mathieu ; les blanchisseuses, saint
Hiaiic: les bouchers et les vieilles tilles, sainte Catherine: les
boulangers, saint Honoré; les chapeliers, saint Jacques: les
charcutiers , saint Antoine ; les chasseurs , saint Hubert ; les
chirurgiens, saint Côme et saint Damien ; les cloutiers, saint
Gloud ; les comédiens, saint Genest : les cordonniers, saint Grépin
et saint Grépinien ; les couteliers fêtent la Décollation de saint
Jean-Baptiste: les crieurs de nuit, saint Bonaventure; les danseurs,
saint Julien des Ménétriers; les écoliers, saint Gharlemagne et
saint Nicolas ; les enfants, les saints Innocents; les fondeurs et les
forgerons, saint Éloi; les gantiers et les tanneurs, saint Barthélémy;
les hôtes, les cabaretiers et les pâtissiers, sainte Marthe; les
huissiers, saint Protais ; les jardiniers, saint Fiacre ; les lanterniers
et les verriers, saint Glair ou sainte Claire ; les lingères, sainte
Yéronique ; les marins , sainte Marie ; les canonniers , sainte
Épissoire, canonisée par l'amiral Tréhouart ; les menuisiers et
les charpentiers , saint Joseph ; les musiciens et les luthiers ,
sainte Cécile ; les ouvriers, sainte Touche ; les parcbeminiers,
saint Jean l'Évangéliste ; les paveurs, saint Roch ; les pécheurs,
saint Pierre ; les peintres et les sculpteurs, saint Luc; les portefaix,
saintChristophe; les soldats, saint Maurice; les tisserands, sainte
Anne ; les vignerons, saint Vincent ; les voyageurs, saint Julien.
— Saint-Simonisme,du nom du fondateur. Système philosophique
et social du comte de Saint-Simon, mort en 1825, mis en pratique
par une réunion de ses adeptes (1831-1832).
Saison, du latin satio, sationcm, l'action de semer.
Temps propre aux semailles.
Ménage dérivait ce mot de statlo : Le Duchat, de seclio.
— Au figuré : Gela est hors de saison, c'est-à-dire déplacé.
— Morte-saison : le temps de l'année où une industrie chôme.
412 SAL
Salade, (k'i'i\é iiu'i-idioii.'il de sal, sel.
lIorl)es s;ilées, ussiiisoniic'cs.
Qui \ in iH' Imil Mpi'i'S saLuir,
l-;st en risiiiic (l'ctrr' iiiaindc.
Salaire, du liiliii salariuni, solde militaires ddiinée aux troupes
pour acheter du sel. Provençal snlari.
— Roquefort explique que les preuiiers Rouiains se servaient de
sel coinute appoint des échanges, avant la falii'icalion des monnaies.
Salamalec, expression comique, de l'arabe sdluia alellc, paix
sur toi.
Salut à l'orientale^ à la turque, avec de grandes révérences.
— Faire un grand salamalec. Cette locution nous vient des
Sarrazins, qui ont occupé longtemps une grande partie du midi de
la France. Un troubadour provençal dit que, de son temps, lors-
qu'on saluait un Sarrazin par celle formule, il répondait : lYaipca
s (fia m I Dieu le confonde !
Les Sarrazins ftireut chassés du Fraxinet, en Provence, l'an 908,
par Guillaume, comte d'Arles et de Provence, qui fut secondé dans
cette expédition par Gibelin de Grimaldi, à qui il donna le golfe
de Sambracie, appelé depuis golfe Grimaldi. et par corruption,
Grimaud. Après celte expulsion, Iteaucoup do familles de Sarrazins
restèrent en Provence, et s'y perpétuèrent.
Avec grande crainte et respect.
Dit par trois fois salamalec.
(ScARP.ox, Virgile travesti.)
Salamandre, du grec salamandra.
— C'est un préjugé que la salamandre vit dans le feu ; le fait est
qu'elle meurt quand on l'y met. Ce qui a pu accréditer cette erreur,
c'est qu'elle suinte, au contact du feu. un liquide abondant, qui
peut éteindre un feu médiocre.
Rabelais (liv. Y, cb. oâ) dit : « Je confesse bien que petit feu de
paille la végète et resjouit, mais je vous asseure que, en grande
fournaise, elle est, comme tout aultre animal, sulToquée et
consumée. »
— François I^'' avait pris pour devise une salamandre au milieu
des llammes, avec ces mots : « J'y vis et je l'éleins. »
— • La devise d'une femme insensible à l'amour serait une sala-
mandre au milieu des flammes, avec les mots : « Froide, même au
niilieu des llammes. »
Sale, (''tymolopie germanique (0-
SyiKtiiymes : Iciron de l;i Grasse, cochon, marsouin, salaud,
saliiraud, souillon.
Sale comme un peiune.
— On dit d'une personne qui a du linge sale, qu'elle porte le
deuil de sa lilanchissoiise. et a divorcé depuis longtemps avec le
savon.
Baclie aciielail deux cravates (pii devaient ser\ii' toute l'année :
une blanche et une noire, l'endant les six derniers nmis c'était la
noire (pii devenait Itlanche, et la blanche qui devenait noire.
— Mains sales : gantées de crasse.
Ongles sales : ongles en deuil, comme un billet d'enterrement.
(L. Larcbey.)
Femme sale : Marie-Graillon.
— L'horrible malpropreté des habitants de ce pays, est un des
maux auxquels je me résigne le plus difficilement ; j'espère bien
ne jamais m'y habituer. 0 t»y- stercoraire.)
— ...Ghodruc Duclos, ...cet homme endimanché de misère,
couvert de vêtements sordides, se traînait, suait, pendillait, puait à
faire reculer les tonneaux de Domange... C'était un incroyalde
fouiUis de loques, de guenilles, de haillons, où tout ce qui n'est pas
trou est tache. Tout cela pendille llasquement, sinistrement,
grouille, remué vaguement par la vermine.
— 11 faut laver son linge sale en famille. (Napoléon.) G'est-à-dire
qu'il ne faut pas raconter les turpitudes des siens.
G'est nu vilain oiseau ([ue celui qui salit son propre nid.
Salé, participe du verbe saler, du latin sal, sel.
Salé comme la mer.
Temps salé (burlesque) : temps chaud, qui altère.
G'est salé, se dit d'une chose trop chère.
Saluer, du lalin saluUire.
G'est donnei' à quelqu'un, en l'abordant, une marque extérieure
de civilité ou de l'espect.
— Les Ronmins saluaient en baisant l'index, et ce doigt était
appelé .?«/^//«;v'.s. Ils disaient : Num quid vis ? Désirez-vous quelque
chose? A quoi on répondait : Ut valeas. Que vous vous portiez
bien. (Plante, Auip/iit7'i/on.)
Quomndn raies ? (Plante.) Comment vous portez-vous ?
Sa/re, salrum te rolo (Térence) : bonne santé.
414 SAN
— Jùi l'iiii'ope, 011 s;ilm\ eu (Uîiiil suii cluipciiii.
Les Orientaux placent la main sur la poitrine, en sinclinani.
Au Tliilict, lorsqu'on veut saluer, on allono-e la lanuue, on fait la
révérence et l'on se <i:ratte la tête. Ces trois opérations doivent
être simultanées. (Hue, Voyage au Thibet. I8G0.)
— Les militaires saluent de l'épée.
Les vaisseaux saluent par une décharge de canons (salve) : les
coups sont impairs : le vaisseau dans le vent salue le premier.
On a calculé qu'en salv(^s , politesses royales et militaires,
formalités de rades et de citadelles, levers et couchers de soleil,
salués tous les jours par les forteresses, navires de guerre, etc., le
monde civilisé tirait à poudre, par toute la terre, toutes les vingt-
quatre heures , cent cinquante mille coups de canon inutiles.
A six francs le coup de canon, cela fait neuf cent mille francs par
jour, trois cents millions par an qui s'envolent en fumée. Ceci n'est
qu'un détail. Pendant ce temps-là, le pauvre meurt de faim ! (Victor
Hugo, les Misérables.)
— Saluer du chapeau : jouer du l)ilhoquet.
Saluer vivement : plonger.
...Philippe s'était découvert en faisant un grand salut, qui
consiste à lever le chapeau très haut et à le tenir au-dessus de la
tête, comme quand on acclame un souverain ou un personnage
populaire. (G. Sand, iMarianne.)
«J'ai l'honneur...», dit-il, en saluant avec la véhémence de
quelqu'un qui éternue.
Sang, du latin sangnis. De là aussi : saigner, sanglant, sangui-
naire, consanguin, sangsue, sanguine et sandragon (couleurs
rouge de sang).
— Chez l'homme et chez les mammifères, le sang artériel est
rouge, et le sang veineux est noir. L'oxygène absorbé par la respi-
ration change le sang de rouge foncé en rouge vermeil. La couleur
rouge du sang est due à des corpuscules appelés globules, qui
nagent dans un '.liquide incolore appelé sérum. Le sérum se com-
pose d'alhumine, et de fibrine qui sert à constituer les fibres
musculaires.
Le sang, abandonné à l'air, se décompose en liquide (sérum) et
en une masse solide et rouge (caillot).
La circulation du sang a été découverte par Hervey, en 1628.
— Avoir le sang chaud : le caractère vif et emporté : par oppo-
sition à sang-froid, qui indique un esprit calme.
SAN 415
— Bon s.'iiiu- 110 ptMit niontir. Les bons exemples que l'on reçoit,
chez ses parents, rendent soii\ent les vertus liéréditaires. Le,
principe n'est pas aussi absuln clic/ llioniine que chez les animaux,
où les races se perpéluenl avec une ré.uiilarité constante, iiotain-
nient chez les chevaux et les chiens.
— Se faire du hou sang : prendre du [)laisir, éprouver des
impressions a,urî'al)les. d'où résulte un hien-étre favorable à la
santé : princijje de physiologie à la portée de tout le monde.
C'est l'opposé de la locution : se faire de la bile.
— N'avoir pas une poiitte de sang dans les veines : être saisi
d'etVroi.
linlhnn li'tiiil liohcs san(/uinis.
(Pi,ai;tk, Moslellarin.)
Ail 1 vt)us iiu' fjiitis iicur. cl Icuil mou sang se fige.
(Mor.iKRE, Ecole des femmes.)
— Sany se dit [)our parenté.
Saiifjuini-s ntirlor.
(VlIlCII.F..)
(Le premier de la race.)
Les liens du sang: être du même sang, ou consanguins.
Le sanc ne remonte jamais : l'amour paternel est plus fort que
l'amour lilial. Le père aime dans son enfant son ouvrage et l'au-
torité qu'il a sur lui. L'orgueil, qui fait aimer au père sa supériorité,
fait haïr à l'enfant sa dépendance. En outre, le père se voit survivre
dans son enfant : le (ils se voit mourir dans la personne de son
père. C'est de l'i qu'est venu le proverbe: le sang ne remonte pas.
— Comme la mort est naturelle, et qu'il est naturel que les pères
meurent plus t()t que les enfants, aussi la douleur que l'on a de leur
mort se dissipe peu à peu. C'est tout autre chose de l'amour; car,
au lieu de nous apporter la mort, il nous apporte la vie, en nous
donnant des enfants qui nous rendent immortels, par manière de
dire. {Heptnméi^on, Nouv. 4'i.)
— Quand le père donne au fils, le père et le fils rient: mais
quand le fils donne au père, le père et le fils pleurent.
Sangsue, du latin sanf/Nisuga, de saiif/uis et de siiyo, sucer.
— C'est une sangsue : au figuré, se dit d'un homme d'une extrê-
me avidité.
— Une sangsue avec les mots : Et dum satiatur aà/Keret, est
l'emblème de l'avidité et de la fausse amitié.
Avec les mots : J/ordendo sanat, elle symbolise la critique.
416 SAN
Sans-culottes. Xoiii des républicains de ITUli.
Le nom vient de ce qu'ils nvaicnl proscrit la culotte de l'ancien
réaiiiie. pour ad()|)ler le [tanlalou.
Santé, du latin smiifas, sanilafom.
Etat de celui qui est sain, qui se porte bien.
— Santé est l'opposé de maladie, et exprime l'idée dun état
normal des fonctions vitales.
— Santé QSl un terme absolu qui ne soullVe aucune épitliète.
Ainsi, lorsqu'on dit: jouir d'une bonne santé, on fait une sorte de
pléonasme: mais lorsqu'on dit: avoir une mauvaise santé, on dit
une absurdité. C'est aussi absurde que de dire : une bonne maladie.
Il s'ensuit qu'on doit dire contracter et non gagner une maladie :
gagner ne pouvant se dire que des clioses avantageuses et profita-
bles. Ce serait jouer à qui perd gagne.
Il en est de même des locutions: mauvaise qualité, mauvaise
valeur, en parlant de valeurs dépréciées, comme celles de la rue
Quincampoix. L'idée de valeur et de qualité ne saurait s'appliquer
à une chose mauvaise. (Etymologiquement, ////«///e signifie non pas
qu'une chose est bonne, mais qu'elle est de telle ou telle nature,
bonne ou mauvaise.)
— Santé de fer: excellente.
— A votre santé! Souhait que l'on échange en buvant. (Voy.
toast.)
Le vin ne tourne à ma santr
Qu'autant que je le bois moi-même.
(Pauny.)
En provençal, ou dit : A la santé ! C'est une tradition païenne,
comme si l'on faisait une invocation, une lil)ation à la déesse de la
Santé.
Les Romains portaient la santé d'une personne en buvant autant
de coupes de vin qu'il y avait de lettres dans son nom. Ainsi, l'on
vidait cinq coupes en l'honneur de César, et dix en l'honneur de
Germanicus. D'où l'expression : BiJjere nomen. (Martial.)
...Beuvons une, trois, neuf fois, jusqu'à quinze fois en évitant le
nombre pair, suivant le conseil de Démocrite. (Rabelais, V. 7.)
Ores, amis, qu'on n'oul)lie
De l'amie
Le nom qui vos cœurs lia :
Qu'on vuide autant cette coupe,
Chère trouppe.
Que de lettres il v a.
SAn \ 1 7
XiMif fuis au luiiu (le ('.assandro.
Je vay iirciidrc
Neuf fois (lu vin du fiai'oii.
Afin de neuf (ois le lioirc
Vm iiK'Uioiiv
jii's iinif li'lln.'s de son nom.
(Ro>-:,\RD, Le Voyarjc r/'/fi'i'riifil.)
\<i'cia sr.r cnldUd'i, xeiitcm .litsiiiia bilxilnr,
Qnintjur Lijcds, Ljjdr iinnllnur, hla tribus.
(FIoRAcK, Odex. III, 19.)
l'ii in'ovtM'lM' l;itiii disait: Aiil 1er hibendinn. aiU fiocies.
Ce (iirAusoiie ;i tradiiil iiinsi :
Ter bibc, tel loties ternum, xic mi/slica lex est,
Yel tria potanli, tel ter tria muUiplicanti.
— Il n'est l'irliossc que de scieiue et de santé.
Xon est cicere, sed valere cita.
(Martiai. VII, G.)
Orandiim est ni sil mens sana in corpore sano.
(.Ii;vK>-Ai., Satire X, UoG.)
On attribué ce mot à Thaïes de Milet.
— Louis XI voulait que, dans les prières qu'on adressait à Dieu
pour lui, on ne demandât que la santé du corps, atin de ne pas
demander trop à la fois.
Sarabande, de la comédienne espagnole Zarabanda, qui, la
première, exécuta en France cette danse d'un caractère grave,
accompagnée de castagnettes, et qui avait une grande analogie
avec le menuet.
Sarcophage, du grec xarx, chair, pharjô, manger.
Nom donné dans l'antiquité à des tombes faites d'une pierre
douée de la propriété de cousiimer les cadavres en très peu de
temps.
— Autrefois sarcou et surqiieii, devenu cercueil.
Kn un riclio sarquou font mise,
Par dessus une i)ierre bise,
Et sor lui des (loretes niistrenl
Et ces dois vers sor lui escriprent :
Ici Florence est enfoïo.
Qui au chevalier fut amie.
(l-'able de Florence et Blanrhefleiir.)
Sardanapafe. Origine bistorique.
Nom du dernier roi de Ninive, qui vécut dans la mollesse et la
4l8 SAÎ
voliipU'. Il iviiiiji viiitil ;iiis. Il passait son Uîiiips avec ses eiiiiiiqnes
et ses concuhiiios, vétii lui-même en Icmmc.
lîcliis et Arsace conspirèrcnl contre lui et assiéfièrent Ninive.
Sardaiiapale, désespérant de son salut, mit le feu à son palais, et
s'y brfda avec ses feinnies et ses trésors (vers 820 ;ivant Jésus-
Christ).
Strabon rapporte rpio son épitaplie était : « Passant, bois, mange,
divertis-toi : tout le reste ne vaut pas une chiquenaude. «
— C'est un Sardanapale : un homme adonné à la débauche.
Voulez-vous bien passer vos jours
A faire le Sardanapale?
(ScAnitoN, Vlrijile travesti.)
Sardonique (rire).
— Une terrible piaule, originaire de Sardaigne, la Sai'donie,
lUmuncuIus sce/era/us, dont les feuilles ressemblent à celles du
persil sauvage, et contiennent un poison dont l'absorption provoque
de violents éclats d'un rire convulsif, au milieu desquels on meurt,
a donné son nom à une sorte de rire amer et méchant.
Sarment, du latin sarmenfum, pour sarpmentiun, desaî^pere,
tailler la vigne. (PlutiH que du verl)e sera, .satum, semer, qui n'ex-
plique pas l'r.)
Le bois que donne un cep de vigne.
On en fait en Provence de petits fagots qu'on appelle gavcou.
— On a équivoque sur sarment f^i serment, et Ral)elais fait dire
à Panurge (Y, 28): « Par le serment de Itois qu'avez faict. »
Sarrasin, nom qu'on donnait autrefois aux musulmans: de
l'arabe scharhiin, peuple de l'Orient.
— C'est aussi le nom du blé noir.
Sasser, du vieux français séas, devenu .sr/,ç, dérivé du bas-latin
sitaciuni pour sœtnceum, de soie.
Passer au sas, au crible, au tamis.
De là le verbe ressasser : répéter souvent.
Satire, du latin sa tira.
Dans l'origine, à Rome, sorte de pièce dramatique où il y avait
un mélange de uiusique, de paroles et de danse. D'où satira, pour
satura, farcissure, mélange. Le nom est resté au genre qui a pour
but la censure, la critique des vices et de la sottise humaine. Telles
sont les satires de Juvénal, d'Horace, de Boileau.
La satire, vieille comme le monde, durera autant que lui.
î^AU 419
Klle est l'aiilillh'st' cl le coiTci-til' nécessaire de roiiliiiiisme
aveugle et crédule.
— Le hàloii est la palme de la satire. (Céruti.)
Un écrit satirique est une letti'e de change de coups de liàton
payable à vue. (lîodin.)
Le poète Koy é[trouva souvent la vérité de cette maxime. Tu de
ses amis ne voidiit pas sortir a\ec lui à minuit, parce cjue, disait-il,
« c'était l'heure des coups de hàton ».
Roy dit un jour à (pieUpfun qu'il travaillait à nn ballet. « Un
balai ! .Monsieur, prenez i^arde au manche! » (Voy. vo's iambique.)
Saturnales, du latin Sa/urnalia, l'êtes de Saturne; dérivé de
Satiu^ne, du latin saturarit. Il se rassasia en dévorant ses enfants.
Il donna là un lùen mauvais exemple à Ugolin !
Sa femme lui donna à dévorer une pierre emmaillotée, pour
soustraire à sa voracité son tils Jupiter.
— Les Saturnales se céléljraient, chez les Romains, les IG, 17 et
18 décembre. Pendant ces l'êtes, en souvenir de l'Age d'or, où
l'égalité régnait sur la terre, les rangs étaient confondus et les
esclaves étaient servis par leurs maîtres.
— Ce sont des Saturnales : des fêtes bruyantes et licencieuses.
JVon semper erunf Salurnalia (Sénèque) : Ce n'est pas tous les
jours fête.
Satyre, du latin Satijnts ; origine mythologique.
— L'homme des bois, appelé satyre, par sa conformation semble
moins dilïérer de l'homme que du singe. (Buffon.)
— Les Satyres, demi-dieux, selon la Fable, habitaient les bois et
avaient des pieds de bouc.
Saint Jérôme dit que saint Antoine vit un Satyre, et Plutarque
conte qu'on en présenta un à Sylla, et qu'on ne put rien compren-
dre à son langage. Il est probable que ces prétendus Satyres étaient
des singes de grande taille.
— Les Satyres, comme les singes, étaient très lascifs, et ce nom
désigne un homme luxurieux.
— Le Salyriasls est l'hystérie des hommes.
Sauce, du latin saha, salée, assaisonnée.
— Gàte-sauce : apprenti cuisinier.
Après la signature de la paix (mars 18o6), M. Thiers dit de
Napoléon III et de ses actes politiques : « J'aime mieux la cuisine
420 SAV
(|ii(' le ciiisiiiit'i'. » N;i|i(il(''(>ii iiiirail réi)()ndii : " Si iii;i ciiisiiie est
lion ne. (•■('Si ([[{(' je ir;ii pas pris ce gûte-saiice. »
— La sauce vaiil mieux (pic le poisson : l'accessoire vaut inieiix
que le principal.
Ce proverbe gaslrononiique est très vrai, car un liaiiile cuisinier
ajoute beaucoup de valeur aux mets qu'il apprête.
Au figuré, il signifie que, par certaines formules adroites de
flatterie, on peut dire aux liommes des clioscs qui, sous une autre
forme, leur sembleraient très désagréables.
— On dit aussi : On ne sait à quelle sauce le manger, de quelque
chose qui n'est l)on à rien.
C'est une allusion à nue anecdote de la vie de Domitien, qui,
un jour, convoqua le Sénat pour le consulter sur la sauce à laquelle
il fallait accommoder un turbot d'une grosseur prodigieuse, dont
on lui avait fait présent.
Sauge, du latin sahna, de sairns, sain, à cause des vertus
attribuées à cette plante.
Saugrenu, do sel et grenu : sel en grains.
S'est dit familièrement pour salé, piquant ; et plus tard a signifié
le contraire, alisurde (comme gros sel).
Saule pleureur.
Mes cliers amis, quand je mourrai,
I^iantez un saule au cimetière :
J'aime son feuillage (^'ploré,
La pâleur m'en est douce et chère.
Et son ombre sera légère
A la terre où je dormirai.
(A. DK AfussET, Lucie, Élégie, i83.ï.)
Saut-de-loup. Fossé qu'on pratique au bout d'une allée, à
l'extrémité d'un parc, pour en défendre l'entrée sans masquer la
vue.
Sauter, du latin saltare ; fréq. de salive, saillir.
Allons, saule, Manjuis.
{Reg.n\i!D, Joueur. IV, 10.)
Saute, crapaud, nous aurons de l'eau.
Savant, du verbe saroi)\ latin sapere.
Synonymes: dictionnaire vivant; puits de science.
SAV 421
— S;i\;iiit en ns. ?;iv;iiiI jnsqu'iiiiN. dciils. s;iv;in(;isse : pédant.
Grands savaiilas, iiatidii iiicivik',
Dont cali'iiiii est k- seul iisleiisik\
(.M'i'c Dtsiioui.iiaiKS.)
De linis ees sa\;int;is i|ni ne sont bons àvkni.
(Mui.ih.ui:, Fâcheux.)
Savoie (lîisciiit de).
(If L;;ile;iii. [)liis csliiné des uoiiniK^ls que des architerles, a été
iii\(Mit('' |t;ir Jean de Uellr\il!e, euisinier d'Aniédée VI, comte de
Savoie en VX'A).
Savoir, du latin .sajicre, avoir dn uont.
— l'ouf passer de la sensation piiysi(iue au sens moral qu(^ nous
donnons au mot .^v/rry//'. nous n'avons qu'à prendre; l'elTet pour la
eause.
(tn trouve déjà dans IMante :
lU'clc t'iji) rem inaon ■■<apio.
[Pr.cudolus, I, ,'j )
— Le mot saculr a cela de particulier qu'il renferme en lui tout
ce qui peut tenter riiomnie le plus ambitieux. En en retranchant
successivement une lettre, on obtient: savoir, aiwir, voir.
— Je ne sais pas, présente la variante je ne sache pas.
On l'a souvent employée au siècle dernier, sans avoir essayé de
la justilier, que je sache.
— Ne savoir ni a ni ù. Les Latins disaient : Ne savoir ni lire ni
nager, indiquant pai' là que l'homme doit exercer à la fois les
qualités de son corps et celles de son esprit.
D'un i.unorant on dit : « On ferait un beau livre de ce qu'il ne
sait pas. »
Lisfranc disait : « Je chan.uerais bien tout ce que je sais pour ce
que je ne sais pas. »
— Savoir par cœur (voy.), ...sur le bout du doigt (voy.).
Savoir une chose comme son paler : la savoir très bien.
Laissez dire les sots, le savoir a son priv.
(La Fu.m-ai.m:, FaO/es VUI, 19.)
Je ne sais bien (pi'une chose, c'est que je ne sais rien.
IJoc utiuni sclo, qnod nil scia. (Pline, Histoire naturelle, II, J7.)
Savon, du latin saponcin, d'où saponaire.
Ce mot est d'origine gauloise, et Pline attribue l'invention du
savon aux Gaulois,
422 SCI-:
— S.ivonnctlo ;"i vihiin : chnrtrc fiuDii nclictiiit pour s'iiiioblir.
Mfiri.'iuc (l'im roturier nvoc iino lille nolile.
A\;iiil J7S0, los rliaracs do sccrékiiro du roi, et .'iiilrcs, s"aclie-
liiicnt cl coiiféi'iiiiMil l;i noltlcssc
Savoyard, de Savoie.
Nom pou li.ii'iiionieux, qui est presque devenu ?;itiri(|ue. rouinie
un grand noinl)ro de mots terminés en ard. On l'a remplacé par
Savoisien. M. de Saint-Genis, dans son Histoire de la Saroie
(18G0), a propose Savoyen, plus conforme à l'étymologie, mais
moins eupl ionique que Savoisien.
— Synonymes : ramoneur, Jean de la Suie.
— C'est un Savoyard, cpitliétc ironique donnée à celui qui
manque trop de distinction dans les manières.
Les Romains disaient : C'est un Allobroge ; on sait que les
Allohroges étaient les habitants de la Savoie et du Dauphiné.
Rufus, qui loties Ciceroncm Allobroga dixit.
(Ji;vi:n.u,. Satire VU, 214.)
Scandale, du grec skandalon, par le latin seandaltnn, piège,
pierre d'acboppement.
Forme populaire : esclandre.
— C'est la pierre de scandale, c'est-à-dire la cause du scandale,
la pierre oîi l'on se heurte, où l'on se choque. C'est donc ce qui
heurte, choque, otïense la morale.
Lorsque Jules César al)rogea la loi des Douze tal)les, qui permet-
tait au créancier de couper un morceau du débiteur insolvable,
il y suhstitua une autre loi, en vertu de laquelle le déhiteur faisait
cession de tous ses biens en frappant trois fois à cul sur une pierre
placée devant le Capitole, et en prononçant les mots : Cedo bonis.
Cette pierre était appelée « la pierre du scandale ». (Voy. cul et
2)ayer.)
— L'enlèvement est le plus poétique des scandales.
Scaramouche, origine httéraire.
Personnage boulfon de l'ancienne comédie itahenne. Il est habillé
de noir des pieds à la tète. Son rôle est celui d'un poUron fanfaron.
Sceau, anciennement séel, du latin sigiUuni, diminutif de
signa m.
Grand cachet, où sont gravées en creux les armoiries d'un État,
d'un prince, d'une communauté.
SCI 423
Le ^. (jui II';) ricii (l'rlynmlopitiiic. srrl ;'i disliiiuiier saV/c?" do
son lioilioplioiic seller.
Schail, mol |)ei's;iii.
— Les ambassadeurs dr Ti|i|)o-S;rili ;i|i[i(ir!riTiii en France les
premiers sctialls de Cachemire, qui furent accueillis comme la
partie la pltis |irt'cieuse des présents de ce prince.
Scie, Ncrlial de scier, latin soraro, couper.
Le pi'oNciical scrirr sJLiiiilic à la t'ois scier cl enunyï^'.
— (Ml ap[)elle scie une chose ennuyeuse répelée à satiété, une
mystification (pii recommence avec une [)ériodicitc agaçanle. D'où :
scici" le dos.
On dit dans le même sens hiiincr. pour ennuyer, du bourdonne-
ineiil insu[)[)orlal)le du laou.
Scie, dans le langage familier, est donc synonyme de rabâchage,
ritournelle, l'eugaine. (Voy.)
Science, du latin scieniia. de scire, savoir.
— La science enorgneiUit : Scientia inflat. (Saint Paul, I''' aux
Corinihiens, 8.)
— Avec les lettres et les arts, les sciences composent tout le
domaine de l'esprit hnmain.
Dans l'antiquité, la science, scientia, sophia, se confondait avec
la sagesse, sapienfia, parce qne la seconde vient de la première.
Il n'y a dans l'arbre de la science que deux branclies-mères,
correspondant aux deux modes fondamentaux de l'esprit liumain.
Il n'y a que la physique, qui constate les faits, et la métaphysique,
qui les analyse et en recherche les rapports : c'est là toute la
philosophie.
— La science, c'est le pouvoir. (Bacon.)
La science est une souveraineté dont l'empire n'a pas de bornes.
Ut rosa dut flores, flos fructus, frnctns adores;
Sic schola dut mores, mos ccn.ius, census honores.
(E|iigrnniiiie du Livre des l'roverhex de A. Wai.trr. Ifil.iO.)
Un fait nouveau acquis à la science, une découverte utile à
riiumanité. donne à l'auteur, dans le sénat universel des intelli-
gences, un rang méiité, dont ni l'intluence d'un ministre, ni le
caprice populaire ne i)euveul le faire descendre, comme ils ne
pourraient l'y élever. (Gui/.ot.)
Les racines de la science sont amères.'mais les fruits en sont
doux. (Aristote.)
424 si;(:
— H (l'oil avoir la science iiiliise : loiil savoir.
(In (lil qu'Adam et Salonioii avaient toutes les sciences infuses,
par un privilège sp«''cial de Dieu.
— La science s'acquiert par la patience.
La science est une serrure dont l'étude est la ciel.
La science et le talent sont la noblesse des [)anvres. (L. l'ibacii. j
Scot (Jean), cordelier écossais.
— Ualielais (11, 7) dit : JUirhouUlaiiit'uiti Scoli, titre inia.L^naire
d'un ouvrage de cet auteur, surnommé le Docteur subtil, à cause
de robsciirité de ses ouvrages, qui foi'mentdix-se[tt volumes in-folio,
et semltleul n'être qu'un barbouillage de papier.
Scrupule, du latin scrupulus, petite pierre.
Doute, délicatesse de conscience.
— Les scrupules sont les gants de la conscience.
— On appelait anciennement scrupule un poids valant vingt-
quatre grains.
Se, particule marquant séparation : séduire, sevrer.
Seau, ancien séel, du latin sitellus, urne (de scrutin).
11 a donné aussi la forme scilfe (baquet), dans Rabelais.
Sec, du latin siccus.
— Être à sec : être sans argent.
Un dit dans le même sens : être bas percé, être à la côte.
On dit, dans l'acception contraire : être à flot.
Secret, du latin secretum, de secevno, mettre à l'écart. De là
aussi sécrétion.
Le contraire de arjréfjor.
— La loi punit la révélation du secret professionnel, d'un empri-
sonnement de un à six mois. {Code pénal, art. 378.)
Cette loi impose le secret aux médecins, pliarmaciens et à toute
autre personne dépositaire, par état ou profession, des secrets
qu'on lui confie. La jurisprudence a étendu l'obligation de la discré-
tion au confesseur, à l'avocat, à l'avoué, au notaire.
— Notre secret est un esclave, qui devient notre maître en nous
écbappant. (Louis XL)
— Secret de deux, secret de Dieu; secret de trois, secret de
tous.
Ce que trois savent, tous le savent.
SEL l2o
C'est le secrcl il(' l;i comédie, ...le secret de Policliincllf : cesl
chose connue df lonl le inonde.
...ni in coniiriliis,
(hiiniit Dinnrs ithi rciriscunt.
^T^;ltK^CK, Hi'fjrf. V, 2.)
Coninie dans les comédies, où lonl le monde est dans le secret.
Uieii m- |)(''si' t;ml (nriin scci'cl.
Le iKirtiT liiiii es! diflicilc aux daint's,
l-;i ji' sais iiKMiU' sur ce lail
liuii iioiultri,' (l'IiuiniiiL'S qui suiU [rniun'S.
(La Fo^iTAiME, Fablcx.)
— Xole secrcle. Socrclhsimo, (ibi sali.
Seigneur, du latin seniorem: le nominatif senior a donné .s7/'e.
De là : sienr, monsieur, messire.
Ce mot rappelle riiomma.ue que, dans les temps anciens, on
rendait à la vieillesse, et témoigne de la moralité de nos ancêtres.
— A lont seigneur, tout honneur : il faut rendre à chacun les
honneurs qui lui sont dus.
— Droit du seigneur. Coutume bizai're et honteuse, qui accordait
au seigneur d'un pays la première nuit des nouvelles mariées.
Prif'lifjfido. Dejlorntio rirgini/alis.
On prétend que ce droit fut établi par Éven. roi d'Ecosse; aholi
par Malcom III et converti en une taxe, que les seigneurs préle-
vaient sur leurs vassaux, à l'occasion du mariage. On l'appelait
« droit de marquette ». C'était un demi-marc d'argent que les
femmes payaient pour se racheter. (Voy. la Mésangcre, p. 228.)
Il n'existe, en réalité, aucune preuve certaine que le droit du
seigneur ait eu le caractère de brutalité sensuelle qu'on lui a
attribué. Si, à l'époque féodale, où régnait la force, il y a eu des
exemples d'aijus odieux, ils ne constituèrent jamais un droit.
Sein, du latin sinus.
L'entre-deux des mamelles; le pli du giron, où l'enfant se repose;
et, par extension, mamelle.
— Synonymes : les coussinets d'amour (Dictionnaire des /Pré-
cieuses); appas; avant-scènes (allusion à la saillie des loges d'avant-
scène) ; l)ossoirs d'avant (terme de marine) ; nénais : « Petite
maman s'est fait faire des nénais avec du coton. » (Gavarni, les
Enfants terribles.)
Sel, du latin sal, salis. En provençal saù (féminin).
— L'a du latin, devenu e en français, reparaît dans un grand
426 SEL
noiiibro de dérivés : sîilé. siiliidc, salière, saline, saiirp, saumure,
saunier, sanpondi-er.
— Le sel marin a été connu de toul trm[is. Les Grecs ima,Ln-
nérent les pr(^miers de saler les viandes et le poisson, pour hîs
empêcher de se corroniprc
— Le sel n'est pas un .iliiiicnl. m;iis il relève le ,uoiit des subs-
tances alimenlaires. Il pi-éserve les corps de la fermentalion, et
communique une éternelle jeunesse aux eaux de la mer et de
certains lacs, qui, sans lui, seraient des foyers de corruption.
— Jésus-Christ dit à si^s apôtres qu' « ils étaient le sel de la
terre», voulant dire qu'ils devaient préserver les hommes de la
corruption.
— Le sel, que l'on appelle le sucre des pauvres, a reçu d'Homère
l'épithéte de divin, et a été pris pour symbole de la sagesse.
— Sel attique (voy.) : raillerie tine des Athéniens, atlicisme.
D'où : Il n'y a aucun sel dans ce qu'il dit ; c'est fade, insipide.
Salem habere (Térence) : avoir de l'esprit.
ScdsHs homo (Gicérou) : homme spirituel.
Il est de sel allùiue assaisonné partout,
Et vous le trouverez, je crois, d'assez Lon goût.
(Molière.)
— Le sel de .luvénal est très piquant : celui de Plante, grossier ;
celui de Térence, très lin.
— Il faut du gros sel pour saler les grosses bétes : de l'esprit
grossier pour amuser la populace.
— Le mot sai/fjrenu, signifie aujourd'hui absurde. (Voy.)
— Cl. de Pixérécourt, auteur de plusieurs mélodrames joués au
l)Oulevard du Temple, disait : « J'écris pour des gens qui ne savent
pas lire. »
— Pour se dire l'ami de quelqu'un, il faut avoir mangé un minot
de sel avec lui. (^Gicéron, De r Amitié.)
— Amicitia, pactum salis. L'Écriture emploie cette expression
pour signiller une alliance inaltérable.
— Les Francs admettaient le sel dans leurs pactes, et l'on croit
que le nom de loi salique provient de cet usage.
— Renverser une salière.
...Si je renverse une sahère. dit un rédacteur de \ Illustration,
je prends sur la lame de mon couteau quelques grains du sel
répandu, et je les lance par-dessus l'épaule gauche, en prononçant
la formule romaine sinistinun. — Pourquoi ? Je n'eu sais trop rien.
si:r. 427
(Jiioi (in'il fil ?()il (le ci'lto siiporstitioii. It* sel ;i IiMijoiirs (-Ir consi-
dère coiiimo une ?ii])St.;inre sacrée et a toujours joué un liraud rôle
dans les relations humaines depuis l'origine du monde.
— On voit dans la Bihle que le pain et le sel sont les symboles de
riiospilalilé. (juaud on rasait une maison, on y st;iuait du sel. La
l'cmme de I.olli fut changée en statue de sel. Les prêtres païens
uu'Itaient du sel dans l'eau lustrale. Dans le liapiciiie chrétien, ou
met une pincée de sel sur la langue de l'enfant. Eulin les gardes-
champétres en mettent dans leur fusil pour remplacer les chevro-
tines (?).
Selle, du lalJM sella, siège, qui est aussi provençal.
Ce mot, qui sa[iplique spécialement à une pièce du harnais du
cheval, a eu la signification générale de siège.
Il se dit aussi d'un siège de tout autre genre que la selle du
cavalier. Par extension, il s'emploie, en médecine, pour les déjec-
tions alvines : du latin celare, cacher (?). Quod e.a celantur quœ
rc'l/fiius esse occulta...
Ce mot devrait, par conséquent, s'écrire par un c au lieu d'un .v,
qui a prévalu; il se trouve, en quelque sorte, placé ainsi entre deux
selles (?).
— Synonymes de « aller à la selle » : faire ses besoins; faire
ses nécessités; faire, absolument, parce qu'il se dit de la fonction
la plus iuqiortante du corps humain ; faire le gros : faire caca, du
latin cdcnre, provençal cacar : avoir la courante, la va-vite.
Touser (en argot). Au commandement des argousins, pendant
le voyage de la chaîne, tous les forçats descendaient pour lonser,
ou faire de la corde.
Aller où le roi va à pied. « C'est, à mots couverts, le lieu on l'on
va se décharger du tro[) plein de la mangeaille. » (Scarron.)
— Raltelais appelait selle percée, ce que nous a[)pelons chaise
percée : « Le fond de voz chausses feroit office de bassin fécal et de
selle percée. »
— Etre entre deux selles le cul par terre. (Rabelais, liv. I, 2.)
Avoir deux projets et n'en réussir aucun. Se dit des personnes
qui, voulant occuper plusieurs positions à la fois, finissent par n'en
pouvoir conserver aucune.
Entre deux selles chet dos à terre. (Proverbe ancien.)
...La Bourse a baissé aujourd'hui : on redoute l'irritation de
la Chambre et l'inditierence du Sénat. Le maréchal est entre deux
selles. (Débats.)
428 si«:m
— Le liilioiirot, sirnc sans l)ras ni dossier, «''tait accordé, au
Louvre, aux pi-incesses et aux duchesses seulement, et leur donnait
le droit de s'asseoir au cercle de la reine.
Scarroii dit à ce sujet :
Votre ciil, (|iii (Idil cliv lin (les l)i';iii\ ciils (If Kraiii-r,
lloiiiiiic un ciil (l'iiiipiii'hinci',
A reçu, cIil'Z la n'ino, enfin le lahunrrl.
...La pauvre comtesse du Plessis est fort lâchée que son mari ne
lait pas laissée duchesse. II est bien dur pour elle de voir sa belle-
m(''r(^ et sa lielle-lille avoir un tabouret, et demeurer ainsi ce (ju'on
appelle entre deux selles le cul à terre. (Hussy, Leflres.)
Selon, sorte de fusion du latin seci/ii(/unt et de loïKjiun.
— Évangile selon saint .lean. Agir selon son inspiration, c'est-à-
dire en suivant son inspiration : scfundiim vient de sequi.
Semaine, du latin sepfi/nana, provençal setmana.
Espace de sept jours. Les quatre quartiers de la lune, qui sont
d'environ sept jours chacun, ont sans doute donné lieu à ce mode
de partage du temps.
— Les Assyriens, les Egyptiens et presque tous les peuples de
l'Orient, ont connu la semaine. Dieu avait lui-même, en souvenir
de la création, ordonné aux Juifs de travailler six jours, et de se
reposer le septième.
Les Romains ni les Grecs ne connaissaient la semaine.
Semer, du latin sefuinarc, provençal scinenar : d'où aussi
séminaire.
— Semer la zizanie : la discorde.
Semez de la graine de niais, il poussera des actionnaires. {Les
1 01 Robert-Maca ire.)
Semez des Gascons, ça pousse partout. (Henri lY.)
— Il ne faut pas laisser de semer par crainte des pigeons : dans
les affaires, il ne faut pas se laisser rebuter par les difiicultés.
— Quand vous n'avez rien à faire, plantez un arbre; il poussera
pendant que vous dormirez.
Qui sème bon grain, recueille bon pain.
Qui sème la vertu, récoltera l'honneur.
Qui sème le vent, récolte la tempête.
Qui sème l'injustice, récoltera la haine et la vengeance. (Franklin.)
Qui sème des chardons, recueille des épines,
Sempiternel, mol |ioii iisitr : du l;itin semjiilornua.
— Vicillt' S(Mii|)iît'nit'll('. l'A|ii-('ssioii contciKiiit iiiio idée comi(iiie.
Il est siipcrllii (le (lire (juc ce (jiii csl ('icrnc! dure toujours. Mais
lilio vieille n'esl jias pour cel;! iiiiMiie (''lenielle.
Sens, du Inliu se>isi/s. l'acuité de recevoir l'iiiipi-ession des
olijets. D'où : sensé, insensé, forcené, etc.
— Les cinq sens.
— Le bon sens : raison. Prendre dans le bon sens : du bon côté.
— Il ne faut rien accoider aux sens, quand on veut leur refuser
quelque chose.
— De tous les sens donnés à riioniine, le plus rare est le sens
commun. (Calembour.)
— Sens dessus dessous : sens devant derrière. Ces expressions
sont pour : ce dessus dessous, ce devant derrière, qui se disaient
autrefois. On a dit ensuite : c'en dessus dessous.
Si fut l;i chose liislournée
Et all;i Cl' (Icvaiil dorrière.
Sensible, dérivé du précédent.
— Sensible comme une tourierelle, ...comme un caillou.
Il y a des gens si sensibles qu'ils vous aflligent de vos douleurs.
(Voy. fcnune sensible.)
Sensitive.
La sensitive est douée d'une grande irritabilité, qui lui a fait
donner par les botanistes le seul nom gracieux qu'ils aient
inventé : nii/nosa pudica. Cette propriété, qui augmente sous
l'action de la chaleur et de la lumière, a beaucoup d'analogie avec
la sensibilité physique des animaux. Un dernier trait de ressem-
blance, c'est qu'elle est paralysée par l'étber. (.I.-.I. Ampère.)
Sensualisme, doctrine qui prétend que toutes nos idées vien-
nent des sens, et ([ui se résume dans la maxime : Niliil est in
intellectu, quod non prius fiierit in sensu. 11 n'y a rien dans
l'esprit (pii n'ait été d'abord dans les sens.
Sentiment, dérivé de sentir, latin sent ire.
— Il est plus diflicile de dissimuler les sentiments que l'on a, que
de feindre ceux que l'on n'a pas.
Si l'on peut se tromper dans le domaine des sensations, que
sera-ce donc dans le domaine des sentiments?
430 SKQ
Sépia, nom il.'ilicii (t'I hiliii) de l;i selrhc.
On ;i|)|)('llt! .'iiissi I;i sciclic unevicr, on calciniir: on Jippohiit
iinlicJ'ois lin encrier (j(iliinar( on calaindr. d(; (([((nnarins. tii'é
(In liilin ra/a//ins, roseau à écrire.
— Ce poisson a reçu le nom de calernar, parce qu'il épanche à
volonté une liqncnr noinltrc, avec laquelle il Iroiihle Tean. ]ionr
éclia[)per' aux i)oiirsni(cs de ses ennemis.
Les Italiens l'ont sécher celte liqueur hourheuse, qu'ils vendent
pour la peinture à l'aquarelle, sous le nom de sépia dl Jtoma.
— La seiche, qui semhle nager dans l'encre, est excellente
accommodée à la sauce hlanche.
Sept, dn latin sepfe/u, en grec hepta.
Ce nombre, comme le nombre trois, a toujours été vénéré.
Les anciens comptaient sept ciels, correspondant aux sept planètes.
Le nombre sept était consacré chez les Juifs, et un grand nombre
de choses étaient chez eux ordonnées par sept : le chandeher à
sept branches ; les sept lampes ; le sabbat était tîxé au septième jour.
Dans la religion clirétienne, on a, comme chez les Juifs, la
semaine, avec le repos le septième jour.
Jésus-Christ a dit à saint Pierre : « Tu pardonneras jusqu'à
septante fois sept fois. »
Le juste pèche sept fois par jour.
Il y a les sept vertus, trois théologales et quatre cardinales.
On compte sept heures canoniales.
On fête les sept douleui's de Notre-Dame.
Citons en outre les sept sacrements, les sept péchés capitaux,
les sept psaumes de la pénitence, les sept œuvres de la miséricorde.
L'antiquité avait les sept sages de la Grèce, les sept merveilles
du monde, et Rome était la ville aux sept colhnes.
Dans la nature, on trouve les sept couleurs primitives, les sept
tons de la musique, les sept planètes, et, d'après Aristote, les sept
métaux ; les sept étoiles des Pléiades. (Voy. ce mot.)
Enfin le nombre sept se trouve trois cent cpiarante-sept fois dans
la Bible.
Sépulture, du latin sepullura, desepe/ii'e, ensevehr.
Le verbe provençal espeli>\ naître, éclore, est l'opposé de ense-
velir {^).
Séquelle, du latin seqiiela, suite.
Se prend en mauvaise part.
SEU 431
Sérail, du persan sera)', palais, par l'italien.
(l'est If palais du sultan l'i (lonslantinoiiic.
— On confond ce mol avec luirciii. lieu où sont cnfcrniécs les
IVnunes, et dont rai)[iroclie est interdite à tous les hommes.
Kn aral)e, liaron siiinilie défendu, sacré. C'est le (jijnécée des
Grecs.
Serf, du latin servus, esclave.
Celui ipii a été sauvé, conservé à la .uuerre, au lieu d'être tué (?).
De là : servile, servage, sergent, servialde.
Sergent, tin Liliii serricns, serrientem, servant.
Je vous (lomando ca (Icmandant,
Coiniiie le roy à son sergent.
(HAnKi.Ais, IV, 27.)
— Philippe-Auguste chassa de France tous les Juifs, parce (pi'ils
avaient des sergents et des chanihrières.
On appelle encore sercanfes, les domestiques femmes.
— Le sergent militaii'o es! le cc/tfuriœ ins/rucior des, Latins;
le sergent de ville ou de police. \'aj)pari/or; le sergent de menui-
serie, Iku'jxkjo rirlorttts. ipii serre, (pii lie.
Sérieux, du latin scriosus, dérivé de sérias.
— Le sérieux est un mystère du corps et de la parole, inventé
par les sots, pour cacher leur nullité d'esprit.
Vn homme sérieux ne saurait plaire aux femmes, parce qu'il n'a
à perdre aucune des trois choses que les femmes dissipent d'ordi-
naire : l'argent, la parole et le temps.
Seringue, du latin sijrinf/n. dérivé de si/rinx, roseau.
Synonyme : escopette d'Ilip[)Ocrate. (Rahelais.)
— Chanter comme une seringue ; parce qu'en grec syrlnx
signifie flûte.
Serment, d'abord sat/rcu/ie/it. puis sobrement : du latin snrra-
mentutn, qui a tait aussi sacremcnf.
Sa prononciation s'est confondue [)arfois avec celle de sarment,
ce qui a donné lieu à des jeux d(; mots.
— Puisqu'ils gaignent tant aux grappes, le serment leur peut
beaucoup valoir. (Uahelais, V, IG.)
— L'année du mariage de Charles YIII, avec Anne de Bretagne,
les vins furent verts, à cause des grandes pluies. On servit de ces
vins à la table de Marguerite d'Autriche, que ce prince avait
432 SKÏI
|-('ii\()u';e, iiniljiré son scriiiriil de r(''|ioii?f'i'. I']lle dil aloi'S que
« la verdeur de ces vins inovciiail de ce que celle année les
serments n'avaient rien \alii ».
Depuis lors, heaucoup de gens se sont fait aussi un jeu des
serments.
Serpent, du latin sei-pcns, de serpere, ramper.
— C'est un sei'pent que j'ai récliaulTé dans mon sein : un ingrat.
L'ingratitude n'est pas le seul atlrihut du serpent : il est l'em-
hlème du démon, de la santé, de la longévité, de la prudence,
comme de l'ingratitude.
— En 1870, la Répul)lique proclamée le 4 septembre, eut à lutter
contre les ennemis du deliors et ceux du dedans : les démagogues
et les Prussiens. C'était trop de serpents dans le berceau d'Hercule.
Serrer, du has-latin serra, verrou, d'où serare, fermer.
De là aussi : serrure, serre, enserrer.
— Serrer quelqu'un de près : le poursuivre vivement.
S'il vous serrait le bras, il vous ferait sortir du sang dos ongles.
(W. Scott.)
— Serrés comme harengs en caque.
Il y a de la place pour deux, en se serrant... beaucoup.
Servilité, disposition à la servitude.
