n
10
. E73 COLLECTION MWiHEïL LeVy
1858 — i Ira ,c (Vvolumc —
1 franc 25 <• •• 'iiites à l'étranger
L ET M. ESCUDIER
DICTI NNAIRE
DE
MUSIQUE
THÉORIQUE ET HISTORIQUE
Vvec uni; préface
l»i: 11. F. HALE^t
Membre le. l'Institut
NOUVELLE ÉDITION.
TOME DEUXIÈME
PARIS
MICHEL LEVY FRÈRES, LIBRAIRES-ÉDITEURS
HUE VI VIENNE, 2 DIS
1858
ÎÎAROLD B. LEELÏBRAR*
B WGHAM YOUNO UNIVERSITE
PROVO.UTAH
*
i
V
#
DICTIONNAIRE
DE MUSIQUE.
#
• • -0
• •
/
•
i.U'.iS. — îv.p. \h\:imst. u i.omneh. ii j. CAHOB ROEl M i: iv COVRM, 4
DICTIONNAIRE
DE
MUSIQUE
THÉORIQUE ET HISTORIQUE
l'A H
LES FRÈRES ESCUDIER
AVEC UNE PRÉFACE
DE M. F. HALÉVT
Membre de l'Institut.
TOME II
PARIS
MICHEL LÉVY, FRÈRES, LIBRAIRES-ÉDITEURS.
% bis, rue vi vienne.
4854
/
\
±iAKGlD B. LLbLibiUvKï
BRIGHAM YOUNG UNI VERSITV
PROVO, UTAH
DICTIONNAIRE
! DE MUSIQUE.
I
Iacuntiiies. Fêtes annuelles célébrées à Amyclès,
sur le territoire lacédémonien, en l'honneur d'A-
pollon, dans lesquelles on faisait entendre le son des
flûtes et de certains instruments à cordes.
Iambique. Nom d'un acte ou d'une partie princi-
pale d'un morceau de musique vocale, exécuté dans
les luttes musicales des jeux publics.
Idée. L'idée musicale est ordinairement un trait de
chant qui se présente à l'esprit du compositeur avec
tous les accessoires qu'il comporte. On voit par là
qu'il y a plusieurs espèces d'idées différentes selon le
genre d'effets, soit simples, soit composés, qu'on se
propose. On doit aussi distinguer les idées en idées
principales et en idées secondaires : les premières
sont propres à faire la base ou la fond d'une compo*
sition, les autres destinées au d Aèloppement de l'idée
principale.
Illusion. Quelques écrivains ont essayé de rendre
l'opéra ridicule à cause de ses invraisemblances, en
disant qu'on ne chante pas au moment de se donner
T. II. I
ï IMA
la mort ou de se quereller. Il faut distinguer à ce su-
jet la vérité d'art et la vérité de nature. On ne trouve
dans la nature ni des airs cadencés, ni des chants
avec accompagnement; on n'y trouve pas non plus
les vers de Virgile ou l'Apollon du Belvédère. Un tra-
vail parfait d'art est une œuvre de l'esprit humain
élevant les objets les plus ordinaires à une plus haute
signification, à une dignité plus sublime.
Il est certain que le plus grand effet de l'art dé-
pend de l'illusion. Le compositeur qui veut faire agir
l'illusion sur les autres, doit d'abord en sentir lui-
môme toute la puissance, c'est-à-dire que l'illusion
doit subjuguer son esprit et son cœur par de vives
images.
Imagination. L'imagination, considérée en géné-
ral, est la faculté de retenir l'impression des objets,
d'en arranger les images et de les combiner en mille
manières. Tous les sens fournissent des secours à
l'imagination; mais ceux de la vue et de l'ouïe l'en-
richissent plus que tous les autres, parce que, rap-
prochant les distances ou franchissaUt les intervalles,
multipliant nos rapports avec l'extérieur, embrassant
presque dans le même moment le ciel et la terre, ils
nous font toucher à un plus grand nombre de choses
qui se gravent dans notre esprit et y déposent leurs
images.
L'imagination joint la réflexion et la combinaison
à la mémoire. Loin de se borner à subir l'influence
de la première impression des objets ou des sons, elle
s'excite à en recevoir de nouvelles; elle recueille et
raisonne ses propres sensations, les rejette ou les ad-
met dans les cadres / l'elle leur a tracés. Autour d'une
idée qui la domine, elle cherche à éveiller une foule
d'idées accessoires. Son coup d'œil rapide et sûr dé-
couvre à de grandes distances les rapports jusqu'alors
inaperçu* entre deux objets, file les rapproche rt les
M V 3
unit, et leur imprime dans ses imitations le cachet de
la nature.
L'imagination du musicien et du poète, réglée par
le goût, fait en petit ce que le créateur a fait en grand ;
elle applique à ses œuvres la même économie que
Dieu à l'ordonnance du monde : c'est surtout cette
faculté qui paraissait aux anciens un don des dieux,
ingenium quasi ingenitum, une inspiration divine.
L'imagination qui invente avec grandeur, médite
avec profondeur, féconde avec patience, dispose avec
sagesse et enchaîne avec habileté, est du génie. Dans
les sciences, elle donne des Newton ; dans les lettres,
des Homère ; dans les arts, des Beethoven, des Ros-
sini. Et qu'on ne soit point choqué de ce rapproche-
ment : on dira peut-être qu'il y a plus de grandeur à
découvrir les lois de l'univers qu'à composer la sym-
phonie héroïque ou Guillaume Tell; et cependant le
musicien vivra aussi longtemps que le philosophe,
et restera comme lui au rang de ces organisations
supérieures dont la nature se montre avare.
Que le jeune musicien ne cherche point ce que
c'est que l'imagination. En a-t-il? la sent-il en lui-
même? Le génie du grand compositeur soumet le
monde entier à son art; il peint tous les tableaux par
des sons, il fait parler le silence même, il rend les
idées par des sentiments, les sentiments par des ac-
cents; et les passions qu'il exprime, il les excite au
fond des cœurs. La volupté par lui prend de nouveaux
charmes; la douleur qu'il fait gémir arrache des cris.
Mais pour que î'imngination produise ces grands
effets, il faut qu'elle soit réglée par le goût. L'imagi-
nation crée, mais le goût chcysit, et un génie trop
abondant a besoin de son secours pour ne point abu-
ser de ses richesses. Sans goût, on peut faire de
grandes choses en musique; mais c'est lui qui les
rend intéressantes. C'est le goût qui fait saisir au com-
positeur les idées du poète, c'est le goût qui met
chaque chose à la place qui lui convient et fait des
diverses parties d'une composition musicale un tout
homogène , un ensemble harmonieux. Sans le goût,
il n'y a point de chef-d'œuvre complet.
Quelques compositeurs ont possédé à un degré
éminent cette alliance de l'imagination et du goût.
Gluck, dans son Iphiaénie en Tauride ; Sacchini, dans
Œdipe; Spontini, dans la Vestale et Fernand Cortez;
Meyerbeer, dans Robert le Diable ; Rossini, dans Guil-
laume Tell; Auber, dans la Muette de Portici; Ha-
lévy, dans la Juive, ont laissé des pages qui sont à
l'abri des variations de la mode et des épreuves du
temps. Mais il est surtout un compositeur chez qui
les deux qualités dont nous parlons ont acquis le plus
beau développement : c'est Rossini. Quelle puissance
d'imagination ! quelle abondance de sève! mais aussi
quel goût exquis ! — Dans Luoia di Lammermoor, la
Favorite, Don Sébastien, Donizetti a prouvé aussi
qu'il était un de ces compositeurs hors ligne chez
qui le jugement et l'inspiration se prêtent un mutuel
appui.
Indépendamment delà grande imagination qui in-
vente, dispose, dessine et colore sous les yeux de la
raison, il existe une imagination de second ordre qui
est celle des détails. Cette imagination jette beaucoup
d'agrément dans un ouvrage; elle sait parfois mettre
en œuvre avec beaucoup d'habileté les idées les plus
vieillies et leur faire subir une heureuse métamor-
phose; mais seule, elle ne saurait constituer des ou-
vrages vraiment supérieurs.
Imitation. Si tous les sentiments ont des tons qui
leur sont propres, et si le compositeur peut se servir
de ces tons pour exprimer les sentiments, la musique,
quoique bornée dans ses imitations, n'est pas moins
1ND 5
un art imilatif, attendu que la nature lui présente ses
modèles avec les moyens pour les reproduire.
Outre l'imitation de la nature, il y en a encore une
autre qui consiste à suivre l'exemple d'autres compo-
siteurs en les prenant pour modèles. À cet égard, on
distingue l'imitation libre et l'imitation servile. L'imi-
tateur servile peut être un homme de talent, tandis
que l'imitateur libre peut suivre les inspirations et
les élans du génie.
Vimilation est un artifice musical qui fait que plu-
sieurs parties reproduisent le même chant à des dis-
tances et à des intervalles différents.
Imperfection. C'était, dans l'ancienne musique, la
soustraction de la troisième partie de la valeur d'une
note.
Improvisateur mécanique. Machine à notation pour
les improvisateurs. Cette machine s'adapte au piano,
et tout ce que l'on joue sur cet instrument s'imprime
en même temps.
Improviser. C'est composer et exécuter impromptu
un morceau de musique. Pour improviser avec suc-
cès en musique, il convient d'être profondément
initié aux ressources de l'art; il faut, en outre, être
maître absolu de l'instrument sur lequel on impro-
vise, posséder une âme qui s'exalte aisément et une
grande présence d'esprit, afin qu'il y ait de l'unité
dans un morceau créé de cette manière.
Incomposé. Un intervalle incomposé est celui, qui
ne peut se résoudre en intervalles plus petits, et n'a
pas d'autre élément que lui-même. Nous n'avons
dans notre système qu'un seul intervalle incomposé,
le demi-ton.
Incorrect. On appelle composition musicale incor-
recte, celle qui pèche contre les règles de l'art.
Inde (Musique de 1'). Les Hindous croient que la
musique a été inventée par Brahma lui-même, ou
IM)
par son pouvoir actif Fereswati, la déesse de la pa-
role, et que leur fils Nnred fut l'inventeur du vina, le
plus ancien des instruments en usage dans l'Hindous-
tan. Parmi les mortels inspirés, le premier musicien,
disent-ils, fut le sage Bhérat, inventeur des natacs ou
drames mêlés de chants et de danses, et auteur d'un
système qui porte son nom. Il y avait, à ce qu'il pa-
rait, dans l'ancienne musique des Hindous, quatre
principaux matas ou systèmes, et chaque royaume ou
province avait presque un genre de mélodie particu-
lier, des noms différents pour les modes, et une ma-
nière différente de les classer.
Indiens (De la musique chez les). Il existe une si
grande analogie entre le système astronomique et
musical des Indiens et celui des Égyptiens et des Chi-
nois, qu'on peut logiquement leur attribuer une com-
mune origine. La forme du gouvernement étant la
théocratie, la connaissance de la musique, comme
celle de toutes les sciences et de tous les arts, n'est
réservée qu'aux prêtres; c'est pourquoi la musique
est liée étroitement à la religion, et soumise à des lois
fixes et invariables.
La gamme des Indiens ne procède pas, comme
celle des anciens Grecs, par tétracordes, mais par oc-
taves comme la nôtre. La plus grande partie de leurs
gammes ne contient que cinq ou six sons stables, et
ressemble par là à l'ancienne gamme chinoise. Ces
gammes, si simples, peuvent être considérées comme
les premiers essais d'un peuple qui aime le chant,
mais qui n'a pas un système d'acoustique complet.
Les Indiens ne connaissent pas notre harmonie.
Leurs diverses espèces de musique pratique sont les
rectahs, teranas, tuppas et raagnies. Les deux premiers
portent le cachet d'un chant facile et régulier. Les
Hindous ont trente-six mélodies d'un genre particu-
lier, appelées rangs ou ragas> et raugines ou raginas.
Des trois genres grecs, celui auquel elles ressemblaient
le plus était le genre enharmonique. Il est extrême-
ment difficile de noter la musique des raugs ou rau-
gïnes, parce que notre système ne fournit point de
signes qui puissent exprimer la petitesse de leurs in-
intervalles. La mesure en est rompue et irrégulière,
et les modulations fréquentes et pour ainsi dire sau-
vages. On dit que ces chants avaient encore plus de
puissance que la musique d'Orphée.
Les instruments de musique en usage chez les In-
diens sont destinés ou à la religion, ou à des divertis-
sements. Les plus simples instruments dont les bra-
mines font usage clans leurs temples sont le song et le
gantha. Le premier est un buccin dans lequel ils
soufflent de toutes leurs forces pour appeler le peuple ;
le second, qui sert au même objet, est une petite
clochette en bronze, ornée d'une tête et de deux ailes,
que les bramines font résonner soir et matin dans les
vestibules du temple, avant de commencer les sacri-
fices. Quelquefois on entend aussi le buccin dans les
bazars et les marchés ; mais alors ce sont les fakirs
qui annoncent ainsi leur arrivée.
Le kortal est un des plus anciens instruments des In-
diens : il est présumable qu'ils en font usage dans
leurs cérémonies religieuses, car beaucoup de leurs
anciennes idoles sont représentées avec cet instru-
ment. Les Indiens ont aussi connu la lyre, la flûte et
le tambour. Il paraît que le violon fut aussi en usage
au commencement du dix-septième siècle dans quel-
ques parties de celte contrée.
Il y a dans l'Inde des chanteurs qui parcourent les
rues, et s'arrêtent aux portes des maisons en chan-
tant les amours et les hauts faits de leurs aïeux; ils
accompagnent souvent leurs chants du son de quel-
que instrument. Ils sont vêtus à peu près comme les
musulmans, et ont ordinairement une besace dans
8 LNF
laquelle ils mettent le riz, les fruits et tout ce qu'ils
reçoivent de leurs auditeurs.
La musique en usage aujourd'hui dans toutes les
parties de l'Inde soumises à la domination de l'Angle-
terre, ne diffère point de celle qu'on cultive en Europe.
Calcutta, particulièrement, a été visité par des artis-
tes distingués, chanteurs et instrumentistes. On joue
dans cette ville beaucoup de quatuors, et surtout ceux
de Haydn.
Indigitamenta. Quelques auteurs prétendent que
ce mot désignait, chez les anciens Romains, les chan-
sons où l'on trouvait plusieurs noms de divinités;
d'autres affirment que ces chansons étaient chantées
en l'honneur des demi-dieux.
Influence de la musique. L'histoire de tous les
temps nous offre une foule d'exemples de la prodi-
gieuse influence de la musique sur la civilisation, les
mœurs, les passions, les maladies et l'héroïsme guer-
rier. Elle est un des principaux moyens employés
pour adoucir le caractère de l'homme ; elle s'associe
à son éducation physique et gymnastique, et déve-
loppe en lui les organes de la voix, en augmentant la
force de ses poumons et de sa poitrine; elle s'associe
également à son éducation morale et intellectuelle,
en réveillant dans son cœur des sentiments de bien-
veillance et d'amour, et en donnant à son intelligence
plus de mouvement et de vivacité.
La musique est aujourd'hui employée dans l'édu-
cation, particulièrement en Allemagne, en Suisse, en
Belgique et en France, comme un puissant moyen
d'adoucir les mœurs.
L'enseignement de la musique fait partie main-
tenant en France de l'enseignement universitaire.
L'homme n'est pas le seul être animé qui soit sen-
sible aux accents de la musique, beaucoup d'animaux
manifestent le plaisir qu'ils éprouvent en l'écoutant,
INS 9
La musique anime le cheval pendant le combat; le
chasseur se sert du chant et du cor pour charmer les
cerfs, de la flûte pour les rennes, et apprivoise la fé-
rocité de l'ours même au moyen du chalumeau. Le
chien apprend en très-peu de jours les airs de chasse
qui ont presque tous une signification particulière, et
ne les confond jamais.
Inhambam (Musique des naturels d'). Dans le voyage
du capitaine Oiven, on lit qu'à Inhambane, ville si-
tuée aux bords de la rivière du même nom, et qui
forme, sous le rapport de la salubrité, un des meil-
leurs établissements portugais sur cette partie des
côtes orientales de l'Afrique, les naturels du pays ont
une danse très-sauvage, et c'est ordinairement au son
du tambour qu'ils se livrent à ce plaisir. Leur princi-
pal instrument est la marimbah. Il consiste en dix
morceaux ou baguettes d'un bois très-dur, qui sont
fixés dans un cadre. Une petite calebasse creusée sert
à chaque baguette de moyen de résonnance : le tout
ressemble à peu près à un harmonica. Un autre ins-
trument, qui s'appelle cassanga, est encore plus ré-
pandu chez ce peuple. Il consiste dans une caisse vide,
dont le dessus est garni d'un certain nombre de
baguettes en fer de diverses longueurs, et que l'on
frappe des doigts.
Innocentemente, Innocemment. Cet adverbe ita-
lien, placé au commencement d'un morceau de
musique, indique un mouvement modéré et un ca-
ractère simple et sans ornements.
Institut. Voici son origine. L'Académie française
fut fondée en 1635, par Richelieu, pour fixer et polir
le langage. Elle se composait de quarante membres.
— L'Académie des inscriptions et belles-lettres, fut
fondée en 1663 par Colbert ;
— L'Académie des sciences, en 1666, par Golbert
encore ;
r
10 INS
— L'Académie de peinture et de sculpture en 1648;
— Celle d'architecture en 1671 ;
Ces diverses Académies avaient été supprimées
en 1793 ; elles ont été réorganisées en Tan IV (25 octo-
bre 1795), et réunies en un seul corps sous le nom
d'Institut de France. L'Institut comprend aujourd'hui
cinq académies, Académie française, Académie des
inscriptions et belles-lettres, Académie des sciences,
Académie des beaux-arts, qui réunit la peinture, la
sculpture, l'architecture, la gravure et la musique, et
enfin l'Académie des sciences morales et politiques.
Tous les ans, les cinq académies de l'Institut se ras-
semblent pour donner une séance solennelle qui attire
l'élite de la société parisienne.
Outre cette séance, chacune des académies a sa
séance publique. Dans la séance publique de l'Aca-
démie des Beaux-Arts, on exécute à grand orchestre
la cantate composée par l'élève ayant obtenu le
grand prix de Rome.
C'est encore dans cette imposante séance, qu'on
distribue les couronnes à tous les lauréats. (Voyez le
mot Académie.)
Instruments de musique. La famille des instruments
de musique est nombreuse; elle se compose de trois
branches principales, bien distinctes l'une de l'autre,
quoique chacune d'elles ait été créée dans le même
but, celui de rendre des sons musicaux, c'est-à-dire
appréciables par leur fixité.
Pour les désigner particulièrement, on emploie ces
différentes dénominations : instrument à vent, à
cordes, de percussion.
Pour les construire, on fait usage de matières de
différentes natures, animales, végétales ou minérales,
telles que l'os, l'ivoire, l'écaillé, la corne, la peau, etc.;
le bois de sapin, d'érable, de buis, d'ébèno; l'or, l'ar-
gent, le platiné le cuivre, le bronze, l'étant, l'acier,
irss u
le fer, le cristal, le verre, etc.; enfin, on emploie
toute espèce de matière ayant par sa nature de la so-
norité, et possédant la faculté de rendre un son fixe
et appréciable.
Des instruments à vent. Tous les instruments à vent
se composent d'un ou plusieurs tubes agencés les uns
au bout des autres. Les tubes sont, dans la majeure
partie de ces instruments, perces de distance en dis-
tance de petits trous que l'exécutant ouvre ou bouche
à volonté avec le bout des doigts, selon la nature du
son qu'il veut produire. Dans plusieurs d'entre eux,
de petites soupapes en métal, et se mouvant sur un
ressort, sont placées sur les tubes à des distances vou-
lues, et servent au même usage que les doigts, qui les
font mouvoir alors pour ouvrir ou boucher les trous
selon le besoin. On les nomme clefs. A l'une des
extrémités de l'instrument, celle du haut, se trouve
placée l'ouverture par laquelle on introduit l'air;
cette ouverture se nomme embouchure.
Les instruments à vent les plus connus sont ; la
flûte de Pan, la petite flûte, la flûte ordinaire,
le flageolet, le fifre, le galoubet, le hautbois, la
clarinette, le cor anglais, le clairon, la trompette
droite, la trompette recourbée, le cor de chasse ou
trompe, le cor à pistons, le basson, le serpent, le
trombone, l'ophicléide, etc. Adolphe Sax vient de
rendre un immense service à l'art musical, en complé
tant la famille des instruments à vent. Ainsi on aura
désormais des clarinettes, des cornets, des trom-
pettes, etc., sopranos, contraltos, basses et contre-
basses. C'est un monde nouveau pour l'instrumenta-
tion.
Des instruments à cordes. Les instruments à cordes
sont presque toujours construits en bois. Les cordes
avec lesquelles on les monte sont ou de boyaux, ou do
métal, ou quelquefois de soie, recouvertes et en-
12 1ÎSS
tourées par un fil d'argent. Ces dernières portent le
nom de cordes filées. Toujours elles sont retenues
d'une manière fixe à une des extrémités de l'instru-
ment, et de l'autre bout tournées sur une cheville
mobile qui sert à les hausser ou à les baisser à vo-
lonté. Dans l'une des parties de leur longueur, ex-
cepté dans la lyre antique et dans toutes les harpes,
elles reposent sur une petite pièce, soit de bois, soit
d'autre matière, placée sur la table d'harmonie de
dessus. Cette petite pièce porte le nom de chevalet.
Presque tous les instruments à cordes sont composés
de deux tables dites d'harmonie : celle du dessus est
presque toujours en bois sonore, tel que celui de sa-
pin, et celle du dessous en bois plus compacte, tel
que celui de l'érable. Ces tables, placées au-dessus
l'une de l'autre, et éloignées selon le besoin, sont
soutenues par des tasseaux et des bordures auxquelles
on donne le nom d'éclisses. Dans quelques-unes, au-
dessous du chevalet, et dans l'intention d'opposer
une résistance au poids que la tension des cordes fait
supporter à la table de dessus, on place aussi comme
soutien une petite colonne en bois, à laquelle on
donne le nom d'âme. L'on pratique dans presque tous
les instruments à cordes des ouvertures à la table du
dessus pour donner une issue au son , qui , sans ce
moyen, ne pourrait sortir de l'instrument.
Pour faire vibrer les cordes , trois moyens sont en
usage : 1° l'archet; 2° les marteaux ou sautereaux,
que les touches du clavier font mouvoir; 3° l'attaque
des cordes opérée par le pincé.
Les instruments à cordes les plus connus sont,
pour ceux à archet, le violon, l'alto, la viole d'a-
mour, la basse ou violoncelle, la contre-basse; pour
ceux à touches et à clavier, l'orgue, le clavecin, l'épi-
nette, le piano, le clavicorde, la vielle; pour ceux de
pizzicato, la lyre, la harpe, la guilaro, la mandoline.
Des instruments de 'percussion. On entend par cette
dénomination toute espèce d'instruments de mu-
sique aptes seulement à rendre un seul son, à
quelques exceptions près, et chez lesquels on n'em-
ploie d'autre moyen que celui du battement ou du
frottement, comme pour le tambour et pour les cym-
bales.
Les instruments de percussion se font avec toutes
les matières sonores, les métaux, le bois, etc.
Les instruments de percussion les plus connus sont,
pour ceux à baguettes frappantes, le tympanum, le
triangle, le tambour, le tambourin, la grosse caisse,
le tambour chinois; pour ceux à baguettes frap-
pantes ou roulantes, la caisse roulante ou tambour;
pour ceux à battants, les sonnettes , les cloches, les
pavillons chinois: pour ceux à marteaux, les timbres,
les carillons; pour ceux à frottement, les cymbales,
les cloches ; les timbres et les timbales s'accordent et
font entendre tous les sons de gamme.
Instruments des grecs anciens. 1° La cithare,
Kithara, d'où dérive notre terme français guitare ;
2<> la ]yre, Lura, autrement appelée Xelus, et en latin,
testudo, parce que sa base ressemblait à l'écaillé
d'une tortue, animal dont la ligure, dit-on, avait
donné la première idée de cet instrument ; 3° le Tri-
nôlon, ou l'instrument triangulaire, qui seul a passé
jusqu'à nous sous le nom de harpe.
La lyre d'Olympe et de Terpandre n'avait que trois
cordes : une quatrième vint rendre le tétracorde com-
plet. L'addition d'une cinquième corde produisit le
pentacorde. Plus tard, il y eut la lyre à sept cordes,
ou Yheptacorde. Thimothée, Milésien qui vivait sous
Philippe, roi de Macédoine, vers la 108e olympiade,
multiplia les cordes de la lyre jusqu'au nombre de
onze.
Instrumentation. C'est l'arl de distribuer dans une
iï Et S
partition les différents instruments qui entrent dans la
composition d'un orchestre, de manière à produire
toute sorte d'effets, soit par la douceur des timbres et
la variété des détails, soit par la force et l'énergie des
masses. Dans ce sens, le mot instrumentation est de
création moderne.
Avant Haendel, Mozart et Haydn, les compositeurs
se bornaient dans leurs accompagnements à soutenir
les voix; d'ailleurs, le nombre des intruments était
très-limité. La musique instrumentale sommeillait
dans l'enfance. Haydn, le père de la musique ins-
trumentale, et Mozart, le créateur de l'accompagne-
ment dramatique, furent les premiers qui surent
tirer parti de l'instrumentation , celui-là dans ses
belles symphonies, celui-ci dans ses opéras.
Une bonne instrumentation exige bien des condi-
tions du compositeur, qui prévoit, par la seule puis-
sance de ses facultés intellectuelles, l'effet de son or-
chestre, comme si cet orchestre se faisait réellement
entendre dans l'instant où l'artiste se livre cà ses ins-
pirations; il doit posséder indépendamment de ces
connaissances approfondies en harmonie, la connais-
sance non moins indispensable de tous les instru-
ments qui composent un orchestre, savoir leur éten-
due respective, leurs timbres et leurs différentes qua-
lités de son, connaître les bonnes et les mauvaises
notes de chacun, et l'effet qui peut résulter de leurs
diverses combinaisons.
Le système ordinaire des instruments d'orchestre
se divise en deux masses, celle des instruments à cor-
des et celle dos instruments à vent. La première se
compose de deux parties de violon, une ou deux
d'alto, et deux de violoncelle et contre-basse; la se-
conde, de deux parties de flûte, deux de hautbois,
deux de clarinettes, deux de bassons, deux ou quatre
décors, deux de trompettes et trois de trombones :
INT 15
on y ajoute quelquefois une partie de timbales et d'o-
phycléides.
Instrumentiste. Musicien qui se livre à la culture
d'un ou de plusieurs instruments.
Intendant de musique. C'est presque toujours un
emploi de cour. L'intendant remplit quelquefois les
fonctions de directeur de musique.
Intense. Les sons intenses sont ceux qui ont le
plus de force, qui s'entendent de plus loin; ou bien
ce sont ceux qui, étant rendus par des cordes fort
tendues ou par des tubes puissants et sonores, vibrent
par cela même plus fortement.
Intermède. C'est le nom générique de tout ce qui
se trouve intercalé entre les actes d'un ouvrage dra-
matique, danses, couplets, etc. Les chœurs des tra-
giques grecs rentraient aussi dans ce genre. L'inter-
mède était fort à la mode dans le siècle de Louis XIV.
Molière dut en placer dans toutes celles de ses pièces
qui furent jouées d'abord à la cour. Dans le siècle
dernier, on donnait aussi le nom d'intermède aux pe-
tits opéras en un acte, tels que la Servante maîtresse,
le Devin de village, etc. C'est l'Académie royale de
Musique qui, tout en dérogeant jusqu'à l'opéra villa-
geois ou comique, avait voulu sauver sa dignité en
leur donnant ce titre inusité. Il n'y a plus aujourd'hui
d'intermèdes dans ce sens, et le Philtre est qualifié
d'opéra sur l'affiche, comme la Muette ou Robert le
Diable. *!■*•
Intervalle. Rapport de deux sons inégaux , eu
égard à leur degré d'élévation, par opposition à Fu-
n'sson qui est celui de deux sons égaux. Ces rapports
sont appréciables par l'oreille, de môme que celui de
deux points confondus ou séparés dans l'espace est
appréciable par les yeux. L'intervalle est donc la dis-
tance qui existe entre un son et un autre son plus
grave ou plus aigu, distance exprimée en musique
16 UNS
par le nom que porte chacun de ces intervalles. Ainsi,
l'on appelle seconde l'intervalle formée des deux sons
les plus rapprochés, tierce celui qui se trouve compris
entre deux sons séparés par un troisième, quarte ce-
lui qui renferme quatre sons, quinte celui qui en com-
prend cinq, et ainsi, à mesure que la distance s'ac-
croît d'un son, sixte, septième, octave, neuvième,
dixième, etc.
Les intervalles peuvent être modifiés de différentes
manières, selon que les sons dont ils se composent
sont eux-mêmes modifiés par un bémol, un bécarre
ou un dièse. Delà leur classification en diminués, mi-
neurs, majeurs et augmentés, termes qui expriment
leurs différents degrés d'extension par rapport au
mode ou à la tonalité.
Intonation. Action d'entonner. L'intonation peut
être juste ou fausse, trop haute ou trop basse, trop
forte ou trop faible, et alors le mot intonation, ac-
compagné d'une épithète, s'entend de la manière
d'entonner.
Introduction. Morceau de musique d'un mouve-
ment grave, composé d'un petit nombre de phrases,
souvent même de quelques mesures ou de quelques
accords solennels destinés à annoncer le premier al-
legro d'une symphonie, d'une ouverture, d'une so-
nate ou de toute autre pièce instrumentale. L'ouver-
ture d'Iphigénie en Aulidc, celle de la Flûte enchantée,
commencent par une introduction. Quelques compo-
siteurs dramatiques, donnant plus d'extension et un
mouvement plus animé à l'introduction, lui ont fait
tenir la place de l'ouverture, dont elle n'a pourtant
ni la forme, ni les développements. Aîiodant de Méhul,
Robert le Diable de Meyerbeer, Dom Sébastien de Doni-
zetti, s'ouvrent par une belle introduction.
Lorsque la pièce étale en commençant un grand
spectacle, lorsqu'elle débute par quelque pompe
IÎSV 17
triomphale, par l'arrivée d'une foule innombrable,
une entrée magnifique, quelque sacrifice solennel,
quelque cérémonie auguste, quelque phénomène ter-
rible de la nature, comme un naufrage, une tempête,
tous ces objets sont si beaux, que le musicien peut
les montrer d'abord sans les annoncer; ils n'en frap-
peront pas davantage. C'est ainsi que Gluck a sup-
primé, dans Iphigénie en Tauride, l'ouverture propre-
ment dite, pour y substituer la représentation du pre-
mier événement de la pièce. Son drame débute par
le grand tableau du calme, d'une tempête qui lui suc-
cède, de la foudre qui éclate, de la mer soulevée, de
la désolation d'Iphigénie. Cette manière de commen-
cer un opéra est très-brillante.
Il y a deux sortes d'introductions : la première est
purement symphonique, nous en avons déjà parlé ;
c'est l'ébauche d'une ouverture. L'introduction de la
seconde espèce est faite, au contraire, pour captiver
l'attention du spectateur au lever du rideau en lui
présentant de magnifiques images, une action déjà
liée et l'expression des sentiments, quand il nr» s'at-
tend qu'aux récits de l'exposition; ces récils vien-
dront ensuite, et on leur donnera tous les développe-
ments nécessaires pour l'instruire de ce qui s'est passé
et de ce que l'on va faire.
Invention. On nomme invention l'art, ou pour
mieux dire, la faculté de trouver des idées. Ce terme
indique suffisamment que nous la regardons entière-
ment comme un don de la nature. On ne peut point
prescrire de règles à ce sujet, mais seulement tracer
quelques observations.
On distingue l'invention dans le plan, dans la con-
duite, dans l'allure d'un morceau, et cette invention
qui consiste seulement à imaginer des détails frais,
ingénieux, et par cela même neufs et originaux. La
première est plus puissante et a plus de grandeur; la
18 I>\
seconde, qui néglige quelquefois la nouveauté dans
la forme pour ne s'attacher qu'à une sorie de nou-
veauté dans le mouvement de la phrase, dans l'origi-
nalité du rhythme, dans la marche de l'harmonie,
produit une impression moins forte et n'est quelque-
fois appréciée que par ceux qui ont étudié les res-
sources et nous dirions presque les mystères de l'art.
Pour que l'invention soit complète, il faut qu'elle
réside à la fois dans la forme et dans les détails. II ne
faut pas que le désir de Y invention fasse tember dans
Y excentricité, c'est-à-dire dans des bizarreries que le
goût réprouve.
Inversion. L'inversion consiste à prendre un sujet
ou trait quelconque de mélodie, dans un ordre diffé-
rent de celui où il est proposé. Cette opération se
nomme autrement imitation inverse.
Il y a quatre sorte d'inversions : la première se
nomme inversion simple; elle consiste à renverser
tous les intervalles d'un trait de mélodie, de manière
que ceux qui sont ascendants dans le sujet soient des-
cendants dans la réponse, et réciproquement. Cette
inversion peut se faire à l'octave , à la quinte, à la
seconde ou à l'unisson.
La seconde est appelée inversion stricte; elle se fait
comme la précédente, mais sans prendre aucune li-
cence, et de manière que les tons répondent aux tons,
et les demi-tons aux demi-tons. Pour cela, il faut
commencer l'inversion à la septième, à la sixte ou à
la tierce majeure en dessus, et laisser les demi-tons
sans altération dans la partie répondante.
La troisième espèce d'inversion se fait en copiant
toutes les notes, à commencer par la dernière, en ré-
trogradant jusqu'à la première inclusivement , soit
sur le même degré, soit sur un degré plus haut ou
plus bas, selon que l'exige la modulation. Cette in-
version se nomme rétrograde.
IKL 49
Enfin, la quatrième espèce d'inversion est celle où
l'on renverse cette troisième sorte par mouvement
contraire, depuis la première jusqu'à la dernière note.
On la nomme inversion rétrograde et contraire.
Invitatorium. Nom de l'antienne avec laquelle on
répond, dans l'église romaine, au psaume Venite
exultemus.
Io Ba.cchus. Chanson en l'honneur de Bacchus,
que les anciens chantaient dans les fêtes et les sacri-
fices. On répétait souvent dans ces chansons les mots
Io et Bacchus.
Irlande (De la musique en). Les compositions
orientales sont d'une grâce, d'une mollesse, d'un raf-
finement d'expression et de sentiment dont n'appro-
che aucun autre peuple ancien ni moderne. La langue
que les Arabes parlent dans ce monde à leurs mai-
tresses, semble être celle qu'ils parleront dans l'autre
à leurs houris. C'est une espèce de musique si tou-
chante et si fine, c'est un murmure si doux, ce sont
des comparaisons si riantes et si fraîches! Je dirais
presque que leur poésie est parfumée comme leur
contrée.
Cette peinture fidèle et brillante de la poésie
arabe parRaynal, dans son Histoire philosophique des
Indes, définit aussi merveilleusement la musique ir-
landaise, qui n'a rien de ce feu barbare et sauvage
inhérent au\ chants et aux ballades du Nord. La res-
semblance qui existe entre la langue et les airs d'Ir-
lande et la langue et la musique d'Orient, se retrouve
également dans Ihs poésies et les images qui l'embel-
lissent, en sorte qu'elles sont une preuve nouvelle de
l'origine orientale du peuple de cette ile.
Spencer appelle les chansons irlandaises un poème
parsemé de petites fleurs qui se donnent de la grâce et de
la beauté les unes aux autres. Le langage en est
chaste, élégant et pur; les nuances qu'elles retracent
20 IRR
sont d'une rare fraîcheur, et on y retrouve plus d'un
trait séduisant du caractère national, et surtout l'ins-
piration delà belle et riche nature d'Érin. L'éblouis-
sante neige dont au printemps la végétation couvre les
arbres, le murmure des cascades, le plumage des oi-
seaux, la gracieuse et mélancolique verdure de l'île
d'émeraude, sont les éternels objets de descriptions
riches et vraies.
Au milieu de tous les malheurs de cette belle et
poétique contrée, la main de fer des oppresseurs n'a
pu, à travers les siècles, y étouffer les plus tendres,
les plus nobles sympathies du cœur; le despotisme
n'y a point alourdi les ailes de la pensée. Cependant
quelques portions de l'Irlande peuvent seules préten-
dre à être encore aujourd'hui appelées la terre de
la chanson. La musique et la poésie ont suivi les des-
tinées de la langue, et se sont comme elle repliées
devant la conquête politique et religieuse de l'Angle-
terre, pour se retirer dans les comtés où la langue
ancienne et la foi catholique ont survécu aux persé-
cutions. La poésie énergique et plaintive, celle qui
chante le courage, le patriotisme, celle qui se lamente
sur les tombeaux et les ruines, l'ode et l'élégie sont
restées au Munster, dans le Waterford, dans le Kerri,
dans les pays de Clare et de Limerick. La chanson,
celle qui décrit la fleur des champs, la fraîcheur des
bocages, l'azur des lacs, la grâce et la beauté des
femmes, est restée dans le Golway, le Mayo, le Con-
naugth. Le Gonnaugth est véritablement la terre de la
chanson : c'est là que de génération en génération se
perpétuent quelques chants dont l'air et les paroles
sont antérieurs au quatorzième siècle, et quelques
autres dont la tradition a perdu l'origine, mais qui
par le sujet semblent appartenir à l'ère du paga-
nisme.
Irrégulier. On appelle dans le plain-chant tons
ITA J\
irréguliers, ou plutôt pièces irrégulières, certains
chants dont il est difficile de déterminer le ton, parce
qu'ils paraissent appartenir en même temps à plu-
sieurs tons de plain-chant. De ce nombre sont : 1<> le
chant du psaume In exitu Israël et son antienne;
2° l'antienne Hcec dies des jours de Pâques.
Italie (De la musique en). Quand la musique re-
parut dans le moyen âge, sa nouvelle existence fut
due à la religion. Exilée de Rome païenne, la musique
se réfugie dans le sein de Rome chrétienne, d'où, à
l'aide des Augustin, des Ambroise et des Grégoire,
elle remonte au rang qu'elle est appelée à occuper
dans les temples. Elle n'eut alors ni moins de puis-
sance, ni moins de popularité que chez les Grecs, et
ce fut encore le mode diatonique qu'elle employa
pour exercer son empire. Ce mode, elle l'avait reçu
des Grecs. Mais le genre chromatique, consacré par ce
peuple éclairé et sensible aux arts, au théâtre, aux
plaisirs de la vie, fut longtemps ignoré à la renais-
sance de la musique; car dans les temps d'affliction
et de douleur où l'Europe, et surtout l'Italie, se trou-
vèrent quand les barbares parurent, le sentiment qui
dominait l'âme accablée n'était ni celui de la joie, ni
celui du plaisir.
Cependant les invasions des barbares cessent. La
musique, introduite dans les églises, est un des plus
puissants auxiliaires de la religion. Des cathédrales
sont fondées, des chapitres dotés, et le clergé s'efforce
de faire fleurir celui de tous les arts qui lui est le plus
efficacement utile. Bientôt il ne se borne point au
chant grégorien et à l'orgue dont il le fait accompa-
gner dans les Te Deum, les motets, les vêpres et les
messes; mais il imagine d'honorer plus solennelle-
ment encore le Seigneur en faisant représenter en
musique la Passion du Christ, les adorations de la
Vierge, celles des anges. De là le retour de la musique
1* fTA
dramatique et du genre chromatique des Grecs, éga-
lement dus à l'Église.
Villani, historien du quatorzième siècle, et l'Ami-
rato, rapportent que le cardinal Riario fit représenter
à Rome la Conversion de saint Paul, pièce dont la mu-
sique fut représentée par Francesco Baverini.
Au rapport de Quadrio, dès l'an 1480, on com-
mença dans celte ville à représenter sur la scène des
sujets profanes; mais on y jouait depuis deux siècles
des sujets sacrés.
Dès cette époque, la noblesse ne brigua pas moins
que le clergé l'honneur d'instituer, de fonder la mu-
sique dramatique. Albertino Muffato de Padoue dit
qu'en 1300 on récitait déjà en musique sur les théâ-
tres les fails et gestes (Ses grands capitaines, écrits en
langue vulgaire, mais versifiée. Ange Politien, cet
écrivain si élégant dans une langue qui déjà n'était
plus parlée en Europe que par les savants, compose,
en 1475, son drame int tulé : Orfeo. En 1480, on re-
présente à Rome une tragédie en musique, et neuf
ans plus tard le célèbre Bergonzio Botta, de Tortone,
s'immortalise par la plus éclatante des fêtes qu'il
donne dans son Palais à Milan, à l'occasion du ma-
riage de Jean Galéas Visconti, souverain de ce duché,
et d'Isabelle d'Aragon, fille d'Alphonse, duc de Ca-
labre.
En 1555, Alfonso Viola met en musique, pour la
cour de Ferrare, il Sacrificio, drame pastoral, dont
Agostino Beccari avait fait les paroles. Mais il convient
d'observer que le drame lyrique n'avait encore pour
musique qui lui fût propre que celle de l'église,
qu'on lui appliquait tant bien que mal.
L'époque historique de la naissance de la musique
dramatique fut celle de l'invention du récitatif, ou
musique parlée, la seule qui devait donner à la tra-
gédie lyrique son véritable langage et sa constitution
(TA 4N
spéciale et positive. Cet événement est très-impor-
tant dans l'histoire de l'art dramatique et de l'art
musical.
Dans le seizième siècle, trois gentilshommes floren-
tins, aimant les arts avec enthousiasme et le théâtre
avec passion, peu satisfaits des efforts tentés jusque-
là pour perfectionner le drame lyrique, se proposè-
rent de faire composer un ouvrage par le meilleur
poète et le plus habile compositeur de musique qu'on
pût trouver dans ce temps. Octave Rinnuccini et Jac-
ques Péri furent choisis pour exécuter ce travail. Le
premier fit le poème de Daphné, auquel le second
appliqua une déclamation notée qui n'avait pas tout
le soutien et la mesure de la musique, mais qui en
avait ce qu'on appelle la tonalité. Cette pièce fut re-
présentée en 1597.
Tandis que Florence préludait si heureusement à
l'invention du grand opéra, Rome suivait son essor;
elle faisait exécuter, en forme d'oratorio, un opéra
composé par un de ses citoyens, nommé Emilio del
Cavalliere, et qui portait pour titre le nom singulier
de l'Anima e'I Corpo.
Mais nous touchons à l'époque où la musique dra-
matique va briller d'un vif éclat.
A partir du seizième siècle, la musique italienne
entra vraiment dans une voie de progrès et de régé-
nération. Rome, Naples, Florence, Milan, Turin, Ve-
nise, toutes les villes de l'Italie, s'associèrent pour
rendre un culte fervent à l'harmonie renaissante, et
quelques-unes d'entre elles portèrent le drame lyri-
que à son plus haut degré de perfection.
L'école napolitaine mérite la première de fixer no-
tre attention.
Jusqu'au commencement du dix-septième siècle,
ia musique dramatique n'avait subi à Naples que très-
peu de perfectionnements. Tl fallait qu'un homme
m ri s,
de génie vînt lui frayer une route originale. Ce com-
positeur parut : c'était Alexandre Scarlatti. Fécond
autant qu'il fut ingénieux et neuf dans ses composi-
tions, il ne brilla pas moins dans la musique d'église
que dans celle de la scène. Il a composé plus de
deux cents messes pour l'une, et pour l'autre un
grand nombre d'opéras, dont les plus beaux sont
Mithridate, Cyrus, Régulas et celui de la Princesse
fidèle.
Dans le même siècle que ce grand homme, vé-
curent d'autres génies célèbres : tels furent Léo Du-
rante, Gaetano-Graco , Feo, Léonard Léo, etc.
Au dix - huitième siècle , l'école napolitaine fut
également fertile en compositeurs éminents. Le pre-
mier de tous, dans l'ordre chronologique, est Nicolas
Porpora, un des plus brillants élèves d'Alexandre
Scarlatti. Ses principaux ouvrages sont ": Ariana e
Teseoy Semiramis, Tamerlano, il Trïonfo di Camillo.
Mais de tous les compositeurs que l'école de Na-
ples vit s'élever pendant la première moitié du dix-
huitième siècle, Pergolèse est sans contredit celui
qui a le plus contribué au progrès de l'art musical.
Au nom de Pergolèse, les images les plus pures, les
plus suaves de la mélodie se présentent en foule à la
pensée.
Pendant la seconde moitié du dix-huitième siècle,
on vit naître encore un grand nombre d'artistes plus
ou moins distingués, tels que Jomelli, Caffaro, Far-
jetta, Majo, Fiorello, et surtout Piccinni, dont le
génie souple et fécond a exercé tant d'influence, non-
seulement sur son pays natal , mais encore sur la
musique française.
A partir de Piccinni, l'école napolitaine ne cesse de
marcher dans une voie de progrès : les chefs-d'œuvre
abondent, les grands maîtres se succèdent. Parmi ces
derniers, il faut signaler Gasparo Saochini, Paisiello»
fTA 23
Cimarosa, Spontini, l'illustre auteur de ta Veslate
et de Fernand Cortez, Carafa, Délia Maria et Fiora-
vanti, qui a laissé à la scène française une preuve de
son gracieux talent en écrivant / virtiwsi ambulanti.
Après Naples, Venise est une des villes de la pénin-
sule qui prirent le plus de part au mouvement de
régénération musicale. Au dix-septième siècle , la
musique dramatique acquiert à Venise de grands dé-
veloppements. Francesco Cavalli introduit le goût de
l'opéra dans cette partie de l'Italie , Stradella le se-
conde avec ardeur dans cette tâche importante et dif-
ficile.
L'opéra continue pendant tout le cours du dix-
septième siècle à subir d'heureux perfectionnements.
Benedetto Marcello débute, à Venise, par l'opéra de
Dorienda, qui obtient un magnifique succès. Antonio
Caldara, Vivaldi , Pietro Porfiri, illustrent aussi à la
même époque l'école de Venise; on distingue encore
le célèbre violoniste Giuseppe Tartini, si connu par
sa découverte du troisième son.
Corelli, Bacranello, Angelo Via, Salieri, complètent
la brillante série des compositeurs de l'école véni-
tienne.
Après cet aperçu sommaire des progrès de la musi-
que à Venise, jetons un coup d'œil sur l'école de Flo-
rence. L'école de Florence, quoique beaucoup moins
considérable que les précédentes par le nombre des
ouvrages qu'elle a produits, est manifestement leur
aînée. En effet, c'est à Arezzo, une des villes de la
Toscane, qu'est né Guido, auquel l'Europe doit les
premiers éléments de la musique moderne.
Comme nous l'avons déjà dit, Giacomo Péri fut le
premier compositeur qui jeta quelque éclat sur l'école
florentine; il introduisit le premier les airs dans l'o-
péra. Gorsi brilla conjointement avec Péri.
Au dix-huitième siècle, l'écolo dp Florence vit
F*
cclore de brillants compositeurs. Signalons parmi
eux Antonio Pistorini , qui, dans les intermèdes et
l'opéra bouffe , fit preuve d'un talent plein de grâce
et de flexibilité; Bernardo Mengozzi, qui a donné
à la scène française de charmantes compositions, la
Dame voilée. Une faute par amour; enfin, l'illustre
Cherubini, un des plus profonds musiciens de ce
siècle.
Les premiers compositeurs de l'école romaine, et le
plus grand de tous, Palestrina, se vouèrent exclusi-
vement à la musique d'église.
Pendant le seizième siècle, Rome vit fleurir Délia
Viola , célèbre dans la musique de théâtre, et sans
contredit le premier compositeur dramatique de l'é-
cole romaine. Carissimi, Allegri, Benevoli, Nicoletti ,
illustrèrent par leurs travaux cette école au dix-sep-
tième siècle.
Au dix-huitième paraît Sarti, auteur de plusieurs
opéras, dont la mélodie est agréable, dont les airs
sont faciles et doux. A la même époque, Antonio
Buroni composa également plusieurs opéras, dans
lesquels il joignit à la solidité de son école l'éclat,
la facilité et la grâce de celle de Naples. Citons encore
Bernardo Porta, qui a fait pour la scène française les
Horaces et le Connétable de Bourbon , ouvrages bien
accueillis à l'Académie royale de Musique, et le Diable
à quatre, qui obtint un très-grand succès à lOpéra-
Comique.
Complétons cette brillante galerie par les noms
des compositeurs de l'Italie moderne : Paër, Mer-
cadante, Pacini, Donizetti, Bellini, ce grand ar-
tiste qui s'est éteint, comme Léopold Robert, dans
toute l'effervescence du génie; Rossini, le puissant
promoteur de la révolution musicale qu'a vue s'ac-
complir le dix-neuvième; enfin Verdi, qui a trouvé
des formes nouvelles pour le chant , donné plus de
JÀV 27
vérité aux récits et répandu dans l'orchestre un intérêt
particulier.
Iulos. Chansons des moissonneurs grecs, chantées
en l'honneur des Gérés.
Javanais (Musique des.) Les Javanais ont porté la
musique à un haut degré de perfection ; on le voit
évidemment par la construction de leurs instruments
de musique. Ces instruments sont de trois espèces : à
vent, à archet et de percussion. La fabrication des
deux premières e.-pôces est encore dans l'enfance, et
c'est uniquement dans la dernière qu'il faut chercher
la perfection de la musique des Javanais.
Le tambour est l'instrument national ; mais il a
différents noms, suivant les divers dialectes. Outre les
différentes espèces de tambours qui leur sont propres,
les Javanais en ont encore emprunté aux Arabes et
aux Européens. Ceux du pays se battent avec les
mains, et paraissent avoir un son faible et peu har-
monieux.
J^e tambour le plus connu est celui qu'on appelle
gongs ou goung. La matière dont il est fait est une
composition de zinc, de cuivre et d'étain. Beaucoup
de goungs ont l'énorme diamètre de quatre à cinq
pieds, et au milieu un bouton qu'on frappe avec des
fuseaux dont la tête est garnie de gomme élastique
ou d'un tampon de laine. Le son de cet instrument
2$ JEU
est d'une force et d'un effet extraordinaires; c'est à
peu près l'instrument que nous nommons tamtam.
Le kromo ou bonang est un autre instrument qui
consiste en plusieurs bassins dont le diamètre est
égal à celui du goung, et dont le son est fort, mais
doux en même temps.
La dernière classe des instruments à percussion
s'appelle stuccatos. Le staccato de bois se compose
d'un certain nombre de bâtons de bois durs et sono-
res, disposés par ordre de grandeur au-dessus d'une
écuelle de bois, et qu'on frappe avec un petit marteau.
Une seconde espèce de staccato ne diffère de la pre-
mière qu'en ce que les bâtons ou baguettes, au lieu
d'être de bois, sont de métal. Le son du staccato de
bois est doux , mais sans force et sans intensité ,
tandis que le staccato de métal a le son plus fort et
plus dur.
Quant au caractère de la musique javanaise , on
remarque que les instruments ont tous le mode dans
lequel sont les plus vieilles mélodies écossaises , ir-
landaises, celles de la Chine, et quelques-unes des
Indes orientales et de l'Amérique septentrionale. Il
paraît donc que toute la musique véritablement in-
digène de Java est composée dans le genre ordinaire
enharmonique.
Les mélodies ont presque toutes une mesure simple.
Plusieurs des cadences rappellent la musique écos-
saise pour la musette; d'autres, en mineur, offrent
cette singularité, que l'intervalle entre les septième et
huitième degrés est d'un ton entier, ce qui montre
évidemment leur antiquité. Il est presque inutile
d'ajouter que chez les Javanais, comme chez tous les
insulaires indiens, l'art d'écrire les notes est inconnu :
tous leurs airs, qui sont en grand nombre, se jouent
de mémoire.
Jérémies. On donne ce nom aux parties ou leçons
JEl 29
de l'office de la semaine sainte, composées avec des
fragments du prophète Jéremié. On emploie, pour
chanter ces leçons, une espèce de récitation mélodi-
que plus variée que la psalmodie, et soutenue ordi-
nairement par un instrument grave, tel que le basson
ou le violoncelle.
Les jérémies sont notés dans les livres du plain-
chanl. Quelques compositeurs ont écrit des jérémies
en musique.
Jet. Les morceaux de musique d'un seul jet sont ces
rares coups de génie dont toutes les idées sont si
étroitement liées, qu'elles n'en forment pour ainsi
dire qu'une seule, et ne pouvaient pas se présenter à
l'esprit du compositeur l'une sans l'autre. Tels sont,
par exemple, le chœur du premier acte dans la Clé-
mence de Titus de Mozart, et la magnifique ouverture
de la Flûte enchantée.
Jeu. Nom que l'on donne à un groupe de tuyaux
d'orgues rangés sur un même registre.
Tous les tuyaux du même jeu rendent des sons qui
ne diffèrent que du grave à l'aigu, tandis que les
tuyaux d'un autre jeu rendent des sons d'un autre
timbre.
Les jeux, outre les noms qui les distinguent les uns
des autres, comme jeu de flûte, jeu de trompette,
prennent encore une dénomination de la longueur
en pieds de leur plus grand tuyau.
On les divise en deux classes, savoir : les jeux à
bouche, qui forment le fond de l'orgue, et les jeux
d'anche, ainsi nommés parce que l'embouchure de
chacun de leurs tuyaux est armée d'une anche en
métal.
On appelle encore jeu l'association de certains jeux
disposés pour être entendus ensemble : le grand jeu,
le plein jeu. On dit d'un instrumentiste en parlant de
son exécution qu'il a un joli jeu.
#r
m joîs
Jeu céleste. Qualité de son très-agréable et d'une
grande douceur que Ton obtient sur le piano, au
moyen de la pédale qui fait avancer des languettes de
buffle entre les cordes et les marteaux. Le jeu céleste
est d'un effet encore plus flatteur, si, pour prolonger
les sons, on joint à cette pédale celle qui lève les
étouffoirs, et que l'on nomme vulgairement grande
pédale.
Jeux ciirysantiniques. C'étaient des fôtes grecques
célébrées à Sardes, capitale de la Lydie, conjointe-
ment à des concours de musique.
Jeux isthmiques. Ces jeux étaient célébrés tous les
trois ans, pendant la nuit, à Corinlhe.
Jeux némêèns. A Argos, on célébrait tous les deux
ans les jeux néméens en l'honneur d'Hercule, vain-
queur du lion de Némée.
Jeux olympiques. Les Grecs célébraient tous les
quatre ans les jeux olympiques près de l'ancienne
ville de Pisa et du fleuve Alphée, dans la vaste plaine
û'Ùiyntpte, aussi délicieuse par sa position que parles
chefs-d'œuvre de l'art qu'elle renfermait. Dans ces
fôtes populaires, on décernait des prix aux concur-
rents de musique.
Jeux pythiques. Pour ce qui avait rapport à la
musique, lès jeux pythiques étaient les plus impor-
tants. Consacrés dès le commencement au chant, ils
étaient le vrai siège des concours de musique, quoi-
que les courses de chevaux, de char, l'escrime et les
autres exercices gymnastiques fissent aussi partie de
ces jeux.
Jongleurs. Joueurs d'instruments qui, au début
de notre poésie, se joignaient aux troubadours ou
poètes provençaux, et couraient avec eux la pro-
vince.
L'histoire du théâtre français nous apprend qu'on
nommait ainsi des espèces de bateleurs qui accom-
JOO M
pagnaient les trouvères, fameux dès le onzième siècle.
Comme ils jouaient de divers instruments, ils s'asso-
cièrent avec les poètes et les chanteurs pour exécuter
les ouvrages des premiers; et, ainsi de compagnie,
ils s'introduisirent dans les palais des rois et des
princes, et en tirèrent de magnifiques présents. Leurs
jeux consistaient principalement en gesticulations,
tours de passe-passe, etc., ou en quelques mauvais
récits du burlesque le plus trivial. Leurs excès ridi-
cules et extravagants les firent tomber dans une telle
déconsidération, que, pour désigner alors une chose
mauvaise, folle, vaine et fausse, on Y appelait jongle-
rie. Philippe-Auguste les chassa; ses successeurs
souffrirent qu'ils revinssent en France. On en trouve
la preuve dans le tarif fait par saint Louis, pour ré-
gler les droits de péage dus à l'entrée de Paris, sous
le Petit-Châtelet. Ce tarif, dans un de ses articles,
porte que les jongleurs seront quittes de tout péage en
récitant un couplet de chanson, ou en faisant gamba-
der leur singe devant le péager.
Vers 1400, les trouvères et les jongleurs se séparè-
rent. On ne parla plus de ceux-ci, que l'on appela
ensuite bateleurs, à cause des tours surprenants qu'ils
s'étaient adonnés à faire avec des épées ou d'autres
armes.
Jouer des instruments. C'est exécuter sur ces ins-
truments des airs de musique, surtout ceux qui leur
sont propres, ou les chants notés pour eux. Le mot
jouer étant devenu générique, s'applique maintenant
à tous les instruments.
On disait autrefois -.jouer du violon, pincer la harpe,
toucher Cornue, donner du cor, sonner de la trompette,
blouser les timbales, battre le tambour, etc. Le mot
jouer a remplacé tous ces termes, et il en résulte un
double avantage : 1° de simplifier le langage et de
prévenir toute fausse application; 2° de pouvoir con-
32 JOl
sacrer ces mêmes termes à des actions tout à fait
étrangères à l'art musical, quoiqu'elles s'opèrent par
les moyens qu'il fournit. Ainsi, nous disons sonner de
la trompette, donner du cor, battre du tambour,
lorsqu'il s'agit d'une charge de cavalerie, d'une
chasse au cerf, ou de l'appel d'un régiment.
Journaux de musique. Les premiers journaux de
musique qui parurent en France n'offraient qu'un
médiocre intérêt. Le Journal hebdomadaire, le Journal
des Troubadours, le Journal d'Euterpe, le Chantre du
Midi, et quelques autres productions du même genre,
n'ont eu chez nous qu'une durée éphémère.
Il faut le dire, la plupart de nos journalistes
littérateurs se sont longtemps efforcés de nous faire
passer pour des ignorants en musique. Analyses ridi-
cules, grossières méprises, absurdités, faux raisonne-
ments dérivant d'un système faux sur tous les points,
voilà ce qu'on trouvait jadis dans certains feuilletons,
quand leurs rédacteurs ne se bornaient pas au proto-
cole dès longtemps adopté, lequel consiste à dire que
la musique d'un opéra est belle, délicieuse, admira-
ble, ou qu'elle est mauvaise, pitoyable, etc.
Pendant que la France était encore si arriérée,
l'Allemagne faisait un pas immense dans la carrière
du journalisme musical. Nous devons mentionner
particulièrement la Gazette musicale de Berlin, la
Gazette musicale de Vienne, la Gazette musicale des états
d'Autriche, et surtout X excellente Gazette de Leipsig,
recueil d'un mérite très-remarquable, entrepris en
1798, et dont la rédaction a été confiée pendant vingt
ans au savant écrivain Frédéric Rochlitz.
En France, quelques écrivains se sont efforcés de
suivre cet illustre modèle. En 1827, M. Fétis publia
la Revue musicale, dont il a été le directeur et le prin-
cipal rédacteur jusqu'à la fin de 1833. Ce recueil a
rendu de grands services à la musique. 11 parait
RAS 33
encore maintenant sous le titre de Revue et Gazette
musicale de Paris. En 1838 a paru la France musicale,
sous la direction des frères Escudier. Ce recueil a mar-
qué, dès son début, une phase nouvelle dans la criti-
que, et sa rédaclion l'a classé parmi les bons jour-
naux de cette spécialité. Le Ménestrel occupe aussi
un rang honorable dans la presse musicale française.
La presse musicale a pris depuis quelques années
une certaine extension en Italie, en Angleterre, en
Belgique, en Espagne, et dans quelques autres pays
de l'Europe.
Juste. Cette épithète se donne généralement aux
intervalles dont les sons se trouvent exactement dans
le rapport qu'ils doivent avoir, et aux voix qui enton-
nent toujours ces intervalles dans leur justesse.
Justi, Chanter juste, jouer juste.
K
Karabo. Petit tambour des Egyptiens et des Abys-
sins.
Kalamaïca. Danse favorite des Hongrois, d'un
mouvement animé et en mesure à 3(4. Elle est com-
posée de deux parties, chacune de quatre mesures
avec des reprises.
Karaklansithyron. Chanson que les anciens Grecs
chantaient devant la maison de leur maîtresse.
Kas. Espèce de tambour des peuples d'Angola
(Afrique), qui, au rapport de quelques voyageurs,
il ki» A
est le seul instrument de musique qu'ils possèdent.
Katakeleusinos. Nom d'une des parties principa-
les d'un morceau de musique exécuté dans les con-
cours musicaux des jeux isthmiques.
Kehraus. Ancienne danse d'invention allemande,
avec laquelle on termine quelquefois les bals.
Keman. Nom d'un violon turc à trois cordes.
Kerrena. Trompette indienne qui, selon Bonnet,
a un tube de quinze pieds de longueur ; d'autres as-
surent qu'elle n'a que quatre pieds de longueur, et
un son très-fort.
Kooranko (Musique des habitants de). Quelques
voyageurs ont assuré que la musique occupe une
place importante dans les cérémonies publiques de ce
pays. Ces peuples ont des chants et des danses parti-
culières, et un grand nombre de musiciens ambu-
lants, qui paraissent doués à un degré remarquable
du talent de l'improvisation.
La musique de cette nation, ainsi que ses instru-
ments, dont le meilleur est une espèce de guitare ou
violon fait d'une calebasse avec des cordes de crins,
sont encore peu perfectionnés ; mais néanmoins on
trouve dans quelques-uns de leurs chants naïfs, une
douceur qui n'est pas surpassée par les modulations
de peuples plus civilisés. Cependant, en général, le
bruit surpasse chez eux l'harmonie, et l'effet de tant
de voix et d'instruments qui se réunissent souvent,
est étourdissant.
Kussier/ Instrument turc, composé de cinq cordes
tendues sur une peau qui couvre une espèce d'as-
siette.
Kyrie. Mot grec qui signifie seigneur au vocatif, et
par lequel commencent les messes en musique. On
s'en sert souvent comme d'un substantif, ou comme
si c'était le nom d'une pièce de musique. Voilà un
beau Kyrie, un Kyrie bien travaillé.
l'Ai
La. Note de musique appelée simplement a par les
Allemands et les Italiens. C'est le sixième degré de
notre échelle musicale. Il porte accord parfait mineur,
et s'emploie en harmonie, ou comme sixième degré
de la gamme majeure d'ut, ou comme premier degré
du relatif mineur de cette môme gamme. La est aussi
le nom de la seconde corde du violon et de la chan-
terelle, ou première corde de la viole, du violoncelle
et de la contre- basse. C'est sur cette note, prise dans
l'octave du médium de notre système sonore, que
s'accordent tous les instruments sans exception, et
que sont réglés les diapasons. Il ne s'ensuit pourtant
pas que tous les diapasons donnent exactement le
même son, quoiqu'ils soient tous accordés sur cette
même note la. Au contraire, ils varient selon les
lieux, et quelquefois selon les orchestres; mais la
différence est fort légère, et excède rarement un quart
de ton au plus. On dit donner le /a, prendre le /a,
pour donner et prendre l'accord.
Lai. Petit poëme gaulois. Quoique nos vieux poètes
français variassent en une infinité de formes les pièces
de poésie qu'ils livraient à leurs lecteurs, ils adop-
taient presque exclusivement la narration, soit qu'ils
eussent à reproduire une anecdote, un bon mot, ou
même à exprimer un sentiment. Ges formes, souvent
bizarres, mais oonstanfps pour chaque espèce, parai-
3$ JLAM
traient indiquer que chacune de ces pièces de poésie
se conformait dans l'origne à un rhythme musical,
à un air consacré, l'un au rondeau, l'autre au lai,
celui-ci au chant royal, etc. On sait, en effet, que les
poëmes des trouvères étaient chantés par des jon-
gleurs, et accompagnés sur des instruments, le rebec
ou violon, la rote ou vielle, par des ménétriers. L'u-
sage du chant était perdu; les pièces de poésie, quoi-
que ayant cessé d'être chantées ou accompagnées des
instruments, auront conservé leurs formes encore
longtemps, jusqu'à ce que l'imitation classique ayant
prévalu, elle les ait fait tomber en désuétude. Parmi
ces poésies, la plus ancienne paraît être le lai,
emprunté aux bardes de l'Armorique. Marie de
France, femme poète du treizième siècle, a composé,
ou plutôt traduit plusieurs de ces anciens lais bre-
tons. Les lais que nous a laissés Marie de France
ne sont que des fabliaux ou contes en vers de huit
syllabes. Plus tard, les poètes donnèrent au lai une
forme nouvelle, qui consistait à intercaler, à des dis-
tances régulières, de petits vers entre d'autres vers
d'une mesure plus longue. Quand l'ordre adopté par
le premier couplet changeait, c'est-à-dire quand on
faisait tourner ou virer, selon l'expression d'alors, les
grand vers en petits vers et les petits en longs, la pièce
devenait un virelai.
Lamentabilb, Lamentable. Ce mot, que Ton fait
précéder quelquefois par adagio ou largo, indique,
même quand il est seul, un mouvement grave et une
expression triste et pour ainsi dire désespérée.
Lamentations de Jérémie. Élégies que l'on chante
dans la semaine sainte : trois le mercredi, trois le
jeudi, et trois autres le vendredi. Ordinairement, en
Italie surtout, on les exécute en plain-chant avec ac-
compagnement de viole, de violoncelle et de piano,
ou bi^n pn musique figurée à une seulp voix, ou avec
LAN 37
chœur, ou à plusieurs voix. Le même nom sert à in-
diquer les différentes compositions.
Landler. Espèce de valses en usage dans l'Au-
triche et dans quelques autres contrées de l'Alle-
magne. Leur mélodie, dont le caractère est d'une
gaieté sautillante, s'exécute dans un mouvement mo-
déré, en mesure à 2/4.
Langoureux. Ce mot indique un mouvement un
peu lent et une exécution sans vibration et sans re-
cherche dans les agréments.
Langue musicale. Comme tous les arts libéraux,
la musique peut être considérée sous un double
point de vue : comme instrument de plaisir et comme
moyen d'expression. Considérée sous ce dernier rap-
port, elle est un langage véritable qui, au moyen c\es
sons et des silences, peint à l'oreille et traduit à l'in-
telligence la plupart des peines, des sentiments et des
images que la parole exprime avec des mots : sou-
vent même elle les traduit avec une profondeur et
uno énergie que cette dernière est incapable d'at-
teindre.
La langue musicale possède tous les éléments et
toutes les parties des autres langues; elle a ses mots,
sa grammaire élémentaire, sa syntaxe, sa poésie et sa
théorie, sa philosophie et son histoire.
L'étude des sons ou mots de la musique et des
autres signes qu'elle emploie, constitue l'enseigne'
ment élémentaire de cet art. Il est assez connu; nous
n'en parlerons pas.
La syntaxe musicale correspond à la syntaxe des
langues proprement dites : c'est l'art de réunir conve-
nablement les signes du langage musical pour en for-
mer des phrases correctos. Elle se divise en deux par-
ties, dont l'une enseigne à écrire la mélodie, et l'autre
Y harmonie.
La littérature musicale correspond à la littérature
T. H. i
o\s LAN
proprement dite et se divise, comme elle, en deux
parties essentiellement distinctes : la littérature géné-
rale qui traite, au point de vue musical, du bon goût,
des styles, des écoles, du but et de la valeur réelle
des règles, du classique, du romantique et de cent
autres questions musicales dont l'énumération est
inutile; et la littérature particulière qui enseigne à
écrire convenablement chaque genre de musique.
Celte dernière partie s'appelle aussi composition : on
y attache ordinairement les règles de la mélodie.
La philosophie de la musique consiste à rechercher
les rapports secrets des sons avec nos sentiments et
nos pensées. L'existence de ces rapports ne peut pas
être contestée, puisque la musique exprime réellement
des sentiments et des pensées au moyen des sons.
C'est une science à peine ébauchée.
Enfin, la musique et l'harmonie ont leur histoire,
où les théories et les œuvres pratiques, les théoriciens
et les compositeurs, les tâtonnements de l'inexpé-
rience, les bévues de l'erreur, les succès du talent et
les progrès de la science musicale apparaissent tour
à tour aux regards.
Madame Laync a publié, il y a quelques années, à
Paris, un ouvrage intitulé : Grammaire musicale,
basée sur les principes de la grammaire française.
Dans son livre, l'auteur donne aux lettres le nom de
sons; à l'alphabet, celui de gamme; les articles sont
comme les trois clefs /a, do, sol. Elle appelle substan-
tifs les notes; adjectifs superlatifs les dièses; adjec-
tifs diminutifs les bémols; adjectifs comparatifs les
bécarres. Les mesures sont les verbes : celles à quatre
temps sont les verbes actifs; celles à trois temps les
verbes passifs; celles à deux temps les verbes neutres,
et ainsi de suite.
Dans ces dernières années, M. Sudre a inventé la
langue musicale, formée au moyen des sept notes de
LAR 39
musique, do, ré, mi, fa, sol, la, si, par le secours des-
quelles il paraît que M. Sudre peut transmettre toute
espèce de phrase et dans quelque langue que ce soit,
c'est-à-dire qu'un Arabe comprendra un Chinois, un
Russe, un anglais, etc. Ces résultats n'ont rien de
surprenant, car la langue musicale a le privilège de
rencontrer partout des oreilles et des cœurs sensibles
à ses charmes. Unis par de semblables liens, les mu-
siciens de [toutes les nations forment une seule fa-
mille dont les goûts sont identiques.
La Grammaire musicale de M. Martin d'Angers est
un des meilleurs ouvrages didactiques que l'on ait
publiés en France dans ces dernières années.
Languette. Nom du petit morceau de bois des
sautereaux d'un clavecin ou d'une épinette, où se
trouve introduit un morceau de plume de corbeau.
C'est aussi le nom d'un petit morceau de métal mo-
bile qui vibre dans les anches de certains jeux d'orgue.
Lapa. Nom turc des tubes en cuivre, longs d'envi-
ron huit ou neuf pieds, se terminant comme nos
trompettes et servant dans la musique.
La ré. Ces syllabes désignaient dans l'ancien sol-
fège cette mutation d'après laquelle on se servait, en
chantant, de la syllabe ré pour les sons la ré, et non
de la syllabe la.