— La servitude abaisse les hommes jusqu'à s'en faire aimer.
(Vauvenargues.)
Servir, du latin servlre, être esclave.
— Nul ne peut servir deux maîtres. (Saint Mathieu, YI, 24.)
— Ne servir de rien : n'être utile, l)on à rien.
Ilien ne sert de courir, il l'aul partit' à point.
(La Fontaine.)
Ne servir à rien, se dit quand un objet n'est pas employé à un
moment et peut servir dans un autre : « Ce livre ne vous sert à
rien, prètez-le moi. »
Seul, du latin solus : provençal sol.
— Seul sous sa tente, dans le grand désert... de la vie.
Seul comme Robinson... Robinson, dans son ile, par les ressources
de son génie inventif, exécute un grand solo au milieu de l'har-
monie universelle.
Vœ snli! fGenèse, II, 8; Ecclésiaste, IV, 10.) Il n'est pas bon
que riiomme soit seul, donnons-lui une compagne à son image.
Sm 433
— La solitiido donne lonjoni's de pcrnirieux conseils.
SoliiH(h) otiudd innld jicrsiiailct . (Sénèqiie.. Lettre 25.)
L'Iiouiine solit;iire est un dieu on une hête. (Aristote, PolUiqno, L)
Il est [lins siipitorliililt' d'rire toujours seul, qne de n'tMre jamais
seul. i^.MontaiLiiie.')
Sevrer, du latin xopavnro. d'où aussi xôparer.
U est restreint aujonrdlMii à l'action de séparer l'enfant du sein,
de cesser rallaiteincMl.
Si, conjonction et adverbe : du latin si et sic.
— La vie liuuiaine est une phrase remplie de si et de mais.
Si le ciel lonihail, il v aurait bien des alouettes prises.
Si ii'iHaii'ut les si ot los mais.
Serions tous ricties à jamais.
Les deux conjonctions si et mais, si fréquentes dans la conver-
sation, sont comme la formule générale qui contient un vœu de
l'homme et le refirs de la nature.
— Qui m'ayme, sy me suyve. (Rabelais, I, 33.)
Si, dans cette phrase, ne signifie pas il ou qiiil: mais ainsi,
et vient du latin sic. C'est le sens qu'il a dans l'ancien axiome du
pouvoir absolu, qu'un ministre a osé invoquer à la tribune, sous la
Restauration : « Si veut le Roi, si veut la Loi » ; tandis que la
Charte avait consacré le principe : « Si veut la Loi, si veut le Roi. »
Sibylle, du grec par le latin Sibylla.
Ce nom s'appliquait à des femmes auxquelles les anciens attri-
buaient le don de prévoir l'avenir.
Les principales sibylles étaient celle de Delphes, fille de Tirésias,
et celle de Cumes, qui présenta à Tarquin les livres sibyllins. On
les représente sous les traits de vieilles femmes.
Dés les premiers temps du christianisme, et jusqu'au wi" siècle,
on admettait l'opinion que l'antiquité païenne avait pressenti et
prédit le Rédempteur du monde. De là, les siitylles citées à côté des
prophètes, par les écrivains ecclésiastiques.
C'est pour cela que Michel-Ange a peint alternativement un
prophète et une sibylle au plafond de la chapelle Sixtine.
— La îjro.^c qui se chante aux messes des morts, commence
ainsi :
Dies irœ, (lies illa
Solcet scf'clum in favilln.
Teste David cum Sibi/lla.
434 SIË
— J.cs livres sibyllins contenaient les prédictions des sibylles,
et les Romains n'enln^prcMiaient rien sans les consnlter. On prétend
que les prédictions des sibylles concernant la venue du Messie
étaient plus claires (jue celles des propliètes.
Sic, mot latin sinnidant ainsi.
On s'en sert en tVancais, entre parenthèses, pour indiquer qu'on
cile textuell(;meut, sans suppression, ou sans correction.
— Sic vos non cohis. (Voy. htinéfice.)
Les Chinois dressent pour la pêche des cormorans à qui ils
apprennent le sic cos non robis, en leur passant au cou un anneau
qui arrête le poisson, et permet au pécheur de s'en emparer.
— Avec les ciels d'un palais, l'architecte en remet au riche tous
les agréments et toutes les jouissances, sans y prendre aucune
part. (Gœthe.)
Siècle, du latin secuhtni.
Espace de cent années.
— Le siècle actuel a commencé le h'' janvier 1801 et finira le
31 décembre 1900.
— Les quatre grauds siècles (ou époques), sont ceux de Périclès,
d'Auguste, de Léon X et de Louis XIV.
Siège, substantif verbal de siéger, qui suppose sediare, dérivé
de sedere.
l'rends ua siège, Ciniia...
(ConNEii.LE, Cinna. V, 1.)
• — Sièges durs : rembourrés de noyaux de pêches.
...Le directeur du théâtre de la Gaîté a vendu les vieilles ban-
quettes du parterre à un distillateur, pour faire de l'eau de noyaux.
— Mon siège est fait. Cette locution vient de la réponse de l'abbé
Yertot, qui venait d'écrire l'histoire du siège de Malte, sans se
préoccuper des détails historiques qu"il avait fait demander au
Grand-Maître de l'Ordre. Les tardifs renseignements arrivèrent
enfin: mais il ne changea rien à son récit, et dit : « J'en suis fâché,
mon siège est fait. »
Sieste, du latin sexta (la sixième heure du jour, midi) ; plutôt
que du latin sisfere.
Les Arabes expriment la même chose par h-cf, dont sieste n'est
qu'un faible équi\ aient.
C'est là que le prélat, muni d'iiii déjeuner,
Diirnianl d'un léger somme, attendait le dîner.
(BoiLEALT, Lutrin.)
SIG 4âS
Siffler, provençal siblar, du latin sihilare.
Dans le patois liorrichon, on dit suhiar, (jui est l'ancienne forme
française (^) et se trouve dans Hahelais.
Ce l)iaii marie (pii siihlail si tiiiciiiciil liant. (Cyrano de Bergerac,
h' Pédant Joué.)
— Siffler comnu' un merle.
— Se faire siffler : se faire moquer de soi. Le public siffle un
mauvais acteur, pour lui témoigner son mécontentement.
CCst un droit quà fa porto on acliète en entrant.
(Boir.KAij.)
Ptijuilus me silnhit.
(HoriACK.)
(Le peuple me siffle.)
Sibilis e scemt explodl ((^.icéron) : être chassé de la scène par
les sifflets.
— Dans la tragédie de CléoixUre, de Maruiontel, l'aspic dont se
sert Cléopàtre pour se donner la mort, était un automate de
Vaucanson, qui faisait entendre un sifflement. La pièce n'eut pas
de succès, et un critique, à qui l'on demandait ce qu'il en pensait,
répondit : « Je suis de l'avis de l'aspic. »
Sifflet, dérivé du précédent.
— Couper le sifflet à quelqu'un : lui couper la parole.
Si vous voulez que je dise des merveilles, que Monsieur ne vienne
pas me couper le sifflet. (Don (Juichottc.J
Sigle, du latin sùjil/uin, dérivé de sujnuni.
Lettre initiale, exprimant à elle seule un mot très usité dans les
inscriptions anciennes.
Telles sont les lettres S.P.Q.R : Senatns populus(iue romanus.
Signe, du latin s/f/niun, d'où aussi seing.
D'oi'[ : tocsin, signer, désigner...
Signer, du latin sùjnare, marquer.
— Cicéron appelle auruni sUjnatinn la monnaie d'or.
— Aux époques d'ignorance, ceux qui ne savaient pas signer
faisaient une croix, ou signe de la croix, au bas des actes, comme
s'ils avaient juré sur la croix d'en observer le contenu.
Soliman signa d'une croiv la capitulation de l'île de Rhodes.
— Signe de la croix se dit depuis que Constantin, ayant vu dans
le ciel une croix lumineuse avec la légende : In hoc sif/no vinces,
fit placer une croix sur les étendards des légions.
43G S(f.
Sailli l'4)i[)liano dit qiio lo sif-nc de la croix rendait les cliarmes
impuissants, et chassait les démons.
Si!ence, du hilin sili-nliinn : provençal silcnri.
— Ilar[)ocrate, dieu du silence, est représenté sans bouche, on
avec un doi.gt sur les lèvres.
Je mis un doigt sur les lèvres, pour lui dire, sans parler, de se
taire. (Lamartine, Fior d'Alisa.)
— Silence ! interjection, pour : faites silence, eu latin fii/efe, que
Térence exprime par si.
— Synonymes : chut! uiotus ! paix !
— Taisez-vous, ou dites quelque chose qui vaille mieux que le
silence. (Pythagore.)
— Il a la passion du silence.
La conspiration du silence.
La parole est d'argent, et le silence est d'or.
Oy, voy et te tay.
Si tu veux A ivre en paix.
(xmmc SlfXLE.)
Le silence est l'esprit des sots.
Un sot qui ne dit rien ne se distingue pas
D'un savant (jui se tait...
(MouÈRE, Dépit, ik 7.)
— Un Grec a ajouté une dixième muse aux neuf autres ; il l'a
appelée la Muse muette. « J'aime cette muse muette, disait Balzac,
je la trouve plus sage que les autres. »
— La règle de certains ordres religieux, Chartreux, Trappistes,
prescrit le silence.
Les disciples de Pythagore observaient aussi le silence pendant
cinq ans.
— D'un endroit silencieux, on dit qu'on y entendrait voler une
mouche. Gham dit: marcher un fromage.
Silhouette, étymologie historique.
Dessin représentant le profd d'un visage ou d'un objet.
C'est la reproduction de rom])re projetée, sur une surface verti-
cale; le dessin a été connu de tout temps, mais le nom est moderne.
11 vient d'Etienne Silhouette, contrôleur des finances, sous Louis XV,
qui contribua à mettre ce genre à la mode. Les réformes financières
de ce ministre ayant paru mesquines et insignifiantes, la caricature
s'en empara, et l'on donna le nom de silhouettes à ces dessins
imparfaits qui se bornent à un simple trait.
SIX 437
Voici (0 ({n'en dit Mercier {Tableau de Paris] :
« La l'élébrilé d'un conlrùleiir général des linances, iiionlé à
cette place avec la plus liaiile réputation, tomba précipitamment.
Il lit plusieurs écoles, quoi(pie doué d'esprit et de connaissances.
Dès lors tout parut à la silhouette, et son nom ne tarda pas à
devenir ridicule. Les modes prirent à dessein une empreinte de
sécheresse et de mesquinerie ; les surtouts n"avai(;nt point de plis,
les culottes point de poches; les tabatières étaient de bois brut;
les portraits lurent des visages tirés de prolll sur du papier noir,
d'après l'ombre de la chandelle sur une feuille de papier blanc.
Ainsi se vengea la nation. »
— L'histoire des règnes de Louis XIY et de Louis XY serait tout
entière dans l'histoire des contrôleurs généraux. Fouquet, Colbert,
Desmaretz, Law, Orry, Silhouette, Berlin, Lavardi, l'abbé Terray,
sans parler des autres, fourniraient des observations curieuses.
Simagrée, étymologie très controversée. Les uns donnent
similis, singe : d'autres le font venir de si m" agrée ou s il m'agrée,
— Manières alVectées et prétentieuses.
Se faire prier et n'acquiescer que difticilemcnt à un désir.
Faire des singeries : prendre des airs atïectés.
Simonie, origine historique.
— La simonie est le trafic des choses saintes.
Ce mot vient de Simon le Magicien qui, ayant reçu le baptême,
à Samarie, et voyant que le Saint-Esprit était donné par l'imposition
des mains, otïrit de l'argent aux apôtres, en disant : « Donnez-moi
aussi ce pouvoir, que ceux à qui j'aurai imposé les mains reçoivent
le Saint-Esprit. « Saint Pierre lui répondit : « Que ton argent
périsse avec toi, puisque tu crois que le don de Dieu se peut acqué-
rir pour de l'argent. » [Actes des Apôtres, YIII, 18.)
Simoniaix, encanlors, luxurios et renoviera.
(Mahcaukus.)
(Simoniaques, enchanteurs, débauchés et usuriers.)
Simple, du latin simplex, sans pli, ouvert.
Xom donné à toutes les plantes dont la médecine fait usage. Est
pour médicament simple. {\o\. végétaux.)
Sincère, du latin sincerus (sine cera ?J.
— Aujourd'hui la falsilicalion ne se borne pas à aUérer le miel;
et la cire elle-même, par une singuUèrc antiphrase, devrait s'appe-
438 su;
1er .s7'//r/'/r, c;ir elle ne coiiliciU plus de cire, depuis l'inveiilioii de
la stéarine.
Singe, dti l.iliii shniits, [trovençal simi.
— On dit: adroit, malin, laid comme un singe.
— Les grands singes sont appelés par la science (/)if/iroj)o-
morplies.
— Payer en monnaie de singe : en grimaces, en gambades.
On lit dans Sainte-Foix, que le joculateur qui se présentait au
pont du Cliàtelet avec un singe, et le faisait jouer et danser, était
quitte du péage, tant du dit singe que de ce qui était à son usage.
[Meraire, février 173G.)
L'Opéra donne tous les ans quelques représentations extraordi-
naires pour la capitation des acteurs. Ainsi, ils paient en monnaie
de singe, en sauts et gambades; le surplus leur tient lieu de
gratification. (Mercier, Tableau de Paris.)
Sire, que quelques-uns ont voulu tirer de kijrios, en grec
seigneur, vient du latin senior, dont l'accusatif seniorem a donné
seigneur.
Titre d'bonneur donné aux souverains. N"a pas de féminin.
Il a été synonyme de seigneur : les sires de Joinville, de Couci.
En Angleterre, sir a la même signification que sieur et monsieur
en français.
Sirène, provençal serenu, latin sirena: dupbénicien sir, chant.
Nymphes célèbres par la douceur magique de leur voix. Gérés
les changea en monstres moitié femmes, moitié oiseaux. C'est ainsi
qu'on les trouve représentées dans les anciens monuments.
A une époque plus rapprochée, quelques auteurs ont prétendu
que les sirènes avaient la forme de poissons, de la ceinture à l'extré-
mité inférieure, et que c'était d'une sirène qu'Horace entendait
parler, quand il suppose une belle femme dont le corps se termine
en poisson (Début de l'Art poétique) :
Desinil in pisccm iniilicr formosa .siqjerne.
Mais il n'y a aucun auteur de l'antiquité qui nous les ait présentées
comme des femmes-poissons.
On a supposé que les anciens avaient découvert, dans les parages
de la Sicile, des filles bizarres et contre nature, sortes de monstres
marins. Elles étaient au nombre de trois : Leucosie, Sigée et Par-
thénope. On les disait lilles du fleuve Achéloiis : elles se nourris-
SIS i30
sniont do clinir lininaiiio, ol abusaient du pouvoir lascinalonr de la
luusiqiie pour ap[irûvisioniier leur tiarde-nianiier.
Ou croit qu'elles étaieut un symbole de la triple volupté des
sens: le vin. la niusi(|ue et l'amour, qui sont si puissants pour
séduire les hommes. De là les exhortations à éviter le eliant des
sirènes.
Il y a ipiclqiie chose de répuiiiiant dans ce mythe anti(jue. Des
femmes-poissons, vilaines bêtes ! ne pouvaient plaire qu'à moitié,
et leur Lialbe monslrueiix réveiller les appétits les plus disparates :
ceux de l'amour (-t de la bouillabaisse.
— S/rè/w s'est écrit aiil relois sera /ne et sereine.
il y avait à Bourges une rue Seraine. ainsi nommée d'une
auberge de la Si/nrine. Le Conseil municipal, dans sa délibération
du 23 décembre 1846, a jugé à propos défaire disparaître ce vestige
du vieux langage, en lui substituant la forme plus moderne de
sijx'ne.
La royne blanclic comme un lys.
Qui chanto\t à voix de soroino.
(VlM.ON.)
Sa voix |iassail le ciianl de la sereine.
(Marot. Ualtadcx.)
...Sevenas... ha cors de femna, et cna de pef/sso, et ongfas
d'airjla. (Vices et Vertus, f" 23.) La sirène a corps de femme,
queue de poisson et serres d'aigle.
Sisara (^le clou de).
Sisara, lieutenant de l'armée de Jabès, roi de Chanaan, voyant
ses troupes vaincues par Déborah et Barach, se réfugia dans la
lente de Jahel, femme d'Héber le Cinéen. Elle parut le recevoir
volontiers, mais elle lui enfonça un clou dans la tète, pendant qu'il
dormait. {Juges, ch. 4 et 5.)
Cette histoire de .label perçant le crâne à Sisara, doit être
apocryplie.
Ce elou pointu, funeste a Sisara.
(VoMMIiK. P,l,-olln. II.)
Sisyphe, personnage mythologique.
Bâtit Corintlie, dont il fut le premier roi. Ses brigandages et ses
cruautés le tirent condamner, dans les enfers, à rouler perpétuelle-
ment une grosse roche ausommet d'une montagne, d'où elle retom-
bait aussitôt par son propre poids : et â la remonter de nouveau,
par un travail sans relâche.
D'où la locution : le rocher de Sisyphe.
440 SOI
— {> rocliei-, pour les sociétés asservies, c'est l;i liborlé. (Glais-
Hi/.oin, 18(58.)
Sobriquet, ('lymologie fort inccrtaiiit'. On \':\ l;iil venir de
res|i;iKnol .so/»Y/, sur, c'est-;i-dire .v/^r/îo/// ; on du lutin si/hridicu-
luni (sous-entendn nomen), nom ridiculisé.
Kpitlièto satirique ou ])urlesque, ajontée an nom. ra[)pelant
(pu'iqne défant |)liysiqnc ou moral dcTindividn, tels (pu; LillrclolTres.
nom (pic UalK'lais donne aux Allemands, [)arce qu'ils smiblenl,
quand ils parlent, ne dire autre chose.
De Tiberlufi Nero, on avait fait Biberius mero, ivrogne.
— On trouve dans la liste des rois des premières races, de
nombreux sobricfuets : Pépin le Bref, Charles le Chauve, le Gros,
le Simple, etc.
Soi, du latin .se.
— Etre soi : être original dans ses créations.
Mon verre est petit, mais je jjuis dans mon verre.
(A. DR .MUSS.ET.)
— Raphaël Sadeler, graveur en 1612, avait pour marque une
tortue, avec cette devise: Sub parro, sed nieo. Mon toit est petit,
mais il est mien.
Un poète du xiii'' siècle avait écrit sur la porte de sa maison :
Parvuius, sed avilus. Le domaine est petit, mais il vient de mes
pères.
Devise que le comte de Grammont avait traduite: « Si je suis
gueux, c'est de ma race. )>
— Pour soi. pourceau. (Yoy. égoïsme.)
— Chacun pour soi, chacun chez soi. On attribue cette phrase à
Dupin aîné. Il a dit en réahté : « Chacun chez soi, chacun son
droit » ; maxime éminemment protectrice du faible contre le fort.
{Moîiifeur, 7 décembre 1830.)
— Le dicton populaire : « Chacun pour soi, et Dieu pour tous »,
qui est la devise favorite des égoïstes, peut être aussi envisagé à
un point de vue honorable, comme signitiant que tout homme a
des devoirs à remplir dans l'intérêt de sa conservation personnelle,
et que Dieu, à son tour, veille également sur tous les hommes.
— La maxime que les Américains ne perdent jamais de vue dans
la pratique de la vie, est : Go a liead. Dieu pour tous, et que le
diable emporte le dernier.
SOI Vil
Soie, du latiii scia, provençal aede.
— La soie s'appelait aussi sericiun, de Scres, nom des Chinois,
du pays desquels on riuii)ortait à Rome, où elle se vendait au poids
de l'or.
— Hélioualinlc lui Ir pivniier ciiipcrenr (pii iioiia des lial)ils de
soie.
— Au vi« siècle, sous Jusliiiien, deux moines rapporlrrenl de
Chine à Conslantinople, des ulïuI's de vers à soie renfermés entre
les nœuds d'un roseau, et les firent éclore.
Pendant lon,uten)i)s la soie resta une rareté luxueuse, et Yopiscus
rapporte qu'Aurélien avait refusé à l'impératrice une rohe de soie,
à cause de sa cherté.
— En 1145. Hoper, roi de Sicile, ravagea la Grèce, et amena en
Sicile des ouvriers en soie, qui propagèrent leur industrie jusqu'en
Provence, à l'époque où la maison d'Anjou reçut l'investiture de
Naples et de Sicile.
— La ville de Lyon consomme annuellement un million de
kilogrammes de soie. La longueur du fil d'un cocon est en moyenne
de oOO mètres. Lyon met en œuvre, par an, une quantité de soie
produite par quatre milliards deux cents miUions de cocons, donnant
une longueur de 111 de deux milliards cent raillions de kilomètres,
soit quatorze fois la distance de la terre au soleil.
— La sériciculture est la culture de la soie.
— Jours filés de soie et d'or : vie heureuse.
Soif, du latin sitis, provençal set.
Tailla fan, tunla sel cl tan .soin.
(Bhrini.VM) m: Buu.n.)
(Sigrand'faim, si grand'soif et si grand sommeil.)
— Synonymes: avoir soif; avoir la pépie; cracher blanc.
— Beali qui esiununt et sitiunt justltiam ! {Ecnnglle.) Heu-
reux ceux qui ont faim et soif de !a justice !
— C'est la soif qui épouse la faim : union de pauvres diables.
— La soif de l'or, du pouvoir, de la vengeance.
— La soif est un besoin très impérieux, et qui fait endurer plus
de soulTrances que la faim; comme aussi il n'y a pas de jouissance
plus grande que de satisfaire une soif ardente.
On meurt plus vite de soif que de faim. Cela s'explique par la
chaleur de 30° que possède le corps humain, chaleur qui tend sans
cesse à vaporiser les divers fluides dont la circulation entretient la
442 S( IL
vie. cl liiiil |);ii' dôvclopiiri' une lir \ rc qui lin'ilc. si on ni^ renom elle
pas CCS liquides ;i niesui-i' qnils se l;ii'issent.
— AKérei', (-"est rendre ;nili'e, changer en mal, délniire : la soif
délrnii'ail la \ie.
Soirée, dérivé de soir, lalin scrutn.
— Dans une soirée chez M"'" Lncifer, on oITril aux in\ilés(ies
lilaces au ploiiil» fondu, des limonades au vilriol, des gâteaux à
l'arsenic, de Tcau de feu, le Vésuve en houleilles, et l'enfer distillé ;
les divans étaient rembourrés en baïonnettes et en lames de
rasoirs; un potage de vers solitaires fut servi...
Un démon d'une prodigieuse laideur, armé d'une fourche de fer,
conduisait les invités à une table couverte de draperies noires.
Sur les plats de ce banquet infernal élaient entassés des serpents,
des couleuvres, des tarentules, des lézards, des crapauds, des
chauves-souris, et d'autres semblables animaux, accommodés par
les cuisiniers de Pluton.
Ces mets étaient placés sur la table, à l'aide d'une pelle, par les
démons, tandis que d'autres suppôts d'enfer versaient à boire dans
des creusets, qui tenaient lieu de verres.
Au dessert, furent jetés sur la table, en guise de sucreries, des
ossements de morts. (Vasari, Vie de Ruslicia.)
(Yoy. burlesque.)
Sol, du latin solum: vient de solus, seul, comme soleil {^.).
On a dit sole., de solea. plante des pieds.
— Tota bestia cornuda ha las solas del pes fendudas. Toute
bète cornue a la sole des pieds fourchue.
Soldat. On a dit soudard, soldier.
— Synonymes (dans le langage familier) : ratapoil (mauvaise
part); culotte de peau; grognard, vieux soldat de l'Empire, ils
grognaient et murmuraient souvent, tout en se battant bien ; Jean-
Jean, jeune conscrit naïf; lignard, soldat d'infanterie de bgne;
officier de guérite ; tourlourou 0 oy-)
— Soldat du pape : mauvais soldat. En 1788, Le Duchat disait :
« Soldats du pape, méchantes troupes. »
Les compagnies de l'Flglise sont le déshonneur de la gendarmerie.
(Machiavel.)
Le promior nui fut roi fut un soldat lioureuv.
(Voltaire, Mérope.'
SOF. 443
— On (lit. on Franco, d'im i<Mino soldai, qu'il a lo liàton do, inai'ô-
rlinl dans sa gibenio. Los Laliiis disaiont : Cdlh/a ad ronsi/ladun
proihiriKs (Séoèque, parlant do Marins). La rali,i:a rtait la cliaus-
snro dn soldat.
— Soldats do (ortuno :
Aujrereau, duc do Gastigiiono. riail lils d'un liiiiioristo dol*aris.
Rt'i-nadotto. roi do Sncdo. lils d'un avocat do Pau.
liortliior, prince do Xoulchàlol, lils d'un portier.
Bcssière, duc d'Istrie, tîls d'un porrucpiior.
Bonaparte, empereur, tlls d'un liroflier.
.MuiMt, roi do Na^ilos. lils d'un auliortiisle.
— Ce qui toml'O dans le fossé est pour le soldai : llioinnie
soipnoux prolito do la né.uliaonco dos antres.
Ce provcrlie remonte à l'époque où les troupes n'avaient pas de
paie régulière, et où la maraude était autorisée.
Solécisme, oriiilno historique.
— On parlait fort incorrectement à Soles, ville de Cilicie.
Solécisme dési,i>na une faute de grammaire, de syntaxe, comme
celles dont étaient coutuniiers les habitants de Soles.
Soleil, du latin sa/ /eu fus, diminutif de sol.
— Synonymes : la cheminée du roi René ; cagnard, Ueu exposé
au soleil.
— Où le soleil n'entre pas, le médecin entre.
— Le soleil était remldome de Louis XIY, avec la devise : Tec
2}luribus im}iar.
Les Hollandais, qui étaient en guerre avec lui, avaient pris
reml)léme do Josué arrêtant le soleil, avec le mol : SUi.
— Adorer le soleil levanl. On est porté à se prosterner devant
les pouvoirs nouveaux, par un mélange de crainte et d'espérance.
— Coup de soleil, insolation. — Hans l'Inde, chaque rayon de
soleil frappe et tue. comme un boulot rouge. On dirait que l'antique
Apollon fait campagne dans le Nouveau-Monde, et qu'il épuise sur
les populations son carquois de Hoches d'or, i L(? Times.)
— Soleil de l'Itaho. — .l'aime à voir le soleil se coucher à Venise,
sûr qu'il se lèvera demain, non pas débile et clignotant dans le
brouillard, comme l'œil morne d'un ivrogne qui geint, mais avec
tout le ciel pour lui seul, sans que le jour soit forcé d'emprunter sa
lumière à ces lampions d"un sou, qui se mettent à trembloter
444 S( )\I
quand Londres ronfiiniL'O fait lioiiillii' son cliaudron troiililc (Lord
H y l'on, lit'ppa.)
Solitude, du latin soUliido.
La solitude était prolondo,
Sï'loiidant pailout à la rondo.
(La KoMAlNE.)
Sologne, en latin segnlonla, d(i scfjdlu, seigle, céréale, dont le
[lays iii'odiiil grande abondance.
— Niais de Sologne : faux bonhomme. (Voy. nuiis.)
Les Solognois, sols à demi,
Qui se trompent à leur profit.
Dorvigny a fait pour le théâtre de la Monlausier, une pièce
intitulée : le Niais de Sologne.
Solstice, du latin sohtiliuin, do sol et stare.
Temps de l'année où les jours sont le plus longs ou le plus
courts. C'est l'époque à laquelle, deux fois par an, le soleil, arrivé
à son plus grand éloignement de l'équateur, semble pendant
quelques jours y être stationnaire, puis revenir sur ses pas. C'est
à partir du solstice d'hiver (23 décembre) que les jours croissent,
et à partir de celui d'été (21 juin) qu'ils diminuent, pour notre
hémisphère.
Sommation respectueuse.
Accouplement de mots inconciliables : rien n'est plus opposé au
respect qu'une sommation, l'action la plus rigoureuse, la plus irré-
vérencieuse. Ces requêtes des enfants majeurs, qui veulent se
marier malgré leurs auteurs, ont reçu le nom d' « actes respec-
tueux ». On notifie ces actes, on ne les signifie pas.
Somme (bête de), du grec sagma, devenu sauma.
En provençal, une ànesse s'appelle sauma.
— Assommer : frapper comme sur une bête de somme.
Somme, du latin summa, le point le plus élevé.
Sommeil, aussi sonune, de somniculus.
Divinité allégorique, fds de l'Érèbe et de la Nuit, et père des
Songes. Il est représenté endormi dans un antre profond, dont
l'entrée est obstruée de touffes de pavots et autres plantes somni-
fères. Les Songes voltigent autour de lui, et Morpliée, son principal
ministre, entrelient un éternel silence dans cette obscure demeure.
SON 44o
Sommelier, de sagma. puis aauma. provision, rlinraes.
Ollicirr clwiiui'' de la cave, et d'aliord de tous les approvisionne-
ments de la maison.
— Sommelier, iiarde-nons dn sommeil.
Arûus avoyt cent yenlx pour voir, cent mains tant an sommelier,
comme a\ait Hi'iai-rt'. poiii- inlali'jalilcinenl verser, (lial)eiais, I, 'J.)
Somptueux, du latin aumplus, dé[)ense.
Appartement somptnenx. repas somptueux.
D'où aussi somptuah^e : lois sompluaires.
Son, dans les langues germaniques, signifie (ils, et a servi à
composer nu grand nombre de mots, tels que : Hohertson, Nelson,
Hohinson : nourrisson, enfant nourri par sa mère (ou par une
noiiri'ict' :, : clianson, le produit du chant (ou plut(U celui de
raniioiicm) : polisson, renfant des villes, des rues, plus vicieux
que ceux de la campagne (à moins que ce ne soit celui de la
police ?).
— En provençal, on ai)pclle les jumeaux bcssons, c'est-à-dire
deux fils, deux enfants.
Sonate, de Titalieu sonala, du latin sonave.
Composition instrumentale formée de trois ou quatre morceaux
de caractère dilïérent : allegro, adagio, rondo...
Ce genre de composition, qui a eu jadis une grande vogue, est
aujourdliui abandonné.
— « Sonate, que me veux-tu ? » s'écria un jour Fonlenelle, dans
un transport d'impatience et d'ennui, causé par les éternelles
symphonies des concerts.
Foutenelle n'aimait pas la musique, à ce qu'il parait. Trop amou-
reux de lui-même pour partager ses affections, c'est avec soin qu'il
évitait toutes les émotions de nature à troubler l'équilibre de ses
heureuses facultés. « Je n'ai jamais fait ah ! ah ! » avouait-il: ses
yeux ne furent jamais mouillés de larmes, et son égoïsme conser-
vateur le mettait à l'abri de toutes les langueurs de l'âme et des
énervements de l'amour.
Dans quelle occasion lit-il entendre cette phrase devenue célèbre ?
C'est proI)al)lement dans un salon où l'on se préparait à entendre
quelque virtuose, que, forcé de changer son rôle de causeur
brillant et écoulé, contre celui d'auditeur muet et attentif, il aura
laissé échapper: «Sonate, que me veux-tu?» (Voy. Kastner,
Parémiologie musicale.)
446 son
Songes, (lii hitiii .so/miiiu/i. Ku [)ro\(Mi(;;il, sonya^a dit ixuiUiUh.
du jii'cc pliiinlasmn (?).
— Knfants du Souiuieil, les Soujios étaient aussi nombi'oux que
les sahles de la nier. Il y en avait trois principaux : Morpliée,
Pliohétor et Pliantase.
— Macrohe (Songe de Scipion, liv. I) dit que les son.ues faux et
confus viennent par la porte d'ivoire, et que les soupes vrais et
clairs viennent par la porte de corne, qui est transparente. (Voyez
Virgile, Enéide, VI.)
— Songes, mensonges. Beaucoup de personnes ne le croient pas,
et pensent trouver la vérité dans l'interprétation des songes. Ce
préjugé des esprits faibles est même exploité etlVontément par des
charlatans qui abusent de cette ridicule crédulité.
Sonneur, dérivé de sonner, latin sonare.
— Boire comme un sonneur. (Voy. tire-Iarir/ot.)
Il semble qu'on devrait dire plutôt : boire comme un saunier,
parce que le sel altère.
...Ponocrates remonstrant que c'estoyt mauvaise diète, ainsy
hovre après dormir, c'est, dit Gargantua, de ma nature, je dors
salé. (Rabelais.)
Sopha, de l'arabe ro(]'ah.
Sorte de lit de repos à dossier, dont l'usage a été introduit en
France au wiii^ siècle. Il a la même patrie que les mots divan et
ottomane, qui sont aussi des sièges orientaux.
Sophisme, du grec sophisina.
Raisonnement captieux, ayant l'apparence de la vérité.
D'où aussi : sopliiste, sophistiquer.
Soprano, mot italien, de sopim, au-dessus.
La voix (pi'on appelait autrefois dessus ; c'est la plus élevée de
toutes.
Un castrat, par euphémisme, s'est appelé sopu^ano.
Les soprani sont des femmes, des enfants ou des castrats.
Sorcier, du l)as-latiu sortiarius. qui jette des sorts, ou qui
prévoit l'avenir.
— Le sorcier dil'fère du magicien, en ce qu'il est de plus bas
étage, et ne fait que du mal. On supposait que les sorciers avaient
fait un pacte avec le diable, pour opérer, par son secours, des
prodiges et des maléfices.
S( )K 447
Ail Moyen-Auo ot loiiLitcmiis .'iprt'S, ils (''titioiit hrùlés \il's. P.iniii
les \i(liinos les plus déplui'iililes do celle superslitioii, on peut citer
Jeanne d'Arc, U. Grandier, et la maréchale d'Ancre.
Les accusations de sorceller'ie cessèrent d'èlre admises par les
tribunaux, en France, en iG7^ ; mais la croyance aux sorciers et
aux sortilèges existe encore dans quelques campagnes.
— Les sorcières, vieilles femmes hideuses, représentaient les
Krinnyes do l'ancienne Grèce (?).
Sornette, du vieux verho sonwr. Quelques-uns le font venir de
serolina [fabula), conte du soir, conte de la veillée.
De là : conte à dormir debout.
Dites, je vous pi'y, sans sorner.
(Patelin.)
Sort, du latin sor>i. sortem.
— Le sort en est jeté : Aléa jarta est, c'est-à-diro le dé. Mot que
prononça César quand il eut pris le parti de franchir le Rubicon
(voy.), pour marcher sur Rome.
De là est venu aléatoire.
— Synonyme : risquer le paquet i^trivial).
— Faire un sort à quelqu'un : le mettre dans une situation aisée,
fortunée.
Sor.<i avait la même origine que fortuna.
...Delille fait un sort à chacun de ses vers, et néglige la fortune
du poème. (Rivarol.)
De sorte mine renio in dahinm.
(TKliRNCE.)
(.le commence à craindre pour mon argent.)
Periil sors cl usuni.
{Pi.M-n:.)
(J'ai perdu capital et intérêts.)
Le sort, l'usure et les intérêts, je pardonne ; je me contente des
dépens. (Rabelais, IH, lo.)
Ne réduysant rien du sort princi[)al. (A/, lll, Ti.)
L'abbé de Marsy, commentateur do Rabelais, n'a pas vu la signi-
llcation de sort, et l'a traduit par fond, disant que sort n'avait
aucun sens. Johanneaii dit, au contraire, que sort est le mot
propre pour les bénéfices du clergé, puisque les mots tierr, clergé,
viennent du grec kléros, sort, héritage.
448 SOT
Sortir, du l;iliii sorliri, loiiilicr en piirtii^io.
(In (lisiiil .iiitrclois /.s-.s7/% doiil il n'est resté que insu, haur.
— Sortons ! S(3 dit on |)l;iis;int;inl. ponr simuler nno provocation.
Le comte de Cliarolais ayant snrpris M. de IJrissac chez sa
inaiiresse, Ini dit: « Sortez, monsieur! — Monseigneur, répondit
le (Inc. vos ancêtres anraient dit : Sortons ! «
Sot, transposition des prcMnières lettres do slolidiis: ou bien
pliil(")l du has-lalin sollus. du syriaque achoteh. Anciennement
solicH. a désigné certaines pièces houllonnes.
— Synonymes : sot en trois lettres, sot cramoisi, sot comme un
panier.
Molière, dans les Fanmes savantes, a créé le mot Trissolin,
qui signitie triple sot. Rabelais (I, 15) avait fait le mot Itassoli,
douI)le sot.
— Sot-l'y-laisse ; morceau très délicat que le fin gourmet ne
dédaigne pas, le croupion d'une volaille.
— A sot auteur, sot admirateur.
...Ainsi qu'en sots auteurs.
Notre siècle est fécond en sots admirateurs.
(Boii.EAi;.)
Un sot trtjuve toujours un plus sot qui l'admire.
(Boii.HAu, Art poi'-tique, I.j
Niillus est tam Imperitus scriptor, qui lectorem non inventât
similem siii. (Saint Jénune.)
— C'est un sot on trois lettres : un sot fielïé. Plante se servant
du même jeu de mots, dit d'un voleur (fur) : Homo triiun litte-
j'oruin.
...Vous êtes un sot en trois lettres, mon fils ;
C'est moi qui vous le dis, (jui suis votre grand'mere.
(Molière, TaAuffv. I, 1.)
— Tbéodulfe, évêque d'Orléans, au ix-^ siècle, disait de Jean
Scot que, dans son nom, la lettre c était une faute d'ortbograpbe,
qu'il fallait la retrancher.
Un sot savant est sot plus (pi'un sot ignorant.
(MouÈiiE, Femmex snvantes.)
La nature fait les bêtes, la société fait les sots.
— On n'est pas nécessairement un sot pour avoir dit ou fait une
sottise ; mais on l'est deux fois quand on cherche à la justifier.
La Rochefoucauld a dit qu'on était quelquefois sot avec de
l'esprit, mais jamais avec du jugement.
sou 419
II n'y ;i point dt» sols si iiicomiiiodos qiio conx (|iii oui de ros|irif.
{\.n Hociu'i'oiirjiiild.)
— Le prince des sots était le cliof de la compagnie des Sois qui
jouaient des pièces appelées soties.
Il est possible que sof ait élé dit par coi'i'uption pour s/m/, parce
((ue les danses et les sauts ('■laicul Icui's principaux exercices (0-
Sou, anciennement soi, qui se dit en provençal; dulatin .vo/<^/w.s-,
qui si»niliait, à Rome, toute monnaie considérée comme matière,
et non divisée en fraction. Le solidus était l'unité monétaire, et la
vingtième partie de la livre de conqite.
De là aussi : solder, soldat, soulte, soudoyer, et le rouiau souda-
(h'iru, prostituée.
— L'usage du mot sou. comme monnaie de compte, s'est main-
tenu dans les petits nombres. On dit même encore : cent sous,
pour cinq francs.
— N'avoir ni sou ni uuiille. (Voy.)
— Perdre jusqu'à son dernier sou.
.1(/ asscin oiiDiia perderc.
(UoilAC.K.)
Soubrette, origine inconnue, tradiu^tion de l'italien ruffJanella.
(Odin , Dict ion n a ire.)
En espagnol, sobretarde, sur le tard, à la brune.
C'était autrefois la servante entremetteuse qui, vers le soir, allait
porter les billets doux.
Souci : l^^ de solser/uiufn, vieux français soulcie. On l'appelle
aussi cafendu/a et inétéorine, jtarce que ses fleurs s'épanouissent
aux rayons du soleil, et se ferment quand l'astre disparaît.
Souci est formé comme tournesol (en roman giraflor) et
héliotrope.
— Cette plante est remblème des chagrins, par suite de la
ressemblance de son nom avec
Souci : 2^ verbal de soucier, latin soUiriiare, causer de l'inquié-
tude.
— Avoir du souci : avoir martel en tète.
Sans-souci : bon vi\ant, Hoger-Bontenips.
Soucieux, mélancolique, encolillucbeté (Rabelais).
— On dit d'une petite contrariété : C'est le cadet de mes soucis.
Il serait burlesque de retourner l'expression, et de dire : ...l'aîné
de mes soucis, pour un grand chagrin.
29
450 SOU
Il y a une foule de petits Soucis volli-iCMiits. (jui \it'iiiH'iit cliMfjue
iiKilin ;'i M)lre iVncil, et qui ne vous qiiillciit plus ([iic le soir.
(Féiieloii.)
Souffler, (In l;iliii su/'/hu'e, de suit et [hire.
— Soufder le diaiid et le fi'oid : dire du bien et du in;il d'une
même chose.
Avrirro coiix dont la Imhu-Iic
Souffle le cliaiid cl le froid.
(I.A l'oNTAlNK.)
C'est V/tonio bUuujuis de l'Écriture.
Je suis oiseau, voyez mes ailes.
Je suis souris, vivent les rats !
(La Fontaine.)
Soufflet. Coup applique sur la joue avec la main.
Synonymes : giflle, .airoflée à cinq feuilles, mornifle, revers de
main.
— Si quelqu'un vous donne un soufflet, présentez l'autre joue.
(Mathieu, V, 39 : Luc, YI, 29.)
— Un démenti vaut un soufflet : un soufflet vaut un coup d'épée.
Le soufflet est regardé chez nous comme une injure grave,
sanglante, parce qu'il n'y avait autrefois que les vilains qui
combattissent la face découverte et pussent être frappés au visage.
Souffleter un gentilhomme, c'était donc le traiter en vilain.
— Dans l'antiquité, quand on achetait un esclave, on en prenait
possession en lui donnant un soufflet.
Ce n'est que dans le sang qu'on lave un tel outrage.
(CdliNEII.I.E )
— Donner un soufllet à Ronsard, c'est parler mal le français,
parce que Ronsard a été une autorité.
— Aulu-Gelle parle d'un certain Lucius Yéranius, Romain très
riche, qui se faisait suivre d'un esclave porteur d'une bourse pleine
d'argent. Lorsqu'il rencontrait quelqu'un qui lui déplaisait, il lui
donnait un soufllet, puis lui remettait vingt-cinq sous, prix fixé par
la loi des Douze tahles pour la réparation de cet atïront.
— Soufflet à feu : la petite maison d'Éole. (Dictionnaire des
Pî'édeuses.J
Souffre-plaisir devrait s'employer, aussi bien que souffre-
douleur, pour désigner certains états, qui obligent ceux qui les
exercent à se rompre le cou ou à se briser le cœur.
sou 451
Tels sont racrolialo, qui risque tous les jours sa vie pour amuser
la foule ; et l'écrivain, qui torture son esprit pour la faire rire.
Le plailiateur conilialtait aussi pour le plaisir du peuple ; il
s'etïorçait de louilior aNcc uràrr. et, après sa mort, tout était dit.
Aujourd'hui, ou uc meurt [ilus sur la scène : le supplice dure toute
la vie.
Souffrir, du latin mifferre, supporter.
Syuonwnes : aller au [)aradis par la voie étroite ; souffrir comme
un martyr, le martyre.
Quod est fcrcndum, feras.
(Tkuk.nck, Phormion, II, o.)
(Souffre ce que tu ne peux éviter.)
Feras, non culpes, quod vitarc non potes.
(P. SVRUS.)
Le mieux est de soulfrir ce qu"on ne peut empêcher : Optimum
pâli quod emcndare non possi.s. (Sénèque, Epdre 107.)
— Veux-tu des œufs ? Soufire le caquetage des poules. (Proverbe
allemand.)
D'une lionne vache à lait on peut bien soulfrir quelques coups de
pied. (Proverbe indien."^
Souhait, de soua et du verbe français haitier.
— A vos souhaits ! (Voy. hénUae.) En latin ave.
Oncques souhait n'emplit le sac.
Les souhaits ne sont que des placets que la folie de l'homme
présente au Destin, et auxquels il fait si peu d'attention, qu'il ne se
donne pas la peine de les lire. (Fénelon.)
Jksine falu deinn flecli sperare precando.
(ViiiciLK, Enéide )V, 37G.)
(N'essaie plus de tléchir par tes prières les divines destinées.)
Si tous nos souhaits étaient exaucés, il n'y aurait plus d'espérance.
(M. de la Palisse.)
Si les chats avaient des ailes, il ny aurait plus d'oiseaux dans les
airs; si chacun avait ce qu'il souhaite, qui aurait encore quelque
chose ? (Herder.)
Si j'avais un souhait à faire, ce serait de n'avoir rien à souhaiter.
Souhaiter, dérivé du précédent : rendre joyeux.
Dans riUe-et-Vilaine, on dit encore liaifer, pour plaire.
Je bois à votre hait : à votre santé.
— Je ne le souhaiterais pas à mon plus mortel ennemi !
452 SOU
Lii'c limviiio, (Milciidrc iiiiê Irajïédie, iii.il dînci'. \()il;'i co (|iie je
iKî S(jiiliailo pas à mes omioinis. (Rivnrol.)
— Je vous eu soiiliaile! iMirase ironique, adressée à ceux (|ui
cherchent l'impossihle.
Vous voudriez bien un logement de 500 francs sur les boulevards?
Je vous eu souhaite !
Souillard, vieux mol, terme de mépris, dérive de mouiller,
peut-être de soiti//e, sucala, dérivé de sus.
13our])ier où se vautre le porc: siiile, étahle à porcs.
De là est venu souillon, servante malpropre.
Gens dignes d'être soiiillards de cuisine. (Saint François de Sales.)
Soûl, anciennement saoul, du \alin satiillus, diminutif de salu}\
rassasié ; provençal sadol ; de là : se soûler (s'enivrer).
Des laros paternels un jour se trouva soûl.
(La FoNTArNE.)
Soulier, du latin solarlns, dérivé de solea.
— Au classique cothurne des Grecs, succédèrent chez les Romains,
le calceus, qui ressemblait beaucoup à notre soulier: et la sandale,
solea, qui garnissait seulement la plante des pieds, où elle était
fixée par des courroies ou lanières de cuir. La chaussure militaire
était la caliga, botte ou guêtre, garnie de clous.
Au Moyen-Age, les souhers dits à la 7>o?</f/m^, terminés en pointe,
furent en grande faveur. Sous Philippe-Auguste, une ordonnance de
1367 interdit en France cette chaussure.
En Russie, le peuple se sert de chaussures d'écorce.
— Il sait où le soulier le blesse.
Paul-Émile, patricien romain, avait pour femme Papiria, belle,
jeune, riche et honnête. Il la répudia cependant. Comme ses amis
s'en étonnaient, il leur répondit en avançant le pied : « Regardez
mon soulier ; il est bien fait et très élégant, mais il n'y a que moi qui
sache où il me blesse. » (Plutarque, Vie de Paul-Émile, ch. Ylll.)
— On dit aussi : trouver chaussure à son pied, et : être dans ses
petits souliers.
Cicéron dit: calceos niutare, pour: changer d'état.
— Synonymes de souliers larges : bateaux, boites à violon.
Souliers trop étroits : souliers seize (13 et 3).
Vieux souliers : gâteaux feuilletés, pompe aspirante, reniflants.
On les appelle aussi, en argot, philosophes. « Serait-ce, dit
Francisque Micheb parce qu'au métier de philosophe il n'y a que
sou 453
do l'eiiii ;'i hoii'o? Jo cnMs (jiio c'est pliit(U à cause do l'analogie
plioniqiiode sfinifc ot do sarfiiif, qui, ciioz le peuple, est synonyme
de pliilostqjlio. I
On appollo oucoi'o souliers di\-liuit. des souliers racommodés. Ils
sont deu\ l'ois luuifs.
Le fahi'icaut de di\-liuil s'appelle rihoni.
— C'est un faiseur de vieux: souliers : un faiiiéaut.
— Raltelais (I, IG) joue sui* le mot soulier.
il no f;nit |):is roiniilci- sur les souliers d'un mort. (Voy. mort.)
Soulte, du l;iliu suf/iis, pour solutun, payé,
l'aieiuout que l;iil une personne pour compléter la valeur d'un
objet échantié contre une autre \aleur supéiicurc.
Soupçon, du latin sicspicio, siispicionem.
oiik'uiniuc C3t soupçonneux, invite à le trahir.
(VoLTAiiit:, Zàire.)
Soupe, du .aerina nique i^nup, allemand suppe.
— L'Académie confond à tort dans une même acception soupe
et potage ; potage (ÛQ pol(irc?) est un terme générique, de tout
aliment liquide, spécialement confectionné avec des légumes ; tandis
que soupe ne se dit que d'un potage au pain.
Sojta, en espagnol, est une mince tranche de pain.
Au xv« siècle, soupe n'avait pas chez nous un autre sens.
Le ti'ouvère Cuvelier dit (pie Duguesclin ne prenait liabituelleuuMit
dans ses repas qu'une tranche de jtain (soupe) trempée dans du vin.
Ne a lalili- sisl por son rcpastement,
t'oi-s une SDiiiii' en \in pivadre liastenient.
— L'étiquette voulait autrefois qu'on présentât au nouveau roi
d'Espagne trois soupes dans un gobelet.
Tallemant des Réaux (tome Y des Historiettes) parle d'un potage
où il n'y a\;iit ([iie deux pauvres soupes qui couraient l'une après
l'auti'o.
...Tripet... lumbanl rendit plus de quatre potées de souppes, et
l'anme meslée parmy ces souppes. (Rabelais, I, 35.)
— Plus ivre ([u'iine soupe ou une éponge. (Proverbe espagnol,
wi*" siècle.)
— L'Académie cite les locutions : ivre, mouillé, trempé comme
nue soupe, qui peuvent bien s'apiiliqiier à du pain trempé dans un
liquide : mais comment oxplitpier : iM-e comme un potage ?
Les expressions: tailler, tremper une soupe, sont aussi des
454 SOU
preuves que le mot soujio ne s'applique qii;'i un mélange de pain
avec un liquide ; que, par (-onséquent, il n'est pas logique de dire:
soupe de légumes, de vermicelle.
— Soupes de prime (Rabelais, V, 7): soupes mangées à l'heure
de prime, qui est la plus matinale. Rabelais les vante et les appelle
« grasses », parce qu'elles sont trempées avec le premier bouillon.
Les autres, qu'il appelle « soupes de lévrier », sont ainsi comparées
à la pâtée des chiens, à cause do l'eau qu'on a dû ajouter au pot-au-
l'eu.
Souper, dérivé du précédent, l)ien plutôt que de sopire. endor-
mir.
Repas du soir, qui doit être très léger, surtout pour les vieillards.
Comme l'indique son nom, il ne devrait consister qu'en une
soupe.
— Qui veut vivre sain, dine peu et soupe moins. Ce proverbe
liygiénique est un de ceux que, dans la pratique, il ne faut jamais
oublier.
Un célèbre médecin disait : « Un n'est jamais venu m'appeler la
nuit pour un homme qui n'avait pas soupe. »
Les Espagnols disent que celui qui vole le souper d'un vieillard,
lui rend un véritable service.
Ex magna cerna slotnacho pi nui. rima jnrna :
Ul .ns nocte lei'is, sit tibi aena brecis.
(École (le Salerne.)
Uinons peu et ne soupons guères.
Et nous vivrons plus que nos pères.
— Le souper était autrefois le principal repas: l'heure a varié
de 0 heures à minuit.
Au xviiie siècle, les soupers eurent beaucoup de vogue ; ils
avaient lieu de nuit, et s'appelaient « petits soupers ».
Soupir, du latin suspirium.
Les enfants de l'air. {Dictionnaire des Précieuses.)
— Pousser un soupir à renverser les meubles. (Comte de Forbin.)
Soupirer comme un soufflet de forge.
Cette grosse femme poussa un soupir à fendre du bois.
Cette aimable dame poussa un long soupir, comme si elle venait
de s'éveiller. (Boccace, Décoméron.)
— Cœur content, soupire souvent. Cœur qui soupire, n'a pas ce
qu'il désire. Proverbes contradictoires.
sou 4oo
Souple, (lu l;i(iii si//)ji/<'.i': ;iiici('ii fr;inr;iis siijifu/cr, être souple.
Soiiplo comme un L:;ml. ...coinine l'osier, ...coiiim»^ une couleuvre.
Cohihrino inijenio (IMaute) : d'esprit souple.
AuricK/a /ii/iina Nio//ior (Ckèvon): plus souple que le lias de
l'oreille.
Souquet, du latiu super tjita {>.).
La lumuc uu'surc : la l'éjouissauce que le liouclier ajoute pour
l'aire Iréituclier la halance.
Source, de raucieii participe de sourdre (sursiun), doublet de
sur;/ h-, laliu surycrc. provençal sorger.
Sourd, du latiu sunlus, de sordes, ordure: comme si l'on avait
les oreilles bouchées par des ordures.
— Les sourds de naissance sont en même temps muets, non par
suite de l'imperfection de l'organe de la parole, mais parce qu'ils
n'ont jamais entendu parler.
— Sourd comme le destin. ...comme un pot.
— On appelle, par extension, bruit sourd, un bruit voilé : Cœcum
murmnr. (Virgile.)
— Jouer en sourdine : avoir un caractère sournois.
Ou (lit aussi : une douleur sourde.
Souricière, de souris, latin sorex, soricem.
Au llguré. piège tendu parla police; lieu surveillé par des agents;
tapis franc, fréquenté par les voleurs et les repris de justice.
On appelle aussi souricière le dép(")t des prévenus, à la préfecture
de police.
Souris. (Voy. le précédent.)
— Souris qui n'a qu'un trou est ltient()t prise.
Moult a souris povre recours
Et on içraïuj péril la drugo (fuite).
Oui M'a (ju lui perlais à refuge.
[Roman de la Rose.)
Qudsi fiorc.t: Itodie pcrii !
(TtRE.NCE, Eunuque, V, 7.)
(Je suis pris comme une souris.)
La montague eu travail eafanle une souris.
(La Fontaine. )
Parlarienl inonles, nuscctur ridiculus mus.
(HOPACE.)
456 SPH
Souvenir, du lilin suboenire.
— Il m'en soii\iciil aussi pou fjiic de ma première (■iiemisc.
Ma foi, s'il inCii soiiNitiil, il ne iii"en soiivioiil }<iièrc.
(Tll. CoiIXEll.l.K.)
Souvent, du lalin si/h/nde, successivement: provençal, soren.
Spadassin, de l'italien spadaccino, brcUeur ; de s/iadn, épéc.
Synonyjues : hi-elleni', duelliste, gàte-cliair.
Spadassin à gages : assassin, bravo, chevalier du poignard.
Spécifique, du latin species.
Se dit des médicaments qni ont une action spéciale sur un organe,
qui guérissent une maladie particulière, comme le quinquina qui
est nn spécifique contre les lièvres intermittentes.
Spectacle, du latin spec/aculum, de spec/are, regarder.
Au même radical se rapportent : spectre, spéculation, suspect,
sceptique.
A Rome, on appelait les gradins du théâtre spectaculu.
— Du pain et des spectacles! Panem et circenses.
Cette maxime politique était souvent citée par Aurélien, qui
croyait les deux choses nécessaires pour maintenir le peuple dans
la soumission. Il disait aussi qu' « il n'y avait rien de plus aimable
que le peuple romain quand il était bien nourri ».
Spectateur solitaire. Amateur de spectacles, qui, pour payer
moins cher sa place, entre au théâtre dans les rangs de la claque,
sans être obligé de claquer. (L. Larchey.)
Spectres, figures fantastiques, fantômes qui, dit-on, rappellent
les morts tels qu'on les a connus pendant la vie.
Cette croyance superstitieuse remonte au paganisme.
Sphinx, du grec sphiggo, serrer, étrangler.
Animal fabuleux que Junon créa pour se venger des Thébains.
Il proposait aux passants des énigmes, et les dévorait aussitôt, s'ils
n'en donnaient pas l'expUcation.
11 proposa l'énigme suivante à OEdipe, qui la devina : « Quel est
l'animal qui, le matin, a quatre pieds, deux à midi et trois le soir? —
C'est l'iiomme. »
— Le sphinx d'Egypte, au buste de vierge perdu dans les reins
puissants du lion, était le symbole de la religion, à cause de l'obs-
curité de ses mystères. Par l'asssniblage de la tète humaine avec le
STA 457
corps du lion, il siLiiiilhiit l;i force inoralc iinio ;'i la (orce physique,
et e\|iriiiiait ainsi l'idre (b» iiiaitrc et seigneur.
Spiritisme, du latin spiritus, esprit.
Croyance à l'intervention surnaturelle des esprits, qui pourraient
être évoqués par certains individus appelés médiums, et répondre
à toutes les (piestions qu'on leur adresse.
Spleen, mot aiiulais venu du ,urec splen, rate.
Sorte d'hypocondrie profonde, qui consiste en un état de consomp-
lion engendré par la mélancolie, et caractérisé par la tristesse, le
dégoût de la vie et de toute ciiose.
Son uoni vient de ce qu'on a placé longtemps daus la rate, la liile
noire, qui, disait-on. en réagissant sur le cerveau, déterminait les
accidents de tristesse.
Cette théorie, que Cl. Bernard a expliquée, sinon rélialiilitée, était
vraie en principe, dans ce sens que le plaisir causé par des émo-
tions douces et agréables, est le remède souverain du S[)leen, et
s'exprime encore par l'expression familière : se faire du bon sang.
Passant, ci-git Rosbif, ûcuyer,
Le(iiii;'l mtiiu'iil pDiir se drscnnuycr.
(Kj)itai)he d'un Anglais.)
Stabat, mot latin.
Pi'ose célèbre qui commence par ces mois : Stabat mater dolo-
rosa. Elle séchante le dimanche delà Passion, au salut, et rappelle,
dans un style plein de mélancolie, les souffrances de la Sainte-Vierge
pendant le crucifiement de son tils.
Le Slabat est attribué au pape Innocent 111, et. avec plus de pro-
babilité, au frère Jacopone Todi, moine franciscain, au xiv' siècle.
Le Slabat a été mis en musique par les plus grands maîtres, tels
que Pergolése, Hœndel, Bossini.
Statistique, du grec staticein, constater ; plut()t que du latin
status.
Moreau la définit : « La science des faits sociaux exprimés par des
chifires ; science dans laquelle on étudie un pays sous le rapport de
l'étendue, de la population, de l'industrie, etc. »
Ce mot est récent, et date de 17(58, quoique la chose fût pratiquée
déjà avant cette époque.
— Un décret du l''' janvier 1852 a créé dans cliaque chef-lieu de
canton, une statistique, dont les travaux sont centralisés au Minis-
tère de l'Intérieur.
4o8 STi:
Statue, (lu l-iliii slalua. de slahio, ('•lo\or.
— C'csl iiiic licllc st;itii(' : iiiic licllc personne. s;ins esprit.
JiL'lk' lèk', ...iii.'iis (le cervelle iKiint.
|f. \ l'o.NrAINK.)
Immobile coinnic une statue, ...conmie ini terme.
Liijiis (jiiiil sliis y
(■I'kiikmje).
Muet cninuie nue statue. (Voy. ro/ossc]
— La calliédrale de Milan contient 0.700 statues en juarjjre.
(Th. Gautier.)
Statu quo, mots latins, employés pour signifier qu'une chose
reste dans le même état qu'auparavant : in eodem slatn, (juo nnte.
Steeple-chase,mot anglais, àQ.sieeplc, clocher, et fA«it', chasse.
Course à cheval, qui se fait en aUant à travers champs, vers le but
indiqué, en franchissant toute espèce d'obstacles : haies, buissons,
fossés, cours d'eau.
Stellionat, du latin sit'lliondius,' fourbe ; de slellio, lézard
tacheté, qui se dissimule ou change aisément de peau...
Fraude qui consiste à veudre la même chose à deux personnes: à
faire un paiement avec des deniers qui ne vous appartiennent pas ;
à substituer une marchandise à une autre; à vendre ou à hypothé-
quer une chose dont on n'est pas propriétaire.
Stentor, origine httéraire.
Un des guerriers qui allèrent au siège de Troie. Sa voix, plus écla-
tante que l'airain, faisait plus de bruit, à elle seule, que cinquante
hommes criant ensemble. Elle servait de trompette à l'armée des
Grecs. (Iliade, V, 785.)
Stoitorc daiiiosior.
(JuvÉ.NAi., Salire, XUI.)
Stentor n'eust oncque telle voix à la bataille de Troye. (Rabe-
lais, 1, 23.)
Stercoraire, du latin slercus, stercoris, excrément.
...Les populations stercoraires de toutes les grandes villes d'Italie
et du Levant... Certaines villes du Midi de la France sont aussi
peuplées de stercoraires humains.
L'homme, animal stercoraire, qui dépose ses ordures dans tous
les coins des rues et des maisons.
Stérile, du latin slerilis.
stipuler, du latin s//j)n///. paille, de sf/po, foider, oiiilialler ;
nialière d'emNallaLio. dOi'i sfi/jia, é[ou\)G, s fip/ùjue, qui constipe.
— Sn'pi(/i'>\ (■"était spécialement lier deux personnes dans les
conclusions d'un niarclié, en brisant une paille dont cliaque inté-
ressé gardait un morceau.
Pecunia siîpulnfa (Gicéron) : somme convenue.
Font meirat al nosfre senJior, et feront la pahnada po'
fevnm stipulât lo de rot. {Vices et Vertus.) Font marché avec
notre sei.uneur, et frappent la paumée pour ferme stipulation de
promesse.
Stock, mot aniilais, to stoclc, emmagasiner.
Huantité de marchandises qui reste en entrepôt, dans un dock ou
dans des magasins générau.x.
Stoîque, étymologie historique, du grec stoa, portique, galerie
cou\erle, parce que Zenon, chef de cette secte, enseignait sous un
portique.
Stoi'cien, celui (pii professe le stoïcisme, doctrine dont la hase
est une morale très sévère.
— Courage stoîque. La devise des stoïques ou stoïciens était :
Sustine et abstine : soulîrir et s'abstenir.
Zenon se coupa la langue avec ses dents, et la cracha au visage
du tyran Xéarque, contre lequel il avait conspiré, et qui voulait le
forcer, par la torture, à dénoncer ses complices.
— Plutarque compare les stoïciens, à cause de leurs vertus
outrées, à des enfants qui tâchent de sauter au-delà de leur ombre.
Les stoïciens sont des fanfarons de morale.
Stratégie, du grec stratèges, général d'armée.
L'art de diriger les armées.
De là viennent aussi : route stratégique, stratagème.
Stupeur, de stupor, de stupeo, être engourdi.
Stupide a la même origine : interdit, immobile de frayeur.
Je (icmcuro slupidc...
(Cori.NKlLLE.)
A pris le sens de sot.
Style, du grec stulos, par le latin slijlus, poinçon aplati à une
extrémité. La pointe servait à tracer les caractères sur des tablettes
460 STY
de cire; l'extrémité aplatie, à les efTacer. De l;i l'expression atyliim
verlere, retourner le slvle, elïacer.
Sii'jte slijlnm vcrUis ..
(H()Ii\i;k, Salirex I, X. 72.)
— Le style est le vèteineiil de l'idée.
Le style, c'est l'honiine même. (Bull'on.)
— 1" Synonymes.
Style alTecté, emphatique, l)Oiir.-^on(1é, ampoulé : Pliœbus.
Grands mois: [jliraséoldiiie i)()iiip(;iise.
Un air de lla.ueohît joué siii- Topliicléide.
Exemples. — Il existe un [)oéme intitnlé : la Mafidclcinc an désert
de la Sainte-Baume, en Provence, poème spirituel en don/.e cliants
(Lyon, 1694, in-12), par Barthélémy, canne, sous le pseudonyme
de Pierre de Saint-Louis. L'auteur y appelle les rossi.-inols, des luths
animés, des orgues vivantes, des sirènes volantes. Il apostrophe les
dames sur leur tenue à l'église :
Vous faites à l'église avecf|ue voire teste
Ce que sur le cloclier faisait la girouette.
Puis, après leur avoir reproché leur amour des cartes, il dit que
la Magdeleine
Pour le grand roi des cœurs couchait sur le carreau.
Ses yeux sont
...les bénitiers (J"où coule l'eau liénite
Qui chasse le démon jusqu'au fond di' son gite.
Voici comment Magdeleine parle de son sein :
Sein, dont mon cjeil enflé fit un \allon de larmes.
Quand ses monts désenfles perdirent tous leurs charmes.
— Les chevaliers combattaient pour l'amour de l'honneur, et en
l'honneur de l'amour. (Féhcien Salva.)
La marquise de Boufllers était la reine de la main gauche de ce
roi sans royaume, Stanislas, qui avait donné sa tille à un royaume
sans roi. (A. Houssaye, le Roi Voltaire.)
I^e voilà, ce poignard (jui du sang de son maître
S'est souillé làcliement ! Il en rougit, le traître !
( l'iiéophile DE ViAu, l'ijnimc et T/iisbc.)
L'Arétin écrit à sa maitresse. la Franceschina, que sa beauté est
la dorure qui enveloppe un excellent gâteau de frangipane ; mais la
beauté trompeuse des autres femmes u'est que la feuille d'argent
qui recouvre des pilules empoisonnées.
STY 461
Je me déliais dans le dt'-lroit de la dilliculté, et je \uis sans cesse
le niiaoe de 1 aliaiuloii jeter sur mon étoile son ombre sinistre.
(.1. .la ni II. 1
Voiture éci'ivait à M l'aidrl (|iril s'était eiiiliai-(|ii('' sur nn
vaisseau char.ué de sucre, li sera coulit à siui arri\(''e, et s'il fait
nanfra.ue, il aura du moins la consolation de mourir en eau douce.
La lime de la conversation aiguist^ la linesse de l'esprit. (L'Arétin.)
L'aime, indite et célèbre université que l'on vocite Lntèce.
(Rabelais, 11, G.)
2° Style brillant.
Cérntti fait des pbrases luisantes. C'est le limaçon de la littéra-
ture : il laisse nne trace arpentée; mais ce n'est que de l'écume.
(H i va roi.)
'i" Style burlesque. (Voy.)
4° Style de cbarlatan.
Avec trois gouttes de mou élixir, j'ai eu l'honneur de guérir
Sa Hautesse le dey d'Alger d'une indigestion de blé de Turquie.
5" Style ennuyeu.x.
Rivarol a dit : « Condorcet écrit avec de ro})ium sur des feuilles
de plomb. »
Tous les genres .sont jiuiis, liors le geiu'e einuiyeuv.
G" Style épistolaire.
Si j'en crois l'almanacb, il n'y a que deux jours que je suis
séparé de ^ous : si j'en crois mon canir, il y a deux siècles.
7" Style fleuiM.
L'abbé Bernis, à cause de son style I1eui-i, avait été surnommé
« Babct la Bouquetière » .
8° Style à la Janot.
Un a beaucoup parlé du singe de l'impératrice : c'est une
guenon. {Gazette, 3 mars 1870.)
9° Style de journaux (style créé par Josepb Prudhomme).
Par suite de la tàcbe que j'assume, je ne me dissimule pas la
responsabibté qui m'incombe.
Cet accident a produit une douloureuse sensation.
Un dél)utant all'rontant pour la première fois le feu de la rampe.
La justice poursuit le cours de ses investigations.
Les voyageurs sont tenus d'obtempérer aux injonctions de l'au-
torité.
L'hydre de la révolution ; la soldatesque elfrénée ; le verdict de
la postérité ; le vaisseau de l'État.
462 STY
10" Slylc l;ic()iii(|ii('. (Voy.)
11» Slylt' inaciiroiiKiiie. (Voy.)
12' Slylc iiiyllioloiiiqiK;.
L;i lyre d'AinpIiion : la laiilcnic do Diouviie : lo caducée de
Mcrciii-c ; la troiiipcllc de la Reiioiniiiée ; les ciseaux des Parques;
le lil de Procusle.
13" Style obcur. (Voy. (j/ilinuiiias.)
l'i." Style ordiirier (dit des natiiralisles).
Style où le mot propi'e est toujours inalproi)re. (Voy. Cam-
bronne.)
loo Style à la La Palisse.
Avant que la foule fût arrivée, on circulait lii^rement dans les
salons des Tuileries. {Gazette de France, février 1870.)
10° Style en proverbes.
Je voudrais une femme qui eût le cœur sur la main : qui sût
quelquefois mettre sa langue dans sa poche ; qui eût le bras long,
un peu de plomb dans la tète, et celle-ci pas trop près du bonnet.
Je crois qu'alors notre ménage serait sur un bon pied.
17'' Style réaliste.
Le Petit Marseillais du 19 avril 1877 raconte que M. Tbiers,
qui vient d'entrer dans sa SI™*' année, se rase lui-même, qu'il passe
avec dextérité le rasoir sur le cuir, et qu'il le promène sans bésita-
tion sur toute sa ligure, car on sait qu'il ne porte ni favoris ni
moustaches ; et cela, sans se faire la plus légère entaille. Il lui
arrive même, pendant l'opération, de continuer une conversation
avec un visiteur; cela ne le dérange ni ne le distrait. Il parle, il
sourit, il s'anime, et on le voit quelquefois quitter la croisée et la
glace devant laquelle il se rase, pour s'avancer, le rasoir à la main,
et la figure barbouillée de savon, vers son interlocuteur, pour
discuter de plus près et triompher de ses objections.
18" Style sentimental. (Voy. pathos.)
19° Style sul)lime.
Le sublime touche au ridicule ; le pathos est la parodie du
pathétique, et, même après les larmes d'attendrissement, on finit
toujours par... se moucher.
Styx, du grec stux, horreur.
Fleus^e d'Arcadie, regardé comme fleuve des enfers.
— Jurer par le Styx. Ce fleuve, qui faisait neuf fois le tour des
enfers, était redouté des dieux eux-mêmes ; ils ne violaient jamais
le serment qu'ils avaient fait par le Styx.
Firn 463
Suaire, du kilin sun, cuiulrr : un l)ieii [)liit(U de siidaritini.
Moiiclioir pour s'essuyer le visage, et qui plus lard servit à
euvoloppor i;i tète du mort, avaut de l'ensevelir. Dans la suite, le
suaire s'élargit pour envelopper tout le coi'ps.
Sub, préposition latine qui niaicpie l'infériorité.
A formé un préfixe, qui modifie sa consonne finale, par assimi-
lation, dans des mots romme : succomber, suagércr, supporter.
Devenu sous en français : sous-entendu, soutenir, soutVrir.
Subreptice, du latin suh et ropere, prendre en dessous.
Terme de jurisprudence.
Se dit des faveurs ol»tenues sur un faux exposé.
Subrepticement : furtivement, illicitement.
Substantif, si/hs/fnifiruin {nomon).
Mot variable (pii sert à désigner l'être, par opposition au nomcii
adjerf/rin/i. f[ui désigne la manière d'être.
Subtil, du latin subiilh. qui passe dessous, se dérobe.
Synonymes : délié, lin, rusé.
Sucre, de l'arabe sokkar, qui a donné le latin saccliarum.
— La canne à sucre est originaire de l'Inde. Le mot grec
sakkaron et le latin saccharum dérivent peut-être du sanscrit
sarkaria, gravier, débris, c'est-à-dire sucre solide, de même que
le sanscrit kandali signifiait sirop sécbé, ou candi.
— Arrien nomme le sucre, miel de roseau. Dioscorides l'appelle
le miel solide. Tzelzis, au xii'' siècle, nomme la canne à sucre
ylijcijcalamos. équivalent de nieUlna canna ou canna mellis,
noms donnés à la canne dans la basse latinité.
— Tliéoiiliraste parle de roseaux qui font du miel sans abeilles.
Qnique hibnnt tencra... nrundinc -succos.
(LucAiN, P/iar.<a/e.)
(Ceux qui boivent la douce liqueur des tendres roseaux.)
— Pline {Illsloire naturelle) parle le premier du sucre comme
médicament : « L'Arabie produit le saccliarum ; mais il est meilleur
dans l'Inde : on ne l'emploie qu'en médecine. »
— La cristallisation du sucre paraît due aux Arabes, qui, vers
lloO, transportèrent en Sicile la culture de la canne et les procédés
de la fabrication du sucre.
— En France, les premières raffineries furent établies à Nantes,
en 1770, et plus tard à Orléans et à Paris.
464 SUF
l'iii 177S, les fi't'TOS Hoiiclirric. de |{oi'(l(';iii\. iicrl'cctioiiiH'-n'nl le
ral'liiin.uo et ohtinroiit 00 0/0 du siicn' luiil. dont on nohtcn.iit
jiiS(iirnloi-s que ()7.
Vers J(S10, le Hlociis coiilinciilMl doiiii;i iiaissaiire nu snrre indi-
ut'iic de- Ijelterave, dont la production était devenue si considérahle,
en JS'il{, f|iie lo aoiivcrnomcnt en proposa la suppression par voie
dindeninité.
— Le sucre ne fait de mal qu'à la bourse. Ce proverbe, très
accrédité dans le peuple, est démenti par la science, qui affirme et
démontre que le sucre est écliaulfant.
— C'est un apothicaire sans sucre : il manque des choses les
plus indispensables à sa profession.
— Le sucre a été employé dans les pharmacies bien avant d'être
d'un usage aussi universel qu'aujourd'hui.
Ce n'est pas une substance uutrili\e, mais respiratoire. Il fournit
dans l'acte de la digestion, les éléments combustibles qui entre-
tiennent la source de la chaleur et la production de l'acide carbo-
nique.
— Le mot sucre, dans la langue populaire, remplace quelquefois
un mot ordurier.
Et l'on vous renverra
Faire du sucre et eœtera.
(Coi.i.i-:, C/iansons.)
Au temps du Blocus continental, une caricature représenta le
roi d'Angleterre jetant de l'autre côté du détroit une betterave, et
s'écriant : « Va te faire... sucre ! »
— Morceau de sucre trempé dans l'eau-de-vie : canard.
— Pain de sucre : enfant de chœur (Vidocq). Allusion à sa petite
taille et à sa robe blanche.
Sucrée. Faire la sucrée : la prude, la bégueule.
Ne fais point tant la sucrée. (Molière, Georye Dandin.)
Suer, du latin sudai'e, provençal sudar.
Synonymes : suer sang et eau ; suer d'ahan ; être tout en nage.
(Voy. eau.)
Suffisance. (Voy. outrecuidance.)
La suffisance est Tamour-propre des autres (?).
Les gens suffisants sont toujours insuffisants.
Suffixe, du latin sub et fixas, ajouté à la suite.
Syllabe ou lettres qu'on ajoute à la suite d'un radical, pour en
sur 465
niodilier l;i siuiiiliciition. S'oppose h pi-r/irc. (f/iiii et r.iiilro sont
des ff/'/îj'c's.)
Suicide, foniié des éléiuenls latins .sui, de soi, el rœ//erc, idée
de iiietti'e en pièces, tuer, qnl se retronve dans homicide.
— C'est l'alihé Desfonlaiiies qui créa ce mot, en 1738, à l'iinila-
lion de homicide. Les anciens employaient des périphrases pour
exprimer l'idée de suicide : se faire mourir, se tuer, se donner la
mort. Suicide, mot très inlelliuihie. est plus rapide dans le lan-
«iage, et exprime parl'aitemenl la pensée. .Mais le verlie se suicide}'
constitue un pléonasme : je me suiciderai (ji; me tuerai soi-même),
est absurde.
— L'iionune est le seul auiuial (pii se douue la mort.
— Platon (/V/t'V/o/<) c(Hi(la ni iu> le suicide, commo l'acte d'un lâche
qui déserte son poste.
Sénèque et les stoïciens l'exalleut comme un acte héroïque.
La religion catholique le condamne, comme un acte de rébellion
contre la volonté divine, et refuse au suicidé la sépulture en terre
sainte.
— H faut être brave pour commettre la lâcheté du suicide.
— Le suicide peut être attribué à des causes très diverses et
apprécié difïéreminent selon ses causes.
Il peut être, chez Judas, la peine que le criminel s'inflige à lui-
même. Chez Caton et Brutus, c'est l'eflet du désespoir d'une grande
âme ; chez les veuves du Malabar, un acte de dévoùment, ou le
résidtat d'un préjugé barbare : ou enfin chez un Chatterton ou un
Werther, le fruit du dérèglement de l'imagination. Le plus souvent
il faut l'attribuer à la foUe.
Suisse, colonie grecque de Marseille, s'appelait Helvelia au
temps des Romains, et a pris le nom de Suisse de celui du canton
de Scliwitz, où se donna le premier comljat qui assura la liberté
du pays.
— Nom donné aux portiers.
Depuis Louis XI les Suisses ont servi la France, et, sous
Louis XIV, on a appelé suisses les portiers des grandes maisons^
parce qu'ils étaient très recherchés pour ces fonctions. Une dépêche
du 18 juin 17^2 prescrit aux intendants des arsenaux de remplacer
les gardiens des portes par des Suisses de nation.
Ce larj^e Suisse à cheveux blancs
Qui ment sans cesse à votre porte.
(VoLIAlliK.)
4()(i SUf
— Mercier {Tuhloau de Parla, rli. 370) dit : « Portier et Suisse
sont (Icvemis synonymes en France... Ces Suisses conservent leiii-s
mœurs étrangères an milieu de Paris. Leurs manières sont loii-
jours un peu brutales; mais le Suisse le plus urossier devient poli
vers le temps des éti-ennes.
« Aux portes des jardins royaux, les Suisses ne laissent passer
ni domestique, ni servante, ni soldat, ni ouvrier, et les livrées de
l'indigence sont repoussées avec dédain. Les filles de joie, qui, à
l'entrée de la nuit, se glissent dans les jardins, sont renvoyées par
les Suisses ou même arrêtées, quand il y a scandale; mais plusieurs
obtiennent grâce et vaguent librement, quand elles ont su partager
avec le portier leur bénéfice nocturne. »
Point (rargcnl, jtoini de Suisse.
(Kacinh, Plaideurs.)
(On n'a rien pour rien.)
Les Suisses qui servaient autrefois en France, tenaient beaucoup
à être exactement payés, et leurs réclamations, en cas de retard,
étaient exprimées par ces mots : « Argent ou congé. »
Grillon, dont Henri IV faisait grand cas, mais qu'il ne pouvait
payer, lui dit un jour : « Sire, trois mots : argent ou congé. » Le
roi lui répondit : « Grillon, quatre mots : ni l'un ni l'autre. »
— Sous la Restauration (1815), un officier françafs dit à un
officier suisse : « Je ne voudrais pas servir, comme vous, pour de
l'argent ; nous autres, Français, nous servons pour l'iionneur. »
Le Suisse lui répondit : « Nous servons tous deux pour ce qui nous
manque. »
— La devise des cantons suisses est : « Un pour tous, tons
pour un. »
Suivre, vieux français seure, du latin barbare sequere.
Au même radical se rattachent : obséquieux et séquelle, qui se
prennent en mauvaise part; conséquence, persécuter, obsèques, etc.
— Il y a deux cboses qui nous suivent malgré nous : notre ombre
et nos chagrins.
— Qui m'aime me suive I c'est-à-dire imite mes actions, me
seconde.
Sequi amicum ''Gicéron) : rester fidèle à son ami.
PhiUppe VI, de Valois, décida du sort d'une bataille contre les
Flamands, malgré l'avis du Gonseil, en criant: « Qui m'aime me
suive ! »
SUP 467
FraïK-ois h'\ en IDIo, ;'i ITiuc de slwA nn?, iiiiilM rot exemple ;"i
I;i iKitnillo do M;n'i,uii;m.
Lo diif do lirissiir. |)n"'t ;'i clwirLîor ;ivoc sa rav;dorio un corps
onnenii considrialilc se retourna vers sa troupe ot rria : « Kn
avant ! et Jean 1... (pii ne me suit pas ! »
Henri de la Rocliejaqueloin harangua ainsi ses soldats au moment
de la bataille : « Si j'avance, suivez-moi : si je recule, tuez-nu)i : si
je meurs, vengez-moi ! »
— Synonymes : filer, espionner, surveiller quelcpiiiu on lo suivant
pailoiil.
Sujet, du latin siibjectum, placé sous, inférieur.
— Mauvais sujet. Cette locution semble en contradiction avec le
sens du mot sujel, qui exprime l'idée de soumission et d'obéissance.
.Mais, ici, il est pris pour liommo en général. L'homme est. en elTet,
soumis, assujetti pendant toute sa vie aux inlluoncos extérieures ;
il est l'esclave de ce qui l'environne, et, par conséquent, un sujet,
dans la force du mot.
Dans lo langage familier, l'expression injurieuse « mauvais sujet»»
se prend souvent en bonne part, et quelquefois c'est plus qu'une
louange, c'est une caresse.
— Dans une discussion que le Dauphin, fils de Louis XV, eut
avec M. de Choiseul, premier ministre, le prince se mit à dire que,
s'il régnait un jour, il saurait bien réprimer l'orgueil de ce sujet.
« 11 est vrai, Monseigneur, dit le ministre, que je pourrai devenir
votre sujet : mais je ne serai jamais votre serviteur. »
— Après la mort do Louis XYlll, lo docteur Breschot dit à ses
aides, au momonl do faire lautopsio : « A[)[»rochez le sujet. » C'est
lo uoui ([u'on donne aux cadavres dans les amphithéâtres. — M. de
Duras en fut lilossé et dit : «Je vous ferai remarquer. Monsieur,
qu'il n'y a de sujets ici que ces Messieurs, vous et moi : ces dépouil-
les sont celles du feu roi. »
Superflu, du latin super et fluere, déborder.
Le sii|U'rflM, chose si inrossairo.
(Voi.TAlIlK.)
Supérieur, du latin sujtcrior, qui est au-dessus.
— C'est supérieur à tout : il faut tirer l'échelle.
Superstition, du latin sapei^slltio, super et slnre: ce qui
dépasse les limites de la croyance (?).
468 SUR
SonlinUMit do vénérntion religieuse, fondé sur l;i civiinte on
ri,mi()r;iii(('.
— f.;i siipcrsliliim. on croyance ;'i une puissjince iinfiginaire, a
exei'cé (le loiil I<'iii|is iiiic urando inllneiice sur les coiitiimes des
nations.
Telles sont les croyances aux fées ; aux korriganes, en Hretagne ;
au drac, en Languedoc. Tels sont le follet, le gobelin, de Normandie;
les sorciers ; le loup-garou; le meneur de loups, du Berry.
Ajontons-y les sortilèges, la magie, la divination, les i)ropliéties
de Martin et de Noslradamus : la terreur causée par les comètes :
la cartomancie, l'envoûtement, etc. (Voy. treize, vendredi.)
— Poni' régir les l'onles, il n'y a rien de plus efficace que la
superstition.
Nu lia res mnllilnd iiicni officariiis rcyil (pi a m si/jierslido.
(Quinte-Curce, liv. IV, cli. 10.)
Supplice, du latin siip})Urhiin, sup])li('alion.
Prière (pii précédait l'exécution d"iin condamné, à Rome.
— V\\ dictionnaire des dilïérents supi)lices pratiqués chez tous
les peuples, ferait frémir la nature, et montrerait l'étendue de la
barbarie et de la cruauté du cœur humain. (Voy. knout .)
Sur, sus, préposition et adverlie, de suj)er et snrsum.
Sus s'est conservé dans la locution en :<us, et dans rinterjcclion
or sus ! synonyme de debout! alerte !
On dit encore : courir sus à quelqu'un.
Sus. joint à (le, a donné dessus.
— Sur, adjectif (certain), ancien sciir. du latin securum.
Pour sûr, il arrivera demain.
— Sur, adjectif (acide), de l'allemand .s-r/^/^r: d'où suret. (Il serait
risqué de le faire venir de Suresnes.)
L'apprendre est sour;
.Mais le fruit est douceiir.
Suresnes (vin de) : mauvais vin (vin sur, aigre).
— Pour boire un verre de vin de Suresnes, il faut être trois :
celui qui le boit, et deux acolytes pour le soutenir^ si le cœur lui
manque.
— 11 y a aux environs de Vendôme, dans l'ancien patrimoine de
Henri IV, une sorte de raisin qu'on appelle su7'en. Il produit un
vin blanc très agréable, qui se bonitie en vieillissant. Henri IV
l'aimait beaucoup, et il y a encore dans ce pays un champ de
SYB 469
viiînos qui s'appollo le dos (VIItMiri ÏV. Plus tard, on a cru quft
c'rlait le villauc do Surosuos. pivs Paris, qui avait |)i-o(luit le vin
fa\()ri (lu Ht'aruais : c'est la réssoniltlauco dos iioiiis qui a causé
cette eiTi'Ui-.
— PieiTO d'Andeiss, daus S(»u [loèuu' de la lUildilIc dex r/'iis,
nomme Deuil. Monliuorency, iMarly, Arpenteuil, mais ne dit rien
de Siiresues. qui est aussi dans le voisina.ae de Paris : ce (pii i)rouvo
qu'au xiir' siècle, ce vin n'avait pas [)lus de mérite qu'à présent.
Surfaire, de sur el foire.
— L(> P. Bourdaloue surfait dans la chaire: mais, daus le confes-
siiiiiiial. il donne à hon mai'clié.
Surnom \iendrait. selon Ducanae, de ce qu'autr(M'ois. dans les
actes, (in l'écrivait au-dessus du nom.
Suzanne (la cliasle), oriuine hildique.
Suzanne, femme de Joacliim, très belle et très vertueuse, fut
surprise par deux vieillards pendant qu'elle était au bain. Ils la
menacèrent de la faire condamner pour adultère, si elle refusait
de les écoulei'. Su/aune jeta un ci'i : les deux suborneurs l'imi-
tèrent et aflirmèreul ([u'ils \enaienl de la voir avec un jeune
homme, qui s'était enfui aussitôt. On la jugea et on allait la
condamm'r à mort : mais les deux accusateurs furent confondus
par Daniel, et ils subirent le supplice qu'ils avaient injustement
réclamé contre Suzanne.
Sybarite, oi'i.uine péopraitliifpu' : de .S'y 6r//v',s-, ville de l'Italie
méridionale, dont les babitants étaient si voluptueux que leur
mollesse était passée en proverbe. Cette ville tirait son nom de la
rivière de Svbaris, à remboucbure de laquelle elle était bâtie; ou
du grec sijharis, luxe(0-
Svbaris fut détruite, TilS avant .lésus-tJbrist, parles Grotoniates.
Les médailles de Svbaris prouvent que les arts y étaient portés
au plus haut degré de pei-feclion.
— Les Sybarites n'étaient occupés que de festins, de jeux, de
spectacles. Ils récompensaient magnifiquement les cuisiniers qui
réussissaient le mieux à faire des découvertes dans l'art de flatter
leur palais et de satisfaire leur gourmandise. Ils bannii-ent de leur
ville les coqs, pour ne pas être réveillés par leur chant matinal, et
les artisans qui faisaient du bruit en travaillant. Un Sybarite se
plaignit d'avoir passé une mauvaise nuit, parce que, parmi les
470 SVN
feuilles de roses dont ét;»it seim'' <ihi lit, il \ m .u.iit inif i|iii s'était
pliée en deux.
— On appelle aujounriuii sijhnriit' uu lioiiiuie qui luéne une vie
e\trènieuieut molle et \oluptueuse.
— Il y avait chez les anciens les proverbes : Sybaritirn mensti,
tal»le de Sybaris: Si/hariticus sus, pourceau de Sybaris.
Sycophante, du urec sijinpluintf's. de sukf', ligue, et phfiinù,
uionlror.
— Les Athéniens avant défendu par une loi, d'exporter les ligues
de l'Attique. et une forte récompense étant accordée à ceux qui
révéleraient la fraude, des hommes pervers abusèrent souvent
de ce prétexte pour accuser des innocents : de sorte que le mot
si/cophnntf devint synonyme de délateur et de calomniateur.
Syl, sym, syn, préfixe grec, correspondant à runi du latin:
Il du grec sassimile parfois, on s^> supprime : <\métrie\ syUepse,
symbole, synthèse.
Syllogisme, du grec sun, avec et /o;/isoitini. je raisonne.
— Les stoïciens avaient imaginé ce syllogisme captieux : Une
mère supplie un crocodile de lui rendre son enfant, qu'il est prêt à
dévorer. « — Je te le rendrai, dit le crocodile, si tu réponds juste
à cette question : Ai-je envie île te le rendre '. — Non. — Tu as
deviné, dit le monstre: mais, si je te le rendais, tu n'aurais pas
deviné. >
— Épiménide a dit que tous les Cretois sont menteurs. Or, il est
Cretois lui-même : donc il a menti : donc les Cretois ne sont pas
tous menteurs : donc Épiménide n'a pas menti : donc les Cretois
sont menteurs (0-
Sylphe, sylphide, se rattache sans doute au grec sylphe,
insecte qui ue vieillit pas.
Génies élémentaires, qui. dans la mythologie poétique du Moyen-
Age, habitent les airs dont ils ont l'empire, et se mettent eu
rapport avec les hommes.
Syncope, mot grec, de sun. et kuptô, retrancher.
En grammaire, raccourcissement d'un mot par le retranchement
d'une syllabe.
Désigne aussi la perte subite et momentanée du seutim^^'" «lu
mouvement, avec arrêt de la respiration.
TAI{ 'i7I
Synonyme, <iii '^vor si//i, cnsciiililc. ononui, ikhii.
(l'c-i (l.iiis li'S s;iliiiis du iiiilini du wii" sirclc, (iiTon li-oinc,
roi'i.irinc de l;i sricncc des sviioiiviiios. M""' de- Srvi^iir, Hiissy, cl
M"'" de (Idliuiiy, s;i lillc, s'i'l.iiciil drjfi li\i'(''S ;'i ce |iii|ii:iiil jeu do
l'cspril. i|iii li\c .incc |iivcisi(iii l:i N.ilciir de cIlkiiic mol, cl iii;ir(|iic
;iii (■(lin (le |;i Imiiiih' SMci(''l('' l;i iiKHiiiMic du Im';iii I.iipj, •!;.'■('.
K\i'iii|ilrs : Imiii sens. jiij^ciiiniL ^^riiic, lidciil.
Le liuii sens s';i|i|»li(|ii(' ;iii\ iiciisccs cl ;ni\ expressions ; \v. jiijjc-
iiiciil, :'i l;i condnilr.
(îcnic csl )^cn(''i';il ; hdcnl csl p.irliinlicr.
— I.;i n;ii\clc csl tmc (pudih'' : rin;j(''Mnilt' est un di'l'.nil.
Synonymie. l''i.L:nrc de rlK'Ioriipic. (pii consislc ;i i'(''pclcr j.i
nicnic idi'c. en Icrnics dillcrcnls : Ahiil, riuisif, cre/isif, c/l'iKjil.
Mlle ;i pour ImiI {\v lr;ip|)er pIns forteiiienl l'esprit des ;jiidileiirs.
Synthèse, iln lircc si/nilicsis. <'onipositioii.
Mi'lliodc d"invesli,!j;ilion qni pfocrdc du simple ;iu composi'', des
élcmcnls ;iii huil. de l;i cinise ;mi\ elTeis.
(^esl le ("onli'.iii'e de YaïKilijsc, qni [»;irl du connu |)our ;iiTiver à
rini'oniiu.
Système, du ucec .v//n, avec, isfihni, se tenir.
A>semlil;eje de princi|)es, vrais ou faux, réunis en un coi-ps do
dociriiie.
— On disliiiijiie, en pliilosopliic;, l(;s systèmes de l*lalon. d'Aris-
tote, (le l)es( arics. Kn astronomie, il y a le système de Copernic,
celui de .New Ion. etc.
Tabac, de kiIkico. nom (pie d(uinaienl les lialiilants de San-
Salvador à la pinc(''c d'liei-he allumée dont ils as[iiraient la fuiiié(!.
Us appelaient l'Iicrltc elle-mèn)(; oilùha.
Le nom de lalxicn a pr(''\alu.
— On (1(5 Tahmjo, imk! des petites Antill(!S, d'où le lahac hit im-
porté en l'^spacrne pour la prennent fois.
— On encore de Tahasco, pays du Mexique.
.I.-.I. Ampère dit que lahascn était le nom du roseau [)crcé avec
lequel les Indiens d'Haïti aspiraient la fumée. Ils appelaient le tabac
47^2 TAH
m hua. C'ost pnr confusion, ou par niélonMiiic (jih' le ihjiu du tuy;iu
de [lipc ;iuî',iil été trans[)orté à la piaille.
— I^a |)laii!(' du tahac a été inlroduilc eu Krancc par .Icau .N'icol,
d(; iSinios, médecin et ambassadeur de France en Porluual.
On lui donna le nom de ;«/V;o//«<?, réservé maintenant aux qualités
toxiques du laliac. Ou l'appela aussi « herbe à la reine », parce
qu'elle fut présfnh'e à la reine Catherine de .Médicis.
— Amurat iV prohiba l'usage du tal)ac, sous peine d"a\oir le
nez coupé.
— Eu \i')\^l. Urbain Ylll pulilia une biilh?. (jui défendait de
prendre du laliac dans les é.tilises.
Pasquier lui reproche cette sévérité, en cilaut le passage suivant
de Job : Contra folium quod. venta rnpitur cstcnf/is jjotentiain
taani, cl stipulani siccani persequcrh. Vous faites éclater votre
puissance contre une feuille sèche, et vous persécutez une feuille
desséchée.
On rapporte la même anecdote à propos d'un imi)(")l mis par
Innocent XI sur le tabac et le papier timbré.
— Le tabac est un poison, ...une Brinvilliers, qui. pour o[jérer
plus librement, partage ses profits avec l'État.
— Synonyme : encens de caporal. Le tabac à fumer, dit caporal,
est plus (in et plus aromatique que celui de cantine, qui se vend
aux niiUtaires à prix réduit.
— Le grand nombre de pipes à ligures symboliques trouvées
parmi les antiquités américaines, prouve que Tusage de fumer
remonte, comme les monuments, au moins à l'an 800.
Cet usage était, chez certaines nations de l'Amérique,, une céré-
monie religieuse ; aujourd'hui encore, c'est, chez plusieurs d'entre
elles, la formule la plus essentielle du cérémonial dans les assem-
blées et pour la ratitication des traités.
Quelques trilius disent avoir reçu le tabac, comme le mais, d'un
messager du Grand-Esprit, auquel elles olïrent la fumée de leurs
pipes, dans toutes les solennités religieuses.
Ainsi, quelque bizarre que la chose paraisse, le tabac était bien
un encens, que l'on brûlait pour rendre hommage à la di\iullé.
(Voy. J.-J. Ampère, Voyaye en Amérique.)
Quoi qu'en di.so Arlstotc et sa docte cahalc.
Le lal)ac est divin ; il nest rien qui légale.
(Cou.NEMi E, l'cxlin de Pierrp.
— Quoi qu'en dise Aristote et toute la philosophie, il n'est rien
TAB 473
d'égal nii tnliar : ("est la passion dos lionnrtos gens, cl qui vil sans
tabac, n'est pas digne de vivre. (Molière. Fcsfin.)
A cette époque (KJGo), le tabac, cultivé depuis pou en Franco,
était devenu l'objet de discussions Irès ^ives, relativement aux
(jualités qu'on lui attribuait, ot ces disputes nuMues contribuèrent à
le mettre à la modo.
.l'ai (lu liuii lal)ac liaiis ma lalialièi'c.
(Voy. ra/isser.)
Tabellion, du latin /ahri/t/. planclicUo, tablette do bois ou
d'ivoii'o enduite de cire, pour prendre dos notes.
— Oftlcior qui rédigeait les ados publics, mais n'en avait pas le
dépôt comme les notaires. (Vieilli.)
Tablature, dérivé de tabula, lablo.
— Donner de la tablature à quoiqu'un : lui causer de l'embarras.
Le mot tablature désignait la table où étaient tracés les signes
qui servaient à écrire la musique avant l'invention des note^. Cette
mélliode oITrait de grandes dillicultés.
— En 1023, Gui d'Arezzo (en Toscane), moine bénédictin, inventa
les lignes ou portées, les clefs, et substitua aux six lettres de
l'alpliabet romain do l'ancienne gamme, les six fameuses syllabes :
ut, /Y', mL fa, soi. la. qu'il trouva dans 1" hymne de saint Jean,
composée par Paul Diacre, en 774 :
L'T queanl la.vis REsonarc flbri^
Mira (jesloruin EAmuli tunnnii
■ SOLvii jwiluti LAbii rcalum.
Sa ne le Joannc-i !
Vers IHOO, un Français, nommé Lemaitro. ajouta la septième
note, st. (Voy. fjammc.)
Table, du latin tabula, planche: provençal taula.
— A tal)le jusqu'au menton. (Balzac.)
S'il se tenait aussi bien à cheval qu'à taltlo, il serait le proiuier
écuyer de France. (Moyen de par tenir.)
De niissa ad niensam. De la messe à la t.iblo. (l'rovoi'be
monacal.)
— Chevaliers de la Table ronde. « Après le pas darnu^s, dit un
auteur, les combattants soupaient à la même table : et on avait soin
qu'elle fût ronde, afin d'éviter toute dispute de préséance. «
On sait que ce fut le fameux Artus, roi de la Grande-Bretagne,
qui, vers 520, établit l'ordre des Chevaliers de la Table ronde, si
474 TAI
v;iiil(''S d.iiis; nos vieux ivmii.iiis. Il m)ii1iiI, en 1rs ;i|i|)f'l;int ainsi,
(in'oii jiincfil (|irils ('laiciil Idiis ('uaiix, sinon en naissance, du moins
en coiii'ago el en v(;rlM.
A laiilc riniili' ir> a dchal
Pour être assis au pri'iiiier plat.
(I'rovfrl)c cspngnol du .\vi« .siétlt- )
Ifoiidi' taille (iste \o dosbat,
riiasciiii estant aiijirè'S du plat.
Tablier, so rapitorli; an prérédent.
— Le coup du tablier. Louis Veuillol emploie cette expression au
sujet des oîîrcs de démission de M. Tliiers, en 1872. C'est une
allusion aux cuisinières, qui abandonnent le tablier en (piittant leur
[tlace.
Tache, en provençal fara, souillure, dans le sens de macula.
Joackim prcs un (uind
Sens tnctt, que u hlanc le pcl.
(Evangile apocryphe.)
Tâche, de l'allemand tasche, poche, mesure. Ou le dérive aussi
du latin taxare, fréquentatif de tangere (?).
Tact, du latin lactus, participe de langerc, toucher, qui a donné
aussi : tangente, contact, contagion, intact.
Taille, de lalca, bouture, branche coupée.
De là viennent aussi : tailleur, taillis.
— Eu vieux français, taille signiliait llèche. Comme la (lèche a\ait
une coche, à l'opposé de la pointe, le mot taille, et entaille.^ est
devenu synonyme de coche.
— Tailler, dans le sens de couper, est resté dans: tailleur (de
pierres ou d'habits), taillandier, taillable et corvéable.
On dit aussi: la taille d'une personne, pour sa façon d'être, ses
proportions.
Jai col que non tailli, c fa'l fer lalliar.
(B. Mautix.)
(La pierre à aiguiser qui ne coupe pas et fait couper le fer.)
— Faire une cote mal taillée : un compromis. Arrêter un compte
en rabattant quelque chose de part et d'autre, sans examen trop
rigoureux.
— Gens taillal)les et corvéables à jnerci. Ceux dont on peut exiger
tout ce qu'on veut.
On appelait ainsi, au temps de la Féodalité, les serfs sur lesquels
TAI 47-)
le soimiour pouvait ;'i volonté iiiottrc un iinni")! ((nillo. ot ;ni\(iii('ls
il pouvait à son tiré imposer tles corvées.
L'impôt de la taille, qui n'était levé que sur les roliii'icrs, était
à la fois mobilier et foncier. Ce qui rendait les tailles odieuses,
c'était sui-lout l'inégalité des charues. Les exceptions ne se hor-
nait-nt pas au clertié et à la noblesse: elles furent étendues aux
officiers royaux et aux cours souveraines.
Cet imp('»t portait sur divei's objets do consommation, comme les
contributions indirectes de nos jours; il était le même que Vaccine
(de accidere, couper), qui est encore en vipiieur en Angleterre,
sous le nom d^ excise.