Largo. Ce mot, écrit à la tête d'un air, indique un
mouvement plus lent que Y adagio, et le dernier de
tous en lenteur.
Le diminutif larghetto annonce un mouvement
moins lent que largo et plus lent que Yandante.
Le largo n'a souvent pas plus de lenteur que l'ada-
gio; mais il a quelque chose de plus décidé dans le
caractère. L'adagio semble devoir être plus onctueux,
plus sensible, plus affectueux; il a autant de noblesse
que le largo, mais celui-ci a plus de fierté.
40 LÉG
Le largo convient à ce qui est religieux, l'adagio à
ce qui est tendre et d'une tristesse passionnée.
Larigot. Jeu d'orgue, l'un des plus aigus : il sonne
la quinte au-dessus de la doublette. Ce jeu, qui est
compris parmi les jeux à bouche, est d'étain et a
quatre octaves et demie d'étendue, ce qui forme tout
le clavier.
la sol. Mutation des deux syllabes la et sol sur le
son ré.
Lauda sion salvatorem. Suite de versets ou prose
que l'on chante dans l'Église romaine, le jour de la
Fêle-Dieu.
Laudi, (Laudes). On entend par le mot italien
Laudi, les cantiques que l'on chantait en Italie au
temps de Laurent de Médicis, qui en composa plu-
sieurs, et de saint Philippe de Néri. Ce genre de poésie
était très-estimé en Italie au quinzième siècle. La mu-
sique en était toujours simple; on adapta quelquefois
à ces compositions poétiques les ariettes profanes les
plus goûtées.
Leçon. On désigne par ce mot tous les exercices
qu'un maître prescrit à son élève, en lui enseignant
un instrument de musique. Les morceaux de mu-
sique imprimés sous le titre de leçons ne sont autre
chose qu'un moyen de rappeler à l'élève les instruc-
tions du maître.
Leçons des nocturnes de l'office des morts.
Leçons de la semaine sainte que l'on a coutume de
chanter en musique figurée à voix seule, ou môme
à plusieurs voix avec chœurs.
Legato. Quand ce mot se trouve en tète ou dans le
courant d'un morceau de musique, il faut en lier les
notes avec soin.
S'il y a sempre legato, il faut conserver jusqu'à la
fin le même genre d'exécution.
Légende, Ce mot, qui signifiait d'abord les ver-
LIA 41
sets que l'on récitait dans les leçons des matines, fut
donné plus tard aux vies des saints et des martyrs,
parce qu'on devait les lire dans les réfectoires et les
chanter dans les chapelles des communautés. Des
monastères, elles se répandirent parmi les fidèles,
enthousiasmèrent leur zèle et le portèrent jusqu'au
fanatisme. Tout ce que le peuple avait recueilli dans
ses souvenirs ou poétisé dans son imagination trouva
place dans ces histoires, qui sont la véritable mytho-
logie du christianisme. Les traits d'héroïsme chré-
tien qu'on y trouve racontés avec une simple naïveté,
parés du prestige de la poésie et de la musique, ré-
chauffèrent la foi et la charité. Si l'histoire en a rejeté
la plupart comme monuments apocryphes, elle leur
doit à toutes profond respect et vive reconnais-
sance.
Légèrement. Cet adverbe indique qu'on doit tou-
cher l'instrument doucement.
Lento. Ce mot signifie lentement, et marque un
mouvement lent comme le largo. Les Allemands in-
diquent ce mouvement par langsacn, et les Anglais
par slow.
Levé. C'est le temps de la mesure où on lève la
main ou le pied. C'est toujours le dernier temps de
la mesure ; par conséquent les temps levés sont : à
deux temps, le second ; à trois, le troisième; à quatre,
le quatrième.
Liaison. Il y a liaison d'harmonie et liaison de
chant. La liaison a lieu dans l'harmonie, lorsque cette
harmonie procède par un tel progrès de sons fonda-
mentaux, que quelques-uns des sons qui accompa-
gnent celui qu'on quitte, demeurent et accompagnent
celui où l'on passe. Il y a liaison dans les accords de
la tonique et de la dominante , attendu que le
même son sert de quinte à l'une, et d'octave à l'autre.
Enfin, il y a liaison dissonante toutes les fois que la
42 LIÉ
dissonance est préparée, puisque cette préparation
elle-même n'est autre chose que la liaison.
La liaison dans l'exécution instrumentale ou dans
le chant a lieu toutes les fois qu'on passe deux ou
plusieurs notes d'un seul coup d'archet, de langue ou
de gosier, et se marque par un trait recourbé dont
on couvre les notes qui doivent être liées en-
semble.
Licences. Liberté que prend le compositeur et qui
semble contraire aux règles, quoiqu'elle soit dans le
principe des règles ; car voilà ce qui distingue les li-
cences des fautes. Par exemple , c'est une règle géné-
rale de ne pas faire marcher deux quintes justes de
suite entre les même parties et par un mouvement
semblable. Berton a enfreint cette règle dans l'ouver-
ture du Délire. C'est une licence qu'il a prise pour
produire plus d'effet.
Comme les règles de l'harmonie ont subi des mo-
difications à mesure que l'art s'est perfectionné, ce
qui était licence autrefois est permis aujourd'hui.
Nous nous servons avec succès de la quinte augmen-
tée, qui aurait offensé l'oreille de nos timides devan-
ciers.
Lichara. Instrument unique d'une tribu de Cafres.
C'est une espèce de flûte formée d'un roseau, ac-
cordée au moyen d'un petit tampon mobile placé à la
partie inférieure,, et ayant au bout supérieur une ou-
verture coupée transversalement. On ne peut rendre
qu'un son sur cet instrument ; il y en a un pour cha-
quenote, et lorsque plusieurs sons se trouvent réunis,
une partie joue à l'unisson, pendant que les autres
font entendre différents sons de l'échelle musicale.
L'intervalle compris entre les plus hautes et les plus
graves de ces flûtes est d'environ douze notes.
Liées. On appelle notes liées celles qu'on passe
d'un seul coup d'archet sur le violon, ou d'un seul
LIT 43
coup de langue sur les instruments à vent, en un
mot, toutes les notes qui sont sous une môme liai-
son.
Ligne* Les lignes de musique sont ces traits hori-
zontaux et parallèles qui composent la portée, et sur
lesquels, ou dans les espaces qui les séparent, on
place les notes selon leurs degrés. La portée du plain-
chant n'est que de quatre lignes, celle de la musique
a cinq lignes stables et continues, outre les lignes ad-
ditionnelles qu'on ajoute au-dessus ou au-dessous de
la portée, pour les notes qui passent son étendue.
Les lignes, soit dans le plain-chant, soit dans la
musique, se comptent en commençant par la plus
basse. La plus basse est la première, la plus haute est
la quatrième dans le plain-chant, la cinquième dans
la musique.
Linon asma. Chanson funèbre des Egyptiens sur
Mamèros, appelé Linos par les Grecs. On croit qu'il
était le fils du premier roi des anciens Egyptiens, et
qu'il mourut à la fleur de l'âge.
Lire. Lorsqu'on veut exécuter une partie que Ton
n'a jamais vue, il faut d'abord s'être exercé à trois
espèces de travaux intellectuels nécessaires pour
lire facilement à première vue , presque sans s'en
apercevoir. On doit, en déchiffrant les notes, 1° em-
brasser d'un coup d'œil l'alternation continuelle des
sons aigus et des sons graves ; 2° les comparer et les
classer selon leur valeur respective ; et 3° rendre cette
valeur relativement à la mesure indiquée. On appelle
cette science : déchiffrer, lire la musique.
Litanies. On désignait autrefois par ce mot le Ky-
rie eleison y aujourd'hui encore les litanies commen-
cent par le lùjrie eleison, mais comme on fait suivre
les invocations en l'honneur de la Vierge, des
saints, etc., on les appelle litanies de la Vierge, des
saints, etc.
44 LOU
Lithographie. Depuis quelques années, la lithogra-
phie a été appliquée à la musique. Des partitions, des
sonates, des fantaisies, des romances même parais-
sent maintenant avec de beaux frontispices en litho-
graphie. Ce sont des paysages charmants où l'on voit
de vieux châteaux gothiques, des paladins, des trou-
badours courant les aventures, etc. ; ce sont des allé-
gories ingénieuses et des sujets qui se rapportent à la
sonate, au nocturne que l'on publie. On doit se défier
quelquefois des compositions musicales que l'on a
pris soin de parer de tant d'ornements; ces accessoi-
res valent trop souvent mieux que le principal, et Ton
peut dire de beaucoup de ces productions : Tout en
est beau, papier, images, caractères, hormis la mu-
sique.
Livre ouvert, a livre ouvert. Chanter ou jouer à
livre ouvert, c'est exécuter toute musique qu'on vous
présente en jetant les yeux dessus, et par conséquent
sans préparation.
Loco. Lorsqu'après un passage marqué pour être
exécuté à l'octave aiguë ou basse, on trouve ce mot
latin ou italien loco, il signifie que l'on doit exécu-
ter ce qui suit, au lieu même où les notes sont
écrites, sans transpositions d'octaves.
Lolichmium. Édifice pubifc, situé près de la ville
d'Olympie, qui était ouvert en tout temps à ceux qui
voulaient prendre part au concours de musique.
Longue. C'était une note qui, dans la musique an-
cienne, valait quatre mesures ; dans le mode mineur
parfait, elle avait la valeur de trois brèves, et dans le
mode mineur imparfait, de deux.
Lqure. Sorte de danse dont l'air était assez lent, et
qui se marquait ordinairement par la mesure à six-
quatre. Quand chaque temps porte trois notes, on
pointe la première, et l'on fait brève celle du milieu;
LUT 45
ce qui est exactement le rhythme de la sicilienne, qui
semble avoir succédé à la loure.
Lourer. C'est nourrir les sons avec douceur, et mar-
quer la première note de chaque temps plus sensible-
ment que la seconde, quoique de môme valeur, et en
liant.
Cette manière d'exécuter est encore en usage pour
les pastorales et toutes les compositions qui ont le ca-
ractère rustique et montagnard.
Lucornario. Nom de l'antienne que l'on chante à
vêpres, selon le rite ambrosien, avant le Dixit.
Luth. Instrument très-cultivé autrefois, et dont on
ne joue plus depuis un siècle. La guitare et la harpe
l'ont fait délaisser. Il était monté de vingt-quatre cor-
des sur un corps arrondi en dessous, en forme de tor-
tue, et ressemblant à celui de la mandoline, qui en
était le diminutif. Ces vingt-quatre cordes composaient
treize groupes; son manche était large et renversé dans
son extrémité. Huit de ces cordes, placées en dehors
du manche, ne se touchaient qu'à vide.
Comçne la lyre antique, le luth, en cessant de ser-
vir aux musiciens, a laissé son nom aux poètes, qui
le font figurer souvent dans leurs stances, et môme
dans l'épopée.
Luthier. Artiste qui fait des violons, des violes, des
violoncelles, des contre-basses, des guitares. Ce nom,
qui signifie facteur de luths, est resté par synecdoche
à ces sortes d'artistes, parce qu'autrefois le luth était
l'instrument le plus commun et le plus répandu.
Lutrin. Pupitre du chœur sur lequel on met les li-
vres de chant dans les églises. Ce mot vient de Lee-
trumf dont on a fait lectrinwr, de là lettrin, et puis lu-
trin par corruption :
Sur ce rang d'ais serrés qui forment sa clôture,
Fut jadis un lutrin d'inégale structure,
t. h. . 2*
46 LYR
Dont les flancs élargis de leur vaste contour
Ombrageaient pleinement tous les lieux d'alentour.
Derrière ce lutrin, ainsi qu'au fond d'un antre,
A peine sur son banc on discernait le chantre,
Tandis qu'à l'autre bout, le prélat radieux,
Découvert au grand jour, attirait tous les yeux.
Boileau. — Le Lutrin.
Luttes musicales. Les anciens peuples professèrent
une grande estime pour la musique. Les Grecs, par-
ticulièrement, la regardaient comme un des moyens
nécessaires pour former l'éducation, et adoptaient,
avec empressement, tout ce qui pouvait contribuer à
ses progrès; ils croyaient que les concours de musi-
que, qui avaient lieu devant des assemblées nom-
breuses, étaient un des moyens les plus favorables pour
arriver à ces résultats. On célébrait donc, à certaines
époques, des fêtes populaires , où l'on délivrait des
prix aux concurrents en musique. Les jeux olympi-
ques, pythiques, néméens et isthmiques étaient les prin-
cipales de ces fêtes. (Voir ces mots.)
Les juges appelés à porter un jugement sur le mé-
rite des chanteurs qui se distinguaient dans le con-
cours, leur décernaient pour prix une couronne de
laurier ou de feuilles de chêne, et toute la Grèce les
comblait d'honneurs et de gloire. On érigea même à
quelques-uns des monuments aux frais de l'État. Plus
tard, on introduisit aussi dans ces fêtes des concours
pour la musique instrumentale.
Plusieurs fêtes solennelles, fondées par les anciens
Romains, étaient également célébrées par des luttes
musicales. Néron, surtout, constitua à Rome des con-
cours de musique qui jetèrent un grand éclat.
Lyre. Instrument de musique, de forme triangu-
laire, dont la mythologie attribua l'invention à Mer-
cure. Quelques auteurs ont accordé tour à tour l'hon-
neur de sa découverte à Orphée , à Amphion, à
LYI\ 47
Apollon , à Polymnice. D'autres ont dit que c'était
une écaille de tortue, qu'Hercule vida, perça, et monta
de cordes de boyaux, au son desquels il accordait sa
voix.
La lyre a beaucoup varié par le nombre de ses
cordes ; celle d'Olympe et de Therpandre n'en avait
que trois. L'addition d'une quatrième rendit le tétra-
corde complet. Pollux attribue aux Scythes l'inven-
tion du pentacorde. L'heptacorde fut la lyre le plus
en usage et la plus célèbre. Simonide ajouta une hui-
tième corde, pour produire l'octave; et, plus tard,
Timothée de Milet, contemporain de Philippe et d'A-
lexandre, multiplia les cordes jusqu'à douze. On les
touchait de trois manières, ou en les pinçant avec les
doigts, ou en les frappant avec le plectmm, espèce de
baguette d'ivoire ou de bois poli, ou en pinçant les
cordes de la main gauche, tandis qu'on les frappait
de la droite armée du plectrum. Les anciens monu-
ments représentent des lyres de différentes formes,
montées depuis trois cordes jusqu'à vingt. Cetle der-
nière ne servait , dit-on, que pour célébrer les dieux
et les héros.
On a essayé de faire revivre cet instrument, en lui
donnant le manche de la guitare à six cordes. Sa for-
me élégante et pittoresque avait d'abord tenté nos
belles musiciennes; mais on est revenu à la guitare,
qui est plus commode à tenir, et dont l'harmonie est
plus pleine et plus agréable.
La lyre et le luth retentiront encore longtemps dans
œuvres des poètes, quoique les progrès de l'art mu-
sical les aient condamnés à un éternel silence. Le
violon a fait disparaître tous ces instruments impar-
faits, qui n'étaient, en quelque sorte , que les essais
des facteurs et des musiciens, les uns préludant à
l'art de la lutherie, et les autres à celui de charmer
l'oreille.
4* LYR
Lyre allemande. Cet instrument, dont on ne se
sert plus, consiste en une caisse de forme oblongue,
ressemblant à la partie inférieure d'une viole d'amour.
Aux parois latérales de cette lyre, il y a dix à douze
touches qui servent à raccourcir les quatre cordes at-
tachées dans l'intérieur de l'instrument, et forment
une étendue de sons diatoniques qui égalent le nom-
bre des touches. On fait résonner les cordes au moyen
d'une roue frottée de colophane, que la main droite
fait tourner avec un levier, tandis que les doigts de la
gauche font mouvoir les touches.
Lyre a bras. Instrument à archet, de la dimension
de l'ancienne viole de ténor à sept cordes, et qui au-
jourd'hui n'est plus en usage.
Lyre barberina. Instrument inventé au dix-
septième siècle , par un praticien florentin , nommé
Donis, et dont on ne se sert plus depuis longtemps.
Lyrique. Cette épithôte se donnait autrefois à la
poésie faite pour être chantée et accompagnée par le
chanteur de la lyre ou de la cithare, comme les odes
et autres chansons. Sous ce rapport, la poésie lyrique
différait essentiellement de la poésie dramatique ou
théâtrale, qui était accompagnée avec des flûtes par
d'autres que par le chanteur. Aujourd'hui l'épithète
lyrique s'applique toujours aux odes, dithyrambes,
chansons, couplets. Mais comme nous avons des
pièces de théâtre qui se chantent, on appelle drame
lyrique ou opéra, le drame expressément composé
pour être mis en musique.
Lyro-guitare. Instrument inventé à Paris, au com-
mencement de ce siècle, et qui a le manche de la
guitare à six cordes. Sa forme élégante et pittoresque
avait d'abord fait sa fortune ; mais ensuite on en re-
vint à la guitare, plus commode à tenir, et dont l'har-
monie est plus pleine et plus agréable.
MAD 49
M
Machicotage. C'est ainsi qu'on appelle, dans le
plain-chant, certaines additions et compositions de
notes qui remplissent, par une marche diatonique,
les intervalles de tierces et autres. Le nom de celte
manière de chant vient des ecclésiastiques appelés
machicots , qui l'exécutaient autrefois après les enfants
de chœur.
Madrigal. Sorte de pièce de musique travaillée et
savante, qui était fort à la mode en Italie au seizième
siècle. Les madrigaux se composaient pour les voix,
à trois, quatre, cinq, six et même sept parties, toutes
obligées, à cause des imitations et dessins dont ces
pièces étaient remplies.
Le style madrigalesque tient de la fugue, sans
lui ressembler entièrement. La différence la plus
essentielle consiste en ce que, même dans les madri-
gaux à voix seule, qui sont les plus sévères de tous,
on prend des licences que la fugue proprement dite
ne comporte pas. On donne au chant des tournures
légères et animées , et l'on suit le sentiment et l'ex-
pression des paroles, ce qui ne s'observe pas dans la
fugue.
La composition des madrigaux remonte à la plus
haute antiquité. Les maîtres de l'école flamande s'y
sont distingués; mais les auteurs qui ont atteint la
perfection de ce genre sont : Adrien Willaërt, Pales-
50 MAI
trina, Luca Marenzio, Monteverde, le prince de Ve-
nouse, enfin A. Scarlatti.
Lotti , B. Marcello , Durante , Steffani ont excellé
dans le madrigal accompagné, qui comporte plus de
liberté que l'autre, à cause de la basse continue qu'on
y ajoutait, mais qui exige, à raison de cela, beaucoup
plus d'expression.
Maestoso, Majestueux. Un morceau de musique
de ce caractère demande un mouvement plus lent et
une exécution semblable au grave.
Magad. Instrument grec antique, à vingt cordes.
Athénée prétend qu'il en avait vingt et une.
Magasin de musique. Boutique où l'on vend des li-
vres, des compositions manuscrites et imprimées,
des instruments do musique et tous les accessoires
qui y ont rapport, tels que cordes, papier réglé, etc.
Magnificat. Nom d'un morceau de chant, dont les
paroles ont été tirées du premier chapitre de saint
Luc , et qui , dans la traduction latine, commence
ainsi : Magnificat anima mea Dominum.
Main harmonique. C'est le nom que donna Guido à
la gamme qu'il inventa, pour montrer le rapport de
ses hexacordes, de ses six lettres et de ses six syllabes
avec les cinq tétracordes des Grecs. Il représente cette
gamme sous la figure d'une main gauche, sur les
doigts de laquelle étaient marqués tous les sons de la
gamme, tant par lettres correspondantes, que par les
syllabes qu'il y avait jointes, en passant, par la règle
des nuances, d'un tétracorde ou d'un doigt à l'autre,
selon le lieu ou se trouvaient les deux demi-tons de
l'octave par le bécarre ou par le bémol, c'est-à-dire
selon que les tétracordes étaient conjoints ou dis-
joints.
Maître de musique. Musicien gagé pour composer
de la musique ou la faire exécuter. C'est le maître de
musique qui bat la mesure et dirige les musiciens. II
MAR 51
doit savoir la composition, quoiqu'il ne compose pas
toujours la musique qu'il fait exécuter.
On donne encore le nom de maître de musique au
chef de la musique d'un régiment. Il fait partie de
l'état-major, et a le grade de sergent-major.
Maîtrise. Logement réservé au maître de musique
d'une cathédrale, et dans lequel un certain nombre
de jeunes gens sont entretenus aux frais du chapitre,
pour y recevoir une bonne éducation musicale, et être
employés en même temps au service religieux comme
enfants de chœur.
Quand on songe à l'état de décadence dans lequel
les maîtrises sont progressivement tombées dans notre
pays, on n'est plus surpris que le goût et l'intelligence
de l'art musical se perdent peu à peu dans nos pro-
vinces. Les bienfaits du Conservatoire ne s'étendent
pas au-delà de l'enceinte de Paris ; tandis que, placées
sur tous les points du royaume, les maîtrises offraient
le moyen de recueillir et de cultiver les grands talents
et les belles voix dans les lieux mêmes où la nature
se plaisait à les produire. Depuis leur suppression
presque totale, la pépinière des bons musiciens
n'existe plus; l'art dégénère et languit dans nos dépar-
tements.
L'école de musique religieuse classique fondée en
1853 par M. Niedermeyer, quelque utile qu'elle soit,
ne remplacera pas les maîtrises qui s'étendaient sur
toute la surface de notre pays catholique.
Marche de Basse. (Voyez le mot Progression.)
Marche des parties harmoniques. En général,
lorsque l'on compose à trois parties ou davantage,
elles ne doivent pas monter ni descendre toutes à la
fois, à moins qu'il n'y ait unisson ou que la pensée ne
l'exige ainsi. Il suffit toutefois que l'une d'elles soit
immobile pendant que les autres montent ou descen-
dent,
52 MAJ
Il est bien que le dessus et la basse procèdent par
mouvements contraires, ou du moins par mouve-
ments obliques.
En tous cas, les parties harmoniques doivent mar-
cher d'une manière simple, naturelle et sans contor-
sion. Il est ridicule et périlleux à la fois de leur
donner des intonations difficiles et hasardées.
Majeur. Les intervalles susceptibles de variations
sont appelés majeurs, quands ils sont aussi grands
qu'ils doivent l'être, d'après la juste appréciation du
système général des intervalles.
L'octave, la quinte et la quarte ne varient pas sans
devenir dissonances. Les autres intervalles peuvent,
sans changer de nom et sans cesser d'être justes, varier
de quatre manière différentes, auxquelles on donne le
le nom de genres, dont deux sont selon la nature du
mode où on les pratique, et deux sont artificiels,
attendu qu'ils participent de deux modes à la fois.
Ces quatre genres sont : diminué, mineur, majeur et
augmenté. Les deux genres naturels sont le majeur et
le mineur. Le diminué et l'augmenté forment les
deux genres artificiels.
Les intervalles variables sont au nombre de quatre,
savoir : la seconde, la tierce, la sixte et la septième.
Un intervalle majeur est toujours plus grand d'un
demi-ton que le mineur. Un intervalle augmenté est
plus grand d'un demi-ton que le majeur ; plus grand
d'un ton que le mineur, et plus grand d'un ton et
demi que le diminué ; de même que l'intervalle dimi-
nué est moindre d'un demi-ton que le mineur, moin-
dre d'un ton que le majeur, et moindre d'un ton et
demi que l'intervalle augmenté.
Majeur se dit aussi du mode, lorsque la tierce de la
tonique est majeure, et alors seulement le mot mode
ne fait que se sous-entendre.
On désigne encore par le mot de majeur pris subs-
MAN 53
tantivement, la partie d'un air, d'un duo, d'une
sonate, d'une symphonie qui se trouve traitée en
mode majeur.
Malgaches (Musique chez les). Les Malgaches ai-
ment beaucoup la musiffue et la danse. Celle-ci, grave
chez les hommes, parait souvent exprimer quelque
action dramatique ; elle est mesurée, et les pas, rare-
ment précipités, sont diversifiés suivant le caractère
de l'air, comme les contredanses françaises.
La danse des femmes, quelquefois gaie et lascive,
ne consiste d'ordinaire qu'en un balancement du
corps, avec de continuels mouvements des bras et
des mains accompagnés d'un léger trépignement de
pieds.
Leur musique a un caractère de mélancolie tenant
peut-être au sujet de leurs chansons qui roulent tou-
jours sur l'amour. Les femmes ont la voix douce et
mélodieuse, chantent en parties et font des accords
suivis que l'on n'entend pas sans plaisir.
Manche. Pièce de bois collée à l'extrémité du corps
de certains instruments à cordes, tels que le violon, le
violoncelle, la guitare. Le manche sert à tenir l'ins-
trument, porte les cordes et les chevilles, et c'est en
posant les doigts sur ces cordes et en les pressant contre
le manche, que l'on forme les différents tons.
Mandoline. Instrument de musique plus petit que
le luth et de la même forme. Il s'accorde comme le
violon, avec cette différence, que ses cordes sont de
laiton et doubles. On en joue avec un petit morceau
d'écorce de cerisier ou un bout de plume taillé comme
un cure-dent plat. Le timbre de la mandoline est d'une
finesse mordante qui la rend très-propre à accompa-
gner les chants d'amour.
Mandore. Espèce de petit luth. Il se joue comme
cet instrument, mais s accorde différemment. La mair
5* MAI
dore n'a que huit groupes de cordes à boyau ; ce qui
fait en tout seize cordes.
La mandore n'est plus en usage depuis longtemps.
Marche. Morceau de musique, composé pour être
exécuté par un grand nombre d'instruments, pendant
la marche d'une troupe militaire ou d'un cortège
nombreux, et servant à régler le pas de ceux qui le
composent.
La marche est plus particulièrement du domaine
de la musique militaire que de l'orchestre complet.
Cependant on introduit souvent des marches dans les
compositions dramatiques.
Brillante et légère dans le style martial, majestueuse
et solennelle dans le style religieux, triste et gémis-
sante pour les pompes funèbres, la marche prend di-
vers caractères, selon que sa destination change.
La mesure de la marche est ordinairement à deux
temps, et son mouvement est allegro maesloso. Quel-
ques marches religieuses d'un mouvement très-lent
sont à trois temps.
Dans le style militaire on distingue deux sortes de
marches, savoir : la marche dont la mesure et le temps
marquent le pas ordinaire, et la marche double^ dont
la mesure et les temps sont doublés ; son mouvement
est du double plus rapide que celui de la marche.
Une belle marche, exécutée par d'excellents musi-
ciens, annonce d'une manière brillante la troupe
qui va défder sous les armes. Ces accents belliqueux,
cette harmonie éclatante s'unissent admirablement
aux idées qu'inspire l'appareil militaire. On croit
assister aux anciens tournois. L'imagination nous
transporte aux fêtes triomphales de la Grèce et de
Rome.
Mais laissons la musique guerrière pour nous oc-
cuper de la scène dramatique, où la marche paraît
avec les plus grands avantages. Elle y prend une
MAR 55
couleur différente, selon le temps et le lieu où se
passe l'action scénique. Au théâtre, la marche se
réunit souvent au chœur, et beaucoup de chœurs
dramatiques, tels que ceux de la Vestale : De lauriers
couvrons les chemins ; Périsse la vestale impie ! sont
dessinés en marches. Une des plus belles marches
qu'il y ait au théâtre est la marche funèbre du troi-
sième acte de Dom Sébastien, opéra de Donizetti. Il y
a aussi une fort belle marche par les instruments de
Sax dans la Reine de Chypre d'Halévy. On appelle
aussi marche un mouvement symétrique et régulier
des diverses parties de l'harmonie.
Marcher. Ce terme s'emploie figurément en musi-
que, et se dit de la succession des sons ou des accords
qui se suivent dans un certain ordre.
Marcheuses. Ce sont, dans les ballets, les femmes
qu'on appelait autrefois comparses et qui ne figurent
sur la scène que pour marcher. Elles ne font autre
chose que parader avec des costumes de pages ou
d'icoglans.
Martaban. (Musique du). Les habitants du Marta-
ban, province de l'empire Birman, paraissent aimer
beaucoup notre musique, dont la leur se rapproche
plus que celle d'aucun autre peuple de l'Inde. Les
instruments dont ils se servent méritent d'être ob-
servés. Ils ont un luth avec deux cordes de laiton,
qu'ils jouent tantôt avec un archet, tantôt avec les
doigts. Ils possèdent encore un instrument qu'on peut
appeler chat, parce qu'il représente ce quadrupède
avec les jambes ployées sous lui et la queue ramenée
en demi-cercle au-dessus de son dos. C'est sur cette
queue que les cordes sont attachées. Ils ont aussi des
espèces de flûtes, des flageolets, des tam-lams et des
cloches qu'ils appellent gongs.
Marteau. Instrument qui a le manche percé com-
me une clef, avec lequel on tend ou on lâche les cor-
56 MAI
des des instruments à chevilles, pour les accorder.
C'est aussi le nom de certaines pièces de la mécanique
du piano qui attaquent les cordes.
Masques. Par ce nom on entendait, chez les an-
ciens Grecs et Romains, certaines figures postiches
qui représentaient, dans les théâtres, les traits des
personnages figurant dans l'action dramatique. Ces
masques étaient en métal, et l'on s'en servait pour
donner plus d'éclat et plus de force à la voix.
Masses. Masses, dans la musique vocale et instru-
mentale , se dit de plusieurs parties considérées
comme ne formant qu'un seul tout. Les arpèges des
violons et des violes, liés par les tenues des instru-
ments à vent, forment de belles masses harmoni-
ques. Un solo de hautbois plane et se dessine avec
grâce sur les masses de l'orchestre.
Matra.ca. Enorme crécelle, en usage en Espagne,
et surtout au Mexique, pendant la semaine-sainte.
Elle remplace les cloches. C'est une roue de plusieurs
palmes de diamètre, dont la circonférence est armée
de marteaux de bois mobile, de sorte qu'en tournant
la roue, ces petits marteaux frappent quelques petits
morceaux de bois plantés comme des dents dans la
circonférence de la roue.
Maxime. Nom de tout intervalle plus grand que le
majeur, pour ceux qui n'admettent pas le degré de
augmenté, et plus grand d'un demi-ton que l'aug-
menté, pour ceux qui admettent ce degré de plus.
Maxime. C'est une note faite en carré long horizon-
tal avec une queue au côté droit, laquelle valait huit
mesures à deux temps, c'est-à-dire deux longues, et
quelquefois trois, selon le mode. — Cette sorte de
note n'est plus en usage, depuis qu'on sépare les me-
sures par des barres, et qu'on marque avec des liai-
sons les tenues ou continuités des sons.
Mazurka. La mazurka possède un rhylhme par-
MEL 57
ticulier qui consiste à marquer souvent le deuxième
temps de la mesure; la période se termine sur le
deuxième temps. Elle est plus lente que la valse.
Mèdes. (Voyez le mot Assyriens.)
Médiànte. C'est la corde ou la note qui partage en
deux tierces l'intervalle de quinte qui se trouve entre
la tonique et la dominante. L'une de ces tierces est
majeure, l'autre mineure, et c'est leur position rela-
tive qui détermine le mode. Pour simplifier cette dé-
finition, nous dirons que la médiànte est la troisième
note d'une gamme.
Médiation. Partage de chaque verset d'un psaume
en deux parties, l'une psalmodiée ou chantée par un
côté du chœur, et l'autre par le côté opposé.
Médium. Milieu de la voix, également distant de ses
deux extrémités au grave et à l'aigu. Le haut de la
voix est plus éclatant, mais il est quelquefois forcé.
Le bas est grave et majestueux, mais il est plus sourd.
Un beau médium donne les sons les mieux nourris,
les plus mélodieux.
Mélodie. La mélodie est la succession de plusieurs
sons différents qui, dans leurs rapports de tonalité,
concourent à former un ensemble agréable et flat-
teur pour l'oreille, ravissant pour le cœur et l'ima-
gination.
D'où vient-elle, cette reine de l'art lyrique, avec
son cortège d'émotions, son sourire fleuri, ses arabes-
ques de tous les temps que l'œil embrasse et admire?
à quelle source de poésie l'enchanteresse a-t-eîle
puisé ses charmes? La mélodie est fille du mystère;
c'est une brise échappée à un monde inconnu ; elle
porte avec elle la fraîcheur de l'aurore, le feu du so-
leil et la sérénité de la nuit. Tous les arts ont leur
poésie, mais aussi tous les arts ont leur langage et
leur modèle : langage matériel, modèles vivants ou
morts; la parole d'un côté, la nature de l'autre. Pé-
58 MÉL
trarque, l'Arioste, le Tasse, Chiabrera, Goethe, Byron,
Chateaubriand, Hugo et Lamartine, tous enfants de
de la renommée, ont fleuri leurs vers des plus belles
images, ont revêtu la pensée humaine des plus riehes
vêtements; mais au service de leurs inspirations, ils
avaient ou ils ont encore des mots, un langage, un
vocabulaire tout entier; Michel-Ange, Léonard de
Vinci, Raphaël, le Corrége, Rubens, Léopold Robert,
Ingres, Yernet, tous illustres parmi les plus illustres,
vous n'avez fait que copier la nature, et votre gloire
est d'avoir été aussi vrais que la nature elle-même;
vous aviez des couleurs, vous aviez des pinceaux ! En-
core une fois, la mélodie n'a ni vocabulaire, ni pin-
ceaux, ni modèles; elle est tendre et amoureuse,
comme le poëte le plus tendre et le plus amoureux ;
elle est rêveuse, emportée, déchirante comme les son-
ges qui bercent la tête, ou les tempêtes qui agitent le
cœur; elle a des larmes pour la douleur, des sourires
pour l'amour; elle est légère, coquette, douce, capri-
cieuse, folâtre, insouciante, enthousiaste, ardente;
elle est dans le passé; elle est dans le présent; elle
vivra aussi longtemps que vivront les étoiles, aussi
longtemps que les roses garderont leurs couleurs, les
arbres leur verdure, le printemps son soleil. Elle re-
viendra d'où elle est venue, et ceux qui assisteront à
sa fin, seuls connaîtront son origine.
La mélodie se divise en trois catégories ; la mélodie
fugitive, la mélodie religieuse et la mélodie dramati-
que, c'est-à-dire appliquée au drame lyrique. Il y a la
mélodie légère, la mélodie gracieuse, la mélodie pas-
sionnée, et, au milieu de tout cela, nous avons la mé-
lodie banale qui veut tout exprimer, qui n'exprime
rien et qui revient de droit aux musiciens sans valeur
poétique. Des mélodies fugitives, Schubert en est un
modèle merveilleux. Lisez, relisez ces petits poèmes
où l'âme pure et calme a répandu son parfum; là,
MÉL 50
point de futilités, point de notes à contresens, point
d'exagération, toujours la vérité; là, c'est le cœur qui
chante, c'est du cœur que part l'inspiration. Schu-
bert se fait un petit cadre et il le remplit toujours des
plus délicieuses peintures; ne lui demandez pas des
développements, de la grandeur, de l'espace : son
haleine est courte et ne peut pas affronter un long
voyage; laissez-lui sa douce rêverie, son amour mé-
lancolique. Il vous dira le songe d'un enfant, la
prière d'une chaste fille, la promenade à deux, sous
le ciel étoile, la douleur d'une mère, et nul mieux
que lui ne rendra tous les sentiments de l'enfant
joyeux, de la jeune fille regardant le ciel, des amou-
reux isolés, de la mère en pleurs. Schubert ne dé-
passe jamais le but, et il l'atteint toujours; ses ta-
bleaux sont des miniatures, mais des miniatures qui,
quelquefois par leurs beautés, s'élèvent aux propor-
tions des grands tableaux ; celui-là possède la vraie
mélodie, que ne donnent ni la science, ni l'étude,
et qui ne reçoit ses règles que du génie et du goût.
A l'Italie la mélodie religieuse et la mélodie dra-
matique. La mélodie religieuse vous la trouvez dans
les vieilles basiliques, au milieu de la foi des croyants,
s'élevant comme une glorification céleste au-dessus
de la tête du Christ. Dans la mélodie religieuse, point
de luxe, point de formés sensualistes, point de co-
quetterie, point de fantaisie. La mélodie religieuse
respire le recueillement, la méditation, un amour
sacré, celui de Dieu, une aspiration brûlante vers
l'infini : allez dans la ville éternelle; écoutez le Mise-
rere d'Allegri, les psaumes de Marcello, les prières '
sublimes de Pergolèse, les cantiques, les louanges,
les hymnes au Seigneur de Palestrina, les chants ins-
pirés de Mozart et de Cherubini; les caprices du
monde sceptique n'ont pas souillé de leurs aîles va-
gabondes le génie de ces compositeurs dévoués à la
60 MÉL
musique la plus imposante, la plus grandiose, la
plus noble, la musique qui puise son inspiration dans
la croyance du bonheur éternel, dans le respect et
l'amour de la divinité. Là est la foi chrétienne, là est
la vérité.
La mélodie dramatique est un mélange de toutes
les passions terrestres; ses effets sont plus variés, ses
formes plus saisissables, et plus accessibles à l'intel-
ligence humaine. La mélodie dramatique, soumise
dès sa naissance à une marche progressive, a com-
mencé pour ainsi dire à Scarlatti, car jusque là la
musique dramatique n'existait pas ou à peu près. Le
compositeur, mettant de côté la routine et se frayant
une route nouvelle à travers l'ignorance, fonda pour
ainsi dire en Italie une école nouvelle; tour à tour
vinrent rayonner Antonio Cavalli, Slradella, le comte
Angelo, Antonio Lotti, GiacomoPeri, Corsi, Porpora,
Dominico Sarri, Leonardo di Vinci, Pcrgolèse, Egilio
Duli, Fiorillo, Piccinni, Sacchini, Paisiello, Cimarosa,
Fioravanti, Spontini, Gara fa, Rossini, Bellini, Do-
nizetti et Verdi. Nous en passons certainement ; mais
il y a eu une abondance telle de compositeurs à Na-
ples, à Florence, à Venise et dans presque toutes les
villes italiennes, que c'est la plus curieuse histoire
de l'art contemporain.
C'est dans la musique de théâtre que le génie peut
ouvrir ses ailes. Exprimer des sensations, des senti-
ments, des passions ; charmer par la suavité, émou-
voir par l'expression, voilà en deux mots le drame
lyrique. On peut avoir le génie de la composition
sans être un musicien dramatique. Que de ressources
a le compositeur pour déployer son génie, quand il a
du génie ! Le mouvement, le geste, l'action doublent
l'effet de la musique. Il a fallu deux siècles pour éle-
ver l'art lyrique au point où il est arrivé de nos jours ;
certes, aucun art n'a subi plus de transformations
MÉL 61
que l'art musical appliqué au théâtre ; le progrès s'est
opéré peu à peu, lentement; chaque compositeur a
eu son genre. Qu'elle est belle, simple, intéressante,
toute cette école italienne, inspirée par une mélodie
élégante, vive, caressante et toujours pleine de séduc-
tions. Elle a toujours marché vers le progrès : Bellini,
Donizetti, Rossini, Rossini surtout, l'ont élevée à un
degré de splendeur inouï ; et lorsqu'on croyait que le
feu s'était éteint dans cette braisière musicale, Verdi
apparaît; Verdi, l'homme de la scène, l'homme qui
donne la vie aux personnages, qui anime les situa-
tions; Verdi qui fait de la mélodie l'application la
plus noble, et dont le génie s'applique surtout à ex-
primer la vérité du drame : c'est toute une transfor-
mation.
L'harmonie et le rhythme constituent la partie
scientifique de l'art musical; la mélodie en est la
partie animée, vivante et poétique. L'harmonie et le
rhythme ont été soumis à des calculs positifs, à des
principes fixes, à des règles immuables. La mélodie
ne peut recevoir de règles que du génie et du goût. Ici
le caprice, la fantaisie, la spontanéité de l'inspiration
jouent un rôle immense. Ici se déploie toute l'origi-
nalité du compositeur.
La mélodie est à la musique ce que l'expression et
le coloris sont à la peinture ; elle l'anime et la vivifie,
la pare et l'embellit. Elle assure son empire sur les
sens et sur l'imagination. Elle communique, en un
mot, aux productions de fart cette étincelle de vie,
cette flamme divine, ce don d'immortalité, qui leur
font traverser les générations et les siècles, sans qu'elles
perdent rien de leur jeunesse, de leur fraîcheur et de
leur éclat.
Pour qu'un tableau excite un grand intérêt ou une
vive admiration, il ne suffît pas qu'il soit remarqua-
ble par la pureté des lignes, la perfection du dessin
2**
#
<>2 MÉL
et une disposition savante des effets, de l'ombre et de
la lumière, il faut, de plus, qu'il se distingue par
l'expression des physionomies, par le sentiment de
l'idéal ou des beautés de la nature, et qu'on voie cir-
culer partout le mouvement et la vie.
Ce que nous disons des arts du dessin s'applique
parfaitement à la musique ; de même qu'on reconnaît
aux qualités que nous venons d'énumérer les pein-
tres éminents, de même on reconnaît à l'abondance,
à la richesse, à l'originalité des mélodies, les musi-
ciens vraiment supérieurs.
Malgré l'insuffisance des documents qui nous sont
parvenus sur la musique des anciens, on ne saurait
douter qu'ils n'aient connu la puissance delà mélolie.
A cet égard, la fable, malgré ses exagérations et ses
mensonges ingénieux, peut servir de supplément à
l'histoire. Qu'est-ce qu'Orphée adoucissant les mons-
tres et attirant les forêts par ses accents divins, si ce
n'est une personnification de cette douce mélodie qui
avait tant de charme pour les Grecs? Et les sirènes,
ces séduisantes femmes qui, au milieu des mers, fas-
cinaient les voyageurs par la magie de leurs chants,
et les attiraient sur les écueils les plus dangereux de
l'Afrique, ne rappellent-elles pas le souvenir des
femmes d'Athènes, de ces courtisanes enchanteresses
qui, par leurs voluptueuses chansons, amollissaient
les cœurs, troublaient la raison des sages et des phi-
losophes, et charmèrent souvent les loisirs de So-
crate et de Périclôs? Oui, on trouve dans les mythes
et les fictions de l'antiquité le plus éclatant hommage
qui ait été rendu «à la mélodie.
Après avoir brillé d'un vif éclat chez les anciens,
elle disparut tout à coup dans les premiers siècles du
christianisme. Les essaims de Barbares qui se préci-
pitèrent alors sur l'Europe en bannirent la douce
mélodie. Et qui donc aurait entendu sa voix au mi-
MÉL 63
lieu de ces hommes de 1er, dans ce choc d'ar-
mures?...
Quand la paix eut succédé au bruit des armes, la
mélodie renaissante ne trouva d'abord d'asile que
dans les temples chrétiens. Mais austère comme la
religion nouvelle, dédaignant tout ce qui peut émou-
voir l'imagination et les sens, elle s'exhala en froides
psalmodies, en plain-chant monotone; elle n'eut
rien en un mot de cette coquetterie, de cette grâce,
de ce charme entraînant qu'elle avait possédé chez
les Grecs. Pendant la longue période du moyen-âge,
les chants tour à tour naïfs, passionnés, mélancoli-
ques des ménestrels, des troubadours, des bardes,
des minnesingers, offrent seuls quelques réminiscen-
ces de l'antique mélodie.
Tandis que l'art végétait en Europe dans un état
d'immobilité et de langueur, l'Italie s'ouvrit la pre-
mière une route nouvelle sur les ailes de la mélodie ;
un essaim de compositeurs éminents s'élança tout à
coup dans des sphères inconnues ; et, pendant trois
siècles, le génie italien prit un essor qu'aucun peuple
n'a atteint depuis, si on en excepte l'Allemagne.
La mélodie est restée longtemps chez nous dans un
état de faiblesse et d'infériorité qui a fait dire à quel-
ques étrangers, prévenus ou irréfléchis, que nous
étions le peuple le plus anti-musical de l'Europe :
malgré les efforts de Lulli, notre grand Opéra n'était
encore , au dix-septième siècle , qu'une machine
lourde et compliquée; et au dix-huitième, toute la
science de Rameau ne put donner un peu d'anima-
tion et de vie à l'Académie royale de musique. C'est
qu'il manquait à ce grand harmoniste ce qui séduit,
ce qui charme dans toute composition musicale, une
abondante et riche mélodie.
Sous ce rapport, Gluck et Piccinni, et de nos jours
Rossini, ont tracé au génie national une route nou-
64 MÉL
velle, et plusieurs compositeurs français sont entrés
avec succès dans cette voie. Méhul, Grétry, Hérold,
Monsigny, Dalayrac, Boiëldieu, Auber, Halévy, Ad.
Adam, A. Thomas, Reber, Clapisson, Grisar, ont
produit des œuvres qui unissent aux séductions de la
mélodie les calculs de la science, et auxquelles cette
heureuse réunion assure une longue popularité.
C'est grâce à cette alliance de l'harmonie et de la
mélodie, que quelques-unes des compositions de
Grétry ont résisté depuis un demi-siècle à toutes les
variations du goût, à tous les caprices de la mode,
et qu'elles sont toujours admirées comme à l'époque
de leur apparition.
Mélodiste. On désigne ainsi le compositeur dont
les œuvres se distinguent par des mélodies heureu-
ses. Mais le musicien qui est tout simplement mélo-
diste ne possède qu'une des parties essentielles de
l'art, et ses œuvres n'obtiendront jamais un véritable
succès, s'il ne joint l'harmonie à la mélodie, la science
des accords à l'inspiration.
Mélodium (orgues). C'est dans l'acception la plus
large et la plus vraie du mot, l'instrument de la mé-
lodie. Moduler les sons divers, leur donner avec grâce
toutes les inflexions de l'âme et de la voix, surpren-
dre l'imagination par des accords vibrants dont le jeu
imite, par une création admirable, les instruments
les plus mélodieux, tel est le but que s'est proposé
l'ingénieux inventeur de cet instrument, M. Alexan-
dre, en offrant au monde musical cette œuvre de
savant mécanisme et d'ingénieuse nouveauté. L'orgue
mélodium, dont l'extérieur frappe la vue au premier
coup-d'œil par sa ressemblance avec l'orgue harmo-
nium, diffère essentiellement de celui-ci par son mé-
canisme intérieur et sa sonorité plus grave, plus vi-
brante et plus mélodieuse. Plus doux, plus louchants,
les accords de l'orgue mélodium, par leurs effets am-
MEL 65
pies et variés d'harmonie, parlent mieux à l'âme en
la transportant. Quelques jours d'étude suffisent pour
apprendre à jouer de cet instrument, dont le clavier
est semblable à celui du piano , il est composé de
cinq octaves; mais, en employant les registres (pis-
tons) qui transposent en se correspondant, on obtient
une étendue de sept octaves chromatiques. Cet orgue
a ordinairement quatre jeux. Les nos l et 4 sont ceux
du diapason ordinaire et équivalent à tous les tuyaux
d'orgues de huit pieds ; le n° 2 est celui de l'octave
grave, et équivaut aux deux tons des quatre pieds ;
les 0 ne servent qu'à augmenter et à diminuer la
force des jeux 3 et 4. La moitié des registres de gau-
che influe sur les notes graves, depuis Yul de la basse
jusqu'au mi de la troisième octave, et l'autre moitié,
depuis le fa suivant jusqu'au dernier ui de dessus.
Par cette ingénieuse symétrie, on peut exécuter le
chant avec de certains jeux ^et reproduire l'accompa-
gnement avec d'autres. Le registre G signifie grand
jeu et les fait parler tous à la fois ; si l'on veut un jeu
dans toute l'étendue du clavier, il suffit de tirer les
numéros correspondants. Le registre E veut dire ex-
pression. L'orgue à deux jeux diffère de l'orgue à
quatre, en ce qu'il a deux registres de moins. L'or-
gue à un seul jeu ne possède que le registre aux for-
tes expressions. L'orgue mélodium n'exige pas de
musique spéciale et rend avec un certain charme
celle du piano, dont le chant et l'accompagnement
gagnent beaucoup à être exécutés sur cet instrument.
A travers une foule de recherches et de perfection-
nements,^!. Alexandre a été conduit à inventer un in-
strument qui ne porte pas encore de nom, mais qui
a, par quelques points, assez d'analogie avec le mélo-
dium, pour que nous en disions ici quelques mots.
Cet instrument qui renferme un piano, a trois cla-
viers superposés l'un à l'autre, qui donnent à l'artiste
66 MEL
le moyen de lutter avec tous les effets de l'orchestre.
Le clavier du piano règne sur les deux autres. La
flûte, la clarinette, le hautbois, le violon, le violon-
celle, marient leurs sons à ceux du piano de la façon
la plus agréable, la plus puissante et la plus variée.
Tout y est, l'orgue, la voix humaine, les instruments
à vent, les instruments à cordes. M. Alexandre a fa-
briqué le premier instrument de ce genre pour le cé-
lèbre pianiste Franz Liszt.
Mélomanie. Manie de la musique. — Le mélomane
n'est pas toujours un musicien habile ; il n'a le plus
souvent que des prétentions à l'habileté et au savoir.
Toujours à son poste dans les concerts, aux premiè-
res représentations des opéras nouveaux, il excite, en-
courage, blâme, critique tour à tour des yeux, du
geste, de la voix. Il se pose en aristarque, en juge sou-
verain, infaillible , et ses décisions ont cassé plus
d'une fois les arrêts de la critique et du public. —
personne ne possède comme lui ce sens exquis, ce
tact parfait, ce sentiment du beau qui sait distinguer
le véritable talent de la médiocrité. A l'en croire, il
est le conseiller intime de tous nos grands artistes;
Rossini lui doit ses plus délicieuses mélodies ; Meyer-
beer, ses pi us belles inspirations ; Auber, ses rhythmes
les plus coquets; Halévy, ses chants les plus passion-
nés; Donizetti, ses cantilènes les plus suaves.
Nous avons seulement parlé jusqu'ici du mélo-
mane qui se pose en connaisseur. C'est , comme
vous voyez, un personnage très-original , et même
quelque peu assommant pour ceux qui l'écoutent.
Mais c'est ma foi bien pis encore, quand le mélo-
mane aspire au titre de chanteur, de virtuose, de
compositeur. Si vous êtes avec lui dans un salon, et
que vous le voyiez aller au piano, ou sur le point de
fredonner un de ses airs, de roucouler une de ses ro-
mances, alors sauvez-vous vite, pour peu que vous
MÉL 67
ayez les oreilles sensibles et les organes délicats ; ou
plutôt restez, si vous êtes curieux d'assister au tohu-
bohu le plus étrange, le plus divertissant...
Toutefois, la critique que nous faisons ne s'adresse
point indistinctement à tous les mélomanes; il en est
quelques-uns qui, malgré leurs singularités et leurs
ridicules, sont des hommes de goût et de talent.
Mais, à part ces rares et honorables exceptions, la
musique n'est le plus souvent chez le mélomane
qu'une passion malheureuse.
Mélopée. C'était, chez les anciens, l'art ou les rè-
gles de la composition du chant, dont la pratique
et l'effet s'appellent mélodie. — Mélopée signifiait
donc la composition des chants , et mélodies les
chants composés.
Ménestrels. Poètes et musiciens qui fïorissaient
en France dès le huitième siècle. — Le maître de cha-
pelle du roi Pépin, père de Charlemagne, était un
ménestrel.— Chanteurs et virtuoses à la fois, les mé-
nestrels obtinrent pendant longtemps de grands suc-
cès. A la suite des preux chevaliers dans les batailles,
les tournois, les carrousels, ils célébraient leurs ex-
ploits, et se rendaient les interprètes des sentiments
exaltés, patriotiques qui faisaient alors battre les
coeurs. — Ils jouaient aussi un rôle dans les cours
d'amour, les combats poétiques et tous les jeux bril-
lants du moyen âge. — Admis dans les salons de
l'aristocratie, ils faisaient l'admiration et les délices
des sentimentales châtelaines.
Cette vogue des ménestrels dura tant que leur nom-
bre n'excéda pas certaines limites; mais à mesure
qu'ils se multiplièrent, ils perdirent peu à peu de
leur crédit et de leur empire sur les imaginations. Il
faut dire que plusieurs d'entre eux s'attirèrent le mé-
pris public par des excès et des désordres qui provo-
quèrent souvent la rigueur des lois.
6S MES
Déchus de leur ancien prestige, exclus des châteaux
et des palais, les ménestrels formèrent une corpora-
tion dont les membres, disséminés sur les divers
points de la France, se mirent à utiliser leurs talents
le plus fructueusement possible. Réunis en groupes
de quinze ou vingt, ils parcouraient les bourgs les
villages, chantant et jouant de la viole et de la lyre;
puis, quand le soir était venu, ils partageaient en
bons camarades leur recette de la journée.
Les ménestrels survécurent aux troubadours. Mais
à mesure que la musique fit des progrès en France,
ils perdirent peu à peu toute considération. Connus
encore aujourd'hui sous le nom de ménétriers, ils
sont relégués au dernier rang de la hiérarchie musi-
cale, et leur archet ne sert plus qu'à défrayer les fêtes
rustiques.
Menuet. Air de danse d'un mouvement modéré et
à trois temps. — Le menuet est d'origine française;
il se dansait à deux, et avait autant de grâce que de
noblesse. Le menuet à'Exaudet a été longtemps cé-
lèbre.
On nomme aussi menuet un morceau ordinaire-
ment le troisième d'une symphonie ou d'un quatuor;
il est aussi à trois temps, mais d'un mouvement très-
rapide.
Les menuets de Mozart, de Haydn, de Beethoven,
sont presque tous des chefs-d'œuvre. Celui que Mo-
zart a placé dans le premier finale de don Juan est
d'un goût exquis.
Merljne. Orgue à cylindre, qui sert à siffler les
merles et les bouvreuils. Il est plus fort que celui
qu'on emploie pour le serin, parce que la voix des
bouvreuils et des merles est plus grave.
Messe. Composition musicale, en plusieurs mor-
ceaux détachés, que l'on chante dans les églises catho-
liques pendant le saint sacrifice de la Messe.
MET 69
Les paroles de la Messe sont fort belles et favora-
bles au langage varié de la musique ; elles fournissent
des contrastes dont un compositeur habile sait tirer
parti. Le Kyrie est une prière affectueuse, le Gloria
s'ouvre par un chant éclatant, le Credo, majestueux
d'abord, passe de l'expression d'un sentiment tendre
à celle d'une profonde tristesse. Les effets bruyants
du Resurrexit contrastent avec l'abattement de la dou-
leur; la trompette du Jugement fait entendre ensuite
ses accents terribles et solennels, et le discours mu-
sical a pour péroraison un finale brillant et rapide
dans l'Et Yilam, ordinairement traité en fugue ; le
Sanctus et YAgnus Dei, sont deux prières ; l'un a le
caractère imposant, l'autre est d'une expression suave
et tendre.
Parmi nos compositeurs modernes, les messes de
Lesueur et de Cherubini sont justement admirées.
Mesure. (Voyez Temps.)
Méthode. Spécialement appliqué à la musique, ce
mot désigne une série de règles et de préceptes qui
enseignent à tirer tout le parti possible des aptitudes
naturelles.
Dans la musique vocale, on dit qu'un chanteur a une
belle, une excellente méthode, pour indiquer que des
études fortes, habilement dirigées et fondées sur une
science profonde, ont développé, assoupli son organe,
et l'ont rendu propre à l'exécution des plus grandes
difficultés. L'on pourrait citer beaucoup d'artistes,
qui, sans posséder des facultés supérieures, sont ar-
rivés à de beaux résultats, grâce à une méthode par-
faite. Ce n'est pas à dire pourtant que la méthode
puisse suppléer à d'heureuses dispositions, mais elle
double l'effet et la puissance des belles voix, et cor-
rige, transforme, modifie les voix défectueuses.
Dans l'enseignement de la musique, on appelle
aussi méthode les préceptes qui serrent de base à l'é-
70 MIN
ducation musicale, et qui ont pour objet de faire par-
courir progressivement à l'élève toutes les difficultés
de l'art. Tout le monde sait quels merveilleux résul-
tats a produits la méthode de M. Wilhem. MM. Jue
et Pastou ont marché avec éclat clans la même car-
rière. Les ouvrages élémentaires de M. Panseron, de
M. de Garaudé, ont aussi exercé une heureuse in-
fluence sur les progrès de l'enseignement musical.
Dans l'exécution instrumentale, les méthodes sont
nombreuses et variées. L'on peut dire que chaque ar-
tiste éminent a la sienne. Parmi nos pianistes, Bertini,
Henri Herz, Kalkbrenner, Zimmerman, ont adopté
chacun une méthode particulière, d'après laquelle ils
ont formé de nombreux disciples. Il en est de même
dans notre école de violon, illustrée par les métho-
des de Yiotti, Baillot etHabeneck.
Minime. On employait autrefois ce mot pour indi-
quer une note valant deux noires ou la moitié d'une
ronde. On appelle intervalle minime celui qui est
moindre que l'intervalle mineur ou diminué pour
ceux qui sont susceptibles d'admettre ce degré.
minnesinger (c'est-à-dire chantre d'amour). Nom
usité en Allemagne pendant le moyen-âge pour dési-
gner celte sorte de poètes nommés en France trouba-
dours ou trouvères. Les minnesingers étaient, pour la
plupart, des chevaliers, ou tout au moins des hommes
nobles, et vivaient à la cour des princes. L'empereur
Frédéric II, l'archiduc d'Autriche Léopold IV, le roi
de Bohême Wenceslas, etc., se rendirent célèbres
par la protection qu'ils accordèrent aux minnesin-
gers. Parmi les plus anciens de ces poètes, on cite
Henri de Veldek, qui florissait vers 1180. Les plus
distingués vécurent à la fin du douzième siècle et au
commencement du treizième. A la fin de ce dernier
on admirait Conrad de Wurtzbourg et Jean Had-
loufe.
MOI) 71
Mode. Ce mot veut dire manière d'être et désigne
la manière d'être du ton.
Un ton donné peut exister de deux manières, qui
sont toutes deux caractérisées par la première tierce
de sa gamme. Ainsi l'on dit qu'il est du mode ma-
jeur si la première tierce de sa gamme est majeure,,
et qu'il est du mode mineur si la première tierce de sa
gamme est mineure.
Changement de mode. — C'est un artifice harmoni-
que très usité, et, quoique fort simple, souvent du
meilleur effet.
On peut, à son gré, employer successivement les
deux modes du ton dans lequel on est, c'est-à-dire
rendre à son gré majeurs ou mineurs les deux ac-
cords du ton dans lequel on se trouve.
L'expression de l'accord parfait est très-différente
dans les deux modes : le mode mineur lui donne une
teinte marquée de mélancolie et de tristesse.
L'accord de dominante est composé des mêmes
notes dans les deux modes; mais son expression est
également différente, parce qu'il prend la teinte du
mode et de l'accord parfait.
Modification des accords. Voyez Accords (Modi-
fication des).
modulation. Moduler, c'est changer de ton.
La modulation est peut-être la partie la plus im-
portante de l'harmonie et la source la plus féconde
de ses richesses et de ses beautés.
Pour moduler, on prend l'accord de dominante du
ton où l'on veut aller, et on le résout dans l'accord
parfait de ce ton. Cette règle est la seule qui existe :
ce qu'on peut y ajouter n'en est que le développe-
ment et l'application.
Les altérations accidentelles introduisent dans un
ton donné des attractions qui lui sont étrangères et
qui fournissent un moyen facile de moduler dans les
72 MON
tons auxquels elles appartiennent. (Voyez Altéra-
tion.)
En pratique, on prend l'une pour l'autre, deux
notes séparées par l'intervalle enharmonique d'un
comma, telles que ut dièse et ré bémol, si naturel et
ut bémol, etc. Toutefois, leurs tendances sont com-
plètement différentes et mettent en rapport les tons
les plus éloignés. Ainsi, ut dièse a une tendance as-
cendante vers ré, et peut être considéré comme la
sensible du tonde ré; ré bémol, au contraire, bien
que synonyme pratique de ut dièse, a une tendance
descendante vers ut naturel, et peut être considéré
comme le quatrième degré du ton de la bémol. L'i-
dentité pratique de ces notes et de celles qui leur sont
analogues réunie à la divergence de leurs attractions
tonales, est, pour les compositeurs habiles, un des
plus riches et des plus puissants moyens d'effets que
l'harmonie puisse fournir.
Moduler. C'est parcourir les cordes d'un ton ou de
plusieurs, l'un après l'autre, en les employant mélo-
diquement ou harmoniquement, ainsi qu'il arrive
dans les préludes, ou d'une manière plus régulière,
comme dans les morceaux de différents carac-
tères.
Moduler, c'est, dans la véritable acception du mot,
faire usage d'une modulation ou de plusieurs succes-
sivement.
Moldavie (Musique de la). La musique de ce peu-
ple est peu importante. Elle consiste en quelques mé-
lodies d'une extension très-bornée et d'un caractère
mélancolique: Il y a parmi le peuple de ce pays quel-
ques troupes de Bohémiens qui font usage du violon,
du fifre, de la flûte, de la clarinette et d'une espèce
de guitare. Les classes riches ont adopté l'usage gé-
néral du piano.
Monocorde. Instrument à une seule corde, que
MOI 73
Ton peut diviser à volonté au moyen de petits cheva-
lets mobiles.
Monologue. C'est une scène chantée par un seul
acteur qui, s'étant identifié avec le personnage qu'il
représente, en exprime les divers sentiments avec
vérité. Cette scène se compose ordinairement d'un
récitatif instrumenté avec soin, suivi presque toujours
d'une cavatine ou d'un air de plusieurs mouvements.
Montre. Jeu d'orgue dont les tuyaux paraissent à
la façade de l'instrument. La montre appartient à
l'espèce des jeux de flûte.
Mordant. Agrément très-souvent employé, qui
consiste en deux ou plusieurs petites notes, placées
immédiatement avant une note quelconque. Le mor-
dant s'exécute de plusieurs manières, et l'on se sert
de différents signes pour l'indiquer.
Motet. Morceau de musique dont le chant, adapté
à des paroles tirées de l'Écriture et des Psaumes, était
autrefois destiné à être exécuté par deux, trois, quatre,
cinq, six voix seules ou accompagnées uniquement
de l'orgue. On imagina seulement, dans le dernier
siècle, d'accompagner ces morceaux de chant avec
d'autres instruments.
Après les messes et les oratorios, les motets sont
la partie la plus importante de la musique religieuse :
ils en ont même toujours été et en seront toujours la
partie la plus usuelle et la plus cultivée.
Presque tous les compositeurs célèbres ont com-
posé des motels. On distingue, entre tous, ceux de
Scarlatti, Léo, Durante, Pergolèse, Haydn, Mozart,
Lesueur, Chérubini, etc.
Motif. Idée primitive et principale par laquelle
commence ordinairement un morceau de musique.
On emploie le mot thème dans la même acception.
Mouvement. On désigne ainsi le degré de vitesse
ou de lenteur dans lequel on exécute un morceau
t. ii, 3
74 AILS
de musique. Les différents degrés de mouvement se
divisent en cinq espèces principales 1° largo ou lento;
2° adagio ; 3° mutante ; 4° allegro; 5° presto. Tous les
autres mouvements, comme par exemple le grave, le
larghetto, Yandantino, Yallegretto9 ne sont que les
modifications des cinq espèces que nous venons
d'indiquer.
Mouvement harmonique. On entend par ce mot la
marche de deux ou d'un plus grand nombre de sons
dans leur progression d'un son à un autre son. 11 y a
trois espèces de mouvements, savoir : le mouvement
direct, quand les parties montent et descendent en
même temps; le mouvement contraire, lorsqu'une
partie monte pendant que l'autre descend ; enfin, le
mouvement oblique, quand une partie étant immobile,
l'autre monte ou descend.
Muances. Changement du nom des notes dans
l'ancienne solmisation, lorsque le chant sortait des
bornes de Yhexacorde.
Mue de la voix. La nature opère un changement
dans la voix à l'époque où les individus des deux
sexes passent de l'enfance à la puberté. L'époque de
ce changement n'est point fixe, ni chez les uns, ni
chez les autres. Ce qui est constant toutefois, c'est que
la voix des hommes, après la mue, change tout à fait
de nature et prend un caractère opposé à celui qu'elle
avait, tandis que la voix des femmes n'éprouve point
une mutation pareille. Le seul changement qui s'o-
père en elles consiste à donner à cette voix plus de
force et d'étendue, sans qu'elle change ordinaire-
ment de nature.
Musette. Instrument de musique à vent et à anche,
composé d'une peau de mouton de la forme d'une
vessie, de chalumeaux, d'un bourdon, de plusieurs
anches et d'un soufflet. Cet instrument a été fort en
usage en France, vers le milieu du \viue siècle.
fttôS 75
On appelle aussi musette un air convenable à l'ins-
trument de ce nom, dont la mesure est ordinaire-
ment à 6/8, le caractère naïf et doux, le mouvement
un peu lent, et soutenu par une basse en pédale.
Musicien. Ce nom se donne également à celui qui
compose la musique et à celui qui l'exécute.
Musique. Musique dérive du mot musa, muse; l'art
enseigné par la muse par excellence, celle qui présida
à la civilisation dans l'enfance des sociétés.
Le son est, si l'on peut s'exprimer ainsi, la matière
musicale. Les diverses combinaisons d'agencement
qui peuvent concourir à établir l'ordre dans lequel
on veut faire succéder un son à un autre son, soit
dans leurs rapports du grave à l'aigu, ou de l'aigu au
grave, ou du grave au médium, ainsi que la durée de
temps que l'on veut assigner à chacun d'eux en par-
ticulier, constituent la partie spéculative de l'art.
La musique se compose de trois parties bien dis-
tinctes.
1° Delà mélodie, ou succession de plusieurs sons
différents qui, dans leurs rapports de tonalité, con-
courent à former un ensemble agréable et flatteur
pour l'oreille ;
2° Du rliythme, ou de l'ordre choisi dans lequel on
établit la succession des sons, leurs durées et leur
placement aux temps forts et aux temps faibles des
mesures ;
3° De Yharmonie, ou audition simultanée de plu-
sieurs sons différents qui, d'accord entre eux, vien-
nent former un harmonieux ensemble.
La musique est, de tous les beaux-arts, celui sur
lequel on a le plus disserté sans s'entendre. C'est
aussi celui qui a donné lieu au plus grand nombre de
théories et de systèmes. L'incertitude que ces di-
verses opinions et ces jugements contradictoires ont
etée dans les esprits est, sans contredit, une des prin-
Yo . MUS
cipales causes des obstacles qui ont longtemps arrêté
les progrès de l'art musical.
La musique a plus besoin d'être sentie que raison-
née. Pour nous émouvoir, elle s'empare toujours de
nos sens, avant de parler à notre esprit. Elle est, par
son essence, purement idéale. Le vague qu'elle sem-
ble porter en elle est une volupté pour l'auditeur, et
les sentiments de piété, d'amour, de fierté, de joie, de
fureur ou de gloire qu'elle sait si bien exprimer, ont
déjà pénétré notre âme bien avant que notre raison
en vienne sanctionner les effets. Les fables mêmes
dont s'enveloppe la mémoire des premiers musiciens,
attestent les prodiges enfantés par cet art, avant que
les hommes eussent appris à transmettre leurs expé-
riences et leurs idées autrement que par la tradition.
Orphée passa pour le fils d'un dieu, bien avant
qu'Homère eût obtenu des autels; et sans doute plus
d'un berger amoureux avait chanté les plaisirs et les
charmes de sa maîtresse, quand Dibutade imagina de
fixer sur la pierre l'ombre incertaine des traits de son
amant. Si, dès l'enfance du genre humain, la sculp-
ture sortit grossière des mains de l'idolâtrie, ce fut
par suite du besoin qu'éprouvait l'homme d'adresser
aux images des dieux des hymnes composés en leur
honneur; et les lambris du premier temple qu'éleva
l'architecture retentirent des mêmes concerts que la
Divinité agréait depuis longtemps sous la voûte reli-
gieuse des forêts. Il est donc hors de doute que si l'on
peut contester à la musique un rang de prédominance
parmi les beaux-arts, on ne saurait du moins lui refu-
ser celui de l'antériorité. Emané de la reconnaissance
des hommes, ce bel art prit naissance avec le monde :
il fallait une langue universelle pour exprimer un
sentiment universel ; Dieu créa la musique.
S'il est bien reconnu que la musique, par son ma-
gique pouvoir, agit sur nos sens avant de parler à
MUS 77
notre intelligence, l'on doit aisément concevoir qu'il
a été plus difficile de fixer ses règles que celles des
autres arts. Cependant il est des parties qui ont pu
être analysées; la succession des accords ou la science
de l'harmonie, et la puissance du rhythme ont été
soumises à des calculs positifs et à des règles immua-
bles.
Quant à la mélodie, elle ne peut recevoir de règles
que du génie et du goût. Le génie ne peut s'acquérir ;
le goût peut se former par l'expérience et la compa-
raison.
La musique étant considérée comme un langage
particulier, a eu besoin d'un alphabet particulier qui
pût lui servir à transmettre ses pensées, et lui offrir le
moyen de représenter et de peindre à nos yeux la va-
riété des sons dont elle sait faire choix pour charmer
nos oreilles. Dans le langage parlé, plusieurs signes
différents, tels que les lettres, les points, les virgules,
les accents, servent à représenter toutes les variétés
de l'organe de la parole; dans le langage musical,
plusieurs signes différents, tels que les portées, les
notes, les clefs, les dièses, les bémols, les bécarres, les
pauses, les soupirs, servent à représenter toutes les
variétés de l'organe chantant.
Longtemps la voix humaine a sans doute été seule
en possession de faire entendre des sons musicaux ;
mais le génie inventif de l'homme, activé par ce
besoin de tout connaître qui le porte incessamment
à tenter de pénétrer les mystères de la création, lui a
dévoilé les premières. lois de l'acoustique, et d'efforts
en efforts, de siècle en siècle, il est parvenu par imita-
tion à créer des voix factices auxquelles il a donné le
nom d'instruments de musique.
Les différents natures des voix humaines dépendent
surtout de celles des sexes. Chez les hommes particu-
lièrement, ces différences dépendent de celles de l'âge.
78 MUS
L'importance de ce dernier sujet nous forçant à le
traiter d'une manière spéciale et approfondie, nous
renvoyons le lecteur à l'article Voix.