— L'expression de lallle, qui s'est conservée jusqu'à la Révolution,
est une preuve parlante de l'ignorance des populations au siècle
dernier. Ces termes de taille, de cote mal taillée, viennent de
l'ancien usage qui existe encore dans le commerce de détail de la
boulangerie, de )nrn'qu('r sur un morceau de liois fendu en deux,
dont cbacun des deux intéressés garde la moitié, et sur lesquels on
fait, en les réunissant, une entaille à chaque livraison de pain. C'est
ainsi que se percevaient les impôts à l'origine. Lorsque les tailles
faites sur chacun des morceaux de bois ne se rapportent pas, ou
(lit (pic c'est une cote mal taillée.
De là est venue aussi l'expression : détailler, vendre au détail.
Telas per cendre a talli. {Carlulalre de Montpellier, f" 30.)
Toiles pour vendre en détail.
— En proven(;al on appelle lailloun, un petit morceau.
Mangez ce taillon de massepain. (^Rabelais, III, 30.)
E levaran novelamen
'Inlhas, e quislas, e uzalges,
E fjabclas, e pesatges.
(Brcv. (l'amor, f" '2i.)
(Et lèveront nouvellement tailles, et quêtes, et impôts, et ga-
helles, et pesages.)
Tailleur, dérivé de (ailler.
— Synonymes : artiste aux jamjjes croisées, pique-prunes, pique
à l'azor.
Mangeur de prunes. « Un croque-prunes, autrement compagnon
tailleur » {Le facétieux réceil-matin des esprit: inélancholiques.)
Le surnom de « pique-prunes », donné aux tailleurs, est popu-
laire, mais son origine est inconnue. Rabelais (IV, o2) y fait allusion,
476 TAL
qinmd il dit f|irim l;iillriii" ;iy;iii( lailh'- ses |i;ili'()tis (l;ins des décré-
talcs (lu |);i|i('. (l('\iii( toiil ;iHol(''. cl ([iic " ;iii lien d'iing savon, il
tailloYl iiii.!^' ('Iia|)!'aii ;i priiiics sucrées «.
— L'ouvrier lailleiirs'a[tpelle /va^///" ; s"il esl Allciiiaiid, il prend
le nom A' hirondelle.
L'ouvrier qui fait des retouches, s'apiielle poinpicr.
L(^ rahonlseur est celui qui reiuet à ueuf les vieux, liahils.
L'apprenti tailleur est un tarturc.
— Tailleur, voleur. On dit que saint Pierre n'a jamais voulu ouvrir
les portes du paradis aux tailleurs ni aux meuniers. (Voy.j
Mets un tailleur, un tisserand, un meunier dans un sac, et secoue
bien : le premier qui en sortira sera un voleur. (Proverbe an.dais.)
Taire, du latin lacère.
— Vous venez de dire une sottise : vous avez juanqué là une belle
occasion de vous taire.
— Synonymes de taisez-vous : allez vous asseoir. C'est ce que le
président dit au témoin après sa déposition, quand il n'a plus qu'à
se taire.
Assez causé. Bouche close (Rabelais).
As-tu fini ? Tu ne sais pas ce que tu dis, tais-toi.
Fichez-nous la paix ! Taisez-vous : vous nous ennuyez.
Talent, du .urec talanlon, par le latin falen/xm.
C'était, chez les Grecs, un poids, une mouuaie de convention. Le
talent attique d'aruent valait 60 mines, ou 6.001) drachmes ("3.560
francs) ; le talent d'or valait dix fois plus.
— Talent a passé au sens de désir et de volonté.
Les Sarrazins répondirent que nous n'avions nul talent d'être
délivrés. (Joinville.)
Au xvii"^ siècle, il a pris celui de don naturel, aptitude.
En cette acception, il se rapproche de génie, avec cette nuance
que le génie découvre et que le talent ne fait que manifester.
Soyez plutôt maçon, si c'est \otre talent,
Qu'écrivain du commun et poète vulgaire.
(BoiLKAu, Art poétique, IV, 26.)
Talion, du latin talio, de (al/s, la pareille.
— Sine talione (Martial") : impunément.
— La loi du talion inflige une peine égale au crime commis.
Moïse lavait inscrite au code des Hébreux, mais les Romains
l'abolirent en Judée.
TAM 477
...Celui qui aura l)lc?sé quelqu'un, sera traité comme il a traité
l'autre : il recevra fracture pour fracture, et perdra œil pour œil,
dent pour dent. (Léci/if/iie, XXIV, 10.)
Celui qui frappe par ré[)ée, |)érira par lépée. (Mathieu. XXVI, oii.)
— Les Américains [)i"atiqueiit le talion sous le nom de lijnch.
— ]'iin ri rcjiellerc licet in condnenti, non ex inlercallo.
(Bartliole.)
Le talion est la justice tles injustes. (Saint Au.uustin.)
Par pari rc/'ci'tiu' : on rend la [)areille.
Tel pour moi, tel pour toi.
Comme à aullriiy faict tu auras,
D"aullriiy aussi tu rccopvras.
Ibi débet fjitis piinivi, uhi delitjuit . (Bartliole.)
Qucii.'isi (/iieumi. (Molière, Bouvrjcois genlil/iomme. III, 10.)
C'est une locution herriclionne, qui signifie : Comme tu m'as fait, je
te fais; je te rends la pareille. Queu est l'ancienne forme de lequel.
Moroué ! queu mal te fais-je ? (Molière, Festin )
— La devise de la ville de Morlaix : « S'ils te mordent, mords-les. »
Talmouse, de telemelier, qui sigiiifiiiiL lioulaiiger ; de talev^
battre, et mêler.
Ce mot a un double sens et rappelle croquignolle, qui signifie à
la fois petite pâtisserie, et coup donné sur la figure, casse-museau.
Taie mousc représente alors taler et museau. C'est un soufflet qui
tombe principalement sur la l)Ouche et sur le nez.
— Ce nom s'est appliqué aussi à un petit gâteau, qui se fait à
Saint-Denis et se compose de crème, de farine, d'œufs, de beurre et
de sucre. Il est très tendre^ et Rabelais l'appelle « casse-museau »
par antipbrase.
Taloche, dérivé de taler, coup de main sur la tète.
Talons-rouges : petits-maîtres. (Voy.)
...Je vis M. le premier président. M'"'' de Soubise, et une foule
d'bonnètes gens, des moines, des prêtres, des militaires, des
magistrats, des femmes pieuses, des femmes du monde, et parmi
tout cela, cette sorte d'étourdis que vous appelez des talons-rouges,
et que j'eus bientôt congédiés. (Diderot, la Religieuse.)
Tampon, de rancien mot tapon, jjoucbon ; suédois, tapp.
Eu provençal, on appelle un bouchon tap ; et tapar, c'est
boucher un vase, ou se couvrir contre le froid.
478 TAR
Tandis, du l;ilin Idindiu, [tliiliH (juc, dt; lani el (lies, jour.
Co mot, ([iii s'employnit autrefois seul, comme adverbe, se joint
actuellciiiciit a\('c (pir.
Tant, (lu laliii laiilittn, advorl)0 de quantité.
Il a l'ait : pavUml, qui siauilie par conséquent.
Plus (laiiKPiU', |i;irl.iiit |iliis de joie.
(I„\ Fo.NTAiNE, lea Animnnx.)
Pourtant : il est riche, et pourtant, il fait peu de dépenses.
Alitant, tantinet, tantôt.
Tantale (Le supplice de).
Tantale, roi de l-.ydie, entre autres forfaits, avait servi aux dieux,
dans un repas, les membres de son lils Pélops. il fut condamné à
souiïrir perpétuellement une soif brûlante, au milieu d'un lac^ dont
l'eau échappait sans cesse à ses lèvres desséchées: et à être dévoré
par la faim, sous des arbres dont le vent élevait les fruits hors de
sa portée, toutes les fois que ses mains essayaient de les cueillir.
Horace (Sath^e I, 1, 68) trouve le portrait de l'avare dans le
supplice de Tantale. (Voy. Bouillet, Dictionnaire.)
Tante, jadis ante, du latin aniita, et non de antiqiia.
Qui fut frère de sa bellf ànte.
(Patelin.)
Tape, taper, de l'allemand tappen. frapper du pied.
Tapir (se), se cacher, agir en tapinois. Etymologie douteuse.
Du Gange le tire de lalpa, taupe (?).
— Taupetiéres (Rabelais), couvent de moines, et l'ile de Tapinois
(liv. IV, 2!)), du grec tapeinosis, humilité, abaissement : « comme
en tapinois » signifie secrètement, en rampant.
— Le nom provençal du câprier, plante rampante, est tapenier.
Tarabuster, probablement forme extensive de l'ancien verbe
tahusier, faire du tapage; plutôt que du grec tliorubéô.
Tarasque. Chaque race a sa tarasque.
Au Moyen-Age (?), un serpent monstrueux ravageait la ville de
Tarascon. Sainte Marthe, patronne de cette ville, s'en empara, en
le liant avec sa jarretière (?). Cet animal fabuleux, représenté en
madriers et en charpentes, sous la forme d'un énorme lézard, est
promené solennellement à Tarascon, à certains jours de l'année.
Le monstre a pris son nom de la ville de Tarascon, au lieu de lui
TAU 479
nvoir doniu'' lo sien, roniiiio on Im cni : cir Slr.ilion ot IMoléinée
iioiiinieiit déjà Tarascoii.
Cette ville, située sur le UIkhic. porte de gueules ;'i uu château
donjonné d'ai'.aeut, souteuu d'un dragou jnouslrueux de siuople,
dévorant un homme. Ces armes rappellent le heau château cons-
truit au xiv^ siècle par les comtes de Provence, ensuite la légende
de la Tarasque. On ne voit plus aujourd'hui, dans cette vieille
croyance populaire, qu'une allusion à la destruction du paganisme
par le christianisme.
— D'autres localités ont des légendes analogues à celle de la
Tarasque, avec quelques modifications. Citons la Gargouille de
Kouen, vaincue par saint Roman; la Graouilly, à Metz: la Lézarde,
à Provins. Draguignan, porte de gueules à un dragon d'argent: ce
sont des armes parlantes, rappelant le dragon ( Dracœna] qui rava-
geait son territoire, et qui périt sous la main de saint Hermentaire,
premier évèque d'Antihes.
Tard, adverhe, du latin tarde.
— Bien tard venu, pour néant venu; proverbe eu contradiction
avec : Mieux vaut tard que jamais.
— Il est un peu tard. — Qu'appelez-vous tard ? Midi, est-ce tard?
Minuit, est-ce de bonne heure ? Où prenez-vous la journée ?
(A. de Musset.)
Tare, taré, de l'arabe tarah, laissé en arrière, rebut.
DéJiu'tion du poids de l'enveloppe d'un colis, afin de faire res-
sortir le poids net de la marchandise.
A donné tarel, ver rongeur, qui taraude; tarière, vrille qui
perce ; et homme taré, dont la réputation est entamée.
Tarentule, de Tarente.
— Etre piqué de la tarentule : être fou.
— La tarentule est une grosse araignée qui, dit-on, se trouve
très communément dans les environs de Tarente, ville de la Pouille.
Sa morsure est venimeuse et détermine une maladie qui se traduit
en des danses frénétiques.
Targe, origine germanique, de farga, bouclier. En provençal
larju, targua.
Sorte de boucher dont on se sert pour jouter sur l'eau; puis le
jeu lui-même.
De là : se targuer ^wwq chose, s'en prévaloir, s'en couvrir comme
480 TAU
d'un l)Oiiclior; lavf/ctio. \w\\\ vcitoii nioiilc'' sur une plaiinf [(oni'
fermer une porte.
— Le jeu de la iiir(jiii\ eu l'rovenee, est aecompafrné d'une
chanson ainsi concMc :
Qu'il <jiiijtin In lari/d ?
N'es patroun (Ituioau :
De lin de Ijt Marna
Bnyuen toux un coou,
A n'uquenii lanjnirc
Dur coiimo un peirar
Qu'a maudu Ici.s fraïre
HueijHrc (lins In uinr.
Tarif, mot arabe. Espagnol tarifa.
A Tarifa, ville située à l'eutréedu détroit de Gibraltar, les .Maures
exigeaient le droit de passage de tous les navires qui pénétraient
dans la Méditerranée.
Tartufe ou Tar(nfJ't\ origine littéraire.
Hypocrite, faux bonhomme; signifie en allemand le diable.
En italien et en vieux français, tartuffe signifie truiïe.
— Molière a emprunté ce nom à l'italien. Tartufe se trouve dans
le MalniantUe de Lippi, avec le sens d'homme à esprit méchant.
(Littré.)
On conte que Molière créa ce mot en voyant un béat s'extasier
devant de belles trutîes.
Selon Génin, Molière n'a pas inventé le mot Tartuffe: il l'a pris
tout fait dans la langue italienne vulgaire, où il s'employait déjà
comme épilhète, non pas tout à fait avec le sens d'hypocrite, que le
chef-d'œuvre de Molière lui a imprimé, mais avec un sens voisin.
— En provençal, on appelle les topinambours des tartiffhs.
— En vieux français, et en provençal, truffer signifie se moquer;
d'oîi trufaldin, imbécile.
Aprè.s, à vous, mon conseiller,
Mcssor Jean, sans truffe et sornette.
Je laisse, pour faire oreiller
Les deux fesses de Guillemette
.Ma femme : cela esthonncste.
(Texlnincnl de Patelin.)
« Comme vous savez bien trulTer les bonnes gens ! » dit Panurge
à Dindenaut. (Rabelais, lY, G.)
— Tartuffe vient de tartuf'olo, une truffe, que l'on considérait
comme une pourriture, un excrément de la terre. C'est un souvenir
Tllf. 481
ilos Uoniîiin?, qui ?o ?orv;iionl du clwiiniiitinnn pour l;i inrino niôln-
[iliorc iiii'prisMiitc.
Tdiili rsl ijunnU fumius pntidn^t.
(l'i vriK. /I',r,/n,lr<. IV, 7.)
(.rcii l;ii> ;iiil;iiit tic cjis (|iu' d'un clKniipi.uiioii pourri.)
D.iiis i;i iiiriiH' |iirc(' de l'iiiiit»'. un homme trompé s'écrie:
Ailrnii me fuisse fiDU/Kiii, td i/ui illi erederein ?
Ce qu'on pont ti'adnire lilirement : « Faut-il que j'aie été assez
rornichon pour le croire ? »
— Ce mot Tarfit//'e, qui uuuKiuail à la langue, a pris sous la plume
de Molière nue valeur spéciale, pour exprimer un im[)OSteur.
Il eu a l'ait aussi le verbe farfu/fier.
VA vous serez, ma foi, lartuffiée.
(Acl. U, se. 3.)
Vous épouserez .M. TartulTe.
Tattersall était un lirooni du duc de Kingston, qui, après s'être
enrichi, fonda à Londres un marché au\ chevaux qui porta son
nom. (Cf. Littré.")
Taupe, du latin lalpa.
— Aveugle comme une taupe. Ce qui a fait croire que la taupe
était aveugle, c'est qu'elle a les yeux très petits et recouverts
de poils.
Taverne, du latin taherna, maison de planches.
Se disait non seulement des boutiques de marchands de vins,
mais des autres mauvais lieux.
On se demande pourquoi les chrétiens en out fait tabernacle.
Teint, participe du verbe teindre: latin tingere.
— Teint de lis et de roses : c'était celui de la Cynthie de Properce.
— Le chevaher de Grammont comparait le teint des Anglaises
à une jatte de lait, dans laquelle on aurait eiïeuillé des roses.
— Son teint se compose du blanc de l'innocence et du rouge de
la pudeur. (Le P. Leraoyne.)
Tel, du latin tnlis, corrélatif de quel: qui a la même qualité : tel
quel, tellement quellement.
— Tel pot, tel couvercle: Dignus palcUa operculuni (proverbe
latin).
Les Provençaux disent : Chaque fnupin a sa caburèlo.
31
482 ti:m
Tel v;i rlicrclioi- (!<' I;i laino, qui s'en retourne tondu.
Ti'l porli' If iKilon,
Ddiil SDiivciil le iKil-on.
Télamons, du urtîc (liaô, supporter.
Figures liuuiaines servîint, connue les caryntides, ;'i supporter des
corniches et des entablements. (Voy. caryatides.)
Télégraphe, du grec lélé, au loin, graphô, j'écris.
Invention renouvelée, en 1793, par les frères Cliappe.
— Dépêche télégraphique : télé.ii ranime, néologisme créé en ISoT.
— Le m parlant, qui n'était qu'une métaphore, est devenu une
réahté, depuis l'invention du téléphone, par l'Américain Bell,
en 1877.
— La poste aux pigeons était connue des anciens. (Yoy. Pline,
liv. X. ch. 22, et Rahelais, IV, 3.)
Témoin, anciennement tesmoinfj, du latin le>>tunonium, témoi-
gnage.
Au même radical se rattachent : tester, testament, attestation.
— lYetno tesfis in re sua intolliriitur.
Testis unus, testis nullus. (Axiomes de droit.)
Tempépament, du latin temperamontam, modération : de
temperare, faire un mélange dans de justes proportions.
Cicéron emploie temperamentum dans ce sens ; Martial l'emploie
dans le sens d'expédient.
— On s'est ser\i improprement de ce mot pour désigner le
mélange des humeurs qui constituent l'organisation d'un individu.
Il y a des tempéraments sanguins, nerveux, biheux, lymphatiques ;
mais l'acception moderne de ce mot, pour signifier la constitution,
la complexion physique du corps, est un sens figuré que l'Académie
dit, à tort, être le sens propre.
C'est plutôt l'usage qui a éta])li une pareille inversion, car l'éty-
mologie est temperare, faire une chose à temps et avec modération ;
tandis qu'on dit d'un homme livré aux excès physiques qu'il a du
tempérament, il faudrait dire, au contraire, qu'il n'use point de
tempérament, qu'il est intempérant.
Tempérance, du latin tetnperans, de temperare.
— La lempéraii/'e enseigne à jouir des plaisirs avec mesure.
Elle tient le milieu entre la sévérité des stoïques, qui rejette
toutes les voluptés, et la mollesse des épicuriens, qui s'y abandonne.
(Aristote.)
TKM WA
— Tempera est \\o\{\' trinpori: à temps, tenipeslif.
— Don : lonjit'i'L'r, cl, par iiuMatlirse, tremper : tremper son vin.
Atlremper, cliez Marot, siuriilie moiUM'er. Le roman avait aussi
oifrempnnce, pour désigner cette douceur acquise, (pii rend làiue
maîtresse d'elle-même.
Kii atrcmpa \cfs lui son iro.
{Roman fie la /{ose. 15.779.)
Tempérafiire. ronstiliitiou de ratmosplière.
Oh/ein/ierer.
■- La tem[)érance est une question de tempérament et snrtout de
température. Les pays chauds qui produisent le plus de liqueurs
alcooliques, sont ceux qui en consomment le moins ; et au Groenland,
011 le froid est excessif, l'alcool est insuffisant pour entretenir la
chaleur animale, et les hahitants hoivenl de l'huile de poisson.
Tempête, du latin tempeslas, provençal tempesta.
Violente agitation de l'air, souvent accompagnée de pluie et de
tonnerre. A signifié d'abord état de l'atmosphère, puis spécialement
mauvais temps.
— Les mugissements de la tempête.
(îarijdUHin nuii/irc putes nemus, aitl mare Tuncnm.
fHoHACK, Epitres, liv. H. 1. '202.)
— Une tempête dans un verre d'eau. Montesquieu {Esprit des
Lois) se sert de cette locution pour exprimer une émeute populaire
dans la petite république de Saint-Marin.
Les Romains disaient dans le même sens : Af/itare /Iiictiim in
siinpnla. Soulever une tempête dans un vase à boire.
Templier, dérivé de temphim, temple.
— Ivoire comme un templier. (Rabelais, I, o.)
— Vers 1118, neuf chevaliers fondèrent l'ordre des Templiers,
et bâtirent leur maison bospitalièro dans l'enclos du Temple de
Salomon, à Jérusalem, pour y recevoir les pèlerins de Terre-Sainte.
L'ordre fut confirmé par le concile de Troyes, en 1127. La règle en
fut composée par saint Rernard.
L'habit des templiers était blanc, avec une croix rouge.
Ils se répandirent liientcH par toute l'Europe, et le nombre de
leurs maisons s'éleva à plus de neuf mille.
A la fin du xiii« siècle, cet ordre était devenu dangereux par ses
richesses, son ambition et ses vices, et, le 13 octobre 1307, les
templiers furent tous arrêtés, en France, sous PhiUppe le Rel. Le
484 Tl'M
pnpc sicncail ;'i Avijiiioii (l<'|iiiis r;mnéc |irécédciile. I);iiis li; procrs
qu'on leur fit, on leur n;procha d'exiger du récipi<Midaire qu'il
reniât Jésiis-Clirisl. (piil crMclifit trois fois sur le crucifix, qu'il
baisùl le supéri<!ur sur la houclie, au nouiljril et à la iiarlie du
corps destinée au soula.uoujent des besoins les plus abjects.
Ou lu'ctondait (pic dans leurs asseuibléfîs nocturnes, les cliova-
liers adoraient une idole: qu'ils s'interdisaient tout commerce avec
les femmes et se Un raient à la sodomie.
L'ordre fut aboli, ses biens conlisipiés, et les templiers dispersés
portèrent dans le inonde le spectacle de leurs vices et de leurs excès.
(Extrait de Papou.)
Temps, du latin fp/npita : d'où tenqiorel. temporaire, tempo-
riser.
La durée des clioses, en tant qu'elle est mesurée ou mesurable.
Ce mot s'écrit avec ps, et non avec s seulement, à cause de
l'étymologie et des dérivés. De même, enfant, prudent, et autres
mots terminés en nt, doivent garder le t devant .s- au pluriel, à
cause de l'étymologie latine.
— Les noms donnés aux principales divisions du temps sont : le
jour, le mois, l'année, le siècle.
— Le temps est personnifié sous les traits d'un vieillard boiteux
avec une faux et des ailes.
On dit : « Il faut attendre le boiteux », c'est-à-dire attendre des
nouvelles.
L'un des plus anciens almanachs s'appelle : le AJessar/er boiteux.
Pythagore appelle le temps « l'âme de l'univers ».
— Avec le temps, on vient à bout de tout.
Avec le temps, les petits deviennent grands.
Avec le temps et la patience, la feuille du mûrier devient satin.
(Proverbe arabe.)
Avec du temps et de la paille, les nèfles mûrissent.
La grande Ijoite à guérison
Est dans le temps et la raison.
Le temps est un grand maître.
(ConxEiLLE, Sertorius.)
Le temps est un vieux juge, qui appelle à son tribunal tous les
coupables. (Sbakespeare.)
— Gbaque vague de la mer, cliaque flot, cbaqiie flocon d'écume
travaillent à rendre une perle plus parfaite, et ajoutent une teinte
mystérieuse à sa beauté. (A. de Vigny.)
TI:M 483
— Il y av.iil aiilrcluis un liraiii tic salilc (ini se lamentait dV'lrc
lin atonio clans les déserts. An hout do (inehjne temps, il de\int
diamant, et anjonrd'lini il est le pins bel ornement de la couronne
dn roi des Indes. (Voltaire, Zadig.)
— {]liaiiu('ment de temps, entretien des sots. (Proverbe espagnol.)
Lo temps luin. I)i'aii on fàclieux.
Est rentrolifii ilr qui ii;i inioux.
— Miil/ilard : Voti'e très linmblo serviteur, monsieur et made-
moiselle :... enchanté de ce que... II fait bien chaud aujourd'hui.
— Gaillard : Mais oui. — Malfîlanl : Nous ne tarderons pas à avoir
de l'eau : je le sens à mon rhumatisme. Je porte un baromètre avec
moi. — Gcovijoji : Cela ne laisse pas que d'avoir son agrément. —
Malfilaril : Cela sera-t-il bon pour les biens de la terre? Vous devez
savoir cela, vous autres, messieurs. — Gaulard : Ah ! dame, les
foins sont faits et rentrés, et une goutte d'eau ne nuirait pas aux
grains, etc. (Picard, les ProDinciaux à Paris, 111, 8.)
Il faisait 00 matin le plus beau teulps du monde.
Pour aller à cheval sur la terre et sur l'onde.
(MAi,:;:i:tANCiiE.)
Rouge le soir, blanc au matin.
C'est le vrai lot du pèlerin.
C'est un proverbe satiriipie, auquel pensait Rabelais, en écrivant,
au prologue du Quart livre : < Doncque vous voulez que à prime je
boyve vin blanc: à tierce, sexte et none pareillement; à complies
vin clairet. »
— Du temps que Bertlie filait. (Voy.) Se dit par regret du passé.
On dit aussi : Du temps que les bétes parlaient... C'était le bon
teiiqis.
— De mon temps : c'est-à-dire au temps de ma jeunesse ; ce que
Cicéron appelle Oona œtas.
— Le temps présent, [lour un vieillard, est celui des illusions
perdues, le temps où l'on a depuis de longues années enfermé,
dans le tiroir de l'oubli, les vieilles lettres d'amour et les mèches
de cheveux.
— Un vieillard qui regrette le bon \ieux tenqjs, regrette seule-
ment le temps où il n'était pas vieux ; le souvenir plein de charmes
de sa jeunesse passée lui fait exagérer l'éloge du bien qu'il trouvait
alors. C'est le...
...Laudator Iciiiporis uctl
Se jjucro,,,
(HuiiAct, Art iioclique, 17Ô.)
480 TKM
— Lo. vioiix roi Slfinislas |)rétondail qiio les rossifrnols de la
l*olognc, où il avilit passé sa jfMinesse, avaient la voix plus iiiélo-
diciise que ceux de France.
— On passe sa vie à regretter le passé, à se plaindi'c du présent,
à craindre jjour l'avenir.
— Ne prétendons pas arrêter le monde au\ jours où nous nous
sommes arrêtés nous-mêmes; si doux que soient nos souvenirs, ne
disons jamais d'aucune époque : « C'était le bon temps! »
C'est toujours le bon temps ! S'il y a toujours des vieillards qui
Unissent et qui regrettent, il y a toujours des jeunes gens qui
conniiencent et qui espèrent. (Maréchal Vaillant, 18G3.)
— Ce qu'on regrette, ce qu'on voit à travers un prisme trompeur
dans le temps passé, c'est un mérite imaginaire, qui n'est autre que
celui de notre première maîtresse, de notre amour pour notre
propre jeunesse.
La Providence se montre généreuse : elle nous détache douce-
ment de la vie, racine par racine. Nous commençons ainsi à ne
plus aimer ce qu'il faudra bientôt quitter: nous sommes étrangers
et presque absents déjà, avant l'exil, avant le départ.
C'esl du \ilaiii présent (luosl fait lo licau passi',
Mais être, je le crois, vaut mieux (juavoir été.
(E. Paim.f.ron.)
— Le temps qu'on doit regretter le plus, c'est celui qui a été
dépensé sans prolit pour le corps, pour l'esprit et })Our le cœur.
(Dubief, directeur de Sainte-Barbe-des-Champs.)
Le temps ne respecte pas ce qu'on a fait sans lui. (Eschyle.)
Les œuvres sont comme les figues ; plus elles sont mûres, meil-
leures elles sont. (Pascal.)
Ce qui croit soudain, périt le lendemain.
Quand on ne s'en rapporte pas au temps, pour ce qu'il doit faire
tout seul, on ne peut que l'entraver dans sa marche réparatrice.
(Talleyrand.)
— Agatharque, peintre de Samos, se vantait devant Apelles de
peindre vite : « On s'en aperçoit », lui dit Apelles.
Voltaire, âgé de 69 ans, composa Olympia en six jours. Il écrivit
à d'Alembert, en lui envoyant son œuvre : « C'est l'ouvrage de six
jours. » D'Alembert répondit : « L'auteur n'aurait pas dû se reposer
le septième. »
— Archidamus disait des trois points du temps, que « le passé
n'existait plus, que le futur n'existait pas encore, et que le présent,
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point insaisiss;il)lc entre le pnssé et le futur, n'existait pas da-
vantage ».
— Les ailes du tonips.
Sur les ;\ilos tlii Temps la tristesse s'envole.
On fait beaiicoii|) de bruit, et puis on se console.
(L.V Fontaine, la Vetive.)
Ilàlons-noiis. le temps luit et ndiis Iraine après soi :
Le moment où je parle est déjà loin de moi.
(Bmi.KAL-. Eiiilre 111.)
...iJuin Inquimiir, ftKjit inriild
OEliis ; carpe dicm, quani minimion cvedida jjo.slero.
(Horace, Oi/ps, 1, H.)-
I/iiislaul où nous \ivons esl un pas vers la mort.
(Voi.taiiif:.)
Le temps, comme les Partîtes, triomphe do tout en s'enfuyant.
Le temps est un charlatan, qui escamote le présent en faisant
briller Favenir. (I^ntenelle.)
— Les temps sont durs : Durls temporlhus. (Cicéron.)
Durissima reipubllcœ teinpora. (Cicéron.)
0 lempora ! o mores ! s'écrie Cicéron^ se plaignant de la corrup-
tion des hommes de son temps.
Dans quel temps vivons-nous ! ô temps ! ô mceurs !
— Perdre son temps : jeter le temps par les fenêtres. (A. de
Musset.)
— Un Yankee, pour utiliser sa promenade, adapte un moulin à
café ;'i l'avant de son vélocipède, et une baratte à l'arrière. A son
retour, il ti'ouve son café moulu et son beurre fait.
— Le temps, c'est de l'argent : Tuiips is money. (Maxime amé-
ricaine.)
De tous les biens que nous possédons, le temps est le seul dont
nous devions être avares.
Dissiper le temps, c'est user l'étoffe dont la vie est faite. (Franklin.)
De toutes les prodigalités, la plus grande est l'oisiveté. (Franklin.)
Oui perd son temps trouve la misère.
On n'est pas né pour la gloire, lorsqu'on ne connaît pas le prix
du tenq^s. (Vauvenargues.)
I^es amis sont des voleurs de tenq)S.
Philippe de Champagne ne perdait pas un moment de la journée,
qu'il consacrait tout entière à l'art. Il disait à ses élèves : « Vous
devez déjeuner sans quitter l'ouvrage, et la récréation qu'il faut
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prendre aprrs dîner, (•"est de descendre resciilicr pour ;dk'r à
ïatelier. »
L'Iioniiiie oisif tiio le (einps : le lem|)S lin; riioiiiine oisif.
La vie est courte, et les joiirnces sont lonuiies.
Comme elle i-ampe lentement, cette limace horrihle appelée le
temps! (II. Heine.)
Tendre, verbe, du latin tendere: d'où étendre, tente, tenture,
attendre, entendre, prétendre, etc., intensité, extension, etc.
— Tendre un arc, autrefois fésir, provençal (ésar ; d'où tèse,
allée d'arbustes loulïus, où l'on tend des pièges, des filets.
Il a tanlost pris une flèche
En la cordo la niisi on croèchc (croix).
Si la li'sa jiisi]ua rorcijle
L'arc qui élait fort à merveille.
{Roman de la Iiosc.)
Tendre, adjectif, du latin fcner, (eneruni.
— La carte de Tendre. C'est une fiction allégorique de la Clélie,
roman de M"'^ de Scudéry. On y voit le fleuve d'Inclination, le lac
d'Inditïérence, la mer Dangereuse, etc. Pour parvenir à la >ille de
Tendre, il îaut passer par les villages de Billets-Doux, de Petits-
Soins, etc.
Cette carte a été gravée dans le Magasin pittoresque (18io).
La carte de Tendre, de M'"" de Scudéry, et celle du royaume de
Coipietterie, de l'abbé d'Aiiljignac, sont probablement des imita-
tions d'une carte ancienne gravée en Italie, oii l'on voit des prisons
pour ceux qui travaillent. Elle est accompagnée d'un sonnet, où
on lit : « Ici, plus on travaille, moins on gagne, et qui n'est pas
fainéant est cbassé avec ignominie... Ici, les fours produisent natu-
rellement du pain », etc.
Cette carte doit avoir été faite à Naples. (Voy. cocayne.)
Tenir, du latin tenere.
Avoir à la main, ou entre les mains.
— Il vaut mieux tenir qu'attendre, ...ou que courir. Ici, courir
est pour quérir, c'est-à-dire demander (O-
...Un tiens Aaut mieux que deux fu l'auras :
L'un est sûr, l'autre ne l'est pas.
(La Fom.mne, V, o.)
Les anciens disaient : « Mieux Aaut aujourd'hui lœuf, que demain
la poule. »
Mieux vaut avoir qu'espoir.
TER 489
MitMix \iiiil im invsiMil (jiio diMix futurs.
Mieux \;iul l;i saucisse de la réalité que rortolan de l'avenir
(Iturlesque).
Ténor, de Tilalieu /cnorr. eelui qui donne le ton, qui soiilienl le
cliant: parce que, dans les motets à plusieurs parties, pendant ((uc
le? voix secondaires exécutaient des variations d'accouipagnement,
le léiioi- disait le plain-cliant, en maintenant toujours le thème do
la ((unposilion musicale.
— La voix de ténor, voix d'homme entre la hasse-taille et la
liaute-contre, est la voix dMiomme la plus aiguë que l'on puisse
obtenir sans contrarier la nature. Le ténor a la même étendue ([uc
le soprano, voix ordinaire des femmes et des enfants, mais il est à
une octave plus bas. La basse-taille est un ténor grave.
Le ténor est la voix la plus brillante de nos opéras. Nourry et
Duprez y ont surtout excellé.
Tentation, du latin tenlalio,
— La tentation, à sa naissance, n'est qu'une fourmi qui cha-
touille ; à la fin, c'est un lion qui dévore. (Camus, évèque de Belley.)
Ne nos induras in tentationon. (Mathieu, YI, 13.)
Tente, du latin tentutn, de tendere.
— La tente d'Achille. Lorsque Achille eut appelé Agamemnon
« chien d'ivrogne », il rentra dans sa tente avec son ami Patrocle,
et y resta oisif pendant que les Grecs se battaient.
On dit encore aujourd'hui, d'un homme en place, qui. [)ar dépit,
s'éloigne volontairement des atTaires, qu'il s'est retiré sous sa
tente. S'il va à la campagne, ses amis disent ([u'il retourne à sa
charrue, comme Cincinnalus ; ses détracteurs, ([uil va i)lanter ses
choux.
Terme, du latin lo minus, borne.
Statue sans pieds: borne qui indique une limite.
— Les hennés ou ternies, sont des bornes de forme cubique,
Unissant en gaine par le bas, surmontées, à l'origine, d'une tète de
Mercure ou Hermès, et, par la suite, d'autres dieux.
Les anciens personniiiaient le repos, la station, liiumobilité, par
le dieu Terme, auquel ils donnaient une léte luuuaine et un torse
sans jambes : être vivant par le liant, rocher par le bas.
— Terme se dit aussi pour limite, délai accordé pour [layer une
somme. D'où : attermoiement. délai accordé à un débiteur.
v.)0 Ti:i{
(Jiii :i U'iiiie, iiu doit rien : avec le U',iii|)S on s'acquillc.
— Terme, mot, expression, est dit aussi pour limite, borne; c'est
la Incalisalion de l'idée.
Mesurer ses termes : se scr\ii' de mots qui ne passent pas les
limites de riionnéteté et des convenances.
Tei'iiie pi'dpre, impropre, technique.
Terne, du latin lerni, trois à la fois.
A la loterie, ce sont trois nombres pris ensemi)le et qui sortent
en même temps. Le terne gagnait 3.500 fois la mise.
Terre, du latin lerra. qui est aussi provençal. De torrere,
bn'der (la chose sèche).
Le plancher des vaches. Joseph Autran (Poèmes de la mer) a dit
d'une vache à bord :
Morne, clic rcgrellait sur le plancher mouvant
La plaine, qui jamais n'ondule sous le vent.
— La terre ferme est, en réalité, bien peu digue de ce nom ;
car, indépendamment du mouvement rotatoire dont elle est animée,
les trcmbleiueuts de terre la font onduler comme une mer agitée,
et nous démontrent combien est mince et fragile cette pellicule qui
enveloppe la partie fluide du glojje et combien elle serait prompte-
ment détruite, si oo9 volcans distribués à la surface, comme autant
de soupapes de sûreté, ne présentaient une libre issue à l'action
des feux souterrains. (De Quatrefages.)
— La surface totale du globe est de 50.940. 100 hectares. La terre
sèche occupe seulement le quart de celte surface. (Babinet.)
— La terre est un soleil enkysté. Son diamètre est d'environ
12.000 kilomètres, et la croûte solide qui s'est formée à sa surface,
par le refroidissement, n'a que 20 à 40 kilomètres d'épaisseur,
suivant la fusibilité des matières qui la composent ; toute la masse
intérieui-e est à l'état de lluide incandescent. Cette épaisseur serait
de 3 à 6 millimètres sur un globe d'un mètre de rayon. La tempé-
rature de la terre augmentant, à mesure que l'on descend, de
1 degré centigrade par 33 mètres, on doit trouver 100 degrés à
3 kilomètres, 6GG degrés à 20 kilomètres, et au centre 200.000
degrés.
— La terre a élé appelée la « machine ronde ». (La Fontaine.)
— En 1736, Maupei'tuis fut envoyé en Laponie pour vériller une
des conjectures les plus hardies de Newton, sa théorie de l'aplatis-
TER 491
scment aux polos. M. do la Condaniino fui rlLiriir (riino mission
soinblaltlo dans rAinériqiic du Sud.
Voltaire célébra dans ses vorsle résultat acquis parla scionco, que
le globe est plat aux deux extrémités de son axe: ce qui anéantit le
vieux préjugé et le nom de « machine ronde »
Oiii' nos fl;isi|iirs auteurs, on clicvillaiil leurs a ers,
Ddiiiiaiciil, ;i raM'iiliiri', a n' plat uiiixers.
— Le mouvement de la teri-e — Galilée fut persécuté par l'Inqui-
sition de Rome, sous l'ri)ain YIII. pour avoir propagé la découverte
du nu)uvement de la terre.
Les passages de l'Ecriture : Terra in œteimum sfnt, et Deits
f'undacit terrain auper stabilUatem sitam {Psaume CIII), et celui
où Josué commande au soleil de s'arrêter, ne pouvaient s'accorder
avec la vérité proclamée par le Florentin.
Le P. Caccini, dans un sermon contre Galilée, lui a|ii)liqua ces
pai'oles de saint Luc : Mri Galilœi, qukl stalis adsplcienlcs in
cœlain? CqUq citation peut donner une idée de l'ignorance des
persécuteurs.
La devise de rivalise est : In dnbiis liber/as : ce qu'il faut
entendre par : la Foi et la Raison sont deux puissances distinctes,
et là où la Foi ne pi'ononce pas, la Raison est libre. Or, à cette
époque, les sciences physiques avaient abandonné les vieilles
théories de l'antiquité, tandis que l'Église en est toujours restée
aux doctrines d'Arislote, ne pouvant les abandonner sans changer
le dogme et la base fondamentale de sou autorité.
« La Rible, dit J.-J. Ampère, est un livre de religion et de poésie,
et non de science. L'Église doit rester étrangère aux doctrines
scientiliques. qui ne sont souvent que des liypothèses. et peuvent
être reconnues fausses ; et la science n'a point à chercher d'appui
hors d'elle-même, fût-ce dans la Bible. Si Galilée eut un tort, ce
fut celui-là. »
Les expressions : le lever, le coucher du soleil, sont aussi des
hérésies scientifiques.
La fameuse étoile des trois rois Mages aurait fort embarrassé un
Lalande, un Cassini, un Newton, s'ils avaient vécu alors.
— Il voudrait être à cent pieds sous terre. Se dit de celui qui
voudrait re soustraire à la honte de quelque mauvaise action.
...Ah ! dure terre! pourquoi ne t'es-tu pas entr'ouverte ? (Dante.)
Auriou vnugut estre un ayliind, et qu'un porc m'af/uesse
mangeât. (Proverbe provençal.)
492 TET
Testament, du l;iliii IcsIdnirnliDn, d(^ loatare, nllostor.
— I);iiis l'.iiiciciiiu', coiilimic. l'oiiiiiiiio, lo IcslMiiioiit no s'écrivail
pas, mais 1«3 l.ostat(;iir (''iioiiçait sa voloiitc'" devant h'iiKiiiis ' h'slia).
— Jiistiiiion dérive tcsidinenlion de lesidtio t/icnfis : mais
Vinnius se moque de cette étymologie en disant qne, par la même
raison, excrementiun viendrait de excretio mentis.
La terminaison ment, dans certains mots, vient cependant de
7nens, esprit. Tels sont les adverbes : bonnement, justement,
comment.
— Bonne marmite, mauvais (eslameiil : les dents sont plus
proches que les parents.
Tête, du latin testa, proprement tesson de pot. Le haut du
crâne ressemble à un tesson.
Testa signilie, en espagnol et en portugais, le sommet de la tète.
— Synonymes : on employait autrefois clief. qui traduit caput.
Rabelais (1, TiO) appelle la tète le moule du bonnet : « C'est le
pot au vin, parce que le vin monte à la teste, et que teste vient de
teslu, qui signilie cruche. >)
Cap, est la forme méridionale de caput.
On dit aussi : binette, caboche, boule. (Yoy. ces mots.)
— Tête se dit pour bomme : payer tant par tète.
Oh ! la drôle de tête ! le plaisant personnage !
O lepulum caput ! (Térence.)
— Tète de linotte : légère, sans cervelle, étourdi.
— Avoir la tète cbaude : être irascible, s'emporter facilement.
Ma femme, jjien souvent, a la tète un peu chaude.
(Moi.LÈKt, Femmes srivnntes.)
On dit aussi dans le même sens : avoir la tète près du bounet.
— Le héros de Vl/iade justifie bien répithète de « bouillant
Achille » quand il appelle Agamemnon « chien divj'ogne », et tue
Thersite d'un coup de poing.
Kt (le plus (jue Jimon la l'olle.
Dont la tête est près du bonnet.
(ScAr.RO.N, Virgile travesti.)
— Tête-bêche. (Yoy. chevet.)
— Grosse tète, peu de sens. Une grosse tête annonce de la
pesanteur par habitude, de l'enthousiasme par éclair, beaucoup de
volonté et souvent du génie.
J'ai la tète plus grosse que le poing, et si (cependant) elle n'est
eullée. (Molière, Bouryeols.)
TIÏE - 493
— Fniro s;i trie : (Mrc [trôh'iiliciix.
Mi'cliaiil poi'li.' (1 fal, Calulli^ a deux travers:
Hélas ! il fait sa lèli- et m- fait pas ses vers.
— X';iV(iir pus de tt'-tf : ;i\()ir une Irtc sans corM'lIt'. l'ii ci-iiiic
cominis ji;ii" un idiot n'est |);is piiiiissalile : on ne s;ini";iit coiiixt 1;i
tète à qni n'eu a pas.
— N'en faire qu'à sa tète. Il est comme le honnetier, il n'en fait
qn'à sa tète.
Têtu, dérivé de (rie.
— Télu comme nn ninlel, comme une mule.
On disail autrefois : qiiinteux comme la mnle dn pape.
— Lentétemcnt nait de la stérilité de resjtril : <piand on n'a
(pi'nne idée, on y tient.
« Tiiez-moi sur place, coupez-moi par morceaux, la tête sur le
billot, je n'avouerai i»as que... »
Texte, du latin lexliis, tissu, de lexcre: anciennement tlslre.
Le texte d'un livre est l'écriture contenue dans le corps de
l'ouvra^ue. par opposition aux notes et commentaires.
Théâtre, du prec thcfitron, par le latin thcdtriiin.
— Le tliéàtre corrige les mœurs par le rire.
Cusli(jal ridendo mores.
(Santeuil.)
Le théâtre est un miroir on chaque époque vient montrer ses
défauts, ses qualités, ses ridicules.
La mission du comique est de nous faire éviter les écarts par la
crainte du ridicule.
Le théâtre, avec toutes ses imperfections et toutes ses lacunes,
n'en est pas moins un des produits les plus délicats de la vie
civilisée, un des elïorts les plus heureux de l'homme vivant en
société, pour alléger ses ennuis et augmenter ses plaisirs.
— Poulailler, paradis. Le dernier étage des galeries d'un théâtre
est appelé ironiquement poulaiUcr, parce que les spectateurs y
sont juchés comme sur un perchoir (L. Larchey). Ou le nomme
aussi paradis.
— Les pièces de théâtre portent difierents noms :
Pièces à femmes, destinées à exhiber de jolies femmes.
Pièces à poudre, dont l'action se passe sous Louis XY ou
Louis XYI, et dont les acteurs portent perruque et poudre.
494 TIM
Pièces;'] liroii-s, on le niriiie ;u'l<'iir joue plusieurs n")les dilTéreiils,
en cliange;iiil de costume.
Pièces ;i Iriirs, oi'i les ciiaiigemcnls ;'i vue sont noiiilireiix. telles
(jue sont les féeries.
— Les lliéfilres romains étaient consacrés à Vénus, à cause du
jeu immoi'al et de rimpudicité des acteurs.
Thébaïde.
C'est une tliéhaide; un lieu désert.
La Tliéhaïde, partie méi'idiouale, de TLaypte, dans laquelle se
trouvait Tiu'!l)es à cent portes, qui lui avait donné son nom, est
devenu(> célèbre dans l'histoii-e ecclésiastique, par le grand nond)re
de saints solitaires qui s'y retirèrent dans les premiers siècles du
christianisme, et y vécurent dans les rigueurs de la pénitence.
Thémis, fdle du Ciel et de la Terre, régnait en Thessalie avec
tant de sagesse, qu'elle fut honorée depuis comme déesse de la
justice.
Selon la Fahle, Jupiter eut d'elle trois iiUes : l'Équité, la Foi et
la Paix.
On la représente tenant une épée d'une main et des balances de
l'autre.
Théorie, du grec théùria^ contemplation.
Tantôt signifie une connaissance qui s'arrête à la simple spécu-
lation, sans passer à l'action ; alors on oppose la théorie à la
pratique ; elles sont dans le même rapport que la science et le
métier. Tantôt ce mot indique un ensemble de connaissances
encbainées.
— Les Grecs appelaient théorie une députation solennelle, qu'ils
envoyaient tous les ans à Délos. Les membres de cette députation
s'appelaient théores.
Thersite, du grec thersos, audace, insolence.
Le plus dill'orme, comme le plus lâche, de tous les Grecs qui
allèrent au siège de Troie. Railleur, insubordonné, il insultait les
chefs. Un jour qu'il s'était moqué de la douleur que témoignait
Achille pour la mort de l'amazone Penthésilée, le héros le tua d'un
coup de poing. {Iliade, II, 212.)
Tiers, du latin tertius, provençal ters.
La troisième partie d'une chose ; trois est le tiers de neuf.
TIR 495
Il ;i cdiist'rvi'' lé sens de troisiriiic (l;iiis : tici's él;it, tiers ordre,
être en tiers, la lièvre tieive.
Le tiei's état est le iiem domié aiilrel'ois, en France, à la classe
bourgeoise, (ini \t'ii;iil au li'disii'iiic ran,u„ après la mililesse et le
clerué-
On a[i|ielle tiers ordre, des [X'rsonnes du siècle, qui s'attaciient à
un ordre religieux, sans renoncer à la vie civile, et qui suivent une
règle à part, appelée la tierce (ou troisième règle).
Tinette, récipient pour les déjections ménagères; diminutif du
latin tina, vase à mesurer le vin.
En provençal tina. cuve on l'on fait fermenter le vin. Cuvier
pour la 1essi\e.
Tintamarre. (À; mol vient, d'après Pasquier, de tinte la niavrc,
la (in marra. Iioyau.
Les cultivateurs, dans le Berry, ont lliabitudo de s'avertir (pi'il
est teu)ps de cesser la Ijesogne, en frappant sur le fer de leurs
marres, et usant ainsi d'une sorte de télégraphie acoustique.
...Duquel faisant les fossés, touclièrent les pioclieurs de leurs
marres ung grand tombeau de bronze. (Habelais, I, 1.)
Tinter, du latin tinnitare, fréq. de tinnire.
— Les oreilles ont dû lui tinter : on a beaucoup parlé de lui.
Absentes tinnitu auriiua prœsentire sermones (Pline). Ces
discours étaient supposés favorables, si c'était l'oroille droite qui
tintait; défavoraiiles, si c'était l'oreille gaucbe. Les Romains avaient
reçu cette superstition des Grecs, et on lit dans une lettre d'amour
dWntistliène : « Ton oreille ne résonnait-elle pas, quand je parlais
de toi en pleurant ? »
Tintoin, se rattache au précédent.
Perversion de l'ouïe, dans laquelle on croit entendre des sons,
qui n'ont rien de réel.
Ce mot se prend souvent au figuré, dans le sens d'embarras :
donner du lintoin.
Tirelire, de l'italien tira-lira, tire-franc.
— Lorscpie Lamartine, après 1848, ouvrit une souscription
populaire eu sa faveur, on dit qu'il avait changé sa lure en tirelire.
Ce mot hjre, qui prête à l'équivociue, a fait dire à llennequin,
expliquant un passage du Deutdrononie, que de Lyra, Lambin et
Juste-Lipse, s'y étaient trompés tous les trois : « Ilic de Lyra
41)6 TIT
ck'lir;it; Liiiiibiiiiis l;iiiiltiii;il : .liisliis Li[)siiis juste lapsus est. »
(Yoy. HalKîliiis, liv. III, cli. I. Edition Jolianneau.)
Tisane, du lalin jiUsanfi, [woveiiral /ipsriîia.
Décoction dOi-ur, ([ni élait la tisane ordinaire riiez les ;mfieiis.
— Tisane Nient (iiiel(|nel'ois de courtisane. ((Calembour.)
Titre, du lai in lilnhta.
Se dit de toute ([ualilication lionoralde, des Jioins rpii marquent
dignité, distinction, prééminence.
— Les titres nobiliaires sont ceu\ de : prince, duc, marquis,
comte, vicomte, baron, clievalier.
TrrUKS nONOUIFIQUKS ATTACHKS A CERTAINS ÉTATS :
Abbé, supérieur d'une communauté religieuse. Féminin altbesse
(ahbas, abbatisaa).
Alcade, arabe al, cadl, le juge.
Altesse royale, prince d'une maison souveraine.
Arcbiduc ou archiduchesse, prince ou princesse royale d'Autriche.
Bailli, oîTicier civil qui rendait la justice dans un certain rayon.