Musique a coups de canon. L'emploi du canon
canonnant en musique, date de 1788. Ce fut un Ita-
lien qui, le premier, tenta cette innovation. C'est le
célèbre Sarti qui réclame l'honneur des concerts py-
rotechniques. Appelé en 1781 à Saint-Pétersbourg,
en qualité de maître de chapelle, il y organisa un or-
chestre formidable pour donner à son bénéfice per-
sonnel, un grand concert spirituel. Mais ce fut surtout
en 1788, à l'occasion de la fête célébrée pour la prise
d'Okrakow, qu'il dépassa tout ce qu'on avait entendu
dans la capitale du Nord. Il composa un grand Te
Deum qui fut exécuté dans le château impérial par
une nombreuse réunion de chanteurs et d'instrumen-
tistes, auxquels se joignit un orchestre de cors russes.
Pour augmenter l'effet de cette musique grandiose,
Sarti fit placer dans la cour du château des canons de
différents calibres, dont les coups tirés en mesure à
des intervalles donnés, formaient la basse de certains
morceaux.
Cette musique étrange, comme on peut se l'ima-
giner, fit du bruit et trouva de l'écho en Allemagne,
où Charles Stamitz, célèbre par son talent sur l'alto
et la viole d'amour, exécuta à Nuremberg une grande
musique vocale et instrumentale de sa composition,
dont la pompe était relevée par l'accompagnement
obligé de coups de canons.
En 1836, au camp de Plaisance de Krasnoje-Selo,
en Russie, il y eut une grande solennité musicale
dont cent vingt coups de canon formèrent l'introduc-
tion. Puis, pendant les morceaux de chants exécutés
par les masses chorales, des coups de canon tirés ré-
gulièrement, battaient la mesure.
Musique avant le déluge. A l'article Oriyine de la
MUS 79
musique, nous dirons que cet art, comme celui de
la parole, ou du langage parlé, venait du créateur de
toutes choses. Si nous ne connaissons point de maî-
tres humains qui enseignassent la musique dans les
premiers siècles du monde, c'est que Dieu lui-même
voulut bien enseigner lui-même ce langage à ses créa-
tures bien aimées. D'après Moïse, il créa l'homme
pour l'aimer et le servir : il lui apprit à célébrer sa
toute puissance et les merveilles de la création par
des chants primitifs, mais pleins de vie, d'expression,
d'enthousiasme. Plus tard, il permit que Jubal in-
ventât des instruments de musique et enseignât cet
art sublime au peuple de son choix. Bientôt Jabel,
Tubalcain, la jeune Noéma firent cercle autour du
fils de Lamech, et l'art musical devint une science,
chez les Hébreux, qui fit probablement des progrès,
considérables pendant les seize cents années et au-
delà qui s'écoulèrent entre la création et la grande
catastrophe du déluge.
Le kinnor, mentionné dans le cinquième chapitre
de la Genèse, est sans doute la lyre ou la harpe ; et le
hagub, l'ancien orgue, n'était pas autre chose que ce
qu'on appelle aujourd'hui flûte de Pan, puisqu'il était
composé de roseaux d'inégales longueurs attachés
ensemble. On sait que cet instrument champêtre a
donné l'idée de l'orgue moderne, dont chaque registre
présente assez bien à l'œil la forme de cette flûte à
tant de tuyaux. Il y avait donc, dans ces temps recu-
lés, des instruments à vent et à cordes, et certaine-
ment ceux à percussion existaient aussi. Quant à la
musique vocale, il est hors de doute qu'elle était en
usage alors, puisqu'il est dit que dans le temps de
Seth, vers l'époque de la naissance d'Énos, les hommes
commencèrent à célébrer le nom du Seigneur. Nous
croyons même, comme nous l'avons dit plus haut,
que cet acte de reconnaissance avait été accompli dès
80 NAS
les premières années de l'ère Judaïque. En offrant ses
sacrifices à l'Éternel, Abel, comme son père et sa
mère, dut chanter les louanges de celui qui bénissait
ses troupeaux. La chronique d'Alexandrie dit que
« les fils de Seth invoquèrent le Seigneur avec l'hymne
des anges. » D'après Calmet, le sens de ces paroles
est qu'ils commencèrent à réciter l'hymne du Sei-
gneur : Saint, saint y saint ; et, comme le dit le P. Mar-
tini, hymne signifiant la réunion de la poésie et de la
musique, il est clairement prouvé qu'il est ici ques-
tion de ce dernier art.
Mutation (Jeux de). On appelle ainsi les registres
de l'orgue dont les tuyaux ne sont point accordés au
diapason des jeux de fonds, et qui sonnent ou la
tierce, ou la quarte, ou la quinte de ceux-ci, et quel-
quefois plusieurs de ces intervalles à la fois. Le cornet,
la cymbale, la fourniture, sont des jeux de mutation.
N
Nabla ou Nebel. Ancien instrument des Hébreux,
que Luther a traduit par psaltérion,. On croit généra-
lement que c'était la lyre des anciens.
Nafiri. Nom d'une trompette indienne.
Nagaret. Espèce de timbales en usage dans l'A-
byssinie. On les frappe avec un bâton courbé , long
de trois pieds, et on les attache sur des mulets de
selle.
Nasard. Jeu d'orgue qui tire son nom de sa qualité
de son nasillard. Il sonne la quinte du prestant ; c'est
NSti 8i
pourquoi on lui donne quelquefois le nom de quinte.
Le nasard est de l'espèce des jeux d'orgue qu'on ap-
pelle jeux de mutation.
Naturel. Voy. les mots accident, chant, intervalle.
Naturel. La beauté de l'art consiste dans l'imita-
tion de la nature. Cependant, comme l'art ne rejette
pas le beau idéal et ne repousse pas les inspirations
de la fantaisie, il arrive que l'artiste, en imitant la na-
ture, l'embellit, et l'élève pour ainsi dire à l'idéal.
Neciiiloth. Nom générique des instruments à vent
en hébreu, comme le mot neginoth est le nom géné-
rique des instruments à cordes.
Nel. Espèce de flûte traversière faite de roseau, en
usage chez les Turcs.
Néronéennes. Fêtes romaines instituées par Néron,
dans lesquelles avaient lieu des luttes musicales.
Neume. C'est un terme employé dans le plain-
chant. Le neume élait une figure mélodique que l'on
plaçait sur une voyelle et le plus souvent sur la der-
nière voyelle du mot Alléluia. C'est un chant sans
paroles, autorisé par le catholicisme d'après un pas-
sage de saint Augustin, qui dit que « ne pouvant
« trouver des paroles dignes de Dieu, l'on fait bien
« de lui adresser des chants confus de jubilation. »
Le neume s'entend aussi d'une pause, d'uncomma,
d'un signe final.
C'est aussi un terme de l'une des six anciennes
écritures musicales qui ont précédé la notation de
Gui d'Arezzo. Les neumes étaient de petits signes
placés au-dessus des paroles, dont chacun exprimait
une formule de chant.
Neuvième. Intervalle dissonant de neuf degrés, ou
l'octave de la seconde; il est de trois espèces : 1° la
neuvième mineure, comme mi, clef de basse, troisième
espace, et fa, clef de violon, premier espace; 2° la
neuvième majeure, comme do, clef de basse, et ré, nu»
3'
82 NOG
dessus de la portée; 3<> la neuvième augmentée, comme
fa, clef de basse,, quatrième ligne, et sol, clef de vio-
lon, seconde ligne.
Nexus. Nom antique de la mélodie, consistant en
une succession alternée de sons qui procédaient ou
par degrés ou par sauts. Lorsqu'ils montaient, ils se
nommaient nexus reetus; lorsqu'ils descendaient, on
les nommait nexus anacamptus, et lorsqu'ils mon-
taient et descendaient nexus circumstans.
Nicolo. Nom que l'on donnait anciennement à
une sorte de hautbois, qui était le contralto de cet
instrument et qui a cessé d'être en usage.
Noble. Le style musical est noble lorsqu'il s'élève
au-dessus de l'expression commune et que les formes
vulgaires et insignifiantes en sont exclues. — Dans
l'exécution, la noblesse consiste à éviter l'emploi
des agréments inutiles, à marquer sans affectation
l'accent oratoire, à exposer avec aisance et dignité
toutes les périodes d'un morceau de musique.
La noblesse doit être exprimée naturellement, sans
vulgarité, mais aussi sans emphase ni affectation,
autrement on tombe dans le style maniéré, qui con-
siste à exécuter un chant simple de sa nature en le
chargeant d'ornements affectés, et par conséquent
de mauvais goût.
Nocturne. Morceau de musique destiné à être
exécuté de nuit en sérénade ou dans les salons. Le
nocturne vocal s'écrit à deux, trois et quatre voix; on
le dispose quelquefois de manière à ce qu'il puisse
être chanté sans accompagnement. — Le nocturne
étant fait pour ajouter aux charmes d'une belle
nuit ou des réunions intimes, son caractère s'éloigne
autant de la gaieté vive et bruyante que de la tris-
tesse et du mouvement impétueux des grandes pas-
sions. Une mélodie gracieuse et suave, tendre e
mystérieuse, des phrases simples, une harmonie peu
non sa
travaillée, mais pleine, onctueuse, telles sont les qua-
lités que l'on doit rencontrer dans le nocturne, et s'il
est exécuté par de bons chanteurs, son effet sera déli-
cieux.
Le nocturne est encore une pièce instrumentale
écrite pour harpe et cor, hautbois et piano, flûte et
piano. Ces nocturnes ne sont, à proprement parler,
que des fantaisies dialoguées.
Nocturne. Partie de l'office des matines qui se di-
vise en trois nocturnes, ainsi appelés parce que les
premiers chrétiens les chantaient pendant la nuit en
trois temps différents.
Noels. Airs destinés à certains cantiques chantés
aux fêtes de Noël. Les airs des noëls doivent avoir un
caractère champêtre et pastoral, en harmonie avec la
simplicité des paroles et avec celle des bergers, qu'on
suppose les avoir chantés en allant rendre hommage
à l'enfant Jésus dans la crèche.
Noeud. On appelle nœuds les points déterminés
par lesquels une corde sonore, mise en vibration, est
divisée en partie aliquotes vibrantes, qui rendent des
sons différents de ceux produits par la corde entière.
Noire. Note de musique qui vaut deux croches ou
la moitié d'une blanche. Dans l'ancienne musique, on
se servait de plusieurs sortes de noires : noire à queue,
noire carrée, noire en losange. Ces deux dernières
espèces sont demeurées dans le plain-chant; mais
dans la musique moderne, on ne se sert plus que de
la noire à queue.
Nome. Espèce d'air des anciens Grecs, dont on ne
pouvait changer en rien la mélodie. Les nomes conte-
naient les principales lois de la vie civile, ou des
louanges en l'honneur de quelque divinité imagi-
naire.
Non troppo, Pas trop. Expression italienne qui
se joint aux indications de mouvement de vitesse ou
84 NOT
de lenteur, ou aux modifications de force et de dou-
ceur. Ainsi non troppo allegro signifie pas trop vite ; non
troppo adagio, pas trop lent, etc.
None. Partie de l'office divin, une des heures ca-
noniales.
Note sensible. Est celle qui est une tierce ma-
jeure au-dessus de la dominante, ou un demi-ton au-
dessous de la tonique. On l'appelle note sensible parce
qu'elle fait sentir le ton et la tonique sur laquelle,
après l'accord dominant, la note sensible, prenant le
chemin le plus court, est obligée de monter.
Notes accidentées. C'est-à-dire accompagnées
d'un des signes que l'on nomme accidents.
Notes a double queue. Ces notes se trouvent habi-
tuellement dans les parties de violons, de violes, de
guitares. On les exécute sur la corde à vide. La double
queue indique qu'à la corde à vide on doit unir son
unisson correspondant, et l'effet désiré s'obtient en
pressant avec le doigt la corcle voisine.
Noter. C'est écrire de la musique avec les carac-
tères destinés à cet usage et appelés notes. Il faut dis-
tinguer noter de copier. Le musicien note ce qu'il
compose ou ce qu'il a retenu de mémoire : celui qui
écrit la musique déjà notée, et d'après un exemplaire
qu'il a sous les yeux, est tout simplement un copiste.
Notes. Signes ou caractères dont on se sert pour
écrire la musique. Les Grecs se servaient des lettres
de leur alphabet pour noter la musique. Les Latins
les imitèrent dans cette pratique. Ce ne fut que dans
le onzième siècle qu'un bénédictin d'Arezzo, nommé
Guido, substitua à ces lettres des points posés sur
différentes lignes parallèles, à chacune desquelles une
lettre servait de clef; dans la suite, on grossit ces
points; on s'avisa d'en poser aussi dans les espaces
compris entre les lignes, et l'on multiplia, selon le
besoin, ces lignes et ces espaces-
-\0T 85
Les notes n'eurent, pendant un certain temps,
d'autre usage que de marquer les degrés et les diffé-
rences de l'intonation; elles étaient toutes, quant à
la durée, d'égale valeur, et ne recevaient à cet égard
d'autres différences que celles des syllabes longues et
brèves sur lesquelles on les chantait.
Cet état de choses dura jusqu'en 1338, époque où
Jean de Murris, docteur et chanoine de Paris, donna
différentes figures aux notes pour marquer les rap-
ports de durée qu'elles devaient avoir entre elles. Il
inventa aussi certains signes de mesure, appelés
modes ou prolations, pour déterminer, dans le cours
d'un chant, si le rapport des longues ou brèves serait
double ou triple. Plusieurs de ces figures ne sub-
sistent plus, on leur en a substitué d'autres en diffé-
rents temps, jusqu'à ce que la division en mesures
de valeur égale soit venue donner une marche fixe et
régulière au chant noté.
On ne donne le nom de notes qu'aux caractères
qui représentent les sept notes do, ré, mi, fa, sol,
la, si.
Notes de passage. Les notes de passage sont ainsi
appelées, parce qu'en remplissant les intervalles qui
se trouvent entre des notes qui procèdent par degrés
disjoints, elles servent de liaison pour passer plus
aisément de l'une à l'autre ; elles donnent les moyens
de varier la mélodie par des suites de notes, de rou-
lades composées alternativement des notes de l'ac-
cord et de celles qui les séparent. De là vient que
cette roulade ou tout autre trait de chant est désigné
par le nom de passage.
Notes surabondantes. Quelques auteurs donnent
ce nom aux triolets et aux sextolets, et dans quel-
ques cas aux notes marquées 5 pour 4, 7 pour 4,
9 pour 8, etc.
Noteurs. Autrefois on appelait ainsi les musiciens
86 OGH
qui étaient employés dans les chapelles à éerire la
musique qu'on distribuait aux exécutants. Ce nom
n'est plus en usage; on Ta remplacé par celui de
copiste.
Numerus sectionalis. Ces mots latins signifient le
nombre des mesures qui appartiennent à chaque
membre parfait du rhythme de la mélodie.
Nunnie. Chez les Grecs on appelait nunnie la
chanson particulière aux nourrices.
o
0. Cette lettre est dans la musique ancienne le
signe de ce qu'on appelait temps parfait (tempus per-
fection), ou du temps composé de trois semi-brèves
(rondes.)
Le signe o désigne la corde à vide sur le violon;
mais, dans ce cas, il est employé comme zéro.
Quelques auteurs, en parlant de la position de la
main, se servent de la lettre o pour indiquer le
pouce.
Dans l'art de lire l'harmonie représentée par des
chiffres, on marque par ce signe o la note qui ne doit
pas être accompagnée; mais, dans ce cas encore, il
est employé comme zéro, pour indiquer néant, c'est-
à-dire pas d'accord.
Obligée. On appelle partie obligée celle qu'on ne
saurait retrancher sans gâter l'harmonie ou le chant;
elle se distingue des parties de remplissage, en ce
que celles-ci ne sont ajoutées que pour donner plus
de perfection à l'harmonie.
Ochetus. C'était autrefois une espèce de chant tron-
qué ou interrompu par des pauses, dont le mot cor-
ODE 87
respondant en français pourrait être hoquet, d'où il
dérive.
Octacorde. Division par octaves réunies, c'est-
à-dire division où le dernier son de la première oc-
tave constitue le premier son de l'octave suivante.
Octave. La première des consonnances dans l'ordre
de leur génération. L'octave est la plus parfaite des
consonnances. Elle est, après l'unisson, celui de tous
les accords dont le rapport est le plus simple. — Il
y a trois espèces d'octaves comme d'unissons : 1° Y oc-
tave juste ; 2° Y octave augmentée ; 3° Y octave diminuée.
(Voyez Quinte.)
Octave est aussi le nom de la petite flûte, attendu
qu'elle sonne l'octave de la flûte ordinaire.
Octave (règle de 1'), c'est le nom que l'on donne à la
règle qui enseigne la manière de chiffrer la gamme, et
qui dicte, par conséquent, les accords que peuvent ou
que doivent recevoir les notes qui la composent.
Octaves (règle des deux). On ne doit pas faire
succéder deux octaves de suite dans l'harmonie, sur-
tout par mouvement direct, quand les parties har-
moniques ne sont point à l'unisson ou à l'octave par
la volonté expresse du compositeur. Ces deux octaves
seraient d'un effet trop nul et trop plat.
Octoecus. Nom d'un livre d'église chez les Grecs,
qui renferme tout ce que l'on chante pendant les of-
fices, selon les huit tons du chant.
OCTOCORDUMPYTHAGORALE, OuLYRE PYTIIAGORIQUE.
Les anciens Grecs comprenaient sous ce nom un sys-
tème d'instrument très-ancien et très-borné, inventé
par Pythagore.
Ode. Mot grec qui signifie chant ou chanson. Il y
a l'ode-symphonie, qui est un poème musical mêlé
de chant, de récitatif noté et parlé, et dans lequel
l'orchestre joue un rôle très-important. Le Désert, de
88 OMN
Félicien David, est un modèle d'ode-symphonie.
(Voyez Chanson.)
Odéon. Édifice public à Athènes et dans d'autres
villes de la Grèce, où les musiciens essayaient leurs
morceaux avant de les exécuter en public.
Odéofone. Instrument inventé à Londres par un
Viennois nommé Vanderburg. C'était une modifica-
tion assez bien imaginée du clavi-cylindre de Gladni.
Le son se tirait de petits morceaux de métal, au
moyen d'un clavier ou d'un cylindre.
Offertoire. C'est cette partie de la messe qui se
trouve entre le Credo et le Sanctns, pendant laquelle
le chœur garde le silence. L'orgue remplit cet inter-
valle ; ou bien on exécute une pièce composée exprès
pour y être placée, et cette pièce, pour ce motif,
prend le nom d'offertoire.
Office divin. On désigne par ce mot tout ce qui
a rapport aux rites religieux, au chant, etc. Il y a
l'office ambrosien, grégorien, mosarabique. Ce der-
nier a été introduit au commencement du seizième
siècle par François Ximenès, archevêque de Tolède-
Olophyrmos. Chanson funèbre des anciens Grecs.
Œuvre. Par ce mot on désigne les compositions
musicales d'un auteur.
Œuvre est du genre féminin, quand il s'agit d'une
seule composition d'un auteur. Il est du genre mas-
culin, quand il s'applique à tous les ouvrages pro-
duits par un artiste. Ainsi l'on dit l'œuvre entier de
Beethoven, de Mozart, de Rossini, etc., etci,
Ombre, nuance de là voix. C'est ainsi qu'on ap-
pelle en italien les différentes gradations des fortes et
des pianos, dont on doit alternativement faire usage
dans les cantilônes pour leur donner un peu de re-
lief, comme les ombres et les demi-teintes servent en
peinture à faire ressortir les couleurs.
Omises. Mot latin qui signifie tutti, et que l'on
OPE 89
trouve quelquefois au lieu de celui-ci dans l'ancienne
musique sacrée.
Ondulation. Ce mot signifie à peu près la même
chose que trémolo, avec cette différence que le mou-
vement en est plus grave, et que Ton émet les sons et
la voix avec plus de latitude. -
Onzième. Réplique ou octave de la quarte. Cette
intervalle s'appelle onzième, parce qu'il faut passer
onze sons diatoniques pour aller de l'un de ces termes
à l'autre.
Opéra. C'est, dans le sens le plus étendu, un drame
musical. Il se distingue de la comédie et des autres
ouvrages dramatiques , en ce qu'il ne peut se passer
du concours de la musique, qui, dans la comédie
et le drame, n'est qu'accidentelle et soumise aux exi-
gences passagères du sujet. Dans l'opéra, au contraire,
la musique est la partie essentielle, non toutefois de
manière à dominer la poésie, mais seulement pour
les mettre toutes deux en relation intime et les faire
marcher d'accord.
Les principales qualités d'un poëme d'opéra sont :
une esquisse exacte et facile des caractères, un grand
fonds de situations lyriques habilement variées, et
surtout un choix d'expressions musicales appropriées
au caractère des différents personnages. Nous ne par-
lons pas du laisser-aller de la pensée, de l'élégance du
rhythme : ce sont là des qualités que doit posséder
toute poésie lyrique.
La musique de l'opéra doit s'élever à la hauteur
de la poésie, et même à celle du drame ; c'est ce qui
lui impose la nécessité d'être plus caractéristique et
plus sévère que toute autre espèce de musique. Sou-
mise à la nature du poème, la musique doit revêtir
son caractère dominant. Par exemple, la Flûte en-
chantée, de Mozart, se distingue par un style solennel
90 OPE
et sévère, auquel ne portent pas atteinte quelques
airs simples et naïfs.
Outre les qualités générales que tout poëme dra-
matique doit posséder, l'opéra en exige quelques au-
tres qui lui sont spéciales : les plus importantes sont
une action et une division favorables aux dévelop-
pements de la partie musicale. Nous empruntons à
un travail de M. Halévy, destiné à l'Académie des
beaux-arts, quelques réflexions excellentes sur ce
double sujet.
« Il ne faut pas que, dans un drame destiné à la mu-
sique, Y action soit trop compliquée. 11 faut que le
sujet soit simple, et plus passionné qu'accidenté. S'il
y a beaucoup d'action dans un opéra ; s'il est chargé
d'événements; si les situations se succèdent rapide-
ment et sans laisser, pour ainsi dire, respirer le spec-
tateur, la musique ne trouve plus sa place; elle est
étouffée entre les incidents ; et quelque vifs et concis
que puissent être les morceaux de musique, ils ralen-
tissent ou du moins semblent ralentir l'action. La
musique est le développement d'une situation don-
née et un repos dans Y action. Il faut donc que l'audi-
teur ne soit pas trop pressé, par Y action elle-même,
d'arriver aux scènes suivantes; il faut donc que l'in-
térêt de la situation elle-même lui permette d'écou-
ter sans impatience ce développement musical. C'est
au compositeur, de son côté, à apprécier la situation,
et à ne pas lui donner plus de musique qu'elle n'en
comporte.
« Le public français est sévère à cet égard; un pu-
blic italien donne plus de place à la musique et plus
de latitude au compositeur.
« Il y a dans un drame de quelque importance des
situations capitales après lequelles l'action doit s'ar-
srèter, se reposer, pour ainsi dire, pour continuer en-
uitc avec dlus de force et avec le surcroît d'intérêt
OPÉ 91
que la situation nouvelle a dû apporter au drame.
Ces points de suspension qui ménagent l'attention de
l'auditoire et excitent sa curiosité, introduisent dans
l'action dramatique des divisions naturelles.
« Chacune de ces divisions a reçu le nom d'acte.
C'est au point de vue du drame lyrique seulement
que nous envisageons Y acte.
« Après les conditions essentielles du drame lui-
même, c'est-à-dire l'intérêt des situations et leur
aptitude à inspirer le musicien, la condition la plus
désirable pour le compositeur, c'est la variété. Non
seulement chaque acte devra lui fournir une couleur
bien tranchée, et tout à fait différente de celle de
Y acte qui a précédé ou de celui qui doit suivre, mais
il faut encore que dans Y acte considéré isolément,
l'auteur sauve au musicien le danger de l'uniformité.
Ainsi donc, dans un opéra, chaque acte, quoique ne
formant qu'une partie d'un tout, doit offrir un en-
semble satisfaisant, aussi complet que possible, et
une distribution intelligente et bien entendue des ef-
fets dont peuvent disposer et le musicien et le théâtre
sur lequel son œuvre devra se produire.
« Un bon acte d'opéra renfermera donc au moins
une situation importante, qui sera comme le pivot de
Y acte, et sur laquelle le musicien devra concentrer
tous ses efforts et toute la puissance de son art. Les
autres scènes devront, sans être sacrifiées, concourir
à faire ressortir 1 éclat de ce point lumineux ; ainsi,
le beau trio de Guillaume Tell est habilement amené
et ménagé. Il est inutile d'ajouter que la scène capi-
tale dont nous parlons devra arriver à la fin ou vers
la fin de Y acte. L'auditoire, encore sous le coup de
Fimpression qu'il aura éprouvée, sera, dès le début
de Y acte suivant, plus accessible aux émotions nou-
velles, et s'associera avec plus de chaleur et de sym-
92 OPÉ
pathie au développement du drame et aux inspira-
lions du musicien.
« Après ces considérations générales, nous entre-
rons dans quelques détails sur la contexture pure-
ment musicale d'un acte d'opéra.
« L'auteur et le compositeur doivent s'y étudier à
varier les combinaisons offertes par les voix diffé-
rentes des personnages qui prennent part à l'action.
Il faut éviter, autant que possible, qu'un air succède
à un air, un duo à un duo ; il faut donc faire enten-
dre alternativement les voix isolées, combinées, et
les masses chorales.
« Le morceau de musique qui commence un acte
reçoit le nom à' introduction ; il doit avoir un certain
développement, une certaine importance musicale.
Ceci s'applique surtout au morceau qui commence
le premier acte et succède à l'ouverture. 11 doit être
traité avec soin. Ordinairement, une introduction se
compose de plusieurs scènes variées et se termine
par un ensemble vocal.
« Comme nous l'avons dit plus haut, l'auteur aussi
bien que le compositeur, doivent, en établissant le
plan général de l'ouvrage, se préoccuper beaucoup
de la fin de chaque acte. Il faut, autant que possible,
laisser l'auditoire sous l'impression d'une vive émo-
tion. Chaque fois que le rideau se baisse, il importe
qu'aucun des actes ne se termine froidement. Dans
un opéra en cinq actes, il faudra donc cinq fois
agir puissamment sur le public et par des moyens
variés : c'est une tâche difficile.
« Quand un acte se termine par un morceau de
musique développé, composé de plusieurs scènes et
auquel prennent part les personnages et le chœur,
ce morceau reçoit le nom de final,
« Les opéras de Quinault, créateur du drame lyrique
en France, étaient divisés en cinq actes. Ils sont ha-
OPK 93
bilement coupés. Secondé par l'instinct de Lulli,
Quinault avait deviné que dans un ouvrage de lon-
gue haleine, le compositeur, comme nous l'avons
dit, a surtout besoin de variété. En effet, la diversité
du spectacle, le changement fréquent du lieti où la
scène se passe , les caractères différents des person-
nages introduits dans le drame, tout cela est néces-
saire au musicien ; ce sont des éléments dont il pro-
fite aussi bien que le spectateur lui-même, et l'oppo-
sition qui en résulte, en même temps qu'elle plaît à
l'auditeur, vient en aide au compositeur et fertilise
son imagination, en lui fournissant des inspirations
nouvelles.
« On se tromperait beaucoup , cependant, si l'on
croyait qu'alors la tâche du compositeur fut ce qu'elle
est aujourd'hui, dans la production d'un opéra en
cinq actes. Outre que l'action était plus simple, et,
par conséquent, comptait moins de situations musi-
cales, les situations elles-mêmes étaient moins déve-
loppées par le poëte; puis la musique ne nécessitait
pas le développement que l'art moderne exige. Si
l'on abuse quelquefois aujourd'hui de ce développe-
ment, que les progrès de la science, l'art du chant, la
déclamation lyrique ont rendu en quelque sorte né-
cessaire, il est juste de dire qu'alors les situations,
aussi bien que les mélodies, n'étaient, pour ainsi dire,
qu'indiquées ; les compositeurs n'avaient pas encore
trouvé ces belles phrases musicales, complètes pour
l'oreille comme pour l'esprit et l'intelligence, qu'on
admire dans Mozart, dans Cimarosa, dans Rossini. Il
en résulte qu'un seul acte d'un opéra moderne ren-
ferme beaucoup plus de musique que les cinq actes
d'un opéra tout entier de Lulli.
« Rameau, et après lui, Gluck, donnèrent une plus
haute importance à la phrase musicale. Les actes,
9* 01»K
par conséquent, prirent plus d'importance, et les
opéras eurent plus de durée.
« Depuis Gluck jusqu'à nos jours, on a joue à l'O-
péra des tragédies lyriques en trois , en quatre et en
cinq actes. On y représente aussi de petits ouvrages
en un ou deux actes, que l'on désigne quelquefois
sous le nom d'opéra de genre, et que l'on représente
avant les ballets.
« On joue sur le théâtre de l'Opéra-Comique des
opéras en un, deux ou trois actes, et quelquefois, ex-
ceptionnellement, en quatre et même en cinq actes.
Les Italiens écrivent généralement leurs opéras, aussi
bien sérieux que bouffes, en deux actes, assez déve-
loppés pour contenir un grand nombre de morceaux ;
il y a cependant des exceptions, et l'on compte aussi
parmi les beaux ouvrages dont nous a dotés l'Italie,
des opéras en trois et quatre actes.
« On représente ordinairement en Italie, entre les
deux actes d'un opéra, un ballet tout à fait étranger
à l'action de ces opéras. En France, le ballet fait par-
tie de l'opéra et de l'action. C'est au poëte et au
compositeur à s'entendre pour que chaque acte ait
des éléments suffisants de curiosité, en donnant une
place importante à la danse dans un acte, quelque-
fois dans deux, et en réservant pour les autres parties
de l'ouvrage tout l'intérêt des situations, toute la
puissance de la musique. »
On distingue le grand opéra de l'opéra comique
par la nature du sujet. Quoiqu'on général le premier
se rapproche de la tragédie, et le second de la comé-
die, cependant jamais un grand opéra ne sera aussi
grave, aussi simple qu'une tragédie ; et jamais un
opéra comique ne comportera une action aussi com-
pliquée que celle d'une comédie. La musique parle
plus au sentiment qu'à la raison. Le comique pur qui
a son origine dans la réflexion, ne peut, sans un mé-
OPE 95
lange lyrique, remplir un opéra. Mais le burlesque, le
grotesque même, lui conviennent parfaitement. II y
a en outre un style intermédiaire qu'il n'est pas facile
de limiter. La Vestale, de Spontini, doit être classée
parmi les grands opéras; il Matrimonio segretto, parmi
les opéras comiques ou bouffes, et Y Enlèvement du
sérail, de Mozart, parmi les opéras du genre inter-
médiaire, ou semi-seria.
Les arts, comme les institutions sociales, sont assu-
jettis à des transformations périodiques. Tout ce qui
est de ce monde naît, s'accroît, arrive, point brillant,
à son zénith, puis pâlit et décroît sur une pente ra-
pide. La musique est, de tous les arts, celui qui pa-
rait affecté des mutations les plus fréquentes. Comme-
le Protée de la Fable, elle marche de métamorphoses
en métamorphoses. Tous les vingt-cinq ou trente ans,
des révolutions, sinon radicales, du moins très-pro-
noncées, s'introduisent dans cette merveilleuse ex-
pression de ce que l'âme humaine renferme en ses
profondeurs de sentiments les plus intimes. Presque
aussitôt usées qu'adoptées, les formes mélodiques,
comme la fleur qui se fane dès qu'elle est épanouie,
vieillissent et veulent être remplacées. Et qu'on ne
croie pas que nous venions faire ici une satire du plus
fugitif et cependant du plus pénétrant de tous les arts.
C'est justement parce que ses formes sont inépuisa-
bles, qu'elles apparaissent et passent comme des
fantaisies ailées. De même que la vie radicale, tou-
jours une, toujours absolue, rayonne dans le multi-
ple infini des êtres qui naissent en son sein créateur,
la musique toujours immuable dans ses lois, la mu-
sique, véritable géométrie phonétique, si on la consi-
dère dans ses règles, livre incessamment aux caprices
du changeant et du variable ses combinaisons har-
moniques et les tournures inépuisables de ses mélo-
dies passagères. Rameau succède à Lulli ; Gluck,
96 OPE
Sacchini, Piccinni s'assoient bientôt à sa place; puis
voici venir Rossini qui les détrône et égale Mozart
même.
Touchons-nous là le terme de toutes ces péripéties?
Gardons-nous de le croire. Une révolution nouvelle,
une révolution qui n'a pas encore, il est vrai, gagné
la France, promène depuis quelque temps son dra-
peau novateur sur toute l'Italie. Prenant Verdi pour
solennel et vigoureux interprète, la musique drama-
tique, la musique précisée par la scène, motivée par
la situation, a chassé complètement la mélodie in-
déterminée, les chants vagues, et qui ne tirent leur
effet que de leur valeur abstraite et intrinsèque.
La marche que, dans cette rénovation, la musique
a suivie en France, nous semble bizarre. Partisans
arriérés d'un vain luxe musical, nous voulons main-
tenir aujourd'hui la culture de la plante exotique que
nous avons longtemps repoussée ; nous prétendons,
du moins quant à l'opéra italien, renvoyer en terre
étrangère celle que nous devons presque regarder
comme indigène; nous disons presque, car avant que
Gluck, dans la tragédie lyrique, et Grétry, dans
l'opéra comique, eussent popularisé la musique dra-
matique en France, Pergolèse en avait donné le mo-
dèle dans la Serva Padrona.
Mais l'Italie, cette terre où tout chante, où des voix
passionnées sortent de tous les points de l'espace et
vibrent dans tous les échos, l'Italie ne put rester long-
temps emprisonnée dans les liens précis et tradition-
nels d'un système musical immuable. Semblable à
son napolitain Vésuve, à son gigantesque volcan de
Sicile, la spontanéité mélodique y lit éruption, étoile
put s'écrier, comme notre poète :
Et la lave de mon génie
Déborde en torrents d'harmonie
Et me consume en s'échappant.
OPE 97
De là ce luxe immodéré de fioritures dictées par la
fantaisie du chanteur, accueillies par l'enthousiasme
du public, entretenues par quelques talents hors
ligne, cet amas de traits, de roulades, de points d'or-
gue, abus de richesse sous lequel le dessin mélodique
disparaît, semblable à ces monuments dont les li-
gnes brisées par une ornementation sans goût et sans
retenue, ne laissent plus apercevoir que formes in-
saisissables et confuses. Cette espèce d'enivrement
de la musique, de la musique sans rapport avec la
parole qu'elle devait exprimer, prise à part, pour
elle-même, et séparée de la situation qu'elle avait à
rendre, quelquefois même en contradiction avec la
scène à laquelle elle devait s'adapter, excepté dans
les chefs-d'œuvre devenus classiques des Paisillo,
des Cimarosa, des Mozart, etc.; cet enivrement,
disons-nous, ne pouvait manquer d'amener une
réaction salutaire. Le grand maître Rossini parut;
mais, avec la finesse de tact qui le distingue, il com-
prit que les réactions ne se font pas tout à coup et
sans transitions préalables. Ménageant donc le goût
du public, et voulant garantir ses œuvres des écarts
de quelques interprètes parfois ignorants et malhabi-
les, lui-même se mit à jeter à pleine main les fleurs,
les perles, les diamans sur le canevas si ingénieuse-
ment tissu de sa brillante musique, et, tout en le ra-
menant par moments à la vérité de la scène, trouva
le secret de changer en moyen d'expression ce qui
jusque-là l'avait presque étouffée; je veux parler de
ces vocalises sans fin, de ces fioritures entassées, de
ces agilités vocales, avant lui prodiguées au hasard.
C'est ainsi qu'après avoir préparé sa révolution, au-
jourd'hui accomplie par delà les monts et que la
routine repousse en France, lui-même en donna le
signal dans l'immortel chef-d'œuvre de Guillaume
Tell. De là à Norma il n'y avait plus qu'un pas ; et
98 OPE
une fois l'art rentre dans la voie de la vérité dra-
matique, devait nécessairement arriver le maître
ayant mission de l'y maintenir, sans s'accorder la
moindre excursion au dehors, même peu lointaine,
sans se permettre une note dont la valeur ne soit en
rapport avec le mot qui la soutient.
Opéra comique. C'est un drame d'un genre mixte,
qui tient à la comédie par l'intrigue et les personna-
ges, et à l'opéra par le chant dont il est mêlé. — L'o-
rigine de ce spectacle remonte aux premiers théâtres de
la foire, dont l'apparition date de 1617. Honoré,
maître chandelier de Paris, après avoir fourni pen-
dant plusieurs années des lumières de sa fabrique au
théâtre, voulut en entreprendre un à son tour ; et, en
1624, il obtint le privilège d'un nouvel Opéra-Comi-
que. Il ne joua jamais lui-même, mais il eut dans sa
troupe des acteurs remarquables. En 1627, il céda
son privilège à Ponton, qui porta l'Opéra-Comique à
sa perfection, grâce au bonheur qu'il eut de trouver
de bons auteurs, des acteurs excellents et des musi-
ciens d'une rare habileté.
L'Opéra-Comique fut supprimé en 1745 ; mais en
1752, le privilège en fut rendu à Jean Monnet. Le
plan qu'il avait formé a été fidèlement suivi par les
directeurs qui lui ont succédé. Ils ont fait subir des
améliorations considérables à certaines parties de dé-
tails que Monnet ne pouvait pas voir seul, et ont ra-
mené à ce genre de spectacle les femmes, effarouchées
par le style quelquefois graveleux des anciens opéras
comiques. C'est sur ces objets principalement que
s'est portée la sollicitude des directeurs.
Leur ardeur à prévenir les désirs du public leur a
attiré pendant plusieurs années un si grand concours
de monde, que les autres spectacles de Paris se trou-
vaient à peu près déserts. La Comédie-Italienne sur-
tout, qui se voyait sans spectateurs, obtint enfin, en
ORA 99
176*2, que l'Opéra-Comique fût réuni à son théâtre.
— Depuis cette époque, l'Opéra-Comique n'a cessé de
marcher dans une voie de prospérité. Il s'est enrichi
tour à tour d'une foule de chanteurs éminents, tels
que Martin, Elleviou, Ponchard, Chollet, Roger, Cou-
derc , Mocker, Bussine, Masset, Puget, Bataille,
Mmes Dugazon , Cinti-Damoreau , Rossi, Ugalde ,
Miollan, Lefèvre, Mlles Lavoye, Darcier, et a vu éclore
quelques compositeurs d'un grand talent et dont
plusieurs sont la gloire de l'école française. Il suffit
de citer Monsigny, Daîayrac, Grétry, Cherubini,
Méhul, Berton,Boieldieu, Hérold, Auber, Halévy,Ad.
Adam, A. Thomas, L. Clapisson, Grisard, F. Bazin,
Y. Massé, Reber, etc.
Opérette. Mot qui, dit-on, a été forgé par Mozart,
pour désigner les compositions en miniature, dans
lesquelles on ne trouve que des chansons ou des cou-
plets de vaudeville. Mozart disait qu'un musicien bien
constitué pouvait composer deux ou trois ouvrages de
cette force entre son déjeuner et son dîner.
Ophicléide. Instrument en cuivre qui, depuis 1820,
fait partie des musiques de l'armée française. Adopté
d'abord dans les régiments de la garde royale, il fut
admis ensuite dans ceux de l'infanterie de ligne et de
cavalerie. Il en devint la contre-basse et remplaça
les anciens serpents d'église. C'est, à proprement par-
ler, un serpent à clefs, comme l'indique la racine
grecque de son nom. Les clefs sont au nombre de neuf.
— L'ophicléide est d'origine hanovrienne, comme les
autres instruments à vent et en cuivre, auxquels l'in-
dustrie des fabricants allemands est parvenue, depuis
le milieu du siècle dernier, à ajouter des clefs.
Oratorio. C'est une espèce de drame dont le
sujet est religieux et qui est destiné à être exécuté par
des chanteurs, avec accompagnement d'orchestre.
Les anciens compositeurs n'avaient qu'un seul ob-
100 ORA
jet auquel ils pussent consacrer les inspirations de
leur génie : la religion. Aussi cette époque est-elle
féconde en productions de musique sacrée de tout
genre; et, depuis Palestrina jusqu'à Haendel, Haydn
et Mozart, on trouve tout ce qui a été composé de
plus beau et de plus parfait. On ne se bornait pas
alors à mettre en musique les paroles de la messe :
outre les cantiques, les hymnes, les psaumes, on avait
imaginé ces espèces de drames religieux appelés ora-
torios, dont le sujet était tiré de l'Histoire Sainte, et
qu'on exécutait dans les églises. Voici ce qui donna
lieu à l'invention de ces sortes de pièces : saint Phi-
lippe de Néri, qui fonda, en 1510, la congrégation de
l'Oratoire à Rome, voyait avec douleur les fidèles dé-
serter l'église pour courir aux spectacles. Connaissant
le goût des Romains pour la musique, il eut l'idée
de faire composer par un bon poëte des intermèdes,
dont le sujet était puisé dans l'Écriture sainte, et les
ayant fait mettre en musique, il les fit exécuter dans
l'église. La foule y courut; le succès fut prodigieux ;
et ce genre de drame s'appela oratorio, du nom de
l'église de l'Oratoire, où il fut joué pour la première
fois.
Les oratorios n'étaient d'abord qu'une simple allé-
gorie, une cantate à plusieurs personnages, qu'on
n'exécutait, soit à l'église, soit au théâtre, que comme
une pièce de concert. Dans la suite ils prirent plus de
développement et acquirent toutes les proportions
d'un vrai drame, sauf le clinquant des costumes et la
pompe théâtrale. — Quant à la musique, qui parti-
cipe à la fois du genre libre et du genre sévère, elle
se compose de récitatifs simples et obligés, de solos,
duos, trios, morceaux d'ensemble et chœurs.
Les plus célèbres compositeurs qui ont illustré le
genre de l'oratorio, sont Emilio del Cavalière, Alexan-
dre Scaiiatti, Léo, Iomelli, Cimarosa, Haendel, Bach,
ORG 101
Haydn, Beethoven et Mendelsohn. On cite, parmi
les oratorios les plus remarquables, le sacrifice d'Abra-
ham, de Scarlatti, celui de Cimarosa, sainte Hélène au
calvaire, de Léo, le Messie, de Haendel, la Passion selon
saint Mathieu, de Bach, conception musicale de la
plus haute portée, la Création, de Haydn, le Christ
au jardin des Olives, de Beethoven, lePaulus et l' Elias,
de Mendelssohn.
Orchestre. L'orchestre dans les théâtre modernes
est un retranchement plus ou moins grand qui règne
autour de qu'on appelle la rampe de la scène ; c'est
la place des symphonistes. Cette enceinte est cons-
truite d'un bois sonore, de sapin ordinairement,
afin de faire vibrer le son des instruments. C'est
absolument la table d'harmonie d'un clavecin, car
cette espèce de grand coffre sans couvercle est éta-
bli sur un vide avec des arcs-boutants.
L'orchestre français ne date véritablement que du
siècle de Louis XIV; ce fut Lulli qui l'organisa. On
doit à Lulli l'introduction des timbales et des trom-
pettes dans l'orchestre, et plus tard à Gluck celle de
la clarinette, dont on usait si sobrement qu'elle ne se
faisait guère entendre que dans les ballets. — Que les
temps sont changés ! quelle admirable instrumenta-
tion nous avons de nos jours ! elle compte au moins
80 instruments; elle a réuni dans nos orchestres,
comme par enchantement, tous les bruits, tous les
sons, toutes les voix de la nature, dont la musique
n'est qu'une imitation. — Le violon possède d'im-
menses ressources : il simule la voix humaine ; c'est
lui qui, avec la viole, le violoncelle et la contre-basse,
règne exclusivement dans un orchestre. La viole re-
pose, par la gravité de ses sons, des brillants éclats
du violon ; le violoncelle, quand il chante, exprime
la prière et le recueillement des marches religieuses;
la flûte, pleine de tendresse, rend les amoureux dé-
102 ORG
sirs; le hautbois est pastoral, propre à la danse des
villageois et des nymphes; la clarinette accompagne
ordinairement les danses gracieuses et les ballets
enjoués, le cor chevaleresque et romantique, appelle
à la chasse Henri IV ou Robin des Bois ; l'ophicléide
gémit; le trombone, aux poumons de cuivre, an-
nonce de grandes catastrophes.
Parce nombre d'instruments si variés, nos orches-
tres aujourd'hui sont un monde, où les passions, les
sentiments déploient toutes leurs expressions, et où
la nature fait ouïr toutes les voix.
Orchestrino. Nom donné par M. Poulleau, en
1808, à un piano à archet de son invention, lequel
.imitait le violon, la viole d'amour et le violoncelle.
Orchestrion. Nom de deux instruments à claviers
qui ont été inventés vers la fin du dix-huitième siècle.
Le premier est un orgue portatif composé de quatre
claviers, chacun de soixante-trois touches, et d'un
clavier de pédales de trente-neuf touches. Le second
est un piano uni à quelques registres d'orgue.
Oreille. Cemot s'emploie figurémenten musique.
Avoir de l'oreille c'est avoir l'ouïe sensible, fine et
juste, en sorte que tant pour l'intonation que pour la
mesure, on soit choqué du moindre défaut, et qu'aus-
si l'on soit frappé des beautés de l'art quand on les
entend. On a l'oreille fausse, lorsqu'on chanie cons-
tamment faux, lorsqu'on ne distingue pas les intona-
tions fausses des intonations justes, ou lorsqu'on n'est
point sensible à la précision de la mesure, qu'on la
bat inégale ou à contre -temps.
Organino. Petit orgue que l'on peut transporter
d'un lieu dans un autre, et dont les plus grands ont
deux pieds de haut et un seul souflet. On appelle
encore de ce nom un petit orgue à cylindre avec une
manivelle, qui, armé de dents, remplace le mouve-
ment des doigts.
OHG 108
Organistjë. Celui ou celle qui joue de l'orgue. Un
grand organiste n'a pas seulement le talent d'exécu-
ter avec perfection toute la musique qui est propre à
cet instrument, mais celui bien plus rare d'improvi-
ser tout ce qu'il joue.
Rameau, D'Aquin, Couperin, Balbatre, Séjean,
Mozart, Keller, Bach, Haendel, sont des noms fameux
dans les fastes de l'orgue.
Autrefois on comptait en France un assez grand
nombre de bons organistes; ils deviennent de jour en
jour plus rares, parce qu'on néglige de faire des étu-
des que demande ce grand art.
Organo lyricon. Instrument inventé à Paris en
1810. Sa forme était celle d'un secrétaire à cylindre;
il contenait un piano ordinaire, autour duquel se
groupaient quelques instruments à vent.
Orgue. Instrument à vent, le plus parfait de tous
pour diriger et soutenir le chant religieux, et celui dont
les sons se marient le mieux avec les voix. Dans un
espace restreint, sous les doigts d'un seul homme, on
peut avec l'orgue obtenir la puissance, la diversité,
la justesse, que ne pourraient produire trente ou qua-
rante instruments réunis. Ses accents sont graves et
dévotieux, comme dit Montaigne. Il embrasse toute
l'échelle des sons, et peut s'unir à tous les genres de
voix ; il a des jeux variés, tour à tour doux ou écla-
tants, suaves ou terribles. Ses trompettes sonores sem-
blent annoncer le jugement de Dieu; ses flûtes loin-
taines paraissent l'écho des concerts des anges. L'or-
gue est l'orchestre que demande le plain-chant.
La musique instrumentale fut peu goûtée dans les
premiers siècles du christianisme ; les fidèles se bor-
naient alors à former des chœurs de voix. C'est seu-
lement sous le pape Yitalien l6? que l'orgue fut connu
en Italie : il fut introduit en France sous le règne de
Pépin, père de Charlemagne; mais cet instrument
104 OHG
resta longtemps imparfait. Bédos de Celles, dans le
siècle dernier, et, de nos jours, MM. Cavaillé-Coll, l'ont
enrichi d'améliorations importantes.
L'orgue est un instrument à vent et à clavier ; il a
plusieurs jeux ou registres, et un très-grand nombre
de tuyaux : il a un, deux, trois, et même quatre cla-
viers composés de quatre octaves et demie; il y a, de
plus, un clavier de pédales qui contient une ou deux
octaves. Le jeu principal, que nous nommons vulgai-
rement bourdon, est en huit pieds, en seize pieds, et
même en trente-deux pieds. L'orgue a encore des
soufflets, des ventilles.
Pendant le moyen-age on soutenait le chant reli-
gieux avec l'orgue seul ; plus tard on y ajouta d'autres
instruments. Sous Louis XIV, un chanoine de Sens
ou d'Auxerre inventa le serpent, et cet instiument
rauque, âpre, inégal, variable dans ses intonations,
vint s'établir dans nos chœurs, y rendre le chant lourd
et traînant, et y faire régner la plus fatigante monoto-
nie. Quel spectacle, en effet, que celui d'un homme
qui, les joues gonflées, le visage déformé, roulant ses
yeux dans leur orbite, étouffe entre ses bras la figure
d'un animal immonde, et semble lui arracher de lu-
gubres hurlements! L'ophicléide a, dans beaucoup
d'endroits, détrôné le serpent. Cet instrument n'est
pas plus agréable à entendre; enfin, plusieurs parois-
ses adoptent maintenant la contre-basse. Tous ces
instruments présentent le même inconvénient qui
doit en faire abandonner l'emploi, c'est de résonner
à l'unisson des voix graves, par conséquent de ne pas
convenir à la voix du peuple. L'orgue est resté seul en
possession de la faveur des masses dans nos temples
catholiques, seul il a le privilège d'exciter la ferveur,
le recueillement, l'enthousiasme religieux.
L'emploi naturel de l'orgue, c'est l'accompagne-
ment des voix; en Allemagne, en Italie, en Belgique,
ORG 105
il remplit toujours cette fonction, et le choeur y est
partout inséparable de l'instrument. Dans les vastes
basiliques de l'Italie, on a des orgues que l'on roule,
et qui suivent le chœur dans les diverses chapelles où
il se transporte pour chanter l'office. Dans ces églises
tout s'exécute avec accompagnement : non-seulement
les hymnes sacrées, mais encore le chant de l'offi-
ciant, les réponses du peuple, la préface, etc.
Il faut le dire, les pays dont nous parlons sont
bien supérieurs à la France sous le rapport de l'exé-
cution de la musique sacrée. Chez nous, à part quel-
ques grandes villes qui font une honorable exception,
quelques voix isolées chantent le kyrie, l'orgue répond
par une fantaisie de la façon de l'artiste, Dieu sait
quelle fantaisie ! .... Le prêtre entonne l'hymne de saint
Ambroise, Te Deum, laudamus ; l'organiste continue
par une réminiscence de quelque air à la mode. Voilà
le rôle que joue souvent l'orgue en France. Cependant
le tableau n'est pas partout le même, nous l'avons
dit, il y a des exceptions; des organistes au style grave,
austère, ont conservé les belles traditions de l'art reli-
gieux.
Les orgues sont extrêmement multipliées en France
depuis quelques années. On en a construit ou réparé
plus de quatre cents, de 1834 à 1844, tandis que
dans les dix années précédentes il ne s'en était pas
établi cinquante. De simples bourgades, des villages
même en ont enrichi leur église, et le nombre s'en
accroîtrait bien plus encore, si l'on n'était arrêté par
une difficulté qui parait insoluble, celle de se procurer
un artiste pour toucher l'instrument. La charité des
fidèles peut, par un effort une fois fait, réunir la
somme nécessaire pour l'acquisition de l'orgue; mais
on ne peut chaque année s'imposer les sacrifices in-
dispensables pour entretenir un organiste. C'est là
une difficulté sérieuse, et dont la solution devrait être
106 ORG
cherchée avec ardeur par les évoques, les membres
du clergé, et tous les hommes qui s'intéressent à l'a-
venir de la musique religieuse. — On trouve à Paris
beaucoup d'organistes habiles et instruits, qui ont
fait de bonnes et sérieuses études au Conservatoire,
sous la direction de M. Benoist ; on devrait tâcher de
les attirer dans les provinces, où ils pourraient à leur
tour fonder un enseignement utile.
Orgue a cylindre. C'est celui qui va par le moyen
d'un cylindre, sur lequel on a noté un certain nom-
bre de morceaux de musique avec des pointes. Ces
pointes font mouvoir les touches d'un clavier qui
leur est approprié. C'est au moyen d'une manivelle
tournante que le cylindre se meut et présente suc-
cessivement, ou simultanément , ses pointes aux
touches qui répondent aux tuyaux. Les orgues d'Al-
lemagne, les orgues de Barbarie , dont les chanteurs
des rues s'accompagnent, les serinettes, les merlines,
sont des orgues à cylindre.
Orgue jexpressif. L'effet de ces orgues est de la
plus grande beauté. M. Erard a mis le comble à la
perfection de l'orgue, en réunissant, dans un instru-
ment qu'il avait construit sous la Restauration, pour
la chapelle du roi, le genre de l'expression de la pé-
dale sur les deux claviers du grand orgue à l'expres-
sion par la pression des doigts sur un troisième cla-
vier. Dans cet état, l'orgue est vraiment l'instrument
le plus beau, le plus majestueux, le plus puissant qui
existe.
Orgue hydraulique. Celui dont les soufflets ou les
cylindres sont mis enjeu par le moyen de l'eau. Comme
l'humidité est extrêmement nuisible aux orgues, ce
moyen n'est plus employé. Au reste, on manque de
renseignements certains sur cet instrument dont par-
lent seulement quelques anciens auteurs.
ORP 107
Orgue pneumatique. C'est l'orgue ordinaire, celui
où le son est produit par le vent.
Orgia. Fêtes en l'honneur de Bacchus. Le chant,
accompagné de la lyre et de la flûte, y figurait comme
une des parties essentielles de la fête.
Originalité. L'originalité dans les arts, et dans la
musique en particulier, c'est la nouveauté dans les
idées et dans la façon de les exprimer, de les agencer,
de les combiner; c'est, en un mot, la force créatrice
et l'individualité du génie. (Voyez Imagination, Génie
musical).
Origine de la musique. La musique est une langue
universelle, qui fut donnée à l'homme parle Créateur,
dès le commencement du monde, pour exprimer des
idées et des sensations qu'aucune autre langue ne
peut traduire. On ne peut douter qu'Adam et Eve,
qui avaient tant d'actions de grâces à rendre à Dieu,
aient chanté ses louanges dans le Paradis terrestre.
Noé et sa famille, à la sortie de l'Arche, firent de
même; et plus tard, Moïse et les Hébreux, après le
passage de la mer Rouge. Avant qu'on eût bâti des
temples à la divinité, la nature entière, et son Roi en
tête, unissaient ici bas leurs concerts à ceux des
anges. (Voyez le mot Musique).
Orphéon. Instrument de musique monté avec des
cordes de boyau, que l'on fait parler au moyen d'un
clavier et d'une roue qui porte un archet; il a la
forme d'un très- petit piano.
Orphéon. C'est le nom donné à une institution
municipale de la ville de Paris, dont le but est d'en-
seigner la musique vocale aux enfants des deux sexes
qui fréquentent les écoles communales, et aux ou-
vriers adultes. L'orphéon a été fondé en 1820, et la
direction en fut confiée à Wilhem, qui avait conçu l'i-
dée première de cet enseignement, et en avait ap-
précié l'utilité. Il avait été secondé par son ami, l'il-
108 OLjV
lustre chansonnier Béranger, dont le patronage et l'ap-
pui constant lui fut d'un grand secours. Wilhem com-
posa pour l'orphéon une méthode en tableaux qui
est encore employée. C'est un enseignement simul-
tané, et les tableaux sont combinés de telle sorte, que
des élèves de force inégale peuvent chanter ensemble.
Wilhem est mort en 18i2. La direction de Yorpkéon
passa, après sa mort, entre les mains de M. Hubert,
élève lui-même de l'orphéon. M. Gounod est aujour-
d'hui directeur de l'orphéon, et M. Hubert est resté
attaché à l'enseignement comme inspecteur général.
Il y a tous les ans une séance publique de l'or-
phéon; on réunit tous les élèves, enfants ou adultes,
dans une des grandes salles de Paris; ils exécutent
des chœurs sans accompagnement. Les dernières
commotions politiques ont nécessairement nui aux
progrès de l'orphéon, mais la sollicitude de la ville de
Paris ne l'a pas abandonné, et les études vont re-
prendre une activité nouvelle.
Orpiiéoréon. Instrument de la famille des luths,
armé de huit cordes de métal. Il n'est plus en usage.
Ouverture. Composition instrumentale qui sert de
début aux opéras et aux ballets.
L'ouverture doit se conformer au drame d'une ma-
nière générale, et peut se lier quelquefois aux pre-
mières scènes qui la suivent immédiatement. L'ou-
verture fera connaître d'abord le caractère de l'opéra
qu'elle précède, et donnera ensuite des pressenti ment s
sur la nature des événements, le caractère des passions
qui doivent occuper la scène, et quelquefois même sur
les personnages, le lieu et le temps où se passe l'ac-
tion. Ainsi, l'ouverture d'iphigénie en Aulide nous dis-
pose à une action vive, intéressante et d'une grande
noblesse ; celle de Guillaume Tell peint le calme de la
vie champêtre troublé par une fanfare de trompettes
qui appelle Jes paysans à Ja conquête de la liberté;
PAN 10&
celle de la Pie voleuse commence par une marche
militaire, qui annonce le retour du soldat dans ses
foyers.
Un allégro de symphonie, brillant et passionné,
succédant à une introduction d'un mouvement grave,
telle est la coupe généralement adoptée pour les ou-
vertures. Gluck en a donné le premier modèle dans
son merveilleux chef-d'œuvre, et les compositeurs
de toutes les nations l'ont suivi.
Ceux qui réduisent l'ouverture à une espèce d'in-
troduction, s'éloignent de l'idée qu'on doit concevoir
d'un morceau de ce genre. Le compositeur doit y dé-
ployer toute sa science : facture savante, dessin pur
et vigoureux, harmonie pleine, variée et riche d'ef-
fets, telles doivent être les qualités principales d'une
ouverture.
Oxiphonos. C'est ainsi qu'on appelait chez les an-
ciens Grecs celui qui possédait une voix aiguë.
p
P. Par abréviation, signifie piano, c'est-à-dire doux.
PP. Signifie pianissimo, c'est-à-dire très-doux.
Palalaika. Guitare montée de doux cordes, très-ré-
pandue parmi la basse classe du peuple en Russie.
Pandore. Instrument de musique à cordes, de la
famille du lulh, mais dont le chevalet était oblique,
ce qui rendait les cordes inégales dans leur longueur.
Le dos de cet instrument éîail niai mmmo celui de la
T. Il, |
HO PAft
guitare. La pandore a été délaissée depuis longtemps,
comme le luth et le théorbe.
Pan-Harmonicon. Cet instrument, au moyen d'un
double soufflet et d'un cylindre mis en mouvement
par un poids, imite assez naturellement une musique
d'instruments à vent et de percussion.
Pantalon. Instrument de musique de l'espèce du
tympanon, mais beaucoup plus grand, puisqu'il a
près de quatre pieds de large. Le pantalon est garni
d'un grand nombre de cordes d'acier que l'on touche
avec deux petites baguettes de bois.
Le mot pantalon est aussi employé pour désigner
une figure de contredanse. (Voyez Quadrille.)
Pantomimes. Comédiens, ainsi nommés parce
qu'ils imitaient et exprimaient tout ce qu'ils voulaient
dire avec les gestes qu'enseignait l'art de la Sallation,
sans employer le secours de la parole. L'art des pan-
tomimes naquit à Rome, sous l'empire d'Auguste.
Les deux premiers instituteurs du nouvel arl furent
Pylade et Bathyle, dont le nom devint fort célèbre
parmi les Romains. Le premier réussit mieux dans
les sujets tragiques, et l'autre dans les comiques.
Cassiodore appelle les pantomimes des hommes
dont les mains disertes, avaient, pour ainsi dire, une
langue au bout de chaque doigt, des hommes qui par-
laient en gardant le silence et qui savaient faire un
récit entier sans ouvrir la bouche.
Papier réglé. On appelle ainsi le papier préparé
avec les portées toutes tracées pour y noter la
musique.
Parfait. Ce mot, dans la musique, a plusieurs
sens. Joint au mot accord, il désigne l'accord formé
par la tonique, le troisième degré et le cinquième
degré d'une gamme, dans les deux modes; par exem-
ple, ut, mi, sol ou la, ut, mi. Joint au mot cadence, il
exprime ('elle qui porte In note sensible, et do la do-
PAR 111
minante tombe sur la finale. Joint au mot conson-
nance, il désigne un intervalle juste et déterminé,
qui ne peut être altéré sans cesser d'être consonnant.
Joint au mot mode, il marquait, dans l'ancienne mu-
sique, la mesure à trois temps.
Parodie, Parodier. C'est ajuster à un air de chant
de nouvelles paroles, dont le sens n'a souvent pas le
moindre rapport avec celles qu'il y avait d'abord. 11
suffit que le parodiste se conforme au caractère des
morceaux de musique, et s'applique surtout à calquer
son dessin sur celui du musicien, pour qu'il y ait une
parfaite concordance entre les images. Le mot parodie
en musique n'a aucun rapport avec la parodie qu'on
représente au théâtre, et qui est l'imitation grotesque,
bouffonne et critique d'un drame sérieux.
Parolier. Ce mot, de l'invention de notre spiri-
tuel Castil-Blaze, exprime parfaitement un auteur de
paroles, de livret, un librettiste enfin, c'est-à-dire celui
qui compose le poëme d'un ouvrage lyrique : opéra,
opéra comique, oratorio, ode-symphonie, etc.
Il serait à désirer que des littérateurs-music'ens
voulussent bien s'ingénier à composer des néologïs-
mes, dans le but d'enrichir notre dictionnaire de la
langue musicale, qui est si pauvre et si baroque.
Partie. La musique étant une langue où plusieurs
discours peuvent se faire entendre à la fois, non-seu-
lement sans se nuire, mais en se servant naturelle-
ment, s'ils ont été disposés d'après les règles de l'art,
il s'en suit que chacun de ses discours est comme la
portion d'un grand tout qui se forme de leur réunion.
De là vient le nom de partie donné à chacune des
portions de ce tout, et qui est elle-même un tout plus
ou moins complet, selon l'importance de la partie et
selon la manière dont elle est conçue. On dit : mor-
ceau à deux parties, à trois parties, etc. La partie est
donc, à la lettre, ce que choque artiste chante ou
lia PAR
joue sur son instrument dans l'exécution d'un mor-
ceau de musique. Le copiste extrait chaque partie de
la partition, qui est la réunion de toutes les parties.
(Voyez Partition.)
Partition. C'est, chez les facteurs d'orgues et de
pianos, une règle pour accorder l'instrument, en
commençant par une corde ou tuyau de chaque tou-
che, dans l'étendue d'une onzième prise vers le milieu
du clavier, et sur celte onzième ou partition l'on ac-
corde, après, tout le monde.
Partition. Collection de toutes les parties d'une
pièce de musique, où l'on voit, par la réunion des
portées correspondantes, l'harmonie qu'elles forment
entre elles. On écrit pour cela toutes les parties, por-
tée à portée, l'une au-dessous de l'autre, avec leurs
clefs, de manière que chaque mesure d'une portée
soit placée perpendiculairement au-dessus ou au-
dessous de la mesure correspondante des autres par-
ties, et enfermée dans les mêmes barres prolongées de
l'une à l'autre, afin qu'on puisse voir d'un coup d'œil
tout ce qui doit s'entendre à la fois.
Quelque ordre que l'on donne aux parties dans une
partition, celle de la basse doit être au-dessous de
tout, et celle du chant vocal immédiatement au-
dessus de celle de la basse et de celle de violoncelle,
s'il y en a une pour l'instrument. Plusieurs compo-
siteurs placent les parties de violon en tète d'une
partition. Les Italiens y mettent quelquefois les cors
et les trompettes.
La diversité des clefs est un moyen excellent pour
donner de la clarté à une partition. Les clefs (Vut
signalent le basson et la viole; les clefs de sol, sans
dièses ni bémols, indiquent sur-le-champ les parties
des cors et des trompettes. Les voix se trouvent clas-
sées selon leur diapason, et l'œil peut les distin-
PAS 113
guer assez facilement, grâce à la physionomie parti-
culière de chaque clef.
La partition réunit en faisceau les forces vocales et
instrumentales. Tout est classé avec ordre, et chaque
partie suit parallèlement celles qui concertent avec
elle. Le chef d'orchestre embrasse tout d'un coup
d'œil, il s'attache particulièrement aux voix et aux
instruments qui récitent. Sans ce précieux secours,
on ne peut exécuter la musique de théâtre, les sym-
phonies, les messes, les cantates, les oratorios.
Pas de deux. Danse exécutée par deux danseurs.
C'est le duo de la danse. Le pas russe est un pas de
deux.
Pas de trois. Danse exécutée par trois danseurs.
C'est le trio de la danse.
Pas seul. Danse exécutée par un seul danseur.
Passacaille. Espèce de chaconne dont le chant
était plus tendre et le mouvement plus lent que celui
des chaconnes ordinaires. Cet air de danse, que l'on
retrouve encore dans les opéras de Gluck, n'est plus
en usage. Ce mot vient de l'espagnol Pasa Calle.
Passage. Ornement que l'on ajoute à un trait de
chant. On appelle encore ainsi chaque portion d'un
morceau qui présente un sens. Les notes de passage,
comme les appogiaturcs, sont des notes qui se trou-
vent dans les parties harmoniques sans appartenir à
l'harmonie. Ce qui les distingue, c'est que les pre-
mières se trouvent aux temps faibles de la mesure ou
aux parties faibles des temps, au lieu que les secondes
se trouvent aux temps forts de la mesure ou aux par-
ties fortes des temps.
Les notes de passage servent à lier entre elles les
notes harmoniques et à orner la mélodie. Leur em-
ploi et leur nombre dépendent du bon goût du com-
positeur.
111 PÀl'
Passage d'un ton dans un autre. ( Voyez le mot
Modulation.)
Passe-Pied. Air d'une danse du même nom dont
la mesure était à trois temps. Cet air n'est plus en
usage.
Pastiche. On appelle ainsi une composition mu-
sicale dans laquelle le musicien fait entrer plusieurs
phrases ou morceaux d'autres compositions, ou dans
laquelle il a imité, soit à dessein, soit sans le vouloir,
le style d'un ou de plusieurs maîtres. Il se prend
presque toujours en mauvaise part.
Pastorale. Opéra champêtre, dont les personnages
sont des bergers, et dont la musique doit être en har-
monie avec la simplicité de goût et de mœurs qu'on
leur suppose. La pastorale ne sera pas indigne de nos
premiers théâtres lyriques, si l'on sait l'écrire avec
une élégante simplicité. Composer une pastorale dans
le style des airs champêtres que l'on admire dans
Don Juan, n'est pas chose facile.
Une pastorale est aussi un morceau de musique
instrumentale, dont le chant imite celui des bergers,
en a la douceur, la tendresse, et nous rappelle les
effets de leurs instruments rustiques. Le troisième
concerto de piano de Steibelt est terminé par une
pastorale dont le sujet est une danse villageoise inter-
rompue par un orage.
Pathétique. Genre de musique dramatique et théâ-
trale qui tend à peindre les grandes passions, et par-
ticulièrement la douleur et la tristesse.
Pause. Intervalle de temps qui, dans l'exécution,
doit se passer en silence pour la partie où la pause
est marquée. La pause est le silence d'une ronde,
mais elle indique aussi le silence d'une mesure en-
tière quelle que soit la valeur de cette mesure. La
pause se marque par un trait très-court, mais forte-
ment marqué, appliqué sous la troisième ou qua-
PJÉD 115
trième ligne de la portée, et dont l'épaisseur prend la
moitié de l'espace compris entre celte ligne et celle
qui est immédiatement au-dessous.
Pavane. Air d'une danse ancienne, qui depuis long-
temps n'est plus en usage. Le nom de pavane lui fut
donné parce que les danseurs faisaient, en se servant
de leur cape et de leur épée, une espèce de roue, à de
la manière des paons.
Pavillon. C'est la partie évasée, en forme d'enton-
noir, qui termine certains instruments à vent, tels que
le cor, la trompette, le trombone, le hautbois, la cla-
rinette.
Pavillon chinois. Instrument de musique à per-
cussion. C'est dans sa forme une espèce de chapeau
de laiton terminé en pointe et garni de plusieurs rangs
de clochettes. Le pavillon chinois est fixé sur une tige
de fer au moyen d'une coulisse. Celui qui veut en
jouer le tient d'une main par cette tige, et lui donne
avec l'autre un mouvement de rotation sur lui-même;
ou bien il le secoue fortement en cadence, de manière
que toutes les clochettes frappent ensemble sur le
temps fort de la mesure.
Le pavillon chinois, comme son nom l'indique,
nous vient de la Chine. On l'emploie avec succès
dans la musique militaire.
Pédale. On appelle ainsi chaque louche du clavier
des pieds que l'orgue contient. On nomme aussi pé-
dales les jeux qui répondent à ce clavier. Pédale se dit
également des petits leviers qui font mouvoir la mé-
canique de la harpe et de ceux qui servent à modifier
le son du piano. Ces divers leviers ont été nommés
pédales, parce que ce sont les pieds qui les font agir.
Pédale. C'est un son prolongé à la basse, sur le-
quel on fait passer des accords qui lui sont étrangers,
mais qui de temps en temps doivent contenir la note
prolongée, sans quoi l'effet de la pédale serait désa-
116 PEN
gréable. La pédale se fait sur la tonique et sur la doi
minante. Elle doit commencer par un accord conson-
nant appartenant au son qui fait la pédale.
Pension. Revenu annuel donné à quelqu'un. Pour
récompenser les compositeurs, les auteurs, les chan-
teurs et les instrumentistes de leurs succès ou de leurs
services, les gouvernements leur accordent des pen-
sions. Les compositeurs célèbres étaient pensionnés
autrefois par le roi sur sa cassette particulière. Plus
tard il fut établi que les compositeurs et les auteurs
dramatiques qui auraient donné à l'Opéra trois ou-
vrages, faisant chacun spectacle complet et repré-
sentés quarante fois, obtiendraient une pension an-
nuelle de 1,000 fr. En 1830, les pensions des
compositeurs et des auteurs furent supprimées ainsi
que celles des choristes, des danseurs et des artistes de
l'orchestre de l'opéra. Le droit à une pension exis-
tait après vingt-cinq ans de service pour les artistes
jouant des instruments à cordes, et après vingt ans
pour ceux qui jouaient des instruments à vent.
Lorsque les acteurs de l'Opéra-Comique cessèrent
d'exploiter le théâtre en société, des pensions furent
données à ceux qui avaient été sociétaires. Les pro-
fesseurs du Conservatoire impérial de musique ont
une pension après trente ans de service. 3,000 fr. de
pension sont faits pendant cinq années aux jeunes
compositeurs auxquels l'Académie des Beaux-Arts a
décerné le grand prix de composition.
Au Conservatoire musical de Paris il y a deux sor-
tes de pensionnaires : les pensionnaires du sexe fémi-
minin, qui, sans être logés dans l'école, reçoivent une
pension du gouvernement; et les pensionnaires du
sexe masculin qui sont complètement entretenus dans
le sein même de l'établissement pendant tout le temps
de leurs études aux frais de l'Etat.
Pensionnaire. On appelle pensionnaire le com-
PEU 117
positeur, l'auteur, le chanteur, l'instrumentiste ou
l'élève qui reçoit une pension d'un prince, d'un
Etat, etc., etc. (Voyez le mot Pension.)
Percussion. Choc de la dissonance frappant sur le
premier temps de la mesure. On distingue dans l'em-
ploi de la dissonance au temps fort, trois circonstan-
ces remarquables, savoir: la préparation, la percus-
sion et la résolution. On nomme instruments de per-
cussion ceux dont on joue en les frappant, comme le
tambour, les timbales, la grosse caisse, etc.
Perdendo si, En se perdant. Quand ce mot est
écrit sous un passage de musique, on doit l'exécuter
en faisant succéder le pianissimo au piano avec une
gradation insensible, et laisser éteindre le son peu à
peu, de manière à n'être plus entendu ; car c'est là le
véritable sens du mot: Perdendo si.
Perfidia, Perfidie. Signifie en musique une obsti-
nation à faire toujours la même chose et à suivre le
même dessein. Contrapunto perfidiato, fugà perfidiata,
sont des contrepoints et des fugues où l'on s'obstine
à suivre le môme dessein. Gela s'appelle aussi pertina-
cia, opiniâtreté.
Périélèse. Terme de plain-chant. C'est l'interpo-
sition d'une ou de plusieurs notes dans l'intonation
de certaines pièces de chant, pour en assurer la finale
et avertir le chœur que c'est à lui de reprendre et
poursuivre ce qui suit.
Période. Phrase musicale composée de plusieurs
membres dont la réunion forme un sens complet. La
période carrée est proprement celle qui est composée
de quatre membres. Mais on ne laisse pas d'appeler
période carrée toute période nombreuse et formée
avec de bons éléments bien ajustés ensemble.
Perses. (Voyez le mot Assyriens).
Péroraison. Ce mot, emprunté à la rhétorique, si-
gnifie la conclusion d'un discours d'éloquence; on
t. h. r
il* PUÉ
l'emploie dans le même sens à l'égard du discours
musical. Les péroraisons de Mozart sont d'un effet
ravissant. Celles de la Flûte enchantée, de l'ouverture
des Noces de Figaro, du premier finale de Don Juan,
doivent être rangées parmi les productions les plus
sublimes en ce genre. Le mot péroraison est quelque
fois synonime de strette, et dans ce Sens il s'applique
à l'allégro final des morceaux les plus importants de
l'opéra, tels que le finale, l'introduction, le sextuor, etc.
Phéniciens (musique des). La musique des Phé-
niciens , d'après Fabre d'Olivet , qui est notre
guide dans ce travail historique, se divisa en au-
tant de branches et forma autant de systèmes par-
ticuliers qu'il y eut de sectes. Ces diverses sectes
qui donnèrent leurs noms aux peuples chez lesquels
elles dominèrent, servirent aussi à désigner l'es-
pèce de musique qu'elles adoptèrent de préfé-
rence. De là le mode lydien, le phrygien, le do-
rien, l'ionien, etc., etc. C'est-à-dire le mode de
Yénus ou de la faculté génératrice universelle; celui
du chef ou du roi-pasteur; celui de la liberté ou de
la force maie; celui de la colombe ou de la nature
féminine. Les divers modes que l'on retrouve chez les
Grecs eurent chacun leur caractère propre. Celui de
tous qui paraît avoir été le plus généralement adopté
en Phénicie, était le mode appelé vulgairement com-
mun, et que les Grecs ont connu sous le nom du mode
locrien, ce qui signifie mode caractéristique de l'al-
liance. La corde fondamentale de ce mode était le la,
celle qui dominait sur le système musical phénicien,
la première à l'aigu, et môme au grave quand elle y
eut été ajoutée. Comme cette corde était assimilée à
la lune, qui tenait le premier rang parmi les divinités
de ces peuples amazones, c'est-à-dire dévoués à la
nature féminine, on donna au mode qu'elle consti-
tuait le surnom de lyn qui veut dire astre nocturne.
VMÏ 119
et suivant l'usage de ces temps, on en lit un person-
nage mythologique, qui passant par la suite pour un
fameux musicien, fut cité comme le maître à chanter
d'Hercule. Cependant Hérodote dit formellement que
c'était une sorte de chant usité en Egypte, qui, du
sein de la Phénicie avait passé en Europe. Cette sorte
de chant qu'il appelle limos, était selon lui d'un ca-
ractère triste et mélancolique. Ceci revient précisé-
ment à l'idée que les Chinois modernes conservent
encore de ce mode phénicien, dont ils désignent la
tonique la par l'épithète expressive de kou-si, lamen-
tation occidentale
Au moment où les pasteurs démembrèrent l'em-
pire indien, et formèrent la fameuse secte qui donna
naissance à la nation phénicienne, il parait qu'ils
choisirent pour désigner les sept sons diatoniques de
leur système musical les sept voyelles de leur alpha-
bet, de manière que la première de ces voyelles alpha
ou A, était apppliquée au principe cyprien fa qu'ils
regardaient comme le premier, et que la dernière, âin,
que les Grecs rendent par oméga et que nous rem-
plaçons par ou, était appliquée au principe saturnien
si qu'ils considéraient comme le dernier. On peut
croire que ce fut par une suite naturelle de cette ma-
nière de noter les deux cordes musicales assimilées
aux deux principes de l'univers, que naquit le fa-
meux proverbe mis dans la bouche de l'être suprême
pour désigner sa toute puissance et son immensité :
Je suis l'Alpha et l'Oméga.
Cependant, soit que les Phéniciens eussent deux ma-
nières de noter les sons, soit qu'ils les considérassent
comme procédant par intervalles harmoniques, si-mi-
la-ré-sol-ut-fa, ou diatoniques, si-ut-ré-mi-fa-sol-la, ou
bien que Je temps ou les révolutions politiques et re-
ligieuses eussent apporté quelques changements à
120 PUR
leur notation, on voit clairement, par plusieurs pas-
sages des anciens, que la corde /a, assimilée à la lune et
tonique du mode commun ou locrien, était notée par
la voyelle A; en sorte que la gamme entière chantée
de l'aigu au grave se solfiait sur le son des sept voyel-
les phéniciennes, inconnues aujourd'hui, et en allant
de l'aigu au grave, par conséquent de droite à gau-
che, au lieu dû grave à l'aigu et de gauche à droite.
Les pasteurs, en se séparant de l'empire indien, pri-
rent cette méthode, qu'ils communiquèrent à tous
ceux qui dépendirent d'eux, soit directement, soit
indirectement. Les Egyptiens, les Arabes, les Assy-
riens, les Grecs, les Etrusques, la reçurent et la con-
servèrent plus ou moins longtemps, suivant les cir-
constances. Les Arabes et tous ceux qui ont reçu le
joug de l'islamisme, la suivent encore aujourd'hui.
Phrase. Suite de chant ou d'harmonie qui forme
sans interruption un sens plus ou moins achevé, et
qui se termine sur un repos par une cadence plus ou
moins parfaite.
Piiraser. C'est, dans l'exécution de la musique, pré-
senter la période musicale avec élégance et noblesse,
l'orner de tous les agréments inspirés par le goût, et
la conduire avec art depuis son début jusqu'à sa con-
clusion.
Piirénologie (la) appliquée à la musique. La phy-
sionomie et les crânes humains offrent-ils des signes
certains, infaillibles, pour préciser les dispositions, les
facultés, le degré d'intelligence des individus, et spé-
cialement des hommes qui se livrent aux arts de l'ima-
gination? Les observations recueillies par Gall et par
Lavater constituent-elles une science positive? A cet
égard, il y a contradiction, doute, incertitude parmi
les savants modernes, et sans doute ce problème ne
sera pasrésolu de longtemps. Quoi qu'il en soit, l'anec-
dote suivante, qui nous a été donnée comme authenti-
PUE 121
que, et qui se rattache à un homme éminent dans l'art
musical, est un argument de plus en faveur des asser-
tions de la science phrénologique.
On sait que Gall, l'illustre fondateur de cette école,
ne sortait jamais d'un salon sans avoir interrogé mi-
nutieusement le crâne et les protubérances caracté-
ristiques de toutes les personnes qui s'y trouvaient
réunies. Chacun se prêtait de bonne grâce à cette
opération, et pour en fixer les résultats, le célèbre
phrénologue avait constamment sur lui un porte-
feuille, sur lequel il inscrivait le nom de tous les
sujets soumis à ses expériences et les remarques qu'il
avait faites sur chacun d'eux. Or, pendant un séjour
de quelques mois qu'il fit à Milan, il y a trente ou
trente-cinq ans, Gall avait particulièrement remar-
qué dans un des salons de cette ville un très- jeune
musicien qui faisait les délices de la société par son
esprit, ses saillies et son talent. Voici ce qu'il écrivit
sur ses tablettes à propos de ce jeune homme :
Œil rayonnant. Sourire intelligent et fin. Front
bombé. Proéminente inspiration. Génie créateur.
Énergie. Grâce. Fécondité. Souplesse.
Rossini était le nom du jeune musicien en question,
nom parfaitement inconnu à cette époque ; et pour-
tant, était-il possible de faire une énumération plus
complète des qualités diverses qui ont brillé depuis
dans les productions du grand maestro ?
Le fait que nous venons de raconter trouvera peut-
être des incrédules; cependant, qui pourrait soutenir
que la science a dit son dernier mot sur l'étude et
l'observation des facultés de l'homme? Pour nous,
sans prétendre nous poser en défenseur de la doctrine
de Gall et du système de Lavater, nous désirons que
des expériences soient poursuivies à ce sujet avec ar-
deur et persévérance; nous le désirons dans l'intérêt
de l'art musical et de ceux qui s'y consacrent. Grâce
122 PIA
aux révélations de la science phrénologique, chacun
serait averti. Les organisations d'élite, les vocations
véritables seraient vivement lancées dans la direction
qui leur convient, et les esprits médiocres seraient
promptement détournés d'une carrière où ils ne peu-
vent que végéter.
Philosophie de la musique. Elle consiste à recher-
cher les rapports secrets des sons avec nos senti-
ments et nos pensées. (Voy. Langue musicale.)
Pianiste. Celui qui joue du piano. Si l'on don-
nait ce nom à tous ceux qui mettent les mains sur
cet instrument, on pourrait compter plus de cin-
quante mille pianistes à Paris seulement.
Il y a le pianijle-professeur, le pianiste de concert,
le pianiste-accompagnateur , le pianiste-improvisateur.
La première classe est très-nombreuse, mais il y a
peu d'excellents professeurs de piano. La seconde
classe s'augmente tous les jours, et c'est un malheur;
car, comme instrument de solo, dans un vaste local,
le piano, presque toujours est insuffisant et ennuyeux :
sa place est au salon, dans les concerts intimes ; la
musique de chambre lui va bien. La troisième classe,
qui devrait être la plus importante, est trop peu re-
cherchée par les pianistes. Les bons accompagnateurs
sont très-rares et il y en a beaucoup trop encore de
mauvais. Il est vrai que ce rôle est ingrat et peu bril-
lant. Or, la plupart des pianistes aiment à briller.
Pour être excellent accompagnateur, il faut d'abord
être musicien profond, lire la partition d'orchestre
et la réduire à livre ouvert ; transposer à la volonté
du chanteur; se faire le très-humble serviteur de la
voix; jamais ne la couvrir, toujours lui servir de cor-
tège; être bon harmoniste et capable, au besoin, d'im-
proviser ou de suppléer un accompagnement. Voilà ce
que font MM. Yauthrot, Frelon et Garaudé. Quelques
autres marchent sur leurs traces, mais un très-petit
PI A 1^3
nombre peuvent atteindre à ce haut degré de perfec-
tion. La quatrième classe est encore plus faible que la
troisième. Il semble qu'on ait perdu le secret des Bee-
thoven , des Mozart, des Hummel, des Boïeldieu.
C'est qu'ici encore il faut une étude longue et persé-
vérante, secondée par une nature exceptionnelle.
L'homme de génie, lui-même, a besoin de longs tâ-
tonnements avant d'arriver à improviser en maître.
Il faut s'y exercer de très-bonne heure et tous les
jours, sans se rebuter des difficultés qui naissent à
chaque nouveau pas dans cette épineuse carrière.
Du reste, l'improvisation , lorsqu'on a franchi tous
les obstacles, procure tant de jouissances, que les'**,
jeunes gens bien organisés devraient s'y livrer avec
plus d'ardeur.
Piano. Instrument de musique à cordes et à cla-
vier, qui a succédé au clavecin. Dans le clavecin et
l'épinette, les cordes étaient pincées par un bec de
plume ou de cuir; dans le piano , ce sont des mar-
teaux mis en jeu par la touche et divers échappe-
ments qui viennent les attaquer. La corde pincée
donnait des sons trop uniformes , tandis que le
marteau est aux ordres de celui qui sait le maîtriser,
et que le son acquiert plus ou moins d'intensité selon
que la corde est frappée avec plus ou moins de vi-
gueur. Le piano donnant des moyens d'expression
jusqu'alors inconnus dans les instruments à clavier,
et modifiant les sons du piano ou forte par degrés im-
perceptibles, reçut d'abord le nom de piano forte ou
forte piano, comme exprimant les deux qualités qui
le distinguaient. Dès le moment de son invention, le
nouvel instrument remporta une victoire complète
sur le clavecin, qui disparut tout à fait.
Si le piano ne peut se montrer avec avantage dans
une vaste enceinte et au milieu d'une foule d'instru-
ments, il prend bien sa revanche dans les salons, où
\±k PI A
il forme à lui seul une harmonie complète. Si le vio-
lon est le roi des orchestres , le piano est le trésor de
l'harmonie et du chanteur à la ville, à la campagne
surtout. Que de soirées dérobées à l'ennui et embel-
lies des charmes de la musique ! On chercherait en
vain à former un quatuor ; le piano est là, c'est le
point de ralliement.
Les jeux brillants et variés de cet instrument , les
licences que la main droite a pu se permettre à la fa-
veur des groupes harmonieux exécutés par la main
gauche, se sont introduits peu à peu dans l'orchestre
dont ils ont augmenté la puissance.
Le piano commença à se répandre en France vers
1780. Mais il y avait loin des premiers essais encore
informes qui furent alors tentés aux instruments su-
perbes, excellents, qui sortent aujourd'hui, des ate-
liers de nos habiles facteurs.
Le piano à forme de clavecin, vulgairement ap-
pelé piano à queue, est celui que l'on doit préférer.
Les cordes étant frappées dans le sens de leur lon-
gueur, on obtient des vibrations plus fortes et plus
prolongées. La forme de ce piano est élégante et pit-
toresque, elle représente une harpe couchée horizon-
talement.
Le grand piano donnant un volume de sons plus
considérable et prolongeant les vibrations, on peut
réellement exécuter des mélodies larges sur cet ins-
trument. Ses moyens sonores et la moindre facilité
que présentent les touches de son clavier donnent
plus de solidité au talent de l'exécutant, et le forcent
en quelque manière à acquérir un beau style.
Les facteurs de pianos dont les produits sont le
plus estimés en France, sont : les frères Erard,
Pleyel, Pape, Dietz, Roller et Blanchet, Souffleto,
Henri Ilerz. On n'attend pas sans doute de nous que
nous signalions ici les qualités qui distinguent les
HA 125
instruments sortis des ateliers de ces divers facteurs,
ou celles qui leur manquent; nous nous bornerons à
trois ou quatre noms que le public a mis depuis long-
temps hors de ligne.
Les pianos de Pleyel se font remarquer par le moel-
leux et la rondeur des sons, par la précision du méca-
nisme et l'égalité des marteaux. C'est en cela qu'ex-
celle ce facteur, habile pianiste lui-môme, et qui fait
tourner au profit de son industrie les connaissances
qu'il a acquises par ses études d'artiste. Les pianos
d'Érard sont justement célèbres par leur vibration et
leur intensité. Les pianos de Pape ont une sonorité
profonde et agréable; le clavier en est parfaitement
réglé, et les marteaux bien égalisés. Les pianos droits
de Roi 1er ont de la vibration et de la force, surtout
relativement à leur grandeur.
Piano a queue vertical. En 1850, M. Dietz, fils
du célèbre mécanicien de ce nom, tant apprécié de
Napoléon Ier, et oncle de Mme Anna de Lagrange, la
célèbre cantatrice, inventa le piano à queue vertical.
Ce piano est d'une forme mignonne, élégante. Sem-
blable à ces chanteurs qui ont de grandes voix dans
de petits corps, il produit des sons aussi puissants
que ceux d'un piano d'Érard à grande queue. Sa
construction modèle, soumise à toutes les lois de l'a-
coustique, l'empêche de se discorder, comme les au-
tres pianos droits, sous l'influence de la température
atmosphérique. Le côté droit n'a que 85 centimètres
de hauteur, et le côté gauche, 1 mètre 75 centimètres.
Il rappelle un peu la gracieuse forme de la harpe.
Le pianiste ne se trouve pas du tout caché par la dis-
position nouvelle de l'instrument.
Le clavier est très-léger et les marteaux frappent
les cordes avec une vigueur extrême, sans porter au-
cune perturbation dans l'âme de l'instrument. Le mé-
canisme du marteau se compose seulement de deux
1^<) PI À
pièces, et dans les autres pianos au moins de cinq.
Ce mécanisme a très-peu de frottement et par consé-
quent doit durer plus longtemps que les autres. La
table d'hamonie ne peut jamais se comprimer par le
tirage des cordes, parce qu'elle se trouve isolée du
sommier.
Il est facile de se convaincre, d'après cette analyse,
que le mécanisme et la construction de ce piano dif-
fèrent essentiellement des autres. Son élégance, sa
simplicité, son petit volume et sa grande puissance
lui assurent un avenir de succès.
, M. Dietz e§t encore auteur du poly- plectron, du tri-
sophone, du piano ovale, de Yaérophone, du piano
colien, ou piano trapèze, du. ventilateur acoustique, du
piano ogive à quatre cordes et du clavi-harpe.
Piano, Docx. C'est l'opposé du forte, fort. Ce mot a
été adopté dans notre langue, ainsi que son dimi-
nutif pianissimo, très-doux.
Piano éouque. Instrument inventé par Kieselstein
et Schwarlz, de Nuremberg. D'après la description
qu'on en donne, il paraîtrait que le mécanisme de cet
instrument est à peu près le même que celui du
physharmonica, puisque le son est produit par la vi-
bration de lames d'acier de différentes grandeurs pla-
cées à l'orifice de trous ou tuyaux d'où sort le vent
des soufflets mis en mouvement par deux pédales.
Indifférence, qui paraîtrait être à l'avantage du nou-
veau piano éolique, consiste en ce que les sons ont
plus de force, et en ce qu'il a six octaves.
Piano mélographe. Au mois d'août 1837, M. Car-
reyre a fait, devant l'Académie des Beaux-Arts de
l'Institut de Paris, l'essai d'un piano mélographe qui
consistait en un mouvement d'horloge, lequel faisait
dérouler d'un cylindre sur un autre une lame mince
de plomb, où s'exprimaient, par l'action des touches
du piano, certains signes particuliers qui pouvaient
MA 1*27
se traduire en notation ordinaire au moyen d'une table
explicative. Après l'expérience, la bande fut enlevée
pour en opérer la traduction, et une commission fut
nommée pour en faire le rapport; mais ce rapport
n'ayant pas été fait, il est vraisemblable que la tra-
duction ne s'en est point trouvée exacte.
Pièce. Ouvrage de musique instrumentale d'une
certaine étendue, composé de plusieurs morceaux
formant un ensemble et un tout pour être exécuté de
suite. Une symphonie est une pièce, une sonate est
une pièce. Ce mot ne s'applique guère qu'à des com-
positions destinées à l'orchestre ou à l'orgue, au
piano, à la harpe.
Pincer. C'est employer les doigts, au lieu de l'ar-
chet, pour faire sonner les instruments qui n'ont ni
touche ni archet, et dont on ne joue qu'en les pin-
çant; tels sont la harpe et la guitare. On pince aussi
quelquefois les instruments à archet, et on l'indique
dans la partition et dans la partie en écrivant pincé,
ou pizzicato. (Voyez ce mot.)
Piqué, piquée. Les notes piquées sont des suites
de notes montant ou descendant, ou rebattues sur le
même degré, sur chacune desquelles on met un point
allongé pour indiquer qu'elles doivent être marquées
égales par des coups de langue ou d'archet secs et
détachés.
Piu, plus. Piu presto, plus vite ; piu lento, plus
lent; piu stretto, plus serré.
Pizzicato. Ce mot, qui signifie pincé, avertit qu'il
faut pincer les cordes du violon ou du violoncelle, de
la viole ou de la contre-basse, au lieu de les faire ré-
sonner avec l'archet. Ces mots co//' arco, ou simple-
ment arco, marquent le lieu où l'on doit reprendre de
l'archet.
Plagal (ton). C'est une règle fondamentale que
toute pièce de plain-chant doit être renfermée dans
m pla
l'étendue d'une octave, ou tout au plus d'une neu-
vième. Cela observé, il peut arriver deux cas, savoir,
que la finale occupe le plus bas degré de cette octave,
ou qu'elle en occupe le milieu. Dans le premier cas,
le ton est authentique, et lorsque la finale occupe le
milieu, le ton est appelé plagal ou collatéral.
Plagale (cadence). C'est, à la basse, le mouve-
ment du quatrième degré sur la tonique, ces deux
notes portant l'accord parfait. La cadence plagale est
une réminiscence du plain-chant et peut s'accorder
cependant avec les exigences de la tonalité moderne.
Plagiat. C'est le nom qu'on donne à un larcin d'i-
dées musicales. En musique comme en littérature, il
faut distinguer les idées créées, les phrases filles de
l'imagination, d'avec les lieux communs de l'école.
On ne saurait s'approprier les premières sous aucun
prétexte; les phrases toutes faites appartiennent à
tout le monde.
Plein jeu. C'est dans l'orgue la réunion des jeux
de cymbale et de fourniture. Pour que le plein jeu
produise un effet satisfaisant, il faut qu'il soit sou-
tenu par de bons fonds, c'est-à-dire par le bourdon
de seize pieds, la montre et les prestants.
Plique. Sorte de ligature dans notre ancienne mu-
sique. La plique était un signe de retardement ou de
lenteur; elle se faisait en passant d'un son à un
autre, depuis le demi-ton jusqu'à la quinte, soit en
montant, soit en descendant. Telle est la définition
donnée par J.-J. Rousseau; mais on croit plus gé-
néralement que la plique des anciens était une espèce
d'ornement semblable, à peu près, à notre trille.
C'est ainsi, du moins, que l'a défini Marchetto de
Padoue.
Plain-Chant. (Voyez Chant ecclésiastique.)
Planche. Se dit d'une plaque de cuivre ou d'étain,
sur laquelle on grave la musique.
POL 1 29
Pochette. Petit violon de poche, qui a le même
manche que le violon, et dont les maîtres de danse se
servent comme étant plus commode à porter. 11
sonne l'octave du violon ordinaire.
Poco, Peu. Poco à poco, peu à peu.
Poème. Ouvrage écrit en vers et destiné à être mis
en musique. On ne donne le nom de poëme qu'à des
ouvrages d'une certaine étendue, tels qu'un opéra,
un oratorio, une cantate; tandis que le mot paroles,
qui a la même signification, s'applique également à
un opéra et à une chanson.
Point. Le point augmente Ta note qui le précède
de la moitié de sa valeur ou de sa durée. Quand il y a
plusieurs points de suite, le second ne vaut que la
moitié du premier, le troisième la moitié du second.
Point d'orgue. Passage brillant qui fait la partie
principale dans un solo. Le point d'orgue se place
sur un repos, ou vers la fin d'un morceau de mu-
sique. Les airs de bravoure de l'école italienne se
terminaient autrefois par un point d'orgue, ou ca-
dence. Cet usage s'est perdu peu à peu.
Pointu, Pointue. On se sert de ce mot figurément
et dans la conversation familière, pour désigner une
voix qui ne donne que des sons grêles, et n'a de dé-
veloppement que dans la partie aiguë.
Politique (musique). C'est surtout à l'époque de
notre première révolution que la musique politique a
joué un grand rôle. C'était en juillet 1789. On venait
de prendre la Bastille. Le peuple célébrait sa victoire
par des chants joyeux, par des cris d'enthousiasme ;
mais depuis quelque temps, à l'Hôtel-de-Ville, les
électeurs s'étaient rassemblés et exerçaient une ma-
gistrature provisoire. Les premiers ils commandèrent
un ouvrage lyrique destiné à immortaliser cette vic-
toire populaire: ils chargèrent un nommé Désaugïer-
Janson de composer un hiérodrame, ou drame sacré,
1 M POL
retraçant autant que possible les épisodes les plus re-
marquables de la prise de la Bastille. Cet ouvrage fut
exécuté en grande pompe dans l'église Noire-Dame, et
jouit pendant quelque temps d'une certaine popula-
rité.
Une innovation est à remarquer à propos de l'œuvre
dont nous parlons; une grosse cloche d'un timbre so-
nore comptait parmi les instruments de l'orchestre,
et rendait au naturel les sons lugubres du tocsin.
Traçons maintenant l'histoire des deux airs fameux
au début de la révolution française, le premier chanté
par tous les amis du roi, le second par tous les amis
de la nation; nous voulons parler du bel air :
0 Richard, ô mon roi, l'univers i abandonne! et du ca-
rillon national Ça ira.
Le mélodique Grétry était alors dans toute la ma-
turité de son talent; son triomphe avait été Richard
Cœur -de-Lion, dont les paroles toutes monarchiques
contrastaient singulièrement avec l'esprit démocra-
tique qui se faisait jour chez le peuple. Les nobles,
ou pour parler le langage du temps, les aristo-
crates en consolidèrent le succès, et, à peine les
états-généraux étaient assemblés, que dans tous les
salons on chantait l'air du fidèle Blondel au pied de
la tour qui renferme son royal maître. Quelques cour-
tisans affectèrent de le faire entendre dans les mo-
destes soirées que Louis XVI donnait à Versailles. Il
devint bientôt une sorte de ralliement sous la ban-
nière monarchique. Mais cette allusion ne se faisait
d'abord que secrètement; une occasion se présenta
de la rendre publique.
En 1790, les gardes-du-corps donnèrent un ban-
quet aristocratique dans l'Orangerie de Versailles.
Après le toast, on chanta l'air: O Richard, et on lit
serment de délivrer Louis XVI. Dès ce moment, il
de\int une Marseillaise rovaliste.
pol m
Quand Louis XVI eut été enfermé au Temple, des
joueurs d'orgue vinrent chanter sous les fenêtres du
monarque l'air du troubadour, tant et si bien que,
sous la Terreur, les musiciens ambulants durent l'en-
lever de leur répertoire, sinon passer pour suspects
et aller en prison.
Tel a été le sort de cet air, qui dut beaucoup de son
succès à la politique. Occupons-nous maintenant de
son rival, le Ça ira.
Depuis la prise de la Bastille, le peuple manifes-
tait hautement sa haine contre les nobles. L'expres-
sion Ça ira était ordinairement employée toutes les
fois qu'il lanternait, c'est-à-dire accrochait au réver-
bère un ennemi de la constitution. Pendant les pré-
paratifs qui précédèrent la fédération du 14 juillet
1790, Ça ira fut mis en chanson avec un grand nom-
bre de variantes quant aux paroles. Le Ça ira officiel
est celui qu'on attribue à Dupuis, l'auteur de COrinine
des Cultes.
Bientôt cet air s'entendit dans toutes les rues. Si l'on
assassinait un aristocrate, si l'on plantait un maiâe
la liberté, le Ça ira était chanté. Ouvrez le Journal de
Paris du temps, aux annonces, voici ce que vous y
trouverez : Nouvelles variations pour le clavecin, sur
l'air Ça ira ; rondeau sur l'air Ça ira. Le Ça ira vécut
jusque sous le Directoire.
Aux clubs, on faisait souvent de la musique; elle
se composait le plus souvent de symphonies ayant
pour basses continues des roulements de tambours,
des vociférations et des décharges de mousqueterie.
De la déchéance de Louis XYI à la Terreur, il n'y
eut qu'un pas. Cependant au point de vue de l'art
musical, la Terreur fut une époque à part. Les qua-
torze armées bordent et défendent nos frontières me-
nacées par la coalition des rois étrangers; la France
fait un offort sur ello-mème : et quel stimulant plus
132 POL
efficace que la musique peut inspirer les manifesta-
tions du courage? Nous ne suivrons pas ces nouveaux
soldats sur les champs de bataille : la Marseillaise
leur suffisait, et dans toutes les occasions périlleuses,
l'hymne fameux redoubla leur courage et les mena à
la victoire.
Et maintenant qu'on nous suive à l'Opéra sous la
Terreur, voici les pièces qu'on entendra: le Siège de
Thionville, musique de Jadin, Y Offrande à la Liberté,
scène religieuse de Gossec, et Fabius, tragédie mise
en musique, par Méreaux. A cette époque, la musique
politique a plus que jamais envahi le théâtre.
Sous la Terreur, le catholicisme avait été remplacé,
d'abord parle culte de la Raison, ensuite par celui
de l'Ètre-Suprême, tous deux inaugurés par des
fêtes solennelles.
La fête de la Raison fut célébrée dans l'église
Notre-Dame ; plusieurs compositeurs concoururent à
la partie musicale. Un témoin oculaire nous a assuVé
que les airs qu'on chantait dans ces solennités étaient
vraiment imposants, et que les motifs en étaient
d'une admirable simplicité.
La Fête de l'Être-Suprême, qui suivit d'assez près
celle de la Raison, fut plus remarquable sous le point
de vue musical ; on y entendit des strophes en ma-
nière de cantiques, dans lesquelles Gossec se sur-
passa. Sous le Directoire, le Consulat, l'Empire, la
Restauration et le Règne de Louis Philippe, la mu-
sique politique n'a pas joué un grand rôle. Elle a
cédé le pas à la musique sérieuse qui a été féconde
en chefs-d'œuvre. La Parisienne et les Girondins ,
voilà tout ce qui mérite d'être signalé pendant cette
période, dans l'histoire de la musique politique.
Polka (la). C'est une danse originaire de Bohême,
une danse de paysans. Elle a tous les signes du type
original, des allures vives, brusqups, tumultueuses.
POL 133
rudes, mais gaies et souvent voluptueuses. La cadence
de ses mouvements suit la mesure deux quatre. Elle
se ralentit et mêle à sa vivacité une délicieuse mol-
lesse. La polka, comme la valse, est à deux, se sépare
du bruit et s'isole de la foule. Elle tourne sur elle-
même, lance au loin ses jambes Tune après l'autre,
de côté, et du pied sur lequel elle se repose elle saute
deux fois par saccades précipitées et en frappant le sol
avec le talon, le plus coquettement du monde. Elle
procède de la Cracovlenne et de la Mazurka.
Pologne (de la musique en). Une grande nation
présida longtemps aux destinées des peuples du Nord ;
elle possédait de riches provinces, cultivait avec éclat
les lettres et les arts. Aujourd'hui elle a tout perdu,
elle gémit soiis ses ruines.
Dans cet état de choses, la musique a dû faire peu
de progrès en Pologne. Avant la chute de Varsovie,
il y avait un Conservatoire bien organisé, qui avait
produit d'excellents élèves. Il était dirigé par Soliva,
Italien, homme de talent, et Joseph Elsner, excellent
compositeur, était au nombre des professeurs. Lui
aussi a rendu de très-grands services à l'école de mu-
sique polonaise ; aimé et adoré de ses élèves, il compte
parmi les meilleurs, Ch. Turpinski, Chopin, Or-
lowki, Wycocki, etc. Outre ces noms déjà connus, on
cite à Varsovie une foule de jeunes talents et de com-
positeurs distingués ; mais n'ayant ni unité ni but, ils
ne peuvent agir sur l'avenir de l'art en Pologne.
Juger l'opéra polonais par ce qui se fait maintenant,
ce serait donner une bien fausse idée de la scène et sur-
tout de l'opéra national. Quand on songe avec quelle
sévérité le gouvernement russe proscrit tout ce qui
porte l'ombre de nationalité, on s'étonne même qu'il
permette déjouer des opéras traduits en polonais; car
c'est déjà avouer qu'il existe des Polonais et une langue
polonaise. Avant la dernière révolution, Elsner, Tur-
m pon
pinski, Stephani, Danze, alimentaient la scène natio-
nale; aujourd'hui on ne joue que des traductions.
Les opéras d'Elsner et de Turpinski sont à Yindex.
Avant 1830, il y avait quatre théâtres qui jouaient
à la fois, le Grand-Opéra le Théâtre-Français, les Va-
riétés-Polonaises et l'Opéra-Allemand. Aujourd'hui,
deux à peine peuvent exister.
Le théâtre de l'Opéra est un des plus grands de
l'Europe. Il est à regretter que l'orchestre ne soit pas
plus nombreux dans une salle immense comme celle
de Varsovie. Cet orchestre, en général, est bon ; il est
composé des premiers professeurs; avec plus de pro-
portions dans les pupitres, il produirait plus d'effet.
Les efforts individuels sont souvent paralysés par le
manque d'une bonne distribution.
Polonaise. Air de chant et de danse mesuré à trois
temps et d'un mouvement modéré. La Polonaise nous
vient de la Pologne, ainsi que l'indique son nom;
elle se distingue par un rhylhme boiteux, que l'on ob-
tient en syncopant les premières notes de la mesure.
Pompe. C'est dans le cor et la trompette un frag-
ment de tuyau en forme de fer à cheval, qui par ses
deux extrémités vient s'emboîter avec une grande pré-
cision sur les deux bouts formés par une section faite
vers le milieu du corps de l'instrument, et les re-
couvre entièrement. En enfonçant plus ou moins
cette pompe, on allonge ou on raccourcit le grand
tuyau, ce qui élève ou abaisse le ton.
Dans la flûte, la clarinette, le basson, la pompe est
une emboiture en métal, placée entre les principales
pièces pour les réunir, et qui sert aussi à donner plus
d'extension à l'instrument, et à baisser par conséquent
son intonation.
Ponctuation, Ponctuer. C'est, en terme de com-
position, marquer les repos plus ou moins parfaits,
et diviser tellement les phrases, qu'on sente par la
POU 135
modulation et par les cadences leurs commence-
ments, leurs chutes et leurs liaisons plus ou moins
grandes, comme on sent tout cela dans le discours à
l'aide de la ponctuation.
Pojnt-Neuf. On appelle ainsi de petits airs et même
de simples refrains gothiques, sans mesure, sans
rhythme, d'une modulation triviale et vulgaire. Les
ponts-neufs ont été quelquefois admis à l'Opéra-Co-
mique, et l'on a applaudi avec transport Tolo Carabo,
Au clair de la lune, Malboroug, Ah! vous dirai-je, maman,
que quelques compositeurs ont daigné mêler à leurs
périodes harmonieuses. Le peuple parisien cria au
miracle. Mais les connaisseurs ne tolèrent ces sortes
d'emprunts que quand un travail harmonique , élé-
gant et pur, un dessin hardi vient leur servir d'excuse.
Ponticello. C'est le nom italien du Chevalet
(voyez ce mot). On trouve quelquefois dans les par-
titions : sut ponticello, sur le chevalet.
Port de voix. C'est ce que les Italiens appellent
portamento. Il y a deux manières de porter la voix ou
les sons; la première, lorsqu'on lie plusieurs sons
d'égale valeur, qui procèdent par degrés conjoints ou
disjoints; la seconde se pratique entre deux sons qui
formant un intervalle plus ou moins grand, et qui
procèdent par degrés disjoints seulement. Elle con-
siste à faire glisser la voix promptement par une liai-
son fort légère, qui part de l'extrémité de la première
des deux notes, pour passer à celle qui la suit, en
l'anticipant.
Portée. La portée ou ligne de musique est compo-
sée de cinq lignes parallèles, sur lesquelles ou entre
lesquelles les diverses positions des notes en mar-
quent les degrés. Ce nom de portée a été donné à la
ligne de musique, parce qu'elle renferme exactement
la portée ou l'étendue d'une voix ordinaire.
Portugal (de la musique en), La musique des
136 ppÉ
Portugais, dérivant de la même source que la musi-
que espagnole, participe de ses qualités et de ses dé-
fauts. Ce peuple possède un grand nombre d'airs
assez beaux et fort anciens ; ses airs nationaux sont
les Tadunes et les Madinhas ; ceux-ci se séparent
complètement des airs des autres nations. La modu-
lation en est tout à fait originale. Les mélodies portu-
gaises sont simples, nobles et très-expressives.
De Costa, Fronchis etSchiopelta, sont les meilleurs
compositeurs portugais de l'époque actuelle. Il y a à
Lisbonne un Opéra-Italien originairement établi par
Jomelli, où ont été représentés les meilleurs ouvrages
de notre répertoire lyrique.
Positif. Petit orgue que l'on place devant le grand
orgue quand il est assez considérable pour être di-
visé en deux.
Position. Lieu de la portée où est placée une note,
pour fixer le degré d'élévation du son qu'elle repré-
sente. C'est aussi l'ordre dans lequel les sons d'un
accord sont disposés au-dessus de la basse.
Pot-Pourri. Suite d'airs pris en totalité ou en par-
tie çà et là dans les compositions de divers maitres,
et même parmi les refrains que l'on chante dans les
rues, et cousus les uns aux autres par quelques
phrases conjonctionnelles. .
Prélude, Préluder. C'est en général chanter ou
jouer quelque trait de fantaisie irrégulier et assez
court, mais passant par les cordes essentielles du ton,
soit pour l'établir, soit pour disposer sa voix; ou bien
poser sa main sur un instrument, avant de commen-
cer un morceau de musique. Mais sur l'orgue et le
piano, l'art de préluder est plus considérable; c'est
composer et jouer impromptu des morceaux chargés
de tout ce que la composition a de plus savant en
dessin, en fugue, en imitation, en modulation et en
harmonie.
PRÏ 137
Préparation. On appelle ainsi, dans les méthodes
harmoniques fondées sur l'expérience, l'obligation de
faire entendre d'abord certaines notes des accords dis-
sonants, avant de les attaquer.
Préparation au chant. On donne ce nom aux
études du solfège et de la vocalisation. Ces études
servent à former l'élève à la lecture de la musique, à
façonner sa voix, à la rendre égale sur tous les
points, à lui donner du corps et de l'agilité, à affer-
mir son intonation, avant de lui confier l'exécution
des compositions vocales.
Préparer. C'est l'action que forme harmonique-
ment une consonnance avant une dissonance, dans
une ou plusieurs parties aiguës ou moyennes sur une
note de basse.
Prestant. Jeu d'orgue; il est d'étain et ouvert. Son
plus grand tuyau a quatre pieds de longueur. Il sonne
Ynt à l'octave au-dessus du bourdon de huit. Le près-
tant entre dans presque toutes les associations de jeux
de l'orgue.
Presto. Ce mot, écrit à la tête d'un morceau de
musique, indique le plus prompt et le plus animé
des cinq principaux mouvements de la musique.
Presto signifie vite ; son superlatif prestissimo, très-
vite, marque un mouvement encore plus pressé et le
plus rapide de tous.
Prima donna. Titre de la première et principale
cantatrice d'un opéra.
Principal, Principale. On donne cette épithète à
la partie récitante d'un concerto et à la partie con-
certante, pour les distinguer des parties des instru-
ments de même nature qui ne doivent figurer que
dans les accompagnements. Violon principal, clari-
nette principale, cor principal.
Prise du sujet. C'est l'instant où une partie s'em-
pare du sujet de la fugue pour faire son entrée.
138 PlVO
Professeur. Celui qui enseigne ou exerce la musi-
que prend le titre de professeur, du mot profession
ou de l'art qu'il professe.
Progrès de la fugue. C'est ainsi que l'on appelle
la suite de la fugue, à partir du point où toutes les
parties ont fait chacune leur entrée, et où tous les
fils du discours musical sont liés ensemble.
Progression (ou marche) de Basse. C'est un mor-
ceau d'harmonie dans lequel toutes les parties mar-
chent avec une telle symétrie, que l'intelligence, exclu-
sivement attentive à cette symétrie parfaite, oublie de
penser à la nature et à l'enchaînement des accords
employés, et les souffre tous.
On écrit sous la forme que l'on veut deux ou trois
accords parfaitement réguliers qui forment le thème
de la progression et qu'on reproduit plusieurs fois, en
montant ou en descendant.
Prolation. C'était dans l'ancienne musique une
manière de déterminer la valeur des notes demi-
brèves sur celle de la brève, ou des minimes sur celle
de la demi-brève. Cette prolation se marquait après la
clef, par un cercle ou un demi-cercle , ponctué ou
non ponctué.
Prologue. Sorte de petit opéra qui précède le
grand, l'annonce et lui sert d'introduction.
Prolongation. La prolongation en général consiste
à continuer une ou plusieurs notes d'un accord sur
un ou plusieurs accords suivants. ( Voyez le mot
Retard).
Proposition. Terme que l'on emploie pour désigner
la première phrase d'une fugue, contenant le sujet et
tous les a&nlre-sujets, quel qu'en soit le nombre.
Propriété. Disposition de la mélodie dans l'an-
cienne musique, selon qu'elle procédait naturelle-
ment par bémol ou par bécarre.
Prose. L'usage des proses était très-fréquent dans
PSA 139
les premiers temps de l'Église. L'office romain n'en
a conservé que trois : Yictimœ paschali laudes, pour
le jour de Pâques, Veni sancte Spiritus, pour la Pen-
côte, Lauda, Sion, Salvatorem, pour la fête du Saint-
Sacrement. On les chante souvent en musique. Le
Stabat Mater est plus célèbre encore. Tous les amis de
la grande musique connaissent ceux de Palestrina, de
Pergolèse, de Haydn, de Rossini, etc., etc.
Proslambanomenos. Nom du la ajouté parles Grecs
au-dessous du si, par lequel commençait leur sys-
tème. Guido ayant placé un sol au-dessous de ce /a,
ce 50/ fut appelé hypo~proslambanomenosy c'est-à-dire
sous-proslambanomène.
Prosodie. La voix de l'homme est naturellement
une succession de notes ou degrés musicaux, lors
même qu'il parle ou émet sa pensée. C'est la plus
grande preuve de la présence d'une âme qui donne
ses passions à la matière. Il est impossible, si la pre-
mière langue parlée par l'homme fut l'hébraïque,
qu'Adam, dans cet idiome, ait manifesté son admi-
ration pour les merveilles de la création, et son amour
pour Eve, sans accentuer vivement sa parole, sans
l'animer de longues et de brèves, tantôt plus lentes,
tantôt plus rapides, enfin sans la chanter en quelque
sorte. La musique fut depuis une extension de cette
prosodie naturelle. Elle se sert même quelquefois du
verbe prosodier pour exprimer les diverses mesures
et rhythmes de son chant. Toutefois la musique, par
son art, perfectionna et fixa, depuis, la prosodie innée
dans chaque idiome. Les vers et la musique sont le
dépôt conservateur de la prosodie générale chez tous
ïeb peuples.
Psalmodier. C'est chanter ou réciter les psaumes et
l'office d'une manière particulière; la psalmodie tient
le milieu entre léchant et la parole. C'est du chant,
parce que la voix est soutenue ; c'est de la parole,
HO PSA
parce qu'on garde presque toujours le même ton,
et que l'on observe exactement le débit oratoire.
Psaltérion. Instrument à cordes fixes, qui a la
forme d'un triangle tronqué par en haut, et dont
chaque note a deux cordes de laiton ou d'acier. Il se
joue des deux mains, en mettant aux doigts des an-
neaux plats, d'où sort un fort tuyau de plume pointu.
Psaumes. Hymnes ou cantiques écrits en hébreu,
et dont le roi David passe généralement pour être
l'auteur. David dansant devant l'arche, ou retiré dans
son palais, ou môme assis à la table des festins,
chantait ses poésies nationales et sacrées au son du
kinnor (la grande harpe), et dans le temple les écla-
tants buccins, les doux psaltérions, les vibrantes
cymbales, les chœurs mélodieux de 4,000 lévites les
accompagnaient de leur puissante harmonie.
Durant la captivité de Babylone, des Juifs mouru-
rent de tristesse de ne pas entendre les belles louanges
du Dieu de leurs pères. Leurs regards se levaient in-
cessamment vers les saintes montagnes. Le Super
flumina Babylonis faisait ruisseler sur leurs joues un
torrent de larmes. Aujourd'hui encore, indifférents
que nous sommes, nous ne lisons pas ces plaintes
harmonieuses sans avoir l'âme navrée de tristesse.
C'est la plus touchante élégie qu'aient enfantée la dou-
leur, la captivité et l'exil.
Beaucoup de compositeurs célèbres ont mis des
psaumes en musique. A leur tète, brille Marcello,
un des plus beaux génies qui aient illustré l'Italie.
Une admirable expression poétique, beaucoup d'ori-
ginalité et de hardiesse dans les idées; entin, une
grande richesse et une grande variété de moyens, ont
fait considérer les cinquante psaumes qu'il a publiés,
non-seulement comme son chef-d'œuvre, mais
comme une des plus belles productions de l'art.
Les Miserere d'Allegri, de Bai, de Jomelli, qui en a
QUA 141
fait quatre ou cinq, parmi lesquels on remarque sur-
tout celui à deuxvoix, dePaisiello, de Donizetti, etc.,
sont célèbres.
Pupitre. Meuble dont on se sert pour poser les
livres de musique, les partitions, les parties séparées,
dans une situation commode pour être lus.
Q
Quadrille. Danse d'un caractère très-gai, d'un
mouvement vif, dont la mélodie est de 2/4, et qui a
deux reprises de huit mesures chacune. On appelle
aussi quadrille un groupe de quatre danseurs et de
quatre danseuses qui figure dans les ballets et les
grands bals, et qui se distingue des autres groupes
par un costume particulier. Le quadrille se compose
de cinq figures ayant chacune son caractère spécial.
On les nomme 1° Pantalon, 2° Été, 3° Poule, 4° Pas-
tourelle ou Trénis, 5° Final. Le Pantalon s'écrit à
6/8, rarement à 2/4. VÉté s'écrit à 2/4 souvent et se
joue plus lentement que le pantalon. La Poule s'écrit
à 6/8 ; elle a un caractère sérieux et sa phrase est on-
dulée. La Pastourelle est d'un mouvement plus vif
que celui de la Poule. Le Final doit avoir de l'entrain;
il est permis d'en presser la mesure, sans cependant
faire courir les danseurs.
Quadricinium. Composition à quatre parties.
Quadruple croche. Note de musique valant le
huitième d'une croche. Les quadruples croches sont
crochées à quatre crochets, ou à quatre barres qui eh
142 QUA
tiennent lieu, quand elles sont plusieurs de suite.
Qualité du son. La qualité du son ne saurait être
déterminée, car les diverses matières qu'on peut em-
ployer pour la confection des instruments, la ma-
nière de les jouer, ou d'autres inventions peuvent
rendre le son tout à fait différent de celui qu'ont tous
les instruments on usage de nos jours.
Quantité des sons musicaux. Si l'on entend par là
l'extension des sons musicaux, cette extension n'étant
pas bornée, il n'est pas possible de la déterminer, car
on peut inventer des instruments qui rendent des
sons plus aigus ou plus graves ( toujours appréciables
cependant) que ceux que l'on connaît aujourd'hui.
Quart de soupir. Chaque note, suivant sa valeur,
a un silence correspondant. Les silences des diverses
valeurs ont des noms qui leur sont particuliers. Ainsi,
par exemple, on appelle pause celui de la ronde,
demi-pause celui de la blanche, soupir celui de la
noire, demi-soupir celui de la croche, quart de soupir
celui de la double croche, etc.
Quart de ton. Quatrième partie de l'intervalle d'un
ton, qui n'est employée ni dans la mélodie ni dans
l'harmonie, attendu que notre oreille n'est point ha-
bituée à mesurer ces petits intervalles. On dit,
en parlant d'une intonation défectueuse, que le
musicien monte ou baisse d'un quart de ton.
Quarte de nasard. Jeu d'orgue qui sonne la quarte
au-dessus du nasard, et l'octave au-dessus du près-
tant. Ce jeu fait partie de ceux qu'on appelle jeux
de mutation.
Quarte. Intervalle de quatre degrés. La quarte
peut être de trois espèces : la naturelle, la diminuée,
Y augmentée.
Tant que la quarte ne forme pas un retardement
de la tierce de l'accord suivant, elle est toujours con-
sonnance et doit êlre considérée comme telle après la
QUA 143
quinte naturelle dans son usage harmonique; elle est
cependant sujette, ainsi que la dissonance, à une pro-
gression limitée. Ceci donna lieu, dans le siècle der-
nier, à beaucoup de controverses sur la question de
savoir si la quarte est ou n'est pas une consonnance ;
mais il est évident qn'elle est consonnance quand elle
fait partie d'un accord parfait; elle est dissonance
quand elle est introduite, comme retard, dans un ac-
cord, dont, naturellement, elle ne ferait pas partie.
La quarte doublée ou transposée à l'octave s'appelle
onzième.
Quarter. C'était chez les anciens musiciens une
manière de procéder dans le déchant ou contre point,
plutôt par quartes que par quintes.
Quasi, Presque. Ce mot sert à indiquer le mouve-
ment; par exemple, andante quasi allegretto.
Quasi-Syncope. Ancien nom de la figure dans la-
quelle on répétait la môme note divisée par la barre
de mesure, sans être unie par la liaison.
Quaternaire. Ce qu'on appelle le quaternaire sa-
cré de Pythagore comprend les nombres 1, 2, 3, 4,
qui indiquent les proportions relatives de l'octave,
de la quinte et de la quarte. Ces nombres correspon-
dent aux notes do, do, sol, do, et on trouve en eux, de
1 à 2, la proportion de l'octave, de 2 à 3 celle de la
quinte, et de 3 à 4 celle de la quarte.
Quatorzième. Septième, augmentée d'une octave.
Quatre mains. On appelle sonate à quatre mains
une pièce composée pour être exécutée par deux
personnes sur un même piano ; elles se placent l'une
à côté de l'autre, et se divisent le clavier par moitié.
L'octave ajoutée à cet instrument ouvre un champ
plus vaste à la sonate à quatre mains, et donne à
chaque exécutant une étendue de trois octaves. Mal-
gré ces avantages, cette espèce de composition pro-
duit peu d'effet, et doit plutôt être considérée comme
144 OUA
pièce d'étude que comme morceau de concert. 11
existe de très-belles sonates à quatre mains de Mo-
zart; on a arrangé des symphonies de Haydn, et des
ouvertures d'opéra à quatre mains pour le piano.
Quatricinia. Nom de petits morceaux de musique
pour quatre cors ou trompettes.
Quatuor. Morceau de musique vocale ou instrumen-
tale composé pour quatre parties. Dans son acception
la plus étendue, ce mot s'applique à toute espèce de
musique écrite pour quatre voix ou pour quatre ins-
truments, quelle que soit d'ailleurs l'importance re-
lative de chacune des parties. Mais, dans un sens plus
restreint et plus particulièrement usité, il ne s'ap-
plique qu'aux compositions dont toutes les parties
sont concertantes ou obligées. C'est dans ce sens que
J.-J. Rousseau, dont au reste les connaissances mu-
sicales étaient incomplètes et fort erronées, dit qu'il
n'existe point de vrais quatuors, ou qu'ils ne valent
rien. Cette assertion, trop absolue pour être juste,
prouve tout au plus que le célèbre philosophe a voulu
jouer sur le mot, ou que la portée de ses vues en mu-
sique ne s'étendait pas au delà du cercle rétréci qui
servait alors de limite à l'art musical.
Le quatuor concertant, lorsqu'il est écrit pour des
voix, peut être accompagné par l'orchestre. Quant au
quatuor instrumental, il est ordinairement exécuté
par les seuls instruments pour lesquels il a été écrit.
Cependant il peut être également accompagné par
l'orchestre, et s'il est conçu dans des proportions ins-
trumentales brillantes, le morceau prend le nom de
symphonie concertante.
Il n'y a pas longtemps que les quatuors et autres
morceaux d'ensemble sont usités en France. Les opé-
ras de Gluck ne présentent même, à l'exception des
chœurs, que du récitatif, des airs, quelques duos, et
presque jamais des trios et des morceaux d'ensemble.
QUE 143
C'est encore à l'Italie que nous devons l'introduction
de cette partie si intéressante de l'art.
Le premier trio qui parut fut entendu dans un
opéra bouffon, composé par Logroscino et exécuté en
1750. Le succès n'eut rien de bien remarquable, mais
la route était indiquée; une nouvelle carrière s'ou-
vrait au génie, et depuis Piccinni jusqu'à Paisiello et
Mozart, les progrès furent immenses. On se souvient
encore de l'enthousiasme qu'excita le fameux septuor
du Roi Théodore de Paisiello, et les quatuors, sextuors
et finales des différents opéras de Mozart, Spontini et
Weber montrent à quel point il est possible de ré-
pandre du charme et de Fintérêt sur les scènes lyri-
ques à plusieurs personnages.
L'illustre Haydn, qu'on a si justement surnommé
le père de la symphonie, peut à aussi juste titre être
regardé comme le créateur du quatuor instrumental.
Après lui, Mozart et Beethoven, deux des plus grands
génies dont l'art musical puisse se glorifier, ont digne-
ment continué l'œuvre qu'il avait commencée, et
porté ce genre de musique à un point de perfection
qui ne laisse rien à désirer.
Querelles musicales. Les querelles musicales les
plus célèbres sont celles qui eurent lieu dans le siècle
dernier entre les Lullisles et les Ramistes, et plus tard
entre les Gluckistes et les Piccinnistes. Nos lecteurs
nous sauront gré sans doute d'entrer dans quelques
détails sur ce dernier sujet.
Gluck, en venant en France avec son Iphigénie en
Aulide d'abord, ensuite avec Orphée arrangé pour
notre théâtre, tout en nous apportant de nouvelles
jouissances, flattait aussi notre orgueil national; il
rendait son éclat à un titre presque effacé de notre
gloire.
Iphigénie en Aulide fut représentée en 1774. Le suc-
cès croissait de représentation en représentation,
T. n. k
146 QLE
et les critiques croissaient aussi tous les jours. Ces
critiques n'étaient pas seulement celles de l'envie,
c'étaient celles de dix à douze hommes de lettres, dont
les jugements avaient beaucoup d'autorité, et qui en-
traînèrent à leur suite une foule d'amateurs et de
dilettanti. Ces hommes ne pouvaient plus concevoir
une autre musique que celle dont ils avaient goûté le
charme dans leur jeunesse ; d'autres affirmaient que
Piccinni avait atteint les dernières limites de l'art,
et criaient : Italiam, Italiam, comme si Gluck était un
barbare, parce qu'il était Allemand, parce qu'il sa-
crifiait de vains ornements à l'expression vraie des
paroles et de la situation.
C'était un avantage et non un inconvénient pour
Gluck d'être né dans cette Allemagne, organisée et
passionnée pour tous les genres de musique, et qui a
donné à l'Europe de savantes leçons et d'éclatants
modèles de l'harmonie la plus belle et la plus variée.
C'en fut un autre pour lui de s'être transporté tout
jeune en Italie, cette vraie patrie de la musique et où
florissaient alors de célèbres écoles et d'excellents
maîtres. Il étudia à Milan, sous la direction deJ.-B.
San-Martini, compositeur habile et fécond. C'est à
Milan qu'en 1741, Gluck fit représenter Artaserse,
son premier opéra.
La naissance, la formation et l'entier développe-
ment des vues musicales de Gluck furent précisément
les résultats de ces croisements de tous les pays. Il
était naturel à ceux qui avaient concouru à créer ou
à rapprocher du moins les éléments du génie de
Gluck, placés à une grande distance, de prendre un
intérêt plus particulier et plus vif à ses créations; et
lorsqu'ils eurent entendu sa musique avec des trans-
ports de plaisir, il leur était naturel d'en parler avec
des transports d'enthousiasme. D'anciennes habi-
tudes, les préventions qu'elles donnent; les préjugés
QUE 147
qu'elles établissent, pouvaient seuls faire penser
que des compositeurs nés en Italie avaient le pri-
vilège exclusif de nous donner une musique qui
convînt à notre langue, à nos oreilles et à notre scène
lyrique.
Les premiers s'appuyaient sur l'autorité des faits,
si puissants sur nos jugements, et sur celle des im-
pressions, si puissantes sur notre âme. Les seconds
n'avaient pour appui que des doctrines et des ouvra-
ges que les Piccinni et les Sacchini pouvaient faire un
jour, mais qu'ils n'avaient pas faits encore. Ces der-
niers, tous écrivains renommés, étaient en grand
nombre. Parmi les premiers, l'abbé Arnauld et Suard
parurent longtemps seuls dans la lice. Mais le plus
habile défenseur de la musique de Gluck fut, sans
aucun doute, l'auteur anonyme d'une série d'articles
qui parurent dans la Gazette de Paris, sous ce titre :
Petites Lettres, par un habitant de Vaugirard. Rien
de plus solide et de plus piquant que cette cor-
respondance, qu'on attribue généralement à Dide-
rot. Depuis les dix-huit petites lettres de Pascal,
qui firent une si glorieuse révolution dans la langue,
dans la plaisanterie et dans l'éloquence françaises,
jamais petites lettres n'ont été, depuis la première,
attendues avec plus d'impatience; on courait de toutes
parts aux cafés de Foy et du Caveau, et l'on en faisait
des lectures publiques; on s'étouffait pour mieux
entendre ; on battait des mains avec des transports et
avec des bravos.
Pendant que tout ceci se passait, des scènes d'un
caractère plus grave et plus sérieux avaient lieu dans
la salle de l'Académie royale de Musique ; on applau-
dissait avec fureur, on sifflait avec acharnement, et les
jeunes gens, les vieillards même en venaient quel-
quefois aux mains.
Qujeue. On distingue dans les notes la tête et la
14$ on
queue : la tête est le corps même de la note ; la queue
est le trait perpendiculaire qui tient à la tête, et qui
monte ou descend indifféremment à travers la portée.
Dans le plain-chant, la plupart des notes n'ont pas
de queue ; mais dans la musique figurée moderne, il
n'y a que la ronde qui n'en ait point. Dans la compo-
sition de la fugue on appelle queue les notes ajoutées
à un sujet pour amener sa réponse. On appelle aussi
queue, ce que les Italiens nomment coda, pour dési-
gner la fin, la péroraison d'un morceau.
Queue de violon, de violoncelle. C'est la partie
de ces instruments à laquelle les cordes sont attachées,
tandis qu'elles sont roulées de l'autre côté des che-
villes.
Quinque. Nom qu'on donnait autrefois en France
à un morceau de chant à cinq voix; aujourd'hui on
dit quintetto ou quintette.
Quinte. La seconde des consonnances dans l'ordre
de leur génération. La quinte est une consonnance
parfaite ; son rapport est de 2 à 3 ; elle est composée
de quatre degrés diatoniques, arrivant au cinquième
son, d'où lui vient son nom de quinte. Son intervalle
est de trois tons et demi.
On compte trois espèces de quintes, lô la quinte
juste ou inaltérée, ou simplement quinte; 2° la
quinte diminuée, que l'on appelait autrefois fausse
'quinte; cet intervalle est composé de deux tons et
deux demi-tons; 3o la quinte augmentée; cet inter-
valle est composé de trois tons et deux demi-tons.
Quintes (leur influence sur la voix). Une des études
les plus essentielles pour assouplir la voix est celle des
quintes. Lorsque l'élève peut l'exécuter d'une manière
correcte avec toute l'énergie et la netteté convenables,
il faut doubler la vitesse du mouvement, et faire dire
trois quintes avec la même respiration.
Outre les résultats que cet exercice doit faire obte-
QUI 149
nir, quand il est bien dirigé, il en est un qui concourt
d'une manière bien essentielle au mécanisme vocal,
c'est la puissance de l'inspiration. Comme toutes les
autres parties de l'organisation humaine, les poumons
sont susceptibles d'habitudes, et, par conséquent,
soumis à une sorte d'éducation. Les plongeurs qui
se tiennent sous l'eau pendant plusieurs minutes sont,
on le conçoit, des hommes dont l'appareil respira-
toire est doué d'une grande vigueur; mais, quelle
que soit l'excellence de leurs organes, il ne faut pas
croire que ces hommes arrivent tout naturellement à
suspendre les mouvements de leurs poumons pendant
un intervalle de temps qui paraîtrait fabuleux à ceux
qui n'en ont pas été témoins ; ils ne parviennent au
dernier degré de leur art qu'au moyen d'exercices
gradués, par lesquels ils obtiennent peu à peu de
leurs poumons toute la puissance inspiratrice dont
ils sont susceptibles.
Il est juste de dire que les vigoureux poumons d'un
individu arrivé à tout son développement organique,
n'ont besoin d'aucune extension pour suffire à la lon-
gueur d'expiration que nécessite l'exécution des trois
quintes dont nous venons de parler. Mais chez les
sujets moins développés ou moins favorisés par la
nature, l'appareil respiratoire peut paraître au pre-
mier abord défectueux, sans qu'il le soit en effet. II
faut les habituer peu à peu à donner à leurs poumons
l'extension normale de toutes leurs facultés. Pour
arriver à ce but, la tenue d'une note serait insuffi-
sante; il faut une succession* de sons, telle que les
quintes ascendantes ou descendantes.
Mais cet exercice exige de la part du maître une pru-
dence qui est en quelque sorte du domaine de la mé-
decine; car il y a dans la nature humaine des limites
qu'on ne peut franchir sous peine de mort, et qu'il
faut cependant atteindre pour obtenir d'indispensa-
150 OU
bîes résultats. Le moindre abus, provenant de l'inex»
périence du maître et des efforts exagérés de l'élève,
peut entraîner, même dans de bonnes organisations,
des désordres dont le moindre effet est l'affaiblisse-
ment et la perte de la voix.
On voit, au résumé, combien l'étude des quintes
est essentielle, puisque ses résultats sont d'assouplir
la voix avec une merveilleuse promptitude, de don-
ner au trait son véritable caractère de netteté et d'éner-
gie, d'égaliser toutes les notes de la voix, et d'habituer
les poumons à fournir de longues expirations.
En harmonie, la grammaire musicale défend la
succession immédiate de deux octaves et de deux
quintes par mouvement direct. Cependant dans une
composition à quatre parties, elle peut tolérer quel-
quefois deux quintes successives par mouvement
contraire; mais elle ne permet deux octaves par
mouvement contraire que dans les morceaux à cinq
parties ou à plus de cinq ; il faut, en outre, que ces
octaves se trouvent entre les voix intermédiaires, ou
tout au plus entre une voix extérieure et une voix
intermédiaire.
On défend les deux octaves par mouvement direct,
parce que c'est une pauvreté qui n'ajoute rien à
l'harmonie. On défend les quintes, parce qu'elles
produisent une dureté.
Quintette. Morceau de musique composé pour
cinq instruments ou cinq voix, et dont chaque partie
est concertante ou obligée. Les quintettes sont ordi-
nairement composés d'un allegro ou moderato ; d'un
andante, d'un menuet ou scherzo, et d'un finale.
Sans parler dans un sens absolu, on peut dire que
le mérite de ce genre de composition consiste autant
dans le charme et la variété de la mélodie que dans
l'exposition, l'arrangement et le développement des
idées, la conception d'un plan déroulé avec art, et
OUO 131
enfin dans l'intérêt d'une instrumentation nuancée
avec goût.
Boccherini a composé un grand nombre de quin-
tettes très-remarquables par la naïveté, la grâce et
l'originalité du style. Georges Onslow a su se créer,
dans le même genre, un style et une manière. Reicha
a aussi composé plusieurs quintettes pour flûte, haut»
bois, clarinette, cor et basson, qui jouissent d'une
réputation bien méritée.
Il est fort difficile de composer un bon quatuor ou
un bon quintette, et tel musicien qui compte au
théâtre des succès brillants et mérités, serait fort em-
barrassé d'en produire un passable. Ce genre de
musique exige des études toutes particulières ; il a des
mélodies et des tours de phrases qui lui sont propres,
des rhythmes d'accompagnement qui ne conviennent
qu'à lui, et enfin des moyens d'expression qui partout
ailleurs seraient dépourvus d'énergie.
QuiNQUATRIÀ MINORA, OU QuiNQUARTUS MINUSCULE.
Nom que Ton donnait, à Rome, à la fête des joueurs
de flûte, pendant laquelle on se promenait dans les
rues de la ville, vêtu d'un costume particulier à ce
jour, pour aller ensuite se réunir au temple de Mi-
nerve.
Quinzième. Double octave. On donne aussi ce nom
à un registre de l'orgue.
Quolibet. On entendait autrefois par ce mot des
morceaux de musique d'un caractère comique et tri-
vial. Ainsi, par exemple, on unissait deux voix, dont
l'une chantait des paroles tout à fait différentes de
celles que chantait l'autre. Un tel ensemble produi-
sait des jeux de mots ridicules. Aujourd'hui on donne
aussi ce nom à un centon musical.
152 RAN
R
Ràbàna. Espèce de timbale dont se servent les
femmes indiennes pour accompagner leur chant.
Racler. Terme de mépris, par lequel on désigne
la mauvaise manière de jouer d'un instrument, tel
que le violon ou la basse, en faisant crier les cordes
sous l'archet.
Racleur. Musicien qui joue avec dureté du violon
ou de la basse.
Rallentando. Ce mot signifie qu'on doit aller en
retardant peu à peu la mesure, comme on diminue
peu à peu la force des sons dans le diminuendo.
On sait que Duprez, avec toutes ses admirables
qualités de chanteur, n'était pas exempt de défauts;
il y en a un surtout que quelques critiques ne lui
ont jamais pardonné, celui de ralentir tous les mou-
vements, mais il tirait souvent de puissants effets de
cette licence. Les ténors qui sont arrivés après lui,
ont exagéré encore ce défaut, et ils en sont venus à
dénaturer complètement les œuvres des maîtres.
Ramage. On désigne par ce nom le chant modulé
des oiseaux chanteurs, tels que le rossignol, la fau-
vette, le serin, etc.
Ramage se prend en mauvaise part, lorsqu'il s'agit
d'un chanteur qui ne plaît pas. C'est en ce sens
qu'on dit : L'ennuyeux ramage de cet homme me
fatigue.
Ranz des vaches. C'est un air bucolique, sans art,
grossier quelquefois, que les bouviers de la Suisse
j ouent avec délices sur la cornemuse, en menant paître
RAP 153
Jeurs vaches sur les rochers, où ils sont nés ainsi
qu'elles. Cet air est devenu fameux, européen même,
par les effets sympathiques qu'il exerçait sur les mon-
tagnards helvétiens, au temps de Page d'or de l'Hel-
vétie, il y a un peu plus d'un demi-siècle. Dans les
régiments suisses à la solde de la France, sitôt que la
cornemuse s'enflait pour jouer cet air, une douce joie
brillait dans les yeux de ces fiers soldats ; mais ils n'en-
tendaient pas plutôt ces sons rustiques et si connus
que répétèrent si souvent les échos de leurs monta-
gnes, que la patrie, leurs chalets, leurs rochers, leur
enfance, leurs sœurs, leurs vieux pères, leurs fiancées,
se reflétaient dans leur âme avec tant de vivacité,
qu'une mélancolie profonde succédait à cette pre-
mière joie. Laplupart d'entre eux n'y pouvaient résis-
ter. Les uns désertaient, d'autres tombaient dans une
langueur incurable, et beaucoup mouraient. Dès lors
le code militaire défendit de jouer cet air, sous peine
de mort.
Rapport des intervalles. C'est le calcul exact du
degré de distance entre deux sons différents, exprimé
par des chiffres.
Rapsodes, Rapsodies, Rapsodistes. Quand les
poëmes d'Homère furent répandus dans la Grèce,
les rapsodes, renonçant à composer eux-mêmes, se
bornèrent à chanter les divers épisodes de l'Iliade et
de l'Odyssée. Ils cousaient ces chants l'un à la suite
de l'autre, suivant les désirs de leurs auditeurs. Par
exemple, ils faisaient suivre la colère d'Achille, de-
venue le premier chant de l'Iliade, par le combat de
Paris et de Ménélas, qui en forme le troisième. Cha-
cun de ces chants pris à part, s'appelait une rap-
sodie.
Les rapsodes étaient fort recherchés par les Grecs,
si passionnés pour les arts et pour les jouissances
qu'ils procurent. On les invitait aux fêtes et aux sa-
154 REB
crifices publics, où ils chantaient les poèmes d'Or-
phée, de Musée, d'Hésiode, et surtout d'Homère. Les
rois et les princes en avaient à leurs gages pour chan-
ter durant les repas. Ils étaient fort soigneux de leur
parure, et ne se montraient jamais qu'avec de riches
habits, quelquefois même, à l'imitation des poètes,
avec une couronne d'or sur leur tête.
Rasgado. Prélude que les Espagnols exécutent en
attaquant successivement toutes les cordes de la gui-
tare avec le pouce, et en suivant la mesure et le
rhythme des boléros et des seguidillas» Le rasgado est
la ritournelle ordinaire de ces sortes d'airs.
Rats de ballet. Ce sont de petites femmes qui
agitent les jambes, qui élèvent les bras et font à peu
près quelque chose qui ressemble à de la danse. Lerat
est élève de l'école de danse, et si on l'a ainsi nom-
mé, c'est probablement parce qu'il est l'enfant de la
maison, qu'il y vit, qu'il y grignote; parce qu'il
ronge et égratigne les décorations, éraille et troue les
costumes et commet une foule de dommages in-
connus.