Barigel, olTicier chargé, à Rome, de veiller à la sécurité publique.
Bey, gouverneur de province turc. S'ajoute au nom des hauts
fonctionnaires turcs ou égyptiens.
Burgrave, seigneur d'un cliAteau-fort, en Allemagne.
Cadi, juge, chez les Turcs ou les Arabes.
Caïd, magistrat chargé de la justice et de la police, dans l'Afrique
du Nord.
Gahfe, vicaire do Mahomet: nom qu'a porté longtemps le chef
politique de l'islamisme.
Caporal, autrefois corporal.
Cardinal, Son Eminence.
Cheik, chef de tribu arabe, seigneur, vieillard.
Chevalier de Malte, au-dessus du commandeur.
Colonel, jadis coroncl.
Consul, de considère, veiller sur.
Corrégidor, premier officier de justice dans une ville d'Espagne.
Czar, ou Tsar, empereur de Russie.
Dauphin, prince héritier de la couronne de France.
Dey, titre que portait le chef de lEtat à Alger. Signifie oncle
maternel. Les Musulmans regardaient le sultan comme leur père:
leur république, comme leur mère; le dey, comme le frère de leur
république.
TIT 497
Dictateur. (Voy.)
Doue. (Voy.)
Dom, altrévi;ition tlo Do/niniis. (Voy. abdé.)
Kmiiience, titre donné aux cardinaux.
Kinir. de X\\\"à\)Qamara, commander: titre arabe qui correspond
à celui de prince.
Kvcque, Sa Grandeur.
Kxceilence, titre donné aux ministres, ambassadeurs.
Feld-marécbal, litre de commandement militaire en Allemagne;
correspond à celui de général de division.
Frère, nom que se donnent les membres des confréries religieuses.
Général (sous-entendu oflicier), qui commande en clief.
Gentleman, gentilhomme anglais: Son Honneur.
Gonl'alonnier, titre du chef de quelques-unes des républiques
italiennes au Moyen-Age.
Hautesse (Sa), titre donné au sultan.
Hidalgo, titre des nobles espagnols, descendus d'anciennes races
chrétiennes, sans mélange de sang juif ou maure.
Honneur (Son), s'applique aux lords anglais.
Honorable, épithète des députés, représentants du peuple.
Hospodar, titre de certains princes vassaux de la Turquie, parti-
culièrement des princes valaques et moldaves.
Landgrave, titre de quelques princes allemands.
Légat, ambassadeur du pape.
Maitre, officier ministériel.
Majesté (Sa) Catholique, le roi d'Espagne.
Majesté (Sa) Très Chrétienne, le roi de France.
Mirza, seigneur de l'Inde et du Thibet.
Nabab, gouverneur commandant dans l'Inde.
Nonce, ambassadeur du pape.
Pacha, titre donné en Turquie aux chefs des armées, aux gouver-
neurs de provinces.
Pape, Sa Sainteté, le Saint-Père, le Souverain Pontife.
Prélats, Révérends Pères.
Primat, dignité ecclésiastique au-dessus de l'archevêque. Syno-
nyme, en Occident, de patriarchat en Orient.
Rabbin, dans le sens de docteur, chez les Juifs.
Satrape, gouverneur de province chez les anciens Perses.
Schah ou Sophi, le roi de Perse.
Seigneurie (Sa), titre donné aux lords anglais.
im TOI
Sénéchal, siirinlendant de la maison du roi.
Sérénissimc (Altesse), titre des princes. S'appliquait aussi à la
République de Venise.
Sire, litre des rois et souverains.
Sultan, souverain des Turcs.
Taïcoun, empereur du .lapon.
Uléma, docteur de la Loi, chez les Turcs.
Vénérable, président d'une loge de francs-maçons.
Vicaire. (Voy.)
Vizir, ministre du sultan.
Titus (coilîure à la).
Le buste de l'empereur Titus, qui est au premier étage du Louvre,
représente ce prince avec les cheveux courts, dont les petites mèches
aplaties s'appliquent sur la tête. Le nom de Titus est resté attaché
à ce genre de coiffure.
Toast, mot anglais, signifiant rôtie ; s'écrit aussi tost.
Proposition de boire à la santé de quelqu'un, à l'accomplissement
d'un souhait.
— Le mot anglais signifie rôtie. Autrefois, en buvant à la santé
de quelqu'un, on mettait dans le verre une croûte de pain rôtie
que mangeait le dernier convive, qui recevait la coupe, passée de
main en main.
Tocsin, pour toque-sin; du vieux français toquer, heurter, et
sing, cloche.
Cloche qui sert à donner l'alarme dans les incendies et autres
dangers.
Tohu-Bohu, expression biblique : tohou va bohoii.
Etat du monde avant la création, le chaos. Ces mots hébreux
signifient vide et sans forme. Tohou, confus, va, conjonction copula-
tive, tohou, vide.
Les deux adjectifs hébreux sont toujours joints ensemble pour
former une sorte de composé invariable, exprimant l'idée de chaos,
de mélange confus.
Le chapitre XVII du livre IV de Rabelais est intitulé : « Comment
Pantagruel passa les isles de Tohu et Bohu. »
Toile, du latin tela. (Voy. toile de Pénélope.)
Toilette, diminutif du précédent.
Petite toile blanche, ornée de dentelles, que l'on étend sur une
table où l'on met ce qui sert à l'ajustement des femmes.
TO.M 401)
Par suite : cosliimo.
— Toiletle oAtravauante, tapageuse : qui dénote une absence
complète de bégueulerie.
Faire toilette : se requinquer: se mettre sous les armes. (Dict.
(les J'rccieifses.)
Avoir une toilette très soignée : être tiré à quatre épingles.
— Marchande à la toilette : ogresse, madame la Ressource,
colle qui loue des nippes aii\ lilles galantes et leur dévore tout ce
({n'eiles gagnent.
Toise, du latin (ensa. anciennement teise, corde tendue.
Mesure de longueur valant six pieds.
Toison, représente le latin (onsio, tonsionem, comme mnlsnn
reitréscnto manslo.
Tolérer, du latin tolernre, de tollere.
Au propre, c'était, d'après la loi romaine, relever de terre l'enfant
qui venait de naître, et lui accorder le droit de vivre.
Tolet, du danois toile, cheville.
Ghe\ille fixée au bateau pour faire mouvoir l'aviron.
Tombeau, dérivé de tombe, latin tiunba.
— On appelle, au propre, tombe une talde de pierre, une dalle
de marbre dont on couvre une fosse; et tombeau, tout monument
élevé sur les restes d'un mort.
Chez les païens, un écusson était placé sur une des faces du
tombeau, pour recevoir l'épitaphe ou inscription, commençant,
pour les Romains, par les lettres D. M. {Dits Manibus) : aux Dieux
Mânes.
— Nombreux sont les mots qui servent à désigner les sépultures :
Bière, bûcher, catafalque, cercueil, s'y rattachent moins directe-
ment.
Catacombes, mot d'origine grecque, Aa/« et kumbos, creux ;
tombes souterraines (des premiers chrétiens).
Cénotaphe, du grec kénos, vide, taphos, toml)eaii, désigne un
monument qui ne contient pas les restes de celui dont il rappelle
la mémoire.
Cimetière, du gVQckolmétérion, dortoir ; terme surtout chrétien.
On a dit aussi chaniier.
Cippe (voy.), du latin cippus. On appelait ainsi des tombeaux
plus ou moins ornés, dont les Romains décoraient le bord de leurs
500 TOM
grandes voies. Ils avaient la forme d'nii autel, (jiielqiiefois celle
d'une tour à plusieurs ('la.ues.
Columbarium : salle mortuaire, où, comme dans un colombier, il
y avait de nombreuses nicbes contenant des urnes cinéraires.
Hypogée, du grec hyjio, sous, (jaia, terre.
Latomie, du grec /a/ot/téô, tailler la pierre.
Mausolée. Les tombeaux les plus magnifiques portent ce nom, à
l'imitation de celui que la reine de Carie, Artémise, avait élevé à la
mémoire de son éi)Oux, Mausole, et dont on a retrouvé les ruines,
en 1857, à Boudroum, l'ancienne Halicarnasse. Les Romains en
avaient construit de gigantesques. Aujourd'hui, celui d'Auguste
sert de théâtre; celui d"ITa(1rien est une forteresse et une prison
d'État.
Nécropole, du grec nécros, mort, polis : la cité des morts.
Ossuaire, du latin ossuarium : lieu où l'on entasse des ossements.
Pyramide. (Voy.) Les pyramides d'Egypte étaient d'immenses
tombeaux. (J.-J. Ampère.)
Sarcophage, du grec sarx, phcKjô. (Voy. cercueil.)
Sépulcre, du verbe sepolire, ensevelir.
Tmnulus, mot latin signifiant tertre, monticule, renflement de
terre (tumeo). De là est venu tumulaire, qui s'applique à tout ce
qui a rapport aux tombeaux : pierre, inscription tumulaire.
Tomber, étymologie douteuse.
D'où tombereau, voiture qui se décharge en culbutant.
— Tomber a le sens absolu de chute, perte, ruine. Il est tombé
bien bas. Ce projet est tombé à l'eau.
— Synonymes : prendre un billet de parterre (jeu de mots
familier) ; tomber de Gbarybde en Scylla. (Voy.)
Je tomiie, par malheur, de la poêle en la braise.
(Régnier, Satire X.)
Il tomberait sur le dos, qu'il se casserait le nez. (Napoléon.)
— Au figuré : faire une chute, commettre une faute.
— En italien cascata, chute, cascade ; d'où le mot du slang pari-
sien cascader, faire des cascades.
Dis-moi, Vénus, pourquoi t'obstines-tu
A faire ainsi cascader ma vertu ?
[La Belle Hélène, 486o.)
— En provençal, on appelle cascarelelte une jeune fille légère,
qui se plait à rire et à folâtrer.
TOR 501
Tombola, iiml il.ilicn. du Ncflio tiimhof(n\ ciilhiitcr.
Sorte (le j(Mi de lolo, loleno do société dont los lots consistent, les
lins (Ml (dijcts de viilcni'. les autres en ohjets ridicules ou plaisants.
Tondre, du latin lomlere.
— Je \eii\éti'e tondu, si...! Anciennement, on coupait les cheveux
aux criminels, comme mai'cpic de leur dégradation.
Les serfs, chez les Gaulois, avaient la tète rasée. Les moines,
pour iii;ir(|iit'î' leur servitude spirituelle, se rasaient la tête, et ne
conser\ aient cpiiin cercle de cheveux. C'est par suite de cet usage
que les prêtres catholiques conservent encore la tonsure, comme
serfs de Dieu(?).
— 11 n'y avait que trois pelés et un tondu. Se dit d'une réunion
pou nomhrouse et pou distinguée.
...Pourtant vouloyt estudieren loix, mais voyant que là n'estoyent
que trois tigneux et ung pelé de légistes, se partit du dict lieu.
(Rabelais, II, o.)
Dans une réunion, il ne faut jamais être moins que les Grâces, ni
plus (juo les .Muses. (Plutarque.)
Tonne, tonneau, du vieil allemand (mina.
— Le tonneau des Danaïdes. (Voy.)
— Le tonnage d'un navire est le volume de son contenu.
Toper, allemand toppen.
Consentir à une otïre, conclure un marché.
— Topez là, dit-on, en se touchant la main.
Cette locution a quelque analogie avec le mot ratifiev{^.).
— Dans le centre de la France, on appelle topette une mesure
pour les liquides, de la contenance de vingt-cinq centilitres environ.
Torcher, du has-latin torcare, dérivé de torquere.
Frotter pour essuyer.
Un ouvrage bien torché : proprement fait.
Torchis, mélange de terre glaise et de paille coupée, qu'on
emploie pour remplir les vides des pans de bois, dans certaines
constructions rurales. (Voy. phé.)
Tordre, du latin torquere, pro.vençal torser.
Doii : torsade, torse, tort, tortu, tortiller, tortueux, entorse,
rétorquer, contorsion, etc.
Tort, dérivé du précédent; opposé à droit.
— Les absents ont tort. (Voy. absent.)
rjo2 ïou
Qui so fficlio a tort. (Voy. fûchor?)
Quand Iniil le inonde n lorl, tout le monde a raison.
(I.A (JiM.ssi.K, la t'ionvernante, 1, 3.)
Torticolis, foi'iiit'' do lorlum rollum, roii tordu.
— Unlichiis ;ii)i)ell(; lard-cou les cafards cl hypocrites qui tordent
leur cou en public, pour paraître en extase séraphiquc. Il dit
(liv. IV, ciiap. IM) que Carcuio-[)rcnaut a la tète contournée en
alambic.
Torture, latin tortura, action de tordre.
Par une sorte d'euphémisme, qui révèle le but qu'on se proposait,
on appelait question l'appareil elTroyable des tortures appliquées
aux accusés pour leur faire avouer des crimes réels ou supposés.
La Torliu'o interroge, et la Douleur répond.
Tory, mot anglais, du celtique signifiant sauvage.
Partisan de Charles II, en Angleterre : est resté pour signifier :
attaché au parti conservateur.
S'oppose à ivhig.
Tôt, adverbe, du latin tôt clto, comme nous disons tout aussitôt.
Dérivés : aussitôt, tantôt, bientôt, plutôt.
Toton, fatum, prononcé à la manière ancienne.
Dé percé d'une cheville sur laquelle on le fait tourner.
Les quatre faces sont marquées des lettres A. D. R. T.
A, initiale du mot latin accipe, prends, fait gagner : D, initiale
de da, fait mettre un jeton ; R indique qu'il n'y a rien à prendre
ni à mettre; T. initiale de tôt uni, indique que le joueur prend
tous les enjeux.
Toujours, est pour tous jours, son ancienne orthographe.
— Ni jamais, ni toujours : c'est la devise des amours.
Toujours est la devise des amours, cowwwq jamais est celle des
ivrognes. (Miirger.)
Toujours ! c'est un billet signé par l'enthousiasme, et protesté
t("»t ou tard par l'oubli. (Miirger.)
Toupet, petite toufle de cheveux. Origine germanique.
— Avoir du toupet, se dit dans le même sens que : avoir du
front, le front de...
Avoir du toupet, c'est avoir de l'audace, de l'aplomb.
Toupin, tupin dans Rabelais.
Pot de terre servant anciennement de mesure.
TOU 503
En Provonro. on appollc toiipin un petit pot de terre qui va
nn feu.
Le féiiiiiiiii toujtinc, di'siiine une petite jarre ou amphore, qui
reçoit les eaii\ iik'ii avères destinées au ruisseau.
De bonne vie bonne fin.
De bonne terre bon toupin.
(\'ieti\ provcrlie.)
— Cliaque toupin trouve sa cal)ucelle. (Proverl»e provençal.)
Tour, est le sui)Slantif verbal de tournrr : latin tornare.
De là : détourner, détour, détournement; contour, atours, pour-
tour, retourner. ,
Détournement de fonds pul)lics : malversation.
— Jouer un mauvais tour, ...un tour de Basque.
— Jambe faite au tour, au propre, serait une jambe de bois.
(Voy. fait au moule) : mais on entend par là une jambe bien faite,
qui a bonne lournure.
Bien loiirné qsI Topposé de ma/i(onie (voy.), homme ou femme
difforme.
— Le mot a/ours, ornements, ne vient pas du grec tornéô^
embellir ; il correspond au roman adoni.
— Teres hrarlnolinn (Catulle) : un petit bras rondelet.
— Les Latins disaient d"un homme bien fait : homo /'actifs ad
unguem, parce que les sculpteurs se servent de l'ongle comme
d'un ébauchoir naturel, pour polir et perfectionner le modelé de
leurs statues.
— Faire un tour (de promenade).
Faire sou tour de France, ...le tour du monde.
Benc (unhnia et redamhula (Plaute) : bon voyage et bon retour,
Tourlourou, jeune soldat d'infanterie.
Turelureaii, soldat de garnison. (Ducange.)
Au xiv^ siècle, on appelait turc lure (tourelourc) un château à
tourelles, et, au xvii'' siècle, on trouve dans Gotgrave, turelureau,
garçon jovial (cf. (jodrlureauj ; d'où les mots toure-loure, turlu-
rette, turlututu, si fréquents dans les refrains populaires, et qui
ont fait donner le nom de hmrc à la cornemuse. (Voy. Fr. Michel,
Études de philologie sur l'argot.)
Tournoi, ainsi appelé de ce que, dans ces exercices militaires
de l'ancienne chevalerie, les combattants ou bâtonniers, faisaient
504 TOIT
tourner rnijidcmcnl leur lifilon, épée ou Inncc, et qu'ils se retour-
nniciit eux-Mirnics inec l;i plus .ui"indc vivacité.
Tournure, dérivé de lourncr.
Synonymes : crinoline, paniers, polisson, vertugadin.
Derrière postirlie rpie portent les femmes. Kspère de supplément
à reiiihonpninl de plus en plus usité dans la toilelle des femmes,
et qui a pris, avec la modo des crinolines, une exagération presque
aussi grande qu'autrefois celle des paniers.
...De quoi elles n'ont plus honte que les femmes de bien qui
montrent l'apanage de leur fessier aux eaux de Pougues. (Moyen
de parveni7\)
Henri Estienne dit que, vers 1580, cette mode existait, et que
lorsqu'une dame demandait son bonnet pour sortir, elle disait :
« Apportez-moi mon cul » ; et quelquefois on répondait : « On ne
trouve pas le cul de madame. »
— Boursault, dans les Mots à la mode (1604), donne les noms
de quelques ajustements des femmes de cette époque : le chou, la
gourgandine, la culbute, le tâtez-y, le papillon, etc.
— En 1828, on adopta un bourrelet de crin attaché au-dessous
des hanches, pour les faire paraître plus saillantes, et qui fut
appelé « polisson ».
En 1868, on porte derrière la taille de longs rubans flottants, qui
s'appellent des « suivez-moi, jeune homme», et des nœuds énormes
appelés (( protégez-moi;, mon père ! » et « tapez-moi là-dessus ».
En 1870, le « pincez-moi ça » était un large ruban formant un
grand nœud derrière la taille.
Tourterelle, du latin tui^lur, par le diminutif turfurelki.
. Columbœ Veneri dictœ, tanquam in a/nore prannoUissimœ.
Les anciens en faisaient le syml)ole de la foi conjugale.
Conjugil fidem non violant columbœ. (Pline, X, 34.)
Tousser, jadis tussir, provençal tussiar, du latin tussive.
...Ils demourarent tous estonnez comme canes, et ne osoyent
seulement toussir. (Rabelais.)
...Puis s'estant rassis et toussy trois bonnes fois, non sans excréa-
tion phlegmatique... (Satire Ménippee, harangue de M. le Légat.)
Tout, du latin totum, provençal tôt.
— Le grand tout. L'univers a été personnifié dans le dieu Pan,
dont le nom, en grec, siguitie tout.
TRA 505
Chez R;il)ol;iis (V, ;]S), li^ pilolc Tli;iiiions ciiltMidil une. ,ùr;in(lo
voi\ qui criiiil : " l.o ,L:r;iiul l*;in ost mort! » Hiiltohiis ajoute, faisant
allusion à la niorl de Jésus-Clirisl : « Car ceslny très bon, très
grand Pan. nostre unicciuc servateur. mourut lez Hiérusalem,
ré.unant à Uoine Tibère César. »
Ual)elais n'est pas le iircniier qui ail eu rid(''e d'appliquei- le récit
laliiiltMix (le IMular(|ii(' à un personnage allégorique sur lequel tous
les historiens de ranli([uilé ont gardé le silence le })lus absolu.
— Tout à tous.
Nous sommes faicts, beaux fils, sans (iouljles.
Toutes pour Ions, et tous pour loiiles.
{Roman de In Rose.)
Tout est dans tout. (Formule de la méthode Jacotot.)
Tout ou rien : Aul Cœsa?', aut nihil. (Devise de César Borgia.)
— Toul se prend adverbialement dans une foule de locutions.
Tout à riieiirc : à l'instant.
Tout comme : la même chose.
— Tout partout ne s'emploie plus que dans le langage populaire.
Tout partout pères on les nomme,
Et, de fait, plusieurs fois advient
Que ce nom très bien leur convient.
(Mauot, ?c colloque d'Erasme.)
— Tout de mcme s'emploie pour : en vérité, néanmoins, malgré
tout : « On me l'a défendu, mais je le fais tout de même. »
— A tout le moins : au moins.
Tous tes pécliés confesseras
A tout le moins une fois l'an.
(Commandements de l'Eglise.)
Touzelle (Rabelais, lY, 4), vient de tonsella, diminutif de tonsa
(spicdj, parce que les épis de ce blé, qui est comiue la femelle
du froment, n'ont pas de barbe, et semblent être tousés, mot qui
autrefois se disait pour tondus.
Aussi touzés que moine ou capelan.
(Mauot, Rondeaux.)
— Ce blé très estimé, mûrit plus tôt que le froment, et le pain
qu'on en fait est plus blanc et plus savoureux.
— S'écrit aujoiird'Iiui foiisclle.
Traducteur, traduire, du latin traducere, faire passer.
Faire passer un texte d'une langue dans une autre.
— Traducteur, traître : traduttore. traditore.
50G ' TRA
Les sols Irnrliirlonrs lossonililoiit ;'i des v;ilots imlH'ciles, qui
clianjionl on sottises les coiiipliiiieiils dont on les charge. (M""-' de
Lafayetlc.)
Tragédie, du grec (mr/ôdln, par le latin Ircuju'dia.
— Le prix de la tragédie, à Athènes, était un houe [Irarjoti), qu'on
oITrait en sacrifice à Bacchus, dans les fêtes duquel la tragédie avait
pris naissance,
])ii plus liahilo clianlro un houe Olail lo prix.
(lioii.i:Ai:, Art poétique.)
— Jouer la tragédie : chausser le cothurne.
— La tragi-comédie est un mélange de tragique et de comique.
Trahir, du latin Irndire, pour trnder'e, anciennement traïr.
— On n"cst jamais trahi que par les siens. C'est parce qu'on ne
saurait prendre les étrangers pour confidents.
On reprochait à Malherlie d'être toujours en procès avec ses
parents : « Voulez-vous donc, dit-il, que je plaide avec les Turcs
et les Moscovites qui ne me disputent rien ?... »
Le moine Luther, le curé Ra hélais, ont été les plus grands
ennemis de l'Église : on n'est jamais trahi que par les siens.
— Haine de frères, haine de diables.
Les hommes seront trahis par leurs pères, les frères par leurs
parents et leurs amis. [Évangile, saint Luc.)
Train, anciennement tm'in, suppose traliimen.
Train de hateaux, de ^vagons.
— Aller grand train, son petit train, son train-train.
Se mettre en train.
Avoir un grand train de maison (attirail).
— Train se dit aussi pour hruit ; ce qui traîne fait du Ijruit.
— De là vient traille, corde tendue d'une rive à l'autre d'un
cours d'eau, pour haler les bateaux.
Traiter, du latin tractare.
Traiter quelqu'un sans façon, du haut en bas, comme un nègre,
de Turc à More.
Trame, du latin trama, de tramcare, passer au-delà.
Fil que le tisserand fait passer transversalement, au moyen de la
navette, entre les fils de la chaîne, pour former les tissus.
Dans les étolTes de fantaisie, la chaîne est ordinairement en
fil d'une matière moins précieuse que la trame.
TUA 507
Tramontane, d." l'italitMi tminonlana, /ra/ts monfrs.
i\oiu (iiioii (loiino dans la .MédiUM-ranée au veut du Nord, ou Itise.
Los Italiens donnaient aussi ce nom à rétoile polaire, parce
quelle indique le Nord.
— L'expression : perdre la tramontane, pour : perdre la lète,
\ient de ce qu'avant la découverte de la boussole, les marins de la
Méditerranée s'orientaient au moyen de la tramontane: dès qu'ils
la perdaient de vue. ils s'égaraient.
Trancher, peut-être de truncareij).
— Trancher le pain, trancher la léte.
Trancher une difliculté : décider une question, faire comme
Alexandre à l'égard du nœud gordien. (Voy.)
De là tranchées, coliques.
— Autrefois, ce verl)e, comme iieaucoup d'autres de la première
conjugaison, faisait son parfait délini en is :
.Mnis jo lui fraiicliis une jaiiibo
D'uiig revers jusiiues à la hanche.
(Vii.LON, Monologue du Franc Archer,]
Lors d'ung coup lui franchis la teste. (Rabelais.)
Tranquille, du latin franqni//us.
Tran(piilk' comme Baptiste. Ce Baptiste est inconnu.
Trans, préfixe latin, qui ajoute l'idée de au-delà aux mots
devant lesquels il se place.
Devient aussi tra, tré : transporter, traduire, trépasser.
A donné aussi l'adverbe ti-ès.
— Le verbe timnsir, qui a signifié mourir, vient du latin tran-
sire (et non de st ingère, d'où élreindre).
Trappe, ancien allemand trapo, piège.
Porte posée horizontalement sur une ouverture, au niveau du
plancher.
— La Trappe, ordre religieux, dont la maison-mère est à la Trappe,
près Mortagne. Trnppan, dans le patois de Mortagne, signifie tertre,
monticule ; le couvent est sur une éminence.
Traquenard, contraction de traque-renard(l).
Piège en furme de trébuchet pour prendre les renards et autres
animaux nuisibles.
S'emploie, au figuré, dans le sens de piège.
50g TRA
Travail, du Inlin Irons, r/(/ift'a. ;'i tr;ivors los vcillosf?). Pro-
vcnriil I rdhfillt, fiiliniio. niiclqiios-iins le rapprocliont de e/tt/'orcr,
et le liront de trabs, poutre. Étymologie très incertninc.
— Travailler, se donner de la peine, sont synonymes. La pré-
tention de Cti. Foui'ier, de i-endre le travail attrayant, est donc
paradoxale.
Dieu a voulu que le travail fût une peine ; ne clicrclions pas à
le rendre attrayant ; c'est le plaisir qu'il faut rendre instructif.
(H. Ri.aaud.)
Le travail est à la société ce que le mouvement est à l'univers.
Le travail est l'application des facultés de l'homme à la pro-
duction.
— L'organisation du travail industriel est un des grands
problèmes de l'économie sociale. Longtemps le travail fut entravé
par les privilèges connus sous le nom de maftrlscx, Jurandes, etc.
La liberté du travail a été proclamée eu France, en 1789.
Un édit de Turgot, de février 1776, avait déjà supprimé les
jurandes, maîtrises et corporations. (Yoy. Reçue des Deux-Mondes,
1850.)
— Le droit au travail demandé, après la Révolution de 1848, par
le parti socialiste, et appliqué aux ateliers nationaux, n'est réclamé
que par ceux qui ne veulent rien faire, ou ne sont bons à rien :
par ceux qui, comme on dit, cherchent de l'ouvrage et prient Dieu
de n'en pas trouver.
— Le droit au repos, ou du minimum, de Fourier, sera sans
doute l'objet d'une nouvelle révolution de l'avenir. Ce serait le
droit des pauvres étendu aux masses et remplaçant l'exception par
la règle.
— Le droit aux travailleurs, c'est-à-dire l'anéantissement du
capitaliste par le travailleur, a été réclamé par Splingard, au
Congrès des étudiants, à Liège (novembre 18Go).
Deus nobis Itwc olia fccit.
(VmGILE.)
(Le travail est le dieu qui donne le repos.)
Après besogner, repos et denier.
Le travail, c'est la liberté.
Qui aime labeur, parvient à honneur.
Absque labore gravi non venil ulla seges.
(HoitACE.)
C'est-à-dire, sans un travail pénible^ aucune moisson.
TRE 509
Celui qui ut' veut pas travaillei', ne mangera pas. (Saint Paul.)
(îraud lra\ail, i^iMiid plaisii' : mains ouvreuses sont iieui'euses.
Le fruit du travail est le plus doux de tous les plaisirs. (Vauve-
nargues.)
La nature nous imposte le travail comme un besoin, la société
nous en lait un devoir, l'habitude nous en fait un plaisir.
Ldhor omiiiii rincit
Improbas, el durix unjcns in rébus ei/estas.
(Viiu;ii.F., Géorrjiqnes, I, IV8.)
Travailler, mtMue origine que le précédent.
Synonymes : liùrher. travailler beaucoup, comme le bùcberon :
piocher, Iravailler comme l'agriculteur.
Travailler à la journée : à la conscience.
Travailler pour les autres : être le bœuf.
Travailler pour le roi de Prusse (voy.) : (jratis pro Deo, inuti-
lement.
Exemple de travail pour le roi de Prusse : porter de l'eau à la
rivière, du Itois à la forêt.
Envoyer des clioueltes à Athènes : Noctuas Alhenas miltere.
(Cicéron.)
Demander de la pitié à sa belle-mère : Apud novercam qaeri.
(Plante.)
Travailler mal : bousiller.
Travailler à des niaiseries : en cogne-fétu.
Cesser de travailler, se mettre en grève. (Voy.)
Tréfonds, contraction de lerrœ fundus.
Le fond qui est sous le sol, qu'on possède comme le sol même.
Treize, du latin iredccua.
— L'idée superstitieuse attachée au nombre treize vient sans
doute de ce que les apôtres étaient treize à tal)le lorsque Jésus-
Christ célébra la Cène avec eux, et que l'un d'eux le trahit. Aussi
appelle-t-on le nombre treize « le point de Judas » et « la douzaine
du diable ».
Cette superstition a donné naissance à la profession fantaisiste
de quatorzième, ou de convive toujours disponible pour rompre le
charme quand on ne serait que treize à table.
Les hommes les plus intelligents sont quelquefois frappés d'une
terreur inexplicable par ce cbilïre funeste. (Voy. néfaste, ven-
dredi.)
510 TRK
— Ktrc treize à table est chose tivs mnllieiireiise. surtout qimnd
il n'y a à manger que pour douze.
— Alphonse de Rotlischild fait changer en 12 Ins le numéro 13
de son hôtel (18(58).
— Il n'y a que la Ireiziruie pomuio à la douzaine, (jui soit bien
accueillie dans le monde superstitieux.
— La boutique à treize a aussi un grand succès dans le public,
et a enrichi plus d'un modeste spéculateur.
— La Société des Treize, à Bordeaux, se propose de détruire par
l'exemple cet absurde préjugé du nombre treize. Les séances de
celte société sont des banquets, où treize convives vont s'asseoir le
vendredi de chaque semaine. La fête de l'association se célèbre le
treizième vendredi de Tannée. On prend l'engagement de com-
mencer un vendredi toutes ses entreprises, et de se mettre en
voyage ce jour-là, de préférence à tout autre, A table, on renverse
le sel, et on allume trois tlambeaux ; on retourne le pain, et on
met les couverts en croix. Les personnes réputées pour avoir le
mauvais œil sont aduiises de plein droit.
— Les gens superstitieux se servent aussi d'une foule de mome-
ries, pour conjurer des maléfices imaginaires. Ils font une croix sur
le pain avant de l'entamer ; un sou troué doit leur porter bonheur,
comme la corde de pendu. 0 o.^')
Le vin répaiida est bon signe.
Sel renversé, mauvais oniine.
(xvi» siècle.)
— Araignée du matin, chagrin ; du soir, espoir.
Tréma, du grec tréma, trou (dans les dés à jouer).
Deux points mis sur une voyelle, pour indiquer qu'elle se détache
de celle qui précède : aïeul, ciguë.
Tremper, du latin temperare, par métathèse.
Tremper du pain dans son vin : boire par procuration. (Rabe-
lais.)
Manger la soupe du perroquet.
Tremplin, du vieux verbe ti^éper, triper ; d'où trépigner.
Planche inclinée, élastique, qui sert à prendre son élan pour
faire le saut périlleux.
Trente et quarante.
.Jeu do hasard, qui se joue avec six jeux de cartes mêlés, tenus
par un banquier qui dépose successivement sur la rouge et sur
TRI SU
la noire, des cartes, jusqu'à une valeur moindre de quarante et
siipérioiire à trente. Celle des deux ronleurs qui approche le plus
de trente et un a ^uaiiué.
Trépied, du latin trijx's, tripedis.
— Le li'épied d'A[)oll()n étail un Nase à trois pieds, qui jouait un
r(')le important dans le mobilier de la diseuse de bonne aventure
appelée chez les anciens Pythie.
— Aujourd'hui, être sur le trépied, c'est être inspiré, transporté
de la fureur [)oéti(iue ou pro[)hétique.
Très, du latin /fans.
Adverbe anipliatif : qui passe les limites, va jusqu'au-delà.
On disait jadis Iréstoiis ; ce vieux mot exprimait le superlatif de
tons.
— Trans se trouve dans frcssuer, suer abondamment (en pro-
vençal tressusar) ; tressaillir.
— Dans certaines provinces, très devient ter, par métathèse :
tersauter, pour tressauter ; tertous.
— Très s'emploie devant les adjectifs et les adverljes, pour leur
donner la valeur d'un superlatif absolu. (Voy. trans.)
Trêve, vieux français trtce, du bas-latin trenga.
Cessation temporaire des hostilités.
— La trêve de Dieu : convention entre les seigneurs, au xi° siècle,
de cesser toute hostilité, du mercredi soir au lundi matin.
Tricher, du latin trlcare, chercher des détours.
Ou de trucher {'.) qui, en argot, signifie gueuser.
De là, tricherie.
La triclierio, enfin, va toujours à son maître.
(Uauteuochk, l(; Soupev mal apprêté.)
Tricot, tricoter, tricoteuse; d'un bourg du département de
l'Oise où l'on a inventé le tricot au métier. Ou de l'allemand strick,
lacet.
— On a appelé, en 1793, certaines femmes, tricoteuses.
Le 6 nivôse, an ii, la commune de Paris décrète: « Les femmes
assisteront aux fêtes nationales avec leurs époux et leurs enfants ;
et elles tricoteront. »
Trinité, du latin trinitas.
Ut unitas, trinitas. (Inscription sur l'église de la Trinité, 1867.)
Nix, glacies, aqiia, sunt tria nomina, res tamen una :
Sic in personis trinus Deiis est tamen unus (157ii).
Slâ TllO
Trinqueballer (Rnbclais) ot irimhalor, terme populnire.
Syiioiiyiiics : l'eiiiiKîr, lir;iiuloiiiller (?).
A force de trinqueballer les cloches (Hahekiis, liv. I).
Trinquer, de l'allemand trinhen, boire.
IJoiro (Ml clioqnant les verres.
Triomphe, du latin iriiunphiis. Du vieux latin trioiies, attelage
de bœufs (0-
Le triomphateur, arrivé au Gapilole, iuiinolait deux. I)œufs, de
même que, dans l'ovation, ou petit triomplie, il immolait des béliers.
Tripot, du latin irlpodium, sorte de danse des anciens, qui
s'exécutait dans les mauvais lieux.
Ou du vieux français triper, marcher, gambader.
On a aussi donné ce nom au jeu de paume.
Trique, anciennement e5/?'/^^^e; du néerlandais^/r^y/i^;?, frapper.
On appelle aussi, par antiphrase, triques, les petites aiguilles qui
servent à tricoter, à démêler le fil et la laine.
Triste, du latin tristis, de tei^o, trivi (?).
— Triste comme un bonnet de nuit.
11 me parut d'une tristesse comme lorsqu'on a fait un pacte avec
le diable, et que le jour de se livrer approche. (Sévigné).
Jérémie aurait été un bouffon auprès de lui, disait Rivarol, en
parlant de son frère.
— Synonymes: broyer du noir ; en. voir de grises; être insup-
portable à soi-même; n'avoir pas le cœur à la danse; avoir des
soucis.
Triton, origine grecque et mythologique.
Divinité marine qui semble être le symbole du mugissement de
la mer. C'est au son de sa conque que Neptune soulève les flots, ou
les apaise après la tempête. Les tritons, monstres moitié hommes
et moitié poissons, accompagnent le char de Neptune et sont ses
hérauts.
Troglodytes, du grec troglê, caverne, duein, entrer.
Peuples fabuleux de l'Afrique orientale, qui, selon Pline, habi-
taient, le long du golfe Arabique, dans des souterrains, sans doute
pour échapper aux ardeurs du climat.
Trognon, pour tronçon (?).
Trognon de cliou, de pomme,
TRO olâ
On (lis.iit iiiid'ofois tron de cliou, de lance. Ce mot ne sert plus,
et rAciidéiiiii' l'a siipiirinié dans réditioii de 183o.
Trois, du latin très, qni est [irovençal.
— Les HoMiains appeUiient la l'ègle de trois, aurea /'Cfju/a.
— Kn ti'inité ,ait perfection. (Bovilly.)
— Les anciens buvaient trois fois, en llionncur des trois Grâces.
11 y a trois vertus tliéolojjales.
11 y avait dans la mythologie trois grands dieux : Jupiter, Nep-
tune et Pluton ; trois Parques, trois Furies, trois Gorgones, trois
Grâces, trois Sibylles.
Cerbère avait trois tètes : Géryon, trois corps.
On comptait trois âges.
Il y a trois couleurs primitives : bleu, jaune, rouge.
— M. de Bouald a a[)pliqué le principe triple de cause, moyen et
ell'et :
A la Trinité : le Père, le Fils et le Saint-Esprit.
Aux mystères de la foi catholique : la Trinité, Tlncarnation, la
Rédemption.
A la société politique : le pouvoir, le ministre, le sujet.
A la société domestique : le père, la mère, l'enfant.
A la vie de l'homme: la volonté, le mouvement, l'action.
Aux pronoms personnels : je, tu, il.
Trombe, du latin (wbn (?) : italien et espagnol tromba.
Colonne d'eau enlevée par le vent, et tournant sur elle-même
avec une très grande vitesse.
Peut-être vient-il de l'italien tromba, à cause de sa forme arrondie
comme celle d'une trompette.
Tromper, ètymologie inconnue.
Au [uupre, sonner de la trompe ; a passé au sens de se jouer de
quelqu'un.
— Il y a plus de trompés que de trompettes : la honte d'avoir
été pris pour dupe empêche de publier sa mésaventure.
Il fait bon battre un glorieux, il ne s'en vante pas.
(Jui diable est-ce donc qu'on trompe ici?... (Beaumarchais,
Barbier, III, 1.)
— On n'est jamais trompé : on se trompe soi-même.
— Synonymes : attraper, carotter, confondre, leurrer, mystifier,
piper, tricher.
Se tromper : faire une bévue; avoir la berlue ; se blouser, couper
33
514 TRO
dans le pont: se fourvoyer; tomber dans le panneau, ...dans le
piège.
S'enconoonrder, en provençal: se mal marier, faire un marché
de dupe, acheter une coiiri^e i)Oiir un melon.
Prendre son cnl pour ses chausses ; prendre Gauthier pour Gar-
guille ; prendre martre pour renard; prendre le Pirée pour un
homme ; prendre des vessies pour des lanternes.
— Trom[)e-rœil : sorte de tahleau où les ohjets de nature morte
sont représentés avec une vérité qui fait illusion.
Trop^ du bas latin troppus, grande quantité.
Dans la basse latinité, troppus a signifié troupeau.
Si cnim in Iroppo de jumentis. {Loi des Allemands, de 030.)
— Adverl)e de (piautité: plus qu'il ne faut, avec excès.
— En provençal, irop signifie excès et troupe.
En roman, (rop équivaut à beaucoup.
Trop vos am mais qu'ien no sai dir.
(Elias de Barjols.)
(Je vous aime beaucoup plus que je ne saurais dire.)
— Trop se disait aussi en vieux français dans le sens de beaucoup
et se rapportait à ce qui peut se compter. On disait : trop de gens
(troupe de gens), pour : beaucoup de gens ; comme nous disons :
une foule de gens.
Et ce a-t-il lait a trop de gent,
Saiiz prendre salaire ne argent.
{Miracle (le aaint Va!eiitin.]
— 7'rop garde encore la valeur de l»ien. pai'faitement, dans :
Je ne sais pas trop si... (3n ne peut trop dire si...
— Qui trop embrasse, mal estreind. (xvie siècle.)
Fais quatre choses à la fois,
Ta dois en manquer près de trois.
Cil qui trop convoite, tout perd.
(Voy. lièvre).
— Rien de trop : lYe quid nimis (Phèdre et Chilon).
Maxime que les Grecs avaient écrite dans le temple dApoUon,
auquel ils l'attribuaient. (Mêden agan.)
Le sens était : L'excès en tout est un défaut.
Rien de trop est, à mon sens, la maxime la plus utile de la vie.
Dans le Paradis perdu, de Milton, Adam demande à l'ange
Gabriel s'il vivra longtemps : « Oui, dit l'ange, si tu observes la
grande règle : Rien de trop. »
THO ol5
— Tro|), c'ost trop. (Kivarol.)
T;ilk'\r;iii(l disail à ses agents diplomatiques : « Surtout, Mes-
sieurs, pas de zèle ! »
Il faut être sage même avec modération.
...Sam iil (irbilror
.Appriinc in riln cs-ic utile, ut ne quid nimis.
(TtJnENCE, Andrienne, I, 1.)
— BeaumaiTliais (Miiruige de Figaro, IV, 1) dit : « En fait
d'amour, vois-tu. trop n'est pas assez. »
Pour être assez l)on, il faut l'être trop.
...Il s'y était amusé fougueusement d'abord, plus qu'assez et
même plus que trop, presque jusqu'à se détruire.
— Panard a fait sur Rien de trop, une pièce dont voici un
fragment :
Troj) (lo repos nous eiigoiinlit,
Trop (lo fracas nous iHouriiil ;
Trop de froideur est indolence.
Trop dacUvilé. turbulence;
Trop damour trouble la raison.
Trop de remède est un poison ;
Trop de finesse est artifice,
Trop de rigueur est cruauté.
Trop d'audace, témérité,
Trop d'économie, avarice ;
Trop de bien devient un fardeau,
Trop d'honneur est un esclavage ;
Ti'up de plaisir mène au ti)mbeau.
Trop d'esprit nous porte dommage ;
Trop de confiance nous perd,
Tro[i de franchise nous dessert ;
Trop de bonté devient fail)lesse.
Trop de fierté devient hauteur.
Trop de complaisance, bassesse.
Trop de politesse, fadeur.
— Monsieur de Trop..., qu'on chasse de partout.
Trope, du grec (rnpos, de trepo, tourner.
— Les iropes tournent au sens lîguré le sens naturel des mots.
Ce sont des ternies d'écolo à la physionomie un peu pédante, mais
qui ont l'avantage, une fois expliqués, d'épargner de grandes circon-
locutions. Le irope est donc l'emploi d'une expression dans un sens
ligure. Exemple : La lumière du soleil éclaire le monde.
Cet écrivain fut nne des lumières de son siècle.
— On peut réduire les tropes à quatre principaux : la synecdoque,
la mélaphore, la mdlonyniie, la mélalepse.
1° La synecdoque est un trope par lequel un mot, au lieu de
Mû TIU)
l'objet qu'il dési,a'n;iit priiiiilivemcnt, en désip^ne un autre, en vertu
de leur coexistence. Ainsi : les ?nor(el.s, pour les hommes-, une
voile, pour un navire.
2° La métapliorc est un trope par lequel un mot, au lieu de
l'objet qu'il désipnc au propre, arrive à en dési.uner un autre, en
vertu de la ressemblance que l'esprit aperçoit entre eux.
Toute métapliore est une comparaison. Le désespoir peut faire
un tigre d'un agneau ; lif/re et arjneau sont pris pour liomme doux
et homme cruel. Dur, pour impitoyable ; pen.Her, pour peser,
sont des métaphores.
3° La métonymie est un trope par lequel un mot fait pour repré-
senter une idée, est employé pour un autre mot exprimant une
idée voisine de la première, en vertu d'un rapport commun.
Ainsi, le mot tjmvail se prend pour la subsistance qu'il procure,
et l'on dit : vivre de son travail ; son travail nourrit toute sa famille.
C'est prendre la cause pour l'etret. Il gagne sa vie avec peine ; ici
vie est mis pour subsistance, et l'elïet est pris pour la cause. On
dit pastel, pour peinture au pastel.
La métonymie emploie aussi le contenant pour le contenu, et
réciproquement : le jKilais, pour les juges ; la maison, pour les
habitants.
...Pour punir les crimes de la terre.
(La Fo.ntaine.)
Eulin ce trope se sert du nom d'origine pour désigner la chose
qui en provient. C'est ainsi que sont formés les mots cachemire,
madapolam, madras, tulle.
On a nommé de l'Inde les produits que ce pays nous envoie :
indienne, indigo, dinde.
4" La métalepse est un trope par lequel un mot, au lieu de l'idée
qu'il exprimait primitivement, rend une autre idée, eu vertu de la
relation d'ordre qui existe entre elles. Cette ligure prend l'antécé-
dent pour le conséquent, ou le conséquent pour l'antécédent.
Ainsi, on emploie entendre pour comprendre : J'entends bien
votre affaire. Il a vécu, pour il est mort. (Yoy. antonomase,
amphibologie.)
Tpou, origine fort incertaine.
— Il n'a vu le soleil que par un trou : c'est un ignorant, qui
n'est jamais sorti de son village.
Rabelais (II, 34) dit qu'il faut se déiler des gens qui regardent
TIIO ;j!7
par un portnis, ou, comme on dit, par une fencMrc de drap. Il veut
parler des moine?, qui voient par l'ouverture de leur cauoule.
Troubadour.
Les purlfs (le raucicnne Ti'ance étaient les Ironlxidourti pour la
lanuue d(n', et les irouvi'res pour la lanuiic d'oïl.
Ces deux termes signilient également trouvcur, créateur, inven-
teur : dans lroubadoiu\ le b gascon a remplacé le v, et le d repré-
sente le t.
LQ,mo\ barde siguiliait aussi chanleur ; comme le grec y^o/eVe*',
d'où poète, créateur.
— Le plus ancien troubadour connu est Guillaume IX, comte
de Poitiers et duc de Guienne, né le 20 octobre 1071, mort le
JO lé\rier 1127. Le second poète, par ordre de date, est le trouvère
Wace, qui puldia le Rof/ia/i de Brul et le lioman de Hou, en
dialecte normand (ll'w).
Trouble. (Voir le suivant.)
— Pècber en eau tronhle : faire des prolits illicites.
Il n\'st que ijèclior en eau trouble.
Il n'y a jamais eu de troubles dans l'État, sans profit pour les
vauriens : quand beau bout, l'écume surnage.
Troubler, \ieu\ français torbler, du latin (urbulare.
De tai'bulare viennent : turbulent, perturbation, imperturbable.
Quelques-uns le font venir de tribukire, qui a laissé tribulation,
et qui se rapprocbe de tinbulus, cbardon à trois pointes.
Trop sommes aveugles qiuuKl si le Irihoiilons.
(J. nv. .\Iki:.m;.)
...Sont foulez
Et par fortune trihuiilez.
(Al. ClIMlTIKIl.)
Géniu condamne;'! regret cette étymologie ingénieuse, et rapporte
troubler à lurbare. L';' a été transposé comme dans beaucoup
d'autres mots, par exemple dans frouiaye, brebis.
— Synonymes de se troubler : perdre la boule, la boussole, la
carte, la tramontane. (Yoy. désorienter.)
Troupe, du bas-latin troppus, d'un type trupa pour turba.
De là : troupeau, attroupement.
— Troupe de comédiens. A Rome, une compagnie de comédiens
s'appelait aussi grex.
5i8 THU
Trousser, ;incion fiMiiciiis loracr; du l.itiii lortUire, (U'Tivc de
(or/IIS, cl de lorf/iirre, ;itl;iclior solidement.
D'oii : trousse, haun.uos, l'éiiiiioii d'olijcts lirs eiiseiiihl)' : retrous-
ser. Illettré plus liant.
(Ml iippelle Mussi /rousse ce qui enveloppe nii ohjet porté; c'est
relui du carquois de Cupidou, aussi bien que celui du harhier ou
du cliii-uroien.
Le trousseau de la mariée, c'est le paquet de ses liardes.
Un trousseau de clefs, c'est proprement un paquet de clefs.
Trousser bagage, c'est plier hagapes, partir.
Les trousses sont le vêtement cpi'oii porte, et se retrousser c'est
relever le bas de ce vêtement.
Se mettre aux trousses de quelqu'un, c'est s'attacber à ses vête-
ments, cbercher à le saisir par là.
Comme Molière a dit : tenir au cul et aux cbausses.
Trouver, peut se rattacher au latin turbare, remuer, fouiller.
Provençal trobar.
Rencontrer, par basard ou en cbercbant.
— Trouver la pie au nid. (Voy. pie.')
Aurl venas invenire (Gicéron) : trouver une mine d'or.
Il ne trouverait pas de l'eau à la mer.
J'ai trouvé ! Eurêka !
Je puis m'écrier, comme Arciiimède : Eurêka !
Truand, origine très douteuse.
Signilie, dans l'usage, un coquin, un mendiant; mais il vient de
tributum, ira, pour tribut, et a le sens de vilain, qui paie taille
et tribut. Serait ainsi l'opposé de genlil, noble, qui se trouve dans
gentilhomme (?\
Rabelais dit (liv. III) : « Toute cette Iruandaille de monde qui ne
preste rien... et qu'il faut nourrir. » 11 entend par là: Tout ce
monde parasite et inutile de bélîtres, ou moines mendiants, appelés
autrefois truands, à cause que leur paresse et leur gueuserie leur
constitue une sorte do tribut sur le reste de la société, qui travaille.
— Les rues de la Grande et de la Pctite-Truanderie, à Paris,
étaient habitées par les truands; le repaire principal où ils se
réunissaient, était la Cour des Miracles. (Yoy.)
Quand je vois tous nods ces truands.
Trembler sur ces fumiers puants,
De froid, de faim, crier et Ijraire,
Conte ne fais de leur affaire.
(Marot.)
* Tl'H ol9
— De trunnd \iont l'arf^ot t7'uchej% mendier, voler.
On n dit ;iu?si (iiie (rnnnd vient de ce qu'autrefois, en Bour^opne,
on ;iv;iit donm'' le nom de //•//, à un imp()t onéreux, qui réduisait
les contriliiialiics à la iiicmlicité.
True, dans l'argot foiirhesqne, est une manière de voler. De
tnicco. Iifiloii. moyen d'introduction pour extorquer de l'argent.