Ré. C'est le second degré de notre échelle musicale.
Il porte accord parfait mineur, et s'emploie en har-
monie comme second degré de la gamme majeure
naturelle d'ut, ou comme quatrième degré du relatif
mineur de cette même gamme. Dans ce dernier cas,
on lui fait quelquefois porter l'accord parfait majeur,
pour éviter la seconde augmentée que ferait sa tierce
mineure, fa naturel, avec le sol dièse sensible du ton.
Ré est aussi le nom qu'on donne à la troisième
corde du violon et à la seconde de l'alto, du violon-
celle et de la contre-basse, parce que dans l'accord
ordinaire, ces cordes sonnent l'unisson ou l'octave
de cette même note.
Rebec. Instrument d'une forme à peu près sem-
blable à celle du violon, dont on faisait usage en
RÉC 155
France dans le moyen âge, et qui ne fut abandonné
par les ménétriers qu'à la fin du dix-septième siècle.
Le rebec était monté de trois cordes; il y avait des
dessus, des tailles et des basses de rebec.
Récitatif. Un opéra entièrement composé d'airs
chantés sans interruption, nous ennuierait et nous
fatiguerait à la seconde scène, malgré le charme, la
beauté, l'expression qui pourraient se trouver réunis
dans ces airs ; pour remédier à ce grave inconvénient,
il faut avoir recours au dialogue parlé, ou imaginer
un langage de convention qui tienne le milieu entre
la parole ordinaire et la parole musicale, un moyen
d'union, enfin, qui fasse disparaître ce qui nous cho-
que dans la transition immédiate de la parole au
chant. Le récitatif semble remplir toutes ces condi-
tions. C'est une sorte de déclamation notée, soute-
nue par une basse ou qu'accompagne l'orchestre, et
contre laquelle il n'y aurait rien à dire si elle n'était
quelquefois, trop souvent même, monotone dans son
accentuation, et pauvre dans ses formes musicales,
dont les combinaisons son» extrêmement restreintes.
Tel qu'il est encore aujourd'hui, le récitatif offre ce-
pendant quelquefois des passages remarquables, sur-
tout lorsqu'il est entremêlé de traits de symphonie
qui lui donnent de l'expression et lui impriment ce
caractère énergique et vrai qui, seul, le rend sup-
portable. Le récitatif, cependant, n'exclut pas l'in-
spiration , tant s'en faut, et il y a de magnifiques
récitatifs dans les chefs-d'œuvre des grands maîtres.
Ceux de Gluck seront toujours cités, ceux (ÏOtello,
de Guillaume Tell sont admirables.
Il y a deux espèces de récitatifs, celui qui n'est ac-
compagné que par la basse ou le piano, quelquefois
par tous les deux ensemble, et qu'on appelle récitatif
libre ou simple, et celui qui est accompagné par l'or-
chestre, et dont les intervalles de repos sont remplis
loti RED
par des traits de symphonie. 11 prend alors le nom
de récitatif obligé. Les Italiens faisaient autrefois
usage du premier, ils ne l'emploient plus aujour-
d'hui que dans leurs opéras bouffes ; le second est
plus particulièrement usité dans les tragédies lyri-
ques, les drames et les opéras d'un caractère mixte,
tels que nos opéras comiques français. Tout le mérite
du récitatif réside dans l'expression et l'énergie de
l'accentuation.
Récit. Cette expression a vieilli et n'est plus
en usage aujourd'hui ; elle est remplacée par le mot
italien solo (seul) qui paraît plus convenable, puisque
réciter dans l'ancien langage signifiait chanter ou
jouer seul, par opposition au chœur ou à la sympho-
nie, qui, comme on sait, sont exécutés par un nom-
bre plus ou moins considérable de concertants.
Réciter. Chanter un récit.
Récitant. Celui qui chante un récit. Ces deux
mots se prennent dans l'ancienne acception du mot
récit.
Redoublement. C'est dans l'harmonie l'emploi si-
multané du même son fait par deux parties diffé-
rentes. (Voyez le mot Doublement).
Redowa. C'est une danse à trois temps; elle a
beaucoup d'analogie avec la Mazurka, et elle en a les
mêmes proportions. C'est sur le troisième temps que
doit porter la mélodie.
Reductio modi. Autrefois, lorsqu'on composait un
morceau de musique dans un ton transposé, et qu'on
voulait examiner s'il était traité conformément à son
ton originaire, on le transposait de nouveau dans son
ton primitif. Ce procédé s'appelait reductio modi.
Réduire. C'est arranger une composition à un ou
plusieurs instruments pour un ou plusieurs instru-
ments d'une nature différente, comme réduire un
concerto pour violon en un concerto pour piano. 11
KÉG 157
se dit principalement de la réduction d'une partition
pour le piano, ou d'un morceau à plusieurs voix,
pour une seule voix.
Réel. Quelques maîtres de chant donnent le nom
de sons réels à ceux qui sont produits par le registre de
la voix de poitrine, et sont directement lancés par toute
la force du souffle; ils appellent, par opposition, sons
de fausset ceux de la voix de tête, attendu qu'étant
formés par la partie supérieure de la trachée et ne
pouvant recevoir le même volume d'air, ils sont mai-
gres et sans force.
Dans une mélodie, on appelle notes réelles, les no-
tes de cette mélodie faisant partie des accords qui
l'accompagnent.
On appelle dans une composition à plusieurs voix,
parties réelles, les parties qui marchent sans former
entre elles plusieurs unissons ou octaves de suite,
c'est-à-dire qui ont chacune leur allure bien dis-
tincte et aussi élégante que possible : on dit d'une
fugue qu'elle est, par exemple, à six, à huit parties
réelles, pour dire qu'il n'y a pas de partie oiseuse, et
purement de remplissage.
Refrain. Terminaison d'un couplet ou d'un air de
vaudeville, qu'on répète ordinairement deux fois, et
qu'on chante quelquefois en chœur.
Régale. Jeu d'anche, le plus ancien de tous les
jeux d'orgue. Il n'est plus employé dans les orgues
modernes.
Régiment (Musique de). La musique a été regardée
dans tous les temps comme un puissant moyen d'ac-
tion sur les sentiments belliqueux. Quoi de plus pro-
pre, en effet, à seconder l'élan, à échauffer l'enthou-
siasme du guerrier? Non-seulement elle Télectrise,
l'enflamme et fui fait affronter les périls, mais elle le
délasse des fatigues de la guerre, ou l'aide à supporter
15« RÉG
patiemment et avec courage les longues marches, les
travaux les plus pénibles.
On sait combien est grande, sous ce rapport, l'in-
fluence du rhythme. Le maréchal de Saxe voulait que
Ton fît travailler les soldats au son du tambour et des
instruments en cadence. C'est ainsi que les Lacédé-
moniens, sous Lisander, avec un détachement de trois
mille hommes détruisirent le Pirée au son de la flûte,
en six heures de temps.
Depuis longtemps, en Europe, la musique de ré-
giment a pris une grande extension. C'est en Italie et
en Allemagne qu'elle reçut d'abord un accroissement
remarquable. Pierre le Grand , s'occupant de l'orga-
nisation de ses armées déterre et de mer, fit venir en
Russie des trompettes et des timbales , des hautbois
et des bassons. A chaque régiment il affecta un corps
de musique dirigé par un chef, qui, en dehors de ses
fonctions, était tenu de choisir parmi les enfants de
troupe un certain nombre de sujets, auxquels il devait
enseigner un des instruments dont se composait alors
la musique militaire. Au moyen de cette disposition,
tous les régiments russes furent en peu d'années
pourvus de musiciens recrutés dans l'armée elle-
même.
Les anciennes musiques des régiments français se
sont accrues successivement d'emprunts faits aux mi-
lices étrangères. On devait l'arigot ou fifre aux Suis-
ses, le tambour et le basson aux Italiens, la trompette
aux Maures de la péninsule, les cymbales et la grosse
caisse aux Orientaux ; la cornemuse vient des Anglais,
la clarinette et le hautbois sont une importation de
l'Allemagne. Toutefois il ne paraît pas qu'en emprun-
tant aux Allemands quelques-uns de leurs instru-
ments, les Français leur aient pris en même temps
leur manière d'en jouer; car Jean-Jacques Rousseau
nous apprend que, dans la guerre de 17 >G, les paysans
REG t5«
autrichiens et bavarois , ne pouvant croire que des
troupes réglées eussent des instruments si faux et si
détestables, prirent tous les vieux corps pour de nou-
velles levées qu'ils commencèrent à mépriser.
De nos jours, où l'art musical est parvenu en France
à un degré si éminent, les musiques militaires des ré-
giments d'infanterie sont restées dans un état d'in-
fériorité en présence de celles d'Allemagne, de Russie,
d'Angleterre et de Naples. Cependant de notables
améliorations ont été introduites dans l'organisation
de la musique de ces régiments; car à la suite des
nouvelles adjonctions d'instruments qui eurent lieu
sous l'Empire et la Restauration, le nombre des mu-
siciens, qui en 1807 était de huit seulement, fut porté
successivement à douze et à vingt-sept. Ce chiffre,
augmenté aujourd'hui d^ vingt élèves environ, semble
suffisant pour maintenir le corps de musique sur un
pied respectable. C'est sous le rapport de la combi-
naison et du jeu des différentes espèces d'instruments
que l'organisation des musiques militaires laisse en-
core à désirer.
Nous devons dire que grâce à l'éducation donnée
par !e Gymnase musical militaire de Paris, de grands
progrès se sont accomplis dans cette branche de l'art;
et tout fait espérer que dans peu de temps la régéné-
ration de nos musiques militaires sera complète.
C'est M. Carafa qui dirige le Gymnase musical mili-
taire, et les principaux professeurs sont : MM. F. Ba-
zin, Le Borne, Forestier, Klosé, Dieppo,Verroust, etc.
Registre d'orgue. Les registres sont des règles de
bois que l'organiste tire ou pousse, et qui font agir cer-
tains mouvements pour ouvrir et fermer les jeux de
l'orgue, selon qu'il éprouve le besoin de les faire chan-
ter ou de les réduire au silence. La poignée par la-
quelle l'organiste ouvre ou ferme un registre s'ap-
pelle tirant »
160 RE\
Règle. Prescription ou précepte auquel on doit
conformer la composition et l'exécution.
Règle d'octave. Formule d'harmonie établie pour
l'accompagnement des gammes majeure et mineure,
tant en montant qu'en descendant, pour faciliter
l'exécution de la basse non chiffrée à celui qui joue
de la basse continue, et pour simplifier l'art ordinaire
de chiffrer l'harmonie. (Voyez Octave.)
Régleur. Ouvrier qui trace les portées sur le pa-
pier pour écrire la musique.
Régulier. Tout ce qui est renfermé dans les règles
et dans de justes limites, ou qui suit une progression
uniforme. C'est pourquoi on appelle cadence régulière
celle qui s'accomplit selon les formules usitées ; mar-
che régulière, une progression de basse portant des ac-
cords se succédant par une marche identique; imita-
tion régulière, celle dont les parties s'imitent bien, etc.
Ré la. Désigne dans l'ancien solfège la nuance de
ces syllabes sur le son ré ou la.
Relation. Rapport entre un son qui vient d'être
entendu~dans une partie vocale et instrumentale, et
un autre son qu'on entend actuellement dans une
autre. Lorsque ces deux sons concourent à laisser
dans l'oreille la sensation d'une consonnance exacte,
la relation est bonne. Quand il résulte de leur rapport
une consonnance altérée, la relation est fausse; les
fausses relations sont proscrites dans la composition
scolastique.
Relation non harmonique. Les anciens appelaient
de ce nom une mauvaise succession de sons.
Renversement. Un accord est renversé quand sa
note fondamentale n'est pas à la basse. L'accord par-
fait a deux renversements, et l'accord de dominante,
trois.
Les renversements et leurs positions ont tous une
expression particulière; leur choix est déterminé par
KEP 161
les exigences de la pensée, par celles du mouvement
naturel et facile des parties, et par la pensée du com-
positeur.
Réplique. Signifie octave, quand il s'agit d'un son
redoublé, et reprise du sujet, quand on parle d'une
fugue.
Répons. Espèce d'antienne redoublée qu'on chante
à l'église après les leçons de matines, et qui finit en
manière de rondeau, par une reprise appelée
réclame.
Réponse. C'est, dans une fugue, la rentrée du su-
jet par une autre partie. Si le sujet est dans le ton de
la tonique, la réponse doit être dans le ton de la domi-
nante, et vice versa; dans une contre-fugue, c'est la
rentrée du sujet qu'on vient d'entendre, après l'avoir
renversé. (Voyez le mot Fugue.)
Repos. C'est la terminaison de la phrase, termi-
naison sur laquelle le chant se repose plus ou moins
parfaitement. Le repos ne peut s'établir que par une
cadence sur la tonique ou sur la dominante. Si la ca-
dence est évitée, il ne peut y avoir de vrai repos, car
il est impossible à l'oreille de se reposer sur une dis-
sonance. On voit par là qu'il y a précisément autant
d'espèces de repos que de sortes de cadences pleines.
Ces différents repos produisent dans la musique l'effet
de la ponctuation dans le discours.
Reprise d'un opéra. Représentation d'un opéra
qu'on donne après être resté plus ou moins long-
temps sans être joué*
Reprise. Au sens propre, c'est toute partie d'un
morceau de musique qui doit être jouée ou chantée
deux fois. Mais généralement on applique cette déno-
mination à la première ainsi qu'à la seconde division
d'un morceau, quoique cette dernière ne s'exécute
presque jamais qu'une fois. Dans un sens plus res-
treint, on entend quelquefois par reprise la seconde
162 RfcLÏ
partie seulement. C'est dans ce sens qu'on dit : La re-
prise de cette ouverture e^t mieux faite que la pre-
mière partie.
Requiem. Prière que l'Eglise fait pour les morts, et
dont l'introït commence par ce mot. Il y a de su-
blimes musiques composées sur ce thème, par Jo-
melli, Mozart, Cherubini.
Ré sol. Désignait dans l'ancien solfège le change-
ment de ces deux syllabes sur le son ré ou sol.
Résolution. La résolution consiste en ce que la
dissonance frappée descend quelquefois, mais rare-
ment, et monte d'un degré conjoint sur la consonnance
voisine. On dit aussi qu'un accord se résout sur un
autre, la septième dominante se résout sur la tonique
ou sur la su-dominante, ou sur une autre septième, etc.
(Voyez Dissonances et Accords (des).
Résonnance. Prolongement ou réflexion du son,
soit par les vibrations continuées des cordes d'un
instrument, soit par les parois d'un corps sonore, soit
par la collision de l'air renfermé dans un instrument
à vent.
Respiration. C'est l'action que font les poumons
pour attirer ou repousser l'air. Cette action se divise
en deux mouvements alternatifs, Y aspiration et Y expi-
ration. Dans l'aspiration, les poumons se dilatent
pour introduire l'air extérieur dans la poitrine, et dans
l'expiration, ils s'affaissent pour le faire sortir.
On ne saurait trop recommander aux élèves de
s'occuper de la respiration. Elle est tout pour le
chant. Sans un grand volume d'air, qu'on doit savoir
comprimer et ménager longtemps avec adresse, il
n'est point de force ni de timbre dans la voix ; de
plus, sans cette faculté, il n'est guère possible de
bien ph raser un chant.
Retard. On retarde, dans un accord , une note
consonnante par une note prise dans l'accord précé-
nu* it>a
dent. Le retard peut être aussi purement mélodique,
et ne pas figurer dans l'harmonie sur laquelle se
déroule le chant. L'art des retards est celui de la
coquetterie en musique, ils ont pour objet de faire
désirer un son dont l'apparition satisfait l'oreille.
Le retard est l'empiétement du levé sur une partie
du frappé; presque tous les retards sont produits par
l'effet des prolongations.
Retranchement de notes dans les accords. Aucune
loi n'oblige d'écrire toutes les notes d'un accord : on
peut donc en retrancher quelques-unes ; grâce à l'en-
chaînement des accords et au sentiment de la tona-
lité, un accord incomplet possède, aux yeux des ha-
biles, la physionomie et la signification de l'accord
complet. Il les possède tout entières, malgré leur
réalité physique moins accusée et moins saillante.
Lorsqu'on retranche une note de l'accord parfait,
on conserve ordinairement la tierce de la tonique,
parce qu'elle indique le mode et caractérise l'accord.
Dans un duo, on conserve habituellement les noies
qui sont à la tierce ou à la suite l'une de l'autre,
comme ut mi, mi sol, mi ut, sol mi. Les notes de l'ac-
cord de dominante peuvent toutes se retrancher suc-
cessivement, et toutes s'associer les unes avec les
autres : chacun de ces groupes possède une nuance
particulière d'expression. Les anciens compositeurs
supprimaient souvent la tierce dans l'accord final.
Rhythme. Le rhythme n'est autre chose que la
symétrie appliquée au mouvement, la différence de
vitesse ou de lenteur modifiée d'une manière symé-
trique, et dont les formes se reproduisent à certains
intervalles disposés dans un ordre assez régulier pour
former une sorte de mesure cadencée. Tout mouve-
ment qui se succède ainsi nous affecte déjà agréable-
ment, même sans le secours d'aucune espèce de sono-
rité musicale. Quel charme n'aura pas ce même
104 Kl G
mouvement, si nous appliquons à chacun des temps
qui le composent des sons choisis, et dont la succes-
sion soit telle qu'elle flatte l'oreille! nous jouirons
alors d'une véritable mélodie, au lieu de la psalmodie
vague et monotone que nous laisserait l'absence du
mouvement rhythmique.
On donne aussi le nom de rhythme en musique, à
certaines formules ou dessins d'accompagnement qui
se reproduisent symétriquement pendant un certain
espace de temps.
Rhythmique. Une musique rhythmique est celle
qui est ordonnée avec une parfaite symétrie dans les
membres dont se composent ses périodes. Un accom-
pagnement rhythmique est celui dans lequel le com-
positeur fait entendre constamment le groupe uni-
forme, l'arpège adopté, tandis que l'harmonie varie
ses accords. Gluck, qu'on doit souvent citer pour le
dessin des accompagnements, nous a donné les pre-
miers modèles dans le genre rhythmique.
Rhythmopée. Partie scientifique de la mélodie qui
apprend l'arrangement des parties mélodiques relati-
vement à leur extension, afin qu'elles puissent avoir
entre elles un rapport agréable.
Ricercata. Est une espèce de fugue dans laquelle
on propose la première moitié du sujet, comme dans
la fugue ordinaire, mais où la seconde moitié se tra-
vaille en inversion simple ou stricte.
Ricercato. En italien signifie recherché. On donne
ce nom à tout genre de composition où sont em-
ployées les recherches du dessin musical. Mais on l'ap-
plique plus particulièrement aux compositions ma-
drigalesques, qui, outre les recherches du dessin,
offrent encore celles du goût et de l'expression. L'école
italienne possède une grande quantité d'ouvrages en
ce genre.
Rigaudon. Sorte de danse dont l'air est à deux
RIT 165
temps, d'un mouvement gai, et se divise ordinaire-
ment en deux reprises phrasées de quatre en quatre
mesures, et commençant par la dernière note du se-
cond temps.
Rinforzando, en renforçant. C'est passer du
piano au fort, et du fort au très-fort, non tout d'un
coup, mais par une gradation continue, en enflant et
augmentant les sons, soit sur une tenue, soit sur une
suite de notes, jusqu'à ce qu'ayant atteint le point qui
sert de terme au renforcé, l'on reprenne ensuite le
jeu ordinaire.
Le rinforzando produit le même effet que le cres-
cendo ; mais son emploi est différent. On se sert plus
particulièrement de celui-ci dans les grandes pério-
des, tandis que le rinforzando ne s'emploie que pour
de petits groupes de notes, et même pour une note
seule.
RlTARDANDO, EN RETARDANT. (Voyez R\LLENTANDO).
Ritournelle. De l'italien ritornello, petit retour,
parce que autrefois l'accompagnement se bornait à
répéter la dernière phrase du chanteur. La ritournelle
a acquis avec le temps un plus haut degré d'impor-
tance; c'est aujourd'hui une sorte de prélude instru-
mental, un trait de symphonie plus ou moins déve-
loppé, qui annonce le début d'un chant vocal, ou
remplit les repos et les silences que dans toute musi-
que bien sentie le compositeur a su ménager à la voix;
ou bien encore elle complète d'une manière brillante,
expressive ou piquante le morceau, après que la voix
a cessé de se faire entendre. Les ritournelles sont d'un
effet admirable dans la musique dramatique; elles
expriment souvent les affections de l'âme avec bien
plus de force et d'énergie que la parole. Mais c'est
surtout dans les airs déclamés et le récitatif qu'elles
montrent jusqu'à quel degré de puissance elles peu-
vent atteindre, en traduisant merveilleusement la.
1*6 ROM
pantomime, le jeu de physionomie, et même jus-
qu'aux regards de l'acteur, à ces moments suprêmes
d'une scène pathétique où la parole devient impuis-
sante à exprimer les émotions de l'âme.
Rôle. Le papier séparé qui contient la musique
que doit exécuter un concertant, et qui s'appelle par-
tie dans un concert, s'appelle rôle à l'Opéra. Ainsi,
on doit distribuer une partie à chaque musicien, et un
rôle à chaque acteur.
Rôle signifie tout ce que doit chanter ou réciter un
acteur dans une pièce de théâtre.
Romains (de la Musique chez les). Rome, quelque
austères que fussent ses lois, reconnut, même dès son
berceau, le pouvoir de la musique; mais elle consa-
cra ses naissantes institutions dans cet art à son dieu
favori, à Mars. Le plus pacifique de ses rois, celui
qu'on doit regarder comme son législateur religieux,
Numa, ordonna que les prêtres de ce dieu chante-
raient, en portant en procession Yancile, ou le bou-
clier sacré tombé du ciel pour servir d'égide à la ville
éternelle. Plus tard, on voit le Napolitain Androni-
cus, affranchi de Livius Salinator, composer, pour
apaiser les dieux irrités contre les Romains, un
hymne qui fut solennellement chanté par un chœur
de jeunes vierges, dont la beauté, dit un historien,
ajoutait au charme de la poésie et de la musique.
Les jeux scéniques furent institués à Rome à l'ins-
tar de ceux de la Grèce, et ils eurent pour cause la re-
ligion. La population romaine, dévorée par une peste
sous le consulat de Sulpicius Pelicus et de Licinius
Stolon, eut recours à des prières, des sacrifices et des
cérémonies extraordinaires pour fléchir l'inclémence
des dieux. Elle n'avait point de chanteurs; elle en fit
venir de l'Étrurie pour établir des fêtes funèbres. L'his-
toire ne nous dit point si ces fêtes apaisèrent le cour-
roux des dieux, et si on leur dut la cessation du ter*
ROM 167
rible fléau ; mais ce qu'elle ne nous laisse pas ignorer,
c'est que In jeunesse romaine goûta beaucoup ces jeux,
qui étaient scéniques , puisque ceux qui y figuraient
se montraient en public sur un théâtre, et qu'ils repré-
sentaient des pièces qui furent considérées comme
satiriques, à cause des vérités souvent amères que ren-
fermaient les vers qu'on y débitait, et dont l'harmo-
nie était soutenue par les sons des flûtes et des lyres.
Quelques années après, sous le consulat d'un des
descendants de Paul Emile , on voit la musique ,
admise jusque-là dans Rome comme une simple
étrangère à laquelle, en récompense de ses talents,
on accorde l'hospitalité, acquérir enfin les nobles
droits de cité dans la ville éternelle. Ce fut, en effet,
dès ce moment, qu'on l'appela à l'honneur de célé-
brer la naissance, le mariage et même la mort des
maîtres du monde ; elle vint mêler sa joie à la gaieté
de leurs festins, donner plus d'éclat à leurs triomphes,
et prêter le charme de la mélodie à leurs funérailles.
Enfin parurent les jours si beaux pour les arts, où
commença le règne d'Auguste. Avant ce grand événe-
ment, il venait de s'en passer un non moins impor-
tant, l'assassinat de Jules César, suivi de ses funé-
railles si remarquables par la douleur du peuple et
l'artificieux et éloquent discours d'Antoine. Ce fut
dans cette circonstance qu'un nombre considérable
de musiciens, attachés au dictateur par leur emploi et
par l'admiration qu'inspiraient ses talents et son génie,
jetèrent, après s'en être servis pendant les funérailles,
leurs instruments dans le bûcher dont les flammes
venaient de consumer les restes d'un grand homme,
comme si, après avoir célébré sa gloire et ses triom-
phes, ces organes de la mélodie ne devaient plus
avoir aucun autre emploi.
Sous le règne d'Auguste, Rome ordonna que le
poëme qu'Horace avait composé en l'honneur de
if>8 ROM
Diane serait chanté par deux chœurs, l'un de jeunes
filles, l'autre déjeunes garçons, tous fils de patriciens.
Les beaux vers de l'héritier de la lyre de Pindare
furent embellis par une musique dont on ignore les
auteurs. Mais cette circonstance montre que cet art,
étendant son empire sur le peuple romain, et suivant
les progrès de la civilisation et du luxe, allait jouir
encore de plus d'honneur sous les empereurs que pen-
dant la république.
Sous le règne de Tibère, la musique dut nécessai-
rement être atteinte de ce marasme qui paralyse tous
les arts sous un tyran; et cependant, sous Caligula,
digne héritier de cet empereur, elle semble s'éveiller
de sa longue léthargie. C'est que ce prince avait pour
cet art un goût très- prononcé, et presque une pas-'
sion. Caligula aimait la musique autant qu'il aimait
le sang, et cette réunion dans un môme homme d'un
goût aimable et d'une fureur sanguinaire n'est pas,
de tous les mystères de l'esprit humain, le moins dif-
ficile à expliquer.
Néron cultiva lui-même la musique en artiste con-
sommé; il consacrait une partie de son temps à l'exer-
cice de son art favori. Tous les jours, s'enfermant
avec Terpanum, le joueur de flûte et de cythare le
plus renommé qu'il y eût alors, il prenait des leçons
de chant qui se prolongeaient jusque dans la nuit.
Quoique sa voix fut grêle et voilée, il fit de tels pro-
grès, que dans la troisième année de son règne il ne
balança point à chanter en public. Il débuta sur le
théâtre de Naples, et y acquit tant de réputation, que
des musiciens accoururent de toutes les contrées
pour l'entendre et admirer son talent. Il en retint
cinq mille, qui, dès ce moment, restèrent attachés à
son service. Il leur donna un costume uniforme, et
leur apprit même, chose incroyable, si Suétone ne
l'attestait, de quelle manière il entendait être ap-
ROM 169
piaudi. Le peuple romain le pria un jour de chanter
dans une des rues de Rome où il passait, et Néron,
qui lui aurait refusé la vie de Trasias, s'il la lui avait
demandée, ne refusa point de lui faire entendre sa
voix divine. Des applaudissements vifs et prolongés
furent le prix de cette complaisance inouïe. Dès ce
moment, le maître du monde se mit lui-même au
rang des comédiens, et accepta sa part des rétributions
publiques destinées à payer leur talent. Non content
des applaudissements donnés à sa voix comme chan-
teur, il brigua les suffrages du public comme compo-
siteur; il voulut traiter le sujet de la prise de Troie,
et l'on prétend même qu'il lit mettre le feu à Rome,
afin de pouvoir imiter avec plus de vérité les voix et
les cris déchirants des victimes de l'incendie. C'est à
l'aspect du plus affreux tableau que puissent contem-
pler les yeux de l'homme, et qui, pour lui, n'était
qu'un brillant modèle, qu'il eut, dit-on, le plaisir en
jouant sur sa flûte, de composer ce qu'on appelle
d'après nature.
A la mort de Néron, le peuple romain, dont l'irri-
tation était extrême, prétendit mettre au rang des
complices de cet empereur la musique, et, comme
telle, la bannit de Rome avec tous les musiciens.
Ainsi proscrit, l'art musical se réfugia au sein de l'É-
glise naissante, qui l'épura en lui donnant un asile et
en simplifiant sa notation.
Romance. Depuis une dizaine d'années, des mil-
liers, des myriades de pièces de ce genre ont été fa-
briquées et livrées à l'appétit glouton des amateurs.
Une centaine au plus méritent d'être distinguées parmi
la foule immense de ces productions éphémères. Le
défaut le plus saillant des romances contemporaines,
c'est la monotonie. A quelques rares exceptions près,
lorsqu'on a pu se dérober à l'ennui d'entendre une
170 no*
romance, il faut se dispenser d'en écouter d'autres;
on les connaît, on les sait presque toutes.
Une romance, que la mode porta sur son aile lé-
gère, a commencé la réputation de Boïeldieu ; et qui
n'a senti son cœur palpiter en écoutant, en chantant
les jolies romances : S'il est vrai que d'être deux ; Bouton
de rose, de Pradber; Je t'aime tant, de Garât; Te bien
aimer, ô ma chère Zélie, de Plantade; Un jeune Trouba.
dour, de Dalvimare ; Charmant ruisseau, de Domnich;
Partant pour la Syrie-, de la reine Hortense ; La Suis»
sesse au bord du lac, de Goulé ; Fleuve du Tage, de
Pollet, et de nos jours, les délicieuses romances de
Labarre, de MHe Loïsa Puget, de Masini, de Grisar,
d'Arnaud, d'Henrion, etc., etc. ?
Le nom de romance est bien ancien en France ; on
l'avait abandonné pendant un siècle. On appelait
brimettes les chansons rimées sur un sujet plein de
tendresse et de sentiment. Dans les anciens recueils
de Ballard, du temps de Louis XIII et de Louis XIV,
toutes les romances portent le nom de brunettes.
Les romances, les brunettes destinées aux amateurs
de haut parage, étaient désignées sous le titre airs de
cour; les chansons prenaient celui de voix de ville,
dont on a fait plus lard vaudeville.
Ronde. Sorte de chanson ordinairement mêlée de
galanterie, composée de divers couplets qu'on chante
dans une réunion nombreuse, debout, formant le
rond, en se tenant tous par la main. Chacun chante
son couplet, et l'on fait chorus en reprenant le re-
frain sur lequel on danse en même temps. La ronde a
été introduite dans nos opéras comiques, où elle fait
beaucoup d'effet. On cite les rondes de Cendrillon, du
Chaperon rouge, de la Neige, du Postillon de Lonju-
meau, des Porcherons, etc.
Ronde. Note blanche et ronde, sans queue, la-
quelle vaut une mesure entière à quatre temps, c'est-
ï\OP< 171
à-dire deux blanches ou quatre noires. La ronde est
de toutes les notes d'un usage habituel celle qui a le
plus de valeur. Autrefois elle était celle qui en avait
le moins, et s'appelait semi-brève.
Rondeau. C'est un très-petit poëme, né gaulois, se»
Ion l'expression de Despréaux.
La naïveté et le badinage de ces pièces si exiguës ne
convenaient pas à un siècle de plaisirs emportés
comme celui qui nous précéda et conviennent encore
moins au nôtre. Aussi, ce léger poëme est-il tombé
en désuétude. Au dix-septième siècle, il se ranima
sous la plume ingénue de La Fontaine, puis il mou-
rut sans doute à jamais, satisfait de ses honneurs et
des pensions considérables qu'il avait values à ses
auteurs.
On compte trois espèces de rondeaux : le plus en
vogue et le premier fut celui qui est composé de treize
vers sur deux rimes; après le cinquième, il doit y
avoir un repos, ainsi qu'à la fin de chaque stance,
et après le huitième, doivent revenir les deux ou trois
premiers mots du premier vers, mots obligés de se
retrouver encore après le treizième ; c'est ce qu'on
appelle le refrain. Le second est le rondeau redoublé ;
il est composé de six quatrains également sur deux
mêmes rimes. Dans les quatre quatrains qui suivent
le premier, un vers complet de ce dernier doit s'y
retrouver et s'enchaîner à l'idée générale. Quant au
sixième quatrain, il suffit qu'après le quatrième vers,
les premiers mots du premier vers de la première
stance viennent se placer naturellement. La troisième
espèce de rondeau est le rondeau simple. Il consistait
en deux quatrains sur mêmes rimes, et séparés par
un distique auquel le refrain était attaché ainsi qu'à
la fin du dernier quatrain.
Rondo. Sorte d'air vocal né en Italie, qui de là passa
#n Allemagne et en France. Il était autrefois un des
1/2 nui
ornements de la scène lyrique, la volupté des dilet-
tanti. Le rondo est composé ordinairement d'une
première, d'une seconde et d'une troisième parties
ou reprises, dont la première se répète après la
seconde et la troisième. Il est aujourd'hui passé de
mode, et les compositeurs modernes l'ont employé
rarement.
Les grands coryphées du rondo scénique sont
les Gluck, les Piccinni, les Sacchini, les Paisiello,
les Cimarosa, les Mozart, les Rossini. Quant au
rondo instrumental, dont les maîtres sont Haydn,
Mozart, Beethoven, Onslow, il suit les règles du
rondo vocal. Beethoven seulement, que débordait
sa fécondité, multiplia souvent les reprises de ses
rondos.
Roulade. C'est le nom vulgaire donné en musique
à ces traits rapides imités de la musique instrumen-
tale, et qu'on place ordinairement dans les points
d'orgue pour faire briller le talent du chanteur, ou
dans toute autre circonstance, pour donner plus de
grâce à la mélodie ou plus de force à l'expression. Les
Italiens sont prodigues de cet ornement de la musique
vocale. Il est vrai que la langue italienne est remplie
de syllabes sonores sur lesquelles on peut prolonger
la voix; mais les chanteurs ultramonlains mettent
trop souvent à profit les occasions qui leur sont of-
fertes, pour qu'une oreille délicate ne se fatigue pas
de leurs éternelles vocalisations.
En français nous n'avons que les o, les é et les a sur
lesquels on puisse convenablement placer un trait de
chant, et comme ces voyelles ne se présentent pas
assez fréquemment dans notre versification lyrique ,
on est souvent obligé de passer plusieurs notes sur
des i, des m, et même des c muets, ce qui est fort dis-
gracieux.
La roulade n'est pas toujours déplacée dans une
KOL 173
situation triste et pathétique, surtout lorsque la chan-
teuse réunit la force à l'agilité. Il y a telles scènes
dans lesquelles elle donne à certains passages une
expression d'énergie qu'on n'aurait certainement pas
obtenue avec une mélodie plus simple. Et cela se
conçoit; lorsqu'une âme est trop affectée, elle ne
trouve plus de paroles et ne peut s'exprimer que
par des interjections.
Roulement. Le roulement s'exécute sur le tambour
et la timbale par le mouvement alternatif de deux
baguettes, et en frappant deux coups avec chacune.
Le roulement de timbale produit un effet surprenant
dans le crescendo et le forte d'un orchestre nombreux ;
il a quelque chose de mystérieux et de sinistre, s'il
est fait pianissimo, ou si les timbales sont voilées.
On l'emploie avec succès de cette manière dans un
morceau lent, surtout dans une marche funèbre.
Plusieurs symphonies de Haydn commencent par
un roulement de timbales.
Roue-Archet. On appelle ainsi une roue pleine,
frottée de colophane, qui dans la vielle tient lieu
d'archet.
Rosalie. On donne ce nom à la répétition d'une
même phrase de chant, sur les cordes qui sont un
degré plus bas ou plus haut. On a banni de toutes
les compositions de bon goût les répétitions fas-
tidieuses et banales , trop faciles à deviner ou à pré-
voir.
Rose. Nom que l'on donne à l'ouverture circulaire
pratiquée sur la table des clavecins, des théorbes, des
luths, des guitares.
Routinier. On donne ce nom aux ménétriers de
village et aux acteurs d'opéra qui, sans avoir appris
la musique et guidés seulement par un instinct
plus ou moins heureux, parviennent à jouer ou
chanter de routine un certain nombre de contredanses
17* nts
et de valses, ou des airs de chant, et môme des rôles
d'opéra.
Runa. C'est le nom d'une mélodie qui, depuis les
temps les plus reculés, est en usage en Finlande.
Russie (de la Musique en). Parmi les peuples qui
s'occupent de musique et qui possèdent des chants
nationaux, on doit sans aucun doute placer la Russie.
Là, l'artisan, le marinier, le soldat dans la mar-
che, l'agriculteur, le postillon, le voiturier, enfin
toute la population chante en se livrant à ses divers
travaux.
Pendant que Pierre le Grand fut sur le trône, ses
réformes s'étendirent jusque sur la musique. Il fit ve-
nir d'Allemagne toute sorte d'instruments, institua
une compagnie de jeunes Russes destinés à apprendre
la musique, encourageant principalement la musique
militaire.
L'impératrice Anne porta sur le trône le goût de
l'art musical. Dans les premières années de son règne,
en 1737, Araja, compositeur napolitain, mit en scène
le premier opéra italien qui ait été exécuté en Russie,
intitulé : Abijazare, et l'année suivante, Sémiramide.
Sous Catherine II, la musique acquit une nouvelle
splendeur. On représenta, en 1702, Y Olympiade, de
Manfredini, et la salle était toujours remplie par plus
de trois mille spectateurs. Des intermèdes italiens et
des comédies russes et françaises alternaient avec
l'opéra.
Sarti fut maître de chapelle de la cour depuis 1785
jusqu'en 1801. L'impératrice le combla d'honneurs
et de biens, et le nomma directeur d'un nouveau Con-
servatoire de musique, avec une augmentation d'ap-
pointements assez considérable.
En 1843, l'empereur de Russie a institué un Opéra-
Italien à Saint-Péterebourg. La troupe composée de
Rubini, Tamburini, Pauline Garcia-Viardot et quel-
SAB 175
ques autres artistes moins importants, a été accueillie
par les Russes avec enthousiasme. Depuis, le théâtre
italien de Saint-Pétersbourg n'a pas cessé d'être
compté au nombre des plus importants qu'il y ait en
Europe. Lablache, Ronconi, DeRassini, Mario, Tam-
berlick, Rossi; Mmes Grisi, Frezzolini, Medori, de
Lagrange, Persiani, ont paru successivement sur
cette grande scène. L'empereur a pris ces grands ar-
tistes sous sa protection particulière.
Parmi les célèbres virtuoses qui ont, à des époques
récentes , visité la Russie , on remarque Clémenti ,
Field, Rode, qui entra, en 1804, au service de l'em-
pereur de Russie, Raillot, Klengel, Hummel, Boïel-
dieu, Ad. Adam, Liszt, Thalberg, Sivori, Artôt, Hau-
man, M^es Cinti-Damoreau, Falcon, etc., etc.
S. Cette lettre, écrite alternativement avec le T, si-
gnifie solo, tandis que l'autre signifie tutti.
On donne aussi le nom de s au tuyau d'anche du
basson, parce que sa forme ressemble à celle de cette
lettre, et aux ouvertures pratiquées dans le corps du
violon et du violoncelle.
S, traversé obliquement par une barre, est em-
ployé quelquefois comme signe de renvoi.
Sabot. C'est dans la harpe une espèce de crochet de
laiton qui a la forme d'un bec de canne, et dont l'of-
tice est d'accrocher la corde pour la raccourcir d'une
176 SÀL
longueur relative à l'augmentation d'un demi-ton. Il
y a dans la harpe autant de sabots qu'il y a de cordes.
Salle de spectacle. C'est le lieu où l'on repré-
sente les opéras, les drames, les comédies, etc., etc.
La plus belle en France est celle de l'Opéra qui a été
bâtie dans les rues Grange-Batelière et Lepelletier,
pour servir de théâtre provisoire. Mais on l'a réparée
en 1853 avec un luxe tel qu'il est permis de la consi-
dérer désormais comme définitive. C'est M. Fould ,
ministre d'État , qui a ordonné ces réparations im-
portantes et qui les a fait exécuter aux frais de l'État.
Les dépenses se sont élevées à 350,000 francs. Le style
architectural qui domine maintenant dans la salle de
l'Opéra est le style de la fin de Louis XYI marié à ce-
lui de l'Empire. L'ensemble est un peu lourd , mais
les détails en sont extrêmement soignés et surtout très-
brillants.
La salle de l'Opéra-Comique est établie sur la place
Favart, entre la rue Favart et la rue Grétry ; elle peut
contenir environ dix-sept cents personne. Celle du
Théâtre-Italien a été élevée sur la place Ventadour et
c'est certainement une des plus élégantes de Paris.
Elle a la même forme et la même dimension que
celle de l'Opéra-Comique.
Les salles de spectacle en Italie sont plus grandes,
plus belles et surtout beaucoup mieux construites que
les nôtres. Leur forme est, en général, celle d'un
cercle parfait, coupé par son diamètre régulier, dont
une moitié appartient aux spectateurs, l'autre à la
scène. On n'a pas en Italie, comme en France, la dé-
testable manie d'étrangler l'avant-scène entre deux
énormes massifs de constructions à colonnes énormes,
ou à pilastres pleins, pi us lourds encore, qui masquent
la scène aux personnes placées dans les quatre ou cinq
premières loges des deux côtés du haut en bas. Les
Italiens ont une excellente manière de construire
SAL 177
Jeurs salles de spectacles; ainsi dans la salle Saint-
Charles, à Naples, la plus grande de toutes, on compte
six rangs de loges, quarante-deux loges à chaque rang,
pouvant contenir douze personnes chacune, et mal-
gré celte prodigieuse dimension , on entend parfaite-
ment partout.
La salle du théâtre royal de Turin est vaste, mais
elle déroge par la forme, qui est un peu ovale. Dans
sa construction il n'est entré que de la pierre et du
fer, et elle se trouve ainsi à l'abri des dangers de l'in-
cendie.
La plus vaste salle, après San-Carlo, est celle de la
Scala à Milan. A Florence, on admire celle de la Per-
gola; à Rome, celle d'Argrntina; à Venise, cellesdeSa?*-
Benedettoel delà Fenice; à Gênes, celle du Carlo Alberto.
Il n'est pas d'usage en Italie d'éclairer les salles de
spectacle pendant les représentations. Lorsque le pu-
blic commence à entrer, on descend une espèce de
lustre garni de quelques torches de cire que l'on fait
disparaître sitôt que l'ouverture commence. Il n'y a
point de contrôle à la porte, point d'ouvreuses pour
les loges. Chaque loge est assez ordinairement la pro-
priété d'une famille, soit par location, soit par acqui-
sition définitive. Les spectacles sont bien moins chers
en Italie qu'en France; on entre au parterre de tous
les grands théâtres pour un franc, celui de San-Carlo
à Naples, excepté, où l'on paie 2 fr. 50 c. On va au
spectacle le plus souvent sans toilette, et, pour ainsi
dire, en robe de chambre. On reçoit ses visites dans
sa loge, on joue, on soupe, alors on ferme les rideaux,
et l'on allume des bougies dans l'intérieur, ou bien
on cause d'affaires tout haut, d'amour tout bas, et
l'on rentre chez soi souvent sans avoir entendu un mot
de ce qui s'est chanté sur le théâtre.
Salpicta. Mot grec qui signifie trompettiste, c'est-
à-dire, qui joue de la trompette.
17* S AH
Salpinx. Ancienne trompette grecque, qui avait la
forme d'un cube conique, long d'environ deux pieds,
avec un pavillon qui transmettait le son.
Saltarelle. Mot dérivé de l'italien salto, qui signi-
fie saut, et qui s'emploie pour indiquer un mouvement
à trois temps vite, ou à six-huit, ou une musique
pointée, et surtout celle où la brève est en frappant.
On trouve des saltarelles dans les forlanes de Venise,
dans les siciliennes et dans quelques gigues anglaises ;
un modèle de saltarelle pour piano, est celle compo-
sée par C.-V. Alkan.
Salve regina. Antienne ou hymne qu'on chante
dans l'Église catholique, à la fin des vêpres du samedi
de la Pentecôte jusqu'à l'A vent.
Le salve regina de Pergolèse est célèbre , bien
qu'il ne le soit pas autant qu'il le mérite. Moins con-
nu que le Stabat du même auteur, il est regardé, par
les connaisseurs, comme une composition plus par-
faite et d'un mérite supérieur.
Saubuque. Instrumenta cordes des anciens Grecs.
Quelques auteurs croient que c'est le barbiton.
San crus. Ce mot latin , répété trois fois, se chante
pendant la messe après la préface.
Sandale. Espèce de chaussure en bois ou en fer,
dont les directeurs de musique ou les batteurs de me-
sure garnissaient leurs pieds chez les anciens, et qui
était destinée à rendre la percussion rhythmique plus
éclatante.
Santiîr. Instrument à cordes turc, qui ressemble au
psaltérion allemand.
Sarabande. En espagnol zarabanda , air d'une
danse grave, portant le même nom, et qui paraît nous
être venue d'Espagne ; elle se dansait autrefois avec
des castagnettes. L'air de la sarabande était à trois
temps.
SÀB
Saut, en italien Salto. Tout passage d'un son à un
autre par degrés disjoints est un saut.
Tous les sauts sont permis dans la mélodie, pourvu
que chaque note trouve sa conséquence et sa résolu-
tion dans celle qui la suit. Les airs de bravoure, les
concertos de violon, de flûte, de basson, de clarinette,
renferment souvent des sauts de dixième, et de plus
grands encore.
Dans l'harmonie les sauts doivent être bien amenés,
pour qu'il n'y ait pas d'incohérence dans les parties.
Sauteuse. Espèce de valse à deux temps et d'un
mouvement très-rapide. On faisait succéder la sau-
teuse à la valse ordinaire. Ce nom lui vient de ce
qu'on la dansait en sautant. La valse russe, qui sa
danse à peu près de la môme manière, a fait délaisser
la sauteuse.
Sauter. On fait sauter le ton, lorsqu'en donnant
trop de vent dans une flûte ou dans un tuyau d'un
instrument à vent, on force l'air à se diviser et à faire
résonner, au lieu du ton plein de la flûte ou du
tuyau, quelques-uns seulement de ses harmoniques.
Quand le saut est d'une octave entière, cela s'appelle
octavier. Il est clair que pour varier les sons du cor
et de la trompette il faut nécessairement sauter, et ce
n'est encore qu'en sautant qu'on obtient certaines oo»
taves sur le basson, la flûte, etc.
Sautereau. Lame de bois mince, armée d'un petit
morceau de plume ou de peau de buffle qui, dans les
clavecins, était poussée contre les cordes, les frappait
et produisait le son en s'échappant.
Sauvages (musique des). On sait bien que les peu-
plades sauvages n'ont pas de véritable musique; elles-
ne se servent guère que d'instruments à percussion.
Les Esquimaux, qui étaient aussi près de l'état de
barbarie que possible lorsque le capitaine Parry les
visita, étaient cependant passionnés pour la musique,
180 SAIT
Ils n'avaient pour tout instrument , qu'une espèce
de tambour ou de tambourin. Ils chantaient des airs ;
mais on n'y trouvait ni variété, ni étendue, ni mélo-
die caractérisée.
Les Mexicains, lors de la conquête de leur pays par
les Espagnols, n'étaient guère plus avancés sous le
rapport musical. Leurs principaux instruments étaient
deux tambours, l'un nommé le huehaetl, l'autre le
tcponaztli. Ils avaient aussi des trompes, des coquilles
marines, des petites flûtes qui rendaient un son aigu,
et un instrument dont se servaient leurs danseurs,
appelé ajacaztli. C'était une sorte de vase rond ou
ovale, percé de petits trous et contenant un certain
nombre de petites pierres, instrument à peu près du
môme genre que le hochet des enfants.
M. Weld, dans sa notice sur les Indiens du nord-
ouest de l'Amérique, donne la description suivante
d?une danse dont il fut le témoin un soir dans l'île
des Bois-Blancs :
« Trois vieillards, assis sous un arbre, étaient les
principaux musiciens; l'un d'eux battait un petit
tambour formé d'un morceau de bois creux couvert
d'une peau, et les deux autres frappaient la mesure
de concert avec le tambour, au moyen d'une sorte de
crécelle faite d'une courge sèche remplie de pois. En
même temps, ces trois hommes chantaient un air, et
tous les danseurs se joignaient à eux. »
Ce que nous savons des naturels des îles de la mer
du Sud, quand elles furent découvertes par le capi-
taine Cook, prouve également la grossièreté et la sim-
plicité de la musique des tribus sauvages qu'elfes
renfermaient. Quatre personnes jouaient sur deux
flûtes faites de bambous creux, d'environ un pied de
long, n'ayant que deux trous, et ne pouvant donner
par conséquent que quatre notes divisées par demi-
tons» On s'en servait comme nous nous servons de la
SAU 181
H Ci te allemande, avec cette différence que l'exécutant,
au lieu de l'appliquer à ses lèvres soufflait dedans
avec une de ses narines pendant qu'il bouchait l'autre
avec le pouce. A ces instruments se joignaient quatre
chanteurs qui observaient fort bien la mesure. Dans
un concert on n'exécutait souvent qu'un seul air.
Aujourd'hui nos programmes sont un peu plus char-
gés.
Dans les îles des Amis il y avait des femmes qui
chantaient et s'accompagnaient en faisant claquer
leurs doigts. La musique de ces peuples est encore
maintenant aussi barbare que lorsqu'ils furent visités
par le capitaine Cook.
Les Indiens du Chili se servent de flûtes faites avec
les os des ennemis qu'ils ont tués dans les combats ;
ils en font aussi avec des os d'animaux; mais les
guerriers indiens ne dansent qu'au son des premières.
Ils chantent tous à l'unisson, et à la fin de chaque
air ils jouent delà flûte et d'une espèce de trompette :
nos ritournelles ont le même but.
Les habitants de l'île de Tougo chantent souvent
une chanson, espèce de récitatif, dont les idées sont
assez poétiques, et qui est dite par les hommes et les
femmes tout à la fois. Ils ont aussi un air mélancoli-
que, sorte de complainte qu'ils chantent près des
morts, comme le Dies iras.
Une tribu de Cafres, les Bachapins, n'ont qu'un
seul instrument appelé lichaka, fait de roseau, et ne
rendant qu'un seul son. Il y en a un pour chaque
note, et lorsque plusieurs exécutants sont réunis,
une partie joue à l'unisson pendant que les autres
font entendre différents tons de l'échelle musicale.
Cet usage rappelle assez l'emploi de la pédale dans
les orgues modernes.
Ce qui frappe le plus les sauvages, c'est le rhy thme :
on a pu s'en convaincre en assistant aux danses de
T. h- «
182 SA\
ceux qui sont venus, il y a quelques années, amuser
les Parisiens.
Sauver les dissonances. Voyez le mot Djsso-
n an ce ( résolution des ).
Savvardin. Chanson des Kalmouks, qu'on chante
en dansant.
Sax. C'est le nom d'un facteur belge qui est venu
s'établir à Paris, et a doté la France d'une série d'ins-
truments à vent, dont la famille s'appelle : les sax.
On va juger de l'importance de ses inventions et de
ses perfectionnements, par l'exposé suivant qui est
un abrégé par ordre alphabétique des travaux consi-
dérables accomplis en peu d'années par ce célèbre
facteur.
Basson. — Ce nouveau basson inventé par M. A.
Sax, en 18'<9, est entièrement construit en cuivre. Sa
forme est d'ailleurs à peu près la môme que celle de
l'ancien basson. Les trous à boucher par l'extrémité
des doigts y sont su pprimés, et tous les trous se bou-
chent au moyen de clefs, d'après le système de la
clarinette-basse, autre instrument également inventé
par M. Sax, en 1838. Grâce à ce procédé, l'inventeur
est parvenu à obtenir une irréprochable justesse,
qualité que l'on n'avait jamais pu atteindre jus-
qu'alors. L'égalité des sons, la sonorité et la facilité
d'exécution découlèrent pareillement du môme prin-
cipe, sans que, pour cela, la qualité du timbre de
l'instrument subît la plus légère altération; on peut,
au contraire, lui faire acquérir à volonté plus d'éclat
et d'intensité.
Caisse de résonnance. — Cette caisse a été inventée
par M. A. Sax, en 1840. Celle qui a été mise en pra-
tique est pour violoncelliste. Les violoncellistes jouant
assis, ont pour habitude lorsqu'ils jouent un solo, ou
en public, de se mettre sur une espèce de boite, afin
d'être un peu plus élevés j c'est cette boite que M, Sax
SAV 183
a remplacée par une caisse sonore; il faut à cet effet
que l'artiste (comme cela se faisait généralement et
se fait encore quelquefois aujourd'hui), mette une
queue à son instrument, qui vient s'appuyer sur la
table sonore.
Cette caisse est à peu près carrée et à peu près
moitié moins haute que large; l'artiste est isolé de la
table par des traverses qui sont elles-mêmes isolées
et portent sur les quatre montants qui servent de
pieds à la table ; la chaise porte donc sur les traverses
disposées pour cela, en môme temps que pour mettre
les pieds de l'artiste, qui se trouve ainsi dans la posi-
tion habituelle du corps et peut donner une sonorité
bien plus grande à l'instrument.
Le môme effet peut se produire en grand pour
l'ensemble d'un orchestre.
Clairon. — On sait que certaines armes de l'infan-
terie, les chasseurs à pied notamment, ne possédaient
jadis que des clairons ordinaires; ces instruments du
même diapason, et ne pouvant donner que quelques
notes, n'étaient susceptibles de former aucun ensem-
ble tant soit peu musical ; si on voulait faire musi-
que, il fallait se résoudre à mettre entre les mains du
soldat un second instrument et ce n'était pas une
mince charge, surtout pour les musiciens à qui le
trombone ou l'ophicléide venait à échoir ; ces graves
inconvénients équivalaient à la suppression presque
absolue de musique dans certains corps. C'est pour y
remédier que M. Sax inventa vers 1847 son nouveau
système de clairon. Yoici en quoi consiste son inven-
tion. Le clairon ordinaire, indispensable pour le ser-
vice des signaux, est maintenu, mais lorsqu'on veut
faire musique, on enlève la petite branche d'embou-
chure et on adapte à sa place un appareil armé de
Cylindres, qui a des développements variés, suivant
le ton et le diapason à obtenir, mais qui, en tout cas,
184 SAX
n'en reste pas moins une pièce aussi légère que por-
tative dont le soldat demeure toujours muni, sans,
pour ainsi dire, s'en apercevoir. Ces appareils une
fois adaptés au corps du clairon ordinaire, qui est en
si bémol, ont pour résultat de le transformer en clai-
ron chromatique soprano en mi bémol, contralto en
si bémol, alto-ténor en mi bémol, baryton-basse en
si bémol et enfin contrebasse en mi bémol. Ainsi, au
lieu de la monotonie et de la pauvreté des anciens
clairons, voilà les régiments dotés d'un véritable or-
chestre de fanfares, parcourant toute l'échelle de
l'aigu au grave et susceptible de former une harmo-
nie aussi pleine que complète. S'ils sont deux seule-
ment, les exécutants peuvent jouer un duo ; trois,
un trio, et ainsi de suite ; enfin, veut-on les utiliser
dans une exécution qui demande le plus de forces
possible, rien n'empêche de les adjoindre, comme
partie concertante, à un corps de musique militaire
de quelque nature qu'il soit.
L'expérience des clairons-sax vient d'être faite au
8e bataillon de chasseurs, avec le plus grand succès.
Tous les avantages annoncés par l'inventeur, ont été
reconnus et constatés ; et l'on a remarqué, en outre,
que l'application de ce système créait un genre de
fanfares d'un caractère tout particulier et de l'effet le
plus agréable.
Il n'est pas superflu d'ajouter que le doigter des
clairons-sax est le même que celui du saxotromba, du
saxhorn, etc.
Clarinette. — Les premiers perfectionnements de
M. Sax ont été apportés aux clarinettes, de 1835 à
1838; pendant plusieurs années il s'est occupé de
faire disparaître les défauts de cet instrument, sous
les rapports de la justesse, de la sonorité, de l'égalité
et de la facilité d'exécution. Le succès a couronné
ses études. La nouvelle clarinette de M. Sax est un
SAX 185
instrument parfait ; les trilles, les arpèges eu octave,
autrefois presque inexécutables, sont devenus faciles ;
les notes suraiguës, grâce à une petite clef, sont de-
venues douces et pures. Sans aucun effort, on peut
attaquer pianissimo le contre-si bémol haut.
Enfin la clarinette a gagné de l'étendue, au grave
et à l'aigu.
Clarinette basse. — M. Sax ne s'est pas borné
à améliorer la clarinette soprano, il a cherché à
perfectionner tout le système et entre autres la cla-
rinette basse, sur laquelle il est devenu un virtuose
très-habile; avant lui, cet instrument était très-défec-
tueux; en 1838, il l'a changé en donnant un diamètre
beaucoup plus grand à son tube; en bouchant les
trous par des clefs, M. Sax a pu les espacer sur son
tube d'après les lois de vibration, et il est arrivé ainsi
à une justesse parfaite au moyen d'une petite clef
qui ouvre tout près du bec un trou presque capillaire;
les sons aigus sortent avec autant de facilité que les
graves, le son est d'un beau volume, d'une grande
égalité et d'un timbre magnifique.
La clarinette basse de M. Sax n'embrasse pas
moins de trois octaves et une sixte dans son étendue
ordinaire; mais on comprend que ce sont principa-
lement les notes graves et du médium qui la rendent
précieuse aux compositeurs.
Clarinette contrebasse. — M. A. Sax a inventé une
clarinette contrebasse, en mi bémol, une quinte au-
dessous de la clarinette basse. Cet instrument très-
portatif et remplissant son but avec les mêmes avan-
tages que sa clarinette basse, est fait d'après le même
principe que cette dernière, et descend jusqu'au der-
nier sol de la contrebasse; il possède des sons magni-
fiques.
Compensateur. — Le compensateur-sax consiste en
un petit mécanisme qui s'applique aux instruments
186 SAX
de cuivre de son système. Mû par le pouce de la
main gauche qui cède ou résiste à la sollicitation
d'un ressort, ce mécanisme a pour résultat de modi-
fier le son par la longueur du tube. De cette manière,
on peut arriver à la justesse la plus parfaite, l'aire sen-
tir la différence du dièse au bémol, appuyer sur une
note sensible, comme aussi modifier un doigter. Ce
n'est là qu'une partie des avantages du compensa-
teur ; en effet, si on le fait mouvoir pendant l'émis-
sion du son, on obtient le glissé ou partamenlo, exac-
tement comme on pourrait le faire avec le trombone
à coulisses,, avec le violon, ou encore avec la voix.
Cette disposition aussi simple qu'ingénieuse met donc
les cuivres au niveau des instruments les plus déli-
cats et les plus parfaits. Un grand nombre d'artistes
ont adopté le compensateur et s'en servent avec au-
tant d'avantage que de succès, notamment sur le
cornet, le saxhorn et le saxotromba.
Fanfare Sax. — H y a quatre organisations de
M. Sax dans ce genre de musique (tous instruments
en cuivre). Celle qui est composée de la famille des
sax-tubas, introduite par M. Halévy dans le Juif Errant,
celle des clairons Sax en usage au 8e chasseur* à
pied ; maintenant les deux autres : l'une, composée de
14 instruments, l'autre, de 36; cette dernière em-
ployée dans tous les régiments delà cavalerie française
depuis 1845, se compose de 6 trompettes à cylindres
(système Sax), 2 saxhorns sopranos en mi bémol,
7 saxhorns contraltos en si bémol, 2 saxhorns en la
pour remplacer les cors, 2 saxotrombas en mi bémol
altos pour remplacer les cors, 2 saxhorns ténors mi
bémol, 2 cornets à piston, 1 trombone à cylindre
(système Sax), 3 trombones à coulisses, 3 saxhorns en
si bémol barytons, 3 saxhorns en si bémol basses à
quatre cylindres, 3 saxhorns contrebasses en mi bé-
mol. Celle de M instruments est composée d'un petit
SAX 187
saxhorn soprano mi bémol, 2 saxhorns en si bémol con-
traltos, 3 saxotrombas en mi bémol, 2 saxhorns bary-
tons en si bémol, 2 saxhorns basses, 1 saxhorn contre-
basse mi bémol, 1 saxhorn contrebasse si bémol et 2
cornets à cylindres.
Flûte de Pan Sax. — Cet instrument, qui se distin-
gue par un caractère particulier, et qui était si in-
complet jusqu'à ce jour, que les compositeurs ont dû
se priver d'en faire usage, M. A. Sax y a apporté de tels
perfectionnements, qu'il l'a rendu digne d'occuper
un rang dans les musiques instrumentales. M. A.
Sax a adapté aux tuyaux des coulisses qui permet-
tent, en raccourcissant le tube, de donner sur cha-
cun d'eux une tierce, une quinte ou une octave d'é-
tendue par demi-tons : par ce moyen, et en soufflant
à la fois dans les deux tuyaux, il sera toujours pos-
sible de faire entendre, non-seulement un chant
quelconque , mais encore un accompagnement à ce
chant, ou même des variations doublées.
Flûte Sax. — Inventée par A. Sax, en 1843, admise
et entendue par le jury de l'Exposition de l'Industrie
française de 1847 : tous les trous sont fermés avec
des clefs qui suppriment les cavités à l'intérieur du
tube, avantage énorme pour la sonorité et la facilité
de l'instrument.
Orchestre Sax. — Cette nouvelle organisation de
M. Sax diffère des autres par suite des progrès qu'il a
fait faire aux instruments de musique; elle diffère
aussi de celle qu'il a fait adopter pour l'armée en
1845.
L'orchestre Sax est bien certainement ce qu'il y a de
plus beau comme ensemble, comme justesse, comme
variété et comme exécution. Cet orchestre se compose
de 2 flûtes, 2 ou 4 petites clarinettes, 6 grandes cla-
rinettes, 1 clarinette basse, 2 hautbois, une famille
de saxophones composée de cinq instruments, 2 pe-
188 SAX
tits saxhorns sopranos mi bémol, 2 saxhorns con-
traltos en si bémol, 3 saxotrombas en mi bémol altos, 2
saxhorns barytons en si bémol, 2 saxhorns basses à
quatre cylindres, 1 saxhorn contrebasse en mi bémol,
1 saxhorn contrebasse en si bémol, 2 cornets à cylin-
dres, 2 cors, 4 trompettes, 3 trombones ténors, 1
trombone basse, timbales, cymbales, castagnet-
tes, etc.
Porte-voix. — Petit instrument ne produisant qu'un
seul son, mais d'une grande puissance. M. A. Sax l'a
inventé principalement pour la marine et les che-
mins de fer; il a environ 30 centimètres de longueur,
le cône de son tube est parabolique. La condition
particulière de son tube et de son embouchure est la
seule cause, par les proportions, de cette grande puis-
sance qui se produit sans anche ni sans sifflet, et seu-
lement par les conditions particulières de l'air; ce
moyen est en partie employé par M. Sax, pour porter
sur un point donné le son du sifflet, en faisant pi-
voter un grand porte-voix sur le sifflet de la loco-
motive.
Réflecteur. — M. A. Sax a inventé en 1839, un réflec-
teur acoustique, qui consiste en une plaque de métal
concave qu'on adapte au pavillon de l'instrument et
dont la mobilité permet de lui faire prendre toutes
les directions voulues ; au moyen de ce réflecteur on
peut diriger les sons vers tel ou tel point; il peut s'ap-
pliquer à tous les instruments à vent.
M. Sax a adapté ce réflecteur à un orchestre en
plein vent, ce qui a donné les meilleurs résultats.
Saxhorns doubles. — Inventés, en 1851, par A. Sax,
ces instruments ont deux pavillons et sont armés de
cinq cylindres : celui en mi bémol, par exemple, a l'é-
tendue à lui seul du soprano en mi bémol, du con-
tralto en si bémol cl de l'alto ténor en mi bémol. Ces
SAX 189
instruments sont livrés à l'étude des artistes, et feront
probablement une nouvelle révolution instrumentale.
Saxhorn. — Instrument en cuivre à bocal, armé d'un
mécanisme de cylindres. M. Sax en a institué une fa-
mille entière qui parcourt une immense étendue de
l'aigu au grave . Le plus élevé est en si bémol , à l'oc-
tave supérieure de l'ancien bugle en si bémol ou de la
clarinette en si bémol, ou encore une quinte au-des-
sus du petit bugle en mi bémol. Le plus grave est le
saxhorn contre-bourdon en si bémol, deux octaves
au-dessous de l'ophicléide ; ce gigantesque instrument
avec ses tubes additionnels des cylindres n'offre pas
moins qu'un développement de 48 pieds ; il se joue
néanmoins avec facilité et sans fatigue pour l'artiste.
Les autres membres intermédiaires de la famille sont,
en allant de l'aigu au grave : le petit saxhorn, en mi
bémol aigu, le saxhorn contralto en si bémol, le
saxhorn alto-ténor en mi bémol, le saxhorn baryton-
basse en si bémol, le saxhorn contrebasse en mi bémol,
le saxhorn contrebasse grave en si bémol et le sax-
horn bourdon en mi bémol. Chacun de ces instru-
ments peut être exécuté un ton au-dessus, c'est-à-
dire en ut pour ceux en si bémol , et en fa pour ceux
en mi bémol.
Les saxhorns se construisent ou droits en avant, ou
avec le pavillon en l'air ; cette dernière disposition de
forme empruntée au saxotromba est surtout favora-
ble pour la cavalerie.
Le cône de l'instrument est un peu plus large que
celui du saxotromba, et un peu moins que celui de
l'ancien bugle et de l'ancien ophicléide; aussi sa voix
participe-t-elle de ces deux différents timbres, mais
naturellement avec beaucoup plus de force, d'éclat,
de pureté et de justesse que n'en ont jamais offert le
bugle ou l'ophicléide. Quant à remplacer ces instru-
ments dans 1 échelle générale, on a pu voir par la no-
190 SAX
menclature ci-dessus, que non-seulement chacun des
individus de l'ancien système y est surabondamment
représenté par le nouveau, mais encore que les nom-
breuses lacunes qui existaient précédemment se trou-
vent aujourd'hui comblées.
Les saxhorns forment Lle fonds de l'orchestre de
fanfares-sax.
Saxopfione. — Le saxophone est un instrument en
cuivre armé de dix-neuf à vingt- deux clefs et qui se
joue au moyen d'un bec à anche dans le genre de ce-
lui d'une clarinette. Son étendue est de deux octaves
et une sixte. Le cône de l'instrument est parabolique,
ce qui donne une grande homogénéité aux sons; le
doigter procède par octave comme celui de la flûte.
Il existe des saxophones à peu près dans tous les
tons, depuis celui en si bémol contrebasse, une neu-
vième au-dessous du basson, jusqu'à celui en fa, à
l'unisson de la petite clarinette. Les saxophones se di-
visent généralement pour le ton et le diapason en
saxophone basse si bémol ou Ht, en saxophone bary-
ton mi bémol ou fa, en saxophone ténor si bémol ou
ut, en saxophone alto mi bémol ou fa, en saxophone
soprano si bémol ou ut, et enfin en saxophone suraigu
mi bémol ou fa.
Le saxophone est un instrument d'invention encore
récente, et déjà sa réputation est faite; il est vrai
qu'indépendamment de ses qualités particulières qui
en font un instrument solo si remarquable, le saxo-
phone est appelé à jouer un rôle des plus importants
dans nos orchestres de symphonie et dans nos musi-
ques militaires ; l'épreuve en a été faite de la façon la
plus triomphante, dans plusieurs musiques régimen-
taires et notamment dans l'orchestre de la grande
harmonie de Paris où sa beauté, sa distinction, et sa
suavité merveilleuse ont produit un effet véritable-
ment magique. Le volume aussi bien que la portée
SAX 191
de sa voix, assigne, pour ainsi dire, au saxophone
le rôle d'intermédiaire ou de concordant entre les
instruments faibles et les instruments forts, si bien
qu'il n'écrase point les premiers, et ne se laisse point
écraser par les seconds. Cet inestimable avantage au-
quel viennent se joindre un timbre entièrement ori-
ginal, d'un éclat et d'un charme extrêmes, une jus-
tesse et une égalité parfaites dans toute son échelle,
une grande facilité d'exécution, une agilité prodi-
gieuse, enfin une étendue considérable, par rapporta
chaque espèce de saxophone, et qui embrasse en
entier le clavier général des sons, tout cela ex-
plique suffisamment l'intérêt qui s'attache à une
découverte si brillante et si parfaite dès son ori-
gine. Le sentiment des compositeurs, des artistes,
bref de tous les hommes compétents a été unanime
sur ce point que le saxophone est un des plus beaux
et des plus utiles instruments qui existent.
Saxolromba. — Instrument en cuivre à bocal, armé
d'un mécanisme de cylindres. Cet instrument a été
inventé par M. A. Sax, vers 1843. Il comporte une
famille de sept membres, allant de l'aigu au grave,
divisés par quinte et quarte; ainsi : le saxotromba
suraigu en si bémol, une octave au-dessus de l'ancien
bugle en si bémol ; le saxotromba en mi bémol so-
prano à l'unisson du petit bugle en mi bémol; le saxo-
tromba contralto en si bémol, à l'unisson du bugle
ordinaire; le saxotromba alto-ténor en mi bémol, à
l'unisson de l'ophicléide alto; le saxotromba bary-
ton-basse en si bémol, à l'unisson de l'ophicléide
basse en si bémol; le saxotromba contrebasse en mi
bémol, une octave au-dessous de l'ophicléide alto, et
le saxotromba contrebasse grave en si bémol, une
octave au-dessous de l'ophicléide basse. Chacun de
ces instruments peut être exécuté un ton au-dessus,
c'est-à-dire en ut pour ceux en si bémol, et en fa pour
192 SAX
ceux en mi bémol. Les proportions du saxotromba
sont entièrement nouvelles, et sa voix tient, en quel-
que sorte, le milieu entre le timbre des trompettes,
des trombones, d'une part, et de l'autre, des bugles
et des ophicléides; moins strident que les premiers,
le saxotromba n'a ni la lourdeur, ni le son empâté
des seconds. Par sa forme nouvelle, comme par le
contour de ses tubes, il est infiniment mieux disposé
pour l'émission du son, ainsi que pour la facilité du
placement et du maniement. Les pavillons se trou-
vant tous dans la même direction, le son se propage
et arrive à l'oreille de l'auditeur avec bien plus de
puissance. Enfin, l'instrument est particulièrement
avantageux pour les musiques de cavalerie.
Les saxotrombas sont presque toujours à trois cy-
lindres; on en fait cependant aussi à quatre et même
à cinq cylindres.
L'alto de la famille est presque partout en usage
soit dans les orchestres de symphonie, soit dans la
musique d'harmonie, soit dans les musiques pour bals.