— Tntr, dans le sens de rouerie, malice, était déjà usité au
XI v« siècle.
— En langage des coulisses, tinic sert à désigner un des cliefs-
d'd'uvre du machiniste, un coup de théâtre bien réussi et ne mon-
trant pas la licelle.
Les féeries sont des pièces à truc.
— La ^ertu simulée qui cache un vice, est uu trur : bref, un truc
est uu procédé ingt''nieux. un moyen peu connu pour arriver à un
but.
— LoH Trnq (d'Auhigné, Aventurpa du baron de Fœneste.
liv. IV. ch. 14). jeu de cartes à deux personnes, où les meilleures
cartes sont le sept, le six et l'as.
Truqueur, vient du saxon fo iriir. commercer par éciiange.
Brocanteur, ai'tiste qui fait et qui vend de fausses antiquités et
autres objets de curiosité.
Tu autem, mots latius.
— Savoir le lu aufcm... Eu sçaurez le fu auiem (Rabelais, liv. l.
ch. 12).
C'est une façon de parler ancienne, prise des leçons du bréviaire,
qui Unissent par celte formule : Ta autem. Domine, miserere
nobis.
Savoir la fin d'une choie, par suite la connaître à fond.
Tuer, étyniologie incertaine; du latin tuditare, fréquentatif de
tudan; \l}, Ijieii itlut()t que du grec thaein, immoler.
Avant de prendre la signilication de « faire périr », a eu celle de
frapper, éteindre, étouffer.
On a dit : tuer le feu, la chandelle, et : ma chandelle est morte.
Tant tués que blessés, il n'y a personne de mort.
Les gens <iiie vous tuez se purleiit assez bien.
(ConNEii.r.K, le Menicur.)
Vous tuez donc des gens qui se portent fort bu/ii.
(.MoLiÉnE, Etourdi, U, 7.)
320 TUU
— Tuer le, leinps. (Voy.)
— On (lit, dans le Herry, d'un Mniricn qui. |ioiii- le plus mince
prolit, ne recule devfint ;iucune mniivaise adion : « Il tuerait bien
un mercier (colporteur auihulant) pour un pei.uue. »
Rabelais intervertit plaisamment les termes de ce dicton : c Oli !
si vous moy (aides vostre lieutenant, dit Merdaillc je lucroye ung
pigne pour un marcier. »
— Tuer la poule aux œufs d'or. Allusion à un ancien apologue
attribué à Ksope. Un boinme possédait une poule qui pondait
cliaque jour un œuf d'or. Il la tua pour devenir ricbe tout d'un
coup, et ne trouva rien.
Il y a aussi des fous de cette espèce, qui jouent une fortune mé-
diocre mais assurée, dans l'espoir d'une grande fortune qui n'arrive
jamais.
Tuffîère, du grec tup/tos, orgueil.
— Destouches a appelé « marquis de Tufiiére ■ le liéros du
Glorieux, comédie jouée le 18 janvier 1732.
Tuile, vieux français toule, du latin icgula. ce (jui sert à
couvrir.
— Il lui est tombé une tuile sur la tête : un accident, un malheur
imprévu lui est arrivé.
Quelle tuile ! — Pyrrhus, roi d'Epire, fut tué, au siège d'Argos,
par une vieille femme qui lui envoya une tuile du haut d'une
maison (272 avant Jésus-Christ).
Patatras ! voilà la tuile; voilà le seau de glace que je redoutais.
Tu quoque! phrase latine elliptique : Toi aussi !
Ce sont les paroles de César, lorsqu'il aperçut au nomlire de ses
assassins Brutus, qui passait pour être son (ils.
Turc.
Les Turcs font remonter leur origine à Turc, (Ils aine de Japhet.
Synonyme : mamamouchi.
— Le Grand Turc. Au xvi" siècle, Mahomet II, empereur des
Turcs, fut appelé par les chrétiens « le Grand Turc », à cause de
l'étendue de son empire; par opposition au sultan de Cappadoce,
qu'on appelait « le Petit Turc » .
— Fort comme un Turc. C'est sans doute un Turc qui a donné
cours à ce proverbe, comme l'homme s'est intitulé « roi de la
création ».
On peut supposer que c'est pour combattre cette prétention qu'a
Tl'ï 521
été inventée la « létc de Tiiir », surmontée d'iin lnrh.iti. sur laquelle
on frappe des coups si terrililes pour donner la prcinc de la vigueur
de son liras.
— Trailer de Turc, à More (Molière, Pt'écieuses, se. X). Traiter
quelfpi'uu avec la dernière riuueur ; sans doute parce que les Turcs
et les Mores, dans leurs anciennes guerres, ne se faisaient aucun
quartier.
— Les Turcs nous appellent « chiens de chrétiens ». A notre
tour, nous donnons souvent à des chiens les noms de Turc et
même de Siill.ni.
Turcaret, riche tlnancier, sot parvenu.
C"est le héros de la comédie de Lesage qui porte ce nom, jouée
en 170Î).
Turlupin.
Moliéi-e appelle (urhipin^ les faiseurs de jeux de mots et de
calemhours, qui étaient très nombreux de son temps. (Yoy. Criti-
que de l'Ecole des femmes, se. I.)
La Bruyère se plaignait encore de leur langage extravagant et de
leurs gestes alîectés.
Boileau, dix ans après Molière, avait dit, dans XArl poétique :
Toutefois à la cour les turlupins resièi'eiit.
Insipides piaisanls, bouffons inforlunés.
D'un ji'U (le mois grossier partisans suranni-s.
— - Ti(rlu])in fut le nom de guerre d'un comédien, dont le vrai
nom était Henri Legrand, garçon Ijoulanger qui se lit acteur en
1383 et joua la cotnédie pendant plus de cinquante ans. Il était
associé avec Gautier Garguille et Gros-Guillaume. Le caractère des
rôles de Turlupin était la raillerie et le ridicule. Gautier faisait le
maitre d'école, et Guillaume l'homme sentencieux.
Turlututu, imitation du son de la llùte.
Refrain de vieilles chansons.
— En 1820, on appelait au Conser\atoire de Paris les opéras
de Rossini, des turlututu. (A. Adam.j
Tutoyer, formé de tu et de toi.
— Dire tu à quelqu'un: être à tu et à toi: traiter familièrement.
Ne tutoyez pas mes atïaires, n'y touchez qu'avec précaution.
On rit avec vous, et lu te fâches ! (Burlesque.)
— Les Provençaux ont l'habitude de se tutoyer eux-mêmes dans
522 UNI
ccrtnins iiioiiolo.uiies iiiliiiics : " Je iik; suis dit : Va ;i la caiiipa^mc;
on ne t'attend pas, tu siirprciulras Ion monde. »
On tr'oiive dans le roman (''.ay|)lien (W Sr'fo. Ii"idiiit |)ai' .M.dlialias,
sur les j)apviMis troiiv(''S dans les hypogées de la ilaiilc-lveypte, Srta
se parlant à liii-mrme en ces termes : « Dois-tii aller à Copies pour
fnnir avec eux ? »
Tympanite, du prec lijmpnnon . par le latin tijmpnnum,
tanilioiir.
Ballonnement du ventre. Citez les hëtes à laine, on lui donne le
nom de méléorisnflon. (Yoy. pet.)
u
U. La lettre u est le v arrondi. Elle n'a été introduite dans la
typographie qu'en 1629, par Zeitner, imprimeur à Strasbourg.
Le t et le ./ ont été créés au xvi" siècle comme consonnes pour
doubler 1'/ et 1'/^. On les appelle des semi-voyelles.
Ultramontain^ du latin ultra, montes.
Nom donné aux partisans du pouvoir spirituel et temporel du
pape, parce que Rome, où siège le pape, est située, par rapport à
nous, au-delà des monts.
— S'oppose à gallican.
Un, du latin uniis.
Qui est seul.
De là : aucun, chacun, quelqu'un.
— Autrefois on écrivait souvent ung, et au pluriel uns.
Rabelais (liv. IV, 52) dit : Unes vieilles Clémentines.
En provençal, on dit aussi uneis au pluriel, se rapportant à des
noms pluriels : uneis ciseaux, uneis l)as.
...Délectation nous combat, luxure nous abat, ambition nous
guerroyé, avarice nous tourmente, envie nous insidie, et ire nous
surprend. Si l'ung de ces vices est vaincu, l'aultre recommence la
bataille. (Le Triomphe de la noble et amoureuse dame)
Uni, datif de unus. Ou plul()t participe de unir, du latin unire :
sauf en composition, où il est le radical latin ; uniforme, unanime,
quand il a le sens d'unique.
USA 523
— Unis rnmmc la chair ot l'onulo. conniio les doijils de la main,
coniiiie le licri'o à l'oiMiieaii.
Union, du laliii iinio.
— L'unidii fait la foi'cc. On (•tniiiail la fable des Iia.iiiieltes qiroii
brise isoléiiicnt. cl ([ii'il est iiii[)i)ssililt', de rompre (jiiaiid elles sont
unies en faisceau.
L'homme n'est fort que par l'union. (Mirabeau.)
— Trait d'union. L'enfant est le trait d'union entre l'homme et
la femme. L'intérêt est le trait d'union des familles ( ?).
Univers, du latin iin/'rersNs: d'où uniL^crscf, qui s'étend à tout.
General, commun à un très .urand nomlu'e, soutire des exceptions;
unir erse/, les exclut.
— L'auteur de la préface du Dictionnaire de VAcadéinie (183o),
dit que « notre lanaiie a pris en Europe un empire presque
universel ». Il y a deux fautes dans cette phrase : ce qui est
presque, n'est pas tout à fait : et ce qui se fait en Europe, n'est pas
plus iinivorsol que l'iMirope n'est l'univers.
Université. Corps établi pour enseigner l'universalité des
coiniaissanres humaines : langues, belles-lettres, sciences, etc.
Urbanité, du latin urbanitas. dérivé de urbs (urbore, tracer
le sillon).
L'usage cliez les anciens était de tracer uu sillon pour circons-
crire resi)ace où l'on voulait construire une ville.
L'rbs ex conjunclis doniici/iis constat; ciritas ex convenli-
culis hominum. (Cicéron.)
Uriner, du latin urina, de urne, vase de nuit (?).
Synonymes : pisser, lâcher l'écluse; faire le petit, faire pipi.
Expulser le superllu de la boisson. (Molière, Médecin inalrjré lui.)
— Uriner contre un mur : lire les aftiches. (Yoy. jocrisse.)
Urinoir.
Synonymes : vespasienne; porcelaine d'appartement; Bourdalouc.
Rambuteau. Guérite-urinoir en forme de colonne, servant à
l'allichage, autorisée sur la voie publique sous Louis-Philippe, par
M. de Rambuteau, préfet de police.
Usage ; anciennement us, de usus, avec le suffixe âge.
— On use d'une chose co//? m ?/;?e (accoutumée), usitée {(\m sert
souvent), inusitée (tombée en désuétude).
o24 rsu
— On emploie encore Texpressioii : les us et coiiUinies, pour
signifier les anciens nsaaes. la pratique suivie clans un pays.
— L'usage fait la lui. More m far II. us us. (Ovide.)
Usas. cfficacisHiinns reriim omnium mnghler. (VWnc. J/i.s/on^e
nalurelle, XXVI, 2.) En toute chose, l'usage est le meilleur
maître.
— Il n'y a ni bien ni mal, ni vice ni vertu, ni beauté ni laideur :
il y a des ti'adilions reçues, des usages admis, et des a[)préciations
relatives au temps et à la société où l'on vit.
— Bossuet appelait l'usage « le père des langues ».
— L'usage est un quarante et unième académicien, qui fait la loi
aux quarante autres.
— Synonymes: enseigner les usages du monde: décrasser;
employer la savonnette à vilain.
User, de usure, dérivé fréquentatif de uti.
De là : utile et outil, abus, usure, usurpé, usité.
— Usé jusqu'à la corde, ...comme une vieille ficelle.
Usé, llétri par l'usage ; frais comme les épinards bouillis.
— La goutte d'eau use la pierre. (Yoy. rjoutte.)
...Il y a (dans les églises d'Italie) de ces images des marbres les
plus durs, de ceux qui font rebrousser le ciseau du sculpteur, usées
et fondues comme la cire, sous l'ardeur et la persévérance des
baisers des fidèles...
Les socles des deux colonnes de la Piazzelta (à Venise), ornées
primitivement de sculptures, sont entièrement usées par le frotte-
ment. Combien il a fallu de fonds de culottes pour user ce granit,
est un problème que nous laissons à résoudre aux mathématiciens
sans ouvrage. (Th. Gautier.)
— L'esprit use le corps. (Yoy. esprit.)
Usure, du latin usura.
— Faire l'usure, c'est agir dans un temps très court comme le
temps fait à la longue en usant (rendant frustes) les monnaies.
Les usuriers soutiennent les tils de famille, comme la corde
soutient les pendus.
Les usuriers ne nous prêtent cinq francs, qu'à la condition qu'on
ajoutera des zéros à la reconnaissance.
— Synonymes d'usurier : Gobseck, mot créé par Balzac.
Ogre : il finit toujours par dévorer ses clients.
TTO tm
Onclo, coiniue « ma tante ■ désigne le mont-dc-piélé. S'applique
snrtont aux [trt'tcnrs sur gages.
Sliilock. vampire.
Usufruit, (lu latin i/si/s frutius.
Jouissance des revenus, des frnifs diin héritage, des intérêts
d"un rapital dont un autre est prnpriétaii-e.
Utile, du latin u/i/is, ce qui est bon pour l'usage.
D'où futile (fu/'l nti/iii), c'e.st-à-dire inutile.
— D'utile on a l'ait, au commencemcïnt du xix« siècle, le mot
utiliserai même utilitaire,\>om' désigner l'école fondée vers 1800,
par Bentliam. et qui ne reconnaît pour principe du bien, que
l'utile ou l'utilité générale.
Les sectateurs de Bentliam ont eu leurs fanatiques, qui auraient
voulu semer du cbanvre sur le boulevard des Capucines.
Ik'urt'uv (|iii sait mêler l'utile à raj^ivahlo.
Omne tulit piinclum qui miscuil iililc dnlci.
(Udiiaci:, Art pocli(jue.)
Utopie, du grec ou, négation, topos, lieu.
Nom donné à une île imaginaire, ainsi appelée iVC/tope (person-
nage créé par Thomas Morus), qui conquit cette île et y établit un
gouvernement idéal.
Le plan de ce gouvernement, exposé par Thomas Morus au
II'' livre de l'ouvrage intitulé Utopia (lolO), renferme des idées
excellentes, mais peu pratiques. On a donné depuis ce nom
d'uiopie à l'idéal du gouvernement.
— On peut citer parmi les écrivains de ce genre (utopistes) :
Babeuf, (pii. à la lin du xviip siècle, inventa le babouvisme,
système qui prétendait établir l'égalité absolue des fortunes.
Campanella, auteur de la Cité du Soleil (1620).
Cabet, /m/'/e (18G8).
Comte (Auguste), dont la formule est : L'amour pour principe, le
progrès pour but, l'ordre pour base.
Fénelon, dans sa description de Salente [Téléinaquc).
Fontenelle, République des Philosophes.
Fourier et le fouriérisme, dont la formule est : Répartition [u'o-
portionnelle du capital au travail et au talent.
Owen (Robert), né eu 1771, est l'auteur d'un système socialiste
établi sur la communauté et l'irresponsabilité humaine. Son expé-
rience de NeM-Lanark. en Ecosse, vers 1806, eut un plein succès,
S26 VAC
dû moins à la honte de la lliéoric qu'au caractère de l'auteur. Des
essais à New-IIanuony (Anicrique) en 1824, et à Orhiston, réussirent
moins liicu. (Vdv. licrnc des Deux-Mondes, ISÎiB. )
IMalou. 1(1 J{i''i)iihli</ne.
Rabelais, r Abbaye de Thélèine, où l'on suit la maxime : « Fais
ce que vouldras », et où l'idéal de la vie forme le contre-pied
al)Solu de tout ce que les couvents ont imafriné pour réduire la
vie humaine à sou minimum d'activité, d'intelligence et de plaisir.
Saint-Simon et le saint-simonisme, dont la formule est : L'œuvre
selon la capacité ; le crédit selon la solvabilité ; le salaire selon le
travail ; la rente selon le capital. (Ollnde Rodrigue.)
— La quadrature du cercle est une utopie mathématique.
— L'uloi)ic est le pathos de l'idéal, et le génie de ceux qui
manquent de bon sens.
V
Vacance, dérivé du latin vacare, être libre, vide.
Etat do loisir. Répond au grec sc/toIé, loisir.
Vacation, même origine que le précédent.
Cessation des séances des tribunaux.
Au même radical remontent les mots : vaquer, évacuer.
Par un singulier a!)us, raquer s'emploie dans le sens de s'occuper :
vaquer à ses atïaires. Cela signifie simplement qu'on est libre pour
s'occuper de ses affaires, que rien n'en détourne.
Vache, du latin vacca, pour boacca, de bos, femelle du bœuf.
— Cliacun son métier, et les vaches seront bien gardées. (Yoy.
métier.)
Qui se mêle d'autrui meslier.
Trait sa vache dans un panier.
Si chacun se renfermait dans ce qui convient à sa vocation, il y
aurait peut-être plus de vaches que de vachers (?).
— Parler français comme une vache espagnole. Vache est ici
pour vace ou ba:<que, nom donné aux habitants de la Biscaye;
d'autant mieux que jadis vache se disait vacce (?) et que les Gascons
ont apporté d'Espagne l'habitude de changer le b en v: ce qui
a fait dire à Scahger : Felices populi, quibus bibere est cicere !
VAI o27
(Peut-être pourrait-on expliquer : comme une vaciie, ou un
Bnsque, parle espaunol i)
La langue des Basques est si étran,t,^e, que Scaliger disait d'eux:
« On prétend qu'ils comprennent leur langue, mais je n'en crois
rien. »
— Bori citellas imponere (Cicéron) : hâter un iiceuf.
— Le plancher des vaches. (Voy. terre.)
Vade-mecum, expression latine : va avec moi.
Nom doiiué à certains livres portatifs (appelés aussi manuels),
qui peuvent être consultés coninuxléuient.
Vagabond, du laliu raf/ohundiis, eri-ant.
Au même radical se rai tachent : vague, extravaguer, divaguer.
— Synonymes: hohémien (voy.), goueppeur ou gouapeur, de
guêpe, qu'où prononce gouape, en Normandie. La guêpe hutine
çà et là pour vivre.
Vain, du latin ranus, léger, \iàe. Rattachez-y: vanité, vanter,
vantard, s'évanouir.
— H y a des gens que l'on croit profonds, qui ne sont que creux.
— La vanité se nourrit de llatterie: quand on est e/i/I«', la vanité
est satisfaite.
— Rahelais (Testament de Patelin) se sert du mot vain dans
le sens de défaillant : « lia ! tant je suis vain. »
Vaincre, du latin vinceve.
— Vaincre ou mourir. Les amis de Pompée lui reprochaient de
trop s'exposer dans les comhats : « Il est nécessaire de mourir, et
non de vaincre », répondit-il.
— On lit cette incription sur la lame d'une épée trouvée à Hercu-
lanum : Senatus consulta, Roma i-incit. Rome doit vaincre, par
ordre du Sénat. Quelle confiance dans la disciphne, le courage et le
patriotisme des soldats !
— Malheur aux vaincus I Vœ victis I Mot qui résume la loi injuste
du plus fort.
Le 20 juillet de l'an 392 avant Jésus-Christ, les Gaulois Sénons,
venus du fond de l'Âhruzze, où ils étaient étahlis depuis plus de
deux cents ans. prirent Rome, la hrrUèrent, et tuèrent les sénateurs,
qui les attendaient à l'entrée de leurs maisons, en hahits d'apparat,
assis sur leurs chaises curules.
Ils campèrent sept mois sur les ruines de Rome, et se retirèrent
m VAï
sans (Hro iiiqniiHôs, (jiioiqiu' Tito-Livc préteiulo que Cninillo les
;iiir;iit (oiis iiiiissMcrés.
L'or (le la rançon \);\\v('. aii\ (laiilois lut de deii\ iiiillo livres, pi'is
parmi les oi'iu'iiieiils des l(Mnpl(;s et les liijoiix des matroïK'S. L'or
fut ap|)oi'lé an camp .uanlois. et, an moment on on le pesait, le Hrenn
détaciia son handrier et le jeta av(M' son sal)r(! dans le plateau de
la balance. L(;s Uomains ayant réclamé, il cria : « Malheur aux
vaincus! » Pai'ole alors nouvelle, mais qni, dit Plutarque, passa
depuis en proverbe. (Plutarque, Vie de Camille, XXXYL)
(Notons ([uaBrennus n'est pas un nom propre, mais un (pialificatif,
un litre; il si.unilie, en bas-breton, 7'oi, c/tef.)
— Sanve qui peut ! Malheur à qui est pris.
Oiriinpoi'lc (lu'dii Iriomplie ou par force ou par ruse?
(Dei.h.i.f..)
,..Doltci (in rirtusj (juts in lio-stc requiral?
(ViF(i;ii,E.)
A Miincre sans péril, on trionipiic sans gloire.
(GoRXKILLE, le C'id.)
— Venl, iridi, vici : je suis venu, j'ai vu, j'ai vaincn.
Jules César écrivit ces trois mots à ses amis, pour leur annoncer
la rapidité de la victoire qu'il venait de remporter, dans le Pont,
contre Pharnace, fils de Mithridate.
— Le cardinal de Richelieu écrivait au bas des projets qui lui
étaient soumis: ]'idi, legi, probavi: vu, lu, approuvé.
Vair, vairon, du latin variua.
Vair signifie de diverses couleurs; d'où \en\ ca irons, d'un bleu
mêlé de gris.
— Menu-vair, ou petil-qris, désignait une pelleterie gris-blanc,
fourrure très estimée au Moyen-Age. Son nom de menu-vair lui
venait de ce que cette peau d'une sorte d'écureuil, est grise sur le
dos, blanche sous le ventre.
Vaisseau, anciennement vasciel, du latin vascellus, diminutif
de vas.
— Brûler ses vaisseaux : s'ôter les moyens de battre en retraite.
(Voy. Rabicon.)
Allusion à la conduite de quelques hardis capitaines qui brûlèrent
les vaisseaux qui les avaient portés sur des rivages étrangers ou
ennemis, afin que leurs soldats fussent par la nécessité déterminés
à vaincre ou à mourir. Agathocle, tyran de Syracuse, fut le premier
VAL 520
qui donna, sur les entes d'Afrique, l'exemple de celle heureuse
audace, il lui imité jtar Asclépiade, lieulenant de Dioclélien. L'empe-
reur Julien. (îuiliaunie le Conquéranl, Roi)ert (luiscard et Fernand
Corle/. lii-cnt de uiénie.
Valet, ancieunenient cavlet, et d'abord va.flef : Aa raasaletua,
diniiniilif de rasaal. (Voy.)
Le sens primitif de cassai, jusqu'au xiii'^ siècle, est hrace,
vaillant . Dans la Clianson de Roland (st. 28G), cette épithéte est
appliquée à Cliai'lematine lui-iuèuie:
Mult est vassals Karlcs de France ihdce.
Le valet ou vaslet est un jeune Itravc, souvent un fils de roi
ou d'euqjereiir. Dans un fabliau, le fils du comte de Beauvais est
appelé « gentil valet » ; et dans les comptes de la maison de
Philippe le Bel, les fds du roi se nomment « valets ».
— Tel maître,, tel valet : Dignus domino servus. (Plante.)
I^ar les airs du valet, on peut juger le maître.
(Destouchks, le Glorieux.)
— Dans les jeux de cartes qui datent d'une époque très ancienne,
on retrouve encore les figures où le ro/, la da?ne et le valet
représentent le père, la mère et le fils. Ce n'est pas à des laquais
qu'on eût donné les noms des chevaliers les plus illustres : Hector,
Ogier, Lahire, Lancelot. Ici, les quatre valets sont quatre princes
héritiers de quatre rois.
Ainsi voilà de? noms qui, après avoir honoré longtemps la plus
haute noblesse, ont été rabaissés à désigner l'homme dans sa plus
basse condition, et à devenir, de nos jours, des termes humiliants
et injurieux, bannis en quelque sorte d'une langue où ils avaient
brillé si longtemps comme des litres d'honneur et de vaillance.
Les noms, comme les hommes, sont exposés à dégénérer et à des-
cendre de significations élevées à des significations basses. Donzelle
signifiait autrefois demoiselle, la petite dame, la jeune maîtresse,
la fille de la nuiison.
Au Moyen-Age, le mot qui avait le sens actuel de valet, est garçon.
Il a gardé cette ancienne acception.
Aujourd'hui, valet ne se dit plus que d'un homme gagé pour
faire le service domestique. On distingue les valets de chambre, les
valets de pied ; en vénerie, les valets de chiens ; dans les fermes,
les valets de charrue ou d'écurie.
Au théâtre, les valets ont de l'esprit et de la ruse, et sont propres
34
mO VAX
;i toutes sortes d'intrigues. Tels sont les Si-ipin. les Crisjiin, les
Frontin.
Valeur, du hiliii ralere, être fort, bien portant.
De là : valide, vaillant, valétudinaire.
— Valeurs : argent monnayé, ou titres de rentes.
Mauvaises valeurs : valeurs de la rue Quincampoix.
Torche c... — Si, au dire de Rabelais (I, 13), le papier n'est pas
le meilleur des anitergea. celui des assignats, de la banque de Law,
et de certaines entreprises industrielles, modernes, est à coup sûr
le plus cher. L'expérience ruineuse de Law inspira à la mère du
Régent celte boutade qu'on trouve dans une lettre du 1" juin 1720 :
« Personne en France n'a plus le sou maintenant : mais je dirai,
sauf respect, en bon allemand palatin, qu'ils ont tous des torche-culs
de papier. »
Vallon, dérivé de val, du latin vallis.
D'où : vallée, a^al, dévaler, vau (dans à vau-l'eau, voy.)
Vampire, origine incertaine.
Mort que lopinion populaire fait sortir des tombeaux pour sucer
le sang des vivants.
Au figuré : un usurier ; celui qui pressure les malheureux.
Vandales. Peuple barbare de la Germanie; du gothique van-
dalen, errer, parce qu'ils changèrent souvent de séjour. Ils lialii-
taient, à l'origine, le long de la Baltique, entre l'Elbe et la Vistule.
Sous Auguste, une partie alla s'établir sur les bords du Rbin, et
plus lard, sur les rives du Danube. Au v^ siècle, ils ravagèrent la
Gaule pendant deux ans (406-408], puis allèrent piller l'Espagne et
l'Afrique, jusqu'au moment où Juslinien envoya Bélisaire, qui en
délivra l'empire (534).
— Vandale et vandalisme s'emploient pour désigner et flétrir
l'ignorance stupide de ceux qui dégradent les monuments des arts.
Vanité, du latin vanitas, de vanus, vide.
— Une once de vanité gâte un quintal de mérite-
Les Anglais disent : « Il n'y a pas de gens plus vides que ceux
qui sont pleins d'eux-mêmes. »
La vanité n'est que l'afïectation de quelque qualité qu'on n'a
pas : qui dit vain, dit vide.
...11 prétendait en être l'auteur: c'était un mensonge gretïé sur
une vanité. (H. Miirger.)
VAU oU
L;i v;inité au dehors est la marque de la pauvreté au dedans.
(Saint Clirysostonio.)
La vanité est raniour-[)n)|ire ([ui se montre; la modestie est
raniour-|in)|ir(' (jui se caclie. (Fontenelle.)
La vanité et l'oruiuMl coûtent plus que la faim et la soif. (JelTei'son.)
Tout nest que vanité. (^Salomon.)
Tout liomine vivant n'est que vanité. (Saint Paul, Romains YIII,20.)
L'homme est le rêve d'une ombre (Pindare). Ce qui sipnifie que
1 lionnne, par sa vanité, est comparable aux deux choses les plus
vaines qui soient au monde.
La vertu n'irait pas loin, si la vanité ne lui tenait compagnie.
(La Rochefoucauld.)
— (Juelqu'un plaignit un jour Diogène de le voir exposé à une
pluie froide et abondante. « Si vous le plaignez, dit Platon, ne le
regardez pas : il se mettra bientôt à l'abri. »
— Epaminondas disait, après la bataille de Leuctres : « Ce qui
flatte le plus mon cœur dans cette victoire, c'est de l'avoir rem-
portée du vivant de mon père et de ma mère. »
Vanner, du latin rannus, van.
Nettoyer le grain au moyen d'un van.
De là : vannier, vanneur, vanne.
Vantard, de canler, avec le sufllxe péjoratif ard. Fanfaron.
— Tout homme manque surtout de la qualité dont il se vante
le plus.
— S'il se vante, je l'abaisse ; s'il s'abaisse, je le vante. (Pascal.)
— De grands vanteurs, petits faiseurs.
Vanter, du latin vanltare, qui se trouve dans saint Augustin.
(juelques-uns ont proposé cendlture, faire l'article, chercher à
placer sa marchandise; faire valoir une personne, une chose,
comme un article de commerce (?).
Varech, de l'anglo-saxon ivac, rejeté ; anglais wrecli, débris
de na\ii'e.
Plante marine que le Ilot rejette sur le rivage.
Varié, du latin carlus, comme vair. (Voy.)
Varus, rends-moi mes légions !
Varus, général romain des troupes de Germanie, se laissa attirer
par Arminius dans un défilé où son armée fut anéantie. Ce désastre
ty^'2 YKA
causa à Auguste une douleur si viv(^, que, pendant londoinps. il
s'écriait sans cesse: « Vai-iis, rends-moi mes lésions ! «
Six ans après, (iermanicus donna la sépulture aux soldats de Yarus,
dont les ossements joncliaicnt le cliam]) de bataille. (Voy. Tacite.)
Vassal, du celtique gicas, jeune garçon, par le has-latin vassa-
lus. IMutùt que du latin vas, caution. (Voy. valet.)
Vas.sal a signilié brave, vaillant, jusqu'au xiii^ siècle.
Les vavasseurs étaient les feudataires des vassaux du sûu\eraiu.
(Syncope de vassus vassormn.)
Vau, forme vocalisée de vat, latin vallia.
A vau-l'eau : au courant de l'eau, à l'aventure, sans qu'on ait rien
dirigé.
Vaudeville, ou vau de vire: de vau et vire.
Mot créé par Olivier Basselin pour les pièces de vers qu'il compo-
sait dans le val de Vire ; le mot s'est modifié en vaudeville.
1)1111 trait de la satire en bons mots si fertile.
Le Français, né malin, créa le Vaudeville.
(BoiLEAii, Art poétique.)
— Le vaudeville a changé de caractère. Le premier théâtre où fut
joué à Paris le vaudeville, s'ouvrit rue de Chartres, le 12 janvier
1792. Barré, qui en fut le directeur, prit pour épigraphe de son
affiche, le vers de Boileau.
Vaugirard.
C'est le grelVier de Vaugirard, qui ne peut écrire si on le regarde :
le moindre ol>stacle arrête les gens peu habiles.
Ce greffier tenait son bureau d'écritures dans une chambre qui
n'était éclairée que par une étroite lucarne. Regarder par cette
ouverture, c'était l'empêcher de voir.
— Prendre Vaugirard pour Rome : se tromper grossièrement.
— La burette du curé de Vaugirard : une grande bouteille.
Vautrer (se), autrefois voltrer, voutrer. Ménage le dérive de
volutare ({).
— On appelle vautre un chien dressé à la chasse du sanglier et
de l'ours, et qui se roule comme eux dans la boue.
— Au figuré : se vautrer dans la débauche^ dans le vice.
Veau, anciennement ve'el, de vitellus, pour vitulus, dont on a
rapproché Italie, qui semble avoir pris son nom de ce qu'elle
nourrit de nombreuses bêtes à cornes.
VEL 533
— I);ms \o \]ovv\ . on emploie le féniiiiiii n'/r. |ioiii- In bénisse du
premier fiu(\ Ce lemiiiin maïupic ;iii Irniiciis, ou il y a cependant le
verlie rr'/cr.
— IMeiirei-, lieuuler, s'étendre comme un ve;ni.
Le cuir ne sei'a pas cher, les veaux s'étendent.
Il oùt (le marisson (cha^'rin) plomv coinmo uno vaclio.
(i;r,i.Mi:ii, Salira III.)
— Veau d'or. Idole que les Israélites érigèrent aux faux dieux,
pendant une absence de quatrc-vinûts jours que fit Moïse sur le mont
Sinai. {Exode XXXII.)
Adorer le veau d'or.
— Tuer le veau gras : faire à quelqu'un grand accueil.
Cette locution est enqirûntée à la paralmle de l'Enfant prodigue.
C'est juste le contraire de « manger de la vache enragée ».
Veiller, provençal velhar, du latin vigi/are.
La Neille est la privation de sommeil pendant la nuit.
— Le mot veille, dans le sens de jour précédent, s'est appliqué
d'ahord au jour qui précède les grandes fêtes religieuses, parce que
les premiers chrétiens passaient en prières la nuit intermédiaire
(ciffiliaj. Aujourd'hui encore, l'Église prescrit le jeûne, la veille ou
vl(jlle des grandes solennités.
— On appelle reillcu.se une petite lampe qu'on laisse allumée
toute la nuit.
— En provençal on appelle villore, le veilleur de nuit (qui veille
au repos des hahitants).
— L'homme vigilant est celui dont rintelligence ne reste pas
endormie.
Veine, du latin vena. du verbe venire : c'est par là que le sang
vient au cœur.
— N'avoir pas de sang dans les veines : manquer d'énergie.
— Qui voit ses veines voit ses peines. Il serait plus exact de
remplacer reiîie par déveine (manque de chance au jeu).
Vélin, peau de veau : fait comme velcr.
Velléité, Icniu' de philosophie, cahpié sur velle, voidoir.
Volonté faible. On peut s'agiter sans agir, piétiner sans avancer;
velléité n'est pas volonté.
Il y a, entre la \elléilé et la volonté, la même différence qu'entre
la paresse et le travail.
534 VRX
Les parossonx ont tnnjoiirs onrir do f;iiro f|iiolrjiip rlioso. (Vauvc-
mirpiios.)
Velours, ;m(ionnemcnl vcloits, du hiiin rillosus, rouvert de
poils.
— Isiiro iiiilte d<5 velours : cacher sous dos dehors caressants hi
dessein de nuire.
Le cliat ne nous caresse pas : il se caresse à nous. (Rivarol.)
— Montcrif composa une histoire des chats, (pii le lit siirnoniiner
« historiogriplic ». Le poète Roy, très satirique et très mordant,
poursuivit de ses sarcasmes riiistorien des chats. Montcrif s'en
vengea en lui donnant une volée de coups de canne. Mais, sous le
bâton même, Roy se mit à crier: « Patte de velours, Minon. patte
de velours ! »
Vendange, du latin vindomia {dcmere viniim '').
De là : vendémiaire, dans le calendrier républicain.
Setembre..., el quai so vendemins, perque en scmhlensn de
vendemlutov lo dipinho. Septembre..., auquel sont vendanges,
c'est pourquoi on le représente en ressemblance de vendangeur.
Vendre, du latin vend ère.
— Il y a autant d'exagération dans le dénigrement de ce qu"on
marchande, que dans l'éloge de ce qu'on vend. (Petit-Senn.)
— Il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué.
Deux compagnons pressés d'argent
A leur voisin fourreur vendirent
La peau d'un ours eneor vivant,
Mais qu'ils tueraient bientôt, du moins à ce qu'ils dirent.
(La FoxTAiNK, Fables V, -20.)
On dit de même : Il ne faut pas chanter Magnificat à Matines.
— Vous ai-je vendu des pois qui ne voulaient pas cuire ? Vous
ai-je trompé ?
Vendredi, du latin Veneris dies.
Jour que la superstition regarde comme funeste.
Dans l'antiquité, c'était le jour heureux par excellence, le jour
fécond de la joie et du bonheur, consacré à Vénus.
Il a été maudit par le christianisme, ou peu s'en faut, parce que
c'est lui qui a vu le supplice du Golgotha.
— La superstition du vendredi est une des plus fortement enra-
cinées. La statistique des chemins de fer, établie par le chiffre des
recettes, constate que le nombre des voyageurs subit une baisse
sensible et régulière, ce jour-là, sur les grandes lignes. (Voy. treize.)
VEX 535
— On li'dint' h(';inc(i!i|t de uciis ([iii. do crMinlc de iiialliciir,
irciili'i'iii'ciiiKMit ri(Mi ce jniii'-h'i. 11 faut en l'ire.
'['c\ qui ril \('ii(ln'(li, (lini;iiii-lii' iileiircra.
(Kacim:, Plnideurx.)
Venelle, pour relnelle, dérivé de veine.
S'est dil pour nielle. No s'emploie plus ûiière que dans la lonilion :
enliler la venelle.
Fui siii' 1' pniiil (l'ciililrr la nliu'IIc
f!.\ l'OMAlNK, V. SI
11 y a. dans cet eni|)!ni de reuelle, la inèuie mélapliore (pi'on
trouve dans re\|)ression actuelle arlr/-e: k Les boulevards sont les
grandes artères de Paris. »
— Je pcnseye qu'en la venelle du licl l'eust voslre selle persée.
iHal.elais. IV. ('.7.)
Vénerie, dérivé de reneur, du latin venatorem.
Lart du veiuuir, de la chasse.
De là aussi : venaison.
Vengeance, siihslanlif. dérivé de reiifjer, latin riiuUrare.
A donné aussi les mots savants : revendiquer, revendication.
— La ven.u'eance est une sorte de justice sauvage et barbare. Elle
semble destituer la loi, et se mettre à sa place. (Bacon).
Quand on se venge, on est juge de sa propre cause; il est bien
diflicile de ne pas demander plus qu'il n'est dû. (M"!"^ de Puisieux.)
La vengeance est une arme à deux tranchants, qui peut blesser
à la fois celui fpii frappe et celui qui est frappé.
Venin, de cenenum, de vena, parce que le poison circule dans
le sang Neineux.
— ]'eni)neu.r, se dit des animaux; vénéneux, des autres êtres.
— Morte la béte, moi't le venin : on n'a rien à craindre d'un
ennemi mort.
Le comte de Vogé fut exilé pour avoir dit qijc le Régent pouvait
faiiv de Dubois un ministre, mais qu'il n'en ferait jamais un honnête
homme, k la mort de Dubois, le Uégent écrivit à Vogé, pour le
rappt'Ier de l'exil, ce singulier billet: « Morte la béte, mort le
venin : je t'attends ce soir à souper au Palais-Hoyal. »
— In ecuuln venenuin : C'est dans la queue qu'est le venin.
Ce proverbe latin fait allusion au scorpion, dont le poison est
caché dans la queue.
o36 YEN
— La inali.Liiiilô diinc Icllro est souvoiU dans le posl-scriplmn, et
l'on dit: In cauda vcnenum. (Voy. queue.)
Venir, du latin vcnlrc.
Sonclic d'nn firand nombre do mots: Avenant, aventure, avenir,
avent, convent, convention, contravention, événement, inconvénient,
inventeur, inventaire', parvenu, prévention, revenant, souvenir,
subvention, etc.
Vent, du lalin i-ontus.
Les vents sont les mouvements de Tatmospiiére.
— Enfants du ciel et d(; la ferre, les Vents étaient placés par les
anciens dans les îles Eoliennes (Llparl); ils avaient pour roi Eole,
qui les tenait enchaînés dans une caverne.
Les quatre vents principaux chez les anciens étaient : Borée (nord),
Eurus (est), Auster (midi). Zéphyr (ouest).
— La rose des vents est une étoile à 32 pointes, pour représenter
les 32 aires ou rhombes des vents, et dont la circonférence est
divisée en 3G0 degrés.
— Un vent fort parcourt de 30 à 70 kilomètres à l'heure : un
vent de tempête, 100 kilomètres; un ouragan, 130 kilomètres.
— Noms des vents :
Alises, du lalin aliseus, qui soufdent d'Orient en Occident ;
Africus, chez les Latins, nord-est; Aquilon, nord; Argestus. latin,
nord-ouest; Auster, latin, nom poétique du vent du midi ; Autan,
vent du sud-est qui souffle sur les cotes de la Méditerranée. (On
n'emploie guère ce mot qu'en poésie, comme synonyme de grand
vent.) Bise, de l'allemand biso, tourbillon (?), nord ; Brise ou Zépbyre,
ouest; Gœcias, latin, nord-est; Caurus, latin, nord-ouest; Etésius,
lafin, nord-est; Euronotus, latin, sud-est; Eurus, latin, est; Favonius,
latin, ouest; Lebecchio, sud ; Maestro, nord-est ; Mistral, nord-ouest;
Moussons (Voy.); Notus, sud; Simoun, vent d'Afrique.
(Yoy. Sirocco, Tramontane, Typhon.)
— En provençal, les vents se nomment :
Tramontana, nord; Miejournari, sud; Levant, est; Larg ou Ponent,
ouest; l'Eisseroc, sud-est; l'Abech, sud-ouest; Mistrau, nord-ouest;
Gregali, nord-est.
— L'alternance régulière de la brise de mer pendant le jour et
de la brise de terre pendant la nuit ; ainsi que, dans les pays
accidentés, le mouvement alternatif d'ascension et de descente de
l'air sur la pente des montagnes, est due à la même cause que le
YEN 537
rriiliiio dos voiils ;ilis(''S ol des iiiniissons, qui rririUMil ppiulaiit ?ix
mois (hins roci'aii Iiulicn. Les iiioiissons soiiflleiit à peu prrs du sud
au nord, d'avril à oc(oI)r(\ quand lo soleil est au nord d(; la ligne,
et dans la direction opposée, de novembre à mars, lorsqu'il est
dans riiémisplière auslrnl. Les relations maritimes se rèdent sur
la [lériodicilé de ces deux courants.
Dans la zone tempérée, la direction des vents opposés souillant
de tous les points de Thorizon, donne naissance aux terribles
méléores qui, sous le nom de (orn/tdos, ci/clonea, dans l'océan
Indien, de typhons, dans les mers de Gliine, sont un sujet d'épou-
vante pour les marins. La vitesse circulaire du vent atteint jus([u';i
quarante lieues à Ibeurc.
Nos tempêtes d'Europe ne sont aulre chose que des cyclones
d'un rayon plus étendu, et dont l'intensité diminue avec l'étendue
des surlaces: leur maximum de vitesse est de dix lieues à l'heure.
— Cyclone. tourlMllon de vont qui prend naissance et se propage
en pleine mer, et forme une trombe spiroïdale, dont le diamètre
est sonvoni très ui'and. qui lourno sur Ini-ménie avec une vitesse
considérable.
— On nomme /Y//V//e une augmentation de vent soudaine et très
forte, mais qui dure peu. Les rafales se produisent pendant les
tempêtes et causent de grands ravages.
...Des personnes ont été blessées pendant cette rafale, par la
chute des tuiles, qui voltigeaient dans les airs comme des feuilles
mortes. (Jolie hyperbole du Toulonnab, 1868.)
— Vents intestinaux. Synonymes: llatuosités, pnouinalose, pet,
vent de la chemise (Rabelais).
— Autant en emporte le vent. Se dit d'une chose sans importance
qu'on oublie aussitôt.
Rabelais (IV, 12), parlant d'un chicanons (huissier) mort sous
le bâton du Seigneur de Basché, ajoute : « Depuis, n'en feust parlé.
La mémoire en expira avec le son des cloches, lesquelles quarillon-
nèrent à son enterrement. »
(irégoire de Tours dit de mémo d'un hérétique mort subitement:
Perlit hujns nienioria cuni sonitit., et Dominus in œternum per-
nianef.
Il (lit, il vole, ft If \oiit eniporfait
Lui, son clieval et tout ce i|iril disait.
(VoLTAiiiE, Pucelle, 6.)
Ramer il'faut, si! no vente.
Aller contre vent et marée. Remis velisque. (Gicéron.)
538 YKN
— Lo vent osl iino forro irrésistible ot i)j'osqiio myslérioiisc ; il
vient d'en luiut. Quand il est favorable, il semble un souflle des
bons génies. La raine est un instrument matériel et bai^médela
siienr liimiainc; le rameur fait toujours un peu penser au ,L^alérien.
(J.-.l. Ampère.)
Ventre, du latin renier, en .arec eniéron, les intestins.
Cavité du coi'ps qui coutiont l'estomac et les entrailles.
— Synonyme: iH'dou, i)edaiue (boulet de pierre lancé par la
catapulte nommée hedoxddine) ; })anse: le cimetière des poulardes.
Vciitri' ;il'f;iiiié n'a ikmmI ildrcillrs.
(La Tontaink, Fahlfx, I.\, 8.)
Jcjnnas renier non nndil rerlm lihenler.
Ce proverbe, né cliez les Grecs, a passé dans toutes les lansiies.
Caton commence ainsi un discours au |)euple romain sur la loi
agraire : Arduum est, (Jabnles, ad venlrem auribus cai'entem
verba facere. \\ est difficile, citoyens, de se faire entendre d'un
ventre qui n'a pas d'oreilles.
Orpbée n'avait pas oublié ce dicton, déjà répandu de son temps,
puisque, pour descendre aux enfers, il avait pris, avec sa lyre, une
provision de gâteaux au miel. Ce n'est qu'après en avoir donné à
Cerbère, qu'il lui lit un peu de musique.
— La faim est une mauvaise conseillère, qui a suscité bien des
révolutions.
Quand il n'y a pas de foin au râtelier, les ânes se battent.
Le peuple est un souverain qui ne demande qu'à manger : Sa
Majesté est tranquille quand elle digère. (Rivarol.)
Le véritable acteur de la Révolution française, ce n'est ni Miralteau,
ni Danton, ni Robespierre ; mais le peuple.
La révolution n'est ni dans les fautes de la royauté, ni dans celles
des assemblées, mais dans les souffrances de vingt-cinq millions
d' affamés.
11 fallait au peuple romain du pain et des spectacles pour qu'il se
tînt tranquille ; ce qui lit dire à Aurélien : « Le peuple romain est
cbarmant quand il a bien diné. »
Le vulgaire no s'occupe, en politique, que des subsistances.
Vulgo una ex republlcn annonce eura. (Tacite, Ilislor., lY, 38.)
Une armée à jeun n'observe pas la discipline.
Bisciplinam Jejunus non serraf exerc/'tus.
Sixte Quint disait que deux cboses étaient nécessaires pour main-
tenir le peuple dans l'obéissance : le pain et le fer.
YEN 539
I^a vio est ;iU('lt''r ;'i deux iiiaiiv;iis clievaiix : le iMiircct le iiiaiiûer.
(Ronsard.)
Najioléon tlisail : « C'est le veiiti-e qui fait mouvoir le inonde. »
MfKjinter urlis, inijeniijitc hinjitur
Venter.
(Pf.rsk, Satires. Prolo<;ue, U.)
L'antagonisme de tous les partis politiques peut se résumer en
deu\ catruorit^s : l(>s maigres et les gras.
— Faire un dieu de son ventre. Les anciens avaient di\iuisé le
vjMiIre dans Coinus, comme étant le preniier moteur de l'activité
humaine, le principe de l'ordre et le régulateur de l'univers; car
la faim pousse au travail, le tra\ail crée l'aiiondance, et de l'aliou-
dauce uait rauiour. le gi-and moliile de l'attraction et de riiarmonie
sociale.
Cornus, dépouillé par les modernes de ses attributions primitives,
est devenu le dieu de la bonne chère et des appétits sensuels; faire
un dieu de son ventre, se prend aujourd'iiui en mauvaise part, pour
signilier une extrême gourmandise.
Veniri servire.
(Tkkknce.)
Ventre alTamé prend tout à gré: au ventre, tout y entre.
Jrjioiits niro sloinachiis cnlgaria temnit.
(HoiiAcK, Snlire, U, 'X.)
(Un estomac vide ne dédaigne pas les aliments communs.)
— Louer son ventre : s'engager à dîner en ville.
— Synonyme de prendre du ventre: bâtir sur le devant, grossir,
ventru, ventripotent.
— Le ventre anoblit. D'après une ancienne coutume de (Champa-
gne, une dame noble anoblissait ses enfants.
De là est venue la locution ci-dessus.
On attribue cette coutume au massiicre d'un gi'and nombre de
guerriers champenois, à la bataille de Fontanet, en 8il, qui obligea
à admettre le principe que la mère transmettait la noblesse.
Vénus, latin Venus, Vcnevis, wwvq de l'amour et déesse de la
beauté.
— Les Latins adoraient Venus plebela, Venus furticu, Venus
rulgaris, etc.
— - Vénus Aphrodite, cbez les Grecs, signifie née de l'écume.
Déesse de la beauté, elle naquit de l'écume de la mer, près de
l'île de Cytbère. Son culte, appelé veneratio, a donné cénérer.
540 \FA\
■ I/idéo do bo.'iiilô friiiiiiiiic (''l;ii( o.\i)riiii(''(' en lutin |inr /-(^/(//.ç/^.s-,
qui n'a pas d'(''qiiival('iit on français.
Sans CL'ii's cl liaccliiis, vr-niis est langiiissanlc
(Voy. plalonu/ue.)
Sine Cerere cl Lihrro, frii/rl Venus.
(TÉnKNCE, Eunuque, IV, 6.)
Vernis se inoiinnd sans la coiniiaiuiiie do (^ôrès ot de Hacchiis, et
eslovt ropinioii dos anciens que inesseï- Priapus lent lils de Bacclius
el Vénus. (Rabelais, III, .31.)
Saint Paul, en vertu de cet aphorisme, et par mesure d'hygiène,
dispensait les époux du devoir conjugal lorsqu'ils jeûnaient.
Luxure est un péché ([ue gloutonie alkiclie,
Et si le lait flamber plus sec que sèciie bùclie.
L"amour, ce dieu si triomphant,
Mange et hoit comme un autre enfant.
Et n'a peur que de la famine ;
Aussi n"est-il jamais plus galant et plus beau
Que quand au feu de la cuisine
11 peut allumer son flambeau.
Vêpres, provençal vespres. du latin vesperas (du soir).
L'une des grandes heures faisant partie de l'office divin. Elles se
disaient autrefois le soir, vers le coucher dii soleil. Aujourd'hui, on
les dit vers 3 heures de l'après-midi. (Voy. heures.)