Il remplace le cor avec un immense avantage, ayant
une bien meilleure sonorité, et n'exigeant pas, à beau-
coup près, autant de talent de la part de l'artiste.
Le doigter est le même pour tous les membres de
la famille.
M. A. Sax a transporté la forme et les principales
dispositions du saxotromba, non-seulement à ses
saxhorns, mais encore à plusieurs instruments an-
ciens, tels que le cornet, le cor, la trompette et le trom-
bone, et il les a ainsi dotés des avantages qui y sont
attachés. L'un des plus considérables, sans contredit,
c'est l'unité de doigter qui fait que lorsqu'on sait jouer
de l'un, on sait jouer également de tous les autres.
Saxtuba. — Instrument de cuivre à bocal armé d'un
mécanisme de cylindres. Cet instrument fut inventé
par M, Ad. Sax, vers 1850, à l'occasion de l'opéra de
SAX 193
M. Halévy : le Juif errant. Sa famille comporte sept
membres de l'aigu au grave, comme celle du saxo-
tromba. La forme des sax tubas a de l'analogie pour
la forme avec celle des tubas romains. Au moyen de
ses cylindres, leur échelle est chromatique. Leurs
proportions diffèrent légèrement de celles des sax-
horns ; quant à la puissance de sons elle est incompa-
rablement plus grande que celle de tous les instru-
ments en cuivre connus, ce qui est principalement dû
à la simplicité des contours ne formant qu'une ou
deux courbes sans aucun angle. Pour se faire une
idée de cet éclat formidable, îl faut avoir entendu,
comme cela nous est arrivé, un petit orchestre de qua-
torze saxtubas dominer et couvrir facilement une
masse de quinze cents instruments à vent ( cérémonie
de la bénédiction des aigles, au Champ de Mars).
Yoici ce que disait à ce sujet M. Adam, dans un feuil-
leton de Y Assemblée nationale du 19 décembre 1852:
« Leur son n'est jamais un bruit, c'est toujours une
» note sonore et accentuée ; l'expérience de leur in-
» tensité et de la facilité de propagation de sonorité a,
» du reste, été faite, il y a dix-huit mois, à la fête des
» aigles, au Champ de Mars, où étaient réunis quinze
» cents musiciens militaires. Quatorze instruments de
» M. Sax suffisaient pour dominer cette énorme
» masse d'instrumentistes.»
On se rappelle la surprise causée par l'apparition
des saxtubas sur la scène de l'Opéra, surprise qui se
changea bien vite en satisfaction et se traduisit en
applaudissements. Leur extrême puissance donna
lieu, à la même époque, à une polémique des plus
vives et des plus animées dans plusieurs journaux,
notamment entre M. Jules Janin, le critique des
Débats ■, et le directeur de l'Opéra, M. Roqueplan.
La forme des saxtubas est aussi pompeuse qu'élé-
gante et concourt merveilleusement a l'éclat d'une
194 SC A
cérémonie publique, ou d'une représentation théâ-
trale.
Timbales Sax. — Inventé par A. Sax , en 1852,
cet instrument est un progrès énorme pour les or-
chestres; sans occuper une place considérable, il
comporte simultanément tous les tons de la gamme
et n'exige pas un long accordage; il est composé
d'une série de cercles de hauteurs à peu près égales,
et dont la capacité intérieure est en rapport avec le
son que chacun d'eux doit produire dans une gamme
chromatique; ces cercles sont superposés de manière
qu'une caisse supérieure soit en retraite sur la caisse
immédiatement inférieure d'une quantité suffisante
pour que les baguettes de l'artiste fassent franche-
ment résonner la peau de chacune d'elles.
Trombone (ténor Iteêso). — Ce nouveau trombone de
l'invention de M. Sax, se joue absolument comme
l'ancien et avec les mêmes positions ; seulement, il est
muni d'un cylindre qui lui donne sur son devancier
une supériorité incontestable. Ainsi, au moyen du
cylindre en question, les notes graves mi bémol, ré, ré
bémol, ut et si qui font lacune sur l'ancien trombone,
deviennent sur le trombone-sax d'une exécution aussi
nette que facile. Le même cylindre permet d'y rendre
avec la plus grande aisance, des traits et passages
d'une difficulté extrême ou même presque inexécuta-
bles sur l'ancien.
Saynette. Petite comédie mêlée de chansons que
l'on représente en Espagne. Les saynettes sont des es-
pèces d'intermèdes comiques, joués par trois ou
quatre acteurs, et quelquefois même par un seul.
Scaia (Théâtre de la). Le théâtre de la Scala, à Mi-
lan, est, sans contredit, une des scènes lyriques les
plus importantes de l'Europe. Malgré son immense
développement, cette salle est fort sonore; ce qui est
dû, sans doute, à l'absence de ces rangs de galeries cl
SCA 195
de loges ouvertes, qui absorbent une grande partie du
son dans nos théâtres. Lorsque le public veut bien
écouter, ce qu'il ne fait guère que par fraction, hor-
mis à certains moments convenus, la plus faible
émission de son arrive jusqu'aux dernières limites de
la salle. A la Scala, des artistes doués de peu de voix
sont parfaitement entendus.
Les voyageurs qui ne font que traverser les villes
d'Italie, en emportent le plus souvent des idées super-
ficielles et fausses, qu'un peu de conscience leur dé-
fendrait d'émettre légèrement. On a prétendu qu'on
joue toujours le môme opéra, pendant plusieurs mois
de suite, dans les grands théâtres d'Italie ; rien n'est
plus faux. A la Scala, par exemple, nous avons vu
défiler, dans un espace de trois mois à peine, sept opé-
ras, dont quatre entièrement nouveaux pour le public
et trois reprises d'ouvrages oubliés. Sur les quatre
nouveautés trois étaient spécialement écrites pour le
carnaval de la Scala ; ce qui forme un ensemble de
travaux qui réduit à bien peu de chose ce que fait notre
Académie impériale de musique. Mais aussi, quel
métier que celui des chanteurs d'Italie ! chanter tous
les soirs l'opéra monté, répéter tous les matins celui
qui va suivre, apprendre toutes les nouveautés écrites
expressément pour le théâtre, voilà leurs obligations.
Il faut avoir une poitrine de bronze et un courage de
fer pour y résister.
La plus grande partie des opéras représentés au
théâtre de la Scala sont en trois actes, divisés cha-
cun en plusieurs tableaux. Après chaque acte, on
joue un ballet qui dure au moins une heure, ce qui
laisse au chanteur le temps de se reposer pour enta-
mer l'acte suivant. Dans la saison d'hiver, dite sai-
son du carnaval, l'opéra est suivi d'un second ballet
de genre comique, qui prolonge la durée du spec-
tacle jusqu'à minuit au moins, de sorte que les spec-
196 SCA
tateurs intrépides n'en sortent que le lendemain du
jour où ils y sont entrés. Le luxe des décorations est
un peu au-dessous de sa réputation à Milan, et notre
Grand-Opéra est bien supérieur à la Scala sous ce
rapport; mais les costumes des ballets sont fort
riches. Un acteur représentant un personnage de qua-
lité n'oserait se présenter en scène sans toute sorte de
broderies et de plumes, souvent peu appropriées à la
sévérité de la tradition historique. Les prime donne
ont toutes l'air d'avoir trempé leurs robes de velours
dans le Pactole, ce fleuve aux paillettes d'or, et la
moindre confidente d'opéra scintille comme le ciel
d'une nuit d'Italie.
L'orchestre de la Scala se distingue avant tout par
uno merveilleuse science d'accompagnement; et c'est
un immense mérite. Là, les individualités ne cher-
chent pas isolément à briller, et tout l'amour-propre
consiste dans le bon ensemble de la masse. Vous en-
tendriez souvent chanter tout un air, un duo, sans
songer qu'il existe un orchestre, tant il se mesure su-
périeurement sur les nuances du chant. Cette supério-
rité discrète dans les accompagnements ne l'empêche
pas d'être nerveux, puissant, chaleureux dans les
moments voulus.
Excellent dans son ensemble , l'orchestre de la
Scala possède plusieurs artistes hors ligne. Nous
citerons notamment les deux frères Cavallini, dont
l'un est premier violon et chef d'orchestre, tandis
que le second possède le plus admirable talent sur la
clarinette. Quoique ce dernier ait, depuis deux ans,
entrepris une tournée en Europe pour se faire enten-
dre dans des concerts, il n'a pas cessé de figurer sur
les cadres de l'orchestre de la Scala.
Scander. Exécuter un trait de manière à en distin-
guer les temps de chaque mesure, les diverses articu-
lations, tant en marquant les coulés, les piqués, que
SCH 197
les divers rhythmes provenant de la progression li-
néaire ou ternaire des notes.
Scène. Division du poëme dramatique, déterminée
par l'entrée d'un nouvel acteur. On divise une pièce
en actes, et les actes en scènes. Aux concours de
composition musicale de l'Académie des Beaux-Arts,
on donne souvent le nom de scène à la poésie que les
concurrents mettent en musique.
Dans les scènes à plusieurs personnages, le chant
doit avoir autant de caractères différents qu'il y a d'in-
terlocuteurs. Il faut rendre dans les scènes, non-seule-
ment le caractère de la passion qu'on veut peindre,
mais celui de la personne qu'on fait parler. Ce carac-
tère s'indique, en partie, par le genre de voix qu'on
approprie à chaque rôle ; car le tour de chant d'un
ténor est différent de celui d'une basse. On met plus
de gravité dans les chants de bas dessus, et plus de
légèreté dans ceux des voix aiguës. Mais outre ces dif-
férences, le compositeur vraiment habile en trouve
d'individuelles qui caractérisent ses personnages.
Seconde. Intervalle d'un degré conjoint ; ainsi, les
marches diatoniques se font toutes sur les intervalles
de seconde.
On distingue quatre sortes de seconde : 1° la se-
conde majeure formée d'un ton entier ; 2° la seconde
mineure, formée d'un demi-ton; 3o la seconde aug-
mentée, formée d'un ton et demi ; 4° Enfin, la se-
conde minime qui appartient au genre enharmoni-
que, et ne peut pas être employée dans la musique.
Sciierzando, En badinant. Ce mot italien désigne
une exécution légère et badine.
SCIIERZI MUSICALI, PLAISANTERIES MUSICALES. L'art
de plaisanter savamment en musique a toujours été
un des privilèges des hommes de génie. Parmi les
charmants badinagcs enfantés par la verve des compo-
siteurs, il faut citer particulièrement le caprice de
198 SCL
Marcello, les canons burlesques du P. Martini, les
fugues trillées de Porpora, etc.
Scherzo, Badinage. On donne ce nom à un mor-
ceau de musique de peu d'étendue et d'un style lé-
ger et badin. Le scherzo est assez souvent un menuet
d'un caractère plus bizarre que celui des menuets
ordinaires.
Sciiisma. C'est le nom d'un petit intervalle qui n'est
pas usité dans la musique pratique, mais qu'on em-
ploie dans la science canonique.
Scilenion. Morceau de musique des anciens Grecs,
d'un caractère doux.
Schofar. Instrument des Hébreux fait avec la
corne d'un bélier ou d'un bœuf, et dont le son très-
éclatant servait à annoncer les cérémonies du culte
divin.
Schotisch. C'est une sœur de la polka ; mais on la
danse plus lentement. Son caractère rhylhmiquc est
binaire, c'est-à-dire que le pas change de nature cha-
que deux mesures. On écrit la schotisch à 2/4 ou à
quatre temps.
Schyari. Sorte d'instrument à vent en usage il y a
quelques siècles, dont la structure ressemblait à celle
de la cornemuse, si ce n'est qu'il était ouvert dans la
partie inférieure.
Sciolto, Délié, Affranchi, Lirre. Ce mot, placé
sous un trait de musique, indique que les notes doi-
vent en être détachées.
Sciolto contrapunto, Canone sciolto. Contre-
point, canon affranchi des règles strictes que l'on a
imposées à ces sortes de compositions.
Sclaii. C'est une opinion à peu près générale, que
ce mot hébraïque, qui se trouve si souvent dans les
psaumes, a une signification musicale, sans cepen-
dant qu'on puisse déterminer quel est son véritable
sens. Les uns croient que c'est notre du capo ou le
SEG 199
signe de la reprise, d'autres prétendent que cette ex-
pression indique un changement de ton ou de temps,
un silence, etc.
Scolies. Chez les anciens Grecs on appelait ainsi
les chansons dithyrambiques. Dans la suite on donna
ce nom aux chansons morales.
Scordatura. Ce mot italien ne peut se traduire en
français que par désaccor dément, qui n'est pas reçu
dans notre langue ; il signifie l'action de désaccorder
un instrument à cordes. Comme rien de faux n'est
admis en musique, ce désaccordement consiste à don-
ner à l'instrument un accord qui, sans être faux, n'est
cependant pas celui qui lui convient et qu'on lui
donne de coutume. La scordatura se pratique pour
étendre les limites de l'instrument, ou faciliter cer-
taines positions que l'accord ordinaire ne permet
pas de prendre, et produire par ce moyen des effets
nouveaux et extraordinaires. Paganini en faisait un
grand usage.
Sdrucciolo, Enharmonique. Cette expression ita-
lienne indique la manière de glisser enharmonique-
ment avec la voix sur quelques sons. Cet agrément,
qui n'est pas toujours de bon goût, est particulière-
ment employé dans le cantabile. Mais on doit, pour
qu'il produise un effet attrayant, n'en faire usage que
de la tonique à la quarte, et, ce qui est encore plus
convenable, de la quarte à la tonique. On peut en-
core s'en servir en passant d'un son à celui qui le pré-
cède immédiatement dans l'échelle musicale ascen-
dante, par exemple, de l'octave à la septième
mineure, et de la quinte à la quarte mineure.
Second. Epithète qui, entre deux parties ou voix
égales, indique la plus basse, comme second violon,
seconde viole.
Segue, Suit. Cette expression italienne, placée au
bas d'une page ou entre deux morceaux de musique,
200 SEP
indique qu'on doit continuer à exécuter ce qui suit
sans aucune interruption.
Seguidille, en espagnol Seguidillâ. Air de chant
et de danse fort en usage en Espagne. La mesure en
est à trois temps, et le mouvement animé. Cet air est
moins étendu que le boléro et le fandango, dont il a
le caractère. C'est, à proprement parler, une chanson.
La ritournelle se fait entendre au commencement et
même au milieu de chaque couplet, ou estrivillo.
Segno, Al segno, Au Signe. Ces mots signifient que
l'on doit reprendre le morceau à partir du signe
indiqué.
Séméiograpiiie. La séméiographie musicale, ou
d' scription des signes, comprend : la portée, les clefs,
les notes, les silences, les accidents, les points d'orgue,
les points d'arrêt, les signes d'agrément, les barres et
l'orthographe musicale.
Sementerion. Instrument de percussion des Grecs,
qui consistait en une planche sur laquelle on frappait
avec un marteau.
Semi. Cette expression latine, qui signifie demi,
s'ajoute à plusieurs mots, comme semi-brève, semi-
minime, etc.
Sensibilité. Disposition de l'âme qui inspire au
compositeur les idées vives dont il a besoin, à l'exé-
cutant la vive expression des beautés et des défauts de
la musique qu'on lui fait entendre.
Septième. Intervalle dissonant de sept degrés. Il y
a trois sortes de septièmes, la septième mineure, la
septième majeure et la septième diminuée.
Septuor. Composition à sept parties obligées.
Le septuor vocal est toujours accompagné par l'or-
chestre ou le piano. Le septuor instrumental se borne
aux sept instruments pour lesquels il est composé.
Nous possédons d'excellents septuors de Beetho-
ven, de Kalkbrenncr, deBcrtini, etc.
SER 201
Sérénade. Les sérénades sont des concerts donnés
la nuit en plein air. Aussi l'étymologie de ce mot
semble-t-elle venir du mot italien sereno. Il y a peu
de conditions essentielles pour la composition des
morceaux exécutés en sérénade. On peut cependant
dire que l'on a généralement choisi des mélodies
tristes et langoureuses, de nature à laisser la personne
à qui on offrait cet hommage dans un vague demi-
sommeil qui lui permettait à peine dans cette occa-
sion de distinguer la réalité du rêve. Les tons bémoli-
sés, surtout ceux de mi et de la, dont la douce
harmonie s'accorde bien avec le mystère dont les
exécutants cherchent d'ordinaire à s'environner, se-
raient heureusement employés.
La véritable patrie de ces concerts nocturnes, c'est
l'Espagne et l'Italie. Voilà où il faut chercher l'ori-
gine de la sérénade. Elle se plaisait surtout dans les
chaudes contrées, où la nuit est l'instant de toutes les
intrigues d'amour. A Venise, les gondoliers ont con-
servé les traditions de la sérénade dans les barcarolles
que la nuit ils font entendre sur les lagunes. Un mo-
dèle de ce genre de morceau est la sérénade de Doni-
zetti dans l'opéra intitulé : Don Pasquale.
Serinette. Très-petit orgue à cylindre, qui joue
des airs sans accompagnement, et qui sert à l'éduca-
tion musicale des serins.
Serpent. Instrument à vent que l'on embouche
par le moyen d'un bocal. Le serpent est un cornet
replié pour le rendre moins long, et pour que les
doigts puissent atteindre les trous qui en règlent l'in-
tonation. Ses replis et sa forme lui ont fait donner
le nom de serpent.
On se sert de cet instrument dans les églises pour
soutenir le chœur, et il était en usage autrefois dans
les musiques militaires pour exécuter avec le trom-
bone la partie de contrebasse.
202 SIC
Sextuor. Composition à six parties obligées.
Le sextuor vocal est accompagné par l'orchestre
ou le piano. Le sextuor instrumental se borne tou-
jours aux six instruments pour lesquels il est com-
posé.
Boccherini a écrit des sextuors pour flûte, deux
violons, viole et deux violoncelles. Les sextuors pour
deux clarinettes, deux cors et deux bassons, sont
d'un bon effet. Les sextuors de IL Bertini sont les
plus beaux de la nouvelle école.
Si. Note de musique que les Allemands désignent
par la lettre h, lorsqu'elle est sans altération, et par
la lettre b, lorsqu'elle est altérée d'un bémol. C'est le
septième degré de notre échelle musicale dans le
mode majeur, et le second dans le mode mineur. Il
porte accord parfait diminué, et s'emploie en har-
monie dans les deux modes, en suivant toujours
une marche différente.
Si. Septième syllabe du solfège moderne.
Siamois (Musique chez les). Les Siamois parais-
sent avoir fait plus de progrès dans la musique que
les autres nations de l'Asie. Leurs mélodies généra-
lement vives et brillantes, ne sont pas dépourvues de
charme, même pour l'oreille exercée d'un Européen.
11 y a beaucoup de douceur, d'agrément et de sim-
plicité dans la musique des Siamois. Elle diffère de
celle des autres nations orientales barbares, en ce
qu'elle est en général dans le mode mineur. Le but
des musiciens siamois est de toucher le cœur, d'in-
téresser l'esprit et d'exciter les passions. Pour y par-
venir, ils ont plusieurs espèces d'airs, qu'ils em-
ploient selon l'effet qu'ils cherchent à produire. Leurs
morceaux de musique sont en très-grand nombre.
Sicilienne. C'est une danse napolitaine à 6/8 qui
doit s'exécuter allegro. Le dessin mélodique est bi-
naire, c'est-à-dire semblable de deux en deux mesu-
SOC '203
res. Elle a les mômes proportions que ses soeurs, la
polka et la mazurka , c'est-à-dire trois périodes ot
huit ou seize mesures terminatives après le rappel du
premier motif, quelquefois des deux premiers.
Signes. Ce sont en général les divers caractères
dont on se sert pour noter la musique.
Silence. Nom générique des signes qui correspon-
dent aux différentes valeurs des notes, et marquent
l'interruption des sons pendant toute la durée de ces
mêmes valeurs. Le silence d'une ronde se nomme
pause, et se marque par une petite barre horizontale ;
celui d'une blanche, demi-pause, et se figure de
môme, à cela près de la différence de position sur
la portée. Le silence d'une noire s'appelle soupir,
celui d'une croche demi-soupir, ainsi de suite.
Simple. Dans la musique, tout double ou composé
a son simple, et tout simple a son double ou composé,
comme contrepoint simple ou double, figure simple
ou double, etc.
Sirvente. Sorte de poésie ancienne des trouba-
dours et des trouvères, ordinairement satirique, et
qui est presque toujours divisée en strophes ou cou-
plets destinés à être chantés. (Voyez Troubadour.)
Sistre. Instrument de percussion. Il est ovale et
fait d'une lame de métal sonore, dont la circonfé-
rence est percée de divers trous opposés, par lesquels
passent plusieurs baguettes de métal. On agite le
sistre en cadence pour lui faire rendre un son. Cet
instrument est employé dans la musique militaire.
Sociétés de musique. C'est surtout en Allemagne
que les sociétés de musique ont pris un grand déve-
loppement. La musique n'est cependant pas innée
chez le peuple allemand, comme on le croit généra-
lement en France. Elle est plutôt le résultat de l'édu-
cation primaire et du protestantisme. Les enfants des
deux sexes prennent chaque jour deux leçons de
204 SOC
chant dans l'école publique, qu'ils aient de la voix
ou non.
Jl n'est pas une ville en Allemagne, si petite qu'elle
soit, qui n'ait au moins sa société dirigée par un
amateur distingué, ou par un maître de l'école pri-
maire. Ces sociétés se composent de jeunes gens et
de jeunes personnes dans la fleur de l'âge. Comme
on se cotise pour couvrir les frais de l'établissement,
chaque membre, homme ou femme, paye un nom-
bre égal de florins par an. Ce fonds sert à acheter de
la musique, à payer les copies, le salon où l'on s'as-
semble, et mille autres choses qui sont à la disposi-
tion du directeur.
On se réunit une ou deux fois par semaine, et Ton
s'exerce à chanter des chœurs et des oratorios. Les
sociétés composées seulement d'hommes chantent les
quatuors sans accompagnement. Souvent la société est
forte de trois ou quatre cents membres. Alors les fonds
sont considérables; les soirées et les bals plus nom-
breux. Chaque nouveau membre y entre par ballotage
et après avoir subi un examen; car s'il n'a pas une voix
excellente, il faut au moins qu'il soit bon musicien et
qu'il sache lire a prima vista. Pour ceux qui ont de la
voix, on est plus indulgent, mais on leur enseigne à
part des soli.
De temps en temps les différentes sociétés se réu-
nissent, soit pour exécuter un grand oratorio au théâ-
tre, soit pour chanter au bénéfice des maheureux. A
Francfort, par exemple, le maître de chapelle n'a qu'à
donner un ordre , et toutes les sociétés de chant se
réunissent au théâtre avec les chœurs, et composent
un ensemble d'environ six à sept cents personnes. On
voit alors de jeunes bourgeoises rivaliser de voix et de
beauté avec les premières artistes ; car celles-ci ont tou-
jours soin de s'habiller en simples bourgeoises. Il en est
de même des sociétés instrumentales, où les amateurs
SOC 205
viennent une fois par semaine pour exécuter les sym-
phonies de Beethoven et de Mozart. Il faut avoir en-
tendu la marche triomphale de Titus de Mozart, exé-
cutée à Francfort, sous la direction de M. Guhr,
maître de chapelle, par trois cents amateurs, cin-
quante musiciens de l'orchestre du théâtre, cent de
la ligne, et cinquante de la garnison autrichienne,
tout cela après une seule répétition : on ne se figure
pas l'effet produit par ces masses vocales et instru-
mentales. Qu'on se représente M. Guhr faisant exé-
cuter la création de Haydn par sept cents voix et
trois cents musiciens. Il ordonnait, et le lendemain
une répétition avait lieu dans l'église Sainte-Ca-
therine, le surlendemain on assistait à la représen-
tation.
Tous les printemps on donne des fêtes musicales à
Heidelberg, Dusseldorf, Trêves, Mayence, Cologne,
Bonn, Carlsruhe et autres villes au bord du Rhin, où
six à sept cents chanteurs et cantatrices se réunissent
pour exécuter de la musique sévère et religieuse. Un
grand compositeur dirige ordinairement les chœurs
et l'orchestre, et les premiers artistes se chargent des
soli. Les chanteurs font souvent des voyages de trente
à quarante lieues, et les habitants de la ville s'enga-
gent à leur donner l'hospitalité.
Les sociétés de musique se multiplient aussi en
France depuis quelques années, grâce au mouvement
musical imprimé par l'Orphéon de Paris aux institu-
tions orphéonistes de la province. Jusqu'à présent,
c'est dans le nord de la France, bien plus que dans
les contrées méridionales, que ces sociétés ont donné
signe de vie. Quelques-unes mêmes, telles que celles
d'Arras, Lille et Douai, sont allées disputer les prix
aux sociétés chorales en Belgique et en Allemagne.
Dans le courant de l'année 1853, il y a eu à Melun, à
Fontainebleau et dans quelques autres villes, de belles
206 SOL
fêles musicales organisées avec le concours des sociétés
chorales de diverses localités. Nous ne doutons pas
que ce genre d'institution ne s'étende peu à peu sur
toute la surface de la France, et n'acquière, dans
notre pays, la même importance qu'en Allemagne et
en Belgique.
Solfège, Solfier. On nomme solfège, ou plutôt
solfèges, tout recueil d'exercices, d'études ou d'airs
disposés le plus ordinairement dans un ordre progres-
sif, et destinés à être solfiés, c'est-à-dire chantés, en
prononçant les syllabes qui servent de dénomination
aux notes. Le nom de solfège s'applique également
aux livres élémentaires qui enseignent les principes
de la musique en général , et qui contiennent des
leçons pour exercer les élèves à solfier. Toute bonne
éducation musicale doit commencer par une longue
pratique des solfèges , même quand on doit se borner
à apprendre à jouer d'un instrument quelconque; car
il n'y a rien de comparable aux exercices de solmisa-
tion pour acquérir le sentiment de la mesure et la jus-
tesse de l'intonation. Presque tous les peuples de l'Eu-
rope, hors les Allemands, emploient pour solfier les
syllabes correspondantes aux sept notes de la gamme
de Guido d'Arezzo,si ce n'est qu'ils remplacent la pre-
mière syllabe du premier degré ut par cette autre
do, comme moins sourde et plus douce à prononcer.
M. A. Panseron, professeur au Conservatoire de musi-
que de Paris, a composé des solfèges qui sont généra-
lement adoptés dans l'enseignement. Ceux du Conser-
vatoire, d'Italie, de Rodolphe, de Cherubini, de Che-
lard, deGaraudé, de Catrufo, etc., sont également
très-estimés.
Solmisation. — C'est l'action de solfier ou solmiser.
Dans l'école française, comme dans celle d'Italie, on
solfie les notes en les nommant par leur nom : ut, ré,
mi, fa, sol, la, si. Il est à remarquer que ces sept
SON 207
lettres correspondent aux sept syllabes de l'hymne de
Saint-Jean :
Ut queant Iaxis Solve polluti
Resonare flbris, Labii reatum,
Mira gestorum Sancta Joannis
Tamuli tuorum , Etc. , etc.
Le mot solmisation, comme le mot solfège, vient de
ce que l'échelle diatonique sur lequel était basé ce
genre d'étude commençait par sol. Il en est de cette
étymologie comme de celle du mot alphabet, qui vient
du nom des deux premières lettres grecques alpha et
bêta, dont on a composé le terme qui est en usage
dans notre langue. Les Allemands et les Anglais se
se servent pour solfier des lettres romaines A, B, G, D,
E, F, G, substituées par saint Grégoire, au VIe siècle,
aux lettres grecques.
Son. Le son n'est point un corps ou un être maté-
riel, mais seulement une propriété d'autres corps,
notamment de l'air qui le produit sous l'influence des
agents qui le font entrer en vibration; car on sait
qu'il n'y a pas de son possible dans le vide. L'on sait
de même que toute espèce de son est incontestable-
ment déterminée par la vibration des corps élastiques,
et que son plus ou moins grand caractère d'unité dé-
pend du nombre plus ou moins grand de ces vibra-
tions. L'air n'est pas le seul véhicule du son, quoiqu'il
en soit le plus ordinaire, et l'on sait même, depuis
Descartes, qu'il se transmet plus rapidement par le
moyen des liquides que par celui des gaz et des
fluides. La transmission par ces derniers, notamment
par l'air, est surtout bien moins rapide que par les
solides, tels que le bois, le fer, par exemple.
Les nuances des sons varient à l'infini, comme le
nombre des vibrations qui les produisent. On nomme
intervalle le rapport d'un son à un autre, ou plutôt
208 SON
le rapport entre les nombres de vibrations qui pro-
duisent ces sons. Les intervalles prennent différents
noms, relativement au nombre de sons qui se trou-
vent entre ceux que Ton compare. On les nomme
seconde, tierce, quarte, quinte, sixième, septième, octave,
quand les sons composés se suivent immédiatement,
ou quand l'oreille peut intercaler 1, 2, 3, 4, 5, 6 sons
intermédiaires.
Le mot bruit, pris quelquefois pour synonyme de
son, est spécialement consacré à caractériser, en fait
de sons, tous ceux qui ne sont pas ce qu'on nomme
musicaux proprement dits.
Son de voix, Ton de voix. Ces deux expressions,
synonymes en ce qu'elles expriment les affections
caractéristiques de la voix, ont cependant entre elles
des différences considérables. Le son de voix est dé-
terminé par la construction physique de l'organe; il
est doux ou rude, agréable ou désagréable, etc. Le
ton de voix est une inflexion déterminée par les
affections intérieures que l'on veut peindre. Il est,
selon l'occurrence, impérieux ou soumis, fier ou
humble, vif ou froid, sérieux ou ironique, triste
ou gai.
Sonate. La sonate, du mot italien suonare, sonner,
s'applique au jeu de tous les instruments; c'est une
pièce de musique instrumentale, quelquefois avec
accompagnement. Elle prend le nom de trio, quand
elle est accompagnée par un troisième instrument.
La sonate se compose ordinairement de deux ou trois
morceaux : 1° allegro ; 2o adagio ; 3° rondo ou presto.
Toutefois, Sébastien Bach a composé des sonates à
quatre et même cinq morceaux, qui ont obtenu long-
temps un grand succès, ce que notre génération a le
tort de ne pas connaître.
La sonate se rapproche du concerto et de la fantai-
sie, en ce sens qu'elle est un morceau d'exécution
SON 209
composé pour faire briller l'artiste ; mais le style en
est plus sévère; de sorte qu'elle est en même temps
une véritable étude, un exercice, et quelquefois une
pièce fort difficile pour un seul instrument. Quelque
resserré que soit le cadre dans lequel se renferme cette
composition musicale, un harmoniste habile peut
y jeter des effets d'une certaine puissance; il doit
môme s'attacher à tempérer la sévérité un peu péda-
gogique du genre par de gracieuses mélodies, des
thèmes originaux et des accompagnements variés.
La sonate demande à être jouée avec une irrépro-
chable précision ; elle ne souffre ni broderies, ni péri-
phrases, ni aucun de ces traits brillants, mais para-
sites, désignés dans l'école sous le nom de fioritures,
MM. Baillot et Liszt ont donné des modèles d'exécu-
tion, le premier dans les sonates de Tartini et de
Yiotti, le second dans celles de Beethoven, admi-
rables chefs-d'oeuvre où se retrouve tout entier, avec
autant d'éclat que d'élévation et de profondeur, le
génie du créateur des symphonies.
Presque tout le dix-huitième siècle fut l'esclave de
la sonate, et chacun connaît la boutade que ce culte
exclusif pour une idole maintenant tombée, inspira à
Fontenelle. De notre temps, M. Fétis, parodiant l'ex-
clamation comique de l'ingénieux auteur de la Plu-
ralité des mondes y a pu dire : Sonate, où es-tu? Et de
fait, la sonate est morte, morte à petit bruit, sans fu-
nérailles, sans oraison funèbre.
Les meilleures sonates pour le piano sont de Ch.-
Emmanuel Bach, Haydn, Mozart, Beethoven, dé-
menti, Dusseck et Hummel. Tous les artistes connais-
sent les sonates de Sébastien Bach pour clavecin et
violon. Krumpholtz a fait pour la harpe ce que dé-
menti avait fait pour le piano. Gorelli, Tartini, Loca-
telli, Leclair, Yiotti, Baillot, Pleyel et Kreutzer ont
écrit d'excellentes sonates de violon. Fruncischello et
210 SUB
Duport ont également laissé sous le même titre des
études fort utiles pour le violoncelle. Les sonates à
instruments à vent sont rares et peu estimées. Il faut
cependant en excepter celles de Krommer et du savant
et regrettable Reicha.
Sons antiphones. Ce sont ceux qui, à la distance
d'une ou plusieurs octaves, font consonnance entre
eux.
Sourdine. Petit instrument de bois, que l'on en-
châsse sur le chevalet du violon, de la viole ou du
violoncelle, pour en intercepter les vibrations et
en diminuer par conséquent le son. La sourdine,
en affaiblissant les sons, change leur timbre et leur
donne un caractère sombre et mélancolique.
Strette. Mot qui vient de l'italien et qui signifie
étroit, serré. Il se rapporte au mouvement d'un mor-
ceau de musique, et indique une marche plus serrée,
plus rapide que celle que l'on suivait déjà.
Strophe. Couplet ou stance d'une ode ou d'une
pièce de vers lyriques, dont le sujet est noble.
Subvention. C'est la part d'argent que donne le Gou-
vernement à des scènes privilégiées pour les aider à
marcher glorieusement dans la voie du progrès mu-
sical et dramatique. Les théâtres subventionnés à Pa-
ris sont : l'Académie impériale de musique, le théâtre
de l'Opéra-Comique, le Théâtre-Italien, le Théâtre-
Français et l'Odéon. Ce mot s'applique aussi aux Con-
servatoires de musique placés sous la surveillance du
Gouvernement. Celui de Paris est entièrement sub-
ventionné par l'État; ceux des départements le sont
en partie par l'Etat et en partie par les administra-
tions locales.
En Italie, la subvention (dote) est plus ou moins
forte selon le rang qu'occupent les cités dans l'ordre
géographique, ou bien selon les circonstances qui
président à l'ouverture des salles de théâtre. C'est la
SUB 211
commune qui donne la dote et le Gouvernement qui
fixe la somme. Comme nos centimes additionnels
dans nos budgets des départements ou d'arrondisse-
ments, les subventions théâtrales sont proportion-
nelles aux produits du pays, à son commerce, à sa
population. Le gouvernement ne refuse jamais son
approbation aux demandes qu'on lui adresse à l'occa-
sion des foires, qui sont les saisons les plus favorables
aux entreprises de théâtre. Par l'attrait du plaisir, on
fait naître la concurrence dans les affaires, et souvent
la fortune publique se trouve liée à la renommée des
artistes choisis par les entrepreneurs.
Substitution. Dans l'accord de dominante sol, si,
ré, fa, sol, et dans tous les autres semblables, au lieu
de répéter la dominante sol à l'octave supérieure, on
peut lui substituer le sixième degré la.
Quand la dominante fondamentale est écrite, la
note substituée doit en être à une neuvième réelle ;
quand elle n'est pas écrite, on a l'accord de septième
de sensible si, ré, fa, la, dont l'emploi est soumis aux
règles suivantes :
Si le mode est majeur et si la note substituée n'est
pas abaissée d'un demi-ton par une altération, elle
doit se trouver toujours à une distance de septième
de la sensible.
Si ce mode est mineur ou si la note substituée est
abaissée d'un demi-ton par une altération quelcon-
que, on peut très-bien récrire à une distance de
seconde de la sensible.
On appelle aussi substitution dans quelques an-
ciens traités, toute espèce de prolongation ou de re-
tard, c'est-à-dire toute introduction dans un accord
quelconque d'une note étrangère à cet accord, pourvu
que les règles de la préparation et de la résolution
soient bien observées.
212 SYM
La substitution peut avoir lieu dans tous les tons
et dans tous les modes.
Suède (de la musique en). L'art musical est consi-
déré par les Suédois comme une partie importante
de l'éducation, surtout parmi les femmes. Les pro-
fesseurs de musique jouissent de beaucoup de consi-
dération, et sont accueillis avec honneur dans les
classes les plus élevées de la société. Dans les mon-
tagnes, les bergers suédois se servent d'une espèce de
longue trompette faite d'écorce de bouleau qu'ils ap-
pellent mir. Cet instrument qui a quelquefois quatre
pieds de long, rend un son très-perçant, et dans un
temps calme il peut être entendu à une grande dis-
tance. Quoique le son de cette trompette soit très-
fort et destiné à éloigner les bêtes sauvages, il n'est
pas désagréable.
Malgré leur goût pour la musique, les Suédois
n'ont point, jusqu'aujourd'hui, manifesté de génie
pour cet art. Il y a un théâtre à Stockholm, mais
on n'y représente que des opéras italiens ou français.
Cette capitale possède une académie de musique
fondée en 1772 par Gustave III. Jenny Lind, qui est
née en Suède, donne à l'histoire musicale de ce pays
un grand relief. Mme Nissen-Saloman, cantatrice
très-distinguée, qui a chanté sur les principaux théâ-
tres italiens de la France, de la Russie, de l'Allema-
gne et de l'Italie, est aussi d'origine suédoise.
Suite. Nom que l'on donnait autrefois à une col-
lection de morceaux de musique pour clavecin et
qui différait de la sonate proprement dite. La plupart
de ces suites contenaient des airs de danse précédés
par l'allemande. Les suites de Hsendel traverseront
les siècles, à cause des belles fugues dont elles sont
enrichies et qui sont des modèles dans ce genre.
Sympiioniaste. Compositeur de plain-chant. Ce
terme, employé par l'abbé Lcbœuf, était autrefois
SYM 213
technique, on ne l'emploie guère aujourd'hui dans
ce sens.
Symphonie. Pièce divisée en trois ou quatre mor-
ceaux et composée pour l'orchestre.
La symphonie commence le plus souvent par une
courte introduction d'un mouvement lent, qui con-
traste avec la vivacité, l'éclat, la véhémence, l'en-
traînante rapidité du premier allegro qu'elle prépare.
Vient ensuite un andante varié, un cantabile ou un
adagio suivi d'un menuet ; un rondo vif et brillant,
un finale plein de mouvement et de vigueur, termi-
nent cette œuvre, une des plus importantes en musi-
que. Rien qui émeuve, qui entraîne comme une belle
symphonie, traduisant avec des gradations habile-
ment ménagées toutes les nuances du sentiment.
Au dix-huitième siècle, Corelli, Geminiani, Vi-
valdi, en composant leurs concerti grossi, avaient ou-
vert la carrière de la symphonie. Mais, malgré l'in-
contestable talent de ces virtuoses célèbres , ce genre
de composition présentait encore toutes les imper-
fections d'un premier essai. Il lui restait à acquérir
une forme plus originale, à prendre un essor plus
vigoureux, plus hardi. Haydn lui donna une vie
nouvelle, l'anima du souffle ardent de son génie,
l'éleva, en un mot, à un haut degré de perfection. Ses
symphonies sont d'admirables chefs-d'oeuvre, qui ont
toujours d'irrésistibles séductions, même pour les
oreilles les moins familiarisées avec les délicatesses de
l'art.
Mozart et Beethoven ont fait aussi des symphonies
qui sont des créations sublimes, et où l'on xetrouve
celte verve, cette abondance d'idées, cette fécondité
inépuisable, cette variété de style et de coloris qui dis-
tinguent ces grands compositeurs. Mendelsohn doit
être encore cité de nos jours comme un des meilleurs
compositeurs dans ce genre de composition, qui exige
214 SYN
à la fois de l'habileté, de l'inspiration et une science
profonde.
Bien qu'elle n'ait abordé le genre de la symphonie
que longtemps après l'Italie et l'Allemagne, la France
a déjà obtenu de brillants succès sous ce rapport. Une
des illustrations de l'école française, un de nos pre-
miers compositeurs dramatiques, Méhul, a fait des
symphonies qui ne sont pas un de ses moindres
titres de gloire. Et de nos jours, celles de M. Berlioz
brillent par des effets nouveaux, par la hardiesse de
la conception, par une instrumentation habile et sa-
vante. MM. Félicien David, Th. Gouvy, Louis La-
combe, Henry Reber, Onslow, ont fait aussi des sym-
phonies qui méritent d'être signalées.
Depuis quelques années, le Conservatoire a tra-
vaillé avec succès à populariser chez nous les sympho-
nies des grands maîtres. Ces œuvres remarquables ne
pouvaient avoir de meilleurs interprètes que les mem-
bres de la Société des concerts.
Symphonie caractéristique. Cette composition se
propose pour but la peinture de quelque caractère
moral, comme le Distratto de Haydn , ou de quelque
phénomène physique, par exemple, la tempête, l'in-
cendie; ou bien elle a une couleur bien tranchée, un
coloris qui lui est propre, comme la symphonie turque
de Haydn, les magnifiques symphonies pastorales ou
héroïques et les Ruines d'Athènes, de Beethoven.
Symphonie concertante. Morceau concerté pour
plusieurs instruments obligés avec accompagnement
d'orchestre.
Symphoniste. Celui qui compose des symphonies.
Ce mot s'applique aussi au musicien qui joue des
instruments de musique, qui est plutôt un bon mu-
sicien d'ensemble qu'un soliste, ou bien encore qui
compose des œuvres qu'on joue sur ces instruments.
Syinaphe. C'était, dans l'uncicnne musique, lacon-
TAC 9tf
jonction do doux tétracordes, au moyen de laquelle
la quatrième corde d'un tétracorde devenait en même
temps la première du tétracorde suivant.
Syncope. Prolongement sur le temps fort d'un son
commencé sur le temps faible. Ainsi, toute note
syncopée est à contre- temps, et toute suite de notes
syncopées est une marche à contre-temps.
Synnemenon. Nom du troisième tétracorde de l'an-
cien système grec, lorsqu'il était conjoint au second.
Synnemenon diatonos. C'était, dans le genre dia-
tonique, le nom qu'on donnait à la troisième corde
de ce même tétracorde, et qu'on nommait aussi
paranète synnemenon.
Syringes. Ancien nom de la flûte de Pan.
Système. (Voyez Théorie.)
Syzygia. C'était, dans l'ancienne musique, une
union consonnante de sons.
T. Celte lettre, écrite alternativement avec s, si-
gniGe tutti, et alors s signifie solo. Quand t est réuni
à s, comme ts, cela veut dire tasto solo (à touche
seule).
Table d'harmonie. C'est dans les clavecins, les
pianos, les harpes, une planche de sapin assez mince
qui sert de couverture à l'espèce de caisse destinée à
recevoir l'air agité par les vibrations des cordes, et à
augmenter ainsi la sonorité de l'instrument. Le dessus
du violon, de la viole, du violoncelle, de la contre-
basse, de la guitare, est une table d'harmonie,
Tacet, Ce mot latin s'écrit dans la musique pour
216 TAM
indiquer le silence d'une partie pendant l'exécution
d'un morceau.
Taille. Nom que l'on donnait autrefois en France
à la voix de ténor. On dit encore basse-taille, qui si-
gnifie ténor grave.
Tambour. C'est un des instruments militaires les
plus anciens. Il était en usage chez tous les peuples
de l'antiquité, excepté chez les Grecs et les Romains,
qui le remplaçaient par les timbales et par la buccine.
Les premiers Francs ne connurent que l'usage du
clairon.
Le tambour a été importé en Europe par les Sar-
rasins et parles Maures. Les Allemands, les Anglais, les
Italiens et les Espagnols s'en servirent ensuite les pre-
miers; il n'apparaît en France qu'en 1347, lors de
l'entrée d'Edouard III, roi d'Angleterre, à Calais. C'est
à partir de cette époque qu'on a créé des tambours
dans l'infanterie, et que l'usage de la caisse s'y est
introduit avec rapidité.
Avec cet instrument, on bat le rappel ou la géné-
rale, pour réunir les corps ; la retraite, pour annon-
cer, le soir, l'heure de rentrer à la caserne, et, sur le
champ de bataille, la fin d'un combat; la charge,
pour marcher en avant et contre l'ennemi, attaquer
une position, un fort, une redoute, un village. Les
autres batteries de caisse sont la diane, la breloque,
autrefois appelée fascine, parce qu'elle servait à aver-
tir les travailleurs; le roulement, aux champs, au dra-
peau, Yassemblée, le ban, qui se bat à l'entrée des
troupes dans les places où elles vont tenir garnison,
ou pour recevoir un officier à la tète des troupes.
Tambour (gros), vulgairement appelé grosse Caisse
ou simplement Caisse. C'est un tambour d'une grande
dimension que l'on emploie dans la musique mili-
taire, et dont les frappements réguliers marquent la
mesure et le rhythme. Rossiniet les musiciens de son
T4M 217
école ont introduit le gros tambour dans les finales et
autres morceaux d'opéra.
La grosse caisse est d'un admirable effet quand on
l'emploie habilement, dans un vaste orchestre; et
lorsque le rhythme s'est fortifié peu à peu par l'intro-
duction successive des instruments les plus sonores,
l'entrée crescendo de la grosse caisse peut lui donner
une physionomie grandiose et formidable. Les notes
pianissimo de la grosse caisse, frappées à de longs in-
tervalles au milieu d'un andante de l'orchestre , ont
quelque chose de solennel et de mystérieux qui saisit
l'imagination. Frappée seule au contraire, et pianis-
simo, la grosse caisse prend une expression mena-
çante et ressemble à un coup de canon lointain.
De tous les instruments à percussion, la grosse
caisse est celui dont on a le plus abusé depuis une
vingtaine d'années. On l'emploie maintenant dans
tous les morceaux d'ensemble, dans tous les finales,
dans tous les chœurs et même dans les airs de danse.
Frapper platement les temps forts de la mesure, dit
un critique célèbre, à la façon des joueurs de gobelets,
des saltimbanques, des avaleurs de sabres et de ser-
pents, écraser l'orchestre, exterminer les voix, étouf-
fer la mélodie, l'harmonie, c'est le comble delà dé-
raison et de la brutalité. ,
Tambour roulant, ou Caisse roulante. Tambour
du diamètre des tambours ordinaires, mais plus haut
de la moitié environ. Ce tambour s'emploie dans la
musique militaire. Le son qu'il rend est fort doux.
Tambourin. Espèce de tambour moins large et plus
long que le tambour ordinaire, sur lequel on bat
avec une seule baguette, et qu'on accompagne ordi-
nairement avec une petite flûte pour faire danser les
villageois.
Tambour de basque. On désigne ainsi une sorte de
petit tambour qui n'a qu'un fond de peau tendue sur
T. II. 7
218 TAK
un cercle de bois, autour duquel il y a des plaques de
cuivre et des grelots, et dont on joue avec le bout des
doigts ou en l'agitant. Les Bohémiens s'en servent en
dansant leurs sarabandes. Quelques commentateurs
prétendent que Marie, sœur de Moïse, frappait un
semblable tambour en chantant le cantique de joie du
15e chapitre de l'Exode.
Tamtam. Instrument de musique à percussion, ori-
ginaire des Indes orientales ou de la Chine. 11 se com-
pose d'un large plateau de métal, sur lequel on
frappe avec un marteau ou avec une forte baguette
garnie d'un tampon de peau. Le son qui en résulte
est d'un caractère lugubre. Il a d'abord une très-
grande force, qu'il perd ensuite dans des vibrations
prolongées. Ce son étrange, qui réveille un senti-
ment de terreur, ces vibrations lentes et continues
sont dues à la combinaison des métaux dont l'instru-
ment est forgé, et plus encore à la manière dont il est
trempé. L'analyse de plusieurs tamtams venus d'O-
rient a fait reconnaître qu'il entre dans la composi-
tion de cet instrument quatre parties de cuivre jaune
et une partie d'étain mêlée d'un peu de zinc, selon les
uns, et sans autre mélange, suivant d'autres. Quant
à la trempe, elle se pratique en sens inverse de la ma-
nière dont on s'en sert ordinairement avec les autres
métaux, c'est-à-dire que le refroidissement, au lieu
d'être subit, s'opère par gradation et très lentement.
Le tamtam, fort en usage chez les Orientaux, ne s'em-
ploie chez nous que bien rarement, avec beaucoup de
réserve, et seulement dans la musique funèbre, ou
dans certaines scènes de musique dramatique desti-
nées à produire des effets d'un caractère sombre et
terrible.
Tapon. Gros tambour en usage dans les Indes
Orientales, qu'on frappe avec le dos de la main.
Tarantelle. Air de danse napolitain, d'un carac-
TAU 219
1ère gai, en mesure à 6/8, et d'un mouvement vif. La
tarantelle est ordinairement accompagnée de tam-
bour de basque.
Tarentisme. Le tarentisme est le nom de la mala-
die singulière attribuée à la piqûre de cet insecte, es-
pèce d'araignée qui se trouve en Italie, et particuliè-
rement dans la Pouille. Le charlatanisme, qui pé-
nètre partout, a voulu faire de la musique un remède
universel. C'est à ce charlatanisme qu'il faut attri-
buer la fable de l'efficacité de la musique contre la
morsure de la tarentule.
Baglivi, célèbre docteur italien, parle d'une femme
mordue par la tarentule. Elle fut mordue dans une
cave, mais elle ne sentit pas cette morsure à l'instant,
et elle revint chez elle sans s'en être aperçue. L'après-
midi, il lui vint à la jambe une petite tumeur, grosse
comme une lentille, accompagnée de défaillance.
Elle se jeta sur un lit et commença à trembler si fort,
que deux hommes vigoureux pouvaient à peine la
tenir. Elle sentit ensuite des douleurs aux mains et
aux pieds. On alla chercher un médecin qui fit ouvrir
la tumeur et employa quelques emplâtres ; ce re-
mède ne produisit aucun effet. Les parents, soup-
çonnant d'abord que leur fille avait été mordue de la
tarentule, envoyèrent chercher des musiciens. Ceux-
ci essayèrent d'abord deux ou trois airs sans le
moindre résultat; mais au quatrième, la malade
parut attentive. Ensuite elle commença à danser
d'une manière si extravagante et avec tant de vi-
gueur et de rapidité, qu'elle fut bientôt délivrée de
tout mal. Depuis cette guérison, ajoute Baglivi, elle
jouissait de la meilleure santé.
Malgré l'opinion de Bagîivi et d'un grand nombre
d'auteurs anciens qui ont écrit sur le tarentisme, on
ne croit plus maintenant à l'origine de cette maladie.
220 TEL
L'opinion actuelle des médecins est tout en faveur
de l'innocuité de la piqûre de la tarentule.
Tasto solo (à touche seule). Mots italiens qu'on
écrit dans la partie de l'organiste, pour lui faire
connaître qu'il ne doit pas accompagner la basse par
les accords de la main droite.
Taun. Instrument en usage sur les côtes de la
Barbarie.
Téléphonie, de télé, — loin, et phonê, — voix. C'est
une télégraphie vocale ou moyen de correspondre à
de longues distances par la puissance du son. Tout
le monde sait que M. Sudre est l'inventeur de cette
admirable découverte , et la presse a souvent parlé
de ses trompettes adoptées par M. le ministre de
la marine, et servant à la transmission du son té-
léphonique sur les vaisseaux de guerre. Ce sys-
tème de correspondance est tellement simple, tel-
lement facile et à la portée des intelligences les plus
bornées, que deux ou trois minutes d'explications
suffisent pour apprendre à le faire fonctionner. On
peut en faire l'expérience au moyen d'un seul signe
clair ou lumineux. A l'aide de toute chose apparente
ou sonore, M. Sudre peut transmettre des phrases,
des ordres et donner des avis. Ainsi donc, que ce
soit un pavillon, une lumière, le bruit du canon, ce-
lui du tambour, ou bien un corps opaque de quel-
que nature qu'il soit, fût-ce même un soldat ou un
cavalier, en un mot, tout ce qui se voit la nuit ou le
jour, peuvent lui servir d'appareil télégraphique
pour correspondre au loin.
Comme on le voit, il y a le double emploi de la
lumière et du son dans la téléphonie. En créant une
langue universelle, M. Sudre a voulu réunir plusieurs
avantages; il a voulu former un mode de communi-
cation capable d'exprimer toutes nos idées; il a
voulu que la nouvelle langue fût susceptible d'être
TEM 221
rendue par des sons, par des caractères, par des
gestes ; qu'elle pût servir, soit à communiquer de
près, soit à transmettre les idées rapidement au loin;
qu'elle pût à volonté être employée, ou pour com-
muniquer sans mystère, ou pour établir des commu-
nications secrètes ; enfin que le système des sons ne
fût pas susceptible, comme la prononciation des
langues parlées, de changer successivement avec le
temps, mais qu'il fût de sa nature inaltérable.
Yoilà le résultat. Quant au moyen, il consiste à
donner aux sept notes de la musique une valeur équi-
valente à peu près à celle des signaux configurés par
les branches du télégraphe. De plus, l'invention de
M. Sudre a sur celle des frères Chappe l'avantage
d'être perceptible par trois sens au lieu d'un seul, à
savoir par l'ouïe au moyen des sons, par la vue au
moyen des signaux fournis par les doigts et corres-
pondant aux notes, enfin par le toucher, au moyen
de ces mêmes signaux rendus sensibles par le con-
tact.
M. Sudre a aussi inventé un nouvel instrument
monstre à air comprimé, ayant la faculté de porter
le son à deux lieues de distance. Cet instrument, à
l'usage des armées de terre et de mer, présente les
ressources les plus importantes pour transmettre,
pendant la nuit ou en temps brumeux, et toujours
au moyen de la téléphonie, des ordres d'un corps
d'armée à un autre, d'un vaisseau à un autre vais-
seau.
Tempérament. On appelle tempérament une alté-
ration presque insensible de la valeur du dièse et du
bémol, pour les faire coïncider au même point dans
les instruments à sons fixes, tels que les pianos, les
orgues, les harpes, etc. Dans leur état naturel, ut dièse
et ré bémol ne coïncident pas : ut dièse est plus
élevé que ré bémol. Il fallait donc altérer un peu cet
222 TEM
état naturel pour ne pas multiplier à l'infini les
touches du clavier, et pour le rendre accessible aux
mains des pianistes.
Tempérament. Dans le système moderne, appelé
tempéré, on trouve que tous les intervalles ne peuvent
pas être pratiqués dans leur justesse parfaite, mais
qu'ils perdent tantôt sur un point, tantôt sur un
autre, quelque chose de leur acuité ou gravité. En
effet, l'expérience nous montre qu'une suite de tierces
majeures et mineures, de quintes et de quartes, ac-
cordées avec un justesse rigoureuse, lorsqu'elles ar-
rivent à un terme donné, produisent un son ou trop
haut ou trop bas, relativement aux premiers. C'est
pour obvier à cei inconvénient que l'on est dans la
nécessité d'altérer l'un ou l'autre son, afin de combi-
ner les intervalles d'un mode avec ceux de l'autre ; et
c'est le résultat de cette opération qu'on appelle tern*
pérament.
Tempo di marcia, Mouvement de marche. Ordinai-
rement allegro maestoso.
Tempo di minuetto, Mouvement de menuet. Autre-
fois c'était un mouvement modéré, propre à l'air de
danse du môme nom. Peu à peu ce mouvement s'est
accéléré, et maintenant il est en général très-rapide.
Temporiser. Ceux qui accompagnent et ceux qui
dirigent sont souvent obligés, pour seconder le chan-
teur ou le concertiste, de s'écarter de l'exacte obser-
vation de la mesure et d'allonger ou abréger la justesse
du temps. Cette manière de procéder s'appelle en
italien temporiser.
Temps fort. C'est le nom que l'on donne à la par-
tie la plus sensible de la mesure, par opposition à
celle qui est la moins sensible, et qu'on appelle temps
faible. Dans la mesure à deux temps, c'est le premier
qui est fort ; dans la mesure à trois et à quatre temps,
le premier et le troisième sont forts.
TER 223
Temps, Mesure. La mesure est la division des sons
en espace de temps égaux, et on l'indique au moyen
d'une ligne appelée barre, qui traverse la portée. Le
signe qui se trouve marqué immédiatement après la
clef, qualifie la mesure, en indiquant : 1° en combien
de parties elle est divisée; 2° de quelle valeur de notes
chacune de ces parties est formée.
On distingue deux sortes de temps ou mesures, les
mesures paires et les mesures impaires. Les mesures
paires sont celles qui se divisent en deux ou en quatre
parties, comme la mesure de deux noires, etc. Les
mesures impaires sont celles qui se divisent en trois
parties, comme la mesure de trois croches, la mesure
de neuf noires, etc.
Tempus imperfectum. Nom ancien de la mesure à
temps pairs, où une brève avait la valeur de deux se- 4*^ ...
mi-brèves.
Tempus perfectum. C'est ainsi qu'on appelait au-
fois la mesure à temps impairs, où la brève valait
deux semi-brèves.
Tempus vacuum. C'était, dans l'ancienne musique,
le silence que l'on pratiquait dans certaines mélodies,
lorsque le vers final manquait d'une syllabe, afin de
conserver un mouvement égal dans la mesure.
Teneidos. C'est le nom grec d'un morceau de mu-
sique pour la flûte.
Tenue. Note soutenue pendant un certain nombre
de mesures ou de temps.
Terpodium. Instrument appartenant à l'espèce de
clavi-cylindre, inventé en 1817 par David Buschmann,
de Gotha.
Tertia conjunctarum. Nom latin de la seconde
corde du tétracorde synnemenon.
Tertia dïvisarum. Seconde corde du tétracorde
dieuzeugmenon.
§
224 THÉ
Tertia excellentium. Nom latin de la seconde
corde du tétracorde hyperbolacon.
Ter unca. Nom ancien de la double croche.
Testudo. Nom latin du luth.
Tète. La tête ou le corps d'une note est cette par-
tie qui en détermine la position, et à laquelle tient la
queue, quand elle en a une.
Tétracorde. Ce mot grec vient de tétra, quatre, et
cordé, corde.
Tétradiapanos. Nom grec de la triple octave.
Tétraoedios. Les Grecs appelaient de ce nom un
morceau de musique composé de quatre strophes,
chacune desquelles se chantait dans un ton différent
des autres.
Tétratonon. Nom grec de la quinte augmentée,
ou sixte mineure.
Théâtre italien. La première troupe d'opéra ita-
lien fut appelée en France par le cardinal Mazarin,
qui ne laissait échapper aucune occasion de faire sa
cour à la reine Anne d'Autriche. Elle débuta à Paris,
en 1645, sur le théâtre du Petit-Bourbon, par la Festa
teatrale et la Finta Pazza. La reine Anne d'Autriche
avait un tel goût pour le spectacle, qu'elle y allait in-
cognito, même pendant le deuil, après la mort de
Louis XIII, son époux. Depuis cette époque, les Ita-
liens ne négligèrent jamais les occasions de venir faire
fortune en France, où on était heureux de les possé-
der et de les enrichir. L'École musicale française est
en grande partie redevable de ses progrès à l'école mu-
sicale italienne, implantée en France par les œuvres
des meilleurs compositeurs et les exemples des plus
célèbres chanteurs ultramontains. C'est au Théâtre-
Italien de Paris qu'on a entendu les chefs-d'œuvre
de Cimarosa, Paër, Paisiello, Rossini, Donizetti, Bel-
lini, Mercadante, Verdi, interprétés par les Crescen-
tini, les Davide, les Garcia, les Rubini, les Galli, les
THÉ 225
Tamburini, les Lablache, les Mario, les Grassini, les
Pasta, les Malibran, les Sontag, les Persiani, les Grisi,
les Cruvelli, les Delagrange. N'oublions pas non plus
que c'est un Italien, Servandoni, habile machiniste
attaché au service de Louis XY, qui introduisit sur nos
théâtres les pantomimes à décorations et à tableaux.
La période la plus prospère du Théâtre-Italien de
Paris a été celle de la direction de MM. Robert et Se-
verini. L'incendie qui, en 1837, dévora la Salle Fey-
deau où la troupe italienne donnait ses représenta-
tions, et dans lequel M. Severini perdit si fatalement
la vie, mit fin à l'association de ces deux hommes in-
telligents, et dès lors commença la décadence de
cette scène parmi nous. Les directeurs qui se sont
succédé depuis à la tête du Théâtre-Italien, sont :
MM. Louis Viardot, Dormoy, Yatel, Dupin, Ronconi,
Lumley, Corti et Ragani. Le plus heureux de tous a été
M. Yatel, qui, en suivant les traditions laissées par
MM. Robert et Severini, a su gagner une fortune con-
sidérable sans rien faire cependant pour le progrès
de l'art.
Thème. Sujet ou partie mélodique déterminant le
caractère de la composition musicale, ou contenant
le motif de l'idée principale qui y est exprimée, et à
laquelle se joignent ensuite les autres idées acces-
soires du morceau.
Théorie musicale. Le mot théorie vient du grec
tkéôria (contemplation), et ainsi comprend la partie
contemplative, spéculative d'une science ou d'un art.
Ce terme est ordinairement pris dans le sens opposé
du mot pratique.
En musique, il y a deux manières bien tranchées
d'envisager la théorie : la première consiste à recher-
cher comment le son se produit et se propage, et
quels sont les rapports des sons entre eux, c'est la
science de l'acoustique ; la seconde s'occupe de com-
T. II. 7*
éÊk
226 THÉ
biner les sons pour faire éprouver à l'âme une im-
pression de plaisir ou de peine, en d'autres termes
pour émouvoir, c'est Y art musical proprement dit.
Sans prétendre nier les avantages de l'acoustique
et tout en reconnaissant, au contraire, les impor-
tantes découvertes réalisées par les travaux des Pytha-
gore, des Euler, des Lagrange, des Chladni, des Sa-
vart, des Sauveur, etc., nous pensons que celte bran-
che des connaissances physico-mathématiques doit
demeurer le domaine exclusif des savants, et qu'elle
n'est rien moins qu'utile au compositeur. C'est donc
à tort, suivant nous, que certains maîtres prétendent
baser uniquement sur l'acoustique la théorie de l'art
musical, et croient devoir entrer en matière par un
déluge de démonstrations arithmétiques et algébri-
ques, où il n'est question que de puissances, déracines
et d'équations ; autant vaudrait, pour un peintre, com-
mencer l'étude de son art par la théorie de la lumière,
des couleurs, des droites et des courbes, etc. Encore
une fois, tout cela n'est, dans ce cas, qu'un vain et
stérile étalage de science : on peut être un habile
théoricien, un excellent contrepointiste , un grand
compositeur, on peut être Mozart ou Haydn, Bach ou
Palestrina, Gluck ou Beethoven, Meyerbeer ou Bos-
sini, Halévy ou Donizetti, sans connaître les rapports
mathématiques des sons, sans savoir, par exemple,
que la quinte est dans la proportion de 3 : 2.
Mais en rejetant l'acoustique de l'enseignement
purement musical, cet enseignement présente encore
deux objets bien distincts et d'un intérêt égal, ou pour
mieux dire, dont l'un n'est que le moyen d'arriver à
Ja réalisation de l'autre : nous entendons parler ici
de la partie technique ou matérielle, et de la partie
esthétique ou idéale.
La première étudie les diverses modifications dont
le son est susceptible quant à la hauteur, à la durée,
THE 227
à l'intensité et au timbre; les diverses combinaisons
qu'il offre relativement à la succession ou à la simul-
tanéité, c'est-à-dire la mélodie et l'harmonie. La se-
conde, qui est l'expression la plus élevée de la théorie,
qui en est le résultat, le but, en un mot la mise en
œuvre, apprend à faire des préceptes une juste appli-
cation et des éléments un emploi convenable sous le
rapport poétique et philosophique de l'art; c'est elle
qui exprime les sensations, qui peint les mouvements
de l'âme, aussi bien que les scènes de la nature, c'est
elle qui parle ce langage si souple, si varié, si riche et
si puissant, dont tous les hommes ont instinctivement
l'intelligence.
Enfin la théorie musicale embrasse encore dans sa
généralité l'art d'exécuter une oeuvre et les procédés
d'exécution. La musique a pour interprètes la voix et
les instruments; la fabrication de ces derniers consti-
tue donc, à ce titre, l'une des branches les plus inté-
ressantes de la science musicale; mais en général, les
individus qui s'y consacrent en font leur spécialité
presque exclusive, et se bornent à fournir aux exécu-
tants les instruments dont ceux-ci ont besoin; voilà
pourquoi on ne peut guère admettre l'art du facteur
que dans la partie mathématique de la théorie; nous
ne laisserons pas d'observer toutefois qu'un bon fac-
teur doit être autant que possible acousticien, musi-
cien et même praticien, afin de découvrir les défec-
tuosités des instruments , et de pouvoir y remédier,
ainsi que pour être à même d'inventer des instruments
nouveaux.
Quant à l'exécution, son rôle par rapport à la musi-
que est bien plus important encore que ne l'est la dé-
clamation pour la poésie, la littérature et le théâtre.
En effet, un livre n'a aucunement besoin d'être récité,
ni une pièce d'être représentée : la simple lecture
suffit pour mettre le public en communication avec
228 THE
la pensée de l'auteur. Une partition musicale, au con-
traire, n'est qu'une lettre morte pour la plupart des
lecteurs : l'exécution seule peut vivifier l'œuvre en-
dormie et faire subir à l'inerte chrysalide une bril-
lante transformation. Ce n'est donc pas sans motif
que l'étude du chant et le jeu des instruments tien-
nent une si grande place dans la théorie musicale; ils
ne viennent toutefois qu'à la suite des démonstrations
qui ont pour objet Y art de composer. Ainsi que nous
l'avons dit en commençant, cet art est des plus diffi-
ciles et des plus complexes : il comprend les prin-
cipes élémentaires, la mélodie, le rhythme, Y harmonie,
la haute composition (le contrepoint et la fugue),
Y instrumentation, la coupe et la forme des morceaux,
enfin les différentes espèces de style dont on peut
faire usage en tel ou tel cas. A la connaissance de
tout ce qui précède se rattachent encore les écrits re-
latifs à l'art musical sous le point de vue esthétique,
historique ou critique. Ainsi, à la considérer dans
son ensemble, il n'y a pas de science plus vaste ni plus
élevée que celle qui se rattache à la théorie musicale.
Vouloir indiquer ici tous les théoriciens célèbres
et les œuvres qui les ont illustrés, ce serait nous
engager à donner une histoire complète de la mu-
sique. Le très-petit nombre d'ouvrages que l'anti-
quité nous a transmis sur cette matière prouve qu'à
cette époque les considérations spéculatives l'empor-
taient généralement sur la démonstration pratique.
Au moyen âge on commença à tenir quelque compte
des définitions, à présenter des règles sur quelques
faits isolés et à donner des exemples de leur applica-
tion. Mais ce n'étaient encore, à vrai dire, que des ébau-
ches imparfaites. Déjà l'école néerlandaise avait ré-
pandu son système, déjà Monteverde avait accompli
une révolution par l'emploi de la septième, et posé
THÉ 229
les bases d'une tonalité nouvelle, sans que la théorie
écrite eût fait de bien grands progrès.
Les maîtres servaient de modèles, et l'enseigne-
ment oral complétait le plus souvent l'éducation des
musiciens. Cependant aux seizième el dix-septième
siècles, et déjà même vers la fin du quinzième, on vit
paraître quelques ouvrages qui favorisèrent puissam-
ment les études musicales et que l'on peut considérer
comme des monuments précieux pour l'histoire de
l'art; tels sont les traités de Gaforio, de Zarlino, de
Prœtorius et autres. Enfin, au dix-huitième siècle,
Rameau fit faire un pas immense à la didactique; un
grand nombre de savants subirent l'influence de ses
idées, et de toutes parts on s'occupa d'approfondir et
de perfectionner la théorie musicale. On doit à ce
noble élan les travaux de Mattheson, de Marpurg, de
Knecht, de Kirnberger, de Sabbatini, de Sorge, de
Daube, de Vogler, de d'Alembert, de J.-J. Rous-
seau, etc. En 1802, Catel publia à Paris un Traité
d'Harmonie, qui eut un grand succès de vogue et
d'estime. Cet ouvrage est bien rédigé, mais il est ap-
puyé sur une théorie qu'on peut trouver incomplète.
Parmi les écrivains distingués qui marchèrent sur ses
traces, il faut citer Rerton, auteur d'un Traité d'Har-
monie suivi d'un Dictionnaire des accords. Un peu
plus tard, Reicha importa en France l'empirisme de
Gottfried Weber, et jouit longtemps d'une réputation
de science aujourd'hui très-contestée. Chérubini pu-
blia ensuite un traité de contrepoint et de fugue> fruit
d'une longue expérience et d'un savoir épuré.
Les théoriciens dont les œuvres sont aujourd'hui le
plus estimés, sont M. Fétis dont tout le monde con-
naît les savants et importants travaux, M. Kastner,
écrivain instruit et consciencieux, MM. Rerlioz,
Zimmerman, Rarbereau, Savart, Elwart et quel-
ques autres. Le lecteur sera sans doute curieux de
230 THÉ
connaître les titres de chacun d'eux à l'estime des
savants et des artistes; voici la liste de leurs princi-
paux ouvrages :
Les principaux ouvrages de M. Fétis, sont :
Ie Un Traité de contrepoint et de fugue.
2° Un Traité théorique et pratique de l'harmonie.
3° La Biographie des musiciens.
4° Un Traité de plain-chant.
Georges Kastner :
lo Un Traité général d'instrumentation, comprenant
les propriétés et l'usage de chaque instrument, pré-
cédé d'un résumé sur les voix.
2° Un Cours d'instrumentation considérée sous les
rapports poétiques et philosophiques de l'art.
3° Une Grammaire musicale comprenant tous les
principes élémentaires de la musique, la mélodie, le
rhythme, l'harmonie moderne et un aperçu succinct
des voix et des instruments.
4° Une Théorie abrégée du contrepoint et de la fugue.
5° Une Méthode élémentaire d'harmonie appliquée au
piano, suivie d'un aperçu de l'accompagnement et de
la transposition.
6° Un Traité de composition vocale et instrumentale ,
ou description détaillée des règles, des formes, de la
coupe et du caractère de toute espèce de composi-
tions musicales, accompagnée de notes historiques et
critiques.
7° Manuel du professeur d'harmonie, ouvrage indis-
pensable pour les professeurs et les élèves.
8° Une Histoire de la musique militaire.
Zimmerman :
Une Encyclopédie du pianiste compositeur, qui con-
siste en trois parties, savoir :
1° Une Méthode de piano.
2e Des Exercices propres à faire aborder toutes les
difficultés de l'école moderne.
THE 23i
3o Un Traité d'harmonie, de basse chiffrée, de contre-
point et de fugue.
Barber eau :
Un Traité théorique et pratique de composition musi-
cale.
Elivart :
1° Etudes élémentaires de la musique , depuis ses
premières notions jusqu'à celles de la composition.
2° Le contrepoint et la fugue appliqués à la composi-
tion idéale.
Savard :
Un Traité d'harmonie.
Berlioz :
Un Grand Traité d'instrumentation et d'orchestration,
où l'on trouve des choses excellentes sur la partie
philosophique et poétique de cette science.
Sous le rapport purement théorique, l'Allemagne,
au dix-neuvième siècle, n'a rien à envier à la France,
avec Gottfried Weber, Logier, André, Marx, Fink,
Schneider, etc., et elle possède en outre une foule
d'écrivains distingués qui ont fort ingénieusement ap-
profondi les mystères de l'esthétique musicale.
Pour ce qui est des méthodes particulières de
chant ou d'instruments, le nombre en est si considé-
rable, que nous devons renoncer à toute citation de
cette nature. Nous nous bornerons à observer que des
hommes spéciaux et tout à fait compétents n'ayant
pas dédaigné d'y appliquer les ressources de leur
talent et de leur expérience, tous les enseignements
les plus infimes comme les plus importants et les
plus élevés y tiennent leur place, et offrent à l'élève
des sujets d'étude aussi variés que complets.
Tel est le résumé succinct des matières qui com-
posent la théorie musicale. Nous n'en avons indiqué
que les principales divisions et subdivisions pour
232 TIE
éviter des développements que ne comporte point la
nature de cet ouvrage.
Théorbe. Instrument à cordes de la famille des
luths, employé autrefois pour l'exécution de la basse
continue. Le théorbe est plus grand que le luth et a
deux manches, l'un pour les cordes qui se doigtent
sur le manche, l'autre pour les grosses cordes qui
servent pour les basses et qui se pincent à vide.
Le théorbe, instrument favori des dames de la cour
de Louis XIV, est maintenant abandonné.
Thésis (en frappant). Un des deux temps de la
musique des Grecs. Per tliesin indique surtout un
chant ou contrepoint où les notes montent du grave
à l'aigu.
Tibia. Ancien nom latin des instruments à vent
avec des trous, tel que la flûte.
Tibia multisonans. Flûte d'un ton fort, en usage
chez les anciens Égyptiens.
Tibia sisticinum. Flûte employée par les anciens
dans les funérailles.
Tibi^ bifores et tibi^e conjunct,e. Doubles flûtes.
Tible pares. Espèce de flûte double des anciens,
formée de deux flûtes d'une égale grandeur, jointes
ensemble.
Tibilustrium. C'est le nom de la fête des joueurs
de flûte des anciens Romains, qui se célébrait tous les
ans, le 15 juin.
Tierce. C'est une des heures canoniales, ou partie
de l'office divin, dont les psaumes se mettent en mu-
sique et s'appellent psaumes de tierce.
Tierce. Intervalle de trois degrés. On distingue
trois espèces de tierce, savoir, la tierce majeure, la
tierce mineure, et la tierce diminuée.
Tierce de Picardie. On appelle ainsi la tierce ma-
jeure frappée au lieu de la mineure, à la finale d'un
morceau composé en mode mineur.
T1M 233
Timbales. Deux bassins sphériques en cuivre, sur
lesquels on adapte des peaux fortement tendues au
moyen d'un cercle de fer et de plusieurs écrous, for-
ment l'instrument que nous nommons timbale. En
frappant successivement sur l'une et l'autre de ces
peaux avec des baguettes, on obtient deux sons très-
distincts. Leur différence provient de l'inégalité des
bassins. En serrant plus ou moins les écrous du cercle
de fer, on parvient à changer le ton des timbales, et
dans certains tons on les accorde de manière à ce
que la tonique soit à la quarte au-dessous , ou la do-
minante à la quinte supérieure, ce qui revient au
même.
Le roulement de timbale s'exécute par le mouve-
ment alternatif des deux baguettes, en frappant deux
coups avec chacune d'elles. Le roulement de timbale
produit un effet surprenant dans le crescendo et le
forte d'un orchestre. Il y a quelque chose de mysté-
rieux et de sinistre, s'il est fait pianissimo, ou si les
timbales sont voilées.
Timbales. Jeu d'orgue dont les tuyaux sont en bois.
Il sonne l'unisson du bourdon de seize pieds. En ac-
cordant le jeu des timbales un peu plus haut que
ceux des bourdons, on obtient une espèce de trem-
blement qui ressemble assez au roulement des tim-
bales.
Timbre. Son d'une cloche, d'une lame métallique
ou d'un ressort dont l'intonation peut être appréciée.
Timbre est aussi la qualité sonore d'un instrument
ou d'une voix. On dit : ce violon a du timbre ; cette
voix est bien timbrée. On dit aussi d'une voix péné-
trante, qu'elle a un timbre métallique.
On donne encore le nom de timbre à la double
corde à boyau placée contre la peau inférieure du
tambour et qui vibre avec elle.
Timbres. Nom que les vaudevillistes donnent aux
234 TON
airs connus sur lesquels ils composent leurs cou-
plets.
Puisque nous avons parlé du timbre des cloches,
les fondeurs devraient bien étudier l'acoustique et
harmoniser leurs sonneries, de manière à ce qu'elles
produisissent les sons justes de la gamme, au lieu
de cette cacophonie qui écorche les oreilles musi-
cales.
Tintinnabulum. Instrument des anciens, composé
d'un certain nombre de cloches.
Tipo, Type. Nom de la corde génératrice du sys-
tème musical.
Tirade. Nom que l'on donnait autrefois à une
suite de plusieurs notes de même valeur, se suivant
par degrés conjoints en montant ou en descendant.
Tirana, Tonadilla. Chansons espagnoles qui se
chantent et ne se dansent pas. La mesure de ces airs
est à trois temps, d'un mouvement un peu lent et
d'un rhythme syncopé.
Tira tutto. Registre qui ouvre tous les jeux de
l'orgue à la fois.
Toccate. Ancienne pièce de musique écrite pour
le clavecin, l'orgue ou le piano. Elle ne diffère de la
sonate qu'en ce qu'elle n'est composée le plus souvent
que d'un seul morceau.
Toccato. Mot italien dont on fait en français lo-
quet ou doquet, qui est le nom de la quatrième partie
de trompette d'une fanfare.
To no to. Espèce d'intonation militaire de la
trompette, qui produit un effet semblable au son de
ces syllabes.
Ton. Ce mot a plusieurs acceptions en musique.
Il signifie d'abord un intervalle formé par deux notes
diatoniques, comme do, ré, etc. Dans la seconde ac-
ception, il désigne le mode ou la constitution d'une
TON 235
gamme quelconque, avec les signes qui la caractéri-
sent. Enfin, le ton est le degré d'élévation ou d'abais-
sement d'un instrument, résultant de sa construction
et de son accord.
Chaque ton a un caractère particulier. De là naît
une source de variétés et de beautés dans la modula-
tion. Faut-il du gai, du brillant, du martial, prenez
les tons de do, ré> mi. Faut-il du touchant, du ten-
dre, prenez les tons de la bémol, mi bémol, si bémol.
Tonalité. La tonalité est l'ensemble des rapports
mutuels qui existent entre les notes d'une gamme.
Cette définition a besoin d'être un peu développée.
La nature produit des sons en nombre immense,
par des moyens également nombreux et avec une
variété infinie d'acuité et de gravité, d'intensité, de
timbre et d'expression.
Les sons produits dans la nature ne peuvent pas
tous appartenir à la musique. Les sons musicaux doi-
vent être nettement appréciables à l'oreille, confor-
mes au goût, à la raison, à l'organisation intellec-
tuelle et artistique de l'homme.
Les sons musicaux peuvent être combinés entre
eux de plusieurs manières. Les systèmes de musique
qui ont régné et qui régnent encore dans le monde
musical, celui des Grecs, celui du plain-chant, le
nôtre, sont quelques-unes de ces combinaisons pos-
sibles.
Toute manière de combiner les sons musicaux et
d'en former un système de musique, se nomme une
tonalité.
En combinant les sons musicaux d'une manière
qui lui est propre, en les groupant les uns à côté des
autres d'une certaine façon particulière, la tonalité
moderne crée naturellement entre eux certaines rela-
tions mutuelles qui lui appartiennent en propre, qui
la caractérisent, qui la distinguent des autres tona-
236 TRA
lités et qui forment les éléments constitutifs les plus
intimes. Elle est donc Y ensemble des rapports qui exis-
tent entre les notes de la gamme moderne ; car la
gamme est la formule qui représente et résume une
tonalité. (Yoy. le mot Harmonie.)
Tone. Espèce de composition musicale des an-
ciens Grecs, dans laquelle on exécutait plusieurs syl-
labes successives sur le môme ton.
Tonique. Base ou première note de la gamme du
ton. Tous les airs finissent communément par cette
note, surtout à la basse.
Topii ou Tof. Ancien instrument des Hébreux,
qui, selon quelques auteurs, ressemblait au tam-
bourin.
Torropit. Nom de la guimbarde dans l'Estonie.
Touche. La touche des instruments à archet est la
partie supérieure de leur manche , recouverte en
ébène, et sur laquelle les doigts appuient les cordes
pour varier leurs intonations. Les touches de la gui-
tare sont les petits filets d'ivoire ou de cuivre, in-
crustés dans le manche, et qui marquent les posi-
tions où il faut mettre les doigts pour former les
intonations. Les touches du clavier, du piano ou de
l'orgue, sont les leviers sur lesquels les doigts agis-
sent pour faire parler les notes.
Tractus. Nom ancien d'un certain air triste qu'on
chantait autrefois dans l'Eglise catholique après l'épî-
tre, à la place de l'alleluia, en prolongeant la voix
en signe de plainte.
Traité. On donne ce nom en musique aux divers
ouvrages classiques qui traitent avec méthode de la
théorie et de la pratique de la musique en général ou
de quelques-unes de ses parties, telles que l'harmo-
nie, le contrepoint ou la fugue.
Transition. Passage d'un ton à un autre. L'art de
TRE 237
faire succéder agréablement une modulation à celle
qui la précède est une des parties essentielles de l'é-
tude de la composition.
Transition enharmonique. C'est celle où une ou
plusieurs des parties font un intervalle enharmoni-
que, comme ut dièse et re bémol. Les transitions en-
harmoniques produisent beaucoup d'effet à la scène,
surtout lorsque les personnages éprouvent une grande
surprise, ou qu'un événement imprévu change tout
à coup leur situation.
Transitus. Sons et accords qui tombent sur le
temps faible.
Transitus irregularis. Mauvaise succession de
sons ou d'accord.
Transitus regularis. Notes d'agrément.
Transposer. C'est noter ou exécuter un morceau
de musique dans un autre ton que celui où il a été
écrit par le compositeur.
Transpositeurs (Instruments). On appelle ainsi
les instruments de musique dont le son est différent
de la note écrite. Les principaux sont : la contre-
basse, toutes les flûtes autres que la flûte ordinaire,
le cor anglais, toutes les clarinettes autres que la cla-
rinette en ut, le basson quinte, le contre-basson, tous
les cors autres que le cor en ut aigu, certains cornets
à piston, toutes les trompettes autres que la trompette
en ut, en si, et en la, les cornets simples, tous les
ophicléides autres que l'ophicléide en ut, le serpent,
la guitare, les ténors et les basses quand on les
écrit sur la clef de sol.
Treizième. Intervalle de treize degrés, ou Foctave
de la sixte.
Trémolo. Le trémolo est un effet que l'on produit
sur les instruments à archet , en faisant aller et
venir sur les cordes l'archet avec tant de rapidité
238 TRI
que les sons se succèdent Jes uns aux autres, sans
laisser remarquer aucune solution de continuité.
Les effets du trémolo se rendent parfaitement sur
le piano, en frappant au moins deux touches alterna-
tivement et avec un mode d'exécution très-rapide.
Triangle. Instrument de percussion qui consiste
en une petite tringle de fer pliée en forme de triangle,
sur laquelle on frappe avec une baguette du môme
métal pour en tirer du son ; — pour que les vibra-
tions du triangle ne soient pas interrompues, on a
soin de le tenir suspendu à un cordon.
On fait aujourd'hui un grand abus de cet instru-
ments, comme de tout ce qui perce, mugit, éclate,
tonne, grince et siffle. Son timbre métallique ne
convient qu'aux morceaux très-brillants dans le forte,
et d'une bizarrerie sauvage dans le piano. Weber en
a fait un usage heureux dans ses chœurs de Bohé-
miens de Préciosa, et Gluck, bien mieux encore, dans
le majeur de son effrayant ballet des Scythes.
Cependant, on entend avec plaisir le timbre cristal-
lin et un peu mordant du triangle au milieu des airs
de danses. Il s'allie on ne peut mieux, ce me semble,
avec les allures piquantes, les poses voluptueuses et
les cambrures hardies des prêtresses deTerpsychore.
Tricinium. Nom de petits morceaux de musique
pour trois cors ou pour trois trompettes.
Trigonon. Instrument à cordes en forme triangu-
laire, dont se servaient les Grecs.
Trille. Mouvement alternatif et accéléré sur deux
notes voisines, qu'on indique par les deux lettres tr.
Les plus belles qualités du trille sont la rapidité, la
souplesse et la parfaite égalité. Le trille vocal est
très-difficile; il demande une étude longue et persé-
vérante; un trille prolongé et bien nuancé manque
rarement son effet sur le public. Les instrumentistes
aussi cultivent le trille, qui donne beaucoup de briU
TIU 239
îant à l'exécution. On peut, sur îe piano et sur le
violon, faire des trilles doubles, en tierces ou en
sixtes. Le trille se nomme aussi quelquefois cadence,
parce que le trille arrive naturellement sur l'accord
de dominante qui fait chute, cadence, sur le tonique.
Trimeles. Les anciens Grecs entendaient par ce
mot un morceau de musique vocale accompagné de
la flûte et formé de trois strophes, dont la première
était écrite dans le mode dorien, la seconde dans le
mode phrygien, et la troisième dans le mode lydien.
Trio. Composition musicale à trois parties, dont
chacune revêt le caractère de voix principale, ou com-
position à deux voix concertantes accompagnées
d'une troisième qui leur sert de voix fondamentale.
Le trio vocal est presque toujours accompagné par
l'orchestre, ou par un instrument, tel que le piano,
la guitare, etc. Le trio instrumental n'est composé
que de trois parties récitantes.
Le trio est regardé comme la plus parfaite de
toutes les compositions, parce que c'est celle qui pro-
duit le plus d'effet proportionnellement aux moyens
employés. — On cite parmi les trios célèbres, le
charmant trio du Matrimonio Segreto, de Gimarosa,
pour trois voix de femmes ; le magnifique trio de Guil-
laume Tell, pour trois voix d'hommes; le trio bouffe
de V Hôtellerie portugaise, de Chérubini; le trio des
Papatacci, de Yltaliana in Algeri. Ces exemples suffi-
sent pour montrer quel effet peuvent produire trois
voix entre les mains d'hommes de génie, à qui toutes
les ressources de l'art sont familières, et qui trou-
vent facilement, ou pour mieux dire sans les chercher,
et par une sorte d'intuition, des idées qui se prêtent
à toutes les combinaisons vocales; mais il faut en
outre beaucoup d'études et une grande expérience.
On nomme aussi trio, une partie du menuet sym-
phonique ou instrumental qui occupe lo milieu du
240 TRO
morceau, et après laquelle on reprend le premier
motif.
Triolet. Groupe composé de trois notes pour deux,
et sur lequel on place souvent un 3. Ainsi , par
exemple, dans la mesure de deux noires, marqué 2/4,
une mesure peut être composée de cinq et même de
six croches, si l'on y introduit un ou deux triolets.
Les trois croches n'ont pas plus de durée que les
deux croches qu'elles remplacent, et il faut par con-
séquent les passer plus vite.
Triphon. Instrument de musique qui a la forme
d'un clavecin droit. Le son que cet instrument pro-
duit est agréable et ressemble à celui de la flûte.
Tromrone. Cet instrument à vent en cuivre, non
percé de trous, avec une large embouchure, a au-
jourd'hui encore presque la même forme qu'il avait
il y a trois siècles. Ses tuyaux , introduits dans une
pompe à deux branches qui se recouvre sur une lon-
gueur de vingt-cinq pouces environ, s'allongent et se
raccourcissent à volonté, et donnent le moyen d'atta-
quer les tons aigus et les tons graves de son diapason.
Il y a quatre espèces de trombones, qui portent le
nom de quatre voix humaines : le trombone soprano,
le trombone alto, le trombone ténor et le trombone
basse. Le trombone soprano et le vrai trombone
basse sont à peu près inconnus en France, et le
trombone alto y est peu employé ; cependant on em-
ploie toujours dans nos orchestres trois trombones,
dont deux trombones ténors et un trombone dit
basse. On peut compléter ce qui manque dans le
grave du dernier trombone, par l'emploi de l'ophi-
cléide, que dans les partitions modernes on unit sou-
vent aux trombones.
Les trombones sont propres à l'expression la plus
solennelle, et produisent un très-bel effet dans les
chœurs guerriers et religieux, dans les marches
TRO 241
triomphales, etc. On trouve dans les œuvres des
maîtres, de magnifiques exemples de l'emploi des
trombones. Telle est la foudroyante gamme en ré mi-
neur sur laquelle Gluck a dessiné le chœur des furies
au second acte d' Iphigénie en Tauride. Tel est, plus
sublime encore, le cri immense des trois trombo-
nes unis, répondant comme la voix courroucée et
formidable des dieux infernaux à l'invocation d'Or-
phée : Spectres! Larves! Ombres terribles!
Trompe. Instrument employé dans la musique de
chasse. La trompe est aujourd'hui un instrument
très-perfectionné. Il n'est pas étonnant que des sons,
habilement dirigés, produisent une agréable har-
monie. Cependant nos aïeux, qui se servaient du ho-
chet, voire même de la corne de bœuf ou de bélier,
avaient tout autant de plaisir que nous. Les anciens
livres de chasse sont remplis d'exclamations sur le
bonheur d'entendre la musique en pleine forêt.
Sous Louis XIII, on ne savait pas tirer un grand
parti de la trompe. Salnove, dans sa Vénerie royale,
fait un grand éloge de ce roi, parce qu'il inventa une
méthode nouvelle de sonner pour le renard. Elle con-
sistait en trois tons grêles terminés par un gros ton.
La trompe, trop petite sous Charles IX, devint trop
grande au temps de Louis XIV, on passa d'un excès
à un autre. Ces grandes trompes étaient fort incom-
modes, surtout pour les valets à pied obligés de tra-
verser des fourrés garnis d'épines. Ils les bosselaient,
et quelquefois cet instrument monstre les empêchait
de suivre en droite ligne les chiens et la bête. L'expé-
rience fit arriver à un juste milieu ; on revint un peu
sur ses pas, et l'on trouva la trompe dont nous nous
servons aujourd'hui.
La tablature de la trompe se compose des harmo-
niques du ton dans lequel on joue. Ce ton est celui
de ré pour la trompe \ il est invariable, puisque l'in-
212 TRO
strument n'a pas de corps de rechange. On a choisi
celui de ré, parce qu'il est assez éclatant sans être
aigu. Les harmoniques sont tê- celui que l'on prend
sur le violoncelle, en mettant le premier doigt sur la
quatrième corde, la qui suit ce ré à l'aigu, ré, fa, la,
ré, mi, fa, sol, la, et le si par extension. La musique
est notée toujours en ut, et par conséquent le fa que
l'œil voit sur le papier, représente le sol que l'oreille
entend. A. cette tablature, il faut ajouter le si bémol,
qui représente à l'oreille un ut naturel.
C'est une fort belle chose à entendre que vingt
trompes se répondant au milieu des bois, et signalant
toutes les péripéties du drame dont un pauvre cerf est
le héros. Sa mort étant nécessaire au dénouement du
cinquième acte, tous les chasseurs qui ne veulent pas
faire fiasco ou revenir bredouille, concourent au suc-
cès de la pièce à grand renfort de poumons. Ces trom-
pes, disséminées tant que le drame se joue, font con-
naître chaque circonstance aux chasseurs et aux
chiens éloignés. On sonne la vue, le retour, le volcelet,
le débuché, etc. Tout le monde comprend ce que cha-
cun veut dire, et les chasseurs, galopant à travers
les bois, manœuvrent, quoique séparés, aussi bien
qu'un régiment sous les yeux de son colonel.
Ces trompes, dont les sons vous charment en dé-
tail, produiront un plus bel effet encore, lorsque
réunies pour le hallali, pour la curée, elles feront en-
tendre leur chant de victoire.
Trompette. Instrument à vent sans trous, com-
posé d'un tube en cuivre d'une égale grosseur à par-
tir de l'embouchure jusqu'au pavillon, et deux fois
replié, afin de pouvoir, en jouant, le tenir plus com-
modément. La trompette a les mêmes sons harmo-
niques que le cor, mais une octave plus haut dans la
plupart des trous.
La trompette a un son héroïque, guerrier et joyeux.
TRO 243
Elle donne plus d'éclat aux magnificences d'une fête.
Elle ajoute à la vivacité de la musique et se joint as-
sez bien au jeu solennel des timbales. La trompette
est employée dans l'opéra, surtout dans les passages
brillants, dans les morceaux à fortes passions, dans
les chœurs, dans les finales, etc. — On emploie au-
jourd'hui aussi la trompette à pistons ou à cylindres,
qui fait toutes les notes de la gamme chromatique,
ce qu'on nomme pour cette raison, trompettes chro-
matiques, en Allemagne et en Italie. (Voyez Trom-
pette a PISTON.)
Trompette. Jeu d'orgue de la classe des jeux d'an-
che, qui sert d'unisson au principal.
Trompette chinoise. François Gemelli, dans le troi-
sième volume de ses voyages, dit que les Chinois ont
un instrument en bois qu'ils estiment beaucoup,
dont la forme est celle d'une cloche de trois pieds de
longueur et entourée de cercles en or.
Trompette marine. Instrument monté d'une seule
corde très-grosse, qu'on joue avec un archet, en ap-
puyant sur cette corde avec le pouce de la main gau-
che. La forme de cet instrument est fort allongée, et
son dos est terminé en poire. La trompette marine
est surtout célèbre par la prédilection du Bourgeois
gentilhomme.
Trompette a pistons. Le mécanisme de la trom-
pette à pistons ressemble à celui des instruments à
vent qui forment leurs sons par le secours de trous
ou de clefs, puisque les pistons sont disposés de ma-
nière qu'en les faisant agir on modifie à volonté le
degré d'élévation du son. Par ce mécanisme la trom-
pette se trouve enrichie d'une grande quantité de no-
tes qu'il lui était impossible de produire auparavant.
Trompette romaine. Cet ancien instrument des
Romains, d'une forme droite, se terminait en une
ouverture évasée et un peu recourbée, ainsi qu'on le
244 TRO
voit sur la gravure de plusieurs médailles et sur
quelques sculptures de marbres anciens.
Trompette papiilagonique. Ancien instrument
grec d'un son grave et dont le pavillon ressemblait à
une tête de bœuf.
Troubadours. Poètes provençaux des XIe, XIIe et
XIIIe siècles, ainsi appelés du mot troubar, trouver,
inventer : ils nommaient leur art la gaie science. Les
plus célèbres d'entre eux furent P. Yidal, Arnaud
Daniel, Janfred Rudel, Bertrand de Born, Anselme
Fayditt, Raimond Bérenger, comte de Provence,
Richard Cceur-de-Lion, Thibaut, comte de Champa-
gne et Guillaume IX, comte de Poitiers. Leurs poésies,
qui, pour la plupart, appartiennent au genre lyrique
et sont très-courtes, se composaient de sirventes,
plaints, tensons, ballades, novas (ou nouvelles). Ils
chantaient surtout la chevalerie et l'amour.
Le troubadour de profession allait de château en
château réciter ou chanter ses vers en s'accompagnant
d'un instrument, ordinairement d'une espèce de gui-
tare : souvent aussi il se faisait accompagner d'un
jongleur (Comir), par lequel il faisait chanter ses vers.
Les troubadours étaient répandus dans le Midi de la
France : Ils florissaient surtout à Toulouse, à Nar-
bonne, à Aix en Provence. Ils parlaient la langue d'Oc,
ou le languedocien.
Trouvères. Poètes du nord de la France, qui du
XIe au XVe siècle ont composé en roman-wallon ou
langue d'Oïl (le vieux français); ils existaient en
même temps que les troubadours, et leur nom a le
même sens (trouver, troubar). Mais, tandis que les
troubadours ont surtout brillé dans le genre lyrique,
c'est à la poésie épique que les trouvères se sont
livrés de préférence. Ils ont admirablement réussi
dans la grande épopée, qui a pris par excellence le
nom de roman, et dans les fabliaux, qui sont souvent
TUR 245
chez eux des chefs-d'œuvre d'originalité, de naïveté,
de gaieté. Les trouvères ont aussi fait quelques poé-
sies lyriques, tels que lais, virelais et ballades; enfin
on leur doit les romans de chevalerie en prose. Les
plus célèbres trouvères sont Wistace ou Wace, Lam-
bert, Alexandre de Bernay, Renaud, Gauder, Gilbert
de Montreuil, Jehan de Flagy, Guillaume de Lorris
et Jean de Meung, dit Clopinel.
Turquie (De la musique en). Il est certain que les
Turcs aiment beaucoup la musique, sans lui donner
cependant une valeur d'art comme en France, en Al-
lemagne, en Italie, etc., etc. Aujourd'hui, il est de
bon ton à Gonstantinople de trouver un plaisir à la
musique, et de savoir jouer de quelque instrument.
Les Turcs bien élevés chantent peu, et les hommes du
peuple beaucoup. Mais si aux yeux des premiers c'est
chose déshonorante que de chanter en public pour de
l'argent, ils aiment néanmoins à se faire entendre
clans les cercles intimes et dans leur harem. C'est à
tort que quelques écrivains ont prétendu que les Turcs
n'ont aucune théorie musicale. Il est vrai que la plu-
part apprennent à chanter et à jouer par le seul se-
cours de l'oreille. Mais ils n'en ont pas moins des si-
gnes réguliers pour noter les sons, un rhythme parti-
culier dans leur mélodie. Leur chant a une juste into-
nation et leur exécution une mesure convenable.
Pour noter leurs sons, ils se servent de nombres,
comme les anciens, et leurs chansons populaires les
plus répandues sont notées de cette façon.
La musique turque, comme celle de toutes les na-
tions qui ignorent l'art véritable, ne sort pas des
deux extrêmes. Elle est très-douce ou bien excessive-
ment heurtée et bruyante. L'amour et la guerre,
voilà les éternels textes des chansons turques, et leurs
harmonies dépassent rarement l'accord de la- domi-
nante, ou celui du mode relatif en mineur, et vice
246 UKR
versa. Les chants d'amour et les chants militaires
sont toujours dans le mineur, caractère propre des
nations qui ne connaissent pas l'art musical.
Typotone. Nouveau diapason inventé par M. Pin-
sonnat, à Amiens. Ce diapason est formé d'une petite
plaque en nacre, percée d'une ouverture en biseau,
sur laquelle est appliquée une petite lame métalli-
que. Cette plaque se met entre les dents, en tournant
le côté de la lame vers l'intérieur de la bouche ; et le
moindre souffle suffit pour en tirer un la assez sem-
blable à celui que produirait un hautbois.
Tyrolienne. Espèce de valse ou mélodie notée en
triolets, en mesure à trois temps et d'un mouvement
modéré. Les chansons tyroliennes ont à peu près
toutes la même allure et s'exécutent ordinairement
avec une voix de tête assez particulière, et que les
nationaux appellent dudeln. La tyrolienne de Guil-
laume Tell est célèbre.
u
Ugab. C'était, chez les Hébreux, le nom général
des instruments à vent.
Ukraine (Chants populaires de Y). Les airs de l'U-
kraine respirent la douceur, le calme et la tristesse.
Le peuple vaincu et persécuté pleure dans ses chants
la perte de sa liberté. Ses dumki sont comme les der-
niers rayons de son bonheur passé que la tyrannie
n'a pu briser. On n'y retrouve point, comme dans les
chants kosaks ou serbes, cette soif de la vie active et
aventureuse qui leur est commune avec les Klephtes
et les Monténégrins; chez les paysans d'Ukraine, la
UKR 247
passion des armes cède au goût paisible de la vie
agricole : le foyer domestique est préféré à tous les
prestiges de la gloire ; les femmes et les hommes du
peuple sont poètes et musiciens. Partout le travail
du jour finit par une chanson, et souvent les senti-
ments de la vie simple, sans accidents ni périls, se
transforment en affections pures, qui s'exhalent en
élégies plaintives, remplies de tendresse et d'amour.
Ce qui ajoute encore à la douce tristesse de ses airs
nationaux, c'est que l'Ukraine est couverte de nom-
breux tertres tumulaires (mogily) sous lesquels re-
posent les guerriers morts pour la patrie.
La langue du peuple d'Ukraine est favorable à la
musique; elle tient le milieu entre la langue polo-
naise et la langue russe. Quant aux airs avec lesquels
on berce les enfants, ils se sont perpétués de généra-
tion en génération, sans avoir été notés.
Les femmes de l'Ukraine ont un goût prononcé
pour leurs dumki. Elles bercent leurs enfants avec ces
mélodies douces et mélancoliques, et c'est ainsi qu'el-
les restent à jamais gravées dans la mémoire et dans
le cœur. Les Adieux du Kosack, la dumka si touchante
de Hyrcio, les Plaintes du Voisin, les Regrets d'une jeune
Mariée, etc., tous ces chants, souvenirs précieux de
l'enfance, ne s'oublient jamais.
Plusieurs autres chants sont cités également comme
venant de la patrie des Kosacks : Le Bal et l'Orage,
le Kosack et la Dziuba, que l'on chante en s'accom-
pagnant sur la bandura, espèce de théorbe russe. Ces
chants sont plus gais et ont, par cela même, moins de
caractère que les dumki.
L'instrument favori du peuple d'Ukraine est la
sensla, qui est d'origine slave. Cet instrument n'avait
d'abord que trois cordes métalliques sur lesquelles
on jouait avec des bâtons. Le nom de guslarz, qui
veut dire devin, ou diseur de bonne aventure, dérive
*
248 UNI
de cet instrument, qui s'appelait, en langue slave,
guzle, ou huszle.
Ultime conjunctarum. Quatrième corde du tétra-
corde synnemenon.
Ultima divisarum. Quatrième corde du tétracorde
diézeugmenon.
Ultima excellentium. Nom latin de la quatrième
corde du tétracorde hyper boléon du système des an-
ciens Grecs.
Unca. Nom ancien de la croche.
Unda maris. C'est le nom d'un jeu d'orgue de
tuyaux à anches de huit pieds, accordé un peu plus
haut que les autres jeux, et, à cause de cela, formant
avec eux une sorte de battement qui a quelque ana-
logie avec le mouvement des flots.
Uniciiordum. Nom de la tompette marine.
Union des registres. L'union des registres de la
voix humaine doit être en général le résultat de l'é-
tude et de l'art. Elle consiste à s'exercer continuelle-
ment à retenir la voix de poitrine et à forcer peu à
peu la voix de tête, pour établir entre la première et
la seconde l'égalité la plus parfaite possible. Cepen-
dant, dans le cas où la voix de poitrine serait plus
faible que celle de tête, il faut renforcer l'intonation
des dernières cordes de poitrine, et dans une juste
proportion leur joindre les premières de fausset.
Cette réunion des registres est une qualité rare chez
les chanteurs, et lorsqu'elle n'est pas un don naturel,
il faut beaucoup de temps ou d'études persévérantes
pour l'acquérir.
Unisson. Rapport de deux sons sur le même degré,
c'est-à-dire d'égale élévation ou gravité. L'unisson est
produit par un égal nombre d'oscillations de deux
corps égaux vibrant dans un égal espace de temps. Si
donc une corde faisant cent vibrations dans une se-
conde, rend un do, un autre corde de la même Ion-
UNI 249
gueur et grosseur, ayant la même tension, fera dans
Je même temps le même nombre d'oscillations et
rendra le même do. Ainsi, deux ou plusieurs voix ou
instruments faisant entendre le même son, font des
unissons.
Le mot unisson, et son abréviation unis, s'écrivent
dans la partie d'orgue pour indiquer que les notes
doivent être jouées sans accompagnement, et que les
octaves seulement doivent être redoublées. Le même
mot, écrit dans une partition, indique que l'on doit
jouer les mêmes notes qui sont écrites dans la ligne
supérieure, ou inférieure, ou dans une partie que
l'on indique.
Unité. L'unité est le premier des deux grands prin-
cipes sur lesquels repose l'harmonie, non-seulement
dans la musique, mais encore dans tous les arts.
Sans unité, tout est pour ainsi dire décousu; l'en-
chaînement heureux des phrases, dont l'une semble
découler de l'autre, produit chez l'auditeur le senti-
ment de l'unité. Avec l'unité et la variété, tout
marche dans les arts et dans chacune de leurs par-
ties. Ce sont les deux balances dont l'homme de
génie doit faire un continuel usage.
Cette règle, qui prescrit que l'action doit être une,
et que l'intérêt se porte toujours sur le même objet,
est parfaitement applicable aux compositions musi-
cales. Un thème musical peut servir à produire une
symphonie entière, et si les modulations sont prépa-
rées avec art, si d'heureux changements dans l'har-
monie lui donnent de la variété dans les retours, si la
gradation des demi-teintes amène de grands effets, il
n'y a point à craindre que les répétitions du thème
fatiguent les auditeurs. On les entendra toujours, au
contraire, avec un nouveau plaisir. Dans les œuvres
des grands maîtres, on trouve une infinité de mor-
ceaux composés sur un seul motif. Quelle unité dans
250 VAL
la marche de ces compositions! Tout se rattache au
sujet; c'est une chaîne dont on ne pourrait enlever un
anneau sans la détruire. Il n'y a que l'homme de
génie, le grand compositeur, qui puisse accomplir
une semblable tâche, aussi admirable que difficile.
Uomo (primo). Nom par lequel on désigne parfois
un sopraniste castrat.
Urajvion. Instrument inventé, en 1810, par
M. Buschmann, en Saxe, long de quatre pieds, large
de deux, et haut d'un pied et demi. Il a une étendue
de cinq octaves et demie, en commençant par le fa,
clef de basse, au-dessous de la portée. — Il a un cy-
lindre couvert de drap et mis en mouvement par une
roue et une pédale. Les sons de l'uranion sont fort
doux et s'obtiennent par le frottement du bois.
Ut. Première note de la gamme de ce nom. On a
adopté aujourd'hui généralement pour solfier, la
syllabe do plus favorable à l'émission de la voix que
la syllabe ut.
V. Cette lettre est une abréviation des mots violino,
volti ; W indique violini ; Y uni à S (vs) indique volti
subito.
Valeur des notes. Durée du son déterminée parla
figure différente des notes. Les silences ont aussi leurs
valeurs, et chaque figure de note a un silence qui
lui correspond. La pause a la valeur d'une ronde,
VAR l>51
la demi-pause a la valeur d'une blanche, le soupir
de la noire, etc.
Variation. C'est une composition musicale dans
laquelle une cantilène appelée thème est successive-
ment ornée de différentes manières.
Rien de plus facile que de composer des variations
d'une façon commune et vulgaire. Il suffit de s'em-
parer d'un thème inventé par un autre, et de lui
faire subir toutes les transformations d'usage, tantôt
sous la figure de croches, doubles croches, tantôt
sous la figure de triolets, de sextolets, tantôt avec
quelque basse figurée, des arpèges, des octaves, sans
oublier l'adagio dans le mode relatif et le temps à la
polonaise. On pourrait dire qu'il n'y a rien de moins
varié que de semblables variations. Mais, quelque
stérile qu'il soit de sa nature, un thème cesse de
l'être entre les mains d'un habile compositeur, d'un
savant contrepointiste. Les trente variations de Jean
Sébastien Bach seraient des titres suffisants pour
faire inscrire son nom au Panthéon musical. C'est
ainsi que Haydn, Yogler, Beethoven, Mozart, et après
eux, Cramer, H. Herz, Kalkbrenner, Moschélès,
S. Thalberg, Doehler, Gottschalk, Paganini, de Bé-
riot, Vieuxtemps, etc., etc., ont donné des variations
qui sont autant de chefs-d'œuvre. On voit, d'après
cela, et en lisant ces noms, qu'il faut pour composer
de bonnes variations, posséder parfaitement l'ins-
trument auquel on les destine, y être de première
force et connaître toutes les ressources de l'harmo-
nie, car il faut que des variations soient à la fois
brillantes et ingénieuses.
Varier. Ajouter à un chant simple des ornements,
soit en divisant les notes d'une plus grande valeur en
notes d'une valeur moindre, soit en changeant quel-
que chose dans l'accent, dans la force, etc. On em-
ploie particulièrement cette méthode, quand une can-
252 VAU
lilène revient plus d'une fois, ou qu'on répète un
morceau de musique. Ce sont surtout les points
d'orgue qu'il faut savoir varier. Il faut pour cela
beaucoup de goût et une grande exécution. Les com-
positeurs aussi doivent savoir varier l'harmonie, les
rentrées, le système d'accompagnement, quand le
même motif se reproduit plusieurs fois.
Vaudeville. Il existe une foule de dictons popu-
laires, qui en France ont presque force de loi, et dont
l'autorité repose sur de lourdes erreurs. Combien de
gens ont répété depuis Boileau que le Français né
malin avait créé le vaudeville, et ne savent pas que
ce vaudeville dont parlait le poëte n'a aucun rapport
avec le genre de composition dramatique auquel ce
nom a été donné par induction.
La rhétorique définit le mot vaudeville ou val de
vire : couplet qui court les rues. Le mot lui-même,
pour ceux qui connaissent un peu l'ancien langage,
indique suffisamment sa signification par ses racines.
Il est dérivé du vieux terme vau ou val, dont on a
fait le terme nautique aval, courant. Ainsi le vau-
deville fut tout simplement un couplet, et non une
réunion de couplets reliés par une action scénique.
Entre les ponts-neufs dont parle Boileau et les pièces
désignées de nos jours sous le nom de vaudeville, il
y a tout un abîme.
Le vaudeville donc que les Français croient avoir
inventé, le vaudeville tel que nous le comprenons en-
fin, est d'origine italienne. Il est le frère aîné de
l'opéra comique.
Considéré sous le rapport musical, le vaudeville est
un petit poëme, le plus souvent d'un caractère plai-
sant et satirique, auquel on adapte des mélodies con-
nues, soit analogues à la situation, soit en opposition
avec elle. Le sujet du vaudeville est la parodie d'une
pièce jouée avec succès ou tombée, un événement re*
VEL 253
marquabledu temps, qui donne prise à la satire. Pou
de jours après l'exécution de la Création, d'Haydn, il
parut un vaudeville intitulé la Récréation. La première
représentation de la Vestale de Spontini fut suivie
d'une parodie, la Marchande de modes. Le nom de
l'auteur demeura inconnu quelque temps, et ce ne
fut pas sans une grande surprise qu'on apprit que
M. de Jouy, l'auteur des paroles de la Vestale, était
aussi l'auteur de la parodie.
Yelches (Musique des). Les Velches, ou habitants
du pays de Galles, passent pour être les descendants
de ces Celtes qui ont tant occupé les savants des dix-
septième et dix-huitième siècles, et dont on a cru re-
trouver les traces chez les Bas-Bretons de France. On
ne peut nier un fait fort singulier, c'est que le langage
des Bas-Bretons et celui du pays de Galles ont de tels
rapports, que les habitants des deux pays s'entendent
sans aucune difficulté, tandis qu'il n'y a pas la plus
légère analogie entre le langage des habitants du pays
de Galles et celui des autres provinces anglaises. Un
autre fait non moins digne de remarque, c'est que la
langue velche ou galloise s'est conservée jusqu'à ce
jour dans sa pureté,- et que le pays de Galles possède
encore des poètes qui écrivent avec facilité dans cette
langue.
La musique du pays de Galles a la même origina-
lité que la poésie, soit sous le rapport des formes de
son chant, soit sous celui du rhythme et du mode
d'exécution , soit enfin sous celui de la forme des
instruments et des modulations. La plupart des
pièces de chant des Gallois sont des stances qu'ils
appellent pennillons. On ne connaît rien dans la mu-
sique d'aucun peuple moderne qui puisse donner
l'idée du chant de ces pennillons. Il faut l'avoir en-
tendu pour s'en faire une idée; car il dépend autant
de la manière dont il est exécuté que de la composition.
*. il s
•25\ \FÀ{
Deux instruments sont particuliers au pays de
Galles. L'un est la harpe à triple rang de cordes,
l'autre est une espèce de viole d'une forme très-bi-
zarre qu'on appelle cruth. Le crutli est un instrument
à archet, qu'on croit avoir donné naissance aux dif-
férentes violes et aux violons. 11 a la forme d'un
carré long, dont la partie inférieure forme le corps de
l'instrument; deux montants placés aux côtés de la
partie supérieure se rattachent dans le haut avec un
manche isolé dans le milieu. Cet instrument est
monté de quatre cordes et se joue comme le violon,
mais avec plus de difficulté, parce qu'il n'a point d'é-
chancrure pour laisser passer l'archet.
Ventilabro. Nom italien de soupapes au moyen
desquelles s'ouvrent et se ferment les canaux du
sommier, dans l'orgue, pour donner passage à l'air.
Vêpres. Une des sept heures canoniales. Ce nom
vient de l'étoile vesper, parce que c'est vers le cou-
cher du soleil qu'on est dans l'usage de chanter ces
prières.
Vermillon. Ancien instrument composé de huit à
dix verres choisis d'après l'échelle diatonique, ou bien
accordés d'après cette même échelle, en les remplis-
sant d'eau. On pose cet instrument sur une planche
recouverte de drap, et on en joue avec un petit bâton
également enveloppé de drap. C'est ce qu'on nomme
aussi harmonica. On a fait plusieurs combinaisons
d'instruments dans lesquels le son est produit par le
verre mis en vibration. Le son ainsi produit, ne
manque pas de charme, et on pourrait employer
plus fréquemment , quoique avec modération , ces
sortes d'instruments, qui donnent quelquefois un
cachet particulier à la mélodie.
Vérité d'art. Ce n'est pas la vérité absolue, mais
une ressemblance embellie que nous demandons aux
arts. C'est à nous donner mieux que la nature que
VÎE 255
l'art s'engage en l'imitant. La poésie affectionne le
langage des vers, elle répand les images et se sou-
tient à un ton plus élevé que la nature. La peinture
élève également le ton de la couleur et corrige ses
modèles. La musique, elle aussi , se permet de pa-
reilles licences. Elle soutient la voix par des accom-
pagnements, fait des cadences, toutes choses (qui ne
sont pas dans la nature. Assurément la vérité de l'i-
mitation en est altérée, mais sa beauté y gagne, et de
là résulte dans la copie un charme que la nature re-
fuse à l'original. Au reste, le but que se propose la
musique, n'est pas l'imitation de la nature, mais
l'expression vraie des sentiments.
Verset. Ordinairement on divise le Gloria, les
psaumes, etc., en divers morceaux d'ensemble, et en
solos, duos, etc. Ce sont ces derniers que l'on ap-
pelle versets.
A la messe, aux vêpres et dans les autres cérémo-
nies, on morcelle le Kyrie, le Dixit, etc., de manière
qu'alternativement une partie est chantée par le
chœur, et que pour l'autre c'est l'orgue qui répond.
Ces réponses se nomment versets ; et ce ne sont que
de petites cadences, de petites périodes musicales, de
petites fugues improvisées ou composées et impri-
mées sous ce nom.
Vibration. (Voyez Son.)
Vide, Corde à vide. C'est, sur les instruments à
manche, tels que le violon, la viole, la guitare, le son
qu'on tire de la corde dans toute sa longueur, de-
puis le sillet jusqu'au chevalet sans y placer aucun
doigt.
Vielle (La) est un instrument fort ancien ; cepen-
dant nous ne croyons pas que ce fut aux sons de la
vielle que tombèrent les murs de Jéricho ; nous Jou-
tons également que la vielle fut l'instrument dont se
servait Amphion ; nous nous permettons de chicaner
256 VIE
Jean de Meung, quand il dit dans son Roman de la
Rose, en parlant d'Orphée, qu'il faisait après soi al-
ler les bois par son beau vieller. Nous suspectons
même Alexandre de Bernai, dit de Paris, qui vivait
sous Philippe-Auguste, et qui, dans son roman d'A-
lexandre le Grand, faisant la description d'un palais
occupé par son héros, parle de deux statues, dont
une représentait un joueur de vielle :
« L'un tient une vielle, l'arcon fu de saphir;
» Li autre une harpe ; moult fut bonne à oir.»
Pour constater l'antiquité d'un instrument, il faut
le débarrasser de tous les accessoires qui ont pu ser-
vir à le perfectionner, lui rendre sa simplicité primi-
tive, et chercher alors si sa forme ne rappelle pas un
instrument connu anciennement. Ainsi, si vous dé-
pouillez le piano de ses marteaux en peau, vous ar-
rivez au clavecin et aux sautereaux armés de plume
et de drap. Enlevez ces sautereaux et les touches, que
reste-t-il? le tympanon, que l'on frappait avec des
bâtons comme ceux employés par les cymbaliers ;
privez encore cet instrument et des bâtons et de la
caisse, que trouvez-vous ? la harpe, connue de toute
antiquité. La vielle est un instrument trop compliqué
pour qu'il n'ait pas subi bien des perfectionnements;
enlevons-lui ses différentes parties, et nous la rédui-
sons à un corps concave armé d'un manche, sur le-
quel des cordes sont tendues. Retrouvons-nous dans
l'antiquité quelque chose de semblable? Oui, le ca-
non ou le chelys, monocorde que l'on voit figurer sur
une foule de monuments de la plus haute antiquité;
le chelys antique est donc la souche de la cythare ou
la guitare, de la rubeblée, de la vielle, et l'on voit
que le chelys est le père de tous les instruments de
musique à corps concave et à manche, soit qu'on
VIE 257
mette leurs cordes en vibration en les frappant, en
les pinçant ou en les frottant.
Les monuments anciens, surtout ceux de Tordre
gothique, présentent dans les sculptures dont ils sont
ornés une foule de faits intéressants pour l'histoire
de la vielle. Mais ce qui donne à ces faits un carac-
tère de véracité de plus, c'est qu'ils se trouvent con-
firmés par les récits des historiens, par les poésies,
par les fabliaux, par les chansons des troubadours,
des trouvères, des ménestrels, des jongleurs, etc.
Tous ces monuments de l'art musical et littéraire,
conservés dans les principales bibliothèques, font
connaître et expliquent toutes les phases de la vielle.
De quelque manière que la vielle se soit formée
par degrés, il paraîtrait, selon M. Burette, membre
de l'Académie des belles-lettres, dans le tome 8 du
recueil des Mémoires, que les anciens ont connu la
vielle; car il dit que « les anciens avoient sur quel-
ques instruments une espèce de bourdon qui soute-
noit le chant en faisant sonner X octave quinte, bour-
don; où se trouvoit aussi la quarte, par la situation
delà corde du milieu. » Puis il ajoute : « Les anciens,
à la vérité, ne nous ont rien laissé par écrit, tou-
chant ces sortes de bourdons ; mais nos vielles et nos
musettes, qui vraisemblablement nous viennent
d'eux, suffisent pour appuyer une telle conjecture. »
Si nous consultons le Dictionnaire de Furetière, à
l'article Vielle, il est dit que les anciens la nommaient
par excellence symphonie. La vielle était encore nom-
mée, au treizième siècle, syphonie, cifonie et cyfoine,
par corruption du nom primitif. Cet instrument s'ap-
pelait aussi sambuque. On croyait qu'elle venait de la
Grèce, comme l'indique son nom, sarbuckê, dont les
Latins ont fait sambuca ; et le père Joubert, dans son
Dictionnaire, définit la vielle par le nom de sambuca
rotala, ce qui nous prouve qu'il y avait des vielles
258 VIE
avec et sans roues. En voilà assez, ce nous semble,
pour établir l'existence de la vielle dans le moyen-
âge.
Nous allons chercher maintenant vers quel temps
les Français ont commencé à faire revivre cet instru-
ment, que les guerres qui agitèrent le monde après
la destruction des anciens empires, avaient fait sans
doute tomber dans l'oubli, ainsi qu'une foule d'au-
tres instruments qui ne sont pas parvenus jusqu'à
nous. Nous ne dépasserons pas la révolution musi-
cale opérée par Gui d'Arezzo, car, avant cette époque,
la musique était trop hérissée de difficultés pour
avoir pu être cultivée par un grand nombre d'indi-
vidus. Mais grâce à la méthode nouvelle du savant
bénédictin, l'étude de cet art devint plus facile et
prit un peu de faveur dans l'esprit des Français. La
France alors (1028) avait changé de forme politique ;
la plupart des seigneurs tenaient chacun une petite
cour particulière dans leurs duchés, comtés ou ba-
ronies; c'est à cette époque que l'on vit paraître en
France plusieurs troupes de chanteurs qui allèrent
mettre à profit leurs talents dans ces diverses cours
princières. Fauchet, dans son livre sur la langue et la
poésie française, explique ainsi l'entrée de ces musi-
ciens : « Or, est-il certain, dit-il, que bientôt après
» la division de ce grand empire français en tant de
» petits royaumes, duchez et contez, au lieu de
» poètes commencèrent à se faire connaître les trou-
» verres et chanterres, conteours et jugleours qui
» trouveurs, chantres, conteurs, jongleurs, c'est-à-
» dire ménestriers, chantans avec la viele; les uns
» desquels composoient, comme les trouvers ou con-
» teurs, les autres chantoient les Inventions d'autrui
» comme les chanterres et les jugleours... Les trou-
» veurs donc et chantres ayant affaire l'un de l'autre,
» s'accompagnoienl volontiers, et afin de rendre
VIE 259
» leurs Inventions et Mélodies plus plaisantes et
» agréables, venoient aux grandes assemblées et fes-
» tins donner plaisir aux princes... rapportants de
» grandes récompenses des seigneurs, qui bien sou-
» vent leur donnoient jusqu'aux robes qu'ils avoient
» vêtues, et lesquelles ces jougleurs ne failloient de
» porter aux autres cours, afin d'inviter les seigneurs
» à pareille libéralité. » ( Recueil sur l'origine de la
Poésie française y chap. 8.) Le goût de la vielle nous
fut sans doute importé d'Italie, car un auteur qui
brillait dans le royaume deNaples, en 1806, parle de
cet instrument en des termes très-favorables; c'est
Constantinus Africanus, moine du mont Cassin ; dans
un traité de médecine, il conseille de faire entendre
aux malades le son de divers instruments parmi les-
quels il cite la vielle. Ante infirmum, diilcis sonitus fiât
de musicorum gêner ibus, sicut campanula, vidula rota
et similibus. (De Morbor. curât, chap. 16.) La vielle
se nommait alors vitula ou vidula, comme l'atteste
Pucange dans son Glossaire. Joannes de Janua, reli-
gieux dominicain, lui donne le nom de Yitula, et
Galfridus de Yino Salvo, poëte normand qui brillait
sous Richard, en 1190, parle de la vielle comme
d'un instrument qui excite la joie : Vitulœjocosœ.
La vielle n'eut pas toujours la forme que nous lui
voyons aujourd'hui; elle ne fut d'abord qu'une sorte
de guitare, assez semblable à la mandoline, et ses
cordes étaient mises en vibration au moyen d'un
morceau de plume, espèce de plectrum; plus tard
on lui substitua une sorte d'archet, composé d'un
morceau de bois denté, dont les dentelures étaient
recouvertes en peau. Mais, jusqu'à ce moment, les
doigts seuls appuyaient sur les cordes, le long du
manche, pour marquer les différentes notes ; le cla-
vier ne fut adapté que postérieurement; car, dans
les temps primitifs, la vielle avait la forme d'un vio-
2G0 VIE
Ion, et c'est ainsi qu'elle est représentée sur les ma-
nuscrits anciens. Comme l'archet employé alors ne
permettait pas de filer des sons, de leur donner plus
ou moins d'ampleur, on lui substitua une roue, sur
laquelle les cordes viennent s'appuyer plus ou moins
fortement; et une petite manivelle servit à faire mou-
voir cette roue. Cet instrument était fort en faveur en
France, vers l'an 1085. Dans ce siècle, elle animait
les meilleurs concerts. Nicolas de Bray, dans sa Yie
de Louis VIII, en parlant d'une fête qui se donna
sous le règne de ce roi, dit que les comédiens firent
leur entrée sur le théâtre au doux son de la vielle et
de plusieurs autres instruments.
Occurrunt mimi, dulci résonante viella
Instrumenta sonant, non sistrum defuit illic.
Sous saint Louis, la vielle faisait le charme de
toutes les réunions; la reine Blanche s'en servait
pour amuser le monarque, et dans les Tournoyements
de l'Ante-Ckrist, roman composé au commencement
du règne de saint Louis, l'auteur place la vielle dans
un concert, comme l'instrument dont se servaient les
jongleurs pour accompagner leurs chansons et ani-
mer la danse.
Quand les tables ôtées furent
Cil Jugleurs in Pies esturent :
Sont vielles et harpes prises
Chansons, sons lais, vers et reprises
Et de geste chante nos ont.
La vielle était l'instrument dont se servait Thibaut,
comte de Champagne, pour accompagner les vers
qu'il adressait à la reine Blanche. Ce prince ne fut
point heureux dans son amour, nous dit l'histoire ;
et tout le fruit qu'il retira de sa passion pour sa
blonde couronnée fut une mélancolie qu'il ne pouvait
SAX 261
calmer qu'en jouant de la vielle, et en mêlant au son
de cet instrument les chansons plaintives que son
constant amour lui inspirait. La Chronique de Saint-
Denis dit : « Et pour ce que profondes pensées engen-
» drent mélancolie, li (Thibaut) fû il loé d'aucuns
» sages homes, qu'il s'estudiast en biaux sons de vielle
» et en doux chants de vielle délitable : si fist entre li
» et Gaces Brûles, les plus belles chansons et les
» plus delitables et mélodieuses qui fussent oncques
» oyes. » La vielle continua d'être très-cultivée sous
les règnes suivants ; car, sous Philippe le Hardi, nous
voyons apparaître le poëte Adenez, ménestrel de
Henri, duc de Brabant, père de la reine Marie, se-
conde femme du roi de France. Ce ménestrel em-
ployait la vielle pour accompagner ses chants, et
dans le Roman d'Ogier, dont il est l'auteur, il cite cet
instrument comme celui dont on se servait alors pour
soutenir la voix. En parlant de Guillaume le Bert
d'Orange et d'Ogier :
Ils violèrent tout doi d'une chanson
Dont les vieles êrent Targe ou Blazon
Et brant d'acier estaient li arçon.
Ce qui prouve qu'alors la vielle était un instrument
tant à la mode, qu'on l'embellissait par des armoi-
ries que l'on faisait peindre ou incruster dessus. Dans
le même temps vivait également Jonglet, poëte, mé-
nétrier fort renommé, et principal en ce métier, dit
Fauchet : il était fort bien vu à la cour de l'empereur
Conrad IV. Ce prince sut le distinguer dans la foule
des musiciens célèbres qui s'étaient, pour ainsi dire,
donné rendez-vous à Mayence, autour de sa personne.
Il paraît que Jonglet ne chantait pas seulement les
chansons courantes, mais encore des espèces d'his-
toires mises en vers et qu'il accompagnait des sons
8*
262 VIE
de sa vielle. Nous lisons dans un ancien roman,
connu sous le nom de Guillaume de Dole, où il est
parlé du prince :
Un sien Vielor qu'il a
Qu'on appelle accort Jonglet
Fit appeller par un Varlet :
Il est sage est grant apris
Mainte chanson et maint biau conte.
Colin Muset vivait également dans ce siècle ; il était
poëte et ménestrel ; il composa diverses chansons
dont il nous reste quelques fragments. Par les uns,
il nous apprend lui-môme qu'il fréquentait les cours
des princes; par les autres, on voit que la vielle était
son instrument.
Ja'ay ali (dit-il) el Praelet
0 tôt la vielle et l'archet
Si li ai chante le Muset.
Ce poëte musicien était aveugle ; les badinages aux-
quels cette cécité donnait lieu, et les tours qu'on lui
faisait, ont sans doute donné naissance au jeu de
clémuselte, abréviation de Colin-Muset. C'est l'opinion
de Dreux de Radier. Nous terminerons ce préam-
bule en faisant observer qu'il est prouvé par un
compte de l'hôtel de Jean, duc de Normandie, depuis
roi, de l'année 1349, que l'on désignait sous le titre
de menestreux tous ceux qui jouaient de la vielle,
sans indiquer leur genre d'instrument ; mais quand
c'étaient d'autres instruments dont ils faisaient usage,
on ajoutait à la suite l'instrument: ainsi menestreux
tout seul indique un joueur de vielle; les autres sont
dits ménestrel du cor sarrasinois, ménestrel de naquai-
resy ménestrel de trompette. (Ducange, Mémoire de
Joinville.) On trouve dans les rôles de la taille de
VIE 263
Paris pour 1292, 1296, 1297 et 1298, dans \arue aux
Jugleeurs, un fabricant de vielles, c'est Henri aux
vieles ou Henri qui fait des vielles; il impose au
chiffre de 6 à 12 sous de cette époque. Nous allons
voir maintenant ce qu'on fit de la vielle sous les rè-
gnes qui suivirent celui de Philippe le Hardi.
Nous voici arrivés au quatorzième siècle, qui s'il
n'offre pas de nombreux faits concernant la vielle,
est du moins une époque remarquable pour les pro-
grès de la musique. Il manquait encore beaucoup de
choses pour que le système de Gui d'Arrezo fût par-
fait. On ne reconnaissait, par exemple, ni noires, ni
blanches, ni croches; toutes les notes avaient une
môme valeur, de même qu'une figure uniforme; ce
fut vers le milieu du quatorzième siècle, environ l'an
1350, sous le règne du roi Jean, qu'un nommé Jean de
Meurs imagina le moyen de distinguer les valeurs iné-
gales des notes. Cette invention rendit plus populaire
l'usage de la musique que Gui d'Arrezo avait déjà
rendu plus facile.
Nous ne nous apercevons pas encore que les pro-
grès de la musique aient beaucoup influé pendant
tout ce siècle sur l'usage de la vielle. Nous découvrons
seulement que dès cette époque on l'appelait parfois
chifonie. En effet, on lit dans la Chronique manuscrite
de Bertrand du Guesclin : Que deux ménétriers d'un
roi de Portugal jouaient d'un instrument nommé chi
fouie, instrument qui était pendu au col avec une
sangle; instrument dont, suivant ce manuscrit, on
jouait alors en France et en Normandie; le poëte
en parlant des deux ménétriers, dit :
Et savait chacun d'eux après luy un sergent
Qui une chifonie va à son col portant,
Et li deux Menectrers se vont appareillant,
Tous deux devant le roi se vont chiflonniant...
264 \IE
Ensuite le poëte nous apprend que Mathieu de
Gournay, qui était alors avec le roi et qui l'entrete-
nait sans doute de quelque affaire importante, écou-
tait cette musique avec impatience :
Et Mathieu de Gournay les va aperchevant.
Et les chiffonnieux à loy priser tant.
Et en son cœur alloit moult durement grabant.
Cependant le roi, plus occupé de ses musiciens que
des affaires de Mathieu de Gournay, lui demanda,
quand ils eurent fini de jouer, son avis sur ses deux
ménétriers.
Et le Roy lui a dit, après le jeu laissant :
Et que vous semble, dit-il, sont-ils bien si
en suffisant?
Mathieu de Gournay, impatienté et maudissant les
symphonistes qui détournent le roi du sujet de la
conversation, fait une déclamation contre la vielle :
Dist Mathieu de Gournay, ne vous irai celant,
Ens ou pays de France et ou pays normant,
Ne vont tels instrumens, fors aveugles portant,
Ainsi vont li aveugles et li Poores truant,
De si fais instrumens li bourgeois esbattant,
Et l'appella depuis un instrumeut truant :
Car ils vont d'huis en huis leur instrument portant
Et demandent leur pain
C'est donc vers le quatorzième siècle que les aveu-
gles et les pauvres s'emparèrent de cet instrument
pour gagner leur vie. Les aveugles se sont appropriés
la vielle en France, comme en Espagne ils ont adopté
la guitare ; et chose assez remarquable, c'est que dans
ce dernier pays ils ont donné leur nom d'aveugle
(ciegos) à tous les musiciens ambulants, qu'ils y voient
ou qu'ils n'y voient pas, ainsi qu'à leurs romances ; et
à la fin du dix-huitième siècle, on envoyait les ciegos
VIE 205
(ménétriers très-voyants) pour jouer dans tous les bals
de société.
Etant devenu l'in&trument de l'indigence, il arriva
à la vielle ce qui arrive à la plupart des choses dont
l'usage est arbitraire et qui dépend du goût. Il y a
cent ans, une personne d'un certain rang n'aurait pas
osé jouer du violon; depuis, cet instrument a recon-
quis ses parchemins, et l'espèce de mépris où il était
tombé n'a jamais pu porter la moindre atteinte à son
mérite. Il eût dû en être de même de la vielle. Elle
fut négligée par la cour, et on ne trouve plus mention
de cet instrument avec éloge par les écrivains du quin-
zième siècle. Mais il paraît que l'on en jouait beau-
coup, car Philippe de Commine dit proverbialement
qu'il faut avant toute chose accorder toutes ses vielles,
comme on a dit plus tard accorder ses flûtes. L'usage de
la vielle, quoique relégué, en France, dans la classe
infime de la société, s'étendit en pays étranger; nous
voyons la vielle s'introduire, à cette époque, en Espa-
gne : dans le roman de Tirant le blanc, écrit en langue
catalane et imprimé vers la fin du quinzième siècle,
l'auteur emploie ces termes mija vivela pour signifier
ma vielle.
Mais, au seizième siècle, nous retrouvons la vielle
ayant repris ses anciens droits et occupant place à la
cour. En 1515, les vielleux font partie du corps de
musique qui assiste au cortège de François Ier à son
entrée dans Paris ; ils étaient vêtus de damas blanc et
marchaient après le chancelier. Durant ce siècle, les
ménétriers chantaient les chansons de geste en s'ac-
compagnant de la vielle que l'on nommait alors sym-
phonie, ainsi que nous l'apprend le Propriétaire en
françoysy cité par Francisque Michel dans la préface
de la chanson de Roland ou de Roncevaux.
Le commencement du dix-septième siècle ne fut
pas favorable au progrès de l'instrument dont nous
266 VIE
parlons. La musique ne fleurit pas beaucoup en France
sous le règne de Louis XIII. Les premières années du
règne de Louis XIV ne fournissent rien de remarqua-
ble sur la vielle, et cet instrument demeura pendant
plusieurs années dans le même état où il avait été
sous le règne précédent. Cependant la musique avait
fait de grands progrès depuis que Jean-de-Meurs avait
inventé les rondes, les blanches, les noires, etc., vers
l'année 1350, pour distinguer la valeur des notes. Il
n'était resté, depuis cette époque, que deux correc-
tions à faire au système de Gui d'Arezzo, pour rendre
l'usage de la musique plus sûr et plus facile : la pre-
mière consistait dans la distinction des mesures par
de petites barres, la seconde était de lever la difficulté
des nuances que l'on était obligé d'employer, faute
d'avoir un septième ton au-dessus du la, pour attein-
dre l'octave. La division des mesures arriva presque
en même temps que l'invention des notes en rondes,
blanches,, noires, etc., etc., par Jean-de-Meurs, niais
lui fut postérieure, quoi qu'en dise Sébastien Bros-
sard, dans son Dictionnaire de musique; car il est
absurde de vouloir faire inventer les séparations des
mesures avant la distinction de la valeur des notes
qui doivent la composer. Quant à l'addition de la
note la, faite au système d'Arezzo, elle date, selon ce
même Brossard, de l'année 1650, sous Louis XIV.
Voici comment s'explique cet auteur : « Comme les
» sons se trouvent naturellement de sept en sept de-
» grés, précisément dans les mêmes intervalles, et
» peuvent se répéter d'octave en octave, pour ainsi
» dire à l'infini, on a ajouté vers le milieu du siècle
» passé, une septième syllabe, savoir si, aux six sylla-
» bes de Gui Aretin, qui donne la facilité d'exprimer
» tous les degrés de l'octave, d'en remplir tous les in-
» tervalles, et par conséquent de faire cette répétition
» indéfinie, sans changer, que fort rarement, le nom
VIE 267
» à pas une des notes. » Brossard ne nous indique pas
le nom de l'inventeur du si ; mais Furetière, qui pa-
raît aussi regarder cette intercalation comme très-
moderne, en attribue l'invention à un nommé Le-
maire : « Le si, dit-il, estime septième note demusi-
» que, ajoutée depuis peu par un nommé Lemaire aux
» six anciennes inventées par Gui Aretin , par le
» moyen de laquelle on évite l'embarras de l'ancienne
» gamme qui se faisait de B mol en nature, et de B
» quarre. » Furetière ajoute encore : « La jalousie des
» hommes est si grande, que trente ans durant, Le-
» maire a prêché vainement la méthode aux musiciens,
» et pas un ne l'a voulu adopter, mais que sitôt qu'il
» a été mort, ils l'ont tous suivie. » Dès l'année 1671,
on rencontre le si dans les partitions des différents
opéras représentés sous le règne de Louis XIY. La
musique devenant, par suite de ces améliorations
dans la notation, plus facile pour la lecture, nous
voyons la vielle reprendre sa première popularité. La
voici qui figure dans les chansons de Gautier Gar-
guille, en 1640.
Une jeune demoiselle
Demandait a un vielleux :
« As-tu perdu les deux yeux
» En jouant de ta vielle?
» — Non, mais ce fut l'autre jour,
» Payant les dettes d'amour. »
Cette même année, on voit paraître une satire, in-
titulée : le Paranymphe de la vielle. Elle nous apprend
que dans ce siècle comme dans ceux qui ont précédé,
les mendiants et les aveugles se servaient de cet ins-
trument pour exciter la commisération publique.
Les aveugles, dessus leur vielle,
Ne chanteront autre nouvelle
En mendiant dans nos maisons.
268 VIE
Dans la Rome ridicule de Saint- Amand, on lit :
Ici, pour instrument de danse,
L'on vit la cimbale tinter,
Les ossets, drus à cliqueter,
En accompagnant la cadence;
Un aveugle^ expert vielleur ,
Joint sa symphonie à la leur,
Sous l'orme droit comme une gaule,
Il grimace en mille façons;
Il tort son minois sur l'espaule
Et fait peur aux petits garçons.
Le même poëte avait dit dans le To'ète sacré :
Remembre-toy des sérénades.
Qu'en mes nocturnes promenades,
Accompagné d'un vielleur
Aveugle, afin que déceleur
De nos amours il ne pust être...
Je t'ai si souvent
Donnez à la pluye et au vent.
Dans la Vraye Histoire comique de Francion, qui date
du commencement du dix-huitième siècle, Ch. So-
rel introduit au quatrième livre un joueur de vielle,
qui fait danser le pédant Hortensius et ses convives;
surpris par le principal du collège où se passait la soi-
rée : « Hélas! monsieur..., pardonnez-moi, dit le viel-
leux, je ne vais que là où l'on me mène ; mon pauvre
luminaire est éteint. Un homme que je ne connais
point, m'a fait venir ici, et a renvoyé mes yeux à la
maison..., j'appelle ainsi un petit garçon qui me con-
duit. » Il parait que ces pauvres aveugles ne se con-
tentaient pas de jouer de leur instrument; ils y ajou-
taient leurs chants. Le poëte Léonard écrit, en parlant
de ceux qui ne pouvaient rien obtenir, pas même un
jiard que l'on nommait alors pistole de vielleur :
Ils avaient beau supplier,
Entonner des Noëls antiques
VIE 269
Et faire génlir le clavier
De leurs vielles mélancoliques.
L'exécution de la vielle était lente, d'où est venu le
proverbe, long comme une vielle, long dans tout ce
que l'on fait. On disait également pour désigner un
homme dont l'humeur est aisée, accommodante,
faisant tout ce que l'on désire : Il est du bois dont on
fait des vielles, comme aujourd'hui, on dit : Il est du
bois dont on fait des flûtes.
Si la vielle était l'instrument des pauvres, nous
allons la voir devenir bientôt aussi celui de la cour.
Car voici venir successivement deux personnages qui
vont réveiller le goût du public pour la vielle. L'un se
nomme La Roze. Il n'était pas grand musicien, et son
talent consistait toujours à jouer les menuets, les en-
trées, contredanses et vaudevilles de ce temps-là;
mais il les exécutait délicieusement; c'était à qui
pourrait le posséder. Il joignait à son talent d'exécu-
tion une jolie voix qu'il conduisait avec goût. Toute
la cour voulut entendre La Roze, et la manière déli-
cieuse dont il jouait de la vielle ne contribuait pas
peu à faire revivre cet instrument dans la haute classe
de la société. Peu de temps après, on vit paraître un
autre joueur de vielle,, qui acquit encore plus de ré-
putation. Son nom était Janot. Il jouait avec perfec-
tion les contredanses et autres airs de l'époque où il
vivait; il chantait aussi fort bien les vaudevilles, en
s'accompagnant avec sa vielle. Il exécutait également
les principaux morceaux des opéras de Lully, tels que
la Descente de Mars. On doit à La Roze et à Janot deux
chansons qui nous sont parvenues ; l'une commence
par ces mots : Je vis content avec ma vielle ; et l'autre,
Dieu qui fait tout pour le mieux. La Roze et Janot réta-
blirent donc la vielle dans son ancien honneur par
les applaudissements qu'ils reçurent à la cour de
Louis XIV, et formèrent de nombreux élèves.
270 VIO
Vielleur, vielleuse. Celui ou celle qui joue de la
vielle.
Vilanelle. Ancienne danse champêtre accompa-
gnée de chant.
Villancico. Espèce d'ode sacrée que les Espagnols
chantent dans les églises pour les fêtes de Noël.
Viola di spalla. On faisait usage de cet instru-
ment dans les premières années du siècle dernier
avec les instruments à vent les plus grands. Il servait
dans la musique instrumentale à l'exécution de la
partie principale. Il tient le milieu entre la viole et le
violoncelle. Ceux qui en jouaient se l'attachaient avec
une lanière passant sur la poitrine, et la rejetaient
sur l'épaule.