Mer, du latin vermis : d'où : vermine, vermicelle, vermisseau.
— Tirer les vers du nez à quelqu'un (Rabelais) : lui arracher la
vérité, sans qu'il s'en aperçoive.
En langue romane, fer signifie vrai, vérité.
Mez ver est ke li vilains dit.
(Robert Waci;.)
(Mais ce que dit le vilain est vrai.)
Vous avez envie de me tirer les vers du nez. (Molière, G. Dandin.)
— Tuer le ver. Cette expression remonte au temps de François P-".
Au mois de juillet lol9, la femme du sieur de la Veruade, maitre
des requêtes, mourut de mort subite. On fit l'autopsie, et les chroni-
queurs naïfs du temps assurent que la mort avait été causée par un
ver, qui lui avait percé le cœur. On appliqua sur ce ver un morceau
de pain trempé dans du vin, et immédiatement il mourut.
C'est depuis lors, dit-on, que l'ouvrier, avant d'aller au travail,
le matin, boit une chopine de vin blanc.
VKR 541
Vergogne, lia latin vcrecundid, pudeur; provençal vo'gonia.
Ce Iciiiii'. aulrefois roiirant ot très iiolile, est devenu familier et
d'un emploi plus rare. Il avait plus de force que honte.
11 est resté son déi'i\é dérmuiondi'.
Vérité, (lu laliu ren'las.
(Juiililé (pii l'ait paraître les choses telles qu'elles sont.
Divinité alléuorique. tille de Saturne et mère de Yesta.
Démocritc disait qu'elle se tenait au fond d'un puits, pour expri-
mer qu'il était difficile de la découvrir.
— La vérité est le nom que chacun donne à son opinion.
L'or et la vérité sont les deux choses les plus précieuses.
La morale a Ijosuiii, pour élrc l)ion reçue.
Du inas(|iie de la fable et du cliarine du vers :
La vérité plail moins quand elle est toute nue.
Et cest la seule vierge, en ee vaste univers.
Qu'on aime à \oir un peu velue.
(nori-[-i.Eiis.)
A/nicus Plafo, sed magis (imica verltas (Aristote et Gicéron) :
J'aime Platon, mais plus encore la vérité.
Yilnm iiiipenilere vero.
(Jl'VF.NAI..)
Consacrer sa vie à la vérité. (Devise de J.-J. Rousseau.)
La vérité ne fait pas autant de bien que ses apparences font de
mal. (La Rochefoucauld.)
Il n'y a que la vérité qui offense : toutes les vérités ne sont
pas bonnes à dii'e.
Il y a des vérités qu'il faut laisser au fond de leur puits.
Les injures sont souvent des vérités sans voiles.
Les vérités qu'on aime le moins à entendre, sont souvent celles
qu'il importe le plus de savoir. (Roiste.)
La vérité est utile à qui l'entend, et nuisible à qui la dit.
Obscquiuni amicos, vcritas oïlium jtarit.
(Tkhence, Andrienne, I, 1; Cickkon, Pro Cœlio.)
(La complaisance nous fait des amis : la franchise, des ennemis.)
Ce vers de Térence était la devise de l'Arétin.
— Fontenello disait que s'il tenait toutes les vérités dans sa
main, il se garderait bien de l'ouvrir.
Que de gens sont damnés pour avoir eu raison !
(Cm'.xiEii, .Xnthan, IV, 4.)
5i2 VER
— Dire la vûrilé en riant.
...Hidrnilo (lierre ver uni
Quid rcltit ?
(Hotucr;, Satires I, I, 24.)
C'est, en ellet, la nianirrc la |)1ms adroite de la dire; c'est, en
quelque sorte, dorer la pilule, anière et difticile à avaler, car un
autre proverbe dit que « toute vérité n'est pas bonne à dire».
Un bonime prudent ne dit jamais la vérité qu'en l'entourant des
formules les plus polies et les moins désobligeantes, tandis qu'un
liomme mal élevé se croit franc en la disant brutalement à ses
amis, qui s'en trouvent toujours blessés. (Voy. périphrase.)
— Le temps découvre la vérité.
Attendre est toujours la vengeance de la vérité. (Lamartine.)
— Huile et vérité montent en sommité.
La vérité est comme le liège, qui surnage toujours, quelque elTort
qu'on fasse pour l'immerger. (William Temple.)
La Vérité est fille du Temps : à la longue, elle obtient tout de
son père. (M. de Feydet, Cour d'assises d'Albi, 182^.)
— In vino Veritas (Salomon) : la vérité est dans le vin.
On est expansif dans l'ivresse.
Vin et confession découvrent tout. Le vin et les enfants disent la
vérité.
Nnlltim secretnm est ubi régnai ehrietas (Salomon, Proverbes,
cil. XXXIl, V, 4). Pas de secret où règne l'ivresse.
— Primo, au vin la vérité, comme nous disons, nous autres
Latins; secundo, il est de serment; tertio, on lève la main en le
prenant ; quarto, et pour le mieux, on le prend et on le met sur
la conscience. (Moyen de parvenir, cli. 109.)
— La vérité est au fond d'un puits (Démocrite). Et l'on dit d'une
vérité évidente : C'est clair, c'est une profonde vérité.
Si Démocrite place la vérité dans un puits, Salomon la met dans
une cave. N'est-ce pas avouer, qu'en somme, on ne sait où elle est ?
— Le P. Loriquet est un puits de vérité, en comparaison de cet
bistorien !...
Vermeil, du latin verinieulus : d'où vermillon.
Argenterie dorée au mercure.
Vernis composé de gomme et de cinabre, broyés avec de l'essence
de térébentbine, dont on se sert pour donner de l'éclat aux
dorures.
Vérole, pour rairole, dérivé de caiv (voy.) ; rapprocliez de
variole, du latin rariolus, et de barioler.
— Ralielais {\\\. IV, cli. 52) appollc la petite vérule la jiirotc, de
jtiquer. [)arce que le visage est souvent piqué, marqué, par cette
maladie.
Ou dit encore : jiicoté de la petite vérole. (Voy. (jrûlé.)
— SyiUTuynies de inarqiu'' de la petite vérole : .arélé, écumoire,
M. des Gi'élons. râ|)e à suci'e, vacciné à coups de pioche.
Verre, du laliu lutrum, provençal ceire, qui siguilie en même
temps roir : le verre est transparent.
— Corps solide, dur, fragile et transparent, qu'on obtient en
fondant du sattle silicieux avec de la potasse ou de la soude.
— La pantoulle de verre de Gendrillon, dans le conte de Per-
rault, est une pantoulle de rair (voy.), nom sous lequel on
désignait auti'efois la fourrure appelée aujourd'hui y^e/^V-^/r/*".
C'est ainsi que le mot est écrit dans les vieux recueils de contes
populaires. Les Itonnes éditions modernes, notamment celle de
Hachette, illustrée pai'G. Doré, ont restitué l'ancienne orthographe.
Verrier, dérivé de cerrc.
— Gentilhomme verrier, gentilhomme souflleur.
Au retour des Croisades, saint Louis anohlit tous ceux qui rap-
portèrent en France l'art de la verrerie, et avec eux, leurs
descendants. Ils reçurent le titre de « gentilshommes verriers», et
le conservèrent jusqu'à la Révolution, qui put appliquer à leur
noblesse, cette chute si connue d'une stance de Polyeucte :
Et, comme elle a l'éclat du verre.
Elle on a la fragilité.
Le poète Saint-Arnaud était de celte noblesse ; et son confrère
Maynard lui lança cette épigramme :
Votre noblesse est miiico,
Car ce n'est pas d'un prince,
Daphnis, (|ue vous sortez ;
Gcntilhonune de verre.
Si vous tombez à terre.
Adieu vos qualités !
Filles de verrier
Sont toujours en dan^ier.
(Vieux jjrovei'be.)
Vers, du latin versus: de verlere, tourner, parce qu'aussitôt
après avoir lu une ligne, on retourne à une autre ligne (?).
VM VEU
D'oii rrr.'U'f.
I",t iiiiii, ji' \niis sotilicns (|iic mes vers sont fort Ijoiis.
(Mot.iKiiK, Misanthrope, I, 2.)
Verser, du l;itin rornarc, fréq. de i^ertorc, tourner: on tourne
un Viiso [)onr vider re qu'il contient.
De là : versement (d'nruenl), injdversation (déloiirnenienl d'ar-
gent).
— Comparez : convertir des rentes, virement de fonds; ce sont
des latinismes.
Facere versuram (Gicéron) : l'aire un emprunt pour payer une
créance.
Faire un trou pour en l)ouclier un autre, dit Térence.
Faire vcrsure, et de la terre d'aultruy remplir le fossé. (Rabe-
lais, m, 3.)
Vert, du latin viridis ; d'où : verdir, verdure, verger.
— Vert comme pré.
— Au figuré : vert galant, verte vieillesse, verte réprimande.
On dit d'un vieillard qu'il est encore vert.
...viridisqne senectus.
(ViriGiLK, Enéide, VI.)
On peut rapprocher de « verte l'éprimande » l'expression « donner
une volée de bois vo-t » .
— On a écrit autrefois verd, plus rapproché du latin viridis.
Pour être conséquent, on devrait changer aussi verdure en
verture, et verdir en vertir.
Ils sont trop verts.
(La Fontaine, Fables, \\\, {{.)
Se dit à propos de celui qui méprise une chose qu'il ne peut
obtenir.
La Fontaine a pris cette fable du vieux proverbe : « Autant en
dit le renard des mûres. »
— Prendre quelqu'un sans vert : le prendre au dépourvu.
Cette locution est due à un jeu très ancien, qui consistait, pen-
dant le carême, à porter sur soi un brin de feuillage vert.
Après que \ Angélus était sonné, celui des joueurs qui était
accosté par l'autre devait montrer sa feuille verte, et, s'il en était
dépourvu, ou si son vert était moins foncé que celui de son adver-
saire, il perdait la partie.
Il est probable que le jeu du vert tire son origine de l'obligation
imposée aux fidèles de porter des branches de verdure à la pro-
\\A\ Mo
cession du (liiii.iiiclic des U;iiiic;iii\ : on le coiniiitMK^iil dès le
in'eiiiicr joui' de ctuvine.
Je vous pi'ciuls sans verd est un des jeii\ de Gar.t2iinlM;i. (l\al)elais,
liv. 1. ±2.)
C'i'st Cl' ijiii l'ail toujours qut' jr suis pris sans vert.
(MoLiÈnE, Etourdi.)
— Ce may nous avertit (jnil faut songer au verd.
— Vous y jouez donc? — Oui. — Ganiez dètre attrapée !
Ces deux vers sont tirés de la scène YllI d'une comédie de La
Fontaine, intitulée : Jf vous jtrcnds sans cerd.
Vertige, du latin ceiiujo, qui s'emploie aussi en français (tour-
noiement).
De là : vertigineux.
— Le vertiijo est, au propre, une maladie du ciieval. qui le fait
chanceler et donner de la tète contre les murs.
Au fjouré : transport de folie.
Vo\rz un pi'U ipii'l verti^t» le prend.
(Moi.iKRK, Pourceau(/nac.)
Vertu, du latin virtus, force, vaillance; de clr, homme.
Divinité allégorique, tille de la Vérité.
— Marcellus éleva un temple à la Vertu, et un autre à l'Honneur.
Il fallait passer par le premier pour arriver au second. Idée ingé-
nieuse, pour faire entendre que la vertu est le principe même de
l'honneur.
— La vertu, hut de toute morale, est la disposition ferme de
l'àrae, qui nous porte à faire le bien et à fuir le mal.
La vertu est une continuité de sentiments généreux. (M""" de
Staël.)
— Les théologiens distinguent trois sortes de vertus :
lo Les vertus intellectuelles, qui perfectionnent le jugement.
Il y en a cinq : l'intelligence, la science, la sagesse, la prudence
et l'art.
2° Les vertus morales, ou cardinales, qui perfectionnent la
volonté : la prudence, la force, la tempérance, la justice.
3" Les vertus théologales, qui ont Dieu pour objet immédiat :
la foi, l'espérance et la charité.
— On a appelé la vertu : l'amour de l'ordre, la musique, la
poUtesse et la beauté de l'àme ; le devoir.
Platon la nomme une chose divine; c'est pour cela, sans doute,
que les hommes la pratiquent si peu.
35
546 VEU
— Chez l(^s aiifions, rlrlKs si^Miili;ii( force, (''iiertiie, roiira.tre'.
L;i hiii.^iie provciirMlc, liôritiri-c- (lii'ccto du latin, a|i[)elle brave
nn lioinine vertueux.
I.cs luots vh et rirtus étaient presque synonymes.
On (lit encore d'un lioininc! faible, qu'il n'a ni force Jii vertu.
— La vertu des plantes, des simples. En vertu de ce principe.
C'est dans ce sens qu'il faut entendre le mot de Brutus : « La
vertu n'est qu'un nom ! » car une vertu pareille est bien voisine
du crime, et. en face du cadavre de ses enfants, la conscience de
ce farouche républicain dut se révolter, et renier une vertu dont
il subissait les funestes conséquences.
Brutus, le meurtrier de César, tantôt maudit, tantôt divinisé,
est plongé par Dante à mi-corps dans la gueule de Satan, qui le
dévore éternellement, tandis que Allleri le glorilie comme le héros
de Borne et le sauveur de la liberté expirante.
Les vertus comme celle de Brutus sont si voisines du crime, que
la conscience des républicains eux-mêmes se troubla en face du
vote du duc d'Orléans qui prononça la mort de Louis XYl. (Lamar-
tine, les Girondins.)
Balzac a dit : La vertu, c'est Achille sans talon. {La Peau de
chagrin.)
— Dans la morale éclairée des temps modernes, le mot vcrlu
exprime absolument l'idée dhonnéteté, l'accomplissement du devoir
dicté par la raison.
...Homme d'austère vertu et d'une grande prévoyance, il joignait
la finesse athénienne à l'inflexibilité Spartiate.
— La vertu rapporte plus que le vice : d'ailleurs il y a moins de
concurrence. (Voy. vice.)
Pour parvenir au bonheur, la vertu est la voie la plus courte et
la moins fréquentée.
La vertu est le plus grand de tous les plaisirs. (Épicure.)
— Où la vertu va-t-elle se nicher ? - Un pauvre, à qui Molière
avait donné une pièce d'or, courut après lui pour l'avertir de son
erreur. « Où diable la vertu va-t-elle se nicher? s'écria Molière.
Tiens, mon ami, en voilà une autre. »
— On vantait devant Agésilas, roi de Sparte, un scélérat qui avait
supporté la torlare avec courage. « Que de vertu perdue ! » dit-il.
— Faut de la vertu, pas trop n'en faut. In medio virlas : la
vertu est dans la modération.
Nos plus grands ennemis dans le monde, sont nos vertus.
VKS r,M
Nos vertus ne sont soinciit (iiic dos vices déuiiisés. (La Roclie-
foiicanUl.)
Les vices entrent dans la composition des vei'tiis, comme les
poisons entrent dans la composition des remèdes. La prudence les
assemble et les tenipriv, et elle s'en sert utilement contre les nian\
de la \ie. (La Rochefoucauld.)
Vertugadin, de l'espagnol vertugado, gardien de vertu; on dimi-
nutif du vieux mot verturjade, que l'on explique par certu-en-yarde.
Gros bourrelet que les femmes portaient au-dessous de leur
corps de robe ; ce qu'on a appelé plus tard paniers.
En Espagne, sous Philippe IV, on appelait fjuarda-infanles,
cache-grossesse, ces sortes de faux.
Rabelais (1, 55) emploie veiHugale dans le sens de jupon. (Voy.
panier, tournure.)
Verveine, du latin rerhena : veneris vena, parce que les
magiciens l'employaient pour rallumer les feux de l'amour.
Ou de rerro, balayer, parce qu'on se servait des tiges de cet
arbrisseau odorant pour balayer les autels de Jupiter.
Les païens ap[)elaient la verveine lierba sacra pour ce motif.
— Appliquée sur la peau après avoir été écrasée, la verveine la
teint en rouge pourpre; ce qui a fait croire qu'elle attirait le sang.
Vesce cultivée, du latin vicia.
Ce légume, dans certaines parties de la France, s'appelle cosce,
sans doute pour éviter une équivoque déplaisante.
Vespasienne, origine bistorique.
l'i'inoii- nommé ainsi de Vespasien, successeur de Vitellius, qui
établit sur ces vases un impiH qui lui a assuré l'immortalité du
ridicule. C'est pour augmenter les revenus du Trésor, fort endetté
par ses prédécesseurs, qu'il avait imaginé ce nouvel impôt.
Comme son fds Titus le raillait à ce sujet, il lui dit, en lui
présentant les premières sommes produites par cette singulière
taxe : « Cela sent-il mauvais ? »
Vesse, vient de véier, du latin visire.
(Quelques-uns le font venir de cesica, vessie, qu'on retrouve dans
billevesée et dans vè:e, qui signifie musette.
Marchand qui no tient sa promesse,
Juge qui vérité délaisse.
Avocat vide de sagesse
Ne valent |ias une vesse.
548 VET
— Avoir la vcssc : vcssor de peur.
« Il est certain, dit Montai.cne, que la peur cxtréiiie et rexlrciiie
ardeur du courage, troublent également le ventre et le laschent. »
— Dans Arlotiuln-Jaaon du théâtre italien (tome I. page î()9),
Jason dit à Médée que les soupirs dont elle se plaint sont un elVet
d'amour et de peur. Et il ajoute :
Tous deux les font sortir par un clieniin contraire,
Mon iunour par devant, et ma peur par derrière.
— Au xvi« siècle, on disait vézic pour pc.av.iA i)lus tard ou
employa vésarde.
— Oudin, dans les Recherclies françaises, note l'expression
vesou : le derrière.
Vessie, vesse, a aussi désigné les femmes de mauvaise vie.
Brantôme (Daines galantes! se sert du terme injurieux de
vesses pour désigner les dames débauchées.
Et Rabelais (liv. III, cli. 12) dit qu'il fut décrété qu'on chasserait
des cieux « toute cette vossaille de déesses ». Cette expression est
mise ici pour les dames de la cour, qui suivaient François I*^^"" à
l'armée, et qui amollissaient ainsi le courage des combattants.
Vessie, du latin veslca, mot fait comme billevesée.
Balle pleine de vent.
— En provençal, on appelle une vessie bouffigue, et boudenfle,
pour boute e;î/?e (boute souffle), mot fait comme boute-feu. Enetïet,
lorsque les enfants veulent enfler une vessie, ils y boutent leur
souffle au moyen d'un tuyau. (Yoy. lanterne.)
Vesta, nom latin ; correspond au grec heslla, foyer, qui répond
lui-même à œstus, chaleur.
Vestales, du lai in vestalls.
Jeunes vierges romaines qui entretenaient perpétuellement le feu
sacré sur l'autel de Yesta ; dans le temple où, sous ce nom, on
adorait réellement le feu, le foyer.
Numa avait créé ce culte, et lui avait consacré un temple de forme
ronde où étaient conservés le feu sacré et le palladium de Troie.
On entretenait aussi le feu sacré à l'entrée des maisons particu-
lières, d'où venait le nom d'atrium donné à cette partie de la
maison ; et aussi le nom de uestibulum : Vestœ slabulum.
Vétiile, origine peu connue; peut-être de vitta, bandelette (?).
Provençal veta. Ou de vitilitigare, chicaner sur des riens, s'attacher
à des riens.
VF/r 549
— Pniiliiv l;iii'on ponl lioin per iina ve(a. (P. Cardinnl.) Paiivro
lari'oii t'sl |KMi(lii pour une vélillo.
Vêtement, du laliu l'cstimontion. provençal ccslunenl.
Ce qui sei"t à eouvrir le corps.
Méine radical re^te : luibil sans basque qu'a remplacé le .iiilct.
Vêtir, du lalin rcs/ire.
De là \iennenl aussi : investir, vestiaire, revêtir, etc.
— Velu coiuiue un oiiinon : qui a [ilusieurs vêtements. Se dit
dans le sens de cossu.
Si/fra/us lionio (Pline) : qui est bien mis, n'a pas froid, recouvert
comme l'oignon, de plusieurs pelures.
Ce dicton by.aiénique conseille des vêlements superposés, sans
doute comme préservatif du fi'oid.
On pourrait aussi conseiller le choix de la couleur blanche, car
les vêtements noirs laissent pénétrer la chaleur du soleil et sortir
celle du corps : ils habillent peu : ils sont froids à l'ombre et chauds
au soleil, double désavantage. Les vêtements Idancs, au contraire,
conservent la chaleur du corps, et ne se laissent pas pénétrer par
les rayons du soleil.
— Les anciens avaient des vêtements si légers, que Pétrone les
appelle du « vent tissé ». (Voy. ga-:c.)
Dans le roman égyptien de Setua, traduit par M. Cliahas, on lit :
« Tabaha se leva : elle s'habilla d'un habit de lin : Setua voit tous
ses membres à travers rétoffe, et son amour grandit encore. »
— Les « .Merveilleuses », lorsqu'elles allaient danser dans les
bals à la sauvage, se montraient en maillot collant couleur chair,
recouvert d'une simple tunique de batiste très cl;iire.
M"'« ïallieu allait dans les salons avec une tuuicjuo tellement
transparente, ([ue ce vêtement pouvait passer pour une indiscrète
superiluité.
Vétiver, plante graminée de l'Inde, voisine du chiendent, dont
les racines, très odorantes, servent à [)réserver les vêtements des
insectes nuisibles.
Veto, mot latin : empêcher.
C'était, à Rome, la formule employée par les tribuns du peuple
pour s'opposer à un décret du Sénat.
En France, la Constitution de 1791 accordait au roi le veto
suspensif. Louis XVI l'ayant opposé aux décrets des 17 et 29
novembre contre les prêtres et les émigrés, le peuple lui donna,
550 VIA
ainsi qii';'i la reine, les noms injurieux de " Monsieur et .Miulamc
Yelo ».
Veuve, (lu lalin ridua : ancien français v ed ne, redire ; WaWom
vedova ; sanscrit vidhava, de vi, sans, dhdca, époux.
L'étymolopie ridua. vide(?), est adoptée bien souvent.
Synonyme: une liancée d'occasion.
— Le de'nier de la veuve.
— Veure s'ajoute seulement au nom des femmes. Ou dit :
« M™" veuve X... » ; mais on ne dit pas : « M. veuf X... »
— Secourir la veuve et l'orplielin. La pièce intitulée /a Vcnrc
du Malabar était à l'étude depuis longtemps, au Théâtre-Français,
lorsqu'on fit jouer l'Orphelin de la Chine, de Voltaire, qui venait
d'être reçu depuis peu.
Lemierre adressa alors ce quatrain au comité :
Par vos délais longs et sans fin
C'est assez me mettre à l'épreiive.
Vous qui protégez Y Orphelin,
Ne ferez-vous rien pour la Veuve ?
Vexer, du latin vexare, tourmenter, fréquentatif de vehere,
veclu/n, porter.
— Synonymes : tourmenter : en faire voir de grises ; empêcher
de voir la vie en rose ; faire passer les mers rouges (locution pro-
vençale) ; bassiner.
Être vexé : maugréer, pester ; jurer entre cuir et ciiair (Pré-
cieuses) ; ronger son frein en silence; fumer sans tabac et sans
pipe ; mousser.
Via, mot latin, signiliant chemin.
S'emploie quelquefois dans une adresse : ria Suez, faire passer
par Suez.
Se trouve dans le mot savant : viatique.
A aussi formé les mots : voyage, provençal ciagi : convoi, dévier,
obvier, fourvoyer.
Viager, qui est à vie, pour la vie durant. Ancien français viage,
cours de la vie.
— Revenu viager.
La rente viagère ne peut pas même assurer à la vieillesse, par
l'appât d'un héritage, le mensonge d'un peu de dévoùment. (Octave
Feuillet,, le Villar/e.)
VIA Soi
Viande, du bas-latin rirenda, vivres, nourriture.
A tl(''sii:ii(' dahord tout ce (iiii est propre à soutenir la vie.
Aiijoui'd'hui, il ne se dit [dus que de la chair des animaux de
lioiiclici'ie.
— Kn roman, il se disait carnnl fcarnem, chair). Ce radical se
retrouve dans un urand noinl)re de dérivés du mot c/ia/r; carnage,
carna\al. cai-nalion. (•arai\ore : cliarnier.
Pua ylutz elz de pelha
Non es loi) d'ovelha
Ni d'autre carnnl.
(I!. DE RoVEXAC.)
(Vous êtes plus avide de vêtement, que le loup n'est d'ouailles
ni d'autres viandes.)
Ainsi le mot riaude est parvenu à se substituer à chair.
— Le provençal a la forme rioiirc, qui correspond au terme
général dn français rirrcs.
Par nn phénomène aimlogue, boucher et boucherie ont désigné
d'abord le métier de la hiuiche (buccaj.
L'or/z/Vr s'appli(piail au\ corps d'état qui vendaient des chairs
d'animaux comeslihles. Celui qui vendait spécialement de la chair
de liuNif. s'a[)pelnit bouder.
On lit dans les Cartulnires de Montpellier (1° 45) : « IMazeliers
aion V tutlos, ço es assaber : 1 boacier, dos motoniers, 1 porcier
et 1 peychonier. » Que les boucliers aient cinq votes, à savoir :
un vendeur de chair de bœuf, deux vendeurs de chair de mouton,
un vendeur de porc, et un poissonnier.
La sicnna viandn era
I'(in>! et ai/rjua tôt dia.
Vie de saint Honorai.)
(Sa nourriture était du pain et de l'eau toujours.)
Com so riandas /'ai/fus de froment cueyt ani airjua e ria.
(Trailiiction d"All)urasis, f° 57.) Comme sont aliments faits de
froment cuit avec eau et riz.
En cesle isle seule naissent ces belles poires... Si on les cuisoit
en casserons par quartiers avecques ung peu de vin et de sucre, je
pense que ce seroit viande très salubre, tant es malades comme
es sains. (Rabelais, liv. IV, cli. 34.)
Notez que c'est viande céleste, manger à desjeuner raisins
avecques fouaces fraisches. (Rabelais, I, 30.)
— Débris de viandes : arlequins, rogatons. (Voy.)
oo2 Vie
Vice, du l;ilin vithim, do rilare, éviler(?).
— Tout vice est issu d';merie. (Voy. ûjnoruncc.)
Le vice est une imporfoction morale pra\e; le défaut nue imper-
fection légère, soit morale, soit intellectuelle.
On a dit de César qu'il avait tous les vices, et pas un seul défaut.
Certains vices n'existeraient pas. sans les vertus qui leur sont
opposées. Ainsi, l'avarice s'appuie sur la générosité : l'asture, sur
la bonne foi : l'exigence, sur la bonté ; l'hypocrisie, sur la religion ;
le crime, sur la clémence ou le pardon.
Souvent la peur d'un mal fait tomber dans un pire. Nos vices, à
leur tour, peuvent faire naître des qualités. L'avarice produit la
sobriété : la peur, la prudence : la défiance, l'ordre : l'orgueil, la
cliarité.
— Vice rédhibitoire. Défaut qui oblige le marchand à reprendre,
avant neuf jours révolus, le cheval qu'il a vendu.
— Fanfaron de vice.
Il y a deux sortes de corruption morale : celle qui se cache, et
que l'on compare à l'eau qui dort ; la corruption elïrontée, qui
étale sa turpitude, et que l'on appelle la fanfaronnade du vice.
Dans l'intérêt de la société, l'hypocrisie, suivant certains moralistes,
est préférable au scandale.
Osuperbiam inauditam, facinorn fffoi'iari ! (Ckévon à Brutus.)
— Il vaut mieux rendre un vice aimable, que de dégrader la
vertu.
Jaimo mieux un vice comaiode
Quane fatigante vertu.
(MoLiKRE, Anip/iilrijon.\
Le vice rapporte plus que la vertu. (Plus de plaisir, mais moins
de bonheur.)
L'innocence est un capital qui ne rapporte que quand on le perd.
(Grévin. la Vie parisienne. J
Tanlo magis expedil inguino. cjuam ingénia friairc !
s'écria Eumolpe, le poète, en faisant un calembour, dans sou dépit
de se voir dédaigné pour Asclyte, qui a de plus grands avantages
corporels. (Pétrone, Satyricon.)
Probilas landalur et alget.
(JrvLNAi., Satire I.)
Le pire de tous les vices est de n'en avoir aucun.
Il y a des esprits si stériles qu'il n'y pousse rien, pas même des
bêtises. (Lamennais.)
vie oo3
On ne inépriso pas tous ceux qui ont des vices, mais tous ceux
(jni n"ont auiiine vertu. (La Hocliefoucauld.)
Son Nice le plus urand est dftre sans vertu. (^Bignon.)
C'est un simple mangeur d'argent, oisif, ennuyé et ennuyant les
autres. Si le ciel lui avait accordé une vraie passion pour quoi que
ce soit, fût-ie pour la pèclie à la ligne, je le respecterais: mais...
(II. Beyle. la Chartreuse de Parme.)
Vice, du latin ricem, rice, rôle. Particule qui entre dans la
composition d'un grand nombre de mots.
Indique fonction en sous-ordre : vice-amiral, vicomte, vidame,
vice-roi.
Se retrouve dans : vicaire.
On désignait sous le nom de viguiei^s (vicaires) les juges dans le
midi de la France.
Yimaire ou vice-maire équivalait à adjoint.
— Vice-versa : réciproquement.
Xe trouver personne, quand on fait des visites de cérémonie et
vice-versa, est un des petits bonheurs de la vie sociale.
Tromper sa femme et vice-versa ne donnent pas la même satis-
faction.
Vicieux, dérivé de viciosus : adonné au vice.
...Il regrette le vin bleu et le ragoût du cabaret : il a la nostalgie
de la boue, l'appétit dépravé de la mauvaise compagnie, la tache
originelle de Paris !
La mer y passerait sans laver la souillure !
Victime, du latin victima, que les étymologistes rapportent les
uns à vincire, enchaîner, les autres à vincere, vaincre.
Ils l'opposent à hostia, sans être bien d'accord. (Cf. Littré.)
Voici le sentiment d'Ovide :
Viclima, qtiœ dexlra cecidit vicirice, vocalur :
Hoslibus a domifis lioslia nomen habet.
[Fastes, I, 33.5.)
Victoire, du latin Victoria.
— Victoire à la Pyrrhus. Pyrrlius, roi dÉpire, ayant gagné
contre les Romains la grande bataille d'Asculum, où il perdit un
grand nombre de soldats et ses meilleurs officiers, dit à ses amis :
« Encore une victoire, et je suis perdu ! »
— La victoire est une joie publique, faite de douleurs privées...
et d'une douleur publique.
S54 VIE
Victuaille. f.'imilicr ol siiniiiiK''. du l;iiiii ririm, vivre, et du
suflixe [irjoriilil'.
(^ir;i|)crrt)is-ji' ■.' (|il-i| ; (■'csl (jiif|(|iic \ iclimilli' !
(I,A Imi.MAI.NK.)
Vidangeur, déi-ivc du o'ubuKje, action de vider.
Syiioiiynics : (ladoiiard, ouvrier nocturne, dont le nom seid
réclame toutes les délicatesses de la iilmiit'.
— Une ordonnance de Henri IV, ap[ielle les vidangeurs « maistres
Fin ». (Pasqiiier, Rerliei^rhei^.}
Rabelais, avant cette époque, avait déjà employé ce mot : « Bon
vespre, mestre Fili, curaire de latrine.-;. »
J'eus ung aultre procez bien ord et bien sale, contre mestre Fili
et ses suppotz. (Rabelais, II, 17.)
Flfi est la réduplication de rinterjcction de dégoût fi ! à cause
de la mauvaise odeur quexbaleut ceux qu'on a appelés aussi :
in'aîtres des basses-œuvres.
— Les vidangeurs appellent ouri^age la matière même sur
laquelle s'exerce leur industrie. Ils disent : tomber dans l'ouvrage.
Travailler proprement, c'est connaître son métier.
Vide, du latin viduus, anciennement cuide.
Correspond à reuf, riduilé.
Vie, du latin vita, provençal vida.
— La vie est l'ensemble des fonctions qui résistent à la mort.
La respiration et la nutrition sont les deux fonctions indispen-
sables à la vie animale.
— Les deux organes essentiels de la vie sont ceux de la digestion
et de la génération : l'un assure la vie individuelle; l'autre, la
conservation de l'espèce. (Rivarol.)
— Avoir la vie dure : vivre très vieux.
— Mener la vie à grandes guides : grand train.
— Vie de cocbon : courte et I)onne.
Les Épicuriens de Rome avaient pris pour devise un vers de
Ménandre traduit ainsi par Cécilius : 3Jihi sex menses salis sunt
vitœ; septimum Orco spondeo.
Regnier-Desmarais l'a imité dans les vers suivants :
Donnez-moi six mois de plaisir.
Je donne à Pluton le septième.
La duchesse de Bon-y, lillo du Hé;2ent, mniinil ;i 2'^ ans. Quand
on lui disait que les excès abrégeraient ses jours, elle répondait :
« Courte et bonne ! »
C'est la devise des lib(M-lins. (pii saiiilieiit leur santé et leur
foi-tune à quelques jouissances matérielles, et ([ui escouiptent ainsi,
dans une jeunesse débauchée, la vigueur et le bien-être de leur
à, Lie nu'ir.
Ce proverbe n'est vrai qu'à moitié ; car, si l'abus des plaisirs
tarit les sources de la vie et la l'end courte, on ne saurait soutenir
qu'il la rend bonne, parce que, au lieu d'élever l'homme, il l'abaisse
au niveau de la l)rute, eu allai blissant sou intelligence.
Sponic -sua sihi qui.sqiti; vdicre cl vicere dodus.
(LucnfxE, dfi .Xatio-ri, V, 9.")8.)
(^Chacun, par instinct, usait de ses forces et ne vivait que
pour soi.)
— Vie de Sai'dauapale. (Voy.)
Vie de Polichinelle, qui consiste à se donner des bosses... au
ventre...
Grande vie, existence panachée, accidentée.
— Beaumarchais fait dire à Figaro : « Vive la joie ! Qui sait si
le monde durera encore trois semaines ? »
Il a imité Rabelais (liv. Ill, ch. 2) : « Qui scait si le monde durera
encore trois ans ? »
Cette pensée est déjà dans Sénèque {Thyesté) :
Nemo tam divos habuit fuvenles
Craalinum ut posset -sibi pnlliceri.
(Aucun n'est assez sur de la faveur divine, pour s'assurer seule-
ment du lendemain.)
— l'u homme très malade des suites d'une vie déréglée, disait au
médecin qui cherchait à le rassurer : « Ne comptez pas sur mes
quarante-six ans ; il faut les doubler, car j'ai vécu jour et nuit. »
— On dit aussi : faire la vie, c'est-à-dire faire la débauche.
Rabelais se sert du mot vu-ablp, adjectif énergique qui n'est plus
d'usage, qui équivaut au riret'c ritain des Latins (et surtout au
rita vitalis de Cicéron), opposé à ferre vitam : porter le fardeau
de la vie.
— Les Provençaux disent d'un gros mangeur, qu'il est d'une
« grosse vie « .
556 VIE
— Fiiiro vie qui dure, ou feu rjui dure, est le proxerlte opposé à
celui des débiiuciiés ; et il est pi-éférahle ;i tous les poiuts de vue.
(]'est Hu'^ujiner sa sauté, ses plaisirs et sa fortune, eu en usant
modérément, pour en prolonger la jouissance.
Cicéron, dans le traité de Senectute, dit : « Soyez vieux de bonne
heure, si vous voulez Tètre longtemps. »
An baiiqiii't di' l;i \ic iiifurliiiir convive...
Ce vers de Gilbert est imité de Lucrèce (UI, 92G) :
Ctir non itl vilœ jdcnus conviva recedis ?
(Que ne sors-tu de la vie comme un convive rassasié?)
— Je donnerais dix ans de ma vie pour...
La première moitié de la vie se passe à désirer la seconde ; la
seconde, à regretter la première. (A. Karr.)
...C'est une mauvaise action. Je ne voudrais pas l'avoir faite,
pour tous les jours qui restent au fond de mon saljlier. (A. de
Vigny.)
— Le cours de la vie.
Ef finit œfas (Cicéron) : La vie s'écoule.
Descendre le fleuve de la vie.
...Sa vie ressemble à un limpide ruisseau, qui coule entre deux
rives fleuries.
Platon {Banquet), et après lui M. Flourens, ont défini la vie « un
mouvement ».
Leibnitz dit : « Notre corps est dans un flux perpétuel, comme
une rivière, et des parties y entrent et en sortent continuelle-
ment. »
Avant Leibnitz, les physiologistes avaient comparé le corps
liumain au vaisseau de Tliésée qui, à force de réparations, n'avait
plus aucune des pièces qui le composaient à l'origine.
Les moralistes ont, comme les physiologistes, assimilé la vie à
un mouvement, en la comparant à un voyage, à un fleuve, à un
torrent.
On dit : marcher droit, cbarrier droit, faire son chemin ; par-
courir une carrière (en provençal rue); cet homme ira loin: il
arrivera malgré ses concurrents ; et enfin : il est arrivé, qui est le
grand mot, le but de tous les efïorts, le terme du voyage (lorsqu'on
a acquis une fortune assurée).
Pans l'expression (^ le cours de la vie », cours (cursus) indique
VIK Hol
iiii iiioiivciiient précipité, un ospace parcouru rapidement. Nous ne
vivons plus (HMil vingt ans, coiiune avant le déiiiuc. et ct'ttt' coinjia-
raison poétique avec une eau fu.uilive et rapide, fait allusion à la
brièveté de la vie, qui est une véritable course, sans ai'rèt ni
retour en arrière.
La fréquente comparaison de la vie à un fleuve tient à ce que les
années se suivent et s'écoulent comme des ondes : un flux sans
rellux: nous emporte, et c'est pour cela que Bernardin de Saint-
IMerre a pu dire : « On ne jette pas l'ancre dans le fleuve de la vie. »
Ue là les locutions mélaplioriques : vogue la galère! être en
vogue ; conduire bien sa barque ; arriver au port.
Ayez le vent en poupe, et vous trouverez des gens qui rempliront
votre barque.
Les Grecs disaient d'un bomnie beureux : « Il pourrait naviguer
sur une claie. "
Saint-Évremond souliaite d'un liomme précieux au monde, que
le cours de ses ans dure autant que le cours de la Seine et
de la Loire.
...Dans le cours de la vie, la folie est au gouvernail, l'amour à la
boussole : les passions enflent les voiles, la raison seule veille au
grain. (De Clinchamp.)
Viédaze. Les Italiens disent viso dl cat:o : imbécile.
Je puis cfire sans périphrase
Que vous êtes un franc viédaze.
[Enfer hiirlex'/iie.)
Vieillard, dérivé de rieil, ancienne forme de rieux, latin
vetulus.
N'a pas de féminin. La langue française a supprimé vieillarde
du dictionnaire par un sentiment de délicatesse et de galanterie,
Ek pus cilianl-s non es sers.
(A. Damki..)
(Il est plus vieux qu'un serpent.)
.1/ cap ses nna viehtrda.
[Ihmiai de Jaii/fre.)
(Au cbevet sied une vieillardc.)
Vierge, vieux français rirye, du latin rlrgo.
— Viiyjo. clicz les Romains, signiliait fille nubile : fœmina
viripotens. Avant l'âge nubile, c'éVcùi piiella [1).
Cependant on appelait aussi vii^ffo, a viridiore œtate, une jeune
558 Vifi
fenimc. C'est ainsi que Virgile dit, en |);ii-l;uil de l'iisipliaé, qui avait
eu déjà trois enfants :
Ah! cir(/o ùiffli.r, t/iur If ilrnirntift repil ?
(Eijlogne, \\, '»".)
— Ainonr(in\ des onze mille vierges : de toutes les femmes.
Cette locution ra|)[)elle la légende apocryphe des onze mille
vierges, suivant laquelle sainte Ursule partit de Londres pour la
Basse-Bretagne, avec onze mille vierges, qui devaient épouser les
onze mille soldats de Conan, son liancé. Une tempête les ayant
poussées dans le Rhin, jusqu'à Cologne, elles furent mises à mort
par les Huns, auxquels elles refusaient de s'unir.
Les anciens martyrologes portent S. S. Ursula et Underimille
Virg. Mart. Les copistes ont pris un nom de femme pour un
nom de nombre, et ont cru que Undecimille était pour undecim
millla.
— La fête des onze mille vierges se célébrait autrefois le
22 octobre.
On lit dans le Journal d'un bourgeois de Paris : « Le vingt-
imième jour du moys d'octobre, vigile des onze mille vierges,
trépassa de ce siècle le bon roy Charles YL »
Cette légende a été prise, en mauvaise interprétation, dans un
sens erotique.
On m'appelait l'amant des onze mille.
Qui tous les jours en aymoit deux ou trois.
(Lps Bi(iarrnres du sieur r/e.t Accords, 1008.)
Vieux, jadis vieil, qui s'emploie encore dans certains cas. Du
latin vetulus : d"où vieillir, vieillesse, vieillard.
— En conseil oi le vieil.
L'expérience de la vieillesse l'appelle aux conseils du gouverne-
ment, et un grand nombre de mots l'indiquent : gérousia, chez les
Grecs, et senatus chez les Latins : Conseil des Anciens. Le mot
seigneur, en français, scheik, en arabe, signifient vieillard.
— Une chose est vieille, lorsqu'elle a cessé d'être en usage ; elle
est ancienne, lorsque l'usage en est entièrement passé; elle est
antique, lorsqu'il y a déjà longtemps qu'elle est ancienne.
— Vieux comme les chemins, ...comme Hérode, ...comme Mathu-
salem, ...comme le temps.
— On dit d'un homme très âgé : Il a plus de jours que de
cheveux; il faudra l'assommer pour qu'il meure; il fera l'épitaphe
du genre humain ; la mort ne veut pas de lui.
\IG ooU
D'un vicill.ird (lui l;iil le jciiiic : l'ii \itMi\ |)oi'lr:iit dans un cadre
niMif : tons les miroirs cliaiiliMit en cIki'iii' snr sa jeunesse nioi'le un
irrévocable De pro/'iindls.
D'une femme de cinquante ans : Son dixième lustre Ijrûle.
Aristophane appelle une vieille mendiante « des haillons amliu-
lants ...
— Sur nu livre imprimé à Paris, en lo07, chez André Bocard, on
trouve ce vieii pour la durée de l'exemplaire :
...Sicl thon /Inclus formica marinns
Kliilidl, cl lolniti lestudo pcrambulet orbcm.
— Le vieil homme. Expurgate velus fermentum, exiiile
vetevem hominein. (Saint Paul, /■■« aux Corlnth., eh. o.) Purifiez-
vous du vieux levain, dépouillez le vieil homme.
Vigile-jeûne, du latin rifiilia.
Vicjile est la forme savante de veille. Il s'emploie, dans la lanaue
de l'Eglise, pour désigner la veille d'une fête solennelle ([ue l'on
sanctifie par ialislinence et le jeûne.
Les premiers chrétiens s'assemblaient d'abord la veille de
Pâques, i)our veiller et prier en attendant l'office du malin, célébré
en mémoire de la résurrection. Cet usage s'étendit aux autres
fêtes: mais, à cause des inconvénients qu'avaient ces assemblées
nocturnes, les veilles furent défendues par un concile, en 1322, et
remplacées par des jeunes, qui ont pris le nom de vigiles-Jeûnes.
C'est de cette coutume qu'est venu au uiot veille le sens de <. jour
précédent » .
— Autrefois, on disait aussi vaille. On lit dans les Sermons de
saint Bernard : « Li première vaille est li droiture de loyvre. »
Prima vigilia est reelitudo operis.
Vigne, [)rovençal vin/ia, du latin vinea, de vi/tum.
Le bois lortu. (Rabelais.)
Anbre touart. (Brueys.)
— Être dans les vignes du Seigneur : être ivre.
— Unis comme la vigne et l'ormeau. (Voy. lierre.)
Dans l'antiquité, l'usage était déjà, en Italie, de faire grimper la
vigne, et c'était l'ormeau qui lui servait de tuteur.
riinisqne <iiljun(/ere vite.s.
(Viiii;'].r:, Gdorgiquex, 1.)
///(( tihi Id'tis intexel vilibus ulinos'.
(ViKGii.t:, Géorgirpies, U, 221.)
SGO Vit
Niihnit pojiKlis riicH (IMiiio) : on marie les vif^mes aux peiijiliers.
...Adiilla riliuni jiroptiyinc
Allas iiKiritiil })(ji)id()S.
(IIoiiAci-, Epodet I.)
— La vigne, symbole de l'inlempérance, laisse ramper ses
rameaux, à moins qu'elle ne rencontre l'ormeau pour la soutenir,
ou l'espalier qui lui prête son épaule.
— En Italie, on fait monter et grimper la vigne en treilles, en
guirlandes, après des l)aliveaux écimés, qu'elle f&stonne de son
feuillage. Rien n'est plus gracieux que ces longues rangées d'arbres
qui, reliées par leurs bras de pampres, ont l'air de se donner la
main et de danser autour des champs une farandole immense.
Ces vignes folles, en courant de branches en branches, semblent
célébrer l'antique fête de Bacchus. (Th. Gautier, Italia.)
— Pleurer comme une vigne. (0.- Feuillet.)
— Fontanes, dans sa Maison rustique, fait rire la vigne :
L'enclos, où la scrpetU» arrondit le ftommier.
Où la treille en fi:rini}iant rit aux yeux du frrniier.
Vignette, diminutif de vigne.
Jadis on mettait au commencement des chapitres d'un livre, ou
à la lin des pages, de petites gravures qui représentaient des ceps
de vigne.
Vilain, du latin villanus, dérivé de villa, maison des champs;
comme rusticus, rustique, de rus : paysan, de pagensis.
Au Moyen-Age, gens de la campagne, de roture, classe asservie
et méprisée. De là le sens péjoratif que le mot a pris dans la
langue, pour en venir à signifier : laid, avare, méchant, dangereux,
déshonnête, incommode, comme s'il venait de vil.
Dés le xvF siècle, il avait déjà le sens d'avare, ladre.
En etïet, Rabelais (hv. 1, ch. 33) fait appeler par Pichrochole
Grandgousier (Louis XII?) du nom de vilain. « Yillain, disons-nous,
parce que ung noble prince n'ha jamais uug sou. Thésaurizer est
faict de villenie. »
Louis XU passait, il est vrai, pour avare ; mais il répondait à cela
qu'il aimait mieux faire rire ses courtisans de son avarice, que
faire pleurer le peuple de ses profusions.
Un proverlie de l'époque dit :
Un noble prince, un gentil roy
N'a jamais ni pile ni croix.
VIL 5GI
— Tous les iincions [ii'ovorlios inontront liieii le mépris (];ms
lociiit'l on t(Mi;iil los vilains :
Loi'fains, \il;nns. (Hahelais.)
Oignez \ilaiii. il vous poindra;
Poi^moz \ilaiii.ii muis oinrlra.
Les termes dans lesquels est exprimé ce proverbe, en montrent
Tancienneté. Aujourd'hui, les vilains proprement dits, les serfs
attachés à la .Gléhe, ont disparu avec la Féodalité; mais il existe
toujours de \ ilaines gens, qui prennent la honte qu'on leur témoione
pour de la faiblesse, et qui sont toujours tentées d'en abuser.
Vilain alïamé, demi-enragé.
(jiii |)rie le vilain, se fatigue en vain.
Graissez les bottes d'un vilain, il dira qu'on les lui bn'de. C'est-
à-dire : quand on oblige un malhonnête homme, on n'en reçoit
qu'ingratitude.
Il n'est chère que de vilain. Gest-à-dire : quand uu avare se
décide à donner à dîner, il se livre à des prodigalités insensées, et
sa talde ferait reculer d'épouvante un Gargantua. On dirait qu'il
veut bourrer ses convives et les faire crever, alin qu'ils n'y
reviennent plus.
Jeux de mains, jeux de vilains. (Yoy. main.)
Et dirent là lUie grand letanie
De plaisants mots et jcii\ sans villanio.
(M.UlOT.)
Villa, mol latin, maison des champs.
.Jadis, maison de plaisance à la campagne se disait plessis
(Plessis-lez-ïonrs).
— Pline le .leune, qui était de Côme. avait deux villas près du lac:
Tune s'appelait Comédie, et l'autre Tragédie. (Pline, Lettres I, 9.)
— La campagne favorite de Gicéron était à Tusculum. G'est là
qu'il écrivit ses Tascu/anes, dialogues philosophiques. (Aujourd'hui
Frascati.)
— Le général Bertrand possède, à Saint-Yalentin (Indre), deux
propriétés qu'il a baptisées les Pi/ra/nides d'Egypte, et le Grand
Caire, en sou\euir de l'expédition d'Egypte.
— La villa de (juinlus, frère de Gicéron, s'appelait Arcannm.
Celle de M. de Ghoiseul s'appelait Chanteloup : celle de M"'^
Dubarry, Luciennes : celle de Lamartine, Milly ; celle de Marie-
Antoinette, Trianon.
36
S6Î VÏL
Celle de M'"" de iMuiiiUînoii se iioiiiiiiiiit le Itcirait, et était â
la chaussée de Ménilmontant. Les époux Favart l'ont occupée plus
tard. Ce nom, devemi lidirait. dans le lanp'a.L'-o des faultoiircrs. a
servi de prétexte à diverses enseignes de cabaret, telles que :
Au Rat très ?nnlheureux ; Au Rat très distingué.
La villa (?) de Rabelais était /« Derinière, à Scnilli, près deCiiinon.
La Muette, ancien rendez-vous de chasse, est une corruption de
la meute.
Village, du bas-latin villaticum.
A .cens de village, trompette de hois.
Il faut du gros sel pour saler les grosses bêtes. (Voy. sel.)
Ville, forme française du mot villa.
Ce que nous nommons ville, s'appelait en latin urhs.