Viola pomposa. Instrument à archet en usage vers
le milieu du siècle dernier, inventé par Jean-Sébas-
tien Bach. Elle était plus grande que la viole ordi-
naire, et avait des cordes plus élevées, et cinq cordes
accordées en do, clef de basse au-dessous des lignes,
et sol ré, la, mi.
Viola tenore. Anciennement on employait dans
la musique vocale deux espèces de violes, celle en
clef d'alto qui marchait à l'unisson avec la voix d'alto
et celle écrite en clef de ténor à l'unisson avec la voix
de ténor.
Viole. Cet instrument, dont l'usage est si étendu,
et qui dans la musique à grand orchestre forme une
des quatre parties principales, ne diffère pas du vio-
lon quant à son doigté. Il en diffère cependant par sa
dimension, qui est plus grande, et par l'accord de ses
quatre cordes, dont les deux dernières sont recouver-
tes de fil de métal. Ces cordes sont accordées en do,
clef de basse second espace, puis par quinte sol ré la.
Mais c'est surtout la qualité du son qui est différente,
précisément à cause de sa grandeur et de ses cordes
moins tendues. Cette manière d'accorder fait que l'on
VIO 271
écrit la partie de la viole en clef d'alto, et de là lui
vient encore le nom d'alto, d'alto viola.
La viole fut longtemps négligée par les composi-
teurs de l'ancienne école. Haydn et Mozart lui don-
nèrent enfin le rang qui lui appartenait et qu'elle
occupe aujourd'hui dans les ouvrages des composi-
teurs distingués. Ses sons tendres et mélancoliques
produisent un excellent effet dans la marche des par-
ties intermédiaires, et s'accordent bien avec la clari-
nette, le cor, le basson.
Viole. Jeu d'orgue de tuyau à bouche, ouvert de
quatre pieds, qui sert d'unisson à l'octave.
Viole (Basse de). Cet instrument extrêmement rare
diffère du violoncelle par son accord de six et quel-
quefois sept cordes en ré clef de basse au-dessous des
lignes sol mi la ré, et par ses sons criards et nasillards.
Viole bâtarde. Très-ancienne espèce de viole. Elle
avait six cordes accordées en do, clef de basse au-des-
sous des lignes fa do mi la ré. Elle avait le corps plus
long et plus étroit que la viole.
Viole d'amour. Cet instrument est plus grand que
la viole ordinaire, et a un manche plus long. Il en dif-
fère encore dans l'accord de ses sept cordes en sol,
clef de basse première ligne; do sol do mi sol do, ou
sol do mi la ré sol do.
Violicembalo. Instrument inventé en 1609 par
Jean Haydn, à Nuremberg. Il voulut faire participer
le piano à l'avantage qu'ont les instruments à archet
ou à vent de soutenir plus longtemps le son et de le
modifier dans sa faiblesse ou dans sa force. Il inventa
donc le violicembalo, qui a la forme du piano. L'abbé
Tréntin, à Venise, attira de nouveau l'attention sur
cet instrument par les réformes qu'il y fit il y a quel-
ques années.
Violon. De tous les instruments, le plus beau, le
plus harmonieux, le plus flexible, le plus riche en
272 VIO
modulations tour à tour énergiques, tendres et pas-
sionnées, c'est sans contredit la voix humaine. Parmi
lesorganes de la mélodie, même les plus perfectionnés,
en est-il un seul qui, pour la puissance, la vigueur,
l'éclat, le charme, la grâce, la variété, le prestige des
ornements, puisse rivaliser avec la voix d'un chan-
teur éminent, quand cette voix a été exercée, assou-
plie, fortifiée par un travail persévérant, quand ce
chanteur s'appelle Rubini ou Lablache, Damoreau ou
Persiani? Toutefois, si parmi nos instruments il en
est un qui, pour l'abondance et la variété des ri-
chesses mélodiques, puisse être jusqu'à un certain
point comparé à la voix humaine, c'est assurément
le violon. Le violon est de tous les instruments le
plus harmonieux, le plus richement doté, et telles
sont la supériorité de son organisation et la fécondité
de ses ressources, qu'il peut remplir d'une manière
brillante le rôle assigné à chacun des autres organes
de la mélodie. Passant par une série d'étonnantes
métamorphoses, il peut, comme la trompette, écla-
ter en accents belliqueux, jeter comme la harpe des
myriades de notes tendres et passionnées, ou soupi-
rer comme la flûte les naïves amours des villageois.
Et non-seulement le violon est le plus varié de tous
les instruments, sous le rapport de l'expression, il est
encore le plus répandu, le plus populaire. Il brille
dans les concerts, fait le charme de toutes les réunions
particulières; mais c'est surtout dans les grandes so-
lennités musicales, c'est sur nos scènes lyriques que
sa puissance se déploie, au milieu de l'orchestration
la plus riche et la plus colossale.
Le violon est monté sur quatre cordes de boyau,
dont la plus grave sonne le sol. Les trois autres por-
tent ré, la, mi. par quinte du grave à l'aigu. La corde
50/ est filée en laiton. Le diapason du violon est de
trois octaves et une sixte. Il commence au troisième
VÎO 273
50/ du piano. Ses quatre cordes suffisent pour donner
plus de quatre octaves, plus de trente-deux notes du
grave à l'aigu. Elles se prêtent à toutes les exigences
du chant, à toutes les variétés de la modulation. Au
moyen de l'archet qui met les cordes en vibration, et
peut en faire parler plusieurs à la fois, il unit aux sé-
ductions delà mélodie le charme des accords, et l'a-
vantage si grand de prolonger le son, d'en doubler
la puissance et l'énergie, la grâce et la suavité.
Quelques artistes célèbres n'ont pas accordé le violon
par quinte, ainsi qu'on le fait ordinairement. Pour en
obtenir une sonorité plus éclatante, Paganini haussait
toutes les cordes d'un demi-ton et jouait en ré naturel,
par exemple, quand l'orchestre était en mi bémol, en la
naturel quand l'orchestre était en si bémol. Par ce fa-
cile artifice, il conservait la plupart de ses cordes à
vide ; et l'on sait que la sonorité de ces cordes est bien
plus éclatante que celle des cordes où les doigts sont
appuyés. De Beriot hausse souvent le sol d'un ton,
dans ses concertos. Baillot, au contraire, baissait quel-
quefois le sol d'un demi-ton, quand il voulait obte-
nir des effets doux et graves. Winter à même em-
ployé, dans le même but, le fa naturel au lieu du
sol.
Les trilles sont praticables sur tous les degrés de la
vaste échelle du violon. Mais ils deviennent très-dif-
ficiles sur les notes les plus aiguës : on les redoute, et
il est prudent de ne jamais les employer à l'or-
chestre.
Les accords de deux, trois ou plusieurs notes qu'on
peut frapper ou arpéger sur le violon sont très-nom-
breux et produisent des effets très- différents. Les ac-
cords de deux notes, qui résultent de ce qu'on ap-
pelle la double- cor de, conviennent aux dessins mé-
lodiques, aux phrases soutenues, aux accompagne-
ments et au trémolo, désaccords de trois ou plusieurs
274 YIO
notes produisent un assez mauvais effet dans \o piano,
mais ils ont de la richesse dans le forte : l'archet peut
les faire vibrer alors d'une manière simultanée. Les
accords que l'on désirerait obtenir entre le 50/ et le ré
graves, sont impossibles à chaque instrument isolé,
puisqu'il n'y a qu'une corde: en ce cas, on divise les
violons. A partir du ré grave, tous les intervalles de
seconde, de tierce, de quarte, de quinte, de sixte, de
septième et d'octave sout praticables : ils deviennent
seulement plus difficiles à mesure qu'on s'élève dans
l'échelle des sons.
L'unisson n'est vraiment facile et vraiment très-so-
nore que sur les trois notes ré, la, mi, parce qu'alors
une des deux cordes au moins est à vide. Les autres
unissons n'ayant pas de cordes à vide, sont difficiles
et rarement très-justes.
Le trémolo des violons produit plusieurs excellents
effets, dans l'orchestre surtout. Il exprime le trouble,
l'agitation, l'épouvante, quand on l'écrit sur une ou
deux des trois cordes sol, ré, la, qu'on ne s'élève pas
au-dessus du si bémol du médium, et qu'on l'exécute
piano, mezo-forte ou fortissimo. Il a quelque chose
de violent, d'orageux, dans le fortissimo, sur le mé-
dium de la chanterelle et de la 2e corde. Il devient
aérien, au contraire, si on l'emploie à plusieurs par-
ties et pianissimo sur les notes aiguës de la chan-
terelle.
Le trémolo du bas et du médium de la troisième et
la quatrième cordes, dit un critique célèbre, est bien
plus caractérisé dans le fortissimo, si l'archet attaque
les cordes près du chevalet. Dans les grands orches-
tres et lorsque les exécutants veulent se donner la
peine de le bien rendre, il produit un bruit assez
semblable à celui d'une rapide et puissante cascade.
Il faut indiquer le mode d'exécution par ces mots :
près du chevalet :,
VIO 275
Une magnifique application de cette espèce de tré-
molo a été faite dans la scène de l'oracle, au premier
acte de YAlceste de Gluck. L'effet du tremblement des
seconds violons et des altos est encore redoublé, dans
ce passage, par la progression grandiose et menaçante
des basses, le coup frappé de temps en temps par les
premiers violons, les encrées successives des instru-
ments à vent, et enfin par le sublime récitatif que ce
bouillonnement d'orchestre accompagne. Nous ne
connaissons rien en ce genre de plus dramatique ni
de plus terrible. Seulement l'idée du trémolo près du
chevalet n'ayant pas été exprimée par Gluck dans sa
partition, l'honneur en revient à M. Habeneck, qui,
en dirigeant au Conservatoire l'étude de cette scène
magnifique, exigea des violons ce mode énergique
d'exécution.
On fait quelquefois usage du trémolo brisé, sur une
ou sur deux cordes, dans certains accompagnements
dramatiques d'un caractère très-agité.
Enfin il existe une dernière espèce de trémolo dont
Gluck a tiré un parti admirable dans ses récitatifs et
qui est aujourd'hui tombée en désuétude. Elle con-
siste dans l'émission peu rapide de notes liées entre
elles sur le même son et sans que l'archet abandonne
la corde. Les exécutants ne peuvent pas se rencon-
trer dans le nombre des notes qu'ils font entendre à
chaque mesure, puisque l'accompagnement est un
vrai trémolo non-mesuré, et il résulte de ces diffé-
rences une espèce de fluctuation et d'indécision, par-
faitement propres à peindre l'inquiétude et l'anxiété.
Les coups d'archet sont d'une grande importance
dans la musique de violon. Ils influent énormément
sur la sonorité et l'expression des traits et des mélo-
dies: il faut donc les indiquer avec le plus grand
soin. Les principaux sont : le détaché, le lié de deux
en deux notes, le grand lié qui réunit un certain
276 YIO
nombre de notes ; le staccato ou détaché léger qui s'exé-
cute pendant la durée d'une seule longueur d'archet,
au moyen de petits coups successifs; le grand détaché
porté qui donne à la corde la plus grande sonorité
possible, en lui permettant de vibrer après que l'ar-
chet Ta fortement attaqué ; les mêmes notes répercu-
tées deux, trois ou plusieurs fois, et quelques autres
moyens d'exécution qu'il serait trop long d'expliquer,
tels que à la pointe de l'archet, avec le talon de l'ar-
chet, avec toute la longueur de l'archet, sur la tou-
che, etc.
On a quelquefois employé le bois des archets pour
frapper les cordes et en obtenir une sonorité moitié
horrible et moitié grotesque. Ce moyen bizarre est
employé très-rarement.
On appelle sons harmoniques ceux que l'on fait naî-
tre en effleurant les cordes avec les doigts de la main
gauche, sans les mettre en contact avec la touche.
Les sons harmoniques ont presque tous un carac-
tère singulier de sonorité aérienne et de mystérieuse
douceur. Nous renvoyons leur étude, qui est intéres-
sante mais assez longue, aux traités spéciaux sur le
violon.
Les sourdines sont de petites machines en bois que
l'on place sur le chevalet des instruments à corde
pour affaiblir leur sonorité. Elle leur donne un ac-
cent triste et doux qui est d'une application fréquente
et souvent heureuse dans tous les genres de musique.
Le pizzicato, dont le nom indique la nature, est
également d'un usage fréquent. Les chanteurs aiment
beaucoup cette espèce d'accompagnement: elle ne
couvre point leur voix et l'environne d'une sonorité
agaçante, cristalline et presque toujours gracieuse. Il
faut cependant éviter le pizzicato à l'extrême aigu et
à l'extrême grave: ici, l'effet en est sourd ; là, grêle,
sec et cassant.
YIO 277
Les violonistes célèbres, qui ont fait école, sont
assez nombreux. Avant de les faire connaître, citons
pour mémoire les noms plus anciens de Giovan-Bap-
tista, surnommé dei violino-; de Constantin, le roi
des violonistes français ; du P. Castrovillari, religieux
de Padoue; de Walther, que ses oiwrages font mettre
au rang des artistes les plus habiles du xvne siècle;
et enfin de Jean-Baptiste Bassani, qui se distingua par
le beau style de sa musique instrumentale et qui eut
la gloire d'initier Corelli aux secrets de son art.
« Archangelo Corelli, dit M. Fétis, grand artiste,
qui, par l'élévation de ses idées et la perfection de son
jeu, s'est placé à la tête de l'école du violon, et a
marqué le temps de ses plus rapides progrès. Arcan-
gelo Corelli ! nom justement célèbre dans les fastes
de la musique, et qui traversera les siècles sans rien
perdre de son illustration, quelles que soient les ré-
volutions auxquelles cet art sera soumis ! le grand ar-
tiste qui le porta, non moins admirable compositeur
que violoniste prodigieux pour son temps, naquit au
mois de février 1653, à Fusignano, petite ville des
États de l'Eglise, et mourut à Borne le 18 janvier 1713.
Ses contemporains ne furent pas ingrats pour sa
gloire, car l'Europe entière salua son talent par d'u-
nanimes acclamations, et ses compatriotes placèrent
ses restes au Panthéon, et lui élevèrent un tombeau
près de celui de Baphaël. Après un siècle et demi,
Corelli est encore considéré comme le type primitif
des bonnes écoles de violon; aujourd'hui même, bien
que l'art se soit enrichi de beaucoup d'effets inconnus
de son temps et que le mécanisme se soit perfectionné,
l'étude de ses ouvrages est encore une des meilleures
qu'on puisse faire pour acquérir un style large et ma-
jestueux. Son œuvre cinquième, composé de douze
sonates pour violon seul, avec accompagnement de
T, II. 2*
278 VIO
basse continue pour le clavecin, qui parut à Rome en
1700, est un chef-d'œuvre en son genre*
« L'art déjouer du violon, et la composition de la
musique pour cet instrument, continuèrent, pendant
toute la durée du xvme siècle, d'être dans une pro-
gression ascendante. Au commencement de ce siècle,
il y avait en Italie peu de villes où l'on ne trouvât
quelque violoniste distingué. Le génie de Corelli avait
animé celui de tous ces artistes : à Pise, c'était Cons-
tantin Glari, non moins remarquable comme compo-
siteur que comme exécutant; à Florence, François
Veracini ; à Bologne, Jérôme Laurenti ; à Modène,
Antoine Yitali; à Massa di Garrara, Gosme Perelli et
François Ciampi; à Lucques, Lombardi; à Crémone,
Visconti, dont les conseils furent, dit-on, fort utiles
au célèbre luthier Stradivari pour la fabrication de
ses instruments; à Pistoie, Giacopino; à Naples, Mi-
chel Mascitti. D'autres, tels que Mathieu Alberti, Tho-
mas Albinoni, Charles Tessarini et Antoine Vivaldi,
tous élèves de Corelli, furent à la fois des virtuoses
de premier ordre pour leur temps et de grands com-
positeurs de musique instrumentale. Vivaldi, dont
on vient de lire le nom, fut un de ces artistes prédes-
tinés qui impriment à l'art de leur époque une direc-
tion nouvelle. Le concerto lui dut ses premiers per-
fectionnements; car le concerto grosso de Corelli est
une œuvre où toutes les parties concertent entre elles
et s'emparent tour à tour de l'intérêt. h'Estro armo-
nico de Vivaldi, composé de douze concertos pour
quatre violons, deux violes, violoncelle et basse con-
tinue pour l'orgue, et dans les mêmes conditions;
mais dans ses œuvres 6e, 7©, 8e, 9e, 10e, 11e et 12e,
le génie de l'auteur prend un autre essor et trouve des
formes nouvelles. La partie principale attire à elle
l'intérêt du morceau, et bien qu'il n'y ait point encore
de division en solos et tutti, le rôle de cette partie prin-
VIO 279
cipale domine tous les autres. Les mélodies de Vivaldi
ont aussi un caractère modernisé que Somis et Gemi-
niani imitèrent.
« Au milieu de tous les artistes distingués qui vien-
nent d'être nommés, le violoniste modèle de la pre-
mière moitié du xvme siècle fut Joseph Tartini. Né à
Pirano en Istrie, le 12 avril 1692, il eut une jeunesse
agitée; mais ayant eu l'occasion d'entendre le célèbre
violoniste Varacini, qui se trouvait à Venise en môme
temps que lui, sa vocation se révéla; il se retira à
Ancône pour y travailler en liberté, et dans sa soli-
tude il fit de constantes observations qui le conduisi-
rent aux principes fondamentaux du maniement de
l'archet ; principes qui, depuis lors, ont servi de base
à toutes les écoles de violonistes d'Italie et de France.
Fixé à Padoue, en 1721, comme violon solo et chef
d'orchestre de la chapelle de la célèbre église du Saint,
il y passa paisiblement quarante-neuf années, uni-
quement accupé des travaux de son art, et y mourut
le 16 février 1770. En 1728 il avait établi dans cette
ville une école de violon qui devint célèbre dans toute
l'Europe, et d'où sortirent une multitude de violo-
nistes distingués, parmi lesquels on cite Nardini,
Pasqualino Bini, Alberghi, Dominique Ferrari, qui
passe pour avoir été l'inventeur des sons harmoniques,
Carminati, Capuzzi, Mme deSirmen, et les violonistes
français Pagin et La Houssaye. Tartini n'a pas moins
contribué au perfectionnement de l'art de jouer du
violon par ses compositions pour cet instrument, que
par les élèves qu'il a formés. Son style est en général
élevé, ses idées ont de la variété, et son harmonie a
de la pureté sans sécheresse. Le nombre de ses con-
certos publiés ou manuscrits s'élève à près de cent
cinquante. Il y a aussi de lui environ cinquante so-
nates au nombre desquelles est la fameuse Sonate du
Diable, dont l'anecdote n'est peut-être pas étrangère
280 VIO
à certains bruits ridicules qui ont couru sur Paganini;
il la racontait lui-même en ces termes : « Une nuit,
» en 1713, je rêvais que j'avais fait un pacte, et que
» le diable était à mon service. Tout me réussissait à
» souhait; mes volontés étaient toujours prévenues,
» et mes désirs étaient surpassés par les services de
» mon nouveau domestique. J'imaginai de lui don-
» ner mon violon pour voir s'il parviendrait à me
» jouer de belles choses ; mais quel fut mon étonne-
» ment lorsque j'entendis une sonate si singulière et
» si belle, exécutée avec tant de supériorité et d'in-
» telligence, que je n'avais même rien conçu qui put
» entrer en parallèle ! J'éprouvais tant de surprise, de
» ravissement, de plaisir, que j'en perdais la respira-
» tion : je fus réveillé par cette violente sensation ; je
» pris à l'instant mon violon, espérant de retrouver
» une partie de ce que je venais d'entendre ; mais ce
» fut en vain. La pièce que je composai alors est, à
» à la vérité, la meilleure que j'aie jamais faite, et je
» l'appelle encore la Sonate du Diable ; mais elle est
» si fort au-dessous de ce qui m'avait frappé, que
» j'eusse brisé mon violon et abandonné la musique,
» si j'eusse été en état de m'en passer. »
« Parmi les élèves de Gorelli, un des plus habiles
fut Geminiani, né à Lucques, vers 1680. Après avoir
terminé ses études de violon, sous le célèbre maître,
il passa en Angleterre en 1714, y forma quelques
bons élèves, et mourut à Dublin, le 17 septembre
1762, à l'âge de quatre-vingt-trois ans. Son talent
d'exécution était à la fois brillant et solide; mais il
manquait d'imagination dans ses ouvrages, qui ne
sont qu'une imitation assez faible du style de Vivaldi.
Somis, autre élève de Gorelli, était né dans le Pié-
mont vers la lin du xvne siècle, et avait visité dans
sa jeunesse Rome et Venise, pour entendre les vir-
tuoses de cette époque.- Gorelli lui fit étudier ses so-
VIO 281
nates, et d'abord Somis s'attacha à son style ; mais
lorsqu'il entendit Vivaldi, il se modifia d'après sa
manière et l'imita dans ses compositions. Somis fut
le fondateur de l'école piémontaise du violon qui,
après la mort de Tartini, exerça une très-grande in-
fluence sur l'art de jouer de cet instrument. Baptiste
Anet, plus connu simplement sous le nom de Bap-
tiste, qui avait aussi reçu des leçons de Gorelli, ar-
riva à Paris vers 1700, et y passa pour un prodige,
ce qui n'était pas étonnant à une époque où, suivant
l'opinion de Lully, les meilleurs violons de l'Opéra et
de la musique du roi n'étaient pas capables de jouer
leur partie sans l'avoir étudiée. Assez médiocre musi-
cien, Baptiste ne forma pas d'autre élève que Senaillé,
en sorte qu'il ne fit que peu de chose pour la forma-
tion d'une école française de violonistes. D'ailleurs,
il ne vécut pas à Paris plus de cinq ans. Une posi-
tion qui lui fut offerte en Pologne, le décida à se fixer
dans ce pays.
« La gloire de poser les bases d'une école de violon
en France était réservée à Jean-Marie Lecler, élève
de Somis, et violoniste de grand talent, qui naquit à
Lyon, en 1697. Le violon ne lui avait servi d'abord
que pour la danse; car dans sa jeunesse il avait dé-
buté comme danseur au théâtre de Rouen; mais
ayant été appelé à Turin, en qualité de maître de
ballets, Somis le prit en affection après avoir en-
tendu quelques airs de danse de sa façon, et lui
donna des leçons de violon qui lui firent faire de ra-
pides progrès. Après deux années d'études, le maître
déclara à l'élève qu'il n'avait plus rien à lui appren-
dre ; mais Lecler continua son travail de mécanisme
avec persévérance, et parvint à la possession d'un
beau talent. Arrivé à Paris en 1729, Lecler fut atta-
ché à l'orchestre de l'Opéra, puis à la musique du
roi. Les élèves qu'il forma, et la publication de ses
282 YIO
sonates, de ses duos et de ses trios, sont le point de
départ de l'école des violonistes français. Jean- Bap-
tiste Senaillé eut aussi de l'influence sur les premiers
développements de cette école. Né à Paris, le 23 no-
vembre 1687, il eut d'abord des leçons de Queversin,
un des vingt-quatre violons de la grande bande du
roi, puis devint élève de Baptiste Anet. Le grand re-
nom des violonistes italiens de cette époque le décida
ensuite à se rendre à Modène pour y prendre des le-
çons d'Antoine Vitali. Son talent fit une vive sensa-
tion dans cette ville, et la grande-duchesse l'attacha
au service de la cour. De retour à Paris en 1719, il y
fit quelques bons élèves au nombre desquels fut Gui-
gnon, et peut-être Guillemain, qui eut de la célébrité
par d'excellentes sonates pour son instrument.
« De tous les élèves de Corelli, celui qui s'éloigna le
plus de sa manière, et qui, par son audace, arriva
aux résultats les plus extraordinaires, fut Pierre Lo-
cateîli, violoniste justement célèbre, né à Bergame,
en 1693. Au surplus, il n'a pu recevoir qu'un petit
nombre de leçons de son illustre maître, car il n'était
âgé que de seize ans lorsque Corelli descendit au
tombeau. Plein de hardiesse et d'originalité, il in-
venta de nouvelles combinaisons pour l'accord du
violon, la double corde, les arpèges et les sons har-
moniques. L'ouvrage le plus important où il dé-
posa le résultat de ses découvertes dans ces choses
diverses a pour titre : Arte di nuova modulazione. Les
éditions françaises qu'on a faites de cet ouvrage
ont pour titre : Caprices énigmatiques. Si Locatelli,
mort en Hollande en 1764, ne forma pas beaucoup
d'élèves, à cause des grandes difficultés de sa musi-
que, il eut pour imitateurs, en quelques parties,
Lolli, Fiorillo, et surtout Paganini, dont le talent a
été le développement le plus complet des tendances
du modèle,
VIO 283
« L'école piémontaise, fondée par Somis, était des-
tinée à devenir la plus productive en talents de pre-
mier ordre. Outre Lecler, ce professeur avait formé
son neveu Schabran, ou Chabran, qui brilla à Paris
en 1751, Giardini, modèle de grâce, et surtout Pu-
gnani, doué d'une organisation grande et forte qui
n'eut pas moins d'influence dans l'art, par la gran-
deur de son style d'exécution et par la variété de son
archet, que par les perfectionnements qu'il intro-
duisit dans la forme du concerto sous le rapport de
l'effet des solos. Devenu chef de cette école du Pié-
mont, Pugnani porta sa gloire à son apogée en for-
mant le talent si beau, si pur, si tendre et si brillant
à la fois de ce Yiotti qui devint ensuite le modèle et
le désespoir des violonistes de tous les pays.
« Contemporain de Pugnani, Gaviniès faisait pour
l'école française à Paris ce que le violoniste piémon-
tais faisait à Turin pour l'école italienne. Mécanisme
d'archet qui lui permettait de se jouer des plus
grandes difficultés; justesse parfaite, style imposant,
enfin expression pleine de charme et de sensibilité,
telles furent les qualités qui frappèrent Yiotti lors-
qu'il eut entendu Gaviniès, et qui le lui firent appe-
ler te Tartini français. Le talent de cet artiste se fit
particulièrement apprécier à sa juste valeur dans di-
verses occasions où il se fit entendre au concert spiri-
tuel, après d'autres violonistes d'un mérite incontes-
table. C'est ainsi que la palme lui fut donnée après
ses luttes avec Pugnani, Dominique Ferrari et Jean
Stamitz.
« L'arrivée de Viotti à Paris y produisit une impres-
sion difficile à décrire. Jamais on n'avait entendu de
talent qui approchât de cette perfection ; jamais ar-
tiste n'avait possédé un son plus beau, une élégance
aussi soutenue, une verve, une variété semblable.
L'imagination qui brillait dans ses concertos ajoutait
284 VIO
encore au plaisir qu'il procurait à son auditoire ; car
ses compositions pour son instrument étaient aussi
supérieures à ce qu'on connaissait auparavant, que
son exécution était au-dessus de celle de ses rivaux.
Dès qu'on connut cette belle musique, la vogue des
concertos de Jarnowick disparut, et l'école française
de violon s'engagea dans une voie plus large. Les
élèves de cet artiste illustre sont en petit nombre;
mais il en est un qui seul valut toute une école : je
veux parler de Rode, talent fin, délicat, brillant, qui
rappelait souvent celui du maître sous lequel il
s'était formé. Il existe aujourd'hui bien peu de per-
sonnes qui aient entendu cet admirable talent dans
toute sa beauté, lorsqu'il se produisit dans les con-
certs de la rue Feydeau et de l'Opéra ; mais les artis-
tes qui ont joui de ce plaisir n'oublieront jamais le
modèle de perfection dont ils furent alors émerveillés.
Il y a une remarque intéressante qui me paraît devoir
être faite, c'est que depuis Corelli jusqu'à Rode il n'y
a pas de lacune dans l'école ; car Corelli fut le maître
de Somis, Somis de Pugnani, Pugnani de Yiotti, et
Yiotti de Rode.
«A l'époque où brillait Rode, deux autres violonistes
de la plus haute valeur illustraient l'école française.
Le premier en date était Rodolphe Kreutzer, fils d'un
musicien de la chapelle du roi, et qui était né à Ver-
sailles en 1766. Élève d'Antoine Stamitz, violoniste
allemand qui a fondé une école, Kreutzer prit d'abord
le style un peu étroit de son maître ; mais lorsqu'il
eut reçu des conseils de Gaviniès et entendu Yiotti, il
élargit sa manière, devint brillant, hardi et presque
chevaleresque. Sa qualité de son était nourrie plutôt
que moelleuse, et sa manière de chanter était moins
remarquable que sa hardiesse dans les difficultés. Ses
grandes qualités étaient d'être original, de n'avoir
suivi aucune école et de n'obéir qu'à l'impulsion de
VIO 285
son sentiment énergique. Kreutzer a fait école et a
produit beaucoup de bons élèves qui se sont assimilé
ses qualités, et qui, en général, ont du brillant dans
l'exécution.
« Baillot, dont il me reste à parler, ne fut pas seule-
ment un grand violoniste par le mécanisme le plus
riche et le plus varié qu'on puisse imaginer, mais en
même temps il fut poëte par le sentiment le plus
exquis des beautés de la musique, et par la concep-
tion prompte du style d'exécution le mieux en rap-
port avec le caractère de chaque composition. Pollani,
élève de Nardini, fut un de ses maîtres de violon;
mais il est vrai de dire que les grandes qualités du ta-
lent de Baillot furent celles qu'il puisa en lui-même.
Grand violoniste solo, il ne put jamais s'élever à toute
sa hauteur lorsque la valeur de l'œuvre qu'il exécu-
tait ne l'émouvait pas. A l'Opéra, par exemple, où il
devait jouer des solos pour la danse, il perdait une
grande partie de son talent et n'était que l'ombre de
lui-même; mais dans ses séances annuelles de qua-
tuors et de quintetti, lorsque le génie de Boccherini,
de Haydn, de Mozart et de Beethoven faisait battre
son cœur, il devenait sublime et sans égal par la va-
riété d'accents, les nuances de sentiment et la poésie
des idées. Son archet était magique, et les sons deve-
naient sous ses doigts d'éloquentes inspirations. Bail-
lot ne fut pas seulement un grand artiste : ce fut un
grand professeur. Le nombre d'excellents violonistes
qu'il a formés est très-considérable. De sa première
école sortirent Habeneck et Mazas, qui furent aussi de
grands artistes. Devenu lui-même professeur au Con-
servatoire de Paris, et successeur de son maître, Ha-
beneck a formé de bons élèves, à la tête desquels se
place M. Alard, aujourd'hui chef de l'école française.
« Et vous aussi, Lafont, vous fûtes une des plus bel-
les gloires de l'école des violonistes français ! D'abord
286 VIO
élève de Kreutzer, Lafont ne trouva pas dans le sen-
timent de ce maître les qualités qui pouvaient sym-
pathiser avec le sien; il ne tarda pas à passer de cette
école dans celle de Rode, qui semblait faite pour dé-
velopper ses qualités naturelles de grâce, de pureté,
d'élégance et de charme; qualités qui parvinrent, par
la suite de ses études, au développement le plus com-
plet, et conduisirent l'artiste à un rare ensemble de
perfections. La justesse de ses intonations était si
sûre; la douceur de son archet avait tant de séduc-
tion ; il y avait tant de goût dans les ornements de
son jeu, que si le sentiment de la grandeur laissait
quelque chose à désirer, on s'en apercevait à peine,
ravi qu'on était par la grâce et par la délicatesse.
« Une école nouvelle s'est formée : nous voulons
parler de l'école belge du violon, qui compte un peu-
ple de héros à la tête duquel se placent De Beriot et
Yieuxtemps, l'honneur de leur patrie.
« L'Allemagne a produit plusieurs écoles de violo-
nistes, dont les qualités principales ont été la justesse
et la netteté du jeu, mais qui, dans le xvme siècle
surtout, ont laissé à désirer un son plus puissant, et
plus d'ampleur dans le style d'exécution. Les prodi-
ges inventés par Wagner au xvne siècle ne paraissent
pas avoir laissé de traces chez ses successeurs. L'Italie
et la Bohême furent les berceaux des deux écoles do
violonistes allemands d'où sont sortis les autres.
<* Gorelli, quia laissé partout des preuves de sa grande
influence, élait premier violon de la chapelle du mar-
grave d'Anspach en 1699, lorsque Pisendel, qui y était
enfant de cœur, devint son élève, et fit de si rapides
progrès sous sa direction, qu'il put être engagé en
1702 comme premier violon de la chapelle. Ce même
Pisendel, devenu très-habile violoniste, fut attaché
au service de la cour de Saxe en qualité de maître de
concerts, et ouvrit à Dresde une école de violon. II y
VIO 287
transmit la tradition de son maître, mais en la modi-
fiant par ie style un peu maniéré qui avait alors beau-
coup de vogue à la cour de Dresde. C'est dans cette
école que se forma le talent de Jean-Théophile Graun,
frère du célèbre compositeur de ce nom, et maître
de concerts de Frédéric-le-Grand, roi de Prusse. Graun
avait un talent solide, dont il a donné des preuves, et
par les élèves qu'il a formés, et par vingt-neuf con-
certos de violon restés en manuscrit, mais dont j'ai
vu quelques-uns qui donnent une haute opinion de
son habileté. Dans sa jeunesse, au sortir de l'école de
Pisèndel, il était allé en Italie, et y avait reçu des
leçons de Tartini, dont il avait adopté la manière.
« L'école de violon sortie de la Bohême commence
par Konieseck, de Prague, qui n'est connu que parce
qu'il a été le maître de François Benda, grand artiste,
né à Althenatka, dans la Bohême, le 23 novembre
1709. Son premier maître fut un juif aveugle nommé
Lœbel, violoniste fort habile. Plus tard il devint élève
de Konieseck, et prit de lui le style brillant, mais un
peu petit sous le rapport du son, qu'il a transmis à
tous ses élèves. L'école de Benda, d'où sont sortis ses
deux fils, Bamnitz, Bust, Matthes, et beaucoup d'au-
très, a été longtemps célèbre en Allemagne. C'est de
cette école que sont sortis la plupart des violonistes
de la Prusse et de la Saxe. Benda, après la mort de
Graun, lui succéda comme maître des concerts de la
cour de Prusse, en 1772, et mourut à Potsdam, en
1786.
« De la Bohême sortit aussi Jean-Charles Stamitz,
violoniste remarquable et compositeur distingué, né
en 1719, qui avait eu pour maître de son instrument
un moine de l'abbaye de Beichnau, nommé le P.
Czernohorsky. Entré au service de l'électeur palatin,
en 1745, Stamitz y devint le fondateur de la célèbre
école de Manheim, qui a produit la plupart des violo-
288 VIO
lonistes allemands des derniers temps. Les concertos
de Stamitz et un duo pour un seul violon, plusieurs
fois publié, prouveraient seuls la grande habileté de
cet artiste, lors même que ses élèves n'en rendraient
pas témoignage. Au nombre de ces élèves sont ses
deux fils Charles et Antoine, Cannabeih, Foester et
plusieurs autres. Chrétien Cannabeih continua l'en-
seignement de son maître, et de son école sortirent
Guillaume Cramer, Danner, Ignace Fraenzel, qui
tous furent des artistes distingués, mais dans des
genres différents. Ainsi Cramer et Danner eurent de
la largeur dans le maniement de l'archet; mais
Fraenzel eut le jeu élégant, gracieux, et le son un
peu mince. Elève de Danner, Jean-Frédéric Eck, né
à Manheim en 1766, devint aussi un brillant violo-
niste de cette école. Ce même artiste, directeur des
concerts de la cour de Munich, a été le maître sous
qui le talent de M. Spohr s'est formé, autant toutefois
que se forme le talent d'un artiste sous un maître
jusqu'à ce que son organisation individuelle et ses
méditations y aient mis le cachet de sa personnalité.
M. Spohr a fondé en Allemagne une école de violon
plus large, plus vigoureuse que celle de ses prédéces-
seurs. Lorsque Paganini l'entendit à Venise, il en
parla avec la plus grande estime. Ce digne artiste a
formé beaucoup de bons élèves qui occupent aujour-
d'hui des positions honorables dans la plupart des
grandes villes, et a exposé les principes de son école
dans sa grande méthode publiée à Vienne chez Has-
linger, et plus tard traduite en français (1). »
Après les noms admirés de ces grands artistes, il
est d'autres noms encore qui, dans une sphère plus
modeste, ont mérité de parvenir à la gloire : je veux
parler des facteurs de violons.
(1) F. J. Fétis,
VIO 289
On a émis, au sujet de l'origine et de l'invention de
cet instrument, une foule d'assertions dont il est
inutile de discuter ici la valeur. Une opinion qui nous
paraît désormais peu contestable, c'est que l'inven-
tion du violon, tel qu'il est actuellement constitué,
ne remonte pas au-delà du quinzième siècle.
C'est au talent du plus habile facteur de la renais-
sance, Stradivarius, et aux efforts réunis des Amati,
des Guarneri, des Bergunzi, des Steiner, des Cappa,
de Saluées, que cet instrument doit sa constitution
définitive. Sous les mains intelligentes de ces artistes
fameux, le violon s'anima d'un souffle puissant, et
son invention, son mécanisme ingénieux ne sont pas
une des conquêtes les moins précieuses du seizième
siècle, cette époque brillante de mouvement intellec-
tuel et de rénovation artistique.
De nos jours en France, M, Yuillaume ajoutant la
science de l'acoustique aux grandes traditions des
facteurs célèbres qui l'ont précédé, a fait entrer la
facture du violon dans une voie nouvelle où il s'est
signalé par des résultats dont l'avenir, nous n'en
doutons pas, consacrera le véritable mérite !
Violon. Jeu d'orgue de tuyaux à bouche, ouvert
de deux pieds, qui sert d'unisson au principal.
Violon piccolo. Accordé en do, au-dessous des
lignes sol, ré, la. Il n'est plus en usage.
Violoncelle. Cet instrument doit son origine à
quelques changements faits à la basse de viole. Il fut
inventé par le P. Tardieu, de Tarascon, au commen-
cement du dernier siècle. Il avait alors cinq cordes
do, sol, ré, la, ré. Aujourd'hui, il n'en a plus que
quatre, dont les deux dernières sont revêtues de fil de
métal. Elles sont accordées en do, clef de basse au-
dessous de la portée : sol, ré, la.
Le violoncelle a un caractère grave et sensible. Son
Chant, touchant et majestueux, charme et élève l'âme.
T. IU
290 |VOI
Il se prête à tous les jeux de l'harmonie, de la double
corde et de l'arpège. Dans les accompagnements, il
sert de base pour déterminer l'effet de l'harmonie où
il occupe une place particulière. Le violoncelle figure
encore tour à tour dans le solo, la sonate, le concerto,
l'air varié, le quatuor et le quintette.
Violone. Instrument de grande dimension, qui
servait autrefois de contre-basse aux différentes espè-
ces de violes.
Virtuose. Ce nom s'applique en musique à ceux
qui possèdent un talent remarquable d'exécution
dans le chant comme dans le jeu des instruments.
Virtuose de chambre. C'est ainsi qu'on désigne
ordinairement, dans les cours ultramontaines, les
chanteurs ot les exécutants de concerts attachés à leur
service.
Vitaliens. Nom du chœur de musiciens romains,
institué par Vitalien pour l'usage de la musique
sacrée.
Vivace, Vivement. Épithète souvent jointe au mot
allegro, et qui indique une exécution pleine d'entraî-
nement, analogue au sentiment dominant du mor-
ceau de musique.
Vocalisation. Espèce de solfège qui ne se chante
que sur la voyelle a.
Vocaliser. Chanter sur une voyelle en ne se ser-
vant que de l'a. Cet exercice est nécessaire au perfec-
tionnement du chant après l'étude du solfège. Pour
cela, il faut, 1° savoir bien attaquer le son; 2° passer
d'un registre à l'autre d'une manière insensible \
B° porter la voix ; 4° exécuter tous les agréments avec
grâce, légèreté et précision ; 5° phraser le chant mu-
sical.
Voix. La voix humaine prend naissance dans la
glotte moyennant une expiration un peu forcée. L'air,
chassé des poumons, s'achemine d'abord par un ca-
VOI 291
nal assez large, mais qui bientôt se resserre et doit
enfin traverser une étroite fente. Les bords de cette
ouverture sont deux lames vibrantes qui, semblables
à celles des anches, permettent ou interceptent de
temps en temps le passage de l'air; et ainsi, par ces
alternatives, elles doivent déterminer des ondulations
sonores dans le courant d'air qui les frappe. Outre le
palais, la langue, les dents, les lèvres, tous organes
utiles au mécanisme de la voix, la trachée-artère, les
poumons, le larynx, les sinus frontaux et maxillai-
res, les fosses nasales, concourent aussi à sa forma-
tion.
L'acuité, la force, l'agrément et le caractère indivi-
duel de la voix dépendent de l'organisation et de l'al-
tération de l'organe principal de la voix, qui est le
larynx.
Le voix se divise, 1° relativement aux quatre prin-
cipales voix de l'homme, en voix de soprano, d'alto,
de ténor et de basse ; 2° relativement au registre, en
voix de poitrine, de tête, et même de médium ; 3° re-
lativement à sa qualité, en voix bonne, c'est-à-dire,
claire, sonore ou argentine, pleine, juste, agile,
flexible, vigoureuse, forte, agréable, douce, riche,
étendue, etc. ; et en voix mauvaise, c'est-à-dire, faible,
mince, criarde, trop forte, nasillarde, gutturale,
lourde, voilée, etc. ; 4° relativement à son acuité et à
sa gravité, en voix grave, moyenne, aiguë.
La voix humaine est le plus beau moyen d'exécu-
tion que possède la musique. Les instruments ne ser-
vent qu'à l'imiter ou à l'accompagner. Semblables,
pour ainsi dire, aux esclaves qui précèdent ou suivent
leurs maîtres, les instruments ne font entendre leurs
accents sur le théâtre que pour annoncer le chanteur
et lui servir de cortège.
Chaque espèce de voix ayant une qualité propre,
elles fournissent au compositeur les moyens de varier
$n voi
les effets. La chose essentielle est de ne pas les forcer
en les jetant hors de leur étendue naturelle. A la ri-
chesse des moyens, aux ressources de la science et du
travail se joint encore, chez certains individus, la ma-
gie d'une remarquable sonorité dans la voix. Ceux qui
ont entendu les grands chanteurs italiens ne perdront
jamais le souvenir des vives jouissances que leur ont
fait éprouver leurs suaves accents.
On a beaucoup disserté sur les moyens les plus
propres à assurer la conservation de la voix.
C'est là une question d'hygiène trop importante
pour que nous ne la traitions pas au moins sommaire-
ment dans ce livre à la fois historique, théorique et
didactique.
Le docteur Second, qui a fait des études spéciales
sur la constitution de la voix humaine, nous fournit
des renseignements dont nous profitons d'autant plus
volontiers, qu'ils ont été élaborés sous les yeux d'un
maître justement estimé, M. Manuel Garcia; les
chanteurs y puiseront d'utiles préceptes.
La vie de l'homme se maintient par deux fonctions
principales qui mettent incessamment son organisme
en rapport avec le monde extérieur. Le poumon,
d'une part, donne accès à une matière gazeuse, l'oxi-
gène de l'air qui. passe, par endosmose, des vésicules
pulmonaires dans le torrent de la circulation ; l'esto-
mac, d'autre part, reçoit les matières solides et liqui-
des qui doivent servir à la nutrition.
Puisque, chez le chanteur, l'une de ces deux fonc-
tions s'exécute avec exagération, il est très-important
d'examiner quelles seront les modifications que cette
suraction fera subir à l'organisme.
Pendant bien des siècles, une grande incertitude a
régné dans l'explication physiologique de ces phéno-
mènes ; aujourd'hui, plus de vague, plus de vains
raisonnements; la lumière nous est venue, et c'est aux
VOI 293
chimistes modernes que nous la devons en grande
partie.
Il résulte des expériences de Lavoisier et de Séguin,
qu'un homme adulte absorbe neuf cent quatre-vingt-
quatorze grammes d'oxygène par jour. Malgré l'ab-
sorption de cette énorme quantité de gaz, on peut
s'assurer qu'au bout de vingt-quatre heures, le même
homme n'a pas sensiblement augmenté de poids, et
cependant il a, en outre, introduit dans son estomac
une certaine quantité d'aliments.
— Qu'est devenu l'oxygène?
— Que sont devenues les matières nutritives intro-
duites dans l'estomac?
L'oxygène, transporté dans tous les organes, se fixe
sur le carbone et l'hydrogène, et le poumon le restitue
à l'air sous forme d'une combinaison carbonée ou
hydrogénée, acide carbonique et eau.
Comment l'homme pourvoit-il à la consommation
continuelle de ces deux éléments constitutifs? Par
l'alimentation. Manger, c'est faire provision de car-
bone et d'hydrogène; respirer, c'est consommer ce
même carbone et ce même hydrogène.
Si vous respirez beaucoup, il faudra que vous man-
giez en proportion ; car, si vous ne restituez pas à
l'organisme tout le carbone et l'hydrogène que l'oxy-
gène aura dévoré, celui-ci, ne devant sortir du corps
que combiné avec ces deux éléments, attaquera votre
propre substance.
Ces principes une fois établis, nous avons l'expli-
cation d'un grand nombre de faits que tout le monde
a bien souvent constatés, mais que personne n'avait
convenablement étudiés avant les savantes recher-
ches des chimistes de notre siècle et du siècle dernier.
L'enfant, dont les organes respiratoires sont si ac-
tifs, mange proportionnellement beaucoup plus qu'un
adulte. L'oiseau, dont le poumon fonctionne si
29* VOI
bien, ne peut souffrir longtemps la faim; privé de
nourriture, il meurt le troisième jour. Le reptile, au
contraire, avec sa respiration lente et paresseuse, sup-
porte impunément la faim pendant un temps très-
long.
L'on peut concevoir, dès à présent, l'importance de
ces faits dans l'hygiène du chanteur; car il nous sera
facile de prouver qu'il respire, au point de vue de
l'absorption de l'oxygène, d'une manière vraiment
exceptionnelle.
L'étude des phénomènes chimiques de la respira-
tion amène invinciblement à reconnaître une relation
parfaite entre cette fonction et l'alimentation; et,
d'après ce que nous avons exposé, l'on comprend que
tout désaccord entre ces deux fonctions doit invaria-
blement produire une perturbation de la santé. Un
homme, par exemple, qui respirerait de manière à
consommer quatre cent cinquante grammes de car-
bone par jour, et qui n'en remplacerait que quatre
cent quarante par l'alimentation, mourrait lentement
de faim.
La quantité d'oxygène absorbée dépend surtout du
nombre et de l'amplitude des inspirations. Celui dont
le poumon fonctionnera de manière à introduire dans
la circulation deux kilogrammes d'oxygène, devra
restituer au corps deux fois plus de carbone que ce-
lui qui n'en aura absorbé qu'un kilogramme.
Si nous étudions la respiration du chanteur, nous
voyons que son poumon, pendant qu'il exerce mé-
thodiquement sa voix, est traversé par des masses
d'air considérables.
La quantité du mouvement respiratoire ne peut être
évaluée qu'approximativement, attendu qu'elle varie
pour chaque individu, suivant les particularités de
son organisation. Aussi, les physiologistes qui ont
étudié cette question ne sont-ils pas arrivés à des ré-
VOI 295
sultats semblables. Séguin évalue le nombre des ins-
pirations de quinze à vingt par minute, Laënnec de
onze à quinze, Menziers à quatorze, Magendie à
quinze; Allen et Papys à dix-neuf, Dalton à vingt,
Davy à vingt-six. En nous arrêtant à dix-huit, nous
avons le terme moyen du nombre des inspirations.
Si nous examinons la question au point de vue de la
quantité d'air qui pénètre le poumon, nous voyons,
d'après les expériences d'Abilgaard, de Wurzer, de
Herbst, de Bostock, etc., qu'elle s'élève, terme moyen,
à 18 pouces cubes par respiration.
Le poumon, dans les conditions les plus générales,
est donc traversé en une minute par plus de 300 pou-
ces cubes d'air, c'est-à-dire plus de 466,000 pouces
cubes en vingt-quatre heures. Ces chiffres, déjà énor-
mes, sont bien inférieurs à ceux que fournit la respi-
ration du chanteur. Celui-ci, ne pouvant bien dire de
longues phrases de chant qu'à la condition d'avoir
une grande étendue de respiration, habitue ses pou-
mons à contenir la plus grande quantité d'air possible.
Cet exercice, augmentant l'activité des organes de la
respiration, détermine bientôt leur accroissement, et
la plupart des chanteurs présentent un grand déve-
loppement de la cavité thoracique. Mais, sans même
tenir compte de cette différence de capacité, si nous
recherchons quelle est la quantité d'air que le poumon
peut contenir, nous apprenons qu'elle dépasse de beau-
coup la moyenne que nous avons posée plus haut en
étudiant la respiration normale. Ainsi, nous savons
que Herbst, ayant fait expirer six jeunes gens avec
toute la force possible, après une inspiration des plus
profondes, trouva que le minimum de l'air expiré
était de 120 pouces cubes, et le maximum de 244,
ce qui donne 167 pour terme moyen.
Un bon chanteur, qui fait des exercices ou qui
phrase une cavatine, ne respire pas autrement. 11 in-
296 VOI
troduit à chaque respiration, dans son poumon,
167 pouces cubes d'air; mais admettons qu'il n'en
prend que 100, et qu'il ne fait que dix inspirations de
ce genre par minute; malgré cette déduction, on trouve
qu'il a respiré plus d'air en vingt minutes, qu'une
personne qui ne chante pas et qui respire normale-
ment n'en peut respirer en une heure.
Qui pourra nier, devant ces chiffres, les conditions
spéciales dans lesquelles se trouve placé le chanteur ?
Evidemment, il n'est peut-être pas d'état physiolo-
gique dans lequel la respiration soit aussi exagérée ;
dès-lors, on comprend tout le soin que le chanteur
devra apportera son alimentation; car, que résulte-
t-il de l'ignorance de ces principes ? c'est que beaucoup
de jeunes artistes et de dilettantes, se livrant avec
ardeur à l'étude du chant, pensent ménager leur la-
rynx en ménageant leur estomac. Au bout de quelque
temps l'épuisement arrive, la voix s'éteint; ils s'ima-
ginent que le travail ou une méthode vicieuse la leur
a brisée, tandis que la véritable cause de cet affaiblis-
sement est une alimentation insuffisante.
Il n'y aurait que demi-mal s'ils en étaient quittes
pour une extinction de voix; mais ne sait-on pas que
les maladies les plus graves peuvent résulter de ce
défaut d'harmonie entre les fonctions les plus essen-
tielles au maintien de la vie? Nous ne voulons pas ef-
frayer le chanteur par la triste énumération des affec-
tions qui se développent, avec une déplorable promp-
titude, au milieu de l'épuisement général de l'orga-
nisme; mais nous devons le prémunir contre elles et
lui donner les moyens de conserver l'intégrité à son
corps, et, par suite, la vigueur aux organes de la voix.
Si l'on a bien saisi la liaison intime que nous avons
essayé d'établir entre la respiration et la nutrition, on
sera naturellement conduit à penser que le chanteur
doit consommer une quantité d'aliments considéra-
VOÎ 29?
ble, et nous entendons beaucoup de personnes se ré-
crier et nous accuser de vouloir faire des Apicius ou
des Héliogabales de tous nos poétiques chanteurs.
Loin de nous la pensée de transformer ainsi ces belles
organisations, qui semblent n'exister que pour ressen-
tir les plus douces sensations et pour les exprimer de
la manière la plus suave ! Ils voudraient ne manger
que pour vivre, mais ils doivent aussi manger pour
chanter.
Voici quelles sont les substances dans lesquelles le
chanteur trouvera les éléments d'une complète répa-
ration. Les chimistes les ont divisées en deux classes :
les aliments azotés et les aliments non azotés. Les pre-
miers, appelés aussi plastiques, constituent l'aliment
proprement dit; introduits dans l'organisme, ils ont
seuls la propriété de se convertir en sang et de don-
ner naissance aux principes des organes. Les aliments
de la seconde classe ont été appelés respiratoires, à
cause de la grande proportion de carbone qu'ils con-
tiennent.
Les aliments proprement dits sont :
La fibrine (chair et sang des animaux),
L'albumine (blanc d'œuf),
Le gluten (céréales),
La matière caséeuse (lait).
Les substances alimentaires de second ordre sont :
La graisse,
La gomme,
Les sucres,
La bière,
Le vin, etc.
Avec cette seconde classe d'aliments, le chanteur
fera facilement provision de carbone et d'hydrogène.
Beaucoup de personnes racontent avec étonnement
que tel chanteur ou telle cantatrice prend du vin de
Bordeaux et du vin de Madère en grande proportion;
298 VOI
qu'on fasse chanter ces mêmes personnes pendant
trois heures, et nous verrons si elles ne trouvent pas
que le bon vin est un excellent réparateur des forces
dépensées pendant la suraction de l'appareil respira-
toire. Hippocrate, ce grand médecin de toutes les épo-
ques, écrivait, il y a plus de vingt siècles, que le vin
apaise la faim. Famem thorexis solvit. (Secte II, aph.
21.)
Les vins, en effet, ceux du Midi surtout, offrent à
l'organisme, sous une forme extrêmement favorable,
une quantité notable de carbone.
Est-il besoin d'observer que les liqueurs qui con-
tiennent une trop grande proportion d'alcool, agissent
d'une manière funeste sur les cordes vocales? Chacun
connaît l'expression triviale par laquelle on désigne
une voix cassée par les spiritueux.
La gomme et les sucres seront également très-pro-
pres à la réparation. Mais, c'est dans la chair des ani-
maux que le chanteur trouvera son véritable aliment.
Il la préférera toujours aux substances végétales, et il
choisira surtout les viandes noires, parce qu'elles por-
tent avec elles un principe d'excitation très-favorable
au développement des forces. Celles-ci, comme l'a
parfaitement démontré M. Edwards, sont en rapport
avec la quantité des aliments. Ce savant a constaté
avec le dynamomètre, qu'après une forte nourriture,
un bon consommé, par exemple, la force est plus con-
sidérable, les mouvements plus sûrs, plus faciles, plus
énergiques qu'après l'ingestion d'aliments légers.
Ce que nous venons d'exposer pour le chanteur,
s'adresse, jusqu'à un certain point, à l'artiste drama-
tique qui, cherchant à exprimer un passage de Racine,
par exemple, fouille dans les trésors de son cœur pour
en tirer l'expression la plus vraie, l'accent le plus
sympathique, et répète ce passage de mille manières.
Il respire alors beaucoup plus que dans les conditions
VOI 299
ordinaires. Les avocats, les orateurs de tribune, les
professeurs, les prédicateurs pourront également pro-
filer de ces considérations.
Nous pourrions donner un grand développement à
toutes ces questions ; mais ce que nous en avons dit
suffira pour persuader le chanteur que c'est par une
nourriture suffisante qu'il conservera sa santé et sa
voix. L'alimentation imparfaite a pour premier effet
d'amoindrir les muscles, de les priver de leur contrac-
tilité et de les rendre rigides et impropres à tout acte
de vigueur et de souplesse. Quand le corps est affai-
bli, la voix devient pauvre et languissante, l'expres-
sion dramatique pâle et uniforme; l'âme de l'artiste,
secouant vainement les organes, ne peut se traduire
que par des vibrations flasques et chancelantes, et
l'auditeur, impassible, frappé seulement par l'im-
puissance, ne subit aucun charme, aucun entraîne-
ment.
Ces réflexions, bien graves pour un chanteur, sont
moins sérieuses que celles qu'on peut faire sur l'épui-
sement général. Il s'agit surtout ici de la santé du
chanteur. Veiller à l'équilibre de ses fonctions, c'est
aussi veiller à la conservation et au développement
de sa voix.
Voix Angélique. Jeu d'orgue qui sonne l'octave du
jeu de voix humaine.
Voix blanche. Expression métaphorique qui indi-
que l'intensité et le caractère de certaines voix et de
certains instruments. Les voix de soprano et d'alto
sont des voix blanches. L'octavin, la flûte, le haut-
bois, la clarinette, la trompette, le violon, sont des
instruments à voix blanches.
Voix de poitrine. C'est dans la voix humaine l'é-
tendue des sons produits par la situation naturelle
des organes de la voix, avec la poitrine pleine et la
bouche ouverte, à la différence de ces sons plus aigus
300 VOL
formés par un effort de ces mêmes organes, et que l'on
appelle voix de tête ou fausset.
Voix extérieures. C'est le nom des voix principa-
les les plus aiguës ou les plus graves d'une composi-
tion musicale, comme dans les chœurs, le soprano et
la basse.
Voix humaine. Jeu d'orgue, ainsi nommé parce qu'il
imite assez bien la voix de l'homme. Dans les siècles
passés, on donnait également ce nom, en Italie, au
violon de concerto, pour le distinguer du violon d'or-
chestre, qu'on appelait voix argentine. En Italie, on
donne aussi le nom de voce umana au cor anglais.
Voix intermédiaires. Ce sont celles qui se trouvent
entre la voix la plus aiguë et la plus grave, comme
dans les chœurs, la voix d'alto et de ténor.
Voix principale. Ce mot indique 1° la partie d'une
composition musicale qui exprime plus particulière-
ment son caractère propre ; toutes les autres lui ser-
vent d'appui, d'expression et d'accompagnement har-
monique; 2° toute voix qui, dans un morceau de mu-
sique, se distingue des autres par une mélodie qui lui
est propre.
Voix solo. Voix principale d'un morceau de mu-
sique, exécuté par une seule personne.
Volate, Volatine. Exécution rapide de plusieurs
sons successifs sur une même syllabe, au moyen de
la simple vocalisation.
Volte. Ancienne danse hors d'usage, du genre de
la gaillarde, et dont l'air était écrit en mesure à
trois quatre.
Voltipresto. Le volti presto est un pupitre pro-
pre à soutenir le cahier de musique auquel le méca-
nisme moteur est attaché dans la partie inférieure.
Ce pupitre porte un nombre quelconque de tringles
mobiles. Chaque tringle, portée à droite, se recouvre
d'un feuillet jusqu'au commencement du morceau
WAL 301
Lorsque cette disposition première est faite, il ne s'a*
git plus que de presser le le\ier avec le pied, le ge-
nou ou la main à volonté pendant l'exécution, et le
mouvement des feuillets de droite à gauche s'opère à
l'instant. Lorsqu'il s'agit de recommencer le mor-
ceau, un autre levier produit l'effet contraire.
Volume. C'est la masse de son que donne une voix
ou un instrument sur chacun des degrés de son dia-
pason.
Voyelles prohibée*. Dans le solfège italien les
voyelles défendues sont i, u.
w
W. Double majuscule, qui sert quelquefois à indi-
quer les parties des violons dans une partition.
Walnica. Chalumeau en usage parmi les paysans
de la Russie, qui consiste en une vessie de bœuf, où
l'on place deux ou trois roseaux.
Webeb. C'est un violon monté de deux cordes, dont
on joue sur les côtes de Barbarie, comme de notre
violoncelle.
Walzer valse. Air de danse à trois temps, d'un
caractère gai, avec deux reprises de huit mesures
chacune, et d'un mouvement modéré. La valse est
originaire d'Allemagne. Il paraît qu'elle n'a été in-
troduite en France que vers 1790. — Parmi les valses
qui ont été inventées, celles de Strauss sont sans con-
tredit les plus populaires. Il y a aussi la valse à deux
temps, c'est la moins gracieuse, et dans le sens de
la mesure c'est une monstruosité, par la raison fort
simple qu'elle est un défi jeté à la musique. — La
302 VAL
coda d'une valse est le rappel de ses diverses fractions
mélodiques. — La valse est à deux. La polka doit être
rangée parmi les valses. (Voyez Polka).
Xacara. C'est le nom d'un air espagnol qu'on
chante et danse en même temps.
Xenorphica. Nom d'un clavecin à archet, inventé
par M. Rœllig, à Vienne, vers la fin du siècle der-
nier.
Xylharmomcon. Instrument inventé par M. Uthe,
il y a quelques années, et qui ressemble à l'euphone
du docteur Chladni.
Xylorganon. Espèce de claquebois avec une tou-
che. Il est aussi appelé xitarganon.
Za. Syllabe dont on se servait autrefois pour dési-
gner le si bémol.
Zurna. Instrument turc, qui par sa forme, et la
qualité de ses sons, ressemble à notre hautbois.
FIN.
| rAMt , — BtriuHBiuE ;. non «akoh, place di i\ bobme, 4.
ERRATUM.
Au premier volume , page 52 , ligne 30 , au lieu de :
Férabosca, lisez : Férabosco.
LLECTION MICHEL LtVY
volumes paru et h paraître. — Format grand lu-lft, h fl futur
vol.
CÉL. deCHABRILLAN
Les Voleurs d'Or. . . 1
EDMOND TEXIER
Toi.
.AMARTINE.
Irlpnces. . . 1
infldenos. . 1
o- .ure. . 1
I. GAUTIER
tsen Europe 2
inople. . . 1
iilcrne. . . 1
es.ques. . . 1
HESAND
ma Vie. . 10
. . . . 1
e 1
. . . . 1
1
1
1
1
l
3
au Diable. .
Fadette. .
le Chanipi.
e Rudolstadt 2
. . . . .1
.... 1
. ... 1
d'un voyag. 1
2
i Floriani. . 1
e M. Antoine 2
nino. ... 2
d'Angibault. 1
1
. Aldini . . 1
rc intime. . 1
I DE NERVAL
ïme galante. 1
. de Fayolle. 1
>s du Feu
NE SCRIBE
(ouv.comp.) 20
lie». . . 3
s. . . . ,2
s comiques.. S
iies-Vaudv.. 10
îs 1
ttes et Prov. 1
Alliaga. . . S
RY MURGER
lendez-Vous. 1
i Latin. . . 1
de Campagne 1
veurs d'Eau. 1
oureuses . . 1
de ville et
s de théâtre. 1
is de Camille. 1
de la Bohême 1
iVie de Jeun. 1
LIER-FLEURY
etNoyageurs. 1
ONSE KARR
mues. ... 1
les Femmes. 1
cl Cécile. . 1
■ de mon Jard. 1
s Tilleuls. . 1
) Orangers. . 1
HITS. . . .
.de mon jard.
: de Vérités..
*pes. . . .
ie normande,
mis pages .
deS# Adresse 1
vol.
M™ B. STOWE
Traduct. E. Furcade.
Souvenirs heureux. . 3
CH. NODIER (Trad.)^ATi"'u7»-rnn:û.ce
Vicaire de Vakeficld. 1
LOUIS REYBAUD
Jérôme Paiurol . • 1
l'.iturol- République. î
Dern. des Commis-
Vovageiirs. ... 1
L" Coq du Clocher. 1
L'Indust. en Europe 1
Ce qu'on voit dans
une rue 1
LaComt. de Mauléon. 1
La Vie à rebours. . 1
FRÉDÉRIC SOULIÉ.
Mémoires du Diable. 2
Les Deux Cadavres. 1
Confession Générale. 2
Les Quatre Sœurs . 1
HV-É. DE GIRAROIN
Marguerite. . . . 1
Nouvelles. . . • .1
Vicomte de Launay. 4
Marq. de Pontanges. 1
Poésies complètes. . 1
Cont. d'une v. Fille. 1
EMILE AUGIER
i
ACHIM O'ARNIM
Trad. T. Oan ier fils.
Contes bizarres. . . t
ARSÈNE HOUSSAYE
Femmes comme elles
sont tA
GÉNÉRAL DAUMAS
Le grand Désert. 1
Chevaux du Sahara. 1
H. BLAZE DE BURY
Musiciens cunlcmp.. 1
OCTAVE DIDIER
Madame Georges. .1
FELIX MORNAND
La vie Arabe. . . 1
ADOLPHE ADAM
Souv. d"un Musicien. 1
Dern. Souvenirs d'un
Musicien. ... 1
J. DE LA MADELÈNE
Les Ames en peine. 1
MARC FOURNIER
LeMondeellxComed. 1
| EMILE SOUVESTRE
Philos, sous les laits 1
iConf. d'un Ouvrier. I
JAu coin du Feu. . 1
. Sien, de la Vieintitn. I
Les'Iyraus de Village 1 rhroniq. de la Mer. 1
CH. DE BERNARD "ans la Prairie. . .1
Le Nœud gordien . .1 Les Clairières. . .1
(jerlaut 1 Sc.de la Chouannerie 1
lin homme sérieux. . 1 Les derniers Paysans 1
1 Souv. d'un Vieillard. 1
8 Sur la Pelouse. . . 1
2 Soirées de Meudon.. 1
1 Se et réc. des Alpes. 1
vol.
r* . VACQUERIE
Prolils et Grimace*. 1
A. DE'PDNTJQiARTIN
Cuites et N"iivelli'^/1- -Huit jours sous IF.
Poisies complètes. .
F. PONSARO
Etudes Antiques. .
PAULMEURICE
Scènes du Foye
Les Ailes d'Icare
tient ilhom.cainpagti
l'n Beau- Père. . .
Le paravent « •
HOFFMANN
Trad. Champ lleury.
Contes posthumes. ■ 1
ALEX. DUMAS FILS
Avenu de 4 femmes. 1
La Vie à vingt ans. 1
Anlonine 1
Dame aux Camélias. 1
La Boite d'Argent. . 1
LOUIS BOUILHET
Mclœuis 1
JULES LEC6MTE
Poignard de Cristal.. 1
X. MARMIER
Au bord de la Newa 1
Les Drames intimes. 1
J. AUTRAN
La Vie rurale. . . 1
Milianah 1
FRANCIS Wf Y
Les Anglais chez eux 1
PAUL DE MUSSET
La Bavolelle. . . . 1
.es Anges du Foyer. 1
L'Echelle de Feinm. 1
La Goutte d'eau. . 1
Sous les Filets . . 1
Le Foyer Breton. . 2
Contes et Nouvelles. 1
LÉON GOZLAN
Châteaux de France. 2
Notaire de Chantilly 1
Polydore Marasquin 1
Nuits du P.-Lachaise 1
Le Dragon rouge. . 1
Le Médecin du l'ecq 1
Hist. de 130 îeinnics. 1
La famille Lambert. 1
THÉOPH. LAVALLÉE
Histoire de l'iris. . 2
EDGAR POE
Trad. Ch. Baudelaire.
Histoires extraonlin. 1
Nuuv. Hisl. exlraord. 1
Aventures d'Artiijr
Gordon Pyin. . . 1
CHARLES DICKENS
Traduction A- l'irUoi.
Neveu de m liante. . 2
i'i-imIps Al Nouvelles. 1
Hit. n. d'un Notaire. .'1
La fin du Procès. . 1
contes d'un Planteur
du choux. ... 1
Pourquoi je reste à
1 1 Campagne. . • 1
HENRI CONSCIENCE
Trad. Lénn W-cquier.
Si-en. de la Vie flam. 2
Le Fléau du Village. 1
Les Heures du soir. 1
Les Veillées flamand. 1
Le Démon del'Argent 1
L i Mère Job. ... 1
L'Orpheline. ... 1
Guerre des Paysans. 1
DE STENDHAL
(H. Beyle.)
De l'Amour. ... 1
L<- Rouge et le Noir. î
La Chartr. de Parme, t
MAX. RAOIGUET
Souv. de l'Amer, esp. 1
PAULFÉVAL
Le Tueur de Tigres. 1
Les dernières Fées. 1
KÉRY
Les Nuits anglaises. 1
Une llist.ite Famille. 1
André Chénier. . . 1
Salons elSout.de P iris 1
Les Nuits italiennes, t
EDOUARD PLOUVIER
Les Dern. Amours. 1
GUST. FLAUBERT
Madame Bovary. • . 2
GHAMPFLEURY
Les Excentriques. . 1
Avenl.de M"«Maricttel
Le Réalisme. ... 1
Prem. Beaux Jours. 1
Les Souffrances du
profess. Delleil. . 1
Les Bourgeois de Mo-
linchart 1
Chien- Caillou.. . « 1
XAVIER AUBRYET
La Femme de 25 ans. 1
VICTOR CE LAPRADE
Psyché 1
H.B,RÉVOIL(Trad.)
Harems duN.-Mondc.l
ROGER DE BEAUVOIR
Chev. de Sl-'Jourges. 1
Avent.etCoiini-i.ines t
Histoires cavalières, t
GUSTAVE O'ALA'JX
Soulouq. et son Kmp. t
F. VICTOR HUGO
(TraiiuMeur.)
Sonn. de Shaksneare. 1
»ol.
AMÉOÉE PICH?T
Les Poêles am mrvui 1
ÉMUE CARREY
iiinleiirj . ... 1
Métis ilgSrV Sivane 1
Les Révoltés du Pari t
CHARLES BARBARA
U'istoir. émouvantes. 1
E. FROMENTiN
Un Eté dans le Sahara 1
XAVIER EYMA
Les Peaux-Noires. . 1
LA COMTESSE DASH
Les Bals masqués. . 1
Le Jeu de la Reine. 1
L'Ecran 1
MAX BUCHON
En Province. ... 1
HILDEBRANO
Trad. l.éon W-cquitr
Sce.de la Vie holUnd. 1
AMÉOÉE ACHARO,
Parisiennes et pro-
vinciales. . . . 1
Brimes et Rlondes. 1
Les dern. Marquises. 1
Le-* Femmes honnêtes 1
A DE BERNARD
LePoriraildela Mar-
quise
CH. OL LA ROUNAT
Comédie de l'Amour. 1
MAX V'LREY
Marthe de Mouthrun. t
A- 3E MUSSET
GEORGE SANO
DE BALZAC etc.
Le Tiroir du Diable. 1
Paris elles Parisiens 1
Parisiennes à Paris. I
ALBÉRIC SECOND
A quoi tient l'Amour. 1
M'"c BERTON
(yW« Saitisim.)
Le Bonheur impossib. 1
NATJAR
Quand j'ét. Etudiant. I
Miroir aux Aiouettes. I
EMILIE CARLEN
Trad. M. SouvKyriiE.
Deux Jeunes Femmes 1
LOUIS ULBACH
Les Secrets du Diable 1
F. HUGONNET
Souvenirs d'un Chef
i!e bureau Arabe. 1
JULES SANOEAU-
Sacs cl Parchemins. 1
LOUIS OE CARNÉ
Drame s. la Terreur, t