— Ville est un exemple du passage d'un mot de son premier
sens à un sens très dilTérent. Il n'est pas rare de voir dans les
langues des faits analogues, produits par la tendance à faire passer
les mots d'acception en acception, au point de les conduire, par
une suite d'évolutions, à représenter une idée très éloignée de celle
qu'ils avaient primitivement.
— Assemblage d'un grand nombre de maisons.
Ce sont les villas et les villages qui ont servi, en quelque sorte,
de noyaux autour desquels se sont formées des agglomérations.
— Il y a des villes qui sont devenues célèbres parce qu'elles ont
donné le jour à des grands hommes. Sept villes se sont disputé
l'honneur d'avoir produit Homère.
D'autres doivent leur célébrité h des faits mémoraliles qui s'y
sont passés.
Quelques-unes enfin ont vu leur nom devenir appellatif pour
désigner les objets usuels qui y ont été inventés, ou qui s'y
fabriquent. (Yoy. immortalité.)
— Certains noms de villes ont été pris dans une acception comique
ou ridicule. Nos ancêtres affectionnaient, dans le langage famiher,
les jeux de mots sur les noms de localités, comme ils en faisaient
sur les noms de saints. (Voy.)
On lit dans les Dicts de VApostnille : « Les plus serfs sont en
Esclavonie. »
Aller en Bavière, c'est baver; il se disait de la salivation mercurielle.
La vallée d'Angoulême, c'est le gosier. Jeu de mots sur avaler
et eiKjouler.
VIL 003
l'ii Lioiiniiand onvoio toiil à Anp-oulèmc.
H;ili('l;iis (!il : nninduoiisier d'Avalon.
Un iunoi-;int sorl;iit de l'iiniversik'' d'Asnières.
il ('st de Lunel, se disait d'un liin;ili([iie.
Aller à Versailles, c'était être renversé.
Aller à Patras, ou nd patres, c'était mourir. '
F.,es Manceaux étaient menteurs, comme ceux de Cracovie.
Un lioniine trompé par sa femme, voyageait en Cornouailles ou à
Corneto.
Aller à Argentan, c'est aller chercher de l'argent.
Aller à Crevant (petit Iioura- près de La Châtre), c'était mourir.
Pour congédier quclcpi'un, on l'envoyait à l'abhaye de Vatan
(Indre).
Loiscau, dans son Trailé des Of/lces (hv. V, cli. 4) dit, au sujet
des injustices que commettaient les juges : « Et tout cela vient de
ce que le juge n'ose contredire la volonté de Monsieur, de peur
qu'il ne change son office en une prébende de Vatan. »
— Certains noms de villes, lorsqu'on les prononce, excitent un
sourire ironique, sans qu'on l'explique bien. Tels sont ceux de
Brive- la-Gaillarde, Carpentras, Landerneau, Pézenas, Quimper-
Corentin, Saint-Jean-Pied-de-Port, Vaugirard.
De même certains peuples, certaines provinces sont, on ne sait
pourquoi, ridicules : les Béotiens, les Chinois, les Iroquois.
— l» Villes tirant leurs noms d'une quahté :
Agde, anciennement agathè tychr: bonne fortune.
Apt, de (/plus, propre à.
Bayonne, du basque baïri, ona, bonne ville.
Belle-Isle, Beaucairc.
Béziers. Si Dieu venait habiter la terre, il choisirait Béziers.
Brignolles, pays des bonnes prunes.
Buenos-Ayres : bon air.
Capoue, chauq) fertile.
Clairvaux: clara vallis, belle vallée.
Dôle, bâtie sur le Doubs, dans un lievi appelé Val d'Amour.
Embrun, montagne fertile.
Eu, signifie prairie.
Florence, la belle, le pays des fleurs.
Gallipoli, la jolie ville.
Montmirail : tfions mirabilis.
Ninive. signifie belle.
664 \\l
Ollioules, de olen, à cause de ses oliviers.
Venise: Venelia, pour roni eliam, viens encore (?).
2° De leur? défauts :
Tonlifaut, localité prés de Cliàleanroiix.
Montifaut, prés Jîourges : il y faut monter.
Ïravaille-Gliien, Travaille-Coquin, localité de l'Indre.
3° De la chaleur :
Asti, nom ancien d'Icija, ville entre Séville et Gordoue, sur-
nommée la Sertanilta (poêle à frire). Elle a pour blason un tournesol
avec ces mots: « Une seule sera nommée la ville du soleil. >'
Balbecli signifie : la ville du soleil.
Pékin, résidence d'été.
Pondichéry, ])nin cli;iud.
4° Des eaux :
Les agglomérations humaines se forment toujours auprès d'un
cours d'eau ou d'une source, qui est la première cause de leur séjour
et devient comme un patrimoine que se transmettent les races et
les générations successives. Comme les sources ne changent pas de
place (?), lorsque la population a disparu ou s'est éteinte, elles
peuvent servir aux archéologues à retrouver l'emplacement d'un
lieu historique, d'une ville, ou d'un village disparu depuis longtemps.
(Voy. i^dys.)
Les pays les plus arrosés sont les plus habités. Aussi un grand
nombre de villes tirent leur nom des eaux qui les alimentent.
Tels sont: Aiguebelle, Eaux-Bonnes, Chaudes-Aiguës, Lafont
(Cher), Clairfont (Indre), Font-Jouan (Cher), Frèdefont (Indre) ;
Segoules. village de la Nièvre, ainsi nommé de ses sept fontaines:
Les Palaz, près de Bourges, lieux marécageux ; Tremhlevif, com-
mune de la Sologne, marécageux et fiévreux.
« Les villes d'eaux et de plaisir, telles que Nice et Monaco, sont
des pays délicieux, des tableaux splendides de la nature, dit George
Sand ; mais on y rencontre trop de Parisiens, trop d'Anglais, trop
de villas prétentieusement bêtes. Un pays sul)lime, un ciel divin,
empestés de civilisation idiote. »
Les villes d'Europe qui possèdent la plus grande quantité d'eau
par jour et par habitant, sont, en 1860 : Rome, 900 litres ;
Carcassonne, 400 : Paris n'en a que 2G7 : Londres, 104.
Aigues-Mortes : eaux stagnantes.
Aix, Ax, du latin nquas.
Amboise : amheuntibus aquis (?).
VIL oCo
Ainsterdniii. do l.i rivit'-ro irAinstol.
Annory : rnincrinn f/quis', ville entourée d'eaux.
A(Hia-IVndtMite. en latin nqidi' larinœ.
Arc'ueil : (ir<-iis .lididni, les arcades de I 'a([iieduc des thermes de
Julien.
Arles, t'ii ccitiiint' lit'ii marécageux.
Hade. de 1 allemand bad, j)ain ; comme Bagnéres, Bagnols.
Harlleiir, bai're du (lot : comme Harfleur, Ilonlleur.
Bilbao, corruption de helcoo, beau gué.
Bordeaux, qui est sur le bord de l'eau (?).
Bourbon-L'Arcliambaud : eaux bourbeuses.
Bruxelles, de bruc/i, marais.
Calais, du celtique ca/, port.
Gaulerels, anciennement rnulderès : eaux chaudes ou thermales.
Elles étaient déjà célèbres au temps des Romains.
(]oblent/., en latin con/Iuenfcs, situé sur deux rivières (à la
jonction du Rhin et de la Moselle).
Condillac : cundi/fe ar/iiœ, eaux savoureuses.
Conllans, au coniluent de la Seine et de la Marne.
Divone, signilie fontaine des dieux (Ausone).
Dusseldorf, entouré de la rivière Dussel.
Fontainebleau, pour fontaine l)elle eau.
Mai'tigues, anciennement maritima.
Monlrieux (Chartreuse de) : montagne des ruisseaux.
Subiaco, an.'iennement suhlaqiicuin, à cause des lacs \oisins.
Utrecht, latin trajeciiis, parce qu'on y traversait le Hhiu.
Verdun, signifie ville du gué.
o" De l'altitude, de la position :
Ancône, coude.
Gourbevoie, près Paris ; ce nom est fait comme Tortes-Voies, près
Va le nç a y (Indre").
Dieppe, mouillage profond.
Montargis: hauteur d'où l'on voit au loin.
Épinal, de spina : crête de montagne.
Embrun : Ebrodunum, montagne fertile.
Falaise, des falaises voisines.
Heidelberg, ville entourée de montagnes.
6° De la religion :
Abbeville, ville de l'Abbé.
Alger, ville qui coiiibat pour la foi.
S66 VIN
Ani^ely (SîiiiU-Jeaii-d"), duncltHc de sainl Jcnn-Biiptislc qu'on y y
trouvée.
Appcnzel : cellier de l'abhé.
Hainboiiru,' : ville de Dieu.
Ilyères, de ///rVo.s, saiul (?).
Issy, de la déesse Isis (?).
Jouarre, àoJoi'is ara.
Monaco, d"llercule Monœcus, qui y avait un lenqjle.
Moutier, Munich, Munster, de monaslerium.
Port-Yendres : portas Vcneris.
Saint-Tropez, nom de saint.
7° De la nouveauté ou de l'ancienneté :
Gliàteauneuf, Villeneuve.
Naples : Nea polis, ville neuve, en grec.
Civila-Vecchia.
New-Yorck.
Vin, du latin vinum, grec oinos, hébreu l'ii/i, de ioan, faire
elïervescence.
Liqueur alcoohque résultant de la fermentation du raisin.
— C'est à tort qu'on le prononce t'a in. Un devrait prononcer
vine (?), comme on le prononce en provençal et dans les composés :
vinaigre, vineux, vinicole.
— Synonymes : eau bénite de cave (Rabelais I, 18) : le piot : la
purée septembrale (Rabelais) ; le lait des vieillards : la liqueur de
Bacchus ; huile de sarments.
— Vin d'Espagne : soleil en bouteille.
— Vin frelaté, vin baptisé. On appelle, à Paris, un marchand de
vins « Monsieur Mélange » .
Pétrone place les cabaretiers de Rome dans le signe du Verseau.
— Mauvais vin : guinguet, ripopée, vin de Suresne.
— Les principaux vins, chez les anciens, étaient :
En Italie: leCécube, vin favori d'Horace: le Galène, de Ca/cnanK
en Campanie que le même poète égale au Cécube {(h/es l. 20) :
le Falerne, qui n'avait acquis toutes ses qualités qu'au bout de dix
ans; le Massique, produit de la Campanie, comme le Falerne: le
Sétine, très estimé d'Auguste II y avait encore le Sabin, le Nomen-
tin, le Spoletum.
En Sicile, près de Messine, se récoltait le Mamertin.
En Grèce, on vantait le Gbio, le Lesbos,. le Thasos, le vin de Crète,
doux et de couleur d'ambre.
VIN 567
La Gaule foiiniissail l(>s vins de Marseille et de Narbonne, qui,
selon Martial, sentaient trop la fumée, parce qu'on les soumettait
au f/n/Kiriiu/i, atin de les vieillir, sans prendre soin de les boucher.
— Parmi les vins modernes, ceux de France sont les premiers, et,
en quelque sorte, les seuls.
La trinilé vinicole: Champagne, Bourgogne et Bordeaux, corres-
pond aii\ trois âmes dont parle Platon. Il y a le vin du cerveau,
le vin du (■(l'ui- et le vin de l'estomac.
Les meilleurs vins de Bourgogne (^Côte-d'Or; sont : le Bomanée, le
Clos-Vougeot, le Ghambertin, le Clos-de-Bèze (à Gevrey).
Viennent ensuite : le .Miisiguy, le Bichebourg, le Saint-Georges.
Les trois grands vins de Bordeaux sont : Chàteau-Margaux,
Chàteau-Laflitte, Chàteau-Latour. Ensuite: le Château-Larose, le
Saint-Kmilion.
Les vins blant's : Chàteau-Yquem, Sauterne, Graves.
Les vins de Champagne: Ay, Bouzy, Épernay.
Dans les Basses-Pyi-énées : les vins de Jurançon.
Drûme, Ardèclie : Ermitage, Saint-Péray.
Gard : ïavel, Saint-Gilles.
Dordogiie : Bergerac.
Jura : A r bois.
Hérault : Frontignan, Lunel.
Pyrénées-Orientales : Grenache, Malvoisie.
Bouches-dii-Blionc : Cassis.
— Béranger, qui était très sobre, et qui ne se connaissait guère
en vins, préférait cependant le Bourgogne au Bordeaux, parce que,
disait-il, lorsqu'on a bu une bouteille de Bordeaux, on est aussi bêle
qu'auparavant.
— Vin sur lait, c'est santé ; lait sur vin, c'est venin.
Cela signilie qu'au sortir de l'enfance, où l'on a été nourri de lait,
on arrive à l'âge où l'on boit du vin; et qu'il ne faut pas revenir
au régime du lait après cette époque, parce que c'est signe qu'on
est malade. C'est pour cela qu'on appelle le vin « lait des vieillards ».
— Ou dit qu'un verre de vin donne de la force ; en voilà plus de
quarante que je bois, et je ne puis me tenir sur mes jambes, disait
Ai'lequin.
— Vin versé n'est pas avalé. (Voy. l'homme pj'opose.)
Ancée, le plus ancien souverain de Samos, de retour de l'expé-
dition des Argonautes, s'appliqua à la culture de la vigne. Un des
ouvriers qu'il employait, nommé Tliètcs, lui prédit qu'il ne boirait
o08 VIN
pus (le ce vin, pour loqiifl il les nccahlait de tant de travaux.
Aiissit/)!, Ancée ordonne qu'on inculte sous le pressoir les j:i-appes
vermeilles, et, recueillant le jus du raisin à mesure qu'il s'écoule,
il porte déjà la coupe à ses lèvres, quand tout :'i coMp on lui
annonce qu'un san.tilier ravage ses terres. H y coml. un cniip de
boutoir le tue. (^esl loriûine du proverbe i^rec (pi'Ilorace a Irndiiil :
Mulhi cndanl inter calices suj) renia que. lahra.
Du bord du verre au l)f)rd des lèvres
La route est longue, on peut verser.
Dans V(Uft/ssée, Antinous, un des poursuivants de Pénélope, a la
gorge percée par une llècbe d'Ulysse, au moment où il [)ortait la
coupe à ses lèvres.
Entre la coupe et les lèvres, il y a place pour le malbeur.
Entre la bouche et la cuiller,
Maint enconibrier.
I On n"exccute pas tout ce ([n'on se propose.
Et le chemin est long du projet à la clioso.
(Molièhf;, Tarliiff-e^UlA.)
A la Sainl-.Martin
Boit-on le bon vin.
(xv"><: siècle.)
— En Provence, les tonneaux se l)Ouclient ordinairement vers la
mi-novembre.
D'où le proverbe : A la San-Marlin, (asfo toun cin et lapo la
boulo. (A la Saint-Martin, goûte ton vin et boucbe ton tonneau.)
Saint Antoine sec et lieau
Remplit la cave et le tonneau.
— Avoir le vin gai.
...Dissipai OEvius.
' Curas edaccs...
(HonAcii, Odes, ni, :;.)
Bacclius dissipe les soucis rongeurs.
Mtdtoque liilarans concivia Bacc/io.
(Viiu.ii.t.)
Le vin réjouit le cœur de l'Iiomme : Vinuni lœti/ical cor
hominis. (Écriture.)
— Le Coran interdit le vin.
— Cuver son vin : s'endormir dans l'ivresse.
Se dégriser en dormant.
Ef/larc cinuin soiiuio.
VIP 569
— Quand le \in est tiré, il faut le lioire.... ;'i moins qu'il ne soit
mauvais.
(Voy. les locutions : esprit-de-\in, véiitc dans le vin, mettre de
l'eau dans son vin, pot-de-vin, sac-à-vin.)
Vinaigre, mot composé des éléments rin et aigre.
— Vinaigre des quatre voleurs. Ou raconte que (piatre voleurs,
pendant la poste de Marseille, avaient composé ce vinai.ure anti-
pestilentiel, au moyen duquel ils parcouraient impunément les
maisons, s'emparant de tout ce (pi'ils y trouvaient de précieux.
Violent, du latin rio/enh/s. de ris.
— Violent comme le mistral (voy.); des odeurs violentes; des
mains violentes (Méry) : lord Kluin, célèbre par la violence de son
admiration...
— De là aussi : violer, viol, violation, inviolable.
Violette, dérivé diminutif du latin viola, vloller.
— L'bumble violette. La violette, symbole do la modestie, se
caclie. comme pour se dérober à tous les yeux.
Violon, de l'italien rlolone ; provençal viola: bas-latin vlinla,
que Diez rattache au latin vitulare, se réjouir, de vituhis, veau ;
pamltader comme un veau.
— Synonyme : crin-crin.
— Payer les violons : payer les frais.
On dit aussi : jouer de la pocbe (voy. imycr), par allusion au
petit violon appelé pochette, dont se servent les maîtres de danse.
Nous verrons s'il me faut a\ec ces scélérats
Pa\er les viuluus, ([uand je ne danse pas.
(Poisson, les Fans (/irirlissaiits.)
— Prison annexe au corps-de-garde.
Ce nom remonte à une coutume monacale. Quand un moine avait
commis une l'auto légère, il était enfermé dans un petit cachot
nommé psaltérlon, non à cause de l'instrument de musique de ce
nom, mais parce que le prisonnier y restait le temps de réciter les
sept psaumes do la pénitence.
Par suite de celte équivoque, quand le violon remplaça le
psaltérion, comme instrument de musique, on appliqua aussi son
nom à la prison.
Vipère, du latin vlpcra, pour vivlpara (?).
En terme de blason : guivre.
570 VIS
On crovr'iit autrefois que la vipt-i'o (Hait vivipare. Do là son nom.
On a reconnu qu'elle esl ovipare.
Race de vipt'ircs. (Saint Mathieu, XII, 2i, .X.XIII, 'X\.)
Virago, jioiir rinn/t of/o : d'où probaltlenient rù-yo.
Femme d'un courape vii'il.
Surnom donné à Minerve et à Diane.
— Didon, reine de Cartliagc, s'appelait Klissa. VAh' fut siiriiom-
mée Dido (en langue punique riruyoj, à cause de sa mort
liéroïque.
— Synonyme : amazone.
— Se prend toujours en mauvaise part. (Voy. femme rolontaire.)
Virgule, du latin vlrgula, diminutif de virga, baguette.
Signe de ponctuation qui sert à séparer les divers membres d'une
même phrase. C'est le plus petit repos.
Virtuel, dérivé de virlus.
S'oppose à formel. Intention virtuelle et non actuelle.
Le chêne est virtuellement renfermé dans le gland.
Virtuose, mot italien, rir/uoso. habile en musique.
Les chanteurs en réputation se glorifient du titre qu'on leur
donne, sans se douter de sa signification équivoque.
Comme un grand nombre de mots du vocabulaire musical, il est
emprunté à l'italien, et veut dire rertueux. Il a été donné ironi-
quement aux castrats. Beaucoup d'artistes de nos jours ne sont pas
aussi vertueux, et pour cause.
Vis-à-vis, de l'ancien français vis; d'oîi visage.
Proprement : visage à visage, face à face, nez à nez.
— Vis est dérivé du latin risus : il a signifié aussi vif, ricus.
De la l'ondrc li jMo au \ is.
(Iloman de Rcnarl.)
Telle fois tu seras advls
Que tu tiendras celle au clcr vis.
[Roman de la Roxe )
Li tis a pou d'cnnis, li mors n'en a nus. (^Vieux proverbe.)
Visite, substantif verbal de risi/cr, du latin risHare.
— Les visites font toujours plaisir ; si ce n'est en arrivant, c'est
en parlant.
VIT 571
Il n'i'st pas tlf |iirli)ii i|iii, Imltaiil Sdiis la pliiio.
No s'ao|uiUo on juraiil (l'iiii dL-Noir t|iii rt'iimiic ;
Kt tous ces visiteurs seraieiil au désespoir
He reiicoiiliiT chez eux les amis (ju'ils vont voir.
(ViKNMiT, lex \'isilex du jour de l'an.)
— Il ne laiil pas se voir souvent, si l'on veut se voir lonjzlenips.
Vite, provençal vista, vue.
Signilierait : en nn clin d'œil, et viendrait de viste, comme tôt
de (osf.
D'autres le rapportcnl à r('(jotus{l).
— A été adjectif.
Tu le vantais d'être si vite.
(L\ P'O.MAIXE.)
— Velis reniisque i^Cicéron) : avec toute la vitesse possible.
— En moins de temps qu'il n'en faut pour faire cuire des
asperges. (Voy. Habelais, Y, 7.) C'est la traduction du proverbe
familier à Auguste: Cifius quam asparagi coquuntur.
Vitesse, dérivé de vile.
— Vitesse que la foudre ne désavouerait pas.
— Quand on dit : rapide comme la pensée, on s'imagine volon-
tiers qu'on vient d'exprimer le nec plus ultra de la vitesse hyper-
bolique, en quelque sorte immatérielle et instantanée. C'est une
erreui-, à laquelle la science donne le plus complet démenti.
M. IlouUioltz. à l'aide d'expériences très délicates, a démontré,
en I80O, que la vitesse de transmission de la volonté par le courant
nerveux qui communique la sensation des organes au cerveau, et
les ordres de la volonté aux organes, n'est que de vingt-six mètres
par seconde, vitesse du pigeon voyageur. Ainsi, par exemple, ce
n'est qu'au bout d'un vingtième de seconde que nous pouvons avoir
conscience d'une blessure faite à l'un de nos pieds. La même
lenteur se retrouve, s'il s'agit d'un ordre que le cerveau donne
aux pieds de se mouvoir. Il résulte de là que l'agent nerveux est
vingt millions de fois moins rapide que le lluide électrique.
Pendant la durée d'une seule pulsation de l'artère, l'électricité
ferait sept fois le tour de la terre. (Levcrrier.)
— La pensée est encore plus rapide que l'électricité, puisqu'elle
se plonge parfois dans les abstractions de l'infini.
Vitrix (Vénus) : Vénus qui attache, de viiicire, lier, selon
Varron ; d'où cinriila. cliaines pour les vaincus, vlctima, victime
sacrifiée par le vainqueur.
572 VIV
iJo là ;uissi intia, les Icmdt'letlc^ (jai aviiienl le don hic f'iiij)loi
d'attacher cl d'orner la chevelure. Les femmes honnêtes avaient
seules le droit do s'en servir.
Ente procul, vittœ tenues, insigne piuloris,
Qiiœque letjis medios, inslitu lonija, pedes.
(Ovii)K, .I/-.V mii'iloriii, i, 'i\.)
Vivace, du kiliii r/ra.v, (jui vit [<)ii.ult'iii[ts.
— Plante vivace : qui vit plus de trois ans. S'oppose aux plantes
annuelles et bisannuelles.
Vivre, du latin vivere.
Se dit aiisolument, comme autrefois à Rome, pour : user de tous
les plaisirs de la vie. (Yoy. vie de cochon.)
— On a trouvé à Narbonne, sur une pierre antique, une
inscription terminée par ces mots : Du/n vicunus, virnmus.
— Vivre à pot et à rôt avec quelqu'un : familièrement.
Vivre au jour le jour : sans prévoyance.
Vivre comme un bohémien ; comme un chien, un ermite, un
chanoine, un loup, un hibou, un ours.
Vivre de racines : sobrement.
Lever à six, diner à ili\.
Souper à six, couclier à dix,
Fout vivre l'iiomnie dix fois dix.
Qui vit de peu, connaît l'indépendance.
Rien n'est plus délicieux dans la vie que le coin du feu, une
salade de homard, du Champagne et de la causette. (Lord Byron,
Don Juan.)
N'avoir pas de quoi vivre : vivre de privations.
Avoir juste de quoi vivre : de quoi joindre les deux bouts, de
quoi ne pas mourir de faim.
— Qui vivra verra.
Ouc;] iiomme u'eul les dieuv tant hieu eu maiu,
Ou'asseuré îust de vivre au leudemain.
(IxABtl.AlS.)
C'est la traduction exacte de ces vers du Jliyeste de Sénèque :
Ncmo tam divos hahuit fa ventes,
Crastinum ut posset sibi polliceri.
— Il faut que tout le monde vive.
Primo vicere, deinde philosopha ri.
TertuUien (Traité de V Idolâtrie, ch. 14) dit qu'il n'est pas
permis de faire des idoles, et que, si un statuaire lui disait qu'il n'a
VOI 573
pas d'aiilro iiiovoii de vi\rt\ il lui iM'iiondrail : ^ Kli ([iioi 1 mon
ami, ost-il m'-ccssairo que In vives ^ »
L'ahlié Desloiitaines répondit à M. d"Ai\uensoii, lienlenant-général
de police, cpii lui reprochait ses éerits scandaleux : « — H faut que
(ont le monde \i\('. — Je n'en vois ])a? la nécessité ». Ini réjdiqna
d'Ai'genson.
Henri IV arriva un jour chez Gahrielle, sans être attendu, et vit
le duc de Belleaarde. son rival, se glisser furtivement sous la table,
où le diner était servi. Le roi lui passa une Ijoite de coniitures, en
disant : * Il faut que tout le monde vive. »
— Petit ])onhomme vit encore !
Jeu renouvelé des Grecs, qui consiste à se passer de main en
main une allumette eullammée, en disant : « Petit bonhomme vit
encore », jus(prà ce qu'elle s'éteigne entre les mains d'un joueur,
qui est le perdant.
— Je dois une belle chandelle à mon médecin : la Camai'de n'a
pas jugé à propos de poser son éteignoir sur le lumignon de mon
existence. (Burlesque.)
Vœu, du latin votum, roman col.
De là \iennent aussi : vouer et voter, ex-volo, votif, aveu, dévot.
Voici, voilà (préposition), pour vois-ci, rois-là, c'està-dire
vois ici... Se sont écrits en deux mots.
— On disait autrefois : vois-me-ci, vois-me-là.
Yoy-me-là prest à boyre. (Hahelais, Garganfiia, 41.)
Gare ! voy-le-cy. (Rabelais, Pantagruel, IV, 26.)
Triboidet fut envoyé devant pour dire : vois-les-cy venir. (Bon.
Despériers, Contes.)
Voy-vous-là composeur de pets. (Rabelais, I. 40.)
— Le verbe s'employait aussi au pluriel :
Mais voyez-ci ce qu'il advint. [Qaince joies du niaviage.)
— Au XVII'' siècle, on donnait encore à voici et voUà un inlinitif
pour complément.
Corneille a dit :
Voici vi-nir ma sœiu* pour ï^o jiUundro avec vous.
[Horace. 330.)
Voie, dn latin via, qui est aussi provençal.
D'où : voyage, envoyer, dévoyé, dévoiement.
— Voie de bois, d'eau, se dit pour : ce qu'on pent apporter d'eau
ou de bois en un voyage.
— Voies de fait, moyens violents.
574 VOI
Voir, ;iii(i(Miii('iii('iil rcoif. du l.itiii r'nh'ro, provençal rcirc.
— Le futur ;i élé aussi je. voirai on roirrrti. (Dilîéronce de
prononcialiou.)
One voinï'Z-voiis là-liaiil, que roncos cl orties?
Ici. Miiis lie vuiiToz (]iie fleurcUcs sorties
Du sclii (Jii renouveau.
(RoXSAIlD.)
Attendez ung pou, et voirrons la vérité du tout. (Rabelais.)
— Voir, c'est savoir.
Quiconque a l)eaucoup vu
Peut avoir Ijcaucoup retenu.
(La Fontaine.)
— Voir une paille dans l'd'il de son voisin, et ne pas voir une
poutre dans le sien. (KiHingile, saint Mathieu. VII, 3.)
Quand dauitruy parler vouldras,
Regarde-toy, et te tairas.
Ce conseil de nos anciens est d'autant meilleur à rappeler qu'il
est moins pratique.
Les Espagnols disent : « Quand on a une maison de verre, il ne
faut pas jeter des pierres dans le jardin du voisin. »
Je l'ai vu, dis-je, vu, de mes propres yeux au,
Ce ([ui s'appelle vu.
(Moi.iKiiE, Tartuffe. V, 3.)
« — Je vous ai vu quelque part. — En effet, j'y vais quelquefois. »
— Voir trente-six cfiandelles. (Voy.)
— Voir tout en noir : être pessimiste.
Il n'y a rien de plus facile que de voir tout en noir : il n'y a qu'à
fermer les yeux (?).
— On voit les objets qui frappent la vue : on regarde ceux qui
excitent la curiosité.
L'artiste regarde les beautés d'un tal)leau qu'il voit ; l'ignorant
regarde le tableau, mais n'en voit pas les Ijeautés.
— N'y voir goutte : ne rien comprendre à une chose.
Tel a des yeux, qui n'y voit goutte.
— Il ne voit pas plus loin que son nez : il est peu clairvoyant.
Qui de loin voit, de près se réjouit.
Ils ont des yeux, et ne verront pas ; ils ont des oreilles, et
n'entendront pas. (Psaumes.)
— Il est une beauté facile à méconnaître, que l'artiste saisit.
L'admiration que font éprouver à l'artiste une foule de sensations
VOI 573
natiirollcs, est duo ;i uno (''{liic;ition spécirilo, qui lui permet de
distin.mier et d'exlrnii-e. en (ptel([iie sorte, des clioses les plus ordi-
naires, des heaiilrs (inc le viilaaire n'aperçoit pas.
Dans le heau, il n'y a de vaiii'lr (pic [loiir les observateurs; les
sots ne sont frappés de rien.
— Sous Louis XIV, on vit ;'i Pai-is des Iroipiois, (pii ne furent
éinci'veillrs que des l)ouli(pi('S de iVtlisseurs.
Voisin, du latin r/r/n/is ; provençal rcstn.
11 a siuniru'' lialiitant d'un nièiue lieu (vicus).
— On le fait aussi venir de voix : d'où, anciennement, i:oisier(l).
Li faine voisic lu noctc et li jor.
— Qui a bon voisin, a bon matin.
Qui ha bon voisin, lia bon matin (Rabelais). Matin est mis pour
journée.
On dit aussi, par homonymie: « Qui a bon voisin, a bon màtiu » :
parce qu'un bon voisin est comme un chien de garde.
Rabelais donne encore le proverbe: « Bon avocat, mauvais
voisin. »
Puissant seigneur, crrami fleuve, grands clieniins.
En tout temps sont mauvais voisins.
N'achète pas la maison, mais achète le voisin. (Proverbe russe.)
Bonus eslo ririnus (^Caton) : Sois Ijon voisin.
Si vous voulez vivre en paix avec vos voisins, n'en ayez pas.
(A. Karr.)
Voiture, du latin veciura, transport.
— Ou disait autrefois « carrosse de voiture ».
...Rs ont été assassinés par des voleurs qui arrêtèrent le carrosse
de voiture où ils étaient avec moi. (Marivaux, Vie de Marianne.)
...11 était parti pour Bordeaux dans le carrosse de voiture.
(M™e Riccoboni.)
— Synonymes: cab (anglicisme), cabriolet où le conducteur est
placé derrière: dog-cart (anglic), voiture de chasse; guimbarde,
vieille voiture démodée.
Panier à salade : voiture pour le transport des provisions ; était
autrefois à claire-voie.
Voix, du latin vo.n: d'où aussi vocal, voyelle, avocat, équivoque.
— Voix de stentor (voy.)
Voix de tonnerre : très forte.
tm VOL
Il n'y a qu'une, voix pour le hlfinior.
La voix (lu \)cuplc est la voix dé Dieu. Vax jtojiiiH, rox Dei.
Vole (faire la), se dit, à quelques jeux de cartes, quand un des
joueurs fait toutes les levées.
(yest une corruption du mot voile, qui se disait au temps d'Henri
Estienne, et qui vient de l'italien volfd, tour, coup de dés. /•>//• ht
voila : faire le coup, .^aiiner la partie.
Volée (de coups).
On ai)|)elait jadis volaiil un .uros bâton court pour se hatlre.
Rabelais (lY, IG) dit: « Si en tout le territoire n'estoyent que
trente coups de baston à gaigner, il en emboursoyt toujours vinat-
huict et demy. »
Racine a mis en vers cette phrase. Il fait dire à i'Intimé :
Et si dans la province
Il se donnait en tout vingt coups do nerf de i)fpiif,
^ Mon père, pour sa part, en einboursait dix-neuf.
(Plaideurs. I, o.)
...Basile, ô mon mignon ! si jamais volée de bois vert, appliquée
sur une écbine... (Beaumarchais, Mai^iage.)
— Synonymes : tripotée, raclée.
Voler, mot récent, dans le sens de prendre, dérober. Il ne date
que de la lin du xvi^ siècle. On disait autrefois : rober, larronner,
emliler. Biez le tire de la racine vola, paume de la main : empoi-
gner. Peut-être est il pour : soustraire, détourner les oiseaux dressés
pour la chasse.
— Synonymes: dépouiller, déprédations, dévaliser, dérober, dé-
trousser, dilapider, escroquer, extorquer, gruger, marauder, piller;
piraterie, rapine.
Voler l'État: baraterie, concussion, exaction, dilapidation, détour-
nement, malversation, péculat, prévarication, steUionat.
— Bien volé ne profite jamais.
Le bien d'autrui jamais ne produit.
Les gains illicites sont les arrhes du malheur. (Saint Grégoire de
Naziance.)
Mule parla, maie dilabunlur.
(X.nEvii-s.)
A'o« halel ecentus sonUdn causa honos.
(Ovide.)
— Il ne Ta pas volé !
VOL 577
Quand je dis l)ri,L:;iiid, jt; raiipcllc par son nom : c'est la seule
chose qu'il n"ait pas volée. (A. Dumas.)
— Il n'est pas défendu de voler : il est défendu de se laisser
prendre.
Voleur, dérivé de coler.
C'est le (pi;dilicatif commun à tous ceux qui prennent le l)ien
d'autrui.
Le filou (voy.), voleur à la tire, vole subtilement, escamote.
Le fourbe prend furtivement.
Le fripon (voy.) prend avec finesse, il vole les bardes, dérol)e.
Ce mot est de la même origine que fripier, celui qui vend de vieux
etïets d'bai)illement.
Le larron vole en cacbette.
— Les noms de Cartoucbe, de Mandrin, de Gaspard de Besse,
voleurs fameux du siècle dernier, sont devenus appcllatifs.
— Voleur comme une pie. (Voy. pie.)
— Être mis comme un voleur : être mal vêtu.
On dit aussi : Cet bai)it fait peur aux voleurs, il montre la corde.
Un jour, M. Parceval-Orandmaison, membre de l'Académie, dont
la tenue était négligée, s'étant présenté pour entrer aux Tuileries,
un officier doré sur toutes les coutures, lui dit : « Vous n'entrerez
pas, vous êtes mis comme un voleur. » L'académicien l'examina de
la tète aux pieds et lui répliqua : « C'est vous, qui êtes mis comme
un voleur, et moi comme un volé. »
— C'est un pays d'bonnètes gens : quand on crie au voleur ! tout
le monde se sauve.
— Au HvrelV, cb. 16, de Rabelais, on vient annoncer à Gymnaste
que les deux plus bonnètes bommcs du pays (des Chicanons) viennent
d'être pendus. On peut juger par là du reste des habitants.
— Le mécliant fuit sans être poursuivi; mais le juste est hardi
comme un lion, et ne craint rien. (Salomon.)
— Quand tout le monde est voleur, le meilleur est celui qui ne
tue pas.
Benefriuui latronis non occidere. (Cicéron.)
Volume, du latin volumen, de volvo, rouler.
De là aussi : volute, volubilité, qui signifie proprement promptitude
à tourner.
Rabelais emploie l'adjectif voluble, qui ne s'est pas conservé, et
dont les Anglais se sont emparés.
37
:J78 VOT
Volupté, (lu Inliii iu)luj)i(iii, voluplnlom, de rr>/o, je veux (?).
— Lu volupté est mère de la douleur. (Voy. jeunesse.)
L;i volupté iilimente les maux.
Malonim c.sca rolnptan.
(Pi.ai:tk, Morcdtnr, V, It.)
Les voluptés, eu trop complaisautcs maîtresses, nous fout tomber
dans un houleux allaiblissemenl.
Debilitatem induxere deliciœ, blandissimœ doyninœ (Sénèque,
Ep. à LuciUus, LV.)
La plus ,121'aude ennemie de la volupté, c'est l'indécence.
Voluptuaire, se dit des dépenses de luxe, de fantaisie, faites
uniquement en vue de l'agrément. (Voy. somptueux.)
— On a appelé voluptuaircs les travaux publics d'art, tels que
les théâtres, promenades, décorations luxueuses.
Vomir, du latin vomere.
— Synonymes nombreux :
Appeler Huet ; Iluet est l'imitation du bruit des hoquets qui pré-
cèdent le vomissement.
Revoir la carte : la liste des mets du dernier repas.
Dégobiller, le contraire de (jober, — moins ignoble que dégiieuler,
dérivé de gueule.
Compter ses chemises ; jeter du cceur sur le carreau.
Renarder, écorcher le renard. (Rabelais lY, 14.)
Rendre la monnaie de la pièce ; rendre tripes et boyaux.
— Au même radical se rattache vomitif.
A la lin de la république romaine, la gourmandise était telle, que
les Romains se faisaient vomir pour recommencer de manger.
Sénèque dit : Vomunt ut edant, et edunt ut vomant.
César, au dire de Cicéron, fut souvent dans ce cas.
— Vomir des injures est une expression qui déplut à l'origine, dit
Vaugelas, à cause de limage qu'elle éveille ; mais Condillac est d'avis
de la conserver, parce qu'elle est juste et peint fidèlement la pensée.
Vomissement, dérivé de vomir.
— Retourner à son vomissement : retomber dans ses erreurs,
dans ses fautes. (Salomon, Proverbes XXVI, M.)
Le chien rehume ce qu'il a vomi. (Proverbe espagnol, xvi^ siècle.)
Voter, du latin votare.
— Voter contre : l)lackhouler ; de l'anglais black, noir: la boule
noire exprimant un vote négatif.
VOU o79
Voto (ex-), iiKils l;ilins. Soii<;-oiitcntlii ohlatnm. Otl'crt |)Oiir
r.'u-coiiiplisscmt'iil d'iiii \m'ii. Mol foi'iiu'' coiiiiiic le l;iliii expio, [vay
III) sjicrilico.
Tabula rôtira. (Horace, Ode.-;.)
Los aïK'iciis ornaient leurs temples do ces sortes de tableaux,
qu'ils appelaient lahalo' votlrœ. La plupart étaient accompagnés
(1 une inscription qui Unissait par les mots ex roto, pour marquer
(pic i'aiileiir s'acquittait (run vœu fait à quelque divinité, dont il
a\ail in\()([U('' rassistaiice dans un extrême danger.
Cet usage nous a été transmis par le paganisme, et l'on suspend
souvent dans les églises des tableaux qui représentent la scène du
danger auquel a échappé celui qui les a olTerts par suite d'un vœu,
ex volo.
— Jacques Tboniassin a fait un traité de taballs rot iris.
Vouloir, provençal rofcr, du latin volerc, pour relie.
Les Latins disaient noio : je ne veux pas.
— Velint, iioli/tt : (jn'iis le veuillent ou non ; bon gré, mal gré.
(Cicéron.)
— Vouloir, c'est pou\oir. (Saint l^inl.)
Mais vouloir est plus lieaii que pouvoir.
— Vouloir se dit dans le sens ûo poaroir, en parlant de choses
inanimées.
Le temps ne veut pas changer; ce bois ne veut pas brfiler.
C'est nue fanfaronnade de dire qu'on peut tout ce qu'on veut:
mais, assurément, un [leiit lieaiicoiip quand on sait vouloir. (Saint-
Simon.)
— Voir, c'est savoir . vouloir, c'est pouvoir ; oser, c'est avoir.
Sic volo, HIC jubeo, sit pro rnlionc voiunlds.
(.Iuvi.;nai„ VI, 222.)
(Je le veux, je rurdonne: ma volonté, voilà la raison.)
— Plus fait celui qui \eiit que celui qui peut.
PoHHunt, fjuia po.ise cidcntur.
(VniGii.i:, Envidc, W, 231.)
Les grandes âmes ont des vouloirs : les autres n'ont que des
velléités. (Proverbe chinois.)
Ce que femme veut, Dieu le veut.
— En vouloir à quelqu'un, c'est lui vouloir du mal.
Pourquoi pas du bien ? Est-ce que le principal versant de notre
volonté serait du côté du mal? Un des plus rudes labeurs du juste,
580 VOV
c'est de s'exlniire conliniiclleiiieiil de r.'nne l:i iii;ilv('ill;ini:o diflicile-
menl épuisable. (Victor Iln.iio, V lloimnc (pu rit.)
Vous, du latin ros.
Pronom qui csl le pluriel de ///. S'est employé dîins les temps de
civilisation moderne en parlant à des personnes que l'on veut
respecter. C'est une sorte de flatterie dont on se sert, comme pour
dire qu'une personne, mise dans la l)alanre de l'opinion, mérite les
honneurs de plusieurs.
De même les souverains s'arrogent le droit de parler d'eux au
pluriel, en disant « Nous ordonnons », au lieu de « J'ordonne ».
Dans les républiques démocratiques et cgalitaires, on supprime
ces locutions puériles et blessantes autant que contraires aux lois
grammaticales (?).
Voyage, voyager, du latin viaticum, provision de route.
Aujourd'hui, viafique a ce sens. (Ne saurait venir de viajyi agere.)
Provençal riatge, italien viaggio, bourguignon viaigc.
Chemin que l'on l'ait pour aller d'un lieu à uu autre lieu éloigné.
— Synonyme : pérégrination.
— Voyager : passer sa vie cà passer son chemin.
— Avant de voyager pour s'instruire, il convient de s'instruire
pour voyager.
— Passer six mois de l'année à la campagne, quatre mois à Paris
et deux mois en voyage, voilà le souhait d'une vie heureuse. (Babinet.)
...Si j'étais riche..., je jouerais cinq mois à Monaco, de décembre
à avril, coupés d'excursions en Italie ; pendant les mois de mai, juin,
juillet, août, je ne quitterais guère la campagne : en septembre, je
ferais un petit voyage maritime. Je donnerais à la vie de Paris
octobre et novembre, et je trouve que ce serait bien assez... (Ville-
messant, 1865.)
Ce qui guérit le plus de la tristesse, c'est le mouvement d'une
queue poudrée de postillon., sur le collet d'une veste d'uniforme.
(Rossini.)
— Le voyage en seize heures de Paris à Marseille, pendant la
saison froide, n'est qu'une enjambée de l'hiver à l'été.
— Un voyage en commun est comme un mariage ; on se voit jour
et nuit, on se pratique, on se contraint si peu, qu'il en résulte
souvent du malaise et souvent de l'humeur. (Le président de
Brosses.)
Dans l»g voyages en commun, il y a toujours un des voyageurs
\\\X 381
qui est le plastron ot Idlijet des sarcasmes de son rompa.gnon. De
Brosses se moque de l.a Moniioye ; Delessert, de Loysel ; Dumas,
de Jadin. etc.
— 11 ne faut pas trop remuer ses os, surtout les femmes, à moins
d'être ambassadrice. (M'"'' de Sévigné.)
— Dans tout voyage, il y a quelque chose de plus agréa hle que
le drpart. c'est le retour. (P. Véron.)
— Longs voyages, longs mensonges. (Yoy. tnenlir.)
— Qui voyage prie ; la terre, comme le ciel, raconte la gloire
de Dieu.
— Commis-voyageur : chevalier errant de l'industrie.
— Voyageur infatigable : Juif errant.
Voyou, Ijlousier, vagabond des rues de Paris.
Le mot a été inventé par Gavarni, le dessinateur; il est tiré de
coie (publique).
Homme qui a tous les vices du peuple, sans en avoir les qualités ;
crapuleux dans sa conduite et dans ses expressions, canaille al)jecte,
en dehors du vrai peuple.
— De ce mot on a formé voi/oucratie, le despotisme de la
canaille, l'aristocratie à rebours.
— Voyoute, la femelle du voyou, comme la peste est la femelle
du choléra.
Des voyous de quatorze ans avec des voyoutes de douze; des
enfants qui n'ont jamais eu d'enfance, des tilles qui n'ont jamais eu
d'innocence. (A. Delvau.)
Vrai, anciennement verai, suppose ve?ricus, du latin vcrus.
11 y a aussi dans l'ancien français voir', voire même.
— Le beau est la splendeur du vrai. (Platon.)
Rien n'est lirau (iiie Iv vrai, lo vrai seul est aimable.
(BoiLKAu, E/iifre IX, 13.)
— Plaider le faux [loiir savoir le vrai.
La ruse se sert du mensonge pour connaître la vérité.
— De vi-ai, se dit pour vraiment, véritablement.
Ilélas ! si ma femme perdoye.
Je sai de vray que je mourroyc
Apres elle...
{Ancien Théâtre frnnrnis, t. I, p. 320.)
Le ciel défend, de vrai, certains contentements.
Mais il est avec lui des accommodements.
{TarOi/Te, IV, 5.)
582 YEU
Vrille, est pour lutrllli', du Inlin oeru.
Avant-trou, dans le Bcrry. Expression composée coninie chansse-
pied, pour corne.
Vulgaire, du Inliu rii/r/xs, la foule, de volco[l).
La foule qui l'oule dans les rues.
— Le vulgaire : les autres.
Les Anglais appellent la popularc, moJi, ahrévialiou (?) de mohik
V ni (JUS.
Loin de moi le profane vulgaire !
Odi profdiinm riil(/i(s et nrcco.
(UoiiACK, Odex UI. 1.)
Willls. Jeunes fdles, qui, selon les légendes allemandes, sortent
chaque nuit de leur tombe et dansent jusqu'au jour.
Wrac, de l'anglais wreck, naufrage, désordre, pèle-méle.
Se dit de marchandises jetées pèle-méle au fond de la cale d'un
navire, et qui sont expédiées sans aucun emballage.
Y (I grec). C'est la réunion de deux /, dont le second aurait été
allongé, surtout à la fin des mots, par les copistes calligraphes.
C'est Vu (upsilon grec) auquel on a ajouté une queue.
Entre deux consonnes, il a le son simple de /: entre deux
voyelles, il a la valeur de deux i. Seul, il équivaut à /.
— Quel chemin faut-il prendre ? Car quelquefois il s'en trouve
de faicts comme un y. (Histoire macaronique.)
Yankee, est le mot emjlish (anglais), défiguré par la pronon-
ciation des Peaux-Rouges.
Sobriquet donné aux Américains du Nord, surtout à ceux qui
sont enthousiastes des institutions de leur pays, et méprisent celles
des autres.
Yeux : les miroirs de l'âme. (Diclionnaire des Précieuses.)
— On emploie yeu au singulier dans le Berry. (Voy. œil.)
— Comme les yeux sont les miroirs de l'âme, il faut se défier de
ceux qui ne regardent jamais en face ; c'est qu'ils craignent que
leurs veux ne trahissent leurs mauvais sentiments.
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\A ^.l r« il >j {/7J M
ZEI{ 583
— On dil : aimer quelqu'un comme la priiiiolle de ses yeux;
c'est-à-dire y tenir heaucoup.
— Dim ohjcl qui coûte cher, on dit qu'il conte les yeux de
la tète.
— Loin des yeux, loin du cœur. C'est une variante de cet autre
proverbe : Les absents ont tort. (Voy. cœur.)
— Synonymes de yeux pros et saillants : houles de loto, lanternes
de calu-iolet.
Yeux orands : salières.
— Avoir les yeux chassieux : faire de la cire pour Notre-Dame.
— Il a les yeux d'un poisson mort : très ternes.
Zéphire ou zêphir. dn prec zcphuroa, par l'intermédiaire du
la lin Lcplujrus.
Vt'iil d'ouest chez les anciens : de rof', vie, et pliera, porter, qui
porte la vie ipii anime (]èl;iit le même que le Fdvonuis des
Latins.
— L'Académie écrit zrphire, vent d'occident, ^i zéphyr, par un ij,
pour sianilier un vent doux et apréahle.
— Les amours de Flore et de Zéphire.
— Les Précicjses ont appelé Zéphire l'amant des Heurs, parce
qu'il les caresse et les fait épanouir.
Zéro, altération de zeftro (?) venant lui-même de l'arabe cifron,
({iii siunilie \ide.
Cifron a donné les deux mots zéro et chiffre.
— C'est un zéro : un homme nul.
Homo nullins nutncri. (Cicéron.)
C'est un zéro en chilïre : un homme sans valeur, sans caractère,
sans talent.
On disait autrefois : un o en chiffre (la lettre o, qui sert à fijiiirer
le zéro). En 1491, Philippe Calender introduisit le mot zéro pour
désigner le chiffre. On changea dès lors o en chiffre en zéro en
chiffre, qui est im pléonasme.
— Il regardait un liomme comme une unité, et une femme
comme un zéro. (Alex. Dumas.)
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Sachant que le zéro n'a aucune valeur par lui-iurnie, il s'était
mis à la suite d'un cliiiïre. (Halzac.)
Tel lirillc au second rima, qui .s"i'clii).sc :iu prf'mior.
{Zéro, énigme.)
Quatre membres font tout mon bien :
Mon dernier vaut mon tout, et mon tout ne vaut rii-n.
[Zéro, charade.)
Zeste, (lu latin schistns, du ,urec schico, diviser.
— Le zeste est la pellicule jaune extérieure des aurentiacées, qui
contient une huile essentielle aromatique, volatile et inllammahle.
L'enveloppe hlanche, charnue, qui est sous le zeste, s'appelle
:::iste, et contient un principe amer.
D'où : entre le ziste et le zeste, c'est-à-dire dans l'incertitude.
— On a dit sèke (zeste) pour rien. Gela ne vaut pas un sèke.
D'où l'argot :ut (?).
Zigzag. Suite de lignes formant des angles rentrants ou sor-
tants. De l'allemand zacke, chose pointue ; ou de l'arabe r/y, table
astronomique, où les figures forment de vrais zigzags.
Zoïle, nom d'homme, origine littéraire.
Zoïle naquit à Amphipolis, vers 200 avant Jésus-Christ.
L'indignation qu'excitèrent ses commentaires injustes des poèmes
homériques, a fait de son nom le synonyme de critique méchant,
envieux.
On l'oppose à Aristarque.
FIN DU TOME SECOND
Toulon. — Impr. Régionale Rom.\in LIAUTAUD et G'^, boulevard de Strasbourg, 56.